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Full text of "Revue de Linguistique et de Philologie comparée"

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UwfV.  OF 

Toronto 

LtBF^RY 


4fifp^i^^; 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


Iittp://www.arcliive.org/details/revuedelinguisti40pari 


REVUE 

DU 

LINGUISTIQUE 

ET    DE 

PHILOLOGIE  COMPARÉE 


TOME   XL 


^ 


REVUE 


LINGUISTIQUE 


ET    DE 


PHILOLOGIE  COMPARÉE 

RECUEIL  TRIMESTRIEL 

PUBLIÉ    PAR 

JU  LIEN     VI  NSON 

PROFESSEUR    A    LÉCOLE    NATIONALE    DES    LANGUES    ORIENTALES    VIVANTES 
Avec  la  collaboration  de  divers  savants  français  et  étrangers 


TOME  QUARANTIÈME 


CHALON-SUR-SAONE 

IMPRIMERIE      FRANÇAISE      ET      ORIENTALE 

E.  BERTRAND  ^ 

5,  Rue   des   Tonneliers,   5  i>v         I 

1907  <L    \    ^-  1  ^ 


% 


LA  LANCxTIK 

ou  LKS  LANGl^ES  1151^:1  11 ILXXKS 


COUP  D'ŒIL  PRELIMINAIRE 


La  Ihéorie  ibéro-basqiie  de  Guillaume  de  Humboldt 
n'élait  que  la  régularisation  scientitique  d'une  hypo- 
thèse déjà  ancienne  :  les  écrivains  des  derniers 
siècles,  lilléraleurs,  historiens,  géographes,  avaient 
fait  un  raisonnement  logique,  mais  enfantin:  puisque, 
disaient-ils,  il  y  a  eu  en  Espagne  des  habitants  anté- 
rieurs aux  Komains,  aux  Carthaginois  et  aux  Celtes,  et 
puisqu'on  parle  encore,  en  un  coin  de  la  Péninsule, 
un  idiome  qui  n'est  ni  celte,  ni  punique,  ni  latin,  le 
basque  est  évidemment  la  vieille  langue  originale.  El 
c'est  ainsi  qu'on  a  été  amené  à  expliipier,  ou  plut(H,à 
chercher  à  expliquer  par  le  basque  les  légendes  mo- 
nétaires, les  monuments  épigrapbiques  que  le  latin 
ou  le  phénicien  ne  pouvait  suffire  à  interpréter.  Je 
n'insiste  pas  sur  l'histoire  des  études  ibérieimes,  sur 
les  objections  que  souleva  la   théorie  de   Humboldt, 


o  


notamment  delà  part  de  M.  Van  Eys  et  de  la  mienne. 
Tout  dernièrement,  un  jeune  savant,  M.  E.  Philipon, 
a  cherché  à  ruiner  définitivement  celte  théorie,  en 
montrant  que  la  langue  ibère  avait  un  caractère  indo- 
européen très  prononcé:  les  démonstrations  de  iVI.  E. 
Philipon  ne  me  paraissent  pas  décisives;  il  a  d'ail- 
leurs aussi,  à  mes  yeux,  le  loit  de  s'attacher  trop 
étroitement  aux  théories  de  l'école  des  néo-grammai- 
riens allemands,  M.  Brugmann  et  autres. 

Grâce  à  la  belle  publication  de  M.  Ém.  Hiibner, 
l'étude  des  monuments,  qui  sont  parvenus  jusqu'à 
nous,  de  la  langue  ibère  est  h  la  portée  de  tous.  Ces 
précieuses  reliques  consistent  en  quelques  mots  rap- 
portés par  les  vieux  auteurs  ;  en  noms  propres,  géo- 
graphiques pour  la  plupart,  en  médailles,  en  inscrip- 
tions. Les  légendes  monétaires  et  les  inscriptions 
sont  écrites,  le  plus  souvent,  au  moyen  d'un  alphabet 
dérivé  du  phénicien  ;  quelques-unes  sont  en  lettres 
latines  cependant. 

Sans  aflîrmer  qu'elles  soient  toutes  d'une  exacti- 
tude absolue,  on  peut  adopter,  |)our  les  caractères 
ibères,  les  lectures  de  M.Hiibner  ;  elles  sont  certaine- 
ment plus  exactes  en  tout  cas  que  les  divers  systèmes 
qui  ont  été  proposés  avant  lui. 

Au  premier  coup  d'oeil,  rien  dans  c^s  mots,  dans 
ces  transcriptions,  ne  paraît  Ijasqiie.  Des  fantaisistes 
ont  bien  vu  idibidea  «  chemin  de  bœuf  »,  et  oros- 
pidca  «  clifmiii  de  veau  »  dans  les  noms  donnés  par 


—  3  — 

Pline  à  deux  chaînes  de  montagnes,  idubeda  el  oros- 
peda;  mais...  On  peut,  avec  plus  de  vraisemblance, 
assimiler  Voeaso  de  Strabon  à  VOyarziin  des  envi- 
rons de  St-Sébastien  :  oyarzim,  ou  mieux  oiharzun, 
vent  dire  «  écho  »;  c'est  un  composé  polysynthé- 
tique  ^Qoihu  «  cri  »,  harri  «  pierre,  roc,  mont  »,  zu 
«  dérivative  locative  »  et  n  suffixe  participial. 

Si  nous  nous  occupons  tout  d'abord  des  textes  en 
caractères  latins  et  des  mots,  fort  peu  nombreux, 
recueillis  par  les  écrivains  de  l'antiquité  classique, 
la  première  question  qui  se  pose  est  l'exactitude  des 
transcriptions,  x^ous  avons  un  moyen  de  contrôle 
dans  les  légendes  monétaires  :  quelques-unes  olfrenl 
le  même  nom  lopographique  en  ibère  et  en  latin  ; 
d'autres,  en  ibère  seul,  sont  avec  certitude  appliquées 
à  des  localités  dont  les  noms  sont  déjà  connus.  J'ai 
fait,  en  conséquence,  le  tableau  suivant  où  ritali(]ue 
donne  la  forme  ibère,  suivant  la  lecture  de  M.  Hûb- 
ner  :  arcailiqs  argaeli,  ausescn  ausa,  calaqriqs  cala- 
gurris,  cslhle  castulo,  cesse  cissa,  dmanki  damania, 
diniu  dianium,  duriasu  turiaso,  litkscen  otogesa, 
ieèfi  iesso,  ilurii-  iliberris,  iltrcescen  ilergetes,  illrd 
ilerda,  ilthraca  iliturgi,  laiesccn  laeetari,  nei^lsp  ncr- 
tobriga,  plplis  bilbilis,  gnthrpa  contrebia,  saitp  sae- 
tabis,  àeqprices  segobriga,  seqsanhè  SQg\sm]^a ,  imtcescn 
indicetes,  urkekn  mc\,  wsecr//i  osicerda.  Il  résulte  de 
ce  tableau  d'abord  que  le  latin  représente  parfois  une 
forme  différente  de  l'ibère  {ausescn,  ausa  ;   /i(kscen, 


—  4  — 

otogesa  ;  ilurir,  iliberris'  ;  ^lem/),  nertobriga)  et, 
qu'en  général,  d'ailleurs,  la  correspondance  est 
exacte.  Il  n'y  avait  donc  pas  d'insurmontables  diffi- 
cultés de  prononciation;  le  //,  rendu,  tantôt  par  une 
voyelle,  tantôt  par  un  //,  n'était  évidemment  qu'une 
aspiration  ordinaire,  ne  ressemblant  en  rien  à  \a  jota 
ou  aux  gutturales  arabes;  la  jota  s'est,  on  le  sait, 
développée  assez  tard  et  provient  d'un  //semi- voyelle, 
d'pn  /  latin  mouillé.  Les  explosives  dures  et  douces 
sont  mises  souvent  l'une  pour  l'autre,  ce  qui  n'étonna 
pas  cbez  des  Iranscripteurs  qui  n'avaient  pas  l'oreille 
exercée  et  attentive  des  linguistes;  dans  l'ibère,  /, 
th,  —  c,  k  et  kh,  (/  —  s,  s,  s  h  —  et  même  ?ret  ??i, 
paraissent  souvent  employés  l'un  pour  l'autre. 
Tandisque  les  voyelles  initiales  sont  exactement  con- 
servées, les  autres  paraissent  moins  fidèlement 
rendues  :  peut-on  en  conclure  que  l'accent  étaitsur  ia 
première  syllabe?  Entre  deux  consonnes,  les  voyelles 
sont  souvent  omises.  Enfin,  de  certaines  formes  (awse, 
ausa;  casthie,  castulo;  iesh,  iesso;  lilks,  otogesa  ;- 
îlîrd,  ilerda  ;  cesse,  cissa),   nous  pouvons  déduire  que 

1.  C'est  ce  mot  iliberris  qui  a  été  le  grand  cheval  de  bataille 
des  ibéro-basquisants;  ils  y  voyaient  les  ilibcrri,  ulibarfi,  iilli- 
hairi,  iribciri,  hiribcrri  «  ville  neuve  »,  des  divers  dialectes 
basques.  Mais  la  forme  primitive  de  hiri  paraît  avoir  été  *kiri... 
D'ailleurs,  on  voit  que  iliberris  correspond  ici- à  ilurir ;  on  peut,' 
il  est  vrai,  soutenir  que  u  est  pour  b,  puisque  les  aquitains  con- 
fondent p  et  b  (felices  popali,  disait  Scaliger,  '/tiibics  ciccre  est 
bibere)  et  que  /=r;  alfana  vient  d'cqurts...  Mais  le  r  final?  Un 
grand  nombre  de  mots  ibères  commencent  par  t7  :  est-il  possible 
que  ce  soit  «  ville  »  ? 


les  ,  noms  ibères  se  lei'niiiiHieiU  souvent  par  luie 
voyelle  sourde,  atone,  (luelquc  chose  comme  notre  e 
muet,  que  les  latins  ie[)résentèrent  par  a,e,  o,  ou  qu'ils 
n'écrivirent  i)as  ;  de  là,  les  variantes  dans  les  lé- 
gendes, comme  arse,  ars  eiarm.  L'alphabet  |)hénicien, 
d'ailleurs,  n'était  pas  fait  pour  l'ibère  et  n'y  était  adapté 
que  très  approximativement. 

Si  maintenant  nous  examinons  les  médailles  et  les 
inscriptions  en  elles-mêmes,  nous  verrons  qu'elles  se 
classent  en  trois  catégories,  celles  du  S.-O.  écrites  en 
caractères  latins,  celles  du  S.  en  caractères  ibéros, 
mais  de  droite  à  gauche,  et  celles  du  N.  et  de  l'E. 
écrites  de  gaucl  e  à  droite.  Il  est  facile  de  remarquer, 
dans  le  recueil  de  M,  Hùbiier,  que  ces  trois  sys- 
tèmes correspondent  à  des  terminaisons,  des  formes, 
des  mots  d'allures  différentes.  Il  y  a  donc  là  très  pro- 
bablement des  langues  différentes. 

.le  ne  prétends  m'occuper  ici  que  de  celles  du  N.  et 
de  l'E. 

Les  médailles  de  ces  régions  offrent  a  priori  deux 
types  caractérisés,  le  premier,  celui  de  l'est,  par  la 
terminaison-  cen'{\^),  kn  (2),  qm  (5)  et  môme  hn  (1)  ; 
le  second  par  .s  (13),  è  (20),  èh  (1),  sa  (1).  .Mais,  dans 
les  premières,  la  syllabe  en  ou  kn  est  parfois  séparée 
et  reportée  sur  l'autre  face  de  la  pièce  (sesars  \  kn, 
carsahs  \  kn);  elle  manque  parfois  {icioe  et  icloekn, 
nerhn  et  nerhncen);  elle  est  quelquefois  remplacée 
par  d'autres  tinales  [arse,  arsesacen,  arsecedr,  arsgdr. 


—  6  — 

arsagsocyra)  ;  d'îiulre  pari,  dans  beaucoup  de  cas,  le 
en,  ccn,  etc.,  est  précédé  de  s  ou  plutôt  s,  qui  est  évi- 
demment un  suffixe,  car  il  manque  lui-même  assez 
souvent  {auseacn,  htkscen,  iltrcescen,  laiescen,  unt- 
cesen,  arsahshn,  klaisqm,  krncèqn,  sethiscen  ou  sethi- 
scn  d'inie  part;  auèescn  et  anèain,  titres  et  iltrescn, 
setliis  et  sethiscen,  sethisa  et  sethisar/m;  alir,  alirin, 
alircn,  d'une  autre;  enfin,  les  variantes  iltrd,  iltrds; 
nertp,  nertp.s:  hrhsi,  hrhèis;  segprice,  segprices;  — 
hilaucu,  h? lances,  hilaukes,  hUauciqs,  hilanceiqs;  — 
are,  arats,  arei,  aregrads,  areigrads,  areiqratqs).  Aux 
revers,  on  lit  —  outre  kn  —  lin,  ca,  àhs.  Que  conclure  de 
tout  cela?  vraisemblablement,  que  cen  et  ses  variantes, 
n'est  pas  un  suffixe,  mais  un  mol  séparé,  correspon- 
dant au  latin  mun,  munici  {mumciinum),  qu'on  lit  sur 
les  médailles  en  caractères  latins.  Quant  au  s  ou  s, 
c'est  incontestablement  un  suffixe,  et  très  probable- 
ment le  suffixe  du  génitif,  la  préposition  ou,  si  l'on 
veut,  la  poslposilion  «  de  »  possessif. 

Ainsi,  l'élude  des  médailles  nous  amène  à  croire 
(jue,  dans  l'idiome  ibère  nord-oriental,  le  suffixe  gé- 
nitif était  s  ou  s;  que  la  plupart  des  substantifs  se  ter- 
minaient par  des  voyelles,  a  ou  e  ;  qu'en  général,  la 
langue  n'admettait  pas  les  groupes  de  consonnes 
autres  que  ceux  formés  avec  r,  7i,  l  ou  s  ;  que  beau- 
coup de  noms  topographiques  commençaient  par  ï7; 
enfin,  que  les  syllabes  cen,  in,  shs,  ca,  se  ratta- 
chaient à  des  mots  ayant  le  sens  de  «  ville,  commune, 
municipe  »,  ou  peut-être  «  monnaie  ». 


—  7  — 

Passons  maiiilenjuil  ,'i  rexanieii  «les  inscriptions. 
Kcartons  d'abord  celles  qui  sont  fausses  ou  suspectes: 
sur  les  soixante-seize  autres,  une  vingtaine  seuleuionl 
sont  utilisables,  pour  des  raisons  diverses  qu'il  serait 
trop  long  de  développer  ici.  Ce  sont  des  pierres  en 
apparence  votives;  des  iiiuli,  funéraires  probable- 
ment; des  ligurines,  servant  sans  doute  de  tesscrcs; 
une  coupe  en  argent,  sans  pied,  destinée,  suivant 
>I.  Hiibner,  à  recevoir  de  l'argent;  une  plaque  de 
bronze,  trouvée  a  Luzaga;  et  une  lame  de  plomb  pro- 
venant de  Castellon  de  la  Plana.  J'ai  du  laisser  de 
côté,  entre  auti'es,  le  plat  de  terre  de  Ségovie,  dont 
l'iiiscription,  écrite  de  droite  à  gauche,  est  vraisem- 
blablement dans  une  aulre  langue,  ou  tout  au  moins 
dans  un  autre  système. 

I.  La  laine  de  i>lomb  de  Castellon  (n"  XXII  du 
recueil  de  Hiibnei)  est  évidemment  le  plus  important, 
au  point  de  vue  qui  nous  occupe,  des  monuments  de 
l'épigrapliie  ibérienne.  Découverte  en  août  1851,  sur 
une  hauteur  appelée  Puchol,  près  de  Castellon  de  la 
Plana,  dans  un  tumulus  ancien,  par  M.  de  Portefaix, 
cor)sul  de  France,  elle  est  aujourd'hui  au  Musée  arché- 
ologique de  iMadrid;  elle  mesure  0'"  435  sur  ()'"  040. 
Elle  contient  21  mots,  séparés  les  uns  les  autres  par 
trois  points  en  ligne  verticale,  disposés  sur  quatre 
lignes  que  M.  Hiibner  transcrit  ainsi  (je  dédouble  les 
lignes  i)our  plus  de  commodité)  : 


-  8  — 

■  (^)irtaùns  :  airietnth  :  sinektn  : 
urcecerere  :  aurunikiceai  : 
asthkiceaie  :  ecariu  :  adnniu  :  kduei  : 
itlisni  :  eosu  :  shsinpuru  : 
krkr/iniu  :  qshiu  :  îithgm  : 
kricarsense  :  ultthcraicase  : 
arrjtco  :  aicag  :  ilcepu raies  : 
îithsîniecarse. 

I.a  première  lettre  est  douteuse.  Mais,  (juelle  que 
soit  la  lecture,  le  groupement  des  caractères  donne 
lieu  à  d'intéressantes  observations.  Il  y  a  sans  doute 
des  fautes  d'orthographe,  des  voyelles  à  suppléer,  des 
lettres  omises,  etc.  Cependant,  le  premier  coup  d'œil 
donne  l'impression  d'un  idiome  agglutinant,  incorpo- 
rant, avec  ses  accumulations  de  suffixes  terminaux 
-ccai,  -ceaie,  -aies,  -craicasc,  -carse,  -case,  -carsense. 
Un  peu  plus  d'attention  fait  voir  que  aurunikiceai  et 
asthkiceaie  sont  formés  des  mêmes  sulïixes;  si,  comme 
on  peut  le  supposer,  Astliki  esl  le  nom  topographique 
Aslifji,  Auruni  doit  être  un  nom  de  même  espèce  :  ic, 
ou  kic,  est  peut-être  la  dérivative  «  originaire  de  »;  e  une 
forme  pronominale  ou  verbale,  prise  quelquefois  pour 
une  forme  nominale,  «  celui  qui  »;  ai,  une  détermina- 
tive,  un  suffixe  adjectif;  le  e  final  de  urcecerere  est, 
selon  toute  apparence,  une  finale  verbale  de  troisième 
personne  singulière  :  ce  dernier  mot  rappelle  le  nom 
de  ville  urkekti  {urci,  prov.  de  Tarragone)  dont  la 
racine  urk-,  urc-,  pourrait  avoir  une  signification  de 


«domicile,  liabitalion,  séjour,  repos».  De  plus,  l'exa- 
men montre  que  certains  mots  sont  probablement  des 
composés,  shsinpiiru,  ilcepur- ;  quelques  autres  pour- 
raient se  rattacher  aux  mêmes  racines  :  ithsni,  îilhfjtn, 
Tithsm;  —  sinekten,  shsinpiiru,  stniecarse;  —  slisiii- 
puru,  ilcepur-\  deux  mots  ont  des  répétitions  singu- 
lières, urcecerere,  krkrlmiu;  enfin  un  mot  commence 
par  ?</ et  un  autre  par  ?/ :  sont-ils  apparentés?  L'ini- 
tiale il  est,  on  l'a  vu,  très  fréquente  en  ibère. 

D'autre  part,  la  forme  et  la  disposition  des  mots 
conduisent  presque  nécessairement  à  partager  ce  texte 
en  trois  morceaux,  le  premier  composé  des  six  mots  : 
(\3)itraùns,  aii'ietntli,  sinektri,  urcecerere,  auruni- 
kiceai,  astliklceaie;  le  second,  les  neufs  mots  ecariu, 
aduniu,  kduei,  ithsm,  eosu,  shsinpuru,  krkrhniu,  r/shiu, 
ïithgm;  le  troisième,  les  six  dei'niers  mots,  krimrsense, 
iilUhcraicase,  argtco,  aicmj,  ïlcepuraies,  ïithsiniecarsc. 
Il  y  a  incontestablement  là  trois  tournures,  trois  com- 
binaisons différentes. 

Le  mot  antépénultième  aicag  est  rapproché  par 
M.  Hiibner  de  aigglegia  qui  est  l'avant-dernier  d'une 
inscription  de  la  même  région;  et  il  ajoute  qu'un  dieu 
des  Callaiques  s'appelait  Aegiamunniaegm .  Il  fait  re- 
marquer aussi  que  Àstlikiceaie  rappelle  la  ville  d'Astigi 
et  que  Awvmikiceai  ïa\i  penser  aux  Àurunqvcs  d'Italie. 

Le  seul  mol  dont  le  sens  soit  à  i)eu  près  certain, 
c'est  argico  qu'on  peut  rapportera  arethq,  aredc,  aredn, 
aredk,  aregratok^  ;  ce  dernier  rappelle  l'inscription  des 


—  10  — 

médailles  trouvées  à  Castellou  et  où  se  lit  areiijrads, 
areif/raUjè,  arer/rads.  Les  premières  formes  sont  en  tète 
d'inscriptions  et,  dans  un  document  })ilingue,  malheu- 
reusement incomplet,  arelhy  correspond  à  lœic.cst.siL.. 
Ce  mot  aurait  donc  une  signification  analogue  à  <.<  ci- 
gît,  ici  repose  »  ;  niais  je  crois  |>lutôt  qu'il  doit  signi- 
fier «  monument,  tombeau,  demeure  »  :  ce  (\u\  me 
conduit  à  le  penser  c'est  que  le  même  radical  se  retrouve 
dans  des  noms  topographiques;  or,  un  nom  de  ville 
peut  très  bien  dériver  de  <.<  habitation,  demeure,  séjour, 
etc.  »,  mais  non  de  «  ci-gît  ».  Ce  mot  aredc  excitera 
d'ailleui'S  sans  doute  l'ardeur  des  Bascomanes;  ils  ne 
manqueront  pas  d'y  lire  araduc,  c'est-à-dire  aran  duc, 
puisque  la  nasale  terminale  est  souvent  omise;  aran 
serait  synonyme  de  an,  car  le  suffixe  du  génitif  et  celui 
du  locatif  sont  semblables;  an  ou  han  duc  veut  dire  : 
«  là  tu  as,  là  est  »,  hic  est  silns. . .  ;  mais  la  forme  pri- 
mitive anti(iue  ne  doit  être  ni  an,  ni  han,  ni  haran;  ce 
serait  kan,  ou  haran; (\e  plus  il  faudrait,  non  pas  i<  là  », 
mais  «  ici  »,  ctncn,  hcmcn,  kcmen.  Le  verbe  convenable 
serait  datza  «jacet».  Il  faudrait  donc  kenien  datzak, 
ce  qui  ne  va  plus  avec  aredc.  Je  n'ai  pas  besoin  de 
rappeler  les  discussions  sur  la  primitivité  de  h  ou  de  k\ 
pour  moi,  le  k  est  antérieur,  comme  le  prouvent  la  loi 
naturelle  du  moindre  effort,  le  maintien  du  /.•  à  la  fin 
des  formes  verbales,  le  kdekume  dans  les  conq)osés 
prosthétiquesde  hume  «  petit  »,  la  mutation  en  dentale 
dans  baiiah  «  parce  que  tu  es  »  pour  baihaiz,  bai- 
kaiz,  etc. 


—  11  — 

i^ous  avons  vu  loutà  l'heurt'  que  kic,  e,  ai,  es,  sont 
probablement  des  suffixes  <^r;iniiiiaticaux,  des  désinen- 
ces formelles;  nous  en  avons  d'autres  dans  lu  et  u, 
danscoet?/i,  n,  et.  La  terminaison  ic  se  retrouve  dans 
d'autres  inscriptions  :  ucasuitic,  oïnaîc,  auedunic 
(XXXIl),  Incanuj  {\L\),casllomic{Wj\).  Mous  retrou- 
verions aussi  ai,  ci,  ni,  etc;  nous  y  reviendrons. 

Peut-on  au  surplus  émettre  une  conjecture  sur  le 
sens  général  de  ce  document?  Peut-être.  M.  Hiibner 
dit  :  «  Cum  in  sei)ulcro  reperta  sit  lammina,  conti- 
neatque  unum  sallem  vocabulum,  arijlco,  (juod  ad 
sepulcrumspeclat,  inscriplionemconiiciolegemaliquam 
sepulcralem  conlinuisse,  sive  fortasse  exsecrationem. 
Taies  enim  exsecraliones  scimus  Graecos  Homanosque 
in  plunibo  scriptas  sepulcris  indidisse;  nomina  de- 
functorum  vix  aut  raro  plumbo  inscribebantur  ». 
Wûnsch  est  du  mémo  avis,  et  je  ne  crois  pas  qu'on 
puisse  avoir  une  autre  opinion. 

\j  exsécralion  est  plus  probable  que  la  loi  funéraire. 
QueUe  formule  a  pu  employer  le  propriétaire  du  tom- 
beau, le  parent,  l'héritier  de  l'Ibère  défunt?  Remar- 
quons que  ce  document  est  unique;  il  y  a  eu  donc,  la, 
l'imitation  d'une  coutume  étrangère,  par  un  étranger, 
un  colon  romain,  ou  un  indigène  ayant  vécu  à  l'étran- 
ger ou  au  courant  des  habitudes  romaines.  C'est  donc 
probablement  en  Italie  qu'il  faut  chercher  le  modèle, 
la  formule  type.  Si  nous  consultons  la  thèse  si  i"emar- 
quable  de  M.  A.  Audollent,  De/ixionum  labellœ,  nous 


—  12  — 

voyons  (jue  les  tablettes  des  séimlcres  contienneiU  des 
exsécrations  contre  les  ennemis  du  décédé,  contre  ceux 
qui  ont  causé  sa  mort,  contre  ceux  qui  pourraient 
violer  son  tombeau.  Ouelquefois,  les  pallies  princi- 
pales du  corps  de  ces  «  voués  »  sont  énumérées,  pour 
être  affligées  chacune  d'un  supplice  spécial.  Or,  la 
partie  moyenne  de  l'inscription  de  Castellon  se  com- 
pose de  neuf  mots  qui  par  leur  disposition  peuvent 
former  une  énumération  de  ce  genre,  et,  parmi  ces 
mots, quatre sontte^minèsen^^/,  deux  en  u\  ne  peut-on 
supposer  que  ces  iu  sont  des  duels,  ces  u  des  pluriels 
et  le  reste  des  singuliers?  Dans  cette  hypothèse,  peut- 
être  pourrait-on  traduire  :  ccariu  «  les  deux  yeux  », 
aduniu  «  les  deux  oreilles»,  kduei  <,<  le  nez  »,  illwn 
«  la  bouche  »,  eosu  «  les  dents  »,  shsinpurii  «  les  or- 
ganes intérieurs  »,  krkrhniu  «  les  deux  bras  »,  qshiu 
«  les  deux  jambes  »,  titligm  «  le  ventre  »  ou  a  l'organe 
sexuel».  Le  sin  de  èhsinpuru,  qui  serait  un  radical 
«  intérieur  »,  se  retrouverait  dans  sinektn  de  la  pre- 
mière partie  et  dans  nlfisimecarse  de  h  (\ermbve',  le 
shs  initial  rappelle  le  groupe  qu'on  trouve  sur  quelques 
médailles,  et  qui,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  peut  cor- 
respondre à  l'idée  de  «  cité,  municipe  »  et  sans  doute 
aussi  «  chose  privée,  intime,  intérieure  ». 

J'ai  dit  plus  haut  que  s  ou  s  devait  être  le  suiTixe 
génitif;  je  crois  en  outre,  et  je  reviendrai  sur  ce  point 
tout  à  l'heure,  que  n  pourrait  être  celui  du  locatif, 
de  l'ablatif,  et  autres  cas  analoi^ues. 


—  13  — 

Comment  iiUerpriHer  l;i  première  et  In  dernière  des 
trois  parties  dont  paraît  se  composer  notre  inscription? 
Elles  contienent  évidemment  des  verbes,  pnisrpie  la 
seconde  partie  n'est  lormée  que  de  noms  (au  rjominatif 
ou  à  l'accusatif,  peu  importe).  Nous  sommes  amenés  à 
voir  des  formes  verbales  dans  les  terminaisons  se, 
peut-être  des  optatifs,  et  des  formes  participiales  dans 
-ceai,  -ceaie,  -aies.  Et  j'imagine  que  le  document  tout 
entier  exprime  quelque  chose  comme  ceci  :  «  Airiemta, 
fils  (ou  fille)  de  /irtaima,  demeure  couché  ici  dedans, 
originaire  d'Astigi,  issu  d'un  natif  d'Aurunigi:  que  les 
yeux,  les  oreilles,  le  nez,  la  bouche,  les  dents,  les 
organes  intérieurs,  les  bras,  les  jambes,  le  ventre, 
soient  en  proie  aux  maux,  qu'ils  le  fassent  soutîrir;  de 
celui  qui  aura  violé  ce  tombeau  !  qu'il  soit  en  exsécra- 
tion  !  » . 

C'est  en  tremblant  que  je  viens  d'écrire  les  lignes 
qui  précédent.  C'est  peut-être  vraisemblable,  mais 
c'est  peut-être  aussi,  c'est  plutôt  une  fantaisie  de 
mon  imaginalion,  un  rêve  de  mon  esprit  surexcité,  une 
brillante  bulle  de  savon  qui  va  disparaître  sans  laisser 
la  moindre  trace.  N'y  voyons  qu'un  exercice,  qu'une 
distraction,  qu'un  jeu  et...  continuons. 

II.  La  seconde  inscription  par  ordre  d'importance 
esta  mon  avis  la  plaque  de  bronze  de  Luzaga,  mesu- 
rant 0  m.  15  sur  0  m.  IG,  trouvée  en  1877  près  de 
Huerta  Hernando  (Guadalajara,  Sigiienza),  avec  quatre 
trous  aux  coins  et  trois  au  milieu,  ipii  ont  dû  servir  à 


—  14  — 

la  fixer  sur  un  mur  ou   sur   une  pierre.  Hiibner  lit 
(n"  XXXV)  : 

areqratoks.  cai'uh.  cecei 
qrtca,  lutacei.  augà.  ïrasihca 
erra.  uela.  tcerseks.  .s// 
ueisui.  mlailionoe 
cecis.  cariqoe.  cecis 
sdn.  qrtcan.  elasuchn 
caruh.  thce^.  sa  qrtca 
thiuhreiçjs 

Le  premier  mot  est  peut-être  areqratodè,  mais  le  k 
est  plus  probable. 

M.  Hiibner  dit  de  cette  inscription  :  «  Tnstrumen- 
tum  in  aère  inscriplum  maioris  sine  dubio  dignitatis 
fuisse  putandum  ([uam  lammina  Castellonensin  plum- 
bea;  oppidorum  nomina  si  plura  recte  agnoscuntur, 
de  tabella  fœderis  fortasse  cogitandum.  Sed  modulus 
exiguus  facit  potius  ut  tabellam  sive  liospitii  sive  pa- 
tronalus  esse  existimem,  quales  in  eiusdem  generis 
lamminis  aereis  in  Hispania  prodierunt  complures 
(C.  II,  1343,  2210,  2211,  2633,  2966,  3695,  5792). 
Cf.  tesserœ  hospiliaies,  n.  XXXIX,  XL.  » 

Si  nous  examinons  ce  texte  en  lui-même,  en 
dehors  de  toute  idée  préconçue,  de  toute  liypothèse, 
nous  remarquerons:  1°  que  le  premier  et  ledernier  mot 
se  terminent  par  le  même  suffixe,  s,  qui  se  retrouve 
dans  deux  autres  mots;  2"  qu'il  va  deux  mois  en*, 
deux  en  ai,  un  en  ai,  trois  en  ca;3°  que  ca  varie  en 


—  15  - 

can  (fpica,  qrtcan)  et  cis  en  cei  (cecis,  cecei)  ;  4°  que  l'on 
;i  d(Mix  fois  le  groupe  -ne  cecis;  5°  que  f/rica  vient  deux 
fois  et  (/rlcaii  une;  Q"  qu'il  va  trois  fois  le  suffixe  n 
dans  trois  mots  consécutifs. 

Pour  interpréter  ce  texte,  j'observe  que  le  mot  le 
plus  important  est  peut-être  t/rlca  (|ui  revient  trois  fois 
et  que  nous  retrouvons  sur  une  ligure  en  bronze,  ayant 
la  forme  d'un  sanglier  {aper,(\\l  M.  llubner)et  qui  était 
vraisemblablement  une  lessera  hoapitialis  ;  on  y  lit  en 
effet:  lipaca.  (jrtca.  car  :  M.  Hiibnei- y  voit  un  insigne 
de  l'alliance  entre  les  Lipaciens  et  lesCariens:  Lipaca 
serait  lipaq^,  dont  on  a  des  médailles  dans  la  région 
de  Pampelune.  Mais,  car  peut  être  rapproché  du  caruh 
de  notre  inscription,  et  ce  mot,  ainsi  que  (frlca,  indi- 
q.uerait,  à  mon  avis,  plutôt  un  titre,  une  fonction,  une 
qualité  :  sur  la  plaque  de  Luzaga,  les  trois  fjrlca  sont 
suivis  de  mots  où  l'on  peut  voir  des  noms  topogra- 
phiques {Lulacci  =  Luzaga,  elasuclin  =  Kkiiskuui, 
thiulireiys  =  Tinriga)  :  (/rtca  pourrait  être  quelque 
chose  comme  «  consul,  qucnestor,  princeps,  jiagi  ma- 
gister»;  prenons  (/uœslor  pour  plus  de  commodité. 
On  supposerait  donc  :  le  questeur  de  Luzaga,  le  ques- 
ten  des  Elaisiciens,  le  questeur  deTurriga.  Un  autre 
mot  caruh,  qui  revient  deux  fois,  est  aussi  accompagné 
de  noms  de  villes,  areijraloks  et  Ikces  [Ttaf/s,  dans  la 
région  de  INumance,  ou  Hztces,  dans  la  région  de  Tu- 
riaso);  la  première  fois,  caruh  est  suivi  de  cecei. 
J'imagine  que  caruh  est  peut-être  un  litre  de  fonction 


—  16  - 

ou  quelque  chose  comme  «  municipe,  assemblée, 
sénat  »;  cecei,  un  qualificatif  «  grand,  illustre,  etc.  » 
dont  cecis,  plus  loin,  serait  l'adverbe.  Le  s  ou  s  final, 
fréquent  dans  les  médailles,  serait  un  suffixe  génitif 
singulier,  qui  servirait  aussi  à  dériver  des  adverbes. 
Le  document  commencerait  donc  par  une  indication 
de  ce  genre  :  «  L'illustre  Sénat  d'Aregrad.le  questeur 
de  Luzaga  »  [ei  étant  un  suffixe  qualificatif)  et  finirait 
par  «  le  questeur  des  Elaisiciens,  le  sénat  de  taogs, 
et  (ow  avec)  le  questeur  de  Turriga  >>.  Dans  l'inter- 
valle, il  y  a  des  génitifs  en  s,  des  nominatifs  en  ca  et 
probablement  deux  formes  verbales  en  oe'.W  s'agit 
vraisemblablement  de  conventions  inter-municipales. 
Sur  les  légendes  monétaires,  à  Areqratoks  corres- 
pond are,  arei,  arals,  arer/rad,  aregads  (avec  èhs 
au  revers),  areiqrads  et  areigratqè.  Il  y  a  là  sans 
doute  un  composé  de  are,  ara,  de  fjrat  et  de  qs,  où 
nous  pouvons  voir  deux  suffixes,  dont  q  (ca?)  et  le  s 
du  génitif;  et  alors  qrtqs  serait  une  variante  de 
qrtca,  ce  qui  confirmerait  mon  hypothèse  d'une  signi- 
fication «  municipale  »  pour  ce  dernier  mot.  Je 
trouve,  sur  les  médailles,  une  terminaison  semblable 
dans  hilaucu,  hilauces,  hilaukes,  liilauciqs  (avec  shs 
au  revers),  hilauceiaà,  où  il  y  a  de  plus  la  dérivative 
locative  eu,  ke,  ci.  On  trouve  aussi  arcailiqs,  aratqs 
(et  arats),  calaqriqs,eoalaqs,  gthlqs,  ecailqs,  ilaca{p)sq, 
lliuitsqs,  lipaqs,  niolqs,  oeltiqè,  piilaqs,  et  peut-être 
segsanhè,    dont    (juchiues-uns   varient  :  esailifjs  (de 


-  17  - 

gauche  à  droite  ).  et  emilq  (de  dr.  à  g.);  gths,  glhfja, 
(jlrn,  (/ihkjs  (de  dr.  l\  g.)  ;  nioh/m,  moir/ts,  molqs  (de 
dr.  à  g.).  Ces  Uois  derniers  noms  sont  de  la  région 
d'Obulco.dans  la  Bétique  orientale,  région  mixte  peut- 
être  au  point  de  vue  linguistique. 

Dans  le  plat  d'argile  de  Ségovie,  où  les  inscriptions 
vont  de  droite  à  gauche,  on  retrouverait  la  terminai- 
son om  ou  se  que  j'ai  supposée  optative  ;  mais  est-ce 
la  même  langue,  le  même  dialecte? 

III.  Nous  avons  vu  que  aredc  et  analogues  ont  un 
caractère  funéraire  à  peu  prés  certain.  Deux  autres 
mots  paraissent  avoir  le  même  caractère;  nous  les 
trouvons  inscrits  sur  deux  pierres  trouvées  à  Sagonte 
et  qui  ont  disparu,  et  sur  une  troisième  qui  est  con- 
servée à  Valence: 

XXVIII.  Nerseatn. 
îlcaine. 

XXIX.  Nersnatn. 
tlcatnde. 

XXXI.  b  ilcatii.  nskd. 
otcr.  etnoi. 
s . .  .  n .  . .  . 

n  paraît  difficile  de  voir  dans  ilcatne,  ilcatnde, 
ikaln,  un  nom  propre,  car  le  même  individu  aurait 
eu  trois  sépultures.  Le  mot  nersnatn  ou  nerseatn, 
dont  nskd  ne,  diffère  pas  très  sensiblement,  ne  doit  pas 
être  non  plus  un  nom  personnel.  Faut-il  rappeler  que 
/te/' est  le  radical  de  <.<  Narbonne  »,    Narbn  Martius, 


—  18  - 

Nerim  en  ibère?  Quoi  qu'il  en  soit,  si  iiersnatti,  ner- 
seatn,  nskd  soiit  un  seul  et  même  mot,  ou  îles  mots 
analogues  de  sens,  il  faut  remarquer  que  le  n  final 
des  premiers  ne  se  retrouve  pas  cliez  le  dernier, 
mais  qu'il  revient  deux  mots  après,  comme  si  ces  deux 
mots  étaient  des  adjectifs,  des  compléments  délermi- 
nalifs.  liemarquonsde  plus  l'interversion  de  ilcalneou 
ilcatnde  qui  est  au  premier  rang  en  XXXI  et  au  second 
en  XXVH[  et  XXIX.  Si  je  n'ai  pas  eu  tort  de  supposer 
que  e  est  une  finale  verbale  et  n  peut-être  le  signe  du 
locatif,  nos  trois  légendes  diraient  quelque  chose 
comme  ceci  :  n  XX VI 11. XXIX.  Kn  ce  séjour  il  re- 
pose, il  gît  »,  et  «  XXXI.  Il  repose  en  ce  séjour  res- 
pectable, sacré  (?)  ».  Le  nom  pro|)re  aurait  pu  être 
ajouté  dessous  ou  à  côté. 

IV.  A  ce  propos,  si  je  reprends  les  inscriptions 
commençant  par  aredc  et  ses  variantes,  elles  se  pré- 
sentent ainsi  : 

VI.  aredc.  atnqlaur.  andhldu 
Fulvia  lintearia. 

VII.  hic.   est.  sit... 

aretliç) .  adu...  sacaritii. 
XXIII.    aredc.  sicduii.  inelii.  nereildun .  d . .  . 
XXVI.    ai'e.  de.   aluni,  iiscac.  1,'hln.  a 
XLII.a.  areqr  ou  ared/,\ 

De  ce  n*^  XLII.a,  M.  Hiibner  dit  :  «  Calinae  (Ca- 
tania)  in  Sicilia  in  museo  P.  P.  Henedictinorum,  exstat 
vasculum  (oenoclioe)    Graecum    pictum   (figurae  lu- 


—  19  — 

brac  siint  in  I'luhIo  iiigro),  allum  m.  0.  19,  cxliihens 
rnuliorein  seilcnlorii,  quae  dexlra  patcram  tcnct,  arti- 
ficii  non  eleganlis,  quod  saecuio  fere  quarto  adscri- 
bilur.  luxla  in  fundo  lilleris  accurale  incisis  inscrip- 
linn  est...  »  L'irrégularité  de  l'orthographe  est  sans 
doute  le  fait  d'un  graveur  étranger  à  la  langue  dont  on 
lui  avait  donné  un  mot  à  écrire. 

Maison  peut  se  demander  quel  rapport  il  y  a  entre 
un  vase  vinaire,  une  femme  tenant  une  coupe,  et  un 
mot  paraissant  avoir  le  sens  de  «  monument  funé- 
raire ».  Serait-ce  que  ce  mot  signifierait  proprement 
«  repos,  oubli,  libération  »,  par  allusion  au  rôle  con- 
solateur souvent  attribué  au  vin,  à  l'influenee  censée 
reposante  de  l'ivresse  ? 

Dans  les  quatre  autres  légendes,  les  mots  qui  suivent 
sont  probablement  des  noms  et  des  titres  ou  des  qua- 
lités. Atnf/laur.  andolsllu  est-il,  comme  l'a  supposé 
M.  Hiibner,  la  traduction  de  Fulvia  lintearia?  Mais 
alors,  je  croirais  plutôt  que  c'est  andlsldu  qui  serait 
Fulma;  ce  mot  est  d'ailleurs  composé,  comme  aussi 
l'autre;  les  deux  expressions  latines  sont  assez  com- 
plexes et  l'ibère  aura  eu  besoin  de  périphrases  pour 
dire  «  fauve  »  et  «  lingère  »  (ou  «  tisserand  »). 

Dans  le  n°  XXVI,  remarquez  le  suffixe  -dun,  sic- 
dun,  nereildun.  Ner  r^[)ÇQ\\e  Nerhn  «  iVarbonnev; 
eildun  est-il  parent  de  Veildul  qui  constitue  à  lui  seul 
l'iiiscriplion  n"  XXXI?  Malheureusement  tout  cela  est 
fragmentaire.  Ce  n"  XXXI  devait  peut-être  élre  joint  à 


~  20  - 

l'un  des  n«^  XKVIII,  XXIX,  XXXI.  b,  et  était  sans 
doute  un  nom  de  personne.  Dun  serait  un  sulFixe, 
une  dérivative  nominale;  nous  avons  les  combinaisons 
dunic,  unie,  nik,  ic,  m,  ni,  an,  can,  canik. 

V.  Ces  deux  dernières  terminaisons  se  lisent  sur  le 
n°  XLI,  la  coupe  en  argent  sans  pied,  découverte  en 
■1618,  près  deCazIona;  elle  est  aujourd'hui  au  musée 
du  Louvre.  lîUe  contenait,  quand  on  l'a  découverte, 
683  pièces  de  monnaies.  M.  Hûbner  a  supposé  que' 
c'était  une  sorte  de  caisse,  comme  disent  les  com- 
merçants, contenant  le  trésor  d'un  individu  dont  le 
nom  serait  gravé  sur  la  coupe.  On  y  lit:  Incanik  goaercan 
que  M.  Hiibner  interpréterait  volontiers  :  «  Lonca- 
nicus  Goercani  lilius  »;  je  croirais  plutôt  que  Incanik 
sérail  un  nom  de  pays,  et  goaercan  un  nom  de  per- 
sonne au  locatif  ou  au  datif  :  «  à  »  ou  «  pour  Goaerca 
de  Lonca  (?)  ». 

VI.  Faut-il  également  voir  un  nom  ou  deux  noms 
sur  l'anneau  d'argent  trouvé,  il  y  a  une  soixantaine 
d'années,  dans  un  tombeau?  Orné  d'un  onyx,  ouest 
gravée  une  tôle  d'homme  barbu,  aux  cheveux  crépus, 
regardant  à  seneslre,  il  porte  la  légende  slsdotce.  Si, 
comme  je  l'ai  supposé,  e  final  est  une  terminaison  ver- 
bale, ce  ce  peut-être  une  sorte  d'oi)latif  ou  d'impératif, 
vale  ou  cave  par  exemple;  ou  peut-être  un  passé 
«il  a  réussi,  il  a  été  heureux  »,  etc.(iN°  V  de  Hûbner). 

VI.  Je  retrouve  ce  ou  ko  sur  le  cippe  (n"  IV)  de  Bar- 


—  21  — 

celone,  cippc  funéraire,  dit  M.  Hiihtier,  et  non  votif, 
où  est  écrit  nnce  illra  zui,  ce  qui  pourrait  signilier 
«  Nuce,  d'Ilerda,  a  été  mise  ici  (hic  sita  es!)  ».  Je 
croirais  plutôt  que  le  nom  serait  illra  ou  iltrazvi  e 
que  le  verbe  signifierait  nuke,  quelque  chose  comme 
«  vixit  ». 

D'autres  inscriptions,  <iui  [)araissent  également  fu- 
néraires, contiendraient  des  noms  de  personnes  : 
le/ul  il),  shsirn  iU),  srès  eo Ho  (Wll)  ;  ekemos  i\[[), 
etc.  ;  un  fragment  bilingue  (XXXI,  a.)  porte  :  «  Fa- 
bius. M.  L.  [sidorus...  drliolhinen.h:  .  .  drho  est-il 
un  reste  de  la  transcription  ou  de  l'adaptation  d'Isi- 
dorus? 

J'arrête  ici  cette  tentative  d'étude  qui  ne  me  parait 
à  moi-même  qu'une  série  de  conjectures  aventureuses. 
Je  ne  l'ai  entreprise  que  par  accident,  si  j'ose 
m'ex|)rimer  ainsi,  le  hasard  d'une  recherche  ayant 
amené  sous  mes  yeux  l'invitation  que  semblait  m'a- 
dresse r  iM.  Hùbner  : 

a  Speramus  fore,  si  ad  studia  haec  cxaminanda 
redierit  vir  doctissimus,  ut  leclionem  sane  scripturae 
ibericae  aliquantum  profecisse  reperiat.  »  Dans  cette 
tentative,  je  me  suis  laissé  conduire  par  ce  qu'Ale- 
xandre Dumas  appelle  v<  le  lil  des  inductions,  ce 
(il  qu'aux  mains  de  l'abbé  Faria,  Dantés  avait  vu 
guider  l'esprit  d'une  manière  si  ingénieuse  dans  le 
dédale  des  probabilités  ».  Et  j'ose  conclure  : 

1°  Que  la  langue  parlée  jadis  en  Kspagne,   au    N. 


—  22  — 

et,  ;i  V\i.,  écrite  de  gauclie  ;i  (lroil(î  .-i  l'aide  de  l'alplia- 
bet  ibéro-pliénicien,  était  une  langue  ugglulinante 
très  développée,  sans  doute  incorporante,  peut-être 
polysynthélique; 

2**  Qu'elle  avait  un  système  phonétique  assez 
simple,  qu'elle  n'avait  pas  il'arliculations  spéciales,  et 
que  sa  prononciation  [)e  devait  rien  avoir  de  bien  dif- 
ficile ; 

3°  Que,  parmi  les  nombreux  suffixes  dont  elle  se  ser- 
vait, on  peut  signaler  les  suivants:  s  ou  è,  «  de  »  gé- 
nitif, n  «  à,  dans,  chez,  par  »,  ik  «  de,  ex,  origine  », 
ei  ou  ai  adjectif  ou  participe;  e,  en  3"  pers.  sing.  du 
verbe  avec  une  consonne  précédente  marquant  le 
temps  ; 

4°  Que  cette  langue  était  tout  à  lait  différente  du 
basque. 

Celte  dernière  conclusion  sera  peut-être  la  seule  à 
laquelle  souscriront  mes  lecteurs.  Je  répète,  moi-même, 
que  tout  le  reste  est  bien  audacieux  et  bien  hasardé;  je 
compte  d'ailleurs  reprendre  celle  étude  plus  à  loisir. 
Aujourd'hui,  je  n'ai  guère  fait  qu'une  ex|)loration  pré- 
liminaire, sans  m'occuper  aucunement  des  diverses 
autres  tentatives  qui  ont  étéprécédeniinoiit  faites.  Mais 
où  trouver  la  solution  du  problème?  Ah  !  si  l'on  pou- 
vait découvrir  une  inscription  liilingue,  conqilèle,  de 
cinq  à  six  lignes  au  moins  ! 

En  attenilaiit,  nous  sommes  réduits  à  des  hypothèses 
donl  le  lendemain  monlre  la  fragilité,  à  i\(is  propos!- 


—  23  — 

tioiis,  ;i  des  im.'iginiilions  séduisunles,  mais  qui  s'ef- 
facent coininc  les  plis  des  vagues  à  la  surface  des 
eaux,  ((ui  passent  sans  rien  laissoM'  après  elles,  comme 
ces  astres  rapides  qui  traversent  l'atmosphère,  comme 
ces  bruits  confus  qu'on  croit  entendre  dans  les  pro- 
fondeurs dus  forets,  dans  l'ombre  des  nuits,  comme 
les  amours  de  Didon,  comme  les  serments  de  Thésée, 
Quac  ciincta  aerii  discerpvnt  irrita  vcnti  ! 

Julien  ViNsoN. 


SUR  LA  BIBLIOGRAPHIE 

DES  LAiNGUES  POLYNÉSIENNES 


I 


Dans  une  Introduction  récemment  publiée,  le  lec- 
teur a  pu  voir  comment  le  groupe  des  langues  poly- 
nésiennes constituait  une  famille  distincte,  dont  l'étude 
sera    le    but   des    présentes    recherches. 

Aujourd'hui,  Fauteur  se  propose,  avant  daller  plus 
loin,  d'indiquer  une  l'ois  pour  toutes  la  bibliographie 
des  ouvrages  assez  nombreux  qu'il  a  déjà  parcourus. 

Il  existe  sur  la  Polynésie  une  grande  quantité  de 
livres,  et,  par  bonheur,  un  érudit  en  a  dressé  le 
catalogue.  Cet  indicateur  précis,  dun  plan  ingénieux, 
commode  à  consulter,  fait  honneur  à  la  science  an- 
glaise, envers  laquelle  nous  aurons,  d'ailleurs  à  con- 
ti'acter  beaucoup  d'autres  dettes  de  reconnaissance, 
particulièrement  en  ce  qui  concerne  la  Polynésie. 

Comme  tous  les  autres  ouvrages  que  je  citerai, 
celui-ci  portera  la  cote  de  la  Bibliothèque  Nationale 
ainsi  abrégée  (Bb.  Nat.). 

Cela  ne  sera  pas  d'une  mince  utilité  aux  curieux, 
et  je  regrette  i)resque  que  la  place  me  manque  pour 
narrer   les    tribulations    fantastiques,    par    lesquelles 


—  25  — 

il  faut  passer  avant  d'oblenir  la  cote  «  exacte  »  d'un 
ou\Tage  dans  la  «  Première  Bil)liotlièque  de  France  ». 
Ceci  dit,  passons,  et  citons  sans  plus  tarder  : 

Edwards  (Francis),  A  catalogue  of  books  relating 
to  Poh'nesie  »  ;  London,  1899  ;  in-S".  (Bb.  Nat.,  8», 
Q  2575). 

Tous  les  autres  volumes  peuvent  se  diviser  en 
deux  catégories: 

lo  Les  ouvrages  de  linguistique  proprement  dite 
(grammaires,    vocabulaires,    etc.). 

2o  Les  relations  de  voyage,  descriptions  géogra- 
phiques,   études   ethnologiques   et   autres). 

Point  n'est  besoin  de  dire  que  les  ouvrages  de 
la  seconde  catégorie  sont  beaucoup  plus  nombreux 
que  les  premiers.  J'ai  déjà  expliqué  pourquoi.  La 
Polynésie  nous  a  toujom\s  été  décrite  par  des  voya- 
geurs qui  n'ont  été  pour  elle  que  des  «  oiseaux  de 
passage  ». 

"  Depuis  Cook,  Forster  et  Bougainville,  tous  ceux 
qui  l'ont  vue,  pénétrés  par  son  charme  si  cares- 
sant ont  tenu  à  dire,  sur  le  papier,  leur  enchante- 
ment. 

Et  si  nous  parcourons  la  série  déjà  longue  des 
livres   ainsi  publiés,  nous   trouvons  : 

J.  Agostini,  «  Tahiti  »,  chez  André,  28,  rue  Bona- 
parte (1905).  (Ouvrage  non  encore  déposé  à  la  Bb. 
Nat.). 

Henri  Mager,  «  Le  monde  Polynésien  »  ;  Paris, 
Schleicher  frères;  1902,  in-18,  250  p.  (Bb.  Nat,  8", 
G  7738). 


—  26  — 

Monchoisy.  La  Nouvelle  Cyllièrc  »;  Paris,  Char- 
pentier, 1888;  iii-12.  (Bb.  Nat.,  LK  13,  139). 

Aylic  Marin,  «  En  Océanie  »  ;  Paris,  Charles  Bayie, 
1888;  in-16.  (Bb.  Nat,  P^  128). 

Parmi  cette  nomenclature,  je  signale  particulière- 
ment un  magnifique  ouvrage,  orné  de  photographies 
très  intéressantes;  c'est  lœuvre  collective  des  Missions 
catholicpies.  ordonnée  et  éditée  par  le  Père  J.-T3. 
Piolet. 

J.  -  B.      Piolet,  Les     Missions     catholiques     au 

XIXe  siècle    ,   A.   Colin,   1902;   tome  IV,   «Océanie». 
(Bb.  Nat.,  L  d\  438). 

Nous  avons  encore  : 

Jules  Desfontaines.  Les  îles  enchantées  de  la  Po- 
lynésie »;  Nantes,  1891;  in-8o.  (Bb.  Nat.,  80,  G  6181). 

Paul  Claverie,  Tahiti  >  ;  Paris,  Plon-Nourrit,  1891; 
in-18.  (Bb.  Nat.,  8»,  G  7122). 

Charles  Lemirc.  «  L'Océanie  française  ;  Paris, 
1901:  in-80.  (Bb.  Nat..  LK  13.  175). 

Paul  Huguenin,  <  Baiatea  la  Sacrée  ,  Ues-sous- 
le-Yent  de  Tahiti);  Ncuchàtel,  P.  Attinger,  1902;  grand 
in-8«,  256  p.  (Bb.   Nat.,  LK  12.  1537). 

Lesson  et  ^[artinet,  «  Les  Polynésiens  »  ;  Paris,  1881- 
81;  Leroux,  28,  rue  Bonaparte.  (Bb.  Nat.,  Pd^  49). 

Paul  Gauguin  et  Charles  Morice,  «  Noa-Noa  >,  aux 
éditions    de    la    ;:  Plume  »,    31,    rue    Bonaparte. 

Bévue  de  lOcéanie  française  »,  pubUée  mensuel- 
lement; Paris,  Lille,  1902;  in-fo.  (Bb.  Nat.,  N.  S.  1345 

(F.)). 


—  21  — 

On  a  pu  voir  par  celle  énumératioii  que  j'avais 
renversé  lordro  des  ealégories,  en  parlanl  d'abord 
de  la  seconde;  c'est  qu'elle  est  à  mes  yeux  la  moins 
inléressanle.  Toutes  les  relations  de  voyage  semblent 
copiées  sur  les  autres  et  reflètent  à  la  longue  une 
écœuranle  banalité;  retour  des  mêmes  lieux  com- 
muns,  absence  de  détails  précis  et  originaux. 

Un  seul  livre  échappe  à  ces  reproches  justifiés; 
c'est  celui  de  M.  Huguenin,  ancien  directeur  d'école 
à  Raiatea.  qui  connaît  admirablement  la  langue,  la 
région  el  les  habitants  donl  il  parle.  Ce  fait  est 
assez  rare  pour  être  remarqué. 

J'ai  déjà  insisté  sur  ce  point,  que  seuls  les  mission- 
naires résidaient  pom-  les  besoins  de  la  foi  dans 
les  îles  riantes,  mais  lointaines  de  la  Polynésie  équa- 
toriale. 

C'est  donc  à  eux  que  nous  devons,  pour  la  plus 
grande  part,  les  travaux  linguistiques  dont  je  vais 
donner   ci-après    l'énumératio)!. 

Mais  la  longue  expérience  acc[uise  par  eux.  quel- 
quefois après  vingt  ans  de  séjour  et  plus,  dans  la 
prati([ue  de  la  langue  indigène,  n'empêche  pas,  néan- 
moins, que  le  peu  d'instruction  générale  et  d'édu- 
cation scientifique  qui  caractérise  les  missionnaires, 
diminue  singulièrement  la  valeur  de  leurs   travaux. 

Ainsi,  pour  ne  donner  qu'un  exemple,  croirait-on 
que.  dans  aucune  des  gi'amm aires  publiées  par  les 
soins  des  missions,  on  ne  trtnive  de  textes  dans  la 
langue    tahitienne,    samoane    ou    maorie  ? 

Cette    inqualifiable   négligeance    dévoile    une    igno- 


—  28  — 

raiice  profonde  de  la  linguistique  et  de  ses  besoins 
les  plus  immédiats. 

Quelques  spécialistes,  comme  Humboldt,  Friedrich 
Muller,  et  Buslimann  ont,  il  est  vrai,  réparé  partiel- 
lement celle  erreur,  mais  il  n'en  reste  i3as  moins  vrai 
qu'un  travail  d'ensemble,  scientifique  et  rigoureu- 
sement documenté,  reste  toujours  à  faire  sur  les 
langues  polynésiennes. 

Est-ce  à  dire  que  la  science  et  l'érudition,  de  plus 
en  plus  actives  et  répandues,  se  soient  désintéressées 
de  la  question  1 

La  liste  des  volumes  déjà  publiés  est  là  pour  nous 
prouver  le  contraire. 

Notons    : 

P.  -  E.  Gaussin,  •;  Du  dialecte  de  Tahiti.',  de  celui 
des  îles  Marquises  et,  en  général,  de  la  langue  poly- 
nésienne »,  in-8o,  1853.  (Bb.  Nat.,  Inventaire,  X  25514). 

Mœrenhout  (ï.  A.),  Voyage  aux  îles  du  grand 
Océan  )>  (2  vol.  in-S»);  Paris,  A.  Bertrand,  1837;  (Ren- 
seignements linguistiques  1res  précieux).  (Bb.  Nat., 
P-"  240). 

«  Alphabets  polynésiens  ),  de  Wilhelm  von  Hum- 
boldt »;  Berlin,  1838;  in-4o.  (3^  partie,  p.  78.  des  mé- 
moires de  l'Académie  de  Berlin).  B.  i..i. 

Wilhelm  von  Humboldt  «  Uber  die  Kawi  Sprachc  , 
Band  III,  Sudsee  Sprachcn  als  ostlicher  Zweig  des 
malayischen  Sprachslammes;  Berlin,  Académie  des 
Sciences,  1839.  B.  i.,  in-4",  O  19R. 

1.  Cette  abréviation  désigne  la  bibliothèque  de  l'Institut  de  France- 


—  29  — 

Lanouc  maorie  ;  Mgr  T('|kiiio  Jausscn,  «  Gram- 
maire et  dicliomialre  de  la  langue  tahitienne  »  ;  Paris, 
Belin.  1808;  in-12.  (Bb.  Nat.,  80,  X,  11800). 

W.  Colenso,  <<  A  Maori-Englisch  Lexicoii  ;  bciiig 
a  comprehciisive  dictioiiary  of  the  New-Zeiilaiid 
longue  »;  Wellington;  prinlcd  ])y  .1.  Mackay,  1898; 
in-8".  (Bb.  Nat.,  8",  X  11750). 

Macdonald  (D.),  -The  asiatic  origin  ofthe  oceanian 
languages  »;  London.  1891;  in-lfi.  (Bb.  Nat..  8",  X 
11047). 

J. -R.  Dordillon  (Mgr);  <  Grammaire  et  diction- 
naire de  la  langue  des  Marquises  »;  Paris,  Belin,  1904; 
in-12.  B.  i.  (N.  S.  D.  2437). 

«  Te  pipi  Tahiti-Farani  »  ;  Papeete,  imprimerie  des 
écoles  françaises  indigènes,  1882.  (Bb.  Nat.,  80,  X 
2243). 

V.  P.  Richard  Le  Moing,  «  Guide  des  enfants 
tahitiens  pour  apprendre  le  français  »  ;  Papeete,  1884  ; 
in-80.  (Bb.  Nat.,  8",  X  3067). 

D.  Macdonald,  «  South  Seas  languages  ^>  ;  Mel- 
bourne, 1891;  in-16.  (Bb.  Nat.,  8»,  X  10675,  II). 

Trcgear  (Edward),  «  The  Maori-Polynesian  com- 
parative DicUonary;  Wellington.  1891;  in-80.  (Bb.  Nat., 
80,  X  10356). 

«  Journal  of  the  Polynesian  Society  :  Wellington, 
New-Zealand,  1892;  in-80,  vol.  I,  april  1892.  (Bb.  Nal., 
Pd2,  88). 

R.  P.  Grézel,  «  Dictionnaire  futunien-français  (pré- 


'       —  30  — 
cédé  crun  abrégé  de  grammaire)))  ;  Paris,  chez  Mai- 
soiiiieiive,  1878.  (Bb.  NaL,  80,  X  954). 

A.  Gill,  «  Myths  and  Songs  from  the  Pacific  »  ; 
London,  Henry  S.  King,  1876;  in-12.  (Bb.  Nat.,  P-,  103). 

Williams  (^Y.  L.).  <:  First  Lessons  in  Ihe  Maori 
Language  with  a  short  vocabulary  >.  ;  London,  1882, 
in-16.  (Bb.  Nat,  80,  X  2298). 

Williams  (W.  L.),  «  Dictionary  of  the  New-Zealand 
longue;  Auckland,  1892;  ln-80.  (Bb.  Nat.,  8»,  X  10927). 

Cust  (Robert  Neadham),  «  Les  Races  et  les  Langues 
de  rOcéanie  »,  traduit  par  A.-L.  Pinart;  Paris,  1888; 
in-18.  (Bb.  Nat,  80,  Z  437  (56)). 

Dans  une  prochaine  étude,  je  rej^rendrai,  en  les 
analysant,  quelques-uns  des  ouvrages  de  la  seconde 
série  qui  présentent  un  intérêt  réel,  soit  comme  tra- 
vaux de  linguistique  générale,  ou  comme  documents 
particuliers. 

Félicien  SOULIER, 

Elève  ;•  l'Ecole  des   Lang-ues  Orientales  vivantes. 


TIIK  IMIlLdl.dli^  (II-  M\i»\(iAS(;\U 


«  J'he  Witlowcd  Missioiiary's  Journal  ;  coiitaining 
some  accounl  ol"  .Madairascar;  and  aiso,  a  narrative  of 
llic  missionary  career  of  the  Kev.  .1.  Jeffreys;  who 
died  on  a  passage  IVoin  Madagascar  lo  tlie  isie  of 
France,  Jnly  4,  1825,  aged  31  years.  By  Keturah 
Jeffreys.  (Sontliampton  :  1827)  »  is  a  work  wliicli  con- 
laiiis  not  only  some  interesting  détails  about  the  reli- 
gions anil  social  castoinsof  tlie  'Madagasses'  or  'Mala- 
gasses'  (as  llie  anthoress  calls  them),  observed  in  the 
years  1822-25,  but  a  few  notes  npon  their  language, 
whicli  ai'e  of  some  importance,  because  it  was  not  un- 
lil  ls:JO  that  the  first  translation  of  the  Bible  in'it  was 
pnblished,  and  live  years  later  that  «  ïhe  tlrst  complète 
.Malagasy  Dictionary  was  proposed  by  the  missionaries 
of  the  London  Missionary  Society,  and  prmted  at  thelr 
press  in  Antananai'ivo  in  the  year  1835  »;  that 
rianiely  of  J.  J.  Freeman  and  I).  Johns. 

Shc  records  the  following  native  words  and  phrases  : 
p.  39,  Tsaratareli//,  beautiful. 

Yes,  the  King  is  good.  lïnij  bava  aij  (indricna. 


—  32  — 

P.  61,  Mananatiakarena  ny  vazaha,  The  whiie 
man  is  rich. 

P.  ()6,  Ranoumafana,  the  hol  wnters. 

P.  75,  Maroumita,  bearers. 

P.  96,  Aza  mataohoutra  l.n  mamnijy  Do  not  fear, 
it  is  nolhing. 

P.  106,  Manassin  a  loumpacalalii,  Token  of  respect 
to  you,  M  aster  1 

P.  122,  Ny  farana  mafty  indrindra,  The  last  is  the 
hardest. 

P.  123,  Andriaina  nitra,  gods. 

P.  129,  Zanhare,  the  highest  god. 

P.  131,  Indiai  marlij  Madama  toiikoulia,  Madam 
wil  sureiy  die  (a  misprint  for  maiy). 

P.  134,  Manou  afanij  [i.e.  manaô  àfana),  lo  per- 
forni  the  ceremony  of  spriiikling  the  corpse  wilh  wa- 
ler  at  the  grave. 

P.  135,  7s/ me/j/a  maï,y /iî/ /a?mA-</, The  sou!  cannotdie. 

P.  138,  Karara,  cat;  vourana  doulouna,  an  owl- 
like  bird. 

P.  139,  Tranou  Andriamamlra,  the  house  of  god. 

P.  141,  Andron  fadij,  day  of  rcsl. 

P.  143  et  146,  lloudij  Havandra,  a  wooden  idol 
painled  bhick  representing  a  married  god,  medicine 
againsl  the  bail. 

P.  147,  Panousourana,  priest. 

P.  149,  ifoudij  Asou,  Medicine  against  the  fire  (a 
bit  of  sacred  wood). 


—  33  — 

P.  151,  Rambouny-d-anitra,  a  water-spout. 

P.  154,  Fangady,  spade;  Zouma,  Friday. 

P.  155,  Skidy,  oracle. 

P.  161  et  168,  Ombiasses,  diviners,  wise  men. 

P.  162,  Lamba,  a  loose  robe  worn  by  men,  which 
envers  the  body  as  low  as  the  knee. 

P.  164,  Hanamami/,  a  herb  eaten  by  the  natives. 

P.  169  et  170,  Tanginy,  a  fruit  used  as  an  ordeal. 

P.  169,  Mamsavi/,  to  bewitch. 

P.  173,  JaboUy  a  sortof  grass. 

On  p.  121 ,  M"  Jeffreys  says  :  «  After  a  few  months, 
the  method  of  teaching  in  the  English  language  was 
considered  generally  impracticable,  and  therefore 
abandoned;  and  an  alphabet  of  the  xMalagasy  was  for- 
med  :  it  consisted  of  twenty-two  of  oiir  letters,  viz.  a, 
b,  d,  e,  f,  g,  h,  i,  j,  k,  1,  m,  n,  o,  p,  r,  s,  t,  u,  v, 
y,  z.Thevowels  take  the  French  sound,  the  dipthongs 
[sic)  are  ao,  as  in  saolao  (seemingly  for  laolao),  pray; 
en,  as  in  babeo,  to  carry;  m,  as  in  deram,  praised; 
they  hâve  only  one  double  consonant,  which  is  ts,  as 
in  tsara,  good.  » 

With  few  exceptions,  the  above  words,though  differ- 
ently  written,  can  be  found  in  the  aforesaid  Dictionary, 
or  in  that  of  the  ReV'.  J.  Richardson,  printed  in  1885  in 
the  same  city  of  Tananarivou,  as  M"'  J.  spells  it. 
\l_  W'  Jeffreys,  who  was  carried  through  the  iland  in 
a  cot  or  hammock,  wrote  on  p.  34  :  «  Who  can  tell, 
but  that  we  shall  fall  a  sacrifice  to  the  dreadful  en- 
démie of  this  unsalubrious  climate  »? 

3 


-  34  — 

If  she  was  not  the  first  writer  to  use  «  unsalu- 
brious»,  the  Historical  English  Dictionary,  now  al 
press  in  Oxford,  will  probably  be  the  first  Diclioiiary  to 
record  it. 

Copies  of  the  above  «  journal  »  are  to  be  seen  in  the 
British  Muséum,  and  the  Bodleian  Library,  Oxford. 

Edward  Spencer  Dodgson. 


THE  FRENCII  IN  INDU 


Miich  lias  been  said  and  many  valuable  works 
iiave  been  written  about  ihe  unyielding  rivalry 
betwecn  the  French  and  the  English  in  India  during 
iho  greatest  part  of  ihe  eighteenth  century  A.  D. 
The  French  came  after  the  English;  they  established 
themselves  first  at  Siirat  in  the  year  1660,  but  passed 
to  the  Coromandol  Coast  in  1672  and  settled  at 
S.  Thome,  from  Avhicli  they  Avere  expelled  by  the 
Dutch  in  1674.  They  fled  then  to  the  neighbouring 
hamlet  of  Pondicherry,  which  they  had  purchased 
from  a  native  chief  in  the  preceding  year;  there  they 
biiilt  a  large  fort  and  a  strong  citadel,  both  greatly 
improved  in  subséquent  times.  They  rapidly  gained 
influence  over  the  native,  struck  acquaintance  with 
most  of  the  local  nabobs,  and  pretended  to  interfère 
in  the  management  of  the  affairs  of  the  decaying 
Mughal  Empire.  Such  a  policy  as  that  entertained 
by  the  Governors,  MM.  Martin  and  Dumas,  was 
energetically  developed  byDupleix,  who  had  a  right 
daim  to  be  reckoned  amongst  the  historical  rulers 
of  India.  Many  a  writer  bas  pointed  out  the  errors, 
faults,  inaccuracies  of  that  great  man,  of  his  compa- 
nions,  and  also  of  the  French  in  gênerai,  whilst  on 
the  contrary  tlieEnglish  remained  firmer  and  firmer, 
more  attentive,  less  impatient  or   disheartened.      Il 


—  36  — 

is  well  known,  however,  thatDupleix  was  for  a  time 
the  most  prominent  man  in  South  India,  and  France 
was  abolit  to  succeed  in  making  India  hers.  To  that 
contest  are  related  the  great  names  of  Diipleix,  La- 
bourdonnais,  Bussy,  and  Lally,  on  the  one  side; 
Clive,  Coote,  Boscawen,  on  the  other,  and  their 
lives,  actions,  and  character  hâve  been  thoroughly 
investigated.  Nevertheless,  ail  is  not  known,  and 
some  particLilars  will  ever  be  looked  for  with  in- 
creasing  interest,  and  gratefiilly  admilted  by  histo- 
rians  and  philosophers.  Such  as  are  concerned  in 
the  future  well-being  of  India,  and  even  of  huma- 
nity,  will  find  in  them  a  large  field  for  their  thoughts 
to  dealwith,  since  history  merely  is  a  simple  rehear- 
sal,  and,  what  is  to  come  after  is  founded  on  what 
is  past.  India  has  been  from  longa  land  forcontests 
and  invasions;  lier  climate,  wealth,  good-natured 
inhabitants,  from  long  attracted  strangers  and  we 
hâve  heard  of  no  other  country  w'here  so  many 
races,  religions, industries,  successively  were  brought 
in  and  lived  side  by  side  either  peacefully  or  reluc- 
tantlycontending  :  old  and  modem  Persians,  Greeks, 
Arabs,  Europeans  of  various  nations  ;  Buddhism, 
Parsism,  Christian  creeds,  etc. 

Historical  documents  must  be  then  heartily  wel- 
comed  by  ail  those  who  like  India.  A  most  curious 
and  valuablebook  hasjustbeen  published  in  Madras, 
at  the  Government  printing  office,  which  afFords 
much  light  on  the  matter,  viz.  on  the  French  past 
activity  in  India.  It  is  «  The  private  diary  of  Ananda 
Ranga   Pillai,  dubash    to  Joseph  François  Dupleix, 


—  37  — 

(jovernor  of    PondicheiTy  »  aiul  is    ihe    fii'st  of   an 
important  séries  of  iisefiil  volumes . 

Ananda  Ranga  Pillai  was  born  on  the  30th  Mardi 
1705,  in  one  of  the  subiirbs  of  Madras;  he  was  the 
son  of  a  certain  Tiruvengada  Pillai,  a  native  trader, 
who  in  the  year  1716  translated  himself  vvith  his 
family  to  Pondicherry  where  the  French  Govern- 
ment invited  native  merchants  to  corne  and  bestowed 
on  them  as  many  favoiirs  ascouldbe  obtained.  Hère 
lived  already  his  brother-in-law,  Xairiya  Pillai,  who 
had  become  the  chief  agents  the  Dewan  or  courtier, 
as  his  office  was  called  at  that  time.  The  charge 
was  an  important  and  fruitful  one,  since  the  courtier 
was  the  ordinary  intermediary  between  the  Govern- 
ment and  the  native  princes,  and  ail  the  Indian 
French  Company  affairs  had  to  pass  through  his 
hands.  The  charge,  however,  did  not  remain  in 
Nainiya  Pillay's  family,  because  of  religion  and 
other  préjudices;  but,  in  1746,  the  titular  Dewan 
having  died,  Ananda  Ranga  Pillai  was  appointed  to 
the  charge  which  he  fulfiUed  till  1755.  This  space 
of  ten  years  is  the  most  interesting  period  of  French 
history  in  India.  From  1736  Ananda  took  port  in 
the  affairs,  political  and  commercial,  and  soon  be- 
camean  every-day  confident  ofDupleix;  he  waswell 
placed  to  observe  and  note  ail  that  was  passingin  the 
country.  From  1736  up  to  1761,  a  few  daysbefore  his 
death,  which  happenedon  January  llth,  1761,hewrote 
himself  or  rather  dictated  a  very  minute  diary,  in 
which  family  things,  private  and  public  events, 
current  rumours  and    sayings,  arrivais   and  depar- 


—  38  — 

tures  of  sliips,  do  not  fail  to  tind  place.  The  diary  is 
of  course  a  large  one  :  a  complète  copy  of  it,  which 
is  preserved  in  the  National  Library  in  Paris,  forms 
twelve  thick  folio  volumes,  and  is  completed  by  four 
other  ones  containing  a  diary  from  1761  up  to  1799, 
copies  of  lellers,  accounts,  horoscopes  and  other 
pièces.  The  diary  was  copied  out  in  Pondicherry, 
some  sixty  years  ago,  for  M.  E.  Ariel,  who  acted  as 
Archivist  then  and  who  discovered  the  tlocumenls 
while  inquiring  about  Tamil  books  and  manuscripts 
in  the  city.  A  short  notice  ofthework  was  published 
in  1847,  but  as  M.  Ariel  died  in  1855,  no  more  atten- 
tion was  paid  to  it  till  1870.  The  statue  of  Dupleix 
was  erected  at  Pondicherry  that  year,  and  M.  Laude, 
the  Chief  Justice  there,  published' a  pamphlet  in 
which  were  translated  a  few  passages  of  Ananda's 
diary  concerning  the  unsuccessful  besieging  of  Pon- 
dicherry in  1748  by  the  English,  In  the  year  1882, 
I  gave  a  few  extracts,  and  in  1894  amplified  them  by 
publishing  a  large  volume  entitled  «  The  «French  in 
India  »,  which  contains  a  translation  of  varions 
passages  from  1736  up  to  1748.  In  1903,  I  gave  a 
spécimen  of  the  first  in  my  Tamil  Manucil. 

But  the  R.  A.  Consular  Agent  at  Pondicherry,  lieu- 
tenant gênerai  H.  Mac  Leod,  took  notice  of  the  ori- 
ginal manuscripts  in  1892,  and  by  liis  care  the  Madras 
Government  was  informed  of  its  importance.  A 
new  copy  lias  ordered,  and  a  complète  translation  in 
English  began  directly.  The  publication  ofthe  first 
volume  lasted  till  the  end  of  1904;  it  is  done  in  a 
most    convenient    way;   for  the  sake    of  order,    the 


—  39  - 

diary  has  been  clivided  inlo  chapters,  a  sunimary  of 

which  is  prefixed  to  the  Avork.     Moreover,  fréquent 

marginal  notes  point  to    the    varions  subjects  dealt 

with  in  the  diary  and  a    complète  table   of  local  and 

Personal  names    makes  the  text  easy,     The    volume 

is  completed  by  two   appendixes  refering  to   a  geo- 

graphical   term   and   to    the    murder   of   Safdar-Ali- 

Khan  and  his    son   Muhamniad-Khan.      Facino-    the 

o 

title  page,  is  a  photograph  which  reproduces  a  pic- 
ture,  still  preserved  in  the  author's  house  at  Pondi- 
cherry. 

The  présent  volume  goes  no  further  than  April23, 
1746,  that  is  to  say  the  beginning  of  the  war  which 
included  the  capture  of  Madras  by  the  P'rench,  their 
failure  in  besieging  Cuddalore,  and  the  attempt 
of  Boscawen  against  Pondicherry  in  1748.  It  appears 
as  a  preliminary  part  and  is  full  of  interest  ;  we 
learn  from  it  how  the  French  Governor  obtained 
from  the  first  Arcot  Nawab  a  charter  authorising  the 
coinage  of  money  in  Pondicherry  ;  it  costed  nearly 
40,000  pagodas  in  varions  présents,  viz.  120,000  ru- 
pees  :  the  Pondicherry  rupee,  which  was  very  fine 
and  which  was  struck  up  to  1837,  was  distinguished 
by  a  little  crescent  on  the  reverse.  There  we  hâve 
plenty  of  information  about  trade  and  exchanges, 
arrivai  and  departure  of  ships,  etc.  We  are  also 
minutely  informed  of  the  negoliations  which  led  to 
the  purchase  of  Karikal  from  the  Raja  of  Tanjore, 
delayed  however  till  1739,  when  Chanda  Sahib  in- 
terfered. 

The  following  chapters  deal  with  the  invasion  of 


-   40  — 

Thamas-Kuli-Khan,«//rt5  Nadir  Shah  ;  the  revolt  and 
progress  of  the  Mahrattas;  the  fear  that  seized  the 
Deccan  Princes  who  fled  and  took  refuge  within  the 
walls  of  Pondicherry;  the  departure  to  France  of 
M.  Dumas,  and  the  beginning  of  M.  Dupleix's  admi- 
nistration. In  the  meantime  the  divisions  come 
giving  many  particulars,  accounts  of  family  matters, 
births  and  marriages,  astronomical  events,  astrolo- 
gical  prognosticSj  quarrels  and  jealousies  of  offi- 
ciais, etc. 

The  whole  is  very  curious  in  that  it  was  written 
daily  on  the  immédiate  impression  of  facts. 

As  far  as  I  am  able  to  judge,  the  translation  seems 
to  be  a  faithful  and  accurate  one,  bat  nevertheless, 
in  some  passages,  I  should  hâve  liked  a  more  literal 
rendering.  Why  has  the  initial  motto,  Time  goes 
and  ivorcls  remain^  been  suppressed  ? 

The  original  manuscripts  hâve  sometimes  been 
left  incomplète  by  the  author  himself,  who  intended 
to  complète  them  afterwards,  but  forgot  it,  or  was 
unable  to  do  so,  but  many  passages  hâve  perished, 
owing  to  fragility  of  paper,  defect  of  ink,  moisture, 
carelessness,  etc. 

At  this  point  of  view,  I  reflected  that  the  copy  in 
the  Paris  National  Library  was  made  in  Pondicherry 
some  fifty  or  sixty  years  ago  and  that  perhaps  it 
would  be  more  exact  and  satisfactory.  In  order  to 
ascertain  it,  I  compared  a  few  pages  in  the  présent 
translation  with  M,  Ariel's  lext,  and  the  resuit  was 
that  the  Paris  manuscript  often  afforded  a  good  sup- 
ply  to  the  Madras   one.     For  example,  the  personal 


—  41  — 

name  omitted  al  p.  96  must  be  vvritten  :  «  Shanal  » 
of  which  the  exact  spelling  l  am  not  able  to  ascertain 
now. 

P.  273.  The  concluding  portion  ofthe  passage  is 
to  be  completecl  thiis  :  «  they  departed  promising 
them  to  bring  the  Nayakkar  in  the  delay  of  fifteen 
days  ». 

P.  298.  The  paragraph  begins  with  thèse  words: 
«  If  one  asks  what  is  going  on  at  Pondicherry,  how 
they  came  from  Siirat  bringing  letters;  and  they 
said...  » 

P.  316.  The  conclusion  is  «  they  went  on  saying 
they  will  ineet  again  to-morrow  morning  and  hear 
the  thing  » . 

I  particularly  noticed  that  the  vast  information 
respecting  the  afîairs  of  the  late  courtier,  Kanaga- 
raya  Mudaliar,  in  which  numerous  passages  are  de- 
fective,  may  often  be  improved  by  the  Paris  manus- 
cript. 

P.  341.  The  full  text  occurs  as  follows  :  «  This 
day,  at  10  o'clok  in  the  morning,  as  ï  was  with  the 
(îovernor  accountant  Rangapillai  in  the  arecanutgo- 
down,  where  we  use  to  stay,  we  came  speaking  to- 
gcther  and  I  said  :  —  Yesterday,  as  regards  the 
accounts  and  the  furniture  in  the  liouse  of  Kanaka- 
raya  Mudali,  whatever  altération  may  be  admitted, 
Chinnamudali  remarked  not  knowingwhat  was  made 
by  us,  being  ungrateful,  because  he  plundered 
muchand  is  much  covetous;  butas  the  widow  of  Ka- 
nagaraya  Mudali  was  unwilling  to  give  him  even  a 
single  cash  after  lier  husband's  death,  he  sent  to  me, 


—  42  — 

as   soon  as    Kanagaraya  Miidali   died,  the  Christian 
named  Krimasi   Piindit,  to  say  to    me  :  yoii  are    my 

mother »,  and  a  little  further  :  «  At  four  nazhigas, 

when  my  younger  brother  went  to  his  house...  » 

At  page  342,  too,  we  may  add  :  «  As  it  appeared 
that  day,  whatever  good  ^\e  may  do  to  him,  he  will 
net  acknowledge  it.  When  I  had  spoken  this  to 
accoimtant  Rangapillai,  he  answered  me:  «  This  is 
trae;  when  we  hâve  examined  the  accounts,  when  we 
hâve  estimated  the  estate,  when  we  hâve  looked  at 
the  other  things,  we  hâve  paid  twelve  pagodas  for 
ten,  and  however  he  has  been  ungrateful...  » 

In  the  lists  on  pp.  344  and  345,  the  following  figu- 
res could  be  supplied  : 

Page  344,  Gold  ornaments 7.462 

Rupees  in  hand 800 

Page  345,  Rupees  800 200 

Total 41.911 

Debts 3.947   5/16 

Net  rest 35 .  964   9/16 

It  would  be  highly  désirable  to  send  a  compétent 
person  to  Paris  to  copy  ont  the  complète  passages.  A 
SLippIementary  volume  can  be  so  obtained;  in  ihe 
meantime  we  must  impatiently  wait  for  and  hearlily 
welcome  the  forthcoming  volumes. 
Paris,  18-3-06. 

Prof.  Julien  Vinson. 

Tlœ  Malabar  Quaricrli/  Rrricir,  Ernakulaiii,  Coeliin,  Sept. 
1906,  vol.  V,  p.  212-216. 


LE  MOUVEMENT  SWADÈCI 


La  politique  du  gouvernement  anglais  clans  l'Inde 
n'a  pas  sensiblement  change,  depuis  que  sa  domina- 
tion s'y  est  définitivement  établie.  Le  principal,  pour 
ne  pas  dire  le  réel  danger  qui  la  menace,  est  la  cons- 
titution de  l'unité  indigène,  de  la  nationalité  hindoue. 
Que  pourraient  contre  trois  cents  millions  d'hommes 
unis  toutes  les  forces  de  l'Angleterre?  Aussi,  après  avoir 
supprimé  l'unité  administrative,  d'ailleurs  très  fac- 
tice, et  l'unité  du  langage  officiel  établies  par  les 
Mongols,  les  Anglais  n'ont-ils  rien  fait  pour  diminuer 
les  rivalités  de  castes,  de  races,  de  religions;  les  deux 
grands  partis  entre  lesquels  se  répartissent  les  Indiens 
ont  eu,  l'un  après  l'autre,  et  suivant  le  cas,  les  faveurs 
et  l'appui  du  gouvernement.  En  1857,  les  Hindous  sont 
devenus  loyaux  et  fidèles.  Aujourd'hui,  les  Musul- 
mans sont  les  plus  fermes  défenseurs  de  l'empire 
contre  les  velléités  d'indépendance  des  Hindous.  Il 
s'est  produit,  depuis  cinquante  ans,  un  double  courant 
inverse:  les  Hindous,  instruits  par  les  Anglais,  s'ins- 
pirent de  plus  en  plus  des  idées  d'indépendance  de 
l'Occident;  les  Musulmans  espèrent  avec  les  faveurs 
gouvernementales  recouvrer  la  primauté  perdue  il 
y  a  un  siècle  et  demi.  Aussi  déploient-ils  une  acti- 
vité extraordinaire  et  excitent-ils  de  plus  en  plus 
l'animosité   des  indigènes  brahmanistes. 

Cette  animosité  a  amené  de  la  part  des  Hindous, 


__  44  — 

au  Bengale,  le  mouvement  swadêçl^  dont,  en  Europe, 
on  n'a  pas  toujours  bien  compris  le  caractère. 

Ce  mot  si^'adêçi  {les  Anglais  écrivent  swacleshi)  a  été 
traduit  par  notre  adjectif  «  autonome  »,  mais  la  tra- 
duction n'est  pas  rigoureusement  exacte,  car  swadêçî 
(de  swa  «  soi,  son,  propre  »,  et  deçà  <;  pays  »)  a  une 
signification  plus  générale  et  plus  absolue.  Il  s'agit 
en  définitive  d'une  tentative  de  rébellion  pacifique 
contre  l'Angleterre,  d'une  sorte  de  grève,  organisée 
par  les  Hindous,  mais  que  les  Musulmans  se  refusent 
à   suivre. 

Déjà  ancien,  car  ses  origines  datent  d'une  ving- 
taine d'années,  ce  mouvement  est  devenu  très  vif, 
à  cause  de  ce  qu'on  a  appelé  la  partition^  c^est-à-dire 
le  remaniement  administratif  du  Bengale,  dont  on  a 
détaché  toute  la  partie  nord-est  pour  la  rattacher  à 
l'Assam,  avec  Dacca  comme  capitale.  L'auteur  de 
ce  remaniement  est  le  Gouverneur  général  Lord 
Curzon,  dont  les  Hindous  ont  salué  le  départ  avec  des 
cris  de  joie,  tandis  que  les  Musulmans,  au  contraire, 
s'en  montraient  profondément  désolés.  C'est  que,  dans 
le  Bengale,  les  Musulmans  se  trouvaient  gênés  et 
dépassés  par  les  Hindous  plus  nombreux,  plus  mal- 
léables; dans  la  nouvelle  province,  les  Musulmans 
seront  en  majorité,  et  ils  espèrent  que  la  séparation 
amènera  le  développement  rapide  des  villes  de  Dacca 
et  de  Chittagong. 

Le  mouvement  protestataire  s'est  organisé  dans  de 
grandes  réunions  publiques,  dont  une  —  de  phis  de 
10.000  personnes  —  s'est  tenue  à  Chandernagor,  sur 


—  45  — 

le  territoire  français,  par  crainte  de  la  police  anglo- 
hindoue,  composée  surtout  de  Musulmans  encadrés 
d'Européens.  La  manifestation  de  la  protestation  se 
résume  en  un  boycottage  universel  des  produits  étran- 
gers: des  femmes  ont  brisé  publiquement  leurs  bra- 
celets de  verre;  des  écoliers  parcourent  les  rues  en 
chantant  le  bandé  mûtaram^^  du  romancier  Dankim 
Chandra  Chatterji,  dont  on  fait  une  sorte  d'air  natio- 
nal :  c'est  un  hymne  extrait  du  roman  historique 
Anandra  Nûth  qui  raconte  un  épisode  de  la  révolte 
des  Sanyasis,  en  1775,  révolte  qui  avait  pour  objectif 
autant  les  Musulmans  que  les  Anglais. 

Le  boycottage  des  produits  européens  a  été  décidé 
dans  107  meetings  tenus  en  quinze  jours,  par  plus  de 
()50.000  personnes.  On  a  cherché  à  l'étendre  à  toute 
l'Inde;  on  a  placardé  au  Panjab  et  dans  les  bazars 
de  Pouna,  de  Nagpour,  d'Allahabad,  de  Dacca  même, 
des  écriteaux  menaçants  pour  ceux  qui  achèteraient 
des  tissus  européens,  des  articles  de  commerce  étran- 
gers. Aussi,  telles  maisons  qui,  le  jour  du  Bijoya 
«  hickij  daij  »,  écoulaient  d'ordinaire  un  millier  de 
balles  de  cotonnades,  en  ont  péniblement  vendu  cette 
année  une  centaine.  On  cite  ce  fait  caractéristique 
d'un  marchand  hindou  qui,  dans  un  accès  d'en- 
thousiasme, a  mis  le  feu  à  tout  son  stock  qui  compre- 
nait pour  plus  de  100.000  roupies  de  produits 
commerciaux  européens.  Les  cigarettes  anglo-améri- 
caines, d'ailleurs  détestables,  sont  impitoyablement 
proscrites;  on  s'efforce  de  les  remplacer  par  les  biris, 

1.  «Je  salue  (ma)  mère.  »  Je  compte  publier  prochainement 

le  texte  et  la  traductio?i  de  ce  chant. 


—  46  — 

purement  indigènes,  fabriqués  avec  du  tabac  blond 
du  Goudjai'ate  parfumé  au  musc  ou  au  sandal. 

Cependant,  ce  nationalisme  paraît  condamné  à  un 
avortement  complet.  Contrairement  aux  prévisions, 
le  récent  voyage  du  prince  de  Galles  a  provoqué, 
dans  le  Bengale  même,  un  accès  inattendu  de  «  loya- 
lisme »  ;  les  rajas  indigènes  sont  allés  en  foule  au- 
devant  du  futur  empereur.  D'autre  part,  les  actions 
émises  pour  la  fondation  de  manufactures  indigènes 
de  tissage,  etc.,  ne  trouvent  pas  de  preneurs,  et,  faute 
de  produits  nationaux,  on  en  reviendra  forcément 
aux  tissus  de  Liverpool   ou  de  Manchester. 

Les  Hindous  accusent  les  Musulmans  de  cet  échec. 
Musulmans  et  Hindous  ne  sont  pas  prêts  de  s'entendre 
contre  l'Anglais.  Les  Musulmans  sont  reconnaissants 
à  Lord  Curzon  d'avoir  encouragé  les  études  musul- 
manes sur  l'Islam,  la  restauration  des  mosquées,  la 
fondation  de  collèges  musulmans.  Sir  R.  Fuller,  lieu- 
tenant-gouverneur de  la  nouvelle  province  Eastern 
Bengal,  a  été  reçu  à  Dacca  avec  un  enthousiasme 
indescriptible  par  les  Musulmans,  tandis  que  les 
Hindous  s'abstenaient  et  que  leurs  journaux  étaient 
pleins   de   protestations  violentes. 

Il  s'est  produit  une  très  curieuse  interversion  dans 
l'attitude  des  deux  peuples  vis-à-vis  de  l'Européen  : 
l'Hindou,  d'abord  accueillant  et  accessible  aux  choses 
d'Europe,  s'est  pour  ainsi  dire  replié  sur  lui-même; 
le  Musulman,  au  contraire,  d'abord  hostile,  s'est  rap- 
proché des  conquérants  et  leur  demande  ses  inspira- 
tions.   Il    a    organisé    des   industries    que    le   swadêçî 


—  47  — 

menace  d'une  concurrence  redoutable.  D'ailleurs, 
les  Anglais,  instruits  par  l'expérience,  ont  composé 
les  régiments  natifs  d'éléments  homogènes,  qui  en 
font  des  antagonistes  naturels;  les  uns,  par  exemple, 
sont  uniquement  formés  de  brahmes,  et  les  autres 
exclusivement  de  Musulmans.  Il  existe  certainement 
dans  toute  l'Inde  un  courant  anti-anglais  très  net, 
plus  ou  moins  accentué  suivant  les  régions.  Les  Musul- 
mans y  sont  pour  la  plupart  étrangers. 

Des  faits  récents  montrent  combien  sont  vives  et 
tenaces  les  haines  de  races.  Le  7  février  dernier, 
les  Musulmans  de  Calcutta  célébraient  la  fête  qui 
comporte  des  sacrifices  de  vaches  devant  les 
mosquées.  Pour  narguer  les  Hindous,  ils  firent  passer 
ces  animaux  par  une  rue  étroite  qui  longe  une  pagode, 
dans  le  quai'tier  de  Chitapoure.  Une  violente  discus- 
sion s'éleva  enti'c  les  Hindous  qui  sortaient  du  temple 
et  les  Musulmans;  un  agent  de  police  hindou  menaça 
les  Musulmans  d'un  procès-verbal.  Mais  ceux-ci, 
irrités,  allèrent  chercher  des  renforts  et  attaquèrent 
la  police  à  coups  de  pierres.  Puis  ils  s'en  prirent 
au  temple  lui-même,  forcèrent  les  portes,  battirent 
les  gardiens  et,  à  l'aide  de  barres  de  fer,  mirent  en 
pièces  les  statues  des  dieux.  Les  Hindous  s'enfuirent 
et  les  vainqueurs,  attachant  à  la  queue  des  vaches 
les  idoles  encore  intactes,  les  traînèrent  ainsi  jus- 
qu'au Gange.  Le  lendemain,  la  fête  recommençait: 
les  Hindous  s'étaient  organisés  et  il  y  eut  une  véri- 
table bataille  entre  sept  ou  huit  mille  Musulmans 
et  toute  la  population  du  quartier.  Il  fallut  faire 
donner  la  cavalerie  pour  rétablir  l'ordre. 


-  48  — 

Il  est  bon  de  rappeler  d'ailleurs  que,  dès  le  5  no- 
vembre 1905,  la  Société  littéraire  mahométane  de 
Calcutta  envoyait  à  ses  coreligionnaires  une  circulaire 
pour  les  engager  à  ne  prendre  aucune  part  à  l'agi- 
tation contre  la  «  partition  »  du  Bengale;  on  les  invi- 
tait dans  ce  document,  signé  de  Bakhtyar  Sliad,  Syed 
Mohammed,  AbduUah  Khan  Ahmed,  etc.,  à  demeurer 
bons  et  fidèles  sujets  de  l'empereur-roi  Edouard  VII, 
en  insistant  sur  ce  point  que  les  intérêts  des  Maho- 
métans  de  l'Inde  sont  tout  différents  de  ceux  des 
Hindous,  et  en  énumérant  les  bienfaits  du  gouver- 
nement actuel:  lo  allocation  annuelle  de  50.000  roupies 
(83.500  fr.)  pour  les  écoles  musulmanes  du  Bengale; 
2°  fondation  de  bourses  nombreuses  à  1  Université 
de  Calcutta;  3»  maintien  des  fondations  antérieures; 
4o  attribution  successive  de  plus  de  100.000  roupies 
(167.000  fr.)  pour  la  construction  à  Calcutta  d'un 
hôtel  devant  servir  à  l'installation  d'une  medressah; 
5»  tempéraments  apportés  aux  règlements  sur  la 
peste  en  faveur  des  dames  musulmanes,  derrière  le 
voile  qui  ferme  les  gynécées;  6o  autorisation,  pendant 
l'épidémie,  de  faire  im  pèlerinage  à  la  Mecque,  en 
l^artant  de  Chittagong  au  lieu  de  Bombaj^,  accordée 
aux  Musulmans  du  Bengale,  du  Beliar  et  de  l'Orixa. 

La  plupart  des  renseignements  qui  i^récèdent  sont 
extraits  d'une  lettre  quij  m'a  été  écrite  par  un  de  mes 
anciens  élèves,  M.  G.  Barrigue  de  Fontainieu,  en  ce 
moment  au  Bengale,  chargé  d'une  mission  scienti- 
fique. 

J.    V. 


BIBLIOGRAPHIE 


Obras  Vascongadas  del  Doctor  Labortano  Joannes 
(VEtcheberri  (1712),  con  una  introduccion  y  notas 
por  Julio  de  Urquijo  é  Ybarra.  Paris,  Paul  Gealhner, 
1907  (Bayonne,  impr.  A.  Lamaignère),  in-4°,  lxxx- 
323-(iv.)  p.  et  une  p.  de  fac-similé. 

Le  10  octobre  1866,  —  il  vient  d'y  avoir  juste  qua- 
rante ans,  —  par  une  belle  soirée  d'automne,  je  dé- 
barquai à  Bayonne,  tout  frais  sorti  de  l'école  forestière, 
plein  d'ardeur  et  d'enthousiasme,  et  bien  disposé  à 
m'éprendre  de  cette  mystérieuse  langue  basque,  qu'une 
bonne  fortune  inespérée  me  mettait  à  même  d'étudier 
sur  place,  dans  les  meilleures  conditions.  Mon  long 
séjour  en  Orient  et  mes  voyages  m'avait  préparé  à  cette 
étude;  aussi  ne  tardai-je  pas  à  me  mettre  à  l'ouvrage. 
Présenté  à  M.  l'abbé  Inchaupé  par  cet  excellent  M.  de 
Gavardie,  juge  d'instruction,  ancien  collègue  de  mon 
père  à  Pondichéry,  je  fus  reçu  par  l'honorable  chanoine 
avec  cette  amabilité  un  peu  dédaigneuse  que  montrent 
souvent  les  Basques  lorsqu'on  ose  s'attaquer  à  leur  re- 
doutable idiome.  11  voulut  bien,  pour  me  guider,  me 
confier  son  Verbe  et  la  Grammaire  de  Harriet,qui  sont 

4 


-  50  — 

d'ailleurs  les  ouvrages  les  plus  propres  à  rebuter  un 
commençant.  Mais  je  n'étais  pas  un  novice  ;  j'aban- 
donnai vite  ces  livres  formidables... 

J'ai  publié,  depuis,  bien  des  choses  sur  la  langue 
et  le  pays  basques  :  quelques  volumes,  une  vingtaine 
de  brochures,  un  très  grand  nombre  d'articles  de  jour- 
naux et  de  revues.  J'ai  soutenu  de  longues  et  vives 
discussions;  mais  j'ai  la  satisfaction  aujourd'hui  de 
voir  qu'on  commence,  dans  le  pays,  à  rendre  justice 
à  mes  efforts.  Je  n'en  veux  d'autre  preuve  que  les  ap- 
préciations bienveillantes  de  M.  de  Azkue  dans  son 
excellent  Dictionnaire  et  la  manière  élogieuse  dont 
M.  de  Urquijo  cile  mon  nom  dans  son  introduction 
aux  œuvres  de  Jean  d'Etcheberri. 

C'est  qu'elle  est  admirable,  cette  introduction! 
M.  de  Urquijo  est  de  ceux  pour  qui  les  coups  d'essai 
sont  des  coups  de  maître.  C'est  complet,  précis,  mé- 
thodique, clair,  intéressant  au  possible,  et  ces  quatre- 
vingts  pages  se  lisent  sans  la  moindre  fatigue,  presque 
avec  l'intérêt  passionnant  du  roman  le  plus  dramatique. 
Et  quand  on  songe  que  l'auteur  de  ce  chef-d'œuvre 
était,  hier  encore,  un  mondain  livré  aux  horreurs  de 
la  politique,  on  éprouve  une  joie  plus  vive  de  ce  qu'on 
pourrait  appeler  une  heureuse  conversion. 

Il  paraît,  —  et  je  m'en  enorgueillis  fort,  —  que  j'y 
suis  pour  quelque  chose.  M.  de  Urquijo  nous  raconte 
en  effet,  que  c'est  ma  Bibliographie  Basqve  qui  l'a 
amené  à  former  sa  collection  de  livres  basques,  déjà  si 


—  51  — 

complète  et  si  belle,  et  à  rechercher  dans  le  Pays  tous 
les  documents,  tous  les  manuscrits,  tous  les  souvenirs 
littéraires  des  siècles  précédents.  C'est  ainsi  qu'il  a  re- 
trouvé, chez  les  Franciscains  de  Zarauz,  le  manuscrit 
qu'il  publie  aujourd'hui  cou  amore,  et  avec  un  soin 
méticuleux. 

L'ouvrage  n'était  pas  tout  à  fait  inconnu  d'ailleurs. 
J'en  avais  indiqué  l'existence,  sur  la  foi  du  regretté 
Ch.  Bernadou,  qui  m'avait  communiqué  un  extrait, 
relatif  à  ce  travail,  des  procès-verbaux  du  Bilçar  d'Us- 
larilz.  Mais  nous  ne  savions  ni  ce  qu'était  devenu  le 
manuscrit,  ni  quelle  avait  été  la  vie  de  l'auteur,  origi- 
naire de  Sare,  que  Larramendi,  vers  1730  ou  1735, 
trouva  installé  comme  médecin  «  municipal  »  cà  Az- 
coïtia . 

M.  de  Urquijo  a  pu  reconstituer  l'histoire  du  livre 
et  la  biographie  de  Jean  d'Etcheberri.  Il  a  voulu  ré- 
soudre le  problème;  il  a  cherché  et  il  a  trouvé,  tout  ce 
qu'on  pouvait  trouver  du  moins. 

Nous  apprenons  ainsi  que  Jean  d'Etcheberri,  de 
l'une  des  maisons  Etcheberri  de  Sare,  était  docteur  en 
médecine,  établi  à  Sare  où  il  avait  épousé  Catherine 
d'Ilsasgarat  qui  lui  donna  plusieurs  enfants.  Mais  le 
métier  de  médecin  ne  rapportait  pas  beaucoup  à  Sare 
et  le  docteur  devait  exercer  son  activité  dans  les  pa- 
roisses limitrophes,  tant  en  France  qu'en  Espagne. 
En  1743,  la  municipalité  de  Vera  le  nomma  son  mé- 
decin officiel;  il  remplit  cette  charge  jusqu'en  1722, 


-  52  — 

mais  il  continua  à  habiter  Sare  :  c'est  en  1716  seule- 
ment qu'il  transporta  sa  résidence  à  Vera.  Sa  réputa- 
tion grandit  en  Espagne;  on  le  recherchait  de  toute 
part  et,  en  1722,  il  devint  médecin  de  Fontarabie,  aux 
appointements  de  150  ducats;  on  avait  objecté  pour- 
tant qu'il  n'était  pas  docteur  d'une  faculté  d'Espagne: 
il  l'était  de  Montpellier  sans  doute.  En  1723,  il  passa 
à  Azcoïtia  où  il  resta  jusqu'à  sa  mort,  survenue  en 
1749;  il  avait  alors  plus  de  quatre-vingts  ans.  Nous 
pouvons  ainsi  supposer  qu'il  était  né  à  Sare  vers  1665. 
Il  n'avait  donc  pas  connu  Axular,  ni  son  neveu;  mais 
il  avait  pu  connaître  Harizmendi,  d'Argaignarats  et 
Pouvreau,  dont  il  cite  le  Philothea. 

Instruit  et  actif,  il  s'était  beaucoup  occupé  de  sa 
langue  maternelle;  il  admirait  le  style  d'Axular  et  le 
prit  pour  modèle  quand  il  écrivit,  en  1712,  l'ouvrage 
que  M.  de  Urquijo  nous  donne  aujourd'hui. 

Il  y  ajouta,  plus  tard,  une  introduction  latine;  plus 
tard  encore,  il  fit  une  grammaire  latine  en  basque,  et, 
pour  annoncer  ce  dernier  travail,  il  publia,  en  1718,  à 
Bayoïine,  chez  Mathieu  Roquemaurel,  une  «  lettre  de 
recommandation  »  Gomendiozco  carta, ^0 ^ . ,^e[ii  in-4°, 
que  M.  de  Urquijo  réimprime  d'après  l'exemplaire, 
unique,  qui  a  appartenu  à  M.  l'abbé  M.  Harriet. 
Etcheberri  avait  fait  en  outre  un  vocabulaire  basque- 
français-espagnol-latin  qu'il  avait  prêté  à  Larramendi 
et  que  M.  de  Urquijo  croit  avoir  aussi  retrouvé. 

Le  manuscrit  des  Hatsapenac  et  de  la  Grammaire 


—  53  — 

latine  est  iiicûiiteslablement  l'original  de  l'auteur, 
comme  le  prouvent  les  corrections,  les  ratures,  les 
additions,  les  retouches  nombreuses  :  le  savant  et  cons- 
ciencieux éditeur  donne  \efac-simile  d'une  page  fort 
bien  choisie,  où  il  est  parlé  d'Axular. 

Le  manuscrit  de  Zarauz,  que  M.  de  Urquijo  décrit 
de  la  manière  la  plus  parfaite,  est  malheureusement 
incomplet.  On  serait  peut-être  en  droit  d'en  accuser 
la  négligence  des  moines,  si  beaucoup  de  bibliothé- 
caires laïques  n'étaient  pas  suspects  de  la  même  insou- 
ciance. Au  surplus,  nous  ne  sommes  plus  au  moyen- 
âge,  à  cette  époque  de  pauvreté  et  d'ignorance,  où  l'on 
grattait  les  vieux  parchemins  pour  y  écrire  des  litanies 
et  des  oraisons... 

M.  de  Urquijo  a  reproduit  le  texte  du  manuscrit 
avec  l'exactitude  la  plus  scrupuleuse,  ce  dont  on  ne 
saurait  trop  lui  savoir  gré. 

L'ouvrage  principal  de  Jean  d'Ktcheberri,  dédié  au 
pays  de  Labourd*,  est  intitulé  Escuararen  Hatsapenac, 
c'est-à-dire  «  Rudiments  de  basque  »  et  comprend  plu- 
sieurs chapitres  qui  traitent  de  la  pureté,  de  la  no- 
blesse, de  l'originalilé,  de  la  ftexibilité,  de  l'unité  du 
basque,  et  de  sa  raison  d'être;  puis  vient  l'éloge 
d'Axular  et  du  parler  de  Sare;  l'auteur  démontre  en- 
suite que  ceux  qui  dédaignent  le  basque  sont  eux- 

1.  Etcheberri  appelle  le  Laboii.rd  laa-urdi,  ce  qui  voudrait 
dire  «  le  pays  aux  quatre  eaux,  aux  quatre  rivières  »  (sans  doute 
la  Bidassoa,  la  Nivelle,  la  Nive  et  la  Bidouze),  étyraologie  fort 
plausible. 


—  54  — 

mêmes  méprisables  et  il  termine  par  un  appel  chaleu- 
reux à  la  jeunesse  du  pays  et  au  lecteur. 

Si  M.  de  Urquijo  n'a  rien  changé  au  texte  d'Etche- 
berri,  il  a  cru  devoir  ajouter  des  notes  utiles  et  intéres- 
santes, et  vérifier  toutes  les  citations  latines  et  basques. 
Il  a  pu  constater  ainsi  que  les  citations  d'Axular  sont 
empruntées  à  la  première  édition,  celle  de  1643,  qui  a 
pour  titre  Grero  et  non  à  la  mauvaise  réimpression 
sans  date  qui  est  du  XVIIP  siècle  et  qui  est  intitulée 
Gueroco  Giicro.  J'avais  fait  la  même  constatation  dans 
le  vocabulaire  de  Pouvreau.  Quant  à  VElicara  erabilt- 
ceco  liburua,  dont  nous  ne  connaissons  que  les  éditions 
de  1665  et  1666,  je  ferai  observer  que  la  première 
édition  est  de  1636  et  non  de  1635.  Du  moins  c'est  la 
date  que  donne  M.  Pierquin  de  Gembloux  qui  avait 
évidemment  sous  les  yeux  un  exemplaire  de  l'ouvrage 
dont  il  a  copié  le  titre  intégralement,  comme  il  a  copié 
aussi  le  titre  du  grand  ouvrage  de  d'Argaignarats,  de 
1641,  que  M.  Gustave  Brunet  avait  vu.  Que  sont  de- 
venus ces  deux  volumes? 

L'intérêt  principal  du  travail  du  docteur  Etcheberri, 
c'est  que  ce  n'est  pas  une  traduction  ou  une  adaptation, 
mais,  comme  celui  d'Axular,  un  ouvrage  original 
pensé  et  écrit  en  basque;  il  n'en  est  pas  beaucoup  qui 
réalisent  cette  qualité.  Ce  nous  est  une  raison  de  plus 
pour  remercier  M.  de  Urquijo,  pour  lui  adresser  toutes 
nos  félicitations  et  pour  lui  demander  de  nous  donner 
d'autres  publications  de  ce  genre.  Un  vaste  champ  est 
ouvert  à  son  intelligente  et  vaillante  activité. 


—  55  — 

,l(;  me  reprocherais  en  terminant  de  ne  pas  accorder 
à  rimi)rlmeur  la  part  d'éloges  qui  lui  revient.  L'exécu- 
tion est  très  soignée  et  fort  belle.  Ce  superbe  volume 
contraste  heureusement  avec  les  élucubrations  com- 
munes, vulgaires  et  sans  goût  de  la  plupart  des  impri- 
meries provinciales. 

Julien   VI^SON. 


Etienne  de  Flàcourt.  Dictionnaire  de  la  langue  de 
Madagascar...  par  Gabriel  Ferrand.  Paris,  E.  Leroux, 
1905,  in-8°(vj)-XXXlX-296p. 

J'ai  donné  ici  même,  il  y  a  deux  ans,  une  notice  bi- 
bliographique sur  Et.  de  Flacourt,  le  premier  gouver- 
neur français  de  [Madagascar.  M.  Ferrand  a  eu  l'excel- 
lente idée  de  réimprimer  la  partie  linguisti(pie  dos 
ouvrages  de  Flacourt,  qui  d'ailleurs  n'était  pas  tant 
son  œuvre  que  celle  d'un  des  missionnaires  qui  l'acom- 
pagnaient.  Mais  M.  Ferrand  ne  s'en  est  pas  tenu  Là  : 
il  a,  à  côté  de  la  forme  donnée  par  le  Lexicographe  de 
1653,  mis  la  forme  moderne  du  mot  dans  la  même 
région  et  aussi  les  variantes  dialectales;  il  a  seulement 
indiqué  les  formes  des  manuscrits  anciens,  écrits  en 
arabe,  que  possède  la  Bibliothèque  Nationale.  Il  a  fait 
précéder  ces  listes  de  mots  d'une  étude  générale  sur 
la  langue  et  la  phonétique  malgaches. 

J'aurais  bien  des  observations  à  faire  sur  la  partie 
phonétique.  D'abord  le  tableau  de  la  p.v  ne  me  satisfait 


—  56  — 

pas  :  je  ne  vois  pas  h\en  j  =  dr  palalo-denlale,  ni  la 
dentale  alvéolaire  ts,  ni  les  palatales  tr,  dr;  je  n'aime 
pas  non  plus  que  /  soit  classée  comme  liquide  :  qu'est- 
ce  au  juste  qu'une  liquide?  Je  trouve  aussi  que  M.  Fer- 
rand  adopte  trop  facilement  la  terminologie  des  néo- 
grammairiens  et  les  théories  «  expérimentales  »  de 
M.  l'abbé  Rousselot,  lui  qui  a  étudié  sur  place  et  en- 
tendu de  ses  oreilles!  Ce  qui  est  dit  des  soi-disant 
palatales  tremblées  tr,  dr,  à  la  p.  xj-xij,  est  extrême- 
ment obscur.  Quant  aux  emphatiques  correspondantes, 
les  arabes  les  écrivaient  rr,  mais  tous  les  grammairiens 
ou  lexicographes  transcrivent  le  tr  par  ts,  tch,chs,  trsh, 
tsh,  et  en  Belsileo  il  devient  s,  tandis  qu'en  Mérina 
il  est  simplement  tr.  Ce  sont  probablement  de  ces 
sons  mixtes,  consonnantico-vocaliques,  où  la  langue, 
le  palais  et  les  dents  interviennent  d'une  façon  varia- 
ble suivant  les  individus  et  les  localités. 

Julien  ViNsoN. 


Eugène  Kouillard.  iYoms  géographiques  de  la  /tro- 
vince  de  Québec...  Etymologie,  traduction  et  ortho- 
graphe. Québec,  E.  Marcotle,  190(3,  in-8".  110  p.  et 
une  carte  (Publication  de  la  Société  du  parler  français 
au  Canada). 

Le  vocabulaire  de  M.  Rouillard,  par  ordre  alphabé- 
tique, est  extrêmement  intéressant.  Il  contient  la  liste 
de  tous  les  noms  topographiques  du  pays,  tels  qu'ils 


—  57  — 

sont  acliiellemcnl  employés  ou  tels  qu'on  les  trouve 
dans  les  historiens  et  les  écrivains  européens  des  trois 
siècles  précédents.  La  reconstitution  des  formes  origi- 
nales n'était  pas  facile,  car  beaucoup  de  noms  étaient  for- 
tement altérés,  mais  l'auteur  a  rapproché  les  diverses 
variantes  ;  il  a  consulté  les  grammaires  et  les  diction- 
naires, et  il  a  pris  l'avis  des  missionnaires  qui  vivent 
aujourd'hui  parmi  les  tribus  indigènes,  —  que  l'auteur 
appelle  sauvages:  je  n'aime  point  du  tout  cette  appella- 
tion dédaigneuse,  —  dont  le  nombre  est  très  réduit  : 
telle  peuplade  qu'on  évaluait  à  cinquante  mille 
hommes,  il  y  a  trois  siècles,  ne  compte  plus  actuelle- 
ment que  deux  mille  individus. 

Ces  noms  topographiques  appartiennent  à  divers  dia- 
lectes des  langues  huronne-iroquoise  et  algonquine. 
M.  Houillard  donne  quelques  détails  sur  ces  divers 
idiomes  dans  son  intéressante  Introduction,  mais 
vraiment  par  trop  sommaire  et  insuffisante.  Que  veut 
dire  ceci  :  les  Hurons  comme  les  Algonquins,  con- 
juguent les  noms  et  multiplient  les  verbes?  En  réalité, 
il  n'y  a,  dans  les  langues  agglutinantes,  ni  noms  ni 
verbes;  il  y  a  des  radicaux  indépendants,  toujours 
isolément  significatifs,  et  dont  les  combinaisons  sont 
innombrables.  Parexemple,  en  tamoul,  vinei  ^<  mal  », 
en'  «  moi  »,  ku  «  direction  »  à  (datif),  fera  vineiyê- 
nukku  «  à  moi  qui  suis  souffrant,  malheureux  »  ;  sdrn- 
dây  «  tu  es  venu  »  donnera  sârndâyeikkandân  où  sârn- 
ddyei  est  formé  de  sâr  «  arrivé  »,  nd  «  temps  passé 


—  58  — 

intransilif  »,  (Uj  «  toi  »,  ei  «  accusatif  »  :  l'idée  verbale 
(relation  de  temps)  s'associe  à  l'idée  nominale  (rela- 
tion d'es[)ace). 

Quant  aux  noms  indigènes,  plusieurs  sont  fort  ins- 
tructifs :  andoseweivegama  «  lac  où  l'on  marche  », 
beauchêne  (lac),  altération  de  ohashing  «  là  où  l'eau  se 
resserre»,  canada  pour  kanata  «  ville,  village  »,  f/uéhec 
ou  kébek  «  c'est  obstrué,  détroit  »,  squaw  (lac)  de 
iskwew  «  femme  »,  etc.  xM.  lîouillard  donne  en  passant 
de  très  intéressants  détails  sur  l'histoire,  la  population, 
les  légendes  de  plusieurs  localités. 

J.    ViNSON. 


Smithsonian  Institution.  Bureau  of  american  ethno- 
logy.  Antiquities  of  the  Gemer-Plaleau,  i^ew  Mexico, 
by  Edgar  L.  Hewett.  Washington,  gov.  pr.,  190G, 
in-8^  53  p.,  16  pi.  et  2  cartes  (Bulletin  n°  32). 

Outre  ces  planches,  l'étude  de  M.  Hewett  contient 
de  nombreuses  figures  dans  le  texte,  toutes  éminem- 
ment intéressantes  et  instructives.  Le  plateau  de 
Gemer,  dans  le  Nouveau  Mexique,  s'étend  à  l'ouest  de 
Rio  Grande  del  Norte,  sur  une  largeur  d'environ 
cent  kilomètres.  Ce  plateau  est  occupé  par  une  grande 
forêt  où  campent  six  tribus  indigènes.  On  y  trouve  de 
nombreuses  ruines  laisséespar  une  population  antique 
très  nombreuse  et  très  active. 

J.  V. 


—  59  - 

Seinitica,  Sprache  und  KechlsvergleicliciKle  Stu- 
dien,  von  I).  H.  Millier.  I  et  II.  Vienne,  A.  Hoclder, 
1906  (Extraits  des  Mémoires  de  l'Acad.  Impér.  des 
Sciences),  in-8%  48  et  88  p. 

La  première  livraison  contient  sept  savantes  études  : 
\.  Un  texte  incompris  dans  les  lettres  d'Amarna  ; 
II.  la  signification  et  l'étymologie  du  verbe  (/âlu  dans 
les  lettres  d'Amarna;  III.  nsd  vlhrbyth  (au  point  de 
vue  juridique);  IV.  gloses  sur  la  théorie  et  la  pra- 
tique dans  le  vieux  droit  babylonien;  V.  la  théorie 
des  races  pures  dans  le  Code  Syro-romain;  VI.  les 
numéraux  multiplicatifs  dans  les  labiés  d'Amarna  et 
en  hébreu;  Vil.  construction  des  strophes  dans  le 
Livre  de  Job. 

La  seconde  se  compose  de  huit  mémoires  sur  le 
droit  privé,  le  droit  héréditaire,  le  Coded'Hammourabi 
et  le  livre  lédéral,  l'histoire  du  Code  Syro-romain  et 
autres  questions  des  plus  intéressantes  de  jurispru- 
dence orientale.  Tout  cela  éch.ippe  un  peu  à  ma  com- 
pétence, mais  paraît  fort  bien  fait  et  fort  instructif. 

J.  V. 


Zeitachrift  fur  vergleicheiide  Sprachforschung ... ,\'on 
E.  KuHN  und  W.  Schulze.  Hand  XL  (V.  F.  xx), 
4*  Heft.  Gutershoh,  C.  Bertelmann,  1906,  in-8°,  i).  425- 
568. 

Contient  :  1.  Sur  la  formation  des  mots  aryens,  par 


-   60  — 

Jarl  Cliarpeiilicr,  p.  425;  2.  La  coinposiliori  en  man, 
par  Joseph  Zubaty,  p.  478;  3.  Talina,  kaikina,  par 
Ernst  Mauss,  p.  520;  4.  Grec  ednos,  par  K.  J.  Jo- 
hansson,  p.  533;  5.  v.  i.  avrk,  parJ.  Wackernagel; 
6.  Gotique  dis-  et  6  marikrailm,  par  Kichard  Loewe, 
p.  547;  7.  Elymologica,  par  G.  G.  Ulileiibeck,  p.  552; 
8.  Etymologica,  par  F.  Lewy,  p.  561  ;  9.  Sur  la  gram- 
maire gotique,  par  W.  Schuize,  p.  563;  10.  Glievilles, 
par  W.  Schulze,  p.  565;  11.  Observations,  p.  566. 

J.  V. 


Bulletin  du  parler Jranrais  au  Canada,  vol.  V,  n°'2 
et  3.  Québec,  Université  Laval,  1906,  p.  41-120,  gr. 
in-8°. 

Outre  les  articles  ordinaires  :  livres  et  revues,  ques- 
tions et  réponses,  sarclures,  anglicismes,  on  trouve 
dans  ces  deux  numéros  de  bons  travaux  :  suite  du 
lexique  canadien-français,  les  dialectes  français  dans  le 
parler  canadien,  par  M.  A.  Rivard;  pour  nos  amis  les 
écoliers,  par  M.  l'abbé  Em.  Ghartier;  quelques  mots 
sauvages,  par  M.  l'abbé  Z.  Laçasse;  la  littérature  ca- 
nadienne (J.  1).  iMermet),  par  M.  l'abbé  Gamille  Koy  ; 
les  noms  populaires  de  quelques  plantes  canadiennes, 
par  Mgr  L.  Laflamme;  deux  chansons  canadiennes, 
par  A.  Kivard,  et  de  plus  un  bulletin  bibliographique, 
un  bulletin  d'observations  et  le  rapport  du  Secrétaire- 
Général.  J.   V. 


—  61  — 

Bévue  du  Monde  Musulman,  publiée  par  la  Mission 
scientifique  du  Maroc,  sous  la  direction  de  M.  A.  Le 
Chatelier.  Pam,  E.  Leroux,  1906-1907,  1'^'=  année, 
gr.  iii-8°. 

IvCS  deux  premiers  n°'  (novembre  et  décembre  1906), 
ont  respectivement  144  et  160  (145-304)  p.  ils  con- 
tiennent de  très  remarquables  articles  :  L'enseigne- 
ment primaire  des  indigènes  musulmans  de  l'Algérie, 
par  M.  Paul  Bernard;  le  Mouvement  swadêçî  dans 
l'Inde  (reproduit  ci-dessus,  p.  43-48),  l'Islam  dans 
rindo-Chine  française,  par  M.  A.  Cabaton;  Aga  Kban, 
par  A.  Le  Chalelier;  La  Constitution  en  Perse,  par 
A.  M.  xNicolas;  Le  Japon  et  l'Islam,  par  F.  Farjanel, 
les  Musulmans  Kusses,  par  A.  Le  Cbatelier;  lesSenous- 
siyas  en  Tripolitaine,  par  M.  Slouscb;  les  populations 
musulmanes  de  la  Roumanie,  par  Popescu-Siocanel; 
les  Bebais  et  le  mouvement  actuel  en  Perse,  par 
H.  Dreyfus;  les  Musulmans  des  Pbilippines,  par  A.  Le 
Cbatelier;  Notes  de  Bibliograpbie  néerlandaise,  par 
A.  Cabaton;  et  d'excellentes  revues:  notes  et  nouvelles, 
la  presse  musulmane,  les  livres  et  les  journaux,  par 
L.  Bouval,  secrétaire  de  la  Rédaction. 

On  ne  peut  que  soubaiter  longue  vie  et  prospérité  h 
cette  savante  et  très  utile  publication. 

J.  V. 


VARIA 


I.  Caractère  et  taille  des  crayons. 

D'après  une  récente  étude,  celui  qui,  après  avoir  taillé  son 
crayon,  laisse  la  pointe  sans  la  dégrossir,  manque  d'énergie  et  de 
force  de  caractère.  Les  Imaginatifs  et  les  exubérants  font  la 
pointe  longue  et  ceux  qui  sont  doués  de  précision  et  de  sens  ar- 
tistique égalisent  les  moindres  aspérités.  Si  vous  faites  une  pointe 
fine  comme  une  épingle,  vous  êtes  un  raffiné,  mais  vous  êtes 
grossier  et  mal  élevé  si  la  pointe  se  termine  en  bouly  sans  que 
vous  enleviez  les  rugosités  de  la  mine  de  plomb. 

II.  Pour  les  écoliers. 

Les  autorités  de  Trêves  viennent  de  prendre  une  mesure  tout  à 
fait  digne  d'être  enregistrée  et  divulguée.  Une  circulaire  rédigée 
à  cet  effet  s'exprime  en  ces  termes  : 

«  Il  n'est  pas  rare  que  des  écoliers  ont  à  faire,  pour  se  rendre  à 
l'école,  un  chemin  relativement  long,  et  que  par  les  temps  de 
brouillard,  de  pluie  ou  de  neige,  ils  doivent  ensuite  s'asseoir  à  leur 
banc,  les  pieds  mouillés  pendant  plusieurs  heures.  Ils  se  re- 
froidissent ainsi  beaucoup  trop  facilement,  et  il  en  résulte  souvent 
des  maladies  plus  ou  moins  graves.  En  divers  endroits,  nous  avons 
remarqué  avec  satisfaction  que  les  inspecteurs  et  les  instituteurs 
ont  engagé  les  parents  à  donner  aux  enfants  une  seconde  paire 
de  chaussures  —  pantoufles  ou  chaussons  —  afin  de  leur  permettre 
de  changer  de  chaussures  dès  leur  entrée  en  classe.  Cette  mesure 
est  à  recommander  de  la  façon  la  plus  pressante.  Pour  les  enfants 
pauvres,  il  y  aura  lieu  d'inviter  les  communes  à  leur  procurer 
les  chaussures.  » 

A  quand  en  France  pareille  décision? 


—  63 


III.  Critique  américaine. 

Le  critique  dramatique  du  jourûal  américain,  Tlic  Leudct-.  a 
ainsi  critiqué  les  sœurs  Cherry,  chanteuses  et  danseuses  :  «  Leurs 
bouches  rances  s'ouvrent  comme  des  cavernes  pour  émettre  des 
sons  semblables  à  ceux  que  poussent  les  damnées  au  milieu  de 
leurs  tortures.  Elles  trottinent,  galopent  et  se  cabrent  tout  autour 
de  la  scène  dans  un  mouvement  qui  tient  le  milieu  entre  la  danse 
du  ventre  et  le  déhanchement  des  guenons,  avec  leurs  faces  peintes 
et  leurs  formes  hideuses.  » 

Les  sci'Uis  Cherry  ont  attaqué  le  journal  américain  en  diffa- 
mation. Le  juge  a  trouvé  l'article  incriminé  "  une  critique  im- 
partiale ». 

IV.  Illusion  ou  naïveté. 

On  lisait,  dans  un  grand  journal  de  décembre  dernier  :  «  Pourquoi 
je  ne  vais  plus  dans  les  universités  populaires?  disait  naguère  un 
professeur  de  la  Sorbonne.  Parce  que  j'y  ai  fait  un  jour  une  ex- 
périence cruelle,  qui  acheva  de  dissiper  mes  dernières  illusions 
sur  l'utili'é  de  nos  conférences...  Devant  notre  auditoire  ordinaire 
d'ouvriers  et  de  petits  bourgeois  curieux  des  choses  de  l'esprit,  je 
devais,  ce  jour-lcà,  traiter  un  sujet  très  simple  de  science  expé- 
rimentale, et,  pour  être  bien  compris  par  tout  le  monde,  je  m'étais 
attaché  à  proscrire  de  mon  vocabulaire  tous  les  termes  techniques, 
toutes  les  expressions  inusitées... 

»  Je  parle;  on  m'écoute  dans  le  plus  respectueux  silence,  et 
quand  j'ai  fini,  suivant  l'usage,  je  demande  à  mes  auditeurs  de 
vouloir  bien  me  poser  des  questions  pour  engager  un  entretien 
profitable.  Personne  ne  souffle.  Un  à  un,  les  quelques  ouvriers  et 
apprentis,  qui  sont  venus  m'en  tendre,  gagnent  la  porte  d'un  air 
morne.  Je  songe  avec  désolation  :  ((  C'est  raté;  il  n'y  en  a  pas  un 
qui  m'ait  suivi...  » 

u  Si  pourtant,  il  y  en  avait  un!  C'était  un  bon  gi'os  garçon 
réjoui,  qui  s'approcha  de  ma  table  avec  des  sourires  et  des  regards 
d'intelligence. 


—  64  — 

»  —  Vous  avez  bien  parlé  de  phénomènes?  me  demanda-t-il  en 
clignant  de  l'œil. 

»  —  En  effet,  disî-je  ;  à  plusieurs  reprises  il  a  été  question  dans 
ma  conférence  des  phénomènes  physiques  et  chimiques. 

))  —  Eh  bien  !  reprit  l'autre  avec  un  rire  d'augure,  nous  pouvons 
le  dire  entre  nous  :  ils  sont  tous  faux,  les  phénomènes.  Moi  qui 
vous  parle,  je  le  sais  mieux  que  personne  :  voilà  dix  ans  que  j'en 
montre  à  la  foire  du  Trône. 

»  J'en  demeurai  suffoqué,  ajouta  le  professeur  de  la  Sorbonne,  qui 
contait  cette  anecdote,  et  je  vous  confesse  que,  depuis  lors,  je  n'ai 
pas  eu  le  cœur  de  retourner  dans  les  universités  populaires.  Je 
n'irai  pas  jusqu'à  dire  que  les  nombreux  «  intellectuels  »  qui  se 
sont  appliqués  de  même  à  «descendre  la  lampe  dans  la  cave», 
comme  dit  Tolstoï,  ont  perdu  leur  temps  et  leur  peine;  mais  il 
me  semble  que  cet  immense  et  généreux  effort  n'a  pas  donné  tout 
ce  qu'on  en  pouvait  attendre  et  que^  pour  entreprendre  «l'édu- 
cation de  la  démocratie»,  il  nous  faudra  bientôt  recourir  à  d'autres 
moyens  plus  discrets  et  plus  efficaces.  Bacheliers  incorrigibles, 
nous  avons  cru  que,  pour  élever  le  peuple,  il  suffisait  de  lui  "  faire 
la  classe  ».  Et  quelle  classe!  N'importe  qui  pérorant  sur  n'importe 
quoi,  sans  ordre  et  sans  méthode...  Quand  donc  reviendrons-nous 
de  cette  erreur  pédante  et  déclamatoire?" 

Est-ce  bien  probant  et  notre  éminent  collègue  ne  s'est-il  pas  trop 
hâté  de  conclure? 

J.  V. 


L' Imprimeur-Gérant  : 

E.  Bertrand. 


CH.\LONSUR-SAONE,    IMP.    FU.\.\(;MSE     KT     OllIENTALE    K.    liERTKAND 


DE  QUELQUES  DIFFÉRENCES 

lexiques  et  typographiques  entre  divers  exemplaires  du 
Nouveau  Testament  basque  de  Liçarrague. 


Jusrjirà  présent,  aiiliuit  ([iie  nous  sachions,  on  a 
considéré  les  rares  exemplaires  survivants  du  .\ .  1". 
de  Liçarrag-ue  comme  rigoureusement  idenlif|ues, 
du  moins  quant  au  texte.  Un  hasard  heureux  nous 
a  permis  de  noter  néanmoins  certaines  difTérences 
({ui  permettent,  croyons-nous,  d'établir  qu'il  y  a  eu 
deux  tirages  de  cet  ouvrage.  Mais  je  n'ai  pu  encore 
trouver  que  cinq  passages  où  l'on  puisse  constater 
des  diftérences  : 

1°  Dans  l'évangile  selon  saint  Mathieu,  alors  que, 
nu  chap.  v,  parag.  26  (ft.  7  v"),  la  plupart  des  exem- 
plaires ont  :  renda  diroano,  celui  de  Bayonne  et, 
paralt-il,  celui  de  Hambourg  ont  deçaqueano. 

2°  Dans  l'évangile  selon  saint  Jean,  l'exemplaire 
du  P.  Joannatéguy  a  (chap.  x,  parag.  16,  l't.  182  v'^) 
par  deux  fois  arthalde,  mais  dans  la  majorité  des 
autres  exemplaires  le  mot  est  devenu  arthegui  par 
l'application  du  mot  egai,  imprimé  sur  un  petit  mor- 
ceau de  papier  qui  a  été  ensuite  collé  de  manière  à 
couvrir  exactement  la  fin  du  mot,  c'est-à-dire  aide, 
jugé  incorrect  après  coup. 


—  66  — 

3"  Dans  ce  même  évangile,  chap.  xvii,  parag.  24, 
(ft.  197  V)  la  plupart  des  exemplaires,  notamment 
celui  du  chanoine  Harriet  et  le  mien  (qui  avait  ap- 
partenu au  Prince  L.-L,  Bonaparte),  ont  les  mots 
ecen  et  haino  écrits  ec  en  et  hciin  o,  quand  dans  Texem- 
plaire  du  chanoine  Arbelbide,  entre  autres,  les  lettres 
fautivement  espacées  ont  été  rapprochées. 

4"  Feuillet  428  r°,  à  la  fin  de  la  première  ligne, 
dans  les  exemplaire  de  Harriet  etde  Joannatéguy, ainsi 
que  probablement  dans  ceux  de  Leipzig,  Stuttgart 
et  Berne,  sur  lesquels  a  été  faite  l'excellente  édition 
de  MM.  Linschmann  et  Schuchardt,  la  dernière  lettre 
de  deus  a  dépassé  le  haut  du  corps  de  la  ligne  et  elle  a 
été  imprimée  comme  il  suit  :  deu\  alors  que  dans 
mon  exemplaire  la  lettre  s  se  trouve  dans  l'aligne- 
ment. 

5°  Dans  la  deuxième  épitreaux  Corinthiens  (chap.  i, 
ft.  316  v^'),  les  paragraphes  Q3  et  54  sont  correcte- 
ment chiffrés  dans  l'exemplaire  d'Arbelbide,  alors 
que  les  chiffres  erronés  .3.3  et  .34  peuvent  se  lire  dans 
mon  exemplaire,  ainsi  que  dans  ceux  de-Harriet  et  de 
Joannatéguy. 

Que  conclure  de  tout  cela  ?  Rien  de  précis.  Force 
nous  est  cependant  d'esquisser  une  hypothèse,  dont 
je  ne  garantis  que  la  vraisemblance. 

Licarraoue  a  dû  tout  d'abord  adresser  à  la  reine 
Jeanne  d'Albret,  —  qui  les  a  aussitôt  distribués,  — 
des  exemplaires  dans  lesquels  arthalde  n'est  pas 
corrigé,  où  la  consonne  finale  de  deus  est  au-dessus 
de  la  ligne,  etc.  Ensuite  un  deuxième  envoi  a  eu  lieu: 
mais,  dans  l'intervalle,  le  traducteur,  «jui  a  été  avisé 


—  (u    - 

([iTil  a  parfois  traduit  la  viilgate  des  catholiques,  a 
c\\nug{'  f//-t/u/l(/e  en  arlliegiii.  Après  ce  premier  tirage, 
les  formes  ont  été  mises  de  coté  et  conservées  par 
ordre  ;  quelque  temps  après,  et  alors  qu'il  s'est  agi  de 
satisfaire  à  une  nouvelle  demande  d'exemplaires  du 
X.  r,  on  a  remis  les  formes  sous  presse  pour  un  second 
tirage.  A  ce  moment  et  en  efTectuant  le  transport 
d'une  forme  sans  doute  mal  coincée,  un  manœuvre 
ou  un  apprenti  inexpérimenté  a  laissé  tomber  le  cul- 
de-lampe  que  l'on  remar([ueàla  fin  de  la  table  (ft.  08 
v°)  et  lorsqu'il  Ta  remis  en  place,  il  l'a  renversé  la 
pointe  en  haut.  Aucun  ouvrier  n'aurait  commis  cette 
maladresse  que  Ton  observe  dans  l'exemplaire  de  Ba- 
yonne'.  Dans  l'exemplaire  du  P.  Joannatéguy,  le  cul- 
de-lampe  en  question  est  normalement  placé,  ce  qui 
revient  à  dire  que  si  l'on  inscrivait  cet  ornement 
dans  un  triangle,  celui-ci  aurait  bien  sa  pointe  en 
bas.  Puis,  avant  de  commencer  à  tirer,  lui  ouvrier  est 
intervenu  et  a  corrigé  deus  (au  lieu  de  deii"),  2.3  et  24 
(au  lieu  de  33  et  .94)  et  a  rapproché  convenablement 
les  lettres  de  ec  en  et  haino. —  Les  trois  corrections 
dont  il  vient  d'être  fait  mention  étaient  faites  lors 
du  tirage  de  l'exemplaire  d'Arbelbide. 

De  ce  qui  vient  d'être  exposé  on  peut  donc 
conclure  que  les  exemplaire  d'Oloron,  de  Madrid, 
d'IIarriet,  '  qui  présentent  la  correction  arlJiegui, 
de   même    (jue    l'exemplaire    de     .Joannatéguy    qui 

1.  Notons  que  cel  pxoniiilairc  est  1  un  des  très  rares  qui  aient 
((  deçaqueano  ». 

2.  De  mon  cxcniiilaiie  on  ne  peut  rien  dire,  car  il  a  été  formé  de  deux 
autres. 


—  68  — 

a  conservé  arthalde^  proviennent  d'un  premier 
tirage,  tandis  que  l'exemplaire  de  Rayonne  et  celui 
qui  appartenait  à  Arbelbide,  et  offrant  soit  le  ren- 
versement du  cul-de-lampe,  soit  les  trois  corrections 
précitées  \  ont  été  imprimés  postérieurement.  A 
ce  moment-là,  sans  doute,  Liçarrague  recevait  les 
observations  que  les  ministres  calvinistes  chargés 
par  la  reine  Jeanne  de  revoir  le  texte  mss.  de  la 
traduction  dont  il  s'agit,  n'ont  pas  manqué  de  lui 
adresser  à  propos  des  fautes  d'impression  qui  ont 
certainement  .attiré  leur  attention  dès  qu'ils  ont  eu 
un  exemplaire  du  1*"^  tirage  du  N.  T. 

Georges  Lacombe. 


OBSERVATIONS  SUR  L'ARTICLE  PRÉCÉDENT 

En  même  temps  que  M.  G.  Lacombe  m'envoyait 
la  très  intéressante  note  qu'on  vient  de  lire,  l'infati- 
gable M.  E.-S.  Dodgson  m'adressait  le  numéro  du 
16  mars  dernier  des  Notes  and  Qiiei'ies  où  il  signale 
(p.  215,  col.  2)  des  différences  entre  les  exemplaires 
de  Liçarrague  de  Bayonne,  de  Hambourg,  du  British 
Muséum,  de  la  Société  Biblique  de  Londres  et  de  la 
Bodleyenne  d'Oxford.  M.  Dodgson,  outre  diroaiio 
remplacé  par  deçaqueano^  a  trouvé  diotsô  changé  en 
diotsa  (ft.  5  v";  S.  Mat.  IV,  6,  9,  10)  et  drauaiiari 
accentué  en    drauânari  (ft.  8  v°;  S.    Math.   V,  40). 

1.  Je  n'ai  pu  vérifier    si  l'exemplaire  d'Arbelbide    n   decaqueano,  car 
il  a  disparu  après  la  mort  de  son  propriétaire. 


—  69  — 

M.  Dodgson  fait  remarquer  que,  après  le  chapitre 
XX  de  S.  Mathieu,  on  ne  rencontre  phis  diotsô,  mais 
toujours  (ilolsa  dans  tout  le  cours  du  volume.  M. 
Dodgson,  qui  profite  de  l'occasion  pour  faire  de  la 
réclame  à  ses  propres  travaux,  pour  donner  le  coup 
de  pied  de  la  fable  ta  la  réimpression  de  Strasbourg 
et  pour  rappeler  que  Jeanne  dWlbret  était  la  grand' 
mère  de  la  femme  du  malheureux  Charles  I*"",  sup- 
pose que  ces  corrections  ont  été  faites  «  when  the 
autlîor  and  his  assistants,  mentioned  in  one  of  the 
préfaces,  were  discussing  the  merits  of  the  newly 
prinled  pages  ». 

D'autre  part,  M.  11.  Schuchardt,  dans  l'introduction 
de  la  réimpression  de  Liçarrague,  signale  quelques 
différences  entre  les  trois  exemplaires  de  Berne,  de 
Stuttgard  et  de  Leipzig.  Les  trois  principales  sont  : 
ft.  412  r"  1.  3  bil\ed°  (St.  et  Leip.),  bilo,  edo  Berne); 
ft.  428  r"  1.  1  deiû  (Leip.),  deas  (B.);  ft.221  Vl.  3,  en 
marge,  2.  4  (Leip.),  berriz  22.  4  (B.  et  St.).  M.  Schu- 
chardt relève  aussi  un  certain  nombre  de  fautes 
d'imprimerie  sur  lesquelles  je  reviendrai. 

Il  m'a  paru  intéressant  de  voir  comment  se  com- 
portent, au  point  de  vue  de  ces  particularités  distinc- 
tives,  les  exemplaires  du  Liçarrague  que  j'ai  sous  la 
main,  celui  de  la  Bibliothèque  Nationale,  celui  de  la 
collection  d'Abbadie,  celui  de  l'Arsenal  et  les  miens. 

L'exemplaire  de  la  Bibliothèque  Nationale  (Réserve, 
A.  6455  bis)  vient  de  la  maison  professe  des  Jésuites 
de  Paris  à  laquelle  il  avait  été  donné  par  Huet, 
évoque  d'Avranches.  Il  avait  appartenu  au  Président 
de  Thou  (jui  l'avait  probablement  reçu  de  Liçarrague 


—  70  — 

lui-même  quand  il  le  vit  à  Laljastide  Clairence,  eu 
1582,  11  a  diolsô^  di/'ornw,  draiianari,  rirtJiegui  (pap. 
coll.),  ecei}^  hain  o,33,  34,  den  \  bil^^  cd",  berriz  22.  4» 
le  fleuron  droit.   Le  ft.  412  est  chiffré  41. 

L'exemplaire  de  M.  d'Abbadie  (Bibl.  NaL,  Z  Ijasfjue, 
coll.  d'Abbadie,  n^  894)  provient  de  la  Bibliothè({ue 
La  Ferté-Séneclère  et  avait  appartenu  à  FI.  Lécluse 
qui  le  tenait  de  «  la  complaisance  réunie  de  M.  \o 
Supérieur  du  Grand  Séminaire  de  Bayonne  et  de 
INI.  le  vicaire  de  Hasparren  ».  Le  volume  devait  donc 
provenir  des  environs  de  cette  dernière  ville.  Il  offre 
les  mêmes  particularités  que  l'ex.  de  Thou,  sauf  que 
le  fleuron  est  renversé. 

L'exemplaire  de  l'Arsenal  (n°  639  T),  dont  l'histoire 
n'est  pas  bien  connue,  a  diolsô,  diroano,  drauanari 
(sans  accent),  arthegui  (petit  papier  collé,  deux  fois), 
ec  eu,  bain  o,  33^34,  deus  (aligne),  le  fleuron  renversé, 
bil",  ed\  berriz  22.  4. 

Mon  exemplaire  complet,  qui  est  fort  beau,  a  diolsô, 
diroano,  drauanari  (sans  accent),  arlliegui  (papiers 
collés),  ec  en,  bain  o,  23,  24,  den'^,  le  fleuron  renversé, 
bilo  et  edo  alignés,  berriz  22.  4. 

Mon  exemplaire  incomplet,  réduit  à  318  ft.  du  N.  T, 
offre  dans  les  parties  qu'il  a  conservées  des  p.arti- 
cularités  intéressantes  :  ec  en,  bain  o,  deu\  33,  34, 
le  fleuron  renversé,  bilo  et  edo  alignés,  berriz  22.  4. 
Au  ft.  182  v°,  il  a,  la  première  fois  arthalde,  la 
seconde  aiilicgni  avec"  le  petit  papier  portant  egui 
collé  sur  aide;  mais,  au  ]or(;mii>r  (/rlhalde,  aide  se 
trouve  dans  un  petit  carré  plus  blanc  que  le  reste  de 
la  page,  ce  (jui   indique  que  le  petit  papier  (|u'on  y 


—  71  — 

avait  collé  s'est  détaché  depuis  longtemps  :  le  même 
accident  a  pu  se  produire  dans  d'autres  exemplaires. 
Dans  celui-ci,  le  ft.  412  est  chilTré  exactement  412, 
alors  (|ue  dans  les  autres  il  y  a  seulement  41  :  c'est 
la  chute  du  2  qui  a  fait  remonter  Vo  de  bilo  et  edo  à 
la  fin  des  deux  lignes  suivantes.  C'est  là  un  accident 
typographique  qui  sera  survenu  pendant  le  tirage  : 
les  exemplaires  c[ui  ont  41  et  bii°,  ed^,  ont  été  tirés 
évidemment  après  ceux  qui  ont  41  et  bilo,  edo.  C'est 
à  des  accidents  de  ce  genre  qu'il  faut  attribuer  la 
montée  du  s  de  deus,  l'espacement  bain  o  et  ec  en 
(qui  se  (correspondent,  l'un  au  dessous  de  l'autre, 
aux  lignes  29  et  30  du  ft.  197  v°),  la  descente  du  k  de 
beJialiten  relevée  par  M.  Schuchardt  dans  les  prières 
ecclésiastiques  (ft.  E  vi  v"  1.  24),  d'autres  encore,  et 
même  le  renversement  du  fleuron.  Avec  les  presses 
à  bras  on  tirait  très  lentement,  on  encrait  ancienne- 
ment les  formes  à  l'aide  de  tampons  dont  le  choc 
répété  amenait  souvent  la  chute  de  cadratins,  de 
filets,  de  lettres  au  bout  des  lignes,  et  les  pressiers 
réparaient  à  la  hâte  le  dommage,  tant  bien  que  mal. 
Ceci  ne  suflirait  donc  pas  à  prouver  qu'il  y  a  eu 
plusieurs  tirages  soit  rapprochés  soit  éloignés.  Il  me 
parait  d'ailleurs  impossible  que  l'Imprimerie  Haultin, 
quelque  bien  outillée  qu'elle  fût,  eût  pu  immobiliser 
une  si  grande  quantité  de  caractères  pendant  le 
temps  nécessaire  au  séchage,  à  la  reliure,  à  l'ex- 
pédition des  premiers  exemplaires,  à  leur  distribution, 
leur  lecture  attentive  et  leur  examen,  et  au  renvoi 
d'un  exemplaire  corrigé  ou  d'observations  impérieu- 
ses. Dans  celte  hypothèse  d'ailleurs,  pourcpioi  n'a-t- 


—  72  — 

on  pas  corrigé  les  fautes  purement  typographiques 
qu'on  retrouve  dans  tous  les  exemplaires  :  par  exem- 
ple ft.  XX  pvé[.\°  apocaca/i/psea,  89  ro(ch.  xiii,  v.  37) 
elzcheco,  193  r''  (ch.  xiiii,  v*'  31)  hemandic,  etc.,  et 
le  chiffrage  inexact  105,  106,  108,  438  ^pour  205.  206, 
208,  448:  la  correction  a  été  faite  à  la  main  sur  l'exem- 
plaire de  l'Arsenal)  ? 

Je  ne  crois  pas  non  jilus,  comme  le  suppose 
M.  Dodgson,  que  le  tirage  ait  été  suspendu  après  la 
première  ou  les  premières  feuilles  et  que  ces  feuilles 
aient  été  envoyées  dans  le  pays  pour  être  soumises 
au  comité  de  révision  dont  parle  Liçarrague  dans  la 
dédicace.  Les  termes  mêmes  de  cette  dédicace  indi- 
quent que  la  révision  a  été  faite,  avant  l'impression, 
sur  le  manuscrit  complet.  D'autre  |)art,  nous  savons 
que  Liçarrague  est  venu  à  la  iiochellc,  qu'il  y  resta 
pendant  tout  le  temps  qu'a  duré  l'impression  du 
N.  T.  et  même  du  Calendrier  et  de  VAbc.  Ce  qu'il  y 
a  de  j)lus  vraisemblable,  c'est  qu'il  a  fait  lui-même 
quelques  corrections  et  quelques  changements,  au 
fur  et  à  mesure  du  tirage.  Le  remplacement  important 
de  arlhalde  jiar  artliegui,  au  moyen  d'un  petit  mor- 
ceau de  papier  collé  par  dessus,  s'est  fait  au  contraire 
\\n  certain  temjis  aj^rèsle  tirage,  sur  les  exemplaires 
non  encore  disti'ibués.  Je  ne  crois  pas  au  surplus  que 
ce  changement  ait  été  inspiré  par  un  préjugé  de  secte; 
(irlhegal  est  «  bergerie,  »  el  arlhdlde  «  troupeau  ■> 
le  grec  a  deux  mots  différents  aûX'/]  et  7roî[JLV7j;  la  vul- 
gate  a  oc/Zc  ;  les  traductions  françaises,  catholique  et 
protestante,  bergerie  et  Iroupeau  (la  vieille  traduc- 
tion calviniste  (|ui  a  servi  de  prototype  à  Liçarrague 


—  7.S  — 

a  sciûenieni  bergerie);  Haraneder(éd.  Udvr'iei) , s-a Ido et 
arlhalde  ;  les  éditions  de  la  société  biblique  et  de  la 
so(ùélc  trinilarienne,  Jiespil  et  arthalde  (laboiirdin), 
ardilegi  et  arlalde  (gdipiizcoan),  saldo  'soiiletin);  la 
traduction  catholicjiie  moderne  Haristoy  a  aussi  hespil 
et  arlhalde\  Il  est  donc  probable  (|ne  le  tirage  n'a 
été  l'ait  qu'en  une  seule  Ibis^  mais  il  est  (Certain  que 
tous  les  volumes  n'ont  pas  été  reliés  ou  cartonnés  en 
même  temps  et  au  même  endrt^it  :  dans  l'exemplaire 
de  l'Arsenal,  deux  fortes  piqûres  de  vers  s'observent, 
l'une  au  milieu  des  pages,  obliquement  de  gauche  à 
droite  en  montant,  seulement  aux  feuillets  34,  42,  50, 
58,  m,  74,  82,  90,  98,  106,  114,  122,  130  et  138;  l'autre, 
vers  le  fond  de  la  marge  inférieure,  aux  fts.  402,  410, 
418,  426,  434,  442,  450  (réparé,  mal)  et  458  unique- 
ment, ce  (jui  fait  voir  que  l'exemplaire  a  dû  être 
gardé  assez  longtemps  en  feuilles  assemblées,  posées 
à  plat  lune  sur  l'autre. 

J'estime  donc  (ju'il  n'y  a  eu  qu'un  seul  tirage  et 
qu'une  seule  édition  de  ce  précieux  ouvrage.  Mais 
j'appelle  1  attention  des  amateurs  sur  les  variantes 
signalées  ci-dessus,  et  je  serais  très  reconnaissant 
aux  pi'opriétaires  des  rares  exejnplaires  qui  en  ont 
été  conservés,   s'ils    voulaient   bien  examiner   leurs 

1.  La  correction  arthalde  et  arthegui  a  été  ins|)irée  par  le  souci  de 
remplacer  «  troupeau  «  par  «  bergerie  »,  conformément  à  la  version  calvi- 
iiisle. 

'_'-  Pciil-on  tirer  arg-uiiiciit  de  ce  que  deux  paiements  successi  s  ont  été 
faits  à  Haullin,  l'imprimeur  ?  Non,  car  il  a  imprimé  deux  ouvrages  dif- 
férents, le  .\oui'eau  Testament  et  le  Calendrier  avec  a,  -b,  c.  Mais  on 
peut  remarquer  que  certains  es.  du  .\ou(>eau  Testament  n'ont  pas  de 
prières  ecclésiastiques  :  y  a-l-il  des  particularités  typographiques 
spéciales  et  communes  à  ces  exemplaires  ? 


74 


exemplaires  et   nous  faire  connaître   le  résultat   de 
cet  examen. 

On  s'est  demandé  combien  il  pouvait  encore  exis- 
ter d'exemplaires  de  Liçarrague  ;  j'imagine  qu'il  doit 
y  en  avoir  une  quarantaine,  dont  peutèlre  quel{|ues 
lins  dans  des  coins  ignorés  du  pays  basque.  Plu- 
sieurs exemplaires  qui  ont  passé  dans  des  ventes 
publiques  n'ont  pas  reparu  ;  p.  ex.  celui  de  La  Yal- 
lière  (première  vente)  et  celui  de  Mac-Garthy,  tous 
deux  reliés  en  marocain  bleu  et  qui  n'en  font  sans 
doute  qu'un,  celui  d'Ansse  de  Yilloison  (sans  titre), 
celui  de  Renouard,  etc.  J'en  connais  actuellement  2(3, 
dont  deux  ont  disparu  :  5  en  Angleterre  ;  12  en 
France;  2  en  Espagne  ;  2  en  Italie;  1  en  Suisse; 
3  en  Allemagne  ;  1  en  Hollande  ;  —  16  sont  dans  des 
bibliothèques  accessibles  au  public;  — 11  sont  tout  à  fait 
complets  ;  3  n'ont  pas  les  appendices  (prières,  etc.)  ; 
les  12  autres  sont  plus  ou  moins  incomplets  et  défec- 
tueux. 

J.   V. 


ADDITIONS  l"r  COUliKCTIONS 

du  prince  Louis-Lucien  Bonaparte 
sur  un  exemplaire  de  son  «  Verbe  basque  » 


L'œuvre  la  j)Ius  importante  du  |)riiicc  L.-L. 
Bonaparte  est  Le  Vei'be  basque  en  Uibleaiix  (Lon- 
dres, 1864  et  1869).  Ce  travail,  bien  que  son  auteur 
ne  soit  mort  qu'en  1891,  est  resté  inachevé.  Il  a  été 
tant  bien  que  mal  complété  par  les  Etudes  sur  les 
(liulevles  cTAc^corf,  de  Salazur  et  de  Honcal  (1872)  et 
par  de  nombreuses  brochures,  et,  en  outre,  il  y  a, 
dans  les  manuscrits  laissés  par  le  prince,  de  nom- 
breux matériaux  pour  l'achèvement  de  cette  œuvre, 
indispensable  à  qui  veut  étudier  de  prés  la  langue 
basque.  Pour  aujourd'hui,  je  me  bornerai  à  noter 
toutes  les  corrections  et  additions  écrites  par  Fauteur 
sur  son  exemplaire  de  travail.  On  pourra  juger  par 
ce  qui  suit  de  la  minutie  avec  laquelle  ont  été  faites 
ces  remarques. 

Dans  le  premier  tableau  préliminaire,  corriger  les 
formes  labourdines  dadiii,  zadin  et  baladin  en 
dadleti,  zadien  et  baledi.  —  Note  9,  au  lieu  de  «  ne 
sont  cm|)loyés  qu'avec  le  nom  (il  «  j)Ouvoif  »,  lire  : 
«  ne  sont  employés  généralement  (|u'avec...  (etc.)  ». 


—  76  — 

—  A  la  fin  de  la  note  4,  5,  7,  lire:  '  u  voir  le  seplième 
tableau  (au  lieu  du  sixième)    ). 

Dans  le  deuxième  tableau  préliminaire,  corriger 
devant  les  formes  2e/'«^e^  zaree,  etc.,  et  les  formes 
dezute^  dozube,  etc.,  /•  par  ?'. 

Dans  le  quatrième  tableau  préliminaire!,  ajouter 
immédiatement  au-dessous  de  «  formes  verbales 
composées  »  rausative-conjonctive  et,  en  regard, 
écrire  sous  la  colonne  labourdine  bailela  \  baitnela, 
sous  la  colonne  souletine  beitela  \  beiliaUi  «  parce 
que  (qu')  il  est,  parce  que  (qu')  il  fa  )  ;  à  bnituela  se 
trouve  ce  renvoi  :  «  See  bailnzida  at  pag.  16  of 
Meditacioneac,  etc.  Fiajonan,  1840.  »  —  Dans  la  liste 
des  formes  verbales  nominales,  ajouter  «  la  forme 
relative-destinative,  p.  ex.  dueii-zat  «.Dans  celle  des 
formes  verbales  composées,  ajouter  la  forme  «  aflir- 
mativo-relative  articulée,  p.  ex.  Elizondo  (Matth., 
6-30,  badena*.  —  Ajouter  enfin,  parmi  les  formes 
nominales  composées,  la  «  négativo-relative-desti- 
native,     p.  ex.   eztueiizat.  » 

Dans  le  cinquième  tableau  préliminaire,  ligne  6, 
au  lieu  de:  «  de  tombé,  d'allé  »,  lire  c  du  tombé, 
de  fallé  »,  et  ligne  23,  substituer  cà  «  de  vu,  de 
mangé  »  —  «  du  vu,  du  mangé  )^. 

Dans  le  sixième  tableau  préliminaire,  note  1,  au 
lieu  de  :  «  lorsqu'il  se  termine  en  67',  lsi,tti  »,  lire  r. 

Dans  le  septième  tableau  préliminaire,  colonnes 
labourdines  in    fine,    lire    ei'or   dndi.cn,  eroria  izcin 

1.  (sic). 

2.  L'auteur  renvoie  ici  à  VEi'uiii:;cllo  scgiin  San  Ma/co,  ilial.  li:iiitiu) ver- 
rais, traduit  jiar  Elcheiiique. 


-    77  — 

dadicn,  cror  zadien,  croria  izaii  zadicw.  Ajouter  à 
la  fin  des  notes  de  ce  septième  tableau  :  «  ou  en  en  ». 

Page  XIII,  ligne  15,  intercaler  «  comme  »  entre 
«  être  considéré  »  et  «  plus  ancien  ». 

Page  xxij  à  la  fin  delà  note  3,  le  prince  a  écrit  : 
(i  Nous  trouvons  duzuek  et  ditatziiek  dans  les  Noelak 
d'Etcheberry  ',  p.  ex.  p.  138  et  199  de  TÉdition  de 
Bayonne  sans  date  (P.  Fauvet)  \ 

Nous  rencontrons  à  la  page  xxviii  (première  ligne 
de  la  note),  une  correction  insignifiante,  «  enre- 
gistrés »  pour  «  enregistrés  ».  H  y  a  une  foule  de 
corrections  de  ce  genre  (additions  d'accents,  de 
points  sur  les  ?',  etc.)  Je  ne  les  donnerai  [)as  par  la 
suite. 

Je  copie  sur  le  verso  de  la  page  oii  se  trouve  le 
vexai  conjugaison  [ceWe  qui  précède  la  page  i]  la  note 
suivante  : 

«   Correction  importante  : 

»  (Changez  en  ten  la  syllabe  finale  ne  de  tous 
»  les  lerminatifs  féminins  labourdins,  à  la  seule 
»  exception  de  ceux  de  la  voix  transitive  ayant  la 
»  troisième  personne  du  pluriel  pour  sujet.  C'est 
»  ainsi  que  natzayone  «je  leur  suis  «,  ziayone  «  il 
»  leur  est  »,  ziaizlxone  «  ils  leur  sont  »,  litzaizko- 
»  kene  «  ils  leur  seraient  »,  gintzaizkiokene  «  nous 
»  leur  pourrions  »,  zione  «  il  le  leur  a»,  ziokene  »  il  le 
»  leur  aura  »,  niozakene  «je  le  leur  pourrais  »,  liokene 
«   il  le  leur  aurait  »,  ginlozakene  «  nous  leur   pour- 


1.  (â/c).  G.  L. 

2.  II  y  en  a  plusieurs  ;    le  Prince  B.    avait  des    exemplaires    des    deux 
éditions  cotées  15  h  et  15  i,  par  M.   Vinson. 


—  78  ~ 

»  rions»,  etc.,  etc.:  seront  covrïgés  en  ?iatzayo/en, 
))  ziayolen,  ziaiskoleii^  litzaizkokcten,  gintzaizkoke- 
»  tcn,  ^io/eii,  zioketen,  niozakeieii,  liokelen,  ginio- 
»  zake/eji,  etc.,  tandis  que  zio/ie  c  ils  le  leur  ont  », 
»  ziokeiie  <>  ils  le  leur  auront  »,  liokene  «  ils  le  leur 
»  auraient  »,  etc.,  resteront  inaltérés.  » 

Page  54,  dans  la  dernière  forme  biscayenne,  aine, 
les  deux  dernières  lettres  sont  barrées,  et  on  les  a 
remplacées  par  en  ??,  et  on  a  écrit  en-dessous  :  «  V. 
Zavala  !  !  ».  De  môme,  à  la  page  57,  ligne  13,  au  lieu 
de  aikene,  il  y  a  «  ai  keeii  ??  V.  Zavala  ». 

Page  75  et  en  beaucoup  d'autres  endroits,  des 
formes  sont  répétées  à  l'encre  violette,  je  n'ai  pu 
savoir  pourquoi  :  ainsi,  à  côté  de  l'imprimé  dit  a,  on 
trouve  le  manuscrit  ditu  ;  dituizte^  zituen^  zituzien, 
etc.,  sont  ainsi  répétés.  Toutes  ces  additions  sont 
indubitablement  de  la  môme  écriture  que  toutes  les 
autres. 

Pao:e  83,  se  trouvent  deux  nouvelles  formes  rela- 
tives  avec  «  me,  te,  nous,  vous  »  pour  objet,  ce  qui, 
avec  \e  giofza(eniangiotza)  «  il  nous  a  donnés  à  lui  » 
découvert  par  Ithurri  dans  \es Méditations  de  Duhalde, 
etlesneuf  ou  dix  signalées  parle  prince  lui-même, 
porte  à  douze  on  treize  les  formes  similaires  qu'on  a 
trouvées  jusqu'à  présent  chez  les  auteurs  '.  Ce  sont  : 

1.  Le  Docteur  Broussain,  de  Haspai-ren,  m'écrit  à  ce  sujet  que  la 
forme  na/w,  avec  le  sens  de  «  il  m'a  à  lui  »,  est,  de  nos  jours,  usitée  à 
Briscous  (G.  L.) 

Les  formes  relevées  par  le  Prince  Bonaparte  sont  emon  a  qu'il  te 
donne  à  lui  »,  ieço»  «  qu'il  t'aie  fi  lui  »,  aiaitfé  a  ils  t'ont  à  moi  », 
naraiianac  «  celui  qui  l'a  à  moi  »  cerauzquiotet  «  je  vous  ai  à  lui  », 
baicraitzi/iiio  «  parce  qu'il  nous  a  à  lui  »,  Qarauzcac  ou  guerauzcac  «  tu 
nous  as  à  lui,  ô  homme  ».  f.T.   V.) 


—  71)  — 

39,  18  :  reconcilialu  vran  garauzquig  «  il  nous  a 
réconciliés  a  toi  [lilL  il  nous  a  en  réconciliés  a  toi)  »  ; 
et  77,  29  :  ailari  reconcilia  guiençonçat  «  pour  qu'il 
NOUS  réconciliât  au  Père  ». 

Page  96,  première  colonne  laboiirdine,  on  lit  à  côté 
de  ddiial  et  de  daiili  les  formes  liçarragiiéennes 
drauat  et  drniik. 

Page  160,  ligne  24,  eilacer  «  sous-dialecte  bazta- 
nais  d'Elizondo  ». 

Telles  sont,  exactement  transcrites,  les  remarques 
additionnelles  du  prince  L.-L.  Bonaparte  à  son 
ouvrage  capital.  Il  y  aura  lieu  de  rechercher  plus 
tard  ce  qu'il  y  a  de  publiable  dans  les  innombrables 
manuscrits  qu'il  a  laissés  concernant  la  langue 
basque. 

Georo-es  Lacoaibe. 


RÉPONSE  A  M.  VINSON 


M.  Vinson  m'a  reproché  plus  d'une  fois  que  je  n'ai 
cité  dans  mes  études  basques  ni  les  ouvrages  de 
lui-même  ni  ceux  du  feu  Prince  L.  L.  Bonaparte. 
Mais  si  j'ai  préféré  citer  les  grammaires  de  van 
Eys  et  de  Campion,  c'est  parce  que  ce  sont  des 
manuels  commodes,  où  l'on  trouve  les  rensei- 
gnements nécessaires.  Là  on  peut  voir  les  noms  de 
ceux  qui  ont  fait  les  découvertes  ou  qui  ont  donné 
les  explications.  Mais  M.  Vinson  a  raison,  il  aurait 
été  mieux  de  citer  toujours  l'auteur  qui  a  été  le 
premier  à  faire  remarquer  ou  à  expliquer  les  faits 
mémorés  dans  mes  études.  Néanmoins  il  ne  me 
semble  pas  juste  de  m'en  faire  un  tel  reproche 
comme  l'a  fait  M.  Vinson.  Le  lecteur  pourrait  ob- 
tenir l'impression  que  j'eusse  un  parti-pris  contre 
des  savants,  dont  je  reconnais  volontiers  les  mérites. 
M.  Vinson  pourra  s'en  convaincre  par  la  lecture  de 
mon  essai  sur  le  caractère  de  la  grammaire  basque. 

ce.  Uhlenbeck. 

Levde.  [Breestraat,  53.] 


THÈME  OU  VERSION 


La  question  n'est  pas  neuve,  mais  elle  est  toujours 
intéressante,  parce  qu'elle  se  lie  à  celle  de  la  mé- 
thode ;  et  toujours  d'actualité,  parce  que  l'étude 
des  langues  étrangères  est  plus  que  jamais  à  l'ordre 
du  jour.  Quels  doivent  être  les  rôles  respectifs  du 
thème  et  de  la  version  dans  notre  étude  ?  Faut-il  com- 
mencer par  le  thème  ou  faut-il  au  contraire  commencer 
parla  version  ?La  plupart  des  professeurs,  des  péda- 
gogues, des  étudiants  même,  afïïrment  que  le  thème 
est  l'exercice  primordial,  qu'il  doit  être  le  premier 
et  d'abord  le  seul  exercice  ;  la  plupart  des  savants 
et  des  linguistes,  au  contraire,  sont  partisans  de  la 
version  et  soutiennent  que  le  thème  ne  doit  être  que 
l'application,  que  la  contre-partie,  que  la  vérification 
delà  version.  Je  suis  de  ceux-là. 

On  pourra  dire,  on  a  dit,  qu'il  fallait  distinguer 
entre  les  langues  mortes  et  les  langues  vivantes, 
qu'il  fallait  tenir  compte  du  but  de  l'étudiant  :  celui 
qui  veut  apprendre  une  langue  pour  la  parler  et  s'en 
servir  couramment  ne  saurait  travailler  de  la  même 
façon  que  celui  dont  l'intention  est  seulement  de  lire 
des  ouvrages  écrits  dans  cette  langue  ou  de  s'accorder 
la  fantaisie  de  pouvoir  l'écrire.  L'objection  est  spé- 
cieuse, mais  elle  est  facile  à  réfuter  :  ({ue  ce  soit  pour 

6 


—  «•? 


parler,  pour  lire  ou  pour  écrire,  il  faut  apprendre  deux 
choses,  les  mots  et  les  règles  de  la  grammaire.  On 
peut  évidemment  arriver  par  la  simple  pratique  à 
parler  couramment,  mais  alors  la  question  de  mé- 
thode ne  se  pose  plus  ;  c'est  de  Tempirisme,  il  n'est 
plus  besoin  de  versions  ni  de  thèmes  et  l'on  sera  tou- 
jours incorrect.  J'ai  déjà  réfuté  plusieurs  fois  des 
afïirmations  de  ce  genre  ;  j'ai  toujours  soutenu  que 
l'étude  directe  d'un  texte,  même  si  l'on  veut 
apprendre  une  langue  dans  un  but  pratique,  doit 
être  mise  au  premier  plan  ;  qu'on  doit  déduire  les 
règles  grammaticales  de  textes  étudiés  et  non  d'un 
livre  dogmatique  procédant  par  affirmations  ;  que  la 
grammaire^  par  conséquent,  ne  doit  être  qu'un  guide, 
qu'une  direction,  qu'une  indication  ;  que  le  thème 
doit  être  essentiellementl'imitation  d'un  texte  original, 
l'application  des  règles  déduites  de  ce  texte  ;  et  qu'en- 
fin la  traduction  libre  d'un  morceau  indépendant  doit 
venir  en  dernier  lieu  et  n'être  en  quelque  sorte  qu'une 
récapitulation  générale .  En  d'autres  termes,  je  suis  tou. 
jours  pour  la  méthode  positive,  celle  qui  procède  de 
l'observation  et  de  l'expérience  :  on  m'objecterait 
en  vain  qu'elle  ne  convient  pas  aux  enfants  qui  ne 
savent  pas  raisonner  ou  qui  raisonnent  mal  ;  et  dont  la 
principale  ressource,  le  principal  élément  de  travail 
est  la  mémoire  ;  je  répondrais  que  l'enfant  n'étudie 
guère  aujourd'hui  sérieusement  les  langues,  le  grec 
et  le  latin  notamment,  avant  la  douzième  année  et  qu'à 
cet  âge,  il  est  déjà  capable  de  raisonner  juste. 

Mais,   si  ces   choses  me  sont  revenues  à  l'esprit, 
c'est  qu'il  est  arrivé  sous  mes  yeux  un  petit  livre,  très 


—  88  — 

intéressant  etfortbion  fait,  plein  d'excellents  conseils, 
qui  a  pour  litre  :  ^^  Le  llu^ntc  laliii  cl  Ui  version  laline 
(leiiriitililé,  leur  méthode,  applications  de  la  méthode), 
à  l'usage  des  élèves  des  classes  de  lettres,  par 
Georges  Anquetil.  Paris,  H.  Daragon,  éditeur,  11)05, 
in-12,  .\viij-i>2-(iij)  p.  >•>.  L'auteur  est  un  partisan  résolu 
du  vieux  système  ;  il  proclame  la  [)riorité  nécessaire 
du  thème  et  son  excellence  et  dit  notamment  (p.  1)  que 
le  thème  «  doit  conduire  logiquement  à  la  version  »  ; 
il  ajoute  :  «  jamais  vous  ne  trouverez  un  élève  réus- 
sissant régulièrement  en  version  latine  fpii  ne  soit 
fort  en  thème  »,  et  plus  loin  :  a  le  thème  latin  apprend 
avant  tout  à  avoir  l'esprit  régulier,  attentif  et  métho- 
di({ue  ;  cultive  la  mémoire  par  l'application  constante 
des  règles  de  l'inexorable  grammaire  ;  corrige  de 
l'étourderie  et  de  rinattenlion_,  et  est  enfin  un  excel- 
lent exercice  de  français  et  d'intelligence  )).  En  rem- 
plaçant le  mot  ((  application  »  par  «  constatation  » 
on  appliquerait  excellemment  ce  dernier  |)aragraphe 
à  la  version.  Il  est  vrai  que  l'auteur  a  surtout  en  vue 
ceux  qui  demandent  la  suppression  complète  du 
thème  dans  les  études  classiques;  cela  est  absurde;  je 
ne  suis  pas  de  cex-là,  je  n'ai  pas  besoin  de  le  dire. 

Une  fois  de  plus,  je  vais  donner  un  exemple  de 
la  manière  dont  je  comprends  le  travail  de  l'étude 
d'une  langue.  Je  prends,  dans  le  livre  de  M. 
Anquetil,  cette  phrase  de  Ouintilien  :  Licei  ipsa 
vi/iiiiii  sil  (iiiibilio,  fréquenter  lainen  caiisd  ^'irtuluni 
est.  Je  commence  par  expli([uer  à  l'élève  les  mots,  un 
à  un  :  «  Quoique  elle-même  défaut  soit  ambition, 
fréquemment   cependant  cause  des    vertus  est  »  ;  il 


—  84  — 

n'est  pas  bien  difficile  de  comprendre  que  cela  si- 
gnifie :  «  Quoique  l'ambition  soit  en  elle-même  un 
défaut,  elle  est  cependant  souvent  une  cause  de 
vertus  ))  ou,  en  meilleur  français  :  «  elle  fait  naître 
souvent  cependant  des  vertus  »  .  Je  fais  alors  re- 
marquer à  l'élève  la  différence  entre  le  mot  à  mot,  la 
traduction  rédigée  et  la  traduction  correcte.  Je  lui 
fais  voir  ensuite  la  différence  qu'il  y  a  entre  la  cons- 
truction latine  et  la  construction  française  :  le  latin 
commence  généralement  parle  sujet,  met  au  second 
rang  le  complément  ou  l'attribut  et  finit  par  le  verbe, 
chacun  de  ces  éléments  de  la  proposition  pouvant 
être  accompagné  d'éléments  modificatifs,  adverbes, 
adjectifs,  propositions  incidentes,  etc.  11  y  a  parfois 
des  inversions,  surtout  lorsque,  comme  dans  le  cas 
présent,  la  phrase  commence  par  une  conjonc- 
tion. Je  lui  fais  noter  enfin  que  l'incidente  précède  le 
plus  souvent  la  proposition  principale,  précisément 
parce  qu'elle  en  modifie  le  sens.  La  syntaxe  est 
principalement  réglée  par  la  pensée  de  celui  qui 
parle  :  l'hindoustani  tourne  toujours  le  passé  actif 
par  le  passif,  il  dit  a  la  maison  a  été  vue  par  moi  » 
main  ne  gliar  dékhà,  pour  «  j'ai  vu  la  maison  », 
parce  que  «  la  maison  »  est  la  partie  la  plus  impor- 
tante de  la  proposition  ;  mais  il  peut  dire  aussi  «  par 
moi  il  a  été  vu  à-la-maison  »  main  ne  gliar  ko  dèkhà, 
et  celte  tournure  s'explique  par  la  prépondérance 
donnée  au  verbe.  C'est  pour  des  raisons  analogues 
que  l'Indien  dit  mèrâ  jawâb  «  ma  réponse  )),  pour 
((  la  réponse  qu'on  m'a  faite  ». 
Passons  maintenant  au  point  de  vue  grammatical. 


—  85  — 

L'étudiant  notera  sur  un  cahier  spécial,  de  gram- 
maire, à  la  î)age  consacrée  aux  conjonctions,  que 
licel  est  employé  pour  «  ([uoique  »  et  qu'il  gouverne 
le  subjonctif;  il  aura  soin  d'indiquer  aussi  que  ce 
mot  est  proprement  un  verbe  impersonnel  signifiant 
«  il  est  permis  »  ;  —  ipsa,  pron.  pers.  réfléchi  fém. 
sing  ;  ici,  adj.  qualifiant  anihitio,  fém.  sing.  ;  — 
sit,  3®  per.  sing.  subj.  prés,  de  esse  «  être  »  ;  — fré- 
quenter, adverbe,  de  l'adj. //•ery^e/z.ç;  la  terminaison 
ter  forme  des  adv.  de  manière  ;  —  virtutuni,  gén. 
plur.  de  virtus,  virtJitis  ;  observer  l'importance  mor- 
phologique du  génitif  singulier,  les  particularités  de 
la  déclinaison  imparisyllabique,  les  variations  des 
génitifs  pluriels  en  um  ou  iiiin  ;  etc. 

Cela  fait,  comme  l'élève  aura  vu  auparavant  et 
analysé  de  la  même  façon  d'autres  phrases,  nous 
pourrons  lui  faire  faire,  sur  ces  divers  textes,  des 
thèmes  d'imitation.  Admettons,  par  exemple,  qu'il 
ait  seulement  traduit:  //os  pa/ria/ii  fugimus...  silvas 
et  doceinus periculosam  libevtalem  iacuriosae  servitati 
anteponendani  esse,  nous  aurons  le  droit  de  croire 
qu'il  n'aura  pas  de  peine  à  traduire  en  latin:  «  la 
vertu  nous  enseigne  que  l'ambition  est  la  cause  de 
tous  les  maux;  cependant  nous  ne  l'abandonnons 
pas  souvent  »,  et  il  n'aura  qu'à  relire  ses  notes  pour 
en  venir  à  bout. 

L'erreur  de  M.  Anquetil  est  dans  la  persuasion  où 
il  paraît  être  que,  pour  l'écolier,  pour  l'enfant,  le 
thème  n'est  pas  un  exercice  mécanique.  Malheureu- 
sement, il  l'est  dans  la  plupart  des  cas.  Avec  un  de 
ces  bons  gros  dictionnaires,  remplis  de  phrases  toutes 


—  86  — 

faites,  Lin  élève  intelligent,  mais  ignorant  la  gram- 
maire, arrivera  sans  trop  de  peine  à  faire  un  thème 
passable,  alors  qu'il  sera  incapable  de  comprendre 
une  version  relativement  facile.  Il  écrira  sans  raison- 
ner, tandis  que  pour  mettre  en  français  un  texte 
étranger,  il  faut  au  contraire  nécessairement 
réfléchir,  penser,  comparer  :  c'est  par  la  version,  et 
par  la  version  seule,  qu'on  j)eut  comprendre  et 
qu'on  doit  apprendre  la  grammaire;  c'est  par  elle, 
par  la  constatation  des  idiotismes,  des  locutions 
diverses  et  des  tournures  constantes,  qu'on  acquerra 
la  connaissance  certaine  des  dix  ou  douze  «  rè- 
gles »  fondamentales  de  la  syntaxe  latine,  si  bien 
résumée  par  M.  Yrondelle  dans  sa  brochure  o  La 
Version  latine  au  baccalauréat  (  Paris  1905,  viij  .-132  p . 
in-8°)  »  :  l'ablatif  absolu,  la  proposition  infinitive 
qu'on  appelait  de  mon  temps  le  que  retranché,  etc. 
Je  ne  saurais  trop  le  répéter,  la  «  règle  »,  puisque 
règle  il  y  a,  n'est  et  ne  doit  être  qu'une  conclusion, 
qu'une  résultante,  qu'une  conséquence,  et  non  une 
aflirmation  ex  cathedra,  un  axiome,  un  poslulatuni 
indiscutable. 

Vn  argument  de  plus  en  faveur  de  la  version,  peut 
être  tiré  de  ceci  :  c'est  que,  le  plus  souvent,  et  sur- 
tout quand  on  étudie  luie  langue  morte,  comme  le 
latin,  le  grec  ou  le  sanscrit,  on  ne  se  propose  pas 
d'écrire  correctement  dans  cette  langue,  mais  de 
lire  le  mieux  et  le  plus  vite  possible  un  texte,  une 
dissertation,  un  poème,  un  ouvrage  quelconque. 

(Quelle  est  donc  la  méthode  la  plus  simple  ?  C'est, 
—  et  je  m'occupe  ici  des  adultes, —  de  se    procurer 


—  87  — 

un  texte,  une  bonne  traduction  de  ce  texte  et  une 
grammaire  quelconque,  la  plus  courte  possible.  On 
commencera  par  faire,  [)our  son  propre  usage^  un 
résumé  de  cette  grammaire,  réduit  aux  formes  de 
déclinaison  et  de  conjugaison,  en  plusieurs  tableaux 
où  ces  formes  seront  l)ien  distinguées  et  bien  mises 
en  relief.  Puis  on  prendra  le  texte  et  on  cherchera, 
phrase  par  phrase  et  mot  par  mot,  à  l'analyser  gram- 
maticalement à  l'aide  du  résumé  dont  il  vient  d'être 
question.  Puis  on  regardera  la  traduction  et  on  se 
rendra  compte  de  ses  erreurs,  s'il  y  a  lieu  ;  et  c'est 
alors  qu'après  avoir  compris  l'idée  générale  de  la 
morphologie,  on  comprendra  la  construction  et  la 
syntaxe.  Si  l'on  n'a  pas  de  grammaire,  le  travail  est 
plus  lent,  puisqu'on  doit  se  faire  à  soi-même  au 
fur  et  à  mesure  le  tableau  des  formes,  mais  il  est 
peut  être  plus  sur.  Il  sera  encore  plus  f)énible,  mais 
tout  aussi  profitable  au  moins,  si  l'on  en  est  réduit  à 
un  texte  et  à  un  dictionnaire  :  dans  ce  cas,  si  la 
chose  est  possible,  il  faut  toujours  vérifier  en  consul- 
tant le  dictionnaire  inverse  et  faire  tous  ses  efforts 
pour  dégager  les  radicaux  et  l'es  racines,  ce  à  quoi 
on  arrive  par  les  mots-parents  que  donnera  le 
di('tionnaire.  Il  faudra  être  bien  pénétré  de  ces  deux 
idées  :  que  l'analyse  minutieuse  de  toutes  les  parties 
de  chaque  mot  est  le  premier  et  le  plus  essentiel  des 
travaux  et  que  les  mots  n'ont  jamais  qu'une  signifi- 
cation relative  et,  si  j'ose  le  dire,  accidentelle.  Le 
français  qui  est  plein  de  nuances,  qui  est  si  souple 
et  si  flexible,  aura  mille  manières  différentes  de 
traduire  les  mêmes  mots  étrangers.  La  signification 


-  88  — 

résulte  du  contexte,  de  la  proposition,  delà  phrase  et 
non  des  mots. 

Je  n'ai  pas  fait  seulement  ici  de  la  théorie;  je  parle  par 
expérience.  J'ai  appris  et  étudiéplusieurs  languespeu 
connues  de  cette  manière.  Je  n'ai  pas  procédé  autre- 
ment quand  j'ai  traduit  du  hongrois  en  français  le 
travail  de  M.  Ribary  sur  le  basque:  je  n'ai  eu  d'autres 
instruments  en  mains  que  le  texte  du  magyare,  la 
grammaire  de  Ballagy  (Bloch)  et  le  petit  dictionnaire 
de  Coloman  Babos. 

Pour  Tentant,  j'accorde  que  la  méthode  ne  peut 
être  absolument  la  même  et  qu'il  faut  faire  une  plus 
large  part  à  l'empirisme  et  à  la  mémoire.  On  commen- 
cera donc  par  lui  mettre  en  mains  une  grammaire 
très  élémentaire,  contenant  surtout  les  paradigmes 
des  déclinaisons,  les  tableaux  des  conjugaisons,  les 
listes  des  pronoms,  des  prépositions,  des  principaux 
adverbes  et  des  conjonctions  les  plus  importantes. 
Au  fur  et  à  mesure,  on  lui  fera  traduire,  du  latin 
en  français,  par  exemple,  des  phrases  très  simples  où 
il  devra  retrouver  ces  formes  el  ces  mots,  et  qu'il 
devra  imiter  en  traduisant,  du  français  au  latin, 
d'autres  phrases  non  moins  simples.  Puis,  quand  il 
aura  été  suffisamment  préparé  et  assoupli  par  cet 
exercice,  on  pourra  lui  faire  aborder  l'étude  et 
l'analyse  des  textes. 

C'est  ici  que  devront  trouver  place  les  conseils 
pratiques  de  MM.  Yrondelle  et  Anquetil.  Je  les 
résume  ci-après  : 

1°  Lire  attentivement  d'un  bout  à  l'autre  le  texte 
donné,    puis    tâcher    d'en   saisir  l'idée  générale    et 


—  89  — 

remarquer  les  passages  essentiels,  les  expressions 
spéciales,  les  mots  caractéristiques; 

2"  Reprendre  chaque  phrase,  l'expliquer  motà  mot, 
de  tête,  et  enfin  écrire  la  traduction  d'un  seul  jet  ; 

3°  Noter,  à  mesure,  les  mots  difficiles,  les  accep- 
tions particulières  précisées  par  le  contexte,  les 
idiotismes,  les  tournures  exceptionnelles  ; 

4°  Relire  et  réviser,  tant  au  point  de  vue  de  la 
signification  que  de  la  correction  ;  le  français  ne 
devra  pas  être  le  calque  du  latin  :  on  pourra  diviser 
ou  réunir  des  phrases,  remplacer  des  substantifs 
par  des  adjectifs,  des  verbes  par  des  substantifs  ou 
des  p.ériphrases  ;  des  pluriels  par  des  singuliers; 
des  présents  par  des  passés  ou  des  futurs,  et  inver- 
sement. Leprincipaf,  c'est  de  suivre  l'ordre  des  idées, 
en  faisant  exactement  se  correspondre  les  mots  ou 
les  expressions  essentielles. 

Pour  faciliter  aux  jeunes  élèves  l'intelligence  de 
la  langue,  M.  Yrondelle  a  résumé,  en  dix  principes 
fondamentaux,  toute  la  syntaxe  latine.  J'y  reviendrai 
tout  à  l'heure. 

Aux  recommandations  de  ^1.  Yrondelle,  M.  Anque- 
til  ajoute  les  suivantes  : 

5"  Pour  bien  comprendre,  décomposer  et  classer  les 
propositions,  et  chercher,  dans  chacune,  le  sujet 
(d'ordinaire  au  nominatif),  le  verbe  (qui  s'accorde  en 
nombre  et  en  genre,  quand  cela  est  possible,  avec 
le  sujet)  et  enfin  le  complément  (au  cas  régi  par  le 
verbe)  ou  l'attribut  au  même  cas  que  le  sujet)  ; 

6°  Ne  pas  essayer  de  deviner,  et  ne  pas  craindre 
de  consulter   le    dictionnaire,   même    pour  les  mots 


—  90  — 

que  Ton  croit  le  mieux  savoir  ;  faire  attention  aux 
idiotismes,  aux  formules,  aux  locutions  spéciales  ; 

7°  Prendre  toujours  pour  base,  pour  point  de 
départ  de  la  traduction  correcte,  le  mot  à  mot  strict 
et  exact  du  texte  donné,  —  et  j'ajoute,  moi,  dans 
l'ordre  même  de  ce  texte,  ce  qui  est  le  meilleur 
moyen  de  se  rendre  compte  de  la  différence  des  deux 
langues  ;  rien  n'est  plus  abominable  que  cette  habi- 
tude de  certains  professeurs  de  transposer  de 
rilomère  ou  du  A'irgilc  dans  l'ordre  de  la  syntaxe 
française  :  cano  arma  que  vi'rii/ii... 

8"  iNe  jamais  écrire  quelque  chose  que  Ton  ne 
comprend  pas;  un  contre-sens  est  préférable  à  un 
non-sens;  le  contexte  d'ailleurs  doit  fournir  à  cet 
égard  de  bonnes  indications. 

Ces  conseils  sont  fort  bons  et  peuvent  servir  à  d'au- 
tresqu'à  des  enfants;  c'est  pourquoi  j'ai  cru  pouvoir  les 
rapporter  ici.  Je  vais  également  résumer  les  conseils 
de  M.  Anquetil  pour  la  bonne  exécution  d'un  thème: 

1°  Lire  lentement  et  attentivement  le  texte  français, 
pour  se  rendre  compte  des  difficultés  qu'il  présente; 

2°  Donner  au  français  l'allure  de  la  phrase  latine 
qui  devra  lui  correspondre  ou  plutôt  préparer  cet 
arrangement  des  mots  dans  la  pensée/  ; 

3°  Se  rappeler  et  appli(|uer  les  règles  résultant  des 
exemples  de  la  grammaire  et  des  textes  que  l'on  a 
déjà  lus  ; 

4°  Bien  comprendre  les  acceptions  particulières 
des  mots  français  et  se  servir  intelligemment  du 
Dictionnaire  français-latin,  en  vérifiant  par  le  Diction- 
naire latin-français  ; 


—  91  — 

5°  Prendre  de  préférence  les  mots  employés  par 
Cicéron,  puis  par  Sénèque,  Qiiinlilien,  César,  Titc- 
Live,  Tacite,  etc. 

()"  Xe  pas  oublier,  aulaiit  (|ii(;  [)0ssible,  de  relier  les 
j>hrases  entre  elles  par  ces  conjonctions  que  les  latins 
aimaient  fort  :  ilaqiie,  elenim,  allamen,  cœteriim,  etc. 
(au  commencement  des  phrases),  ou  enini,  tameii, 
vero^  aitlem,  quideDi,  etc.  (après  le  premier  mot); 

7"  Simplifier  et  réduire  autant  que  possible  le 
nombre  des  mots  ; 

8'^  Suivre  en  général  Tordre  de  construction  sui- 
vant :  sujet,  —  attribut  ou  complément^  — verbe,  en 
groupant  autour  de  chacun  de  ces  éléments  princi- 
j)aux  les  éléments  secondaires  qui  les  modifient 
(adjectifs,  adverbes,  etc.); 

9"  Ilelire  pour  vérifier,  compléter,  pré('iser, 
corriger  et  voir  si,  en  retraduisant  en  français,  le 
sens  l'eslerait  le  même. 

?*1.  Ancjuetil  voudrait  en  outre  que  l'élève  sut, 
avant  tout,  les  règles  de  la  grammaire  à  fond.  Je 
demande,  moi,  qu'il  les  apprenne  au  fur  et  à  mesure, 
et,  par  conséquent,  qu'il  ait  à  faire  seulement  des 
thèmes  où  il  n'ait  ix  appliquer  que  ce  qu'il  a  appris 
j)our  ainsi  dire  par  les  yeux. 

M.  Yrondelle  résume  ainsi  les  postiilala  de  la 
syntaxe  latine  : 

1°  Les  mots  sujets  des  phrases  sont  toujours  au 
nominatif; 

2°  L'attribut  doit  être  au  même  cas  que  le  nom 
auquel  il  se  rapporte  ; 

3°  Les  compléments  des    noms  et  des  adjectifs  se 


—  92  — 

mettent  au  génitif  (et  par  conséquent  les  verbes  dans 
ce  cas  prennent  la  forme  dite  gérondif  en  di),  sauf 
certaines  exceptions  qui  s'expliquent  par  le  sens 
même  du  mot  déterminé  ; 

4'  Le  régime  direct  des  verbes  actifs  se  met  à 
l'accusatif,  mais  il  faut  remarquer  que  certains 
verbes  français  ne  se  traduisent  pas  exactement  et 
ont  pour  équivalent  en  latin  des  verbes  composés 
ou  des  verbes  neutres  qui   demandent  d'autres  cas; 

5°  Le  régime  indirect  se  met  au  datif,  à  l'ablatif, 
au  génitif,  ou  même  à  l'accusatif,  suivant  la  nature 
du  verbe  et  d'après  la  préposition  de  liaison; 

6°  En  général,  la  proposition  subordonnée  est  ren- 
due par  ce  qu'on  appelle  la  proposition  infînitive, 
sauf  celles  exprimant  le  doute  ou  l'incertitude  ; 

7°  Une  proj)Osition  qui  peut  être  mise  sous  une 
forme  participiale  se  traduit  par  l'ablatif  absolu  ; 

8°  On  remplace  le  participe  présent  et  le  participe 
passé  du  verbe  être,  ainsi  que  le  participe  passé  des 
verbes  actifs,  par  une  proposition  conjonctive  com- 
mençant par  cum. 

Je  supprime  les  deux  autres  principes  qui  me 
paraissent  inutiles;  j'ai  modifié  un  peu  la  rédaction 
de  quelques-uns,  car  j'ai  trouvé  là  le  défaut  qu'on 
peut  reprocher  à  trop  de  pédagogues,  celui  de  pro- 
céder par  affirmations  et  de  faire  appel  à  la  mémoire 
seule,  au  lieu  du  raisonnement.  Ainsi,  les  adjectifs 
utllis,  finiliniiis,  d'une  part,  altus,  dives,  dignus,  de 
l'autre,  ne  peuvent  évidemment  avoir  leurs  complé- 
ments, les  premiers  qu'au  datif,  les  seconds  qu'à 
l'aijlatif.  Et  quant  aux  verbes,  n'est-il  pas  absurde  de 


—  93  •=- 

dire  que  stiiclere  gouverne  le  datif,  clocere  Taccusatif, 
meminisse  le  génitif,  par  exemple  ?  Si s/ude/e  veut  le 
datif,  c'est  parce  qu'il  signifie  «  s'appliquer  à  »;  si 
clocere  demande  deux  accusatifs,  c'est  parce  qu'il 
forme  des  propositions  analogues  à  celles-ci  :  «je 
vous  fais  roi  »  ;  si  memiiii  a  la  forme  du  passé  et  la 
signification  du  présent,  et  réclame  le  génitif,  c'est 
parce  qu'il  a  le  sens  de  :  «  j'ai  eu  l'impression  de  » 
c'est-à-dire  :  «  je  me  souviens  de  »,  etc.^  etc.  Que  de 
choses  gagneraient  à  être  ainsi  expliquées  !  me 
pœnilel  contracté  de  mepœna  tenet,  verbes  déponents 
à  forme  passive  qui  sont  en  réalité  des  moyens,  etc. 
Il  en  serait  de  même  pour  toutes  les  langues.  En 
hindoustani,  par  exemple,  certains  grammairiens 
«  pratiques  »,  s'obstinent  à  dire  que  la  terminaison 
du  génitif  varie  et  s'accorde  en  genre  et  en  nombre 
avec  l'objet  possédé  [bàp-kt  bêti  «  la  fille  du  père  »; 
bêti-kâ  bâp  «  le  père  de  la  fille  »),  au  lieu  d'expliquer 
que  cette  terminaison  prétendue  est  un  suffixe 
adjectif,  le  participe  passé  «  fait  »,  qui  s'accorde 
nécessairement  avec  le  nom  déterminé.  Ils  disent  de 
même  qu'il  y  a  un  cas  «  agent  »  en  ne  qui  entraine 
l'accord  du  verbe-participial  actif  passé  avec  son 
complément  direct,  tandis  qu'en  réalité  ne  est  le 
suffixe  instrumental  «  par  »  et  que  la  phrase  est 
retournée,  «  j'ai  vu  le  livre  (fém.)  »  devenant  «  par 
moi  le  livre  (a  été)  vu  »  main  ne  kilâb  dêkhi  ;  on  peut 
même  dire  impersonnellement  :  main  ne  kitàb  ko 
dékkà  «  par  moi  au  livre  il  a  été  vu  ».  Tout  ceci 
entre  autres  est  assez  mal  exposé  dans  l'une  des  der- 
nières grammaires  qui  vient  de  paraître  [Hindustani 


—  94  — 

grammar  self  iaughi^  par  le  cap.  G. -A.  Thim,  Lon- 
dres (in-8'^,  p.  30-31).  En  tamoul,  les  participes  sont 
essentiellement  relatifs,  mais  ils  peuvent  être  pris 
subjectivement  ou  objectivement,  kanda^  par  exem- 
ple, signifiant  tantôt  «  qui  a  vu  »  et  tantôt  «  qu'on  a 
vu  »  :  nàn  kanda  maram  «  l'arbre  que  j'ai  vu  », 
en  11' ei  konda  ni  «  toi  qui  m'as  vu  »  ;  en  tamoul,  aussi, 
chacun  des  éléments  formels  garde  son  indépen- 
dance :  dans  kandây  «  tu  as  vu  »,  ày  est  si  bien  «  toi  » 
qu'on  peut  y  ajouter  des  suffixes  de  relation  et  dire 
par  exemple  kandâijkku  «  à  toi  qui  as  vu  »;  de 
même  on  peut  dire  màrhên  «j'ai  une  poitrine  »,  et 
pûn  luàrbèuei  kcmdân  «  il  a  vu  moi  dont  la  poitrine 
est  ornée  d'un  bijou  »  {pùn^  bijou;  nidrbii,  poitrine). 
Le  basque,  qui  a  les  constructions  participiales  et 
même  le  cas  agent,  distingue  nik  ikusia  «  ce  que  j'ai 
vu  »,  de  ni  ikusiak  «  celui  qui  m'a  vu  ».  Il  place 
toujours  le  génitif  avant  le  déterminé,  et  l'adjectif 
au  contraire  après,  ce  qui  implique  une  interversion 
des  rôles;  le  verbe  actif  a  toujours  son  régime  direct 
incorporé  en  lui  :  etcJiea  dakusal  signifie,  non  pas 
«  je  vois  la  maison  »,  mais  «  je  la  vois,  la  maison  », 
ce  qui  explique  pourquoi,  à  la  question  «  avez-vous 
fermé  la  porte  ?  »  une  servante  basquaise  répondra 
toujours,  en  français  :  «  j'ai  fermé  »  au  lieu  de  «  je 
l'ai  fermée  »  :  on  sait  qu'au  contraire  le  hongrois  a 
les  deux  formes,  lalolc  erdôt  «  je  vois  une  prairie  », 
Q\.latovi  az  erdôt  «je  la  vois,  la  prairie  ».  Je  pourrais 
citer  bien  d'autres  particularités  syntactiques  ou 
grammaticales,  le  duel,  les  pronoms  affixes,  les  voix 
dérivées    (comme    les    trois     formes    hindoues,    pî 


-  95  — 

«  ho'im», pila  «  faire  boire,  abreuvei-  «,  pihvâ  «  faire 
donner  à  l)oire,  faire  abreuver,  être  eause  que 
quelqu'un  IjoïL  »),  l'état  eonstruit  des  mots,  etc.  A 
propos  du  duel,  sait-on  quel  est  le  texte  grec'  qui 
m'en  a  fait  le  mieuxcomprendreremploi?c'estrii\  m- 
ne  de  Callistrates  à  Harmodius  et  Aristogiton,  avec 
ses  £T:ot7]aaT7]vet£7rot7jaaTOv,  sesxxavéTTjv  etxTavsTOv, 
et  son  arpwv;  nous  y  voyons,  par  parenthèse,  des  conju- 
rés cacher  leur  glaive  sous  un  rameau  de  myrte,  comme 
l'assassin  du  président  Garnot  cacha  son  poignard 
dans  un  bouquet. 

Au  fond  d'ailleurs,  la  question  est  surtout  une 
question  de  méthode.  C'est  toujours  la  vieille  que- 
relle entre  l'empirisme  et  l'observation,  entre  la 
routine  et  l'expérience,  entre  le  principe  d'autorité 
et  celui  de  liberté  :  j'allais  presque  rappeler  la  fameuse 
querelle  des  anciens  et  des  modernes.  Les  gram- 
mairiens tamouls  ont  formulé  un  précepte  d'un  con- 
servatisme farouche,  bien  fait  pour  empêcher  le 
développement  et  le  progrès  de  la  littérature  : 

Epporul  éççolin  évvâru  uyarndôr 
Ceppinar  appadi  çeppudan  marahè 

«  Sur  quels  sujets,  avec  quels  mots,  de  quelle  fa- 
çon, les  gens  supérieurs  ont  parlé;  parler  de  cette 
manière,  c'est  la  convenance  du  style.  »  Mais,  si  un 
arbre  doit  être  jugé  par  ses  fruits,  un  système  d'édu- 
cation doit  l'être  par  ses  résultats.  Or,  il  est  facile 
de  constater  que  ceux  qu'on  appelle  familièrement 

1.  J  aurais  pu  rappelei'  aussi  le  çloka  célèbre  du    Rdmâyaiiu  :   l'atrd- 
ham  krpanavandhdu 


—  ge- 
lés forts  en  thème  n'ont  pas  joué  dans  la  société  le 
rôle  important  auquel  ils  semblaient  appelés.  La 
plupart  des  grands  politiciens,  des  homme  d'état^  des 
écrivains  éminents,  des  savants  de  mérite,  ont  été 
seulement  de  bons  écoliers,  se  tenant  dans  une  hon- 
nête moyenne,  et  souvent  aussi  les  premiers  de  leur 
classe  sont  devenus  de  vulgaires  médiocrités  quand 
ils  n'ont  pas  complètement  disparu.  Les  professeurs 
les  plus  renommés  n'ont  eux-mêmes  souvent  produit 
que  des  œuvres  fort  ordinaires  où  le  souci  de  la  forme 
n'a  laissé  que  peu  de  place  aux  idées  et  où  le  mauvais 
goût  le  dispute  à  la  fausseté  du  raisonnement.  J'ai 
connu  un  professeur  de  rhétorique  qui  répétait,  tous 
les  ans,  cette  niaiserie  :  «  quels  romantiques,  Mes- 
sieurs, que  ces  classiques  de  l'antiquité  !..»;  et  c'est 
lui  qui,  à  propos  de  je  ne  sais  plus  quel  livre  célèbre, 
a  écrit  la  phrase  fameuse  :  «  ce  fut  le  je  pense  donc 
je  suis  de  la  littérature  ».  Et  le  temps  précieux  perdu 
en  vains  exercices  de  mémoire \  Aujourd'hui  encore, 

1.  Je  ne  sais  si  je  m'abuse  mais  il  me  semble  que  plus  j'avance  en 
âge,  plus  ma  mémoire,  qui  a  toujours  été  fort  bonne,  se  renforce  et  se 
perfectionne  Je  retiens  mieux  et  plus  vite,  sans  doute  par  ce  que  j'ai 
bien  conijoris  et  je  m'explique  bien  tout  ce  que  je  veux  apprendre.  En 
est-il  de  même  de  l'enfant .' Non,  Lélas  !  et  trop  souvent  il  ne  comprend 
pas  ce  qu'il  récite.  On  me  permettra,  à  ce  propos,  de  citer  ici  des  vers 
qui  ont  été  composés,  pour  moi,  par  mon  père,  en  1845,  avec  cette  épi- 
graphe excellemment  apliquée,  maxima  debetur  puero  reccrentia  : 

Dès  qu'un  enfant  paraît  avoir  quelque  mémoire, 
Ses  parents  aiment  fort  à  charger  son  esprit 
De  grands  mots  inconnus,  fastidieux  grimoire; 
Plus  il  est  perroquet,  et  plus  on  lapplaudit. 
Pour  un  petit  enfant,  c'est  un  travail  d'Hercule  : 
On  blâme  avec  raison  ce  travers  ridicule; 


—  î)7  — 

on  fait  apprendre  par  cœur  aux  enfants  des  listes 
interminables  de  verbes  irréguliers  grecs,  alors 
qu'ils  les  apprendraient  bien  mieux,  un  à  un, 
par  le  travail  quotidien;  sans  leur  expliquer  d'ail- 
leurs pourquoi  tel  verbe  actif  a  un  futur  de 
forme  moyenne  et  pourquoi  tel  autre  a  deux  ou 
trois  radicaux  différents.  Qui  s'est  donné  la 
peine  de  chercher  pourquoi  fera  varie  en  tuli  et 
latuiii  ?  qui  s'est  avisé  de  comparer  ainor  et  amatus 
siini  à  icii  werde  geliebt  et  ich  bin  geliebt  ?  Un  lexi- 
cographe basque  a  commis  cette  bourde  :  «  bego, 
laissez,  impératif  de  iiLz  »  :  utz  est  le  radical 
«  laisser  »,  mais  bego  est  «  qu'il  reste,  qu'il  demeure  »  ; 
le  sens  subjectif  s'es.t  objectivé  et  l'inertie  naturelle 
a  été  confondue  avec  le  résultat  d'iuie  action  exté- 
rieure. D'autres  bas(juisants  ont  dit  que  baantzut 
(pour  baddiitzulj  rend  notre  «  plait-il  ?  »,  mais  sans 
faire  voir  qu'il  signifie  proprement  «  est-ce  que  je 
l'entends  ?  »  ou  plutôt  «  si  je  l'entends  »,  du  radical 
eiilzaii  «  entendu  ».  Je  n'en  finirais  pas  si  je  voulais 
(ùter  toutes  les  extravagances  analogues  des  gram- 
maires et  des  dictionnaires.  Les  grammairiens 
hindous  nous  offriraient  ainsi  de  nombreux  exemples 
de  confusions  et  d'erreurs,  surtout  ceux  du  sud  qui 
ont  voulu  à  toute  force  adapter  au  cadre  de  l'orga- 
nisme  sanskrit    leurs    idiomes    qui    en    ditfèrent  si 

Mais  les  penseurs  sont  rares  en  tout  temps; 
Et,  dans  le  siècle  heureux  de  lumière  où  nous  sommes, 

On  voit  que  la  plupart  des  hommes 
Ne  savent  que  des  mots  et  sont  de  grands  enfants. 


—  98  — 

profondément.  Mais,  pour  en  revenir  à  nos  pédago- 
gues français,  que  de  critiques  n'aurait-on  pas  à  leur 
adresser,  ne  serait-ce  par  exemple  que  sur  leur 
manière  de  noter  les  devoirs  de  leurs  élèves  :  versions, 
thèmes,  compositions  françaises  même  sont  appré- 
ciées d'après  le  nombre  des  fautes  comptées  d'ailleurs 
par  quarts  et  par  demies  :  où  est  le  critérium,  où 
est  le  type  correct  absolu  ?  qu'est-ce  qu'une  faute, 
qu'un  quart  de  faute  ?  C'est  réduire  la  chose  à  un 
simple  calcul  d'arithmétique;  or,  rien  n'est  plus 
inexact,  car  telle  copie  qui  aura  dix  fautes  vaudra 
mieux  dans  son  ensemble  que  telle  autre  qui  en  aura 
cinq  seulement.  L'intelligence  et  l'initiative  sont 
encore  une  fois,  par  le  système  courant,  sacrifiées  à 
la  mémoire,  à  la  routine,  au  travail  machinal  et  irrai- 
sonné. 

Mais,  si  je  trouve  mauvais  les  formes  et  les  pro- 
cédés de  renseignement  classique,  si  je  suis  par- 
tisan des  exercices  oraux  (thèmes  et  versions  au 
tableau),  je  n'en  ai  pas  plus  d'enthousiasme  pour 
les  prétendues  réformes  de  ces  derniers  temps; 
pour  le  baccalauréat  polychrome;  pour  ces  chinoi- 
series de  classes  A,  B,  C,  D;  pour  le  surmenage 
ou  la  réforme  de  l'orthographe.  Je  ne  suis  pas 
convaincu  non  plus  que  la  suppression  du  discours 
latin  et  des  vers  latins  ait  été  une  si  bonne  chose.  .  . 
Je  suis  également  de  ceux  qui  n'éprouvent  aucun 
enthousiasme  pour  la  nouvelle  «  méthode  directe  » 
d'enseignement,  en  ce  qui  concerne  les  langues 
étrangères  :  c'est  le  développement  du  sytème  désas- 
treux des    bonnes    anglaises    ou   allemandes.    Pour 


—  99  — 

apprendre  à  nagera  quelqu'un,  le  jettera-t-on  à  l'eau 
du  haut  d'un  pont  ?  Télémaque  savait  nager  quand 
Mentor  lui  joua  ce  tour;  d'ailleurs  le  précepteur 
rejoignit  aussitôt  son  élève  qui  avait  bu  l'onde  anière, 
contre-poison  souverain  de  sa  passion  pour  Eucharis. 
Le  système  classique  actuel  m'apparait  sous  les 
traits  d'un  vieux  magister  prétentieux,  pénétré  de 
son  importance,  grincheux  et  grognon,  cuistre  tou- 
jours prêt  à  morigéner,  qu'un  lapsus  indigne,  qu'un 
solécisme  irrite,  qu'un  barbarisme  exaspère,  —  un 
Ratin  aux  pudibondes  harangues,  —  empressé  de 
distribuer  des  pensums  et  des  retenues;  railleur  et 
spirituel  à  froid,  orgueilleux  et  vain,  redouté  d'ail- 
leurs et  méprisé  de  ses  élèves.  Au  contraire,  la 
méthode  scientifique  me  semble  une  jeune  et  vaillante 
mère,  femme  vigoureuse  et  superbe,  qui  surveille 
de  près,  mais  sans  l'ennuyer  de  sa  sollicitude  trop 
active,  les  premiers  pas  de  son  enfant;  elle  le  laisse 
aller  en  lui  donnant  les  indications  nécessaires  et 
se  tient  là  attentive,  prête  à  intervenir  en  cas  de 
besoin:  l'enfant  va,  court,  trébuche,  tombe  même, 
mais  il  voit  par  lui-même  le  résultat  de  son  inex- 
périence et,  rebelle  aux  ordres,  revient  demander 
des  conseils.  L'initiative,  la  responsabilité,  la  liberté, 
font  des  hommes;  l'obéissance  passive,  la  discipline 
subie,  la  loi  imposée  font  des  esclaves  ou  des  imbé- 
ciles. 

Julien  Vin  SON 


ÉTUDE  COMPARÉE 

DES   LANGUES    POLYNÉSIENNES 


II 


Le  Maori  de  Nouvelle-Zélande, 
d'après  la  Grammaire  de  W.-L.  Williams 


Après  avoir  donné  une  hitrodaction  et  une  Biblio- 
grapJiie  du  sujet  que  cette  étude  a  pour  but  d'appro- 
fondir, il  est  temps  maintenant  d'aborder  la  partie 
essentielle  de  nos  recherches,  c'est-à-dire  l'examen 
grammatical  des  diverses  langues  parlées  dans  les 
archipels. 

L'auteur  a  l'ambition,  qui  pourra  paraître  assez 
grande,  de  donner  sur  chacune  d'elles  des  renseigne- 
ments grammaticaux,  linguistiques  et  philologiques 
aussi  complets  que  possible. 

11  se  préoccupera  notamment  d'en  rédiger  sur  un 
plan  nouveau  les  grammaires,  pour  la  plupart  incon- 
nues en  France  où  de  tels  travaux,  trop  ardus  pour 
attirer  les  «  intellectuels  »  à  demi-culture,  et  trop 
spéciaux  pour  que  le  public  s'y  intéresse,  ne  comptent 
que  fort  peu  de  sectateurs. 

On  ne  saurait  croire  combien  il  est  humiliant  de 
constater  chez  nous  une  infériorité  constante  dans 
la  quantité,   la   richesse  d'informations,  et  la  valeur 


—  101  — 

documentaire  de  nos  publications  lingiiisti{|iies, 
quand  on  les  compare  à  celles  que  rAllemagne, 
l'Angleterre  et  même  l'Amérique  ont  fournies  depuis 
cinquante  ans. 

Particulièrement  en  ce  qui  concerne  les  langues 
polynésiennes,  c'est  faire  œuvre  entièrement  nouvelle 
que  de  s'en  préoccuper.  Aussi  ces  pages  commen- 
cent-elles une  série  qui  sera  longue,  puisqu'il  s'agit 
de  remonter  les  îles  du  sud  au  nord,  groupe  par 
groupe,  depuis  la  Nouvelle-Zélande  jusqu'aux 
Sandwich. 

*  * 

Le  Maori  de  Nouvelle-Zélande, 
d'après  la  grammaire  de  W.  L.  Williams 

Les  Maoris  sont  le  peuple  indigène  qui  occupait  la 
Nouvelle-Zélande  avant  l'arrivée  des  Anglais.  On  ne 
les  croit  pas  autochtones  et  certains  auteurs  se 
querellent  pour  les  faire  venir  de  Savaï  dans  le 
Samoa,  suivant  les  uns,  et  de  Tonga  —  dont  ils  se 
rapprochent  beaucoup  par  leur  langue  —  suivant  les 
autres. 

Quoi  qu'il  en  soit,  depuis  le  temps  lointain  où  Te 
Kupe,  l'ancêtre  maori,  aborda  dans  l'île  Aotea-Roa,la 
plus  septentrionale  de  Nouvelle-Zélande,  les  Maoris 
qui  longtemps  furent  une  des  plus  puissantes  nations 
de  race  polynésienne,  ont  grandement  déchu;  leur 
nombre  a  baissé  de  cent  mille  à  quarante  mille 
individus. 

Enfin  et  surtout  leur  patrie  est  devenue  colonie 
anglaise  :  pied  à  pied,  ils  ont  dû  malgré  leur  résis- 


—  102  = 

tance  farouche,  reculer  devant  l'européen  envahisseur; 
et  aujourd'hui  leurs  conquérants  les  ont  confinés  dans 
l'île  du  Nord,  où  ils  occupent  un  territoire  spécial  de 
25000  km.  q.,  dit  «  King's  country  », 

Là  leur  dernière  énergie  se  consume  à  conserver 
intactes  leur  langue,  leurs  mœurs,  et  par-delà  le 
protestantisme  superficiel  qui  n'a  pu  qu'effleurer  leur 
âme  païenne,  toutes  les  belles  légendes  de  mytho- 
logie fabuleuse  qui  inspirent  encore  les  orateurs  et 
poètes  indigènes. 

C'est  donc  seulement  depuis  la  pénétration  anglaise 
en  Nouvelle-Zélande,  que  nous  a  été  révélée  par  des 
auteurs  anglais,  la  langue  Maorie. 

Parmi  ceux  qui  l'ont  étudiée,  il  y  a  quatre  ou  cinq 
noms  qui  sont  à  retenir  :  E.  Tregear,  W.  Colenso, 
W.-L.  Williams,  Maunsell,  Lee  etKendal. 

Edouard  Tregear,  est  de  beaucoup,  le  plus  impor- 
tant; l'auteur  du  Maori- Polynesian  Comparative 
Dictionary  s'est  fait  un  nom  sans  rival  en  matière 
de  linguistique  polynésienne.  C'est  le  plus  grand 
«  Maorisant  »  moderne  et  aussi  le  fondateur  d'une 
compagnie  savante,  sorte  d'Académie  Polynésienne, 
la  «  Polynesian  Society  »,  sur  laquelle  je  reviendrai 
plus  lard. 

Mais  comme  il  n'a  pas  composé  de  grammaire,  il 
faut  pour  s'enseigner  les  éléments  de  la  langue  re- 
courir aux  ouvrages  de  Colenso,  Maunsell  ou  W.-L. 
Williams. 

J'ai  préféré  ce  dernier  dont  les  Leçons  de  Maori, 
précises  et  claires,  ont  l'avantage  d'être  courtes. 

C'est  donc  cette  grammaire,  pour  la  première  fois 


—   103  — 

traduite  en  français,  que  je  mets  ici  même  sous  les 
yeux  du  lecteur. 

Sans  être  parfaite,  elle  est  relativement  pratique; 
niais  comme  à  toutes  celles  que  j'ai  pu  consulter 
jusqu'à  ce  jour,  on  peut  lui  reprocher  à  juste  titre  de 
traiter  uniquement  la  théorie  grammaticale,  sans 
l'appuyer  par  ces  textes  si  précieux,  qui  sont  un 
complément  indispensable,  plus  importants  peut 
être  que  la  grammaire,  au  sens  étroit  où  Ton  ent(înd 
vulgairement  ce  mot. 

Il  est  vrai  que  depuis  vingt  ans  nous  avons  en 
France  des  idées  toutes  différentes  de  celles  qui  ont 
longtemps  prévalu  sur  la  façon  d'apprendre  les 
langues.  Le  directeur  de  celte  Revue  en  particulier, 
J.  Vinson,  a  fait  beaucou[)  pour  réformer  des  métho- 
des stériles  et  surannées  que  prônait  encore  l'ensei- 
gnement officiel. 

Les  grammaires  devront  être  conçues  désormais  à 
la  base  des  nouvelles  idées  que  les  linguistes  réfor- 
mateurs ont  fait  triompher. 

Et  c'est  dans  ce  sens  qu'à  l'exposé  de  \V.-L. 
Williams,  j'ajouterai  des  commentaires  qui  seront 
autant  de  corrections,  et  quelques  textes  qui  font 
grandement  défaut. 


—   104  — 

PREMIÈRE    PARTIE 

La  lecture 

1. —  L'alphabet  se  compose  des  quinze  lettres  qui 
suivent  : 

Son 

aller 
amener 


Vite 


rouME 

JNOM 

A  a 

a 

E  e 

e 

H  h 

ha 

I  i 

i 

K  k 

ka 

M  m 

ma 

N   n 

na 

Ng  ng 

nga 

0   o 

0 

Pp 

pa 

R  r 

ra 

ï  t 

ta 

U  u 

ou 

W  w 

wa 

Wh    AVh 

Avha 

comme   l  anglais   sin^'ing 
obéir 


2.  Prononciation . 

Les  lettres  qui  n'ont  pas  leur  [)rononciation  in- 
diquée dans  la  table  ci-dessus  j)euvent  être  pro- 
noncées comme  en  anglais  :  toutefois,  t  et  /■  sont 
émis  plus  au  fond  du  gosier  en  maori  qu'en  anglais  ; 
et  wh ,  n'est  pas^  comme  en  écriture,  un  composé 
de  U'  -|-  //,  mais  une  simple  consonne,  résultat  de 
l'air  ciiassé  rapidement  entre  les  lèvres,  le  même 
son  en  un  mot  (|ue  celui  (ju'on  émet  en  soufflant  avec 
la  bouche. 


—  106  — 

A''^,  que  le  Maori  emploie  pour  commencer  une 
syllabe,  paraît  défectueux  à  certaines  gens  ;  mais  la 
diflîculté  est  bientôt  vaincue  si  Ton  fait  attention  que 
la  disposition  des  organes  de  la  parole  est  la  même 
pour  cette  lettre  que  pour  g  et  /»•,  lettres  avec  les- 
quelles son  rapport  est  le  même,  que  celui  de  m  à 
b  et/;  ou  de  //  avec  d  et  t. 

Prononcez  les  trois  lettres  successivement,  avec  la 
voyelle  maorie  a  ainsi  qu'il  suit  : 

Ka  ,  )/a,  nga,  et  répétez  jusqu'à  ce  que  vous  soyez 
venu  à  bout  de  la  lettre. 

Chaque  voyelle  n'a  qu'un  seul  son,  mais  elles 
peuvent  toutes  varier  en  longueur  selon  les  mots. 

(}uand  dans  un  même  mot  se  présentent  deux 
voyelles,  la  première  est  ordinairement  accentuée 
plus  fortement  que  l'autre  dans  la  prononciation. 

Doubler  une  voyelle  équivaut  simplement  à 
l'allonger. 

Les  consonnes  sont  toujours  isolées  et  chaque 
syllabe  finit  sur  une  voyelle. 

RemaVque. 

Prenez  bien  soin  de  toujours  donner  à  chaque 
voyelle  son  propre  son,  et  d'éviter  ainsi  la  confusion 
entre  ae  et  ai,  comme  pour  les  mots  wcuvae  et  wai  ; 
entre  no  et  au,  comme  pour  les  mots  tao  et  tau  ; 
entre  on  et  ii,  comme  pour  les  mots  koiifon  et  mutu. 

II    Noms  et  Pronoms  Personnels 

4.  Les  noms  ne  présentent  ni  inflexions  ni  dis- 
tinctions de  genre  qui  influent  sur  la  construction 
grammaticale. 


-  106  = 

Observation  :  Le  pronom  interrogatif  ordinaire, 
aha,  qui  ?  que  ?  est  traité  comme  un  nom  commun. 

Le  nombre  d'un  nom  commun  est  généralement 
indiqué  par  celui  du  déterminatif  qui  l'accompagne. 

(Voir  §  §  17,  18).  Les  mots  suivants  ont  une 
voyelle  qui  s'allonge  au  pluriel. 


SINGULIER 

Mdtua,  parent- 

Tûpuna,  ancêtre. 

Tdngata,  homme. 

Wdhine,  femme. 

Tuàhine,  sœur  (d'un  hom- 
me). 

Tuàkana,  frère  aîné. 

Tëina^  frère  cadet. 


PLURIEL 

Màtua,  parents. 
Tûpuna,  ancêtres. 
Tûngata,  hommes. 
Wàhine,  femmes. 
Tuàhine,  sœurs 

Tuàkana,  frères  aînés. 
Tèina,  frères  cadets. 


Le  mot  tamaiti,  enfant,  ne  s'emploie  qu'au  singu- 
lier ;  au  pluriel  on  emploie  toujours  tainariki. 


6.  Les  pronoms  personnels  ont  trois  nombres,  sin- 
gulier, duel  et  pluriel,  comme  le  montre  la  table  qui 
suit  : 

TABLE     DES    PRONOMS     PERSONNELS 


PERSONNES 

SINGULIER 

DUEL 

PLURIEL 

l^e  Personne 

Ahau  ou  au 

M  au  a 

Matou 

l^e  renferm'  la  2® 

Taua 

Tatou 

2^  Personne 

Koe 

Ko  rua 

Koutou 

3'  Personne 

la 

Raua 

Ratou 

Interrogative 

M^ai  f 

Wai   ma? 

Wai  ma  ? 

Indéfinie 

Mea 

Mea  ma 

Mea  ma 

—  107  — 

Les  pronoms  (duel  et  pluriel)  de  la  première  per- 
sonne taua  et  tatou,  renferment  la  personne  à  qui 
l'on  parle,  tandis  que  maua  et  matou  Texcluent. 

Les  pronoms  personnels  ne  s'emploient  pas  en 
parlant  des  choses  inanimées. 

7.  Les  noms  de  lieu  sont  traités  comme  des  noms 
propres. 

Hea,  quel  endroit. 

Ko,  cet  endroit  (à  quelque  distance)  là-bas. 
Konei,  cet  endroit-ci  (près  de  celui  qui  parle). 
Kona,  cet  endroit  (près  de  la  personne  à   qui 

l'on  parle). 
Re/'ra,  cet  endroit  (déjà  mentionné). 
Runga,  le  sommet. 
Rare,  le  fond. 
Roto,  rintérieur. 
Waho,  l'extérieur. 

Tawahi,  l'autre  rive  (d'un  cours  d'eau,  d'une   vallée, 

etc.). 
Tua.,    l'autre  versant  (d'une   colline,   d'une   maison, 

etc.). 
Tdtahi^  le  bord  de  la  mer  (par  opposition  aux  endroits 

de  l'intérieur). 
Taliaki,  le  rivage  (par  opposition  à  Teau). 
Uta^  le  terrain  sec  (par  opposition  à  l'eau). 
—  ,  endroits  de  rintérieur(par  opposition  ktatahi). 
Mua,  le  front  ou  partie  avancée. 
Mûri,  le  derrière  ou  partie  postérieure. 
Waenganui,  le  milieu. 


--  108  — 


On  emploie  le  préfixe  nominal  a  avec  les  noms 
de  personnes,  les  pronoms  wai  et  mea  et  avec  les 
noms  de  mois  \ 

1.  Quand  ils  sont  sujets  dans  une  phrase. 

2.  Quand  ils  suivent  une  des  prépositions  ki,  i, 
hei,  kei  ;  mais  noii  lorsqu'ils  suivent  ko,  ou  l'une 
des  prépositions  r/,  o,  ma,  mo,  na,  no,  e,  me  (voir 
§§  15,  16). 

On  emploie  aussi  le  préfixe  nominal,  avec  les  pro- 
noms personnels  (excepté  ahaii,  bien  que  au  suive 
la  règle)  seulement  lorsqu'ils  suivent  ki,  hi,  hei, 
kei  ,  ou  lorsqu'ils  sont  répétés  par  explication  ; 
mais  pas  d'ordinaire  quand  ils  sont  sujets  dans  une 
phrase. 

On  emploie  enfin  le  préfixe  nominal  avec  des 
noms  de  places  et  les  noms  de  lieu  (§  7),  mais  seule- 
ment lorsf|u'ils  sont  sujets  dans  une  phrase  ou  lors- 
qu'ils sont  répétés  en  manière  d'explication. 

EXEMPLES 

Ka  ara  a  Hoani,  Hoani  est  beau. 

Kei  a  Tamati  to  hoiJio^  C'est  Tamati  qui  a  voire  che- 
val. 
Ma  Pita  teuei,  Ceci  est  pour  Pita. 
He  laone  a  Akarana,  Auckland  est  une  ville. 
Homai  hi  a  au,  Donnez-le  moi. 
Ka  wera  a  walio,  L'extérieur  est  brûlé. 

1.   Les   noms  des  jours  de  la    semaine  sont  Irailés  comme    noms  t;om- 
niuns  ;  mais  ils  prennent  toujours  l'article  défini  ic. 


—  109  — 


9.  Ma.  —  Quand  on  parle  d'une  personne  en  même 
temps   que   d'autres    qu'il    n'est  pas    nécessaire    de 
spécifier,  mettez  ma  après  le  nom,  comme  il  suit  : 
Kahutia  ma,  Kahulia  et  ses  compagnons. 

Quand  on  s'adresse  à  plus  d'une  personne,  on 
peut  employer  différentes  formes  de  discours,  ainsi  : 
E  hoa  ma  !  Amis  ! 

Avec  les  pronoms  <>K'ai  ?  et  mea  (§6],  il  se  forme  un 
pluriel. 

A  ivai  mea  ?  Quels  ?  (pi.) 
A  mea  mea  ?  Telles  et  telles  personnes. 


Les  pronoms  personnels  singuliers  ahaii,  je,  koe, 
toi,  deviennent  respectivement  ku,  a,  lia,  lorsqu'ils 
suivent  les  prépositions  possessives  «,  o,  de  lia,  no., 
appartenant  à  ; 

ma,  mo,  pour  ; 

et  les  composés  ta  et  to  (construits  avec  l'article 
te  et  les  prépositions  a  et  o). 

Par  suite  de  cette  irrégularité  la  préposition  et  le 
pronom,  pour  chaque  cas,  sont  ordinairement  écrits 
en  un  seul  mot. 

PREMIÈRE    PERSONNE 

Ahau,  je,  moi. 

Aku  ou  okii,  de  moi. 

Nakii  ou.  nokii,  m'appartenant,  à  moi. 

Maku  ou  moku.,  pour  moi. 

Taku  ou  toku.,  mien  (m.  à  m.,  le...  de  moij. 


—  110  — 

DEUXIÈME     PERSONNE 

Koe,  toi. 

Au  ou  ou,  de  toi. 

Nau  ou  nou,  l'appartenant,  à  toi. 

Mau  ou  mou^  pour  toi. 

Tau  ou  ton,  tien. 

/rt,  il  ou  elle. 

TROISIÈME    PERSONNE 

Ana  ou  Oria,  de  lui. 

Nana  ou  noiiciy  lui  appartenant,  à  lui. 

Mana  ou  mona,  pour  lui. 

7Vïw«  ou  ^07?«,  sien. 

Quand  on  énumère  un  certain  nombre,  une 
quantité  de  personnes  ou  de  choses,  la  particule  ou 
préposition  qu'on  emploie  avec  la  première  doit  être 
répétée  pour  chacune  de  celles  qui  suivent  : 

EXEMPLE    : 

Nga  rangatira  o  Rotorua,  o  Rotoiti,  o  Tara^vera. 
Les  chefs  de  Rotorua,  Rotoiti  et  Tarawere. 


Quand  on  parle  collectivement  d'un  certain  nombre 
de  personnes,  il  est  bon  d'employer  les  pronoms  au 
duel  ou  pluriel  suivi  du  ou  des  noms  des  personnes 
additionnelles,  en  accompagnant  chaque  nom  de  Ko  : 
mais  si  les  noms  sont  précédés  par  une  préposition, 
la  préposition  ne  se  répète  pas. 


—  111  — 

Quand  les  noms  sont  énumérés  à  la  troisième  per- 
sonne, l'un  des  noms  doit  précéder  le  pronom  à 
moins  que  l'un  d'entre  eux  n'ait  été  antérieurement 
mentionné.' 

EXEMPLES  : 

Mana  ko  Rend,  Hemi  et  moi. 

Koutou  ko  Hemi,  ko  Hohepa^  vous,  Hemi  et  Hohepa. 

A  Hemi  raua  ko  Hoani,  Hemi  et  Hoani. 

A7  a    Hoani   ralou  ko   Hemi    ma,    à    Hoani,    Hemi, 

etc.. 
Ko  t,vai  ma  era  ?  Quels  sont  ceux-là  ? 
Ko  Hemi  ratou  ko  Pita,  ko  Hohepa,   Hemi,  Pita  et 

Hohepa. 

* 

Quand  des  noms  sont  apposés,  c'est-à-dire  quand 
on  ajoute  un  second  nom  pour  expliquer  le  premier, 
répétez  la  préposition,  etc.,  du  premier  nom  au 
second,  et  mettez  d'abord  le  nom  le  pluscompréhensif, 
ensuite  le  plus  restreint  comme  acception. 

EXEMPLE    : 

Ma  tona   tupuna   ma  Paora,    pour   son  grand' père 

Paora. 

Dans  cet  exemple,  tona  tupuna  est  un  terme  plus 
général  c^uq paora,  et  c'est  pourquoi,  régulièrement, 
il  est  mis  le  premier  ;  la  préposition  ma  est  répétée 
avec  le  nom  moins  général  Paora. 

*  * 
Noms  communs  employés  comme  adjectifs 
Tous  les   noms    communs  peuvent  être   employés 
comme  adjectifs. 


112 


EXEMPLES 


He  whare  papa,  une  maison  de  pension. 
He  Kakahu  riiiena,  un  vêtement  de  toile. 

*  * 
CHAPITRE  III 
Prépositions 
Prépositions  simples 
A,  de,  appartenant  à  ; 
à,  (temps  futur); 
a  Jiea?  en  quel  temps  ? 
jusqu'à. 
0,  de,  appartenant  à,  passif  de  a  ; 

de   (lieu   ou    temps),    caractérisant    le   point  de 
départ. 
Na,  de,  appartenant  à  ; 

par^  au  moyen  de,  à  cause  de; 
en  guise  de. 
No,  de.  appartenant  à,  passif  de  na  ; 

de  (lieu)   mais  non  après  des  verbes  de  mouve- 
ment ; 
de,  à,  temps  passé. 
Ma,  pour  ; 

par,  de  cette  manière  ; 
par,  a  travers,  en  guise  de  (direction). 
MOj  pour,  passif  de  ma; 

à,  sur,  en  (temps  futur)  ; 
sur,  vers,  au  sujet  de. 
Ra,  par  le  moyen  de,  à  travers  (grâce  à). 


—  lia  — 

£,  [)ar(se  dit  (rmiag-ent),  seulement  après  les  verbes 

passifs. 
/,  pai*,   avec,   se  dit  d'un  agcut   ou  d'uri  instrument, 

après    les   participes,    adjectirs,    et    verbes 

neutres  ; 
pour  cause  de,  en  raison  de; 
de,  après  les  verbes  de  mouvement  ; 
avec,  en  possession  de,  ou  possédant  ; 
généralement  au  passé  ; 
avec,  en  compagnie  de  ; 
à  (temps),  généralement  passé  ; 
en  comparaison  de  ; 
au-delà,  hors  de  ; 
à,   dans,  sur  (prép.    de  lieu \   ordinairement    au 

passé  ; 
au  moment  de,  au  moment  oii  ; 
au  lieu  de,    sur   le  fait  de  (passé),  gouverne  les 

adjectifs  ou  les  verbes; 
—  simple  transitif,  sans  équivalent  en  français. 
Kei^  à,  sur  (au  présent),  ne  s'emploie    pas  après  les 

verbes  ; 
avec,  en  possession  de  (futur)  ; 
au  lieu  de.   sur  le   fait  de,  avec  les   adjectifs  ou 

verbes  au  présent. 
Hei,  à,  sur   (lieu   et  temps),  au   futur  :   ne  s'emploie 

pas  après  des  verbes  ; 
avec,  en  possession  de,  au  futur  ; 
pour,  propre  à,  destiné  à,  sans  aucini  qualificatif  : 

s'emploie   avec    les   noms   ou    les  verbes  à 

l'infinitif. 
A7,  à  (place  ou  action),  dans,  vers  ; 


—  114  — 

à  ou  dans,  endroit  où  une  action  est  accomplie 
(après  les  verbes)  ; 

à,  après  arriver,  etc.; 

avec,  par,  à  Taide  de  (instrument); 

contre  ; 

conformément  à,  touchant; 

pour,  désirant,  en  quête  de  ; 

—  après  des  verbes  sans  équivalents  français. 
Me,  avec,  en  plus  de,  et  —  aussi. 

/fo,  à,  allant  à^  avec  des  noms  de  lieu  et  des  verbes 
actifs  à  Tinfinitif  ; 

à,  dans,  —  temps  futur,  —  caractérisant  l'inten- 
tion. 
7b,  jusqu'à  ; 
Whakci,  vers,  à  la  rencontre  de. 

Prépositions  complexes 

Ce  sont  plutôt  des  façons  irrégulières  d'employer 
quelques  noms  énumérés  au  paragraphe  7. 


SÉRIE    I 


Ki  rang  a  kl         \ 
I  runga  i  1 


,  .  ^  sur,  au  sommet  de,  en  haut  de; 
Kei  runga  kei 


Hei  runga  hei 

No  runga  no^  d'en  haut,  c'est-à-dire  situé  au  sommet 

de  ; 
/  runga  i,   d'en  haut,  —  signification  spéciale  de  — 

mouvement  de  ; 
Mo  runga  nio,  pour  le  sommet  de; 


—  115  — 


Ma  riiDga  nui,  par-dessus,  par  le  faîte  de  (direction); 
Ko  riuiga  ko,  au  haut  de. 


SKRIE    II 


Ki  ruiiga  i 


I  rmigd  I  \  au-dessus,  par-dessus  ; 

Kei  raiiga  i 
Hei  runga  i 

No  riinga  i,  d'au-dessus,   c'est-à-dire  faisant  partie 

de  celte  hauteur  ; 
/  ningd  /,  d'au-dessus,  impliquant  niouvetnent  de  ; 
Mo    ruiiga    i,  pour  au-dessus,    c'est-à-dire   être   au- 
dessus  de  ; 
Ma  riinga  /,  par-dessus  (direction)  ; 
'    Ko  runga  /,  aller  au-dessus,  par-dessus. 

Dans  la  seconde  de  ces  séries,  o  peut  être  substi- 
tué à  ?',  pour  régulariser  la  construction. 

Les  prépositions  simples  peuvent  être  combinées 
de  la  même  façon  :  avec  raro,  pour  avoir  au-dessous, 
sous,  en  bas  ; 

avec  rofo,  pour  avoir  dans,  à  l'intérieur,  en  dedans; 
avec  ivaho,  pour  avoir  sans,  à  l'extérieur,  du  dehors, 

etc. 
M?ia  et  /iiuri  ne  s'emploient  que  dans  la  série  2. 

IV.  —  Déterminatifs 

Les  déterminatifs  sont  des  mots  qui  indiquent 
l'étendue  de  la  signification  d'un  nom,  et  où  elle  se 
limite. 

Cette  appellation  comprend  donc  ce  qu'on  désigne 
ordinairement  sous  le  vocable  de   article,  pronoms 


—  UG  — 

possessifs,  cas   possessifs   des  noius   et  les  pfonoms 
déinonstralifs. 

Tous,  à  part  une  exception,  ont  deux  nombres, 
singulier  et  pluriel  ;  et  tous  se  mettent  devant  les 
noms  auxquels  ils  se  rapportent. 

Un  nom  commun  est  toujours  précédé  d'un  déter- 
mi  natif. 

Table  des  Déterminatifs 


SIXCULIEH 


He,  un  OH  une  ; 

Te,  le,  la; 

Tetalii,  un; 

Tcnei,  ce,  cette  ; 

Tena,  ce  (près  de  la  personne 
à  laquelle  on  parle)  ; 

Teva,  ce  (à  une  certaine  dis- 
tance), l'autre  (opposé  à  ce- 
lui ou  celui-là)  ; 

T(ina^  celui  là  ; 

la,  celui-là; 

Tehea?  quel  ? 

Taku,  mon  ; 

Tohit,  mon  ; 

T(tu,  ton  ; 

Tau,  ton  ; 

Tana,  son  om  sa  ; 

Tonn,  son  ou  sa  ; 

Ta  taua,  nôtre  ; 

To  taua,  nôtre  ; 

Ta  tatou,  nôtre  ; 

To  tatou,  nôtre. 


He; 

Nga,  les  ; 

Etalii,  des  ; 

Enei,  ces,  cette  ; 

Ena,  ces  (près  de  la  personne 

à  laquelle  on  parle)  ; 
Era,     ces    (à     distance),     les 

autres  ; 

Auu,  ceux-là  (pas  de  pluriel)  ; 

Eltea  ?  quels  ? 
Aku,  mes  ; 
Oku,  mes  : 
Au,  tes  ; 
Ou,  tes  ; 
Ana,  leurs  ; 
Ona,  leurs  ; 
A  taua,  nos  ; 
O  taua,  nos; 
A  tatou,  nos  ; 
O  tatou,   nos. 


Et  ainsi  de  suite  avec  tous  les  autres  pronoms 
{personnels,  avec  les  noms  de  personnes,  de  places, 
de  lieux,  avec  tous  les  noms  communs  lorsqu'ils 
suivent  un  déterminatif,  excepté  Jie,  en  préfixant  ta 
ou  lo  pour  le  singulier,  a  ou  o  pour  le  pluriel.) 


—  117  — 

KXliMPLKS  : 

Toku  ivhrire,  ma  maison  ; 
Enei  hoîho,  ces  chevaux  ; 
He  K\'h(ire,  une  maison,  ou  des  maisons; 
T((  Hcnii  puhapiikcf,   le  livre  crUenii; 
Ta  lenei  laitgdld  kainga ,  la  demeure  de  ccl  homme. 
L'article    possessif    lo    est    souvent    condensé    en 
article  el  préposition. 

EXEMl'Lli  : 

Te  wliare  o  Ilenii  é(|uivaut  à   To  llenii  Kvkdre. 


Parliciihirilés  de  he  el  te, 

cC\,  N'employez  jamais  he  après  une  piéposition, 
mais  substituez- lui  telalii. 

EXEMPLES  : 

Ile  laii^dld,   un   homme; 

Ki  leldlii  Idiigdld,  à  un  homme. 

b)  Quandon  emploie  unnomcommun  pour  (h}si«>ner 
une  catégorie,  comme  le  pluriel  simple  est  souvent 
usité  en  anglais,  mettez  te  au  singulier,  et  non  lie. 

EXEMPLES    : 

Te  kdhd  o  le  hoilio,  la  force  du  cheval  ; 
Te  hoi/io,    le    cheval,    c'est-à-dire     les    chevaux    en 
général. 


Les  prépositions  possessives  (|ui  suivent  des  déter- 
minai! fs: 


—  118  — 

a)  Quand  une  possessive  suit/^e,  employez  toujours 
Tune  ou  l'autre  des  prépositions  na  ou  no,  jamais  a 

ou  o. 

EXEMPLES     : 

He  pukdpuka  /iaku,   un  de   mes  livres  ou    un  livre 

qui  m'appartient  ; 
He  ivhare  no  tenei  tangala\  une  maison  appartenant 

à  cet  homme  ou  de  cet  homme. 
h)  Quand  une  possessive  ne  suit  aucun  autre  déter- 
minalif  que  Ae^  employez  toujours  Tune  des  préposi- 
tions (i  ou  o,  jamais  na  ou  no. 

EXEMPLES    : 

Te  pukapuha  a   Plta,  le  livre  de  Pita; 

Tenei  taha  ohii,  ce  penchant  qui  m'est  propre  ; 

Taiia  whare  o  Hemi.,  cette  maison  d'Hemi. 


Les  démonstratifs  tenei,  tena,  leva  sont  composés 
de  l'article  te  et  des  adverbes  nei,  na,  va.  Tenei  signi- 
fie que  la  chose  dont  on  parle  est  près  de  celui  qui 
parle,  ou  en  relation  avec  lui;  tena^  qu'elle  est  proche 
ou  rattachée  de  quelque  manière  à  la  personne  à  la- 
quelleon  parle;  /e/r/marque  qu'elleestéloignée,  etnon 
rattachée  ni  à  celui  qui  parle,  nia  son  interlocuteur: 
taita  indique  quelle  a  été  déjà  mentionnée  avant. 

la  est  fréquemment  employé  comme  distributif 
dans  le  sens  de  chacun^  en  le  répétant  avec  le  nom. 

Tenei,  lena,  et  tcra  peuvent  s'employer  aussi  de  la 
môme  façon. 


119 


EXEMPLES    : 

la  Inngata  io  l(ing((la,  chaque  homiiio  ; 
Tenei    ropii     Icnei  lopii  o   ralou,   cliacuue  de    leurs 
sociétés. 

On  emploie  souvent  /e/y^  avec  un  sens  emphatique 
pour  le  pronom  personnel  de  la  Iroisième  personne 
du  singulier. 

Tenei,  tend  et  leva  sont  souvent  seuls,  le  nom 
restant  sous-entendu,  maison  n'emploie  jamais  land 
de  cette  façon. 

EXEMPLES    : 

N((lcu  lenei,  nau  Icna,  ceci  est  à  moi,  cela  est  à  vous. 
He  rangdli.rd  Idiid  tdngdla,  cet  homme  est  un  chef. 


La  différence  entre  d  et  o  cjui  s'applicjue  aussi  à 
nd,  no,  nid,  nw,  Id,  lo,  est  la  suivante  : 

d  s'emploie  lorsqu'on  parle  d'actions  transitives, 
des  instruments,  des  travaux  accomplis  ou  entrepris, 
de  la  nourriture,  des  enfants,  des  esclaves,  etc 

0  s'emploie  lorsqu'il  est  question  des  parties  d'un 
tout,  de  noms,  de  qualités,  de  particularités,  d(!  senti 
ments,  de  maisons,  de  pays,  d'habitants,  d'eau  |)o- 
table,  de  médecine,  de  vêtements,  de  parents,  de 
supérieurs;  on  l'emploie  aussi  pour  les  noms  dérivés 
des  adjectifs^  les  participes,  les  verbes  intransitifs 
dont  on  peut  se  servir  avec  le  sens  du  passif. 

EXEMPLES   : 

Tohii  pàpâ,  mon  père; 


—  12U  — 

Tan  a  tamaili,  son  enfant; 

Tona  rangatira,  son  maître; 

He  poiionga  ncnia,  un  de  ses  domestiques; 

Tona  kakahu,  son  vêtement; 

Ou  waeivae^  vos  pieds  ; 

He  kai  maii,  de  la  nourriture  pour  vous; 

Tetahi  wai  moka,  de  l'eau  pour  moi; 

Ton  ingoa,  votre  nom  ; 

Ton    ingoa   mau,   mon  nom    pour  vous  (c'est-à-dire 

mon  nom  que  je  vous  ai  donné)  ; 
Taku   patunga    ia    koe,  la    correction   que   je   vous 

donne  ; 
Toku   paUinga   e   koe,    la   correction   que    vous    me 

donnez; 
Observation  :  /o,  ton,   pluriel  o,  ressemble  à  tau  et 

non  à  tou . 

FÉLICIEN  Soulier, 

Elève  à  l'Ecole  des  Langues  Orientales. 

(A  suivre.) 


1 


LlSTi:  ÉTYMOLOGIOUE 


PRINCIPAUX    MEMBRES    DE     L.V    FAMILLE     DU    LATIN    OPUS 


Lat.    Ops,  acquisition,  accroissement,  richesse; 
Opuleiitus,  riche; 
Opus,  ce  qui  enrichit,  ce  dont  on  a  besoin,  ce 

qui  est  désiré   (cf.  sansc.  ipsi-tcnn,   objet  de 

désir)  ; 
Oplo,  désirer; 
Oper-a,  ce  dont  on  a   besoin,   œuvre  utile  ;  ce 

qu'on  doit  produire,  faire,  fabriquer. 
Gr,     ôcpéXXw,  accroître; 

ooEÀjjia,  accroissement; 
oçeXoc,  utilité,  profit; 
or^éÀXto,  être  utile; 

O'^clXo), 


,  .        ,  devoir 


p.    PliGNAUD. 


NÉCROLOGIE 


C'est  décidément  une  triste  chose  que  de  vieillir; 
heureux  encore  ceux  qui  laissent  après  eux  des  af- 
fections qui  garderont  leur  mémoire  et  des  enfants 
qui  pourront  continuer  leur  œuvre!  Mais,  d'année 
en  année,  on  sent  de  plus  en  plus  lourd  le  poids  de 
Tâge,  on  se  trouve  comme  isolé  dans  un  monde  in- 
connu, on  ne  se  voit  plus  entouré  que  de  figures  nou- 
velles. Depuis  plus  de  dix  ans  déjà,  j'ai  vu  disparaî- 
tre, —  en  dehors  du  cercle  de  la  famille,  —  un  trop 
grand  nombre  d'amis,  de  compagnons  de  luttes  et  de 
travaux!  Il  y  a  quelques  semaines,  j'apprenais,  avec 
un  profond  chagrin,  la  mort  d'une  femme  aimable, 
jadis  adulée  et  heureuse  au  possible,  dont  la  maison 
me  fut  longtemps  hospitalière  et  (ju'une  catastrophe 
soudaine  avait  réduite  à  la  ruine,  à  l'infortune  et  à 
la  douleur.  Et  voici  (|ue  la  mort  inintelligente  vient 
d'enlever  un  de  mes  plus  dignes  amis,  de  mes  colla- 
borateurs les  plus  fidèles,  le  Rév.  \V.  Webster 
dont  les  travaux  sur  les  Pyrénées  occidentales  sont 
bien  connus. 

Wentworth  Webster,  né  le  16  juin  1828  à  Uxbridge, 
Middlesex  (Angleterre',  fut  élevé  dans  une  école  pri- 


—  123  — 

vée  à  Brighton.  En  1849,  il  entra  au  Lincoln-CoUege 
à  Oxford,  d'oii  il  sortit  en  1852  avec  le  grade  de 
B.  A.  (M.  A.  en  1856).  Il  fil  alors  partie  d'une  Mission 
anglicane  et,  reçu  diacre  en  1854,  il  dut  partir  quatre 
ans  plus  tard  pour  Buenos-Aires,  d'où  il  revint  en  Eu- 
rope et  alla  à  Bagnères-de-Bigorre.  En  1861,  il  devint 
prêtre  et  il  voyagea  en  Egypte  de  1862  à  1863.  Pendant 
sa  jeunesse,  il  avait  parcouru  l'Ecosse,  l'Allemagne 
et  la  Suisse.  Peu  d'années  avant  la  guerre  de  1870,  il 
était  venu  à  Biarritz;  il  alla  s'établir,  comme  chape- 
lain de  la  colonie  anglicane,  à  Saint-Jean-de-Luz,  où 
il  demeura  jusqu'en  1882.  Des  raisons  de  santé 
l'obligèrent  à  quitter  le  bord  de  la  mer  et  à  se  retirer 
à  Sare,  aux  pieds  de  la  Rhune,  où  il  vient  de  mou- 
rir le  2  avril  1907.  Il  laisse  un  fils  professeur  à 
Oxford,  une  fille  professeur  à  Cambridge,  et  deux 
autres  enfants. 

Il  a  donné  de  nombreux  articles  à  diverses  revues 
et  notamment,  en  France,  au  Bulletin  de  la  Société 
liainoiid  de  Bagnères-de-Bigorre  et  au  Bulletin  de  la 
Société  des  Sciences  et  Arts  de  Bayonne;en  Angleterre, 
à  V Academy^  à  YAthenœnni,  à  V Anglican  Church  Ma- 
gazine, etc.  Son  dernier  travail  est  un  article  sur  les 
Basques  dans  la  nouvelle  édition  de  VEncyclopœdia 
Britannica  ;  je  compte  reproduire  cet  article  dans  la 
présente  Bévue.  Il  a  publié  en  outre  les  ouvrages 
suivants  : 

1.  Basque  legends jCoWeciaà  cliiefly  in  tlie  Labourd. 
Londres,  1877,  in-8%  xvj-233  p.  —  2"  édition,  aug- 
mentée d'un  appendice  sur  la  poésie  basque,  1879, 
in-8°,  xvj-276  p. 


—  i-^1  — 

2.  Spain.  Londres,  1882,  pet.  in-S%  xvj-240  p., 
2  cartes  et  fig.  (dans  la  collection  Foreigii  Coiintries 
and  Brilish  Colonies). 

3.  Grammaire  Canlabriqitc,  basque,  par  Pierre 
d'Urle  [1112]...  Bagnères-dc-Bigorre,  1900,  gr.  in-8", 
4-viij-5  à  568  p. 

Tirage    à  part   du   Bulle  lin  de  la  Société  Bamond. 
Un  erratum  a  été  publié  dans  la  Bévue  de  Linguis- 
tique, t.  XXXIV,  1901,  p.  205-216  et  294-300. 

4.  Les  loisirs  d'un  étranger  au  pays  basque.  Cha- 
lon-sur-Saône, 1901,  in-8",  xxiv-359  p. 

5.  Gleanings  in  cJiurch  /??5/o/'^,chiefly  in  Spain  and 
France.  Londres,  1903,  pet.  in-8°,  356  p. 

W.  Webster  était,  depuis  de  longues  années,  mem- 
bre correspondant  de  l'Académie  royale  d'histoire  de 
Madrid  et  depuis  deux  ans  membre  de  la  Hispanic 
Society  of  America. 

Ce  qui  prouve  sa  haute  valeur,  c'est  le  respect  et 
l'estime  qui  Tont  toujours  entouré  dans  le  pays  bas- 
que. Parmi  les  journaux  du  |)ays  qui  ont  annoncé  sa 
mort,  je  signalerai  particulièrement  le  journal  basque 
Eskualdun  ona,  le  plus  clérical  et  le  plus  réaction- 
naire de  la  région,  qui  en  parle  comme  d'un  ami  des 
Basques  et  loue  sa  bonté  et  sa  charité.  Bonté,  charité, 
modestie,  c'étaient  bien  là  les  traits  dominants  de 
son  caractère,  avec  une  foi  sincère,  nn  libéralisme 
éclairé, un  large  esprit  de  toléran(;e.  Époux  et  père  de 
famille  modèle,  ami  sur  et  dévoué,  savant  prudent  et 

réservé...  cesontdeces  [)ertes  dont  rien  ne  console  ! 

J.  V. 


BfBLIOGRAPHlE 


A.  Meillet.  Lélat  actuel  des  éludes  de  limjuistif/ue 
générale,  leçon  d'ouverture  du  cours  de  Grammaire 
comparée  au  Collège  de  France,  lue  le  mardi  13  février 
1906  (s.  I.  aid.),  in-8°  carré,  30  p. 

C'est  toujours  un  événement  important  que  l'ouver- 
ture d'un  Cours  au  Collège  de  France,  mais  l'événe- 
ment ofïre  un  intérêt  plus  grand  encore  quand  il  s'agit 
d'un  professeur  nouveau  succédant  à  un  maître  comme 
M.  Michel  Bréal.  C'est  pour  M.  Bréal  qu'avait  été  créée, 
il  y  a  plus  de  quarante  ans,  la  chaire  de  Grammaire 
comparée,  rubrique  qui  ne  signifie  pas  grand  chose 
d'ailleurs.  Mais  les  étiquettes  sont  peu  de  chose;  en 
fait,  on  voulait  inaugurer  l'enseignement  de  la  linguis- 
tique. C'est  pourquoi  nous  aurions  voulu  qu'on  pro- 
htàt  de  la  vacance  de  la  chaire  pour  en  agrandir  offi- 
ciellement le  programme  et  pour  lui  donner  le  titre  de 
«  linguistique  généiale  »,  comme  la  chaire  de  l'histoire 
des  religions  aurait  dû  devenir  la  chaire  de  mytho- 
logie comparée. 

M.  Meillet  a  si  bien  compris  la  situation  qu'il  parle, 
dans  son  discours,  de  la  linguistique  générale.  ïl  dit 


—  126  — 

avec  raison  que  la  manière  dont  les  langues  indo-eu- 
ropéennes ont  été  étudiées  devra  servir  de  guide  et  de 
modèle;  mais  il  se  trompe,  à  mon  avis,  quand  il  dit 
que  l'étude  des  autres  familles  permettra  de  vérifier 
les  conclusions  qu'on  a  tirées  de  celle  des  langues 
indo-européennes  et  de  poser  un  certain  nombre  de 
questions  qui  n'apparaissent  pas  clairement  dans 
celles-ci.  C'est  donner,  je  crois,  trop  d'importance  aux 
langues  indo-européennes,  car  tous  les  problèmes  que 
soulève  l'étude  des  langues  ne  se  retrouvent  nécessai- 
rement pas  dans  les  idiomes  aryens,  et  les  familles  du 
second  groupe  morphologique,  les  idiomes  agglutinants, 
sont  certainement  très  instructives  à  cet  égard.  Mais 
M.  Meillet  a  le  malheur,  —  on  comprendra  ce  que  je 
veux  dire,  -—  de  n'avoir  guère  étudié  que  l'indo-euro- 
péen, et  le  malheur,  plus  grand  encore  à  mes  yeux,  de 
se  rattacher  à  l'école  des  néo-grammairiens  allemands 
dont  M.Brugmann  est, pour  ainsi  dire, le  protagoniste, 
cette  école  dont  la  méthode  est  si  discutable,  qui  fait 
de  la  théorie  et  de  la  spéculation  et  qui  conclut  du 
simple  au  composé. 

Une  grande  erreur,  c'est  de  regarder  la  linguistique 
comme  une  science  historique,  alors  qu'elle  est  sur- 
tout une  science  naturelle.  M.  Meillet  voit,  dans  l'évo- 
lution des  langues,  quatre  facteurs  principaux:  la  loi 
phonétique,  l'analogie,  l'emprunt,  le  fait  social.  Je  n'y 
contredis  pas,  mais,  en  ce  qui  concerne  la  phonétique 
par  exemple,  n'est-il  pas  nécessaire  de  rechercher  la 


—  127  — 

cause  possible  de  certains  phénomènes,  en  un  mot  de 
ne  passe  bornera  relever  des  faits  sonores,  mais  à  étu- 
dier la  formation  même  des  sons  et  des  bruits,  les 
mouvements  des  organes,  les  conditions  physiolo- 
giques? Il  estincontestable,par  exemple,  que  certaines 
articulations  ne  se  développent  ou  ne  se  produisent 
que  dans  certaines  conditions  climatériques. 

J'aurais  bien  des  réserves  à  faire  sur  certaines  affir- 
mations de  M.  Meillet.  Quand  il  dit,  par  exemple,  que 
rindo-Européen  commun  avait  des  formes  grammati- 
cales variables  et  complexes,  c'est  encore  là  pour  moi 
de  la  théorie.  L'Indo-Européen  commun  primitif 
devait  être  au  contraire  très  simple  et  très  régulier  et 
je  n'admettrai  jamais,  notamment,  que  le  verbe  y  eût 
deux  présents,  l'un  en  o,  l'autre  en  mi.  La  terminaison 
mi  «  moi  »  est  seule  générale  et  primitive  :  si  le  grec 
et  le  latin  l'ont  le  plus  souvent  perdue,  l'indien  et  l'éra- 
nien  l'ont  le  plus  ordinairement  gardée,  et  ils  sont  cer- 
tainement plus  fidèles  à  la  forme  primitive. 

Julien  ViNsoN. 


The  102'^  report  oft lie  british  and  foreign  Bible  So- 
ciety.,. London,  190G,  in-8°,xvj-470-(ij)-272  p. 

Ce  volume,  aussi  intéressant  que  les  précédents,  ne 
contient  aucune  carte  géographique.  Le  budget  de  la 
Société  s'est  élevé  pendant  l'année  (de  mars  1905  à 
mars  1906)  à  313.555  1.  st.  1  sh.  2d.,  c'est-à-dire  à 
7.838.876  fr.  45,  un  vrai  budget  d'état.  Le  nombre 


—  138  — 

des  langues  dans  lesquelles  des  traduclions  de  la  Bible 
ou  du  Nouveau  Testament,  partielles  ou  totales,  ont  été 
faitess'estélevéàiOOdontl'l  nouvelles, parmi  lesquelles 
je  citerai  le  Ladakhi,  sur  la  frontière  du  Thibet,  et  le 
Laotien.  On  a  révisé  les  traduclions  en  frdu  et  en 
Hindi,  ainsi  qu'en  Canara. 

Je  crois  qu'il  y  aurait  lieu  de  revoir  et  de  corriger  en 
plusieurs  endroits  la  liste  générale  des  langues.  Que  si- 
gnifient par  exemple  les  mentions  Spanish  basr/ue  et  do 
[Guipuzcoa)  :  on  suppose  que  la  première  indication 
s'applique  au  Biscayen,  mais  pourquoi  ne  pas  le  dire? 

J.  V. 


Suomalais-ugrilaisen  Seuran  Aikakauskirja.  Jour- 
nal de  la  Société  Finno-Ougrienne,  t.  XXIII.  Helsing- 
fors,  1906,  gr.  in-8°,   x-(ij)-50-20-20-iv-60-1 2-2-2! - 
10-9-20-2-8-7-4-10-1 1  -5-8-7-8-13-1 2-7-23-2-12-10- 
9-8-10-33  p.,  fig.,  3  pi.  et  1  portrait. 

Comme  le  fait  voir  cette  extraordinaire  pagination, 
ce  volume  comprend  trente-deux  mémoires  séparés. 
Composés  en  l'honneur  de  M.  0.  Donner,  le  fondateur 
de  la  Société,  à  l'occasion  de  son  soixante-dixième  aii- 
niversaire,  ces  mémoires,  précédés  d'une  dédicace,  en 
suédois  et  en  français,  à  >i.  Donner  dont  le  portrait  est 
en  regard  du  titre,  sont  en  finnois,  en  lapon,  en  sué- 
dois, en  français,  en  italien  et  en  allemand.  Tous  très 
intéressants  et  faits  pour  les  savants  les  plus  compé- 
tents, ils  ont  trait  aux  langues,  aux  mœurs,  au  folk- 


-  12i)  — 

lore  des  Finnois,  des  M;i|^yars,  des  Lapons,  des  Mor- 
dvines,  des  Estlioniens  et  autres  ourai-altaïques.  C'est 
un  recueil  de  premier  ordre. 

Je  regrette  de  n'avoir  pas  été  prévenu  de  cette  pu- 
blication, à  laquelle  j'aurais  été  heureux  d'envoyer 
une  modeste  contribuliofi,  en  l'honneur  d'un  linguiste 
auquel  tout  le  monde  studieux  doit  rendre  un  légitime 
et  sincère  hommage. 

J.  V. 


Suonialais  -  ugrilaken  seuran  toiinituksia.  Mé- 
moires de  la  Société  Finno-Ougrienne.  Tome  XXin  et 
XXIV.  Hekin(/on,  1905.  (ij)-xviij-30i  p.  et  (ij)-90  p. 
gr.  in-8°. 

La  première  de  ces  deux  livraisons  se  compose  du 
commencement  d'un  travail  de  M.  K.  F.  Rarjalainen, 
en  allemand,  sur  la  phonétique  votiaque:  le  vocalisme 
de  la  première  syllabe.  La  seconde  est  le  complément 
(appendice  et  index)  d'un  travail  précédemment  pu- 
blié (n"  xx),  sur  le  lapon  de  Polmak,  par  M.  Konrad 
Nielsen.  J.  V. 

Revue  internationale  de^  éludes  basques.  Paris,  Paul 
Geuthner,  1907,  in-8°.  n°^  1  et  t,  (iv)-216  p. 

Cette  nouvelle  publication,  très  intéressante  et  très 
utile,  véritablement  internationale,  paraît  appelée  à  un 
très  grand  succès.  Elle  est  dirigée,  avec  une  rare 
maestria,  par  notre  éminent  collaborateur  M.  Julio  de 

9 


—  130  — 

Urquijo;   le  secrétaire  de  la  rédaclion  est  M.  Georges 
Lacoinbe  également  bien  connu  de  nos  lecteurs. 

Les  deux  premiers  numéros  contiennent  un  grand 
nombre  d'articles  aussi  variés  qu'intéressants,  tou- 
chant à  la  linguistique,  à  la  littérature,  à  l'ettinogra- 
phie  et  à  l'histoire.  Citons,  parmi  les  principaux  :  Les 
études  basques  de  4901  à  i906,\}aiV  Julien  Vinson,etun 
pust-scriptum  de  M.  de  Urquijo;  Jean  de  Tartas,  par 
M.  J.  de  Jaurgain;  Le  bilçar  d'Ustarilz,  par  M.  Ytur- 
bide  ;  Fables  en  Biscayen,  attribuées  au  P.  Zavala;  Le 
Catéchisme  de  Arzadun  {âvec  photogravures,  par  M. de 
Urquijo;  Corisandre  d! Audoains,  par  M.  de  Jaurgain  ; 
Variantes  des  exemplaires  de  Liçarrague,  par  G.  La- 
combe;  des  notices  bibliographiques,  biographiques 
et  philologiques  par  MM.  Oaranats,  Dubarat,  Mujica, 
Eleizalde,  Aguirre,  Baraibar,  de  Cliarencey,  Darricar- 
rère;  et  enfin  une  réimpression,  rigoui'eusement  exacte, 
du  premier  livre  souletin  en  imprimé  connu,  VOnsa 
LJilceco  bidla  de  Tartas.  J.  V. 


Bulletin  du  parler  français  au  Canada.  Tome  V, 
\r'  4  à  7,  déc.  1906  à  mars  1907.  Québec,  Université 
LavaU 906-7,  p.  1â1-279. 

On  y  trouve  de  fort  intéressants  travaux  :  la  suite 
du  Lexique  Canadien-Français;  Glanureset  Sarclures; 
des  Bulletins  bibliographiques  qui  témoignent  de  l'ac- 
tivité littéraire  de  nos  compatriotes  d'origine;  des  ar- 


licles  fort  instructifs  sur  le  langage  commercial  (par 
M.  J.-P.  Paradis),  quelques  vieux  mots  dans  des  do- 
cuments anciens  par  M.  Plilieas  (iagnon),  les  noms 
po[)ulaires  de  quelques  plantes  canadiennes  (par 
M.  C.  Latlammc  ,  le  compte  rendu  de  la  séance  géné- 
rale de  la  Société  du  12  décembre  1906,  etc. 

Le  dernier  numéro  contient  une  nouvelle  étude  de 
M.  Kouillard  sur  les  prénoms  au  CajMda.  Nous  y 
apprenons  que  de  malheuieuscs  lilleltos  ont  été  a[>pe- 
lées,  l;i-bas,  Thessalonir/uc,  Lncivinia,  Dorsina,  Ozitk, 
Eximasse,  Ananolie,  Plumyeta,  Lauricrànc  et  d'infor- 
tunés garçons  Ira,  Phébé,  Piiilandrc,  Perplexe  et 
Anif/danol 

Un  excellent  travail  qui  se  recommande  à  toute  l'at- 
tention du  linguiste  est  celui  de  M.  Hivard  sur  la 
francisalioii  des  mois  anglais  dans  le  /rauco-canadien. 
Mais  il  est  gâté  par  la  transcription  grotesijue  de  >iiVl. 
Gilliéron  et  Housselot. 

.1.     VlNSOA. 

lievKe  du  monde  musulman  ^volume  1,  n°*  3  et  4). 
Paris,  E.  Leroux,  janvier  et  février,  1907,  p.  305- 
640. 

Outre  les  revues  très  intéressantes  et  si  bien  faites 
de  M.  Bouvat,  ces  deux  numéros  contiennent,  comme 
on  devait  s'y  attendre,  de  très  remarquables  travaux  : 
les  Hongrois  et  les  études  musulmanes  (f..  Bouvat),  les 
Habous  de  Tanger  (AI  Moutabassii),  une  université 


—  132  — 

musulmane  en  Tunisie  (Emile  Amar),  les  Turcs  et  les 
indigènes  en  Tripolitaine  (N.  Slouscti),  l'instruction 
publique  chez  les  Kirgliizes  (N.  Slousch),  le  collège 
d'4ligarli  (L.  Bouvat),  les  musulmans  chinois  (Niga- 
rendê  et  Al-Katib),  le  Pan-Islamisme  et  le  progrès 
(A.  Lechatelier),  les  Laks  du  Caucase  (N.  Slousch),  le 
clergé  musulman  aux  Indes  néerlandaises  (A.  Caba- 
ton),  etc.,  etc.  Je  signale  tout  particulièrement,  une 
excellente  étude  de  M.  L.  Bouvat  sur  la  Presse  musul- 
mane avec  de  nombreux  spécimens  et  de  très  curieux 
fac-similé  de  titres.  J.  V. 


Anthropos,  Revue  Internationale  d'Ethnologie  et  de 
Linguistique,  sous  la  direction  du  père  G.  Schmidt, 
S.  Gabriel,  iMoedling  près  Vienne  (Autriche).  Tome  II, 
n°  1,1907,  in-8°  carré  de  180  p.  et  nombreuses 
planches. 

Journal  véritablement  international,  car  il  accepte 
des  articles  dans  toutes  les  langues,  dû  à  la  collabora- 
tion de  savants  et  de  missionnaires  catholiques.  Le 
numéro  que  nous  avons  sous  les  yeux  se  compose  de 
seize  articles,  en  français,  latin,  anglais,  italien,  alle- 
mand et  espagnol.  Je  signale  particulièrement  ceux 
du  P.  Gains,  Au  paj/s  des  castes  (p.  35-39),  du  docteur 
Gasartelli  :  Hindumythology  and  littérature  as  recorded 
by  Portuguese  Missionaries  of  the  early  41"'  century 
p.  128-132);  de   M.  Aliih.Pinart,   Gcroglifi  entre  las 


—  i:«  — 

Indios  de  la  F  brida  (p.  133-136),  et  du  Fr.  H.  Millier. 
Grammatik  des  Mengen  Sprache  (p.  80-99). 

La  langue  dont  il  s'agit  dans  ce  dernier  travail  est 
parlée  dans  la  Nouvelle-Guinée  depuis  le  cap  Oxford 
jusqu'au  cap  Ouoi,  sur  la  côte;  elle  comprend  deux 
dialectes  différenciés  par  l'emploi  plus  ou  moins  fré- 
quent de  l'article  délini,  par  les  signes  de  pluralilé, 
etc.  Le  matéiiel  phonique  ne  |)araît  comprendre  que 
les  sons  et  les  bruits  suivants  :  a,  i,  u,  e,  o,  û,  —  k,  y, 
ny:  I,  d,  n,  //,  s,  /,  r;  p,  b,  m,  y.  Il  y  a  un  article  post- 
posé. Le  pluriel  se  dérive  par  un  r  préfixe,  un  redou- 
blement, une  suffixation;  le  duel  paraît  dérivé  du 
pluriel.  Les  noms  de  nombre  simples  ne  vont  pas  au 
delà  de  quatre.  Les  pronoms  ont  plusieurs  formes  : 
substantive,  adjective,  possessive,  déterminative,  et  ils 
varient  suivant  qu'ils  s'appliquent  à  des  personnes 
animées  ou  à  des  êtres  inanimés.  Le  prochain  numéro 
nous  parlera  du  verbe  sans  doute. 

J.  V. 


VARIA 


I.  —  Politesse  espagnole. 

On  sait  qu'en  Espagne,  lorsqu'on  adresse  à  quelqu'un  des  com- 
pliments sur  un  objet  de  toilette,  un  livre,  un  objjt  d'ati,  un 
bijou,  qu'il  a  en  sa  possession,  la  personne  interpellée  doit  ré- 
pondre :  a  su  disposiclon  ou  n  la  diaposicion  de  rm.,  «  à  votre 
disposition  »,  c'est-à-dire  «  veuillez  en  disposer  ».  Le  dialogue 
doit  se  poursuivre  :  esfn  miii/  bien  entplcndo  «  il  est  bien  em- 
ployé, il  est  en  de  bonnes  mains  ».  —  Muc/io  nu\jor  lo  série 
«  il  le  serait  beaucoup  mieux  ».  —  Xn  cnhc  mcjoria  «  il  ne  saurait 
l'être  mieux  ».  Je  crois  qu'on  ajoute  encore  d'antres  phrases 

C'est  aussi  en  Espagne  qu'on  baise  encore,  an  moins  en  paroles, 
les  mains  et  les  pieds,  et  qu'on  offre  aux  visiteurs  sa  maison. 

Victor  Hugo,  qui  se  piquait  d'espagnolisme,  ne  manquait  pas 
de  dire  à  ses  visiteurs  :  a  cette  maison  est  la  vôtre  ». 

Les  billets  de  faire  part  de  mariage  se  terminent  tous  par  la 
formule  classique  :  //  les  ofrecen  su  case. 

Et  cependant,  il  n'est  pas  rare  d'entendre  au-delà  des  Pyrénées 
des  femmes  charmantes  employer  certaines  expressions  qui  rap- 
pellent l'aventure  de  Sterne  avec  M""  de  Rambouillet. 

IL  —  Le  verbe  basque. 

Pour  some  \\  ater  in  a  bowl 

And  make  the  froth  of  lathering  soap; 
Then  blow  it  from  the  pi|ielets  hole  : 

The  bubble  rises,  as  we  hope, 
AU  huesorae  as  the  rainy  bow, 

I  0  forra  the  little  Hlmy  sphère, 
Reflecting  ail  the  things  bclow. 


—  135  — 

Above,  aïoniifl,  or  far  or  near. 
Even  so  the  verb  in  biskish  tongue, 

A  perfect  niirror,  floats  in  air, 
Although  no  otber  word  is  sung, 

I^ortraying  ail  that  passes  there. 

E.-S.   DODGSON. 

(At  Kirk  Andréas,  Isle  of  Man,  sept.  :{,  1901). 


111.  —  Prononciation  du  français  par  les  Allemands. 

Il  y  a  encore  en  France  beaucoup  de  gens  qui  ont  pour  les  lan- 
gues étrangères  le  dédain  le  plus  profond  et  qui,  dans  leur  igno- 
rance superbe,  émettent  les  affirmations  les  plus  saugrenues. 
C'était  jadis,  en  littérature,  monnaie  courante.  A  côté  de  ce  joli 
mot  d'Alexandre  Dumas  :  «Ah  !  s'écria-t-il  en  portugais  »,  que  de 
sottises  ne  trouve-t-on  pas  dans  les  romans  écrits  il  y  a  soixante  ou 
quatre-vingts  ans. Un  Allemand,  par  exemple,  disait  toujours  7»o«- 
t((iiK'!  pour  «Madame»  et  ne  jurait  que  par  TarteiJ]le(i  derTeufel». 

Je  relisais  dernièrement  l'un  des  romans  les  plus  connus  de 
Balzac,  un  de  ceux  où  le  baion  de  Nucingen  (personnification  du 
vieux  Rothschild,  à  ce  qu'il  parait)  joue  l'un  des  principaux 
rôles.  Balzac  a  voulu  indiquer  la  manière  barbare  dont  son  héros 
prononçait  notre  belle  langue.  Il  ne  s'est  pas  mis  pour  cela  en 
grands  frais  d'observation.  Il  est  parti  de  cette  hypothèse,  qui  est 
d'ailleurs  fort  discutable,  que  les  Allemands  disent  toujours  t  pour 
u,  rJi  pour  /.  t  pour  d,  d  pour  t,  p  pour  h,  h  pour  p,  etc.,  et  il  a 
porté  la  naïveté  jusqu'à  transcrire  dans  ce  système,  non  plus  les 
sons,  mais  l'orthographe  des  mots.  II  n'a  pas  pris  garde  aux 
consonnes  muettes,  aux  groupes  de  voyelles;  il  n'a  pas  un  seul 
moment  réfléchi,  par  exemple,  que  eu  fait  un  son  simple  et  il 
commet  les  abominables  phrases  que  voici  : 

Fus  edes  pien  hercùc  fou  hiroise). 

C'esde  ein  cheffe  d'œicrc. 

Sa  cordine  esd  vaidde. 

Fis  n'afcc  bas  î  l>aitf/oiih  t'  cccarts. 


—  136  — 

Tiddos...  c/ic  rornifhil  hir  fus. 
Elle  fus  afanfie. 
L'eshoir  te  la  droaffer. 
Edre  tans  mes  cintereds 
Vaire  tes  accaires 
Barler  hir  moi 
Ce  fj'on  ubhéle. 

Et  ces  expressions  au   moins  bizarres  :   mods  «  mots  »,   ôme 

«  iiomme  »,  p/tâme  «  femme  »,  mon  hàmi  «  mon  ami  »,  eine  fcn- 

feuse  ((  une  vendeuse  »,  boind  «  point  )),  hire  «  heure  »,   Ichènie 

«  Eugénie  »,   ghibbè  «  chippé  ",    ch'èhroujfe  «j'éprouve  »,  eine 

haif/charbe  a  une  écharpe  »,  et  même  le  paron   tl  Nichenguenne 

«  le  baron  de  Nucingen  ». 

J.  V. 


IV.  —  La  langue  universelle. 

Je  trouve,  dans  un  catalogue,  l'indication  suivante  : 
«PASILOGIE,  ou  de  la  musique  considérée  comme  langue  uni- 
verselle, par  Anne-Pierre-Jacques  De  Vismes.  Paris,  1806,  in-8, 
cart.,  qq.  taches.  » 
Il  y  a  eu  de  tout  temps  des  fous,  des  utopistes  et  des  rêveurs. 

J.  V. 


L' Imprimeur-Gérant  : 

E.   Bertrand. 


CHALON-SUR-SAONE,    IMP.    FRANÇAISE    BT     ORIENTALE    E.    BERTRAND 


LES  MUSULMANS  DU  SUD  DE  L'INDE 


Les  ^lusiilniaus  de  la  pointe  méridionale  de  l'Inde 
se  partagent  en  deux  grandes  catégories  bien  dis- 
tinctes, les  Tululih((i-s  «  turcs  »  ou  Pathâns  (syno- 
nyme iï Afghans)  et  les  Choulias  ou  Maplets.  Les 
premiers  sont  les  descendants  directs  des  immigrants 
venus  du  Xord  à  partir  du  X"  siècle  de  notre  ère  ;  ils 
ne  sont  point  confondus  avec  la  population  indigène  ; 
ils  parlent  divers  dialectes  de  Thindoustani  ' urdù  et 
dalilïUÎ  notamment),  qu'ils  écrivent  à  l'aide  de 
Talphabet  arabo-persan,  augmenté  de  trois  signes 
quadriponctués  pour  représenter  les  consonnes 
cérébrales  ou  linguales.  Les  seconds,  au  contraire, 
ne  se  distinguent  guère  du  reste  de  la  population 
locale  ;  ils  en  ont  les  goûts,  les  habitudes,  le  lan- 
gage ;  ils  écrivent  cependant  les  idiomes  du  pays  à 
l'aide  de  l'alphabet  arabe  directement  importé  et 
auquel  ils  ont  ajouté  quelques  signes  ponctués  par- 
dessus et  par-dessous  pour  correspondre  aux  articu- 
lations dravidiennes  spéciales  '.  Ils  savent  lire  l'arabe, 
car  ils  ont  des  écoles  où  on  leur  fait  apprendre  par 

1.  Cf.  L'i'crituro  arabe  npplù/iice  aux  laii;/iics  ((raridimncs, 
par  Julien  Vinson  {Journal  Asiatique,  1895). 

10 


—  138  — 

cœur  le  Qorân,  sans  le  leur  expliquer  d'ailleurs.  On 
les  appelle  Maplets  sur  la  cote  occidentale  et  Chou- 
lias  sur  celle  de  Goromandel.  Ils  se  divisent  en 
castes  dont  les  membres  sont  distingués  par  des 
appellations  particulières  :  Sinnapoullé//?r//ec«/-, 
Ahmedkandu/e^^e,  Mugammadu/«(^«/^«/',les  pathaus 
ajoutent  ordinairement  à  leurs  noms  les  qualifica- 
tions de  kliàii^  càJiib  ou  cheick. 

Le  recensement  de  1901  a  établi  qu'il  y  aurait, 
dans  les  régions  qui  nous  occupent,  910.843  Maplets, 
425.788  Lebbés  et  25.000  Choulias  environ. 

Que  signifient  ces  divers  mots  et  quelle  est  l'ori- 
gine de  ces  populations?  Les  Musulmans  du  sud, 
qui  ne  parlent  ni  Thindoustani  ni  le  persan,  sont 
incontestablement  les  descendants  de  commerçants 
arabes  qui  venaient  trafiquer  sur  les  cotes  de  l'Inde 
et  qui  s'alliaient  à  des  femmes  du  pays,  de  castes 
fort  inférieures  ordinairement.  Elles  étaient  simple- 
ment pour  eux  des  concubines  temporaires  et  ils  les 
abandonnaient  avec  leurs  enfants  ou  les  passaient  à 
d'autres  arrivants,  quand,  leurs  affaires  terminées,  ils 
retournaient  chez  eux  ou  allaient  ailleurs.    . 

C'est  ainsi  qu'on  explique  le  mot  MàppiUei,  qui 
voudrait  dire,  en  tamoul,  «  fils  de  mère  »  (et  de  père 
inconnu).  On  lit  à  cet  égard,  dans  le  Glossary  of 
Indian  Teriwi  de  H.-H.  Wilson,  Londres,  1855,  in-4'' : 
«  MappilUiy  plur.  iuappillammai\,  commonly  nioplali 
or  inoplay,  malayâla.  A  native  of  Malabar,  or  des- 
cendant of  the  Arabs,  who  first  settled  in  Malabar, 
lit.  «  the  son  {pilla)  of  his  mother  [ma)  »  as  sprung 
from  Ihe  intercourse  of  foreign  colonists,  who  were 


—  139  — 

persons  unknown,  with  malabar  \vomen  ».  Dans  leur 
dictionnaire  Hobson-Jobsoii,  MM.  Yule  et  Burnell 
disent,  de  leur  côté,  que  cette  appellation  s'applique 
aussi  aux  chrétiens  nestoriens  du  Travancore  et  de 
Cochin  et  qu'en  tanioul  niàppillei  sig'nifie  propre- 
ment «  fiancé  »  ou  plutôt  «  gendre,  beau-fils  »  ;  ils 
rappellent  que  le  D''  Badger  y  voit  une  altération  de 
l'arabe /rt/<'/Ar/  et  lui  donne,  comme  à  l'égyptien /ê//ff//, 
le  sens  de  «  cultivateur  »,  tandis  que  M.  C.-P. 
Brown  y  voit  une  altération  de  mu  ahbar  «  de  dessus 
les  eaux  ». 

Sur  ma  demande,  mon  ami  M.  Bourgoin,  (Conser- 
vateur de  la  Bibliothèque  de  Pondichéry,  a  bien  voulu 
s'enquérir  des  traditions  qui  auraient  cours  parmi 
les  Musulmans  de  Pondichéry  et  de  Karikal,  sur 
leur  origine.  L'un  d'eux  lui  a  remis  une  note  dont 
voici  la  traduction  : 

«  Hasan  et  Hucain,  fils  de  Huzrat  'Ali  Mortaza, 
petits-fils  du  Prophète,  furent  invités  à  se  rendre 
auprès  des  habitants  de  Kufa  qui  leur  disaient  qu'ils 
étaient  prêts  à  les  reconnaître  comme  les  légitimes 
successt^urs  de  Mahomet.  Confiants  dans  ces  pro- 
messes, Hasan  et  Hucain  allèrent  chez  les  Koufiens 
qui  les  assassinèrent  de  sang-froid. 

»  Un  siècle  après,  Gengis-Khan,  le  conquérant 
tartare,  traversa  la  Perse  et  passa  en  Arabie  dans  le 
but  de  se  venger  des  Koufiens.  Il  les  aurait  exter- 
minés tous,  jusqu'au  dernier,  sans  son  ministre  qui 
lui  persuada  de  faire  transporter  tous  les  Koufiens 
màlesdans  diverses  contrées  de  l'Univers.  Oiiatreo-ros 
vaisseaux  en  furent  remplis  el  partirent  de  l'Arabie. 


—  140  — 

»  Un  de  ces  vaisseaux  arriva  à  la  côte  de  Malabar, 
près  de  Cochin  ou  de  Tellichéry.  Les  trois  autres 
mouillèrent  à  Négapatam,  à  Madras  et  à  Paliacate, 
sur  la  côte  de  Coromandel.  Toutes  ces  localités 
étaient  alors  des  villages  de  pécheurs  très  peu  peu- 
plés ;  outre  les  marins  {/nacoiias),  il  n'y  avait  que 
des  cânàrs  (ceux  qui  extraient  le  suc  du  cocotier 
pour  en  faire  une  boisson  fermentée).  Les  Koufîens 
débarqués,  n'ayant  point  de  femmes,  car  leurs 
femmes  et  leurs  filles  avaient  été  réduites  en  esclavage 
par  les  vainqueurs,  s'unirent  à  des  Indiennes  et  alors 
commença    la    multiplication   d'une    nouvelle    race. 

))  Comme  ils  ne  connaissaient  pas  la  langue  du 
pays,  les  nouveaux  débarqués  répondaient  toujours, 
à  toutes  les  questions  que  leur  posaient  les  indi- 
gènes :  labbéik,  avec  le  sens  de  «  merci  »  ou  «  bien  ». 
C'est  pourquoi  les  Indiens  les  appelèrent  Lebhés  ou 
Levés.  Les  enfants  nés  des  nouveaux  venus  et  des 
femmes  du  pays  furent  aussi  appelés  Lebhés  à  la  côte 
de  Coromandel.  Au  Malabar,  on  les  désigna  sous  le 
nom  de  Mapplets  {Màppillei},  qui  veut  dire  «  mari  » 
en  tamoul,  parce  que,  faute  de  connaître  leurs  noms 
propres,  on  appelait  «  maris  »  /nàppillel  les  étran- 
gers mariés  à  des  femmes  indigènes. 

»  Au  commencement,  les  Lebbés  furent  pécheurs 
ou  fabricants  de  filets.  Puis  quelques-uns  devinrent 
tailleurs  et  prirent  le  titre  de  Choiilias,  Chônavar, 
ou  Taynkkar.  Leur  colonie  s'était  augmentée, 
ils  se  marièrent  entre  eux  et  cessèrent  de  prendre 
des  femmes  du  pays.  Un  certain  nombre  de  Lebbés 
abandonnèrent  les  villages  de  la  côte  et  allèrent  se 


—  141  — 

fixer  dans  les  villes  de  rintérieiir  en  ([iialité  de 
marchands  de  poisson  sec  salé  ;  ils  prirent  des  fem- 
mes dans  ces  villes  el  s'y  adonnèrent  à  divers  tra- 
vaux de  culture.  Ils  formèrent  alors  la  tribu  des 
Hdvoiilters  ou  Kayalers . 

»  Ceux  des  Lebbés  qui  tirent  des  voyages  sur  mer 
[)our  commercer,  en  qualité  de  marchands  de  tissus, 
et  qui  acquirent  ainsi  de  rargent,  de  la  considéra- 
tion et  de  rinstrut;tion,  méritèrent  l'appellation  de 
Mdrailikàyer  (en  fr.  marécars)  «  grands  hommes  » 
ou  «  maîtres  hommes  ». 

»  On  appelle  Tidiikhers  tous  les  Musulmans  en 
général;  Pafhans  les  conquérants  venus  du  Nord, 
qui  ne  sont  pas  unis  à  des  femmes  indigènes  et 
dont  la  race  est  restée  pure  ;  Saïds  ou  M  las  les 
descendants  du  Prophète.  » 

Suivant  W.  Logan  {Malabar,  Madras,  (iov.  Press, 
1887),  CJiônaha,  qui  est  la  forme  littéraire  de  Chou- 
lia,  serait  \\.\\q.  altération  de  Yavanalca,  Yonien, 
Grec.  Dans  le  Paijijaiu'ir  pàl,  le  plus  vieux  poème 
nialayàla  connu,  certains  marins  sont  appelés  67/(9«<7- 
vaii.  Chônavaii,  Chônagav,  Chonaka,  Jonaka  sont 
identiques.  Il  y  aurait  bien  là  un  souvenir  des  ancien- 
nes relations  commerciales  de  Tlnde  méridionale 
avec  les  Européens. 

M.  Bourgoin  ajoute,  dans  la  lettre  ([u'il  m'a  fait  lo 
plaisir  de  m'adresser  :  «  Les  ChoiiUas  sont  donc  les 
«  matelots  ».  Aussi,  à  Karikal,  les  marins  et  les  bate- 
liers musulmans  sont- ils  ofliciellement  appelés 
«  bateliers  vhoidia^  »  par  opposition  aux  «  bateliers 
('((fcars^i  ;  ceux-ci  sont  des  marins  (\\\  rivai»"e  Icarci), 


—  142  — 

déterre,  d'eau  douce,  A  Pondichéry,  il  y  a  la  rue  des 
Choulias.  Les  Lebbés  ou  Levés,  comme  on  dit  à  Kari- 
kal  (le  mot  est  inusité  à  Pondichéry),  exercent  les 
professions  de  marchands,  boutiquiers,  petits  com- 
merçants, etc.  Devenus  riches  après  avoir  entrepris 
des  voyages  sur  mer  avec  des  cargaisons  d'étoffes, 
ils  sont  très  fiers  de  s'appeler  Marccais. 

Dans  le  ManuaL  of  the  District  ofTaiijore,  par  Ven- 
kasamy  Row  [Madras,  1883),  on  lit,  sous  la  rubrique 
mixed  races  :  «  The  community  which  comes  pro- 
minently  to  view  under  this  head  is  that  of  the 
tamul-speaking  Mahomedans  called  Labbés  ov  Sona- 
kars,  a  race  of  mixed  Semitic  and  Turanian  blood. 
They  are  the  descendants  of  the  early  colonists  from 
Arabia,  who  emigrated  from  their  native  land  in  the 
early  part  of  the  eighlh  century,  in  conséquence  of 
the  tvrannical  sway  of  Hijajben  Yusef,  and  to  whom 
the  coast  line  of  Tanjore,  as  commanding  a  never- 
failing  Irade  in  rice  with  Ceylon,  lield  ont  spécial 
attractions.  First  establishing  themselves,  as  else- 
where,  on  the  coast,  they  hâve  in  course  of  time  crept 
into  the  interior,  and  hâve  everywhere  adopted  the 
language  of  the  country.  In  the  absence  of  ail  res- 
traint,  religions  or  social,  they,  on  their  first  set- 
tlement,  took  women  of  the  lowest  classes  as  both 
wives  and  concubines,  and  also  admitted  into  their 
households,  and  made  metnbers  of  their  OAvn  family, 
young  boys  and  girls  of  the  same  class,  who  were 
either  parted  with  for  a  considération  or  abandoned 
by  their  relations  during  the  prevalence  of  famine 
aiid  gcMieral  distress.  And  the  resulting  cross-bi'ced 


—  143  — 

race,   with  f'ree   concubinage    and  widow-niarriage, 
lias  lapidly  multiplied  and  is  multpilying. 

»  The  Labhés  who  inhabit  ihe  coast  hâve  tlie  hono- 
rilic  titie  oï iuarakl{(iij(ii\  and  those  wlio  hâve  setlled 
in  llie  interior  ihat  of  raviiltar. 

))  Tiie  Labbé  class  constitiites  more  than  ioiir 
fiilhs  ollhe  Mahomedan  population  of  Tanjore. 

»  Caste  ruies,  in  respect  ol"  inter-marriage,  are 
now  observed  more  or  less,  by  ail  classes  oI  Malio- 
medans,  the  Labbcs  nol  excepted,  but  the  custom  is 
récent.   » 

A  propos  du  mot  ravultai',  M.  Bourgoin  écrit: 
<»  J'ai  questionné,  il  y  a  déjà  longtemps,  à  Ivarikal, 
diverses  personnes,  sur  la  signilication  de  ce 
mot,  sur  son  origine,  son  étymologie  ;  et  voici  ce 
qu'on  m'a  dit  à  ce  sujet  :  certains  Choulias  ayant 
renoncé  aux  métiers  exercés  tout  d'abord  par  les 
descendants  des  Arabes  tuiis  à  des  femmes  de  la 
côte  de  Coromandel,  devinrent  agriculteurs  ;  leurs 
mères  étaient  ou  des  veuves  de  la  caste  des  Siirar 
ou  des  filles  de  cette  caste.  Par  une  sorte  d'ata- 
visme, ils  s'adonnèrent  au  travail  des  champs  et 
particulièrement  à  la  culture  du  bétel;  encore  au- 
jourd'hui, les  plus  beaux  jai-dins  de  bétel  sont 
cultivés  par  des  Musulmans.  C'est  ceux  là  rpii 
ajoutent  à  leurs  noms  le  titre  de  ravallar.  » 

Il  est  diflicile  d'expliquer  ce  mot  ravallar  en  ta- 
moul  ;  il  y  a  là  évidemment  des  altérations  profon- 
des ;  le  dictionnaire  de  la  Mission  de  Pondichéry  le 
traduit"  cavalier».  Macoaa,  (ju'on  a  vu  plus  haut, 
est  proprement  luukkuvan  «  pécheur  «. 


L 


—  144  — 

Quant  à  lebbé  [Happai),  le  même  dictionnaire  le 
traduit  «  marchand  ».  MM.  Yule  et  Burnell,  qui 
récrivent  liibbye,  lubbee,  rapportent  Texplication  de 
M.  C.-P.  Brown  pour  qui  ce  serait  une  altération  de 
\irabi.  Mais  on  y  voit  généralement  Tarabe  labbdik 
«  me  voici,  je  suis  à  toi,  je  suis  prêt  à  t'obéir,  etc.  ». 

Marécar  est  proprement  muraikkàyar,  pour  ma- 
rakkâyar,  et  vient  de  maram  «  arbre,  bois,  vais- 
seau »;  c'est  donc  quelque  chose  comme  «  marin, 
navigateur,  armateur  ». 

Julien  ViNSON. 


SUR 

l'iiiieiice  fle  l'ancieie  IMrie  sir  la  Russie  aicieie 

AU  POINT  DE  VUE   LINGUISTIQUE 


I 

Quelle  inttueiKX  rancienne  ll)érie  a-t-elle  eue  sur 
rancienne  Russie  ?  (blette  question  pourra  bien 
étonner  quelques-uns,  mais  le  fait  de  cette  influence 
est  hors  de  doute. 

Quelques  auteurs  trouvent  l'influence  de  l'ibérie 
dans  une  poésie  populaire  russe  sur  Thamar,  reine 
de  Géorgie  (XII®  s.',  dans  Tarchitecture  russe  où  Ton 
remarque  quelquefois  des  dômes  coniques,  reproduits 
d'après  ceux  des  églises  géorgiennes,  et  dans  récri- 
ture slave,  dont  quelques  caractères  ressemblent  à 
ceux  de  l'écriture  géorgienne  dite  klioiiizouri^  sacrée. 

Les  autres  prétendent  que  l'ancienne  Ibérie  aurait 
du  avoir  de  l'influence  sur  l'origine  même  des 
Russes.  Par  exemple,  selon  Rawlson,  orientaliste 
anglais,  l'ancien  Moscou  avait  été  une  colonie  des 
Mosches,  peuple  géorgien  de  la  province  de  Mes- 
chethi  qui  a  joué  un  grand  rôle  dans  l'histoire  de  la 
Géorgie,  et  a  donné  à  la  patrie  des  noms  illustres, 
des  rois,   des   hommes  d'état,   des  écrivains  et  des 


—   146  — 

artistes.  Procenco,  auteur  russe,  dans  un  ouvrage 
spécial,  nous  assure  que  les  Variagui,  invités  par 
les  Russes  et  qui  fondèrent  le  royaume  de  Russie, 
étaient  des  Ibères. 

Il  est  bien  possible  (|ue  les  opinions  que  nous  avons 
rapportées  soient  adoptées  par  les  uns  et  rejetées 
par  d'autres  à  cause  de  Torigine  qui  sépare  les  Russes 
indo-européens  d'avec  les  (géorgiens  sémites.  Les 
anciens  peuples  d'Urarthu  et  Helhi  ',  qui  sont  consi- 
dérés comme  les  ancêtres  des  Ibères  et  des  Armé- 
niens, formaient,  dans  l'antiquité  la  plus  reculée,  une 
puissante  nation  répandue  dans  toute  l'Asie  mineure 
jusqu'aux  sources  de  l'Euphrate.  Par  consécpient,  ils 
pouvaient  être  en  contact  avec  les  Slaves  (jui,  par 
leurs  invasions,  atteignaient  parfois  même  Constan- 
tinople  et  les  autres  endroits  peuplés  aux  bords  de 
la  mer  Noire. 

Ce  sont  ces  circonstances  qui  firent  naître  che/> 
quelques  auteurs  le  désii'  de  rechercher  l'inlluence 
de  ribérie  aussi  sur  la  langue  russe.  Dans  ce  but, 
Moïse  Djanaschvili  a  d'abord  essayé  de  comparer 
quelques  formes  grammaticales  russes  avec  celles  du 
géorgien.  Il  nous  a  montré,  dans  la  revue  géorgienne 
Moambé  (Le  Messager),  d'une  manière  assez  persua- 
sive, que  oscha,  terminaison  de  la  troisième  personne 
du  pluriel  du  passé  des  verbes  slaves,  n'est  autre 
chose  que  es  des  verbes  géorgiens   pris  à  la  même 

1.  Ne  sont-ils  pas  équivalents  aux  formes  géorgiennes  IJii'thl, 
qui  veut  dire  le  pays  d'Ur,  et  He/hi,  le  pays  de  Hi.  On  pourrait 
les  traduire,  en  arménien,  Vmsiaii.  la  (Jéorgie,  et  Hahistan, 
l'Arraénie. 


—  147  - 

personne,  au  même  nombre  et  au  inème  temps. 
Ensuite  c'est  L.  Lopatinsky  qui  a  lu  en  russe,  dans 
la  Société  archéologique  de  Tiflis.  un  exposé  spécial 
sur(Hî  (|uele  suffixe  russe  shy,  employé  pour  (|uelques 
adjectifs,  n'est  que  sqiia  qui,  en  mingrélien,  dialecte 
géorgien,  veut  dire  «  le  fils  w  et  dérive  d'une  racine 
géorgienne  su  ou  schii,  d'où  scJtuili  «  le  fils  ».  Le 
qn  y  est  aspiré  aussi  bien  que  dans  les  mots  min- 
gréliens  tchqainii  «  mon  »  (géor.,  tchemi),  squani 
«  ton  »  (geor.,  scheni),  et  géorgiens  qumariu  le  mari  » 
(svane,  dialecte  géorgien,  mare;  arménien, /^zr/zr/)  et 
quvrivi  «  le  veuf»  (arménien,  aïri). 

Jusqu'à  présent,  les  recherches  sur  la  question  se 
sont  arrêtées  à  ce  point.  La  philologie  comparée  est 
bien  le  moyen  de  recherches  le  plus  rassurant  et  c'est 
pour  cela  que  nous  avons  pris  le  parti  d'expliquer 
(|uelques  faits  de  la  philologie  russe  qui  restaient 
inexpliqués. 

La  langue  .russe  emploie,  pour  le  superlatif,  le 
sulfixe  e/.sY'A?,  qui  n'est  que  esi,  employé  en  géorgien 
pour  le  même  degré.  Les  lettres  s  et  sch  ne  sont 
que  les  expressions  des  sons  sifflants  qui  se  rem- 
])lacent  l'un  par  l'autre.  Le  sens  du  suffixe  géorgien 
esi  reste  pour  nous  inconnu  et  il  ne  sert  qu'à  indiquer 
la  comparaison  des  objets. 

Pour  exprimer  le  genre  féminin,  la  langue  russe 
emploie  souvent  le  suffixe  hha ,  mais  sa  signification 
i-este  pour  les  Russes  inconnue.  Dans  les  inscriptions 
cunéiformes  laissées  par  le  peuple  d'Urarthu  et 
Hethi,  les  cunéologues  rencontrent  souvent  le  suflixe 
khi  qu'ils  traduisent  «  le  fils  ».  Or,  le  nom  Cardii-hhi, 


—  148  — 

que  les  anciens  Grecs  donnaient  aux  (léorgiens.doit 
se  traduire  «  le  fils  de  Cardii  »,  en  géorgien  Qnaithu, 
d'où  quarihueli,  nom  que  les  Géorgiens  se  donnent 
à  eux-mêmes.  Aussi  entendons-nous  le  sulïixe  lîhi 
dans  le  nom  slave  variagai,  «  issus  »,  selon  Procenco, 
«  des  Ibères  ».  Par  consécjuent,  variagai  devrait 
indiquer  «  le  fils  d'Ur».  Ce  nom  donna  l'origine  aux 
termes  Vraslan  et  Vii\  employés  par  les  Arméniens 
pour  désigner  la  Géorgie  et  les  Géorgiens,  d'oii 
dérive  à  son  tour  l'iêv^pta  classique,  llest  à  remarquer 
que  le  suffixe  khi,  comme  tel,  se  retrouve  dans  un 
seul  mot  géorgien,  zrohJia  «  la  vache  »,  et  comme 
racine  aussi  dans  un  seul  mot  inkhevali,  qui  veut 
dire  «  la  fille  ».  Mais,  en  mingrélien,  dialecte  géor- 
gien, il  existe  toujours  enqualité  de  sufiixe  ets'emploie 
quand  on  veut  indiquer  une  naissance  de  la  fille,  par 
exemple  dadikhé  i(.  née  Dadiani  ».  Aussi  s'emploie-t-il 
en  arménien  pour  indi(juer  le  genre  féminin,  par 
exemple  varjouhi  «  Tinstitutrice  «.  Après  cela,  il  est 
évident  que  le  suffixe  russe  k/i a  sevl  aussi  à  indiquer 
le  féminin.  Les  mots  russes po/inik/i(t  «  une  tailleuse  », 
starukha  «  une  vieille  »,  povarikha  «  une  cuisinière», 
ne  peuvent  être  expliqués  autiement  ({u'à  Taide  du 
suffixe  khi. 

Pour  quelques  noms  substantifs,  les  Russes 
emploient  le  suffixe  ai\  par  exemple  pakhar  «  un 
laboureur  »,  buiitar  «  un  révolté  »,  zvoiuir  «  un 
sonneur  ».  Ce  suffixe-là  nous  rappelle  (iri  (|ui  dérive 
de  «/•,  a  est^  et  s'emploie  en  géorgien  pou  r  les  parti- 
cipes et  les  noms  substantifs,  par  exemple  maqnéhuri 
((  louant»,  nctqaébaii  «  loué  »,  saqnéburi  «  à  louer». 


-  149  — 

odiscliari  c  un  liabitanL  d'Odischi  n.  Les  mots  mtsqrali 
«  fâché  »,  mUhrdall  «  timide  »,  nous  représentent 
les  formes  avec  changement  de  r  en /devant/' radical. 

Aussi  quelques  noms  substantifs  russes  ont-ils 
parfois  le  sufiixe  idii^  par  exemple  smutian  «  un  tra- 
cassier»,  huUtii  «  un  insensé  ».  Ce  sufïixe  n'est  que 
le  iani  du  géorgien,  employé  quand  on  veut  répondre 
à  la  question  avec  quoi?,  par  exemple  inadiani  «  capri- 
cieux ».  Les  Arméniens  s'en  servent  aussi  pour  indi- 
(juer  le  nom  du  père,  par  exemple  Petros  Mdrcoséan 
«  Pierre  fils  de  Marc  ». 

Nul  doute  que  quelques  linguistes  trouveront 
ridentité  des  sufïixes  géorgiens  ari,  ali  et  iani  avec 
a/'ins,  alis  et  ianus  employés  dans  la  langue  latine 
avec  le  même  sens.  Mais  je  dirai  à  mon  tour  que  cette 
identité  des  sufïixes  géorgiens  et  latins  va  nous  inté- 
resser plus  encore  en  présence  d'une  grande  multi- 
tude de  racines  primordiales  communes  que  nous 
rencontrons  dans  les  deux  langues  parmi  lesquelles 
il  y  a,  comme  on  le  sait,  une  grande  différence 
d'origine. 

Après  cette  hypothèse  de  Trombetti  suivant  laquelle 
les  langues  aryennes  et  sémitiques  auraient  une 
seule  langue  pour  mère,  surgit  une  question  :  le 
géorgien  ne  paraît-il  pas  être  le  prototype  de  la 
langue  mère,  cherchée  par  Trombetti  ? 


II 


A    l'époque     païenne,    quand    il     fallait    immoler 
quelques   animaux  pour  rendre  les  dieux  cléments, 


—  150  — 

les  Ibères  avaient  Thabitude  d'immoler  un  veau,  en 
géorgien  zuaraki^  de  ziiara,  et  Tarte  d'inimohition 
s'appelait  zorva  [ua  =  o),  qui,  plus  tard,  s'est  changé 
en  tzirva  «  la  messe  ».  Le  mot  russe  jeilva  «  la  vic- 
time »,  donty'e/' est  une  racine,  nous  rappelle  bien  le 
o-éoreien  et  devait  siernifier,  au  commencement,  une 
offrande  de  veau. 

L'action  du  zorva,  dans  l'antiquité,  avait  lieu  sur 
les  places  publiques  ou  foires.  Aussi  les  Russes 
auraient-ils  dû  accomplir  le  jertva  à  leur  vetché  (\\\\^ 
étant  une  place  publique,  formait  en  même  temps 
la  foire,  le  lieu  des  discussions.  Ce  qui  nous  le 
confirme,  c'est  le  forum  des  Latins  {fari,  parler)  et 
l'àyopâ  des  Grecs  (àYopditoiJta!,,  parler)  où,  comme  nous 
le  savons,  avait  lieu  l'immolation  des  veaux,  ainsi 
que  les  discussions  concernant  les  affaires  publiques 
et  la  vente,  à  savoir  la  fixation  des  prix.  Le  mot 
géorgien  btché  «  un  juge  »,  dont  la  racine  est  htch 
ou  vlch  et  d'où  dérive  le  verbe  arménien  vtclirel 
«  fixer,  marchander  »  et  le  mot  géorgien  vatchari 
«  un  marchand»,  n'est  que  le  prototype  du  vetché  des 
Russes.  Ainsi  vetché  devait  d'abord  indiquer  le  juge, 
comme  veut  dire  le  Z>/rAe  des  Géorgiens,  mais  ensuite 
il  était  rattaché  à  une  place  oii  avaient  lieu  le  jugement 
et  la  vente.  11  est  complété  d'un  e  ainsi  que  vetcJi, 
qui  veut  dire  en  arménien  «la  dispute  ».  Les  usages 
du  vetché  russe  étaient  les  mêmes  que  ceux  du 
forum  latin,  de  rà-j-op^  grec  et  pour  les  ancêtres  des 
Géorgiens  et  des  Arméniens  (avant  Tarianisation  de 
l'arménien);  le  mot  Uiparaki,  qui  veut  dire  en  géor- 
gien «  la  discussion  »,  a  conservé  dans  la  bouche  des 


—  151  — 

Anrumiens   le    s(mis   de  «    placée    publique  n,   comme 
nous  le  montre  le  mot  liraparak. 

Les  Russes  étaientdes  agriculteurs  et  nous  trouvons 
clans  leur  langue  les  termes  propres  à  Tagriculture 
comme  pakluil  «  labourer»  et  plug  «  la  charrue  ». 
Mais  que  veut  dire  le  mol  sokha  qui,  en  russe,  a  le 
môme  sens  que  plug  ?  Ce  terme,  par  sa  forme  et  sa 
signification,  nous  rappelle  le  sakhiiisi  des  Géorgiens 
qui  signifie  proprement  «  à  labourer».  La  racine  en 
est  kluin,  d'où  khiuiva  ou  khvnvd,  vulgairement 
khvna  «  iajjourer  ».  Sa  en  est  le  préfixe  et  isi  n'est 
que  la  terminaison  que  l'on  emploie  parfois  |)our 
indiquer  le  participe  futur  passif.  L^a  racine  khan 
représente  un  développement  de  Tancien  kku,  ainsi 
que  le  sii/U  des  Latins  à  Tégard  de  la  forme  slave  siif^ 
qui  a  le  môme  sens.  Le  u  a  disparu  dans  sokha,  ainsi 
que  dans  sakhnisi,  mais  ce  qui  est  à  remarquer  dans 
sokha,  c'est  qu'il  a  conservé  le  préfixe  so,  qui  est 
é(juivalent  au  so^  des  Géorgiens  que  l'on  rencontre 
seulement  dans  deux  mots,  somekhi  u  l'arménien  », 
soplieli  «  le  monde,  le  village  ». 

(Qu'est-ce  que  le  mot  jat,  qui  veut  dire  en  russe 
«  moissonner  »  ?  Ce  mot,  ainsi  que  siiop  «  la  gerbe  », 
nous  rappelle  le  mot  géorgien  zna  «  la  gerbe  ».  La 
lettre  a,  en  slave,  se  prononçait  e«.  Nous  en  sommes 
assurés  par  sa  conjugaison  :  jnu  «  je  moissonne  », 
jiiesch  «  tu  moissonnes  »,  etc.  Au  mot  géorgien  ziia 
se    rattache   aussi   le  troisième  mot  russe  zerno,  qui 

1.  Ses  autres  formes  sont  :  su,  rencontré  dans  le  mot  suphéra 
«  le  royaume  »,  se,  dans  sephè  «  royal  »,  et  st,  dans  plusieurs  mots, 
à  savoir,  sitqua  «  dire  »,  sirhili  «  courir  »,  etc. 


—  152  — 

signifie  «  le  grain  »  et  qui  aurait  dû  auparavant  expri- 
mer seulement  «  le  grain  de  blé  ».  La  racine  de  zerno 
est  zen,  r  n'y  est  qu'une  aspiration.  Zen  nous  rappelle 
la  racine  géorgienne  Izen,  d'où  les  Izentzis  «  pousser  » 
et  Izanel,  des  Arméniens,  qui  veut  dire  «  semer  », 
sans  aucun  doute,  et  ces  mots  sont  dérivés  de  zna, 
dont  la  racine  s'entend  mieux  dans  le  mot  snop. 

Dans  l'histoire  de  l'évolution  des  principes  de  la 
religion,  de  la  politique  et  de  l'agriculture  dans 
l'ancienne  Russie,  les  termes  vietche,  jertva^  sokha^ 
jats,  snop  et  zerno  doivent,  sans  doute,  avoir  une 
grande  valeur,  mais,  pour  mieux  les  comprendre,  il 
faut  que  nous  cherchions  leur  origine  et  leur  expli- 
cation dans  la  langue  des  Ibères  ou  Géorgiens 
actuels. 

La  philologie  slave,  à  l'aide  du  géorgien,  pourra 
expliquer  beaucoup  de  choses  au  premier  abord 
inexplicables,  si  messieurs  les  slavistes  se  mettent 
à  étudier  la  philologie  géorgienne. 

Pierre  Mirianischvili. 

Tittis'  le  20  mars  1907. 


A    SYNOPSIS 

ANALYTICAL  AND  QUOTATIONAL 

of  llie  .138  Forms  of  the  Verb,  iiscd  in  tlie  Epistle  to 
the  Hehrews,  as  foiind  in  the  Baskisli  New  Testa- 
ment oï  Jean  de  Liearrague,  printed  in  157 1,  at  La 
Rochelle . 


'Ou   paotov   aTCav-a-    jjixvfJavî    aévxoi    oaa   xscpaXauôoTj   (Lucieil, 

Dialogue  des  Morts,   17). 

[The  alphabelical  order  hère  assumed  is  \,  B,  C 
and  Qu  =  K,  D,  E,  G,  l,  L,  N,  T,  ÏZ  and  Z  and  C 

and  Ç  =  Z.] 

AC.  1.  Impératif  singulier  2'' personne,  régime  sin- 
gulier, adressé  au  masculin  \  auxiliaire 
actif.  Hâve  thon  it,  o  mon! 

1.  Du  tutoiement  masculin,  on  voit  dans  cette  Epître  les  22  mots 
que  voici  :  Ac,  Deçân,  Diaudec^  Die,  Diraueat,  Dituc,  Dituc, 
Ditzân,  Diaucac,  Drautac,  Duc,  Duc,  Nauc,  ez  Taquiâla,  ez  Teçàla, 
ezTituc,  ezTituc,  ezTuc,  Çayân,  Çaic,  eTZaizquic,  eTZiayôc. 

Le  tutoiement  dans  l'Evangile  de  St  Marc,  que  nous  avons 
étudié  dans  \z.- Revue  de  Linguistique  (1898-1903),  contient  les 
83  mots  que  voici  : 

Masculins  (c'est-à-dire  en  s'adressant  à  un  homme).  75  :  Ac, 
Aguc,  Auc,  Daquiala,  Daquizquic,  baDacusquic,  baDacussac,  Da- 
guiadan,  baDaguic,  baDeçac^  Deçânçat,  Diabiltzac,  baDiacusquiat, 
Diagu,  Diarioc,  Diat,  Die,  Dié,  Dieçadan,  Dilioac,  Dioc,  Diossat , 

11 


AIZ 

.  7. 

1. 

o. 

1. 

11. 

1. 

12. 

5. 

5. 

5. 

6. 

—  154  — 

8.      5.    ,  .  . ,  Bada  iKUssr/r.  .  .  Or  voy 
y\DI.  1.   Imp.  siiig.,  2*  p.,  auxiliaire.  Be  thon  ! 
1.    13.    .  .  .,  lAR  adi  ene  escuinean,  .  .  .,    Siez-toy  à 
ma  dextre. 
Indicatif  présent,  2,  verbe  substantif.  Art. 
.  .  . ,  PJne  Seniea  aiz  hi,   .  .  . ,  Tu  es  mon  Fils, 
.  .  . ,  baina  hi  permanent  aiz  :  .  .  . ,  mais  tu  es 

permanent  : 
...  :  baina  hi  hura  bera  aiz,   ...  :  mais  toy, 

lu  es  vn  mesme, 
.  .  . ,  Ene  Semea  aiz  hi,   .  .  . ,  Tu  es  mon  fils, 
...,  Hi  AIZ  Sacrificadore  ...,  Tu  es  Sacri- 
ficateur 
7.    17.    .  .  .,  Hi  AIZ  Sacrificadore  .  .  .  (Hautin  mit  aiz, 
parce  que  Liçarrague  avait  lu  «  'Ot-.  Tj'ispko;  ».) 
.  .  . ,  Tu  es  Sacrificateur 
7.    21.    ...,  Hi  AIZ  Sacrificadore  ...,  Tu  es  Sacri- 
ficateur (H.  mit  aiz,  parce  que  L.  avait  lu 

AICExX.  1.  I.  q.  aiz,  auxil.,  avec  e  euphonique  devant 
//  conjonctif.  Thaï  Ihon  art. 

Diraucuc,  Diraueat,  Dituala,  Dituanac,  Dituc,  Dituc,  Drauat, 
Drauc,  Ditzân,  Drauzquiân.  Duân,  Duanâ,  Duana,  Duc,  Duc, 
Eyec,  Eçac,  Gaituc.  Gaitzac,  Gaitzaizquic,  Guendiquec,  leçaguc, 
lieçagun.  lecec,  letzéc,  Itzac.  Xauâla,  Nauc,  Nauc,  Xeçaquec, 
Neçan,  Nitziayec,  ikusQuic,  ezTaguioala,  ezTeçâla,  ezTerreola, 
ezTerroan,  ezTié,  ezTituc,  ezTuâla,  ezTuc,  ezTuc,  ezTsea- 
quiagu,  Çaic,  Caizquic,  baCeaquiat,  baCeaquiagu,  Cieçan  et 
eTZieçan,  Cieçateân  &  eTZieçatean,  Cioc,  Citiagu,  Citiat,  Ciluio. 
Féminins,  8:  Dionân,  Diosnat.  Draunat,  Dun,  ezTinàt.  ezTun, 
ez  Tun,  eTZ«aquinat. 


—  155  — 

2.     6.    ...,    harcaz   ohhoit  aicen?    ...    que    tu    as 
mémoire  de  luy  ? 
AICENEAxN.  1.  I.  q.  «/s,  aux.  e  euph.,  il  pronom  rela- 
tif temporel  décliné  au  temporel  [iiean  = 
quand).    W'hcii  tlioii  a  ri. 

12.  5.    ...  haroaz  corregitzen  aicenean. 

.  .  .  quand  tu  es  reprins  de  luy. 
AV.    1.    fndic.  prés.,  s.,  3,  rég.  sing.,  2®  pers.,   aux. 
act.  Ha  s  thee. 
l.      9.    ...   :   halacotz  u^ctatu    ukan    an    laincoac, 
eure  laincoac  ...  :  pour  ceste  cause  Dieu, 
ton   Dieu  t'a  oinct 
A\'r.7.   Ind.  prés.,  s.,  1,  r.  s.,  2"  p.,  aux.  act.  /  liave 
thee. 

1.  5.    ...,  nie  egun    engendratu  aul    lii  ?    ...,  ie 

t'ay  auiourd'huy  engendré  ? 

2.  12 eta  Eliçaren  erdian  laudaturex  aut  hi. 

.  .  .,  &;  te  loueray  au  milieu  de  rassemblée.- 
(The  greek  text  lias  no  équivalent  Ibr   eta 
or  k.) 
PS.      5.    .  .  .,  nie  egun  engendratu  aiit  hi. 

.  .  .,  ie  t'ay  engendré  auiourd'huy. 
6.    14.    ...,  Segtir  bbnedigatuz  benedicaturen  aat., 

eta      MULTIPLICATUZ     MLLTIPLICATUREN      ail  t. 

...,   Certes  ie  te  beniray  abondamment, 
tk  te  multiplieray  merueilleusement. 

13.  5.    ...,  Ez««^  UTziREN,    eta     ez««// abandonna- 

TUREN.   .  ,  .,  le  ne  te  laisseray  point,  &  ne 
t'abandonneray  point. 
AVÇVE.  2.  Impér.  pi.,  2,  r.  s.,  aux.  act.   Ha^e  ije  it  ! 


—  15G  — 

3.    12.    GOGor/uçiic,  anayéac,   Frères,  prenez  garde 

12.  25.    REGvinauçue  .  .  .  Voyez 

BEDI.  1.  Imp.  s.,  3,  aux.  Be  //,  let  if  be ! 

13.  1.    Charitate  fraternala  egon  bedi .  Que  la  cha- 

rité fraternelle  demeure, 

BEÇATE.  1.  Imp.  pi.,  3,  r.  s.,  aux.  act.  Let  Ihcm  havc 
Him  ! 

1.  6.    ...,     Ela     ADORA    beçale    hura      laincoaren 

Aingueru  guciéc,  M.  omit  la  virgule.) 
.,.,  Et  que  tous  les  Anges  de  Dieu 
l'adorent. 

BlPiE  1.  Imp.  pi.,  3,  V.  subst.  Be  they^  let  them  bel 
13.  5.  Ciien  conditioneac  bire  auaritia  Sfabe, 
Que  vos  mœurs  soyent  sans  auarice, 
HAlCAPiA  &  GARA.  14.  Ind.  prés.,  pi.  1.  We  are. 
[Cara  is  probably  more  ancient  than  gara. 
Many  instances  prove  that  an  initial  g  in 
the  Baskish  of  the  IGth  century,  where  our 
sludy  of  it  finds  its  beginning  fixed  by 
cruel  destiny,  represents  an  earlier  k  or 
hard  latin  c.) 

2.  5.    .  .  . ,  ceinez  MiNÇO  bairrt/7?  ;  ...,  duquel  nous 

parlons. 

3.  6.    ...  :  ceinen  etchea  baicARA  gu,  ...  :   du(|uel 

nous  sommes  la  maison, 
3.    14.    Ecen  Christen  participant  eguin  içan  ga/a, 
.  .  .,  ceinez  sustengatzen  hiàca/a,  Car  nous 
sommes  faites  participans  de  Christ,  .  .  .  de 
nostre  soustenance  (voyez  baDeçagu). 


—  lo7  — 

4.  3.  Eceii  SARTHLRKN  gara  reposean  <jii,  (Gainons 
.  .  .   entrerons  au  re|)OS, 

6.  9.    Baina   skglhatzen  stti'(t   ■  ■  .  '•   luinela  minco 

hagara-ere.    Or   nous-nous  sommes  pei- 
siiadez  .  .  . ,  ia  soit  que  parlions  ainsi. 

7,  19.    ...  ceinez  HURBiLTZE>-  halcara  laincoagfana. 

o 

.  .  . ,  par  laquelle  nous  a()pro(;hons  de  Dieu. 

10.  10.  Cein  vorondatez  sanctificati  ican  bai^Y//Y/, 
Par  laquelle  volonté  nous  sommes  sanc- 
tifiez, 

10.  39.  Baina  gu  ez  gaha  (11.  mit  guezgara;  Me'is 
nous  ne  sommes  point 

12.      9.    ...,  eta    vicico  ha'icara?  ...,  &  viurons? 

12.  25.    ...,  gu  anhitzez  guehiago  pumturen  gfffa, 

.  .  .,  nous  serons  punis  beaucoup  plus 

13.  18.    ...  :     ecen    asseglratze:^    gara     ...  :     car 

nous-nous  asseurons 

baiQVIRAïE.  1.  Ind.  fut.,  pi.  1,  v.  s.  It  is  the  old  lorm 
of  souletin  gairate.  (See  Inchauspe,  Le 
Verbe  Basque,  18.58.)   We  sliall  be. 

12.  28.  ...  non  haren  gogaraco  baiguiRATE,  .  .  . ,  tel- 
lement que  luy  soyons  agréables 

DA.  62,    Ind.  prés.,  s.  3,  v.  s.  et  aux.  Is. 
2.      2.   Ecen  baldin  ...  hitza  fermu  içan  ba«frt,  Car 

si  la  parole  ...  a  esté  lerme  : 
2.  6.  .  .  .,  Cer  da  guiçonà,  ...  ?  edo  cer  da  gui- 
çonaren  semea, .  .  .  .'  .  .  . ,  (Urest-ce  de 
l'homme  ...  ?  ou  qu'est-ce  du  fils  de 
l'homme  ...  .'  (H.  mit  car  da,  parce  que 
dit  7]  ulôç  àvGpWTTOU,  sans  verbe.) 


—  158  — 

2.  14.  .  .  .,  hura-ere  halaber  participant  eguin  iraii 
da  hetan  beretan,  .  .  .,  luy  aussi  sembla- 
blement  y  a  participé, 

2.  18.    ...    AiUTATZECo    botheretsii   da,    ...,    il   est 

aussi  puissant  à  aider 

3.  3.    ...   «loria  handiagoren  digne  estimatu  içan 

da,  .  .  .  est  réputé  digne  de  plus  grande 
gloire 

3.  4.  Ecen  etche  oro  norbeitez  edificatzen  da  : 
....  laincoa  da.  Car  toute  maison  est  édi- 
fiée de  quelqu'vn  :   .  .  .,  est  Dieu. 

3.  5.  Eta  segur  Moysesfidel  IÇAN  drt.  ...Or  bien  est 
vray  que  Moyse  a  esté  fidèle 

3.  6.  Baina  Christ  semé  beçala  da  bere  etchean  : 
]\Iais  Christ  est  comme  fils  sur  sa  maison  : 

3.  17.    Baina  ceinéz  enoyati     içan    da    berroguey 

vrthez  ?  Mais  desquels  a-il  esté  ennuyé 
quarante  ans?  (H.  mit  27.) 

4.  10.    ...,  REPOSATUi'rrt/î  c?«  hura-ere  bere  obretaric, 

.  .  . ,  s'est  reposé  aussi  de  ses  œuures, 

4.  12.    Ecenlaincoarenhitza  vicif/<7etaefiicaciotaco, 

...  :  eta  da  .  .  .  iuge,  (H.  omit  ce  point). 
Car  la  parole  de  Dieu  est  viue  kS:  d'eliîcace, 
.  .  . ,  kk  est  iuge  (H.  mit  vici  d((,  parce  que 
L.  a  lu  ^wv  yàp  ô  Xôyo^,  sans  verbe.) 

5.  l.    E(;eii  Sacrificadore  subirano  gucia  guicone- 

taric  HARTZE.N  (/a,  eta  s'uiconenci-atic  ohde- 
NATZKN  da  laincoa  baitharaco  gaucelan  : 
Or  loul  souuerain  Sacrificateur  se  prend 
d'entre  les  hommes,  »S:  est  constitué  pour 
les  hommes  es  choses  <|ui  se  font  ciincrs 
Dieu  : 


159 


o 


13.    ...  :  ecen  liaoïir  da  :  ...  :  car  il  est  eiilant. 

5.  14.  Baina  handitlentzat  da  viaiida  carratua, 
Mais  la  viande  ferme  est  pour  ceux  cjui 
sont  desia  tous  grans, 

fî.  8.  .  .  .,  REPROBATUA  da  H.  mil  f/rt  parce  queL.  a 
lu  ioô/.'.ijio^,  sans  verbe)    ...,   est   reieltee, 

7.  2.  ...  :  eta  lehenic  luira  da  interpretatzen 
iustitiazco  regue,  ...  :  tk  premièrement 
est  interprété  Roy  de  iustice  : 

7.      7.    ...   BENEDiCATZEN  <:/«.   ...  est  bénit 

7.  D.  Eta  .  .  .  Abrahamtan  detchematl  iraii  da 
Leui  bera-eie,  El  .  .  .,  Leui  mesme  ...  a 
esté  dismé  en  Abraham. 

7.  12.  Ecen  Sacrificadoregoareu  ofïicioa  cambiatl 
iÇANic,  necessario  da  .  .  .  Car  l'office  de  Sa- 
crificature  estant  changé,  il  est  nécessaire 

7.  14.  Ecen  claro  da  ...  Veu  qu'il  estoil  notoire 
(L.  traduit  «  est  clair  »,  parce  qu'il  a  lu 
TCoôoTjÀov,  sans  verbe.  Dans  quelques  éditions 
Calvin  aussi  avait  traduit  «  est  ».  Pour- 
quoi donc  Haulîn  n'a-t-il  pas  nns  da'}] 

7.  1.5.  Eta  are  haur  da  claroago,  Et  d'auanlage 
ceci  est  encore  plus  manifesté,  (H.  niit(/r/, 
bien  que  le  grec  dise  b-:-./). 

7.  18.  Ecen  aitzineco  mananiendua  abolitzen  da 
.  .  .  Cav  il  se  fait  abolition  du  mandement 
précèdent 

7.    19.    ...  :   baina   içan   da  speranca   hobeagoaren 
preparationebat     H.    mit    «.     icaii    da     » 
...  :  mais  a  esté  vne  seconde  introduction 
de   meilleure  espérance, 


—  160  — 

7.  22.    Hambatenaz     alliança    hobeagoren    fiadore 

EGUiN  içan  da  lesus.  D'autant  lesiis  est 
fait  pleige  d'vn  meilleur  Testament. 

8.  1.    Bada  .  .  .  sommarioa  haiir  da,  Or  la  somme 

.  .  .  est.,  (H.  mit  da  parce  que  le  grec 
n'exprime  pas  est]. 
8.  3.  ...  donoén  eta  sacrificioén  offrendatzeco 
oRDE^'ATZE^'  (la  :  bada,  necessario  da 
.  .  est  ordonné  pour  offrir  dons  &  sacri- 
fices :  parquoy  il  est  nécessaire 

8.  10.    Ecen  haur  da  .  .  .  Alliança,  Car  voici  le  Tes- 

tament (It  is  remarkable  that  da  should 
not  be  in  Italie  hère,  because  the  équiva- 
lent is  not  found  in  the  Greek,  and  in  the 
French  one  reads,  cest  que). 

9.  2.    Ecen  Tabernaclea  edificatu  içan  da,  Car  le 

tabernacle  a  été  construit, 
9.    12.    ...   behin   sarthu   içan   da  leJca  sainduetan 
redemptioneeternala  015TENITLHIC.  ....est 
entré    vue    fois    es    Lieiiv   saincts,    ayant 
obtenu  vne  rédemption  éternelle. 
9.    15.    Eta  halacotz  da  Testamentu  berriaren  arar- 
teco,  herioa  artean  iarriric.  Et  pourtant 
est-il  Médiateur  du  nouveau  Testament,  . . . 
la  mort  entreuenant 
9.    16.    . ,.  . ,  necessario  da    .  .  . ,  il  est  nécessaire 
9.    17.    Ecen    testamentua   hilétan   confirmait    da, 
Car  le  Testament  est  confermé  es  morts  : 
9.    20.    ...,HaurDA  ...  odola.   ...,  C'est  ici  le  sang 
9.    23.    I5KIIAH  iran  da  beraz    ...    lia  l'alu  doue 


I 


—  161  - 

9.  26,  ...,  bere  biiriuizco  sacrificioa/  comparitu 
içaii  da.  ...  il  est  comparu  .  .  .  par  le 
sacrifice  de  soy  mesme. 

10.  7.  ...  (liburuaren  HATSE.4N  scRiBA.TU.\  da  niçaz) 
...  :  au  commencement  du  liure  il  est 
escrit  de  moy, 

10.  12.  Baina  haur  sacrificio  bakoitzbat  bekatuacga- 
tic  OFFHENDATUHic,  eternalqui  iarria  da 
Jaincoaren  escuinean.  Mais  cestui-ci  ayant 
offert  vn  seul  sacrifice  pour  les  péchez, 
est  assis  éternellement  à  la  dextre  de  Dieu. 

10.    16.    Haur  da  .  .  .  alliançà,  C'est  ici  Talliance 

10.  23.  (ecen  fidel  da  ...  :  car  ...  est  fidèle  :  (H,  mit 
d(t^  parce  que  L.  a  lu  r-.cr-o;  yàp,  sans 
verbe.; 

10.     30.      ...,    Eue    DA    MENDECATZEA,  '     ...,    A    HÎOy   CSt 

la  vengeance, 
10.    31.    Gauça  horriblea  DA  lainco  viciaren  escuetara 

ERORTEA.  C'est  cliose  horrible  de  cheoir  es 

mains  4©  Dieu  viuant. 
10.    37.    ...   ETHORRiREN  f/«,   ...  viendra, 

10.  38,    Eta  iustoa  l'edez  vicico  dd  :  Et  le  iusle  viura 

de  foy  : 

11 .  1 ,    liada,  fedca  da  .  .  .  Or  la  foy  est 

11.      4,    :  eta  oraino   .  .  .   minço  du.   ...  :  &  ...  parle 

encore 
11,      .1.    Fedez    Henoch    eraman    ican    da ,    Par    foy 

Henoc  a  esté  emporté 

1.   From  xnndica  pronounced  hindica.  Cf.  mena,  nwa  =  mincy 
from  cfiia  —  bcna,  cein  of  métal. 


—  162   — 

11.  6.  Bada  impossible  DA  l'ede  ^abe  A«/e/;  gogaraco 
içATEA  :  .  ,  . ,  BEHA»  dci  .  .  .  Oi*  il  Gst  impos- 
sible de  luy  plaire  sans  foy  :  ...  il  faut 

11.  12.    Ela    Ifalacotz   batetaric   (etare    ia    hilaganic 

soRTHU  içciîi  da  gende  haiidi  .  .  .  Pourtant 
aussi  d'vn  seul  (voire  mesme  amorti)  sont 
nais  de  gens  en  Dinllilude 

12.  2.    ...,    eta   laincoaren   thronoaren     escuinean 

lARHi  içaii  da.  .  .  . ,  &  s'est  assis  à  la  dextre 

du  throne  de  Dieu. 
12.      7.    ...  :  ecen  cein  da  haourra  ...?...:  car  (jui 

est  l'enfant  ...  ? 
12.    20.    ...,  LAPiDATURKiN  dci  edo  gueciaz'  iraganen 

da.   ...,  elle  sera  lapidée,  ou  percée  d'vn 

dard. 

12.  29.   Ecen  gure  laincoa  .  .  .    ua.  Car  aussi  nostre 

Dieu  est  (L.  wrongly  omits  «  xà-.  »,  «  aussi  »  ) 

13.  4.    Honorable     da     gucién     artean     ezconçà% 

Mariage  est  honnorable  entre  tous, 
13.      8.    ...,  hura  bera  da  eternalqui-ere\    ...,  est 

aussi  le  mesme  éternellement. 
13.      9.    ...  :  ecen  on  da  ...  :  car  il  est  bon. 
13.    Colophon.    Hebraicoetara    SCRIBATU  icon    da 

Il  alla  rie  Timalheorequin.  Ku  noyée  d'Italie 

par   Timothee. 

1.  L.  translates  d  du  dard  o.  The  woid  is  Latin  çiœsi,  ifesi, 
which  D'  J.  Rliys  takes  to  be  Gaulish.  Cf.  'jucci  Epli.,  6,  16.  See 
tbe  Diccionnario  Bilinfjnc,  of  D.  J.  Fiancisfo  de  Aizquibel. 

2.  In  thèse  verses  Hautiii  put  '/"  because  Ihe  Gi-eek  has  no 
équivalent  of  «  est  ». 


—  163  — 

DABIL'FZALA.  i.  Ind.  prés.,  pi.  3,  avec  la  (^onjonc- 
tif  =  que,  verbe  irrég.  intr.  ehil.  ThaL 
they  Hrilk. 

il.  14.  ...  ecen  ^e/e  herriaren  ondoan  dabiltza.la. 
.  .  .    qu'ils   cerchent   feu/-   païs.    ot-.  -a-rp-oa 

ÈTT'.^TjTO'Jat. 
f 

DA(^)VlpN.  1.  Subj.  prés.,  s.  o,  r.  i.  s.,  aux.  f/ial  il 
bc  lo  Hini. 

6.  10.    ...,   AHANz  daquiôn  çuen  obra,  (H.  omit  la 

virgule)    .  .  . ,  pour  mettre  en  oubli  vostre 

œuure  (L.   translates  «  that  it  be  to  Him 

forgotten  »). 
baDAQVlÇVE.  1.  Ind.  prés.,  pi.  2,  r.  s.,  v.  irr.  act. 

taquin. 
12.    17.    Ecen    bauAQUiçuE   are    ...   Car  vous  sçauez 
baDACVSSAGV.  1,    Ind.  prés.,  plur.  1,  r.  s.,  v.  irr. 

act.   ijxus. 
3.    19.    Ecen  baoACUssAGL     .  .  .  Ainsi  nous  voyons 

ba  DADI.  1.  Hypothétique  prés.,  s.  3,  aux.  If  lie  be. 
10.   38.    ...  :   baina  baldin  cembeit  apparta  h-^dadi, 

...  :  mais  si  quelquvn  se  soustrait, 
DADIN.  3.  Subj.  prés.,  s.  3,  aux.  That  it  be. 

7.  12.    ...    Leguearen    cambioa-ere    eguin    dadin. 

.  .  .   qu'il  y  ait  aussi  changement  de  Loy. 

12.  13.    .  .  .,  bainaitzitic  sendo  dadin.    .  .  . ,  mais  que 

plustost  il  soit  remis  en  son  entier. 

13.  9.    ...    bihotza  gratiaz  confirma  <:/ftf//;?,  ..     que 

le  cœur  soit  establi  par  grâce, 
DADN'GAGVN.  3.  Impératif,  pi.  1,  r.   s.,  v.  irr.  act. 
eduki.  Let  us  hold  it  ! 


—  164  — 

4.    14 DADUCAGUN  confessioiie //«///• tenons 

la  confession. 

10.  23.  Eta  iKUCiRic  gorputza  v  r  chaliuz,  dadlcv- 
GUN^f^/'esperançaren  confessionea  variatu 
gabe  .  .  .  10.  22.  .  .  . ,  &  le  corps  laué  d'eau 
nette  :  Tenons  la  confession  de  nostre 
espérance  sans  varier  (H.  pul  giu-e  because 
the  Greek  lias  not  the  équivalent  of 
«  nostre  ».  L.  in  some  places  départs  froni 
Galvins  division  of  the  verses,  e.  g.  raicii 
il.; 

12.    28.    . . . ,  DADLCAGUN  gratià,  ...,  l'etenons  la  grâce 

DAGVIGV.  2.  Ind.  prés.,  pi.  1,  r.  s.,  v.  iii.  act.  cifuin. 
Ile  make  it. 
2.  3.  ...,  baldin  hain  saluamendu  handiaz  centu- 
rie ezpaDAGUiGU  ?  FI.  omit  la  virgule, 
comme  aussi  Timprimeur  Lyonnais) 
.  .  . ,  si  nous  mettons  en  nonchalance  vn  si 
grand  salut,  (L.  translates  «  if  \ve  make  not 
any  account  »,  for  àijtsÀYJ^xvTE;  . 

10.  26.  Ecen  baldin  iaquiaha  bekatu  bauAGUiGu' 
eguiaren  eçagutzea  recebitiz  gueiozlic, 
Car  si  nous  péchons  volontairement  après 
auoir  receu  la  cognoissance  de  vérité, 

DAGVIGV.X,  1.  Impér. ,  pi.  1,  r.  s.,  v.  irr.  act.  eguin. 
Lel  tis  iiKihe  il  ! 


1.  Ba ,  the  complément  of  lntldui,  meaning  if.  is  probably  a 
more  récent  form  of  pu,  whicli  remains  unchanged  \\  lien  it  lias 
the  négative  <v  as  a  prefix. 


—  ir.5  — 

4.    II.    DAGiiGUN^     bâcla     diligentia     repos     liartan 

sARTZEKA  :    F]stiidions-nous  donc  d'entrer 

en  ce  rej)Os-là  : 
DAGVIÇVEN.  1.  Siibj.  prés.,  pi.  2,  r.  .s.,  v.  irr.  act. 

eguiu.  Thaï  ye  may  do  it. 
13.    19.    ...  haur  daguiçukn,   ...  de  ce  faire 
DA(tO.  1.    [nd.    prés.,    .s.  3,   v.    neutre   irrég.    egon. 

Remains. 

7.  3.    ,..:    baina     laincoaren    Semearen    irudico 

EGUiN  iÇANic,  DAGoSacrificadore  eternalqui. 
.  .  . ,  mais  estant  fait  semblable  au  Fils  de 
Dieu,  demeure  Sacrificateur  éternelle- 
ment. 
DAGOCA.  1,  Ind,  prés.,  s.  3,  r.  i.  s.,  v.  irr.  neut. 
egon.  Remains  to  il. 

8.  13.    ...  ABOLiTU  içATEABi  hurbil  DAGOCA est 

près  d'estre  aboli.  (En  basque  «  à  Testre  », 

içateari.) 
DAGOELARIC.  1.   I.    q.    dago,   avec  e  euphonique 

devant  laric  participial.  While  He  sfays,  He 

staying. 
10.    i'^.    ...  BEGUiRA  DAGOELARIC,  Attendant  ce 
DAIDIDAN.  1.  I.  q.  daidit.  Potentiel  futur,  s.  3,  r.  s., 

r.  i.  s.  \y^  pers.,  avec   da   euph.    pour    t 

devant  n  pron.  rel.  =zque;  [Thaï)  n'hich  he 

may  do  to  ?ne\ 

1.  Tins  Word  is  but  chif/nù/u  with  the  sutBx  n  =  '/ne  the  con- 
junction.  It  is  not  only  imperative  in  sensé,  but  expresses  the 
conjunctive  or  subjunctive  mood. 

2.  This  is  an  unfortunate  homonym  of  daididan.    of  the  Hrst 


—  ine  — 

13.      6.    ...     gniçonac     ah\l    daididan     gaiicaren. 

.  .  .  chose  que  l'homme  me  puisse  faire. 
DAITEQVEEN.  2.  Pot.  prés.,  s.  3,  e  euph.  devant  n 

rel.  nom.  ^=qui,  aux.  [That]  n'hich  caii  he. 
12.    18.    ...    escuz    HUNQUi   ahal    daitequeen    mendi 

batetara,  ...  à  vne  montagne  qui  se  puisse 

toucher  à  la  main, 
12.   28.    Hunegatic    higli    ecin    daitequeen    résuma 

...  le  royaume  qui  ne  peut  estre  esbranlé 

DAITEQVENA.  1.  1.  (\.  daitequeen,  i{éc\.  ace.  That 

a-hich  can  ht. 
6.    17.    ...  fermetateMUTHA  ECIN  fZ<7//e^//,e/<«  ebacutsi 
NAHiz,  ...  voulant  ...  monstrer Timmuable 
fermeté 

DAITEN.  1.  Pot.  prés.,  s.  3,  aux.,  n  rel.  nom.  =  qui . 

[That]  which  can  be. 
11 .    12 .    . . . ,  eta  itsas  costaco  conta  ecin  daiten  sablea 

beçala.   .  .  . ,  &  comme  le  sablon  qui  est  au 

riuage  de  la  mer,  lequel  ne  se  peut  nom- 

brer. 
DAITEZQVENEZ.  1.  Pot.  prés.,  pi.  3,  n  rel.  nom.  pi., 

déd.  médiatif indéterminé,  aux.  [nez^^par 

(choses)  qui.]  By  tltings  ^vliich  can  be. 
6.    18.    Bi  gauça  mutha  ecin  daitezquenez    .  .  .   |)ar 

deux  choses  immuables 
DATENIC.  1.  Ind.  fut.,  s.  3,  n  rel.  nom.,  décl.  partitif 


person,  the  conjunctive  of  daidit,  St  I>uc.  16,  3;  St  Jean,  5,  30. 
See  St  Matt.,  26,  36  ;  St  Mark.  14.  32,  daididoiw;  St  Matt-,  9,  28, 
daididala. 


—  107  — 

indéfini,    verbe    subst.    Sornel/iins^   n'/iic// 
s  ha  il  b(i. 
13.    21.    ...  euelan  haren  aitzinean  placent  datenic, 
...  en  vous  ce  qui  est  agréable  deuant  luy, 

baDATOR.  1.  Ind.  prés.,  s.  3,   v.  irr.  passif  e^Ao/Ti. 

Cornes. 
13.    2.).     baldin    sarri   banATOR)     ...,  s'il  vient  bien 

tost . 

DAVDENEV.  1.  Ind.  prés.,  pi.  3,  n  rel.  nom.  pi.  ^qtii , 
décl.  dat.  pi.  déterminé,  v.  irr.  neutre  egon 
[ney  =  à  ceux  qui).  To  tliose  a' ho  unit. 
\) .    28.    ...   haren  beguira  daudeney  sahiamenduta- 
cotz.    ...   à  ceux  qui  l'attendent  à  salut. 

DAVDP:CENÇAT.  l.  Subj.  prés.,  pi.  3,  décl.  destinatif, 
v.  irr.  neut.  egon.  To  the  end  iJiat  thei/ 
reinain. 

12.    27.    . . .  DALDECENÇAT.  ..,  afin   que  ...  demeurent. 

baDAÇAGYGA'.  1.  Ind.  prés.,  pi.  1,  r.  s.,  v.  irr.  act. 

ecagun.  IVe  know  it. 
10.    30.    Ecen  banAÇAGUGU  ...  [voyez  du  en  a)  ...  Car 

nous  cognoissons  celuy 

DELA  11.    I.  q.  lia,  avec  la  conj.  =  que.  That  it  is. 
2.      9.    ...,  gloriaz  eta  ohorez  coroatl  içan   delà: 

.  .  .  estre  couronné  de  gloire  &  d'honneur: 
7.     8.    ...  :  baina  han  vici  delà  ...  :  mais  .  .  .  qu'il 

vit. 
7.    14.    ...    ludaren   leinutic    ilk[    ican    delà    gure 

launa,  ...  que  nostre  Seigneur  est  issu  de 

luda, 


—  168  — 

10.  25.    .  .  .  HURBiLT/EN  (lelo  egLin  hura.   ...  le  iour 

approcher. 

11.  3.    ...    laincoaren    hitzaz   mundua   eguin   içan 

delà  :  . . .  que  les  siècles  ont  esté  ordonnez 
par  la  parole  de  Dieu,  (L.  is  hère  indepen- 
dent  of  the  Greek  as  well  as  of  Calvins 
French.) 
11.  6.  .  .  .  ecen  laincoa  baDELA,  eta  ...  recom- 
pensaçale  delà.  .  .  .  que  Dieu  est,  ia  qu'il 
est  rémunérateur  (L.  mit  laincoa  en  ita- 
lique parce  que  le  grec  ne  dit  pas  Dieu 
mais  ù-ut  l'a-ut.) 

.  .  .  bozcariotaco  delà,    .  .  .  estre  de  ioye, 

.  .  . ,  REFL'SATU  icaii  (leUi  :   .  .  .  que   .  .  . ,  il  fut 
reietté  : 

,  .  .  gare  anaye  Timotheo  largatu  içan  delà, 
.  .  .  que  iiostre  frère  Timothee  est  deliuré, 

Gratia  delà  çuequin   gucioquin.  Grâce  soit 
auec  vous  tous. 

E.-S.  Dgdgson. 
{A  suivre.) 


12. 

11. 

12. 

17. 

13. 

23. 

13. 

25. 

L'HYPOTHÈSE 


CONTRACTIOMÉÏÉLATRICE  D'ÉTYIOLBWES  liû-ElûfÉEMES 


1°  imber,   uinbra,   ôfxêpoç,   etc. 
2°  [JLéyaç,   {JLeyàX-'/],   mille,  etc. 


T 

Le  latin  luiibra  «  ombre  »,  pour  *uinber-a,  est 
proprement  le  féminin  régulier  du  latin  iinber 
«  pluie  »,  ((  nuage  »,  «  eau  ».  De  son  côté,  le  grec 
o;ji6'p-o(;  «  pluie  »,  peut  être  considéré  comme  la  forme 
masculine  du  même  mot.  Enfin  le  neutre  correspon- 
dant ne  faisait  |)as  défaut  dans  la  langue  mère  :  le 
sanscrit  l'a  conservé  sous  la  forme  du  mot  ablir-am 
pour  ^abha/--am,  *ainbhar-ain,  au  sens  de  «  nuage  ». 
Ajoutons  pour  <;onipléter  la  liste  des  termes  sanscrits 
de  cette  famille  : 

Ambhas  «  eau  »,  dont  le  changement  de  la  finale 
s  en  /•  dans  certains  cas  déterminés  par  le  scnndJà 
rend  compte,  tout  à  la  fois,  de  la  finale  thématique 
/•  de  iimlir-a  féni.),  de  ojjiêp-oî  (masc),  et  de  r/(0///--r^//? 
(neutre). 

12 


—  170  — 

Se.  Ah/i/'-iyas,  adjectif  au  sens  de  «  aqueux,  ora- 
geux, nuageux  »,  en  rapport  de  dérivation  avec  le 
subst.  ambhas. 

Se.  Amhar-am  (subst.  neutre),  au  sens  de  «  en- 
tourage, enveloppe  ». 

Se.  Aiubhii  (subst.  neutre),  au  sens  de  «  eau  ». 

(hiant  à  la  concordance  sémantique,  elle  s'établira 
facilement,  à  la  suite  de  la  concordance  phonétique 
et  morphologique,  si  l'on  fait  remarquer  que  la 
signification  commune  est  celle  de  «  brouillard  »  ou 
de  «  nuage  pluvieux  »,  enveloppant  d'ombre  ou  de 
ténèbres  l'ensemble  des  choses  visibles. 

Nous  achèverons  la  preuve  de  ces  rapports  en 
rappelant  que  la  même  constatation  ressoit  de  la 
synonymie  originaire  du  se.  iiabhas,  «  enveloppe 
du  ciel  »,  du  gr.  vÉti-o;  «  nuage  »,  v/^â;  «  neige  »  et 
«  pluie  »,  et  vîc&io  «  neiger  »,  —  du  lat.  niibes  «  nuage, 
ombre,  voile  »,  du  gr.-lat.  vû^o-t,,  lyinpha  «  l'eau  my- 
thique personnifiée»,  etc. 

Conclusions  :  1°  L'ombre  a  été  considérée  d'abord 
comme  brume  ou  brouillard. 

2*^  Le  sens  primitif  de  nùbo  est  «couvrir,  voiler  »; 
celui  d'épouser  est  secondaire. 

Il 

Des  développements  analogues,  accompagnés  de 
contractions,  ont  donné  naissance  à  des  formes  aussi 
curieuses,  prises  parmi  les  dérivés  de  la  famille  à 
laquelle  appartient  le  gr.  [xi'^%^  «  grand  ». 

Nous  nous  en  rendrons  compte  en  établissant 
d'abord   la    possibilité   de   la   chute   d'une   gutturale 


—  171  — 

(/.  ou  y;  c  '^o  g]  devant  la  liquide  X  (lat.  /).  Entre  dif- 
férents exemples  ce  phénomène  phonétique  se 
remarquedansle  \?i\.. paulum,  pour  '*pauc-l uni,  comme 
l'indique  pauc-us.  Appliquant  cette  hypothèse  à  la 
recherche  de  Tétymologie  du  lat.  mel-ioi\  nous 
serons  en  droit  de  conclure  que  la  forme  anté-classi- 
que  de  ce  mot  était  meg-l-ior,  à  savoir  le  compara- 
til"  masculin  de  Tadjectif  [xi'cx:,  sous  la  forme  altérée 
par  le  rhotacisme,  piyap  (cf.  \j.t-(yl  par  lambdacisme 
ultérieur),  et  dont  le  féminin  est  resté  sous  la  forme 
très  régulière  [xz-^H-r^.  Explications  analogues  pour  la 
série  suivante  qui  s'y  rattache  : 

Gr.  ijtâXa  «  grandement,  fortement  »,  pour  *;jiaY'X-a, 
neutre  plur.  de  Tadjectif  *[jLaY'X-o;,  employé  adverbia- 
lement. 

Gr.  ijiàXXov  pour  ^uaY'À-jwv,  comparatif  neutre  sing. 
employé  adverbialement,  se  rattachant  au  même 
adjectif. 

Gr.  [jLâX-tffx-a  pour  [x%-fh-'.i~-'x,  neutre  plur.  du  super- 
latif correspondant  employé  adverbialement. 

Gr.  ij.aX£pôç  pour  ijtaY'X-spo;,  adj.,  «violent,  robuste  ». 

11  convient  d'ajouter  à  cette  liste  le  lat.  mille,  très 
probablement  pour  *//?/^7-p  au  sens  primitif  de  «grand 
(nombre)  »,  —  ainsi  que  le  gothique  niikils  et  les 
noms  gaulois  magulus  et  magliis,  indiqués  par 
M.  Yendryès  [Mcm.  de  la  Société  de  Linguistique  de 
Paris,  XIII,  225  ,  et  dont  le  sens  est  très  probable- 
ment celui  de  «  grand  ». 

.le  n'ajouterai  rien  pour  l'instant  aux  observations 
générales  que  suggère  l'exposé  de  ces  faits  :  les 
leçons    qu'ils    comportent    se    dégageront    d'elles- 


—  172  — 

mêmes,  totoii  tard,  grâce  aux  travaux  des  phonétistes 
compétents. 

III 

ADDENDA 


Rapprochements    de   formes    linguistiques    au    sens 

fondamental  de  grand  dont  le  vocalisme  s'encadre 

Cp 
dans  {le  graphique)    ?-~X~f\- 

A 

Le  radical  gr.  /iX-o  «  mille  »,  est  pour  (jjLJ'y.À'-o,  et 
s'identifie  par  là,  pour  le  sens  et  la  forme,  avec  le  lat. 
mille  {mih-l-e),  compte  étant  tenu,  d'ailleurs,  des 
contractions  qui  ont  resserré  les  éléments  phonéti- 
ques de  l'un  et  l'autre  de  ces  vocables. 

B 

Le  nom  actuel  d'Achille,  le  héros  vaillant  et  fort 
des  poèmes  homériques,  part  d'un  antécédent, 
jjLfa/-tU-£tj  (forme  actuelle  'AyOl-vjç)  dont  le  sens  pro- 
pre et  original  est  d'accord  avec  Vidée  grandiose  que 
suggèrent  les  faits  et  gestes  du  Péléide  ;  —  cf.  l'épi- 
thète  àXxtSiiç  «  le  fort  »,  qui  s'est  adaptée  au  nom 
d'Hercule. 

G 

Au  goth.  mikils  «  grand  »  et  au  lat.  tnille  imili-l-c) 
«  grand  »  (par  le  nombre),  d'oii  notre  mot  mille,  se 
rapproche  surtout  le  lat.    miles  (pour  ^mlh-l-es)  au 


-    173  — 

sens  de  «  troupe  »;  d'où  «  celui  qui  fait  partie  d'une 
troupe  armée,  attroupée  =  soldat  »  (au  plur.  «mili- 
taires, troupiers,  etc.». 

Explication  analogue  pour  le  lat.  môLês  {/)iôh-'l-ës) 
au  sens  de  «  multitude  »  =  «  grand  nombre,  masse  » 
(confusion  de  l'idée  du  sing.  et  de  celle  du  plur.).  — 
Autres  formes  apparentées  :  .atoXo;  pour  *[jiw/-"X-o;  au 
sens  d'  «  effort  »  =  «  emploi  de  la  force  »,  auprès 
de  o/'X-oç  pour  *;jlj^o/-'X-o;  au  sens  de  «  troupe,  mul- 
titude »,  yLoy-'l-6:;  «  levier  =  outil  pour  l'eflf'ort, 
—  qui  sert  l'effort  »;  —  ;jijÀo^  pour^ijijy-'À-o;  au  sens  de 
«  meule,  masse  »  ; —  ;i.j).T,  pour  *iijy-l-r„  même  sens 
et  même  explication  phonétique  ;  —  o^up-ô;,  È/jp-ô; 
«  fort  »,  probablement  pour  un  antécédent  com- 
mun    ';JLO£/-'jp-o;,  *;jij:c/-jp-0(;,    etc. 

D 

Conclusion  des  faits  qui  précèdent  au  point  de  vue 
de  la  sémantique  germanique;  se  rattachent  au  rad. 
;i.£Y  avec-  l'idée  de  grandeur  et  de  force  : 

Allemand  uiehr  a   plus  », 

—  uuicht  V   puissance   », 

—  môgen   «   pouvoir   »,   etc. 
Anglais  more  «   plus  », 

—  nui  cil   «   beaucoup  », 

—  miglil  c(   pouvoir  »,   etc. 

D'où  la  constatation  importante  qu'en  ce  (jui  con- 
cerne celte  famille,  l'idée  de  pouvoir  a  pour  hast 
celle  de  grandeur  ou  de  force. 

l'aul   Regnald. 


LE  MALAIS  VULGAIRE 

VOCABULAIRE 

ET 

ÉLÉMENTS  DE  GRAMMAIRE 


INTRODUCTION 

Les  Malais  paraissent  originaires  de  l'ancien 
royaume  de  Tyampa,  qui  s'étendait  le  long  de  la 
côte  de  l'Indo-Chine,  à  l'est  du  Delta  du  Mékong. 
De  là,  ils  se  répandirent  sur  la  presqu'île  de  !Ma- 
lakka,  sur  Tlnsulinde  et  jusqu'en  Polynésie.  Com- 
merçants ou  pirates,  ils  s'établirent  principalement 
sur  les  côtes,  introduisant  partout,  avec  Tislâm  qu'ils 
avaient  adopté  au  XIII"  siècle,  leur  langue,  qui  de- 
vint la  lingua  franco  de  toute  la  Malaisie, 

Abâtardie,  mais  enrichie  aussi  par  de  nombreux 
emprunts  au  sanscrit,  à  l'arabe  et  aux  langues  des 
peuplades  conquises,  puis,  au  XVI"  et  au  XVIP  siè- 
cle, par  des  mots  introduits  par  les  conquérants  por- 
tugais et  hollandais,  cette  langue,  le  malais  vulgaire, 
se  parle   aujourd'hui  sur   tontes  les  côtes,  d(>puis  la 


—   17o  - 

Pointe  d'Atchin  juscju'à  la  .Nouvelie-Guinée  :  tlaiis 
la  presqu'île  de  Malakka,  dans  certaines  régions  de 
la  Cochinchine  et  du  Cambodge,  à  Sumatra,  à  Java. 
à  Bornéo,  à  Célébès,  dans  les  petites  îles  de  la  Sonde, 
aux  Moluques,  etc.  Et  le  lagal  des  Philippines,  la 
langue  des  indigènes  de  la  cote  de  Formose  et  le 
malgache  ne  sont  eux-mêmes  (|ue  des  idiomes  déri- 
vés du  malais. 

La  connaissance  du  malais  vulgaire  est  indispen- 
sable à  tous  ceux  qui  voyagent  dans  l'archipel  indo- 
australien. Son  acquisition  est  d'ailleurs  des  plus 
faciles  :  quelques  semaines  d'étude  et  de  pratique 
suffisent  pour  comprendre  les  indigènes  et  se  faire 
comprendre.  Il  est  évident  que,  dans  une  région  aussi 
étendue,  il  existe  plusieurs  dialectes,  et  que  le  parler 
des  gens  de  Padang  diffère  de  celui  des  habitants  de 
Ternate  ;  mais  les  différences  sont,  en  somme,  peu 
considérables,  et  il  suffit  de  connaître  un  dialecte 
malais  pour  se  tirer  d'affaire  dans  la  Malaisie  en- 
tière. 

Le  présent  vocabulaire  est  .surtout  celui  des  grands 
centres  :  Singapour,  Batavia,  Sourabaya,  avec  lequel 
on  peut  se  faire  comprendre  partout.  Quand  nous 
nous  sommes  trouvé  en  présence  de  deux  mots 
différents  exprimant  la  même  chose,  nous  les  avons 
donnés  tous  deux  ou  nous  avons  choisi  celui  doiil 
l'usage  nous  a  paru  le  plus  répandu, 

(Hiant  à  la  transcription,  nous  l'avons  simplifiée 
autant  (jue  possible,  n'utilisant  que  les  lettres  stricte- 
ment nécessaires.  Elles  se  prononcent  toutes  et  con- 
servent toujours   leur  son  al|)liab(''lique. 


—  176  - 

Règles  de  Proîionciation. 

Parmi  les  voyelles,  «,  /  et  o  se  rendent  comme  en 
français  ; 

Il  se  prononce  toujours  comme  ou  (Ex.  :  gunung 
=  gounoung)  ; 

e  et  é  se  prononcent  à  peu  près  comme  dans  le 
mot  liberté;  cependant,  dans  la  première  syllabe,  Ve 
est  généralement    presque   muet.   (Ex.  :  sebab,  etc.) 

Les  voyelles  particulièrement  longues  ont  été  pour- 
vues d'un  accent  circonflexe.  iEx.  :  bodô.) 

Les  voyelles  nasales  n'existent  pas  :  an,  am,  en, 
em,  i/i,  im,  on,  om,  un,  uni,  se  prononcent  donc  ann, 
amm,  enn,  emni,  inii.  innn,  onn,  onini,  oun,  ouni. 
(Ex.  :  hutan  ^  houtann.) 

Dans  les  diphtongues,  les  voyelles  se  prononcent 
séparément  :  ai  =  aï,  au  =  aou.  (Ex.  :  kain  =  ka'in, 
taun  =  taoun.) 

Les  consonnes  ont  le  même  son  qu'en  français; 
cependant  Vh  est  toujours  —  quoique  légèrement  — 
aspiré;  1'^,  sifflant;  le  ^ se  prononce  toujours  comme 
devant  a,  o,  u  (Ex.  :  gila  =  guila,  gedong  =  gue- 
dong\  le  k,  à  la  fin  d'un  mot,  est  presque  muet 
(Ex.  :  baïk  =  bai")  ;  Vf  ne  se  trouve  guère  que  dans 
des  mots  d'origine  étrangère,  et  les  indigènes  lui 
donnent  généralement  le  son  de  p  Ex.  :  fransis 
=  pransis).  —  La  prononciation  des  consonnes 
composées  dj  et  hj  se  rapproche  de  celle  de  di  et  // 
dans  les  mots  diable  et  tiai'e  ;  ng  se  prononce  com- 
me en  chinois  ou  en  allemand,  dans  les  mots  Ding, 
faug,  etc. 


177 


I.  —  SUBSTANTIFS 

OniGINE      DES      NOMS      MALAIS 

In  grand  nombre  de  noms  malais  sont  tirés  de 
l'aral^e.  (]e  sont  surtout  des  termes  métaphysiques  : 
AlldJi  (Dieu),  (luuin  (univers),  ahnl  (intelligence), 
htikum  (loi),  sadaha  (aumône),  etc.  ;  mais  aussi  des 
noms  physiques  :  Idfab  {livre),  surat-kahaf^  (journal), 
garfii  (fourchette),  kiosi  (siège),  kaua  (café),  etc. 

Beaucoup  d'autres  substantifs  sont  des  mots  por- 
tugais ou  espagnols  à  peine  altérés;  ce  sont  e.xclu- 
sivement  des  noms  concrets  :  handéva  ^drapeau), 
honihd  (pompe),  roda  (roue),  niarlil  (marteau),  trigu 
(blé),  teiuhako  (tabac),  tint  a  (encre),  didal  (dé),  man- 
téga  (beurre),  sabun  (savon),  toala  (serviette),  sako 
(sac),  baiiko  (banc),  leniari  Q.Ymo\ve),  karéta  ^'oiture), 
sepatii  'soulier;,  kûniédja  (chemise),  soldada  (soldat), 
padi-e  (prêtre),  etc. 

D'autres  encoi-e,  moins  nombreux,  sont  hollan- 
dais :  kamar  (chambre),  setal  (écurie;,  kantor  (bu- 
reau), Ixcirap  (carafe),  jas  (veste),  glas  (verre),  koki 
(cuisinier),  jonges  (domestique),  mots  qui  ne  se 
trouvent  d'ailleurs  guère  que  dans  le  vocabulaire 
des  indigènes  au  service  des  Européens  aux  Indes 
néerlandaises. 

Les  Anglais,  dont  les  établissements  en  Malaisie 
sont  postérieurs  et  moins  étendus  que  ceux  des 
Hollandais,  n'ont  doté  le  malais  (jue  de  très  peu  de 
mots. 


—   178  — 

D'autres  noms  sont  d'orip^ine  hindoue,  chinoise, 
javanaise,  etc. 

Beaucoup  de  substantifs  malais  ne  sont  f|ue  des 
adjectifs  ou  des  verbes  employés  comme  tels  : 

Adjectifs  :  giia  (fou,  folie),  djctga  (attentif,  atten- 
tion), sala  (coupable,  faute  ,  nuira  'emporté,  colère  , 
main  (honteux,  hontei  djahal  (méchant,  vice),  inalas 
(paresseux,  paresse),  etc. 

Verbes  :  lidor  (dormir,  sommeil),  balok  tousser, 
toux),  makan  fmanger,  repas),  saka  (aimer,  désir\  etc. 
—  Quelquefois  le  substantif  se  forme  par  Taddition^ 
au  verbe,  du  sufïixe  an,  ou  de  celui-ci  et  du  préfixe 
ka.  Exemples  :  inakanan  (aliments,  makan  =  man- 
ger) ;  minuman  (boissons,  niinuni  =:z  ho'ire),  kah'ha- 
tan  (vue;  liliat  =  voir),  katakutan  (terreur;  takiit 
=  craindre). 

NOMS  COMPOSÉS. 

Les  noms  composés  sont  nombreux  ;  ils  sont  for- 
més de  deux  substantifs,  d'un  substantif  et  d'un  ad- 
jectif, ou  d'un  substantif  et  d'un  verbe,  réunis  sans 
aucune  préposition.  Exemples  : 

Deux  substantifs  : 

mata-hari  (œil-jour)  =  soleil, 
^M/îM/?^-r//;/ (montagne-feu)  ^=^  volcan. 
areng-batu  (charbon-pierre)  =  houille, 
orang-liulan     homme-forèt)    =    orangoutaii.    cl»-. 

Substantif  cl  adjcviif  : 

pokok  ketj'il  (ar])ve  petit)  =  buisson. 
ru  ni  put  k/'ing  (herbe  sèche)  =  foin. 


—  179  — 

tenibaga  hitning  'enivre  jaune    =  laiton, 
tima  puti   plomb  blanc    =z  étain,  etc. 

Substantif  et  verbe  : 
tali-ikat  (lien-serrer)  =  ceinture, 
lc(tniar-tidor  (chambre-dormir)  =  dortoir, 
orang-minta  (homme-mendier)  =  mendiant, 
()!•(( ng-dayong  (homme-ramer)  =  rameur,  etc. 

(;enrk. 
En  malais,  il  n'y  a  une  difterence  de  sexe  que 
pour  les  êtres  animés  :  hommes  et  animaux.  L'ar- 
ticle n'existant  pas,  et  le  substantif  lui-même  étant 
invariable,  la  distinction  se  fait  par  les  mots  îahi- 
laki^    homme t  el  prampiian    femme  .  Exemple  : 

anak  laki-laki  =  garçon  ;  anak  pvampuan  :=  fille 
'anak  =  enfant). 

Pour  désigner  le  sexe  des  animaux,  on  peut  se 
servir  des  mêmes  termes;  mais  on  fait  usage,  plus 
communément,  de  djaiilan  niàle  et  bclina  femelle,. 
Exemple  : 

kiida  (Ijdiitan   =   étalon  ;   kiida  bclina   =  jument 
{knda  =  cheval;. 

NOMBRE. 

On  forme  le  pluriel  diin  substantif  en  le  doublant. 
Exemple  : 

(la  ou  une)  maison  :=  riinia  ;  (les  ou  des)  maisons 
=  rania-runia. 

1.  Ovcuuj  —  homme  dans  le  sens  du  latin  homo,  de  l'allemand 
Mcnsch  ;  laki-laki  =  liomme  dans  le  sens  du  latin  c//',  de  l'alle- 
mand Mann. 


—  180  — 

On  ne  double  pas  le  mot  quand  la  pluralité  est 
évidente.  Exemples  : 

anipat  rama   =   quatre    maisons  ;   banyak    ru  ma 
=  beaucoup  (de)  maisons. 

Certains  substantifs  s'emploient  toujours  douliles  : 
ce  sont  des  noms  collectifs,  comme  burang-barang 
(bagages),  nianik-nianik  (perles  de  verre),  alang- 
alang  (une  herbe  haute,  très  répandue  en  Malai- 
sie),  etc. 

COMPLÉMENT    DU    NOM. 

Le  complément  d'un  nom  se  j)iace  a  sa  suite  sans 
aucune  préposition.   Exemples  : 

puntjak  gunjing  =  (le)  sommet  (de  la)  montagne. 
kapala  desa  =^  (le)  chef  (du)  village,  etc. 


Vocabulaire  des  Substantifs 

ASTRES,    MÉTÉORES,     ETC. 


Soleil 

ma  ta -ha  ri 

lune 

bulan 

étoile 

bintaug 

terre 

hunii 

monde,  univers 

dunia 

ciel 

langit 

air 

udara 

eau 

ayer 

terre,  sol 

tana 

feu 

api 

-   181   — 

niiago  auan 

brouillard  habut 

pluie  hudjan 

rosée  umban 

neige  saldj 

glace  ayer-batu 

vent  angin 

tempête  ribut 

ouragan  tofan 

tonnerre  guntur,  guro 

éclair  kilat 

arc-en-ciel  plangi 

TERRE,     MER,    ETC. 


terre 

tana 

mer 

laut 

nord 

utara 

sud 

selatan 

est 

timor 

ouest 

barat 

cote,  rive 

darat 

plage 

panté 

pays 

negri 

Ile 

pulu 

cap,  promontoire 

tandjong, 

udjong 

baie 

teluk 

chenal,  passa 

ge 

trusan 

roc,  ('cueil 

batu,  karang 

sable 

pasir 

poussière 

habu 

boue 

lumpur 

—  182 


montagne 

colline 

volcan 

sommet 

plaine 

vallée 

forêt,  jungle 

fleuve 

rivière 

ruisseau 

source 

cascade 

lac,  étang 

marécage 

vague 

marée  haute 

marée  basse 


gunung 

bukit 

gunung-api 

puntjak 

padang 

lemba 

hutan 

kali 

sungé 

sungé  ketjil 

mata-ayer 

ayer  terdjun 

tasek,  danan,  telaga 

paya 

ombak 

ayer  surut 

ayer  pasang 


LE    TEMPS. 


uaktu,  tempo 
ta  un 
musim 
musiiu  panas 


temps 

année 

saison 

saison  sèche  (chaude) 

saison  pluvieuse  (froide)    musim  dingin 

mois  bulan 

semaii)e  minggo 

jour  ha  ri 

heure  djam  ' 


1.  Djani  est  l'analogue  de  l'anglais   «  Iwnr  »,    de   l'allemand 
«  Stundc  »,  de   l'espagnol   «  hofa  ».   Dans    une   phrase   comme 


183 


demi- ho  lire 

sienga  djam 

quart  (rheure 

sa'  per  ampat  djam 

matin 

pagi 

midi 

stenga  hari 

soii- 

soré,  petang 

nuit 

malam 

minuit 

stenga  malam 

dimanche 

hari  minggo 

lundi 

hari  senin 

mardi 

hari  selasa 

mercredi 

hari  rebô 

jeudi 

hari  kamis 

vendredi 

hari  djuraaët 

samedi 

hari  sabtu 

jour  de  fête 

hari  radja 

l'homme. 

homme  (homo) 

orang 

homme  ivirj 

laki-laki 

le  m  me 

prampuan 

enfant 

anak 

garçon 

anak  laki-laki 

lille 

anak  prampuan 

corps 

badan 

squelette 

rangka 

os 

tulang 

celle-ci  :  il  faut  deux  heures  pour  aller  à...,  on  traduira  «  deux 
heures  »  par  «  dua  djam  »  ;  mais  dans  «  il  est  deux  heures  »  ou 
«  je  viendrai  à  deux  heures  »  on  dira  «  pukul  dua  »  ;  en  ce  cas 
tt  pukul  »  (frapper,  sonner)  correspond  à  l'anglais  «  o'clock  »,  ù 
l'allemand  «  Uhr  »,  à  l'espagnol  «  las  ». 


Ifi4  — 


chair 

daging 

peau 

kulit 

sang 

dara 

sueur 

ayer  kring 

voix 

suara 

respiration 

nafas 

tête 

kapala 

face 

muka 

front 

dahi 

joue 

pipi 

menton 

dagu 

mâchoire 

rahang 

œil 

mata 

paupière 

klopak-mata 

nez 

hidong 

narine 

lobang-hidong 

oreille 

kuping,  telinga 

bouche 

mulut 

lèvre 

bibir 

langue 

lida 

dent 

gigi 

cheveux,  poils 

rambut 

barbe 

djengut 

cerveau 

otak 

cou 

leher. 

épaule 

bahu 

dos 

blakang 

poitrine 

dada 

cœur 

hati 

poumon 

paru 

ventre,  estomac 

prut 

185 


taille 

pinggang 

fesses 

pantat 

membre 

angguta 

bras 

langan 

coude 

siku 

poignet 

gelangan 

poing 

gengam 

niain 

tangan 

paume  de 

la  main 

tapak-tangan 

doigt 

djari 

pouce 

djumpol 

ongle 

kuku 

cuisse 

paha 

jambe,  pied 

kaki 

genou 

lutut 

cheville 

jîiata-kaki 

talon 

tu  mit 

plante  du 

pied 

tapak-kaki 

orteil 

dja  ri-kaki 

MALADIES,    ETC. 


maladie 

sakit,  penjakit 

blessure 

luka 

fatigue 

lété 

sommeil. 

repos 

tidor 

fièvre 

demam 

folie 

gila 

faim 

lapar 

soif 

aus 

douleur, 

mal 

usik 

toux 

batok 

13 


—  186  — 


enflure 

ulcère 

tumeur 

éruption 

mal  de  tète 

mal  de  la  poitrine 

médicament 

poison 


famille 

race,  tribu 

mari,  époux 

femme,  épouse 

parents 

père 

mère 

enfant 

fils 

fille 

frère 

sœur 

grand'père 

grand'mère 

petit-fils,  petite-fille 

oncle 

tante 

cousin,  cousine 

neveu 

nièce 

mariage 


bengkok 

bisul 

bongko 

djeravat 

sakit  kapala 

sakit  dada,  etc. 

obat 

ratjun 

LA    FAMILLE 

anak-ber-anak 

bangsa 

laki 

bini 

orang  tua 

baba 

mak 

anak 

anak  laki-Jaki 

anak  prampuan 

sudara  laki-laki,  abang 

sudara  prampuan,  kakak 

ungkong 

ma 

tjutju 

baba  sudara 

mak  muda 

sa-pupu 

anak  sudara  laki-laki 

anak  sudara  prampuan 

kauirï 


—  187  — 

veuf,  veuve  djanda 

orphelin  anak  yalim 


pays 

nation 

France 

Angleterre 

Hollande 

Chine 

Français 

Anglais 

Hollandais 

Chinois 

Malais 

Javanais 

Siamois 

nègre 

Batavia 
Singapore 

indigène 

étranger 

chrétien 

mahoniétan 

bouddhiste 

Israélite 


PAYS,    NATIONS,    RELIGIONS 


negri 

bangs 

a 

negri 

fransis 

» 

inglis 

» 

blanda 

)) 

tjina 

etc. 

orang 

fransis 

)) 

inglis 

n 

blanda 

» 

tjina 

» 

melayu 

» 

djava 

)) 

siam 

>) 

kafri,  o.  hitam 

etc. 

Betavi 

Singapura 

etc. 

orang 

negri 

» 

asing 

» 

srani 

t) 

slam 

» 

buda 

» 

yahudi 

etc. 


—  188  — 


niGNITKS    ET    PROFESSIONS. 


empereur 

SI 

dtan 

roi 

ra 

dja 

prince 

ra 

den 

gouverneur 

gobenor 

chef 

k£ 

ipala 

prêtre 

pa 

dre, 

pandita. 

jiige 

hakim 

commerçant 

saudagar 

maître  d'école 

guru 

médecin 

dokter 

pharmacien 

tukang  obat 

orfèvre 

» 

mas 

maçon 

» 

batu 

charpentier 

» 

kayu 

forgeron 

» 

besi 

boulanger 

)) 

rôti 

tailleur 

» 

djahit 

cordonnier 

)) 

sepatu 

blanchisseui' 

)) 

menatu 

barbier 

etc. 

» 

tjukor 

marin 

orang 

laut 

marchand 

» 

dagang 

gardien 

» 

djaga 

serviteur 

)) 

gaflj' 

journalier 

)) 

kuli 

mendiant 

» 

minta 

contre-maître 

mandur 

—  189  — 

agent  de  police  mata-mata 

paysan  rayât 

cuisinier  koki 

servante  indigène  babu 

sage-femme  diikun 

danseuse  rongeng 

esclave  hamba 

brigand,  voleur  pentjuri 

pirate  prompak 

etc. 

Monsieur'  luan,  sinyo 

Madame  nyonya,  nya,  mem 

Mademoiselle  nonna 

AGGLOMERATIONS    HUMAINES,   ÉDIFICES,   ETC. 

ville  kota,  bandar 

bourg;,  village  desa 

hameau,  quartier  kampong 

maison  ruma 

hutte  poiidok 

route,  rue  djalan  besar 

1.  Les  indigènes  des  Indes  néerlandaises  ne  se  servent  du  tei'me 
«  (nan  »  (seigneur)  que  vis-à-vis  des  Européens  et  des  Arabes.  Il 
s'emploie,  comme  «  monsieur  »,  seul  ou  accompagné  d'un  titre  : 
taaa  doktcr,  etc.  «  Sinjo  »  s'emploie,  comme  «  inoster  »  en  an- 
glais ou  «  senorito  »  en  espagnol,  en  s'adressant  à  des  enfants  et 
à  des  jeunes  gens.  «  Ni/om/n  »  se  dit  à  une  dame  européenne 
mariée,  «  nonna  »  à  une  jeune  Hlle.  Les  métis  de  pérè  européen 
(half-castes,  kleurlingen),  mariés  ou  non,  sont  titulés  «  sinr/o  » 
et  «  nonna  ».  Dans  les  colonies  anglaises,  «  m/oni/a  n  et  u  nonna.  » 
sont  remplacés  par  «  inem  »  (madame). 


—  190  — 


chemin 

djalan 

ruelle,  sentier 

lorong 

canal 

parit,  trusan 

pont 

djembatan,  dedoko 

marché,  bazar 

pasar 

place 

alun-alun 

promenade 

padang 

palais 

kraton,  istana 

église 

gredja 

mosquée 

mesigit 

temple,  pagode 

tempat  sembayang 

magasin,  hangar 

gedong 

boutique 

toko,  varong 

théâtre 

vayang 

caserne 

tangsi 

bureau 

ofis,  kantor 

poste 

pos 

banque 

tempat  vang 

bain 

»       mandi 

école 

ruma  skola 

hôpital 

»     sa  kit 

pharmacie 

n     obal 

hôtel,  restaurant 

n     makan 

prison 

»     tutup,  penyara 

jardin 

kebun 

ferme,  plantation  . 

ladang,  kebun 

clôture,  haie 

pagar 

cimetière 

kuburan 

tombe 

kubur 

marabout 

kramat 

—  191 


MAISON,    MEUBLES,   ETC. 


maison 

meubles 

brique 

tuile 

poutre 

planche 

mur 

cloison 

toit 

plafond 

plancher 

cheminée 

porte 

fenêtre 

clef 

chambre 

chambre  à  coucher 

salle  à  manger 

cuisine 

salle  de  bain 

commodités 

écurie 

remise 

poulailler 

escalier,  échelle 

table 

chaise 

canapé,  banc 

armoire 


ruma 

pekakas  ruma 

batu-bata 

genting 

batang-kayu 

papan 

tembok 

dinding 

atap 

langit-langit 

lanté 

tjorong-asap 

pintu 

djandela 

kuntji 

kamar,  bilek 

kamar-tidor 

kamar-makan,  etc. 

dapur 

kamar  mandi 

kamar  buang  ayer 

tempat  kuda,  setal 

ruma  kareta 

kandang  ayam 

langa 

médja 

krosi 

banko 

le  mari 


—  192  — 

toilette  médja  tjutji  tangan 

lit  tempat  tidor 

matelas  tilam 

oreiller,  coussin  bantal 

rouleau  guling 

drap  de  lit  kain 

couverture  kain  panas 

taie  d'oreiller  sarong  bantal 

moustiquaire  klambu 

miroir  katja,  tjermin-miika 

pendule  lontjeng 

tableau  gambar 

cage  sangker 

paravent  sampiran 

rideau  tabir,  pagar 

natte  tikar 

lapis  permidani 

cloche,  sonnette  lotjeng 


D""  F.  Weisgerber. 


(A  suivre.) 


LA  SCIENCE  a  LES  ÂMATELRS 


On  me  communique  un  numéro  daté  du  17  janvier 
1907,  du  journal  quotidien  w  économique  et  litté' 
raire  »  La  politique  coloniale.  En  tète  de  ce  numéro, 
est  un  article  signé  w  Henri  Mager,  du  Conseil  supé- 
rieur des  Colonies»,  intitulé  «  les  origines  du  Tahi- 
tien  et  des  Tahitiens  ».  En  commençant,  Tauteur 
rappelle  que,  dans  le  même  journal,  le  7  juillet 
1902,  il  a  démontré  que  le  malgache  «  dérive  direc- 
tement d'une  l'orme  primitive  asiatique  »  et  que 
«  comme  ses  frères  le  battak,  le  malainésien  (sic)  et 
le  polynésien,  il  s'est  constitué  par  des  modifications 
de  consonnances  (jui  sont  régulières  et  (jui  le 
caractérisent  parce  qu'elles  lui  sont  propres  »  ;  et  il 
ajoute  :  «  Depuis,  j'ai  recherché  de  quelle  forme 
primitive  asiaticjue  dérive  le  malgache,  et  ma  convic- 
tion est  faite  aujourd'hui  :  le  malgache  descend  en 
ligne  directe  de  la  langue  originelle  des  Indo-Euro- 
péens.  »  Ceci  posé,  M.  Mager  prétend  démontrer 
(|ue  le  tahïtieii  est  apparenté  au  malgache  et  par 
conséquent  à  l'indo-européen  primitif.  Si  l'on  jette 
les  yeux  sur  les  raisonnements  et  les  prétendues  dé- 
monstrations de  l'auteur,  on  reste  confondu  devant 
l'ignorance,  qu'on  me  permette  le  mot,  et  la  naïveté 
(jui  s'.y  révèlent. 


—  194  — 

Le  procédé  est  véritablement  enfantin.  Il  me  suf- 
fira de  citer  un  exemple  :  «  Grâce  »,  dit  M.  Mager, 
«  aux  règles  de  concordance  que  j'ai  posées,  il  est 
loisible  de  déduire  de  la  racine  primordiale  la 
forme  probable  des  mots  malgaches  correspondants. 
A  la  racine  primordiale  la-ba  (tomber  ,  d'où  vient 
le  latin  la-bo  (chanceler),  devra  correspondre  un 
mot  malgache  en  la-b  ou  la-v  :  ouvrant  le  dic- 
tionnaire malgache  à  la  lettre  /,  nous  y  verrons 
le  mot  la-vo  qui  signifie  précisément  tomber.  »  Et 
Ton  nous  explique  que,  si  le  malgache  a  été  pris 
pour  intermédiaire  de  préférence  aux  autres  lan- 
gues du  même  groupe^  c'est  parce  qu'il  a  seize 
consonnes  (f,  h,  m,  n,  p,  r,  t,  v,  b,  d,  j,  i,  k,  1, 
s,  z),  tandis  que  le  tahitien  n'en  a  que  huit  (f, 
h,  m,  n,  p,  r,  t,  v).  C'est  pourquoi  le  tahitien, 
qui  a  laissé  tomber  la  consonne  de  quantité  d'élé- 
ments constitutifs,  ne  permet  pas  la  recherche  directe 
des  éléments  qui  l'ont  formé  :  il  dit  i-te  (pénétrerJ 
pour  le  mot  malgache  i-di-tra .  Un  dernier  exemple  : 
«  la  racine  gha-da  (creuseri  a  constitué  le  mot  sans- 
crit katvalas  (fossse),  le  mot  grec  hêthis  (urne),  le 
mot  latin  catinus  (plat  creux),  le  mot  malgache  hadi 
(creux)  et  le  mot  tahitien  etu  (creuser)  ». 

Je  n'aurais  pas  relevé  ces  fantaisies,  s'il  n'était 
à  craindre  que  quelques  lecteurs  de  bonne  foi  ne 
les  prissent  au  sérieux.  C'est  pourquoi  il  m'a  paru 
bon  de  protester  une  fois  de  plus  contre  les  préten- 
tions des  amateurs  à  l'encontre  de  la  méthode  et  des 
affirmations  de  la  science. 

Julien  ViNSON. 


NÉCROLOGIE 


iNous  avons  annoncé,  dans  notre  dernier  numéro, 
la  mort  de  notre  ami  regretté,  W.  Webster.  L'amour 
de  la  vérité  nous  oblige  à  dire  que  c'est  uniquement 
pour  raison  de  santé  qu'il  alla^  en  1858,  dans  l'Amé- 
rique du  Sud. 

A  la  liste  de  ses  ouvrages,  il  faut  ajouter  le  suivant, 
qui  a  paru  sans  nom  d'auteur,  et  qui  est  un  recueil 
d'articles  publiés  dans  V Anglican  ChurcJi  Magazine  : 

6.  Sonie  features  of  modem  romani sni.  Londres, 
Society  for  promoting  Christian  knowledge,  1884,  pet. 
in-8^  viij-159  p.  ;  —  2«  éd.,  1898,  viij-224  p. 

Nous  avons  également  à  déplorer  la  mort,  surve- 
nue le  9  février  dernier,  d'un  de  nos  anciens  collabo- 
rateurs, M.  Victor  Henry,  qui  s'est  occupé  surtout 
des  langues  américaines  et  des  idiomes  indoeuro- 
péens  classiques  (sanskrit,  grec  et  latin).  Son  dernier 
travail,  dans  cette  Revue,  a  été  un  article  sur  le  pré- 
tendu langage  de  la  planète  Mars  inventé  par  une 
visionnaire  spirite. 

Né  à  Colmar  en  1850,  docteur  en  droit,  conserva- 
teur de  la  Bibliothèque  de  Lille,  docteur  es  lettres, 
professeur  à  la  F'aculté  des  Lettres  de  Douai,  et  enfin 
professeur  de  sanskrit  et  de  gra-mmaire  comparée  à  la 
Sorbonne,  il  laisse  le  souvenir  d'un  travailleur 
acharné,  d'un  homme  aimable  et  d'un  esprit  original. 

.1.  V. 


BIBLIOGRAPHIE 


Linguistic  survey  of  liidia.  Toine  \\ .  Mundâ  and 
Dravidian  languages.  (]ompiled  and  edited  by 
G. -A.  Grierson.  Calcutta,  Gov.  printing  ofïice,  1906, 
in-fol.,  xvj-681  p.  et  2  cartes. 

L'œuvre  excellente  se  poursuit,  sous  Tactive  et  in- 
telligente direction  de  M.  G. -A.  Grierson.  Le  présent 
volume,  —  le  huitième  qui  a  paru  sur  les  seize 
qu'on  nous  a  promis,  —  est  extrêmement  intéressant  : 
il  est  consacré  au  Munçlâ  et  au  Dravidien,  c'est-à-dire 
aux  deux  familles  anaryennes  les  plus  importantes  de 
rinde;  elles  représentent  une  popidation  de  soixante- 
dix  millions  d'hommes^  c'est-à-dire  près  du  quart 
de  la  population  totale.  Il  parait  que  le  volume  a  été 
préparé  par  M.  Sten  Konow,  de  Norvège,  et  que  les 
épreuves  de  la  partie  dravidienne  ont  été  revues  par 
V.  Venkayya,  épigraphiste  d\\  Gouvernement  de 
Madras. 

Je  ne  m'occupe  ici  que  de  la  j)artie  dravidienne, 
qui  commence  à  la  p.  277.  11  est  extrêmement  regret- 
table que  M.  Grierson  n'ait  pas  cru  pouvoir  s'oc- 
cu|)e)'  du  l'idu,  du  Kuflagu,  du  Kola  el  tiu  Toda.  Ce^^ 
quatre  très  intéressants  idiomos  non  littéraires 
forment  ce  qu'on  pourrait  appeler  le  groupe  dravi- 


—  197  — 

clien  sauvage  des  Nilagiris  ou  de  l'ouest;  ils  ne  sont 
pas  assez  connus  et  niérilcraient  de  l'être  davan- 
tage, le  Toda  surtout,  qui  n'est  que  peu  soumis  à  des 
influences  aryennes  et  dont  le  système  phonétique 
paraît  si  spécial  :  le  court  essai  de  grammaire  écrit 
par  M.  G.-U.  Pope,  il  y  a  une  trentaine  d'années,  est 
devenu  véritablement  insuffisant.  En  revanche,  nous 
avons  de  nombreux  détails  et  de  bons  spécimens  du 
groupe  sauvage  nord-orienlal,  qui  comprend  les  pa- 
tois parlés  sur  la  frontière  Mundâ-aryenne,  le  Kuviik/i, 
le  Malto,  le  Kui  et  le  Gôndi,  auxquels  on  ajoute  le 
Bràhùi  de  la  frontière  Indo-Bélouchistane. 

Une  question  importante  se  pose  à  propos  de  ces 
diverses  langues.  Les  consonnes  cérébrales,  —  ^,  d,  n, 
/,  /%  —  paraissent  spéciales  aux  Mundàs  et  aux  Dra- 
vidiens.  Etrangères  aux  idiomes  Indo-Européens, 
elles  se  sont  cependant  développées  en  sanskrit. 
Ont-elles  donc  été  empruntées  parles  Aryens  aux 
habitants  antérieurs  de  l'Inde?  Je  réponds  sans  hési- 
ter :  certainement  non;  des  sons  et  des  bruits  vocaux 
ne  s'empruntent  pas,  mais  se  développent  sponta- 
nément dans  les  mêmes  conditions  physiologiques^ 
sociales  et  climatériques.  Les  cérébrales  sont  un  pro- 
duit direct  et  spontané  de  l'Inde  :  elles  sont  plus 
employées  chez  les  Dravidiens  et  les  Mundâs,  moins 
avancés  et  plus  près  de  la  nature;  elles  le  sont  moins 
et  elles  tendent  à  dis[)araître  chez  les  Arj^ens,  plus 
civilisés  et  dont  les  conditions  générales  d'existence 
sont,  si  j'ose  m'exprimer  ainsi,  plus  raflinées.  D'autre 
part,  le  /  barré  polonais  est  une  cérébrale;  et  les  /, 
(l,  l,  anoflais  le  sont  aussi  fort  souvent. 


—  198  — 

Je  trouve  beaucoup  trop  dure  cette  appréciation  : 
«  the  form  tamul  is  due  to  the  french  missionaries 
and  should  be  disregarded  ».  Ni  Ziegenbalg  qui  écrit 
damulica,  ni  Beschi  et  Walther  qui  écrivent  tamu- 
lica,  ni  Fabricius,  Breithaupt  et  Anderson  qui  écri- 
vent tamul,  n'étaient  français.  C'est  que  «  tamoul  » 
est  la  forme  qui  se  rapproche  le  plus  de  la  pronon- 
ciation. 

La  notice  bibliographique  sur  le  tamoul  (p.  302- 
307)  est  malheureusement  insuffisante  et  contient  des 
inexactitudes  fâcheuses.  Le  Nannûl  n'était  pas  la 
seule  grammaire  indigène  qu'on  aurait  dû  citer. 
Quant  aux  grammaires  de  Beschi,  la  première  édition 
de  celle  du  dialecte  vulgaire  est  de  1738  :  il  n'y  a  pas 
d'édition  de  1728;  la  seconde  édition  de  la  traduction 
de  Horst  n'est  pas  de  1881  mais  de  1831.  Quant  à  la 
grammaire  du  haut  tamoul,  il  y  en  a  eu  deux,  l'une 
qui  n'a  jamais  été  imprimée  et  qui  a  été  traduite  en 
anglais  par  Babington  en  1822;  l'autre  qui  est  une 
adaptation  laline  d'une  grammaire  écrite  en  tamoul 
et  qui  a  été  imprimée  à  Tranquebar  en  1876.  La  gram- 
maire de  Baltasar  da  Costa  n'a  jamais  été  imprimée. 
Il  n'y  a  aucune  grammaire  tamoule  imprimée  à  Tran- 
quebar en  1734.  J'aurais  d'autres  erreurs  et  d'autres 
omissions  à  relever. 

Dans  les  indications  sur  la  prononciation  tamoule, 
il  est  dit  que  les  explosives  initiales  sont  quelque- 
fois prononcées  douces  :  guru,  devait,  bayam,  ja- 
nam;  c'est  que  ce  sont  là  des  mots  sanskrits  em- 
pruntés, dont  la  prononciation  originale  a  été  re- 
tenue. 


—  199  — 

P.  292,  il  est  dit  que  a  neuf))  et  «  huit  »  sont  pro- 
bablement «  dix  moins  un,  dix  moins  deux  ».  Je  ne 
suis  pas  de  cet  avis.  En  ce  qui  concerne  «  neuf» 
par  exemple,  il  paraît  établi  que  ce  numéral  est  formé 
de  «  dix  »  avec  le  préfixe  fol,  ton  ayant  le  sens  de 
«  incomplet,  défectueux  »  :  le  tamoul  onbadii  est 
pour  ionhadii  [tondu  existe),  comme  on  a  tonnûr'u 
«  quatre-vingt-dix  »  et  tollâyiram  «  neuf  cents  ».  Quant 
à  huit,  et  ou  en  se  rattache  peut-être  à  ir  «  deux  »  : 
dans  beaucoup  de  langues,  «  huit  »  est  apparenté  à 
«  deux  »;  c'est  un  duel  en  aryen \ 

P.  294,  il  n'est  pas  exact  de  dire  que  beaucoup  de 
bases  sont  à  la  fois  noms  et  verbes.  Les  suffixes  dra- 
vidiens  gardent  si  bien  leur  indépendance  et  leur 
signification  propre  que,  lorsqu'il  disait  par  exemple 
vardên  «  je  suis  venu  »,  un  tamoul  voyait  dans  en  la 
première  personne  :  c'était  comme  s'il  disait  «  venu- 
moi  »,  et  dès  lors,  rien  d'étonnant  à  ce  qu'il  dise  Kôn- 
èn  «je  suis  roi  »,  (;'est-à-dire  «  roi-moi  ». 

P.  293  :  les  pluriels  pronominaux  en  m  substitué 
au  îi  du  singulier,  rapprochés  des  k,  ùg,g,  nga  gôndî 
et  kuî,  suggèrent  l'idée  d'un  pluriel  personnel  inclu- 
sif primitif  opposé  à  l'exclusif  ^«/  neutre  et  général. 
C'est  un  point  à  étudier. 

P.  296,  il  est  dit  que  le  futur  est  formé  de  diverses 
façons.  C'est  que  le  futur  n'est  pas  un  temps  pri- 
mitif; il  a  été  formé  à  une  époque  postérieure  du 
développement  de  la  langue.  Il  n'y  avait  originaire- 
ment qu'un  passé  et  qu'un  présent  peu  défini. 

1.  M.  Stempf  a  rapproché  le  basque  ^ortsi  «  huit  »  de  sor  v  naî- 
tre »  ;  il  y  a  peut-être  là  une  racine  commune  «  divisé,  tendu,  cou- 
pé en  deux  ». 


—  -200  — 

P.  486,  je  remarque  une  formation  très  curieuse 
du  gonçli.  L'instrumental  y  est  en  àl  ou  en  se  :  mâr- 
sâiiâl  ou  mârsânsê  «  par  Thomme  »  :  àl  est  dravi- 
dien  et  se  est  hindî.  C'est  ainsi  que  la  grammaire 
s'altère  par  l'intrusion  de  suffixes  d'emprunt.  Le 
processus  paraît  évident  :  on  emprunte  des  phrases 
toutes  faites,  puis  des  mots  tout  formés,  puis  des 
mots  qu'on  soumet  aux  règles  de  la  grammaire  spé- 
ciale, puis  des  suffixes;  et  enfin  la  grammaire  s'altère 
de  plus  en  plus  :  la  langue  change  de  caractère  et 
n'existe  pour  ainsi  dire  plus. 

Est-ce  le  cas  du  brâhûi,  parlé  dans  le  Bélouchistan 
et  par  environ  48.000  Hindous?  Il  ne  m'est  pas  pos- 
sible d'y  voir  ime  langue  dravidienne  :  quelques 
formes  pronominales,  deux  noms  de  nombre,  un  ou 
deux  suffixes,  cinq  à  six  racines  sur  cent,  ne  sauraient 
suffire  à  établir  une  parenté.  Cette  parenté  pourrait 
servir  à  prouver  que  les  Dravidiens  sont,  comme  les 
Aryens  et  avant  eux,  venus  du  nord;  mais  je  ne  vois 
pas  l'utilité  de  cette  démonstration.  Certains  savants 
locaux  pensent  au  contraire  qu'ils  viennent  du  sud. 
Que  nous  importe?  Je  ne  verrais  aucun  inconvénient 
à  les  regarder  comme  originaires  du  sol  qu'ils 
habitent.  Julien  Vinsoin. 


Maiiuali  HoepU.  E.  Portal.  Letteratura  proven- 
zale  ;  /  tnoderni  trovalovl.  Milan,  U.  Hoepli,  1907, 
in-18,  xvj-21.5,  portrait  de  Fr.  Mistral. 

Je  n'ai  jamais  eu  un  grand  enthousiasme  pour  la 
renaissance  provençale,   jjoui'  le  félibrismc,  pour  la 


—  201  — 

tradition  basque,  pour  les  pardons  bretons,  et  pour 
toutes  les  entreprises  analogues  qui,  sous  prétexte 
de  culture  littéraire,  d'originalité  locale,  de  décen- 
tralisation, cachent  un  ed'ort  plus  ou  moins  av^oué  de 
réaction  cléricale  et  anti-républicaine.  Je  n'en  veux 
d'ailleurs  nullement  aux  vieux  lanflragfes,  aux  anciens 
patois,  dont  je  déplore  la  disparition  et  dont  l'étude 
est  si  importante  au  point  de  vue  de  la  linguistique 
générale  ou  particulière.  Mais  le  fait  est  là,  incon- 
testable :  ces  respectables  restes  du  passé  subissent 
la  loi  commune  des  choses  humaines  :  ils  ont  vécu, 
ils  ont  prospéré,  ils  sont  entrés  en  décadence  et 
meurent  lentement  d'anémie,  si  j'ose  m'exprimer 
ainsi.  Ce  ne  sont  pas  les  fêtes,  les  associations,  les 
banquets,  les  poètes,  qui  pourront  leur  rendre  la  vie  ; 
l'heure  est  passée  et  le  mouvement  sera  toujours 
artificiel,  superficiel  et  factice. 

Ces- réflexions  n'enlèvent  rien  d'ailleurs  à  l'intérêt 
du  petit  volume  de  M.  Portai.  C'est  un  recueil  de 
notes  biographiques  recueillies  avec  soin  et  con 
amore.  Mais  quand  on  lit  les  titres  de  tous  ces 
ouvrages  peu  connus,  dont  beaucoup  sans  doute  ont 
de  la  valeur,  mais  dont  beaucoup  aussi  sont  médio- 
cres, on  songe  malgré  soi  au  vers  de  Boileau,  et  on 
se  dit,  en  le  modifiant  un  peu  :  «  Ils  se  tuent  à  rimer 
en  provençal,  que  n'écrivent-ils  en  français  ?  » 

Julien    ViNsoN. 


14 


—  202  — 

La  morte  di  Vaca  ossia  il  Racsaso  di  Ecaciacra, 
tradotto...  da  M.  Kerbaker  (Nova  biblioteca  di 
cultura,  t.  m),  l^aples,  T.  Pironti,  1906,  in-18,  88  p. 

L'épisode  dont  il  s'aj^it,  intitulé  Vakavadhâ,  forme 

les  chants   58  à  66  du   livre  premier,  Adiparva,  du 

Mahâbhârata.  M,  Kerbaker  l'a  traduit  en  108  octaves 

qui  correspondent  chacune  à  un,  deux  ou  trois  des 

clôkas  de  Toriginal.  La  traduction  paraît  d'ailleurs 

exacte,    autant  du  moins   que   peut  l'être,    dans  ces 

conditions,  une  traduction  en  vers.  Le  traducteur  a 

mis,  à  la  fin  du  volume,   des  notes  intéressantes  et 

utiles.  Mais  je  n'aime  pas  beaucoup,  dans  le  récit,  ces 

adaptations  orthographiques   où   c   devient   ci,  j  ji, 

ks  es,  etc.    Je  sais  bien  qu'elles  ont  pour  but  de  ne 

pas  rebuter  les  lecteurs  ;   mais  est-ce  vraiment  bien 

utile  ? 

J.   V. 

.1.  Berjot.  Premières  leçons  d\inn(imile .  .  .  Paris, 
E.  Leroux,  1907,  petit  in-8",  19  p. 

Ce  petit  ouvrage  est  réellement  bien  fait  et  pourra 
rendre  service  à  ceux  qui  voudront  étudier  Tanna- 
mite,  C'est  une  bonne  introduction,  assez  claire  et 
précise,  à  l'étude  rigoureuse  de  la  langue.  La  seule 
chose  à  craindre,  c'est  qu'après  cet  exposé  si  simple, 
l'étudiant  ne  se  heurte  aux  complications  voulues 
d'une  grammaire  soi-disant  complète.  Comme  si  les 
langues  monosyllabiques  avaient  besoin  de  gram- 
maires ! 

Mais  quel  alphabet  bi/.arre  que   celui  inventé  par 


—  203  — 

les  missionnaires  pour  la  transcription  :  r/  valant  a 
bref,  r/y  eil,  d  intermédiaire  entre  ij  et  z,  etc. 

J.  V. 


Manuel  de  la  langue  japonaise,  par  Th.  Gollier. 
1.  Eléments  de  la  Grammaire.  Bruxelles  et  Leipzig, 
Misch  et  Thron,  1907,  in-8%  239  p. 

Livre  utile  et  consciencieusement  fait,  quoique  les 
mots  japonais  y  soient  tous  en  caractères  latins.  11  en 
ressort  une  fois  de  plus  la  preuve  que  le  japonais  est 
une  langue  agglutinante  et  qu'il  a  subi  fortement 
l'influence  du  chinois.  La  complexité  de  certaines 
expressions  demanderait  une  analyse  minutieuse  : 
de  ([uoi  et  comment,  par  exem|)le,  sont  formés  les 
pronoms  personnels  .'  Du  reste,  en  général,  ce  livre 
est  fait  d'une  façon  vraiment  trop  empirique  et  avec 
la  préoccupation  trop  évidente  de  suivre  le  cadre  clas- 
sique ordinaire  :  déclinaisons  avec  nominatif,  génitif, 
etc.  ;  conjugaisons  avec  les  temps  dérivés  et  compo- 
sés de  rindo-européen  ;  etc.  C'est  pourquoi  certaines 
indications  paraissent  naïves,  comme  par  exemple 
lorsque  l'auteur  dit  qu'il  y  a  des  fausses  post-posi- 
tions, des  quasi-post-positions,  qui  sont  en  réalité  des 
substantifs. 

Après  la  grammaire,  M.  Gollier  a  mis  une  antho- 
logie, recueil  de  textes  en  prose  (toujours  en  romain) 
qui  occupe  26  p.,  et  qui  est  suivie  d'un  vocabulaire  très 
complet;  ce  vocabulaire  paraît  avoir  été  établi  avec 
beaucoup  de  soin. 

J,    V. 


—  204  — 

Bulletin  du  parler  français  au  Canada.  Québec, 
Université  Laval,  1907  (mai-aoùt,  n°'  9  et  10).  Gr. 
in-8°,  p.  321-408. 

Contient,  outre  les  sarclures,  les  anglicismes,  les 
revues  de  livres  et  brochures,  les  tablés  du  tome  V. 
Comme  articles  de  fond,  on  y  lira  avec  intérêt  la 
suite  du  lexique  canadien-français  ;  une  étude  de 
M.  l'abbé  Amédée  Gosselin  sur  l'instruction  primaire 
au  Canada  sous  le  régime  français  ;  un  article  fort 
instructif  de  M.  Rivard  qui,  répondant  à  M.  Paul 
Mayer,  fait  voir  que  la  proportion  des  Canadiens  par- 
lant français  est  au  moins  32,04  pour  cent  ;  un  tra- 
vail de  M.  Tabbé  Camille  Roy  sur  l'histoire  de  la 
littérature  canadienne  (Michel   Bibaud)  et   quelques 

extraits  de  journaux  européens. 

J.  V. 

Revue  Internationale  des  Etudes  basques.  Paris, 
P.  Geuthner,  mai  1907,  n°  3  (p.   217-3281.  gr.   in-8«. 

Contient  douze  notes  ou  articles  fort  intéressants 
et  consciencieux,  en  espagnol,  en  français  et  en 
basque  :  A.  Campion,  l'exactitude  de  la  forme  eus- 
kera  (avec  s)  ;  — L.  Echegaray,  les  calligraphes  bas- 
ques :  C.  de  Iciar  ;  —  G.  Hérelle,  les  représentations 
de  pastorales  ;  —  .J.-B.  Daranatz,  monnaies  romaines 
découvertes  au  pays  basque  (avec  fig.,  dont  une  réduc- 
tion de  l'inscription  de  Hasparren)  ;  —  J.  Vinson  et 
,lean  de  Jaurgain,  le  Noiiveau-'festament  de  Liçarra- 
gue  ;  —  A.  Campion,  les  noms  de  l'antique  Vasconie  ; 
—  .1.  de  .Jaurgain,  Corisandre  dWndoains  ;  —  .I.-B. 


—  20b  — 

Darricarrère,  proverbes  et  dictons  ;  — G.Lacombe, 
W.  Webster;  —  X...,  la  laitière  basque;  —  Biblio- 
graphie, 

Revue  du  Monde  Musulnn/n.  t.  II,  n"' v,  vi  et  vii, 
gr.  in-8°.  p.  1-448  :  Paris,  E.  Leroux,  mars  à  mai 
1907. 

Outre  les  notices  bibliographiques  et  les  Notes 
et  Nouvelles,  les  revues  de  \^  presse  musulmane,  les 
analyses  de  livres  et  revues,  ces  trois  numéros  con- 
tiennent de  très  remarquables  travaux  :  Ghilan,  Le 
club  national  de  Tauris  ;  —  L.  Bouvat,  L'Islam  dans 
l'Afrique  nègre  ;  — X.  Slousch,  Les  Juifs  en  Tripoli- 
taine  ;  —  A.  Le  Chatelier,  L'Emir  d'Afghanistan 
aux  Indes;  —  A.  Cabaton,  Les  Chams  musulmans 
dans  rindo-Chine  française; — E.  Fevret,  Le  groupe- 
ment des  centres  habités  en  Perse  ;  —  J.  Vinson,  Les 
Musulmans  du  Sud  de  l'Inde  (reproduit  ci-dessus,  p. 
137-144)  ;  Abboz,  En  Perse  ;  Imzâ  Marfouz,  L'Islam  en 
Bosnie  et  Herzégovine  ; —  A.  Le  Chatelier,  La  Révo- 
lution persane;  — A.-L.-M.  Nicolas,  Le  Sermon  de 
de  A.  Seyyéd  Djemal-al-din  ;  —  Cl.  Huart,  Le  droit 
de  la  guerre; — E,  Michaux-Bellaire,  L'Islam  chez 
les  Berbères  marocains. 

J.   V. 


VARIA 


I.  —  Le  Nouveau-Testament  basque  de  1571. 

Nous  empruntons  à  la  Revue  internationale  des  Études  bas- 
ques (t.  I,  p.  288)  la  très  intéressante  note  ci-après,  de  M.  Jean 
de  Jaurgain  : 

Le  Fonds  d'Oihenart,  de  mon  ami  Paul  Labrouche,  contient 
un  cahier  intitulé  Rolle  des  offices  et  mandements  de  finances 
expédié  par  commandement  de  Monseigneur  de  Gramont  (27 
avril  1564-28  novembre  1565)  dans  lequel  je  relève  ces  trois 
articles  : 

«  10  juillet  1565.  A  Lissarrague,  traducteur  du  Nouveau  Tes- 
tament en  langue  basque,  ses  gages  comme  à  un  ministre  non 
marié,  à  compter  du  1"  janvier  dernier,   par  l'advis  du  Conseil. 

»  A  Tartas  (ministre  à  Saint-Palais  en  1578),  La  Rive  (aussi 
ministre  à  Saint-Palais),  Landetehevery,  Tardets  (ministre 
à  Ostabat,  mort  en  septembre  1.^78),  correcteurs  et  revisiteurs  [sic) 
de  ladite  traduction,  la  somme  de  6  s.  t.  par  jour  jusque  au  pre- 
mier synode,  à  compter  du  jour  qu'ils  ont  commencé. 

»  Dernier  septembre  1565.  Aux  mêmes,  pareille  somme  de  6  s. 
par  jour,  durant  qu'ils  vaqueront  à  ladite  traduction.  » 

Il  en  ressort  que  Liçarrague  commença  sa  traduction  vers  le 
mois  de  janvier  1.565  et  qu'il  eut  pour  collaborateurs  quatre 
ministres  basques,  dont  deux  au  moins,  —  Tartas  et  Tardets,  — 
étaient  souletins. 


II.  —  Prononciation  modifiée. 

La  Comédie- Française  est  un  temple  de  la  tradition.  On  y  a  le 
culte  du  genre  classique.  Tous  les  artistes  de  la  Comédie  Française 
prononçaient  le  mot  Acliéron,  non  pas  Âkéron,  mais  en  ayant 
bien  soin  de  marquer  les  deux  lettres  ch  .  Ils  taisaient  remarquer 


—  207  — 

avec  raison  qu'ils  avaient  pour  eux  l'opinion  de  Racine.  Lorsque 
celui-ci  écrivait  : 

Et  l'acarc  Achèron  ne  lâche  point  sa  proie, 

c'était  surtout  au  point  de  vue  de  l'harmonie  imitative.  Ch  se 
trouve,  en  effet,  dans  Achéron  et  dans  lâche.  Mais  voici  que  de- 
puis quelque  temps  les  artistes  de  la  Comédie-Française  pronon- 
cent Akéron. 

D'aucuns,   esprits   malicieux,   feignent   de   croire  que   l'ordre 
vient  du  sous-secrétaire  d'État  à  la  Guerre. 


III.  —  Indiens  et  Européens. 

Dernièrement  le  ministre  anglais  s'est  décidé,  sur  la  demande 
de  lord  Ripon,  à  appuyer  un  bill  tendant  à  soumettre  les  Anglais 
et  autres  Européens  résidant  aux  Indes  à  la  juridiction  des  juges 
indigènes.  Il  en  est  résulté  une  extrême  effervescence  parmi  la 
colonie  européenne  qui  n'a  aucune  confiance  dans  la  justice  hin- 
doue et  qui  prétend  qu'elle  ne  peut  en  attendre  que  de  la  mal- 
veillance et  de  l'hostilité. 

En  présence  de  cette  explosion  de  mécontentement,  il  est  à 
présumer  que  le  gouvernement  ajournera  indéfiniment  la  mesure 
dont  il  s'agit.  Mais  il  en  résultera  un  des  ferments  d'antipathie 
entre  les  Européens  et  les  indigènes.  Voici  déjà  comment,  malgré 
la  législation  si  rigoureuse  qui  pèse  sur  la  presse,  s'exprime  une 
feuille  hindoue,  le  Progrès,  en  s'adressant  aux  conquérants  des 
Indes  : 

«  Vous  nous  avez  familiarisés  avec  les  idées  anglaises  ;  après 
avoir  aboli  nos  institutions  séculaires^  vous  nous  avez  initiés  aux 
sciences,  à  l'administration  européennes  ;  vous  nous  avez  cons- 
truit des  chemins  de  fer.  Toutes  ces  innovations,  nous  les  avons 
acceptées,  mais  pour  les  exploiter  en  vued'i  n  but  dont  vous  ne 
vous  doutez  pas  même  en  rêve. 

))  Nous  savons  ce  que  nous  voulons,  et  nous  ne  nous  repose- 
rons plus  avant  d'avoir  constitué  une  Inde  libre,  avant  d'avoir 
gouverné,  unifié  les  populations  de  notre  continent,  et  secoué  le 
joug  des  étrangers  qui  nous  pressurent.  » 


—  208  — 

IV.  —  L'âge  et  le  génie. 

Voici  une  curieuse  statistique  publiée  par  The  Musical 
Times  sur  les  dates  où  les  plus  grands  compositeurs  ont  composé 
leurs  œuvres  les  plus  remarquables.  11  ne  s'agit  que  de  maîtres 
morts.  Sont  placés  à  côté  l'un  de  l'autre  le  nom'  du  compositeur, 
l'œuvre  principale,  l'âge  du  compositeur  quand  il  composa  cette 
œuvre,  et  l'âge  de  sa  mort  : 

Bach,  messe  en  si  mineur,  quarante-huit  ans,  mort  â  soixante- 
cinq  ans. 

Haendel,  le  Messie,  cinquante-six  ans,  mort  à  soixante-qua- 
torze ans. 

Haydn,  la  Ct^èation,  soixante-cinq  ans,  mort  à  soixante-dix- 
sept  ans. 

Mozart,  Don  Juan,  trente  et  un  ans,  mort  à  trente-cinq  ans. 

Beethoven,  symphonie  en  ut  mineur,  trente-cinq  à  trente-huit 
ans,  mort  à  cinquante-six  ans. 

Weber,  le  Freiscluitz,  trente  à  trente-trois  ans,  mort  à  trente- 
neuf  ans. 

Schubert,  symphonie  en  ut  majeur,  trente  et  un  ans,  mort  à 
trente  et  un  ans. 

Mendelssohn,  Elie,  trente-sept  ans,  mort  à  trente-huit  ans. 

Schumann,  concerto  de  piano,  trente  et  un  à  trente-cinq  ans, 
mort  à  quarante-six  ans. 

Wagner,  les  Maîtres  chanteurs,  quarante-cinq  à  cinquante- 
quatre  ans,  mort  à  soixante-neuf  ans. 

Brahms,  Requiem,  trente-deux  à  trente-cinq  ans,  mort  à 
soixante-trois  ans. 

11   conviendrait   d'ajouter  à  cette  liste  notre  grand  compositeur 
Rameau,  qui  composa   son   premier  opéra  Hippolytc  et  Aricie,  à 
l'âge  de  cinquante  et  un  ans.  Il  mourut  à  soixante-dix-neuf  ans. 
fLe  Temps.) 

L'Iriiprinieur-Gérant  : 

E.  Bertrand. 

CHALON-SUR-SAÔNE,    IMP.    FRANÇAISE     ET    ORIENTALE    E.    BERTRAND 


L'IBÈRE  ET  LE  BASQUE 


Réponse  a  H.  SCHUCHARDT 


Le  travail  de  M.  E.  Philipon  sur  «  la  déclinaison 
dans  l'onomastique  de  l'Ibérie  »,  qui  occupe  les  pa- 
ges 237  à  269  des  «  Mélanges  d'Arbois  de  Jubain- 
ville  »  publiés  en  1906,  m'a  amené  à  m'occuper  de  la 
question  ibérienne  en  janvier  dernier  dans  cette 
Revue  (p.  1  à  23).  En  même  temps,  M.  H.  Schuchardt 
était  conduit  à  préparer  un  mémoire  qu'il  a  commu- 
niqué à  l'Académie  des  Sciences  de  Vienne  (séance 
du  6  mars  1907)  et  qui  forme  une  brochure  de  90  p. 
in-S'»  (Vienne,  A.  Hôlder,  1907).  Les  p.  79  à  80  for- 
ment un  post-scriptum  consacré  à  mon  article  de 
janvier  dernier.  La  conclusion  de  Schuchardt  est  que, 
s'il  n'adopte  pas  les  propositions  de  M.  Giacomino, 
il  n'est  pas  exact  de  dire  que  M.  Giaeomino  soit  seul 
à  soutenir  la  parenté  du  basque  et  de  l'ibère  :  cette 
parenté,  dit-il,  est  à  considérer  comme  démontrée, 
tant  que  les  bases  de  la  démonstration  n'auront  pas 
été  réfutées  une  à  une  et  dans  leur  ensemble.  La  ré- 
serve est  prudente,,  car  les  argument  de  Schuchardt 
ne  me  paraissent  point  convaincants  et  je  persiste  à 
affirmer  que,  jusqu'à  présent,  la  parenté  du  basque 
moderne  et  de  l'ibère  antique  n'est  aucunement  éta- 
blie. 

15 


—  210  — 

Certes,  il  ne  s'agit  plus,  comme  au  temps  de  G.  de 
Humboldt,  de  voir  dans  le  basque  le  descendant 
direct,  le  représentant  exact  de  l'ibère  ;  la  parenté 
dont  on  nous  parle  est  semblable  à  celle  de  l'anglais 
et  du  gotique  ou,  pour  plus  d'analogie  encore,  du 
tamoul  littéraire  et  d'un  idiome  dravidien  inculte, 
Turaon  ou  le  gôndî,  par  exemple.  Ces  parentés-là  ne 
sont  point  évidentes  et  n'apparaissent  pas  au  premier 
examen.  Ainsi  ce  passage  d'Ulphilas  :  Jali  qath  im 
Jésus  :  hiriats  afcir  mir  jali  gatauja  igqis  vairtliau 
nutaus  manne  (Marc,  1,  17)  paraît  fort  différent  de 
l'anglais  :  and  Jésus  said  unto  theni  :  corne  ye  after 
me  and  1  ^vill  niake  y  ou  io  become  fishers  of  men. 
Cependant  iîu  fait  penser  à  him^  afar  mir  n'estpas  trop 
éloigné  de  after  me,  manne  et  men  se  ressemblent 
fort,  et,  si  nous  connaissons  un  peu  le  germanisme, 
nous  retrouverons  do  dans  gatauja.  D'autre  part  le 
gôndî  undi  (ou  bor)  manèkur  rand  (ou  irur)  mark 
(ou  pêkor)  mattôr  (ou  matlork,  ou  mandork),  comparé 
au  tamoul  oru  mànidanukku  irandu  pilleigal  (ou 
makkal)  irundàrgal  «  à  un  homme  deux  enfants  (ou  fils) 
étaient  »,  permet  un  peu  plus  facilement  de  penser  à 
une  communauté  d'origine,  quoique  cette  parenté 
ne  s'impose  pas  au  premier  abord.  Je  ne  vois  rien  de 
pareil  dans  les  documents  ibères;  ni  mots,  ni  racines, 
ni  formes  grammaticales,  ni,  —  qu'on  me  pardonne  le 
mot, — faciès  général  rappelant  le  basque.  On  a  trouvé 
sans  doute  des  analogies  comme  les  désinences  en 
an  ou  iVf,  comme  les  mots  asturko  ou  idubeda,  mais 
elles  sont  rares,  forcées  et  peu  probantes. 

Quelle    langue    ou  quelles  langues   parlait-on  en 


—  211  — 

Espagne  il  y  a  vingt  siècles  ?  Les  côtes  du  S.-O. 
avaient  été  occupées  par  les  CartliEiginois,  d'autres 
marins  y  étaient  venus  ;  les  Celtes  avaient  envahi  la 
péninsule  et  s'étaient  mélangés  aux  habitants  indi- 
gènes, aux  Ibères,  et  Piome  avait  étendu  partout  sa 
domination. 

Le  pays  est  demeuré  latin,  malgré  l'invasion  des 
Barbares,  le  règne  des  Goths,  la  longue  occupation 
des  Arabes.  H  est  donc  probable  que  le  langage  pri- 
mitif de  ribérie  avait  subi,  dans  une  assez  grande  me 
sure,  l'influence  du  latin.  D'autre  part,  si  les  races  peu- 
vent se  mêler,  les  langues  ne  se  mêlent  point.  Les 
Celtibères  parlaient  donc  un  idiome  celte  avec  des 
mots  et  des  tournures  ibères,  ou  ibère  avec  des  tour- 
nures celtiques.  J'ai  fait  voir  précédemment  que 
les  monuments  écrits,  ceux  du  S.-O.  en  caractères 
romains,  ceux  du  S.  en  caractères  ibéro-phéniciens 
tracés  de  droite  à  gauche,  ceux  de  l'E.  en  caractères 
ibéro-phéniciens  de  gauche  à  droite,  indiquaient  trois 
systèmes  ou  trois  langues  différentes.  Il  est  remar- 
quable que  dans  aucune  inscription  n'apparaissent 
des  mots  d'emprunt,  latins,  celtes,  puniques  ;  il  est 
remarquable  aussi  que  l'on  ne  trouve  pas  de  formules 
communes,  de  tournures  analogues,  de  phrases  ré- 
pétées. Gela  pourrait  faire  supposer  que  le  déchif- 
frement n'a  pas  dit  son  dernier  mot  et  qu'il  y  avait 
peut-être  là  une  écriture  mystérieuse,  ancienne,  un 
langage  de  convention.  Je  ne  le  crois  pas  pourtant. 

J'ai,  en  janvier  dernier,  examiné  ces  documents 
et  proposé  quelques  faits  grammaticaux.  Le  travail 
de   Schuchardt  ne  démontre   point  que  je    me    sois 


—  212  — 

trompé.  Il  fait  des  hypothèses  différentes,  voilà 
tout. 

Pour  pouvoir  comparer  utilement  le  basque  et 
l'ibère,  il  faut  d'abord  être  sûr  de  la  forme  des 
mots  ibères  et,  en  second  lieu,  reconstituer  autant 
que  possible  l'état  ancien  de  la  langue  basque. 

En  ce  qui  concerne  l'ibère,  les  lectures  de  Hiibner 
sont  généralement  bonnes,  sauf  bien  entendu  les 
voyelles  à  intercaler,  et  sous  réserve  des  erreurs  et 
des  méprises  du  graveur.  M.  Schuchardt  modifie 
quelques-unes  des  valeurs  ou  des  transcriptions  de 
Hiibner,  et  je  remarque  notamment  le  nom  de  ville 
ilurir^  qui  correspond  au  latin  iliberi,  et  qu'il  faut 
lire,  parait-il,  plutôt  ildurii'.  Je  n'y  contredis  point 
et  j'accorderais  même  que  la  forme  complète  peut 
être  ilidurir  ;  je  n'explique  pas,  du  reste,  comment 
ildurir  ou  ilidurir  a  donné  la  graphie  latine  iliberi. 
On  a,  dans  les  listes  de  noms  topographiques  de 
ribérie,  d'autres  iliberi,  illiberi,  illiberri,  etc.,  et 
dans  tous  on  y  a  vu  les  noms  modernes  ulibarri, 
ullibarri,  iriberri,  hiriberri  «  ville  neuve  »  du  basque 
moderne.  Schuchardt  m'oppose  triomphalement  ce 
passage  de  Webster  [Bull.  Hisp.,  1.  17)  :  «  Vil- 
leneuve ou  Newlowii  ne  sont  pas  français  ou  anglais, 
si  Iriberri,  lliberri,  Ulibarri^  Iria  flavia  ne  sont  pas 
basques  »,  mais  l'argument  de  Webster  est  un  argu- 
ment de  sentiment;  il  raisonne  en  historien,  en  litté- 
rateur, en  philosophe  et  pas  du  tout  en  linguiste. 
Schuchardt  serre  de  plus  près  la  question;  il  s'étonne 
de  l'objection  fondée  sur  l'antériorité  probable  du  /'  ; 
/•,  dit-il,  peut  très  bien  provenir  d'un  /  primitif,  car 


—  213  — 

/  intervocal  latin  est  souvent  devenu  /•  en  basque  : 
co.elum  =--  ^eru,  par  ex.  Mais,  je  remarque  que  tous 
les  exemples  sont  en  e  ou  //  et  pas  en  i  ;  or,  i  a  cer- 
tainement plus  d'afïinités  avec  l  qu'avec  r;  d'ailleurs, 
en  phonétique  générale,  /•  a  précédé  /.  (hiant  au  Ji  ini- 
tial du  moderne  hiri,  Schuchardt  ne  serait  pas 
éloigné  d'y  voir  une  particularité  dialectale,  un  ren- 
forcement latin  postérieur,  quelque  chose  comme  ce 
qui  s'est  produit  dans  hirrisku  «  risque  »,  hira 
«  ira  »,  garrathoin  «  raton  »,  guipiizcoa,  dont  la 
forme  ancienne  paraît  avoir  été  Ipuzkoa  (cf.  esp. 
guada^  pour  l'arabe  wadî  ^).  Mais  je  ferai  remarquer 
que  la  tendance  phonétique  générale  du  basque  (je 
dirai  même  de  toutes  les  langues  parlées  en  Espagne  ; 
témoin  l'espagnol  où  le  h  initial  n'est  plus  qu'un  signe 
étymologique  correspondant  à  une  souillante  latine 
que  le  béarnais  aspire  fortement  :  cf.  filius,  hil,  hijo  ; 
femina^  hemne,  hemhra,  etc.)  est  la  suppression  des 
aspirations.  L'exemple  le  plus  caractéristique  et  le 
plus  certain  est  le  pronom  de  seconde  personne  sin- 
gulière :  hl  est  certainement  antérieur  à  /.  Il  y  a 
plus  ;  je  crois  avoir  démontré  que,  dans  ce  mot 
comme  dans  d'autres  [liame  «  petit  »  notamment),  h 
a   remplacé   un  />:   ancûen  :  ki,  kame,  etc.*.  Une  fa- 

1.  On  peut  ajouter  les  variantes  a^Wiar  et  (/a.Hi(/ar  «tilleul», 
et  rappeler  que  l'esp.  ataiid  (de  l'arabe  tàbiU  is^jt".  attàbùt  avec 
l'article)  a  t'ait  aiabntc  et  kntabutc. 

2.  J'ai  trouvé  sngdlnimo  «  serpenteau  ».  Einalaimc  «  femme  » 
doit  être  définitivement  expliqué  «  fomelle  enfant»;  cnic,  ema 
«  femelle  »  n'est  pas  douteux  :  cf.  par  ex.  otsonui  «  louve  »  (Oih., 
proi\  390).  De  cina  dérive  emante^  ema^teki  comme  i(/u^/n  (  idiul.i, 


—  214  — 

mille  de  mots  intéressante  à  ce  point  de  vue  est  celle 
de  kide  «  compagnon  »  :  adiskide  «  compagnon 
d'âge,  ami  »,  haiirhide  ou  aurhide  «  parent,  compa- 
gnon de  bouche,  commensal?^  »,  ohaide  «  compagne 
de  lit,  concubine  »  ;  kide  et  ses  dérivés,  kidego^ 
kidetasun^  sont  d'un  usage  courant. 

Cette  question  du  h  initial  est  fort  importante  et 
elle  se  pose  notamment  à  propos  de  la  forme  primitive 
de  certains  pronoms  et  de  certains  adverbes  basques. 
J'en  reparlerai  plus  loin. 

Relativement  à  Tétat  ancien  de  la  langue  basque, 
voici  où  j'en  suis  arrivé.  La  phonétique  basque 
n'admet  pas  de  /■  initial,  adoucit  les  explosives  dures 
initiales  des  mots  d'emprunt,  durcit  les  douces  après 
les  sifflantes,  adoucit  les  dures  après  les  nasales, 
n'aime  pas  les  géminations  de  consonnes,  ne  tolère 
que  les  groupes  formés  de  consonnes  d'ordres  diffé- 
rents, etc.  Elle  aime  les  contractions  et  les  syncopes 
et  nous  en  avons  vu  se  produire,  pour  ainsi  dire,  sous 
nos  yeux  depuis  deux  ou  trois  siècles  :  les  noms  de 
lieux  Çuhihurii  et  Berazkoitz  (Briscous)  sont  devenus 
Çiburu  et  Beskoitze. 

Faut-il  rappeler  les  complexités  et  les  irrégu- 
larités de  la  déclinaison  :  la  définie  sans  pluriel, 
le  double  nominatif  passif  et  actif  (on  a  pu  voir  dans 

iruzkl,  iliukij  vient  de  eçjun,  dont  le  sens  primitif  pouvait  être 
«  soleil  »  et  auquel  se  rattache  le  nom  du  dimanche. 

1.  D'où  vient  ahaïde?  n'est-il  pas  apparenté  à  nhi:pa  «sœur  de 
femme»?  Et  n'y  a-t-il  aucune  relation  entre  ces  mots  et  aitn 
0  père  »,  anai  et  anai/a  «  frère  »  (en  biscayen  «  frère  d'homme  »  ; 
«  frère  de  femme  »  s'y  dit  nrlm,  où  se  retrouve  la  finale  de 
arreba  «  sœur  d'homme  »>). 


—  215  — 

ce  dernier  un  instrumental),  la  suppression  de 
l'artrcle  au  défini  singulier  avec  certains  suflixes  et 
son  remplacement  par  eta  au  pluriel,  les  interca- 
lations  de  lettres  inexpliquées,  les  contractions 
inattendues,  etc.  ?  L'article  était  primitivement  triple, 
car  ce  n'était  que  les  trois  démonstratifs  :  celui-là, 
celui-ci,  cet  autre.  Le  pronom  personnel  de  seconde 
personne  pluriel  est  devenu  un  succédané  hono- 
rifi(|ue,  respectueux,  majestatique  de  «  tu,  toi  »  et 
s'est  fait  un  pluriel  pléonastique.  La  distinction  des 
genres  n'existe  pas  et  ne  s'observe  que  dans  les 
conjugaisons  aux  formes  où  la  seconde  personne 
singulière  est  sujet  ou  bien  dans  ce  qu'on  a  appelé 
les  variantes  allocutives  de  chaque  expression 
(datif  éthique).  Il  n'y  a  pas  de  duel,  pas  d'adjectifs  pro- 
nominaux suffixes.  La  composition  est  très  abon- 
dante et  les  éléments  juxtaposés  sont  d'ordinaire 
fortement  altérés.  Le  vocabulaire,  à  la  fois  pauvre 
et  varié,  mant|ue  de  mots  généraux \  et  comprend 
surtout  des  mots  de  signification  matérielle  et  con- 
crète. 

L'indéfini  jouait  jadis  dans  la  grammaire  basque 
un  rôle  plus  important  qu'aujourd'hui.  Les  noms 
propres,  qui  sont  des  noms  de  maisons,  —  Jauregui, 


1.  Ainsi,  il  n'y  a  pas  de  mots  pour  «  sœur  »,  mais  on  distingue 
la  sœur  d'un  homme,  arrcha,  de  celle  d'une  femme,  n/ii^pa.  11 
est  nécessaire  de  ne  pas  oublier  cette  distinction  pour  bien  com- 
prendre le  proverbe  cité  par  Oibenart  :  arreha  bi^  etchea  betho 
«  de  deux  sœurs,  la  maison  (est)  pleine  ».  On  a  vu  plus  haut  que 
le  biscayen  distingue  aussi  le  frère  d'un  homme,  anai,  du  frère 
d'une  femme,  neba. 


—  216  - 

Etchbarne^   Hirigaray ,  —   n'ont  point   d'article  ;  et 
«  le  roi  »  se  dit  Errege,  également  sans  article. 

Quant  au  verbe,  je  ne  pense  pas  qu'on  puisse 
soutenir  aujourd'hui  la  priniitivité  de  la  conjugaison 
périphrastique  ;  elle  est  évidemment  de  formation 
secondaire,  postérieure,  relativement  moderne.  Le 
verbe  basque,  qui  incorpore  les  pronoms  sujets  et 
régimes,  se  réduit  d'ailleurs  à  deux  temps  simples', 
un  présent  et  un  passé  (qui  a  pris  généralement 
aujourd'hui  le  sens  de  l'imparfait)  ;  ces  deux  temps 
diffèrent  l'un  de  l'autre,  pour  les  radicaux  intran- 
sitifs, par  une  nasalisation  au  passé  ;  pour  les  radi- 
caux transitifs,  par  une  interversion  de  position  de 
l'élément    sujet    :    niz    «   je    suis    »,   gizaz    «  nous 

1.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  le  basque  dérive  des  temps,  modes 
et  voix  sc^condaires,  à  Taide  de  divers  préfixes  et  sufiBxes  :  dcra- 
haUa  «  il  le  fait  oublier  »,  hanint:;  «  si  j'étais  »,  ailu  «  puisse-t-il 
l'avoir!  »,  baikare  «parce  que  nous  sommes»,  albaitindoa 
«puisses-tu-aller!»,  duket  «je  l'aurai,  je  l'aurais,  je  puis  l'avoir», 
nizate  «  je  serais  »,  etc.  On  pourrait  faire,  des  formes  en  cra, 
ara,  préfixés,  une  voix  secondaire,  la  voix  causative,  et  à  ce 
propos,  je  crois  qu'on  pourrait  expliquer  par  le  causatif  les 
formes  en  /•  de  l'auxiliaire  dans  la  conjugaison  périphrastique  : 
là  où  on  prononce  aujourd'hui  dio^  ditjo  «  il  l'a  à  lui»,  daut 
«  il  l'a  à  moi  »,  on  écrit  ou  on  écrivait  derio  (et  deinc  pi.),  deriz- 
tadaçu  «  vous  l'avez  à  moi  »,  cenericun  «  vous  l'aviez  à  nous  », 
darot,  daraut,  deraut,  dorât,  etc.  Einan  daraut  serait  propre- 
ment «  il  le  fait  avoir  à  moi  donné  »  et  cinaiten  dorio  «  il  le  fait 
avoir  à  lui  en-donner  »,  emancn  dcracute  «  il  le  font  avoir  à  nous 
pour-donner  »  {dandum).  Je  me  suis  même  demandé  si,  dans 
l'auxiliaire  transitif  cza,  il  n'y  aurait  pas  un  causatif  (avec  mu- 
tation de  r  en  ?);  cf.  ozarri  «  mettre»,  de  ifarri  «se  placer»; 
dans  l'auxiliaire  intransitif  cdi,  le  di  serait  un  suflixe  conditionnel, 
dubitatif  (cf.  le  radical  aidi  :  daidit  «  je  peux,  je  pourrais  le  faire  »  ; 
balaidi  «  elle  pourrait  le  faire  »,  Oih.,  pi'ov.  20). 


-  217  -- 

Sommes  »,  nohn  «  je  vais  »,  gohazi  «  nous  allons  >■>  ; 
niniz  «  je  fus,  j'étais  »,  ginizaz  «  nous  fûmes,  nous 
étions  »  ;  niiioha  «  j'allai,  j'^allais  »,  ginohaz  «  nous 
allions  »  ;  dut  «  je  l'ai  »,  dugu  «  nous  Pavons  », 
dakit  «  je  le  sais  »,  dakigii  «  nous  le  savons  »  ;  nu 
«  je  l'avais  »,  ginu  «  nous  l'avions  »,  naki  «  je  le 
savais,  je  le  sus  »,  ginaki  «  nous  le  savions  ». 
Il  faut  remarquer  cependant  que,  lorsque  le  régime 
direct  est  de  première  ou  de  seconde  personne, 
l'imparfait  offre  la  même  construction  que  le  présent 
et  se  caractérise  par  une  nasalisation  :  zitut  «j'ai  vous  », 
zindud  «  j'avais  vous  »,  nuzu  «  vous  m'avez  »,  ninduzu 
«  vous  m'aviez  »  ;  pourquoi  cette  anomalie  ?  Je  crois  en 
avoir  trouvé  l'explication  :  dans  le  présent  transitif, 
le  pronom  sujet  est  suffixe  et  le  pronom  régime 
préfixé  ;  dans  l'imparfait  intransitif  et  dans  le  tran- 
sitif à  régime  de  troisième  personne,  le  pronom 
sujet  est  préfixé  ;  dans  le  transitif  à  régime  de 
troisième  personne,  rien  ne  représente  ce  régime, 
de  même  que  rien  ne  représente  le  sujet  de  troisième 
personne  dans  le  présent  transitif  ordinaire  ;  mais 
cette  absence  de  l'élément  sujet  de  troisième  per- 
sonne ne  nous  surprend  pas  ;  le  verbe  sémitique  nous 
y  a  habitués.  Ce  qui  est  extraordinaire,  c'est  l'absence 
du  régime.  Aussi,  me  suis-je  demandé  si  cette 
absence,  si  cette  identité  de  formation  entre  les  temps 
intransitifs  et  l'imparfait  transitif,  n'impliquerait  j)as 
une  identité  de  signification,  c'est-à-dire  si  l'imparfait 
transitif  n'était  pas  proprement  un  intransitif.  Dans 
cette  hypothèse,  le  verbe  bas(jue  primitif,  comme  le 
verbe  sémitique^    comme    le    verbe    ougro-finnois, 


—  218  — 

comme  le  verbe  algonquin,  comme  le  verbe  dravi- 
dien,  comme  tant  d'autres,  aurait  eu  deux  voix  : 
l'une  intransitive,  indéterminée,  indéfinie,  neutre, 
moyenne  ;  l'autre  transitive,  déterminée,  définie, 
active,  caractérisées  par  l'interversion  de  position  de 
l'élément  sujet,  et  deux  temps  dont  l'imparfait  était 
caractérisé  par  une  nasalisation \  Aux  magyares  làtok 
«  je  vois  »  et  lâtom  «  je  le  vois  »  correspondaient  en 
basque  iiàkus  et  dakust  ;  à  l'imparfait,  on  aurait  eu 
*ninakus  (cf.  le  plur.  ginaki^)  et  ^dinakust.  Puis  l'im- 
parfait déterminé  aurait  disparu,  ainsi  que  le  présent 
indéterminé  qui  se  serait  parfois  confondu  avec  l'im- 
parfait indéterminé    et  qui    n'aurait     subsisté     que 


1.  Nu  «  j'ai  »,  ginu^^  ou  ;jinuto  «  nous  eûmes»,  ^itut  «  j'ai  vous  », 
sindiit  «  j'avais  vous  »,  dut  «  je  l'ai  »,  etc. 

2.  On  ne  me  demandera  pas,  je  l'espère,  de  justifier  ici  les  res- 
titutions que  je  piopose.  Entre  autres  choses  probables,  j'ai  cru 
remarquer  que  les  formes  plmielles,  outre  rrlément  pronominal, 
ont  un  signe  de  pluralité,  ,■  ou  /.  Ainsi,  «  j'avais  vous  ».  dndudan 
en  guipuzcoan  u)oderne,  fait  ;indudri^aii  en  biscayen  et  ^indu^ada 
en  haut-navariais  méridional  ;  «  nous  serions  »  c/inic;ke  en 
laboiirdin  donne  <iuiî;aul,it;ul,('  «  nous  serions  à  vous  »,  où 
;/int;(ii.-  a  manifestement  lesens.de  o  nous  étions  ». 

Je  ne  puis  m'empêcher  de  constater,  à  ce  propos,  combien  sont 
mal  commodes  et  peu  méthodiques  les  travaux  du  prince  L.-L. 
Bonaparte  sur  le  verbe  basque.  Outre  son  entêtement  à  faire  de 
;u  le  pronom  singulier  de  la  seconde  personne,  il  présente  les 
formes  dans  un  ordre  fantaisiste,  accumule  à  peu  près  au  hasard 
les  paradigmes  et  se  perd  dans  les  détails.  Il  semble  [.ilutôt  préoc- 
cupé de  la  signification  actuelle  des  formes  que  de  leur  dériva- 
tion ;  n'y  iuirai't-il  pas  eu  avantage  par  exemple  à  rapprocher, 
en  souletin,  iiihidii:^iin.  «  vous  aviez  moi  »  de  ititndul.o:i'i  «  vous 
m'auriez  »,  Ixtnundi'uu  «  si  vous  m'aviez  »,  et  diniindiL'u  «  puis- 
siez-vous  m'avoir  »? 


—  219  — 

dans  les  formes  à  régime  direct  de  première  ou  de 
seconde  personne.  Les  deux  temps  indéterminés 
auraient  été  naturellement  conservés  pour  les  verbes 
essentiellement  intransitifs.  M.  Stempf  avait  proposé 
naguère  de  voir  dans  le  présent  actif,  dans  le  présent 
déterminé,  une  l'orme  passive,  rZw^ par  exemple  devant 
être  traduit  «  il  est  à  moi  »  et  non  «  je  l'ai  »;  l'expli- 
cation était  ingénieuse,  mais  je  crois  la  mienne  bien 
meilleure.  Aussi  proposerais-je  volontiers  de  rap- 
porter à  l'imparfait  indéterminé  les  formes  dauntza, 
zaantza^  gauntza  «  ils  gisent,  vous  gisez,  nous 
gisons  »,  dont  se  préoccupe  Schuchardt  (cf.  Revue 
internationale  des  études  basques,  t.  I,  n'*  2,  p.  154)  et 
où  il  voit  des  formations  produites  sous  l'influence 
de  egon.  La  position  singulière  du  n  ne  saurait  nous 
étonner  quand  nous  rencontrons  des  formes  comme 
eztazqui  «  il  ne  les  sait  pas  ».  11  est  vrai  que  le  au 
pour  a  est  surprenant;  mais  il  n'y  a  peut-être  là 
qu'un  renforcement  vocalique.  Le  verbe  eraunizi  qui 
a  le  sens  de  «  sonner  »  ne  me  paraît  être  qu'une 
variante  de  erasi  «  bavarder  »,  avec  le  même  renfor- 
cement et  le  même  ti  ;  on  pourrait  aussi  y  voir  un 
dérivé  du  causaiif  erantzuji  a  faire  entendre»,  dont 
le  radical  est  enzu,  car  les  n,  ?',  o,  hi\  etc.,  sont  des 
terminaisons  de  participes  passés.  Il  y  a  tant  de 
choses  surprenantes  dans  la  grammaire  basque, 
par  exemple  les  doublets  gaude  et  gaudez  où  le 
second  a  deux  ibis  un  signe  de  pluralité  ;  on  ne  peut 
que  constater  ces  faits  dont  l'explication  est  évidem- 
ment dans  la  préoccupation  constante  de  faire  sentir 
que  le  mot  est  pluriel.  Quant  à  l'imparfait  déterminé, 


—  220  — 

il  doit  certainement  en  rester  des  traces  dans  les 
vieux  auteurs*. 

La  construction  est  d'ordinaire  :  sujet,  —  com- 
plément ou  attribut,  —  verbe.  Le  déterminant  se 
place  après  le  déterminé;  le  génitif  cependant  se 
met  avant  le  cas  nominatif.  Le  pronom  relatif  qui 
manque  est  remplacé  par  une  phrase  commençant 
par  bai  «  parce  que  »_,  qui  forme  alors  comme  une 
sorte  de  parenthèse.  N'oublions  pas  les  construc- 
tions participiales  :  nik  ikhUsia  «  ce  que  j'ai  vu  »,  ni 
ikhusia  «  ce  qui  m'a  vu  »,  Nous  avons  vu  que  la  dé- 
rivation s'opère  par  suffixes  le  plus  souvent,  mais 
quelquefois  aussi  par  préfixes. 

Un  point  assez  obscur  de  l'histoire  du  basque, 
c'est  la  forme  primitive  des  pronoms.  Il  n'y  a  pas  de 
difficulté  pour  ni  «  moi  »,  ki  «  toi  »,  gu  «  nous  »,  jsu 
«  vous^  »;  cependant,  quand  le  pronom  de  première 


1.  11  n'est  pas  inutile  de  faire  remarquer  ici  que  certains  verbes 
intransitifs  suivent  en  basque  la  conjugaison  transitive  ;  on  dit 
iluzkiak  argit::en  du  «  le  soleil  brille  »  ;  odolak  su  c/abe  diraki 
«  le  sang  bout  sans  feu  »  (Oih.,  prov.  342;  pror.  1596,  n°  146). 
Ce  cas  n'est  pas  du  tout  le  même  que  celui  des  verbes  qui  n'ont  pas 
de  correspondants  exacts  ;  ainsi  «  suivre  »  se  traduit  par  arrtd 
qui  est  intransitif,  arrcit  iiiri  «  suis-moi  »  (Liçariague).  Il  y  a 
d'ailleurs  des  exemples  de  radicaux  qui  ont  les  deux  conjugaisons, 
transitive  et  intransitive  :  dans  les  proverbes  de ^596,  on  trouve 
ezaun  adi  «connais-toi,  yv^oOi  Tsa-jrov  ».  Dans  le  proverbe  i;-f9 
d'Oihenart,  rii.l,-  deinaddn  est  pris  dans  le  sens  intransitif  ou 
moyen  «  afin  que  je  m'adonne  »  ;  da.ns  le  Brèciairc  des  dcrots 
de  Dargaignaratz,  j'ai  relevé  demaf/uela  avec  le  sens  «  qu'elle  se 
mettra».  N'ai-je  pas  entendu  souvent  dans  le  pays  l'iium  zitf 
dans  le  sens  de  «asseyez-vous,  mettez- vous  là,  nr/nucii  Sic  plat;»'? 

2.  Le   prince  L-L.  Bonaparte,  qui  a  eu    la  maladresse  de 


—  221  — 

personne  singulière  est  suifiicé,  il  devient  t.  Quel 
rapport  y  a-t-il  entre  /  et  n?  Sont-ce  des  mots  diffé- 
rents? Peut-on  supposer  que  le  n  final,  resté  seul 
après  la  chute  de  t,  se  soit  assourdi  en  un  /■  facilement 
varié  en  d,  lequel  à  son  tour  se  serait  durci  en  t?  Le 
dialecte  de  Roncal,  actuellement,  dit  dud,  avec,  au 
lieu  de  ^,  un  d  imparfait,  intermédiaire  entre  d  et  /-, 
suivant  le  prince  Bonaparte  :  dans  saiVb^iVi«,Oihenart 
écrit  dud  pour  dut.  D'autre  part,  «  soi  »  paraît  être 
un  radical  commençant  par  6  et  ce  b  se  retrouve 
préfixé  aux  soi-disant  impératifs  de  3*  personne  : 
biz  «  qu'il  soit  »,  berrait  «  qu'il  me  suive  »,  bemo 
«  qu'il  la  lui  donne  ».  Enfin,  le  pronom  de  3'  per- 
sonne, qui  est  o  quand  il  est  complément  indirect, 
offre,  préfixé,  les  variantes  d,  r,  l;  quel  est  le  proto- 
type et  à  quoi  se  rattache-t-il?  au  b  réfléchi? 

L'o  dont  il  vient  d'être  parlé  représente  évidemment 
l'un  des  trois  démonstratifs  qui  sont  en  a  ou  ar 
«  celui-là  »,  M  ou  ur  [un)  «  celui-ci  »,or  «  cet-autre  », 
et  servent  tous  les  trois  d'articles  déterminatifs 
suffîxés\  Isolés,  ils  sont  en  11  initial  :  hura^^haujiori; 
le  roncalais  et  le  zalazarais  ont  A'(7m,  kaur,  kori;  le 


s'obstiner  à  voir  dans  -r»  la  seconde  pers.  sing.  «  toi  »,  ce  qui  a 
gâté  tous  ses  paradigmes,  croyait  m'embarrasser  en  na'opposant  le 
ir-cL-  «  vous  »  de  certaines  vallées  espagnoles.  Mais  cela  prouve 
au  contraire  la  prioaitivité  de  su  «  vous  »;  quand  il  est  devenu 
d'emploi  général  au  singulier,  on  a  éprouvé  le  besoin  de  faire  un 
«  vous  »  pluriel  :  les  uns  l'ont  dérivé  de  hi,  la  plupart  des  autres 
de  :2u. 

1.  Un  pronom,  dont  la  formation  est  assez  obscure,  se  rencontre 
dans  les  auteurs  labourdins  du  dix-septième  siècle,  haina  ou 
haiùa  «  celui-là,  lui  ». 


-.222  — 

hatit-navarrais  méridional,  gaa^gori.  Les  mêmes  dia- 
lectes disent  kola,  gota;  kala,  gala;kan,gan  ;  kemen, 
gemeii;  pour  hola  «  ainsi  »,  hala  «  ainsi  »,  han  «  là  », 
hemen  «  ici  ».  Je  ne  prétends  pas,  comme  le  prince 
Bonaparte,  que  Texistence  de  ces  formes  en  k  on  g 
soit  décisive  en  faveur  du  k  initial  :  elles  peuvent  être 
au  contraire  purement  accidentelles,  locales  et  ré- 
centes :  c'est  ainsi  que  l'absence  du  n  final  des  impar- 
faits en  haut-navarrais  méridional  ne  prouve  rien, 
car  ce  dialecte  a  connu  le  n  final.  Mais  ici,  il  paraît 
y  avoir  une  tendance  phonétique  générale,  k  primi- 
tif passant  à  A,  puis  suppression  de  l'aspiration  :  kl, 
hi,  i;  —  kori,  gori,  hori,  ori. 

Schuchardt  m'objecte  que  l'ibère  avait  l'aspiration 
initiale  et  même  qu'il  écrivait  sans  h  des  mots  où 
l'aspiration  paraît  s'être  produite  postérieurement. 
On  m'objectera  aussi  l'aversion  du  basque  pour  les 
explosives  dures  initiales  {gorpiUz  =  corpus, 
gela  =  cella,  garthak  =  les  quatre  (temps),  etc.;. 
Cependant,  je  répondrai  qu'il  y  a  peut-être  là  un  fait 
d'évolution  et  je  rappellerai  qu'un  allemand  parlant 
français  durcira  ou  adoucira  une  explosive  là  où, 
dans  sa  propre  langue,  il  prononcerait  une  douce  ou 
une  dure. 

C'est  à  propos  de  la  formule  arethg,  aredc,  are-de, 
aredk,  qui  paraît  correspondre  au  latin  hic  est  silus 
(ou  sita),  que  la  question  s'est  posée.  Y  a-t-il  là  deux 
mots  ou  n'y  en  a-t-il  qu'un  ?  Les  bascomanes  — 
cette  expression  paraît  avoir  choqué  Schuchardt, 
mais  je  n'en  trouve  pas  de  meilleure  —  tiennent 
pour  la  première  opinion  ;  pour  eux  are  est  «  ici  » 


—  -223 

et  Schiicharclt  dit  à  cv,  propos  :  «  ich  halle  die  lied. 
are  «  hier  »,  iLir  sicher,  will  esaber  vorderhand  mit 
keinem  bask.  Wort  identifizieren  ».  Quant  à  de,  dk, 
thg,  on  y  verrait  le  basque  dago  «  il  demeure  »  et 
Schuchardt  lirait  volontiers  sur  le  vase  de  Sicile  : 
«  ici  est  (le  vin)  m.  Il  me  dit  que  datza  et  dago  sont 
aussi  bien  employés  l'un  que  l'autre  sur  les  tombeaux 
actuels  ;  mais  je  lui  ferai  observer  que  dago  «  il  de- 
meure »  est  abusivement  employé  pour  da  «  il  est  ». 
par  analogie  avec  l'espagnol  où  estar  remplace  sou- 
vent ^e/-.  Un  Guipuzcoan  ne  demandera-t-il  pas  iiola 
dago  berori,  voulant  dire  «  como  esta  vm.  »,  là  où 
un  Labourdin  dira  simplement:  iwlazare  «  comment 
étes-vous  ?  w  Si  l'on  tient  pour  le  basque,  il  vaudrait 
mieux  lire  aren  duk  «  tu  l'as  en  ce  lieu  »,  en  faisant 
de  aren  le  locatif  de  ar  «  cela  »  ;  mais  l'absence  du  k 
ou  Ji  initial  ?  mais  la  variante  thg  ? 

Avant  de  parler  de  la  déclinaison  ibérienne  que  nous 
présente  Schuchardt,  est-il  utile  que  je  réponde  à 
toutes  les  observations  qu'il  m'adresse  ?  Je  ne  le  crois 
pas;  je  voudrais  seulement  noter  qu'il  n'accepte  pas 
mon  étymologie  de  oiharzun  ci  écho  »,  oihu-harri- 
zun,  c.-à-d.  «  endroit  où  il  y  a  des  [)ierres  sonnantes  ». 
Schuchardt  préfère  voir  dans  oihar  une  variante  de 
oilian  «  forêt,  bois  »  :  cf.  le  nom  oyarbide  «  chemin 
de  (la)  forêt  ».  C'est  possible,  mais  je  crois  mon 
explication  meilleure  et  plus  conforme  au  fait  maté- 
riel. Oikar  d'ailleurs  ne  se  rattache-t-il  pas  ix  oihu  ? 

Voici  maintenant  le  tableau  de  la  déclinaison  ibère, 
suivant  mon  savant  contradicteur  : 


224  — 


SING. 

PLUR. 

Nom. 

)) 

"  -ce 

Gén. 

-71  {-m) 

-cen 

Dat. 

-i   i-e) 

-cei  {-ceai) 

Erit. 

-s   (s) 

-cis  ? 

A  et. 

-c   i-k) 

p 

Quelle  est  la  déclinaison  basque  ?  On  peut  en  faire 
le  tableau  suivant  : 


SINGULIER 

INDEFINI 

DEFINI 

ogi 

ogi 

-a 

-r-en 

-a-r-en 

-r-V 

-a-r-i 

-r-ik 

-     }) 

-z 

-a-z 

-n  ou  -ta-. 

n 

-a-n 

-ta-ko 

-ko 

-ta-r-ik 

-tik 

-ta-r-at  ou 

(^') 

-rai  (-ra,  -ala,  -alat, 

-ara 

-gabe 

-a-gabe 

-tzat 

-a-r-en-tzat 

-ki,  kin 

-a-re-ki-n,  a- gaz 

-k 

-ak 

PLURIEL    DEFINI 

ogi-a-k  nom. 

-{a-k-)en  de  (gén.) 


1.  La  forme  primitive  du  suffixe  du  datif  est  peut-être  Ai.  Dans 
les  formes  verbales,  f.i  indique  le  datif  :  cf.  nalorkio  «  j'arrive  à 
lui  »,  dualdt  «  il  vient  à  moi  »,  yuyuzkit^u  «  nous  demeurons  à 
vous»,  mais  ce  /à  précède  le  pronom  régime  indirect. 


—  22:>  — 

-'a-k)-i,   ei  à  (dal.) 

-cz  par 

-eta-n  dans 

-eta-ko  de  (pos.) 

-eta-rik  ou  -tik  de  (abl.) 

-ela-ra  -rai,  etc.)  à  (mouv.),  vers 

-a-kabe  sans 

-en-tzat  pour 

-e-kin,  a-kaz,  e-ki-cn     avec 

-^A'  nom.  actif 

Il  y  a  aussi  les  suffixes  -ontz  «  vers  )>,  -/zo 
K  jusqu'à  «,  etc.  ;  les  suffixes  locaux  et  personnels 
gan,  ganik^  ganat,  baithaii,  baîtharik,  baithara,  etc. 
et  les  combinaisons  comme  dans  esku-ra-tze-ko-aii 
«  main-vers-être-de-dans,  quand  il  était  près  de 
venii'  à  la  main  »,  manada-re-ki-en  «  avec  les  en- 
fants »,  egnn-da-ïio-ti-ka-ko  «  de  depuis  presque 
vers  le  jour,  depuis  le  temps  passé  jusqu'à  ce  joui-  »; 
gizonendako  «  pour  les  hommes  »,  enekilako  «  de  pour 
être  avec  moi  »,  zeziilikaii  a  du  haut  du  ciel  »,  etc. 

Il  y  aurait,  avec  de  grandes  différences,  certaines 
analogies.  Mais  le  tableau  de  Schuchardt  est-il  exact  ? 
Pour  l'établir,  Schuchardt  a  dépouillé  des  inscrip- 
tions et  surtout  des  légendes  monétaires,  et  dressé 
des  listes  plus  ou  moins  longues,  mais  où  est  la  ga- 
rantie de  la  classification?  Pourquoi  «ou  m  est-il 
plutôt  génitif  ((u'autre  chose  ?  pour(|uoi  ceai  serait-il 
datif  pluriel  ?  J'ai  peur  que  Schuchardt,  songeant  au 
basque,  n'ait  obéi  à  une  sorte  d'auto-suggestion.  On 
peut  lui  adresser  du  reste  la  même  objection  qu'à 

16 


—  226  — 

Philipon  :  comment  reconnaître  tel  ou  tel  cas  dans 
un  texte  qu'on  ne  comprend  pas  ?  Sans  doute,  les 
médailles  peuvent  offrir  des  nominatifs,  des  datifs, 
des  génitifs  pluriels,  mais  qui  les  reconnaîtra  ?  Par 
exemple,  keii  qui  est  le  génitif  pluriel  basque,  esl-il 
vraiment  le  correspondant  des  en,  cm,  qm,  o?n,  gin, 
etc.,  ibères  ?  Je  prends  entre  autres  neroncen  (peut- 
être  plutôt  nerhoncen''),  où  le  nominatif  est  certaine- 
ment neron  ou  nerhon  ;  si  c'est  un  génitif,  on  ne  de- 
vrait traduire  que  de  trois  façons:  «  de  Narbonne  », 
«  des  Narbonnes  »,  «  des  habitants  de  Narbonne  »  ; 
mais  la  première  traduction  n'est  pas  possible  à  cause 
du  c  pluriel  ;  la  seconde,  non  plus,  car  Narbonne  n'a 
jamais  été  un  pluriel  ;  la  troisième,  pas  davantage 
puisqu'aucun  élément  ne  représente  «  ceux,  habitants, 
citoyens,  etc.  ».  Mais  alors?  D'autre  part  n'est-il  pas 
aventureux  et  hardi  d'assimiler  cen,  gin  et  com  ? 
Décidément,  en  tout  ceci,  on  raisonne  vraiment  trop 
par  à  peu  près. 

Je  trouve  d'ailleurs  un  autre  exemple  de  raisonne- 
ment défectueux  aux  p.  62-64  du  mémoire  de  Schu- 
chardt  :  il  a  remarqué  que,  dans  les  composés,  son 
m  «  ville  »  devient  quelquefois  ilit,  ce  qui  lui  rap- 
pelle les  féminins  hébreux,  et  il  en  rapproche  les 
mots  basques  betarte  «  vue,  visage  »,  helazal  «  pau- 


1.  De  ce  que  le  signe  lu  h  est  un  o  certain  dans  une  variante 
d'une  légende,  s'ensuit-il  que  le  premier  signe  soit  toujours  o  ? 
Ne  peut-OQ  supposer  tantôt  une  erreur  du  lapicide,  tantôt  une 
omission  de  la  voyelle  ou  de  l'aspiration  '?  Les  véritables  formes 
ne  peuvent-elles  être  nerhon,  saronaho...,  Itothèccn  ou  même 
o/iU,scfii   •' 


—  227  - 

pière  »,  otondo  «  morceau  de  pain  »,  sutopil  a  pain 
cuit  sous  la  cendre  ».  bepurii  «  sourcil  »,  siipazter 
«  côté  du  feu  »,  pour  hegitarle^  begitazal,,  ogitondo, 
sukopily  begitbiiru,  sulbazler,  etc.,  de  begi^  ogi,  su. 
On  pourrait  ajouter  belhule  «  sourcil  »,  belaspa- 
lak  variante  de  begispalak  «  paupières  »,  bekoki 
«  frontj  audace,  toupet  »,  bekhaitz  «  envie,  mauvais 
œil  »,  bethUz  a  langage  des  yeux,  œillade  »,  betazpi 
«  ce  qui  est  sous  les  yeux,  cernes  »,  beteraztun 
u  sourcil,  mine  »,  betheritsii  «  qui  a  mal  aux  yeux  », 
betsein  «  pupille  »,  betain  et  betagin  «  dent  canine  '  », 
betazbeta  «  face  à  face  »,  de  begi  (en  faisant  remar- 
quer qu'en  labourdin  on  prononce  bethazal^  betliule 
et  bethille,  bephiiru)  ;  —  okhiri  «  boulanger  »,  otliu- 
riiiitz  ou  oloroiilz  «  aliment  »,  olhorde  «  en  place  du 
pain  »,  de  ogi  ;  —  sutliondo  «  coin  du  feu  »,  sutliai- 
tziii  «  devant  du  feu  »,  sukhalde  «  cuisine  »,  sukopil 
var.  de  sutopil^  sugino  ou  sukhino  «  place  au  foyer  », 
de  sa;  —  artizar  et  arthizctr  «  Vénus,  Lucifer,  étoile 
du  matin  »,  arlhiwratz  «  aube,  point  du  jour  »,  de 
civgl;  —  et  même  bethalde  «  troupeau  de  vaches  », 
de  behi.  On  pourrait  indiquer  aussi  bitarte  «  inter- 
valle, entre  deux  ».  Dans  tous  ces  composés,  le/ ou 
le  ih  pourrait  être  considéré  comme  une  mutation  du 
k  du  suffixe  ko,  après  élision  de  o,  qui  aurait  été  sui- 
vie d'une  contraction,  d'une  syncope  quand  ce  ko  au- 
rait  été    précédé  de  plus   d'une   syllabe.  11  aura  pu 

1. -Be«!«9 c'a  correspond  à  notre  «  œillère  (dent  canine  supérieure, 
censée  placée  immédiatement  sous  l'œil),  dent  de  l'œil  »  ;  afjin 
ou  Juigiti  est  «incisive».  Mais  on  a  les  variantes  itain,  litairij 
litajjin,  lethagin  :  d'où  vient  ce  l  ? 


-  228  — 

aussi  y  avoir  élision  du  i  final  et  durcissement  com- 
pensatif  du  g  en  k  puis  en  t  [hb  en  p  ;  pour  hegibura, 
bephiu'u).  On  peut  supposer  aussi  le  passage  à  t 
du  k  initial  ancien  du  second  composant  :  iile,  ille, 
azal,  ondo,  arte^  ^''g^i  auraient  été  hule,  hiUe,  har- 
rale^  hondo,  harte,  hargi,  pour  de  plus  anciens  kargi, 
kule,  kazal,  karte,  kondo,  etc.  ;  on  a  bien  asteharte 
ou  astearte  «  milieu  du  commencement^  mardi  ^  »  ; 

1.  Ce  mot  montre  que  les  Basques,  en  dehors  du  dimanche,  parta- 
geaient leur  semaine  en  deux  périodes  de  trois  jours  :  le  commen- 
cement {lias)  et  la  fin  (sans  doute  hil  «  tuer,  mourir,  finir, 
terminer  »,  d'où  ilkl  «  sortir  »)  ;  les  noms  du  Jeudi  et  du  vendredi 
ont  été  empruntés  à  des  mythologies  étrangères  (((  jour  du  ton- 
nerre »,  «  (joui')  qui  suit  (celui  du)  tonnerre  »),  mais  le  samedi 
s'appelle  encore  n^kcneguna  «  dernier  jour  ».  Les  souletins  disent 
nnzkanegun,  naskenegun,  nezlMnegun,  ce  qui  a  permis  à  de 
mauvais  plaisants  de  traduire  «  jour  des  filles»,  sous  prétexte  que, 
en  raison  du  repos  dominical,  la  nuit  du  samedi  au  dimanche 
est  la  plus  propre  aux  rendez-vous  amoureux;  mais  il  ne  faut  pas 
confondre  l'immoralité  avec  le  naturalisme.  Le  samedi  s'appelle 
aussi  larunbat,  où  le  prince  Bonaparte  voit  avec  raison  «  un 
quart»  (de  la  lunaison).  La  semaine  commençait  donc  par  le 
dimanche  et  le  mois  était  lunaire.  Il  est  probable  que,  de  temps 
en  temps,  on  intercalait  un  treizième  mois  pour  rétablir  la  corres- 
pondance des  saisons.  Celles-ci  étaient  vraisemblablement  au 
nombre  de  deu.\  :  la  belle,  la  chaude  (tidd)  et  la  désagréable,  la 
froide  (ncgu),  qui  so  partag-'aient  chacune  en  trois  périodes  de 
deux  mois  :  udalchen,  adarto,  udazken,  etc.  Le  parallélisme  entre 
la  semaine  et  l'année  suggère  l'idée  que  le  jour  de  l'an  devait  être 
une  fête  générale  comme  le  dimanche  {i(;andc  «  jour  du  soleil  », 
plutôt  que  «  grand  jour  »)  et  s'appeler  e;irihrrri  «  >oleil  nouveau  », 
nom  que  les  Basques  christianisés  ont  donné  à  la  Noël,  où, 
comme  on  sait,  l'année  a  longtemps  commencé  •  en  persan, 
le  jour  de  l'an  est  bien  7u?«/o;  «  nouveau  jour  ».  On  pourrait 
peut-être  aussi  voir  dans  les  mots  astclchen,  ((stcartc,  asieasken, 
lavunbaf.  les  noms  des  quatre  semaines  de  la  lunaison.  Remar- 
quons en  passant  lamn  pour  lauron,  laurden  «  quart  »,  à  rappro- 


—  229  — 

quant  i\  gaitz  «  mauvais  »,  il  est  peut-être  pour  /cailz, 
comme  hitz  «  parole  »  serait  pour  kilz,  avec  l'inter- 
médiaire gùz ,  d'où  pourrait  être  dérivé  gizoïi 
«■  homme,  être  à  la  bonne  parole'».  C'est  ainsi  que  ki 
"  toi  »  a  donné  t  dans  baiUiiz  «  parce  que  tu  es  », 
albeitindoa  «  puisses-tu  aller  !  »,  etc.  Nous  voici  rame- 
nés à  la  théorie  du  k  primitif",  affaibli,  dans  le  cours 
des  âges,  en  Ji  qui  tombe  à  l'époque  moderne  ^  On 


cher  de  licren  «  tiers  »,  Iclirn  «  premier  »,  où  se  révèle  la  dérivation 
ordinale  primitive. 

1.  Cette  étymologie  est  très  douteuse  ;  dans  les  composés,  ///^o/i 
devient  (j'ca  ;  ;/i;a/iiine  c(  enfant  mâle  »,  (jL-erhaile  «  homicide», 
etc.  ;  Liçarrague  fait  remarquer  qu'il  a  traduit  «  pêcheur  »  par 
fjcHcadure  pour  ne  pas  mettre  ;/barrain^aIe  «  poissonnier  d'hom- 
mes ».  Je  crois  d'ailleurs  que  g  vient  après  h  et  que  h  est  le  substi- 
tut direct  de  /,-,  sans  doute  par  l'intermédiaire  de  AA.  Au  milieu 
des  mots,  où  p. ex.  h  remplace  /•,  ;j  est  sûrement  postérieur  :  iirofcho, 
uhotcho,  ugoicho  «  brochet,  loup  d'eau  »  ;  urarte,  uharte,  ugarte 
((  île,  (maison)  entre  les  eaux  »,  qui  a  donné,  par  métathèse,  huart; 
tirolde,  a/ioldc,  ugoldr  «  déluge  »  ;  aralde,  uhalde,  ugalde,  et 
même  iibaldc  «  cours  d'eau»  ;  *iira(;,  ^uhaU^  ?/(;«/,- «mamelle». 

2.  Beaucoup  de  noms  topographiques  basques  se  terminent  en 
eta^  aga  et  egi;  eta  indique  particulièrement  la  pluralité,  aga 
l'abondance  et  cgi  la  collectivité  ;  je  traduirais  harrieta  «  les 
pierres  »,  e^pclcta  «  les  buis  »,  orrcaga  «  la  genevraie  »,  arif^aga 
«  la  chesnaye»,  ^nmulahari-i'gi  «  endroit  couvert  de  bourdaine  », 
etc.  Mais  ogi,  et,  gi  se  rattache  à  tegL  tel,  toi,  ti.  Eta  est  de  même 
très  probablement  pour  hcfa,  qui  est  d'usage  courant  :  ame^keta 
«  les  chênes  tauzins  »,  clhcl.eta  «  conversation  »,  ardiketn 
«  troupeau  de  brebis  »,  etc.  Ce  ketu,  ne  pourrait-il  pas  être  le 
suffixe  général  de  pluralité,  réduit  plus  tard  à  k^*  Il  y  aurait  eu 
un  pluriel  indéfini  et  un  défini  ;  on  aurait  dit  mendi  a  montagne  », 
mcndiar  «  la  montagne»,  mendiketa  «  montagnes»,  incndiarkcta 
((  les  montagnes  »  ;  et  il  se  serait  produit  des  confusions  entre  le 
déflni  et  l'indéfini  :  mendietan  «  dans  les  montagnes  »  serait 
pour  mcndiketan^  tandis  que  mcndiea  «des  montagnes  »  serait  une 


—   SàO  — 

sait  combien  le  basque  aime  la  composition  synco- 
pée :  opil  est  pour  ogi-bil^  okhiii  pour  ogi-egin.  En 
tout  cas,  le  /  ne  parait  pas  pouvoir  venir  du  premier 
composant. 

Mais,  pour  en  revenir  à  la  déclinaison  proposée, 
il  m'est  difficile  d'admettre  que  e,  i,  cet',  ceai  soient 
des  datifs;  s  un  instrumental;  c  ou  k  actif  serait  plus 
admissible,  mais  ne  prouverait  rien  par  lui  seul.  En 
ce  qui  concerne  s  et  en,  je  persiste  dans  mon  opi- 
nion, exposée  aux  p.  5-6  de  mon  précédent  article  :  5 
doit  être  un  génitif  et  en  un  mot,  abrégé  sans  doute, 
ayant  le  sens  de  «  ville,  cité,  municipe  ».  Schuchardt 
n'a  point  discuté  celte  opinion;  il  s'est  borné  à  re- 
produire, avec  une  pointe  de  raillerie,  la  traduction 
tout  à  fait  hypothétique  que  j'ai  indiquée  comme 
possible  pour  la  lame  de  Castellon.  Il  la  rapproche 
des  traductions  fantaisistes  de  MM.  Stempf  et 
Giacomino;  cela  n'est  pas  juste,  car  ces  messieurs 
ont  prétendu  faire  une  traduction  ferme,  définitive; 
au  lieu  que  j'ai  dit  seulement  que  l'inscription  pour- 
rait signifier  quelque  chose  comme  :  airiemta,  etc.; 
mais  je  n'y  tiens  en  aucune  façon.  Schuchardt  rec- 
tifie la  lecture  de  quelques  mots;  le  quinzième  serait 
ïithsm,  ce  qui  permet  de  rapprocher  ithsni,  lilhsni, 
iithsin...  comme  je  l'avais  déjà  fait;  le  dix-neuvième 
aicas ;  le  dix-huitième  arsleo.  11  s'ensuivrait  qu'il  y 
aurait  identité  entre  les  deux  mots  oii  j'ai  vu  hypo- 
thétiquement  «  bouche  »  et  «  ventre, organe  sexuel  »; 

réduction  de  mcndiar-kcia-en,  mcndiaketcn,  tncndiakccn,  mcn- 
diaken,   tnendiaen. 


—  2:^1  — 

il  y  a  entre  ces  deux  expressions  «  bouche  »  et 
«  ventre  »  une  idée  commune,  celle  de  chose  inté- 
rieure; le  second  pourrait  être  aussi  «  anus  ». 

Schuchardt  ne  fait  aucune  conjecture  sur  la  signi- 
fication possible  des  incriptions;  c'est  prudent,  mais 
cela  ôte  un  peu  de  valeur  à  ses  propositions.  Tout 
le  monde  n'a  pas  imité  cette  prudence.  Ainsi,  le 
P.  Fita,  dans  le  Bullelin  de  V Académie  royale  c/Viw- 
^otVe  de  Madrid,s'est  occupé  d'un  monument  découvert 
à  Fraga  (Huesca)  depuis  la  publication  du  livre  de 
Hïibner  et  qui  est  fort  intéressant.  11  se  rapproche  de 
l'inscription  n"  IV  de  Hiibner,  en  ce  qu'il  présente 
comme  celle-ci  l'image  d'une  roue,  signe  religieux, 
mystique,  ou  allégorique  ;  il  lit  ensuite  alosildu  \  i- 
glasïis  I  erein  •  celder  \  crerid  •  atue  \  zikheii-  cru.  \  i. 
Schuchardt  corrige  aloo  ildu  \  i-klasïis  \  ereïii- cel- 
der I  ercerui-aue  \  tliiceoen-erc  \  i.  Le  n"  IV  porte 
nuke-iltra-ziii  (ou  tui).  Ces  deux  inscriptions  sont 
analogues,  elles  sont  probablement  funéraires;  on 
doit  y  trouver  des  noms,  des  titres,  des  indications  de 
parenté,  des  formules  pieuses.  La  plus  ancienne  se 
compose  de  trois  mots  dont  le  dernier  finit  par  i;  la 
nouvelle  se  partage  en  trois  membres  de  phrase  ter- 
minés chacun  par  /.  Cet  i  est-il  le  signe  du  datif? 
Le  mot  zui  (ou  tLii)  est  bien  court  pour  être  un  datif; 
quand  je  me  rappelle  les  formations  re/,  ai,  ceai, 
et('.,  j'y  verrais  plutôt  une  dérivative  nominative,  une 
sorte  d'article,  et  alors  mike  pourrait  être  un  verbe, 
à  la  3*  pers.  sing.,  «  il  repose,  il  est  béni,  il  est  loué  »  ; 
le  fameux  aredk  pourrait  se  lire  arediike,  avec  ke 
verbal.  Le  nouveau  document  n'aurait  pas  de  verbe; 


—   •2'à2  — 

il  aurait  trois  nominatifs  en  /';  lé  premier  mot  alo- 
sildii  rappelle  le  andlsldu  du  n"  VI  de  Hiibner  qui 
corresj)oud  au  latin  fiilvia  ou  lintearia;  ce  serait 
donc  un  nom  de  femme.  Erein,  ercerui  ou  ererui^ 
eriii  ou  erci  sont  parents  l'un  de  l'autre  et  le  P.  Fita 
les  rapproche  de  Verba  du  n°  XLVl  (en  caractères 
latins);  ce  n''  XLVI  et  le  suivant  sont  remarquables 
par  des  mots  répétés  en  o  et  o/ii  :  a/'imo,  arimom; 
sintamo,  sintamom,  et  par  indi  qui  revient  sept  fois 
comme  un  adverbe  ou  une  conjonction  copulative, 
Ereiii  est  peut-être  le  féminin  de  ei'ci  ou  erul^  avec 
Il  final  marquant  le  datif  :  «  A  Fulvia,  fille  de  Gla- 
si  (?)  ».  Ercerui  ou  Ererui  est  peut-être  «  petit-fils  » 
et  erci,  erui  «  fils  »;  celder  et  atue  ou  auedik  seraient 
des  noms  d'hortimes  ou  des  adjectifs  de  qualité  : 
une  inscription  a  Aaedimic;  en  transcription  latine, 
Fita  cite  y4^7V/o;^^' (dérivé  de  aio,  <7m?).iV  (peut-être  m 
des  ariinoiu,  etc.,  que  les  Latins  prononçaient  en  na- 
salisant) serait  donc  un  datif,  comme  je  le  propose  à 
la  p.  22  (le  mon  précédent  article.  Je  n'affirme  rien; 
.  mais  il  me  semble  que  cet  i,  qu'on  trouve  souvent 
précédé  de  //,  joue  plutôt  le  rôle  d'un  nominatif:  les 
formules  relevées  par  Schuchardt,  iqnuciai-ildii-kle- 
seiii  (où  ildu-kleseiii  ressemble  à  Vildui-klasïis  ci- 
dessus),  cirdc-aiLLiii,  ardc-sicdiiniiieiii  (il  confère 
sicdii  avec  Ségéda;,  confirment  mon  hypothèse  :  ildii, 
klasi,  aiu  pourraient  être  des  noms  propres;  de  aiu 
dériverait  aiuni  et  môme  aueduni,  comme  sicduni  de 
6' iCi/f.;  (l'habitant  de  Ségéda),  et  sicdnninein  serait  un 
second  dérivé,  quelque  chose  comme  «  à  ceux,  parmi 
ceux   de  Ségéda   »  :  n   serait   un   datif-locatif,    l   un 


-  233  — 

adjectil'-pronominal  ou  un  article,  e  une  dérivative 
participiale  :  sicduninein  pourrait  donc  être  sicdu-ii- 
i-îi-e-i-n  «  Ségéda-à-lui-à-qui  est-lui-à,  à  celui  qui  est 
originaire  de  Ségéda  ».  Je  n'insiste  pas  sur  ces 
hypothèses;  ni  pourrait  être  d'ailleurs  un  suffixe 
spécial. 

Mais  appliquons,  vérilions,  recherchons  les  suffixes 
casuels  indiqués  par  Schuchardt.  La  lame  de 
Castellon,  par  exemple,  nous  donnerait  :  un  instru- 
mental, —  un  nominatif  (ou  verbe),  —  un  génitif, 
—  un  datif,  —  deux  datifs  pluriels,  —  2  nominatifs 
(ou  verhesi,  —  un  datif,  —  un  génitif,  —  4  nominatifs 
(ou  verbes  ,  —  un  génitif,  —  2  datifs,  —  2  nominatifs 
(ou  verbes),  —  un  instrumental,  —  un  datif;  il  y  aurait, 
dans  le  même  texte,  des  datifs  en  e  et  en  i,  des 
génitifs  en  m  et  en  n;  et  il  y  aurait  des  combi- 
naisons singulières  de  suffixes  :  ceai^  ceaie,  sensé, 
case,  (lies,  carse.  Il  est  vrai  (jue  sinekten  pourrait 
être  un  vei'be,  dit-on.  En  résumé,  Tarrangement 
grammatical  serait  tout  à  fait  étrange.  Les  mêmes 
difficultés  se  présenteraient  avec  tout  autre  docu- 
ment. On  peut  remarquer  aussi  que  Schuchardt  dresse 
des  listes  de  suffixes  particuliers,  les  uns  aux 
légendes  monétaires,  les  autres  aux  inscriptions  ; 
il  v  aurait  eu,  dans  la  même  langue,  deux  systèmes 
différents;  p.  ex.  le  suffixe  génilifc«,ce/z  des  médailles 
deviendrait  eia  dans  les  inscriptions,  et  on  nous 
affirme  ([u'il  y  aurait  là  un  aff'aiblissement  de  c  en  /, 
affaiblissement  déjà  constaté  dans  les  variantes  de 
légendes  salircn  et  salirin,  qntlicqni  etqnthiqni  ;  mais 
n'y  a-t-il  pas  une  erreur  d'observation  :  salir,  saliri, 


—  234  — 

salirin,  salircen  ne  forment-ils  pas  plutôt  des  cas 
différents  ?  Je  pourrais,  pour  tous  les  suffixes  pro- 
posés, faire  des  objections  analogues. 

Trouve-t-on  le  ko  basque  dans  Tibère  q,  qo,  qn^ 
qom  (avec  le  suffixe  génitif  ordinaire  m  ou  n  en  plus}? 
Faut-il  traduire  astarco  par  «  (le  cheval)  d'Asturie  »? 
Ko  a  certainement  un  sens  locatif;  etcheko  yauiia 
est  «  le  maître  dans  la  maison  ».  Mais,  ajouter  à  ce 
ko  le  11  génitif  ne  signifierait  rien  en  basque  :  -koen 
serait  une  contraction  de  -koaken  :  Bayonakoeii  «  des 
gens  de  Bayonne»  pour  *  Bayonako-ak-en.  Quant  à 
Alorsus,  rattaché  par  Giacomino  à  Alor-ko  de  alor 
«  champ  »,  je  réclame  la  priorité  pour  alhor  avec  h  ; 
on  néglige  vraiment  trop  les  formes  aspirées  dans 
toutes  ces  étymologies.  Il  est  d'ailleurs  exact  que  -ko 
forme  des  diminutifs,  parce  qu'il  signifie  :  «  de, 
venu  de,  dérivé  de  »,  mais  je  ne  crois  pas  qu'il  ait 
jamais  formé  des  augmentatifs.  Schuchardt  retrouve 
même  le  suffixe  composé  -tiko  dans  les  -icoi,  -digoé 
ibères  :  c'est  au  moins  fort  douteux,  car  on 
n'explique  pas  les  e  ou  i  ajoutés  :  est-ce  le  signe  du 
datif  ?  Ce  seraient  alors  des  datifs  indéfinis,  mais  quel 
en  serait  le  sens  ?  Toudadigoe  est  traduit  «  à  celui 
de  Tuda  »,  comme  Lamaticom  «  de  celui  de  Lama  »  ; 
or,  en  basque  moderne,  on  emploierait  dans  ce  cas 
ko  seulement  et  non  tiko,  on  intercalerait  l'article 
et  l'on  dirait  Tudakoari,  Lainakoaren,  ou  plutôt 
encore  Tudatarrari,  Lamataridien.  Tout  cela  est 
donc  très  incertain  et  même  un  peu  fantaisiste. 

De  même,  Schuchardt  expliquerait  volontiers  par 
«  épouse  »  le  mot  nersnatn  (et  ses  variantes;,  qu'il 


—  235  - 

rapprocherait  du  basque  neskato,  neskciso,  neskatcha 
«  fille,  servante  »  [magd,  màdchen)^  qu'on  a  expliqué 
par  un  diminutif  en  to  [paella]  ou  par  neska-oso 
«  fille  entière,  intacte,  vierge  ».  Je  crois  plutôt  qu'il 
convient  de  le  rapprocher  de  nerhabe  «  domestique, 
célibataire  mâle  »,  dérivé  de  yabe  «  maître».  Quant 
à  yabe  lui-même,  j'y  verrais  un  dérivé  de  yaiin 
«  seigneur  »  par  be  «  sous,  inférieur  »  ;  ce  serait  le 
magister  ope r uni  p.  ex.,  le  commandeur  des  esclaves  : 
faire  de  yaun  un  composé  de  yabe-on  «  bon  maître  » 
m'a  toujours  paru  beaucoup  trop  métaphysique  pour 
être  exact. 

Pour  prouver  que  le  basque  a  été  parlé  sur  un  ter- 
ritoire plus  étendu  (ju'aujourd'hui,  on  a  cité  des 
noms  à  apparence  basque  qui  figurent  dans  des  ex- 
voto  et  des  inscriptions  de  toute  la  région  pyré- 
néenne ;  mais  cela  peut  simplement  être  le  fait  de 
voyageurs,  comme  la  pierre  de  Cagliari  et  l'urne  de 
Sicile  sont  des  faits  accidentels.  Il  est  du  reste  re- 
marquable que  l'escuara  moderne,  dont  le  vocabulaire 
contient  tant  de  mots  latins,  offre  si  peu  d'éléments 
celtes^  s'il  est  vraiment  apparenté  à  l'ancien  ibère. 
Car^  il  ne  faudrait  pas  oublier  qu'à  l'époque  des  ins- 
criptions, l'Espagne  était  habitée  par  une  population 
mixte,  les  Geltibères  :  il  avait  dû  se  produire  là  ce 
qui  est  arrivé  dans  l'Inde  dravidienne  où  les  Aryas 
se  sont  infiltrés  peu  à  peu  dans  la  population  locale, 
adoptant  son  langage,  mais  y  ajoutant  beaucoup  de 
mots  sanscrits  ;  de  même  l'ibère  a  dû  s'altérer  et  se 
mélanger  de  mots  celtes.  Il  ne  sufïit  pas  au  surplus 
de  comparer  des  désinences,  des  suffixes  grammati- 


—  236  — 

eaux  pris  un  peu  au  hasard  ;  il  l'audrait  pouvoir  assi- 
miler des  racines  verbales,  des  mots  complets  ;  or,  à 
part  le  très  discutable  ill  (car  berri  ne  se  trouve  pas 
dans  les  textes  originaux),  on  ne  nous  en  présente 
aucun.  Aucun  nom,  aucune  légende,  aucune  inscrip- 
tion n'a  pu  être  expliquée  à  Taide  du  basque.  Si  nous 
relevons  les  noms  originaux  de  personnes,  de  divi- 
nités, de  localités,  assez  nombreux  dans  les  ins- 
criptions latines  de  TEspagne,  nous  n'en  voyons  pas 
qui  nous  apparaisse  comme  basques  :  aiu,  aia^  aio, 
ainmo,  allô,  ambaicus,  anibnici\  ambatus,  ambata, 
anio,  aenio,  cloutai^  cloiifi,  alecina  dea,  ceceaigi 
dei,  ceceaeci  lares,  cerepaeci  lares,  bandiae a polise- 
gus,  bandueaetobrigus,  inaiiliniaecus,  reaveanaba- 
raecus,  ongiamunaecus ,  crougintoudadicoe,  etc., 
etc.  ;  peut-être  pourrait-on  retenir  audero,  bigar  et 
deux  ou  trois  autres.  Bien  habile  celui  qui  verra  dans 
tout  cela  des  radicaux  basques!  M.  A.  Carnoy  vient 
précisément  de  publier  dans  le  Mnseoti  (t.  VUI, 
n°'  1-2,  1907,  39  p.,  gr.  in-8"j  une  étude  sur  les  £'/e- 
inents  celtiques  dans  les  noms  de  personnes  des  ins- 
criptions d'Espagne,  où  il  fait  voir  que  la  plupart 
dés  noms  dont  je  viens  de  pnrler  sont  d'origine 
celtique,  ou  si  Ton  veut,  indo-européenne.  Bien  des 
dérivations  d'apparence  escuarieiine  sont  plutôt  cel- 
tiques; ainsi  les  ko,  i/w,  goni,  etc.,  [)araissent  se  rap- 
porter aux  icus,  cas,  cuni,  gîte,  (juin  du  celte  ou  du 
gaulois.  Les  étymologies  sont  eu  tout  cas  fort  dou- 
teuses. 

Je  n'ai  donc  aucune  raison   pour  revenir   sur   les 
conclusions  de  mon  article  du  mois  de  janvier  der- 


—  237  — 

nier.  La  parenté  de  Tibère  et  du  basque  n'a  point  été 
démontrée,  même  par*  Schuchardt.  Mais  quelque 
négatifs  ou  incertains  que  soient  les  résultats  de  pa- 
reilles études  et  de  pareilles  discussions,  elles  ne 
sont  pas  inutiles.  Elles  dégagent  le  terrain  en  portant 
la  lumière  sur  beaucoup  de  points  obscurs,  en  atti- 
rant l'attention  sur  beaucoup  de  questions  secon- 
daires, en  posant  de  nouveaux  problèmes  de  détail. 
La  question  principale  sera-t-elle  jamais  résolue  ? 
Peut-être,  car  rien  n'est  impossible  à  l'esprit  hu- 
main, mais  la  prudence  n'est  jamais  inutile,  et,  comme 
dit  le  proverbe  basque,  celui  qui  parla  par  «  peut- 
être  »  ne  se  trompa  pas,  aguian  zerrana  etzadiii  en- 
gana.  Julien  Vinson. 

6y\oç-oki-^oç 

Le  grec  ôyXoç,  pour  àyyk-oç  au  sens  de  «  troupe, 
foule,  nombre,  quantité  »,  se  range,  comme  je  l'ai 
fait  voir  dans  le  numéro  de  la  Reçue  du  15  juillet 
dernier,  dans  la  liste  des  termes  du  rad.  sansc.  mah 
au  sens  de  «  grand,  étendu,  nombreux,  etc.  ». 

Je  reprends  la  plume  à  ce  propos  pour  signaler 
comme  appartenant  à  la  même  liste  le  gr.  àXiyoç  «  en 
(petit)  nombre  »  pour  l'adj.  ô)('X-tx-6ç  «  ce  qui  con- 
cerne la  foule  »,  lequel  a  tous  les  caractères  d'un  dérivé 
synonymique  de  ô)(Xoç  (en  restituant  à  l'une  et  à  l'autre 
de  ces  formes  les  éléments  phonétiques  détruits  par  la 
contraction).  Ainsi  s'expliquent  de  plus  en  plus  par  un 
même  schéma  primitif  des  dissemblances  qui  parais- 
saient irréductibles  à  première  vue. 

P.  Regnaud. 


LES  MOTS 

ARABES  ET  HISPANO-MOPJSQUES 

DU  «  DON  QUICHOTTE  » 


Le  25  septembre  1575,  la  galère  El  Sol,  voguant 
de  Naples  vers  les  côtes  d'Espagne,  rapatriait,  après 
trois  rudes  campagnes  contre  le  Turc,  un  groupe  de 
militaires  en  congé  des  armées  navales  de  Don  Juan 
d'Autriche  et  d'André  Doria,  lorsqu'elle  donna  au 
milieu  d'une  escadre  algérienne,,  fut  contrainte  d'ame- 
ner son  pavillon  en  dépit  d'une  héroïque  résistance, 
puis  conduite  en  triomphe  jusqu'au  nid  des  corsai- 
res. 

Parmi  les  prisonniers  se  trouvait  le  poète-soldat 
Miguel  de  Cervantes,  le  glorieux  estropié  de  Lé- 
pante  ' . 

Du  bagne  de  Déli-Mammi,  renégat  albanais,  celui- 
là  même  à  qui  revenait  la  prise  du  vaisseau  espagnol, 
Cervantes  passa  par  voie  d'achat,  vers  1577,  dans  le 

1.  Il  y  avait  aussi  son  frère,  Rodrigo,  soldat  comme  lui.  Ses 
multiples  allusions  à  cette  bataille,  livrée  le  7  octobre  1571, 
semblent  prouver  qu'il  était  plus  6er  du  sobriquet  qu'il  se  donnait, 
el  manco  de  Lcpanto,  que  d'avoir  écrit  le  Don  Quicltotto,  auquel 
il  préférait  de  beaucoup  son  théâtre  (cf.  le  Prologue  de  la  1"  par- 
tie). —  Les  Vénitiens  ont  fait  Lcpanto  de  Naupahtos,  et  les 
Turcs  Ajnébakltti, 


—  239  — 

propre  bagne  du  roi  d'Alger,  Hassan-Aga,  de  son 
vrai  nom  Andreta,  car  il  était  Vénitien  de  nation, 
renégat  comme  de  juste,  au  demeurant  le  plus  féroce 
et  le  plus  rapace  de  tous  les  forbans  du  rivage 
barbaresque. 

Après  trois  tentatives  d'évasion  aussi  infructueuses 
que  sévèrement  châtiées,  après  cinq  ans  passés 
sous  la  menace  permanente  du  gibet  ou  du  pal,  il 
fut  enfin  donné  au  misérable  captif  d'apaiser  la  soif 
de  liberté  qui  le  dévorait.  Une  commission  de  rachat 
pour  la  Couronne  de  Castille  débarqua  à  Alger,  y 
traita  du  prix  des  rançons  et,  le  19  septembre  1580, 
le  futur  auteur  du  Don  Quichotte  était  arraché  à  grand 
peine  des  serres  de  son  vautour.  Quelques  minutes 
plus  lard,  Hassan-Aga,  esclave  du  Grand-Seigneur, 
qui  venait  de  lui  retirer  le  gouvernement  de  la 
régence  d'Alger,  mettait  le  cap  sur  Stamboul \ 

Il  y  avait  alors  25.000  esclaves  chrétiens  dans  les 
bagnes  d'Alger;  mais  tous  ne  relevaient  pas  de 
Philippe  II. 

Le  souvenir  des  glorieuses  campagnes  de  Lépante 
et  de  Tunis,  et  surtout  de  la  terrible  aventure  qui 
s'ensuivit,  resta  à  jamais  gravé  dans  l'esprit  de 
Cervantes.  Il  y  a  fait  allusion  dans  presque  tous  ses 
écrits;  il  a  été  jusqu'à  prendre  pour  sujets  de  drames 
et  de  nouvelles  les  étranges  épisodes  de  sa  captivité. 
Le  Capitan  cautivo  qu'il  inséra  dans  la  1^^  partie  du 
Don  Quichotte,  le  Trato  de  Argel,  les  Baiios  de  Argel, 
la  Gran  Suttana   Catalina   de   Oviedo,    la   Espanola 

1.  Cf.  Perez  Pastoi-,  Dociiinontos  cpvvantliios,  Madrid,  1897. 


—  240  — 

Inglesa,  la  Guarda  cuidadosa,  sont  autant  de  chapi- 
tres d'autobiographie  où  le  romanesque,  cependant, 
n'a  pas  complètement  abdiqué  ses  droits.  Il  suffit  de 
lire  son  œuvre  maîtresse  pour  voir  combien  il  se 
plaît  et  combien  il  excelle  à  mettre  en  scène  quel- 
qu'un de  ces  Mores  ou  de  ces  renégats  marfuces^  au 
milieu  desquels  il  vécut  les  plus  sombres  heures  de 
son  existence  accidentée.  Leurs  usages,  leur  costume, 
leur  mentalité  si  particulière  ont  trouvé  en  lui  un 
observateur  attentif.  D'un  trait  de  plume  il  campe 
ses  silhouettes  orientales,  véritables  croquis  de 
voyage  enlevés  sans  retouche.  Il  n'est  pas  jusqu'à 
leurs  propres  expressions  qu'il  n'emploie,  quand, 
l'imagination  hantée  par  le  souvenir  des  choses 
vécues,  il  veut  teinter  son  récit  d'une  pointe  de  cou- 
leur locale.  Sous  ce  rapport,  l'histoire  du  Captif,  qui 
est  un  peu  la  sienne,  forme  un  intéressant  feuillet 
d'album  (fre  partie,  ch.  XXXIX  à  XLIl).  Enfin,  on  a 
émis  l'opinion,  en  partie  fondée,  semble-t-il^  que  son 
séjour  à  Alger,  où  il  s'attarda  pendant  quelques  mois 
après  sa  délivrance,  n'a  pas  été  sans  influence  sur 
son  style  et  sur  ses  idées. 

Cervantes,  on  le  sait,  se  piqua  toujours  d'écrire 
purement  —  ses  admirateurs  disaient  :  divinement 
—  dans  une  langue  d'ores  et  déjà  qualifiée  de  divine, 
mais  qui  commençait  alors  à  déchoir  de  cette  dignité 

1.  «  No  te  fies  de  ningun  nioro,  porque  son  todos  marfuccs  » 
(2'  p'%  ch.  XL)  :  mot  arabe  passé  en  espagnol.  Engelmann  le 
fait  venir  de  markhoù?  =  vil,  sans  valeur,  et  Dozy  de  mar/oûd 
=  réprouvé.  V.  leur  Glossciwe  des  mots  espagnols  et  portugais 
dérioés  de  l'arabe,  Leyde,  1869,  pp.  3U;{  et  o91. 


-  211  — 

et  de  celte  élégance  qu'elle  avait  acquises  au  cours 
du  siècle  précédent.  Une  nouvelle  école,  en  effet, 
était  apparue,  dans  les  rangs  de  laquelle  se  pressait 
tout  ce  que  TEspagne  comptait  de  copieras,  de  poètes 
crottés,  de  licenciés  en  veine  d'écrire,  tristes  imita- 
teurs de  la  littérature  italienne,  les  uns  parlant 
espagnol  en  latin,  les  autres  en  arabe,  tous  mécon- 
naissant la  hauteur  et  la  fécondité  du  castillan,  de 
l'idiome  national,  tous  encourant  pour  cette  injure 
l'anathème  de  l'immortel  manchot,  qui  regardait  leur 
pédantesque  littérature  comme  u  la  idiotez  y  la 
arrogaiicia  del  mundo  ». 

Cervantes  s'érigea  donc  en  champion  de  la  pureté 
castillane  et  consacra  tous  ses  efforts  à  réagir  contre 
le  goût  facile  de  l'époque.  Les  Avellaneda,  les  Ville- 
gas,  les  Suarez  de  Figueroa  ne  lui  pardonnèrent  pas 
leur  infériorité.  Il  y  eut  une  levée  d'écritoires  :  les 
pygmées,  empruntant  au  géant  ses  propres  armes,  le 
blâmèrent  insolemment  d'allonger  son  Ronian  d'his- 
toires parasites,  taxèrent  son  style  de  langage  terre 
à  terre  «  idioma  humilde  »,  comme  si  Sancho  Panza 
eût  été  un  bachelier  de  Salamanque  et  la  Teresina 
quelque  Galathée  de  pastorale;  ils  lui  reprochèrent 
enfin  de  faire  «  ostentacion  de  sinon imos  voliintat-ios  » . 

«  Olivo  y  aceituno  — ■  es  todo  uno\  »  Ce  dicton 
populaire  a  raison^  on  ne  peut  le  nier.  On  ne  peut 
nier  davantage  que  le  Don  Quichotte  renferme 
nombre    de  vocables   de  l'idiome  courant,  de   cette 

1.  Ces  deux  mots  sont  synonymes,  l'un  est  latin,  l'autre  est 
arabe,  Zeïtoûn  =  olivier. 

17 


—  242  — 

langue  où  foisonnaient  par  centaines  les  termes 
relatifs  à  l'administration  et  aux  sciences,  à  l'agri- 
culture et  aux  arts  et  métiers,  que  la  conquête  arabe 
avait  imposés  à  la  péninsule  avec  sa  civilisation. 
Tous  ces  mots  étrangers,  plus  ou  moins  privés  d'équi- 
valents ou  de  synonymes  d'origine  latine,  mais  pitto- 
resques, éparpillés  à  travers  les  cent  vingt-six  chapi- 
tres du  livre,  vont  et  viennent,  se  perdent_,  puis  se 
retrouvent,  parfois  à  de  longs  intervalles,  ou  encore 
se  rencontrent  dans  la  même  phrase  par  groupes 
de  plusieurs. 

A  quoi  faut-il  attribuer  ces  petites  débauches 
à'algarabia^  ?  Sont-ce  des  marques  de  l'empreinte 
laissée  par  cinq  ans  d'existence  en  pays  arabe  ?  Est- 
ce  le  résultat  d'une  composition  hâtive  ? 

Ce  ne  sont  que  les  négligences  hautaines  du  génie. 

La  preuve  en  est,  pour  le  moins,  dans  l'admirable 
page  où  Ricote,  le  More  converti,  narre  ses  aventures. 
Ce  hors-d'œuvre  est,  à  n'en  pas  douter,  une  réponse, 
entre  vingt  autres  tout  aussi  spirituelles,  adressée 
aux  Zoïles  qui  supportaient  si  difficilement  les  leçons 
dégoût  sorties  de  la  bouche  même  de  Don  Quichotte  % 
«  plus  apte  à  faire  un  prédicateur  qu'un  chevalier 
errant  »,  au  dire  de  Sancho  Panza.  Au  préalable, 
Cervantes  a  avisé  le  lecteur  que  «  Ricote,  sin  iropezar 
nacla  en  su  lengua  morisca,  en  la  pura  castellana 
le  dijo   las  siguientes  razones  ».  Et,  de  fait,  le  récit 

1.  C'est-à-dire  «  la  langue  arabe  »  el-'Aj-abîya,  mot  qui  a  fini 
par  signifier  en  espagnol  «  galimatias  »  et  qui  est  passé  en 
français  sous  la  forme  charabia. 

2.  Cf.  entre  autres  passages  le  ch.  XVI  de  la  2'  partie. 


-  243  — 

de  Ricote,  cette  victime  de  la  persécution  de  1609 
que  l'auteur  déplore  hardiment,  est  rendu  dans  un 
style  impeccable,  dont  nulle  expression  d'importation 
étrangère,  /iwZ  emprunt  fait  à  Yaljamia\  ne  vient 
choquer  la  belle  tenue,  en  un  mot  dans  le  plus  élé- 
gant et  le  plus  pur  castillan,  comme  si  le  puissant 
écrivain  eût  voulu  rappeler  que  son  génie,  quand  il 
lui  plaisait,  pouvait  ne  pas  connaître  de  limites. 

Par  contre,  on  demeure  quelque  peu  interdit, 
lorsque,  six  chapitres  plus  loin,  on  voit  l'Ingénieux 
hidalgo  de  la  Manche,  dont  la  folie  bien  souvent 
sommeille,  faire,  «  en  passant  »,  un  petit  cours 
d'étymologie  hispano-morisque  à  son  écuyer  balourd 
et  madré  tout  à  la  fois.  Que  penser  de  ces  lignes, 
sur  lesquelles  d'ailleurs  nous  aurons  à  revenir? 

«  Dieu  me  garde  !  dit  Don  Quichotte.  Quelle  vie 
nous  allons  mener,  Sancho  mon  ami  1  Que  de  flageo- 
lets [churumbelas)  vont  résonner  à  nos  oreilles  !  que 
de  cornemuses  [gaitas  zamoraiias)^  que  de  tambou- 
rins, que  de  grelots  et  que  de  rebecs  [rabeles]  !  Que 
si  parmi  ces  diversités  de  musiques  résonne  celle 
des  albogues^  nous  aurons  là, presque  tous  les  ins- 
truments champêtres  !  — Qu'est-ce  là,  des  albogues  ? 
demanda  Sancho  ;  je  n'en  ai  jamais  entendu  parler 
et  n'en  ai  jamais  vu  de  ma  vie  entière.  —  Les  albo- 
gues, répondit  Don  Quichotte,  sont  des  plaques"  dans 

1.  Arabe  el-'Adjamîya,  le  castillan  corrompu  et  mêlé  de  mots 
arabes  que  parlaient  les  Morisques.  Ceux-ci,  de  leur  côté,  don- 
naient ce  nom  à  l'espagnol  parce  que  c'était  la  langue  des  étran- 
gers, des  barbares,  'Adjam. 


—  244  — 

le  genre  des  chandeliers  de  cuivre  (sic)  ;  en  les  frap- 
pant l'une  contre  l'autre,  par  le  côté  vide  et  creux, 
cela  rend  un  son  sinon  très  harmonieux  et  agréable, 
du  moins  qui  ne  déplait  pas  et  qui  s'accorde  bien 
avec  la  rusticité  de  la  cornemuse  et  du  tambourin. 
Or  ce  nom  d'albogue  est  morisque,  comme  le  sont 
tous  ceux  qui  dans  notre  langue  castillane  commen- 
cent par  al;  savoir:  Abnohaza  (étrille),  almorzar 
(déjeûner),  alhombra  (tapis),  alguacil  (agent  de 
police),  alhuzema  (lavande),  almacen  (magasin), 
alcancia  (tirelire,  etc.),  et  autres  semblables  qui  ne 
doivent  pas  être  beaucoup  plus  nombreux;  notre 
langue  n'a  que  trois  mots  qui  sont  morisques  et 
finissent  en  i,  ce  sont  ;  borcegui  (brodequin),  zaqui- 
zami  (galetas),  et  maravedi.  ^Z^eZi  (giroflée)  et  alfaqiii 
(théologien  musulman),  tant  par  I'al  du  commence- 
ment que  par  l'i  de  la  fin,  sont  connus  pour  être 
arabes  \  Je  te  dis  cela  en  passant,  le  hasard  qui  m'a 
fait  te  parler  des  albogues,  me  l'ayant  rappelé  à  la 
mémoire.  . .»  (2*  partie,  ch.  LXVII.) 

La  leçon  est  assurément  incomplète;  le  plus 
fâcheux,  c'est  qu'elle  est  tissue  d'inexactitudes  dont 
il  paraît  bien  difficile  de  démêler  l'origine  et  le 
but.  Si  Don  Quichotte,  poursuivant  une  nouvelle 
chimère,  expose  simplement  son  opinion  de  mono- 
mane,  la  cause  est  entendue;  elle  devient  sérieuse 
s'il  est  l'innocent  truchement  de  Fauteur;  dans  l'une 

1.  Tous  ces  mota  sont  identifiés  dans  le  Glossaire  de  Dozy.  — 
V.  le  commentaire  par  endroits  erroné  que  Diego  de  Clemencin 
consacre  à  ce  passage  dans  une  note  du  tome  VI,  p.  360,  de  son 
édition  du  Don  Qtdjoto  (Madrid,  1833-39,  6  vol.,  pet.  in-4°). 


—  245  — 

et  l'autre  alternative,  quelque  invraisemblable  qu'elle 
soit,  elle  mérite  d'être  examinée. 

1°  Il  est  presque  absurde  d'observer  qu'un  mot 
n'est  pas  nécessairement  arabe  parce  qu'il  commence 
par  AL.  Il  y  en  a  plusieurs  en  espagnol  qui  ont  de 
ce  chef  toute  l'apparence  de  mots  arabes,  bien  que 
dérivant  directement  du  latin.  Voici,  à  titre  d'exem- 
ples, les  plus  curieux  de  ces  vocables  mulâtres  : 
Alcorque  (quercus),  Almaceria  (maceria),  Almeiia 
(minœ),  Almodrote  (moretum)  ;  peut-être  Almorzcir 
(mordere?);  puis  Albedrio  (arbitrium),  qui  n'a  de 
trompeur  que  l'apparence,  et  Alimana  (animal).  Ce 
dernier  n'est  pas  le  moins  intéressant  comme  phé- 
nomène linguistique;  dans  la  bouche  des  Morisques, 
ce  mot  latin  est  devenu  fl'/-}'«/;z«/z/?/a:=:  originaire  du 
Yémen  !  et,  ainsi  altéré  par  l'interversion  des  con- 
sonnes, il  a  obtenu  ses  lettres  de  naturalisation,  il 
est  rentré  dans  le  giron  de  la  langue  maternelle,  oii, 
sous  son  masque  de  moharracho\  il  s'est  retrouvé 
synonyme  de  lui-même,  car  le  mot  latin  animal  avait 
été  soigneusement  conservé  en  castillan. 

2°  Le  dictionnaire  espagnol  ne  contient  pas  moins 


1.  ((  Quiùii  diablos  te  habia  de  conocer,  Ricote,  en  ese  irajc 
de  moharracho  que  traes?»  Qui  diable!  pourrait  te  reconnaître, 
Ricote,  sous  cet  accoutrement  de  carême-prenant,  que  tu  portes? 
(2*  p'",  ch.  LIV.)  —  C'est  l'arabe  mouharradj  (V.  Glossaire, 
p.  308),  synonyme  de  maskliani  qui  a  donné  mascara  en  espa- 
gnol et  mascarade  en  français.  Cf.  Devic,  Dictionnaire  éti/mo- 
logi'/ue.  Le  mot  alimatïa,  qui  n'a  plus  cours  aujourd'hui,    était 

encore  en  usage  à  l'époque  de  Cervantes  :  « los  jumentos 

Il  alimanas  que  sircen  de  eahallerla  à  los  escuderos  de  los  cabal- 
leros  andantes.  »  (Z).  Q.,  2°  p",  ch.  XI.) 


—  246  — 

de  dix-huit  cents  mots  d'origine  arabe,  et  non  pas  une 
vingtaine,  comme  Finsinue  Cervantes  par  Forgane 
de  son  héros.  Engelmann  et  Dozy  en  ont  inventorié 
un  peu  plus  des  trois  quarts;  Eguilaz  et  Simonet 
après  eux  n'ont  pas  tout  épuisée 

3°  Les  vocables  morisques  terminés  en  i  qui  sont 
venus  enrichir  l'espagnol  ne  dépassent  pas  la  tren- 
taine. On  se  contentera  de  citer  ici  ceux  que  Cervantes 
lai-même  emploie  dans  son  Don  Quichotte^  \  ce  sont: 
Lelili  (le  cri  de  guerre  des  Mores),  Bocaci  (toile 
gommée,  boucassin),  Guadamaci  (tenture  de  cuir 
gaufré  et  doré),  Tabi  (taffetas  onde,  tabis),  Tahali, 
baudrier),  /dô«Zi  (sanglier).  —  Alholi,  moderne  Alfoli 
(grenier  à  fourrage)  et  Aljonjoli  ou  AJouJoli  [sésame) 
semblent  être,  avec  les  deux  mentionnés  par  Cervan- 
tes, les  seuls  mots  arabes  passés  en  espagnol  qui 
ont  conservé  l'article  al  et  qui  ont  i  pour  désinence. 

4°  Quant  au  sens  de  cymbales  que,  au  moyen  d'une 
bizarre  comparaison,  Don  Quichotte  prête  au  mot 
albogues  [uiias  chapas  a  modo  de  candeleros  de 
azofar,  que  dando  una  cou  otra  por  la  vacio  y  hueco 
hacen  un  son),  il  est  d'autant  plus  déconcertantque  ce 
mot  revient  plusieurs  fois  dans  le  livre  avec,  suivant 
toute  apparence,  sa  véritable  signification  qui  est  : 
instrument  à  vent,  en  arabe  boûq  (Dicc.  de  la  Acad.  : 
lat.  buccina)\  que  l'espagnol  n'a  qu'un  mot  pour 
désigner  les  cymbales  :  platillos^  et  que  l'arabe,  qui 

1.  Eguilaz,  Glosario  etimoloyico  de  las  palabras  cspanolas  de 
oricjen  oriental,  Granada,  1886.  Simonet,  Glosario  de  coces  ibe- 
ricas  y  latinas  usadas  entre  los  Mos:arabes,  Madrid,  1888. 

2.  Cette  liste  ne  prétend  pas  être  complète. 


—  247  — 

n'en  possède  pas,  confond  dans  une  même  expres- 
sion cymbales  et  crotales,  c'est-à-dire  sounoâdj. 
5°  Si,  dans  ce  passage,  la  distinction  entre  mots 
moriscos  et  mots  arabigos  est  intentionnelle,  elle  ne 
repose  cependant  sur  rien  de  sérieux  au  point  de 
vue  de  la  linguistique.  Elle  nous  laisse  seulement 
soupçonner  que,  sur  ces  douze  mots,  Torigine  des 
dix  premiers  était  vaguement  tombée  dans  l'oubli 
ou  près  de  le  devenir. 

Que  Cervantes  ait  péché  par  ignorance  ou  seule- 
ment par  inadvertance  en  faisant  tenir  au  chevalier 
de  la  Triste  Figure  un  discours  à  ce  point  hors  de 
saison  et  de  raison,  c'est  une  hypothèse  qui,  à  la 
réflexion,  parait  inadmissible.  Par  la  force  des  choses, 
en  sa  double  qualité  d'Espagnol  —  ce  qui  suppose 
un  homme  ataviquement  habitué  à  l'ambiance  arabe 
—  et  d'écrivain  hors  de  pair,  capable  de  doter  son 
pays  «  du  seul  livre  qui  montre  le  ridicule  de  tous 
les  autres^  »,  Cervantes  était  mieux  placé  que  per- 
sonne pour  connaître  non  seulement  l'historique  de 
la  langue  «  divine  »  qu'il  travailla  à  rénover,  mais 
encore  les  principes  de  la  langue  ondoyante  et  para- 
site qu'était  celle  des  Mores  d'Espagne.  Quant  aux 
séjours  qu'il  avait  faits  parmi  Mores  et  Qouloghlys 
de  Tunis  et  d'Alger,  il  y  a  lieu  de  croire  qu'ils  ne 
furent  pas  tout  à  fait  sans  profit  pour  lui. 

1.  Montesquieu,  Lettres  persanes,  LXXVIII.  Diego  de  Cle- 
mencin  dit  que  les  Mores  étaient  particulièrenaent  nombreux  dans 
les  villages  de  la  Manche,  surtout  depuis  1568  et  1569.  L.  c.  I, 
p.  200,  note. 


—  248  — 

Il  est  donc  impossible  que  Cervantes  n'ait  pas 
commis  délibérément  les  erreurs  qu'on  vient  de 
signaler. 

Aussi  bien,  dans  le  même  temps  qu'il  composait 
la  deuxième  partie  du  Don  Quichotte,  le  licencié 
D.  Sébastian  de  Cobarruvias  Orozco,  «  Capellan  de 
S.  M.  C.  el  Rey  D.  Felipe  111,  jMastrescuela  y  Cano- 
nigo  de  la  santa  Iglesia  de  Cuenca,  y  Consultor  del 
santo  Oficio  de  la  Inquisicion  ■>^,  publiait  son  Tesoro 
de  la  lengLia  Castellana  (Madrid,  m.dc.xi),  œuvre 
remarquable  pour  l'époque,  unique  en  son  genre,  où 
la  plus  large  part  était  faite  à  l'étymologie  des  mots 
issus  de  l'arabe.  Malgré  quelques  assertions  hasar- 
dées, ce  dictionnaire  qui  complétait  d'heureuse  façon 
les  livres  de  vulgarisation  publiés  un  siècle  aupara- 
vant par  le  P.  Pedro  de  Alcala\  fut  accueilli  des 
érudits  et  des  littérateurs  de  métier  avec  toute  la 
faveur  qu'il  méritait. 

Cervantes  fut-il  du  nombre  ?  Pourquoi  en  doute- 
rait-on ?  Ce  précieux  ouvrage  de  lexicographie 
réunissait  assez  de  titres  pour  attirer  son  attention, 
exciter  son  intérêt,  satisfaire  sa  curiosité,  le  conduire 
à  des  découvertes.  11  le  consulta.  Dès  les  premières 
pages,  l'article  Albogiie  l'édifia,  comme  nous-mêmes, 
amplement  :  «  Espèce  de  flûte,  de  doulcine,  en  usage 
chez    les    Mores   d'Espagne,    particulièrement   dans 


].  Vocabalista  aracirjo  en  Ictra  castellana,  Granada,  1505  ; 
AHg  para  lif/cramcnie  sabcr  la  Icnr/ua  araruja,  Salaraanca,  1505. 
Ces  manuels,  extrêmement  rares  aujourd'hui,  furent  composés 
dans  le  but  de  faciliter  aux  religieux  la  conversion  des  Morisques. 
Ils  sont  imprimés,  l'arabe  transcrit,  en  caractères  gothiques. 


—  249  — 

leurs  zambras  (ce  sont  des  danses);  espèce  de  gaila, 
suivant  le  Padre  Guadix...'»  Voilà  ce  que  dit 
Cobarruvias  ;  mais  de  cymbales,  il  n'est  pas  question. 
Vingt  articles  du  même  genre  précèdent  celui-ci, 
cent  autres  et  davantage  le  suivent.  Les  mots  latins 
commemant  par  al  alternent  dans  l'ordre  alphabé- 
tique avec  les  arabes  de  la  même  catégorie...  Et 
csetera.  D'où,  encore  une  fois,  l'inévitable  conclu- 
sion: c'est  à  bon  escient  que  Cervantes  fait  disserter 
son  héros  sur  l'épineux  sujet  que  l'on  sait. 

Depuis  quelque  temps  déjà,  remarquons-le  bien, 
Don  Ouichotte,  qui  se  sent  parvenu  au  terme  de  son 
aventureuse  carrière,  songe  avec  attendrissement  à 
troquer  lance  et  rondache  contre  la  pacifique  houlette 
des  bergers  arcadiens.  «  Quelle  vie  nous  allons 
mener,  Sancho  mon  ami  !  »  Et,  «  en  passant  »,  à 
propos  à' albogues ,  il  continue  à  déraisonner  le  plus 
naturellement  du  monde,  ni  plus  ni  moins  qu'à  son 
ordinaire. 

Mais  rien  ne  nous  dit  que  sous  Textravagance  de 
ce  dernier  hors-d'œuvre  d'un  genre  tout  spécial,  le 
«  père  putatif  de  Don  Quichotte,  de  ce  fils  sec,  maigre, 
jauni,  fantasque,  plein  de  pensées  étranges  et  que 
nul  autre  n'avait  conçues^  »,  n'ait  pas  caché  un  dernier 

1.  Les  principales  références  de  Cobarruvias  sont  deux  lexiques 
qui  semblent  aujourd'hui  perdus  et  dont  les  auteurs  sont  le 
P.  Francisco  Guadix  et  le  P.  Francisco  Lopez  Tamaiid  de  Gre- 
nade. Il  a,  en  outre,  misa  contribution  les  lumières  de  l'interprète 
du  roi  (Philippe  111)  pour  les  langues  orientales.  Don  Diego  de 
Urrea,  «qui  sait  l'arabe,  dit-il,  de  façon  magistrale  ». 

2.  V.  le  Prologue  de  la  l"  partie. 


—  250  — 

trait  d'énigmatique  ironie  à  l'adresse  des  «  gradués 
de  Sigûenza  »%  des  puristes  de  mauvais  aloi,  des 
syllabarum  aucipites,  qui  traitaient  de  Don  Quichotte 
le  créateur  de  Don  Quichotte  lui-même. 

11  me  reste,  avant  d'aborder  l'examen  critique  des 
mots  arabes  tombés  sous  la  plume  de  Cervantes,  à 
montrer  la  fortune  d'une  très  vieille  légende  orientale 
qui,  née  dans  le  temple  de  Salomon,  fut  tour  à  tour 
et  simultanément  juive,  chrétienne  et  musulmane, 
franchit  les  terres  et  les  mers,  les  déserts  et  les 
montagnes,  et  trouva  l'accomplissement  de  son  der- 
nier avatar  dans  le  XLV«  chapitre  de  la  seconde  par- 
tie du  Don  Quichotte  :  «  Comment  le  grand  Sancho 
Panza  prit  possession  de  son  île  et  de  quelle  manière 
il  commença  à  gouverner.  » 

Qu'on  veuille  bien  lire  ou^  pour  ne  pas  être  im- 
pertinent, relire  ces  pages  pleines  de  sens  et  de  verve, 
et  s'arrêter  davantage  au  différend  très  banal  qui 
amène  devant  le  gouverneur  de  l'île  de  Barataria 
deux  vieillards  :  l'un,  débiteur  de  l'autre  pour 
quelques  écus  d'or,  jure  que  la  somme  est  rendue, 
cependant  qu'il  confie  son  bâton  au  demandeur  le 
temps  de  prêter  serment.  Mais  Sancho  qui,  du  coin 
de  l'œil,  observe  les  deux  parties,  llaire  la  ruse  :  le 
bâton  est  creux  et  renferme  l'objet  du  litige.  Sancho 
explique  alors  comment  il  a  pu,  quoicjue  sot,  pronon- 
cer en  juge  avisé  :  «  C'est,  dit-il,  que  j'ai  ouï  conter 
jadis  une  histoire  semblable  au  curé  de  mon  village.  » 

1.  Cf.  ch.  l,  1"  partie.  L'Université  de  Sigiienza,  ville  de 
4.000  âmes,  n'existait  que  de  nom,  comme  beaucoup  d'autres. 


—  251  — 

Elle  se  Irouve  en  effet  rapportée  tout  an  long  dans 
VHistoria  lomhardina  seu  Legenda  sancla  (Vie  de 
Saint-Nicolas  de  Bari,  ch.  III),  dontrauteur,  Fra  Gia- 
copo  di  Voragine,  né  à  Voraggio  vers  1230,  mourut 
évêque  de  Gênes  en  1298;  livre  si  célèbre  au  moyen 
âge  —  et  même  longtemps  après  —  que  l'admi- 
ration des  pieux  lecteurs  le  décora  du  nova  àe Légende 
dorée.  Seulement,  cette  historiette,  Cervantes  Ta 
quelque  peu  dénaturée  quant  au  fond,  sans  doute 
pour  les  besoins  de  la  cause. 

Ce  reproche  n'atteint  pas  les  Arabes,  ces  tradi- 
tionnistes  par  excellence.  S'en  étant  emparés  sur 
place,  c'est-à-dire  à  Jérusalem,  à  l'époque  de  la  con- 
quête, comme  l'ont  fait,  d'ailleurs,  les  Chrétiens  à 
l'époque  des  Croisa  des,  les  Arabes  conservaient  encore 
de  cette  fable,  au  XVP  siècle  de  notre  ère,  un  sou- 
venir que  les  milliers  d'années  n'avaient  pas  entamé. 
Dans  leurs  traditions,  qui  ne  varient  guère  de  l'une 
à  l'autre,  la  scène  se  passe  dans  le  Temple,  près  de 
la  roche  de  Jacob  (la  Sakhra  de  la  mosquée  d'Omar)  : 
le  serment  des  plaideurs  est  prêté  sur  une  chaîne 
miraculeuse  qui  se  lève  ou  s'abaisse  suivant  qu'elle 
est  touchée  par  un  homme  véridique  ou  un  parjure  ; 
la  contestation  a  pour  objet  un  dépôt  qui  consiste  soit 
en  un  joyau  précieux,  soit  en  une  somme  de  cent  ou 
de  deux  cents  dinars  en  espèces  ou  fondus,  coulés 
dans  le  bâton  foré;  les  parties  adverses  sont  deux 
Juifs.  La  moralité  de  la  fable  ne  souffre  pas  de  va- 
riantes :  la  perversité  du  genre  humain  a  tué  le  pro- 
dige. 

C'est  ainsi  que  cette  curieuse    légende   est  trans- 


—  252  — 

crite  pour  la  dernière  fois,  seinble-t-il,  en  Orient,  par 
l'Arabe  Moudjir  ed-Dîn  el-Hanbaly,  mort  en  1521, 
dans  son  Histoire  de  Jérusalem  et  d'Hébron  (p.  30  de 
la  traduction  de  H.  Sauvaire,  Paris,  1876)  ;  un  siècle 
auparavant,  par  le  compilateur  Chihâb  ed-Dîn  el- 
Achbîhy,  mort  en  1446,  dans  son  Kilàh  el-Mousta- 
traf{\.omQ  11,  p.  198  de  la  traduction  de  M.  G.  Rat. 
Paris,  1902);  enfin,  par  un  contemporain  de  celui-ci, 
Khalil  ben  Ghâhîn  ez-Zâhiry,  vizir  du  sultan 
d'Egypte  Djaqmaq  (1438-1453),  dans  sa  Zoubdat 
Kachf  el-Mamâlik  (p.  21  du  Texte  arabe,  publié  par 
P.  Ravaisse,  Paris,  1894).  La  voici  telle  que  nous  la 
trouvons  consignée  dans  cet  ouvrage  : 

«  Une  légende  nous  apprend  que  Salomon,  fils  de 
David,  avait  fait  suspendre  dans  la  Maison  du  Sanc- 
tuaire une  chaîne  que  devait  toucher  quiconque  avait 
à  prêter  serment.  Elle  s'élevait  devant  le  parjure,  elle 
s'abaissait  au  contraire  sous  la  main  de  rhomme 
véridique.  Mais  il  arriva  dans  la  suite  qu'un  homme 
confia  à  un  autre  cent  pièces  d'or.  Quand  il  les  lui 
réclama,  l'autre  nia  de  les  avoir  reçues.  Tous  deux 
alors  se  présentèrent  devant  la  chaîne.  Cependant 
le  dépositaire  avait  glissé  les  cent  pièces  d'or  dans 
un  bâton  [creux]  qu'il  remit  à  son  créancier.  Or, 
comme  la  somme  était  coulée  en  lingot  dans  le  corps 
du  bâton,  la  chaîne  ne  s'éleva  point  lorsqu'il  la  tou- 
cha, ce  qui  frappa  de  stupéfaction  et  le  plaignant  et 
ses  témoins.  Aussi,  à  partir  de  ce  jour,  elle  ne 
s'abaissa  plus  et  elle  est  restée  suspendue  jusqu'à 
présent.  C'est  à  cela  que  le  poète  fait  allusion  dans 
ce  vers  : 


—  253  — 

«  De  même  que  Tlnspiration  d'en  haut,  l'ère  des 
grandes  choses  est  passée  ;  ainsi  la  vertu  est  restée 
en  suspens  avec  la  Chaîne.  » 

Paul  Ravaisse. 

(A  suivre.) 


A  SYNOPSIS 

ANALYTICAL  AND  QUOTATIONAL 

of  the  338  Forms  of  the  Verb,  used  in  tlie  Epistle  to 
ihe  Hehrews,  as  fouiid  in  the  Baskish  New  Testa- 
ment of  Jean  de  Liçarrague,  printtd  in  1571,  at  La 
Rochelle. 


(suite) 

DELARIC.  3.  I.  q.  delà,  but  in  the  participial  sensé. 
The  partitive  ending  rie  adds  nothing 
perceptible  to  the  meaning.  He  heing. 
1.  3.  .  .  .  eta  .  .  .  imagina  propria  delaric,  (H. omit 
la  virgule.)  .  .  .  estant  .  .  . ,  &  la  marque 
engrauee 

7,   25 bethi  vici  delaric   hecgatic  ararteco 

IÇATECO.  .  .  .,  tousiours  viuant  pour  inter- 
céder pour  eux. 

11.  4.  ...  :  eta  .  .  .  hil  delaric  ...  :  &  luy  estant 
mort 

DEMOGVN.  1.  Imp.  pi.  1,  r.  s.,  r.  i.  s.,  v.  ir.  act. 
eman.  Let  us  give  it  to  himl 

10.  24.  Eta  gogoa  demogun  elkarri,  charitatera  eta 
obra  onetara  incitatzeco  :  (H.  omit  la  vir- 
gule.) Et  prenons  garde  Tvn  à  l'autre, 
afin  de  nous  inciter  à  charité  &  à  bonnes 
œuures. 


-  255  — 

DEN.  25.  I.  q.  (la,  qui  devient  de  devant  n'  relatif, 
et  (12.  3.,  13.  7.)  conjonctif.  Whlch  is ;  in 
{\'hich  is  ;  of  whidi  any  one  is  ;  lie  may  be  ; 
[n'hat]  may  be. 
1.  7.  Eta  Aingueruéz  den  becembatean  ...  Et 
quant  aux  Anges 

1.  8.    Baina     Semeaz    den    becembatean  .  .  .  Mais 

.  .  .,  quant  au  Fils,  (L'imprimeur  lyonnais 
mit  «  aux  ».) 

2.  5.    ...  ETHORTEGO   DEN  mundua,  ...  le    monde 

à  venir, 
4.     4.    ...  çazpigarren   egunaz    den  becembatean, 
(H.  put  çazpi  at  the  end  of  the  linewithout 
a  hyphen.) 
.  .  .,  touchant  le  septième  iour, 

4.  12.    .  .  .,  eta  den   ezpata  bi  ahotacoric  baino  pc- 

netrantago^  :   ...,  &  plus  pénétrante   que 
tout  glaiue  à  deux  trenchans, 

5.  2.    ...  BEHAR  den  becembat  .  .  .  competemment 

6.  5.    .  .  . ,  eta   ethorteco    den    secularen  verthu- 

teac  :   .  .  . ,  &  les  puissances    du   siècle  à 
venir, 
6.     6.    ...  hetan    den    becembatean,   ...   quant    à 
eux, 


1.  This  pronoun  is  in  the  nominaiive  case  except  in  10.  18-, 
where  it  is  locative;  and  in  11.  1.,  where  it  is  the  possessive 
plural. 

2.  The  use  of  den  =  ichich  is,  in  the  sensé  of  «  ail,  or  any 
a/àch  is  »,  is  common.  L-  renders  trenchans  =  edges  by  aho  = 
mouth,  as  if  he  weie  speaking  of  a  two-edged  saw.  The  expression 
occurs  again  under  Car  de. 


—  256  — 

6.     9.    .  .  .  çiieçaz    den   becembatean,   .  .  .    cjuant  à 
vous, 

6.  19.    ...  SARTZEN  de/i-hai  heçala.  .  .  .  comme  .  .  ., 

&  pénétrant  (L.  translates  «  as  one-which- 
is  entering  ».) 

7.  4.    ...  cein    handi    eguin  içan    den    haur,   ... 

combien  grand  a  esté  cestuy-ci, 
7.   23.   Eta  Sacrificadoréz  den  becembatean,  D'au- 

antage,  quant  aux  Sacrificateurs, 
9.    13.    ...  haraguiaren    puritateaz    den    becemba- 
tean :   .  .  .  quant  à  la  pureté  de  la  chair  : 
9.    16.   Ecen  testamenturic  den   lekuan,    .  .  .   testa- 
mentu  eguilearen  lierioa  den.  Car  où  il  y 
a  Testament,  .  .  .  que  la  mort  du  testateur 
entreuienne. 
10.   Som.  26.   Spiritu  sainduaren  contra  DEN  beka- 
tua.  Péché  contre  le  sainct  Esprit. 

10,  18.   Bada  gauça  hauen  barkamendua  den  lekuan. 

Or  là  où  il  y  a  rémission  de  ces  choses, 

11.  1.    ...  nehor    sperançatan    den   gaucén  funda- 

menta,    .  .  .   vne  subsistenoe    des    choses 
qu'on  espère, 

11.  7.    ...  fedearen  arauez    den    iustitiaren    here- 

dero.  .  .  .  héritier  de  la  iustice  qui  est  se- 
lon la  foy. 

12.  3.    ...  nor    den  ...  celuy    (L.  translates  «  who 

may  be  ».) 
12,    13.    ...  :  maingu    den    gaucâ  ...  ce    qui  cloche 
(H.  mit    den,  parce    que    L.  avait    lu    tô 
yjiùkov.) 


—  257  — 

12.  18.  .  .  . ,  ez  ERRATZEN  clen  sura',  ez  haice  buhum- 
bara,  .  .  . ,  ni  au  feii  bruslant,  ni  au  tour- 
billon, 

12.  23.    ...,eta   gucién   iuge    den    Taincoagana,  eta 

iusto  SANCTiFiGATUEN  spiritiietara  :  .  .  .,  & 
à  Dieu  qui  est  iuge  de  tous,  &  aux  esprits 
des  iustes  sanctifiez   : 

13.  7.    ...  ceric  içan  den  hayén  conuersatione"aren 

lina.  quelle  a  esté  Tissue  de  leur  conver- 
sation. 
DENA.   10.   I.  q.  den^  ii   rel.    nom.  décl.    nom.  intr. 
&  accusatif,  [na  ^=  celui  qui)  He,  or  Him 
n'ho  is  ;  that  which  is. 

3.  2.    ...  fidel  DENA  :  (régime  d'eçaçue.)  Fidèle 

4.  10.   Ecen  laincoaren  reposean  SARTHU  ?V<'?7i  r/e/îr/, 

Car  celuy  qui  est  entré  au  repos  de  Dieu. 
4.  15.  ...  manera  berean  gauça  gucietan  tentatu 
içan  dena,  salbu  bekatuan.  (régime  de 
dugu.)  .  .  .  celuy  qui  a  esté  sembablement 
tenté    en    toutes   choses,  hors  mis  péché. 

7.  7.    ...  chipién  dena  ...  ce  qui  est  moindre 

8.  13.    ...  :  eta    çahartzen    eta   anclanotzen   dena 

...  :  &  ce  qui  est  fait  vieil  &  ancien, 

9.  3 Sainduén  sainduac  deitzen  dena  :   .  .  ., 

qui  est  appelé  : 

10.  37.    .  .  . ,  eta   ethorteco    dena  .  .  . ,  &   celuy   qui 

doit  venir 

11.  27.    ...  :  ecen   inuisible    dena  ...  celuy  qui  est 

inuisible. 

1.  Cf.  latin   suber,  sûrus,  surcûlus,  sûbârc,  sûrtre,  et   basque 
criti'c  =  bois,  niinea  =  mimbie,  et  caetera. 

18 


—  258  — 

12.  25.    ...  MiNÇO  dena  :  .  .  .  celuy  qui  parle  : 

13.  8.    lesus   Christ  atzo   içan   dena  eta  egun,  (H. 

mit  içan  dena.)    lesus   Christ   qui  a  esté 
hier  &  auiourd'huy, 

DENAC.  2.  I.  q,  f/e/i,  aux.,  n  rel.  nom.  décl.  nom.  s. 
act.  [nac  =  celui  qui;  nom.  de  eztrauca 
&  deçan.)  He  who  is. 

5.     4 baina  laincoaz  deitzen  denac,  ....  ains 

celuy  qui  en  iouit  qui  est  appelé  de  Dieu, 
(L.  ne  traduit  pas  en  iouit.) 

11.  6.    ...  :  ecen  laincoagana  ETHORTEN  c?e«â!c,   ... 

que  celuy  qui  vient  à  Dieu, 

DENAGANIC.  1.  I.  q.  den,  n  rel.  nom.  décl.  ablatif 
déterminé.  From  him  who  is. 

12.  2.5.    ...  cerutic   minço   denaganic  ...    de    celuy 

qui  parle  des  cieux.  (L.  dit  «  de  ciel  ». 
DENAREN.  2.   I.  q.  den.,  n  rel.  nom.  décl.  possessif 

dét.  Ofthat  which  is. 
10.    13.   Goitico  DENAREN  .  .  .  cc  qui  reste,  (Voyez  da- 

goelaric.) 

13.  14.    ...  :  baina  ethorteco  denaren   ondoan  ... 

celle  qui  est  à  venir.  (Voyez  gabiltza.) 

DENAZ.   1.  1.  q.  den,  v.  s.,  n  rel.  nom.  s.,  décl.  mé- 
diatif  dét.  [naz  =  par-  celui  qui.)  By  him 
who  is. 
7.     7,    ...  guehién  denaz  .  .  .  par  le  plus  grand. 

DENEC.  1.  I.  q.  denac,  mais  indéterminé,  influencé 
par  cemheit  =  quelque,  {nec  =  qui.)  Sujet 
de  etzaitzatençât.  [Something)  <,vhic]i  is. 


—  259   — 

12.  15.  ...  :  cembeit  erro  karmin  goiti  ialguiten 
denec  ...  :  que  quelque  racine  d'amer- 
tume bourionnant  en  haut  (The  sensé  of 
the  Baskish  is  the  same  as  ilone  read  den 
cemheitec^  namely  «  any  (one)  which  may 
be  ».  It  is  in  the  active  case,  because  il  is 
the  nominative  ol'  the  transitive  verb 
etzaitzatençdt.  Itis  quite  différent  l'rom  the 
defînite  and  determinate  denac  meaning 
that  which  is.  So  too  batek  means  [any] 
one  in  the  active  case.  But  batek  is  «  the 
one  »  in  the  active  case,  as  distinguished 
from  berzeak  =■  «  the  other  ».  For  the  same 
différence  compare  denaz  and  denez.) 

DENEZ,  1.  I,  q.  den  aux.  avec  e  euph.  devante  mé- 
diatif  ou  adverbial  indéterminé,  [nez  =  de 
[quelque  chose)  qui.]  About  [soniething] 
which  is.  (The  sensé  would  be  the  same 
were  gauça  [■=  causa  =  thing)  thro^vn 
forward  and  the  sentence  formed  thus 
«  hobe  eta  ...  den  gauça  bâtez  «.The 
whole  relatival  clause  is  an  epithet  added 
to  hobe  =  better.  Such  séparations  be- 
tween  the  noun  and  the  termination  that 
qualifies  it  are  common  in  Baskish  phrases. 
See  the  note  on  denec.) 
6.  9.  ...,  gauça  hobez,  eta  saluamenduarequin 
EGUiTENAGO  ^  denez  ;  . .  . ,  choses  meilleures 
&  conuenables  à  salut,  (L.  traduit  chose.) 

1.  For  cases  of  the  application  of  the  comparative  degree  to  the 


—  260  — 

DENIC.  1.  I.  q.  deii,  v,  s.,  //  rel.  décl.  partitif  indé- 
terminé, [nie  =  quelque  chose  qui)  quali- 
fiant le  régime  de  duçuela.  [Soîiiething) 
which  is. 

10.   34.    .  .  .,  eta  permanent  denic.  .  .  .  vne  .  .  .,&  qui 

est  permanente. 
DENO.  3.  I.  q.  den,  aux.,  n  rel.  temporel  décl.  dura- 
tif.  [no  =  durant  que.)  Wliile  it  is. 

3.    13.    .  .  .,  egungo  egun  deitzen  deno,  .  .  .,  tandis 
que  ce  iourd'huy  est  nommé, 

3.    15.   ERRAiTEN  deuo,  Cependant  qu'il  nous  est  dit, 
(Leiçarraga  does  not  express  nous.) 

9.  17.  > .  .  testamentu  eguilea  vici  deno.  . . .  durant 
que  le  testateur  vit.  [Eguilea  is  the  maker) 
which  governs  testament  =  will,  i.  e.  the 
[will-)maker. 
DIAVDEG.  1.  Ind.  prés.,  pi.  3  adr.  masc,  v.  irr. 
neutre  egon.  They  stand,  o  man!  (Acts,  13. 
21.) 

1,    12.    . . .,  eta  MUTHATZECo  diaudec  :  .    .,  &  seront 
changez  :  (L.  dit   «  restent  à  changer  ».) 
DlC.  3,  Ind.    prés.,   s.  3,  r.  s.  adr.  masc.^  aux.  act. 
Has  it.,  o  man! 

1.   21.    ...,  lURATU    ukan   die   launac,  ,..,  Le  Sei- 
gneur a  iuré, 
12.     6.    ...    launac  gaztigatzen  die,  eta   ...  haour 
gucia  CEHATZEN  dic.  Car  le  Seigneur  chas- 
tie  celuy  .  .  .,  &  fouëte  tout  enfant 

infinitive,  cf.  Acts,  9.  22,  fortificat;scnago  ;  Luke,  23.  5,  gort^e- 
nago. 
The  sensé  is  «  making-er  »,  i.  e.  «  more  contributive  to  ». 


—  261  — 

DIEÇOGVX.   1,   Imp.    pi.    1,  r.  s.,  r.   i.  s.,  aux.  act. 

Let  us  hâve  il  to  Him. 
13.    15.    [larcaz  bada  oiFRENDA  rfi'e^oo^w/i  ardura  lain- 

coari  laudoriozco  sacrificio,  (H.  mit  lain- 

coari,)  OH'rons    donc   par   luy  sacrifice  de 

louange  à  tousiours  à  Dieu  : 
DIO.   10.  Ind.  prés.,  s.  3,  r.  s.,  v.  irr.  act.  e//«/<,  Says 

it\ 
1 .      6 .    .  .  . ,  DIO,  (H.  omit  la  2"  virgule.;  .  .  . ,  il  dit, 
1.      7.    ...   DIO,  .  .  . ,  il  dit, 

1.  8.    .  .  .   DIO,  ([1,  mit  ilio  et   omit  la   virgule.)  il 

dit, 
8.     5.    ...  (dio)  ...  (dit-il) 

8.     8 DIO  launac,  (dit  le  Seigneur) 

.  .  .,  DIO  launac.   .  .  .,  dit  le  Seigneur. 
.  .  .,  DIO  launac,   .  .  .,  dit  le  Seigneur, 
Halacotz,  munduan  sartzeân,  dio.  A  raison 
de  quoy,  en  entrant  au  monde,  il  dit, 

.  .  .,  DIO  launac le  Seigneur  dit, 

.  .  . ,  DIO  launac dit  le  Seigneur, 

DIOELA.  4.   I.  q.  dio^  avec  e  euph.  devant  la  parti- 
cipial.  While  lie  says  il. 
2  .      6.    .  .  . ,  DIOELA,  ....  disant, 

2.  12.    DIOELA,  Disant, 

8.    11.    ...,  DIOELA disant, 

12.   26.    ...,  DIOELA,  ...,  disant, 

1.  From  astupid  note  in  the  Grammar  of  Iturri  it  seems  neces- 
sary  to  say  that  dio  and  the  nextthree  forins  are  not  derived  from 
crran;  but  express  its  idea.  just  as  da  does  that  of  i^an,  or  in 
Latin  fuit  that  of  ferre,  fui  that  of  cssc. 


8. 

9. 

8. 

10. 

10. 

5. 

10. 

16. 

10. 

30. 

—  262  — 

DIOSTE.   1.  Ind.  prés.,  s.  3,  r,  s.,  r,  i,  pi.,  v.  irr.  act. 
erran.  Says  it  1o  tJiein. 

8.  8.    .  .  . ,  DIOSTE,  ...  il  leur  dit, 

DIOT.   1.  Ind.  prés.,  s.  1,  r.  s.,  v.  irr.  act.  erran.  Isay 
it. 

9.  2 DIOT,  (H.  mit  diot,.)  .  .  .,  asçaiioir 

DIRADE.  23.  Ind.   prés.,  pi.  3,    v.  s.    et  aux.    They 

are. 

2.  11.    ...^batganic  dira.de  guciac,  ...,  sont  tous 

d'vn, 

3.  11 Baldin  seculan  sarthuren  hadirade  ene 

reposean.  .  .  . ,  si  iamais  ils  entrent  en  mon 
repos. 

4.  3 Baldin  seculan  sarthuren  hadirade  ene 

reposean  :   .  .  . ,  si  iamais  ils    entrent  en 

mon  repos, 
4.     5.    .  .  . ,  Baldin  seculan  sarthuren  h^dirade  ene 

reposean.  ...,  Ils    n'entreront    point    en 

mon  repos. 
4.    13.    ...  :  aitzitic  gauça  guciac  dtrade  billuciac^ 

eta    irequiàc    haren   beguietan  ...   :  ains 

toutes    choses    sont  nues  &  ouuertes  aux 

yeux  de  celuy 
7.     5.    .  .  .,  Abrahamen  guerruncetic  ilki  içan  ba- 

dirade  -  ère.    .  .  .    combien    qu'ils  soyent 

sortis  des  reins  d'Abraham. 
7.    20.    (ecen  berceac  iuramendu  gabe  Sacrificadore 

EGMm  içan  dirade.  .  .  .  (car  les  autres  ont 

esté  faits  Sacrificateurs  sans  serment  : 


1.  Du   latin    rîllo  et   ut:-  =  vidl\  dcponnvi,  comme  la  brebis 
tondue? 


—  263  — 

7.  23.    . .  .,  anhit/-   eguin   içan  diradt,  .  .  . ,  il  en  a 

esté  fait  plusieurs, 

8.  8.    .  .  . ,  ETHORRi   dirade   egunac,  ...,  les  iours 

viendront,  (L.  traduit  £p)(OVTai.) 

8.  10 eta  hec  içanen  dirade  ene  populu. 

.  .  . ,  &  ils  me  seront  peuple. 

9.  22.   Eta  quasi  gauça  guciac   Leguearen    arauez 

odolez  PURIFICATZEN  dircide^  Et  presque 
toutes  choses  selon  la  Loy  estoyent  net- 
toyées par  sang,  (In  the  original  there  is  a 
comma  after  Loy,  but  not  after  sang.) 

11.  13.  Fedean  hauc  gucioc  hil  içan  dirade  pro- 
messac  recebitu  gabe  :  Tous  ceux-ci  sont 
trespassez  en  foy,  n'ayans  receu  les  pro- 
messes : 

11.  34.  .  .  .,  sendo  eguin  içan  dirade  erietaric,  bor- 
thitz  EGUIN  içan  dirade  g\\eT\2Ln\  .  .  . ,  de 
malades  sont  deuenus  vigoreux,  se  sont 
monstrez  forts  en  bataille, 

11.  35.  ...  :  eta  batzu  hedatu  içan  dirade,  .  .  .,  les 
vns  aussi  ont  esté  estendus, 

11.  36.  Eta  berceac  phorogatu  içan  dirade  escar- 
nioz  eta  vkaldiz,  Et  les  autres  ont  esté 
esprouuez  par  mocqueries  &  batures, 

11.  37.  LAPiDATU  içan  dirade,  segxtu  içan  dirade, 
TENTATU  iça?i  dirade,  ezpata  herioz  hil 
içan  dirade  :  hara  huna  ebili  içaji  dirade 

1.  Does  (jiicrla  come  from  f/uerra,,  or  froin  low-latin '/«/ere/a.^ 
The  use  of  erietaric,  to  render  a  de  raalades».  appears  too  lite- 
ral.  L.  ought  to  hâve  used  a  périphrase  to  shew  that  it  means 
<f  instead  of,  or  after  being  il!  »,  such  as  «  eri  içanez  gueroztic  ». 


—  264  — 
ardi  eta    ahunz   larruz  veztituric,    aban- 

DONNATURIC,    AFFLIGITURIC,   TORMENTATURIC. 

Ils  ont  esté  lapidez,  ils  ont  esté  sciez,  ils 
ont  esté  tentez,  ils  ont  esté  mis  à  mort 
par  occision  de  glaiue,  ils  ont  cheminé  çà 
&  là  vestus  de  peaux  de  brebis,  &  cheiires, 
destituez,  affligez,  tormentez. 

12.  25.    ...  :  ecen  baldin  itzuri  içan  expsidirade  .  .  . 

:  carsi  ceux-là  ...,  ne  sont  point  eschappez, 

13.  11.   E('en  abrén  gorputzac,  ,  .  .,  erratzen  dirade 

tendetaric    lekora'.    Car    les     corps    des 
bestes  .  .  . ,  sont  bruslez  hors  du  camp. 
DIRADELA.  3.    I.  q.  dirade,  avec   la    conjonctif  = 
que.  That  they  are. 

2.  8.    .  .  .  gauça  guciâc  haren  suiet  diradela. 

.  .  .    toutes  choses  luy  estre  suiettes. 

3.  19.    ...  EciN    SARTHu    iça?i   diradela.  ...  qu'ils 

n'y  peurent  entrer 

4.  6.    ...    batzu     SARTZEN    diradela    hartan,     ... 

qu'aucuns  y  entrent, 

DIRADELA RIG.   1.  I.  q.  dirade,  aux.  avec  laric  par- 
ticipial. While  they  are,  or  they  beiiig. 

1.    14 cerbitzuco    igorten  diradelaric  .  .  .,  & 

qu'il  enuoye  (L.  traduit  ziç,  ôia/wOVtav 
àTro(7T£XX6(j.£va). 

DIRADEN.  7.   1.  (j.  dirade,  avec  ii  conj.  (5.12.,  and 9- 
33.  ruled  by  baino)  rel.et  -=  qui,  et  1.6. de 

1.  Cf.  (hujula  13.  13.  Ra  is  the  directive  case-ending,  or  post- 
position. Possibly  Icrobkli  in  the  Lclo  (=  Canclôn)  of  Markina 
may  mean  a  let  be  excepted  »,  «  soit  mis  hors  ». 


—  265  — 

laquelle.  TJiat  tJtey  are,  (they)  whicli  are^ 
and  7.  6.  of  whidi  llicy  are. 

5.  12.    .    .  cer  diraden  ...  lehen  hatseco  elemen- 

tac  :  .  .  .  quels  sont  les  rudimens  du  com- 
mencement 

7.  6.  Baina  hec  dihaden  leinu  bereco  Mais  ... 
dVne  mesnie  race  qu'eux,  (L.  mit  diraden 
parce  que  dans  le  grec  on  ne  trouve  que 
é^  aÛTWv.) 

7.     8.   Eta  hemen  iiiltzen  diraden  gmconec 
Et  ici  les  hommes  qui  sont  mortels, 

9.  23.  ...  ceruëtan  diraden  gaucén  figurâc,  .  .  . 
hauc  DIRADEN  baiuo  sacrificio  hobez.  .  .  . 
les  figures  des  choses  qui  sont  es  cieux 
.  .  .  par  meilleurs  sacrifices  que  ceux-là. 
12.  23.  Eta  ceruëtan  scribatuac  diraden  lehen  sor- 
THUÉN  congregationera,  Et  à  l'assemblée 
des  premiers  nais  qui  sont  escrits  és 
cieux, 

DIRADENAC,  6.  I,  q.  dirade,  avec  n  rel.  nom.  pi. 
décl.  pi.  nom.  intr.  et  accusatif,  [nac  = 
ceux,  ou  celles  qui.)  Thosc  iv/io  are. 
2.  11.  Ecen  bay  sanctificaçalea,  bay  SANGTiFiCATZEN 
diradeuac.  Car  celuy  qui  sanctifie,  &  ceux 
qui  sont  sanctifiez, 

6.  4.    .  .  .  behin    illuminatu  içan  diradenac,  ..., 

eta  Spiritu  sainduan  participant  eguin 
içan  diradenac,  .  .  .  ceux  qui  ont  vne  fois 
esté  illuminez,  .  .  . ,  &  ont  esté  faits  parti- 
cipans  du  sainct  Esprit. 


—  266  — 

7.  25.  .  .  .,  harçaz  laincoagana'  hurbiltzen  dirade- 
nac,  .  .  .  ceux  qui  s'approchent  de  Dieu 
par  luy, 
10.  14.  ...  SANCTiFiCÂTZEN  dlradencic.  ...  ceux  qui 
sont  sanctifiez.  (L.  translates  toùç 
àyta^Ofxévouç  -—  those  who  are  being 
sanctified.) 

12.  27.    ...  :  fermu    diradenac    ...   celles   qui   sont 

immuables 

DlRADExNACGATIG.  1.  \.<\.  diradenac,  avec  n  nom. 
pi.  et  la  terminaison  prodessive  gatic.  For 
those  who  are. 
1.  14.  ...  saluamenduco  heredero  içanen  dirade- 
nacgatic.  ...  à  cause  de  ceux  qui  receu- 
ront  l'héritage  de  salut.  (L  translates 
«  On  behalfof  those  who  shall  be  heir  ».) 

DIRADENEC.  2.  l.  (\.  diradenac,  ixi?às  nominatif  ac- 
tif, sujet  de  baduté  et  ezpaitute.  Those  who 
are. 
7.  5.  Eta  Leuiren  semetaric  diradenéc  .  .  .  Car 
ceux  d'entre  les  fils  de  Leui  (Voyez  dule- 
laric.  L.  ought  to  hâve  put  diradenéc  in 
Italie,  because  the  Greek  has  only  ol  (Jièv 

13.  9.    ...  APPLicATU    içaii    diradenéc.   ...   à    ceux 

qui  s'y  sont  occupez.  (See  e^pai Lille.  L. 
translates  ol  usptTraT'/jaavTSç,  which  Calvin 
turned  into  a  dative.) 


1.  The  Heuskarian  idiom  expresses  the  idea  of  appioach,  as  in 
English,  by  to   or  toico.rds,  hère  rendered  fjann. 


—  267  — 

DIRADEiNÉX.  2.    I.  q.  diraden  nom.  aux.  décl.  poss. 
dét,  pi.  {nén  =  de  ceux,  ou  celles  qui.)  Of 
those  who  are. 
2,    18.    ...  TENTATZEN  diradeiiéii-eTe  ailtaïzeco  .  .  . 
à  aider  ceux  qui  sont  tentez. 

12.   27 hala  nola  escuz  eguin  diradenen  dese- 

GUiTEA   :    ...    Tabolition    ...,  comme    de 
celles  qui  ont  esté  faites  de  main, 

DIRADENETARANO.  i.l.  q.diradenx.  s.,/?.reI.nom. 
décl.  au  cas  arrivatif  déterminé,  inetarano 
=jusquà  ceux  qui.)  Until,  or  as  far  as, 
those  wliicli  are. 
6.  19.  .  .  . ,  eta  vêla  barnean  diradenetarano  sartzen 
.  .  . ,  &  pénétrant  iusqu'au  dedans  du 
voile  :  [L. translates  neither  the  Greek  nor 
the  Fren(;h;  but  turns  to  éacoTspov  into 
«  those  (tliings)  which  are  ».] 

DIRATENEY.  1.  Ind.  fut.,  pi.  3,  n  rel.  nom.  décl. 
dat.  pi.  dét.  aux.  [ney  =  à  ceux  qui.)  To 
those  ivho  shall  be. 

12.  11.    ...  harçaz  exercitatu  diraieney.  (Y£Yi>[Jt.va(7- 

(JLÉvotç,  exercitatis.)  ...  à  ceux  qui  sont 
exercez  par  iceluy.  (L.  translates  seront, 
parce  que  l'idée  est  future.  Voyez  guero 
sous  draue.) 
DIRADENEZ.  1.  I.  q.  diraden,  aux.  nom.  décl.  mé- 
diatif  pi.  déterminé,  [néz  =  de  ceux  qui.) 
Of,  or  aboul,  ihose  who  are. 

13.  3.    ...  :  AFFLIGITZEN  dirudenez,  ...  :  &  de  ceux 

qui  sont  tormentez,  (L.  does  not  translate 


—  268  — 

et,  because  the  Greek  bas  not  tbe  équiva- 
lent. Tbe  termination  ougbt  to  be  éz.) 

DIRAVEAT.   1.  Ind.  prés.  s.   1.    r.  s.,  r.  i.  pi.  adr. 

■     masc.  aux.  act.  /  hâve  il  to  them,  o  inan! 

2 .    12 .    .  .  . ,  DENU^•TIATURE^•  divciiLeat  hire  icena  neure 

anayey,  .  .  .,  l'annonçeray  ton  nom  à  mes 

frères,  (cf.  St  Jean,  17.  6.) 

DITEXO.  1.  Subj.  prés.,  pi.  3,  aux.  a  rel.  temp. 
décl.  duratif.  [no  =  jusqu'à  ce  que).  Uiitil 
they  be. 

10.  13.  ...,  haren  etsayac  haren  oinén  scabella 
EÇAR  diteno.  .  .  . ,  iusqu'à  ce  que  ses  enne- 
mis soyent  mis  pour  le  marchepied  de  ses 
pieds. 

baDITEZ.   1.   Hypothétique   pi.    3,    aux.    Cf.  St  Luc, 
19.  40.  If  they  be. 
6.   6.    Baldin    eror    haditez,    S'ils    retombent,   (Cf. 
dadi.  The    Hypothetic  is  the  Suppositive 
ofthe  Subjunctive.) 

DITECEN.  2.  Subj.  prés.,  pi.  3,  aux.  (Variante  de 
diten.)  That  they  be. 

6.6 berriz  arramberri  ditecen  penitentiatara, 

que  (v.  4.)  ....  soyent  renonciez  à  repen- 
tance, 
9.  23.  .  .  . ,  baina  celestial  berac  plrifica  ditecen 
.  .  . ,  mais  que  les  célestes  soyent  nettoyées 
[U.  mit  purifica  ditecen,  et  Calvin  soyent 
nettoyées,  parce  que  le  grec  n'exprime 
pas  ces  mots.  L.  ought  to  hâve  written 
celestialac,  because  berac  is  not  hère 
eadem  buL  ipsd.) 


—  269  — 

DITV.  5.   Ind.  prés.,  s.  3,  r.  pi,,  aux.  act.  Has  them. 
7.     8.    ...  :  baina  han  .  . .  hartzen  ditu.  ...  :  mais 
là  ...  les   prend    (H.   mit    hartzen    ditu.) 
(The   italic  in  both  texls   shews  that  the 
(jreek  does  not  express  the  équivalent.) 
7.   28.   Ecen  Legueac  Sacrificadore  subirano  ORDEN- 
ATZEN  ditu  guioon  infîrmoac  :  Car  la  Loy 
ordonne    pour    souuerains   Sacrificateurs 
les  hommes  qui  sont  infirmes  : 
9.    13.   Ecen  baldin  cecenén  eta  akerrén  odolac,  eta 
bigâren  hauts  barreyatuag,  satsuac  san- 
CTiFiCATZEN  h^ditu  .  .  .  Car  si  le  sang  des 
taureaux  &  des  boucs,  &  la  cendre  de  la 
génisse  espandue  sanctifie  les  souillez 

10.  14.  Ecen  oblatione  bakoitz  bâtez  consegratu 
ukan  c^i'ia  seculacotz  . . .  Car  par  vne  seule 
oblation  il  a  consacré  à  perpétuité 

13.  4.  ...  :  baina  paillartac  eta  adulteroac  iugea- 
TUREN  ditu  laincoac.  ...  :  mais  Dieu  iugera 
les  paillards  &  les  adultères. 

E.    S.    DODGSON. 

{A  suivre.) 


GORRIGENDA 


p.  134.   Entre  «  pour  »  et  «  some  »,  insérez  «  we  »  à 
l'impératif. 
Il  serait  mieux  de  commencer  ces  rimes  ainsi  : 
«  With  water  let  us  fiU  a  bowl, 
And  make  it  froth  with  lathering  soap  ;  » 
P.  135.   1.  4,  Changez  is  en  be. 
P.  153.   Selon  l'édition  de  Dindorf  (Paris,  1840),   il 
faut  lire  paôtov  et  ogol  [xévTOi  X£(paXatcî)57] 
[jLàv9av£  (Dialogues  des  Morts,  20,  p.  107). 
1.  5  d'en  bas,  lisez  82;  4  d'en  bas,  74. 
P.   154.   1.  5.  Lisez  :  présent  sing.  2. 

1.  5  et  6  d'en  bas.  Lisez  eTZeaquiagu  &  ba- 

Ceaquiagu. 
St'Marc,  12.  14.    bacequiagu   est   une   faute 
d'impression,  Etzeaquiagu  en  est  la  forme 
négative. 
P.  156.   Lisez  BaiCARA. 
P.   157.  1.    pénultième.   Après    «que»,   ajoutez  «le 

texte  grec  ». 
P.  160.   1.  15.  Après  «  que  »,  ajoutez  «ie  mettray...  ») 
P.   163.   1.  14.  Après  iaquin,  insérez  Ye  know. 

1.  17.  Après  ikus,  ajoutez  We  see  it. 
P.  164.   1.  3.  Lisez  :  vr. 

1.  7.  Après  «varier»,  insérez  deux  points. 
1.  11.  Lisez  :  1.  1. 
1.   12.  Lisez  :  grâce 
P.   165.    1.  6.  d'en  bas.  Après  ^we,  insérez  :  v.  irr.  act. 
eguin. 

E.  S.    DODGSON. 


LE  MALAIS  VULGAIRE 


VOCABULAIRE 


ÉLÉMENTS  DE  GRAMMAIRE 


USTENSILES    DE 

TABLE,  DE    MENAGE,    ETC. 

couteau 

piso 

fourchette 

garfu 

cuiller 

sendok 

assiette 

piring,  pingan 

plat 

basi 

soupière 

tempat  sop 

tasse 

mangkok 

soucoupe 

piring  ketjil 

verre 

glas 

bouteille 

botol 

carafe 

karap 

gargoulette 

gendi 

bouchon 

sumbat-botol,  prop 

filtre 

batu-saringan 

cafetière 

tempat-kopi 

pot 

blanga 

chaudron 

priok 

poêlon 

kuali 

jarre 

tempayan 

—  272  — 


conduite  d'eau 

seau 

tonneau,  fût 

panier 

sac 

balai 

brosse 

cuvette 

brosse    à  dents 

brosse  à  ongles 

»        à  cheveux 
peigne 
éponge 
rasoir 
savon 
serviette 
lampe 
lanterne 
bougie 
allumette 
mèche 

corde,  ficelle 
fil 

ciseaux 
aiguille 
épingle 
dé 

encre 
plume 
papier 
livre 


panljuran 
timba 
tonof 
bakul 

sako,  karono- 
penyapu 
sapu 

tempat  ayer  tjutji 
sekat-gigi 
»       kuku 
»       rambut 
sisir 
gabus 
piso-tjukor 
sabun 

toala,  sapu-tangan 
lampo,  pelita 
tenglong 
lilin 

korek  api,  tarek  api 
tali  api 
tali 
benan 
gunting 
djarum 
peniti 
didal 
tinta 

penna,  kalam 
kartas 
kitab,  buku 


—  273 


VETEMENTS 

,    BIJOUX,    ETC. 

vêtements 

pakéan 

chapeau 

topi,  kepia 

veste 

badju,  jas 

gilet 

rompi 

pantalon 

tjélana,  seluar 

caleçon 

tjélana  di  baua 

chemise 

kamédja 

bas,  chaussettes 

sarong-kaki 

gants 

»     -tangan 

soulier,  bo 

iltine 

kasut,  sepatu 

pantoufle 

tjinella 

robe 

badju,  kaïn 

poche 

sako 

mouchoir 

s  tangan 

pagne  indi 

gène 

sarong 

vestCj  camisole 

kabaya 

turban 

serban,  stangan-kapala 

ceinture 

tali-pinggang,  tali-ikat 

bijou 

permata 

montre 

orlodji 

chaîne 

ranté 

broche 

krusang 

bague 

tjin-ljin 

bouton 

kantjing 

éventail 

kipas 

éperon 

tadji 

canne 

tongkat 

parapluie, 

ombrelle 

payong 

lunettes 

katja-mata 

parfum 

vangi 

19 


—  274 


ALIMENTS,    BOISSONS,    ETC, 


aliments,  p 

rovisions 

makanan 

boissons 

minuman 

repas 

makan 

banquet 

makan  besar 

viande 

daging 

bœuf,  porc, 

,  etc. 

daging  sapi,  d.  babi,  etc 

poisson 

ikan 

volaille 

ayam 

venaison 

daging  rusa 

pain 

rôti 

farine 

tepong 

œuf 

telor 

omelette 

dadar 

légumes 

sajoran 

riz  (cuit) 

nasi 

haricot 

katjang 

pois 

katjang  puti 

pomme  de 

terre 

ubi,  kentang 

salade 

slada 

oignon 

bauang 

lait 

susu 

crème 

kapala  susu 

beurre 

mantega 

fromage 

kédju 

gâteaux 

kvé-kvé 

confitures 

manisan 

miel 

madu 

sucre 

gula 

sel 

garam 

—  275  — 


poivre 

noix  de   muscade 

gingemljre 

cannelle 

cary 

vinaigre 

huile 

fruits 

banane 

ananas 

mangue 

noix  de  coco 

raisin 

orange 

citron 

pamplemousse 

grenade 

pastèque 

papaye 

anone 

mangka,    mangistan, 

eau  potable 

glace 

limonade 

lait  de  coco 

vin 

bière 

vin  de  cocotier 

cognac 

genièvre 

bitter 


maritja,  lad  a 

pala 

halia,  djaï 

kayu-manis 

karé 

tjuka 

minyak 

bua-bua 

pisang 

nanas 

manga 

kalapa 

bua-angor 

djeruk-manis 

»     -asam 

»     -besar 
delima 
semangka 
papaya 
bua-nona 
duku,  rambutan,  durian,  etc. 
ayer-minum 
ayer-batu 
ayer-djeruk 
ayer-kalapa 
angor 
bir 
tuvak 
brendi 
sopi 
paît 


—  276 


Champagne 

café 

thé 

chocolat 

tabac 

cigare 

cigarette 

opium 

béteP 


angor-puf 

kaua,  kopi 

té 

tjoklat 

tembako 

roko 

serutu 

tjandu 

siri 


INDUSTRIE,    COMMERCE,    ETC. 

travail  kerdja 

outils  pekakas 

machine  djentra 

chaudière  priok 

roue  roda 

vapeur  huap 

houille  areng-batu 

feu,  flamme  api 

étincelle  '      bunga-api 

fumée  asap 

cendre  habu 


1.  La  chique  de  bétel,  ce  masticatoire  dont  l'usage  est  si  répandu 
parmi  les  habitants  des  îles  de  la  Sonde,  se  compose  d'un  petit 
morceau  de  pinan<j  (fruit  de  VArcca  Catec/iu),  d'un  peu  de 
fjainbir  (suc  solidifié  des  feuilles  du  Nauclea  Garnbir),  de  chaux 
et  de  tabac  enveloppés  dans  une  feuille  de  siri  (Piper  Betle). 
Constamment  tenue  sous  la  lèvre  inférieure,  elle  déforme  la  bouche , 
teint  la  salive  en  rouge  et  les  dents  en  noir;  mais  elle  parfume 
l'haleine  et,  astringent  énergique  du  tube  digestif,  oppose  son 
action  aux  atteintes  d'un  climat  débilitant. 


277  — 


suie 

areng-para 

bassin,  réservoir 

kolam-ayer 

tuyau 

pantjoran 

bord 

tepi 

pointe 

udjong 

surface 

atas 

pompe 

bomba 

hache 

kapak 

marteau 

pengetok,   i 

tenailles 

girgadji 

clou 

paku 

rabot 

patjol 

scie 

arit 

lime 

kikir 

ciseau 

pahat 

enclume 

landasan 

bêche 

tjankul 

chaîne 

ranté 

corde 

tali 

fil  de  métal 

tavaï 

commerce 

perniagan 

poids 

brat 

mesure 

sukat 

valeur,  prix 

harga 

balance 

datjing 

lettre 

su  rat 

D-^  F.  Wi 

(A  suivre.) 

BIBLIOGRAPHIE 


Twenty-fourth  report  of  the  Bureau  of  anierican 
ethnologij.  .  .  1902-1903.  .  .  by  W.  H.  Holmes,  Chief. 
Washington,  GoA^prillting  office,  1907,  gr.  in-4°,  xl- 
846  p.,  1112  fig.  et  21  planches. 

Outre  le  rapport  du  Chef  du  bureau,  ce  volume 
contient  un  très  important  et  très  remarquable  mé- 
moires par  j\I.  Stewart  Culin,  sur  les  jeux  des  In- 
diens de  TAmérique  du  Nord. 

Je  retiens  surtout,  dans  le  rapport,  les  deux  noti- 
ces, p.  xxxv-xxxviii,  sur  M.  Powell  et  M^'"  Thomas,  le 
premier  chef  et  la  seconde  bibliothécaire  du  bureau, 
dont  la  perte  sera  vivement  regrettée  par  tous  les 
linguistes.  M.  John  Waley  PoNvell,  né  à  Mont-Morris 
le  24  mars  1834,  est  mort  le  23  septembre  1902  à 
Haven.  Il  se  livra,  dès  sa  première  jeunesse,  à  des 
études  approfondies  d'histoire  naturelle  et  parcourut 
une  grande  partie  de  l'Amérique,  Officier  de  mérite 
pendant  la  guerre  de  sécession,  il  revint  à  ses  tra- 
vaux scientifiques  et  fut  professeur  de  géologie;  puis 
il  devint  directeur  du  service  géologique  et  fonda  le 
Bureau  d'ethnologie  américaine  dont  il  fut  le  direc- 
teur pendant  de  longues  années  :  les  vingt-trois  rap- 
ports (pTil  a  jMibliés  suffii'ont  à  rendre  sa  mémoire 
immortelle.   Quant  à  M^'^   Thomas  (Jésus  E.),  née  à 


—  279  — 

Carbondale  le  31  octobre  1875,  elle  s'était  0{'cu{)ée 
de  linguistique  sous  la  direction  de  son  père,  le 
D'  Cyrus  Thomas;  après  avoir  passé  avec  un  grand 
succès  l'examen  spécial  institué  par  le  Gouverne- 
ment, elle  fut  nommée  en  mai  1900  bibliothécaire 
adjointe  et  en  janvier  1901  bibliothécaire  titulaire  du 
bureau.  Elle  est  morte,  lamentablement,  le  14  janvier 
1903,  d'un  accident  de  «  skating  ». 

Julien  ViNSON. 

Handbook  of  american  Iiidians  (north  Mexico), 
editedby  FrederickWebbe  Hodge.  Washington,  Gov. 
pr.,  1907,  in-8°,  ix-972  p.  à  2  col.  et  1  carte,  fig.  dans 
le  texte.  Toiae  l^r,  Aanatun-Mythology  ;  Smithsonian 
Institution,  Bureau  of  american  ethnology,  Bulletin 
n«30. 

Ce  Manuel,  dû  à  la  collaboration  de  quarante-six 
travailleurs  habiles,  est  une  véritable  encyclopédie 
de  tout  ce  qui  regarde  l'ethnologie  du  Mexique 
septentrional,  non  seulement  contemporaine  mais 
historique,  avec  de  nombreuses  références  bibliogra- 
phiques; l'ordre  alphabétique,  seul  convenable,  a 
été  rigoureusement  suivi.  Livre  extrêmement  inté- 
ressant, fort  bien  fait  et  très  utile  :  on  a  hâte  de  voir 
paraître  le  second  volume.  J.  V. 

Die  syntaktischen  Verhàltnisse  des  Siiaheli,  von 
D.  W.  Planert.  Berlin,  W.  Sûsserolt,  1907,  in-8% 
v-59  p. 

Travail  d'un  haut  intérêt  pour  la  linguistique  géné- 
rale, car  il  montre  les  incertitudes  et  les  complica- 


—  280  — 

lions  de  la  phrase  dans  les  idiomes  primitifs.  Les 
suffixes  s'accumulent  et  modifient,  les  uns  par  les 
autres,  leurs  significations  déjà  confuses.  Par  exemple, 
mpisJii  a-nga-bi-vi-pika  viazi  ivatuimva  <>va-nga-li- 
paia  vyakula  «  si  le  cuisinier  avait  fait  cuire  les  pa- 
tateSj  les  esclaves  auraient  eu  de  quoi  manger  », 
mot-à-mot  :  «  cuisinier  lui-peut-ètre-était-à-aller-à- 
cuire patates  esclaves  eux-peut-être-étaient-à  obtenir 
aliments  ». 

On  ne  peut  résumer  une  étude  aussi  intéressante; 
il  faut  la  lire.  Je  la  recommande  à  tous  les  linguistes. 

J.  V. 


Revue  du  Monde  musulman,  vol.  II,  n°  8  et  vol.  III, 
n°9,  juin  à  septembre  1907.  p.  449-640,  1-192,  gr. 
in-8^ 

Contient,  comme  d'ordinaire,  de  fort  intéressants 
articles  :  De  Téhéran  à  Ispahan  par  Eug.  Aubin, 
A  propos  de  V ancien  Khotan  par  A.  Le  Chatelier,  Les 
Musulmans  algériens  au  Maroc  et  en  Syrie  par  X.  .  . , 
Chine  et  Turquie  par  A.  Vissière,  Voyage  à'Echref 
Khan  à  7e/ze/'rt«  par  A.-L.-M.  Nicolas,  La  médecine  en 
Turquie  par  Abdul-Hakîm-Hikmet,Z/e.s  Tatars  de  Cri- 
mée par  A.  Fevret,  Le  club  national  de  Tauris  par 
Ghilan,  Hadji  Mohammed  ^Ali  par  Vàkif;  et  les  revues 
habituelles  :  La  presse  musulmane  par  L.  Bouvat, 
Notes  et  nouvelles,  Livres  et  revues,  Bibliographie. 

J.  V. 


—  281  — 

Revue  internationale  des  études  basques^  n°  lY, 
juillet  1097,  p.  329-439. 

Onze  articles  tous  pleins  d'intérêt  :  Basque  et  Ro- 
man par  TI.  Schuchardt,  Palabras  alavesas  par 
C,  Baraibar,  El proceso  de  Dechepare  par  J.  de  Ur- 
{\m]o,  Un  manuscrit  de  Larreguy  itdiV.N .jyuh?kVdii,Notes 
du  prince  Bonaparte  sur  son  Verbe  par  G.  Lacombe, 
Lettres  à  M.  Duvoisin  par  V.  Dubarat,  Maintonen 
Poza  par  P-.  Zamarripa_,  Euskalzaleen  bilzarra  par 
Landerretche,  Le  catéchisme  de  Arzadun  par  J.  de 
Urquijo,  Bibliographie^  et  le  commencement  (16  p.) 
de  la  reproduction  phototypographique  d'un  opuscule 
basque  fort  rare,£'/  borracho  bnrlado,  publié  en  1764 
par  le  comte  de  Peflaflorida.  J.  V. 


I 


VARIA 


I.  L'esprit  du  coq. 

«  J'étais  occupé,  hier,  nous  écrit  un  lecteur^  dans  mon  bureau, 
peu  éloigné  d'un  poulailler;  la  fenêtre  était  ouverte.  Le  chant  d'un 
coq  plusieurs  fois  répété  me  causa  des  distractions.  Je  pris  le  parti 
de  faire  taire  mon  agaçant  voisin.  Quand  je  fus  arrivé  devant  le  gril- 
lage, je  m'aperçus  que  les  poules  avaient  l'air  triste;  le  coq  se  sé- 
para d'elles,  s'avança  vers  moi  et,  me  regardant  fixement,  se  mit 
à  jargonner;  j'en  conclus  qu'il  voulait  me  «  parler  ».  Je  n'y  aurais 
rien  compris,  bien  entendu,  si  je  n'avais  remarqué  que,  de  temps 
en  temps,  il  tournait  la  tête  vers  un  angle  du  poulailler.  Suivant 
des  yeux  le  geste  du  roi  de  la  basse-cour,  j'aperçus  un  poulet  étendu 
à  terre,  la  tête  prise  entre  deux  grosses  pierres,  et  dégagé,  le  poulet 
se  retira  vivement.  Le  coq  entonna  un  vrai  chant  de  joie  ;  les 
poules  se  dispersèrent,  et  ce  poulailler  auparavant  lugubre  rede- 
vint animé  et  joyeux.  » 

Qu'où  aille  soutenir,  après  un  tel  récit, 
Que  les  bétes  n'ont  pas  d'esprit! 

{Journal  thermal,  août  1907.) 

II.  Les  beautés  de  l'Allemand. 

Chez  les  Hottentots,  Hoitcntvtcn,  les  kangourous,  Bcutclraiie, 
se  trouvent  en  grand  nombre.  Beaucoup  sont  capturés  et  mis  dans 
des  cages,  Kotlcr,  munies  d'une  couverture,  LalicnijlHcr,  qui  les 
met  à  l'abri  du  mauvais  temps.  Ces  cages  s'appellent  donc  en  al- 
lemand LaUcii>ji((rr/,(iitiw,  et  le  kaniiourou  c.i[)tif  prend  le  nom 
de  LatUjnrjiUfrkollerbcalelrattc 


-  283  — 

Uq  joui'  on  arrêta  un  assassin,  Altentatcr,  qui  avait  tué  une 
Hottentote,  Hottcntoienmuiter,  mère  de  deux  enfants  hébétés  e  t 
hègue^y Stottcrtroticl.C&iiQ  mère,  en  bon  allemand,  avait  droit  au 
titre  de  Hottcntotenstottertroielinutter,  d'où  il  suit  que,  de  son 
coté,  l'assassin  prend  le  nom  d'HotCuntoicnstoUcriroteliniU- 
tcrattcnta ter. 

Le  meurtrier  fut  enfermé  dans  une  cage  à  kangourou,  Bcutcl- 
rcU(cnlal'tcn;/i/lrrii'a/(r//,u(t('i-, d'où,  il  réussit  à  s'évader.  Mais  il  ne 
larda  pas  à  retomber  dans  les  mains  d'un  Hottentot.  qui  se  pré- 
senta tout  joyeux  au  chef  du  district. 

—  J'ai  pris  le  Beutclrattc,  dit  il. 

—  Lequel,  fit  le  juge. 

—  UAdentater  tattengiUcriccticrkottcrbautdrattc  !  balbutia 
l'indigène. 

—  Mais  nous  en  avons  plusieurs   ! 

—  C'est,  acheva  à  grand'peine  le  malheureux,  VHolientotcn- 
struttertrottelmatterattcntater  ! 

—  Alors  vous  ne  pouviez  pas  dire  tout  de  suite  que  vous  aviez 
pris  le  Hottentotenstrottcrtrolelmutierattcntriterlattcnf/Utcncet- 
icrkottcrheutclraUc  1 

Le  Hottentot  s'enfuit.  H  y  a  longtemps   que  le  lecteur  en  a 

fait  autant. 

{Le  Cri  de  Paris,  août  1907.) 


III.  Il  faut  travailler 

There's  just  one  thing  that  makes  life  worth  livint 

In  every  time  and  tide, 
One  joy  beyond  ail  mère  mortal  giving, 

Suprême,  superb,  vs'orld-wide  ; 
One  friend  that  never  will  fail,  forsake  you, 

Nor  times  of  trouble  shirk. 
But  comfort  bring  when  sore griefs  o'ertake  you  - 

So  hère 's  to  work,  dear  work  ! 
'1  lie  dreariest  day  it  can  touch  with  glory, 

The  loneliest  Hll  with  cheer  ; 


—  284  — 

'Twill  sweeten  alike  sad  failure's  story 

And  solace  the  raourner's  tear; 
A  boon  from  the  glow  ol  life's  radiant  morning       ' 

'l'ill  the  twilight  shadows  luik, 
In  this  world's  dusk  and  the  next  world's  dawning- 

So  here's  to  work.  dear  woik  ! 


IV.  Le  vol  au  British  Muséum 

It  is  reniarkable  how  verj'  few  books  are  stolen  from  the  Bri- 
tish Muséum  reading  room.  A  book  scarcely  ever  disappears,  and 
tho  few  volumes,  not  a  dozen,  that  hâve  recently  been  purioined 
duiing  as  many  years,  bave  in  ail  instances  been  of  small  value 
and  generally  of  an  elementary  character.  During  the  South  Afri- 
can  war,  for  example,  a  Dutch  grammar  and  dictionary  passed 
beyond  the  precincts  of  the  British  Muséum;  and  if  thèse  Unes 
should  meet  the  eye  of  the  young  gentleman  in  whose  baggage  they 
presumably  found  a  passage  to  the  southern  hémisphère,  he  is 
invited  to  restore  them  to  their  lawful  owners.  He  would  only  be 
following  another  example.  A  few  years  ago  a  parcel  of  four  or 
fîve  valuable  scientifîc  books,  which  had  been  missing  for  very 
many  years,  was  unexpectedly  returned  tlirough  the  Post  Office. 
The  person  who  had  borrowed  them  appears  to  hâve  finished 
w^ith  them,  for  subséquent  inquiries  disclosed  the  fact  thatawi- 
dow  lady  had  posled  the  parcel.— Sir  E.  Maunde  Thompson  in 
the  "Cornliill  Magazine." 

{Daily  Mail,  Sept.  1907.) 


V.  Prononciation  transcrite 

J'ai  donné,  il  y  a  longtemps,  dans  cette  Reçue,  un  spécimen  de 
la  manière  dont  les  Allemands  prétendent  indiquer  la  pronon- 
ciation des  mots  français.  Je  reçois  le  spécimen  suivant  d'un 
guide  de  la  conversation  allemand -anglais  : 


-  285  — 


Dculscli. 

Gehen  Sie  mit  dem 

Schnellzug  ? 
Wann  fàhrl  der  Zug 

ab  ? 
Kanu  ich  eiiie  Durch- 

reise-  Fabrkarte 

nach  ...  haben  ? 
Wip-  môchlen   eiuen 

Schlafwageu  haben 

—  einen  Durchgangs- 

wagen 

—  ein  Damén-Koupp 

—  ein  Nicht-Raucher- 

Koupé 
Ist     dies     der     Zug 

nach  ...  ? 
Wo  muss  ich  umstei- 

gen  um  nach  ...  zu 

gelaiigeii  ?  [setzt? 
Ist  dieser  Platz  be- 
Da  ist  kein  Platz  [ner 
Rufen  SiedenSchaff- 
Hier  ist  die  Station 
Halteu  wir  hier  ? 
Wie  lange  halten  wir 

hier? 
Fûnf  Minuten 
Mein  Gepàch  ist  ver- 

loren  gegangen 


Englisch. 

An'    you    Qoing    by 

the  express  f 
When  cloes  the  train 

start  ? 
Can  I  book  throuqh 

to  ...  ? 

\Ve  want  a  sleeping 
carriage 

—  a    corridor   car- 
riage [ladies 

—  a    carriage    for 

—  a  non-smoking 

coinpartment 
Is     this     the     train 

for  ...  ? 
Whcre  must  I  change 

for  ...  f 

[gaged  ? 
Is      this      seat     en- 
Therc  is  no  rooin 
Call   tho  guard 
Hère  is  the  station 
Do  ice  stop  hère  ? 
Hoio  long  do  œe  stop 

hère  ? 
F  ice  minutes 
My  luggage  is  lost 


Aussprache. 

ahr  juh    goh'ing  bei 

t/ii  express  ? 
huenn  dos  thô  trehn 

start? 
kânn  ei  bukk  thruh 

tu  ...  ? 

tdh  wonnt  ô  sslibping 
kârridsc/i 

—  ô    korridor    kâr- 
rid.sc/i        [lehdis 

—  ô  karridsoA  for 

—  o  noun-smohking 

kommpartment 
is     thïss     tho     trehn 

for  ...  ? 
hMehr     môst     ei 

tschehnd?c/i for ...  ? 
[dsrh'd  ? 
is  thiss  ssiht  enngeh'- 
théhr  is  noh  ruhm 
kâhl  thô  gahrd 
hihr  is  thô  sieh'scb'n 
duh  «ih  stopp  hihr  ? 
bau    long    duh    uih 

stopp  hihr  ? 
feiw  niinnits 
mei  lôggedsc/i  is  lost 


Das  Dampfboot.  (Tho  Steamboat.) 


Wohin    geht    das 

Boot  ? 
Wann  gehen  Sie  ab? 
Mit  der  Flut 
Um  welche  Zeit  ? 
Um  neun  Uhr 
Man  fàhrt  ab 


Where    is    the    bout 

going  ? 
\Vhen  do  you  start? 
With  the  tide 
At  ichat  time  ? 
At  nine  o'clock 
They    are    going    to 

start 


hwebr    is     tho    boht 

goh'ing  ? 
huenn  duh  ]uh  start? 
u'itl^  thô  teid 
àtt  buott  teim  ? 
âtt  nein  o'klokk 
iheh   ahr  goh'ing  tu 

start 


TABLE  DU  TOME  QUARANTE 


J,  ViNsoN.  La  langue  ou  les  langues  ibériennes ■ 1 

F,  Soulier.  La  langue  polynésienne 24,  100 

E.  S.  DoDGSON.  The  philology  of  Madagascar 31 

J.  ViNSON.  The  French  in  India 35 

G.  B.  DE  FoNTAiNiEU.  Ls  moQvement  Çwadêcî 43 

C.  Lacombe.  Variantes  des  exemplaires  de  Liçarrague 65 

J.  ViNSON.  Observations  sur  l'article  précédent 68 

G.  Lacombe.  Notes    du    prince   L.-L.    Bonaparte  sur   son 

Verbe  . . 75 

C.  -  C.  Uhlenbeck.  Réponse  à  M.  Vinson 80 

J.  ViNSON.  Thème  ou  version 81 

P.  Régna UD.  La  famille  du  latin  opns 121 

J.  ViNSON.  Les  jSIusulmans  du  sud  de  l'Inde 137 

P.  MiRiANiscHviLi.  L'Ibérie  et  la  Russie 145 

E.  -S.  DoDGSON.  Le  Verbe  de  l'Épître  aux  Hébreux  de  Liçar- 
rague  153,  254 

P.  Regnaud.  La  contraction  révélatrice  d'étymologies 169 

F.  W^EisGERBER.  La  langue  malaise 174,  271 

J.  ViNSON.  La  Science  et  les  amateurs 193 

J.  ViNSON.  L'Ibère  et  le  basque 209 

P.    Regnaud.  oyXoi;-okr(o<; 237 

F.  Ravaisse.  Les  mots  arabes  et  hispano-morisques  du /)o» 

Quichotte 238 

Nécrologie  (W.  Webster.  Victor  Henry) 122,  195 

Varia .    Le  caractère  et  la  taille  des  crayons 62 

—  Pour  les  écoliers 62 

—  Critique  américaine 63 

—  Illusion  ou  naïveté. 63 

—  Politesse  espagnole 134 

—  Le  Verbe  basque 134 

—  Prononciation  du  français  par  les  Allemands 135 

—  La  langue  universelle 136 


—  287  — 

Varia.    Le  Nouveau-Testament  basque  de  1571 206 

—  Prononciation  modifiée 206 

—  Indiens  et  Européens 207 

—  L'âge  et  le  génie 208 

L'esprit  du  coq 282 

—  Les  beautés  de  l'allemand 282 

—  Il  faut  travailler 283 

—  Le  vol  au  British  Muséum 284 

—  Prononciation  anglaise  en  allemand 284 

BIBLIOGRAPHIE 

J.  de  Urquijo.  Obras  de  J.  d' Etcheberri 49 

G.  Ferrand.  Dictionnaire  de  Flacourt 55 

E.  Rouillard.  Noms  géographiques  de  Québec 56 

Siaithsonian  Institution.  Bulletins  n°  30  et  .32 .58,  279 

—  —  24-=  Rapport  pour  1902-  Iy03 278 

H.  Mùller.  Scniitica.  I  et  II 59 

A.  Meillet.  L'état  actuel  des  études  de  linguistique 125 

G.  -A.  Grierson.  Linguistic  survey  of  India,  t.  IV 196 

E.  Portai.  Letteratura  provenzale 200 

M.   Kerbaker.  La  morte  di  Vaca 202 

J.  Berjot,  Premières  leçons  d'annamite 202 

Th.  GoUier.  Manuel  de  la  langue  japonaise 203 

W.  Planert.  Die  Syntaktischen  Verhâltnisse  des  Suaheli. .     279 

Kuhn's  Zeitschrift.  XL,  4 59 

Bulletin  du  parler  français  au  Canada.  V 60,  204,  130 

Reçue  du  monde  musulman.  I-IX 61, 131,  205^  280 

British  and  Foreign  Bible  Societg.  102"  rapport 127 

Journal  de  la  Société  Finno-Ougrienne.  XXIII 128 

Mémoires  de  la  Société  Finno-Ougrienne.  XXIII  et  XXIV     129 

Reçue  internationale  des  études  basques.  1-4 129,  204,  2«1 

Anthrnpos.  H .  .     132 

LANGUES  ÉTUDIÉES 

Linguistique  générale.  59,  81, 125,  127, 135, 136, 169,193,  2C6,  282 

Sanscrit  et  Inde 43,  202 

Grec 237 


—  288  — 

Latin 121 

Français 60,  130,  204 

Espagnol 238 

Provençal 200 

Allemand " 135,  283,  284 

Anglais 282,284 

Russe 145 

Sémitique 59 

Arabe 238 

Annamite 202 

Japonais . .     202 

Dravidien 137 

Tamoul 35,  137 

Ougro-Finnois 123, 129 

Géorgien 145 

Basque.  1,  49,65,  68,  75,  80, 129,  134, 153,  204,  206,  209,  254,  281 

Américain 56,  58,  278,  279 

Maléo-polynésien    24,  100,  174,  271 

Malgache 71,  45,  193 

AUTEURS 

E.  -  S.  Dodgson 31 ,  134,  158,  254 

G.  -  B.  de  Fontainieu 43 

G .  Lacombe 65,  75 

P.  Mirianischvili 145 

P.  Ravaisse 238 

P.  Regnaud ' ■ .  121, 169,  237 

F.  Soulier 24,  100 

C.  -  C.  Uhlenbeck 80 

J.  Vinson...   1,    35,  49-61,68,  81,    125-129,  137,  193,196-203, 

209,  282-284, 
F.  Weisgerber 174,  271 


L' Imprimeur-Gérant  : 

E.  Bertrand. 


CHALON-SUR-SAÔNE,     IMP.     IRANÇ.MSE    ET    ORIENTALE    E.    BERTRAND 
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