UwfV. OF
Toronto
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4fifp^i^^;
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University of Ottawa
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REVUE
DU
LINGUISTIQUE
ET DE
PHILOLOGIE COMPARÉE
TOME XL
^
REVUE
LINGUISTIQUE
ET DE
PHILOLOGIE COMPARÉE
RECUEIL TRIMESTRIEL
PUBLIÉ PAR
JU LIEN VI NSON
PROFESSEUR A LÉCOLE NATIONALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
Avec la collaboration de divers savants français et étrangers
TOME QUARANTIÈME
CHALON-SUR-SAONE
IMPRIMERIE FRANÇAISE ET ORIENTALE
E. BERTRAND ^
5, Rue des Tonneliers, 5 i>v I
1907 <L \ ^- 1 ^
%
LA LANCxTIK
ou LKS LANGl^ES 1151^:1 11 ILXXKS
COUP D'ŒIL PRELIMINAIRE
La Ihéorie ibéro-basqiie de Guillaume de Humboldt
n'élait que la régularisation scientitique d'une hypo-
thèse déjà ancienne : les écrivains des derniers
siècles, lilléraleurs, historiens, géographes, avaient
fait un raisonnement logique, mais enfantin: puisque,
disaient-ils, il y a eu en Espagne des habitants anté-
rieurs aux Komains, aux Carthaginois et aux Celtes, et
puisqu'on parle encore, en un coin de la Péninsule,
un idiome qui n'est ni celte, ni punique, ni latin, le
basque est évidemment la vieille langue originale. El
c'est ainsi qu'on a été amené à expliipier, ou plut(H,à
chercher à expliquer par le basque les légendes mo-
nétaires, les monuments épigrapbiques que le latin
ou le phénicien ne pouvait suffire à interpréter. Je
n'insiste pas sur l'histoire des études ibérieimes, sur
les objections que souleva la théorie de Humboldt,
o
notamment delà part de M. Van Eys et de la mienne.
Tout dernièrement, un jeune savant, M. E. Philipon,
a cherché à ruiner définitivement celte théorie, en
montrant que la langue ibère avait un caractère indo-
européen très prononcé: les démonstrations de iVI. E.
Philipon ne me paraissent pas décisives; il a d'ail-
leurs aussi, à mes yeux, le loit de s'attacher trop
étroitement aux théories de l'école des néo-grammai-
riens allemands, M. Brugmann et autres.
Grâce à la belle publication de M. Ém. Hiibner,
l'étude des monuments, qui sont parvenus jusqu'à
nous, de la langue ibère est h la portée de tous. Ces
précieuses reliques consistent en quelques mots rap-
portés par les vieux auteurs ; en noms propres, géo-
graphiques pour la plupart, en médailles, en inscrip-
tions. Les légendes monétaires et les inscriptions
sont écrites, le plus souvent, au moyen d'un alphabet
dérivé du phénicien ; quelques-unes sont en lettres
latines cependant.
Sans aflîrmer qu'elles soient toutes d'une exacti-
tude absolue, on peut adopter, |)our les caractères
ibères, les lectures de M.Hiibner ; elles sont certaine-
ment plus exactes en tout cas que les divers systèmes
qui ont été proposés avant lui.
Au premier coup d'oeil, rien dans c^s mots, dans
ces transcriptions, ne paraît Ijasqiie. Des fantaisistes
ont bien vu idibidea « chemin de bœuf », et oros-
pidca « clifmiii de veau » dans les noms donnés par
— 3 —
Pline à deux chaînes de montagnes, idubeda el oros-
peda; mais... On peut, avec plus de vraisemblance,
assimiler Voeaso de Strabon à VOyarziin des envi-
rons de St-Sébastien : oyarzim, ou mieux oiharzun,
vent dire « écho »; c'est un composé polysynthé-
tique ^Qoihu « cri », harri « pierre, roc, mont », zu
« dérivative locative » et n suffixe participial.
Si nous nous occupons tout d'abord des textes en
caractères latins et des mots, fort peu nombreux,
recueillis par les écrivains de l'antiquité classique,
la première question qui se pose est l'exactitude des
transcriptions, x^ous avons un moyen de contrôle
dans les légendes monétaires : quelques-unes olfrenl
le même nom lopographique en ibère et en latin ;
d'autres, en ibère seul, sont avec certitude appliquées
à des localités dont les noms sont déjà connus. J'ai
fait, en conséquence, le tableau suivant où ritali(]ue
donne la forme ibère, suivant la lecture de M. Hûb-
ner : arcailiqs argaeli, ausescn ausa, calaqriqs cala-
gurris, cslhle castulo, cesse cissa, dmanki damania,
diniu dianium, duriasu turiaso, litkscen otogesa,
ieèfi iesso, ilurii- iliberris, iltrcescen ilergetes, illrd
ilerda, ilthraca iliturgi, laiesccn laeetari, nei^lsp ncr-
tobriga, plplis bilbilis, gnthrpa contrebia, saitp sae-
tabis, àeqprices segobriga, seqsanhè SQg\sm]^a , imtcescn
indicetes, urkekn mc\, wsecr//i osicerda. Il résulte de
ce tableau d'abord que le latin représente parfois une
forme différente de l'ibère {ausescn, ausa ; /i(kscen,
— 4 —
otogesa ; ilurir, iliberris' ; ^lem/), nertobriga) et,
qu'en général, d'ailleurs, la correspondance est
exacte. Il n'y avait donc pas d'insurmontables diffi-
cultés de prononciation; le //, rendu, tantôt par une
voyelle, tantôt par un //, n'était évidemment qu'une
aspiration ordinaire, ne ressemblant en rien à \a jota
ou aux gutturales arabes; la jota s'est, on le sait,
développée assez tard et provient d'un //semi- voyelle,
d'pn / latin mouillé. Les explosives dures et douces
sont mises souvent l'une pour l'autre, ce qui n'étonna
pas cbez des Iranscripteurs qui n'avaient pas l'oreille
exercée et attentive des linguistes; dans l'ibère, /,
th, — c, k et kh, (/ — s, s, s h — et même ?ret ??i,
paraissent souvent employés l'un pour l'autre.
Tandisque les voyelles initiales sont exactement con-
servées, les autres paraissent moins fidèlement
rendues : peut-on en conclure que l'accent étaitsur ia
première syllabe? Entre deux consonnes, les voyelles
sont souvent omises. Enfin, de certaines formes (awse,
ausa; casthie, castulo; iesh, iesso; lilks, otogesa ;-
îlîrd, ilerda ; cesse, cissa), nous pouvons déduire que
1. C'est ce mot iliberris qui a été le grand cheval de bataille
des ibéro-basquisants; ils y voyaient les ilibcrri, ulibarfi, iilli-
hairi, iribciri, hiribcrri « ville neuve », des divers dialectes
basques. Mais la forme primitive de hiri paraît avoir été *kiri...
D'ailleurs, on voit que iliberris correspond ici- à ilurir ; on peut,'
il est vrai, soutenir que u est pour b, puisque les aquitains con-
fondent p et b (felices popali, disait Scaliger, '/tiibics ciccre est
bibere) et que /=r; alfana vient d'cqurts... Mais le r final? Un
grand nombre de mots ibères commencent par t7 : est-il possible
que ce soit « ville » ?
les , noms ibères se lei'niiiiHieiU souvent par luie
voyelle sourde, atone, (luelquc chose comme notre e
muet, que les latins ie[)résentèrent par a,e, o, ou qu'ils
n'écrivirent i)as ; de là, les variantes dans les lé-
gendes, comme arse, ars eiarm. L'alphabet |)hénicien,
d'ailleurs, n'était pas fait pour l'ibère et n'y était adapté
que très approximativement.
Si maintenant nous examinons les médailles et les
inscriptions en elles-mêmes, nous verrons qu'elles se
classent en trois catégories, celles du S.-O. écrites en
caractères latins, celles du S. en caractères ibéros,
mais de droite à gauche, et celles du N. et de l'E.
écrites de gaucl e à droite. Il est facile de remarquer,
dans le recueil de M, Hùbiier, que ces trois sys-
tèmes correspondent à des terminaisons, des formes,
des mots d'allures différentes. Il y a donc là très pro-
bablement des langues différentes.
.le ne prétends m'occuper ici que de celles du N. et
de l'E.
Les médailles de ces régions offrent a priori deux
types caractérisés, le premier, celui de l'est, par la
terminaison- cen'{\^), kn (2), qm (5) et môme hn (1) ;
le second par .s (13), è (20), èh (1), sa (1). .Mais, dans
les premières, la syllabe en ou kn est parfois séparée
et reportée sur l'autre face de la pièce (sesars \ kn,
carsahs \ kn); elle manque parfois {icioe et icloekn,
nerhn et nerhncen); elle est quelquefois remplacée
par d'autres tinales [arse, arsesacen, arsecedr, arsgdr.
— 6 —
arsagsocyra) ; d'îiulre pari, dans beaucoup de cas, le
en, ccn, etc., est précédé de s ou plutôt s, qui est évi-
demment un suffixe, car il manque lui-même assez
souvent {auseacn, htkscen, iltrcescen, laiescen, unt-
cesen, arsahshn, klaisqm, krncèqn, sethiscen ou sethi-
scn d'inie part; auèescn et anèain, titres et iltrescn,
setliis et sethiscen, sethisa et sethisar/m; alir, alirin,
alircn, d'une autre; enfin, les variantes iltrd, iltrds;
nertp, nertp.s: hrhsi, hrhèis; segprice, segprices; —
hilaucu, h? lances, hilaukes, hUauciqs, hilanceiqs; —
are, arats, arei, aregrads, areigrads, areiqratqs). Aux
revers, on lit — outre kn — lin, ca, àhs. Que conclure de
tout cela? vraisemblablement, que cen et ses variantes,
n'est pas un suffixe, mais un mol séparé, correspon-
dant au latin mun, munici {mumciinum), qu'on lit sur
les médailles en caractères latins. Quant au s ou s,
c'est incontestablement un suffixe, et très probable-
ment le suffixe du génitif, la préposition ou, si l'on
veut, la poslposilion « de » possessif.
Ainsi, l'élude des médailles nous amène à croire
(jue, dans l'idiome ibère nord-oriental, le suffixe gé-
nitif était s ou s; que la plupart des substantifs se ter-
minaient par des voyelles, a ou e ; qu'en général, la
langue n'admettait pas les groupes de consonnes
autres que ceux formés avec r, 7i, l ou s ; que beau-
coup de noms topographiques commençaient par ï7;
enfin, que les syllabes cen, in, shs, ca, se ratta-
chaient à des mots ayant le sens de « ville, commune,
municipe », ou peut-être « monnaie ».
— 7 —
Passons maiiilenjuil ,'i rexanieii «les inscriptions.
Kcartons d'abord celles qui sont fausses ou suspectes:
sur les soixante-seize autres, une vingtaine seuleuionl
sont utilisables, pour des raisons diverses qu'il serait
trop long de développer ici. Ce sont des pierres en
apparence votives; des iiiuli, funéraires probable-
ment; des ligurines, servant sans doute de tesscrcs;
une coupe en argent, sans pied, destinée, suivant
>I. Hiibner, à recevoir de l'argent; une plaque de
bronze, trouvée a Luzaga; et une lame de plomb pro-
venant de Castellon de la Plana. J'ai du laisser de
côté, entre auti'es, le plat de terre de Ségovie, dont
l'iiiscription, écrite de droite à gauche, est vraisem-
blablement dans une aulre langue, ou tout au moins
dans un autre système.
I. La laine de i>lomb de Castellon (n" XXII du
recueil de Hiibnei) est évidemment le plus important,
au point de vue qui nous occupe, des monuments de
l'épigrapliie ibérienne. Découverte en août 1851, sur
une hauteur appelée Puchol, près de Castellon de la
Plana, dans un tumulus ancien, par M. de Portefaix,
cor)sul de France, elle est aujourd'hui au Musée arché-
ologique de iMadrid; elle mesure 0'" 435 sur ()'" 040.
Elle contient 21 mots, séparés les uns les autres par
trois points en ligne verticale, disposés sur quatre
lignes que M. Hiibner transcrit ainsi (je dédouble les
lignes i)our plus de commodité) :
- 8 —
■ (^)irtaùns : airietnth : sinektn :
urcecerere : aurunikiceai :
asthkiceaie : ecariu : adnniu : kduei :
itlisni : eosu : shsinpuru :
krkr/iniu : qshiu : îithgm :
kricarsense : ultthcraicase :
arrjtco : aicag : ilcepu raies :
îithsîniecarse.
I.a première lettre est douteuse. Mais, (juelle que
soit la lecture, le groupement des caractères donne
lieu à d'intéressantes observations. Il y a sans doute
des fautes d'orthographe, des voyelles à suppléer, des
lettres omises, etc. Cependant, le premier coup d'œil
donne l'impression d'un idiome agglutinant, incorpo-
rant, avec ses accumulations de suffixes terminaux
-ccai, -ceaie, -aies, -craicasc, -carse, -case, -carsense.
Un peu plus d'attention fait voir que aurunikiceai et
asthkiceaie sont formés des mêmes sulïixes; si, comme
on peut le supposer, Astliki esl le nom topographique
Aslifji, Auruni doit être un nom de même espèce : ic,
ou kic, est peut-être la dérivative « originaire de »; e une
forme pronominale ou verbale, prise quelquefois pour
une forme nominale, « celui qui »; ai, une détermina-
tive, un suffixe adjectif; le e final de urcecerere est,
selon toute apparence, une finale verbale de troisième
personne singulière : ce dernier mot rappelle le nom
de ville urkekti {urci, prov. de Tarragone) dont la
racine urk-, urc-, pourrait avoir une signification de
«domicile, liabitalion, séjour, repos». De plus, l'exa-
men montre que certains mots sont probablement des
composés, shsinpiiru, ilcepur- ; quelques autres pour-
raient se rattacher aux mêmes racines : ithsni, îilhfjtn,
Tithsm; — sinekten, shsinpiiru, stniecarse; — slisiii-
puru, ilcepur-\ deux mots ont des répétitions singu-
lières, urcecerere, krkrlmiu; enfin un mot commence
par ?</ et un autre par ?/ : sont-ils apparentés? L'ini-
tiale il est, on l'a vu, très fréquente en ibère.
D'autre part, la forme et la disposition des mots
conduisent presque nécessairement à partager ce texte
en trois morceaux, le premier composé des six mots :
(\3)itraùns, aii'ietntli, sinektri, urcecerere, auruni-
kiceai, astliklceaie; le second, les neufs mots ecariu,
aduniu, kduei, ithsm, eosu, shsinpuru, krkrhniu, r/shiu,
ïithgm; le troisième, les six dei'niers mots, krimrsense,
iilUhcraicase, argtco, aicmj, ïlcepuraies, ïithsiniecarsc.
Il y a incontestablement là trois tournures, trois com-
binaisons différentes.
Le mot antépénultième aicag est rapproché par
M. Hiibner de aigglegia qui est l'avant-dernier d'une
inscription de la même région; et il ajoute qu'un dieu
des Callaiques s'appelait Aegiamunniaegm . Il fait re-
marquer aussi que Àstlikiceaie rappelle la ville d'Astigi
et que Awvmikiceai ïa\i penser aux Àurunqvcs d'Italie.
Le seul mol dont le sens soit à i)eu près certain,
c'est argico qu'on peut rapportera arethq, aredc, aredn,
aredk, aregratok^ ; ce dernier rappelle l'inscription des
— 10 —
médailles trouvées à Castellou et où se lit areiijrads,
areif/raUjè, arer/rads. Les premières formes sont en tète
d'inscriptions et, dans un document })ilingue, malheu-
reusement incomplet, arelhy correspond à lœic.cst.siL..
Ce mot aurait donc une signification analogue à <.< ci-
gît, ici repose » ; niais je crois |>lutôt qu'il doit signi-
fier « monument, tombeau, demeure » : ce (\u\ me
conduit à le penser c'est que le même radical se retrouve
dans des noms topographiques; or, un nom de ville
peut très bien dériver de <.< habitation, demeure, séjour,
etc. », mais non de « ci-gît ». Ce mot aredc excitera
d'ailleui'S sans doute l'ardeur des Bascomanes; ils ne
manqueront pas d'y lire araduc, c'est-à-dire aran duc,
puisque la nasale terminale est souvent omise; aran
serait synonyme de an, car le suffixe du génitif et celui
du locatif sont semblables; an ou han duc veut dire :
« là tu as, là est », hic est silns. . . ; mais la forme pri-
mitive anti(iue ne doit être ni an, ni han, ni haran; ce
serait kan, ou haran; (\e plus il faudrait, non pas i< là »,
mais « ici », ctncn, hcmcn, kcmen. Le verbe convenable
serait datza «jacet». Il faudrait donc kenien datzak,
ce qui ne va plus avec aredc. Je n'ai pas besoin de
rappeler les discussions sur la primitivité de h ou de k\
pour moi, le k est antérieur, comme le prouvent la loi
naturelle du moindre effort, le maintien du /.• à la fin
des formes verbales, le kdekume dans les conq)osés
prosthétiquesde hume « petit », la mutation en dentale
dans baiiah « parce que tu es » pour baihaiz, bai-
kaiz, etc.
— 11 —
i^ous avons vu loutà l'heurt' que kic, e, ai, es, sont
probablement des suffixes <^r;iniiiiaticaux, des désinen-
ces formelles; nous en avons d'autres dans lu et u,
danscoet?/i, n, et. La terminaison ic se retrouve dans
d'autres inscriptions : ucasuitic, oïnaîc, auedunic
(XXXIl), Incanuj {\L\),casllomic{Wj\). Mous retrou-
verions aussi ai, ci, ni, etc; nous y reviendrons.
Peut-on au surplus émettre une conjecture sur le
sens général de ce document? Peut-être. M. Hiibner
dit : « Cum in sei)ulcro reperta sit lammina, conti-
neatque unum sallem vocabulum, arijlco, (juod ad
sepulcrumspeclat, inscriplionemconiiciolegemaliquam
sepulcralem conlinuisse, sive fortasse exsecrationem.
Taies enim exsecraliones scimus Graecos Homanosque
in plunibo scriptas sepulcris indidisse; nomina de-
functorum vix aut raro plumbo inscribebantur ».
Wûnsch est du mémo avis, et je ne crois pas qu'on
puisse avoir une autre opinion.
\j exsécralion est plus probable que la loi funéraire.
QueUe formule a pu employer le propriétaire du tom-
beau, le parent, l'héritier de l'Ibère défunt? Remar-
quons que ce document est unique; il y a eu donc, la,
l'imitation d'une coutume étrangère, par un étranger,
un colon romain, ou un indigène ayant vécu à l'étran-
ger ou au courant des habitudes romaines. C'est donc
probablement en Italie qu'il faut chercher le modèle,
la formule type. Si nous consultons la thèse si i"emar-
quable de M. A. Audollent, De/ixionum labellœ, nous
— 12 —
voyons (jue les tablettes des séimlcres contienneiU des
exsécrations contre les ennemis du décédé, contre ceux
qui ont causé sa mort, contre ceux qui pourraient
violer son tombeau. Ouelquefois, les pallies princi-
pales du corps de ces « voués » sont énumérées, pour
être affligées chacune d'un supplice spécial. Or, la
partie moyenne de l'inscription de Castellon se com-
pose de neuf mots qui par leur disposition peuvent
former une énumération de ce genre, et, parmi ces
mots, quatre sontte^minèsen^^/, deux en u\ ne peut-on
supposer que ces iu sont des duels, ces u des pluriels
et le reste des singuliers? Dans cette hypothèse, peut-
être pourrait-on traduire : ccariu « les deux yeux »,
aduniu « les deux oreilles», kduei <,< le nez », illwn
« la bouche », eosu « les dents », shsinpurii « les or-
ganes intérieurs », krkrhniu « les deux bras », qshiu
« les deux jambes », titligm « le ventre » ou a l'organe
sexuel». Le sin de èhsinpuru, qui serait un radical
« intérieur », se retrouverait dans sinektn de la pre-
mière partie et dans nlfisimecarse de h (\ermbve', le
shs initial rappelle le groupe qu'on trouve sur quelques
médailles, et qui, ainsi que nous l'avons vu, peut cor-
respondre à l'idée de « cité, municipe » et sans doute
aussi « chose privée, intime, intérieure ».
J'ai dit plus haut que s ou s devait être le suiTixe
génitif; je crois en outre, et je reviendrai sur ce point
tout à l'heure, que n pourrait être celui du locatif,
de l'ablatif, et autres cas analoi^ues.
— 13 —
Comment iiUerpriHer l;i première et In dernière des
trois parties dont paraît se composer notre inscription?
Elles contienent évidemment des verbes, pnisrpie la
seconde partie n'est lormée que de noms (au rjominatif
ou à l'accusatif, peu importe). Nous sommes amenés à
voir des formes verbales dans les terminaisons se,
peut-être des optatifs, et des formes participiales dans
-ceai, -ceaie, -aies. Et j'imagine que le document tout
entier exprime quelque chose comme ceci : « Airiemta,
fils (ou fille) de /irtaima, demeure couché ici dedans,
originaire d'Astigi, issu d'un natif d'Aurunigi: que les
yeux, les oreilles, le nez, la bouche, les dents, les
organes intérieurs, les bras, les jambes, le ventre,
soient en proie aux maux, qu'ils le fassent soutîrir; de
celui qui aura violé ce tombeau ! qu'il soit en exsécra-
tion ! » .
C'est en tremblant que je viens d'écrire les lignes
qui précédent. C'est peut-être vraisemblable, mais
c'est peut-être aussi, c'est plutôt une fantaisie de
mon imaginalion, un rêve de mon esprit surexcité, une
brillante bulle de savon qui va disparaître sans laisser
la moindre trace. N'y voyons qu'un exercice, qu'une
distraction, qu'un jeu et... continuons.
II. La seconde inscription par ordre d'importance
esta mon avis la plaque de bronze de Luzaga, mesu-
rant 0 m. 15 sur 0 m. IG, trouvée en 1877 près de
Huerta Hernando (Guadalajara, Sigiienza), avec quatre
trous aux coins et trois au milieu, ipii ont dû servir à
— 14 —
la fixer sur un mur ou sur une pierre. Hiibner lit
(n" XXXV) :
areqratoks. cai'uh. cecei
qrtca, lutacei. augà. ïrasihca
erra. uela. tcerseks. .s//
ueisui. mlailionoe
cecis. cariqoe. cecis
sdn. qrtcan. elasuchn
caruh. thce^. sa qrtca
thiuhreiçjs
Le premier mot est peut-être areqratodè, mais le k
est plus probable.
M. Hiibner dit de cette inscription : « Tnstrumen-
tum in aère inscriplum maioris sine dubio dignitatis
fuisse putandum ([uam lammina Castellonensin plum-
bea; oppidorum nomina si plura recte agnoscuntur,
de tabella fœderis fortasse cogitandum. Sed modulus
exiguus facit potius ut tabellam sive liospitii sive pa-
tronalus esse existimem, quales in eiusdem generis
lamminis aereis in Hispania prodierunt complures
(C. II, 1343, 2210, 2211, 2633, 2966, 3695, 5792).
Cf. tesserœ hospiliaies, n. XXXIX, XL. »
Si nous examinons ce texte en lui-même, en
dehors de toute idée préconçue, de toute liypothèse,
nous remarquerons: 1° que le premier et ledernier mot
se terminent par le même suffixe, s, qui se retrouve
dans deux autres mots; 2" qu'il va deux mois en*,
deux en ai, un en ai, trois en ca;3° que ca varie en
— 15 -
can (fpica, qrtcan) et cis en cei (cecis, cecei) ; 4° que l'on
;i d(Mix fois le groupe -ne cecis; 5° que f/rica vient deux
fois et (/rlcaii une; Q" qu'il va trois fois le suffixe n
dans trois mots consécutifs.
Pour interpréter ce texte, j'observe que le mot le
plus important est peut-être t/rlca (|ui revient trois fois
et que nous retrouvons sur une ligure en bronze, ayant
la forme d'un sanglier {aper,(\\l M. llubner)et qui était
vraisemblablement une lessera hoapitialis ; on y lit en
effet: lipaca. (jrtca. car : M. Hiibnei- y voit un insigne
de l'alliance entre les Lipaciens et lesCariens: Lipaca
serait lipaq^, dont on a des médailles dans la région
de Pampelune. Mais, car peut être rapproché du caruh
de notre inscription, et ce mot, ainsi que (frlca, indi-
q.uerait, à mon avis, plutôt un titre, une fonction, une
qualité : sur la plaque de Luzaga, les trois fjrlca sont
suivis de mots où l'on peut voir des noms topogra-
phiques {Lulacci = Luzaga, elasuclin = Kkiiskuui,
thiulireiys = Tinriga) : (/rtca pourrait être quelque
chose comme « consul, qucnestor, princeps, jiagi ma-
gister»; prenons (/uœslor pour plus de commodité.
On supposerait donc : le questeur de Luzaga, le ques-
ten des Elaisiciens, le questeur deTurriga. Un autre
mot caruh, qui revient deux fois, est aussi accompagné
de noms de villes, areijraloks et Ikces [Ttaf/s, dans la
région de INumance, ou Hztces, dans la région de Tu-
riaso); la première fois, caruh est suivi de cecei.
J'imagine que caruh est peut-être un litre de fonction
— 16 -
ou quelque chose comme « municipe, assemblée,
sénat »; cecei, un qualificatif « grand, illustre, etc. »
dont cecis, plus loin, serait l'adverbe. Le s ou s final,
fréquent dans les médailles, serait un suffixe génitif
singulier, qui servirait aussi à dériver des adverbes.
Le document commencerait donc par une indication
de ce genre : « L'illustre Sénat d'Aregrad.le questeur
de Luzaga » [ei étant un suffixe qualificatif) et finirait
par « le questeur des Elaisiciens, le sénat de taogs,
et (ow avec) le questeur de Turriga >>. Dans l'inter-
valle, il y a des génitifs en s, des nominatifs en ca et
probablement deux formes verbales en oe'.W s'agit
vraisemblablement de conventions inter-municipales.
Sur les légendes monétaires, à Areqratoks corres-
pond are, arei, arals, arer/rad, aregads (avec èhs
au revers), areiqrads et areigratqè. Il y a là sans
doute un composé de are, ara, de fjrat et de qs, où
nous pouvons voir deux suffixes, dont q (ca?) et le s
du génitif; et alors qrtqs serait une variante de
qrtca, ce qui confirmerait mon hypothèse d'une signi-
fication « municipale » pour ce dernier mot. Je
trouve, sur les médailles, une terminaison semblable
dans hilaucu, hilauces, hilaukes, liilauciqs (avec shs
au revers), hilauceiaà, où il y a de plus la dérivative
locative eu, ke, ci. On trouve aussi arcailiqs, aratqs
(et arats), calaqriqs,eoalaqs, gthlqs, ecailqs, ilaca{p)sq,
lliuitsqs, lipaqs, niolqs, oeltiqè, piilaqs, et peut-être
segsanhè, dont (juchiues-uns varient : esailifjs (de
- 17 -
gauche à droite ). et emilq (de dr. à g.); gths, glhfja,
(jlrn, (/ihkjs (de dr. l\ g.) ; nioh/m, moir/ts, molqs (de
dr. à g.). Ces Uois derniers noms sont de la région
d'Obulco.dans la Bétique orientale, région mixte peut-
être au point de vue linguistique.
Dans le plat d'argile de Ségovie, où les inscriptions
vont de droite à gauche, on retrouverait la terminai-
son om ou se que j'ai supposée optative ; mais est-ce
la même langue, le même dialecte?
III. Nous avons vu que aredc et analogues ont un
caractère funéraire à peu prés certain. Deux autres
mots paraissent avoir le même caractère; nous les
trouvons inscrits sur deux pierres trouvées à Sagonte
et qui ont disparu, et sur une troisième qui est con-
servée à Valence:
XXVIII. Nerseatn.
îlcaine.
XXIX. Nersnatn.
tlcatnde.
XXXI. b ilcatii. nskd.
otcr. etnoi.
s . . . n . . . .
n paraît difficile de voir dans ilcatne, ilcatnde,
ikaln, un nom propre, car le même individu aurait
eu trois sépultures. Le mot nersnatn ou nerseatn,
dont nskd ne, diffère pas très sensiblement, ne doit pas
être non plus un nom personnel. Faut-il rappeler que
/te/' est le radical de <.< Narbonne », Narbn Martius,
— 18 -
Nerim en ibère? Quoi qu'il en soit, si iiersnatti, ner-
seatn, nskd soiit un seul et même mot, ou îles mots
analogues de sens, il faut remarquer que le n final
des premiers ne se retrouve pas cliez le dernier,
mais qu'il revient deux mots après, comme si ces deux
mots étaient des adjectifs, des compléments délermi-
nalifs. liemarquonsde plus l'interversion de ilcalneou
ilcatnde qui est au premier rang en XXXI et au second
en XXVH[ et XXIX. Si je n'ai pas eu tort de supposer
que e est une finale verbale et n peut-être le signe du
locatif, nos trois légendes diraient quelque chose
comme ceci : n XX VI 11. XXIX. Kn ce séjour il re-
pose, il gît », et « XXXI. Il repose en ce séjour res-
pectable, sacré (?) ». Le nom pro|)re aurait pu être
ajouté dessous ou à côté.
IV. A ce propos, si je reprends les inscriptions
commençant par aredc et ses variantes, elles se pré-
sentent ainsi :
VI. aredc. atnqlaur. andhldu
Fulvia lintearia.
VII. hic. est. sit...
aretliç) . adu... sacaritii.
XXIII. aredc. sicduii. inelii. nereildun . d . . .
XXVI. ai'e. de. aluni, iiscac. 1,'hln. a
XLII.a. areqr ou ared/,\
De ce n*^ XLII.a, M. Hiibner dit : « Calinae (Ca-
tania) in Sicilia in museo P. P. Henedictinorum, exstat
vasculum (oenoclioe) Graecum pictum (figurae lu-
— 19 —
brac siint in I'luhIo iiigro), allum m. 0. 19, cxliihens
rnuliorein seilcnlorii, quae dexlra patcram tcnct, arti-
ficii non eleganlis, quod saecuio fere quarto adscri-
bilur. luxla in fundo lilleris accurale incisis inscrip-
linn est... » L'irrégularité de l'orthographe est sans
doute le fait d'un graveur étranger à la langue dont on
lui avait donné un mot à écrire.
Maison peut se demander quel rapport il y a entre
un vase vinaire, une femme tenant une coupe, et un
mot paraissant avoir le sens de « monument funé-
raire ». Serait-ce que ce mot signifierait proprement
« repos, oubli, libération », par allusion au rôle con-
solateur souvent attribué au vin, à l'influenee censée
reposante de l'ivresse ?
Dans les quatre autres légendes, les mots qui suivent
sont probablement des noms et des titres ou des qua-
lités. Atnf/laur. andolsllu est-il, comme l'a supposé
M. Hiibner, la traduction de Fulvia lintearia? Mais
alors, je croirais plutôt que c'est andlsldu qui serait
Fulma; ce mot est d'ailleurs composé, comme aussi
l'autre; les deux expressions latines sont assez com-
plexes et l'ibère aura eu besoin de périphrases pour
dire « fauve » et « lingère » (ou « tisserand »).
Dans le n° XXVI, remarquez le suffixe -dun, sic-
dun, nereildun. Ner r^[)ÇQ\\e Nerhn « iVarbonnev;
eildun est-il parent de Veildul qui constitue à lui seul
l'iiiscriplion n" XXXI? Malheureusement tout cela est
fragmentaire. Ce n" XXXI devait peut-être élre joint à
~ 20 -
l'un des n«^ XKVIII, XXIX, XXXI. b, et était sans
doute un nom de personne. Dun serait un sulFixe,
une dérivative nominale; nous avons les combinaisons
dunic, unie, nik, ic, m, ni, an, can, canik.
V. Ces deux dernières terminaisons se lisent sur le
n° XLI, la coupe en argent sans pied, découverte en
■1618, près deCazIona; elle est aujourd'hui au musée
du Louvre. lîUe contenait, quand on l'a découverte,
683 pièces de monnaies. M. Hûbner a supposé que'
c'était une sorte de caisse, comme disent les com-
merçants, contenant le trésor d'un individu dont le
nom serait gravé sur la coupe. On y lit: Incanik goaercan
que M. Hiibner interpréterait volontiers : « Lonca-
nicus Goercani lilius »; je croirais plutôt que Incanik
sérail un nom de pays, et goaercan un nom de per-
sonne au locatif ou au datif : « à » ou « pour Goaerca
de Lonca (?) ».
VI. Faut-il également voir un nom ou deux noms
sur l'anneau d'argent trouvé, il y a une soixantaine
d'années, dans un tombeau? Orné d'un onyx, ouest
gravée une tôle d'homme barbu, aux cheveux crépus,
regardant à seneslre, il porte la légende slsdotce. Si,
comme je l'ai supposé, e final est une terminaison ver-
bale, ce ce peut-être une sorte d'oi)latif ou d'impératif,
vale ou cave par exemple; ou peut-être un passé
«il a réussi, il a été heureux », etc.(iN° V de Hûbner).
VI. Je retrouve ce ou ko sur le cippe (n" IV) de Bar-
— 21 —
celone, cippc funéraire, dit M. Hiihtier, et non votif,
où est écrit nnce illra zui, ce qui pourrait signilier
« Nuce, d'Ilerda, a été mise ici (hic sita es!) ». Je
croirais plutôt que le nom serait illra ou iltrazvi e
que le verbe signifierait nuke, quelque chose comme
« vixit ».
D'autres inscriptions, <iui [)araissent également fu-
néraires, contiendraient des noms de personnes :
le/ul il), shsirn iU), srès eo Ho (Wll) ; ekemos i\[[),
etc. ; un fragment bilingue (XXXI, a.) porte : « Fa-
bius. M. L. [sidorus... drliolhinen.h: . . drho est-il
un reste de la transcription ou de l'adaptation d'Isi-
dorus?
J'arrête ici cette tentative d'étude qui ne me parait
à moi-même qu'une série de conjectures aventureuses.
Je ne l'ai entreprise que par accident, si j'ose
m'ex|)rimer ainsi, le hasard d'une recherche ayant
amené sous mes yeux l'invitation que semblait m'a-
dresse r iM. Hùbner :
a Speramus fore, si ad studia haec cxaminanda
redierit vir doctissimus, ut leclionem sane scripturae
ibericae aliquantum profecisse reperiat. » Dans cette
tentative, je me suis laissé conduire par ce qu'Ale-
xandre Dumas appelle v< le lil des inductions, ce
(il qu'aux mains de l'abbé Faria, Dantés avait vu
guider l'esprit d'une manière si ingénieuse dans le
dédale des probabilités ». Et j'ose conclure :
1° Que la langue parlée jadis en Kspagne, au N.
— 22 —
et, ;i V\i., écrite de gauclie ;i (lroil(î .-i l'aide de l'alplia-
bet ibéro-pliénicien, était une langue ugglulinante
très développée, sans doute incorporante, peut-être
polysynthélique;
2** Qu'elle avait un système phonétique assez
simple, qu'elle n'avait pas il'arliculations spéciales, et
que sa prononciation [)e devait rien avoir de bien dif-
ficile ;
3° Que, parmi les nombreux suffixes dont elle se ser-
vait, on peut signaler les suivants: s ou è, « de » gé-
nitif, n « à, dans, chez, par », ik « de, ex, origine »,
ei ou ai adjectif ou participe; e, en 3" pers. sing. du
verbe avec une consonne précédente marquant le
temps ;
4° Que cette langue était tout à lait différente du
basque.
Celte dernière conclusion sera peut-être la seule à
laquelle souscriront mes lecteurs. Je répète, moi-même,
que tout le reste est bien audacieux et bien hasardé; je
compte d'ailleurs reprendre celle étude plus à loisir.
Aujourd'hui, je n'ai guère fait qu'une ex|)loration pré-
liminaire, sans m'occuper aucunement des diverses
autres tentatives qui ont étéprécédeniinoiit faites. Mais
où trouver la solution du problème? Ah ! si l'on pou-
vait découvrir une inscription liilingue, conqilèle, de
cinq à six lignes au moins !
En attenilaiit, nous sommes réduits à des hypothèses
donl le lendemain monlre la fragilité, à i\(is propos!-
— 23 —
tioiis, ;i des im.'iginiilions séduisunles, mais qui s'ef-
facent coininc les plis des vagues à la surface des
eaux, ((ui passent sans rien laissoM' après elles, comme
ces astres rapides qui traversent l'atmosphère, comme
ces bruits confus qu'on croit entendre dans les pro-
fondeurs dus forets, dans l'ombre des nuits, comme
les amours de Didon, comme les serments de Thésée,
Quac ciincta aerii discerpvnt irrita vcnti !
Julien ViNsoN.
SUR LA BIBLIOGRAPHIE
DES LAiNGUES POLYNÉSIENNES
I
Dans une Introduction récemment publiée, le lec-
teur a pu voir comment le groupe des langues poly-
nésiennes constituait une famille distincte, dont l'étude
sera le but des présentes recherches.
Aujourd'hui, Fauteur se propose, avant daller plus
loin, d'indiquer une l'ois pour toutes la bibliographie
des ouvrages assez nombreux qu'il a déjà parcourus.
Il existe sur la Polynésie une grande quantité de
livres, et, par bonheur, un érudit en a dressé le
catalogue. Cet indicateur précis, dun plan ingénieux,
commode à consulter, fait honneur à la science an-
glaise, envers laquelle nous aurons, d'ailleurs à con-
ti'acter beaucoup d'autres dettes de reconnaissance,
particulièrement en ce qui concerne la Polynésie.
Comme tous les autres ouvrages que je citerai,
celui-ci portera la cote de la Bibliothèque Nationale
ainsi abrégée (Bb. Nat.).
Cela ne sera pas d'une mince utilité aux curieux,
et je regrette i)resque que la place me manque pour
narrer les tribulations fantastiques, par lesquelles
— 25 —
il faut passer avant d'oblenir la cote « exacte » d'un
ou\Tage dans la « Première Bil)liotlièque de France ».
Ceci dit, passons, et citons sans plus tarder :
Edwards (Francis), A catalogue of books relating
to Poh'nesie » ; London, 1899 ; in-S". (Bb. Nat., 8»,
Q 2575).
Tous les autres volumes peuvent se diviser en
deux catégories:
lo Les ouvrages de linguistique proprement dite
(grammaires, vocabulaires, etc.).
2o Les relations de voyage, descriptions géogra-
phiques, études ethnologiques et autres).
Point n'est besoin de dire que les ouvrages de
la seconde catégorie sont beaucoup plus nombreux
que les premiers. J'ai déjà expliqué pourquoi. La
Polynésie nous a toujom\s été décrite par des voya-
geurs qui n'ont été pour elle que des « oiseaux de
passage ».
" Depuis Cook, Forster et Bougainville, tous ceux
qui l'ont vue, pénétrés par son charme si cares-
sant ont tenu à dire, sur le papier, leur enchante-
ment.
Et si nous parcourons la série déjà longue des
livres ainsi publiés, nous trouvons :
J. Agostini, « Tahiti », chez André, 28, rue Bona-
parte (1905). (Ouvrage non encore déposé à la Bb.
Nat.).
Henri Mager, « Le monde Polynésien » ; Paris,
Schleicher frères; 1902, in-18, 250 p. (Bb. Nat, 8",
G 7738).
— 26 —
Monchoisy. La Nouvelle Cyllièrc »; Paris, Char-
pentier, 1888; iii-12. (Bb. Nat., LK 13, 139).
Aylic Marin, « En Océanie » ; Paris, Charles Bayie,
1888; in-16. (Bb. Nat, P^ 128).
Parmi cette nomenclature, je signale particulière-
ment un magnifique ouvrage, orné de photographies
très intéressantes; c'est lœuvre collective des Missions
catholicpies. ordonnée et éditée par le Père J.-T3.
Piolet.
J. - B. Piolet, Les Missions catholiques au
XIXe siècle , A. Colin, 1902; tome IV, «Océanie».
(Bb. Nat., L d\ 438).
Nous avons encore :
Jules Desfontaines. Les îles enchantées de la Po-
lynésie »; Nantes, 1891; in-8o. (Bb. Nat., 80, G 6181).
Paul Claverie, Tahiti > ; Paris, Plon-Nourrit, 1891;
in-18. (Bb. Nat., 8», G 7122).
Charles Lemirc. « L'Océanie française ; Paris,
1901: in-80. (Bb. Nat.. LK 13. 175).
Paul Huguenin, < Baiatea la Sacrée , Ues-sous-
le-Yent de Tahiti); Ncuchàtel, P. Attinger, 1902; grand
in-8«, 256 p. (Bb. Nat., LK 12. 1537).
Lesson et ^[artinet, « Les Polynésiens » ; Paris, 1881-
81; Leroux, 28, rue Bonaparte. (Bb. Nat., Pd^ 49).
Paul Gauguin et Charles Morice, « Noa-Noa >, aux
éditions de la ;: Plume », 31, rue Bonaparte.
Bévue de lOcéanie française », pubUée mensuel-
lement; Paris, Lille, 1902; in-fo. (Bb. Nat., N. S. 1345
(F.)).
— 21 —
On a pu voir par celle énumératioii que j'avais
renversé lordro des ealégories, en parlanl d'abord
de la seconde; c'est qu'elle est à mes yeux la moins
inléressanle. Toutes les relations de voyage semblent
copiées sur les autres et reflètent à la longue une
écœuranle banalité; retour des mêmes lieux com-
muns, absence de détails précis et originaux.
Un seul livre échappe à ces reproches justifiés;
c'est celui de M. Huguenin, ancien directeur d'école
à Raiatea. qui connaît admirablement la langue, la
région el les habitants donl il parle. Ce fait est
assez rare pour être remarqué.
J'ai déjà insisté sur ce point, que seuls les mission-
naires résidaient pom- les besoins de la foi dans
les îles riantes, mais lointaines de la Polynésie équa-
toriale.
C'est donc à eux que nous devons, pour la plus
grande part, les travaux linguistiques dont je vais
donner ci-après l'énumératio)!.
Mais la longue expérience acc[uise par eux. quel-
quefois après vingt ans de séjour et plus, dans la
prati([ue de la langue indigène, n'empêche pas, néan-
moins, que le peu d'instruction générale et d'édu-
cation scientifique qui caractérise les missionnaires,
diminue singulièrement la valeur de leurs travaux.
Ainsi, pour ne donner qu'un exemple, croirait-on
que. dans aucune des gi'amm aires publiées par les
soins des missions, on ne trtnive de textes dans la
langue tahitienne, samoane ou maorie ?
Cette inqualifiable négligeance dévoile une igno-
— 28 —
raiice profonde de la linguistique et de ses besoins
les plus immédiats.
Quelques spécialistes, comme Humboldt, Friedrich
Muller, et Buslimann ont, il est vrai, réparé partiel-
lement celle erreur, mais il n'en reste i3as moins vrai
qu'un travail d'ensemble, scientifique et rigoureu-
sement documenté, reste toujours à faire sur les
langues polynésiennes.
Est-ce à dire que la science et l'érudition, de plus
en plus actives et répandues, se soient désintéressées
de la question 1
La liste des volumes déjà publiés est là pour nous
prouver le contraire.
Notons :
P. - E. Gaussin, •; Du dialecte de Tahiti.', de celui
des îles Marquises et, en général, de la langue poly-
nésienne », in-8o, 1853. (Bb. Nat., Inventaire, X 25514).
Mœrenhout (ï. A.), Voyage aux îles du grand
Océan )> (2 vol. in-S»); Paris, A. Bertrand, 1837; (Ren-
seignements linguistiques 1res précieux). (Bb. Nat.,
P-" 240).
« Alphabets polynésiens ), de Wilhelm von Hum-
boldt »; Berlin, 1838; in-4o. (3^ partie, p. 78. des mé-
moires de l'Académie de Berlin). B. i..i.
Wilhelm von Humboldt « Uber die Kawi Sprachc ,
Band III, Sudsee Sprachcn als ostlicher Zweig des
malayischen Sprachslammes; Berlin, Académie des
Sciences, 1839. B. i., in-4", O 19R.
1. Cette abréviation désigne la bibliothèque de l'Institut de France-
— 29 —
Lanouc maorie ; Mgr T('|kiiio Jausscn, « Gram-
maire et dicliomialre de la langue tahitienne » ; Paris,
Belin. 1808; in-12. (Bb. Nat., 80, X, 11800).
W. Colenso, << A Maori-Englisch Lexicoii ; bciiig
a comprehciisive dictioiiary of the New-Zeiilaiid
longue »; Wellington; prinlcd ])y .1. Mackay, 1898;
in-8". (Bb. Nat., 8", X 11750).
Macdonald (D.), -The asiatic origin ofthe oceanian
languages »; London. 1891; in-lfi. (Bb. Nat.. 8", X
11047).
J. -R. Dordillon (Mgr); < Grammaire et diction-
naire de la langue des Marquises »; Paris, Belin, 1904;
in-12. B. i. (N. S. D. 2437).
« Te pipi Tahiti-Farani » ; Papeete, imprimerie des
écoles françaises indigènes, 1882. (Bb. Nat., 80, X
2243).
V. P. Richard Le Moing, « Guide des enfants
tahitiens pour apprendre le français » ; Papeete, 1884 ;
in-80. (Bb. Nat., 8", X 3067).
D. Macdonald, « South Seas languages ^> ; Mel-
bourne, 1891; in-16. (Bb. Nat., 8», X 10675, II).
Trcgear (Edward), « The Maori-Polynesian com-
parative DicUonary; Wellington. 1891; in-80. (Bb. Nat.,
80, X 10356).
« Journal of the Polynesian Society : Wellington,
New-Zealand, 1892; in-80, vol. I, april 1892. (Bb. Nal.,
Pd2, 88).
R. P. Grézel, « Dictionnaire futunien-français (pré-
' — 30 —
cédé crun abrégé de grammaire))) ; Paris, chez Mai-
soiiiieiive, 1878. (Bb. NaL, 80, X 954).
A. Gill, « Myths and Songs from the Pacific » ;
London, Henry S. King, 1876; in-12. (Bb. Nat., P-, 103).
Williams (^Y. L.). <: First Lessons in Ihe Maori
Language with a short vocabulary >. ; London, 1882,
in-16. (Bb. Nat, 80, X 2298).
Williams (W. L.), « Dictionary of the New-Zealand
longue; Auckland, 1892; ln-80. (Bb. Nat., 8», X 10927).
Cust (Robert Neadham), « Les Races et les Langues
de rOcéanie », traduit par A.-L. Pinart; Paris, 1888;
in-18. (Bb. Nat, 80, Z 437 (56)).
Dans une prochaine étude, je rej^rendrai, en les
analysant, quelques-uns des ouvrages de la seconde
série qui présentent un intérêt réel, soit comme tra-
vaux de linguistique générale, ou comme documents
particuliers.
Félicien SOULIER,
Elève ;• l'Ecole des Lang-ues Orientales vivantes.
TIIK IMIlLdl.dli^ (II- M\i»\(iAS(;\U
« J'he Witlowcd Missioiiary's Journal ; coiitaining
some accounl ol" .Madairascar; and aiso, a narrative of
llic missionary career of the Kev. .1. Jeffreys; who
died on a passage IVoin Madagascar lo tlie isie of
France, Jnly 4, 1825, aged 31 years. By Keturah
Jeffreys. (Sontliampton : 1827) » is a work wliicli con-
laiiis not only some interesting détails about the reli-
gions anil social castoinsof tlie 'Madagasses' or 'Mala-
gasses' (as llie anthoress calls them), observed in the
years 1822-25, but a few notes npon their language,
whicli ai'e of some importance, because it was not un-
lil ls:JO that the first translation of the Bible in'it was
pnblished, and live years later that « ïhe tlrst complète
.Malagasy Dictionary was proposed by the missionaries
of the London Missionary Society, and prmted at thelr
press in Antananai'ivo in the year 1835 »; that
rianiely of J. J. Freeman and I). Johns.
Shc records the following native words and phrases :
p. 39, Tsaratareli//, beautiful.
Yes, the King is good. lïnij bava aij (indricna.
— 32 —
P. 61, Mananatiakarena ny vazaha, The whiie
man is rich.
P. ()6, Ranoumafana, the hol wnters.
P. 75, Maroumita, bearers.
P. 96, Aza mataohoutra l.n mamnijy Do not fear,
it is nolhing.
P. 106, Manassin a loumpacalalii, Token of respect
to you, M aster 1
P. 122, Ny farana mafty indrindra, The last is the
hardest.
P. 123, Andriaina nitra, gods.
P. 129, Zanhare, the highest god.
P. 131, Indiai marlij Madama toiikoulia, Madam
wil sureiy die (a misprint for maiy).
P. 134, Manou afanij [i.e. manaô àfana), lo per-
forni the ceremony of spriiikling the corpse wilh wa-
ler at the grave.
P. 135, 7s/ me/j/a maï,y /iî/ /a?mA-</, The sou! cannotdie.
P. 138, Karara, cat; vourana doulouna, an owl-
like bird.
P. 139, Tranou Andriamamlra, the house of god.
P. 141, Andron fadij, day of rcsl.
P. 143 et 146, lloudij Havandra, a wooden idol
painled bhick representing a married god, medicine
againsl the bail.
P. 147, Panousourana, priest.
P. 149, ifoudij Asou, Medicine against the fire (a
bit of sacred wood).
— 33 —
P. 151, Rambouny-d-anitra, a water-spout.
P. 154, Fangady, spade; Zouma, Friday.
P. 155, Skidy, oracle.
P. 161 et 168, Ombiasses, diviners, wise men.
P. 162, Lamba, a loose robe worn by men, which
envers the body as low as the knee.
P. 164, Hanamami/, a herb eaten by the natives.
P. 169 et 170, Tanginy, a fruit used as an ordeal.
P. 169, Mamsavi/, to bewitch.
P. 173, JaboUy a sortof grass.
On p. 121 , M" Jeffreys says : « After a few months,
the method of teaching in the English language was
considered generally impracticable, and therefore
abandoned; and an alphabet of the xMalagasy was for-
med : it consisted of twenty-two of oiir letters, viz. a,
b, d, e, f, g, h, i, j, k, 1, m, n, o, p, r, s, t, u, v,
y, z.Thevowels take the French sound, the dipthongs
[sic) are ao, as in saolao (seemingly for laolao), pray;
en, as in babeo, to carry; m, as in deram, praised;
they hâve only one double consonant, which is ts, as
in tsara, good. »
With few exceptions, the above words,though differ-
ently written, can be found in the aforesaid Dictionary,
or in that of the ReV'. J. Richardson, printed in 1885 in
the same city of Tananarivou, as M"' J. spells it.
\l_ W' Jeffreys, who was carried through the iland in
a cot or hammock, wrote on p. 34 : « Who can tell,
but that we shall fall a sacrifice to the dreadful en-
démie of this unsalubrious climate »?
3
- 34 —
If she was not the first writer to use « unsalu-
brious», the Historical English Dictionary, now al
press in Oxford, will probably be the first Diclioiiary to
record it.
Copies of the above « journal » are to be seen in the
British Muséum, and the Bodleian Library, Oxford.
Edward Spencer Dodgson.
THE FRENCII IN INDU
Miich lias been said and many valuable works
iiave been written about ihe unyielding rivalry
betwecn the French and the English in India during
iho greatest part of ihe eighteenth century A. D.
The French came after the English; they established
themselves first at Siirat in the year 1660, but passed
to the Coromandol Coast in 1672 and settled at
S. Thome, from Avhicli they Avere expelled by the
Dutch in 1674. They fled then to the neighbouring
hamlet of Pondicherry, which they had purchased
from a native chief in the preceding year; there they
biiilt a large fort and a strong citadel, both greatly
improved in subséquent times. They rapidly gained
influence over the native, struck acquaintance with
most of the local nabobs, and pretended to interfère
in the management of the affairs of the decaying
Mughal Empire. Such a policy as that entertained
by the Governors, MM. Martin and Dumas, was
energetically developed byDupleix, who had a right
daim to be reckoned amongst the historical rulers
of India. Many a writer bas pointed out the errors,
faults, inaccuracies of that great man, of his compa-
nions, and also of the French in gênerai, whilst on
the contrary tlieEnglish remained firmer and firmer,
more attentive, less impatient or disheartened. Il
— 36 —
is well known, however, thatDupleix was for a time
the most prominent man in South India, and France
was abolit to succeed in making India hers. To that
contest are related the great names of Diipleix, La-
bourdonnais, Bussy, and Lally, on the one side;
Clive, Coote, Boscawen, on the other, and their
lives, actions, and character hâve been thoroughly
investigated. Nevertheless, ail is not known, and
some particLilars will ever be looked for with in-
creasing interest, and gratefiilly admilted by histo-
rians and philosophers. Such as are concerned in
the future well-being of India, and even of huma-
nity, will find in them a large field for their thoughts
to dealwith, since history merely is a simple rehear-
sal, and, what is to come after is founded on what
is past. India has been from longa land forcontests
and invasions; lier climate, wealth, good-natured
inhabitants, from long attracted strangers and we
hâve heard of no other country w'here so many
races, religions, industries, successively were brought
in and lived side by side either peacefully or reluc-
tantlycontending : old and modem Persians, Greeks,
Arabs, Europeans of various nations ; Buddhism,
Parsism, Christian creeds, etc.
Historical documents must be then heartily wel-
comed by ail those who like India. A most curious
and valuablebook hasjustbeen published in Madras,
at the Government printing office, which afFords
much light on the matter, viz. on the French past
activity in India. It is « The private diary of Ananda
Ranga Pillai, dubash to Joseph François Dupleix,
— 37 —
(jovernor of PondicheiTy » aiul is ihe fii'st of an
important séries of iisefiil volumes .
Ananda Ranga Pillai was born on the 30th Mardi
1705, in one of the subiirbs of Madras; he was the
son of a certain Tiruvengada Pillai, a native trader,
who in the year 1716 translated himself vvith his
family to Pondicherry where the French Govern-
ment invited native merchants to corne and bestowed
on them as many favoiirs ascouldbe obtained. Hère
lived already his brother-in-law, Xairiya Pillai, who
had become the chief agents the Dewan or courtier,
as his office was called at that time. The charge
was an important and fruitful one, since the courtier
was the ordinary intermediary between the Govern-
ment and the native princes, and ail the Indian
French Company affairs had to pass through his
hands. The charge, however, did not remain in
Nainiya Pillay's family, because of religion and
other préjudices; but, in 1746, the titular Dewan
having died, Ananda Ranga Pillai was appointed to
the charge which he fulfiUed till 1755. This space
of ten years is the most interesting period of French
history in India. From 1736 Ananda took port in
the affairs, political and commercial, and soon be-
camean every-day confident ofDupleix; he waswell
placed to observe and note ail that was passingin the
country. From 1736 up to 1761, a few daysbefore his
death, which happenedon January llth, 1761,hewrote
himself or rather dictated a very minute diary, in
which family things, private and public events,
current rumours and sayings, arrivais and depar-
— 38 —
tures of sliips, do not fail to tind place. The diary is
of course a large one : a complète copy of it, which
is preserved in the National Library in Paris, forms
twelve thick folio volumes, and is completed by four
other ones containing a diary from 1761 up to 1799,
copies of lellers, accounts, horoscopes and other
pièces. The diary was copied out in Pondicherry,
some sixty years ago, for M. E. Ariel, who acted as
Archivist then and who discovered the tlocumenls
while inquiring about Tamil books and manuscripts
in the city. A short notice ofthework was published
in 1847, but as M. Ariel died in 1855, no more atten-
tion was paid to it till 1870. The statue of Dupleix
was erected at Pondicherry that year, and M. Laude,
the Chief Justice there, published' a pamphlet in
which were translated a few passages of Ananda's
diary concerning the unsuccessful besieging of Pon-
dicherry in 1748 by the English, In the year 1882,
I gave a few extracts, and in 1894 amplified them by
publishing a large volume entitled « The «French in
India », which contains a translation of varions
passages from 1736 up to 1748. In 1903, I gave a
spécimen of the first in my Tamil Manucil.
But the R. A. Consular Agent at Pondicherry, lieu-
tenant gênerai H. Mac Leod, took notice of the ori-
ginal manuscripts in 1892, and by liis care the Madras
Government was informed of its importance. A
new copy lias ordered, and a complète translation in
English began directly. The publication ofthe first
volume lasted till the end of 1904; it is done in a
most convenient way; for the sake of order, the
— 39 -
diary has been clivided inlo chapters, a sunimary of
which is prefixed to the Avork. Moreover, fréquent
marginal notes point to the varions subjects dealt
with in the diary and a complète table of local and
Personal names makes the text easy, The volume
is completed by two appendixes refering to a geo-
graphical term and to the murder of Safdar-Ali-
Khan and his son Muhamniad-Khan. Facino- the
o
title page, is a photograph which reproduces a pic-
ture, still preserved in the author's house at Pondi-
cherry.
The présent volume goes no further than April23,
1746, that is to say the beginning of the war which
included the capture of Madras by the P'rench, their
failure in besieging Cuddalore, and the attempt
of Boscawen against Pondicherry in 1748. It appears
as a preliminary part and is full of interest ; we
learn from it how the French Governor obtained
from the first Arcot Nawab a charter authorising the
coinage of money in Pondicherry ; it costed nearly
40,000 pagodas in varions présents, viz. 120,000 ru-
pees : the Pondicherry rupee, which was very fine
and which was struck up to 1837, was distinguished
by a little crescent on the reverse. There we hâve
plenty of information about trade and exchanges,
arrivai and departure of ships, etc. We are also
minutely informed of the negoliations which led to
the purchase of Karikal from the Raja of Tanjore,
delayed however till 1739, when Chanda Sahib in-
terfered.
The following chapters deal with the invasion of
- 40 —
Thamas-Kuli-Khan,«//rt5 Nadir Shah ; the revolt and
progress of the Mahrattas; the fear that seized the
Deccan Princes who fled and took refuge within the
walls of Pondicherry; the departure to France of
M. Dumas, and the beginning of M. Dupleix's admi-
nistration. In the meantime the divisions come
giving many particulars, accounts of family matters,
births and marriages, astronomical events, astrolo-
gical prognosticSj quarrels and jealousies of offi-
ciais, etc.
The whole is very curious in that it was written
daily on the immédiate impression of facts.
As far as I am able to judge, the translation seems
to be a faithful and accurate one, bat nevertheless,
in some passages, I should hâve liked a more literal
rendering. Why has the initial motto, Time goes
and ivorcls remain^ been suppressed ?
The original manuscripts hâve sometimes been
left incomplète by the author himself, who intended
to complète them afterwards, but forgot it, or was
unable to do so, but many passages hâve perished,
owing to fragility of paper, defect of ink, moisture,
carelessness, etc.
At this point of view, I reflected that the copy in
the Paris National Library was made in Pondicherry
some fifty or sixty years ago and that perhaps it
would be more exact and satisfactory. In order to
ascertain it, I compared a few pages in the présent
translation with M, Ariel's lext, and the resuit was
that the Paris manuscript often afforded a good sup-
ply to the Madras one. For example, the personal
— 41 —
name omitted al p. 96 must be vvritten : « Shanal »
of which the exact spelling l am not able to ascertain
now.
P. 273. The concluding portion ofthe passage is
to be completecl thiis : « they departed promising
them to bring the Nayakkar in the delay of fifteen
days ».
P. 298. The paragraph begins with thèse words:
« If one asks what is going on at Pondicherry, how
they came from Siirat bringing letters; and they
said... »
P. 316. The conclusion is « they went on saying
they will ineet again to-morrow morning and hear
the thing » .
I particularly noticed that the vast information
respecting the afîairs of the late courtier, Kanaga-
raya Mudaliar, in which numerous passages are de-
fective, may often be improved by the Paris manus-
cript.
P. 341. The full text occurs as follows : « This
day, at 10 o'clok in the morning, as ï was with the
(îovernor accountant Rangapillai in the arecanutgo-
down, where we use to stay, we came speaking to-
gcther and I said : — Yesterday, as regards the
accounts and the furniture in the liouse of Kanaka-
raya Mudali, whatever altération may be admitted,
Chinnamudali remarked not knowingwhat was made
by us, being ungrateful, because he plundered
muchand is much covetous; butas the widow of Ka-
nagaraya Mudali was unwilling to give him even a
single cash after lier husband's death, he sent to me,
— 42 —
as soon as Kanagaraya Miidali died, the Christian
named Krimasi Piindit, to say to me : yoii are my
mother », and a little further : « At four nazhigas,
when my younger brother went to his house... »
At page 342, too, we may add : « As it appeared
that day, whatever good ^\e may do to him, he will
net acknowledge it. When I had spoken this to
accoimtant Rangapillai, he answered me: « This is
trae; when we hâve examined the accounts, when we
hâve estimated the estate, when we hâve looked at
the other things, we hâve paid twelve pagodas for
ten, and however he has been ungrateful... »
In the lists on pp. 344 and 345, the following figu-
res could be supplied :
Page 344, Gold ornaments 7.462
Rupees in hand 800
Page 345, Rupees 800 200
Total 41.911
Debts 3.947 5/16
Net rest 35 . 964 9/16
It would be highly désirable to send a compétent
person to Paris to copy ont the complète passages. A
SLippIementary volume can be so obtained; in ihe
meantime we must impatiently wait for and hearlily
welcome the forthcoming volumes.
Paris, 18-3-06.
Prof. Julien Vinson.
Tlœ Malabar Quaricrli/ Rrricir, Ernakulaiii, Coeliin, Sept.
1906, vol. V, p. 212-216.
LE MOUVEMENT SWADÈCI
La politique du gouvernement anglais clans l'Inde
n'a pas sensiblement change, depuis que sa domina-
tion s'y est définitivement établie. Le principal, pour
ne pas dire le réel danger qui la menace, est la cons-
titution de l'unité indigène, de la nationalité hindoue.
Que pourraient contre trois cents millions d'hommes
unis toutes les forces de l'Angleterre? Aussi, après avoir
supprimé l'unité administrative, d'ailleurs très fac-
tice, et l'unité du langage officiel établies par les
Mongols, les Anglais n'ont-ils rien fait pour diminuer
les rivalités de castes, de races, de religions; les deux
grands partis entre lesquels se répartissent les Indiens
ont eu, l'un après l'autre, et suivant le cas, les faveurs
et l'appui du gouvernement. En 1857, les Hindous sont
devenus loyaux et fidèles. Aujourd'hui, les Musul-
mans sont les plus fermes défenseurs de l'empire
contre les velléités d'indépendance des Hindous. Il
s'est produit, depuis cinquante ans, un double courant
inverse: les Hindous, instruits par les Anglais, s'ins-
pirent de plus en plus des idées d'indépendance de
l'Occident; les Musulmans espèrent avec les faveurs
gouvernementales recouvrer la primauté perdue il
y a un siècle et demi. Aussi déploient-ils une acti-
vité extraordinaire et excitent-ils de plus en plus
l'animosité des indigènes brahmanistes.
Cette animosité a amené de la part des Hindous,
__ 44 —
au Bengale, le mouvement swadêçl^ dont, en Europe,
on n'a pas toujours bien compris le caractère.
Ce mot si^'adêçi {les Anglais écrivent swacleshi) a été
traduit par notre adjectif « autonome », mais la tra-
duction n'est pas rigoureusement exacte, car swadêçî
(de swa « soi, son, propre », et deçà <; pays ») a une
signification plus générale et plus absolue. Il s'agit
en définitive d'une tentative de rébellion pacifique
contre l'Angleterre, d'une sorte de grève, organisée
par les Hindous, mais que les Musulmans se refusent
à suivre.
Déjà ancien, car ses origines datent d'une ving-
taine d'années, ce mouvement est devenu très vif,
à cause de ce qu'on a appelé la partition^ c^est-à-dire
le remaniement administratif du Bengale, dont on a
détaché toute la partie nord-est pour la rattacher à
l'Assam, avec Dacca comme capitale. L'auteur de
ce remaniement est le Gouverneur général Lord
Curzon, dont les Hindous ont salué le départ avec des
cris de joie, tandis que les Musulmans, au contraire,
s'en montraient profondément désolés. C'est que, dans
le Bengale, les Musulmans se trouvaient gênés et
dépassés par les Hindous plus nombreux, plus mal-
léables; dans la nouvelle province, les Musulmans
seront en majorité, et ils espèrent que la séparation
amènera le développement rapide des villes de Dacca
et de Chittagong.
Le mouvement protestataire s'est organisé dans de
grandes réunions publiques, dont une — de phis de
10.000 personnes — s'est tenue à Chandernagor, sur
— 45 —
le territoire français, par crainte de la police anglo-
hindoue, composée surtout de Musulmans encadrés
d'Européens. La manifestation de la protestation se
résume en un boycottage universel des produits étran-
gers: des femmes ont brisé publiquement leurs bra-
celets de verre; des écoliers parcourent les rues en
chantant le bandé mûtaram^^ du romancier Dankim
Chandra Chatterji, dont on fait une sorte d'air natio-
nal : c'est un hymne extrait du roman historique
Anandra Nûth qui raconte un épisode de la révolte
des Sanyasis, en 1775, révolte qui avait pour objectif
autant les Musulmans que les Anglais.
Le boycottage des produits européens a été décidé
dans 107 meetings tenus en quinze jours, par plus de
()50.000 personnes. On a cherché à l'étendre à toute
l'Inde; on a placardé au Panjab et dans les bazars
de Pouna, de Nagpour, d'Allahabad, de Dacca même,
des écriteaux menaçants pour ceux qui achèteraient
des tissus européens, des articles de commerce étran-
gers. Aussi, telles maisons qui, le jour du Bijoya
« hickij daij », écoulaient d'ordinaire un millier de
balles de cotonnades, en ont péniblement vendu cette
année une centaine. On cite ce fait caractéristique
d'un marchand hindou qui, dans un accès d'en-
thousiasme, a mis le feu à tout son stock qui compre-
nait pour plus de 100.000 roupies de produits
commerciaux européens. Les cigarettes anglo-améri-
caines, d'ailleurs détestables, sont impitoyablement
proscrites; on s'efforce de les remplacer par les biris,
1. «Je salue (ma) mère. » Je compte publier prochainement
le texte et la traductio?i de ce chant.
— 46 —
purement indigènes, fabriqués avec du tabac blond
du Goudjai'ate parfumé au musc ou au sandal.
Cependant, ce nationalisme paraît condamné à un
avortement complet. Contrairement aux prévisions,
le récent voyage du prince de Galles a provoqué,
dans le Bengale même, un accès inattendu de « loya-
lisme » ; les rajas indigènes sont allés en foule au-
devant du futur empereur. D'autre part, les actions
émises pour la fondation de manufactures indigènes
de tissage, etc., ne trouvent pas de preneurs, et, faute
de produits nationaux, on en reviendra forcément
aux tissus de Liverpool ou de Manchester.
Les Hindous accusent les Musulmans de cet échec.
Musulmans et Hindous ne sont pas prêts de s'entendre
contre l'Anglais. Les Musulmans sont reconnaissants
à Lord Curzon d'avoir encouragé les études musul-
manes sur l'Islam, la restauration des mosquées, la
fondation de collèges musulmans. Sir R. Fuller, lieu-
tenant-gouverneur de la nouvelle province Eastern
Bengal, a été reçu à Dacca avec un enthousiasme
indescriptible par les Musulmans, tandis que les
Hindous s'abstenaient et que leurs journaux étaient
pleins de protestations violentes.
Il s'est produit une très curieuse interversion dans
l'attitude des deux peuples vis-à-vis de l'Européen :
l'Hindou, d'abord accueillant et accessible aux choses
d'Europe, s'est pour ainsi dire replié sur lui-même;
le Musulman, au contraire, d'abord hostile, s'est rap-
proché des conquérants et leur demande ses inspira-
tions. Il a organisé des industries que le swadêçî
— 47 —
menace d'une concurrence redoutable. D'ailleurs,
les Anglais, instruits par l'expérience, ont composé
les régiments natifs d'éléments homogènes, qui en
font des antagonistes naturels; les uns, par exemple,
sont uniquement formés de brahmes, et les autres
exclusivement de Musulmans. Il existe certainement
dans toute l'Inde un courant anti-anglais très net,
plus ou moins accentué suivant les régions. Les Musul-
mans y sont pour la plupart étrangers.
Des faits récents montrent combien sont vives et
tenaces les haines de races. Le 7 février dernier,
les Musulmans de Calcutta célébraient la fête qui
comporte des sacrifices de vaches devant les
mosquées. Pour narguer les Hindous, ils firent passer
ces animaux par une rue étroite qui longe une pagode,
dans le quai'tier de Chitapoure. Une violente discus-
sion s'éleva enti'c les Hindous qui sortaient du temple
et les Musulmans; un agent de police hindou menaça
les Musulmans d'un procès-verbal. Mais ceux-ci,
irrités, allèrent chercher des renforts et attaquèrent
la police à coups de pierres. Puis ils s'en prirent
au temple lui-même, forcèrent les portes, battirent
les gardiens et, à l'aide de barres de fer, mirent en
pièces les statues des dieux. Les Hindous s'enfuirent
et les vainqueurs, attachant à la queue des vaches
les idoles encore intactes, les traînèrent ainsi jus-
qu'au Gange. Le lendemain, la fête recommençait:
les Hindous s'étaient organisés et il y eut une véri-
table bataille entre sept ou huit mille Musulmans
et toute la population du quartier. Il fallut faire
donner la cavalerie pour rétablir l'ordre.
- 48 —
Il est bon de rappeler d'ailleurs que, dès le 5 no-
vembre 1905, la Société littéraire mahométane de
Calcutta envoyait à ses coreligionnaires une circulaire
pour les engager à ne prendre aucune part à l'agi-
tation contre la « partition » du Bengale; on les invi-
tait dans ce document, signé de Bakhtyar Sliad, Syed
Mohammed, AbduUah Khan Ahmed, etc., à demeurer
bons et fidèles sujets de l'empereur-roi Edouard VII,
en insistant sur ce point que les intérêts des Maho-
métans de l'Inde sont tout différents de ceux des
Hindous, et en énumérant les bienfaits du gouver-
nement actuel: lo allocation annuelle de 50.000 roupies
(83.500 fr.) pour les écoles musulmanes du Bengale;
2° fondation de bourses nombreuses à 1 Université
de Calcutta; 3» maintien des fondations antérieures;
4o attribution successive de plus de 100.000 roupies
(167.000 fr.) pour la construction à Calcutta d'un
hôtel devant servir à l'installation d'une medressah;
5» tempéraments apportés aux règlements sur la
peste en faveur des dames musulmanes, derrière le
voile qui ferme les gynécées; 6o autorisation, pendant
l'épidémie, de faire im pèlerinage à la Mecque, en
l^artant de Chittagong au lieu de Bombaj^, accordée
aux Musulmans du Bengale, du Beliar et de l'Orixa.
La plupart des renseignements qui i^récèdent sont
extraits d'une lettre quij m'a été écrite par un de mes
anciens élèves, M. G. Barrigue de Fontainieu, en ce
moment au Bengale, chargé d'une mission scienti-
fique.
J. V.
BIBLIOGRAPHIE
Obras Vascongadas del Doctor Labortano Joannes
(VEtcheberri (1712), con una introduccion y notas
por Julio de Urquijo é Ybarra. Paris, Paul Gealhner,
1907 (Bayonne, impr. A. Lamaignère), in-4°, lxxx-
323-(iv.) p. et une p. de fac-similé.
Le 10 octobre 1866, — il vient d'y avoir juste qua-
rante ans, — par une belle soirée d'automne, je dé-
barquai à Bayonne, tout frais sorti de l'école forestière,
plein d'ardeur et d'enthousiasme, et bien disposé à
m'éprendre de cette mystérieuse langue basque, qu'une
bonne fortune inespérée me mettait à même d'étudier
sur place, dans les meilleures conditions. Mon long
séjour en Orient et mes voyages m'avait préparé à cette
étude; aussi ne tardai-je pas à me mettre à l'ouvrage.
Présenté à M. l'abbé Inchaupé par cet excellent M. de
Gavardie, juge d'instruction, ancien collègue de mon
père à Pondichéry, je fus reçu par l'honorable chanoine
avec cette amabilité un peu dédaigneuse que montrent
souvent les Basques lorsqu'on ose s'attaquer à leur re-
doutable idiome. 11 voulut bien, pour me guider, me
confier son Verbe et la Grammaire de Harriet,qui sont
4
- 50 —
d'ailleurs les ouvrages les plus propres à rebuter un
commençant. Mais je n'étais pas un novice ; j'aban-
donnai vite ces livres formidables...
J'ai publié, depuis, bien des choses sur la langue
et le pays basques : quelques volumes, une vingtaine
de brochures, un très grand nombre d'articles de jour-
naux et de revues. J'ai soutenu de longues et vives
discussions; mais j'ai la satisfaction aujourd'hui de
voir qu'on commence, dans le pays, à rendre justice
à mes efforts. Je n'en veux d'autre preuve que les ap-
préciations bienveillantes de M. de Azkue dans son
excellent Dictionnaire et la manière élogieuse dont
M. de Urquijo cile mon nom dans son introduction
aux œuvres de Jean d'Etcheberri.
C'est qu'elle est admirable, cette introduction!
M. de Urquijo est de ceux pour qui les coups d'essai
sont des coups de maître. C'est complet, précis, mé-
thodique, clair, intéressant au possible, et ces quatre-
vingts pages se lisent sans la moindre fatigue, presque
avec l'intérêt passionnant du roman le plus dramatique.
Et quand on songe que l'auteur de ce chef-d'œuvre
était, hier encore, un mondain livré aux horreurs de
la politique, on éprouve une joie plus vive de ce qu'on
pourrait appeler une heureuse conversion.
Il paraît, — et je m'en enorgueillis fort, — que j'y
suis pour quelque chose. M. de Urquijo nous raconte
en effet, que c'est ma Bibliographie Basqve qui l'a
amené à former sa collection de livres basques, déjà si
— 51 —
complète et si belle, et à rechercher dans le Pays tous
les documents, tous les manuscrits, tous les souvenirs
littéraires des siècles précédents. C'est ainsi qu'il a re-
trouvé, chez les Franciscains de Zarauz, le manuscrit
qu'il publie aujourd'hui cou amore, et avec un soin
méticuleux.
L'ouvrage n'était pas tout à fait inconnu d'ailleurs.
J'en avais indiqué l'existence, sur la foi du regretté
Ch. Bernadou, qui m'avait communiqué un extrait,
relatif à ce travail, des procès-verbaux du Bilçar d'Us-
larilz. Mais nous ne savions ni ce qu'était devenu le
manuscrit, ni quelle avait été la vie de l'auteur, origi-
naire de Sare, que Larramendi, vers 1730 ou 1735,
trouva installé comme médecin « municipal » cà Az-
coïtia .
M. de Urquijo a pu reconstituer l'histoire du livre
et la biographie de Jean d'Etcheberri. Il a voulu ré-
soudre le problème; il a cherché et il a trouvé, tout ce
qu'on pouvait trouver du moins.
Nous apprenons ainsi que Jean d'Etcheberri, de
l'une des maisons Etcheberri de Sare, était docteur en
médecine, établi à Sare où il avait épousé Catherine
d'Ilsasgarat qui lui donna plusieurs enfants. Mais le
métier de médecin ne rapportait pas beaucoup à Sare
et le docteur devait exercer son activité dans les pa-
roisses limitrophes, tant en France qu'en Espagne.
En 1743, la municipalité de Vera le nomma son mé-
decin officiel; il remplit cette charge jusqu'en 1722,
- 52 —
mais il continua à habiter Sare : c'est en 1716 seule-
ment qu'il transporta sa résidence à Vera. Sa réputa-
tion grandit en Espagne; on le recherchait de toute
part et, en 1722, il devint médecin de Fontarabie, aux
appointements de 150 ducats; on avait objecté pour-
tant qu'il n'était pas docteur d'une faculté d'Espagne:
il l'était de Montpellier sans doute. En 1723, il passa
à Azcoïtia où il resta jusqu'à sa mort, survenue en
1749; il avait alors plus de quatre-vingts ans. Nous
pouvons ainsi supposer qu'il était né à Sare vers 1665.
Il n'avait donc pas connu Axular, ni son neveu; mais
il avait pu connaître Harizmendi, d'Argaignarats et
Pouvreau, dont il cite le Philothea.
Instruit et actif, il s'était beaucoup occupé de sa
langue maternelle; il admirait le style d'Axular et le
prit pour modèle quand il écrivit, en 1712, l'ouvrage
que M. de Urquijo nous donne aujourd'hui.
Il y ajouta, plus tard, une introduction latine; plus
tard encore, il fit une grammaire latine en basque, et,
pour annoncer ce dernier travail, il publia, en 1718, à
Bayoïine, chez Mathieu Roquemaurel, une « lettre de
recommandation » Gomendiozco carta, ^0 ^ . ,^e[ii in-4°,
que M. de Urquijo réimprime d'après l'exemplaire,
unique, qui a appartenu à M. l'abbé M. Harriet.
Etcheberri avait fait en outre un vocabulaire basque-
français-espagnol-latin qu'il avait prêté à Larramendi
et que M. de Urquijo croit avoir aussi retrouvé.
Le manuscrit des Hatsapenac et de la Grammaire
— 53 —
latine est iiicûiiteslablement l'original de l'auteur,
comme le prouvent les corrections, les ratures, les
additions, les retouches nombreuses : le savant et cons-
ciencieux éditeur donne \efac-simile d'une page fort
bien choisie, où il est parlé d'Axular.
Le manuscrit de Zarauz, que M. de Urquijo décrit
de la manière la plus parfaite, est malheureusement
incomplet. On serait peut-être en droit d'en accuser
la négligence des moines, si beaucoup de bibliothé-
caires laïques n'étaient pas suspects de la même insou-
ciance. Au surplus, nous ne sommes plus au moyen-
âge, à cette époque de pauvreté et d'ignorance, où l'on
grattait les vieux parchemins pour y écrire des litanies
et des oraisons...
M. de Urquijo a reproduit le texte du manuscrit
avec l'exactitude la plus scrupuleuse, ce dont on ne
saurait trop lui savoir gré.
L'ouvrage principal de Jean d'Ktcheberri, dédié au
pays de Labourd*, est intitulé Escuararen Hatsapenac,
c'est-à-dire « Rudiments de basque » et comprend plu-
sieurs chapitres qui traitent de la pureté, de la no-
blesse, de l'originalilé, de la ftexibilité, de l'unité du
basque, et de sa raison d'être; puis vient l'éloge
d'Axular et du parler de Sare; l'auteur démontre en-
suite que ceux qui dédaignent le basque sont eux-
1. Etcheberri appelle le Laboii.rd laa-urdi, ce qui voudrait
dire « le pays aux quatre eaux, aux quatre rivières » (sans doute
la Bidassoa, la Nivelle, la Nive et la Bidouze), étyraologie fort
plausible.
— 54 —
mêmes méprisables et il termine par un appel chaleu-
reux à la jeunesse du pays et au lecteur.
Si M. de Urquijo n'a rien changé au texte d'Etche-
berri, il a cru devoir ajouter des notes utiles et intéres-
santes, et vérifier toutes les citations latines et basques.
Il a pu constater ainsi que les citations d'Axular sont
empruntées à la première édition, celle de 1643, qui a
pour titre Grero et non à la mauvaise réimpression
sans date qui est du XVIIP siècle et qui est intitulée
Gueroco Giicro. J'avais fait la même constatation dans
le vocabulaire de Pouvreau. Quant à VElicara erabilt-
ceco liburua, dont nous ne connaissons que les éditions
de 1665 et 1666, je ferai observer que la première
édition est de 1636 et non de 1635. Du moins c'est la
date que donne M. Pierquin de Gembloux qui avait
évidemment sous les yeux un exemplaire de l'ouvrage
dont il a copié le titre intégralement, comme il a copié
aussi le titre du grand ouvrage de d'Argaignarats, de
1641, que M. Gustave Brunet avait vu. Que sont de-
venus ces deux volumes?
L'intérêt principal du travail du docteur Etcheberri,
c'est que ce n'est pas une traduction ou une adaptation,
mais, comme celui d'Axular, un ouvrage original
pensé et écrit en basque; il n'en est pas beaucoup qui
réalisent cette qualité. Ce nous est une raison de plus
pour remercier M. de Urquijo, pour lui adresser toutes
nos félicitations et pour lui demander de nous donner
d'autres publications de ce genre. Un vaste champ est
ouvert à son intelligente et vaillante activité.
— 55 —
,l(; me reprocherais en terminant de ne pas accorder
à rimi)rlmeur la part d'éloges qui lui revient. L'exécu-
tion est très soignée et fort belle. Ce superbe volume
contraste heureusement avec les élucubrations com-
munes, vulgaires et sans goût de la plupart des impri-
meries provinciales.
Julien VI^SON.
Etienne de Flàcourt. Dictionnaire de la langue de
Madagascar... par Gabriel Ferrand. Paris, E. Leroux,
1905, in-8°(vj)-XXXlX-296p.
J'ai donné ici même, il y a deux ans, une notice bi-
bliographique sur Et. de Flacourt, le premier gouver-
neur français de [Madagascar. M. Ferrand a eu l'excel-
lente idée de réimprimer la partie linguisti(pie dos
ouvrages de Flacourt, qui d'ailleurs n'était pas tant
son œuvre que celle d'un des missionnaires qui l'acom-
pagnaient. Mais M. Ferrand ne s'en est pas tenu Là :
il a, à côté de la forme donnée par le Lexicographe de
1653, mis la forme moderne du mot dans la même
région et aussi les variantes dialectales; il a seulement
indiqué les formes des manuscrits anciens, écrits en
arabe, que possède la Bibliothèque Nationale. Il a fait
précéder ces listes de mots d'une étude générale sur
la langue et la phonétique malgaches.
J'aurais bien des observations à faire sur la partie
phonétique. D'abord le tableau de la p.v ne me satisfait
— 56 —
pas : je ne vois pas h\en j = dr palalo-denlale, ni la
dentale alvéolaire ts, ni les palatales tr, dr; je n'aime
pas non plus que / soit classée comme liquide : qu'est-
ce au juste qu'une liquide? Je trouve aussi que M. Fer-
rand adopte trop facilement la terminologie des néo-
grammairiens et les théories « expérimentales » de
M. l'abbé Rousselot, lui qui a étudié sur place et en-
tendu de ses oreilles! Ce qui est dit des soi-disant
palatales tremblées tr, dr, à la p. xj-xij, est extrême-
ment obscur. Quant aux emphatiques correspondantes,
les arabes les écrivaient rr, mais tous les grammairiens
ou lexicographes transcrivent le tr par ts, tch,chs, trsh,
tsh, et en Belsileo il devient s, tandis qu'en Mérina
il est simplement tr. Ce sont probablement de ces
sons mixtes, consonnantico-vocaliques, où la langue,
le palais et les dents interviennent d'une façon varia-
ble suivant les individus et les localités.
Julien ViNsoN.
Eugène Kouillard. iYoms géographiques de la /tro-
vince de Québec... Etymologie, traduction et ortho-
graphe. Québec, E. Marcotle, 190(3, in-8". 110 p. et
une carte (Publication de la Société du parler français
au Canada).
Le vocabulaire de M. Rouillard, par ordre alphabé-
tique, est extrêmement intéressant. Il contient la liste
de tous les noms topographiques du pays, tels qu'ils
— 57 —
sont acliiellemcnl employés ou tels qu'on les trouve
dans les historiens et les écrivains européens des trois
siècles précédents. La reconstitution des formes origi-
nales n'était pas facile, car beaucoup de noms étaient for-
tement altérés, mais l'auteur a rapproché les diverses
variantes ; il a consulté les grammaires et les diction-
naires, et il a pris l'avis des missionnaires qui vivent
aujourd'hui parmi les tribus indigènes, — que l'auteur
appelle sauvages: je n'aime point du tout cette appella-
tion dédaigneuse, — dont le nombre est très réduit :
telle peuplade qu'on évaluait à cinquante mille
hommes, il y a trois siècles, ne compte plus actuelle-
ment que deux mille individus.
Ces noms topographiques appartiennent à divers dia-
lectes des langues huronne-iroquoise et algonquine.
M. Houillard donne quelques détails sur ces divers
idiomes dans son intéressante Introduction, mais
vraiment par trop sommaire et insuffisante. Que veut
dire ceci : les Hurons comme les Algonquins, con-
juguent les noms et multiplient les verbes? En réalité,
il n'y a, dans les langues agglutinantes, ni noms ni
verbes; il y a des radicaux indépendants, toujours
isolément significatifs, et dont les combinaisons sont
innombrables. Parexemple, en tamoul, vinei ^< mal »,
en' « moi », ku « direction » à (datif), fera vineiyê-
nukku « à moi qui suis souffrant, malheureux » ; sdrn-
dây « tu es venu » donnera sârndâyeikkandân où sârn-
ddyei est formé de sâr « arrivé », nd « temps passé
— 58 —
intransilif », (Uj « toi », ei « accusatif » : l'idée verbale
(relation de temps) s'associe à l'idée nominale (rela-
tion d'es[)ace).
Quant aux noms indigènes, plusieurs sont fort ins-
tructifs : andoseweivegama « lac où l'on marche »,
beauchêne (lac), altération de ohashing « là où l'eau se
resserre», canada pour kanata « ville, village », f/uéhec
ou kébek « c'est obstrué, détroit », squaw (lac) de
iskwew « femme », etc. xM. lîouillard donne en passant
de très intéressants détails sur l'histoire, la population,
les légendes de plusieurs localités.
J. ViNSON.
Smithsonian Institution. Bureau of american ethno-
logy. Antiquities of the Gemer-Plaleau, i^ew Mexico,
by Edgar L. Hewett. Washington, gov. pr., 190G,
in-8^ 53 p., 16 pi. et 2 cartes (Bulletin n° 32).
Outre ces planches, l'étude de M. Hewett contient
de nombreuses figures dans le texte, toutes éminem-
ment intéressantes et instructives. Le plateau de
Gemer, dans le Nouveau Mexique, s'étend à l'ouest de
Rio Grande del Norte, sur une largeur d'environ
cent kilomètres. Ce plateau est occupé par une grande
forêt où campent six tribus indigènes. On y trouve de
nombreuses ruines laisséespar une population antique
très nombreuse et très active.
J. V.
— 59 -
Seinitica, Sprache und KechlsvergleicliciKle Stu-
dien, von I). H. Millier. I et II. Vienne, A. Hoclder,
1906 (Extraits des Mémoires de l'Acad. Impér. des
Sciences), in-8% 48 et 88 p.
La première livraison contient sept savantes études :
\. Un texte incompris dans les lettres d'Amarna ;
II. la signification et l'étymologie du verbe (/âlu dans
les lettres d'Amarna; III. nsd vlhrbyth (au point de
vue juridique); IV. gloses sur la théorie et la pra-
tique dans le vieux droit babylonien; V. la théorie
des races pures dans le Code Syro-romain; VI. les
numéraux multiplicatifs dans les labiés d'Amarna et
en hébreu; Vil. construction des strophes dans le
Livre de Job.
La seconde se compose de huit mémoires sur le
droit privé, le droit héréditaire, le Coded'Hammourabi
et le livre lédéral, l'histoire du Code Syro-romain et
autres questions des plus intéressantes de jurispru-
dence orientale. Tout cela éch.ippe un peu à ma com-
pétence, mais paraît fort bien fait et fort instructif.
J. V.
Zeitachrift fur vergleicheiide Sprachforschung ... ,\'on
E. KuHN und W. Schulze. Hand XL (V. F. xx),
4* Heft. Gutershoh, C. Bertelmann, 1906, in-8°, i). 425-
568.
Contient : 1. Sur la formation des mots aryens, par
- 60 —
Jarl Cliarpeiilicr, p. 425; 2. La coinposiliori en man,
par Joseph Zubaty, p. 478; 3. Talina, kaikina, par
Ernst Mauss, p. 520; 4. Grec ednos, par K. J. Jo-
hansson, p. 533; 5. v. i. avrk, parJ. Wackernagel;
6. Gotique dis- et 6 marikrailm, par Kichard Loewe,
p. 547; 7. Elymologica, par G. G. Ulileiibeck, p. 552;
8. Etymologica, par F. Lewy, p. 561 ; 9. Sur la gram-
maire gotique, par W. Schuize, p. 563; 10. Glievilles,
par W. Schulze, p. 565; 11. Observations, p. 566.
J. V.
Bulletin du parler Jranrais au Canada, vol. V, n°'2
et 3. Québec, Université Laval, 1906, p. 41-120, gr.
in-8°.
Outre les articles ordinaires : livres et revues, ques-
tions et réponses, sarclures, anglicismes, on trouve
dans ces deux numéros de bons travaux : suite du
lexique canadien-français, les dialectes français dans le
parler canadien, par M. A. Rivard; pour nos amis les
écoliers, par M. l'abbé Em. Ghartier; quelques mots
sauvages, par M. l'abbé Z. Laçasse; la littérature ca-
nadienne (J. 1). iMermet), par M. l'abbé Gamille Koy ;
les noms populaires de quelques plantes canadiennes,
par Mgr L. Laflamme; deux chansons canadiennes,
par A. Kivard, et de plus un bulletin bibliographique,
un bulletin d'observations et le rapport du Secrétaire-
Général. J. V.
— 61 —
Bévue du Monde Musulman, publiée par la Mission
scientifique du Maroc, sous la direction de M. A. Le
Chatelier. Pam, E. Leroux, 1906-1907, 1'^'= année,
gr. iii-8°.
IvCS deux premiers n°' (novembre et décembre 1906),
ont respectivement 144 et 160 (145-304) p. ils con-
tiennent de très remarquables articles : L'enseigne-
ment primaire des indigènes musulmans de l'Algérie,
par M. Paul Bernard; le Mouvement swadêçî dans
l'Inde (reproduit ci-dessus, p. 43-48), l'Islam dans
rindo-Chine française, par M. A. Cabaton; Aga Kban,
par A. Le Chalelier; La Constitution en Perse, par
A. M. xNicolas; Le Japon et l'Islam, par F. Farjanel,
les Musulmans Kusses, par A. Le Cbatelier; lesSenous-
siyas en Tripolitaine, par M. Slouscb; les populations
musulmanes de la Roumanie, par Popescu-Siocanel;
les Bebais et le mouvement actuel en Perse, par
H. Dreyfus; les Musulmans des Pbilippines, par A. Le
Cbatelier; Notes de Bibliograpbie néerlandaise, par
A. Cabaton; et d'excellentes revues: notes et nouvelles,
la presse musulmane, les livres et les journaux, par
L. Bouval, secrétaire de la Rédaction.
On ne peut que soubaiter longue vie et prospérité h
cette savante et très utile publication.
J. V.
VARIA
I. Caractère et taille des crayons.
D'après une récente étude, celui qui, après avoir taillé son
crayon, laisse la pointe sans la dégrossir, manque d'énergie et de
force de caractère. Les Imaginatifs et les exubérants font la
pointe longue et ceux qui sont doués de précision et de sens ar-
tistique égalisent les moindres aspérités. Si vous faites une pointe
fine comme une épingle, vous êtes un raffiné, mais vous êtes
grossier et mal élevé si la pointe se termine en bouly sans que
vous enleviez les rugosités de la mine de plomb.
II. Pour les écoliers.
Les autorités de Trêves viennent de prendre une mesure tout à
fait digne d'être enregistrée et divulguée. Une circulaire rédigée
à cet effet s'exprime en ces termes :
« Il n'est pas rare que des écoliers ont à faire, pour se rendre à
l'école, un chemin relativement long, et que par les temps de
brouillard, de pluie ou de neige, ils doivent ensuite s'asseoir à leur
banc, les pieds mouillés pendant plusieurs heures. Ils se re-
froidissent ainsi beaucoup trop facilement, et il en résulte souvent
des maladies plus ou moins graves. En divers endroits, nous avons
remarqué avec satisfaction que les inspecteurs et les instituteurs
ont engagé les parents à donner aux enfants une seconde paire
de chaussures — pantoufles ou chaussons — afin de leur permettre
de changer de chaussures dès leur entrée en classe. Cette mesure
est à recommander de la façon la plus pressante. Pour les enfants
pauvres, il y aura lieu d'inviter les communes à leur procurer
les chaussures. »
A quand en France pareille décision?
— 63
III. Critique américaine.
Le critique dramatique du jourûal américain, Tlic Leudct-. a
ainsi critiqué les sœurs Cherry, chanteuses et danseuses : « Leurs
bouches rances s'ouvrent comme des cavernes pour émettre des
sons semblables à ceux que poussent les damnées au milieu de
leurs tortures. Elles trottinent, galopent et se cabrent tout autour
de la scène dans un mouvement qui tient le milieu entre la danse
du ventre et le déhanchement des guenons, avec leurs faces peintes
et leurs formes hideuses. »
Les sci'Uis Cherry ont attaqué le journal américain en diffa-
mation. Le juge a trouvé l'article incriminé " une critique im-
partiale ».
IV. Illusion ou naïveté.
On lisait, dans un grand journal de décembre dernier : « Pourquoi
je ne vais plus dans les universités populaires? disait naguère un
professeur de la Sorbonne. Parce que j'y ai fait un jour une ex-
périence cruelle, qui acheva de dissiper mes dernières illusions
sur l'utili'é de nos conférences... Devant notre auditoire ordinaire
d'ouvriers et de petits bourgeois curieux des choses de l'esprit, je
devais, ce jour-lcà, traiter un sujet très simple de science expé-
rimentale, et, pour être bien compris par tout le monde, je m'étais
attaché à proscrire de mon vocabulaire tous les termes techniques,
toutes les expressions inusitées...
» Je parle; on m'écoute dans le plus respectueux silence, et
quand j'ai fini, suivant l'usage, je demande à mes auditeurs de
vouloir bien me poser des questions pour engager un entretien
profitable. Personne ne souffle. Un à un, les quelques ouvriers et
apprentis, qui sont venus m'en tendre, gagnent la porte d'un air
morne. Je songe avec désolation : (( C'est raté; il n'y en a pas un
qui m'ait suivi... »
u Si pourtant, il y en avait un! C'était un bon gi'os garçon
réjoui, qui s'approcha de ma table avec des sourires et des regards
d'intelligence.
— 64 —
» — Vous avez bien parlé de phénomènes? me demanda-t-il en
clignant de l'œil.
» — En effet, disî-je ; à plusieurs reprises il a été question dans
ma conférence des phénomènes physiques et chimiques.
)) — Eh bien ! reprit l'autre avec un rire d'augure, nous pouvons
le dire entre nous : ils sont tous faux, les phénomènes. Moi qui
vous parle, je le sais mieux que personne : voilà dix ans que j'en
montre à la foire du Trône.
» J'en demeurai suffoqué, ajouta le professeur de la Sorbonne, qui
contait cette anecdote, et je vous confesse que, depuis lors, je n'ai
pas eu le cœur de retourner dans les universités populaires. Je
n'irai pas jusqu'à dire que les nombreux « intellectuels » qui se
sont appliqués de même à «descendre la lampe dans la cave»,
comme dit Tolstoï, ont perdu leur temps et leur peine; mais il
me semble que cet immense et généreux effort n'a pas donné tout
ce qu'on en pouvait attendre et que^ pour entreprendre «l'édu-
cation de la démocratie», il nous faudra bientôt recourir à d'autres
moyens plus discrets et plus efficaces. Bacheliers incorrigibles,
nous avons cru que, pour élever le peuple, il suffisait de lui " faire
la classe ». Et quelle classe! N'importe qui pérorant sur n'importe
quoi, sans ordre et sans méthode... Quand donc reviendrons-nous
de cette erreur pédante et déclamatoire?"
Est-ce bien probant et notre éminent collègue ne s'est-il pas trop
hâté de conclure?
J. V.
L' Imprimeur-Gérant :
E. Bertrand.
CH.\LONSUR-SAONE, IMP. FU.\.\(;MSE KT OllIENTALE K. liERTKAND
DE QUELQUES DIFFÉRENCES
lexiques et typographiques entre divers exemplaires du
Nouveau Testament basque de Liçarrague.
Jusrjirà présent, aiiliuit ([iie nous sachions, on a
considéré les rares exemplaires survivants du .\ . 1".
de Liçarrag-ue comme rigoureusement idenlif|ues,
du moins quant au texte. Un hasard heureux nous
a permis de noter néanmoins certaines difTérences
({ui permettent, croyons-nous, d'établir qu'il y a eu
deux tirages de cet ouvrage. Mais je n'ai pu encore
trouver que cinq passages où l'on puisse constater
des diftérences :
1° Dans l'évangile selon saint Mathieu, alors que,
nu chap. v, parag. 26 (ft. 7 v"), la plupart des exem-
plaires ont : renda diroano, celui de Bayonne et,
paralt-il, celui de Hambourg ont deçaqueano.
2° Dans l'évangile selon saint Jean, l'exemplaire
du P. Joannatéguy a (chap. x, parag. 16, l't. 182 v'^)
par deux fois arthalde, mais dans la majorité des
autres exemplaires le mot est devenu arthegui par
l'application du mot egai, imprimé sur un petit mor-
ceau de papier qui a été ensuite collé de manière à
couvrir exactement la fin du mot, c'est-à-dire aide,
jugé incorrect après coup.
— 66 —
3" Dans ce même évangile, chap. xvii, parag. 24,
(ft. 197 V) la plupart des exemplaires, notamment
celui du chanoine Harriet et le mien (qui avait ap-
partenu au Prince L.-L, Bonaparte), ont les mots
ecen et haino écrits ec en et hciin o, quand dans Texem-
plaire du chanoine Arbelbide, entre autres, les lettres
fautivement espacées ont été rapprochées.
4" Feuillet 428 r°, à la fin de la première ligne,
dans les exemplaire de Harriet etde Joannatéguy, ainsi
que probablement dans ceux de Leipzig, Stuttgart
et Berne, sur lesquels a été faite l'excellente édition
de MM. Linschmann et Schuchardt, la dernière lettre
de deus a dépassé le haut du corps de la ligne et elle a
été imprimée comme il suit : deu\ alors que dans
mon exemplaire la lettre s se trouve dans l'aligne-
ment.
5° Dans la deuxième épitreaux Corinthiens (chap. i,
ft. 316 v^'), les paragraphes Q3 et 54 sont correcte-
ment chiffrés dans l'exemplaire d'Arbelbide, alors
que les chiffres erronés .3.3 et .34 peuvent se lire dans
mon exemplaire, ainsi que dans ceux de-Harriet et de
Joannatéguy.
Que conclure de tout cela ? Rien de précis. Force
nous est cependant d'esquisser une hypothèse, dont
je ne garantis que la vraisemblance.
Licarraoue a dû tout d'abord adresser à la reine
Jeanne d'Albret, — qui les a aussitôt distribués, —
des exemplaires dans lesquels arthalde n'est pas
corrigé, où la consonne finale de deus est au-dessus
de la ligne, etc. Ensuite un deuxième envoi a eu lieu:
mais, dans l'intervalle, le traducteur, «jui a été avisé
— (u -
([iTil a parfois traduit la viilgate des catholiques, a
c\\nug{' f//-t/u/l(/e en arlliegiii. Après ce premier tirage,
les formes ont été mises de coté et conservées par
ordre ; quelque temps après, et alors qu'il s'est agi de
satisfaire à une nouvelle demande d'exemplaires du
X. r, on a remis les formes sous presse pour un second
tirage. A ce moment et en efTectuant le transport
d'une forme sans doute mal coincée, un manœuvre
ou un apprenti inexpérimenté a laissé tomber le cul-
de-lampe que l'on remar([ueàla fin de la table (ft. 08
v°) et lorsqu'il Ta remis en place, il l'a renversé la
pointe en haut. Aucun ouvrier n'aurait commis cette
maladresse que Ton observe dans l'exemplaire de Ba-
yonne'. Dans l'exemplaire du P. Joannatéguy, le cul-
de-lampe en question est normalement placé, ce qui
revient à dire que si l'on inscrivait cet ornement
dans un triangle, celui-ci aurait bien sa pointe en
bas. Puis, avant de commencer à tirer, lui ouvrier est
intervenu et a corrigé deus (au lieu de deii"), 2.3 et 24
(au lieu de 33 et .94) et a rapproché convenablement
les lettres de ec en et haino. — Les trois corrections
dont il vient d'être fait mention étaient faites lors
du tirage de l'exemplaire d'Arbelbide.
De ce qui vient d'être exposé on peut donc
conclure que les exemplaire d'Oloron, de Madrid,
d'IIarriet, ' qui présentent la correction arlJiegui,
de même (jue l'exemplaire de .Joannatéguy qui
1. Notons que cel pxoniiilairc est 1 un des très rares qui aient
(( deçaqueano ».
2. De mon cxcniiilaiie on ne peut rien dire, car il a été formé de deux
autres.
— 68 —
a conservé arthalde^ proviennent d'un premier
tirage, tandis que l'exemplaire de Rayonne et celui
qui appartenait à Arbelbide, et offrant soit le ren-
versement du cul-de-lampe, soit les trois corrections
précitées \ ont été imprimés postérieurement. A
ce moment-là, sans doute, Liçarrague recevait les
observations que les ministres calvinistes chargés
par la reine Jeanne de revoir le texte mss. de la
traduction dont il s'agit, n'ont pas manqué de lui
adresser à propos des fautes d'impression qui ont
certainement .attiré leur attention dès qu'ils ont eu
un exemplaire du 1*"^ tirage du N. T.
Georges Lacombe.
OBSERVATIONS SUR L'ARTICLE PRÉCÉDENT
En même temps que M. G. Lacombe m'envoyait
la très intéressante note qu'on vient de lire, l'infati-
gable M. E.-S. Dodgson m'adressait le numéro du
16 mars dernier des Notes and Qiiei'ies où il signale
(p. 215, col. 2) des différences entre les exemplaires
de Liçarrague de Bayonne, de Hambourg, du British
Muséum, de la Société Biblique de Londres et de la
Bodleyenne d'Oxford. M. Dodgson, outre diroaiio
remplacé par deçaqueano^ a trouvé diotsô changé en
diotsa (ft. 5 v"; S. Mat. IV, 6, 9, 10) et drauaiiari
accentué en drauânari (ft. 8 v°; S. Math. V, 40).
1. Je n'ai pu vérifier si l'exemplaire d'Arbelbide n decaqueano, car
il a disparu après la mort de son propriétaire.
— 69 —
M. Dodgson fait remarquer que, après le chapitre
XX de S. Mathieu, on ne rencontre phis diotsô, mais
toujours (ilolsa dans tout le cours du volume. M.
Dodgson, qui profite de l'occasion pour faire de la
réclame à ses propres travaux, pour donner le coup
de pied de la fable ta la réimpression de Strasbourg
et pour rappeler que Jeanne dWlbret était la grand'
mère de la femme du malheureux Charles I*"", sup-
pose que ces corrections ont été faites « when the
autlîor and his assistants, mentioned in one of the
préfaces, were discussing the merits of the newly
prinled pages ».
D'autre part, M. 11. Schuchardt, dans l'introduction
de la réimpression de Liçarrague, signale quelques
différences entre les trois exemplaires de Berne, de
Stuttgard et de Leipzig. Les trois principales sont :
ft. 412 r" 1. 3 bil\ed° (St. et Leip.), bilo, edo Berne);
ft. 428 r" 1. 1 deiû (Leip.), deas (B.); ft.221 Vl. 3, en
marge, 2. 4 (Leip.), berriz 22. 4 (B. et St.). M. Schu-
chardt relève aussi un certain nombre de fautes
d'imprimerie sur lesquelles je reviendrai.
Il m'a paru intéressant de voir comment se com-
portent, au point de vue de ces particularités distinc-
tives, les exemplaires du Liçarrague que j'ai sous la
main, celui de la Bibliothèque Nationale, celui de la
collection d'Abbadie, celui de l'Arsenal et les miens.
L'exemplaire de la Bibliothèque Nationale (Réserve,
A. 6455 bis) vient de la maison professe des Jésuites
de Paris à laquelle il avait été donné par Huet,
évoque d'Avranches. Il avait appartenu au Président
de Thou (jui l'avait probablement reçu de Liçarrague
— 70 —
lui-même quand il le vit à Laljastide Clairence, eu
1582, 11 a diolsô^ di/'ornw, draiianari, rirtJiegui (pap.
coll.), ecei}^ hain o,33, 34, den \ bil^^ cd", berriz 22. 4»
le fleuron droit. Le ft. 412 est chiffré 41.
L'exemplaire de M. d'Abbadie (Bibl. NaL, Z Ijasfjue,
coll. d'Abbadie, n^ 894) provient de la Bibliothè({ue
La Ferté-Séneclère et avait appartenu à FI. Lécluse
qui le tenait de « la complaisance réunie de M. \o
Supérieur du Grand Séminaire de Bayonne et de
INI. le vicaire de Hasparren ». Le volume devait donc
provenir des environs de cette dernière ville. Il offre
les mêmes particularités que l'ex. de Thou, sauf que
le fleuron est renversé.
L'exemplaire de l'Arsenal (n° 639 T), dont l'histoire
n'est pas bien connue, a diolsô, diroano, drauanari
(sans accent), arthegui (petit papier collé, deux fois),
ec eu, bain o, 33^34, deus (aligne), le fleuron renversé,
bil", ed\ berriz 22. 4.
Mon exemplaire complet, qui est fort beau, a diolsô,
diroano, drauanari (sans accent), arlliegui (papiers
collés), ec en, bain o, 23, 24, den'^, le fleuron renversé,
bilo et edo alignés, berriz 22. 4.
Mon exemplaire incomplet, réduit à 318 ft. du N. T,
offre dans les parties qu'il a conservées des p.arti-
cularités intéressantes : ec en, bain o, deu\ 33, 34,
le fleuron renversé, bilo et edo alignés, berriz 22. 4.
Au ft. 182 v°, il a, la première fois arthalde, la
seconde aiilicgni avec" le petit papier portant egui
collé sur aide; mais, au ]or(;mii>r (/rlhalde, aide se
trouve dans un petit carré plus blanc que le reste de
la page, ce (jui indique que le petit papier (|u'on y
— 71 —
avait collé s'est détaché depuis longtemps : le même
accident a pu se produire dans d'autres exemplaires.
Dans celui-ci, le ft. 412 est chilTré exactement 412,
alors (|ue dans les autres il y a seulement 41 : c'est
la chute du 2 qui a fait remonter Vo de bilo et edo à
la fin des deux lignes suivantes. C'est là un accident
typographique qui sera survenu pendant le tirage :
les exemplaires c[ui ont 41 et bii°, ed^, ont été tirés
évidemment après ceux qui ont 41 et bilo, edo. C'est
à des accidents de ce genre qu'il faut attribuer la
montée du s de deus, l'espacement bain o et ec en
(qui se (correspondent, l'un au dessous de l'autre,
aux lignes 29 et 30 du ft. 197 v°), la descente du k de
beJialiten relevée par M. Schuchardt dans les prières
ecclésiastiques (ft. E vi v" 1. 24), d'autres encore, et
même le renversement du fleuron. Avec les presses
à bras on tirait très lentement, on encrait ancienne-
ment les formes à l'aide de tampons dont le choc
répété amenait souvent la chute de cadratins, de
filets, de lettres au bout des lignes, et les pressiers
réparaient à la hâte le dommage, tant bien que mal.
Ceci ne suflirait donc pas à prouver qu'il y a eu
plusieurs tirages soit rapprochés soit éloignés. Il me
parait d'ailleurs impossible que l'Imprimerie Haultin,
quelque bien outillée qu'elle fût, eût pu immobiliser
une si grande quantité de caractères pendant le
temps nécessaire au séchage, à la reliure, à l'ex-
pédition des premiers exemplaires, à leur distribution,
leur lecture attentive et leur examen, et au renvoi
d'un exemplaire corrigé ou d'observations impérieu-
ses. Dans celte hypothèse d'ailleurs, pourcpioi n'a-t-
— 72 —
on pas corrigé les fautes purement typographiques
qu'on retrouve dans tous les exemplaires : par exem-
ple ft. XX pvé[.\° apocaca/i/psea, 89 ro(ch. xiii, v. 37)
elzcheco, 193 r'' (ch. xiiii, v*' 31) hemandic, etc., et
le chiffrage inexact 105, 106, 108, 438 ^pour 205. 206,
208, 448: la correction a été faite à la main sur l'exem-
plaire de l'Arsenal) ?
Je ne crois pas non jilus, comme le suppose
M. Dodgson, que le tirage ait été suspendu après la
première ou les premières feuilles et que ces feuilles
aient été envoyées dans le pays pour être soumises
au comité de révision dont parle Liçarrague dans la
dédicace. Les termes mêmes de cette dédicace indi-
quent que la révision a été faite, avant l'impression,
sur le manuscrit complet. D'autre |)art, nous savons
que Liçarrague est venu à la iiochellc, qu'il y resta
pendant tout le temps qu'a duré l'impression du
N. T. et même du Calendrier et de VAbc. Ce qu'il y
a de j)lus vraisemblable, c'est qu'il a fait lui-même
quelques corrections et quelques changements, au
fur et à mesure du tirage. Le remplacement important
de arlhalde jiar artliegui, au moyen d'un petit mor-
ceau de papier collé par dessus, s'est fait au contraire
\\n certain temjis aj^rèsle tirage, sur les exemplaires
non encore disti'ibués. Je ne crois pas au surplus que
ce changement ait été inspiré par un préjugé de secte;
(irlhegal est « bergerie, » el arlhdlde « troupeau ■>
le grec a deux mots différents aûX'/] et 7roî[JLV7j; la vul-
gate a oc/Zc ; les traductions françaises, catholique et
protestante, bergerie et Iroupeau (la vieille traduc-
tion calviniste (|ui a servi de prototype à Liçarrague
— 7.S —
a sciûenieni bergerie); Haraneder(éd. Udvr'iei) , s-a Ido et
arlhalde ; les éditions de la société biblique et de la
so(ùélc trinilarienne, Jiespil et arthalde (laboiirdin),
ardilegi et arlalde (gdipiizcoan), saldo 'soiiletin); la
traduction catholicjiie moderne Haristoy a aussi hespil
et arlhalde\ Il est donc probable (|ne le tirage n'a
été l'ait qu'en une seule Ibis^ mais il est (Certain que
tous les volumes n'ont pas été reliés ou cartonnés en
même temps et au même endrt^it : dans l'exemplaire
de l'Arsenal, deux fortes piqûres de vers s'observent,
l'une au milieu des pages, obliquement de gauche à
droite en montant, seulement aux feuillets 34, 42, 50,
58, m, 74, 82, 90, 98, 106, 114, 122, 130 et 138; l'autre,
vers le fond de la marge inférieure, aux fts. 402, 410,
418, 426, 434, 442, 450 (réparé, mal) et 458 unique-
ment, ce (jui fait voir que l'exemplaire a dû être
gardé assez longtemps en feuilles assemblées, posées
à plat lune sur l'autre.
J'estime donc (ju'il n'y a eu qu'un seul tirage et
qu'une seule édition de ce précieux ouvrage. Mais
j'appelle 1 attention des amateurs sur les variantes
signalées ci-dessus, et je serais très reconnaissant
aux pi'opriétaires des rares exejnplaires qui en ont
été conservés, s'ils voulaient bien examiner leurs
1. La correction arthalde et arthegui a été ins|)irée par le souci de
remplacer « troupeau « par « bergerie », conformément à la version calvi-
iiisle.
'_'- Pciil-on tirer arg-uiiiciit de ce que deux paiements successi s ont été
faits à Haullin, l'imprimeur ? Non, car il a imprimé deux ouvrages dif-
férents, le .\oui'eau Testament et le Calendrier avec a, -b, c. Mais on
peut remarquer que certains es. du .\ou(>eau Testament n'ont pas de
prières ecclésiastiques : y a-l-il des particularités typographiques
spéciales et communes à ces exemplaires ?
74
exemplaires et nous faire connaître le résultat de
cet examen.
On s'est demandé combien il pouvait encore exis-
ter d'exemplaires de Liçarrague ; j'imagine qu'il doit
y en avoir une quarantaine, dont peutèlre quel{|ues
lins dans des coins ignorés du pays basque. Plu-
sieurs exemplaires qui ont passé dans des ventes
publiques n'ont pas reparu ; p. ex. celui de La Yal-
lière (première vente) et celui de Mac-Garthy, tous
deux reliés en marocain bleu et qui n'en font sans
doute qu'un, celui d'Ansse de Yilloison (sans titre),
celui de Renouard, etc. J'en connais actuellement 2(3,
dont deux ont disparu : 5 en Angleterre ; 12 en
France; 2 en Espagne ; 2 en Italie; 1 en Suisse;
3 en Allemagne ; 1 en Hollande ; — 16 sont dans des
bibliothèques accessibles au public; — 11 sont tout à fait
complets ; 3 n'ont pas les appendices (prières, etc.) ;
les 12 autres sont plus ou moins incomplets et défec-
tueux.
J. V.
ADDITIONS l"r COUliKCTIONS
du prince Louis-Lucien Bonaparte
sur un exemplaire de son « Verbe basque »
L'œuvre la j)Ius importante du |)riiicc L.-L.
Bonaparte est Le Vei'be basque en Uibleaiix (Lon-
dres, 1864 et 1869). Ce travail, bien que son auteur
ne soit mort qu'en 1891, est resté inachevé. Il a été
tant bien que mal complété par les Etudes sur les
(liulevles cTAc^corf, de Salazur et de Honcal (1872) et
par de nombreuses brochures, et, en outre, il y a,
dans les manuscrits laissés par le prince, de nom-
breux matériaux pour l'achèvement de cette œuvre,
indispensable à qui veut étudier de prés la langue
basque. Pour aujourd'hui, je me bornerai à noter
toutes les corrections et additions écrites par Fauteur
sur son exemplaire de travail. On pourra juger par
ce qui suit de la minutie avec laquelle ont été faites
ces remarques.
Dans le premier tableau préliminaire, corriger les
formes labourdines dadiii, zadin et baladin en
dadleti, zadien et baledi. — Note 9, au lieu de « ne
sont cm|)loyés qu'avec le nom (il « j)Ouvoif », lire :
« ne sont employés généralement (|u'avec... (etc.) ».
— 76 —
— A la fin de la note 4, 5, 7, lire: ' u voir le seplième
tableau (au lieu du sixième) ).
Dans le deuxième tableau préliminaire, corriger
devant les formes 2e/'«^e^ zaree, etc., et les formes
dezute^ dozube, etc., /• par ?'.
Dans le quatrième tableau préliminaire!, ajouter
immédiatement au-dessous de « formes verbales
composées » rausative-conjonctive et, en regard,
écrire sous la colonne labourdine bailela \ baitnela,
sous la colonne souletine beitela \ beiliaUi « parce
que (qu') il est, parce que (qu') il fa ) ; à bnituela se
trouve ce renvoi : « See bailnzida at pag. 16 of
Meditacioneac, etc. Fiajonan, 1840. » — Dans la liste
des formes verbales nominales, ajouter « la forme
relative-destinative, p. ex. dueii-zat «.Dans celle des
formes verbales composées, ajouter la forme « aflir-
mativo-relative articulée, p. ex. Elizondo (Matth.,
6-30, badena*. — Ajouter enfin, parmi les formes
nominales composées, la « négativo-relative-desti-
native, p. ex. eztueiizat. »
Dans le cinquième tableau préliminaire, ligne 6,
au lieu de: « de tombé, d'allé », lire c du tombé,
de fallé », et ligne 23, substituer cà « de vu, de
mangé » — « du vu, du mangé )^.
Dans le sixième tableau préliminaire, note 1, au
lieu de : « lorsqu'il se termine en 67', lsi,tti », lire r.
Dans le septième tableau préliminaire, colonnes
labourdines in fine, lire ei'or dndi.cn, eroria izcin
1. (sic).
2. L'auteur renvoie ici à VEi'uiii:;cllo scgiin San Ma/co, ilial. li:iiitiu) ver-
rais, traduit jiar Elcheiiique.
- 77 —
dadicn, cror zadien, croria izaii zadicw. Ajouter à
la fin des notes de ce septième tableau : « ou en en ».
Page XIII, ligne 15, intercaler « comme » entre
« être considéré » et « plus ancien ».
Page xxij à la fin delà note 3, le prince a écrit :
(i Nous trouvons duzuek et ditatziiek dans les Noelak
d'Etcheberry ', p. ex. p. 138 et 199 de TÉdition de
Bayonne sans date (P. Fauvet) \
Nous rencontrons à la page xxviii (première ligne
de la note), une correction insignifiante, « enre-
gistrés » pour « enregistrés ». H y a une foule de
corrections de ce genre (additions d'accents, de
points sur les ?', etc.) Je ne les donnerai [)as par la
suite.
Je copie sur le verso de la page oii se trouve le
vexai conjugaison [ceWe qui précède la page i] la note
suivante :
« Correction importante :
» (Changez en ten la syllabe finale ne de tous
» les lerminatifs féminins labourdins, à la seule
» exception de ceux de la voix transitive ayant la
» troisième personne du pluriel pour sujet. C'est
» ainsi que natzayone «je leur suis «, ziayone « il
» leur est », ziaizlxone « ils leur sont », litzaizko-
» kene « ils leur seraient », gintzaizkiokene « nous
» leur pourrions », zione « il le leur a», ziokene » il le
» leur aura », niozakene «je le leur pourrais », liokene
« il le leur aurait », ginlozakene « nous leur pour-
1. (â/c). G. L.
2. II y en a plusieurs ; le Prince B. avait des exemplaires des deux
éditions cotées 15 h et 15 i, par M. Vinson.
— 78 ~
» rions», etc., etc.: seront covrïgés en ?iatzayo/en,
)) ziayolen, ziaiskoleii^ litzaizkokcten, gintzaizkoke-
» tcn, ^io/eii, zioketen, niozakeieii, liokelen, ginio-
» zake/eji, etc., tandis que zio/ie c ils le leur ont »,
» ziokeiie <> ils le leur auront », liokene « ils le leur
» auraient », etc., resteront inaltérés. »
Page 54, dans la dernière forme biscayenne, aine,
les deux dernières lettres sont barrées, et on les a
remplacées par en ??, et on a écrit en-dessous : « V.
Zavala ! ! ». De môme, à la page 57, ligne 13, au lieu
de aikene, il y a « ai keeii ?? V. Zavala ».
Page 75 et en beaucoup d'autres endroits, des
formes sont répétées à l'encre violette, je n'ai pu
savoir pourquoi : ainsi, à côté de l'imprimé dit a, on
trouve le manuscrit ditu ; dituizte^ zituen^ zituzien,
etc., sont ainsi répétés. Toutes ces additions sont
indubitablement de la môme écriture que toutes les
autres.
Pao:e 83, se trouvent deux nouvelles formes rela-
tives avec « me, te, nous, vous » pour objet, ce qui,
avec \e giofza(eniangiotza) « il nous a donnés à lui »
découvert par Ithurri dans \es Méditations de Duhalde,
etlesneuf ou dix signalées parle prince lui-même,
porte à douze on treize les formes similaires qu'on a
trouvées jusqu'à présent chez les auteurs '. Ce sont :
1. Le Docteur Broussain, de Haspai-ren, m'écrit à ce sujet que la
forme na/w, avec le sens de « il m'a à lui », est, de nos jours, usitée à
Briscous (G. L.)
Les formes relevées par le Prince Bonaparte sont emon a qu'il te
donne à lui », ieço» « qu'il t'aie fi lui », aiaitfé a ils t'ont à moi »,
naraiianac « celui qui l'a à moi » cerauzquiotet « je vous ai à lui »,
baicraitzi/iiio « parce qu'il nous a à lui », Qarauzcac ou guerauzcac « tu
nous as à lui, ô homme ». f.T. V.)
— 71) —
39, 18 : reconcilialu vran garauzquig « il nous a
réconciliés a toi [lilL il nous a en réconciliés a toi) » ;
et 77, 29 : ailari reconcilia guiençonçat « pour qu'il
NOUS réconciliât au Père ».
Page 96, première colonne laboiirdine, on lit à côté
de ddiial et de daiili les formes liçarragiiéennes
drauat et drniik.
Page 160, ligne 24, eilacer « sous-dialecte bazta-
nais d'Elizondo ».
Telles sont, exactement transcrites, les remarques
additionnelles du prince L.-L. Bonaparte à son
ouvrage capital. Il y aura lieu de rechercher plus
tard ce qu'il y a de publiable dans les innombrables
manuscrits qu'il a laissés concernant la langue
basque.
Georo-es Lacoaibe.
RÉPONSE A M. VINSON
M. Vinson m'a reproché plus d'une fois que je n'ai
cité dans mes études basques ni les ouvrages de
lui-même ni ceux du feu Prince L. L. Bonaparte.
Mais si j'ai préféré citer les grammaires de van
Eys et de Campion, c'est parce que ce sont des
manuels commodes, où l'on trouve les rensei-
gnements nécessaires. Là on peut voir les noms de
ceux qui ont fait les découvertes ou qui ont donné
les explications. Mais M. Vinson a raison, il aurait
été mieux de citer toujours l'auteur qui a été le
premier à faire remarquer ou à expliquer les faits
mémorés dans mes études. Néanmoins il ne me
semble pas juste de m'en faire un tel reproche
comme l'a fait M. Vinson. Le lecteur pourrait ob-
tenir l'impression que j'eusse un parti-pris contre
des savants, dont je reconnais volontiers les mérites.
M. Vinson pourra s'en convaincre par la lecture de
mon essai sur le caractère de la grammaire basque.
ce. Uhlenbeck.
Levde. [Breestraat, 53.]
THÈME OU VERSION
La question n'est pas neuve, mais elle est toujours
intéressante, parce qu'elle se lie à celle de la mé-
thode ; et toujours d'actualité, parce que l'étude
des langues étrangères est plus que jamais à l'ordre
du jour. Quels doivent être les rôles respectifs du
thème et de la version dans notre étude ? Faut-il com-
mencer par le thème ou faut-il au contraire commencer
parla version ?La plupart des professeurs, des péda-
gogues, des étudiants même, afïïrment que le thème
est l'exercice primordial, qu'il doit être le premier
et d'abord le seul exercice ; la plupart des savants
et des linguistes, au contraire, sont partisans de la
version et soutiennent que le thème ne doit être que
l'application, que la contre-partie, que la vérification
delà version. Je suis de ceux-là.
On pourra dire, on a dit, qu'il fallait distinguer
entre les langues mortes et les langues vivantes,
qu'il fallait tenir compte du but de l'étudiant : celui
qui veut apprendre une langue pour la parler et s'en
servir couramment ne saurait travailler de la même
façon que celui dont l'intention est seulement de lire
des ouvrages écrits dans cette langue ou de s'accorder
la fantaisie de pouvoir l'écrire. L'objection est spé-
cieuse, mais elle est facile à réfuter : ({ue ce soit pour
6
— «•?
parler, pour lire ou pour écrire, il faut apprendre deux
choses, les mots et les règles de la grammaire. On
peut évidemment arriver par la simple pratique à
parler couramment, mais alors la question de mé-
thode ne se pose plus ; c'est de Tempirisme, il n'est
plus besoin de versions ni de thèmes et l'on sera tou-
jours incorrect. J'ai déjà réfuté plusieurs fois des
afïirmations de ce genre ; j'ai toujours soutenu que
l'étude directe d'un texte, même si l'on veut
apprendre une langue dans un but pratique, doit
être mise au premier plan ; qu'on doit déduire les
règles grammaticales de textes étudiés et non d'un
livre dogmatique procédant par affirmations ; que la
grammaire^ par conséquent, ne doit être qu'un guide,
qu'une direction, qu'une indication ; que le thème
doit être essentiellementl'imitation d'un texte original,
l'application des règles déduites de ce texte ; et qu'en-
fin la traduction libre d'un morceau indépendant doit
venir en dernier lieu et n'être en quelque sorte qu'une
récapitulation générale . En d'autres termes, je suis tou.
jours pour la méthode positive, celle qui procède de
l'observation et de l'expérience : on m'objecterait
en vain qu'elle ne convient pas aux enfants qui ne
savent pas raisonner ou qui raisonnent mal ; et dont la
principale ressource, le principal élément de travail
est la mémoire ; je répondrais que l'enfant n'étudie
guère aujourd'hui sérieusement les langues, le grec
et le latin notamment, avant la douzième année et qu'à
cet âge, il est déjà capable de raisonner juste.
Mais, si ces choses me sont revenues à l'esprit,
c'est qu'il est arrivé sous mes yeux un petit livre, très
— 88 —
intéressant etfortbion fait, plein d'excellents conseils,
qui a pour litre : ^^ Le llu^ntc laliii cl Ui version laline
(leiiriitililé, leur méthode, applications de la méthode),
à l'usage des élèves des classes de lettres, par
Georges Anquetil. Paris, H. Daragon, éditeur, 11)05,
in-12, .\viij-i>2-(iij) p. >•>. L'auteur est un partisan résolu
du vieux système ; il proclame la [)riorité nécessaire
du thème et son excellence et dit notamment (p. 1) que
le thème « doit conduire logiquement à la version » ;
il ajoute : « jamais vous ne trouverez un élève réus-
sissant régulièrement en version latine fpii ne soit
fort en thème », et plus loin : a le thème latin apprend
avant tout à avoir l'esprit régulier, attentif et métho-
di({ue ; cultive la mémoire par l'application constante
des règles de l'inexorable grammaire ; corrige de
l'étourderie et de rinattenlion_, et est enfin un excel-
lent exercice de français et d'intelligence )). En rem-
plaçant le mot (( application » par « constatation »
on appliquerait excellemment ce dernier |)aragraphe
à la version. Il est vrai que l'auteur a surtout en vue
ceux qui demandent la suppression complète du
thème dans les études classiques; cela est absurde; je
ne suis pas de cex-là, je n'ai pas besoin de le dire.
Une fois de plus, je vais donner un exemple de
la manière dont je comprends le travail de l'étude
d'une langue. Je prends, dans le livre de M.
Anquetil, cette phrase de Ouintilien : Licei ipsa
vi/iiiiii sil (iiiibilio, fréquenter lainen caiisd ^'irtuluni
est. Je commence par expli([uer à l'élève les mots, un
à un : « Quoique elle-même défaut soit ambition,
fréquemment cependant cause des vertus est » ; il
— 84 —
n'est pas bien difficile de comprendre que cela si-
gnifie : « Quoique l'ambition soit en elle-même un
défaut, elle est cependant souvent une cause de
vertus )) ou, en meilleur français : « elle fait naître
souvent cependant des vertus » . Je fais alors re-
marquer à l'élève la différence entre le mot à mot, la
traduction rédigée et la traduction correcte. Je lui
fais voir ensuite la différence qu'il y a entre la cons-
truction latine et la construction française : le latin
commence généralement parle sujet, met au second
rang le complément ou l'attribut et finit par le verbe,
chacun de ces éléments de la proposition pouvant
être accompagné d'éléments modificatifs, adverbes,
adjectifs, propositions incidentes, etc. 11 y a parfois
des inversions, surtout lorsque, comme dans le cas
présent, la phrase commence par une conjonc-
tion. Je lui fais noter enfin que l'incidente précède le
plus souvent la proposition principale, précisément
parce qu'elle en modifie le sens. La syntaxe est
principalement réglée par la pensée de celui qui
parle : l'hindoustani tourne toujours le passé actif
par le passif, il dit a la maison a été vue par moi »
main ne gliar dékhà, pour « j'ai vu la maison »,
parce que « la maison » est la partie la plus impor-
tante de la proposition ; mais il peut dire aussi « par
moi il a été vu à-la-maison » main ne gliar ko dèkhà,
et celte tournure s'explique par la prépondérance
donnée au verbe. C'est pour des raisons analogues
que l'Indien dit mèrâ jawâb « ma réponse )), pour
(( la réponse qu'on m'a faite ».
Passons maintenant au point de vue grammatical.
— 85 —
L'étudiant notera sur un cahier spécial, de gram-
maire, à la î)age consacrée aux conjonctions, que
licel est employé pour « ([uoique » et qu'il gouverne
le subjonctif; il aura soin d'indiquer aussi que ce
mot est proprement un verbe impersonnel signifiant
« il est permis » ; — ipsa, pron. pers. réfléchi fém.
sing ; ici, adj. qualifiant anihitio, fém. sing. ; —
sit, 3® per. sing. subj. prés, de esse « être » ; — fré-
quenter, adverbe, de l'adj. //•ery^e/z.ç; la terminaison
ter forme des adv. de manière ; — virtutuni, gén.
plur. de virtus, virtJitis ; observer l'importance mor-
phologique du génitif singulier, les particularités de
la déclinaison imparisyllabique, les variations des
génitifs pluriels en um ou iiiin ; etc.
Cela fait, comme l'élève aura vu auparavant et
analysé de la même façon d'autres phrases, nous
pourrons lui faire faire, sur ces divers textes, des
thèmes d'imitation. Admettons, par exemple, qu'il
ait seulement traduit: //os pa/ria/ii fugimus... silvas
et doceinus periculosam libevtalem iacuriosae servitati
anteponendani esse, nous aurons le droit de croire
qu'il n'aura pas de peine à traduire en latin: « la
vertu nous enseigne que l'ambition est la cause de
tous les maux; cependant nous ne l'abandonnons
pas souvent », et il n'aura qu'à relire ses notes pour
en venir à bout.
L'erreur de M. Anquetil est dans la persuasion où
il paraît être que, pour l'écolier, pour l'enfant, le
thème n'est pas un exercice mécanique. Malheureu-
sement, il l'est dans la plupart des cas. Avec un de
ces bons gros dictionnaires, remplis de phrases toutes
— 86 —
faites, Lin élève intelligent, mais ignorant la gram-
maire, arrivera sans trop de peine à faire un thème
passable, alors qu'il sera incapable de comprendre
une version relativement facile. Il écrira sans raison-
ner, tandis que pour mettre en français un texte
étranger, il faut au contraire nécessairement
réfléchir, penser, comparer : c'est par la version, et
par la version seule, qu'on j)eut comprendre et
qu'on doit apprendre la grammaire; c'est par elle,
par la constatation des idiotismes, des locutions
diverses et des tournures constantes, qu'on acquerra
la connaissance certaine des dix ou douze « rè-
gles » fondamentales de la syntaxe latine, si bien
résumée par M. Yrondelle dans sa brochure o La
Version latine au baccalauréat ( Paris 1905, viij .-132 p .
in-8°) » : l'ablatif absolu, la proposition infinitive
qu'on appelait de mon temps le que retranché, etc.
Je ne saurais trop le répéter, la « règle », puisque
règle il y a, n'est et ne doit être qu'une conclusion,
qu'une résultante, qu'une conséquence, et non une
aflirmation ex cathedra, un axiome, un poslulatuni
indiscutable.
Vn argument de plus en faveur de la version, peut
être tiré de ceci : c'est que, le plus souvent, et sur-
tout quand on étudie luie langue morte, comme le
latin, le grec ou le sanscrit, on ne se propose pas
d'écrire correctement dans cette langue, mais de
lire le mieux et le plus vite possible un texte, une
dissertation, un poème, un ouvrage quelconque.
(Quelle est donc la méthode la plus simple ? C'est,
— et je m'occupe ici des adultes, — de se procurer
— 87 —
un texte, une bonne traduction de ce texte et une
grammaire quelconque, la plus courte possible. On
commencera par faire, [)our son propre usage^ un
résumé de cette grammaire, réduit aux formes de
déclinaison et de conjugaison, en plusieurs tableaux
où ces formes seront l)ien distinguées et bien mises
en relief. Puis on prendra le texte et on cherchera,
phrase par phrase et mot par mot, à l'analyser gram-
maticalement à l'aide du résumé dont il vient d'être
question. Puis on regardera la traduction et on se
rendra compte de ses erreurs, s'il y a lieu ; et c'est
alors qu'après avoir compris l'idée générale de la
morphologie, on comprendra la construction et la
syntaxe. Si l'on n'a pas de grammaire, le travail est
plus lent, puisqu'on doit se faire à soi-même au
fur et à mesure le tableau des formes, mais il est
peut être plus sur. Il sera encore plus f)énible, mais
tout aussi profitable au moins, si l'on en est réduit à
un texte et à un dictionnaire : dans ce cas, si la
chose est possible, il faut toujours vérifier en consul-
tant le dictionnaire inverse et faire tous ses efforts
pour dégager les radicaux et l'es racines, ce à quoi
on arrive par les mots-parents que donnera le
di('tionnaire. Il faudra être bien pénétré de ces deux
idées : que l'analyse minutieuse de toutes les parties
de chaque mot est le premier et le plus essentiel des
travaux et que les mots n'ont jamais qu'une signifi-
cation relative et, si j'ose le dire, accidentelle. Le
français qui est plein de nuances, qui est si souple
et si flexible, aura mille manières différentes de
traduire les mêmes mots étrangers. La signification
- 88 —
résulte du contexte, de la proposition, delà phrase et
non des mots.
Je n'ai pas fait seulement ici de la théorie; je parle par
expérience. J'ai appris et étudiéplusieurs languespeu
connues de cette manière. Je n'ai pas procédé autre-
ment quand j'ai traduit du hongrois en français le
travail de M. Ribary sur le basque: je n'ai eu d'autres
instruments en mains que le texte du magyare, la
grammaire de Ballagy (Bloch) et le petit dictionnaire
de Coloman Babos.
Pour Tentant, j'accorde que la méthode ne peut
être absolument la même et qu'il faut faire une plus
large part à l'empirisme et à la mémoire. On commen-
cera donc par lui mettre en mains une grammaire
très élémentaire, contenant surtout les paradigmes
des déclinaisons, les tableaux des conjugaisons, les
listes des pronoms, des prépositions, des principaux
adverbes et des conjonctions les plus importantes.
Au fur et à mesure, on lui fera traduire, du latin
en français, par exemple, des phrases très simples où
il devra retrouver ces formes el ces mots, et qu'il
devra imiter en traduisant, du français au latin,
d'autres phrases non moins simples. Puis, quand il
aura été suffisamment préparé et assoupli par cet
exercice, on pourra lui faire aborder l'étude et
l'analyse des textes.
C'est ici que devront trouver place les conseils
pratiques de MM. Yrondelle et Anquetil. Je les
résume ci-après :
1° Lire attentivement d'un bout à l'autre le texte
donné, puis tâcher d'en saisir l'idée générale et
— 89 —
remarquer les passages essentiels, les expressions
spéciales, les mots caractéristiques;
2" Reprendre chaque phrase, l'expliquer motà mot,
de tête, et enfin écrire la traduction d'un seul jet ;
3° Noter, à mesure, les mots difficiles, les accep-
tions particulières précisées par le contexte, les
idiotismes, les tournures exceptionnelles ;
4° Relire et réviser, tant au point de vue de la
signification que de la correction ; le français ne
devra pas être le calque du latin : on pourra diviser
ou réunir des phrases, remplacer des substantifs
par des adjectifs, des verbes par des substantifs ou
des p.ériphrases ; des pluriels par des singuliers;
des présents par des passés ou des futurs, et inver-
sement. Leprincipaf, c'est de suivre l'ordre des idées,
en faisant exactement se correspondre les mots ou
les expressions essentielles.
Pour faciliter aux jeunes élèves l'intelligence de
la langue, M. Yrondelle a résumé, en dix principes
fondamentaux, toute la syntaxe latine. J'y reviendrai
tout à l'heure.
Aux recommandations de ^1. Yrondelle, M. Anque-
til ajoute les suivantes :
5" Pour bien comprendre, décomposer et classer les
propositions, et chercher, dans chacune, le sujet
(d'ordinaire au nominatif), le verbe (qui s'accorde en
nombre et en genre, quand cela est possible, avec
le sujet) et enfin le complément (au cas régi par le
verbe) ou l'attribut au même cas que le sujet) ;
6° Ne pas essayer de deviner, et ne pas craindre
de consulter le dictionnaire, même pour les mots
— 90 —
que Ton croit le mieux savoir ; faire attention aux
idiotismes, aux formules, aux locutions spéciales ;
7° Prendre toujours pour base, pour point de
départ de la traduction correcte, le mot à mot strict
et exact du texte donné, — et j'ajoute, moi, dans
l'ordre même de ce texte, ce qui est le meilleur
moyen de se rendre compte de la différence des deux
langues ; rien n'est plus abominable que cette habi-
tude de certains professeurs de transposer de
rilomère ou du A'irgilc dans l'ordre de la syntaxe
française : cano arma que vi'rii/ii...
8" iNe jamais écrire quelque chose que Ton ne
comprend pas; un contre-sens est préférable à un
non-sens; le contexte d'ailleurs doit fournir à cet
égard de bonnes indications.
Ces conseils sont fort bons et peuvent servir à d'au-
tresqu'à des enfants; c'est pourquoi j'ai cru pouvoir les
rapporter ici. Je vais également résumer les conseils
de M. Anquetil pour la bonne exécution d'un thème:
1° Lire lentement et attentivement le texte français,
pour se rendre compte des difficultés qu'il présente;
2° Donner au français l'allure de la phrase latine
qui devra lui correspondre ou plutôt préparer cet
arrangement des mots dans la pensée/ ;
3° Se rappeler et appli(|uer les règles résultant des
exemples de la grammaire et des textes que l'on a
déjà lus ;
4° Bien comprendre les acceptions particulières
des mots français et se servir intelligemment du
Dictionnaire français-latin, en vérifiant par le Diction-
naire latin-français ;
— 91 —
5° Prendre de préférence les mots employés par
Cicéron, puis par Sénèque, Qiiinlilien, César, Titc-
Live, Tacite, etc.
()" Xe pas oublier, aulaiit (|ii(; [)0ssible, de relier les
j>hrases entre elles par ces conjonctions que les latins
aimaient fort : ilaqiie, elenim, allamen, cœteriim, etc.
(au commencement des phrases), ou enini, tameii,
vero^ aitlem, quideDi, etc. (après le premier mot);
7" Simplifier et réduire autant que possible le
nombre des mots ;
8'^ Suivre en général Tordre de construction sui-
vant : sujet, — attribut ou complément^ — verbe, en
groupant autour de chacun de ces éléments princi-
j)aux les éléments secondaires qui les modifient
(adjectifs, adverbes, etc.);
9" Ilelire pour vérifier, compléter, pré('iser,
corriger et voir si, en retraduisant en français, le
sens l'eslerait le même.
?*1. Ancjuetil voudrait en outre que l'élève sut,
avant tout, les règles de la grammaire à fond. Je
demande, moi, qu'il les apprenne au fur et à mesure,
et, par conséquent, qu'il ait à faire seulement des
thèmes où il n'ait ix appliquer que ce qu'il a appris
j)our ainsi dire par les yeux.
M. Yrondelle résume ainsi les postiilala de la
syntaxe latine :
1° Les mots sujets des phrases sont toujours au
nominatif;
2° L'attribut doit être au même cas que le nom
auquel il se rapporte ;
3° Les compléments des noms et des adjectifs se
— 92 —
mettent au génitif (et par conséquent les verbes dans
ce cas prennent la forme dite gérondif en di), sauf
certaines exceptions qui s'expliquent par le sens
même du mot déterminé ;
4' Le régime direct des verbes actifs se met à
l'accusatif, mais il faut remarquer que certains
verbes français ne se traduisent pas exactement et
ont pour équivalent en latin des verbes composés
ou des verbes neutres qui demandent d'autres cas;
5° Le régime indirect se met au datif, à l'ablatif,
au génitif, ou même à l'accusatif, suivant la nature
du verbe et d'après la préposition de liaison;
6° En général, la proposition subordonnée est ren-
due par ce qu'on appelle la proposition infînitive,
sauf celles exprimant le doute ou l'incertitude ;
7° Une proj)Osition qui peut être mise sous une
forme participiale se traduit par l'ablatif absolu ;
8° On remplace le participe présent et le participe
passé du verbe être, ainsi que le participe passé des
verbes actifs, par une proposition conjonctive com-
mençant par cum.
Je supprime les deux autres principes qui me
paraissent inutiles; j'ai modifié un peu la rédaction
de quelques-uns, car j'ai trouvé là le défaut qu'on
peut reprocher à trop de pédagogues, celui de pro-
céder par affirmations et de faire appel à la mémoire
seule, au lieu du raisonnement. Ainsi, les adjectifs
utllis, finiliniiis, d'une part, altus, dives, dignus, de
l'autre, ne peuvent évidemment avoir leurs complé-
ments, les premiers qu'au datif, les seconds qu'à
l'aijlatif. Et quant aux verbes, n'est-il pas absurde de
— 93 •=-
dire que stiiclere gouverne le datif, clocere Taccusatif,
meminisse le génitif, par exemple ? Si s/ude/e veut le
datif, c'est parce qu'il signifie « s'appliquer à »; si
clocere demande deux accusatifs, c'est parce qu'il
forme des propositions analogues à celles-ci : «je
vous fais roi » ; si memiiii a la forme du passé et la
signification du présent, et réclame le génitif, c'est
parce qu'il a le sens de : « j'ai eu l'impression de »
c'est-à-dire : « je me souviens de », etc.^ etc. Que de
choses gagneraient à être ainsi expliquées ! me
pœnilel contracté de mepœna tenet, verbes déponents
à forme passive qui sont en réalité des moyens, etc.
Il en serait de même pour toutes les langues. En
hindoustani, par exemple, certains grammairiens
« pratiques », s'obstinent à dire que la terminaison
du génitif varie et s'accorde en genre et en nombre
avec l'objet possédé [bàp-kt bêti « la fille du père »;
bêti-kâ bâp « le père de la fille »), au lieu d'expliquer
que cette terminaison prétendue est un suffixe
adjectif, le participe passé « fait », qui s'accorde
nécessairement avec le nom déterminé. Ils disent de
même qu'il y a un cas « agent » en ne qui entraine
l'accord du verbe-participial actif passé avec son
complément direct, tandis qu'en réalité ne est le
suffixe instrumental « par » et que la phrase est
retournée, « j'ai vu le livre (fém.) » devenant « par
moi le livre (a été) vu » main ne kilâb dêkhi ; on peut
même dire impersonnellement : main ne kitàb ko
dékkà « par moi au livre il a été vu ». Tout ceci
entre autres est assez mal exposé dans l'une des der-
nières grammaires qui vient de paraître [Hindustani
— 94 —
grammar self iaughi^ par le cap. G. -A. Thim, Lon-
dres (in-8'^, p. 30-31). En tamoul, les participes sont
essentiellement relatifs, mais ils peuvent être pris
subjectivement ou objectivement, kanda^ par exem-
ple, signifiant tantôt « qui a vu » et tantôt « qu'on a
vu » : nàn kanda maram « l'arbre que j'ai vu »,
en 11' ei konda ni « toi qui m'as vu » ; en tamoul, aussi,
chacun des éléments formels garde son indépen-
dance : dans kandây « tu as vu », ày est si bien « toi »
qu'on peut y ajouter des suffixes de relation et dire
par exemple kandâijkku « à toi qui as vu »; de
même on peut dire màrhên «j'ai une poitrine », et
pûn luàrbèuei kcmdân « il a vu moi dont la poitrine
est ornée d'un bijou » {pùn^ bijou; nidrbii, poitrine).
Le basque, qui a les constructions participiales et
même le cas agent, distingue nik ikusia « ce que j'ai
vu », de ni ikusiak « celui qui m'a vu ». Il place
toujours le génitif avant le déterminé, et l'adjectif
au contraire après, ce qui implique une interversion
des rôles; le verbe actif a toujours son régime direct
incorporé en lui : etcJiea dakusal signifie, non pas
« je vois la maison », mais « je la vois, la maison »,
ce qui explique pourquoi, à la question « avez-vous
fermé la porte ? » une servante basquaise répondra
toujours, en français : « j'ai fermé » au lieu de « je
l'ai fermée » : on sait qu'au contraire le hongrois a
les deux formes, lalolc erdôt « je vois une prairie »,
Q\.latovi az erdôt «je la vois, la prairie ». Je pourrais
citer bien d'autres particularités syntactiques ou
grammaticales, le duel, les pronoms affixes, les voix
dérivées (comme les trois formes hindoues, pî
- 95 —
« ho'im», pila « faire boire, abreuvei- «, pihvâ « faire
donner à l)oire, faire abreuver, être eause que
quelqu'un IjoïL »), l'état eonstruit des mots, etc. A
propos du duel, sait-on quel est le texte grec' qui
m'en a fait le mieuxcomprendreremploi?c'estrii\ m-
ne de Callistrates à Harmodius et Aristogiton, avec
ses £T:ot7]aaT7]vet£7rot7jaaTOv, sesxxavéTTjv etxTavsTOv,
et son arpwv; nous y voyons, par parenthèse, des conju-
rés cacher leur glaive sous un rameau de myrte, comme
l'assassin du président Garnot cacha son poignard
dans un bouquet.
Au fond d'ailleurs, la question est surtout une
question de méthode. C'est toujours la vieille que-
relle entre l'empirisme et l'observation, entre la
routine et l'expérience, entre le principe d'autorité
et celui de liberté : j'allais presque rappeler la fameuse
querelle des anciens et des modernes. Les gram-
mairiens tamouls ont formulé un précepte d'un con-
servatisme farouche, bien fait pour empêcher le
développement et le progrès de la littérature :
Epporul éççolin évvâru uyarndôr
Ceppinar appadi çeppudan marahè
« Sur quels sujets, avec quels mots, de quelle fa-
çon, les gens supérieurs ont parlé; parler de cette
manière, c'est la convenance du style. » Mais, si un
arbre doit être jugé par ses fruits, un système d'édu-
cation doit l'être par ses résultats. Or, il est facile
de constater que ceux qu'on appelle familièrement
1. J aurais pu rappelei' aussi le çloka célèbre du Rdmâyaiiu : l'atrd-
ham krpanavandhdu
— ge-
lés forts en thème n'ont pas joué dans la société le
rôle important auquel ils semblaient appelés. La
plupart des grands politiciens, des homme d'état^ des
écrivains éminents, des savants de mérite, ont été
seulement de bons écoliers, se tenant dans une hon-
nête moyenne, et souvent aussi les premiers de leur
classe sont devenus de vulgaires médiocrités quand
ils n'ont pas complètement disparu. Les professeurs
les plus renommés n'ont eux-mêmes souvent produit
que des œuvres fort ordinaires où le souci de la forme
n'a laissé que peu de place aux idées et où le mauvais
goût le dispute à la fausseté du raisonnement. J'ai
connu un professeur de rhétorique qui répétait, tous
les ans, cette niaiserie : « quels romantiques, Mes-
sieurs, que ces classiques de l'antiquité !..»; et c'est
lui qui, à propos de je ne sais plus quel livre célèbre,
a écrit la phrase fameuse : « ce fut le je pense donc
je suis de la littérature ». Et le temps précieux perdu
en vains exercices de mémoire \ Aujourd'hui encore,
1. Je ne sais si je m'abuse mais il me semble que plus j'avance en
âge, plus ma mémoire, qui a toujours été fort bonne, se renforce et se
perfectionne Je retiens mieux et plus vite, sans doute par ce que j'ai
bien conijoris et je m'explique bien tout ce que je veux apprendre. En
est-il de même de l'enfant .' Non, Lélas ! et trop souvent il ne comprend
pas ce qu'il récite. On me permettra, à ce propos, de citer ici des vers
qui ont été composés, pour moi, par mon père, en 1845, avec cette épi-
graphe excellemment apliquée, maxima debetur puero reccrentia :
Dès qu'un enfant paraît avoir quelque mémoire,
Ses parents aiment fort à charger son esprit
De grands mots inconnus, fastidieux grimoire;
Plus il est perroquet, et plus on lapplaudit.
Pour un petit enfant, c'est un travail d'Hercule :
On blâme avec raison ce travers ridicule;
— î)7 —
on fait apprendre par cœur aux enfants des listes
interminables de verbes irréguliers grecs, alors
qu'ils les apprendraient bien mieux, un à un,
par le travail quotidien; sans leur expliquer d'ail-
leurs pourquoi tel verbe actif a un futur de
forme moyenne et pourquoi tel autre a deux ou
trois radicaux différents. Qui s'est donné la
peine de chercher pourquoi fera varie en tuli et
latuiii ? qui s'est avisé de comparer ainor et amatus
siini à icii werde geliebt et ich bin geliebt ? Un lexi-
cographe basque a commis cette bourde : « bego,
laissez, impératif de iiLz » : utz est le radical
« laisser », mais bego est « qu'il reste, qu'il demeure » ;
le sens subjectif s'es.t objectivé et l'inertie naturelle
a été confondue avec le résultat d'iuie action exté-
rieure. D'autres bas(juisants ont dit que baantzut
(pour baddiitzulj rend notre « plait-il ? », mais sans
faire voir qu'il signifie proprement « est-ce que je
l'entends ? » ou plutôt « si je l'entends », du radical
eiilzaii « entendu ». Je n'en finirais pas si je voulais
(ùter toutes les extravagances analogues des gram-
maires et des dictionnaires. Les grammairiens
hindous nous offriraient ainsi de nombreux exemples
de confusions et d'erreurs, surtout ceux du sud qui
ont voulu à toute force adapter au cadre de l'orga-
nisme sanskrit leurs idiomes qui en ditfèrent si
Mais les penseurs sont rares en tout temps;
Et, dans le siècle heureux de lumière où nous sommes,
On voit que la plupart des hommes
Ne savent que des mots et sont de grands enfants.
— 98 —
profondément. Mais, pour en revenir à nos pédago-
gues français, que de critiques n'aurait-on pas à leur
adresser, ne serait-ce par exemple que sur leur
manière de noter les devoirs de leurs élèves : versions,
thèmes, compositions françaises même sont appré-
ciées d'après le nombre des fautes comptées d'ailleurs
par quarts et par demies : où est le critérium, où
est le type correct absolu ? qu'est-ce qu'une faute,
qu'un quart de faute ? C'est réduire la chose à un
simple calcul d'arithmétique; or, rien n'est plus
inexact, car telle copie qui aura dix fautes vaudra
mieux dans son ensemble que telle autre qui en aura
cinq seulement. L'intelligence et l'initiative sont
encore une fois, par le système courant, sacrifiées à
la mémoire, à la routine, au travail machinal et irrai-
sonné.
Mais, si je trouve mauvais les formes et les pro-
cédés de renseignement classique, si je suis par-
tisan des exercices oraux (thèmes et versions au
tableau), je n'en ai pas plus d'enthousiasme pour
les prétendues réformes de ces derniers temps;
pour le baccalauréat polychrome; pour ces chinoi-
series de classes A, B, C, D; pour le surmenage
ou la réforme de l'orthographe. Je ne suis pas
convaincu non plus que la suppression du discours
latin et des vers latins ait été une si bonne chose. . .
Je suis également de ceux qui n'éprouvent aucun
enthousiasme pour la nouvelle « méthode directe »
d'enseignement, en ce qui concerne les langues
étrangères : c'est le développement du sytème désas-
treux des bonnes anglaises ou allemandes. Pour
— 99 —
apprendre à nagera quelqu'un, le jettera-t-on à l'eau
du haut d'un pont ? Télémaque savait nager quand
Mentor lui joua ce tour; d'ailleurs le précepteur
rejoignit aussitôt son élève qui avait bu l'onde anière,
contre-poison souverain de sa passion pour Eucharis.
Le système classique actuel m'apparait sous les
traits d'un vieux magister prétentieux, pénétré de
son importance, grincheux et grognon, cuistre tou-
jours prêt à morigéner, qu'un lapsus indigne, qu'un
solécisme irrite, qu'un barbarisme exaspère, — un
Ratin aux pudibondes harangues, — empressé de
distribuer des pensums et des retenues; railleur et
spirituel à froid, orgueilleux et vain, redouté d'ail-
leurs et méprisé de ses élèves. Au contraire, la
méthode scientifique me semble une jeune et vaillante
mère, femme vigoureuse et superbe, qui surveille
de près, mais sans l'ennuyer de sa sollicitude trop
active, les premiers pas de son enfant; elle le laisse
aller en lui donnant les indications nécessaires et
se tient là attentive, prête à intervenir en cas de
besoin: l'enfant va, court, trébuche, tombe même,
mais il voit par lui-même le résultat de son inex-
périence et, rebelle aux ordres, revient demander
des conseils. L'initiative, la responsabilité, la liberté,
font des hommes; l'obéissance passive, la discipline
subie, la loi imposée font des esclaves ou des imbé-
ciles.
Julien Vin SON
ÉTUDE COMPARÉE
DES LANGUES POLYNÉSIENNES
II
Le Maori de Nouvelle-Zélande,
d'après la Grammaire de W.-L. Williams
Après avoir donné une hitrodaction et une Biblio-
grapJiie du sujet que cette étude a pour but d'appro-
fondir, il est temps maintenant d'aborder la partie
essentielle de nos recherches, c'est-à-dire l'examen
grammatical des diverses langues parlées dans les
archipels.
L'auteur a l'ambition, qui pourra paraître assez
grande, de donner sur chacune d'elles des renseigne-
ments grammaticaux, linguistiques et philologiques
aussi complets que possible.
11 se préoccupera notamment d'en rédiger sur un
plan nouveau les grammaires, pour la plupart incon-
nues en France où de tels travaux, trop ardus pour
attirer les « intellectuels » à demi-culture, et trop
spéciaux pour que le public s'y intéresse, ne comptent
que fort peu de sectateurs.
On ne saurait croire combien il est humiliant de
constater chez nous une infériorité constante dans
la quantité, la richesse d'informations, et la valeur
— 101 —
documentaire de nos publications lingiiisti{|iies,
quand on les compare à celles que rAllemagne,
l'Angleterre et même l'Amérique ont fournies depuis
cinquante ans.
Particulièrement en ce qui concerne les langues
polynésiennes, c'est faire œuvre entièrement nouvelle
que de s'en préoccuper. Aussi ces pages commen-
cent-elles une série qui sera longue, puisqu'il s'agit
de remonter les îles du sud au nord, groupe par
groupe, depuis la Nouvelle-Zélande jusqu'aux
Sandwich.
* *
Le Maori de Nouvelle-Zélande,
d'après la grammaire de W. L. Williams
Les Maoris sont le peuple indigène qui occupait la
Nouvelle-Zélande avant l'arrivée des Anglais. On ne
les croit pas autochtones et certains auteurs se
querellent pour les faire venir de Savaï dans le
Samoa, suivant les uns, et de Tonga — dont ils se
rapprochent beaucoup par leur langue — suivant les
autres.
Quoi qu'il en soit, depuis le temps lointain où Te
Kupe, l'ancêtre maori, aborda dans l'île Aotea-Roa,la
plus septentrionale de Nouvelle-Zélande, les Maoris
qui longtemps furent une des plus puissantes nations
de race polynésienne, ont grandement déchu; leur
nombre a baissé de cent mille à quarante mille
individus.
Enfin et surtout leur patrie est devenue colonie
anglaise : pied à pied, ils ont dû malgré leur résis-
— 102 =
tance farouche, reculer devant l'européen envahisseur;
et aujourd'hui leurs conquérants les ont confinés dans
l'île du Nord, où ils occupent un territoire spécial de
25000 km. q., dit « King's country »,
Là leur dernière énergie se consume à conserver
intactes leur langue, leurs mœurs, et par-delà le
protestantisme superficiel qui n'a pu qu'effleurer leur
âme païenne, toutes les belles légendes de mytho-
logie fabuleuse qui inspirent encore les orateurs et
poètes indigènes.
C'est donc seulement depuis la pénétration anglaise
en Nouvelle-Zélande, que nous a été révélée par des
auteurs anglais, la langue Maorie.
Parmi ceux qui l'ont étudiée, il y a quatre ou cinq
noms qui sont à retenir : E. Tregear, W. Colenso,
W.-L. Williams, Maunsell, Lee etKendal.
Edouard Tregear, est de beaucoup, le plus impor-
tant; l'auteur du Maori- Polynesian Comparative
Dictionary s'est fait un nom sans rival en matière
de linguistique polynésienne. C'est le plus grand
« Maorisant » moderne et aussi le fondateur d'une
compagnie savante, sorte d'Académie Polynésienne,
la « Polynesian Society », sur laquelle je reviendrai
plus lard.
Mais comme il n'a pas composé de grammaire, il
faut pour s'enseigner les éléments de la langue re-
courir aux ouvrages de Colenso, Maunsell ou W.-L.
Williams.
J'ai préféré ce dernier dont les Leçons de Maori,
précises et claires, ont l'avantage d'être courtes.
C'est donc cette grammaire, pour la première fois
— 103 —
traduite en français, que je mets ici même sous les
yeux du lecteur.
Sans être parfaite, elle est relativement pratique;
niais comme à toutes celles que j'ai pu consulter
jusqu'à ce jour, on peut lui reprocher à juste titre de
traiter uniquement la théorie grammaticale, sans
l'appuyer par ces textes si précieux, qui sont un
complément indispensable, plus importants peut
être que la grammaire, au sens étroit où Ton ent(înd
vulgairement ce mot.
Il est vrai que depuis vingt ans nous avons en
France des idées toutes différentes de celles qui ont
longtemps prévalu sur la façon d'apprendre les
langues. Le directeur de celte Revue en particulier,
J. Vinson, a fait beaucou[) pour réformer des métho-
des stériles et surannées que prônait encore l'ensei-
gnement officiel.
Les grammaires devront être conçues désormais à
la base des nouvelles idées que les linguistes réfor-
mateurs ont fait triompher.
Et c'est dans ce sens qu'à l'exposé de \V.-L.
Williams, j'ajouterai des commentaires qui seront
autant de corrections, et quelques textes qui font
grandement défaut.
— 104 —
PREMIÈRE PARTIE
La lecture
1. — L'alphabet se compose des quinze lettres qui
suivent :
Son
aller
amener
Vite
rouME
JNOM
A a
a
E e
e
H h
ha
I i
i
K k
ka
M m
ma
N n
na
Ng ng
nga
0 o
0
Pp
pa
R r
ra
ï t
ta
U u
ou
W w
wa
Wh AVh
Avha
comme l anglais sin^'ing
obéir
2. Prononciation .
Les lettres qui n'ont pas leur [)rononciation in-
diquée dans la table ci-dessus j)euvent être pro-
noncées comme en anglais : toutefois, t et /■ sont
émis plus au fond du gosier en maori qu'en anglais ;
et wh , n'est pas^ comme en écriture, un composé
de U' -|- //, mais une simple consonne, résultat de
l'air ciiassé rapidement entre les lèvres, le même
son en un mot (|ue celui (ju'on émet en soufflant avec
la bouche.
— 106 —
A''^, que le Maori emploie pour commencer une
syllabe, paraît défectueux à certaines gens ; mais la
diflîculté est bientôt vaincue si Ton fait attention que
la disposition des organes de la parole est la même
pour cette lettre que pour g et /»•, lettres avec les-
quelles son rapport est le même, que celui de m à
b et/; ou de // avec d et t.
Prononcez les trois lettres successivement, avec la
voyelle maorie a ainsi qu'il suit :
Ka , )/a, nga, et répétez jusqu'à ce que vous soyez
venu à bout de la lettre.
Chaque voyelle n'a qu'un seul son, mais elles
peuvent toutes varier en longueur selon les mots.
(}uand dans un même mot se présentent deux
voyelles, la première est ordinairement accentuée
plus fortement que l'autre dans la prononciation.
Doubler une voyelle équivaut simplement à
l'allonger.
Les consonnes sont toujours isolées et chaque
syllabe finit sur une voyelle.
RemaVque.
Prenez bien soin de toujours donner à chaque
voyelle son propre son, et d'éviter ainsi la confusion
entre ae et ai, comme pour les mots wcuvae et wai ;
entre no et au, comme pour les mots tao et tau ;
entre on et ii, comme pour les mots koiifon et mutu.
II Noms et Pronoms Personnels
4. Les noms ne présentent ni inflexions ni dis-
tinctions de genre qui influent sur la construction
grammaticale.
- 106 =
Observation : Le pronom interrogatif ordinaire,
aha, qui ? que ? est traité comme un nom commun.
Le nombre d'un nom commun est généralement
indiqué par celui du déterminatif qui l'accompagne.
(Voir § § 17, 18). Les mots suivants ont une
voyelle qui s'allonge au pluriel.
SINGULIER
Mdtua, parent-
Tûpuna, ancêtre.
Tdngata, homme.
Wdhine, femme.
Tuàhine, sœur (d'un hom-
me).
Tuàkana, frère aîné.
Tëina^ frère cadet.
PLURIEL
Màtua, parents.
Tûpuna, ancêtres.
Tûngata, hommes.
Wàhine, femmes.
Tuàhine, sœurs
Tuàkana, frères aînés.
Tèina, frères cadets.
Le mot tamaiti, enfant, ne s'emploie qu'au singu-
lier ; au pluriel on emploie toujours tainariki.
6. Les pronoms personnels ont trois nombres, sin-
gulier, duel et pluriel, comme le montre la table qui
suit :
TABLE DES PRONOMS PERSONNELS
PERSONNES
SINGULIER
DUEL
PLURIEL
l^e Personne
Ahau ou au
M au a
Matou
l^e renferm' la 2®
Taua
Tatou
2^ Personne
Koe
Ko rua
Koutou
3' Personne
la
Raua
Ratou
Interrogative
M^ai f
Wai ma?
Wai ma ?
Indéfinie
Mea
Mea ma
Mea ma
— 107 —
Les pronoms (duel et pluriel) de la première per-
sonne taua et tatou, renferment la personne à qui
l'on parle, tandis que maua et matou Texcluent.
Les pronoms personnels ne s'emploient pas en
parlant des choses inanimées.
7. Les noms de lieu sont traités comme des noms
propres.
Hea, quel endroit.
Ko, cet endroit (à quelque distance) là-bas.
Konei, cet endroit-ci (près de celui qui parle).
Kona, cet endroit (près de la personne à qui
l'on parle).
Re/'ra, cet endroit (déjà mentionné).
Runga, le sommet.
Rare, le fond.
Roto, rintérieur.
Waho, l'extérieur.
Tawahi, l'autre rive (d'un cours d'eau, d'une vallée,
etc.).
Tua., l'autre versant (d'une colline, d'une maison,
etc.).
Tdtahi^ le bord de la mer (par opposition aux endroits
de l'intérieur).
Taliaki, le rivage (par opposition à Teau).
Uta^ le terrain sec (par opposition à l'eau).
— , endroits de rintérieur(par opposition ktatahi).
Mua, le front ou partie avancée.
Mûri, le derrière ou partie postérieure.
Waenganui, le milieu.
-- 108 —
On emploie le préfixe nominal a avec les noms
de personnes, les pronoms wai et mea et avec les
noms de mois \
1. Quand ils sont sujets dans une phrase.
2. Quand ils suivent une des prépositions ki, i,
hei, kei ; mais noii lorsqu'ils suivent ko, ou l'une
des prépositions r/, o, ma, mo, na, no, e, me (voir
§§ 15, 16).
On emploie aussi le préfixe nominal, avec les pro-
noms personnels (excepté ahaii, bien que au suive
la règle) seulement lorsqu'ils suivent ki, hi, hei,
kei , ou lorsqu'ils sont répétés par explication ;
mais pas d'ordinaire quand ils sont sujets dans une
phrase.
On emploie enfin le préfixe nominal avec des
noms de places et les noms de lieu (§ 7), mais seule-
ment lorsf|u'ils sont sujets dans une phrase ou lors-
qu'ils sont répétés en manière d'explication.
EXEMPLES
Ka ara a Hoani, Hoani est beau.
Kei a Tamati to hoiJio^ C'est Tamati qui a voire che-
val.
Ma Pita teuei, Ceci est pour Pita.
He laone a Akarana, Auckland est une ville.
Homai hi a au, Donnez-le moi.
Ka wera a walio, L'extérieur est brûlé.
1. Les noms des jours de la semaine sont Irailés comme noms t;om-
niuns ; mais ils prennent toujours l'article défini ic.
— 109 —
9. Ma. — Quand on parle d'une personne en même
temps que d'autres qu'il n'est pas nécessaire de
spécifier, mettez ma après le nom, comme il suit :
Kahutia ma, Kahulia et ses compagnons.
Quand on s'adresse à plus d'une personne, on
peut employer différentes formes de discours, ainsi :
E hoa ma ! Amis !
Avec les pronoms <>K'ai ? et mea (§6], il se forme un
pluriel.
A ivai mea ? Quels ? (pi.)
A mea mea ? Telles et telles personnes.
Les pronoms personnels singuliers ahaii, je, koe,
toi, deviennent respectivement ku, a, lia, lorsqu'ils
suivent les prépositions possessives «, o, de lia, no.,
appartenant à ;
ma, mo, pour ;
et les composés ta et to (construits avec l'article
te et les prépositions a et o).
Par suite de cette irrégularité la préposition et le
pronom, pour chaque cas, sont ordinairement écrits
en un seul mot.
PREMIÈRE PERSONNE
Ahau, je, moi.
Aku ou okii, de moi.
Nakii ou. nokii, m'appartenant, à moi.
Maku ou moku., pour moi.
Taku ou toku., mien (m. à m., le... de moij.
— 110 —
DEUXIÈME PERSONNE
Koe, toi.
Au ou ou, de toi.
Nau ou nou, l'appartenant, à toi.
Mau ou mou^ pour toi.
Tau ou ton, tien.
/rt, il ou elle.
TROISIÈME PERSONNE
Ana ou Oria, de lui.
Nana ou noiiciy lui appartenant, à lui.
Mana ou mona, pour lui.
7Vïw« ou ^07?«, sien.
Quand on énumère un certain nombre, une
quantité de personnes ou de choses, la particule ou
préposition qu'on emploie avec la première doit être
répétée pour chacune de celles qui suivent :
EXEMPLE :
Nga rangatira o Rotorua, o Rotoiti, o Tara^vera.
Les chefs de Rotorua, Rotoiti et Tarawere.
Quand on parle collectivement d'un certain nombre
de personnes, il est bon d'employer les pronoms au
duel ou pluriel suivi du ou des noms des personnes
additionnelles, en accompagnant chaque nom de Ko :
mais si les noms sont précédés par une préposition,
la préposition ne se répète pas.
— 111 —
Quand les noms sont énumérés à la troisième per-
sonne, l'un des noms doit précéder le pronom à
moins que l'un d'entre eux n'ait été antérieurement
mentionné.'
EXEMPLES :
Mana ko Rend, Hemi et moi.
Koutou ko Hemi, ko Hohepa^ vous, Hemi et Hohepa.
A Hemi raua ko Hoani, Hemi et Hoani.
A7 a Hoani ralou ko Hemi ma, à Hoani, Hemi,
etc..
Ko t,vai ma era ? Quels sont ceux-là ?
Ko Hemi ratou ko Pita, ko Hohepa, Hemi, Pita et
Hohepa.
*
Quand des noms sont apposés, c'est-à-dire quand
on ajoute un second nom pour expliquer le premier,
répétez la préposition, etc., du premier nom au
second, et mettez d'abord le nom le pluscompréhensif,
ensuite le plus restreint comme acception.
EXEMPLE :
Ma tona tupuna ma Paora, pour son grand' père
Paora.
Dans cet exemple, tona tupuna est un terme plus
général c^uq paora, et c'est pourquoi, régulièrement,
il est mis le premier ; la préposition ma est répétée
avec le nom moins général Paora.
* *
Noms communs employés comme adjectifs
Tous les noms communs peuvent être employés
comme adjectifs.
112
EXEMPLES
He whare papa, une maison de pension.
He Kakahu riiiena, un vêtement de toile.
* *
CHAPITRE III
Prépositions
Prépositions simples
A, de, appartenant à ;
à, (temps futur);
a Jiea? en quel temps ?
jusqu'à.
0, de, appartenant à, passif de a ;
de (lieu ou temps), caractérisant le point de
départ.
Na, de, appartenant à ;
par^ au moyen de, à cause de;
en guise de.
No, de. appartenant à, passif de na ;
de (lieu) mais non après des verbes de mouve-
ment ;
de, à, temps passé.
Ma, pour ;
par, de cette manière ;
par, a travers, en guise de (direction).
MOj pour, passif de ma;
à, sur, en (temps futur) ;
sur, vers, au sujet de.
Ra, par le moyen de, à travers (grâce à).
— lia —
£, [)ar(se dit (rmiag-ent), seulement après les verbes
passifs.
/, pai*, avec, se dit d'un agcut ou d'uri instrument,
après les participes, adjectirs, et verbes
neutres ;
pour cause de, en raison de;
de, après les verbes de mouvement ;
avec, en possession de, ou possédant ;
généralement au passé ;
avec, en compagnie de ;
à (temps), généralement passé ;
en comparaison de ;
au-delà, hors de ;
à, dans, sur (prép. de lieu \ ordinairement au
passé ;
au moment de, au moment oii ;
au lieu de, sur le fait de (passé), gouverne les
adjectifs ou les verbes;
— simple transitif, sans équivalent en français.
Kei^ à, sur (au présent), ne s'emploie pas après les
verbes ;
avec, en possession de (futur) ;
au lieu de. sur le fait de, avec les adjectifs ou
verbes au présent.
Hei, à, sur (lieu et temps), au futur : ne s'emploie
pas après des verbes ;
avec, en possession de, au futur ;
pour, propre à, destiné à, sans aucini qualificatif :
s'emploie avec les noms ou les verbes à
l'infinitif.
A7, à (place ou action), dans, vers ;
— 114 —
à ou dans, endroit où une action est accomplie
(après les verbes) ;
à, après arriver, etc.;
avec, par, à Taide de (instrument);
contre ;
conformément à, touchant;
pour, désirant, en quête de ;
— après des verbes sans équivalents français.
Me, avec, en plus de, et — aussi.
/fo, à, allant à^ avec des noms de lieu et des verbes
actifs à Tinfinitif ;
à, dans, — temps futur, — caractérisant l'inten-
tion.
7b, jusqu'à ;
Whakci, vers, à la rencontre de.
Prépositions complexes
Ce sont plutôt des façons irrégulières d'employer
quelques noms énumérés au paragraphe 7.
SÉRIE I
Ki rang a kl \
I runga i 1
, . ^ sur, au sommet de, en haut de;
Kei runga kei
Hei runga hei
No runga no^ d'en haut, c'est-à-dire situé au sommet
de ;
/ runga i, d'en haut, — signification spéciale de —
mouvement de ;
Mo runga nio, pour le sommet de;
— 115 —
Ma riiDga nui, par-dessus, par le faîte de (direction);
Ko riuiga ko, au haut de.
SKRIE II
Ki ruiiga i
I rmigd I \ au-dessus, par-dessus ;
Kei raiiga i
Hei runga i
No riinga i, d'au-dessus, c'est-à-dire faisant partie
de celte hauteur ;
/ ningd /, d'au-dessus, impliquant niouvetnent de ;
Mo ruiiga i, pour au-dessus, c'est-à-dire être au-
dessus de ;
Ma riinga /, par-dessus (direction) ;
' Ko runga /, aller au-dessus, par-dessus.
Dans la seconde de ces séries, o peut être substi-
tué à ?', pour régulariser la construction.
Les prépositions simples peuvent être combinées
de la même façon : avec raro, pour avoir au-dessous,
sous, en bas ;
avec rofo, pour avoir dans, à l'intérieur, en dedans;
avec ivaho, pour avoir sans, à l'extérieur, du dehors,
etc.
M?ia et /iiuri ne s'emploient que dans la série 2.
IV. — Déterminatifs
Les déterminatifs sont des mots qui indiquent
l'étendue de la signification d'un nom, et où elle se
limite.
Cette appellation comprend donc ce qu'on désigne
ordinairement sous le vocable de article, pronoms
— UG —
possessifs, cas possessifs des noius et les pfonoms
déinonstralifs.
Tous, à part une exception, ont deux nombres,
singulier et pluriel ; et tous se mettent devant les
noms auxquels ils se rapportent.
Un nom commun est toujours précédé d'un déter-
mi natif.
Table des Déterminatifs
SIXCULIEH
He, un OH une ;
Te, le, la;
Tetalii, un;
Tcnei, ce, cette ;
Tena, ce (près de la personne
à laquelle on parle) ;
Teva, ce (à une certaine dis-
tance), l'autre (opposé à ce-
lui ou celui-là) ;
T(ina^ celui là ;
la, celui-là;
Tehea? quel ?
Taku, mon ;
Tohit, mon ;
T(tu, ton ;
Tau, ton ;
Tana, son om sa ;
Tonn, son ou sa ;
Ta taua, nôtre ;
To taua, nôtre ;
Ta tatou, nôtre ;
To tatou, nôtre.
He;
Nga, les ;
Etalii, des ;
Enei, ces, cette ;
Ena, ces (près de la personne
à laquelle on parle) ;
Era, ces (à distance), les
autres ;
Auu, ceux-là (pas de pluriel) ;
Eltea ? quels ?
Aku, mes ;
Oku, mes :
Au, tes ;
Ou, tes ;
Ana, leurs ;
Ona, leurs ;
A taua, nos ;
O taua, nos;
A tatou, nos ;
O tatou, nos.
Et ainsi de suite avec tous les autres pronoms
{personnels, avec les noms de personnes, de places,
de lieux, avec tous les noms communs lorsqu'ils
suivent un déterminatif, excepté Jie, en préfixant ta
ou lo pour le singulier, a ou o pour le pluriel.)
— 117 —
KXliMPLKS :
Toku ivhrire, ma maison ;
Enei hoîho, ces chevaux ;
He K\'h(ire, une maison, ou des maisons;
T(( Hcnii puhapiikcf, le livre crUenii;
Ta lenei laitgdld kainga , la demeure de ccl homme.
L'article possessif lo est souvent condensé en
article el préposition.
EXEMl'Lli :
Te wliare o Ilenii é(|uivaut à To llenii Kvkdre.
Parliciihirilés de he el te,
cC\, N'employez jamais he après une piéposition,
mais substituez- lui telalii.
EXEMPLES :
Ile laii^dld, un homme;
Ki leldlii Idiigdld, à un homme.
b) Quandon emploie unnomcommun pour (h}si«>ner
une catégorie, comme le pluriel simple est souvent
usité en anglais, mettez te au singulier, et non lie.
EXEMPLES :
Te kdhd o le hoilio, la force du cheval ;
Te hoi/io, le cheval, c'est-à-dire les chevaux en
général.
Les prépositions possessives (|ui suivent des déter-
minai! fs:
— 118 —
a) Quand une possessive suit/^e, employez toujours
Tune ou l'autre des prépositions na ou no, jamais a
ou o.
EXEMPLES :
He pukdpuka /iaku, un de mes livres ou un livre
qui m'appartient ;
He ivhare no tenei tangala\ une maison appartenant
à cet homme ou de cet homme.
h) Quand une possessive ne suit aucun autre déter-
minalif que Ae^ employez toujours Tune des préposi-
tions (i ou o, jamais na ou no.
EXEMPLES :
Te pukapuha a Plta, le livre de Pita;
Tenei taha ohii, ce penchant qui m'est propre ;
Taiia whare o Hemi., cette maison d'Hemi.
Les démonstratifs tenei, tena, leva sont composés
de l'article te et des adverbes nei, na, va. Tenei signi-
fie que la chose dont on parle est près de celui qui
parle, ou en relation avec lui; tena^ qu'elle est proche
ou rattachée de quelque manière à la personne à la-
quelleon parle; /e/r/marque qu'elleestéloignée, etnon
rattachée ni à celui qui parle, nia son interlocuteur:
taita indique quelle a été déjà mentionnée avant.
la est fréquemment employé comme distributif
dans le sens de chacun^ en le répétant avec le nom.
Tenei, lena, et tcra peuvent s'employer aussi de la
môme façon.
119
EXEMPLES :
la Inngata io l(ing((la, chaque homiiio ;
Tenei ropii Icnei lopii o ralou, cliacuue de leurs
sociétés.
On emploie souvent /e/y^ avec un sens emphatique
pour le pronom personnel de la Iroisième personne
du singulier.
Tenei, tend et leva sont souvent seuls, le nom
restant sous-entendu, maison n'emploie jamais land
de cette façon.
EXEMPLES :
N((lcu lenei, nau Icna, ceci est à moi, cela est à vous.
He rangdli.rd Idiid tdngdla, cet homme est un chef.
La différence entre d et o cjui s'applicjue aussi à
nd, no, nid, nw, Id, lo, est la suivante :
d s'emploie lorsqu'on parle d'actions transitives,
des instruments, des travaux accomplis ou entrepris,
de la nourriture, des enfants, des esclaves, etc
0 s'emploie lorsqu'il est question des parties d'un
tout, de noms, de qualités, de particularités, d(! senti
ments, de maisons, de pays, d'habitants, d'eau |)o-
table, de médecine, de vêtements, de parents, de
supérieurs; on l'emploie aussi pour les noms dérivés
des adjectifs^ les participes, les verbes intransitifs
dont on peut se servir avec le sens du passif.
EXEMPLES :
Tohii pàpâ, mon père;
— 12U —
Tan a tamaili, son enfant;
Tona rangatira, son maître;
He poiionga ncnia, un de ses domestiques;
Tona kakahu, son vêtement;
Ou waeivae^ vos pieds ;
He kai maii, de la nourriture pour vous;
Tetahi wai moka, de l'eau pour moi;
Ton ingoa, votre nom ;
Ton ingoa mau, mon nom pour vous (c'est-à-dire
mon nom que je vous ai donné) ;
Taku patunga ia koe, la correction que je vous
donne ;
Toku paUinga e koe, la correction que vous me
donnez;
Observation : /o, ton, pluriel o, ressemble à tau et
non à tou .
FÉLICIEN Soulier,
Elève à l'Ecole des Langues Orientales.
(A suivre.)
1
LlSTi: ÉTYMOLOGIOUE
PRINCIPAUX MEMBRES DE L.V FAMILLE DU LATIN OPUS
Lat. Ops, acquisition, accroissement, richesse;
Opuleiitus, riche;
Opus, ce qui enrichit, ce dont on a besoin, ce
qui est désiré (cf. sansc. ipsi-tcnn, objet de
désir) ;
Oplo, désirer;
Oper-a, ce dont on a besoin, œuvre utile ; ce
qu'on doit produire, faire, fabriquer.
Gr, ôcpéXXw, accroître;
ooEÀjjia, accroissement;
oçeXoc, utilité, profit;
or^éÀXto, être utile;
O'^clXo),
, . , devoir
p. PliGNAUD.
NÉCROLOGIE
C'est décidément une triste chose que de vieillir;
heureux encore ceux qui laissent après eux des af-
fections qui garderont leur mémoire et des enfants
qui pourront continuer leur œuvre! Mais, d'année
en année, on sent de plus en plus lourd le poids de
Tâge, on se trouve comme isolé dans un monde in-
connu, on ne se voit plus entouré que de figures nou-
velles. Depuis plus de dix ans déjà, j'ai vu disparaî-
tre, — en dehors du cercle de la famille, — un trop
grand nombre d'amis, de compagnons de luttes et de
travaux! Il y a quelques semaines, j'apprenais, avec
un profond chagrin, la mort d'une femme aimable,
jadis adulée et heureuse au possible, dont la maison
me fut longtemps hospitalière et (ju'une catastrophe
soudaine avait réduite à la ruine, à l'infortune et à
la douleur. Et voici (|ue la mort inintelligente vient
d'enlever un de mes plus dignes amis, de mes colla-
borateurs les plus fidèles, le Rév. \V. Webster
dont les travaux sur les Pyrénées occidentales sont
bien connus.
Wentworth Webster, né le 16 juin 1828 à Uxbridge,
Middlesex (Angleterre', fut élevé dans une école pri-
— 123 —
vée à Brighton. En 1849, il entra au Lincoln-CoUege
à Oxford, d'oii il sortit en 1852 avec le grade de
B. A. (M. A. en 1856). Il fil alors partie d'une Mission
anglicane et, reçu diacre en 1854, il dut partir quatre
ans plus tard pour Buenos-Aires, d'où il revint en Eu-
rope et alla à Bagnères-de-Bigorre. En 1861, il devint
prêtre et il voyagea en Egypte de 1862 à 1863. Pendant
sa jeunesse, il avait parcouru l'Ecosse, l'Allemagne
et la Suisse. Peu d'années avant la guerre de 1870, il
était venu à Biarritz; il alla s'établir, comme chape-
lain de la colonie anglicane, à Saint-Jean-de-Luz, où
il demeura jusqu'en 1882. Des raisons de santé
l'obligèrent à quitter le bord de la mer et à se retirer
à Sare, aux pieds de la Rhune, où il vient de mou-
rir le 2 avril 1907. Il laisse un fils professeur à
Oxford, une fille professeur à Cambridge, et deux
autres enfants.
Il a donné de nombreux articles à diverses revues
et notamment, en France, au Bulletin de la Société
liainoiid de Bagnères-de-Bigorre et au Bulletin de la
Société des Sciences et Arts de Bayonne;en Angleterre,
à V Academy^ à YAthenœnni, à V Anglican Church Ma-
gazine, etc. Son dernier travail est un article sur les
Basques dans la nouvelle édition de VEncyclopœdia
Britannica ; je compte reproduire cet article dans la
présente Bévue. Il a publié en outre les ouvrages
suivants :
1. Basque legends jCoWeciaà cliiefly in tlie Labourd.
Londres, 1877, in-8% xvj-233 p. — 2" édition, aug-
mentée d'un appendice sur la poésie basque, 1879,
in-8°, xvj-276 p.
— i-^1 —
2. Spain. Londres, 1882, pet. in-S% xvj-240 p.,
2 cartes et fig. (dans la collection Foreigii Coiintries
and Brilish Colonies).
3. Grammaire Canlabriqitc, basque, par Pierre
d'Urle [1112]... Bagnères-dc-Bigorre, 1900, gr. in-8",
4-viij-5 à 568 p.
Tirage à part du Bulle lin de la Société Bamond.
Un erratum a été publié dans la Bévue de Linguis-
tique, t. XXXIV, 1901, p. 205-216 et 294-300.
4. Les loisirs d'un étranger au pays basque. Cha-
lon-sur-Saône, 1901, in-8", xxiv-359 p.
5. Gleanings in cJiurch /??5/o/'^,chiefly in Spain and
France. Londres, 1903, pet. in-8°, 356 p.
W. Webster était, depuis de longues années, mem-
bre correspondant de l'Académie royale d'histoire de
Madrid et depuis deux ans membre de la Hispanic
Society of America.
Ce qui prouve sa haute valeur, c'est le respect et
l'estime qui Tont toujours entouré dans le pays bas-
que. Parmi les journaux du |)ays qui ont annoncé sa
mort, je signalerai particulièrement le journal basque
Eskualdun ona, le plus clérical et le plus réaction-
naire de la région, qui en parle comme d'un ami des
Basques et loue sa bonté et sa charité. Bonté, charité,
modestie, c'étaient bien là les traits dominants de
son caractère, avec une foi sincère, nn libéralisme
éclairé, un large esprit de toléran(;e. Époux et père de
famille modèle, ami sur et dévoué, savant prudent et
réservé... cesontdeces [)ertes dont rien ne console !
J. V.
BfBLIOGRAPHlE
A. Meillet. Lélat actuel des éludes de limjuistif/ue
générale, leçon d'ouverture du cours de Grammaire
comparée au Collège de France, lue le mardi 13 février
1906 (s. I. aid.), in-8° carré, 30 p.
C'est toujours un événement important que l'ouver-
ture d'un Cours au Collège de France, mais l'événe-
ment ofïre un intérêt plus grand encore quand il s'agit
d'un professeur nouveau succédant à un maître comme
M. Michel Bréal. C'est pour M. Bréal qu'avait été créée,
il y a plus de quarante ans, la chaire de Grammaire
comparée, rubrique qui ne signifie pas grand chose
d'ailleurs. Mais les étiquettes sont peu de chose; en
fait, on voulait inaugurer l'enseignement de la linguis-
tique. C'est pourquoi nous aurions voulu qu'on pro-
htàt de la vacance de la chaire pour en agrandir offi-
ciellement le programme et pour lui donner le titre de
« linguistique généiale », comme la chaire de l'histoire
des religions aurait dû devenir la chaire de mytho-
logie comparée.
M. Meillet a si bien compris la situation qu'il parle,
dans son discours, de la linguistique générale. ïl dit
— 126 —
avec raison que la manière dont les langues indo-eu-
ropéennes ont été étudiées devra servir de guide et de
modèle; mais il se trompe, à mon avis, quand il dit
que l'étude des autres familles permettra de vérifier
les conclusions qu'on a tirées de celle des langues
indo-européennes et de poser un certain nombre de
questions qui n'apparaissent pas clairement dans
celles-ci. C'est donner, je crois, trop d'importance aux
langues indo-européennes, car tous les problèmes que
soulève l'étude des langues ne se retrouvent nécessai-
rement pas dans les idiomes aryens, et les familles du
second groupe morphologique, les idiomes agglutinants,
sont certainement très instructives à cet égard. Mais
M. Meillet a le malheur, — on comprendra ce que je
veux dire, -— de n'avoir guère étudié que l'indo-euro-
péen, et le malheur, plus grand encore à mes yeux, de
se rattacher à l'école des néo-grammairiens allemands
dont M.Brugmann est, pour ainsi dire, le protagoniste,
cette école dont la méthode est si discutable, qui fait
de la théorie et de la spéculation et qui conclut du
simple au composé.
Une grande erreur, c'est de regarder la linguistique
comme une science historique, alors qu'elle est sur-
tout une science naturelle. M. Meillet voit, dans l'évo-
lution des langues, quatre facteurs principaux: la loi
phonétique, l'analogie, l'emprunt, le fait social. Je n'y
contredis pas, mais, en ce qui concerne la phonétique
par exemple, n'est-il pas nécessaire de rechercher la
— 127 —
cause possible de certains phénomènes, en un mot de
ne passe bornera relever des faits sonores, mais à étu-
dier la formation même des sons et des bruits, les
mouvements des organes, les conditions physiolo-
giques? Il estincontestable,par exemple, que certaines
articulations ne se développent ou ne se produisent
que dans certaines conditions climatériques.
J'aurais bien des réserves à faire sur certaines affir-
mations de M. Meillet. Quand il dit, par exemple, que
rindo-Européen commun avait des formes grammati-
cales variables et complexes, c'est encore là pour moi
de la théorie. L'Indo-Européen commun primitif
devait être au contraire très simple et très régulier et
je n'admettrai jamais, notamment, que le verbe y eût
deux présents, l'un en o, l'autre en mi. La terminaison
mi « moi » est seule générale et primitive : si le grec
et le latin l'ont le plus souvent perdue, l'indien et l'éra-
nien l'ont le plus ordinairement gardée, et ils sont cer-
tainement plus fidèles à la forme primitive.
Julien ViNsoN.
The 102'^ report oft lie british and foreign Bible So-
ciety.,. London, 190G, in-8°,xvj-470-(ij)-272 p.
Ce volume, aussi intéressant que les précédents, ne
contient aucune carte géographique. Le budget de la
Société s'est élevé pendant l'année (de mars 1905 à
mars 1906) à 313.555 1. st. 1 sh. 2d., c'est-à-dire à
7.838.876 fr. 45, un vrai budget d'état. Le nombre
— 138 —
des langues dans lesquelles des traduclions de la Bible
ou du Nouveau Testament, partielles ou totales, ont été
faitess'estélevéàiOOdontl'l nouvelles, parmi lesquelles
je citerai le Ladakhi, sur la frontière du Thibet, et le
Laotien. On a révisé les traduclions en frdu et en
Hindi, ainsi qu'en Canara.
Je crois qu'il y aurait lieu de revoir et de corriger en
plusieurs endroits la liste générale des langues. Que si-
gnifient par exemple les mentions Spanish basr/ue et do
[Guipuzcoa) : on suppose que la première indication
s'applique au Biscayen, mais pourquoi ne pas le dire?
J. V.
Suomalais-ugrilaisen Seuran Aikakauskirja. Jour-
nal de la Société Finno-Ougrienne, t. XXIII. Helsing-
fors, 1906, gr. in-8°, x-(ij)-50-20-20-iv-60-1 2-2-2! -
10-9-20-2-8-7-4-10-1 1 -5-8-7-8-13-1 2-7-23-2-12-10-
9-8-10-33 p., fig., 3 pi. et 1 portrait.
Comme le fait voir cette extraordinaire pagination,
ce volume comprend trente-deux mémoires séparés.
Composés en l'honneur de M. 0. Donner, le fondateur
de la Société, à l'occasion de son soixante-dixième aii-
niversaire, ces mémoires, précédés d'une dédicace, en
suédois et en français, à >i. Donner dont le portrait est
en regard du titre, sont en finnois, en lapon, en sué-
dois, en français, en italien et en allemand. Tous très
intéressants et faits pour les savants les plus compé-
tents, ils ont trait aux langues, aux mœurs, au folk-
- 12i) —
lore des Finnois, des M;i|^yars, des Lapons, des Mor-
dvines, des Estlioniens et autres ourai-altaïques. C'est
un recueil de premier ordre.
Je regrette de n'avoir pas été prévenu de cette pu-
blication, à laquelle j'aurais été heureux d'envoyer
une modeste contribuliofi, en l'honneur d'un linguiste
auquel tout le monde studieux doit rendre un légitime
et sincère hommage.
J. V.
Suonialais - ugrilaken seuran toiinituksia. Mé-
moires de la Société Finno-Ougrienne. Tome XXin et
XXIV. Hekin(/on, 1905. (ij)-xviij-30i p. et (ij)-90 p.
gr. in-8°.
La première de ces deux livraisons se compose du
commencement d'un travail de M. K. F. Rarjalainen,
en allemand, sur la phonétique votiaque: le vocalisme
de la première syllabe. La seconde est le complément
(appendice et index) d'un travail précédemment pu-
blié (n" xx), sur le lapon de Polmak, par M. Konrad
Nielsen. J. V.
Revue internationale de^ éludes basques. Paris, Paul
Geuthner, 1907, in-8°. n°^ 1 et t, (iv)-216 p.
Cette nouvelle publication, très intéressante et très
utile, véritablement internationale, paraît appelée à un
très grand succès. Elle est dirigée, avec une rare
maestria, par notre éminent collaborateur M. Julio de
9
— 130 —
Urquijo; le secrétaire de la rédaclion est M. Georges
Lacoinbe également bien connu de nos lecteurs.
Les deux premiers numéros contiennent un grand
nombre d'articles aussi variés qu'intéressants, tou-
chant à la linguistique, à la littérature, à l'ettinogra-
phie et à l'histoire. Citons, parmi les principaux : Les
études basques de 4901 à i906,\}aiV Julien Vinson,etun
pust-scriptum de M. de Urquijo; Jean de Tartas, par
M. J. de Jaurgain; Le bilçar d'Ustarilz, par M. Ytur-
bide ; Fables en Biscayen, attribuées au P. Zavala; Le
Catéchisme de Arzadun {âvec photogravures, par M. de
Urquijo; Corisandre d! Audoains, par M. de Jaurgain ;
Variantes des exemplaires de Liçarrague, par G. La-
combe; des notices bibliographiques, biographiques
et philologiques par MM. Oaranats, Dubarat, Mujica,
Eleizalde, Aguirre, Baraibar, de Cliarencey, Darricar-
rère; et enfin une réimpression, rigoui'eusement exacte,
du premier livre souletin en imprimé connu, VOnsa
LJilceco bidla de Tartas. J. V.
Bulletin du parler français au Canada. Tome V,
\r' 4 à 7, déc. 1906 à mars 1907. Québec, Université
LavaU 906-7, p. 1â1-279.
On y trouve de fort intéressants travaux : la suite
du Lexique Canadien-Français; Glanureset Sarclures;
des Bulletins bibliographiques qui témoignent de l'ac-
tivité littéraire de nos compatriotes d'origine; des ar-
licles fort instructifs sur le langage commercial (par
M. J.-P. Paradis), quelques vieux mots dans des do-
cuments anciens par M. Plilieas (iagnon), les noms
po[)ulaires de quelques plantes canadiennes (par
M. C. Latlammc , le compte rendu de la séance géné-
rale de la Société du 12 décembre 1906, etc.
Le dernier numéro contient une nouvelle étude de
M. Kouillard sur les prénoms au CajMda. Nous y
apprenons que de malheuieuscs lilleltos ont été a[>pe-
lées, l;i-bas, Thessalonir/uc, Lncivinia, Dorsina, Ozitk,
Eximasse, Ananolie, Plumyeta, Lauricrànc et d'infor-
tunés garçons Ira, Phébé, Piiilandrc, Perplexe et
Anif/danol
Un excellent travail qui se recommande à toute l'at-
tention du linguiste est celui de M. Hivard sur la
francisalioii des mois anglais dans le /rauco-canadien.
Mais il est gâté par la transcription grotesijue de >iiVl.
Gilliéron et Housselot.
.1. VlNSOA.
lievKe du monde musulman ^volume 1, n°* 3 et 4).
Paris, E. Leroux, janvier et février, 1907, p. 305-
640.
Outre les revues très intéressantes et si bien faites
de M. Bouvat, ces deux numéros contiennent, comme
on devait s'y attendre, de très remarquables travaux :
les Hongrois et les études musulmanes (f.. Bouvat), les
Habous de Tanger (AI Moutabassii), une université
— 132 —
musulmane en Tunisie (Emile Amar), les Turcs et les
indigènes en Tripolitaine (N. Slouscti), l'instruction
publique chez les Kirgliizes (N. Slousch), le collège
d'4ligarli (L. Bouvat), les musulmans chinois (Niga-
rendê et Al-Katib), le Pan-Islamisme et le progrès
(A. Lechatelier), les Laks du Caucase (N. Slousch), le
clergé musulman aux Indes néerlandaises (A. Caba-
ton), etc., etc. Je signale tout particulièrement, une
excellente étude de M. L. Bouvat sur la Presse musul-
mane avec de nombreux spécimens et de très curieux
fac-similé de titres. J. V.
Anthropos, Revue Internationale d'Ethnologie et de
Linguistique, sous la direction du père G. Schmidt,
S. Gabriel, iMoedling près Vienne (Autriche). Tome II,
n° 1,1907, in-8° carré de 180 p. et nombreuses
planches.
Journal véritablement international, car il accepte
des articles dans toutes les langues, dû à la collabora-
tion de savants et de missionnaires catholiques. Le
numéro que nous avons sous les yeux se compose de
seize articles, en français, latin, anglais, italien, alle-
mand et espagnol. Je signale particulièrement ceux
du P. Gains, Au paj/s des castes (p. 35-39), du docteur
Gasartelli : Hindumythology and littérature as recorded
by Portuguese Missionaries of the early 41"' century
p. 128-132); de M. Aliih.Pinart, Gcroglifi entre las
— i:« —
Indios de la F brida (p. 133-136), et du Fr. H. Millier.
Grammatik des Mengen Sprache (p. 80-99).
La langue dont il s'agit dans ce dernier travail est
parlée dans la Nouvelle-Guinée depuis le cap Oxford
jusqu'au cap Ouoi, sur la côte; elle comprend deux
dialectes différenciés par l'emploi plus ou moins fré-
quent de l'article délini, par les signes de pluralilé,
etc. Le matéiiel phonique ne |)araît comprendre que
les sons et les bruits suivants : a, i, u, e, o, û, — k, y,
ny: I, d, n, //, s, /, r; p, b, m, y. Il y a un article post-
posé. Le pluriel se dérive par un r préfixe, un redou-
blement, une suffixation; le duel paraît dérivé du
pluriel. Les noms de nombre simples ne vont pas au
delà de quatre. Les pronoms ont plusieurs formes :
substantive, adjective, possessive, déterminative, et ils
varient suivant qu'ils s'appliquent à des personnes
animées ou à des êtres inanimés. Le prochain numéro
nous parlera du verbe sans doute.
J. V.
VARIA
I. — Politesse espagnole.
On sait qu'en Espagne, lorsqu'on adresse à quelqu'un des com-
pliments sur un objet de toilette, un livre, un objjt d'ati, un
bijou, qu'il a en sa possession, la personne interpellée doit ré-
pondre : a su disposiclon ou n la diaposicion de rm., « à votre
disposition », c'est-à-dire « veuillez en disposer ». Le dialogue
doit se poursuivre : esfn miii/ bien entplcndo « il est bien em-
ployé, il est en de bonnes mains ». — Muc/io nu\jor lo série
« il le serait beaucoup mieux ». — Xn cnhc mcjoria « il ne saurait
l'être mieux ». Je crois qu'on ajoute encore d'antres phrases
C'est aussi en Espagne qu'on baise encore, an moins en paroles,
les mains et les pieds, et qu'on offre aux visiteurs sa maison.
Victor Hugo, qui se piquait d'espagnolisme, ne manquait pas
de dire à ses visiteurs : a cette maison est la vôtre ».
Les billets de faire part de mariage se terminent tous par la
formule classique : // les ofrecen su case.
Et cependant, il n'est pas rare d'entendre au-delà des Pyrénées
des femmes charmantes employer certaines expressions qui rap-
pellent l'aventure de Sterne avec M"" de Rambouillet.
IL — Le verbe basque.
Pour some \\ ater in a bowl
And make the froth of lathering soap;
Then blow it from the pi|ielets hole :
The bubble rises, as we hope,
AU huesorae as the rainy bow,
I 0 forra the little Hlmy sphère,
Reflecting ail the things bclow.
— 135 —
Above, aïoniifl, or far or near.
Even so the verb in biskish tongue,
A perfect niirror, floats in air,
Although no otber word is sung,
I^ortraying ail that passes there.
E.-S. DODGSON.
(At Kirk Andréas, Isle of Man, sept. :{, 1901).
111. — Prononciation du français par les Allemands.
Il y a encore en France beaucoup de gens qui ont pour les lan-
gues étrangères le dédain le plus profond et qui, dans leur igno-
rance superbe, émettent les affirmations les plus saugrenues.
C'était jadis, en littérature, monnaie courante. A côté de ce joli
mot d'Alexandre Dumas : «Ah ! s'écria-t-il en portugais », que de
sottises ne trouve-t-on pas dans les romans écrits il y a soixante ou
quatre-vingts ans. Un Allemand, par exemple, disait toujours 7»o«-
t((iiK'! pour «Madame» et ne jurait que par TarteiJ]le(i derTeufel».
Je relisais dernièrement l'un des romans les plus connus de
Balzac, un de ceux où le baion de Nucingen (personnification du
vieux Rothschild, à ce qu'il parait) joue l'un des principaux
rôles. Balzac a voulu indiquer la manière barbare dont son héros
prononçait notre belle langue. Il ne s'est pas mis pour cela en
grands frais d'observation. Il est parti de cette hypothèse, qui est
d'ailleurs fort discutable, que les Allemands disent toujours t pour
u, rJi pour /. t pour d, d pour t, p pour h, h pour p, etc., et il a
porté la naïveté jusqu'à transcrire dans ce système, non plus les
sons, mais l'orthographe des mots. II n'a pas pris garde aux
consonnes muettes, aux groupes de voyelles; il n'a pas un seul
moment réfléchi, par exemple, que eu fait un son simple et il
commet les abominables phrases que voici :
Fus edes pien hercùc fou hiroise).
C'esde ein cheffe d'œicrc.
Sa cordine esd vaidde.
Fis n'afcc bas î l>aitf/oiih t' cccarts.
— 136 —
Tiddos... c/ic rornifhil hir fus.
Elle fus afanfie.
L'eshoir te la droaffer.
Edre tans mes cintereds
Vaire tes accaires
Barler hir moi
Ce fj'on ubhéle.
Et ces expressions au moins bizarres : mods « mots », ôme
« iiomme », p/tâme « femme », mon hàmi « mon ami », eine fcn-
feuse (( une vendeuse », boind « point )), hire « heure », Ichènie
« Eugénie », ghibbè « chippé ", ch'èhroujfe «j'éprouve », eine
haif/charbe a une écharpe », et même le paron tl Nichenguenne
« le baron de Nucingen ».
J. V.
IV. — La langue universelle.
Je trouve, dans un catalogue, l'indication suivante :
«PASILOGIE, ou de la musique considérée comme langue uni-
verselle, par Anne-Pierre-Jacques De Vismes. Paris, 1806, in-8,
cart., qq. taches. »
Il y a eu de tout temps des fous, des utopistes et des rêveurs.
J. V.
L' Imprimeur-Gérant :
E. Bertrand.
CHALON-SUR-SAONE, IMP. FRANÇAISE BT ORIENTALE E. BERTRAND
LES MUSULMANS DU SUD DE L'INDE
Les ^lusiilniaus de la pointe méridionale de l'Inde
se partagent en deux grandes catégories bien dis-
tinctes, les Tululih((i-s « turcs » ou Pathâns (syno-
nyme iï Afghans) et les Choulias ou Maplets. Les
premiers sont les descendants directs des immigrants
venus du Xord à partir du X" siècle de notre ère ; ils
ne sont point confondus avec la population indigène ;
ils parlent divers dialectes de Thindoustani ' urdù et
dalilïUÎ notamment), qu'ils écrivent à l'aide de
Talphabet arabo-persan, augmenté de trois signes
quadriponctués pour représenter les consonnes
cérébrales ou linguales. Les seconds, au contraire,
ne se distinguent guère du reste de la population
locale ; ils en ont les goûts, les habitudes, le lan-
gage ; ils écrivent cependant les idiomes du pays à
l'aide de l'alphabet arabe directement importé et
auquel ils ont ajouté quelques signes ponctués par-
dessus et par-dessous pour correspondre aux articu-
lations dravidiennes spéciales '. Ils savent lire l'arabe,
car ils ont des écoles où on leur fait apprendre par
1. Cf. L'i'crituro arabe npplù/iice aux laii;/iics ((raridimncs,
par Julien Vinson {Journal Asiatique, 1895).
10
— 138 —
cœur le Qorân, sans le leur expliquer d'ailleurs. On
les appelle Maplets sur la cote occidentale et Chou-
lias sur celle de Goromandel. Ils se divisent en
castes dont les membres sont distingués par des
appellations particulières : Sinnapoullé//?r//ec«/-,
Ahmedkandu/e^^e, Mugammadu/«(^«/^«/',les pathaus
ajoutent ordinairement à leurs noms les qualifica-
tions de kliàii^ càJiib ou cheick.
Le recensement de 1901 a établi qu'il y aurait,
dans les régions qui nous occupent, 910.843 Maplets,
425.788 Lebbés et 25.000 Choulias environ.
Que signifient ces divers mots et quelle est l'ori-
gine de ces populations? Les Musulmans du sud,
qui ne parlent ni Thindoustani ni le persan, sont
incontestablement les descendants de commerçants
arabes qui venaient trafiquer sur les cotes de l'Inde
et qui s'alliaient à des femmes du pays, de castes
fort inférieures ordinairement. Elles étaient simple-
ment pour eux des concubines temporaires et ils les
abandonnaient avec leurs enfants ou les passaient à
d'autres arrivants, quand, leurs affaires terminées, ils
retournaient chez eux ou allaient ailleurs. .
C'est ainsi qu'on explique le mot MàppiUei, qui
voudrait dire, en tamoul, « fils de mère » (et de père
inconnu). On lit à cet égard, dans le Glossary of
Indian Teriwi de H.-H. Wilson, Londres, 1855, in-4'' :
« MappilUiy plur. iuappillammai\, commonly nioplali
or inoplay, malayâla. A native of Malabar, or des-
cendant of the Arabs, who first settled in Malabar,
lit. « the son {pilla) of his mother [ma) » as sprung
from Ihe intercourse of foreign colonists, who were
— 139 —
persons unknown, with malabar \vomen ». Dans leur
dictionnaire Hobson-Jobsoii, MM. Yule et Burnell
disent, de leur côté, que cette appellation s'applique
aussi aux chrétiens nestoriens du Travancore et de
Cochin et qu'en tanioul niàppillei sig'nifie propre-
ment « fiancé » ou plutôt « gendre, beau-fils » ; ils
rappellent que le D'' Badger y voit une altération de
l'arabe /rt/<'/Ar/ et lui donne, comme à l'égyptien /ê//ff//,
le sens de « cultivateur », tandis que M. C.-P.
Brown y voit une altération de mu ahbar « de dessus
les eaux ».
Sur ma demande, mon ami M. Bourgoin, (Conser-
vateur de la Bibliothèque de Pondichéry, a bien voulu
s'enquérir des traditions qui auraient cours parmi
les Musulmans de Pondichéry et de Karikal, sur
leur origine. L'un d'eux lui a remis une note dont
voici la traduction :
« Hasan et Hucain, fils de Huzrat 'Ali Mortaza,
petits-fils du Prophète, furent invités à se rendre
auprès des habitants de Kufa qui leur disaient qu'ils
étaient prêts à les reconnaître comme les légitimes
successt^urs de Mahomet. Confiants dans ces pro-
messes, Hasan et Hucain allèrent chez les Koufiens
qui les assassinèrent de sang-froid.
» Un siècle après, Gengis-Khan, le conquérant
tartare, traversa la Perse et passa en Arabie dans le
but de se venger des Koufiens. Il les aurait exter-
minés tous, jusqu'au dernier, sans son ministre qui
lui persuada de faire transporter tous les Koufiens
màlesdans diverses contrées de l'Univers. Oiiatreo-ros
vaisseaux en furent remplis el partirent de l'Arabie.
— 140 —
» Un de ces vaisseaux arriva à la côte de Malabar,
près de Cochin ou de Tellichéry. Les trois autres
mouillèrent à Négapatam, à Madras et à Paliacate,
sur la côte de Coromandel. Toutes ces localités
étaient alors des villages de pécheurs très peu peu-
plés ; outre les marins {/nacoiias), il n'y avait que
des cânàrs (ceux qui extraient le suc du cocotier
pour en faire une boisson fermentée). Les Koufîens
débarqués, n'ayant point de femmes, car leurs
femmes et leurs filles avaient été réduites en esclavage
par les vainqueurs, s'unirent à des Indiennes et alors
commença la multiplication d'une nouvelle race.
)) Comme ils ne connaissaient pas la langue du
pays, les nouveaux débarqués répondaient toujours,
à toutes les questions que leur posaient les indi-
gènes : labbéik, avec le sens de « merci » ou « bien ».
C'est pourquoi les Indiens les appelèrent Lebhés ou
Levés. Les enfants nés des nouveaux venus et des
femmes du pays furent aussi appelés Lebhés à la côte
de Coromandel. Au Malabar, on les désigna sous le
nom de Mapplets {Màppillei}, qui veut dire « mari »
en tamoul, parce que, faute de connaître leurs noms
propres, on appelait « maris » /nàppillel les étran-
gers mariés à des femmes indigènes.
» Au commencement, les Lebbés furent pécheurs
ou fabricants de filets. Puis quelques-uns devinrent
tailleurs et prirent le titre de Choiilias, Chônavar,
ou Taynkkar. Leur colonie s'était augmentée,
ils se marièrent entre eux et cessèrent de prendre
des femmes du pays. Un certain nombre de Lebbés
abandonnèrent les villages de la côte et allèrent se
— 141 —
fixer dans les villes de rintérieiir en ([iialité de
marchands de poisson sec salé ; ils prirent des fem-
mes dans ces villes el s'y adonnèrent à divers tra-
vaux de culture. Ils formèrent alors la tribu des
Hdvoiilters ou Kayalers .
» Ceux des Lebbés qui tirent des voyages sur mer
[)our commercer, en qualité de marchands de tissus,
et qui acquirent ainsi de rargent, de la considéra-
tion et de rinstrut;tion, méritèrent l'appellation de
Mdrailikàyer (en fr. marécars) « grands hommes »
ou « maîtres hommes ».
» On appelle Tidiikhers tous les Musulmans en
général; Pafhans les conquérants venus du Nord,
qui ne sont pas unis à des femmes indigènes et
dont la race est restée pure ; Saïds ou M las les
descendants du Prophète. »
Suivant W. Logan {Malabar, Madras, (iov. Press,
1887), CJiônaha, qui est la forme littéraire de Chou-
lia, serait \\.\\q. altération de Yavanalca, Yonien,
Grec. Dans le Paijijaiu'ir pàl, le plus vieux poème
nialayàla connu, certains marins sont appelés 67/(9«<7-
vaii. Chônavaii, Chônagav, Chonaka, Jonaka sont
identiques. Il y aurait bien là un souvenir des ancien-
nes relations commerciales de Tlnde méridionale
avec les Européens.
M. Bourgoin ajoute, dans la lettre ([u'il m'a fait lo
plaisir de m'adresser : « Les ChoiiUas sont donc les
« matelots ». Aussi, à Karikal, les marins et les bate-
liers musulmans sont- ils ofliciellement appelés
« bateliers vhoidia^ » par opposition aux « bateliers
('((fcars^i ; ceux-ci sont des marins (\\\ rivai»"e Icarci),
— 142 —
déterre, d'eau douce, A Pondichéry, il y a la rue des
Choulias. Les Lebbés ou Levés, comme on dit à Kari-
kal (le mot est inusité à Pondichéry), exercent les
professions de marchands, boutiquiers, petits com-
merçants, etc. Devenus riches après avoir entrepris
des voyages sur mer avec des cargaisons d'étoffes,
ils sont très fiers de s'appeler Marccais.
Dans le ManuaL of the District ofTaiijore, par Ven-
kasamy Row [Madras, 1883), on lit, sous la rubrique
mixed races : « The community which comes pro-
minently to view under this head is that of the
tamul-speaking Mahomedans called Labbés ov Sona-
kars, a race of mixed Semitic and Turanian blood.
They are the descendants of the early colonists from
Arabia, who emigrated from their native land in the
early part of the eighlh century, in conséquence of
the tvrannical sway of Hijajben Yusef, and to whom
the coast line of Tanjore, as commanding a never-
failing Irade in rice with Ceylon, lield ont spécial
attractions. First establishing themselves, as else-
where, on the coast, they hâve in course of time crept
into the interior, and hâve everywhere adopted the
language of the country. In the absence of ail res-
traint, religions or social, they, on their first set-
tlement, took women of the lowest classes as both
wives and concubines, and also admitted into their
households, and made metnbers of their OAvn family,
young boys and girls of the same class, who were
either parted with for a considération or abandoned
by their relations during the prevalence of famine
aiid gcMieral distress. And the resulting cross-bi'ced
— 143 —
race, with f'ree concubinage and widow-niarriage,
lias lapidly multiplied and is multpilying.
» The Labhés who inhabit ihe coast hâve tlie hono-
rilic titie oï iuarakl{(iij(ii\ and those wlio hâve setlled
in llie interior ihat of raviiltar.
)) Tiie Labbé class constitiites more than ioiir
fiilhs ollhe Mahomedan population of Tanjore.
» Caste ruies, in respect ol" inter-marriage, are
now observed more or less, by ail classes oI Malio-
medans, the Labbcs nol excepted, but the custom is
récent. »
A propos du mot ravultai', M. Bourgoin écrit:
<» J'ai questionné, il y a déjà longtemps, à Ivarikal,
diverses personnes, sur la signilication de ce
mot, sur son origine, son étymologie ; et voici ce
qu'on m'a dit à ce sujet : certains Choulias ayant
renoncé aux métiers exercés tout d'abord par les
descendants des Arabes tuiis à des femmes de la
côte de Coromandel, devinrent agriculteurs ; leurs
mères étaient ou des veuves de la caste des Siirar
ou des filles de cette caste. Par une sorte d'ata-
visme, ils s'adonnèrent au travail des champs et
particulièrement à la culture du bétel; encore au-
jourd'hui, les plus beaux jai-dins de bétel sont
cultivés par des Musulmans. C'est ceux là rpii
ajoutent à leurs noms le titre de ravallar. »
Il est diflicile d'expliquer ce mot ravallar en ta-
moul ; il y a là évidemment des altérations profon-
des ; le dictionnaire de la Mission de Pondichéry le
traduit" cavalier». Macoaa, (ju'on a vu plus haut,
est proprement luukkuvan « pécheur «.
L
— 144 —
Quant à lebbé [Happai), le même dictionnaire le
traduit « marchand ». MM. Yule et Burnell, qui
récrivent liibbye, lubbee, rapportent Texplication de
M. C.-P. Brown pour qui ce serait une altération de
\irabi. Mais on y voit généralement Tarabe labbdik
« me voici, je suis à toi, je suis prêt à t'obéir, etc. ».
Marécar est proprement muraikkàyar, pour ma-
rakkâyar, et vient de maram « arbre, bois, vais-
seau »; c'est donc quelque chose comme « marin,
navigateur, armateur ».
Julien ViNSON.
SUR
l'iiiieiice fle l'ancieie IMrie sir la Russie aicieie
AU POINT DE VUE LINGUISTIQUE
I
Quelle inttueiKX rancienne ll)érie a-t-elle eue sur
rancienne Russie ? (blette question pourra bien
étonner quelques-uns, mais le fait de cette influence
est hors de doute.
Quelques auteurs trouvent l'influence de l'ibérie
dans une poésie populaire russe sur Thamar, reine
de Géorgie (XII® s.', dans Tarchitecture russe où Ton
remarque quelquefois des dômes coniques, reproduits
d'après ceux des églises géorgiennes, et dans récri-
ture slave, dont quelques caractères ressemblent à
ceux de l'écriture géorgienne dite klioiiizouri^ sacrée.
Les autres prétendent que l'ancienne Ibérie aurait
du avoir de l'influence sur l'origine même des
Russes. Par exemple, selon Rawlson, orientaliste
anglais, l'ancien Moscou avait été une colonie des
Mosches, peuple géorgien de la province de Mes-
chethi qui a joué un grand rôle dans l'histoire de la
Géorgie, et a donné à la patrie des noms illustres,
des rois, des hommes d'état, des écrivains et des
— 146 —
artistes. Procenco, auteur russe, dans un ouvrage
spécial, nous assure que les Variagui, invités par
les Russes et qui fondèrent le royaume de Russie,
étaient des Ibères.
Il est bien possible (|ue les opinions que nous avons
rapportées soient adoptées par les uns et rejetées
par d'autres à cause de Torigine qui sépare les Russes
indo-européens d'avec les (géorgiens sémites. Les
anciens peuples d'Urarthu et Helhi ', qui sont consi-
dérés comme les ancêtres des Ibères et des Armé-
niens, formaient, dans l'antiquité la plus reculée, une
puissante nation répandue dans toute l'Asie mineure
jusqu'aux sources de l'Euphrate. Par consécpient, ils
pouvaient être en contact avec les Slaves (jui, par
leurs invasions, atteignaient parfois même Constan-
tinople et les autres endroits peuplés aux bords de
la mer Noire.
Ce sont ces circonstances qui firent naître che/>
quelques auteurs le désii' de rechercher l'inlluence
de ribérie aussi sur la langue russe. Dans ce but,
Moïse Djanaschvili a d'abord essayé de comparer
quelques formes grammaticales russes avec celles du
géorgien. Il nous a montré, dans la revue géorgienne
Moambé (Le Messager), d'une manière assez persua-
sive, que oscha, terminaison de la troisième personne
du pluriel du passé des verbes slaves, n'est autre
chose que es des verbes géorgiens pris à la même
1. Ne sont-ils pas équivalents aux formes géorgiennes IJii'thl,
qui veut dire le pays d'Ur, et He/hi, le pays de Hi. On pourrait
les traduire, en arménien, Vmsiaii. la (Jéorgie, et Hahistan,
l'Arraénie.
— 147 -
personne, au même nombre et au inème temps.
Ensuite c'est L. Lopatinsky qui a lu en russe, dans
la Société archéologique de Tiflis. un exposé spécial
sur(Hî (|uele suffixe russe shy, employé pour (|uelques
adjectifs, n'est que sqiia qui, en mingrélien, dialecte
géorgien, veut dire « le fils w et dérive d'une racine
géorgienne su ou schii, d'où scJtuili « le fils ». Le
qn y est aspiré aussi bien que dans les mots min-
gréliens tchqainii « mon » (géor., tchemi), squani
« ton » (geor., scheni), et géorgiens qumariu le mari »
(svane, dialecte géorgien, mare; arménien, /^zr/zr/) et
quvrivi « le veuf» (arménien, aïri).
Jusqu'à présent, les recherches sur la question se
sont arrêtées à ce point. La philologie comparée est
bien le moyen de recherches le plus rassurant et c'est
pour cela que nous avons pris le parti d'expliquer
(|uelques faits de la philologie russe qui restaient
inexpliqués.
La langue .russe emploie, pour le superlatif, le
sulfixe e/.sY'A?, qui n'est que esi, employé en géorgien
pour le même degré. Les lettres s et sch ne sont
que les expressions des sons sifflants qui se rem-
])lacent l'un par l'autre. Le sens du suffixe géorgien
esi reste pour nous inconnu et il ne sert qu'à indiquer
la comparaison des objets.
Pour exprimer le genre féminin, la langue russe
emploie souvent le suffixe hha , mais sa signification
i-este pour les Russes inconnue. Dans les inscriptions
cunéiformes laissées par le peuple d'Urarthu et
Hethi, les cunéologues rencontrent souvent le suflixe
khi qu'ils traduisent « le fils ». Or, le nom Cardii-hhi,
— 148 —
que les anciens Grecs donnaient aux (léorgiens.doit
se traduire « le fils de Cardii », en géorgien Qnaithu,
d'où quarihueli, nom que les Géorgiens se donnent
à eux-mêmes. Aussi entendons-nous le sulïixe lîhi
dans le nom slave variagai, « issus », selon Procenco,
« des Ibères ». Par consécjuent, variagai devrait
indiquer « le fils d'Ur». Ce nom donna l'origine aux
termes Vraslan et Vii\ employés par les Arméniens
pour désigner la Géorgie et les Géorgiens, d'oii
dérive à son tour l'iêv^pta classique, llest à remarquer
que le suffixe khi, comme tel, se retrouve dans un
seul mot géorgien, zrohJia « la vache », et comme
racine aussi dans un seul mot inkhevali, qui veut
dire « la fille ». Mais, en mingrélien, dialecte géor-
gien, il existe toujours enqualité de sufiixe ets'emploie
quand on veut indiquer une naissance de la fille, par
exemple dadikhé i(. née Dadiani ». Aussi s'emploie-t-il
en arménien pour indi(juer le genre féminin, par
exemple varjouhi « Tinstitutrice «. Après cela, il est
évident que le suffixe russe k/i a sevl aussi à indiquer
le féminin. Les mots russes po/inik/i(t « une tailleuse »,
starukha « une vieille », povarikha « une cuisinière»,
ne peuvent être expliqués autiement ({u'à Taide du
suffixe khi.
Pour quelques noms substantifs, les Russes
emploient le suffixe ai\ par exemple pakhar « un
laboureur », buiitar « un révolté », zvoiuir « un
sonneur ». Ce suffixe-là nous rappelle (iri (|ui dérive
de «/•, a est^ et s'emploie en géorgien pou r les parti-
cipes et les noms substantifs, par exemple maqnéhuri
(( louant», nctqaébaii « loué », saqnéburi « à louer».
- 149 —
odiscliari c un liabitanL d'Odischi n. Les mots mtsqrali
« fâché », mUhrdall « timide », nous représentent
les formes avec changement de r en /devant/' radical.
Aussi quelques noms substantifs russes ont-ils
parfois le sufiixe idii^ par exemple smutian « un tra-
cassier», huUtii « un insensé ». Ce sufïixe n'est que
le iani du géorgien, employé quand on veut répondre
à la question avec quoi?, par exemple inadiani « capri-
cieux ». Les Arméniens s'en servent aussi pour indi-
(juer le nom du père, par exemple Petros Mdrcoséan
« Pierre fils de Marc ».
Nul doute que quelques linguistes trouveront
ridentité des sufïixes géorgiens ari, ali et iani avec
a/'ins, alis et ianus employés dans la langue latine
avec le même sens. Mais je dirai à mon tour que cette
identité des sufïixes géorgiens et latins va nous inté-
resser plus encore en présence d'une grande multi-
tude de racines primordiales communes que nous
rencontrons dans les deux langues parmi lesquelles
il y a, comme on le sait, une grande différence
d'origine.
Après cette hypothèse de Trombetti suivant laquelle
les langues aryennes et sémitiques auraient une
seule langue pour mère, surgit une question : le
géorgien ne paraît-il pas être le prototype de la
langue mère, cherchée par Trombetti ?
II
A l'époque païenne, quand il fallait immoler
quelques animaux pour rendre les dieux cléments,
— 150 —
les Ibères avaient Thabitude d'immoler un veau, en
géorgien zuaraki^ de ziiara, et Tarte d'inimohition
s'appelait zorva [ua = o), qui, plus tard, s'est changé
en tzirva « la messe ». Le mot russe jeilva « la vic-
time », donty'e/' est une racine, nous rappelle bien le
o-éoreien et devait siernifier, au commencement, une
offrande de veau.
L'action du zorva, dans l'antiquité, avait lieu sur
les places publiques ou foires. Aussi les Russes
auraient-ils dû accomplir le jertva à leur vetché (\\\\^
étant une place publique, formait en même temps
la foire, le lieu des discussions. Ce qui nous le
confirme, c'est le forum des Latins {fari, parler) et
l'àyopâ des Grecs (àYopditoiJta!,, parler) où, comme nous
le savons, avait lieu l'immolation des veaux, ainsi
que les discussions concernant les affaires publiques
et la vente, à savoir la fixation des prix. Le mot
géorgien btché « un juge », dont la racine est htch
ou vlch et d'où dérive le verbe arménien vtclirel
« fixer, marchander » et le mot géorgien vatchari
« un marchand», n'est que le prototype du vetché des
Russes. Ainsi vetché devait d'abord indiquer le juge,
comme veut dire le Z>/rAe des Géorgiens, mais ensuite
il était rattaché à une place oii avaient lieu le jugement
et la vente. 11 est complété d'un e ainsi que vetcJi,
qui veut dire en arménien «la dispute ». Les usages
du vetché russe étaient les mêmes que ceux du
forum latin, de rà-j-op^ grec et pour les ancêtres des
Géorgiens et des Arméniens (avant Tarianisation de
l'arménien); le mot Uiparaki, qui veut dire en géor-
gien « la discussion », a conservé dans la bouche des
— 151 —
Anrumiens le s(mis de « placée publique n, comme
nous le montre le mot liraparak.
Les Russes étaientdes agriculteurs et nous trouvons
clans leur langue les termes propres à Tagriculture
comme pakluil « labourer» et plug « la charrue ».
Mais que veut dire le mol sokha qui, en russe, a le
môme sens que plug ? Ce terme, par sa forme et sa
signification, nous rappelle le sakhiiisi des Géorgiens
qui signifie proprement « à labourer». La racine en
est kluin, d'où khiuiva ou khvnvd, vulgairement
khvna « iajjourer ». Sa en est le préfixe et isi n'est
que la terminaison que l'on emploie parfois |)our
indiquer le participe futur passif. L^a racine khan
représente un développement de Tancien kku, ainsi
que le sii/U des Latins à Tégard de la forme slave siif^
qui a le môme sens. Le u a disparu dans sokha, ainsi
que dans sakhnisi, mais ce qui est à remarquer dans
sokha, c'est qu'il a conservé le préfixe so, qui est
é(juivalent au so^ des Géorgiens que l'on rencontre
seulement dans deux mots, somekhi u l'arménien »,
soplieli « le monde, le village ».
(Qu'est-ce que le mot jat, qui veut dire en russe
« moissonner » ? Ce mot, ainsi que siiop « la gerbe »,
nous rappelle le mot géorgien zna « la gerbe ». La
lettre a, en slave, se prononçait e«. Nous en sommes
assurés par sa conjugaison : jnu « je moissonne »,
jiiesch « tu moissonnes », etc. Au mot géorgien ziia
se rattache aussi le troisième mot russe zerno, qui
1. Ses autres formes sont : su, rencontré dans le mot suphéra
« le royaume », se, dans sephè « royal », et st, dans plusieurs mots,
à savoir, sitqua « dire », sirhili « courir », etc.
— 152 —
signifie « le grain » et qui aurait dû auparavant expri-
mer seulement « le grain de blé ». La racine de zerno
est zen, r n'y est qu'une aspiration. Zen nous rappelle
la racine géorgienne Izen, d'où les Izentzis « pousser »
et Izanel, des Arméniens, qui veut dire « semer »,
sans aucun doute, et ces mots sont dérivés de zna,
dont la racine s'entend mieux dans le mot snop.
Dans l'histoire de l'évolution des principes de la
religion, de la politique et de l'agriculture dans
l'ancienne Russie, les termes vietche, jertva^ sokha^
jats, snop et zerno doivent, sans doute, avoir une
grande valeur, mais, pour mieux les comprendre, il
faut que nous cherchions leur origine et leur expli-
cation dans la langue des Ibères ou Géorgiens
actuels.
La philologie slave, à l'aide du géorgien, pourra
expliquer beaucoup de choses au premier abord
inexplicables, si messieurs les slavistes se mettent
à étudier la philologie géorgienne.
Pierre Mirianischvili.
Tittis' le 20 mars 1907.
A SYNOPSIS
ANALYTICAL AND QUOTATIONAL
of llie .138 Forms of the Verb, iiscd in tlie Epistle to
the Hehrews, as foiind in the Baskisli New Testa-
ment oï Jean de Liearrague, printed in 157 1, at La
Rochelle .
'Ou paotov aTCav-a- jjixvfJavî aévxoi oaa xscpaXauôoTj (Lucieil,
Dialogue des Morts, 17).
[The alphabelical order hère assumed is \, B, C
and Qu = K, D, E, G, l, L, N, T, ÏZ and Z and C
and Ç = Z.]
AC. 1. Impératif singulier 2'' personne, régime sin-
gulier, adressé au masculin \ auxiliaire
actif. Hâve thon it, o mon!
1. Du tutoiement masculin, on voit dans cette Epître les 22 mots
que voici : Ac, Deçân, Diaudec^ Die, Diraueat, Dituc, Dituc,
Ditzân, Diaucac, Drautac, Duc, Duc, Nauc, ez Taquiâla, ez Teçàla,
ezTituc, ezTituc, ezTuc, Çayân, Çaic, eTZaizquic, eTZiayôc.
Le tutoiement dans l'Evangile de St Marc, que nous avons
étudié dans \z.- Revue de Linguistique (1898-1903), contient les
83 mots que voici :
Masculins (c'est-à-dire en s'adressant à un homme). 75 : Ac,
Aguc, Auc, Daquiala, Daquizquic, baDacusquic, baDacussac, Da-
guiadan, baDaguic, baDeçac^ Deçânçat, Diabiltzac, baDiacusquiat,
Diagu, Diarioc, Diat, Die, Dié, Dieçadan, Dilioac, Dioc, Diossat ,
11
AIZ
. 7.
1.
o.
1.
11.
1.
12.
5.
5.
5.
6.
— 154 —
8. 5. , . . , Bada iKUssr/r. . . Or voy
y\DI. 1. Imp. siiig., 2* p., auxiliaire. Be thon !
1. 13. . . ., lAR adi ene escuinean, . . ., Siez-toy à
ma dextre.
Indicatif présent, 2, verbe substantif. Art.
. . . , PJne Seniea aiz hi, . . . , Tu es mon Fils,
. . . , baina hi permanent aiz : . . . , mais tu es
permanent :
... : baina hi hura bera aiz, ... : mais toy,
lu es vn mesme,
. . . , Ene Semea aiz hi, . . . , Tu es mon fils,
..., Hi AIZ Sacrificadore ..., Tu es Sacri-
ficateur
7. 17. . . ., Hi AIZ Sacrificadore . . . (Hautin mit aiz,
parce que Liçarrague avait lu « 'Ot-. Tj'ispko; ».)
. . . , Tu es Sacrificateur
7. 21. ..., Hi AIZ Sacrificadore ..., Tu es Sacri-
ficateur (H. mit aiz, parce que L. avait lu
AICExX. 1. I. q. aiz, auxil., avec e euphonique devant
// conjonctif. Thaï Ihon art.
Diraucuc, Diraueat, Dituala, Dituanac, Dituc, Dituc, Drauat,
Drauc, Ditzân, Drauzquiân. Duân, Duanâ, Duana, Duc, Duc,
Eyec, Eçac, Gaituc. Gaitzac, Gaitzaizquic, Guendiquec, leçaguc,
lieçagun. lecec, letzéc, Itzac. Xauâla, Nauc, Nauc, Xeçaquec,
Neçan, Nitziayec, ikusQuic, ezTaguioala, ezTeçâla, ezTerreola,
ezTerroan, ezTié, ezTituc, ezTuâla, ezTuc, ezTuc, ezTsea-
quiagu, Çaic, Caizquic, baCeaquiat, baCeaquiagu, Cieçan et
eTZieçan, Cieçateân & eTZieçatean, Cioc, Citiagu, Citiat, Ciluio.
Féminins, 8: Dionân, Diosnat. Draunat, Dun, ezTinàt. ezTun,
ez Tun, eTZ«aquinat.
— 155 —
2. 6. ..., harcaz ohhoit aicen? ... que tu as
mémoire de luy ?
AICENEAxN. 1. I. q. «/s, aux. e euph., il pronom rela-
tif temporel décliné au temporel [iiean =
quand). W'hcii tlioii a ri.
12. 5. ... haroaz corregitzen aicenean.
. . . quand tu es reprins de luy.
AV. 1. fndic. prés., s., 3, rég. sing., 2® pers., aux.
act. Ha s thee.
l. 9. ... : halacotz u^ctatu ukan an laincoac,
eure laincoac ... : pour ceste cause Dieu,
ton Dieu t'a oinct
A\'r.7. Ind. prés., s., 1, r. s., 2" p., aux. act. / liave
thee.
1. 5. ..., nie egun engendratu aul lii ? ..., ie
t'ay auiourd'huy engendré ?
2. 12 eta Eliçaren erdian laudaturex aut hi.
. . ., &; te loueray au milieu de rassemblée.-
(The greek text lias no équivalent Ibr eta
or k.)
PS. 5. . . ., nie egun engendratu aiit hi.
. . ., ie t'ay engendré auiourd'huy.
6. 14. ..., Segtir bbnedigatuz benedicaturen aat.,
eta MULTIPLICATUZ MLLTIPLICATUREN ail t.
..., Certes ie te beniray abondamment,
tk te multiplieray merueilleusement.
13. 5. ..., Ez««^ UTziREN, eta ez««// abandonna-
TUREN. . , ., le ne te laisseray point, & ne
t'abandonneray point.
AVÇVE. 2. Impér. pi., 2, r. s., aux. act. Ha^e ije it !
— 15G —
3. 12. GOGor/uçiic, anayéac, Frères, prenez garde
12. 25. REGvinauçue . . . Voyez
BEDI. 1. Imp. s., 3, aux. Be //, let if be !
13. 1. Charitate fraternala egon bedi . Que la cha-
rité fraternelle demeure,
BEÇATE. 1. Imp. pi., 3, r. s., aux. act. Let Ihcm havc
Him !
1. 6. ..., Ela ADORA beçale hura laincoaren
Aingueru guciéc, M. omit la virgule.)
.,., Et que tous les Anges de Dieu
l'adorent.
BlPiE 1. Imp. pi., 3, V. subst. Be they^ let them bel
13. 5. Ciien conditioneac bire auaritia Sfabe,
Que vos mœurs soyent sans auarice,
HAlCAPiA & GARA. 14. Ind. prés., pi. 1. We are.
[Cara is probably more ancient than gara.
Many instances prove that an initial g in
the Baskish of the IGth century, where our
sludy of it finds its beginning fixed by
cruel destiny, represents an earlier k or
hard latin c.)
2. 5. . . . , ceinez MiNÇO bairrt/7? ; ..., duquel nous
parlons.
3. 6. ... : ceinen etchea baicARA gu, ... : du(|uel
nous sommes la maison,
3. 14. Ecen Christen participant eguin içan ga/a,
. . ., ceinez sustengatzen hiàca/a, Car nous
sommes faites participans de Christ, . . . de
nostre soustenance (voyez baDeçagu).
— lo7 —
4. 3. Eceii SARTHLRKN gara reposean <jii, (Gainons
. . . entrerons au re|)OS,
6. 9. Baina skglhatzen stti'(t ■ ■ . '• luinela minco
hagara-ere. Or nous-nous sommes pei-
siiadez . . . , ia soit que parlions ainsi.
7, 19. ... ceinez HURBiLTZE>- halcara laincoagfana.
o
. . . , par laquelle nous a()pro(;hons de Dieu.
10. 10. Cein vorondatez sanctificati ican bai^Y//Y/,
Par laquelle volonté nous sommes sanc-
tifiez,
10. 39. Baina gu ez gaha (11. mit guezgara; Me'is
nous ne sommes point
12. 9. ..., eta vicico ha'icara? ..., & viurons?
12. 25. ..., gu anhitzez guehiago pumturen gfffa,
. . ., nous serons punis beaucoup plus
13. 18. ... : ecen asseglratze:^ gara ... : car
nous-nous asseurons
baiQVIRAïE. 1. Ind. fut., pi. 1, v. s. It is the old lorm
of souletin gairate. (See Inchauspe, Le
Verbe Basque, 18.58.) We sliall be.
12. 28. ... non haren gogaraco baiguiRATE, . . . , tel-
lement que luy soyons agréables
DA. 62, Ind. prés., s. 3, v. s. et aux. Is.
2. 2. Ecen baldin ... hitza fermu içan ba«frt, Car
si la parole ... a esté lerme :
2. 6. . . ., Cer da guiçonà, ... ? edo cer da gui-
çonaren semea, . . . .' . . . , (Urest-ce de
l'homme ... ? ou qu'est-ce du fils de
l'homme ... .' (H. mit car da, parce que
dit 7] ulôç àvGpWTTOU, sans verbe.)
— 158 —
2. 14. . . ., hura-ere halaber participant eguin iraii
da hetan beretan, . . ., luy aussi sembla-
blement y a participé,
2. 18. ... AiUTATZECo botheretsii da, ..., il est
aussi puissant à aider
3. 3. ... «loria handiagoren digne estimatu içan
da, . . . est réputé digne de plus grande
gloire
3. 4. Ecen etche oro norbeitez edificatzen da :
.... laincoa da. Car toute maison est édi-
fiée de quelqu'vn : . . ., est Dieu.
3. 5. Eta segur Moysesfidel IÇAN drt. ...Or bien est
vray que Moyse a esté fidèle
3. 6. Baina Christ semé beçala da bere etchean :
]\Iais Christ est comme fils sur sa maison :
3. 17. Baina ceinéz enoyati içan da berroguey
vrthez ? Mais desquels a-il esté ennuyé
quarante ans? (H. mit 27.)
4. 10. ..., REPOSATUi'rrt/î c?« hura-ere bere obretaric,
. . . , s'est reposé aussi de ses œuures,
4. 12. Ecenlaincoarenhitza vicif/<7etaefiicaciotaco,
... : eta da . . . iuge, (H. omit ce point).
Car la parole de Dieu est viue kS: d'eliîcace,
. . . , kk est iuge (H. mit vici d((, parce que
L. a lu ^wv yàp ô Xôyo^, sans verbe.)
5. l. E(;eii Sacrificadore subirano gucia guicone-
taric HARTZE.N (/a, eta s'uiconenci-atic ohde-
NATZKN da laincoa baitharaco gaucelan :
Or loul souuerain Sacrificateur se prend
d'entre les hommes, »S: est constitué pour
les hommes es choses <|ui se font ciincrs
Dieu :
159
o
13. ... : ecen liaoïir da : ... : car il est eiilant.
5. 14. Baina handitlentzat da viaiida carratua,
Mais la viande ferme est pour ceux cjui
sont desia tous grans,
fî. 8. . . ., REPROBATUA da H. mil f/rt parce queL. a
lu ioô/.'.ijio^, sans verbe) ..., est reieltee,
7. 2. ... : eta lehenic luira da interpretatzen
iustitiazco regue, ... : tk premièrement
est interprété Roy de iustice :
7. 7. ... BENEDiCATZEN <:/«. ... est bénit
7. D. Eta . . . Abrahamtan detchematl iraii da
Leui bera-eie, El . . ., Leui mesme ... a
esté dismé en Abraham.
7. 12. Ecen Sacrificadoregoareu ofïicioa cambiatl
iÇANic, necessario da . . . Car l'office de Sa-
crificature estant changé, il est nécessaire
7. 14. Ecen claro da ... Veu qu'il estoil notoire
(L. traduit « est clair », parce qu'il a lu
TCoôoTjÀov, sans verbe. Dans quelques éditions
Calvin aussi avait traduit « est ». Pour-
quoi donc Haulîn n'a-t-il pas nns da'}]
7. 1.5. Eta are haur da claroago, Et d'auanlage
ceci est encore plus manifesté, (H. niit(/r/,
bien que le grec dise b-:-./).
7. 18. Ecen aitzineco mananiendua abolitzen da
. . . Cav il se fait abolition du mandement
précèdent
7. 19. ... : baina içan da speranca hobeagoaren
preparationebat H. mit «. icaii da »
... : mais a esté vne seconde introduction
de meilleure espérance,
— 160 —
7. 22. Hambatenaz alliança hobeagoren fiadore
EGUiN içan da lesus. D'autant lesiis est
fait pleige d'vn meilleur Testament.
8. 1. Bada . . . sommarioa haiir da, Or la somme
. . . est., (H. mit da parce que le grec
n'exprime pas est].
8. 3. ... donoén eta sacrificioén offrendatzeco
oRDE^'ATZE^' (la : bada, necessario da
. . est ordonné pour offrir dons & sacri-
fices : parquoy il est nécessaire
8. 10. Ecen haur da . . . Alliança, Car voici le Tes-
tament (It is remarkable that da should
not be in Italie hère, because the équiva-
lent is not found in the Greek, and in the
French one reads, cest que).
9. 2. Ecen Tabernaclea edificatu içan da, Car le
tabernacle a été construit,
9. 12. ... behin sarthu içan da leJca sainduetan
redemptioneeternala 015TENITLHIC. ....est
entré vue fois es Lieiiv saincts, ayant
obtenu vne rédemption éternelle.
9. 15. Eta halacotz da Testamentu berriaren arar-
teco, herioa artean iarriric. Et pourtant
est-il Médiateur du nouveau Testament, . . .
la mort entreuenant
9. 16. . ,. . , necessario da . . . , il est nécessaire
9. 17. Ecen testamentua hilétan confirmait da,
Car le Testament est confermé es morts :
9. 20. ...,HaurDA ... odola. ..., C'est ici le sang
9. 23. I5KIIAH iran da beraz ... lia l'alu doue
I
— 161 -
9. 26, ..., bere biiriuizco sacrificioa/ comparitu
içaii da. ... il est comparu . . . par le
sacrifice de soy mesme.
10. 7. ... (liburuaren HATSE.4N scRiBA.TU.\ da niçaz)
... : au commencement du liure il est
escrit de moy,
10. 12. Baina haur sacrificio bakoitzbat bekatuacga-
tic OFFHENDATUHic, eternalqui iarria da
Jaincoaren escuinean. Mais cestui-ci ayant
offert vn seul sacrifice pour les péchez,
est assis éternellement à la dextre de Dieu.
10. 16. Haur da . . . alliançà, C'est ici Talliance
10. 23. (ecen fidel da ... : car ... est fidèle : (H, mit
d(t^ parce que L. a lu r-.cr-o; yàp, sans
verbe.;
10. 30. ..., Eue DA MENDECATZEA, ' ..., A HÎOy CSt
la vengeance,
10. 31. Gauça horriblea DA lainco viciaren escuetara
ERORTEA. C'est cliose horrible de cheoir es
mains 4© Dieu viuant.
10. 37. ... ETHORRiREN f/«, ... viendra,
10. 38, Eta iustoa l'edez vicico dd : Et le iusle viura
de foy :
11 . 1 , liada, fedca da . . . Or la foy est
11. 4, : eta oraino . . . minço du. ... : & ... parle
encore
11, .1. Fedez Henoch eraman ican da , Par foy
Henoc a esté emporté
1. From xnndica pronounced hindica. Cf. mena, nwa = mincy
from cfiia — bcna, cein of métal.
— 162 —
11. 6. Bada impossible DA l'ede ^abe A«/e/; gogaraco
içATEA : . , . , BEHA» dci . . . Oi* il Gst impos-
sible de luy plaire sans foy : ... il faut
11. 12. Ela Ifalacotz batetaric (etare ia hilaganic
soRTHU içciîi da gende haiidi . . . Pourtant
aussi d'vn seul (voire mesme amorti) sont
nais de gens en Dinllilude
12. 2. ..., eta laincoaren thronoaren escuinean
lARHi içaii da. . . . , & s'est assis à la dextre
du throne de Dieu.
12. 7. ... : ecen cein da haourra ...?...: car (jui
est l'enfant ... ?
12. 20. ..., LAPiDATURKiN dci edo gueciaz' iraganen
da. ..., elle sera lapidée, ou percée d'vn
dard.
12. 29. Ecen gure laincoa . . . ua. Car aussi nostre
Dieu est (L. wrongly omits « xà-. », « aussi » )
13. 4. Honorable da gucién artean ezconçà%
Mariage est honnorable entre tous,
13. 8. ..., hura bera da eternalqui-ere\ ..., est
aussi le mesme éternellement.
13. 9. ... : ecen on da ... : car il est bon.
13. Colophon. Hebraicoetara SCRIBATU icon da
Il alla rie Timalheorequin. Ku noyée d'Italie
par Timothee.
1. L. translates d du dard o. The woid is Latin çiœsi, ifesi,
which D' J. Rliys takes to be Gaulish. Cf. 'jucci Epli., 6, 16. See
tbe Diccionnario Bilinfjnc, of D. J. Fiancisfo de Aizquibel.
2. In thèse verses Hautiii put '/" because Ihe Gi-eek has no
équivalent of « est ».
— 163 —
DABIL'FZALA. i. Ind. prés., pi. 3, avec la (^onjonc-
tif = que, verbe irrég. intr. ehil. ThaL
they Hrilk.
il. 14. ... ecen ^e/e herriaren ondoan dabiltza.la.
. . . qu'ils cerchent feu/- païs. ot-. -a-rp-oa
ÈTT'.^TjTO'Jat.
f
DA(^)VlpN. 1. Subj. prés., s. o, r. i. s., aux. f/ial il
bc lo Hini.
6. 10. ..., AHANz daquiôn çuen obra, (H. omit la
virgule) . . . , pour mettre en oubli vostre
œuure (L. translates « that it be to Him
forgotten »).
baDAQVlÇVE. 1. Ind. prés., pi. 2, r. s., v. irr. act.
taquin.
12. 17. Ecen bauAQUiçuE are ... Car vous sçauez
baDACVSSAGV. 1, Ind. prés., plur. 1, r. s., v. irr.
act. ijxus.
3. 19. Ecen baoACUssAGL . . . Ainsi nous voyons
ba DADI. 1. Hypothétique prés., s. 3, aux. If lie be.
10. 38. ... : baina baldin cembeit apparta h-^dadi,
... : mais si quelquvn se soustrait,
DADIN. 3. Subj. prés., s. 3, aux. That it be.
7. 12. ... Leguearen cambioa-ere eguin dadin.
. . . qu'il y ait aussi changement de Loy.
12. 13. . . ., bainaitzitic sendo dadin. . . . , mais que
plustost il soit remis en son entier.
13. 9. ... bihotza gratiaz confirma <:/ftf//;?, .. que
le cœur soit establi par grâce,
DADN'GAGVN. 3. Impératif, pi. 1, r. s., v. irr. act.
eduki. Let us hold it !
— 164 —
4. 14 DADUCAGUN confessioiie //«///• tenons
la confession.
10. 23. Eta iKUCiRic gorputza v r chaliuz, dadlcv-
GUN^f^/'esperançaren confessionea variatu
gabe . . . 10. 22. . . . , & le corps laué d'eau
nette : Tenons la confession de nostre
espérance sans varier (H. pul giu-e because
the Greek lias not the équivalent of
« nostre ». L. in some places départs froni
Galvins division of the verses, e. g. raicii
il.;
12. 28. . . . , DADLCAGUN gratià, ..., l'etenons la grâce
DAGVIGV. 2. Ind. prés., pi. 1, r. s., v. iii. act. cifuin.
Ile make it.
2. 3. ..., baldin hain saluamendu handiaz centu-
rie ezpaDAGUiGU ? FI. omit la virgule,
comme aussi Timprimeur Lyonnais)
. . . , si nous mettons en nonchalance vn si
grand salut, (L. translates « if \ve make not
any account », for àijtsÀYJ^xvTE; .
10. 26. Ecen baldin iaquiaha bekatu bauAGUiGu'
eguiaren eçagutzea recebitiz gueiozlic,
Car si nous péchons volontairement après
auoir receu la cognoissance de vérité,
DAGVIGV.X, 1. Impér. , pi. 1, r. s., v. irr. act. eguin.
Lel tis iiKihe il !
1. Ba , the complément of lntldui, meaning if. is probably a
more récent form of pu, whicli remains unchanged \\ lien it lias
the négative <v as a prefix.
— ir.5 —
4. II. DAGiiGUN^ bâcla diligentia repos liartan
sARTZEKA : F]stiidions-nous donc d'entrer
en ce rej)Os-là :
DAGVIÇVEN. 1. Siibj. prés., pi. 2, r. .s., v. irr. act.
eguiu. Thaï ye may do it.
13. 19. ... haur daguiçukn, ... de ce faire
DA(tO. 1. [nd. prés., .s. 3, v. neutre irrég. egon.
Remains.
7. 3. ,..: baina laincoaren Semearen irudico
EGUiN iÇANic, DAGoSacrificadore eternalqui.
. . . , mais estant fait semblable au Fils de
Dieu, demeure Sacrificateur éternelle-
ment.
DAGOCA. 1, Ind, prés., s. 3, r. i. s., v. irr. neut.
egon. Remains to il.
8. 13. ... ABOLiTU içATEABi hurbil DAGOCA est
près d'estre aboli. (En basque « à Testre »,
içateari.)
DAGOELARIC. 1. I. q. dago, avec e euphonique
devant laric participial. While He sfays, He
staying.
10. i'^. ... BEGUiRA DAGOELARIC, Attendant ce
DAIDIDAN. 1. I. q. daidit. Potentiel futur, s. 3, r. s.,
r. i. s. \y^ pers., avec da euph. pour t
devant n pron. rel. =zque; [Thaï) n'hich he
may do to ?ne\
1. Tins Word is but chif/nù/u with the sutBx n = '/ne the con-
junction. It is not only imperative in sensé, but expresses the
conjunctive or subjunctive mood.
2. This is an unfortunate homonym of daididan. of the Hrst
— ine —
13. 6. ... gniçonac ah\l daididan gaiicaren.
. . . chose que l'homme me puisse faire.
DAITEQVEEN. 2. Pot. prés., s. 3, e euph. devant n
rel. nom. ^=qui, aux. [That] n'hich caii he.
12. 18. ... escuz HUNQUi ahal daitequeen mendi
batetara, ... à vne montagne qui se puisse
toucher à la main,
12. 28. Hunegatic higli ecin daitequeen résuma
... le royaume qui ne peut estre esbranlé
DAITEQVENA. 1. 1. (\. daitequeen, i{éc\. ace. That
a-hich can ht.
6. 17. ... fermetateMUTHA ECIN fZ<7//e^//,e/<« ebacutsi
NAHiz, ... voulant ... monstrer Timmuable
fermeté
DAITEN. 1. Pot. prés., s. 3, aux., n rel. nom. = qui .
[That] which can be.
11 . 12 . . . . , eta itsas costaco conta ecin daiten sablea
beçala. . . . , & comme le sablon qui est au
riuage de la mer, lequel ne se peut nom-
brer.
DAITEZQVENEZ. 1. Pot. prés., pi. 3, n rel. nom. pi.,
déd. médiatif indéterminé, aux. [nez^^par
(choses) qui.] By tltings ^vliich can be.
6. 18. Bi gauça mutha ecin daitezquenez . . . |)ar
deux choses immuables
DATENIC. 1. Ind. fut., s. 3, n rel. nom., décl. partitif
person, the conjunctive of daidit, St I>uc. 16, 3; St Jean, 5, 30.
See St Matt., 26, 36 ; St Mark. 14. 32, daididoiw; St Matt-, 9, 28,
daididala.
— 107 —
indéfini, verbe subst. Sornel/iins^ n'/iic//
s ha il b(i.
13. 21. ... euelan haren aitzinean placent datenic,
... en vous ce qui est agréable deuant luy,
baDATOR. 1. Ind. prés., s. 3, v. irr. passif e^Ao/Ti.
Cornes.
13. 2.). baldin sarri banATOR) ..., s'il vient bien
tost .
DAVDENEV. 1. Ind. prés., pi. 3, n rel. nom. pi. ^qtii ,
décl. dat. pi. déterminé, v. irr. neutre egon
[ney = à ceux qui). To tliose a' ho unit.
\) . 28. ... haren beguira daudeney sahiamenduta-
cotz. ... à ceux qui l'attendent à salut.
DAVDP:CENÇAT. l. Subj. prés., pi. 3, décl. destinatif,
v. irr. neut. egon. To the end iJiat thei/
reinain.
12. 27. . . . DALDECENÇAT. .., afin que ... demeurent.
baDAÇAGYGA'. 1. Ind. prés., pi. 1, r. s., v. irr. act.
ecagun. IVe know it.
10. 30. Ecen banAÇAGUGU ... [voyez du en a) ... Car
nous cognoissons celuy
DELA 11. I. q. lia, avec la conj. = que. That it is.
2. 9. ..., gloriaz eta ohorez coroatl içan delà:
. . . estre couronné de gloire & d'honneur:
7. 8. ... : baina han vici delà ... : mais . . . qu'il
vit.
7. 14. ... ludaren leinutic ilk[ ican delà gure
launa, ... que nostre Seigneur est issu de
luda,
— 168 —
10. 25. . . . HURBiLT/EN (lelo egLin hura. ... le iour
approcher.
11. 3. ... laincoaren hitzaz mundua eguin içan
delà : . . . que les siècles ont esté ordonnez
par la parole de Dieu, (L. is hère indepen-
dent of the Greek as well as of Calvins
French.)
11. 6. . . . ecen laincoa baDELA, eta ... recom-
pensaçale delà. . . . que Dieu est, ia qu'il
est rémunérateur (L. mit laincoa en ita-
lique parce que le grec ne dit pas Dieu
mais ù-ut l'a-ut.)
. . . bozcariotaco delà, . . . estre de ioye,
. . . , REFL'SATU icaii (leUi : . . . que . . . , il fut
reietté :
, . . gare anaye Timotheo largatu içan delà,
. . . que iiostre frère Timothee est deliuré,
Gratia delà çuequin gucioquin. Grâce soit
auec vous tous.
E.-S. Dgdgson.
{A suivre.)
12.
11.
12.
17.
13.
23.
13.
25.
L'HYPOTHÈSE
CONTRACTIOMÉÏÉLATRICE D'ÉTYIOLBWES liû-ElûfÉEMES
1° imber, uinbra, ôfxêpoç, etc.
2° [JLéyaç, {JLeyàX-'/], mille, etc.
T
Le latin luiibra « ombre », pour *uinber-a, est
proprement le féminin régulier du latin iinber
« pluie », (( nuage », « eau ». De son côté, le grec
o;ji6'p-o(; « pluie », peut être considéré comme la forme
masculine du même mot. Enfin le neutre correspon-
dant ne faisait |)as défaut dans la langue mère : le
sanscrit l'a conservé sous la forme du mot ablir-am
pour ^abha/--am, *ainbhar-ain, au sens de « nuage ».
Ajoutons pour <;onipléter la liste des termes sanscrits
de cette famille :
Ambhas « eau », dont le changement de la finale
s en /• dans certains cas déterminés par le scnndJà
rend compte, tout à la fois, de la finale thématique
/• de iimlir-a féni.), de ojjiêp-oî (masc), et de r/(0///--r^//?
(neutre).
12
— 170 —
Se. Ah/i/'-iyas, adjectif au sens de « aqueux, ora-
geux, nuageux », en rapport de dérivation avec le
subst. ambhas.
Se. Amhar-am (subst. neutre), au sens de « en-
tourage, enveloppe ».
Se. Aiubhii (subst. neutre), au sens de « eau ».
(hiant à la concordance sémantique, elle s'établira
facilement, à la suite de la concordance phonétique
et morphologique, si l'on fait remarquer que la
signification commune est celle de « brouillard » ou
de « nuage pluvieux », enveloppant d'ombre ou de
ténèbres l'ensemble des choses visibles.
Nous achèverons la preuve de ces rapports en
rappelant que la même constatation ressoit de la
synonymie originaire du se. iiabhas, « enveloppe
du ciel », du gr. vÉti-o; « nuage », v/^â; « neige » et
« pluie », et vîc&io « neiger », — du lat. niibes « nuage,
ombre, voile », du gr.-lat. vû^o-t,, lyinpha « l'eau my-
thique personnifiée», etc.
Conclusions : 1° L'ombre a été considérée d'abord
comme brume ou brouillard.
2*^ Le sens primitif de nùbo est «couvrir, voiler »;
celui d'épouser est secondaire.
Il
Des développements analogues, accompagnés de
contractions, ont donné naissance à des formes aussi
curieuses, prises parmi les dérivés de la famille à
laquelle appartient le gr. [xi'^%^ « grand ».
Nous nous en rendrons compte en établissant
d'abord la possibilité de la chute d'une gutturale
— 171 —
(/. ou y; c '^o g] devant la liquide X (lat. /). Entre dif-
férents exemples ce phénomène phonétique se
remarquedansle \?i\.. paulum, pour '*pauc-l uni, comme
l'indique pauc-us. Appliquant cette hypothèse à la
recherche de Tétymologie du lat. mel-ioi\ nous
serons en droit de conclure que la forme anté-classi-
que de ce mot était meg-l-ior, à savoir le compara-
til" masculin de Tadjectif [xi'cx:, sous la forme altérée
par le rhotacisme, piyap (cf. \j.t-(yl par lambdacisme
ultérieur), et dont le féminin est resté sous la forme
très régulière [xz-^H-r^. Explications analogues pour la
série suivante qui s'y rattache :
Gr. ijtâXa « grandement, fortement », pour *;jiaY'X-a,
neutre plur. de Tadjectif *[jLaY'X-o;, employé adverbia-
lement.
Gr. ijiàXXov pour ^uaY'À-jwv, comparatif neutre sing.
employé adverbialement, se rattachant au même
adjectif.
Gr. [jLâX-tffx-a pour [x%-fh-'.i~-'x, neutre plur. du super-
latif correspondant employé adverbialement.
Gr. ij.aX£pôç pour ijtaY'X-spo;, adj., «violent, robuste ».
11 convient d'ajouter à cette liste le lat. mille, très
probablement pour *//?/^7-p au sens primitif de «grand
(nombre) », — ainsi que le gothique niikils et les
noms gaulois magulus et magliis, indiqués par
M. Yendryès [Mcm. de la Société de Linguistique de
Paris, XIII, 225 , et dont le sens est très probable-
ment celui de « grand ».
.le n'ajouterai rien pour l'instant aux observations
générales que suggère l'exposé de ces faits : les
leçons qu'ils comportent se dégageront d'elles-
— 172 —
mêmes, totoii tard, grâce aux travaux des phonétistes
compétents.
III
ADDENDA
Rapprochements de formes linguistiques au sens
fondamental de grand dont le vocalisme s'encadre
Cp
dans {le graphique) ?-~X~f\-
A
Le radical gr. /iX-o « mille », est pour (jjLJ'y.À'-o, et
s'identifie par là, pour le sens et la forme, avec le lat.
mille {mih-l-e), compte étant tenu, d'ailleurs, des
contractions qui ont resserré les éléments phonéti-
ques de l'un et l'autre de ces vocables.
B
Le nom actuel d'Achille, le héros vaillant et fort
des poèmes homériques, part d'un antécédent,
jjLfa/-tU-£tj (forme actuelle 'AyOl-vjç) dont le sens pro-
pre et original est d'accord avec Vidée grandiose que
suggèrent les faits et gestes du Péléide ; — cf. l'épi-
thète àXxtSiiç « le fort », qui s'est adaptée au nom
d'Hercule.
G
Au goth. mikils « grand » et au lat. tnille imili-l-c)
« grand » (par le nombre), d'oii notre mot mille, se
rapproche surtout le lat. miles (pour ^mlh-l-es) au
- 173 —
sens de « troupe »; d'où « celui qui fait partie d'une
troupe armée, attroupée = soldat » (au plur. «mili-
taires, troupiers, etc.».
Explication analogue pour le lat. môLês {/)iôh-'l-ës)
au sens de « multitude » = « grand nombre, masse »
(confusion de l'idée du sing. et de celle du plur.). —
Autres formes apparentées : .atoXo; pour *[jiw/-"X-o; au
sens d' « effort » = « emploi de la force », auprès
de o/'X-oç pour *;jlj^o/-'X-o; au sens de « troupe, mul-
titude », yLoy-'l-6:; « levier = outil pour l'eflf'ort,
— qui sert l'effort »; — ;jijÀo^ pour^ijijy-'À-o; au sens de
« meule, masse » ; — ;i.j).T, pour *iijy-l-r„ même sens
et même explication phonétique ; — o^up-ô;, È/jp-ô;
« fort », probablement pour un antécédent com-
mun ';JLO£/-'jp-o;, *;jij:c/-jp-0(;, etc.
D
Conclusion des faits qui précèdent au point de vue
de la sémantique germanique; se rattachent au rad.
;i.£Y avec- l'idée de grandeur et de force :
Allemand uiehr a plus »,
— uuicht V puissance »,
— môgen « pouvoir », etc.
Anglais more « plus »,
— nui cil « beaucoup »,
— miglil c( pouvoir », etc.
D'où la constatation importante qu'en ce (jui con-
cerne celte famille, l'idée de pouvoir a pour hast
celle de grandeur ou de force.
l'aul Regnald.
LE MALAIS VULGAIRE
VOCABULAIRE
ET
ÉLÉMENTS DE GRAMMAIRE
INTRODUCTION
Les Malais paraissent originaires de l'ancien
royaume de Tyampa, qui s'étendait le long de la
côte de l'Indo-Chine, à l'est du Delta du Mékong.
De là, ils se répandirent sur la presqu'île de !Ma-
lakka, sur Tlnsulinde et jusqu'en Polynésie. Com-
merçants ou pirates, ils s'établirent principalement
sur les côtes, introduisant partout, avec Tislâm qu'ils
avaient adopté au XIII" siècle, leur langue, qui de-
vint la lingua franco de toute la Malaisie,
Abâtardie, mais enrichie aussi par de nombreux
emprunts au sanscrit, à l'arabe et aux langues des
peuplades conquises, puis, au XVI" et au XVIP siè-
cle, par des mots introduits par les conquérants por-
tugais et hollandais, cette langue, le malais vulgaire,
se parle aujourd'hui sur tontes les côtes, d(>puis la
— 17o -
Pointe d'Atchin juscju'à la .Nouvelie-Guinée : tlaiis
la presqu'île de Malakka, dans certaines régions de
la Cochinchine et du Cambodge, à Sumatra, à Java.
à Bornéo, à Célébès, dans les petites îles de la Sonde,
aux Moluques, etc. Et le lagal des Philippines, la
langue des indigènes de la cote de Formose et le
malgache ne sont eux-mêmes (|ue des idiomes déri-
vés du malais.
La connaissance du malais vulgaire est indispen-
sable à tous ceux qui voyagent dans l'archipel indo-
australien. Son acquisition est d'ailleurs des plus
faciles : quelques semaines d'étude et de pratique
suffisent pour comprendre les indigènes et se faire
comprendre. Il est évident que, dans une région aussi
étendue, il existe plusieurs dialectes, et que le parler
des gens de Padang diffère de celui des habitants de
Ternate ; mais les différences sont, en somme, peu
considérables, et il suffit de connaître un dialecte
malais pour se tirer d'affaire dans la Malaisie en-
tière.
Le présent vocabulaire est .surtout celui des grands
centres : Singapour, Batavia, Sourabaya, avec lequel
on peut se faire comprendre partout. Quand nous
nous sommes trouvé en présence de deux mots
différents exprimant la même chose, nous les avons
donnés tous deux ou nous avons choisi celui doiil
l'usage nous a paru le plus répandu,
(Hiant à la transcription, nous l'avons simplifiée
autant (jue possible, n'utilisant que les lettres stricte-
ment nécessaires. Elles se prononcent toutes et con-
servent toujours leur son al|)liab(''lique.
— 176 -
Règles de Proîionciation.
Parmi les voyelles, «, / et o se rendent comme en
français ;
Il se prononce toujours comme ou (Ex. : gunung
= gounoung) ;
e et é se prononcent à peu près comme dans le
mot liberté; cependant, dans la première syllabe, Ve
est généralement presque muet. (Ex. : sebab, etc.)
Les voyelles particulièrement longues ont été pour-
vues d'un accent circonflexe. iEx. : bodô.)
Les voyelles nasales n'existent pas : an, am, en,
em, i/i, im, on, om, un, uni, se prononcent donc ann,
amm, enn, emni, inii. innn, onn, onini, oun, ouni.
(Ex. : hutan ^ houtann.)
Dans les diphtongues, les voyelles se prononcent
séparément : ai = aï, au = aou. (Ex. : kain = ka'in,
taun = taoun.)
Les consonnes ont le même son qu'en français;
cependant Vh est toujours — quoique légèrement —
aspiré; 1'^, sifflant; le ^ se prononce toujours comme
devant a, o, u (Ex. : gila = guila, gedong = gue-
dong\ le k, à la fin d'un mot, est presque muet
(Ex. : baïk = bai") ; Vf ne se trouve guère que dans
des mots d'origine étrangère, et les indigènes lui
donnent généralement le son de p Ex. : fransis
= pransis). — La prononciation des consonnes
composées dj et hj se rapproche de celle de di et //
dans les mots diable et tiai'e ; ng se prononce com-
me en chinois ou en allemand, dans les mots Ding,
faug, etc.
177
I. — SUBSTANTIFS
OniGINE DES NOMS MALAIS
In grand nombre de noms malais sont tirés de
l'aral^e. (]e sont surtout des termes métaphysiques :
AlldJi (Dieu), (luuin (univers), ahnl (intelligence),
htikum (loi), sadaha (aumône), etc. ; mais aussi des
noms physiques : Idfab {livre), surat-kahaf^ (journal),
garfii (fourchette), kiosi (siège), kaua (café), etc.
Beaucoup d'autres substantifs sont des mots por-
tugais ou espagnols à peine altérés; ce sont e.xclu-
sivement des noms concrets : handéva ^drapeau),
honihd (pompe), roda (roue), niarlil (marteau), trigu
(blé), teiuhako (tabac), tint a (encre), didal (dé), man-
téga (beurre), sabun (savon), toala (serviette), sako
(sac), baiiko (banc), leniari Q.Ymo\ve), karéta ^'oiture),
sepatii 'soulier;, kûniédja (chemise), soldada (soldat),
padi-e (prêtre), etc.
D'autres encoi-e, moins nombreux, sont hollan-
dais : kamar (chambre), setal (écurie;, kantor (bu-
reau), Ixcirap (carafe), jas (veste), glas (verre), koki
(cuisinier), jonges (domestique), mots qui ne se
trouvent d'ailleurs guère que dans le vocabulaire
des indigènes au service des Européens aux Indes
néerlandaises.
Les Anglais, dont les établissements en Malaisie
sont postérieurs et moins étendus que ceux des
Hollandais, n'ont doté le malais (jue de très peu de
mots.
— 178 —
D'autres noms sont d'orip^ine hindoue, chinoise,
javanaise, etc.
Beaucoup de substantifs malais ne sont f|ue des
adjectifs ou des verbes employés comme tels :
Adjectifs : giia (fou, folie), djctga (attentif, atten-
tion), sala (coupable, faute , nuira 'emporté, colère ,
main (honteux, hontei djahal (méchant, vice), inalas
(paresseux, paresse), etc.
Verbes : lidor (dormir, sommeil), balok tousser,
toux), makan fmanger, repas), saka (aimer, désir\ etc.
— Quelquefois le substantif se forme par Taddition^
au verbe, du sufïixe an, ou de celui-ci et du préfixe
ka. Exemples : inakanan (aliments, makan = man-
ger) ; minuman (boissons, niinuni =:z ho'ire), kah'ha-
tan (vue; liliat = voir), katakutan (terreur; takiit
= craindre).
NOMS COMPOSÉS.
Les noms composés sont nombreux ; ils sont for-
més de deux substantifs, d'un substantif et d'un ad-
jectif, ou d'un substantif et d'un verbe, réunis sans
aucune préposition. Exemples :
Deux substantifs :
mata-hari (œil-jour) = soleil,
^M/îM/?^-r//;/ (montagne-feu) ^=^ volcan.
areng-batu (charbon-pierre) = houille,
orang-liulan homme-forèt) = orangoutaii. cl»-.
Substantif cl adjcviif :
pokok ketj'il (ar])ve petit) = buisson.
ru ni put k/'ing (herbe sèche) = foin.
— 179 —
tenibaga hitning 'enivre jaune = laiton,
tima puti plomb blanc =z étain, etc.
Substantif et verbe :
tali-ikat (lien-serrer) = ceinture,
lc(tniar-tidor (chambre-dormir) = dortoir,
orang-minta (homme-mendier) = mendiant,
()!•(( ng-dayong (homme-ramer) = rameur, etc.
(;enrk.
En malais, il n'y a une difterence de sexe que
pour les êtres animés : hommes et animaux. L'ar-
ticle n'existant pas, et le substantif lui-même étant
invariable, la distinction se fait par les mots îahi-
laki^ homme t el prampiian femme . Exemple :
anak laki-laki = garçon ; anak pvampuan := fille
'anak = enfant).
Pour désigner le sexe des animaux, on peut se
servir des mêmes termes; mais on fait usage, plus
communément, de djaiilan niàle et bclina femelle,.
Exemple :
kiida (Ijdiitan = étalon ; kiida bclina = jument
{knda = cheval;.
NOMBRE.
On forme le pluriel diin substantif en le doublant.
Exemple :
(la ou une) maison := riinia ; (les ou des) maisons
= rania-runia.
1. Ovcuuj — homme dans le sens du latin homo, de l'allemand
Mcnsch ; laki-laki = liomme dans le sens du latin c//', de l'alle-
mand Mann.
— 180 —
On ne double pas le mot quand la pluralité est
évidente. Exemples :
anipat rama = quatre maisons ; banyak ru ma
= beaucoup (de) maisons.
Certains substantifs s'emploient toujours douliles :
ce sont des noms collectifs, comme burang-barang
(bagages), nianik-nianik (perles de verre), alang-
alang (une herbe haute, très répandue en Malai-
sie), etc.
COMPLÉMENT DU NOM.
Le complément d'un nom se j)iace a sa suite sans
aucune préposition. Exemples :
puntjak gunjing = (le) sommet (de la) montagne.
kapala desa =^ (le) chef (du) village, etc.
Vocabulaire des Substantifs
ASTRES, MÉTÉORES, ETC.
Soleil
ma ta -ha ri
lune
bulan
étoile
bintaug
terre
hunii
monde, univers
dunia
ciel
langit
air
udara
eau
ayer
terre, sol
tana
feu
api
- 181 —
niiago auan
brouillard habut
pluie hudjan
rosée umban
neige saldj
glace ayer-batu
vent angin
tempête ribut
ouragan tofan
tonnerre guntur, guro
éclair kilat
arc-en-ciel plangi
TERRE, MER, ETC.
terre
tana
mer
laut
nord
utara
sud
selatan
est
timor
ouest
barat
cote, rive
darat
plage
panté
pays
negri
Ile
pulu
cap, promontoire
tandjong,
udjong
baie
teluk
chenal, passa
ge
trusan
roc, ('cueil
batu, karang
sable
pasir
poussière
habu
boue
lumpur
— 182
montagne
colline
volcan
sommet
plaine
vallée
forêt, jungle
fleuve
rivière
ruisseau
source
cascade
lac, étang
marécage
vague
marée haute
marée basse
gunung
bukit
gunung-api
puntjak
padang
lemba
hutan
kali
sungé
sungé ketjil
mata-ayer
ayer terdjun
tasek, danan, telaga
paya
ombak
ayer surut
ayer pasang
LE TEMPS.
uaktu, tempo
ta un
musim
musiiu panas
temps
année
saison
saison sèche (chaude)
saison pluvieuse (froide) musim dingin
mois bulan
semaii)e minggo
jour ha ri
heure djam '
1. Djani est l'analogue de l'anglais « Iwnr », de l'allemand
« Stundc », de l'espagnol « hofa ». Dans une phrase comme
183
demi- ho lire
sienga djam
quart (rheure
sa' per ampat djam
matin
pagi
midi
stenga hari
soii-
soré, petang
nuit
malam
minuit
stenga malam
dimanche
hari minggo
lundi
hari senin
mardi
hari selasa
mercredi
hari rebô
jeudi
hari kamis
vendredi
hari djuraaët
samedi
hari sabtu
jour de fête
hari radja
l'homme.
homme (homo)
orang
homme ivirj
laki-laki
le m me
prampuan
enfant
anak
garçon
anak laki-laki
lille
anak prampuan
corps
badan
squelette
rangka
os
tulang
celle-ci : il faut deux heures pour aller à..., on traduira « deux
heures » par « dua djam » ; mais dans « il est deux heures » ou
« je viendrai à deux heures » on dira « pukul dua » ; en ce cas
tt pukul » (frapper, sonner) correspond à l'anglais « o'clock », ù
l'allemand « Uhr », à l'espagnol « las ».
Ifi4 —
chair
daging
peau
kulit
sang
dara
sueur
ayer kring
voix
suara
respiration
nafas
tête
kapala
face
muka
front
dahi
joue
pipi
menton
dagu
mâchoire
rahang
œil
mata
paupière
klopak-mata
nez
hidong
narine
lobang-hidong
oreille
kuping, telinga
bouche
mulut
lèvre
bibir
langue
lida
dent
gigi
cheveux, poils
rambut
barbe
djengut
cerveau
otak
cou
leher.
épaule
bahu
dos
blakang
poitrine
dada
cœur
hati
poumon
paru
ventre, estomac
prut
185
taille
pinggang
fesses
pantat
membre
angguta
bras
langan
coude
siku
poignet
gelangan
poing
gengam
niain
tangan
paume de
la main
tapak-tangan
doigt
djari
pouce
djumpol
ongle
kuku
cuisse
paha
jambe, pied
kaki
genou
lutut
cheville
jîiata-kaki
talon
tu mit
plante du
pied
tapak-kaki
orteil
dja ri-kaki
MALADIES, ETC.
maladie
sakit, penjakit
blessure
luka
fatigue
lété
sommeil.
repos
tidor
fièvre
demam
folie
gila
faim
lapar
soif
aus
douleur,
mal
usik
toux
batok
13
— 186 —
enflure
ulcère
tumeur
éruption
mal de tète
mal de la poitrine
médicament
poison
famille
race, tribu
mari, époux
femme, épouse
parents
père
mère
enfant
fils
fille
frère
sœur
grand'père
grand'mère
petit-fils, petite-fille
oncle
tante
cousin, cousine
neveu
nièce
mariage
bengkok
bisul
bongko
djeravat
sakit kapala
sakit dada, etc.
obat
ratjun
LA FAMILLE
anak-ber-anak
bangsa
laki
bini
orang tua
baba
mak
anak
anak laki-Jaki
anak prampuan
sudara laki-laki, abang
sudara prampuan, kakak
ungkong
ma
tjutju
baba sudara
mak muda
sa-pupu
anak sudara laki-laki
anak sudara prampuan
kauirï
— 187 —
veuf, veuve djanda
orphelin anak yalim
pays
nation
France
Angleterre
Hollande
Chine
Français
Anglais
Hollandais
Chinois
Malais
Javanais
Siamois
nègre
Batavia
Singapore
indigène
étranger
chrétien
mahoniétan
bouddhiste
Israélite
PAYS, NATIONS, RELIGIONS
negri
bangs
a
negri
fransis
»
inglis
»
blanda
))
tjina
etc.
orang
fransis
))
inglis
n
blanda
»
tjina
»
melayu
»
djava
))
siam
>)
kafri, o. hitam
etc.
Betavi
Singapura
etc.
orang
negri
»
asing
»
srani
t)
slam
»
buda
»
yahudi
etc.
— 188 —
niGNITKS ET PROFESSIONS.
empereur
SI
dtan
roi
ra
dja
prince
ra
den
gouverneur
gobenor
chef
k£
ipala
prêtre
pa
dre,
pandita.
jiige
hakim
commerçant
saudagar
maître d'école
guru
médecin
dokter
pharmacien
tukang obat
orfèvre
»
mas
maçon
»
batu
charpentier
»
kayu
forgeron
»
besi
boulanger
))
rôti
tailleur
»
djahit
cordonnier
))
sepatu
blanchisseui'
))
menatu
barbier
etc.
»
tjukor
marin
orang
laut
marchand
»
dagang
gardien
»
djaga
serviteur
))
gaflj'
journalier
))
kuli
mendiant
»
minta
contre-maître
mandur
— 189 —
agent de police mata-mata
paysan rayât
cuisinier koki
servante indigène babu
sage-femme diikun
danseuse rongeng
esclave hamba
brigand, voleur pentjuri
pirate prompak
etc.
Monsieur' luan, sinyo
Madame nyonya, nya, mem
Mademoiselle nonna
AGGLOMERATIONS HUMAINES, ÉDIFICES, ETC.
ville kota, bandar
bourg;, village desa
hameau, quartier kampong
maison ruma
hutte poiidok
route, rue djalan besar
1. Les indigènes des Indes néerlandaises ne se servent du tei'me
« (nan » (seigneur) que vis-à-vis des Européens et des Arabes. Il
s'emploie, comme « monsieur », seul ou accompagné d'un titre :
taaa doktcr, etc. « Sinjo » s'emploie, comme « inoster » en an-
glais ou « senorito » en espagnol, en s'adressant à des enfants et
à des jeunes gens. « Ni/om/n » se dit à une dame européenne
mariée, « nonna » à une jeune Hlle. Les métis de pérè européen
(half-castes, kleurlingen), mariés ou non, sont titulés « sinr/o »
et « nonna ». Dans les colonies anglaises, « m/oni/a n et u nonna. »
sont remplacés par « inem » (madame).
— 190 —
chemin
djalan
ruelle, sentier
lorong
canal
parit, trusan
pont
djembatan, dedoko
marché, bazar
pasar
place
alun-alun
promenade
padang
palais
kraton, istana
église
gredja
mosquée
mesigit
temple, pagode
tempat sembayang
magasin, hangar
gedong
boutique
toko, varong
théâtre
vayang
caserne
tangsi
bureau
ofis, kantor
poste
pos
banque
tempat vang
bain
» mandi
école
ruma skola
hôpital
» sa kit
pharmacie
n obal
hôtel, restaurant
n makan
prison
» tutup, penyara
jardin
kebun
ferme, plantation .
ladang, kebun
clôture, haie
pagar
cimetière
kuburan
tombe
kubur
marabout
kramat
— 191
MAISON, MEUBLES, ETC.
maison
meubles
brique
tuile
poutre
planche
mur
cloison
toit
plafond
plancher
cheminée
porte
fenêtre
clef
chambre
chambre à coucher
salle à manger
cuisine
salle de bain
commodités
écurie
remise
poulailler
escalier, échelle
table
chaise
canapé, banc
armoire
ruma
pekakas ruma
batu-bata
genting
batang-kayu
papan
tembok
dinding
atap
langit-langit
lanté
tjorong-asap
pintu
djandela
kuntji
kamar, bilek
kamar-tidor
kamar-makan, etc.
dapur
kamar mandi
kamar buang ayer
tempat kuda, setal
ruma kareta
kandang ayam
langa
médja
krosi
banko
le mari
— 192 —
toilette médja tjutji tangan
lit tempat tidor
matelas tilam
oreiller, coussin bantal
rouleau guling
drap de lit kain
couverture kain panas
taie d'oreiller sarong bantal
moustiquaire klambu
miroir katja, tjermin-miika
pendule lontjeng
tableau gambar
cage sangker
paravent sampiran
rideau tabir, pagar
natte tikar
lapis permidani
cloche, sonnette lotjeng
D"" F. Weisgerber.
(A suivre.)
LA SCIENCE a LES ÂMATELRS
On me communique un numéro daté du 17 janvier
1907, du journal quotidien w économique et litté'
raire » La politique coloniale. En tète de ce numéro,
est un article signé w Henri Mager, du Conseil supé-
rieur des Colonies», intitulé « les origines du Tahi-
tien et des Tahitiens ». En commençant, Tauteur
rappelle que, dans le même journal, le 7 juillet
1902, il a démontré que le malgache « dérive direc-
tement d'une l'orme primitive asiatique » et que
« comme ses frères le battak, le malainésien (sic) et
le polynésien, il s'est constitué par des modifications
de consonnances (jui sont régulières et (jui le
caractérisent parce qu'elles lui sont propres » ; et il
ajoute : « Depuis, j'ai recherché de quelle forme
primitive asiaticjue dérive le malgache, et ma convic-
tion est faite aujourd'hui : le malgache descend en
ligne directe de la langue originelle des Indo-Euro-
péens. » Ceci posé, M. Mager prétend démontrer
(|ue le tahïtieii est apparenté au malgache et par
conséquent à l'indo-européen primitif. Si l'on jette
les yeux sur les raisonnements et les prétendues dé-
monstrations de l'auteur, on reste confondu devant
l'ignorance, qu'on me permette le mot, et la naïveté
(jui s'.y révèlent.
— 194 —
Le procédé est véritablement enfantin. Il me suf-
fira de citer un exemple : « Grâce », dit M. Mager,
« aux règles de concordance que j'ai posées, il est
loisible de déduire de la racine primordiale la
forme probable des mots malgaches correspondants.
A la racine primordiale la-ba (tomber , d'où vient
le latin la-bo (chanceler), devra correspondre un
mot malgache en la-b ou la-v : ouvrant le dic-
tionnaire malgache à la lettre /, nous y verrons
le mot la-vo qui signifie précisément tomber. » Et
Ton nous explique que, si le malgache a été pris
pour intermédiaire de préférence aux autres lan-
gues du même groupe^ c'est parce qu'il a seize
consonnes (f, h, m, n, p, r, t, v, b, d, j, i, k, 1,
s, z), tandis que le tahitien n'en a que huit (f,
h, m, n, p, r, t, v). C'est pourquoi le tahitien,
qui a laissé tomber la consonne de quantité d'élé-
ments constitutifs, ne permet pas la recherche directe
des éléments qui l'ont formé : il dit i-te (pénétrerJ
pour le mot malgache i-di-tra . Un dernier exemple :
« la racine gha-da (creuseri a constitué le mot sans-
crit katvalas (fossse), le mot grec hêthis (urne), le
mot latin catinus (plat creux), le mot malgache hadi
(creux) et le mot tahitien etu (creuser) ».
Je n'aurais pas relevé ces fantaisies, s'il n'était
à craindre que quelques lecteurs de bonne foi ne
les prissent au sérieux. C'est pourquoi il m'a paru
bon de protester une fois de plus contre les préten-
tions des amateurs à l'encontre de la méthode et des
affirmations de la science.
Julien ViNSON.
NÉCROLOGIE
iNous avons annoncé, dans notre dernier numéro,
la mort de notre ami regretté, W. Webster. L'amour
de la vérité nous oblige à dire que c'est uniquement
pour raison de santé qu'il alla^ en 1858, dans l'Amé-
rique du Sud.
A la liste de ses ouvrages, il faut ajouter le suivant,
qui a paru sans nom d'auteur, et qui est un recueil
d'articles publiés dans V Anglican ChurcJi Magazine :
6. Sonie features of modem romani sni. Londres,
Society for promoting Christian knowledge, 1884, pet.
in-8^ viij-159 p. ; — 2« éd., 1898, viij-224 p.
Nous avons également à déplorer la mort, surve-
nue le 9 février dernier, d'un de nos anciens collabo-
rateurs, M. Victor Henry, qui s'est occupé surtout
des langues américaines et des idiomes indoeuro-
péens classiques (sanskrit, grec et latin). Son dernier
travail, dans cette Revue, a été un article sur le pré-
tendu langage de la planète Mars inventé par une
visionnaire spirite.
Né à Colmar en 1850, docteur en droit, conserva-
teur de la Bibliothèque de Lille, docteur es lettres,
professeur à la F'aculté des Lettres de Douai, et enfin
professeur de sanskrit et de gra-mmaire comparée à la
Sorbonne, il laisse le souvenir d'un travailleur
acharné, d'un homme aimable et d'un esprit original.
.1. V.
BIBLIOGRAPHIE
Linguistic survey of liidia. Toine \\ . Mundâ and
Dravidian languages. (]ompiled and edited by
G. -A. Grierson. Calcutta, Gov. printing ofïice, 1906,
in-fol., xvj-681 p. et 2 cartes.
L'œuvre excellente se poursuit, sous Tactive et in-
telligente direction de M. G. -A. Grierson. Le présent
volume, — le huitième qui a paru sur les seize
qu'on nous a promis, — est extrêmement intéressant :
il est consacré au Munçlâ et au Dravidien, c'est-à-dire
aux deux familles anaryennes les plus importantes de
rinde; elles représentent une popidation de soixante-
dix millions d'hommes^ c'est-à-dire près du quart
de la population totale. Il parait que le volume a été
préparé par M. Sten Konow, de Norvège, et que les
épreuves de la partie dravidienne ont été revues par
V. Venkayya, épigraphiste d\\ Gouvernement de
Madras.
Je ne m'occupe ici que de la j)artie dravidienne,
qui commence à la p. 277. 11 est extrêmement regret-
table que M. Grierson n'ait pas cru pouvoir s'oc-
cu|)e)' du l'idu, du Kuflagu, du Kola el tiu Toda. Ce^^
quatre très intéressants idiomos non littéraires
forment ce qu'on pourrait appeler le groupe dravi-
— 197 —
clien sauvage des Nilagiris ou de l'ouest; ils ne sont
pas assez connus et niérilcraient de l'être davan-
tage, le Toda surtout, qui n'est que peu soumis à des
influences aryennes et dont le système phonétique
paraît si spécial : le court essai de grammaire écrit
par M. G.-U. Pope, il y a une trentaine d'années, est
devenu véritablement insuffisant. En revanche, nous
avons de nombreux détails et de bons spécimens du
groupe sauvage nord-orienlal, qui comprend les pa-
tois parlés sur la frontière Mundâ-aryenne, le Kuviik/i,
le Malto, le Kui et le Gôndi, auxquels on ajoute le
Bràhùi de la frontière Indo-Bélouchistane.
Une question importante se pose à propos de ces
diverses langues. Les consonnes cérébrales, — ^, d, n,
/, /% — paraissent spéciales aux Mundàs et aux Dra-
vidiens. Etrangères aux idiomes Indo-Européens,
elles se sont cependant développées en sanskrit.
Ont-elles donc été empruntées parles Aryens aux
habitants antérieurs de l'Inde? Je réponds sans hési-
ter : certainement non; des sons et des bruits vocaux
ne s'empruntent pas, mais se développent sponta-
nément dans les mêmes conditions physiologiques^
sociales et climatériques. Les cérébrales sont un pro-
duit direct et spontané de l'Inde : elles sont plus
employées chez les Dravidiens et les Mundâs, moins
avancés et plus près de la nature; elles le sont moins
et elles tendent à dis[)araître chez les Arj^ens, plus
civilisés et dont les conditions générales d'existence
sont, si j'ose m'exprimer ainsi, plus raflinées. D'autre
part, le / barré polonais est une cérébrale; et les /,
(l, l, anoflais le sont aussi fort souvent.
— 198 —
Je trouve beaucoup trop dure cette appréciation :
« the form tamul is due to the french missionaries
and should be disregarded ». Ni Ziegenbalg qui écrit
damulica, ni Beschi et Walther qui écrivent tamu-
lica, ni Fabricius, Breithaupt et Anderson qui écri-
vent tamul, n'étaient français. C'est que « tamoul »
est la forme qui se rapproche le plus de la pronon-
ciation.
La notice bibliographique sur le tamoul (p. 302-
307) est malheureusement insuffisante et contient des
inexactitudes fâcheuses. Le Nannûl n'était pas la
seule grammaire indigène qu'on aurait dû citer.
Quant aux grammaires de Beschi, la première édition
de celle du dialecte vulgaire est de 1738 : il n'y a pas
d'édition de 1728; la seconde édition de la traduction
de Horst n'est pas de 1881 mais de 1831. Quant à la
grammaire du haut tamoul, il y en a eu deux, l'une
qui n'a jamais été imprimée et qui a été traduite en
anglais par Babington en 1822; l'autre qui est une
adaptation laline d'une grammaire écrite en tamoul
et qui a été imprimée à Tranquebar en 1876. La gram-
maire de Baltasar da Costa n'a jamais été imprimée.
Il n'y a aucune grammaire tamoule imprimée à Tran-
quebar en 1734. J'aurais d'autres erreurs et d'autres
omissions à relever.
Dans les indications sur la prononciation tamoule,
il est dit que les explosives initiales sont quelque-
fois prononcées douces : guru, devait, bayam, ja-
nam; c'est que ce sont là des mots sanskrits em-
pruntés, dont la prononciation originale a été re-
tenue.
— 199 —
P. 292, il est dit que a neuf)) et « huit » sont pro-
bablement « dix moins un, dix moins deux ». Je ne
suis pas de cet avis. En ce qui concerne « neuf»
par exemple, il paraît établi que ce numéral est formé
de « dix » avec le préfixe fol, ton ayant le sens de
« incomplet, défectueux » : le tamoul onbadii est
pour ionhadii [tondu existe), comme on a tonnûr'u
« quatre-vingt-dix » et tollâyiram « neuf cents ». Quant
à huit, et ou en se rattache peut-être à ir « deux » :
dans beaucoup de langues, « huit » est apparenté à
« deux »; c'est un duel en aryen \
P. 294, il n'est pas exact de dire que beaucoup de
bases sont à la fois noms et verbes. Les suffixes dra-
vidiens gardent si bien leur indépendance et leur
signification propre que, lorsqu'il disait par exemple
vardên « je suis venu », un tamoul voyait dans en la
première personne : c'était comme s'il disait « venu-
moi », et dès lors, rien d'étonnant à ce qu'il dise Kôn-
èn «je suis roi », (;'est-à-dire « roi-moi ».
P. 293 : les pluriels pronominaux en m substitué
au îi du singulier, rapprochés des k, ùg,g, nga gôndî
et kuî, suggèrent l'idée d'un pluriel personnel inclu-
sif primitif opposé à l'exclusif ^«/ neutre et général.
C'est un point à étudier.
P. 296, il est dit que le futur est formé de diverses
façons. C'est que le futur n'est pas un temps pri-
mitif; il a été formé à une époque postérieure du
développement de la langue. Il n'y avait originaire-
ment qu'un passé et qu'un présent peu défini.
1. M. Stempf a rapproché le basque ^ortsi « huit » de sor v naî-
tre » ; il y a peut-être là une racine commune « divisé, tendu, cou-
pé en deux ».
— -200 —
P. 486, je remarque une formation très curieuse
du gonçli. L'instrumental y est en àl ou en se : mâr-
sâiiâl ou mârsânsê « par Thomme » : àl est dravi-
dien et se est hindî. C'est ainsi que la grammaire
s'altère par l'intrusion de suffixes d'emprunt. Le
processus paraît évident : on emprunte des phrases
toutes faites, puis des mots tout formés, puis des
mots qu'on soumet aux règles de la grammaire spé-
ciale, puis des suffixes; et enfin la grammaire s'altère
de plus en plus : la langue change de caractère et
n'existe pour ainsi dire plus.
Est-ce le cas du brâhûi, parlé dans le Bélouchistan
et par environ 48.000 Hindous? Il ne m'est pas pos-
sible d'y voir ime langue dravidienne : quelques
formes pronominales, deux noms de nombre, un ou
deux suffixes, cinq à six racines sur cent, ne sauraient
suffire à établir une parenté. Cette parenté pourrait
servir à prouver que les Dravidiens sont, comme les
Aryens et avant eux, venus du nord; mais je ne vois
pas l'utilité de cette démonstration. Certains savants
locaux pensent au contraire qu'ils viennent du sud.
Que nous importe? Je ne verrais aucun inconvénient
à les regarder comme originaires du sol qu'ils
habitent. Julien Vinsoin.
Maiiuali HoepU. E. Portal. Letteratura proven-
zale ; / tnoderni trovalovl. Milan, U. Hoepli, 1907,
in-18, xvj-21.5, portrait de Fr. Mistral.
Je n'ai jamais eu un grand enthousiasme pour la
renaissance provençale, jjoui' le félibrismc, pour la
— 201 —
tradition basque, pour les pardons bretons, et pour
toutes les entreprises analogues qui, sous prétexte
de culture littéraire, d'originalité locale, de décen-
tralisation, cachent un ed'ort plus ou moins av^oué de
réaction cléricale et anti-républicaine. Je n'en veux
d'ailleurs nullement aux vieux lanflragfes, aux anciens
patois, dont je déplore la disparition et dont l'étude
est si importante au point de vue de la linguistique
générale ou particulière. Mais le fait est là, incon-
testable : ces respectables restes du passé subissent
la loi commune des choses humaines : ils ont vécu,
ils ont prospéré, ils sont entrés en décadence et
meurent lentement d'anémie, si j'ose m'exprimer
ainsi. Ce ne sont pas les fêtes, les associations, les
banquets, les poètes, qui pourront leur rendre la vie ;
l'heure est passée et le mouvement sera toujours
artificiel, superficiel et factice.
Ces- réflexions n'enlèvent rien d'ailleurs à l'intérêt
du petit volume de M. Portai. C'est un recueil de
notes biographiques recueillies avec soin et con
amore. Mais quand on lit les titres de tous ces
ouvrages peu connus, dont beaucoup sans doute ont
de la valeur, mais dont beaucoup aussi sont médio-
cres, on songe malgré soi au vers de Boileau, et on
se dit, en le modifiant un peu : « Ils se tuent à rimer
en provençal, que n'écrivent-ils en français ? »
Julien ViNsoN.
14
— 202 —
La morte di Vaca ossia il Racsaso di Ecaciacra,
tradotto... da M. Kerbaker (Nova biblioteca di
cultura, t. m), l^aples, T. Pironti, 1906, in-18, 88 p.
L'épisode dont il s'aj^it, intitulé Vakavadhâ, forme
les chants 58 à 66 du livre premier, Adiparva, du
Mahâbhârata. M, Kerbaker l'a traduit en 108 octaves
qui correspondent chacune à un, deux ou trois des
clôkas de Toriginal. La traduction paraît d'ailleurs
exacte, autant du moins que peut l'être, dans ces
conditions, une traduction en vers. Le traducteur a
mis, à la fin du volume, des notes intéressantes et
utiles. Mais je n'aime pas beaucoup, dans le récit, ces
adaptations orthographiques où c devient ci, j ji,
ks es, etc. Je sais bien qu'elles ont pour but de ne
pas rebuter les lecteurs ; mais est-ce vraiment bien
utile ?
J. V.
.1. Berjot. Premières leçons d\inn(imile . . . Paris,
E. Leroux, 1907, petit in-8", 19 p.
Ce petit ouvrage est réellement bien fait et pourra
rendre service à ceux qui voudront étudier Tanna-
mite, C'est une bonne introduction, assez claire et
précise, à l'étude rigoureuse de la langue. La seule
chose à craindre, c'est qu'après cet exposé si simple,
l'étudiant ne se heurte aux complications voulues
d'une grammaire soi-disant complète. Comme si les
langues monosyllabiques avaient besoin de gram-
maires !
Mais quel alphabet bi/.arre que celui inventé par
— 203 —
les missionnaires pour la transcription : r/ valant a
bref, r/y eil, d intermédiaire entre ij et z, etc.
J. V.
Manuel de la langue japonaise, par Th. Gollier.
1. Eléments de la Grammaire. Bruxelles et Leipzig,
Misch et Thron, 1907, in-8% 239 p.
Livre utile et consciencieusement fait, quoique les
mots japonais y soient tous en caractères latins. 11 en
ressort une fois de plus la preuve que le japonais est
une langue agglutinante et qu'il a subi fortement
l'influence du chinois. La complexité de certaines
expressions demanderait une analyse minutieuse :
de ([uoi et comment, par exem|)le, sont formés les
pronoms personnels .' Du reste, en général, ce livre
est fait d'une façon vraiment trop empirique et avec
la préoccupation trop évidente de suivre le cadre clas-
sique ordinaire : déclinaisons avec nominatif, génitif,
etc. ; conjugaisons avec les temps dérivés et compo-
sés de rindo-européen ; etc. C'est pourquoi certaines
indications paraissent naïves, comme par exemple
lorsque l'auteur dit qu'il y a des fausses post-posi-
tions, des quasi-post-positions, qui sont en réalité des
substantifs.
Après la grammaire, M. Gollier a mis une antho-
logie, recueil de textes en prose (toujours en romain)
qui occupe 26 p., et qui est suivie d'un vocabulaire très
complet; ce vocabulaire paraît avoir été établi avec
beaucoup de soin.
J, V.
— 204 —
Bulletin du parler français au Canada. Québec,
Université Laval, 1907 (mai-aoùt, n°' 9 et 10). Gr.
in-8°, p. 321-408.
Contient, outre les sarclures, les anglicismes, les
revues de livres et brochures, les tablés du tome V.
Comme articles de fond, on y lira avec intérêt la
suite du lexique canadien-français ; une étude de
M. l'abbé Amédée Gosselin sur l'instruction primaire
au Canada sous le régime français ; un article fort
instructif de M. Rivard qui, répondant à M. Paul
Mayer, fait voir que la proportion des Canadiens par-
lant français est au moins 32,04 pour cent ; un tra-
vail de M. Tabbé Camille Roy sur l'histoire de la
littérature canadienne (Michel Bibaud) et quelques
extraits de journaux européens.
J. V.
Revue Internationale des Etudes basques. Paris,
P. Geuthner, mai 1907, n° 3 (p. 217-3281. gr. in-8«.
Contient douze notes ou articles fort intéressants
et consciencieux, en espagnol, en français et en
basque : A. Campion, l'exactitude de la forme eus-
kera (avec s) ; — L. Echegaray, les calligraphes bas-
ques : C. de Iciar ; — G. Hérelle, les représentations
de pastorales ; — .J.-B. Daranatz, monnaies romaines
découvertes au pays basque (avec fig., dont une réduc-
tion de l'inscription de Hasparren) ; — J. Vinson et
,lean de Jaurgain, le Noiiveau-'festament de Liçarra-
gue ; — A. Campion, les noms de l'antique Vasconie ;
— .1. de .Jaurgain, Corisandre dWndoains ; — .I.-B.
— 20b —
Darricarrère, proverbes et dictons ; — G.Lacombe,
W. Webster; — X..., la laitière basque; — Biblio-
graphie,
Revue du Monde Musulnn/n. t. II, n"' v, vi et vii,
gr. in-8°. p. 1-448 : Paris, E. Leroux, mars à mai
1907.
Outre les notices bibliographiques et les Notes
et Nouvelles, les revues de \^ presse musulmane, les
analyses de livres et revues, ces trois numéros con-
tiennent de très remarquables travaux : Ghilan, Le
club national de Tauris ; — L. Bouvat, L'Islam dans
l'Afrique nègre ; — X. Slousch, Les Juifs en Tripoli-
taine ; — A. Le Chatelier, L'Emir d'Afghanistan
aux Indes; — A. Cabaton, Les Chams musulmans
dans rindo-Chine française; — E. Fevret, Le groupe-
ment des centres habités en Perse ; — J. Vinson, Les
Musulmans du Sud de l'Inde (reproduit ci-dessus, p.
137-144) ; Abboz, En Perse ; Imzâ Marfouz, L'Islam en
Bosnie et Herzégovine ; — A. Le Chatelier, La Révo-
lution persane; — A.-L.-M. Nicolas, Le Sermon de
de A. Seyyéd Djemal-al-din ; — Cl. Huart, Le droit
de la guerre; — E, Michaux-Bellaire, L'Islam chez
les Berbères marocains.
J. V.
VARIA
I. — Le Nouveau-Testament basque de 1571.
Nous empruntons à la Revue internationale des Études bas-
ques (t. I, p. 288) la très intéressante note ci-après, de M. Jean
de Jaurgain :
Le Fonds d'Oihenart, de mon ami Paul Labrouche, contient
un cahier intitulé Rolle des offices et mandements de finances
expédié par commandement de Monseigneur de Gramont (27
avril 1564-28 novembre 1565) dans lequel je relève ces trois
articles :
« 10 juillet 1565. A Lissarrague, traducteur du Nouveau Tes-
tament en langue basque, ses gages comme à un ministre non
marié, à compter du 1" janvier dernier, par l'advis du Conseil.
» A Tartas (ministre à Saint-Palais en 1578), La Rive (aussi
ministre à Saint-Palais), Landetehevery, Tardets (ministre
à Ostabat, mort en septembre 1.^78), correcteurs et revisiteurs [sic)
de ladite traduction, la somme de 6 s. t. par jour jusque au pre-
mier synode, à compter du jour qu'ils ont commencé.
» Dernier septembre 1565. Aux mêmes, pareille somme de 6 s.
par jour, durant qu'ils vaqueront à ladite traduction. »
Il en ressort que Liçarrague commença sa traduction vers le
mois de janvier 1.565 et qu'il eut pour collaborateurs quatre
ministres basques, dont deux au moins, — Tartas et Tardets, —
étaient souletins.
II. — Prononciation modifiée.
La Comédie- Française est un temple de la tradition. On y a le
culte du genre classique. Tous les artistes de la Comédie Française
prononçaient le mot Acliéron, non pas Âkéron, mais en ayant
bien soin de marquer les deux lettres ch . Ils taisaient remarquer
— 207 —
avec raison qu'ils avaient pour eux l'opinion de Racine. Lorsque
celui-ci écrivait :
Et l'acarc Achèron ne lâche point sa proie,
c'était surtout au point de vue de l'harmonie imitative. Ch se
trouve, en effet, dans Achéron et dans lâche. Mais voici que de-
puis quelque temps les artistes de la Comédie-Française pronon-
cent Akéron.
D'aucuns, esprits malicieux, feignent de croire que l'ordre
vient du sous-secrétaire d'État à la Guerre.
III. — Indiens et Européens.
Dernièrement le ministre anglais s'est décidé, sur la demande
de lord Ripon, à appuyer un bill tendant à soumettre les Anglais
et autres Européens résidant aux Indes à la juridiction des juges
indigènes. Il en est résulté une extrême effervescence parmi la
colonie européenne qui n'a aucune confiance dans la justice hin-
doue et qui prétend qu'elle ne peut en attendre que de la mal-
veillance et de l'hostilité.
En présence de cette explosion de mécontentement, il est à
présumer que le gouvernement ajournera indéfiniment la mesure
dont il s'agit. Mais il en résultera un des ferments d'antipathie
entre les Européens et les indigènes. Voici déjà comment, malgré
la législation si rigoureuse qui pèse sur la presse, s'exprime une
feuille hindoue, le Progrès, en s'adressant aux conquérants des
Indes :
« Vous nous avez familiarisés avec les idées anglaises ; après
avoir aboli nos institutions séculaires^ vous nous avez initiés aux
sciences, à l'administration européennes ; vous nous avez cons-
truit des chemins de fer. Toutes ces innovations, nous les avons
acceptées, mais pour les exploiter en vued'i n but dont vous ne
vous doutez pas même en rêve.
)) Nous savons ce que nous voulons, et nous ne nous repose-
rons plus avant d'avoir constitué une Inde libre, avant d'avoir
gouverné, unifié les populations de notre continent, et secoué le
joug des étrangers qui nous pressurent. »
— 208 —
IV. — L'âge et le génie.
Voici une curieuse statistique publiée par The Musical
Times sur les dates où les plus grands compositeurs ont composé
leurs œuvres les plus remarquables. 11 ne s'agit que de maîtres
morts. Sont placés à côté l'un de l'autre le nom' du compositeur,
l'œuvre principale, l'âge du compositeur quand il composa cette
œuvre, et l'âge de sa mort :
Bach, messe en si mineur, quarante-huit ans, mort â soixante-
cinq ans.
Haendel, le Messie, cinquante-six ans, mort à soixante-qua-
torze ans.
Haydn, la Ct^èation, soixante-cinq ans, mort à soixante-dix-
sept ans.
Mozart, Don Juan, trente et un ans, mort à trente-cinq ans.
Beethoven, symphonie en ut mineur, trente-cinq à trente-huit
ans, mort à cinquante-six ans.
Weber, le Freiscluitz, trente à trente-trois ans, mort à trente-
neuf ans.
Schubert, symphonie en ut majeur, trente et un ans, mort à
trente et un ans.
Mendelssohn, Elie, trente-sept ans, mort à trente-huit ans.
Schumann, concerto de piano, trente et un à trente-cinq ans,
mort à quarante-six ans.
Wagner, les Maîtres chanteurs, quarante-cinq à cinquante-
quatre ans, mort à soixante-neuf ans.
Brahms, Requiem, trente-deux à trente-cinq ans, mort à
soixante-trois ans.
11 conviendrait d'ajouter à cette liste notre grand compositeur
Rameau, qui composa son premier opéra Hippolytc et Aricie, à
l'âge de cinquante et un ans. Il mourut à soixante-dix-neuf ans.
fLe Temps.)
L'Iriiprinieur-Gérant :
E. Bertrand.
CHALON-SUR-SAÔNE, IMP. FRANÇAISE ET ORIENTALE E. BERTRAND
L'IBÈRE ET LE BASQUE
Réponse a H. SCHUCHARDT
Le travail de M. E. Philipon sur « la déclinaison
dans l'onomastique de l'Ibérie », qui occupe les pa-
ges 237 à 269 des « Mélanges d'Arbois de Jubain-
ville » publiés en 1906, m'a amené à m'occuper de la
question ibérienne en janvier dernier dans cette
Revue (p. 1 à 23). En même temps, M. H. Schuchardt
était conduit à préparer un mémoire qu'il a commu-
niqué à l'Académie des Sciences de Vienne (séance
du 6 mars 1907) et qui forme une brochure de 90 p.
in-S'» (Vienne, A. Hôlder, 1907). Les p. 79 à 80 for-
ment un post-scriptum consacré à mon article de
janvier dernier. La conclusion de Schuchardt est que,
s'il n'adopte pas les propositions de M. Giacomino,
il n'est pas exact de dire que M. Giaeomino soit seul
à soutenir la parenté du basque et de l'ibère : cette
parenté, dit-il, est à considérer comme démontrée,
tant que les bases de la démonstration n'auront pas
été réfutées une à une et dans leur ensemble. La ré-
serve est prudente,, car les argument de Schuchardt
ne me paraissent point convaincants et je persiste à
affirmer que, jusqu'à présent, la parenté du basque
moderne et de l'ibère antique n'est aucunement éta-
blie.
15
— 210 —
Certes, il ne s'agit plus, comme au temps de G. de
Humboldt, de voir dans le basque le descendant
direct, le représentant exact de l'ibère ; la parenté
dont on nous parle est semblable à celle de l'anglais
et du gotique ou, pour plus d'analogie encore, du
tamoul littéraire et d'un idiome dravidien inculte,
Turaon ou le gôndî, par exemple. Ces parentés-là ne
sont point évidentes et n'apparaissent pas au premier
examen. Ainsi ce passage d'Ulphilas : Jali qath im
Jésus : hiriats afcir mir jali gatauja igqis vairtliau
nutaus manne (Marc, 1, 17) paraît fort différent de
l'anglais : and Jésus said unto theni : corne ye after
me and 1 ^vill niake y ou io become fishers of men.
Cependant iîu fait penser à him^ afar mir n'estpas trop
éloigné de after me, manne et men se ressemblent
fort, et, si nous connaissons un peu le germanisme,
nous retrouverons do dans gatauja. D'autre part le
gôndî undi (ou bor) manèkur rand (ou irur) mark
(ou pêkor) mattôr (ou matlork, ou mandork), comparé
au tamoul oru mànidanukku irandu pilleigal (ou
makkal) irundàrgal « à un homme deux enfants (ou fils)
étaient », permet un peu plus facilement de penser à
une communauté d'origine, quoique cette parenté
ne s'impose pas au premier abord. Je ne vois rien de
pareil dans les documents ibères; ni mots, ni racines,
ni formes grammaticales, ni, — qu'on me pardonne le
mot, — faciès général rappelant le basque. On a trouvé
sans doute des analogies comme les désinences en
an ou iVf, comme les mots asturko ou idubeda, mais
elles sont rares, forcées et peu probantes.
Quelle langue ou quelles langues parlait-on en
— 211 —
Espagne il y a vingt siècles ? Les côtes du S.-O.
avaient été occupées par les CartliEiginois, d'autres
marins y étaient venus ; les Celtes avaient envahi la
péninsule et s'étaient mélangés aux habitants indi-
gènes, aux Ibères, et Piome avait étendu partout sa
domination.
Le pays est demeuré latin, malgré l'invasion des
Barbares, le règne des Goths, la longue occupation
des Arabes. H est donc probable que le langage pri-
mitif de ribérie avait subi, dans une assez grande me
sure, l'influence du latin. D'autre part, si les races peu-
vent se mêler, les langues ne se mêlent point. Les
Celtibères parlaient donc un idiome celte avec des
mots et des tournures ibères, ou ibère avec des tour-
nures celtiques. J'ai fait voir précédemment que
les monuments écrits, ceux du S.-O. en caractères
romains, ceux du S. en caractères ibéro-phéniciens
tracés de droite à gauche, ceux de l'E. en caractères
ibéro-phéniciens de gauche à droite, indiquaient trois
systèmes ou trois langues différentes. Il est remar-
quable que dans aucune inscription n'apparaissent
des mots d'emprunt, latins, celtes, puniques ; il est
remarquable aussi que l'on ne trouve pas de formules
communes, de tournures analogues, de phrases ré-
pétées. Gela pourrait faire supposer que le déchif-
frement n'a pas dit son dernier mot et qu'il y avait
peut-être là une écriture mystérieuse, ancienne, un
langage de convention. Je ne le crois pas pourtant.
J'ai, en janvier dernier, examiné ces documents
et proposé quelques faits grammaticaux. Le travail
de Schuchardt ne démontre point que je me sois
— 212 —
trompé. Il fait des hypothèses différentes, voilà
tout.
Pour pouvoir comparer utilement le basque et
l'ibère, il faut d'abord être sûr de la forme des
mots ibères et, en second lieu, reconstituer autant
que possible l'état ancien de la langue basque.
En ce qui concerne l'ibère, les lectures de Hiibner
sont généralement bonnes, sauf bien entendu les
voyelles à intercaler, et sous réserve des erreurs et
des méprises du graveur. M. Schuchardt modifie
quelques-unes des valeurs ou des transcriptions de
Hiibner, et je remarque notamment le nom de ville
ilurir^ qui correspond au latin iliberi, et qu'il faut
lire, parait-il, plutôt ildurii'. Je n'y contredis point
et j'accorderais même que la forme complète peut
être ilidurir ; je n'explique pas, du reste, comment
ildurir ou ilidurir a donné la graphie latine iliberi.
On a, dans les listes de noms topographiques de
ribérie, d'autres iliberi, illiberi, illiberri, etc., et
dans tous on y a vu les noms modernes ulibarri,
ullibarri, iriberri, hiriberri « ville neuve » du basque
moderne. Schuchardt m'oppose triomphalement ce
passage de Webster [Bull. Hisp., 1. 17) : « Vil-
leneuve ou Newlowii ne sont pas français ou anglais,
si Iriberri, lliberri, Ulibarri^ Iria flavia ne sont pas
basques », mais l'argument de Webster est un argu-
ment de sentiment; il raisonne en historien, en litté-
rateur, en philosophe et pas du tout en linguiste.
Schuchardt serre de plus près la question; il s'étonne
de l'objection fondée sur l'antériorité probable du /' ;
/•, dit-il, peut très bien provenir d'un / primitif, car
— 213 —
/ intervocal latin est souvent devenu /• en basque :
co.elum =-- ^eru, par ex. Mais, je remarque que tous
les exemples sont en e ou // et pas en i ; or, i a cer-
tainement plus d'afïinités avec l qu'avec r; d'ailleurs,
en phonétique générale, /• a précédé /. (hiant au Ji ini-
tial du moderne hiri, Schuchardt ne serait pas
éloigné d'y voir une particularité dialectale, un ren-
forcement latin postérieur, quelque chose comme ce
qui s'est produit dans hirrisku « risque », hira
« ira », garrathoin « raton », guipiizcoa, dont la
forme ancienne paraît avoir été Ipuzkoa (cf. esp.
guada^ pour l'arabe wadî ^). Mais je ferai remarquer
que la tendance phonétique générale du basque (je
dirai même de toutes les langues parlées en Espagne ;
témoin l'espagnol où le h initial n'est plus qu'un signe
étymologique correspondant à une souillante latine
que le béarnais aspire fortement : cf. filius, hil, hijo ;
femina^ hemne, hemhra, etc.) est la suppression des
aspirations. L'exemple le plus caractéristique et le
plus certain est le pronom de seconde personne sin-
gulière : hl est certainement antérieur à /. Il y a
plus ; je crois avoir démontré que, dans ce mot
comme dans d'autres [liame « petit » notamment), h
a remplacé un />: ancûen : ki, kame, etc.*. Une fa-
1. On peut ajouter les variantes a^Wiar et (/a.Hi(/ar «tilleul»,
et rappeler que l'esp. ataiid (de l'arabe tàbiU is^jt". attàbùt avec
l'article) a t'ait aiabntc et kntabutc.
2. J'ai trouvé sngdlnimo « serpenteau ». Einalaimc « femme »
doit être définitivement expliqué « fomelle enfant»; cnic, ema
« femelle » n'est pas douteux : cf. par ex. otsonui « louve » (Oih.,
proi\ 390). De cina dérive emante^ ema^teki comme i(/u^/n ( idiul.i,
— 214 —
mille de mots intéressante à ce point de vue est celle
de kide « compagnon » : adiskide « compagnon
d'âge, ami », haiirhide ou aurhide « parent, compa-
gnon de bouche, commensal?^ », ohaide « compagne
de lit, concubine » ; kide et ses dérivés, kidego^
kidetasun^ sont d'un usage courant.
Cette question du h initial est fort importante et
elle se pose notamment à propos de la forme primitive
de certains pronoms et de certains adverbes basques.
J'en reparlerai plus loin.
Relativement à Tétat ancien de la langue basque,
voici où j'en suis arrivé. La phonétique basque
n'admet pas de /■ initial, adoucit les explosives dures
initiales des mots d'emprunt, durcit les douces après
les sifflantes, adoucit les dures après les nasales,
n'aime pas les géminations de consonnes, ne tolère
que les groupes formés de consonnes d'ordres diffé-
rents, etc. Elle aime les contractions et les syncopes
et nous en avons vu se produire, pour ainsi dire, sous
nos yeux depuis deux ou trois siècles : les noms de
lieux Çuhihurii et Berazkoitz (Briscous) sont devenus
Çiburu et Beskoitze.
Faut-il rappeler les complexités et les irrégu-
larités de la déclinaison : la définie sans pluriel,
le double nominatif passif et actif (on a pu voir dans
iruzkl, iliukij vient de eçjun, dont le sens primitif pouvait être
« soleil » et auquel se rattache le nom du dimanche.
1. D'où vient ahaïde? n'est-il pas apparenté à nhi:pa «sœur de
femme»? Et n'y a-t-il aucune relation entre ces mots et aitn
0 père », anai et anai/a « frère » (en biscayen « frère d'homme » ;
« frère de femme » s'y dit nrlm, où se retrouve la finale de
arreba « sœur d'homme »>).
— 215 —
ce dernier un instrumental), la suppression de
l'artrcle au défini singulier avec certains suflixes et
son remplacement par eta au pluriel, les interca-
lations de lettres inexpliquées, les contractions
inattendues, etc. ? L'article était primitivement triple,
car ce n'était que les trois démonstratifs : celui-là,
celui-ci, cet autre. Le pronom personnel de seconde
personne pluriel est devenu un succédané hono-
rifi(|ue, respectueux, majestatique de « tu, toi » et
s'est fait un pluriel pléonastique. La distinction des
genres n'existe pas et ne s'observe que dans les
conjugaisons aux formes où la seconde personne
singulière est sujet ou bien dans ce qu'on a appelé
les variantes allocutives de chaque expression
(datif éthique). Il n'y a pas de duel, pas d'adjectifs pro-
nominaux suffixes. La composition est très abon-
dante et les éléments juxtaposés sont d'ordinaire
fortement altérés. Le vocabulaire, à la fois pauvre
et varié, mant|ue de mots généraux \ et comprend
surtout des mots de signification matérielle et con-
crète.
L'indéfini jouait jadis dans la grammaire basque
un rôle plus important qu'aujourd'hui. Les noms
propres, qui sont des noms de maisons, — Jauregui,
1. Ainsi, il n'y a pas de mots pour « sœur », mais on distingue
la sœur d'un homme, arrcha, de celle d'une femme, n/ii^pa. 11
est nécessaire de ne pas oublier cette distinction pour bien com-
prendre le proverbe cité par Oibenart : arreha bi^ etchea betho
« de deux sœurs, la maison (est) pleine ». On a vu plus haut que
le biscayen distingue aussi le frère d'un homme, anai, du frère
d'une femme, neba.
— 216 -
Etchbarne^ Hirigaray , — n'ont point d'article ; et
« le roi » se dit Errege, également sans article.
Quant au verbe, je ne pense pas qu'on puisse
soutenir aujourd'hui la priniitivité de la conjugaison
périphrastique ; elle est évidemment de formation
secondaire, postérieure, relativement moderne. Le
verbe basque, qui incorpore les pronoms sujets et
régimes, se réduit d'ailleurs à deux temps simples',
un présent et un passé (qui a pris généralement
aujourd'hui le sens de l'imparfait) ; ces deux temps
diffèrent l'un de l'autre, pour les radicaux intran-
sitifs, par une nasalisation au passé ; pour les radi-
caux transitifs, par une interversion de position de
l'élément sujet : niz « je suis », gizaz « nous
1. Il ne faut pas oublier que le basque dérive des temps, modes
et voix sc^condaires, à Taide de divers préfixes et sufiBxes : dcra-
haUa « il le fait oublier », hanint:; « si j'étais », ailu « puisse-t-il
l'avoir! », baikare «parce que nous sommes», albaitindoa
«puisses-tu-aller!», duket «je l'aurai, je l'aurais, je puis l'avoir»,
nizate « je serais », etc. On pourrait faire, des formes en cra,
ara, préfixés, une voix secondaire, la voix causative, et à ce
propos, je crois qu'on pourrait expliquer par le causatif les
formes en /• de l'auxiliaire dans la conjugaison périphrastique :
là où on prononce aujourd'hui dio^ ditjo « il l'a à lui», daut
« il l'a à moi », on écrit ou on écrivait derio (et deinc pi.), deriz-
tadaçu « vous l'avez à moi », cenericun « vous l'aviez à nous »,
darot, daraut, deraut, dorât, etc. Einan daraut serait propre-
ment « il le fait avoir à moi donné » et cinaiten dorio « il le fait
avoir à lui en-donner », emancn dcracute « il le font avoir à nous
pour-donner » {dandum). Je me suis même demandé si, dans
l'auxiliaire transitif cza, il n'y aurait pas un causatif (avec mu-
tation de r en ?); cf. ozarri « mettre», de ifarri «se placer»;
dans l'auxiliaire intransitif cdi, le di serait un suflixe conditionnel,
dubitatif (cf. le radical aidi : daidit « je peux, je pourrais le faire » ;
balaidi « elle pourrait le faire », Oih., pi'ov. 20).
- 217 --
Sommes », nohn « je vais », gohazi « nous allons >■> ;
niniz « je fus, j'étais », ginizaz « nous fûmes, nous
étions » ; niiioha « j'allai, j'^allais », ginohaz « nous
allions » ; dut « je l'ai », dugu « nous Pavons »,
dakit « je le sais », dakigii « nous le savons » ; nu
« je l'avais », ginu « nous l'avions », naki « je le
savais, je le sus », ginaki « nous le savions ».
Il faut remarquer cependant que, lorsque le régime
direct est de première ou de seconde personne,
l'imparfait offre la même construction que le présent
et se caractérise par une nasalisation : zitut «j'ai vous »,
zindud « j'avais vous », nuzu « vous m'avez », ninduzu
« vous m'aviez » ; pourquoi cette anomalie ? Je crois en
avoir trouvé l'explication : dans le présent transitif,
le pronom sujet est suffixe et le pronom régime
préfixé ; dans l'imparfait intransitif et dans le tran-
sitif à régime de troisième personne, le pronom
sujet est préfixé ; dans le transitif à régime de
troisième personne, rien ne représente ce régime,
de même que rien ne représente le sujet de troisième
personne dans le présent transitif ordinaire ; mais
cette absence de l'élément sujet de troisième per-
sonne ne nous surprend pas ; le verbe sémitique nous
y a habitués. Ce qui est extraordinaire, c'est l'absence
du régime. Aussi, me suis-je demandé si cette
absence, si cette identité de formation entre les temps
intransitifs et l'imparfait transitif, n'impliquerait j)as
une identité de signification, c'est-à-dire si l'imparfait
transitif n'était pas proprement un intransitif. Dans
cette hypothèse, le verbe bas(jue primitif, comme le
verbe sémitique^ comme le verbe ougro-finnois,
— 218 —
comme le verbe algonquin, comme le verbe dravi-
dien, comme tant d'autres, aurait eu deux voix :
l'une intransitive, indéterminée, indéfinie, neutre,
moyenne ; l'autre transitive, déterminée, définie,
active, caractérisées par l'interversion de position de
l'élément sujet, et deux temps dont l'imparfait était
caractérisé par une nasalisation \ Aux magyares làtok
« je vois » et lâtom « je le vois » correspondaient en
basque iiàkus et dakust ; à l'imparfait, on aurait eu
*ninakus (cf. le plur. ginaki^) et ^dinakust. Puis l'im-
parfait déterminé aurait disparu, ainsi que le présent
indéterminé qui se serait parfois confondu avec l'im-
parfait indéterminé et qui n'aurait subsisté que
1. Nu « j'ai », ginu^^ ou ;jinuto « nous eûmes», ^itut « j'ai vous »,
sindiit « j'avais vous », dut « je l'ai », etc.
2. On ne me demandera pas, je l'espère, de justifier ici les res-
titutions que je piopose. Entre autres choses probables, j'ai cru
remarquer que les formes plmielles, outre rrlément pronominal,
ont un signe de pluralité, ,■ ou /. Ainsi, « j'avais vous ». dndudan
en guipuzcoan u)oderne, fait ;indudri^aii en biscayen et ^indu^ada
en haut-navariais méridional ; « nous serions » c/inic;ke en
laboiirdin donne <iuiî;aul,it;ul,(' « nous serions à vous », où
;/int;(ii.- a manifestement lesens.de o nous étions ».
Je ne puis m'empêcher de constater, à ce propos, combien sont
mal commodes et peu méthodiques les travaux du prince L.-L.
Bonaparte sur le verbe basque. Outre son entêtement à faire de
;u le pronom singulier de la seconde personne, il présente les
formes dans un ordre fantaisiste, accumule à peu près au hasard
les paradigmes et se perd dans les détails. Il semble [.ilutôt préoc-
cupé de la signification actuelle des formes que de leur dériva-
tion ; n'y iuirai't-il pas eu avantage par exemple à rapprocher,
en souletin, iiihidii:^iin. « vous aviez moi » de ititndul.o:i'i « vous
m'auriez », Ixtnundi'uu « si vous m'aviez », et diniindiL'u « puis-
siez-vous m'avoir »?
— 219 —
dans les formes à régime direct de première ou de
seconde personne. Les deux temps indéterminés
auraient été naturellement conservés pour les verbes
essentiellement intransitifs. M. Stempf avait proposé
naguère de voir dans le présent actif, dans le présent
déterminé, une l'orme passive, rZw^ par exemple devant
être traduit « il est à moi » et non « je l'ai »; l'expli-
cation était ingénieuse, mais je crois la mienne bien
meilleure. Aussi proposerais-je volontiers de rap-
porter à l'imparfait indéterminé les formes dauntza,
zaantza^ gauntza « ils gisent, vous gisez, nous
gisons », dont se préoccupe Schuchardt (cf. Revue
internationale des études basques, t. I, n'* 2, p. 154) et
où il voit des formations produites sous l'influence
de egon. La position singulière du n ne saurait nous
étonner quand nous rencontrons des formes comme
eztazqui « il ne les sait pas ». 11 est vrai que le au
pour a est surprenant; mais il n'y a peut-être là
qu'un renforcement vocalique. Le verbe eraunizi qui
a le sens de « sonner » ne me paraît être qu'une
variante de erasi « bavarder », avec le même renfor-
cement et le même ti ; on pourrait aussi y voir un
dérivé du causaiif erantzuji a faire entendre», dont
le radical est enzu, car les n, ?', o, hi\ etc., sont des
terminaisons de participes passés. Il y a tant de
choses surprenantes dans la grammaire basque,
par exemple les doublets gaude et gaudez où le
second a deux ibis un signe de pluralité ; on ne peut
que constater ces faits dont l'explication est évidem-
ment dans la préoccupation constante de faire sentir
que le mot est pluriel. Quant à l'imparfait déterminé,
— 220 —
il doit certainement en rester des traces dans les
vieux auteurs*.
La construction est d'ordinaire : sujet, — com-
plément ou attribut, — verbe. Le déterminant se
place après le déterminé; le génitif cependant se
met avant le cas nominatif. Le pronom relatif qui
manque est remplacé par une phrase commençant
par bai « parce que »_, qui forme alors comme une
sorte de parenthèse. N'oublions pas les construc-
tions participiales : nik ikhUsia « ce que j'ai vu », ni
ikhusia « ce qui m'a vu », Nous avons vu que la dé-
rivation s'opère par suffixes le plus souvent, mais
quelquefois aussi par préfixes.
Un point assez obscur de l'histoire du basque,
c'est la forme primitive des pronoms. Il n'y a pas de
difficulté pour ni « moi », ki « toi », gu « nous », jsu
« vous^ »; cependant, quand le pronom de première
1. 11 n'est pas inutile de faire remarquer ici que certains verbes
intransitifs suivent en basque la conjugaison transitive ; on dit
iluzkiak argit::en du « le soleil brille » ; odolak su c/abe diraki
« le sang bout sans feu » (Oih., prov. 342; pror. 1596, n° 146).
Ce cas n'est pas du tout le même que celui des verbes qui n'ont pas
de correspondants exacts ; ainsi « suivre » se traduit par arrtd
qui est intransitif, arrcit iiiri « suis-moi » (Liçariague). Il y a
d'ailleurs des exemples de radicaux qui ont les deux conjugaisons,
transitive et intransitive : dans les proverbes de ^596, on trouve
ezaun adi «connais-toi, yv^oOi Tsa-jrov ». Dans le proverbe i;-f9
d'Oihenart, rii.l,- deinaddn est pris dans le sens intransitif ou
moyen « afin que je m'adonne » ; da.ns le Brèciairc des dcrots
de Dargaignaratz, j'ai relevé demaf/uela avec le sens « qu'elle se
mettra». N'ai-je pas entendu souvent dans le pays l'iium zitf
dans le sens de «asseyez-vous, mettez- vous là, nr/nucii Sic plat;»'?
2. Le prince L-L. Bonaparte, qui a eu la maladresse de
— 221 —
personne singulière est suifiicé, il devient t. Quel
rapport y a-t-il entre / et n? Sont-ce des mots diffé-
rents? Peut-on supposer que le n final, resté seul
après la chute de t, se soit assourdi en un /■ facilement
varié en d, lequel à son tour se serait durci en t? Le
dialecte de Roncal, actuellement, dit dud, avec, au
lieu de ^, un d imparfait, intermédiaire entre d et /-,
suivant le prince Bonaparte : dans saiVb^iVi«,Oihenart
écrit dud pour dut. D'autre part, « soi » paraît être
un radical commençant par 6 et ce b se retrouve
préfixé aux soi-disant impératifs de 3* personne :
biz « qu'il soit », berrait « qu'il me suive », bemo
« qu'il la lui donne ». Enfin, le pronom de 3' per-
sonne, qui est o quand il est complément indirect,
offre, préfixé, les variantes d, r, l; quel est le proto-
type et à quoi se rattache-t-il? au b réfléchi?
L'o dont il vient d'être parlé représente évidemment
l'un des trois démonstratifs qui sont en a ou ar
« celui-là », M ou ur [un) « celui-ci »,or « cet-autre »,
et servent tous les trois d'articles déterminatifs
suffîxés\ Isolés, ils sont en 11 initial : hura^^haujiori;
le roncalais et le zalazarais ont A'(7m, kaur, kori; le
s'obstiner à voir dans -r» la seconde pers. sing. « toi », ce qui a
gâté tous ses paradigmes, croyait m'embarrasser en na'opposant le
ir-cL- « vous » de certaines vallées espagnoles. Mais cela prouve
au contraire la prioaitivité de su « vous »; quand il est devenu
d'emploi général au singulier, on a éprouvé le besoin de faire un
« vous » pluriel : les uns l'ont dérivé de hi, la plupart des autres
de :2u.
1. Un pronom, dont la formation est assez obscure, se rencontre
dans les auteurs labourdins du dix-septième siècle, haina ou
haiùa « celui-là, lui ».
-.222 —
hatit-navarrais méridional, gaa^gori. Les mêmes dia-
lectes disent kola, gota; kala, gala;kan,gan ; kemen,
gemeii; pour hola « ainsi », hala « ainsi », han « là »,
hemen « ici ». Je ne prétends pas, comme le prince
Bonaparte, que Texistence de ces formes en k on g
soit décisive en faveur du k initial : elles peuvent être
au contraire purement accidentelles, locales et ré-
centes : c'est ainsi que l'absence du n final des impar-
faits en haut-navarrais méridional ne prouve rien,
car ce dialecte a connu le n final. Mais ici, il paraît
y avoir une tendance phonétique générale, k primi-
tif passant à A, puis suppression de l'aspiration : kl,
hi, i; — kori, gori, hori, ori.
Schuchardt m'objecte que l'ibère avait l'aspiration
initiale et même qu'il écrivait sans h des mots où
l'aspiration paraît s'être produite postérieurement.
On m'objectera aussi l'aversion du basque pour les
explosives dures initiales {gorpiUz = corpus,
gela = cella, garthak = les quatre (temps), etc.;.
Cependant, je répondrai qu'il y a peut-être là un fait
d'évolution et je rappellerai qu'un allemand parlant
français durcira ou adoucira une explosive là où,
dans sa propre langue, il prononcerait une douce ou
une dure.
C'est à propos de la formule arethg, aredc, are-de,
aredk, qui paraît correspondre au latin hic est silus
(ou sita), que la question s'est posée. Y a-t-il là deux
mots ou n'y en a-t-il qu'un ? Les bascomanes —
cette expression paraît avoir choqué Schuchardt,
mais je n'en trouve pas de meilleure — tiennent
pour la première opinion ; pour eux are est « ici »
— -223
et Schiicharclt dit à cv, propos : « ich halle die lied.
are « hier », iLir sicher, will esaber vorderhand mit
keinem bask. Wort identifizieren ». Quant à de, dk,
thg, on y verrait le basque dago « il demeure » et
Schuchardt lirait volontiers sur le vase de Sicile :
« ici est (le vin) m. Il me dit que datza et dago sont
aussi bien employés l'un que l'autre sur les tombeaux
actuels ; mais je lui ferai observer que dago « il de-
meure » est abusivement employé pour da « il est ».
par analogie avec l'espagnol où estar remplace sou-
vent ^e/-. Un Guipuzcoan ne demandera-t-il pas iiola
dago berori, voulant dire « como esta vm. », là où
un Labourdin dira simplement: iwlazare « comment
étes-vous ? w Si l'on tient pour le basque, il vaudrait
mieux lire aren duk « tu l'as en ce lieu », en faisant
de aren le locatif de ar « cela » ; mais l'absence du k
ou Ji initial ? mais la variante thg ?
Avant de parler de la déclinaison ibérienne que nous
présente Schuchardt, est-il utile que je réponde à
toutes les observations qu'il m'adresse ? Je ne le crois
pas; je voudrais seulement noter qu'il n'accepte pas
mon étymologie de oiharzun ci écho », oihu-harri-
zun, c.-à-d. « endroit où il y a des [)ierres sonnantes ».
Schuchardt préfère voir dans oihar une variante de
oilian « forêt, bois » : cf. le nom oyarbide « chemin
de (la) forêt ». C'est possible, mais je crois mon
explication meilleure et plus conforme au fait maté-
riel. Oikar d'ailleurs ne se rattache-t-il pas ix oihu ?
Voici maintenant le tableau de la déclinaison ibère,
suivant mon savant contradicteur :
224 —
SING.
PLUR.
Nom.
))
" -ce
Gén.
-71 {-m)
-cen
Dat.
-i i-e)
-cei {-ceai)
Erit.
-s (s)
-cis ?
A et.
-c i-k)
p
Quelle est la déclinaison basque ? On peut en faire
le tableau suivant :
SINGULIER
INDEFINI
DEFINI
ogi
ogi
-a
-r-en
-a-r-en
-r-V
-a-r-i
-r-ik
- })
-z
-a-z
-n ou -ta-.
n
-a-n
-ta-ko
-ko
-ta-r-ik
-tik
-ta-r-at ou
(^')
-rai (-ra, -ala, -alat,
-ara
-gabe
-a-gabe
-tzat
-a-r-en-tzat
-ki, kin
-a-re-ki-n, a- gaz
-k
-ak
PLURIEL DEFINI
ogi-a-k nom.
-{a-k-)en de (gén.)
1. La forme primitive du suffixe du datif est peut-être Ai. Dans
les formes verbales, f.i indique le datif : cf. nalorkio « j'arrive à
lui », dualdt « il vient à moi », yuyuzkit^u « nous demeurons à
vous», mais ce /à précède le pronom régime indirect.
— 22:> —
-'a-k)-i, ei à (dal.)
-cz par
-eta-n dans
-eta-ko de (pos.)
-eta-rik ou -tik de (abl.)
-ela-ra -rai, etc.) à (mouv.), vers
-a-kabe sans
-en-tzat pour
-e-kin, a-kaz, e-ki-cn avec
-^A' nom. actif
Il y a aussi les suffixes -ontz « vers )>, -/zo
K jusqu'à «, etc. ; les suffixes locaux et personnels
gan, ganik^ ganat, baithaii, baîtharik, baithara, etc.
et les combinaisons comme dans esku-ra-tze-ko-aii
« main-vers-être-de-dans, quand il était près de
venii' à la main », manada-re-ki-en « avec les en-
fants », egnn-da-ïio-ti-ka-ko « de depuis presque
vers le jour, depuis le temps passé jusqu'à ce joui- »;
gizonendako « pour les hommes », enekilako « de pour
être avec moi », zeziilikaii a du haut du ciel », etc.
Il y aurait, avec de grandes différences, certaines
analogies. Mais le tableau de Schuchardt est-il exact ?
Pour l'établir, Schuchardt a dépouillé des inscrip-
tions et surtout des légendes monétaires, et dressé
des listes plus ou moins longues, mais où est la ga-
rantie de la classification? Pourquoi «ou m est-il
plutôt génitif ((u'autre chose ? pour(|uoi ceai serait-il
datif pluriel ? J'ai peur que Schuchardt, songeant au
basque, n'ait obéi à une sorte d'auto-suggestion. On
peut lui adresser du reste la même objection qu'à
16
— 226 —
Philipon : comment reconnaître tel ou tel cas dans
un texte qu'on ne comprend pas ? Sans doute, les
médailles peuvent offrir des nominatifs, des datifs,
des génitifs pluriels, mais qui les reconnaîtra ? Par
exemple, keii qui est le génitif pluriel basque, esl-il
vraiment le correspondant des en, cm, qm, o?n, gin,
etc., ibères ? Je prends entre autres neroncen (peut-
être plutôt nerhoncen''), où le nominatif est certaine-
ment neron ou nerhon ; si c'est un génitif, on ne de-
vrait traduire que de trois façons: « de Narbonne »,
« des Narbonnes », « des habitants de Narbonne » ;
mais la première traduction n'est pas possible à cause
du c pluriel ; la seconde, non plus, car Narbonne n'a
jamais été un pluriel ; la troisième, pas davantage
puisqu'aucun élément ne représente « ceux, habitants,
citoyens, etc. ». Mais alors? D'autre part n'est-il pas
aventureux et hardi d'assimiler cen, gin et com ?
Décidément, en tout ceci, on raisonne vraiment trop
par à peu près.
Je trouve d'ailleurs un autre exemple de raisonne-
ment défectueux aux p. 62-64 du mémoire de Schu-
chardt : il a remarqué que, dans les composés, son
m « ville » devient quelquefois ilit, ce qui lui rap-
pelle les féminins hébreux, et il en rapproche les
mots basques betarte « vue, visage », helazal « pau-
1. De ce que le signe lu h est un o certain dans une variante
d'une légende, s'ensuit-il que le premier signe soit toujours o ?
Ne peut-OQ supposer tantôt une erreur du lapicide, tantôt une
omission de la voyelle ou de l'aspiration '? Les véritables formes
ne peuvent-elles être nerhon, saronaho..., Itothèccn ou même
o/iU,scfii •'
— 227 -
pière », otondo « morceau de pain », sutopil a pain
cuit sous la cendre ». bepurii « sourcil », siipazter
« côté du feu », pour hegitarle^ begitazal,, ogitondo,
sukopily begitbiiru, sulbazler, etc., de begi^ ogi, su.
On pourrait ajouter belhule « sourcil », belaspa-
lak variante de begispalak « paupières », bekoki
« frontj audace, toupet », bekhaitz « envie, mauvais
œil », bethUz a langage des yeux, œillade », betazpi
« ce qui est sous les yeux, cernes », beteraztun
u sourcil, mine », betheritsii « qui a mal aux yeux »,
betsein « pupille », betain et betagin « dent canine ' »,
betazbeta « face à face », de begi (en faisant remar-
quer qu'en labourdin on prononce bethazal^ betliule
et bethille, bephiiru) ; — okhiri « boulanger », otliu-
riiiitz ou oloroiilz « aliment », olhorde « en place du
pain », de ogi ; — sutliondo « coin du feu », sutliai-
tziii « devant du feu », sukhalde « cuisine », sukopil
var. de sutopil^ sugino ou sukhino « place au foyer »,
de sa; — artizar et arthizctr « Vénus, Lucifer, étoile
du matin », arlhiwratz « aube, point du jour », de
civgl; — et même bethalde « troupeau de vaches »,
de behi. On pourrait indiquer aussi bitarte « inter-
valle, entre deux ». Dans tous ces composés, le/ ou
le ih pourrait être considéré comme une mutation du
k du suffixe ko, après élision de o, qui aurait été sui-
vie d'une contraction, d'une syncope quand ce ko au-
rait été précédé de plus d'une syllabe. 11 aura pu
1. -Be«!«9 c'a correspond à notre « œillère (dent canine supérieure,
censée placée immédiatement sous l'œil), dent de l'œil » ; afjin
ou Juigiti est «incisive». Mais on a les variantes itain, litairij
litajjin, lethagin : d'où vient ce l ?
- 228 —
aussi y avoir élision du i final et durcissement com-
pensatif du g en k puis en t [hb en p ; pour hegibura,
bephiu'u). On peut supposer aussi le passage à t
du k initial ancien du second composant : iile, ille,
azal, ondo, arte^ ^''g^i auraient été hule, hiUe, har-
rale^ hondo, harte, hargi, pour de plus anciens kargi,
kule, kazal, karte, kondo, etc. ; on a bien asteharte
ou astearte « milieu du commencement^ mardi ^ » ;
1. Ce mot montre que les Basques, en dehors du dimanche, parta-
geaient leur semaine en deux périodes de trois jours : le commen-
cement {lias) et la fin (sans doute hil « tuer, mourir, finir,
terminer », d'où ilkl « sortir ») ; les noms du Jeudi et du vendredi
ont été empruntés à des mythologies étrangères ((( jour du ton-
nerre », « (joui') qui suit (celui du) tonnerre »), mais le samedi
s'appelle encore n^kcneguna « dernier jour ». Les souletins disent
nnzkanegun, naskenegun, nezlMnegun, ce qui a permis à de
mauvais plaisants de traduire « jour des filles», sous prétexte que,
en raison du repos dominical, la nuit du samedi au dimanche
est la plus propre aux rendez-vous amoureux; mais il ne faut pas
confondre l'immoralité avec le naturalisme. Le samedi s'appelle
aussi larunbat, où le prince Bonaparte voit avec raison « un
quart» (de la lunaison). La semaine commençait donc par le
dimanche et le mois était lunaire. Il est probable que, de temps
en temps, on intercalait un treizième mois pour rétablir la corres-
pondance des saisons. Celles-ci étaient vraisemblablement au
nombre de deu.\ : la belle, la chaude (tidd) et la désagréable, la
froide (ncgu), qui so partag-'aient chacune en trois périodes de
deux mois : udalchen, adarto, udazken, etc. Le parallélisme entre
la semaine et l'année suggère l'idée que le jour de l'an devait être
une fête générale comme le dimanche {i(;andc « jour du soleil »,
plutôt que « grand jour ») et s'appeler e;irihrrri « >oleil nouveau »,
nom que les Basques christianisés ont donné à la Noël, où,
comme on sait, l'année a longtemps commencé • en persan,
le jour de l'an est bien 7u?«/o; « nouveau jour ». On pourrait
peut-être aussi voir dans les mots astclchen, ((stcartc, asieasken,
lavunbaf. les noms des quatre semaines de la lunaison. Remar-
quons en passant lamn pour lauron, laurden « quart », à rappro-
— 229 —
quant i\ gaitz « mauvais », il est peut-être pour /cailz,
comme hitz « parole » serait pour kilz, avec l'inter-
médiaire gùz , d'où pourrait être dérivé gizoïi
«■ homme, être à la bonne parole'». C'est ainsi que ki
" toi » a donné t dans baiUiiz « parce que tu es »,
albeitindoa « puisses-tu aller ! », etc. Nous voici rame-
nés à la théorie du k primitif", affaibli, dans le cours
des âges, en Ji qui tombe à l'époque moderne ^ On
cher de licren « tiers », Iclirn « premier », où se révèle la dérivation
ordinale primitive.
1. Cette étymologie est très douteuse ; dans les composés, ///^o/i
devient (j'ca ; ;/i;a/iiine c( enfant mâle », (jL-erhaile « homicide»,
etc. ; Liçarrague fait remarquer qu'il a traduit « pêcheur » par
fjcHcadure pour ne pas mettre ;/barrain^aIe « poissonnier d'hom-
mes ». Je crois d'ailleurs que g vient après h et que h est le substi-
tut direct de /,-, sans doute par l'intermédiaire de AA. Au milieu
des mots, où p. ex. h remplace /•, ;j est sûrement postérieur : iirofcho,
uhotcho, ugoicho « brochet, loup d'eau » ; urarte, uharte, ugarte
(( île, (maison) entre les eaux », qui a donné, par métathèse, huart;
tirolde, a/ioldc, ugoldr « déluge » ; aralde, uhalde, ugalde, et
même iibaldc « cours d'eau» ; *iira(;, ^uhaU^ ?/(;«/,- «mamelle».
2. Beaucoup de noms topographiques basques se terminent en
eta^ aga et egi; eta indique particulièrement la pluralité, aga
l'abondance et cgi la collectivité ; je traduirais harrieta « les
pierres », e^pclcta « les buis », orrcaga « la genevraie », arif^aga
« la chesnaye», ^nmulahari-i'gi « endroit couvert de bourdaine »,
etc. Mais ogi, et, gi se rattache à tegL tel, toi, ti. Eta est de même
très probablement pour hcfa, qui est d'usage courant : ame^keta
« les chênes tauzins », clhcl.eta « conversation », ardiketn
« troupeau de brebis », etc. Ce ketu, ne pourrait-il pas être le
suffixe général de pluralité, réduit plus tard à k^* Il y aurait eu
un pluriel indéfini et un défini ; on aurait dit mendi a montagne »,
mcndiar « la montagne», mendiketa « montagnes», incndiarkcta
(( les montagnes » ; et il se serait produit des confusions entre le
déflni et l'indéfini : mendietan « dans les montagnes » serait
pour mcndiketan^ tandis que mcndiea «des montagnes » serait une
— SàO —
sait combien le basque aime la composition synco-
pée : opil est pour ogi-bil^ okhiii pour ogi-egin. En
tout cas, le / ne parait pas pouvoir venir du premier
composant.
Mais, pour en revenir à la déclinaison proposée,
il m'est difficile d'admettre que e, i, cet', ceai soient
des datifs; s un instrumental; c ou k actif serait plus
admissible, mais ne prouverait rien par lui seul. En
ce qui concerne s et en, je persiste dans mon opi-
nion, exposée aux p. 5-6 de mon précédent article : 5
doit être un génitif et en un mot, abrégé sans doute,
ayant le sens de « ville, cité, municipe ». Schuchardt
n'a point discuté celte opinion; il s'est borné à re-
produire, avec une pointe de raillerie, la traduction
tout à fait hypothétique que j'ai indiquée comme
possible pour la lame de Castellon. Il la rapproche
des traductions fantaisistes de MM. Stempf et
Giacomino; cela n'est pas juste, car ces messieurs
ont prétendu faire une traduction ferme, définitive;
au lieu que j'ai dit seulement que l'inscription pour-
rait signifier quelque chose comme : airiemta, etc.;
mais je n'y tiens en aucune façon. Schuchardt rec-
tifie la lecture de quelques mots; le quinzième serait
ïithsm, ce qui permet de rapprocher ithsni, lilhsni,
iithsin... comme je l'avais déjà fait; le dix-neuvième
aicas ; le dix-huitième arsleo. 11 s'ensuivrait qu'il y
aurait identité entre les deux mots oii j'ai vu hypo-
thétiquement « bouche » et « ventre, organe sexuel »;
réduction de mcndiar-kcia-en, mcndiaketcn, tncndiakccn, mcn-
diaken, tnendiaen.
— 2:^1 —
il y a entre ces deux expressions « bouche » et
« ventre » une idée commune, celle de chose inté-
rieure; le second pourrait être aussi « anus ».
Schuchardt ne fait aucune conjecture sur la signi-
fication possible des incriptions; c'est prudent, mais
cela ôte un peu de valeur à ses propositions. Tout
le monde n'a pas imité cette prudence. Ainsi, le
P. Fita, dans le Bullelin de V Académie royale c/Viw-
^otVe de Madrid,s'est occupé d'un monument découvert
à Fraga (Huesca) depuis la publication du livre de
Hïibner et qui est fort intéressant. 11 se rapproche de
l'inscription n" IV de Hiibner, en ce qu'il présente
comme celle-ci l'image d'une roue, signe religieux,
mystique, ou allégorique ; il lit ensuite alosildu \ i-
glasïis I erein • celder \ crerid • atue \ zikheii- cru. \ i.
Schuchardt corrige aloo ildu \ i-klasïis \ ereïii- cel-
der I ercerui-aue \ tliiceoen-erc \ i. Le n" IV porte
nuke-iltra-ziii (ou tui). Ces deux inscriptions sont
analogues, elles sont probablement funéraires; on
doit y trouver des noms, des titres, des indications de
parenté, des formules pieuses. La plus ancienne se
compose de trois mots dont le dernier finit par i; la
nouvelle se partage en trois membres de phrase ter-
minés chacun par /. Cet i est-il le signe du datif?
Le mot zui (ou tLii) est bien court pour être un datif;
quand je me rappelle les formations re/, ai, ceai,
et('., j'y verrais plutôt une dérivative nominative, une
sorte d'article, et alors mike pourrait être un verbe,
à la 3* pers. sing., « il repose, il est béni, il est loué » ;
le fameux aredk pourrait se lire arediike, avec ke
verbal. Le nouveau document n'aurait pas de verbe;
— •2'à2 —
il aurait trois nominatifs en /'; lé premier mot alo-
sildii rappelle le andlsldu du n" VI de Hiibner qui
corresj)oud au latin fiilvia ou lintearia; ce serait
donc un nom de femme. Erein, ercerui ou ererui^
eriii ou erci sont parents l'un de l'autre et le P. Fita
les rapproche de Verba du n° XLVl (en caractères
latins); ce n'' XLVI et le suivant sont remarquables
par des mots répétés en o et o/ii : a/'imo, arimom;
sintamo, sintamom, et par indi qui revient sept fois
comme un adverbe ou une conjonction copulative,
Ereiii est peut-être le féminin de ei'ci ou erul^ avec
Il final marquant le datif : « A Fulvia, fille de Gla-
si (?) ». Ercerui ou Ererui est peut-être « petit-fils »
et erci, erui « fils »; celder et atue ou auedik seraient
des noms d'hortimes ou des adjectifs de qualité :
une inscription a Aaedimic; en transcription latine,
Fita cite y4^7V/o;^^' (dérivé de aio, <7m?).iV (peut-être m
des ariinoiu, etc., que les Latins prononçaient en na-
salisant) serait donc un datif, comme je le propose à
la p. 22 (le mon précédent article. Je n'affirme rien;
. mais il me semble que cet i, qu'on trouve souvent
précédé de //, joue plutôt le rôle d'un nominatif: les
formules relevées par Schuchardt, iqnuciai-ildii-kle-
seiii (où ildu-kleseiii ressemble à Vildui-klasïis ci-
dessus), cirdc-aiLLiii, ardc-sicdiiniiieiii (il confère
sicdii avec Ségéda;, confirment mon hypothèse : ildii,
klasi, aiu pourraient être des noms propres; de aiu
dériverait aiuni et môme aueduni, comme sicduni de
6' iCi/f.; (l'habitant de Ségéda), et sicdnninein serait un
second dérivé, quelque chose comme « à ceux, parmi
ceux de Ségéda » : n serait un datif-locatif, l un
- 233 —
adjectil'-pronominal ou un article, e une dérivative
participiale : sicduninein pourrait donc être sicdu-ii-
i-îi-e-i-n « Ségéda-à-lui-à-qui est-lui-à, à celui qui est
originaire de Ségéda ». Je n'insiste pas sur ces
hypothèses; ni pourrait être d'ailleurs un suffixe
spécial.
Mais appliquons, vérilions, recherchons les suffixes
casuels indiqués par Schuchardt. La lame de
Castellon, par exemple, nous donnerait : un instru-
mental, — un nominatif (ou verbe), — un génitif,
— un datif, — deux datifs pluriels, — 2 nominatifs
(ou verhesi, — un datif, — un génitif, — 4 nominatifs
(ou verbes , — un génitif, — 2 datifs, — 2 nominatifs
(ou verbes), — un instrumental, — un datif; il y aurait,
dans le même texte, des datifs en e et en i, des
génitifs en m et en n; et il y aurait des combi-
naisons singulières de suffixes : ceai^ ceaie, sensé,
case, (lies, carse. Il est vrai (jue sinekten pourrait
être un vei'be, dit-on. En résumé, Tarrangement
grammatical serait tout à fait étrange. Les mêmes
difficultés se présenteraient avec tout autre docu-
ment. On peut remarquer aussi que Schuchardt dresse
des listes de suffixes particuliers, les uns aux
légendes monétaires, les autres aux inscriptions ;
il v aurait eu, dans la même langue, deux systèmes
différents; p. ex. le suffixe génilifc«,ce/z des médailles
deviendrait eia dans les inscriptions, et on nous
affirme ([u'il y aurait là un aff'aiblissement de c en /,
affaiblissement déjà constaté dans les variantes de
légendes salircn et salirin, qntlicqni etqnthiqni ; mais
n'y a-t-il pas une erreur d'observation : salir, saliri,
— 234 —
salirin, salircen ne forment-ils pas plutôt des cas
différents ? Je pourrais, pour tous les suffixes pro-
posés, faire des objections analogues.
Trouve-t-on le ko basque dans Tibère q, qo, qn^
qom (avec le suffixe génitif ordinaire m ou n en plus}?
Faut-il traduire astarco par « (le cheval) d'Asturie »?
Ko a certainement un sens locatif; etcheko yauiia
est « le maître dans la maison ». Mais, ajouter à ce
ko le 11 génitif ne signifierait rien en basque : -koen
serait une contraction de -koaken : Bayonakoeii « des
gens de Bayonne» pour * Bayonako-ak-en. Quant à
Alorsus, rattaché par Giacomino à Alor-ko de alor
« champ », je réclame la priorité pour alhor avec h ;
on néglige vraiment trop les formes aspirées dans
toutes ces étymologies. Il est d'ailleurs exact que -ko
forme des diminutifs, parce qu'il signifie : « de,
venu de, dérivé de », mais je ne crois pas qu'il ait
jamais formé des augmentatifs. Schuchardt retrouve
même le suffixe composé -tiko dans les -icoi, -digoé
ibères : c'est au moins fort douteux, car on
n'explique pas les e ou i ajoutés : est-ce le signe du
datif ? Ce seraient alors des datifs indéfinis, mais quel
en serait le sens ? Toudadigoe est traduit « à celui
de Tuda », comme Lamaticom « de celui de Lama » ;
or, en basque moderne, on emploierait dans ce cas
ko seulement et non tiko, on intercalerait l'article
et l'on dirait Tudakoari, Lainakoaren, ou plutôt
encore Tudatarrari, Lamataridien. Tout cela est
donc très incertain et même un peu fantaisiste.
De même, Schuchardt expliquerait volontiers par
« épouse » le mot nersnatn (et ses variantes;, qu'il
— 235 -
rapprocherait du basque neskato, neskciso, neskatcha
« fille, servante » [magd, màdchen)^ qu'on a expliqué
par un diminutif en to [paella] ou par neska-oso
« fille entière, intacte, vierge ». Je crois plutôt qu'il
convient de le rapprocher de nerhabe « domestique,
célibataire mâle », dérivé de yabe « maître». Quant
à yabe lui-même, j'y verrais un dérivé de yaiin
« seigneur » par be « sous, inférieur » ; ce serait le
magister ope r uni p. ex., le commandeur des esclaves :
faire de yaun un composé de yabe-on « bon maître »
m'a toujours paru beaucoup trop métaphysique pour
être exact.
Pour prouver que le basque a été parlé sur un ter-
ritoire plus étendu (ju'aujourd'hui, on a cité des
noms à apparence basque qui figurent dans des ex-
voto et des inscriptions de toute la région pyré-
néenne ; mais cela peut simplement être le fait de
voyageurs, comme la pierre de Cagliari et l'urne de
Sicile sont des faits accidentels. Il est du reste re-
marquable que l'escuara moderne, dont le vocabulaire
contient tant de mots latins, offre si peu d'éléments
celtes^ s'il est vraiment apparenté à l'ancien ibère.
Car^ il ne faudrait pas oublier qu'à l'époque des ins-
criptions, l'Espagne était habitée par une population
mixte, les Geltibères : il avait dû se produire là ce
qui est arrivé dans l'Inde dravidienne où les Aryas
se sont infiltrés peu à peu dans la population locale,
adoptant son langage, mais y ajoutant beaucoup de
mots sanscrits ; de même l'ibère a dû s'altérer et se
mélanger de mots celtes. Il ne sufïit pas au surplus
de comparer des désinences, des suffixes grammati-
— 236 —
eaux pris un peu au hasard ; il l'audrait pouvoir assi-
miler des racines verbales, des mots complets ; or, à
part le très discutable ill (car berri ne se trouve pas
dans les textes originaux), on ne nous en présente
aucun. Aucun nom, aucune légende, aucune inscrip-
tion n'a pu être expliquée à Taide du basque. Si nous
relevons les noms originaux de personnes, de divi-
nités, de localités, assez nombreux dans les ins-
criptions latines de TEspagne, nous n'en voyons pas
qui nous apparaisse comme basques : aiu, aia^ aio,
ainmo, allô, ambaicus, anibnici\ ambatus, ambata,
anio, aenio, cloutai^ cloiifi, alecina dea, ceceaigi
dei, ceceaeci lares, cerepaeci lares, bandiae a polise-
gus, bandueaetobrigus, inaiiliniaecus, reaveanaba-
raecus, ongiamunaecus , crougintoudadicoe, etc.,
etc. ; peut-être pourrait-on retenir audero, bigar et
deux ou trois autres. Bien habile celui qui verra dans
tout cela des radicaux basques! M. A. Carnoy vient
précisément de publier dans le Mnseoti (t. VUI,
n°' 1-2, 1907, 39 p., gr. in-8"j une étude sur les £'/e-
inents celtiques dans les noms de personnes des ins-
criptions d'Espagne, où il fait voir que la plupart
dés noms dont je viens de pnrler sont d'origine
celtique, ou si Ton veut, indo-européenne. Bien des
dérivations d'apparence escuarieiine sont plutôt cel-
tiques; ainsi les ko, i/w, goni, etc., [)araissent se rap-
porter aux icus, cas, cuni, gîte, (juin du celte ou du
gaulois. Les étymologies sont eu tout cas fort dou-
teuses.
Je n'ai donc aucune raison pour revenir sur les
conclusions de mon article du mois de janvier der-
— 237 —
nier. La parenté de Tibère et du basque n'a point été
démontrée, même par* Schuchardt. Mais quelque
négatifs ou incertains que soient les résultats de pa-
reilles études et de pareilles discussions, elles ne
sont pas inutiles. Elles dégagent le terrain en portant
la lumière sur beaucoup de points obscurs, en atti-
rant l'attention sur beaucoup de questions secon-
daires, en posant de nouveaux problèmes de détail.
La question principale sera-t-elle jamais résolue ?
Peut-être, car rien n'est impossible à l'esprit hu-
main, mais la prudence n'est jamais inutile, et, comme
dit le proverbe basque, celui qui parla par « peut-
être » ne se trompa pas, aguian zerrana etzadiii en-
gana. Julien Vinson.
6y\oç-oki-^oç
Le grec ôyXoç, pour àyyk-oç au sens de « troupe,
foule, nombre, quantité », se range, comme je l'ai
fait voir dans le numéro de la Reçue du 15 juillet
dernier, dans la liste des termes du rad. sansc. mah
au sens de « grand, étendu, nombreux, etc. ».
Je reprends la plume à ce propos pour signaler
comme appartenant à la même liste le gr. àXiyoç « en
(petit) nombre » pour l'adj. ô)('X-tx-6ç « ce qui con-
cerne la foule », lequel a tous les caractères d'un dérivé
synonymique de ô)(Xoç (en restituant à l'une et à l'autre
de ces formes les éléments phonétiques détruits par la
contraction). Ainsi s'expliquent de plus en plus par un
même schéma primitif des dissemblances qui parais-
saient irréductibles à première vue.
P. Regnaud.
LES MOTS
ARABES ET HISPANO-MOPJSQUES
DU « DON QUICHOTTE »
Le 25 septembre 1575, la galère El Sol, voguant
de Naples vers les côtes d'Espagne, rapatriait, après
trois rudes campagnes contre le Turc, un groupe de
militaires en congé des armées navales de Don Juan
d'Autriche et d'André Doria, lorsqu'elle donna au
milieu d'une escadre algérienne,, fut contrainte d'ame-
ner son pavillon en dépit d'une héroïque résistance,
puis conduite en triomphe jusqu'au nid des corsai-
res.
Parmi les prisonniers se trouvait le poète-soldat
Miguel de Cervantes, le glorieux estropié de Lé-
pante ' .
Du bagne de Déli-Mammi, renégat albanais, celui-
là même à qui revenait la prise du vaisseau espagnol,
Cervantes passa par voie d'achat, vers 1577, dans le
1. Il y avait aussi son frère, Rodrigo, soldat comme lui. Ses
multiples allusions à cette bataille, livrée le 7 octobre 1571,
semblent prouver qu'il était plus 6er du sobriquet qu'il se donnait,
el manco de Lcpanto, que d'avoir écrit le Don Quicltotto, auquel
il préférait de beaucoup son théâtre (cf. le Prologue de la 1" par-
tie). — Les Vénitiens ont fait Lcpanto de Naupahtos, et les
Turcs Ajnébakltti,
— 239 —
propre bagne du roi d'Alger, Hassan-Aga, de son
vrai nom Andreta, car il était Vénitien de nation,
renégat comme de juste, au demeurant le plus féroce
et le plus rapace de tous les forbans du rivage
barbaresque.
Après trois tentatives d'évasion aussi infructueuses
que sévèrement châtiées, après cinq ans passés
sous la menace permanente du gibet ou du pal, il
fut enfin donné au misérable captif d'apaiser la soif
de liberté qui le dévorait. Une commission de rachat
pour la Couronne de Castille débarqua à Alger, y
traita du prix des rançons et, le 19 septembre 1580,
le futur auteur du Don Quichotte était arraché à grand
peine des serres de son vautour. Quelques minutes
plus lard, Hassan-Aga, esclave du Grand-Seigneur,
qui venait de lui retirer le gouvernement de la
régence d'Alger, mettait le cap sur Stamboul \
Il y avait alors 25.000 esclaves chrétiens dans les
bagnes d'Alger; mais tous ne relevaient pas de
Philippe II.
Le souvenir des glorieuses campagnes de Lépante
et de Tunis, et surtout de la terrible aventure qui
s'ensuivit, resta à jamais gravé dans l'esprit de
Cervantes. Il y a fait allusion dans presque tous ses
écrits; il a été jusqu'à prendre pour sujets de drames
et de nouvelles les étranges épisodes de sa captivité.
Le Capitan cautivo qu'il inséra dans la 1^^ partie du
Don Quichotte, le Trato de Argel, les Baiios de Argel,
la Gran Suttana Catalina de Oviedo, la Espanola
1. Cf. Perez Pastoi-, Dociiinontos cpvvantliios, Madrid, 1897.
— 240 —
Inglesa, la Guarda cuidadosa, sont autant de chapi-
tres d'autobiographie où le romanesque, cependant,
n'a pas complètement abdiqué ses droits. Il suffit de
lire son œuvre maîtresse pour voir combien il se
plaît et combien il excelle à mettre en scène quel-
qu'un de ces Mores ou de ces renégats marfuces^ au
milieu desquels il vécut les plus sombres heures de
son existence accidentée. Leurs usages, leur costume,
leur mentalité si particulière ont trouvé en lui un
observateur attentif. D'un trait de plume il campe
ses silhouettes orientales, véritables croquis de
voyage enlevés sans retouche. Il n'est pas jusqu'à
leurs propres expressions qu'il n'emploie, quand,
l'imagination hantée par le souvenir des choses
vécues, il veut teinter son récit d'une pointe de cou-
leur locale. Sous ce rapport, l'histoire du Captif, qui
est un peu la sienne, forme un intéressant feuillet
d'album (fre partie, ch. XXXIX à XLIl). Enfin, on a
émis l'opinion, en partie fondée, semble-t-il^ que son
séjour à Alger, où il s'attarda pendant quelques mois
après sa délivrance, n'a pas été sans influence sur
son style et sur ses idées.
Cervantes, on le sait, se piqua toujours d'écrire
purement — ses admirateurs disaient : divinement
— dans une langue d'ores et déjà qualifiée de divine,
mais qui commençait alors à déchoir de cette dignité
1. « No te fies de ningun nioro, porque son todos marfuccs »
(2' p'% ch. XL) : mot arabe passé en espagnol. Engelmann le
fait venir de markhoù? = vil, sans valeur, et Dozy de mar/oûd
= réprouvé. V. leur Glossciwe des mots espagnols et portugais
dérioés de l'arabe, Leyde, 1869, pp. 3U;{ et o91.
- 211 —
et de celte élégance qu'elle avait acquises au cours
du siècle précédent. Une nouvelle école, en effet,
était apparue, dans les rangs de laquelle se pressait
tout ce que TEspagne comptait de copieras, de poètes
crottés, de licenciés en veine d'écrire, tristes imita-
teurs de la littérature italienne, les uns parlant
espagnol en latin, les autres en arabe, tous mécon-
naissant la hauteur et la fécondité du castillan, de
l'idiome national, tous encourant pour cette injure
l'anathème de l'immortel manchot, qui regardait leur
pédantesque littérature comme u la idiotez y la
arrogaiicia del mundo ».
Cervantes s'érigea donc en champion de la pureté
castillane et consacra tous ses efforts à réagir contre
le goût facile de l'époque. Les Avellaneda, les Ville-
gas, les Suarez de Figueroa ne lui pardonnèrent pas
leur infériorité. Il y eut une levée d'écritoires : les
pygmées, empruntant au géant ses propres armes, le
blâmèrent insolemment d'allonger son Ronian d'his-
toires parasites, taxèrent son style de langage terre
à terre « idioma humilde », comme si Sancho Panza
eût été un bachelier de Salamanque et la Teresina
quelque Galathée de pastorale; ils lui reprochèrent
enfin de faire « ostentacion de sinon imos voliintat-ios » .
« Olivo y aceituno — ■ es todo uno\ » Ce dicton
populaire a raison^ on ne peut le nier. On ne peut
nier davantage que le Don Quichotte renferme
nombre de vocables de l'idiome courant, de cette
1. Ces deux mots sont synonymes, l'un est latin, l'autre est
arabe, Zeïtoûn = olivier.
17
— 242 —
langue où foisonnaient par centaines les termes
relatifs à l'administration et aux sciences, à l'agri-
culture et aux arts et métiers, que la conquête arabe
avait imposés à la péninsule avec sa civilisation.
Tous ces mots étrangers, plus ou moins privés d'équi-
valents ou de synonymes d'origine latine, mais pitto-
resques, éparpillés à travers les cent vingt-six chapi-
tres du livre, vont et viennent, se perdent_, puis se
retrouvent, parfois à de longs intervalles, ou encore
se rencontrent dans la même phrase par groupes
de plusieurs.
A quoi faut-il attribuer ces petites débauches
à'algarabia^ ? Sont-ce des marques de l'empreinte
laissée par cinq ans d'existence en pays arabe ? Est-
ce le résultat d'une composition hâtive ?
Ce ne sont que les négligences hautaines du génie.
La preuve en est, pour le moins, dans l'admirable
page où Ricote, le More converti, narre ses aventures.
Ce hors-d'œuvre est, à n'en pas douter, une réponse,
entre vingt autres tout aussi spirituelles, adressée
aux Zoïles qui supportaient si difficilement les leçons
dégoût sorties de la bouche même de Don Quichotte %
« plus apte à faire un prédicateur qu'un chevalier
errant », au dire de Sancho Panza. Au préalable,
Cervantes a avisé le lecteur que « Ricote, sin iropezar
nacla en su lengua morisca, en la pura castellana
le dijo las siguientes razones ». Et, de fait, le récit
1. C'est-à-dire « la langue arabe » el-'Aj-abîya, mot qui a fini
par signifier en espagnol « galimatias » et qui est passé en
français sous la forme charabia.
2. Cf. entre autres passages le ch. XVI de la 2' partie.
- 243 —
de Ricote, cette victime de la persécution de 1609
que l'auteur déplore hardiment, est rendu dans un
style impeccable, dont nulle expression d'importation
étrangère, /iwZ emprunt fait à Yaljamia\ ne vient
choquer la belle tenue, en un mot dans le plus élé-
gant et le plus pur castillan, comme si le puissant
écrivain eût voulu rappeler que son génie, quand il
lui plaisait, pouvait ne pas connaître de limites.
Par contre, on demeure quelque peu interdit,
lorsque, six chapitres plus loin, on voit l'Ingénieux
hidalgo de la Manche, dont la folie bien souvent
sommeille, faire, « en passant », un petit cours
d'étymologie hispano-morisque à son écuyer balourd
et madré tout à la fois. Que penser de ces lignes,
sur lesquelles d'ailleurs nous aurons à revenir?
« Dieu me garde ! dit Don Quichotte. Quelle vie
nous allons mener, Sancho mon ami 1 Que de flageo-
lets [churumbelas) vont résonner à nos oreilles ! que
de cornemuses [gaitas zamoraiias)^ que de tambou-
rins, que de grelots et que de rebecs [rabeles] ! Que
si parmi ces diversités de musiques résonne celle
des albogues^ nous aurons là, presque tous les ins-
truments champêtres ! — Qu'est-ce là, des albogues ?
demanda Sancho ; je n'en ai jamais entendu parler
et n'en ai jamais vu de ma vie entière. — Les albo-
gues, répondit Don Quichotte, sont des plaques" dans
1. Arabe el-'Adjamîya, le castillan corrompu et mêlé de mots
arabes que parlaient les Morisques. Ceux-ci, de leur côté, don-
naient ce nom à l'espagnol parce que c'était la langue des étran-
gers, des barbares, 'Adjam.
— 244 —
le genre des chandeliers de cuivre (sic) ; en les frap-
pant l'une contre l'autre, par le côté vide et creux,
cela rend un son sinon très harmonieux et agréable,
du moins qui ne déplait pas et qui s'accorde bien
avec la rusticité de la cornemuse et du tambourin.
Or ce nom d'albogue est morisque, comme le sont
tous ceux qui dans notre langue castillane commen-
cent par al; savoir: Abnohaza (étrille), almorzar
(déjeûner), alhombra (tapis), alguacil (agent de
police), alhuzema (lavande), almacen (magasin),
alcancia (tirelire, etc.), et autres semblables qui ne
doivent pas être beaucoup plus nombreux; notre
langue n'a que trois mots qui sont morisques et
finissent en i, ce sont ; borcegui (brodequin), zaqui-
zami (galetas), et maravedi. ^Z^eZi (giroflée) et alfaqiii
(théologien musulman), tant par I'al du commence-
ment que par l'i de la fin, sont connus pour être
arabes \ Je te dis cela en passant, le hasard qui m'a
fait te parler des albogues, me l'ayant rappelé à la
mémoire. . .» (2* partie, ch. LXVII.)
La leçon est assurément incomplète; le plus
fâcheux, c'est qu'elle est tissue d'inexactitudes dont
il paraît bien difficile de démêler l'origine et le
but. Si Don Quichotte, poursuivant une nouvelle
chimère, expose simplement son opinion de mono-
mane, la cause est entendue; elle devient sérieuse
s'il est l'innocent truchement de Fauteur; dans l'une
1. Tous ces mota sont identifiés dans le Glossaire de Dozy. —
V. le commentaire par endroits erroné que Diego de Clemencin
consacre à ce passage dans une note du tome VI, p. 360, de son
édition du Don Qtdjoto (Madrid, 1833-39, 6 vol., pet. in-4°).
— 245 —
et l'autre alternative, quelque invraisemblable qu'elle
soit, elle mérite d'être examinée.
1° Il est presque absurde d'observer qu'un mot
n'est pas nécessairement arabe parce qu'il commence
par AL. Il y en a plusieurs en espagnol qui ont de
ce chef toute l'apparence de mots arabes, bien que
dérivant directement du latin. Voici, à titre d'exem-
ples, les plus curieux de ces vocables mulâtres :
Alcorque (quercus), Almaceria (maceria), Almeiia
(minœ), Almodrote (moretum) ; peut-être Almorzcir
(mordere?); puis Albedrio (arbitrium), qui n'a de
trompeur que l'apparence, et Alimana (animal). Ce
dernier n'est pas le moins intéressant comme phé-
nomène linguistique; dans la bouche des Morisques,
ce mot latin est devenu fl'/-}'«/;z«/z/?/a:=: originaire du
Yémen ! et, ainsi altéré par l'interversion des con-
sonnes, il a obtenu ses lettres de naturalisation, il
est rentré dans le giron de la langue maternelle, oii,
sous son masque de moharracho\ il s'est retrouvé
synonyme de lui-même, car le mot latin animal avait
été soigneusement conservé en castillan.
2° Le dictionnaire espagnol ne contient pas moins
1. (( Quiùii diablos te habia de conocer, Ricote, en ese irajc
de moharracho que traes?» Qui diable! pourrait te reconnaître,
Ricote, sous cet accoutrement de carême-prenant, que tu portes?
(2* p'", ch. LIV.) — C'est l'arabe mouharradj (V. Glossaire,
p. 308), synonyme de maskliani qui a donné mascara en espa-
gnol et mascarade en français. Cf. Devic, Dictionnaire éti/mo-
logi'/ue. Le mot alimatïa, qui n'a plus cours aujourd'hui, était
encore en usage à l'époque de Cervantes : « los jumentos
Il alimanas que sircen de eahallerla à los escuderos de los cabal-
leros andantes. » (Z). Q., 2° p", ch. XI.)
— 246 —
de dix-huit cents mots d'origine arabe, et non pas une
vingtaine, comme Finsinue Cervantes par Forgane
de son héros. Engelmann et Dozy en ont inventorié
un peu plus des trois quarts; Eguilaz et Simonet
après eux n'ont pas tout épuisée
3° Les vocables morisques terminés en i qui sont
venus enrichir l'espagnol ne dépassent pas la tren-
taine. On se contentera de citer ici ceux que Cervantes
lai-même emploie dans son Don Quichotte^ \ ce sont:
Lelili (le cri de guerre des Mores), Bocaci (toile
gommée, boucassin), Guadamaci (tenture de cuir
gaufré et doré), Tabi (taffetas onde, tabis), Tahali,
baudrier), /dô«Zi (sanglier). — Alholi, moderne Alfoli
(grenier à fourrage) et Aljonjoli ou AJouJoli [sésame)
semblent être, avec les deux mentionnés par Cervan-
tes, les seuls mots arabes passés en espagnol qui
ont conservé l'article al et qui ont i pour désinence.
4° Quant au sens de cymbales que, au moyen d'une
bizarre comparaison, Don Quichotte prête au mot
albogues [uiias chapas a modo de candeleros de
azofar, que dando una cou otra por la vacio y hueco
hacen un son), il est d'autant plus déconcertantque ce
mot revient plusieurs fois dans le livre avec, suivant
toute apparence, sa véritable signification qui est :
instrument à vent, en arabe boûq (Dicc. de la Acad. :
lat. buccina)\ que l'espagnol n'a qu'un mot pour
désigner les cymbales : platillos^ et que l'arabe, qui
1. Eguilaz, Glosario etimoloyico de las palabras cspanolas de
oricjen oriental, Granada, 1886. Simonet, Glosario de coces ibe-
ricas y latinas usadas entre los Mos:arabes, Madrid, 1888.
2. Cette liste ne prétend pas être complète.
— 247 —
n'en possède pas, confond dans une même expres-
sion cymbales et crotales, c'est-à-dire sounoâdj.
5° Si, dans ce passage, la distinction entre mots
moriscos et mots arabigos est intentionnelle, elle ne
repose cependant sur rien de sérieux au point de
vue de la linguistique. Elle nous laisse seulement
soupçonner que, sur ces douze mots, Torigine des
dix premiers était vaguement tombée dans l'oubli
ou près de le devenir.
Que Cervantes ait péché par ignorance ou seule-
ment par inadvertance en faisant tenir au chevalier
de la Triste Figure un discours à ce point hors de
saison et de raison, c'est une hypothèse qui, à la
réflexion, parait inadmissible. Par la force des choses,
en sa double qualité d'Espagnol — ce qui suppose
un homme ataviquement habitué à l'ambiance arabe
— et d'écrivain hors de pair, capable de doter son
pays « du seul livre qui montre le ridicule de tous
les autres^ », Cervantes était mieux placé que per-
sonne pour connaître non seulement l'historique de
la langue « divine » qu'il travailla à rénover, mais
encore les principes de la langue ondoyante et para-
site qu'était celle des Mores d'Espagne. Quant aux
séjours qu'il avait faits parmi Mores et Qouloghlys
de Tunis et d'Alger, il y a lieu de croire qu'ils ne
furent pas tout à fait sans profit pour lui.
1. Montesquieu, Lettres persanes, LXXVIII. Diego de Cle-
mencin dit que les Mores étaient particulièrenaent nombreux dans
les villages de la Manche, surtout depuis 1568 et 1569. L. c. I,
p. 200, note.
— 248 —
Il est donc impossible que Cervantes n'ait pas
commis délibérément les erreurs qu'on vient de
signaler.
Aussi bien, dans le même temps qu'il composait
la deuxième partie du Don Quichotte, le licencié
D. Sébastian de Cobarruvias Orozco, « Capellan de
S. M. C. el Rey D. Felipe 111, jMastrescuela y Cano-
nigo de la santa Iglesia de Cuenca, y Consultor del
santo Oficio de la Inquisicion ■>^, publiait son Tesoro
de la lengLia Castellana (Madrid, m.dc.xi), œuvre
remarquable pour l'époque, unique en son genre, où
la plus large part était faite à l'étymologie des mots
issus de l'arabe. Malgré quelques assertions hasar-
dées, ce dictionnaire qui complétait d'heureuse façon
les livres de vulgarisation publiés un siècle aupara-
vant par le P. Pedro de Alcala\ fut accueilli des
érudits et des littérateurs de métier avec toute la
faveur qu'il méritait.
Cervantes fut-il du nombre ? Pourquoi en doute-
rait-on ? Ce précieux ouvrage de lexicographie
réunissait assez de titres pour attirer son attention,
exciter son intérêt, satisfaire sa curiosité, le conduire
à des découvertes. 11 le consulta. Dès les premières
pages, l'article Albogiie l'édifia, comme nous-mêmes,
amplement : « Espèce de flûte, de doulcine, en usage
chez les Mores d'Espagne, particulièrement dans
]. Vocabalista aracirjo en Ictra castellana, Granada, 1505 ;
AHg para lif/cramcnie sabcr la Icnr/ua araruja, Salaraanca, 1505.
Ces manuels, extrêmement rares aujourd'hui, furent composés
dans le but de faciliter aux religieux la conversion des Morisques.
Ils sont imprimés, l'arabe transcrit, en caractères gothiques.
— 249 —
leurs zambras (ce sont des danses); espèce de gaila,
suivant le Padre Guadix...'» Voilà ce que dit
Cobarruvias ; mais de cymbales, il n'est pas question.
Vingt articles du même genre précèdent celui-ci,
cent autres et davantage le suivent. Les mots latins
commemant par al alternent dans l'ordre alphabé-
tique avec les arabes de la même catégorie... Et
csetera. D'où, encore une fois, l'inévitable conclu-
sion: c'est à bon escient que Cervantes fait disserter
son héros sur l'épineux sujet que l'on sait.
Depuis quelque temps déjà, remarquons-le bien,
Don Ouichotte, qui se sent parvenu au terme de son
aventureuse carrière, songe avec attendrissement à
troquer lance et rondache contre la pacifique houlette
des bergers arcadiens. « Quelle vie nous allons
mener, Sancho mon ami ! » Et, « en passant », à
propos à' albogues , il continue à déraisonner le plus
naturellement du monde, ni plus ni moins qu'à son
ordinaire.
Mais rien ne nous dit que sous Textravagance de
ce dernier hors-d'œuvre d'un genre tout spécial, le
« père putatif de Don Quichotte, de ce fils sec, maigre,
jauni, fantasque, plein de pensées étranges et que
nul autre n'avait conçues^ », n'ait pas caché un dernier
1. Les principales références de Cobarruvias sont deux lexiques
qui semblent aujourd'hui perdus et dont les auteurs sont le
P. Francisco Guadix et le P. Francisco Lopez Tamaiid de Gre-
nade. Il a, en outre, misa contribution les lumières de l'interprète
du roi (Philippe 111) pour les langues orientales. Don Diego de
Urrea, «qui sait l'arabe, dit-il, de façon magistrale ».
2. V. le Prologue de la l" partie.
— 250 —
trait d'énigmatique ironie à l'adresse des « gradués
de Sigûenza »% des puristes de mauvais aloi, des
syllabarum aucipites, qui traitaient de Don Quichotte
le créateur de Don Quichotte lui-même.
11 me reste, avant d'aborder l'examen critique des
mots arabes tombés sous la plume de Cervantes, à
montrer la fortune d'une très vieille légende orientale
qui, née dans le temple de Salomon, fut tour à tour
et simultanément juive, chrétienne et musulmane,
franchit les terres et les mers, les déserts et les
montagnes, et trouva l'accomplissement de son der-
nier avatar dans le XLV« chapitre de la seconde par-
tie du Don Quichotte : « Comment le grand Sancho
Panza prit possession de son île et de quelle manière
il commença à gouverner. »
Qu'on veuille bien lire ou^ pour ne pas être im-
pertinent, relire ces pages pleines de sens et de verve,
et s'arrêter davantage au différend très banal qui
amène devant le gouverneur de l'île de Barataria
deux vieillards : l'un, débiteur de l'autre pour
quelques écus d'or, jure que la somme est rendue,
cependant qu'il confie son bâton au demandeur le
temps de prêter serment. Mais Sancho qui, du coin
de l'œil, observe les deux parties, llaire la ruse : le
bâton est creux et renferme l'objet du litige. Sancho
explique alors comment il a pu, quoicjue sot, pronon-
cer en juge avisé : « C'est, dit-il, que j'ai ouï conter
jadis une histoire semblable au curé de mon village. »
1. Cf. ch. l, 1" partie. L'Université de Sigiienza, ville de
4.000 âmes, n'existait que de nom, comme beaucoup d'autres.
— 251 —
Elle se Irouve en effet rapportée tout an long dans
VHistoria lomhardina seu Legenda sancla (Vie de
Saint-Nicolas de Bari, ch. III), dontrauteur, Fra Gia-
copo di Voragine, né à Voraggio vers 1230, mourut
évêque de Gênes en 1298; livre si célèbre au moyen
âge — et même longtemps après — que l'admi-
ration des pieux lecteurs le décora du nova àe Légende
dorée. Seulement, cette historiette, Cervantes Ta
quelque peu dénaturée quant au fond, sans doute
pour les besoins de la cause.
Ce reproche n'atteint pas les Arabes, ces tradi-
tionnistes par excellence. S'en étant emparés sur
place, c'est-à-dire à Jérusalem, à l'époque de la con-
quête, comme l'ont fait, d'ailleurs, les Chrétiens à
l'époque des Croisa des, les Arabes conservaient encore
de cette fable, au XVP siècle de notre ère, un sou-
venir que les milliers d'années n'avaient pas entamé.
Dans leurs traditions, qui ne varient guère de l'une
à l'autre, la scène se passe dans le Temple, près de
la roche de Jacob (la Sakhra de la mosquée d'Omar) :
le serment des plaideurs est prêté sur une chaîne
miraculeuse qui se lève ou s'abaisse suivant qu'elle
est touchée par un homme véridique ou un parjure ;
la contestation a pour objet un dépôt qui consiste soit
en un joyau précieux, soit en une somme de cent ou
de deux cents dinars en espèces ou fondus, coulés
dans le bâton foré; les parties adverses sont deux
Juifs. La moralité de la fable ne souffre pas de va-
riantes : la perversité du genre humain a tué le pro-
dige.
C'est ainsi que cette curieuse légende est trans-
— 252 —
crite pour la dernière fois, seinble-t-il, en Orient, par
l'Arabe Moudjir ed-Dîn el-Hanbaly, mort en 1521,
dans son Histoire de Jérusalem et d'Hébron (p. 30 de
la traduction de H. Sauvaire, Paris, 1876) ; un siècle
auparavant, par le compilateur Chihâb ed-Dîn el-
Achbîhy, mort en 1446, dans son Kilàh el-Mousta-
traf{\.omQ 11, p. 198 de la traduction de M. G. Rat.
Paris, 1902); enfin, par un contemporain de celui-ci,
Khalil ben Ghâhîn ez-Zâhiry, vizir du sultan
d'Egypte Djaqmaq (1438-1453), dans sa Zoubdat
Kachf el-Mamâlik (p. 21 du Texte arabe, publié par
P. Ravaisse, Paris, 1894). La voici telle que nous la
trouvons consignée dans cet ouvrage :
« Une légende nous apprend que Salomon, fils de
David, avait fait suspendre dans la Maison du Sanc-
tuaire une chaîne que devait toucher quiconque avait
à prêter serment. Elle s'élevait devant le parjure, elle
s'abaissait au contraire sous la main de rhomme
véridique. Mais il arriva dans la suite qu'un homme
confia à un autre cent pièces d'or. Quand il les lui
réclama, l'autre nia de les avoir reçues. Tous deux
alors se présentèrent devant la chaîne. Cependant
le dépositaire avait glissé les cent pièces d'or dans
un bâton [creux] qu'il remit à son créancier. Or,
comme la somme était coulée en lingot dans le corps
du bâton, la chaîne ne s'éleva point lorsqu'il la tou-
cha, ce qui frappa de stupéfaction et le plaignant et
ses témoins. Aussi, à partir de ce jour, elle ne
s'abaissa plus et elle est restée suspendue jusqu'à
présent. C'est à cela que le poète fait allusion dans
ce vers :
— 253 —
« De même que Tlnspiration d'en haut, l'ère des
grandes choses est passée ; ainsi la vertu est restée
en suspens avec la Chaîne. »
Paul Ravaisse.
(A suivre.)
A SYNOPSIS
ANALYTICAL AND QUOTATIONAL
of the 338 Forms of the Verb, used in tlie Epistle to
ihe Hehrews, as fouiid in the Baskish New Testa-
ment of Jean de Liçarrague, printtd in 1571, at La
Rochelle.
(suite)
DELARIC. 3. I. q. delà, but in the participial sensé.
The partitive ending rie adds nothing
perceptible to the meaning. He heing.
1. 3. . . . eta . . . imagina propria delaric, (H. omit
la virgule.) . . . estant . . . , & la marque
engrauee
7, 25 bethi vici delaric hecgatic ararteco
IÇATECO. . . ., tousiours viuant pour inter-
céder pour eux.
11. 4. ... : eta . . . hil delaric ... : & luy estant
mort
DEMOGVN. 1. Imp. pi. 1, r. s., r. i. s., v. ir. act.
eman. Let us give it to himl
10. 24. Eta gogoa demogun elkarri, charitatera eta
obra onetara incitatzeco : (H. omit la vir-
gule.) Et prenons garde Tvn à l'autre,
afin de nous inciter à charité & à bonnes
œuures.
- 255 —
DEN. 25. I. q. (la, qui devient de devant n' relatif,
et (12. 3., 13. 7.) conjonctif. Whlch is ; in
{\'hich is ; of whidi any one is ; lie may be ;
[n'hat] may be.
1. 7. Eta Aingueruéz den becembatean ... Et
quant aux Anges
1. 8. Baina Semeaz den becembatean . . . Mais
. . ., quant au Fils, (L'imprimeur lyonnais
mit « aux ».)
2. 5. ... ETHORTEGO DEN mundua, ... le monde
à venir,
4. 4. ... çazpigarren egunaz den becembatean,
(H. put çazpi at the end of the linewithout
a hyphen.)
. . ., touchant le septième iour,
4. 12. . . ., eta den ezpata bi ahotacoric baino pc-
netrantago^ : ..., & plus pénétrante que
tout glaiue à deux trenchans,
5. 2. ... BEHAR den becembat . . . competemment
6. 5. . . . , eta ethorteco den secularen verthu-
teac : . . . , & les puissances du siècle à
venir,
6. 6. ... hetan den becembatean, ... quant à
eux,
1. This pronoun is in the nominaiive case except in 10. 18-,
where it is locative; and in 11. 1., where it is the possessive
plural.
2. The use of den = ichich is, in the sensé of « ail, or any
a/àch is », is common. L- renders trenchans = edges by aho =
mouth, as if he weie speaking of a two-edged saw. The expression
occurs again under Car de.
— 256 —
6. 9. . . . çiieçaz den becembatean, . . . cjuant à
vous,
6. 19. ... SARTZEN de/i-hai heçala. . . . comme . . .,
& pénétrant (L. translates « as one-which-
is entering ».)
7. 4. ... cein handi eguin içan den haur, ...
combien grand a esté cestuy-ci,
7. 23. Eta Sacrificadoréz den becembatean, D'au-
antage, quant aux Sacrificateurs,
9. 13. ... haraguiaren puritateaz den becemba-
tean : . . . quant à la pureté de la chair :
9. 16. Ecen testamenturic den lekuan, . . . testa-
mentu eguilearen lierioa den. Car où il y
a Testament, . . . que la mort du testateur
entreuienne.
10. Som. 26. Spiritu sainduaren contra DEN beka-
tua. Péché contre le sainct Esprit.
10, 18. Bada gauça hauen barkamendua den lekuan.
Or là où il y a rémission de ces choses,
11. 1. ... nehor sperançatan den gaucén funda-
menta, . . . vne subsistenoe des choses
qu'on espère,
11. 7. ... fedearen arauez den iustitiaren here-
dero. . . . héritier de la iustice qui est se-
lon la foy.
12. 3. ... nor den ... celuy (L. translates « who
may be ».)
12, 13. ... : maingu den gaucâ ... ce qui cloche
(H. mit den, parce que L. avait lu tô
yjiùkov.)
— 257 —
12. 18. . . . , ez ERRATZEN clen sura', ez haice buhum-
bara, . . . , ni au feii bruslant, ni au tour-
billon,
12. 23. ...,eta gucién iuge den Taincoagana, eta
iusto SANCTiFiGATUEN spiritiietara : . . ., &
à Dieu qui est iuge de tous, & aux esprits
des iustes sanctifiez :
13. 7. ... ceric içan den hayén conuersatione"aren
lina. quelle a esté Tissue de leur conver-
sation.
DENA. 10. I. q. den^ ii rel. nom. décl. nom. intr.
& accusatif, [na ^= celui qui) He, or Him
n'ho is ; that which is.
3. 2. ... fidel DENA : (régime d'eçaçue.) Fidèle
4. 10. Ecen laincoaren reposean SARTHU ?V<'?7i r/e/îr/,
Car celuy qui est entré au repos de Dieu.
4. 15. ... manera berean gauça gucietan tentatu
içan dena, salbu bekatuan. (régime de
dugu.) . . . celuy qui a esté sembablement
tenté en toutes choses, hors mis péché.
7. 7. ... chipién dena ... ce qui est moindre
8. 13. ... : eta çahartzen eta anclanotzen dena
... : & ce qui est fait vieil & ancien,
9. 3 Sainduén sainduac deitzen dena : . . .,
qui est appelé :
10. 37. . . . , eta ethorteco dena . . . , & celuy qui
doit venir
11. 27. ... : ecen inuisible dena ... celuy qui est
inuisible.
1. Cf. latin suber, sûrus, surcûlus, sûbârc, sûrtre, et basque
criti'c = bois, niinea = mimbie, et caetera.
18
— 258 —
12. 25. ... MiNÇO dena : . . . celuy qui parle :
13. 8. lesus Christ atzo içan dena eta egun, (H.
mit içan dena.) lesus Christ qui a esté
hier & auiourd'huy,
DENAC. 2. I. q, f/e/i, aux., n rel. nom. décl. nom. s.
act. [nac = celui qui; nom. de eztrauca
& deçan.) He who is.
5. 4 baina laincoaz deitzen denac, .... ains
celuy qui en iouit qui est appelé de Dieu,
(L. ne traduit pas en iouit.)
11. 6. ... : ecen laincoagana ETHORTEN c?e«â!c, ...
que celuy qui vient à Dieu,
DENAGANIC. 1. I. q. den, n rel. nom. décl. ablatif
déterminé. From him who is.
12. 2.5. ... cerutic minço denaganic ... de celuy
qui parle des cieux. (L. dit « de ciel ».
DENAREN. 2. I. q. den., n rel. nom. décl. possessif
dét. Ofthat which is.
10. 13. Goitico DENAREN . . . cc qui reste, (Voyez da-
goelaric.)
13. 14. ... : baina ethorteco denaren ondoan ...
celle qui est à venir. (Voyez gabiltza.)
DENAZ. 1. 1. q. den, v. s., n rel. nom. s., décl. mé-
diatif dét. [naz = par- celui qui.) By him
who is.
7. 7, ... guehién denaz . . . par le plus grand.
DENEC. 1. I. q. denac, mais indéterminé, influencé
par cemheit = quelque, {nec = qui.) Sujet
de etzaitzatençât. [Something) <,vhic]i is.
— 259 —
12. 15. ... : cembeit erro karmin goiti ialguiten
denec ... : que quelque racine d'amer-
tume bourionnant en haut (The sensé of
the Baskish is the same as ilone read den
cemheitec^ namely « any (one) which may
be ». It is in the active case, because il is
the nominative ol' the transitive verb
etzaitzatençdt. Itis quite différent l'rom the
defînite and determinate denac meaning
that which is. So too batek means [any]
one in the active case. But batek is « the
one » in the active case, as distinguished
from berzeak =■ « the other ». For the same
différence compare denaz and denez.)
DENEZ, 1. I, q. den aux. avec e euph. devante mé-
diatif ou adverbial indéterminé, [nez = de
[quelque chose) qui.] About [soniething]
which is. (The sensé would be the same
were gauça [■= causa = thing) thro^vn
forward and the sentence formed thus
« hobe eta ... den gauça bâtez «.The
whole relatival clause is an epithet added
to hobe = better. Such séparations be-
tween the noun and the termination that
qualifies it are common in Baskish phrases.
See the note on denec.)
6. 9. ..., gauça hobez, eta saluamenduarequin
EGUiTENAGO ^ denez ; . . . , choses meilleures
& conuenables à salut, (L. traduit chose.)
1. For cases of the application of the comparative degree to the
— 260 —
DENIC. 1. I. q. deii, v, s., // rel. décl. partitif indé-
terminé, [nie = quelque chose qui) quali-
fiant le régime de duçuela. [Soîiiething)
which is.
10. 34. . . ., eta permanent denic. . . . vne . . .,& qui
est permanente.
DENO. 3. I. q. den, aux., n rel. temporel décl. dura-
tif. [no = durant que.) Wliile it is.
3. 13. . . ., egungo egun deitzen deno, . . ., tandis
que ce iourd'huy est nommé,
3. 15. ERRAiTEN deuo, Cependant qu'il nous est dit,
(Leiçarraga does not express nous.)
9. 17. > . . testamentu eguilea vici deno. . . . durant
que le testateur vit. [Eguilea is the maker)
which governs testament = will, i. e. the
[will-)maker.
DIAVDEG. 1. Ind. prés., pi. 3 adr. masc, v. irr.
neutre egon. They stand, o man! (Acts, 13.
21.)
1, 12. . . ., eta MUTHATZECo diaudec : . ., & seront
changez : (L. dit « restent à changer ».)
DlC. 3, Ind. prés., s. 3, r. s. adr. masc.^ aux. act.
Has it., o man!
1. 21. ..., lURATU ukan die launac, ,.., Le Sei-
gneur a iuré,
12. 6. ... launac gaztigatzen die, eta ... haour
gucia CEHATZEN dic. Car le Seigneur chas-
tie celuy . . ., & fouëte tout enfant
infinitive, cf. Acts, 9. 22, fortificat;scnago ; Luke, 23. 5, gort^e-
nago.
The sensé is « making-er », i. e. « more contributive to ».
— 261 —
DIEÇOGVX. 1, Imp. pi. 1, r. s., r. i. s., aux. act.
Let us hâve il to Him.
13. 15. [larcaz bada oiFRENDA rfi'e^oo^w/i ardura lain-
coari laudoriozco sacrificio, (H. mit lain-
coari,) OH'rons donc par luy sacrifice de
louange à tousiours à Dieu :
DIO. 10. Ind. prés., s. 3, r. s., v. irr. act. e//«/<, Says
it\
1 . 6 . . . . , DIO, (H. omit la 2" virgule.; . . . , il dit,
1. 7. ... DIO, . . . , il dit,
1. 8. . . . DIO, ([1, mit ilio et omit la virgule.) il
dit,
8. 5. ... (dio) ... (dit-il)
8. 8 DIO launac, (dit le Seigneur)
. . ., DIO launac. . . ., dit le Seigneur.
. . ., DIO launac, . . ., dit le Seigneur,
Halacotz, munduan sartzeân, dio. A raison
de quoy, en entrant au monde, il dit,
. . ., DIO launac le Seigneur dit,
. . . , DIO launac dit le Seigneur,
DIOELA. 4. I. q. dio^ avec e euph. devant la parti-
cipial. While lie says il.
2 . 6. . . . , DIOELA, .... disant,
2. 12. DIOELA, Disant,
8. 11. ..., DIOELA disant,
12. 26. ..., DIOELA, ..., disant,
1. From astupid note in the Grammar of Iturri it seems neces-
sary to say that dio and the nextthree forins are not derived from
crran; but express its idea. just as da does that of i^an, or in
Latin fuit that of ferre, fui that of cssc.
8.
9.
8.
10.
10.
5.
10.
16.
10.
30.
— 262 —
DIOSTE. 1. Ind. prés., s. 3, r, s., r, i, pi., v. irr. act.
erran. Says it 1o tJiein.
8. 8. . . . , DIOSTE, ... il leur dit,
DIOT. 1. Ind. prés., s. 1, r. s., v. irr. act. erran. Isay
it.
9. 2 DIOT, (H. mit diot,.) . . ., asçaiioir
DIRADE. 23. Ind. prés., pi. 3, v. s. et aux. They
are.
2. 11. ...^batganic dira.de guciac, ..., sont tous
d'vn,
3. 11 Baldin seculan sarthuren hadirade ene
reposean. . . . , si iamais ils entrent en mon
repos.
4. 3 Baldin seculan sarthuren hadirade ene
reposean : . . . , si iamais ils entrent en
mon repos,
4. 5. . . . , Baldin seculan sarthuren h^dirade ene
reposean. ..., Ils n'entreront point en
mon repos.
4. 13. ... : aitzitic gauça guciac dtrade billuciac^
eta irequiàc haren beguietan ... : ains
toutes choses sont nues & ouuertes aux
yeux de celuy
7. 5. . . ., Abrahamen guerruncetic ilki içan ba-
dirade - ère. . . . combien qu'ils soyent
sortis des reins d'Abraham.
7. 20. (ecen berceac iuramendu gabe Sacrificadore
EGMm içan dirade. . . . (car les autres ont
esté faits Sacrificateurs sans serment :
1. Du latin rîllo et ut:- = vidl\ dcponnvi, comme la brebis
tondue?
— 263 —
7. 23. . . ., anhit/- eguin içan diradt, . . . , il en a
esté fait plusieurs,
8. 8. . . . , ETHORRi dirade egunac, ..., les iours
viendront, (L. traduit £p)(OVTai.)
8. 10 eta hec içanen dirade ene populu.
. . . , & ils me seront peuple.
9. 22. Eta quasi gauça guciac Leguearen arauez
odolez PURIFICATZEN dircide^ Et presque
toutes choses selon la Loy estoyent net-
toyées par sang, (In the original there is a
comma after Loy, but not after sang.)
11. 13. Fedean hauc gucioc hil içan dirade pro-
messac recebitu gabe : Tous ceux-ci sont
trespassez en foy, n'ayans receu les pro-
messes :
11. 34. . . ., sendo eguin içan dirade erietaric, bor-
thitz EGUIN içan dirade g\\eT\2Ln\ . . . , de
malades sont deuenus vigoreux, se sont
monstrez forts en bataille,
11. 35. ... : eta batzu hedatu içan dirade, . . ., les
vns aussi ont esté estendus,
11. 36. Eta berceac phorogatu içan dirade escar-
nioz eta vkaldiz, Et les autres ont esté
esprouuez par mocqueries & batures,
11. 37. LAPiDATU içan dirade, segxtu içan dirade,
TENTATU iça?i dirade, ezpata herioz hil
içan dirade : hara huna ebili içaji dirade
1. Does (jiicrla come from f/uerra,, or froin low-latin '/«/ere/a.^
The use of erietaric, to render a de raalades». appears too lite-
ral. L. ought to hâve used a périphrase to shew that it means
<f instead of, or after being il! », such as « eri içanez gueroztic ».
— 264 —
ardi eta ahunz larruz veztituric, aban-
DONNATURIC, AFFLIGITURIC, TORMENTATURIC.
Ils ont esté lapidez, ils ont esté sciez, ils
ont esté tentez, ils ont esté mis à mort
par occision de glaiue, ils ont cheminé çà
& là vestus de peaux de brebis, & cheiires,
destituez, affligez, tormentez.
12. 25. ... : ecen baldin itzuri içan expsidirade . . .
: carsi ceux-là ..., ne sont point eschappez,
13. 11. E('en abrén gorputzac, , . ., erratzen dirade
tendetaric lekora'. Car les corps des
bestes . . . , sont bruslez hors du camp.
DIRADELA. 3. I. q. dirade, avec la conjonctif =
que. That they are.
2. 8. . . . gauça guciâc haren suiet diradela.
. . . toutes choses luy estre suiettes.
3. 19. ... EciN SARTHu iça?i diradela. ... qu'ils
n'y peurent entrer
4. 6. ... batzu SARTZEN diradela hartan, ...
qu'aucuns y entrent,
DIRADELA RIG. 1. I. q. dirade, aux. avec laric par-
ticipial. While they are, or they beiiig.
1. 14 cerbitzuco igorten diradelaric . . ., &
qu'il enuoye (L. traduit ziç, ôia/wOVtav
àTro(7T£XX6(j.£va).
DIRADEN. 7. 1. (j. dirade, avec ii conj. (5.12., and 9-
33. ruled by baino) rel.et -= qui, et 1.6. de
1. Cf. (hujula 13. 13. Ra is the directive case-ending, or post-
position. Possibly Icrobkli in the Lclo (= Canclôn) of Markina
may mean a let be excepted », « soit mis hors ».
— 265 —
laquelle. TJiat tJtey are, (they) whicli are^
and 7. 6. of whidi llicy are.
5. 12. . . cer diraden ... lehen hatseco elemen-
tac : . . . quels sont les rudimens du com-
mencement
7. 6. Baina hec dihaden leinu bereco Mais ...
dVne mesnie race qu'eux, (L. mit diraden
parce que dans le grec on ne trouve que
é^ aÛTWv.)
7. 8. Eta hemen iiiltzen diraden gmconec
Et ici les hommes qui sont mortels,
9. 23. ... ceruëtan diraden gaucén figurâc, . . .
hauc DIRADEN baiuo sacrificio hobez. . . .
les figures des choses qui sont es cieux
. . . par meilleurs sacrifices que ceux-là.
12. 23. Eta ceruëtan scribatuac diraden lehen sor-
THUÉN congregationera, Et à l'assemblée
des premiers nais qui sont escrits és
cieux,
DIRADENAC, 6. I, q. dirade, avec n rel. nom. pi.
décl. pi. nom. intr. et accusatif, [nac =
ceux, ou celles qui.) Thosc iv/io are.
2. 11. Ecen bay sanctificaçalea, bay SANGTiFiCATZEN
diradeuac. Car celuy qui sanctifie, & ceux
qui sont sanctifiez,
6. 4. . . . behin illuminatu içan diradenac, ...,
eta Spiritu sainduan participant eguin
içan diradenac, . . . ceux qui ont vne fois
esté illuminez, . . . , & ont esté faits parti-
cipans du sainct Esprit.
— 266 —
7. 25. . . ., harçaz laincoagana' hurbiltzen dirade-
nac, . . . ceux qui s'approchent de Dieu
par luy,
10. 14. ... SANCTiFiCÂTZEN dlradencic. ... ceux qui
sont sanctifiez. (L. translates toùç
àyta^Ofxévouç -— those who are being
sanctified.)
12. 27. ... : fermu diradenac ... celles qui sont
immuables
DlRADExNACGATIG. 1. \.<\. diradenac, avec n nom.
pi. et la terminaison prodessive gatic. For
those who are.
1. 14. ... saluamenduco heredero içanen dirade-
nacgatic. ... à cause de ceux qui receu-
ront l'héritage de salut. (L translates
« On behalfof those who shall be heir ».)
DIRADENEC. 2. l. (\. diradenac, ixi?às nominatif ac-
tif, sujet de baduté et ezpaitute. Those who
are.
7. 5. Eta Leuiren semetaric diradenéc . . . Car
ceux d'entre les fils de Leui (Voyez dule-
laric. L. ought to hâve put diradenéc in
Italie, because the Greek has only ol (Jièv
13. 9. ... APPLicATU içaii diradenéc. ... à ceux
qui s'y sont occupez. (See e^pai Lille. L.
translates ol usptTraT'/jaavTSç, which Calvin
turned into a dative.)
1. The Heuskarian idiom expresses the idea of appioach, as in
English, by to or toico.rds, hère rendered fjann.
— 267 —
DIRADEiNÉX. 2. I. q. diraden nom. aux. décl. poss.
dét, pi. {nén = de ceux, ou celles qui.) Of
those who are.
2, 18. ... TENTATZEN diradeiiéii-eTe ailtaïzeco . . .
à aider ceux qui sont tentez.
12. 27 hala nola escuz eguin diradenen dese-
GUiTEA : ... Tabolition ..., comme de
celles qui ont esté faites de main,
DIRADENETARANO. i.l. q.diradenx. s.,/?.reI.nom.
décl. au cas arrivatif déterminé, inetarano
=jusquà ceux qui.) Until, or as far as,
those wliicli are.
6. 19. . . . , eta vêla barnean diradenetarano sartzen
. . . , & pénétrant iusqu'au dedans du
voile : [L. translates neither the Greek nor
the Fren(;h; but turns to éacoTspov into
« those (tliings) which are ».]
DIRATENEY. 1. Ind. fut., pi. 3, n rel. nom. décl.
dat. pi. dét. aux. [ney = à ceux qui.) To
those ivho shall be.
12. 11. ... harçaz exercitatu diraieney. (Y£Yi>[Jt.va(7-
(JLÉvotç, exercitatis.) ... à ceux qui sont
exercez par iceluy. (L. translates seront,
parce que l'idée est future. Voyez guero
sous draue.)
DIRADENEZ. 1. I. q. diraden, aux. nom. décl. mé-
diatif pi. déterminé, [néz = de ceux qui.)
Of, or aboul, ihose who are.
13. 3. ... : AFFLIGITZEN dirudenez, ... : & de ceux
qui sont tormentez, (L. does not translate
— 268 —
et, because the Greek bas not tbe équiva-
lent. Tbe termination ougbt to be éz.)
DIRAVEAT. 1. Ind. prés. s. 1. r. s., r. i. pi. adr.
■ masc. aux. act. / hâve il to them, o inan!
2 . 12 . . . . , DENU^•TIATURE^• divciiLeat hire icena neure
anayey, . . ., l'annonçeray ton nom à mes
frères, (cf. St Jean, 17. 6.)
DITEXO. 1. Subj. prés., pi. 3, aux. a rel. temp.
décl. duratif. [no = jusqu'à ce que). Uiitil
they be.
10. 13. ..., haren etsayac haren oinén scabella
EÇAR diteno. . . . , iusqu'à ce que ses enne-
mis soyent mis pour le marchepied de ses
pieds.
baDITEZ. 1. Hypothétique pi. 3, aux. Cf. St Luc,
19. 40. If they be.
6. 6. Baldin eror haditez, S'ils retombent, (Cf.
dadi. The Hypothetic is the Suppositive
ofthe Subjunctive.)
DITECEN. 2. Subj. prés., pi. 3, aux. (Variante de
diten.) That they be.
6.6 berriz arramberri ditecen penitentiatara,
que (v. 4.) .... soyent renonciez à repen-
tance,
9. 23. . . . , baina celestial berac plrifica ditecen
. . . , mais que les célestes soyent nettoyées
[U. mit purifica ditecen, et Calvin soyent
nettoyées, parce que le grec n'exprime
pas ces mots. L. ought to hâve written
celestialac, because berac is not hère
eadem buL ipsd.)
— 269 —
DITV. 5. Ind. prés., s. 3, r. pi,, aux. act. Has them.
7. 8. ... : baina han . . . hartzen ditu. ... : mais
là ... les prend (H. mit hartzen ditu.)
(The italic in both texls shews that the
(jreek does not express the équivalent.)
7. 28. Ecen Legueac Sacrificadore subirano ORDEN-
ATZEN ditu guioon infîrmoac : Car la Loy
ordonne pour souuerains Sacrificateurs
les hommes qui sont infirmes :
9. 13. Ecen baldin cecenén eta akerrén odolac, eta
bigâren hauts barreyatuag, satsuac san-
CTiFiCATZEN h^ditu . . . Car si le sang des
taureaux & des boucs, & la cendre de la
génisse espandue sanctifie les souillez
10. 14. Ecen oblatione bakoitz bâtez consegratu
ukan c^i'ia seculacotz . . . Car par vne seule
oblation il a consacré à perpétuité
13. 4. ... : baina paillartac eta adulteroac iugea-
TUREN ditu laincoac. ... : mais Dieu iugera
les paillards & les adultères.
E. S. DODGSON.
{A suivre.)
GORRIGENDA
p. 134. Entre « pour » et « some », insérez « we » à
l'impératif.
Il serait mieux de commencer ces rimes ainsi :
« With water let us fiU a bowl,
And make it froth with lathering soap ; »
P. 135. 1. 4, Changez is en be.
P. 153. Selon l'édition de Dindorf (Paris, 1840), il
faut lire paôtov et ogol [xévTOi X£(paXatcî)57]
[jLàv9av£ (Dialogues des Morts, 20, p. 107).
1. 5 d'en bas, lisez 82; 4 d'en bas, 74.
P. 154. 1. 5. Lisez : présent sing. 2.
1. 5 et 6 d'en bas. Lisez eTZeaquiagu & ba-
Ceaquiagu.
St'Marc, 12. 14. bacequiagu est une faute
d'impression, Etzeaquiagu en est la forme
négative.
P. 156. Lisez BaiCARA.
P. 157. 1. pénultième. Après «que», ajoutez «le
texte grec ».
P. 160. 1. 15. Après « que », ajoutez «ie mettray... »)
P. 163. 1. 14. Après iaquin, insérez Ye know.
1. 17. Après ikus, ajoutez We see it.
P. 164. 1. 3. Lisez : vr.
1. 7. Après «varier», insérez deux points.
1. 11. Lisez : 1. 1.
1. 12. Lisez : grâce
P. 165. 1. 6. d'en bas. Après ^we, insérez : v. irr. act.
eguin.
E. S. DODGSON.
LE MALAIS VULGAIRE
VOCABULAIRE
ÉLÉMENTS DE GRAMMAIRE
USTENSILES DE
TABLE, DE MENAGE, ETC.
couteau
piso
fourchette
garfu
cuiller
sendok
assiette
piring, pingan
plat
basi
soupière
tempat sop
tasse
mangkok
soucoupe
piring ketjil
verre
glas
bouteille
botol
carafe
karap
gargoulette
gendi
bouchon
sumbat-botol, prop
filtre
batu-saringan
cafetière
tempat-kopi
pot
blanga
chaudron
priok
poêlon
kuali
jarre
tempayan
— 272 —
conduite d'eau
seau
tonneau, fût
panier
sac
balai
brosse
cuvette
brosse à dents
brosse à ongles
» à cheveux
peigne
éponge
rasoir
savon
serviette
lampe
lanterne
bougie
allumette
mèche
corde, ficelle
fil
ciseaux
aiguille
épingle
dé
encre
plume
papier
livre
panljuran
timba
tonof
bakul
sako, karono-
penyapu
sapu
tempat ayer tjutji
sekat-gigi
» kuku
» rambut
sisir
gabus
piso-tjukor
sabun
toala, sapu-tangan
lampo, pelita
tenglong
lilin
korek api, tarek api
tali api
tali
benan
gunting
djarum
peniti
didal
tinta
penna, kalam
kartas
kitab, buku
— 273
VETEMENTS
, BIJOUX, ETC.
vêtements
pakéan
chapeau
topi, kepia
veste
badju, jas
gilet
rompi
pantalon
tjélana, seluar
caleçon
tjélana di baua
chemise
kamédja
bas, chaussettes
sarong-kaki
gants
» -tangan
soulier, bo
iltine
kasut, sepatu
pantoufle
tjinella
robe
badju, kaïn
poche
sako
mouchoir
s tangan
pagne indi
gène
sarong
vestCj camisole
kabaya
turban
serban, stangan-kapala
ceinture
tali-pinggang, tali-ikat
bijou
permata
montre
orlodji
chaîne
ranté
broche
krusang
bague
tjin-ljin
bouton
kantjing
éventail
kipas
éperon
tadji
canne
tongkat
parapluie,
ombrelle
payong
lunettes
katja-mata
parfum
vangi
19
— 274
ALIMENTS, BOISSONS, ETC,
aliments, p
rovisions
makanan
boissons
minuman
repas
makan
banquet
makan besar
viande
daging
bœuf, porc,
, etc.
daging sapi, d. babi, etc
poisson
ikan
volaille
ayam
venaison
daging rusa
pain
rôti
farine
tepong
œuf
telor
omelette
dadar
légumes
sajoran
riz (cuit)
nasi
haricot
katjang
pois
katjang puti
pomme de
terre
ubi, kentang
salade
slada
oignon
bauang
lait
susu
crème
kapala susu
beurre
mantega
fromage
kédju
gâteaux
kvé-kvé
confitures
manisan
miel
madu
sucre
gula
sel
garam
— 275 —
poivre
noix de muscade
gingemljre
cannelle
cary
vinaigre
huile
fruits
banane
ananas
mangue
noix de coco
raisin
orange
citron
pamplemousse
grenade
pastèque
papaye
anone
mangka, mangistan,
eau potable
glace
limonade
lait de coco
vin
bière
vin de cocotier
cognac
genièvre
bitter
maritja, lad a
pala
halia, djaï
kayu-manis
karé
tjuka
minyak
bua-bua
pisang
nanas
manga
kalapa
bua-angor
djeruk-manis
» -asam
» -besar
delima
semangka
papaya
bua-nona
duku, rambutan, durian, etc.
ayer-minum
ayer-batu
ayer-djeruk
ayer-kalapa
angor
bir
tuvak
brendi
sopi
paît
— 276
Champagne
café
thé
chocolat
tabac
cigare
cigarette
opium
béteP
angor-puf
kaua, kopi
té
tjoklat
tembako
roko
serutu
tjandu
siri
INDUSTRIE, COMMERCE, ETC.
travail kerdja
outils pekakas
machine djentra
chaudière priok
roue roda
vapeur huap
houille areng-batu
feu, flamme api
étincelle ' bunga-api
fumée asap
cendre habu
1. La chique de bétel, ce masticatoire dont l'usage est si répandu
parmi les habitants des îles de la Sonde, se compose d'un petit
morceau de pinan<j (fruit de VArcca Catec/iu), d'un peu de
fjainbir (suc solidifié des feuilles du Nauclea Garnbir), de chaux
et de tabac enveloppés dans une feuille de siri (Piper Betle).
Constamment tenue sous la lèvre inférieure, elle déforme la bouche ,
teint la salive en rouge et les dents en noir; mais elle parfume
l'haleine et, astringent énergique du tube digestif, oppose son
action aux atteintes d'un climat débilitant.
277 —
suie
areng-para
bassin, réservoir
kolam-ayer
tuyau
pantjoran
bord
tepi
pointe
udjong
surface
atas
pompe
bomba
hache
kapak
marteau
pengetok, i
tenailles
girgadji
clou
paku
rabot
patjol
scie
arit
lime
kikir
ciseau
pahat
enclume
landasan
bêche
tjankul
chaîne
ranté
corde
tali
fil de métal
tavaï
commerce
perniagan
poids
brat
mesure
sukat
valeur, prix
harga
balance
datjing
lettre
su rat
D-^ F. Wi
(A suivre.)
BIBLIOGRAPHIE
Twenty-fourth report of the Bureau of anierican
ethnologij. . . 1902-1903. . . by W. H. Holmes, Chief.
Washington, GoA^prillting office, 1907, gr. in-4°, xl-
846 p., 1112 fig. et 21 planches.
Outre le rapport du Chef du bureau, ce volume
contient un très important et très remarquable mé-
moires par j\I. Stewart Culin, sur les jeux des In-
diens de TAmérique du Nord.
Je retiens surtout, dans le rapport, les deux noti-
ces, p. xxxv-xxxviii, sur M. Powell et M^'" Thomas, le
premier chef et la seconde bibliothécaire du bureau,
dont la perte sera vivement regrettée par tous les
linguistes. M. John Waley PoNvell, né à Mont-Morris
le 24 mars 1834, est mort le 23 septembre 1902 à
Haven. Il se livra, dès sa première jeunesse, à des
études approfondies d'histoire naturelle et parcourut
une grande partie de l'Amérique, Officier de mérite
pendant la guerre de sécession, il revint à ses tra-
vaux scientifiques et fut professeur de géologie; puis
il devint directeur du service géologique et fonda le
Bureau d'ethnologie américaine dont il fut le direc-
teur pendant de longues années : les vingt-trois rap-
ports (pTil a jMibliés suffii'ont à rendre sa mémoire
immortelle. Quant à M^'^ Thomas (Jésus E.), née à
— 279 —
Carbondale le 31 octobre 1875, elle s'était 0{'cu{)ée
de linguistique sous la direction de son père, le
D' Cyrus Thomas; après avoir passé avec un grand
succès l'examen spécial institué par le Gouverne-
ment, elle fut nommée en mai 1900 bibliothécaire
adjointe et en janvier 1901 bibliothécaire titulaire du
bureau. Elle est morte, lamentablement, le 14 janvier
1903, d'un accident de « skating ».
Julien ViNSON.
Handbook of american Iiidians (north Mexico),
editedby FrederickWebbe Hodge. Washington, Gov.
pr., 1907, in-8°, ix-972 p. à 2 col. et 1 carte, fig. dans
le texte. Toiae l^r, Aanatun-Mythology ; Smithsonian
Institution, Bureau of american ethnology, Bulletin
n«30.
Ce Manuel, dû à la collaboration de quarante-six
travailleurs habiles, est une véritable encyclopédie
de tout ce qui regarde l'ethnologie du Mexique
septentrional, non seulement contemporaine mais
historique, avec de nombreuses références bibliogra-
phiques; l'ordre alphabétique, seul convenable, a
été rigoureusement suivi. Livre extrêmement inté-
ressant, fort bien fait et très utile : on a hâte de voir
paraître le second volume. J. V.
Die syntaktischen Verhàltnisse des Siiaheli, von
D. W. Planert. Berlin, W. Sûsserolt, 1907, in-8%
v-59 p.
Travail d'un haut intérêt pour la linguistique géné-
rale, car il montre les incertitudes et les complica-
— 280 —
lions de la phrase dans les idiomes primitifs. Les
suffixes s'accumulent et modifient, les uns par les
autres, leurs significations déjà confuses. Par exemple,
mpisJii a-nga-bi-vi-pika viazi ivatuimva <>va-nga-li-
paia vyakula « si le cuisinier avait fait cuire les pa-
tateSj les esclaves auraient eu de quoi manger »,
mot-à-mot : « cuisinier lui-peut-ètre-était-à-aller-à-
cuire patates esclaves eux-peut-être-étaient-à obtenir
aliments ».
On ne peut résumer une étude aussi intéressante;
il faut la lire. Je la recommande à tous les linguistes.
J. V.
Revue du Monde musulman, vol. II, n° 8 et vol. III,
n°9, juin à septembre 1907. p. 449-640, 1-192, gr.
in-8^
Contient, comme d'ordinaire, de fort intéressants
articles : De Téhéran à Ispahan par Eug. Aubin,
A propos de V ancien Khotan par A. Le Chatelier, Les
Musulmans algériens au Maroc et en Syrie par X. . . ,
Chine et Turquie par A. Vissière, Voyage à'Echref
Khan à 7e/ze/'rt« par A.-L.-M. Nicolas, La médecine en
Turquie par Abdul-Hakîm-Hikmet,Z/e.s Tatars de Cri-
mée par A. Fevret, Le club national de Tauris par
Ghilan, Hadji Mohammed ^Ali par Vàkif; et les revues
habituelles : La presse musulmane par L. Bouvat,
Notes et nouvelles, Livres et revues, Bibliographie.
J. V.
— 281 —
Revue internationale des études basques^ n° lY,
juillet 1097, p. 329-439.
Onze articles tous pleins d'intérêt : Basque et Ro-
man par TI. Schuchardt, Palabras alavesas par
C, Baraibar, El proceso de Dechepare par J. de Ur-
{\m]o, Un manuscrit de Larreguy itdiV.N .jyuh?kVdii,Notes
du prince Bonaparte sur son Verbe par G. Lacombe,
Lettres à M. Duvoisin par V. Dubarat, Maintonen
Poza par P-. Zamarripa_, Euskalzaleen bilzarra par
Landerretche, Le catéchisme de Arzadun par J. de
Urquijo, Bibliographie^ et le commencement (16 p.)
de la reproduction phototypographique d'un opuscule
basque fort rare,£'/ borracho bnrlado, publié en 1764
par le comte de Peflaflorida. J. V.
I
VARIA
I. L'esprit du coq.
« J'étais occupé, hier, nous écrit un lecteur^ dans mon bureau,
peu éloigné d'un poulailler; la fenêtre était ouverte. Le chant d'un
coq plusieurs fois répété me causa des distractions. Je pris le parti
de faire taire mon agaçant voisin. Quand je fus arrivé devant le gril-
lage, je m'aperçus que les poules avaient l'air triste; le coq se sé-
para d'elles, s'avança vers moi et, me regardant fixement, se mit
à jargonner; j'en conclus qu'il voulait me « parler ». Je n'y aurais
rien compris, bien entendu, si je n'avais remarqué que, de temps
en temps, il tournait la tête vers un angle du poulailler. Suivant
des yeux le geste du roi de la basse-cour, j'aperçus un poulet étendu
à terre, la tête prise entre deux grosses pierres, et dégagé, le poulet
se retira vivement. Le coq entonna un vrai chant de joie ; les
poules se dispersèrent, et ce poulailler auparavant lugubre rede-
vint animé et joyeux. »
Qu'où aille soutenir, après un tel récit,
Que les bétes n'ont pas d'esprit!
{Journal thermal, août 1907.)
II. Les beautés de l'Allemand.
Chez les Hottentots, Hoitcntvtcn, les kangourous, Bcutclraiie,
se trouvent en grand nombre. Beaucoup sont capturés et mis dans
des cages, Kotlcr, munies d'une couverture, LalicnijlHcr, qui les
met à l'abri du mauvais temps. Ces cages s'appellent donc en al-
lemand LaUcii>ji((rr/,(iitiw, et le kaniiourou c.i[)tif prend le nom
de LatUjnrjiUfrkollerbcalelrattc
- 283 —
Uq joui' on arrêta un assassin, Altentatcr, qui avait tué une
Hottentote, Hottcntoienmuiter, mère de deux enfants hébétés e t
hègue^y Stottcrtroticl.C&iiQ mère, en bon allemand, avait droit au
titre de Hottcntotenstottertroielinutter, d'où il suit que, de son
coté, l'assassin prend le nom d'HotCuntoicnstoUcriroteliniU-
tcrattcnta ter.
Le meurtrier fut enfermé dans une cage à kangourou, Bcutcl-
rcU(cnlal'tcn;/i/lrrii'a/(r//,u(t('i-, d'où, il réussit à s'évader. Mais il ne
larda pas à retomber dans les mains d'un Hottentot. qui se pré-
senta tout joyeux au chef du district.
— J'ai pris le Beutclrattc, dit il.
— Lequel, fit le juge.
— UAdentater tattengiUcriccticrkottcrbautdrattc ! balbutia
l'indigène.
— Mais nous en avons plusieurs !
— C'est, acheva à grand'peine le malheureux, VHolientotcn-
struttertrottelmatterattcntater !
— Alors vous ne pouviez pas dire tout de suite que vous aviez
pris le Hottentotenstrottcrtrolelmutierattcntriterlattcnf/Utcncet-
icrkottcrheutclraUc 1
Le Hottentot s'enfuit. H y a longtemps que le lecteur en a
fait autant.
{Le Cri de Paris, août 1907.)
III. Il faut travailler
There's just one thing that makes life worth livint
In every time and tide,
One joy beyond ail mère mortal giving,
Suprême, superb, vs'orld-wide ;
One friend that never will fail, forsake you,
Nor times of trouble shirk.
But comfort bring when sore griefs o'ertake you -
So hère 's to work, dear work !
'1 lie dreariest day it can touch with glory,
The loneliest Hll with cheer ;
— 284 —
'Twill sweeten alike sad failure's story
And solace the raourner's tear;
A boon from the glow ol life's radiant morning '
'l'ill the twilight shadows luik,
In this world's dusk and the next world's dawning-
So here's to work. dear woik !
IV. Le vol au British Muséum
It is reniarkable how verj' few books are stolen from the Bri-
tish Muséum reading room. A book scarcely ever disappears, and
tho few volumes, not a dozen, that hâve recently been purioined
duiing as many years, bave in ail instances been of small value
and generally of an elementary character. During the South Afri-
can war, for example, a Dutch grammar and dictionary passed
beyond the precincts of the British Muséum; and if thèse Unes
should meet the eye of the young gentleman in whose baggage they
presumably found a passage to the southern hémisphère, he is
invited to restore them to their lawful owners. He would only be
following another example. A few years ago a parcel of four or
fîve valuable scientifîc books, which had been missing for very
many years, was unexpectedly returned tlirough the Post Office.
The person who had borrowed them appears to hâve finished
w^ith them, for subséquent inquiries disclosed the fact thatawi-
dow lady had posled the parcel.— Sir E. Maunde Thompson in
the "Cornliill Magazine."
{Daily Mail, Sept. 1907.)
V. Prononciation transcrite
J'ai donné, il y a longtemps, dans cette Reçue, un spécimen de
la manière dont les Allemands prétendent indiquer la pronon-
ciation des mots français. Je reçois le spécimen suivant d'un
guide de la conversation allemand -anglais :
- 285 —
Dculscli.
Gehen Sie mit dem
Schnellzug ?
Wann fàhrl der Zug
ab ?
Kanu ich eiiie Durch-
reise- Fabrkarte
nach ... haben ?
Wip- môchlen eiuen
Schlafwageu haben
— einen Durchgangs-
wagen
— ein Damén-Koupp
— ein Nicht-Raucher-
Koupé
Ist dies der Zug
nach ... ?
Wo muss ich umstei-
gen um nach ... zu
gelaiigeii ? [setzt?
Ist dieser Platz be-
Da ist kein Platz [ner
Rufen SiedenSchaff-
Hier ist die Station
Halteu wir hier ?
Wie lange halten wir
hier?
Fûnf Minuten
Mein Gepàch ist ver-
loren gegangen
Englisch.
An' you Qoing by
the express f
When cloes the train
start ?
Can I book throuqh
to ... ?
\Ve want a sleeping
carriage
— a corridor car-
riage [ladies
— a carriage for
— a non-smoking
coinpartment
Is this the train
for ... ?
Whcre must I change
for ... f
[gaged ?
Is this seat en-
Therc is no rooin
Call tho guard
Hère is the station
Do ice stop hère ?
Hoio long do œe stop
hère ?
F ice minutes
My luggage is lost
Aussprache.
ahr juh goh'ing bei
t/ii express ?
huenn dos thô trehn
start?
kânn ei bukk thruh
tu ... ?
tdh wonnt ô sslibping
kârridsc/i
— ô korridor kâr-
rid.sc/i [lehdis
— ô karridsoA for
— o noun-smohking
kommpartment
is thïss tho trehn
for ... ?
hMehr môst ei
tschehnd?c/i for ... ?
[dsrh'd ?
is thiss ssiht enngeh'-
théhr is noh ruhm
kâhl thô gahrd
hihr is thô sieh'scb'n
duh «ih stopp hihr ?
bau long duh uih
stopp hihr ?
feiw niinnits
mei lôggedsc/i is lost
Das Dampfboot. (Tho Steamboat.)
Wohin geht das
Boot ?
Wann gehen Sie ab?
Mit der Flut
Um welche Zeit ?
Um neun Uhr
Man fàhrt ab
Where is the bout
going ?
\Vhen do you start?
With the tide
At ichat time ?
At nine o'clock
They are going to
start
hwebr is tho boht
goh'ing ?
huenn duh ]uh start?
u'itl^ thô teid
àtt buott teim ?
âtt nein o'klokk
iheh ahr goh'ing tu
start
TABLE DU TOME QUARANTE
J, ViNsoN. La langue ou les langues ibériennes ■ 1
F, Soulier. La langue polynésienne 24, 100
E. S. DoDGSON. The philology of Madagascar 31
J. ViNSON. The French in India 35
G. B. DE FoNTAiNiEU. Ls moQvement Çwadêcî 43
C. Lacombe. Variantes des exemplaires de Liçarrague 65
J. ViNSON. Observations sur l'article précédent 68
G. Lacombe. Notes du prince L.-L. Bonaparte sur son
Verbe . . 75
C. - C. Uhlenbeck. Réponse à M. Vinson 80
J. ViNSON. Thème ou version 81
P. Régna UD. La famille du latin opns 121
J. ViNSON. Les jSIusulmans du sud de l'Inde 137
P. MiRiANiscHviLi. L'Ibérie et la Russie 145
E. -S. DoDGSON. Le Verbe de l'Épître aux Hébreux de Liçar-
rague 153, 254
P. Regnaud. La contraction révélatrice d'étymologies 169
F. W^EisGERBER. La langue malaise 174, 271
J. ViNSON. La Science et les amateurs 193
J. ViNSON. L'Ibère et le basque 209
P. Regnaud. oyXoi;-okr(o<; 237
F. Ravaisse. Les mots arabes et hispano-morisques du /)o»
Quichotte 238
Nécrologie (W. Webster. Victor Henry) 122, 195
Varia . Le caractère et la taille des crayons 62
— Pour les écoliers 62
— Critique américaine 63
— Illusion ou naïveté. 63
— Politesse espagnole 134
— Le Verbe basque 134
— Prononciation du français par les Allemands 135
— La langue universelle 136
— 287 —
Varia. Le Nouveau-Testament basque de 1571 206
— Prononciation modifiée 206
— Indiens et Européens 207
— L'âge et le génie 208
L'esprit du coq 282
— Les beautés de l'allemand 282
— Il faut travailler 283
— Le vol au British Muséum 284
— Prononciation anglaise en allemand 284
BIBLIOGRAPHIE
J. de Urquijo. Obras de J. d' Etcheberri 49
G. Ferrand. Dictionnaire de Flacourt 55
E. Rouillard. Noms géographiques de Québec 56
Siaithsonian Institution. Bulletins n° 30 et .32 .58, 279
— — 24-= Rapport pour 1902- Iy03 278
H. Mùller. Scniitica. I et II 59
A. Meillet. L'état actuel des études de linguistique 125
G. -A. Grierson. Linguistic survey of India, t. IV 196
E. Portai. Letteratura provenzale 200
M. Kerbaker. La morte di Vaca 202
J. Berjot, Premières leçons d'annamite 202
Th. GoUier. Manuel de la langue japonaise 203
W. Planert. Die Syntaktischen Verhâltnisse des Suaheli. . 279
Kuhn's Zeitschrift. XL, 4 59
Bulletin du parler français au Canada. V 60, 204, 130
Reçue du monde musulman. I-IX 61, 131, 205^ 280
British and Foreign Bible Societg. 102" rapport 127
Journal de la Société Finno-Ougrienne. XXIII 128
Mémoires de la Société Finno-Ougrienne. XXIII et XXIV 129
Reçue internationale des études basques. 1-4 129, 204, 2«1
Anthrnpos. H . . 132
LANGUES ÉTUDIÉES
Linguistique générale. 59, 81, 125, 127, 135, 136, 169,193, 2C6, 282
Sanscrit et Inde 43, 202
Grec 237
— 288 —
Latin 121
Français 60, 130, 204
Espagnol 238
Provençal 200
Allemand " 135, 283, 284
Anglais 282,284
Russe 145
Sémitique 59
Arabe 238
Annamite 202
Japonais . . 202
Dravidien 137
Tamoul 35, 137
Ougro-Finnois 123, 129
Géorgien 145
Basque. 1, 49,65, 68, 75, 80, 129, 134, 153, 204, 206, 209, 254, 281
Américain 56, 58, 278, 279
Maléo-polynésien 24, 100, 174, 271
Malgache 71, 45, 193
AUTEURS
E. - S. Dodgson 31 , 134, 158, 254
G. - B. de Fontainieu 43
G . Lacombe 65, 75
P. Mirianischvili 145
P. Ravaisse 238
P. Regnaud ' ■ . 121, 169, 237
F. Soulier 24, 100
C. - C. Uhlenbeck 80
J. Vinson... 1, 35, 49-61,68, 81, 125-129, 137, 193,196-203,
209, 282-284,
F. Weisgerber 174, 271
L' Imprimeur-Gérant :
E. Bertrand.
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