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Full text of "Revue des langues romanes"

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^^  ^ 


REVUE 


DES 


LANGUES  ROMANES 


REVUE 

LANGUES  ROMANES 

PUBLIÉE 

PAR  LA  aOClËTÉ 

POUR  l/ÉTUDE  DliS  LANGUES  ItOMANICS 


Quatrième    Série 

TOME    QUATRIÈME 

TOJiIB  XXXIV  DE    M    COLLECTION 


MONTPELLIER 


Kne  da  l'Ancian-Cciarrier,  n 


PARIS 
JEAN    MAISONNEUVE 


25,  gUAl   VOLTAIRE 


REVUE 


DES 


LANGUES  ROMANES 


POÉSIES  PROVENÇALES  INÉDITES 


>. 


TIREES    DES    MANUSCRITS    D  ITALIE 


BarUch,  GrundrisSy  ii«>  2,  2.  —  Ms.  D  142.—  Les  vers  1  à  12, 25  à  32  sont 
imprimés  dans  Rayn.  Choix  5,  1;  Malin,   Werke  3,  348. 

N'  AIMARS  JORDANS 


Sj  tôt  m'ai  estât  loniamenz 
guerreian  ab  mon  mal  seingnor, 
e  pert  lai  entre  mos  parenz, 

c'uns  no  me'n  acor, 

5  ges  non  lais  per  tan 

qe  solaz  e  chan 
no  sega  e  domnei, 
si  tôt  me  guerrei. 

Ane  guerra  no*m  fo  espavenz 

10    ni  mais  traitz,  per  so  c'a  honor 

> 

pogues  estar  entre  las  genz, 
ses  maldich  de  fol  parlador  ; 
c'als  non  vei  qe  n'an 

10  traies. 
TOME  IV  DE  LA  QUATRIÈME  SÉRIE.  — Janvier-Février-MaFs  1890. 


16/912 


6  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

li  rie,  qant  se*n  van, 
15  per  q'eu  o  plaidei 

segon  so  qe'n  vei. 

Bons  cavals  e  bons  garnimenz 
am  mais  qe  non  faz  ioc  d'austor  ; 
mas  dels  deseretaz  sostrenz, 
20     qui,  •!  malvaz,  no*m  fan  paor, 

mi  torn*  ad  affan 

qui  me*n  van  parlan, 

e  non  am  ni  crei 

lor  aunidalei. 

25    Puois  qe'l  vescoms  m*es  avinenz 
e*m  rete  per  son  servidor, 
molt  li  serai  obedienz  ; 
e  llo  coms  non  aura  peior 
.  guerrer  a  son  dan, 
30  q'eu  non  ai  talan 

mas  de  far  qeûll  grei, 
on  q'an  ni  estey. 

21  tor. 

4 .  Vers  trop  court  de  trois  syllabes . 

19.  Il  y  a  bien  sostrenz  dsiUB  le  manuscrit .  Je  ne  sais  ni  expliquer 
ce  mot  ni  le  remplacer,  avec  quelque  certitude,  par  un  autre . 

20.  Vers  trop  court.  Corr.  qui,  li  m.  'i 
22.  Faut-il  corriger  vaj).  ? 

Quant  à  l'auteur  de  cette  pièce,  rien  n'est  plus  vraisemblable  que  la 
supposition  de  M.  Chabaneau  (Histoire  de  Languedoc,  X,  327j,  qui 
reconnaît  le  troubadour  dans  le  chevalier  Azemar  Jordan,  fait  prison- 
nier en  1212  par  Simon  de  Montfort  à  Saint- An  ton  in.  Les  deux  poésies 
attribuées  dans  les  chansonniers  à  Raimond  Jordan  sont  pleines 
d'un  esprit  belliqueux,  ce  qui  s'accorde  parfaitement  avec  le  vers  2367 
de  la  Chanson  de  la  Croisade,  qui  parle  du  chevalier  de  Saint- 
Antonin  : 

Cel  de  Sant  Antoni  se  prezon  a  enardir 

Per  n' Azemar  Jorda;  mas  cant  venc  al  partir, 

Ane  non  i  ac  negu  que' s  ne poguesjauzir. 


TIREES  DES  MANUSCRITS  d'iTALIE  7 

L*identité  admise,  il  est  probable  que  le  vescoms  dont  parle  le  vers 
25  est  le  vicomte  Pons,  qui  fut  fait  prisonnier  avec  le  chevalier,  et  le 
comSf  au  vers  28,  ne  serait  autre,  dans  ce  cas,  que  Simon  de  Montf  ort. 
Le  sirventesfut  donc  probablement  écrit  vers  1212,  pendant  les  prépa- 
ratifs du  combat. 

Il  y  a  deux  poésies  qui  suivent  le  même  compas  :  Bertran  de  Born 
20  et  Peire  Cardenal  40  (celle-ci  faite  sur  le  modèle  de  celle-là)  ; 
mais  les  rimes  sont  différentes  de  celles  d*Azemar  Jordan  (sauf  la 
dernière,  en  ei)  et  la  forme  de  la  strophe  étant  assez  simple,  il  n*est 
pas  sûr  que  le  son  des  trois  poésies  ait  été  le  même.  Il  est  pourtant 
à  remarquer  que  le  sirventes  de  Peire  Cardenal  date  précisément  du 
temps  que  nous  avons  cru  pouvoir  assigner  à  celui  de  notre  troubadour. 


Grundnss,  n*»  10,  16.  —  Ms.  c  50 

N'  AIMERIG  DE  PEGUGNAN 


Chautar  vuilh.  —  per  qe? —  ia'm  platz. 
iate'n  eras  tu  laichatz?  — 
0  eu.  —  fols  es  tu.  qin'  es 
de  oui  chantas  ?  —  fola  res, 
5    de  la  gensor  q*el  mon  sia.  — 
oc,  benleu;  mas  si  tu'l  cres, 
altre  no'l  te  ereiria  ges.  — 
per  deu,  si  faria 

toz  hom  qe  vis  sas  beutatz.  — 
10    es  tan  pros  cora  lo'm  lauçaz?  — 
la  melher  q'anc  dieus  feçes.  — 
doncs  fas  tu  ben  qe  certes.  — 
et  eu,  fol,  no  t'o  diçia?  — 
si  be.  —  doncz,  de  qe'm  mescres?   — 
15    sai,  si  es,  platz  mi  e  sos  bes.    — 
no'm  entremetria, 

1 .  qera  ia  pladz.  —  5.  fia.  —  9.  sa. 


8  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

sai,  si  no  fos  la  vertatz.    — 
era,  vos,  qar  me  digaz  !  — 
e  qe? — ama'us  tan  niqan?  — 
20    vai  tu,  mensongier  truan  ; 
ela  per  qe  m'ameria? 
en  tant  qant  soleilhs  resplan, 
n'a  tan  pro  ni  tan  preçan. 
fol,  co's  tanheria 

25    a  mi  sos  genz  cors  hondratz?  — 

Ben  es  doncs  nesis  e  fatz.  — 

cum? —  car  as  mes  tôt  afan, 

a  guisa  de  fol  aman, 

la  on  ga  res  no*t  valdria.  — 
30    cre  me  tu  qe  merseian 

aman  sirven  e  preian 
conqer  hom  amia 

tost  0  tard,  don. . .'  —  er  auiatz 

qe  be*n  es  hom  enguanafz.  — 
35     non  es  ges.  Saps  qe  m'a  sors?  — 

eu  no. —  us  conortz  :  q'amors 

restaura  tôt  en  un  dia 

qant  qe  a  mesfait  alhors, 

per  qe*m  sofri  sas  dolors 
40  en  paç  tota  via 

e-ls  afans  qe  m'a  tardatz. 
las,  eu  mur!  —  cum  ?  —  soi  nafratz.  — 
qui't  nafret?  —  del  mon  la  flors.  — 
qe  flors  es?  —  de  las  melhors.  — 
45     per  qe  fetz? —  qar  se  volia.  — 
be*l  cre  ;  don  atens  socors?  — 
de  leis,  qe  sa  granz  valors 
m'es  suaus  medgia. 

garir  ses  leis  no  poiria 
50    per  re  de  mas  greus  dolors, 

29.  Ce  vers  est  placé  à  la  fin  du  couplet,  après  30  â  83.  —  36.   conorl, 
-  43.  flor.  —  44.  la.  —  46.  atea.  —  47.  gran. —  48.  raedgria. 


TIRÉES   DES   MANUSCRITS  D'ITALIE 

q'asrm  nafret  gent  s'amors, 
no'n  sai  con  m'estia. 

Na  Beatrix,  cui  iois  guia, 
d'Est,  q'es  flors  de  las  gensors 
55    e  mellier  de  las  meillors, 
raeillura  tôt  dia. 


51.  naifret.  —54.  la. 

1.  On  pourrait  lire  aussi  sans  interi-uption  :  Chantar  vuilh  per  qe 
ia'm  pîatz, 

3.  qin'  =  quina,  «  quelle,  de  quelle  sorte.  »  Diez  fait  venir  ce  pro- 
nom, qui  se  trouve  sous  les  formes  quin,  quinh  et  quanh&u  masculin, 
quina,  quinha  et  quanha  au  féminin,  du  \ai'm  quinam.  Alors  la  forme 
masculine  devrait  avoir  été  faite  sur  le  féminin,  en  prenant  l'a  de  quina 
pour  tenninaison  du  genre.  Encore  resterait-il  à  expliquer  Vn  mouillée 
de  quinh,etc.  Peut-être  vaut-il  mieux  dériver  le  mot  du  latin  quine. 
Quiiie  donnerait  qui  dans  les  régions  où  tombe  Vn  entre  deux  voyelles. 
En  ce  cas,  le  pronom  quine  ne  pourrait  plus  être  distingué  du  pronom 
intcrrogatif  qui,  et  il  est  remarquable  que,  d'après  Mistral,  quin, 
quinh  ne  semble  guère  se  trouver  que  dans  les  régions  où  Vn  «  mobile  » 
persiste.  Dans  cette  partie  delà  France  méridionale,  g'winô donnerait 
donc  quin  et^  en  se  méprenant  sur  la  nature  de  la  terminaison  n,  on 
aurait  formé  le  féminin  quina  sur  quin  d'après  l'analogie  de  fin  : 
fina.  Dans  quinh,  je  suis  disposé  à  voir  un  exemple  de  «  Satz-pho- 
netik  »,  principe  qui  peut  s'appliquer  avec  un  peu  plus  de  vraisem- 
blance à  l'explication  des  formes  pronominales  qu'ailleurs.  Quine- 
est?  pouvait  donner  quinh-es?  comme  ille-est  a  pu  donner  elh-es ,  à 
côté  de  el  es,  en  provençal  et,  ce  qui  est  plus  concluant,  egli-è  en 
italien.  Du  reste  il  semble  que  ce  pronom  se  soit  confondu  avec  l'inler- 
rogatif  quant,  puisque  nous  trouvons  en  provençal  moderne  qulnf, 
forme  qui,  à  ma  connaissance,  n'existe  pas  dans  la  vieille  langue  :  mais 
on  pourrait  vouloir  expliquer  par  une  confusion  pareille  la  vieille  forme 
quan,  quanh, 

7.  Une  syllabe  de  trop.  On  peut  corriger  n'ot  creiria  ou  no'l  te 
creira . 

10.  Il  ne  semble  pas  nécessaire  de  lire  Ztï'm  au  lieu  àelo'tn. 

15.  Sai  (^  «  je  sais  »)  semble  être  employé  ici  et  au  vers  17  pres- 
que comme  une  sorte  d'interjection.  De  même,  en  provençal  moderne, 
sai,  hessai  sont  devenus  une  sorte  d'interjection  dans  quelques  locu- 


10  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

lions,  voy.  Mistral.  —  La  leçon  du  vers  15  ne  pourrait  guère  être 
acceptée.  Il  faut,  je  pense,  supprimer  e,  et,  probablement,  lire  tos  au 
lieu  de  sos. 

27.  Corr.  ton  a/an. 

41.  Lisez  cargatz  au  lieu  de  tardatzf  II  était  plus  usuel  de  dire 
don  m'a  carz/ate,  mais  la  construction  ^'we  vi'a  cargatz  n'est  pas  impos- 
sible. 

63.  Pour  Beatrîx  d'Esté  voy.  Diez,  Lében  tind  WerJce,  seconde 
édition,  p.  353. 


Grundriss,n^  94,  t.  Ms.D  197.  —  V.  9  à  16  imprimés  Rayn.  55, 14. 

LO  VE^SQUES  DE  BASAZ 


Cor,  poder,  saber  e  sen 
ai  de  chantar  e  d'amor 
c  de  servir  gai  seignor 
que  prez  e  valor  enten'; 
5        q'esters  es  obra  perduda, 

e  «  'ill  mort  son  greu  per  garir  », 
e  si*m  volguesson  auzir, 
mel  traissera  de  secuda. 

Bella  dompn'  ab  cors  plazen 
10        triât  co'l  grans  de  la  flor 

am  eu,  del  mont  la  genzor  : 
que  negun'  ab  lois  no*s  pren 
oilz  de  falcon  trait  de  muda, 
bocha  rien  per  ben  dir, 
15        e*l  cors  plus  dolz  per  sentir 

c'uns  prims  ranzans  sus  char  nuda. 

Bona  dompna  et  avinen 
am,  e  no  ges  per  amor. 
mas  en  luoc  de  bon  seignor 
20        servirai  son  bel  cors  gen,  — 


15.  cor. 


TIRÉES  DES   MANUSCRITS  d'iTALIE  11 


ar  es  tost  causa  saubuda,  — 
e  pren  per  luoc  de  iauzir 
qant  li  plai  que'm  faz'auzir. 
allais,  domna,  vos  saluda. 


24.  doonae. 


8.  secuda,  cigu'è  =i  cïcuda  dans  Raynouard.  Prov.  mod.  cigtido, 
12.  «  Nulle  ne  peut  se  comparer  à  elle.  » 

Le  compas  de  cette  poésie  ayant  été  imité  dans  la  tenHon  de  Blacatz 
et  d'en  Raimbaut  (Gr.  97,  4),  et  Blacatz  étant  mort  en  1237,  il  ne 
peut  s'agir,  pour  Tauteur  de  cette  pièce,  que  de  Gaillard  de  la  Mothe, 
qui  était  évêque  de  Basaz  de  1186  à  1213,  ou  d'Arnaud  des  Pins, 
1220-26,  ou  encore,  à  la  rigueur,  de  Rairaond,  que  l'on  trouve  évêque  à 
partir  de  1230  jusqu'en  1261.  Voy.  GalUa  christ , ,  I,  c.  1197,Chabaneau 
dans  Hist.  de  Languedoc,  X,  c.  334, 


Gvwidriss,  no  167,  13  (comp.  136,  2.  3) 

Robert  Meyer  {Dos  Leben  des  Trohadors  Gaticelm  Faidit,  p.  16  s.) 
et  Cbabaneau  [Histoire  de  Languedoc,  X,  p.  246  s.)  ont  fait  impri- 
mer, d'après  le  ms.  H,  trois  couplets  qui  ont  été  échangés  entre  Elias 
d'Uisel  et  Gaucelm  Faidit.  Il  faut  y  en  ajouter  un  quatrième,  qui  ne 
se  trouve  pas  dans  H,  mais  qui  est  dans  D  (fol.  210).  C'est  la  réponse 
de  Gaucelm  Faidit  au  couplet  d'Elias  :  Manens  forai  fraruis  pelegris  *.* 

A  juzamen  de  sos  vesis 
raena  grant  de  sa  honor 
n'Elias  sa  meia  seror; 
ço  diz  n'Ebles,  q'es  lef  cosis. 

5     Non 

. . .  .qar  parlet  de  graissa  fez  no-sen, 

*  Robert  Meyer  n'a  pas  remarqué  que  les  mots  qui  suivent  ce  premier  cou- 
plet, et  qu'il  a  imprimés  comme  de  la  prose,  sont  une  toimada  de  deux  vers  : 

Aqestz  motz  fetz  n'Elias,  qe'ls  saup  far 
miels  q'en  Gauselms,  q'es  plus  gros  d'un  pilar. 

Ces  mots  ne  sont  donc  pas  une  interpolation,  comme  le  croit  Cbabaneau. 


12  POESIES   PROVENÇALES  INEDITES 

q'andui  em  gros,  mas  el  o  es,  cho*m  par, 
de  clara  fam,  et  eu  per  pro  maniar. 

2.  Une  syllabe  au  moins  manque.  Y  avait'il  en  vieux  prov  une  phrase 
menar  a  grant  comme  en  vieux  franc,  estre  en  grant,  metre  en  grant?t'oy. 
Tobler,  li  dis  dou  vrai  aniel,  v.  2  note,  —  5-6.  Le  copide  a  sauté  une 
ligne.  —  7.  em]  en. 


GARIN  D'APCHIER  ET  TORCAFOL 


Les  poésies  de  Garin  d'Apcliier  et  de  Torcafol,  son  adversaire, 
offrent  assez  de  difficultés,  tant  pour  leur  texte,  qui  est  souvent 
obscur,  et  pour  les  événements  historiques  dont  il  y  est  parlé,  qui 
sont  difficiles  à  éclaircir,  que  pour  la  question  de  propriété  litté- 
raire, puisque  nous  verrons  que  les  poésies  n'appartiennent  pas 
toujours  à  celui  des  deux  auteurs  à  qui  les  manuscrits  les  attribuent. 
Pour  deux  pièces,  les  attributions  ne  sont  pas  d'accord  :  Le  sirventes 
Comunal  vielh  ma  tor  appartiendrait  à  Torcafol  selon  IK,  à  Garin 
selon  D  ;  le  couplet  Memhrarius  del  jornal  se  trouve  deux  fois  dans 
D,  une  fois  comme  poésie  de  Garin,  la  seconde  fois  comme  poésie 
de  Torcafol.  Pour  les  autres  pièces,  les  mss.  sont  unanimes  à  les 
attribuer  ou  à  l'un  ou  à  l'autre  des  deux  poètes,  mais  les  attributions 
ne  sont  pas  pour  cela  plus  incontestables. 

Pour  éclaircir  la  question,  il  faut  partir  d'une  pièce  dont  l'auteur 
soit  bien  certain,  c'est-à-dire  du  sirventes  Comtor  d'Apchier  rehuzat, 
qui  est  naturellement  l'œuvre  de  l'adversaire  de  Garin,  de  Torcafol. 
Il  se  trouve  dans  les  mss.  DR,  et  a  été  publié  par  Rayn.  4,  253  et 
réimprimé  par  Mahn,  W.^,  277.  Bien  que,  dèslors,  il  n'entre  pas  dans 
le  plan  de  mon  travail,  je  ne  crois  pas  superflu  de  le  publier  encore 
une  fois,  avec  toutes  les  autres  pièces  des  deux  troubadours,  sauf 
Comunal  en  rima  clansa,  imprimé  récemment  dans  mes  Provenxa- 
lische  Jnedita  ans  parîser  Handschriften,  p.  305  ss.  Ce  qui  m'en 
donne  le  droit,  c'est  que  ces  pièces  difficiles  ne  sont  pas  publiées  p;»r 
Raynouard  d'après  tous  les  manuscrits,  et  que,  par  conséquent  leur 
texte  réclame  quelquefois  des  corrections.  Je  ne  me  flatte  pa.«, 
pourtant,  de  fournir  moi-même  un  texte  définitif.  Il  n'y  reste  que 
trop  d'obscurités. 


TIRÉES   DES  MANUSCRITS  d'iTALIE  13 


Gr.  443, 1.  Mss.  D  139,  R  23.  Rayn.  4,  253;  Mahn  W.  3,277. 

Comtor  d'Apchier  rebuzat, 
pos  del  chan  vos  ai  laissât, 
recrezut  vos  lajs  et  mat, 
luenh  de  tota  benaoansa, 
5    vencut  de  guerr*  e  sobrat, 
comtor  mal  encompanhat, 
ab  pauc  de  vi  e  de  blat, 
plen  d'enuey  e  de  carn  ransa. 

Aisi  prenc  de  vos  comjat, 
10    pos. 

e  de  vostre  vielh  barat, 
c  de  vostra  vielha  pansa, 
e  del  nas  tort  mal  talhat, 
e  del  vezer  biaisât, 
15    que  tal  vos  a  dieus  tornat 
c'anas  co  escut  e  lansa. 

Beus  a  breuiat  lo  coril 
Moiilaurs,  que  ténias  vil, 
que  de  maj  tro  en  abril 
20    vos  fai  estar  en  balansa  ; 
e  non  aves  senhoril 
tant  aut  son  dur  cor  apil, 
que  ia*us  trobon  en  planil, 
per  que'm  pren  de  vos  pezansa. 

25    Et  an  vos  claus  lo  cortil 
sil  que'us  son  deus  lo  capil, 
e  tornat  de  brau  humil 


Oftogvaphe  d'après  R.  —  2.  de  R  ;  es  laissatz  R.  -  5.  guerre  e  D.  — G  acom- 
paignat  D.  —  7.  A  D.  — 9.  pren  D.  —  10.  oimais  de  mi  chaotat  D,  may  de 
mi  DO  chantatz  R.  —  11.  del  R.  —  14.  baissât  D.  —  15.  Ca  D.  —  17  briuat 
D  ;  corrilh  R.  —  18.  Mos  laurs  D,  Montlaur  R  ;  qi  tenez  D.  —  19.  tro 
quin  R.  ^^  22,  so  dun  D.  —  23.  iaus]  uos  D;  plau  rail  R  —  25.  Can 
V.  R     —  26.  que  s.  daus  D. 


14  POESIES  PROVENÇALES   INEDITES 

e  tout  chant  et  alegransa  ; 
e  s'anc  raubes  loc  mongil, 
30     ara-us  faitz  dire  a  mil 
que  dieus  e  Torde  clergil 
vos  an  tout  pretz  et  onransa. 

Pos  del  chantar  em  al  som, 
aisieus  desampar  lo  nom. 

35    totz  votr'  argens  toru'  en  plom 
e  vostr*  afars  desenansa. 
vilhet  pus  blanc  d'un  colom, 
bo'us  menon  de  tom  en  tom, 
e  no  sabetz  qui  ni  com. 

40    tart  seres  mais  reis  de  Fransa  ! 


m 


30.  dir  R.  —  31.  lorde  de  glognil  D.  —  32.  a  R.  —  33.  de  chanta  ho 
D.  —  34.  desain  per  D.  —  35.  Tôt  v.  argen  R;  toroa  D.  —  36  afar  R  ; 
desenassa  D.  —  37,  Viellz  D;  blancs  D.  —  38.  Vos  D.  —  39.  saiibes  I). 
—  40.  FarzD. 


10.  La  leçon  n'est  pas  sûre.  Ni  l'un  ni  l'autre  manuscrit  ne  peut 
avoir  le  texte  correct.  Il  semble  que  le  vers  doive  dire  à  peu  près 
ce  que  disait  le  vers  2  :  pos  de  chan  vos  ai  laissât.  En  partant  de 
la  leçon  de  D,  on  pourrait  lire  pos  ai  mais  de  miei  chantât  «  puisque  j'ai 
chanté  plus  qu'à  demi  »,  c'est-à  dire  «  puisque  j'ai  chanté  tout  à  fait, 
puisque  j'ai  fini  de  chanter  »  (voy.  Zeitschrift,  XI,  133).  Mais  l'expres- 
sion serait  bien  peu  naturelle. 

17.  Raynouard  a  traduit  (Lex.  II,  490):  «  Monlaur  vous  a  bien 
abrégé  le  chemin.  »  Mais  cette  traduction  est-elle  correcte  ?  S'il  faut 
dériver  cor'd  de  currere,  il  vaut  peut-être  mieux  encore  lire  «  brivat  lo 
coril  [corr'dh,  qui  est  dans  R,  ^  curricidum)  «  il  vous  a  activé  la 
course,  il  vous  a  fait  courir.  »  Mais  il  semble  que  Torcafol  distingue 
dans  la  rime  l  d'avec  Ih.  Voy.  plus  loin  la  note  du  vers  2  de  162,  7. 

21  à  23.  Vers  assez  obscurs.  Je  ne  connais  pas  d'autre  exemple  de 
X)lanil,  mot  qui  doit  signifier  pays  plat  :  «  On  vous  trouve  en  pays 
plat,  réduit  au  pays  plat.  » 

26.  essera  alcu  deus  lo  capil.  Encore  une  exi3ression  dont  je  ne  con- 
nais pas  d'autre  exemple. 

37.  Le  diminutif  vilhet  manque  dans  Rayn. 


TIRÉES   DES   MANUSCRITS   d'iTALIE  15 

La  pièce  précédente  est  placée  dans  les  deux  manuscrits  entre  Mos 
ComunaU  fai  hen  parer  et  Veillz  Comunals  ma  tor.  Ces  deux  poésies 
étant  réunies  aussi  dans  les  mss.  IK,  on  peut  supposer  qu'elles  étaient 
voisines  dans  le  manuscrit  qui  était  la  source  commune  de  D  I  K  R. 
En  effet  on  voit  qu'il  y  est  parlé  des  mêmes  événements  (comp. 
les  vv.  36  à  38  de  Mos  Comunals  aux  deux  premiers  couplets  de  Vielhs 
Comunals  ma  tor),  et,  bien  que  les  compas  ne  soient  pas  les  mêmes, 
on  peut  dire  que  la  seconde  répond  à  la  première. 

Gr.  162,  5.  Mss.  D  139,  I  192,  K  177,  R  23  (Malin  Gcd.  iO^i:. 
Imprimée  Rayn.  4,  250;  Mahn  "W.  3,  275. 

Mos  Comunals  fai  ben  parer 
que,  si  el  pogues  dir  ni  far 
causa  que'm  degues  enoiar, 
ill  en  faria  son  poder  ; 
5    mas  paubrieira  e  veillencs  Tassaill 
e  poders  e  iovenz  11  faill, 
per  qu'aïs  guerriers  non  fai  paor  ; 
e  non  a  amie  ni  seignor 
que  no'l  teingna  per  enoios 
10    mas  tant  quant  ditz  nostras  tensos. 

E  s'ieu  lo  voill  ben  dechazer, 

que*l  vuoilla  tolre  mon  chantar, 

ia  non  er  qui'l  don  a  maniar 

ni'l  voilla  albergar  un  ser  ; 
15    per  que  metrai'l  chan  dinz  seraill, 

per  qu'el  sovent  trembFe  badaill  ; 

que  la  verchiera  de  sa  oissor 

vendet,  dont  son  gai  maint  pastor, 

car  lai  vivi,  ab  sos  lairos 
20    emblan  las  fedas  e*ls  moutos. 


Oi'tographe  d'après  K.  —  1.  Pos  comioal  R.  —  2.  sil  DIK;  saubes  IK. — 
3.  Se  qua  mi  IK.  —  4.  Quel  IK.  —  5.  vilenc  R.  —  5,  6.  Mas  iouenz  e 
j)oders  len  faill  E  paubrieira  e  ueillors  lasaill  IK.  —  6.  la  f.  D.  —  7.  cal 
R;  Per  qua  home  IK;  nom  R.  —  9.  enueyos  R.  —  11.  Mas  seul  u.  D.  —  12. 
Quill  D,  Que  IK;  uoiU  la  t.  IK.  —  15.  Perquel  ch.  métrai  d.  lo  s.  IK;  Mas 
metray  lo  R;  metraiU  canzD.  —  17.  Quel  u.  IK;  uergiera  de  soisor  D;  sa 
sor  R.  —18.  dont]  deR.—  19.  Que  IK;  uenia  D  ;  los  D.—  20.  EmblarD. 


16  POESIES  PROVENÇALES   INEDITES 

Ane  ab  armas  non  saup  valer 
hom  meinz,  tant  se*n  volgues  lauzar, 
ni  als  guerriers,  mas  ab  parlar, 
no  saup  hom  meinz  de  dan  tener  ; 

25    mas  sovent  mou  guerra  et  assaill 
a  cels  que  an  croz  e  sonaill, 
don  mil  monge  dinz  refeitor 
pregan  plorant  nostre  seingnor 
qu'en  Pons-tortz  e'n  Sainz-Laurenz  fos 

30    si  cum  es,  viellz  e  soffraitos. 

Leiautat  sol  molt  mantener 

e  falsetat  totz  temps  blasmar, 

mas  al  tornell  la*i  vim  laissar 

e  del  tôt  mètre  e  non  caler  ; 
35    per  que  ditz  lo  pair  d'en  Eraill 

que  home  qui  nafre  ni  taill 

ni  prenda  son  lige  seingnor 

ni  que'l  toilla  castel  ni  tor, 

no'l  deu  mantener  nuls  hom  bos, 
10     per  qu'el  no'l  mante  ni'n  Randos. 

Ja  nuill  marit  non  cal  tenier 

de  lui  ni  sa  moiller  gardar, 

anz  lo  po  laissar  domneiar 

et  estar  ab  leis  a  lezcr  ; 
45     ([ue  quais  que-1  debois  ni*ll  cntaill, 

deboissar  lo  po  d'aital  taill  : 

ses  pel,  ses  carn  e  ses  color 

e  ses  ioven  et  ses  vigor; 

e  d'ome  qu'es  d'aitals  faichos, 
50     non  deu  esser  raaritz  gelos. 

21.  sap  IK.  —22.  sen]  en  IK  ;  guabar  IK.  —  23.  guerres  D,  gerres  K.  — 
24.  sap  D  ;  de  mam/ue  R.  —  25.  trebaill  IK.  —  26.  qan  c.  D  ;  o  R  ;  soniail  I, 
soniails  K.  —  27,  refreyior  R.  —  29.  Que  p.  t.  D  ;  pons  totz  e  son  1.  R.  —  30. 
es]el  D.  — 31.  Leialtaz  D;  mo't  manque  D  ;— 32.  falsitaz  D.  — 33.  Mal  R, 
lorneill  D  lornei  R;laill  IK.  —  35.  paire  D,  par  IK,  payre  R;  d.  E.]  nerralli 
R.  —  36.qes  naure  D;  e  DR.  —  37.  E  DR;  pren  IK.  —  38.  E  D  ;  Nil  renou 
ia  c.  R.  —  39.  No  d.  D.  —  40.  no  m.  D  ;  ui  r.  K  ;  rasos  D  —  41  uuillz 
mariz  D;  nom  R.  —  42.  ni  de  s.  R. —  44.  a]  en  D.  —  45.  cal  DR;  uill  1, 
—  46.  Debossar  1 K . --  49,  daylal  R.  —50.  deo  D;  marritz  IKR. 


TIRÉES   DES   MANUSCRITS  lUïALIE  17 

Gr.  162,  8.  Mss.  D  139,  I  192,  K  177,  R  23.  V.  25  à  32;  Rayn.  5,449; 

Mahn  W.  3,347. 

Veill  Comunal,  ma  tor 
ai  «"obrad'  ad  honor, 
car  bon  envaidor 
non  pot  hom  leu  faidii*; 
5     qu'a  vos  o  auzi  dir  ; 
per  que 'm  mis  en  la  via 
e  fi'n  cellui  issir 
que  a  tort  la  ténia; 
don  sapchon  mei  amie, 
10    tuich,  li  paubr'e  li  rie, 
qu'ieu  guerrai  so  que  die, 
puois  sus  son,  don  issic. 

Qui  m'apela  traichor, 

el  men  per  mieg  lo  mor; 
15     mas  quar  al  meu  seignor 

podion  ren  laich  dir, 

eu  non  o  vole  sofPrir  ; 

ni  voill  que  tracher  sia  ; 

e  saup  lo  meillz  garrir 
20     qu'el  eus  no  se*n  garia, 

qu'en  aissise*n  partie 

qu'anc  colbe  noû  feric, 

et  eu  fi  so  qu'ieu  die, 

que*l  pris  e  no'l  retic. 

25    Ben  viu  a  grant  honor 

Ortographe  d'après  K.  —  1.  Veillz  D;  Cominal  R;  Comunal  ueill  I  K; 
cor  R.  —  3.Qua  b.  csuaidor  IK.  —  4.  Nos  D.  —  5.  Car  D;  ausai  I  K.  — 
6.  mes  D.  —7.  Eo  Q  IK;  fi  D.  —  8.  ter  DIK,  cor  R;  temia  R.  —  9  à  12 
ont  échangé  leurs  places,  dans  I  K,  avec  21  à  24.  —  9.  Esaupchon  IK.  —  10. 
p.  eill  r.  IK,  —  11  manque  D.  —  12.  P.  sui  d.  il  i.  U.  -—  13.  Sui  I, 
CuiK;  man  pela  IK,  —  14.  m.  denan  pel  m.  IK.  —  15.  a  mon  s.  1  K.  — 
16.  Podiom  IK;  laidir  D,  lay  dir  R.  —  17.  no  lo  D;  vuelh  R.  —  18.  trai- 
chers  D.  —  19  et  20  manquent  R.  —  19.  saubil  D;  grazir  I,  garzirK.  — 
21  à  24,  voy.  9  à  12.  —  21.  issic  DR.—  22.  colpe  D.  —  23.  fi  magique 
IK;  f.  s.  q,  d.]  si  fo  que  d  R.  —24.  que  p.  R  — 25  à  36  manquent  DR. 


18  POESIES  PROVENÇALES   INEDITES 

qui  pert  son  mal  seignor, 
qu'ieu  perdei  lo  peior 
qu'anc  morz  pogues  aucir, 
mas  eu  non,  puois  moric; 
30     ni  non  voill  qu'om  m'aucia  ; 
per  ma  vida  gandir 
garni  la  maison  mia 


35 


Si  be's  fan  gabador 

lifillat  e*ill  oissor, 

Monlaurs  fai  sobre  lor 
40    SOS  honraz  faiz  auzir  ; 

e  quant  Tauzon  venir, 

no'lserron  ges  la  via, 

anzlor  a  faich  gequir 

Torgoill  e*ill  gaillardia; 
45    e  parec  a  Nou-Vic, 

on  preiron  tal  destrie 

que  quan  Testors  partie, 

el  remas  près  en  gic. 

Ges  no  me  don  paor 
50    per  lor  dig  de  folor, 

si  tôt  quatre  comtor 

mi  menasson  d' aucir  ; 

quar  en  els  po  venir 
*  anz  qu'e  mi  la  moria  ; 
55     et  yen,  podes  lor  dir, 

30.  quel.  —  33  à  36  manquent  aussi  IK;  espace  laissé  libre.  —  37. 
beus  R;  cabador  DT.  —  38.  e  lorsor  R,  —  39.  Monlaur  R.  —  40.  Ses  I;  hon- 
rar  fai  grazir  T  K.  —  42.  seron  D,  saron  1  K.  —  43.  An  D  ;  an  DR;  gechir  I  K. 
44.  e  la  feonia  1  K.  —  45.  en  R  ;  non  uic  IK,  vau  vie  R.  —  46  à  48  quant 
la  chocha  partie.  On  preiron  tal  destric.  Quancar  lan  iai  en  gic  IK.  —  46, 
prezon  R.  —  47.  lestorn  R.  —  48.  Lay  R.  —  49  à  60  manquent  D.  —49. 
nom  d.  gran  p.  IK.  —  50.  Ni  ira  ni  dolor  IK.  —  52.  Me  mes  sen  daucir  I  K. 
—  54,  li  moria  I  K,  la  murria  R.  —   55  à  57.  Queu  en  prec  îam  e  fie  I  K. 


TIRÉES   DES  MANUSCîlITS  D  ITALIE  19 

prec  dieu  a  cascun  dia 
que  gotela  me  fie 
el  lag  mal  don  moric 
uns  comtois,  qu'ieu  ausic 
60     qu'anc  preveire  non  vie. 

58.  laie  I  K.  —  59.  aussic  R. 

5.  J'ai  suivi  la  leçon  de  DR,  qui,  généralement,  ont  le  meilleur 
texte,  mais  eu  égard  aux  vers  1 1  et  23,  on  pourrait  préférer  ici  ausai. 

1 1 .  guerrai  dans  tous  les  mss.  ;  on  aimerait  mieux  farai. 

25.  Ce  fragment  d'un  troisième  couplet  n'est  que  dans  I  K.  C'est  un 
travestissement  curieux  d'un  couplet  de  P.  Vidal  (Gr.  364,  13)  : 

Ben  viu  a  gran  dolor 
qui  pert  son  bon  senlior. 
q  eu  perdei  le  melhor 
qu'anc  mortz  pogues  aucir: 
e  quar  non  pose  morir 
ni  es  dreitz  qu'om  s'aucia, 
per  ma  vida  gandir 
m'en  anei  en  Ongria,  etc. 

La  rime  du  vers  29  n'est  pas  correcte.  Mais  il  n'est  guère  permis 
de  lire  comme  dans  le  sirventes  de  P.  Vidal  :  Mas  eu  non  pose  morir. 
Cela  n'aurait  pas  de  sens  ici.  Tout  ce  fragment  me  paraît  bien  suspect. 

45.  J'ai  choisi  la  leçon  de  D,  qui  me  paraît  la  plus  vraisemblable; 
mais  je  n'ai  trouvé  aucun  Neuvic  où  il  y  ait  eu  un  combat  en  ces 
temps-là. 

48.  Gic  est-il  substantif  verbal  de  gequir  ?  et  signifie-t-il,  par  con 
séquent,  «  abandon  ?  »  Je  ne  trouve  le  mot  qu'ici . 

54.  Moria,  murria,  voy.  Grodefroy,  morie,  mourie,  mur  le  ^  «  mort, 
massacre.  »  Il  semble  que  le  mot  français  désigne  la  mort  causée  par 
une  maladie  contagieuse. 

57.  Autre  vers  difficile  que  je  ne  comprends  pas  sans  des  change- 
ments trop  considérables. 


Il  est  évident  que  ces  deux  pièces  ne  sont  pas  du  même  auteur,  et 
on  ne  peut  douter  que  Mos  Comunah  n'appartienne  à  Torcafol,  puis- 
qu'on y  retrouve  le  portrait  de  Garin,  comme  il  était  tracé  dans 
Comtor  d'Apchier,  portrait  d'un  pauvre  vieillard,  décrépit,  mais  qui 


20  POESIES   PROVENÇALES  INEDITES 

est  toujours  acharné  contre  les  religieux.  La  seule  difEéionce  est 
qu'il  est  désigné  ici  par  son  senlial,  dans  l'autre  pièce  par  son  nom 
réel  ;  et  ceci  s'explique,  si  j'ai  bien  compris  les  vers  33,  34  du  premier 
sirventes  (p.  14).  Ces  vers  semblent  dire  que  Torcafol  voulait  cesser 
désormais  d'appeler  Garin  par  son  nom  poétique  :  «  je  vous  quitte  le 
nom  ^  »  Il  en  résulterait  que  le  sirventes  Comtor  fut  postérieur  à  ^foa 
Comunaîs  et  peut-être  aussi  postérieur  à  Veill  Comunal  ma  tor,  puisque 
Garin  y  appelle  encore  son  adversaire  Comunal,  ce  qu'il  n'aurait  pro- 
bablement pas  fait  après  le  sirventes  Comtor.  Mais  alors  il  faut  sup- 
poser que  Garin  avait  nouvellement  perdu  le  château  dont  il  était  en 
possession  au  temps  de  la  pièce  Veill  Comunal. 

Les  trois  poésies  dont  nous  avons  parlé  jusqu'ici  forment,  nous 
l'avons  vu,  une  sorte  de  groupe  dans  les  mss.  qui  les  renferment.  Un 
autre  groupe  est  formé  par  Comunal  ve'dl  Jlac  plaides  et  Comunal  en 
rima  clausa.  La  seconde  de  ces  deux  pièces  est  attribuée  dans  tous 
les  mss.  à  Torcafol.  En  effet,  nous  y  retrouvons  tous  les  traits  qui 
caractérisaient  le  portrait  de  Garin  d'Apchier  :  sa  vieillesse  qui  le  ren- 
drait impropre,  d'après  l'opinion  de  son  adversaire,  à  être  drut,  son 
hostilité  envers  les  religieux  et  envers  les  pauvres  paysans,  dont  il 
aime  à  voler  les  moutons,  etc.  Il  est  donc  évident  que  cette  pièce  est 
bien  de  Torcafol.  (Voyez  Inedita  aus  pariser  Hdss,  p.  305.) 

L'autre  pièce  est  attribuée  dans  les  mss.  à  Garin  d'Apchier. 


Ur.  162,  2.  Mss.  D  138, 1 191,  K  177,  R  8.  -  Rayo.  4,  249; 

Mahn  W.  3,  274. 

Comunal  veill,  flac,  plaides, 
paubre  d'aver  et  escas, 
tant  faitz  malvais  serventes 
que  del  respondre  sui  las  ; 
5    e'I  vostra  cavalaria 
venra  tota  ad  un  dia 
quant  er  cho  denan  detras, 
Tavols  bos  e'I  ])0s  malvas. 


Orthographe  d'après  K.  —  1.  uiellz  flacs  D.  —  2.  escars  I  K.  —  5.  Sil 
R;  vostre  l  K.  —  6.  Vendra  D.—  7.  Car  R  ;  se  D  R.  —  8.  Lauol  ben  eill  pro 
m.  IK,  Lauol  bo  el  bo  m.  R. 

1  Ce  nom  a  été,  conformément  à  un  usage  bien  connu,  commun  à  tous  les 
deux,  ce  qui  explique  la  confusion  dans  les  attributions  de  leurs  poésies. 


TIREES  DES  MANUSCRITS  D^ITALlE  21 

Ane  un  bon  mot  non  fezes 

10    non  i  âges  dos  malvas, 

per  qu'ie'us  tolrai  vostre  ses  : 
mon  chan,  ah  que* us  formias  ; 
quar  chantatz  ab  vilania, 
que-ill  comtessa  me*n  chastia 

15    que  ten  Beders  e  Burlas, 
que  ditz  que  vos  rebusas. 

Ane  sagramen  non  tangues 
del  tornel,  quant  Tavias  ; 
ni  nuill  temps  ver  non  disses, 
20    si  mentir  non  cuidavas  ; 
et  anatz  queren  tôt  dia 
qu'om  se  û;  e  qui  se  ûa, 
tenetz  lo  taulier  e*ls  das, 
e  del  ioc  sabetz  assas. 

25    Qui -us  tolia  Vivares, 

TArgentieira  e-1  Solas, 

on  lor  comtatz  mainz  orbes, 

mesures  vos  hom  lo  vas  ; 

que  quant  Pons-tortz  vos  passia 
30     e  Sainz-Laurens  vos  vestia, 

siatz  totz  paubres  e  ras, 

que  sieus  es  anquer,  si* os  plas. 

Et  avez  tanz  de  mais  près 
aras  e  d'aissi  en  tras 
35     que  non  sai  cum  vos  tolgues 
qui'l  pe  no'us  tolli  *  o'I  nas 

10.  dti  D,  des  T;  maluatz  IK.  —  11.  queus  D;  fes  R.  —  12.  Mos  R;  quieus 
K  ;  formais  IK;  E  m.  ch.  ab  formas  D.  —  13.  Can  R.  —  14.  El  R;  me  R; 
Qui  cortesamen  ch.  D.  —  15.  Beders]  lobresD,  lombes  R.  —  17  à  24  api'ès 
25  à  32  D  R.  —  18.  t.]  tort  uey  R;  lamas  D.  —  19.  nuillz  D.  —  22.  Cusi  fi  e 
cussi  fana  D,  Conssi  e  per  mayslria  R. —  23.  Tener  D.  —  24.  assatzIK. — 
25.  Quieus  R.  —  27.  comtes  R. —  28.  Mesuresoa  D .  —  29.  tort  R,  torstz  I  K, 
manque  D;  vos  manque  D  ;  passai  I  K.  —  30.  san  laures  qeus  v  R.  —  31. 
molt  DR.  —  32.  ED  ;  sius  D  IK  ;  er  D;  sieus  R.  —  33.  tans  de  mal  D;  laos 
mais  après  R.  —  ^.  Qeu  D;  com  D,  col  R.  —  36.  Si  D,Sil  R;  pel  D. 

2 


\ 


22  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

0  del  tôt  no* us  aussizia. 
si  ho  fos  la  cofrairia 
de  Chasiers  e  de  Carias, 
40    ab  los  pecols  anaras. 

37.  DOS  auzizia  IK  ;  Ois  oillz  o  nous  a.  DR.  —  38.  coffaria  D.  —  39.  cha- 
tiers  IK,  cbassierR;  o  D  ;  carals  IK. 

15.  Beders  e  Burîas  est  la  leçon  de  IK,  qui,  pour  cette  pièce,  ont 
généralement  le  meilleur  texte.  D  a  lohres  au  lieu  de  Beders,  R  lombes, 
ce  qui  donnerait  la  comtessa  que  ten  Lomhers  (dép.  du  Tarn,  plutôt  que 
Lomhez  dép.  du  Gers)  e  Burlas,  Outre  que  la  leçon  de  Beders  est 
mieux  attestée,  la  biographie  d'Arnautde  Maruelh  nous  dit  expressément 
qu'il  y  avait  une  comtesse  qui  fut  appelée  par  les  troubadours  comtesse 
de  Béziers  et  de  Burlats,  c'est-à-dire  Azalaïs  de  Toulouse. 

26.  Il  y  a  plusieurs  lieux  du  nom  de  Soulage,  Solage,  Soulatge, 
Solaise,  Soulages.  Je  n'en  connais  aucun  qui  soit  nommé  Soûlas.  Mais 
est-ce  bien  de  noms  de  lieux  réels  qu'il  s'agit  ici,  ou  n'est-ce  plutôt  un 
exemple  de  cette  sorte  de  jeux  de  mots  dont  parle  Tobler  dans  «  Ver- 
bluemter  Ausdruck  und  Wortspiel  in  altfranzosischer  Kede  »,  p.  2  ss.  ? 

27.  orbes  n'est  pas  dans  Rayn.  Je  ne  comprends  pas  le  sens  du 
vers.  Peut-on  corriger  ordes=ordescs  «  ordures  »? 

32.  «  Vous  êtes  encore  le  sien  »,  c'est-à-dire  :  «  Vous  appartenez 
toujours  encore  au  tombeau,  à  la  mort  »  ??  Cela  ne  donne  pas  de  sens 
satisfaisant.  Y  a-t-il  un  jeu  de  mots  entre  vas  «tombeau»  et  va-s  «vain»  ? 
«  vous  appartenez  encore  toujours  à  la  vanité  ;  tant  elle  vous  plaît  »  ? 
Dans  les  vers  29,  30  il  faut  peut-être  lire  no* us  au  lieu  de  vos, 

39.  Probablement  Chassiers,  département  de  l'Ardèche,  et  Carias, 
département  du  Cantal. 

40.  pecol  «menu  bétail  »,  manque  dans  Rayn.  ;  jfj^cow,  pecoul, 
pecoulh  dans  Mistral  «  niais,  imbécile.  » 

Si  nous  rapprochons  ce  sirventes  des  poésies  précédentes,  nous  ne 
douterons  pas  que  les  mss.  n'aient  tort  de  l'attribuer  à  Garin  d'Apchier, 
(Outre  le  portrait  de  celui  qui  y  est  attaqué,  comp.  particulièrement 
les  vers  17,  18  et  29,  30  de  cette  pièce-ci  aux  vers  33  et  29  de  Mos 
Comunalsfai  ben  parer.)  QqHq  pièce  encore  est  sans  doute  Pœuvre  de 
Torcafol. 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS  d' ITALIE  23 

Il  nous  reste  quelques  poésies  qui  ne  se  trouvent  que  dans  le  ms  D . 

Gr.  162,  4.  D  202,  attribuée  à  Garin. 

Mais  albergiers  dinarada  de  fen 
DO  vendet  anc  mielz  qe  el  a  vendut 
la  verchiera  e  de  Tautre  gran  ren  ; 
mas  e  mal  iuoc  11  faill,  si  dieus  m'aîut. 
5    vieil  enoios  rebussat  Comunal^ 
mon  oliver  vert  e  foillat  brancut 
cossi  m'ausses  anc  retraire  per  mal  ? 

1.  fen  rimant  avec  ren,  l'w  à  la  fin  doit  être  Tnobile,  «  Denrée  de 
foin  »  ne  donne  pas  de  sens  satisfaisant.  Faut-il  livefe  :  re  et  traduire 
«  denrée  de  foi,  denrée  conmiise  à  sa  bonne  foi,  pour  la  garder  »  ? 

Nous  avons  vu  que  dans  Mos  Comunals,  vers  17,  on  reprochait  à 
Grarin  d'avoir  vendu  la  dot  de  sa  femme.  Ce  reproche  étant  répété 
dans  les  premiers  vers  de  ce  couplet-ci,  nous  conclurons  qu'ici  encore 
c'est  Garin  qui  est  attaqué,  et  que  c'est  probablement  Torcafol  qui  est 
l'agresseur. 


Après  avoir  trouvé  que  tant  de  pièces  attribuées  à  Garln  par  les 
mss.  ne  sont  pas  de  lui,  nous  hésiterons  aussi  à  lui  accorder  celles 
qui  ne  démentent  pas  aussi  clairement  le  témoignage  des  mss.  Nous 
nous  déciderons  probablement  à  reconnaître  Torcafol  pour  l'auteur  de 
la  pièce  Vielks  Comunals  plaides,  où  l'on  remarque  à  peu  près  le  même 
style  et  le  même  genre  d'injures  que  dans  les  autres  sirventes  de  ce 
troubadour. 

Gr.  162,  7.  Msc.  D.  139.  Jmpr.  Klein,  die  DichtuDgen  des  Mœnchs  voo 
Moniaudon,  p.  107.  V.  1, 3  à  9,  11  et  12.  Rayo.  5,  156.  Mahn  W.  3,  276. 

Veillz  Cumunals  plaides, 
ver  brivat  lo  corves  ; 
e*ill  malvatz  serventes 
qe  vos  auch  far  e  dir, 
5    me  tornon  en  azir, 
e*ill  vostra  ianglosia, 

1.  cumunal. 


24  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

don  vos  faiz  escarnir, 
me  desplaz  chascun  dia, 
e*m  n'es  vos  enoios, 
10    que  limars  d'esperos, 
gais  esems  e  falcos 
am  mais  auzir  que  vos. 

Mas  sobrebe  vos  près 

car  viella  no  volges, 
15    c'  ab  autra  foraz  mes 

e  fera'us  greu  soffrir.  , 

e  non  a  obs  que* us  tir 

tossa  sa  drudaria, 

se  iase*n  voliauzir; 
20    qe  no  se'n  iauziria, 

c'outra  doas  messos 

non  auria  drut  de  vos  ; 

e  de  nuUa'l  ianglos 

no  sera  ia  cogos. 

10.  des  esperos.  —  11.  falcons. 

2.  La  leçon  semble  corrompue.  Mais  comment  faut-il  corriger? 
Corves  pourrait  être  le  cortves  vfr.  corvois  «  cordouan  »,  constaté 
récemment  par  Tobler  dans  la  Chansoneta  îeu  e  plana  de  Guillem  de 
Berguedan  (Zts.  13,  546).  Alors  corves  serait  probablement  par  méto- 
nymie pour  sotlars  de  corves,  peut-être  aussi  pour  braiasdecoi^ves.  Ou 
doit-on  y  substituer  plutôt  corres,  corretz  «  courroie»  et  lire  breuiar 
(Ve'us  hreuiatf)  îo  corres  (briuar  D  =  breuiar  R  aussi  dans  Comtor 
d'Apchier,y,  17),  ce  qui  serait  le  contraire  de  alounga  la  courreja 
«  donner  des  libertés  »  dans  Mistral  ?  On  est  tenté  aussi  de  rapprocher 
les  deux  expressions  briuar  lo  corres  ici  et  breuiar  {briuar  D)  lo  corHl 
dans  443,  1.  v.  17  ;  mais  je  ne  vois  pas  alors  comment  dériver  corriL 
En  somme,  je  ne  sais  pas  expliquer  ce  vers. 

3.  Le  malvaz  serventes  dont  parle  ce  vers  sera  Veill  Comunal,  ma 
tor,  qui  a  le  même  compas  que  cette  pièce -ci  et  qui  la  précède,  chro- 
nologiquement, puisqu'il  a  adopté  non  seulement  le  compas  de  Pierre 
Vidal  Be  vîu  a  gran  dolor,  mais  encore  ses  rimes,  tandis  que  Ve'illz 
Comunals  plaides  n'en  suit  que  la  forme  métrique  sans  en  adopter 
les  rimes. 

14.   Corr.  viella  vos  volges. 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS  d' ITALIE  25 


22.  Vers  trop  long.  Corr.  aura, 

23.  Corr.  gelosf 


H  ne  me  semble  pas  aussi  sûr  que  les  trois  poésies  qui  restent 
appartiennent  à  Torcafol.  Le  style  m'en  paraît  un  peu  différent,  et  le 
fait  que  la  personne  attaquée  y  est  caractérisée  comme  un  pauvre 
gueux  et  comme  un  vieillard  ne  suffit  pas  pour  y  reconnaître  Garin. 
Les  pièces  Uautrier  trobei  et  Aissi  con  hom  sont  attribuées  à  Garin 
seul  ;  le  couplet  Membrari'us  del  iornal  est  attribué,  nous  l'avons  dit, 
aux  deux  auteurs. 

Gr.  162,  3.  Mss.  D  202,  irapr.  Klein,  p.  107.  V.  17  à  24  Raya.  5,  155. 

MahQ  W.  3,  276. 

L'autrier  trobei lonc  un  fogier 
un  cror,  onn  era  us  efas  mes 
e  la  olet'  e  dos  conres 
e  la  noirissa  en  un  gat  nier. 
5     aquest  ostals  fon  d'un  parier, 
Comunal,  qu'i  veieli  dechaier; 
e  qant  lui  vi,  cuidei  vezer 
Ruqet,  un  viel  ioglar  lanier. 

D  140  :  L'autrier  trobei  tras  un  fogier 

un  croille  ab  dos  enfanz  mes 
en  un  leit  ab  dos  cures 
0*1  nuirissa,  un  cbat  nier. 
5    aqest  ostals  fo  d'un  parier, 
Cumunal,  qu'i  vei  deschazer; 
e  quant  lui  vi,  cuidei  vezer 
tu,  lait  veill  iuglar  lainier. 
8.  lais. 

Gel,  s'es  paubres,  mal  no  l'en  mier, 
10    q'ieu  no-ill  tulc  ren  mas  las  pares 
e*l  moli  donrendia  ses 
al  paire  d'en  Poisson  Gaifier  ; 
qe'n  dis  un  tal  enuich  l'autrier, 
donmen,  qe  no 'm  dis  point  de  ver; 

2.  un    —  5.  800.  —  14.  poinz. 


2  6  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

15     mas  no 'S  pode  mal  dir  tener. 
an  vos  los  maiors  colps  q'el  fier  ! 

Eu  no  m'apel  ges  Olivier 
ni  Rothlan,  qe  q'el  se*  n  dises  ; 
mas  valer  los  cre  maintas  ves, 
20     quant  cossir  de  leis  q'eu  enquer; 
e  non  sai  el  mon  cavalier 
q'euadoncs  no •  1  crezes  valer; 
e  volria  tal  fieu  aver 
a  partir  regisme  o  enpier. 

23.  sicu.  —24.  regierae. 

La  forme  métrique  et  les  rimes  sont  les  mêmes  que  dans  Peire 
Cardinal  Ane  no  vi  Breio  ni  Baivier, 

3.  Pour  coures,  cures,  voy.  la  note  du  vers  2  de  la  pièce  précé- 
dente. Oleta  n*est  pas  dans  Rayn.  Le  mot  sera  le  diminutif  de  ola, 

1 1 .  Corr.  del  moli  f 

12.  Corr.  Ponsonf 

13.  14.  Lire  gwe'm,  TWn.* 

16.  An  est-il  le  même  que  ecf  v.  Mistral  an-nous-aqui  «  nous 
voici  »  (à  Castelnaudary) . 


Gr.  162,  i.  Msc.  D.  202. 

Aissi  con  hom  tra  Testam 
as  envers,  q'era  adreich, 
e  si  cum  meno'l  carreich 
li  bon,  qanttrao'l  legnam, 
5    un  non  sirventes  ailluc 
de  mon  Comunal  astruc, 
qui  chaschus  torna  en  desdeing 
e  destorz  son  entresseing. 

la  no  Mil  cal  gardar  cho  clam 
10    per  si  ni  per  son  arneich, 


7.  descleing.  —  8.  e.]  au  tresseing. 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS  d'iTALIE  27 

ni  per  bon  astre  qeûl  veich 
nipel  sieu  corren  volam, 
pel  ioglareiar  faduc, 
ni  per  las  canas  del  suc, 
15    ni  per  las  cordas  del  seing 
qui  son  el  sieu  col  susteing. 

4.  legnam  manque  dans  Rayn.  ;  voy.  it.  legname,  catal.  lenyam, 

8.  Lire^'w? 

12.  volam  manque  dans  Rayn.;  je  ne  le  comprends  pas. 

16.  Le  dernier  mot  du  vers  ne  peut  être  sostenh  «  soutien  ».  Peut- 
on  corriger  sotz  tenh  ?  «  pour  les  cordes  de  cloches  qui  sont  à  son  col, 
au-dessous  de  la  teinte  »,  c'est-à-dire  «  sa  barbe  ressemblerait  à  des 
cordes  de  cloches,  si  elle  n'était  pas  teinte  »  ? 


Gr.  443,  3.  Msc.  D   202,  140.  Impr.  Rayn.  5,   156.    Mahn  W.  3,217, 

Klein,  p.  106. 

Membrari-us  del  iornal 
qant  perdes  vostres  cussos 
a  Montfort,  e  meses  vos 
dinzen  la  boissera? 
5    granz  esmais 

vos  i  crée  e  grans  esglais, 
qe'ls  draps  vos  trauqes  denan. 
be'us  garitdieus,  per  semblan, 
car  no  *  us  toqes  en  carn  nuda. 
10     «  savis  apren  e  fols  quda.  » 

D'  (202)  :  4.  D.una  b. 

D*  (140)  :  2.  cuisses.  —  3.  messes.  —  6.  Vos  uieng.  —  7.  traisses.  —  P, 
torqes.  —  10.  flos  cuida. 

4,  5.  Ces  deux  vers  sont  sans  doute  incomplets.  Il  est  probable  qu'ils 
ont  eu  sept  syllabes  comme  tous  les  autres,  et  que  le  quatrième  finissait 
en  al  comme  le  premier  vers  du  couplet. 


En  somme, des  huit  pièces  qui  se  trouvent  dans  les  mss.  sous  le  nom 
de  Garin,  nous  ne  pouvons  lui  attribuer  avec  certitude  qu'une  seule 


28  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

trois  ne  sont  certainement  pas  de  lui,  une  quatrième  probablement 
non  plus  ;  trois  sont  douteuses . 

Du  reste,  Garin  n'a  pas  beaucoup  à  se  plaindre  du  résultat  de  nos 
recherches.  S'il  ne  lui  reste  qu'une  seule  pièce,  c'est  du  moins 
la  meilleure,  et  pour  la  vivacité  du  style,  et  pour  le  genre  de  la  satire, 
moins  grossière  et  plus  ironique  que  dans  les  compositions  de  son 
adversaire,  et  pour  les  sentiments  qui  y  sont  exprimés.  Auteur  de 
cette  pièce  et,  surtout,  inventeur  du  descort,  Garin  occupera  encore 
une  place  honorable  dans  la  littérature  provençale. 

Mais  qui  est  donc  ce  Garin  d'Apchier?  Il  semble  impossible  qu'avec 
tant  de  noms  de  personnes  et  de  lieux,  qu'il  y  a  dans  les  sirventes 
des  deux  troubadours,  on  ne  puisse  retrouver  Garin  dans  l'histoire.  Il 
me  le  faut  confesser,  pourtant,  je  n'ai  pas  été  plus  heureux  à  présent 
que  la  première  fois  que  j'ai  essayé  de  résoudre  la  question  (Zeitschr. 
/.  rom,  Phil.,i.  XI,  221  ss.).  Ce  n'est  pas  l'impossibilité  de  trouver 
des  noms  identiques  dans  les  documents  qui  fait  la  difficulté,  c'est 
plutôt  l'embarras  de  choisir  parmi  toutes  les  personnes  du  même  nom. 
11  y  a  un  assez  grand  nombre  de  Garin  d'Apchier,  et  s'il  est  vrai  que 
presque  tons  ceux  que  nous  connaissons  ont  vécu  dans  un  temps  trop 
moderne  pour  notre  troubadour,  il  est  bien  probable  aussi  que  le  nom 
de  Garin  était  fréquent  dans  la  famille  dès  le  commencement  du  XII® 
siècle.  Du  moins  je  crois  qu'il  s'agit  d'un  membre  de  cette  famille  (qui 
est  appelée  dans  les  documents  «  de  Apcherio  »  ou  «  de  Castronovo  », 
c'est-à-dire  de  Châteauneuf-de-Randon,  département  de  la  Lozère), 
dans  l'extrait  suivant  d'une  charte  de  1126. 

Noturn  sit. . .  quod  ego  Raymundus  cornes  Barchinonae  et  Provinciae  mar- 
chio  et  coDJux  raea  Dulcia  et  filii  nostri  Raymundus  et  Berengarius  donatores 
sumus  vobis  Garino  et  Odiloni  fidelibus  nostris  et  uxoribus  veslris  et  filiis 
et  filiabus  vestris  in  perpetuum  castrurn  quod  vocalur  Rando,  ut  habealis  et 
teneatis  illud  per  feudum...  {IHst.  de  Languedoc,  V,  886.) 

Il  y  a  donc  à  trouver  parmi  les  divers  Garin  d'Apchier  celui  qui 
peut  avoir  été  notre  troubadour. 

Il  n'en  est  pas  autrement  des  noms  d'Eralh,  de  Monlaur  et  de 
Randon .  Le  nom  d'Eralh  est  commun  dans  les  familles  des  vicomtes 
de  Polignac  (nous  trouvons  des  Héraclius  de  PoJignac  déjà  au  ix«  siè- 
cle, voy.  Hist.  de  Languedoc,  t.  IV,  Registre)  et  des  seigneurs  de 
Monlaur,  qui  tous  les  deux  étaient  du  voisinage  des  seigneurs 
d'Apchier  et  qui  se  trouvent  souvent  ensemble  avec  eux  dans  les 
documents. 

Les  hostilités  de  Garin  envers  les  religieux  ne  nous  aident  pas  non 
plus  à  fixer  le  temps  où  il  vivait,  puisque,  aux  xiie  etxiii®  siècles,  les 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS    D'iTALIE  29 

évêques  deMende  et  du  Puy  étaient  presque  toujours  en  guerre  avec 
les  barons  de  leurs  diocèses,  et  entre  autres  avec  les  seigneurs  d'Apchier, 
de  Polignac  et  de  Montlaur'.  En  1 165,  nous  voyons  le  roi  Louis  le  Jeune 
entreprendre  une  expédition  pour  protéger  TEglise  contre  les  vexations 
de  ces  seigneurs  (Rist.  de  Languedoc,  t.  VII,  8  ss.),  expédition  qui 
fut  suivie  d'une  autre  en  1171.  L'évêquedeMende,  Aldebertde  Tournel 
(1 151-87),  reconnaissait  alors  la  suzeraineté  des  rois  de  France  {Gallia 
christ.  1, 90),  de  sorte  que,  dès  lors,  les  ennemis  de  Tévêché  de  Mende 
étaient  aussi  les  ennemis  de  la  France.  Les  comtes  d'Apchier  étant 
feudataires  des  évêques  de  Mende,  mais  combattant  toujours  contre 
eux,  cette  circonstance  pourrait  peut-être  servir  à  expliquer  les  vers 
A  pauc  apchiers  no'usfo  Fransa  {Comunal,  en  rima  cîausa^v.  12)  et 
tart  seres  mais  reis  de  Fransa  (^Comtor  d'Apchier,  v.  40). 

L'époque  où  florissait  le  troubadour  serait  fixée,  jusqu'à  un  certain 
point,  si  la  comtessa  qiie  ten  Beders  e  Burlas  était  en  effet  Azalaïs  de 
Béziers,  surnommée  de  Burlats  dans  la  biographie  d'Arnaut  de  Maruelh. 
Elle  était  fille  de  Raimon  V  de  Toulouse,  épousa,  en  1171,  le  comte 
Roger  V  de  Béziers  et  mourut  avant  1201  [w.Eist.  de  Languedoc,  Y I 
156,  X  220).  Mais  il  n'est  pas  bien  certain  que  ce  soit  la  même  comtesse. 

Dans  la  Zeiisch,f,  rom.  Phil.  t.  XI,  p.  223,  j'ai  dit  que  les  deux  sir- 
ventes  Gr.  162, 7  et  8  devaient  avoir  été  composés  après  1 196,  puisqu'ils 
suivent  le  compas  d'une  poésie  de  Pierre  Vidal  qui  est  de  cette  année- 
là.  Ce  n'est  peut-être  pas  exact.  La  pièce  de  Vidal  étant  un  sirventes, 
toutes  les  trois  peuvent  avoir  imité  un  original  aujourd'hui  perdu. 
Mais  le  sirventes  de  Garin  serait  naturellement  une  imitation  de  celui 
de  Vidal,  si  le  fragment  du  couplet,  dont  nous  avons  parlé  à  la  page 
19,  était  vraiment  de  lui.  La  chanson  de  Raimbaut  de  Vaqueiras, 
dont  le  compas  est  imité  par  162,  5,  est  probablement  à  placer  entre 
1180  et  1190.  Le  genre  poétique  du  descort,  inventé,  selon  la  biogra- 
phie de  Garin,  par  ce  dernier,  existait  déjà  avant  1 180.  Si  la  notice  de 
la  biographie  est  exacte,  ce  dont  nous  n'avons  pas  le  droit  de  douter, 

*  Une  charte  de  1223  peut,  en  quelque  manière,  servir  d'illustratiçn  aux 
reproches  faits  à  Garin  de  voler  les  moutons  aux  paysans.  Gallia  christ.^ 
1,  92:  «  In  schedis  R.  P.  Andreae  a  S.  Nicolao...  lego  hune  Stephanum 
(évéque  de  Meode)  strenuum  se  ostendisse  in  compescendis  nobilium  vexa- 
tiouibus  erga  rusticos,  quibus  arare  non  nisi  dominicis  et  solemnioribus 
diebus  permittebant.  Ut  eorum  superbiam  frangeret,  multos  équités  et  du- 
ceotos  milites  accersivit,  maxime  ex  Arvernia,  qui  ducibus  domino  de  Mer- 
corio,  comité  de  Bononia,  etc.  Randonem  de  Castronovo  debellarunt,  et  18 
castra  tam  de  feudo  et  retrofeudo,  quam  de  proprietate  Raudonis  ceperunt 
et  destruxerunt.  »  Empêcher  les  paysans  de  labourer  ou  leur  voler  les  mou- 
tons, il  n'y  a  pas  grande  différence. 


30  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

la  carrière  deGarin  doit  avoir  commencé  vers  1175,  au  plus  tard.  Il 
me  faut  abandonner  les  recherches  ultérieures  à  ceux  qui  disposent 
d'une  bibliothèque  historique  plus  riche  que  la  mienne.  Je  ne  doute 
pas  qu'on  n'arrive  à  déterminer  les  dates  de  quelques-uns  des  événe- 
ments dont  il  est  fait  mention  dans  ces  poésies. 


Grundriss,  no  167,  20«».  Ms.  T  i4i. 
GIAUSEM  FADITZ 


D'un  'amer  on  s'es  asis 
mes  ferms  cors  fis, 
movon  tuit  miel  certes  saber; 
c'amors  m'ensegna 
5        cansons  far  e'm  maïstris 
e-m  esbaudis 
cor  e  sen  e  geng  e  poder, 
per  c'ieu  devegna 
e  gais  SOS 
10  coindes  e  bos; 

qe  s'ill  non  fos, 
gia  per  autra  isciensa 
mes  trebars, 
qi  es  fins  e  clars, 
15  non  fora  cai^s 

ni  agra  gran  valensa. 

Ni  non  cre  qu'om  gia'l  graisis 
ni  abelis 
gia,  tant  non  o  sabr'  eu  voler, 
20  s'amors,  ce  régna 

*  J'avais  oublié  de  publier  celte  pièce,  omise  par  Bartsch,  dans  mes  hie- 
dita  aus  pariser  Handschriften.  Je  profite  de  roccasion  qui  s'offre  pour  la 
publier  ici,  bien  que  cette  poésie,  n'étant  contenue  dans  aucun  des  manu- 
scrits d'Italie,  sorte  du  cadre  du  présent  travail . 

2.  mon  ferm;  fins.  — 4.  camor. — 5.  nais  bis,  —9.  sons.  — i5.  clars,  — 
18,  Mabelis.  —  20.  samor. 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS  d'iTALIE  31 

e  me  giors  e  sers  e  matis, 
no*m  crecis 
de  vos,  ce*m  fatz  viur  'e  valer, 
domna,  on  c'ieu  tegna. 
25  tant  es  pros 

ce  mas  cansos 
an  pretz  pros. 
per  so  non  bistensa 
merceiars 
30  e  mos  cautars 

ni  gens  prechars 
ab  cor  d'umil  parven?a. 

Donc  non  es  gies  vers  devis 
aicell  ce  dis 
35    c'ieu  cant  per  aver  ; 

ch'en  re  no*l  degna 
mon  cor  tant  per  ccn  mentis 
\^  lei,  c'obesis, 
e  mos  cantz,  on  no  fas  parer 
40  ce-m  desovegna 

SOS  gioios 
cors  amoros  ; 
es  esraisos; 
qu'en  tant,  ses  faglensa, 
45  c'enclau  mars 

no  es  sa  pars; 
per  qie'/lausars 
de  leis  e'I  pretz  m'agenssa. 

Soau  e  gient  nie  concis, 
50  can  vole  c'ieu  vis 

son  bell  cors  blanc  gioios  giaser, 
don  bes  me  vegna. 
e  no  cresatz  ce  ieu  partis, 
s'il  m'o  sofris 


21.  E]  el.  —  23.  fat;  ualens.  —  31.  Nigus  p.  —  33.  uer.  —  39,  caot,  - 
40.  Com.  — 41,  Son. 44.  Con  clau.  —  47.  Por  quieu  lausors. 


32  POÉSIES  PROVENÇALES  INEDITES 

55     so  qu'ieu  plus  vole  veser. 

trop  eut  qe-m  fegna! 

c'a  sasos 
notz  bon  al  pros 
paue'  oeiaisos. 
60  par  so'm  fai  temensa 

fols  vanars 
e  trop  parlars, 
ee  mans  afars 
en  assi's  desavinensa. 

65        tan  be*l  soi  aclis, 

ear  so  que*ll  quis, 
me  de/,  qe  ges  no*m  po/  plaser 
c*autra'm  retegna. 
ans  no  lais   Lemosis, 
70  un  dotz  pais, 

perlieis,  en  oui  ai  bon  esper 
ee  giois  me*nvegna; 
don  ganglos 
contraries 
75  fais  ni  gelos 

no  i  ay'  entendensa 
cil  ganglars 
ni'l  eridars 
braus  :  a  fais  amars  !  » 
80  nos  ni  nostr'  amer  vensa. 

E  per  aiso  m'esgausis 
ear  s'afortis 
mes  bels  Sobiras  ab  cor  ver 
en  pretz  revegna, 
85        q'era,  s'ell  no  Vaculhis, 
ia  meg-aueis 
per  tais  qui'll  degran  mantener. 


55.  Camu(8o)oM  Comai(so).  —  59.  ociaisons.  —  64.  enaseis.  —  65.  o  t.; 
aclins.  — 67.  der;poc.  —  72.  gioi.  —  73.  sanglos.  —  76.  ag.  —  78.  cridar. 
—  79.  Brau.  —83.  sobirar,  —  85.  Géra;  nola  cug  uis.  —87.  tal. 


TIRÉES  DES  MANUSCRITS   d'iTALIE  33 

e  cal  qu'estregna 
son  cor  blos 
90  flac  enoîos 

vas  gioi  duros, 
a  lui  a  tenensa 
pretz,  donars, 
ses  faitz  avars, 
95  e  gens  ondrars 

ab  francha  captenensa. 

Ma  cansos 
ab  ditz  gioîos 

va  dir 

100  n'Agout  en  Provenssa 

ce*«l  presclars 
de  vos  m'es  cars 
e'I  gerears 
de  Santongier  m'agensa.  » 

88.  que  stregha.  —  89.  cors.  —  90.  noios.  —  94.  Sos.  —  95.  gems.  — 
102.  mos  c.  —  104.  santangier. 

5.  J'ai  introduit  maïstris,  bien  que  le  verbe  maïstrir  n'existe  pas 
dans  Raynouard.  On  y  trouve  pourtant  enmaistrit  «  habile  »: 

12.  Ou  ce  vers-ci  est  trop  long  d'une  syllabe,  ou  les  vers  28,  44, 
60,  92  sont  trop  courts.  La  mesure  du  dernier  vers  de  chaque  cou- 
plet, vers  correspondant  à  celui-ci,  rend  probable  qu'il  doit  y  avoir 
six  syllabes  dans  tous;  mais  alors  il  faudrait  corriger  quatre  vers  sur 
six,  tandis  qu'on  n'aurait  à  en  changer  qu'un  seul,  si  Ton  acceptait  pour 
ces  six  vers  la  mesure  de  cinq  syllabes. 

22.  crecis.  Il  paraît  qu'il  faut  corriger  enrecis  =  enrequïs, 

27.  Vers  trop  court.  Il  faudra  remplacer  pros,  qui  est  déjà  au 
v.  25,  par  un  adjectif  de  deux  syllabes,  peut-être  ricos. 

31.  Corr.  preghars, 

35.  Vers  trop  court  de  trois  syllabes. 

36  ss.  :  o  puisque  mon  cœur  ne  l'estime  point  (c.-à-d.  l'avoir)  à  un 
tel  point  que  je  mente  pour  cela,  dans  mes  chansons,  à  elle,  à  qui 
j'obéis.  » 

37.  Pour  mon  cor  au  lieu  de  mos  cors,  voy.  Inedita  aus  pariser 
Handschrifterif  p.  xv,  xvi  et  Mushacke,  AUprov,  Marienklage,  p.  57. 

55.  Lisez  Cane  vis,  etc.  ? 


â 


34  POESIES  PROVENÇALES  INEDITES 

65.  Lisez  Ja  ?  mais  il  manque  encore  une  syllabe. 

69 .   Lisez  ne  l.  f 

69,  78.  Vers  trop  courts. 

77.  cil  =  que-ill. 

83,  100,  104.  VowT  Sohira,  n'Agout,  Santongier,  voy.  Hist.  de  Lan- 
guedoc X,  p.  246,  et  Robert  Meyer,  Leben  des  Trobadars  Gaucelm 
Faiditf  p.  56,  57. 

99.  Vers  trop  court  de  deux  syllabes,  qui  devaient  contenir  aussi 
la  rime  en  os. 


Gr.  231,  2.  Msc.  D  260. 
GUILLELMS  RANOLS 


Laissatz  m'era  de  chantar, 
mas  per  esqivar  los  danz 
qe  prenia  ioiâ  e  chanz, 
m'erper  eus  pas  atornar. 
5    e  no  •  m  chai  s'entrels  maritz 
non  es  mos  chanz  achoillitz, 
tan  gen  s'acord'  ab  los  gais  ; 
mas  trop  n'i  trob  de  savais 
abrigatz  sotz  bel  parer, 
10    quais  qez  ill  cuion  saber 
de  prez  com  vai  ni  don  mou, 
ezunsno  tastec  del  brou. 

Malvestat  vei  trop  poiar 
e  prez  decazer  a  panz, 

15    e  per  colpa  dels  truanz 
vei  tôt  lo  segle  torbar, 
qe*l  bocs  es  al  lop  arditz 
e  Taustor  sec  la  perdiz, 
Fagnels  garda  e*l  pastre  pais 

20    e'I  muls  cavalca  son  fais, 
e  vei  lo  frevol  tener 


4.  a]o.—  Le$  couplets  2  e^  3  soJit  intervertis  dans  le  manuscrit,^  15.delz. 


TIRÉES   DES  MANUSCRITS   D  ITALIE  35 

e'I  fort  bruzar  e  cazer 
e*l  carre  denan  lobou 
e  nadal  segrent  an  nou. 

25    Si 'm  qers  ni  -m  vols  demandar 

don  es  traitz  aquest  semblanz  : 

dels  ries,  qar  per  lor  enganz 

losvol  deus  tant  abaissar 

q'us  frevols  pobols  petitz, 
30    armatz  de  sobrepelitz, 

q'anc  mais  az  enan  no*s  trais, 

lor  tolon  tors  e  palais, 

e's  fan  contr'els  tan  temer 
.  qe  contra  lor  fais  poder 
35    han  bastit  un  segle  nou, 

e  no  son  mas  oitz  o  nou. 

24.  El. 

Ud  beau  sirventes  de  Guillem  RaiDol,  dirigé  comme  celui-ci  contre 
le  clergé,  mais  plus  encore  contre  Simon  de  Montfort  et  les  Français, 
date  des  années  1216  à  1218.  Voy.  Stimming,  Bertran  de  Born,  pp. 
82,  136. 

2.  esqivar,  dans  le  sens  de  «  détourner  »,  manque  dans  Rayn. 

12.  hrou, y oy,  bro  dans  Rayn. 

22.  Corr.  hrucar  «broncher  ».  Raynouard  n'a  que  la  forme  burcar. 

24.  segrent  par  métathèse  pour  segv^ntre . 

Cari  Appel, 
(A  8um*e.) 


/ 


LE  LIBRE  DE  MEMORIAS 

DE 

JAGMB  HASGARO 


AVANT-PROPOS 


On  ne  connaît  de  Jacme  Mascaro  que  son  nom,  Tépoque  approxi- 
mative de  sa  naissance  et  ses  fonctions.  Né  probablement  à  Béziers 
au  commencement  du  xiv*  siècle,  il  fut  élu  écuyer  du  consulat  en 
1348,  ainsi  qu'il  nous  l'apprend  lui-même:  «  E  van  elegir  que  fos 
lur  escudier  Jacme  Mascaro.  »  (folio  4  verso).  Chaque  consul  avait 
à  son  service  un  écuyer,  et  Técuyer  du  premier  consul,  outre  les 
charges  habituelles  de  cette  fonction  (exploits  pour  le  recouvrement 
des  impôts,  exécution  de  la  justice  consulaire,  etc.),  devait  tenir  un 
registre  des  affaires  de  la  commune  :  telle  est  sans  doute  Torigine 
du  Libre  de  memorias. 

Ce  livre  contient,  année  par  année,  la  liste  des  fonctionnaires 
principaux  de  la  ville  de  Béziers,  Texposé  sommaire  des  faits  qui 
intéressent  directement  la  cité  (montant  des  impôts,  privilèges,  tra- 
vaux publics,  pestes,  disettes,  phénomènes  météorologiques,  passages 
de  rois  ou  de  grands  personnages,  entrée  des  évoques,  dissensions 
intestines,  etc.),  des  événements  les  plus  saillants  de  l'histoire  géné- 
rale, comme  la  mort  et  la  naissance  des  princes  de  la  maison  royale, 
les  principaux  épisodes  de  la  guerre  de  Cent  Ans,  et  notamment  la 
pnse  par  les  Anglais  des  localités  de  la  région.  11  s'étend  de  l'année 
1336  à  Tannée  1390  inclusivement*.  En  dehors  de  son  intérêt  histo- 
rique, cette  chronique  constitue  un  document  important  pour  l'étude 
de  la  langue  d'oc,  et  particulièrement  du  dialecte  biterrois,  au  xiv» 
siècle. 

Le  manuscrit  de  Mascaro  est  conservé  à  la  Bibliothèque  munici 
pale  de  Béziers,  salle  des  Archives,  armoire  8,  no  1.  C'est  un  grand 

*  La  chronique  s'ouvre  par  la  mention,  en  l'an  1247,  de  rabdicalion  du 
dernier  des  Trencavel,  c'est-à-dire  d'un  des  faits  les  plus  importants  pour 
riiistoire  de  la  cité  ;  Mascaro  passe  ensuite  sans  transition  à  Tannée  1336. 


LE    «LIBRE   DE   MEMORIAS»  3  7 

volume  (40  X  29  X  4  cent.)  relié  à  laide  de  deux  planches  de  bois 
recouvertes  de  cuir,  ornées  chacune  de  cinq  gros  clous  de  cuivre  ;  la 
face  supérieure  porte  eu  outre  un  anneau  de  fer  rectangulaire  qui 
était  destiné  à  enchaîner  le  manuscrit.  La  tranche  est  peinte  en  bleu, 
mais  la  couleur  a  disparu  en  grande  partie.  Le  papier  est  du  papier 
d'ouate.  Il  y  a  deux  sortes  de  foliotation,  l'une  à  droite,  en  chiffres 
romains,  qui  a  le  plus  souvent  disparu  par  le  fait  de  la  rognure,  l'au- 
tre à  gauche,  en  chiffres  arabes,  conforme  à  la  précédente,  qui  sub- 
siste entière  ;  nous  l'indiquons  dans  notre  copie.  L'écriture,  très 
espacée,  est  à  Tencre  noire,  sauf  quelques  lettres  initiales,  titres  ou 
signes  à  l'encre  rouge.  C'est  une  gothique  assez  régulière,  d'une  lec- 
ture facile,  à  part  quelques  rares  additions  au  texte,  faites  par  une 
autre  main  et  que  nous  signalons  en  note.  Les  abréviations  sont  peu 
nombreuses  et  aucune  ne  présente  de  difficulté. 

Le  Libre  de  Memorias  a  déjà  été  publié  en  183G  dans  le  Bulletin 
de  la  Société  archéologique  de  Béziers,  l*'e  série,  1er  volume,  page 
67-146.  L'auteur  de  cette  publication  n'a  pas  toujours  reproduit  le 
texte  avec  fidélité.  C'est  pourquoi  nous  ne  croyons  pas  inutile  d'en 
donner  une  seconde  édition,  rigoureusement  conforme  à  l'original. 
Nous  avons  cru  devoir  respecter  jusqu'aux  caprices  même  de  l'ortho- 
graphe, souvent  variable  pour  un  même  mot. 

Ch.  Barbier. 


[F.  1  recto]  AYSSO  ES  LO  LIBRE  DE  MEMORIAS,  LO  QUAL 
Jacme  Mascaro,  escudier  dels  honorables  senhors  cossols  de  la 
viela  de  Beses,  a  fach  e  hordenat  de  niotas  e  diverssas  causas  que 
son  endevengudaSf  aissi  quan  se  ceq  : 

Premieramen  : 

L'an  MCCXLVii,  el  seten  jour  del  mes  d'abriel,  Trencavelh, 
viscomte  de  Bezes,  fes  carta  et  instrumen  d'absolucio  als  se- 
nhors cossols  de  Bezes,  del  sagramen  de  fizeltat,  que  los  ditz 
senhors  cossols  et  la  viela  de  Bezes  li  farian  et  eran  tengutz  de 
far,  et  yschamen  del  servisi  e  servitut,  que  los  sieutadas  de 
la  dicha  viela  li  farian.  Esta  ne  carta  piiblica,  la  quai  es  en  la 
gran  cayscha  de  la  mayo  coinuna. 

[1  V.]  Item  Tan  dessus  digMCCXLVii,  e  la  novena  calenda  de 
jun,  se  comenset  lo  tractamen  de  far  lo  comensamen  de  la 
font  del  mercat  de  Bezes,  per  los  honorables  senhors  cossols, 

3 


38  LE   «LIBRE    DE    MEMORIAS  » 

e  per  lot  lur  honorable  cosselh  de  la  dicha  viela  de  Bezes,  en 
la  manieira  que  podes  vezer  hobrada. 

So  son  loa  senhors  cossols  sobreditz  que  en  aquel  temps 
eron^  so  es  a  saber  : 

Sen  Bernât  de  Pradas;  sen  Pejre  Panta  Salada;  sen 
Esteve  de  Bajas;  sen  Pejre  de  Santa  Aularie  ;  sen  Guilhem 
Daynha;  sen  Bertran  Sayschac;  sen  Peyre  Molinier. 

Losquals  senhors  cossols  dessus  nominatz  van  apelar  los 
senhors  de  jus  escrigz,  e  motas  genz  de  la  viola  de  Bezes,  per 
saber  si  degun  y  volia  deguna  cauza  dir. 

[2  r.]  Premieyramen  van  appelar  los  sobreditz  senhors 
cossols  : 

Mossen  Johan  Eranha,  senescalc  de  Carcassona  e  de  Bezes  ; 
pus  van  apelar  mossen  Ramon,  evesque  de  Bezes  ;  pus  mos- 
sen Guilhem,  abat  de  mossenhor  Saut  Jacme;  pus  mossen 
Jacme,  abat  de  mossenhor  Sant  Afrodisi  ;  pus  van  far  venir  lo 
sen  Bernât  Caus,  el  sen  Guilhem  Guitart,  los  quais  dos  sen- 
hors van  perpenre  Tobra  de  la  dicha  fon,  aissi  quant  vezer  se 
pot  hobrada. 

L'an  Mcccxxxvi  foron  cossols  : 

Mossen  Pejre  Desmas,  savi  en  dreg,  per  taulas;  sen  Ber- 
nât Gibeli,  per  mercadies  ;  maystre  Guilhem  Danha,  notari  ; 
sen  Ramon  Laures,  per  parayres  ;  sen  Johan  do  Sant  Andrieu, 
per  sabaties;  sen  Peyre  Seriiiha,  per  pelicies  ;  sen  Andrieu 
Galhart,  per  lahor. 

[2  V.]  Item  Tan  sobredich  mcccxxxvi,  el  xvii  jour  de 
genoyer,  los  sobreditz  senhors  cossols  van  manlevar  de 
mossen  Andrieu  Frezols,  filh  que  fo  saentras  de  mossen  P. 
Prezols,  cavalier,  del  castel  de  la  Veruna,  vu*'  xi  libr,  vi  d. 
torn.,  contan  lo  tomes  xii  d. 

Item  Tan  dessus  escrich  mcccxxxvi,  dijous  que  fo  lo  viii^  jour 
de  febrier,  a  hora  de  vespras,  venc  a  Bezes  lo  rey  de  Franssa 
nostre  senhor,  que  avie  nom  mossen  Phelip  de  Valoys.  Et 
anava  amb  el  madama  la  regina,  sa  molher.  Els  senhorscos- 
sols  de  la  dicha  viela  feron  li  présent  de  belcop  de  bêla  vais- 
sela  d'argent.  Et  feron  mantos  los  ditz  senhors  cossols,  que 
degun  temps  no  fouc  vist  qu'en  portesso  davan  '. 

*  Daus  le  manuscrit,  le  mot  davan,  écrit  à  l'encre  noire,  est  rayé  d'un  trait 
à  l'encre  rouge. 


DE   JACME    MASCARO  39 

Et  van  venir  am  nostre  senhor  lo  rej  sobre  dig,  so  es  a 
saber  :  lo  rej  de  Navarra  et  motz  d'autres  dux,  princeps, 
comtes,  baros,  et  tanta  de  nobleza  que  non  se  pojria  nomnar. 

[3  r.]  L'an  mcccxli  foron  cossols  : 

Sen  Guilhem  Augie  de  Pauiha  ;  sen  Sicart  Roart  ;  sen  Jolia 
Barrieyra;  sen  Amalric  Lieura;  sen  Miquel  Folcran  ;  sen 
Johan  Nadal;  sen  Mathieu  Vilar. 

Aquel  an  mezeis  dessus  dig  foron  autriadas  letras  per  lo 
rej  de  Franssa,  nostre  senhor,  lo  rey  Phelip,  als  senhors 
cossols  dessus  ditz  et  a  lur  honorable  cosselh  de  la  viela  de 
Bezes,  que  son  en  la  manieyra  que  es  aissi  escrig.  Et  en  la 
manieyra  que  se  seq  es  estât  publicat  et  cridat  a  vos  de 
trompa,  que  los  sobreditz  senhors  cossols,  que  la  hora  eron, 
aguezon  et  empetrezo  las  letras  dessus  digchas,  que  aguesso 
fiejra  en  la  viela  de  Bezes  per  tostemps.  Et  sus  aysso  los 
sobreditz  senhors  cossols  feron  gracias,  et  a  votz  de  trompa  las 
crideron  a  totas  vicias  e  castels,  et  a  totz  merchans,  aissi  quan 
se  seq: 

[3  V.]  Premieyramen,  autriam  per  nos  e  per  nostres  suc- 
cessors  cossols,  que  per  tostemps  seraft  en  la  dicha  viela  de 
Bezes,  als  senhors  merchanz,  comprados  et  vendedos  de  Nar- 
bona,  la  Grassa,  Carcassona,  Ljmos,  Fangaus,  Montolieu, 
Vielapencha,  Avinhonet,  Tholosa*,  Sant  Paul,  Sant  Felis, 
Monrial,  Sozere,  Trebes,  Belpuech,  Mazeras,  Pamias,  Mira- 
pejs,  Albi,  Castras,  Sant  Pons  de  Thomieyras,  Sant  Amans  de 
Valthoza,  Lodeva,  Ginhac,  Clarmon,  Montanhac,  Castelnou- 
darri,  Sant  Paragori,  Monpeylier*,  Nemze,  Belcaire,  Vivies, 
Avinho,  Aies,  Aycx,  Tarasquo,  Masselha,  Aurenga,  Carpen- 
tras,  et  de  totz  autres  merchans,  et  de  totz  los  autres  lox  e 
castels,  vielas  et  ciutatz  del  rialme  de  Fransa,  e  de  foras  lo 
rialme  d'on  que  sian,  que  vengan  a  las  fîeyras,  que  nostre 
senhor  lo  -rey  de  Fransa  ha  autreiadas  a  nos  ditz  cossols,  et 
a  la  viela  de  Bezes,  et  a  nostres  successors  perpetualmen,  las 
quais  fieyras  son  e  seran  d'aisi  avan  perpetualmen,  al  xx* 
jour  del  mes  de  may,  am  vi  jorns  prodanamens  enseguens. 

Item  donam  et  autriam  nos  ditz  cossols,  e  nom  de  nos  e  dels 

'  Lp  manuscrit  porte  Thola,  avec  un  tilde  sur  l'o. 
'  Le  manuscrit  porte  Monplr,  avec  un  tilde  sur  le  p. 


i 


40  LE  «  LI»RE  DE  MEMORIAS  » 

autres  successos  nostres  cossols,  que  per  tostemps  seran  en 
la  dicha  viela  de  Bozes,  ;i  totz  mercadies,  comprados  e  ven- 
dedos  dels  lox  sobreditz,  et  de  totz  autres,  quais  quesian,  que 
vengan  en  las  dichas  fieyras  de  Hezes^que  siaii  quittis  e  franx 
de  pagar  deniers  ny  autra  causa,  de  botigas,  de  liegz  e  d'es- 
tacas,  de  un*™  ans  esseguens,  tenguda  la  premiejra  fieyra. 

Item  volem  et  autriam  et  l'iometeni  a  totz  comprados  e  ven- 
dedos,  (tenguda  la  premieyra  fieyra),  qu'els  puesco  totas  las 

horas  que  se  volraii  elej^ir,  mètre  et  establir *  ses  ape- 

lar  nos  ditz  cossols  iij  autres  de  la  viela  de  Bezes,  per  lo 
temps  aveuen,  segon  que  lor  sera  avist  de  far,  et  segon  que 
en  las  autras  iievras  de  Pezcnas  e  de  Montanhac  son  escri- 
nadas. 

Item  volem  et  autriam  iids  ditz  cossols,  e  nom  de  nos  e  de 
nostres  successos,  que  per  tostemps  sei'an,  de  tener  et  de  gar- 
dar  lo  for  de  vis,  de  civadas  et  de^fes  aissi  quan  valra  i  mes 
davan  las  fieyras  de  Bezes. 

Item  volem  et  autriam  nos  ditz  cossols,  et  prometem,  e 
nom  de  nos  et  de  nostres  successors  cossols,  que  per  temps 
seran  de  la  dicha  viela  de  Bezes,  de  encartar,  tener  e  gardar 
Testima  do  las  botigas  que  per  alcus  prosomes  dessus  ditz, 
elegidos  por  las  alas  dois  merclians  avenidos,  sera  fâcha,  els 
bes  de  la  majo  comuna  e  de  la  universitat  de  Bezers  obligar, 
per  las  cauzas  contengudas  en  aquestas  letras  atendre  e  no 
contravenir,  totas  las  horas  que  per  los  sobre  pauzatz  o 
alcus  d'aquelas  alas  no  seran  requistz. 

Item  fam  a  saber  e  manifostani  nos  ditz  vossols,  a  totz  qui 
aquestas  [4  r.]  letras  veyraii,  ([ue  totz  mereadier  que  porte  o 
fassa  portar  draps,  o  aver  de  pes,  o  autras  mercadarias  en 
las  dichas  fieyras,  es  e  sera  quittis  d'intrada,  do  leuda  e  de 
barra,  et  si  tant  es  que  tenga  botiga  e  taula  en  la  dicha  viela 
e  on  las  fieyras  dessus  diclias  de  Bezes,  no  pagara  deguna 
leuda  de  las  mercadaries  que  vendra,  sino  tant  solamen  un  d. 
per  taulier  e  de  botiga  al  rey,  aisi  coma  es  acostumat  en  las 
fit\vras  de  Perenas  e  de  Montanhac  e  en  la  dicha  viela  de 
Bezes.  Et  si  tant  es  que  vendre  no  puesco,  que  cascu  las  ne 
puesca  tornar  vas  son  hostal  ses  pagar  leuda  ny  peratge. 

Ml  y  a  ici  uoe  lacune  d'une  ligne  dans  le  manuscrit. 


DE  JACME    MASCAKO  4  1 

Item  autriam  et  volem  que  las  mercadarias  et  totz  los  autres 
homes  e  femnas,  que  venran  a  las  fieyras  de  la  davan  dicha 
viela  de  Bezes,  seran  quittis  de  pagar  vara  viii  jorns  davan 
las  dichas  fiejTas,  e  viii  jorns  après,  et  aj^tant  quant  las  dichas 
fieyras  duraran.  Et  per  so  que  aquestas gracias  et  promesas  e 
las  autras  cauzas,  en  aquestas  presens  letras  contengudas, 
sian  veras,  e  fermas,  et  estabblas  pei'  tostemps  perpetualmen, 
ses  jamaj  neguna  cauza  franher  ny  amermar, 

Nos  Guilliem  Augie,  Sicart  Roart,  Jolia  Bariejra,  Amalrlc 
Lieura,  Miquel  Folcran,  Johan  Nadal,  Mathieu  Vilar,  cossols 
dessus  ditz  de  la  viela  de  Bezes,  per  nos  et  e  nom  de  nostres 
successors  cossols,  que  per  tostemps  seran  en  la  viela  de 
Bezes,  pausam  lo  sagel  del  coinu  de  la  dicha  viela  de  Bezes 
en  pendent,  de  volantat  et  de  cossentimen  del  cosselh  nostre 
gênerai,  Tan  de  la  nativitat  de  nostre  senhor  Dieu  mil 
cccxLi,  el  ters  jorn  del  mes  de  may. 

[4  V.]  E  en  Tan  mil  cccxi.viii,  la  premiejra  semmana  de 
carema,  comenset  a  Bezes  la  gran  mortalitat,  et  comenset 
Costa  lo  porge  d'en  Sicart  Taborieg,  meicadier,  costa  en  P. 
Peruc,  qu'es  de  pejra  al  cap  de  la  cariejra  franceza,  et 
moriron  totz  los  senhors  cossols,  els  clavaris,  els  escudiers,. 
et  après  tanta  de  gent,  que  de  mil  non  y  remanian  cent. 

En  après  estet  tota  la  majo  comuna  desolada,  que  no  fouc 
home  que  lay  trêves  ny  rodes;  et  va  venir  lo  sen  Guilhem 
Augie  de  Fauiha,  borzes,  et  anet  per  la  viela  parlar  als  hos- 
tals  d'aquels  que  eron  malautes,  e  que  hom  volgues  provesir 
sus  lo  fach  del  cossolat,  et  ajustet  tant  de  bos  homes  quant 
poc  trobar,  et  aneron  far  regens  per  los  cossols,  so  es  a 
saber: 

Sen  Johan  Guitart ,  per  taulas;  sen  Steve  Barba,  per 
mercadiers  ;  sen  Johan  Corregie ,  per  marel  ;  sen  Bernât 
de  Serez,  per  sabatiers;  sen  Ramon  Hue,  per  aludies;  sen 
Steve  Portai,  per  lahorayres. 

E  van  elegirque  fos  lur  escudier  Jacme  Mascaro. 
Pus  van  elegir  clavaris,  a  xx  de  may,  coma  regisson  : 

Sen  Aymerie  Barbât,  per  taulas;  sen  Olivier  Paulinha, per 
pararia  ;  sen  Guilhem  Raynes,  per  lahor. 

[5  r.]  Et  van  levar  una  talha,  que  era  endicha  per  los 
senhors  cossols,  que  mortz  eron,  que  valie  lo  d.  vi  sols. 


«2  LE    w  MBKK    DK    MEMOHIAS  » 

Pu3  feron  caritadies  mages  : 

Sen  B.  Guitart,  per  taulas  ;  sen  Razols  Sira,  per  merca- 
Hier3;8en  B.  Olivier,  per  mesies:  sen  Guilhem  Roma.  per 
lahorayres. 

Et  feron  encantajres  lo  jorn  que  mossen  P.  Desmas  moric, 
et  aiso  fouc  a  xxiiii  de  may,  davan  la  porta  mage  de  Sant 
Felis  : 

Vices  Cruvelier,  Steve  Raynaut,  Berihomieu  Bonafos. 

L'an  MCCCXLviiiJo  jorn  de  sant  Andrieu,  que  era  dimergue, 
se  va  endevenir  que  lo  comte  dWrmanhac,  que  era  adonx  loc- 
tenen  del  rej  nostre  senhor  en  Lengadoc,  venc  aBezes;  et 
I  cavalier  seu  s'en  anet  deportar  al  bore  del  Rejforas  los  murs, 
et  anet  en  una  cariejra  près  del  bordel,  en  que  avia  una 
novia,  en  que  balavon  e  dansavon.  El  cavalier  regardan  lur 
estât,  van  li  dir  que  s'en  ânes.  El  cavalier  no  s'en  vole  anar, 
et  els  van  lo  batre  etnafrar  ;  el  cavalier  va  s'en  anar  al'ostal 
del  comte,  de  que  lo  comte  ne  fouc  trop  corrossat.  Et  mandet 
que  aquels  que  ho  avian  fach  fosson  près,  e  que  s'en  feres  jus- 
ticia.  Et  va  lo  hom  mettre  a  la  cort,  e  fouc  jujat  a  pendre. 
May  lo  poble  menut  se  va  escomoure,  et  aneron  a  la  cort,  e 
van  dir  que  aquel  que  era  jujat  a  pendre  lo  laycesson  anar, 
sino  els  romperon  las  portas  de  la  cort.  Et  la  una  partida 
[5  v.]  de  las  gens  aneron  a  la  hostalaria  del  comte,  et  van  li  dir 
que  feres  revocar  la  sentencia,  e  lur  bayles  lo  prionier,  sino 
que  pesses  de  mori.  El  comte  mandet  a  la  cort  que  tantost 
lur  fos  baylat. 

Ben  valgra  may  non  ho  aguesso  fach,  que  pueysas  ne 
foron  pendutz  trops,  et  aquel  que  ho  avia  fach  no  perdet  may 
lo  ponh. 

L'an  McccxLix  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Bigot,  per  taulas;  sen  Guilhem  Escardavilha, 
per  mercadies;  maystre  P.  Pastre,  per  notaris;  sen  Jacme 
Betinha,  per  marel  ;  sen  Nicholau  Pojol,  per  mersies;  sen 
B.  Rog,  per  coyraties;  sen  Guilhem  Capelie,  per  orgies,  e 
moric  aquel  an.  Els  senhors  cossols  feron  sonar  lo  gros  cen 
de  Sant  Nazari. 

[6  r.]  Foron  clavaris  : 

Sen  Razols  Sira,  per  mercadiers  ;  maystre  Miquel  Sedel, 
per  notaris;  sen  Pey.  Segui,  per  messiers;  sen  P.  Gavasto, 


DE   JACME    MASCARO  4  3 

per  coyratiers. 

Et  feron  de  talha  en  aquel  an  x  sols  per  denier. 

Foron  caritadiers  : 

Bernât  de  Badonas,  per  taulas  ;  Jacme  Vaniejra,  per  mer- 
cadiers;  Benezeg  Bru,  per  marel  ;  Bernât  Amielh,  per  coyra- 
tiers. 

[6  V.]  L'an  mcccl  foron  cossols  : 

Sen  Guilhem  Augie  de  Fauiha,  per  taulas  ;  sen  Razols  Sira, 
per  mercadiers  ;  sen  Esteve  Emengau,  per  pararia;  sen  Johan 
Cotelier,  per  peliciers;  sen  Pons  Ros,  per  sabatiers  ;  sen 
Esteve  Sabatie,  per  molinies  ;  sen  Johan  Cortinals,  per  lahor^ 

Foron  clavaris  : 

Hue  Cabot,  per  taulas;  Ramon  Gayschac,  per  mercadiers  ; 
Ramon  Yslan,  per  lahor. 

[7  r.]  Feron  aquel  an  de  talha  per  testa  i  fiori. 

Pus  per  denier  ii  sols. 

Pus  per  denier  m  sols. 

Pus  per  denier  m  sols,  et  v  sols  per  testa. 

Foron  caritadiers  : 

Guilhem  Audi,  per  taulas;  Johan  Benezeg,  per  mercadiers; 
maystre  Bernât  Cornelh,  per  notaris  ;  Johan  Visme,  per 
pelicies. 

L'an  sobredich,  lo  jorn  de  sant  Berthomieu,  moric  lo  rev 
de  Fransa,  que  avia  nom  mossen  Philip  de  Valoys.  Dieu  del 
cel  li  aia  la  sua  arma. 

[7  V.]  L'an  mccou  foron  cossols  : 

Mesier  Guilhem  Morut,  per  taulas;  sen  P,  Astrebo,  per 
mercadiers;  sen  Guilhem  Rossilho,  per  niarel;  sen  B.  Abelha, 
per  messiers  ;  sen  P.  Bonct,  per  fabres;  sen  Ramon  Folcran, 
per  lahor  ;  sen  Johan  Baudriga,  per  sabatiers,  et  moric  cossol. 

Foron  clavaris  : 

Johan  Benezeg,  per  mercadiers  ;  Ramon  Ortz,  per  saba- 
tiers; Johan  Andrieu,  per  messiers;  Bernât  Rajnes,  per  fa- 
bres. 

[8  r.]  Foron  caritadiers  : 

Brenguie  Augie,  per  taulas  ;  Pons  Amielh,  per  mercadiers; 
Ramon  Navar,  per  mesiers;  Pey.  Ramon  Revel,  per  fabres. 

Aquel  an  feron  de  talha  per  testai  fiori. 

Pus  per  denier  i  seyre  d'escut. 


4  4  LE    «  LIRUE   DE    MEMOHIAS  » 

Pus  per  denier  i  ters  de  floi'i.  ^ 

I/an  sobredich,  fouc  una  gran  qiiestio  entre  la  cortde  Car- 
cassona  et  la  cort  de  Bezes,  so  es  a  saber,  que  per  manda- 
men  de  mossenbor  lo  senescalc  de  Carcassona,  venc  a  Bezes 
majstre  Ramon  Rogie  per  comossari,  e  ben  xii  sirvens  de 
Carcassona,  per  trajre  alcus  sirvens  riais,  que  se  dirie  que 
avian  fach  una  gran  enjuria  al  jutge  de  crims  de  Carcassona. 
El  dig  mossenhor  senescalc,  volen  far  justicia,  volia  que  lo 
dich  coméssari  les  ne  gites  de  la  cort  de  Bezes,  els  ne  menés 
a  Carcassona.  E  sobre  aisso,  los  senhors  cossols  de  Bezes 
foron  requitz  que  lor  [8  v.]  plagues  que,  per  la  vertut  dels 
privilèges  qu'els  avian  de  nostre  senbor  lo  rej,  qu'els  no  sos- 
tenguesso  que  la  cort  de  Carcassona  non  los  trenquesso,  quar 
els  volian  que,  si  els  agucsso  res  fuch,  que  la  cort  de  Bezes  ne 
feres  justicia.  Els  senhors  cossols,  veren  et  regardan  la  enju- 
ria, van  perpenre  la  dicha  causa,  el  quas  que  los  ditz  prioniers 
aguesso  fâcha  causa  mal  a  ponch,  que  lo  dig  mossenhor  senes- 
calc ne  feres  justicia,  quant  se  vengra  a  las  siras,  en  aisi 
coma  lo  cosselh  de  la  cort  de  Bezes  ordenera. 

L'an  MCCCLii  foron  cossols  : 

Sen  Frances  Bofat,  per  taulas  ;  sen  Andrieu  Astrebo,  per 
mercadies  ;  sen  Olivier  Paulinha,  per  pararie;  sen  Guilhem 
Boq,  per  notaris  ;  sen  Bernât  Rog,  per  coyratiers;  sen  Johan 
Gangi,  per  policiers;  sen  Augie  Nicholau,  per  fustiers. 

[9  r.]  Foron  clavaris  : 

Sen  Guilhem  de  Badonas,  per  taulas  ;  sen  Foie  Girona,  per 
pararie  ;  sen  Ramon  Boquet,  per  fustiers. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  d.  mieg  flori. 

Pus  per  denier  i  quart  de  flori. 

Pus  per  testai  flori,  et  i  quart  de  flori  per  denier. 

Aquel  an  valc  lo  carto  del  vi  i  gros. 

Foron  carrayries  : 

Sen  B.  de  Badonas,  per  taulas  ;  sen  P.  Boquie,  per  merca- 
diers  ;  sen  Guilhem  Duran  Sicart,  per  parayres  ;  sen  G". 
Marti,  per  fustiers. 

[9  V.]  Foron  caritadies  : 

Sen  Ramon  Brenguie,  per  taulas;  sen  Esteve  Barba,  per 
mercadies  ;  majstre  Guilhem  Salât,  per  notaris. 

Aquel  an  comenset  la  pladeiaria  d'Aygas  Mortas. 


DE  J'ACMK    MASCARO  4  5 

Et  en  ^quel  an  meteis,  lo  dimecres  davan  nadal,  fouc  près 
Sant  Anthoni  per  lo  captai  de  Bucg,  que  era  engles. 

Lo  senhor  de  Sant  Guiraut  es  tengut  de  pagar  casciin  an, 
a  la  festa  de  Totz  Santz,  al  cornu  de  Bezes  xxx  sols.  Près  ne 
carta  maj'stre  B.  Pons,  alias  Sabatier,  notari  rial,  Tan  mccclii, 
a  XXV  del  mes  de  jun. 

L'an  MCCCLII,  a  xxv  de  jun,  feron  donacio  als  senhors  cos- 
sols  de  Bezes  e  a  tota  la  nniversitat  totz  aquels  que  son  en 
aquest  cartel  escrigz,  so  es  a  saber  de  la  parso  que  avian  en 
la  fon  del  mercat  de  Bezes,  aisi  quant  se  conte  en  las  notas 
de  majstreB.  Pons  Sabatie,  notari  rial  : 

[10  r.]  Lo  sen  Johan  Bigot,  borzes,  i  carto  d'ayga, 

Sen  P.  Cabot,  mercadior,  m  cartos, 

Sen  Guilhem  Honelha,  fustie,  v  cartos  e  mieg,  a  xxvi  de  jun, 

Mossen  Guiraut  Buadela,  ix  cartos,  quar  el  ne  cantava  en 
la  capela  de  la  Majre  de  Dieu  de  la  INIagdaleria,  quar  lo  sen 
P.  Aludie  laj  donet,  [)er  so  que,  pregues  Dieu  per  l'arma  de 
si  e  de  sos  pajros  ; 

Sen  P.  Ginieys  hj  remes  tôt  lo  dreg  que  y  avia; 

Sen  Jacme  Bedos,  parajre,  y  remes  ii  quartes  que  y  avia. 

L'an  MCCCLiii  foron  cossols  : 

Sen  Cabot  Cabot  %  per  taulas;  sen  P.  Raynols,  per  merca- 
dies;  sen  Johan  Coregie,  per  raarel  ;  sen  Brenguie  Laures, 
per  sabaties  ;  sen  Johan  Garnit,  per  aludies  ;  sen  Johan 
Rossel,  per  peyralies  ;  sen  Guilhem  Roma,  per  lahor. 

[10  V.]  Foron  clavaris  : 

Jacme  Vanuieyra,  per  mercadiers;  Peyre  Thomas,  per  sa- 
baties; Ramon  Hue,  per  aludies  ;  Johan  Costans,  per  peyra- 
liers. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  testa  mieg  escut,  et  i  quart 
d'escut  per  denier. 

Pus  mieg  escut  per  testa,  e  i  quart  d'escut  per  d. 

Pus  una  talha,  ad  ops  dels  murs,  vi  d.  per  d.,  et  levet  se 
per  XV  sempmanas. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Johan  Raynaut,  per  marel  ;  Peyre  Romieu,  per  lahor; 
Bernât  de  Badonas,  per  taulas. 

*  Le  mot  est  répété  dans  le  manuscrit. 


4  6  LE    «  LIBRE    DE   MEMORIAS  » 

[11  r.]  Foron  carriejries  : 

Guilhem  Audi,  per  taulas  ;  Peyre  Cabot,  per  mercadies  ; 
Peyre  Segui,  per  mesies  ;  Ramon  Vilar,  per  peyralies. 

ForoD  caritadiers  : 

Guilhem  de  Badonas,  per  taulas  ;  Ramon  de  Mars,  per  mer- 
cadiers;  Johan  Baudriga,  persabaties;  Jacme  Betinha,  per 
marel. 

Aquel  an  fouc  mes  seti  davan  Sant  Anthoni,  per  lo  comte 
d'Armanhac,  lo  dimergue  davan  Cararaantran,  quar  los  En- 
gles,  dels  quais  era  capitanis  lo  captai  de  Bucg,  avian  près 
lo  dig  loc,  e  lo  tengro  entro  près  de  Sant  Miquel,  que  lo  de- 
zamparero  de  lur  bon  grat,  e  s'en  aneron  en  Bordales  *. 

[11  V.]  Aquel  an  meteis,  intret  mossen  Hue,  evesque  de 
Bezes,  et  intret  al  portai  de  la  costa  del  pon.  Els  senhors 
cossols  van  far  claure  lo  lo  ^  dich  portai,  entro  que  agues 
jurât  las  libertatz  e  las  franquezas  de  la  viela;  e  Tarcivesque 
de  Narbona,  son  frajre,  va  li  dir  que  levés  la  ma  sus  aut  al 
portai  en  senhal  de  juramen,  a  un  del  mes  de  maj.  Près  ne 
carta  maystre  Esteve  Vices,  et  maystre  Johan  de  Camplonc. 
Et  aquel  jour  fes  sobre  gran  freg  e  sobre  gran  ven,  qu-e  toni- 
bavan  los  teules  dels  hostals,  que  hom  non  aura  va  anar  per 
cai'ieyras. 

L'an  MCCCLiui  foron  cossols  : 

Messie  Pons  Peyre,  per  taulas;  sen  Jacme  Vanieyra,  per 
mercadiers;  sen  Duran  Sicart,  per  pararie  ;  sen  Peyre  Tho- 
mas, per  sabaties;  sen  Johan  Rial,  per  policiers  :  sen  Ramon 
Yrlan,  per  lahor;  sen  Johan  Seinhier,  per  fabres.  Mays  fouc 
y  mes  coma  regen  per  sen  [12  r  1  Pey.  Revel,  que  los  notaris, 
quant  venc  a  la  cort  per  far  lo  sagramen,  los  ditz  notaris  li 
aneron  enpauzar  alcus  crims,  de  que  el  no  dévie  esser  cossol. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Brenguie  Bertran,  per  taulas  ;  sen  Johan  Folcran,  per 
pararie  ^  ;  sen  Ramon  Geli,  per  lahor. 


*  Cet  alinéa,  à  partir  de  lo  diuienjue  davan..,  jusqu'à  en  Bordales  est 
écrit  d'une  autre  main. 

^  L'article  est  répété  dans  le  manuscrit. 

3  Le  mot  Folcran  a  été  écrit  par  une  autre  main,  la  même  qui  a  etîacé  le 
mot  pararie  écrit  deux  fois. 


DE  JAGME    MASGARO  47 

Feron  de  talha  en  aquest  an  i  quart  d'escut  per  d. 

Pus  I  autre  quart  d'escut  per  d. 

[12  V.]  Foron  carrieyries  : 

Hue  Cabot,  per  taulas  ;  Peyre  Genieys,  per  mercadies  ; 
Ramon  Jori,  per  parayres  ;  Ramon  Ortz,  per  sabaties. 

Foron  caritadies  : 

Ymbert  de  Montadi,  per  taulas  ;  Peyre  Esteve,  per  mer- 
cadies ;  maystre  Bernât  Cornelh,  per  fabres  ;  Johan  Cote- 
lier,  per  pelicies. 

[13  r.]  Foron  ievayres  de  bans  : 

Peyre  Cabot,  per  mercadies  ;  Johan  Baudriga,  per  saba- 
ties ;  Maystre  Santz,  per  fabres  ;  Brenguie  Bayle,  per  pelicies. 

En  aquest  an  cremet  lo  cloquier  de  Sant  Nazari,  so  es  a 
saber  la  nueg  de  nadal. 

Aquel  an  meteys  foron  fâchas  justas  lo  jorn  de*  Caraman- 
tran,  que  tenie  la  taula  maystre  Pey.  Fabre,  el  castela  de 
Cesseno,  en  que  era  mossen  Hue  d'Archas,  et  mossen  Sicart 
de  Murvielh,  e  Guilhem  de  Mezo,  que  tenc  taula  a  ^  Celas  Raras 
Tendema,  e  se  portet  mot  noblamen  et  esperta  et  a  Celas 
Cubas  et  a  Celas  Razas,  de  que  Lac  gran  renom.  Dieus,  per 
sa  dossa  piatat,  aia  merce  de  la  sua  arma^. 

[13  V.]  L'an  mccclv  foron  cossols  : 

Sen  Bernât  Guitart,  per  taulas;  sen  Daunis  Serinha,  per 
mercadies;  sen  Benezeg  Bru,  per  marel;  maystre  Ramon 
Bertran,  per  notaris  ;  sen  Pey.  Gavasto,  per  coyraties;  sen 
Johan  Andrieu,  per  messies  ;  sen  Bernât  Salvayre  per  orgies. 
El  dich  sen  Bernât  Salvayre  se  va  rebellar  contra  lo  cossolat, 
per  que  li  feron  despolhar  las  raubas  tro  que  se  fos  reconce- 
liat,  car  el  era  de  la  partida  dels  Reformados. 

Foron clavaiis  : 

Sen  Johan  Esteve,  per  mercadies  ;  maystre  Guilhem  Roma, 
per  notaris  ;  sen  Jacme  Bernât,  per  coyraties  ;  sen  Johan 
Emengau,  per  mesies. 


1  Où  avait  d'abord    écrit  e7i  tovn.  Ces  mois  ont  été  rayés  et  remplacés 
par  les  mots  lo  jorn  de  écrits  au-dessus  de  la  ligne  par  une  autre  main. 

2  Le  mot  a  a  été  ajouté  en  surcharge  par  une  autre  main. 

3  La  fin  de  l'alinéa  à  partir  de  Vendema  est  d'une  autre  main,  la  même 
«jui  a  fait  les  corrections  mentionnées  dans  les  deux  notes  précédentes. 


18  Î.K    «   r.lBHK    DE    MKMOKIAS   » 

[14  r.]  E  feron  de  talha  per  denier  i  ters  de  flori.  Pus 
per  denier  i  quart  de  flori.  Pus  ad  ops  dels  murs  i  quart  de 
gros.  Et  no  se  levet  majs  per  vi  sempmanas. 

Foron  levajrcs  de  bans  : 

Sen  P.  Estaci,  per  taulas  ;  Ramon  Gaudel,  per  marel  ; 
Guilhem  Trencavelli,  per  orgies. 

Foron  carajries  : 

Ramon  Cotelier,  i)cr  tanlas  ;  Veria  Scrinha,  per  mcrcadies  ; 
maystre  Guilhem  Revel ,  per  notaris  :  Jacme  Vidal,  per 
mesies. 

[14  v.J  Foron  caritadiers  : 

Sen  Hue  Cabot,  i)er  taulas  ;  sen  Ramon  Gayschac,  per 
mercadies  ;  sen  Pons  Veria,  per  cojraties  ;  sen  Jolian  Cor- 
regie,  per  marel. 

L'an  MCCCLV,  davan  las  Totz  Sanz,  venc  en  aquest  pays  lo 
princep  de  Galas.  E  vengueron  los  coredos  entro  a  Bezes. 
Mais  quant  el  saup  que  en  Bezes  avia  grans  gens  d'armas,  no 
vole  pus  avant  passar  ;  e  venc  ta  grau  neu  que  si  no  s'en 
fos  tornat,  non  y  aguera  engles  no  fos  remangut  en  las 
plassas. 

[15  r.]  L'an  mccclvi  foron  cosï^oIs  : 

Sen  Razols  Sira,  per  l'escala  de  taulas  ;  sen  P.  Astrebo, 
per  mercadies  ;  sen  Foie  Girona,  per  pararie  ;  sen  Ramon 
Ortz,  per  sabaties  ;  sen  P.  Aymoy,  per  pelicies  ;  sen  Esteve 
Sabatie,  per  monies  ;  sen  Jolian  Cortinals,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Aymeric  Barbât  vielli,  per  taulas  ;  Guilhem  Mauri,  per 
pararie  ;  Peyre  Bragayrie,  per  laor. 

[15  V.]  Feron  de  talha  en  aquest  an  davan  dich  mieg  flori  per 
denier.  Pus  per  denier  i  flori. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Veria  Serinha,  [/er  mercadies;  Johan  Bial,  per  pelicies  ; 
Brenguie  Laures,  per  sabaties. 

Foron  caritadies  : 

Peyre  Boquie,  per  mercadies;  Ramon  de  Puzac,  per  peli- 
cies ;  Esteve  Gautier,  per  monies  ;  Ramon  Yrlan,  per  lahor. 

[16  r.]  Foron  carrieyries  : 

Ramon  Cotelier,  per  taulas  ;  Jacme  Gautaroia,  per  merca- 
dies ;  Peyre  Boyer,  per  parayres  ;  Bernât  Miralhie,  per 
sabaties. 


DE  JACME   MASCARO  49 

L'an  dessus  dig  mccclvi,  a  viii  del  mes  de  setembre,  fouc 
près  nostre  senhor  lo  vey  de  Fransa,  que  avie  nom  mossen- 
hor  Johan.  Et  aisso  davaii  la  viela  de  Pe;yties,  don  ne  fouc 
tût  lo  rialme  en  tristor.  Et  près  lo  en  batalha  rengada  lo 
princep  de  Galas,  filh  del  rey  d^Anglaterra,  e  pueys  menet 
Ion  en  Anglaterra. 

Aquelanmezeis  c'omenset  hom  a  bastir  la  muralha  de  Bezes. 
Els  capitols  de  las  glieysas  et  totz  los  autres  clergues  comen- 
seron  a  pagar  a  las  dichas  muralhas. 

Pus  en  aquel  an  se  comenseron  a  mètre  e  enpauzar  las 
imposicios  sus  totas  las  mercadarias,  las  quais  emposicios 
foron  autreiadas  al  cornu  per  lo  rey  nostre  senhor,  o  son 
loctenen,  en  ajutori  de  bastir  la  muralha  ;  e  las  dichas  empo- 
sicios montavan  gran  soma  ^ 

[16  V.]  E  foron  clavaris  dels  ditz  murs,  que  jamay  non 
avie   fag   pus  lo  cossolat  : 

Sen  Peyre  Amielh,  canabasier;  sen  Nicholau  Pojol,  espe- 
ciayre  ;  sen  Andrieu  Galhart,  lahorayre. 

La  venue  desjuifz^ 

L'an  dessus  dig  mccclvi,  venguero  a  Bezes  los  jurieus  en 
tal  ponch,  que  despueys  en  sa  la  viela  ny  los  castelsno  ferem 
nostre  pro. 

[17  r.]  L'an  mccclvii  foron  cossols  : 

Mesie  Bertran  Andrieu,  per  taulas  ;  sen  Ramon  Gaysac, 
per  mercadies  ;  sen  Ramon  Gaudel,  per  marel  ;  sen  Johan 
Baudriga,  per  sabaties  ;  sen  Nicholau  Pojol,  per  mesies  ; 
sen  Andrieu  Galhart,  per  laor  ;  sen  Guilhem  Fabre^,  per 
fabres. 

Foron  clavaris  : 

Esteve  Desmas,  per  mercadiers  ;  Jacme  Vidal,  per  mesies; 
Bernât  Redorta,  per  sabaties. 

]17  V.]  Feron  de  talha  aquel  an  i  flori  per  denier. 

•  La  fia  de  l'alinéa  à  partir  de  las  quais  emposicios  est  d'une  autre  main. 

*  Cette   ligne  a  été  écrite  après   coup,  bien  postérieurement  au  reste  du 
manuscrit. 

^  Le  mol  est  répété  dans  le  maouscrit. 


4,.     ■ 


50  LE    a  LIBRE    DE   MExMORIAS  » 

Pusters  de  flori  per  dénie. 

Pus  ad  ops  dels  murs  i  gros  per  d.,  e  levet  se  per  vi  meses. 

Foron  levajres  de  bans  : 

Hue  Cabot,  per  taulas  ;  Benezeg  Bru,  per  marel  ;  Johan 
Cortes,  per  laor. 

Foron  caritadies  : 

Brenguie  Augie,  per  taulas  ;  Daunis  Serinha,  per  merca- 
dies  ;  Jaome  Majstre,  per  marel  ;  Pons  Ros,  per  sabaties. 

[18  r.]  Foron  carrieyries  : 

Guilhem  de  Badonas,  per  taulas  ;  Jacme  Vanieyra,  per 
mercadies  ;  Bernât  Abelha,  per  mesies  ;  Ramon  Garoti,  per 
fabres. 

L'an  dessus  dig  mccclvii,  fouc  trames  sen  Johan  Bigot, 
})orzes,  per  embaj'sador,  am  lo  sen  Johan  Servia,  parajre  de 
Bezes,  al  rey  de  Fransa  nostre  senhor,que  era  près  en  Engla 
terra. 

[18  V.]  L'an  mccclviii  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Bigot,  per  taulas  ;  sen  P.  Raynols,  per  merca- 
dies ;  sen  Guiraut  Blanquier,  per  parayres  ;  sen  Johan  Cote- 
lier,  per  pelicies  ;  maystre  P.  Fabre,  per  notaris  ;  sen  Ramon 
Boquet,  per  fusties  ;  sen  Bernât  Rog,  per  coyraties. 

E  feron  raubas  la  i  partit  de  vay. 

Foron  clavaris  : 

Guilhem  Audi,  per  taulas  ;  Ramon  Guiraut,  per  pararie  ; 
Johan    Pastre  pus  vielh,  per  fusties. 

[19  r.]  E  feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  ters  de  flori. 

Aquel  an  se  leveron  los  portais  de  la  viela  de  Bezes,  e  se 
caveron  las  cavas. 

Aquel  an  meteis  passet  a  Bezçs  lo  cardenal  de  Boluenha. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Andrieu  Gaso,  per  taulas;  Benezeg  Bru,  per  marel  ;  Ramon 
Yrlan,  per  lahor. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Cotelier,  per  taulas  ;  Jacme  Lombart,  per  merca- 
daria  ;  Peyre  Pelegri ,  per  fusties  ;  Peyre  Bechier,  per 
messies. 

[19  V.]  Foron  caritadies  : 

Hue  Cabot,  per  taulas  :  Esleve  Fabre,  per  mercadies  : 
Guilhem  Rossilho,  per  marel  ;  Bernât  Miralhier,  per  saba- 
ties. 


DE  JACME   MASCARO  51 

Aquel  an  comenset  hom  a  far  las  cossieyras  dels  murs  de 
Bezes,  tôt  entorn  la  viela,  e  comenseron  a  plareiar  am  los 
clercz. 

[20  r.]  L*an  dessus  mccclviii,  fouc  mot  gran  descencio 
entre  los  senliors  cossols  de  Bezes,  mossen  Tibaut  de  Bar- 
bara, raossel  senesjalc  de  Carcassona,  lo  jutge  mage,  lo 
jutge  de  crims,  lo  avocat  del  rey,  el  procurajre  del  rej. 
Totz  aquestz  officiers  de  Carcassona  foron  requisitz  per  los 
ditz  senhors  cossols,  que  venguesson  jurar  las  libertatz  e 
franquezas  o  privilèges  de  la  viela.  Et  els  recuran  qu'els  non 
ho  volian  far,  los  sobreditz  senhors  cossols  agueron  letras  del 
rey  de  Franssa  nostre  senhor,  que  fosson  totz  aquetz  officies 
ajornatz  davan  lo  rey.  Et  els,  vezen  Tajornamen,  volgron 
far  lo  dig  sagramen  non  pas  dins  la  viela  de  Bezes.  Et  sus 
aiso  mossenhor  Tarcivesque  de  Narbona  e  Tavesque  de 
Bezes  van  s'en  entremetre,  et  van  ne  parlar  al  dig  mossenhor 
senescalc  et  als  autres  officies  de  Carcassona,  e  van  los  ditz 
senhors  oberi,  e  feron  totz  lo  sagramen.  Près  ne  carta 
maystre  Frances  Causenuejols,  notari  rial  de  Bezes.  dedins 
la  viela  de  Narbona. 

[20  V.]  L'an  mccclix  foron  cossols  : 

Sen  Brenguie  Augie,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Gautaroia, 
per  mercadies  ;  sen  Johan  Coregie,  per  marel  ;  sen  Pons 
Ros,  per  sabaties  ;  sen  Johan  Garnit,  per  aludies  ;  sen 
Mathieu  Lombart,  per  peyralies,  e  mori  aquel  an  cossol  ; 
sen  Johan  Folcran,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Pons  Amielh,  canabassie  ;  Ramon  Vielar,  per  peyralies  ; 
Argant  *  Barrieyra,  per  sabaties;  Symon  Savayda,  per  alu- 
dies. 

[21  r.]  Feron  de  talha  aquel  an  m  quartz  de  flori  per  denier. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas  ;  Beneze^:  Bru,  per  marel  ;  Ramon 
Yrlan,  per  lahor. 

Foron  caritadies  : 

Sen  Hue  Cabot,  per  taulas;  sen  Esteve  Fabre,  per  merca- 

*  Ce  nom  remplace  Bernât,  écrit  d^abord  et  exponclué.  Avgant  est  au- 
dessus  dans  Vinterligae. 


52  LE    a   LIBRE   DE   MKMORIAS  » 

dies  ;    sen    Guilhem   Rossilho,  per    marelies  ;    sen   Bernât 
Miralhie,  per  sabaties. 

[21  V.]  Foron  carrayries  dediiis  la  viela  : 

Ramoii  Cotelier,  per  taulas  ;  Jacme  Lombart,  per  merca- 
dies  ;  Peyre  Bechie,  per  messies;  Pons  Vit4ar,  per  peyra- 
lies. 

Aquel  an  los  clergues  de  las  gliejas  de  Bezes,  de  voluntat 
de  lur  capitols,  so  es  a  saber  :  del  capitol  de  Sant  Nazari  e  de 
totz  los  senhors  canoiiges,  del  capitol  de  Sant  Afrodisi,  e  de 
Tabat  de  Sarit  Jacme*,  et  de  totz  los  canorgues,  el  prior  de 
Cassa  ^  e  de  totz  los  canorgues  de  Cassa,  e  la  viela  de  Bezes 
am  totz  son  cosselh  ancron  mètre  en  compromes  lo  débat  et 
questio,  que  era  entr'els  ^ ,  en  los  honorables  senhors  cosse- 
Ihiers  de  mossenhor  lo  comte  de  Peyties,  aisi  cum  fo  mossen 
Pey.  de  Carato,  cavalier,  e  mossen  R.  la  Roqua  d'una  part, 
e  mossen  R.  Barot,  canonge  de  la  glieya  de  Sant  Just  de 
Narbona,  e  a  maystre  R.  Malpel  e  al  sen  P.  Dorimnis, 
merchan  de  Narbona,  et  en  lo  sen  Pey.  del  Lac,  cossols  de  la 
viela  de  Narbona.  E  van  ordenar  que  los  senhors  de  las 
glieyas  dessus  nommadas  paguosson  lo  fach  de  la  muralha 
de  so  que  era  fach  nys  feres  per  tostemps,  très  melia  tioris 
0  dos  cens  floris  ;  e  que  d'aqui  avan  non  aguesso  pus  des- 
cencio. 

Item  may  ordenero  que  el  quas  que  d'aqui  avan  agues  res 
a  far,  tant  a.pons,  a  fons,  quant  a  mais  passes,  que  paguesso 
la  novena  part  de  tôt  quan  costera.  Près  ne  carta  maystre  R. 
Bertran  o  maystre  Bernât  Agel,  notaris  riais*. 

[22  r.]  I/an  mccclx  foron  cossols  : 

Mesie  Bernât  Garra,  per  taulas  ;  sen  Peyre  Cabot,  per 
mercadies,  et  mori  cossol  en  la  viela  de  Monpeylier  ;  sen 
Johan  Servia,  per  pararie  ;  sen  Pey.  Thomas,  per  sabaties  ; 

'  Le  mot  Jacme  est  rayé,  et  au-dessus  est  écrit  un  mot  à  demi  effacé  et 
illisible. 

*  Les  mots  de  Cassa  sont  écrits  en  surcharge  dans  l'interligne. 

^  Les  mots  en  compromes  lo  débat  et  questio  que  era  etitr'els  sont  en 
renvoi  dans  la  marge  du  manuscrit,  à  droite. 

*  En  face  de  cet  alinéa  il  y  a  dans  la  marge  du  manuscrit,  à  gauche,  uoe 
main  grossièrement  dessinée,  au-dessus  de  laquelle  sont  écrits  les  mots  :  de 
la  fontayna. 


DE  JACME   MASGARO  53 

sen  Johan  Cabrajressa  per  canabassies.  Et  aquest  an  comen- 
sero  aver  cossol  que  encaras  non  avian  ahut,  et  agron  lo 
que  los  pelicies  los  aqulhiro. 

Sen  Bernât  Rajnes,  per  fabres  ;  sen  Ramon  Gili,  per 
lahor. 

Foron  clavaris  : 

Ajmeric  Estaci,  per  taulas  ;  Pejre  Mauri,  per  parajres  ; 
Guilhem  Pages,  per  lahor. 

Feron  de  talha  per  denier  m.  franc. 

Pus  per  denier  autre  mieg  franc. 

[22  V.]  Foron  levajres  de  bans  : 

Jacme  Lombart,  per  mercadies  ;  mesie  Jaques  Qoch,  per 
canabasies  ;  Griiilhem  Fabre,  per  fabres  ;  Bernât  Miralhie, 
per  sabaties. 

Foron  caritadies  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas  ;  Daunis  Serinha,  per  mercadies  ; 
Peyre  Segui,  per  canabassies  ;  Pejre  Fabre,  per  lahor. 

[23  r.]  Foron  carrajries  : 

Jacme  Botho,  per  taulas  ;  Pons  Amielh,  per  mercadies  ; 
Bernât  Promit,  per  parajres  ;  Bernât  Arnaut,  per  sabaties. 

Aquel  an  dessus  dich  se  cpmenset  à  far  lo  compes,  mais  los 
grans  rix  homes  de  la  viela  non  lo  layssero  aternir,  ny  vol- 
gro  que  se  feres,  per  sso  que  hom  no  saupes  lur  estât. 

[23  V.]  L'an  mccclxi  foron  cossols  : 

Sen  Brenguie  Bertran,  per  taulas  ;  sen  Ramon  Gajschac, 
per  mercadies,  e  mori  estan  cossol  ;  sen  Benezech  Bru,  per 
mazel,  e  mori  estan  cossol  ;  sen  Pons  Veria,  per  coiraties  ; 
maistre  Esteve  Vices,  per  notnris  ;  sen  Pey.  Massas  per 
messies,  e  mori  estan  cossol  ;  sen  Arnaut  Fornie,  per  orgies. 

Foron  clavaris  : 

Pejre  de  Badonas,  per  mercadies  ;  maistre  Bernât  Sebeli, 
per  notaris  ;  Peyre  Gaubart,  per  mesies  ;  Johan  Marti,  per 
coyrafies. 

Feron  de  talha,  per  d.  i  franc. 

[24  r.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Sen  Jacme  Botho,  per  taulas  ;  sen  Peyre  Arnaut,  per 
orgies  ;  sen  Peyre  Acde,  per  marelies. 

Foron  carayries  : 

Ramon  Cotelie,  per  taulas;  Esteve  Fabre,  per  mercadies  ; 

4 


à 


54  LE    «  LIBRE    DE    MEMORIAS  » 

maystre  Guilhem   Revel,  per    notaris  ;  Ramon   Massas,  per 
messies. 

[24  V.]  Foron  caritadies: 

Arnaut  Barbât,  per  taulas  ;  Johan  Esteve,  per  mercadies  ; 
Guilhem  Rossilho,  per  marel  ;  Brenguie  Cambavielha,  per 
coiraties. 

ËQ  aquel  an  dessus  dicli  fouc  fâcha  la  portalieira  nova  de 
la  majo  comuna. 

Item  aquel  an  mezeis  feq  hom  genz  d'armas  per  estar  en- 
establida  contra  Gassiot  del  Castel,  que  era  engles,  lo  quai 
avie  près  en  carema  per  escala  lo  luoc  de  Cesseras*. 

Pus  aquel  an  mezeis  Vf  ne  el  pais  de  Lengadoc  lo  comte  de 
Tustaraera,  que  era  frayre  del  rey  de  Castela. 

Pus  en  quel  an  venc  en  lo  dich  pais  mossen  Segui  de  Bada 
fol,  que  era  engles,  et  près  lo  luoc  de  Frontinha. 

Mays  non  triguet  gaire  que  la  vigarie  de  Bezes  y  anet 
provesir,  et  fes  motas  de  genz  d* armas  tant  que  gaires  no  y 
esteron,  e  los  feron  passar  tôt  lo  pays. 

[26  r.*  ]  Foron  levayres  de  bans  : 

Jacme  Lombart,  per  mercadies  ;  Ramon  Ortz,  per  sabaties; 
Peyre  Catala,  per  pelicies  ;  Bernât  Fabre,  per  monies. 

Foron  caritadies  : 

Ramon  Cotelier,  per  taulas  ;  Andrieu  Amielh,  per  merca- 
dies ;  Ramon  de  Puzac,  per  pelicies  ;  Esteve  Sabatie,  per 
monies. 

Foron  carrayries  : 

Jacme  Boto,  per  taulas  ;  Daunis  Serinha,  per  mercadies  ; 
Peyre  Mauri,  per  parayres  ;  Bernât  Golfi,  per  marel. 

[26  v].  L'an  mccclxiii  foron  cossols  : 

Mesie  Pons  Peyre,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Gautaroia,  per 
mercadarie  ;  sen  Guilhem  Rossilho,  per  marel;  sen  Jacme 
Vidal,  per  mesies  ;  sen  Ramon  Ortz,  per  sabaties  ;  sen  Johan 
Sahonier,  per  fabres  ;  sen  Ramon  Roqua,  per  lahorayres. 

Foron  clavaris  : 

Esteve  Fabre,  per  mercadies  ;  Johan  Coyra,  per  me.-ies  ; 
Bernât  Bermon,  per  fabres  ;  Daude  Albi,  per  sabaties. 

Feron  de  talha  très  miegz  floris  per  d.. 

i  Ms.  Cecesseras.  —  2  La  feuille  25  du  manuscrit  est  en  blanc. 


DE  JACME  MASGARO  55 

[27  r.]  Poron  levajres  de  bans  ; 

Guilhem  Audi,  per  taulas  ;  Frances  Barriejra,  per  marel  ; 
Pons  Ermengau,  per  lahor. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Gotelier,  per  taulas  ;  Ramon  Massas,  per  mesies  ; 
Ramon  Viguier,  per  mercadies  ;  Raynaut  Passavan,  per 
fabres. 

Foron  caritadies  : 

Jacrae  Botho,  per  taulas  ;   Peyre  de  Badonas,   per  mer- 
cadies ;  Jacme  Maistre,   per  marel;  Peyre  Bragayrie,   per 
.  laor  ;  B.  Miralhier,  per  sabaties. 

[27  V.]  L'an  dessus  mccclxiii,  venc  a  Nemze  lo  rey  Johan, 
et  aiso  quant  ysit  fouc  de  prio,  so  es  a  saber  d'Anglaterra. 
E  covidet  totz  los  cossolatz  a  dirnar  lo  jorn  de  nadal. 

Item  Tan  dessus  dich,  a  xi  de  novembre,  la  nueg  de  Saut 
Marti,  fouc  près  lo  luoc  de  Peyriac  per  Bertrugui  et  sos 
companhos  *. 

Aquel  an  meteis  %  fouc  près  lo  castel  de  Linha  per  avol 
garda,  la  nueg  de  Sant  Nazari,  per  Loys  Roinbaut,  que  era 
engles,  de  que  n'ac,  avans  que  laysses  ni  desampares  lo  dig 
luoc,  de  Tavesque  de  Bezes  e  dels  senhors  cossols  de  la  dicha 
viela,  X  milia  floris. 

Item  costet  pus  d'autres  x  milia  floris  per  tener  gens  d'ar- 
mas  et  autres  en  establida  contra  lo  sobredich  Roinbaut  et 
sos  companhos;  et  las  establidas  estavan  en  très  luox,  so  es 
a  Maraussa,  a  Thesa  et  a  Cornelha. 

[28  r.]  L'an  mccclxiiii  foron  cossols  : 

Sen  Jacme  Boto,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Lombart,  per  mer- 
cadies; sen  Ramon  Promit,  per  parayres  ;  maystre  Johan  de 
Fontaynas,  per  notaris  ;  sen  Bernât  Promit,  per  coyraties  ; 
sen  Ramon  de  Puzac,  per  pelicies  ;  sen  Johan  Pastre,  per 
fusties. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Peyre  Vilar,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Genestas,  per 
parayres  ;  sen  Pons  Laurens,  per  fusties. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  flori  e  mieg. 

^  Dans  le  manuscrit  cet  alioéa  est  barré. 

*  Le  mot  meteis  a  été  barré,  et  au-dessus  on  a  écrit  :  lxiii. 


56  LE    u  LIBRE    DE    MFMORIAS  » 

[28  V.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Sen  Andrieu  Amielh,  per  mercadies  ;  maystre  Quilhem 
Boquie,  per  notaris;  sen  Pey.  Gavasto,  per  coyraties  ;  sen 
Bertran  Pratz,  per  pelicies. 

Foron  carrayries  : 

Guilhem  Cotelier,  per  taulas  ;  Guilhem  Carie,  per  mer- 
cadies ;  Ramon  Sabatie,  per  parayres;  Arnaut  Fromit,  per 
coyraties;  Bernât  Porquie,  per  fusties. 

[29  r.]  Foron  caritadies  : 

Mesie  Esteve  Crotz,  per  taulas  ;  Jacme  Emengau  ;  majstre 
Berthomieu  Saynier,  per  notaris  ;  Johan  Rial,  per  pelicies. 

L'an  sobredich,  fec  ta  gran  freg  que  totz  los  olivies 
moriron,  ny  non  se  trobavo  ges  de  cauls,  e  vendie  se  la 
lieura  dels  cauls  xv  deniers. 

Item  l'an  dessus  dig  fouc  près  lo  luoc  de  Bederieus  per 
alcus  engles. 

Et  aquel  an  fouc  près  lo  luoc  de  Peyriac. 

Item  aquel  an  meteis,  a  xvi  de  may,  fouc  mes  ceti  per 
davan  lo  dich  luoc  de  Peyriac. 

[29  V.]  En  après  Tan  dessus  dich  mil  ccclxuii,  fouc  donada 
la  crozada  per  nostre  senhor  lo  papa,  papa  Urba,  contra 
aquels  que  tenian  et  occupavan  lo  dich  luoc  de  Peyriac,  et 
generalmencontra  totz  aquels  que  raubavan,  pilhavan  et  des- 
cipavan  lo  reyalme  de  Franssa,  dont  non  triguet  gayres  de 
temps,  que  totz  ho  la  major  partida  foron  mortz  e  tlestrutz  a 
mala  mort. 

Es  a  saber  que  l'an  dessus  escrig  mil  ccclxuii,  avie  en  la 
senescalcia  de  Carcassona  ciiii  milia  fuox. 

Item  avie  ne  en  la  senescalcia  de  Belcayre  lxx  milia 
fuox. 

Pus  avie  ne  en  la  senescalcia  de  Tholoza  l  milia  fuox. 

Somma  las  très  senescalcias  ii^  e  xxiiii  milia  fuox. 

[30  r.]  L'an  dessus  mil  ccclxuii  mossen  Guilhem  Arnaut, 
morgue  de  Sant  Gili,  prior  de  Malsa,  de  Tavescat  d'Uzes,  ven- 
det  tôt  quant  avie  a  Bezes  ni  en  lo  termenal  de  la  dicha  vila, 
so  es  a  saber,  totz  los  bes  que  eron  estatz  de  mossen  Bertran 
de  Monpezat,  cavalier,  a  nostre  senhor  lo  papa,  papa  Urba, 
ad  ops  del  monestier  de  sant  Girma  de  Monpeylier,  et  ayso 
per  pretz  de  mil  iiu^'  libras. 


DE  JAGMK  MASCARO  57 

[30  V.]  L'an  mccclxv  foron  cossols  : 

Sen  Brenguie  Bertran,  pertaulas;  sen  Pej.  Boquie,  per 
mercadies  ;  sen  Ramon  Gaudel,  per  marel  ;  sen  Bernât  Mira- 
Ihier,  per  sabaties  ;  sen  Pej.  Cambavielha,  per  laor;  sen  Johan 
Garnit,  par  aludies;  sen  Guilhem  Barta,  per  pejralies. 

Foron  clavaris: 

Andrieu  Amielh,  per  mercadies  ;  Johan  Bonservisi,  per 
mesies;  Bernât  Arnaut,  per  sabaties;  Helias  Geli,  per  pey- 
ralies. 

Feron  de  talha  per  d.  i  franc  e  mieg. 

[31  r.]  Foron  levayres  de  bans: 

Ramon  Brenguie,  per  taulas;  Peyre  Acde,  per  marel;  Johan 
Certes,  per  laor. 

Foron  carrayries: 

Ramon  Alari,  per  taulas;  Peyre  Lunas,  per  mercadies; 
Benezeg  Guitart,  per  aludies  ;  Paul  Bossela,  per  peyralies. 

[31  V.]  Foron  caritadies  : 

Guilhem  Cotelier,  per  taulas;  Guilhem  Carie,  per  merca- 
dies; Johan  Dolha,  per  sabaties;  Johan  Corregie,  per  marel. 

Af|uel  an  dessus  dich  mccclxv  se  comenset  ad  empauzar  la 
gabela  de  la  sal. 

Item  aquel  an  mezeis  fouc  fagacort  entre  los  senhors  clercz 
els  senhors  cossols  de  Bezes,que  totas  las  mesuras,  quais  que 
fosson,  dels  capitols  de  Monflores,  de  l'Almorna,  de  Sant 
Afrodisi,  e  de  Sauma  Longa,  tornesso  a  mesura  quer  es  de  la 
peyra  en  lo  capitol  de  Sant  Nazari. 

Aquel  an  mezeys  mcculxv,  a  xviii  de  febrier,  comenset  a 
venir  a  Bezes  lo  duc  d'Ango,  frayre  et  loctenen  del  rey 
Karles,  rey  de  Franssa,  fiUi  del  bon  rey  Johan,  en  Lengadoc. 
.  [32  r.]  Item  aquel  an  dessus  dich  vengueron  tantas  de  lan- 
gostas,  que  a  penas  veria  hom  l'ayre  del  cel. 

Item  en  aquel  an  fouc  tractât  et  ordenat,  per  los  ditz  sen- 
hors cossols  e  la  cort  de  Bezes,  que  tota  femnaque  se  aja- 
gues  d'effant,  al  batejar  del  dich  enfant  non  ânes  ni  agues 
sino  VI  ho  vil  homes  et  atrestant  de  femnas.  Et  aiso  sur  la 
pena  de  i  franc. 

En*  Tan  mil  ccclxv  dessus  escrig,  pagava  la  vila  de  Bezes 
als  subsidis  et  talhadas  per  xu^  menhs  v  fuox,  e  duret  entro 
Tan  MCCCLXxviii,  que  tornezon  los  fuox  de  Bezes  a  vie  fuox. 


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58  LE    «  LIBRE   DE   MEMORLVS  » 

Et  en  aquel  au  mccclxxviii,  trobet  se  que  de  cent  melia 
fuox,que  avieenla  senescalcia  de  Carcassona,  Tan  mccclxiiii, 
fouc  tornat  et  amermat  axvi  melia  fuox. 

Item  es  tornada  la  senescalcia  de  Belcayre  de  lxx  melia 
fuox  que  y  avie  a  xii  melia  fuox. 

Item  la  senescalcia  de  Tholoza  de  l  melia  fuox,  que  j  solie 
aver,  coma  dessus  es  dich,  es  tornada  a  viii  melia  fuox. 

Somma  las  très  senescalcias  xxxvi  melia  fuox. 
.    Et  solie  ne  aver  iic  e  xxiiii  melia  fuox. 

[32  V.]  L'an  mccclxvi  foron  cossols  : 

Mesie  Ramon  Fabre,  per  taulas  ;  sen  Bernât  Laur,  per 
raercadies;  sen  Ramon  Guiraut,  per  parajres;majstre  Ramon 
Geniejs,  per  canabassies  ;  sen  Bernât  Redorta,  per  sabaties; 
maystre  Guilhem  Rossel,  perfabres;  sen  P.  Agel,  per  lahor. 

Foron  clavaris: 

Ramon  Alari,  per  taulas;  Ramon  Rog,  per  parayres;  Gui- 
lhem Bonet,  per  lahorayres. 

[33  r.]  Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  ii  floris. 

Pus  autriet  hom  a  mossenhor  lo  duc  d'Ango  i  subsidi  de 
V  gros  per  fuoc. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Peyre  de  Badonas,  permercadies;  Jacme  Fabre,  per  cana- 
basies;  Ramon  Ortz,  per  sabaties;  Raynaut  Passavan,  per 
fabres. 

Foron  caritadies  : 

Ramon  Brenguie,per  taulas  ;  Johan  Pradas, permercadies; 
Rayrolet  Trenquie,  per  canabasies;  Ramon  Garoti,  per 
fabres. 

[33  V.]  Foron  carrayries: 

Jacme  Emengau,  per  mercadies;  Arnaut  Bonet,  per  para- 
rie  ;  Jacme  Laures,  per  sabaties. 

Aquel  an  passet  a  Bezes  mossen  Bertran  de  Clequi,  cava- 
lier, que  s'en  anava  en  Castela,  am  gran  cop  de  gens  d'armas, 
et  la  viela  li  fes  gran  yssida  am  totz  los  bos  homes  de  la  viela. 
E  feron  li  grans  presens,  elh  doneron  gf  an  cop  de  bêla  vay- 
sela  d'argent. 

[34  r.]  L'an  mcccixvii  foron  cossols  : 

Sen  Bernât  Guitart,  per  taulas  ;  sen  Andrieu  Astrebo,  per 
mercadies;  maystre  Guilhem  Boquie,  per  notaris;  sen  Johan 


DE  JACME  MASCARO  59 

Paralops,  per  mesies  ;  sen  Jacme  Betinha,  per  marel  ;  sen 
Esteve  Albanhana,  per  coyraties  ;  sen  Pejre  Arnaut,  per 
orgies. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Jacme  Emengau,  per  mercadies;  maystre  Guilhem 
Ramon,  per  notaris;  sen  Anric  Malras,  per  mesies  ;  sen  Gui- 
lhem Salvayre,  per  cojraties. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  franc. 

[34  V.]  Foron  levajres  de  bans  : 

Sen  P.  Vilar,  per  taulas;  sen  Johan  Corregie  jove,  per 
marel;  sen  Esteve  Campanha,  per  orgies. 

Foron  carrajries  : 

Sen  Ramon  Brenguie,  per  taulas;  sen  Johan  Pradas,  per 
mercadies;  maystre  Guiraut  Teysejre,  per  notaris;  Vesia 
Gobi,  per  mesies. 

Foron  caritadies  : 

Johan  Teron,  per  taulas;  Peyre  Lunas,  per  mercadies; 
Guilhelmes,  per  marelies  ;  Jacme  Bonaric,  per  coyraties. 

[35  r.]  En  aquel  an  se  venderon  totz  los  arquibanx  de  las 
glieyas  de  Sant  Felis  et  de  la  Magdalona. 

L'an  dessus  mccclxvii,  a  xi  de  genoier,  los  senhors  cossols 
de  Bezes,  am  motz  d'autres  bos  homes  de  la  dicha  vila, 
aneron  a  Monpeylier,  per  far  la  reverencia  a  nostre  senhor 
lo  papa,  papa  Urba,  que  era  vengut  a  Moiipeylier,  lo  premier 
jorn  de  genoier. 

[35  V.]  L'an  mccclxviii  foron  cossols  : 

Sen  Guilhem  de  Badonas,  per  taulas;  sen  Peyre  Lunas, 
per  mercadies;  sen  Bernât  Gibeli,  per  parajres  ;  sen  Jacme 
Laures,  per  sabaties  ;  sen  Bertran  Pratz,  per  pelicies  ;  sen 
Bernât  Fabre,  per  monies  ;  sen  Ramon  Roqua,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Johan  Teron,  per  taulas;  Arnaut  Bonet,  per  pararie  ;  Pons 
Emengau,  per  lahor. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  flori. 

Pus  per  denier  i  franc. 

[36  r.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Guilhem  Carie,  per  mercadies;  Bernât  Redorta,  per  sabaties; 
Ramon  de  Puzac,  per  pelicies  ;  Esteve  Gautie,  per  monies. 

Foron  caritadies  : 


60  LE    «   LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

Ramon  Cabot,  per  taillas  ;  Loys  Vayssa,  per  mercadies  ; 
Paul  Bajas,  per  parajres;  Bernât  Miralbie,  per  sabaties. 

[36  V.]  Foron  carrajries  : 

Bernât  de  Golbias,  per  taulas  ;  Ramon  Viguier,  per  merca- 
dies; Pejre  Laures,  per  lahorayres  ;  Duran  Canier,  per  monies. 

A  quel  an  foron  mot  grans  aygadas,  so  es  a  saber  la  nueg 
de  Sant  Guiraut. 

Item  passeron  tantas  de  gens  d'armas  entorn  Bezes,  que 
era  ses  nombre,  que  hom  no  podia  vendemiar  ni  semenar. 

Et  aquel  an  meteis  autriet  hom  a  mossenhor  d'Ango,  en  lo 
mes  d'octobre,  a  Tholosa,  ii  franx  per  fuoc. 

[37  r.]  L'an  dessus  mccclxviii  fouc  mot  gran  secada.  Els 
senhors  cossols  e  tota  la  viela  de  Bezes  ho  los  habitans 
d'aquela,  totz  pes  nutz,  s'en  anezon  vigolar  am  grans  proces- 
sios  a  la  Mayre  de  Dieu  de  Serinha.  Et  aportet  hom  lo  crocific 
de  Sant  Felis,  e  motas  d'autras  emaginas  de  sans. 

L'an  dessus  mccclxviii,  a  m  de  desembre,  vengueron  a 
Bezes  letras  de  part  madama  la  regina  de  Fransa,  farens  a 
saber  que  ela  se  era  ajaguda  de  i  bel  filh,  lo  quai  lo  comte 
Marti  lo  avie  batejat.  Et  avie  nom  Caries;  de  la  quai  causa 
tota  la  viela  n'ac  mot  grant  gaug,  en  feron  mot  gran  festa. 
E  fouc  mandat  et  cridat  a  vos  de  trompa  per  los  senhors 
cossols,  que  tôt  home  vengues  am  lur  banieyras  a  la  majo 
comuna.  Et  anezon  de  dos  en  dos  a  la  glieja  de  mossenhor 
Sant  Nazari,  et  aqui  foron  totas  las  processios  de  las  gliejas 
de  Bezes,  e  partiron  se  d'aqui  e  venguero  s'en  am  grans  ora- 
tios  a  la  glieia  de  la  Maria  Magdalena,  hont  se  fes  mot  sol- 
lempne  sermo,  pregan  totz,  petitz  e  grans,  que  nostre  senhor 
Dieus  li  dones  bona  vida  e  longa. 

[37  V.].  L'an  mccclxix  foron  cossols  : 

Mesie  Esteve  Cros,  per  taulas;  sen  Jacme  Lombart,  per 
mercadies;  sen  Johan  Coregie,  per  marel;  sen  Jehan  DoJha, 
per  sabaties;  sen  Pevre  Gaubart,  per  mesies  ;  sen  P.  Ramon 
Revel,  per  fabres  ;  sen  Johan  Menerbes,  coma  regen,  que  loj 
mes  hom  per  l'escala  de  laor. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Johan  Pradas,  per  mercadies;  sen  Johan  Evesque,  per 
messies;  sen  Esteve  Rozievra.  per  sabaties;  sen  Ramon  Ga- 
roti,  per  fabres. 


DE   JACME  MASCARO  61 

Feron  aquel  an  de  talha  per  d.  ii  franx. 

[38  r.]  Foron  kvayres  de  bans  : 

Bernât  de  Golbias,  per  taulas  ;  sen  Guilhem  Rossilho,  per 
marel;  sen  Ramon  Geli,  per  lahor. 

Foron  caritadies  : 

Sen  Pej.  Vilar,  per  taulas;  sen  Loys  Vayssa,per  mercadies; 
sen  Johan  Cabrel,  per  marel;  sen  Johan  Cruzi,  per  sabaties. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Cotelier,  per  taulas;  Johan  Benezeg,  per  mercadies; 
Johan  de  Boservisi,  per  mesies. 

[38  V.]  Aquel  an  dessus  dig  fouc  autriat  per  los  cornus,  en 
la  viela  de  Carcassona,  a  mossenhor  d'Ango  ii  franx  per  fuoc. 

Pus,  aquel  an  meteis,  i  autre  subsidi  de  ii  franx  per  fuoc. 

L'an  dessus  mccclxix  fouc  mot  gran  carestia  de  blat,  que  a 
penas  s'en  trobàva  ges,  e  valc  lo  sestie  de)  fromen  ii  franx. 

[39  r.]  L'an  mccclxx  foron  cossols  : 

Sen  Peyre  Vilar,  cambiador,  per  taulas;  sen  Pejre  Boquie, 
per  mercadies;  maystre  Ramon  de  Fuelhval,  per  notaris  ;  sen 
P.  Vidal,  per  pararie  ;  sen  P.  Gavasto,  coyratie  ;  sen  Pey. 
Catala,  pelicie,  e  mori  estan  cossol;  sen  Johan  Augie,  fustier. 

Foron  clavaris  : 

Ramon  Brenguie,  per  taulas;  Peyre  Barot,  parayre;  Peyre 
Porquie,  fustier. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  franc. 

[39  V.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Sen  Jacme  Emengau,  mercadie;  maistre  Ramon  Catala, 
notari;  sen  Guilhem  Aymoy,  pelicie;  sen  Bernât  Promit, 
coyratie. 

Foron  carrayries  : 

Sen  Bernât  de  Golbias,  per  taulas  ;  sen  Ramon  Viguie,  per 
mercadies  ;  sen  Symon  Dalmas,  per  parayres  ;  sen  Bernât 
Sedada,  per  coyraties  ;  sen  Bernât  Porquie,  per  fusties*. 

[40  r.]  Foron  caritadies  : 

Pey.  Genieys,  per  mercadies  ;  Paul  Glieyas,  per  taulas  ; 
maystre  Bernât  Agel,  per  notaris;  sen  Pey.  Esteve,  per  peli- 
cies. 

*  Il  n'y  a  pas  en  général  de  réclames  dans  ce  manuscrit.  Cependant  au 
bas  de  la  feuille  39  verso  on  lit  la  réclame  :  foron  caritadies. 


6  2  LE    «  LIBRE  DE  MEMORIAS  » 

En  aquel  an  comprezon  los  ditz  senhors  cossols  la  part 
pertoquan  ad  Ymbert  de  Montadi,  so  es  a  saber  totz  los 
vigayrals,  exceptât  las  copas  e  las  lengas  del  mazel. 

Près  ne  carta  majstre  Bernât  Sebeli,  notari  rial  de  Bezes. 

L'nn  dessus  mccclxx,  vendet  Guilhem  Pejre,  filh  que  fo 
d'en  Sicart  de Pauli,  als  sindix  de  Lespinha,  lo  bandejratge  els 
erbatge>  del  terraenal  de  Bajscha  per  tostemps,  per  pretz  de 
11^  Lx  franx.  Els  senhors  cossols  dessus  ditz, non  saben  aquesta 
venda,  van  tantost  provesi  d'anar  a  mossenhor  d'Ango,  que 
era  loctenen  del  rey,  e  van  aver  letras  mandans  al  viguier 
del  rej,  que  si  los  sobreditz  sindix  de  Lespinha  venguesso 
ho  no  venguesso  foriscapia,  [40  v.]  quez  el  prezes  tota  la  dicha 
compra  a  la  man  del  rej,  e  tantost  que  Tagues  presa,  que 
la  feres  forescapia  als  senhors  cossols  de  Bezes.  Totas  ves 
los  sobreditz  sindix  de  Lespinha  sauperon  que  los  dilz  senhors 
cossols  ho  volian,  van  ho  tantost  remetre  als  ditz  senhors 
cossols.  Els  ditz  senhors  cossols  van  la  foriscapiade  raaistre 
Ramon  Pascal,  clavari  de  Bezes,  per  lo  rej  nostre  senhor. 
Et  costet  lo  foriscapi  xliii  franx  vi  sols  vin  d.  Près  ne  carta 
raaistre  Pejre  Salvayre,  notari  rial,  l'an  mccclxx,  a  xxiii 
del  mes  de  mars. 

Item  aquel  an  meteis,  las  donas  morgas  de  Bezes,  coma 
heretiejras  del  sen  Frances  Boffat  saentras  de  Bezes,  ven- 
deron  aïs  senhors  cossols  de  Bezes  totz  los  usatges  que  pre- 
nie  lo  dig  sen  Frances  Boffat,  per  pretz  de  mil  franx.  E  près 
ne  carta  maistre  Esteve  Prunet  e  maystre  Bernât  Sebeli, 
notaris  riais. 

Item  en  aquel  an  dessus  dig  fouc  fâcha  la  gran  cajscha, 
en  la  quai  estan  totas  las  letras  et  privilèges,  que  son  de  la 
majo  comuna  de  Bezes.  E  costei  xx  floris  d'aur. 

L'an  dessus  mccclxx  comprerou  los  sobreditz  senhors  cos- 
sols de  Bezes  las  très  partz  de  Bajssa  d'en  Guilhem  Peyre 
de  Pauli,  per  pretz  de  iiii^  lx  franx.  Près  ne  carta  maistre 
Guiraut  Got,  notari  reval. 

Pus  fouc  foriscapiat  de  niaystre  Ramon*  Pascal,  clavari 
de  Bezes  per  lo  rey  nostre  senhor. 

1  Le  mot    Ramon  est  écrit  en   surcharge  au-dessus  du  mot   Peyre  qtii  a 
été  effacé. 


DE  JACME  MASGARO  63 

Près  ne  carta  lo  dig  maistre  Guiraut  Got  a  i  d'abriel. 

[41  r.]  L'an  mccclxxi  foron  cossols  : 

Seri  Johan  Teron,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Emengau,  per 
mereadies  ;  sen  Johan  Cabrel ,  per  marelies  *  ;  sen  Pey. 
Thomas,  per  sabaties  ;  maistre  Alias  Geli,  per  peyralie<  ; 
sen  Johan  Garnit,  per  aludies;  sen  Pey.  Messier,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Pejre  Genieys,  per  mereadies  ;  Hue  del  Bosc,  per  sabaties  ; 
Duran  Canie,  per  monies  ;  Ramon  Savola,  per  aludies. 

[41  V.]  Aquel  an  feron  de  talha  per  denier  i  flori. 

Pus  aquel  an  meteis  per  denier  i  franc. 

Aquel  an  meteys  comessero  de  far  i  moli  de  sanc  al  verdie 
de  la  mayo  comuna,  mais  non  valc  res. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Guilhem  Cotelie,  per  taulas  ;  Ramon  Gaudel,  per  marel  ; 
Ramon  Roqua,  per  lahor. 

Foron  caritadies  : 

Ramon  Cabot,  per  taulas  ;  Peyre  de  Badonas,  per  merea- 
dies ;  Brenguie  Audran,  per  marel  ;  Johan  Barrieyra,  per 
sabaties. 

[42  r.]  Foron  carrayries  : 

Ramon  Cotelie,  per  taulas  ;  Esteve  Desmas,  per  mereadies  ; 
Pons  Vilar,  per  peyralies  ;  Peyre  del  Truelh,  peralurlies. 

En  Tan  sobredich  venc  a  Bezes  madama  Johana,  filha  del 
bon  rey  Philip  de  Franssa,  e  dévie  esser  molher  del  duc  de 
Girona,  premier  rat  del  rey  d'Arago.  dont  fo  grandamen 
malauta,  de  la  quai  malautia  ela  vay  raori.  E  fouc  sebelida 
al  pe  de  Tautar  mage  de  raossenhor  Sant  Nazari  de  Bezes. 
Et  après  a  cap  de  i  temps  mossenhor  lo  duc  d'Ango  ne  fes 
portar  la  hossa  en  Franssa. 

En  après  lo  duc  de  Girona,  saubut  que  ac  las  novelas  que 
la  sus  dicha  madama  Johana  era  venguda  a  Bezes,  e  que  ela 
era  malauta,  veiic  a  Bezes  en  manieyra  qu'el  no  fos  conogut, 
mais  ben  se  saup  tantost,  dont  fouc  mandat  als  senhors  cos- 
sols, que  per  muralha  e  per  viela  e  tôt  entorn  Testai,  on 
era  la  dicha  madama  Johana,  agues  gran  multitut  de  gens 
ben   armadas,  e  tôt  entorn  on  lo  duc  tornava,  et  fouc  fach. 

Ml  y  a  dans  le  maDuscrit  :  marelinies,  avec  Vn  et  Vi  suivant  exponctués. 


64  LE  «  LIBRE    DE  MEMORL\S  » 

Tota3  de  vetz  lo  dig  duc  yssic  â  las  fenestras,  et  ac  mot  gran 
meravilhas,  quan  vie  aquelas  gens  armadas. 

[42  V.]  L*an  dessus  mccclxxi,  a  iiii  de  dezembre^  mossen 
Sicart  d'Ambres,  evesque  de  Bezes,  près  sa  pocession,  et 
intret  per  lo  portai  de  la  Sors  Menos,  e  juret  les  privilèges 
de  la  vija.  Près  ne  carta  maistre  Johan  de  Fontajnas  et 
maystre  Pey.  Comte,  notaris  reials. 

Item  en  aquel  an  se  mes  lo  soquet  en  lo  quarto  del  vi,  que 
montava  la  octava  part  del  quarto. 

Item  aquel  an  meteis  comprezo  los  ditz  senhors  cossols 
Testai,  que  solia  esser  d'en  P.  Saseno,  que  es  al  Segares.  Cos- 
tet  Lfloris. 

Item  comprezo  los  sobreditz  senhors  cossols  aquel  an  de 
maistre  Johan  de  Camplonc  i  autre  hostal  aqui  meteis.  Cos- 
tet  xxiiii  franx. 

Item  comprezo  i  autre  hostal  aqui  meteis  dVn  Jacme  Régi 
Ortola,  per  pretz  de  xx  franx. 

Et[es]a  saber  que  totz  aquestz  hostals  foron  comprafz  per  far 
escorjados,  en  que  escorgesso  los  marelies. 

Aquel  an  dessus  digpaguet  hom  a  mossenhor  lo  duc  d'Ange 
I  subsidi  de  dos  franx  per  fuoc 

[43  r.]  L'an  mccclxxii  foron  eossols  : 

Mossen  Bertran  de  la  Garda,  doctor  en  leys,  per  taulas  ; 
sen  Bernât  Lanr,  per  mercadies  ;  sen  Ramon  Rog,  per  para- 
rie  ;  sen  Johan  Criizi,  per  sabaties  ;  mesie  Jaques  Gog,  per 
canabàsies  ;  sen  Johan  Cortes,  per  lahor  ;  maistre  Raynaut 
Passavan,  per  fabres. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Ramon  Cabot  per  taulas  ;  sen  Peyre  Promit,  per  para- 
rie  ;  sen  Ramon  Agel,  per  lahor. 

Feron  de  talha  aquel  an  i  franc  per  d. 

Item  mieg  flori  per  denier. 

[43  V.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Duran  Selie,  per  mercadies  ;  sen  Ramon  Coregie,  per 
canabassies  ;  sen  Johan  Dolha,  per  sabaties  ;  sen  Anric 
Goroti,  per  fabres. 

Foron  carayries  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas  ;  Johan  Benezeg,  per  mercadies  ; 
Jacme  Paulinha,  per  pararie;  Guilhem  Benquelh,  per  sabaties. 


DE  JACiME  MASGARO  65 

[44  r.]    Foron  caritadies  : 

Ramon  Alari,  per  taulas  ;  Andrieu  Astrebo  jove,  per  mer- 
cadies  ;  Jacme  Fabre,  per  canabasies  ;  maistre  P.  Rogie,  per 
fabres. 

Paguet  hom  aquel  an  a  mossenhor  d'Anjo  v  franx  per 
fuoc. 

L'an  sobredig  MCCCLXxii,  coraprezo  los  ditz  senhors  cossols 
Tamenlayreda,  qu'es  foras  lo  portai  de  Presicadors,  dels  ditz 
Presicados. 

[44  V.]  L'an  mccclxxui  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Bermon,  per  taulas  ;  sen  Guilhem  Karle,  per 
mercadies  ;  majstre  Esteve  Prunet,  per  notaris  ;  sen  Pejre 
Acde  ,  per  marel  ;  sen  Ramon  Massas  ,  per  mesies  ;  sen 
Brenguie  Graza,  per  cojraties  ;  sen  Guiraut  Portel,  per 
orgies.  Totas  ves  l'escala  dels  ditz  orgies  non  ho  volian.  Totz 
aneron  s'en  a  la  cort,  e  van  far  qu'el  no  jures  ni  fereslol 
sagramen  coma  los  autres  senhors  cossols,  e  van  li  enpauzar 
quer  el  era  lebros  et  mezel.  D'aiso  lo  dig  sen  Guiraut  Portel 
s'en  defendet,  en  feq  la  proha  qu'el  era  sa  e  net.  Totas  ves, 
atant  quan  duret  la  pladeiarie,  la  cort  y  mes  regen  en  son 
luoc,  so  es  a  saber,  io  sen  Jacme  Lombes,  lo  quai  fouc  vestit 
del  tros  de  las  raubas  dels  ditz  senhors  cossols  ;  e  fenida  la 
pladeiarie,  fouc  mes  et  receubut  en  cossolat  coma  cossol  et 
régie  coma  cossol,  don  las  escalas  de  orjarie,  defustarie  e 
del  lahor  lo  van  vestir  d'unas  raubas  semblans  ad  aquelas 
dels  autres  senhors  cossols.  El  sobredig  sen  Jacme  Lombes 
fouc  foras,  mays  el  non  perdet  per  so  sas  raubas. 

[45  r.]  Forons  clavaris  : 

Esteve  Desraas,  per  mercadies  ;  maystre  Ramon  Catala, 
per  notaris;  Guilhem  Castras,  per  mesies;  Johan  Promit, 
per  cojraties. 

Aquel  an  feron  de  talha  per  denier  ii  franx. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas;  Jacme  Causenuejols,  per  marel  ; 
Guilhem  Miquel,  per  orgies. 

[45  V.]  Foron  caritadies  : 

Guilhem  Cotelier,  per  taulas;  Pons  Floyra,  per  mercadies; 
Steve  Campanha,  per  orgies:  Jacme  Sicre,  per  marel. 

Foron  carayries  : 


66  LE    «   LIBRE   DE   MEiMOÇJAS  » 

Sen  Ramon  Cotelie,  per  taulas;  sen  Esteve  Fabre,  per 
mercadies  ;  maystre  Ramon  Seguie,  per  notaris  ;  sen  Johan 
Emengau,  per  mesies. 

[46 r.]  L'an  sobredig,  a  ii  joins  del  mes  de  mars,lo  premier 
dimercres  de  carema,  a  miega  nueg,  fouc  gran  terratremol 
per  tôt  aquest  pais,  e  fouc  dos  ves  en  aquest  an. 

L'an  sobredig  fouc  fâcha  la  cambra  de  costa  la  clavarie  els 
setis  que  son  dedlns  la  porta  de  la  majo  comuna. 

Aquel  an  meteis  los  ditz  senhors  cossols  venderon  lo  soquet 
del  vi,  que  era  la  octava  part,  ixc  i  libras  ;  la  pejssonarie, 
une  libras  ;  lo  pes  del  blat,  xviii(  libras;  lo  mazel,  iic  libras  ; 
la  polarie,  lx  libras. 

Pus  lo  quart  de  la  sal  prezeron  los  clavaris  de  la  majo, 
lo  quai  mossenlior  d'Anjo  donet  à  la  viola  de  Bezes. 

[46  V.]  Pus  douet  lo  sobredig  mossenhor  d'Ango  a  la  dicha 
viela  de  Bezes  lo  quart  de  las  emposicios. 

Aquel  meteis  an  autrieron  los  cornus  de  las  très  senescal- 
cias  de  Carcassona,  de  Tholosa  e  de  Belcayre  al  sobredig 
mossenhor  d'Ango  un  franx  per  fuoc. 

Transaction  faite  dacord  par  messieurs  les  conseuls  et  les 
juifs  ^ 

L'an  dessus  MCCCLXxni,  a  xnii  de  novembre,  fouc  fâcha  la 
iransactio  et  Tacordi  dels  senhors  cossols  de  Be^s  e  dels 
Juzieus,  80  es  a  saber,  que  d'aqui  avan  los  ditz  Juzleus  no 
prestesse  ni  aguesso  a  prestar  a  degunà  persona,  quai  que 
fos,  de  la  dicha  viela,  aur  ni  argent  am  carta,  ni  sus  gatge, 
et  en  quas  que,  ho  feresso  ^  qu'els  non  preresso  degun  renou. 
Près  ne  carta  maistre  Johan  de  Fontaynas. 

[47  r.]  L'an  McccLXvnn  foron  cossols  : 

Sen  Bernât  Guitart,  per  taulas  ;  sen  Andrieu  Astrebo,  per 
mercadies  ;  sen  P.  Mauri,  per  parayres  ;  sen  Guilhem  Ajmoj, 
per  pelicies;  sen  Johan  Barrieyra,  per  sabaties;  sen  Duran 
Canie,  per  monies  ;  sen  Ramon  Yrlan,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas;  Symon  Dalmas,  per  pararie  ; 
Johan  Boyer,  per  lahor. 

i  Cette  ligne  a  été  écrite  par  une  autre  main,  bien  postérieurement  au  reste 
du  manuscrit.  —  ^  Ms.  ferosso. 


DE   .TACMK    MASCAKO  67 

Aquel  an  feron  de  talha  per  d.  i  franc. 
[47  V.]  Foron  levayres  de  bans: 

Pons  Floyra,  per  mercadies  ;  Bertran  Pratz,  per  pelicies; 
Frances  Bechieu,  per  sabaties  ;  Estove  Gautie,  per  monies. 

Foron  cara  jries  : 

Ramon  Cabot,  per  taulas  ;  Esteve  Desmas,  per  mercadies; 
Daude  Aibi,  per  sabaties  ;  Johan  Blanquet,  per  parayres. 

[48  r.]  Foron  caritadies  : 

Mesie  Loys  Blonde,  per  taulas;  Pejre  Esteve,  per  pelicies; 
Ramon  Emengau,  per  mercadies;  Jacme  Fabre,  per  monies. 

L'an  dessus  mccclxxiiii,  sen  Pey.  de  Mozere  ena  Margarida, 
sa  molher,  amdos  essemps,  venderon  als  senhors  cossols  de 
Bezes  tôt  lo  dreg  que  els  avian  en  los  molis  del  rec.  Près  ne 
carta  maistre  Guiraut  Got,  notari  rial  de  Bezes.  Et  fouc  foris- 
capiat  de  maistre  Ramon  Pascal,  clavari  de  Bezes,  per  lo  rey 
nostre  senhor. 

[48  V.]  L'an  mccclxxv  foron  cossols: 

Mesie  Pons  Pejre,  per  taulas  ;  sen  Feyre  Geniejs,  per  mer- 
cadies;-sen  Ramon  Gaudel,  per  marelics;  sen  Johan  Emen- 
gau, permesies;  sen  Bernât  Golfi,  per  sabaties  ;  sen  Anric 
Garoti,  per  fabres  ;  sen  Johan  Folcran,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Pons  Floyra,  per  mercadies;  Ramon  Betizac.  per  mesies  ; 
Varia  Londras,  per  sabaties  ;  Mathieu  Rossant,  per  fabres. 

P'eron  de  talha  aquel  an  i  franc  per  denier. 

[49  r.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Bernât  de  Golbias,  per  taulas  ;  Frances  Barrieyra,  per 
niarel  ;  Pons  Cavalie,  per  lahor. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Cotelie,  per  taulas  ;  Guilhem  P.  Trenquavelh,  per 
mercadies  ;  Johan  Laures,  per  mesies  ;  Daude  Creyschieu,  per 
fabres. 

[49  V.]  Foron  caritadies  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas;  Paul  Barba,  per  mercadies;  Ber- 
nât Roquacels,  per  marel  ;  Bernât  Redorta,  per  sabaties. 

L'an  dessus  mccclxxv  fouc  mot  gran  carestia  de  blat,  que 
valie  lo  sestie  de  torela  vi  franx  ;  el  sestie  del  fromen  v  franx  ; 
el  sestie  del  ordi  un  floris. 

Els  senhors  cossols  dessus  ditz  s'en  anezo  a  la  gleysa  de 


l:   ^ 


68  LE    «  LIBRE   DE   MEMOUIAS  » 

mossenhor  Sant  Nazari,  e  van  esplicar  als  senhors  canonges 
de  la  dicha  glieja,  que  las  genz  de  la  viela  eron  paubres,  e 
que,  per  amor  de  Dieu,  volguesso  aver  misericordia  ad  aquels 
que  lur  farian  usatge.  Els  ditz  senhors  canonges  feron  ho,  so 
es  a  saber,  que  paguesso  per  lo  sestie  del  fromen  dos  franx, 
e  pel  sestie  del  ordi  i  flori  e  mieg. 

[50  r.]  L'an  sobredich,  trames  hom  una  gale  en  Serdenha 
per[que]  portes  de  blat,  e  non  aportet  ges,  quar  lo  jutge 
d'Arboreya  non  vole  permetre  que  degun  blat  no  salhis  foras 
del  pais. 

L'an  dessus  venderon  los  ditz  senhors  cossols  lo  pes  del 
blat  xvi^  libras  ;  item  vendero  lo  soquet  del  vi  xim°  libras; 
pus  ordeneron  que  se  levés  per  cadasaumada  de  vi  per  intrada 
m  sols. 

[50  V.]  L'an  mccclxxvi  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Teron,  per  taulas;  sen  Andrieu  Astrebo  jovc, 
per  mercadies  ;  sen  Frances  Rog,  per  pararie;  maystre 
Ramon  Seguie,per  notaris  ;  sen  Johan  Promit,  per  cojTaties  ; 
sen  Bertran  Pratz,  per  pelicies;  sen  Johan  Pastre  jove,  per 
fusties.  . 

Foron  clavaris  : 

Sen  Guilhera  Cotelie,  per  taulas;  sen  Johan  Estassi,  per 
pararie  ;  sen  Jacme  Boquet,  per  fusties. 

[51  r.]  Feron  de  talha  aquel  an  per  denier  i  franc. 

Pus  paguet  per  saumada  de  vendemia  mieg  gros. 

Pus  per  saumada  de  vendemia  d'avol  bestia  un  patatz. 

Pus  per  saumada  de  careta  viii  patatz. 

Foron  levajres  de  bans  : 

Sen  Pejre  G-eniejs  vielh,  per  mercadies;  maystre  Jacme 
Hejraut,  per  notaris  ;  ArnautFromit,  per  cojraties;  Guilhem 
Aymoy,  per  pelicies. 

[51  V.]  Foron  carrayries: 

Aymeric  Barbât,  per  taulas  ;  Johan  de  Pradas,  per  merca- 
dies; Peyre  Gorgori,  per  coyraties  ;  Jacme  Vedel,  per  fusties. 

Foron  caritadies  : 

Johan  Gordo,  per  taulas  :  Peyre  Gautaroia,  per  merca- 
dies ;  maystre  Ramon  Peno,  per  notaris  ;  Ramon  de  Puzac, 
per  pelicies. 

L'an  dessus  mccclxxvi,  a  xiiii  de  setembre,  papa  Gregori 


DE  JAGME   MASGARO  69 

partie  de  la  ciutat  d'Avinho  per  anar  en  Roma,  de  que  des- 
pueys  ensa  la  glieja  nil  pais  non  fes  son  pro  ni  son  ben. 

[52  r.j  Aquel  an  dessus  dig  mccclxxvi  fouc  mot  gran 
sequada,  que  lo  poble  se  pessava  que  non  nasques  ges  de 
blat,  dont  no  se  farian  majs  plorar.  E  fes  hom  motz  grans 
processios  a  Bezes,  que  aportero  lo  crocific  de  la  glieya  de 
Sant  Felise  lo  cors  sans  de  mossenhor  Sant  Afrodisi.  E  faren 
la  dicha  processio,  venc  tanta  de  plueia  que  lot  home  fouc  ben 
banhat.  Benezettes  en  sie  nostre  senhor  Dieus  Jhesu  Christ,  e 
lauzat  e  grazit  ne  sie  lo  sieu  santé  nom. 

En  aqael  an  raezeis  mccclxxvi,  se  trenquet  e  sse  talhet  per 
fortuna  d'alcunas  genz  de  Bezes,  la  ribieyra  qu'es  de  la  molher 
de  mesie  Guilhem  de  Taurel,  que  es  en  la  ribiej[ra]  d'Orp  de 
jus  los  molis  del  ga  de  Bezes,  de  que  ne  paguet  la  viela  de 
Bezes  v^'  franx,  dont  fo  gran  pecat,  quar  la  viela  non  mesia 
mal.  E  ben  fora  estât  pus  razonabla  causa  que  ho  aguesso 
pagat  cels  que  la  feron  talhar  ni  rompre. 

[52  V.]  L'an  mccclxxvii  foron  cossols: 

Sen  Guilhem  Cotelier,  per  taulas  ;  sen  Lojs  Vajscha,  per 
mercadies;  majstre  Johan  de  Fontajnas,  per  notaris  ;  sen 
Johan  Coregie,  permarel;  sen  Bernât  Miralhier,  persabaties; 
sen  Ramon  Sahola,  per  aludies;  sen  Ramon  Roqua,  per  laor. 

Foron  clavaris: 

Sen  P.  Gautaroia,  per  mercadies  ;  sen  P.  Fons,  per  saba- 
ties;  sen  Arnaut  Guinho,  per  pejralies;  sen  P.  Truelh,  per 
aludies. 

[53  r.]  Aquel  an  paguet  la  viela  de  talha  ii  franx  per  denier. 

Pus  paguet  hom  per  l'intrada  de  cascuna  saumada  de  bona 
bestiade  vendemia  i  gros. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Paul  Glieyas,  per  taulas  ;  Jacme  Mauri,  per  mercadies; 
Pejre  Ajmoy,  per  aludies;  Esteve  Gautie,  per  monies. 

Foron  caritadies  : 

Andrieu  Gasc,  per  taulas;  Peyre  Genieys  pus  vielh,  per 
mercadies  ;  Jacme  Lauzes,  per  marel  ;  Johan  Dolha,  persaba- 
ties. 

[53  V.]  Los  senhors  cossols  dessus  digz  dobleron  aquel  an 
lo  pes  del  blat. 

L'an  dessus  mccclxxvii,  mossenhor  Tevesque  de  Bezes  donet 

5 


70  LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

licencia  als  sobreditz  senhors  cossols  de  Bezes  qu'els  poguesso 
far  cantar  messas  et  celebrar  lo  cor  de  Dieu  en  la  capela,  que 
es  dins  la  mayo  comuna,  totas  las  vegadas  qu'els  se  vol- 
guesso. 

Lo  premier  capela  que  cantet  en  ladicha  capela,  so  fo  mos- 
sen  Pey.  Dolha,  capela  de  la  glieya  de  mossenhor  Sant  Felis 
de  Bezes. 

Aquel  an  dessus  dig,  paguet  la  viela  de  Bezes  a  mossenhor 
d'Ango  I  subside  de  vi  franx  e  mieg  per  fuoc. 

En  aquel  an  dessus  dig  mccclxxvii,  los  dessus  ditz  senhors 
cossols  de  Bezes  se  vestiron,  e  feron  raubas  d'una  fina  escar- 
lata  vermelha,  que  costava  la  cana  x  franx,  don  d'aqui  avan 
los  cossols  ny  los  escudies  no  son  estatz  vestitz  sino  a  taxa, 
so  es  a  saber,  que  cascun  senhor  cossol  agues  per  raubas  del 
cossolat  xxim  franx,  els  escudies  vi  franx. 

[54  r.]  L'an  mccclxxviu  foron  cossols  : 

Mesie  Jacme  Bru,  avocat,  per  taulas  ;  sen  Jacme  Gautaroia, 
per  mercadies  ;  sen  Johan  Estaci,  per  pararie  ;  sen  Pey.  Fons, 
per  sabaties;  sen  Jacme  Fabre,  per  canabasies;  sen  Ramon 
Garoti,  per  fabres  ;  sen  Johan  Certes,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Johan  de  Camplonc,  per  taulas  ;  sen  Daude  Comte,  per 
pararie  ;  sen  Peyre  Trobat,  per  lahor. 

[54  V.]  En  aquel  an  dessus  dig  feron  de  talha  per  d.  ii 
franx. 

Pus  ordeneron  que  tota  persona  que  molgues  o  feres  moire 
blat  pagues  xx  blancas,  que  eron  vu  gros  menhs  nu  patatz.Et 
aiso  per  cascun  saq.  E  duret  da  xii  de  genoier  entro  lo  pre- 
mier jorn  d'abriel. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Cotelie,  per  taulas  ;  Paul  Barba,  per  mercadies  ; 
Peyre  Biro,  per  parayres  ;  Johan  Dolha,  per  sabaties. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Jacme  Mauri,  per  mercadies  ;  Daude  Creysieu,  per  fabres  ; 
Daude  Albi,  per  sabaties  ;  Peyre  Lieura,  per  canabasies. 

[56  r.*]  Aysso  son  los  subsides  inditz  e  levatz  per  monsen- 
hor  lo  duc  d'Anjou,  frayre  e  loctenen  del  rey  de  Franssa,  nos- 

^  La  feuille  55  du  manuscrit  est  en  blanc. 


DE  JAGME   MASGARO  71 

tre  senhor,  en  las  partidas  de  Lengadoc,  en  las  très  senes- 
calcias  de  Tholoza,  de  Carcassona  e  de  Belcayre,  aissi  quant 
se  seq  : 

Premieyramen  : 

L*an  MCCCLXVi,  i  subside  de  v  gros  per  fuoc  ;  item  Tan  après 
Lxvii,  autre  subside  de  v  gros  per  fuoc  ;  item  Tan  lxviii,  i  sub- 
side, autriat  a  Tholoza,  en  octobre,  de  ii  franx  per  fuoc;  item 
Tan  LXix,  a  Tholoza,  i  subside  de  ii  franx  per  fuoc  ;  itemaquel 
an  mezeis,  a  Carcassona,  i  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  item  Tan 
Lxx,  el  mes  de  mars,  i  subside  :  m  franx  per  fuoc;  pus  aquel 
an  mezeis,  en  abriel,  i  subside  de  i  franc  per  fuoc  ;  pus  aquel 
au  mezeis,  en  novembre,  i  subside  de  i  franc  e  quart  per  fuoc  ; 
item  Tan  lxxi,  i  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  item  Tan  lxxii, 
I  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  pus  aquel  an  mezeis,  i  subside  : 
I  franc  per  fuoc;  pus  l'an  meteis,  a  Carcassona,  en  octobre, 
1  subside  :  n  franx  per  fuoc  ;  [56  v.]  item  Tan  lxxiu,  a  Narbona, 
en  mars,  i  subside  :  nu  franx  per  fuoc  ;  pus  Tan  mezeis,  en 
desembre,  a  Nemze,  i  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  item  Tan 
Lxxim,  en  abriel,  a  Tholoza,  i  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  pus 
aquel  an  meteis,  el  mes  de  jun,  i  subside  :  m  franx  per  fuoc  ; 
item  Tan  lxxv,  i  subside:  ii  franx  per  fuoc;  item  Tan  lxxvi, 
en  ahost,  i  subside  :  ii  franx  per  fuoc  ;  item  Tan  lxxvii,  per  tôt 
I  an,  I  subside  :  vi  franx  per  fuoc  ;  item  Tan  lxxviii,  i  subside  : 
XII  franx  per  fuoc  ;  pus  aquel  an  mezeis  que  indit  sus  cada 
saumada  de  vendemia  i  gros  que  valc  plus  de  i  franc  per 
fuoc  ;  item  Tan  lxxix,  i  subside  de  xii  franx  per  fuoc. 

Soma  LXii  franx  xiiii  gros  * . 

[57  r.]  L'an  mccclxxix  foron  cossols  : 

Sen  Ramon  Alari,  borzes,  pertaulas;  sen  Jacme  Emengau, 
per  mercadies;  sen  Peyre  Bru,  per  mazel;  maystre  Guilhem 
Boquie,  per  notaris;  sen  Anric  Malras,  per  mesies  ;  Arnaut 
BYomit,  per  coyraties;  Guilhem  Miquel,  per  orgies. 

Foron  clavaris: 

Sen  Jacme  Mauri,  per  mercadies  ;  maystre  Ramon  Peno, 
per  notaris  ;  sen  Johan  Navas,  per  mesies  ;  sen  Bernât  Cam- 
bavielha,  per  coyraties. 

Feron  de  talha  aquel  an,  ad  ops  de  la  muralha,  un  gros  per 
denier. 

A  Cette  ligne  difficile  à  lire  est  écrite  d'une  autre  main. 


-  i]B-*>r.  •  \ 


7  2  LE    «  LIBRE  DE    MEMORIAS  » 

[57  V.]  Foron  levajres  de  bans  : 

Sen  Johan  Gordo,  per  taulas  ;  seu  Frances  Barieyra,  per 
mazel;  sen  Jacme  Lombes,  per  orgies. 

Foron  caritadios: 

Ramon  Cotelie,  per  taulas;  Pejre  de  Badonas,  per  merca- 
dies  ;  Jacme  Caucenuejols,  per  marel  ;  Guilhem  Salât,  per 
orgies. 

Foron  carrayries: 

Ymbert  Aynart,  per  laulas  ;  Ramon  Emengau,  per  merca- 
dies  ;  majstre  Bernât  Ferrier,  per  notaris  ;  Johan  Evesque, 
per  mesies. 

[58  r.]  L'an  dessus  mccclxxix,  a  xxiiii  jorns  del  mes  d'oc- 
tobre, fouc  mot  gran  decencio  entre  la  viela  de  Monpeylier 
els  senhors  cosselhiers  de  mossenhor  lo  duc  d'Anyo,  so  es  a 
saber  :  lo  chancelier  del  dig  mossenhor  d'Ango  ;  maystre  Johan 
Perdiguie  ;  maistre  Arnaut  del  Lar,  governador  de  Monpey- 
lier  ;  mossen  Guy  Gonestaria*,  senescal  de  Roergue;  Pabina 
de  Gontaut,  e  motz  d'autres,  e  demandavo  i  franc  per  fuoc 
quascun  mes,  per  tôt  i  an,  e  la  dicha  viela^  non  y  vole  cos- 
senti;  els  ditz  comessaris  e  los  cosselhiers  feron  liar  los  cos- 
sols  de  la  dicha  viela  de  Monpeylier,  per  menar  a  Someyre. 
El  poble,  vezen  tal  fag,  vay  se  levar  et  escomoure  en  armas, 
e  van  los  totz  aussir,  et  mezeron  los  en  diverses  pozes  foras  de 
la  viela.  Per  lo  quai  fach  mossenhor  d'Anyo  ne  vole  far  gran 
justicia,  mays  mossenhor  lo  cardenal  d'Albana,  frayre  que 
fouc  de  papa  Urba,  venc  a  Monpeylier  et  tractet  la  pas  e  la 
concordia  entre  lo  dig  mossenhor  d'Anyo  e  la  viela  de  Mon- 
peylier. Totas  de  vetz  lo  dig  mossenhor  d'Anyo  n'ac  una  gran 
somma  d'aur,  e  foron  perdonatz. 

[58  V.]  L'an  mccclxxx  foron  cossols: 

Johan  de  la  Gariga,  per  taulas  ,  sen  Peyre  Boquie,  permer- 
cadies  ;  sen  Peyre  Fromit,  per  paraj^es  ;  sen  Johan  Barrieyra, 
per  sabatios  ;  sen  Peyre  Esteve,  per  pelicies;  sen  Esteve 
Gautie,  per  monies;  sen  Johan  Boyer,  per  lahor. 

Foron  clavaris: 


*  Ce  mot  a  élé  corrigé  par  une  autre  main  en:  Lestaria;  la  première  syl 
labe  a  été  rayée  et  i'n  transformée  en  L. 
2  Ces  quatre  derniers  mots  sont  répétés  dans  le  manuscrit. 


DE   JACME   MASCARO  73 

Ajmeric  Barbât,  per  taulas;  Peyre  Girona,  per  pararie; 
Jacme  Estaci,  per  lahor. 

Aquel  an  feron  de  talha  per  denier  ii  franx. 

Pus,  ad  ops  de  la  muralha,  per  denier  iiii  gros. 

[59  r.]  Foron  levajres  de  bans: 

Paul  Barba,  per  mercadies;  Guilhem  Barriejra,  per  saba- 
ties  ;  Peyre  Rodie,  per  pelicies;  Guilhem  Bedos,  per  monies. 

Foron  caritadies  : 

Anthoni  de  la  Garda,  per  taulas;  Ramon  Emengau,  per 
mercadies;  Esteve  Cornuejol,  per  pelicies;  Bernai  Catala,per 
monies. 

[59  V.]  Foron  carrayries: 

Ramon  de  Monestie,  per  taulas  ;  Jacme  Mauri,  per  merca- 
dies; Duran  Canie,  per  monies;  Jacme  Lauzes,  per  sabaties. 

L'an  dessus,  a  xvi  de  genoier,  partiron  de  Bezes  los 
senhors  deputatz  per  anar  en  Franssa,  so  es  a-  saber  :  sen 
Ramon  Alari,  borzes  ;  maystre  Bernât  Sebeli,  notari  ; 
sen  P.  Promit,  parayre  e  cossol  ^  ;  sen  Anric  Malras,  mesie  ; 
sen  Bernât  Promit,  coyratie.  Et  aiso  per  monstrar,  dize  e 
notificar  a  nostre  senlior  lo  rey  los  grans  greuges  que  lo 
poble  el  pays  sostenian,  tant  de  subsides  quant  d'autras 
opressios. 

L'an  dessus  mccclxxx,  la  nueg  de  Santa  Lucia,  fouc  près 
et  escalat  lo  castel  de  Cabrieyra  per  Benezeg  Chipparel  et  pel 
Bastart  de  Landorra,  capitanis  d'alcunas  rotas  de  genz  d'ar- 
mas,  et  d'aqui  en  foras  [60  r.]  donezon  al  pays  motz  grans 
dampnages.  Totas  de  vetz  lo  pays,  so  es  a  saber,  la  vigaria 
de  Bezes,  de  Ginhac  e  de  Narbona,  lor  donet  xiii^  franx,  et 
aneron  s'en.  Empero  lo  pais  avia  donat  a  mossenhor  d'Anyo 
u^  franx  que  lor  ne  gites,  mays  el  non  fec  res. 

E  costet  mays  d'atrestant  de  gatges  a  genz  d'armas  qu'es- 
tavan  en  establida  a  Fontes,  a  Pezet,  et  a  Perenas,  et  ad 
Aspira  de  Cabrayres^ 

L'an  dessus  mccclxxx,  lo  xvi  jorn  de  setembre,  a  xi  horas, 
moric  e  trespasset  lo  rey  de  Franssa  nostre  senhor,  que  avia 
nom  Karles,  filh  que  fo  del  bon  rey  Johan. 

*  Les  mots  e  cossol  ont  été  ajoutés  par  une  autre  main. 
-  Les  mots  ad  Aspira  de  Cab7'ayres  sont  d'une  autre  main,  écrits  au- 
dessus  d'uQ  grattage. 


74  LE   «  LIBRE  DE   MEMORIAS  » 

Aquel  an  passet  a  Bezes  madama  la  duguessa  d'Ango,  que 
venie  de  Tholoza  e  s'en  anava  vas  Avinho,  am  son  bel  filh, 
que  avie  nom  mossen  Loys.  Els  senhors  cossols  anezon  li  fa 
la  reverencia,  e  deron  li  vi  tassas  d'argent. 

L'an  dessus  dig  mccclxxx,  dimenge  a  v  de  novembre,  fouc 
coronat  en  la  viela  de  Rems  lo  rey  de  Franssa,  que  avia  nom 
Karles,  fllh  del  dessus  dig  mossen  Karles. 

[60  V.]  L'an  mccclxxxt  foron  cossols  : 

Mesie  Esteve  Gros,  per  taulas  ;  sen  Duran  de  Guirgols, 
per  mercadies  ;  sen  Frances  Barrieyra ,  per  mazel  ;  sen 
Johan  de  Bonservisi,  per  mesies  ;  sen  Johan  Dolha,  per  saba- 
ties;  maystre  Sans  Symeon,  per  fabres  ;  sen  Bernât  Jolia, 
per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Ramon  Emengau,  per  mercadies  ;  Peyre.Puech,  per  mes- 
sies ;  Hue  Miquel,  per  sabaties  ;  maystre  Johan  Ayraut,  per 
fabres. 

[61  r.]  Feron  de  talha  aquel  an  i  franc  per  denier. 

Pus  feron  autra  talha,  ad  ops  de  la  muralha,  un  gros  per  d. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Ramon  Cotelie,  per  taulas  ;  Jacme  Sicre,  per  mazel  ;  Esteve 
Cambavielha,  per  laor. 

Foron  carrayries  : 

Ramon  Brenguie,  per  taulas  ;  Johan  Benezeg,  per  merca- 
dies ;  Johan  Masens,  per  mesies  ;  maistre  P.  Rogie,  per 
fabres. 

[61  V.]  Foron  caritadies  : 

Mesie  Bertran  Andrieu,  per  taulas  ;  Paul  Barba,  per  mer- 
cadies ;  Bernât  Roquacels,  per  marel  ;  Johan  Crusi,  per 
sabaties. 

L'an  dessus  dig  mil  ccclxxxi,  à  viii  de  setembre,  que  fouc 
lo  jour  de  Nostra  Dona  de  setembre,  se  ajusteron  los  senhors 
cossols  de  Bezes  am  tôt  lur  honorable  cosselh  a  la  mayo 
comuna,  per  consulta  sus  la  intrada  de  mossenhor  lo  duc  de 
Berri,  que  era  loctenen  del  rey  de  Fransa,  nostre  senhor, 
en  las  partidas  de  Lengadoc,  et  en  lo  dugat  de  Guiayne. 
Et  els  estan  en  lo  cosselh,  venguezo  motas  genz  plenas  de 
mais  esperitz,  etesperezo  que  lo  cosselh  fos  defenitz,  et  quant 
las  portas  foron  ubertas,  comesseron  a  far  mot  gran  rumor, 


DE  JACME   MASCARO  7  5 

tant  que  totz  aquels  del  cosselh  agùezo  gran  paor,  e  tornezon 
a  reyre  dedins  la  mayo  comuna,  e  tanquero  las  portas.  E 
aquels  de  totasmalas  enequitatz  comessero  a  cridar  ad  armas, 
e  la  horas  totz  aquels  que  eron  dins  la  mayo  comuna  van  se 
totz  esbayr.  E  totz  aquels  pies  de  mais  esperitz  trenquero 
las  portas  amb  abchas  et  am  conhassas.  Et  alcus  bons  senhors 
van  s'en  montar  sus  la  tor  de  la  dicha  majo,  affin  que  fosso 
pus  segurs.  Els  ditz  pies  de  totz  mais  esperitz  van  venir  am 
fuoc,  e  van  lo  mètre  a  la  tor,  en  tal  guiza  que  totz  aquels  que 
laj  eron  van  ardre  et  cremar,  exeptat  alcus  senhors  que  per 
paor  del  fuoc  sauteron  de  la  tor  aval,  los  quais  senhors  aisi 
mezeis  foron  mortz. 

[62  r.]  Ayso  son  los  noms  de  quels  senhors  que  arderon  en 
la  tor  : 

Sen  Bernât  Guitart,  borzes  ;  mesie  Guilhem  de  Taurel, 
licenciât  en  leys  ;  sen  Jacme  Boto,  borzes;  maystre  Ramon 
Genieys  ;  maystre  Guiraut  Got,  notari  de  la  mayo  comuna  ; 
Paul  Barba,  mercadie  ;  lo  filh  d'en  Jacme  Salamo  de  Thesa  ; 
mossen  Esteve  Carbonie,  capela  del  sobre  dig  sen  B.  Guitart. 

Aquels  que  sautero  de  la  tor  per  paor  del  fuoc  : 

Sen  Ramon  Alari,  borzes;  Johan  Sabatie,  que  era  bothe- 
Ihier  del  sen  B.  Guitart. 

[62  V.]  En  après  quant  agron  fach  aquest  horrible  fach, 
los  ditz  pies  de  totz  mais  esperitz  van  s'en  anar  per  la  viela  e 
per  los  hostals,  e  van  aussir  et  pessejar  aquels  que  se  segon: 

Sen  Brenguie  Ferrier,  sirven  d'armas,  et  son  gros  vaylet 
am  el  *  ;  sen  Ramon  Bermon,  borzes  ;  sen  Johan  Teron,  bor- 
zes ;  sen  Andrieu  Astrebo  jove  ;  sen  Peyre  Genieys  ;  Pey. 
Gava,  conhat  del  sen  Johan  Bermon;  Bona  Grassia,lo  sirven  ; 
Guiraudo,  lo  sirven. 

Et  quant  aguezon  mortz  et  aussitz  totas  aquestas  bonas 
gens,  s'en  van  anar  per  la  viela,  rauban  e  pilhan  los  hostals 
dels  bos  homes,  e  mesclet  si  tanta  de  gent  que  non  se  poyrie 
nommar,  mal  a  lur  ops  que  pueysas  ne  fouc  fâcha  gran  justi- 
cia,que  ne  foron  escapitatz  ependutz  totz  aquels  dejotzescrigz, 
e  foron  fâchas  las  forchas  de  la  peyra  que  son  foras  lo  portai 

*  Les  mots  et  son  gros  vaylet  am  el  ont  été  ajoutés   par  une  autre 
mai  11. 


>#iki. 


76  LE    «  LIBRE   DE    MEMORTAS  » 

de  Presicadors,  hont  foron  messes  totz.  Et  devise!  las  dichas 
forchas  e  las  fes  far  maistre  Pej.  Fabre,  notari,  que  era  loc- 
tenen  de  viguier  adonx.  Et  si  el  agues  i  pauc  mais  viscut. . . 
{la  suite  manqué). 

[63  r.]  Aquels  que  foron  escapitatz  en  la  plassa  sus  una 
vit  de  truelh  : 

Johan  Huguet,  sirven  del  bore  de  Sant  Jacme;  Cabot,  alias 
Bonet,  lahoraire;  Guilhem  Amat,  teisseyre  ;  Peyre  Amat, 
teissejre. 

Aquels  que  foron  pendutz  son  aquestes  *  : 

Esteve  Boia,  teissejre  ;  Pons  Tantusel,  teisseyre  ;  Johan 
Pastre,  teysseyre  ;  Bernât  Gontart,  teisseire  ;  Guilhem  Reme- 
nie,  teisseyre  ;  Johan  Sonie,  teisseire  ;  Pons  Pepi,  teisseyre  ; 
Johan  Sauze,  teissej^re  ;  Peyre  Bira,  teisseyre  ;  Emengau 
Andrieu,  teisseire,  e  son  frayre  ;  Bernât  Emengau,  teisseire; 
Bernât  Vezola,  teisseire;  Peyre  Trebes,  sabatie;  Peyre  Bra- 
conet  e  son  âlh,  sabaties;  Bernât  Massai,  lahoraire;  P.  Salvayre, 
laorayre  ;  Guilhem  Masselha,  laorayre  ;  Duran  Bedos,  laorayre; 
Johan  Caramanh  et  son  filh;  Guilhem  Peyrie,  que  farie  las  taver- 
nas;  Pej^re  Raynie,  lahorayre;  Johan Labana,  parayre;  Guilhem 
Caratie,  sirven  ;  Peyre  Lombes,  trompaire  ;  Andrieu  Nycholau, 
crida;  Ramon  lo  Rog,  laoraire  ;  Johan  Botagrais,  laorayre; 
Guilhem  lo  fustie  ;  Guilhem  Sabatie,  fustie  ;  Gamot  e  sa  molher, 
laorayre  ;  Esteve  Balhot,  laoraire;  Johan  Auriac,  teisseire  ; 
G.  del  Bosc,  laoraire  ;  Girart  lo  frances;  Gasco;  Johan  Gau- 
tie,  laoraire;  lo  genre  de  G.  B.,  monie  ^. 

[63  V.]  Et  sia  memoria  a  totz  qui  aquestas  cauzas  dessus 
dichas  ausiran  ny  legiran,  que  aion  a  dir  e  manifestar  a  lur 
enfans,  et  a  totz  aquels  que  ho  demandaran,  per  tal  que  se  aion 
a  castiar  de  esser  rebelles  contra  nostre  senhor  lo  rey  de 
Franssa  ni  als  sens  que  regiran  son  reialmo,  ny  a  sos  officiers, 
e  non  re  menhs  vuelho  esser  hobedions  a  mossenhor  Tevesque 
de  Bezes  ^,  als  senhors  cossols,  et  az  aquels  que  regiran  los 
cossolatz.  E  per  tal  que  cascun  y  prenga  yssample,  regarde 


*  Le  mot  aquestes  a  été  ajouté  par  une  autre  main. 

*  Sur  trois  colonnes  dans  le  manuscrit. 

3  Les  mots  a  mossenhor  Vevesque  de  Bezes  sont  écrits  en  renvoi  dans  la 
marge,  à  droite. 


DE  JAGME   MASCARO  7  7 

la  gran  destruccio  el  dampnatge,  que  la  viela  de  Bezes  et  lo 
poble  n'a  près  e  suffertat,  ny  la  gran  justicia  que  s'en  es  fâcha, 
que  plus  de  cent  personas  ne  son  estatz  destrutz  e  justiciatz, 
qui  descapitatz,  qui  escartajratz,  qui  pendutz.  E  qui  aytal 
fara  aital  périra.  Per  que  cascun  et  cascuna  s'en  aia  a  gardar 
QUE  VUELHAN  BEN  FAH,  ET  LO  MAL  LAYSSAR. 

[66  r.]  *  L'an  mccclxxxii  foron  cossols  : 

Sen  Pey,  Vilar,  pertaulas;  Guilhem  Carie,  per  mercadies  ; 
Jacme  Genestas,  per  pararie;  maistre  Guilhem  Ramon,  per 
notaris;  sen  Hue  Pomajrols,  per  fusties;  sen  Esteve  Cor- 
nuejol,  per  pelicies;  sen  Bernât  Promit,  per  coyraties. 

Foron  clavaris  : 

Johan  Gordo,  per  taulas  ;  Pey.  Bechie,  per  pararie;  Jacme 
Guiraut,  per  fusties. 

Feron  de  talha  aquel  an  vi  franx  per  fuoc. 

[66  V.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Sen  Johan  de  Pradas  ;  sen  Jacme  Gorgori,  per  coiraties. 

Foron  caritadies  : 

Sen  Ramon  Cotelie,  per  taulas;  sen  Jacme  Mauri,  per 
mercadies;  maistre  Guilhem  Fenassa,  per  notaris;  sen  Peyre 
Rodie,  per  pelicies. 

L'an  dessus  dig  mccclxxxii,  el  iiii  jorn  del  mes  de  gen- 
oier,  intret  premieiramen  a  Bezes  monsenhor  lo  duc  de  Berri, 
loctenen  del  rey  de  Fransa  nostre  senhor,  et  intrezon  amb  el 
lo  comte  de  Sant  Surra,  el  comte  de  Stampas,  el  cardenal 
d'Amiens.  Et  esteron  a  Bezes  entroia  festa  de  Panthacosta,  et 
paguet  la  viela  de  Bezes  al  dig  mossenhor  de  Berry  per  l'en- 
sult  que  si  era  fach,  e  per  so  que  tôt  fos  remes  e  perdonat 
xii**  franx. 

[67  r.]  L'an  dessus  dich  mccclxxxi,  el  segon  jour  del  mes 
de  novembre,  los  senhors  cossols  sobreditz  de  la  viela  de 
Bezes,  de  voluntat  de  lur  honorable  cosselh  de  la  ma,yo  co- 
muna,  anezon  aremprar  la  molher  del  sen  Bernât  Guitart, 
saentras  borzes  de  Bezes,  quez  elalor  volgues  prestar  e  bailar 
alcuna  somma  de  moneda  que  avien  bezonh,  per  pagar  a  mos- 
senhor lo  duc  de  Berry  la  finanssa  de  xii^^  franx,  la  quai  avien 
fâcha  per  l'ensult  que  lo  pobolar  de  la  dicha  viela  avie  fach 

'  Les  feuilles  G4  et  65  du  manuscrit  sont  en  blanc. 


78  LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

dedins  la  vielae  de  foras,  en  contra  el  ni  contra  tota  autra 
persona. 

A  las  quais  paraulas  per  los  sobre  ditz  senhors  cossols 
dichas,  la  dicha  dona  molher  del  sobredig  sen  B.  Guitart  vay 
respondre  et  dir  quez  ela  non  avie  ges. 

Els  senhors  cossols  sobreditz,  sabens  et  entendens  que 
alcuna  quantitat  de  vajschela  d'argent  obrada  del  dig  saen- 
tras  sen  B.  Guitart  s'era  atrobada  resconduda  en  la  glie^^a 
de  mossenhor  Sant  Affrodizi  de  Bezes,  la  quai  vaissela  era 
estada  bailada  al  sacrista  de  mossenhor  Sant  Afrodisi  a  la 
man  del  rey,  van  asemprar  la  dicha  dona  autra  vegada,  que 
d'aquela  vaissela  dessus  dicha,  que  era  estada  atrobada,  lor 
volgues  prestar  et  baylar. 

Et  la  dicha  dona,  coma  tutrix  de  ssos  enfans,  va  lor  prestar 
et  baylar  la  vajssela  que  s'enseq  : 

Premieyramen  très  tassas  d'argen  dauradas  pezans  v  marx 
uonsas;  item  dos  tassas  dauradas  d'argen,  pezans  iiimarxionsa 
m*  III  d.;  item  m  tassas  d'argent  dauradas, pezans  iiii  marx 
VII  onsas  i  quart  d'onsa  ;  item  ii  tassas  d'argent  dauradas  pe- 
zans II  marx  vi  onsas  m  d.  ;  item  ii  pintas  d'argent,  pezans 
VI  marx  vi  onsas  e  ma.;  [67  v.]  item  una  pinta  d'argent  pezant 
vimarxe  mieg  e  vi  onsas;  item  una  autra  pinta  d'argent  pezant 
VI  marx  i  onsa;  item  una  copa  d'argent  daurada  am  son  co- 
bessel  pezan  m  marx  ii  onsas;  item  vi  gobels  am  sa  pinta  pe- 
zans V  marx  e  v  onsas;  item  xxx  qulhiers  d'argent  pezero 
m  marx  v  onsas  m  quartz  ;  item  d'argent  trenquat  i  marc 
menhs  ii  d.;  item  i  drage  d'argent  am  son  culhier  perans 
311  marx  v  onsas  menhs  m  d.;  item  una  tassa  fâcha  a  forma  de 
nau  pezet  v  onsas  menhs  ii  d.  ;  item  m  tassas  d'argent  daura- 
das am  las  armas  de  l'ostal,  pezans  m  marx  x  onsas  m  d.; 
item  m  tassas  d'argent  dauradas  am  las  dichas  armas:  vimarx 
i  quart  d'onsa;  item  i  tassa  sobre  daurada  am  son  coberto  pe- 
zan m  marx  v  onsas  xxi  d .  ;  item  xii  escudelas  d'argent  pezans 
XV  marx  e  m  quartz  d'onsa. 

Soma  tota  aquesta  vayschela  dessus  dicha  daurada  et  no 
daurada,  la  quai  fouc  pezada  en  presencia  de  la  molher  del 
sen  Bernât  Guitart  dessus  dicha,  e  de  sa  dona  mayre,  et  de 
la  molher  de  messie  G.  de  Taurel,  e  del  sacrista  de  Sant  Afro- 
disi, e  de  motz  bos  homes  :  iiif^xii  marx  v  onsas  m  d. 


DE  JACME  MASCARO  79 

Et  van  la  recebre  los  clavaris  de  Tan  sobredig,  dont  es 
estada  bon  pagada  la  major  partida  sus  lo  pas  del  blat,  estans 
cossols  senhor  Johan  de  la  Garriga.  Près  ne  carta  maistre  R. 
Peno,  notari  rial. 

[68 r.]  Item*  las  escalas  de  lahorados,  e  defusties,e  d'orgies, 
queeraniii  escalas  ensemps  ajustadas,  serancoma  davanero, 
que  rçs  non  si  mou  ny  si  ajusta  nj  se  devesis  res  en  lur  cos- 
solat,  aisi  quan  se  seq,  so  es  a  saber,  que  los  lahorados  au- 
ran  d'aisi  avan  dos  ans  a  ro  cossol,  el  ters  orgies,  el  quart  el 
sinque  lahorajres,  el  seyre  fusties.  Et  aisi  torno  a  cap  d'aisi 
avan.  Et  auzanx  cosselhiers  so  es  a  saber,  lahorayres  vii  cos- 
selhiers,  e  fusties  dos  cosselhies,  e  orgies  i  cosselbier. 

Item  las  escalas  de  sabataria  e  de  coyrataria  que  non  eron 
maj  dos,  son  ajustadas  am  iiii  autras  escalas,  so  es  a  saber 
sabatiers,  coyratiers  ^,  pelicies,  fabres,  molinies  e  peyralies. 
E  d'aisi  avan  seran  vi  escalas.  Emperono  faran  may  très  cors, 
so  es  a  saber:  sabatarie  fara  per  si  i  cors;  e  coyratarie  e  pelis- 
saria  I  autre  cors;  molinies,  fabres  e  peyralies  i  autre  cors.  E 
devisizan  lur  cossolat,  aisi  quant  se  seq,  so  es  a  saber,  que  la 
I  an  auzan  cossol  los  sabaties  ;  el  segon  auzan  cossol  los  coi- 
raties  el  pelicies  ;  el  tes  an  auzan  cossol  tes  fabres,  molinies 
e  peyralies.  Et  aisi  torno  a  cap  d'aisi  avan.  Et  auzan  x  cos- 
selhiers, so  es  a  saber:  sabatarie  m.  cosselhiers,  coyratarie 
et  pelissarie  m  cosselhies,  fabres  ii  cosselhies,  am  ^  molinies 
I  cosselbier  e  peyralies  i  autre. 

[68  V.]  Et  es  a  saber  que,  en  lo  quas  que  en  lo  nombre  de 
cascuna  de  las  dichas  escalas,  al  quai  membre  pertocaria 
d'aver  cossol  justa  son  torn,  e  no  si  atrobes  persona  sufâcien 
per  esser  cossol,  quehom  ne  deu  penre  dels  autres  membres 
amb  aquel  ajustatz,  sens  prejudici  del  dig  membre.  Et  en  lo 
quas  que  en  temps  endevenidor  si  atrobes  hom  sufâcien  per 
esser  cossol,  que  hom  elegigues  quant  venria  autra  vegada 
son  torn,  e  fos  cossol. 

Item  dels  cosselhies  se  deu  servar  en  la  dicha  manieyra  e 


*  Le  commencement  de  la  charte  consulaire  que  Ton  va  lire  manque. 
'  Les  mots   sabatiers,  coyratiers  sont  écrits  en  surcharge  dans  l'inter- 
ligne, par  une  autre  main. 
^  Le  mot  am  a  été  rayé  dans  le  manuscrit  par  une  autre  main. 


80  LE    «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

forma  coma  dels  cossols,  et  sens  prejudici  dels  membres,  coma 
es  dig. 

Es  a  saber  que  cascun  an  davan  la  festa  de  Sant  Andrieu, 
los  ditz  cossols  ho  lur  plus  propda  predecessor  cossol  de  sa 
escala,  en  quas  que  n'y  agues  degun  mort,  o  absen  de  la  viela, 
et  que  autramen  no  y  pogues  essor,  auran  cascun  de  totz  sinq 
los  plus  propdas  très  cossols  predecessors  lurs  cascu  de 
sas  escalas,  per  far  la  eleccio  d'autres  sinq  cossols  per  Tau 
aladoncas  seguen  los  quais  seran  quinze  elegidos  en  nombre. 
E  en  lo  quas  que  degun  d'aqucls  que  deura  esser  elegidor  fos 
mortz,  ho  séria  absems  de  la  viela,  o  autramen  non  y  pogues 
esser,  que  hom  prenga  d'aquela  escala  meteissa  i  autre  cossol 
plus  propdanamen  davant  aquel  passât  en  loc  d'aquel  mort  e 
que  autramen  non  poirie  es>!er. 

Item  juraran  los  sobreditz  xv  elegidos,  on  las  mas  dels  sen- 
hors  curials  del  rey  nostre  senhor,  e  de  mossenhor  Tavesque 
de  Bezes,  que  ben  e  lialmen  se  auran  en  la  elecxio  dels  ditz 
sinq  cossols,  totas  pregarias,  totz  pretz,  tota  temor,  amor, 
favor,  odi,  rancor,  enequitat,  [69  r.]  malavoluntat  e  perentat 
foras  gitat.  E  que  els  eligiran  los  plus  sufficiens  els  plus  nota- 
bles personas  que  trobaran  en  aquelas  escalas,  a  qui  pertocara 
d*aver  cossol,  et  lo  cas,  coma  dessus  es  dig,  * 

membre  a  qui  pertocara  de  aver  cossol  non  auzia  persona  suf- 
ficien  per  esser  cossol,  que  els  ne  penran  dels  autres  membres 
amb  aquel  ajustât  dels  plus  sufficiens  e  plus  notables,  els  ne 
eligiran  i  cossol. 

Item  juraran  si  son  estatz  sobornatz  ni  pregatz  per  deguna 
persona,  ny  si  lur  es  estât  res  pronies,  ny  donat,  remes,  quitat 
ny  absolt,  ny  ad  els,  ny  autres  per  els,  e  que  aqui  o  aian  a 
revelar  als  ditz  senhors  curials  per  so  quez  els  ne  prengan  tal 
correxio,  que  d'aqui  avan  sie  yssimple  als  autres. 

Item,fach  lo  dich  sagramen,  los  ditz  xv  elegidos  e  los  sen- 
hors cossols  d'aquel  an  s'en  tizaran  en  la  mayo  comuna.  E  los 
senhors  cossols  se  seyran  ad  una  part,  et  auran  aqui  davant 
els  lo  notari  de  la  mayo  comuna,  et  i  nota  ri  de  la  cort  del  rey, 
et  autre  de  mossenhor  Favesque.  Els  sobreditz  elegidos  se 
seyran  ad  autra  part.  E  la  i  dels  senhors  cossols   apelara  la 

'  Il  y  a  ici  une  lacune  dans  le  manuscrit. 


DE  JACME   MASCAUO  81 

I  dels  ditz  elegidos  davan  senhors  autres  cossols  els  ditz  très 
notaris,  et  enterogara  lo  en  son  sagramen  quai  te  el  per  plus 
sufâcien  de  esser  cossol  de  Tescala,  a  la  quai  perthocara  ad 
aver  cossol.  E  donada  per  aquel  sa  votz  ad  aquel  que  li  pla- 
zera,  los  ditz  très  notaris  la  escriuran,  et  aquel  se  anara  sezer 
en  autra  part,  que  non  tornara  ponch  sezer  la  ont  es  partitz, 
per  so  que  nonpuesca  enformarlos  autres,  a  qui  aura  donada 
sa  votz.  Et  après  aquel  ne  apelara  i  autre  cossol  per  la  dicha 
forma,  et  après  i  autre,  entro  que  totz  xv  sian  passatz,  et  aion 
cascun  donadas  lur  votz  az  aquels  que  lur  sera  vist  faredor 
al  cossol  d'una  escala,  et  après  se  fara  d'un'  autra  escala  per 
la  dicha  forma  e  maniera,  et  après  d'un*  autra,  tro  que  los 
ditz  sinq  cossols  sian  elegitz. 

[69  V.]  E  quar  se  poyrie  cndevenir  que  y  aurie  dos  o  très 
personas  elegidas  en  cossols  que  serien  engals  en  vorzes,  que 
cascu  ne  aurie  sinq,  o  vi,  o  majs,  o  menhs,  es  ahordenat  que 
en  aquel  cas  los  noms  d'aquels  se  escriuran,  so  es  a  saber  lo 
nom  de  cascu  d'aquels,  en  i  petit  albara  per  los  ditz  notaris, 
et  après  aquels  ditz  albaras  metran  los  ditz  notaris  en  una 
borsa,  o  en  una  brostia,  et  après  lo  sambotaran  be  per  so 
que  los  albaras  se  mesclo;  e  fach  aquo,  de  coutenen  aura 
hom  I  enfant  petit,  c  bayli  li  hom  la  dicha  borsa  o  brostia,  e 
que  la  hubrisca,  en  traga  i  dels  ditz  albaras,  aquel  que  li  pla- 
zera,  ses  aiso  que  deguna  persona  li  diga  qu'en  prenga  majs 
I  que  autre,  et  aquel  que  sera  escrig  en  lo  dig  albara  sia  cos- 
sol, et  autre  no. 

E  fâcha  la  dicha  elexio  en  la  forma  dessus  dicha,  los  ditz 
V  cossols  sian  aqui  nomnatz  en  presencia  dels  ditz  senhors  e 
dels  XV  elegidos  per  los  ditz  notaris,  o  la  un  d'els,  e  s'en  fassa 
carta.  E  fach  aiso,  que  hom  los  ane  nomnar  e  notifficar  a  las 
cortz  del  rey  nostre  senhor  e  de  mossenhor  l'avesque  de 
Bezes,  lo  die  meteis,  o  al  menhs  la  vespra  de  Sant  Andrieu  ;  e 
pueys  anaran  jurar  en  las  mas  dels  senhors  curials  de  las 
dichas  cortz,  quant  als  senhors  cossols  plazera. 

Et  es  a  saber  que  dogun  home  menor  de  xxv  ans  non  pot 
ny  deu  esser  cossol,  quar  non  pot  per  si  meteis  estar  en  juziri, 
et  si  per  si  meteis  non  pot  estar,  doncas  menhs  per  autre. 

Item  que  degun  home  que  sie  estât  clavari  et  encaras  non 


82  LE  «LIBRE  DE  MEMORIAS  » 

aja  rendutz  sos  comptes  ny  no  sie  quitât  ben  e  lialmen  de  sa 
ministracio  non  pot  ny  deu  esser  cossol*.    • 

Item  que  deguna  persona  que  sie  estât  cossol  non  pot  ny 
deu  esser  cossol  autravegada,  sino  que  sian  passatz  m  ans  a 
prop  la  fi  de  son  cossolat  premier. 

[71  r.  ^]  L'an  que  dessus,  dilus,  a  vu  d'abriel,  fouc  fach 
mandamen  de  part  monsenhor  de  Berri  als  senhors  cossols 
dessus,  qu'els  venguesso  far  sagramen  de  fizeltat  a  nostre  sen- 
horlo  rey  de  Franssa.  Puoys  en  après  fouc  fâcha  crida  a  votz 
de  trompa  que  tôt  home,  de  qualque  estât  e  condicio  que  fos, 
entro  Tatge  de  xiui  ans,  vengues  a  Tavescat  far  lo  dich  sagra- 
men, ont  era  monsenhor  lo  duc  de  Berry  présent,  el  cardenal 
d'Amyes,  el  comte  de  Sansurra,  et  Tavesque  de  Bezes,  et  mais 
Tavesque  de  Masquo,  et  motz  d'autres.  Près  ne  carta  maistre 
Johan  de  Bezuenha,  notari  de  Carcassona. 

[71  V.]  L'an  mccclxxxiu  foron  cossols: 

Sen  Ramon  Cabot,  per  taulas  et  per  mesies;  sen  Andrieu 
Astrebo,  per  mercadies,  notaris  et  canabassies.;  sen  Jacme 
Sicre,per  mazel,  pararie  et  aludies;  senDaude  Albi,  persaba- 
ties,  coyraties,  pelicies,  fabres,  monies  e  peyralies;  sen  P. 
Brenguie,  per  laor,  fusties  e  orgies. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Johan  Reynaut,  per  canabasies;  sen  Bernât  Fabre, 
sabatie. 

Et  feron  de  talha  aquel  an  mieg  franc  per  denier. 

[72  r.]  Foron  levayres  de  bans: 

Aymeric  Barbât,  per  taulas  ;  Frances  Barrieyra,  per  marel  ; 
Johan  Jotglar,  per  laor. 

Foron  carrayries: 

Ramon  Cotelie,  per  taulas  ;  Veria  Londras,  per  sabaties. 

Foron  caritadies: 

Berthomieu  P  %  per  taulas  ;  Jacme  Emengau,  per  mercadies  ; 
Perrin  de  Rems,  per  sabaties;  Brenguie  Cesseno,  per  mazel. 


*  En  face  de  cet  alinéa,  il  y  a  dans  la  marge,  à  gauche,  une  main  grossière- 
ment dessinée,  au-dessus  de  laquelle  sont  écrits  les  mots  de  clavariis, 

*  La  feuille  70  du  manuscrit  est  en  blanc. 

8  La  place  du  nom  est  restée  vide  sur  le  manuscrit  ;  seule  la  première 
lettre  a  été  écrite. 


DE  JAGME  MASGARO  83 

[72  V.]  L'an  sobredig  los  senhors  cossols  se  vestizo  d'un 
drap  blau  de  melinas,  e  foron  taxatz  axxiiii  franx  per  cossol, 
els  escudies  a  vi  franx. 

Aquel  an  mezeis  davan  dich,  passèt  a  Bezes  lo  rey  d'Ermi- 
nia,  que  s'en  era  fugit  de  son  pais,  per  so  que  los  Sarrarys  li 
avian  près  tôt  son  reialme,  et  li  avian  presa  sa  molher  e  sos 
effans,  et  anava  al  rey  de  Franssa. 

Aquel  an  mereis  moric  et  trespasset  mossenhor  Sicart 
d'Ambres,  evesque  de  Bezes,  lo  jour  de  Santa  Maria  Magda- 
lena,  a  hora  de  terssia. 

Aquel  an  mezeis  mccclxxxiii,  fouc  fach  evesque  de  Bezes 
mossenhor  Symon  de  Grimoart,  frayre  de  mossenhor  Sant 
Anthoni^  Et  près  la  pocessio  de  l'avesquat  lo  segon  jour  de 
setembre . 

En  aquel  an  dessus  dig  los  sobreditz  senhors  cossols  de 
Bezes,  venderon  lo  pes  del  blat,  et  vendet  se  iim  e  u^  libras. 
Et  comprezo  ho  los  eretiers,  enfans  del  sen  Bernât  Guitart, 
per  so  que  se  paguesso  dels  iiii^^  e  xii  marx  v  honssas  e  m 
deniers  d'argent,  que  avian  prestat  e  lur  mayre  al  comu  de 
Bezes,  aissi  cum  dessus  es  dig^. 

Item  aquel  an  mezeis  paguet  tôt  hom  de  la  dicha  viela  de 
Bezes  per  caacuna  saumada  de  vendemia  que  mezes  dins  viela, 
so  es  a  saber,  de  bona  bestia  mieg  gros,  et  de  careta  vm  patatz, 
et  d'aze  uu  patatz. 

[73  r.]  L'an  mccclxxxiiii  foron  cossols  : 

Sen  Johan  de  la  Gariga,  per  taulas  :  sen  Pey.  Gautaroia, 
per  mercadies  ;  sen  Guilhem  Revel,  per  pararie  ;  sen  Bernât 
Sedada,  per  coyratarie  ;  sen  Esteve  Cambavielha,  per  lahor. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Ramon  Sira,  per  taulas  ;  sen  Guilhem  Catala,  per  para- 
rie ;  sen  Pey.  Cartolha,  per  lahor. 

Feron  de  talha  aquel  an  que  paguet  per  testa  d'orne  vm 
gros. 

Pus  per  testa  de  femna  nu  gros. 

Pus  una  blancha  per  libr. 

*  Les  mots  Grimoart,  frayre  de  mossenhor  Sant  Anthoni  sont  rayés  dans 
le  manuscrit,  et  au  dessus  est  écrit  d'une  autre  main  le  mot  Cramant. 
2  Cf.  folio  67  verso. 


84  LE  «  LIBRE   DE  MEMORIAS  » 

[73  V.]  Foroii  levayres  de  bans  : 

Sen  Bernât  Laur,  per  mercadies  ;  sen  Brenguie  Camba- 
vielha,  per  coiraties. 

Foron  caritadies  : 

Sen  Pos  Gordo,  per  taulas  ;  sen  P.  de  Badonas,  per  mer- 
cadies ;  sen  Jacme  Estaci,  per  lahor. 

Foron  carrajzies  : 

0 

Sen  Johan  de  Camplonc,  per  taulas;  sen  Peyze  Trenqua- 
velh,  per  mercadies  ;  sen  Guilhem  Peyrie,  per  coyraties. 

[74  r.]  L'an  dessus  mccclxxxiiii,  a  xvi  del  mes  de  may, 
intret  à  Bezes,  per  lo  portai  de  'as  Sors  Menos,  mossen  Simon 
de  Grimoart  *,  evesque  de  Bezes,  lo  quai,  avans  que  intres 
dedins  la  viela,promes  etjuret  de  tener  et  servar  las  libertatz 
e  franquezas  delà  diclia  viela,  en  la  forma  et  manieira  que  sos 
predecessors  avian  acostumat.  Près  ne  cirta  maistre  Johan 
de  Fontainas  et  maistre  P.  Estaci,  notaris  riais. 

Es  a  saber  que  lo  sen  Johan  de  la  Gariga  cossol,  e  lo  sen 
P.  Gautaroya  cossol,  et  totz  sos  companhos  anezo  dissendre 
de  lurs  cavalgaduras  a  terra.  El  ditz  sen  Johan  de  la  Gariga 
el  sen  Peyre  Gautaroia  prezeron  lo  sobredig  mossenhor  l'aves- 
que  per  las  régnas  de  son  caval.  Els  autres  senhors  cossols 
anezon  tôt  entorn  e  destrezon  el  nienezon  entro  al  pe  de  Sant 
Salvayre,  et  aqui  el  descavalguet,  car  aqui  foron  vengutz  los 
senhors  canonges  et  los  autres  capelas,  portans  las  santas  reli- 
quias,  e  van  lo  recebre  coma  senhor  evesque.  Erapero  los 
sobreditz  senhos  cossols  sen  Johan  de  la  Gariga  e  sen 
P.  Gautaroia  lo  destrezon  el  menezon  perlas  régnas  tôt  a  pe, 
coma  es  dich.  Totas  de  vetz  els  non  ho  feron  de  voluntat  del 
cosselh  de  la  mayo  comuna,  sino  de  lur  propria  auctoritat 
et  voluntat,  quarjamay  non  se  erafach  a  degun  autre  senhor 
evesque. 

Aquel  an  mezeis,  la  nueg  de  Sant  Mathieu,  a  dos  horas  de 
la  nueg,  raoric  lo  duc  d'Anyo  en  Ytalia,  en  la  viela  de  Bar. 

Item  l'an  sobredig,  dijous,  a  xxvi  de  may,  moric  lo  comte 
d'Armanhac  a  Vinho, 

[74  V.]  L'an   dessus    mccclxxxiiii,  los    sobreditz   senhors 

*  Le  mot  Grimoart  est  rayé  dans  le  manuscrit,  et  au-dessus  est  écrit  d'une 
autre  main  le  mot  Cramaut.  Cf.  la  note  1  de  la  page  83. 


DE  JAGME   MASCARO  85 

cossols  de  Bezes  venderon  per  hun  an  lo  pes  del  blat,  per 
pretz  de  ii»  ii^  libras. 

Pus  vendero  los  ditz  senhors  cossols  lo  soquet  del  vi,  per  i 
autre  an,  per  pretz  de  m  franx. 

Pus  vendero  la  intrada  de  la  vendemia,  per  i  autre  an,  per 
pretz  de  xiii*^  libras. 

Pus  vendero  lo  bosc  de  Baischa,  per  mit"  ans,  per  près  de 
XXX  franx. 

[75  r.]  L'an  que  dessus  mccclxxxiui,  se  fes  lo  compes  de  la 
viela  de  Bezes  per  los  senhors  dessotz  escrigz,  los  quais 
foron  deputatz  per  los  sobreditz  senhors  cossols  pt  per  lur 
honorable  cosselh. 

Premieyraraen  : 

Mesie  Esteve  Gros,  per  taulas;  sen  Jacme  Gautaroia,  per 
mercadies;  sen  Ramon  Guiraut,  parayre;  sen  Johan  Estaci, 
paraire  ;  sen  Ramon  Corregie,  canabassie  ;  sen  Ramon  Mas- 
sas, especiayre  ;  sen  Pej.  Fons,  sabatie  ;  sen  Ramon  Roqua, 
laoraire  ;  sen  P.  Brenguie,  laoraire  ;  sen  Guilhem  Salvayre, 
coyratie. 

Cascun  d'aquestz  senhors  sobreditz  comperayres.n'aguezon 
per  trebalh  xxx  franx.  Dieus  vuelha  quels  aion  leialment 
gazanhatz,  a  profiech  et  salvacio  de  la  lur  arma. 

[75  V.]  L'an  mccclxxxv  foron  cossols  : 

Mesie  Ramon  Seguie,  avocat,  per  taulas  ;  maistre  Pey. 
Pabre,  notari,  e  moric  estan  cossol  ;  sen  Brenguie  Audran, 
mazelie  ;  sen  Ramon  Emeric,  per  monies  ;  sen  Jacme  Lom- 
bes, per  orgies. 

Foron  clavaris  : 

Maystre  Pons  Trebes,  per  notaris  ;  sen  Daude  Creysieu, 
per  fabres. 

Feron  de  talha  aquel  an  i  denier  per  libra. 

Item  per  testa  d'ome  iiii  gros. 

Pus  per  testa  de  dona  e  d'enfan  pupil  n  gros. 

Pus  una  autra  talha  per  libra  ii  dénies. 

Pus  per  testa  aysi  coma  dessus. 

[76  r.]  Fozon  levayzes  de  bans  : 

Pons  Floyza,  per  taulas  ;  Guilhem  Rigaut,  per  mazel  ; 
Johan  Campanha,  per  monies. 

Foron  carrayzies  : 

6 


86  LE   «LIBRE  DE   MEMORIAS  » 

Ymbert  Aynart,  per  taulas;  Guilhem  Miquel,  orgie; 
maystre  Olivie  Paulinha,  notari  ;  Esteve  Gautie,  molinie, 

Foron  caritadies  : 

Majstre  Sicart  Boquas,  notari  ;  Pons  Vedel,  marelie  ;  Symon 
de  Gaholhiac,  orgie. 

[76  v].  L'an  dessus  dig,  mossenhor  le  duc  de  Berry,  que  era 
adonx  en  la  viela  de  Bezes,  va  mandar  en  i  roUe  alcus  rix 
homes  de  la  dicha  viela,  que  li  prestesso  iiii^  franx.  Et  aquels 
rix  homes  van  s'en  anar  al  cossolat,  e  van  adordenar  que  tôt 
home  que  pogues  prestar  que  prestes.  E  presteron  li  los 
iiii**  franx. 

Pus  donezo  los  sobreditz  senhors  cossols  de  Bezes  a  mosse- 
nhor de  Berry  ii  conquas  d'argent,  que  avian  d'ample  ii  palmps 
e  mieg,  fâchas  au  formas  de  Damas. 

Item  may  li  doneron  e  li  i)resteron  los  ditz  senhors  cossols 
II  potz  d'argent  dauratz  graiitz  an  dos  brocz,  e  portavo  davan 
1  escut  fach  de  las  armas  de  mossenhor  lo  duc. 

Et  pezet  lot  lui^^  marx  d'argen,  de  que  paguet  la  viela  de 
Bezes  mil  franx  en  Avinho. 

Aquel  an  mezeis  dessus  dig,  se  baylet  a  près  fach  la  fon  del 
mercat  de  la  mayo  del  Tor  entro  lo  portai  de  las  Sos  Menos, 
a  frayre  B.  Maistre,  de  l'orde  dels  Prezicados,  del  coven  de 
Clarmon,  per  près  de  iii^lxx  franx,  mays  non  ferom  lur  pro 
que  tôt,  quan  fec  no  valc  res.  Près  ne  carta  maistre  R.  Peno. 

L'an  dessus  se  trenquet  et  cancelet  la  carta  de  l'obliganssa, 
.  que  era  entre  los  senhors  cossols  e  frayre  B.  Maistre,  quar 
avie  adobat  la  fon  del  mercat,  mais  foron  ne  ben  enganatz,  que 
valgra  mais  non  y  aguesso  toquât. 

[77  r].  L'an  dessus  escrig  mccclxxxv,  a  xxiii  d'abriel  se  sa- 
gret  la  ymagina  de  la  mayre  de  Dieu,  quez  es  en  Torde  dels 
Carmes,  de  Bezes.  Etsagretla  l'avesque  d'Alboreya  qu'es  pre- 
sicador. 

Pus  l'an  sobredich  se  gitet  e  se  fec  lo  sen  de  Santa  Maria 
Magdalena  de  Bezes,  dijous  a  ix  de  novembre. 

Pus  aquel  an  et  el  mes  dessus  dig  de  novembre,  que  era 
dilus  xiii,  se  bateget  lo  dig  sen,  et  bateget  lo  maistre  Johan 
de  Betizac.  Et  foron  aquel  an  obriers  de  la  gliea  de  Santa 
Magdalena  lo  sen  Peyre  Fons,  el  sen  Johan  Barrieyra,  saba- 
ties,  et  Johan  Tomas,  cordie,  e  Bernât  delTelh,  los  quais  feron 
far  aquesta  bona  hobrar 


DE  JACME  MASGARO  87 

[77  v].  L'an  mccclxxxvi  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Coyra  per  mesies,  borzes  et  avocatz  ;  sen  Johaii 
de  Pradas,  per  mercadies,  notaris  et  canabassies  ;  sen  Guilhem 
Nicholau  paraire,  per  para(ra)rie,  mazel  et  aludarie;  sen  P. 
Fons,  per  sabaties,  coiraties,  fabres,  monies  e  peyraliers;  sen 
Ramon  Roqua,  per  laor,  fusties  e  horgies. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Johan  Orthola,  per  mesies;  sen  Estaci  Duran,  per  pa- 
raires  ;  sen  Ramon  Marti,  per  lahor. 

E  feron  de  talha  aquel  an  per  testa  cascun  dimergue  una 
blancha. 

Pus  feron  i  dénie  per  libra. 

Pus  feron  de  talha  per  testa  viii  gros  e  viii  patatz. 

Pus  feron  per  libra  i  patat*. 

[78  r.]  Fozon  levajzes  de  bans  : 

Johan  Gajschac,  per  mercadies;  Bernât  Miralhie,  per  sa- 
baties. 

Fozon  carrayries  : 

Johan  Betinha,  per  messies  ;  Ramon  Emengau,  per  merca- 
dies.; Esteve  Gaucelm,  per  pararie. 

Foron  caritadies  : 

Johan  Avesque,  per  mesies  ;  Peyre  Trenquavelh,  per  mer- 
cadies; Johan  Barriejra,  per  sabaties;  sen  Peyre  Brenguier, 
per  lahor. 

[78  V.]  L'an  sobre  dich,  a  xvii  dezembre,  venc  a  Bezes 
l'enquisidor  de  Carcassona,  et  fec  ajornar  los  senhors  cossols 
que  venguesson  davaut  el.  Et  los  ditz  senhors  cossols  anezon 
lay,  am  mesie  Ramon  Fabre  e  mesie  Jacme  Bru,  avocatz,  et 
am  motz  d'autres  bos  homes  de  la  viela.  Efes  lur  far  sagramen 
de  l'enquisicio.  Près  ne  carta  maistre  P.  Estaci,  notari  rial. 

Aquel  an  sobre  dig  mccclxxxvi,  a  xxiii  de  dezembre,  fes 
mot  gran  neu  que  ne  carec  tanta  que  totz  los  olivies  tren- 
quava  et  arabava,  per  lo  gran  pes  que  avie. 

Aquel  an  mezeis,  item  lo  an  aprop  lxxxvii^,  lo  premier 
jour  de  genoier,  que  fouc  a  dilus,  ad  hora  de  tercia,  fouc 

*  Au  bas  de  la  feuille  77  verso  on  lit  la  réclame  :  for^n  levayres  de 
bans, 

^  Les  mots  item  lo  an  aprop  lxxxvu  sont  écrits  d'uue  autre  main,  au- 
dessas  de  la  ligue,  en  renvoi. 


88  LE    «LIBRE   DE  MEMORTAS  » 

eclipsi  que  semblet  que  lo  jour  fos  tornat  nuech  negra,  don 
motas  genz  de  pahor  s'en  fugiron  a  la  glieyza. 

En  aquel  mezeis  an  mccolxxxvi,  a  xviii  del  mes  geli,  près 
molher  nostre  senhor  lo  rey  de  Franssa,  mossen  Karles  jove, 
que  era  del  état  de  xviii  ans,  so  es  a  saber,  la  filha  del  duc  de 
Bavaria  d'Alamanha.  Et  non  jac  amb  ela  mais  très  nuegz,  que 
venguezo  li  novelas,  que  la  viela  de  Dam  s'era  fâcha  englera, 
la  quai  viela  es  en  Flandres.  Per  la  quai  causa  lo  rey  vay  far  fa 
motz  grans  provesios,  so  es  de  ii^  melia  saumadas  de  besquech, 
et  111^  naus  car-[79  r.]-gadas  de  fustas  e  de  castels  per  tremetre 
en  Englaterra,  am  lo  conestable  mossen  Olivie  de  Clisson, 
las  quais  provisios  foron  totas  cremadas  per  los  Engles  et  per 
las  genz  de  Gans. 

Kl  rey  de  Franssa,  aiizen  las  novelas  dessus  dichas,  tantost 
montet  en  armas,  et  anet  s'en  en  Flandres,  et  vay  mettre  loseti 
davan  la  viela  de  Dam,  e  tenc  bi  lo  ceti  xxxv  jours,  et  après 
va  penre  per  fach  d'armas  la  dicha  viela,  en  que  avie  dedins 
M  e  v^  bassinetz  d'Engles  e  de  Gans,  e  fes  los  totz  niori  e 
mètre  a  Tespaza,  que  no  y  demoret  home  ny  femna  ny  enfans 
que  tôt  no  moris  a  Tespaza,  exeptat  los  Engles  d'Anglaterra, 
que  no  vole  que  morisson.  Et  en  après  fes  ardre  tota  la  viela. 

L'an  dessus  dig,  a  xxv  d'octobre,  vengro  letras  de  part  la 
regina  de  Fransa,  que  fouc  filha  del  duc  de  Bavaria  en  Ala- 
manha,  quez  ela  s'era  ajaguda  d'un  bel  filh,  lo  quai  avia  batejat 

10  comte  Marti,  et  avie  li  mes  nom  Karles.  Dieus  del  cel  lo 
nos  salve. 

Et  ahudas  aquestas  letras,  los  senhors  cossols  sobre  ditz 
van  ordenar  que  hom  ne  fezes  grans  processios,  e  van  man- 
dar  totas  las  escalas  dels  mesties,  que  cascun  vengues  am  lur 
banieyra  a  la  mayo  comuua.  E  van  ho  fa.  E  d'aqui  partizo  et 
s'en  anezo  a  la  glieya  catredal  de  mossenhor  Sant  Nazari  en 
la  maniera  que  se  sec  : 

Premieyramen  foron  mandatz  totz  los  relegios  et  totas  las 
autras  glieyas  de  Bezes,  que  venguesso  a  la  glieia  de  mos- 
senhor Sant  Narazi,  per  far  preguieyras  a  Jhesu  Christ*,  que 

11  dones  bona  vida  e  longa^. 

'  Il  y  a  dans  le  manuscrit  :  ihu  x. 

2  Au  bas  de  la  feuille  79  recto  on  lit  la  note   suivante  écrite  d'une  autre 


DE  JACME   MASGARO  89 

[79  V.]  Item  partie  tota  premiejra  a  caval   de   la  majo 
comuna  tota  solala  baniejra  del  rej  ; 

Pus  après  anet  la  baniejra  de  la  mayo  comuna  tota  sola  a 
caval  ; 

Item  anet  après  la  banieyra  de  taulas,  am  la  baniera  de 
mercadies  essemps,  tôt  a  pe  ; 

Pus  la  baniera  de  pararie,  amb  aquela  de  mazel  essemps, 
tôt  a  pe  ; 

Pus  la  baniera  de  notaris,  amb  aquela  de  messies; 

Pus  la  baniera  de  sabaties,  amb  aquela  del  bore  de  Sant 
Afrodisi  ; 

Pus  la  baniera  de  canabasies,  amb  aquela  del  bore  de  Sant 
Johan  ; 

Pus  la  baniera  de  coyraties,  amb  aquela  del  bore  de  Sant 
Jacme  ; 

Pus  la  baniera  de  fustiefi,  amb  aquela  de  pelicies; 

Pus  la  baniera  de  fabres,  amb  aquela  del  bore  del  Rey  ; 

Pus  la  baniera  d'orgies,  amb  aquela  del  bore  de  Montibel; 

Pus  la  baniera  de  Campnou,  amb  aquela  de  pejralics; 

Pus  la  baniera  de  sartres,  amb  aquela  de  peyssonies; 

Pus  la  baniera  de  molinies,  amb  aquela  de  candelies; 

Pus  la  banieyra  de  tejssejres,  amb  aquela  de  tenheyres; 

Pus  la  baniera  de  eardayres,  amb  aquela  de  messatges. 

[81  r.  ]  *  Et  après  totas  las  banieyras,  anezon  los  senhors 
cossols  am  tôt  lo  poble  de  la  viela  de  Hczes,  et  partizo  de  la 
mayo  comuna  en  la  manieyra  dessus  dicha,  et-  anezo  totz  a  la 
glieya  eatredal  de  mossenhor  Sant  Nazari.  E  van  yssir  totas 
las  processios  e  aporteron  davan  las  diehas  proeessios  la  ba- 
niera del  Capitol  de  Sant  Nazari,  e  d'aqui  partiron  las  ban- 
dieyras  de  dos  en  dos,  anezon  per  la  viela,  e  venguero  totz 
al  sementeri  de  Santa  Magdalena,  et  aqui  se  feq  mot  gran 
sollempnitat,  e  lii  feron  mot  gran  sermo,  que  presiquet  i 
frayre  mono,  maistre  en  santa  theolegia. 

[81  V.]  L'an  mccclxxxvii  fozon  cossols  : 

Sen  Ramon  Cabot,  borzes,  per  taulas;  sen  Jacme  Mauri, 

main  :  a  L'an  m. une  e  xxiii  a  m  de  juli,  nasquet  Loys,  filh  del  rey  de  Fransa, 
nostre  sobran  senhor,  que  avia  nom  Karles  seleme.  » 
*  Les  feuilles  80  et  81  du  manuscrit  ont  été  transposées. 


90  LE    «  LIBRE    DE   MEMORIAS  » 

per  mercadies  ;  sen  Raraon  Raynes,  per  pararie,  e  de  fauta 
de  aludies,  e  moric  cossol  ;  els  senhors  cossols  feron  ne  sonar 
lo  gros  sen  de  Sant  Nazari;  sen  Bertran  Pratz,  per  pelicies  ; 
sen  Bernât  Jolia,  per  lahor. 

Fozon  clavaris  : 

Johan  Gayschac,  per  mercadies;  Andrieu  Lieura,  per  coj- 
raties. 

Aquel  an  feron  de  talha  xxu  gros  per  testa. 

Pus  II  patatz  et  mieg  per  libra. 

[80  r.]  *  Foron  levajres  de  bans  : 

Ymbert  Ajnart,  per  taulas  ;  Johan  Rogie,  per  pararie; 
Peyre  Cartholha,  per  laor. 

Foron  carairies  : 

Aj^meric  Baibat,  per  taulas  ;  Guilhem  P.  Trencavelh,  per 
mercadies;  Johan  de  la  Gros,  per  pelicies. 

Foron  caritadies  : 

Johanet  Cotelie,  per  taulas;  Ramon  Emengau,  per  merca- 
dies; Guilhem  Fabre,  per  parayres  ;  Pej^e  Ajmoy,  per  peli- 
cies ;  Ramon  Marti,  per  lahor. 

[80  V.]  Aquel  an  dessus  dig  mccclxxxvii,  fouc  portât  lo  cap 
de  mossenhor  Sant  Felis  de  Bezes  a  Linha,  ont  era  mossenhor 
Bcrthomieu  de  Montolieu,  evesque  de  Bezes,  e  senhet  lo. 

Aquel  an  mezeis,  dijous  lo  derrier  jour  d'abriel,  a  hora 
de  vespras,  venc  a  Bezes  mossenhor  Berthomieu,  evesque  de 
Bezes,  e  dirneron  se  amb  el  los  senhors  cossols  davan  ditz. 

Item  aquel  an  mezeis,  lo  jorn  de  TAcencio,  que  s'apela  las 
Caritatz  a  Bezes,  ont  se  faria  mot  gran  festa  e  jocz,  carec 
plueia  e  pejra  mesclada  mot  granda  ;  maj,  la  merce  de  Dieu, 
no  feq  degun  dampnatge. 

Item  Tan  sobredig  mccclxxxvii,  fouc  aportada  a  Linha  al 
sobredig  mossenhor  Tavesque  de  Bezes  una  bêla  crotz  d'aur 
e  d'argent  de  la  glieja  de  mossenhor  Sant  Felis  de  Bezes, 
am  una  espina,  que  era  cadastada  en  la  dig  cros,  la  quai 
Paul  Triquart  de  Bezes  avia  donada,  la  quai  espina  es  estada 
de  la  corona  de  la  testa  de  Jhesu  Christ  ^.  E  fay  tal  senhal 
que  lo  jour  del(s)  Venres  Sanz  torna  tota  vermelha  coma  sanc. 
E  lo  dig  mossenhor  Tavesque  va  ho  tôt  senhar  e  benezir. 

*  Voir  la  note  de  la  page  précédente. 
>  11  y  a  dans  le  manuscrit  :  ihu  xst. 


DE  JACME   MASCARO  91 

L*an  dessus  dig,  a  xix  dezembre,  venc  a  Bezes  mossen 
Rotgier  d'Espanha,  senescalc  de  Carcassona  e  de  Bezes,  per 
tener  las  sims,  aisi  coma  es  acostumat.  Els  senhors  cossols 
van  lo  requesi  que  jures  las  franqiiezas  e  libertatz  de  la  dicha 
viela,  e  juret  las  en  la  maniera  que  sos  predecessors  avian 
fuch.  Près  ne  carta  maistre  B.  Ferrier,  notari  rial  de  Bezes, 
e  maistre  G.  Sicart,  notari  de  Carcassona. 

[82  r.]  *  L'an  mcoclxxxviii  foron  cossols  : 

Sen  Johan  de  la  Gatriga,  per  taulas,  per  avocatz  et  per 
mesies  ;  sen  Ramon  CoiTegie,  per  canabasies,  mercadies  et 
notaris  ;  sen  Pej.  Golfi,  per  mazel,  pararie  et  aludies  ;  sen 
Johan  Pastre  jove,  per  fusties,  lahor  e  orgies  ;  sen  Mathieu 
Rossaut,  per  fabres,  coiraties,  sabaties,  monies  et  pejraliers. 

Foron  clavaris  : 

Sen  Anthoni  de  la  Garda,  per  taulas  ;  sen  Guilhem  Vayssa, 
per  mazel  ;  sen  Jacme  Nicholau,  per  fusties. 

Feron  de  talha  aquel  an  per  testa  i  franc. 

Pus  II  patatz  per  libra. 

[82  V.]  Foron  levayres  de  bans  : 

Johan  Raj^naut,  per  canabasies;  Anric  Garoti,  per  fabres. 

Foron  caritadies  : 

Peyre  Flojra,  per  taulas  ;  Bernât  Cornelh,  per  canabasies  ; 
Brenguie  Cesseno,  per  mazel  ;   Peyre  Rotgie,  per  fabres. 

Foron  carrayries  : 

Johan  de  Camplonc,  per  taulas;  Johan  Bru,  per  canabasies; 
Bernât  Roquacels,  per  mazel;  Guilhem  Espauol,  per  fabres. 

[83  r.]  Aquel  an  dessus  dig  paguet  la  viela  de  Bezes  e  tôt 
l'autre  pays  i  subsidi,  que  era  estât  endich  e  eni)auzat  per 
raossenhor  de  Berr3%  Tan  Lxxxvii,  i  franc  e  ters  per  fuoc. 

Pus  aquel  an  meteis  paguet  la  dicha  viela  e  tôt  lo  pais  très 
franx  per  fuoc,  que  dizie  hom  e  farie  entendre  que  lo  comte 
d'Armanhac  dévia  far  hoiar  las  plassas  et  los  lox,  que  tenian 
los  Engles  en  Roergue,  et  en  autre  pais,  e  los  dévie  gitar 
foras  del  realme  de  Franssa,  malalag  s'es  enseguit. 

Item  aquel  an  mezeis  paguet  la  dicha  viela  de  Bezes  e 
Tautre  pais.i  autre  subsidi  de  ii  franx  e  quart  per  fuoc,  per 
lo  quai  ne  vendero  los  senhors  cossols  de  Bezes  lo  emolimen 

1  Voir  la  note  de  la  page  89. 


92  LE    a  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

del  pes  del  blat  e  de  las  farinas,  et  compret  lo  maistre  Johan 
de  Betizac  per  près  de  xvii^  libras. 

L'an  dessus  dig  mccclxxxviii,  dimenge  que  fo  lo  v«jour 
del  mes  de  geli,  se  sagret  la  capela  apelada  de  la  Majre  de 
Dieu  de  Pietat,  que  es  en  Tordre  dels  Carmes  de  Bezes,  e 
??agret  la  Tavesque  de  Malhares,  ont  fouc  Tavesque  de  Cotze- 
rans  atressi.  Et  fes  si  mot  grau  sollempnitat,  dont  Tavesque 
de  Malhares  hi  donet  de  perdo  xl  jours,  e  mossenhor  Faves- 
que  de  Bezes  autres  xl  jours,  e  Tavesque  de  Cotzerans  autres 
XL  jours  de  verav  perdo. 

[83  V.]  L'an  mccclxxxix  foron  cossols  : 

Mesie  Ramon  Fabre  jove,  licenciât  en  lejs,  per  Tescala 
dels  senhors  avocatz,  de  taulas  e  de  mesies  ;  majstre  Bernât 
Ferrier,  notari,  per  Tescala  de  uotaris,  mercadies  et  canaba- 
sies;  sen  Guilhem  Catala,  parayre,  per  Tescala  de  pararie, 
d'aludies  et  de  mazel  ;  sen  P.  Cartholha,  lahorajre,  per  l'es- 
cala  de  lahor,  de  fusties  et  d'orgies;  sen  Esteve  Vanieyra, 
sabatie,  per  sabatarie,  pelicies,  cojraties,  fabres,  monies  et 
peyralies. 

Foron  clavaris  : 

Majstre  Olivier  Paulinha,  notari  ;  sen  Brenguie  Sedada, 
coyratie,  en  de  fauta  de  sabaties. 

Aquel  an  feron  una  talha,  que  paguethom  per  testa  i  franc. 

Pus  feron  ii  patatz  per  libra. 

[84  r.]  Pus  paguethom  per  cascuna  saumada  de  vendemia 
que  fos  de  carreta  d'intrada  :  iiii  patatz  ;  pus  per  saumada 
de  bona  bestia  :  m  patatz  ;  pus  per  saumada  d'aze  :  u  patatz  ; 
item  per  cada  saumada  de  vi  que  intres  :  viii  gros. 

Item  aquel  an  raeteis  denan  dig  se  vendet  lo  xii*  de  la 
pej^ssonarie,  del  premier  divenres  de  carema  entro  lo  jour 
de  Pascas,  per  près  de  lxvii  libras. 

Item  Tan  dessus  dig,  a  xvii  d'abriel,  se  vendet  lo  xii®  de  la 
peysonarie  en  i  an  per  *  de  ii^vi  libras.  Compret  lo  Peyre 
Fons,  sabatie  :  ii^vi  libras. 

Pus  se  vendet  lo  mazel;  compret  lo  sen  Ramon  Cabot:  v^'lx 
libras. 

Pus  venderon  lo  pes  del  blat  e  de  las  farinas,  de  xv  jours 

'  Le  mol  près  a  été  omis  dans  le  manuscrit. 


DE  JÂCME   MÂSCAHO  93 

d'octobre  en  i  an,  a  maistre  Johan  de  Fonta\nas,  notari,  et 
a  Guilhem  Revel,  parayre,  per  près  de  xviii^'  libras  a  pagar 
tantost  :  xvjii*'  libras. 

Item  aquel  an  dessus  dig  fouc  endig  per  mossenhor  de 
Berry  i  subsidi  de  v  franx  per  fuoc.  Et  fouc  pagat  a  nostre 
senhor  lo  rej  per  son  novel  avenimen  en  Lengadoc. 

[84  V.]  Fozon  levayzes  de  bans  : 

Mesie  Bertran  Andrieu,  savi  eh  dreg,  per  avocatz  ;  sen 
P.  Girona^  parajre  ;  sen  Johan  de  Sas,  per  lahor. 

Foron  carraj-ries  : 

Mesie  Jacme  Bedos,  per  taulas  ;  majstre  P.  Estaci,  per 
notaris  ;  sen  Johan  Rogie  ,  per  pararie  ;  sen  Guilhem  de 
Mojschac,  per  sabaties. 

Foron  caritadies  : 

Mesie  B.  Costa,  per  taulas  ;  sen  Bernât  Gibeli,  per  merca- 
dies  ;  [85  r.]  maistre  Jacme  Bena,  per  notaris  ;  Arnaut 
Barriejra,  per  sabaties  ;  Pons  Cavalie,per  lahor. 

Aquel  an  meteis,  dijous  a  xui  de  may,  passet  a  Bezes  la 
filha  del  comte  de  Boluenha,  molher  de  mossenhor  lo  duc 
de  Berry,  que  venie  del  comte  de  Foys. 

E  la  viela  de  Bezes  fec  li  la  honor  que  se  seq  : 

So  es  a  ssaber  que  del  cap  del  portai  del  pont  fouc  tôt 
empaliat  de  doblas  e  de  tendas,  entre  a  Testai  de  maistre 
Johan  de  Betizac,  que  es  aras  del  rey,  et  aqui  se  aloget. 

Item  anezo  li  yssir  los  senhors  cossols  de  la  viela,  am  lo 
raielhs  de  tota  la  viela  a  caval. 

Item  van  li  donar  i  vayssel  de  vi. 

Pus  li  donezo  xii  entortas  de  cera. 

Pus  de  doblos  de  cera  xii  libras. 

Pus  xiï  tassas  d*argen  pezans  xviii  niarx. 

Item  aquel  [an]  mezeis  mccciiii^^  e  ix,  los  sobreditz  senhors 
eossols  feron  far  e  mètre  sus  cada  portai  de  la  viela  i  escut  am 
très  flors  de  li  en  cascun  esqut,  quar  las  très  flors  de  li  son 
las  armas  proprias  de  nostre  senhor  lo  rey,  et  sus  cascun  esqut 
avie  una  bêla  corona  d'aur.  Et  aisso  fouc  fach  per  honor  del 
rey  de  Franssa  nostre  senhor,  e  per  so  quar  novelamen  venie 
en  lo  pays  de  Lengadoc. 

[85  V.].  Item  may  feron  far  los  sobredigz  senhors  cossols  per 
honor  et  reverencia  del  rey  sobredig  nostre  senhor  un  belpava- 


pi 


94  LE   «LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

Iho  d'un  drap  d'aur,  que  eron  las  angardas  d'un  sendat  d'azur, 

tôt  obrat  de  flors  da  lis  d'aur  fin  batut,  pendens  tôt  en  torn 
lo  pavalho.  Et  aisso  per  mètre  sus  lo  rey  quant  intrera  a  Bezes. 

Item  feron  far  penos  ad  ops  de  las  trompas  et  dels  autres 
menestries. 

Pus  feron  far  raubas  los  ditz  senhors  cossols  a  xii  menes- 
tries de  mieg  partit  d'un  drap  vayr  e  d'un  drap  de  mesclat . 

Item  los  sobreditz  senhors  cossols,  am  tôt  lur  honorable 
cosselh,  van  ordenar  que  per  la  novela  venguda  del  rey  las 
escalasdels  meslies  feresson  liureja.  En  après  los  ditz  senhors 
cossols  anezo  a  las  cortz  del  rey  e  de  mossenhor  l'avesque,  per 
saber  am  los  senhors  curials,  si  volian  esser  de  las  linrey[a]s 
de  las  cscalas  dels  mesties;  els  ditz  senhors  curials  et  notaris 
van  dirque  volian, et foron  tolz  vestitzd'unalieureya  vermelha. 

Itom  quant  los  senhors  cossols  sentizo  ni  saupro  que  lo  rej' 
fouc  vengut  a  Sant  Thiberi,  van  mandar  que  tôt  home  que 
agues  fâcha  lienreya  vengues  tantost  a  la  maj'O  comuna,  tôt  a 
caval,  per  anar  far  yssida  et  reverencia  al  rey  nostre  senhor. 

Item  plus  ordenezo  los  ditz  senhors  cossols,  e  tôt  lur  hono- 
rable cosselh,  qu'els  no  fossou  pas  vestitz  de  neguna  lieureya, 
sino  d'aquela  del  cossolat,  per  tal  que  lo  rey  los  conogues  a 
las  raubas  mieg  partidas. 

[87  r.]*  En  après  los  ditz  senhors  cossols  van  s'en  anar  al 
rey.  E  foron  pus  de  iiic  homes  a  caval  vestitz  de  la  lieureya 
vermelha.  E  anezo  entro  la  cros  de  lalega,  e  van  li  fa  la  reve- 
rencia. E  fâcha  la  reverencia,  van  s'en  venir  al  hostal  dels 
tiradors,  et  estenderon  lo  pavalho  sus  lo  rey.  Et  intrezon  per 
lo  portai  de  Presicados,  portan  tôt  a  pe  los  senhors  cossols  lo 
dig  pavalho. 

E  es  a  saber  que  quant  lo  rey  fouc  vengut  al  cap  de  la  Mer- 
cadaria,  van  gizar  ves  la  maj^o  comuna,  et  van  gizar  de  la 
part  de  la  Orgaria,  anan  vas  la  sieutat.  E  quant  lo  rey  fouc 
a  Sant  Salvayre,  va  descavalgar,  et  a  qui  fouc  mossenhor  Tavcs- 
que  de  Bezes  tôt  revestit  am  tôtas  las  reliquias,  el  rey  anet 
las  adorar.  Et  anet  tôt  a  pe  adorar  a  mossenhor  Sant  Nazari. 
Et  après  montet  a  caval,  et  anet  s'en  en  son  hostal,  que  es 
Costa  lo  portai  d'en  Grindas. 

1  Les  feuilles  86  et  87  du  maDuscrit  ont  été  transposée». 


DE  JACME   MASCARO  95 

L'an  MOCCLXviii  a  iiii  del  mes  de  dezembre,  nasquet  mossen 
Karles,  filh  que  fo  de  mossen  Karles,  rej  de  Franssa,  nastre 
senhor,  al  quai  Dieus  fassa  veray  perdo. 

L'an  Mccciiii^'^  e  ix,  lo  jour  de  la  Santa  Trenitat,  que  fo  lo 
XX®  jour  de  novembre,  a  hora  de  compléta,  venc  et  intret 
novelamen  a  Bezes  nostre  senhor  lo  rey  de  Franssa  dessus 
dig,  et  avie  nom  Karles,  et  era  del  état  de  xxii  ans. 

Et  venc  amb  el  mossen  Loys,  son  frayre,  que  era  duc  de 
Thorena  ;  [87  v.]  pus  monsenhor  lo  duc  de  Borbon  ;  pus 
mossen  P.  de  Navarra,  frayre  del  rey  de  Navarra  ;  pus  lo 
filh  del  duc  de  Bar;  pus  lo  conestable  de  Fianssa;  pus 
mossen  Loys  de  Sansuerra,  marescal  de  Franssa;  pus  lo 
senhor  de  Lebret;  pus  lo  senhor  de  Corsi. 

Item  tanta  de  bêla  nobleza  et  de  cavalarie,  que  era  sens 
nombre.  E  jac  lo  rey  aquela  nueg  a  Bezes,  e  Tendema  que 
fouc  dilus  après  dirnar  s'en  anet  jazer  a  Narbona,  e  d'aqui 
en  fora  s'en  anet  a  Tholosa. 

Ensegon  se  los  presens  que  la  viela  de  Bezes  feq  a  nostre 
senhor  lo  rey  dessus  dig  : 

Premieyramen  dos  bassinas  d'argent  totas  dauradas,  que 
avian  d'ample  cascuna  ii  palras. 

Item  I  flesco  d'argent  tôt  daurat,  tenen  très  quartos;  pus 
dos  justas  d'argent,  tenen  cascuna  i  quarto  e  mieg. 

[86  r.]*  Item  viii  tassas  d'argent  pezan  cascuna  i^  marc  o 
mieg,   e  la  una  era  am  son  cobessel. 

Pus  donero  los  ditz  senhors  cossols  a  mossen  Loys,  duc  de 
Tozena,  frayrc  de  nostre  senhof  lo  rey,  una  bêla  nau  d'argen 
tota  daurada,  que  li  fouc  presentada  a  taula,  quar  lo  dig 
mossen  Loys  se  dirnava  ab  lo  rey,  de  que  nostre  senhor 
lo  rey  n'ac  mot  gran  joya  et  plazer. 

L'an  Mccciiii^  e  x  foron  cossols  : 

Sen  Johan  Navas,  messier,  per  l'escala  de  messaria,  d'a- 
vocatz  et  de  taulas;  sen  P.  Gautaroia,  mercadier,  per  Tescala 
de  mercadaria,  de  notaris  et  de  canabasies  ;  sen  Jacme  Cau- 
cenuejol,  marelie,  per  l'escala  del  mazel,  de  pararie  et  d'alu- 
darie  ;  sen  Ramon  Roqua,  lahoraire,  per  l'escala  de  lahor, 

'  Voir  la  note  de  la  page  précédente. 

*  Une  autre  main  a  corrigé,  et  on  lit  :  «  ii  marc  {au  singulier),  » 


1  . 


96  LE    «  LIBRE    DE   MEMORIAS  » 

de  fustarie  et  orgarie  ;  sen  P.  Aymoyr,  pelicie,  per  Fescala  de 
pelissarie,  coyratarie,  sabatarie,  fabres,  monies  e  peyralies. 

[86  V.]  Foron  clayaris  : 

Sen  Ramon  Gilabert,  per  Fescala  de  messarie  ;  sen  Bernât 
Roquacels,  per  Tescala  de  mazel  ;  sen  Johan  da  Sas,  per 
Tescala  de  lahor. 

Feron  de  talha  aquest  an  un  d.  per  libra  *. 

Foron  levayres  de  bans  : 

Jacme  Mauri,  perTescala  de  mercadarie  ;  sen  Brenguie  Cam- 
bavielha,  coyratie,  per  Tescala  de  cojratarie  e  de^  pelissarie. 

Foron  carrajries  : 

Johanneri  Gueyraut,  per  messarie  e  per  taulas  ;  Bernet 
Laur  jove,  per  mercadarie;  Guilhem  Rigaut,  per  mazel; 
Guilhem  Pejrie,  coyratie,  per  pelicies. 

[88  r.]  ^  Foron  caritadies  : 

Joban  Laures,  per  Tescala  de  taulas;  Andrieu  de  Fon- 
taynas,  per  mercadies  ;  Daude  Raynaut,  per  coyraties  ; 
Peyre  Jorda,  marelie,  per  mazel;  Johan  Faberza,  per  lahor. 

Kan  dessus  dig  mccclxxxx,  dimas  a  xviii  de  genoier,  venc 
a  Bezes  nostre  senhor  lo  rey  de  Franssa  que  venia  de  Tho- 
losa.  Et  anet  prener  conget  de  nostre  senhor  lo  papa  aAvinho, 
e  pueys  s'en  anet  a  Paris. 

Item  aquel  an  sobredig  et  aquela  venguda  de  nostre  senhor 
lo  rey  derieyra,  los  senhors  cossols  davan  ditz  Johan  Navas 
els  autres  sos  companhos  foron  per  lo  rey  desapausatz  et 
amerraatz  del  nombre,  so  es  a  saber  que  de  v  cossols  que  y 
avie  los  tornet  a  un.  Et  en  aqui  meteis  ho  fes  per  tôt  lo  pais 
de  Lengadoc. 

E  es  a  ssaber  que  los  senhors  cossols  dessus  noranatz  so 
vestiro  las  raubas  del  cossolat  lo  jour  de  nadal,  e  non  las 
portero,  sino  de  nadal  entre  lo  divenres  a  xxi  de  genoier,  que 
y  intrezon  los  autres  senhors  cossols  desotz.  escrigz. 

[88  V.]  Item  Tan  dessus  dig  mccciiii'^  e  x,  a  xx  de  genoier, 
fes  cridar  a  votz  de  trompa  nostre  senhor  lo  rey  per  totas  las 
vielas,  que  d'aqui   enan  non  agues  per  las  vielas,  sino   un 

*  Uoe  autre  main  a  ajouté:  et  viii  d.  per  testa. 

'^  Les  mots  coyratarie  e  de  sont  rayés  dans  le  manuscrit. 

5  Voir  la  oote  de  la  page  94. 


DE  JACME   MASCARO  97 

cossols.  E  fâcha  aquesta  crida,  los  senhors  cossols  sobreditz, 
que  eron  davan  la  crida,  van  relaxar  lo  cossolat,  quar  no 
sabian  quai  de  totz  sinq  fos  foras,  e  non  fazen  enjuria  de  la  i 
a  l'autre,  foron  d'acort  que  totz  ensemps  non  y  remangues 
degun  de  totz  sinq. 

Pus  lo  jour  e  Tan  dessus  ditz,  a  xx  de  genoyer*,  fes  far  una 
autia  crida  en  la  viela  de  Bezes,  aissi  quant  se  seq  : 

Aujatz  que  vos  fa  hom  a  saber  de  part  lo  rey  de  Franssa 
vostre  seiihor,  e  vos  notiffiqua  hom,  que  lo  dig  nostre  senhor 
lo  rey  de  Franssa,  aven  pietat  e  compacio  al  poble  de  son 
rialme,  a  volgut  e  ordenat  per  certanas  causas  sus  aisso  la 
sua  gracia  moven,  que  tota  persona,  quai  que  sia,  ni  quai  que 
no  de  Lengadoc,  que  se  sia  partit  del  rialme  de  Franssa  per 
talhas  niezas  el  temps  passât,  o  per  doutes  per  els  degutz  al 
qnalque  persona  que  sia,  sia  juzieu  ho  crestia,  que  puesca 
retornar  en  lo  pais,  estar,  demorar  francamen  e  quitia  e  pari- 
blamon  de  tôt  so  quez  els  poyran  de  ver  a  las  dichas  talhas  o  a 
crededors,  an  condicio  que  els  aian  a  pagar  lor  ditz  doutes 
enfra  un*'®  ans  contados  de  la  data  de  las  letras  sus  aisso 
autriadas,  cascun  del  ditz  iiii  iuis  la  quarta  partida  dels  dou- 
tes, e  que  seran  tengutz  an  prestan  caucio  de  pagar  los  deutes 
aquela  que  poyran  prestar. 

[89  r.]  Encaras  may  vos  fa  hom  a  saber  que  lo  rey  nostre 
senhor  a  ordenat,  per  lo  reaime  ^  relevamende  son  poble,  que 
dels  bes  que  foron  de  maistre  Johan  Betizac  saeutras  de 
Bezes  confiscatz  al  rey  nostre  senhor  se  convertisca  sus  lo 
fag  de  la  hueia  dels  Engles  la  somma  de  xx  melia  franx. 

Encaras  may  vos  fa  hom  a  saber  que  lo  rey  nostre  senhor, 
per  lo  ben  del  poble  et  de  la  causa  publica,  a  hordenat  que  lo 
nombre  e  la  quantitat  dels  capitols,  cossols,  governados  de 
cascuna  viela  de  Lengadoc  majore  pasan  lo  nombre  de  quatre 
sia  apetisat,  destreg  et  remes  al  dig  nombre  de  un,  los  quais 
capitols,  cossols,  ho  autres  governados  no  se  puescon  asem- 
blar,  ny  congregar,  ny  deguna  causa  far,  sino  que  lo  senes- 
calc,  ho  viguier,  ho  jutge  de  las  dichas  violas  hy  sia  présent. 

Item  vol  e  ordena  lo  rey  nostre  senhor,  que  totas  aydas, 

*  Lesmotsaxx  de  g  etioyer  sont  d'une  autre  main,  écrits  au-dessus  de  la  ligne. 

*  Le  mot  reaime  est  exponctué  et  doit  être  négligé  dans  la  lecture. 


98  LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

carges,  messios,  presas  al  temps  passât  per  los  ditz  capitols, 
cossols,  governados  en  las  dichas  vielas,  empauzatz  sus  fari- 
nas, carns,  pejs  et  autras  denajradas  o  bes  sessen  de  tôt  e  no 
sian  plus  levatz,  nv  los  ditz  capitols,  cossols,  ho  governados 
no  puescan  los  ditz  carges  mettre,  nj  enpauzar,  uy  far  culhir, 
nj  levar  d'aisi  enan,  sens  exprès  mandamen  ho  ordenansa  del 
rey  nostre  senhor  ho  de  son  cosselh. 

L'an  dessus  escrig  MCCCLXXXX,divenres  a  xxi  de  genoier,  io 
sen  Caries  del  Templier,  raesie  Bernât  Audran,  el  sen  Jacquet 
de  Bencjerget*  vengueron  a  la  mayo  comuna  de  las  partz  de 
nostre  senhor  lo  rey  de  Franssa,  per  ordenar  cossols  novels 
an  cossentiraen  de  tôt  lo  cosselh  de  la  mayo  comuna.  E  feron 
cossols  novels,  so  es  a  ssaber: 

[S9  V.]  Sen  Guilhem  Cotelie  ;  sèn  Duran  de  Guirgols,  mer- 
cadie  ;  sen  Johan  Estaci,  parayre;  sen  Peyre  Brenguie,  laho- 
rsiyre. 

Item  fouc  autriat  als  ditz  senhors  cossols  per  lo  gran  cos- 
selh de  la  mayo  comuna,  en  presencia  de  mossenhor  lo 
viguier  del  rey,  que  aguesso  raubas  del  cossolat.  Et  feron  ho. 

Pus  los  ditz  senhors  cossols  se  vestiron  las  raubas  dimer- 
gue,  que  fouc  lo  xiiijour  de  febrier,  que  fouc  lo  jorn  de  Cara- 
mantran  ^ 

Item  Tan  dessus  dich  mcccii^'^ii  e  x,  dimars  a  xx  del  mes  de 
setembre,  lo  jour  de  las  asiras,  juret  los  privilèges,  las  fran- 
quezas  e  libertatz  de  la  viela  e  vigarie  de  Bezes  mossen 
Peyre  de  Mornay,  cavalier,  senescalc  de  Caicassona  e  de 
Bezes,  et  mossen  Guilhem  del  Bruelh,  doctor  en  decretz, 
jutge  mage  de  Carcassona,  en  l'ostal  del  cabiscol  mage  de  la 
glieia  quatredal  de  mossenhor  Sant  Nazari  de  Bezes.  Prezero 
ne  carta  maistre  Bernât  Ferrier,  notari  de  Bezes,  et  maistre 
Johan  Hue,  notari  de  Carcassona. 


*  Les  mots  de  Bencyerget  soDt  dans  la  marge,  à  droite,  presque  effacés 
par  le  temps*  «, 

*  Les  mots  que  fouc  lo  jorn  de  Caramantran  sont  d'une  autre  main. 


DE  JÂCME   MÂSCAHÛ  99 


APPENDICE 


Le  volume  sur  lequel  est  éciit  le  Libre  de  Memorias  de  Jacme 
Mascaro  contient  en  outre  (feuille  92,  recto  et  verôo  *)  la  copie  d'un 
privilège  accordé  en  1371  à  la  ville  de  Béziers  par  le  roi  Charles  V. 
Cet  acte,  rédigé  en  latin,  est  précédé  du  titre  suivant: 

Aysso  es  lo  privilège  de  la  viela  de  liezers  sus  lo  fach  de  la  vin- 
demia  e  del  vi  estranha  *. 

Dans  le  même  volume  se  trouvent  aussi  les  deux  pièces  suivantes, 
que  nous  publions  in-extenso: 

I 

[93  r.].  JJAN  MIL  CCCC  E  JSOU,  A  DETZ  JOR  \S  DEL 

mes  de  feùrier,  intret  a  Dezers,  per  lo  portai  de  las  Soi*s  Me- 
nors,  mossen  DERTRAN  DE  MALMONT,  ovesque  de  Besers, 
lo  qualy  avans  que  hel  intrvs  dedins  la  vila,  al  intran  del  portai, 
promes  etjuret  de  tener  et  servar  las  libcrtaiz  e  franquesas  de  la 
dicha  vila  y  enta  forma  e  maweyra  que  sos  predecessors  avian  acos- 
tumat,  E  près  ne  carta  maistre  Bernât  Raynaut,  maisfre  Peijre 
Marinier  e  maistre  P.  Eslassi.  Empero  maistre  B,  Raynaut 
recitet  la  carta.  Et  es  a  ssaber  que  en  aquel  an  cran  cossolz 
maistre  Domerane^  de  Cucuro,  maistre  en  medccina,  scn  P, 
Laierety  canabassier,  sen  Guillem  Conort,  parayre,  sen  Andrieu 
Rama,  lauraire,  e  sen  Ramon  Yvern,  peyralier.  E  fouc  azorde- 
nat  per  lo  grant  coiiselh,  que  hom  dones  e  présentes  al  dig 
mossenhor  lo  avesque  quant  fora  pausat  lo  raust  entro  a  xx 
G  a  xviii  marx  de  argent  obrat,  de  que  los  senhors  sobre  ditz 
cossolz  compreron  dotze  tassas  obradas,  que  pezavan  entre 
totas  entorn  quinze  marx,  que  costava  lo  marc  de  las  siejs  set 
franx  e  mieg,  e  de  las  autras  siejs  set  franx,  quar  en  las  siejs 
non  avia  de  obratge.  E  majs  Ihi  presenteron  ab  las  dichas  xii 
tassas  liun  gobel  daurat,  ab  sa  cuberta,  e  ben  hobrat,  que 
pezava  très  marx,  e  costava  lo  marc  detz  iibras,  dos  solz,  siejs 
deniers  torues. 

•  Les  feuilles  93  et  91  du  manuscrit  Bont  en  blanc. 

'  Il  y  a  là  sans  doute  uae  faute  du  copiste  ;  il  faut  lire  :  estranh, 

^  La  dernière  syllabe  du  nom  est  d'une  autre  main. 


100  LE   «  LIBRE   DE   M  E  MO  RI  A  S  » 


II 


L'an  Miii^  e  xv,  divenres  a  vu  de  junh,  fes  eclipsi  que 
tornet  lo  die  nueg,  e  vit  hom  las  stelas  en  lo  cel,com  si  fos  de 
tôt  nueg;  estet  a  passar  lo  solelh  sos  la  luna,  que  fouc  novela 
aquel  die  a  hora  de  vi  horas  de  jorn,  ben  Tespari  de  m.  quart 
de  hoza  en  scurtat;  e  fouaben  freg  lo  temps  ;  e  fouc  lo  signe 
cranc. 

Item  en  Tan  desus  dig,  a  xv  de  ahost,  venc  en  Bezes  Tera- 
perador,  lo  quai  avia  nom  Seguimon,  et  ajsso  perfar  la  unio 
de  santa  glieya;  et  aquel  jorn  partie,  et  anet  jazer  aNarbona, 
et  aqui  tenc  son  cosselh,  e  lo  senhor  emperador,  aven  pre- 

guarias  dels  senhors  consenhors  de  Perpinha,  que  el  ^ 

[93  V.].  E  cant  fouc  de  part  de  la,  y  fouc  lo  senhor  rey  de 
Araguo,  am  très  donas  reginas,  so  es  a  ssaber  :  la  regina 
Violan,  e  la  regina  Marguarida,  e  la  regina  molher  del  senhor 
rey  e  fouc  alotgat  en  Torde  delz  frayres  menos,  e  mossenhor 
P.  de  Luna  al  castelh  de  Perpinha,  ont  el  y  avie  per  sa  guarda 
mot  grans  gens  d'armas  de  sasanh  et  autres;  et  entre  venc  y 
molt  gran  scandol  que  los  Catalas  feron  et  aussigron  de  gens 
d'un  senhor  avesque  trames  al  cosselh,  que  era  de  Castela, 
ont  cremeron  hun  hostal  en  lo  dig  loc  de  Perpinha,  e  de  las 
gens  en  que  eran  alutgatz,  que  fouc  jutgat  a  paguar,  per  lo 
dampnatge  que  si  fes,  xxx  melia  floris,  dont  mot  stet  esbayt 
lo  senhor  emperador,  e  fec  arma  ben  e  tostz  sas  gens  d'armas, 
cum  si  entresso  en  batalha  arenguada,  tro  que  ac  novelas  del 
rey  de  Araguo  bonas,  que  non  ly  qualia  ponh  aver  (a)neguna 
pavor  de  re  ;  et  aqui  fes  mot  gran  procès  del  fag  de  la  unio 
de  santa  glieya  am  mossenhor  P.  de  Luna,  e  non  y  fes  negun 
aponhiamen  que  hom  sertanamen  ne  pogues  saber  sertana 
causa.  Et  aqui  venc  lo  compte  de  Armanhac,  et  après  venc  lo 
compte  de  Foix  et  autres  baros  ;  e  cant  aqui  agron  pro  stat,  lo 
senhor  emperador  s'en  tornet  a  Narbona,  a  vi  de  novembre. 

(A  suivre.)  Ch.  Barbier. 

^  Cette  deuxième  pièce,  dont  le  commencement  est  sur  la  même  page  que  la 
précédente,  n'en  est  séparée  que  par  un  léger  intervalle  en  blanc;  comme  la 
précédente,  elle  ne  porte  pas  de  titre  ;  elle  est  d'une  écriture  bien  différente, 
beaucoup  moins  régulière,  beaucoup  plus  difficile  à  déchiffrer. 

2  La  feuille  du  manuscrit  a  été  rognée  de  telle  sorte  qu'une  ou  plusieurs 
lignes  ont  été  enlevées. 


NOTES  DE  PHILOLOGIE  ROUERGATE 


TABLE  DES  NOTES 

AVEC  SOMMAIRE,  CORRECTIONS  ET  ADDITIONS 


Note  I.  —  T.  VII  (1882),  p.  62 

Sommaire.  —  Double  traitement  des  J,  s,  t  primitifs  entre  deux 
voyelles,  donnant  lieu  à  une  série  de  doublets  dont  il  est  produit  de 
nombreux  exemples.  —  Genèse  phonétique  de/àw,  je  fais,  et  de/âw, 
ils  font  ;  de  vàuy  je  vais,  et  vàu,  ils  vont. 

Corrections,  —  A  la  page  63,  dernier  alinéa,  lire:  BosX.s  et  BoXs, 
au  lieu  de  :  bossa  et  Bosa.  —  Page  66,  ligne  2  de  la  note,  lire  :  assu. 
rément,  au  lieu  de  :  assuréméent. 

Additions,  —  Page  66,  entre  les  exemples  n''  9  et  n°  10,  introduire 
le  suivant,  sous  le  n**  9  bis:  crus,  crusa,  et  cru,  crua,  adj.,  du  lat. 
crudus,  a.  —  P.  68,  à  la  fin  de  la  page,  en  note,  il  est  dit  :  «  estau, 
avec  a  ouvert  pour  la  l^^  personne  du  singulier,  et  estau  avec  a  fermé 
pour  la  3®  du  pluriel,  sont  entièrement  oubliés.  »  A  cette  remarque 
il.  convient  d'ajouter  que  la  3^  personne  du  singulier  de  l'indicatif 
présent,  estai,  hors  d'usage,  s'est  conservée  dans  le  proverbe  suivant  : 

Que  trepa,  leca, 
Qu^estai,  seca. 

Note  II.  —  T.  VII  (1882),  p.  71 

Sommaire.  —  Discussion  sur  les  formes  jumelles  vila,  vïlar  et 
nala,  vïalar,  —  Autres  doublets  analogues  en  il  et  ial. 

Corrections.  —  P.  74,  avant-dernier  alinéa,  au  lieu  de  :  Ce  type 
ioZ,  lire  :  Le  type  iol. 

Note  III.  —  T.  VII  (1882),  p.  218 

Sommaire,  -—  Dissertation  sur  l'étymologie  du  mot  trahalh,  fr.  tra- 
vail. 

Correction.  —  P.  219,  3e  alinéa,  au  lieu  de  :  An  American  Dic- 
tionary  ofthe  englisk  language,  lire  :  An  American  Dictionary  of  the 
English  language. 

7 


I 


102  NOTES 

Note  IV.  —  T.  VIII  (1882),  p.  221 

Sommaire.  —  Analyse  de  proverbes  rouergats  à  double  sens  dont 
on  obtient  le  sens  caché  en  restituant  à  certains  de  leurs  mots  Vn 
terminale  caduque,  tombée  dans  les  parlers  du  Kouergue,  mais  qui 
existe  encore  dans  les  patois  de  l'Elst.  Cette  particularité  phonétique 
date  les  dictons  auxquels  elle  appartient  en  fixant  leur  origine  avant 
l'époque  très  reculée  de  la  chute  de  la  lettre  en  question. 

Addition.  —  P.  225,  2®  alinéa.  Ajouter,  à  ce  qui  est  dit  du  nh 
terminal,  que  dans  certains  patois,  notamment  celui  du  Gers,  il  pos- 
sède encore  sa  prononciation  première  de  n  mouillée.  Ainsi  on  y  dit 
castanh,  en  donnant  à  nh  le  même  son  que  dans  Castanha,  et  comme 
nom  propre  on  l'écrit  aujourd'hui  Castaing,  tandis  qu'en  Rouergue  le 
même  mot  s'écrit  de  nos  jours  Castan. 

NoTB  V.  —  T.  VIII  (1882),  p.  20 

Sommaire.  —  De  certains  diminutifs  épenthétiques  en  oeit  pour  oet. 
—  Les  verbes  torrelhar  et  eslorrelhar. 

Correction.  —  P.  21,  note,  au  lieu  de:  extorricaîare,  lire:  extorri- 
culare  ;   et,  au  lieu  de  :  èstoiTUCulare,  lire  :  extorruculare. 

Note  VI.  —  T.  VIII  (1882).  p.  21 

Sommaire.  —  Discussion  du  jugement  de  M.  P.  Meyer  sur  les 
racines  romanes  cail  et  cair.  —  Cailus  et  cailar,  de  casthis  et  ca^st- 
lar  par  caslus  et  caslar,  variante  barbare  de  castellus  et  castelîar,  qui 
a  dû  prendre  naissance  parmi  les  habitants  d'origine  germaine. 

Note  VII.  —  T.  X  (1883),  p.  157 

Sommaire.  —  Caire,  au  sens  de  rocher  fortifié  et  de  château-fort, 
n'est  pas  le  même  mot  que  caire  signifiant  carreau.  Ce  dernier  procède 
dn  latin  quadrum;  le  premier  tire  son  origine  du  celtique,  où  l'on 
observe  kaer  avec  la  même  signification,  —  Preuves  à  l'appui  de 
de  cette  thèse. 

Note  VIII.  —  T.  X  (1883),  p.  159 

Sommaire,  —  Doublets  par  différence  de  position  de  l'accent  toni- 
que, et  doublets  par  concurrence  de  contraction  et  de  non-contraction, 
sans  difiiérence  de  tonalité.  —  Ces  dichotomies  phonétiques  ne  peu- 
vent s'expliquer  que  par  Thypothèse  de  la  superposition  de  deux 
romans  contemporains,  tous  deux  directement  issus  du  latin,  mais 
parlés  par  des  catégories  sociales  distinctes,  l'un  étant  à  l'usage  des 
hautes  classes,  l'autre  de  la  classe  inférieure. 


DE   PHILOLOGIE  ROUERGATE  103 

Note  IV.—  T.  X  (1883),  p.  210 

Sommaire.  —  Étude  sur  les  noms  d'arbres  et  d'arbustes  et  leurs 
collectifs  de  divers  types  observés  dans  le  rouergat. —  Une  nouvelle 
étymologie  du  mot  garric,  chêne.  —  Inductions  sur  l'histoire  agricole, 
économique  et  politique  du  pays  tirées  des  collectifs  d'arbres  usités 
à  diverses  époques. 

Corrections.  —  P.  215,  2e  alinéa,  2®  ligne,  au  lieu  de;  besoniia, 
lire  :  besonia.  —  P.  220,  fin  de  la  page,  au  lieu  de: 

La  penche  de  bois 
A  la  rusca  se  conoit. 
lire  : 

La  pcDche  de  bois 
A  la  rusca  se  cooois. 

P.  226, 2e  alinéa,  Se  ligne,  au  lieu  de  :  fagcta,  lire  :  fageta .  —  P.  230, 
fin  de  la  page,  au  lieu  de: 

Quod  natura  est 
S'arraba  pas  com'  un  ginest. 
lire  : 

Quod  natura  est 
S'arra  pas  coma  'n  ginest. 

P.  238,  5«  alinéa,  au  lieu  de:  visus  est  mancere,  lire:  vlsus  est 
manere. 

Dans  le  tableau  synoptique  : 

lie  mot  de  la  l'e  colonne,  au  lieu  de  :  acklaris,  lire  :  aceralis  ;  — 
17«  mot  -de  la  l'«  col.,  au  lieu  de  :  XURUS,  lire  :  buxus  ;  —  19*  et 
20«  mots  de  la  7«  colonne,  au  lieu  de  :  Fraissinet  Fraxinetum,  lire  : 
Fraissinet  (?)  Fraxinetum  (?)  ;  —  22®  mot  de  la  5®  colonne,  au  lieu 
de  :  Mespularium,  lire  :  Mespularium  (?)  ;  —  2«  colonne,  à  la  suite  du 
mot  RUMEX  de  la  1^*  colonne,  ajouter  Ruhus  ;  —  7"  colonne,  au  lieu 
de:  Tremolet  TremuUtum,  lire:  Tremolet(?)  Tremuletum  (?) 

Additions.  —  P.  212,  au  6®  alinéa,  il  est  dit:  «  Le  français  litté- 
raire moderne  n'a  pas  l'homonyme  de  notre  albar  et  de  ses  dérivés.  » 
Il  convient  de  compléter  cette  observation  en  ajoutant  que,  d'après 
Littré  (au  mot  Aubier),  le  vocabulaire  berrichon  a  aubier  avec  le 
même  sens  que  le  rouergat  albar  ou  aubar,  —  P.  215,  2«  alinéa, 
ajouter  au  mot  besonîa,  comme  autre  exemple  de  dérivés  de  bes,  le 
moi  Besbna  (par  o  ouvert),  nom  d'un  village  des  environs  de  Rodez. 
—  Deux  lignes  plus  bas,  je  cite  le  mot  Besorg,  en  déclarant  que  je  ne 
puis  l'expliquer  ;  je  crois  que  l'explication  s'offre  dans  un  primitif 
latin  possible  betionicum.  —  P.  217,  4®  ligne,  ajouter  que  le  mot  Bes- 


104  NOTES 

8ola  est  par  o  ouvert.  —  P.  228,   à  la  12«  ligne  du  2®  alinéa,  après 

Euthenensis j  ajouter  :  farrar,  atarrar,  jaîar,  pour Et  après  ces 

mots  ajouter  comme  autres  exemples  :  Clamens  et  Clamensa  pour 
Clemens  et  Clemensa,  —  P.  231,  dernière  ligne,  ajouter  que  dans 
mespola,  nespola,  Vo  est  fermé. 

Note  X.  —  T.  XI  (1884),  p.  77 

Sommaire, —  De  diverses  causes  de  corruption  phonétique. — Réac- 
tions différenciatrices  des  parlers  en  contact  s'exerçant  de  l'un  sur 
l'autre  (corruption  des  bs,  chs,  es,  ds,  ps,  ts,  x,  organiques  en  ch  ;  —  id, 
du  suffixe  iâ  =  lat.  ianus,  en  ier;  —  id.  de  ou  organique  en  au;  — 
id.  de  oa  organique  en  o  ouvert  ;  — id.  de  obbe  =  oc  be,  en  apé; —  id.  de 
la  voyelle  française  eu  en  u,  et  consécutivement  de  la  v.  îr.ueneu  dans 
la  prononciation  du  français  chez  les  hommes  de  langue  d*oc  ;  —  sub- 
stitution du  ba,uv,  et  consécutivement  du  v  au  6  chez  les  mêmes  gens 
de  langue  d'oc  dans  leur  prononciation  française).  —  Influence  de  la 
rédaction  française  sur  l'orthographe  de  la  langue  d'oc  chez  les  scri- 
bes bilingues  du  xvi«  siècle.  —  La  grande  différence  que  l'on  croit 
observer  entre  le  provençal  écrit  du  xvi«  siècle  et  nos  patois  à  par- 
tir du  xvii®  siècle  est  une  pure  illusion  résultant  de  ce  que  les  vieux 
textes  provençaux  sont  lus  par  nous  à  la  française,  c'est-à-dire  bien 
autrement  qu'ils  n'étaient  lus  par  les  «  Provençaux  »  contemporains, 
et  que  d'un  autre  côté,  quand  nous  écrivons  nos  patois,  c'est  également 
à  la  française,  c'est-à-dire  avec  une  orthographe  tout  autre  que  celle 
qui  leur  aurait  été  appliquée  par  les  vieux  Provençaux. 

Corrections.  —  P.  80,  dernier  alinéa,  au  lieu  de  :  excellents,  lire  : 
excellent, —  P.  81,  3®  ligne,  au  lieu  de  acaptar,  lire  :  acapsar, —  P.  83, 
13®  ligne,  au  lieu  de  :  le  féminin  bizarre ,  lire  :  ce  féminin  bizarre. — 
P.  88,  12«  ligne,  au  lieu  de  :  les  mots  à  la  provençale,  lire  :  ces  mots 
à  la  provençale. 

Note  XI.  —  T.  XI  (1884),  p.  189 

Sommaire  :  Formation  des  mots  Roergue  (Rouerg^e)  et  Roergas, 
et  de  leurs  analogues  Auvemhe  et  Auvernhas.  —  Le  mot  Rosergas, 
lu  Rosengas  par  M.  P.  Meyer,  et  laissé  en  blanc  dans  sa  traduction 
de  Flamenca .  —  L'histoire  et  l'anthropologie  du  Rouergue  éclairées 
par  la  philologie.  —  Solution  du  problème  anthropologico-historique 
du  contraste  entre  le  type  moyen  de  la  population  française  moderne 
et  le  portrait  classique  du  Gaulois. 

Corrections  et  additions  :  P.  189,  15©  ligne,  au  lieu  de:  introduit, 
lire:  intraduit.  —  P.  193,  7«  vers  de  la  citation,  au  lieu  de:  cinq, 
lire  :    cinc.  —  P.  194,    3«  alinéa.    Ce  qui  est  dit    de   l'acception 


DE  PHILOLOGIE   ROUERGATE  105 

première  de  Roergue  comme  adjectif  s'appliquant  aux  habitants  et 
choses  du  pays,  ainsi  qu'au  pays  lui-même,  trouve  une  confirmation 
intéressante  dans  le  mot  rudergue  employé  dans  la  partie  septen- 
trionale du  département  de  l'Hérault  pour  désigner  le  vent  du  Nord. 
Cet  exemple  établit  l'emploi  d'une  variante  de  Roergue  comme  adjec- 
tif, et  cette  variante  est  remarquable  d'ailleurs  en  ce  qu'elle  nous 
offre  une  forme  intermédiaire  entre  le  prototype  latin  rutenicus  et  la 
forme  rouergate  la  plus  archaïque,  rosergue,  forme  intermédiaire 
où  la  dentale  primitive  existe  encore  quoique  adoucie.  Enfin  cette 
variante  est  digne  d'intérêt  en  ce  qu'elle  diverge  de  la  filiation  de 
roergue,  Vu  de  rutenicus  y  étant  resté  m,  tandis  qu'il  s'est  transformé 
en  0  dans  notre  mot  indigène.  —  Même  page,  dernières  lignes,  il  est 
dit  que  Auvernhas  est  formé  d'un  adjectif  primitif,  auvemhe,  répon- 
dant à  un  prototype  latin  arvemius.  Cette  hypothèse  se  trouve  véri- 
fiée par  les  mots  suivants  de  la  Charte  vi®  (année  930)  du  Cartu- 
laire  de  l'abbaye  de  Conques  :  in  pago  arvemio . 

Note  XII.  —T.  XII  (1884),  p.  226 

Sommaire  :  Les  mots  hrôa  et  randa  et  leurs  origines . 
Correctum  :  P.  227,  6®  ligne,  au  lieu  de  :  english  language,  lire  : 
English  kmguage. 

Note  XIII.  —T.  XIII  (1885),  p.  85 

Sommaire  :  Noms  propres  de  langue  d'oc  transformés  en  génitifs 
latins.  —  Noms  propres  de  langue  d'oc,  d'abord  fiancisés,  et  puis 
ramenés  au  provençal  par  une  fausse  interprétation  qui  les  défigure . 
—  Noms  propres  de  langue  d'oc  passés  dans  le  français  avec  une 
fausse  orthographe,  résultant  de  ce  que,  au  lieu  d'être  transcrits  d'après 
leur  orthographe  provençale,  ils  ont  été  écrits  sur  audition  par  des 
plumes  a  françaises  »  sous  la  dictée   de  bouches  «  provençales  » . 

Addition:  P.  85,  aux  exemples  de  noms  rouergats  sous  forme  de 
génitifs  latins,  ajouter  les  suivants  :  Bertrandy  (Bertrandi),  pour 
Bertrand  ;  Casàlis,  pour  Casai  ;  Comitis,  pour  Comte  ;  Dominici,  pour 
Domergue;  Fabry  (Fàbri),  pour  Fabre;  Fauvety  (Fouvéti),  pour 
Fouvet  ;  Marcilhacy  (Marcilhàci),  pour  Marcilhac  ;  Maurandy  (Mau- 
ràadi),  pour  Maurand. 

Note  XIV.  —  T.  IV  (-1885),  p.  44 
Sommaire  :  Étymologie  du  mot  marrà. 

Note  XV.  —  T.  XIV  (1885),  p.  44 

Sommaire  :  Les  mots  lerla  et  Revoit,  Revàlta,  de  la  toponymie 
cadastrale  du  Rouergue  ;  leur  origine  et  leur  formation . 


106  NOTES 

Correction  :  P .  46,  les  deux  vers  qui  terminent  la  page  ne  doivent 
en  faire  qu'un  ;  on  doit  donc  lire  : 

Tan  l'exemple  del  raestre  entancha  les  variais. 

Notes  XVI  et  XVII.  —  Avril -mai-juin  1887,  p.  296 

Sommaire  :  Réponse  à  des  diatribes  de  M.  P.  Meyer.  — Substantifs 
rouergats  en  o  fermé  atone  ;  ils  paraissent  être  d'origine  espagnole. — 
Les  Rouergats  savent  distinguer  Tun  de  l'autre,  dans  les  mots  espa- 
gnols, l'o  et  l'a  atones  désinentiels  ;  ils  les  prononcent  respective 
ment  comme  o  et  a  fermés,  ce  qui  prouve  que  l'a  fermé  provençal  a 
un  son  distinct  de  Vo  vrai  et  qu'il  ne  doit  pas  être  exprimé  par  ce 
signe.  —  L'auteur  revendique  la  priorité  de  l'assimilation  de  Vo 
estrech  des  grammaires  provençales  à  Vou  de  la  graphie  des  patoisants 
et  félibres.  —  Réplique  à  M.  P.  Meyer  au  sujet  de  sa  leçon  Rosengas 
pour  Rosergas.  —  Rudergue,  variante  de  Roergue,  encore  employé  . 
comme  adjectif.  —  Discussion  avec  M.  C.  Chabaneau,  à  propos  du 
mot  rudergue^  sur  les  transformations  de  Vo  et  de  Vu  latins  dans  le 
provençal . 

Corrections  :  P.  301,  15«  ligne,  au  lieu  de  :  le  c  dur,  lire  un  c  dur. 

—  P.  308,  5®  ligne,  au  lieu  de  :  exiologiques,  lire  :  lexiologiques .  — 
P.  305,  4«  alinéa,  au  lieu  de:  Cadurceus,  lire  :  Cadurciens. 

Note  XVIII.  —  4«  Série,  T.  III  (1889),  p.  45 

Sommaire  :  Examen  critique  de  la  thèse  de  MM.  Paul  Meyer  et 
Gaston  Paris  de  la  non-existence  de  dialectes  dans  le  gallo-roman. 

—  D'après  ces  auteurs,  il  n'y  a  pas  de  langues  filles,  il  n'y  a  pas  de 
langues  mères,  et  le  gallo-roman  est  une  masse  linguistique  com- 
pacte, indivisible  en'dialectes,  qui  ne  se  déversifie  d'un  lieu  à  un 
autre  que  par  des  «  traits  linguistiques  »  discordants.  Ces  proposi- 
tions sont  démenties  par  l'observation,  et  l'on  peut  dire  d'ailleurs 
que  si  elles  étaient  vraies  elles  seraient  également  applicables  à  tous 
les  groupes  de  langues,  et  aussi  à  l'histoire  naturelle,  chez  qui  toute 
tentative  de  classification  serait  dès  lors  chimérique.  —  C'est  le  latin 
classique  seul  qui  s'est  établi  dans  les  Gaules,  c'est  par  les  hautes 
classes  seules  qu'il  a  été  d'abord  employé,  et  c'est  d'elles  qu'il  est 
passé  plus  tard  au  peuple.  —  Le  germanique  de  l'invasion  a  eu  au 
contraire  son  premier  contact,  en  Gaule,  avec  les  masbes  rurales,  et, 
simultanément  ou  successivement,  par  ses  différents  dialectes  de  peu- 
plade. —  Qu'est-ce  qu'une  langue,  et  qu'est-ce  qu'un  dialecte?  — 
Langues  génériques  et  langues  individuelles.  —  La  langue  latine  est 
la  mère  des  divers  idiomes  romans,  et  la  langue  romane  en  est  le 
genre,  dont  ces  idiomes  sont  les  espèces  ou  les  individus.  —  Dialec- 


DE  PHILOLOGIE  ROUERGATE  107 

tes  chronologiques  ou  dans  le  temps,  et  dialectes  géographiques  ou 
dans  Tespace.  —  Chacun  des  dialectes  géographiques  du  gallo-roman 
dérive  du  latin  par  une  ligne  directe  et  distincte  à  lui  propre  ;  ils 
sont  enti'e  eux  dans  un  rapport  de  parenté  purement  collatérale,  et  ne 
peuvent  par  conséquent  pas  se  prêter  à  une  classification  généalogi  - 
que.  —  Exemples  de  classification  généalogique  dans  les  langues. 

MM-  P.  Meyer  et  G.  Paris  soutiennent  que  les  «  traits  linguisti- 
ques »  ne  coïncident  jamais  avec  «  les  limites  anciennes  ou  moder- 
nes )>;  faits  à  l'encontre  de  cette  assertion,  principalement  tirés  de 
l'histoire  linguistique  du  Rouergue.  —  Un  atlas  de  différents  traits 
phonétiques  dont  les  cartes  ont  été  dressées  par  l'auteur  il  y  a  qua- 
rante ans.  Ces  cartes  sont  consacrées  aux  traits  phonétiques  sui- 
vants :  1<*  lat.  CA,  GA,  =  ca,  ga,  et  ^  cha,ja;  2^  lat.  ct  z=  ch  et  = 
it;  3«  lat  V  =  V  et  =  &  ;  4°  lat.  f  =/  et  =  ^. /  5°  prov.  ch.j\  =  ch, 
j  et  =  t8  ;  6°  prov.  o  lare  ^  uo  et  =  io.  —  Particularités  caracté- 
ristiques du  rouergat  et  de  ses  diverses  variétés  locales.  —  Reprise 
de  la  question  de  cailar  et  cailus,  et  des  influences  locales  du  ger- 
manique. —  Liste  de  noms  germains  de  femme  relevés  d'après  les 
vieilles  chartes  rouergates. 

Réponses  de  MM.  P.  Meyer  et  G.  Paris  aux  critiques  de  l'auteur, 
et  réplique  de  ce  dernier. 

Corrections.  —  P.  267,  avant-dernière  ligne,  au  lieu  de:  Tun  de 
l'autre,  lire:  l'une  de  l'autre. —  P.  280,  l*"®  et  2«  ligne,  au  lieu  de: 
féminime,  lire  :  féminine.  —  Même  page,  11« ligne,  supprimer  la  pre- 
mière virgule.  —  P.  437,  1'®  ligne  de  la  note  2,  supprimer  la  pre- 
mière virgule.  —  P.  444,  17®  ligne,  au  lieu  de  :  fut  portée,  lire  :  fut 
parlée.  —  Même  page,  24«  ligne,  au  lieu  de  :  des  manses  les  plus  écar- 
tées, lire  :  des  raanses  les  plus  écartés. 

Additions.  —  P.  278,  3*^  alinéa,  mentionner  encore  comme  trait 
caractéristique  du  parler  local  la  corruption  de  la  désinence  ia  en  ié, 
donnant,  par  exemple,  àhadié  pour  ahadia,  malautié  pour  malautia 

P.  437,  aux  exemples  du  suffixe  uss  (en  note)  énumérés  ajouter  les 
suivants:  cantussier^  lutrin,  qui  suppose  un  verhe,  cantussar,  lat. 
caniutiare,  fréquentatif  de  cantare,  qui  se  rencontre  en  composition 
dans  le  rouergat  cantussejar,  chsintonner  ;  capussat,  participe  passé,  se 
disant  pour  huppé,  par  allusion  de  la  tête  du  chapon,  capô,  qui  est 
garnie  d'une  touffe  de  plumes  au  lieu  de  crête. 

P.  440,  une  rectification  et  une  addition  sont  à  faire  au  passage 
relatif  à  la  contraction  du  lat.  vetulum  en  veclum.  Il  paraît  que 
VAppendix  Probi,  que  j'ai  cité  d'après  Litlré,  n'est  pas  do  Probus,  ce 
que  j'aurais  dû  voir  tout  d'abord,  et  que  cet  appendice  daterait  du 
III®  siècle.  Incompétent  sur  ces  questions  d'érudition,  je  me  bornerai 


108  NOTES 

à  faire  observer  que  plus  le  texte  dont  il  s'agit  est  ancien,  et  plus  il 
vient  à  l'appui  de  ma  thèse  comme  quoi  le  groupe  tl  répugnait  à  la 
phonétique  latine,  et  non  pas  seulement  à  la  phonétique  gallo-romane. 
Cela  dit,  voici  une  autre  observation  qui  me  paraît  intervenir  à  propos, 
c'est  que  dans  les  langues  romanes  de  l'Occident  (j'ignore  ce  qu'il  en 
est  du  moldo-valaque)  les  métaphonies  de  vetuhis  visent  toutes  une 
forme  intennédiaire  vecîus,  témoins  l'ital.  recchio  et  le  castil.  viejo, 
respectivement  formés  à  l'instar  de  occhio  ci  ojo,  de  ocw^w»,  tout  comme 
le  prov.  vielh  et  le  fr.  vieil,  analogues  de  uelh  et  œil. 

Les  mots  cailar  et  caïlus,  sur  lesquels  j'ai  glosé  dans  les  Notes  VI 
et  XV m,  appellent  encore  quelques  observations.  Ces  deux  mots 
constituent  un  phénomène  de  tératologie  linguistique  des  plus  remar- 
quables, digne  d'une  étude  approfondie.  J'ai  constaté  que  cette 
curieuse  anomalie  ne  se  montre  que  sur  le  territoire  de  la  langue 
d'oc  et  même  que  sur  une  section  restreinte  de  ce  territoire.  Partout 
ailleurs  les  mêmes  mots  se  retrouvent  sous  leur  forme  normale,  qui 
est  ca^^^r  et  castelua  pour  le  domaine  provençal,  cJiâtelier  et  châtelux 
pour  le  domaine  français  ;  et  l'italien  et  l'espagnol,  qui  ne  les  ont 
pas  seulement  conservés  comme  noms  propres  de  lieu,  mais  les  possè- 
dent jusqu'à  présent,  du  moins  partiellement,  dans  le  vocabulaire  de 
la  langue,  nous  offrent,*le  premier,  castellnre  et  castelluccio,  le  second, 
casiellar  seulement.  On  a  contesté  que  le  Châlelier  des  pays  français 
répondît  à  notre  Castelar,  c'est-à-dire  au  lat.  castellare,  en  se  fondant 
sur  ce  que  la  désinence  française  ier  procède  du  suffixe  latin  arius. 
D'après  cette  opinion,  Châtelier  procéderait  do  castellarius.  A  cela 
je  répondrai  d'abord  que  castellarius,  dans  Du  Gange,  a  la  significa- 
tion de  châtelain  :  «  Castellarius,  Ugotioni,  Dominus  Castri,  velqui 
prœest  castris.  »  En  second  lieu,  je  ferai  observer  que  le  suffixe  lat. 
aris  fait  le  plus  souvent  ier  en  français  ;  témoins  :  aubier,  de  albaris  ; 
collier,  de  collare  ;  familier,  de  familtaris  ;  sanglier  et  singulier, 
de  siNGULARis  ;  soulier,  de  subtelaris  ;  villier,  de  yillare. 

Le  dictionnaire  de  Raynouard  cite  un  texte  provençal  du  xiii® 
siècle  où  castelar  et  caslar  figurent  concurremment  comme  deux 
mots  de  signification  distincte  :  «  E'I  caslar  e'I  castelar  (Arch.  du  Roy. 
J.  323).  ))  Je  vois  là  un  nouvel  indice  à  relever  à  l'appui  de  ma 
thèse  comme  quoi  les  formes  anomales  caslar  et  caslus  seraient  des 
barbarismes  romans  de  facture  germaine.  On  peut  très  pi ausiblement 
supposer  que  castelar,  dénaturé  en  caslar  par  les  Barbares,  fut  en 
même  temps  détourné  par  eux  de  sa  signification  rigoureuse,  qui  était 
celle  d'un  adjectif  employé  substantivement,  et  désignant  ce  qui 
appartient  au  Castellum,  ses  appartenances,  ses  diverses  fortifications. 
«  Castellare,  castrum,  ipsa  castelli  munitio  »,  dit  Du  Cange.  les 
Barbares,   en  ceci  comme  dans  nombre  d'autres  cas,  n'ayant    pas 


DE  PHILOLOGIE  ROUERGATE  109 

saisi  la  nuance  des  appellations  latines,  auront  appliqué  à  l'habitation 
du  fort,  au  château  proprement  dit,  ce  qui  se  disait  de  l'ensemble 
(les  fortifications  environnantes  ;  puis  le  mot,  ainsi  altéré  par  eux  de 
façon  à  rendre  son  identification  avec  le  type  original  difficile,  aura 
été  accepté  par  les  «  Romains  »  comme  une  expression  tudesque,  telle 
que  la  sala,  qui  a  à  peu  près  la  même  acception,  et  les  deux  termes 
castelar  et  caslar,  qui  n'en  formaient  d'abord  qu'un  seul,  auront 
ainsi  vécu  côte  à  côte,  chacun  avec  son  usage  propre. 

Il  est  à  remarquer  que  nos  Cailar,  Cailua  (Caylar,  Chaylar,  Caylus, 
Chaylus)  se  présentent  invariablement,  dans  les  textes  les  moins  an- 
ciens du  moyen  âge,  à  l'état  de  caslar^  caslus,  qui  ne  se  rencontre  plus 
dans  la  prononciation  actuelle. 

J.-P.  Durand  (de  Gros). 


DEUX  POÉSIES  EN  PATOIS  NORMAND 


Notre  confrère,  M.  Henri  Bsiilleul,  docteur  en  droit,  directeur  de  la 
4«  circonscription  pénitentiaire,  à  Rouen,  nous  communique  les  pièces 
suivantes  en  patois  normand  contemporain . 

Elles  sont  l'œuvre  d'un  vieux  curé  né  en  1803,  mort  il  y  a  quelques 
années  à  peine.  L' une,  !&  Notre-Dame  d^Auti-etot,  composée  vers  1830, 
est  une  poésie  réellement  populaire,  véritable  photographie  des 
réjouissances  en  usage  dans  la  plupart  des  villages  lors  des  fêtes 
patronales,  assemblées  en  Normandie,  pardons  en  Bretagne,  Ker- 
messes dans  les  pays  flamands,  voto  en  Provence,  festas  tout  court 
dans  une  grande  partie  du  Languedoc. 

L'autre,  composée  vers  1847,  pour  la  fête  d'un  confrère  de  l'auteur, 
est  une  œuvre  littéraire,  moins  intéressante  à  la  rigueur  pour  les  lec- 
teurs de  notre  Revue,  mais  qui  montre  avec  quelle  facilité  l'auteur 
avait  su,  dans  un  sujet  plus  sérieux,  s'assimiler  la  langue  populaire. 

A.  E. 


LA  NOTRE-DAME  D'AUTRETOT 

(Vers  1830) 

Air  :  la  Comète. 

La  Noter-Dame  d'Autertot 
Est  eunne  superbe  assemblaye  ! 
Lés  pu  grands  Yiolonnneux  d'Yv'tot 
Et  lous  les  râcleux  d'ia  tornaye 

Y  violonnent  si  bien 
Q'cha  vo'  z'enleuve  (bis)  ; 

Y  violonnent  si  bien 

Q'cha  vo  met  tout  le  monde  en  train  ! 

La  veuiir  lès  homm*  vont  cheux  Tboucher 
Fair'  couper  gigots  et  cot'lettes  ; 
De  là  no  s'rend  cheux  l'épicier. 
Pou'  l'café  no  fait  ses  emplettes. 


DEUX  POESIES  EN  PATOIS  NORMAND  1 1 1 

L'  marchand  qui  n'en  revient  point 
Dit  :  «  Cha  m'enleuve  (bis),  d 
L'marchand  qui  n'en  rVient  point 
Dit  :  ((  Cha  m'enleuv',  tant  q'cha  va  bien  !  » 

N'y  a  point  besoin  d'avé  d'iergent* 
I  suffit  d'êt'  eunn'  vieull'  pratique  ; 
L'marchand  est  oco  bien  cotent 
D'vo  vair  choisi  dans  sa  boutique. 

No  dit  :  «  Ecrisez  cha.  »    • 

Pi  no  z'enleuve  (bis) 

No  dit  :  «  Ecrisez  cha  : 
L'ergent  viendra  quantt  cha  s'pourra.  » 

Pendant  cha,  la  maîtresse,  au  four, 
Pétrit  des  gatiaux,  des  galettes  ; 
E  chaque  marmot,  à  son  tour, 
Veut  des  douillons  et  des  boulettes. 

No  cuit  du  galuchon 

Qui  vo'  z'enleuve  (bis); 

No  cuit  du  galuchon 
Qui  vo'  z'enleuv'  tant  qu'cha  sent  bon  ! 

Le  jou'  d'ia  faîte,  un  bon  daînné 
Met  en  gaîté  chaque  famille, 
No  prend  un  bon  quart  ed'café 
Pi  dans  les  verr'  l'iau  dVie  pétille  ; 

Quand  cha  vient  à  passer 

Cha  vo'  z'enleuve  (bis) 

Quand  cha  vient  à  passer, 
Cha  z'enleuv'  la  piau  du  gosier. 

Cha  n'est  pas  tout,  i  faut  danser, 
Car,  sans  la  dans'  n'iérait  point  de  faîte  ; 
Stilà  qui  voudrait  s'en  passer 
S'rait  bien  sûr  d'en  pédre  la  taîte. 

C'te  flûte,  ces  violons 

Cha  vo'  z'enleuv'  (bis); 

C'te  flûte,  ces  violons, 
Cha  vo'  z'enleuv'  fill'  et  garchons. 


112  DEUX  POÉSIES  EN   PATOIS  NORMAND 

C'est  là  q' chacun  mont'  sen  talent, 
Surtout  quanttno  dans'  la  gavotte. 
Noz  est  joyeux,  noz  est  cotent, 
L'moins  dégourdi  s'y  ravigotte  ; 
Mais  quantt  no  crie  «  l'galot  »  ! 
Cha  vo*  z'enleuve  (bis) 
Mais  quantt  no  crie  «  Tgalot  «  ! 
Cha  vo*  z'enleuve  !  no  va  l'grand  trot. 

Souvent  il  tonne,  il  grêle,  il  pleut; 
Pour  cha  quitt'  ra-t-on  l'assemblaye, 
Contre  Tmauvais  temps,  qu'est  qu'no  peut? 
No  brave  l'vent  et  la  grêlaye. 

Su  tambour,  seu  flûtiau, 

Cha  vo'  z'enleuve  (bis) 

Su  tambour,  su  flûtiau 
Cha  fait  danser  les  pieds  dans  l'iau. 

Su  plaisi-la  vo  sembl'  si  doux 
Q'no  l'fait  duai  toute  eun'  semaine  : 
Chaq'  soué  no  s'réunit  tertous  ; 
No  saut',  no  danse  àpédre  haleine. 

Su  tambour,  su  crin-crin 

Cha  vo'  z'enleuve  (bis)  ; 

Su  tambour,  su  crin-crin, 
Cha  vo  fait  omblier  l'chagrin. 

I  n'y  a  point  d'bonheur  qui  n'prenne  fin-. 
N'y  a  point  d'si  biau  jou'  qu'  la  nuit  n'vienne. 
Bintôt  ne  change  de  refrain 
Et  chacun  répète  c't'  antienne  : 

C'te  flûte,  su  tambourin 

Cha  vo'  z'enleuve  (bis)  ; 

C'te  flûte,  su  tambourin 
Cha  vo'  z'enleuv'  l'argent  et  l'pain. 

A  quelqu'un  qui  s'était,  pour  ainsi  direj  attribué  cette  chanson 

Plus  d'un  s'est  prétendu  l'auteur 
De  cette  pauvre  chansonnette  ; 


DEUX  POESIES  EN  PATOIS  NORMAND  1 1  » 

Mais  il  faut  être  bien  menteur 
Pour  nous  conter  cette  sornette. 

S' vanter  d'avai  fai  cha, 

Chavo'  z' enlenve  fbisj  ; 

SVanter  d'avai  fait  cha, 
Cha  vo'  z'enleuv'  le  droit  d'papa. 


bis, 


POUR  LA  FETE  DE  M.  L'ABBÉ  PIERRE  BOSSEL 

CURB    d'hARFLEUR  * 

(Vers  1847) 

Bien  ï  bonjour,  nof  bon  Maîte, 
No  v'  nous  pou  vu  faîter. 
C'est  aujourd'y  vot'  fête 
J'allons  la  célébrer 
Ah  1  mais,  oui-dà 
Comment  peut-on  trouver  du  mal  à  cha? 

Bravant  tout'  réprimande, 
Dans  un  charmant  bosquet 
Pour  vos  en  faire  offrande, 
J'ai  volai  un  bouquet. 
Ahl  mais,  etc. 

Pour  vo  s'haiter  vot'  fête, 
J'  veux  faire  un  copliment  ; 
No  m'  dit  que  j'  sieux  trop  bête, 
Que  c'  n'est  point  m'n'  élément. 
Ah  !  mais,  etc. 

Quandj'  veux  fair'  vot'  éloge 
Et  chanter  vos  vertus. 


'  Le  jour  de  sa  fête,  cette  anaée-là,  il  souffrait  beaucoup  d'un  accès  de 
goutte  à  laquelle  il  était  très  sujet.  —  L'auteur  se  présentait  accompagné  des 
membres  du  clergé  paroissial. 


►-_.«■  _ 


1 1 4      DEUX  POESIES  EN  PATOIS  NORMAND 

Men  pauvre  esprit  déloge 
Et  ma  mémoir'  n'y  est  plus 
Ah  !  mais,  etc. 

Vous  avez  trop  d'  mérite 
Et  nous  trop  p'tieu  d'  talent; 
Ma  cervelle  s'en  irrite, 
Mon  cœur  en  est  adolent. 
Ah  l  mais,  etc. 

ËhbienI  chantons  l'histoire 
De  votre  saint  patron  ; 
No  dit  qu'  vos  li  fait'  gloire 
En  bien  portant  son  nom. 
Ah  !  mais,  etc. 

Saint  Pierre  avait  du  zèle, 
Il  aimait  le  Sauveur  ; 
Le  prenant  pour  modèle 
Nous  aimons  not'  pasteur. 
Ahl  mais,  etc. 

—  M'aimez,  m'aimez-vous,  Pierre, 
Lui  demanda  le  Sauveur? 

—  Mon  ardeur  est  entière, 
Dit  Pierre  avec  humeur. 

Ah  !  mais,  etc. 

L'apôtre  à  sa  parole 
Certatns  jour  fit  faux  bond  ; 
A  la  sienn'  gloriole 
Chacun  d*  nous  tiendra  bon. 
Ah!  mais,  etc. 

Pierr'  trembla,  faisant  route 
Sur  la  moite  élément; 
Sur  terre  avec  la  goutte. 
Eut-il  fait  autrement? 
Ah  1  mais,  etc. 


DEUX  POESIES  EN  PATOIS  NORMAND  115 

Pierre,  no  dit  Thistoire, 
Mourut  la  tête  en  bas  : 
Il  fut  donc  à  la  gloire 
Sans  avoir  fait  un  pas. 
Ah!  mais,  etc. 

Quittez  donc  votre  chaise 
Et  changez  votre  sort  ; 
Pour  vivre  enfin  à  Taise, 
Marchez  comme  il  est  mort. 
Ah  !  mais,  etc. 

Pierre,  ajout'  la  chronique. 
Vécut  quatre-vingts  ans  ; 
Si  Dieu  veut  d'  ma  supplique, 
vos  vivrez  p'u  longtemps. 

Ah!  mais,  oui-dà  ■ 

/    bis 
Qui  pourrait  donc  trouver  du  mal  à  cha? 


IL  PANE  DI  AMORE 

(dal  provenzale  DI  a.  de  gagnaud) 


Ben  saporoso  il  pane  de  Vamore 
Ma  non  si  assagia  afTatto  in  tutte  Tore. 

T.  Aubanbl. 


I 


Si  vorrebbe  gustare  in  tutte  Fore 
Il  saporoso  pane  de  Tamore  ! 

L'amor  tàlora  dal  ciel  scende  solo, 
E  a  noi  di  attorno  svolazzando  va; 
Ma  se  ghermirlo  vogliamo  per  Tala, 
Verso  le  azzure  altezze  ei  vola  già, 
E  per  sempre  da  noi  piglia  il  suo  volo. 

Ma  non  si  gode  affatto  ciascun  di 
Il  pan  gustoso  de  Tamore,  oh  si! 


LOU  PAN  D'AMOUR 
A  Teodor  Aubanèu 


MaDjas  d'aise  lou  pan  d'amour  : 
Se  n'en  manjo  pas  chasque  jour. 
T.  Aubanel. 

I 

N'en  voudrian  tasta  cade  jour — dôu  pan  sabourous  de  l'amour! 

L'amour,  perfés,  dôu  cèu  davalo  —  e  voulastrejo  à  noste  entour; 
—  mai  se  voulen  i'  aganta  l'alo, — vers  lis  auturo  celestialo,  —  cate 
cant  lando,  e  pèr  toujour  ! 

Se  n'en  pasto  pas  cade  jour —  d'aquéu  pan  goustous  de  l'amour. 


IL  PANE   DI  AMORE  1 1 7 

II 

In  mezzo  a  mille  lacrime  del  core, 
Chi  mai  non  fa  i  suoi  sogni  di  amore? 

Vediàm  talora  che  una  Stella  brilla 

Di  chiarezza  abbagliante  in  suo  fulgore  : 

Il  suo  splendore  brucia  la  pupilla, 

Ma  al  mane  impallidisce  Tastro  adorno 

Per  estinguersi  allor  che  spunta  il  giorno. 

L'eterno  amore  è  un  sogno,  un  vago  incanto; 
Solo  eterno  è  quaggiù  Taffanno  e  il  pianto! 

III 

Si  vorrebbe  ascoltarla  in  tutte  le  ore 
Quella  dolce  canzone  de  l'amorc. 

Talor  tua  voce  dolce  e  chiara  scende, 
0  poeta,  a  Tabisso  :  esulta  il  core 
Per  tutta  udirla  ;  al  suo  poter  si  arrende 
L'aima  più  dura  ;  tu  ben  disacerbi 
Sue  pêne  un'  ora,  o  cantico  di  amore. 


II 

Entre-mitan  de  milo  plour —  quau  noun  fai  soun  pantai  d'amour? 

Vesen,  de  fes,  coume  uno  estello  —  qu'esbrihaudo  pèr  sa  clarour 

—  soun  trelus  abro  la  parpello  ;  —  mai,  lou  matin,  vèn  palinello,  — 
e  s'amosso  quand  vèn  lou  jour. 

Es  un  pantai  Teterne  amour:  —  i'  a  d'eterne,  eici,  que  li  plour! 

HI 

Li  voudrian  ausi  cade  jour,  —  li  dôuci  cansoun  de  Tamour. 

De  fes,  claro  e  siavo,  descende —  ta  voues,  pouèto,dins  lou  gourg: 

—  lou  cor  tressauto  quand  l'entôude  ;  —  Tarmo  la  mai  duro  se  rende  ; 
— esvarto,  imo  ouro,  si  doulour. 

8 


118  IL  PANE   DI  AMORE 

0  signore,  co'  tuoi  versi  di  amore, 

Deh,  cuUa  ciascun  giorno  il  nostro  corel . . . . 

Cav.  G.  Spera. 
Monte  Cassino,  1  décembre  89. 


0  mèstre,  emé  ti  vers  d'amour,  —  brèsso  nôsti  cor  cade  jour  ! 

A.  DE  Gagnaud. 

Pourchiero  (B.-Aup). 


LOU  POURQUET  DE  LAIT 


Francomen  m'estounariot  pla 
Qu'ajèssets  pas  ausit  parla 
Dal  ritou  que  bau  mètre  en  scèno  : 
Brabas,  apetissat,  se  pourtabo  à  rabi, 
Car,  se  cantabo  pla  Tantièno, 
Fiulabo  milhou  lou  boun  bi. 

Ero  pas  flèsc  ;  quand  coufessabo 
Las  fennos,  que  benion  à  bols  ! 
«  Passats  à  Tacroucho  I  cridabo, 
D  Que  daissariot  ruma  's  fabols  !  » 

El,  quand  la  salço  se  broussabo, 
Ou  bé  que  lou  roustit  abio  dous  tours  de  trop, 

Birabo  d'èls  coumo  'no  crabo, 
Diguent  :  «  Acô  bal  pas  uno  bato  d'esclop  !  » 


LE  PETIT  COCHON  DE  LAIT 


Je  serais  franchement  étonné  —  que  vous  n'eussiez  pas  entendu 
parler  —  du  curé  que  je  vais  mettre  en  scène  ;  —  brave  homme, 
jouissant  d'un  bon  appétit,  il  se  portait  à  ravir  ;  —  et,  s'il  chantait 
bien  les  antiennes,  —  il  sifflait  encore  mieux  le  bon  vin. 

11  n'était  pas  mielleux  ;  quand  il  confessait  —  les  femmes,  qui 
venaient  en  foule  :  —  «  Prenez  le  plus  court  chemin,  leur  criait-il  ; 

—  vous  laisseriez  brûler  vos  haricots  !  » 

Lui,  quand  la  sauce  était  manquée,  —  ou  que  le  rôti  avait  deux 
tours  de  broche  de  trop,  —  il  tournait  les  yeux  comme  une  chèvre, 

—  disant  :  «  Ça  ne  vaut  pas  le  cuir  d'un  sabot  !  » 


i 


120  LOU    POURQUET   DE  LAIT 

Amé  tout  acô,  caritable  : 
A  sous  paures  malauts  mandabo  de  boulhoun. 
Tabé,  rebiscoulats,  dision  :  «  Qun  ome  afable  ! 
«  Coussi  's  pas  riche  d'un  milhoun  !  » 
Soun  soûl  défaut,  fort  perdounable, 
Au  mens  à  moun  moudeste  abis, 
Es  qu'escoupissio  pas  sus  lous  bounis  boussis. 

L'autre  an  dal  gros  ibèr,  per  la  fèsto  loucalo, 
Coubidèt  cinq  ou  sièis  ritous. 
«  Arribats  amé  la  fringalo, 

»  Fabio  *scrit,  éi  de-que  fa  tiba  lous  cintous.  » 

De  fèt,  on  besio  à  la  tendilho 
E  de  gibiè  de  plumo  e  de  bourro,  abenat 
Qu'atendio  que  la  dent  ;  mes  lou  tal   mai  presat, 

Qu'ai  ritou  fa  dansa  la  cilho, 
Es  uu  pichot  pourquet,  poulit  coumo  'n  amour, 
Lusent,  tout  roso-blanc  de  la  cougueto  al  mour. 

Es  digne,  sa-fasio,  d'uno  taulo  papalo  ! 
En  babant  de  plasé  !  Wpp  !  quand  aquel  legum 
Sara  ûambat  e  quèit  à  punt, 


Avec  tout  cela,  charitable  :  —  à  ses  pauvres  malades  il  envoyait 
du  bouillon.  —  Aussi,  une  fois  ressuscites,  ils  disaient:  «  Quel 
homme  affable  !  —  Que  n'est-il  riche  à  millions!  »  —  Son  seul  défaut,' 
très  pardonnable,  —  au  moins  à  mon  humble  avis,  —  c'est  qu'il  ne 
méprisait  pas  les  bons  morceaux. 

L'année  du  rigoureux  hiver,  à  l'occasion  de  la  fête  locale,  il  invita 
sept  ou  huit  curés.  —  «  Arrivez  avec  la  fringale,  leur  avait-il  écrit  ; 
—  j'ai  de  quoi  tendre  vos  ceinturons.  » 

En  effet,  on  voyait  au  garde-manger  —  du  gibier  à  plume  et  du 
gibier  à  poil,  faisandé,  —  attendant  le  coup  de  dent;  mais  la  plus 
précieuse  pièce,  —  celle  qui  faisait  reluire  l'œil  de  notre  curé,  — 
c'était  un  petit  cochon  de  lait,  joli  comme  un  amour,  —  luisant,  tout 
rose  et  blanc  de  la  queue  au  groin. 

«  11  est  digne  d'une  table  papale!  —  disait  le  curé,  en  bavant  de 
plaisir.  —  Vpp  !  quand  ce  légume  —  sera  flambé  et  cuit  à  point,  — 


LOU  POURQUET  DE   LAIT  121 

Âuren  mai  fantesiè  d'atrapa  la  cigalo 
Que  de  predica  la  mouralo! 

Lou  sant  jour  dal  Patrou  se  mostro  ensoulelhat. 
Moussu  l'abat  Jalard,  —  bous  Tabio  pas  noumat, 

Mes  Tabiots  toutis  à  la  bouco, 

A  soun  bièl  cousiniè  Jaquet, 

Lurrat  e  sourd  coumo  'no  souco, 

Recoumandabo  soun  pourquet. 

En  presenço  de  sous  coullègos, 
Qu'abion  fait  très  ou  quatre  lègos 

Am'un  frech  que  tenio  tout  lou  mounde  arroupit, 
I  disio,  d'uno  boues  sereno  ; 

Jacou,  de  temps  en  tems  unto-si  la  coudeno, 

Mes  sans  arresta  Tast  !  Ten-te  bo  pla  por  dit, 

E  sustout  t'anes  pas  endourmi  sul  roustit  ! 

Lou  darniè  de  la  messo  souno  ; 
Lous  chantres  soun  al  cor  prèstis  à  fa  tampon  no  ; 

Ta  très  ou  quatre  gargalhols 

Que  fan  boula  las  tatiragnos. 
Picounèl,  Jan-Francés  soun  de  bièlhis  rascagnos 

Al  constat  d'aqués  roussignols. 


nous  serons  plus  enclins  à  prendre  un  plumet  —  que  désireux  de 
prêcher  la  morale.  » 

Le  saint  jour  de  la  fête  patronale  arrive,  ensoleillé.  —  Monsieur 
Tabbé  Jalard  (je  ne  vous  l'avais  pas  nommé,  —  mais  vous  aviez  tous 
son  nom  sur  les  lèvres),  —  à  son  vieux  cuisinier  Jacquet,  —  stupide 
et  sourd  comme  une  souche,  —  recommandait  le  friand  morceau. 

En  présence  de  ses  confrères,  —  qui  avaient  fait  trois  ou  quatre 
lieues,  —  par  un  froid  qui  tenait  tout  le  monde  pelotonné,  —  il  disait 
d'une  voix  douce  au  gâte-sauces  :  —  «  Jacquet,  de  temps  en  temps, 
il  faut  oindre  la  couenne,  —  mais  sans  arrêter  la  broche.  Ne  l'oublie 
pas,  —  et  surtout  ne  va  pas  t'endormir  sur  le  rôti. 

On  sonne  le  dernier  pour  la  messe.  —  Les  chantres  sont  au  chœur, 
prêts  à  s'égosiller.  —  Il  y  a,  parmi  eux,  trois  ou  quatre  voix  — 
qui  enlèvent  les  toiles  d'araignées.  —  Picounèl,  Jean-François,  sont 
des  grillons  —  à  côté  de  ces  rossignols. 


122  LOU  POURQUET  DE  LAIT 

Moussu  Jalard  ouficiàbo  : 
Coumprendrets  amé  iéu  sas  sicrètos  rasous. 
Toujours,  dins  soun  esprit,  lou  porc  de  lait  troutabo 
E,  de  Tauta,  soun  èl  flambejant  surbelhabo 

Lou  roustit  dabant  lous  tisouns, 
Car  la  capelaniè  besinabo  de  sorto 
Qu'on  besio  la  cousino  à  trabèts  uno  porto. 

Tout  d'un  cop,  paure  abat  Jalard  ! 
Dal  sancôpi  ne  perd  très  liuros  de  soun  lard  ! 
Jaquet,  Tanimalas  !  ben  de  fa  cap-in-pocho. 
Uno  minuto  après  s'endourmits  e  la  brocho 

Rodo  pas  pus,  noum  d'un  pétard  ! 

Ai,  moun  Dius  !  lou  pourquet  se  rumo 

La  coudeno,  lous  coustelous  ! 

La  fumatièro  mounto'n  brumo, 
Lou  grais  rajo  azimant  lou  foc  das  estelous  ! 

Moussu  Jalard  se  descrestiano  ; 
Pousso  quatre  ou  cinq  hèms  !  sans  èstre  enraumassat  ; 
S'enfregounits  e  chasuble  et  soutane. 
Se  debigosso  encrispassat  ; 
Se  mouco  'n  faguent  la  troumpeto, 


Monsieur  Jalard  officiait.  —  Vous  comprendrez  avec  moi  ses 
secrètes  raisons:  —  11  était  toujours  préoccupé  par  le  cochon  de  lait; 

—  et  de  Tautel  son  œil  vigilant  pouvait  surveiller  —  le  rôti  devant 
le  feu,  —  car  la  disposition  du  presbytère  était  telle,  —  qu'on  voyait 
la  cuisine  par  une  porte  entr'ouverte. 

Tout  à  coup,  pauvre  abbé  Jalard, —  du  coup,  il  en  maigrit  de  trois 
livres  :  —  Jacques,  ce  gros  animal!  vient  de  saluer;  son  nez  touche 
à  sa  poitrine.  —  11  s'endort,  et,  une  minute  après,  —  la  broche  — 
ne  tourne  plus,  nom  d'un  pétard  ! 

Ah!  mon  Dieu!  le  cochon  se  brûle  —  la  couenne,  les  côtelettes  ! 
La  fumée  monte  en  nuage  :  —  la  graisse  ravive  les  flammes. 

Monsieur  Jalard  se  donne  au  diable  ;  —  il  pousse  trois  ou  quatre 
hum!  sans  être  enrhumé  ;  —  il  chiffonne  sa  chasuble  et  sa  soutane  ; 

—  il  fait  mille  contorsions,  tant  il  est  crispé  ;  —  il  se  mouche  avec 
un  bruit  de  trompette  ;  —  il  tousse  encore  :  —  il  crache  de  nouveau  ; 


LOU   POURQUET  DE   LAIT  123 

Tourno  toussi, 
Tourno  'scoupi  ; 
Pato  das  dous  talous  à  toumba  la  barreto. 
Mes  tant  bal  que  cante  Malbrouc, 
Jaquet  ausits  pas  res,  roupiiho  coumo  'n  souc. 

Zan  I  uno  espiraciu  subito 
Illumino  nostre  ritou  ; 
Coumo  'n  pétard  de  dinamito 
Bous  fa  *sclata  'queste  sermou 
Court  e  bou. 

«  Mous  fraires,  es  pas  sus  la  fèsto 
»  Que  celebran  aqueste  jour 
»  Que  bau  parla;  Tabat  Ginèsto, 
))  Das  ouratous  la  âno  flour, 
»  A  bèspros  prechara  *80un  tour. 

Téu  soulomen  béni  bous  faire 
Quaucos  oubserbacius  que  tendran  dins  sièis  mots. 

Podi  pas  mai  demeura  'staire 
Al  sutjèt  das  pourquets  que  flsats  as  marmots, 
Lous  daissouu  en  pertout  ronda  la  patantèino, 
Tout  i  deben  planiè,  digus  pus  nou  se  gèino  ; 


—  il  frappe  du  pied,  au  point  de  laisser  tomber  sa  barrette  ;  —  mais 
autant  vaudrait  chanter  Malhorough:  —  Jacques  n'entend  rien,  — 
il  dort  comme  un  billot. 

Crac!  une  inspiration  subite  —  illamine  notre  curé.  —  Comme  une 
explosion  de  dynamite,  —  il  lance  le  sermon  qui  suit,  —  court  et 
bon  : 

«  Mes  frères,  ce  n'est  point  sur  la  fête  —  célébrée  aujourd'hui  — 
que  je  vais  parler.  L'abbé  Gineste,  —  des  orateurs  la  fine  fleur,  — 
aux  vêpres  prêchera  à  son  tour. 

»  Je  viens  seulement  vous  faire  —  quelques  observations  en  peu 
de  mots.  —  Je  ne  puis  garder  plus  longtemps  le  silence  —  au  sujet 
des  jeunes  cochons  dont  vous  confiez  la  garde  à  vos  enfants,  —  qui 
les  laissent  partout  courir  la  prétantaine.  —  Tout  est  permis  à  ces 
animaux,  et  ils  ne  se  gênent  pas  —  pour  piétiner  et  farfouiller  dans 
les  champs  ensemencés.  —  Et  pas  de  danger  que  vous  criiez  :  — 


124  LOU  POURQUET  DE   LAIT 

Lous  besèts  mousilha,  trepeja  semenats, 

Mes  Tase  quilhe  se  cridats  I 
a  Digos  I  biro  louporcf,,,  »  Nostre  ouratou  s'arrèsto. 

4       Abio  talomen  naut  gisclat  : 
c(  Biro  lou  porc  »,  que  ne  sioguèt  engargassat 
Coumo  s'abio  'ngoulit  pel  trabès  uno  arèsto. 
Coumo  'n  cop  de  fusil  dreit  lou  sermou  pourtèt  ; 
Jaquet,  estrementit,  bitomen  s'espertèt, 
Poussèt  un  loun  badal  e  la  brocho  roudèt. 

20  de  Mars  1889. 

A.  MiR. 


«  Hé  I  là-bas  I  gare  au  cochon  !  »  Notre  orateur  s'arrête.  —  11  avait 
crié  si  fort  :  —  Gare  au  cochon  I  qu'il  en  eut  le  gosier  malade,  — 
comme  après  avoir  avalé  de  travers  une  arête  de  poisson. 

Comme  un  coup  de  fusil,  le  sermon  alla  droit  au  but.  —  Jacques, 
quoique  sourd,  secoué,  s'éveilla,  —  poussa  un  long  bâillement,  et 
remit  la  broche  en  train. 


CONGRÈS  DE  PHILOLOGIE  ROMANE 


(26-27  mai  1890) 


COMPTE    RENDU 

Le  Congrès  de  philologie  romane  organisé  par  la  Société 
pour  Tétude  des  Langues  Romanes  a  eu  lieu  à  Montpellier, 
dans  le  grand  amphithéâtre  de  la  Faculté  des  Lettres  (Palais 
de  l'Université),  le  26  et  le  27  mai  1890,  à  la  suite  des  fêtes  du 
sixième  centenaire  de  l'Université  de  Montpellier,  célébrées 
du  22  au  25  mai. 

Une  circulaire  adressée  à  tous  les  romanisants  et  dont  on 
trouvera  le  texte  dans  la  Revue  des  Langues  romanes  *  avait 
indiqué  les  principales  questions  qui  seraient  traitées  (dialec- 
tes, cours  d'amour,  épopée  provençale).  Un  avis,  inséré  plu- 
sieurs jours  à  l'avance  dans  les  journaux  montpeliiérains, 
priait  tous  les  hôtes  de  l'Université  qui  n'avaient  pu  être 
invités  personnellement  dé  venir  honorer  le  Congrès  de  leur 
présence.  Comme  on  pourra  en  juger  par  la  liste  des  membres 
du  Congrès,  que  nous  donnons  plus  loin,  les  auditeurs  ont  été 
assez  nombreux.  Malheureusement,  plusieurs  circonstances 
défavorables  ont  empêché  beaucoup  de  philologues  de  venir 
se  joindre  à  nous.  Le  congrès  annuel  des  Sociétés  savantes 
ouvrait  en  même  temps  ses  sessions  à  Paris  et  le  quatrième 
congrès  des  philologues  modernes  d'Allemagne  se  réunissait 
à  Stuttgart  et  nous  privait  de  la  plupart  des  maîtres  de  la 
science. 

Les  personnes  qui  assistaient  au  Congrès  étaient  les  sui- 
vantes :  Monseigneur  de  Cabrières,  évêque  de  Montpellier  ; 
M.  le  général  Borson,  commandant  la  31^  division  d'infan- 
terie ;  M.  Maurice  Faure,  député  du  département  de  la 
Drôme  ;  M.  Daubian-Delisle ,  directeur  des  contributions 
directes;   MM.  Gaudenzi,  professeur  à  l'Université  de  Bolo- 

1  T.  XXXUI,  ann.  1889,  p.  629. 


;.-•■•*  . 


126  CONGRES 

gne,   Harvej,  délégué    du    Candian  Institute   de  Toronto, 
M™®  Harvej,  Lévj,  professeur  à  l'Université  de  Fribourg-en- 
Brisgau ,  Nyrop ,  professeur  à  TUniversité  de  Copenhague, 
Sôderhjelm,  professeur  à  l'Université  d'Helsingfors,  Trojel, 
professeur  au  Ljcée  de  Copenhague,  Van  Hamel,  professeur 
à  l'Université  de  Groningue,  Wahlund,  professeur  à  l'Univer- 
sité d'Upsal  ;  M.   Frédéric    Mistral,    M.    Mariéton,   chance- 
lier du  Félibrige,  M.  Roumieux,  assesseur  de  la  Maintenance 
de  Languedoc  ;  M.  Bréal,  membre  de  l'Institut,  professeur  au 
au  Collège  de  France  ;  MM.  Clédat,  professeur  à  la  Faculté 
des  lettres  de  Lyon,  Constans,  professeur  à  la  Faculté  des 
lettres  d'Aix,  Devaux,  professeur  à  l'Université  catholique  de 
Lyon,  Thomas,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Paris; 
D*^  Dejeanne,  délégué  de  la  Société  Ramond  (Bagnères-de- 
Bigorre),  D""  Durand  de  Gros,  D''  Garrigou,  directeur  de  V As- 
sociation pyrénéenne  et  de  la  Revue  des  Pyrénées  et  de  la  France 
méridionale  \  MM.  le  D^  Balestier,  G.  de  Bosc,  D'Fr.  Cazalis, 
D'  E.  Claparôde,  A.  d'Espous,  Farrouch,  Fontenay,  Le  Bars, 
De  Possac-Génas,  E.  Sahut,Tédenat,  Tempié,  de  Montpellier; 
L.  Mangeot,  de  Paris  ;  MM.  Bonnet,  Pélîssier  et  Dauriac, 
professeurs  à  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier;  Glaize, 
professeur  à  la  Faculté  de  droit  de  Montpellier;  Méon,  profes- 
seur au  Collège  d'Agde  :  Bousquet,  Braguin,  L.  Castets,  Falk, 
Rivoire,  Thomas,   étudiants  ;  MM.   Castets,   Chabaneau,   D*" 
Espagne,  Grand,  Lambert, Ré villout,  de  Tourtoulon,  membres 
du  Comité  directeur  de  la  Société  pour  l'étude  des  Langues 
Romanes. 


Séance  du  26  mai  1890 

La  séance  est  ouverte  à  deux  heures  et  demie  de  Faprès- 
midi. 

Le  Congrès  est  inauguré  par  l'allocution  suivante  de 
M.  Castets,  président  de  la  Société  pour  l'étude  des  Langues 
Romanes  : 

Messieurs, 

A  roccasion  de  la  célébration  du  VI®  Centenaire  de  l'Université  de 
Montpellier,  nous  vous  avons  priés  de  vous  réunir  dans  cette  ville  où 


DE  PHILOLOGIE  ROMANE  127 

fut  fondée,  il  y  a  vingt  ans,  la  Société  pour  l'étude  des  langues 
romanes.  Quel  moment  était  plus  opportun  pour  inviter  les  romani- 
sants  à  se  réunir  en  un  Congrès,  que  celui  où  Tune  des  plus  anciennes 
Universités  latines,  celle  qui  pendant  des  siècles  a  jeté  un  si  vif  éclat 
sar  notre  Languedoc,  reçoit  la  visite  de  nombreux  savants  de  toutes 
les  nations  ?  Quel  lieu  pouvait  être  mieux  choisi  que  celui  où  la  lan- 
gue des  troubadours  est  restée  une  langue  vivante  ?  Vous  avez  bien 
voulu  répondre  à  notre  appel  :  nous  vous  en  sommes  reconnaissants 
et  nous  vous  en  remercions. 

Je  regrette  vraiment  que  nous  ne  puissions  espérer  de  vous  retenir 
plusieurs  jours.  Mais,  quelle  que  soit  la  durée  de  ce  Congrès,  il 
n*aura  pas  été  inutile.  Sans  parler  des  résultats  immédiats  que  don- 
neront vos  discussions  sur  les  différents  points  que  nous  vous  avons 
soumis,  votre  présence,  cette  sorte  de  manifestation  de  Tintérêt  que 
vous  portez  aux  recherches  et  aux  progrès  de  la  philologie  romane, 
ce  témoignage  de  votre  foi  dans  ses  destinées,  est  en  soi  un  fait  d'une 
importance  considérable. 

Notre  Congrès  aura  enfin  des  conséquences  qui,  pour  n'être  pas 
d'ordre  scientifique,  ne  nous  en  touchent  pas  moins.  11  réunit  des 
hommes  qui  ne  se  connaissaient  que  par  leurs  travaux.  Au  lien  qu'éta- 
blissait entre  eux  la  communauté  des  études,  il  ajoute  celui  d'une 
confraternité  amicale  et  durable.  Soyez  les  bienvenus.  Messieurs, 
et  puissent  ces  assises  de  la  philologie  romane  se  renouveler  souvent! 

La  tâche  de  la  Société  est  terminée,  et  il  ne  me  reste  plus  qu'à 
vous  prier  de  nommer  le  bureau  qui  présidera  à  vos  travaux. 

L'assemblée  élit  pour  président  M.  Castbts,  pour  vice- 
présidents  MM.  Chabaneau  et  Révillout  et  pour  secrétaire 
M.  E.-D.  Grand. 

M.  Chabaneau  donne  les  renseignements  suivants  sur  les 
convocations  adressées  à  l'occasion  du  Congre?  : 

Messieurs, 

J'ai  d'abord  à  vous  donner  lecture  d'une  lettre  que  je  viens  de  rece- 
voir de  M.  Gaston  Paris,  membre  de  l'Institut,  professeur  au  Collège 
de  France,  de  qui  plusieurs  de  ceux  qui  sont  dans  cette  salle  ont  eu 
l'heureuse  fortune  de  recevoir  les  leçons. 

Paris,  dimanche  25  mai  1890. 

Cher  Monsieur, 

Voulez-vous  dire  aux  membres  du  Congrès  des  romanistes  combien,  en 
d'autres  circonstances,  j'aurais  été  heureux  d'être  avec  eux  et  combien  je 


12S  CONGRES 

regrette  de  ne  pas  y  être?  Vous  inaugurez  des  réunions  qui,  je  Tespère,  se 
multiplieront  et  dont  la  Société  des  Langues  romanes  aura  toujours  l'hon- 
neur d'avoir  pris  l'iaitiative. 

Croyez-moi  bien  siacèrement  votre  dévoué, 

G.  Paris, 

Cette  lettre  pour  la  plupart  d'entre  vous  n'a  pas  besoin  d'explication. 
Je  n'y  ajouterai  que  quelques  mots.  M.  Gaston  Paris,  lorsqu'il  apprit 
que  la  Société  avait  l'intention  de  réunir  un  Congrès  de  philologie, 
accueillit  cette  idée  avec  une  grande  faveur  et  il  se  faisait  une  vérita- 
ble *fête  d'y  prendre  part.  Dans  l'intervalle,  il  a  été  frappé  dans  ses 
affections  du  coup  le  plus  cruel  :  il  a  perdu  sa  femme,  et  c^est  ce  funeste 
événement  qui  nous  prive  de  sa  présence.  Je  propose  que  le  Congrès 
envoie  à  M.  Gaston  Paris  une  dépêche  lui  exprimant  les  regrets  que  nous 
éprouvons  tous  de  ne  pas  le  voir  aujourd'hui,  parmi  nous,  à  la  place 
d'honneur  que  nous  lui  réservions  (Approbations)  *. 

M.  Chabaneau  ajoute  : 

Nous  avions  adressé  des  invitations,  en  Europe  et  en  Amérique,  à 
tous  ceux  qui  ont  une  certaine  notoriété  dans  nos  études,  sans  compter 
lés  maîtres,  que  nous  ne  pouvions  pas  oublier.  Beaucoup  de  ceux 
qui  n'ont  pu  venir  nous  ont  exprimé  les  sentiments  de  la  plus  pro- 
fonde sympathie,  en  même  temps  que  des  regrets  très  vifs  de  ne  pou- 
voir se  joindre  à  nous.  Nous  avons  reçu  des  lettres  de  ce  genre  des 
différents  départements  2,  d'Allemagne  3,  d'Italie  *,  des  pays  scandi- 

*  A  l'issue  de  la  séance  du  26  mai,  la  dépêche  suivante  a  été  envoyée  à 
M.  Gaston  Paris  :  «  Le  Congrès  de  philologie  romane  de  Montpellier  vous 
exprime  à  l'unanimité  ses  regrets  de  ne  pas  vous  avoir  à  sa  tête. 

»  Castets,  président.  » 

'  MM.  Charmes,  directeur  du  Secrétariat,  Liard,  directeur  de  l'Enseigne- 
ment supérieur,  Rabier,  directeur  de  l'Enseignement  secondaire,  et  Buisson, 
directeur  de  l'Enseignement  primaire  au  Ministère  de  Plnstruct  on  publique; 
Delisle,  directeur  de  la  Bibliothèque  Nationale  ;  Gaston  Paris,  dont  on  trou- 
vera la  lettre  ci-dessus,  Renan,  Boissier,  du  Collège  de  France  ;  Crouslé, 
professeur  à  la  Faculté  des  letlres  (Paris)  ;  Joret,  professeur  à  la  Faculté  des 
lettres  d'Aix  ;  Condamin,  professeur  à  l'Université  catholique  de  Lyon  ; 
Leroux,  archiviste  de  la  Haute- Vienne  ;  D>^  Vincent,  de  Guéret  ;  Du  Puitspelu, 
de  Lyon  ;  Bailleul,  directeur  des  prisons  de  Rouen  ;  Chenu,  instituteur  à 
Montgirod  (Savoie),  Chiron,  inst*tuteur  à  Saint-Just  (Ardèche)  ;  Mazat,  insti- 
tuteur à  Coubon  (Haute -Loire),  Ranc,  instituteur  au  Colombier -Saint-Pierre 
(Lozère);  Viguier,  instituteur  à  Maus.^ans  (Tarn). 

3  MM.  Appel  (Kônigsberg),  Behrens  (léna),  Fôrster  (Bonn),  Gaspary  (Bres- 
lau),  Grôber  (Strasbourg),  Koschwitz  (Greifswald),  Settegast  (Leipzig),  Sten- 
gel  (Marbourg),  Tobler  (Berlin), 

*  MM.   d'Ancona  (Pise),  Ascoli  (Milan),  Cesare   de  LoUis  (Rome),  Rajna 


DE  PHILOLOGIE  ROMANE  129 

naves*,  de  Suisse*,  de  Belgique',  d'Espagne*,  et  de  Russie  ^  Je  les 
dépose  sur  lo  bureau  ^  I 


M.  Castets  rend  un  hommage  spécial  à  M.  Harvey, délégué 
du  Canadian  Institute  de  Toronto  (Canada),  qui,  pour  arriver 
à  temps  au  Congrès,  a  dû  changer  de  ligne  de  paquebots  et 
arriver  par  Bordeaux  (Applaur/issementsJ. 

M.  Harvey  remercie  M.  le  Président  dans  les  termes  sui- 
vants : 

Monsieur, 

C'est  avec  beaucoup  de  plaisir  que  j'ai  accepté  cette  invitation.  11 
y  a  très  longtemps  que  je  n'ai  pas  l'habitude  de  parler  français.  Si 
je  ne  m'explique  pas  bien,  acceptez  mes  excuses.  Nous  avons  chez 
nous  deux  sociétés  où  l'on  étudie  les  langues  romanes  :  une  société 
pour  l'étude  des  langues  romanes,  *Socie/î//br  the  study  of  Romances 
Languages,  qui  s'inspire  de  la  même  idée  qu'ici  et  veut  étudier  la 
langue  française  canadienne,  l'espagnol,  puis  le  portugais  et  toutes 
les  langues  d'origine  latine,  mais  la  langue  française  surtout  ;  l'/n- 
stitut  Canadien,  qui  est  une  société  plus  connue:  elle  est  divisée  en 
sections,  et  nous  avons  une  section  qui  est  consacrée  à  l'étude  des 
langues  romanes  et  à  leurs  diverses  transformations,  aussi  bien  dans 
le  Valais  que  dans  la  Roumanie,  la  Croatie  ou  la  Dalmatie.  Elle  s'est 
efforcée,  dans  ces  dernières  années,  de  se  mettre  en  rapports  avec 
les  sociétés  d'ailleurs,  la  vôtre,  celle  de  Liège,  qui  nous  envoient  leurs 
publications.  Elle  m'a  prié  de  venir  ici  pour  faire  hommage  à  votre 
Société  et  lâcher  de  savoir  de  quelle  manière  vous  étudiez  les  langues 

(Florence\  Spera  (Mont-Cassin).  Ce  dernier  a  envoyé  à  la  Société  deux  articles 
sur  l'Epopea  provenzale  et  la  Lirica  provenzale^  extraits  des  4«  et  5°  parties 
d'un  Saggio  di  letteratura  comparata  greco-latiîio-italiana,  qui  paraîtra 
prochainement,  et  deux  pièces  de  vers  :  Omaggio  alla  Cor  le  di  Amore  et 
Salutoa'  confratelli  provenzali. 

*  MM.  Sundby  (Copenhague),  Slorm  (Chrisliania),  Geijer  (Upsal),  Visiog 
(Lund). 

*  MM.  Bonnard  (Lausanne),  Morf  (Zurich),  Rabiet  (Fribourg),  Ritter  (Genève). 
3  M.  Wilmotte  (Liège). 

*  M.  Castelar. 

8  MM.  Fieury,  Wesselofsky  (Saint-Pétersbourg). 

«  Dans  des  lettres  reçues  après  le  Congrès,  MM.  Monaci(Rorae),  H.  Suchier 
(Halle)  et  Schuchhardt  (Graz)  ont  aussi  exprimé  le  regret  de  n'avoir  pu  y 
assister. 


130  CONGRES 

romanes .  Je  viens  ici  pour  apprendre  et  non  pour  tâcher  d'enseigner 
quelque  chose:  c'est  tout  à  fait  pour  apprendre  (Applaudissements). 
Si  quelqu'un  d'entre  vous  voulait  savoir  quelque  chose  de  la  race  et 
de  la  langue  française  au  Canada,  je  serai  très  heureux  de  le  faire 
connaître  (Applaudissements) . 

M.  Harvey  est  appelé  à  siéger  au  bureau. 

Le  bureau  s'occupe  du  programme  et  du  nombre  des  séan- 
ces du  Congrès. 

M.  DE  TouiiTOULON  fait  la  communication  suivante  sur  la 
classification  des  dialectes  : 

MONBEIQNEUR,    MESSIEURS, 

Je  regrette,  dans  la  communication  que  je  vais  faire,  d'avoir  à 
m'attaquer  aune  autorité  bien  forte;  mais  j'y  suis  en  quelque  sorte  obligé. 
Puisque  le  Congrès  a  posé  la  question  des  dialectes,  il  faut  d'abord 
savoir  s'il  y  a  des  dialectes.  Un  homme  que  tout  le  monde  ici  connaît, 
respecte  et  aime,  M.  Gaston  Paris,  a  nié  l'existence  des  dialectes  :  je 
ne  puis  guère  me  dispenser  de  donner  mon  avis  pour  les  raisons  que 
je  ferai  connaître  tout  à  l'heure. 

Le  Congrès  des  Sociétés  savantes,  tenu  à  la  Sorbonne  en  mai  1888, 
fut  clôturé  par  un  discours  plein  d'intérêt,  mais  tout  à  fait  déconcer- 
tant. M.  Gaston  Paris,  avec  le  charme  et  l'autorité  qu'on  lui  connaît, 
s'y  proposait  de  «  dire  très  brièvement  ce  qu'on  sait  aujourd'hui  sur 
les  idiomes  parlés  dans  notre  pays,  ce  qu'il  reste  à  découvrir,  à  com- 
prendre et  à  préciser,  et  les  points  sur  lesquels  l'activité  des  travail- 
leurs, surtout  de  ceux  de  province,  pourrait  se  porter  avec  le  plus  de 
chances  de  succès  *.  » 

Il  y  a  dans  ce  discom-s,  —  personne  n'en  sera  surpris,  —  des  par- 
ties absolument  parfaites  ;  il  y  en  a  qui  renversent  les  idées  reçues, 
non  seulement  dans  la  science  du  langage,  mais  dans  toutes  les 
sciences  connues. 

S'il  s'agissait  d'une  circonstance  moins  solennelle,  on  pourrait  voir 
dans  ces  passages  de  simples  boutades  servant  à  donner  le  relief  du 
paradoxe  à  des  idées  qu'il  fallait  imprimer  fortement  dans  l'esprit 
des  auditeurs.  On  n'a  eu  que  trop,  — c'est  certain,  —  de  délimitations 
de  dialectes  sans  étude  intrinsèque  des  dialectes  à  délimiter,  de  con- 

*  Les  Parlers  de  France^  lecture  faite  à  la  séance  générale  de  clôture  du 
Congrès  des  Sociétés  savantes,  le  26  mai  1888,  par  M.  Gaston  Paris  (Extrait 
du  Bulletin  du  Comité  des  ti^avaux  historiques,  année  1887).  Paris, 
1889. 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  131 

clasions  prématurées  Bur  la  concordance  des  circonscriptions  linguis- 
tiques .et  des  anciennes  circonscriptions  politiques,  de  recherches 
vaines  de  radicaux  celtiques  dans  le  vocabulaire  des  patois  de  la 
France  ;  aussi  comprendrait-on  qu'afin  de  couper  court,  avec  éclat, 
à  d'inutiles  travaux,  un  maître  se  soit  écrié,  dans  un  moment  de 
mauvaise  humeur  :  n  H  n'y  a  pas  de  dialectes Les  limites  lin- 
guistiques n'ont  rien  de  commun  avec  les  limites  politiques 

Nous  parlons  latin  et  rien  que  latin.  »  On  admettrait  peut-être 
encore  qu'obéissant  d'instinct  à  une  de  ces  vagues  craintes  patrioti- 
ques qui  peuvent  obséder  même  un  esprit  sain,  il  ait  laissé  échapper 

à  propos  de  patois,  cette  phrase  :  «  Il  n'y  a  pas  deux  Frances 

Aucune  limite  réelle  ne  sépare  les  Français  du  Nord  de  ceux  du 
Midi.  » 

Mais,  faut-il  ne  voir  dans  les  paroles  de  l'éminent  philologue  que 
des  exagérations  de  forme  ?  Je  n'ose  le  penser.  Lorsqu'un  homme  de 
ce  caractère  déclare  à  un  auditoire  sérieux  qu'il  veut  «  donner  une 
idée  du  point  où  en  est  arrivée  aujourd'hui  l'exploration  linguistique 
de  la  France,  »  il  n'avance  rien  qui  ne  doive  être  pris  à  la  lettre  et 
qu'on  ne  soit  disposé  à  accepter  comme  acquis  à  la  science.  Il  semble 
difficile  cependant  de  reconnaître  cette  valeur  aux  propositions  sui- 
vantes que  je  copie  textuellement: 

«  Les  parlers  populaires  de  toute  la  France  se  perdent  les  uns  dans 
les  autres  par  des  nuances  insensibles. 

»  Dans  une  masse  linguistique  de  même  origine,  comme  la  nôtre, 
il  n'y  a  réellement  pas  de  dialectes;  il  n'y  a  que  des  traits  linguisti- 
ques qui  entrent  respectivement  dans  des  combinaisons  diverses.  . . 
Il  ne  faut  même  pas  excepter  de  ce  jugement  la  division  fondamen- 
tale qu'on  a  cru,  dès  le  moyen  âge,  reconnaître  entre  le  français  et 
le  provençal  ou  la  langue  d'oui  et  la  langue  d'oc.  Ces  mots  n'ont  de 
sens  qu'appliqués  à  la  production  littéraire. 

»  Nous  parlons  latin Il  ne  faut  plus  répéter,  comme  on  le  fait 

trop  souvent,  que  les  langues  romanes  viennent  du  latin,  qu'elles  sont 
les  filles  dont  la  langue  latine  est  la  7nère. 

»  Si  le  développement  naturel  (du  latin)  n'avait  pas  été  entravé  par 
des  actions  politiques  et  littéraires,  il  n'y  aurait  sans  doute  pas 
aujourd'hui  deux  communes  qui  parlassent  le  même  latin. 

»  Les  limites  des  traits  linguistiques  ne  coïncident  pas  avec  les 
limites  politiques  anciennes  ou  modernes.  » 

Tout  "^ela  est-il  rigoureusement  démontré,  et  peut-on  accepter  ces 
cinq  propositions  comme  autant  de  vérités  acquises?  Les  deux  der- 
nières, par  exemple,  ne  gagneraient-elles  pas  à  être  émises  sous  la 
forme  du  doute,  les  preuves  manquant  aussi  bien  dans  un  sens  que 
dans  l'autre  ?  Dans  celle  qui  les  précède  immédiatement,  faut-il  voir 


*;'  ;  .  ■ 


132  CONGRES 

rexpresBÎon  paradoxale,  —  non  pans  danger  scientifique,  —  d'une 
Térité  courante,  j'allais  dire  banale.  Enfin  les  affirmations  relatives 
à  la  fusion  graduelle  des  parlers  de  toute  la  France  les  uns  dans  les 
autres,  à  l'impossibilité  de  les  diviser  même  en  deux  groupes,  sont- 
elles  appuyées  sur  un  assez  grand  nombre  d'observations  concor- 
dantes, et  n'y  trouve-t-on  pas  un  déconcertant  oubli  des  procédés  en 
usage  dans  toutes  les  sciences? 

Simple  curieux  des  choses  de  la  philologie,  je  n'aurais  aucun  droit 
de  prendre  la  parole  en  ce  débat,  si  je  ne  m'y  trouvais  depuis  longtemps 
engagé.  M.  G.  Paris  a  rappelé  en  termes  bienveillants  la  recherche 
des  limites  communes  aux  langues  d'oil  et  d'oc  commencée  par  moi  en 
1873  avec  la  collaboration  de  mon  regretté  confrère  et  ami  Octavien 
Bringuier.  Je  n'ai  pas  renoncé  à  ce  travail,  malgré  les  circonstances, 
parfois  bien  douloureuses,  qui,  depuis  des  années,  l'ont  trop  souvent 
interrompu.  On  comprendra  sans  peine  mon  embarras  à  la  lecture  du 
discours  de  M.G.Paris.  Devais- je  abandonner  ma  tâche,  puisqu'elle 
était  déclarée  inutile  par  un  juge  dont  personne  ne  songe  à  contes- 
ter l'autorité?  Mon  devoir  était-il  de  m'incliner  devant  l'affirmation 
du  maître,  ou  de  ne  renoncer  à  l'œuvre  entreprise  qu'après  m'être  con- 
vaincu par  moi-même  de  son  inutilité?  On  me  pardonnera  peut-être 
d'avoir  pris  ce  dernier  parti,  et  de  m'être  mis  aussitôt  au  dépouille- 
ment des  travaux  de  toute  sorte  où  pouvaient  se  rencontrer  quelques 
données  propres  à  étayer  le  système  que  patronne  M.  G.  Paris,  tout  en 
reportant  à  M.  Paul  Meyer  l'honneur  de  la  découverte. 

Deux  questions  m'intéressent  surtout  : 

La  fusion  graduelle  des  idiomes  vulgaires  les  uns  dans  les  autres, 
si  souvent  afiirmée  à  priori,  si  souvent  démentie  par  l'observation, 
est- elle  enfin  démontrée  ? 

Cette  fusion,  en  la  supposant  prouvée,  s'opposerait-elle  à  la  distinc- 
tion des  langues  entre  elles,  à  leur  subdivision  en  dialectes  et  sous- 
dialectes,  en  un  mot  à  la  classification  morphologique  ^  des  parlers  et 
à  leur  délimitation  géographique  ? 

J'ai  parcouru  avec  soin  tout  ce  qui  a  été  publié  depuis  quinze  ans 
sur  les  parlers  vulgaires  de  la  France,  et  j'y  ai  vainement  cherché 

1  J'emploie  ce  mot  afin  d'indiquer  qu'il  ne  s'agit  pas  ici  d'une  classification 
empirique  qui  grouperait,  par  exemple,  sous  le  nom  de  languedocien  tous  les 
parlers  en  usage  dans  l'ancienne  province  de  Languedoc;  sous  celui  depro- 
vençal  tous  ceux  de  Provence,  etc.  On  a  distingué  la  classification  morpholo- 
gique des  langues  de  leur  classification  généalogique.  En  fait  de  parlers 
romans,  Nf.  G.  Paris  n'admet  pas  plus  l'une  que  l'autre  ;  mais  il  est  vrai  de 
dire  que,  lorsqu'il  s'agit  d'idiomes  aussi  intimement  appai^entés,  la  classification 
généalogique  n'est  qu'une  classification  morphologique  dans  le  temps. 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  133 

rensemble  d'observations  précises,  la  série  de  faits  noncluants  néces- 
saire à  la  confirmation  de  la  nouvelle  théorie.  Je  ne  connais  pas,  il 
est  vrai,  le  mémoire,  de  M.  Paul  Meyer  sur  les  dialectes.  Ce  ti-avail 
couronné    par    F  Académie  des  Inscriptions,    est    resté  manuscrit. 
Malgré  le  nom  de  l'auteur,  malgré  la  récompense  obtenue,  des  conclu- 
sions dont  les  prémisses  n'ont  pas  été  rendues  publiques  et  ne  peu- 
vent, par  conséquent,  être  utilement  discutées,  ne  sauraient  être  reçues 
comme  des  vérités  incontestées.  De  sorte  que,  jusqu'à  nouvelles  preu- 
ves, le  système  de  M\f.  P.  Meyer  et  G.  Paris  repose  uniquement  sur 
cette  double   affirmation  :   1°  Qu'une  «  observation  bien  simple,  que 
chacun  peut  vérifier,  »  démontre  la  fusion  des  parlers  de  toute  la 
France  les  uns  dans  les  autres  par  nuances  insensibles  ;  2°  que  cette 
fusion  rend  impossible  tout  groupement  des  idiomes  locaux  et  régio- 
naux. Mais  si,  d'une  part,  l'observation  dont  il  s'agit  n'était  pas  aussi 
simple,  aussi  facile  à  vérifier  qu'on  pourrait  le  croire  au  premier  abord  ; 
si  elle  avait  conduit  tous  ceux  qui  vivent  au  milieu  des  parlers  po- 
pulaires  à  des  conclusions   opposées  à  celles  de  MM.  P.  Meyer  et 
G.  Paris  ;  si,  d*autre  part,  la  nécessité  d'une  classification  était  reconnue 
dans  toutes  les  sciences,  quels  que  soient  l'entrecroisement  des  carac- 
tères et  la  difficulté-des  déterminations  ;  si,  en  un  mot,  les  deux  affir- 
mations, sur  lesquelles  la  nouvelle  théorie  a  été  édifiée,  étaient  sérieuse- 
ment contestées, il  faudrait  conclure  que  cette  théorie  n'est  pas  acquise 
à  la  science,  qu'elle  est  simplement  une  opinion  personnelle  des  plus 
respectables,  étant  donnée  l'autorité  de  ceux  qui  l'ont  mise  en  circu- 
lation ;  mais  qu'il  est  permis  de  la  combattre  à  l'aide  des  faits  et  du 
bon    sens,  c'est-à-dire   avec   des   armes  qui  ne   sont  pas   à    l'usage 
exclusif  des  philologues. 

On  trouvera  sans  doute  un  peu  longues  les  pages  qui  suivent  ;  mais 
il  y  a  trop  longtemps  qu'on  escarmouche  autour  de  la  question  sans 
jamais  l'attaquer  de  front,  au  moins  en  public.  Si  je  dois  être  battu, 
je  ne  veux  pas  que  ce  soit  sans  avoir  mis  tous  mes  arguments  en 
ligne  et  en  bonne  posture  pour  vaincre  ou  tomber  avec  honneur  *. 


Le  passage  suivant  renferme  l'exposé  du  système  que  j'examine  : 
w  En  disant  partir  d'un  point  central  plusieurs  longues  chaînes 
d'hommes  dont  chacun  comprendrait  son  voisin  de  droite  et  son  voi- 

*  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  que  le  discours  de  M.  G.  Paris  a  soulevé  bien 
des  pretestatioDs.  Je  signalerai,  entre  autres  réponses,  celles  de  M.  le  pro- 
fesseur Caslets  et  de  M.  Durand  de  Gros,  l'une  et  l'autre  dans  la  Revue  des 
Langues  romanes. 


l>.«_    .-  ^I        E    J. 


134  CONGRES 

sin  de  gauche,  on  arriverait  à  couvrir  toute  la  France  d*une  étoile  dont 
on  pourrait  de  même  relier  les  rayons  par  des  chaînes  transversales 
continues.  Cette  observation  bien  simple,  que  chacun  peut  vérifier, 
est  d'une  importance  capitale  ;  elle  a  permis  à  mon  savant  confrère  et 
ami,  M.  Paul  Meyer,  de  formuler  une  loi  qui,  toute  négative  qu'elle 
soit  en  apparence,  est  singulièrement  féconde,  et  doit  renouveler 
toutes  les  méthodes  dialectologiques  :  cette  loi,  c'est  que,  dans  une 
masse  linguistique  de  même  origine,  comme  la  nôtre,  il  n'y  a  réelle- 
ment pas  de  dialectes;  il  n'y  a  que  des  traits  linguistiques  qui  entrent 
respectivement  dans  des  combinaisons  diverses,  de  telle  sorte  que 
le  parler  d'un  endroit  contiendra  un  certain  nombre  de  traits  qui  lui 
seront  communs,  par  exemple,  avec  le  parler  des  quatre  endroits  les 
plus  voisins,  et  un  certain  nombre  de  traits  qui  différeront  du  parler 

de  chacun  de  ces  quatre  endroits Il  suit  de  là  que  tout  le  travail 

qu'on  a  dépensé  à  constituer,  dans  l'ensemble  des  parlers  de  la  France, 
des  dialectes  et  ce  qu'on  a  appelé  des  sous-dialectes ,  est  un  travail  à 
peu  près  complètement  perdu. 

»  Il  ne  faut  même  pas  excepter  de  ce  jugement  la  division  fonda- 
mentale qu'on  a  cru,  dès  le  moyen  âge,  reconnaître  entre  le  français 
et  le  provençal  ou  la  langue  d'oui  et  la  langue  d'oc.  Ces  mots  n'ont  de 

sens  qu'appliqués  à  la  production  littéraire C'est  bien  autre 

chose  si  on  essaie,  comme  l'ont  fait  il  y  a  quelques  années  deux  vail- 
lants et  consciencieux  explorateurs,  de  tracer  de  l'Océan  aux  Alpes  une 
ligne  de  démarcation  entre- les  deux  prétendues  langues.  Ils  ont  eu 
beau  restreindre  à  un  minimum  les  caractères  critiques  qu'ils  assi- 
gnaient à  chacune  d'elles,  ils  n'ont  pu  empêcher  que  tantôt  l'un,  tan- 
tôt l'autre  des  traits  soi-disant  provençaux  ne  sautât  par-dessus  la 
frontière  qu'ils  élevaient,  et  réciproquement.  Et  comment,  je  le 
demande,  s'expliquerait  cette  étrange  frontière  qui,  de  l'Ouest  à  l'Est, 
couperait  la  France  en  deux  en  passant  par  des  points  absolument 
fortuits  ?  Cette  muraille  imaginaire,  la  science,  aujourd'hui  mieux 
armée,  la  renverse,  et  nous  apprend  qu'il  n'y  a  pas  deux  Franccs, 
qu'aucune  limite  réelle  ne  sépare  les  Français  du  Nord  de  ceux  du 
Midi,  et  que,  d'un  bout  à  l'autre  du  sol  national,  nos  parlers  populaires 
étendent  une  vaste  tapisserie  dont  les  couleurs  variées  se  fondent 
sur  tous  les  points  en  nuances  insensiblement  dégradées.  » 

M.  Paul  Meyer  aurait  donc  découvert  une  loi  linguistique.  Il  serait 
plus  exact  de  dire  que  le  savant  directeur  de  l'Ecole  des  Chartes  a 
constaté  l'application  à  la  linguistique  d'une  loi  déjà  formulée  depuis 
longtemps  :  «  Natura  non  facitsaltus  ».  Cette  application  pouvait  être 
supposée  à  priori,  puisque  le  langage,  fonction  d'un  être  organisé, 
appartient,  par  un  certain  côté,  au  domaine  de  l'histoire  naturelle. 
Mais,  tandis  que  les  naturalistes  de  tous  les  pays  ont  tiré  de  la  grande 


DE   PHILOLOGIE  ROMANE  135 

loi  que  je  viens  de  rapporter,  cette  conclusion  qu'il  faut  faciliter  Tétude 
des  êtres  en  s'efforçant  de  les  classer  aussi  exactement  que  le  permet 
rentrecroisêment  des  caractères,  MM.  P.  Meyer  et  G.  Paris  concluent, 
en  sens  inverse,  qu'il  faut  renoncer  à  toute  classification.  Ils  n'admettent 
même  pas  la  division  des  parlers  de  la  France  en  deux  groupes  :  l'un 
septentrional  ou  langue  d'oil,  l'autre  méridional  ou  langue  d'oc.  Ces 
mots,  d'après  eux,  n'ont  de  sens  qu'appliqués  à  la  production  littéraire. 
Mais,  si  tout  groupement  des  parlers  de  la  France  est  rendu  impos- 
sible par  ce  fait  que  ces  parlers  se  perdent  les  uns  dans  les  autres 
par  des  nuances  insensibles  ;  s'il  n'y  a  même  pas  de  ligne  de  démar- 
cation entre  ce  qu'on  appelle  encore  la  langue  d'oil  et  la  langue  d'oc, 
il  n'y  en  a  pas  davantage  entre  les  parlers  de  la  France  et  ceux  de 
l'Italie  et  de  l'Espagne,  entre  les  parlers  de  l'Espagne  et  ceux  du  Por- 
tugal. C'est  la  conséquence  inévitable  delà  loi  «  Naturanonfacit  saltus  » 
interprétée  par  M.  P.  Meyer.  Cette  conséquence  n'effraie  pas  M.  G. 
Paris  :  «  Si  nous  examinons,  dit-il,  le  vocabulaire  et  la  grammaire  qui 
leur  sont  en  très  grande  partie  communs  (aux  parlers  de  la  Fiance), 
nous  y  découvrons  sans  peine  la  plus  visible  affinité  avec  les  langues 

qui  se  parlent  en  Espagne,  en  Italie  et  dans  la  lointaine  Roumanie 

La  langue  que  nous  parlons,  que  parlent  les  autres  peuples  que  je 

viens  de  nommer,  c'est  le  roman,  la  langue  des  Romani,  c'est-à-dire 

le  latin.  »  Et  le  savant  professeur,  remarquant  avec  raison  que  «  la 

nature  ne  fait  paô  plus  de  sauts  dans  le  temps  quo  dans  l'espace  », 

mais  persistant  dans  sa  manière  d'interpréter  cette  vérité,  n'admet 

pas  que  l'on  distingue  le  latin  parlé  aux  temps  antiques  dans  les  rues 

de  Rome  des  idiomes  vulgaires  de  nos  jours, qui  sont  le  «  résultat  de 

l'évolution  spontanée,  variée  suivant  les  lieux,  du  latin  importé  par 

la  conquête  romaine.  »  D'où  cette  conclusion  assez  inattendue  que  les 

langues  romanes  ne  viennent  pas  du  latin,  ne  sont  pas  les  filles  du  latin, 

niais  sont  le  latin  même.  Je  cite  :  «  Nous  parlons  latin Il  ne  faut 

pins,  en  effet,  répéter,  comme  on  le  fait  trop  souvent,  que  les  langues 
romanes  viennent  du  latin,  qu'elles  sont  las  filles  dont  la  langue  latine 
68t  la  mère.  Il  n'y  pas  de  langues  mères  et  de  langues  filles.  Le  lan- 
Ç^ge,  sous  l'empire  d'impulsions  encore  mal  connues,  les  unes  d'or- 
dre physiologique,  les  autres  d'ordre  psychologique,  va  sans  cesse  en 
86  modifiant,  mais  ses  états  successifs  ne  se  séparent  pas  avec  plus 
"6  netteté  que  ses  variations  locales.  » 

Comme  personne  n'a  jamais  soutenu  que  la  naissance  d'une  langue 
**t  quelque  rapport  avec  la  naissance  d'un  animal,  ou  qu'un  parler 
Populaire  ait  jamais  été  créé  un  beau  jour  de  toutes  pièces  et  aussitôt 
aaopté,  les  paroles  qui  précèdent  ne  peuvent  avoir  qu'un  sens  :  c'est 
q^eles  langues  romanes  et  le  latin  ne  font  réellement  et  absolument 
quune  même  langue.  Si  l'orateur  pensait,  en  effet,  que  l'évolution 


136  CONGRES 

spontanée  du  latin  eût  produit  peu  à  peu,  par  un  travail  aussi  insen- 
sible qu*on  voudra  le  supposer,  des  langues  nouvelles,  il  ne  pourrait 
nier  que  ces  langues  viennent  du  latin,  et  qu'il  est  permis  de  les 
appeler,  par  une  métaphore  qui  n'a  rien  de  forcé,  ^/Ze«  du  latin.  Cette 
façon  de  parler  ne  peut  être  inexacte  que  si  l'évolution  spontanée  du 
latin  n'a  pas  produit  de  nouvelles  langues,  si  les  langues  romanes 
ne  doivent  pas  être  séparées  du  latin  et  ne  font  absolument  qu'un 
avec  lui,  car  on  ne  peut  naître  de  soi-même,  être  la  fille  de  soi-même. 
Ainsi,  après  avoir  affirmé  qu'il  n'y  a  pas  de  dialectes  en  France, 
pour  cette  raison  que  le  langage  vulgaire  se  modifie  graduellement 
d'un  point  à  un  autre,  M.  G.  Paris  reste  conséquent  avec  lui-même  et, 
pour  une  raison  analogue,  nie  qu'il  existe  scientifiquement  des  langues 
romanes  distinctes  entre  elles  et  distinctes  du  latin.  Langues  roma- 
nes actuelles  et  latin  parlé  du  haut  moyen  âge  et  de  l'antiquité  ne 
forment  pour  lui  qu'une  «  masse  linguistique  »  dans  laquelle  il  n'y  a 
de  subdivision  possible  ni  dans  le  temps  ni  dans  l'espace,  et  qui  doit 
s'appeler  le  latin.  Il  ne  s'arrête  pas  là:  «  Si  les  formes  principales  de  la 
langue  indo-européenne,  ajoute-t-il,  l'indien,  le  grec,  le  latin,  le  cel- 
tique, le  germanique,  le  slave,  nous  apparaissent  comme  parfaitement 
distinctes  les  unes  des  autres,  cela  tient  à  ce  que  nous  ne  possédons 
sur  l'évolution  de  chacune  d'elles  que  des  notions  absolument  frag- 
mentaires. »  Rien  de  plus  exact  que  cette  constatation,  mais  rien  de 
plus  étrange  que  la  conclusion  à  laquelle  conduit  l'inexorable  logique. 
La  langue  indo-européenne  n'est  donc  à  son  tour  qu'une  «  masse  lin- 
guistique »  dans  laquelle  le  hasard  a  produit  des  subdivisions  artifi- 
cielles, mais  qui,  si  elle  était  mieux  connue,  serait  aussi  indivisible 
que  l'est  le  latin.  On  juge  de  la  clarté  qui  se  répandrait  sur  l'étude  des 
langues  le  jour  où  la  science  n'admettrait  plus  que  des  «  masses  lin- 
guistiques »  et  des  «  traits  linguistiques  »,  étudiant  ceux-ci  pris  iso- 
lément, proscrivant  l'emploi  des  mots  qui  servent  à  distinguer  ou  à 
rapprocher  les  idiomes  suivant  leurs  dissemblances  et  leurs  analogies. 
Tel  paraît  être  cependant  l'idéal  de  M.  G.  Paris,  puisqu'il  ne  veut 
entendre  parler  ni  de  la  distinction  entre  les  langues  romanes  et  le 
latin,  ni  de  la  division  des  parlers  de  France  en  deux  groupes,  le 
groupe  d'oil  et  le  groupe  d'oc.  Si  tout  ce  qu'il  dit  de  l'unité  et  de 
l'indivisibilité  du  latin  dans  le  temps  comme  dans  l'espace,  n'est 
qu'une  explication  philosophique  de  la  formation  des  langues,  l'étude 
sur  le  vif  des  idiomes  vulgaires  doit  en  être  influencée  de  la  même 
façon  que  les  travaux  de  classification  des  animaux  et  des  végétaux 
le  sont  par  la  théorie  qui  considère  tous  les  êtres  organisés  comme  le 
résultat  de  l'évolution  spontanée,  —  variée  suivant  les  milieux,  — 
de  la  cellule.  Rien  ne  s'oppose  donc  à  ce  que,  dans  la  pratique,  on 
distingue  entre  elles  les  langues  romanes,  comme  on  distingue  les 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  137 

diverses  classes  d'êtres  vivants,  sous  la  réserve  des  modifications  que 
les  progrès  de  la  science  peuvent  apporter  aux  classifications  actuelles. 
Mais  alors,  rien  ne  s'oppose  non  plus  à  ce  qu'on  sépare  la  langue  d'oc 
de  la  langue  d'oil,  et  à  ce  qu'on  groupe,  suivant  certaines  règles,  les 
diverses  modifications  locales  ou  régionales  de  chacune  de  ces  langues. 
Si,  au  contraire,  M.  G.  Paris  fait  passer  sa  théorie  dans  la  pratique 
au  point  de  nier  la  possibilité  de  distinguer  entre  elles  les  deux 
langues  de  la  France  et  les  modifications  locales  ou  régionales  de  ces 
deux  langues,  la  logique  le  force  à  étendre  ces  conséquences  de  son 
principe  à  tous  les  parlers  romans  et  même  à  tous  les  parlers  indo- 
européens, c'est-à-dire  à  tomber  dans  l'étrangeté  et  la  confusion  que 
je  viens  de  signaler. 


II 

MM.  G.  Paris  et  P.  Meyer  me  paraissent  errer  gravement  en  ne  te- 
nant aucun  compte  du  besoin  qui  s'impose  à  l'homme  de  tout  classer,  ce 
qu'il  voit  et  ce  qu'il  entend,  les  choses  et  les  idées,  les  êtres  et  leurs 
manifestations.  Il  est  facile  de  constater  que  ce  besoin  de  classifica- 
tion s'étend  jusqu'au  langage. 

Supposons  cinq  hommes  en  présence  :  l'un  est  né  à  Paris,  le  second 
à  Rome,  le  troisième  à  Madrid,  le  quatrième  à  Lisbonne,  le  cinquième 
à  Bucarest  *.  Chacun  d'eux  ne  connaît  que  la  langue  de  son  pays 
d'origine;  ils  essaient  vainement  de  se  comprendre.  Cependant,  d'après 
M.  G.  Paris,  ils  parlent  tous  latin.  Ils  ne  parlent  pas  des  langues  qui 
viennent  du  latin,  des  langues  filles  du  latin,  ils  parlent  latin.  Si  l'on 
demande  à  mon  éminent  contradicteur  pourquoi  ces  cinq  hommes 
qui  parlent  tous  latin,  ne  peuvent  s'entendre,  il  sera  bien  forcé  de  ré- 
pondre que  cela  tient  à  ce  que  l'évolution  spontanée  du  latin  parlé 
dans  Tancienne  Rome  et  importé  en  divers  points  de  l'Europe  par  la 
conquête,  ayant  varié  suivant  les  lieux,  le  latin  parlé  aujourd'hui  à 
Paris  diffère  du  latin  actuel  de  Rome,  comme  celui-ci  diffère  du  latin 
de  Madrid,  de  Lisbonne  et  de  Bucarest.  Cette  explication  seule  est 
une  classification;  car  définir  une  chose,  la  différencier  d'une  autre,  la 
rapprocher  d'une  troisième,  c'est  classer,  et  pour  éviter  des  répétitions 

*  Il  serait  mieux  de  dire:  aux  environs  de  Paris,  de  Rome,  de  Madrid, 
etc.;  car,  suivant  une  remarque  de  M.  G.  Paris,  qu'il  convient  cependant  de 
ne  pas  trop  généraliser,  les  langues  littéraires  enseignées  à  l'école  ont  souvent 
modiflé  et  parfois  remplacé  les  parlers  locaux  dans  les  villes.  Il  reste  donc 
entendu  que,  lorsque,  pour  plus  de  concision  et  de  clarié  géographique,  je 
désigne  les  parlers  par  le  nom  d'une  ville,  il  s'agit  du  langage  populaire  de 
la  campagne  environnant  cette  ville. 


138  CONGRES 

fatigantes  en  classant,  on  se  sert  de  mots  qui,  une  fois  leur  sens  con- 
ventionnel connu,  rappellent  ces  définitions,  ces  distinctions,  ces  rap- 
prochements . 

Dès  que  vous  admettez  que  les  parlers  de  Paris,  de  Home,  de  Ma- 
drid, de  Lisbonne,  de  Bucarest  diffèrent  aujourd'hui  entre  eux  et 
diffèrent  également  du  latin,  il  devient  d'une  subtilité  presque  puérile 
de  nier  que  ce  ne  soient  là  six  parlers  distincts  dont  le  dernier,  le  latin, 
a  produit  les  cinq  premiers.  Il  est  beaucoup  plus  rationnel  et  surtout 
plus  commode  d'appliquer  à  ceux-ci  une  dénomination  qui  indique  à 
la  fois  ce  double  fait  incontestable,  qu'ils  diffèrent  entre  eux  de  nos 
joiu-8  et  qu'ils  n'étaient  autrefois  qu'une  même  langue,  le  latin  ;  en 
un  mot  d'appeler  chacun  d'eux  d'un  nom  particulier:  français,  italien, 
espagnol,  portugais,  roumain,  et  de  les  grouper  sous  l'appellation 
commune  de  langues  romanes. 

Si  maintenant  nous  mettons  en  présence  deux  hommes,  dont  l'un 
est  né  à  Tours,  l'autre  à  Marseille,  et  qui  ne  connaissent  que  la  langue 
de  leur  pays  d'origine,  ils  ne  se  comprendront  pas  mieux  que  le  Pa- 
risien de  tout  à  l'heure  ne  comprenait  l'Italien,  l'Espagnol,  le  Portu- 
gais ou  le  Roumain.  Or,  d'après  M.  G.  Paris,  non  seulement  ils  par- 
lent latin  tous  les  deux,  mais  leurs  langages  appartiennent  à  la  même 
masse  linguistique  résultant  de  l'évolution  spontanée  du  latin  importé 
en  Gaule  par  la  conquête  romaine,  masse  dans  laquelle  il  n'y  a  réel- 
lement pas  de  dialectes,  pas  de  subdivision  possible,  même  en  deux 
parts. 

L'éminent  philologue  sera  cependant  forcé  d'avouer  que  le  latin 
importé  en  Gaule  ayant  évolué  d'un^  façon  à  Tours  et  d'une  autre 
façon  à  Marseille,  le  résultat  n'a  pas  été  le  même  aux  deux  endroits 
et  que,  pour  cette  raison,  le  Tourangeau  et  le  Marseillais  ne  peuvept 
se  comprendre.  Dire  que  l'évolution  du  latin  à  Tours  n'a  pas  été  la 
même  que  l'évolution  du  latin  à  Marseille,  c'est  constater  deux  résul- 
tats distincts,  l'existence  de  deux  parlers,  c'est  faire  œuvre  de  clas- 
sificateur. 

Mais  M.  G.  Paris  ne  nie  pas  qu'il  y  ait  des  parlers  divers  ;  ce  qu'il 
nie,  c'est  qu'on  puisse  les  grouper,  les  classer.  D'après  lui,  le  patois 
de  chaque  commune  est  un  patois  distinct,  plus  ou  moins  différencié 
du  patois  de  telle  autre  commune.  Dès  que  vous  essayez  de  rapprocher 
ces  langages,  ils  se  fondent  et  ne  forment  plus  un  groupe  de  parlers 
divers,  mais  un  bloc  unique,  une  masse  linguistique.  Entre  le  patois 
d'une  commune  et  la  masse  linguistique  à  laquelle  il  appartient,  il  n'y 
a  place  pour  aucune  division  intermédiaire.  C'est  bien  là,  je  crois,  le 
vrai  sens  du  système  que  j'examine. 

Il  est  cependant  évident  que  si  l'on  considère  ces  patois  séparés  les 
uns  des  autres  en  les  prenant  village  par  village,  il  en  est  qui  ont 


DE    PHILOLOGIE   ROMANE  139 

entre  eux   plus  d'affinité  qu'ils  n'en  ont  avec  d'autres  patois  de  la 
même  masse  linguistique.  Que,  par  exemple,  le  parler  de  Toulouse  a 
plus  de   ressemblance  avec  celui  de  Marseille  ou  le  parler  de  Rouen 
avec  celui  de  Tours  que  celui  de  Tours  avec  celui  de  ^larseille.  Enon- 
cer ce  fait  indiscutable,  c'est  faire  un  pas  de  plus  dans  la  voie  de  la 
classification.  Car  aussitôt  cette  vérité  connue,  la  personne  à  qui  vous 
la  révélez,  —  l'élève  en  philologie  par  exemple,  —  en  vertu  de  la 
acuité  classificatrice  de  l'esprit  humain  et  du  fonctionnement  normal 
de  la  mémoire,  rapproche  par  la  pensée  le  parler  de  Rouen  de  celui  de 
Tours,  le  parler  de  Toulouse  de  celui  de  Marseille.  Que  vous  le  vouliez 
ou  •  non,  voilà  deux  groupes  constitués.  Toutes  les  fois  que  l'élève 
entendra  parler  d'un  nouveau  patois   de   France,  il  le  rapprochera 
instinctivement  soit  du  groupe  Rouen-Tours,  soit  du  groupe  Toulouse- 
Marseille.  Que  vous  donniez  à  ces  groupes  les  noms  de  langue  d'oil 
et  de  langue  d'oc  ou  tout  autre  nom,  peu  importe  ;  la  division  que 
vous  refusiez  de  reconnaître  est  faite  par  vous-même  et  malgré  vous. 
On  objectera  qu'à  un  moment  donné,  Télève  se  trouvera  en  présence 
de  parlers  qui  réuniront  assez  de  caractères  empruntés  à  la  fois  aux 
parlers  du  Nord  et  aux  parlers  du  Midi  pour  qu'il  ne  sache  plus  dans 
quel  groupe  les  classer.  Ce  sera  une  difficulté  comme  il  s'en  rencontre 
à  chaque  pas  dans  l'histoire  naturelle  et  ailleurs  ;  ce  ne  sera  pas  un 
argument  contre  la  nécessité  d'une  classification. 

A  quel  moment  de  sa  transformation  insensible  le  germe  cesse-t-il 
d'être  germe  pour  devenir  l'être  qu'il  renfermait  en  lui?  A  quel 
moment  l'œuf  cesse-t-il  d'être  œuf  pour  devenir  l'animal  qui  doit  en 
briser  l'enveloppe  ?  Et,  dans  un  autre  ordre  d'idées,  ne  dit-on  pas, 
précisément  pour  obéir  à  la  nécessité  de  classification  dont  je  parlais 
tout  à  l'heure,  qu'un  bâton  a  deux  bouts  et  un  milieu  ?  Il  serait  impos- 
sible cependant  de  marquer  le  point  précis  où  finissent  les  bouts  et  où 
le  milieu  commence.  Direz-vous  pour  cela  que  le  bâton  n'a  ni  bouts 
ni  milieu?  Proscrirez-vous  l'emploi  de  ces  mots  qui  représentent 
évidenament  une  réalité,  une  subdivision  de  ce  tout  appelé  bâton  ; 
mais  une  subdivision  dont  les  limites  ne  sont  pas  marquées  par  la 
nature  de  l'objet? 

Donc,  alors  même  que  toute  délimitation  nette  des  langues  et  des 
dialectes  serait  impossible,  il  n'en  serait  pas  moins  nécessaire  de  les 
distinguer,  de  les  grouper,  en  un  mot  de  les  classer. 

III 

Jusqu'au  discours  de  M.  G.  Paris,  j'avais  compris  ainsi  qu'il  suit 
les  objections  que  M.  P.  Meyer  avait  bien  voulu  faire  à  mes  essais 
de  délimitation  géographique  des  langues  et  des  dialectes  : 


140  CONGRES 

«  Il  est  certain,  disait  à  ce  qu'il  me  semble  l'éminent  directeur  de 
rÉcoledes  Chartes  (je  n'ai  pas  sous  les  yeux  ses  paroles  textuelles),  il 
est  certain  qu'il  existe  des  familles  de  langues,  par  exemple  la  famille 
romane.  Ces  familles  se  subdivisent  naturellement  en  langues,  ainsi  les 
diverses  langues  romanes  ou  néo-latines,  parmi  lesquelles  on  distingue, 
depuis  des  siècles,  la  langue  d'oil  et  la  langue  d'oc.  Les  langues  elles- 
mêmes  se  fractionnent  en  dialçctes,  si  l'on  prend  pour  types  lespar- 
1ers  nettement  caractérisés  de  certaines  régions  ;  mais  si,  non  content 
de  classer  ces  parleis  types,  choisis  sur  des  points  divers  du  territoire 
relativement  éloignés  les  uns  des  autres,  vous  voulez  tracer  exacte- 
ment leurs  limites  respectives,  ou  même  la  limite  qui  sépare  la  langue 
d'oil  de  la  langue  d'oc,  vous  verrez  ces  parlers  se  fondre  les  uns 
dans  les  autres  d'une  manière  tellement  insensible  qu'il  vous  sera 
impossible  de  marquer  par  un  trait  sur  la  carte  les  contours  de  leurs 
domaines  respectifs.  Contentez- vous  donc  de  vous  référer  à  ces  dia- 
lectes types  sans  essayer  de  les  délimiter,  à  peu  près  comme  vous 
parlez  des  bouts  et  du  milieu  d'un  bâton  sans  vouloir  tracer  les  limi- 
tes de  ces  bouts  et  de  ce  milieu.  » 

Réduite  à  ces  proportions,  l'objection  n'a  rien  de  paradoxal,  rien 
qui  choque  l'évidence.  Klle  n'est  pas   nouvelle  :    Bringuier  et  moi 
l'avons  signalée  dans  les  observations  préliminaires  de  notre  rapport. 
11   y  a  plus  de    trente   ans,  cette  croyance  à  la  fusion  des  idiomes 
m'avait  frappé  lorsque,  après  l'obtention  d'un  très  modeste  diplôme 
scientifique,  la  pensée  me  vint  qu'il  ne  serait  sans  doute  ni  impossi- 
ble ni  inutile  d'importer  dans  le  domaine  linguistique  les  méthodes 
de  classification  claires  et  précises  qu'on  m'avait  appris  à  appliquio 
à  l'histoire  naturelle.  Cette  pensée  est  d'ailleurs  celle  de  bien  des 
maîtres  de  la  philologie  ;  Max  Miiller,  entre  autres,  a  dit  à  ce  sujet:  «  La 
philologie  comparée  est  une  des  sciences  de  la  nature,  et,  par  con- 
séquent, sa  méthode  doit  être  identique  à  celle  qui  a  été  suivie  avec 
tant  de  succès  en  botanique,  en  géologie,  en  anatomie  et  dans  les 
autres  branches  de  l'étude  de  la  nature  »  (  Lectures  sur  la  science 
du  langage).  Bien  que,  durant  de  longues  années,  je  n'aie  pu  tenter 
une  application  méthodique  de  ces  principes  à  Pétude  des  dialectes, 
j'étais  cependant  comme  hanté  par  cette  idée  dans  mes  fréquentes 
excursions  à  travers  la  France,  la  Belgique,  la  Suisse,  l'Espagne  et 
un  tout  petit  coin  de  l'Italie.  Je  me  suis  trouvé  un  jour  avoir  recueilli 
assez  d'observations  pour  que  mon  hypothèse  m'apparut  comme  une 
vérité.  Depuis  longtemps,  j'ai  la  conviction  que  la  classification  des 
idiomes,  même  locaux,  et  la  classification  des  êtres  ofi'rent  les  mêmes 
avantages  etles  mêmes  difficultés,  que  toutes  les  objections  qui  peuvent 
être  adressées  à  l'une  ont  été  résolues  par  l'autre,  et  que  si  les  natu- 
ralistes de  tous  les  temps  et  de  tous  les  pays  ont  trouvé  utile  de  se 


t^ 


DE  PHILOLOGIE  ROMANE  141 

diriger  dans  leurs  travaux  au  moyen  de  méthodes  de  plus  en  plus 
perfectionnées,  les  philologues  et  les  historiens  ne  retireraient  pas 
un  moindre  profit  d'un  procédé  qui  permettrait  de  grouper  les  parlers 
suivant  leurs  affinités  et  d'en  préciser  V habitat;  car  en  linguistique 
la  classification  doit  aboutir  à  une  délimitation  géographique. 

Je  viens  de  rapprocher  les  historiens  des  philologues.  On  ne  peut, 
en  effet,  isoler  le  langage  du  milieu  où  il  se  développe,  des  cerveaux 
qui  Tont  conçu,  des  sociétés  dont  il  est  le  lien.  Étudié  soit  dans  ses 
grandes  manifestations,  dans  ce  qu'on  pourrait  appeler  sa  physiolo- 
gie, soit  dans  les  menus  détails  de  son  anatomie,  chaque  idiome  fait 
partie  de  l'histoire  même  des  races  qui  le  parlent,  des  territoires  sur 
lesquels  il  s'étend. 

Revenant  à  l'opinion  que  je  combats,  je  constate  qu'elle  repose  non 
seulement  sur  une  observation  imparfaite,  mais  aussi  sur  une  erreur 
théorique  énoncée  par  M.  P.  Meyer  à  titre  d'objection  à  mon  adresse 
et  qui  peut  se  traduire  ainsi  :  «  L'histoire  naturelle  classe  des  êtres, 
c'est-à-dire  des  individus  parfaitement  distincts,  en  tant  qu'unités, 
des  autres  êtres  de  même  espèce  ou  d'espèce  différente  qui  les 
entourent.  Il  peut  y  avoir  doute  sur  la  place  à  assigner  à  l'individu 
que  vous  avez  sous  les  yeux,  jamais  sur  son  entité.  Quand  il  s'agit 
de  langage,  au  contraire,  la  difficulté  est  de  déterminer  l'unité  à 
classer.  L'idiome  que  vous  entendez  ou  dont  vous  lisez  un  échantillon 
écrit,  se  perd  dans  l'idiome  voisin,  vous  ne  pouvez  y  voir  une  vérita- 
ble unité,  ce  qu'en  histoire  naturelle  on  appelle  un  individu.  » 

L'argument  est  spécieux.  La  réponse  est  cependant  facile  et  je  suis 
étonné  de  ne  l'avoir  rencontrée  nulle  part*.  L'unité,  Vindividu  à  clas- 
ser en  matière  de  langage,  c'est  le  parler  de  chaque  homme.  Nous 
avons  tous  une  langue  apprise  dès  le  berceau,  dans  laquelle  nous 
pensons,  que  nous  employons  dans  l'intimité  de  i)référence  à  toute 
autre.  C'est  ce  langage  naturel  à  chaque  homme  qui  constitue  l'unité 
linguistique.  Le  langage  de  deux  hommes  ayant  même  parler ^  peut 
ne  pas  être  exactement  pareil;  mais  les  différences  ne  sont  pas  plus 
grandes  que  celles  qui  existent  souvent  entre  deux  êtres  de  même 

*  MM.  Van  Hamel,  professeur  à  l'Université  de  Groniogue,  et  Kristoffer 
Nyrop,  professeur  à  l'Université  de  Copenhague,  ont  eu  l'obligeance  de  me 
signaler  certains  passages  des  Principien  der  Sprachgeschichte  de  M.  Her- 
mann  Paul  et  de  VEinleitung  in  das  Spvachstiidium  de  M.  B.  Delbrûck  rela- 
tifs au  rôle  de  l'individu  dans  le  développement  du  langage.  (Voir  Kr.  Nyrop, 
Adjektivemes  Kônsbôjning  i  de  romanske  sprog,  Copenhague,  1886).  Ce 
point  de  vue  diffère  quelque  peu  du  mien.  J'aurai  l'occasion  d'y  revenir  dans 
rintroduction  de  mou  Essai  de  géographie  de  la  langue  d'oc. 

2  Je  ne  dis  pas:  deux  hommes  nés  dans  le  même  village,  puisqu'il  y  a  des 
villages  où  se  parlent  deux  idiomes  distincts. 

10 


142  CONGRES 

espèce.  Que  si  Ton  remarque  chez  quelqu'un  une  altération  réelle 
du  langage  local  par  suite  de  l'introduction  d'éléments  étrangers  ou 
pour  toute  autre  cause,  c'est  le  pendant  exact  en  linguistique  soit  de 
l'hybridité,  soit  de  la  monstruosité  en  histoire  naturelle.  Les  règles 
de  l'hybridité  et  de  la  tératologie  végétales  et  animales  s'appliquent 
à  l'hybridité  et  à  la  tératologie  linguistiques,  de  telle  sorte  que  la 
méthode  n'en  reçoit,  dans  son  ensemble,  aucune  atteinte. 

M.  G.  Paris  me  semble  regarder  le  parler  de  chaque  commune 
comme  une  sorte  d'unité  linguistique.  On  rencontre  cependant  en 
France  des  communes  composées  de  plusieurs  villages  et  hameaux  où 
sont  parlés  des  idiomes  différents  S  et  même  des  agglomérations  plus 
ou  moins  importantes  dont  tous  les  habitants  n^ont  pas  le  même 
patois.  Tout  le  monde  connaît  le  provençal  particulier  du  quartier 
Saint-Jean  de  Marseille.  Bringuier  et  moi  avons  recueilli  quelques 
observations,  restées  inédites,  sur  le  parler  du  quartier  de  Montpel- 
lier appelé  le  Plan  de  l'Olivier;  nous  avons  aussi  constaté  dans 
notre  rapport  l'existence  de  plusieurs  patois  dans  une  même  ville  et 
parfois  dans  un  même  petit  village 2,  Pour  M.  G.  Paris  cependant  le 
parler  de  la  commune  n'est  pas  à  proprement  parler  Punité  lin- 
guistique, et  il  se  croit  obligé  de  chercher  celle-ci  dans  le  «  trait 
linguistique.  »  C'est  de  Tanatomie;  ce  n'est  pas  l'observation  de  la 
nature  telle  qu'elle  se  présente  à  nous,  pas  plus  que  l'étude  des 
tissus  et  des  organes  considérés  en  eux-mêmes,  indépendamment  des 
êtres  dans  la  constitution  desquels  ils  entrent,  n'est  l'étude  complète 
de  ces  êtres.  Je  ne  nie  pas  l'utilité  scientifique  de  cette  façon  de  pro- 
céder; mais  toute  science  serait  faussée  qui  s'en  tiendrait  à  cette 
méthode  unique. 

IV 

L'unité  linguistique  une  fois  déterminée,  le  philologue  doit  grouper 
les  individus  suivant  les  règles  qui  lui  paraissent  les  plus  ration- 
nelles. Il  n'y  a  pas  plus  de  difficultés  à  ce  groupement  qu'au  groupe- 
ment des  êtres. 

M.  G.  Paris  semble  croire  qu'une  classification  est  quelque  chose 
d'absolu  qui  ne  prête  à  aucun  doute  et  ne  doit  être,  suivant  ses 
expressions,  ni  «  arbitraire  »  ni  «  factice.  »  Personne  n'ignore  cepen- 
dant que  la  répartition  des  êtres  en  espèces,  genres,  familles,  ordres, 
classes,  règnes,  n'est  pas  une  loi  de  la  nature,  qui  «  ne  fait  jamais  de 
sauts.  ))Ce  qui  est  une  loi,  c'est  la  nécessité  pour  l'homme  de  classi- 

1  Rapport  sur  la  limite  géographique  de  la  Langue  d'oc  et  de  la  langue 
d'oil,  p.  20,  23,  27  à  33,  35,  37,  41,  42,  51,  52,  54,  55,  57,  59. 

2  /rf  ,  p.  24,  29,  31,  32,  34,  35,  59. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  143 

fier  tout  ce  qui  lui  tombe  sous  les  sens.  Cette  classification  est  tan- 
tôt purement  instinctive,  tantôt  raisonnée  ;  elle  peut  être  plus  ou 
moins  rationnelle^  plus  ou  moins  scientifique;  mais  il  y  a  toujours  en 
elle,  dans  des  proportions  variables,  quelque  chose  d'arbitraire  et  de 
factice. 

Dans  les  sciences,  on  a  voulu  tirer  parti  de  la  faculté  classifica- 
trice  de  Fesprit  humain,  la  rendre  plus  féconde  en  la  réglementant  de 
façon  à  ce  qu'elle  s'exerçât  au  moyen  de  mots  qui  rappellent  les  traits 
les  plus  caractéristiques  et  les  rapports  réciproques  des  objets  à  clas- 
ser, et  c'est  précisément  ce  procédé  qu'il  ne  serait  pas  inutile  d'intro- 
duire dans  l'étude  des  parlers  locaux  et  régionaux.  Supposer  qu'il 
existe  quelque  part  au  monde  un  groupe  d'êtres  ou  d'objets  dont  aucun 
des  caractères  ne  se  retrouve  dans  un  autre  groupe  est  une  erreur 
des  plus  évidentes  et  des  plus  graves.  Mais  tous  les  caractères  n'ont 
pas  la  même  valeur;  la  tâche  du  classificateur  est  de  rechercher 
ceux  qui  paraissent  les  plus  saillants,  qui  donnent  à  l'objet  sa  vraie 
physionomie,  point  sur  lequel  les  opinions  peuvent  varier  et  ont  varié 
en  effet  dans  toutes  les  sciences . 

L'antique  classification  des  êtres  d'après  la  Genèse,  —  végétaux 
«  herbes  vertes  et  bois  portant  des  fruits  »,  animaux  subdivisés  en 
reptiles  aquatiques,  reptiles  terrestres,  grands  cétacés,  poissons, 
animaux  «  volant  sous  le  firmament  »,  animaux  «  se  mouvant  sur  la 
terre  »  —  est  basée  sur  des  caractères  qui  frappent  les  yeux  de  l'ob- 
servateur le  plus  superficiel.  C'est  quelque  chose  comme  la  réparti- 
tion des  parlers  humains  en  grandes  classes,  en  familles,  en  langues, 
en  dialectes  ;  quelque  chose  comme  la  distinction  de  la  langue  d'oil 
et  de  la  langue  d'oc,  du  dialecte  gascon  et  du  dialecte  provençal,  du 
normand  et  du  picard,  pris  d^ns  leurs  types  les  plus  caractérisés. 
L'existence  de  ces  groupes  tombe  sous  les  sens  ;  il  n'y  a  pas  de  sub- 
tilité  philosophique  qui  puisse  prévaloir  contre  cette  évidence.  Sur 
ce  point  un  paysan  a  le  droit  d'en  remontrer  an  plus  savant  philolo- 
gue, comme  il  aurait  le  droit  de  rappeler  à  la  vérité  l'anatomiste  qui 
affirmerait  que  les  oiseaux  ont  quatre  pattes  sous  le  prétexte  qu'on 
retrouve  dans  leurs  ailes  tous  les  éléments  des  membres  antérieurs 
des  quadrupèdes. 

Mais  lorsque,  après  avoir  constitué  des  groupes  suivant  certains 
types,  on  prend  chaque  unité  soit  d'histoire  naturelle,  soit  de  linguis- 
tique et  qu'on  veut  la  faire  entrer  dans  le  groupe  qui  lui  convient, 
on  rencontre  des  unités  qui,  par  l'ensemble  de  leurs  caractères,  sont 
comme  à  cheval  sur  une  des  limites  tracées.  On  trouve,  par  exemple, 
des  végétaux  doués  de  mouvement  et  de  sensation,  du  moins  appa- 
rente, qui  se  nourrissent  ou  paraissent  se  nourrir  d'insectes  vivants, 
tandis  que  certains  animaux  sont  fixés  au  sol  ou  se  reproduisent 


1 4 \  CONGRES 

par  boutures.  Et  dans  le  règne  animal  seulement,  tel  classificateur, 
qui  a  voulu  prendre  pour  caractère  les  sécrétions  des  téguments,  poils, 
plumes,  écailles,  test,  s'est  vu  forcé  de  réunir  dans. le  même  groupe 
des  poissons,  des  reptiles,  les  papillons  et  le  mammifère  appelé  tatou. 
Tel  autre,  se  basant  sur  le  mode  de  locomotion,  a  dû  mettre  le 
poisson  volant  et  la  chauve-souris  à  côté  de  l'oiseau  et  de  la  mou- 
che. On  a  vu  longtemps  le  lézard  et  le  cheval  figurer  l'un  et  l'autre 
dans  Tordre  des  quadrupèdes,  et  les  mammifères  englobent  aujour- 
d'hui le  singe  et  la  baleine.  Je  me  borne  aux  grands  traits  ; 
M.  Durand  de  Gros  a  donné,  dans  la  Revue  des  langues  romanes, 
des  détails  fort  instructifs  sur  les  incertitudes  de  classification  en  bo- 
tanique. On  peut  donc  appliquer  à  l'histoire  naturelle  aussi  bien  qu'à 
la  linguistique  ces  paroles  de  M.  G.  Paris  :  «  Les  groupes  qu'on  est 
tenté  de  former  se  dissolvent  et  se  recomposent  autrement  suivant 
le  critérium  qu'on  emploie  à  les  constituer.  » 

Malgré  les  difficultés,  les  imperfections,  les  erreurs  mêmes  ;  mal- 
gré des  disciissions  qui  ne  sont  pas  près  de  finir,  qui  ne  finiront 
jamais,  les  méthodes  empiriques,  artificielles  ou  naturelles,  ont  rendu 
suivant  les  temps  .des  services  inappréciables  à  la  science,  et  per- 
sonne n'a  songé  à  nier  l'utilité  même  des  plus  imparfaites.  En  ce 
moment,  les  découvertes  de  l'embiyo génie  semblent  destinées  à 
amener  la  refonte  complète  de  la  classification  zoologique  ;  mais 
tant  que  le  nouveau  moule  ne  sera  pas  formé  dans  son  entier,  on 
se  gardera  de  briser  l'ancien.  La  classification,  qui  n'est  pas  le  but 
de  la  science,  mais  un  simple  procédé  d'études,  doit  forcément  se 
perfectionner  à  mesure  que  de  nouvelles  connaissances  sont  acquises, 
de  sorte  que,  pour  arriver  à  la  meilleure  méthode  dans  une  branche 
quelconque  des  connaissances  humaines,  il  faudrait  que  la  science 
fût  définitivement  arrêtée  et  qu'il  n'y  eût  plus  rien  à  découvrir,  ce  qui 
est  impossible  aussi  bien  en  linguistique  comme  en  histoire  naturelle. 

Quatre  conclusions  résultent  de  ce  qui  vient  d'être  dit: 

1°  L'unité  est  facile  à  reconnaître  en  linguistique,  aussi  bien  que 
dans  les  sciences  naturelles,  l'unité  linguistique  étant  le  langage 
maternel  de  chaque  homme  ; 

2°  En  vertu   du  principe  Natura  non  facii  saltus,  il  est  impossi- 
*ble,  dans  quelque  science  que  ce  soit,  de  former  des  groupes  absolu- 
ment tranchés,  ne  présentant  que  des  caractères  leur  appartenant  en 
propre,  à  l'exclusion  de  tout  autre  groupe  ; 

3°  Toutes  les  objections  que  l'on  peut  faire  à  la  classification  des 
langues  peuvent  être  adressées  à  la  classification  des  êtres,  d'où  il 
résulte  que  celle-ci  étant  universellement  reconnue  indispensable,  il 
n'y  a  aucune  raison  pour  ne  pas  travailler  au  perfectionnement  de 
celle-là  ; 


DE   PHILOLOGIE    ROMANE  145 

« 
4°  Cette  classification  ne  sera  jamais  définitive  et  immuable  ;  elle 

doit  an  contraire  varier  plus  ou  moins  à  mesure  que  s'étendront  les 
connaissances  en  matière  d'idiomes. 

La  possibilité  d'une  classification  linguistique  ainsi  établie  en  théo- 
rie, montrons  quels  procédés  peuvent  être  employés  pour  y  parvenir 
dans  la  pratique. 


Pour  se  faire  une  idée  juste  d'un  être  quelconque  il  ne  suffit  pas, 
—  on  ne  saurait  trop  le  répéter,  —  de  l'étudier  à  l'aide  du  scalpel  et 
du  microscope  ;  il  faut  aussi  l'observer  à  l'état  vivant  et  agissant. 
Pour  juger  de  l'importance  et  du  rôle  d'un  organe,  il  faut  voir  cet 
organe  en  jeu.  Or  il  arrive  trop  souvent  que  les  philologues  n'ont 
pas  vu  assez  vivre  le  parler  qu'ils  étudient  sur  des  échantillons 
écrits,  c'est-à-dire  dans  un  état  voisin  de  la  moit. 

Je  n*ai  pas  besoin  d'insister  sur  les  altérations  que  les  copistes  de 
tous  les  temps  ont  fait  subir  aux  textes  en  langue  vulgaire  ;  mais 
je  rappellerai  que  dans  toutes  ou  presque  toutes  les  langues,  litté- 
raires ou  non,  il  s'est  établi  par  tradition  des  formes  graphiques 
qui  n'ont  aucune  raison  d'être  acceptable,  rapprochant  par  l'écriture 
ce  qui  est  distinct  en  tant  que  son,  et  réciproquement.  J'ai  été 
témoin,  par  exemple,  de  l'étonnement  de  bien  des  philologues  lors- 
qu'ils apprennent  que  la  désinence  ac  des  noms  de  lieux  est  géné- 
ralement en  France  prononcée  comme  la  désinence  at,  c'est-à-dire  a 
accentué  non  suivi  d'une  consonne.  Pendant  longtemps,  des  hommes 
très  instruits  dans  les  patois  de  langue  d'oc  ont  rangé  le  parler  de 
Nice  au  nombre  des  patois  italiens  parce  que,  sous  la  domination  pié- 
montaise,  on  a  pris  l'habitude  d'orthographier  le  niçois  à  la  manière 
italienne:  gl  pour  l  mouillé  ;  ch  pour  qii  =  k  ;  f/i  pour  J  =  dj^  etc. 

11  est  superflu,  je  crois,  de  faire  remarquer  que  les  caractères  ne 
doivent  pas  être  comptés,  mais  pesés  ;  et  (qu'on  pardonne  l'étrangeté 
de  l'expressionj  on  ne  peut  les  peser  qu'à  l'oreille,  la  langue  étant 
faite  d'abord  pour  être  parlée.  Les  traits  que  la  prononciation  ne  mar- 
que pas  doivent  être  comptés  pour  rien  ou  à  peu  près  rien  dans  la 
classification.  Parmi  ceux  qu'elle  marque,  il  en  est  qui  modifient  plus 
ou  moins  profondément  la  physionomie  du  langage,  et  auxquels  les 
indigènes  ne  se  trompent  jamais  lorsqu'ils  veulent  distinguer  leur 
parler  de  ceux  des  régions  voisines. 

Je  rappellerai  ici,  comme  corollaire  de  ce  qui  précède,  ce  qui  a  été 
dit  dans  le  rapport  sur  la  limite  géographique  de  la  langue  d'oc  et 
de  la  langue  d'oil  au  sujet  de  la  nécessité  d'étudier  les  patois  dans  les 
pays  même  où  ils  sont  parlés,  et  des  précautions  à  prendre  pour  être 


146  CONGRES 

assuré  qu'on  s'adresse  à  des  personnes  parlant  le  vrai  langage  indi- 
gène. Je  ne  saurais  trop  le  redire,  c'est  dans  le  peuple,  parmi  les 
illettrés,  qu'il  faut  chercher  des  renseignements  exacts  et  sur  l'idiome 
local  et  sur  les  traits  qui  le  distinguent  des  idiomes  voisins.  Mais 
tout  le  monde  n'est  pas  apte  à  recueillir  de  bonnes  observations  pho- 
nétiques; la  science  acquise  dans  les  écoles  et  dans  les  livres  est  pour 
cela  d'un  bien  faible  secours.  J'ai  connu  plus  d'un  philologue  distin- 
gué qui,  n'ayant  pas  été  familiarisé  dès  l'enfance  avec  les  langues  à 
paroxytons  et  à  proparoxytons,  était  incapable  de  reconnaître,  autre- 
ment qu'en  théorie,  la  place  de  l'accent  tonique  et  encore  plus  de  le 
marquer  en  parlant.  M  G.  Paris,  dans  son  Traité  du  rôle  de  V accent 
latin,  a  signalé  cette  «  incapacité  de  l'organe  des  Français  à  porter 
l'accent   autre  part  que  sur  la    dernière  syllabe  ».  L'incapacité  de 
parole  piovient  souvent  d'une  incapacité  d'ouïe  et  se  remarque  chez 
les  plus  lettrés.  Ce  n'est  pas  un  des  moindres  obstacles  que  rencon- 
trent les  Français  du  Nord  dans  la  pratique  des  langues  étrangères. 
Pour  démontrer  d'une   manière  absolue  la  possibilité  de  délimiter 
les  dialectes  et  les  sous-dialectes,  il  faudrait  procéder  au  tracé  géo- 
graphique de  tous  les  parlers  dépendant  d'une  même  langue,  de  tous 
les  patois  d'oc,  par  exemple,  ce  qui  serait  tout  à  fait  hors  de  propor- 
tion avec  le  cadre  du  présent  travail.  Je  dois  me  borner  ici  à  établir, 
en  premier  lieu,  que  les  gens  du  peuple  classent  d'instinct  les  parlers 
qu'ils  comprennent  ;  en  second   lieu,  que   l'observation  scientifique 
justifie  ce  classement  tout  au  moins  dans  ses  principaux  traits.  Je  vais 
donc  faire  connaître  tout  d'abord  quelques-unes  des  observations  qui 
m'ont   conduit  à  réclamer  l'application  à  l'étude   des  patois   d'une 
méthode  naturelle  de  classification  ;  puis,  prenant  pour  exemple  une 
région  peu  étendue,  mais  intéressante,  du  midi  de  la  France,  j'essaierai 
de  montrer  les  caractères  distinctifs  les  plus  saillants  de  chacun  des 
parlers  qu'on  y  rencontre,  et  de  prouver  qu'en  cet  endroit,  du  moins, 
il  existe  des  limites  bien    tranchées    entre   deux  langues  romanes, 
entre  deux  dialectes  et  même  entre  deux  sous-dialectes. 

Première  Observation.  — La  femme  P...,  née  en  1810,  à  Montpel- 
lier ;  d'intelligence  moyenne  ;  sait  lire,  presque  pas  écrire  ;  connaît  par- 
faitement le  patois  de  sa  ville  natale  et  malheureusement  assez  bien 
le  français  pour  une  femme  du  peuple  de  ce  pays.  Pendant  plus  de 
trente  ans,  cette  femme  est  restée  attachée  successivement  à  deux 
personnes  de  ma  famille  avec  qui  j'ai  voyagé  en  France  et  en 
Espagne . 

A  Nice,  la  femme  P..,.  est  un  peu  surprise  par  l'idiome  local  et 
demande  tout  d'abord  qu'on  le  lui  parle  lentement.  Après  quelques 
heures,  elle  le  comprend  facilement  et  se  fait  comprendre  d'un  assez 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  147 

grand  nombre  de  Niçois  sans  trop  de  difficulté  en  leur  parlant 
montpelliérain.  Dès  que  son  oreille  est  habituée  aux  sons  niçois,  les 
flexions,  les  tournures  de  phrase,  la  grammaire  en  un  mot,  ne  lui 
offrent  à  peu  près  aucune  difficulté.  Le  vocabulaire  est  ce  qui  la 
gêne  le  plus.  Bien  qu'en  contact,  durant  près  de  trois  ans,  avec  des 
personnes  parlant  l'italien  officiel,  le  génois  et  le  piémontais,  la 
femme  P...  ne  parvient  à  comprendre  aucun  de  ces  trois  idiomes; 
elle  en  apprend  quelques  mots  isolés,  mais  ne  parvient  jamais  à 
construire  ni  à  comprendre  une  phrase.  11  faut  reconnaître  que, 
n'étant  pas  absolument  obligée  de  communiquer  à  l'aide  de  ces  lan- 
gues, mon  sujet  ne  fait  aucun  effort  sérieux  pour  se  familiariser 
avec  elles. 

Je  crois  pouvoir  affirmer  que  la  femme  P...  comprend  également 
toutes  les  variétés  de  niçois  parlées  depuis  Sospel  *  jusqu'au  Var, 
limite  de  ce  sous-dialecte.  Du  Var,  en  suivant  le  littoral  jusqu'aux 
limites  du  catalan  et,  plus  haut,  jusqu'aux  parlers  gascons  carac- 
térisés par  l'emploi  de  h  pour  f  initial,  elle  entend  aisément  tous 
les  idiomes,  à  quelques  vocables  près  aussitôt  expliqués.  Dans  les 
conversations  entre  femmes,  la  volubilité  méridionale  ne  souffre  nulle- 
ment de  la  différence  des  parlers.  Vers  Toulouse  et  vers  Foix,  il  est 
nécessaire  cependant  de  quelques  heures  d'accoutumance  ;  la  femme 
P...  doit  «  se  mettre  dans  l'oreille  »  les  sons,  l'accent  dans  le  sens 
vulgaire  de  ce  mot.  Je  ne  parle  pas  des  divergences  du  vocabulaire 
qui  commencent  plus  ou  moins  à  quelques  lieues  de  Montpellier  et 
ne  constituent  jamais  une  vraie  difficulté. 

En  pays  gascon,  la  femme  P...  a  assez  de  peine  à  s'habituer  à  l'A 
tenant  la  place  de  1'/";  mais  il  est  facile  de  voir  que  c'est  à  peu  près 
tout  ce  qui  la  gêne  dans  ce  nouveau  dialecte.  Si  l'on  remet  Vf  à  la 
place  de  Yh,  toute  hésitation  disparait. 

Sur  les  limites  de  l'ancien  Roussillon,  entre  Leucate  et  Salces, 
petites  villes  qui  ne  sont  séparées  que  par  une  distance  de  13  kilo- 
mètres, le  catalan  succède  brusquement  au  languedocien.  Ici  deux 
des  principes  posés  par  M.  G.  Paris  sont  nettement  contredits  par 
les  faits  :  il  n*y  a  pas  de  fusion  entre  les  deux  idiomes  juxtaposés  et 
la  limite  linguistique  coïncide  avec  une  limite  politique.  C'est  une 
exception,  dira-t-on.  11  y  aurait  à  vérifier  si  les  exceptions  de  ce 
genre  ne  se  renouvellent  pas  si  souvent  qu'elles  finissent  par  deve- 

*  Je  prends  Sospel  comme  point  frontière  et  non  Vintimille  parce  qu'entre 
cette  dernière  ville  et  Nice,  se  trouve,  outre  le  génois  de  Monaco,  le  dialecte 
mentonais  sensiblement  différent  du  niçois,  et  sur  lequel  Tattenlion  de  la 
femme  P...  n'a  jamais  été  appelée.  J'étudierai  plus  loin  l'idiome  de  Menton 
comparé  aux  parlers  de  Vintimille  et  de  Nice, 


1 i 8  CONGRES 

nir  plas  fréonentes  qae  la  prétendae  règle.  Cette  limite  franchie, 
notre  voyageuse  et  les  indigènes  ne  se  comprennent  qn'avec  de  grands 
efforts  d'attention.  J'essaie  de  prononcer  des  phrases  catalanes  avec 
Taccent  (sens  vulgaire)  de  Montpellier,  et  des  phrases  de  montpel- 
liérain  en  imitant  de  mon  mieux  Taccent  catalan,  je  suis  à  peu  près 
compris  des  deux  côtés.  Après  quelques  jours  passés  à  Barcelone,  le 
catalan  courant  n'a  plus  guère  de  difficutés  pour  la  femme  P...  11 
en  est  tout  autrement  du  catalan  littéraire  et  même  en  général  du 
catalan  écrit.  Tandis  qu'elle  éprouve  toujours  une  véritable  joie  à 
lire  ou  à  entendre  lire  les  œuvres  du  montpelliérain  Favre,  du  tou- 
lousain Gondouli,  du  rouergat  Peyrot,  du  niçois  Rancher  et  des 
félibres  provençaux,  le  reclor  de  Vallfogona  et  les  contes  en  prose 
catalane  lui  donnent  trop  de  peine  à  comprendre  pour  qu'elle  les 
écoute  avec  plaisir.  Cependant,  pour  tout  ce  qui  est  usuel,  elle  com- 
munique parfaitement  avec  les  personnes  de  Barcelone,  de  Valence, 
d'Alicante  et  de  Lerida. 

Entre  le  catalan  et  Taragonais,  la  transition  est  aussi  brusque 
qu'entre  le  languedocien  et  le  catalan.  Sur  la  route  de  Barcelone  à 
Sarragosse,  le  petit  village  d'Alraacellas  marque  l'extrême  limite  du 
catalan,  et,  après  un  intervalle  à  peu  près  inhabité  de  18  kilomètres, 
on  rencontre  Binefar,  premier  village  aragonais.  Sur  ce  nouveau  ter- 
ritoire, il  est  impossible  à  la  femme  P...  de  communiquer  avec  les 
habitants  autrement  que  par  signes.  «  Ce  n*est  plus,  dit-elle,  le  même 
espagnol  qu'à  Barcelone  ».  J'essaie  quelques  explications  ;  elles  servent 
de  peu  :  il  aurait  fallu  faire  un  cours  complet  de  langue  espagnole. 
Après  un  séjour  à  Madrid  de  plus  de  deux  mois,  la  bonne  femme  ne 
fait  d'autres  progrès  dans  la  langue  de  Cervantes  que  l'acquisition 
d'un  certain  nombre  de  vocables,  à  l'aide  desquels  elle  essaie  de  parler 
petit  nègre  en  castillan. 

Si,  partant  de  Montpellier,  nous  nons  dirigeons  vers  le  Nord,  la 
femme  P...  comprend  très  aisément  le  parler  des  Cévennes,  le  lozé- 
rien,  le  rouergat;  avec  un  peu  plus  de  peine,  mais  encore  assez  bien, 
le  dauphinois,  l'auvergnat,  le  limousin  de  la  Creuse. 

Sur  les  confins  de  la  langue  d'oil, l'expérience  devient  plus  difficile: 
le  français  appris  rend  le  contraste  des  langues  moins  appréciable. 
Cependant  ce  que  Bringuier  et  moi  avons  appelé  le  sous-dialecte 
marchois  est  traité  de  franchiman  (français  du  Nord)  par  mon 
sujet.  En  revoyant  et  classant  d'anciennes  notes  relatives  à  cette 
observation,  je  constate  que  la  femme  P. . .  appelle  franchiman  tout 
parler  où  les  paroxytons  d'oc  sont  devenus  oxytons,  soit  par  le. 
déplacement  de  l'accent  tonique,  soit  par  la  substitution  de  Ve  muet 
aux  voyelles  post-toniques.  Dans  le  limousin  bien  parlé,  elle  recon- 
naît la  place  de.  l'accent  tonique  même  lorsque  la  finale  post-tonique 


DE   PHILOLOGIE    ROMANE  149 

est  longue,  puisqu'elle  range  ce  dialecte  dans  la  catégorie  des  pap- 
iers gahachs,  11  faut  noter  encore  que,  pour  Tusage  courant,  le  fran- 
çais lui  est  aussi  familier  que  le  montpelliérain  ;  mais,  tandis  que  rien 
ne  lui  échappe  des  idées  les  plus  hautes  exprimées  dans  les  beaux 
vers  de  Mirèio,  la  lecture  du  français  lui  laisse  beaucoup  d'impressions 
incertaines  et  souvent  fausses;  elle  ne  paraît  jamais  bien  assurée 
d'avoir  compris  tout  ce  qui  n'est  pas  terre  à  terre,  et  en  effet  elle  se 
trompe  sur  le  sens  de  phrases  assez  simples. 

En  résumé,  pour  cette  femme,  les  langages  sur  lesquels  son  atten- 
tion a  été  appelée  se  divisent  ainsi  :  1°  son  patois   montpelliérain; 
2®  le  provençal  ;  3°  le  niçard  (niçois)  ;  4<'  les  parlers  gahachs  (patois 
de  Béziers,  de  l'Aude,   de  Toulouse,  de   TAriège,  cévenol,  lozérien, 
rouergat,  auveignat,  dauphinois,  limousin),  qu'elle  distingue  presque 
tous  les  uns  des  autres;  5°  le  parler  de  Bordeaux  {h  pour /"initial); 
6°  le  catalan;  7°  les  parlers  franchimans ;  8°  les  langues  qu'elle  ne 
comprend  pas.  espagnol  et  italien,  dans  lequel  elle  englobe  le  génois 
et  le  piémontais.  Tout  ce  qui  n'est  pas  langue  étrangère,  catalan  ou 
franchiman,  est  pour  elle  «  notre  patois  ou  un  patois  qui  ressemble 
au  nôtre.  » 

Je  sais  avec  quels  sourires  dédaigneux  et  quelles  fines  plaisante- 
ries certains  théoriciens  vont  accueillir  cette  classification  des  par- 
Ws  par  une  femme  du  peuple.  Mais  les  gens  de  bon  sens,  qui  savent 
combien  d'indications  précieuses  sur  des  nuances  de  structure  ani- 
ntiale  ou  végétale  les  naturalistes  doivent  à  des  remarques  de  pay- 
sans, ne  seront  pas  étonnés  de  me  voir  donner  cet  exemple  de  classe- 
^6nt  instinctif  des  langages.  Ils  savent  que,  pour  saisir  l'allure  et  la 
Physionomie  des  parlers  populaires  vivants  qu'elle  comprend,  une 
<^0i8iniôre  vaut  dix  élèves  de  l'Ecole  des  Chartes,  comme  pour  relever 
première  vue  certaines  particularités  de  la  faune  ou  de  la  flore  locales 
°  Paysan  vaut  dix  citadins,  fussent-ils  membres  de  l'Institut. 

^*  Obskrva.tion.  —  Augustine  R. . .,  âgée  de  douze  ans,  née  dans 

°  pôtit  village    de  la  Lozère,  éloigné  de  tout  grand  centre  et  de 

^^  Voie  importante   de  communication  ;  n'a  jamais  quitté  son  vil- 

S®'  Instruction  de  l'école  primaire;  intelligence  au-dessus  de  la 

"doyenne;  parle  presque  toujours  patois;  sait  bien  lire. 

'^^^^  a  sous  les  yeux  un  conte  en  dialecte  de  Montpellier  et  le  lit 

couramment  en  transformant  sans  hésitation  les  formes  du   texte  en 

termes  lozériennes,  n'ayant    pas  l'air  de   se  douter  que  les    mots 

vmpiinaés  sont  sensiblement  différents  de  ceux  qu'elle  prononce.  Elle 

ht,  pav  exemple  :  peèe  pour  pioi,  fremigeto  \)o\ir  fournigueta,  sou- 

9^^^  ^(i\iv  sourel,  anal  pour  awà^.  Elle  comprend  parfaitement   tous 

lesmots  pris  isolément  et  toutes  les  nuances  des  phrases.  Elle  trans- 


../  ■ 


150  CONGRES 

forme  ainsi  en  lozérien  tous  les  textes  de  langue  d'oc  de  diverses 
régions,  toutes  les  fois  qu'elle  les  comprend  à  première  lecture.  Jamais 
d'hésitation  pour  les  désinences  ;  elle  les  remplace  toutes  par  les  dési- 
nences exactement  correspondantes  de  son  parler  lorsqu'elle  saisit 
le  sens  du  mot.  Le  vocabulaire  la  fait  souvent  hésiter;  mais  l'absence 
d'un  mot  n'obscurcit  jamais  le  sens  grammatical  de  la  phrase.  Elle 
lit  ainsi  le  provençal  des  bords  du  Rhône  [Oiihrelo  en  proso  de  Rou- 
manille),  le  dauphinois,  le  toulousain,  le  rouergat,  l'auvergnat,  le 
limousin.  Pour  plusieurs,  il  est  nécessaire  de  lui  expliquer  parfois 
le  vocabulaire,  jamais  la  grammaire.  L'^  initial  des  parlers  pyrénéens 
la  déroute,  ainsi  que  l'orthographe  italienne  du  niçois.  Si  je  remplace 
Vh  par  f,  et  si  j'écris  le  niçois  à  la  manière  provençale,  elle  n'y  voit 
pas  plus  de  difficulté  que  pour  les  autres  dialectes  d'oc.  Elle  renonce 
à  lire  le  catalan  et  le  comprend  peu  si  je  le  lui  parle.  Elleest  décon- 
certée par  les  textes  en  langue  d'oil  vulgaire  qu'on  lui  met  sous  les 
yeux.  Ne  pouvant  plus  les  lire  à  sa  manière,  et  ne  reconnaissant  pas 
le  français  de  l'école,  elle  demande  quelle  est  cette  langue.  Elle  saisit 
bien  tous  les  contes  en  langue  d'oc,  quel  que  soit  le  dialecte,  et  y 
piend  grand  plaisir.  Les  contes  en  français  nécessitent  chez  elle  de 
grands  efforts  d'intelligence.  Alors  même  qu'elle  comprend  bien  tous 
les  mots  pris  isolément,  elle  se  trompe  souvent  sur  le  sens  de  la 
phrase. 

3«  Observation.  —  La  veuve  A...,  née  en  1850,  à  Saint-Girons 
(Ariège),  parlant  médiocrement  le  français  usuel,  ne  sachant  ni  lire 
ni  écrire  ;  intelligence  au-dessous  de  la  moyenne. 

On  lui  parle  le  langage  de  Saint-Girons  qu'elle  reconnaît  pour  celui 
de  son  pays.  Puis,  prenant  pour  centre  la  région  où  domine  cet 
idiome,  on  lui  parle  successivement  les  patois  des  régions  environ- 
nantes, en  procédant  par  cercles  concentriques.  Si,  comme  on  le  pré- 
tend, les  parlers  de  toute  la  France  se  pjerdent  les  uns  dans  les 
autres  par  des  nuances  insensibles,  la  différence  entre  un  parler  quel- 
conque pris  pour  centre,  et  chacun  des  patois  qui  l'entourent  à  la 
même  distance,  devra  être  égale  en  intensité  bien  que  ne  portant  pas 
sur  les  mêmes  traits.  En  d'autres  termes,  si  l'on  prend  successive- 
ment chacun  des  hommes  formant  les  longues  chaînes  imaginées  par 
M.  G.  Paris,  chacun  doit  comprendre  avec  la  même  facilité  son  voi- 
sin de  droite  et  son  voisin  de  gauche.  Mais  si,  en  quelques  points, 
le  voisin  de  gauche  est  mieux  compris  que  celui  de  droite  ou  réci- 
proquement, la  fusion  ne  sera  plus  insensible  et  ce  point  marquera 
une  limite  linguistique.  Or,  c'est  ce  qui  arrive  pour  la  veuve  A. . .;  elle 
considère  l'idiome  du  Médoc,  éloigné  de  plus  de  350  kilomètres  de 
Saint-Girons,  comme  plus  voisin  de  son  parler  que  celui  de  Foix,  qui 


DE   PHILOLOGIE   ROMAN R  151 

commence  à  quatre  ou  cinq  lieues  de  chez  elle.  Je  ne  dis  pas  que  la 
femme  A...  comprend  mieux  le  premier  que  le  second;  car,  d'une 
part,  le  langage  de  Foix  et  celui  de  Saint-Girons  sont  parlés  concur- 
remment, mais  non  mêlés,  à  Saint-Girons  même  et  par  conséquent 
également  compris  ;  et,  d'un  autre  côté,  il  y  a  dans  le  dialecte  du 
Médoc  des  mots  inconnus  dans  TAriège;  mais  la  veuve  A. . .  recon- 
nait  la  parenté  du  médocain  et  do  son  propre  idiome,  s'étonnant  qu'on 
parle  presque  comme  chez  elle  dans  un  pays  aussi  éloigné.  C'est  Vh 
initial  pour  f,  la  vocalisation  du  b  dans  certains  cas  qui  m'ont  semblé 
constituer  aux  yeux  de  cette  femme  la  ressemblance  entre  son  dia- 
lecte et  celui  du  Médoc.  Elle  distingue  les  patois  de  Foix,  ceux  de 
Pamiers  et  de  Cintegabelle  (Haute-Garonne)  ;  elle  donne  à  tous  le 
nom  de  toulousain.  Elle  comprend  un  peu  le  catalan  de  Perpignan, 
qu'elle  a  entendu  parler  par  des  colporteurs  ;  mais  pas  du  tout  l'espa- 
gnol. Elle  distingue,  parmi  les  dialectes  d'oc,  le  provençal  et  le  mont- 
pelliérain   du  toulousain  et  de  son  patois  ;  le  limousin  lui  paraît  un 
parler  gahach  ;  elle  le  comprend  avec  quelque  difficulté.  Ellle  n'en- 
tend à  peu  près  rien  aux  dialectes  d'oil,  elle  les  appelle  du  franchi- 
man  ;  c'est  l'accent  tonique  qui  paraît  la  dérouter.  Le  français  d'école, 
qu'elle  comprend  tant  qu'il  exprime  des  idées  qui  lui  sont  familières, 
lui  échappe  complètement   sinon  quaut  à  la    signification  des  mots 
isolés,  du  moins  quant  au  sens  des  phrases,  même  quand  on  lui  lit 
de  simples  faits -divers. 

Les  trois  observations  qui  précèdent,  données  à  titre  d'exemple, 
sont  corroborées  par  des  centaines  d'autres.  Le  procédé  qui  consiste 
à  prendre  comme  centre  l'idiome  d'une  localité  et  à  lui  comparer 
successivement,  en  suivant  des  cercles  concentriques  de  plus  en  plus 
grands,  les  parlers  qui  l'environnent,  m'a  toujours  donné  le  même 
résultat  sur  divers  points  des  pays  d'oc  et  des  pays  mixtes.  Jamais 
1  idiome  central  n'a  été  en  se  dégradant  également  dans  toutes  les 
directions.  Tandis  que  ses  caractères  saillants  se  prolongeaient  sou- 
vent fort  loin  dans  un  sens,  ils  s'arrêtaient  brusquement  à  une 
courte  distance  dans  un  autre  sens.  Ce  fait  a  été  signalé  dans  le 
rapport  sur  la  limite  des  deux  langues  de  France  ^  :  il  a  servi  de 
°^8e  à  la  délimitation  de  ces  langues  et  des  dialectes  mixtes.  C'est 
1«  résultat  absolument  contraire  à  celui  que  M,  G.  Paris  donne  comme 
constant.  D'où  vient  cette  divergence  radicale  sur  un  point  de  fait 
qu'il  semble  facile  de  véiifier?  C'est,  je  crois,  que  MM.  P.  Meyer  et 
"•  Paris  dissèquent  dans  leur  cabinet  des  échantillons  écrits  des 
parlers  vulgaires,  les  décomposent,  en  séparent  les  éléments  et  con- 

'  Voir  notamment  la  note  2  de  la  page  16  du  rapport. 


152  CONGRES 

cluent,  par  exemple,  que  si  Tidiome  a  renferme  dix  traits  qui  lui 
sont  communs  avec  l'idiome  b,  dix  traits  qui  se  retrouvent  dans 
l'idiome  c  et  dix  traits  qu'on  remarque  également  dans  Tidiome  dy 
il  y  a  parenté  égale"  entre  a  e^t  chacun  des  idiomes  b,  c,  d.  C'est  là 
une  erreur  que  l'observation  sur  le  vif  rend  évidente.  La  physionomie 
d'un  parler  est  constituée  par  les  traits  les  plus  saillants,  c'est-à-dire 
qui  se  reproduisent  le  plus  souvent  dans  le  discours  et  frappent  à 
chaque  instant  l'oreille. 

Je  reviendrai  tout  à  l'heure  sur  cette  question  du  choix  des  carac  • 
tères.  Pour  le  moment,  je  constate  les  résultats  suivants  des  trois 
observations  que  je  viens  de  résumer  et  qu'un  très  grand  nombre  d'au- 
tres, je  le  répète,  pourraient  confirmer  au  besoin  : 

1°  Les  gens  du  peuple  du  midi  de  la  France  distinguent  très  nette- 
ment la  langue  d'oc  des  parlers  étrangers  environnants  ,'piémon- 
tais,  génois,  italien,  espagnol)  et  aussi  des  patois  d'oil  ou  fran- 
chimans  ; 

2°  Ils  reconnaissent  une  parenté  intime  entre  tous  les  parlers  qui 
s'étendent  de  la  frontière  italienne  à  Salces  (Pyrénées-Orientales), 
à  l'Océan  et  à  Guéret,  avec  certaines  différences  suivant  les  régions. 
Ils  reconnaissent  une  parenté  moins  rapprochée  entre  les  patois  du 
midi  de  la  France  et  le  catalan  ; 

3**  Ils  distinguent  les  principaux  dialectes  d'oc  considérés  dans 
leurs  types  (provençal,  niçois,  languedocien,  gascon,  rouergat,  etc.), 
bien  qu'ils  ne  sachent  pas  toujours  le  nom  qu'il  convient  de  donner 
à  chacun  de  ces  dialectes  ; 

4°  Ils  distinguent  leur  parler  des  parlers  d'oc  qui  l'entourent  et, 
parmi  ces  derniers,  ils  signalent  ceux  qui  sont  plus  ou  moins  appa- 
rentés avec  leur  propre  parler.  Ils  constatent  qu'il  n'y  a  pas  de  rap- 
port constant  entre  le  degré  do  parenté  et  la  distance  géographique  ; 

5**  Ils  ne  sont  point  déroutés  par  les  différences  grammaticales  entre 
les  idiomes  d'oc.  Les  principales  difficultés  proviennent  pour  eux  du 
vocabulaire.  Lorsqu'il  s'agit  de  langues  étrangères  et  même  du  fran- 
çais d'école,  c'est  la  grammaire  qui  les  déconcerte  surtout  ;  de  là  leur 
tendance  à  parler  petit  nègre  les  langues  étrangères  et  même  le  fran- 
çais, ce  qui  ne  leur  arrive  jamais  lorsqu'ils  veulent  se  faire  compren- 
dre dans  un  dialecte  d'oc  qui  ne  leur  est  pas  familier  ; 

6^  Le  vocabulaire  ne  fournit  probablement  aucun  caractère  pour 
la  distinction  des  dialectes.  11  importe  peu,  en  effet,  qu'un  radical  ait 
disparu  d'une  région  et  se  soit  conservé  dans  une  autre;  les  faits  de 
ce  genre  ne  sont  jamais  assez  nombreux  pour  influer  sur  l'ensemble 
du  langage,  sur  sa  physionomie. 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  153 


VI 

Je  crois  utile  de  rapprocher  de  ces  conclusions  les  remarques  sui- 
vantes qui  les  confirment. 

La  plupart  des  faits  révélés  par  l'instinct  des  gens  du  peuple  con- 
cordent avec  les  observations  des  personnes  éclairées  qui  ont  vécu 
au  milieu  des  parlers  populaires,  du  moins  en  pays  d'oc.  On  a  signalé 
ailleurs  *  cette  particularité  que  tous  les  auteurs  qui  se  sont  occupés 
de  la  délimitation  de  la  langue  d'oc  et  de  la  langue  d'oil  pour  la 
région  qu'ils  habitaient  et  dont  ils  connaissaient  l'idiome,  ont  tracé 
une  limite  très  nette.  Mais,  parmi  ceux  mêmes  qui,  vivant  loin  de  la 
frontière,  ne  paraissent  pas  admettre  la  possibilité  d'un  pareil  tracé, 
il  n'en  est  aucun,  je  crois,  qui  soit  disposé  à  reconnaître  la  fusion 
insensible  des  parlers,  telle  que  la  comprennent  MM.  P.  Meyer  et 
G.  Paris.  Je  prends  pour  exemple  l'abbé  de  Sauvages,  auteur  d'un 
Dictionnaire  languedocien  estimé  (1756),  où  il  a  traité  la  question 
avec  quelque  étendue.  Pour  lui,  la  langue  d'oc,  qu'il  appelle  le  gascon, 
se  perd  par  nuances  dans  le  français,  l'italien  et  l'espagnol  ;  mais  il 
ajoute  que  «  les  nuances  du  gascon  vont  par  des  bandes  parallèles  » 
à  la  limite  de  la  langue  d'oil,  «  en  sorte  que  le  bas  peuple  et  les  habi- 
tants d'une  même  bande  qui  traverse  en  ce  sens  le  royaume,  parlent 
tous  à  peu  près  le  même  langage,  ou  sont  du  même  dialecte,  et  s'en- 
tendent mieux  entre  eux  qu'avec  ceux  de  la  bande  voisine,  mais  plus 
éloignée  de  la  frontière  11  suit  de  là  que  les  habitants  des  Cévenues, 
du  Rouergue,  de  l'Agenois,  etc.,  doivent  s'entendre  mieux  entre  eux 
qu'un  Cévenol  et  un  Toulousain,  et  c'est  ce  que  l'expérience  confir- 
me'.» Voilà  bien  la  négation  de  lafusion  insensible  des  dialectes, puis- 
que les  idiomes  situés  sous  un  même  parallèle  diffèrent  moins  entre  eux, 
à  distance  égale,  que  ceux  qui  se  trouvent  sous  le  même  méridien. 

L'auteur  avait  dit,  dans  son  Discours  préliminaire  ;«  Les  Cévenois 
qui  ont  fait  quelque  séjour  à  Toulouse  ne  trouvent  de  différence  dans 
le  langage  courant  du  peuple  de  cette  ville  d'avec  celuiqui  est  propre 
aux  Cévennes  que  dans  une  douzaine  d'expressions  qu'ils  ont  coutume 
de  rassembler  dans  une  phrase  qui  contient  les  termes  de  GoM5,-Bré'5- 
palia,  Engranéro,  Goujho  ^,  etc.  Si,  dans  des  cantons  plus  éloignés 
l'un  de  l'autre,  il  se  rencontre  un  plus  grand  nombre  de  ces  termes 

*  Rapport  sur  la  limite  géographique  de  la  langue  d*oc  et  de  la  langue 
d'oil,  p.  5. 

'  L'abbé  de  Sauvages,  Dictionnaire  languedocien,  verbe  Frannhiman. 

3  Ces  mots  soat  orthographiés  d'après  le  système  un  peu  étrange  de  l'abbe 
de  Sauvages. 


1 5  4  CONGRES 

que  n'entendent  pas  ceux  d'un  centre  plus  éloigné,  on  en  doit  con- 
clure tout  au  plus  que  ces  termes  caracténsent  un  dialecte  parti- 
culier et  non  un  langage  tout  différent.  »  Et  encore  :  «  La  diversité 
de  langage  dans  ces  différents  endroits  (le  Languedoc  et  les  pro- 
vinces voisines)  ne  se  trouve  le  plus  souvent  que  dans  quelques 
changements  de  lettres,  dans  la  terminaison  des  mots  et  dans  le  ton 
de  leur  prononciation  :  la  plupart  des  expressions  y  sont  communes, 
le  ^tour  de  phrase  peu  différent  ;  nous  nous  en  sommes  assurés  en 
traversant  les  provinces  qui  s'étendent  de  l'une  à  l'autre  mer,  et  en 
parcourant  un  bon  nombre  de  petites  feuilles  imprimées  dans  les 
différents  dialectes  de  ces  provinces.  Il  en  est  à  peu  près  comme  de 
la  langue  grecque  dans  ses  différents  dialectes  ;  on  y  trouve  le  même 
ton,  le  même  accent,  le  même  fond  de  langage.  C'est  pour  cela  que 
nous  tombons  tous  dans  les  mêmes  gasconismes  *.  »  Donc,  unité  de 
la  langue  d'oc  dans  ses  variétés  dialectales,  facilité  pour  les  Méri- 
dionaux de  comprendre  les  divers  parlera  d'oc,  peu  d'importance  des 
variations  grammaticales,  puisque  le  «  Cévenois  »  ne  relève  que  des 
divergences  de  vocabulaii'e  entre  son  parler  et  celui  du  Toulousain, 
qui  sont  pourtant  notablement  différents. 

On  objectera  que  l'abbé  de  Sauvages  n'était  pas  un  philologue. 
C'est  vrai;  il  était  naturaliste,  et,  comme  tel,  mieux  préparé  qu'un 
philologue  à  l'observation  rigoureuse  de  la  nature. 

11  est  donc  avéré  que,  pour  les  illettrés  comme  pour  les  lettrés  qui 
savent  entendre  et  comprendre  les  parlers  d*une  région  de  quelque 
étendue,  les  dialectes  existent.  Ils  ne  sont  niés  que  par  des  philolo- 
gues de  profession,  habitués  à  l'analyse  minutieuse  des  langues  écri- 
tes, et  qui,  —  je  ne  saurais  trop  insister  sur  ce  point,  parce  que  là 
est  l'origine  du  malentendu,  —  procèdent  comme  le  ferait  un  savant 
qui  refuserait  de  distinguer  les  êtres  vivants  autrement  que  par  les 
éléments  de  leur  organisme,  tissus  et  cellules,  liquides  et  gaz.  Par 
ce  système,  on  trouverait  de  telles  affinités  entre  tous  les  êtres 
vivants,  même  les  moins  apparentés,  qu'on  arriverait  à  douter  de  la 
possibilité  d'une  classification.  Et  cependant,  le  premier  homme  qui  a 
ouvert  les  yeux  sur  les  animaux  et  les  végétaux  dont  la  terre  est 
peuplée,  en  a  fait  un  classement  instinctif,  que  la  science  a  confirmé, 
du  moins  dans  les  grandes  lignes. 

Le  problème  de  la  classification  en  histoire  naturelle  ne  s'est  point 
posé  ainsi  :  «  Chercher  par  l'étude  de  la  structure  intime  des  organis- 
mes vivants,  s'il  y  a  des  êtres  distincts  et  s'il  est  possible  de  les 
grouper  suivant  certaines  règles;»  mais' bien  de  cette  manière: 
«  Etant  donné  qu'il   existe  des   êtres  distincts  qui,  à  première  vue, 

1  Dict.  langued..  Discours  préliminaire,  p.  xv. 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  155 

peuvent  être  groupés  suivant  des  affinités  évidentes,  rechercher  d'où 
proviennent  ces  affinités,  marquer  avec  plus  de  rigueur  les  limites  de 
chaque  groupe  et  préciser  les  rapports  des  divers  groupes  entre  eux.» 
De  même  en  linguistique,  étant  donné  qu'il  existe  des  idiomes  distincts 
qui,  à  première  vue,  peuvent  être  groupés  suivant  des  affinités  évi- 
dentes, il  convient  de  rechercher  d'où  proviennent  ces  affinités,  de 
marquer  avec  plus  de  rigueur  les  limites  de  chaque  groupe  et  de  pré- 
ciser les  rapports  des  divers  groupes  entre  eux. 

Qu'il  y  a  des  idiomes  distincts  entre  lesquels  on  remarque  dès 
l'abord,  —  à  la  condition  de  les  comprendre,  —  des  affinités  plus  ou 
moins  étroites,  c'est  ce  qui  résulte  des  observations  rapportées  plus 
haut  et  de  bien  d'autres  qui  les  confirment.  Ce  point  étant  acquis,  la 
tâche  du  classificateur  consiste  à  reconnaître  les  traits  qui  donnent  à 
chaque  idiome  sa  physionomie  et  peuvent  servir  de  base  à  un  grou- 
pement méthodique.  Il  n'est  pas  indispensable  pour  cela  d'avoir  la 
grammaire  complète  de  chaque  parler,  pas  plus  qu'il  n'a  été  néces- 
saire de  connaître  dans  ses  détails  la  structure  anatomique  de  chaque 
animal  et  de  chaque  végétal  pour  procéder  au  premier  classement  des 
êtres  organisés.  Il  importe  de  ne  pas  perdre  de  vue  l'objet  principal 
de  toute  classification,  qui  est  de  mettre  de  l'ordre  dans  les  résultats 
acquis,  afin  de  les  rendre  à  la  fois  plus  accessibles  et  plus  profitables 
aux  ignorants  de  bonne  volonté,  pour  lesquels  en  somme  la  science 
est  faite.  Il  s'agit  donc  de  connaître  suffisamment  chaque  idiome  pour 
en  distinguer  les  caractères  les  plus  frappants  ;  c'est  dire  qu'il  est 
nécessaire  de  le  comprendre  à  1  audition  et  non  pas  seulement  à  la 
lecture.  M.  Paul  Meyer  a  dit  que  l'aptitude  à  l'étude  scientifique  d'une 
langue  est  en  raison  inverse  de  la  connaissance  pratique  que  l'on  a 
de  cette  langue  ;  d'où  il  faudrait  conclure  que  les  Français  seraient  le 
plus  mal  préparés  à  l'étude  de  la  langue  française.  Je  n'ai  pas  à  dis- 
cuter cette  opinion  en  ce  qui  touche  à  l'anatomie  pure  du  langage  ; 
mais  lorsqu'il  s'agit  d'observer  les  parlers  sur  le  vif,  il  semble  difficile 
d'admettre  que  la  première  condition  à  remplir  soit  de  ne  pas  les 
comprendre. 

Voici  maintenant,  à  titre  d'exemple,  comment  j'ai  cru  pouvoir  pro- 
céder pour  reconnaître  les  traits  caractéristiqnes  des  parlers  popu- 
laires en  usage  entre  Vintimille  et  Antibes.  Sur  ce  parcours  de  50 
kilomètres,  nous  rencontrons  deux  langues  romanes,  l'italien  et  la 
langue  d'oc  ;  un  dialecte  mixte,  le  mentonais,  et  deux  sous-dialectes, 
le  niçois  et  le  marseillais,  d'un  même  dialecte,  le  provençal. 

Je  n'ai  pas  besoin  d'ajouter  que,  fidèle  à  la  règle  que  je  me  suis 
imposée,  j'ai  étudié  ces  idiomes  sur  les  lieux  où  on  les  parle  ^ 

*  Je  ne  crois  pas  nécessaire  de  donner  ici,  comme  il  a  été  fait  dans  le  rap- 
port sur  la  limite  de  la  langue  d'oc,  le   nom  de  toutes  les  personnes  aux- 


*  ^1  ■*  I»  r^rr  B^'i  i .  V 


156  CONGRES 


VII 


En  suivant  la  rivière  de  Gênes  dans  la  direction  de  la  France,  on 
remarque,  —  pour  peu  que  l'on  connaisse  Titalien  et  le  provençal,  — 
que  le  génois,  dialecte  évidemment  italien,  renferme  quelques  traits 
provençaux  s'accentuant  d'autant  plus  qu'on  approche  davantage  delà 
frontière  française.  La  langue  semble  aller  en  se  dégradant  insensi^ 
blement,  suivant  la  théorie  de  MM.  G.  Paris  et  P.  Mever,  c'est-à-dire 
que  les  limites  des  diverses  variétés  ne  sont  pas  facilement  appré- 
ciables pour  qui  n'a  pas  une  connaissance  approfondie  du  dialecte. 
Vers  Savone,  le  langage  subit  comme  un  ressaut,  marquant  une  limite 
que  des  recherches  spéciales  arriveraient  à  déterminer  exactement. 
On  entre  là  sur  le  domaine  d'un  parler  qui  s'étend,  sans  variations 
notables,  jusqu'à  la  frontière  de  France.  C'est  le  parler  de  Vintimille. 
Mais,  dès  qu'on  a  franchi  les  falaises  de  la  pointe  de  la  Murtola,  limite 
du  territoire  français,  la  langue,  qui  s'était  peu  modifiée  depuis  Gênes 
et  presque  pas  depuis  Savone,  change  brusquement.  Il  n'est  pas  pos- 
sible de  méconnaître' qu'on  se  trouve  en  présence  d'un  nouvel  idiome 
mélangé  sans  doute  d'italien  et  de  provençal,  mais  dans  des  propor- 
tions telles  que  la  physionomie  du  langage  en  est  tout  à  coup  trans- 
formée; c'est  l'idiome  de  Menton*.  Quels    traits  ont  produit  cette 

quelles  j'ai  eu  recours  pour  mes  renseignements  ;  mais  je  ne  saurais  passer 
sous  silence  l'utile  et  obligeant  concours  que  je  dois  à  M.  le  professeur  Giro- 
lamo  Rossi,  de  Vintimille  ;  à  mon  excellent  ami  et  confrère  delà  Société  des 
Langues  romanes,  M.  Paul  Glaize,  consul  de  France  à  Monaco,  à  M.  le 
baron  Eugène  de  iVJilo,  secrétaire  du  consulat;  à  M.  Sardou,  le  très  distingué 
président  honoraire  de  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts  des  Alpes-Mari- 
times ;  à  M.  l'abbé  Tombarel,  curé  de  Gagnes,  à  MM.  Louis  Funel,  institu- 
teur à  Vence,  et  Roque,  instituteur-adjoint  à  Gagnes.  Un  mémoire  de  M.  Louis 
Funel  sur  les  dialectes  de  la  région  des  Alpes-Maritimes  a  été  couronné,  il 
y  a  plusieurs  années,  par  la  Société  des  Langues  romanes.  Ce  travail  est 
malheureusement  re.^té  manuscrit  et  il  m'a  été  impossible  jusqu'ici  de  le 
consulter;  mais  l'auteur,  dont  tous  les  amis  des  études  méridionales  connais- 
sent la  compétence  et  l'intelligente  activité,  a  bien  voulu  me  donner  des 
indications  précieuses,  que  je  n'ai  pu  cependant  accepter  en  tous  les  points. 
1  M.  James  Bruyn  Andrews  a  publié,  en  1875,  un  Essai  de  grammaire  du 
dialecte  mentonais,  et,  en  1877,  un  Vocabulaire  français  mentonais,  dans 
lesquels  on  trouve  d'utiles  indications.  Mais  l'auteur,  qui,  dans  une  très 
modeste  préface,  reconnaît  ce  que  son  travail  a  d'incomplet,  n'a  pas  toujours 
bien  entendu.  Il  donne  comme  certaine  Id  transformation  de  1'/  en  r,  qui  est 
souvent  douteuse,  du  moins  à  Menton,  et  n  a  pas  remarqué  que  l'accent 
tonique  se  déplace  parfois  dans  les  mêmes  cas  qu'en  provençal;  facile  et 
non  pas  facile. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  157 

transformation?  Pour  répondre  à  cette  question,  qui  se  pose  à  chaque 
frontière  linguistique,  je  procède  de  la  manière  suivante  : 

Je  prends  au  hasard  une  phrase  du  nouveau  dialecte  et  je  me  de- 
mande à  quels  caractères  je  reconnais  que  cette  phrase  appartient 
à  un   parler  dijBTérent  de   celui  que  je  viens    de   quitter;  en  d'au- 
tres termes,  je   recherche  en  quoi  cette  phrase  diffère  de  la  phrase 
exactement  correspondante  du  précédent  idiome,  et  je  note  avec  soin 
toutes  les  différences.  Je  renouvelle  la  même  expérience  sur  un  très 
grand  nombre  de  phrases  toutes  usuelles,  recueillies  pour  la  plupart 
de  la  bouche  de  gens  du  peuple  dont  j'ai  préalablement  constaté  l'ori- 
gine indigène,  et  j'ai  ainsi  le  plus  grand  nombre  des  caractères  qui, 
dans  Vusage,  servent  à  distinguer  ce  parler  du  parler  voisin,  carac- 
tères que  je  classe  d'après  leur  fréquence  et  non  d'après  leur  valeur 
intrinsèque.  Une   flexion   du  verbe  peut  avoir  scientifiquement  plus 
(Vimportance  que  la  transformation  d'une  voyelle  ;  mais  s'il  s'agit  d'une 
voyelle  d'un  usage  fréquent,  a  ou  o,  par  exemple,  et  si  la  trans- 
formation est  constante,  ce  caractère  frappera  dès  la  première  phrase 
entendue  et  marquera  le  changement  d'idiome,  tandis  que  le  temps 
ou  la  personne  du  verbe  affectée  d'une  flexion  spéciale  se  présentera 
peut-être  si  rarement  dans  le  discours  que,  si  ce  caractère  était  le 
seul,  on  pourrait  entendre   une  longue  conversation   sans  se  douter 
qu'on  a  changé  de  dialecte.  Découvrira-t-on  un  rapport  plus  ou  moins 
étroitentre  les  particularités  de  structure  intime  qui  constituent  les  ca- 
ractères plus  spécialement  scientifiques  de  chaque  parler,  et  les  traits 
plus  superficiels,  mais  plus  souvent  répétés,  qui  marquent  la  physio- 
nomie du  langage?  C'est  ce  qu'il  est  impossible  d'affirmer  en  l'état  de 
la  science  des  parlers  populaires;  mais  il  pourrait  bien  se  passer  ici 
quelque  chose  d'analogue  à  ce  qui  s'est  produit  en  histoire  naturelle, 
où  l'apparence  extérieure  a  servi   tout  d'abord  à  grouper  les  êtres; 
après  quoi  l'anatomie  est  venue  démontrer  que  la  masse  de   chaque 
groupe  ainsi  formé,  présentait  un  caractère  scientifique  de  la  plus 
haute  importance  jusque-là  méconnu  ou  négligé.  De  ces  démonstra- 
tions résultent  presque  toujours  des  modifications  vers  les  limites  de 
la  classe,  l'élimination  de  quelques  genres  ou  de  quelques  espèces, 
l'accession  de  genres  ou  d'espèces  piis  à  d'autres  groupes;  mais  le 
noyau  reste  le  même,  parce  qu'il  est  rare  que  l'apparence  extérieure  ne 
se  l'attache  point,  par  des  liens  souvent  invisibles,  à  des  caractères 
de  structure  intime.  Le  groupe  des  roses  a  existé  avant  que  les  bota- 
nistes eussent  délimité  la  famille  des  rosacées  ;   les  poissons    ont 
formé  une  classe  avant  qu'on  en  eût  séparé  la  baleine  et  le  phoque. 
Il  fallait  qu'il  en  fût  ainsi  pour  que  la  science  pût  progresser  sans 
confusion,  et  jeter  dans  la  grande  circulation,  — à  laquelle  en  somme 
ils  sont  destinés,  — les  résultats  utiles  de  ses  découvertes.  C'est  fausser 

11 


158  CONGRES 

la  science  que  d*y  voir  la  négation  et  non  l'explication  de  ce  que  la 
nature  montre  clairement  à  tous  les  hommes  ;  c'est  la  stériliser  pen- 
dant des  années  ou  pendant  des  siècles,  que  d'en  faire,  durant  une 
période  plus  ou  moins  longue,  un  ramassis  de  matériaux  où  ne  pour- 
ront utilement  puiser  ceux  qui,  sans  être  ses  initiés  ou  ses  piètres, 
ont  cependant  besoin  de  son  secours. 

Appliquant  le  procédé  que  je  viens  de  faire  connaître  au  langage 
de  Menton  comparé  à  celui  de  Vintimille,  je  remarque  entre  ces  deux 
parlers,  appelés  respectivement  dans  leur  pays  mentànasch  *  et  ven- 
timigliosOf  des  dissemblances  que  je  vais  énumérer  par  ordre  de 
fréquence.  11  m'a  paru  que  les  cinq  premiers  des  caractères  qui 
suivent  frappaient  à  peu  près  également  dès  qu'on  franchissait  la 
frontière  française  ;  que  les  trois  suivants  étaient  moins  appréciables 
dès  l'abord,  et  enfin  que  les  deux  derniers  influaient  encore  moins  sur 
la  physionomie  générale  du  langage  men tenais,  en  tant  qu'on  le  com- 
pare au  parler  de  Vintimille. 

1.  —  Le  vintimillois,  à  l'exemple  de  l'italien  littéraire,  conserve  à 
presque  tous  les  mots  le  nombre  de  syllabes  qu'ils  avaient  en  latin  ; 
le  mentonais  supprime  ou  contracte  certaines  syllabes  et  produit  ainsi 
des  diphthongues  inconnues  aux  idiomes  de  l'Italie,  du  moins  dans 
cette  région:  veni,  venir,  au  lieu  du  vintimillois  venire;  vende,  ven- 
dre, au  lieu  de  vendere;  gioue  2,  jeune  homme,  au  lieu  de  zùvano  ; 
paure,  pauvre,  au  lieu  de  pôvero  ;  aurar,  tu  auras,  au  lieu  de  avérai. 

2.  —  A  Vintimille,  comme  dans  toute  ou  presque  toute  l'Italie, 
tous  les  mots,  à  Fexceplion  de  quelques  monosyllabes,  sont  terminés 
par  une  voyelle,  toutes  les  fois  que  l'euphonie  n'exige  pas  la  snppre- 
sion  accidentelle  de  cette  voyelle  linale.  A  Menton,  il  y  a  de  nombreux 
substantifs  et  adjectifs  qui,  au  singulier,  se  terminent  par  une  consonne, 
et  la  même  particularité  se  remarque  à  certaines  personnes  des  ver- 
bes :  gat,  chat  ;  dent,  dent,  capelàs,  grand  chapeau  ;  omenet,  petit 
homme  ;  caud,  chaud  ;  prudent,  prudent  ;  est,  tu  es  et  vous  êtes  ; 
avent,  ayant  ;  parlerian,  nous  parlerions.  On  dit  à  Vintimille  :  gato, 
dente,  cappellasso,  omette,  caudo,  prudente,  sei  (tu   es),  se  (vous 

*  A  Menton,  suivant  l'orthographe  italienne,  ch  =  c  guttural  C  fînal  se  pro- 
nonce tch.  Je  conserve  aux  deux  parlers  de  Vintimille  et  de  Menton  leur 
forme  orthographique  usuelle,  qui  est  celle  des  dialectes  de  Tltalie.  Je  marque 
Taccent  tonique  lorsque  cela  me  paraît  nécessaire. 

s  A  Menton,  u  aie  son  ou  après  une  voyelle,  comme  dans  la  langue  d'oc; 
mais  ici  Vi  n'a  d'autre  fonction  que  d'adoucir  la  consonne  g  (yi  =z  j  d'oc). 
Une  faut  donc  pas  le  considérer  comme  une  voyelle;  c'est  pourquoi,  au  lieu 
de  giue,  j'écris  gioue,  qui  serait  plus  logiquement  orthographié  joue,  si, 
comme  c'est  mon  avis,  on  classait  le  mentonais  dtuis  les  dialectes  d'oc. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  159 

êtes),  avendo,  parleremmo  ou  ciarleremmo.  Ce  dernier  idiome,  il 
est  vrai,  termine  par  une  consonne  les  troisièmes  personnes  du  plu- 
riel des  verbes  :  eli  i  son,  ils  sont  ;  eli  i  partcn,  ils  partent  ;  et  il  y 
a  en  mentonais  des  adjectifs  avec  voyelle  finale  au  singulier  :  helo, 
beau  ;  caro,  cher  ;  vero,  vrai  ;  qui  cependant  ont  aussi  la  forme  pro- 
vençale, usitée  lorsque  le  verbe  les  précède  :  ti  vende  cà,  vous  le 
vendez  cher  ;  acô  es  vé,  c'est  vrai.  Mais  ces  exceptions  n'ont  pas 
plus  dlmportance,  quant  à  l'ensemble  du  langage,  que  l'habitude  des 
Mentonais  d'appuyer  sur  la  consonne  finale  de  telle  sorte  qu'on  la 
croirait  parfois  suivie  d'un  e  muet  français. 

3.  —  Vu  latin  a  le  son  ou  à  Vintimille  et  le  son  de  ii  français  à 
Menton  comme  dans  toute  la  langue  d'oc.  Le  son  ou  provient  presque 
toujours  à  Menton  d'une  consonne  vocalisée  après  une  voyelle  ou  de 
Va  latin  qui  a  donné  Vo  estreit  en  langue  d'oc  ;  on  l'écrit  o.  11  est 
un  peu  plus  fermé  que  Vo  chiuso  des  Italiens. 

4.  —  La  conjugaison  mentonaise  est  presque  toute  de  langue  d'oc. 
Je  viens  d'en  donner  quelques  exemples.  Il  faut  diviser  les  formes 
de  cette  conjugaison  en  quatre  catégories  :  1»  celles  qui  sont  com- 
munes à  la  langue  d'oc  et  aux  dialectes  italiens,  particulièrement  au 
vintimillois  ;  2<>  celles  qui  sont  italiennes  ou  vintimilloiscs  et  ne  se 
retrouvent  pas  dans  la  langue  d'oc,  du  moins  dans  les  régions  voisi- 
nes :  3o  celles  qui  sont  de  langue  d'oc  et  ne  se  rencontrent  pas  en 
vintimillois  ;  4°  celles  qui,  jusqu'à  plus  ample  informé,  doivent  être 
considérées  comme  exclusivement  mentonaises,  puisque  nous  ne 
les  retrouvons  ni  dans  les  dialectes  italiens,  ni  dans  les  dialectes 
d'oc  en  contact  avec  le  mentonais.  Je  considère  comme  semblables 
les  formes  dont  les  parties  essentielles  sont  identiques  et  ne  se  distin- 
guent tout  au  plus  que  par  une  légère  altération  de  certaines  voyelles; 
ainsi,  son  et  su,  saremo  et  serema,  eira  et  era  sont  semblables  ;  ho 
et  hai,  sarô  et  serai,  avessa  et  aghessa  sont  différents. 

Les  formes  de  la  première  catégorie,  c'est-à-dire  qui  se  rencon- 
trent à  la  fois  dans  le  mentonais,  le  vintimillois  et  la  langue  d'oc  des 
régions  voisines,  sont  nombreuses.  Elles  ne  peuvent  évidemment 
fournir  aucun  indice  pour  distinguer  le  premier  de  ces  idiomes  des 
deux  autres  ;  mais  ces  caractères  venant  s'ajouter  à  de  nombreux 
traits  exclusivement  provençaux,  alors  que  les  traits  exclusivement 
italiens  sont  insignifiants,  me  permettent  de  dire  que  la  conjugaison 
mentonaise  est  presque  toute  de  langue  d'oc. 

Dans  la  deuxième  catégorie,  celle  des  formes  exclusivement  italien 
nés  ou  tout  au  moins  particulièrement  vintimilloises,  —  je  constate 
seulement  :  1°  le  changement  en  e,  au  futur  et  au  conditionnel  de  la 
voyelle  caractéristique  de  la  première  et  de  la  deuxième  conjugaison, 


160  CONGRES 

et  le  maintien  de  la  même  voyelle  à  la  3®  :  caterai  (de  ca^à)  j'achè- 
terai ;  senterian  (de  senti)  nous  sentirions  ;  perderiar  (de  perde),  vous 
perdriez  ;  2°  la  terminaison  en  ema  (amo  et  emo  à  Vintimille)  de 
la  première  personne  du  pluriel  de  l'indicatif  présent,  du  futur  et 
de  l'impératif  de  toutes  les  conjugaisons.  Mais  la  terminaison  d'oc 
est  très  souvent  employée  :  anén  à  Mentan,  au  lieu  de  anema  à 
Mentan,  allons  à  Menton  ;  avén  fam,  au  lieu  de  acema  fam,  nous 
avons  faim. 

La  troisième  catégorie,  exclusivement  de  langue  d'oc,  comprend, 
sauf  quelques  exceptions  et  irrégularités  : 

La  première  personne  du  singulier  de  l'indicatif  présent  du  verbe 
avoir  {hai)  ; 

La  deuxième  personne  du  singulier  de  l'imparfait  de  l'indicatif 
du  même  verbe  {avié)  ; 

La  première  personne  du  pluriel  de  l'imparfait  de  l'indicatif  de 
tous  les  verbes  [aviarif  parlavan,  vendian)  ; 

Le  futur  du  verbe  avoir  {aurai),  moins  la  deuxième  personne  du 
singulier,  qui  est  exclusivement  mentonaise  (aurar),  et  la  première 
du  pluriel,  qui  est  de  la  deuxième  catégorie  (aurema)  ; 

La]|ipremière  personne  du  singulier  du  futur  de  tous  les  verbes, 
moins  le  verbe  avoir  (parlerai,  senterai,  perderai); 

Le  conditionnel  présent  de  tous  les  verbes  de  la  deuxième  et  de 
la  troisième  conjugaisons,  moins  la  deuxième  personne  du  pluriel,  ex- 
clusivement mentonaise  (venderiar  vous  vendriez)  ;  et  la  troisième  du 
pluriel,  qui  est  de  la  première  catégorie  (venderianj  ; 

L'impératif  du  verbe  avoir  (aighej,  moins  la  deuxième  personne 
du  pluriel  qui  est  de  la  quatrième  catégorie  (aigar),  et  la  troisième, 
qui  est  de  la  première  catégorie  (aigan)  ;  mais  y  compris  la  pre- 
mière personne  du  pluriel,  pour  laquelle  la  désinence  ema  n'est  pas 
usitée  (aigan)  ; 

L'impératif  de  tous  les  autres  verbes  moins  la  première  personne 
du  pluriel  qui  est  de  la  deuxième  catégorie  (parlema)  et  la  troisième 
qui  se  range  dans  la  première  catégorie  (parlan)  ; 

Le  présent  du  subjonctif  du  verbe  être  et  du  verbe  avoir  (sieghe,ai' 
ghe);  moins  la  deuxième  personne  du  pluriel, exclusivement  mentonaise  ; 

L'imparfait  du  subjonctif  du  verbe  être  sous  une  de  ses  formes 
(foghessa)  ;  l'autre  forme  (fossa)  étant  analogue  à  la  forme  vintimil- 
loise  fossi;  moins  la  deuxième  personne  du  pluriel,  qui  est  de  la  qua- 
trième catégorie  dans  les  deux  formes; 

La  première  personne  du  pluriel  de  l'imparfait  du  subjonctif  de  tous 
les  autres  verbes  (calessan,  vendessan)  ; 

Le  participe  présent  (calent,  vendent)  et  le  participe  passé  (agu, 
cata,  vendu)  de  tous  les  verbes. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  161 

La  quatrième  catégorie  comprend  : 

La  deuxième  personne  du  singulier  de  Tindicatif  présent  du  verbe 
être  (est)  ; 

La  deuxième  personne  du  singulier  du  présent  de  l'indicatif  du 
verbe  avoir  (har)  ; 

La  deuxième  personne  du  singulier  du  futur  de  tous  les  verbes 
(caterar,  venderar)  ; 

La  deuxième  personne  du  pluriel  de  l'impératif  et  du  subjonctif  pré- 
sent des  verbes  être  et  avoir  (siegnr,  aigar)  ; 

La  deuxième  personne  du  pluriel  de  l'imparfait  de  l'indicatif,  du 
conditionnel  et  de  l'imparfait  du  subjonctif  des  autres  verbes  {cata- 
var ,  vous  achetiez;  venderiar ,  vous  vendriez;  venghessar,  que 
vous  vinssiez) . 

Le  passé  défini  n'existe  pas  en  mentonais. 

5. —  Le  vintimillois  a  à  peu  près  tous  les  proparoxytons  (sdruc- 
cioîi)  italiens  et  notamment  ceux  que  j'appellerai  artificiels,  formés  par 
Tadjonction, —  on  pourrait  dire  l'agglutination, —  de  mots  enclitiques, 
de  telle  sorte  que  l'accent  est  quelquefois  reculé  jusqu'à  la  cinquième 
syllabe  avant  la  dernière  :  mândamivisene,  portàndomivelo,  date- 
lomi.  Menton  ne  connaît  pas  cette  espèce  de  sdruccioli.  Si,  par  une 
imitation  maladroite  de  l'italien,  on  y  a  pris  l'habitude  d'écrire  par 
exenjple  donamelo,  menamely,  les  mots  ajoutés  au  verbe  ne  sont  pas 
enclitiques  et  l'on  prononce  dona  me  lo,  mena  me  hj.  Quant  aux  pro- 
paroxvtons  proprement  dits,  ils  paraissent  importés  d'Italie.  Ainsi 
princij>e  existe  concuremment  dcvec  prinse ;  mùgero ,  mulet  (poisson)  ; 
médico,  médecin,  sont  d'origine  italienne  comme  l'indique  leur  termi- 
naison en  0  au  singulier  et  i  au  pluriel  (mî/^cri,  médichi).  Quelques 
adjectifs  en  évole  sont  absolument  italiens,  par  exemple  amichécole, 
amical,  à  côté  duquel  on  trouve  amistôs  *.  Ces  importations  italiennes 
sont  aussi  évidentes  que  les  emprunts  nu  français  tels  que  marapropô» 
mal  à  propos  ;  d'emblée  grenadié,  etc.  Les  adjectifs  sdruccioli  en 
bile  :  ainàbile,  bevibile,  etc  ,  sont  en  réalité  prononcés  amahle,  bevi- 
ble,  Mônego  est  le  nom  de  Monaco  emprunté  à  la  langue  monégasque, 
variété  du  vintimillois.  Je  ne  connais  à  Menton  qu'un  proparoxyton 
qui  paraisse  indigène  :  dtiménighe,  dimanche,  que  nous  retrouverons 
à  Nice,  avec  une  légère  modification.  On  pourrait  y  ajouter  péssigo, 
pêche  (fruit),  malgré  sa  terminaison  italienne.  En  somme,  le  mento- 
nais a  peu  de  goût  pour  les  sdruccioli,  la  preuve  en  est  dans  le 
déplacement  de  l'accent  do    certains    mots    (facile  et  non  facile)^ 

*  On  a  aussi  spaventôs,  et  non  spaventevole,  épouveiitable  ;  compatiaaeiit 
et  non  compassionevole,  compatissant;  et  quelques  aulres  qui  prouvent  Tori- 
gioe  étrangère  des  adjectifs  en  evole. 


102  CONGRES 

dans  la  contraction  ordinaire  des  adjectifs  en  bilis  :  amable,  bevible, 
et  dans  la  disparition  de  ce  que  j'appelle  les  proparoxytons  artificiels, 
formés  par  l'adjonction  de  mots  enclitiques  au  mot  principal. 

6. —  A  Vintimille,  comme  dans  toute  Fltalie,  c  palatal  (^c^)  provient 
du  c  latin  devant  e,  i,  œ,  œ;  cas  dans  lequel  la  langue  d'oc  pure 
n'admet  que  la  sifflante.  A  Menton,  à  côté  du  c  italien  {cède,  facile, 
celo)  on  trouve  le  c  palatal  de  la  langue  d'oc  provenant  de  et  :  nuec 
(pron.  nuetch*),  nuit;  ^ec,toit  ;  liée,  lit  ;  faç,  fait;  beaucoup  plus  rare- 
ment dé  c  devant  a  :  ciarmant,  (pron.  tcharmant),  charmant,  et  une 
vingtaine  de  mots  analogues,  tous  empruntés  au  français  :  ciagrin, 
chagrin  ;  ci amb élan,  cha,mhe\\sint  ;  ciarcularia,  etc.  Les  mots  incon- 
testablement indigènes  ont  tous  le  c  guttural  dans  ce  cas  :  cambi, 
cardo,  canià,  caussina,  chaux  ;  etc.  Dans  quelques  mots,  le  mento- 
nais  a  adopté  la  sifflante  au  lieu  du  c  palatal  italien  :  ausse,  oiseau  ; 
prinse,  prince. 

7.  —  Les  groupes  bl,  pi,  cl,  gl,  fl,  que  la  langue  d'oc  pure  res- 
pecte, se  transforment  à  Vintimille  en  bi  et  quelquefois  gi,  ci,  gi,  sci. 
Exemples  :  biondo,  blond  ;  gianco,  blanc  ;  ciassa,  place  ;  ciave^  clé  ; 
giassa,  glace;  sciura,  fleur.  A  Menton,  bl  ne  devient  jamais  ^e;  pi 
devient  pi;  cl,  chi  :  gl  est  traité  comme  à  Vintimille  ;  fl  se  transforme 
en  fi.  Exemples  :  biond,  bianc,  piassa,  chiau,  giassa,  fiou. 

8.  —  A  Menton  comme  à  Vintimille,  s  initial  suivi  d'une  consonne 
ne  s'appuie  jamais  sur  une  voyelle  antécédente.  On  y  dit  ;  spirilo  ou 
mieux  speril  ;  stacà,  attacher  ;  spacentà,  épouvanter  ;  strec  (prononcé 
stretch)  étroit,  etc.  ;  et  non  esperit  ou  esprit,  estacà,  espaventà, 
estrech,  comme  dans  tous  ou  presque  tous  les  dialectes  d'oc.  Mais 
pour  renverser  le  sens  d'un  mot  ou  pour  exprimer  une  idée  de  sépa- 
ration, de  destruction,  de  dépréciation,  le  mentonais  n'emploie  1'*^ 
initial  qu'exceptionnellement  ;  il  se  sert  d'ordinaire,  comme  toute  la 
langue  d'oc,  du  préfixe  de.  On  trouve  smenti,  démentir  ;  sbarassà, 
débarrasser:  sconsiderà,  inconsidéré;  scoret,  incorrect,  etc.,  mais 
plus  fréquemment  des  formes  comme  celles-ci:  rfe^ooronà,  découron- 
ner, étêter;  desdegnà,  dédaigner;  descaussà,  déchausser;  despiega, 
déplier;  à  Vintimille  :  scalzare,  spiegare,  scoronare,  sdegnare. 

9  —  Le  pluriel  des  substantifs  et  des  adjectifs  se  termine  par  une 
voyelle  à  Menton  comme  à  Vintimille;  mais,  dans  cette  dernière 
ville,  cette  voyelle  est  i  pour  le  masculin,  e  pour  le  féminin.  Elle  est 
uniformément  e  pour  les  deux  genres  en  mentonais  :  o  gat,  le  chat  ; 
u  gâte,  les  chats  ;  a  noas,  la  noix  ;  u  noase,  les  noix  ;  prudent,  pru- 
dent ;  prudente,  prudents  et  prudentes.  Le  plus  souvent  e  s'ajoute 

1   (7  ne  se  prononce  ou  à  Menton  que  lorqu'il  est  précédé  d'une  voyelle. 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  163 

simplement  au  singulier  pour  former  le  pluriel,  comme  dans  les 
exemples  qui  précèdent;  mais,  si  le  singulier  est  terminé  par  une 
voyelle,  Ve  se  substitue  à  cette  dernière  :  rauca,  l'oie  ;  Vauche,  les 
oies.  La  plupart  des  substantifs  terminés  en  n  font  le  pluriel  par  la 
simple  suppression  de  cette  consonne,  et  parfois  modifient  la  voyelle 
qui  la  précède  :  o  can,  le  chien  ;  u  ca,  les  chiens  ;  o  pigian  *,  le  pigeon; 
u  pigiôj  les  pigeons.  Les  adjectifs  helo,  beau:  caro,  cher;  vero, 
vrai,  font  au  pluriel  masculin  helu^  caru,  veru.  Cet  u  très  fermé 
est  presque  un  i,  d'où  Ton  peut  conclure  que  ces  adjectifs,  déclinés 
comme  en  italien,  ont  été  empruntés  à  cette  langue.  De  même 
quelques  rares  substantifs  masculins  en  o  ont  le  pluriel  en  i  : 
medico,  medichi.  Il  ne  serait  probablement  pas  impossible  de  reti'ou- 
ver  la  forme  mentonaise  de  ces  substantifs,  ainsi  que  des  exemples 
de  belo,  caro,  vero,  ou  plutôt  bel,  ca,  i?eV  déclinés  à  la  manière  men- 
tonaise. 

10.  —  L  médiane  tombe  à  Vintimille  :  a  scaa,  Tescalier:  a  saa,  la 
salle;  elle  est  remplacée  à  Menton  par  r  très  douce:  a  scara^  a  sara. 
Dans  cette  dernière  ville,  l  initiale  de  l'article,  qui  persiste  devant 
une  voyelle  et  dans  certains  cas  réglés  par  l'euphonie,  tient  le  milieu 
entre  l  et  r.  Quelques  villages  ont  Vr  bien  marquée,  qui  se  retrouve 
d'ailleurs  en  génois.  On  ne  peut  donc  considérer  comme  un  vrai  carac- 
tère cette  nuance  de  prononciation. 

L'article,  lùalgré  des  différences  de  graphie,  est  sensiblement  le 
même  en  vintimillois  et  en  mentonais. 

En  résumé,  à  la  limite  du  territoire  français  commencent  les  traits 
suivants,  qui  ne  se  rencontrent  pas  sur  le  territoire  italien  limitrophe: 

Contraction  d'un  grand  nombre  de  mots  qui,  en  Italie,  ont  le  même 
nombre  de  syllabes  qu'en  latin; 

Nombreux  substantifs  et  adjectifs  terminés  au  singulier  masculin 
par  une  consonne; 

U  latin  prononcé  à  la  française  ; 

Conjugaison  presque  entière  d'oc  ; 

Disparition  complète  des  proparoxytons  formés  par  l'adjonction 
de  mots  enclitiques,  et  presque  complète  des  autres  proparoxytons  ; 

C  palatal  d'oc  Çnuec,  ciarmont)  ; 

Traitement  différent  des  groupes  pi,  cl,  fl  ; 

Pluriels  masculins  en  e; 

Persistance  de  l  médiane. 

Ces  caractères  sont  plus  que  suffisants  pour  permettre  d'affirmer 
que  Tidiome  de  Menton  est  différent  de  celui  de  Vintimille.  Faut-il  le 

*  Le  vrai  son  de  cette  nasale  est  entre  an  et  on;  il  n'y  a  donc  pas  là, 
à  proprement  parler,  changement,  mais  modification  de  la  voyelle. 


1 6  4  CONGRES 

• 

ranger  parmi  les  dialectes  d*oc  ?  Je  le  crois  ;  mais  ce  n'est  pas  là  ce 
qu'il  s'agit  d'établir  aujourd'hui.  Je  veux  seulement  prouver  que  le 
raentonais,  qu'on  le  classe  parmi  les  dialectes  italiens,  les  mixtes  ou 
les  pravençaux,  est  bien  un   idiome  distinct  de  ceux  qui  l'entourent. 

Les  caractères  que  j 'ai  fait  connaître  apparaissent  brusquement  à 
Garavan,  faubourg  de  Menton  situé  près  de  la  frontière,  où  l'on 
retrouve  encore  quelques  indigènes  noyés  dans  une  foule  d'étrangers 
aux  langages  divers  et  souvent  fort  composites.  Les  communes  de 
Roquebrune,  Gorbio,  Sainte-Agnès,  Castelar  et  les  hameaux  de  Cabrol 
et  de  Monti  *  parlent  comme  Menton.  C'est  entre  ces  villages  qu'on 
pourrait  noter  des  nuances  à  peine  sensibles,  donnant  l'illusion  d'une 
fusion  graduelle  du  langage  ;  mais,  dès  qu'on  franchit  en  un  point 
quelconque  la  limite  du  parler  mentonais,  la  transition  est  tout  aussi 
marquée  que  celle  que  nous  avons  constatée  en  quittant  le  territoire 
vintimillois . 

Nous  allons  nous  en  convaincre  en  comparant  le  mentonais  au 
niçois  qui  l'entoure  de  tous  les  côtés  sur  le  territoire  français,  excepté 
du  côté  de  Monaco. 


VIII      - 

Le  domaine  du  parler  mentonais,  dont  je  viens  d'indiquer  les  limi- 
tes, est  borné  du  côté  de  la  terre  par  un  demi-cercle  de  montagnes 
la  plupart  fort  élevées,  ce  qui  explique  comment  cet  idiome  a  pu 
conserver  ou  acquérir  une  physionomie  distincte  de  celle  des  parlers 
environnants.  Juxtaposé  à  ce  demi-cercle  s'en  trouve  un  de  moins 
grandes  dimensions  qui  renferme  la  principauté  actuelle  de  Monaco. 
Là  encore  on  entend  les  langages  les  plus  divers  ;  le  niçois  y  domine 
parmi  les  petits  marchands ,  les  ouvriers  et  les  domestiques  de  la 
Condamine  et  de  Monte-Carlo.  Il  faut  aller  chercher  le  langage  indi- 
gène dans  la  vieille  ville,  où  un  millier  de  personnes  tout  au  plus 
représentent  aujourd'hui  la  race  du  pays.  Ce  langage  est  à  peu  près 
celui  de  Vintimille.  M.  le  professeur  Rossi  explique  cette  particula- 
rité par  l'arrivée  sur  le  rocher  de  Monaco,  vers  l'an  1000,  d'une  colo- 
nie vintimilloise.  D'autres  prétendent  que  les  Monégasques  ont  tou- 

*  Je  n'ai  pu  visiter  tous  ces  villages,  mais  j'ai  eu  l'occasion  d'interroger  des 
gens  du  peuple  qui  étaient  originaires  de  trois  d'entre  eux.  En  outre,  quelques 
personnes  connaissant  bien  Je  pays  m'ont  confirmé  cette  délimitation  donnée 
déjà  par  M.  Andrews  dans  son  Essai  de  grammaire  du  dialecte  mentonais. 
Je  n'ai  pas  d'ailleurs  pour  but,  dans  le  présent  travail,  de  délimiter  les  idio- 
mes dont  jft  m'occupe,  mais  seulement  de  marquer  leurs  points  de  séparation 
le  long  du  littoral . 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  IG5 

jours  eu  des  relations  suivies  avec  Gênes  et  Yintimille.  Mais  pour- 
quoi Menton,  qui  a  fait  longtemps  partie  de  la  principauté,  aurait-il 
eu  moins  de  relations  avec  Monaco  que  celui-ci  avec  Gênes  ?  Com- 
ment la  capitale  et  la  ville  la  plus  peuplée  n*ont-elles  pas  exercé 
Tune  sur  Tautre  une  influence  appréciable  au  point  de  vue  du  lan- 
gage, alors  que  Menton  adoptait  Tidiome  de  villages  qui  n'ont  point 
fait  partie  de  la  principauté  ou  leur  imposait  son  parler  ?  Serait-ce 
parce  que,  —  suivant  l'opinion  de  M.  G.  Paris,  —  le  développement 
naturel  du  latin  à  Monaco  et  à  Menton,  n'a  pas  été  entravé  par  des 
actions  politiques  et  littéraires  que  la  première  de  ces  deux  villes  au 
lieu  de  parler  le  latin  de  la  seconde,  parle  le  latin  de  Vintimilie? 
Ou  bien  seraient-ce,  au  contraire,  des  influences  politiques  qui 
auraient  imposé  à  Monaco  le  parler  de  Vintimilie  et  de  Gênes? 

Je  me  borme  à  poser  ces  questions,  qu'à  défaut  de  preuves  directes 
il  semble  impossible  de  résoudre  pour  le  moment,  et  je  constate  qu'à 
la  Turbie,  sur  la  frontière  même  de  la  principauté,  se  rôvèle  brusque- 
ment un  ensemble  de  traits  linguistiques  qui  ne  permettent  de  confon- 
dre le  parler  de  ce  village  ni  avec  celui  de  Monaco,  ni  avec  celui  de 
Menton.  Ce  nouvel  idiome  est  celui  de  Nice*,  encore  en  usage  même 
dans  la  haute  bourgeoisie. 

Le  monégasque,  je  viens  de  le  dire,  est,  à  peu  de  choses  près,  le 
vintimillois,  et  je  n'aurais  qu'à  répéter  à  son  sujet  les  remarques 
faites  plus  haut  à  propos  du  langage  de  Vintimilie.  Je  vais  montrer 
en  quoi  l'idiome  de  Nice,  qui  commence  brusquement  à  la  Turbie, 
diffère  de  celui  de  Menton,  dont  il  est  morphologiquement  plus  rappro- 
ché que  de  celui  de  Monaco. 

Le  caractère  le  plus  frappant  est  que  tous  les  mots,  à  très  peu 
d'exceptions  près,  ont  la  forme  d'oc  :  contractions,  aphérèses,  diph- 
thoDgaison,  tout  est  provençal.  On  remarque  dans  certains  quartiers 
de  Nice  et  dans  plusieurs  communes  des  environs  une  tendance  à 
ajouter  à  la  consonne  finale,  particulièrementà  la  dentale  et  à  la  gut- 
turale, un  son  assez  analogue  tantôt  à  Ve,  tantôt  à  ïou:  es  vengule, 

'  MM.  A.-L.  Sardou  et  J.-B.  Calvino  ont  publié,  en  1881,  une  Grammaire 
de  Vidiome  niçois,  pour  laquelle  ils  ont  malheureusement  adopté  la  méthode 
pédagogique.  Au  père  de  l'illuslre  auteur  de  Théodora  et  de  La  lïuiJie 
revient  l'honneur  d'avoir  entrepris  la  première  campagne  sérieuse  cor)tr« 
l'orthographe  italienne  si  maladroitement  appliquée  à  un  idiome  d'oc.  Par 
une  singulière  contradiction,  ce  parler,  ainsi  travesti  à  l'italienne,  est,  de 
tous  ses  congénères,  celui  qui  a  accepté  les  plus  choquantes  importations 
françaises,  de  telle  sorte  que  la  pittoresque  langue  niçoise  presque  mécon- 
naissable sous  ses  oripeaux  italiens  et  /rawcA/mons,  dépouillée  de  ses  vieilles 
formes  qu'il  faut  aller  chercher  aujourd'hui  chez  les  paysans  et  les  marins,  a 
pris,  dans  les  publications  de  la  ville,  des  allures  vraiment  carnavalesques. 


166  CONGRES 

il  est  venu;  amicou,  B-mi.  Mais  le  plus  souvent  cette  voyelle  finale  est 
à  peine  perceptible;  elle  n'a  d'ailleurs  jamais  été  écrite. 

Le  c  palatal  italien,  c'est-à-dire  venant  du  c  latin  devant  e,  œ,  œ, 
a  complètement  disparu  ;  il  ne  reste  que  le  c  palatal  d'oc. 

Les  groupes  6Z,  pi,  cl,  gl,  fl  ne  subissent  aucune  altération. 

L'^  suivi  d'une  consonne  est  toujours  précédé  d'une  voyelle,  et 
l'on  ne  met  jamais  cette  lettre  au  commencement  des  mots  pour  en 
changer  le  sens  ou  pour  marquer  une  idée  de  disjonction,  de  destruc- 
tion ou  de  dépréciation.  On  emploie  pour  cela,  comme  dans  toute  la 
langue  d'oc,  le  préfixe  de. 

Le  verbe  est  entièrement  de  langue  d'oc  :  aiman,  nous  aimons,  et 
non  ametna;  venguessias,que  vous  vinssiez  et  non  v en gue s sar.  Toute 
trace  exclusivement  mentonaise  a  disparu.  11  ne  reste  comme  ves- 
tige de  la  conjugaison  italienne,  que  le  futur  et  le  conditionnel  avec  e 
au  radical;  aimerai,  j'aimerai  ;  senterii,  je  sentirais  ;  venderion,  ils 
vendraient.  Mais  Timpaifait  de  l'indicatif  des  deux  verbes  auxiliaires 
et  des  verbes  de  la  deuxième  et  de  la  troisième  conjugaison,  qui 
était  à  peu  près  d'oc  en  mentonais,  revient,  pour  les  deux  premières 
personnes  du  pluriel,  à  une  forme  voisine  de  l'italien  :  e7^avanf  era- 
vas,  aviavan,  aviavas,  sentavan,  nous  sentions  ;  sentavas ;  renda- 
van,  nous  rendions  ;  rendavas. 

Comme  caractère  spécial  à  la  conjugaison  niçoise,  il  faut  encore 
noter  la  première  personne  du  singulier  de  l'imparfait  de  l'indicatif  du 
verbe  avoir,  des  verbes  de  la  deuxième  et  de  la  troisième  conjugai- 
son et  du  conditionnel  présent  de  tous  les  verbes,  qui  est  en  ii  dis- 
syllabe avec  l'accent  sur  le  premier  i :  avil,  j'avais  ;  sentit,  je  sen- 
tais; aimerii,  j'aimerais. 

Le  passé  défini  existe  ;  il  est  en  éri,  ères,  et,  eriàn,  erîàs,  éron. 

De  même  qu'à  Menton,  il  n'y  a  à  Nice  aucun  sdrucciolo  formé  par 
des  mots  enclitiques,  malgré  la  graphie  vicieuse  laissemi,  pour/aw^e- 
mi,  laisse-moi  ;  regarjaluj  pour  ra^rar^a-Zw,  regarde-le.  Nous  ne  trou- 
vons ici  que  quatre  proparoxytons  :  péssegue,  pêche  (fruit),  diméne- 
gue ,  anima  et  âninio  * . 

Les  substantifs  n'ont  pas  de  marque  du  pluriel  en  niçois,  non  plus 
que  les  adjectifs  masculins  2.  Les  adjectifs  féminins  font  le  pluiiel  en 
i:  una  filha  saja,  une  fille  sage  ;  de  filha  saji,  des  filles  sages. 

L  médiane  et  initiale  est  conservée  dans  les  mêmes  cas  qu'en  langue 

•  M.  Sardou  m'a  signalé  les  deux  proparoxytons  péssegue  et  ànimo,en  fai- 
sant remarquer  le  vrai  sens  de  ce  dernier  mot,  qui  est  ardeur,  courage  et 
non  âme. 

*  Les  quatre  adjectifs  masculins  bèUy  beau;  bouon,  hou ;pichoun,  petit  et 
tout,  tout,  font,  par  exception,  au  pluriel,  bèiy  bouoi,  pichoûi  et  tout. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  167 

d'oc  :  escala,  échelle  ;  lou,  le  ;  la,  la  :  lu,  les  (masculin)  ;  li,  les 
(féminin). 

Le  pronom  personnel  sujet  est,  à  la  première  personne,  mi  à  Men- 
ton comme  à  Vintimille  ;  il  est  iéu  à  Nice  comme  en  Provence.  Mais 
comme  dans  aucun  de  ces  idiomes  il  n'est  d'usage  de  faire  précéder  le 
verbe  du  pronom  personnel,  ce  caractère  passe  souvent  inaperçu. 

A  ces  traits  il  faut  ajouter  les  deux  suivants,  vestiges  de  l'italien  : 

Emploi  du  pronom  possessif  pour  l'adjectif  possessif  :  lou  miéu 
capèu,  mon  chapeau  ;  ranima  mieuva,  mon  âme. 

Distinction  de  l'ablatif  et  du  génitif  :  véni  da  la  vila,  je  viens  de 
la  ville  ;  la  pouorta  de  la  vila,  la  porte  de  la  ville.  Les  génitifs  con- 
tractés dôu,  du  ;  dei,  des  (masculin)  doivent  rigoureusement  être 
distingués  des  ablatifs  dau  et  dai;  mais  on  les  confond  le  plus  souvent 
dans  la  pratique. 

11  faut  noter  encore  comme  apparaissant  sur  la  limite  du  comté  de 
Nice  : 

1°  La  nasalisation  de  certaines  voyelles  finales  :  cen  que,  pour  ce 
ou  ço  que,  ce  que  ;  pen  pour  ;9e,  pied  ;  nen  pour  nautre  ou  nous, 
nous  ; 

2°  La  chute  fréquente,  mais  non  constante,  de  s  doux  :  maïoun, 
maison  ;  caua,  chose  ;  afroua,  affreuse  ;  gria,  grise  ;  ou  son  rem- 
placement par  V  :  afrouva,  cauva  ; 

3°  L'addition  d'un  v  initial  ou  médial  :  vuech,  huit  ;  miejiva, 
mienne.  On  dit  aussi  mieva  ;  dans  ce  cas  v  est  une  transformation 
de  u. 

En  résumé,  au  village  de  la  Turbie  se  trouve  la  limite  précise  des 
traits  linguistiques  suivants,  qui  suffisent  à  marquer  très  nettement  la 
physionomie  respective  des  dialectes  de  Menton  et  de  Nice  : 

Disparition  des  caractères   mentonais  et  italiens  de  l'article,  du 
substantif,  de  l'adjectif,  du  pronom  personnel  et  du  verbe,  à  l'excep- 
tion de  l'ablatif  pour  l'article,  du   futur  et  du  conditionnel  pour  le  .^ 
verbe; 

Disparition  complète  du  c  palatal  italien  et  de  Vs  initiale  suivie 
d'une  consonne,  quelle  qu'en  soit  l'origine  ou  la  fonction  ; 

Apparition  des  groupes  bl,  pi,  cl,  gl,  fl,  sans  modification  ; 

Absence  du  signe  du  pluriel  pour  les  substantifs  des  deux  genres 
et  pour  presque  tous  les  adjectifs  masculins. 

L'idiome  niçois  domine  dans  une  région  beaucoup  plus  étendue 
que  celle  où  se  parle  l'idiome  mentonais.  Il  règne  dans  la  plus  grande 
partie  de  l'arrondissement  de  Nice.  Il  se  subdivise  en  variétés;  mais, 
comme  je  l'ai  déjà  fait  remarquer,  les  variétés  d'un  même  sous-dia- 
lecte se  distinguant  entre  elles  par  des  traits  peu  accentués,  semblent 


168  CONGRES 

donner  raison,  en  certains  endroits,  à  la  théorie  de  la  fusion  insensible 
des  parlers.  Je  ne  crois  pas  utile,  pour  le  moment,  de  démontrer  la 
possibilité  d*une  subdivision  des  sous-dialectes. 

Si  nous  continuons  à  suivre  le  littoral  dans  la  direction  de  l'ouest, 
nous  rencontrons,  dès  que  nous  posons  le  pied  sur  la  rive  droite 
du  Var,  un  parler  nouveau  sensiblement  distinct  du  niçois,  que  nous 
ne  quittons  qu'avec  les  derniers  hameaux  de  la  rive  gauche.  Mais  ici 
nous  passons  simplement  d'un  sous-dialecte  à  un  autre  sous- dialecte  ; 
car,  malgré  ses  légers  vestiges  d'italien,  le  niçois  est  incontestable- 
ment provençal,  à  la  différence  du  mentonais  qu'on  pourrait  consi- 
dérer comme  un  dialecte  intermédiaire  entre  les  parlers  italiens  et  les 
parlers  de  langue  d'oc,  bien  que  très  nettement  distinct  des  uns  et 
des  autres.  Les  parlers  des  deux  rives  du  Var,  vers  l'embouchure  du 
fleuve,  différent  par  des  traits  de  second  ordre  qui  caractérisent  deux 
subdivisions  du  dialecte  provençal,  c'est-à-dire  ce  qu'on  a  appelé  avec 
raison,  selon  moi,  deux  sous-dialetes. 

Le  caractère  le  plus  saillant  qui  soit  commun  à  tou  tes  les  variétés 
du  dialecte  me  parait  être  la  répugnance  pour  les  finales  sifflantes 
surtout  dans  les  substantifs  et  les  adjectifs.  On  la  remarque  à  la  fois 
sur  les  deux  rives  du  Var  inférieur. 

Comme  le  niçois,  le  mentonais  et  les  dialectes  italiens,  le  parler 
de  la  rive  droite  offre  la  diphthongaison  de  Vo  tonique  :  vouastre 
ou  vouostre,  votre  ;  founrço  ou  fouorço,  force  ;  bouen,  bon.  En  niçois  : 
vouoslre,  fouorça,  bouon.  En  mentonais  :  voasc  ou  voastre  (pronon- 
cez :  vouasc  et  iwuastre),  foarza;  mais  ban,  Vo  nasal  à  la  fin  des  mots 
se  transfqrmant,  à  Menton,  en  une  sorte  d'à  nasal.  La  diphthongaison 
de  Vo  n'a  pas  lieu  dans  le  sous-dialecte  provençal  rhodanien. 

Voici  maintenant  quelles  sont  les  principales  différences  entre  le 
niçois  et  le  parler  de  la  rive  droite,  qui  n'est  autre  qu'une  variété  du 
sous-dialecte  marseillais  : 

Disparition  des  dernières  traces  d'italien,  c'est-à-dire  :  1°  des 
rares  proparoxytons  niçois  (  dimenge,  amo,  et  non  plus  diménegue, 
anima)  ;  2°  de  l'ablatif  de  l'article  {veni  de  la  vilo,  et  non  da  la 
vilo)  ;  3°  de  l'imparfait  de  l'indicatif,  du  futur  et  du  conditionnel 
italiens  erian,  avian,  sentian,  rendian,  aiwarai,  rendriéu,  et  non 
eravan,  aviavan,  senlavan,  rendavan,  aimerai,  renderii)  ;  4®  du 
pronom  possessif  employé  comme  adjectif  possessif  {moun  capèu,  et 
non  lou  m,iéu  capèu)  ; 

Première  personne  du  singulier  de  l'imparfait  de  l'indicatif  du  verbe 
avoir,  des  verbes  delà  deuxième  et  de  la  troisième  conjugaison  et  du 
conditionnel  de  tous  les  verbes  en  iéu  monosyllabe  (  triphthongue  à 
peine  sensible,  presque  iou  diphthongue) et  non  plus  en  il  dissyllabe; 


DE    PHILOLOGIE   ROMANE  169 

Pluriel  de  Tarticle  leis,  dont  Vs  se  fait  sentir  en  certains  endroits, 
pour  les  deux  genres  devant  une  voyelle  ;  jamais  devant  une  con- 
sonne :  leis  orne,,  les  hommes  ;  leis  aigo,  les  eaux  ;  et  non,  comme  à 
Nice,  lu  orne,  li  aiga. 

J'ai  noté  en  o  la  finale  féminine  atone  des  parlers  de  la  rive  droite 
du  Var;  elle  est  en  réalité  entre  Va  et  Vo  sourd,  presque  eu  ou  e  muet 
français;  mais  elle  est  si  indécise  qu'on  ne  peut  guère  y  voir  un  carac- 
tère du  sous-dialecte.  11  en  est  de  même  de  la  finale  provenant  de  tio 
ou  cio  latin,  qui  est  ioun  à  Nice  :  admiracioxmy  coumpassioun  ;  et 
un  son  intermédiaire  entre  ioun  fet  ien  à  Gagnes  et  à  Saint-Laurent- 
du-Var  ;  à  peu  près  admiracien,  coumpassien. 

Le  sous-dialecte  qui  commence  à  la  rive  droite  du  Var  inférieur 
s'étend  sur  le  littoral  à  travers  l'arrondissement  de  Grasse,  dans  les 
Alpes-Maritimes,  le  département  du  Var  et  l'ouest  des  Bouches-du- 
Rhône.  11  se  subdivise  en  plusieurs  variétés. 

IX 

Il  résulte  des  constatations  qui  précèdent  : 

Qu'un  dialecte  italien,  dont  le  domaine  se  continue  à  une  distance 
notable  vers  l'est,  cesse  brusquement  à  la  frontière  française  actuelle, 
qui  fut  jadis  la  frontière  du  comté  de  Nice  et  de  la  principauté  de 
Monaco  ; 

Qu'un  dialecte  mixte,  ayant  des  rapports  très  étroits  avec  la  langue 
d'oc,  commence  à  la  frontière  de  France  et  s'arrête  net  à  la  frontière 
occidentale  de  la  principauté,  enclavant  Monaco,  où  les  indigènes 
parlent  le  dialecte  italien  dont  il  vient  d'être  question  ; 

Que  le  provençal  avec  ses  caractères  essentiels  apparaît  au  village 
de  la  Turbie,  situé  sur  la  frontière  de  la  principauté,  et  qui  fut  dans 
l'antiquité  la  limite  entre  l'Italie  et  la  Gaule; 

Que  les  caractères  distinctifs  du  provençal  se  prolongent  considé- 
rablement vers  l'ouest;  mais  que,  sur  le  Var,  à  l'ancienne  frontière 
du  comté  de  Nice  et  de  la  France,  il  se  })roduit  tout  à  coup  des  modi- 
fications secondaires  qui  différencient  sensiblement  le  parler  de  Nice 
de  celui  de  la  rive  droite  du  Var  inférieur,  do  telle  sorte  que  le  parler 
de  Nice  s'étend  sur  une  partie  de  l'ancien  comté  de  ce  nom,  et  le  par- 
ler de  la  rive  droite  se  continue  vers  Antibes,  Toulon,  Marseille,  avec 
quelques  variations  de  moindre  importance  que  celles  que  l'on  remar- 
que entre  le  langage  de  Nice  et  celui  de  Gagnes. 

Dans  la  région  dont  je  viens  de  m'occuper,  il  n'y  a  donc  pas  de 
fusion  insensible  des  parlers  locaux  les  uns  dans  les  autres,  et  les 
limites  des  traits  linguistiques  coïncident  avec  des  limites  politiques 
anciennes  oy  modernes. 


^^ 


1 7  0  CONGRES 

On  m'objectera  que  nous  sommes  en  présence  d'une  série  d'excep- 
tions. Il  serait  intéressant  de  savoir  combien  d'exceptions  de  ce  genre 
on  rencontrerait  sur  le  territoire  de  la  France.  J'ai  voulu  seulement 
indiquer  comment  on  peut  procéder,  — en  l'état  des  connaissances  sur 
les  patois  et  sans  attendre  des  études  qui  ne  seront  jamais  complètes, 
—  à  une  délimitation  des  dialectes  et  sous-dialectes  de  notre  pays. 

Parmi  les  caractères  que  j'ai  assignés  à  chacun  des  parlers  obser- 
vés par  moi,  il  en  est  qui  ne  se  continuent  probablement  pas  surtout 
le  territoire  du  dialecte.  D'autre  part,  certains  traits  notables  peu- 
vent m'avoir  échappé.  J'ai  donné  ceux  qui,  — indépendamment  de 
leur  valeur  intrinsèque  et  de  leur  persistance,  —  impriment  à  ces 
parlers  leur  physionomie  ,et  indiquent,  sans  qu'on  puisse  s'y  mépren- 
dre, qu'on  passe  du  domaine  d'un  idiome  dans  le  domaine  d'un  autre 
idiome  ;  c'est  là  ce  qui  constitue  une  vraie  limite  linguistique. 

Le  point  où  le  dialecte  change  n'est  pas  toujours  celui  où  s'arrête 
un  trait  linguistique  important.  Il  suffit  parfois  qu'un  trait  saillant 
perde  de  son  relief,  de  sa  fréquence,  on  qu'un  trait  jusqu'alors 
secondaire  devienne  prépondérant  pour  modifier  l'aspect  de  la  lan- 
gue. Ainsi,  en  histoire  naturelle,  un  organe  cesse  d'être  un  carac- 
tère essentiel  dos  qu'il  ne  se  présente  plus  qu'à  l'état  rudimentaire. 
La  confusion  entre  la  persistance  d'un  trait  linguistique  et  son  inten- 
sité est  une  des  causes  d'erreur  auxquelles  on  doit  la  croyance  à  la 
fusion  des  parlers.  Prenons  pour  exemple  la  région  que  nous  venons 
de  parcourir: 

Les  caractères  italiens  s'y  prolongent  jusqu'au  Var,  de  telle  sorte 
qu'à  Nice  on  retrouve  encore  des  traces  de  proparoxytons,  les  futurs 
aimerai,  venderai ;  les  conditionnels  senteriï,  renderii;  les  impar- 
faits erax>an,  aviavan;  l'ablatif  vetti  da  la  vila;  la  tournure  lou  miéu 
capèu.  Si  l'on  compte  ces  traits  sans  avoir  une  idée  nette  de  leur  fré- 
quence, de  ce  que  j'appelle  leur  intensité;  si  l'on  remarque,  d'un 
autre  côté,  que  le  mentonais  offre  encore  plus  de  caractères  italiens 
mêlés  à  un  certain  nombre  de  traits  provençaux,  et  que  le  vintimillois 
se  restent,  jusqu'à  un  certain  point,  du  voisinage  de  la  langue  d'oc; 
si,  enfin,  on  observe  qu'entre  Savone  et  Vintimille,  entre  Menton  et 
Roquebrune,  entre  la  Turbie  et  l'embouchure  du  Var,  il  y  a,  du  parler 
d'un  village,  parfois  d'un  quartier,  au  parler  du  village  ou  du 
quartier  voisin,  des  nuances  à  peine  perceptibles,  entre  lesquelles  il 
semble  impossible  de  tracer  une  limite,  on  sera  disposé  à  conclure 
que,  de  Savone  à  l'embouchure  du  Var,  tous  les  parlers  du  littoral  se 
fondent  les  uns  dans  les  autres  par  des  nuances  insensibles,  et  que 
ces  parlers  intermédiaires  entre  l'italien  et  la  langue  d'oc,  ne  peu- 
vent être  légitimement  classés  dans  l'une  ou  l'autre  de  ces  deux 
langues.  C'est  par  des  observations  de  ce  genre  qu'on  est  arrivé  à 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  171 

la  théorie  que  je  combats.  Or,  rieu  n'est  plus  [inexact  qu'une  pareille 
conclusion.  En  effet,  entre  Savone  et  Vintimille,  le  langage  est  presque 
tout  italien  :  les  quelques  noms,  les  quelques  formes  d'oc,  sont 
comme  noyés  dans  la  masse  des  sons  et  des  formes  étrangers  à 
la  France.  Sur  la  frontière,  on  se  heurte  brusquement  au  flot  pro- 
vençal qui,  refoulant  la  plupart  des  formes  italiennes,  se  laissant 
pénétrer  cependant  par  quelques-unes  d'entre  elles,  constitue  le  lan- 
gage de  Menton,  assez  distinct  à  la  fois  de  celui  de  Vintimille  et  de 
celui  de  Nice,  pour  qu'il  ne  puisse  y  avoir  discussion  sur  ses  limites 
et  sur  son  entité,  bien  qu'il  soit  permis  d'hésiter  sur  la  place  à  lui 
assigner  dans  un  classement  des  dialectes.  A  la  Turbie,  un  nouveau 
flot  provençal  vient  délayer  ce  qui  restait  d'éléments  italiens,  au 
point  qu'on  n'eu  aperçoit  plus  que  quelques  traces.  Qu'importe, 
par  exemple,  qu'il  subsiste  dans  le  parler  de  Nice  de  rares  proparo- 
xytons? M.  Sardou  et  moi  n'en  avons  constaté  que  quatre.  En  quoi 
la  physionomie  générale  de  ce  langage  en  est-elle  influencée?  Et  si, 
dans  une  carte  des  traits  linguistiques,  on  prolonge  le  trait  mar- 
quant les  proparoxytons  jusqu'au  Var,  ce  qui  est  rigoureusement 
exact,  peut-on  dire  que  ce  trait  a  la  même  valeur  à  Nio«,  où  il  ne 
représente  que  quatre  mots,  et  à  Vintimille,  où  sdruccioU  proprement 
dits  et  sdruccioU  par  adjonction  d'enclitiques  paraisssent  à  peu  près 
dans  toutes  les  phrases? 

On  me  permettra  de  faire  ressortir  par  une  comparaison  la  diffé- 
rence qui  existe  entre  l'opinion  que  je  combats  et  la  mienne. 

On  sait  qu'en  peinture  le  mélange  du  bleu  et  du  jaune  donne  le 
vert.  Rien  n'est  plus  facile  que  de  passer  par  des  nuances  absolu- 
ment insensibles  du  bleu  au  jaune,  le  vert  franc  se  trouvant  à  égale 
distance  de  l'un  et  de  l'autre.  Dans  ce  cas,  ou  ne  peut  indiquer  le 
point  précis  où  commence  chaque  couleur  ou  chaque  nuance.  M.  G. 
Paris  conclurait  de  là  qu'il  n'y  a  sur  la  surface  peinte  de  cette  façon 
ni  jaune  ni  vert,  ni  nuances  intermédiaires  ;  mais  seulement  une  cou- 
leur unique,  une  masse  colorée  dans  laquelle  il  est  impossible  d'éta- 
blir des  séparations.  D'autres,  ne  s'élevant  pas  jusqu'à  cette  concep- 
tion philosophique  de  l'unité,  reconnaissent  dans  cet  ensemble  trois 
couleurs  tranchées  et  des  nuances  intermédiaires,  dont  les  limites 
respectives  ne  peuvent  être  tracées  d'une  manière  précise,  mais  qu'il 
est  utile  de  distinguer  par  des  noms  divers.  Telle  était,  transportée 
dans  le  domaine  linguistique,  l'opinion  de  tous  ceux  qui,  il  y  a  peu 
d^années  encore,  croyaient  à  la  fusion  graduelle  des  parlers. 

Mais  au  lieu  de  fondre  les  nuances  les  unes  dans  les  autres,  on 
peut  juxtaposer  par  bandes  les  principales  d'entre  elles.  L'addition  du 
jaune  au  bleu,  au  lieu  de  se  faire  par  doses  imperceptibles  insensi- 
blement augmentées,  peut  avoir  lieu  par  quantités  notables,  de  telle 


î  7  2  CONGRES 

sorte  que,  côtoyant  le  bleu  franc  et  bien  distincte  sur  la  ligne  de  con- 
tact, se  trouve  une  bande  bleu-vert,  puis  une  bande  verte,  puis  du 
vert-jaune  et  enfin  du  jaune  franc.  On  peut  même  supposer  entre  ces 
cinq  nuances  des  nuances  intermédiaires  suffisamment  nettes,  ne  se 
confondant  pas  avec  leurs  voisines.  Ici,  comme  dans  le  premier  cas, 
il  y  a  transition  du  bleu  au  jaune  ;  mais  non  pins  transition  insensi- 
ble. Chaque  bande  est  bien  limitée  ;  plusieurs  sont  composées  des 

• 

mêmes  éléments,  mais  combinés  en  proportions  diverses,  ce  qu^ 
donne  des  nuances  parfaitement  distinctes.  Le  bleu-vert,  le  vert,  le 
vert-jaune  et  leurs  intermédiaires  sont  également  composés  de  bleu  et 
de  jaune,  et  n'en  constituent  pas  moins  autant  de  bandes  différentes 
qui  commencent  et  finissent  en  des  points  précis.  Les  parlers  locaux 
sont,  à  mon  avis  et  suivant  mes  constatations,  disposés  d'une  manière 
analogue.  Nous  venons  de  voir,  de  Vintimille  à  Antibes,  le  vinti- 
millois,  le  mentonais,  le  niçois,  se  nuancer,  dans  des  proportions 
diverses  et  suffisamment  tranchées,  d'italien  et  de  langue  d'oc,  puis 
le  marseillais  éliminer  les  derniers  vestiges  de  la  langues  italienne, 
et  j'espère  qu'il  me  sera  possible  de  prouver  bientôt  que  les  choses  se 
passent  ainsi  sur  tout  le  territoire  de  la  langue  d'oc. 

En  attendant,  j'ai  pu  constater  que  la  prétendue  fusion  insensible, 
que  nous  avons  cherchée  vainement  vers  la  frontière  italienne,  n'existe 
pas  davantage  entre  le  languedocien  et  le  catalan  sur  la  limite  du 
Roussillon,  ou  entre  le  catalan  et  l'espagnol  sur  la  limite  de  l'Ara- 
gon.  Sur  la  limite  de  la  langue  d'oc  et  de  la  langue  d'oil,  on  ne  sau- 
rait nier  que  la  démarcation  ne  soit  nette  sur  un  parcours  d'au  moins 
200  kilomètres.  Pour  le  surplus  de  cette  limite,  je  crois  avoir  établi 
que,  s'il  y  a  doute  sur  la  place  à  assigner,  il  n'y  a  pas  fusion,  ce  qui 
concorde  avec  ce  fait  que  les  idiomes  d'oil  voisins  de  la  limite  sont 
traités  à  première  vue  de  langages  franchimans  par  les  gens  du 
Midi. 

N'en  déplaise  à  M.  G.  Paiis,  il  y  a  bien  deux  langues  françaises 
séparées  par  une  frontière  non  imaginaire."  Et  comment,  dit-il,  s'expli- 
querait cette  étrange  frontière  qui,  de  l'est  à  l'ouest,  couperait  la 
France  en  deux,  en  passant  par  des  points  absolument  fortuits?  » 
Explicable  ou  non,  un  fait  est  ou  n'est  pas,  et  lorsqu'il  s'agit  seule- 
ment de  constater  s'il  existe  ou  n'existe  pas,  c'est  une  déplorable 
disposition  d'esprit  pour  un  observateur  que  de  se  préoccuper  de 
l'explication  à  donner.  Il  serait  un  étrange  savant  celui  qui  élimi- 
nerait de  la  science  tout  ce  qu'il  n'explique  pas.  Le  fait  incompris 
aujourd'hui  paraîtra  peut-être  tout  naturel  demain.  Nous  trouvons  au 
delà  des  Pyrénées  l'analogue  de  ce  que  M.  G.  Paris  considère  comme 
inexplicable  en  France.  La  péninsule  ibérique  est  partagée  du  nord 
au  sud  eu  trois  bandes  linguistiques  inégales  :  à  l'est  le  catalan,  au 


DE   PHILOLOGIE   ROM  AXE  173 

centre  le  castillan,  à  Touest  le  gallego  ou  portugais.  Aucune  des 
trois  langues  ne  se  fond  dans  la  langue  voisine.  A-t-on  quelque 
explication  de  cette  étrange  té?  J'en  ai  hasardé  une:  la  conquête 
musulmane,  en  refoulant  les  chrétiens  vers  les  Pyrénées,  les  frac- 
tionna en  trois  groupes  restés  longtemps  tout  à  fait  séparés  et  peut- 
être  inconnus  les  uns  des  autres.  Le  parler  de  chaque  groupe  évo- 
lua dans  un  sens  différent  pendant  cette  période  d'isolement  ;  il  en 
résulta  trois  langues,  qui,  la  reconquista  venue,  s'étendirent  peu  à 
peu,  à  mesure  que  les  peuples  qui  les  parlaient  refoulaient  devant 
eux  les  musulmans  dans  la  direction  du  Midi.  Puis,  le  domaine  de 
chaque  peuple  ou  groupe  dépeuples  s'élargissant,  les  idiomes  en  vin- 
rent à  se  toucher;  mais  leur  développement  était  trop  avancé  pour 
qu'ils  aient  pu  s'influencer  notablement  aux  points  de  contact.  Ce 
n'est  là  qu'une  hypothèse  dont  je  ne  me  dissimule  pas  les  côtés  fai- 
bles ;  mais  une  hypothèse  est  une  explication  provisoire  qui  prouve 
tout  au  moins  la  possibilité  d'une  explication  définitive.  Or,  une 
supposition  analogue  n'est-elle  pas  acceptable  pour  la  France?  Ne 
peut-on  pas  admettre  que  de  larges  espaces  boisés  et  inhabités  aient 
longtemps  séparé  les  populations  du  Nord  de  celles  du  Midi,  que 
les  parlers  des  unes  et  des  autres  se  soient  développés  dans  des  sens 
différents,  et  que,  le  défrichement  ayant  progressivement  rétréci, 
puis  supprimé  la  zone  déserte,  les  idiomes  se  soient  rencontrés  à 
une  époque  où  leur  développement  ne  leur  permettait  plus  de  se  fon- 
dre les  uns  dans  les  autres.  L'analogie  plus  ou  moins  grande  des 
parlers  en  contact  indiquerait  la  plus  ou  moins  grande  ancienneté  de 
leur  rapprochement*. 

Si  maintenant  on  met  en  présence  des  affirmations,  jusqu'ici 
dénuées  de  preuves,  de  MM.  P.  Meyer  et  G.  Paris,  les  faits  et  les 
arguments  que  nous  devons  d'une  part  à  l'observation,  d'autrs  part 
aux  principes  posés  dans  toutes  les  sciences  par  des  maîtres  dont 
l'autorité  ne  le  cède  à  nulle  autre,  il  me  semble  difficile  de  ne  pas 
modifier  ainsi  qu'il  suit  les  cinq  propositions  de  M.  G.  Paris  que  j'ai 
relevées  en  commençant  : 

P  Les  parlers  populaires  de  la  France  paraissent  se  fondre  les  uns 
dans  les  autres  sur  certains  points;  mais  il  n'a  pas  été  prouvé  encore 
que  ce  soit  par  nuances  insensibles,  et  qu'il  n'y  ait  pas  toujours  un 
ou  plusieurs  caractères  saillants  qui  marquent  la  physionomie  de 
chaque  idiome  et  serrent  à  le  déterminer  ; 

2°  Dans  une  masse  linguistique  de  même  origine,  comme  la  nôtre, 
qui  a  été  et  est  encore  soumise  à  tant  d'influences  variées,  ethniques, 

»  Voir  Rapport  sur  la  limite. .. -,  p.  85  et  49,  note  1 , 


-/.' ..    . 


174  CONGRES 

climatologiques,  économiques,  politiques,  etc.,  il  y  a  des  parlers  qui 
sont  des  types  de  dialectes,  autour  desquels  se  rangent  d'autres  par- 
lers plus  ou  moins  ressemblants.  Parmi  ces  parlers  d'un  même  dia- 
lecte, on  peut  distinguer  des  groupes  secondaires,  qui  constituent 
les  sous-dialectes,  des  variétés  et  même  des  sous-variétés  de  sous- 
dialectes  ;  mais  la  divergence  est  surtout  marquée  entre  la  masse  des 
dialectes  du  Nord  et  celle  des  dialectes  du  Midi,  c'est-à-dire  entre  la 
langue  d'oil  et  la  langue  d'oc  ; 

3°  Nous  parlons  latin  ;  mais  un  latin  qui  a  évolué  de  diverses 
façons  suivant  les  lieux,  de  telle  sorte  que  le  latin  actuel  est  non 
seulement  fort  éloigné  du  latin  vulgaire  de  l'antiquité,  mais  se  divise 
en  langues  tout  à  fait  distinctes.  Ces  langues,  qu'on  appelle  langues 
romanes,  viennent  du  latin  par  une  suite  de  transformations  insen- 
sibles, et  c'est  pour  indiquer  par  un  mot  clair  et  commode  cette  ori- 
gine qu'on  les  appelle  filles  du  latin*; 

40  Si  le  développement  naturel, du  latin  n'avait  pas  été  influencé 
par  des  actions  politiques,  littéraires  et  autres,  il  se  serait  produit 
autre  chose  que  ce  qui  existe  aujourd'hui.  Mais  l'expérience  de  ce 
développement  libre  n'ayant  pu  être  faite  nulle  part,  et  les  impulsions 
d'ordre  physiologique  et  d'ordre  psychologique,  auxquelles  le  langage 
obéit,  étant  mal  connues,  on  ignore  absolument  ce  qui  serait  arrivé 
si  les  peuples  romans  avaient  pu  soustraire  leur  parler  à  toute 
influence  extérieure; 

5**  Il  ne  paraît  pas  que  les  limites  des  traits  linguistiques  coïnci- 
dent toujours  avec  des  limites  politiques  anciennes  ou  modernes  ; 
mais,  en  gardant  sur  chaque  cas  particulier  une  prudente  réserve, 
il  est  permis  de  croire  que  les  actions  politiques,  qui  ont  influencé  le 
développement  du  latin,  ont  pu  avoir  quelquefois  pour  résultat  de 
rapprocher  la  limite  linguistique  de  la  limite  politique. 

'  Max  Miiller  a  défini  très  nettement  le  sens  des  mots  langue  mère  et  langue 
fille:  «Je  ne  vois  pas  d'inconvéDÎeot,  a-t-il  dit,  à  appliquer  aux  langues  ces 
noms  de  mère  et  de  filU,  pourvu  que  nous  ne  laissions  pas  des  termes  eu 
apparence  si  clairs  et  si  simples  couvrir  des  conceptions  vagues  et  obcures. 
Or,  si  nous  appelons  la  langue  italienne  fille  du  latin,  nous  ne  voulons  nulle- 
ment attribuer  à  l'italien  un  nouveau  principe  de  vie,  car  pas  un  seul  radical 
nouveau  n'a  été  créé  pour  le  former  ;  c'est  du  latin  sous  une  nouvelle  forme, 
du  latin  moderne,  ou  bien  encore  le  latin  est  de  l'italien  ancien.  Les  noms  de 
mère  et  de  fille  ne  marquent  que  des  périodes  dans  le  développement  d'une 
langue  dont  le  fonds  est  le  même.  »  Ces  quatre  mots  :  «  sous  une  nouvelle 
forme  »,  sont  tout  ce  qui  distingue  l'opinion  de  Max  Mûller  de  celle  de 
M.  G.  Paris  ;  ils  marquent  entre  elles  toute  la  distance  qui  sépare  la  vérité  du 
paradoxe. 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  175 

Ce  n'est  qu'en  tremblant  que  je  me  permets  de  retourner  ainsi  les 
axiomes  du  maître.  Il  faut  que  je  sois   bien  convaincu   de  mon  bon 
droit  ;  car  je  ne  me  dissimule  pas  le  danger  que  je  cours.  Je  sais  com- 
bien il  sera  toujours  plus  malaisé  de  s'entendre  en  linguistique  qu'en 
tout  autre  science.   Un  cas  de  phonétique  est  moins  aisé  à  vérifier, 
pour  la  généralité  de  ceux  qu'il  intéresse,  que  la  plupart  des  faits  scien- 
tifiques d'un  autre  ordre.  Qu'un  naturaliste  prenne  pour  un  mammifère 
un  reptile  exotique,  qu'il  ne  connaît  qu'à  l'état   de  squelette  incom- 
plet ;  qu'un  historien  diplômé  place  en  Champagne  une  localité  de  la 
Touraine,  il  sera  facile   à  un  simple  amateur  mieux   renseigné    de 
prouver  l'erreur  en  quelque  pays  qu'elle  se  soit  produite.  Qu'un  phi- 
lologue parisien  persiste  à  nier  des  constatations  phonétiques  évi- 
dentes à  Marseille  ou  à  Toulouse,    mais    difficilement  perceptibles 
pour    son    oreille  d'homme  du  Nord,  l'ignorant  qui  essaiera  de   le 
détromper  sera  tenu  en  suspicion  par  tous  ceux  qui  ne  peuvent  véri- 
fier par  eux-mêmes  le  point  en  litige.  Et  pourtant  l'ignorant  aura  rai- 
son. 11   aura  raison,  non   seulement    lorsqu'il  affirmera   ce  qui  est 
l'évidence  pour  des  millions  d'individus,  mais  aussi  lorsqu'il  dira  que 
le  devoir  de  la  science  est  d'expliquer  ce  qui  tombe  sous  les  sens  et 
non  de  le  nier,  que   ses  résultats  appartiennent  à  tous,  qu'ils  doi- 
vent concorder,  pour  être  justes  et  féconds,  avec  ce  que  l'observation 
et  le  bon  sens  apprennent  à  tous,  et  que  l'on  aura  beau  philosopher 
sur  le  moi  et  le  non  moi,  sur  la  matière  et  la  forme,  sur  l'évolution 
de  la  cellule,  sur  l'unité  du  latin  dans  les  temps  anciens  et  modernes, 
chacun  de  nous  continuera,  dans  la  pratique  de  la  vie  et  dans  la  pra- 
tique scientifique,  à  avoir  conscience  de  sa  personnalité,  à  confondre 
dans  ce  qu'il  voit  la  matière  et  la  forme,  à  regarder  la  cellule  deve- 
nue herbe  comme  différente  delà  cellule  devenue  homme,  et  la  lan- 
gue parlée  des  Alpes  à  l'Océan  comme  distincte,  dans  son  unité  essen- 
tielle et  dans  ses  variétés  régionales,  de  la  langue  également  une  et 
variée  qui  se  parle  dans  la  moitié  septentrionale  de  la  France. 

Une  discussion  s'engage  entre  divers  membres  au  sujet  des 
limites  géographiques  des  dialectes  du  midi  de  la  France  et 
du  caractère  d'unité  qu'ils  peuvent  présenter  par  rapport  aux 
dialectes  d'Italie  et  d'Espagne. 

M.  Mistral  ,  qui  entre  à  ce  moment,  est  appelé  à  la 
présidence  d'honneur   du  Congrès. 

M.  CoNSTANS,  après  avoir  rendu  hommage  aux  efforts  faits 
par  MM.  de  Tourtoulon  et  Bringuier  pour  donner  des  bases 
àl'étude  scientifique  des  patois  et  rappelé  dans  quelles  condi- 


-_.»  *■* 


1 7  G  CONGRES 

lions  rigoureuses  de  méthode  et  d'observation  sur  place  cette 
étude  se  fait  aujourd'hui,  propose  au  Congrès  d'émettre  le 
vœu  que,  en  raison  de  la  disparition  possible  et  de  Faltération 
progressive  des  patois  de  la  France  et  en  particulier  des 
patois  de  la  région  intermédiaire  entre  la  langue  d'oc  et  la  lan- 
gue d'oil,  le  Ministre  de  Tlnstruction  publique  encourage 
Tétude  sur  place  des  patois  et  spécialement  de  ceux  de  cette 
dernière  région. 

MM.  Castets,  RÉviLLOUT  et  db  Tourtoulon  appuient  le 
projet  de  M.  Constans. 

M.  Chabaneau  fait  valoir  l'importance  des  recherchas  que 
M.  de  Tourtoulon  a  entreprises  sur  les  patois  intermédiaires 
entre  la  langue  d*oc  et  la  langue  d'oil  et  dont  il  doit  bientôt 
publier  la  suite. 

M.  Maurice  Faure  signale  tout  particulièrement  à  l'atten- 
tion des  membres  du  Congrès  l'importance  philologique  des 
patois  modernes  pour  Tétude  des  dialectes  anciens  et  propose 
l'adoption  du  vœu  suivant: 

Considérant  que,  notamment  en  ce  qui  concerne  les  dialectes  de  la 
langue  d'oc,  l'enseignement  officiel,  dans  les  Facultés,  ne  s'applique 
presque  exclusivement  qu'aux  anciennes  formes  de  ces  dialectes  ;  — 
considérant  qu'un  dialecte  ne  peut  être  bien  connu  et  étudié  que  s'il 
est  envisagé  à  tous  les  degrés  de  son  évolution  ;  — considérant  que, 
spécialement  en  ce  qui  touche  la  plupart  des  dialectes  d'oc,  les  élé- 
ments vivants  et  actuels  d'étude  abondent,  soit  parmi  les  populations 
qui  les  parlent,  soit  dans  les  livres  des  auteurs  qui  ont  écrit  dans  ces 
dialectes,  —  le  Congrès  émet  le  vœu  :  que,  dans  renseignement  offi- 
ciel, l'étude  des  anciens  dialectes  romans  ne  soit  pas  séparée  de  celle 
des  dialectes  actuels  et,  au  contraire,  y  soit  étroitement  rattachée, 
même  au  besoin  par  la  création  de  cours  spéciaux. 

M.  Chabaneau  fait  remarquer  que  précisément  il  applique 
toujours,  dans  son  enseignement,  la  méthode  préconisée  par 
M.  Faure,  et  il  pense  que  ses  collègues  n'agissent  pas  autre- 
ment. 

Une  discussion  s'engage  sur  la  rédaction  définitive  du  vœu 
à  adopter.  MM.  Castets,  Chabaneau,  Rbvillout,  Constans, 
Faure,  Clédat,  Thomas,  etc.,  y  prennent  part.  On  parle  de 
l'avenir  des  patois  et  de  l'utilité  ou  de  l'inconvénient  de  leur 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  177 

maintien.  On  traite  la  question  de  savoir  si  Tétude  des  patois 
doit  être  recommandée  de  préférence  pour  les  patois  intermé- 
diaires entre  la  langue  d*oc  et  la  langue  d'oil,  c'est-à-dire 
ceux  de  la  Marche,  du  Bourbonnais,  du  Lyonnais,  etc.,  qui 
s'altèrent  beaucoup  plus  rapidement  que  les  autres,  ou,  au 
contraire,  pour  les  patois  qui  sont  encore  presque  intacts , 
comme  ceux  du  Languedoc,  de  la  Gascogne  et  de  la  Pro- 
vence. 

M.  Durand  de  Gros  est  partisan  du  maintien  des  patois.  Il 
donne  quelques  exemples  des  altérations  subies  par  le  dialecte 
rouergat:  des  sons  nouveaux  s'introduisent,  comme  le  ch  (dans 
machine)^  et  une  foule  de  mots  tombent  du  vocabulaire.  Le 
patois  est  en  train  d'être  remplacé  par  un  jargon. 

M.  l'abbé  Devaux  donne  quelques  renseignements  sur  les 
patois  de  l'Isère  (environs  de  La-Tour-du-Pin).  Ces  patois 
subissent  très  fortement  Tinfluence  du  français,  qui  les  refoule 
vers  le  sud.  Le  provençal  se  maintient  par  îlots,  isolés  les  uns 
des  autres,  où  la  caractéristique  du  patois  est  la  persistance 
du  son  aou. 

M.  RÉviLLouT  propose  qu'on  émette  le  vœu  que  l'on  rédi- 
geât, pour  l'étude  des  parlers  locaux,  des  questionnaires  des- 
tinés à  ceux  qui,  se  trouvant  sur  place,  tels  que  les  instituteurs, 
les  percepteurs,  les  contrôleurs,  les  facteurs,  etc.,  pourraient 
travailler  à  l'inventaire  de  ces  parlers. 

Le  Congrès  se  décide  à  adopter  le  vœu  suivant,  rédigé  par 

M.  CONSTANS  : 

Le  Congrès  émet  le  vœu  : 

Que  le  Ministre  de  rinstruction  publique  favorise,  par  des  missions 
et  des  encouragements,  l'étude  sur  place  des  patois  de  France,  et  en 
particulier  des  patois  qui  n'ont  pas  encore  été  suffisamment  étudiés. 

M.  Castets  donne  lecture  de  la  communication  suivante, 
envoyée  par  M.  le  docteur  Garrigou  : 

Le  docteur  Garrigou,  qui  n'est  nullement  linguiste,  mais  qui  est  le 
collaborateur  de  Julien  Sacaze,  comme  rédacteur  de  la  Revue  des 
Pyrénées  et  de  la  France  méridionale^  a  l'honneur  de  rappeler  que  ce 
regretté  savant  a  fait  faire,  dans  toute  la  région  pyrénéenne,  par  les 
hommes  les  plus  compétents  du  pays  et  par  les  instituteurs,  la  traduc- 


1 7  8  CONGRES 

tion  d'une  légende  dans  tous  les  dialectes  pyrénéens,  de  manière  à  ce 
que  cette  traduction  serve  à  l'étude  des  langues. 

Ce  travail  constitue  une  œuvre  considérable,  collectionnée  dans 
trente  volumes,  qui  furent  exposés  en  1887  à  l'Exposition  internatio- 
nale de  Toulouse.  Ils  sont  aujourd'hui  la  propriété  de  la  bibliothèque 
de  Toulouse,  où  l'on  vient  souvent  les  consulter. 

M.  Mistral  fait  une  communication  sur  les  effets  intellec- 
tuels de  la  suppression  du  patois  dans  l'enseignement  primaire. 
Le  petit  paysan,  auquel  on  enseigne  les  éléments  des  sciences 
naturelles  en  français,  perd  la  notion  d'une  foule  de  termes 
patois  correspondant  à  des  désignations  précises.  Il  n'em- 
ploiera plus  le  terme  patois  prègue-DifiU'de-restouble,  mais  il 
n'appellera  pas  cet  insecte  de  son  nom  français,  la  sauterelle, 
et  ne  fera  plus  usage  que  d'un  terme  vague,  une  bête.  Le. 
pêcheur  marseillais,  qui  n'a  pas  oublié  son  patois  et  qui  con- 
naît les  termes  précis  des  noms  des  poissons  et  de  tout  ce  qui 
a  rapport  à  son  métier,  présente  un  développement  intellec- 
tuel beaucoup  plus  grand  que  le  petit  gamin  qui  a  désappris 
son  dialecte  à  l'école  primaire,  qui  ne  connaît  plus  les  expres- 
sions de  sa  propre  langue  et  qui,  lorsqu'il  a  besoin  d'une  épi- 
thète,  ne  trouve  plus  que  les  mots  français  rigollot,  chic,  ou 
un  machiriy  une  chose. 

Une  discuvssion  s'engage  sur  l'opportunité  de  l'interdiction 
de  l'enseignement  du  patois  à  l'école  primaire.  MM.  Durand 
DE  Gros,  Mistral  et  Castets  défendent  les  patois,  contre 
M.  RÉviLLOUT,  qui  souhaite  leur  amoindrissement. 

M.  Castets  déclare  que  la  pensée  de  M.  Mistral  est  que  le 
patois  soit  considéré,  dans  l'enseignement  primaire,  comme  un 
instrument  pour  l'étude  plus  complète  de  la  langue  française. 
Le  Midi  sait  parler  français  et  a  produit  des  orateurs  qui 
sont  là  pour  le  prouver,  mais  il  possède  aussi  une  langue  qui 
sait  exprimer  des  sentiments  intimes  et  délicats  et  qui  a  le 
droit  d'exister. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  du  soir. 


DE   PHILOLOGIE  ROMANE  179 


Séance  du  27  mai  1890 


La  séance  est  ouverte  à  neuf  heures  et  demie  du  matin. 

MM  .  Bréal  et  Harvey  sont  appelés  à  la  présidence  d'hon- 
neur du  Congrès. 

M  .  Harvey  fait  une  communication  sur  l'Université  de 
Toronto  et  Tétude  de  la  langue  française  au  Canada.  L'Uni- 
versité de  Toronto  vient  d'être  détruite  par  un  incendie,  ce 
qui  sera,  dit-il,  une  occasion  de  faire  mieux,  en  reconstruisant 
un  bâtiment  mieux  adapté  au  progrès.  Les  étudiants  de  l'Uni- 
versité forment  une  association,  divisée  en  sections,  qui  se 
réunissent  presque  tous  les  jours.  Ils  publient  une  petite 
gazette. 

M .  Harvey  communique  au  Congrès  diverses  publications 
canadiennes*. 

M.  Trojel  fait  la  communication  suivante  sur  les  Cours 
d'amour  : 

Messieurs, 

D'abord  je  vous  demande  bien  pardon,  si  je  ne  m'explique  pas  assez 
bien  en  français  :  je  suis  étranger.  Puis  je  vous  prie  d'excuser  ce 
que  mon  discours  pourra  avoir  de  leste:  ce  caractère  est  inhén  nt  au 
sujet,  et  je  ne  saurais  l'en  exclure.  Afin  de  ne  rien  laisser  dans  l'obscu- 
rité, je  vais  expliquer  d'abord  en  peu  de  mots  mon  opinion  sur  la  ques- 
tion des  Cours  d'amour.  Il  y  a  de  nos  jours  trois  opinions  diiférentes 
sur  cette  question:  une  qui  rejette  tout  ce  qui  en  a  été  dit  comme 
faux,  une  qui  suppose  vrai  tout  ce  qui  en  a  été  dit,  et  enfin  une  qui 
se  tient  au  milieu  des  deux,  qui  rejette  bien  l'idée  des  tribunaux  de 
dames,  mais  qui  n'ose  pourtant  nier  que  des  dames  n'aient  jugé  par- 
fois des  différends  d'amour  réels;  seulement,  il  ne  faut  pas  supposer 
des  tribunaux  siégeant  et  fonctionnant  comme  les  tribunaux  ordi- 
naires :  la  dame  qui  juge  est  choisie  comme  arbitre  par  les  parties 
en  litige  et,  si  elle  veut,  elle  peut  demander  le  conseil  d'autres 
dames.  C'est  là  mon  opinion  et,  quoi  qu'on  en  ait  dit,  elle  n'est  pas 
conforme  à  celle  de  Raynouard.  Après  cette  introduction  qui  m'a  paru 
nécessaire,  j'appellerai  votre  attention  sur  quelques  faits,  bien  connus 
à  la  vérité,  mais  qui  n'ont  pas  été  mis  en  rapport  avec  cette  question, 

*  Ces  publications  feront  l'objet  d'une  notice  ultérieure. 


^^ÊJSSi  \.^ 


180  CONGRES 

que  je  sache.  Ils  me  semblent  confirmer  mon  opinion  en  affaiblissant 
la  force  de  quelques  remarques  très  judicieuses  qu*on  y  a  opposées. 

Dans  son  intéressant  article  sur  les  Cours  d'amour,  M.  Paris  dit 
ce  qui  va  suivre  : 

H  Que  des  personnes  engagées  réellement  dans  une  liaison  illégitime 
(on   a  déjà  vu  qu*il  ne  s'agissait  pas  d'autre  amour)  aient  jamais 
soumis  à  un  jugement  de  ce  genre  un  différend  survenu  entre  elles 
(sauf  peut-être  pour  quelques  discussions  sur  la  théorie  de  Tamour, 
comme  le  comte  et  la  dame  qui  éciivent  à  Marie  de  Champagne  et  en 
reçoivent  la  lettre  citée  plus  haut),  c'est  ce  qui  n'a  aucune  espèce  de 
vraisemblance,  pour  des  raisons  sur  lesquelles  il  semble  vraiment  inu- 
tile d'insister.  Je  dirai  même  que  cette  intrusion  d'une  autorité  pour 
ainsi  dire  légale  dans  les  rapports  des  amants  aurait  été  directement 
contre  les  idées  les  plus  essentielles  de  l'amour,  tel  que  le  définissait 
le  XII*  siècle.  Si  en  effet  cet  amour  ne  peut  exister  dans  le  mariage, 
c'est,  dit  la  comtesse  de  Champagne,  parce  que  les  amants  s'accordent 
librement  et  volontairement  tout  ce  qu'ils  se  donnent,  tandis  que  les 
époux  ont  l'un  envers  l'autre  des  droits  et. des  devoirs  mutuels.  L'amour 
peut  bien  créer  aux  amants  des  obligations,  mais  elles  ne  sauraient 
avoir  d'autre  sanction  que  leur  propre  vouloir,  d'autres  juges  et  exé- 
cuteurs qu'eux-mêmes.  Une  femme  qu'un  arrêt  d'amour  aurait  forcée 
à  se  donner  à  l'amant  qu'elle  écartait  aurait  été  moins  libre  qu'une 
épouse  ne  l'est  envers  son  époux,  et  l'amant  qui  aurait  joui  par  ce 
moyen  de  faveurs  non  volontaires  aurait  à  coup  sûr  manqué  à  toutes 
les  règles  de  l'amour  «  honnête^  ». 

Quoique  ces  objections,  tirées  de  la  nature  de  l'amour,  soient  faites 
presque  pour  clore  la  bouche  à  toute  discussion  ultérieure,  j^ose  me 
mettre  sur  la  brèche  pour  les  combattre.  Quelques  passages  des  écrits 
du  moyen  âge  me  semblent  prouver  qu'on  voyait  ces  liaisons  d'un 
autre  œil  qu'on  ne  le  pense,  et  qu'on  n'avait  pas  peur  d'invoquer  l'aide 
d'un  tiers  en  cas  de  différend  survenu  entre  les  amants,  ni  de  réta- 
blir, d'après  l'avis  de  celui-ci,  les  relations  antérieures. 

Mes  auditeurs  se  souviendront  d'un  épisode  de  l'histoire  de  Ber- 
tran  de  Born.  Le  fameux  troubadour  entretenait  une  liaison  avec 
Maeuz  de  Montignac.  A  l'arrivée  dans  le  pays  d'une  dame,  célèbre 
par  sa  beauté,  le  poète  invite  tous  (je  n'ai  pas  besoin,  je  pense,  d'af- 
firmer qu'il  ne  s'agit,  dans  tout  ce  qui  appartient  à  l'amour  galant, 
que  de  la  chevalerie,  non  pas  de  toutes  les  classes  de  la  société},  il 
invite  donc  tous  à  faire  la  cour  à  cette  dame,  et  il  semble  vouloir  se 
mettre   lui-même    sur  les  rangs  pour  obtenir  ses   faveurs.  Aussitôt 

*  Journal  des  savants,  ann.  1888,  p.  783  (décembre). 


DE   PHILOLOGIE   ROMANE  181 

Maeuz  lui  donne  congé  et  né  veut  plus  le  voir.  Irrité,  Bertran  ne 
l'épargne  pas  dans  une  autre  chanson,  où  il  se  tourne  encore  vers 
l'astre  levant  de  la  nouvelle  enchanteresse.  Mais,  n'ayant  rien  obtenu 
de  celle-ci  ou  n'ayant  rien  voulu  obtenir,  il  cherche  par  quelques  chan- 
sons bien  flatteuses  et  ingénieuses  à  regagner  l'amour  perdu.  La  dame 
ne  veut  pas  lui  pardonner  ;  elle  fait  la  sourde  oreille.  Enfin,  il  va 
rendre  visite  à  une  dame  connue  dans  tout  le  pays  pour  sa  beauté, 
sa  courtoisie,  sa  prudence;  elle  s'appelait  Tiburge  de  Montausier. 
Après  s'être  plaint  devant  elle  de  la  conduite  de  Maeuz  deMontignac, 
il  la  prie  de  le  prendre  pour  serviteur  et  chevalier.  Tiburge  lui  répond 
qu'elle  est  bien  sensible  à  l'honneur  qu'il  lui  fait,  mais  que,  s'il  a  dit 
ou  fait  ce  que  lui  impute  Maeuz,  elle  ne  saurait  nullement  l'approu- 
ver :  ni  elle,  ni  aucune  autre  dame  ne  saurait  en  ce  cas  ni  le  recevoir 
chez  elle,  ni  accepter  ses  services;  cependant  elle  prendra  des  ren- 
seignements et,  au  cas  qu'il  n'ait  pas  commis  de  faute,  elle  lui  fera 
ravoir  la  faveur  de  sa  bien-aimée  ;  si  elle  ne  réussit  pas,  elle  promet 
de  le  prendre  pour  serviteur  et  chevalier,  et  lui,  de  son  côté,  jure  de 
n'en  jamais  aimer  aucune  autre.  Peu  après,  Maeuz  se  laisse  convain- 
cre, et  tout  rentre  dans  l'ordre.  Seulement,  elle  exige  que  Bertran  prenne 
congé  de  Tiburge  et  qu'ils  se  rendent  mutuellement  leurs  promesses. 
Le  biographe  n'a  pas  inventé  ce  récit  en  brodant  sur  les  vers  du  trou- 
badour. Certains  passages  appuient  ses  paroles;  mais  tous  les  détails, 
les  noms,  tout  ce  qu'on  apprend  sur  la  visite  de  Bertran  à  Tiburge,  ne 
s'y  trouvent  pas.  On  ne  saurait  donc  prétendre  que  ce  soit  un  conte 
postérieur  fait  d'après  les  vers. 

On  voit  que  les  dames  et  le  conteur  prennent  la  liaison  bien  au 
sérieux.  Personne  n'en  parle  comme  d'une  relation  illégitime,  et, 
quoique  les  trois  personnes  agissantes  soient  mariées,  aucune  allusion 
n'y  est  faite.  On  pourrait  supposer  que  Tiburge  se  réjouît  de  voir 
cesser  une  telle  liaison  ;  mais  non,  elle  prend  à  tâche  de  la  restituer, 
et  même,  si  elle  n'y  réussit  pas,  elle  a  bien  envie  de  s'engager  elle- 
même  dans  une  liaison  pareille.  11  faut  remarquer  aussi  la  menace 
d'expulser  Bertran  de  la  bonne  société,  et  avant  tout  l'intervention 
de  Tiburge  dans  la  querelle  et  le  désir  des  autres  de  se  conformer  à 
son  vouloir. 

Si  nous  n'avions  que  ce  fait  unique,  on  n'en  tiendrait  pas  compte  ; 
mais  le  biographe  de  Pons  de  Capdeuil  raconte  sur  celui-ci  une  his- 
toire tout  à  fait  analogue.  Lui  aussi,  ayant  excité  le  courroux  de  sa 
dame,  cherche  à  la  radoucir  par  des  chansons  pleines  d'humilité  et  de 
galanterie.  Désespérant  de  réussir,  il  s'adresse  à  trois  dames  de  la 
plus  haute  aristocratie,  pour  les  prier  de  lui  servir  d'intermédiaires, 
et  c'est  par  leur  secours  qu'il  obtient  à  la  fin  son  pardon.  Aussi  il 


w.  'li.ji--'-' 


182  CONGRES 

nomme  dans  une  chanson  deux  de  ces  dames,  bien  connues  dans  le 
monde  des  troubadours,  et  prie  le  Ciel  de  les  garder. 

Enfin,  nous  trouvons  dans  la  biographie  de  Guillaume  de  Balaun 
un  cas  pareil.  Seulement,  le  médiateur  est  cette  fois  un  homme,  en 
tous  points  considéré,  à  ce  qu'il  semble,  qui  s'offre  lui-même  pour 
rétablir  une  liaison  pas  tout  à  fait  innocente. 

On  pourrait  citer  d'autres  exemples  encore;  ceux-là  suffisent  pour 
montrer  qu'on  ne  refusait  pas  les  services  d'un  intermédiaire,  qu'on 
les  recherchait  même.  Et  c'est  ce  que  nous  voyons  confirmé  par  les 
vers  de  Jacques  de  Baisieu,  qui  dit  qu'un  amant,  s'il  se  sent  mal- 
mené, doit  s'adresser  à  d'autres  pour  obtenir  une  réconciliation  par 
leur  moyen,  qu'il  faut  porter  plainte  devant  ceux  qui  sont  les  fidèles 
de  l'amour.  11  faut  avouer,  ce  me  semble,  que  nous  avons  ici  affaire 
à  un  usage  du  xiie  siècle.  Et  si  cela  est,  quelle  différence  y  a-t-il 
en  réalité  entre  cet  usage  et  ce  que  raconte,  dans  sa  nouvelle, 
Raimon  Vidal,  des  deux  dames  qui  demandaient  à  Ugon  de  Mataplana 
de  décider  sur  leur  querelle?  Si  les  dames  de  Bertran  de  Bom,  de' 
Pons  de  Capdeuil,  de  Guillaume  de  Balaun,  et  celles  de  la  nouvelle 
de  Raimon  Vidal  ont  pu  se  laisser  fléchir  et  accorder  aux  amants  les 
faveurs  qu'elles  leur  avaient  refusées,  il  me  semble  qu'on  en  pourrait 
conclure  que  cela  n'était  pas  contraire  aux  lois  de  l'amour  galant  et 
qu'on  n'avait  pas  peur  de  s'adresser  à  de  grandes  dames  et  de  leur 
parler  sans  façon  d'une  liaison  de  cette  sorte,  ni  d'invoquer  leur 
secours  pour  la  rétablir. 

Dans  les  biographies  des  troubadours,  nous  voyons  donc  un  amant 
s'adresser  à  une  ou  à  plusieurs  dames,  les  priant  de  vouloir  bien 
intervenir  auprès  de  sa  bien-aimée  pour  lui  faire  entendre  raison. 
Dans  la  nouvelle  de  Raimon  Vidal,  deux  dames,  sous  le  sceau  du 
secret,  font  demander  à  un  homme  expert  en  matière  d'amour  de 
juger  entre  elles;  de  même,  dans  la  lettre  de  Guillaume  de  Bergue- 
dan  ;  Jacques  de  Baisieu  recommande  aux  amants  maltraités  de 
s'adresser  aux  fidèles  de  l'amour  pour  qu'ils  ramènent  la  bonne  intel- 
ligence entre  les  amants  ;  il  n'exige  pas  expressément  le  secret,  seu- 
lement, les  paroles  doivent  être  couvertes,  de  sorte  qu'elles  soient 
inintelligibles  à  tous  ceux  qui  n'y  sont  pas  intéressés.  Il  me  paraît 
très  vraisemblable  que  nous  avons  dans  tout  cela  les  traces  d'un  usage 
qui  aura  existé  sous  des  formes  quelque  peu  différentes,  au  fond 
pourtant  analogues. 

Dans  tout  ce  qui  précède,  je  n'ai  pas  nommé  André  le  Chapelain. 
C'est  que  cet  auteur  n'offre  peut-être  pas  de  base  solide.  Cependant, 
en  comparant  avec  les  exemples  cités  les  règles  qu'il  donne,  s'il  faut, 
comme  il  dit,  s'adresser  aux  dames,  il  me  semble  encore  y  trouver 
une  confirmation  de  ce   que  je  viens  de  dire.  On  sait  que  lui  aussi 


DE    PHILOLOGIE   ROMANE  183 

recommande  aux  amants  de  faire  vider  leurs  querelles  par  d'autres, 
qui  seront  d'après  lui  des  dames,  et  qu'il  exige  le  secret  quant  aux 
noms  des  personnes  en  litige,  lesquelles  devront  se  faire  représenter 
par  des  confidents.  S'il  fallait  voir,  dans  les  lois  de  l'amour  courtois, 
un  obstacle  à  l'usage  de  provoquer  un  jugement  entre  les  amants, 
comment  André,  ce  maître  expert,  peut-il  donner  ces  jugements 
en  exemples  à  son  disciple  ?  Si  l'idée  d'un  jugement  était  contraire 
à  l'amour  courtois,  dont  il  ne  cesse  de  prêcher  les  règles,  il  n'au- 
rait que  faire  de  ces  jugements.  On  a  dit  que  les  cas  de  controverse 
qui  s'y  trouvent  ne  sont  pas  d'autre  nature  que  les  tensons.  Je  le 
veux  bien,  les  Judicia  amoris  d'André  n'ont  d'autre  contenu  que 
des  tensons,  et  comment  l'auraient-ils  ?  Mais  ce  qui  est  d'antre 
nature,  ce  sont  les  règles  qu'il  donne  pour  ces  controverses,  les 
mêmes  règles  qui  semblent  suivies  dans  les  autres  exemples  que 
j'ai  cités.  Je  ne  connais  pas  de  tenson  ni  de  jeu  d'esprit  où  il  soit 
dit  qu'il  faille  garder  le  secret  quant  aux  noms  des  personnes,  ni 
qu'il  faille  envoyer  des  confidents  pour  traiter  l'affaire.  Les  person- 
nes étant  sans  réalité,  on  n'a  que  faire  de  garder  le  secret.  Le 
jugement  du  roi  de  Bohême  et  les  jeux  dans  le  Filocolo  me  sem- 
blent appartenir  à  la  même  catégorie  que  les  tensons.  Ce  sont  des 
cas  fictifs  et  personne  ne  songe  à  donner  des  règles  pour  la  conduite 
de  ceux  qui  y  prennent  part  et  qui  ne  sont  pas  même  des  amants. 

J'ai  cité  dans  mon  livre  *  Pépisode  du  jugement  d'amour  dans 
Méraugis  de  Portlesguez.  Comme  on  se  le  figure  bien,  je  l'ai  fait, 
parce  qu'il  me  semble  y  voir  une  certaine  ressemblance  avec  une 
telle -assemblée  de  dames  voulant  juger  une  querelle  d'amants;  d'ail- 
leurs, certaines  paroles,  comme  celles  de  la  reine,  qui  dit  que  les 
jugements  d'amour  lui  appartiennent,  m'ont  semblé  mériter  quel- 
que attention  ;  enfin,  cette  affaire  est  représentée  par  le  poète  comme 
quelque  chose  de  sérieux  et  non  pas  comme  un  amusement  des  dames. 
II  y  a  d'autres  vers  du  moyen  âge  où  sont  racontés  des  jeux  et  des 
amusements  ;  on  en  conclut  que  ces  jeux  et  ces  amusements  ont  été 
d'usage  en  ces  temps-là,  même  si  aucun  chroniqueur  n'en  parle  ;  si 
nous  trouvons  des  vers  où  sont  représentés  des  usages  pris  au  sérieux, 
ne  serait-il  pas  permis  d'en  conclure  que  de  tels  usages  aient  pu 
exister,  quand  même  les  chroniqueurs  ne  nous  en  apprendraient  rien? 
(Applaudissements.) 

M.  Chabaneau  félicite  M.  Trojel  de  sa  communication  et 
lui  offre  de  publier,  sous  les  auspices  de  la  Société  des  langues 

^  Middelalderens  Elskovskoffer,  Copenhague,  188.S,  in-S»,  p.  173. 


I  •:•  ^' . 


1 8 l  CONGRÈS 

romanes,   une  traduction  française  de  son  ouvrage  sur  les 
Cours  d^amour. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  question  de  Tépopée  provençale. 

M.  CoNSTANS  s'excuse  que  ses  occupations  Talent  empêché 
de  préparer  aucune  communication  sur  ce  sujet. 

M.  Tabbé  Devaux  fait  une  communication  sur  l'origine 
du  Fragment  (T Alexandre,  dit  de  Besançon  ou  de  Briançon. 
M.Ascoli  Ta  rattaché  au  franco-provençal,  M.  l'abbé  Devaux 
croit  pouvoir  le  considérer  comme  appartenant  aux  dialectes 
provençaux,  parlés  au  sud  de  la  ligne  séparative  du  provençal 
et  du  franco-provençal  (Drôme  ou  Hautes-Alpes). 

M.  A.  Thomas  fait  une  communication  sur  la  légende  de 
Saint- Vidian,  honoré  à  Martres-Tolosanes  (Haute-Garonne). 
Il  montre  que  cette  légende  reproduit  les  traits  essentiels  de 
deux  chansons  de  geste  françaises,  les  Enfances  Vivien  et  Alis- 
cans. 

Cette  communication  donne  lieu  à  quelques  observations  de 
MM.  RÉviLLOUT  et  Constans  sur  l'étymologie  du  nom  de 
Martres, 

M.  BRÉALfait  une  communication  surl'étymologie  du  verbe 
toucher.  Il  compare  ce  mot,  dont  Tétjmologie  est  inconnue, 
au  verbe  grec  zvyyxvoi,  qui  signifie  arriver,  mais  qui  a  pour 
sens  primitif  toucher  :  un  guerrier  d'Homère,  lorsqu'il  est 
manqué  par  le  dard  que  lui  lance  son  adversaire,  lui  crie  : 
ouy.  eru^sî,  tu  ne  m'as  pas  touché.  L'idée  de  toucher  a  donné 
naissance  à  celle  d'arriver  au  but  par  fortune,  de  réussir  : 
Tvxn  est  en  grec  le  nom  de  la  Fortune.  Il  est  possible  que  tou- 
cher, tocar,  toquer,  soit  le  frère  jumeau  de  TV7;^av&). 

M.  RÉVILLOUT  fait  une  communication  sur  les  moyens  pra- 
tiques à  employer  pour  Tétude  des  patois  et  appelle  l'atten- 
tion sur  les  secours  que  peuvent  donner  pour  cette  étude  tous 
les  fonctionnaires  que  leurs  occupations  retiennent  dans  les 
campagnes. 

M.  Chabaneau  parle  de  l'expérience  qu'il  a  acquise,  en  ce 
genre,  dans  l'administration  des  postes,  du  parti  qu'il  tirait  des 
facteurs  ruraux,  et  cite  quelques  exemples  d'étjmologie  popu- 
laire. 

M.  le  docteur  Espagne  fait  part  au  Congrès  de  la  mort  de 


DE  PHILOLOGIE   ROMANE  185 

M.  le  docteur  Noulet,  de  Toulouse,  dont  il  vient  d'apprendre 
là  nouvelle. 

M.  Chabaneau  fait  Téloge  de  M.  le  docteur  Noulet  et  rap- 
pelle ses  études  sur  la  littérature  provençale  et  sa  connais- 
sance des  dialectes  modernes. 

M.  Chabaneau  proclame  les  lauréats  du  prix  Boucherie, 
dont  le  sujet  était  un  travail  philologique  sur  un  texte  pro- 
vençal ancien,  imprimé  ou  inédit*.  Ce  prix  a  été  partagé  entre 
MM.  Charles  Barbier  et  Georges  Reynaud,  boursiers  d*agré- 
gation  près  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier. 

M.  Bréal  prononce  une  allocution  sur  le  rôle,  de  TUniver- 
sité  de  Montpellier,  sur  l'importance  et  l'activité  ininterrom- 
pue de  ses  Sociétés  savantes  et  sur  la  création  de  chaires  spé- 
ciales pour  renseignement  du  provençal.  (Applaudissements,) 

M.  Chabaneau  distribue  aux  membres  du  Congrès  un  cer- 
tain nombre  d'exemplaires  d'une  publication  offerte  par 
M.  Stengel,  de  Marbourg,  qui  n'a  pu  se  rendre  au  Congrès 
(Kleinere  Schriften  von  Ferdinnnfl  Wolf...  zusammengestellt 
von  Edmund  Stengel...,  Marbourg,  Klwert,  1890,  in  S'',  16  pp.). 

La  séance  est  levée  à  onze  heures  et  demie  du  matin. 

Une  dernière  réunion  a  eu  lieu  le  même  jour,  sous  forme 
d'un  banquet,  auquel  assistaient  21  membres  du  Congrès  et 
qui  s'est  terminé  par  un  certain  nombre  d'allocutions. 

E. -Daniel  Grand. 

*  Voy.  le  programme  du  concours  dans  la  Revue  des  Langues  romanes^ 
T.  XXXIII,  d889,  p.  468. 


c-_      .r^       ."I 


PÉRIODIQUES 


Zeitschrift  fttr  romanische  Philologie,  XIII,  1-2  —  P.  1. 
H.  Werth.  Traités  sur  la  chasse  en  ancien  français  et  la  bibliogra- 
phie générale  des  manuscrits  de  la  littérature  cynégétique  en  Occi- 
dent (suite  et  fin).  —  P.  35.  E.  Bechmann.  Trois  Dits  de  Tâme,  tirés 
du  manuscrit  Ms,  GalL  Oct.  28  de  la  bibliothèque  royale  de  Berlin. 
Ces  trois  dits  n'ont  pas  encore  été  signalés  ailleurs,  à  l'exception  de 
quelques  couplets  du  troisième,  qu'on  retrouve  dans  un  ms.  de  Bru- 
xelles. Le  ms.  de  Berlin,  nouvellement  acquis,  contient  un  assez 
grand  nomb^'e  d'opuscules  pieux  dont  M.  B.  nous  donne  les  rubriques, 
mais  non,  sauf  pour  le  traité  do  la  Messe,  les  premiers  mots  du  texte. 
Pour  les  mss.  de  ce  dernier  ouvrage,  voy.  Rom,  VI,  10  et  Bulletin 
de  la  Soc,  des  anc.  textes,  1885,  p.  50.—  P.  85.  H.  Andresen.  Fragment 
durom^n  en  ancfr.  rf'Amadas  et  Ydoine.  Il  s'agit  de  deux  feuillets  de 
parchemin  tirés  d'une  vieille  reliure  et  qui  renferment  le  premier  140, 
le  second  14G  vers  appartenant  à  deux  passages  distincts.  —  P.  98. 
R.  Otto.  Ordonnance  sur  le  duel  judiciaire  à  Barcelone,  Elle  est  tirée 
du  ms.  du  Vatican.  Ott.  3058,  dont  deux  extraits  ont  été  récemment 
publiés  par  M.  0.  dans  les  Modem  Language  Notes  (Voy.  Rom.  XVIII, 
187).  —  P.  115.  A.  Feist  (récemment  décédé).  Extraits  de  vieux 
recueils  de  poésies  religieuses  en  italien.  L'auteur  a  dressé  une  table 
alphabétique  du  ou  des  premiers  vers  de  1,381  pièces  empruntées  à 
onze  recueils  imprimés  et  à  trente-huit  manusciits.  —  P.  186. 
A.  Tobler.  Mélanges  de  grammaire  française  (nouvelle  série).  10. 
Nouvelles  observations  sur  ce  fait  depuis  longtemps  signalé  par  l'au- 
teur (Gottinger  Gelehrten  Anzeigen,  1875,  p.  1065  sqq.),  que  Tancien 
français  n'emploie  la  forme  atone  des  pronoms  personnels  ni  devant  un 
infinitif,  ni  devant  un  gérondif,  ni  devant  un  participe  passé.  Les 
exemples  anciens  que  l'on  allègue  de  l'usage  moderne  s'expliquent 
par  l'enclise  du  pronom  sur  le  verbe  qui  régit  l'infinitif  (etc.),  et  non 
par  la  proclise  du  même  pronom  sur  l'infinitif.  —  11.  Explications 
de  phrases  conditionnelles  comme  celle-ci  :  S'il  t  eiissent  tous 
jours  mis  leur  aviSt  s'est  (=  si  est)  l'uns  de  l'autre  noblernent  envaïs, 
où  la  proposition  principale  est  introduite  par  si  =  sic.  —  12.  Sup- 


PERIODIQUES  187 

pression  de  Tarticle  devant  certaines  catégories  de  noms,  principale- 
ment dans  l'ancienne  langue.  —  13.  Emploi  de  que  dans  les  propo- 
sitions de  sens  temporel  concessif,  etc.  :  on  essayait  encore  de  le  retenir 
qu'il  était  déjà  dans  l'antichambre  ;  je  ne  l'écoute  jamais  qu'il  ne  me 
fasse  peur  ;  nous  nous  égarerions  que  nous  finirions  bien  par  arriver 
ailleurs,  etc.  —  P.  213.  H.  R.  Lang.  Notes  de  philologie  portugaise. 

—  P.  217.  H.  R.  Lang.  Traditions  populaires  des  Açares,  —  P.  225. 
C.  Appel.  Le  Lucidarius  provençal  (Voy.  Rom.  XIX,  628).  —  P.  253. 
F.  Schulze.  Ritomelli  romains.  Ils  sont  au  nombre  de  410  et  se  rappor- 
tent principalement  à  l'amour  ou  aux  femmes. 

MÉLANGES.  I.  Histoire  littéraire.  —  1.  P.  291.  A.  Feist.  Sur 
\q  Poème  inédit  de  Martin  Le  Franc  de  Gaston  Paris  (Voy.  Rom.  XIX, 
628).  —  2.  P.  294.  R.  Zenker.  Sur  Guilhem  Ademar,  Ehle  d'Uisel  et 
Cncahnon.  —  II.  Textes.  P.  300.  F.  Lauchert.  Fragment  d'un  rema- 
niement du  Trésor  de  Brunetto  Latini  (trouvé  à  Strasbourg  dans  une 
reliure).  Au  f*  2*,  1.  4,  En^i  est  li  dechiaus,  où  l'éditeur  corrige  est 
en  sont,  il  faut  lire  :  Fnsi  est  il  de  chiaus.  —  111.  Exégèse.  1.  P.  307. 
A.  Gaspary.  P/oier  lecorjon.  Essai  d'explication  de  cette  locution,  qui 
se  trouve  dans  Ivain,  v.  5916  et  qui  a  des  analogues  en  provençal  et 
en  italien.  —  2.  P.  309.  H.  R.  Lang.  San  Secreto.  Explication  de 
cette  expression  plaisante,  que  l'on  trouve  dans  Calderon  {La  vida 
es sueno,  III,  I)  et  ailleurs.  —  3.  P.  310.  E.  Levy.  Sur  la  nouvelle 
de  Raim,on  Vidal  :  Ahr'ûs  issi'e  mays  intrava  (jBaî'fscA,  Denkmaeler, 
p.  144-192).  Corrections  au  texte.  —  IV.  Grammaire.  1.  P.  317. 
H.  Schuchardt.  Hiatustilgung .  Explication  de  ce  terme  (Cf.  Zeits- 
chrift,  XII,  442  sqq.).  —  2.  P.  319.  W.  Sander.  Passage  du  j  espagnol 
du  son  sifflant  au  son  râpant  (son  spécial  difficile  à  émettre  pour  les 
étrangers).  —  3.  P.  322.  D.  Behrens.  Normand  non,  nou,  no  =  n'on. 
Ces  formes  viendraient  de  un  hon,  (u)n'on,  ce  qui  semble  difficile,  à 
cause  de  leur  ancienneté.  —  V.  Ktymologie.  1.  P.  323.  A.  Horning. 
Etymologies  françaises  :  suie  =  *sûd\ca  pour  sûcida;  courtier,  rattaché 
à  currere.  —  2.  P.  325.  A.  Gaspary.  Ancien  fr.  pec,  «  pitié  ».  Ce 
serait  le  nom  verbal  de  pechier ;  on  sait  que  «  péché  »  et  «  malheur» 
sont  synonymes  dans  l'ancienne  langue  (cf.  encore  aujourd'hui  pecaire 
=  peccator,  dans  les  patois  du  Midi).  L'idée  de  «  pitié  »  semble  bien, 
en  effet,  se  rencontrer  déjà  très  anciennement,  du  moins  pour  l'ad- 
jectif. Cf.  Alexis,  79  d  :  ^  las!  pechable  .  La  forme  seule  pourrait 
faire  difficulté,  à  cause  de  Ve  bref. 

Comptes  rendus.  —  P.  327.  Ed.  Montet,  La  noble  leçon{E.  Levy). 

—  P.  338.  Romania,  n°«  68  et  69  (W.  Mejer,  A.  Tobler).  —  P.  331. 
Revue  des  langues  romanes,  t.  XXXI,  juillet -décembre  1887, 
t.  XXXII,  janvier-septembre    1888  (E.   Levy).  —P.  340.  Giomale 


■  ê 


188  PERIODIQUES 

storico délia  Letteratura  italiana,  anno  VI,  vol.  xii,  fasc.  3  (A.  Gaspary)- 
—  P.  343.  Livres  nouveaux  annoncés  sommairement  par  M .  Grober. 
3-4.  —  P.  353.  B.  Eggert.  Développement  du  dialecte  normand  dans 
le  département  de  la  Manche  et  dans  les  îles  de  Guernesey  et  Jersey. 
Etude  méthodique  basée  sur  de  nombreux  documents  (textes  littérai- 
res et  chartes)  et  qui  semble  bien  conduite.  —  P.  404.  D.  Behrens. 
Etymologie:  1.  patois  de  l'Est  zwayi  (audirej  (le  z  provient  des  pro- 
noms noz,  voz,ez)  ;  2.  pat.  de  l'Est  zway'  (auca)  etc.,  (le  z  provient 
de  l'article  pluriel);  3.  fr.  sépoule;A.  fr.  étnette  (le  même  que  tenettes  ; 
revient  de  l'article  pi.)  >  5.  fr.  om«,  08  pour  vow*/ 6.  pat.  de  l'Est 
deto  d'  (  =  d'atout  de,  atout  de)  ;  7.  fr.  itou  (  =  ancien  atout,  a  tout, 
«  avec  »}  ;  8.  dauphinois  councou  pour  ouncou,  ouncle  (Cf.  tante  =  fante); 
9.  anc.  pr.  avaissa,  avais  (l'a  provient  de  l'article  la)\  10.  fr.  coche, 
«  truie  »  ;  11.  morvan  aum,  «  graisse  de  porc  »  ;  12.  fr.  annille  (  = 
anaticula);  13.  fr.  hallope;  14.  anc.  fr.  bracon;  15.  ital.  guanto ; 
16.  ital.  bricco;  17.  prov.  brac. —  P.  416.  H.  R.  Lang.  Traditions 
populaires  des  Açores  (suite).  —  P.  431.  Ch.  Bonnier.  Étude  critique 
des  chartes  de  Douai  de  1203  à  1275.  l*"®  partie  :  Recherches  sur  l'an- 
tagonisme des  chartes  et  du  langage  vulgaire.  Cette  étude  est  précédée 
d'une  discussion  où  l'auteur,  combattant  les  idées  généralement  reçues, 
cherche  à  démontrer  qu'il  n'y  a  presque  rien  à  tirer  des  chartes  pour 
l'étude  des  dialectes,  et  qu'il  faut  partir  des  patois  modernes  :  c'est 
ce  que  fait  l'auteur.  Nous  croyons,  pour  notre  part,  qu'il  y  a  lieu  de 
tenir  grand  compte  de  l'état  actuel  des  patois,  mais  qu'on  ne  saurait 
se  passer  des  chartes,  qui  peuvent  être  d'un  utile  secours,  dans  les 
parties  qui  ne  constituent  pas  des  formules  savantes.  —  P.  463.  H. 
Schuchardt   Contribution  à  l'étude  du  créole  roman. 

MÉLANGES.  I.  Er-ihiOLOGiE. y  H.  Schuch3iTdt.Ety mologies  romaTies: 
1.  port,  eirôj  eiroz;  esp.  chorizo,  port.  chouriço,~a;  2.  esp.  port. /o/"©  / 
3.  fr.  aller  ;  esp.  lerdo,  etc.  ;  port  ardégo;  esp.  port,  lôbrego  ; 
port,  manteiga,  esp.  manteca;  port,  vadio  ;  4.  Aliboron  (  ^  lat. 
elleborum)  ;  5.  ital.  disio;  fr.  reproche  (ne  doit  pas  être  séparé  de 
l'ital.  rimprôvero  et  de  ohbrobrio) . —  ii.Gra.mm aire.  P.533,  W.  Fœrs- 
ter.  1.  Volsintiers  et  volontiers;  2.  lieu  de  locum  (Vi  développé 
d'abord  dans  gieu  par  la  palatale,  s'est  étendue  ensuite  par  analogie 
à  lùu,  leu,  etc.  ;  feu  est  resté  tel,  sans  doute  pour  éviter  la  confusion 
&YecJieu,  «  fief»);  3.  fr. /issu  de  -d-.  — III.  Lexicologie.  P. 
546.  A.  Tobler.  prov.  cortves  (=  cuir  de  Cordoue),  meliana(s=  anc 
fr.  meruenne,  «  milieu  du  jour  »). 

Comptes  rendus.  —  P.  548.  Giovanni  Sercambi,  Novelle  inédite.,, 
per  curadi  R.  Renier  (A.  Gaspary).  —  P.  556.  A.  Stimming,  Ueber 
den provenzalischen  Girart  von  Rossillon  (A.  Pakscher).  —  P.  567. 
A.  Malmignati,  Il  Tassoa  Padova,  suo primo  amore  e poésie  giovanili. 


CHRONIQUE  189 

etc  (V.  Crescini).  —  P.  571.  A.  Ebert,  Allgemeine  Geschichte  der 
Literatur  des  MittelaUeni  im  Abendlande  bis  zum  Beginne  des  XI 
lahrhunderts,  l,  2«  édition  (G.  Grœber).  Rappelons  que  cet  excel- 
lent ouvrage,  arrivé  à  son  troisième  volume,  est  traduit  au  fur  et  à 
mesure  en  français  par  MM.  Aymeric  et  Condamin  et  paraît  à  Paris, 
à  la  librairie  E.  Leroux.  — 572.  // Projptt^rwa tore,  nouvelle  série,  I, 
2-6  (A.  Gaspary).  —  P.  580.  Archiv  fur  das  Studium  derneueren 
Sjrrachen,  LXXVII-IX  (E.  Schwan).  —  P.  587.  Giornale  storico 
délia Letteratura  italiana,  XIII,  1  (A.  Gaspary).  —  P.  596.  Romania 
(n°»  70  et  71  W.  Meyer-Lùbke,  A.  Tobler).  —  P.  600.  Additions 
à  Zeitschrift,  XIII,  213  et  330.  —  P.  601 .  Livres  annoncés  sommai- 
rement par  M.  G.  Grœber. 

L.    CONSTANS. 


CHRONIQUE 


Congrès  d'études  languedociennes.  —  Le  Congrès  d'études 
languedociennes  organisé  par  le  Comité  félibréen  (sous-section  de  la 
Maintenance  de  Languedoc  du  Félibrige),  sous  la  direction  de  MM. 
Roque-Ferrier  et  De  Lapouge,  a  eu  lieu  à  Montpellier,  du  28  mai 
au  2  juin  1890.  Parmi  les  communications  qui  ont  été  faites  à  ce  Con- 
grès, un  certain  nombre  ont  porté  sur  des  sujets  philologiques. 

M.  Roque-Ferrier  a  traité  la  question  des  rapports  des  limites 
des  dialectes  avec  les  limites  des  anciens  diocèses  de  la  France 
méridionale  et  il  a  constaté  une  corrélation  étroite  entre  ces  diverses 
limites,  sur  une  foule  de  points. 

Le  même  a  étudié  quelques  mots  gaulois  conservés  dans  la  langue 
d'oc,  ainsi  que  les  diminutifs  et  les  augmentatifs  pendant  l'époque 
gallo-romaine.  Il  a  examiné  en  particulier  les  noms  topographiques 
Alzoun,  Auzoun,  Ausonnet,  appliqués  à  divers  cours  d'eau  et  qui 
signifient  rivière.  II  l'a  cité  les  équivalents  provençaux  de  Mosa  et 
Mosella. 

M.  E.-D.  Grand  a  expliqué  et  commenté  une  proclamation  d'un 
héraut  du  roi  de  Majorque,  en  dialecte  montpelliérain,  faite  à  l'occa- 
sion de  la  publication  de  lettres  de  sauvegarde  accordées  par  le  roi  de 
France  à  l'Ecole  de  Droit.  Ce  document  est  inséré  dans  un  acte  notarié 
du  8  février  1336,  publié  dans  le  Cartulaire  de  V Université  de 
Montpellier  (t.  I,  p.  709). 

M.  Savinibn,  des  Écoles  Chrétiennes  d'Arles,  majorai  du  Féli- 
brige, a   fait    une   communication  sur  l'enseignement  du   français 

13 


190  CHRONIQUE 

par  le  provençal,  sur  les  facilités  que  la  connaissance  des  patois  donne 
au  maître  d'école  pour  l'enseignement  et  sur  Fusage  des  versions  en 
provençal,  dont  il  a  publié  un  recueil  qui  lui  sert  pour  ses  élèves.  A  la 
suite  de  cette  communication,  un  voeu  a  été  émis  en  faveur  de  l'ensei- 
gnement du  français  par  la  langue  d'oc  dans  les  écoles  primaires . 

M.  le  D"^  Espagne  a  proposé  une  interprétation  du  mot  rouergat 
joura,  signifiant  dormir  et,  en  particulier,  faire  la  méridienne  ou  la 
sieste,  dans  l'expression  Moussu  Antoni  jour  a.  Il  l'a  rapproché 
de  la  3«  p.  pi.  pf.  jurent,  en  citant  un  exemple  emprunté  à  la  chanson 
de  Roland. 

M.  Roque-Fbrkier  a  lu  diverses  communications  de  M.  Lapont  de 
Sentenac,  sur  le  poisson  d'avril,  rapproché  de  l'tx^uc  des  chrétiens 
des  Catacombes,  et  de  M.  Elzéar  Jouveau,  sur  le  conte  provençal  de 
Cendroulet,  où  Cendrillon  se  transforme  en  jeune  gascon,  qui  épouse 
la  fille  du  roi. 

M.  J.  Laurès  a  exposé  la  biographie  des  deux  poètes  montpellié- 
rains  Cyrille  et  Auguste  Rigaud. 

M.  le  D^  Marignan,  de  Marsillargues,  a  fait  une  communication 
sur  les  sirènes  gravées  sur  des  cornes  de  taureaux  de  la  Camargue 
(ourguenas,  serenas,  serenelas). 

M.  C.  Brun  a  fait  une  communication  sur  les  troubadours  à  la  cour 
des  Guilhems,  seigneurs  de  Montpellier  (Guilhem  de  Balaun,  Folquet 
de  Lunel,  Arnaut  Peire  de  Ganges,  Gormonda,  Peire  Raimon  de 
Toulouse,  Gui  Guerrejat,  Folquet  de  Marseille,  Arnaut  de  Ma- 
reuil,  etc.). 

M.  Roque-Ferrier  a  expliqué  l'origine  de  la  légende  biterroise  de 
Pépézuc,  qui  est  un  nom  donné  à  une  statue  de  Béziers.  Le  nom  du 
capitaine  Montpezuc,  qui  défendit  Béziers  contre  les  Anglais  en  1355, 
a  été  tranformé  en  Pechpezuc,  comme  dans  le  nom  de  lieu  Montau- 
beroUf  quelquefois  appelé  Pechauberou  (pech  =  mont). 

M.  Varlet  a  communiqué  quatre  romances  montpelliéraines,  dont 
deux  des  frères  Rigaud  et  une  de  Benoît  Gaussinel,  en  les  faisant 
accompagner  d'une  exécution  instrumentale. 

M.  Roque-Ferrier  a  étudié  les  comparaisons,  les  métaphores,  les 
énigmes,  les  proverbes,  les  dits  et  les  ternaires  du  languedocien,  en 
les  comparant  à  leurs  analogues  en  Bretagne,  Sicile,  Chypre,  Grèce 
et  Italie. 

M.  FoNTENAY  a  signalé  des  proverbes  biterrois. 

M.  C.  Brun  a  communiqué  deux  fragments  de  comptes  des  consuls 
de  mer  de  1372,  en  langue  d'oc,  de  Montpellier,  appartenant  à  une 
collection  particulière. 

M.  Roque-Ferrier  a  fait  l'histoire  de  la  substitution,  qui  a  eu  lieu 
à  Nimes,  des  articles  provençaux  lei  et  li  aux  articles  lous  et  las. 


CHRONIQUE  191 

Cette  substitution  est  déjà  achevée,  au  xvii®  siècle,  dans  VEmbarras 
de  la  fieiro  de  Beucaire  de  Michel  de  Nîmes,  qui  n'emploie  plus 
lous  et  las,  et  apparaît  déjà,  par  intervalles,  dans  les  Actes  du 
synode  de  la  sainte  Reformations  de  Guillaume  do  Reboul  (1599). 

M.  J.  Laurès  a  donné  la  bibliographie  des  poésies  languedociennes 
de  Peyrottes,  de  Clermont-rHérault,  publiées  dans  des  journaux  vers 
1850. 

M.  Lafont  de  Sentbnac  a  envoyé  un  recueil  de  noëls  de  l'Ariège . 

M.  DoUMSRGUff,  instituteur,  adonné  une  traduction  languedocienne 
d'un  acte  latin  de  1535,  dans  une  monographie  de  l'église  de  Saint- 
Martinde-Londres . 

M.  l'abbé  Doumenjou,  curé  de  Saurat  (Ariège),  a  envoyé  une  série 
de  documents  sur  le  père  Amilia,  poète  de  Pamiers  au  xviie  siècle. 

M.  Roquk-Fkrrikr  a  étudié  les  poésies  montpelliéraines  de  Tou- 
chy,  qui  vivait  au  commencement  du  xix®  siècle  et  dont  les  manu- 
scrits se  trouvent  à  la  bibliothèque  de  la  ville  de  Montpellier. 

Le  même  a  communiqué  une  fable  en  vers,  le  Sonneur  et  VArai- 
gnée,  attribuée  à  La  Fontaine,  dans  le  recueil  des  Mémoires  de 
l'Académie  des  sciences  et  belles-lettres  de  Béziers  (1736). 

Le  même  a  signalé  des  variantes  inédites  des  Méditations  de 
Lamartine,  qui  se  trouvent  à  la  bibliothèque  de  la  ville  de  Montpellier. 

Le  même  a  fait  connaître  quatre  sonnets  français  et  un  sonnet 
toulousain  sur  la  pose  de  la  première  pierre  du  canal  des  Deux-Mers, 
contenus  dans  un  Mémoire  imprimé  du  xvii®  siècle,  adressé  aux 
capitouls  de  Toulouse  par  Arquier. 

Le  même  a  traité  la  question  des  légendes  dracontiaques  de  la 
Provence  (la  Tarasque  de  Tarascon;  légendes  de  Draguignan,  Mé- 
thamis,  Vaucluse,  Montdragon,  Rochemaure),  qu'il  a  rattachées  à 
une  origine  gauloise. 

M.  le  D'  Vincent,  de  Guéret,  a  envoyé  les  conclusions  d'un  travail 
relatif  à  la  géographie  dialectale  de  la  Creuse,  comparée  à  celle  des 
anciens  diocèses  de  la  Marche  et  des  pays  circonvoisins. 

M.  Roque-Ferrier  a  lu  une  étude  sur  la  Roumanie  dans  la  litté- 
rature du  midi  de  la  -France  et  le  Languedoc  dans  celle  de  la  Rou- 
manie. 11  a,  en  particulier,  analysé  la  tragédie  La  Fontaine  de  Blan- 
dusie,  d'Alecsandri. 

Le  même  a  fait  connaître  deux  poésies  avignonnaises  de  Royer  et 
deux  versions  languedociennes  du  conte  de  Mitât  de  Gai. 

Parmi  les  seize  vœux  spéciaux  émis  par  le  Congrès  d'études  lan- 
guedociennes, plusieurs  ont  un  objet  philologique  :  introduction  des 
versions  languedociennes-françaises  dans  l'enseignement  primaire, 
de  la  langue  d'oc  parmi  les  matières  des  examens  des  instituteurs  et 
d'un  thènae  ou  d'une  version  en  langue  d'oc,  roussillonnais,  basque 


:  .zut      nin*    :  .noue    jl'î  ~.: 

ZIESSSCS:      -r        "rr.T.n     -^ 


"ICZLIZIZIIS.     -:      "^ !-T— !-.7T.g      ._  ■  '  TTt'^SiTIL.      ttS-     .JUDS     .lè    .ItriZ 

"1.*     ..-dt  ^  -■"?!■ -iiu     -r-  iti^w    lii     Tninnrri'rf   ~M*rnniT    id    i  tttî- 


■__ZEÎQS. 


X13iii£C3ZiimUZE5:   n?   .1    . 


rOUlii^Tm  — t^rr*  .  .         yjZL  -r     anB-    .e   ."±1 


rasa  ^a:  "^Ar^S-rTT-.-X.^  rSiEza  :s.  '.H'Vr^^srrFTR 

i  La  Tiiir  î«*  ?^n3  *îtt  in  -atiftat  iaïasor  «a  urne  in  ei»  «  .in  ht*  siècles 
et  coatenaat  «i  Ari^m^es  snmcoaies  ie  Mamçâlier. 


CHRONIQUE  193 

L'inaugaration  avait  été  précédée  de  la  cérémonie  de  la  bénédic- 
tioa  du  marbre  de  Jacme  dans  la  cathédrale  par  Monseigneur  TEvê- 
que  de  Montpellier,  le  22  mai*.  Une  allocution  sur  Jacme-le- Conqué- 
rant fut  prononcée  à  la  cathédrale  par  Monseigneur  TEvéque,  le 
dimanche  25  mai*. 

Les  invités,  qui  étaient  très  nombreux,  avaient  reçu  la  lettre  sui- 
vante : 

«   COMITfiE   PBLIBRIN    DB   MONTPELLIER 

»  17  mai  1890. 
»  Monsieur, 

»  La  ville  de  Montpellier  fêtera,  le  22  mai  et  les  jours  suivants,  le 
sixième  centenaire  de  la  fondation  de  son  Université  et  la  naissance 
de  Jacme-le-Conquérant. 

»  M.  le  Président  de  la  République  et  plusieurs  de  ses  ministres, 
MM.  Mistral,  Roumanille,  Henri  de  Bornier  et  les  félibres  provençaux  ; 
les  délégués  et  les  Etudiants  des  principales  Universités  de  l'Europe 
et  du  Nouveau  Monde  honoreront  de  leur  présence  la  commémoration 
de  ces  dates  capitales  de  Thistoire  languedocienne,  méridionale  et 
latine. 

»  Le  Comité  félibrin  de  Montpellier  vient,  Monsieur,  vous  prier  de 
vouloir  bien  assister  à  l'allocution  que  Sa  Grandeur  Monseigneur 
l'Evêquede  Montpellier  prononcera  sur  Jacme-le-Conquérant  le  diman- 
che delà  Pentecôte,  dans  la  cathédrale  de  Saint-Pierre, 

»  Il  vous  convie  également  à  l'inauguration  solennelle  du  marbre 
sur  les  vieilles  murailles  de  la  Tour  des  Pins  (26  mai)  et  aux  Jeux 
Floraux  latins  de  Jacme-le-Conquérant  et  du  Félibrige  montpellié- 
rain. 

»  Le  Languedoc  et  la  Couronne  d'Aragon  ont  été  longtemps  deux 
mains  jointes  ensemble.  Les  souvenirs  de  cette  vieille  union,  la  fra- 
ternité d'aspirations,  de  gloires  et  de  périls  communs  qu'elle  rappelle 
ne  s'effaceront  point  de  la  mémoire  des  Catalans,  des  Montpellié- 
rains  et  des  Languedociens.  Vous  fortifierez,  Monsieur,  la  persistance 
de  ces  grands  souvenirs  en  acceptant  notre  invitation  et  en  ajoutant 
ainsi  une  page  nouvelle  et  pacifique  à  l'histoire  que  les  Languedo- 
ciens, les  Catalans  et  les  Provençaux  écrivirent  sur  les  champs  de 
bataille  où  les  conduisait  le  fils  à  jamais  glorieux  de  Pien*e  II  et  de 
Marie  de  Montpellier. 

»  Daignez  agréer.  Monsieur,  l'expression  de  la  considération  très 

J  Voy.  le  journal  l'Éclair  des  23,  24,  25  et  26  mai  1890. 
»  Voy.  le  même  journal,  n©  du  27  mai  1890, 


/ 


194  CHRONIQUE 

respectueuse  avec  laquelle  j'ai  l'houneurde  me  dire  votre  bien  dévoué 
serviteur. 

»  Pour  le  Président  du  Comité  félibrin  du  VI®  Cente- 
naire de  l'Université  de  Montpellier, 

»  Le  Délégué  général, 

»  A.  Roque-Ferrikr, 
»  Secrétaire  de  la  Maintenance  de  Languedoc. 

»  P. -S. — Cette  lettre  servira  de  carte  d'entrée  personnelle  à  l'inau- 
guration du  marbre  de  la  Tour  des  Pins  et  à  la  séance  des  Jeux  Flo- 
raux. » 

Cette  lettre  d'invitation  avait  été  envoyée  aux  alcades  des  villes  de 
Barcelone,  Sarragosse,  Valence,  Palma,  Murcie,  Lérida,  Girone  et 
Vich  et  aux  principaux  poètes  et  lettrés  de  la  Catalogne.  Plusieurs 
alcades  (ceux  de  Barcelone,  de  Valence,  de  Murcie  et  de  Lérida)  ont 
adressé  au  président  du  Comité  félibrin  des  lettres  où,  tout  en  s'ex- 
cusant  de  ne  pouvoir  se  rendre  à  la  cérémonie  de  l'inauguration  du 
marbre  de  Jacme-le-Conquérant,  ils  glorifient  en  termes  abondants 
et  éloquents  le  passé  du  Languedoc  et  rappellent  les  liens  de  frater- 
nité qui  l'unissent  à  l'Aragon  et  à  l'Espagne. 

M.  J.  Verdaguer,  qui  a  envoyé  une  poésie  que  nous  reproduisons 
plus  loin,  avait  adressé  les  lettres  d'excuses  qui  suivent  : 

«  1°  S^^  D.  A,  Roque-Ferrier. 

»  Mon  estimât  amich  y  confrare,  molt  plasent  me  seriâ  assistir  à 
les  festes  celebradores  en  Montpeller  en  lo  sise  centenari  de  sa  Uni- 
versitat,  mes  ab  molta  recansa  vos  ho  dich,  no  m'es  posible  per  no 
trobarme  be  des  de  la  influenza.  Si  Deu  ho  vol,  vos  enviaré  un  verset  ; 
poca  cosa,  mes  preneune  la  bona  voluntat. 

»  Gloria  al  gran  rey  En  Jaume  lo  Conqueridor  ! 
»  Queda  vostre  de  cor. 

»  Jacinto  Verdaguer,  Pbre. 
»  15  maig.  90.  » 

«  2°  S^^  D.  A .  Roque- Février. 

»  Mon  respectable  amich  y  S**'  :  no  se  si  m  sera  posible  animar 
algun  de  nostres  lletrats  à  venir  â  la  festa  de  Don  Jaume.  Cutxet 
esta  invalit,  Aguilo,  Collell  y  Calvet  malalts,  Mateu  estd  espérant  un 
altre  fill  aquestos  dias.  D.  Anton  Rubio,  fill  del  Gayter  del  Llobregat, 
esta  d'examens ,  com  d  catedratich. 

»  No  obstant  jo   cerco  y  empenyo  y  tendrià  un  sentiment  de  que 


CHRONIQUE  105 

Catalunya  no  estigues  representada  en  aqueix  acte  que  tant  Thonra. 
»  Demà  vos  tomaré  à  escriure,  mentres  tant  quedo  vostre  de  cor, 

»  Jacinto  Verdaguer,  Pbre. 

»  22  maig.  90.  » 

«  3°  M,  Roque-Fevrier, 

»  Mon  ilustre  y  estimât  amich  :  avuy  estan  mes  animats  mos  amichs 
Catalanistes  y  espero  que'n  vindrau  algunes,  acompanyant  los  très 
regidores  de  nostre  ajuntament  que  venen  à  la  festa  del  rey  don 
Jaume.  Ajunt  li  envio  un  retall  de  la  Renaixensa,  que'n  parla  y  un 
pobre  sonet  meu  dedicat  al  assumpto. 

»  Prengan  V.  la  bona  voluntat  y  cregam  de  cor  ab  tots  vostés 

»  seu  afîm  y.  y.  a. 

»  Jacinto  Verdaguer,  Pbre.  » 

M.  J.  Collell  s*était  également  excusé  par  la  lettre  suivante  : 

«  Jhs.  —  AD.  Alfons  Roque-Ferrier. 

»  Barcelona,  23  Maig  de  1890. 

»  Molt  apreciat  senyor  meu  y  amich  :  quan,  très  anys  ha,  m'anun- 
cidreu  lo  propôsit  de  dedicar  â  Montpeller  un  monument  à  la  memoria 
del  ait  Rey  en  Jaume,  jo  propos!  no  faltar  à  la  solemnitat  de  la  inau- 
guraciô. 

»  Mes  una  llarga  dolencia,  que'm  te  quasi  impossibilitat  de  tôt 
treball  me  privan  del  gust,  que  quasi  puch  anomenar  un  deber  sagrat, 
de  assis  tir  à  la  ceremonia,  y  cregau  que  es  ab  gran  recansa  de  mon 
cor,  que  tinch  de  renunciarhi.  Aquest  monument  que  axecau  â  la 
memoria  del  nostre  gran  Rey,  ha  de  ser  com  una  pedra  termenal  ô 
miliaria  plantada  en  eixa  gloriosa  carrera  del  renaxement,  sino  de  las 
velles  nacionalitats,  del  esperit  que  les  informava,  que  es  lo  que'ns 
mou  als  que  cerquem  la  uniô  dels  pobles  llatins  en  altres  rahons  que 
en  les  dels  costosos  exércits  y  en  les  fortificacions  de  les  fronteres. 
La  memoria  que  plantaréu  en  les  antigues  muralles  de  Montpeller, 
sia  també  recordansa  de  la  nostra  germa.ndat. 

»  VuUau  ser  présent  mos  sentiments  â  tots  los  companys  de  Man- 
tenensa  y  Uetrats  de  la  vostra  Cort  de  Amor,  y  vos,  compteu  ab  la 
seguritat  del  afecte  que  vos  professa 

»  vostre  aff™  SS.  y  AA. 

»  Jaume  Collell  pbre.  » 

On  pourra  juger,  par  l'extrait  suivant  de  la  Renaixensa  de  Barce- 
lone, envoyé  par  M.  Verdaguer,  de  l'intérêt  que  la  Catalogne  prenait 
à  l'inauguration  du  marbre  de  Jacme  : 


é 


196  CHRONIQUE 

«  En  las  darrerîas  d'aquest  mes  se  celebraràn  en  la  ciutat  de  Mont- 
pellier solemnfssimas  festas  en  conmemoraciô  del  sise  'centenari  de 
la  fundaciô  de  la  famosa  Universitat  de  la  ciutat  llenguadociana. 

»  Los  organisadors  de  la  gran  festa  recordantse  bé  de  que  la  historia 
de  Montpellier  fou  un  temps  llarch  y  gloriôs  part  de  la  historia  de 
Catalunya,  han  dirigit  â  varias  corporacions  y  â  distingidas  persona- 
litats  catalanas  efectuosas  esquelas  de  convit,  pregântloshi  que  hi 
concorrin  y  procurin  ferhi  concorrer  la  major  numéro  possible  de 
catalans. 

»  També  nosaltres  desitjariam  que  aixis  fos,  y  que,  sobre  tôt,  dels 
catalanistas  n'hi  anés  una  bona  representaciô ,  puig  apart  del  interés 
que  ja  hem  indicat  te  per  nosaltres  la  festa  montpellerina,  s'hi  reali- 
sarâ  un  altre  acte  que  per  si  sol  exigeix  lo  concurs  dels  catalans. 
Aprofîtant  la  ocasiô  d'aquestas  festas,  la  Comissiô  encarregada  de 
posar  una  Idpida  en  recort  del  naixement  de  nostre  gran  rey  En 
Jaume  '1  Conqueridor,  en  la  ciutat  que  fou  son  gloriôs  bressol,  ha 
decidit  celebrar  la  festa  de  sa  colocaciô  en  las  murallas  de  la  iorre 
dels  pins,  lo  prôxim  dilluns  de  Pasqiietas  Com  diumenge  y  dilluns 
son  festas,  es  de  creure  que  aquesta  bona  ocasiô  decidirâ  à  alguns 
catalans  â  assistir  d  la  glorificaciô  del  gran  Rey.  » 

{La  Renaixensa,  p.  3166,  an.  1890,  in-8°.) 

« 

La  cérémonie  de  l'inauguration  a  été  ouverte  par  un  discours  de 
M.  Roque-Ferrier.  Ce  discours  rappelait  que  l'idée  première  du  marbre 
de  Jacme  revenait  à^Verdaguer,  qui  composa  à  ce  sujet  une  poésie, 
lue  aux  Jeux  floraux  de  la  Maintenance  de  Languedoc  le  18  juillet 
1886». 

Le  palmarès  des  Jeux  Floraux  de  Jacme-le- Conquérant  et  du  Féli- 
hrige  montpelliérain  a  été  ensuite  proclamé.  Pour  le  concours  sur 
Jacme,  les  récompenses  suivantes  ont  été  décernées  :  1®'  prix,  à 
M.  W.-C.  Bonaparte-Wyse,  pour  son  ode  triomphale  en  provençal 
(reproduite  ci-dessous);  médailles  d'argent,  ex-œquo,  à  M.  l'abbé  Mali- 
gnon  (poésiereproduiteci-dessous)'etàM.  Hubert Fabre,  deLansargues 
(Hérault),  pour  sa  poésie  la  Roumansa  dau  rei  Jaume  e  de  dona 
Tresa;  mention  honorable,  à  M.  Alexandre  Roux,  de  Laroque.près 
Ganges  (Hérault),  pour  VEfant  del  miracle,  pièce  en  un  acte  et  en 
vers.  Pour  les  sujets  libres  ou  indiqués  et  le  concours  de  versions 
en  langue  d'oc,  41  pièces  ont  été  citées,  dont  18  avec  récompenses. 
Parmi  ces  pièces,  on  remarque  plusieurs  éloges  de  Montpellier,  deux 
éloges  de  Marseille  et  de  la  Provence,  des  traductions  de  Dante,  de 
Virgile,  de  Cervantes,  etc.  Les  dialectes  languedocien,  provençal, 

i  Voy.  le  jouroal  l'Éclair,  n»  du  27  mai  1890. 


CHRONIQUE  197 

gascon,  dauphinois,  roumanche,  sicilien,  macédo-roumain,  etc.,  y  sont 
représentés*. 

Un  certain  nombre  de  pièces  récompensées  et  divers  autres  mor- 
ceaux ont  été  ensuite  lus,  quelques-uns  par  leurs  auteurs  mêmes. 

1 .   Un  monument  pel  rey  don  Jaume,  par  J.  Verda.guer 

Tria  l'arbre  mes  bell  de  tes  campanyes 
Per  l'estatua  del  gran  Conqueridor, 
Oh  Montpeller  :  tu  que  en  la  mar  te  banyas, 
Traune,  gentil  Mallorca,  arènes  d'or. 

Dona  '1  marbre  mes  fi  de  tes  montanyes, 
Valencia,  y  de  ton  pla  roses  y  amor  : 
Tu  '1  ferro  virginal  de  tes  entranyes, 
Catalunya,  y  tos  brassos  y  ton  cor. 

Voltau  son  ample  front  d'im  raig  de  gloria, 
Armau  son  bras  del  llamp  de  la  Victoria. 
Mes  perqué  't  veja  d'Avinyé  â  Alineria, 

Bella  garba  de  pobles  que  ha  lligat, 
La  estatua  del  gegant  tallada  sia 
Del  penyal  mes  altiu  del  Montserrat. 

2.  Lou  grand  Rèi,  Ion  bon  Rèi  !  Odo  à  la  lausour  de  Vilustre 
Moiint-pelieren,  En  Jaume  lou  Counquis taire,  Per  William-C, 
Bona.parte-Wyse. 

Composée  au  Manor  of  St-John's,  Waterford  (Irlande),  en  1887. 

«  Le  manuscrit  de  l'auteur  avait  l'épigraphe  suivante  :  «  Lo  pus 
bell  princep  del  mon,  é  lo  pus  savi,  é  lo  pus  gracios,  é  lo  pus  dretu- 
rer,  é  cell  que  fos  araat  de  totas  gents,  que  rey,  que  hanch  fos  :  que 
aytant  com  lo  mon  dur  se  dira  lo  bô  Rey  en  Jacme  Daragô  (Chron, 
de  Ramon  Muntaner,  chap.  VII,  fol  vi),  accompagnée  d'une  abeille 
sur  une  fleur,  avec  la  devise  :  «  Me  pause  ounte  fleuris.  »  qui  est  celle 
de  M.  Bonaparte-Wyse 

Dôu  grand  Rèi,  dôu  bon  Rèi. 
D6u  nistoun  dôu  Clapas,  dôu  famous  Counquistaire, 
Sarén  tôutis  iuei  lis  enfant,  li  coumpaire; 

A  la  lausour  dôu  Rèi 
D'Aragoun,  Valènço  e  Maiorco, 
Largaren  nôsti  cant,  bèn  amourousamen  ; 

*  Voy.  le  journal  Y  Eclair,  no  du  28  mai  1890. 


.>   .         -r. 


10?  CHRONIQUE 

Coumblaren  nôsti  plaço  e  nôsti  bastimen 
De  lausié,  de  roso  e  de  torco  ! 

Lou  bon  Rèi,  lou  grand  Rèi  ! 
Dedins  aqueste  siècle  inchaiènt  e  trufaire, 
Este  tèms  d'amaresso  e  de  nègre  desaire, 
L'eisemple  soûl  d'un  rèi 
Tant  grand  coume  lou  sies.  En  Jaume; 
0  mignot  de  Barcino,  o  car  Mount-pelieren, 
Me  lusis  i  vistoun  coume  un  azur  seren, 
A  moun  cor  coulo  coume  un  baume. 

0,  cantèn  lou  grand  Rèi, 
L'enfant  de  Mount-pelié,  bèus  amis,  mi  counfraire  ! 

0  dono  i  clàri  voués  !  o  melicous  troubaire  ! 

Car  aquéu  rèi  di  rèi, 

Esbrihant  jout  l'or  de  si  floto  *, 
Que  l'istôri  a  quiha  sus  lou  mai  a  ut  cresten 
Dôu  renoum  miejournau,  es,  veritablamen, 

Nosto  eros  e  coumpatrioto. 

0,  canten  lou  bon  Rèi, 
Qu'èro  -uno  souleiado  en  mitan  de  si  fraire. 
Un  rivau  soubeiran  di  mai  fiers  emperaire, 
Di  mai  sublimi  rèi  ; 
Que,  fèr  aigle,  sus  lis  abisme 
E  li  roco  e  li  ro ,  voulant  superbamen. 
De  vitôri  en  vitôri,  esbaudissié  li  gen. 
Sus  soun  pit  la  crous  de  l'Autisme. 

Lou  bon  Rèi,  lou  grand  Rèi, 
Qu'èro  di  Catalan  lou  pastour  e  lou  paire, 
La  gau  di  bèlli  dono  e  di  Muso  l'amaire  ; 

Qu'èro  i  reiaume,  i  rèi. 
Un  nivas  e  pièi  uno  estello  ; 

1  nemi  de  la  Glèiso  un  uiau  cerulen  ; 
A  milo  e  milo  ami  un  delicious  alen  ; 

Tour  à  tour,  tron,  voués  cantarello  ! 

1  «  Havie  bells  cabells  e  rossos  que  semblavon  fil  d'aur  »,  nous  dit  le  chro- 
niqueur d'Èsclot,  dans  son  histoire  de  la  Conquista  de  Mallorca,  J'en  suis 
témoin,  ayant  en  raa  possession  une  mèche  de  ses  cheveux  très  authentique, 
que  M.  Hernandez,  Tarehéologue  bien  connu  de  Tarragone  (qui  la  coupa 
lui-même  sur  la  tête  du  roi  à  l'occasion  de  l'ouverture  de  son  tombeau  à  Poblet), 
voulut  bien  m'offrir.  (Note  de  M    Bonaparte- Wyse.) 


CHRONIQUE  199 

Loii  grand  Rèi,  lou  bon  Rèi  ! 
La  floup  di  cavalié,  lou  lum  dis   escalaire, 
Di  Maugrabia  lou  dôu,  di  catau  l'aclapaire, 
La  perlo  entre  li  rèi  ; 
Au  councile,  au  coumbat  font  flôri, 
Di  païs  souleious  li  serre,  lis  aven, 
De  la  mar  di  Latin  li  flot,  li  caraven, 
Fasièn  tôuti  clanti  sa  glôri. 

Lou  grand  Rèi,  lou  bon  Rèi, 
Mai  bèu  qu'un  bèu  paumié,  dret,  savi,  de  bon  aire, 
Qu  èro  ama  de  soun  tôms  coume  un  fiéu  de  sa  maire  ; 
Un  rèi  subre  li  rèi. 
Qu'à  travès  la  mar  e  la  terro 
Castelan  e  prélat  seguissièn  touis  ensen, 
A  la  gàrdi  de  Dieu  sèmpre  invinciblamen. 
Au  crit  de  soun  «  Desperto  ferro  I  » 

Lou  bon  Rèi,  lou  grand  Rèi  I 
Coume  un  pinas  brounzènt  au  mistrau  boulegaire, 
L'aguste  tregen  siècle,  en  tout  constat  e  caire, 
Resounavo  dôu  rei  : 
I  nacioun  de  raço  latino, 
D'eila  li  Dardanello  i  Pilas  Erculen, 
Soun  regard  enaura,  soun  iue  paradisen 
Ero  un  calèu  dins  l'escurino. 

Lou  grand  Rèi,  lou  bon  Rèi, 
Noun  calas  de  canta,  dôu  Peirou  li  trevaire  ! 
Fasès  boumbi  lèu-lèu  fin  qu'i  toumple  de  l'aire 
Lou  renoum  dôu  grand  rèi 
D'Aragoun,  Maiorco  e  Valènço, 
Que  soun  fres  souveni,  sempiternalamen, 
Espandira  'n  perfum,  un  dous  rebatrosen 
Dessubre  soun  nis  de  neissènço  ! 

Lou  bon  Rèi,  lou  grand  Rèi  ! 
Sa  glôri  espetaclouso  aura  sèmpre  un  esclaire, 
Tant  que  lou  Mount-serrat  dentelejara  Taire  ! 
E,  rèi  entre  li  rèi, 
Soun  noun  sara  cen  de  l'aimenço 
De  Barcino  la  bello  e  di  Mount-pelieren, 
Tant  que  lou  soulèu  d'or,  sus  soun  trône  azuren, 
Is  ome  fara  lumenenço  ! 


-i»!-'- 


200  CHRONIQUE 

MANDADIS    A   JACINTK   VERDAGUKR 

Pouèto,  grand  pouèto  ! 
A  tu  premiè  moun  odo  en  l'ounour  dôu  grand  rèi, 
Que  belavo  soun  pople,  estent  jouve,  estent  vièi... 
Qu'èro  perèu  pouèto, 
Se  coumplasènt  dedins  li  vers. 
Li  troubaire  d'elèi  soun  de  raço  reialo  : 
An,  coume  li  grand  rèi,  au  cor  de  bèllis  alo 
E  counsacre  aquest  cant  à  tu,  grand  Verdaguer  ! 

3,  Au  Rèi  Jaume  d'Aragouriy  par  M.  l'abbé  C.  Malignon 

S'amount,  quand  vèn  Sant-Jan,  s'entre-vèi  fiô  d'estello, 

Que,  dins  Ter  fasènt  farfantello, 
Lampejon  un  moumen,  pièi  s'esperdon  subran, 

Manco  pas  d'estello  lusènto 

A  l'iue  badant  toujour  presènto, 
Pourgissènt  àplasé  soun  rebat  soubeiran. 

Coume  uno  estello  majo,  au  clar  cèu  de  l'istôri, 

Rèsto  giganto,  ta  memôri, 
0  Jaume  :  sies-ti  pas  lou  rèi  Conquistador  f 

Parié  titre  es  proun  de  requisto 

Pèr  jamai  se  perdre  de  visto, 
É  pèr  cencha  toun  noum  d'uno  auriolo  d'or. 

Mai  pèr  nàutri  es  pas  tout,  aquéu  titre  de  marco  : 

Se  tant  d'amour  chascun  te  marco, 
Es  que  sies  clapassié,  Jaume  ;  vaqui  perqué 

luèi  la  ciéuta  mount-pelierenco, 

Urouso  maire,  en  cor  atrenco. 
Autour  de  ta  bressolo,  e  cansoun  e  bouquet  ; 

E  perqué,  de  pertout,  clantisson  crit  de  joio. 

Que  t'ôufris  elo,  pèr  beloio, 
Au  grand  jour  festenau  qu'enauro  à  soun  enfant. 

Sies  dôu  Clapas,  o  moun  bèu  Jaume  ; 

A  vans  d'ajougne  toun  reiaume, 
Es  eici  qu'as  passa,  jouinet,  ti  premiès  an. 

Es  eici  lou  palai  mounte  ta  pauro  maire, 

Souleto,  liuencho  de  toun  paire. 
Te  bressavo,  enfantoun,  pèr  çal4  soun  mau-cor. 


CHRONIQUE  201 

r  as  vîsca  ta  primo  jouvènço, 
E,  pèr  t'ensigaà  la  valènço, 
Te  counûsè,  ta  maire,  à  Simoun  de  Mount-fort. 

Pèire  toumbo  à  Muret  e  ta  maire  es  à  Roumo  : 

L'Aragoun  alor  rèi  te  noumo 
En  plaço  de  toun  paire,  e  tant  lèu  que  Simoun 

N'en  aprend  li  novo,  te  mando 

Au  légat  que  te  redemando, 
E  partiguères  pièi  au  pais  d'Aragoun. 

Eres  bèn  jouvenet,  ansin  quand  nous  quitères, 

E  que,  de  forço,  counquistères 
Toun  reiaume  espagnôu,  que  dous  ouncle  marrias, 

Vesènt  toun  âge  e  ta  fiblesso, 

Gueiravon  :  ta  soulo  prouësso, 
Derrôutant  si  calcul,  te  sauvé  de  si  las . 

Es  pau  après  Muret,  qu'en  l'ardour  que  t'aflamo, 

Escriucelères  sus  ta  lamo 
Ta  deviso  inmourtalo,  o  rèi:  aVincre  o  mouri!  >y 

E  l'as  coumplido  touto  entiero  : 

Jamai,  en  piano  bataiero. 
Desastre  n'es  vengu  toun  cor  endoulouri. 

Counquistant  toun  reiaume,  em  lou  sang  de  ti  veno. 

Ferme,  alor,  tenguères  li  reno. 
E  quand  li  pus  catiéu,  te  vesènt  rèi  titra, 

Te  jurer  on  pas  e  councôrdi, 

Bèn  mens  pèr  ta  misericôrdi. 
Que  pèr  ta  glôri,  à  tu  li  faguères  vira. 

Seculàri  nemi  de  tôuti  lis  Espagne, 

Li  Mouro  tenièn  la  campagno, 
Toujour  Içst  à  doumta  li  Crestian  si  vesin. 

Déjà,  luchant  pèrsapatrio, 

Lou  rèi  Ferdinand  de  Gastiho 
A  vie,  souvènti-fes,  batu  lou  Sarrasin. 

En  Jaume,  de  segur,  istara  pas  en  resto 

E  noun  fugira  la  batesto. 
D6u  tèms  que  soun  cougnat,  dins  sa  bouiènto  ardour, 

Rambaio  lou  creissènt  sus  terro, 

le  déclarant  nouvello  guerro. 
Eu  sounjo,  dins  sis  isclo,  à  lou  jougne  à  soun  tour. 


202  CHRONIQUE 

Vès-lou  I  passant  la  mar,  s*esmarrant  vers  l'estrange, 

S'en  vai  au  païs  dis  arange, 
Plen  d'ardidesso,  abordo,  e,  Jeu,  l'espaso  au  poung, 

Après  rùdi  courabat  s'eraparo 

Di  vilo  -e  fort  di  Balearo, 
E  Maiorco  e  Minorco  à  sa  courouno  apound. 

S'en  torno  triounflant,  e  PAragoun  Taclamo. 

Mai  en  repaus  tant  bono  lamo, 
Noun  se  rouvihara,  segur,  dins  soun  fourrèu. 

Valènço,  la  gènto  Valènço, 

Tento  de  longo  sa  valènço 
E  partis  pèr  n'ana  cousseja  Tlnfidèu. 

Rèn  ie  pôu  rèsisti  :  e  pau  à  pau  tout  croulo, 
Barri,  tourre,  annado  emai  foulo  ; 

Enfin  tant  cranaraen  se  dis  que  bataiè, 
Que  pèr  Sant-Jôrgi  lou  prenguèron 
Si  soudard,  e  qu'atribiièron 

Tant  famouso  vitôri  au  patroun  di  guerriè. 

E  Valènço  fugue  prouvinço  aragouneso. 

0  Jaume,  après  tant  richo  preso, 
Aviès  gagna  toun  noun  de  rèi  Conquislador  ; 

Eres  fidèu  à  ta-  deviso, 

E  l'istôri,  que  tout  reviso, 
Souto  aquéu  noum  d'elèi  t'a  liéura  passo-port. 

Mai,  s'ères  pèr  toun  pople  un  valent  counquistaire, 

Eres  tamben  amenis  traire 
E  juste  e  religions  e  de  longo  au  devé. 

A  Valènço  la  Musulmane, 

Fères  presica  fe  crestiano  ; 
La  doutères  d'evesque  e  de  prèire  à  souvet. 

» 

Jusquo  dins  ti  desbord  ta  fe  demeuré  vivo, 

E,  pèr  tancà  l'ardour  cativo 
Que  transissié  toun  cor,  en  cerco  d*un  èr  pur, 

Penitènt,  quitères  lou  mounde. 

Avide  de  trouva  'n  abounde. 
Au  founs  d'un  mounastié,  de  perdoun,  de  bonur. 

Oublidaren  pas,  iuei,  ta  noblo  bènfasènço  : 

Mount-pelié,  per  dré  de  neissènço, 
Ero  tiéu,  d'Aragoun  èro  fièu  e  coumtat. 


CHRONIQUE  203 

Après  pau  tèms,  lou  deliéurères, 
Au  Lengadô  lou  rendeguères, 
E  mai  i'aguères  voués,  o  celebro  ciéuta  ; 

D'aqui  tant  qu'un  bèu  jour,  coume  flume  e  ribiero, 

Deverson  sis  oundo  pleniero 
Pèr  coungreia  l'ampleur  de  l'inmense  Oucean, 

Emé  ti  sorre  miejournalo, 

Pèr  unioun  douço  e  leialo, 
Pensères  de  te  jougne  au  mage  pople  franc. 

le  dounères  toun  sang,  mai,  pèr  ie  faire  arengo, 

Vouguères  counserya  ta  lengo. 
Sauva  lou  parauli  dôu  bon  vièi  tèms  passa. 

Franco,  t'aiman  de  cor  e  d'amo, 

Pèr  t'apara  sian  tout  de  flamo  ; 
Vengon  li  marrit  jour,  contre  toun  sen  preissa, 

Fidèu  nous  troubaras  sènso  pôu  ni  reproche, 

Sèmpre,  de  tu  marcharen  proche, 
Laissent  lis  esprit  court  à  si  deliramen. 

Noun,  es  pas  tu.  Patrie,  o  maire, 

Que  de  nàutri  as  pouscu  mau-traire  ; 
Hou  sabes  que  t'aman,  te  sufis  que  t'amen. 

Mai,  tu,  ciéuta  d'elèi,  s'a  l'euro  d'iuei  t'agrado 

D'èstre  vilo  franceso  astrado, 
A  Jaume,  de  segur,  deves  un  grameci. 

léu,  la  vese,  ta  gratitude. 

Sus  lou  front  de  ti  multitude, 
En  aquéu  jour  seren,  gaiamen  trelusi, 

E  vaqui  perdeqné,  fier  de  ta  remembranço, 

Enfant  d'Espagno,  enfant  de  Franco, 
Urous,  iuèi,  t'oufrissèn  lou  maubre  de  Tounour, 

E  Lengadoc  e  Catalougne, 

Ardit  !  fan  clanti  si  zambougne 
Pèr  enaurà  toun  noum  e  lausa  ta  valeur. 

0  Jaume,  ligaras  mai  que  mai  lou  deus  liame 

Que  rend  fraire  deus  pople  flame  ! 
De  Pirenèu,  n'i'a  plus  !  Di  mountagno,  en  cantant, 

Nosto  voués,  trespassant  l'auture, 

Crido  pèr  cime  e  pèr  planuro  : 
—  «  Vivo  la  lengo  d'O  î  Vive  lou  Catalan!...» 


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204  CHRONIQUE 

4.  Strophes  extraites  de  la  cantate  écrite  en  Vhonneur  de  Jacme-le- 
Conquérant,  poésie  languedocienne  couronnée  en  1889  à  la  fêli 
hrée  de  Lengarran,  par  M.  Xavier  Peyre,  de  Bédarieux. 

Jaume  devotament  aimava 
La  vila  à-n-ounte  era  nascut: 
A  Moimt-peliè  tout  lou  menava, 
Disoun  lous  que  Tan  counougut, 
Maugrat  lou  sagan  treboulaire, 
Qu*aviè'mé  lous  Mùrous  d'enlai, 
La  dessoublidet  pas  jamai  : 
Lou  fil  aimet  toujour  sa  maire. 

Dins  lou  prince  que  festam  ara, 
A  part  lou  sourdat  aguerrit 
E  lou  grand  gênerai  encara, 
l'aviè  tabé  lou  bel  esprit, 
Lou  savant  que  de  pouësia 
Aimava  de  se  regalà  ; 
E,  quand  vouliè  s'en  enmesclà, 
Fasiè  pas  ges  de  gabusilha. 

E  coussi  la  cieutat  famousa. 
Que  de  tout  tems  a  jitat  lum, 
Demourariè  dessoublidousa, 
D'un  fil  que  menet  tant  de  fum  ? 
Sus  unas  de  sas  permenadas, 
Per  de  que  n'a  pas  mes  quicom 
Que  se  deviste  de  ben  lion? 
Série  tems  après  tant  d'annadas. 

D'aquesta  festa  un  pau  tardieira, 
Au  grand  felibre  catalan. 
N'en  devem  l'ideia  premieira  ; 
Es  el  qu'a  bailat  lou  balan. 
loi,  Verdaguer,  lou  fier  can taire, 
A  fach  segui  sa  lira  d'or, 
Emb  el  per  cantà  de  bon  cor, 
A  tour,  Jaume  lou  Counquestaire  I 

Pioi  que  s'agis  d'un  tant  grand  prince, 
Cau  fa  las  causas  grandament. 
Aquel  moucel  de  malbre  mince, 


CHRONIQUE  205 

Aco's  bon  per  en  atendent  ; 
Fau  pas  una  peira  fragilla, 
Fau  un  mounument  defenit, 
Siegue  de  brounze  ou  de  granit, 
Digne  d'aquesta  nobla  vila. 

Mais  carguen  pas  à  la  bravoura 
Un  abilhage  trop  destrech  ; 
Una  estatua,  à  la  bona  oura  ! 
En  Jaume  d*Aragoun  i'a  drech. 
La  plaça  n  es  touta  marcada, 
En  lioc  mai  série  pas  milhou  : 
Louvis  Quatorze  es  au  Peirou, 
Que  Jaume  siegue  à  TEsplanada. 

Refrin 

Après  tant  d'ans  passats  de  fila, 
Que  Jaume  âge  soun  ped-estal, 
Plantât  au  pus  bèu  de  la  vila  ! 
Que  lèu  lou  vegem  à  chival. 

Estudiants,  jouinessa  galoia 
D'aquestas  quatre  Facultats, 
0  vautres  que  menas  la  joia 
Per  tout  à-n-ounte  vous  moustràs, 
Venès,  mesclàs-vous  embé  nautres 
Per  cantà  Jaume  d'Aragoun 
E  mountà  naut  lou  diapasoun. 
Tout  Mount-peliè  comta  sus  vautres. 

Véni,  lusenta  Estudiantina, 
Tus  tabé,  seguis  lou  courrènt. 
Enfants  de  la  raça  latina, 
Cantàs  Jaume  lou  Counquerrent. 

Touta  aquesta  vila  s'apresta 
A  rendre  un  oumage  pious 

—  Degus  deu  pas  estre  de  resta  — 
A  Jaume  lou  Vitourious. 

Dins  lous  acesses  de  la  febre, 
Aicj  tout  crida  à  plen  gousiè  : 

—  «  De  Maria  de  Mount-peliè, 
Viva  l'enfant  vint  cops  célèbre  !  » 

14 


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206  CHRONIQUE 

E,  zou  !  couraetas  e  musetas  ! 
Zou,  lou  tambourin  e  l'auboi  ! 
Que  se  parle  dins  las  gasetas 
De  la  festa  que  fasem  ioi  I 

5 .  A  Mount'pelié,  sus  lou  sieisèn  centenàri  de  soun  universita,  par 
L.  M.  Bard.  Épigraphe  ;  «  Lou  passa  ensegno  l'aveni.  » 

Ero  la  guerro  aièr,  e  lou  canoun  brutau 
Fasié  trambla  lou  sôu,  desoundrant  lis  oustau, 

Chaplant  lis  orne  pèr  centeno. 
Aièui,  en  pleno  pas,  la  joio  e  li  cansoun, 
Mount-pelié,  de  toun  cèu  esbrandon  li  ressoun 

E  proumeton  d'ouro  sereno  ! 

Pèr  s'ajougne  à  ti  fèsto,  à  toun  trefoulimen, 
S'amano  à  toun  entour,  de  vint  despartamen, 

Dins  uno  coumuno  alegrio, 
Tout  ço  qu'aimo  l'utile  e  lou  vrai  e  lou  bèu, 
Tout  ço  qu'aimo  d'amour  aquel  double  simbèu  : 

La  grando  e  pichoto  patrie  ! 

Car  lou  pople  es  fidèu,  maugrat  si  divisioun, 
I  grand  revieutamèn,  i  vièhi  tradicioun, 

A  la  poulpro  de  soun  istôri  ! 
Quand  un  d'aquéli  jour  se  lèvo,  un  sant  desbord 
Lou  barbèlo,  l'estrèn,  e  saludo  em  tresport 

Lou  revieure  d'aquéli  glôri  ! 

Alor,  vengue  de  biôu  !  Alor,  fau  que  l'auboi, 
Maride  si  refrin  au  tambourin  galoi  ! 

Zou  I  de  danso  e  de  farandouno  ! 
Pèr  iue  jour  à  l'oustau,  laisse  peno  e  soucit, 
E  s'afresco  lou  sang  dins  d'ouneste  plesi, 

Car  la  joio  veraio  es  bouno  I 

Car  la  joio,  l'a  dich  un  de  ti  majourau  *, 
De  l'amo  es  lou  besoun  e  dôu  cor  es  la  sau. 

Quand  lou  pople  ris  emai  canto, 
Counèis  ges  de  maucor,  tout  à  fiéu  d'aigo  vai  ; 
Pièi  quand  s 'es  esbaudi,  mai  drud,  torno  au  travai, 

Plen  de  voio  fourtificanto  ! 

i  Antonin  Glaize,  Li  sèt  vertu  de  la  joio. 


CHRONIQUE  207 

E  vejaqui  perqué,  bourgés,  oubrié,  pacan, 
Ari'ibon  d'en  pertout,  à  Tapèl  di  Decan, 

Pèr  célébra  lou  centenàri 
De  rUniversita  qu'a  'spandi  toun  renoum  I 
Es  pèr  glourifîcà,  pèr  enaussa  toun  noum 

Que  s'amoulounon  dins  ti  barri  I 

Quand,  pièi,  estrambourdà,  farandoulejaran, 
Quand  si  crid,  si  vivat  dins  toun  cèu  vibraran 

Coume  un  tron  que  boumbo  e  reboumbo  J 
Li  doutour,  li  letru  qu'en  glôri  t'an  aussa, 
Qu'i  cimo  de  la  sciènço,  en  luchant,  t'an  quiha, 

Tresanaran  dedins  si  toumbo  ! 

E  la  Gleiso,  perèu,  elo  te  benirà  ! 

Car  toun  escolo  es  nado  à  soun  alen  sacra  ; 

Es  fièro  de  l'agué  creado  ! 
E  souto  soun  afiat,  au  sortre  de  si  man, 
De  longo  a  couneigu  que  d^irous  lendeman, 

De  jour  sens  ges  de  mau-parado! 

E  nautre,  li  felèn  dis  encian  troubadour, 

Venèn,  la  flamo  au  front,  d'Espagno  e  dôu  Miejour, 

Lauseja  tis  obro  inmourtalo, 
T'auboura  mai-que-mai,  car  sies  un  di  fougau 
Ounte  a  recaliva  l'èngèni  patriau 

E  flouri  la  lengo  meiralo  ! 

Nous  abéura  venèn  au  pouèti  rajôu, 

Ounte  an  déjà  begu,  dôu  tèms  dis  grans  aujôu, 

Li  mèsfcre  de  la  pouësio 
E  dôu  cop  te  prouva  qu'oublidarèn  jamai 
Qu'empures  aquel  fiô  crèmadis  tournamai, 

En  ounourant  nôsti  sesiho! 

Es  ta  glôri  qu'aièui  s'alargo  e  bat  soun  plèn  ! 
Mostro  au  pople  afouga  qu'as  encaro  d'alèn, 

Que  te  trufes  di  mau-disènço  ! 
Qu'à  v6u  lis  escoulan,  sus  ti  banc  empreissa, 
Te  fan  un  aveni  digne  de  toun  passa. 

Digne  perèu  de  sajouvènço  I 

Mai-que-mai,  fai-te  bello  I  Alando  ti  pourtau  ! 
En  l'ounour  de  tis  oste,  enflouris  toun  lindau  ! 


..'^  ' 


208  CHRONIQUE 

E  que  ta  courouno  coumtalo, 
Esbrihaude  lis  iue  coume  au  tèms  di  Guihèm 
E  cantaren,  ravi,  Talleluia  maièn 
Que  marco  ti  triounfle,  o  rèino  miejournalo  !. 

6.  Vers  en  l'honneur  de  Jacme-le-Conquérant ,  par  M.  Hippolyte 
GuiLLiBKRT.  Datés  d'Aix-en-Provence,  le  25  mai  1890. 

Ounour  à  Jaume,  au  Counquistaire, 
Qu'  esbleugissé  Tage  miejan  ; 
Que  pèr  lou  pople  e  si  can taire 
Fugué  subre-nouma  lou  Grand. 

D'autres  morceaux,  qui  n'avaient  pas  de  rapport  direct  avec  l'inau- 
guration du  marbre  de  Jacme,  ont  été  lus  à  cette  cérémonie  :  la  Chan- 
son de  VEnfant,  poésie  de  M.  Henri  de  Bornier,  en  français  ;  Jeanne 
d'Arc,  poésie  de  M.  Martin,  de  Nimes,  en  provençal;  Li  Moitsco, 
conte  en  prose  provençale,  par  le  même. 

E.-Daniel  Grand. 


Le  Gérant  responsable:  E.  Hamelin. 


Montpellier,  Imprimerie  centrale  du  Midi.  —  Hamblin  Frâres. 


LÉGENDES    PIEUSES    EN    PROVENÇAL 


Parmi  les  manuscrits  jadis  volés  dans  nos  bibliothèques,  dont  la 
France  est  rentrée  en  possession,  grâce  au  zèle  et  aux  habiles  négo- 
ciations de  M.  Léopold  Delisle,  figure  unms.  provençal,  ainsi  décrit 
dans  le  Catalogue  des  mss,  des  fonds  Lihri  et  Barrois,  p.  119  : 
«  Nouv.  acq.  franc.   4505  (Libri,  107). 

»  LÉGENDES  PIEUSES,  en  provençal Volume  en  parchemin. 

44  feuillets.  187  millim.  sur  130.  Ecriture  à  longues  lignes  du  xiii®  siè- 
cle. Une  note  frauduleusement  ajoutée  au  bas  de  la  dernière  page  : 
«  Iste  liber  est  conventus  Sancti  Dominici  de  Mantua  »,  permet  de 
supposer  que  le  volume  a  été  dérobé  dans  une  de  nos   bibliothèques. 
Le  manuscrit  a  perdu  les  cinq  feuillets  du  commencement*,  et  peut- 
être  plusieurs  cahiers  à  la  fin,  ce  qui  en  rend  jusqu'à  présent  l'identi- 
fication très  incertaine,  comme  l'a  fait  remarquer  M.  Meyer  dans  la 
Uomania,  t.  XII,  p.  341. —  Reliure  en  ais  de  bois,  avec  dosen  cuir  2.  » 
Ce  ms.  a  été  en  effet  volé  dans  une  de  nos  bibliothèques,  et  cette 
bibliothèque  n'est  autre  que  celle  de  Carpentras.  Les  44  feuillets  qui 
constituent  le  ms.  107  de  Libri  ont  été  arrachés   au  commencement 
du  ms.  461  de  Carpentras,  dont  la  reliure,  qui  n'a  pas  été  réparée 
depuis,  conserve  la  trace  trop  évidente  de  cette  mutilation.  J'avais  eu 
de  ce  méfait  un  vague  soupçon  dès  le  premier  jour  (il  y  aura  bientôt 
dix  ans)  où  j'ai  pu  examiner  ce  dernier  ms.,  grâce  à  la  comparaison 
que  l'extrait  publié  par  M.  Paul  Meyer  ^  du  ms.  Libri  permettait  d'é- 
tablir entre  les  deux,  au  point  de  vue  de  la  langue  et  du  contenu  ^.  Ce 

>  C'est  neuf  feuillets,  et  non  cinq,  qu'il  a  perdus  au  commencemeDt,  comme 
on  le  verra  plus  loin. 

^  Cette  reliure  est  récente.  Le  titre,  enlor,  sur  le  dos,  est  Vite  |  di  \  santi 
et,  plus  bas,  in  provenzale. 

3  Recueil  d'anciens  textes^  p.  136. 

*  Mon  soupçon  pourtant,  je  dois  le  dire,  était  contrarié  par  l'absence,  dans 
Textrait  publié  par  M.  Meyer,  de  l'un  des  traits  caractéristiques  les  plus  fré- 
quents du  texte  de  Carpentras,  je  veux  dire  de  la  forme  fe?i  {=  fidem),  due, 
comme  plusieurs  autres  qu'on  y  remarquera,  à  riafluence  analogique  de  mots 
en  n  instable,  tels  que  ren,  ben,  etc.  (cf.  fan,  mercen,  sen,  min,  sin,  etc., 

TOME  IV  DE  LA  QUATRIÈME  SÉRIE.  —      A vril-Maî-Juln  i890.. 

15 


'.i, 


208  CHRONinuF. 

E  que  ta  courouno  coumlo!  .  .  .  '*.^  ^^^^^^^  ^"^ 

Esbrihaude  lis  iue  coume  nv  ^■'''■''  ^^  ^''^'  ^"'" 

E  cantaren,  ravi,  l'all.l.;  ■-"^  ^^  ^^^^^^^^''^  l'^"^' 

Que  marco  ti  tiiouiiiio.   ■                       ^  -..Miuicricée  par  moi, 

-.  'îounôes  par  M.  I)e- 

e.  Vers  en  l'hoiv^r...  -^"^  ^^^  reconnut  idon- 

GuiLLiBKRT.  '  ■  '1'/"  ^^'^^^^-^^  présente  au 

:  ^liliots,  nombre   de  ceux 

<•■  ••  îiiljlor. 

.:    i-iîi'Mno,  grâce  à  l'obligeance 

.    ;  .''S.  avoir  à  la  fois  sous   les 

l'i.^ir;  ot  aucun  doute  ne  me 

.   .  Lii)ii.  C'est  bien,  comme  je  l'ai 

■   i  i  .ivoo  une  certitude   absolue,  un 

■.' ,: ^ciiiî-ts.  aiiaehé  au  commencement  de 

--.  .1  :uio:"otôs  rt'oomnicnt  en  chiffres  arabes,  dont  se 

.>.    i/ibri.  que  j'appellerai  désormais   ms.  de  Paris,  se 

.  ->  ..Kiiao  et  peuvent  paraître  au  premier  abord  former  un 

.v'i,  j;r;ioe    au    soin   qu'on   a  piris    de  gratter  les   chiffres 

,   10  i'.uioiouuo  foliotationqui  n'étaient  pas  déjà  devenus  illisi- 

i.i.îi  »u  ou  distingue  encore  çà  et  là,  plus  ou  moins  vaguement 

..>.  de  Carpontras   se  compose  dans    son  état  actuel  de  123 
.  v-,v.   la  tVuillo  do  garde,  en  papier,  sur  laquelle   on  lit,  d'une 
.»».u.o».\  oo  qu'il  semble,  do  Tavant-dernier  siècle:  DcmonsLraUo  | 
Cvi;:  >\ï<i'ijr.  I  aUquot,  a  été  comprise  dans  la  nouvelle  folio - 

v„.    y\\ii\  vicvvf,  *r,  mi,  si)^  la  forme  fe  se  reucontraot  au  contraire  trois 

■. .  il  1^  \\  pul»li\Mlion  de  .M.  Meyer.  Mais  il  se  trouve  justement  que  le  ms. 

....•      -i    Si'uloauHit  l'/i  est  ou  parait  exponctuée,  ce  que  M.  xMeyer,  contre 
:  lalniuiU»,  a  iu\i;iigt'  île  constater.  Voir  ci-après,  p.  267,  n.  1  et  4. 
'  \iii:  MU'  ioH  folios  actuels  il,  12,  20,  21,  22,  35,  37,  43,  il  ost  encore 

■  .  î.«:»»  d»'  doviuor,  do  reconstituer  à  l'aide  de  ce  qui  r<jste  apparent  (37),  ou 
•  II.»  lU»  ihsliii^ui'r  entièrement  (22,  -43;  les  chiffres  primitifs  xx,  xxj,  xxix, 
\\\.  wvi.  nlùijt  "^'^'j'  l'J*  —  Di*"5  'e  passage  de  la  Homania  cité  plus  haut, 
>(  l'.iiil  .Moy»'r  sis'uaie,  parmi  les  numéros  de  l'ancienne  foliation  qui  ont  échappé 
,.i  malla^i',  lo  n"  i  i,  lequel,  dit-il,  correspond  au  folio  9  actuel.  Ce  folio  9 
«  .1  Mï  ooulruiiv,  aujourd'hui  du  moins,  l'un  de  ceux  où  l'ancien  chiffre  a  été 
:.<  i>la.i  ^nitU'.  Maison  y  distingue  encore  trois  petits  traits  qui  probablement 
juiiiioiihiioiil  autant  d*/.  Or  le  chiffre  primitif  était  certainement  xviij,  comme 
tl  lo.iullii  dii  lu  l'oncordanoc  d<)s  autres  indications,  et  non  xiiij,  que  M.  Paul 
W«»^ui'  avuil  cru  lin*,  d'où  sou  erreur,  répétée  par  M.  DeUse,  sur  l'étendue  de 
U  liKuiio  du  l'ouniieacement. 


LEGENDES  PIEUSES  211 

tatioQ  en  chiffres  arabes,  ce  qui  réduirait  à  122  le  nombre  effectif  des 
feuillets  du  ms.,  si  un  même  numéro  (60j  n'avait  pas  été  inscrit  sur 
deux  feuillets  consécutifs. 

La  lacune  du  commencement,  comblée,  en  partie  seulement  d'ail- 
leurs, par  le  ms.  de  Paris,  n'est  pas  la  seule  qu'on  y  remarque  ;  il  y 
en  a  plusieurs,  plus  ou  moins  considérables,  à  Tintérieur,  et  une 
encore  à  la  fin,  résultant  toutes,  comme  la  première,  de  mutilations 
récentes,  postérieures  dans  tous  les  cas  à  la  reliure  actuelle,  —  qui 
ne  paraît  pas  très  ancienne  *,  —  comme  l'indique  clairement  le  misé- 
rable état  de  celle-ci.  La  plus  considérable  de  ces  lacunes  (26  feuil- 
lets) se  trouve  entre  les  folios  actuels  22  et  23.  Provient  elle  aussi 
d'un  vol  de  Libri? 

Grâce  aux  indications  fournies  par  les  restes  encore  nombreux  ^  de 
l'ancienne  foliotation,  par  les  feuillets  doubles  du  milieu  des  cahiers, 
qui  devaient  en  comprendre  chacun  quatre,  soit  huit  feuillets  simples, 
et  par  ce  qui  subsiste  encore  des  numéros  d'ordre  des  chapitres,  on 
peut  arriver  sans  trop  de  difficulté  à  se  représenter  Tétat  primitif  du 
ms.  et  à  marquer  avec  précision  la  place  et  l'étendue  des  lacunes. 
C'est  ce  que  nous  avons  essayé  de  faire  dans  le  tableau  suivant^. 

!«'  cahier.  F©*  j-viij.  Manque  entièrement. 

^^      , .  (     F°    ix.  Manque. 

ca  le  .  ^     —  [x-xvj] =  Ms.  de  Paris  f^»  1-7 

3**  cahier .        —  [xvij-xxiv] 8-15 

4«  cahier .        —  [xxv-xxxij] 16-23 

5«  cahier.        —  [xxxiij-xl] 24-31 

6«  cahier.        —  [xlj-xlviij] 32-39 


*  Elle  o*est  pas,  d'un  autre  côté,  postérieure  aux  neuf  premières  années 
du  XVIII*  siècle,  car  sur  le  plat  intérieur  sont  collées  les  armoiries  gravées 
d'André  Joseph  de  Brancas,  personnage  que  l'on  sait  être  mort  ea  1709,  à 
Beaucaire,  dont  il  était  gouverneur  depuis  1697. 

'  Dans  le  ms.  de  Carpent:as  seulement,  car  celui  de  Paris,  comme  on  Ta 
déjà  remarqué,  n*en  a  conservé  que  des  traces  rares  et  peu  distinctes.  Dans 
celui  de  Carpentras  même,  on  n'en  trouve  plus  aucune  à  partir  du  f*  106  de 
la  nouvelle  foliotation,  probablement  parce  que  les  anciens  chiffres  romains,  au 
lieu  d'être  seulement  plus  ou  moins  entamés  par  le  couteau  du  relieur,  comme 
il  est  arrivé  à  plusieurs  des  précédents,  ont  été  à  partir  de  là  entièrement 
rognés. 

'  J'imprimerai  en  italique  les  numéros  d'ordre  afférents  aux  feuillets  per- 
dus, en  romain  ceux  des  feuillets  subsistants,  sauf  à  placer  ceux-ci  entre  cro- 
diets,  en  tout  ou  en  partie,  selon  qu'ils  auront  disparu  en  entier,  par  grat- 
tage ou  autrement,  ou  qu'ils  seront  seulement  mutilés. 


î 


2  12 


7«  cahier.   ) 


8«  cahier. 

9®  cahier, 
10«  cahier. 

ll«  cahier. 

12«  cahier. 
13*  cahier. 
14°  cahier. 


15«  cahier.   S     — 


16"  cahier. 


]?•  cahier, 
(Complet.) 


LEGENDES  PIEUSES 

—  [xlvix-lj] 

—  [lij-liij*]  (feuillet  double  du  milieu) 

—  liv-lvj =  Ms.  de  Carpentras  f*» 

—  Ivij'lviij.  Manquent. 

—  Iix2 

—  Ix-lxi  (feuillet  double  du  milieu) 

—  Ixij'lxiv,  Manquent. 

—  Ixv-lxxij 

—  [Ixxiij'lxxx].  Manque. 

—  Ixxxj  -Ixxxvij 

—  Ixxxviîj.  Déchiré^. 

—  IxxxiX'lxxxxoj.  Manque  entièrement. 

—  Ixxxxvij'Civ .  là. 

—  cv-cxij\  Id. 

—  cxiij  (^).  Manque. 

cxiij  *-cxiv 

cxv-cxvj  (feuille  double  du  milieu) 

—  cxvii-cxviij 

—  cxix  .  Manque 

—  cxx.  Manque . 

—  cxxj-  cxxij 

—  cxxiij-cxxiv  (feuille  double  du  milieu). . 

—  cxxv-cxxvj 

—  cxxvij 

—  cxxviij 

—  cxxviij  (bis; 

—  cxxix 

—  cxxx-cxxxj 

—  cxxxij-cxxxiij . . 

—  cxxxv^. 


40-42 

43-44 

2-4 

20 
21-22 

5-12 
13-19 


23-24 
25-26 

27-28 


29-30 

31-32 

33-34 

35 

36 

37 

38 

39-40 

41-42 

43 


*  Pour  ce  qui  peut  eucore  se  distinguer  ou  se  deviner  des  numéros  x  à  liij 
(=  Paris  1-44),  voir  ci- dessus,  p.  210  n.  \. 

2  Feuillettransposé,  ainsi  que  les  deux  quisuivent,  depuis  la  mu lilaiion  dums. 
'^  U  reste  deux  minces  fragments  du  bord  extrême  de  la  marge. 

*  Ce  no  ou  l'un  de  ceux  qui  précédent,  à  partir  de  Ixxxvij,  a  du  être  répéié 
par  erreur,  comme  il  est  arrivé  plus  bas  pour  quatre  autres.  De  là  l'irrégularité 
dans  la  série  des  nombres  et  l'anomalie  que  présente  le  feuillet  double  intérieur 
du  15^  cahier  dont  la  première  partie  devrait  porter  un  nombre  pair  et  qui 
est  foliotée  cxv,  au  lieu  de  cxvj . 

5  Sic,  au  lieu  de  cxxxiv,  erreur  qui  compense  celle  du  feuillet  2  de  ce  cahier 
et  laisse  par  conséquent  subsister  l'irrégularité  signalée  dans  la  note  précé- 
dente. 


19*  cahier. 


LEGKNDES  PIEUSES 

—  cxxxvj 

—  cxxxv[ij] 

—  cxxxvi[ij] 

18®  cahier.  (    —  cxxxvi[iij] 

—  cxxxix* 

—  cxxxx 

—  cxxxxj'Cocxxxij,  Déchirés  2. 

—  ''*i'y •  [  Déchirés  3 

—  cxliv .  ) 

—  [cxlv?] 

—  cxlv  (bis*) 

—  cxlvj 

—  cxlvij-cxlix. , 

—  cL  Déchiré  ^ 

—  clj-clij 

—  cliij-cliv 

—  clv   

—  clvj 

—  clvij 

—  clviij-clxv 

—  clxvj-clxxiij 

—  clxxiiij-clxxxj 

—  clxxxi[ij].. .    

—  clxxx[iij]. 

—  clxxx[iv] 

—  clxxxv 

—  clxxxv[i] 

—  clxxxv[ii] 

—  clxxx  [viii] 

—  clxxxix.  Déchiré  ^ 


20«  cahier. 


21  •  cahier. 
22«  cahier. 
23«  cahier. 


24«  cahier. 


213 

44 
45 
46 

47 
48 
49 


50 

51 

52 

53-55 

56-57 

58-59 

60 

60  bis 

61 

62-69 

70-77 

78-85 

86 

87 

88 

89 

90 

91 

92 


*  Ce  feuillet  devrait  porter  le  n©  cxxxx  ;  l'un  des  4  nombres  précédents, 
136,  137,  138  ou  139,  a  donc  été  répété  à  tort. 

'Il  reste  à  chacun  un  morceau  de  l'extrémité  supérieure  de  la  marge.  Quelques 
lettres  se  lisent  encore  sur  le  premier  débris,  moins  étroit  que  le  second. 

*  Reste  à  chacun  un  morceau,  en  forme  de  coin,  du  milieu  de  la  marge  ou  à 
peu  près.  On  y  lit  quelques  lettres  et  même  quelques  mots,  mais  d*où  il  n'y  a 
rien  à  tirer  pour  l'intelligence  de  ce  qui  est  perdu. 

*  Ce  peut  être  aussi  bien  l'un  des  nombres  compris  entre  140  et  144  inclus, 
qui  a  été  répété,  puisque  le  feuillet  précéden*  a  perdu  son  n«  d'ordre  et  que 
quatre  antres  ont  disparu  avant  ce  dernier. 

^  Il  ne  reste  que  deux  tout  petits  et  très  étroits  morc'^aux  de  la  marge. 
B  Reste  UQ  morceau  de  la  marge,  vers  la  partie  supérieure,  où  se  voient 
seulement  quelques  lettrep. 


i 


25*  cahier. 


21  i  LEGENDES  PIEUSES 

—  clxxxx 93 

—  cxc  (bis) 94 

—  clxxx[xj] 95 

—  clxxx[xij] 96 

—  clxxxxi[ij] 97 

—  clxxxx[iiij] 98 

—  clxxxxv 99 

—  clxxxxvj 100 

—  clxxxx[vij] 101 

—  clxxxxv[iij] 102 

,    —  [clxxxxix] 103 

26*  cahier.  ^    _  ^^ ^^4 

—  ccj 105 

—  [ccij-cciv] 106-108 

27«  cahier.         —  [ccv-ccxij] 109-1 16 

i—  [ccxiij-ccxix] « 117-123 
—  ccxx.  Déchiré  ou  coupé  » . 

Entre  ce  28e  cahier  et  la  feuille  de  garde,  il  y  a  la  place  d'au  moins 
un  autre  cahier,  qui  a  dû  être  enlevé,  mais  avec  plus  de  précautions 
que  ceux  du  commencement,  car  la  reliure  n'est  pas  de  ce  côté  aussi 
maltraitée. 

Ainsi,  en  admettant,  comme  nous  le  supposons,  que  le  ms.  dans  son 
état  primitif  se  composât  de  39  cahiers  complets,  il  devait  avoir 
232  feuillets,  dont  il  reste  aujourd'hui  167,  ainsi  répartis: 

Paris  :  44  ; 

Carpentras  :  123  ; 

Il  en  aurait  donc  perdu  65. 

J'ai  parlé  plus  haut  de  n°»  d'ordre  de  chapitres,  encore  subsistants. 
On  remarque,  en  effet,  de  loin  en  loin,  sur  la  marge  gauche  du  verso 
de  quelques  feuillets,  tant  du  ms.de  Paris  que  de  celui  de  Carpentras, 
à  la  hauteur  de  la  première  ou  de  la  seconde  ligne  de  la  page,  des 
chiffres  romains  qui  ont  évidemment  cette  destination.  Ces  chiffres 
n'apparaissent  que  lorsque  un  nouveau  chapitre  commence,  soit  sur  le 
verso  où  ils  figurent,  soit  sur  le  recto  suivant,  c'est-à-dire  sur  l'une  ou 
l'autre  des  deux  pages  que  le  lecteur  a  simultanément  sous  les  yeux, 

1  L'extrémité  de  la  marge  subsiste  dans  les  deux  tiers  de  sa  hauteur;  une 
ou  deux  lettres  au  plus  des  dix  dernières  ligues  sont  encore  apparentes,  mais 
seulement  au  rectoavec  netteté;  au  verso  on  n'en  distingue  plus  aucune,  bien 
qu'il  soit  évident,  par  les  traces  qu'elle  a  laissées,  que  l'écriture  se  continuait 
jusqu'à  la  fia  de  la  page  et  que  le  manuscrit  ne  se  terminait  pas  là. 


LEGENDES  PIEUSES  215 

et  ils  se  suivent  dans  un  ordre  régulier.  C'est  ce  que  montrera  la  table 
suivante,  dans  laquelle  je  place  entre  crochets  et  les  numéros  qui  man- 
quent entièrement  aujourd'hui  pour  une  cause  quelconque,  et  les 
chiffres  retranchés  par  le  couteau  du  relieur  des  numéros  partielle- 
ment conservés. 

[1].  Le  premier  cahier,  dans  lequel  ce  n°  devait  se  trouver,  avec  la 
légende  correspondante,  a  disparu  en  entier. 

[11].  Même  observation. 

[III].  Folio  ix  v°  (disparu). —  Passio  imaginis  Domini  nostriJesu 
Christi,  F°  x  r®  (=  Paris  1  r»), 

[IV]^  F°  xvij  v°.  —  Chapitre  sans  rubrique.  Ibid,  (==  Paris  8  v°). 

[V]*.  F°xxv°.  — In  dedicatione  saacti  Michaelis ,  Ibid.  (  =  Pa- 
ris llv°). 

VI.  F°  XXV  v°.—  In  festivitate  sancti  Pétri.  Ibid.  (=  Paris  16  v®). 

VII.  F*  xxxiij  v°.  —  In  commemoratione  sancti  Pauli,  Ibid,  (= 
Paris  24  v^). 

[VIII]*.  F°  xlj  v*». —  Passio  sanctarum  virginuni  Fidei,  Spei  et 
Caritatis  et  ma'ris  earum  Sapientie.  F°  xlij  r°  (=  Paris  33  r<»). 

[VIIII]*.  Fo  Ij  vo.—  Obitus  sancte  Petronille  et  Felicule.  F°  lij  r»  (= 
Paris  43  r^). 

[X]2.  F**  liij  v^^'sss  Paris  44  w°).—  Passio  sancti  Adriani,  Foliv  r^ 
(=  Carpentras  2  r°) . 

XI.  Fo  Ixviij  vo.  —  Vita  sancti  leronimi.  Ibid.  [=  Carp.  8  Vo). 

XII.  Fo  Ixxj  vo.  —  Passio  sancti  Maximi.  Ibid.  (=  Carp.  Il  vo). 

XIII.  Fo  Ixxij  vo. —  ?  —  Huit  feuillets  (Ixxiij-lxxx)  manquent  après 
celui-ci.  C'est  au  recto  du  premier  de  ces  huit  feuillets  que  com- 
mençait ce  chapitre  XIII,  perdu  en  entier. 

[XIV].  Au  verso  de  Tun  des  feuillets  perdus  qui  précédaientlc  n<*lxxxj 
(=  Carp.  13). —  [Passio  sancti  Thomœ'].  Manquent  de  ce  chapitre  le 
commencement  et  la  fin.  Ce  qui  en  reste  occupe  les  folios  Ixxxj-Ixxxvij 
(==Carp.  13-19). 

[[XV]  et  [XVI].  Ces  deux  chapitres,  dont  le  sujet  ne  peut  être  de- 
viné, occupaient,  avec  la  fin  de  la  vie  de  S.  Thomas  et  le  com- 
mencement de  celles  de  S.  Simon  et  S.  Jude,  les  feuillets  Ixxxviij  à 
cxij,  dont  la  perte  a  produit  la  lacune  la  plus  considérable  de  notre  ms. 

[XVII]  Au  verso  d*un  des  feuillets  perdus  qui  précédaient  le  n°  cxiij 
(sas  Carp.  23).  —  [Passio  sancti  Simonis  et  sancti  Judœ,]  Manquent 
de  ce  chapitre  le  commencement  et  la  fin.  Ce  qui  en  reste  occupe  les 
feuillets  cxiij  à  cxviij. 

*■  Gratté,  mais  se  distingue  encore  sous  le  grattage. 

8  L'angle  du  folio  liij,  où  devait  se  trouver  ce  n©  d'ordre,  est  déchiré. 


i 


•-»  .<- 


2  I  6  LÉGENDES  PIEUSES 

[XVIII].  Sur  Vun  des  feuillets  perdus  cxix  ou  cxic.— [Pas^eo  sancU 
Andreœ'].F''  cxxj  r»  (=  Carp.  29  r°).  I.e  commencement  fait  défaut 
[K]VIIII.  F°  cxxxvj  v°.  —  Passio  sancti  Jacohi.  F°   cxxxvij   r° 

(=  Carp.  45  r°). 

[XXJ.  Sur  l'un  des  folios  disparus  entre  cxl  et  cxliij.  —  Le  peu 
qui  reste  de  ce  chapitre  au  recto  du  folio  cxliv  ne  permet  pas  d'en 
deviner  le  sujet. 

[XXI].  Po   cxliij  s^  (disparu).    -  Sancti  Johannis  evangeliste. 

po  cxliv  ro  (=  Carp.  50  r°). 

[X]XIÏ.  F*>  cxlv  v°.  —  Vita  sancti  Silvestri.  F«  cxlvj  r<»  (=  Carp. 

52  ro). 
XXIII.  F»  clvij  v«. —  Passio  sancti  Bartolomei  apostoli   Ibid.  (= 

Carp.  61  vo). 
[XJXIIII.  F°  clxiv  vo.—  Passio  san-li  Mathei.  F^  clxv  r»  (=  Carp. 

69  ro) . 
XXV.  Fo  clxxxj  v".  —  Passio  sancti  Sixti    et  sancti  Laurentii. 

po  clxxxij  ro  (=  Carp.  79  ro). 

[X]XVI.  P<>  clxxx  v».—  Passio  sancti  Stephani  martyris,  Ibid.  (= 
Carp .  84  v°) . 

[X]XVII.  F»  clxxxij  vo.  -  Vita  sancti  Panthaleonis.  F°  clxxxiij 
ro  (=  Carp .  86  r<>) . 

[X]XV11I  F°  clxxxxij  v«.  —  Vita  sancti  Martini.  F°  clxxxxiij  i*" 
(=  Carp .  97  r*>) . 

XXVIlII.Po  ccj  v».—  Vita  sancti  Benedicti.  Ibid.  (=  Carp.  105  v»). 
Manque  la  fin. 

Le  no  405  des  nouvelles  acquisitions  de  la  Bibliothèque  Nationale  et 
le  n"  461  de  l'Inguimbertine  étant  donc,  comme  il  résulte  de  ce  qui 
précède,  deux  fragments  d'un  seul  et  même  manuscrit,  il  était  naturel 
de  les  réunir  dans  une  seule  et  même  publication.  C'est  ce  que  nous 
faisons  ici.  Je  suis  seul  responsable  de  la  copie  et  de  l'impression  des 
44  feuillets  du  manuscrit  de  Paris  Le  reste  a  été  transcrit  parM.  Geor- 
ges Reynaud;  mais  j'en  ai  corrigé  moi-même  les  épreuves  sur  le  ms. 

La  perte  du  premier  et  du  dernier  feuillet  du  manuscrit,  par  con- 
séquent de  Vincipit  et  de  V explicita  nous  laisse  ignorer  le  titre  que 
l'auteur  ou  du  moins  le  copiste  avait  donné  au  recueil  dont  nous  pu- 
blions les  restes.  Celui  de  Vitœ  sanctorum,  inscrit  sur  la  feuille  de 
garde  et  au  dos  du  manuscrit  de  Carpentras  et  que  Libri  s'est  borné 
à  traduire  en  italien,  paraît  convenir  moins  que  celui  de  Légendes 
pieuses,  du  catalogue  de  M.  Delisle.  puisque  dans  les  deux  premiers 
des  récits  conservés,  ce  qui  était  peut-être  aussi  le  cas  de  ceux  qui 
précédaient  et  qui  sont  perdus,  c'est  de  Jésus-Christ  qu'il  est  ques- 


LEGENDES  PIEUSES  217 

tion.  Nous  croyons,  en  conséquence,  devoir  adopter  ce  dernier  titre, 
non  sans  faire  remarquer  toutefois  qu'au  point  de  vue  de  la  forme, 
c'est,  dans  la  plupart  des  cas  du  moins,  à  de  véritables  homélies  que 
nous  avons  ou  paraissons  avoir  à  faire  ^  Le  tout  est,  du  reste,  comme 
on  le  verra  dans  les  notes  qui  suivent  le  texte,  traduit,  plus  ou  moins 
fidèlement,  du  latin. 

C.  C. 


LÉGENDES  PIEUSES 

EN  PROVENÇAL     DU  XIII»  SIÈCLE. 


[I] 


[H] 


[III] 

[  a  po  1  ro]  INCIPIT  PASSIO  IMAGINIS  DOMINI  NOSTRÏ 

JESU  CHRISTI 

El  temps  que  11  fes  de  Jesu  Christ  acomensava  a  florir  per 
lo  mont  &  a  creisser,  s*ajosterontuh  li  evesque  d'Asia  &  ven- 
gron  en  Capadocia,  en  una  gran  ciutat  qued  hom  appellava 
Cesarea^  per  confermar  los  establimenz  de  sancta  Gleisa.  E 
can  se  foron  tiih  ajostat  ensemps  en  un  lue,  levet  sus  le  ves-  5 
ques  de  Nicomedia  &  acomenset  a  parlar  e  dis:«  Si  a  toz  vos 
autres,  sennors',  plazia,  saintre  ha  un  libret  de  saint  Athana- 
sii,  la  patriarcha  d'Alexandria,  e  poiria  lo  hom  legir.  »  Res- 
ponderon  tuh  essemps  &  disseron  que  mot  lur  plazia  que  fos 
legitz.  Ab  aitant  acomenset  a  legir  &  dis  :  10 

»  Cela  ressort  encore,  pour  les  no^  V,  VI  et  VII,  de  lenr  rubrique  même. 
2  Ms.  de  Paris.  —  3  Ms.  sennols. 


218  LEGENDES  PIEUSES 

«Una  ciùtatz  es  en'Ciria,  denfra  los  termes  de  Tjri  &  Sjdo- 
nis,  qued  es  appellada  B^ritus  ;  &  en  aquesta  ciutat  estavan 
moût  Judeu,  car  en  aquella  ciutat  avia  major  synagoga  qued 
en  nengun  loc  autre  de  la  terra.  Josta  aquesta  sjnagoga 

15  estava  uns  bos  hom  christians  en  una  maison  que  logava. 
Aquest  bos  hom  avia  fah  far  una  image  de  nostre  Seinnor 
Jesu  Christ  aici  con  fo  mes  en  cros,  &  avia  la  messa  en  sa 
cambra  on  jazia,  sagellada  en  la  p9,ret,  denant  lo  leg  on  jacia. 
Per  la  figura  d' aquella  magestat  el  pregava  nostre  Sennor 

20  de  jornz  e  de  noh.  Cant  ac  estât  lonc  temps  aquel  pros  hom 
en  aquella  maison,.  .*  loguet  el  corn  de  la  ciutat  [1  v®]  una 
autra  maison,  caraquil  li  era  trop  pauca  ad  el  &  a  sa  mainada. 
Meiret  se  la  ab  tota  sa  rauba  &  ab  tôt  quant  avia,  estiers 
aquesta  majestat  qued  oblidet.  Aquist  magestas  remas  per  la 

25  voluntat  de  Deu,  qui  vult  omnes  homines  salvos  fieri  et  ad  agni- 
cionem  veritatis  venire;  le  qualz  volria  totz  los  homes  del  mont 
esser  salz,  &  que  venguessan  a  la  fe  de  veritat.  Apres,  quant 
aquest  bos  hom  s'en  fon  eissitz,  intreti  us  juzeus  per  estar.  E 
quant  iac  estât  gran  pessa,non  se  fon  donatz  garda  d'aquesta 

30  magestat;  car  aquil  cambra,  on  aquist  magestatz  era,  era  locs 
escurs,  e  non  la  podia  hom  vezer  fort  clar.  Cant  venc  un  jorn 
aquest  juzeus  envidet  un  autre  juzeu,  e  manjeron  laintre  en 
la  cambra  on  aquist  magestatz  estava;  e  domenz  qe  manjavan, 
aquest  juzeus  autre  qued  era  envidatz  esgarda  en  la^  paret 

35  e  vi  aquesta  magestat  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ  sagellada 
intre  ;  e  cant  Tac  vista,  fon  moût  iratz  e  marritz,  e  regarda  se 
vers  céllui  que  l'avia  envidat,  &  comenset  lo  a  rasonar  moût 
asprament,  &  dis  li:  «  En  per  que  tenes  esconduda  en  ta 
maison  la  figura   de  Jesu  Nazaretz?  »  Ab  aitant  aquest  folz 

40  acomenset  a  dir  tan  foJlas  paraulas  e  tant  malas  de  notre 
Seinnor  Jesu  Christ  que  nuilz  bos  hom  qued  crezensa  ni  espe- 
ransa  agues  en  Deu  [2  r°]  soffrir  ni  escoutar  per  nuilla  ren 
non  0  pogra.  L'autre  juzeus,  qued  aquel  trachoravia  envidat, 
acomenset  se  arazonar  <k  far  raout  granz  sagramenz  qued  el 

45  non  s'era  ancar  donaz  soin  d'aquella  magestat.  Ab  aitan 
aquest  tracher  se  calet  &  non  parlet  adonx  plus.  Manjeron, 

1  Deux  lettres  illisibles  [el?). 
*  Ms.  sa. 


LEGENDES   PIEUSES  219 

• 

e  quant  agron  manjat,  aquest  autre  comandet  Ta  Deu  e  tenc 
sa  carrera.  &  va  s'en  alz  sabis  &  alz  princes  do  lur  gent  e  dis 
lur  qued  «aitalz  judeus  qued  era  de  nostre  linnatge  &  de  nos- 
tra  lei  avia  &  t 'nia  en  sa  maison  rescondudamenz  la  mages-  50 
tat  de  Jesu  de  Galilea.  »  Eil,  cant  ausiron  aquesta  paraula, 
foron  moût  irat  &  moût  marrit;  &  erà  ja  vespres,  &  non  vol- 
gron  parlar  de  tôt  aquel  seras  tro  al  matin. 


Item. 

»  Quant  venc  lo  matin,  li  princep  e  tuh  li  major,  ab  tôt  55 
l'autre  pobol  delz  judeus,  ab  aquest  qued  avia  aici  trahit  son 
conpainno,  anneron  a  sa  maison  d'aquest.  Intreron  laintre,  e 
troberon  la  magestat  aici  con  aquest  lur  avia  comtat.  E  van 
penre  aquest  mesqui  de  juzeu,  irat  &  marrit  per  la  magestat, 
e  bateron  lo  e  tormenteron  lo  moût  asprament  ;  e  pois  van  lo  60 
penre  e  me[ne]ron  lo  denaut  la  synagoga  dimei  mort.  Pois 
van  penre  la  majestat  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  e  gelant 
la  en  terra  &  acomenseron  la  a  batre  ab  los  pes  &  a  escarnir 
éi  adiré;  [2  v®]  «  Totas  aquellas  causas  que   nostre  pairon 
feron  a  Jesu  Nazaretz,  &  nos  fassara,   per  lo  seu    despecg,  65 
ad  aquesta  soa   magestat  e  non   nos  en  triguem.  Car   aici 
con  hom  leg  en  la  soa  passion  que  nostre   pairon  meseron 
sobre  son  cap   corona  d'espinas  &  Tabeureron  de  vinaigre 
mescle  ab  fel,  el  meseron  en  cros,  el  fiqueron  clavelz  en  las 
mans  &  elz  pes,  &  pois  feron  li  passar  una  lansa  per  lo  seu  70 
latz,  e  nos,  car  non  fom  ad  aquo,  fassam,  al  seu   despech, 
tôt   aizo   ad  aquesta  soa  magestat.  »  Adonx,   ab  aquestas 
malas  paraulas,  tôt  so    que  fon  fah  a  Jesu  Christ  el   temps 
de  la  soa  passio   eil  renovelleron   e   feron  ad  aquesta  soa 
magestat,  et  a  dererelegiron  un  delz  plus  fortz  trachors  qued  75 
aqui  era,  e  meseron  li  una  lansa  en  las  mas  e  feron  li  foire  lo 
latz.  E  can  le  tracher  ac  fah  aquesta  maleza,  per  lo  manda- 
ment  delz  autres  judeus,  repente  07*bis   terre  elementa  snnt 
mutata  et  alta  signa  renovantur  antiqua,  quia  ab  jectu  ferientis 
lancée^  tanquam  ex  materia  sensMlt,  aqua  et  sanguis  distillai^e  80 
cepit  ad  laudem  et  gloriam  eferni  Dei  patris.  En  eus  pas  li  élé- 
ment del  segle  foron  mudat  &  las  signas  antiqnas  foron  reno- 


220  LEGENDES   PIEUSES 

• 

velladas.  E  de  quai  manera  foron*  renovelladas  las  antiquas 
sein  lias  &  Ji  élément  de  la  terra  mudat?  Car,  quan  le  tracher 
85  trais  la  lansa  del  costat  de  la  imagen,  e  lo  [3  r°]  n'issi  sanx  & 
aigua,  con  fera  de  nuil  home  carnal,  &  [comenset]  a  rajar  moût 
fort,  ad  laudem  et  glon'am  eierni  Dei  patris, 

Itbm  de  imagine. 

»  Tibi  igitur,  Christe,  cura  Pâtre  Sanctoque  Spiritu  gloria  sit 
90  perpes  honorque  per hennis  ac  virtus  tndeficiens  per  indeficientia 
temporum  secula.  Amen,  A  te,  Senner  Jesu  Christ,  ab  lo  Paire 
&  ab  lo  Saint  Esperit,  sia  gloria  &  durabla  honors  &  vertuz 
non  defallenz  per  totz  temps.  Amen.  Seinnér,  qui  es  aici  con 
tu?  Car  autre  Deus  non  es  mas  tu  ;  tu  fas  meraveillas  sus  el 
95  cel  e  miraclas  granz  sa  aval  en  terra.  A!  Seinner  Jesu 
Christ,  con  granz  es  en  homilitat,  qui^  cum  deus  esses  invisibilis 
et  tmpassibilis,de  supernis  monfïbus  inhanc  convallem  lacrimarum 
descendendo  et  morticinum^  nostre  carnis  assumendo  apparuisti 
tocius  mundi  salvator.  Tu,  qued  eras  Deus  non  soffrens  mort, 

100  &  qued  non  podias  esser  vist,  descendest  delz  sobeiras  pohg 
en  aquest  val  de  lagrimas,  &  presist  la  nostra  carn  mortal  & 
apparegnist  salvaire  d'aquest  mont.  Otu,  Senner,  quan  granz 
e  quan  misericordios  &quan  sennorilz  es,  car  tu,  el  temps  que 
dévias  esser  trahiz,  non  vediest  que  le  tracher  que  te  traie 

105  non  te  b  lises,  &  al  serv  reddest  Taureilla  que  li  fon  taillada, 
quan  tu  per  los  nostres  peccatz  eras  menaz,  quais  agnelz 
soaus,  a  la  mort.  0  quam  pins  es  homousion^ I  0  tu,  Senner 
Deus,  quan  bons  &  quan  soaus  [3  v^]  es!  car,  domenz  que  tu 
eras  en  la  cros,  preguiest  lo  tieu  paire,  qued  es  poderos  de  tôt 


i  Ms.  /bn,  avec  le  signe  abréviatif  qui  vaut  er  au  dessus  de  Vo 
'  Lecture  incertaine;  le  mot  a  été  corrigé;  il  semble  qu'on  avait  d'abord 
ôcrit  morciu,  avec  le  signe  de  la  nasale  au  dessus  de  Vu;  on  parait  ensuite 
avoir  fait  de  l'r  un  groupe  indistinct  (/-f)  el  exponctué  Vi;  au  dessus  de  lo 
dans  l'interligne  on  a  ajouté  un  r  et  au  dessus  de  !'/  un  n.  Le  tout  ferait  bien 
mortici?ium  (=  charogne,  métaphoriquement),  si  l'on  considérait  comme  invo- 
lontaire le  point  placé  au-dessus  de  Vi  et  qu'on  lût  ou  suppléât  la  même  lettre 
après  le  t.  C'est,  du  reste,  la  leçon  du  texte  latin  ici  reproduit. 

3  Ms.  hoo,  avec  un  tilde  au  dessus,  séparé  de  nsion^  comme  8*11  y  avait  là 
deux  mots.  La  traduction  montre  d'ailleurs  que  l'auteur  provençal  n'a  pas  com- 
pris. 


LEGENDES   PIEUSES  221 

quant  es,  per  aquelz  que  te  crucifiavan  &  dissist  :  «  Pater,  1 10 
tgnosce  illis,  quia  nesciunt.  Paire,  percîona  lur,  car  eil  non 
sabon  que  se  fan.  »  Senner,  tu  nos  laisseist  eissemple  & 
demonstrament  de  la  toa  sancta  bontat,  que  nos  aguessarn 
vers  nostres  enemix.  0  tu,  Jesu  Christ,  bénigne  reformaire  de 
Tuman  linnatge,  qued  en  aquella  carn,  que  tu  presist  de  la  115 
sancta  vergen  Maria,  te  laissest  tener  &  liar  &  flagellar  & 
granz  anctas  far,  &  a  derrier  te  laisseist  mètre  en  cros  per 
la  nostra  fragilitati  A!  Senner  Reis  d'Israël,  quan  glorios  te 
sezes  en  la  cadera  del  tieu  règne,  lo  quai  li  fello  &  li  non  cre- 
zevol,  quant  te  viron  amermat  un  pauc  ménz  delz  angelz,  non  120 
te  tempserôn  far  morir  ad  espanteol  mort  &  que  non  te  pie- 
guesson  a  salvatga  sentencia.  E  tu,  bons  mejers  de  Deu  e 
delz  homes,  filzde  Deu  lo  viu,vec  te  que,  per  aqui  mezeis,  per 
la  humana  salut  as  suffert  que  li  serpentina  genz  delz  juzeus 
ajan  mes  la  toa  image  en  la  cros,  non  solaraent  per  reprenne-  125 
ment  delz  non  fizelz,  mas  a  confermament  de  tos  fizelz.  Per 
aquest  dos  &  per  toz  los  autres  bens  fagh  de  la  toa  gracia,  que 
tu  donas  &  as  donat  a  Tuman  linnatge,  per  la  toa  misericordia 
te  rendem*  nos  granz  laus&  granz  gracias,  [4  r']  nos  tei  serve 
e  tei  serven,  aoras  &pe?'  infinita  secula  seculorvm.  Amen.  130 

»  Audite,  seinnor,  zo  que  De  us  vole  e  sufferc  que  n'esdeven- 
gues  puis.  Per  la  soa  voluntat  n'esdevenc  zo  que  vos  anem 
comtar  aici.  Aquil  juzeu  qued  eran  aqui,  quan  viron  aquesta 
meravilla, * alz  princes  &  ad  aquelz  majors  qued  eran  aqui: 
«  Sennor,  nos  auzem  dir  ad  aquelz  de  Galilea  que  crezon  en  135 
Jesu  que,  quant  annava  per  terra,  el  fazia  seinnas  e  meravillas 
el  pobol.  Aporte  om  una  amola  de  veire  &  pause  Tom  a  la  bocca 
de  la  naffra  de  la  magcstat,  &  vejam  si  i  donara  ni  i  degotara 
seinna  del  sanc»)  Ab  aitant  aporteron  una  ampolla  de  veire 
&  meseron  la  a  la  bocca  de  la  naffra  ;  &  aqui  eis  fon  plena  140 
del  sanc  entre  sus  a  la  bocca.  Quan  li  juzeu  viron  aizo,comen- 
set  a  dir  Tus  a  Tautre  :  a  Porte  om  aquesta  ydria  a  nostra 
synagoga,  e  fassahom  venir  toz  los  malautz  e  totz  los  frevolz 
qued  hom  poira  atrobar,  &  oinna  los  hom  d'aquest  sanc;  et 
en  eis  pas  seran  sanat,  si  veras  son  aquellas  causas  que  nos   145 

*  Ms.  renden. 
2  Suppl.  van  dir? 


222  LEGENDES  PIEUSES 

auzem  dir  de  Jesa  Christ.»  Et  fon  aventura  qued  en  la*  vila 
avia  jazeu  malaut,  qued  avia  estât  lonc  temps  que  non  s'era 
levaz  de  son  leg  ni  se  podia  girar  de  Tun  latz  en  Tautre,  qui 
nol  girava;  &  avia  una  malautia  qued  hom  appellava  parali- 

150  sin;  &  destren-[4  v*>]-nialo  tan  fort  que  po(r)der  non  avia  nen- 
gum,  mas  solament  en  la  lengua.  Van  penre  aquest  li  autre 
juzeu,  epoiteron  lo  a  li  sjnagoga,  &  oisseron  lo  d'aquest 
sanc  ;  &  en  eus  pas  qued  aquest  fon  oins  d'aquest  sanc,  a  laus 
&  a  la  gloria  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  el  levet  sus  del 

155  leg  en  que  jazia,  e  fon  aici  sans  &  alegres  con  si  mal  non  agues 
agut,  &  acomenset  a  saillir  et  a  trepar,  co  fa  le  sers  en  la 
forest.  Le  pobolz  toz,  cant  auzi  aquesta  meravilla,  aduzian  los 
cex,  &  oinnia  lur  hom  los  oilz^  &  eran  enluminât  &  recobra- 
van  lo  vezer  aicel  que  non  avian  veut' .  Lo[s]  contragh  &  los 

160  mangs  &  totz  los  malauz  de  qualque  malautia  qued  aguessant 
en  eus  pas  eran  sanat  e  garit,  quant  eran  oinzh  d'aquel  sanc  ; 
e  recobravan  lur  menbres  celz  que  non  avian;  li  sort  reco- 
bravan  lur  auzi r  ;  li  mut  recobravan  lur  parlar  ;  li  lebros  i  eran 
sanat;  las  plantas  delz  clops  i  son  refermadas  ;  et  alieinfirmi- 

165  (ates  diverse  ad  laudem  et  gloHam  fabricatoris  mundi  remediwn 
consecuntur  salutis;  e  de  las  autras  enfermetatz  a  laus  &  a  la 
gloria  d'aquel  seinnor  que  fab reguet  lo  mont  i  recebiant  re- 
medi  de  salut. 

»  Igitur  kebrei,  dum  talia  fièrent^  compuncti  corde,  omnes  pa- 

170  riter  crediderunt  in  Dominum  Jesum  Christum  et  cum  lacrimis 

incredulitatem  sue  mentis  [5  r°]   deflebant  dicentes  :  Gloria  tibi, 

domine  Deus patrum  nostrorum,  qui  nobis  miseris  et  indignis  pec- 

catoribus  revelasti  Jesum  Christum,  filium  tuum,  quemut  Esaya- 

num  cecinit  vaticinium  virgo  ante  partum  genitrix  Maria  edidit  et 

175  non  solum  in  par  tu,  verum  etiam  post   partum,  eadem  mater 

inviolata  permansit,  Li  ebreu,  canviron  aquestas  causas,  cre- 

zeron  tuh  ensemps  en  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  &  osteron 

lur  non  crezensa  de  sobre  se  ;  &  dizian  ab  lagrimas&  ab  plors: 

a  Senner  Deus  de  nostres  pairons,  a  te  sia  gloria  &  laus, 

180  qued  a  nos,  mesquis  peccadors,  as  révélât  lo  tieu  fil  Jesu  Christ, 

1  Ms.  sa. 

a  Le  mot  est  surchargé;  il  semble  qu'oQ  ait  voulu  corriger  vht;  mais  IV, 
daos  ce  cas,  a  été  omise. 


LEGENDES  PIEUSES  223 

lo  quai  avia  propbetizat  lonc  temps  adenant  Ysayas,  &  avia 
dih  quo  verges  lo  concebria  &  vergens  Tenfantaria  &  aprop 
Teufantamen  remanria  vergens.  0  tu,  Jesu  Christ,  filz  de  Deu 
viu,  a  te  sia  gloria  &  laus,  car  tu  as  fag  conoisser  la  toa  gran 
vertut  en  ganren  pobolz,  &  as  révélât  lo  tieu  glorios*  in  Israël  185 
&  as  sostrah  los  filz  de  Jacob  de  la  foUa  crezensa^  en  que  esta- 
van.  0  tu,  Sainz  Esperiz,  a  te  sia  granz  gloria,  qued  es  vivi- 
fiaire  &  restauraire  del  human  linnatge,  le  qualz  donas  ad  un 
cada  un,  per  Faigua  del  sant  baptisme,  remission  del  peccat 
original  (peccat),  te  manifestem  nos  per  sennor  e  per  Deu  ;  a  te  190 
reddem  granz  gracias  &  grand  laus.  Seinner,  perdona  a  nos, 
peccadors  escumenegatz,  car  nos  [5  v**]  nos  tornem  a  te  de 
totz  nostres  coratges.  Senner,  recep  nos  en  la  confession  del 
tieu  saint  nom,  car  nos  fugem  a  te  per  penitencia  » 

»  Eo  tempore,  apud  eandem  civitatem,  v[i]r  religiosus  et  per  195 
cuncta  laudabilis  Adeodatus  preera[t]  metropolitanus.  Ad  quem 
accedentes  hebreiyCum  lacrimiset  gemittibus,  universa  inpropatu- 
lo  que  acta  fuerant  pandunt  per  ordinem.  En  aquel  temps  era 
en  aquela  ciutat  uns  arcivesques  moût  bons  hom  e  moût  reli- 
gions &  en  totz  afars  temenz  Deu.  Ad  aquest  saint  homen  ven-  200 
gron  tuh  li  hébreu,  qued  estavan  en  la  ciutat,  e  comteron  li 
tôt  per  orde  de  quai  manera  era  esdevengut.  Quan  le  bons 
hom  auzi  aizo,  rendet  granz  laus  e  granz  gracias  a  nostre 
Sennor  ;  après  demandet  lur  le  bos  hom  de  cui  avian  agut 
aquella  image  de  la  figura  de  nostre  Sennor.  Eil  responderon  205 
e  disseron  qued  aitalz  hom  avia  estât  en  aquella  maison,  & 
avia  la  oblidada  per  aventura  laintre  en  aquella  cambra  en 
que  jazia.  Aqui  mezeis  Tarcivesques  trames  querre  aquest  bon 
home;  &  quant  aquel  bons  hom  fon  venguz  denant  el,  le  bons 
hom  Tarcivesques  demandet  li  de  quai  manera  era  esdeven-  210 
gut  ni  qui  podia  aver  formada  tan  meravillosament  aquella 
imagen.  El  respondet  &  dis  qued  aquel  [6  r^]  Nichodemus  Tavia 
pencha,  le  qualz  era  discipolz  de  Jesu  Christ  rescondudamenz, 
car  a  sauput  non  osava  ^  esser,  per  paor  delz  juzeus  ;  le  qualz 
parlet  ab  Jesu  Christ  de  noh,  aici  con  diz  li  Escriptura:  Qui  215 

*  Sic,  Supp.  wow? 

*  Substitué  à  lei^  par  un  renvoi  à  la  marge. 
3Corr.  o  awava? 


2zl  LEGEXDKS   PIECSES 

vénérai  noete  ad  Dominum  Jesum,  quia  discifMhi»  ejai  erat  m 
ffCC»4Uf^  propter  metum  judei^rum  ;  qoed  era  Tengurz  parLar  an 
Jeiïa  Christ  v,e  oohg,  car  soâ  discipolz  era  rescoadadamenz. 
per  la  paor  deU  juzeua.  Ar|aeât  avîa  depeacha  ia  imagen,  e 

22r)  quai)  vole  morir,  laisse!  la  a  Gamaliel.  Aqaest  Gamalielz  tba 
i]Qai.%tre  de  saint  Pau],  e  can  venc  a  fin,  laisset  la  ad  Acheu  ; 
ai  Aehens  liuret  la  a  Jacme;  et  Jacmes  a  Sjmeon,  et  Svmeonz 
ad  un  qued  avia  nom  Matheu.  Et  enaici  de  pairon'  ede  gène- 
racion  en  génération,  estet  en  Jérusalem  tro  al  quaranteu  an 

225  qued  nvia  que  nostre  Senne r  Jesu  Christ  s'en  era  pnjatz  en 
ceL  l'ois  do.^t  »nz  enanz  que  Titus  ni  Vespasianus  li  emperador 
de  Rorna  destruissessan  Jhenisalemni  messessanen  caitivitat 
los  juzcus  que  i  troberon  *,  li  âdel  de  Jesu  Christ,  qued  esta  van 
en  l;i<nutat,  foron  amonestar  del  Saint  Esperit  qued  eissessan 

230  d'aqu^dla  ciutat,  ah  toz  los  saiictuaris  qued  apertenian  a  la 
nostra  religion  À  a  la  nostra  feii,  cl  annessan  s'en  en  la  terra 
ffun  rei  (\\vn\  :ivia  nom  Âgi'i()a,  qued  avian  elegit  <k  establit 
li  Roman.  En  H<juel  temps  aquist  âgura  de  la  imagen  de  nostre 
S<;nnor  venc  [0  v**]  «n  nostra  lena,  cl  eu  ac  la  de  mon  paire  e 

2^r>  (le  m:i  maire  que  la  me  laisscron,  Ci  eu  ai  la  enaici  aguda  e  ten- 
gnda  per  hcretat.  Ilec  vera  racio  esse  manifestissime  compro^ 
/mlur.  Aquist  razons  es  proada  manifestament  veraia,aici  con 
eu  vos  ai  comtat  d'aquesta  imagen  de  nostre  Senuor  Jesu 
Christ,   salvaire  del  mont,  de   quai   mariera   fon  meirada   de 

240  Judea  en  la  terra  de  SiriM.  » 

»  Audiens  talia  beatissimm  pontifex,  magnanimus  redditus,ad 
judeos  converti tur,  dicens:  «  Queso  vos  ut  confiteamini  quid  de 
Chrisio  nostro  sentitis.))  Le  benazuratz  archivesques,  quant  ac 
auzit  aquosta  paraula,  ac  moût  gran  gauh  e  giret  se  deus  los 

245  juzeus,  &  comenset  lur  a  dir:  «  Prec  vos  que  vos  me  diguas 
.si  vos  crezos  el  nostre  Jesu  Christ.  »  Ab  aitan  eil  responderou 
ttih  onsemps  o  disseron:  «  l/nus  est  Deus  pnter  et  ipse  ingen[iy 
tus,  Unus  est  Jésus  Christ  us,  ejus  filius,  et  ipse  unigenftus,  Unus 
Spiritus  Sanctus  et  ipse  ab  utroque  procedens.  Uns  es  Deus 

250  le  paire  6i  el  non  es  engenratz.  Uns  es  Jésus  Christ,  le  seus 
fllz,  &  aquel  es  solz  engenratz.  Uns  es  le  Sainz  Esperitz  & 
aquel  eis  de  Tun  &   de  Tautre.  Aquest  Deu  crezem  nos  un 

*  Suppl.  e?i  fil'?.  —  2  Substitué  à  i  eran,  écrit  d*abord. 


LEGENDES  PIEUSES  225 

en  trinitat  &  trin  in  unitat.  Aquest  manifestem  ;  aquest  lau- 
zem;  aquest  beuezizem;  aquest  glorifiam.  »  En  après,  quant 
agron  dih  aizo,  getan  se  tuh  ensemps  en  terra,  &  ab   plorj^  &  255 
[7  r**]  ab  lagrimas  pregueron  li  qued  el,  per  la  soa  merce,  zo 
es  Tarcivesques,  los  deinnesbatejar.  Le  sanz  evesques,  segon 
lup  peticion  e  lur  preguera,  lavet  los  totz  elz  renovellet(z)  del 
saint  baptisme.  Factum  est  autem  magnum  gaudium  in  illa 
cîvitate,  super  tanta  reuocata  multitudine  stirpis  judaice  diabolica  260 
prctvitale  et    ad  gratiam  supetme  hereditatis   intrante,  Granz 
gauh,  zo  diz,  fon  fah  per  tota  la  ciutat  per  aquella  gran  com- 
painna  delz  juzeus,  car  se  foron  tout  d'aquella  error  en  que 
eran,  e  se  foron  tuh  tornat  a  la  fez  &  a  la  crezensa  de  Jesu 
Christ.  Gant  venc  aprop  que  foron  tuh  batejat,  pregueron  tuh  265 
ensemps  aquel  saint  evesque  que  totas  lur  synagogas  recon- 
silies  *  e  sagres,  en  la  honor  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  lo 
salvaire  del  mont.  Ab  aitant  Tarcivesques,  josta  lurpregueira, 
ab  gran  gauh  nedejet  e  fe  mundar  e  lavar  las  sjnagogas,  e 
sagret  las  e  fez  en  gleisas  en  la  honor  de  nostre  Sennor  Jesu  270 
Christ.  Aquil  fama  fon  saupuda  en  loin  &  en  près,  per  tôt  lo 
segle  &  per  totas  las  terras,  e  fou  conseilz  que  tuh  li  eves- 
que &  li  arcivesque  de  la  fen  catholica,  on  quo  fossan,  bas- 
tissan  gleisas  &  oratoris  el  sagressan  &  autars',  en  la  honor 
de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  lo  salvaire  del  mont.  Car  tro  275 
ad  aquel  temps,  li  nostre  saint  pairon  &  li  nostre  major  non 
s'en  eran  ausat  presumir  de  far  que  fezessan  gleissas. 

»  Venerabilis  [7,  v°]  autem  pontifex,  etc.  L'onratz  evesques 
acomenset  a  pensar  de  jornz  e  de  noh  &  a  tractar  en  son  cor 
que  faria  ni  que  poiria  esser  fah  d'aquesta  ydria,  qued  era  280 
piena  del  sanc  &  de  Taigua  qued  era^  eissit  dellatz  de  la  ima- 
gen,  qued  era  fâcha  a  la  figura  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ. 
Pero  trobet  conseil  bon  &.profechaol,  a  salut  de  la  fen  ca- 
tholica &  de  sancta  Gleisa.  Près  ampollasde  veire  e  d'evori  e 
de  cristal  e  d'argent  (&  d*aur,  e  mes  en  cada  una  d' aquel  sanc,  285 
e  trames  las  per  totas  las  terras  en  las  gleisas,  e  trames  escrih 
en  carta  de  quai  manera  era  esdevenguda  aquist  granz  mera- 


1  Ms.  r  consilietz. 

2'Corr.  e  sagressan  autars?  Ou  seulement  els? 

^  Corr.  ei^an  ? 

16 


226  LEGENDES  PIEUSES 

villa,  e  que  fostotz  temps  maissauput  e  récitât  en  sancta  Gleisa. 
Pois  establi  que  trastuh  li  fizel  de  sancta  Gleisa  que  cad'an 

290  fesessan  festa,  en  remenbransa  de  la  passion  d'aquella  gloriosa 
imagen  de  la  figura  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  e  la  onres- 
san  e  la  colguessan  aitan  fort  con  farian  lo  jorn  de  Pascas  o 
de  Calendas  .v°.  idus  novembris.  Per  amor  d'aizo,  conoscan 
tuh  cil  que  son  de  la  nostra  religion  &  coledor  de  la  nostra  fen 

295  qued  aquist  relations  es  certa  e  veraia,  qued  aici  eissi  sanx 
&  aigua  del  latz  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ  sus  en  la  cros 
con  a  fah  de  la  soa  sancta  imagen,  en  la  ciutat  de  Berit  ;  & 
d'aquel  sanc  troba  hom  ancar  en  montas  gleisas.  E  per  aizo 
volem  vos  pregar  &  amonestar  que  [8  r**]  nuil  sanc  non  cre- 

300  zaz  autre  que  sia  de  Jesu  Christ  mas  aquest  &  aquel  que  per 
las  mas  delz  preveires  e  per  la  obra  del  Saint  Esperit  le  vis 
esdeven  sanx,  sus  en  la  ara  de  Tautar.  E  qui  aquestas  causas 
creira  d'autra  manera  senz  dopte  es  loin  de  la  veritat.  Sennor 
fraire,  car  eu  sabia  aizo,  ai  moût  désirât  qued  eu  o  fezes  saber 

305  a  la  vostra  amor  &  a  la  vostra  caritat,  qued  vos  per  aquestas 
causas  puscas  saber  quan  granz  es  li  misericordia  de  Deu,  qued 
ell  a  ab  nos.  Per  aizo,  sennor,  annaz  per  la  via  delz  seus  man- 
damenz  sen  tota  triga,  &  rendes  li  trastotas  horas  laus  & 
canz,  e  pregaz  la  soa  longuanimitat  e  la  soa  pietat  benigna, 

310  manifestant  ab  la  Psalmista  que  diz:  «  Magnificate    eum    et 

exaltate  nomen   ejus  per    cuncta  secula  secw/orww.  A  mbn  . 

Magnifiatz    &    eissaussaz    lo    seu    nom  per    totz    temps. 

Amen.  » 

Item. 

315  Cant  sainz  Peire,  evesques  de  Nichomedia,  ac  legit  totas 
aquestas  causas,  qued  ac  trobadas  escrichas  el  libre  de  nos- 
tre paire  saint  Athanasii,  &  ac  las  recitadas  en  concili,  en 
Capadocia  la  terra,  en  una  ciutat  qued  avia  nom  Cesarea, 
humilment  redderon  tuh  ensemps  gracias  a  nostre  Seinnor 

320  Jesu  Christ  ;  pois  comanderon  se  tuh  ensemps  a  Deu,&  tornet 
s'en  cada  us  la  don  era,  lauzant  nostre  [8  v°]  Sennor.  Aquist 
leissons  fon  pois  tornada  de  grecx,  en  qued  era,  en  lati,  zo 
es  en  aquesta  nostra  lengua  ;  &  es  esgricha  en  mouz  libres 
nostres.  Unde  sit  laus  et  honor  Palriet  Filio^  Sanctoque  Spiri- 

325  tui,  ab  utroque  procedenii,  per  secula  indeficientia .  A  m  b  n  . 

*  Après  filio,  et  (en  abrégé)  exponctué. 


LEGENDES  PIEUSES  827 


[IV]  « 


Le  nostre  salvaire  &  le  nostre  rezemeire  Jésus  Christ, 
davant  que  receupes  mort  ni  passion  sus  en  la  cros,  per  la 
rezemzo  de  Tuman  linnatge,  trames  una  pistola,  escriclia  ab 
las  soas  saintas  mas,  al  rei  d'una  ciutat  qued  avia  nom  Ëdis-  5 
sena,  qued  era  caps  de  tota  Mesopotaraia  Syria.  Aquest  reis 
volgra  moût  vezer  Jesu  Christ,  per  malautia  qued  avia  gran, 
de  que  volgra  esser  sanatz.  Aquest  reis  desirava  &  avia  mot 
gran  talent  de  vezer  Jesu  Christ  corporalmenz^.  Nam  idem  rex, 
audi[ti\s  signis  miraculorum  ejus,  per  Ananiam  cursorem  in  Ilie- 
rosolimis  ad eum  direxit  epistolam.  Carie  reis,  quant  ac  auzit  10 
las  seinnas  e  las  granz  meravillas  que  Jésus  Christ  fazia, 
trames  li  leiras  per  un  messatge,  qued  avia  nom  Anania,  en 
la  terra  de  Jherusalem  on  Jésus  Christ  estava  ;  en  las  qualz 
letras  li  fez  saber  lo  gran  talent  qued  el  avia  dé  lui  a  vezer 
6  la  gran  voluntat.  15 

Epistola  quam  misit  rex  Jesu  Christo. 

[9  r®]  «  Agarus,  toparcha,  Uchane  filius,JesUjSalvatori  bono, 
qui  in  locis  apparuit  Iherosolimorum,  salutem  dirigimus  ma- 
ximam,  Agarus  toparcha,  le  fils  d'Ucha,  a  Jesu  lo  bon  Salvador, 
le  qualz  es  apparegutz  en  la  terra  de  Iherosolima,  trametem 
moût  granz  salutz.  Eu  ay  auzit  de  te  &  de  la  sanitat  que  tu  fas,  20 
que  senz  herbas  &  senz  totz  autres  metjamenz  sanas  et  curas 
las  enferme tatz  delz  homes  ;  &  per  aizo  eu  sai  en  mon  coratge 
que  tu  est  us  d' aquest  dos:  0  tu  es  Deus,  o  tu  eist  filz  de  Deu. 
Per  amord' aizo,  eu,desirans  moût  te  vezer,  aitrames  atehumil- 
menz  aquestas  letras,  que  tu,  si  li  toa  merces  es,  deinnes  venir  25 
ad  me,&  que  tu  me  sanes  d*aquesta  mena  mala  malautia  &  me 
desliures,li  qualz  m'a  tengut&  tormentat  per  mouz  anz  en  mon 
legh.  Eu  ai  auzit  que  li  fellon  juzeu  t'agachan  &  se  trabaillan 
mont  conte  poscan  delir  &  aucire  &  ostar  la  toa  memoria  de 
sobre  terra.  Senner,  eu  ai  una  ciutat,  jacia  zo  qued  a  te  sia  30 
pauca,  a  nos  autres  es  granz,  e  ven  t'en  estar  aqui  ;  e  fai  en 

^  Sans  rubrique  dans  le  ms. 

*  Ms.  corpalmenz,  avec  p  simplement  barré. 


^28  LÉGENDES  PIEUSES 

a  ta  voluntat  &  a  ta  guiza.  Vale,  Jesu  àone,  salvutor  oràis  terre, 
semperque  nostri  digneins  memor  esse,  Deus  te  salv,  Jésus  bons, 
salvaire  del  mont,  menbre  te,  si  te  platz,  lotas  horas  de  nos.  »» 

«^5  EpISTOLA   DOMINI   QUAM  MISIT  REGI. 

[  9  V**  ]  a  Beatus  es  qui  in  me  credidisti,  cum  ipse  non  videris. 
Benazuratz  es  tu  que  non  m'as  vist  <k  as  crezut  en  me  ;  car 
escrih  es  de  me  que  cil  que  me  veiran  non  me  creiran  <S: 
cil  que  non  me  veirau,  cil  creiran  en  me,  per  tal  que  sian 
40  salv.  D^aizo  que  tu  m'as  escrihg,  qued  eu  vengues  ad  te, 
primeîrament  conven  qued  eu  âdimplisca  zo  per  qued  eu  soi 
trames  aissi  ;  e  pois,  quant  o  aurai  tôt  complit,  conven  que 
cel  que  m'a  trames  merecepia  per  aqui  mezeis;  epuis,  quant 
eu  m'en  serai  pujatz,  eu  te  trametrai  un  de  mos  discipolz, 
45  que  te  sanara  <k  te  curara  de  ta  enfermetat  <k  salvara  tôt 
ton  pobol.  Mas,  car  tu  as  talent  que  me  vejaz  corporalment, 
vec  te  qued  eu  ti  tramet  drap  Une,  el  quai  eu  ai  pausat  la 
figura  e  la  image  de  la  mia  cara  e  de  tôt  mon  cors  ;  e  quant 
tu  voiras  aquella  image  ni  aquella  figura,  lo  talent  qued  as  de 
50  la  mia  vista  se  refrezira.  Benazuratz  es  e  tuh  aioil  seran  bena- 
zurat  que  non  auran  ira  en  me.  Ben  aiaz  tu  en  la  sapieza  de 
Deu  lo  paire  per  toz  temps.  » 

A  !  quan  lauzevolz  e  quan  nobles  fon  le  prex  del  just  e  del 
sanctisme  reî  Agari,  le  qualz  ameritet  que  le  salvaire  del 
55  mont  lo  lau-[10  r°]-zes  ni  l'onros,  e  non  solament  en  sa  pistola, 
mas  ab  sa  propria  bocca  diz  que  benezuraz  era,car  el  11  plazia 
moût,  e  qued  el  mezeis  le  filz  de  Deu  li  vole  far  son  plazer  en 
totas  causas,  en  tant  que  se  luezeis  afiguret  en  un  drap  blanc, 
e  pois  trames  lo  li,  que,  car  el  non  podia  vezer  el  mezeis, 
60  vis  la  soa  imagen  e  la  soa  figura  en  aquel  drap  en  qued  el  s'era 
transformatz  et  avia  pausat  sa  semblansa,  et  ad  el  <k  a  tôt 
autre  home  que  non  aguest  vist  nostre  Sennor  en  carn,  can 
veiria  aquella  transformatio,  li  aondes.  Aquel  draps  es  gardaz 
per  la  divina  gracia,  que  per  veilleza  de  temps  non  pot  enveiU 
65  lezir  ni  corrumpre,  6i  es  en  la  major  gleisa  de  la  eiutat  de 
Ëdissa,  qued  es  caps  de  tota  Mesopotamia  Sjria,  <k  aqui  es 
tenguz  <k  gardaz  ;  et  a  totas  las  granz  festas  de  Tan,  aici  con 
son  Calendas  e  Pascas,  sol  Tom  traire  de  Tescrin  de  Taur  en 


i 


LEGENDES   PIEUSES  2  29 

qued  es,  &  ab  gran  reverencia  totz  le  pobolz  venia  e  baizava 
os  pes  de  la  âgura  de  la  magestat.  70 

Ancar  dizon  cil  qued  an  vist  aquesta  raajestat  de  iiostre 
Seinnor,  qued  es  afiguradaen  latoailla,  que,  quan  venia  cad'an 
lo  jorn  de  Pascas,  se  solia  mudar  en  diversas  etatz,  per  las 
diversas  horas  del  jorn  ;  aici  con  es  a  la  prima  hora  del  jorn, 
la  viras  en  enfansa;  la  tercia,  puricia;  la  quinta,  adolescentia;  75 
[10  V®]  la  septima  demonstrava  juventut  ;  la  nona  tota  sa  état, 
en  la  quai  Jésus  Christ  sufferc  mort  et  passion,  en  la  ara  de  la 
cros,  per  los  nostres  peccatz. 

Parlât  vos  avem  de  la  toailla  &  de  la  transformation,  con 
Jesu  Christ  la  i  fez.  Ara  a  obs  que  vos  diguam  aizo  que  plus  80 
necessari  es,  de  quai  manera  li  promessions  que  nostre  Senner 
avia  fah  al  rei  s'esdevenc  pois  ni  fon  adimplida.  Car  el  mezeis 
nostre  Seinner  diz  en  Tavangeli:  «  Ego  sum  via,  veritas^  e[t] 
vita;  eu  soi  via,  veritaz  e  vida.  » 

Apres  quan  nostre  Seinner  Jésus  Christ  s'en  fon  pujatz  sus  85 
el  cel,  unum  ex  septuaginta  discipuliSy  Tadeum  nomine,  ad  se- 
minandum  divinum  verbum  in  corde  credentium  misit  Mesopotha- 
miam  Syrie  ad  Agarum  regem,  sicut  ei  olimper  epistole  sue  tex- 
tum  mandaverat.  Trames    un   delz  setanta  discipolz,   Tadeu 
per  nom,persemenarla  divinaparaula  elz  cors  del[z]  crezenz,   90 
en  Mesopothamia  Sjria,  al  rei  Agar,  aici  con  el  li  avia  man- 
dat sa  en  reire,  en  sa  pistola.  Aquest  discipolz,  quan  venc  en 
la  ciutat  de  Edissa,  venc  a  la  maiso  d'un  prohome  deia  vila, 
qued  avia  nom  Thobia,  &  laintre  alberguet  &  estet,  &  rendet 
sanitat  ad  un  fil  seu,  qued  era  moût  malautz,  per  sa  oration.  95 
Venc  a  saber  al  rei  qued  uns  hom  de  Galilea  era  venguz  en 
la  ciutat,  que  dizia  que  sers  e  discipolz  era  de  [11  r"]  Jesu 
Christ,  loqual  avian  li  juzeu  crucifiât,  &  el  cui  nom  el  podia 
sanar  totz  los  malautz.  Trames  lai  le  reis  pros  homes  de  sa 
cort,  qued  ab  gran  reverencia  &  ab  gran  honor  lo  li  aduissessan  100 
denant.  ^Mirf /:>/Mra ?  Anneronlo  querrae^  &  atroberon  lo  &  ad- 
duisseron  lo  davan  lo  rei.  E  can  Tapostolz  ac  fâcha  sa  oration, 
vai  penre  lo  rei  per  la  man  e  levet  lo  del  paviment  on  jacia 
San  &  salv  &  desliure  de  tota  sa  malautia,  al  laus  de  nostre 
Sennor  Jesu  Christ,  &  reformet  lo  a  sa  sanitat,  &  rendet  lo  a   105 

*  Ms.  veritatz.^  *  Sic. 


Vvsr  «^>«  ,n^>ftwr5#  «s;  i  v,'^;!  ^  *>»:rra-.  lui  laed  -ira  veiiz.  ranr  jffvnc 
*  *;f^''  iw:i.:r.'.:îîïi*  ">  ^  T^ir-iî  tô  ars^tir^  Seaaor  a  ne  loais 
/,T*  A^m  5^n.  ï^  r*ti^,  'taû  vi  a«^i«sta  aurscia.  ac  zrauiz  aiera- 
»>.  îi<  ^  ^f*A  ;r;iîih  *  ^^  tùfififi^^^  <;x\xt  hea  5a:ip  aaed  ai*n  coa 

;iK  Vr*'/  i^s  ;•  X  !ir»«^  ai  ah  t/>tA  la  ^eaî  de  3a  terra  :  e  d^aq^ai 
^.rkunl  *'A  îou  m;^*iàf^*i  e  predi-^aîre  de  La  fea  de  Jesu  Christ. 
(mii  vj  .^l  J6m  en  îia  no^irre  Seîaaer  ooft  âofferc  nue^l  ea  la 
^/ihfA.t  ^"Kdi^^a  vi'sl/'jne^  nnlzjazen.^  ni  pognes  estar,  ni  nail 

M'/  Afif.f/sj  h//rr»<î  ^joe  ^.rfi7A%  idola  ni  naiila  error,  mas  La  vera  fen 

d^  /f^'.iiii  Christ,  Ni  anCf  pois  qiie  le  reîi9  ac  receapada  la  pis- 

f//U  de  la  rnari  de   nostre  Sennor  Jesu  Christ,  nnila  genz 

fmtmïrtufi  hou  poc  envazir  la  cin-^ll  v*]-tat  ni  far  nnil  mal. 

A<f  ffi^t  U'/innonn  e»  translatada  de  la  lengaa  de  Svria  en  latina 

lî^;  fit  t,fff',r\it^  «ancta  Oiei«a.  aici  con  peira  preciosa resplandens 
con  Jiiif'H,  ^/n^^r  nimjflex  Trinita$  et  triplex  Vnitas  benetUcta  sit 
in  Mffm/nifirna  nemda,f^ui  Muam  ecclesiamita  mirifice  dianm^  pro- 
vfikU  fit  lumorifimi.  Amen. 

[VJ 
IN   l)KI)K:ATI'»NIt:   SANCTI   MICHAELIS  ARCHANGELî. 

lltiH  cititAty,  ON  on  las  On»  de  Campainna,  qued  es  appellada 

Hnporit.ina,  k    oh   prop   de  dotze  millas  d'un  puhg  qued  hom 

a|)polla  mon  (hirfçan.  Sus  en  aquestpughauna  gleisa  de  saint 

MIcJH*],  (pio  non  fon  fâcha  per  mans  d'omens  carnalz  ;  e  direm 

h   voM  (•()  ni  (lo  (pial  manora  aquist  gleisa  fon  atrobada. 

Mil  a(|U0Hta  ciutat  quod  eu  vos  ai  dicha,  avia  un  rie  home 
(pUMl  ora  appollat/.  Gargan.  Aquest  avia  moulas  bestias,  bous 
iSi  vHoouM,  K^dovono  un  jorn  que  sos  vacquers  menet  paisser 
MUN  bostius  on  a(iuost.  pugh.  Ab  aitan  uns  taurs  quais  per  gail- 
10  lanlla  part  «o  do  iotas  las  autras  bestias,  &  pujet  s'en  sus  el 
pug«  on  lui  luo  on  mais  bostia  ni  nuil  home  non  avia  agut.  Can 
vono  lo  soras  quoil  aquest  acampet  sas  bestias,  reconoc  las 
0  vi  ijuoil  aquost  taurs  non  i  era.  Quer  d'amont  e  quer  d'aval, 

*  CvMi\  /;?  ou  Au?  Ou  lirt*  Un't  —  *  SiV;  ou  du  moios  dia  +  cioq  j»m- 
lm^\*H,  i\MT.  \{\y\mK\t*.\<^\s  iiiiitntVY  dans  Du  Caoge. 


LEGENDES   PIEUSES  231 

e  non  Tatrobet.  E  cant  [12  r°]  Tac  gran  pessa  quesit,  esgarda 
e  vi  Testar  sus  el  som  del  pugh,  a  la  bocca  d'una  balma.    15 
Vi  que  non  la  poc  annar  ;  fon  moût  iratz  ;  e  va  penre  son  arc 
6  tendet  lo,  e  met  sus  una  sageta  entoisegada,  e  laissa  la  li 
annar.  Li  sagetta,  quan  fon  près  del  taur  que  lo  vole  ferir, 
torna   atras  e  va  ferir   celui  que  l'avia  tracha.  Annet  s'en 
aquest  hom  a  la  ciutat,  e  comtet  a  la  gent  con  11  era  esdeven-  20 
gat.  Li  home,  cant  o  auziron,  agron  granz  meravillas  &  anne- 
ron  a  Tevesque  de  la  ciutat,  e  comteron  li  o,  e  demanderon 
li  que  poiria  esser.  El  fez  venir  tôt  lo  pobol  de  la  ciutat  denant 
se,  e  comandet  lur  a  totz  que  dejunessan  très  jornz,  que  nos- 
tre  Seinner,  per  la  soa  merce,  lur  demonstres  que  volia  esser  25 
aizo.  Cant  agron  fah  lo  dejuni,  sainz  Michelz  apparec  una 
noh  a  Tevesque  e  dis  li  :  «  Jam  bene  fecisti  quod  homines  late- 
bat  a  Deo  guerendo  mystetium,  vide  lice  t  hominis  percussi  suo 
telo,  Ben  e  gent  as  fah  zo  qued  as  fahg,  car  tu  faras  saber 
alz  homes  aizo  qued  eil  an   quist  a  Deu,  de  Tome  qued  ha  30 
naffrat  li  soa  sageta.  Sabchas  que  per  la  mia   voluntat  es 
esdevengut.  Eu  soi  sainz  Michelz,  Tangelz  qued  estauc  totas 
horas  davant  Deu  ;  et  en  terra  garde  aquel  loc  on  era  le  taurs  ; 
e  voil  monstrar  e  far  saber  alz  homes  qualz  [12  v®]  causas  son 
fâchas  aqui  e  qued  eu  soi  garda  d'aquel  lue.  »  Cant  venc  Ten-  35 
deman  que  Tevesques  ac  vista  aquesta  révélation,  retrais  o  al 
pobol  de  la  ciutat  ;  &  anneron  s'en  tuh  ensemps  la  al  puh,  e 
feron  carrera   con  pogron  pujar  entro   sus  ;  e  vengron   ad 
aquella  balmeta,  e  troberon  la  fâcha  en  loc  de  gleisa,  e  trobe- 
ron  i  doas  rejas,  aici  con  deu  aver  en  gleisa  ;  &  la  una  era  40 
majer  que  li  autra,  aici  con  en  gleisa.  Mas  pero  en  la  gleisa 
non  auseron  intrar,  mas  de  foras  a  la  reja  esterou,  e  pregue- 
roD  saint  Michel. 

Non  triguet  gaire  que  li  sarrazin  d'una  ciutat  qued  era 
appellada  Neopolita  agron  granz  mesclas  e  granz  tensos  ab  45 
aquest  d'aquesta  ciutat  Sepontina,  si  que  ne  *  s'escomeseron 
de  batailla  e  doneron  en  jorn  e  preseron  très  jornz  d'espazin. 
Cantlos  agron  près,  aquelz  très  jornz,  anneron  &  aconseilleron 
se  ab  Tevesque.  L'evesques  conseillet  lur  que  dejunessan 
aquelz  très  jornz  e  que  preguessan  sainz  Michel  qued  el  lur  50 

1  M 8.  plutAt  ne;  corr.  be? 


232  LEGENDES  PIEUSES 

fos  capdelz  e  guis.  Li  pagan  atressi  pregueron  lur  ydolas  e 
lurs  falz  deus  que  lur  ajudessan.  Ab  aitan,  en  aquella  noh 
que  Tendeman  degron  far  la  batailla,  sanz  Miquelz  apparec 
a  revesque(s),  e  dis  li  que  las  pregueiras  e  bis  orations   eran 

55  auzidas  e  que  Tendeman,  la  quarta  hora  del  jorn,  intressan  en 
la  batailla,  car  toz  lur  enemix  vencerian  [13  r°]  &  aucirian,  & 
el  séria  lur  en  aj utoris.  Quan  venc  lo  matin,  e  Tevesques  retrais 
e  dizal  pobol  zo  que  sainz  Miquelz  li  avia  dih  lo  seras,  que  lur 
pregueras  eran  auzidas  e  qued  eil  vencerian  la  batailla.  Eil, 

60  quant  o  auziron,agron  gauh  e  foron  moût  alegre  ;  &  acerman 
lur  bataillas,  e  comenseron  s'en  ad  annar  encontra  als  sarrazfs; 
&  el  primer  cap  de  la  batailla,  le  pog  de  Garga  se  crollet  per 
gran  tremor.  Fuhjura  crehra  volant  et  qualigo  tenebrosa  totum 
montis  cacumen  obduxit,  [et]  impleta  [est]  prophetia  Dominum 

65  laudans  qui  facit  angelos  suos  spiritus  et  ministi^os  suos  flammam 
ignis.  Una  nuz  tenebrosa  cuberc  tôt  lo  som  del  puhg  e  li  fouzer 
voleron  espes  e  cazegron,  e  fon  adimplida  li  prophetia  que  diz  : 
«  Gel  que  fa  los  sens  angelz  esperiz  e  delz  seus  ministres  fa  flamâ 
de  foc.  »  Li  pagan,  can  viron  aizo,  agron  gran  paor  e  comen- 

70  seron  a  fugir,  una  partida,  per  los  fouzers  quelz  aucian,  e  li 
cristian  quelz  apreissavan  moût  fort;  et  en  aici  fugiron  entro 
a  lur  ciutat  cil  que  n'escaperon  ;  e  can  foron  laintre  en  lur 
ciutat,  reconogron  se  e  disseron  que  Tangelz  de  nostre  Sennor 
era  vengutz  en  aitori  alz  cristians,  e  que  fouzer  avian  ben 

75  mort  delz  lur  set  cenz.  Et  en  eus  pas  tota  aquil  ciutatz  se 
tornet  a  Jesu  Christ,  e  vestiron  las  armas  de  la  soa  fen.  Li 
Christian,  cant  agron  vencut  la  batailla,  torneron  s'en  [13  v**] 
a  lur  ciutat  &  vengron  al  pug,  «d  aquella  gleisa,  &  renderon 
granz  gracias  a  Deu  &  a  Tarchangel  saint  Michel,  e  regar- 

80  deron,  e  viron  denant  la  menor  reja  pezadas  quais  d'ome, 
inz  en  la  rocha  sagelladas,  &  sanpron  e  conogron  que  sainz 
Michelz  volia  monstrar  &  far  saber  qued  el  era  aguz  en  aquel 
loc;  &  en  aquel  loc  feron  pois  Tautar  &  lo  bastiron,  &  per 
aquellas  pezadas  li  gleisa  fon  pois  appellada  Ipodoraa.  Pois 

85  fon  granz  doptansa  entre  los  homes  de  la  ciutat,  que  séria  fah 
d'aquel  lue,  si  ausarian  intrar  laintre  e  sagrar,  aici  con  gleisa 
deu  esser  sagrada.  Pois  prezeron  conseil  enfr'elz  mezeis,  e 
fon  lur  conseilz  que  fezessan  gleisa  de  saint  Peire,  deus  soleil 
levant.  E  feron  o  &  edifieron  i  autars  de  madonna  sancfa 


LEGENDES   PIEUSES  233 

Maria  é  de  saint  Joan  Baptista.  Pois  Tevesques  de  la  ciutat     90 
près  conseil  a  se  mezeis  e  trames  mesatges  a  Tapostoli,  que 
li  dones  conseil  que  faria  d^aquest  afar,  qued  era  esdevengutz 
d'aital  manera.   L'apostolis    estava  adonx  défera  Roma,  el 
pug  de  Sjmptim,  que  n'es  loin  cinquanta  millas,  lo  quai  pug 
appellan  cil  qued  estan  entorn  sobre  nom  de  saint  Salvestre,     95 
car  el  estava  aqui  quan  Temperaire  lo  getet  de  Roma,  car 
predicava  la  fen  de  Jesu  Christ  ;  e  man-[14  r°]-det  li  aizo,  si 
hom  carnalz  dévia  sagrar  aquella  gleisa,  e   marjorment  ad 
aquel  jorn  que  li  Victoria  fou  fâcha  ;  si  non  que  bastis  hom 
gleisa  en  autre  loc,  a  la  honor  de  sant  Michel,  qued  es  gar-    loo 
daire  d'aquel  loc,  si  ad  el  venia  a  plazer,  L'apostolis,  cant  ac 
auzit  aizo,  fez  li  saber  per  letras  &  entreseinnet  li  très  jornz 
que  dejunessan  amdui,  e  preguessan  nostre  Seinnor  e  saint 
Michel  qued  el  lur  fezes  saber  que  volria  que  fos  fah  d'aquest 
afar.  Can  venc  la  derrera  noh  qued  agron  complit  lur  dejuni,    105 
e  sanz  Michelz  apparec  a  Tevesque  de  Sepontina  e  dis  li  :  «  Non 
est,  inquit,  vos  opus  hanc  quam  ego  hedificavi  dedicare  ecclesiam , 
Non  es  obs,  dis  el,  qued  aquesta  gleisa  qued  eu  ai  hedificada 
vos  autre  sagres.  Mas  intratz  laintre,  &  frequentatz  lo  loc 
per  orations,  qued  eu   serai  guarda  e  capdelz  del  loc;  e  tu,    110 
canta  dema  laintre  messa  e  comenega  lo  pobol,  aici  con  cons- 
tumna  es  ;  et  eu   demonstrarai  de  quai  manera  eu  ai  sagrat 
aquel  lue.  »  Can  venc  Tendeman,  venc  Tevesques  ab  totz  los 
clergues,  ab  gran  procession  &  ab  tôt  lo  pobol  de  la  vila,  & 
intreron  en  aquella  gleisa  ;  &  aici  con  intreron,  atroberon  un    115 
gran  portegue   que  tenc  entre  a  Tautra  re-[14  v°]-ja,  don 
foron  atrobadasla<  pezadas,  aici  con  dih  vos  ai  ;  e  pois  intre- 
ron laintre  et  atroberon  deus  orient  una  grant  gleisa  plus  aut 
non  sai  quantas   grazas  ;  et  entre  la  gleisa  e  lo  portegue 
pogron  caber  entre  a  cincxenz  homes  ;  &  atroberon  laintre    120 
un  moût  bel  autar,  cubert  d'un  pâli  vermeil  moût  bel,  prop  ' 
del  meg  de  la  paret  deus  megh  jorn.  Aquil  gleisa  era   raout 
angulosa  ;  e  per  que  ?  Car  eil  non  era  fâcha  ab  mans  d'ornes 
carnalz,  ni  las  paretz  non  eran   polidas  ni  hetlilîcadas  a   lei 
d'omes  carnalz  ;  mas  aici  con  roca  es  aspra  &  en  un  loc  auta    125 
&  en  autre  bassa,  aici  era  aqui  ;  car  en  un  lue  pogras  tocar 


*  }&s.pprop,  le  premier  p  bouclé. 


234  LEGENDES   PIEUSES 

ab  Ja  testa  <k  en  l'autre  non  pogras  tochar  ab  la  man.  E  par 
aizo  eu  crez  ben,  aici  con  l'angelz  o  a  monstrat  &  esseinuat, 
rjuo  Deus  nostre  Senner  non  vol  ni  quer  hornament  de  bellas 

130  peiras,  mas  de  coratge  ;  puritat  e  neteza  de  coratge  vol  e 
quer.  E  sus  el  som  d'aquel  pugh  a,  des  Tuna  part,  una  gran 
selva  de  corniers,  e  des  l'autra,  un  gran  plan  en  que  non  ha 
arbres.  Can  Tevesques  ac  celebra[t]  la  messa  e  le  mestiers 
fon   compliz,  cada  us  s'en  tornet  ab  gran  gauh  &  ab  gran 

135  alegreza  on  lur  maisons.  L'evesques  fez  far  aqui  maisons  & 
estars  granz,  &  establi  i  preveires  e  clergues,  que  servissan 
la  gleisa.  Nuilz  hom,  zo  diz,  de  nogh  non  ausava  intrar  den- 
fra  aquesta  [15  r°]  gleisa,  mas,  cant  li  alba  era  clara,  cantava 
hom  laintre  matinas.  D'aquella  rocha,  qued  es  sobre  Tautar 

140  deus  cers,  degota  una  aigua  moût  clara  e  moût  dousa  ;  et  a 
i  un  orzol  de  veire  que  pent  ab  una  cadena  d'argent,  que 
recep  aquella  gotta.  Et  es  constumna  &  usatges  que,  quan 
le  pobolz  a  cumoneguat,  qued  aici  con  cada  us  cumenegua, 
puja  ad  aquest  orzol  per  grazas,  e  vai  beure  d'aquella  aigua, 

145  car  moût  douza  e  moût  soauz  es  a  beure  e  dona  salut  d'eu- 
fermetatz,  car  ja  nulz  hom  non  aura  agut  ta  mala  febre  qued, 
quant  ha  begut  de  Taigua,  non  sia  gueriz  e  sanatz.  Aquestas 
meravillas  de  sanar  los  malautes,  ed  autras  montas  de  qued 
eu  non  sai  nombre,  i  son  esdevengudas  per  la  podestat  delz 

150  angelz,  e  majorment  ad  aquest  jorn  quant  hom  fa  la  festa,  car 
totas  las  genz  d'aquella  vila  i  venian  ad  aquel  jorn.  E  per  zo 
que  tuh  crezas  plus  fermament  que  li  angel  an  poder  en  terra 
de  soccorre  los  amix  de  Jesu  Christ,  direm  vos  zo  qued  en 
diz  Tapostolz,  qued  el  en  vi  esperitalment.  In  Jesu  Christo 

155  Domino  nostro.  Amen, 

Angélus  Domini  descendit  de  celo  cum  Azaria  et  sociis  ejus  in 
fornacem  et  excussit  flammam  ignis  de  fornace  et  fecit  médium 
fornacis  quasi  ventum  roris  fiante  m.  L'angelz  de  nostre  Sennor 
descendet  de  cel  &  venc  ad  Azaria  &  a  sos  compainnos,  qued 

H>0  eran  en  una  fornaz  [15  v°]  ardent,  e  fez  del  meg  de  la  fornaz 
eissir  un  vent  que  sofâet  la  ûama  sa  e  la;  et  anc  le  fox  e 
nuilla  guisa  non  toquet  elz,  ni  lur  fez  malz  ni  nuUa  re  que 
grou  lur  fos.  Adonx  aquist  très  quais  ab  unabocca  acomense- 
rou  a  lausar  <k  a  benezir  nostre  Seinnor  &  a  dir  en  la  fornatz  : 

165  «  Benedictu^  es,  Domine  Deus  palrum  nostrorum  et  laudabilis  et 


LEGENDES  PIEUSES  235 

gloriosus  et  supereœaltatus  in  secula.  Benezegh  es,  Senner  Deus 
de  nostres  paires,  &  lauzevolz  &  glorios  &  eissausevolz  sobre 
totz  los  segles.  » 

En  autre  lue  trobem*  que  Tangelz  venc  a  la  propheta  Daniel 
e  diz  li  :  «  Non  aias,  paor,  Daniel,  quia  ex  die  primo,  quo  oppo-  170 
suisti  cor  tuum  ad  intelligendum  ut  te  affligeres  (ad  inteUigen- 
dumj  in  conspectu  Domini,  exaudita  sunt  verba  tua,  et  ego  veni 
propter sei^mones  tuos»  Cardes  lo  primer jorn  que  tu  pausest 
ton  cor  ad  entendre,  &  t'afflechezist  davant  la  fatz  de  nostre 
Sennor,  las  tieuas  paraulas  son  auzidas,  et  eu  soi  venguz  per   175 
aco  aici  a  te.  Le  princes  del  règne  de  Persa  a  estât  encontra 
me  vin  &  un  jorn  ;  e  vec  te  que  saiuz  Miquelz,  us  de  nostres 
majors  princeps,  es   venguz  per  adjutori  a  me.  Ven  en  &  eu 
esseinnarai  te  aizo  tôt  qued  esdevenra  a  ton  pobol  elz  derrers 
jornz,  car  tu  es  ancar  en  Syon^.  Veruntamen  annun-{\Q  v^]'Ciabo    180 
tibi  quod  expressum  est  in  scriptwis  veritatis,  Ancar  t'anuncia- 
rai  zo  qued  es  escrih  en  Tescriptura  de  veritat,  &  en  tôt  aîso 
non  ai  adjutori  mas  saint  Michel,  lo  nostre  prince.  » 

Item. 

fn  tempore  autem  illo  consurget  Michael^  princeps  magnus    185 
qui  stat  pro  filiis  populi  sui,  et  veniet  tempus  quale  non  fait,  ab 
eo  quo  gentes  esse  ceperunt  usque  ad  tempus  illud.  Eu  aicel  temps 
se  levara  sainzMichelz,  le  granz  princes,  le  qualzesta  per  los 
filz  de  son  pobol,  &  venra  aquel  temps  le  qualz  non  era  aguz, 
d'aicella   sazon  que   las   genz  acomenseron   ad   esser  entro   190 
adonx;  et  en  aicel  temps  se  salvara  le  tiens  pobolz.  Tuh  aquil 
que  seran  atrobat  escrih  el  libre  de  vida  &  moût  d'aquelz  que 
dormon  en  lapolz  de  la  terra  s'esveillaran,  e  li  un  annaran  en 
la  vida  durabla,  &  li  autri  annaran  en  torment  per  toz  temps 
mais.  Qui  autem  docti  fuerint  fulgebunt  sicut  splendor  firma-   195 
menti,  E  cil  que  seran  sapi  resplandran  aici  con  li  resplandors 
del  firmament,  e  cil  qued  auran  esseinnat  drechura  seran  aici 
con  las  este  las  perpétuai  <k  eternal. 

*  Corr.  ti'obatn?  —  2  Le  texte  de  la  Vulgale,   dans  le  livre  de   Daniel 
(X,  14),  d'où  est  pris  ce  passage  est  ici  :  «  Quoniam  adhuc  visio  in  dies.  » 


/ 


tSe  LÉGENDES   PIEUSES 


Item. 


200  In  diebus  illis  factum  est  prelium  magnum  in  cela  :  Michael 
et  angeli  ejuspreliahantur  cum  drackone.  En  aicelz  jornz  fon 
[16  v°]  fâcha  una  granz  batailla  en  cel  :  Sainz  Michelz  e  sei 
angel  se  combatian  ab  lo  dragon,  e  le  dragons  e  sei  angel  se 
combatian  ab  el,  e  fon  vencuz,  e  d'aqui  adenant  non  ac  plus 

205  loc  en  cel,  e  fon  getaz  aicel  granz  dragos  fora  dal  cel,  serpenz 
antix,  qued  era  appellatz  diabolz  e  Sathanas,  que  torbava  tôt 
lo  segle;  &  fon  getatz  en  terra  e  cei  angel  ab  el.  Et  auzi  una 
gran  voz  pois  sus  el  cel  que  dis  :  Nunc  facta  est  salus  et  virtus 
et  regnum  Dei  nostri  et  potestas  Chnsti  ejus,  quia  projectus  est 

210  accusator  fratrum  nostrorum,  qui  accusabat  illos  ante  conspec- 
tum  Dei  nostri  die  ac  nocte.  Ara  es  fâcha  salutz  &  vertutz  &  le 
règnes  de  nostre  deu  &  le  poders  dei  seu  Christ,  quar  Tacu- 
saire  de  nostres  fraires  es  getaz  a  terra,  que  los  accusava  de 
jornz  et  de  noh  davant  Deu;  e  sanz  Michelz  e  sei  angel  an  lo 

215  vencut  per  lo  sanc  de  Tainnel  &  per  la  paraula  de  la  soa  gua- 
rentia.  Propterea  letamini,  celi  et  qui  habitatis  in  eis.  E  per 
aizo  alegra[tz]  vos,  cel,  &  tuh  cil  qued  habitatz  en  elz. 


VI 
IN  FESTIVITATE  SANCTI  PETRI 

Jgitur  post  corporeum  domim'ce  nalivitatis  adventum,  cum 
ipse  dominus  Jésus  ChristuSy  vera  lux  mundi,  mundanis  tenebris 
illuxisset,  ambulans  juxta  mare  Galilée,  vidit  duos  fraires, 
Symonem,  qui  vocatur  Petrus,  et  Andream  fratrem  ejus,  mit- 

5  tentes  recia  in  mare.  Erant  enim  [17  r°l  piscatores.  Et  ait  illis 
«  Venite  post  me  ;  faciam  vos  fieri  piscatores  kominum.  »  Et 
conlinuo  relictis  retibus,  secuti  sunt  eum.  Aprop  lo  corpo- 
ral  esdeveniment  de  la  nativitat  de  nostre  Sennor,  cant  el 
mezeis  nostre  Senner  Jésus  Christ,  lumnera  dei  mont,  luzi  en 

10  las  tenebras  dei  mont,  el,  annanz  de  josta  la  mar  de  Galilea, 
vi  dos  fraires,  Simon,  qued  era  appellatz  Peire,  &  Andreu  son 
fraire,  que  mettian  filatz  en  la  mar,  car  eil  eran  pescador.  E 
dis  lur  nostre  Senner:  «  Venez  e  segues  me,  qued  eu  vosfarai 


LEGENDES   PIEUSES  237 

pescadors  d'omes,  zo  es  que  penres  homes.  »  Et  aqui  eis  lais- 
seron  lur  filatz  &  seguiron  lo.  Et  anneron,  e  quan  foron  en  la  15 
terra  d'una  ciutat  qued  hom  appellava  Cesarea  Philipi,  deman- 
det  a  SOS  discipolz  e  dis  lur:  «  Quem  dicunt  homines  esse  filium 
hominis?  )^  At  illi  dixerunt  :  «  Alii  Johannem  Baptistam,  alii 
autem  Heliam,  alii  vero  Jeremiam   aud  unum  ex  prophelis.n 
«  Li  home,  que  dizon  de  me,  que  soi  filz  de  la  vergena  ?  »   20 
Eil  responderon  e  disseron:  «  Li  un  dizon  que  vos  es  Johans 
Baptista,  qued  Héros  ha  degollat,  li  autre  dizon   d'Elias  la 
propheta,  Ji  autri  de  Jheremias,  li  autri  d'un  de  las  autras 
prophetas.  »  —  «   E  vos  autre,  diz    nostre  Seinner,  qu'en 
dizes?  »  Respondet  sainz  Peire  e  dis  :  «  Tu  es  [17  v°]  Christ,  25 
filz  de  Deu  lo  viu.  »  Respondet  nostre  Seinner  e  dis  li  ;  «  Bena- 
zuratz  es,  S;ymon,  car  zo  qued  tu  as  dih  non  t'a  révélât  carnz 
ni  sanx,  mas  le  meus  paire  qued  es  el  cel;  et  eu  die  te  que  tu 
es  Peire,  e  sobre  aquesta  peira  eu  bastirai  la  mia  gleisa,  e  las 
portas  d'enfern  non  seran  fortz  escontra  te,  e  darai  te  las  30 
claus  del  règne  celestial,  e  tôt  zo  que  tu  liaras  sobre  terra 
sera  liât  el  cel(z),  et  zo  que  tu  desliaras  sobre  terra  sera  des- 
liat  el  cel(z).  » 

Sciens  autem  Doymnus  Jésus  quia  omnia  dedit  ei  pater  in 
manus  et  quia  a  Deo  exivit  et  ad  Deum  vadit,  surrexit  a  cena  et  35 
ponit  veslimenta  sua,  et  cum  acceptisset  linteum,  precinxit  se, 
et  cetera.  Laissarem  vos  estar  la  razon  que  vos  aviam  moguda 
de  sus,  e  penrem  vos  d'autre  lue,  car  qui  tôt  o  volia  dire  per 
orde,  aici  con  annet,  longas  no  vas  serian  trop. 

Nostre  Senner  Jésus  Christ,  sabens  que  le  paire  avia  totas  40 
las  causas  del  mont  pausadas  enfre  sas  mas,  &  aiei  con  el  era 
oiscis  de  Deu  lo  paire,  convenia  que  tornes  ad  el,  levet,  zo 
diz,  de  la  cena,  e  vai  penre  un  drap  line  &  seis  s'en  entorn 
se,  si  que,  pausatz  sos  vestirs,  pois  mes  d'aigua  en  una  conca, 
&  comenset  a  lavar  los  pes  a  sos  discipolz,  &  pois  a  terzer  ab  45 
aquel  drap  de  que  era  ceinz.  E  cant  venc  [18  ro]  a  saint  Peire, 
dis  li  sainz  Peire:  «  Seinner,  lavarias  me  tu  doux  los  pes?  » 
Respondet  Jésus  e  dis  :  «  Tu  non  sas  mingua  aoras  per  qued 
eu  o  fatz,  mas  sabras  o  aprop.»  Adonx  li  dis  sainz  Peire  :  «  Sen- 
ner, ja  non  me  lavaras  pes  a  tota  ma  vida.  »  Respondet  Jésus  50 
e  dis  li  :  «  E  si  eu  non  te  lau  los  pes,  tu  non  auras  part  en 
me.  ))  Respondet  sanz  Peire  e  dis  li:  «  Senner,  non  tan  sola- 


238  LEGENDES   PIEUSES 

ment  los  pes,  mas  la  mans  e  lo  cap.»  Adonx  dis  nostre  Senner  : 
«  Zo  qued  es  net  non  cal  lavar .  » 

55  Pois  can  nostre  Senner  ac  receuput  morft]  e  passion,  el  ap- 
parec  a  saint  Peire  e  dis  li  :  «  Symon  Johannis,  diligis  me  ? 
Symon,amas  me?»  Respondet  li  sainz  Peire  e  dis:  «Seinner, 
tu  sabes  ben  qued  eu  t'am.  »  Adonx  dis  li  nostre  Senner: 
«  Pais  mos  agnelz.  »  E  pois  demandet  li  per  aqui   mezeis  : 

60  «  Symon,  amas  me?  »  Respondet  sainz  Peire  e  dis:  «  Senner, 
tu  sabes  qued  eu  t'am.  »  —  «  Pais  doux,  zo  diz  nostre  Senner, 
mas  fedas.  »  Demandet  li  la  terza  vegada  si  Tamava.  Sainz 
Peire  acomenset  s*en  ad  iraiscer,  caji  tant  li  o  demandalva, 
e  respondet  li:  «  Senner,  tu  conoisses   e  sas  tôt  cant  es  e 

65  sabes*  ben  qued  eu  t*am.  »  —  «  Pais,  dis  nostre  Senner,  mas 
fedas.  Et  eu  die  te  verament  qued  aici  con  tu  te  ceinnias,  cant 
erasjoves  homet  annavas  on  te  volias,  aici  can  tu  seras  veilz, 
&  tu  estendras  [18  v°]  tas  mas,  &  autre  te  ceinnera  &  te  menara 
la  on  tu  non  voiras.  »  Aizo  li  dis,  car  demostrar  li  vole  de  quai 

70   mort  dévia  morir  ni  annar  a  Jesu  Christ. 

Postquam  autem  dominus  Jésus  assumptus  est  in  celum,  Petrus 
et  Johannes  ascenderunt  in  templwn  ad  hoy^am  orationis  nonatn. 
Pois  que  nostre  Senner  Jésus  Christ  s'en  fon  pujatz  en  cel, 
sainz  Peire  &  sainz  Johanz  intreron  un  join  al  temple  ad 

75  hora  nona,  per  preguar  nostre  Seinnor;  et  atroberon  un 
contrah  alaportadel  temple,  qued  era  appellada  speciosa, 
qued  0  avia  trah  del  ventre  de  la  maire,  &  estava  aqui  per 
querre  almorna  a  celz  qued  intravan  ni  eissian  del  temple. 
Aquest  contrah,  cant  vi  saint  Peire  e  saint  Johan  intrar  lain- 

80  tre,  acomenset  lur  a  pregar  que  li  fezessan  almorna.  Regardet 
se  sanz  Peire  &  sainz  Johanz  vers  aquest  e  dis  li  sanz  Peire  : 
«  Regarda  te  vers  nos.  »  Regardet  se  vers  elz  e  cujet  que  li 
volguessan  quedocom  donar.  «  Nos  non  avem  aur  ni  argent 
que  te  puscam  donar,  mas  zo  qued  avem  te  donarem,  el  nom 

85  de  Jesu  Christ  de  Nazaretz;  leva  sus  e  vai  t'en.  »  E  va  lo 
penre  perlaman  dextra  e  levet  lo  sus,  &  en  eus  pas  las  join- 
chas  de  las  cambas  e  las  plantas  delz  pes  foron  fermadas, 
[19  r°]  e  comenset  a  saillira  a  correr,  &  intret  ab  elz  el  tem- 
ple, saillenz  &  trepanz  &  lauzans  Deu.  Aquest  hom  era  d'état 

*  Ms.  sabas. 


LEGENDES   PIEUSES  239 

de  caranta  anz  o  de  plus.  Augebatar  autem  numerus  creden-     90 
tium  in  Domino  multitudo  virorum  ac  muh'erum.  Le  nombres 
delz  homes  e  de  las  femenas  que  crezian  en  nostre  Sennor  se 
creissia  ades  cada  jorn,  si  qued  en  las  plassas   jetavan  los 
malautz  elz  pausavan  en  leg  &  en  colgas,  que^  can  i  passaria 
salnz  Peire,  sivalz  li  soà  umbra  los  pogues  tocar,  quar  en  eus     95 
pas  eran  sanat  e  guérit  de  lur  malautias.  Totas  las  genz  de 
la  terra  &  de  las  ciutatz  d'entorn  Jherusalem  aportavan  lur 
malautz  aqui  en  Jherusalem  &  los  demoniaix,  &  en  eus  pas 
queli  apostol  los  tocavan,  eil  eran  guarit&  sanat. Can  li  apostol, 
aquil  qued  eran  en  Iherosolima,  auziron  que  li  terra  de  Samaria  100 
avia  receuput  la  paraula  deDeu,  trameseron  la  dos  delz  apos- 
tolz,  saint  Peire  &  saint  Johan.  Li  quai,  quan  vengron  en  la 
terra,  pregueron  per  aquelz  que  Deus  lur  trameses  lo  Saint 
Esperit.  Ancar  en  nengun  d'elz  le  Sainz  Esperitz  non  era  ven- 
guz,  mas  batejat  eran  tan  solament  el  nom  de  Jesu  Christ.    105 
Adonx  sanz  Peire  e  sainz  Johanz  pausavan  lur  mas  sobre  elz,  e 
recebian  lo  Saint  Esperit.  En  la  terra  avia  un  encantador  qued 
avia  nom  Symon.  Aquest,  can  vi  que  perlo  pausament  de  las 
mans  delz  [19  v^]  apostolz,  recebian  Saint  Esperit,  près  gan- 
ren  de  deniers  &  aportet  los  alz  apostolz  e  dis  lur  :«  Prennez  110 
aques  deners,  &  donatz  me  aquest  poder  qued   a  tôt  home 
qued  eu  pause  mas  mans  de  sobre,  recepia  lo  Saint  Esperit.  » 
Sainz  Peire  respondet  e  dis  li:  «  Ta  pecunia  sia  ensemps  ab 
te  en  perdicion,  car  tu  lo  don  de  Deu  as  adermat  a  peccunia. 
El  mont  non*  es  aquel  hom  qued  aizo  degues  aver  dih.  Mas   115 
le  tieus  cors  non  es  drechuriers  davant  Deu.  Fa  penitencia 
d'aquesta  toa  nequicia,  &  prega  nostre  Sennor,  &  per  aven- 
tura perdonara  te  aquesta  mala  cogitacion  qued  as  en  ton 
coratge,  car  eu  vehg  que  tu  es  en  fel  d'amaror  &  en  deleg 
de  iniquitat.  »  Respondet  aquel  Sjmon  e  dis  :  «Pregas  per  me   120 
nostre  Sennor  que  non  me  vengua  de  sobre  zo  qued    aves 
dih.  »  Et  illi  quidem  testificati  et  locuti  verbum  Domini  reddi- 
bant  lerosolimam.  Et  eil,  cant  agron  guarentida  &  fah  saber 
la  paraula  de  nostre  Seinnor,  torneron  s'en  en  Iherosolima. 
E  moût  d'aquella  région  delz  Samaritans  acomenseron  annun-   125 
ciar  &  a  predicar  ab  los  apostolz  nostre  Seinnor  Jesu  Christ 

<  Le  me.  répète  non. 


24  0  LEGENDES   PIEUSES 

(ab  los  apostolz).  Can  sans  Peire  passava  per  las  ciutatz  ab 
aquelz  seus  discipolz  que  lo  seguian,  venc  ad  una  vila  una 
vegada,  qued   avia  nom  Lidda.  Trobet  aqui  un  home  qued 

130  avia  nom  Enea,  [20  r°]  le  qualz  avia  jagut  oc^o  anz  malautz 
en  son  legh,  &  era  paraliticus,  zo  es  una  malautia  avia  que 
non  avia  poder  en  se  meseis.  Sainz  Peire  venc  ad  aquest 
malaut  e  dis  li  :  «  Enea,  Jesu  Christ  te  sane  ;  vai  sus  &  esta 
en  pes.  »  Et  en  eus  pas  levet  sus  e  fon  sanatz  e  guaritz.  E  tuh 

135  aquil  d'aquella  vila  Lidda  &  (da)d'una  autra  qued  avia  nom 
Sarone,  can  viron  aquesta  meravilla,  se  tdrneron  a  nostre 
Sennor. 

En'  una  vila  autra  qued  avia  nom  Joppe,  prop  d'aquestas 
vilas  Lidda  e  Farone,  on  sainz  Peira  si  bistentava,  per  predi- 

140  car  laparaula  de  Deu,  avia  una  donna,  discipula  delz  apostolz, 
qued  avia  nom  Tabitas,  Aquist  donna  fazia  moût  voluntiers 
îilmorna  e  vestia  paupres  &  era  plena  de  totas  bonas  obras. 
Esdevenc  qued  en  aquelz  jornz,  cant  sainz  Peire  era  en  Lidda, 
qued  aquist  donna  près  malautia  e  mori.  E  presseron  la  donna 

145  li  amie  e  laveron  la  &  acermeron  la,  aici  con  tain  a  mort,  e 
meseron  la  en  un  portegue.  Lidiscipol  qued  eran  aqui,  can  au- 
ziron  que  sanz  Peire  era  en  Lidda,  tramesseron  li  dos  messat- 
ges  que  non  se  trigues  que  vengues  tost.  Annet  sainz  Peire  e 
venc  s'en  ab  aques  mesatges.  E  can  fon  vengutz,  van  lo  penre 

150  li  discipol  e  menero[nlo]  ^  la  on  era  aquist  donna  morta,  Ab  ai- 
[20  v°]-tan  vengron  las  vezinas  e  las  vezoas,  plorant  et  fazent 
moût  grand  dol,  e  monstravan  li  las  gonnellas  e  los  vestirs  qued 
aquist  donna  lur  fazia.  E  sainz  Peire  dis  lur  e  lur  monstret 
que  s'en  eissessan  tuh,  e  cant  foron  tuh  fora,  getet  se  ad  ora- 

155  tion  e  preguet  nostre  Sennor;  &  quan  ac  fâcha  sa  oration, 
giret  se  deus  lo  cors  e  disli:  a  Tabita,  sur  g  e,  Tahita,,  leva 
sus.  »  Ab  aitant  ella  uberc  los  oilz,  e  cant  ac  vist  saint  Peire, 
asetet  se  elleg;  e  sanz  Peire  va  la  penre  per  la  man  e  dreis- 
set  la  sus,  e  sonet  celz  que  s'en   eran  eissit,  e  rendet  la  lur 

160  viva.  Aizo  fon  sauput  per  tota  la  ciutat  de  Jopen,  e  crezeron 
en  nostre  Senner  Jesu  Christ.  En  aquel   temps  trames  le 


'  Ms.  VUf  par  une  erreur  du  rubricaleur. 

*  vi  E  meneroQ  lo  la  »  ;  en  renvoi  à  la  marge  à  l'encre  bleue  ;  les  lettres 
suppléées  ont  été  rognées  par  le  relieur. 


LEGENDES   PIEUSES  241 

reis  Héros  sos  mesatges  per  las  terras  qued  afOiichezes  celz 
de  sancta  Gleiza,  et  aucis  saint  Jacme,  lo  fraire  de  saint 
Johan^  ab  gladi;  e  vi  que  mot  plazia  alz  juzeus  e  fez  penre 
saint  Peire.  Et  erant  li  jorn  de  Pascha.  E  can  ac  près  saint   165 
Peire,  fez  lo  mètre  (&)  en  carcer  &  mes  i  catre  compainnas 
de  bacallars  que  lo  gardessan,  e  vole  lo  rendre  aprop  Pasca, 
per  justiziar,  al  pobol  delz  juzeus.  E  domens  que  sainz  Peire 
era  en  la  carcer,  sancta  Gleiza  pregava  nôstre  Sennor  assi- 
dualment  per  el.   Can  venc  en  aquella  noh  que  Tendeman   170 
lo  vole  Héros  liurar  al  pobol  delz  juzeus,  e  sainz  Peire  se  dor- 
mia  entre   doas  [21  r**]  gardas,  liatz  de  doas  cadenas,  e  las 
autras  gardas  esta  van  davan  Tuis,  que  gardavanla  carcer.  E 
vec  vos  Tangel  de  nostre  Seunor,  &  estet  laintre,  &  tota  li 
maisons  de  la  carcer  resplandic*  moût  fort.  E  va  s'en  a  saint  175 
Peire  e  toque t  lo  al  latz,  &  esprec  lo  &  dis  11  :  «  Levatost  sus.» 
Et  ab  ai  tant  las  cadenas  11  cazegron  de  las  mans.  Ë  dis  li  Tan- 
gelz  :  «  Pren  ton  vestir  e  met  lo  entorn  te  e  causa  tas  caus- 
sas.  »  E  fez  o.  E  quan  o  ac  fah  :   «  Ar,  zo  diz  Tangelz,  me 
sec.  »  Et  li  carcer  s'aobri  ab  aitan,  e  Tangelz  met  se  primers  e   180 
comensa  s'en  ad  eicir  e  sainz  Peire  comenset  lo  a  seguir;  e 
non  sabia  que  fos  vers  aizo  qued  era  fah  per  Tangel,  mas  ader- 
mava  se  que  fos  somnes.   Passeron  la  primera  garda  e   la 
segonna,  e  vengron  a  la  porta  de  la  ciutat,  qued  era  de  ferre, 
&  obère  se  ad  elz  per  sa  voluntat.  Et  eissiron  foras  &  passeron   185 
una  carrera,  <k  aqui  eis  Tangelz  se  parti  d'el.  Et  Petrus  ad  se 
reversus  dixit:  o  jNunc  scio  vere  quia  misit  Dominus  angelum 
suum  et  eripuit  me  de  manu  Herodis  et  de  omni  expectatione 
plebis  Judeorum.  »  Adonx  se  reconoc  sanz  Peire  e  dis  :  «  Ara 
sai  eu  verament  que  nostre  Senner  m'a  trames  son  angel  &  a  190 
me  trah  de  la  man  d'Eron  e  de  tôt  Tatent  que  le  pobolz  del[s] 
Juzeu[s]  en  fazia.  » 

Bis  itp.  gestis,  surrexit  quidam  Symon  Samarim  génère  qui 
dudum  visis  miraculis  Pétri  peccunia  compa'[2i  y^yrare  voluit 
donum  spiritale,  Cant  tôt  aizo  fon  esdevengut  aici,  levet  se  195 
as  hom  qued  avia  nom  Sjmon,  qued  era  del  linnatge  dels 
Samaritans,le  qualz,  cant  ac  vist  tanta  meravilla  co  sainz  Peire 
fazia,  volgra  compra[r]  lo  don  esperital  ab  deners.  El  aquest 

i  Ck>rngé  àe  resplandac,  écrit  d'abord. 

ri 


r2i2  LEGENDES  PIEUSES 

dizia  e  fazia  encrezent  a  las  genz  qued  el  era  filz  de  Deu  e 

200  que  totz  temps  viuria,  e  prometia  e  dizia  que  cil  qued  en  el 
oreirian  viurian  totz  temps  atressi  e  ja  morir  non  poirian. 
Aquest  encantaire  se  penava  moût  que  zo  que  sainz  Peire 
esseinnava  ni  las  meravillas  que  fazia  pogues  desfar  e  trastor- 
nar  e  far  encrezent  a  las  gens  que  res  non  era.  E  cant  venc 

205  un  jorn,  acomenset  a  tensonar  ab  saint  Peire  e  dis  li  que 
presessan  (e)  jorn  et  aquel  jorn  fos  i  totz  le  pobols,  &  auzent 
tôt  lo  pobol,  desputessan  ;  e  cel  que  séria  vencutz  non  fos  ja 
pois  crezutz.  Aquestas  paraulas  foron  en  unà  ciutat  qued  avia 
nom  Cesarea  Stratonis.  Preseron  jorn,  e  cant  venc  ad  aquel 

210  jorn  qued  agron  près,  Zacheus,  qued  era  bailles  d'aquella 
ciutat,  venc  a  saint  Peire  o  dis  li  :  «  Peire,  oi  es  le  jornz  que 
tu  deves  venir  a  desputacion  ab  Sjmon.  »  Adonx  aquel  Zacheus 
fez  ajostar  tôt  lo  pobol  de  la  vila  en  la  plassa  e  venc  aquel 
Simon  aqui.  Sainz  Peire,  [22  r*]  quant  o  vi,  diz  a  sos  com- 

215  painnos:<(  Orem,  fraire,e  preguem  nostre  Sennor  Jesu  Christ 
que,  per  la  soa  misericordia,  done  salut  a  son  pobol  &  lur  tolla 
la  error  en  que  son  &  estan.  »  Cant  agron  lur  oratio  com- 
plida,  annet  s'en  sainz  Peire  ab  sos  compainnos  en  la  plassa, 
on  totz  le  pobolz  Tatendia  ab  aquest  Sjmon.  Et  aici  con  el 

220  intret,  el  feron  tuh  ensemps  gran  silensi,&  saludet  los  d'aital 
manera:  «  Pas  sia  a  toz  aquelz  que  son  appareillât  de  donar 
lur  dextras  a  la  veritat.  Cil  qued  obezisson  a  la  veritat  obe- 
disson  a  Deu  per  la  soa  gracia,  e  nostre  Senner  rendra  lur  en 

225  lo  sobeira  guizardon,  car  eil  van  per  las  soas  vias.  Per  aizo 
nos  es  obs  a  cada  un  que  nos  queiram  primerament  lo  règne 
de  Deu  e  la  soa  drechura.  Drechura,  per  zo  que  puscam  far 
drechurerament  zo  que  farem  ;  lo  règne,  que  nos  puscam 
conoiscer  qualz  er  le  guizardos  de  trabail  qued  aurem  suflfert 

230  P^"^  T>eu^  le  qualz  es  bons  guizardonaire  delz  eternalz  bens. 
Ad  aquest  qued  annaran  contra  sa  voluntat  rendra  digna 
pena,  per  aizo  qued  auran  fah.  Nos  autri,  qued  em  pausat  en 
aquesta  présent  vida,  conven  que  conoscam  &  sapiam  qualz. 
es  li  soa  voluntatz.  E  si  alcuns  volia  saber  ni  far  la  voluntat 

235  de  Deu,  davant  qued  lia-[22  v°]-gues  emendat  sos  avolz  fah, 
non  0  poiria  saber,  e  séria  vans  aquel  sabers  ni  aquel  deman- 
dars.  Aquist  vida  es  breus  en  que  nos  estem*,  e  non  sabem 

1  Sic.  Corr.  esiam. 


LEGENDES  PIEUSES  243 

cora  se  venra  le  juizis  de  Deu  sobre  nos.  E  per  zo  a  nos  obs 
que  demandem,  davan  totas  causas,  que  nos  coven  a  far  con 
aiam  vida  durabla,  car  11  sentencia  de  la  propheta  es  aitalz: 
Cil  que  dizon  qued  aman  Deu  coven  que  tengan  drechura  ;  e  240 
per  zo  a  obs  que  cil  que  auran  ni  sabran  dechura  en  se  qued 
o  digan,  o  cant  autre  o  dira,  qued  o  aujan  bonamenz  &  en 
pas.  Per  qued  eu  vos  dis  el  comensament  de  la  salutation  que 
pas  vos  dones  Deus  a  trastotz.  »  Adonx  respondet  Symon  e 
dis:  «  Li  toa  pas  non  nos  es  obs  ;  car  si  entre  me  &  te  era  pas  245 
&  concordia  a  trobar  la  veritat  ren  non  auriam  fah  ;  car  li 
lairon  e  li  raubador  e  li  mal  fazedor  an  pas  e  concordia  entr' 
elz  ;  mas  entre  me  e  te  non  a  obs  que  sia  patz,   car  si  era 
patz  entre  me  e  ten,  aquist  que  son  ajostat  aici  non  auzirian 
la  meua  razon  ni  la  toa.  Per  zo  non  diguas  qued  aia  pas  entre  250 
me  &  te,  mas  guerra;  car  entre  drechura  &  non  drechura  non 
aura  ja  patz  ni  concordia,  mas  davant  te  voil  far  saber,  cant 
du!  se  combaton  e  Tus  es  vencuz,  adonx  es  pas  entr'  elz  dos.» 
Adonx  respondet  sainz  [23  r°]  Peire  e  dis  :  «  Caitiu,  per  que 
ternes  auzir  pas  ?  Non  sas  tu  doux  que  Tadimplimenz  de  la  Lei  255 
es  pas  e  que  de  peccatz  eisson  tenson  &  bataillas,  et  aqui  on 
non  ha  peccat  aqui  es  pas  ?  En  desputacion  deu  esser  veritatz 
&  en  obras  drechura.  »  Adonx  respondet  Sjmon  :  «  Aizo  que  tu 
dis  non  esplega  ren  ;  mas  eu  te  farai  ades  conoisser  las  mias 
vertutz  e  lo  meu  poder  e  la  mia  divinitat,  per  zo  que  tu  t'age-  260 
noilles  ades  aici  davant  me  e  que  m'adores.  Eu  intrei  el  ven- 
tre de  Rachel  &  nasquei  d'ella  con  hom,  per  tal  que  li  home 
me  poguessan  vezer.  Eu  volei  per  Taer,  mesclatz  ab  fuec*  e 
fui  semblanz  a  fuec*  &  ac  cors  de  fuec*.  Eu  fiz  moure  las 
images  &  lur  donei  armas  &  las  lur  tolc.  Eu  ûz  de  las  peiras  265 
pan.  Eu  volei  d'un  pug  en  autre.  Eu  fui  suffertz  per  mas  d'an- 
gelz.  Eu  soi  deiscenduz  a  las  terras.  Et  aici  con  eu  ai  fah  aizo, 
aici  o  pois  ancar  faire,  per  tal  qued  tuh  sapian  e  conoscan  per 
aquestas  causas  qued  eu  soi  filz  de^Deu  e  le  meus  poders 
estara  totz  temps,  e  celz  que  creiran  en  me  farai  totz  temps  270 
durables.  Mas  tu    e  las  toas  paraulas  son  vanas  e   non  son 
d'obra  de  veritat  plus  que  de  cellui  que  t'a  trames,  de  cui  tu 
es  discipolz,  le  qaalz  era  encantaire,  qued  anc  se  mezeis  non 

•  On  avait  d'abord  écrit  fuc,  Ve  a  été  ajouté  au-dessus,  dans  Tlnterligoe. 


244  LEGENDES    PIEUSES 

poc  desUurar  de  la  pena  de  la  cros.  Eu  pois  far,  si  me  ^  oil, 

275  que  cil  que  [23  v°]  me  volrian  penre  non  me  poirian  vezer,  e 
per  aqui  mezeis,  cant  me  voirai,  eil  me  poiran  vezer.  E  si  eu 
fugir  volia,  eu  tranforaria  los  poh  e  passaria  inz  per  roca^, 
aie!  con  per  fane.  Si  eu  me  laissava  cader  de  sus  d'un  aut  puh 
en  terra,  eu  non  me  faria  mal  plus  que  si  era  portatz  enfre 

280  mas.  Si  eu  era  liatz,  eu  mezeis  me  desliaria  e  rendria  liaiz 
celz  que  m'aurian  liât.  Si  eu  era  encarceratz  en  carcer,  las 
clausuras  de  la  carcer  faria  obrir  de  lur  voluntat  per  ellas 
mezeissas.  Imagens  farai  semblar  homes  tan  fort  que  tuh  cil 
que  las  veiran  cujaran   que  sian  vivas.  Arbres  novelz  farai 

235  subtanament  naiscer  &  aqui  eis  portar  frucg.  Me  mezeis 
getarai  en  foc  <&  non  ardrai.  Ma  cara  mudarai  de  guisa  que  ja 
non  serai  conogutz  e  farai  sembblant  alz  homes  qued  eu  aia 
doas  caras;  o  me  mudarai  en  cabra,  o  en  feda,  on  en  enfant, 
o(n)  en  home  viel.  Sus  per  Taer  annarai  volant.  Moût  aur 

290  monstrarai.  Reis  e  princes  farai.  Serai  adoratz  aici  con  Déus. 
Vezent  lo  pobol,  me  sserau  *  fâchas  montas  honors,  de  guisa 
qued  una  imagen  faran  a  ma  semblansa  <&  aquella  adoraran 
aici  con  deu.  E  que  voles  que  vos  diga  mais?  Tôt  quant  voil 
far  pois  far.  Tôt  zo  que  pot  esser  fah,  tôt  ai  fah.  Un'  autra 

295  vegada  quan  [24  r°]  ma  maire  Rachel  me  comandet  qued, eu 
annes  el  camp  per  meire,  eu  annei  lai  e  vi  a  la  terra  una  serra 
colgada;  anuet  sus  11  serra  e  mezet  dez  aitanz  que  nenguns 
delz  autres  messors.  Moutz  arbres  ai  fah  eissir  de  terra  &  en 
una  hora  &  en  un  moment  lur  fiz  getar  fruc.  Aquest  puhg  qued 

300  es  aici  prop  ai  traucat  doas  vegadas.  d 

Cant  aquest  encan  taire  ac  tôt  aiso  dih,  sainz  Peire  respon- 
det  e  dis  :  «  Tu  es  encantaire  &  as  confessât  <k  manifestât 
aquellas  causas  qued  has  fâchas  per  encantament.  Le  nostre 
maistre,  ûlz  de  Deu,  manifestet  e  dis  aquellas  causas  que  co- 

305  venian  que  fossan  dichas,  e  seran  totz  temps  mais  dichas.  Mas 
tu,  Sjmon,  qued  es  encantaire,  volz  qued  eu  t'oprove,  vezent 
totz  aques  que  son  aici  ?  Si  volz  qued  eu  t'o  prove,  annen^  a  ta 
maison,  ab  totz  aques  que  son  aici,  e  farai  o  saber  a  totz  & 
adonx  parra  qui  es  tu.  »  Can   sainz  Peire  ac  dih  tôt  aizo, 

310  Sjmon  Tacomenseta  maldir  &  a  blatesmar;  à  fon  granz  ten- 

1  Ms.  mes  seran* 


LEGENDES   PIEUSES  245 

SOS  el  pobol.  Sainz  Peire  non  s'en  vole  gequir  per  las  blasthe- 
mas,  anz  ades  lo  repres  plus  fort.  Totz  le  pobolz  cuminalmenz 
cridet  sobre  aquest  Sjmon,  car  tuh  conogron  que  bausaire  era; 
e  van  lo  penre  tuh  essemps  e  geteron  l[o]*  fora  las  portas  d'a- 
quel  parlador^,  en  que  eran.  E  can  Tagron  getat  foras,  [24  v°j  315 
unsdiscipolz  seus  aoomensetlo  a  seguir  totz  soletz.  Sainz  Peire 
seinnet  a  tôt  lo  pobol  que  fezessan  pas.  Ë  can  se  foron  tuh 
calât  acomenset  lur  a  parlar  d'aital  manera  :  «  Sennor  ô*aire, 
pacienment  devem  soffrir  los  malz  e  devem  saber  que  Deus 
los  poiria  aucire,  si  se  volia,  e  laissa  los  durar  e  viure,  entre  320 
ad  aicel  jorn  qued  es  establitz,  el  quai  sera  fah  juzizis  de  tôt 
quant  es.  Per  que  non  soffrirem  nos  donx  zo  que  Deus  vol 
soffrir?  Vos  autri,  que  vos  tornatz  a  nostre  Seinnor  per  pa- 
ciencia,  agenoilla[tz]  vos  adel.  »  Can  sainz  Peire  ac  dih  aizo, 
tuh  doneron  de  genoilz  en  terra,  e  sainz  Peire  regardet  se  325 
vers  lo  cel  e  preguet  nostre  Sennor  per  aquelz,  que  per  la  soa 
bonitat  los  receupes,  car  eil  fugian  ad  el.  Can  venc  la  noh, 
le  tracher  encantaire  se  mes  en  mar  en  una  nau  et  fugi  s'en  a 
Roma. 


VII 
IN  COMMEMORATIONE  SANCTI  PAULI 

Fuit  vir  quidam  in  Jherusalem  de  tribu  Benjamin,  nomme 
Saulus,  eruditissimus  in  libris  Moysi  et  cunctis  Legis  cerimo- 
niis,  que  tune  secundum  litteram  gerebantur,  nichil  in  his  sen^ 
ciens  aud  advertens.  Uns  hom  fon  en  Jherusalem,  del  trip  de 
Benjamin,  qued  avia  nom  Saul,  sabis  el[s]  libres  de  Mojsen  5 
&  en  totz  los  autres  mandamenz  de  la  Lei,  qued  adonx  segon 
la  letra  simpla  eran  portât.  A-[25  r°]-quest  destruia  &  annava 
tant  cant  podia  contra  la  gleisa  de  Deu.  Intrava  en  las  mai- 
sos  e  trazia  en  homes  e  femenas,  que  per  Jesu  Christ  se  cla- 
mavan,  ô  mena[va]  los  en  carcer.  Can  venc  un  jorn,  el  se  10 
penset  con  '  pogues  aucir  ni  destruire  de  tôt  los  apostolz  de 

*  geteron  lo  en  renvoi  à  la  marge  ;  l'o  suppléé  a  été  rogné. 

*  Lecture  incertaine  ;  le  mot  est  presque  effacé. 
3  Après  ce  mot  se  expooetué. 


246  LEGENDES   PIEUSES 

nostre  Sennor,  &  annet  s'en  alz  princes  de  la  Lei,  &  quasi  lur 
letras  que  portes  a  Domas  a  las  synagogas,  que  si  i  trobava 
homes  ni  femenas   d*aquesta  lei,  que  liatz  los  aduisses   en 

15  Jherusalem.  E  domenz  que  s'en  annava,  esdevenc  que  venc 
prop  de  Domas,  e  vec  vos  subtanament  qued  una  lutz  de  cel 
resplandic  tôt  entorn  el  subtanament,  &  ab  aitant  el  cadec  en 
terra  &  auzi  una  vos  que  diz  :  «  Saule ,  Saule,  quid  me  perse- 
5'werîs?  Saul,  Saul,  perque  me  persegues?))  Saulz  ac  gran 

20  paor  &  respondet:  «  Qualz  es  tu,  Senner,  que  m'apellas?  » — 
«  Eu  soi  aquel  Jésus,  oui  tu  persegues.  Mas  leva  sus,  &  intra 
t'en  en  la  ciutat,  &  dira  te  hom  zo  que  conven  que  tu  fassas.  » 
Aquil  compainnon  seu,  qued  annavan  ab  el,  estavan  estabo- 
sit  &  auzian  la  vos  &  non  vezian  nuil  homen.  Surrexit  autem 

25  Saulus  de  tei^a;  levet  se  Saulz  de  terra  &  obère  los  oils  e  non 
vi  ren.  Van  lo  penre  sei  compainnon  enfre  lur  mas,  e  porteron 
lo  a  la  ciutat  de  Damasc  ;  <k  estet  très  jornz  e  très  noh  que  non 
vi  ni  anc  non  bec  ni  manjet. 

[25  V*]  En  la  ciutat  de  Damasc  avia  un  discipol  de  Jesu  Christ, 

30  qued  avia  nom  Anania^.  E  nostre  Senner  venc  li  en  vesion  e 
dis  li  :  «  Anania  !  »  El  respondet  e  dis  li  :  «  Senner,  vec  te  me 
aici.  »  —  «  Leva  sus  e  vai  t'en  en  aital  carrera,  qued  hom 
appella  rectus,  &  quer  en  la  maison  d'una  juzeua  Saul*  de 
Tarsensem.  Vec  te  qued  ades  prega.  E  vai,  pausa  li  desobre 

35  la  man,  per  tal  que  recobre  lo  vezer.  »  Respondet  Ananias 
&  dis  :  «  Senner,  eu  ai  auzit  dir  a  mouz  qued  aquest  hom  a 
fag  &  fai  tan  granz  malz  alz  tieus  sainz  en  Jherusalem,  et  en 
esta  vila  ha  pouder  delz  princes  delz  preveires  que  totz  aquelz 
que  se  clamon  per  lo  teu  nom  lie  e  meta  en  preison.  »  Adonx 

40  diz  nostre  Senner  :  «  Vade,  Ananias,  quia  vas  electionis  est 
michi  iste,  ut  portet  nomen  meum  coram  gentihus  et  regibus  et 
filiis  Israël.  Vai,  Ananias,  carvaicelz  d'élection  es  a  me  aquest, 
qued  el  porte  lo  ^  meu  nom  davan  lo[s]  reis  e  las  genz  &  los 
fllz  d'Irael.  Et  eu  demonstrarai  li  quanz  malz  coven  que  sofra' 

45  per  lo  meu  nom.  »  Annet  Ananias  en  aquella  carrera,  &  intret 
en  la  maison,  et  atrobet  Saul  &  pauset  li  sa  man  desobre  e 
dis  li  :  «  Fraire  Saul,  nostre  Senner  Jésus,  que  apparec  [26  r°] 
a  te  en  la  via,  m'a  trames  aici  a  te,  que  recobres  ton  vezer  e 

*  Ms.  Salu»  —  2  Mb.  /e.  —  ^  Ms.  so/^ia  (l'i  expontué). 


LEGENDES   PIEUSES  24  7 

sias  adimpliz  del  Saint  Ësperit.  »  Et  en  eus  pas  cazegron  11 
delz  oilz  cais  «scauma  de  peis,  &  recobret  son  vezer  e  levet  50 
sus  aqui  eis,  &  fez  se  batejar  ;  e  poiz  manjet  un  pauc  &  con- 
fortet  se.  Et  estet  ab  aquelz  discipolz  qued  eran  en  Damasc 
non  sai  quanz  jornz  ;  et  en  eus  pas  intret  en  las  synagogas 
delz  judeus,  e  predicava  aquest  Jesu  Christ,  e  dizia  que  vera- 
ment  era  filz  de  Deu.  Tuh  aquil  que  Tauzian  parlar  se  mera-  55 
villavan  moût  e  dezian  :  «  Non  es  doux  aizo  aquel  que  destruia 
en  Jherusalem  aicelz  qued  appellavan  aquest  nom,  e  per  aizo 
era  venguz  en  esta  vila  qued  aicelz  ques  i*  atrobaria  en  menés 
liatz  en  Jherusalem  alz  princes  de  la  Lei?  »  Saulz,  zo  dis, 
adonx  plus  fort  desputava  ab  los  juzeus  elz  confondia,  aquelz  60 
qued   estavan    en  Damasc,   &  affermava    qued   aquest   era 
•Christ  filz  de  Deu.  Cant  ac  aici  estât  moutz  jornz,  el  juzeu  viron 
qued  aici  desputava  elz  confundia,  preseron  conseil  entr'elz 
mezeis  con  Taucizessan.  E  cant  venc  una  noh,  meseronli  agah. 
Cusiodiebant  autern  (et) portas  civitatù  die  et  nocte  ut  eum  inter-  65 
ficerent,  Garderon  las  portas  [26  v^]  de  la  ciutat  e  meseron  i 
gardas,  col  poguessan  aucire.  Li  discipol  de  saint  Paul,  cant 
o  auziron,  van  penre  saint  Paul  e  geteron  lo  de  noh  ab  una 
corda  foras  de  la  ciutat  per  los  murs.  E  venc  en  Jherusalem; 
et  volia  se  ajostar  ab  los  discipolz  de  Jesu  Christ;  e  tuh  temian  70 
lo,  car  non  podian  creire   que  fos  convertitz.  Barnabas,  uns 
delz  discipolz,  va  lo  penre  &  aduis  lo  alz  apostolz,  et  comtet  lur 
con  avia  vist  nostre  Sennor  Jesu  Christ  en  la  via  &  qued  el 
parlet  ab  el,  e  con  avia  prédicat  fizelment  en  Damasc  lo  nom 
de  Jesu  Christ.  D'aqui  en  la  fon  appellatz  Paul  en  lue  de  Saul.  75 
Esdevenc,  quant  ac  prédicat  en  montas  ciutaz  Jesu  Christ,  lo 
fil  de  Deu,  qued  el  venc  en  una  vila  qued  avia  nom  Listris. 
En  aquella  vila  avia  un  malaut,  qued  era  contrah  delz  pes, 
le  qualz  non  avia  annat  des  que  fon  natz.  Aquest,  cant  auzi 
parlar  saint  Paul,,  acomenset  lo  moût  fort  ad  esgardar.  Sainz  30 
Paulz  se  regarda  vers  el,  e  vi  e  conoc  que  fez  e  crezensa  avia 
qued  el  lo  podia  sanar.  Et  ab  aitan  acomenset  li  fort  a  dire  : 
«  Leva  sus  planament  sobre  tos  pes.  »  Ab  aitant  le  malautz  sail 
en  pes,  sans  &  salz,  &  acomenset  ad  annar.  Las  genz,  can 
viron  aquesta  meravilla  que   sainz  Paulz  avia  fah,  crideron  85 

*  Ms  que  si. 


24  8  LEGENDES   PIEUSES 

[27  r**]  merce  a  nostre  Sennor  e  torneron  se  a  la  fen  del  seu 
fil  Jesu  Christ. 

Esdevenc  pois  qued  el  annet  al)  saint  Peire  a  la  cîutat  de 
Roma.  Et  aqui  atroberon  ambedui  un  encantador  qued  avia 

90  nomSyraon,  le  qualz  era  fugitz,  per  paop  de  saint  Peire,  de  la 
terra  d'outramar,  et  era  s'en  vengutz  aqui  estar.  Sainz  Peire 
e  sainz  Paulz  acoraenseron  a  predicar  la  fen  de  Jesu  Christ, 
e  per  lur  prédication  moutz  pobolz  se  tornet  a  la  fen  de  Jesu 
Christ.  En  eis   esdevenc   que  per  lur  prédication   Libia,  li 

95  moiller  de  Nero,  &  Agripina,  li  moiller  del  baille,  non  vol- 
gron  plus  estar  ab  lur  maritz  e  volgron  tenir  castitat.  Per 
lur  prédication  laissavan  li  home  maleza  e  tornavan  se  a 
Deu.  Li  cavalier  se  tollian  de  la  cort  del  rei  e  fazian  se 
Christian  e  non  volian  pois  tornar  a  la  maleza  ni  al  palais 

100  del  rei.  Per  aizo  le  pobolz  acomenset  moût  a  parlar  mala- 
ment  de  saint  Peire  e  de  saint  Paul.  L'encantaire  Sjmon, 
cant  0  auzi,  acomenset  malament  a  parlar  d'aques  dos,  zo  es 
de  saint  Peire  e  de  saint  Paul,  e  dizia  qued  encantador  eran 
e  quel  pobol  fazian  tornar  en  error.  Ganren  i  avia  d'aquelz 

105  qu6  crezian  Symon,  per  aquo  que  li  vezian  far;  car  el  fazia 
moure  serpent  de  coure  per  encantament,  &  cans  de  peira 
fazia  lairar,  et  i  -  (27  v**]  -  mages  de  coure  e  de  peira  fazia 
rire  e  moure  e  corre  davan  se.  Escontra  aizo  sainz  Paulz 
e  sainz  Peire,  pregant  nostre  Sennor,  curavan  malautz,  enlu- 

110  minavan  cex,  encausavan  e  getavan  diabolz  delz  cors  delz 
homes,  resuscitavan  mortz,  e  dizian  al  pobol  que  non  cre- 
zessan  Symon  Mag,  ni  las  obras  qued  el  fazia,  car  filz  era 
de  diabol  &  zo  qued  el  fazia  era  deus  part  de  diabol,  e  cil  * 
qued  el  avia  convertiz  amonestava^  que  lo  fugissan  e  se  tol- 

115  guessan  de  las  obras  soas,  &  que  las  descubreguessan  &  fezes- 
san  saber  que  des  part  de  diabol  las  fazia.  Esdevenc  que  li 
religions  home,  que  crezian  la  prédication  de  saint  Peire, 
dizian  alz  autres  qued  encantaire^  e  zo  que  fazia  era  des  part 
de  diabol  &  escumenegatz  era.  Et  encontra  li  mal  home  e  li 

120  fellon,  cil  que  le  bauzaire  avia  convertiz,  dizian  de  saint  Peire 
e  de  saint  Paul  qued  encantador  eran,  e  zo  qued  eil  predi- 
cavan  era  errors.  Et  aquist  tensons  era  el  pobol.  Aquist  ten- 

1  Corr.  celz.—  2  Corr.  amonestavan.  —  3  Sic.  Suppl.  era  (à  savoir  Symon). 


LEGENDES  PIEUSES  •?4  9 

sons   venc  a   saber  a  Nero  Temperador,  e    trames  querre 
aquest  encantador  Symon.  El,  can  fon  denant  el,  acomenset 
S03  encantamenz  a  far;  et  era  sub  -  [28  r*]  -  danament  en   125 
guisa  d'enfant  &   aqui  eis   esdevenia  veilz,  e  pois  tornava 
jovens  hom.  Et  aici  mudava  se  en  quai  qued  état  se  volia, 
per  montas  figuras,  diabolo  opérante,  si  que,  lo  diabol  obrant, 
cant  Nero  Temperaipe  vi  aizo,  cujet  se  verament  que  fos  filz 
de  Deu.  Sainz  Peire  e  sainz  Paulz  vengron  denant  Tempe-   130 
rador  e  disseron:  «  Emperaire,  non  crezas  aquest  lairon,  car 
el  es  messoneguiers  &  encantaire,  e  fa  lagezas,  et  es  felz  e 
reneguatz,  et  en  totas  causas  qued  a  Deu  apertenon  es  con- 
traris  de  veritat.  Nuilla  causa  de  mal  non  es  qued  en  el  non 
sia.  »  Adonx  diz  Tencantaire  a  Nero  :  «  Audi  me,  bone  impe-   135 
rator;  autz  me,  bons  emperaire;  eu  soi  filz  de  Deu,  que  so 
vengutz  de  cel  ;  avia  soffert  entro  aci  ;  ara  i  es  vengutz  aquest 
Paulz  &  es  doblatz  le  malz;  e  tu,  emperaire,  si  non  pessas 
con  aquist  dui  sian  mort,  le  tieus  règnes  non  pot  estar.  » 
L'emperaire,  cant  auzi  aizo,  crezet  o,  e  can  venc  Tendeman,   140 
fez  los  venir  a  se. 

Cant  venc  Tendeman,  qued  eil  foron  denant  el,  Simon  diz 
a  Temperador  :  «  Aquist  son  discipol  d'aquel  Nazaretz.  » 
L'emperaire  diz  :  «  Qued  es  Nazareth  ?  »  Simon  dis  :  [28  v®] 
«  Una  ciutatz  es  en  Judea,  que  totz  temps  es  aguda  contra  145 
vos  &  contra  vostres  mandamenz,  ed'aquesta  Nazaretz  fon  lur 
maistre  d'aquest.  »  Nero  Temperaire  respondet  :  «  Deusja 
ama(va)  tôt  homen  &  Tamonesta.  Tu  per  que  persegues  aques?» 
—  «  Aquist  dui  an  tota  Judea  convertida  e  tornada  que  non 
crezessan  en  me.  »  Nero,  cant  auzi  aizo,  diz  a  saint  Peire  &  150 
a  saint  Paul  :  «  Per  que  es  tan  trachor  vos  ni  vostre  lin- 
natge  ?  »  Adonx  diz  sanz  Peire  a  Symon  :  «  Sjmon,  aquelz 
avîas  deceuputz  que  crezessan  en  te  ;  mi  non  as  pogut  dece- 
bre  *  ;  mas  Jesu  Christ  aquelz  qued  avias  deceupuz  a  trah 
d'aquella  error  per  me.  E  pois  car  tu  saps  que  nos  autres  155 
apostolz  de  Christ  non  pos  convertir  per  la  toa  art  encantai- 
ritz,  meravil  me  con  auzas  parlar  davan  Temperador.  »  Adonx 
dis  Nero  Temperaire  :  «  Qui  es  Christ?  »  Sainz  Peire  res- 
pondet :  «   Aquel  es  Jesu   Christ,  de    cui  aquest  bauzaire 

^  Soivent  immédiatement  cinq  mots  biffés:  me  no?i  poguist  anc  deceère. 


250  LEGENDES   PIEUSES 

160  afferma  e  diz  qued  el  es.  Aquest  es  malz  hom  e  las  soas  obras 
son  de  diabol  ;  mas  tu,  bons  emperaire,  volz  saber  aquellas 
causas  que  Jesu  Christ  fez  en  Judea  ?  vejas  las  letras  [que] 
Ponz  Pilatz  trames  a  Claudium  &  adonx  [29  r°]  conoisseras 
o  &  sabras  o.  »  Adonx  Nero  fez  se  aportar  las  letras  &  fez 

165  la[s]  se  legir  davan;  e  dlsseron  en  aici  ;  «  Ponz  Pilatz  a  son 
amie  Claudi,  montas  salutz.  Voil  vos  far  saber  zo  qued  es 
esdevengut  novellarment  en  la  terra  delz  juzeus,  li  quai  per 
enveja  an  dampnat  se  &  aquelz  que  venran  aprop  elz,  car  eil 
trobavan  escrili  en  lur  libres,  et  a  lur  pairons  era  promes, 

170  que  Deus  lur  trametria  lo  seu  fil  de  sus  del  cel,  le  qualz  nais- 
ceria  de  la  vergen  &  appareisseria  en  terra.  Aquest,  domenz 
qued  eu  era  bailes  en  Judea,  trames  Deus  en  la  terra.  Li 
Juzeu,  cant  lo  viron  fazent  meravillas,  qued  enluminava  los 
cex,  elz  lebros  mundava,  los  malauz  curava  de  qualque  enfer- 

175  metat  qued  agues,  los  diabolz  cassava  delz  cors  delz  homes, 
los  mortz  resuscitava,  las  auras  fazia  venir  o  remaissar,  sobre 
las  undas  de  la  mar  annava  per  essuh  pes,  e  moutas  autras 
meravillas  que  fazia;  li  juzeu,  cant  o  viron,  agron  gran  enveja 
car  le  pobolz  crezia  en  el.  E  van  lo  penre  li  fellon  prince  de 

180  la  Lei,  e  liureron  lo  me.  E  dizian  me  mesoneguas  e  so  que 
res  [29  v®]  non  era,  e  dizian  qued  encontra  lur  lei  annava. 
Eu  crezei  o,  e  liât  e  batut  e  flagellât  rendei  lo  lur.  Eil  van 
lo  penre  e  meseron  lo  en  cros,  &  aqui  feron  lo  morir  ;  e  pois 
pauset  Tom  en  un  sepulchre,  e  disseron  qued  hom  gardes  lo 

185  sépulcre  très  jornz,  e  meseron  i  gardas  cavaliers  me[u]s  e 
resuscitet  al(z)  ters  dia,  non  remas  per  garda.  Li  enveja  e  Ir 
fellonia  delz  juzeus  crée  tant  qued  aver  doneron  alz  caval- 
iers, que  dissessan  que  sei  discipol  avian  emblat  lo  cors.  Cant 
li  cavalier  agron  receuput  la  peccunia,  zo  que  fon  fah  non 

190  pogron  celar,  car  eil  disseron  a  tôt  lo  pobol  que  resuscitatz 
era  e  qued  eil  o  avian  vist  e  que  li  juzeu  lur  n'avian  donat 
aver  que  non  o  dissessan.  Aizo  esdevenc  enaici,  et  en  autra 
guisa  hom  non  o  diz  que  non  menc/a^wr;  e  las  messonegas 
delz  juzeus  non  devon  esser  crezudas.  » 

195  Cant  aquist  carta  fon  legida  aici,  Nero  l'emperaire  dis  : 
«  Diguas  me,  Peire,  fon  aici  fah  aizo  con  o  diz  li  carta?  » 
Sainz  Peire  respondet  e  dis  :  «  Bos  emperaire,  crezas  ben 
qued  aici  fon,  e  non  fon  d'autra  guisa.  Et  aquest  Sjmon, 


I  LEGENDES   PIEUSES  251 

plens  de  mesoneguas  e  d'engan,  <k  hom  carnalz  qued  es,  fai 
se  deus.  Aici  con  en  Jesu  Christ  ha  doas  sustancias,  zo  es  200 
sustancia  de  Deu  <k  d'orne  :  en  la  sustancia  de  Deu  avia  to- 
[30  r**]-ta  pleneza  de  divinitat  ;   en  la  sustancia   qued  avia 
d*ome,  rezemet  la  humanitat  ;  aici  en  aquest  Sjmon  haautras 
doas  sustancias  :    sustancia  d'orne  &  substancia  de  diabol, 
le  qualz  s'esforssa  de  dampnar  los  homens  e  de  mètre  en  error,  205 
per  la  sustancia  d'aquest  homen.  »  Adonx  respondet  Symon  : 
u  Meravil  me,  bons  emperaire,  con  pos  auzir  ni   escoutar 
aquest  fol  home  pescador  e  messoneguier,  qued  en  paraula 
ni  en  linnatge  ni  en  nulla  ren  poder  non  ha.  Mas  ja  plus  non 
soflfrirai  aquest  enemic,  car  ades  farai  venir  mos  angelz  e 
dirai  lur  que  m'en  venjon.  »  Sanz  Peire  dis  :  «  Eu  non  tem  210 
te  ni  los  tiens  angelz  ;  mas  eil  podon  temer  me,  en  la  vertut 
et  en  la  fizansa  de  Jesu  Christ.  »  Adonx  diz  Nero  :  «  Peire, 
non  ternes  tu  donx  la   divinitat  de  Sjmon  qued  a  tan  gran 
poder  que  tôt  cant  vol  fa  ?  «  Sainz  Peire  dis  :  «  Si  aquil  215 
divinitatz  es  en  el,  li  qualz  conois  los  secretz  delz  coratges, 
digua  me  zo  qued  eu  pes  ni  que  farai  ;  et  eu  dirai  te  prime- 
rament  a  Taureilla  zo  qued  eu  pes  ni  que  farai,  per  tal  que  tu 
conoscas  si  ment  de  zo  que  dira,  w  Adonx  diz  Nero  :  «  Ara 
te  fa  en  sa,  Peire,  &  diguas  me  ta  cogitation.  »  Annet  sanz  220 
Peire  e  dis  li  :  «  Fa  me  aportar  un  pan  d'ordi  &  fa  lo  me 
donar  a  ce-[30  v**]-lat,  qued  hom  non  o  sapia.  »  Fez  li  aportar 
un  pan  d'ordi;  e  cant  Tac  près  sainz  Peire,  benezis  lo  e  frais 
lo  e  pois  mes  lo  en  sas  manegas.  Ë  cant  o  ac  fah,  &  el  dis  : 
«  Ara  digua  Symon  oimais  zo  qued  eu  pes  ni  ai  fah.  »  Respon-  225 
det  Nero  Temporaire  e  dis  :  «  Cujas  donx,  dis  Temperaire, 
qued  eu  creza  que  Sjmon  non  sapia  aizo  que  tu  pensas^  le  qualz 
resuscitet  lo  mort  &  el  mezeis,  can  ac  perdut  lo  cap,  resusci- 
tet  al  terz  dia,  e  tôt  cant  eu  li  ai  dih  tôt  a  fah  ?  »  Adonx  dis 
sanz  Peire  :  «  Davan  me  non   n'a  ren  fah.  »  Nero  l'empe-  230 
raire  dis  :  «  Eu  li  port  ben  guarentia  d'aizo,  qued  el  coman- 
det  a  SOS  angelz  de  cel  que  venguessan,  e  vengron.»  Respondet 
sainz  Peire  :  «  Pois  qued  aco  qued  es  tan  granz  causa  ha  fah, 
per  que  non  fa  aizo  que  non  es  tan  granz  causa,  qued  el  digua 
zo  t|ued  eu  pes  ni  qued  ai  fah  ?  »  L'emperaire  dis  :  «  Que  235 
dis  tu  d'aizo,  Symon  ?  Eu  non  sai  en  que  me  tengua  de  vos 
dos.  »  Adonx  dis  Symon  :  «  Peire  digua  zo  qued  eu  pes.  w 


252  LEGENDES   PIEUSES 

Respondet  sanz  Peire  :  «  En  aizo  qued  eu  ai  fah  farai  saber 

240  a  totz  zo  que  tu  pensas.  »  Adonx  dis  Simon  :  a  Be  sapias, 
bons  emperaire,  que  las  pensas  delz  homens  non  conois  ni 
sap  mas  solament  Deus.  »  Sainz  Peire  respondet  e  dis  :  «  Ja 
dis  tu  que  tu  es  Deus  ;  diguas  doux  zo  qued  ai  fabg  ni  qued 
eu  pens,  &  fai  o  saber  a  totz.  »  Adonx  Sy-[31  r^]-mon  ac  gran 

245  dol  &  gran  ancta,  car  non  poc  dir  lo  secret  de  Tapostol  ;  e 
comenset  a  cridar  &  a  dir  :  «  Vengan  gran  can  e  dévorent 
te  e  te  manjon,  davan  Temperador  qued  aici  es.  »  Et  en  eis 
pas  apparegron  can  a  desmesura  gran,  <k  abrivan  se  vers 
saint  Peire.  Sainz  Peire  trais  lo  pan  de  sas  maneguas,  &  en 

250  eis  pas  eil  avalisson  &  anc  pois  non  apparegron,  cant  agron 
vist  lo  pan  que  sainz  Peire  lur  monstret.  Adonx  dis  sainz 
Peire  a  Nero  :  a  Emperaire,  vec  te  qued  eu  t'ai  monstrat, 
non  per  paraulas,  mas  per  fah,  qued  eu  sabia  zo  qued  el  pen- 
sava  ;  et  el  qued  avia  dih  que  sos  angelz  faria  venir  &  ad 

255  aquelz  faria  me  devorar,  a  los  fah  venir  ;  e  par  ben  que  aquil 
angel  non  aian  poder  de  la  divina  gloria,  car  en  semblansa 
de  cans  e  de  diabolz  son  vengut,  e  non  a  *  agut  poder  de 
mal  far  a  me.  »  Adonx  dis  Nero  Temporaire  a  Sjmon  :  «  Qued 
es  aizo,  Symon  ?  Ar  euh  eu  ben  que  tu  sias  vencutz.  »  Res- 

260  pondet  Symon  e  dis  :  «  Aquest  m'a  fah  aizo  en  la  terra  de 
Judea  &  en  tota  Palestina  &  en  Cesarea,  &  domenz  qued  el 
tensonava  ab  me,  après  aizo,  car  a  las  soas  obras  era  contra- 
ria^ ;  e  per  aizo  qued  el  escapes  a  me,  après  aizo,  car  las 
pensas  delz  homes  non  sap  mas  soletament  Deus.  »  Sainz 

265  Peire  respondet  :  «  E  tu,  que  diz  qued  es  Deus,  per  que  non 
dis  las  co-[31  v'^J-gitations  delz  homes?  »  Adonx  se  giret 
l'emperaire  a  saint  Paul  e  dis  li  :  «  Tu,  Paul,  perque  non  dis 
quedocom?  »  Saiiiz  Pauls  respondet:  «  Ben  sapias,  empe- 
raire, que  si  tu  laissas  ad   aquest  encantador  tan  tas  causas 

270  faire,  gran  mal  fara  a  ton  pais,  &  creissera  tant  li  maleza  que 
tôt  lo  regnum  getara  de  son  luc^  »  Nero  respondet  e  dis  a 
Sjmon  :  a  Qu'en  dis  tu,  Symon?  »  Symon  dys  :  «  Si  eu  non 
manifest  verament  qued  eu  soi  Deus,  ja  non  voil  que  li  home 
me  fassan  la  honor  que  devon.  »  Nero  dis  :  a  E  qued  atten- 
des que  non  o  fas  ades,  per  tal  qued  aquist  sian  tormentat?  » 

1  Sic.  Corr.  ûfn?  —  *  Sic,  Corr.  contrari'i 


LÉGENDES   PIEUSES  253 

Symon  dis  :  «  Fai  me  far  una  torre  autha  de  fust,  &  pojarai  275 
sus  &  farai  venir  mos  angelz,  e,  vezent  tôt  io  pobol,  pujaran 
m'en  en  cel  a  mon  paire,  et  ad  aizo  poiras  saber  qued  aquist 
home  son  fol.  »   L'emperaire  respondet  :    «  Qu'en  dis  tu, 
Peire  ?  En  aizo  pareissera  *  li  soa  vertutz  &  aquil  del  tieu  deu.» 
Sainz  Peire  dis  :  «  Bons  emperaire,  si  tu  te  volz,  tu  poiras  280 
conoisser  que  deus  part  de  diabol  es.  »  Nero  dis  :  «  Deman 
sabrem  qualz  de  vos  dis  ver.  »  Sjmon  respondet:  «  Cres*  tu 
doux,  bons  emperaire,  qued  eu  sia  encantaire  ?  Ja  fui  eu 
mortz  e  resusoitei.  »  Le  tracher  Sjmon  avia  fah  un  encanta- 
ment,  car  el  avia  dih  a  Nero  i'emperador  :  «  Fai  me  taillar  285 
la  testa  en  [32  r*^]  un  lue  escur,  e  laissa  me  aqui  estar  mort, 
e  si  eu  non  resuscite  al  terz  dia,  sapias  qued  eu  soi  encantaire  ; 
et  si  eu  resuscite,  sapias  qued  eu  soi  ôl  de  Deu.  »  E  Nero  avia 
lo  fah  penre  e  mètre  en  un  lue  escur,  e  comandet  ad  un  que 
li  tolgues  sa  testa.  E  can  le  tracher  fon  laintre,  ac  un  aret  ser-  290 
mat  &  fez  son  encan tament  ;  e  fon  vejaire  a  cel  que  li  volia 
tolre  lo  cap  de  Taret  qued  el  fos.  Mas  pero,  cant  li  ac  tout 
lo  cap,  près  lo  &  annet  lo  regardar  déferas  alla  '  clairor,  e  vi 
e  conoc  que  caps  d'aret  era,  e  non  o  vole  dir  a  l'emperador, 
per  paor  de  se  mezeis,  qued  el  non  fos  encolpatz,  qu'om  non  295 
disses  que  per  safoUia  era  esdevengut,  car  el  Tenu  avia^  aici 
enfollit  qued  un  aret  li  avia  fah  aucir  en  son  lue  ;  e  per  aiso 
non  o  vole  descobrir.  E  per  aizo  dizia  Simon  qued  al  tertz  jorn 
era  resuscitatz,  car  el  n'avia  portât  lo  cap  el(z)  cors,  &  avia 
fah  recebre  lo  sanc  en   una  conca.  Cant  venc  al  terz  jorn  el  300 
se  demonstrete  dis  que  resuscitatz  era;  et  adonx  dis  a  Tem- 
perador  :  «  Fai  ostar  lo  meu  sanc  d'aqui  on  es  escampatz, 
car  eu  que  fui  degoUatz,  aici  con  o  avia  promes  soi  resusci- 
tatz al  terz  jorn.  »  Car  Nero  Temperaire  avia  dih  :  «  Deman 
sabrem  qualz  de  vos  autres  dira  ver  ni  er  vertadiers  »,  dis  a  305 
saint  Paul  :  «  Tu  per  que  non  parlas,  [32  v°]  Paul  ?»  Sainz 
Paulz  respondet  e  dis  :  «  Zo  que  Peire  diz,  crezas  qued  eu 
die   atressi;  una  causa  dizem,  car  ambedui  prediquem  un 

^  lis.  pareinsara. 

•  Ce  mot  est  précédé  de  non,  exponctaé  et  biffé. 

3  Ms.  al  la. 

^  Ms.  len  nauia. 


254  LEGENDES   PIEUSES 

seinnor,   Jesu   Christ.  »    Symon  respondet  :   «  Entent  me, 

310  César.  Per  zo  que  tu  sapias  qued  aquist  son  falz  &  eu  soi 
trames  de  sus  de  oel,  deman  m'en  pujarai  sus  el  cel,  per  tal 
qued  eufassabenazuratz  aquelz  que  crezon  en  me,  et  en  aques 
que  me  deneguan  demonstrarai  ma  ira.  Et  aujas  me,  César. 
Part  aques  dos  de  te,  que  cant  eu  serai  ab  mon  paire  el  cel, 

315  qued  eu  te  pnscha  esser  bons.  »  Nero  respondet  :  «  Con 
sabrem  nos  que  tu  t'en  pujes  en  cel  ?  »  Sjmon  dis  :  «  Fai 
far  una  torre  de  fust  e  de  granz  traus,et  eu  pujarai  en  aquella, 
e  can  serai  sus,  li  mei  angel  venran  sus  en  Taer  e  portaran 
me  ;  car  a  terra  non  poirian  venir  a  me  antre  los  peccadors.  » 

320  Nero  respondet  :  a  Ben  voil  vezer  si  poiras  far  zo  que  tu 
dis.  » 

Adonx  Nero  fez  far  una  torre  el  Camp  de  Martz  gran  & 
auta.  E  cant  li  terres  fo  fâcha,  fez  venir  tôt  lo  pobol  e  totas 
las  genz  delà  vila  per  vezer  aquesta  meravilla.  Cant  totas  las 

325  genz  foron  acampadas,  e  sainz  Peire  et  sainz  Paulz  i  fon,  e  lo 
diz  Nero  :  «Ara  apareissera  li  veritatz.  »  Sainz  Peire  e  sainz 
Paulz  disseron  :  «  Nos  non  lo  descobrirem,  mas  nostre  Sen- 
ner  Jesu  Christ,  fils  de  Deu,  cui  el  se  fa,  cel  lo  descobrira.  » 
Adonx  Sjmon,  vezent  tôt  lo  pobol,  [33  r°].  s'en  pujet  en  la 

330  tor,  et  fon  coronatz  de  laurier,  &  estendet  las  mans  &  acomen- 
set  a  volar.  Nero,  cant  o  vi,  dis  a  saint  Peire  &  a  saint  Paul  : 
«  Aquest  hom  es  verais;  vos  au(s)tri  es  bauzador  delz  homes 
e  del  pobol.  »  Adonx  respondet  sainz  Peire  :  «  Sofri  te  un 
pauc,  que  tu  sabras  e  conoisseras  *  ades  que  nos  autri  em  mes- 

335  satge  de  Christ  &  el  es  messoneguiers  &  encantaire.  »  Nero 
respondet  qued  «  ancar  persévéras  en  vostra  dureza  ;  vec  vos 
qued  el  es  ja  sus  el  cel.  »  Adonx  esgardet  sainz  Paulz*  sus  el 
cel  e  dis  :  «  Paul,  dreissa  ton  cap  et  vejas.  »  Sanz  Paul  dreissa 
son  cap  contra  sus  e  vi  lo  volar,  &  comenset  a  plorar  e  dis  : 

340  «  Peire,  que  fas  ?  Monstra  aquel  poder  que  Jesu  Christ  t'a 
donat.  »  Adonx  sanz  Peire  esgardet  el  cel  e  dis  :  n  Eu  vos 
conjur,  angel  de  Sathanas,  que  lo  portas  en  l'aire,  per  dece- 
bre  los  coratges  delz  non  fizels  homes,  per  Deu  lo  creator  de 
totas  causas  e  per  Jesu  Christ  lo  seu  fil,  que  resuscitet  al 

345  tertz  jorn  de  mort,  que  vos  d'aici  enant  non  lo  portes,  e  làis- 

*  Ms.  sabres  e  conoisseres.  —  *  Sic.  Corr.  Peire. 


LEGENDES   PIEUSES  255 

sas  lo.  »  Et  en  eis  pas  li  diabol  lo  laissan  e  cadec  en  terra,  e 
parti  en  catre  parz,  e  cada  una  de  las  partz  esdevenc  peira, 
las  qualz  son  guarentia  d'aizo  entro  en  aquest  jorn.  Adonx 
Nero  Temperaire  fez  penre  saint  Peire  e  saint  Paul.  Saint 
Peire  fez  mètre  en  cros  &  a  saint  Paul  fez  taillar  lo  cap.  Et  350 
adonx  totz  le  pobolz  de  la  vila  fon  iratz,  e  corregron  [33  v**] 
al  palais  de  Temperador  e  volgron  cremar  lo  palais  e  Tempe- 
rador.  Can  a  saint  Paul  taillet  hom  la  testa,  en  lue  de  sanc 
n'eissi  lahg.  Sainz  Peire  fon  mes  en  croz,  lo  cap  deus  terra  e 
los  pes  contra  mont;  e  domenz  qued  el  era  en  la  cros,  el  aco-  355 
menset  a  dir  :  «  Senner  Jesu  Christ,  bons  pastre,  a  te  faz  eu 

gracias,  car  las  fedas  que  tu  m'as  liuradas non  sian  ni 

estian  oimais  senz  latoa  garda.»  E  cant  acdihaizo,  transpasset. 
Et  aqui  eis  apparegron  aqui  dui  saint  home,  los  qualz  non  avia 
hom  vist  desenanz  ni  anc  pois  non  fez,  &  dizian  que  per  aquest  360 
eran  vengut  de  la  terra  de  Jherusalem.  Aquist  dui  van  penre 
lo  cors  de  saint  Peire,  essemps  ab  autre  saint  home,  qued 
avia  nom  Marcel,  le  qualz  era  agutz  decipolz  de  Symon  Mag  e, 
per  la  prédication  de  saint  Peire,  avia  laissât  aquella  error  & 
avia  seguit  saint  Peire,  de  Jherusalem  entro  aqui  a  Roma.  365 
Aquist  van  penre  lo  cors  e  sebeliron  lo  en  un  lue  qued  hom 
appella  Vaticanus.  Aquist  dui  bon  home  dizian  que  vengut 
eran  de  Jherusalem  &  dizian  a  tôt  lo  pobol  :  «  Alegras  vos, 
car  gran  gauh  deves  aver  que  sainz  pairos  aves  ameritat  ad 
aver  &  amix  de  notre  Sennor  Jesu  Christ;  e  sapias  que  Nero,  370 
aquest  fêlions  reis  vostre,  non  pot  gaire  tener  Temperi  aprop 
la  mort  d'aquestz  dos  apostolz.  »  Esdevenc  alo  que  le  po[bo]lz 
de  Roma  eniret  Temperador,  [34  r°]  et  acorderon  enfre  elz 
quel  presessan  el  liessan  ad  un  pilar  e  qued  hom  lo  bâtes  tant 
entre  que  fos  mortz,  aici  con  gazainnat  o  avia.  Venc  a  saber  375 
ad  el,  e  cant  o  auzi,  ac  tan  gran  paor  que  non  saup  que  se 
fezes  ;  e  fugi  s'en  de  noh  elz  bosc  &  en  las  selvas,  &  aqui  mori 
de  fam  et  de  freh,  e  lop  manjeron  lo.  Cant  venc  pois,  li  grec 
vengron  e  preseron  lo[s]  cors  dele  apostolz  e  cujeron  losportar 
en  Orient  ;  &  en  eus  pas  li  terra  acomenset  moût  fort  a  tremo-  380 
lar,  &  venc  totz  le  pobolz  de  Roma  e  seguiron  los  aprop,  & 
acosegueron  los  ad  un  lue  qued  hom  appella  Catacombas, 
&  aqui  tolgron  lo[s]  lur  e  garderon  los  aqui  un  an  &  set 
mens,  entro  qued  agron  fah  gleisas,  en  quel[s]  sebeliron  pois 


256  LEGENDES   PIEUSES 

385  honestament.  Ubi  prestanlur  bénéficia  usque  in  hodiernum  diem 
et  in  secula  seculorum.  Amen, 


[VIII] 

PASSIO  SANCTARUM  VIRGINUM   FIDEI,  SPEI 
&    CARITATIS    &   MATRIS     EARUM     SAPIENTIE  * 

Mulier  igitur  quedam  nomine  Sapientia,  de  génère  primoy 
valde  dives,  Romam  advenit,  cum  filiabus  suis,  et  hee  decons- 
sime  ntmium  fuerunt.  Una  femena  era,  qued  avia  nom  Sapien- 
tia, de  gran  linnatge,  et  era  moût  riqua.  Aquist  femena  venc 
5  estar  a  Roma,  ab  très  fillas  qued  avia  ;  &  eran  moût  bellas. 
Cant  foron  aqui,  las  très  donzellas  anneron  e  preseron  lo  sen- 
nal  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  zo  es  que  batejar  se  feron. 
Lur  maire  las  [34  v»]  avia  esseinnadas  desenanz  que  ferma- 
meuz  e  bona  tenguessan  lo  nom  de  la  christianitat.  Elias  creis- 

10  clan  cada  jorn  en  la  obra  &  en  la  fen  de  Jesu  Christ,  aici  con 
lur  avia  esseinnat/ Lur  maire  s'alegrava  en  Deu  nostre  Sen- 
nor Jesu  Christ,  e  pregava  lo  que  major  fen  e  major  crezensa 
dones  a  sas  ûllas,  con  ellas  estessan  &  annessan  en  la  vertut 
de  paciencia.  Las  donzellas  eran  joves  de  jornz,  viellas  de 

15  senz.  Zo  que  las  prophetas  avian  dih  tractavan  en  lur  corat- 

/  ges  &  alegravan  se   en  nostre  Sennor.  Ellas  annavan  cada 

jorn  moutvoluntiers  a  lagleisa,  e  pregavan  cada  jorn  nostre 

Seianor  qued  el  volgues  &  soffergues  qued  ellas  soffrissan  ^ 

martyre  per  el.  Esdevenc  un  jorn  qued  uns  malz  hom  de  la  ^ 

20  vila,  quan  vi  qued  aquestas  donzellas  annavan  tan  soven  a  la 
gleisaper  pregar  nostre  Sennor,  annets'en  aTemperadore  dis 
11:  u  Senner,  una  femena  es  venguda  en  esta  vila,  abtres  ûllas 
soas,  non  sai  don,  &  amonesta  e  predicanostras  moillers  que 
crezan  en  Jesu  Christ,  lo  fil  de  Deu  e  fa  las  partir  de  nos;  et 

25  a  lias*  aici  convertidas'&  tornadas  ad  aquella  fen  qued  apostot^ 
non  volon  manjar  ni  heure  ab  nos.  »  Cant  Temperaire  Adrians 
auzi  aizo,  trames  la  messatges  que  li  aduissessan  aquesta 
femena  ab  sas  fillas.  Anneron  la  &  aduisseron  las  ;  e  cant  las 

1  Ms.  SapiUf  avec  un  tilde  sur  Tt.  —  *  Ms.  soffrissam.  —  3  Ms.  sa.  — 
*  Ms.  allas,  —  «  Sic,  Corr.? 


LEGENDES   PIEUSES  257 

donzellas  foron  prop  del  palais  del  rei,  ellas  se  senneron  el 
nom  del  Paire  e  del  Fil  e  del  Saint  Esperit.  Li  gracia  de  Christ  30 
era  en  ellas,  que  las  conferma-[35  r'^J-va.  Cant  ellas  intreron 
el  palais,  Adrians  Tempérai re  las  acomeasa  ad  agardar,  e  vi 
las  tan  bellas  e  tan  gloriosas,  car  li  gloria  de  Deu  era  en 
ella[s],  qued  anc  ren  non  lur  poc  dir.  Pois  cant  ac  estât  un 
pauc,  &  el  sonet  lur  maire  e  fez  la  venir  a  se,  &  acomenset  la  35 
a  demandar  &  a  dire  :  «  De  quai  dignitat  ni  de  quai  lei  es,  ni 
per  que  venguist  en  esta  vila  e  denejas  nostres  deus.  que  son 
sennor  d'estaciutat  e  quelabastiron?  E  diguas  me  ton  nom.» 
Li  donna  respondet  e  dis  :  «  Christiana  soi.  »  Adrians  Tem- 
peraire  dis  :«  Eu  te  demant  aquel  nom  ab  qued  hom  t'apella.»  40 
—  «  Le  meiller  noms  qued  eu  aia  es  que  soi  christiana.  Le 
noms  que  mos  paire  ni  ma  maire  me  doneron  es  que  m'apel- 
leron  Sapientia  ;  et  en  aici  m^apella  hom  ;  e  soi  delz  meillors 
homes  e  delz  plus  autz  de  Lombardia.  Mas  le  meus  senner 
Jesu  Christ,  bons  &  misericordions  m'a  aducha  en  aquesta  45 
ciutât  de  Roma,  ab  aquestas  très  fillas  meuas,  qued  el  m'a 
donadas,  e  gart  las  en  castitat  &  eu  fatz  li  d'ellas  offrenna  e 
don.  n  Cant  Adrians  Temperaire  auzi  aquestas  paraulas, 
comandet  las  ad  un  rie  home  seu  entro  ajorn  qued  hom  la 
demandes.  Menet  las  hom  a  la'  maison  d'aquest  rie  homen,  50 
qued  avia  nom  Palladii.  Can  foron  laintre  en  Talberc,  li  donna 
acomenset  sa[s]  fillas  ad  amonestar  &  ad  apellar  en  Saint 
Esperit  e  dis  lur  :  «  Fillas  meuas,  eu  vos  ai  [35  v^j  esseinnat 
bonas  letras  ;  gardas  aquellas  en  cellui  en  cui  avez  pausat 
vostra  esperansa,  cel  vos  appella  a  la  vostra  fen.  Non  vuUas  55 
atendre-a  la  vostra  joventut  ;  mas  garnes  vos  de  las  armas  de 
nostre  Sennor  Jesu  Christ,  <k  coronatz  vostra  maire  de  vostre 
enemic^,  e  desliuras  me  de  celui  que  m'a  cargada  de  peccat, 
zo  es  del  diabol  ;  car  si  eu  vos  tramet  davan  me  a  la  cavalla- 
ria  del  verai  rei,  graii  légation  lai  m'acabares.  Fillas,  tenez  60 
perfechament  la  via,  qued  eu  per  la  vostra  fen  sia  renovel- 
lada  del  règne  celestial;  et  appcllaran  me  a  vos  cil  que  pla- 
zôn  a  Deu  et  eu  estarai  lai  ab  vos  totz  temps  mais.  Et  vos,  fil- 
las meuas,  las  qualzporteien  mon  ventre,  aias  merce  de  vos- 
tra maire,  &  tensouatz  contra  las  artz  del  maligne  maistre,   65 

*  Ms.  la  a.  —  '  Sic;  lacune  ? 

Iî5 


£ 


258  LEGENDES   PIEUSES 

zo  es  del  diabol,  qued  escoraou  contra  vos  autras  tormens  elz 
acerma.  Claraa[tzJ  vos  per  Deu  lo  Paire  et  per  nostre  Sennor 
Jesu  Christ,  lo  seii  unial  fil,  qued  vos  rendra  coronas  e  gui- 
zardon  per  la   vostra  paciencia.  »  Cant  11  donna  ac  semenat 

70  aqiiesta  esperital  semensael  cor(s)  de  sa.[s]  fillas,  las  donzellas 
non  oblidavan  minga  la  senna  do  Jesu  Christ,  car  tota  hora 
fazian  lo  seinnal  de  la  cros  en  lur  cara,  e  pregavan  nostre 
Sennor  qued  el  las  corones  porfechament  e  qued  el  lur  dones 
forsa  contra   lur  enemic,  e  pois  dizian   a  lur  maire:  «  Donna 

75  maire,  alegra  [36  v°]  te  en  nostre  Seinnor  e  mena  nos  davan 
Temperador  Adrian,  e  veiras  nostra  forsa  e  la  confession  de 
la  nostra  fen.  Le  nostre  salvaire  Jesu  Christ,  del  quai  nos  em 
essennadas,  el  concis  la  nostra  fen  e  nos  donara  respons  a  zo 
qued  hom  nos  demandara.  »  Adonx  lur  dis  lur  maire  :  «B'illas, 

80  6u  vos  engenrei  ;  nuilla  rens  non  es  en  aquest  mont  que  vida 
aia  ni  longamen  pusca  durar,  que  non  sia  destermenat.  Per  zo 
soffres  un  pauc  temporalz*  penas,  que  vos  aias  la  vida  dura- 
bla  ;  et  eu,  cant  vos  aurai  offertas  a  nostre  Sennor  perfeh 
sacrifizi,  segrai  vos.  ))    Tribusque   ita   diebus   transactis,  jussit 

85  imperator  Adrianus  adduci  eas.  Que  cum  ducerentu7\  sequebatur 
eas  mater  gaudens  et  cxultans.  Can  foron  passât  très  jorn, 
Adrias  Temperaire  trames  querre  las  donzellas,  e  domenz 
qued  hom  las  en  menava,  lur  maire  las  seguia,  lauzant  nostre 
Seinnor.  Can  foron  el  palais  intradas  e  foron  davan  Tempe- 

90  rador  Adrian,  acomenset  lur  a  dir  :  «  0  vos,  bonas  tozetas, 
gran  pietat  ai  de  vos,  car  eu  vos  vei  tan  bellas.  Prec  vos  qued 
aias  pietat  de  vostra  maire,  &  non  vullas  perdre  la  flor  de 
vostra  juventut.  Crezes  me  aici  con  farias  a  vostre  paire,  à 
sacrifiatz  alz  nostre[s]  deus,  que  son  sennor  de  tôt  lo  segle  ; 

95  e  si  d'aizo  me  voletz  creire,  eu  vos  tenrai  en  lue  de  mas  fillas 
et  estares  en  las  mias  rique-[36  v°]-zas,  e  sera  vos  granz 
honors  que  vos  sias  appelladas  fillas  d'emi)erador;  et  eu  farai 
venir  toz  mos  rix  homes,  mos  dux  &  mos  princes  &  tôt  lo 
scenat,  &  afiUarai  vos  denant  totz  ;  e  si  vos  non  me  voles 
100  creire,  eu  vos  farai  far  mouz  tormenz,  6i  vostres  cors  petitz 
e  vostra  gran  beutat  destruirai  malament  e  degastarai  per 
tormenz,  e  zo  que  remanra  de  vostres  menbres   donarai  alz 

*  Ms.  temperalz  (per  en  abrégé:  p  barré  et  non  bouclé). 


LÉGENDES   PIEUSES  ^59 

cans.  Crezes  me,  avan  qued  eu  vos  fassa  aizo.  »  Las  sanctas 
vergenas  responderon  totas  ensemps  e  disseron  :«  Reis,  aitalz 
promessions   non  nos   an   ren  a  far.  Nos  avem   paire,  Jesu   105 
Chrisf,  &  aquel  recebra  nos  aici  con  perfechas  fillas.  En  aizo 
avem    près  armas   de  veritat,   con    puscam   contrastar   alz 
enganz  de  la  toa  bauzia  &  intrar  en   la  maiso  de  celui   que 
pujet  el  cel,  car  las  portas  son  ubertas  ;  e  fai  nos  aquelz  tor- 
menz  que  far  voiras,  car  per  aquelz  conoisseras  la  vertut  de   110 
nostre  Sennor  Jesu  Christ  qued  es  en  nos.  »  L'eraperaire,  cant 
auzi   aizo,  fon  enrabiatz;  e   sonet  la  maire  d'ellas   e    dis  11  : 
«Diguas  me  lo  nom  de  tas  ôllas  ni  de  canz  de  jornz  son.  ))Res- 
pondet  11  donna  e  dis  :  «  Li  majer  de  mas  fillas  a  nom  E'«pe- 
ransa  &  es  d'état  de  .xii.  anz  ;  li  autraha  nom  Fez  &  es  de  dez   115 
anz  ;  li   autra  ha  nom  Caritat  &  ha  nou  anz.  »  Adonx  Tempe- 
raire  sonet  la  primera  e  dis  11  :  «  Esperansa,  sacrifia  a  la  gran 
Diana.  »  Esperansa  respondet  e  dis  :  «  0  tu,  [37  r®]  acomen- 
samenz  de  la  huraana  cecitat,  per  que  me  mandas  laissar  lo 
meu  sennor,  que  fez  lo  cel  e  la  terra  e  toi  cant  es,  e  mandas   120 
me  adorar  las  ydolas,que  son  senz  armae  son  fâchas  de  peira 
e  non  han  poder  plus  qued  una  peira?»  Audiens  imperator  hos 
sermoneSy  ira  i^epletus,  jussù  eam  expoltari  et  virgis  cedi,  donec 
consentiret  immolare.  Can  Temporaire  auzi  aquestas  paraulas, 
fon  moût  iratz,  e  comandet  qued  hom  la  despoilles  e  donnes   125 
Tom  tantas  ab  vergas  &  qued   hom   la  bâtes   tan  entro  que 
sacrifizes  alz  deus.E  quan  i  agron  frag  dotze  manadas  de  ver- 
guas,  plaga  nuillanon  li  parec  en  sa  carn.  Adonx  Temporaire, 
cant  0  vi,  comandet  qued  hom  li  tailles  las  possas.  Adonx  totz 
le  pobolz,  qued  era  vengutz   aqui  per  vezer  aquella  justizia,    130 
vezian*  la  tosa  tan  jove  et  tan  bella  e  tan  soffrent,  avian  gran 
pietat  quan  la  vezian  batre  ni  taillar  las  possas,  e  dizian:  «  Quai 
mal  an  fah,  Deus  1  aquestas  donzellas,  qued  aital  pena  soffron?  » 
D'aquel  lue  don  foron  tailladas  las   possas  eissia  lahg  en  lue 
de  sanc.  Sancta  Esperansa  acomeftset  a  dir  :  «  0  tu   fêlions,    135 
aizo  son  las  toas  menassas  !  Vec  te  que  tanz  homes  as  fah 
lassar  en  me  batre,  e  li  miâ  carnz  non  o  sent,  ni  le  tocamenz 
nilasplagas  de  las  toas  vergas  non  son  apparvent  el  meu  cors. 
Mos  menbres  m'as  taillatz,  mas  vejas,  fellon,  cazer  [37  v**]  lahg 

*  Corr.  vezent  ? 


260  LEGENDES   PIEUSES 

140  a  la  terra  en  lue  de  sanc.  Tu  cujas  per  aizo  vencer  lo  meu 
prepausament  e  la  mia  confession,  qued  ai  de  la  fen  de  Jesu 
Christ.  Ancar  tu,  tjrant  fellon,  si  tu  coraandavas  a  taillar  ma 
cara,  eu  non  séria  confunduda  ;  eu  soi  ferma  en  Jesu  Christ 
&  non   renegarai  mon   sennor.  »  L^emperaire  Adrians,   cant 

145  auzi  aizo,  fon  enrabiatz  e  fez  aportar  una  grazilla  e  far  foc 
desotz,  tant  tro  li  grazilla  fon  tota  blanca;  e  pois  fa  penre  la 
donzella  e  getar  desobre.  Ella  non  temps  lo  foc,  anz  se 
repausava  sus  en  la  grazilla  con  fa  li  naus  en  la  mar,  cant 
esta  soau,  que  las  ondas  non  la  bâton.  Ab  aitant  li  donzella 

150  acomenset  a  cridar  moût  fort  :  «  Seinner  Jesu  Christ,  regarda 
la  toa  ancilla,  e  non  me  fassas  morir  en  aquest  fuc,  qued  eu 
pusca  contrastar  alz  tormenz  d'aquest  tarant,  &  confunt  la 
soa  temporal  *  vertut.  »  Estet  très  horas  sus  en  la  grazilla, 
qued  anc  le  fux  non  la  toquet.  L'emperaire,  cant  o  vi,  fez 

155  aportar  una  sartaja  e  mètre  pez  e  ceu  e  cera  e  fondre  tôt 
ensemps,  &  eissia  en  tan  granz  flaors  que  nuillz  hom  soffrir 
non  0  podia;  e  fez  getar  intre  la  donzella.  Ella,  can  fon  intre, 
acomenset  aici  estar  sana  e  salva  sus,  con  fera  en  rosada  que 
fos  cazucha  do  cel.  Adrians,  cant  o  vi,  ac  moût  gran  dol,  car 

160  won  li  podia  far  creire  sas  ydolas,  ni  per  nuil  torment  non 
[38  r°]  la  podia  destruire,  ni  per  aquestas  penas  qued  el  li 
fazia  ;  et  acomenset  a  pensar  a  quai  pena  la  poiria  far  morir, 
e  fon  aitalz  sos  conseilz  que  li  fezes  taillar  lo  cap.  Cant  sancta 
Esperansa  ac  auzit  del  rei  lo  terme  de  sa  fin,  acomenset  a 

165  pregar  sa  maire  &  a  dire:  u  Maire  donna,  si  le  tieus  plazers 
es,  prega  lo  meu  sennor  qued  el  me  lais  aici  persuirà  afônar 
lo  prepausament  qued  eu  avia  de  la  soa  fen  &  cui  eu  ai  totz 
temps  désirât.  »  Pois  annava  e  dizia  a  sas  serors  :  «  Sorres 
meuas,  aconseillas  vos  ab  cellui  de  cui  es  en(s)tresseinnadas  ; 

170  vec  vos  que  li  nostra  maire  a  gaug  de  las  nostras  passions, 
per  tal  qued  ella  nos  pusca  vezer  en  l'autre  segle  perfechas.- 
Sorres  douzas,  non  voillam  far  irada  la  nostra  sancta  maire, 
que  nos  portet  nou  mes  en  son  ventre,  e  que  n'ac  dolor  eau 
nasquem,  &  que  nos  allachet  ab  lo  lagh  de  sas  possas,  et  que 

175  nos  essennet  en  la  sapieza  de  nostre  Seinnor,  &  ara  nos 
appella  a  la  vida  durabla.  Et  eu,  serors,  vauc  aquella   via, 

1  Ms.  tempei^al  (pei^  en  abrégé,  comme  plus  haut,  p.  §58  n.  1) 


LEGENDES   PIEUSES  261 

laquai  nostre  Seinner  me  vol  donar,  et  eu  prec  vos,  dousas    . 
sorres,  que  vos  fassas  atretal,  que  me  seguias  per  aqui  on  eu 
annarai,  per  tal  que  nos  aiam  &  uzera  ensemps  los  bens  que 
nos  son  promes  del  règne  celestial,  »  Et  cant  ac  dih  aizo,  vai   180 
enbrassar  sa  maire  &  baisar,  &  quis  li  que  pregues  per  ella. 
Pois  annet  [38  v®]  a  sas  serors  e  baiset  las.  E  pois  part  se 
d'ellas,  et  annet  s'en  a  cellui  que  ténia  lo  glazi  &  estendet  lo 
col.  Sa  maire  e  sas  serors  *,  cant  o  viron,  acomenseron  a  cri- 
dar  &  a  dire  :   «  Donna,  alegrament  vai  a  la  passion  &  non  185 
temias  lo  glazi  ;  mas  perfecharaent  vai  per  la  bona  via,  per  tal 
que  nos  n'aiam   plus  fort  coratge  d'annar  per  aquella  eissa 
via  e  puscam  plus  fort  contrastar  al  tjrant.  Nos  vencerem  la 
soa  forsa  &  seguirem  te  al   cel.  »  Et  cant  cel  que  ténia  lo 
glazi,  levet  la  man  per  ferir  la  donzella  sancta  Esperansa,    190 
ella  levet  sas  mas  contra  mont  e  dis  :  «  Benezeh  Senner  Jesu 
Christ,  a  te  ren  eu  gracias  e  recep  me,  peccairis,  ta  serva, 
que  m'as  appellada  ad  aquest  martjri.  Senner,  menbri  te  de 
la  mia  casta  maire  e  de  mas  bonas  serors,  que  tu  las  fassas 
partir  d*aquest  segle  per  passion.  Senner,  recep  la  mia  arma   195 
e  non  voillas  soffrir  aquest  mal  home,  mas  castia  lo  sieu  forsen 
e  la  soa  ira.  »  E  cant  ac  dih  aizo,  e  cel  que  ténia  lo  glazi  la 
fer,  6  taillet  li  son  cap.  Ab  âitan  sa  maire  va  la  penre  &  (e) 
baisar.  Le  pobolz,  qued  era  aqui,  acomenset  moût  fort  a  plo- 
rar,  de  pietat  qued  avian  de  las  donzellas.  Aquist  consumet  200 
enaici  sa  vida. 

Pois  i'emperaire  Adrians  fez  a  si  venir  Tautra,  qued  avia 
nomFides,  &  acomenset  li  a  dir  :  a  Filla,  crez  me  &  adora  e 
sacrifia  a  la  gran  Diana,  que  tu  vivas  &  reman-[39  r**]-gas 
sana  &  salva.  »  Fides  respondet  :  «  Sapias,  reis,  qued  aques-  205 
tas  paraulas  que  tu  me  dis  non  profechan  ren,  car  vanas  e 
follasson.  Aquella  via  que  masorre  ha  fah  aquella  voil  eu  far, 
e  non  voillas  escarnir  te  mezeis  ;  mas  fai  zo  que  te  voiras  de 
me,  car  aici  con  eu  &  aicil  qued  es  morta  siam  serors  de  paire 
ede  maire,  aici  voil  que  siam  serors  el[s]  tormenz.  »  Can  Tem-  210 
peraire  Adrians  auzi  aquestas  paraulas  qued  ella  dizia,  saup 
ben  e  conoc  que  ja  ren  qued  el  li  disses  non  auziria  nil 
creiria.  Comandet  qued  hom  la  despoilles  &  la  bâtes  ab  nervis. 

*  Ms.  serorors. 


262  LEGENDES   PIEUSES 

.  Can  Tagron  longament  batuda,  que  si  n'i  foron  lassât  seis  de 

215  batre,  li  donzella  sofria  ades  douzament  los  tormenz;  sa  maire 
Tesgardava  de  loin  &  ab  gran  pietat  pregava  nostre  Sennor  e 
dizia  :  «  Senner  Jesu  Christ,  dona  suffrensa  a  la  mia  filla  qued 
eu  la  veja  perfechament  annar  en  la  toa  via,  aici  con  ai  la 
miaôlla  primera  Esperansa.  »  Li  donzella,  cant  auzi  aizo  dir 

220  a  sa  maire,  acomenset  a  cridar  merce  a  nostre  Sennor  et  a 
dire  :  «  Senner,  que  m'as  donat  crezensa  en  te,  dona  me  suf- 
frensa e  Victoria  »  Pois  respondat  al  rei  e  dis  :  «  0  tu,  fêlions 
tyrans,  lo  pejor  torment  que  tu  pensaras,  aquel  me  fa,  car  ben 
sapias  verament  que  li  vertutz  de  Deu  es  en  me.  »  Can  l'em- 

225  peraire  auzia  aizo,  avia  lo  sen  perdut,  e  pensava  a  quai  pena 
la  poiria  far  morir  ;  e  dis  li  sos  [39  v®]  conseilz  que  la  crèmes. 
El  ab  aitant  comandet  qued  hom  fezes  un  gran  foc,  e  can  fon 
fah,  fez  sancta  Fidem  getar  intre.  Ella  cant  intret  el  foc,  en  eus 
pas  li  flarama  fon  estencha;  e  sancta  Fez  estava  el  meh  del  f  uc  e 

230  preguava nostre  Sennor  e  dizia:  «  Seinner,  laissa  aquesta  toa  ser- 
va  en  pas,  &en  paciencia  fai  estar  lamiaarma,  e  pusca  trobar 
la  toa  gracia  e  la  toamisericordiadavant  lo  tieu  esgardament. 
Al  fellontjrant  laissa  far  sa  voluntat.  »  Can  Temperaire  Adri- 
ans  auzi  aizo,  comandet  qued  hom  la  getes  del  foc  e  qued  hom 

235  la  pendes  e  la  tormentes.  E  dom^z  qued  hom  la  tormentava, 
de  sos  raenbres  degotavan  en  lue  de  suzor  oinnemenz  raeilz 
flairanz  de  nuilespessi.  Et  acomenset  a  dir  :  a  Tu,  tjran,  que 
me  vez  tormentar  malament  en  aquestas  penas,  en  aquest 
segle  &  en  l'autre  tormentara  tu  Deus  ;  mas  li  mia  arma  non 

240  sent  ren  de  dolor;  anz  soi  salva  en  cors  &  en  arma,  aici  con  tu 
pos  vezer.  »  Adonx  comandet  Adrians  qued  hom  aportes  un 
par,  e  fez  lo  implir  de  pes  e  de  cera  e  de  résina,  e  pois  fez 
li  mètre  fuc  desotz;  e  cant  le  pars  boilli  fort,  comandet  Adrians 
qued  hom  getes  intre  sancta  Fez.  Et  en  eis  pas  qued  ella  fon 

245  intre  el  par,  le  pars  leguet  aici  con  cera,  e  de  la  âamma  del 
fuc  cil  qued  eran  tôt  entorn,  qued  fazian  [40  r®]  ni  aminis- 
travan  aquella  maleza,  foron  cremat.  Ab  tota  aquesta  mera- 
villa,  Adrians  Temperaire  non  temps  que  non  comandes  qued 
hom  li  tolgues  lo  cap.  Li  donzella  sancta  Fes,  can  auzi  aquesta 

250   sentencia,  correc  *  tost  a  sa  maire,  e  vai  la  baisar  et  dis  li  : 

*  Ms.  corroc. 


LEGENDES   PIEUSES  263 

«  Pax  tibiy  mater;  vade  et  mémento  hujus  quam  genuisti  filie. 
Maire,  pas  sia  ab  te  &  vai  e  menbre  ti  de  mi,  cui  tu  engen- 
rest.  »  Pois   vai   abrassar   sa  seror  pauca,  e  dis  li:  «  Sorre 
doussa,  eu  vauc  a  la  vida  durabla,  que  Deus  nos  a  promessa; 
e  tu   cocha  te  de  venir  aprop  nos.   E  tu,  sorre  Cari tat,  non  255 
aias  paor,  que  cel   que  nos  ha  donat  caritat,  cel  es   nostre 
deffendeire.  »  E  cant  ac  dih  aizo,  acoraenset  a  pregar  nostre 
Sennor  &  a  dire  :  «  Deus  Seinner,  qued  es  perfeh  e  verais  & 
vius  paire,  conferma  et  recep  me.  »  Sa- maire,  cant  auzi  aizo, 
acomenset  a  dir  :  «  Filla  bona  &  dousa,  cui  eu  ai  portada  en  260 
mon  ventre,  aias  fort  coratge  e  menbre  te  de  me,  que  te  en- 
genrei.  »  E  domens  que  sa  maire  dizia  aizo,  &  hom  li  taillet 
la  testa.  Li  maire  va  penre  lo  saint  cors  de  sa  filla  e  comenset 
lo  a  baisar  e  dis  :  a  Oimais  aj  tramessas  doas  fillas  davan  me 
a  nostre  Seinnor.  »  Pois  regarda  se  deus  sa  pauca  filla,  e  vi  265 
que  sa  cara  non  li  fon  mudada,  per  ren   qued  agues  vist  far 
de  sasserors,  &  ac  gran  gauh,  e  dis  li  :  a  Filla  Caritaz,  [40  v°] 
sias   de  fort  coratge  &  aias   gran  paciencia  &  esgarda  la 
via  li  qualz  te  menara  al  cel.  Las  toas  doas  serors  an  receu- 
pudas  lur  coronas,  e  li  toa  t'es  appareillada.  Pren  la  de  bon  270 
cor  6  de  bona  voluntat.  Gran  gauh  ai,  car  eu  vci  prop  lo  tieu 
cors,  &  eu  correrai  aprop  te.  D'aici  adenant,  filla  dousa,  con- 
forta te  el  nom  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ.  »  Ab  aitan  Adrias 
Temperaire  appellet  aquesta  pauca  donzella  &  essaiava  la  en 
totas  guizas  con  la  pogues   far  sacrifiar  e  creire  sas  ydolas.   275 
Mas  Caritatz  respondia  el  dizia  perfechament  :  «  Non  cretz  tu 
donx  que  cel  per  cui  son  mortas  mas  doas  serors  semenes 
atressi  sas  paraulas  en  me  con  en  ellas,  &  aici  con  ma  maire 
avia  eissennat  ellas  ha  esseinnat  me?  Et  aici  con  nos  siam* 
d'una  conversion  e  d'una  doctrina  e  d'una  lei,  enaici  volem  280 
far  una  via.  »  L'emperaire,  can  l'auzi  aici  parlar,  fon    moût 
iratz  ;  e  fez  moût  tost  cermar  con  la  fezes  tormentar,  e  coman- 
det  qued  hom  la  mezes  sus  en  una  post  e  qued  hom  Testendes 
sus  e  qued  hom  la  tyres  tan  que  menbre  cada  menbre  la  des- 
menbres  hom  tota.  E  can  Tac  longament  fah  tjrar  en  aici,  et  285 
el  Ten  fez  ostar;  e  can  fon  ostada  d'aquel  torment,  comandet 
qued  hom  la  bâtes  ab  vergas.  Edomenzque  la  batian,  Caritatz 

*  Ms.  sian. 


264  LEGENDES   PIEUSES 

levet  SOS  oilz  verslo  cel  e  dis  :  a  Tyrant,  per  que  te  trebaillas 
en  van,  car  eu  per  lo  meu  seinnor  non  sent  aquestas  toas 
290  penas?  »  Cant  Adrias  Tomperairo  vi  que  per  [41  r®]  nuilla  re 
qued  el  lur  fozes,  non  las  podia  convertir  e  qued  aici  Tavian 
vcncut,  fon  cais  forsenuatz,  e  comandet  qued  hom  appareilles 
un  foru  e  fezes  Tora  cremar  très  jornz  e  très  noh.  Can  venc  a 
cap  de  très  jornz,  venc  Temporaire  denant  lo  forn  e  fez  venir 
295  Caritat  e  dis  li  :  «  Diguas  tan  solament  que  granz  es  uostra 
divessa  Diana,  e  laissaraite.  d  Respondet  Caritatz  e  dis  :  «FoU 
cec,  &  senztotsens,  per  quejanglas  enbadanime  dis  tangran 
follia?»  L'eraperaire,  cant  auzi  aizo,  fez  la  gitar  entre  elforn. 
Karitatz,  cant  intret  el  fort,  seinnet   se   en  croz  el  nom  de 
300  Christ  et  intret  el  forn.  E  domenz  qued  intret,  li  flamma  eis 
del  forn  6:  va  s'en  la  on  eran  lur  ydolas  e  lur  deu  e  cremet  o 
tôt.  Ella  annava  laintre  per   lo  forn  e   lauzava  e  glorificava 
nostre  Sennor,  car  non  avia  donat  al  diabol  poder  encontra 
ella.  Adrians  l'emperaire,  quan  vezia  aizo,  era  moût  iraz  & 
305  avia  gran  meravilla  con  podia  esser,  e  meravillava  se  fort. 
Comandet  alz  menistios  del  forn  que  Fen  traissessan.  Ven- 
gron   al  forn  li  ministre,  6i  agardan  laintre,  e  viron  annar  & 
estar  ab  Caritat  très  homes,  vestitz  de  blanx  vestirs  plus  blanx 
de  neu,  &  lur  esgardamenz  era  plus  clars  qe  le  soleilz,  e  lur 
310  ^^P  ^^^"  P^^^  resplandent  qued  aurs.  Eil,  cant  o  viron,  agron 
granz  meravillas  e  cazegron  abauzos,  pois  dreisseron  se.  E 
can  se  [41  v**]  foron  dreissat,  soneron  ladonzella  e  disseronli: 
«  Ve   sai  fora,  ancilla  de  Deu,  que  Temperaire  te  demanda.» 
Annet  fora  li  donzella  e  ve[n]c  denant  Teraperador.  L'empe- 
315  raire  era  totz  berusclatz  del  fuc,  cant  eissi  del  forn;  e  can  vi 
que  d'autra  guisa  non  podia  nafrar  la  donzella,  comandet  qued 
hom  Taucizes  ab  espaza,  aici  con  avia  hom  fah  sas  serors.  Can 
Karitatz  o  auzi,  acomenset  a  glorifiar  nostre  Seinnor  e  dis  : 
«  Gratia[s]  tibi  ago,  Domine,  quodcumsororummearumsocietate 
320  d^Q^^t^s  ^5  ^^  adunare  el  replesii  me  deliciis  Paradist.  A  te 
rent  eu  gracias,  Senner,  car  voles  qued  eu  sia  compainna  de 
mas  serors,  6:  as  me  repleta  delz  deleh  de  paradis.  Prec  te 
Seinner,  que  tu  adrechures  la  mia  sancta  maire  Sapientia, 
que  tu  ab  pas  &  ab  gauh  aprop  très  jornz  de  la  nostra  mort 
325  la  nos  trametas,  e  que  se  repause  ab  nos  en  la  nostra  sopou- 
tura,  e  dona  nos essempslo durable  repaus,on  nosteglorifiem  & 


LEGENDES    PIEUSES  265 

lauzem.  «Samtiire,  cant  o  auzi,  acomenset  raout  fort  a  plorar 
e  pregava Deu  qifel  li  dones  perfechament  persuir  <k  consumar 
son  cors  e  dizia  :  «  Filla  douza,  aias  fort  coratge  &  esgarda  la 
bona  via,  car  eu  ai  totz  temps.desirat  e  quis  anostre  Seinnor  *   330 
con  eu  vos  pogues  offrir  ad  el,  con  fosses   esposas  [de  Jesu 
Christ.  Ara  vei  la  toa  corona  que  t'es  appareillada.  »  E  do- 
menz  que  sa  maire  dizia  aizo,  aicel  que  toriia  lo  glazi  feri  la 
donzella  e  tôle  [42  r"]  li  lo  cap.  Ab  aitant  sa  maire  va  embras- 
sar  sa  pauca  filla,  e  portet  la  ab  las]  autras  serors  soas,  &  335 
arezet  las  e  vesti  las,  aici  con  atain  a  mort,  &  oins  las  totas 
très  de  precions  enguent  ;  car  usatges  era  el  temps  antic  que 
los  morz  oinnia  hom  de  basme,  celz  quel  podian  aver,  par  tal 
que  verms  ni  nulla  mala  bestia  non  i  vengues  nil  toques.  Can 
li  donna  ac  appareillât  sas  fiUas  6l  acermadas,  mes  las  sus  en  340 
un  carre]&  portet  las  loin  de  Roma  m  miliarium  vicesimum, 
&  aqui  sebeli  las  ;  e  comandet  alz  christians  elz  preguet  qued 
i  fezessan  gleisa,  e  feron  o  aprop.  Ab  ella]eran  annadas  profe- 
menas^  e  donnas  moutas  de  la  ciutat,  que  portavan  precios 
unguenz,  que  meseron  en  la  sepoltura  de  las  sanctas  vergenas.  345 
E  pois,  cant  las  agron  sebelidas,  torneron  s'en  a  Roma,  lau- 
zans  nostre  Sennor  e  rendens  gracias.  Can  venc  al  terz  jorn, 
venc  lur  maire  al  sépulcre  on  jacian,  per  far  lo  septeme,  e 
venc  ab  ella  granz  compainna  de  femenas.  Can  foron  aqui, 
pauset  se  sobre  lo  monument  e  dis  :  «  Baillas  mias,  perfechas  350 
e  coronadas,  recebez  me  eusemps  ab  vos.  »  E  cant  ac  dih 
aizo,  tôt  soau,  cais  que  s'adormis,  transpasset  del  segle.  Las 
femenas  qued  eran^vengudas'ab  ella,  canviron  que  morta  era, 
acomenseron  moût  fort  a  plorar,  e  mes  >ron  [42  v**]  la  el  monu- 
ment,*el  quai  era[n]  sas  sanctas  fillas.  Et  d'aital  manera  trans-  355 
passeron  d'aquest  segle  a  nostre  Sennor  las  fillas  &  li  maire* 
Pois  non  triguet  guaire  que  l'angelz  percuciens  feri  Adrian 
Temperador,  &  cazec  en  caitivetat,  en  tan  gran  qe  las  pal- 
perllas  delz  oilz  li  cazegron  e  sas  carnzse  partjron  delz  os,  de 
guisa  qued  ab  pauc  li  os  non  se  partion  li  un  delz  autres.  Li  360 
det  li  cazian  de  las  mas  &  li  arteil  del  pes.  De  la  bocca  li  eissia 
carnz  poirida  ab  verms.  Can  venc  un  jorn,  qued  ac  aici  estât 
longamenz,  acomenset  a'cridar  moût  forte  dis  :  a  Seinner 

*  Ms.  .s.  —  *  yis.  proro femenas  (p  bouclé). 


266  LEGENDES   PIEUSES 

Deus  de  las  très  vergenas,  las  qualz  eu  tormentei,  e  de  lur 
365  maire,  jeta  tost  l'arma  d'aquest  cors,  car  eu  sai  ben  que  per 
ellas  son  vengut  sobre  mi  tuh  aquiat  mal.  »  E[t]  cum  hec 
dixisset  in  magno  ejulatu  exclamans  crepuit,  et  dissipate  sunt 
carnes  ejus  et  ossa  et  comminûtus  est,  secundum  sanctarum  pro- 
pketiam,  E  domenz  qued  el  dizia  aizo,  p'orant  &  cridant, 
370  crebet,  &  sas  carnz  foron  dissipadas  e  sei  os  atrissat,  e  fon 
esdevenguda  li  prophetia  de  las  sanctas  verges,  que  li  avian 
dih  :  «  En  aquest  segle  &  en  l'autre  te  tormentara  Deus.  » 

Las  sanctas  vergens  Esperansa  e  Fens  e  Caritatz  foron  mar- 

tirias  e  receupron  mort,    ab  lur  maire  Sapiencla,  lo  primer 

375  jorn  de  jul,  en  la  ciutat  de  Roma,  sotz  Temperador  Adrian. 

Régnante  J)o-[i3  r°]-mino  nostro  in  perpétua  Jesu  Christa,  Cui 

est  honor  et  glariaper  cuncta  seculorum  secula.  Amen. 


[IX] 

OBITUS  SANGTE  PETRONILLE  &  FELICULE 

Sainz  Peire  avia  una  filla,  qued  avia  nom  Peironella,  &  era 
moût  bella  femena.  E  per  la  belleza  qued  avia  sainz  Peire 
vole  e  suflferc  qued  agues  una  malautia  qued  hom  appella 
paralisin.  Aquist  malautia  es  aitalz  qued  en  quai  que  menbre 

5  que  toque,  jamais  poder  non  1  aura  hom.  Aquist  jacia  malauta 
e  non  avia  poJer  en  se  mezeissa.  Esdevenc  un  jorn  que 
sainz  Peire  se  disnava  laintre,  ab  discipolz  seus.  Et  us  delz 
discipolz  qued  avia  nom  Tito,  acomenset  a  dir  a  saint  Peire  : 
((  Tu  ja  salvas  totz  los  autres  malautz  :  per  que  laissas  jasser 

10  Peironella  malauta  al  leg?  »  Sainz  Peire  respondet  e  dis: 
«  Car  aici  li  conven  e  li  tain  qued  estia.  Mas  per  zo  qued 
vos  non  aias  doptansa  que  per  las  mias  paraulas  pusca  esser 
sanada,  voil  que  levé*  sus.  »  E  dis  li  :  «  Peironella,  leva  sus 
&  ser  nos.  »  En  eis  pas  ella  se  leva  sus,  sana  e  salva,  e  servi 

15  lur.  E  can  se  feron  disnat,  comandet  li  que  tornes  al  legh. 
E  des  aqui  adenant  ella  fon  perfecha  en  Famor  de  nostre 
Seinnor,  &  fon  sanada  6i  garida,  e  prediquet  la  fen  ^  de  Jesu 

ï  On  avait  d'abord  écrit  leu;  Ve  final  a  été  ajouté  en  renvoi  dans  l'interligne, 
2  L'n  a  été  exponctuée,  mais  d'une  encre  plus  noire,  et,  à  ce  qu'il  semble, 
assez  récemment. 


LEGENDES    PIEUSES  267 

Christ,  &  sanet  atressi  moutz  malautz,  con  sos  paire  fazia, 
ei[s]  tornet  a  la  fen  *  de  Jesu  Christ  per  sas  orations.  Car 
era  tan  bella,  venc  un  jorn  ad  ella  le  coms  [43  v**]  Flaccus,  25 
ab  ganren  de^  cavaliers,  e  dis  li  que  be'  la  penria  per  moiller. 
Sancta  Peironella  respondet  e  dis  li  :  a  A  me,  que  soi  don- 
zella,  es  vengutz  ab  tos  cavaliers  armatz.  Si  penre  me  vols 
per  moiller,  tramet  me,  a  cap  de  très  jornz,  profemenas  6l 
donzellas  honestas,  ab  cui  eu  m'en  pusca  aunar  a  ton  alberc  30 
honestament.  »  Annet  s'en  le  coms.  Sancta  Peironella  en 
aquelz  très  jornz  qued  ac  près  d'espazi,  estet  en  orations 
&  en  dejunis  ;  &  estava  ab  ella  una  vergena  qued  avia  nom 
Felicula,  qued  era  sa  cosina  &  era  perfecha  en  la  fen*  de 
Deu.  Can  venc  ad  aquel  jorn,  qued  avia  donat  respegh  al  35 
comte,  &  ella  fez  venir  a  se  un  preveire,  qued  avia  nom 
Nichomedi,  &  fez  se  cumenegar  &  adordenar.  Et  en  eis  pas 
que  fon  cumenegada,  &  ella  clina  son  cap  el  leg  e  traspasset 
del  segle.  Esdevenc  qued  aquellas  donnas  &  aquellas  profe- 
menas, qued  eran  vengudas  per  ella  menar  alla  cort  del  40 
comte,  Taonderon  a  sebelir.  Flaccus  le  coms  gira  se  ^  pois  a 
sancta  Felicula,  e  dis  li  :  «  Pren  una  d'aquestas  doas  :  o  tu 
seras  ma  moiller,  o  tu  sacriflca  a  nostres  deus.  »  Sancta 
Felicula  respondet  e  dis  :  «  Eu  non  serai  ta  moiller,  car 
sagrada  soi  a  Jesu  Christ,  ni  sacrifizarai  a  las  jdolas,  que  45 
christiana  soi.  »  Adonx  le  coms  fez  la  penre  &  liuret  la  a 
son  [44  r°]  haillon  e  fez  la  mètre  en  una  cercer  esct/?%  senz  * 
draps  e  senz  conduh,  et  estet  laintre  ,\u.  jornz ^'  qaed  anc 

1  Même  observation  que  dans  la  note  précédente. 

*  Ajouté  après  coup  dans  l'interligne.  —  3  Ms.  i^e^ 

*  Un  est  ou  paraît  exponctuée  ;  mais  ici  Texponctualion  est  peut-être  aucienae 
et  d*une  encre  de  même  teinte.  M.  Paul  Meyer  imprime  partout  fe,  sans  aver- 
tir de  cette  particularité,  bien  qu'il  signale  plus  loin  l'exponctuatioa  de  Ve  dans 
gira  se.  Voir  la  note  suivante. 

5  Ue  est  exponctué;  mais  le  poiot  paraît  n'avoir  pas  été  mis  Là  avec  inten- 
tion. Ce  doit  être  un  accident,  comme  il  y  en  a  d'autres  pareils  çà  et  là  dans 
le  ms.  (cf.  fos  20  ro,  1.  6;  22  ro,  I.  14;  41  ro,  1.  8  du  bas);  il  est  d'ailleurs 
beaucoup  plus  maigre  que  ceux  dont  la  signification  est  certaine,  p.  ex.  fos  8  vo, 
1.  4,  25  ro,  1.  5,  31  yo,  1.  5  du  bas.  Même  observation  pour  celui  qui  fait  l'objet 
de  la  note  précédente . 

*  Les  lettres  imprimées  en  italique  ici  et  au  commencement  du  verso  du 
même  feuillet  44  sont  suppléées  par  conjecture.  Le  ms.  est  déchiré  en  cet 
endroit. 


268  LEGENDES   PIEUSES 

non  bec  ni  manjet.  E  venian  li  motVlers  *  de  celz  que  la  gar- 

50  davan  e  dizian  li  :  «  Per  que  vols^  raorir  a  ta  mala  mort? 
Pren  aquest  ric  home,  le  qualz  es  de  gran(z)  paratge  &  es 
compse  belz  joves  hom  6i  amix  de  Temperador.  »  Can  sancta 
Felicula  auzi  aizo,  non  lur  respondia  nuiila  ren  aire,  mas 
solament  aizo  :  «  Vjrges  soi  de  Clirist,  &  estier  el  non  aurai 

55  autre  marit.  »  Gant  ac  estât  set  jornz  en  la  carcer,  fez  Ten 
jetar  le  comps,  e  fez  Ten  menar  a  son  alberc,  ab  vsas  autras 
donzellas.  Laintre  estet  autres  set  jornz,  senz  conduh,  car 
en  nulla  guisa  non  la  pogron  ad  aizo  adurre  que  preses  nuil 
conduh  de  lur  raan.  Can  le  comps  o  vi,  fez  la  pendre  en  una 

60  trau,  &  aqui  fazia  la  tormentar.  Et  aiceil  que  la  tormentavan 
dizian  li  :  «  Digas  tan  solament  que  non  es  christiana,  &  lais- 
sarem  te.  »  Sancta  Felicula  respondia  :  «  En  non  reneguarai 
pas  lo  meu  seinnor,  qe  per  me  fon  abeuratz  de  fel  mesclat 
ab  vin  aigre,  &  fon  coronatz  d'espinas  &  fon  clavellatz  en 

65  la  croz.  »  Cant  ac  aizo  dih,  deissenderon  la  d'aqui  e  getseron^ 
la  en  una  pozaraca  lo  cap  primer.  Sainz  Nichomedis  le  preire 
venc  la  noh  et  trais  la  d'aqui,  e  portet  l'en  en  una  balmeta 
on  estava  tôt  rescondudamenz,  e  sebeli  la  [44  v®]  lai'ntve  ; 
&  es  fora  de  la  ciutat  de  Roma,  en  un  lue  qued  hom  appella 

70  via  ardiatina,  et  en  aquel  lue  fcz^  hom  puis  gleisa,  on  nostre 
Seinner,  per  la  preguera  de  sancta  Felicula,  fez  pois  montas 
meravillas.  Venc  a  saber  a  Flaccum,  qued  aici  o  avia  fah  le 
preire  Nichomedis,  e  trames  lo  querre  e  fez  lo  venir  davan 
se  e  dis  li  :  «  Sacrifia    a  nostres   deus.  »   Nichomedis   res- 

75  pondet  e  dis  :  «  Eu  non  sacrifiarai  mas  solament  al  deu  qued 
es  poderos  de  tôt  cant  es,  e  non  alz  vostres  deus,  lo[s]  qualz 
vos  tenes  enclaus  elz  temples,  aici  con  en  una  carcer.  »  Cant 
ac  aizo  dih,  fez  lo  penre  Flaccus  e  fez  li  tantas  donar  ab 
massas  de  plump,  entro  que  fon  mortz;  e  pois  fez  getar  lo 

80  cors  en  flum  de  Tyber.  Le  clergues  d'aquest  preveire,  qued 
avia  nom  Justus,  ques  tant  lo  cors  per  Taigua  entro  quel 
trobet;  e  cant  Tac  trobat,  vesti  lo  &  arezet  lo,  &  pauset  lo 

*  Voir  la  note  précédeute.  —  2  sic.  —  3  m.  Paul  Meyer,  dont  j'ai  adopté 
toutes  les  restitutions  au  recto  de  ce  feuillet,  supplée  ici  Aûs^îs;  mais,  outre  que 
c'est  là  une  forme  que  son  incorrection  rend  inadmissible,  le  mot  serait  trop 
loDg  pour  le  vide  à  remplir.  Il  n'y  a  pas  place  pour  plus  de  trois  lettres. 


LEGENDES   PIEUSES  26  9 

en  un  legh,  e  portet  lo  en  un  orfc  seu,  fora  los  murs  de  la 
ciutat,  &  aqui  sebeli  lo   honestament.    In   quo   loco    orantes 
Dominum  consecuntur  que  postulant  interventu  martyris^  ejus.  El  85 
quai  lue  zo  quedhom  quer  anostre  Seinnor  drechurerament, 
per  la  preguera  del  martyr,  li  es  donat.  Ad  honorent  Domini 
Nostri  JesuChristipro  cujus  nomme  passus  est,  El  nom  de  nos- 
tre  Sennor  Jesu  Christ,  per  cui  nom  el  sufferc  martyri.  Qui 
cum  Pâtre  etSpiritu  Sancto  vivit  et  régnât  per  secula  seculorum*  90 
Ajnen, 

[X] 
PASSIO  SANCTl  ADRIANI  MARTYRIS 

j-2  po  2  l'O]  Factura  est  in  secunda  interrogatione  tyranni  Ma- 
ximiani,  ut  ingcntes  persecutores  ad  Nichomediorum   mitteret 
civitatem,  ad  interficiendos  per  singula  loca  eos  qui  in  Christo 
crederent,  Uiis   emperaire,  qued   avia   nom   Maximia,  trames 
messatges  per  tota  la  terra  de  Nichomedia,  pér  los  castelz  e     5 
per  las  ciutatz,  que  totz  aquelz  qued  hom  trobaria  que  predi- 
carian  la  lei  de  Christ,  que  totz  los   aucizes  hom.  Esdevenc 
un  jorrn  qued  el  mezeis  le  reis  intret  en  una  ciutat,  &  annet 
s'en  tost   al  temple,  &  agenoillet   se  &  adoret   zos  deus,  & 
comandet  qued  hom  lur  fezes  sacrifizi.Las  genz  de  la  ciutat,    10 
can  auzirou  alzo,  aporteron,  li   un  taurs,  li  autri  vedelz  ;  e 
fazian  lur  sacrifizi  a  lur  deus.  Las  cridas  estavan  aqui,  que 
cridavan  que  tuh  venguessan  &:  aportessan  offerendas  &  sacri- 
fizessan  alz  dieus;  e  cil  que  non  o  farian,  que  mespresarian 
lo  mandament  del  rei,  serian  tormentat  ;   e  si  atrobava  hom    15 
nengun  Christian,  aquel   séria  tormentatz  e  crematz.  Esta- 
bliron  cerquas,  qued  anneron  per  la  région  e  per  las  ciutatz, 
que  quesissan  curosament,  si  i  atrobaria  hom  nuil  Christian  ni 
nuilla  christiana,  qued  hom  los  aduices  al  jutge  e  que  fossan 
tormentat  aigrament  o  cremat  en  fuc.  E  donet  en  le  reis  ren-  20 
[2  v<>]-dezas  et  aver  a  celz  que  los  esseinnarian.  Cant  las  genz 
0  auziron,  li  un  vezin  trahiant  los  vezis,  e  li  amie  los  amix,  li 

*  Ma.  mris  avec  un  signe  abréviatif  au-dessus.  M.  Meyer  a  lu  matris.  Mais 
cf.  la  traduction  qui  suit. 
'  Manuscrit  de  Carpentras . 


270  LEGENDES   PIEUSES 

parent  los  parens,  por  los  dons  que  le  reis  lur  avia  promes;  li 
autri,  non  per  dons,  mas  per  la  paor  qued  avian  del  rei  ;  car 

25  moût  greu  pena  e  greu  turment  devian  aver  cil  que  los  celavan. 
Anneron  cil  qued  eran  eleh  per  cerquar,  &  cerqueron  laciutat 
el  regisme,  e  pois  torneron  al  rei,  e  disseron  11  a  celât  :«  Sein- 
ner,  la  ciutat  avem  cerquada,  &  avem  atrobat  christians  qued 
estan  rescondut  en   una  balma,  <k  aqui  cantan  tota  nohg.  » 

30  Comandetle  reis  a  sos  bailos  que  la  annessan.  Preseron  caval- 
iers ab  elz,  et  anneron  s'en  la,  e  meseron  se  entorn  la  balma, 
e  preseron  los.  Et  aduisseron  los  a  la  ciutat  on  era  le  reis, 
liatz  per  lo  cors  ab  cadenas  de  ferre.  Can  venc  lo  matin, 
qued  annava  al  temple  le  reis,  per  adorar  sos  folz  deus  &  per 

35  far  sacrifizi,  aduiseron  li  aques  christians  denant  liatz,  e 
disseron  li  :  «  Reis,  vec  que  nos  avem  cercat  tota  la  région  e 
la  ciutat,  et  avem  vist  que  tuh  li  home  de  la  terra  adoran  los 
tiens  granz  deus  &  obedisson  alz  tieus  mandamenz  ;  solamenz 
avem  aques   atrobat,  que  mesprezan  los  tieus  cotnandamenz, 

40  &  neis  blastemian  los  tieus  deus.  »  Can  le  reis  auzi  aquesta 
paraula,  fez  estan-[3  r°]-car  lo  carre  en  que  annava,  e  fez 
los  venir  davan  se,  e  dis  lur  :  «  Don  es  vos  autri?  »  Respon- 
deron  *  tuh  essemps,  e  disseron:  «  En  esta  terra  em  nat;  mas 
secundum^  nostra  fen  em  de  Galilea.»  Adonx  lur  dis  le  reis: 

45  «Vos  non  avez  auzit  cal  pena  devon  aver  cil  que  son  d'aquesta 
vostra  religion  (son),  ne  que  van  contra  mon  mandament?» 
—  «Reis,  ben  o  avem  auzit;  et  diz(i)èm  que  folz  es  aquest 
vostres  mandamenz;  &  avem  escarnit  lo  diabol  que  met  sas 
obras  elz  filz  non  fizelz,  del[z]  qualz  tu  es  senner  et  princes.» 

50  Adonx  lur  dix  le  reis  :  «  Et  auzas  dir  que  le  meus  mandamenz 
sia  folz  !  Per  los  meus  deus  !  eu  consomarai  los  vostres  cors 
per  amars  tormenz.  »  E  diz  a  sos  princes  :  a  Sian  estendut  al 
sol,  &  bâta  los  hom  ab  bastos;  et  veirem  si  lur  venra  ajudar 
lur  deus,  ni  los  desliurara  d' aquesta   mia   ira.»  E  fez   hom 

55  venir  très  bacallars  que  los  bateron  ab  nervis  crutz.  E  do- 
menz  qued  hom  los  batia,  li  martir  de  Deu  disseron  :  «  0  tu, 
felz  ennemix  de  Deu,  fai  nos  plus  fort  tormentar,  qued  on 
mais  nos  tormentaras,  on  majors  coronas  aurem.  »  Le  reis 
Maximias  dis:  a  0  vos,  caitiu,  ja  vos  farai(s)  ades  taillar  sos 

*  iMs.  l'osponderon,  —  ^  En  abrégé  {scd'm). 


LEGENDES   PIEUSES  271 

caps.  Et  atendes  coronas  !  Desamparas   aquella  trachoressa  60 
doctrina  vostra  &  non  vullas  vos  mezeis  [3  v°]  aici  perdre  en 
van!  »  Li  saint  martyr  responderon  :  «  Deus  destruia  te  !  car 
tu  tormentas  senz  iicaison   los  sers  de  Deu,  li  quai  son  senz 
culpa.  »  Maximias  Temperaire  dis  :  «  Bâtes  lur  me  sas  boccas 
en  redon  ab  peiras.  »  Ab  aitan  li  tormentador  preseron  peiras  65 
e  fraisseron  lur  las  gingivas.  Li  saint  martyr  disseron:  «  Aici 
nos  as  liuratz  a  torment  senz  misericordia,  con   si  nos  avias 
atrobat  mal  fazent.  Per  amor  d'aizo  Pangelz  de  Deu  te  ferra. 
Ancar  non  es  sadolz  d'aques  tormenz  que  tu  nos  faz  venir 
desobre,  ni  non  nos  ternes  far  tôt  jorn  tan  fellonessa  pena  70 
traire,  ni  ta  greu  marture.  Per  que  non  te  pensas  tu  qued 
atressi  em  de  carn  e  de  sanc,  con  tu  es,  ja  zia  zo  que  tu  aias 
mais  de  fellonia  en  tu?  Reconois  te  e  vejas  car  las  toas  peiras 
agudas   non  an   pogut   atrissar   las  nostras  maxillas.  »  Can 
Maximias  auzi  aizo,  fon  moût  iratz,  e  dis  :«  Per  los  meus  granz   75 
deus  !  farai  vos   taillar  sas   lengas,  que   tuh    sapian    qe   non 
deves  contrastar  a  vostre  sennor.  »  Li  martir  de  Christ  disse- 
ron :  a  0  tu,  fellon   tyrant,  si   tu   aquelz,  que  segon  lo   segle 
mespresan   lur  sennor,  adiras  ni  fas  tormentar,  per  que  nos 
cujas  far  contradir  al  nostre  deu,  que  nos   pot  donar  aquelz   80 
tormenz  que  te  son  appareillât  ?  »  L'emperaire  Maximias  res- 
pondet,  e   dis  :  «  Qualz   tormenz  m'es  lo  appareillatz?  »  Li 
martyr  disseron  :  a  Aquel  cui  Deus  appareillet  al  diabol  e  alz 
seus  menbres,  qued  es  vos  autrl  [4  r°]  fellon.  Zo  es  fox  que 
ja  non  esteinnera^  <k  verms  que  ja  non  morra,  e  torment  que   85 
ja  non  auran  fin,  e  pena  durabla,  lac  de  perdicion,  tenebras 
soteiranas,  on   es  plors  &  estreinnemenz  de   denz,  &  autres 
tormenz  de  que  non  es  nombres,  aici  con  Deus  los  a  appa- 
reillatz al  sieus  enemix,  qued  es  vos.  »  Maximias  Temperaire 
dis  :  aAdes  vos  farai  taillar  las  lengas.  »  Li  saint  martir  res-  90 
ponderon  :  «  E  si  tu  taillas  lo  son  de  la  nostra  lauzor,  le  gemi- 
menz  de  nostre  coratge  poira  meilz  pujar  a  nostre  Sennor,  et 
nostre  coratges  cridara  plus  fort  a  Deu  ;  car  le  nostre  sanx, 
cui  tu  as  escampat  de  badas,  a  major  son  d'un  corn,  e  crida  a 
nostre  Sennor,  per  lo  quai  nos   soifrem  aizo.  »  Cant  le  reis  95 
auzia  aquestas  paraulas,  fon  plens  de  gran  ira,  e  dis  :  «  Aujas 

*  Ms.  esteinnara. 


272  LEGENDES   PÎEUSES 

lo  respons  d'un  cada  un,  e  cargas  los  me  totz  de  ferre,  e  metez 
los  me  en  lapejor  carcer,  e  totz  los  tormenz  que  ja  far  lur 
poires,  lur  fazes;  car  eu  los  farai  morir  greument  aici  con 

100  eil  0*  desiran.  Car  eil  non  son  digne  solament  que  moiran  ab 
glazi.  Anz  es  obs  granz  que,  per  Teissemple  d'aques,  tota  li 
terra  se  convertisca.  »  Adrians  per  nom,  qued  era  majer  en 
tormentar  aques,  can  vi  la  gran  suffrensa  e  la  gran  fen  qued 
avlan  contra  los  tormenz,  dis  lur:  «  Eu  vos  conjur  per  lo  vos- 

105  tre  Deu,  per  lo  quai  vos  sofres  aquestz  tormentz,  que  vos  me 
digas  la  veritat,  qualz  [4  v°]  es  lo  guizardos  que  vos  esperatz 
ad  aver  per  aques  tormenz,  car  semblanz  m'es  que  granz 
guizardos  &  rix  n'esperatz  ad  aver.  »  Responderon  11  saint 
martyr  e  disseron  :  a  Li  nostra  bocca  non  es  aondosa  a  com_ 

110  tar  ni  las  nostras  aureillas  non  o  poirian  auzir.  »  Adrias  dis: 
«  E  de  tanz  bens  non  aves  ren  auzit  per  propheta  ni  per  autra« 
escriptura?  »  Responderon  li  martyr:  «  Las  prophetas  eran 
home  simi)le,  aici  con  nos  autri  era,  e  non  saupron  ren  plus 
que  nos  autri  fazem.  Mas  aizo  que  Sainz   Esperiz  lur  essein- 

115  net,  aizo  disseron.  Scriptum  enim  de  gloria  illa  sic  est.  Et  es 
en  aici  escrih  d'aicella  gloria  :  Occufus  non  vidtt,  nec  auris 
audivif,  nec  in  cor  hominis  ascendit,  que  preparavit  Deus  dili' 
genlibus  se,  Oilz  non  poc  vezer,  ni  aureilla  auzir,  ni  cors  d'ome 
pensar  zo  que'Deus   ha  appareillât  a  celz    que  lo   temon    n 

120  Taman.  »  Cant  Adrians  auzi  aizo,  en  eis  pas  vai  estar  elm'egh 
d'elz  e  dis  :  «  Escrives  ^  me  ab  aques  sainz  de  Deu,  &  notàz 
ma  confession,  qued  eu  soi  christians.  »  Et  aqui  eis  movon 
s'en  dui  d'aquelz  que  los  guardavan  &  anneron  s'en  al  palais, 
e  disseron  o  al  rei,  e  porteron  li  la  carta.  Can  Maximians  vi 

125  la  carta,  penset  se  qued  Adrians  agues  escrih  alcuna  accu- 
sation contra  los  christians  &  dis:  a  Leges  tost  aizo  que  m'a 
trames  le  meus  amix  Adrians.  »  Cil  que  li  avian  aportat  l'es, 
crig  disseron  :  «  Reis  ^, » 

130  [20  r°]  ac  aizo  dih,  agenoillet  se  denant  elz  &  adorava  la  ca- 

*  Ms.  los;  mais  17  et  Vs  sont  exponctuées. 

2  Mot  à  peine  lisible,  comme  quelques-uns  des  deux  ou  trois  lignes  suivan- 
tes. 

3  Lacune  de  deux  feuillets  {Ivij-lviij),  Voir  l'introduclion  p.  212. 


LEGENDES   PIEUSES  273 

dena  ab  que  erant  liât  ;  e  pois  tornet  a  son  marit  Adrian  ; 
car   el   estava  en  autra  maison,  estendutz  en  una  trau  ;  e 
dis  li  :   «  Vejas,  seinner  meus,  non  esgardes   la  belleza  de 
ton   cors   ni   la    beutat  de  ta  joventut,  car   tôt  es  conduh 
de  verms.  Non  te  tempte  Taurs,  ni  Targenz,  ni  li  precions   135 
vestirs,  ni  las  possessions,  ni  nuilla  res  terrenals,  car  al  jorn 
del  juizi  non  sera  ja  res,  que  tôt  reman  aici,  ni  adonx  non 
poira  hom  ja  ren  donar  per  s'arma,  car  non  sera  qui  o  proses; 
solament  recebra  Deus  los  dons  de  las  sanctas  armas.  »  E 
cant  ac  dih  aizo,  comandet  lo  a  Deu,  et  annet  s'en  a  sa  mai-   140 
son.  Cant  venc  aprop  non  sai  canz  jornz,  Maximiaa  comandet 
qued  hom  li  aduisses  los  martyrs  de  Deu  denant.  Cant  Adrians 
o  auzi,  &  el  dis  alz  autres  :  «  Sennor,  si  vos  autri  o  coseilla- 
vas,  eu   annaria  a  la  mia  maison  &  adurria  la  mia  moiller, 
vostra  serva,  que  vis  la  nostra  passion.  Car  l'autre  jorn  loi   145 
covinc,  elo  li  plevi,  qued  eu  lifariasaber  cant  hom  nos  appel- 
laria.  »  Autrejeron  lo  li  li  saint  martyr.  E  cant  0  agron  autre- 
jat,  donet  loguier  a  las  gardas  que  los  gardavan,  quel  laisses- 
san  annar,  e   donet  lur  fermansas  los  sainz  qued  eran  aqui 
qued  ades   tornaria.  E  domenz  que  s'en  annava,  vi  lo   uns   150 
d'aquels  delà  ciutat,  e  conoc  lo  [20  v°]  &  annet  corenz  a  sa 
moiller  e  dis  l'o  :'«  Tos  mariz  es  deliures  e  ven  s'en.  Eu  l'ai  a- 
des  laissât  aici  prop.  »  Nathalia,  cant  auzi  aizo,  non  0  crezet, 
e  dis  :  «  Et  qui  lo  poc  desliurar  d'aquesta  preison  ?  Ja  Deus  non 
voilla  qued  el  se  parta  d'aques  sainz.  »  Et  domens  qued  ella   155 
dizia  aizo,  vec  vos  un  parent  seu,  ben  tost,  e  dis  li  :  «  Donna, 
mos  senner  es  desliures,  e  ven  s'en.  »  E  cant  Nathalia  auzi 
aizo,  penset  se  qued  agues  fugit  lo  martyre  ;  e  fon  moût  trista 
e  dolenta,  &  acomenset  a  plorar.  Et  ab  aitant  vi  lo  venir,  e 
getet  purre  zo  que  ténia  en  sas  mas,  e  vai  tost  claure  la  porta   160 
de  sa  maison,  e  comenset  a  cridar  :  «  Ja  non  vengas  a  me  tu 
que  t'es  partiz  de  Deu  &li  as  mentit  ta  fen  I  Ja  aquil  lengua 
non  parlara  ab  me,  ab  la  quai  tu  as  renégat  noste  Seinnor  ; 
ni  eu  non  l'auzirai,  carengan  afah  en  l'esgardamen  de  nostre 
Seinnor.  »  E  pois  gira  se  deus  el  e  dis  li  :  «  0  tu  hom  sen  deu   165 
davan  totz  autres,  qui  te  fez  penre  obra  que  non  poguessas 
persuir?  Qui  t'a  fah  partir  delz  sainz?  0  qui  t'a  enfoUit,  que  tu 
te  sias  partitz  del  conven  de  pas?  Diguas  me  per  que  as  fugit 
davan  que  fossas  en  la  batailla  !  Con  as  getat  porre  tas  armas, 

19 


274  LEGENDES   PIEUSES 

170  davan  que  vissas  ton  enemic  ab  cui  te  dévias  corabatre?  Ni 
con  es  naffratz  davan  qued  hom  Vagues  getat  cairel  ni  sagetta? 
Eu  avia  lo  meravillas,  si  [21  r*]  de  la  gent  qued  es  senz  Deu, 
ni  de  la  ciutat  delz  fêlions  podia  esser  res  offert  a  nostre 
Seinnor,  ni  de  quai  manera  podia  esser  sagratz  de  gent  homi- 

175  cidasacrifizis  a  Deu.  Eu  que  farai,  mesquina  que  soi,  ajostada 
ab  aquest(a)  fellon  del  linnatge  delz  malz?  Ni  autreiat  non 
m'es  qued  eu  sia  apellada  una  hora  moiller  de  martyr.  Anz 
serai  appellada  moiller  de  mal  home.  Un  petit  ai  agut  gauh; 
mas  oimais  aurai  totz  temps  mais  dol.  »  Adrians  auzia  moût 

180  voluntiers  aquestas  paraulas,  e  donava  s'en  gran  cura  &  gran 
gauh  &  ades  avia  major  talent  d'adimplir  zo  qued  avia  promes. 
Avia  se  granz  meravillas,  con  de  bocca  de  femena  podian 
aitalz  paraulas  eissir,  per  zo  car  era  joves  &  non  avia  gaire 
que  Tavia  presa  per  moiller,  car  mas  tretze  mes  non  avia  que 

185  la  près  per  moiller,  ni  mais  non  avia  estât  ab  el.  Ad[r]ians, 
can  la  vi  aici  irada,  coraenset  la  a  conortar,  e  dis  li  :  «  Donna 
Nathalia,  obri  me,  car  non  es  aici  con  tu  cujas,  qued  eu  aia 
fugit  lo  martjri.  Ja  Deus  non  vuilla  qued  eu  lo  fuja!  Mas  per 
zo  zai  soi  vengiitz,  qued  eu  t'en  mené  e  que  sias  a  la  nostra 

190  passion  e  que  la  vejas  aici  con  eu  t'avia  promes.  »  Ella  non 
crezia  zo  qued  el  li  dizia,  e  respondet  e  dis  :  a  Vejas  co  me 
cuja  engannar  aquest  bausaire  !  Aquest  contrafai  Judas  I  Toi 
te  de  me,  hom,  qued  ades  au-[21  v.]  cirai  me  mezeissa,  e  seras 
t'en  adonx  ben  venjatz.  »  Et  domenz  qued  ella  se  triguava 

195  d'obrir,  el  dis  «  Obri  tost,  que  si  eu  m'en  vauc,  d'aici  enant 
non  me  veiras  ;  e  ploraras  pois  car  non  m'auras  vist  davant 
qu'eu  moira.  Fermansas  ai  donat  los  sainz.  E  cant  querrant, 
si  non  m'atroban,  li  saint  martir,  cui  ai  donat  per  fermansa, 
soffriran  los  tormenz  qued  eu  deuria  aver  essemps  ab  lo  lur  ; 

200  e  sera  granz  peccatz,  qued  eil  non  podon  a  penas  soffrir  los*  lur  : 
car  eil  son  cais  mort,  per  los  tormenz  que  le  malz  hom  lur  a 
fah  far.  »  Can  Nathalia  auzi  aquestas  paraulas,  annet  ben 
tost  a  la  porta  &  uberc,  e  getet  se  a  sos  pes.  E  sanz  Adrians 
dis  li  :  «  Beneita  es  entre  totas  femenas,  car  tu  es  appareguda 

205  soleta  sobre  terra,  qued  amas  ton  marit.  Benezeita  es  li  toa 
corona;  tu  es  frucs  de  Victoria*  &  compainnera  delz  martirs, 

*  Ms.  las,  —  *  Ms.  victaria. 


LEGENDES   PIEUSES  275 

jacia  zo  que  tu  non  sias  raarturiada.  »  E  près  la  &  acomense- 
ron  s'en  ad  annar  amdui.  Domenz  qued  eran  en  la  via,  que 
s'en  annavan,  e  lo  dis  Adrians  :  «  Diguas  me,  donna,  con  as 
adordenat  ta  sustancia  ni  zo  qued  as.  »  Ella  respondet  e  dis  210 
li  :  «  Seinner,  non  te  membre  de  las  causas  d'aquest  mont, 
per  zo  que  non  te  tjron  a  se.  Solament  te  membre  d'aizo  en 
que  es  appelatz.  Toi  te  de  totas  las  causas  cor-[22  ro]-rum- 
pudas  d'aquest  segle  !  Mas  cocha  te  de  vezer  aquellas  causas 
que  ja  non  transpassaran,  que  te   son  appareilladas,  &  ad  215 
aquelz  sainz  que  van  ab  te  en  la  via  de  nostre  Sennor.  »  E 
cant  intreron  en  la  carcer,  li  ancilla  de  Deu  se  va  getar  alz 
pes  delz  sainz  martyrs  &  baisava  la  cadena  ab  que  eran  liât. 
Trobet  lur  cors  poiritz  per  los  tormenz,  tan  que  verm  lur 
cazian  de  las  naffras,  e  clinava  se  e  terzia  lur  tôt  aquel  poiri-  220 
guier.  Pois  trames  donzellas  soas  a  sa  maison,  que  li  aportes- 
san  delz  belz  draps  que  lai  eran  pro  :  ella  era  moût  riqua 
femena  e  de  gran  linnatge.  E  cantl'agron  aportat  los  draps, 
ella  los  vai  penre,e  torquavalur  ab  sas  mans  proprias  las  naf- 
fras, &  ab  los  draps  faissava  lur  pois  los  pes  e  las  mas.  Erant  225 
enim  dissoluta  menbra  pondère  ferri,  Lur  menbre  eran  desjoinh, 
per  lo  gran  fais  del  ferre  de  que  eran  cargat.  Estet  laintre  ab 
elz  en  la  carcer  set  jornz  e  cura  las  naffras  del[z]  sainz  martirs. 
Can  venc  lo  jorn  que  Temperaire  avia  douât,  comandet  qued 
hom  11  aduisses  denant  los  sainz.  Et  anneron  a  la  carcer  cil  230 
qued  en  foron  mandat.  E  can  foron  laintre^  getavan  los  en  ad 
enpenchas;  e  car  eran  tuh  desfah  per  los  tormenz,  que  non 
podian  annar,  cargavan  los  a  lur  costas,  con  feiran  en  ases, 
&  aici  portavan  [22  v°]  los  liatz  ab  una  cadena.  Adrians  venia 
aprop  elz,  liatz  las  mas  detras  lo  dos.  E  cant  foron  prop  de  la  235 
cort,  vi  los  aquelz  que  n'e[ra]  maistre  davant  los  autres,  & 
annet  o  dir  al  rei  :  «  Senner,  aici  son  aquil  dampnat.  »  Maxi- 
mians  dis  ^  :  a  Despoille  los  hom  nutz  en  lur  bragas,  que  Tuns 
veja  los  tormenz  de  Tautre  e  las  penas.  »  Li  ministre  respon- 
deron  :  «  Senner,  aicelz  que  foron  primerament  tormentat,  240 


*  Oa  diz.  Ce  mot,  écrit  après  coup  dans  riolerligne,  est  d'une  lecture  dou- 
teuse. Lés  deux  premières  lettres  seules  sont  sûres  ;  Vs,  si  elle  existe,  est 
absolument  indistincte  ;  on  croit  voir  à  la  fin  un  t  ou  un  r.  Faudrait-il  lire 
dist? 


276  LEGENDES  PIEUSES 

non  pot  hom  ren  demandar.  Mas  Adrian  fassa  hom  venir 
sainz,  que  non  ha  an  car  gran  mal.  Car  le  cors  delz  autres 
son  tant  poirit  deus  totas  partz  que  las  costas  lur  pareisson, 
e  si  hom  lur  demandava,  non  poirian  respondre,  car    li  un 

245  espiran,  li  autri  volon  fenir  lur  vida,  e  non  poirian  recebre 
aquest  tormenz  que  lur  son  appareillât.  E  nos  non  volem  que 
moiran  tan  tost;  anz  devon  recebre  gran  pena,  car  fort  col- 
pable  son.  Mas  comanda  qued  Adrians  intre.  n  Ë  comandet  le 
reis  qued  hom  Taduisses.  Anneron  lai  &  despoilleron  lo,  e 

250  feron  lo  intrar  laintre,  &  portava  el  mezeis  sos  grillons.  E 
domenz  qued  el  s'en  intrava,  li  saint  martyr  li  disseron  : 
«  Adrian,  vec  te  que  tu  es  dignes  que  tuleus  ta  cros  e  seguias 
Christ.  Vejas  que  per  paor  non  sias  desliatz  ni  tomes  atras, 
que  le  tiens  guizardons  non  sia  fah  vans,  e  le  diabolz  non 

255  te  tolla  ton  thesaur.  Aquil  que  veiras  non  te  espauton  ;  mas 
agarda  ad  aquellas  causas  que  * , » 

[fe]-[5  r°]  -  menas  que  li  martyr,  que  volian  ja  raorir  per  la 
preiso,  eran  ja  guarit  per  Tamenistrament,  fez  aportar  una 

260  gran  colonna  de  coure  e  mètre  sus  en  lur  pes,  que  per  lo 
gran  fais  e  per  la  gran  pesantura  lur  fraissessan  las  cambas, 
e  dizia:  «Tant  lur  farai  sofFrir  de  penas,  que  ja  non  morran 
aici  co  moron  li  autri  a  mort  cominal.  »  Anneron  li  ministre 
e  feron  o  aici  con  Maximians  lur  ac  comandat.  Aporteron  lur 

265  arezament,  e  vengron  en  la  carcer.  Can  Nathalia  los  vi,  annet 
ves  elz,  e  preguet  lur  qued  o  acoraensessan  primerament  ad 
Adrian,  per  tal  que,  can  veiria  primerament  tormentar  los 
autres,  non  n'agues  paor.  Feiron  o  aici  con  ella  lur  preguet. 
Vengron  primerament  ad  Adrian  et  estenderon  li  las  cambas 

270  en  aquel  estrument,  e  tailleron  li  los  pes.  Pois  Nathalia  dis  li  : 
«  Senner,  eu  te  prec,  si  le  tiens  plazers  es,  domens  que  tu 
vins  ancara,  que  tu  estendas  la  toa  man,  qued  eil  la  te  taillon, 
que  tu  puscas  esser  esgalz  alz  autres  sainz  martirs,  car  eil 
an  soflfers  majors  turmenz.  »  Sainz  Adrians  estendet  sa  man, 

275  e  li  questionari  feriron  sus  e  tailleron  la  li.  Et  en  eis  pas  el 
transpasset  del  segle.  Pois  van  s'en  aquil  menistre  alz  autres 
sainz  martirS;  e  frainnion  lur  las  cambas  e  las  coissas.  Li 

*  Lacune  de  trois  feuillets  {Ixij'lxiv),  Voir  l'introduction,  p.  212. 


LEGENDES   PIEUSES  27  7 

saint  martyr,  can  los  veziaa  venir  ves  elz,  estendian  lur  pes 
e  dizian:  «  Senner  Jesu  [5  v°]  Christ,  recep  lo  nostre  esperit!  » 
E  cant  avlan  dih  aizo,  reddian  las  arnaas  a  Deu.  Le  reis  Maxi-  280 
mians  comandet  qued   hom  crames  los  cors;  e  dizia  :  a  Per 
aventura  venrian   aquil  de    Qalilea  &  portarian  los  en.    » 
Sancta  Nathalia   avla  resconduda  la  man  d'Adria,  so  marit, 
en  son  sen,  que  non  fos  crenmda  ab  l'autre  cors.  Li  ministre 
portavan  los  cors  delz  sainz  cremar,  aici  con  le  reis  o  avia  285 
comandat,  car    uns   fornz    ardens   era  appareillatz.    Sancta 
Nathalia  seguia  los  cors  delz  sainz  e  recebia  lo  sanc  ;  e  mou- 
tas  autras  femenas  seguian  los  atressi  ab  ella,  e  recebion  lo 
sanc  en  lur  draps  &  en  lur  vestirs,  que  degotava  delz  sainz 
cors  delz  martirs.  Los  vestirs  d'aquelz  que  los  portavan,  qued  ^^^ 
eran  tuh  sanguenent,  compravan  las  sanctas  femenas  moût 
carament  &  rescondian  los  &  tenian  los  moût  car.  Can  foron 
vengut  al  forn,  geteron  los  inz  de  sus  de  la  sobeirana  bocca. 
Las  femenas  qued  estavan  aqui  ploravan  e  dizian  :   «  Senner, 
membre   vos    de  nos  el  vostre  repaus  !  »    Sancta  Nathalia  ^^ 
abrivet   se    e  vole  se  getar  el  foc.  En  eus  pas  [que  li  cors 
foron  getat  el  fuc,  e  lo  venc  subtanament  pluia,  &  eslauci, 
&  t^o^,  e  tempesta,  &  fon  terratremolz  tan  granz  que  tro  ad 
aquelz  temps  non  era  aguda  majers.  Totz  aquel  lues  e  tota 
li  ciutatz  nadet  en  aigua,  &  aici  esteis  li  fornaz  ardens  per  ^^ 
la  gran  pluia.   Li  ministre,  can  o  viron,  agron  gran  paor  e 
fugiron  s'en.  Li  autri  de  [6  r"*]  paor  cazian  a  la  terra,  &  estein- 
nian.  Nathalia  e  las  autras  sanctas  femenas,  qued  eran  aqui, 
anneron  de  cors  penre  los  cors  delz  martirs,  e  troberon  los 
entiers,  de  guisa  que  sol  uns  pelz  non  lur  fon  crematz.  Aqui  305 
ae  un  religions  home,  &  venc  ab  sa  moiller,  &  getet  se  alz  pes 
de  Nathalia  e  delz  autres   sainz  fraires,  qued  eran  aqui,  et 
acomenset  lur  a  pregar  &  a  dir  :  «  Seinnor,  nos  soliam  estar 
aqui  deforas,  lonc  los  barris  d'esta  ciutat,  tôt  privadament, 
e  vim  e  conoguem  la  maleza  del  rei,  &  con  escampava  lo  310 
sanc  de  celz  que  se  clamavan  per  Deu.  Fugem  d'aici,  &  annem 
nos  en  Bezanci,  &  desamparem  aquest  lue.  E  per  aizo  vol- 
riam  vos  pregar  que  vos  nos  donasses  los  cors  delz  sainz  ; 
e  levariam  los  en  la  nostra  naveta,  e  portariam  los  en,  e 
sebeliriam  los  la  on  estem  ;  &  estarian  la,  entro  qued  aquest  315 
malz  emperaire  fos  mortz.  Car  si  nos  los  laissem  aici,  venra 


278  LEGENDES   PIEUSES 

aquest  malz  reis,  e  comandara  qued  hom  los  crome  per 
aqui  eis,  aques  que  Deus  a  desliuratz  per  la  pluia  e  per  lo 
tron^  »  E  plac  moût  aquist  paraula  a  totz  aquelz  qued  eran 

320  aqui,  e  leveron  los  cors  delz  sainz  en  la  nau,  &  porteron  los 
en  Bezanti.  Nathalia  remas  en  sa  maison  e  retenc  ab  si  la 
raan  de  son  marit  Adrian.  E  dizia  :  u  Si  per  aventura  li  cors 
delz  sainz  lur  eran  tout,  Senner*Deus,  cal  conseil  penria  eu, 
ni  on  auria  eu  oimais  ma  esperansa?  »  Près  la  man  de  son 

325  marit,  &  envolopet  la  de  polpra  et  [6  v®]  ois  la  de  mirra,  e 
pois  pauset  la  al  capsal  de  son  leg,  qued  anc  hom  non  o  saup. 
Pois  can  venc  aprop  non  sai  quanz  jornz,  domenz  que  sancta 
Nathalia  era  en  la  ciutat,  venc  uns  rix  hom  al  palais  de  Maxi- 
mian,  e  preguet  lo  rei  que  li  dones  Nathalia  per  moiller.  Ella 

330  era  moût  riqua  femena,  &  valia  mais  que  las  autras  qued  eran 
de  la  ciutat,  &  era  trop  bella.  Trames  li  aquest  rix  hom  hones- 
tas  femenas  &  bonas,  que  U  parlessan  d'aquest  maridatge. 
Sancta  Nathalia,  cant  auzi  aquestas  paraulas,  respondet  en 
aici  :   «  Moût  ai  gran  gauh,  car  eu  auh  aquestas  paraulas. 

335  Qui  me  poira  lo  acermar,  qued  eu  sia  moiller  d'aital  home  ? 
Mas  prec  vos  que  me  dones  espazi  de  très  jornz,  con  eu  me 
pusca  appareillar,  car  eu  non  cujava  penre  marit.  »  Aizo 
dizia  per  tal  que  fugir  s'en  voila  et  annar  la  on  jazian  li  saint 
martir.  E   per  aquestas  paraulas  eil  deceup  las  femenas,  que 

340  li  avia  trames  le  rix  hom.  Can  las  femenas  s'en  foron  eissidas, 
&  ella  s'en  intret  en  sa  cambra,  on  era  li  mans  de  son  marit 
Adrian  ;  &  gotet  se  a  la  terra,  &  acomenset  a  pregar  nostre 
Sennor  ab  plors  &  ab  lagriraas  &  a  dire  :  a  Senner  Deus, 
qued  es  Deus  de  celz  qued  an  tribulation,  &]es  de  josta  a 

345  celz  que  son  tribulat  per  cor,  regarda  en  me  la  toa  ancilla, 
e  non  me  laisses  bautugar  ab  la  man  del  tieu  saint  martir 
Adrian.  E  prec  te,  Senner,  que  non  oblides  lo  lieu  martir. 
Senner,  aias  merce  [7  r°]  de  me  e  de  lui,  e  non  oblidar  los 
liamps  qued  el  sostenc  per  lo  tieu  nom  !  Tu,  Senner,  es  mise- 

350  ricordios,  &  non  laisses  los  sens  tormens  en  van,  e  los  caiti- 
vers  qued  el  sofferc  per  te.  Senner,  menbre  te  de  lui  ;  sostrai 
me,  Seinner,  de  la  compainna  del  diabol,  e  que  Fenemix  non 
bautugue  lo  legh  d'Adrian  I  Tu,  Senner,  que  desliurest  los 
tieus  sers  del  fuc,  desliura  me  de  Tatent  d'aquest  fellon.  » 

355   E  cant  ac  ganren  pregat  ab  plors  &  ab  lagrimas  &  ab  gran 


LEGENDES  PIEUSES  279 

tristicia,  &  ella  s'adormi,  &  ve  vos  un  d'aquelz  sainz  martirs, 
&.  estet  denant  ella,  e  dis  11  :  «  Pas  sia  ab  te,  Nathalia, 
ancilla  de  Christ!  Aias  esperansa,  car  Deus  non  t'a  despresada, 
ni  a  oblidat  los  tiens  trabailz,  que  as  fah  en  nos.  Car  aqui  eis 
can  nos  appareguem  *  denant  Christ,  nos  lo  preguem  que  ven-  360 
guessas  tost  a  nos.  »  Respondet  sancta  Nathalia  e  dis  : 
((  Diguas  me,  sainz,  si  le  meus  senner  Adrians  esta  essemps 
ab  vos  denant  Christ.  »  E  respondet  le  sainz  :  «  Verament 
apparec  &  annet  davan  tostz  nos  davan  la  fas  de  Christ.  Mas 
leva  sus  &  intra  en  aquesta  nau:  &  vai  t'en  la  on  son  li  nostre  365 
cors,  &  aqui  te  visitara  nostre  Senner,  e  te  menara  lai  on 
nos  em.  »  Et  ab  aitan  Nathalia  reissidet  ;  e  can  se  fon  reco- 
noguda,  levet  sus,  e  près  solament  la  man  d'Adrian,  e  laisset 
tôt  cant  avia  ;  e  portet  la  essemps  ab  se  &  acomenset  s'en 
ad  annar.  E  domens  que  s'en  annava  &  volia  intrar  en  la  nau,  370 
&  ella  atrobet  una  gran  compainna  [7  v°]  d'omes  e  de  femenas, 
que  s'en  fugian  per  paor  del  rei  ;  et  ab  elz  ella  intret  en  la 
nau,  &  annet  s'en.  Quan  le  rix  hom,  que  la  dévia  penre  per 
moiller,  saup  que  Nathalia  s'en  fugia,  annet  el  palais  e  ques 
al  rei  adjutori  de  cavaliers,  &  intret  en  una  nau,  &  acomeu-  375 
set  a  segu[i]r  Nathalia.  E  cant  ac  annat  ben  mil  millas,  venc 
uns  venz  contraris,  e  tornet  lo  lai  don  era  vengutz.  E  li  un 
delz  compainnos  sens  foron  mort,  e  li  autre  cazegron  en  las 
ondas  de  la  mar.  Can  venc  entorn  meja  noh,  e  le  diabolz  se 
meiret  en  semblansa  d'una  nau  ab  ganren  homes  &  venc  380 
encontra  aquesta  nau,  on  era  Nathalia,  e  comenset  a  cridar 
cais  que  fos  le  nauclers  :  «  Don  es  eissi(s)t,  ni  on  annares?  » 
Aquil  de  la  nau  responderon  e  disseron  :  «  Nos  em  eissit  de 
la  ciutat  de  Nichomedia,  &  volem  annar  en  Bezancium.  » 
E  le  diabolz  acomenset  lur  a  dir:  «  Vos  erras,  car  vos  non  385 
navigatz  ad  aquellas  partidas.  Tenes  a  la  senestra  part.  » 
E  volia  los  mètre  en  la  mar.  Eil  se  cujavan  verament  qued 
aco  fossan  verament  nautonier  d'Orient.  Et  acomenseron  ja 
amudar  lur  vêlas,  per  annar  lai  on  le  diabolz  lur  avia  dih. 
E  vec  vos  que  sainz  Adrians  lur  apparec  subtanament,  e  dis  390 
lur:  «  Venez,  qued  aizo  es  vostres  viatges;  e  non  vuillas 
seguir  aquel  que  vos  parlla,  car  aquel  vos  cujava  destruire, 

*  Ms.  appareguen 


280  LEGENDES  PIEUSES 

epersec  vos  ades.  »  Et  d*aqui  enant  le  diabolz  non  lurapparec. 
Levet  sus  [8  r°]  Nathalia  e  conoc  qued  Adrias  los  guizava,  & 

395  ac  moût  gran  gauh.  Et  en  eis  pas  levet  se  uns  bons  venz  e 
menet  los  a  Bezanci  davan  que  fos  jornz.  Et  eissiron  de  la  nau, 
can  foron  a  Bezanci,  &  anneron  s'en  en  la  maison  on  eran 
li  cors  delz  sainz  martirs.  Can  foron  laintre,  sancta  Nathalia 
se  val  agenoillar  davan  los  cors  delz  martyrs,  li  quai  avian 

400  soffert  pacienment  lo  marturi,  e  près  la  man  qued  era  aguda 
taillada,  e  pauset  la  de  lonc  lo  cors  de  saint  Adrian  &  agenoil- 
let  se  &  acomenset  a  pregar.  E  cant  ac  preguat,  intret  s'en 
en  la  maison,  e  saludet  tos  los  fraires  e  las  serors,  e  dis  lur 
que  preguessan  per  ella.  Aqui  avia  gran  compainna  de  ôzelz, 

405  que  li  pregavan  que  se  pauses  uu  pauc,  car  moût  era  aguda 
trabaillada  en  la  nau.  Et  annet  se  pausar  et  adormi  se.  E  can 
se  fon  adormida,  en  eus  pas  e  lo  li  apparec  sainz  Adrians,  e 
dis  li:  «  Ben  es  venguda  en  pas,  ancilla  de  Christ  !  Ven  el 
nostre  repaus,  ven  e  recep  los  guizardos  que  te  son  appareil- 

410  lat  !  »  Et  en  eis  pas  ella  reissidet,  &  comtet  o  a  totz.  E  cant  o 
ac  comtat,  adormi  se,  &  aqui  eis  ella  transpasset  del  segle. 
Vengron  li  fraire  e  las  serors  qued  eran  aqui,  e  cujeron  la 
espreisser,  e  troberon  la  morta.  Van  la  penre  &  arezeron  la, 
aisi  con  costumna  es  de  mort,  e  feron  lur  oration,  e  pauserou 

415  la  ah  los  martirs.  E  can  to  agron  tôt  complit,  establiron  fraires 
e  serors,  que  servissan  totz  temps  mais  la-[8  v**]-intre  a  nos- 
tre Sennor,  &  [desamparessan]  las  causas  terrenalz  d'aquest 
segle,  &  servissan  totz  temps  mais  a  nostre  Sennor.  Cui  est 
honor  et  gloria  in  secula  seculorum.  Amen. 


XI 


VITA  SANCTI  lERONIMI 


Impossibile  est  omnino  et  longum  de  isto  viro  ejusque  dts- 

tricta  vïta  et  illius  moribus  retexere   omnia,  Sainz  leronimes 

fon  uns  bons  hom,  e  fez  moutaz   meravillas  en  sa  vida,  e 

direm  vos  n'una  ;  car  si  dire    las  vos  voliam  totas,  longas 

5  no  vas  seriau.  Aici  con  nos  trobam  escrih,  qued  o  [esjcriuseron 


LEGENDES  PIEUSES  2  81 

li   saint  home  qued  o  viron  &  o  auziron  en  la  terra  de  Betli- 
leen,  on  era  le  monestiers  de  saint  Iheronime,  can  venc  un 
jorn  que  sanz  leronimus  ab  toz  los  fraires  eran  a  colleta,  aici 
con   usatges   es  de  morgues,  e  legia   hom  la  leisson,  e  lo 
intra   laintre    un[s]  granz  leons  en  la  claustra,  e  venc  moût   10 
fort  dolent,  et  annel  ab  très  pes  e  lo  cart  portet  pendent.  Can 
li  fraire  lo  viron,  acomenseron   s'en    a  fugir  de  paor   qued 
agron.  Sainz  leronimes,  can  lo  vi,  non  ac  anc  nuilla  paor.  & 
vai  li  encontra,aici  con  fera  ad  un  hoste.  Can  le  leons  fon  en- 
contra  el,  monstret  a  saint  leronime  la  planta  del   pen,  car   15 
parlar  non  podia.  Can  sainz  leronimes  o  vi,  appellet  los  frai- 
res, e  dis  lur  que  li  lavessan  lo  pen  de  que  annava  clopeian, 
&  vissan  curosamen  per  que  se  dolia.  Li  fraire  van  penre  lo 
leon  et  laveron  li  lo  pen  moût  curosament,  e  viron  &  atro- 
beron  qued  uns  escotz  Tavia  naffrat  en  sa  planta.  Sanz  [9  r®]   20 
leronimes  fez  li  oinner  la  naffra  &  fez  s'en  donar  cura  &  fez 
Testar  laintre  entro  que  fon(s)  guaris.  Le  leons  laisset  estar 
la  maleza  &  acomenset  estar  laintre,  aici  con  una  bestia  au- 
tra  domestegua,  entre  los  fraires.  Can  sainz  leronimes  o  vi, 
del  leon  qued  aici  estava,  acomenset  a  dir  alz  fraires:  <(  Frai-  25 
res,  pree  vos  totz,  que  vos  diguas,  e  doties  conseil,  quai  mes- 
tier  poirem  far  far  ad  aquest  leon,  car  eu  sai  ben  qued  el  fara 
zo  qued  hom  li  mandara  que  far  pusca.  Car  eu  crez  e  sai  que 
nostre  Senner  lo(s)  nos  a  trames  mais  perla  nostra  fen  acreis- 
ser,  que  per  la  salut  de  son  pen,  car  el    lo  pogra  ben  garir,   30 
ja  non  intres  ni  vengues  en  aquest  monestier.  Mas  per  zo  lo 
nos  a  trames  qued  el  nos  adjude  a  las  nostras  necessitatz.  » 
Adonx  responderon  tuh  essemps  himilment,  e  disseron  aital 
x-espons:  <  Tu,  senner,  sas  que  Tases,  que  nos  aporta  la  leinna 
del  bosc,  non  ha  mingua  de  guarda,  &  avem  gran  paor  qued  35 
silcuna  mala  bestia  non  lo  manje  e  non  lo  dévore.  Per  zo,  si  a 
"te  platz,  senner,  si  vejaire  t'es  que  drechurera  causa  sia,  met 
l*ase  en  sa  guarda  e  qued  el  lo  menés  a  la  pastura,  e  lo  guar- 
ciesla,  e  pois  lo  seras  tornes  l'en.  »  E  fon  fah  en  aici.  Carguet 
"hom  al  leon  l'asen  que  lo  menés  en  pastura,  e  que  lo  guardes  40 
la,  e  pois  lo  seras  tornes  l'en  a  maison.  Fez  o  aici  le  leos  : 
xnenava  lo  cada  jorn  en  pastura,  el  seras  tornaval'en.  E  cant  el* 

'  Sic.  Corr.  le. 


282  LEGENDES  PIEUSES 

leons  era  ab  el,  non  avia  gaire  [9  v»]  de  regart  d'autras  malas 
bestias.  Et  en  aiei  tenc  o  gran  passa.  Can  venc  un  jorn  que  Tases 

45  Tac  menât  en  pastura,  et  el  s'adormi,  e  dormi  moût  fort.  E 
domenz  que  dormia,  e  lo  passeron  mercader  per  la  via,  qued 
annavam  comprar  oli  en  Egipte;  &  eran  i  passât  moût  soven 
autras  vegadas,  e  vezian  ades  aqui  paisser  Tasen  e  vezian 
qued  hom  nonlo  gardava.  Van  penre  Tasen,  e  meneron  lo  ab 

50  se.  Can  le  leos  reisidet,  regardet  se  e  non  vi  Tase  e  non  saup 
que  se  fos  devengutz.  Fon  moût  iratz  &  acomenset  annar  de 
sa  e  de  la,  e  non  lo  trobet  aqui  on  lo  solia  laissar  per  paisser 
&  acomenset  a  rugir,  e  quis  lo  tôt  lo  jorn  de  sa  e  de  la.E  can 
se  fon  ben  aseguratz  del  trobar  e  vi  qued  en  tôt  aquel  encon- 

55  tre  non  era,  annet  s'en  lo  seras  el  monestier  &  estet  a  la 
porta,  e  non  auzet  intrar,  e  fon  moût  vergoinnos  quar  non 
aduzia  son  ase  aici  con  solia.  Can  sainz  leronimus  e  11  autri 
fraire  lo  viron  estar  a  la  porta  e  non  i  viron  Tasen,  penseron 
se  que  per  fam,  qued  agues  agut,  Tagues  manjat.  E   non  li 

60  volgron  donar  a  manjar  aici  con  solian.  E  dizian  li  :  «  Val  e 
manja  zo  que  t'es  sobrat  de  Tasen  &  impie  en  ton  ventre.» 
Si  tôt  eil  li  se  dizian  aizo,  eil  non  eran  ^pero  cert  si  el  lo 
s'agues  manjat  0  non.  E  per  aizo  anneron  li  fraire  la  on  paissia 
Tases  &  on  le  leos  lo  solia  menar,  per  vezer  si  ja  ren  i  tro- 

65  barian  de  las  remasillas  ;  e  can  la  foron,  non  n'i  atroberon 
nuilla  ren,  e  torneron  s'en,  et  [10  r°]  anneron  o  dire  a  saint 
leronime.  Sainz  leronimes,  cant  o  auzi,  acomenset  a  pregar 
&  a  dir  alz  fraires  :  «  Praires,  prec  vos  soflfrias  lo  dan  de 
Tasen,  el  leon  non  vuillas  esfraidar  ne  getar  de  saintre.  Mas 

70  aici  con  Taves  tengut  entro  aici  de  mangar  e  de  beure,  aici 
lo  tenes  ancara,  et  estacas  lo  e  menas  lo  al  bosc,  et  aportela 
leinna  aici  con  Tases  solia  far,  e  fassa  totlo  seu  mestier.  »  Van 
penre  lo  leon,  &  enbasteron  lo  &  adrezeron  lo  aici  con  fazian 
Tasen,   &  acomenset*  a  portar  la  leinna  &  a  far  lo  mestier 

75  que  Fases  fasia.  Can  le  leons  ac  aizo  tengut  non  sai  canz 
jornz,  e  fon  venguz  le  termes  que  li  mercadier  torneron,  cant 
venc  un  jorn  qued  ac  complit  sa  obra,  ja  fos  zo  que  bestia 
muda  fos,  eu  me  pes  que  de  Saint  Esperit  o  ac,  annet  s'en 
la  on  avia  perdut  son  compainno  &  acomenset  a  corre  de  sa 

^  Ms.  acomenseron. 


LEGENDES    PIEUSES  283 

e  de  la,  per  saber  si  ja  trobaria  *  nuilla  riovella  de  son  asen.  80 
Can  se  fon  aitan  lassas  de  querre,  venc  el  cami,  per  on  passa- 
van  las  mercadarias.  Can  fon  aqui  elcamin,  acomenset  a  gardar 
de  sa  et  de  la,  e  vi  venir  de  moût  loin  homes  qued  aduzian 
camelz  cargatz  ;  &  ab  aques  venia  l'ases  toz  primers  cargatz 
atressi.  Mas  car  li  eran  tan  loin,  non  lo  poc  guaire  ben  conois-  85 
ser.  Mas  pero  annet  s'en  tôt  soau  encontra  elz.  Et  era  aitalz 
usatges  en  la  terra  que,  can  camelz  menava  hom  loin  en  mer- 
cadarias, prennia  hom  un  asen,  e  metia  li  hom  una  corda  al 
col,  e  metia  Tom  primer,  &  estacava  [10  v°]  hom  los  camelz 
après  a  la  corda  e  seguian  Tase.  Gant  aquil  raercader  appro-  90 
benqueron  del  leon,  &  el  connoc  Tasen  &  abriva  se  en  elz,  & 
acomenset  a  rugir  &  ^a  bramar  &  annar  moût  malament 
enfr*elz;e  non  toquet  pero  mingua.  Eil  li  mercadier  agron 
paor,  can  viron  lo  leon,  e  fugiron  s'en  e  laisseion  estar  los 
camelz  e  tôt  cant  i  avia.  Le  leos  can  lo[s]  en  vi  aici  fugir,  aco-  95 
menset  moût  fort  a  rugir  &  a  ferir  de  sa  coza  en  terra  moût 
fort  atressi(t),  elz  camelz  totz  espautatz,  aici  con  eran  car- 
gat,  acomenset  los  en  a  menar  a  Tabadia.  Li  fraire,  can  viron 
aici  venir  Tase  cargat  elz  camelz  cargatz  e  lo  leon  aprop,  que 
los  menet,  van  s'en  de  cors  &  anneron  o  dir  a  saint  leronime.  100 
Can  sainz  leronimes  o  auzi,  eissi  foras,  e  fez  obrir  las  portas 
del  monestier,  qued  hom  las  meses  laintre,  &  qued  hom  las 
descargues,  e  qued  hom  laves  a  lasbestias  los  pes  e  las  cambas 
e  pois  lur  dones  hom  a  manjar:  «E  veirem  que  nos  voira  nos- 
tre  Senner  demonstrar  enaizo;  »  Feron  o  en  aici  con  el  o  ac  105 
comandat.  Le  leos  annet  laintre  perla  claustra,  menan  sa  coza 
efazen  moût  grand  gauh  ;  &  annava  bai?an  los  pes  alz  fraires, 
que  conoguessan  que  non  avia  fah  aizo  qued  eil  se  pensavan. 
Li  fraire,  canto  vezian,  avian  moût  gran  gauh,  et  avian  granz 
pendensas  de  la  maleza  que  li  metian  sus.  Sainz  leronimus  110 
dis  alz  fraires  :  «  Appareillatz  a  manjar,  qued  hoste  nos  ven- 
ran.»  Appareilleron  a  [11  r®]  manjar.  E  cant  agron  appareillât, 
&  parlavan  essemps  ab  saint  leronime,  e  vec  vos  un  messatge, 
que  dis  qued  a.las  portas  del  monestier  avia  hostes,  que  dizian 
que  parlar  volian  ab  lo  paire  del  monestier.  Cant  saint  leroni-    115 

*  Ou  i  atrobaria;  mais  le  ms.,  bien  que  la  séparation  ne  soit  pas  trop 
nette,  indique  pIuLôt  ia  trobaria. 


284  LEGENDES   PIEUSES 

mus  o  auzi,  comandet  qued  hom  los  laisses  intrar.  E  can  foron 
intrat,  e  viron  saint  leronirae,  &  eil  se  van  getar  a  sos  pes, 
moût  vergoinnos,  e  quiseron  perdon  de  zo  qued  avian  fah  de 
Tasen.  Sainz  leronimes  va  los  penre  e  levet  los  sus  &  amones- 

120  tet  los  que  non  volguessan  penre  las  autrui  causas  e  que  de  las 
lur  se  tenguessan  por  pagat,  e  d'aioi  adenant  estessan  en  la 
temor  de  Deu.  E  cant  sanz  leronimes  ac  complit  aici  sas 
paraulas,  comandet  qued  annessan  manjar  ;  e  cant  aurian 
manjat,  qued  presessan  lur  camelz  ab  tota  lur  causa,  e  qued 

125  s'en  annessan.  Adonx  acomenseron  tuh  essemps  a  dire:  «  Nos 
te  pregam,  paire,  qued,  al  lum  de  la  gleisa  &  a  la[s]  necessitatz 
del[s]  fraires,  reten  la  meitat  de  Toli,  car  nos  em  cert  e  sabem 
verament  que  per  los  vostres  obs  mais  que  per  los  nostres 
annem  en  Egipte  per  coraprar,  »  Respondet  sainz  leronimes 

130  e  dis:  «  Non  queresdrechurerament  zoque  queres;  car  non  es 
bon  que  nos,  que  devem  valer  alz  autres  &soccorre  a  lur  obs, 
&em  tengut  al  pobol  de  Deu,  que  nos  los  gravem  ni  prennam 
lur  causas,  de  que  nos  non  avem  soflfracha.  »  Responderon 
eil  e  disseron:  «  Ja  re  que  non  si  aiam  non  portarem  ni  en 

135  trairem,  [11  v°]  si  non  fas  aizo  que  nos  te  dizem,  que  prennas  la 
meitat  de  l'oli.  E  prometem  vos  que  d'aici  adenant  toz  temps 
mais  vos  donem  cad'an,  nos  e  nostre  enfant,  una  mesura 
d'oli.  n  Et  aici  sainz  leronimes  totz  constreh,  e  mal  grat  seu, 
li  avenc  a  far  penre  la  meitat  de  Toli.  E  pois  cant  agron 

140  manjat,  preseron  lur  camelz  e  lur  autri  oli,  &  anneron  s'en  ab 
bénédiction. 

XII 

PASSIO  SANCTI  MAXIMI 

Uns  emperaire,  qued  avia  nom  Decius,  volia  sobrepujar  e 
destruire  la  lei  delz  christians  &  establi  sa  lei  per  tôt  lo  segle, 
que  tuh  li  Christian  se  partissan  del  Deu  viu  e  verai,  e  sacrifi- 
zessan  alz  diabolz.  En  aquel  temps  era  uns  bons  hom  en  la  terra 
5  d'Asia,  qued  avia  nom  Maximus.  Aquest  vole  far  saber  qe  chris- 
tians era.  Mestier  avia  e  d'aquel  volia  viure.  Cant  hom  saup 
que  christians  era,  près  lo  hom  e  menet  Ten  al  baille  de  la  vila. 
Can  fon  deiiant  el,  demandet  li;  «  Con  as  tu  nom? »  Respon- 


LEGENDES   PIEUSES  285 

det  e  dis  :  «  Maximus.  »  Adonx  dis  le  bailes  :  «  Quais  *  hom  es?» 
—  «  Eu  son,  dis  el,  franx  per  linnatge  ;  mas  sers  soi  de  Christ,  10 
e  de  mon  afan  vive,  e  soi  christians,  jacia  zo  qued  eu  sia  pec- 
caire.  »  Respondet  le  viguiers  :  «Tu  non  as  donx  auzitla  lei  que 
11  emperador  sai  an  tramessa  aoras  novellarment?  »  —  «  E 
qualz  ?  »  zo  dis  Maximus.  Respondet  le  veguiers  :  «  Que  tuh 
li  Christian  laisson  aquella  folla  vida  que  tenon  &  obediscan  15 
ad  elz,  que  an  tôt  lo  mon  en  poder,  &  adoron  tuh  lur  de.us.  » 
Bespondet  Maximus:  «  Car  eu  conuc  aquesta  sentencia,  qued 
era  folla  &  avolz,  me  voil  demons-[12  r**]-trar  qued  eu  sia 
christians.  »  Adonx  dis  le  bailes  :  «  Sacrifia  alz  dieus.  »  Res- 
pondet Maximus  :  «  Eu  non  sacrifiarai  mas  solament  al  Deu  20 
viu  e  verai,  a  oui  ai  totz  temps  sacrifiât.  »  Le  veguiers  dis  : 
«  Sacrifia,  per  tal  que  non  moiras;  si  non,  eu  te  farai  morir 
ad  aigres  tormenz.  »  Maximus  respondet  :«  Aizo  voil  eu  moût. 
E  per  zo  me  soi  descobertz,  qned  eu  defailla  d'aquesta  mes- 
quina  vida,  e  recepia  la  vida  durabla.»  Adonx  lo  fez  penre  25 
le  veguiers  e  fez  lo  batre  ab  fustz  ;  e  dome[n]z  qued  hom  lo 
batia,  e  le  bailles  li  dizia  :  «  Sacrifia  alz  deus,  e  seras  esca- 
patz  d'aquestz  tormenz.  »  Maximus  respondet  :  «  Aizo  qued 
eu  soffrl  per  lo  nom  de  nostre  Sennor  non  son  torment,  anze 
son  ben  oinnement.  Mas  si  eu  me  partia  delz  comandamenz  30 
del  meu  seinnor  ni  del  seu  avangeli,  del  quai  eu  son  essein- 
natz,  adonx  soffriria  tormenz  perpetualz.  »  Adonx  comandet 
le  veguiers  qued  hom  lo  pendes.  E  can  fon  pendutz,  &  hom 
lo  turmentava,  &  el  li  dizia  :  «  Maxime,  laissa  aquesta  toa 
foUia  e  sacrifia  alz  deus,  que  salves  la  toa  arma.  »  Maximes  35 
respondet  :  «  Si  eu  non  sacrifize,  aizi  gazainnarai  m'arma  ; 
e  si  eu  sacrificava,  eu  la  perdria.  Aquist  fust,  ni  aquist 
vercant,  ni  nuUa  res  que  tu  me  fassas,  non  m'es  tormenz 
ni  pena,  car  li  gracia  de  Christ  [es  en  me]  que  me  fara  saul 
en  l'autre  segle,  per  las  pregueiras  de  totz  aquelz  sainz  que  40 
son  passât  per  martiri  &  an  vengut  los  vostres  forsenz  e  las 
vostras  iras.  j>  Adonx  comandet  le  veguiers  qued  hom  li  fezes 
la  sententia  que  li  empera-[12  v^j-dor  avian  establida,  car 
non  volia  sacrifiar  a  la  gran  Diana.  Fez  lo  lapidar,  per  zo  que 
tuh  li  autri  Christian  i  presessan  eissemple  e  n'aguessan  paor.   45 

1  Ms.  Quais. 


286  LEGENDES   PIFUSES 

Et  en  aici  lo  sers  do  Christ  [en  fo  menatz]  per  los  nienistres 
del  diabol,  gracias  rendens  a  Deu  lo  paire,  per  Jesu  Christ, 
lo  seu  fil,  que  volia  e  soffria,  qued  el  en  aici  soffren  venquest 
lo  diabol  &aquest  mont.  Menet  Tom  foras  los  murs  de  laciutat 

50  &  lapidet  Tom  ab  peiras  6l  aici  transpansset  d'aquest  segle  a 
nostre  Sennor,  pridie  idus  maii,  E  sofferc  passion  en  la  terra 
d'Asia,  quan  reinnava  Temperaire  Dacians;  &  aquest  que  lo 
martirizet  era  bailles  en  Asia.  Moutz  tormenz  an  soffert  11 
martir  de  nostre  Sennor,  qued  a  nos  autres  serian  moût  greu 

55  a  soffrir.  E  pero  si  diz  nostre  Senner  en  Tavangeli:  a  Qui  non 
bajulat  crucem  suam  &  venit  post  me,  non  potest  meus  esse  disci- 
pulus.  Qui  non  soffrira  martire  per  me,  aici  con  eu  perel, 
non  pot  esser  mos  discipolz.  »  Nos  podem  ben  soffrir  martjri 
sens  aucizement  de  nostres  cors,  si  far  volem  lo  seu  servize. 

60  E  con?  Que  venguara  a  sancta  gleisa  volontiers,  e  fassam 
almornas,  vesitem  malautz,  e  fassam  obras  de  misericordia, 
et  en  aici  soffrirem  raarturi  per  el,  &  serem  esgalz  delz  martirs 
&  aurem  soffert  martire.  E  nostre  [Seinner]  lais  nos  far  de 
tal  guisa  lo  seu  comandament,  que,  cant  las  armas  partiran 

65  d'aquest  cors,  puscam  venir  a  la  soa  celestial  gloria,  on  es 
gauh  senz  dolor  e  vida  que  ja  non  aura  fin.  Quod  ipse  prestare 
dignelur,  qui  cum  Pâtre  et  Spiritu  Sancto  vivit  et  régnât  in 
trinitate.  et  irinitas  in  unitate,  per  secula  *  [seculorum.  Amen.] 


[XIII] 


[XIV] 
[PASSIO  SANCTI  THOM^] 


[13  r**]  nos  in  omm  verùate,  ut  nichilnobis  desi{t)t  de  scientia  Dei. 
Conforma  nos  en  tota  veritat,  que  de  la  sciencia  de  Dea  non 

(l)  Lacune  de  huit  feuillets  entre  les  folios  actuels  12  et  13.  Voir  l'introduc- 
tion, p.  212. 


LEGENDES   PIEUSES  287 

nos  failla  res.  »  —  «  Eu  venrai  a  vos,  a  Tautra  nohg,  et  estruirai     5 
vos  plus  plenerament,  e  que  meil  zo  entendatz.»  Can  venc  ad 
aquella  nohg,  &  el  venc  ad  elz,  aici  con  lur  o  avia  promes,  & 
estruis  los  de  lafe  de  Jesu  Christ  &  baptiset  los  e  sanctifiet  los. 
E  parti  se  d'elz,  e  mes  se  en  la  nau  e  tengron  lur  carera.  Pois 
can  s'en  fon  annatz,  non  triguet  guaire  qued   el  adordenet  a  10 
preveire  un  de  sos  discipolz,  e  trames  lo    en  la  ciutat,  que 
estes  aqui,  &  i  bastis  gleisa.  E  fez  o  en  aici  con  Tapostolz  o 
comandet  :  basti  gleisa,  en  laquai  mouz  pobolz  fon  convertiz 
a  nostre  Sennor,  &  aqui  es  le  setges  de  saint  Thomas  Tapos- 
tol,  &  li  fes  catholica  entro  al  jorn  d'oi.  De  l'enfant  qued  avia   15 
presa  la  fiUa  del  rei,  Dionisius  que  avia  nom,  fez  hom  eveç- 
que,  et  el  mezeis  sagret  sa  moiller,  Pelàsgia  per  nom,  e  fez 
en  monegua,  li  qualz  soflferc  pois  martiri  aprop  la  mort  de 
son  marit,  e  sobre  son  sépulcre,  et  en  aici  fon  escrih  sobre  so 
sépulcre  per  letras  de  grex  &  d'ebraic  e  de  latin  :  «  Aici  se  20 
repausa  li  espoza  de  Dionisi  l'evesque,  fiUa  de  saint  Thomas 
l'apostol.  » 

Can  sainz  Thomas  intret  en  la  ciutat  d'India,  intret  Abba- 
nes'  al  rei  Gondafre,  e  dis  li  qued  aduhg  li  avia  maistre.  Le 
reis,  can  vi  saint  Thomas,  acomenset  li  a  dir  :«  Foiras  me  far  25 
un  palais  ?  »  Respondet  sainz  Thomas  e  dis  qued  hoc  ben.  Val 
le  reis  e  monstret  li  lo  lue,  e  dis  :  «  Ar  me  diguas  de  quai 
manera  lo  me  bastiras  aici  en  aquest  lue.  »  Sanz  Tho-[13  v"]- 
mas  respondet  e  dis  :  «  Eu  te  dirai  ben  con  lo  farai.  »  E  val 
penre  una  vergua,  e  deguizet  lo,  e  dis  :  «  Aici  farai  la  porta  30 
deus  Orient,  e  pois  farai  aici  la  sala,  &  aici  aprop  lo  consistori, 
&aici  las  maisos  d'uvern  &  aici  las  maisons  d'estiu,  et  aici  la  co- 
zina,  &aici  las  cambras  en  qued  hom  jaira.»  Et  aici  déchet  li  lo 
palais.  Le  reis,  cant  o  vi,  comenset  lo  ad  esgardar,  e  dis  :  «  "Ve- 
rament  es  bons  maistre,  e  tain  ben  qued  obres  alz  reis.  »  Près  35 
moût  gran  aver,  tant  que  non  ac  nombre,  e  laisset  lo  li, 
&annet  s'en  le  reis  en  autras  terras.  Sainz  Thomas  annet  per 
las  ciutatz  e  per  las  vilas,  e  prediquet  la  paraula  de  Deu  &ba- 
tejet  los  crezenz,  &  donava  larguament  alz  paupres  l'aver  &  a 
toz  celz  qued  obs  era.E  cant  ac  mot  gran  pobol  convertit,  basti  40 
gleisas  &  adordenet  clergues.  E  can  venc  a  cap  de  dos  anz, 
qued  estet  le  reis  que  non  i  fon,  ac  tôt  l'aver  despendut.  Can 
le  reis  fon  vengutz,  &  ac    après  zq  que  l'apostolz  avia  fah, 


288  LEGENDES    PIEUSES 

comandet  qued  hom  lo  preses  6i  Abbanes  e  lies  los  hom  ab 

45  cadenas,  e  pois  getes  los  hom  en  la  carcer.  E  car  le  fraire  del 
rei  era  malautz,  alonguet  se  car  non  foron  aucis;  car  elles 
cujava  totz  vins  far  escortegar  e  pois  cremar.'Esdevenc  que 
mori  le  fraire  del  rei,  qued  avia  nom  Gatz,  e  fon  fah  moût 
granz  dolz,  car  le  reis  Tarnava  mais  que  nuilla  ren  que  fos. 

50  Arezet  Tom  e  vesti  Tom  de  polpra  e  de  bis,  &  adornet  Tom 
tôt  lo  cors  de  peiras  preciosas.  Comandet  le  reis  qued  hom 
li  fezes  vas  de  peiras  vermeillas  e  qued  hom  lo  pauses  intre. 
[14  r°]  Domenz  que  li  maistre  appareillavan  la  sopoutura,  & 
agron  i  ja  poinnat  quatre  jorns,  can  venc  al  cart  jorn  entorn 

55  hora  prima,  &  Gaz  qued  era  mortz  resuscitet.  Li  maistre  e 
cil  tuh  que  lo  ploravan  agron  moût  gran  paor  e  moût  gran 
meravilla,  e  non  poc  anc  nulz  hom  mo(u)t  sonar  de  la  paor 
qued  agron.  E  domenz  qued  eil  se  meravillavan  aici,  Gaz  diz 
al  rei  Gondafre,  son  fraire  :  «  Enten  me,  fraire.  Aquest  hom, 

60  que  tu  volias  far  escortegar  e  cremar,  es  amix  de  Deu  ;  e 
li  angel  de  Deu  li  servon.  Et  eil  li  àngel  porteron  la  mia  arma 
sus  el  cel  e  montreron  me  lo  palais  que  Tapostolz  Thomas 
fa  bastit  sus  el  cel  d'aital  maneira  con  el  t'a  monstrat  en 
terra.  Mas  totz  es  fahg  de  peiras  preciosas,  de  maragdes  e  de 

65  jacinctes  &  de  cerauneis  ;  et  aici  es  estruh  e  dedinz  e  défera. 
E  domenz  qued  eu  pensava  la  gran  belleza  qued  avia  le  palais, 
e  li  angel  me  disseron  :  a  Aizo  es  le  palais  que  Thomas  Tapos- 
tolz  a  bastit  a  ton  fraire.  »  Et  eu  dis  lur  :  «  Per  la  mia  volontat 
eu  séria  portiers  d'aquest  bel  palais.  »  Adonx  me  disseron  li 

70  angel  :  «  Le  tiens  fraire  s*es  fah  non  dignes  d'aquest  palais;  e, 
si  tu  lo  volz  aver,  nos  preguarem  nostre  Sennor  Jesu  Christ, 
|0  fil  de  Deu,  qued  el  te  fassa  resuscitar;  &  tu  compra  lo  de  ton 
fraire,  e  ren  li  totala  peccunia  qued  el  cujava  aver  perduda.» 
E  cant  ac  dih  aizo,  acomenset  s'en  ad  annar  ben  tost  vers  la 

75  carcer.  Et  intra  laintre  &  vai  se  getar  alz  pes  de  Tapostol,  e 
pregava  li  que  perdones  a  son  fraire,  car  el  non  conoissia  ni 
sabia  qued  [14  v°]  el  fos  apostolz.  E  vai  penre  aqui  eis  los 
liamps  de  que  era  liatz,  e  pregava  li  que  vestîs  bos  vestirs  e 
precios.  Respondet  sainz  Thomas  e  dis  :   «  Pensas  te  doux 

80  ancara  que  cel,  que  vol  aver  las  celestials  causas,  aia  cura  de 
las  terrenalz  ni  de  las  carnalz?  Aquist  mena  gannacha  &  aquest 
meus  mantelz,  que  tu  me  vez  aici,  m'aondara  pro,  &  aquestas 


LEGENDES    PIEUSES  289 

sandalias  ;  car  ja  non  saran  usadas  aitan  con  eu  viurai.  »  E 
domenz  que  Tapostolz  eissia  de  la  carcer,  venc  li   acontra  le 
reis  Gondafres*,  e  va  se  getar  a  sos  pes,  e  pregava  li  que  li     85 
perdones.  Sainz  Thomas  respondet  :  «   Moût  vos  a  donat  le 
meus  senner  Jesu  Christ,  car  vos  a  deinnat  monstrar  los  seus 
secretz.  Vec  vos  que  vostra  terra  &  vostras  ciutatz  son  plenas 
de  gleisas.  E  vos  appareillas  vos,  que  sias  sanctifiât  &  lavât 
en  Taigua  de  la  font  del  sant  baptisme,  e  sias  fahg  parzoner     90 
del  perpétuai  règne.  »  Adonx  dis  Gaz  :  «  Lo  palais,  que  tu  as 
bastit  a  mon  fraire,  pregueron  Fangel  a  nostre  Seinnor  qued 
eu  pogues  comprar.  »  Respondet  saint  Thomas  :  a  Aizo  es  en 
la  volontat  de  ton  fraire.  »  Gondafres  le  reis  dis;  «  Eu  euh 
qued  aquel  palais  qued  es  fah  per  mos  obs  sera  meus  ;  e  Thomas     95 
fassa  en  a  te  autre.  E  si  far  non  t'en  pot  autre,  d'aquest  aurem 
pro    amdui.  ))  Sainz   Thomas   respon.let:  «    Eu   vos   voil   far 
conoisser  e  saber  que  li  palais,  que  son  bastit  en  cel,  non  an 
nombre,  e  desTacomensament  del  mont  en  sa  son  bastit,  e  son 
comprat  per  près  de  fe  e  de  crezensa.  E  si  vos  voles  aver  las    100 
ce-[15  r**]-lestialzriquezas,nil  règne,  ni  lo  palais,  obs  ha  que  lo 
compre-»  davan  que  moiras.  Carja  pois  non  lo  poirias  comprar. 
Et  aquel  aver  de  que  lo   comprai'es  a  obs  que  lo  doues  alz 
paupres  &  en  servas  los   tribulanz  &   a  ceiz  que  soffriran 
desaize,  alz  malautz,  a  las  vetzoas  <k  alz  orphes,  <k  en  pascas   105 
celz  qued  auran  fam,  <k  n'abeures  celz  qued  auran  set,  &  en 
vestias  celz  que  seran  nuz  ;  &  aici  comprares  lo  palais.  E  sias 
segur  e  cert  qued  aqui  vos  seran  cent  vegadas  dobladas  las 
vostras  riquesas,   las   qualz  non   auran  jafin.»  Li  fama  de 
l'apostol  eissi  per  tota  la  teira  d'India.  E   saupron  las  genz   110 
qued  en  la  terra  avia  un  home,  que  can  pausava  sa  man  sobre 
los  malautz,  eran  sanat  :  li   cec  recobravan  lur  vezer,  li  sort 
lur   auzir,  los  diabolz  encausava,  los   mortz  resuscitava.  E 
cujavan  se  totas  las  genz  que  fos  Deus.  E  venian  de  totas 
la  ciutatz  de  la  terra  <S:  aportavan  li  coronas  d'aur  e  peiras    115 
preciosas  e  rix  vestirs,  e  volian  los  li  vestir,  &  volian  li  sa- 
crifiar  bous  &  aretz,  atressi  con  a  Deu.  L'apostolz  quis  al  rei 
Gondafre  que   se   sufFergues   un  mes  de  batejar,  entre   que 
totas  la  genz  de  la  terra  i   fossan.  Can  venc  a  cap  de  trenta 

'  Ms.  GondrafreSj  avec  la  première  r  exponcluée. 

20 


290  LEGENDES    PIEUSES 

120  jornZf  fou  se  acampat  tan  de  gent,  que  non  caupron  denfra 

vila,  ni  denfra  nuil  cu])crt.  Can  Tapostolz  vi  que  non  trobava 

hom  nuilla  plassa  en  que  poguessan  caber,  comandet  q\i^  s^a- 

campessan  tuh  en  un  camp  de  josta  lo  puhg  de  Gozi.  E  can  se 

foron  tuh  acampat,  ac  i  mot  [15  v"]  malautz  de  diversas  ma- 

125  lautias.  E  fez  los  Tapostolz  totz  mètre  ad  una  part.  E  cantlos 

ac  hom  totz  ajostatz,  éi  el  se  mes  el  meg  d'elz,  e  dis:  «  Deus, 

Seiiner,  cui  hom  non  pot  vezer,  6i  quedesnon  prennevolz  e 

non  mudevolz,  c  que  totz  temps  es  e  totz  temps  seras,  e  que 

nos  tramesist  lo  tieu   fil  nostre  Sennor  Jesu   Christ,  enlu- 

130  minador  del  mont,   le  qualz,   can  venc,    donet   a   nos,  sos 

apostolz,  que  nos  el  seu  nom  tota  dolor  e  tota  malautia  sanas- 

sem,  e  dis  nos:   «  Quodcnmque  pecierttis    Patrem  in  nomine 

meo,  prestahit  vobis  ;  qualque  causa  que   vos  queiras  al  meu 

Paire  per  me,  el  vos  donara  »,  per  aizo  eu  te  prec,  Senner, 

135   el  seu  nom,  que  trametas  ad  aquest  malautz  la  metcina  de  la 

toa  majestat,  que  sane  las  malautias  e  las  dblors  e  las  febres 

(raques.  Alz  cex  sia  renduz  lur  vezers,  alz  sortz  lur  auzirs. 

Li  clop  sian  redreissat  e  las  autras  diversas  enfermetatz  sian 

encausadas   de  sobre  cada  un  ;  que  totz  le  pobolz  qued  aici 

140  es  conosca  que  tu  es  Deus  e  non  es  autres  deus  te  enfora  & 

uns  Jésus  Christ  nostre  Senner,  per  cui  as  fah  tôt  cant  es, 

zo  qued  hom  pot  vezer  e  zo  qued  hom  non  pot  vezer  ;  &  us 

Sainz  Esperitz  enluminaire  &  sanctiûaire  de  tôt,  et  nunc  et  in 

perpétua  secula   seculorum.  »  Cant  tuh  aquil  qued  eran  ba- 

145  tejat  6i   esseiimat  vespondevou:  a  Amen  /  »,  e  lo  venc   una 

resplandors  sobre  elz,  talz  que  tuh  cujeron  esserferit  de  colp 

de  fouzer.  Trastuh  jagron  essemps  ab   Tapostol  a  la  terra, 

ben   una  meja  hora.  Dreisset  se  Tapostolz,  e  cridet  a  totz  : 

«  Levaz  sus  !  Car  le  [16  r»]  meus  senner  Jesu  Christ  es  ven- 

150  gutz  aici  con  fonzers,  et  a  vos  sanatz  totz.  »  Eil   leveron  sus 

tuh  san,  e  glorifieron  nostre  Seinnor&  Thomas,  lo  seu  apos- 

tol.  Adonx  pujet  sainz  Thomas  en  una  peira,  que  los  pogues 

vezer  totz  e  que  tuh  poguessan  vezer  el,e  sennet  lur  que 

fezessan  pas,  e  dis  lur  :   «  Aujaz  me  tuh  &  entendes  zo  qued 

155  eu  vos   dirai.  Le  meus  senner,  de  cui   eu    soi  sers,  qued  es 

appellatz  Jesu  Christ,  m'a  trames  a  vos,  &  el  a  aquest  pobol 

visitât  e  curât  de  sa  malautia.  Eu  soi  hom,  aici  con  us  de  vos 

autres,  trames  ad  aizo  qued  eu  vos  csseinne  e  que  vos  fassa 


LEGENDES   PIEUSES  291 

partir  d'aquestasydolas,  que  son  senz  entendement  e  senz  tôt 
sen,  e  que  colas  un  creator  vostre,  qued  es  Deus  sus  el  cel  &  que    160 
vol  sanartotz  celz  que  creiran  en  el.  Aujatz,  horaee  femenas, 
enfant  e  donzellas,  joven  home  e  vergenas,  veil  e  joven,  &  un 
&  autre,  si  voles  venir  a  la  vida  durabla,  crezes  en  un  Deu,  lo 
Paire,  lo  quai  anc  nuilz  hom  non  poc  vezer,  e  lo  sieu  unial  fil 
nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  per  lo  quai  totas  causas  son  fâchas,    165 
per  la  voluntat  del  Paire,  las  causas  qued  hom  pot  vezer  e  cellas 
qued  hom  non  pot  vezer,  las  celestialz  e  las  terenalz;  &  el 
Saint  Esperit  qued  es  non  vezevolz  e  senz  acomensament,  aici 
con  le  Paire  e  le  Fils.  E  tuh  très  son  d'una  sustancia,  e  d'un 
poder.  Le  SainzEsperiz  enlumina  las  armas  d*aquelz  que  cre-   170 
zon  en  Deu,  ab  los  qualz  vos  autri  seres,  si  crezes  en  Deu,  & 
despoillas  lo  veil  home  ab  totz  sos  fah,  e  destruies  las  ydolas 
del  [16  v°  ]  diabol  e  trastotas   sas  festas  èi  calcigas.  Laissas 
tenebras,  que  puscas  trobar  lutz  !  Fuges  mort  et   atrobares 
vida  !  Toiles  vos  de  totz  malz  e  totas  blastemias.  Si  croire   175 
voles  en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  lo  primer  fruc  aures  en 
vos,  si  ben  crezes;  lo  segon,  si  vos  fais  batejar;  lo  ters,  que 
vos  abstenguas  de  fornication  ;  lo    cart,  que  non  aias  avari- 
cia;  lo  quint,  que  aias  poder  en  la  gola,  zo  es  que  non  vuillas 
trop  manjar  ni  trop  heure,  lo  seize,  que  tengas  paciencia;  lo    180 
seten,  qued  en  aquestas  obras  observes  especialment  pacien- 
cia ;roctau,  qued  albergueslospaupres  ;  lo  noven,que  veillas 
saber  qualz  es  li  voluntatz  de  Deu  &  que  aquella  fassas  ;  lo 
dezen,  que  demandes  zo  qued  a  Deu  non  plas  e  qued  aco  non 
vuillas  far;  Tonzen,  que  aias  xîaritat  e  non  solament  ab  vos-    185 
très  amix,  anz  ab  vostres  enemix  ;  lo  dotzen  fruc  aures,  si 
aves  pensament  con   puscas  gardar  las    riquezas    de   totas 
aquestas  vertuz.  Car  cel  que  mais  ha  de  lascelestials  riquezas, 
plus  las  deu  gardar,  que    non   las   perda.  En  aquestas  dot- 
zen vertutz   es  tota  li    perfections  de   celz   que  volon    esser   190 
coiedor  del  verai  Deu.  Aquest  dons  <k  aizo  que  m'avias  apor- 
tat  donas   alz   paupres.  Car  eu   non   soi  Deus,  anz  zoi   ben 
sers  de  Deu.  Et  appareillaz  vos  con  cada  us  vos  batejes.  »  Can 
venc  lo  ditmenegue  aprop,  &  el  los   batejet;  et   ac  n'i  nou 
niilia  homes,  deus  las  femenas  elz  petitz  enfanz.  Pois  comandet    195 
los  a  Deu  Tapostolz,  e  moc  se  d'aquella  terra,  <k  annet  s'en  en 
la  [17  r*]  sobeirana  India,  per  amonestament  de  Saint  Esperit. 


292  LEGENDES  PIEUSES 

Can  le  pobolz  d'aqucUa  terra  vi  las  meravillas  qued  el  fazia 
e  las  vertutz,  auzian  raout  voluntiers  sa  prédication.  Car  el 
200  decassavalos  diabolz  delcors  delz  homes,  raortz  resuscitava, 
cex  enluminava,  los  lebros   mondava,  totas    dolors  e    totas 
enfermetatz  decassavadelz  cors  delz  homes. Esdevonc  qued  una 
donna,  qued  avia  nom  Sinthica,  qued  avia  estât  seis  anz  cega, 
recobret  son  vezer  per  l'apostol.Et  venc  ad  una  autra  donna 
205  qued  avia  nom  Magdonia,  qued  era  moût  s'amigua  &  era  moil- 
1er  del  coinnat  del   roi.  Aquist  donna,  quan  vi  Sinthica  qued 
avia  aici  recobrat  son  vezer,  qued  aici  clarament  &  aici  sana 
era  garida,  e   vezia  ben,  con  si  ja  mal  non  i  agues  agut,  et 
acomenset  a  dir  :  «  Aquest  es    verament  Deus  o  angelz  de 
210    Deu,  qued   aici,  senz    tota   medicina  fa   rendut  ton  vezer.  » 
Respondet  Sinthica  e  dis  :   «  Con  !  E  non  a  doux  sanat  mas 
solament  me?  Quanz  homes  e  cantas  femenas  e  quanz  enfanz 
a  sanatz  de   diversas  malautias,  el  nom  d'aquel   qued   hom 
appella  Jesu  Christ!»  Adonx  dis  Micdonia  :  «  Pensas  sija 
215   lo  poirai  vezer?»  Respondet  Sinthica  :  a  Deman  deu  far  ser- 
mon al  pobol,  e  si  te  volz,  poiras  lo  vezer.  Muda  ton  ves- 
tir  e  cobri  ton  cap,  e  met  te  entre  las  autras  femenas,  e  ja 
non  seras  conoguda.  »  Aquist  Migdonia  era  moiller  de  Ca- 
risi,  coinnada  del   rei  Misdeu,  qued  aici  avia  nom.  Cant  ac 
220  mudat  aici  son  vestir  (k  se  fon  [17  v°]  messa  enfre  las  autras 
femenas,  &  ella  venc  aqui  on  Tapostolz  predicava  lo  fil  de 
Deu.  E  dizia  :  «   Aquist  vida,  en  que   nos  autri   em  nat,  es 
mesquina  e  jaz  per  aventura,  que  can  nos  la  cujam  tener, 
ella  s'en  fuhg  e  se  part  de  nos.  Aventura  la  nos  toi  subda- 
225  nament,  e  ja  pois   non  er  acoseguda,  tan  fort  s'en   fug.  E 
per  aizo  venc  entre  nos  li  hitz  del  cel,  zo  es  le  filz  de  Deu, 
que  nos  monstret  &  nos  esseinnet  autra  vida,  en  la  quai  non 
aura  ja  mort,   ni   dolor,    ni  gemiment,  ni  tristicia,  mas  toz 
temps  i  a  gauh  &  alegreza,  e  toz  temps  i  es  hom  sadolz  e 
230  repletz,  e  totz  temps  i  a  clardat  senz    tenebras.    Per  aizo 
trames   Deus  son  fil  en   aquest   mont,  que    los  homes,  qued 
erant  nat  en  mort,  &  fossan  per  aqui  eis  nat  a  la  vida,  et 
fossan  fah  fil  de  Deu  per  la  doctrina  delz  apostolz  aquist  que 
son  peccador  e  fil  de  peccadors.  Car  li  fil  delz  homes  mortalz 
235  non  podian  esser  fah  non  mortal,  si  per  aigua  hoc  e  per 
Saint  Esperit;  e  per  aco  son  renat  e  son  fah  fil  de  Deu.  Et 


LEGENDES   PIEUSKS  293 

per  aizo  qued  aquist  prédications  pusca  esser  crezuda,  cel 
que  nos  comandet  aizo  a  predicar  nos  donet  poder  qued  al 
seu  nom  iliumenassem    cex,  rendessam  auzir  alz  sortz,  alz 
clops  annar,  encausassem  diabolz,  mondassem  lebros,  resus-  240 
citassem  mortz,  per  tal  qued  totz  hom  conosca  e  digua  que, 
si  aquist  predicacions  non  era  veraia,  ja  non  fariam  aquestas 
meravillas  ni  aquestas  vertutz.  E  per  aizo,  fil  mei,  hier  &  a  sel 
autre  •  fost  appellat  que   li   vostre   cors    sian   sanat.  Et  hoi 
avem  establit,  qued  al  metjament  de  la   parau-[18  r°]-la  de  245 
Deu  las  vostras   armas  sian    salvadas,  cant  auran  receuput 
la  paraula  de  Deu.  Car  aici  con  li  oil,  que  non  recebon  col- 
liri,  non  podon  esser  sanat  per  metges,  ni  li  malaut,  que  non 
volon  beure  las  poisons  ni  recebre  los  emplastres,  non  podon 
esser  curât  per  metges,  en  aici  las  armas  de  celz  non  podon  250 
esser  curadas  ni  sanadas  per  apostols  ni  per  doctors,  li  quai 
non  recebon  la  paraula  de  Deu  ni  crezon  la   veritat,  &  de 
tôt  lur  entendement  non  gardan   castitat,  ni  se  gardan  de 
glotonia  &   a\aricia   non   parton   de  lur,  ni    temon  gravar 
nengun   homen ,  e  que  non  s'esforsan    d'auzir  e  de  gardar  255 
la   paraula   de  Deu.  Mas   tuh   aicil    que  gardaran  aizo,  lur 
armas   son  "curadas  e    sanadas   &   acomensan   a  querre   lo 
conduh  de  la  paraula  de    Deu,  las  qualz,  davan    que  fossan 
sanadas,  non  lo  podian  manjar.  Car  aici  con  li  malautia  del 
cors  non  laissa  Tomen  carnal    manjar    ni   recebre    conduh,  260 
aici  li   malautia  de   Tarma  non  la  laissa  sadollar  de  Tespe- 
rital  conduhg..  Car  totz  hom,  que  met  s'amor  e  so  senz  en 
Tamor  de  la  carn,  non  pot  amar  en    nulla   manera  Tarma. 
Per  que  dis  li  antigua  propheta  :  a  Quoniam  qui  diligit  iniqui- 
tatem,  odit  animam  suam.  Car  cel  qued  ama  iniquitat,  adira  265 
s'arma.  »  Et  dis  àqui  eis  aprop  :  «  Pluet  super  peccatores  la- 
queosignis.  Sobre  los  peccadors  ploura  latz  de  fuc.  »  Aujaz 
qualz  es  aquist  ploja,  &  entendes  las  penas  delz  peccadors. 
Vejatz  la  ploja  qued  es  aiguadouza,  que  si  vos  es  en  un  camp, 
e  plou,  e  non  aves  de   que  vos  cobrias,  moût  vos  er  mal  e  270 
greu  a  sof-[18  v°]-frir.  E  pois  qued  er  annat  en  una  hora,  o  en' 
un  jorn,  que  faran  aquil    mosqui  sobre  los  qualz   caira  totz 
temps,  senz  fin  e  senz  repaus,  pluja  de  foc   e   de  fouzer  ? 
Crezas  que  li  peccador  auran  veraias  penas  en   enfern,  e  li 
just  auran  veraias  riquezas  el  cel.  Per  aco  son  veraias,  car  275 


uu-rt,it  t:t  -il''!,  i.tc '. '.i  *="=  i:ie-:  la  i::.  r»« -^mjitîiaz»  v^aai:  es 
miïin'..^  ''irî  a-  1  «fi.i  i:j'ï::t.  *  .ar  /  i:iM*r,.  ^  ii«  nii  lizj  e 
Tirt»iri-»?i  iiir.'ij*    :;i::sïi>,   :l'-::::^'■  ". 'j    r?  Ti'i».,..:  *îi  jo?irr^  Seaaoc. 

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.U.jr  it>'.i:i  "  i  ^•î  j-ir.i.'  i.j  Te:»  ie  .'ini:sroL  o:  jtiooien^iC  Lo-  & 
>r*'j.t.' X  i  ::.*^:  t  A:''»-:^  ie  Z»fïi.  ii  ".à  ir*:.  vrar  aer  me 
-forf/-..^  i.ii-r'',  '  >.*'.  .  :  t  "  i  :.L.-.-*:i*  -  -a.r  .;i  .i-i  :■*  Z»e*i  sobre  ai^-n 
Rx*^>->  iiirr*  ."i;.:-^':  :  ;    •  T:7d.-L  "rj.  "L-r  -^ii  "a  aiaisoa.  car  ea 

2^/0  7-în  'lu  .  t.  i  ''^-  ;-'  :  -  ..  1-:  i-i.  .  i. j  -  :  .i:-?'ia^  rie  ea  volL  «oc- 
:  ■:.'  ;.•*?  ai.i  7-..  :.:m-  l.  m.  ^1  3.-:ai  ir.  .-nf  i  -i^nn-ic.  e  «^oaiL  gran 
:;•->•: ir  .-.a  ..  :■:::-"»  .  i^  :  i<.  -t^  zi-i-^-t  S-r  1:1.:. •  Trsa  CliriàT:.  •  Toraeî 
^'>r.  ..  : :;.:::».  ri*,  i.i  :l..K7:.  >i.  -^-ii.xiii  *e  ^1  sa  '.'uaibra.  «k.  aco- 
meri.^e':  a  .^r-ej*.^  2. >*.*-ï  Se-z.:.*  c.  i  i^^^r  :  i  Se.iaer  Deas  po- 

2rf5  i'»r'js  «i-î  '.''A  '\iAcr.  i.*-'  •  \  -e^.  1:  vil!  ir-jiiM  T.ioaLis  Tapos- 
W.z,  fii  rû>.  peiCi ::•:.-.  ;.ir-i.:r>eri  ie  ..i  >.:a  .i>:frica-  ^  Can 
V'>n^  a  m-=:ja  ri. h.  -=:  '.-'.  .:  i::-ir'r:  .'lo-?*.:!:  -ienint,  e  dis  li  : 
t  ML;i  .riiâ,  ai;*.*  i::itr^.v-*.  :-ir  al_:  -oa  :!i  venr^à  per  me  a  la 
virià  durahla.  «^n  aici  vrrnrji  ei  1^7  le  al  ceii  seîaaor  Jesa 

y/>  Ciihit  per  coroni  ie  mârtiin.  .j  C;^^.:  o  a-iz:  Mljrdonîa  ac  gran 
paor,  ft'-iis:  'i  I>jrr;on*Ta:rede  la  :Lra'..la  .uniaera^eu  te  prec, 
(\n^fl  ai  ;i  con  tu  uber-T'iist  los  oara.i'.z  oLz  delz  cer,  en  aici 
a  lohrias  loi  oi.z  de  la  meua  arma,  qued  eu  pasea  vezer  e  co- 
noi.^iîer  la  via  drecha,  e  non  caja  en  la  fossa.  »  Sainz  Thomas 

'*/)Ty  f}\n  11  :  H  Kita  set  jornz  en  dejunis.  ûc  a  i'ootau  jorn  eu  Tenrai 
a  tfj  e  bateja:  ai  te,  e  3agrarai  le  en  i'oiiJa  <lel  saint  baptisme, 
e  totz  aquelz  que  creiran  per  te.  >»  Carisius,  le  eoinuatz  del  rei, 
la  cm  seror  avia  le  rei.s  per  moiller,  preguet  lo  rei  e  dis: 
«  Senriftr  reis,  eu  te  preg^aria,  si  te  plazia,que  tu  fessas  annar 

.'îlO  vezer  Mi^donia  a  ma  donna  la  regina,  per  vezer  si  la  poiria  far 
tornar  a  ho  «en,  ni  a  sa  pensa.  Car  eu  per  pregueras,  e  per 
mcnafli^as,  e  per  prometemeus,  e  per  amix,  e  per  amiguas,  e 

<  Sic.  -  »  Mh.  la . 


LEGENDES   PIEUSES  295 

per  vezis  e  per  parenz,  Tai  pregada  e  fah  pregar,  &  en  nuUa 
maneira  non  la  pois  far  tornar  a  son  leg,  ni  per  nuilla  razon 
non  la  pusc  far  manjar  ni  beure  ab  me,  ni  neis  non  la  pois  315 
far  esgardar  en  sa  raeua  cara.  »   Respondet  le  reis  e  dis  : 
«  Annatz  lai  vos  a  vostra  seror,  e  pregas  Ten,  &  annara  lai 
voluutiers.  »  Annet  Carisius  a  sa  seror  Trepicia,  la  moiller  del 
rei,  &  acomenset  la  a  pregar  e  dis  [19  v°]  li:   «  Aniicdonia» 
[li  meua]  moller,  se  part  de  me  e  non  l'en  pois  tornar.  Annas-  320 
ses  lai  &  amonestases  la.  «  Annet  la  li  regina  &  acomenset  la 
a  pregar  &.  a  dir  :  a  0  Amigdona,  cara  amiga  e  cara  sorre,  eu 
te  prec,  si  te  platz,  que  tu  laisses  aquest  fol  coratge,  e  non 
laisses  las  ^rechuras  de  ton  maridatge,  e  non  voillas  annar 
contra  los  deus  ni  contra  ton  linnatge  ni  contra  Tarma  de  ton  325 
mafit.  Car  le  reis  es  moût  iratz,  e  tuh  tei  parent  e  tei  amie  en     • 
parlan.  Trastuh  te  plainnon  e  te  queron  e  ploran,  car  tu  tan 
subtanament  es  cambiada  ni  eissida  de  ton  sen.  «  Respondet 
Migdonia  e  dis:  «  0  tu,  sorre  Trepicia,  si  tu  sabias  zo  qued 
eu  ai  après,  tu  annarias  ades  vezer  aquel  home.  Car  li  meua  330 
amiga  Sinthica,  qued  avia  estât  cega  per  moutz  annz,  a  reco- 
brat  per  el  son  vezer.  E  que  te  diria  ?  Li  sort  recobran  lur 
vezer*  &  a  totz  los  malautz  dona  salut;  los  mortz  resuscita  e 
torna  a  vida.  Aquest  monstra  &  esseinna  qued  autra  vida  es, 
on  ja  non  aura  mort,  ni  ja  non  sentira  hom  dolor,  ni  aura  hom  335 
dol  ni  tristicia.  E  si  non  m'en  crezes,  can  venc  est' autra  noh, 
le  filz  del  duc  Sjmforus  fon  mortz,  annet  s'en  Symforus  a  la 
carcer,  e  près  lo  delz  carceriers  en  sa  fen,  e  menet  lo  a  sa 
maison  ;  e  can  la  fon,  fez  sa  oration,  e  resuscitet  lo.  Et  ancar 
es  en  la  maison  &  esseinna  toz  aquelz  qued  intran  laintre  ad  340 
el  e  cura  las  enfermetatz.  »  Respondet  Trepicia:  «  Si  en  aici 
es  con  tu  dizes,  annem  ad  el,  e  si  eu  vehg  que  vers  sia  ni  o 
pois  provar,  eu  creirai  en  el.  Folz  es  qui  non  vol  aver  vida 
du  ^  -[rabîa] 


*  Sic;  corr.  auzir. 

*  Ici  s'ouvre  une  lacune  de  2Q  feuillets.  Voir  TintroductioD,  p.  212.  —  Les 
feuillets  actue's  20,  21  et  22,  comme  on  l'a  déjà  remarqué  (ibid.,  note  2),  ont 
été  déplacés  et  par  suite  mal  foliotés;  leur  place  véritable,  qui  leur  a  été  ici 
restituée,  est  après  les  folios  actuels  4  et  5. 


2 or,  r.EiiExr.'ES  pif: l' ses 


XV 


-xvr 


wvir 

EW.-SIO  SANCTI  SIMONIS  ET  SANlTI  JUD.E' 


-  - 1 .  •  • 


r2.*>  r«'  E  ':ar;î  fi^-ion  lali  i»a?,  SLiinz  Svmon  acomenset  lup 
d'aital  mariera  u  pîtrltr  :  a  Sovennerament  esdeven,  seinnor, 
5.  que  flenfra  h'i-lz  escri:;hs,  cube:  r 7.  ri'aur  e  d'argent  e  de  peiras 
preciosas,  son  onc!a:i<as  montas  re<  que  non  son  profechaolz. 
Et  atressi  esdeven  que  denfra  en  usas  de  fust,  que  son  rilz  e 
vilment  fâchas,  ha  montas  bonris  causas  e  preciosas  rescos- 
tas.  Bel  vjissel  ?oIon  esser  |Ȕen  montas  vegadas  de  vinaigre, 

10  e  d'avol,  c  do  tornat:  et  avol  vaicel,  de  foras  poirit  e  lag, 
solon  esser  plen  dedinz  de  hons  vis.  En  aici  o  fan  li  homen 
e  las  genz,  car  si  eil  non  vezon  las  bellas  personas  e  qued 
hom  sia  ben  vestitz  non  lo  presan  nuilla,  e  son  i  mont  engan- 
nat.    C'ar  si  hom  vol  aver  una   causa,  en  tota  manera^  deu 

15  pcnsar  con  Taia.  E  per  aizo  li  nostra  persona  ni  le  nostres 
vilz  vestirs  non  vos  deu  offendre  ;  car  denfra  nos  ha  aquel- 
las  causas  que  nos  faran  atrobar  durabla  vida.  Trastuh  nos 
au  tri  fom  nat.  d'un  [)aii'e  e  d'una  maire,  li  quai,  can  foron  fah 
0  pausat  on  la  région  delz  vins,  transpasseron  la  lei  quedavian 

20  re'îouput  rie  lur  creator,  e  foron  fah  serv  de  cellui  oui  crezeron 

por  sons  ainonestamenz.  Pois  foron  getat  d'aicella  région  delà 

durabla  vi(laô:foron  mcseissillaten  aquesta terra. E  Deusesta- 

bli  en  aquesta  partida  d'aital  manera  la  soa  misericordia  alz  eis- 

.    sillaiz,  que  totz  hom  que  colria  son  creator,  aicel  angelz  ene- 

25  uiix  non  li  pogues  nozer.  Aquest  malz  angelz  ha  0  fah  en  aici, 
qued  el  fa  adorar  alzfolz  homes  las  ydolas,pertal  que  los  [23  v**] 

^  Ms.  vKint'tas ;  mais  Vs  est  pxponcluée. 


-«. 


LEGENDES   PIEUSES  297 

fassa  partir  de  lur  creator,  &  adoran  los  elemenz,  e  dizon  a 
la  peira  &  al  fust  :  «  Dens  meus  es  tu.  Tu  es  le  meus  Deus.  » 
Cant  hom  s'es  partitz  del  |seu  Deu,  &  el  sec  la  error,  &  es 
obediens  a  son  enemic.  Aquest  angelz ,  princes  d'enveja,  30 
noiris  per  aizo  aquesta  error  elz  homes,  qued  el  pusca  esser 
lur  seinner  &  fassa  d'elz  aizo  qued  el  se  voira  ;  car  le  verais 
Deus,  lo  quai  temp  aquest  angelz  malignes,  non  esab  elz.E  per 
aquesta  causa  aquest  angelz,  per  aques  encantadors  seus,  a 
vos  fah  estar  mutz,  aitant  can  se  vole  ;  c  pois  fez  vos  estar  35 
que  non  vos  poguest  moure  ni  annar,  pois  que  non  poguest 
vezer;  &  aici  per  aquestas  falsezas  enganna  los  homes.  E  per 
zo  que  vos  sapias  e  i>roves  qued  aizo  es  vers,  aici  con  nos  o 
dizem,  venes  a  nos,  e  prometes  nos  a  partir  d'aquellas  follas 
ydolas,  e  coles  &  adoras  solament  lo  verai  Deu  viu,  le  qualz  40 
non  pot  esser  vist  per  los  carnalz  hoilz.  Et  cant  aures  aizo  fah, 
nos  vos  pausarem  las  mas  sobre  vostres  caps  &  farem  vos  lo 
seinnal  de  Christ  en  vostres  fronz  ;  e  si  non  los  confondes, 
sapias  &  entendes  qued  escarnitz  vos  avem.  »  Adonx  tuh  aquil 
qued  eran  aqui  saupron  qued  aquist  paraula  era  vera  ;  e  van  se  45 
getar  alz  pes  delz  apostolz  e  disseron  :  «  Vos  o  fais  de  guisa 
que  non  nos  puscan  nostras  lengas  liar,  ni  nuilencobolament 
mètre  en  nostres  menbres.  E  li  ira  de  Deu  venga  sobre 
nos,  si  nos  jamais  crezem  las  ydolas  !  »  Adonx  acomenseron 
ad  orar  11  apostol  e  disseron  :  «  Senner,  Deus  d'Israël,  qued  50 
en-[24  r**]-vanezist  los  encantamenz  elz  enfeinnemenz  de  Jam- 
iies  e  de  Mambres,  e  fezist  los  tornar  en  confusion,  e  fezist 
iiaiscer  en  lur  carn  nafras  &  poiriguer,  en  aici  vengua  li  toa 
ira  sobre  aquelz  encantadors.  Et  aques  sers  tiens,  que  se  pro- 
méron  partir  de  colre  las  ydolas,  fai  fortz  e  permanenz  encon-  55 
tra  aques  ;  que  tuh  conoscan  e  sapian,  que  tu  es  Deus  poderos, 
&  non  es  autres  mas  solament  tu,  que  reinnas  m  secula 
seculorum.  Amen,  »  Cant  tuh  ensemps  agron  respondut  : 
«  Amen  »,  feron  tuh  cros  en  lur  fronz  &.  anneron.  Vengron 
ensemps  ab  lo  duc  davan  lo  rei  ;  e  foron  i  atressi  li  encanta-  60 
dor,  e  volgron  o  atressi  far  d'aques  con  o  avian  fah  a  Tautra 
vegada  ;  et  en  nuil  sénz  ni  en  nuilla  manera  far  non  o  pogron. 
Uns  d'aquelz sapis,  qued  avia  nom Zebedeu,  acomenseta  dire: 
«Reis,  aquist  dui  son  merdas,  e  deuria  los  liom  getar  d'aquest 
tieu  règne  ;  car  paors  es  qued  alz  homes  non  engenron  poi-   65 


é 


298  LEOIîNnKS    IMKUSKS 

riguer.  Eil  han  ensemps  ab  lur  Taugel,  qued  es  eiiemix  de 
l'aman  linnatgc  ;  cV  ab  aquol  escarnisson  los  homes,  los  qualz 
aquel  malz  angelz  pot  aversubjocs,  per  zo  car  non  volon  esser 
siibjec  a!  podorosDcu.  Anz  volon  aver  per  Deu  celz  cui  eil 

70  gardan,  zo  sun  las  ydola^s,  las  (jualz  non  los  podon  gardar  ni 
doftendre  de  nuilni:il.  E  per  aizo,  reis,  tlizian  aquist  encanta- 
dor  que  11  apostol  adorossun  las  jdolas,  qued  aquel  malignes 
angelz  los  agues  on  son  i)oder.  Et  eil,  li  apostol,  an  nos  fah 
lo   signe   de  lur  [2i  v°]  Deu  en  nostres  fronz  &  an  sai  nos 

75  trames  e  disseron  nos,  que  si  cil  nos  apoderavan  aprop  aquest 
signe,  qued  tôt  aizo,  «jued  eil  nos  avian  esseinnat  ni  dih,  era 
mesonega.  E  vec  vos  quod  el  nom  de  Deu  nos  los  cofondem.  » 
Trastoz  le  pobolz,  qued  era  aqui  acampatz,  cridavan  sobr'elz  e 
dizian  :  «  Ara  fais,  si  podos,  zo  que  fezest  her  !  d  Can  li  encan- 

80  tador  auziron  aizo,  foron  moût  irat  e  non  se  volgron  partir  de 
lur  engan  ni  de  lur  bauzia.  Et  a  ici  con  eran  fugit  d'Ethiopia 
davan  la  faz  de  saint  Matheu  Tapostol,  en  aici  fugiron  davant 
aques  dos  autres  apostolz.  Et  anneron  per  la  terra  de  Persida, 
&  venian  alz  temples  e  movian  enemistatz  antre  los  coledors 

85  de  las  ydolas  encontra  los  apostolz,  e  dizian  :  «  Dui  enemic 
de  nostres  deus  venran  a  vos  aici  ;  e  si  .voles  aver  ad  amix 
nostres  deus,  constroinnet  los,  elz  forsas  que  lur  sacriâzen  e 
los  adoren  ;  et  si  non  o  volon  far,  aucizes  los.  »  Aquist  en- 
cantador  annavan  per  totz  los  temples,  e  fazian  lur  sacriâzes 

90  alz  fliabolz;  e  fazian  subdanament  los  homes  liatz,  e  desliatz;  e 
fazian  los  cex,  e  per  aqui  mezeis  vezer;  e  fazian  los  mutz,  e 
per  aqui  mezeis  parlar.  Li  apostol  esteron  en  la  ciutat  de 
Babelonia  per  amonestament  del  rei,  &  aqui  facian  moutas 
miraclas  e  montas    meravillas.  Eil  avian  moutz  discipolz-,  & 

95  avian*'  delz  uns  preveires,  e  delz  autres  diaques  ;  &  aquil  ser- 
vian  las  gleisas  qued  eil  avian  bastidas&enstruchas.  Esdevenc 
qued  ad  un  d'aquelz  diaques,  qued  eil  avian  adordenat,  mes 
hom  un  gran  blas-[25  r°]-me  de  sobre.  Aquest  diaques  era  vezis 
d'un  rie  home.  Et  aquest  rix  hom  avia  unafilla  mont  bella.  Et  us 

100  jovens  hom  de  sa  vila  avia  li  tout  sa  vergenitat,  &  avia  la 
penreinnada.  Can  venc  al  jorn  que  dec  enfantar,  e  sas  dolors 
la  meneron,  e  lo  venc  sos  paire  e  sa   maire,  e  sei   anaic,  e 

*  Suppl.  adordenat? 


LEGENDES   PIEUSES  299 

demandavan  li  qui  Tavia  enpreinnada.  Ella  respondet  e  dis 
lur  que  le  bons  hora,  le  diaques  Eufrosinus,  Tavia  enprein- 
nada. Cant  0  auziron  li  paren,  foron  moût  irat  &  acomenserbn  105 
acermar  con  presessan  venjansa  d'aquest.  Venc  a  saber  aizo 
alzapostolz;  e  cant  o  saupron,  anneron  alz  parenz  de  la  don- 
zella.  Can  le  paire  e  li  maire  viron  los  apostolz,  acomenseron 
•se  moût  fort  clamar  d'aquest  diaque,  &  fort  ad  encusar  &  a 
dir  qued  aital  blasme  avia  fah  &  aital  lajeza.  Can  li  apostol  110 
o  auziron,  acomenseron  lur  a  demandar  amdui  cora  era  natz 
Tenfas.Responderon  li  parent  e  dissseron  :  «  Hoi  nasque(s)t,  la 
primera  hora  del  jorn.  »  Disseron  li  apostol  :  «  Aportas  l'en- 
fant &  adduzes  lo  diaque,  cui  encolpas.  »  Can  foron  tuh 
ajostat  denant  los  apostolz,  et  eil  demanderon  :  «El  nom  115 
de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  parla,  enfas,  e  diguas  si 
aquest  diaques  t'a  engenrat,  ni  ha  fâcha  aquesta  eniquitat.  » 
L'enfans  pnrlet  &  respondet  moût  espertament  e  dis  :  «  Iste 
diaconus  vir  sanctus  et  castus  est  et  nwnquam  inquinavit  car- 
nem  suam,  Aquest  diaques  es  lo  sâinz  hom  &  castz,  &  anc  non  120 
bautuguet  sa  carn.»  Can  li  parent  o  auziron,  pregavan  [25 v°] 
los  apostolz  que  li  demandessan  quin'era  colpaolz  ni  de  cui  era 
el*  Tenfanz.  Responderon  li  apostol  e  disseron  :  «A  nos  autres 
conven  que  solvam  celz  que  non  son  colpable,  e  non  coven 
mingua  que  destruiam  cel[zj  qued  auran  colpa.  »  125 

Can  venc  autravegada,  le  reisannetenbatailla,&adun  amie 
seu,  un  rie  home  qued  avia  nom  Nicanor,  nafret  hom  en 
sogenoil  ab  una  sagitta,  la  quai  nuilz  hom,  per  art  niper  gein 
qued  agues,  traire  non  la  li  poc,  &  essageron  s'i  moût  home. 
Fez  hom  venir  saint  Symon  Tapostol,  et  en  eis  pas  qued  el  130 
toquet  ab  la  man  la  sagetta  el  nom  de  nostre  Seinnor  Jesu 
Christ,  e  li  sagetta  va  fora  &  aqui  eis  fon  aici  sanatz  e  garitz, 
que  neis  li  plaga  non  li  fon  aparvent.  Esdevenc  per  aqui 
mezeis  que  doas  malas  tigres,  qued  hom  ténia  enclausas  en 
cavas  desotz  terra,  s'escaperon;  e  tôt  cant  atrobar  podian  ni  135 
aconsegre,  tôt  devoravan  e  destruian.  Venc  totz  le  pobolz  et 
tota  li  genz,  &  anneron  alz  apostolz,  e  disseron  lur:  «  Sein- 
nor, soccoretz  nos,  car  las  tjgres  nos  devoran  e  nos  man- 
jan.»  Can  li  apostol  o  auziron,  anneron  s'en  la  on  estavan  las 

1  Dans  rinterligne,  au-dessus  de  ra. 


300  LEGENDES   PIEUSES 

140  tygres,  e  comanderon  lur  el  nom  de  nostre  Seinnor  Jesu 
Christ  que  los  seguissan  en  la  maison  on  eil  estavan;  e  feron 
0  et  esteron  ab  elz  très  jornz.  Can  venc  a  cap  de  très  jornz, 
feroh  venir  tôt  lo  pobol  aqui,  e  disseron  :  «  Aujatz,  vos  autri, 
fil  delz  homes,  qued  es  fahg  a   la  image  de  Deu,  et  alz  qua'z 

145  Deusa  donatengein  e  memoriaeten-[26r°]-tendement!  Regar- 
das vos  ad  aquestasbestias  salvatgas,  qued  anc  mais  non  pogron 
esser  domptadas;  et  aras,  cant  auziron  lo  nom  de  nostre  Seinnor 
Jesu  Christ,  son  tornadas  plus  domesteguas  qued  uns  ainneiz. 
E  li  home  son   endurzit  en   tan  gran  follia,  à.  en  tan  granz 

150  tenebras,  qued  eil  non  podon  conoisser  que  las  ydolas,  que 
son  fâchas  per  agin  d'omen  d'aur  e  d'argent  e  de  peiras  e  de 
fust,  non  sian  lur  deu.  Aquel  Deu  que  vos  a  fah  e  creatz, 
aquel  non  conoisses,  le  qualz  vos  dona  la  ploja  del  cel  &  vos 
fa  eissir  lo  pa  de  la  terra,  e  lo  vin  e  Foli  de  las  soccas  del 

155  fust.  E  per  zo  que  vos  sapias  qued  el  es  vers  Deus,  aquestas 
tigres  vos  estaran  en  garentia,  que  per  aquesta  manera  vos 
amoneston  que  vos  non  colatz  ni  crezas  autre  deu,  mas  nos- 
tre Sennor  Jesu  Christ,  per  lo  cui  nom  aquestas  bestias  son 
fâchas  soaus,  &  estaran  e  conversaran  el  mei  de  vos  autres, 

160  aici  con  fedas,  e  lo  seras  ellas  tornaran  en  lur  maisons.  A  nos 
autres  coven  a  predicar  perlas  ciutatz  e  per  las  terras,  qe 
li  prédications  de  Favangeli  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ 
posca  esser  connoguda.  »  Totz  le  pobolz,  cant  auziron  qued 
annar  s'en  volian,  acomenseron  moût  fort  a  plorar,  e  prega- 

165  van  lur  que  non  se  partissan  d'aqui.  Li  apostol,  can  viron  la 
volontat  del  pobol,  e  que  tan  fort  los  pregavan,  remaseron 
un  an  e  très  mes.  Et  en  aquest  meja  batejeron  ben  seissanta 
milia  homes,  estiers  los  petitz  enfanz  e  las  femenas,  si  que, 
bate-[26  v°]-jat  primerament  lo  rei  ab  tota  sa  mainada,  ab  sa 

170  moiller  6:  ab  sos  enfanz  6c  ab  totz  sos  rix  homes,  car  eil 
vezian  que  solament  per  para.ula  curavan  totas  las  enferme - 
tatz,  los  cex  illuminavan,  elz  mortz  resuscitavan  el  nom  de 
nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  tuh  li  pobol  eran  tornat  a  la  fen 
de  Jesu  Christ,  &  destruian  los  temples  de  las  ydolas,  &  bas- 

175  tian  gleisas. 

Li  apostol  adordeneron  en  la  ciutat  un  evesque  qued  avia 
non  Abdiam,  le  qualz  era  vengutz  ab  elz  de  la  terra  de  Judea, 
e  qued  avia  vist  nostre  Seinnor  Jesu  Christ  carnalment  ab  sos 


LEGENDES  PIEUSES  301 

oilz.  E  tota  li  ciutatz  fon  adimplida  de  gleisas.  E  can  H  apostol 
las  agron  adordenadas  aici  con  degron,  aiineron  s'en  per  las   180 
terras  predicar  la  fe  de  Jesu  Christ;  e  seguiron  los  ben  dozen 
discipol  o  d'aqui  en  sus.  Et  annavan  per  las  terras  de  Persia  e 
predicavan  pertotas  las  ciutatz  e  per  totz  los  castelz,  e  cover- 
tiron  moutz  pobôlz  et  torneron  a  la  fen  de  Jesu  Christ.  E  tôt 
can  feron  e  totz  los  malz  e  las  penas  que  sofergron,  Craton,    185 
us  lur  discipolz,  o  escrius  en  des  libres,  en  lengua  d'ebraic. 
E  pois  uns  bons  clergues,  qued  avia  nom  Affrican,  translatet  o 
enaquesta  nostra  lengua  latina,  êtes  moût  1  on  ga  narrations. 
Mas  nos  avem  en  près  breument.  Car  totz  hom  que  voira  saber 
Tacomensament  de   lur  prédication   ni  la  fin,  con    li  saint   190 
apostol  laisseron  aquest  mont  ni  transpasseron  alz  celestialz 
palais,  aquist  breus  legenda  que  nos  avem  tracha  de  tan  gran 
libre  loi  monstrara  e  loi  esseinara. 

Li  [27  r°]  encantador  que  nos  vos  aviam  dihs  de  sobre,  Zo- 
roes  &  Arfaxat,  fazian  lur  lajezas,  per  las  ciutatz  e  per  los   195 
castelz,  e  dizian  qued  eil  eran  del  linnatge  delz  deus,  e  fugian 
ades  davan  los  apostolz,  &  estavan  tan  en  cada  una  ciutat,  en- 
tro  que  sabian  que  li  apostol  i  devian  venir.  Li  apostol,  en 
qualque  ciutat  qued  intressan,  descobrian  los  lahg  fag  delz 
encantadors,  e  demonstravan  que  lur  doctrina  avia  atrobada  200 
le   diabolz,  enemix  de  Tuman  linnatge.  Vengron  en  la  ciutat 
de  Suasis,  en  la  quai  avia  setanta  evesques  del[z]  temples,  on 
eran  las  y'dolas  que  colian  en  lue  de  deu.  Aquist  evesque  fazian 
quatre  granz  festas  Fan  de  la  jdola  del  soleil  :  a  Tintrar  d'es- 
tiu  en  fazian  una,  &  a  Tintrar  d'hivern  en  fazian  autra,  &  a  205 
rintrar  de  primavera  autra,  &  a  Tintrar  d'auton  autra;  &  a 
cada  una  festa,  le  reis  donava  a  cada  un  evesque  una  liura 
d'aur.  Ab  totz  aques  evesques  avian  parlât  li  encantador,  per 
tal  que  moguessan  contraria  alz  apostolz,  e  disseron  lur  :  c  Dui 
Ebreu  venran  aici  a  vos,  que  son  enemic  de  totz  los  deus,  et  210 
acomensaran  a  predicar  qued  autre  deu  deu  om  adorar,  e  non 
lo  vostre.  Et  aqui  eis  creira  los  hom,  e  tolra  vos  hom  tôt  cant 
aves,  6  getara  vos  hom  foras  a  cent  diabolz.  Parlatz  ab  tôt  lo 
pobol,  qued,  aqui  eis  cant  intraran  en  aquesta  ciutat,  hom  los 
prenna  elz  fassa  hom  sacrifiar  alz  deus.  E  si  adorar  ni  sacrifiar  215 
lur  volon,  aian  pas  ab  vostres  deus.  Si  far  non  o  vol[on],  ben 
sapiatz  qued  eil  non  son  [27  v°]  vengut  mas  per  vostra  mort  e 
par  vostre  destruiement.  » 


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LEGENDES   PIEUSES  303 

a  la  corona  del  martjri.  »  Aizo  auzian  e  vezian  solament  li 
apostol,  e  li  autri  qued  aqui  eran  non  sabian  ren,  &.  li  evesque 
cochavan  los  ades  d'azorar  las  ydolas  del  soleil  e  de  la  luna. 
Adonx  lur  disseron  li  apostol:  «  Fais  far  pas,  qued  auja  totz 
le  pobolz  lo  respons  que  nos  vos  farem.  »  E  can  se  foron  tuh  2ôO 
calât,  e  li  saint  apostol  disseron  :  «  Aujas  trastuh  e  vejas  !  Nos 
sabem  certamenz  e  conoisseni  que  le  soleilz  es  creatura  de 
Deu,  e  li  luna  es  atressi  en  sa  subjection  ;  e  sabem  ben  que 
sus  el  firmament  del  cei  estan,  e  séria  granz  torfz  si  vos  autri 
los  enclausias  saintre  en  aquest  temple,  li  quai  nos  donan  265 
gran  clardat  de  sus  del  cel.  E  per  zo  que  vos  autri  [28  v°] 
conoscas  e  sapiatz  qued  en  aquesta  ydola  non  es  le  soleilz  ni 
li  luna,  anz  son  amdoas  plenas  de  diabolz,  eu  comandarai  al 
diabol,  qued  es  en  la  ydola  del  soleil,  &  mos  fraire  comandara 
atressi  ad  aquel  qued  es  en  la  jdola  de  la  luna,  qued  escan  270 
foras,  e  cada  uns  atressi  la  soa^  »  Can  le  pobolz  auzi  aquesta 
paraula,  meravillet  se  moût.  E  va  sanz  Sjmonz,  &  acomenset 
adir  a  la  jdola  del  soleil:  «  Eu  te  comant,  escarnire  d'aquest 
pobol,  fêlions  diabolz,  que  tu  escas  d'aquesta  ydola  del  soleil, 
&  espessa  la,  e  la  carreta  en  qued  esta  atressi.»  Can  Judas  275 
ac  dih  atretal  a  laydola  de  la  luna,  e  lo  eissi  de  cada  una  le 
diabolz,  vezent  tôt  lo  pobol,  en  forma  de  dos  sarrazis  nuz, 
raout  nègres  e  moût  fers,  &  ab  horrible  esgardament,  e  cada 
uns  vai  penre  sa  ydola,  en  que  estava,  &  frais  &  atrisset 
trastot  canmalay  ac,  ab  granz  bramps,  <k  ab  critz  que  fazian.  280 
Adonx  tuh  ensemps  li  evesque  corregron  sobre  los  apostolz 
&  aucizeron  los.  E  domenz  qued  eil  los  aucizian,  el  eran  ale- 
grae  e  gaujos,  e  rendian  gracias  a  nostre  Seinnor  Jesu  Christ, 
quar  eil  eran  digne  de  recebre  mort  per  lo  seu  nom.  Eil 
receupron  passion  drehlojorn  delà  caleuda  dejuil;efon  285 
atressi  martirizatz  ab  elz  Sennetz,lur  estes,  car  non  vole  sacri- 
fiar  a  las  ydolas.  En  aquella  hora,  can  foron  martirizat,  era 
le  celz  moût  serens  e  clars,  e  vengron  subtanament  fouzer  e 
fox  de  cel,  e  feriron  el  temple,  e  fenderon  lo  tôt,  des  amont 
entro  aval  el  fondament.  Aquelz  encantadors,  Zoroes  et  290 
Arfaxat,  feri  le  fouzers,  e  cremet  los  totz,e  foron  tor  *-[nat]... 
(A  suivre.) 

*  Sic;  manque  le  verbe  {espesse  ou  fraissa?) 

*  Lacune  de  deux  feuillets.  Voir  riiitroduction,  p.  212 


BIBLIOGRAPHIE 


Chrestomattaie  de  l'ancien  français  (IX^-XV<>  siècles),  précédée  d*iin 
tableau  sommaire  de  la  littérature  française  au  moyen  ftge  et 
suivie  d'un  glossaire  étymologique  détaillé.  Nouvelle  édition  soi- 
gjiewtemoit  revue  et  awjmeiitée  avec  le  supplément  refondu^  par  L.  Coos- 
lans,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  d'Aix.  Ouvrage  couronné  par 
l'Académie  française.  Paris,  Bouillon,  1890;  in-S®,  XLvn[-497  p. 

Nous  avons  déjà  loué  ici  comme  il  convenait  la  première  édition 
et  \q  Supplément  (Xe,  la  Chrestomalhie  ;  nous  ne  voulons  aujourd'hui 
qu'annoncer  l'édition  nouvelle.  Tout  d'abord,  le  Supplément  a  été 
fondu  dans  l'ouvrage  primitif,  de  sorte  que  chaque  texte  à  étudier  est 
maintenant  accompagné  de  ses  notes  et  que  les  plus  difficiles  sont 
immédiatement  suivis  de  leurs  traductions  ;  seules,  les  vai'iantes, 
auxquelles  ne  s'intéresse  qu'une  certaine  catégorie  de  lecteurs,  ont 
été  rejetées  à  la  fin  du  recueil.  Mais  M.  Constans  ne  s'est  pas  contenté 
de  réunir  les  deux  parties  de  son  travail,  il  a  tenu  à  les  améliorer. 
Aussi  a-t-il  ajouté  un  millier  de  vers  environ, pour  mieux  faire  connaî- 
tre les  genres  littéraires  les  plus  importants  ;  le  glossaire  et  les  notes 
ont  été  soigneusement  revus  et  complétés  ;  quelques  textes  ont  été 
améliorés,  grâce  à  de  nouvelles  publications,  comme  les  extraits  de  la 
Chanson  de  Roland  de  AL.  G.  Paris,  la  deuxième  édition  du  Voyage 
de  Charlemagne  à  Jérusalem  de  M.  Koschwitz,  le  Cligès  de  Chrétien 
de  Troyes,  publié  par  M.  Fœrster.  Deux  morceaux  surtout  sont  faits 
pour  piquer  la  curiosité  des  romanisants  :  un  fragment  du  Roman  de 
Troie  que  M.  Constans  a  essayé  de  reconstituer  d'une  façon  critique 
d'après  tous  les  manuscrits  (n<*  XVI),  et  un  extrait  de  l'édition  criti- 
que du  Roman  de  Thèhes  à  laquelle  M.  Constans  travaille  depuis  si 
longtemps  (n»  XVII). 

Nous  souhaitons  de  bon  cœur  une  troisième  édition  à  la  Chrestoma- 

tliie  de  M.  Constans,  sûr  que  ce  travailleur  infatigable  saura  encore 

ajouter  quelque  mérite  à  un  ouvrage  utile  et  excellent. 

E.  R. 


Le  Gérant  responsable:  E.  IIamelin. 


LÉGENDES  PIEUSES 

EN  PROVENÇAL  DU  XIH°  SIÈCLE 

(Suif-eJ 


[XVIII] 
[PASSIO  SANCTI  ANDREA] 


[29  r°]  Pois  sainz  Andreus  tornet  s'en  en  sa  région  don  era 
niogutz.  Can  veftc  un  jorn,  &  el  annava  per  la  vila  e  sei  discipol 
aiinavan  ab  el,  &  venc  li  uns  cex  e  dis  li  :   «  Andreu,  apostol 
de  Christ,  eu  *  sai  ben  que  tu  me  pos  rendre  vezer  ;  mas  eu  non 
lo  voii  recobrar,  entro  que  tu  m'aias  fah  donar  ad  aques,  que       5 
van  ab  te,  tan  de  lur  peccunia,  de  qued  eu  pusca  totz  temps 
mais  aver  vestir  e  causar  e  manjar  e  beure.»  Respondet  sanz 
Andreus,  e  dis  :  «  Ben  sai  veramenz  e  conosc  qued  aquist  vos 
non  es  d'orne,  anz  es  ben  del  diabol,  le  qualz  non  laissa  ad 
aquest  home  recobrar  son  vezer.  »  Et  ab  aitan  gira  se  deus  el      10 
&  toquet  li  sos  oilz;  e  recobret  son  vezer,  e  glorificava  nostre 
Seinnor.  Sos  vestirs  era  moût  veilze  raout  avolz,  e  dis  Tapos- 
tolz  :  «  Tollez  li  aquestz  vestirs  horres,  e  donaz  los  li  totz 
nous.  »  E  domenz  quedhom  lo  despoillava,  e  lo  disl'apostolz: 
0  Aitalz  vestirs  con  obs  li  son,  aitalz  los  li  donatz.  »  E  feron      15 
o.  E  cant  ac  son  vestir  receuput,  annet  s'en   a  sa  maison, 
gracias  rendons  a  nostre  Seinnor. 

Uns  delz  plus  rix  homes  d'aquesta  ciutat,  eu  qued  era  sainz 
Andreus,  avia  un  enfant,  cui  amava  aitant  con  hom  Tama  can 
non  n'a  mas  un.  Venc  granz  malautia  ad  aquest  enfant,  e  20 
mori.  Aquest  rix  hom,  Demetri  qued  avia  nom,  paire  de  Ten- 
fant,  auzi  las  meravillas  que  sainz  Andreus  fazia.Venc  ad  el  e 
getet  se   a  sos  pes  &  acomenset  moût  fort  a  plorar,  e  dis  : 

i  Ms.  fu. 
TOME  IV  DE  LA  QUATRIÈME  SÉRIE.  —  JuiUet-Août-Septembre  1890.  21 


306  LÉGENDES   PIEUSES 

«  0  ministres  e  messatges  de  Deu,  eu  me  fiz  moût  en  te.  Vec 
25  te  qued  uns  meus  enfans,  oui  eu  amava  aitant,  es  mortz  ;  e 
prec  te  eu,  si  le  teus  plazers  es,  que  tu  vauguas  [29  v*]  a  la 
mia  maiso,  e  que  lo  me  rcndas.  »  Cau  sainz  Andréas  auzi  aizo, 
ae  en  pietat,  et  anuet  s'en  ab  el  en  sa  maison,  on  Tenfans  jacia 
mortz.  Et  can  fon  laintre,  acomenset  a  predicar  zo  qued  aper- 

30  ténia  a  lur  salut.  Ecant  ac  ganren  prédicat  e  dih,  giret  se 
deus  lo  leg  on  jazia  Tenfans,  e  dis  :  «  0  tu,  enfans,  eu  te  die, 
el  nom  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  que  tu  vaugas  sus 
sans  (k  alegres.  »  Et  en  eis  pas  Tenfans  se  levet  sus  sans  et 
alegres,  (k  rendet  lo  a  son  paire.  Gant  aquil  qued  eran  aqui^ 

35  non  crezent,  viron  aquesta  meravilla,  crezeron  en  nostre 
Seinnor  e  feron  se  tuhg  batejar  a  Tapostol. 

Can  venc  autra  vegada,  venc  ad  el  uns  enfas  christians,  qued 
avia  nom  Sustrat,  &  dis  li  eu  secret:  «  Seinner,  ma  maire  s'es 
adautada  de  me  e  volria  qued  eu  jagues  ab  ella  &  a  m'o  dih. 

40  Eu,  cant  o  auzi,  ac  dol  e  vergoinna  ;  &  respondei  11  moût  ma- 
lamenz,  e  soi  m'en  fugiz.  Ella,  cant  o  auzi^  fc^n  moût  irada;  et 
es  s'en  annada  al  jutge,  e  cuja  tornar  lo  blasme  desobre  me. 
Et  eu  am  mais  esser  mortz  qued  eu  descobria  ma  maire«  Et 
eu  die  te  aizo  en  celât,  que  tu  pregues  nostre  Seinnor  per  me, 

45  qued  eu  per  aizo  non  moira.  »  E  domenz  qued  el  dizia  aizo  a 
saint  Andreu,  vengron  li  metssage  dcl  jutge,  e  van  penre 
Tenfant.  Sainz  Andreus  fez  sa  oration,  e  can  Tac  fâcha,  vai 
penre  Tenfant  per  la  man,  &  annet  s'en  ab  el.  Sa  maire  estava 
denan  lo  jutge  à:  accusava  ades  Tenfant,  e  dizia  :  «  Seinner, 

50  aquest  avia  oblidat  la  pietat  de  [30  r°]  sa  maire,  e  volia  se  tor- 
nar ^  si  qued  apenas  m'en  pue  desliurar.»  Adonx  disle  jutges: 
«  Diguas,  enfas,  es  aici  vers  con  o  dis  ta  maire  ?  »  Le  tozetz 
de  vergoinna  non  volia  respondre.  Le  jutges  demandava  li 
per  aqui  meseis,  e  li  demandava  &  el  non  volia  ren  respondre. 

55  Le  jutges,  cant  o  vi,  demandava  conseil  qu'en  poiria  far.  Ma- 
ter autem  pueri  cepit  flere,  Li  maire  del  tozet  plorava.  A  la 
quai  sanz  Andreus  acomenset  a  dir  :  a  O  tu,  femena  malas- 
truga,  que  getas  los  plors  d'amareza  per  lo  blasme  que  volias 
far  far  a  ton  fil,  e  li  toa  cobezeza  ha  te  tant  enpencha,  e  ta 

60  luxuria  te  crema  tant,  que  tu  non  temes  far  aucire  aquest  fil 
tieu  solet  !  »  Domenz  qued  sainz  Andreus  dizia  aizo,  li  femena^ 

1  Sic,  —  *  Ms.  f émana. 


LEGENDES   PIEUSES  307 

respondia  :  «  Escouta  me,  seinner  jutges.  Pois  que  le  meus 
filz  vole  far  aizo  e  non  poc,  mes  se  ab  aquesthome  &  anc  pois 
d'el  non  se  partie.  »  Le  jutges,  cant  auzi  aizo,  fon  mot  iratz, 
e  comandet  qued  hom  li  lies  los  pes  e  las  mas,  el  meses  hom  65 
en  un  sac,  et  que  lo  getes  hom  en  un  fluvi.  E  saint  Andreu 
comandet  qued  hom  meses  en  una  carcer,  entre  que  s'agues 
pensât  a  quai  mort  lo  poiria  far  morir.  Ab  aitant  sainz  Andreus 
acomenset  a  pregar  nostre  Seinnor,  &  en  eis  pas  tota  li  terra 
se  moc,  e  venc  uns  moût  granz  trons,  si  que  le  jutges  cadec  70 
de  la  cadera  e  trastuh  li  autri  cadegron  a  terra.  Venc  fouzers, 
e  feri  la  maire  del  tozet  &  fon  morta.  Le  jutges,  can  vi  aizo, 
[30  V®]  vai  se  jetar  alz  pes  de  Tapostol,  e  dis  :  a  0  tu,  sers  de 
Deu,  aias  merce  de  nos  autres  que  non  periscam,  ni  li  terra 
non  nos  deglutisca  !  »  Ab  aitant  Tapostolz  acomenset  ad  orar,  75 
e  li  terra,  que  se  movia,e  li  fouzer  e  li  tron  remaisseron.  Sainz 
Andreus  annet  entorn  aquelz  que  jacian  a  la  terra  dimei  mort, 
per  los  colps  delz  trons  e  del[z]  fouzers,  e  fez  los  levar  sus  sans 
&  alegres.  Le  jutges  receup  la  paraula  de  Deu  e  crezet  en 
Jesu  Christ  ab  tota  sa  mainada,  &  Tapostolz  batejet  los  totz.  80 

Esdevenc  qued  en  una  autra  ciutat  avia  un  rie  home, 
qued  avia  nom  Grati,  &  aquel  rix  hom  avia  un  fil,  e  domenz 
qued  aquel  filz  se  bainnava  una  vegada  eil  bain  on  se  lavavan 
las  femenas,  intret  li  le  diabolz  el  cors,  e  perdet  lo  sen,  e 
tormentet  lo  le  diabolz  moût  malamenz.  Va  Gratins  e  fez  far  85 
una  carta,  e  trames  la  ad  aquest  jutge,  que,  si  ad  el  plazia, 
pregues  saint  Andreu  que  vengues  entre  ad  el.  Et  el  mezeis 
Gratis  era  mot  malautz  de  febre,  e  sa  moiller  d'una  autra 
malautia,  qued  hom  appella  jdropysi.  Annet  sainz  Andreus 
per  lo  prec  del  jutge,  e  pujet  en  una  bestia  e  tenc  ad  aquel-  90 
la  ciutat,  e  venc  a  la  maison  d' aquest  rie  home  Grati  ;  et 
aqui  eis  cant  intret  laintre  *,  le  malz  esperiz  acomenset  moût 
fort  a  tormentar  Tenfant.  E  vai  se  getar  davan  los  pes  deTa- 
postol.  Sainz  Andreus  acomenset  a  menassar  lo  diabol,e  dis: 
<c  0  tu,  enemix  de  Tuman  linnatge,  part  te  d'aquest  famol  de  95 
Deu  I  M  Et  en  eis  pas,  cridan  e  bramant,  parti  se  d'el.  [31  r°] 
Pois  venc  s'en  sainz  Andreus  al  legh  on  jacia  Gratins,  e  dis 
li  :  «  Polz  es.  Gratin,  car  per  gran  drehg  t'es  venguda  aquist 

Ms.  laintretf  et,  après  ce  mot,  laintre,  biffé  à  Tencre  rouge. 


308  LEGENDES  PIEUSES 

malaatia,  qae  ta  desamparavas  lo  leg  de  ta  moiller,  &  aiina- 

100  Tas  jacer  ab  putas.  Leva  sus  el  nom  de  nostre  Seinnor  Jesu 
Christ.  6i  sias  sans  ;  e  non  voilias  d^aici  adenant  peccar,  per 
tal  que  non  cajas  en  major  malautia.  »  Et  en  eis  pas  el  fon 
sans  6i  alegres.  Pois  annet  s'en  aqui  on  jacia  li  donna,  e  dis 
li:  ((  0  tu,  femena,  li  cobezeza  de   tos  oilz  t'a  deceupuda; 

105  car  tu  laissavas  ton  marie  e  mesclavas  te  ab  autres.  »  £  pois 
acomenset  a  pregar,  e  dis;  a  0  tu,  Seinner  Jesu  Christ,  eu 
prec  la  toa  gran  misericordia  que  tu  m'aujas  e  veillas  que, 
si  aquist  femena  a  corni  voluntat  de  tornar  el  peccat,  queda 
fah  sa  en  reirc,  ja  non  sia  sanada  ni  guarida;  car,  Seinner, 

1 10  per  lo  gran  poder  tieu  conoisses  las  causas  que  son  ad  avenir; 
e  si  ella  se  pot  tener  d'aquest  peccat.  qued  ella  sia  sana  e 
salva.  »  Domenz  que  Tapostolz  dizia  aizo,  ella  fon  sanada  de 
sa  malautia.  E  va  penre  sainz  Andreus  de  pan.  e  frais  lo,  e 
donet  Teii  a  manjar  el  nom  de  Deu.  Ella  receup  lo,  éi  lenilet 

115  gracias,  e  crezet  en  nostre  Seinnor  ab  tôt  son  alberc.  E  d'aqui 
enant  ella  ni  sos  maritz  non  torneron  el  peccat.  Pois  Gratis 
trames  per  sos  sers  (pois)  gianz  dons  a  Tapostol.  Et  el  mezeis 
e  sa  moiller  anneron  la,  e  geteron  se  a  sos  pes  e  pregavan  li 
que  preses  aquel  aver.  Respondet  sainz  Andreus,  e  dis:  «  Eu 

120  non  dei  mingua  recebre  aizo  ;  car  non  o  dei  far  ;  mas  major- 
ment  aperten  a  vos  qued  o  dones  alz  paupres.  [31  v°]  Et  anc 
ren  non  vole  penre  de  zo  que  li  aportavan. 

Pois  annet  s'en   sainz  Andreus  a  la   ciutat  de  Nicea,   on 
estavan  set  diabol  en  un  cementeri,  entre  los  sépulcres  del[z] 

125  homes  mortz  ;  et  era  aquest  cementeris  de  josta  una  via  peron 
hompassava.  E  can  venia  entorn  mehg  jorn,  celz  que  passa- 
vau  per  aqui  lapidavan,  &  aiicizian  en  ganres.  Can  saupron 
en  la  ciutat  que  sainz  Andreus  i  venia,  totz  le  pobolz  eissi  li 
encontra  ab  ramps   d'olivers,  lauzant  nostre   Seinnor  e    di- 

130  zent:  «  0  tu,  hom  de  Deu,  tota  nostra  esperansa  e  nostra 
salutz  es  en  la  toa  man.  »  Et  esposeron  li  tôt  Tafarper  orden, 
aici  con  li  diabol  o  fazian.  Can  Tapostolz  o  auzi,  &  el  lur  dis  : 
«  Si  vos  crezes  en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  lo  fil  de  Deu, 
e  lo  Saint  Esperit  en  un  Deu,  vos  seres  desliure -per  la  soa 

135  aj'ifla  d'aquest  engan  que  vos  fan  li  diabol.  »  Eil  acomenseron 
tuh  a  cridar  et  a  dir  :  «  Tôt  cant  tu  nos  predicaras,  tôt  crei- 
rem,  &  obedirem  alz  tieus  mandamenz,  sol  tan  solament  nos 


LEGENDES   PIEUSES  309 

desliura  d'aquesta  persécution.  «  Ab  aitan  sainz  Andreus  ren- 
det  gracias  a  Deu,  per  la  fe  qued  avia  atrobada  en  elz,  e  co- 
raandet  alz  diabolz  que  venguessan  aqui  davan  tôt  lo  pobol,    140 
e  vengron  en  semblansa  de  cans.  Giret  se  deus  olz  Tapostolz, 
e  dis  :  «  Vec  vos  los  diabolz  que  vos   an  fahg  tanta  contraria. 
E  si  vos  crezes  qued  eu  los  pusca  ostar  de  sobre  vos,  el  nom 
del  raeu  seinnor  Jesu  Christ,  manifestas  o  aici   davan  me.  » 
Ab  aitan  acomensan  tuhg  essemps  [32  r°]  a  cridar  :  «  Nos  cre-   145 
zem  que  Jésus  Christ  es  filz  de  Deu,  lo  quai  tu  predicas.  » 
Adonx  coraandet  sainz  Andreus  alz  diabolz,  e  dis  lur.  «Annatz 
en  lux  sex  &  non  fructifiaolz,  e  jamais  non  vos  appropies  de 
nuil  home,  ni  mal  non  lur  fassas,  ni  jamais  nonvenguasen  lue 
on  hom  me  [njtauga  lo  nom  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  en-   150 
tro  al  jorn  del  juzizi,  que  recebres  lo  torment  el  fuc  d'enfern 
e  vostre  guizardo  !  »  E  cant  ac  aizo  dihg  Tapostolz,  li  diabol 
acomenseron  moût  fort  a  rugir  &  evanuiron  davan  los  oilz 
d'aquelz  qued  estavan  aqui.  Et  aici  li  ciutaz  fon  desliura  delz 
diabolz.  E  feron  se  trastut  batejar  a  Tapostol.  E  pois  establi    155 
lur  gleisa  &  adordenet  lur  evesque,  qued  avia  nom  Celestum, 
moût  sapi  home  e  moût  bon  homen,  e  que  lur  esseinnet  pois 
fizelment  la  doctrina  de  saint  Andreu. 

Pois  cant  o  ac  adordenat,   tornet  s'en  a  la  ciutat  de  Nico- 
media.  E  can  fon  a  la  porta  de  la  ciutat,  e  vec  vos  qued  hom    160 
aportava  un  mort  sus  en  un  lehg,  e  seguia  lo  moût  granz 
pobolz,  e  SOS  paire  qued  era  tan  veilz  que  non  podia  annar, 
e  suffria  Tom  de  sa  e  de  la  enfre  lur  bratz,  car  a  penas  podia 
seguir  lo  cors.  Sa  maire  era  atressi  d'aquesta  eissa  état,  e 
seguia  lo  plorant  e  tirant  sos  cabeilz,  e  dizia  :  «  Eu,  mes-    165 
quina,  per  que  ai  tan  visent  qued  eu  veja  sebelir  lo  meu  fil  ? 
Moût  estaera  meilz,  qued  el  me  vis  sebelir.  »  Cumque  hec  et 
his  similia  [32  v°]  deplorando  cadaver  vociférantes  prosequeretur, 
ad  fuit  apostoius  Dei,  condolensque  lacrimis  eorum  ait»  Domens 
que  li  donna  dizia  aizo  e  seguia  aprop  celz  queploravan,  esde-    170 
venc  que  Tapostolz  fon  vengutz  aqui  &  ac  pietat,  can  los  vi 
aici  plopar,  e  dis:  a  Baron,  eu  vosprec  que  vos  me  diguas  que 
esdevenc  ad  aquest,  per  que  sia  mortz.  »  Can  aquil  qued  eran 
aqui  auziron  aizo,  agron  granz  meravillas,  e  li  servent  respon- 
deron,  cil  qued  eran  de  Talberc,  e  disseron  :  «  Domenz  qued   175 
aquest  se  jacia  soletz  en  un  leg,  vengron  subtanamenz  set 


•7 
♦. 


*r-.*r  i»-ts  iils  u  y»:.  *  II*  u*   aAgTrr.ih»     •  ?«5iiiiitC  î^tsn  Chr!SC 

iii4*  M  il  r*5Hiftiir«is,  ritt  _'  iar*fniT  le  '  muia  iimacA  aiia  $*».>- 

rr^  t»î  it  *i>i  juir".  »  Z  i-ii  il»  1*.  laip*  iei  juim  «  «^b»  aie 

t.  njtrfa*.  ^  -ai  'jA  ?^iiii  '  m  il  '  »  jL±ffl«iiiiieii  j*  iiûre.  «ï  &*: 

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".  I:*  v.çiii  .'  i^'ott  :*  i.';^  \A^  irLÎLic  ii.  luc*.  iti*».  ■•aa  «er»  reass- 
vTj^a,^  i*-.  i--**  II-*:  :  T*-L'-ti  :L.it*»:a  sk  -ssm-:  ie  js  j~£oïa*  e  tor- 

-.•^r.-arjt.  vi^  ,uti:«  1:1  fLia  «l'i;»»"  &  3L':'rLiiLi^  per  la  loa 

yrMzrxr,  yi.^\^z.  iTir^-irir  -^-■::i  iiracli.  t   El<!:$94»LierMi  tru- 

'izr.  :  ':^î  r*^  c  Ax.-*«  .   i  Z."  siz.:  irroa  ri«>«Mii«î.  lornet  se 

-é^i  .0  .Tisr:,  •*   iu  :   t  £  -:ai  ii  Jri-^ri  rart*;:.  te  eotmaint  eu 

!^,  ç-î^  i*T«  \z.^.  :  À  *T'«i  *:'".?*  *o-i  :«r*.  »  En  *a  eiâ  pas  el  leTet 

f^r'i^l^a  .'j  i«::i^  »e:^  As.:?-»?!*.  ^  Le  p*îre  e  1  maire  doneron  a 
iefan  xti'^nK  çrr^riz  ^ons.  a  lar  dl.  r^aei  ap>?rte4  a  Tapostol;  mas 

2^/>  «1  non  To*c  naii^a  reo  penre.  Maâ  a  Teniaziï  oonoandet  que  lo 
nej^i»  À  annes  ab  el  entro  a  Mace-loaia:  &  esâeinnet  lo  Âc 
eatmi»  io  de  ia  fen  de  Jeaa  Christ. 

Moc  .96  d*aqai  sainz  Andréas  de  intret  en  ana  nau,  e  vole 
annar  en   Bizanti.  E  li  mars,  can  fon  eupele^at.  acomenset  se 

2()T}  a  rnoure,  e  levet  se  mont  granz  venz,  e  li  naus  acomensava  a 
plumbiar  tant  fort  que  tugh  dizian  e  cajaran  esser  mort. 
Sain// Andréas  comandet  alz  venz  qae  secalessan;  <k  en  eis 
paH  fo  fâcha  granz  soavitatz,  e  li  mars  e  li  vent  se  caleron. 
(/an  foron  escapat  d'aqael  péril,  vengron  a  Bizanti.  Pois  par- 

210  tiron  ne  d^aqui,  e  vengron  en  Tracia  sainz  Andréas  ab  sos 
compainnos.  E  domenz  qaed  eil  s'en  annavan,  &  eil  viron 
venir  une  gran  compainna  d'ornes;  &  tengron  lurespazas  tra- 
oliaM  ft  lur  lansas  en  lur  mas,  &  vengron  vers  saint  Andreu  & 


LEGENDES  PIEUSES  311 

vers  lur  compainnos,  perelz  ad  aucire.  Sainz  Andreus,  can  los 
vi  venir  de  loin  aici  ves  se  &  vers  sos  compainnos,  fez  signe  215 
de  cros  encontra  elz,  e  dis  :  «  Eu  te  prec,  Seinner,  que  le  dia- 
bolz  lur  paire,  que  lur  fa  far  aizo,  [33  v**]  sia  destruhg  e  caja.» 
E  cant  ac  dihg  aizo,  l'angelz  de  nostre  Seinnor  passet  per 
aqui  ab  gran  resplandor,  e  toquet  totz  lur  glazis  &  ab  aitant 
cazegron  tuhg  en  terra.  Passet  per  elz  Tapostolz  ab  totz  los  220 
seus,  &  anc  nengus  motz  non  li  soiiet,  ni  agron  poder  que  li 
fezessan  mal,  car  tuhg  getavan  por  lur  glazis  &  annavan  lo 
adorar. 

En  la  ciutat  de  Thesalonica  era  uns  jovenshom  moût  rix  e 
de  gran  paratge,  qued  avia  nom  Exosus.  Aquest  venc   moût  225 
celadament  a  l'apostol,  qued  anc  non  o  saupron  sei  parent, 
e  getet^se  a  sos  pes,  e  pregava  lo  e  dizia  li  :«  Eu  te  prec,  sers 
de  Deu,  que  tu  me  monstres  la  via  de  veritat  ;  car  eu  conosc 
ben  e  sai  que  tu  es  verais  ministre  de  celui  que  t'a  trames.  » 
L'apostolz  prediquet  li  nostre  Seinnor  Jesu  Christ  ;  crezet  le  230 
jovens  hom  &acomenset  ad  annarab  lo  saint  apostol,  &  anc 
non  li  membret  de  sos  parens,  ni  anc  de  reu  qued   el  agues 
non  ac  cura.  Anneron  lo  querent  sei  parent,  e  troberon  lo  en 
la  ciutat  de  Philippis,  qued  estava  ab  Tapostol,  &  vengron  & 
aporteron  li  gran  aver,  e  pregavan  li  que  se  partis  de  l'apos-  235 
toi.  Mas  el  non  o  volia  far,  e  dizia  :  «  Per  lo  meu  grat  vos 
non  aurias  nenguna  d'aquestas  riquezas,  per  tal  que  cono- 
guesses  lo  fazedor  del  mont,  qued  es  verais  Deus,  que  vos 
poguesses    sostraire    las  vostras    armas    de  dampnation.» 
L'apostolz  descendet  foras  ad  els,  <k  predicava  lur  la  paraula  240 
de  Deu.  Mas  eil  non  la  volian  auzir.  Can  Tapostolz  o  vi,  intret 
s'en  intre  &  claus  la  porta.  Eil  cant  o  viron,  feron  acam-[34 
r®]-par  aqui  denaut  Testar  moût  gran  gent,  e  volgron  lo  cre- 
mar,  e  saint  Andreu  e  lo  mancip  qued  era  intre  ;  &  dizian  : 
«  Moira  aquest  tracher  enfas,  qued  ha  laisat  e  desamparat  245 
sos  parenz  e  sa  terra  î  »  Van  penre  faillas  e  pailla  e  leinna,  e 
meton  fuc  entorn  Testar;  e  volgron  cremar  tôt  cant  i  ac.  Can 
Tenfans  qued  era  laintre  ab  saint  Andreu  o  vi,  va  penre  una 
botriga  plena  d'aigua,  e  dis  :  «  Seinner  Jesu  Christ,  en  cui 
ma  son  totas  las  naturas  delz  elemenz,  le  qualz  fas  reverdir  250 
las  seccas  causas,  e  pois  las  verz  fas  seccar,  lo  fuc  fas  refre- 
zir,  e  cant  es  esteinz   lo  fas  avivar,  tu  fa  esteinner  aquest 


r 


312  LEGENDES   PIEUSES 

fuc,  per  tal  que  cil  que    son    tieu   non  s^entebeziscan,  anz 
sian  mais  enbrasat  en  la  toa  fen.»  E  cant  ac  dih  aizo,  escam- 
255  pet  Taiga  de  FampoUa  sobre  lo  fuc,  &  en  eis   pas  le  fon  aici 
amorâat,  con  si  fuc  non  i  agues  agut.  Can  li  parent  de  Tenfant 
o  viron,  dizian  :  «  Vec  vos   que  nostre  filz  es  ja  fah  encair- 
tairel  »  E  van  penre  escalas  e  volian  pujar  sus  el  scier,  per 
tal  que  Taucizessan  ab  glazi.  Dominas  autem  excecavit  eos,  ne 
260  vidèrent  ascensum  scalarum .  Mas  nostre  Seinner  essequet  lur 
oilz,  que  non  podian  vezer  pujar  per  las  escalas.  E  domenz 
qued  eil  estavan  en  aquesta  error,  uns  d'aquelz   qued   eran 
aqui,  qued  avia  nom  Lis[i]machus,  acomenset  a  dir  :   «  Baron, 
per  que  vos  trabaillas  de  badas?  Car  nostre  Seinner  se  combat 
265  per  aques  &  vos  non  o  conoisses.  Laissa[s]  vos  d'aquesta  fol- 
lia,  que  li  ira  del  cel  non  vos  vengua  desobre.  »  Cant   aquest 
[34  V®]  ac  dih  aizo,  trastuhaquil,  qued  eran  aqui,  acomenseron 
moût  fort  a  plorar  à.  dizian  :  «  Verais  es  aquest  Dieus  qued 
aquist  colon,  cui  nos  cujavam  persegre.  »  E  domenz  qued  eil 
270  dizian  aizo,  vec  vos  subtanamenz  que  venc   una  granz  lutz 
de  sus  del  cel,  car  adonx  eraja  nohg,&  li  oil   de  totz  aquelz 
foron  enluminât.  E   pujeron  sus  el  soler  on  era  Tapostolz  de 
Christ,  e  troberon  lo  orant,  e  van  se  tuh  getar  aqui  el  sol,  & 
acomenseron  a  cridar  &  a  dire  :  «  Seinner,  nos  te  preguam 
275  qu®  ^^  ^^^^  V^^  ^^^  tiens  sers,  que  siam  envolopat  en  error.  » 
Tan  gran  compunction  avian  tuh  qued  aquel  Lisimachus  dizia: 
«  Verament  Jesu  Christ  es  filz  de  Deu,  lo  quai  predica  le  sens 
sers  Andreus.  »  Adonx  va  Tapostolz  e  dreisset  los,  e  foron  aqui 
eis  ferm  en  fen,  mas  solament   li  parent  de  Tenfant  que  non 
280  crezeron.  Mas  menasseron  moût  fort  l'enfante  torneron  s'en 
en  lur  terra.  Cant  venc  aprop  cincanta  jornz,  sos  paire  e  sa 
maire  de  Tenfant  moriron  amdui  ensemps,  en  un  moment  & 
en  una  hora.  Et  aprop  aizo,  car  li  home  de  la  ciutat  amavan 
Tenfant,  le  seinner  de  la  ciutat  desamparet  li  e  li  autrejet 
285  tôt  quan  sos  paire  ni  sa  maire  avian  ni  tenian,  e  Tenfans  receup 
0,  e  non  desamparet  mingua  Tapostol;  mas   tôt  cant  aisia 
de  la  honor,  tôt  o  donava  alz  paupres,  e  tôt  o  despendia  en 
la  nécessitât  de  las  vezoas  e  delz  orfes.  Le  mancips  preguava 
Tapostol  que  lo  menés   ab  se  en    Thesalonica   E  can  foron 
290  aqui,  feron  acampar  lo  pobol.  Le  pobolz,  can  vezia  l'enfant, 
avia  [35  r°]   moût  grau  gauh.  E  can  foron  tuhg  acampat   al 


LEGENDES   PIEUSES  313 

théâtre,  Tenfans  predicava  la  paraula  de  Deu,  e  Tapostolz  non 
volia  rnotz  sonnar,  per  tal  que  tuhg  aguessan  meravillas   de 
la   savieza   de  Tenfant.  Acomenseron    trastuh  a   cridar  &  a 
dire:  «  Seinner,  salva  lo  fil  d'un  prohome  d'esta  vila,  qued  ha  295 
nom  Carprian,  car  fort  es  malautz,  e  nos  creirem  trastuh  en 
aquest  Jesu  Christ   cui  tu  predicas.  »  Respondet  lur  Tapos- 
tolz  e  dis:  «  Nuilla  res  non  es  que  Deus  non  pusca  far.  Mas 
per  tal  que  vos  crezas,  aduzes  lo  denant  nos,  &  nostre  Sein- 
ner Jesu  Christ  sanara   lo.  »  Can  le  paire  de  Tenfant  auzi  300 
aizo,  annet  s'en  a  sa  maison,  e  dis  a  Tenfant,  zon  fil  :  «  Car 
filz  Adimant,  encoi  seras  guaritz.  »  Respondet  Tenfas  e  dis  : 
«  Ara  sai  euben  verament  que  mos  sompnes  es  vers.  Car  eu 
avia  somniat  qued  uns  hom  me  guaria  de  ma  raalautia.  »  R 
cant  ac  flih  aizo,  vestic  se  tost,  e  levet  del  leg  &  annet  s'en  305 
tost  e  de  cors  ab  son  paire  al  theathre.  Et  aqui  eis,  can  fon 
aqui,  va  se  getar  alz  pes  de  Tapostol,  e  pregava  lo  fort  que 
li  rendes  sanitat.  Et  en  eis  pas  Tapostolz  mes  li  la  man  deso- 
bre,  et  fon  sanatz.  Le  pobolz,  totz  aqiiel  qued  eraaqui,  agron 
granz  meravillas,  car  el  avia  estât  vint  e  très  anz  malautz,  à:  310 
glorifiavan  Deu  e  dizian  car  non  era  Deus  aitalz  con  le  Deus 
que  predicava  sainz  Andreus.  Ab  aitant  uns  d'aquelz  autres 
homes,  qued  eran  aqui,  acomenset  a    preguar  l'apostol,  6i 
dizia:  a  0  tu,  hom  de  Deu,  eu  te  prec  que  tu  sanes  lo  meu 
fil,  car  le   diabolz  lo  trabailla  malament.  »  Le  diabolz,  cant  315 
Gonoc  qued  eissir  de-[35  v*»J-via  del  cors  de  Tenfant,  menet 
lo  en  un  secret  lue,  e  fez  lo  pendre  en  un.latz,  e  fez  lo  morir 
aqui.  Venc  lo  paire  de  l'enfant  e  trobet  lo  mort,  e  can  vi  qued 
aici  s'era  mortz,  acomenset  moût  fort  a  plorar,  e  dis  a  sos 
amix:  «  Portaz  lo  cors  de  mon  fil  qued  aici  es  mortz.  Eu  me  320 
fiz  en  Deu  qued  aquel  hostes,  que  predica  Jesu  Christ,  lo  resus- 
oitara.  »   Can  l'agron  aportat,  pauseron  lo  denant  l'apostol,  e 
comteron  li  tôt  de  quai  manera  le  diabolz  l'avia  mort.  «  Et  eu 
crozben,  zo  diz  le  paire  de  l'enfant,  o  tu,  hom  de  Deu,  que  tu 
lo  nae  puscas  rendre.  »  Tornet  se  l'apostolz  deus  lo  pobol,  e  325 
dis:  «  0  vos,  baro  de  Thesalonica,  qua'z  profehg  vos  er,  si 
vos  vezes  aquesta  meravilla  d'aquest,  que  sia  resuscitatz,  e 
non  crezes  en  Jesu  Christ?  »  Respondet  totz  le  pobolz,  e  dis: 
<c  Hom  de  Deu,  non  aias  doptansa,  que,  cant  auras  aquest 
resusoitat,  nos  creirem  tugh  a  toa  paraula.  »  Cant  agron  aizo  330 


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jLr.-i"  m.i  3Li.xi'..i:  i  ::-'  i  .■uo?r:L:  frOTi-  îlobi  de  Z>ea,  en 
:•*  >?»:  :x-^  :K  r'  ~i  *ïui*j  n^ia  i>  :  ar  îoa  es  desfidig  de 
»•',".  î:?^  -i  l'i  *•:■§  11*»!! " p^w.  ï  E  t:au!xz  ii*!  eL  ii  dîzia  aîio, 
•*.  s.:n~i  a-:*  f:r:.  Ir*  *:i-2-:  w»:'?':.:-^  TersiA  l*s  nfttas,  e  te- 

':C  -'..i  -.  -^  -^i-  ^'1^  i-  ii;.  ^  i— :.i:  c  FlL:.  -roafjcta  te  e  crezu, 
*  Mr^  î::::!:..  :i  .:  T:i  -r :\ iz'.jl'z.  •  Eî  ab  &icaac  ra  lo  penre 
p^r  *  mri-.  i  \z:Lr',  *'-»a  i"  *.  -i^  «4  Tîla.  E  domenz  qaed  eil 
Ven  ir.'ntTin  ç-*:»  1:>?  :.:r:jL.z  t^  .i  îiaîat.  e  :o  lar  rené  encon- 
i:r*  Q-'n  pro*  h:ii  t:*:.z.  i  i::zieaaet  a  pregmr  saint  Andréa 

///)  p^p  io-^  tîiX  «e*:».  1:  V  :ii!;  teaia  près  en  sa  carcer  aqaest 
M-^rliâ-^.  s^Tiz  :o:a  -lolpa.  i  eraa  cahe  plea  de  naffras,  las 
f^fi^iZ  per  la  lonza  preis^jn  lar  eran  poiridas.  Gaa  rapostolx 
aazi  fi'izo,  tomet  ^e  dei^^  Media?,  e  dis  li  :  •<  O  ta  hom,  aiyas 
7/}  qae  1  ea  te  dirai.  Ta  pregas  que  to3  ôlz  sia  sanaz,  e  tu  te- 

'ATjSy  ïtfsn  homes  en  ta  prei^on,  de  qualz  lar  carnz  son  poiridas.  Ë 
]>f:r  aizo,  si  ta  volz  nue  las  toas  pregaeiras  sia[n]  profechaolz 
a  Deij,  largua  primei'ament  aqaes  mesquis  de  ta  preison,  que 
Ui  tiouri  fil/  ^ia  largatz  de  sa  malautia.  Careu  vei  encobolament 
a  laff  mias  preg'ueras,  zo  es  aquist  maleza  que  tu  fas.  b  Adonx 

;'^'/)  MerliaH  cadec  a  sos  pes  &  baisava  les  li,  À  dis:  «  Aquil  dui, 
Moinner,  HJan  desliure,  &  autre  set  que  lai  n*a,  de  que  tu  non 
HfiH  rori  ni  as  auzit,  sol  le  meus  filz  sia  sanatz.  »  E  comandet 
Main?:  Andréas  qued  hom  li  aduises  los  près  denant.  E  canfo- 
rori  douant  el,  pauset  lur  sa  man  desobre,  e  lavet  lur  las  naf- 

fWîT)  f'^'i^i  «î^i  on  ois  pas  foron  sanat  e  guarit.  Can  venc  Tendeman, 
unnot  s'en  aqui  on  jacia  Tenfas,  e  dis  li  :  «  Ijeva  sus  el  nom 
do  [îJOv"]  noHtre  Seinnor  Jesu  Christ,  que  m*a  trames  aici, 
i|und  ou  Hano  la  toa  enfermetat.  »  E  va  lo  penre  i'apostolz  per 
la  ma,  o  lovot  lo  sus.  Et  en  eis  pas  el  fon  sanatz  e  guaritz,  & 


LEGENDES   PIEUSES  315 

acomenset  âd  annar,  lauzanz  Deu.  Aquel  mancips  eraappellatz  370 
Philionedis  &  avia  estât  malautz  vint  e  dos  anz.  Adonx  totz 
le  pobolz  acomenset  cominalmenz  a  cridar  &  a  dire  :  et  0  tu 
Andreu,  sers  de  Deu,  val  per  nostras  maisons  &  sana  nostras 
enfermetatz.  »  Respondet  Tapostolz,  e  dis  a  Tefant  cui  avia 
sanat:  «  Vai  per  las  maisons  delz  malautz,  et  el  nom  de  Jesu  375* 
Christ,  per  cui  tu  es  sanaz,  e  digas  lur  que  levon  sus  san  & 
salv.  »  Le  pobolz,  cant  auzi  aizo,  ac  granz  meravillas  ;  e  le 
mancips  annet  per  las  maisos  delz  malautz,  et  el  nom  de  Je- 
su Christ  sanava  los.  Trastoz  le  pobolz  crezet,  &  aportavan 
granz  dos  a  Tapostol,  &  el  non  los  volia  penre,  anz  lur  pre-  380 
gava  qued  auzissan  la  paraula  de  Deu,  &  fasia  lur  sermo. 

E  domenz  qued  el  predicava,  venc  li  denant  uns  rix  hom  de 
la  vila,  qued  havia  nom  Nicholau,  &  aduis  una  carreta  sobre 
daurada,  ab  qu[a]tre  muls  blanx  &  ab  quatre  cavalz  atressi  totz 
blanx;  &disa  l'apostol:  «  0  tu,  sers  de  Deu,  pren  aizo,  car  en  385 
tôt  Tafar  qued  eu  ai,  non  pois  trobar  ren  plus  precios  ni  meil- 
lor  d'aizo  ;  sol  tan  solament  me  sana  ma  fiUa,  qued  es  moût 
malauta.  »  Can  Tapostolz  o  auzi,  acomenset  a  somrire,  e  dis  : 
((  0  tu,  Micholau,  eu  recebi  los  tieus  dos,  mas  non  mingaaques 
que  tu  m'as  aportatz  aici.  Mas  tu  aici  con  as  aportat  per  tan  390 
fiUa  la  plus  [37  r**]  cara  causa  qued  avias  en  ton  alberc,  aici 
deves  donar  moût  plus  preciosa  causa  per  Tarma.  Eu  voil  de  te 
aver  que  tu  conoscas  de  tôt  ton  coratge  lo  Deu  que  t'a  fahg, 
e  ton  Creator,  le  qualz  non  vol  las  terrenalz  causas,  mas  las 
celestialz,  e  mespresa  aquesta  vida  défaillent,  per  Tautra  que  395 
ja  non  faillira.  »  Pois  amonestet  a  tôt  lo  pobol  cuminalment 
que  laissessan  la  errorde  lasydolas,e  crezessan  el  verai  Deu. 
E  va  penre  la  fiUa  de  Micholau,  e  sanet  la  de  sa  malautia.  E 
totz  lepobolz  acomenset  alauzar  Deu;  e  li  fama  de  las  vertutz 
que  fazia  Tapostolz  annet  per  tota  la  terra  de   Macedonia.        400 

Cant  venc  Tendema,  qued  el  parlava  al  pobol,  e  lo  li  venc 
denant  us  joves  hom,  &  acomenset  a  cridar  <k  a  dire  :  «  0  tu, 
Andreu,  sers  de  Deu,  que  t'avem  forfah,  per  que  tu  nos  vens 
getar  de  nostres  propris  setges?»  Adonx  Tapostolz  respondet 
al  raancip,  e  dis  :  a  0  tu,  diabolz,  eneraix  de  l'uma  linnatge,  405 
que  parlas  el  cors  del  joven  home,  digas  me  qualz  es  li  toa 
obra.  »  Respondet  le  diabolz  inz  el  cors  del  joven  home  :  «Eu, 
dis  el,  ai  estât  el  cors  d'aquest  joven  home,  des  que  era  paux 


/ 


316  LEGENDES   PIEUSES 

enfans,  &  pensava  me  que  jamais  non  m'avengues  a  partir 

410  d'el.  Mas  can  venc  oi  a  très  jornz,  &  eu  auzi  dir  al  paire 
d'aquest:  «  Annarai  m'en  a  Tome  de  Deu,  e  sanara  mon  fil.  » 
Eu,  cant  o  auzi,  tiras  los  tormenz  que  vos  autri,  apostol,  nos 
lais  ;  soi:  vengutz  aici,  per  tal  qued  eu  esca  del  cors  aici  deriant 
te.»  Etaqui  eis  lejoves  hom  cadec  alz  pesde  Tapostol,  [37  v®] 

415  e  le  diabolz  eissi  li  del  cors;  e  fon  sanatz,  e  levet  sus  e  glo- 
rifiava  nostre  Seinnor.  Tan  gran  gracia  avia  nostre  Seinner 
donnât  a  Tapostol,  que  tuh  venian  adel  per  auzir  la  paraula 
de,  Deu,  e  dizian  :  «  0  tu,  hom  de  Deu,  fai  nos  connoiser 
qualz  es  le  verais  Deus,  en  cui  nom  tu  curas  los  malautz.  » 

420  E  venian  li  sapi  d'aquella  lei,  e  desputavan  ab  el,  &  non 
podian  constrastar  a  la  soa  doctrina..  E  domens  qued  eil  des- 
putavan ab  Tapostol,  levet  se  us  d'elz,  et  venc  al  jutge  de  la 
vila  e  dis  li  (aquest  avia  nom  Viri)  :  «  Seinner,  uns  hom  s'es 
levatz  moût  malz  en  aquestaciutat  de  Tessalon[ic]a,  le  qualz 

425  predica  qued  hom  destruia  los  temples  delz  deus,  &  comanda 
a  laissar  los  sacrifizis  (k  totz  los  mandamenz  de  nostra  lei.  Un 
Deu  comanda  solaraent  a  colre,  del  quai  el  dis  e  manifesta 
qued  es  hom  e  sers.  »  Can  le  jutges  auzi  aizo,  trames  la  ca- 
valiers ab   cavalz,  &  ab   garnimenz,   que   lo    li    aduisessan 

430  denant.  E  can  foron  a  la  porta  de  la  maiso,  demanderon  si 
era  laintre  e  dis  lur  hom  qued  hoc,  &  intneron  s'en;  6i  can 
viron  saint  Andreu,  viron  que  sa  cara  getettan  gran  res[)lan- 
dor,  que  de  paor  cazegron  tuh  a  sos  pes.  E  can  toron  cazuh, 
Tapostolz  acomenset  a  comtar  a  toz  aicelz  qued   eran  aqui, 

435  de  quai  manera  era  fah  encrezent  d'el  al  jutge.  E  venc  totz  le 
pobolz  ab  glazis,  e  volian  toz*  los  cavaliers  aucire,  mas  Ta- 
postolz  non  o  laisset  far.  Ab  aitant  li  cavalier  torneron  s'en. 
Le  jutges,  cant  vi  que  non  aduzian  Tapostol,  frémi  totz  aici 
con  leos,  [38  r'^]  e  trames  la  autres  vint  cavaliers.  E  cant  foron 

440  laintre  en  la  maison,  e  viron  saint  Andreu,  foron  tan  torbat 
qued  hanc  re  non  saupron  dir  ni  pogron,  e  torneron  s'en. 

Le  jutges,  cant  o  auzi,  fon  moût  iratz,  e  trames  la  una  gran 
compainna  de  cavaliers,  que  per  plana  forsa  Taduissessan. 
Quan  sainz  Andreus  los  vi,  acomenset  lur  a  dir:  «  Non  est 

1  Ou  tos  ?  La  dernière  lettre  est  indistincte  et  surchargée.  On  paraît  avoir 
fait  un  z  d'un  s. 


LÉGENDES   PIEUSES  317 

donx  vos  autri  vengut  per  me?  »  Responderon  eil  :  «  Par  te  445 
em  nos  vengut,  si  tu  es  encantaire  que  predicas  qued  hom  non 
cola  los  deus.  Il    Adons  dis  sanz  Andreua  :  «  Eu  non  soi  en- 
cantaire, anz  soi  apostolz   del   nieii  Seinnor  Jesu  Crist,  oui 
predico.  >i  E  domeriK  quod  âl  dlzia  aizo,  e  le  diabolz  intret  el 
cors  ad  un  d'aquelz  cavaliers,  &  perdet  lo  sen.  Si  trais  s'espaza  450 
à  aoomenset  a  cridar  et  a  dire  :  «  0  tu,  jutges,  que  t'avem 
forfahg,  que  m'as  trames  ad  aquest  home,  que  solament  non 
me  pot  getar  d'aquest  vaisel,  anz  me  art  tôt  e  me  crema  per 
las  vertuz  qued  en  el  son.  Per  mon  grat  tu  mezeis  sai  vearias, 
e  ja  iiuil  mal  non  li  farias.  »  E  caiit  ao  aizo  dih,  le  diabolz  455 
eissi  del  cors  del  cavalier,  e  le  cavaliers  cadec,  e  fon  mortz. 
Ab  aiian  venc  le  jutges  moût  Jratz,  et  estet  denant  l'apostol  & 
anc  vezer  non  io  poc,  Adocix  dis  li  l'apoatolz:  n  0  tu  jutges, 
eu  son  aquel  que  tu  queres.  »  Et  en  eis  pas  li  sei  oil  del  jutge 
foron  ubert,  e   vi  Tapostol,  e  dis   li  moût  ergoillosament  ;   JGO 
«  Qualz  es  aquest  tieus  forsenz,  qued  aici  mospresas  mon 
mandament,  e  de  mos  meuistres  t'as  aizo  que  te  voJzî  Eu  sai 
ben  verament  &  entent  que  tu   es   m»lz  liom  &  encantaire  ; 
[38  VJ&eufarai  te  manjar  abestias  salvatgas,  perlo  raespresa- 
ment  que  tu  fas  de  nos  e  de  uostres  deus  ;  e  veiras  si  aquel   465 
deus  que  tu  predicas,  que  fon  cruciflatz,  te  poira  dealiupar  de 
la  noatra  man.  »  Respondet  Tapostolz  e  dis:  «  0  jutges,  lo 
eoveu  que  tu  crezas  lo  verai  Deu,  &  lo  seu  fil  Jesu  Christ,  que 
m'a  trames  ;  car  tu  vezes  prezent  aici  un  de  tos  cavaliers 
mort,  &  eu  el  seu  nom  resuscitarai  lo.  »  Et  ab  aitant  l'apostolz   470 
getet  se  ad  oration  ;  &  cant  ac  fâcha  sa  oration,  toquet  lo  ca- 
valier e  dis:  «  Leva  susl   Nostre  Seinner  Jesu  Christ  te  res- 
suscite, lo  quai  eu  prediqiie.  »  Ab  aitau  totz  le  pobolz  aco- 
menset  a  rendre  gracias  a  Deu,  e  le  jutges  acomenset  a  dire  : 
[i  0  vos,  pobol,  non  vullas  croire  Tencantador.  ii  Respondet   475 
le  pobolz,  e  dis  :  u  Aizo  non  es  encantamenz,  anz  es  ben  doc- 
trina  aana  e  veraia.  »  Adonx  dis   le  jutges:  '(Aquest  home 
farai   devorar  a  raaias  hestias,  e  de  vos  autres  escriurai    a 
César  que  totz  vos  fassa  aucir,  car  vos  aves  despresadas  las 
Boas  leis.  11  Eil  van  tuh  eiisemps  penre  peuaa  e  volian  lo  la-    480 
pidar  e  dizian  :  a  Ara  escriu  a  César  que  li  Macedonenc  an  re- 
ceupuda  la  paraula  de  Deu  &  mesprezan  las  ydolas  &  adoran 
lo  verai  Deu.  » 


À 


318  LEGENDES  PIEUSES 

Adonx  annet  s*en  totz  iratz  le  jutges,  e  parti  se  d*aqoi.  E 
cant  venc  lo  matin,  el  fez  mètre  bestias  salvatgas  el  teatre, 

485  e  comandet  qued  hom  aduisses  saint  Andreu.  Van  lo  penre 
per  los  cabeilz  li  menistre,  e  tiravan  lo,  e  11  autre  lo  ferian 
detras  ab  bastos  &  ab  fustz  ;  &  aici  bâtent  meseron  lo  en 
Tarena  ;  e  pois  laisseron  li  [39  r°]  annar  un  porc  cenglar,  moût 
mal   e  moût  horrible  ;  &  annet  tôt  entorn  très   vegadas  a 

400  saint  Andreu  &  ren  plus  non  li  nohc.  Can  le  pobolz  qued  era 
aqui  viron  aizo,  renderon  gracias  a  Deu.  Pois  le  jutges,  can 
vi  aizo,  fez  adurre  un  taur;  &  aduiseron  lo  trenta  home,  & 
meseron  lo  en  Tarena  ab  saint  Andreu  ;  &  anc  nol  toquet;  mas 
vai  penre  dos  delz  ministres,  et  escoicendet  los  totz,  e  mes. 

495  los  mortz  ;  pois  cant  o  ac  fahg,  acomenset  a  mugir  e  cadec 
mortz.  Et  ab  aitant  acomenset  a  cridar  toz  le  pobolz  &  a  dire  : 
«  Verais  Deus  es  Jesu  Christ.»  E  domenz  qued  eil  eran  en  aizo, 
et  eil  viron  descendre  l'angel  de  nostre  Seinnor  del  t;el,  que 
confortavarapostol  en  Tarena.  Le  jutges,  can  viqued  aquellas 

500  bestias  non  li  avian  tengut  dan,  fez  adurre  un  laupart  mot 
cruzel,  e  fez  lo  larguar  a  Tapostol.  Le  laupartz  laissa  estar 
Tapostol  e  sail.sus  al  setge  del  jutge,  e  va  penre  son  fil,  & 
aucis  lo.  Tant  avi[a]  le  diabolz  encecat  los  oilz  del  jutge  que 
sol  son  fil  non  plainnia,  ni  ren  non  dizia.  Adonx  giret  se 

505  Tapostolz  deus  lo  pobol  e  dis  :  «  Ara  podes  tuhg  conoisser 
que  vos  coles  lo  verai  Deu,  per  la  cui  vertut  totas  aquestas 
bestias  malas  son  vencudas  e  sobradas,  lo  quai  Virinus,  le  jut- 
ges, non  conois.  E  perzo  que  vos  autri  o  crezas  meilz,  elnom 
de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  resuscitarai  lo  seu  fil,  lo  quai 

510  eu  predique,  e  per  zo  que  li  foUia  del  seu  fol  paire  de  l'enfant 
sia  cofunduda.  »  Et  ab  aitant  Tapostolz  getet  [39  v°]  se  ad 
oration.  E  cant  ac  orat,  levet  sus,  et  annet  lo  penre  per  la 
man,  e  resuscitet  lo.  Can  le  pobolz  vi  aizo,  ag  gran  gauh,  e 
lauzeron  nostre  Seinnor,  e  renderon  li  gracias,  e  feron  se 

515  batejar  a  Fapostol.  Le  jutges  cofundutz  parti  se  d'aqui  totz 
iratz,  &  annet  s'en. 

Ab  aitant  us  joves  hom,  qued  era  aqui  ab  Tapostol,  can  vi 
aquestas  meravillas  que  fazia,  part  se  d'aqui  ;  &  annet  o  dir 
a  sa  maire,  e  pregava  li  qued  annes  veslo  bon  home.  Ab  aitan 

520  li  donna  levet  sus  &  annet  s'en  la  on  l'apostolz  era  ;  e  va  se 
getar  a  sos  pes,  e  pregava  li  que  li  monstres  e  li  disses  la 


LEGENDES  PIEUSES  319 

paraula  de  Deu.  Ë  Tapostolz  acomenset  li  a  monstrar  la  fen 
de  Jesu  Christ;  e  can  Tac  gran  pessa  predicada,  li  donna 
acomenset  li  a  pregar  que,  se  le  sens  plazers  era,  qued  annes 
ad  un  camp  seu,  on  avia  un  trop  gran  serpent,  que  degas-  ^^5 
ta  va  tota  aquella  région.  Annet  s'en  la  Tapostolz.  E  can  fon 
el  camp,  le  serpenz  acomenset  a  venir  encontra  a  Tapostol,  e 
portet  lo  cap  moût  aut,  e  siblet  moût  horriblament.De  lon- 
geza  avia  cincanta  cobdadas;  tant  era  granz  qued  aquil, 
qued  eran  aqui  ab  saint  Andreu,  agron  tan  gran  paor,  qued  530 
tuh  se  geteron  a  terra.  AdonxTapostolz  dis  al  serpent  :  «  Otu, 
bestia  salvatga,  clina  lo  cap  qued  bas  dreissat  per  destruire 
Tuman  linnatge,  &  sias  subjex  alz  sers  de  Deu,  e  moiras  ades  !» 
Etaquieis  le  serpens  getet  un  moût  gran  bram,  e  pois  mes 
se  entorn  un  gran  rover,  qued  [40  r°]  era  aqui  de  prop,  et  535 
liet  se  tôt  entorn  el,  e  getet  un  grand  riu  de  vérin  ab  sanc 
mescle  per  la  bocca,  et  cazec  mortz.  Pois  Tapostolz  tornet 
s'en,  e  venc  a  la  maison  de  la  donna,  et  atrobet  que  tenian 
aqui  un  enfan  mort,  le  qualz  era  mortz  per  lo  sufflament  del 
serpent.  E  cant  sainz  Andreus  vi  plorar  aici  sos  parenz  de  540 
l'enfant,  acomenset  lur  a  dir:  a  Le  nostre  Deus,  que  vol  que 
vos  autri  sias  salv,  m'a  trames  aici  a  vos,  que  crezas  en  el. 
Annas  foras  el  camp,  e  trobares  mort  cellui  qued  ha  mort 
vostre  fil.  »  Eil  responderon  e  disseron  :  «  Ja  non  plainneriam 
la  mort  de  nostre  fil,  si  podiam  vezer  venjansa  de  Tenemic.  »  545 
Anneron  s'en  per  vezer  si  era  en  aici  con  Tapostolz  o  avia 
dih.  E  can  foron  foras,  Tapostolz  dis  a  la  moiller  del  jutge  : 
«  Val,  e  resuscita  l'enfant.  »  Ella  non  doptet  anc  en  ren,  e 
venc  al  cors  de  l'enfant,  e  dis  :  a  Vai  sus,  enfans,  sans  e  salz, 
el  nom  de  Jesu  Christ.  »  Et  en  eis  pas  el  levet  sus.  Ab  aitant  550 
sos  paires  et  sa  maire  vengron  ab  gran  gauh,  car  agron 
atrobat  lo  serpent  mort  ;  e  can  foron  a  lur  alberc,  troberon 
lur  enfant  viu  e  san.  E  van  se  getar  alz  pes  de  Tapostol  e  ren- 
dîan  11  montas  gracias,  e  torneron  se  a  la  fen  de  Jesu  Christ. 

Can  venc  la  nohg,  e  sainz  Andreus  somniet  un  somne,  e  555 
retrais  lo  l'endeman  a  sos  discipolz,  e  dis  :  «  Aujaz,  fraire,  lo 
pantais  qued  eu  ai  a  nohg  fah:  So  m'era  vejaire  qued  eu  vezia 
denan  me  un  gran  puhg,  qued  esta-[40  v°]-va  sus  entrenant 
moût  aut  &  non  avia  nuilla  causa  terrenal  de  sobre  se,  mas 
tan  solament  resplandia  per  gran  lutz,  de  guisa  que  toi  lo  mon  560 


•'^^O  LÉGENDES    PIEUSES 

enluminava.  Et  ab  aitan  esteron  denant  me  nostre  dui  fraire, 
Peire  &  Johanz,  apostol,  e  sairiz  Johanz  estendet  sa  man  a 
saint  Peire,  e  levet  lo  sus  el  som  del  pugh.  Pois  tornet  se  deus 
me,  e  pregava  me  qued  eu  m'en  pujes  après  saint  Peire,  & 

565  acomenset  me  a  dir  :  «  Andreu,  tu  beuras  ab  aquel  enap,  jque 
Peire  a  begut.  »  Et  estendet  sa  man,  e  dis  me  :  «  Appropia  te 
de  me,  &  estent  tas  mas,  &  ajosta  las  a  las  meuas,  e  lo  tieu 
cap  ajosta  ab  lo  meu.  »  E  fiz  o  e  non  fui  tan  granz  con  saioz 
Johanz.  E  pois  dis  me  :  «  Volz  conoisser  ni  saber  que  vol  dir 

570  aquist  figura,  que  tu  vezes,  o  qui  son  eu  que  parle  ab  te?  » 
Respondei  eu,  e  dis  que  moût  o  volria  conoisser.  E  dis  me: 
«  Eu  soi  li  paraulacle  la  cros,  en  la  quai  tu  pendras  breument, 
per  lo  nom  de  celui  cui  tu  predicas.  »  E  montas  autras  causas 
me  dis,  que  non  coven  qued  eu  las  diga  aoras  ;  car  can  eu 

575  m'api'opiarai  de  la  mort,  &  ellas  seran  manifestas.  E  vos  autri, 
fais  ajostar  totz  aicelz  qued  an  receupuda  la  paraula  de  Deu, 
ai  eu  comandarai  los  a  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  qued  el  los 
gart  de  tôt  bautugament,  e  los  conserve  en  la  soa  doctrina. 
Car  eu  transpassarai  d'aquest  segle  &  annarai  ad  aicella  pro- 

580  raessio,  que  m'a  promes  le  reis  del  cel  e  de  la  terra,  qued  es 
filz  do  Tautisme  Deu,  ab  lo  Saint  Esperit  permanens  m  secula 
sempllerna,  » 

Can  li  fraire  e  li  discipol,  qued  eran  [41  r°]  aqui,  auziron 
aizo,  acomenseron  moût  fort  a  plorar,  e  batian  lur  fronz  ab 

585  lur  palmas,  ab  granz  gemps  &  ab  granz  plors.  Vengron  tuh 
aquilque  crezian,e,can  toron  tuhacampat,  acomenset  lur  a  dir 
sanz  Andreus  :  a  Fraire  e  serors,  eu  sai  qued  eu  me  partirai 
de  vos.  Mas  eu  me  fiz  el  meu  Seinnor,  la  cui  paraula  eu  pre- 
dique,  qued  aquesta  semensa,  qued  eu   ai  semeaada  en  vos, 

590  non  laisse  arancar  a  Tenemic,  zo  es  li  conoissensa  e  li  doctrina 
del  meu  Seinnor  Jesu  Christ.  Vos  autri,  oras  ades  assidual- 
ment,  &  estas  fort  en  fe,  que  nostre  Seinner  aranque  la  zizania 
mala  &  aici  con  bon  froment  e  mont  el  vos  deiune  mètre  el 
celestial  graner.  »  Et  aici  sainz  Andreus  per  cinc  jornz  es- 

595  seinnava  lo  pobol,  el  confermava  el[z]  comandamenz  de  Deu. 
Can  venc  a  derrer,  &  el  estendet  sas  mas  a  nostre  Seinnor,  e 
dis  :  «  Seinner,  eu  te  prec  que  tu  gardes  aquest  pobol,  cui 
as  fah  conoisser  la  toa  salut,  que  Tenemix  non  lur  pusca  tener 
dan;  mas  aquellas  causas,  qued  ou  lur  ai  esseinnadas  per  lo 


LEGENDES   PIEUSES  321 

tieu  mandament,  poscan  tener  complidament,  senz  tôt  failli-  600 
ment,  in  secula  seculorum,  »  E  cant  ac  dih  aizo,  tuh  aquil 
qued  eran  aqui,  responderon:  «  Ameni.  »  E  pois  près  un  pan 
e  rendet  gracias  a  nostre  Seinnor,  e  frais  lo,  e  comeneguet 
los  totz,  e  dis  :  «  Recebez  la  gracia  que  nostre  Seinner  Jésus 
Christ  vos  a  donada  per  lo  seu  serv.  »  E  poisbaisava  los  totz,  605 
e  comandava  los  a  Deu.  Et  cl  annet  s'en  en  Tesalonica.  E  moût 
home  de  Mascedonia  anneron  s'en  ab  el,  delz  qualz  [41  v°] 
foron   doas  naus  plenas.   Trastuhg   querian  qued   hom  per 
amor  de  Deu  los  laisses  intrar  en  la  nau,  on  era  sanz  Andreus, 
quar  moût  desiravan  con  Tauzissan  parlar,  que  li  paraula  de  610 
Deu  non  lur  failles  en  mar  ni  en  terra. 

Aqui  eis,  can  foron  intrat  tuh  en  las  naus,  venc  venz  bons  ; 
<k  enpeis  los  a  la  ciutat  de  Patras,  de  la  quai  era  bailles  Egeas. 
E  can  foron  aribat  aqui,  eissiron  de  las  naus,  &  intreron  s'en 
en  la  ciutat.  E  sainz  Andreus  acomenset  a  predicarla  parau-  615 
la  de  Deu;  e  domenz  quepredicava,  vencli  una  femena,  qued 
avia  nom  Ephidima,  e  getet  se  a  sos  pes,  &  acomenset  li  a 
dir  :  u  0  tu,  sainz  hom,  apostolz  de  Deu,  li  mia  donna  Maxi- 
milla  eg  moût  malauta  de  febre,  e  pregava  te,  si  le  tiens  pla- 
zers  era,  que  tu  Tanessas  vezer  ;  car  eil  désira  moût  auzir  la  620 
toa  doctrina  e  la  toa  paraula  ;  car  le  jutges  sos  maritzesta  de- 
nant  son  leg,  s'espaza  tracha,  qued,  alo  cant  eil  morra,  el  se 
cuja  aucir.  »  Vai  sainz  Andreus  &  annet  s'en  la  ;  e  venc  al 
leg  on  jacia  li  donna,  e  vi  son  marit  que  l'estet  denant,  s'es- 
paza  tracha,  e  dis  li  sainz  Andreus  :  «  Tu  non  te  fassas  mal  ab  625 
aquel  glazi,  mas  estoja  lo  en  son  lue  ;  car  encar  venra  temps 
que  tu  lo  trairas  per  nos.»  Le  jutges,  cant  auzi  la  paraula,  es- 
tojet  son  glazi,  e  laisset  lo  venir  entro  al  legh.  Venc  Fapos- 
tolz  denant  lo  leg  de  la  malauta,  e  fez  sa  oration,  e  pois  va  la 
penre  perla  man,  et  en  eis  pas  ella  acomenset  a  suzar,   e  li  630* 
febres  laisset  la,  e  comandet  Tapostolz  [42  r°]  qued  hom  li  do- 
nes  a  manjar.  Vai  le  jutges  e  fez  aportar  a   Tapostol   cent 
marx  d'argent  ;  mas  el  sol  non  los  vole  tocar  niesgardar.  Ma- 
ximilla  venia  cada  jorn  al  teatre,  can  sos  maritznon  i  era,  e 
trametia  querre  Tapostol  &  auzia  ades  volontiers  la  paraula  635 
de  Deu.  Le  jutges  non  era  en  la  ciutat  de  Patras,  anz  era  an- 
naz  en  Macedonia ,  e  li  donna  annava  mot  volontiers  vers 
Tapostol,  que,  can  sos  maritz  i  era,  non  ausava  venir  en  lue 

22 


i 


322  LEGENDES   PIEUSES 

qued  el  fos;  car  mot  portava  gran  enemistat  a  Tapostol,  per 
040  aizo  quar  anc,  pois  que  sa  moiller  Maximiila  ac  auzit  sa  pré- 
dication, non  se  vole  ajostarab  el. 

Domenz  que  sainz  André  us  conversava  en  la  vila,  e  predi- 
cava  la  paraula  de  Deu,  Ëgeas,  le  jutges  de  laciutat  de  Patras, 
lo  fez  penre  &  adurre  dcnant  se,  e  dis  li  :  «  Tu  es  Andréas, 
045  que  destruis  los  temples  delz  deus  &  amonestas  alz  homes 
aquesta  folla  sexta  per  colre,  li  qualz  es  atrobada  novellar- 
menz?»  Respondct  sainz Andreus,e  dis:  «  Eu  soi  benaquelque 
predique  la  paraula  de  la  veritat  e  nostre  Seinnor  Jesu  Christ, 
e  que  li  home  se  partan  de  la  error  de  las  jdolas,  que  son  fa- 
050  chas  per  mas  carnalz,  e  conoscan  lo  verai  Deu,  per  lo  quai 
totas  causas  son  fâchas.  »  Egeas  dis  :  «  Aquestas  paraulas, 
que  tu  dis,  son  follas  e  vanas.  Car  aquel  Jésus,  que  fon  cruci- 
fiatz,  0  dizia  &  o  esseinnava  atressi.  »  Respondet   sainz  An- 
flreus,  e  dis  :  a  El,  qued  ara  seinner  de  magestat,  descendet 
055  per  aizo  del  cal,  qued  el  pre-[42  v°]-zes  e  receupes  la  forma  de 
rome,  le  qualz  era  perdutz  per  la  transgression   qued  avia 
fahg.  De  son  grat  vole  sofrir  mort,  qued  el  desliures  de  mort 
cellui  qued  avia  fahg.  »  Adoiix  comandet  le  jutges  qued  hom 
lo  meses  en  carcer,  e  dis  que  Tendeman  lo  faria  aucire.  E  can 
000  foii  enclaus  en  la  carcer,  venia  le  pobolz  aqui  déferas  ad  el, 
e  parlava  lur  e  dizia  :  «  Eu  soi  apostolz  del  meu  Seinnor  Jesu 
Christ,  que  m*a  trames  a  vos,  sennor  fraire,  que  vos,  qued  es 
pausat  en  tenebras  &  en  umbra  de  mort,  per  la  paraula  del 
meu  Seinnor,  sias  tornat  a  lumnera  &  a  la  via  de  veritat. 
005  D'aizo  non  me  cessarai  qued  eu  non  vos  digua&  amonesti  vos, 
que  vos  partias  del  coutivament  delz  diabolz;  &  queres  e  de- 
mandas lo  verai  Deu,  e  persévéras  el[s]  seus  mandamenz,  que 
vos  puscas  esser  haras  de  la  soa  gran  promession.  Et  eu, 
seinnor  fraire,  die  vos,   e  vos  amonesti,  que  la  vostra  fen, 
070  qued  aves  pausada  sobre  la  fondamenta  del  meu  Seinnor  Jesu 
Christ,  que  vos  la  fassas  creiscer  en  esperansa  &  en  lauz  del 
meu  Seinnor  Jesu  Christ.  Eu  non  vos  dirai,  ni  vos  farai  saber 
aqueilas  causas  que  a  me  esdevenran,  per  talque  vos  non  sias 
irat.  Car  tôt  aizo  m'a  proruas  le  meus  Seinner  Jesu  Christz, 
075  aici  con  es  escrih:  Quia  pro  nomine  illius  oportetnosmulùa  pati. 
Car  per  lo  seu  nom  conven  que  nos  soffriam  motz  tormenz, 
que  siam  flagellât  &  aduh  denan  los  reis  e  los  comtes,  e  que 


LEGENDES  PIEUSES  323 

portera  guarenti[a]  d'el.  Et  qui  perseveraverit  usque  in  finem, 
hic  salvus  erit,  E  cel  que  perse ve- [43  r®]-rara  entro  a  la  fin, 
cel  sera  salz.  Per  aizo  ha  obs  qued  ores  senz  tota  cessation,  680 
quar  le  diabolz  que  vos  environa  senz  repaus,  aici  con  leons, 
volria  alcun  de  vos  devorar,  et  vos  autri  captenez  vos  de 
guisa  qued  el  jassa  subjetz  et  apoderatz  per  vos  autres.  » 

Aquestas  causas  e  moufas  autras  lur  monstret  tota  la  nohg. 
E  can  venc  lo  ben  matin,  levet  se  Egeas  le  jutges  &  annet  se  685 
sezer  en  sa  tribu[n]a*,  &  comandet  qued  hom  li  aduisses  saint 
Andreu.  Aduis  Tom.  E  can  fon  denant  el,  acomenset  li  a  dir  : 
«  Andreu,  eu  comandei  qued  hom  te   mezes  en  carcer,  qued 
eu  conogues  e  saupes  certanamenz  alcuna  causa  de  te.  Eu  ai 
auzit  dir,  mas  non  sai  si  se  sia  vers,  qued  a  nohg  tota  noh  as  690 
parlât  &  amonestat  a  la  gent  tas  vanas  paraulas  e  tas  follas.  » 
Sainz  Andreus  respondet  :  «  Eu  non  me  ce  ssarai,  ni  me  dei 
cessar  d'obrar  zo  que  le  meus  Seinner  m'a  esseinnat  ni  cargat 
qued  eu  fassa,  qued  aquest  pobolz  sia  getatz  de  la  via  d'error 
e  sia  tornatz  a  la  vera  conoissensa.  »  Le  jutges  dis  :  «  Toi  te  695 
d'aquesta  foUia,  &    non    veillas  celz  que    ben  vivon   tornar 
atras  ni  mètre  en  error.  »  Sainz  Andreus    respondet  :  «  Le 
meus  Seinner  Jesu  Christ  me  carguet  qued    eu  en  totz  senz 
prediques  la  soa  paraula,  e  que  non  m'en  cesses,  e  qued  eu 
demonstres  penitencia  alz  erranz.  »   Egeas   dis  :  «  Si  tu  non  700 
prometes  que  te  partas  d'aquesta  follia  &  d'aquesta  avol  doc- 
trina,  eu  comandarai  qued  hom  te  auciza.   »  Sainz  Andreus 
respondet  :  «  Eu  soi  appareillatz  de  recebre  [43  v°]  mort  e 
totas  maneras  de  tormenz,  per  lo  meu  Seinnor  J^su  Christ, 
enanz  qued  eu  me  parta  de  la  soa  paraula  a  predicar.  »  Va  le  705 
jutges  e  comandet  qued  hom  lo  bâtes  ab  flagelz,  e  pois  lo 
meses  hom  en  cros.  E  comandet  alz  ministres  qued  hom  li  lies 
les  pes  e  las  mas  en  la  cros,  e  qued  hom  non  los  li  clavelles 
per  tal  que  plus  longament  e  mais  poinnes  en  morir. 

E  domenz  que  li  carnificer  lo  menavan  per  mètre  en  la  cros,  710 
una  gran  compainna  delz  fizelz  los  seguia  aprop,  cridan  e  di- 
zent  :  «  Le  drechuriers  hom,  &  l'amix  de  Deu,  el  bons  maistre 
es  menatz  a  mort  I  »  Sainz  Andreus  los  amonestava,  e  lur  dizia 
moutas  bonas  paraulas,  entro  que  venc  el  lue  on  hom  lo  dévia 

*  On  peut  lire  aussi  bien  tribna  que  tribua . 


i 


32  4  LEGENDES   PIEUSES 

715  mètre  en  croz.  E  can  vi  la  croz,  d'aitan  loin  con  la  vi,  acomen- 
set  a  cridar&adire  :  «  Deus  te  salv,  croz,  qued  eras  enohiada 
del  lonc  atent  qued  has  fah  de  me.  Certament  sai  que  tu  as 
gauh  e  t'alegras,  car  tu  recebras  lo  discipol  de  celui  que  pen- 
det   en  te.   Per  qued  eu  totz  alegres  vauc  vers  te,  quar  eu 
720  conosc  e  sai  lo  tieu  secret,  ni  per  cal  causa  tu  es  ficada.  Recep 
cellui  cui  tu  desiras,  car  eu  ai  longament  disirada  la  toa  beu- 
tat.  Eu  conosc  en  te  aquellas  causas  que  le    meus  Seinner 
m'a  promessas.  0  tu,  benezeita  cros,  per  Deu  recep  mi  himil 
&  transpassa  me  al  meu  Seinnor  Jesu  Christ  !  »  E  can  Tapos- 
725  tolz  acaizo  dih,  despoillet  se,  eliuret  sos  vestirs  alz  menistres. 
Et  eil  van  lo  penre,  e  lieron  li  los  pes  e  las  mas,  aici  con  lur 
fon  comandat  a  far,  e  penderon  lo  en  la  cros.  [44  r®]  Aqui  era 
vengutz  totz  le  pobolz  per  vezer,  tant  que  ben  eran  entro  a 
vînt  milia,    entrelz  qualz  era  Stratocleus,  fraire  d'Egeas  lo 
730  jutge.  Uberc  saboccasainz  Andreusetamonestava  los  tan  fort 
qued  aquil,  que  non  crezian,  tornavan  a  la  vera  fen  de  Jesu 
Christ.  Tôt  lo  jorn  e  tota  la  nohg  los  amonestet,  qued  banc 
nengus  non  fon  las  d'estar  aqui. 

Can  venc  Tendeman,  toz  le  pobolz  vi  la  soa  paciencia,  e  lo 

735  seu  sen,  e  la  gran  forsa  de  sa  pessa.  Vengron  tuh  ensemps  ad 

JEgeas,  lo  jutge,  et  acomenseron  li  a  dir  :  «  0  tu,  jutges,  qualz 

es  aquist  toa  sentencia?  Malamenz  has  jutgat.  Cruzel  senten- 

tia  as  donada.  Fellon  son  tuh  li  tieu  juzizi.  Cal  mal  avia  fah 

aquest  sainz  hom  ?  Ni  qued  avia  dih?  Tota  aquist  ciutatz  es 

740  torbada  e  tuh  deuriam  périr.  0  tu,  jutges,  non  voillas  des- 

truire  aquesta  ciutat  de  César.  Liura  nos  aquest  drechurier 

home.  Ren  nos  aquest  saint  home.  Non  voillas  aucir  aquest 

car  home  de  Deu.  Non  voler  destruire  aquest   bon   home, 

ni  aquest  mansuet.  Dos  jornz  ha  estât  penduz  &  ancar  es 

745   ^ius,  &  non  se  cessa  de  parlar  ni  d'amonestar  sanctas  parau- 

las;  &  trastuh  amem  lo  mais  escoutar  que  manjar  ni  heure. 

Rent  nos  aquest  saint  home,  que  non  periscam  e  puscam  viure. 

Laissa  annar  aquest  cast  home,  e  tota  li  terra  er  en  pas. 

Desliura  aquest  home  sapi,  e  tota  Achaia  aura  misericordia.» 

750       Egeas  non  volia  auzir  ni  escoutar  nulla  re  que  li  dissessan. 

Cant  eil  o  viron,  mogron  se  tuh  ensemps  e  volgron  aucire  lo 

jutge. Can  lo  jutges  o  [44  v®]  vi,  ac  gran  temensa  que  non  Tau- 

cizessan,  e  levet  se  de  sa  cadera,  &  acomenset  s'en  ad  annar 


LEGENDES   PIEUSES  325 

la  on  era  sainz  Andreus  en  cros.Le  pobolz,  can  lo  viron  moure, 
agron  gran  gauh  tuh,  car  se  penseron  qued  annes  per  des-  755 
liurar  saint  Andreu.  Can  fon   vengutz  en  aquel   lue  on  era 
sainz  Andreus,  &  el  vi  lo  jutge,  acomenset  ii  a  dir  :  «  Qued 
es  vengutz  far,  Egea?  Es  me  vengutz  desliurar?  0  as  penden- 
sas  de  zo  que  fas,  e  voles  tornar  a  la  fe  de  Jesu  Crist?  Non  me 
digas  ni  me  amonestes  nuilla  error,  queja  non  t'en  creiria.  760 
Car  eu  ren  gracias  al  meu  Deu  &  al  meu  Seinnor,  car  m'a 
liurat  en  las  toas  mas,  que  per  la  bona  confession  eu  aia  la 
perpétuai  gloria  e  sia  fah  sos  amix  e  sos  conogutz.  E  tu  non 
t'apropies  de  me,  qued  eu  sia  fah  proprias  del  meu  Seinnor 
toz  temps  mais,  &  en  la  soa  gloria  pusca  habitar,  e  qued  el  765 
me  renda  las  promessions  que  m'a  fâchas.  »  Lejutges,  cant 
auzia  aquestas  paraulas,  estava  toz  esbaiz,  e  non  li  podia  ren 
dire,  ni  sabin.  Toz  le  pobolz  acomenset  a  crïdar  :  «  Desliura^lo 
saint  home,  el  drechurer,  el  cast,  &  home  de  Deu.  »  Apro- 
piet  se  Egeas  de  la  cros,  e  vole  saint  Andreu  desliar.  Can  770 
sainz  Andreus,  o  vi,  que  desliurar  lo  volia,  acomenset  a  dir  : 
c(  Seinner  Jesu  Christ,  non  laisses  lo  tieu  serv  desliurar  de 
la  cros,  que  per  lo  tieu  nom  i  es  pendutz.  Seinner,  eu  te  prec 
que,  eu  qued  acomenz  a  tocar  alz  tiens  secretz,  non  me  laisses 
tornar  a  la  humana  conversation.  Seinner,  eu  que  conosc  la  775 
toa  granneza  per  la  croz,  non  veillas  qued  eu  plus  viva  en 
aquest  segle.  Seinner  Jesu  Crist,  maistre,  cui  eu  am,  e  cui 
[45  r®]  conosc,  e  cui  tenc,  e  cui  désire  vezer,  &  en  cui  es  tota 
ma  esperansa,  Seinner,  recep  mon  esperit.  »  Et  hec  dicens 
glorificans  Dominum,  et  gaudens,  et  populo  fiente,  reddidit  spi-  780 
7*itum,Et  cant  ac  aizo  dih,totz  le  pobolz  plorava  moût  fort;  et 
ab  aquestas  paraulas,  glorifianz  Deu,   rendet  Tesperit  sanz 
Andreus  a  nostre  Seinnor. 

Maximilla,  li  raoiller  d'Egeas,  sancta  femena  e  bona,  va  penre 
lo  cors  de  saint  Andreu  ab  gran  diligencia,  et  ois  lo  de  rix  785 
oinneraenz,  e  sebeli  lo  en  un  moût  bon  lue.  Le  jutges  en 
aquella  eissa  noh  enrabiet,  &  uns  diabolz  intret  li  en  son  cors, 
e  d'unu  auta  torre  deroquet  s'en,  e  fon  mortz.  Can  Strato- 
cleus,  sos  fraire,  auzi  qued  aici  era  mortz  Egeas,  non  vole 
ren  tocharde  sasubstancia  ni  de  ren  qued  agues,e  dis  :  «Tôt  790 
cant  m  os  fraire  avia  ni  tonia,  tôt  sia  en  perdicion,  aici  con 
el  es  !  Eu  ai  pro,  ab  que  le  meus  Seinner  Jesu  Christ  me  voilla 


/ 


3  26  LEGENDES   PIEUSES 

ajudar,  lo  quai  eu  conosc  &  ai  conogut  per  lo  [seu]  serv 
Andreu.  »  Le  qualz  es  martirizatz  un  jorn  enant  la  calenda  de 
795  dezembre,  en  Acaia,  en  la  eiutat  do  Patras,  cant  Egeas  n'era 
bailles.  Rengnante  *  Domino  nostro  Jesu  Christo,  cm  est  honor 
et  gloria  in  secula  seculorum.  Amen. 


XVIIII 

PASSIO  SANCTI  JACOBI  APOSTOLI,  PRATRIS 

JOHANNIS 

[Jacobu\s^,  frnter  Johannis,  apostoli  et  evangeliste^  [omnem] 
Judeam  et  Smnariam  visitabat,  fngrediens per  st/[nagogà]s,8ecun- 
dum  scripturas  sanclas,  ostendebat  omnia  que  [a  prophetis  pre}- 
dicta  erant,  in  Domino  Jesu  Christo  esse  impieta. 

5  [Sainz  J]acraea,  fraire  de  saint  Johan  evangelista,  aQ[nava 
per  tota  la]  terra  de  Jiidea  e  de  Samaria  &  intrava  en  [las 
synag]ogas  delz  juzeus,  e  monstrava,  segon  las  [45  v*]  escrip- 
turas,  que  zo  quedavian  dih  las  prophetas  era  complit  en  Jesu 
Christ. 

10  Esdevenc  que  domenz  qued  el  predicava,  uns  encantaire, 
qued  avia  nom  Ermogene,  li  trames  un  seu  discipol,  quedavia 
nom  Pliilet.  Aquest  Philez  mcnet  ab  se  ganre  de  phariseus,  & 
afFermava  e  dizia  que  Jesu  Christz  de  Nazarethz  non  era  ve- 
ramentfilz  de  Deu,  del  quai  Jacmes  dizia  qued  era  discipolz. 

15  Sainz  Jacmes  desputava  ab  el  e  per  Saint  Esperit  vencia  totas 
las  questions  qued  el  li  fazia,  e  per  sancta  escriptura  falsava 
totz  SOS  argumenz  e  monstrava  qued  aquest  era  âlz  de  Deu. 
Aquest  Philetus,  can  vi  que  re  non  li  valian  sas  questions, 
tornet  s'en    ad  Hermogene,  son   maistre  ,   e  dis  li:    «Ben 

20  sapias,  maistre,  qued  aquestz  Jacmes,  que  diz&  afferma  qued 
apostolz  e  sers  es  de  Jesu  Christ  de  Nazaretz,  non  poira 
ja  esser  vencutz  per  home.  Car  el  nom  d'aquel  Jesa   li  ai 

1  Sic, 

'  La  lettre  initiale  de  ce  chapitre  a  été  coupée.  Il  résulte  de  cette  muti- 
lalion  quo-  l^is  sept  dernière  =>  lignes  du  recto  et  du  verso  ont  chacune  perdu 
quelques  lettres,  celles-là  au  commeucemcnti  celles-ci  à  la  fin.  On  a  placé  ici 
entre  crochets  les  lettres  qu'on  a  cru  pouvoir  suppléer. 


LEGENDES  PIEUSES  327 

vistencaussar  diabolz  del  cors  delz  homes  &  li  ai  vist  en- 
luminar  cex,  lebros  li  ai  vist  sanar.  E  cil  neis  que  son  mei 
amie  m'an  dih  verament  qued  eil  li  an  vist  morz  resuscitar.  25 
Et  que  voles  qued  eu  vos  digua  mais?  Totas  las  sanctas 
escripturas(sanctas)  sap  etenmemorialment,  perlas[qualzde]- 
monstra  que  non  es  autre  fil  de  Deu,  ma[s  aicel]  que  li  juzeu 

crucifizeron.  E  non  me  te zo  qued  eu  te  dirai,  e 

crezmon  conse[l] [ad]  elequerliperdon  que  sinon  o  30 

fas  i jamais  li  toa  artz  encantaritz  non 

...  ni  ren  valer.  E  sapias  ben  qued  e  [u  tornarai  m'en]  [46  r°] 
ad  el  e  querrai  li  perdon  e  d'aici  adenant  serai  sos  discipolz.  /> 
CantHermogenus  auzi  aizo,  fon  moût  iratz  e  fez  Phileton  estar 
en  un  lue  per  encantament,  de  guisa  qued  hanc  non  se  poc  35 
moure,  e  dizia  li:  «  Ara  veirem  si  le  tieus  Jacmes  te  poira  des- 
liurar  d'aquestzliamps.  »  Adonx  Philetz  diz  ad  unjoven  home 
seu  :  «  Vai  0  dir  a  Jacme,  qued  aici  me  fa  estar  Hermogenus.  » 
Annet  s'en  la  on  era  sanz  Jacmes  e  comtet  li  de  quai  manera 
era  près  ni  liatz  Philetz.  Can  sainz  Jacmes  0  auzi,  donet  li  al  40 
messatge  un  de  sos  vestirs  e  dis  li  :  «  Ara  prenna  aquest  ves- 
tir  e  digua  :  Dominus  Jésus  Christus  erigït  elizos  et  ipse  solvit 
compeditos.  Nostre  Seinner  Jesu  Christz  dreissa  los  abaisatz 
e  deslia  los  liatz.»  Annet  s'en  le  messatges,  et  en  eis  pas  que 
toquet  Philet  del  drap,  &  el  fon  soutz  delz  liamps  del  encan-  45 
tador,  &  annet  s'en  de  cors  a  saint  Jacme  &  acomenset  escar- 
nir  losencantamenz  d'aquel  maistre  seu  Hermogene.  Hermo- 
genus, can  saup  qued  aici  l'escarnia,  fez  venir  per  encanta- 
ment los  diabolz  e  trames  los  a  saint  Jacme,  e  disluriaAnnas 
&  aduzes  me  Jacme  e  Philetum,  lo  meu  discipol,  e  venjarai  50 
m'en,  per  tal  que  li  mei  discFpol  autre   non  me  escarniscan 
airessi.  »  Anneron  s'en  li  diabol  la  on  era  sainz  Jacmes,  e  vo- 
lavan  sus  per  l'aer,  e  dizian:  «  0  tu,  Jacme,  apostolz  de  Deu, 
aias  merce  de  nos,  car,  davan  que  le  nostres  jornz  sia  ven- 
guz,  nos  cremam*  tuh  per  granz  flammas.»  Respondet  sainz  55 
Jacmes,  e  dis  lur  :  a  Per  que  es  vengut  aisai  a  me  ?  »  Dis-[46  v°]- 
seron  li  diabol:  «  Ermogenus  nos  a  trames  aisai  a  te,  que  te 
&  Philet  aduissessam  ad  el.  Et  en  eis  pas  can  fom  aici,  Tan- 
gelz  de  nostre  Seinnor  nos  ha  liatz  ab  cadenas  de  fuc  et  em 

^  Ms.  cremem. 


3  28  LEGENDES  PIEUSES 

60  mout  fort  tormentat.  »  Respondet  lur  sainz  Jacmes,  e  dis: 
«  El  nom  del  Paire  e  del  Fil  e  del  Saint  Esperit,  vos  desliure 
Tangelz  de  nostre  Seinnor,  que   puscas  tornar  ad  Hermoge- 
nume  senz  naframent  de  son  cors  Fadugas  aici  denant  me 
liât.  »  Ab  atant  torneron  s'en  li  diabol  ad  Hermogenum,  e 
65  Héron  li  las   mas  ab  retz  detras  lo   dos,  &  adduisseron  lo  a 
saint  Jacme,  e  dizian  ad  Hermogenum:  «  Tu  nos  has  trames 
aqui  on  em  tormentat  &  cremat  e  degastat  malament.  »  Ab 
aitan  foron  vengut  denant  saint  Jacme.  E  can  sainz  Jacmes 
lo  vi,  acomenset  a  dir  ad  Hermogenum  :  «  0  tu,hom  folz,  per 
70  que  mantenes  en  paraula  ni  en  razon  Tenemic  de  Tuman  lin- 
natge?  Car  en  aici  con  tu  pregues  lo  diabol  qued  el  trameses 
SOS  angelz  a  me,  per  destruire  e  per  aucire,  aici  los  tenc  eu 
près  e  liaz  q«e  non  lur  don  poder  qued  eil  estendan  en  te 
lur  ira.  »  Li  diabol  cridavan  ades  e  dizian  :«  Jacme,  dona  nos 
75  poder  con  puscam  venjar  en  aquest  los  tiens  tortz  e  lo  crema- 
mentque  nos  a  fah  penre.»  Respondet  sainz  Jacmes,  e  dis: 
«  Philetz,le  seusdiscipolz,  es  aici;  ad  aquel,  pois  que  comandat 
vos  0  avia,    per  que  non  fais  mal?»  Responderon   li  diabol: 
«  Nos  non  possumus  nec  formicam  contingere  que  in  cubiculo  tuo 
80  est.  Nos  non  avem  poder  de   tocar  nuilla  ren   qued  en  ton 
poder  sia,  neis  una  formiga.  »  Adonx  dis  sainz  Jacmes  ad  Phi- 
let:  «  Per  tal  que  tu  e  tuhli  autri  [47  r°]home  del  mont  sapian 
e  conoscan  que  li  leis  el  comandamenz  del  meu  seinnor  Jesu 
Christ  es  qued  hom  renda  ben  per  mal,  tu,  aici  con  elte  liet, 
85  en  aici  lo  deslia  tu.  Et  aici  con  el  te  fez  liar  alz  diabolz  & 
adurre  a  se,  en  aici  lo  desliura  de  la  preison  delz  diabolz.  « 
Vai  emPhiletz  e  desliet  lo.  E  cant  Tac  desliat,  Hermogenus 
estet  mout  himilz  e  mout  vergoinnos.  Adonx  li  dis  sainz  Jac- 
mes :  «  Vai  la  on  te  plazera  souz  e  desliures,  car  non  es  en  la 
90  nostra  disciplina  que  nengus  hom  mal  gratseu  se  convertisca.  » 
Respondet  Hermogenus:  «Senner,  euconoscben  lasiras  del[z] 
diabolz  ;  e  si  tu  non  me  donas  quedhocom  del  tieu  que  port 
essemps  ab  me,  eil  me  penran  &  auciran  me  per  divers  tor- 
menz  eper  diversas  penas.  »  Adonx  li  dis  sainz  Jacmes:  «  Pren 
95  aquest  baston  qued  eu  port,  &  vai  segurament  la  on  te  voiras 
ab  aquest.  »  Vai  penre  Hermogenus  lo  baston  de  Tapostol  & 
annet  s'en  a  son  alberc,  e  près  totz  sos  libres  &  impli  en  ma- 
letas,  0  carguet  en  se  e  sos  discipolz,  et  aportet  los  davan  Ta- 


LEGENDES   PIEUSES  329 

postol,  &acomensetli  a  pregar  q.ue  los  cremessan.  Respon- 
det  sainz  Jacmes  e  dis  :  a  Per  tal  que  le  fums  non  fassa  mal   100 
a  la  gent,  metganre  de  peiras  e  de  plump  intre  en  las  maletas, 
e  fcii  las  getar  intre  en  la  mar.  wFez  o  aici  Hermogenus  co  Ta- 
postolz  lui  comandet;  e  cant  o  ac  fah,  tornet  a  Tapostol  e  val 
se  getar  a  sos  pes  *,  &  acomenset  lo  a  pregar  et  a  dire:  «  0 
tu,  desliuraire  &  capdelaire  de  las  arnaas,  recep  aquest  pêne-   105 
dent,  le  qualz  es  agutz  falz  e  desleialz   entro   aci!  »  Sainz 
Jacmes  dis  :  «  Si  tu  offris  a  nostre  Seirinor  vera  [47  v°]  pe- 
nitencia,  el  te  fara  vera  perdonansa.  »  Respondet  Hermoge- 
nus :  «  Si   eu  non  offris  vera  penitencia  a   nostre  Seinnor, 
mos  codis  ni  mos  libres,  en  qued  eran  escrichas  moutas  pre-   110 
sumptions,  non  agra  eu  getat  en  mar,  ni  ja  non  agra  renegada 
las  artz  del  enemic.  »  Adonx   li  dis  l'apostolzf  «  Vai  per   las 
maisons  de  celz  qued  as  convertiz,e  torna  los  ad  aquel  sein- 
nor a  oui  los  as  toutz;  e  fai  lur  saber  &  entendre  qued  aizo 
es  verai,quelur  avias  dih  quedera  falz;  et  aizo  es  falz,  que    115 
lurfazias  entendre  qued  era  verai.  Las  ydolas  que  tu  adora- 
vas  et  los  devinamenz,  que  tu  pensavas  qued  ellas  te  respon- 
dessan,  tôt  o  frain  &  o  delis.  Las  peccunias  qued  has  de  mala 
obra  conquestadas,  totas  las  despent  en  bonas  obras;  qued 
aici  con  es  agutz  filz  de  diabol,  fazent  sas  obras,  aici  sias  filz    120 
de  Deu,  fazent  las  soas  obras.  Car  el  dona  los  sieus  bens  cada 
jorn  a  celz  que  non  li  son  agradevol,  &  a  celz  que  lo  blasman 
dona,  per  la  gran  misericordia  qued  en  el  es,  dona  lur  viure. 
Car  domenz  que  tu  eras  malz   escontra  Deu,  el,  que  te  pogra 
delir  en  un  moment  &  en  una  hora,  fon  bons  escontra  te,   125 
car  anc  non  te  vole  delir  ;  &  encar  te  sera  plus  bénignes,  si 
te  volz  gequir  que  non  sias  encantaire,  e  li  voles  plazer  per 
bonas  obras.  »  De  totas  aquestas  causas  e  de  moutas  autras 
que  l'apostolz  li  dis  lo  crezet  Hermogenus,  &  acomenset  tan 
fort  esser  perfebg  en  la  temor  de  Deu  que  nostre  Seinner   130 
fazia  pois  moutas  vertutz  per  el. 

Can  li  juzeu  viron  qued  [48  r°]  aquest  encantador  avia  aici 
convertit,  lo  quai  eil  pessavan  que  ja  non  séria  vencutz, 
e  sos  discipolz  e  toz  sos  amix,  li  quai  solian  venir  a  lur  sjna- 
goga,  qued  aici  los  avia  tornatz  a  la  fe  de  Jesu  Christ,  foron   135 

1  VLs.peis,Vi  expoïïHué. 


mnnr.  irar.  *  acr^na  ztul  p«i::iaaia  i.  ia»  rrr  cm  mes  ♦&  Is 

Irt  •»!!  îar'?»*r.  E^t^  .o  pohoi.  i^  leT^^  aiûiit  zrsnz   ûea:i(M^  c 

14*1  iiîweî-îa  i  ii»*i,  -îimnz  ri«»<î  mm  L'iniiizas.  1*3  ieiirii&  lit: m.  adnrre 
jk  lasr  Zii  vie  •ier!a.  K:r'3a  !a  .i^i.  :liiiz  JauL:  e  ,*a3.  fiTO.  ^p^^ 
•»a  n  i!as?ia,  j.  loa^réen  .1  uooiezLseraa  a  <iir  :  i  Pisr  qae 
preftleasi  i«ijid.  jotne  J-^ii.  1*»  ^aa^  foa  «mciâaxz  «acre  laîros  I  • 
Sainz    Jiiîrn»»,   reoLerz    iei  Saut  Esperit.  reâppaaiiec  e  dû  : 

145  «  Aa;aî»,  ?eiaaoc  fîn;r»,  i;-!:  uto.  ■**  *::iji  iei.  llimaigç  «f^AbrsÎLUL: 
I><(ii.'9  proTneii  ^1  20!?rr<î  pair*î  H^ibriaiiai.  aoeii  «îd.  ÛLSOftsen&easa 
l'^r'^tar^a  'ora:3  .as  r^ox.  Abrnh:iniga  hai  ir.â  dlz.  Ismahel  4 
Yia^'î.  Y^maatiri.  a.:  :e  ?a  «rvaa'ij,  Ajar  ol  Tsaa«:  ae  de  n 
moiller  Sarra.  Yîm;i**LZ  -*  «i  m  ai?!*  A-rar  f:roa  secas  de  wt  lo 

:.">j  pep':i*aeai»*!ir.  fAbraji.  E  il.'?  Deii*  i-:  Ai rajam. i^aifti  ea  Tssie 
s*i  r^ia  aç  7*  •* .  L  a.  :  a  i  3*:  a  *i  .•n»»  n  *a.  Ab  raî  iza  iioatre  paire  fan  a^ 
p«*i.ari  ^aux  i-»  I»*îîi.  iaTaa  :Ti-îii  ^L  reoeap*»  La  cîreaitcisKWy 
a.  'Zij-.jTi'*^  lo  *:ip*iî^.  aï  <aape*  aiL  escabaoLea;:  de  la  diriai 
>i.  Am.  ::   i-*  D«'i  foa  ap"eLaz.  aoa  per  la  cirtroaeisoiu  mas 

L55  '17'iz^z  an  Den .  *ii.  iizo  foa  T'îre'aaieiLS  Tue  to^^is  îa^j  genz  '48  f*j 
f-*r :a  ea  ^a  «eai-insa.  E  poii  ^tî-îî  Habraham.-*  foa  amix  de 
E^îa.  car  i*.  crezer.  iea  e*«er.  ç«*r  razoa  'eafsniix  de  Dea^  cel 
l'i^  n  îa  l->  irez.  ■>  Rasçoa  i^rca  L:  jazea:  i  E -loalz  e$  »iniel  que 
aoa  ir*iz  Dei  ?  i  Dis  «aiaz  Ja^ai-r:?  :  c  CeL  '^^le  noa  jrea  qaed 

IrO  ea  [a  ?oa  semeiLaa  her^rtoa  ^o'j,^  ia§  seai.  e  cel  q^ae  non  crei 
Mo^îea.  qae  diz  :  Sn^j.'iht  D'iriiiauLi  €o6û  propà^tam  MO^moiy 
iptHm  auiiietU  tanquam  me  p»>T  ooiniti  quacumque  preeepfrit 
«ro^'-i.  f>ôa«  «rî-fe^ara  «rucre  vis  a^iires  ona  grau  propheta; 
-i'â'^.iiftl  aczire-S'  tôt  caat  to*  diri,  ai'*L  eoa  îfarias  me.  e  lares 

1*55  tôt  oaa  to-»  iomaniara.  D'acaesta  pr^pheta  dis  Ysajas  de  quai 
maaftra  venria:  £'^«  ctr^o  j«  fU^îro  CK-ncpî^t  et  fMÊrùftMiimm  et 
KO^oMtur  nomen  ej^  Hemanuhely  quoi  ett  î/iterpretsiiMm  mobis- 
cum  Devs.  Tec  to«  qae  U  Teri^es  eoacebra  en  son  ventre  & 
enfantara  on  eafant.  d^  le  seas  nomps  sera  appellatz  Hemanael, 

17Q  que  es  interpretaz  qae  Deas  es  ab  nos.  E  Jereos^îas  dis  atressi: 
£cee  Kemiet  rede?nf,tor  tuus,  Jherusalem^  et  A#c  ejms  stgnwn  erii  : 
retr/rum  ocuio^  arperiet^  mrdU  rtddet  auditum  ei  roee  sua  exci-- 
tatdl  m&rtum,  O  ta  Jhenxsaiem.  le  tieas  reiemeire  Tenra,  et 
aizo  er  le  seos  signes  :  el  adubhra  losjoilz  delà  eex,  •  rendra 


LEGENDES  PIEUSES  331 

auziment  alz  sortz,  &  ab  sa  paraula  resuscitara  los  mortz.   175 
D'aquest  adsignet  Ezechiel,  e  dis  o  en  aici  :  Veniet  rex  tuns, 
Syon,  humilis  veaiet  et  restaurabit  te,  0  tu  Sjon,  le  tieus  reis 
venra  himilz  &  restaurara  te.  Danielz  dis  atressi  :  Sicut  filius 
hominis,  ita  veniet  et  ipse  obtinebit  principatus  et  potestates.  Le 
filz  de  la  vergen  venra  &  tenra  en  son  poder  los  princes  e  las   180 
podestas.  David  dis  atressi  per  la  bocca  del  fil  de  Deu  :  Domi- 
nus  dixit  ad  me  :  [49  r®]  Filius  meus  es  tu.  Nostre  Seinner  dis 
a  me  :  Tu  es  le  meus  filz.  E  li  vos  del  paire  dis  del  fil  :  Ipse 
mvocabit  me  :  pater  meus  es  tu.  El  m'apellet,  e  dis  me  :  Tu  es 
le  meus  paire.  Et  ego  primogenitum  ponam  illum  excetsum  pro  185 
regibus  terre.   Et  eu  pausarai    mon  primer  engenrat  davant 
totz  los  reis   de  la  terra.  E  nostre  Seinner  dis  a  David  :  De 
fructu  ventris  tui  ponam  super  sedem  meam.  Del  fruc  de  ton 
ventre  pausarai  sobre  ma  cadera.Delasoa  passion  disEsayas  : 
Sicut  ovis  ad  occisionem  ductus  est,  et  cetera.  Aici  con  fedasera  190 
menatz  per  aucire.  Et  David  dis  en  la  soa  persona:  Foderunt 
manus  meas  et  pedes  meos  [et]  dinumeraverunt  omnia  ossa  mea, 
Eil  han  fos  mas  mas  &  mos  pes  &  an  nombratz  totz  mos  os. 
Ipsi  vero  consideraverunt  et  conspexerunt  me  ;  diviserunt  sibi 
vestimenta  mea,  et  super  vestem  meam  miserunt  sortem,  Eil  se   195 
penseron  entre  lur;  &  esgarderon  me,  &  entre  lur  partiron 
mos  vestimenz,  e  sobre  mon  vestir  meseron  sort.  Et  en  autre 
lue  dis  atressi  David  ;  «  Dederunt  in  escam  meam  fel,  et  in  siti 
mea  potaverunt  meaceto.  Eil  me  doneron  amanjarfel  &  a  beure 
vin  aigre.  De  la  soa  mort  dis  atressi  :  Caro  mea  requiescet  in  200 
spe.  Li  mia  carnz  se  repausara  en  esperansa.  Quoniam  non  dere- 
lingues  animam  meam  in  inferno,  nec  dabis  sanctum  tuum  videre 
corruptionem.  Car  tu  non  laissaras  la  mia  arma  en  enfern,  ni 
laîssaras  vezer  al  tieu   sant  corruption.  Li  vos  del  fil  dis  al 
paire  :  Exurgam  adhuc  et  tecum  sum.  Eu  m'en  pujarai  ancar  205 
a  te,  e  serai  ab  te.  Et  en  autre  lue  :  Propter  miseriam  inopum 
et  gemitum  [49  \°]pauperum  nunc  exurgam,  dicit  Dominus,  Per 
lo  caitiver    delz  sofrachos  &  per  lo  gemement  delz  paupres, 
en  me  levarai,  zo  diz  nostre  Seinner.  De  la  soa  ascention  dis 
li  propheta  :  El  s'en  pujet  en  aut,  &  escaitivet  la  caitivitat.  ^10 
Et  per  aqui  mezeis  dis  :  Et^  ascendit  super  Chérubin  et  volavit. 

i  iAs.E8. 


332  LEGENDES  PIEUSES 

Deus  pujet  sobre  Chérubin  À  volet.  Aona,  li  maire  de  Samu- 
bel,  dis  atresài  :  Dominus  ascendtt  ceios  et  ionat,  Nostre  Sein- 
ner  pujet  sobre  los  celz  <k  tonet.  Â(|uesta8  causas  e  moutas 

215  autras  son  trobadas  en  la  lei,  que  portan  guarentia  de  la  soa 
ascencion.  E  per  zo  car  el  sez  a  la  dextra  del  seu  paire  aoras, 
diz  David  :  Dixit  Dommus  Domino  meo  :  Sede  a  dextris  mets» 
Nostre  Seinner  dis  al  meu  Seinnor  :  Sez  a  la  mia  dextra.  E 
venrajutgartot  lo  segle  perfuc;  per  que  dizli  autrapropheta: 

220  Deus  manifeste  ventet,  Deus  noster,  et  non  silebit.  Deus  veora 
raanifestameiit,  le  nostre  Deus  venra,  e  non  se  quezara.  Ignis 
in  conspeclu  ejus  exardescet,  et  in  circuitu  ejus  tempes  tas  valida. 
Davau  lo  seu  os^^ardament  cremara  fux,  &  tôt  entorn  el  caira 
granz  tempesta.  Tôt  aizo  qued  eu  vos  ai  en  aici  dih  es  adim- 

225  plit  en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  e  zo  que  non  es  ancar 
fah,  zo  er  (er)  ancar  adimplit,  aici  con  es  prophetizat.  Car  li 
propheta  Ysayas  dis:  Surgent  mortaiet  résurgent  qui  in  monur 
mentis  siint.  Li  mort  levarant  sus,  ai  resuscitaran  cil  que  son 
elz  monumenz.  En  aquelia   résurrection,   rendra  a  cada  un 

230  son  guizardon,  aici  con  diz  li  Escriptura  :  Quia  tu  reddes 
unicuique  secundum  * 


[XX] 


[50  r°]  fazemenz  escomou  lo  deleh,  e  le  deleh  la  frequentaciou. 
Aizo  sun  doas  cordas,  scilicet  transgressoria  voluntas  et  transito- 
ria  voluptaSf  ab  las  qualz  cobezeza  tira  lo  mesqui  de  peccador 

5  &  enlassa.  Deprecemur  tgitur  Dominum  ut  nos  ab  istis  funibus 
illaqueare  non  permittat,  Preguem  nostre  Sennor  que  per  la 
soa  pietat  non  nos  gequa  enlassar  en  aquestas  cordas,  ab  las 
qualz  nos  fossem  tyrat  ad  aquestas  nossas  &  ad  aquest  conduh 
del  enfernal  espos,  ubi  erit  fletus  et  stridor  dentium.  Mas  el  nos 

10  fassa  intrar  ab  las  vergenas  sapias  a  las  seuas  nossas.  Ubi  erit 
gaudium  sine  fine  in  secula  seculorum.  Amen, 

1  Lacune  de  quatre  feuillets.  Voir  l'iatroduction,  p.  213. 


LEGENDES  PIEUSES  333 

[XXI] 
SANCTI  JOHANNIS   EVANGELISTE 

In  illo  tempore  ïgitur,  cum  sancti  apostoU  Domini  et  Salva- 
toris  nostri  Jesu  Christi  cetenque  discipuli  ad  predicandum 
verbum  Dei  per  singulas  quasque  provincias  orbis  terre  dirigun- 
tur.  En  aicel  temps,  quan  nostre  Senner  trames  sos  apostolz 
per  lo  mont,  per  predicar  la  soa  paraula,  elegi  saint  Johan  5 
apostol  &  evangelista,  fil  de  Zebedeu,  fraire  de  saint  Jacme, 
le  qualz  era  vergens.  Aquest  amava  mais  nostre  Senner  delz 
autres  discipolz,  &  Tadormi  desobre  son  pegh,  &  aqui  bec  de 
la  sancta  font  de  Tavangeli  de  nostre  Seinnor.  Aquest  sainz 
Johanz,  domenz  qued  an-[50  v°]-nava  predicantravangeli  de  10 
nostre  Seinnor  [50  v°]  Jesu  Christ  en  la  terra  d'Asia,  venc  en 
una  ciutat  qued  avia  nom  Effesum  ;  &  aqui  predicava  la  pa- 
raula de  Deu.  Venc  a  saber  al  seinnor  de  la  vila  e  fez  lo  penre; 
e  dizia  li  que  crezes  la  lei  de  l'emperador  e  tolgues  se  de  la 
prédication  d'aquel  Jesu  Christ,  qued  el  annava  annunciant.  15 
Sainz  Johanz  respondet  e  dis  :  «  Oportet  obedh^e  Deo  magis 
quant  hominibus,  Meilz  es  qued  hom  obedisca  a  Deu  qued  alz 
homes.  Et  eu,  diz  el,  non  reneguarai  mon  sennor  Jesu  Christ, 
ni  me  laissarai  de  la  prédication,  entre  qued  aia  consummat 
lo  cors  qued  eu  ai  acomensat.  »  Cant  aquel  bailes  de  sa  vila  20 
auzi  aizo,  fez  escalfar  unaplenachaudera  d'oli,  &,  domenz  que 
buillia,  fez  lo  gitar  intre.  El  estet  aici  sans  et  salz,  en  Toli, 
con  si  fons  aigua  en  que  se  bainnes.  Aquel  bailles,  quan  vi 
aquesta  meravilla,  estet  esperduz,  e  fez  Ten  getar  san  e  salv, 
e  vole  lo  far  estar  franc  ;  mas  temps  lo  mandament  de  Tempe-  25 
rador  e  non  vole  annar  contra  la  soa  lei.  Mas  comandet  qued 
hom  lo  menés  en  eisseil,  en  una  isla  qued  era  appellada  Path- 
mos.  En  la  quai  el  escrius  Apoca-[51  r°]-lipsin,  e  quan  Tac  es- 
crih,  trames  lo  a  las  set  gleisas,  qued  avia  bastit  en  Asia. 

Primerament  i  escrius  aici  con  avia  vist  lo  fil  de  la  ver-  30 
gêna,  sedent  en  sa  cadera,  &  vint  &  quatre  veils  &  quatre  bes- 
tias  qued  estavan  denan  el.  Aquellas  quatre  bestiassignifiavan 
las  quatre  evangelistas,  e  non  vos  direm  Testoriaminga  aoras, 
car  trop  serian  longas  novas.  Pois  escrius  los   dotzc  milia 


334  LEGENDES  PIEUSES 

35  tribps  del[z]  sers  de  Deo,  qued  eran  entreseinna[t]  elzfronz;  e 
pois  con  li  set  angel  canteron  cada  us  ab  un  corn,  si  que  tem- 
pesta,  e  fox,  e  sanx  en  cadia  en  terra.  Aqui  vicon  li  tersapartz 
de  la  terra  dévia  cremar,  e  li  tersa  partz  de  la  mar  esdevenia 
sanx,  e  con  li  tersa  partz  de  las  estelas  perdian  lur  clartat. 

40  Aqui  vi  e  conoc  de  quai  manera  eissia  fums  del  pos  d^eufern, 
&  con  le  fumps  engenravaligostas.  FoUas  ligostas  aviaen  ai- 
talz;  certe  nichil  aliudnisi  demones;  nulla  autra  res  non  era 
mas  diabol;  &  aquestas  ligostas  avian  poder  de  nafrar  totzcels 
que  non  eran  seinnat  del  sanc  de  Tainnel  en  lur  fronz.  Aizo 

45  deu  tôt  esdevenir  &  esdevenra  a  la  fin  del  segle. 

Li  libre  qued  vos  avem  dih  desobre,  era  cada  uns  [51  v*J  . 
claus  de  set  sennalz;  &  en  aquelz  libres  era  escrih  le  caitivers, 
e  li  mortz,  e  li  clamors  delz  aucis,  e  li  fins  del  segle.  Tôt  aizo 
escrius  sainz  Jobanz  aici  con  o  avia  vist.  Et  escrius  con  sainz 

50  Miquelz  se  combatet ab  lo  serpent,  zo  es  ab  Lucifer*,  le  qualz 
era  le  plus  autz  angelz  el  plus  belz  de  totz  los  autres,  e  con 
esdevenc  aici  fers  &  aici  espautevolz,  per  Torguil  que  fez.  Car 
can  Deus  Tac  fah  aici  bel  &  aici  precions,  &  el  se  sentit  tan 
autz  e  tan  poderos,  en  la  gloria,  dis  a  se  meis  :  «  Ponam  sedem 

55  meam  ad  aquilonem  et  similis  ero  Altissimo.  Eu  pausarai  ma 
cadera  el  plus  aut  lue  del  cel,  e  serai  semblanz  al  Autisme.» 
Per  aquesta  paraula,  aici  con  era  plus  belz,  esdevenc  lag  & 
horribles  &  dragos  granz  &  antix  ;  &  sanz  Miquels  getet  lo  del 
cel  a  la  terra.  Tôt  aizo  escrius  en  son  libre,  e  la  figura  de 

60  TAntechrist  que  venra  a  la  fin  del  [segle],  lo  quai  afiguraqued 
aura  set  caps  del  règne  &  des  corns  de  poder.  Si  eu  aici  con 
dih  vos  ai  vos  volia  aplanar  Testoria,  non  séria  oi  en  aquest 
jorn  dicha.  Pois  escris  Tesdeviniment  del  juizi,  e  la  mort  de 
l'Antéchrist,  el  gran  torment  del  diabol  que  sofrira  en  [52  r*} 

65  enfern,  ab  aquelz  que  per  lur  peccat  seran  sei  parzoner,  e  con 
resuscitarem  tuh,  e  pois  con  Deus  fara  cel  nou  &  terra  nova, 
e  con  nostre  Senner  faralojutjament,  e  con  se  voira  demons- 
trar  aici  con  li  juzeu  lo  meseron  en  la  cros.  Tôt  aizo  escris 
sainz  Johanz  en  aquella  ysla  on  estava  eissillatz. 

70  Pois  esdevenc  que  le  consolatz  de  Roma  aucis  Temperador 
de  Roma,  Domicia  qued  avia  nom,  le  calzdecassavatotz  aioelz 

«  Ms.  lutifer. 


LEGENDES  PIEUSES  335 

que  predicavan  lo  nom  de  Jesu  Christ.  Car  toUia  lur  drechu- 
ras  al  consolât,  auciseronlo.  E  tuh  li  près  qued  el  ténia  nisei 
bâillon  par  lo  mon  foron  desliure  ;  e  li  eissillat  foron  restaurât 
en  lur  pais.  Sainz  Johanz  &  tuh  aquil  qued  eran  ab  el  eissillat  75 
en  la  isla  de  Pathmos  s'en  torneron  en  la  ciutat  d'Effesum. 
En  aquella  ciutat  prediquet  lo  pobol  ;  e  cant  Tac  tôt  tornat  a 
la  fen  de  Jesu  Christ,  li  evesque  qued  el  avia  establit  en  Asia 
li  pregueron  qued  escriuses  los  fah  de  Jesu  Christ  e  que  par- 
les esperitalment,  car  li  autri  evangeliste  avian  escrih  los  fah  80 
de  Jesu  Christ  carnalment.  Adonx  sainz  Johanz  acomensetson 
avangeli,  e  dis  :  «  In  prmcipio  erat  verbum,  »  Aizo  fon  Taco- 
mensamenz  [52  v°]  de  son  avangeli. 

Aprop  lonc  temps,  can  sainz  Johanz  ac  visent  lonc  temps, 
venc  nostre  Seinner*  &  dis  li  :  «  Veniyquia  tempus  est  ut  epuleris  85 
in  convivio  meo  cum  fratribus  tuis,  Venen,  car  temps  es  oimais 
que  tu  manjes  el  meu  conduh  ab  tos  fraires.  »  Sainz  johanz, 
cant  auzi  la  paraula,  ac  gran  gauh.  E  can  venc  lo  ditmenegue 
aprop,  el  fez  ajostar  tôt  lo  pobol  de  la  ciutat  d'EfFesum  a  la 
gleiza,  e  prediquet  los,  &  amonestet  los,  e  diz  lur  que  nostre  90 
Senner  Tavia  appellat,  &  qued  el  non  podia  plus  estar  en 
aquest  segle.  El  cant  ac  dig  aizo,  totz  le  pobolz  acomenset  a 
plorar  &  ac  gran  pietat  del  seu  departiment;  car  en  el  avian 
tan  bon  paire  &  tan  bon  capdel  de  lur  armas.  Adonx  sainz 
Johanz  acomenset  a  pregar  nostre  Seinnor  &  a  dire  :  «  Sen-  95 
ner,  tu  qui  es  solz  salvaire,  le  qualz  as  conquestat  aquest 
pobol  per  la  gloriosa  passion  del  teu  fil,  que  perman  en  las 
toas  obras,  tu,  Senner,  lo  capdella  totas  horas,  el  garda  de 
totz  malz,  &  voilla  qued  eil  permainnan  elz  tiens  mandamenz. 
Seinner,  autz  la  mia  preguera&  esdreisa  aquest  pobol  teu.  ».  100 

Cant  sainz  Johanz  ac  aici  prédicat  e  [53  r°]  dih  tôt  aizo,  fez 
se  cumenegar,  e  puis  cumeneguet  tôt  lo  pobol  ;  e  fez  far  sa 
sopoutura  davanTautar,  e  davan  lo  pobol  colguetse  intre  totz 
vius,  e  fez  se  cobrir;  et  en  eis  pas  li  sopoutura  fon  plena  de 
nianna  que  fon  cais  farina,  e  moût  granz  claritaz  resplandi  105 
laintre  en  la  gleisa,  de  guisa  qued  anc  nuilz  hom  non  poc  es- 
tar en  pes.  Et  aici  sainz  Johanz  transpasset  d^aquest  segle. 
Aizo  es  aquel  sainz  Johanz  del  quai  nostre  Senner  avia  dih 

i   Ms.  .s. 


336  LÉGENDES    PIEUSES 

a  saint  Peire.  «  Sic  eum  volo  manere  quoadusque  veniam.  Tu 
110  vero,  sequere  me.  Eu  voil  qued  aquest  estia  en  carn  entro  qued 
eu  lo  vengua  querre  ;  mas  tu  penras  marture  per  me,  aici  con 
eu  fiz  per  tu.  »  Ara  preguem  nostre  sennor  saint  Johan,  que 
per  la  soa  merce  &  per  la  soa  pietat,  pregue  nostre  Sennor 
qued  el  nos  lais  far  en  aquest  segle  aquellas  obras  per  que 
115  puscam  aver  la  soa  gloria  perpétuai.  Quod  ipse  prestare  digne- 
tur,  qui  vivit  et  régnât, 

XXII 

VITA  SANCTI  SILVESTRl,  PAPE  ET  CONFESSORIS 

Silvester  igitur,  nrbis  Rome  episcopus,  cum  essel  infantulus,  a 
vidua  matre  sua,  Justina  nominey  traditus  esc  Cinno  presôytero, 
Cnjus  [53  v°]  et  vitam  iminitatus  et  mores  ad  summum  apicem 
Chris tiane  religionis  attigit.  Factus  juvenis  (juvenis),  hospitali- 

5  tatem  tota  nnimi  diligent i a  exhibebat,  Can  sainz  Selvestres,  que 
fon  apostolis  de  Roma,  era  enfans,  sos  paire  mori,  &  sa  maire 
remas,  e  comandet  lo  per  esseinnar  ad  un  bon  home  preveire, 
qued  avia  nom  Cjrin.  Aquest  preire  essennet  lo  &  estruis  lo 
de  bonas  costumnas  e  de  bona  vida  e  de  bons  fahg. 

10  Esdevenc  qued,  en  aquel  temps  que  fon  ja  talz  qued  granz 
&  avengutz  fon,  venc  en  aquella  ciutat  on  el  era  uns  bons  hom, 
qued  avia  nom  Timotieu  ;  et  era  venguz  de  la  terra  d'outra 
mar,  d'Antiocha,  e  predicava  la  fen  de  Jesu  Christ.  En  aquelz 
temps  era  granz  persécutions  delz  messatges  de  Deu,que  neis 

15  li  evesque  non  los  auzavan  recebre  en  lur  alberx.  Sainz  Sal- 
vestres  non  laisset,  per  nuilla  paor  ni  per  nuillatemensa,  qued 
aquest  non  receupes  en  son  alberc  <k  que  la  soa  bona  vida  e  la 
soa  predicatio  non  lauzez  e  non  manifestes  al  pobol.  Aquest  Ti- 
motheus  prediquet  en  aquesta  [54  r°]  vila  un  au  &  très  mes  la 

20  fen  e  le  veritat  de  nostre  Sennor  Jesu  Christ,  &  converti  moutz 
pobolz  e  montas  genz. 

Venc  a  saber  al  veguier  de  la  vila  qued  aquest  Timotheus 
predicava  e  convertia  aici  las  gens.  Trames  la  messatges,  e 
fez  lo  penre  e  mètre  en  carcer  ;  e  fez  lo  tormentar  &  destrein- 

25  ner,  que  se  tolgues  d'aquella  prédication  e  se  tornes  a  lur 
deus  e  sacriâzes  a  las  jdolas.  El,  aici  con  fortz  messatges  de 


LEGENDES  PIEUSES  337 

Deu,  estet  ferms  en  fen,  e  per  nuil  torment  quedeilli  fezessan 
non  lo  pogron  moure  de  la  vera  fen  de  Jesu  Christ.  Cant  le 
bailles  o  vi,  fez  li  taillar  sa  testa.  Cant  venc  la  nogh,  sainz 
Silvestre,  ab  totz  los  christians  qued  el  i  poc  aver,  lo  30 
portet  a  sa  maison,  e  pois  fez  o  saber  a  l'evesque  Melchiadem, 
e  preguet  li  qued  i  vengucs.  L'evesques  canto  auzi,  venc  i  ab 
toz  SOS  preveires  &  ab  sos  clergues,  e  sagret  son  martir. 
Pois  preguet  Tevesqne  unabona  fenaena,  una  christiana  qued 
avia  non  Therone,  que  li  laisses  lo  cors,  e  sebeliria  lo  en  son  35 
ortjuxta  la  sepultura  de  saint  Paul.  Cant  li  Christian  qued 
eran  aqui  auziron  aizo,  plac  [54  v°]  moût  a  totz,  &  sebeliron 
aqui  lo  cors  moût  honestament;  puis  us  cada  uns  tornet  a  sou 
alberc.  Tarquinius,  aquest  veguiers,  comandet  e  fez  penre 
saint  Silvestre,  quar  el  se  pensava  qued  el  agues  agut  aver  de  40 
saint  Thimothieu,  e  fez  lo  venir  davan  se  :  «  Si  tu  non  me 
rendes  Taver  d'aquest  escumeneguat,  cui  tu  albergavas,  eu  te 
farai  tormentar  moût  aigrament.  »  Sainz  Salvestres  dis  li,  e 
monstret  li  per  mout[z]  guarenz  qued  el  non  avia  agut  d'el 
dener  ni  mezailla.  Cant  Tarquinius 0  auzi,  dizli  que,  si  non  lais-  45 
sava  aquella  fen  christiana,  e  que  [non]  sacrifizes  a  lasjdolas, 
qued  el  lofariamorira  greu  mort.  Sainz  Salvestres  respondet, 
e  dis  li:«  Tu,  mesqui,  sapias  lo  que  seras  tormentatz  en  dura- 
ble torment,  si  non  creses  en  nostre  Sennor  Jesu  Christ.  » 
Adonx  fon  Iratz  Tarquinius  e  fez  lo  mètre  en  carcer,  e  dis  li  :  50 
«  A  greus  tormenz  te  farai  ades  morir.  »  Sainz  Salvestres 
respondet,  e  dis  :  «  Eu  te  parlarai  per  la  sentencia  de  l'avan- 
geli  :  StuHe,  liac  nocte  auferetur  anima  tua  a  le,  ut  tormentar 
que  christianis  temporalia  ivrogasti,  tu  eterna  recipias,  et  inter 
ipsa  tormenta  hune  esse  Deum^  quem  christiani  colimus,  reco-  55 
ffnos-[55  v°]'Cas,  Fol,  en  aquesfca  noh  te  sera  touta  li  toa 
arma,  qued  aquelz  tormenz  temporalz*  que  tu  fas  alz  christians, 
que  tu  lo[s]  recepias  lai  durablament;  e  domenz  que  tu  seras  en 
aquelz  tormens  tu  reconoisseras  qued  aquest  es  verais  Deus 
lo  quai  nos  au  tri  Christian  colem  e  crezem.  Et  adonx  prova-  60 
ras  e  conoisseras  qued  aquest  Thimotheus  non  es  escumene- 
guatz,  aici  con  tu  Fapellas  ;  anz  es  martyr  de  Deu.  »  Ab  ai  tan 
el  fez   liar  saint  Salvestre  &  mètre  en  la  carcer;  &  el  annet 

*  Ms.  tempérais  (p  simplement  barré). 

23 


33?  LEGENDES   PIEUSES 

manjar.  E  dorn-ssz    -[nei   e'.  nLinJava,  li  renjansa  de  Deu  fon 
^>5  rriani  testai:!.  Car  ii:i  ■:::i  sîi:.z  Si-vestres  li  a  via  dih,  uns  os 

entraniverà-E:'.  *;  en  sa  j  j.î,  le  'lalz  per  :milla  art  de  metge  non 
Ji  pO'i  ei-er  irah.  E:  C'y  "et  à-?  ;?  aque-la  hora,  ^  sufferc  moût 
grarj  'îoior  entro  a  la  ri^e;  \  non:  et  a  ionx»  segon  la  sentencia 
do  saint  Salvêatre,  qued  el  li  avia  dih,  transpasset  del  segle. 
70  K  la  primera  hora  del  Jorn,  eu  la  quai  el  avia  menassat  ad 
aucir  saint  Salvestre,  el  fou  portatz  a  la  sopoutura  e  fon 
scbeliz. 

Âdonx  annet  sainz  Melchiades  Tevesques  a  la  carcer,  ab  totz 
lo.s  christiaus,  6i  traisseron  en  suiut  Salvestre  ab  gran  gauh 
75  6i  ab  gran   [55  v*^  houor.  Vengron  denant  el  tuh  aquil  que 
pcr  lo  rnandaïuent  de  Tarquinii  li  avian  fah  mal,  e  geteron  se 
a  gonoillos  davau  sos  pe?:,  e  pregavan  li  que  per  la  soa  merce 
pregues   nostre   Sennor    per  elz,  qued  aitalz  causa  non  lur 
esdevengiies,  quo  era  esdevengut  a  Tarquini. 
80      Sainz  Salvestres,  can  fon  d'état  de    xxxa  anz,  Melchades 
Tevesfqjues  en  fez  diaque.  Toz  los  autres  clergues  passavade 
totas  bonas  costumnas.  Pois  non  triguet  guaire  que  fon  ador- 
denatz  a  preveire.  Adonx  li  donet  nostre  Senner  tan  gran  gra- 
cia, qued  totz  le  pobolz  can  lo  vezia  n'avia  gauh,  e  dizian  tuh: 
«5  «  Aquest  es  sers  de  Deu.  »  Fî^at  aulem  aspectu  angeltcus,  set*- 
moue  nilldus,  opère  saiictus,  corpore    integet*,  ingénia  oplimus, 
consiiio  magnuSy  fide  catkolicus,  spe  pacientissimus ,  caritatedif- 
fufsjsus.  Esgart  avia  d'angol,  en  paraula  era  resplandens,  en 
obra  era  sainz,  en  cors  era  entiers,  per  engien  era  bons,  en 
\)i)  conseil  era  granz,  en  fez  era  catholicus,  en  esperansa  sapis, 
en  cîiritat  larx.   Mas  car  lioin  non  pot  dir  totas  las    bonas 
costumas  (lucd  el  avia  en  se,  diguam  en  una  partida. 

h]s(lovenc    que  sainz   Melchiades  Tevesques  mori,  e  trans- 
passet d'aquost  segle  a  nostre  Semnor  * 

\)Ty  [5()  r°  J  la  salut  dclz  homes  ;  e  per  lo  poder  del  seu  nom,  le 
diabolz,  aquest  diabolz,  fos  confondutz. 

Can  venc  lo   torz  jorn,   Tapostolz  sainz  Peire   appareca 

saint  Sahvstro,  o  dis  li  :  «  Pren  aquestz  très  preveires  ab  te, 

Thooiloruni  &  Dionisium  &  Kelicissimum  &  aquest  dos  dia- 

UM)  quos,  Ilonoratum  «is:  llomanum  ;  «k  enanz  quedescendas  aldra- 

»  l.aouniMl'iin  ftHiill«-l.  Voir  ci-dessu?,  p,  213. 


LEGENDES  PIEUSES  339 

gon,  fa  sacriûzî  a  Deu  e  canta  messa.  E  pois  cant  auras  can- 
tat,  penra[s]  aquest  cadenat,  e  venras  laintre  &  atrobaras  la 
luga  on  jatz  le  dragos;  &  ha  i  portas  de  coure,  et  en  aquellas 
portas  ha  anelz.  Ë  cant  i  seras,  clauras  las  portas,  e  passaras 
la  cadena  per  aquelz  hanelz,  e  pois  pestellaras  la  ab  aquesta  105 
clau,  e  diras  :  «  Aquestas  portas  non  sian  mais  ubertas  entro 
al  jorn  del  juizi.  »  Pois  pren  la  clau,  e  sotterra  la  aqui  on  te 
voiras.  Levet  sus  Tapostolis,  e  fez  o  aici  con  sainz  Peire 
lui  ac  dihen  vezion.Le  serpenz  estetpois  enclausetotz  temps 
mais  la  estera  entro  al  jorn  del  juizi.  Can  venc  a  cap  de  Tan,  110 
li  pagan  agron  prohat  que  le  serpenz  era  vencuz  e  crezeron 
en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  e  feron  se  batejar. 

En  aquel  temps  Constantis  Temperaire  reinnava,  e  trames 
SOS  messatges  per  totas  las  terras  que  prezes  hom  los  cristians, 
per  tôt  aqui  on  hom  los  trobaria,  e  qued  los  fezes  hom  sacrifiar  1 15 
mal  grat  d*elz  a  las  ydolas  ;  e  comandet  que  cil  que  non  volrian 
sacriôar  fossan  tormentat  ;  e  fez  n'aucir  tanz  per  aquest  co- 
mandamenz  que  non  fon  nombres  ;  e  per  aizo  nostre  Seinner 
feri  lo  de  lebrosia.  E  per  aizo  sainz  Salvestres  escondet  se  ab 
totz  los  sieus  sus  [56  v**]  en  un  pug,  en  una  balma. 

D'aquella  lebrosia   non  poc    garir  remperaire,per  nuilla  120 
medicina  que  metges  li  fezes,  ni  per  nuilla  art  d'encantador. 
Can  venc  tôt  a  derrier,  li  evesque  d'aquest  capitoli  doneron 
li  aital  conseil  que  fezes  far   una   piscina  laintre  el  mehg  del 
capitoli,  e  que  fezes  [aucire]  tant  d'efanz  vergens  que  delsanc 
fos  plena  aquil  piscina,  e  pois  qued  hom  Tescalfes,  e  que  se    125 
bainnes  inz;'  &  en  eis  pas  séria  sanatz  e  gueritz.  Et  ab  aitan 
l'emperaire  fez  penre  totz  los  enfanz  qued  hom  poc  trobar  que 
tetessan.  Cant  venc  ad  aquel  jorn  qued  hom  hac  establit  per 
aucir  los  enfanz  e  que  l'emperaire  se  dec  bainnar  el  sanc,  el 
s'en  annava  al  palais,  e  domenz  qued  el  s'ennanava,  e  lo  li  venc    130 
encontra  una  granz  compainna  de  femenas  ;  &  ac  n'i  tant  que 
non  fon  nombres  ;  e  vengron  tiran  lur  pelz,  &  escoissendent 
lur  caras  e  lur  pehg  e  tôt  cant  agron,  e  ploreron  e  crideron 
tan  fort  qued  aco  fon  eissit  de  tota  auzida.  L'emperaire  e  tuh 
li  rie  home  qued  eran  ab  el,  can  viron  aizo,  agron  gran  fereza,    135 
&  acomenset  a  demandar  l'emperaire  qued   era  aizo.  Dis  li 
hom  qued  aco  eran  las   maires  delz  enfanz  qued  hom  dévia 
aucire,  del  cui  sanc  hom  dévia  implir  la  piscina.  L'emperaire, 


340  LEGENDES   PIEUSES 

140  cant  o  auzi,  ac  gran  fereza  e  refuget,  e  dis  que  ja  aqaist 
fellonia  non  séria  fâcha,  e  dis  qued  aitanz  peccatz  anria  fah 
vers  Deu,  quanz  enfanz  anria  mortz.  Et  aici  II  pietatz  del 
emperador  venquet  la  crueleza  d'aquelz  eyesques  d^aqnella 
lei.  E  can  fon    al  palais,  appellet  totz  celz  [57r**]  qued  eran 

145  aqui,  e  dis  lur:  «  Aujas  me  trastuh  aici  co  es.  Per  que  auciria 
eu  los  etifanz  que  mal  non  me  meron  ni  peccan  de  ma  ma- 
lautia?  Ni  per  que  escamparai  lo  sanc  del  non  nozent  pobol 
per  la  mia  salut?  Ja  es  lo  nostra  leis,  que,  cant  nos  em  en 
batailla  ab  nostres  ennemix,  que   totz  hom   qued  i  auciza* 

150  enfant  de  nostres  enemix  deu  perdre  la  testa.  E  pois  que  nos- 
tra leis  veda  qued  hom  non  auciza  los  enfanz  de  nostres  ene- 
mix,  ben  sembla  que  plus  fort  déjà  esser  delz  nostres  tengut. 
E  si  nos  autri,  de  oui  eisson  las  leis,  las  frainniam,  deuriam 
esser  colpavol  e  subjet  a  la  lei.  » 

155  Can  Tcmperaire  lur  ac  dih  aquestas  paraulas  et  montas  au- 
tras,  e  moût  granz  pobolz  ora  vengutz  aqui  par  vezer  aqaest 
marturiameiit,  dis  l'emperaire  :  «  Redda  hom  los  enfanz  a  las 
maires  &  a  cada  una  doue  hom  gran  aver,  qued,  aici  coneran 
vengudas  iradas  |)cr  la  mort  que  lur  enfant  devian  recebre, 

160  aici  s'en  tornonalcgras  e  pagadas  per  lur  enfanz  e  perTaver.» 
Et  aici  fez  rendre  los  enfanz  a  las  maires  ab  gran  aver  aoada 
una. 

Can  venc  la  nohg  de  seguentre,  el  vi  en  vision  qued  esteron 
denant  el  dui  apostol  e  disseron  li  ;  «  Nos  dui  em  Paire  & 

165  Paulz.  Car  tu  non  as  volgut  far  tan  gran  maleza,  qued  as 
tempsut  escampar  lo  sanc  delz  non  nozenz,  nostre  Seinner 
Jesu  Christ  nos  ha  trames  aici  a  te,  que  te  donem  conseil  de 
recobrar  sanitat.  Et  aujas  zo  que  nos  te  direm.  Salvestres 
Tapostolis  s'en  es  fugitz,  per  las  toas  [57  v**]  persécutions^  à 

170  esta  rescondutz  ab  totz  sos  clergu«s  en  una  cava,  sus  el  puhg 
de  Syrap.  Tramet  lo  querre.  Ecant  er  vengutz,  aqueltemons* 
trara  la  piscinade  Deu,  en  la  quai  can  te  seras  plu mbiatz  très 
vez,  &  auras  rennegat  las  jdolas  e  croiras  en  nostre  Seinnor 
Jesu  Christ,  tu  recebras  sanitat  de  ton  cors  e  tei  peccat  te  se- 

175  ran  perdonat.  » 

*  Après  ce  mof,  la  fm  de  la  ligne,  une  douzaine  de  lettres  environ,  a  été 
grattée.  On  n'en  dislingue  plus  rien. 


I 


LEGENDES   PIEUSES  341 

Can  Temperaire  reisidet,  trames  cavaliers  al  puh g  deSjrap, 
on  sainz  Salvestres  estava  en  oration.  Can  sainz  Salvestres  vi 
los  cavaliers,  crezet  que  fos  vengutz  a  la  corona  de  marturi, 
&  acomenset  a  dir  a  sos  clergues  :  «  Ecce  nunc  tempus  accep- 
tabile  ;  ecce  nunc  dies  salutis.  Vec  vos  lo  temps  acceptable  e  180 
vec  vos  los  dias  de  salut.  Nostre  Seinner  vai  per  aqui  mezeis 
entre  los  homes  ;  e,  si  nengus  lo  vol  seguir,  denegue  se  me- 
zeis e  leu  sa  cros,  e  seguia  nostre  Seinnor  I  »  E  cant  ac  fâ- 
cha sa  oration,  près  pas  de  totz.  E  vec  vos  que  li  cavalier  foron 
vengut,  que  li  disseron  que  J'eraperaire  lo  demandava.  185 

Ab  aitan  sainz  Salvestres  s'en  acomensa  ad  annar,  e  sei 
clergue  acomenseron  lo  a  seguir,  xxx.  preveire  qued  iavia& 
cinc  diaque,  ab  autra  gran  compainna  de  clergues  ;  e  dizian 
que  maisamavan  recebre  mortab  el  que  visquessan  en  aquest 
segle  senz  el.  Et  en  aici  venc  el  palais  de  Letras.  Can  fon  aqui,  190 
annethom  dira  Temperador  que  Salvestres  era  venguz  &  es- 
tava a  la  porta  ab  sos  clergues.  Comandet  Teraperaire  qued 
hom  lo  laisses  intrar  ab  très  preveires  ck  ab  dos  diaques.  E 
can  fon  intratz  e  Temperaire  lo  vi,  [58  1°]  &  el  se  leva  ben 
tost,  e  va  li  encontra,  e  saludet  lo  primers,  e  dis  :  «  Ben  sias  195 
tu  vengutz,  car  gran  gauh  ai  car  eu  te  veih.  »  Respondet 
sanz  Salvestres  :  «  Pas  e  Victoria  te  sia  donada  de  cel  !  »  Can 
l'emperaire  Tac  aici  bonament  receuput,  comtet  li  tôt  con  li 
era  révélât,  &  pois  acomenset  li  a  demandar  quai  eran  aquil 
deu  qued  aici  Tavian  visitât.  Respondet  sainz  Salvestres,  e  200 
dis  li  ;  «  Uns  Deus  es  totz  solz,  lo  quai  nos  colem,  que  fez  tôt 
cant  es.  Sanz  Peire  e  sainz  Paulz,  que  te  son  apparegut,  non 
son  miga  deu,  mas  sers  de  Deu  son  ;  e  per  la  fez  qued  agron, 
plagron  tant  a  nostre  Seinnor  qued  el  vole  que  mais  agues- 
san  de  sancteza  que  li  autri;  e  son  primer  el  nombre  delzapos-  205 
tolz  e  de  totz  los  autres  sainz,  e  primerament  prediqueron  la 
lei  de  Deu  a  las  genz  e  sancta  gleisa  près  comensament 
d'elz  ;  e  cant  agron  complit  tôt  lur  offici  de  Tapostolat,  &  eil 
transpasseron  d'aquest  segle  ab  corona  de  martiri,  &  son  ao- 
ras  amie  del  poderos  Deu.  »  210 

Can  l'emperaire  auziaizo,  fon  li  moût  bon,  &preguet  li  que 
si  eL  avia  en  la  soa  gleisa  las  images  d'aques  penchas  eu  al- 
cun  lue,  que  las  li  monstres,  qued  el  pogues  conoisser  e  sa- 
ber  si  aco  eran  aquil  que  li  eran  apparegut.  Adonx  l'apostolis 


3(3  LEGENDES  PIEUSES 

215  comandet  a  un  de  sos  diaques  qued  annes  qnerre  las  images 
delz  apostolz.  E  cant  las  ac  aportadas.  e  Temperaire  las  vi, 
acomenset  adir  :  a  Ben  saicertament  qned  aizoeslisemblansa 
d'aquelz  que  m'aparegron  en  vezion.  Aquist  me  disseron  : 
«  Tramet  querre  Salves-[58  V^J-tre  Tapostoli,  &  aquel  te  mons- 

220  trara  la  piscina  de  Deu.  E  cant  te  seras  lavatz  en  aquella  pis- 
cina,  e  tu  seras  sanatz  de  ta  malautia.  0  RespondetsaînzSal- 
vestres,  e  dis  ;  a  Auz  me,  reis,  e  demanda  la  piscina  e  ]a 
quer,  qued  es  necessaria  a  la  toa  salut,  per  aital  manera:  pri- 
merament  crez  Jesu  Christ,  lo  âl  de  Deu,  que  par  aîzo  veno 

225  del  cel,  qued  en  aquesta  piscina  se  manifestes  a  celz  que  Jo 
creirian.  d  Respondet  Constantis,  e  dis  :  «  Si  eu  non  o  crezes, 
ja  non  te  agra  trames  querre.»  Adonx  li  dis  sainz  Salvestres; 
((Ara  tota  aquesta  senmana  dejuna,  &  toi  aquest(z)  vestir  de 
polpra,  Si  vest  un  celitz,  &  non  escas  de  ta  cambra,  e  prega 

230  ades  nostre  Seinnor  ;  e  manifesta  lo  peccat  e  la  error  en  qued 
has  estât,  car  perseguias  los  christians  et  Jesu  Christ,  lo  Sal- 
vador de  las  armas.  Los  temples  comanda  qued  hom  clausa,e 
qued  hom  non  sacrifîze  a  las  ydolas.  Totz  los  preisoners  e 
totz  celz  que  tens  en  eissil,  o  de  calque  manera  sian  en  ta 

235  preison,  tu  los  desliura,  &  per  tota  aquesta  senmana  fa  gran 
aliflorna .  »  L'emperaire  dis  :  ((  Verament  crez  eu  que  las 
ydolas  non  an  en  se  nuilla  deitat,  e  toz  hom  es  mesonegniers 
que  diz  ni  crez  que  li  ydola  sia  deus.  Et  eu  sai  verament  qued 
aquel  Deus  poderos,  que  sana  los  cors,  lava  las  armas  delz 

240  psccatz.  » 

Can  l'emperaire  ac  dih  aizo,  sanz  Salvestres  li  pauset  laman 
sus  el  cap,  e  crestianet  lo.Et  fez  venir  totz  los  christians,  e  dis 
lur  que  dejunessan  6l  estessan  en  abstinencia:  0  Aici  con  feron 
aquil  de  [59  r**]  la  ciutat  de  Niniven  per  la  prédication  de  Jo- 

245  nas  la  propheta,  que  dejuneron  très  jornz  à  aici  escaperon  de 
la  ira  de  Deu,  e  nos  escaparem  de  la  persécution  delz  malz 

homes.» 

Cant  tuh  agron  fah  lur  dejuni  e  complit,  sainz  Salvestres 
venc  a  Temperador,  e  disli:  ((  Auz  me,  reis  :  aquist  piscin^fc' 
250  es  tota  aigua  ;  mas  tant  granz  es  li  vertutz  del  nom  de  Jesm 
Christ  que    li  aigua  lava  los  peccatz  e  dona  sanitat.  »  Can. 
venc  al  sapte  al  seras,  e  sainz  Salvestres  comandet  a  Tempe- 
rador  que  s'en  intres  el  palais,  e  fez  acermar  aigua,  e  seinnet 


LEGENDES   PIEUSES  34  3 

la;  e  cant  Tac  seinnada,  comandet  aTemperador  qued  intres 
intre.  Ecan  fon  intre,  el  nom  del  Paire  e  d^l  Fil  e  del  Saint  255 
Esperit,  plumblat   lo  très  vegadas  en  Taigua  &  oinz  lo  de 
cresma,  e  dis:  «  Seinner  Deus,  que  mundiest  la  lebrozia  de 
Nahaman  Siro  en  flum  Jorda,  e  per  aigua  oberguist  losoilz  de 
cellui  qued  era  natz  cex,  et  a  saint  Paul  Tapostol  per  lo  bap- 
tisme  rendest  lo  vezer,  e  de  perseguedor  qued  era  de  la  toa  260 
sancta  gleisa  en  fezist  maistre  &  esseinnador  de  las  genz, 
Seinner,  tu  munda  aquesttieu  sers  Constantin  per  Taigua  e 
perlo  Saint  Esperit,  qued  aici  conel  erapersegueired'aquesta 
toa  sancta  gleisa,  aici  sia  d'aici  enant  defendeire  de  totz  celz 
que  mal  i  volrian  far,  per  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  lo  tieu  265 
fil,  qui  tecum  vivit  et  régnât  Deus  in  unitate  Spiritus  Sancti  per 
omnia  secula  seculorum,  » 

Can  tuhg  agron  respondiit  :  a  Amen  n^  e  lo  venc  subtaria- 
menz  una  lus  de  cel  e  resplandi  moût  [59  v^*]  fort,  e  tota  li  ai- 
gua acomenset  aici  a  frémir  con  fa  li  sartais  cant  es  sobrel  270 
fuc.  Et  aqui  eis  cant  Constantis  eissi  de  Taigua,  fon  aici  monz 
&  aici  sans  con  lo  jorn  que  fon  natz,  e  diz  e  confesset  qued 
el  el  baptisme  avia  vist  Jesu  Christ. 

Can  venc  Tendeman,  &  el  donet  aquesta  lei  que  tuhgado" 
ressan  e  crezessan  Jesu  Christ,  le  qualz  Favia  mondât  de  la  275 
lebrosia.  Al  segon  jorn  donet  que  totz  hom  que  no  lo  creiria 
fos  tormentatz.  A.I  tertz  jorn  donet  que  totz  hom,  que  faria  tort 
alz  christians,  perdes  totas  las  causas  qued  auria.  Al  cart 
jorn  donet  privilegi  a  Fapostoli  que  tuh  li  preveire  del  mont 
Tobezissan,  aici  con  fan  li  rie  home  los  reis.  Al  cinque  jorn  280 
donet  que  cada  una  gleisa  agues  aquest  poder,  que  si  nuilz 
hom  colpaolz  podia  venir  ad  ella,  d*aquella  colpa  fos  soutz  e 
disliures.  A  Toctau  jorn  &  el  laisset  sas  albas  e   venc   s'en 
sans  e  salz  a  la  confession  de  saint  Peire  e  de  saint  Paul,  e  tolc 
sa  corona,  &  agenoillet  se,  &  acomenset  moût  piatosament  a  285 
dire  que  non  era  dignes  d'intrar  en  tant  saint  lue,  &  fez  aqui 
sa  oration  ;  &  aici  cant  ac  receuput  lo  ben  fah  de  nostre  Sen- 
nor,  tornet  s'en  ab  gran  gauhg  en  son  palais. 

Can  venc  Tendeman,  &  el  felz  acomensar  denant  son  palais 
Una  gleisa  en  honor  delz  dotze.  apostolz.  Can  venc  a  l'autre  290 
jorn,  el  capitoli,  qued  era  el  seu  palais  de  Letras,  acomenset 
a  bastir  una  gleisa  en  honor  de  saint  Johan  ;  e  donet  aquesta 


34  4  LEGENDES   PIEUSES 

loi  :  «  Conogut  sia  a  toz  que  [60  r*]  nos  em  tornat  coledor  de 
Christ,  (!y:  avem  f^^h  una  gleisa  el  mei  de  nostrsd  palais  el  seu 

205   nom,  per  tal  que  plus  cert  en  sias,  en  la  qufil  toz  le  pobolz  li 
renda  gracias  essemps  ab  nos.  » 

En  aquel  temps  li  juzeu  e  11  phariseu  agron  desputaiioDS 
ab  saint  Salvcstre.  K  cant  agron  desputat  li  un  e  11  autri,  e  lo 
se  levet  uns  oncantaire,  qued  avia  nom  Zambn\  &  acomenset 

300  a  dir  :  «Si  Salvestres  nos  pot  vencer  per  zos  argumenz,  nos 
laissarem  nostras  paternalz  lois  e  segrem  la  lei  d*aquel  en- 
cantador  Jesii  Christ,  cui  nostre  pairo  crucifieron.  Mas  ta, 
seinner  emperaire,  auz  me  de  zo  qued  eu  te  dirai  :  Fai  querre 
un  taur  fort  brau,  el  quai  demonstrem  la  vertut  del  poderos 

:^05  Deu.  Et  aqui  poires  saber  e  conoisser  qualz  de  noz  diz  ver; 
car  eu  non  voil  ab  el  contendre  per  paraulas.  » 

•Ë  vai  l'emperaire,  e  fez  lo  querre.  Et  en  aquel  meja,  sainz 
Salvestres  acomenset  a  demandar  a  Zambri  per  que  fazia  de- 
mandar  aquest  taur.  Respondet  aquest  encantaire  Zambris,  e 

310  dis  :  «  Car  nnilla  vertutz  non  pot  ren  valer  contra  lo  nom  de 
nostre  Seinnor.  Car  nostre  primer  paire,  can  fazian  sacriûze 
a  Deu,  et  ofFrian  taurs  braus,  dizian  aquest  gran  nom  de  Deu 
en  Taureilla  del  taur,  6:  en  eis  pas  getava  un  bram,  e  cazia 
mortz.  Nuilla  res  non  es  qued  aquest  nom  auja,  que  viure 

.315  pusca.  ))  Sainz  Salvestres  respondet  :  a  E  con  Taprezist  tu 
donx,  si  non  Tauzist?  *>  Zambris  dis  :  «  Cujas  tu  donx  qued 
eu  Taprezes  per  auzir  rlire,  zo  que  nuilla  res  humana,  sia 
l)e3tia  o  aucelz,  sofFrir  non  pot?  »  Sainz  Salvestres  respon- 
det: «  Diguas  0  a  Tempera-fôO  v**]-(]or,  de  quai  manera  Tapre- 

320  zist,  si  non  Fauzist.  »  Zambris  dis  :  «  A  te  non  tain  qued  o 
sapias,  car  enemix  es  d  i\z  juzeus.  »  Respondet  l'emperaire: 
((  Con  non  Fapresist  donx  legent?  »  Zambris  dis  :  «  Aquest 
nomps  non  pot  esser  escrih  en  pel,  ni  en  carta,  ni  en  peira,  ni 
en  fust;  car  cel  que  Tescriu  alo  mor,&  aquo  en  qued  es  escrih 

325  es  dissipât.  «  Respondet  l'emperaire  e  dis  :  «  Diguas  nos  tôt 
simplament  con  Tapresist.  »  Zambris  Tencantaire  dis  :  «  Set 
jornz  dejunei.  Cant  venc  a  cap  de  set  jornz,  &  eu  hac  una 
conca  d'argent  tota  nova,  en  la  quai  non  avia  hom  fah  nuill«i 
ren,  &  impli  Tom  tota  do  Taigua  d'unafont.  E  can  fon  plena, 

330  benezi  l'om.  E  pois  ab  lo  det  fez  hom  las  letras,  qued  essein- 
nan  lo  nom,  e  reten  l'om  en  son  coratge.  Et  eu  en  aici,deus 


LEGENDES  PIEUSES  345 

lo  matin  entro  al  seras,  fazent  ades  las  letras,  poînnei  en 
apenre,  si  qued  a  penas  lo  pue  retener  en  mon  coratge.  Et 
aici  poira  hom  conoisser  si  eu  die  ver,  o  qualz  de  nos  dos  deu 
esser  crezutz.  Car  tensonar  poiriam  pro  a  dir  aco  e  Taire.  »     335 

E  domenz  qued  Zambris  dizia  aquestas  paraulas,  e  vec  vos 
qued  hom  aduis  liât  lo  taur  ab  cordas.  Adonx  Zambris  aco- 
menset  a  dir  a  saint  Salvestre  :  a  Ara,  Salvestre,  penran  fin 
li  argument  de  las  toas  paraulas.  Ara  diguas  lo  nom  del  tieu 
deu  en  Taureilla  del  taur,  e  poiras  saber  si  tu  coles  lo  pode-  340 
ros  Deu.  0  eu  lo  dirai,  e  trastuh  tornon  se  pois  a  la  nostra 
religion.  »  Can  li  fizel  de  Deu  auziron  aquesta  paraula,  ab 
pauc  tuh  non  foron  torbat  ;  [60  bis  r°]  mas  sainz  Salvestres 
estet  ades  ferras  &  alegres,  e  dizia  qued  on  majors  enpachers 
aurian  del  diabol,  e  nostre  Seinner  majors  a'toris  lur  faria,  o  345 
plus  fort  losacorreria,  con  eillosvenquessant;  car  necessitatz 
era  qued  en  Tacomensament  li  fez  de  celz  que  creirian  en 
Jesu  Christ  fons  fermada  per  miracles. 

Trastuh  acomenseron  a  dire  qued  Zambris  disses  lo  nom 
del  seu  deu  en  Taureilla  del  taur,  per  vezer  si  era  vers  aici  350 
con  el  o  avia  promes.  Vai  s'en  al  taur  e  dis  li  lo  nom  a  Fau- 
reilla,  &  en  eis  pas  le  taurs  cazec,  &  getet  un  bramp,  e  li  oil 
sailliron  li  de  la  testa,  e  fon  mortz.  E  can  li  juzeu  0  viron,  le- 
veron  se  tuh,  &  acomensenseron  ad  escarnir  saint  Salvestre 
&  a  dir  queben  era  raesoneguatot  cant  dizia;  et  acomenseron  355 
lo  moût  fort  a  repenre.  Sainz  Salvestres  quis  ajuda  a  nostre 
Seinnor  et  acomenset  a  pregar  a  Temperador  que  fezes  far 
pas.  Can  fon  tôt  calât,  sainz  Salvestres  acomenset  a  dir  :  «  0 
vos,  prince  e  pozestatz,  e  totz  le  pobolz  romans  cuminalment, 
aujaz  me  !  Le  meus  seinner  Jesu  Christz,  cui  eu  predique,  en-  360 
luminet  los  cex,  alz  sortz  rendet  auzir,  alz  mutz  parlar  ;  a  celz 
que  non  avian  poder  en  lur  mas  rendet  sanitat;  alz  clops 
rendia  annar  ;  los  lebros  mundava  ;  lo[s]  paralitices  sanava,  e 
los  mortz  resuscitava  ;  per  que  es  ben  semblanz  qued  aquest 
nomps  no  sia  de  Deu,  si  de  diabol  hoc,  qued  aquest  taur  aia  365 
mort,  si  non  lo  pot  far  reviure.  Cel  es  enemix  de  vida  e  de 
salut,  qui  [60  bis  v°]  zo  que  viu  aucis,  e,  cant  es  mort,  non  o 
pot  resuscitar.  »  Adonx  Zambris  escoissendet  se  totz,  &  aco- 
menset a  dir  :  «  Seinner  emperaire,  car  aquest  Salvestre  non 
pot  hom  vencer  per  paraulas,  comanda  li  que  fassa  quedo-  370 


34  6  LEGENDES   PIEUSES 

com  e  qe  non  o  parle  tôt.  »  Siiinz  Salvestres  respondet  :  cVolz 
qued  eu  el  nom  del  meu  Seinnor  Jesu  Christ  resuscite  aquest 
taur,  que  tu  as  mort?  »  Adonx  dis  Zambris:  «Totatressi  con 
tu  poirias  volar,  tôt  atressi  poiras  resuscitar  aquest  taur.  » 

ri75  L'emperaire  respondet  :  «  Meravil  me  d'aquesta  engressesa 
que  tu  as,  que  tu  as  dih  qued  hoi  mais  non  tensonasses  &  que 
per  fah  monstrasses  qualz  deuria  es-ïer  crezntz.  Et  el  diz  e 
promet  que  resuscitaralo,  e  tu  dis  &  affermas  que  non  o  poi- 
ra  far;  per  qued  es  drechurera  causa  que,  si  el  resuscita  lo 

380  bou,  que  tu  crezas  qued  aquest  es  verais  Deus  per  lo  quai  le 
mortz  er  resuscitatz,  6i  aquel  es  verai  diabolz,  perlo  quai  nom 
le  taurs  es  mortz  et  non  pot  reviure.  »  Adonx  Zambrls  res- 
pondet, e  dis  e  covenc  a  Temperador  que,  si  Salvestres  podia 
resuscitar  lo  taur,  qned  el  laissaria  tota  la  lei  delz  juzeus  e 

385  tornaria  se  a  la  religion  delz  christians. 

Vai  sainz  Salvestres,  &  estendet  sas  mas  vers  lo  cel,  &  aco- 
m[en]set  a  pregar  nostre  Seinnor  <Sl  a  dire  :  «  O  tu,  Seinner 
Jesu  Christ,  eu  nianifest  lo  tieu  nom,  auzent  totz,  &  auz  me, 
que  soi  tos  sers,  qued  aquest  taurs  reviva  per  l'apellament  del 

3'iO  tieu  saint  nom,  le  qualz  es  mortz  per  Tapellament  del  diabol; 
qued  totz  aquest  pobolz  te  conosca  o  ma-[61  r**]-nifeste  la  vertut 
del  tieu  gran  poder,  qued  ara  es  temps  e  sazos  que  li  vertutz 
del  tieu  nom  se  demonstre.  »  Pois  cant  ac  dih  aizo,&  el  s'ap- 
propiet  del  taur,   e  dis  li  :  «  El  nom  del  meu  Seinnor  Jesu 

395  Christ,  lo  cal  crucifieron  li  juzeu  sotz  Ponz  Pilât,  te  die  eu 
que  tu  levés  sus.  »  Et  aqui  eis  le  bous  levet  sus  sans  e  salz.  E 
vai  ves  el  sainz  Salvestres,  e  desliet  lo,  e  comandotli  que  s'en 
annes  bonament  a  las  autras  bestias  don  era  mogutz  e  que 
non  fezes  mal  ad  home,  ni  hom  non  fezes  mal  ad  el.  E  cant  ac 

400  dih  aizo,  laisset  Tannar,  &  annet  s'en  tôt  bonament  &  soau. 
Et  aqui  eis  tuh  li  juzeu  van  se  getar  a  sos  pes  &  clamavan  li 
merce,  que  lur  perdones,  e  que  pregues  nostre  Seinnor  per 
elz.  Et  Elena,  li  maire  de  l'emperador,  vezent  tôt  lo  pobol, 
se  vai  atressi  getar  a  sos  pes  &  acomenset  li  a  pregar  que  li 

405  dones  penitencia.  Et  aici  totz  le  pobolz  de  Roma,  e  li  juzeu, 
foron  convertit  e  tornat  a  la  fez  de  Jesu  Christ.  E  car  serian 
longas  novas  de  comtar  zo  qued  Helena  fez,  prennam  deus  la 
fin  de  la  legenda. 

En  aquella  hora   aduisseron  a  saint  Salvestre  le  pobolz 


LÉGENDES   PIEUSES  34  7 

moutz  demoniaix,  e    per  lo  mandament  de  saint  Salves tre  410 
eissian  delz  cors  delz  homes  li  diabol.  Pois  fez  escriure  lo  nom. 
de  cada  un  e  nol  vole  far  batejar  entro  a  Pascas,  don  eran 
prop,  carli  intradade  martzera.  Aquestfon  letrentae  cincques 
apostolis  aprop  saint  Peire,  e  tenc  la  cadera  vint  e  très  anz 
&  des  mes  &  unze  jornz.  E  cant  ac  complit  drechurerament  415 
son  cors,  transpas-[61  v*]-set  a  nostre  Seinnor;  e  fon  sebelitz 
el  sementeri  de  Priscilla,  qued  es  a  via  Salaria,  .m.  kalendas 
januarii.  Régnante  Domïno  nostro  Jesu  Christo,  qui  cum  Pâtre 
et  Spiritu  Sancto  vivit  et  régnât  in  secula  seculorum.  Amen. 


XXIII 
PASSIO  SANCTI  BARTOLOMEI  APOSTOLI 

Seinnor,  nos  autri  sabem,  aici  con  li  escriptura  o  diz,  que 
très  Indias  son.  Li  primera  es  aquil  que  se  ten  ab  Ethiopia. 
Li  autra  India  s'en  ten  ab  una  autra  terra,  qued  ha  nom 
Medos.  Li  autra  India  es  al  corn  del  mont,  car  d'aqui  en  la 
non  ha  terra,  mas  li  granz  mars,  que  li  tocha  des  l'una  part,  5 
e  des  Tautra  li  régions  escura.  En  aquesta  India  intret  sainz 
Bertalmeus  l'apostolz.  Cant  venc  un  jorn  qued  el  era  en  una 
ciutat  d'India,  intret  en  un  temple,  on  avia  una  ydola  qued 
appellavan  Astaroth  ;  &  acomenset  aici  con  romeus  estar  aqui. 
En  aquesta  ydola  avia  un  diabol  aital  que  donava  respos,  e  10 
dizia  que  sanaria  los  malauz.  Los  cex,  los  qualz  el  essecava, 
dizia  qued  el  senz  dopte  los  enluminaria.  Tuh  aquil  home 
erant,  zo  diz,  senz  lo  verai  deu,  per  qued  era  necessitatz  que 
le  falz  deus  los  escarnis.  Per  aquest  art  escarnis  le  falz 
deus  aquelz  que  non  crezon  lo  ver  deu  :  el  lur  fa  venir  dolors  15 
&  enfermetatz  &  danz  &  mouz  perilz,  e  dona  lur  respons  que 
crezan  en  el  &que  li  sacrifizon,&  quais  qued  eil  sian  sanat  per 
el.  Et  era  semblanz  alz  folz  homes,  qued  el  los  sanetz.  Aquil  dia- 
bol non  sanan,  mas  del  mal  que  faut,  can  s'en  [62  r°]laissan, 
es  vejaire  a  la  foUa  gent  que  los  guariscan.  20 

Esdevenc  que,  domenz  que  sainz  Bertalmeus  estava  aqui, 
Astaroth  non  poc  donar  nuil  respons,  ni  poc  acorre  celz 
qued  avia  naffratz.  Cant  totz  aquel  temples  fon  ja  plens  de 
malautz,  &  cada  jorn   sacrifiavan  ad  Astaroth,  e   non    lur 


t:ii  î-s  v.ij-t*  T*-r '.\^ .  -!■   Eli  TLrrit   i»*  3(«r  pree    mi  per 

■  i-:*r.±i.»  :i-r'    *.    :^t**Li  i-m    i?  t*^^*  ?«»x.  laed  Astarotli 

:•  ::i'*4  •*■  :.:i*  i.   --»  rxi.-*  :*  .i?  tuLaxza^  asBeroa  s'eo 

i.:    :i.t  ti-'i  1.  L--f.  :i   :•;    ti    l*  r*i^  xa  Axm  dîftbo!  qaed 

.*.  iT-t  i:2.  B»:.-*:  ■:  :t*:i  .  *;L:r±:i:  *  su*  ii  a^roa  sacri- 
iiT  1.1: 2i*:L*^r:  1  ..  i  if*2Li.i:-.'  T-rr  :t-»  îsr  "îess  Astaroht 
-  -  ■  -: r  vr.  \  :  :  z.  l:  rr* ;  -_  ?.  rLr^  :•:  x . r:  Ixr  1*  lix-boix  Beiiitz, 
*  :  *  :  t  7*.?  .*  t:-*--^^  :-ri-  **  i:  ri  '.eusti  pî>»  «  lîatz  que 
r.>>  •::»    .-ir  1.  zi-.tr  1:1  l.**:.  f-a^  ï-^C'»!^  kor&  *)iie  Ber- 

.'v>  li -..*--*.  .'i:  :•»:.:.!  î*  I-r:.  f  -  1:1:.  >  E»isser»>a  aqail  qoed 
^r-ii  i\..:  ?îl  mIi  r^  i:;-?^*  3*r:j.Izie!î5?»  Respondei  îc 
■r.ivoiz  :  Krz^.z.  -r*  i-r.  ::::*r':5  r»-»i.  E' per  jiio  es  vengatz 
-^rri  a.': -.-r-î'-i  :,::TrL?i.  :ir:  àû^rli    ^-eas,  cae  vos  an  tri  coles, 

î.»  r.r.a  a-.T^»^:'::.  1.  *oi.  I:-  p^is^Aai  tririr:  c^r  entre  tan  gran 
j^,:.\  lo  farîi  rc^l  o - nciss-er.  n  Res:oadet  le  diabolz,  e  dis: 
«  L  car^e!.  de  «o:.  c  vT-  5.::i  i.ejrre  e  creps  :  sa  carnz  es  blan-rfô 
V* -ca:  .i  -ei  oil  ^on  jr/k:.::  .0  :i:is  a  e^gal  e  dreh  e  ben  fahg; 
«ei  cabeii  ii  cobroa  la.*  airei.Ia^:  !a  barba  ha  un  pa:ri  f«*ranDa 

J5  â'  esta  Ii  moût  gent:  et  es  moût  bea  fahg  per  cors.  Vestitï 
va  d'^ifia  ganîiacha  de  polpra  blanc  la;  sos  mantelz  atressi 
blarr;x.  ab  peinai  f^re^iosas  vermeiilas.  Vint  e  seis  anz  a  portatz 
a'fij'-'.z  vestimenz.  e  ja  non  s'enlagesiran  ni  s'enveilleziran, 
mas  totz   temps  s^^ran  aitan  b.»!  con  lo  jorn  que   foron  fah. 

i9)  Atressi  a  portât  sas  sendali.is  .xivj.  anz.  que  ja  non  seran  si 
novas  hoc.  Cent  veg lias  s'aqenoilla  lo  jorn  o  cent  vegadas 
la  nohg  per  pregar  nostre  Seiiinor.  Li  soa  paraula  es  moût 
dousa,  e  moût  auta.  Li  angel  de  Deu  van  ab  el,  que  non  lo 
laissan  lassar  ni  aver  nu  il  fam  ni  nuil  desaise.  Aitalz  con  es  ei^ 

•V)  la  cara,  aitalz  es  per  coratg  \  Nuilz  enganz  el  seu  cors*  noi^ 
os.  Totas  horas  es  alegres  e  gauzenz   Tôt  cant  es  vez,  e  to^ 
cant  es  conois.  Los  lengatges  de  totas  las  genz  parla  &  ententr    • 
Kt  ancara  vos  die  mais  aizo  que  vos  non  me  demandas:  ï    ^ 
an  gel  de  Deu  parlan  ab   el,  e  fan  li  saber  tôt  cant  es  ,  &  lu-     ^ 

r,0  annun(nan.  P]  can  vos  lo  querres,  si   el  se  vol,  el  se  démons   ^^ 
frara  a  vos;  0  si  se  vol,  ja  non  lo   poires  vezer.  Et   eu  prec^ 

*  Mh.  iOTB. 


LEGENDES   PIEUSES  349 

vos  que  cant  Taures  trobj,t,  que  vos  li  pregues  que  non  venna 
sa,  per  tal  que  li  angel,  que  son  ab  el,  non  fassan  atrestal  de 
me  con  an  fahg  de  mon  fraire  Astaroht.  »  E  can  le  diabolz  ac 
dih  tôt  aizo,  &  el  se  calet.  65 

Torneron  s*en  aquist,  e  can  s'en  foron  tornat,  acomenseron 
[cercar]  totz  los  ostalz  delz  pelle-[63  r"]-gris  ;  &  totz  agardavan 
en  sas  caras  e  lur  vestirs,  per  tal  si  conoisserian  saint  Bertal- 
raeu.  Et  ai  ci  de  dos  jornz  non  feron  anc  si  querre  hoc,  &  anc 
trobar  non  lo  pogron.  70 

Can  venc  un  jorn,  &  uns  qued  avia  lo  diabol  el  cors  aco- 
menset  a  cridar  &  a  dire  :  a  0  tu,  Bartolraeu,  apostolz  de 
Deu,  tas  orations  me  creman  tôt.  »Adonxdis  Tapostolz:  a  0 
tu,  diabolz,  eis  foras  !  »  Et  en  eis  pas  Tom  fon  desliures  d*aquel 
diabol  que  Tavia  tengut  près  e  liât  per  moutz  anz.  Pôle-  75 
mius,  le  reis  d'aquella  terra,  avia  una  fillaqued  era  lunatica. 
E  fon  li  dih  qued  en  la  vila  era  un  home,  qued  avia  nom 
Bertalmeu,  et  avia  aici  getat  lo  diabol  del  cors  de  Tome.  E 
trames  li  messatgesle  reis  que  vengues  ad  el.Vencsainz  Ber- 
talmeus;  e  cant  fon  deuant  lo  rei,  acomenset  li  a  dir  le  reis  :  80 
«Ma  filla  es malament trabaillada  ;  et  eu  prec  te,  se  le  tiens 
plazers  es,  qued  aici  con  tu  as  desliurat  Seustium,  qued  avia 
estât  moutz  anz  trabaillatz,  que  tu  desliures  e  sanes  la  mena 
ÛUa.  »  Ab  aitant  levet  se  le  reis,  &  annet  ab  saint  Bertal- 
meu la  on  era  sa  filla.  Can  foron  laintre  on  ella  era,  sainz  85 
Bertalmeus  Tacomenset  ad  esgardar,  e  vi  la  que  fon  liada  ab 
cadenas  moût  fort,  car  tôt  cant  podia  penre  ni  tener,  tôt  o 
escoissendia,&o  taillava,  &  o  mordia;  per  que  nuilz  hom  non 
s'ausava  appropiar  d'ella.  Adonx  comandet  Tapostolz  qued 
hom  la  deslies.  Responderon  aquil  qued  eran  aqui  :  «  E  qui  90 
ausaria  pausar  sa  man  sobre  ella?»  L'apostolz  dis:  «  Non  vos 
cal  temer,  [63  v°]  car  eu  tenc  liât  Tenemic  qued  es  en  ella; 
e  desliatz  la,  e  pois  tolletz  li  son  vestir  e  lavatz  la;  e  lo 
matin  e  vos  la  m'aduzes.  »  E  feron  o  tôt  en  aici  con  Tapostolz 
lurac  comandat.  E  d*aqui  enant  le  diabolz  non  la  poc  tra-  95 
baillar  ni  tener  dan. 

Tune  rex  honeravit  camelos  auro  et  argento,  e  de  peiras  pre- 
ciosas,  e  de  rix  vestirs,  e  trametia  o  lot  a  Tapostol.  Mas  anc 
tant  nol  quiseron,  de  sa  ni  de  la,  qued  banc  atrobar  lo  po- 
guessan  ;  &  pois  cant  li  messatge  viron  que  nol  podian  atro-    100 


350  LKGRNDKS   PIEUSES 

bar,  torneron  o  al  palais.  Passet  aquel  jornz  e  li  nohgr.  Gsn 
venc  rcndeman^  que  li  alba  acomensct  a  pareisser,  &  le  reis 
cra  tût  soletz  en  sa  cambra,  e  Fuis  era  serratz,  e  Tapostolz 
li  apparec  davant.  E  foron  tuh  sol  laintre  eil  dui.  Et  aco- 

H)5  menset  li  a  dir  sainz  Bertalmeus:  «  Per  que  me  fezist  er  tôt 
so  dia  querre  ab  ton  aur  &  ab  ton  argent  &  ab  tas  peiras  pre- 
ciosas  <k  ab  tos  vestirs?  Aquist  don  son  necessari  a  celz  que 
queron  las  terrenalz  causas.  Eu  non  voil  ni  quer  nuilla  causa 
terrenal  ni  carnal.  Mas  ai/o  te  voil  annunciar  e  far  saber, 

110  que  le  filz  de  Deu  deinnet  venir  en  aquest  mont,  e  près  cani 
huraana  el  ventre  de  la  vergen,  e  d'aqui  nasque(s)t  ensemps 
deus  6i  hom^  que  fez  lo  cel  e  la  terra  e  tôt  cant  en  elz  es.  Aizo 
fon  aquil  vergcna  que  non  vole  aver  paria  ab  nuil  home  del 
mont.  Ella  fon  primera  que  vodet  al  poderos  Deu  que  tenria 

115  virginitat.  Per  aizo  die  primera  que  vodet,  car  deus  Tacomen- 
sament  del  segle,  ni  deus  qued  [64  r®]  hom  fon  fahg,  nuilla 
femena  non  avia  fahg  aquest  vot  a  Deu  ;  car  ella  establi  en 
son  coratge,  e  dis  :  a  Domine,  offero  tibi  virginitatem  meam, 
Seinner,  eu  offri  a  te  ma  vergenitat.  »  Ane  aizo  non  fez  saber 

120  per  paraula  ni  per  semblant  ad  home,  mas  solament  a  Deu, 
qued  ella  estes  totz  temps  vergens  per  amor  de  Deu.  Can  venc 
un  jorn  qued  ella  estava  enclausa  en  sa  cambra,  e  loresplandi 
laintre  subtanamenz  una  clartatz  quais  de  soleil,  &  apparec 
li  davant  sainz  Gabrielz  Fangelz.  Ella,  can  lo  vi,  ac  moutgran 

125  paor,  e  dis  li  Tangelz:  «  Non  aias  paor,  Maria,  car  tu  conse- 
bras  un  enfant.  »  Ella  cant  o  auzi,  pauset  la  paor,  &  dis  moût 
ardidamenz  e  moût  coratjosa  :  «  Quomodo  in  me  fiet  hoc,  quor 
niam  virum  non  cognosco  ?  Con  poira  aizo  en  me  esdevenir, 
qued  eu  non  conosc  home?»  Respondet  Fangelz  e  dis:  «  Per 

130  zo  car  tu  avias  promes  a  Deu  verginitat,  le  Sainz  Esperitzso- 
brevenra  en  te,  e  li  vertutz  de  TAutisme  se  solombrara  ea 
te.  E  zo  que  naiscera  de  te  sera  sainta  causa,  &  appellatz  fil^ 
de  Deu.»  Aquest,  can  fon  natz,  sofferc  que  le  diabolzlo  temp^ 
tes,  acel  diabolz  qued  aviavencutloprimerhome,  amonestant^ 

135  que  presumis  manjar  de  Talbre  queDeus  li  avia  vedat.  Aquest 
diabol  laisset  appropiar  de  se  ;  car  aici  con  el  avia  dih  al  pri- 
mer home  Adam,  per  la  bocca  de  la  femena  :  «  Manja  d'aquest 
fruc  »,  e  manjet  en,  &  en  eis  pas  el  fo  getatz  de  paradis,  & 
eissillatz  en  aquest  mont,  et  en  [64  v°]  aquest  peccatengenret 


LEGENDES   PIEUSES  351 

tôt  ruhman  linnatge,  aici  sofferc  aquest  filz  de  Deu  qued  140 
aquest  diabolz  li  disses  :  «  Die  lapidibus  ut  panes  fiant  et  man- 
duca,  ut  non  esurias,  Diguas  a  las  peirasque  sian  pan  &  manja, 
que  non  aias  fam.  »  Respondefc  el,  e  dis  :  «  Non  in  pane  tan- 
tum  vivit  homo,  sed  in  omni  verbo  Dei,  Tan  solament  non  viu 
hom  per  pan,  mas  en  la  paraula  de  Deu.»  Aquest  diabolz,  que  145 
manjant  avia  vencut  homen,  per  cel  que  lo  mesprese(s)t  deju- 
nant  perdet  sa  Victoria.  Per  aizo  era  digna  causa  que  cel  qued 
avia  vencut  lo  fil  de  la  vergen  fossa  vencutz  perlo  fil  de  la 
vergen.  » 

Respondet  le  reis,  e  dis  :  a  E  cou  podes  tu  donx  dire  qued  ai-   150 
so  sia  li  primera  vergens,  de  la  quai  nasque(s)t  ensemps  Deus  & 
hom?»  Adonx  dis  Tapostolz  :  «  A  Deu  faz  eu  gracias,  car  tu 
as  entendut  zo  qued  eu  t'ai  dih.Le  primers  hom  fon  appellatz 
Adam,  &  aquel  fon  fah  de  terra.  Aquil  terra,  de  que  fon  fahg, 
era  vergens,  car  ancar  non  era  bautugada  per  huma  sanc,    155 
ni  non  era  ancar  uberta  per  soboutura  d'alcun  mort.  E  per 
aco  era  digna  causa,  aici  con  eu  t'ai  dih,  que  cel,  qued   avia 
vencut  lo  fil  de  la  vergen,  fos  vencutz  per  lo  fil  de  la  vergena. 
Et  el,  qued  avia  estât  venceire  el  primer  home,  tramet  ancar 
SOS  compainnos  en  totz  lux,  qued  aqui  on.poiran  vencer,  ni    160 
conquerre  ren,   pauson   lo  titol   de  la  Victoria  e   del  règne 
d'aquest  tirant.  Aici  Jesu  Christ,  qued  ha  vencut  aquest  tirant, 
princep  de  mort,  a  trames  nos  autres  per  totaslas  terras,  que 
nos  [65  r°]  decassem  los  menistres  del  diabol,  li  quai  habi- 
tant per  los  temples  inz  en  las  ymages,  et  aquelz   homes  que    165 
los  colon  getem  del  poder  de  cçllui  qued  es  liatz.  E  per  aizo 
nos  non  volem  aur,ni  argent,  nil  prenciem,  anz  lo  mesprezem 
aici  con  Jesu  Christz  lo  mespreset.  Car  nos  non  volem  esser 
rie,  mas  aqui  on  es  le  sens  emperis  e  le  sens  règnes.  Car  aqui 
non  aura  ja  malautia,  ni  enfermetat,  ni  mort,  ni  dolor,  ni   170 
tristicia,  ni  ja  lue  non  i  poiran  aver.  Aqui  es  perpetualz  feli- 
citatz,  &  durabla  benazuranza,  &  gauhg  senz  fin,  e  durable 
delehg.  Per  zo,   reis,  te  die  eu  que,  pois  qued  eu  intrei  el 
vostre  temple,  le  diabolz,  que  vos  donava  respons  inz  en  la 
ydola,  tenc  liât  per  los  angelz  de  cellui  que  m'a  trames.  Et  eu   1*75 
farai  lo  te  vezer,  e  conoisser  quan  granz  penas  sofFri,  si  tu  te 
laisses  batejar,  que  sias  enluminatz  del  Saint  Esperit.  Car 
totz  aquelz  malautz,  que  jazon  el  temple,  devian  esser  curât 


352  LEGENDES   PIEUSES 

per  Tart  del  «ii;ibol.  Le  qaalz  a  via  yeacac  lo  primer  home  aici 
180  con  eu  t'ai  dîii  iesobre:  ^:ar  ..er  a.{ueLla  rictoria  a  encar  a- 
quest  mal  po>ier  sobre  ai^aeiz   ^ue  veacer  pot.  Et  en  los  us 
ha  maiâ  de  poderqaed  ea  ios  ancres.  Eln  aquelzque  maispec- 
caut,  en  aquelz  ha  mais  de  poder.  En  aquelz  qae  meinz  peccant, 
en  aqaelz  ha  meinz  de  poder.  \qaest  diabolz  fa  per  sa  art  los 
lâo  homeâ  malaatz  ol  amoaesta  lur  qae  crezan  en  las  jdolas.  Ë 
per  zo  qued  aia  poder  en  las  armas,  se  cessa  que  non  lur  fa 
mai,  cant  dizon  a  la  peira.  o  a  qaalque  metail  :  a  Deus  meus 
es  tu.  [(jô  y^]  Tu  es  le  meus  deus.  o  Per  aizo  Tenon  11  home 
cada  joru,  e  dizon  al  métal  :  a  Tu  es  le  meus  deus.  »  Mas  per 
100  zo  car  eu  teDc  liât  lo  diabol  qued  es  enla  jrdola,  non  pot  donar 
respons  a  celz  que  li  sacriûan  ni  i  azoran.  Et  si  tu  volz  saber 
ni  proar  qued  aiso  sia  en  aici  con  eu  t'ai  dih,  eu  comandarai 
al  diabol,  qued  es  en  la  vdola,  qued  el  digua  e  manifeste,  au- 
zent  torz.  si  el  es  en  aici  liatz  que  non  posca  donar  respons.» 
105  Respoudet  le  reis  e  dis  :  a  Cant  venra  deman  la  primera  hora 
del  jorn,  serari  appareiil.it  li  evesque.  b:  eu   venrai  i,   que 
vejam  aquest  meravillos  fahg.  » 

Can  venc  lo  matin  la  primera  hora  del  jorn,  e  lo  venc  le 

reis,  e  foron  tuh  aquil  evesque  appareillât,  éi  acomenseron  a 

200  far  lur  sacrifizis.  Ab  allant  le  diabolz  acomenset  a  cridar  inz 

en  la  ydola  :  a  Caitiu,  cessa[s]  vos  de  sacriôar  a  me,  que  non 

soffrias  majors  tormenz  qued  eu  fatz,  que  soi  liatz  per  los 

angelz  de  Jesu  Christ  ab  cadenas  de  fuc,  lo  quai  crucifieron 

juzeu,  car  lo  pessavan  aucire  ;  mas  el  morent  escaitivet  la 

205  mort,  qued  es  nostra  regina  ;.ô:  mezesme  nostre  prince,  qued 

es  maritz  de  la  mort,  liet  ab  liamps  de  fuc.  Et  al  terz  jorn  el, 

venceire  de  la  mort,  resuscitet,  &.  donet  Tantreseinna  de  sa 

cros  a  SOS  apostolz,  &  ha  los  trames  per  totas  las  partz  del 

mont.  Et  aquest  Bertalmeus,  qued  es  aici,  es  en  uns,  le  qualz 

210  me  ten  liât.  Et  eu  die  vos  que  lo  pregues  que  me  laisse  an- 

nar  en  autra  terra.  »  Adonx  dis  sainz  Bertalmeus  :   «  O  tu, 

horres  enemix,  manifesta  e  diz  qualz  [66  r**]  es  aquel  que  fa 

aver  aquestas  diversas  malautias  qued  sofTron  ni  an  aquist 

home.  ))  Respondet  le  diabolz  :  a  Le  nostre  princes,  qued  es 

215  liatz,  nos  tramet  alz  homes,  que  naffrem  primerament  lur  carn 

per  que  eil  nos  sacrifian,  que  si  non  nos  sacrifiavan,  ja  non 

auriam  poder  en  lur  armas.  E  [cant]  per  salut  de  lur  cors  sa^ 


LEGENDES    PIEUSES  353 

crifîân  nos,  e  nos  cessem  nos  que  non  lur  fazem  mal,  car  lur 
armas  acomensem  ad  aver  en  nostre  poder.  E  cant  nos  nos 
cessem  que  non  lur  fazem  mal,  es  lur  semblanz  que  los  curem  220 
de  lur  malautia,  e  per  aizo  colon  nos  atressi  con  deus.  E  pois 
que  tu,  apostolz  Bertolmeus,  &  discipolz  de  Jesu  Christ,  fust 
ni  venguist  aici,  eu  soi  liatz  e  consumitz  per  cadenas  de  fuc. 
E  per  aizo  parle  car  tu  m'o  as  comandat;  car  eu  ni  neis4e  nos- 
tre princes  non  ausera  parlar  que  tu  i  fessas  presenz.  »  Adonx  225 
dis  Tapostolz  :  «  Per  que  non  sanas  totz  aquestz  que  son  aici 
vengut  ad  te  ?  »   Respondet  le  diabolz  :  a  Nos  cant  nafrem 
los  cors,  si  non  naffravam  las  armas,  li  cors  serian  sanat.  » 
Adon  dis  sainz  Bertalmeus  a  tôt   lo  pobol  :  «  Ar  podes  auzir 
novellas  del  verai  Deu,  le  qualz  habita  sus  el  cel  ;  e  non  o  230 
crezas  per  paraulas  vanas,  mas  per  veras.  E  si  voles  qued  eu 
pregue  per  vos,  que  trastuh  rescipiatz  sanitat,  pausatz  aquesta 
ydola  a  terra,  etfrainnetz  la.  E  cant  o  aures  fahg,  eu  sagrarai 
aquest  temple  el  nom  de  Jesu  Christ,  e  pois  totz  vos  autres 
sagrarai  en  aquest  temple  del  baptisme  de  Christ.  »  Adonx  235 
comandet  le  reis  qued  hom  aportes  cordas.  E  cant  foron  [66  v°] 
aportadas,  e  lieron  la  ydola,  &  anc  en  nuilla  manera  ni  en 
nuilla  guisa  moure  ni  trastornar  non   la  pogron.  Can  sainz 
Bertalmeus  o  vi,  dis  lur  que  la  desliessan  &  ostessan  aquellas 
cordas.  E  cant  o  agron  fah,  dis  al  diabol  qued  era  en  la  jdola  :  240 
«  Si  tu  volz,   diabol,  qued  eu    non   te   metta  en  habis,   eis 
d'aquesta  ydola  e  frain  la  ;  et  pois  vai  t'en  en  tal  désert,  on 
îvucelz  non  vola,  ni  voz  d'orne  non  i  es  auzida.  »  Et  en  eis  pas 
el  eissi  de  la  ydola,  et  trisset  la  tota,  aquella  e  las  autras 
qued  eran  per  las  pares  del  temple,  de  guisa  que  néis  penchura  245 
non  i  parec.  Adonx  acomenset  totz  le  pobolz  cumilnament  a 
cridar  :  «  Uns  deus  es  soletamént  poderos,  lo  quai  predica  le 
seus  apostolz  Bertalmeus  !  »  Adonx  estendet  sas  mas  Tapos- 
tolz  a  nostre  Seinnor,  e  dis  :  «  Deus  d'Abraham,  e  Deus  de 
Jacob,  e  Deus  d'Isahac,  que  per  la  nostra  rédemption  trame-   250 
sist  lo  tieu  unial  fil,  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  que  totz  nos 
autres,  que  siam  serv  de  peccat,  rezesmes   de   son  sanc  &  en 
fezes  los  tieus  filz  ;  qui  per  aizo  es  conogutz  verais  Deus,  car 
totz  temps  es  uns,   e  persévéras  non  mudevolz,  tu  es  uns  Deus 
Paire  non  engenratz,  &  us  Filz  tos  engenratz,  nostre  Seinner   255 
Jesu  Christ,  et  uns  Sainz  Esperitz,  enluminaire  &  guizaire  de 

24 


1  :  rru  kr=.s.* .  :  -r  i  :  •  :.i  :  :  ii:  ;  l'ttT  ice  siÙTem  io*  malaoïz. 

'^'.<  :î"-.r:»  2  j-z.-  î  ■'.' . .  >.:  : .  .'f*.  Vcr-iLien:  ]oT  r*^  vos  die  eo, 
tir  :::  .ml  •:•  '.'.-rrrri  &  — :■-  i-àire  el  mea  nom.  tôt  tos 
'-  -j-'-irà.  Pc:  i.i  :.  S--.-Lrr.  ,  -*:*  cu,  il  $*u  noai.  que  lah  aqoist 
:;*à-i*j:  .-t:  ?::.  i._.  iiii.  î^lâ:.  ,-e  :ulz  oonos.^an  qae  in  es 
'^";^j  u:.-  L'rr'-î  -,:.  .r.  «JL  ri  "-rrri  «a  ^l  siât.  1*  qaftlz  doDas  salot 
;^r  a*ez-.-i:Le  ::-î::c  Sc.:.-.r  Jrsu  Ciirisi.  ab  lo  quai  es  a  te 
L-j'^.Ti.  D_--5  Pi.:e.  û  gl.iii  i":  .o  SâId;  Esperii,  per  inmorta- 

«Jar.t  fj;^  a:::- j:.  r-rs:  :i:iu'  :  l  .4'>i?n  3,  ^  îi  malaute foron  tuh 

$^<j  sanat.  o  i:uer;:.  oc  a:-: are:-  a  :u:  /aaj'elz  de  nostre  Seînnor, 
rcs^y^an  j-:.s  ai-jl  :•  ou  le  s.lci.z.  oc  a:  alas.  éa  volet  per  lo  tem- 
p!e,  a  a  caia  -^n  itrl;:  cc:lz  el  es^rlus  ab  son  det  en  la  paret  si- 
irue  'ie  ■::•;;•?,•--  i.s:  -.  Le  ineu<  S-inaer,  «j'ie  m'a  trames,  me  dis 
a>.v.  'i^ej,  aiji  oon  vos  auiri  es  sanai  e  guérit  de  vostra  ma- 

275  Ia-.t;a.  «.•;!  ai':i  nrm  les  eu  a;iiesi  teijii»le  de  tôt  lo  bautugament 
doi  »:iiitoo*  e  dd  las  yiolji^  0:1  el  estava,  al  quai  aquest  apoa- 
loiz  du  ijeu  a  eoiaauJat  que  s'en  vauja  el  désert.  Mas  enauz 
i{n*ii\  i:\  iai  vauga,  eu  lo  vos  demonstrarai  manifestamenz,  e 
cani  io  veires,  non  aias  paor,  mas  ab  lo  det  fais  en  yostres 

280  fronz  aquol  .«signe  qued  eu  ai  fali  en  las  pares,  <k  tuh  mal  seraii 
en'^aussat  de  sobre  vos.»  Adonx  apparec  lur  eu  guisa  d'un  gran 
sarraziii,  niout  nigre  plus  que  niella.  La  carra  ac  aguda,  la 
barba  ferranila,  li  cabel  li  toqueron  entre  alz  pes,  los  oilz  ac 
aici  vermeilzcon  es  ferres  cautz,  bellugas  cremanzli  eissiron 

285  per  la  bocca  e  per  lo  natz  [01  v®]  6i  flamma  de  solpre,  alas 
ac  ùi  fon  totz  empennatz  cais  d'espinas,  6i  ac  liât  las  mas  detras 
lo  dos  ab  cadenas  de  fuc.  E  dis  Tangelz  de  nostre  Seinnor: 
«  Car  tu  as  auzit  la  vos  de  Tapostol,  et  bas  mondât  aquest 
temple  do  totz  los  tiens  enganz,  segon  la  promession  de  Tapos- 

21)0  ^^U  ^^  desliarai  ;  e  vai  t'en  en  aquel  lue  on  non  ha  nuUa  con- 
version d'ornes  ni  de  nuilla  bestia,  &  aqui  esta  entre  al  joru 
(loi  juzizi.  »  K  cant  l'angelz  Tac  desliat,  acomenset  a  getarle 
diabolz  un  moût  fer  bram,  <k  acomenset  s'en  a  volar,  &  anc 
pois  non  apparec  en  nengun  lue.  L'angelz  de  nostre  Seinnor 

il'Jo  s'(Mi  volt'tol  col,  vezent  totz.  Adonx  le  reis,  ab  sa  moiller  &  ab 
dos  lllz  sous  6:  ab  toz  sos  rix  homes  ai  ab  tôt  lo  pobol  d'aquella 


LEGENDES   PIEUSES  355 

ciutat  e  de  totas  las  autras,  qued  a  son  regisme  apertenian,  e 
que  crezeron  en  la  fen  de  Jesu  Christ,  se  batejet.  E  tolc  la 
corona  de  son  cap  &  la  polpra  de  qued  era  vestitz,  &  acomen- 
set  a  segu[i]r  Tapostol. 

Entre  aizo  H  evesque  de  totz  los  temples  s'ajosteronensemps  300 
&  anneron  s'en  al  major  rei,  fraire  d'aquest,  qued  avia  nom 
Strage,  e  disseron  li  :   a  Le  tiens  fraire  s'es  fahg  discipolz 
d'aquel  encantador,  que  torna  los  nostres  temples  a  sa  lei  e 
totz  nostres  deus  frain.  »  Domenz  qued  aquist  dizian  aizo  al 
roi  plorant,  &  vec  vos  los  evesques  d'una  autra  ciutat,  &  aco-  305 
menseron  moût  fort  a  plorar,  &  acomenseron  se  a  clamar  al 
rei  d'aizo  eis  que  li  autri  s'eran  clamât.  Gant  le  reis  auzi  aizo, 
fon  li  [68  r°]  moût  mal,   e  trames  mil  homes  armatz  ab  los 
evesques  ;  e  mandet  qued,  on  qued  atrobessan  Tapostol,  lo  li 
aduissessan  liât.  Anneron  s'en  la,  e  preseron  saint  Bertalmeu  310 
&  aduisseron  liât  al  rei  Strage.  E  can  fon  denant  el,  le  reis  li 
acomenset  a  dir  :  «  ïu  es  aquel  qued  has  mon  fraire  aici  tras- 
tornat  ?  »  Respondet  Tapostolz  :  «  Eu  non  l'ai  minga  trans- 
tornat,  mas  convertit  Tai  ben.  »  Le  reis  dis  :  «  Et  es  aquel 
qued  has  fah  atrissar  totz  nostres  deus  ?  »  Respondet  sainz  315 
Bertalmeus  :   «  Eu  soi  ben  aquel  que  donei  poder  alz  diabolz, 
qued  eran  en  elz,  que  totas  las  ydolas  vanas  cassessan  e  frais- 
sessan,  en  las  qualz  eil  permanian  <k  estavan,  per  zo  que  tuh  11 
home  laissessan  aquella  error  e  crezessan  al  poderos  Deu, 
qued  es  &  habita  sus  elz  celz.  »  Le  reis  dis  :   «  Aici  con  tu  as  320 
fah  qued  eil  aian  laissât  lur  deu  e  crezon  lo  tieu,  en  aici  farai 
eu  a  te  laissar  lo  tieu  deu  e  creire  en  lo  meu,  e  que  tu  li  sa- 
crifiaras.  »  Respondet  Tapostolz,  e  dis  :  «  Aquel  deu,  que  tos 
fraire  colia,  ai  monstrat  a  totz  liât  las  mans  detras  lo  dos,  & 
ad  el  ai  fahg  frainner  la  ydola  en  que  estava  ;  e  si  tu  podes  far  325 
aizo  al  meu  deu,  tu  me  poiras  ben  far  sacrifiar  al  tieu.  E  si  tu 
non  o  pos  far,  razos  es  que  tu  crezas  al  meu  deu,  et  qued  eu 
frainna  totz  lo[s]  tiens.»  Domenz  que  Tapostolz  dizia  aizo,  e  lo 
venc  uns  messatges,  que  dis  al  rei  que  sos  deus  era  cazuhg  & 
era  tornatz  polz.  Can  le  reis  o  auzi,  fon  moût  iratz,  &  escois-  330 
sendet  la  polpra  de  [68  v"]  qued  era  vestitz,  e  fez  escortegar 
saint  Bertalmeu  ;  e  pois  can  fon  escortegatz,  comandet  qued 
hom  li  tailles  la  testa.  Abreujarai  mas  paraulas,  car  qui  volia 
tôt  comtar  per  orden,  aici  con  o  trobam  escrihg,  non  séria  de 


>:'.  LI>ÏE?fMS  MEr$E5 


*ir^  ;-f*i  p-f^Bk  t  :s.ikT  r-  i-t-  Cki.  fiiTMi  eteonegmi.  e  Imli^  Bout 
1  t»'L*<rf  v.-rzLti:;.  th..^; .:  ii>a.:*  c&;«.  £  eui  o  saaproa  per  Ii 
^tr-*.  '.  -ti  i. ..  *:c  il:  r-:  i^l-i^  B*nâlae«§,  TeDC  loi  îe  pobolz 
'.  c  t'.'i^^  :.-^fc*;.  :-_  -r.  Lt.i  :  :iT*rL:i  ab  3o  reî  Polemiam,  e 
y.r.'r::'.!,  *l  .:  :-:r*-  4,:  73.1..$  a:  *.••  Iah*  À  ab  gioria,  qoeren- 

rjfr'.'  c^;vi  k  Lv*::c  Sr.ir.:.-.  L»  c:ft't-^li  ÎDtret  ei  cor»  del  rw 
A»'.r.?**.  Ci  i.'-Lcî  §>:.  &  ^-.Zi  :*iap!e.  cnâ  el  eolia;  e  foron  la- 
,:.:r>  .:  *:Tev\ -^e.  <k  ii-tr*:  il  \ire5*î  J  diabok  el  cors  de  cadaoo. 
h*.  4;:-.  foroi  iî.::  e^rav-:.:.  ^ic  marjife^iaTan^e  dizian  qaed  Bcr- 
t&lfLeii^  era  aiovx.z  «ie  L*eT3.  Pois  aucizeron  te  toli  entr^elz, 

y^iTj  H  r:'a.!&l  IL  a  liera  -e:;.  iLorlroa. 

FnctuM  ett  aut^rm  iimor  e'i'  tremor  fyptr  omnes  tneredulaSt  et 
rredidfT^nt  unt'cerû.et  bijtt'Zfiti  iunt  a  pretbytertSj  quo$ordi' 
uac*r/'ot  apfj* toi tt§  Biriftoi')  ntus.  CaiiX  aizo  fon  aîei  esdeTengat, 
ffrariZ  paors  e  fr:<jLz  ie:uors  Ûju  sobre  aquelz  que  non  creziao, 

'/jT/)  e  c  r*rz  ••  r  o  n  •  u  ii  a  -  ^  y  i  e  i  s .  e  1  e  ro  a  se  î  lale j  ar  alz  p  re  veîres  que 
«HHiz  li-rfTdimeus  a  via  adorienatz.  Pois,  per  rerelament  de 
rjaint  K-perit,  tuh  li  cler^ue  e  totz  le  pobolz  cuminalment 
'('A'Aftvou  que  fezes  hom  eve^que  del  rei  Polesmi  ;  &  aici  fon 
H'ioîdc'ijatzade's' ve<oue,'o9  r^"  ô:  acomenset  a  far,  el  nom  del 

.T;5  rajioslo!,  las  meraviilas  que-i  el  fazia  cant  era  vius. 

.Sainz  HcrtMimeus  estet  en  son  evescat  vint  anz  ;  et  cant  ac 
aici  perfecliament  adordenat  tôt  son  afar  <k  ben  &  estantural- 
ment  a  la  fen  de  Jesu  Christ,  ca  el  transpasset  d*aquest  segle, 
aici  con  vos  avem  dih  desobre,  ab  corona  de  martiri,  &  annet 

'M'A)  ab  nostre  Seinnor,  cum  quo per  secula  régnât.  Amen, 

XXIIII 

PASSIO  SANCTI  MATHEI 

Quoniam  Deo  cura  est  de  hominibus  et  plus  animarum  curant 
ijcrit  quam  corporum.  Nostre  Seinner  ha  cura  de  totz  homes, 
mas  mais  ha  cura  de  las  armas  que  delz  cors.  Car  mainta^ 
V(}f,Mdas  csdeven  que  le  gauh  del  cors  e   le  deleh,  qued  e^ 
5  tomporalz  0  traspassanz,  enganna  home,  e  fai  aver  a  l'arma  1^ 
durabhi  trihulation  ;  car  del  deleh  del  cors  naisson  ligranpec^ 
cat,  (piod  aucizon  l'arma.  E  per  zo  die  que  nostre  Seinner  hm^ 
mais  curas  do  las  armas  que  del  cors,  qued  el  fa  venir  tem- 


LEGENDES  PIEUSES  357 

poralz  iras,  qued  afflichezisson  lo  cors,  que  non  podon  aver 
los  temporalz  *  gauh,  que  toUon  los  eternalz.  E  car  nostre   10 
Seinne[rl  a  cura  del  cors  e  de  l'arma,  las  granz  enfermetatz 
cura  ab  granz  medicinas. 

En  la  terra  de  Ethiopia  avia  dos  encantadors  :  Tus  avia 
nom  Zoroes  e  Tautre  Arfaxat,  &  estavan  en  una  gran  ciutat 
qued  avia  nom  Nadaven,  en  la  quai  estava  le  reis  Eglippus.  15 
Aquest  rei  escarnian  aici  aquistdui  encantador,  qued  encre- 
zent  li  fazian  qued  [69  v°]  eil  eran  deu  ;  e  le  reis  crezia  o,  e 
totzle  pobolz  de  la  ciutat.  Et  eraannada  aquist  fama  lur  per 
tota  Ethiopia,  si  que  de  montas  longas  régions  venian  ad 
aquesta  ciutat,  &  adoravan  los.  Eil  fazian  subtanamenz  estar  20 
los  homes  en  un  lue,  qued  en  nuilla  manera  non  se  podian 
moure,  entro  que  eil  se  volian.  Et  aici  per  encantament  tol- 
lian  ad  home  Tannar,  el  vezere  Tauzir;  e  pois  lo  rendian  cora 
se  volian.  Comandavan  alz  serpenzquemorsessan  los  homes;  e 
cant  los  avian  mors,  venian  ad  aques  encantadors,  e  aqui  eis  25 
per  lur  encantament  curavan  los.  Et  aici  con  dis  li  escriptura, 
major  reverencia  sol  om  portar  alz  malz  per  paor,  que  non 
fa  alz  bons  per  amor.  E  car  Deus  ha  cura  delz  homes,  que  non 
se  perdan,  trames  saint  Matheu  encontra  aques.  Cant  sainz 
Matheusintret  en  la  ciutat,  acomenset  a  descobrir  los  enganz  30 
d'aquest  dos  encantadors.  E  totz  aquelz  homes  qued  aquist 
dui  encantador  fazian  que  non  se  podian  moure,  sainz  Matheus 
los  desliava,  el  nom  de  Jesu  Christ;  e  totz  aquelz  qued  eil 
encecavan,  sainz  Matheus  enluminava;  et  aquelz  cui  eiltollian 
lo  vezer,  sainz  Mathieus  lo  lur  rendia.  Los  serpenz  qued  eil  35 
escomovian  per  los  homes  aucir,  aquest  los  fazia  adormir,  e 
celz  qued  avian  mors,  celz  sanava  de  la  nafra,  ab  lo  signe  de 
la  cros  de  Jesu  Christ. 

Can  vi  saint  Matheu  uns  Ethiops  crestatz  qued  avia  nom 
Candatis,  lo  quai  avia  batejat  uns  diaques,  qued  avia  nom  40 
[70  r"]  Phelip,  &  tornat  a  la  fen  de  Jesu  Christ, vai  se  getar 
a  SOS  pes  &  acomenset  lo  a  pregar  &  a  dire  :  «  Deus  ha  reguar- 
dat  aquesta  ciutat,  quar  desliurarla  vol  de  la  man  d'aques  dos 
encantadors,  delz  qualz  cujan  li  fol  home  que  sian  Deu.»  E 
receup  saint  Matheu  en  sa  maison.  E  venian  laintre  tuh  li  amie  45 

*  Ms.  temperalz  {p  barré). 


35^  LEGENDES  PIEUSES 

rie  Candace  6:  auziaii  la  paraula  de  Dea  predicar  a  saint  Ma- 
theu,  e  crezian  en  Jcsu  Christ,  e  fazian  se  batejar.  e  cmr  reziaii 
atressi  ({ue  tôt  zo  que  H  encantadorfiiiziao  alz  home?.  eTapos* 
to]z  dcsfazia  tôt.  Per  aco  nafravan  totz  celz  qae  podian,  qaed 

50  aquelz  naffratz  tornessan  a  lur  lei.  SaiDz  Matheas  enrara 
aquelz  qued  eil  naffraTaD,  e  totz  lo3  autres  qued  hom  li  apor- 
tava,  de  lur  diversas  malantias.  El  predicara  a  tôt  lo  pobol  la 
veritat  de  Deu.  de  guisa  que  tuh  cil  que  Tauzian  merarilIaTan 
la  soaeloqiiencia.  Adoux  Candaces,  cel  que  Tavia  receoputen 

55  son  alberc,  acomenset  li  a  demandar  ii  a  dir  :  «  En  te  pree, 
Beinner,  que  tu  me  dig'as,  tu  queJ  eshebrens,  coq  apresistlo 
Icngatge  delz  grex,  ni  delz  egiptienx,  ni  d'aquesta  terra  de 
Ethiopia,  que  cil  neis  que  son  naten  esta  terra  non  laparian 
tan  ben   ni  tan  drehg  con  tu  fas.  »  Respondet  li  Matheos 

60  Tapostolz,  c  dis  :  '<  En  tôt  lo  mon  non  solia  aver  mas  od 
lengatge,  mas  nasquet  i  una  presumptions  aitalz,  que  11  home 
ciijeroii  far  una  torre  tan  auta  que  le  somps  toques  al  cel. 
Mas  aquesta  presumption  tornet  nostre  Seinner  d*altal  ma- 
nera  en  '70  v*]    reire  que  Tus  non  poc  entendre  Tautre.  Et 

65  aici  con  aquil  presumptions  era  fâcha  per  un  lenguatge,  eo 
aici  remas  per  montas  lenguas.  Bona  fon  aquil  Toluntatz  que 
fezessan  la  torre,  que  le  somps  toques  al  cel.  Mas  mala  fon  li 
presumptions,  car  eil  non  volian  annar  ab  bona  volontat  ni 
ab  sainta  el  saint  lue.  Venc  le  filz  de  Deu,  lo   poderos,  et 

70  demonstret  de  quai  manera  dévia  hom  bastir  la  tor,  ab  qne 
hom  pujes  al  cel,  e  trames  lo  Saint  Esperit  a  nos  autres,  qne 
siam  dotze  discipol  seu  de  sus  del  cel,  quan  nosseziam  en  una 
maison  enclaus;  ck  yenc  sobre  cadaun  de  nos  en  semblansa 
(le  lenguas  de  fuc  «k  fom  enaici  enflamat  <k  escalfat,  con  es  le 

75  ferres  per  lo  fuc.  E  cant  aquil  paors  &  aquil  resplandors  se 
fon  partida  de  nos,  e  nos  acomensem  a  parlar  ab  totz  loslen- 
gatges  las  meravillas  de  la  nativitat  de  Christ,  e  de  quai 
manera  el,  filz  de  Deu,  nasquet  en  aquest  mont,  le  qualz  era 
natz  enant  Tacomensament  del  segle,  e  de  quai  manera  el 

80  nasquet  del  ventre  de  la  vergen,  nos  o  annunciem  &  o  fam 
saber  e  con  li  vergen  Talachet,  e  lo  noiri,  e  l'esseinnet,  & 
pois  con  fon  batejatz,  ni  temptatz,  e  con  sufferc  passion,  e 
con  fon  mortz  <k  sebelitz,  e  pois  resuscitet  al  terz  jorn, 
pois  s'en  pujet  elFz]  celz,  <k  aqui  sez  a  la  dextra  de[l]  seu 


LEGENDES   PIEUSES  359 

paire,  e  d'aqui  venra  jutgar  a  la  fin  del  mont  tôt  lo  segle  per  85 
fuc.  Non  solament  aici  con  tu  pessas  eu  sai  parlar  aquestas 
quatre  lenguas,  an  sai  totas  aquellas  del  mont  parlar  plana- 
mente  perfecha,  et  eu  e  li  autri  onze  qued  [71  r°]  em  sei  dis- 
cipol.  Et  ad  qualque  gent  que  nos  venguam,  entendem  e  par- 
lam*  perfechament  lur  lengatgc.  Et  ara  es  bastida  li  torres,  90 
non  perpeiras,  mas  per  la  vertut  de  Christ.  Et  atotz  celz  que 
son  batejat  el  nom  del  Paire  e  del  Fil  e  del  Saint  Esperit, 
aquist  torres  li  es  uberta,  la  quai  ha  estrucha  Jesu  Christ.  E 
per  aquesta  hedificantes,  zo  es  cil  que  la  bastisson,  pujaran 
tant,  entro  que  tocharan  al  règne  del  cel.  »  95 

Domens  que  sainz  Matheus  dizia  aizo  e  montas  autrasparau- 
las,  venc  uns  messatges,  que  dis  que  li  encantador  venian  ab 
sengles  drachos.  Aquist  dragon  avian  helmes  en  lur  cap  ;  fox 
e  flama  lur  eissia  per  la  bocca;  per  las  nars  lur  eissia  aura 
de  solpre,  li  odors  de  la  quai  aucizia  los  homes.  Adonx  sainz  100 
Matheus  seinnet  se  &  eissi  foras  moût  seguramenz.  Candaces 
olaus  son  uis,  e  vedava  li  que  non  lai  issis,  mas  que  per  las 
fenestras  parles  ad  aquelz  encantadors.  Adonx  dis  sainz  Ma- 
theus :  «  A  me  obri,  mas  tu  esta  sus  en  la  fenestra,  e  d'aqui 
esgarda  Tardiment  delz  encantadors.  »  Uberc  l'uis  sainz  Ma-  105 
theus,  &  aqui  eis  can  fon  eissitz  deforas,  e  vec  vos  que  li 
encantador  foron  vengut,  &  aduisseron  lur  dragosdenant  elz. 
En  eis  pas  que  li  dragon  foron  denant  los  pes  de  Tapostol,  e 
eil  s'adormiron.  Adonx  dis  Tapostolz  alz  encantadors:  «  On 
esaoras  li  vostra  artz?  Ar  los  espreises,  si  podes  !  Si  eu  non  110 
agues  preguat  lo  meu  seinnor  Jesu  Christ,  tota  aquella  ma- 
leza  que  vos  avias  escomoguda,  qued  fezessan  en  me,  tôt  o 
feran  en  vos  autres,  e  tôt  vos  [71  v°]  tornera  de  sobre.  Mas 
aquist  serpent  estaran  tant  adorrnit,  entro  que  totz  le  pobolz 
sia  vengutz,  et  adonx  eu  lur  comandarai  qued  eil  s'en  tornon  115 
en  lur  lue.  »  Li  encantador  s'esforsavan  ades  con  los  espre- 
guessanab  lur  encantament,  &  en  nenguna  manera  solament 
non  lur  podian  far  obrir  los  oilz  ni  moure  nuilla  ren.  Totz  le 
pobolz  pregava  Tapostol  e  dizia  :  «  Nos  te  pregam,  seinner, 
que  tu  comandës  qued  aqucst  pobolz  &  aquist  ciutatz  sia  des-  120 
liura  d'aquestas  bestias.  »  Respondet  Tapostolz,  e  dis:  «  Non 

*  M  s.  ^arlnn. 


iiu'.*f  €>u'si»  il'.  »»tîtt^i»*^iifL  !iii*  a  STiirritdniTL..  ^  lumij  dbc 
<yo./itiitK:  V  u  ^^'r  .ivm  •'twii;»^j  i;*r  Ut  mtrr  jt  snrwaeaBŒC  jkI» 
i<vM  «tt.(#«i^  <,v«r  ci^^•::îrv^::     ri   .n>n;:.  *  i»:  iii«^ -eiTttnin*!E  BniiBraff 

{^   i*iiM?rf/    -'.    .iV'tv.    tivrt.*<  »*î:Aîir  *  VI  l'K*^  *Jr.  Bas:,  ^seom 

^<;i;   -tM*vv  .  V*   vf.',t    o   v-^ti.?-,:   -',  "L*  :*  a  arucL  -si  fine  givs 

,."/'*.*    )'/<•**<  ^r^'wAu^  'îit,  i.k,'rj,  H  -:>_  frszws.  Xr^scpe  Seiaawr 
^4/y  ^/#  *  'ri^v^^r*  *  ';:■  *  rv*  \^\t^\  ;^^?  T-'>r.r*  iAlct.  «iw  t«cw  haïsses 

//*<««,  ';;>o»  A^;  fit'i'/  îo  y'ïînHr  hoai«,  lo  p:aiiset  ei  deSehg  de  pa- 
iw^î%,  ifU  ^Hi  mhMt'.r  Kvai,  f:»i  format  d'ana  costa  soa.  Paradis 
i;4  Imji  'J<?  4*ii*iUif,  à  tt%  \9iii'^  âiut  loe  de  terra,  si  qoe  prop  es 

\\U  iM  rM,  SM\h,  rti  non  Un  an  paradis,  que  sia  contra  salai 
tVnm^'U,  \éh\uU'h  tuni  Un  aucel^qucd  aia  paor  d^ome.  Laintre 
uuu  u^\ii^hn  itn\iUMt%  ni  hoiMxon.  Uosas  ni  lili  non  lai  seccaran 
ju,  ni  nnilia  /lor4  non  lai  f/crdra  sa  color.  Ja  tanz  anz  non 
uMi'ii  liom  <jUM  hiititro  piiHca  i^nveillesir.  Lainz  non  aura  ira- 

l^'O  ImiII,  ni  liuM<4/Mr,  ni  ira,  ni  rnarrimcnt,  ni  nuilla  malautia,  mas 
Mi|»i4  Miiniùii  H  \rm\\,  Ja  mori/i  non  la  trobara*  son  lue.  Las 
iUii'iiM.  qnn  liiinit'i)  Hon,  r.orron  rnout  soau,  e  donan  durabletat 
|Mir  liiM  ntii'rt  lui  Itomo.  (Jar  alui  oon  le  fumps  de  Tenceâ  de- 
ttM«Na  lart  inaluM  llairorH,  aie!  aquollas  auras  espiran  per  las 

Ihh  iiurM  vida  diiralila,  ((uo  non  laissait  homo  lassar  ni  cazer  en 
iiiillla  \\\\\\\\\  inaH  loi/,  iomps  viu  jovos  &  alegres,  e  ja  non 
140  «Muulilnru.  Imihtro  Honaiit  las  orguenas  delz  angelz,  e  las 
tl«M)iii>iar«  vi)M  ^\\\\  aportadas  on  las  aureillas.  Serpens  ni  es- 

*  \U,  /niAonf. 


LEGENDES  PIEUSES  361 

corpions  non  aura  ja  laintre  lue,  ni  escaravais,  ni  mosca, 
ni  nuilla  res  que  sia  encontra  home.  Li  leon,  e  las  tj-[72  v*]-  160 
grès,  e  li  laupart,  e  li  aucel,  e  totas  las  bestias  salvatgàs  autras 
obezisson  aqui  ad  homen,  e  fan  toison  mandament,  aici  con 
al  car  amie  de  Deu.  De  laintre  eisson  quatre  fluvi.  L'uns  d'a- 
quelz  fluvis  es  appellatz  Gizon,  l'autre  Fizon,  e  l'autre  Eu- 
frates,  e  l'autre  Tjgris.  Aquist  fluvi  son  plen  de  totas  mane-  165 
ras  de  peiras  preciosas.  Ja  laintre  non  rugira  leons;  car  totas 
las  bestias  de  laintre  son  soaus,  emansuetas,  e  totas  estan  en 
gran  repaus.  Ja  laintre  li  cara  del  cel  non  s'enumbrara  per 
cobriment  de  nutz.  Ja  laintre  non  resplandran  fouzer,  ni  sons 
de  thron  non  lai  sera  auzitz.  Laintre  ha  totz  temps  gauhsenz  170 
fin,  e  li  festa  que  ja  non  aura  terme.  Per  aco  vos  ai  dih  de 
sus  del  serpent  queja  lue  non  lai  aura,  carper  lo  serpent  obret 
primerament  lo  rovil  de  la  soa  enveja  le  diabolz,  &  en  eis  pas 
ol  fon  malezehz.  E  per  aco  en  lue  benezihg  non  pot  esser  ni 
estarcausa  malezeita.  Enveja nasque(s)t  primerament d'aquest  175 
angel  de  Sathanas.  Car  el  vi  la  imagen  de  Deu  sagellada  en 
home,  e  car  hom*  podia  parlar  en  aquesta  benazurada  région 
ab  totas  bestias,  aquest  angelz,  qued  avia  eoneeuput  enveja, 
intret  el  serpent  &  amonestet  a  la  moiller  d'Adam^  que  manjes 
del  pom  que  Deus  li  avia  vedat,  que  ja  tan  tost  non  manjaria,  180 
que  el  séria  mortz.  Manjet  en  li  moiller,  pois  fez  en  œanjar  al 
marit.  Et  aqui  eis  cant  ambedui  agron  aici  traspassat  lo  man- 
dament de  nostre  Seinnor,  foron  eissiliat  en  aquesta  terra. 
Et  el  mezeis  le  diabolz,  atrobaire  e  fazeire  de  tan  gran  fellonia, 
[73  r<»]  fon  atrobatz  ancar  el  serpent,  que  non  n'era  eissitz,  185 
e  receup  en  malédiction  durabla.  Aquest  filz  de  Deu  que,  per 
lo  mandament  de  son  paire,  fez  homen,  per  lanostra  fragilitat 
deinnet  penre  persona  d'orne  &  nan  perdet  sa  deitat.  Aquest 
hom  Jesu  Christ  recobret  aquest  home  qued  era  perdutz,  sof- 
frent  lo  torment  de  la  cros,  elz  batemenz  elz  esquernz  que  li  190 
juzeu  li  fazian.  El  venquet  la  mort  morent,  que  resuscitant 
adobris  paradis.  Car  nenguns  non  deves  aver  doptansa  que 
tuh  aquilque  ereiran  en  Jesu  Christ  la  intraran.En[aquest  pa- 
radis mes  Jesu  Christz  primerament  lo  lairon,  a  cui  donet  signe 
del  fust  en  qued  el  era  pausatz;  e   per  aquest  fust  li  prevari    195 

1  Ms.  ad  home. 


:^h2  LEGENDES   PIEUSES 

cations  dcl  fruli^  fo(s)  dcstruchâ,  &  obère  paradis  a  ]as  sanctas 
armas,  cant  cissirian  dcl  cors.  Et  al  derrier  jorn.can  tuh 
resuscitaran,  (k  cl  Jesu  Christ  obrîra  los  celestialz  règnes, 
que  puscan  intrar.  Por  aizo  totz  hom,  que  la  voira  intrar,  esca 

200  do  mort,  e  corra  a  la  vida,  con  pusca  tornar  en  paradis,  don 
le  nostre  paire  carnalz  Adamps  fou  getatz  en  aquest  eissil.  on 
ha  totz  nos  autres  engenratz.  Nostre  Seinner  nos  ha  ubertas 
las  portas  do  paradis,  que  nos  lai,  don  em  eissit,  puscam  to^ 
nar,  cl  quai  lue  mortz  non  ha  lue,  mas  gauh  perpetualz  la 

205  persévéra.  » 

Domcnz  que  Tapostolz  dizia  aizo  e  predicava  al  pobol,  vec 
vos  subtanamenz  que  vencuns  moutgranz  dolz,  e  granzplorSi 
que  tota  li  genz  plorava;  car  le  filz  del  rei  era  mortz,  e 
plainnia  Tom  moût  fort,   Et  cran  la  annat  [73  v*^]  li  encanta- 

210  dor,  et  cran  se  moût  penat  con  lo  poguessan  resuscitar.  E 
caut  viron  que  reii  non  lur  valia,  acomenseron  a  dir  al  rei 
qncli  deu  Tavian  raubit  c  mes  en  lur  compainna,  que  sia  uns 

• 

dous  aici  con  uns  dclz  es  :  c  E  conven,  reis,  que  tu   li  fassas 
temple  ai  imagen.»  Adonx  venc  Candacis  a  la  regina,  maire 

215  d'a([uest  enfant,  edisli:  «  Donna,  fui  penre  aquestz  dos  en- 
cantadors  c  fai  los  gardar  fort,  e  pregatz  que  vengua  aici  a 
vos  Tapostolz  do  Deu  Matheus;  e  si  el  pot  resuscitar  vostre 
fil,  fais  cremar  aquest  dos  encantadors,  car  tuh  li  mal  que  ve- 
non  en  aquesta  ciutat,  tôt  ven  per  aquestz  dos  falz  encanta- 

220  dors.»  Vai  li  regina,  e  près  onratz  homes  e  coseillers  del 
rei,  e  trames  los  a  saint  Matheu,  e  pregueron  li  qued  annes 
parlar  ah  lo  rei.  Annet  s'en  ab  elz  sainz  Matheus.  Et  aqui  eis 
cant  intret,  li  regina  se  va  getar  a  sos  pes,  e  dis  :  a  Eu  sai 
0  conosc,  apostolz,  que  Deus  t'a  tramés  per  la  salut  delz 

225  homes,  &  tu  es  sos  discipolz  de  cellui  qued  ha  resuscitatz  los 
mortz  e  totas  las  malautias  ha  decassat  delz  cors  delz  homes. 
Per  amor  d'aiso,  seinner,  ven  aizai  &  appella  lo  seu  nom 
sobre  mon  fil,  qued  es  mortz;  &  eu  crez  que,  si  tu  o  fas,  el 
reviura  ben».  Respondet  l'apostolz,  e  dis  li:  «  Encar  non  as 

230  auzit  la  prédication  del  meu  seinnor  Jesu  Christ  per  la  mia 
bocca,  e  dizes  que  be  *  lo  crezes.  Per  amor  d'aizo  sapias  ben 
qued  eu  te  rendrai  ton  fil.»  Intret  Tapostolz  laintre  on  era 

*  Ms.  ue. 


LEGENDES   PIEUSES  363 

le  raortz,  &  estendet  sas  mas   al  cel,  e  dis:  «  Deus  [74  r°] 
d'Abraham,  e  Deûs  d'Isaac,   &   Deus  de  Jacob,  que  per  lo 
nostre  restaurament  tramesist  lo  tieu  unial  fil  del   cel  a  las  235 
terras,  le  qualz  nos  tornes  de  la  error  en  que  siam,  e  nos  fez 
conoisser  te  qued  es  verais  Deus,  membre  te  de  zo  que  nos  dis 
nostre  Seinner  Jesu   Christ,   le  tieus  cars  filz  :  Amen  dico 
vobis  quia  omnia,  que  in  nomine  meo  pecieritis  a  pâtre  meo, 
dabit  vobis.  Verament  vos  die  que  tôt  cant  vos  querres  almeu  240 
paire  per  lo  meu  nom,  tôt  vos   donara.  E  per  zo  que  totas 
las  genz  crezan  que  non  es  autre  deus  poderos,  mas  solament 
tu,  &  que  *  li  paraula  de  la  mia  bocca  qued  eu  afferme  de  te  sia 
vera,  aquest  enfans  resuscite  !  »  Et  ab  aitant  va  penre  sainz 
Matheus  la  ma  de  Tefant  mort,  e  dis  &  appellet  lo  per  so  245 
nom:«  Eufranon,  leva   sus  el    nom   del  meu  Seinnor  Jesu 
Christ.  »  Et  aqui  eis  Tenfas  levet  sus,  sans  e  salz. 

Cant  le  reis  vi    aquest  gran  fahg,  ac   gran  fereza  e  gran 
gauh  en  son  cor,  &  comandet  aqui  eis  qued  hom  aportes  coro- 
nas  d'aur  &  riquas  polpras,  &  aver  moût,  qued  hom  dones  a  250 
saint  Malheu,  &  trames  mesatges  per  totas  las  autras  ciutatz 
e  per  totas  las  terras,  que  tuh  venguessan  ad  aqiiesta  ciutat 
on  el  estava,  per  vezer  Deu,  qued  i  era  vengutz  en  semblansa 
d'ome.  Venc  totz  le  pobolz  de  la  terra,  ab  candelas  &  ab  lam- 
pezas  &  ab  encens  &  ab  lur  offerendas  &  ab  lur  sacriûzis  ;  &  255 
can  fon  totz  le  pobolz  acampatz,  sainz  Matheus  lur  acomenset 
a  parlar  [74  v°]  en  aici  :  «  Praire  e  serors,  eu  non  soi  mingua 
deus,  mas  sers  soi  del  meu  seinnor  Jesu  Christ,  fil  de  Deu 
omnipotent,  que  m'a  trames  aici  a  vos,  que  laisses  la  error  de 
las  ydolas  que  coles,  e  vos  tornes  al  verai  Deu.  E  si  vos  autre  260 
cujas  e  crezes  qued  eu  sia  deus,  que  soi  hom  aitalz  con  huns 
de  vos  autres,  majorment  deves^creire   en    aquest  deu,  del 
quai  eu  soi  hom  e  sers,  &  en  cui  nom  eu  ai  resuscitat  aquest 
mort,  lo  fil  del  roi.  Et  vos  tuh  qued  entendetz  aquesta  sainta 
razon,  aquest  aur  &  aquest  argent  &  aquestas  coronas  estas  265 
denant  mos  oilz,  e  fais  en  un  temple  a  nostre  Seinnor,  el  quai 
nos  puscam  acarapar  per  auzir  la  paraula  de  Deu.  » 

Can  le  pobolz  totz  auzi  aizo,  preseron  tôt  Taver  qued  avian 
aqui  aportat,  e  feron  en  una  gleisa,  &  ac  i  ben  caranta  milia 
homes  qued  i  obreron,  &  agron  la  en  meinz  de  trenta  jornz  270 
compliJa.  E  can  fon  fâcha,  apellet  la  sainz  Matheus  Resur- 

1  Ms.  qui. 


^h\  LÉGENDES  PIEUSES 

If:  t  ion,  c.'ir  li  n\surrec  lions  del  mort  fon  ucaîsons  de  b&?tir 

St'flil  fin  f  fin  Mat  heu»  in  ecclesia  annos  viginii  e'j\  //'et,  et  «w<- 
titult  /ireshijti'rosvt  (liacnnes per  civilates  et  caêtelias,  elordinatit 
f'fiinf'opoXfft  mu/fns  fabricavit  ecclesia».  Sainz  Matheos  tenc  la 
srt/.  do  la  ^^loisa  vint  6:  très  anz,  ai  establi  preveîres  À  dia- 
<|U<*s,  cv  adordoiiot  ovosqiies  per  las  ciutatz,  e  basti  moatis 
^'icisa-;  pcr  la^<  vihi.s  a  perlos  castelz.  Fon  se  fahg  batejar  le 

'.'H)  ivis  K;;lipptis  (X  sa  iiioillcr  Kuphanisia  e  ses  filz  Ëaphranoo, 
t\\u\  fon  rcâiisc.itat/,,  c  sa  illla  [75  r^]  Epigenia,  qued  estet  Ter- 
p'iis  ijo  Ciirist,  (^  (|uo  fez  far  un  monestier,  en  qaed  esUbli 
sain/,  M  allions  dozonUs  donnas.  Can  li  encantador  Zoroes  À 
Arfaxat  viron  a  i/o,  a<^n*on  paor  c  fugiron  s'en  en  Persia.  £ 

-js.")  rar  sorian  U'o])  l(>n^^'ls  no  vas  de  comlar  quanz  cex  enluminet 
sain/.  MatliiMis,  ni  (^nan/  paralites  curet,  ni  quanz  homes  des* 
linipt,  (Ici  po(l(>r  (i(d  diabol,  ni  quanz  mortz  resuscitet,  ni  quan 
hons  lioin  ni  canl  christiaiis  fon  pois  le  reis,  ni  sa  moillercaot 
lioiia  fiMnona,  ni  cant  dovota  fon  a  Deu  totali  compainnadel 

\*\)')  l'iM,  ni  con  dostrnissoron  totz  los  temples,  ni  fraisseron  totas 
las  y«i()las,  toi  ai/o  aici  con  vos  ai  dili  laissarem  estar  per  las 
loii^^Ms  novas  ({no  tson,  <x  dironi  vos  de  qualmanera  el  celebrdt 
(?  l'iMîcînj»  passion. 

Ijo  rcîis  Kj^lippus  cant  ac  complit  sos  jornz  e  fon  veilz,  et 

.?'.).■)  ol  iranspassot  d'a([aost  sojjflo,  ûc  annet  s'en  a  nostre  Seinnor; 
cN:  IlvriMis  t«'no  pois  son  renj^nio.  Aqucst  Yrcus  volgra  penre 
por  nioilloi*  l<][)i,LriM)ia,  la  filla  dol  rci  qued  era  mortz,  qued  era 
njont'fjfna  sa^^rala  a  Deu  cV  avia  roceuput  lo  saint  vel  de  la 
nian  do  Tapostoi  cV  ostava  bon  ah  dozentas  moneguas.  Et  avia 

!U)i)  ^^ran  osporansa  a(|nost  folz  rcis  que  Tapostolz  sainz  Matheus 
li  poj^uos  son  ooralijro  tornar  atras  ad  aquesta  Epigenia,  con 
ol  la  popfuos  avor  por  moillor.  E  dizia  li  :  «  Tota  la  meitat  del 
nuMi  roj^no  to  «lonarai,  si  solanient  la  pos  convertir  con  eu 
Taia  por  moillor.  »  llospondot  Tapostolz  e  dis  :  a  Rëis,prega 

1^05  clrooliuroramontz  zo  [75  v"]  douras  ',  o  fai  ajostar  en  aquel  lue, 
on  ou  soil  pivdicai'  la  paraula  do  Dou  al  pobol,  totas  las  mo- 
noguaâ  dol  nionostor,  on  os  Epigenia,  <k.  ella  sia  i  ab  ellas, 
cVl  adonx  au/iras  can  granz  bons  lur  dirai  de  bon  maridatgo. 
Car  Dous  recep  bon  maridatge,  e  moût  11  es  agradavolz.  » 

•  SiV.  Suppb  que  après  so? 


LEGENDES  PIEUSES  365 

Cant  Yrtacus  auzi  aizo,  ac  moût  gran  gauh,  e  comandet  que  310 
venguessant  totas  las  vergens  &  Epigenia  ab  ellas,  per  auzir 
la  paraula  de  la  bocca  de  Tapostol,  quais  qued  Epigenia  vol- 
gues  que  fos  moiller  d'Yrtaci.  Cant  totas  las  vergens  foron 
vengudas,  e  totz  le  pobolz,  e  feron  pas,  Tapostolz  uberc  sa 
bocca,  e  dis  :  «  0  vos  totas,  fillas  de  sancta  Gleisa,  aujatz  ma  315 
paraula,  aujatz  &  entendetz  zoque  eu  vos  dirai,  que  remangua 
escrich  en  vostres  coratges.  Le  nostre  Deus  benezi  primera- 
ment  nossas.  E  totz  raatrimonis,  cant  es  ajostatz,  deu  esser 
leialment  e  bona  fah,  e  que  sia  adornatz  d'onestat,  de  bona 
obra,  que  vivan  saintament  &  justa,  &  qued  hom  non  los  320 
pusca  de  ren  repenre,  &  aquel  maridatges  es  adonx  bons. 
Mas  si  uns  reis  ha  hoi  una  moiller,  &  ha  un  sers  que  sia  tan 
tirditz  que  la  li  auze  malviziar,  non   solaraent  fai  failliment 
vers  ella,  anz  fa  vers  son  seinnor  tan  gran  lageza  e  tan  gran 
blasme  que  totz  vins  deuria  esser  cremalz.  Non  per  zo  car  325 
hapreza  moiller,  mas  per  zo  car  era  moiller  de  son  seinnor  lo 
rei  &  ha  la  preza  per  meillurar,  o  per  zo  car  vol  lo  matrimoni 
de  so  seinnor  offendre,  e  que  li  vol  malviziar  sa  moil-[76  r°]- 
1er.  En  aici  es  de  te,  o  tu,  reis  Yrtacus,  que  tu  sas  que  Epi- 
genia fon  fiUa  del  rei  ton  ancesser,  &  es  se  fâcha  espoza  del  330 
rei   celestial  &  es  sagrada  e  cuberta  del  saint  vel.  De  quai 
manera  poiriastu  penre  ni  tolre  per  razon  sa  moiller  ad  aquel  . 
rei,  qued  es  plus  poderos  que  tu,  e  que  la  prezessas  a  tos  obs 
per  moiller  ?  » 

Cant  le  reis  Yrtacus  auzi  aquesta  paraula,  fon  moutiratz,e  335 
parti  se  d'aqui.  L'apostolz  non  temps  anc  ren;  anz  estet  plus 
alegres,  &  acomenset  adir  :  «  Aujatz  tuh  vos  que  temes  Deu! 
Totz  terrenalz  reis  conoissem  tuh,  e  sabem  que  ten  pauc  sa 
seinnoria,  e  non  pot  gaire  durar.  L'emperis  del  rei  celestial 
es  durables;  et  aici  con  elfai  aver  gauh  tan  granz  que  cors  340 
d'orne  non  los  pot  pensar,  a  toz  celz  que  gardan  la  soa  fen, 
en  aici  dona  tormenz,  que  son  eissit  de  tôt  nombre,  a  celz  que 
se  parton  de  la  soa  fen  e  de  la  soa  sancteza.  E  pois  qued  hom 
temp  la  ira  del  rei,  per  que  non  temera  hom  mais  la  ira  de(l) 
Deu?  Car  li  ira  de  Tome  es  consumada per  tormenz  temporalz,  345 
&  es  complit  en  un  pauc  d'ora.  Mas  li  ira  de  Deu,  aquil  abrasa 
alz  peccanz  durabla  flamma,  que  ja  fin  non  aura.  Per  que 
nostre  Seinnor  Jesu  Christ  e  nostre  Maistre  nos  dis  presen- 


3G6  LEGENDES    PIEUSES 

ment  :  Apud  reges  stabitis,  qui  cum  flagellaf)€i*mt  vos  aud  occi- 

350  derint,  post  hec  non  habent  quid  facient.  Et  ideo  dico  vobis  ne 
timueritis  eos.  Vos  es  tares  davan  los  reis,  e  los  princed,  à 
flagellarant  vos,  &  auciran  vos  ;  mas  pois  [76  v®]  sera  annatz 
totz  lur  poders.  Et  eu  die  vos  o  per  aizo  que  noa  los  temias. 
Mas  cellui  ternes  que,  pois  qued  hom  es  mortz,  ha  poder  de 

355  mètre  Tarma  e  lo  cors  en  la  flamma  &  el  fuc  durable.  Et  eu 
die  a  totz  vos  autres  que  temias  aquel.  n 

Ab  aitant  Epigenia  se  leva,e  val  se  getar  alz  pes  de  Tapos- 
tol,  e  dis  li  :  a  Eu  te  prec,  per  cellui  de  cul  tu  es  apostolz  & 
messatges^  que  tu  pauses  sobre  aquestas  vergens  tans  mans, 

360  e  per  la  toa  paraula  sian  sagradas  a  nostre  Seinnor,  que  nos 
puscam  esçapar  las  meuassas  d'aquest  Yrtaci.Car  domenz  que 
mos  paire  e  ma  maire  eran  viu,  el  lur  prometia  moût  con 
aquest  fah  s'esdevengues  ;  e  car  eil  non  o  volian  far,  mena- 
sava  los  moût.  E  domenz  qued  eil  eran  viu,  el  auzava  aizo  far 

365  ni  essajar  ;  que  fara  el  aoras  que  son  mort?  »  Gant  Tapostolz 
auzi  aizo,ac  gran  fizansa  en  Deu  &  apostot  non  temps  anc  ren 
Yrtacum,  mas  pauset  lo  vel  sobre  lo  cap  d'Epigenia  e  de  las 
autras  vergens,  qued  aqui  eran,  &  dis  aquesta  benedictio  : 
«  Deus,  plasmaire  delz  cors  &  parlaire  ab  las  armas,  le  qualz 

370  non  mesprezas  état  ni  refugas  nuil  home,  ni  nuilla  re,  que 
tu  aias  fah,  non  fas  non  digne  de  la  toa  gracia,  &  es  creaire 
de  tût  cant  es  &  rezesmeire,  tu,  bons  pastre,  tria  aquestas 
toas  ancillas  de  ton  foie,  a  conservar  &  a  gardar  la  corona  de 
la  perpétuai  castitat,  e  cobri  las  de  Tescut  de  la  toa  protectio, 

375  a  tota  obra  de  la  toa  vertut  e  de  la  toa  gloria,  &  appareilla 
lur  que  Ir  toa  sapieza  luresseinnae  a  vencerlas  fail-[77  r**]-lidas 
de  la  carn,  con  ellas  refujon  los  maridatges  de  peccat,  e  qued 
ameriton  ad  aver  lo  maridament  que  ja  non  se  partira,  zo  es 
del  lieu  fil,  nostre  Seinnor  Jesu  Christ.  Senner,  eu  te  quer 

380  que  tu  las  garniscas  d'armas  non  carnalment,  mas  del  poder 
e  de  la  vertut  del  tieu  esperit,  que,  cant  auras  garnit  lur 
menbres  e  lur  sen,  peccatz  non  pusca  reinnar  en  lur  cors,  e 
qued  ellas  vuillan  totz  temps  viure  sotz  la  toa  gracia,  quô 
cel,  qued  es  deffendeire  delz  malz  &  enemix  delz  bons,  non 

385  pusca  penre  venjansa  en  aquestas,  que  son  sagradas  en  lo  tieu 
nom.  Tota  la  calor  de  luxuria  esteinna  en  ellas  li  pluja  de  la 


LEGENDES   PIEUSES  367 

celestial  gracia  ;  e  li  perpetualz  castitâtz  enlumene  en  ellas 
son  lum,  e  li  failla  casta  sia  enbrasada  en  ellas  ;  e  negli- 
gencia  non  lur  don  ucaison  de  laissar.  Verginitatz  siaen  ellas, 
armada  &  ornadad'entera  fen,  d'esperansacertana,  do  caritat  390 
pura,  e  que  lur  coratge  sian  appareillât  de  recebre  la  gran 
vertut  de  continencia,  qued  ellas  poscan  vencer  los  sobrepu- 
jamenz  del  diabol  e  los  divers  enfeinnemenz,  e  qued  ellas 
mespreson  las  presenz  causas,  &  aian  la[s]  futuras.  Aian 
abstinencias  de  carnalz  conduh  ;  &  en  lue  de  manjar  e  de  395 
heure,  aujan  las  sanctas  leissos,  que  per  orations  sian  pagu- 
das,  e  per  éruditions  sian  repletas;  enluminadas  sian  de  vigi- 
lias,  que  puscan  far  la  obra  de  la  virginal  gracia.  D'aquestas 
armas  de  vertutz  aquestas  toas  ancillas  sian  garnidas  dedinz 
e  déferas,  qe  senz  tota  contra-[77  v°l-ria  puscan  *  adimplir  lo  400 
cors  de  virginitat  per  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  rezesraeire 
de  nostras  armas,  ab  lo  quai  es  a  te  honors,  Deus  paire,  &  glo- 
ria  ab  lo  Saint  Esperit,  aoras  &  totas  autras  oras,  &  per  inmor- 
talia  secula  seculorum!  »  Responderon  tuh  :  «  Amen.  »  Ab  ai- 
tant  celebret  la  messa,  e  curaeneguet  tôt  lo  pobol,  de  josta  405 
Tautar  on  avia  sagrat  lo  cors  de  Christ  ;  &  aqui  receup  mar- 
tyri.  Car  cant  ac  son  mestier  coraplit,  et  le  reis  Yrtacus  tra- 
mes sons  carnificers  armatz  ;  e  van  penre  saint  Matheu,  e 
iieron  li  las  mans  detras  lo  dos,  e  pois  tailleron  li  la  testa, 
&  d'aital  manera  l'apostolz  de  Jesu  Christ  receup  martiri.  410 

Cant  le  pobolz  o  saup,  acomenseron  tuh  ensemps  ad  annar 
ab  fuc  al  palais  del  rei,  e  volgron  cremar  lo  palais  el  rei 
intre.  Can  li  preveire  e  li  clergue  e  li  discipol  de  saint  Ma- 
theu viron  aici  correr  lo  pobol  ves  lo  palais,  &  eillur  acomen- 
seron a  pregar,  &  a  dire  :  «  Seinnor  fraire,  non  veillas  far  415 
contra  lo  mandament  de  nostre  Seinnor;  car  can  li  juzeu  lo 
prezerou,  e  sainz  Peire  trais  son  glazi,  e  taillet  l'aureilla  ad 
un  d'aquelz  que  tenian  nostre  Seinnor,  qued  avia  nom  Malc, 
e  can  nostre  Seinner  o  vi,  non  vole  qued  hom  rendes  mal  per 
mal,  e  dis  (qued)  a  saint  Peire  que  tornes  l'aureilla  en  son  lue  ;  420 
&  aqui  eis  can  li  ac  pausada,  fon  sanada  e  guerida.  E  dis 
nostre  Seinner  a  saint  Peire:  «  Peire,  si  eu  me  volia,  non 
me  trametria  le  meus  Paire  dotze  légions  d'angelz  [  78  r°  ]  o 

*  Ms.  puscam. 


3G8  LEGENDES   PIEUSES 

plus,  qued  aucirian  toz  aquestz?  «  Mas  per  amor  d*aizo,  cele- 
425  brem  tuh  ab  gran  gauh  lo  martiri  de  Tapodiol,  &  aguardem 
cui  Deus  voira  adordenar  en  son  lue.  »  Epigenia,  qued  era  sa- 
crada  vcrgena  de  Christ,  lot  cant  avia  en  aur  &  en  argent  & 
en  peiras  preciosas,  ni  aver  poc,  tôt  o  portet  alz  preveires,  e 
dis  lur  qued  en  bastissan  gleisa,  en  honor  de  Tapostol,  e  laa 
430  sobras  donessan  totas  alz  paupres.  «  Me  laisas  estar  ab  Yrco, 
car  lo  conven  qued  eu  aia   gucrra  ab  el  &.  tenson.  »  Aprop 
aizo  Yrtacus  le  reis  fez  venir  a  se  las  moillers  de  totz  los  rix 
homes,  e  cujava  se  que  per  alcuna  razon  ellas  poguessan  con- 
vertir Epigenia,  con  el  Tagues  per  moiller,  e  trames  lai  las 
435  donnas  on  ella  era.  Et  anc  per  nuilla  ren  convertir  non  la 
pogron.  Cant  Yrtacus  o  vi,  fezappareillar  el  mehg  de  la  plassa 
un  gran  fuc,  e    fez  inz  mètre  Epigenia.  Cant  le  fux  fon  atj- 
satz  tôt  entorn  ella,  e  Tangelz  de  nostre  Seinnor  apparec  li 
ab  saint  Matheu,  e  dis  li  :  «  Epigenia,  sias  ferma,  e  non  temias 
440  aquestz  fux,  car  ad  aquelz  que  lo  fan  mes,  ad  aquelz  tornara 
de  sobre.  »  Et  ab  aitant  can  le  fux  fon  abrasatz  tôt  entorn  Iji 
vergen,  e  Deus  fez  levar  un  vent  moût  fort,  et  ostet  li  fuc,  e 
fez  Tannar  al  palais  del  rei  Yrtaci,  e  cremet  lo,  de  guiza  que 
nuilla  ren,  que  laintre  fons,  non   poc  hom  acorre  ni  traire, 
445  qued  a  penas  soletament  le  reis  ab  un  fil  seu  s'en  poc  eissir. 
[  78  v°  ]  Mas  meilz   li  vengra  que  fos  crematz  laintre,  carlo 
diabolz  intret  aqui  eis  al  cors  a  Tenfant  &  acomenset  lo  moût 
fort  a  trabaillar,  &   el  mezeis  le  diabolz  liet  li  las  mas  detras 
lo  dos,  e  pois  de  gian  cors  menet  loa  la  sopoutoura  de  l'apos- 
450  toi,  et  dizia  aqui  e  manifestava  el  mezeis  las  tracions  elz  engaï^* 
de  son  paire.  Mezesrae  Yrtacum  feri  de  lebrozia  deus  lo  »^^ 
entre  alzpes.  Et  el,  can  vi  que  non  poc  esser  curatz  per  m^^^' 
cina  nuilla  de  metge,  ni  per  nuil  encantament,  vai  el  me^  ^^ 
penre  un  glazi  &  aucis  se.  Et  aici  con  el  avia  fahg  transf(^  ^'^ 
455  lo  cors  de  Tapostol,  en  aici  transforet  lo  seu  ventreil  ab  ^^^ 
glazi.  g 

Totz  le  pobolz  ac  gran  gauh,  car  en  aissi  se  fon  mortz 
van  penre  lo  fraire  d'Epigenia,  qued  avia  nom  Behor,  loq   "^^ 
avia  batejat  sainz  Matheus  e  tornat  a  la  fen  de  Jesu  Chr-^  ^  ♦ 
460  per  la  predicacion  d'Epigenia  sa  seror,  e  feron  en  rei;  &  ^^^ 
joves  hom,  d'état  de  vint  e  cinc  ans  ;  &  acomenset  a  reinn  ^^> 
e  rengnet  seissanta  e  très  anz.  Et  aici  visquet  oitanta  &  .vi  V* 


LEGENDES   PIEUSES  369 

anz  ;  e  domenz  qued  el  vivia,  establi  e  fez  d'un  seu  fil  rei. 
E  vi  los  filz  de  sos  filz  entro  en  la  carta  génération,  et  establi 
per  tota  sa  terra  gran  pas  e  ferma  delz  Romas  &  d'aquelz  de  465 
Persia.  Totas  las  terras  d'Ethiopia  foron  adimplidas  de 
gleisas,  las  qualz  i  son  ancar  entro  al  jorn  d'oi,  e  fan  ancar 
gran  festa  per  Epigenia,  la  filla  del  rei.  E  D  jus  fa  ancar  granz 
meravillas  a  la  confession  de  saint  Mallieu  Tapostol,  le  qualz 
escrius  primeraraent  Favangeli  de  nostre  Seinnor  Jesu  470 
Christ  en  Ebreu.  Cui  est  honor  et  gloria,  per  tnfi'[79i'^]-7iita 
secula  seculorum.  Amen. 


XXV 

PASSIO  SANCTI  SIXTI  &  SANCTI  LAURENTII 

MARTYRUM. 

Decius  imperator  tenuit  beathsimum  senem  Sixtutn,  episco- 
pum  romanum,  cum  omniclero  suo  et  reclusit  in  custodia  publica, 
et  fuerunt  ibi clausi  multisdiebas,  Decius,  Temperaire  de  Roma, 
près  saint  Sixst,  qued  era  apostolis  ab  totz  sos  clergues,  e  fez 
lo  mètre  en  carcer.Can  venc  un  jorn,  qued  eilagronlongament  5 
estât  près,  e  Decius  Temporaire  &  Valerians,  qued  era  jutges, 
comanderon  qued  hom  lur  aduisses  davan  en  la  plassa,  vezent 
lo  pobol,  Fevesque  ab  sos  clergues.  E  can  fon  denaut  elz,  e 
Decius  César,  Temperaire,  li  dis  :  «  Sas  tu  per  qued  es  près, 
ni  aduh  aici  davan  nos,  vezent  tôt  lo  pobol?  »  Respondet  10 
saint  Sixst,  e  dis  :  «  Eu  o  sai  lo  ben.  »  Decius  Temperaire  dis  : 
«  Ara  0  fai  de  guisa  que  tulig  aquist  o  sapian,  per  zo  que  tu 
vivas  e  ta  clerzia  puscha  creiscer.  »  Sainz  Sixst  respondet  : 
«  Verament  o  ai  eu  fah,  et  o  farai,  e  li  meu  clergue  seran  cre- 
gut.  »  L'emperaire  dis:  «  Per  amor  d'aizo,  sacrifia  alz  deus  15 
non  mortalz,  e  seras  princes  e  seinner  de  totz  los  autres  pre- 
veires.  »  Respondet  le  sainz  evesques  :  «  Eu  ai  totas  horas 
sacrifiât  e  sacrifiarai  a  Deu  lo  Paire  poderos  &  a  nostre  Sein- 
nor  Jesu  Christ  &  al  Saint  Esperit  sacriflzi  pur  e  net.»  Adonx 
comandet  Temperaire  qued  hom  lo  menés  al  temple  d'en  20 
Mart,  e  que  lo  fezessan  aqui  sacrifiar.  Mas  el,  per  nuil  tor- 
ment  qued  eil  li  fezessau,  non  lo  pogron  far  sacrifiar  ;  e 
cant  eil  o  viron,  raeseron  lo  en  una  carcer  ab  diaques  seus, 

25 


370  LEGENDES  PIEUSES 

Felicissi-[79v°]-mura  <k  Agapitum.E  can  l'en  menavan,  sainz 

25  Laurenz  Tarchidiaques  li  acomenset  a  dir  aitalz  paraulas  : 
«  0  tu,  paire,  on  annaras  seii  ton  fil?  0  tu,  sainz  preire,  on 
tenras  senz  ton  diaque?  Tu  non  avias  lo  usât,  qued  offrissas 
ton  sacrifizi  senz  servidor.  0  tu  paire,  que  t'es  desplagut  en 
me?  As  doux  après  qued  eu  forIinne?0  as  près  autre  sirvedor, 

30  que  sia  plus  fizelz,  a  cui  as  comandat  lo  sagrament  del  sanc 
de  nostre  Seinnor?  Aici  con  soi  agutz  to-î  compainz  el  sacri- 
fizi del  cors  de  Jesu  Christ,  deuria  eu  esser  tons  compainz  el 
sacrifizi  del  tieu  cors.  Vejas,  seinner,  que  le  tieus  juizis  sia 
drechuriers,  car  mal  o  fale  maistre,  can  raespresalo  discipol. 

35  Abrahamps  oiTerc  son  fil;  sainz  Peire  trames  saint  Esteven 
denant  se  a  nostre  Seinnor.  E  tu,  paire,  demonstra  el  tieu  fil 
latoavertut.  Offre  primerament  mo  cui  asesseinnat,  e  tramet 
me  primer,  que  plus  segurament  puscas  annar  per  la  via  on 
deves  annar  a   la   corona   de  martiri.  »  Adonx   li  dis  sainz 

40  Sixst  :  «  Filz,  eu  non  te  laisse  pas  ni  te  desampare.  Masmajer 
corona  de  raartire  t'es  dcguda.  Nos,  car  em  veil,  recebrem 
plus  leu  batailla;  et  a  te,  qued  esjovens  hom,  coven  qued  aias 
major  Victoria  del  tjrant,  que  soffrias  major  torment.  E  non 
veillas  plorar,  qued  ades  venras  a   me.    Apres  très  jornz  me 

45  segras.  Car  primerament  deu  vencer  le  maistre  la  batailla, 
e  pois  tu  deves  li  querre  adjutori.  Mas  pren  tôt  Taur  e  l'ar- 
gent e  tôt  [80  ro]  lo  thesaur  de  la  gleisa,  e  départ  o  a  celz 
que  vejaire  ti  er  )). 

Cant  sainz  Sixst  ac  donat  aquest  poder  a  saint  Laurens,  an- 

50  net  sainz  Laurenz  per  la  terra,  &  aqui  on  sabia  los  clergues 
paures,  qued  estavan  escondut,  per  la  fen  de  Jesu  Christ,  por- 
ta va  lo  thesaur,  e  donava  en  a  cada  un  zo  qued  obs  li  era.  Can 
venc  aprop,  l'emperairc  dis  qued  hom  li  menés  davant  saint 
Sixst.  Cant  fon  aqui  davant  el  en  la  plassa,  &  Felicissimus  & 

55  Agapitus  ab  el,  e  Temperaire  Decius,  pies  d'ira,  li  acomenset 
a  dir:  «  Tu  es  veilze  nos  dariam  te  bon  conseil.  Auz,  e  fa  nos- 
tre mandament,  &  sacrifia  alz  deus.  »  Respondet  sainz  Sixst  e 
dis  :  «  Caitiu,  tu  acoseilla  te  mezeis,  &  non  voillas  tas  paraulas 
getar  en  va.  Mas  fai  penetencia  del  sanc  delz  sanz,  qued  as 

00  escampat.  »  Adonx  Decius,  per  lo  conseil  de  Valerian  lo 
jutge,  comandet  qued  hom  lo  menés  al  temple  d'en  Mart,  e  si 
non  volian  sacrifiar  qued  hom  aqui  eis  lur  tolgues  laS  testas. 


i 


LEGENDES   PIEUSES  371 

Menet  los  hom  foras  de  la  ciutat,  ad  un  temple  d'en  Mart  ;  e 
can  foron  aqui,  sainz  Sixst  acomenset  a  dir  al  temple  :  «  Des- 
truet  te  C hrtstus  filius  Deivivil  Destruia  te  Christ,  le  filz  de  Deu  65 
viu!»  Canttuhgli  Christian  agronrespondut:  aAm^w»,  aquieis 
cadec  una  granz  partida  del  temple, &  fon  tota  atrissada.  Adonx 
sainz  Laurenz  acomenset  a  cridar  :  «  Sainz  paire,  non  me 
laisses,  car  aquelz  tresaurs,  que  tu  m'avias  comandatz,  ai  totz 
despendutz.  »  70 

Li  ministre,  cant  auziron  delz  thesaurs,  prese-[80  v**]-roa 
saint  Laurenz,  Tarquidiaque  Saint  Sixst,  &  Felicissimon  &  Aga- 
pitum  meneron  davan  lo  temple  d'en  Mart,  &  aqui  taillet  lur 
hom  las  testas,  ,viij,  idiis  augvsH.  Can  venc  la  nohg,  e  lo  ven- 
gron  li  clergue  e  li  Christian  &  coilliron  los  cors  del[z]  sainz  75 
martirs,  e  sebeliron  saint  Sixst  en  una  crota  el  cimenteri  de 
Calixti,  enmesesmala  via  ;  los  autres  martirs,  Felicissimum& 
Agapitum,  sebeliron  atressi  en  mezesrae  lo  sementeri.  Ab 
aquest  foron  atressi  martiriat  autre  quatre,  aici  con  hom  o 
troba  legent  en  la  gesta  delz  evesques,  Januarius,  Magnus,  80 
Vincencius&  Stephanus,  &  atressi  fon  martirizatz  ab  elz  Beatus 
Quartus,  aici  con  o  escrius  sainz  Cjprians.  Aquest  sainz  Sistz 
fon  natz  &  esseinnatz  ad  Athenas,  e  fon  primerament  philoso- 
pus,  e  pois  fon  discipolz  de  Christ.  Et  estet  un  an  en  Tevescat 
et  .X.  mes  &  .xxij.  jornz*.  85 

Aici  con  dih  vos  avem  desobre,  sainz  Sixst,  can  annet  amar- 
tire,  comandet  los  thesaurs  de  la  gleisa  a  sant  Laurenz.  Annet 
s'en  sainz  Laurenz  en  un  poi  qued  avia  nom  Celion,  on  estava 
una  donna  qued  avia  estât  .xxx.ij.  anz  vezoa;  e  ténia  escondutz 
en  sa  maison  moutz  crestians  e  moutz  clergues  e  motz  pre-  90 
veires.  Venc  s'en  laintre  sainz  Laurenz  &  aportet  los  thesaurs 
de  la  gleisa,  e  vestimenz,  e  donet  lur  o  a  cada  u,  segon  qued 
obs  li  era,  &  lavet  a  totz  los  pes.  Aquil  donna,  Ciriaca  qued 
avia  nom,  vai  se  getar  a  sos  pes  de  saint  Laurenz,  &  acomenset 
li  a  dir  :  «  Senner,  eu  te  conjur  per  Jesu  Christ  que  tu  pauses  95 
[tas  mas]  sobre  mon  [81  r°]  cap,  car  moutgrandolore  moût  gran 
enfermetat  i  sofri.  »  Sainz  Laurenz  seinnet  la  e  pauset  li  sas 
mas  desobre  lo  cap,  &  lo  ^  drap  ab  que  terzia  los  pes  del  sainz, 
<&  aqui  eis  fon  sanada  e  guerida. 

*  Oa  avait  d'abord  écrit  .xxx.iij.  Le  dernier  x  et  le  second  i  ont  été  grattés. 
2  Ms  la. 


372  LEGENDES   PIEUSES 

100  Ciint  0  ac  falig,  moc  se  craqui  ai  annet  s'en  en  una  carrera 
qued  hom  appellava  Canarius,  éi  venc  a  la  maison  d'un  qued 
avia  nom  Narcissi  &  era  cliristians,  Si  atrobet  laintre  moutz 
christians  ajostatz,ques'escondian  per  Temperador,  &lavetlos 
pes  a  totz,  <k  pois  donet  lur  del  tresaur.  Laintre  en  aquella  mai- 

105  son,  avia  un  home  cec  qued  avia  nom  Crcscencius,  &  acomen- 
set  a  pregar  saint  Laurentz  que  li  pauses  sa  man  sobre  sos  oilz. 
Sainz  Laurenz,  cant  o  auzi,  acomenset  a  plorar,  e  dis:  «  Nos- 
tre  Seinner  Jesu  Christz,qaed  uberc  los  oilz  de  celui  qued  era 
natz  cex,  el  enlumine  los  teus  oilz  !  »  E  fez  li  cros  sobre  los 

110  oilz,  <k  en  eis  pas  foron  enluminât,  o  vi  clarament.  Cant  sainz 
Sixst  Tevesques  fon  menatz  a  martire  ab  dos  diaques  sens,  e 
domenz  que  l'en  menavan,  e  lo  venc  sainz  Laurenz  &  acomenset 
moût  fort  a  cridar  :  «  Sainz  paire,  non  me  voillas  laissar,  car 
los  thesaurs,  que  tu  m'avias  comandat,  ai  totz  despendutz.  m 

115  Cant  li  cavalier  de  Temperador,  qued  eran  aqui,  auziron  del 
tresaur,  van  penre  saint  Laurenz  &  liureron  lo  al  veguier, 
qued  avia  nom  Pateriiion.  Et  aquel  mandet  a  Temperadore 
fez  saber  que  près  avia  l'arquidiaque  Laurenz,  qued  avia  rescos 
los  thesaurs   de  l'evesque  [81  v°]  Sixst.  L'emperaire,  canto 

120  auzi,  ac  gran  gauh,  e  comandet  qued  hom  lo  li  aduisses 
davant.  E  cant  fon  denant  el,  (k  ac  auzit  sa  razon,  liuret  loal 
jutge  Valerian.  Valerians  donet  lo  en  garda  ad  un  qued  avia 
nom  Ypolite.  Aquest  Ypolites  mes  lo  en  sa  carcer,  ab  moutz 
autres  que  n'i  avia. 

125  Laintre  en  la  carcer  avia  un  home,  qued  avia  nom  Lucillus, 
&  era  cex.  E  dis  li  sainz  Laurenz  :  «  Lucille,  crez  en  Jesu 
Christ,  lo  fil  de  Deu,  6i  bateja  te,  &  recobraras  ton  vezer.  » 
Respondet  Lucilliis,  e  dis  :  «  Totz  temps  ai  désirât  con  ea 
fons  batejatz  el   nom  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ.  »  Ab  ai- 

130  tant  sainz  Laurenz  christianet  lo,  e  pois  fez  se  aportar  d'aigua, 
e  batejet  lo  ;  et  aqui  eis  sei  oil  foron  enluminât.  Can  saupron 
per  la  vila  aquesta  meravilla,  qued  ac  fahg  sainz  Laurenz» 
venian  moût  cec  en  la  carcer  on  era  sainz  Laurenz,  e  pausava 
lur  las  mans  sobre  los  oilz,  &  eran  enluminât,  Cant  Ypolitus, 

135  quel  ténia  en  sapreizo,vi  aizo,  crezet  en  Jesu  Christ,  e  dis  a 
saint  Laurenz  que  lo  batejes.  Pois  mandet  Valerianus  le  jut- 
ges  qued  hom  li  aduisses  saint  Laurenz  denant.  E  can  fon  de- 
nant el,  et  el  li  dis  :  «  Laurenz,  laissa  aquesta  follia,  et  rent 


LEGENDES   PIEUSES  37  3 

nos  lo  thesaur  de  Sixst,  que  nos  sabem  qued  tu  as  rescost.  » 
Respondet  li  sainz  Laurenz,  e  dis  :  «  Dona  me  espazi  de  dos  140 
jornz  o  de  très,  e  pois  aportarai  los  te  davant.  »  Larguet 
Tom  ;  e  can  fon  largatz,  annet  per  la  ciutat,  &  acampet  los 
paupres,  [82  r°]  elz  frevolz,  elz  cex,  elz  clops,  e  mes  los  en  la 
maison  d'Ypolite.  Valerians  fez  saber  a  Temperador  que  Lau- 
renz avia  quist  espazi  de  très  jornz,  e  pois  rendria  los  the-  145 
saurs. 

Aprop  très  jornz,  sainz  Laurenz  venc  al  palais  de  Salusti,  e 
dis  li   Decius  l'emperaire  :  «  On  son  li  thesaur  qiie  tu  avias 
promes  que  rendrias?  »  Ab  ai  tant  sainz  Laurenz  eis  s'en  foras, 
&  ac  acampatz  totz  los  paupres,  &  fez  los  toz  intrar  el  palais,    150 
e  dis  :   a  Emperaire,  aizo  son  li  thesaur  durable,  que  ja  non 
amermaran,  anz  creisson  cadajorn;  e  tuhg  podon  lo  aver, 
aquest  thesaur,  e  cada  uns  hom  pot  Taver  tôt.  »  Valerians  le 
jutges  acomenset  a  dir  :   «  Q[uid]  varias^  permulta  ?  Per  que 
nos  vas  aici  essajant?  Sacrifia  alz  deus  &  oblida  aquestas   155 
artz  encantairitz  en  que  te  fizas!  »  Respondet  sainz  Laurenz, 
e  dis  :  «  Per  que  vos  destrein  tant  le  diabolz  que  vos  diguas  alz 
christians  :  Sacrifiatz  alz  diabolz  ?  »  Gant  Temperaire  Decius 
auzi  aizo,  coraandet  qued  hom  lo  despoilles,   &    qued  hom 
lo  bâtes  ab  aguilensiers.  E  domenz   qued  hom  lo  batia,  &  el   160 
dizia  :  «  Eu  ren  gracias  al  meu  Seinnor  Jesu  Christ,  que  vol 
qued  eu  sia  en  la  compainna  delz  seus  sainz  martirs.  Mas  tu, 
mesqui,  zo  dis  a  l'emperador,  tormenta  ta  ira  e  tos  forssenz.  » 
Adonx  dis  Temperaire  :  «  Levatz  lo,  &  tormentatz  lo  en  totas 
maneras   qued   hom   pot  nuil  home  tormentar.  »  Van  penre   165 
sanz  Laurenz  e  lieron  lo  ab  cadenas,  e  meneron  lo  al  [82  v®] 
palais  de  Tiberii.  L'emperaire  fon  en  un  temple  d'en  Jupiter, 
qued  era  laintre  el  palais,  &  sez  se  en  una  cadera,  e  menet  li" 
hom  denant  saint  Laurenz.  Cant  fon  denant  el,  acomenset  li  a 
dir  :  «  Sacrifia  alz  deus,  &  non  te  voler  fizar  el[z]  thesaurs  qued   170 
has  rescondutz.  »    Sanz   Laurenz  respondet  desliuramenz  : 
«  Veramentme  fiz  eu  en  mos  thesaurs,  &  en  soi  ben  segurs.  » 
L'emperaire,  cant  o  auzi,  fon  moût  iratz,  e  comandet  qued 
hom  lo  bâtes  ab  fustes.  E  domenz  qued  hom  lo  batia,  el  cri- 
dava  a  l'emperador,  e  dizia  :  a  Ar  podes  conoiscer,  mesqui,    175 

^  Ms.  Quarias. 


374  LEGENDES   PIEUSES 

qued  eu  me  fitz  tant  el[z]  thesaurs  de  Christ  que  los  tieus  tor- 
menz  non  senti.  »  Can  Temperaire  o  auzi,  comandet  qued  hom 
li  aj estes  al  latz  platas  de  ferre  ardens  ;  e  cant  o  agron  fahg, 
sainz  Laurenz  acomenset  a  dire  :  «  Domine  Jesu  Christe,  Deusde 

180  Deo,  miserere  met  servo  tuo,  quia  accusatus  non  negavi  nomen 
sanctum  tuum,  int^rroyatus  te  Chrislum  dominum  J(^sum  confes- 
SU8  sum,  Seinner  Jesu  Christz,  Filz  de  Deu,  aias  raerce  de  me, 
que  soi  tos  sers,  car  eu  accusatz  non  ai  denegat  lo  tieu  saint 
nom,&  ai  ades^onfessat,  cant  eil  me  demandavan,  te,  Seinner 

185  Jesu  Christ.  »  Ab  aizo  eil  Tacomensavan  moût  fort  a  batre 
ab  massas  de  piump.  E  domenz  qued  eil  lo  batian,el  acomen- 
set a  dir  :  «  Seinner  Jesu  Christ,  que  per  la  nostra  salut  dein- 
niest  recebre  la  forma  deto  sers,  que  nos  desliuressas  delser- 
vizi  del  diabol,  recep  lo  meu  espcrit  !  »  Ab  aitant  e  vec  vos 

190  una  votz  de  cel,  que  li  dis:  «  Laurenz,  ancar  te  son  degu(s)t 
ma-[83  r^]-jor  torment.  »  Ab  aitant  va  l'om  penre,  &  esteudet 
Fom  en  un  estrument,  e  liet  Tom  aqui,  &  acomenset  Tom  meut 
malament  a  batre.  E  domenz  qued  hom  lo  batia,  &  el  aco- 
menset gracias  a  rendre  a  nostre  Sennor,  <k  dizia  :  «  Benezeihg 

195  sias  tu,  Seinner  Deus,  Paire  de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ, 
que  nos  has  donat  la  toa  misericordia,  que  non  aviam  ameri- 
tada.  Mas  tu,  Seinner,  per  la  toa  pietat,  dona  nos  aquella  gra- 
cia, qued  aicel,  que  son  aioi  entornme,  conoscan  que  confor- 
tas los  tieus  sers.  » 

200  Aqui  eis  uns  delz  cavaliers  qued  estavan  aqui,  qued  avia  nom 
Roman,  crezet  en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ,  e  dis  a  saint 
Laurenz  :  «  Eu  vei  qued  uns  hom  trop  belz  esta  aqui  ab  te, fî 
ten  un  drap  ab  que  torca  tos  menbres  del  sanc.  Et  eu  conjur 
te  per  Jesu  Christ,  que  t'a  trames  son  angel,  que  tu  non  me 

205  laisses.  »  Ab  aitant  levet  hom  saint  Laurenz  d'aquel  estru- 
ment, &  desliet  Tom  e  rendet  Tora  ad  Ypolite  laintre  al  palais. 
Venc  Romas  &  aportet  aigua  en  una  conca,  e  pauset  la  alz  pes 
de  saint  Laurenz,  e  preguet  lo  que  lo  batejes.  "Vai  sainz  Lau- 
renz e  benezi  Taigua,  e  batejet  lo.  Cant  l'emperaire  auzi  que 

210  Romans  s'era  aici  fahg  batcjar  a  saint  Laurenz,  fon  mout 
iratz,  e  comandet  qued  hom  lo  bâtes  ab  fustes  &  ab  paiz.  Et 
enanz  qued  hom  Tapelles,  el  acomenset  a  cridar  :  «  Christian^ 
soi,  »  Ab  aitant  Temporaire  comandet  qued  homlo  menés  foras 
de  la  ciutat,  e  qued  hom  li  tailles  lo  cap.  MaenetTom  foras  de 


LEGENDES   PIEUSES  375 

laciutat,  e  tailletlihom  latesta,  segonlo  coman-[83v**]-dament  215 
de  Temperador,  v,  idus  augusti.  Cant  venc  la  nohg,  e  lo  venc 
le  praire  Justis,  e  près  lo  cors  e  sebeli  lo  en  una  crota  en 
camp  Vera. 

Can  venc  en  aquella  eissa  nohg,  Decius  Temperaire  venc  en  220 
la  plassa,  josta  lo  palais  de  Salusti,  e  comandet  per  aqui  eis 
qued  hom  li  aduisses  saint  Laurenz  davant;  &  aduis  lo  li  hom, 
&  aportet  hom  ab  el  montas   maneras   de  tormenz,  plumbate, 
fusteSy  lamin€y  ungues,  lecti,  baculi,  E  dis  a  saint  Laurenz  Tera- 
peraire  :  «  Pausa  Tengan  de  la  toa  art  encantairiz,  &  digas 
nos  ton  linnatge,  ni  don  est.  »  Respondet  sainz   Laurenz,  e  225 
dis  :  «  Mos  linnatges  fon  d'Espainna.  Esseinnatz  e  noiritz  soi 
en  Roma,  &  des  qued  era  el  brez  soi  christians  ;  e  des  qued 
acomensei  a  parlar,  ai  après  la  sancta  lei  e  la  divina.  »  L'em- 
peraire  dis  :  «  Sacrifiza  alz  deus,  que  si  non  o  fas,  totaaquesta 
nohg  seras  tormentatz.»  Respondet  sainz  Laurenz,  e  dis  :  «  Mea  230 
nox  obscurum  non  habet^  sed  omnia  in  luce  clarescunt.  Li  mia 
nox  non  ha  d'escur,  mas  tôt  cant  i  a  resplandis  per  gran  lutz.» 
Vai    Temperaire,  e  comandet  qued  hom  li  bâtes  sa  bocca,  e 
domenz  qued  hom  la  li  batia,  sainz  Laurenz  rizia,  e  se  con- 
fortava»  e  dizia:  «  A  te,  Seinner,  qued  es  Deus  de  totas  eau-  235 
sas,  rent  eu  gracias.  »  Ab  aitant  aportet  hom  una  grazilla  ab 
très  costas   de   ferre,  e  despoillet  hom  saint  Laurenz  de  sos 
vestimenz,  &  estendet  l'om  desus,  &  ab  forquetas  de  ferre  & 
hom  Festreis   de    sobre    que   non   se  po-[84  r*^]-gues  moure. 
Adonx   can  fon  aici  estendutz,  &  el  acomenset  a  dir  a  Tem-  240 
perador  :  «  Ego  me  obstuli  sacrificinm  Deo,  in  odorem  suavi- 
talis,  quia  sacrificium  Deo  est  spiritus  contribulatus.  Eu  me  soi 
offertz  sacrifizis  a  Deu  en  odor  de  suavitat  ;  car  sacrifizes  es  a 
Deu  esperitz  contribulatz.  »  Li  carnificer,  que  lo  destreinnian, 
acermavan  las  brasas,  e  metian  las  desotz  la  grazilla,  e  de  245 
Sobre  prennian  saint  Laurenz  ab  forquas  de  ferre.  Ab  aitant 
Sainz  Laurenz  acomenset  a  dire  :  «  Mesquin,  ara  vejas  can 
g^ranz  es  li  vertuz   del   meu    Seinnor,   car  li  tieu  carbon  me 
donan  refrisreri  ;  &  a  te  daran  durable  torment.  Car  le  meus 
Seinner  Jesu  Christz  sap  ben  que,  cant  eu  fui  accusatz,  non   250 
lo  deneguei,  anz  ades  ai  confessât  qued  el  es  mos  seinner.  E 
domenz  qued  hom  me  raustis,   eu   li  rent  gracias.  »   Et  ab 
xnout  gran  gauh  &  ab  alegre   vont  el  dizia:  «  Gratias  ago 


376  LEGENDES   PIEUSES 

tibi.  Domine  Jesu   Christe,  qui  me  confortare  dignaliis  es,  A  te 

255  fatz  eu  gracias,  Seinner  Jesu  Christ,  car  tu  m*as  deinnat  con- 
Ibrtar.  »  Et  ah  aitant  levet  sos  oilz,  e  regardet  se  vers  rem- 
perador,  e  dis  H  :  «  Majsqui,  vec  te  qued  as  raustit  Tuna  par- 
tida;  gira  me  deus  Tautra  part,  e  manja.  »  Et  acomenset  a 
glorifiar  &  a  lauzar  nostre  Seinnor,  e  dis  :   «  A  te  rent  gra- 

260  cias,  Senner,  car  eu  ai  ameritat  ad  iutrar  per  las  toas  portas.» 
Et  ab  aitant  Tesperitz  li  eissi  del  cors.  E  cant  venc  a  la  prima 
alba  del  jorn,  <i:  Ypolitus  emblet  lo  cors  e  portet  Ten,  et 
envolopet  lo  en  moût  belz  draps,  et  [84  v°]  maudet  o  al  pre- 
veire  Justin,  que  saintLaurenz  avia  aicifahgaucir  Temperaire. 

265  Venc  le  preire  Justis,  <k  Ypolitus,  moût  trist  &  plorant,  e  por- 
teron  en  lo  cors  del  benazurat  martir  in  via  Tiburtina,  en  la 
maison  d'aquesta  donna  vetzoa  Ciriaca,  m  campo  Verano,  a 
cui  alberc  sainz  Laurenz  avia  portât  de  nohg  alz  paupres 
que  lainz  erau  del  thesaur,  ai  ad  ella  avia  donat   per  la  dolor 

270  del  cap  lo  drap,  ab  qued  avia  ters  los  pes  alz  paupres  ;  &  cant 
venc  lo  seras  sebeliron  lo  aqui,  .  iiij'^,  idus  agusti.  Aqui 
vengron  li  Christian,  &  dejuneron,  k  feron  i  vigiliastres  nohg. 
Sainz  Justis  le  preire  cantetsasmessas,  e  cumeneguetlopobol, 
e  rendet  son  sacrifizi  a  nostre  Seinnor. 


XXVI 

PASSIO  SANCTI    STEPHANI   MARTYRIS 

In  diebus  illis,  crescente  numéro  discipulorum,  factus  est  ihw*^ 
mur  in  ter  apostolos,  eo  quod  non  haberent  qui  ministrarent  ac^ 
mensam  Dei    Can  li  apostol  annavan  predicant  la  paraula  d^ 
Deu,  &  eil  acomenseron  a  dir  un  jorn  entr'elz,  &  acomensero 

5  se  a  rancurar,  car  non  avian  discipolz  adordenatz  que  lur  cir 
vessan  a  la  taula  de  Deu;  e  disseron:  «Elejam*  de  nos  autre 
talz.  vij.,   que  sian   bon  &  util  &  plen  de  Saint   Esperit  e  d 
sapieza;  &.  aquestz  establam  sobre  aquesta  obra.  »  Plac  mou 
aquist  paraula  a  tota  la  compainna.  Et  elegiron  Esteven,  pie 

10  de  fez  e  de  Saint  Esperit,  &  Philipum  &  Prochorum  &  Nicha — 
norem,  &  Thimotheum  &  Parmenara  &  Nicholaum  advenanc^ 

1  Ms.  eleian. 


LEGENDES   PIEUSES  377 

Anthioce-[85  r°]-num,    Aquest  establiron  davan  los  apostolz. 
E  cant  los  agron  elegitz,  pauseron  lur  mas  de  sobre,  e  pregue- 
ron  nostre  Seinnor,    e  receupron    Saint-Esperit.  Li  paraala 
de  nostre  Seinnor  Jesu  Christ  creiscia  ades,  e  multipliava,  et   15 
le  nombres  atressi   delz  discipolz  en  Jherusalem  moût  fort. 
Moût  preveire  de  la  lei  delz  Juzeus  obedian  a  la  t'en  de  Jesu 
Christ   e   s'i  tornavan.  Slephanus  plenus  gratia  et  fortitudine 
faciebat  prodigia  et  signa  magyia  in  populo,  Esteves,  plens  de 
gracia  e  de  forsa,  fazia  signes    e   granz    meravillas  el  pobol.  20 
Can  li  Juzeu  o  viron,  leveron  se  encontra  saint  Esteve  aquil 
do  la  sjnagoga,  qued  era  appellada  tlelz  Libertiencx,  e  delz 
Cirenenx,  &  delx  Alexandrienx,  &  d'aicelz  qued  eran  de  Cilicia 
e  d*Azia,  desputanz  ab  saint  Esteven.    Mas  non  podian  con- 
trastara  la  sapieza  de  lui  ni  al   Saint  E-^perit  qued  era  en  el.   25 
El  lur  dizia  de  lur   lei  con  la  degran  tener,  si  con  Deus  la 
donet  a  Mojson,  e  cal  amor  portet  al  pobol  d'Israël,  can  lur 
passet  mare  rubrum  e  xi.  anz  los  pac  de  la  manna  el  désert, 
el  mesprezeron,  e  laisseron  la  leiel[z]  comandame[n]z  de  Deu, 
e  feron  ydola  en  semblansa  de  vedel,  et  adoreron  lo  en  lue  de   30 
Deu;   per   zo   foron   perdut  eil  e  tuhg  aquil  que  segon  la  lur 
leig  obravan.  Per  aquestas  paraulas  qued  el  lur  dizia  e  per 
los  malz  captenemenz  de  que  los  reprennia,  irasqueron  se  ab 
el  per  gra'n  ira,  à.  amonesteron  a  de  talz  n'i  ac  que  deissan  e 
fezessan  encrezent  al  pobol  qued  aquest  Esteves  blathesmava  35 
Deu  &  Mojsen. 

Ab  aitant  feron  ajostar  tôt  lo  po-[85  v°]-bol  e  totz  los  sapis 
homes  de  la  lei,  e  corregron  tuhg  ensenjps,  &  van  lo  penre, 
<k  adduisseron  lo.  el  conseil,  et  establiron  a  sos  nian  falz 
guarenz  que  deisseron:  a  Aquest  hom  non  5^e  cessa  de  parlar  40 
paraulas  contra  aquest  lue  &  escontra  la  sanctalei.  Nos 
avem  auzit  qued  el  a  dih  qued  aquest  Jésus  Nazaretz  des- 
truira  aquest  lue,  e  muda  aquelz  comandamenz  que  nos  ha 
liuratz  Moyses.  «  Et  ab  aitant  tuhg  aquil,  que  se  sezian  el 
concili,  acomenseron  ad  agardar  saint  Esteve  e  viron  sa  fatz  45 
aital  con  fatz  d'angel.  Mas  sainz  Esteves,  plens  de  Saint  Es- 
perit,  esgardet  vers  lo  cel  e  vi  la  gloria  de  Deu,  o  dis:  «  Eu 
vei  los  celz  ubertz,  e  Jesu  Christ  estar  a  la  dextra  del  seu 
Paire.  »  Eil  non  voigron  entendre  la  paraula  qued  el  dizia. 
Mas  tuhg  ensemps  s'abriveron  moût  malament  en  el  &  aco-  50 


378  LÉiiEXDES   PIEUSES 

menseron  a  cridar:  cPrenna  fom.  «>  El  ab  aitant  encaasseron 
lo  foras  de  ia  oiutHt,  e  lojiiaQ  I^ir  vesiimenz,  per  zo  que  plas 
fort  lo  poguessaii  eneaussar  e  lapidar.  e  pausavan  \os  aiz  pes 
d*un  enfant,  que  i  avia  nom  Sa'.u.  Aquest  enfans  qoe  gardava 

55  lur  vestimenz.  domentre  q-ied  eii  lapidavan  saint  Esteve,  zo 
fon  sainz  Paulz  .'aposiolz,  que  non  era  ancar  convertitz.  E  li 
nieserezent  Juzeu  ia^idavan  saint  Esteve,  et  el  pregava  À  di- 
zia  :  «  Seinner  Je>u  Christ.  re:ep  lo  mea  esperii,  e  non  lur 
queras  aquest  peeeat.  car  eii  non  sabon  que  se  fan.  •  E  cant 

60  a 0  aizo  diligr,  a  ei  î'eni  en  Crist,  zo  es  en  bona  obra.  Ad  quant 
finem  nos  perducat  ùorninm  nos  ter  Jr:8us  Chris  ins,  qui  cum 
pâtre  *    civit  et  régnât.' 

XXVII 
S*}!**  VITA  SANCTI  PANTHALEONIS  ik  PASSIO 

In  fiieffus  iflis, rengninte impf\'<yimo Maximiano,  plun'mi,  hanc 
r.'fam  despicr'entff^.  per  fi-iem  D^:i  et  Domini  nostri  Jesu  Christi, 
tn  montiôus  se  abscondehmt ,  Eu  a«'uel  temps,  cant  reinnava 
le  malz  reis  Maximians.  e  cil  que  crezian  en  Jesu  Christ,  per 
5  paor  del  mai  emi>era  :or,  eseondian  se  elV  puhg.  li  autre  en 
lascavas  sotz  la  terra,  con  po^uessari  fugir  las  penas  e  les 
trabailz  d'aquesi  z;  segle.Li  autre  non  se  volian  moure,  anz 
attendianlos  tonnenz  de!z  malz  princes,  ôc  a:ci  fenian  lur  vida, 
el  nom  de  nostre  Seinn-r  Jesu  Christ.  AJonx  sanctitas  e  fez 

10  probava  per  sapieza  los  messatires  de  Deu,  los  qualz  menava 
Victoria  a  vida  durabia.  Le  fe.lons  reis  Maximiansse  trabail- 
lava  ab  los  messatges  de  l)eu,  lo  s]  qualz  podia  atrobar  en  la 
ciutat  de  NichomeJia,  on  el  os:ava;  e  li  saint  constrastavan 
ab  el  entro  a  la  mort. 

15  En  aquelz  jornzera  uns  rix  hom  en  la  ciutat  de  Nichomedia, 
qued  avia  nom  Eustorgius,  ôc  avia  un  fil  qued  avia  nom  Pan- 
thali,  e  liuret  lo  per  esseinnar  ad  un  qued  avia  nom  Eufrosin, 
que  servia  al  rei  eu  son  palais.  Près  'lo]  aquest  maistre  &  es- 
soinnet  li  Tart  de  metgia  :  ce  menava  lo  moutsovent  le  maistre 

»    Tin  do  IsH  lij;;:^'  et  de  Ki  i»i^e:  c'est  pour«iuoi  sans  doute  le  scribe  n'a  pas 
rtrliovi»  la  formule. 


LEGENDES   PIEUSES  379 

ab  se  el  palais  del  rei.  Cantle  reis  e  tuh  li  rie  home  de  la  cort  20 
viron  aquest  enfant,  dizian  at  maistre  Eufrosin  :  «  De  cui  es 
aquest  belz  enfans?  »  Aquest  Panthalis  era  talz  quenuil[86  v°] 
home  non  podia  hom  atrobar  de  la  soa  belleza,  car  tota  bel- 
ieza  que  nuilz  hom  degues  aver  ni  pogues,  deiis  lo  suc  entro 
alz  pes,  tota  l'avia  el.  Eufrosinus  respondet  lur,  e  dis:  «  Filz  25 
es  d'Eustorgio  lo  consol,  &  sa  maire  ha  nom  Envola.  Et  ha  lo 
me  liurat  qued  eu  Tessein  Fart  de  metgia.  »  Le  reis  e  cil  qued 
eran  ab  el  acomenseron  a  dir  :  «  Per  la  vertut  delz  deus,  dignes 
es  qued  estia   davan  rei.  »  Venian  cada  jorh  al  maistre  tuh  li 
rie  home,  e  dizian  lique  l'esseinnes  fort.  Le  reis  atressi  con-  30 
jurava  moût  Eufrosin,  qued  en   fos  moût  pregatz,  con  l'es- 
seinnes fort,  car  pausar  lo  volgra  en  son  lue,  si  saupes  de  la 
ôsica. 

En  sa  vila  avia  un  prohome  qued  avia  nom  Hermelau  &  era 
se  escondutz  en  una  maison  ab  dos  christians  autres,  per  paor  35 
del  rei  ;  &  denant  aquella  maison  passava  moût  soven  aquest 
Panthalis.  Hermelaus,  eant  vi  aquest  un  jorn  passar  per  aqui, 
aici  con  solia,  e  vi  la  gran  belleza  e  la  gran  reverentia  de  Fen- 
fant,  conoe  per  Saint  Esperit  que  vaicelz  d'élection  dévia  es- 
ser,  aici   con  fon  Sainz  Paulz  l'apostolz.  Nengus  hom  non  li   40 
podia   tant  dire  qued  el  se  volgues  appariar  ab  femena,  nil 
podia  hom  far  aniiar  en  plassa,  ni  jugar,  ni  rire,  aici  con  es 
usatges  d'autres  enfauz.  Caiit  venc  un  jorn,  e   lo  lo   sonet 
aquest  veilz  Hermelaus,  cant  passava,  aici  con  solia,  per  la  car- 
rera, e  fez  rintrar  laintre  en  la  masoneta  on  s'era  escondutz.    45 
E  cant   Pan-[87  r°]-thalis  intret,  saludet  lo   Hermelaus,  e 
dis  :  «  Deus  te  don  gauh,  enfans.  »  Respondet  Tenfans,  e  dis  : 
((  Et  a  te  don  gauh  e  te  fassa  digne  de  tota  honor.  »  Ab  aitant 
le  veilz  va  lo  penre  per  la  man,  e  dis  li  que  se  sezes.  E   pois 
acomenset  lo  mètre  en  novas,  e  dis  li:  «  Filz  con  estas  tu?  0   ^0 
de  quai  doctrinaes?  0  quai  disciplina  segues  ?  »  Respondet 
Panthalis,  e  dis  :  a  Eu  soi  filz  del  sénat  Eustorge,  e  ma  maire 
fon  Euvola,  qued  ancar  non  ha   gaire  qued  es   morta.  »  Le 
v[ejilz  li  dis:  a  De  quai  sexta  es?»  Respondet  Panthalis  :«  Can 
ma  maire  era  viva,  volgra  qued  eu  estes  ades  ab  ella.  Mas  55 
mos  paire  non  o  vole  e  volgra  qued  eu  estes  el  palais  del  Rei, 
&  aqui  apreses  cavallaria.  Mas  pois  que  ma  maire  fon  moi  ta, 
mos  paire  a  me  liurat  aqui  on  se  vole.  »  Hermelaus  le  vielz  li 


a.    il     r  i.    ;-   -    .  '.       .  .r.t  .-sir  Hrr   S*:»*  HllUFLri:  C_I1*'.,   MOi*  -PI 
>oi'.*r-.    :..-•';..-         ...  1-       Ir      -r  ■-  •Lirt^  iXrkî  "LI'Tt  1&^  -fiUDS:^ 


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!«.•>  \m  '.'j\--x<  .\.-  '.:  ..        .1*:  -r.  ±  ;-r.i     le  errz>n  en  e;,  hi 
.1  ■:i.i*.    ,  .-z       : ...  .'j."  ;-   ,  -."  -    i-r7-iv_^i.i  .-■*•=  1  e:  non  fazia.* 

7.^  A  ;.  •  ^.':  ^..  x  *  ■"  -  -r  .  j.  ^  :ii-f-^i  e  rent  per  an  gran 
î:-..'iir.i,  'i  ;'■::-  x  ,'.:■ -.  <z.^-x:r  i.  r  :-r:  i-.:re  ceat.  aici  sainz  Pan- 
i  .  i  i^  !v:  ;:«:.  '  -•;,•.  r.  i:.^-..  e:.  >:2  2or.  a  fructiôamcnt  d^  a 
N.iuiz  .i«;  fij'/;^*/.  V.  >  'JL  :  i{-r:*:ï.-.ii  lo  preveîre:  «Senner,  si 
îii  lo  w^M^,  ':'i  •'-'   î'.'.'X  tao-^:-   i  riiori  p:iire.  Car  aizo  que  ta 

so  ili^;  a!]/.i  '?!!  'Aï<)  i'  •<  M/w.s  i.r-;  a  riii  maire,  <k  qued  ella  orava 
c*  pic^:tva  J^î'iu  ^'i;  s',  qi».'  vx  r^i'edi^a?.  </  Respondet  le  preire 
t*  ilis:  '.(  Civ/  <*M  J'-'su  C:iri:i%  e  faras  tôt  aizo  qued  eu  t*ai 
(lili  ;  o.ir  cl  \v)\\  <^\  {i  a-r.  î'i  <;<  sers.  »  De  jorn  en  jorn  annava 
l*;inili:ilis  ;il  pivv«î;r<*   u    tiff'jrmiva   se    de    ta   fen   de   Jesu 

H5  Clii'ist;  v;v  j.i  Mon  veni^'ni  a  son  alberc,  entro  qued  avia  vist 
priiiioruiiuMit  lo  [»i"<*v«;ir.»  ;  Cv  ai'ji  fon  repletz  de  la  gracia  de 
iKistro  Sciiiiior  .Jo>ii  Clirist. 

('an  vono  un  jorn,  t;  <os  niaistre  laisset   annar  Panthali  a 
Hoti  alborcî,  o  (lonnMi/  f[in?<l  cl  s'en  annava,  <k  el  setroba  ab  un 

U(»  onl'jinl,  (iui>  jac  nioi't/  [xt  un  serpent  que  li  era  de  lonc,  que 
\\\K\  njors.  ('iuii  I*antbalis  lo  vi,  ac  paor,  e  loinnet  se  un  petit; 
K\\  pois  rocono.î  se,  (\  inonbrot  li  de  las  paraulas  que  [88  r*»]  le 
pi'oiro  li  ac  dii^lias,  «S:  aconionset  a  (iir  a  se  mezeis:  «  Ar  pois 
conoissor  si  son  voras  las  paraulas  que  m'a  dichas  Hermelaus 

1*')  lo  priMro.  »>  Vi  ro"j:arilot  so  vers  lo  cel,  e  dis:  «  Seinner  Jesu 
Cbrisl,  si  eu  soi  dij^nos  (piod  ou  te  appelle,  &  volz  qued  eu  sia 
los   sors,  ol  tieu  nom   resusv'ito  aquost  onfaus.»  Et   aqui  eis 


LEGENDES   PIEUSES  381 

Tenfans  resuscitet,  e  le  serpens  esclatet  per  lo  mehg. 
Adonx  receup  major  gracia  Panthaleons  e  dis:  «  Benegh 
sias  tu,  Seinner  Jesu  Christ,  que  m'as  d[e]innat  ajostar  ab  tos  100 
sers!  »  Vai  s'en  ab  aitan  ab  moût  gran  gauh,  e  vai  se  getar 
alz  pes  d'Ermelau,  lo  preveire,  e  dis  li  :  «  Eu  te  prec,  seinner 
sers  de  Deu,  que  tu  me  batejes,  car  eu  ai  oi  en  aquest  jorn 
conogut  que  non  es  autres  Deus,  mas  solament  nostre  Seinner 
Jesu  Christ,  cui  tu  predicas,  per  lo  cui  nom  li  mort  resusci-  105 
tant.  »  E  comtet  li  tôt  con  li  era  près,  de  quai  manera,  per 
l'apellament  del  nom  de  Christ,  Tenfas  era  suscitatz  de  mort  e 
le  serpenz  era  esclatatz.  Can  Hermelaus  le  preire  auzi  aizo, 
ac  moût  gran  gauh,  e  dis  li  :  «Sai  ven,  filz,  e  monstra  me  lo 
serpent  mort.»  Et  anhet  ab  Panthaleon,  e  vi  lo  serpent  mort.  110 
E  cant  Hermelaus  lo  vi,  esgardet  verslo  cel,  e  dis  :  «  Seinner 
Jesu  Christz,-  benezehg  sias  tu,  e  benezeita  sia  li  toa  gloria  de 
la  toa  pietat,  e  li  gracia  de  la  toa  misericordia!  Car  la  toa 
gloria  non  pot  nuilz  hom  comtar  ;  car  tu  as  donat  al  tieu  fa- 
mol  Panthali  los  tieus  sagramenz.  »  Cant  ac  dicha  sa  oratiori,  ^^ 
torneron*  amdui  en  la  maison  d'Ermelau,  e  feron  segon  la 
lei  [88  v^]  de  sancta  gleisa.  Donet  li  ^Hermelaus  le  preire  lo 
saint  batisme  &  estet  laintre  ab  el  .vij.  jornz.  Can  venc  a 
Tootau  jorn,  annet  s'en  Panthalis  a  son  alberc.  Et  cant  sos 
paire  lo  vi,  acomenset  li  a  dir:((On  as  estât,  filz,  aitanz  120 
jornz?»  Panthaleon  dis  li  :  «  Paire,  un  home  qued  era  moût 
malautz  avem  sanat  el  palais.  Et  per  zo  car  era  delz  meillors 
homes  de  laintre,  amix  del  rei,  avem  la  estât  set  jornz  ab  el, 
entro  qued  es  ben  sanatzde  sa  malautia.  »  Ab  aitan  sos  paire 
se  quezet.  125 

Cant  venc  Tendeman,  annet  s'en  a  son  maistre  Eufrosi- 
num  ;  e  cant  Eufrosinus  lo  vi,  acomenset  li  a  dir  :  «Diguas 
me,  Panthaleon,  on  as  estât  tanz  jornz?»  Respondet  el  e  dis: 
«Mos  paire  a  comprat  un  camp,  &  trames  lai  me,  per  vezerlos 
termes  ;  &  ai  la  estât  set  jornz,  entro  qued  el  venc  e  vi  qualz  130 
era  aquilz  possessions.  E  val  moût  mais  aquil  possessions  de 
nuilla  peira  preciosa,  la  quai  ha  comprat  mos  paire.»  Aizo 
dizia  per  lo  enluminament  del  baptisme.  E  cant  Eufrosinus 
auzi  aizo,  non  li  vole  plus  demandar.  Panthalis,  repletz  de  la 

1  Ms.  totmerom.  • 


382  LÉGENDES  PIEUSES 

1:î5  gloria  de  Christ,  conqueria  adeslo  thesaur  de  Christ,  e  donava 
se  ades  gran  cura  con  pogues  tornar  son  paire  a  la  fez  &  a  la 
crezensade  Christ.  Cada  jorn  parlavaa  son  paire,  e  lli  diziala 
vertut  de  Christ  e  la  vana  gloria  de  las  ydolas.  E  dizia  li  : 
«  Paire,  per  queappella  hom  aques  deus  que  totz  temps  estan 

140  e  ja  non  se  mouran,  e  totz  temps  se  sezon  e  ja  non  se  moa- 
ran,  ni  se  levaran?»  Respondet  sos  paire,  e  dis  li  :  «  Per 
ma  fez,  te  die  eu  qued  [89  r°]  aquist  paraulaque  tu  dis  es  moût 
greus,  e  non  te  sai  respondre.)^  Sainz  Panthalis,  cant  auzi 
aizo,  ac  moût  gran  gauh,  e  rendet  gracias  a  Deu,  car  sol  per 

145  una  paraulaavia  appellat  son  paire  a  la  sciencia  de  Deu.  Des 
aquella  hora  fon  ades  pois  sos  paire  doptans  en  las  ydolas,  car 
el  non  lor  *  volia  offrir  ni  far  sacrifizi.  &  avia  en  son  alberc 
moutas  ymagens.  Panthalis  volia  las  frainner  maintas  vega- 
das,  e  pois  pensava  se  que  sos  paire  en  séria  iratz  ;  per  que 

150  non  o  volia  far,  mas  fizava  se  en  nostre  Seinnor  Jesu  Christ, 
que  doues  voluntat  a  son  paire,  qued  el  volgues  que  fossan 
frac  h  as. 

Domenz  que  Panthalis  era  en  aquestas  paraulas,  e  vec  vos 
que  soneron  a  la  porta  homen  qned  aduisseron  un  cec,  e  de- 

155  manderon  si  la  era  Panthalis  le  metges.  E  can  saupron  que 
lainz  era,  pregavan  li  qued  eisses  deforas,  e  sanes  aquel  cec. 
Can  Panthalis  auzi  aizo,  eissi  ben  tost  foras,  per  vezer  lo  cec, 
&  eissi  sos  paire  essemps  ab  el.  E  cant  Panthaleon  vi  lo  cec,  e 
le  cex  li  acomenset  a  dir:  «Eu  auz  la  toa  douza  paraula,  mas 

100  la  lutz  non  vei.  Tuhg  li  metge  an  obrat  en  me,  &  nuilla  ren 
non  m'a[n]  profechat  ;  Si  aquo  eus  pauc  que  vezia,  aco  eis  m' an 
tout.  Ara  soi  remasuz  cex  e  paupres.  »  Panthalis  dis  li  :  a  Alz 
autres  as  donat  ta  sustancia  tota.  A  me  que  donaras,  si  pos 
recobrar  ton  vezer?»  Respondet  le  cex:  «Aquo  de  ma  sus- 

165  tancia  que  m'es  remasut,  aquo  te  donarai.»  Panthalis  dis  li: 
«  Lo  don  de  lutz  te  donara  per  me  [89  v°]  Jesu  Christz.  Evai, 
6i  aquella  part  que  tu  me  donarias  dona  alz  paupres.»  Le 
paire  de  Panthali  li  vedava  ades,  e  li  dizia:  «  Filz,  toi  te  d'a- 
quest  home  e  non  t'en  entrametas.Tu  non  podes  essermingua 

170  plus  sapisd'aques  metges,  que  non  l'an  pogut  curar,  per  poinna 
qued  i  aian  mes.  »  Sainz  Panthalis  dis  a  son  paire  :«  Seinner, 

1  Ms.  los. 


LEGENDES   PIEUSES  383 

la  cura  qued  eu  done  ad  aquest  homen,  nenguns  delz  autres 
metges  nonlali  pot  donar.  Le  meus  maistre  sana  solament  ab 
sa  paraula  aicelz  que  crezon  en  el.»  Le  paire  cujava  qued  o 
disses  d'Eufrosino,  son  maistre.  Panthalis  tenc  la  man  del  cec,  175 
6  fez  li  cros  sus  elz  oilz,  e  dis  li  :  «  El  nom  del  meu  Seinnor 
Jesu  Christ,  qued  enluminet  aquellas  causas  qued  eran  denant 
escuras,  e  sana  las  estrechas  malautias,  e  coil  aquellas  causas 
que  son  escampadas,  &  convertis  los  erranz  a  sa  voluntat, 
veiras  totz  temps  mais  aquesta  lutz,  aitant  can  viuras,  &  en  180 
l'autre  segle  veiras  majorment,  si  crezes  en  Jesu  Christ.  »  E 
domenz  qued  el  dizia  aizo,  e  sei  oil  foron  ubert.  E  cant  le 
paire  de  saint  Panthali  vi  aquesta  meravilla,  crezet  en  Jesu 
Christ,  e  cel  atressi  que  recobret  lo  vezer.  Et  anet  aqui  eis 
Panthalis  e  comtet  o  al  preveire,  quant  granz  causas  avia  185 
nostre  Seinner  fahgperel.  Et  estset  pois  raainz  jornz  cel  que 
fon  guaritz  ab  Panthali,  &  annava  ab  el  &  ab  son  paire  al 
preveire  cada  jorn,  que  los  confermava  en  fen,  &  [90  r**]  lur 
donet  lo  baptisme  de  la  celestial  gracia. 

Aprop  non  tarzet  guaire  que  mori  sos  paire  de  Panthali.  E  190 
tôt  Taver  e  tota  la  sustancia,  que  sos  paire  11  laisset,  donet  alz 
paupres;  &a  celz  qued  eran  en  carcer  ni  en  tormenz  per  lo 
nom  de  nostre  Seinnor,  el  lur  servia,  e  lur  aministrava,  e 
los  curava.  Nostre  Seinner  obrava  ensemps  ab  el  en  totas 
causas,  e  li  autre  metge  avian  moût  gran  enveja  de  zo  qued  195 
el  fazia.  Cant  venc  un  jorn  e  tuhg  li  metge  foron  ensemps,  e 
fon  aqui  denant  elz  aquel  cex  cui  avia  Panthalis  sanat.  E  can 
lo  viron,  acomenset  a  dir  Tus  a  l'autre:  «  Non  es  donx  aizo 
aquel  cex  que  nos  autri  non  poguem  anc  sanar  ni  guérir? 
Qualz  es  aquel  que  Ta  ai  ci  sanat?»  Et  appelleronlo,  e  disseron  200 
li:  0  Qualz  es  aquest  que  t'a  sanat  ni  guérit?  »  E  dis  lur: 
«Panthalis,  le  filz  d'Eustorgii,  m'a  curât.  »  Li  metge  disseron 
ad  Eufrosinum  :«  Aquest  Panthalis  non  es  donx  tos  discipolz?» 
E  dizian  pois  entre  lur  :  «Per  Deu,  discipolz  es  de  rie  metge.» 
Mas  aizoprophetizeron,  non  sabent,  de  Christ.  205 

Gran  enveja  avian  li  metge  encontra  Panthali,  &  annavan 
ades  querent  ucaison  con  lo  poguessan  encusar  &  dire  alcuna 
ucaison  encontra  el.  Cant  venc  aprop  lonc  temps,  agarderon  e 
viron  un  d'aquelz  que  sainz  Panthalis  ac  guaritz,  e  confesset 
e  disia  qued  el  nom  de  Jesu  Christ  Tavia  guarite  sanat.  Et  210 


3S4  LEGENDES   PIEUSES 

anneron  s'en  li  metge  al  rei,  e  disseron  li  :  «  Reis,  aquel  que 
tu  comandest  [90  v']  qued  apreses  tost  Tart  de  medicina,  per 
tal  qued  estes  ab  te  en  ta  cort,  aquest  vai  ab  aquelz  que  van 
encontra  aquesta  ait,  e  lo3  cura,  &  consent  a  las  lur  paraulas. 

215  E  si  tu  tost  non  l'on  toiles,  moutz  homes  fara  tolre  de  sacri- 
fiar  alz  deus  ;  e  la  sanitat  que  dona  Asclepis  transportar  fara 
a  Jesu  Christ.  >>  E  pregueron  al  rei  que  fezes  venir  lo  cec,  qued 
avia  sanat  Panthalis,  e  que  li  demandes  per  quai  art  era 
sanatz.  K  can  fon  vengutz  denant  lo  rei,  acomenseron  li  a  dir 

220  li  metgo  :  «  Diguas  per  quai  cura,  ni  per  quai  medicina  es 
sanatz  ?  »  Dis  sel  qued  era  agutz  cex  :  a  Lo  nom  de  Jesu 
Christ  appellet  Panthalis  &  seinnet  mos  oilz,  &  aqui  eis  eu  vi 
clarament.  »  Le  reis  dis  li  :  «  E  tu  qued  en  dis  ?  Es  sanatz 
per  la  vertut  delz  deus,  o  per  aquel  qued  es  appellatz  Christ?» 

225  Respondet  el  e  dis  :  «  Reis,  tuhg  aquist  metge,  que  tu  ves, 
an  obrat  montas  causas  en  me  6l  an  agut  tôt  cant  eu  avia,  & 
anc  nuilla  ren  noa  me  profecheron  ;  anz  aco  eis  petit  qued  eu 
vezia,  aco  m'avian  tout.  E  non  val  doux  mais  aquest  que  m'a 
rendut  mon  vezer  que  non  fa  Asclepis,  que  non  me  pogron  anc 

230  pro  tener  ?  »  Ab  aitant  le  reis  dis  li  :  «  Vai,  e  non  voillas 
esser  folz,  que  diguas  que  Christz  o  aia  fah  ;  car  li  deu  t'an 
rendut  ton  vezer.  »  Aquel  respondet  e  dis  :  «  Mas  tu,  reis, 
non  voillas  esser  folz  ;  car  Jesu  Christz  m'a  rendut  lo  vezer 
per  lo   scu  sers   Panthali  ;  car  el  m'a  adubert  los  oilz  &  m'a 

235  enluminât  lo  sen  de  l'arma,  per  lo  renovellament  de  Saint  Espe- 
rit.  Rcis,li  tieu  deu  que  ren  [91  r"]  non  vezon,  con  me  pogran 
rendre  lo  vezer  ?  »  Cant  le  reis'^auzi  aizo,  acomenset  a  dir: 
a  Per  la  fen  qued  eu  dei  alz  meus  deus,  vers  es  en  aici-  con 
hom  me  dizia.  Car  si  gaire  viu,  moutz  homes  tolra  de  la  cre- 

240  zensa  delz  meus  deus.  »  E  comandet  qued  hom  getes  aquel 
foras,  e  qued  hom  li  tailles  la  testa.  E  cant  li  agron  taillât  la 
testa,  sainz  Panthalis  donet  aver  a  celz  que  l'agron  degoUat, 
que  li  aportessan  lo  cors.  E  cant  lo  li  agron  aportat,  presloe 
sebeli  lo  honestament  dejosta  son  paire. 

245  Pois  comandet  le* reis  qued  hom  annes*querre  Panthali.  E 
domens  qued  hom  Taduzia,  el  annava  dizent  :  «  Deus,  laudem 
meam  ne  tacueris,  quia  os  peccatoris  et  os  dolosi  super  me  aperlum 
est,  Loculi  sunt  adoersum  me  lingua  dolosa.  Senner  Deus,  non 
laisses  la  mia  lauzor,  car  li  bocca  del  peccador  e  de  Tengan- 


LEGENDES   PIEUSES  38  5 

nador  es  uberta  sobre  me.  Eil  an  parlât  encontra  me  ab  lenga  250 
engannairitz,  &  an  me  environat  de  paraulas  d'azirament,  & 
combateron  se  encontra  me  de  lur  grat.  E  per  zo  qued  eil  me 
degran  amar  &  eil  me  trahian,  &  eu  pregava  ;  e  pauseron 
encontra  me  malz  en  lue  de  bens,  &  azirament  per  Tamor  qued 
eu  lurportava.  Seinner  Deus  meus,  ajudame  e  faimesalvper  255 
la  toa  gran  misericordia  !  Cil  que  me  traisson  sian  vestit  de 
vergoinna  e  de  reverentia,  &  sian  cobert  de  lur  confusion  ;  e 
le  tiens  sers  s'alegrara.  »  Et  ab  aitan  Pantalis  fon  aduhg 
déliant  lo  rei,  &  avia  ades  sos  oilz  [91  v°]  a  nostre  Seinnor. 

Ab  aitant  le  reis  li  acomenset  a  dir  :  «  Diguas  me,  Panthali,  260 
si  aizo  es  vers  qued  eu  ai  auzit  dir  de  te.  Non  avia  eu  donx 
pregat  ton  maistre  qued  ab  gran  diligencia  t'esseinnes,  car  eu 
te  volia  aver  per   ta  belleza  en  mo  palais  ?  »  Panthalis  res- 
pondet .  «  Qued  es  aizo  que  n'as  auzit,  reis  ?  »  Le  reis  dis  : 
«  Eu  non  crez  zo  qued  eu  n'ai  auzit,  car  ben  poiria  esser  mes-  265 
sonegua.  Eu  ai  auzit  dir  que  tu  vas  ab  los  crestians  ;  &  celz 
que  nos  tormentem  per  la  non  crezensa  deiz  deus,  tu  los  sa- 
nas,  e  lur  fas  lur  obs  de  manjar  e  de  beure  ;  e  tu  manifestas 
essemps  ab    elz  lo  nom  de  Jesu.  »    Panthalis   respondet  : 
«  Scriptum  est  :  Dii  qui  celiim  et  terram  non  fecerunt  dispereant  ;  270 
a  terra  enim  dii  non  sunt,  Escrihg  es  :  Li  deu  que  non  feron  lo 
cel  ni  la  terra  sian  confondut.  Diguas  me,  reis,  si  li  tieu  deu 
an  resuscitat  mortz,  ni  rend  ut  vezer  alz  cex  ;  &  si  vers  es 
qued  0  aian  fah,  eu  creirai  en  elz.  Tu  qu'en  dis,  reis  ?  »  Le  reis 
dis  :   a  Con  pot  donx  far  aizo  aquel  Jesu  Christz  que  colon  li  275 
Christian  ?  »  Panthalis  respondet  :  «  Cel  que  colon  li  Christian 
fai  aizo.  E  comanda  qued  hom  aporte  aici  un  d'aquelz  malautz 
que  jazon  en  la  plassa  &  fa  venir,  reis,  aquelz  que  tu  voiras  ; 
&  appellon  los  tiens  deus,  &  eu  appellarai  lo  meu,  &  adonx 
conoisseras   per  cui  vertut  sera  sanatz  ;  et  d'aqui  adenant  280 
devem  creire  a  cellui  que  sera  plus  poderos.  »  Adonx  dis  le 
reis  :  «  Per  deu,  ben  as  dihg.  Sia  fahg  en  aici.  »  Comandet  le 
reis  qued  hom  aportes  un  delz  malautz  de  la  plassa,  &  annet 
l'om  quer-[92  r**]-re,  &  aportetl'om  en  un  legh.  E  fez  venir  le 
reis  los  preveires  de  sa  lei,  e  dis  lur  qued  el  nom  de  lur  deus  285 
sanessan  aquest  malaut.  Ab  aitant  aquil  horre  preveire  &  li 
philosophia  acomenseron  ad  aver  tuhg  una  crezensa.  Li  un 
d'elz  acomenseron  a  cridar  Asclepium,  e  li  autri  Ypocrat,  e  li 

26 


386  LEGENDES  PIEUSES 

autri  Jupiter,  e  li  autri  Diana,  e  li  autri  Herculem,  &  totz  lur 
290  deas  autres,  qued  eran  diabol,  <k  totz  lur  appellamenz  era  vans. 
Panthalis  estet,  &agardavalur  vanitat  e  lur  trabail;  e  fazi*  en 
son  esquern. 

Can  le  reis  vi  que  ren  non  podian  far,  acomenset  a  dir  : 
((  Passa  Panthalis  son  appellament.    »  Panthalis  reguardet 
295  el  cel,  e  dis  :  u  Domine  Jesu  C /triste,  exaudi  orationcm  meatriy 
et  clamor  meus  ad  te  veniat,  Seinner  Jesu  Christ,  autz  la  mia 
pregueira,  e  li  mia  cridors  vengua  a  te.  Seinner  non  me  tras- 
vires  ta  cara  ;  e  cora  qued  eu  t*apelle,  auz  me  tost  !  Car  eu  ai 
levada  a  te  la  mia  arma,  Seinner,  demonstra  ad  aques  noR 
300  dignes  &   horres  preveires,  que  tu  es  Deus,  que  sanas  acelz 
qued  esperan  en  te.  »  E  vai  penre  ab  aitant  la  man  del  malaut, 
e  dis  :  «  El  nom  del  meu  Seinnor  Jesu  Christ,  esta  sans  e 
salz  d'aquesta  hora  enant.  »  &  aqui  eis  le  malautz  vai  sus  sans 
e  salz  &  annet  s'en  a  sa  maison  alegres  &  lauzans  nostre  Sein- 
305  nor.  Ac  n'i  moût  d'aquelz  que  crezeron  en  Jesu  Christ,  can 
viron  aquella  meravilla,   &  se  partiron  de  la  vanitat  de  las 
ydolas.  Li  horre  pre-[92  v**]-veire  e  li  metge  eran  moût  iratz 
encontra  Panthali,  e  dizian  al  rei  :  «  Reis,  li  vertutz  delz  tieus 
deus  es  destrucha,  si  tu  lo  mantens.  Totz  los  homes  fara  tolre 
310  de  sacrifiar  alz  deus.   Reis,  non   voillas  creire  en  el(z),  car 
aquest  malautz  es  sanatz  per  las  vertutz  delz  deus.  »  E  crezet 
los  le  reis  d'aizo,  et  acomenset  a  dir  a  Panthali  :  «  Crez  me 
de  zo  qued  eu  te  dirai,  Panthali,  e  sacrifia  alz  deus.  Non  vez 
tu  doux  cant  home  son  mort,  car  non  lur  volian  sacrifiar?  n 
315  Panthalis  respondet,  e  dis  :  «  Cil  que  moron  per  Jesu  Christ 
vivon  durablament,  quar  per  lo  seu  nom  sunt  mort.  »  Le  reis 
dis  :  «  Panthali,  non  voillas  appellar  lo  nom  de  Christ,  et  aias 
merce  de  te  mezeis,  e  de  ta  joventut,  &  ven  &  sacrifia  alz 
deus,  que,  si  non  o  fas,  montas  granz  penas  te  agardant,  si 
320  persévéras  en  aquesta  non  crezensa.  »  Panthalis  respondet: 
€  Reis,  aquestas  penas,  que  tu  dis,  tost  son  annadas,  &  eu 
soi  appareillas  de   recebre  per  nostre  Sennor  Jesu  Christ.» 
Maximians  le  reis  dis  :  «  Non  sans  tu  donx  quantas  penas 
sofferc  l'autre  jorn  le  preire  Artemius  ?  »  Panthalis  dis  :  «  Tu 
325  sas  cant  granz  tormenz  soôerc,  &  anc  per  aco  non  laisset  sa 
fe,  anz  liuret  ardidament  &  ab  gran  gauhg  son  cors  veil  al 
ïnartiri,  confortans  en  fez.  Et  eu  que  soi  joves,  dei  moût  plus 


LEGENDES   PIEUSES  387 

ardidament  appropiar  a  la  fen,  qued  eu  sia  fahg  dignes  de  la 
corona  de  martiri.»  Vi  le  reis  que  ja  non  lo  poiria  hom  moure 
de  sa  fez  ni  de  sa  crezensa  ;  comandet  qued  hom  *, 33.0 

[93  r°]  saint  Panthali  per  la  man,  e  menet  lo  entro  a  la  riba, 
glorifianz  e  lauzanz  nostre  Seinnor,  e  dizia  :  «  Confiteàor  tiùt, 
Domine f  in  ioto  corde  meo,  narrabo  omnia  mirabiUa  iua,  Sein- 
ner,  eu  te  confessarai  de  tôt  mon  coratge,  e  comtarai  tota[s]  335 
las  toas  meravillas.  Eu  aurai  gauhg,  &  alegrarai  me  en  te,  Au- 
tismes, et  saillirai  per  lo  teu  nom  glorios.  Li  meu  enemic  sian 
torna[tJ  atras,  &  sian  enferm,  &  periran  davan  la  toa  fas.  Car 
tu  que  sezes  sobre  lo  tron,  e  jutgas  la  drechura,  as  jutgat  lo 
meu  juzizi  e  lo  meu  plahg.  E  menasses  las  genz,  e  le  fêlions  340 
peric,e  tu,  Seinner,  permanes  durablament.  »  E  cant  fon  ven- 
gutz  a  terra,  acomenset  li  a  dir  le  reis  :  a  Con  an  li  tieu  encan- 
tamentsobrada  la  mar?  »  Panthalis  respondet:  «  Eu  non  o  ai 
fahg,  mas  cel  qued  es  ab  me,  cel  o  fez,  del  quai  tu  non  es  di- 
gnes que  lo  vejas.  »  ,  345 

Le  reis,  cant  auzi  aizo,  fon  dessennatz  e  plens  de  gran  ira, . 
e  comandet  qued  hom  aduisses  las  bestias  salvatgas  qued  el 
ténia  enclausas,  que  lo  devoressan.  Et  acomenset  li  a  dir  le 
reis  :  a  Vejas,  Panthali,   totas  aquestas  bestias  :  totas  son 
appareilladas  per  te  a  devorar.  E  crez  me,  e  sacrifia  alz  deus,    350 
&  aias  merce  de  ta  belleza,  car  es  joves,  que  non  moiras,  aici 
con  son  mort  li  autre  sa  en  reire.  »  Panthalis  dis  al  rei  :  «  De 
tota  error  es  repletz  e  pies  ;  e  per  aizo  faz  me  appareillar 
majors  tormenz  et  plus  fortz.  D'aquelz  que   tu  dis  que  son 
périt,  aquil  [93  v°]  an  vencut  totz  los  tiens  atrobamenz.  Per  355 
Je  nom  de  nostre  Seinnor,  serai  atressi  eu  enbellezitz  per  corona 
con  son  li  autri.  Et  eu,  per  lo  seu  nom,  ai  estenh  las  toas  lam- 
pezas,  &  ai  dessipatz  tos  ministres,  e  ton  plomp  ai  fahg  frehg, 
e  tas   cruzelz  bestias   ai  fâchas  soaus,  que  per  ta  plana  ira 
sias  tormentatz  e  moiras.  »  360 

Can  le  reis  auzi  aizo,  comandet  qued  hom  lo  meses  en  Tare- 
na  ;  &  aqui  eis  can  fon  intre,  e  lo  li  apparec  Jesu  Christz  en 
semblansa  d'Ermelau  lo  preveire,  e  dis  li:  a  Panthali,  bons  e 
fizelz  m'est  auguz  en  paucas  causas  :  sobre  montas  te  establi- 

*  Lacune  d'un  feuillet.  Voir  ci-dessus,  p.  213, 


3f»8  LÉGENDES    PIEUSES 

:^  rai.  *»  Et  comandet  le  reis  qued  hom  laisses  annar  las  bestias 
laJDtre  en  l'are iia  ab  saint  Pantali.  E  can  foron  laintre,  aco- 
menseron  li  annar  entorn.  Lileon  venian &  aMatavan  iarcara 
a  S03  pens.  Li  laupart  venian  e  licavan  los  li.  Las  autras  bes* 
tias  ce  pelegaran  entr'eilas  mezeissas,  qualz  primera  pogaes 

^0  ^6Dir  a  SOS  pes,  <k  pois  can  li  avian  baisât  los  pes,  partian  s*eD, 
cais  ab  lur  vos  laozant  Deu.  Gant  totz  le  pobols  vi  aizo,  ae 
granz  meravillas.  et  acomenset  a  cridar  èi  a  dire  :  «  Granz 
es  le  Deus  delz  christians.  O  tu,  tyrant,  disseron  al  rei,  laissa 
estar  lo  jast.  »  Vai  le  reis,   e  fez  penre  aquelz  que  cridavan, 

375  e  fez  en  aucire  ben  entro  a  mil,  e  fazia  los  getar  a  las  bestias, 
mas  elias  non  los  volian  tocar.  Le  reis,  caut  o  vi,  comandet 
qued  hom  auzizes  las  bestias,  ab^los  homes  essemps,  car  non 
los  tocavan. 

Âdoux  [94  r^]  sainz  Panthalis  acomenset  a  glorifiar  nostre 

380  Sennor  et  a  dire  :  «  Gloria  sia  a  te,  Seinner  Jesu  Christ,  per 
las  toas  granz  meravillas,  car  per  te  non  mor  solament  Tumaos 
linnatges,  anz  las  Ij^stias  saivatgas  aman  mais  morîr  que  to- 
con  un  delz  tieus  sers.  »  Tuhg  aquil  que  foron  mort  foron  se- 
belit  rescondudamenz  la  nohg  per  los  christians.  Mas  peroel, 

385  le  reis,  avia  comandat  qued  hom  fezes  uuagran  fossa,  e  qued 
hom  mezes  intre  los  homes  ab  las  bestias,  et  aici  sotteres  o 
hom  tôt  essemps.  E  pois  acomenset  a  d[i]r  a  celz  qued  eran 
entorn  el  :  «  Que  poirem  far  d*aquest  enfant,  qued  aici  per 
son  encan tament  a  fah  convertir  aitanta  gent,  que  non  Yolran 

390  sacrifiaralz  meus  deus  ?  »  Et  acomenseron  li  a  dire  :  «Coman- 
da  qued  hom  fassa  una  gran  roda,  e  qued  hom  la  puje  sus  en 
un  aut  puh,  et  pois  qued  hom  i  lie  ben  <kfort  Panthali;  epois 
laisse  i'om  annar  d'aqui  en  aval  per  la  costa,  &  aici  li  roda 
dissipara  totas  sas  carnz,  À  morra,  voilla  o  non.  »  Et  coman- 

395  det  le  reis  qued  hom  o  fezes  eu  aici.  E  comandet  le  reis  qued 
hom  mezes  Panthali  en  la  carcer,  entro  que  li  roda  fosfaeha* 
Can  li  roda  fon  fâcha  el  théâtre,  et  hom  la  pujet  sus  en  un 
puhg  ;  e  cant  fon  sus,  À  hom  la  menet  atressi  saint  Panthali; 
e  fez  cridar  atressi  le  reis  per  tota  la  vila,  e  per  tota  la  cia- 

400  tat,  que  vengues  totz  lepobolz,  per  vezer  la  mort  de  Pantalii 
que  tuhg  aquil,  que  creirian  en  Jesu  Christ,  n'agiuBSsan  pen- 
densas,  e  se  tornessan  alz  sens  folz  deus.  [94  v*]  E  comandet 
le  reis  qued  hom  aduisses  Panthali.  E  domenz qued  hom  Tado- 


LEGENDES  PIEUSES  389 

zia,  et  el  pregava  nostre  Sennor  e  dizia  :  «  Senner,  clina  ta 
aureilla  &  auz  me,  car  eu  soi  paupres  e  soflfrachos.  Senner,   405 
garda  la  mia  arma  &  salva  me,  car  eu  ai  espérât  en  te.  Aias 
merce  de  me,  car  eu  t'ai  cridat  tôt  zo  dia.  Alegra  Tarma  del 
tieu  sers,  car  eu  l'ai  levada  a  te,;Soinner.  Car  tu,  Seinner,  es 
soaus  e  bons  &  es  moût  misericordios  a  celz  que  t'apellan  en 
veritat.  Seinner,  recep  la  mia  oration  en  tas  aureillas  &  en-  410 
tent  a  la  vos  de  la  mia  preguera.  Seinner,  eu  ai  cridat  ad  te 
&  auz  me,  car  tu,  Seinner,  m'as  ajudat&  m'as  consolât.  » 
Cant  ac  aici  complida  sa  oration,  meneron  lo  aqui  on  era  li 
roda,  e  lieron  lo  sus.  E  cant  acomenseron  a  volver  la  roda, 
en  eis  pas  las  liguaduras  foron  desjoinchas,  eli  roda  fon  dissi-   415 
pada  e  desfacha.  Sainz  Pantalis  remas  sans  e  salz  ;  et  Jesu 
Christz  era  ades  ab  el,  quel  capdelava. 

Can  tubg  aquil  qued  eran   aqui   viron  aquest  fahg,  agron 
gran  paor  e  granz  meravillas,  Mezeis  le  reis  ac  gran  paor  & 
gran  meravilla,  &  acomenset  a  dir  qued  hom  li    aduisses  420 
Panthali  denant.  E  cant  fon  denant  el,  acomenset  li  a  dir.  Li 
roda,  aici  con  correc  un  pauc,  aucis  delz  ministres  qued  aco- 
seguet  cincanta.  Et  acomenset  a   dir  lo  reis  a  sant  Panthali  : 
a  Per  que  fas  aizo,  car  tu  convertisses  lo  pobol  a  la  toa  lei,  e 
celz  que  non  pos  convertir  aucis  ?  »  [95  r°]  Sainz  Panthalis  425 
respondet,  e  dis  :  a  0  tu  folz  e  tracher  filz  de  diabol,  ben  diz 
de  vos  li  propheta  :  Convertantur  dolores  eorum  in  captid,  e^ 
in  vertice  eorum  descendat  iniquitas  eorum.  Las  dolors  d'elz  lur 
tornon  sobre  lur  cap,  &  en  lur  vertitzdescenda  lur  iniquitatz!» 
Maximias  le  reis  acomenset  li  a  dir  :  «  Qui(s)  es  aquest  que  t'a  430 
esseinnat  aizo  ?  »  Sainz  Panthalis  respondet  e  dis  :  «  Le  meus 
seinner  Hermelaus,  le  preire,  m'a  esseinnat  aizo  &  tota  la  fen 
de  Jesu  Christ.  »  Le  reis  dis  :  «  Poiria  l'eu  vezer  ?  qued  eu  vol- 
ria  aizoapenre  d'el.»  Aizo  dizia  per  engan  e  per  bauzia.  Sainz 
Panthalis  respondet,  e  dis  :    «  Reis,  laissa  lai  me  annar  &  435 
eu  adurrai  lo  te.  »  Le  reis  comandet  li  que  la  annes;  e  donet 
li  gardas  qued  anneron  ab  el  per  gardar.  Annet  Panthalis  & 
venc  a  la  maison  on  Hermelaus  le  preire  s'era  escondutz& 
intret  intre.  Et  can  fon  inz,  &  vi  Hermelau,  &  el  Panthalis  li 
acomenset  a  dire  :  «  Senner  paire,  le  reis  te  demanda.  »  Le  440 
preire  respondet,  e  dis  :  «  Bene  venisti,  fili  :  tempus  enim  meum 
est.  Ben  sias  tu  vengutz,  ûlz  :  le  meus  temps  sai  ben  qued  es 


r^rurvz.  Zat  -m  j*i  ii^w-a  l'^air  rie*:  -î»  innafs.  ai"Mar»tî  le 
ji»*'Lt  'i'iî  JOi^r  J'H'Ti  Vir.^TL-i  lis  ail»  :  I-  ti  «t»  auns.  «  i»Hiii«a 
vi«»  •»'îJ*T:w  3i.ir*^T».  *«t»aij#  in  .a  met  **rï  ?ïàa£uLL  i  & 

AyiL  •»'..4.  vi.1  'ina  im  :mi    ieaan."  ji  rei  Maxiaiiaa,  iei  Itir 
ii-trt  'in.i.z  Tz  "^^  Vî:i.z  ■»-?  'i*  lomn*  ?  i  Risg^îa-ieçleireire: 

«  Con  %a  a'>!ii  ivi..  ri»*'i  -«'aa  lâ  Te?  i  L*  prêtre  re^poajet, 

ft  i:.-»  ;  «  £•!  *i  :•:•»  r'.-tiT**  :  .'is  •*«  i^g-è.likrz  BraLvias,  ÀFantre 

H^rTmorraiiiî .  s.  laiii:  5«:a.  iar!.*r"aa-  >  I»tj  iereL*  'iced  bon 

l'S"»  ir.:i*»s  ■'l^•*^r■*.  £  îan*  looi  lo^i  i*  i»i-i!L^  i<*iLiiLî  el.  et  le  rws 

în-*n.^  i-i-.^?  »  Ri*i  :':2.:-*7':!i  eil,  e  ::-*c:rca  :  «  Œrtst  Fa  hhz 
•l^ra*  i*  «•*.  »  Li*  r^..<  il:*  :  «  Ars.or.-îstia--::  q^^-ï sacrlâie alz «feus, 
À  s*r*^  x^i  îkin:^  Mr.  >  R*»po2.ieroa  rah^  eas^^nrps  ti  home  de 
lyen  :  f  Pr^sriiçai  "i-ib.  ei^îs-p-?  !L-:-5tre  Seinnor.  que  ta,  reis, 

4if5»'>  ^T-e:^*.^  ^n  î*ll  i:  en  "ii-*  n:*  «îrezeai,  «jt  ea  el  eoasamem  noetn 
rHa, A  R  dom^nz  C'iei  •*:! e^ravin  ^î  oraran  tuhç qoatre.  e Jcsa 
Oiri-^tz  l^ir  appareî. ic  en  ^i-  pas  *:otz  a.:/iei  lax  en  qued estavan 
s*  mrr'î,  E  le  reîs  acoateaset  lara  -iir  :<  Yejas  con  se  iraisson  U 
^^o,  '^j^e  tota  la  terra  fan  moire,  i  Pantalis  respondet,  c  dis: 

4^  « Li  t^rra  «"ea  mogada,  reîs, e  î:  liea  deo  son  cazohg,  e  sontubg 
atri«3iat.  Car  fa,  rei:»,  non  dis  ren  de  zo  qoe  ta  dis.  »  E  domenî 
<|ri^  «ainz  ParithaîU  dîzia  aizo,  e  lo  Tenc  uns  messatges,  edis 
al  rei  ;  c  Kein,  lideuson  cazuhgesontahfrahg.  »  Lereisdis: 
"  l>r  ma  fen,  si  en  non  aacisto^t  aqaes^eil  penran conseil qu^ 

470  d^^imiari  los  deus.»  Etotz  ie  poboîz  acomenset  li  annar  en- 
rjtuiv^,  K  comandet  qued  hom  tornes  Panthali  en  la  carcer. 
Kloniren  autres  comandet  qued  hom  tormentes,  et[96r*] 
qne  hjn  menés  om  foras  de  la  ciutat,  e  que  lur  tolgues  homlfts 
testas « 

475  Peron  o  aici  li  ministre,  con  le  reis  o  ac  comandat.  E  can 
foron  foras  de  la  ciutat,  eil  acomenseron  a  pregar  ;  e  cant 
agron  fahg  lur  oration,  e  li  ministre  lur  tailleron  los  caps.  B 
pois  vcngron  li  Christian,  e  sebeliron  los  honestament.  E  pois 

'  \)ti  preire,  écrit  d'abord  on  a  fait  *'eis,  en  exponctuaot  la  première  et  1* 
dernière  lettre,  et  en  changeant  en  s  la  deuxième  r. 


LEGENDES  PIEUSES  391 

comandet  le  reis  qued  hom  aduisses  Panthali.  E  can  fon  denant 
el,  acomenset  li  a  parlar  le  reis  &  a  dire:  «Cujas  me  tu  donx  480 
aici  escapar,  Panthali,  si  non  sacrifizas  alz  deus?  »/  Respondet 
sainz  Panthalis  e  dis:  «  Eu  non  ai  obsde  respondre  ad  aquesta 
paraula.  »  Le  reis  dis  :  a  Vec  te  que  tei  maistre,  Hermelaus, 
&  Ermicus,  &  Ermogradus,  m'an  crezut  &  an  sacrifizat  alz 
deus,  et  ai  los  mes  en  mon  palais,  e  son  li  meillor  amie  qued  485 
eu  aia.»  Sainz  Panthalis  respondet  e  dis:  «  Fais  los  me  vezer, 
qued  eu  pusca  estar  ab  els  en  vida  durabla  &  el   celestial 
palais.))  Le  reis  dis:  a  Per  granz  obs  los  ai  trames  ad  autra 
ciutat,  &  aqui  ai  los  estab[l]iz.  »  Sainz  Panthalis  respondet: 
«  O  tu  fêlions,  ben  diz  aizo  que  dis  ;  e   volz  mentir,  mas  tu   490 
dis  la  veritat.  Car  eil  sont  verament  asetgat  &  aluguat  en  la 
celestial  ciutat   del  meu  Seinnor  Jesu  Christ.  » 

Cant  le  reis  auzi  aizo,  comandet  qued  hom  lo   tormentes 
fort,  e  qued  hom  li  tailles  la  testa,  e   qued  hom   lo   crèmes. 
Van  lo  penre  li  ministre,  &  acomensan  l'en  a  menar.  Sainz  495 
Panthalis  annava  s'en  moût  alegres,  lauzant  Deu,  e  dizent  : 
«  Des  ma  jo-[96  v°]-ventut  m'an  ades  combatut  mei  enemic, 
&  ancar  non  i  anren  conquis.  Lipeccador  fabregueron  sobre 
mon  dons,  &  an  alonguada  lur  iniquitat.  Nostre  Sennnerdre- 
churers  taillara  las  servilz  delz  peccadors.»  Ab  aitant  uns  delz  500 
ministres  s'apropiet  d'el,  e  cujet  lo  ferrir  ab  una  ancona,  e 
lo  ferres  pleguet,    aici  con  si  fons  cera,  e   non  toquet  anc 
Tome  de  Deu.  Cantli  cavalier,  qued  eran  aqui,  viron  aquest 
fahg,  acomenseron  a  dir  entr'elz  :  «  Granz  e  poderos  es  le 
Deus  delz  christians.»  E  van  se  getar  alz  pes  de  saint  Panthali,  505 
e  disseron  li  :  «Sers  de  Christ,  nos  te  preguam  quetupregues 
per  nos,  &  crezam  essemps  ab  te,  &recepia  nos  Jesu  Christz.» 
Et  ab  aitan  sainz  Panthalis  reguardet  se  vers  lo  cel,  e  dis  : 
€  Domine  Deus  meus,  compte  desiderium  meum  m  loco  isto,  Sen- 
ner  Deus  meus,  adimple  mon  désirer  en  aquest  lue,  e  dona  510 
remission  de  lur  peccatz  ad  aques  homes,  &  dona  lur  part  el 
tieu  rengne.»  Et  ab  aitant  venc  una  vos  de  cel,  e  dis  :  «  Pan- 
thali, le  tieus  desiriers  es  compUtz,  car  li  cel  te  son  ubert,  & 
Deua  ha  te  donat  la  gracia  de  sanitat.  Et  d'aici  adenant  non 
seras  appellatz  Panthalis,  mas  Pauthalamon,  per  zo   car  a  515 
moutz  as  donat  misericordia,  elz  as  sanatz,  à.  appellatz  al  ren- 
gne de  Deu.»  Sainz  Panthalis  pregava  alz  ministres  quel  feris- 


392  LEGENDES  PIEUSES 

san  ;  mas  eil  non  o  volian  far.  Sainz  Panthalis  dis  Inr  :  o  Si 
vos  non  fais  aizo,  vos  non  aures  part  essemps  ab  me.  »  Cant 

520  auzirou  aizo  aquil  que  s'eran  convertit,  aco-[97  r*]-men8eron 
lo  a<lorar,  &  aici  tolgron  li  la  testa.  Et  en  lue  de  sane,  eissi  en 
lahg  de  son  cors.  Et  uns  olivers  qued  era  aqui  fou  aqni  eis  totz 
carguatz  e  plens  de  frucg.  Montas  genz  de  la  ciutat  de  Nico- 
media,  can  viron  qued  en  lue  de  sanc  era  eissis  lahg  del  cors 

525  del  benaznrat  martir,  éi  que  Tolivers  era  aici  adimplis  de  frnc, 
crezoron  en  nostre  Seinnor,  e  renderon  li  laus  e  gracias. 

Can  Maximias  le  reis  auzi  qued  aici  era  esdevengut, 
oomandet  qued  hom  tailles  Toliver,  e  qued  hom  en  crèmes  lo 
cors  de  sant  Panthali  Vengron  autre   ministre  e  feron  o  aici 

530  con  le  reis  o  ac  comandat  :  tailleron  l'arbre  e  feron  en  leinna, 
e  cremeron  en  lo  cors  de  saint  Pantali  ;  e  pois  laisseron  lo 
en  aquel  eis  lue.  Can  venc  la  noh,  e  lo  vengron  li  Christian, 
e  leveron  en  lo  cors  del  saint  martir,  e  sebeliron  lo  honesta- 
ment.  Pr estante  Domino  nostro  Jesu  Càn'sto,  eut  est  honor. 


XXVIII 

VITA  SANCTI  MARTINI 

Igitur  Martinus  Sabbarie  Panoniorum  oppido  oriundus  fuit; 
sed  intra  Italiam  Ticini  alitus  est,  So  dis  que  sainz  Martins 
fon  de  Sabbaria,  mas  noiriz  fon  en  Lombardia.  Segon  la 
dignitat  del  segle,  fon  moût  d'autz  homes  e  de  gran  paratge, 
5  maspagan  eran.Sos  paires  fon  primerament  cavaliers,  e  pois 
fon  tribuns,  zo  es  comandaire  del[z]  cavaliers,  zo  es  qued  ac 
en  son  poder  tota  la  cavallaria.  Domenz  que  saintz  Martis 
fon  petiz,  e  sos  paires  li  fez  apenre  letras,  e  can  [97  v©]  fon 
talz  que  poc  portar  armas,  &  el  en  fez  far  cavalier,  e  non  de 

10  son  grat.  Car  deus  qued  era  paux  ni  acomenset  ad  aver 
reconoissement,  fon  sos  coratges  cou  fons  cavaliers  de  Jesu 
Christ,  &  en  el  avia  tôt  son  ooratge,  con  li  servis.  Car  qant 
aprennia  letras,  &  ac  entorn  x.  anz,  &  el  s'en  annet,  mal  grat 
de  son  paire  e  de  sa  maire,  a  la  gleisa,  &  quis  qued  hom  en 

15  fezes  Christian.  Et  can  viron  li  preveire  qued  aici  o  queria, 
christianeron  lo.  Et  aqui  eis  can  fon  christianatz,  fon  aici  con 


LEGENDES   PIEUSES  393 

vertitz  del  tôt  en  la  obra  de  Deu,  que  cant  ac  dotz'  anz  vol- 
gra  estar  ermitas  el  désert;  mas  li  joventutzloi  defendia.  Son 
coratge  avia  ades  entorn  las  gleisas  &  entorn  los  monestiers, 
e  pensava,  domenz  qued  era  enfans,  zo  qued  adimpli  pois  bona-  20 
ment,  can  fon  d'état  qued  o  poc  soffrir. 

Can  venc  en  aquel  temps,  comandet  le  reis  que  li  fil  delz 
rix  homes  fossan  escrihg,  que  deurian  esser  cavalier.  Vole  le 
paire  de  Martin  que  fons  escrihg  sos  filz  ;  escrius  Tom.  Can 
venc  qued  ac  quinze  ans,  &  le  reis  en  fez  cavalier.  Caval-  25 
guet  &  annet  ades  pois  ab  cavaliers.  A  sos  compainnos  totz 
fon  moût  himilz  e  bénignes,  &  ac  gran  caritat  en  se  meteis, 
pacientia  &  humilitat,  outra  tota  manera.  Tant  ac  de  totas 
bonas  bonas  constumnas  en  se  que,  deus  pois  que  fon  caval- 
iers, fazia  abstinencias  e  ténia  vida  aitan  estrecha  con  fera  30 
nuils  monegues:  per  que  tuh  sei  compainnon  Tonravan  moût. 
Car  deus  pois  qued  el  fon  re-FOS  r°]-geueratz  en  Christ,  aco- 
menset  ad  obrar  zo  qued  Jesu  Christ  dis  en  Tavangeli  :  qued 
hom  sotzleves  los  trabaillatz,  alz  caitius  portes  *  hom  ajuda, 
alz  bezoinnos  acorregues  hom,  los  paures  vestis  hom.  Nuilla  35 
rende  zo  que  li  escazia  de  sa  cavallaria  per  conduh  non  volia 
servar  tro  Tendeman,  mas  tôt  escassament  son  conduh  en 
retenia,  car  non  volia  annar  encontra  l'avangeli,  que  diz  : 
iiNolite  cogitare  de  crastino:  non  veillas  pensar  de  l'endeman.» 

Quoddam  itaque  tempore,  cum  jam  nichil  prêter  arma  et  sinr  40 
plicem  vestem    milicie   haberet,  média  hijeme,  Can  venc  uns 
temps,  &  el  cavalguava  ab  lo  rei,  à.  non  ac   mas   solament 
sas  armas  &  son  vestir,  aital  con  tain  a  cavalier,  e  fon  en 
mehg  d*uvern,  e  fazia  tan  gran  freh  que  moût  homen  n'eran 
mort.  Esdevenc  que  domenz  qued  eil  intravan  en  una  ciutat,   45 
&  eil  se  troberon  ab   un  paupre  tôt  nutz,  &  acomenset  lur 
a  querre  beu  aici  con  passavan,  &  anc  mingua  non  n'i  ac  que 
ren  li  dones.  Esdevenc  qued  venc  alz  derriers  sainz  Martins, 
&  can  vi  aquest  paupre  aici  estar  nutz,  ac  en  pietat,  &  non 
ac  nulla  ren  que  li  pogues  donar  ;  mas  trais  s'espaza,  e  parti  50 
so  mantel  per  lo  megh,  e  donet  lo  li  ;  car  tôt  cant  avia  al- 
ren  avia  atressi  donat  a  paupres.  Can  sei  compainnon  viron 
aici  annar  saint  Martin  (annar)  envout  ab  la  meitat  de  son 

*  }is,  portez. 


DES  PIEUSES 


395 


'lias  qued  eu  d'aici  adenant  sia 
,  que  tu  me  volias  donar,  part  entre 
ntran  per  te.  En  soi   cavaliers   d«    95 
^d  eu  mi  coiubata.  »  Cant l'emperaire 
lomenset  li  a  dir  que  per  paor 
'  rendeman,  o  dizia,  e  non  per 
ttiil  bon  sor  qued  aguea  vei-s  Deu.  Res- 
tent 0  segura:«  Ëmperaire,  si  ta   100 
Idiyua  per  bonafen,  [99  V]  caa  venra 
ivaii    tota  ta    ost,  can    deura  osser 
c  l'arKi  lo  signe  de  nostre  Seinnor 
ja  gai'oitz  d'escut,  ni  d'elrae,  ni  de 
?rc,  ni  de  iiuilla  garnizo  ;  &  estarai   105 
'  totK  ]iriiners  lo3  enemix,  e  ja  nuil 
Bniperaii'H,  cant  auzi  aizo,  fez  lo  mètre 
■  jiroaP  si   aizo,  qued  el  dizîa,  séria 
^nt   de  t'ez  qued  estes  aicî  desgaraitz 

110 
D,  que  dec  esser  li  batailla,  e  li  enonilc 
i  a  l'eraperador  per  pas,  e  qae  H  ren- 
I  près  d'el  ni  de  sa  terra,  &  eil  estarian 
^er  aizo  nuilz  liom  non  deu  aver  doptansa 
z  aijuesta  Victoria  per  so  saint,  qued  el    115 
Fia  batailla  ilesgarnitz.  Car  nostre  Seinner 
los  glazis  delz  enemix,  o  per 
r  vole  las  maa   del  seu  satot, 
bautugudas  del  sanc  d'alcun  borne.  Adonx 
{ Martina  sa  cavallaria,  &  annet  sen  [ad]  Ylari,    120 
eveaquea  de  Peitieus;  &  adonx  era  conoguda 
ler  las  terras  li  sancta  fez  de  saint  Ylari:  per 
ns  s'en  annet  ab^  el,  &  estetab  el  gran  pesaa. 
ab  sant  Ylari  gran  pessa,  &  el  conoc  la  bona 
artin,  fez  n'arcbidiaque,  volgues  o  non.  Car   125 
r°]-tins  se  deffendia  ades,  e  dizia  que  non  era 
■an  lionor,  ni  de  tau  grau  dignitat.  Cant  veno 
gran  pe^sa  son  arquidiaquenat,  e  lo  li  venc 
annes  vezer  sos  parenz,  qued  eran  aacar  pa- 


394  LEGENDES  PIEUSES 

mantel,  acomenseron  a  rire  &  ad  escarnir,  car  lahg  li  estava, 
55  car  portava  aquel  man-[98  v°]-tel  aici  desfahg.  Alz  autres  era 
mal,  qued  avian  maia  de  vestirs  que  lipogran  donar,  car  non 
avian  tan  fah  de  lur  gent  estar.  Carit  venc  la  nohg,  que  sainz 
Martins  se  fon  colgatz,  e  lo  li  apparec  Jesu  Christz,  domenz 
que  dormia,  e  portet  vestit  lo  mantel  qued  el  avia  donat  al 
60  paupre,  e  portet  lo  deus  aquella  part  vestit,  qued  el  n'avia 
cubert  lo  mesquin.  Sainz  Martins  acomenset  moût  bonament 
a  gardar  Jesu  Christ,  e  conoc  lo   mantel  qued  el  avia  donat 

10  jorn.  E  fon  una   gran  compainna  d'angelz  entorn  nostre 
Seinnor,  &  acomenset  a  dir  Jesu  Christz,  ab  clara  votz  :«  Mar- 

65  iinuSy  adhuc  cathecuminus,  hac  me  veste  contexit.  Martins,  que 
non  es  ancar  mans  christianatz,  m'a  cubert  deus  aquesta 
part.  »  Vole  remembrar  nostre  Seinner  zo  qued  avia  dih  a  sos 
discipolz  :  c  Quod  U7ii  ex  minïmis  mets  fecistis,  mihi  fecistis, 
Zo  que  vos  fares  ad    un   delz   meus    paupres,  fares    a   me 

70  mezeis.  »  E  per  confermar  la  guarentia  de  tan  bona  obra,  vole 
se  demonstrar  nostre  Seinner  en  aquel  habite  que  le  paupres 
avia  receuput. 

Cant  sainz  Martins  ac  vista  aquesta  vision,  non  s'en  donet 
humana  gloria,  mas  la  boneza  de  Deu  reconoc  en  sa  obra.  E 

75  cant  fon  d'état  de  .xx.  anz,  &  el  se  fez  batejar.  Mas  aqui  eis 
non  laisset  minga  sa  cavallaria.  Car  domenz  que  sons  paire 
tenc  lo  tribut,  vole  e  li  preguet  que  non  se  partis  de  lui.  Mas 
el,  Martins,  li  prometia  ben  a  son  paire  que,  [99  r°]  cant  el 
auria  laissât  lo  tribunat,  qued  el  desampararia  lo  segle.  Can 

80  venc  aprop  dos  anz  qued  el  fon  batejatz,  tenc  cavallaria.  En 
aquel  meja  cavalgueron  li  barbarin  en  la  terra  de  Fransa. 
Ab  aitan  l'eraperaire  Julius  César  acomenset  a  far  so  man- 
dament,  con  getes  aquellas  genz  de  la  terra.  Et  trames  son 
tribut  e  sos  dons  alz  cavaliers  d'una  ciutat  qued  avia  nom 

85  Vuagionum.  Et  aici  con  era  constumna,  nomnava  los  hom 
toz  per  lur  nomps,  &  venc  hom  a  saint  Martin  &  escrius 
l'om,  aici  con  un  delz  autres  cavaliers,  per  recebre  lo  don 
de  l'emperador.  Sainz   Martins,  can  saup  qued  Temperaire 

11  daria  aver  per  lo  cavalgar,  penset  s'en  a  se  mezeis  :  «  Si 
90  eu  recebi  lo  don  que  l'eraperaire  me  fara  e  non  cavalgui, 

mal  estara.  »  Vai  el,  &  annet  a  l'emperador  César,  e  dis  li  : 
«  Seinner,  eu  ai  estât  tos  cavaliers  entro  assi  ;  prec  te,*  si 


LEGENDES  PIEUSES  395 

te  platz,  que  tu  voillas  e  soffrias  qued  eu  d'aici  adenant  sia 
cavaliers  de  Deu.  Et  aizo,  que  tu  me  volias  donar,  part  entre 
los  autres  que  se  combatran  per  te.  Eu  soi  cavaliers  de  95 
Christ,  e  non  conven  qued  eu  mi  combata.  »  CantTemperaire 
auzi  aizo,  fon  moût  iratz,  &  acomenset  li  a  dir  que  per  paor 
de  la  batailla,  que  dévia  esser  Tendeman,  0  dizia,  e  non  per 
nuilla  boneza  ni  per  nuil  bon  cor  qued  agues  vers  Deu.  Res- 
pondet  sainz  Martins  fermament  e  seguraiw  Emperaire,  si  tu  100 
cujas  qued  eu  aizo  non  digua  per  bonafen,  [99  y°]  can  venra 
deman,  eu  me  métrai  davan  tota  la  ost,  can  deura  esser 
batailla,  totz  desgarnitz;  e  farai  lo  signe  de  nostre  Seinnor 
Jesu  Christ  ;  e  non  serai  ja  garnitz  d'escut,  ni  d'elrae,  ni  de 
capel  de  ferre,  ni  d' aubère,  ni  de  nuilla  garnizo  ;  &  estarai  105 
seguraraent  &  envazirai  *  totz  primers  los  enemix,  e  ja  nuil 
mal  non  penrai.  »  L'emperaire,  cant  auzi  aizo,  fez  lo  mètre 
en  preison  &  gardar,  per  proar  si  aizo,  qued  el  dizia,  séria 
vers,  ni  se  el  auria  tant  de  fez  qued  estes  aici  desgarnitz 
deman  en  la  batailla.  110 

Can  venc  Tendeman,  que  dec  esser  li  batailla,  e  li  enemic 
trameseron  messatges  a  Temperador  per  pas,  e  que  li  ren- 
drian  tôt  can  avian  près  d'el  ni  de  sa  terra,  &  eil  estarian 
pois  en  sa  merce.  Per  aizo  nuilz  hom  non  deu  aver  doptansa 
que  nostre  Seinner  fez  aquesta  Victoria  per  so  saint,  qued  el  115 
non  fos  trames  en  la  batailla  desgarnitz.  Car  nostre  Seinner 
vole  gardar  son  cavalier  denfra  los  glazis  delz  enemix,  0  per 
zo  vole  que  fos  li  pas,  car  gardar  vole  las  mas  del  seu  saint, 
que  non  fossan  bautugudas  del  sanc  d'alcun  home.  Adonx 
laisset  aqui  sainz  Martins  sa  cavallaria,  &  annet  sen  [ad]  Ylari,  120 
qued  era  adonx  evesques  de  Peitieus;  &  adonx  era  conoguda 
e  renomenada  per  las  terras  li  sancta  fez  de  saint  Ylari  :  per 
que  sainz  Martins  s'en  annet  ab^  el,  &  estetab  el  gran  pessa. 

Can  ac  estât  ab  sant  Ylari  gran  pessa,  &  el  conoc  la  bona 
fan  de  saint  Martin,  fez  n'archidiaque,  volgues  0  non.  Car  125 
sainz  Mar-[100  r°]-tins  se  deffendia  ades,  e  dizia  que  non  era 
dignes  de  tan  gran  honor,  ni  de  tan  gran  dignitat.  Cant  venc 
qued  ac  tengut  gran  pessa  son  arquidiaquenat,  e  lo  li  venc 
en  vision  qued  annes  vezer  sos  parenz,  qued  eran  ancar  pa- 

*  Ms.  envazarai. 

•  Sic.  Corr.  ad  ? 


^9^  LEGENDES   PIEUSES 

1^)  if.^n.  Bfïtrai4  o  a  fiaint  Ylari,  èc  ab  sa  volontat  aftsroiefr  i'ai 

À  anrmt  Von  la.  Kt  moût  plorant  À  ab  lagrimad  prwi«c  li 
sariz  Ylari»  rpie  toriie.^,  e  dis  li  sanz  Ylaria  e  fez  li  fober  ^œ» 
rnoiif^M  adviTAitat/  Hoffrîria  en  la  via.  E  cant  foa  sainz 
tins  »iM  é^ri  Ia"«  ^mn/  mon  tain  na.H,  e  lo  It  venjçroa  lairoa  e 

irc>  lo  pirnro.  K  Tih  dulz  lairog  levet  una  destral,  e  cnj^iz  ha  ferir 
RiM  por  lo  «!a|>,  éi,  us  autrtMi  va  li  penre  lo  bratz  e  r««;ii-î  le 
<*nlp  Mha  van  lo  ponre,  À  lieron  li  las  mas  detras  lo  'io^.  e 
inoAcron  lo  on  carcer,  Kdomens  que  l'en  menavan^  eîl  Li  de- 
ninndnvan  ((iii  ora.  Kl  respondet,  e  dis  lur  que  ckrîstîans  en. 

I4()  K  dtMnandavan  li  aï  avia  paor.  Sainz  Martins  respoadia  I«r 
qii«*d  hanr  iiimIh  tan  tiogurament  non  estet,  car  el  sabîa  beB 
qu«)  no4tro  S<Miinor*  trametia  majorment  sa  misericordia  a  sos 
nf^rn  vn  lur  touiptarion».  Pois  acomenset  a  dire  &  a  monstrar 
al/.  lairOM  lo4  ainoiioMtamonz  de  Tavangeli,  tant  qaed  un  delz 

MTy  lairofi  noiivrrti  ;  <ii  a(M>uionMet  s'en  ad  annar  ab  saint  Martin, 
0  pro^ava  li  quo  pro^çue^'  nodtre  Seinnor  per  el,  que  Tostes 
d'.iqnolla  niala  vida.  Kt  aquost  converset  pois  ades  ab  el.  B 
rorntava  quo  donion/  que  s'en  annavan,  &  agron  passât  la 
[100  v"]  riutat.  do  Modiolatia,  e  lo  li  apparec  en  la  Tia  le  dîa- 

l.V)  bol/  on  HomMauMa  d'orao,  éi  dis  li  on  annaria.  Respondet  li 
sainz  Marlin.^,  o  di.M  quo  la  on  Deus  volria,  la  annaria.  Res- 
pond«Yt  lo  d  in  bol/,  o  di»  li  :  «  Quocumque  ieris,  vel  quocumque 
tpmpfarefhf  dinhnlun  tihi  advermbitur.  On  que  tu  vaugas,  ni  on 
que  tu  tornos,  In  diabol/  te  sera  ades  encontra,  qne  te  fara 

155  ados  enobg.  »  Kospondot  sainz  Martins,  e  dis:  u  Dominusmi- 
chi  ndjutor  est,  non  timeho  quid  faciat  michi  homo.  Nostre 
Seinner  m'es  adjutorin,  &  non  temerai  nuilla  ren  qued  hom 
me  fassa.  i>  Kn  ei.s  pas  Tenemix  envanezi  davant  sos  oilz,  & 
anc  pois  non  fon  vistz. 

160  Venc  aqui  on  ora  sos  paire  e  sa  maire;  e  converti  sa  maire,  e 
tornet  de  la  error  on  era  del[z]  pagans;  son  paire  non  poc  anc 
convertir,  et  remas  en  la  error.  Moutz  homes  salvet,  per  son 
bon  eissemple,  e  tornet  a  la  via  de  veritat.  Cant  venc  approp 
non  triguet  gaire,  e  sainz  Martis  basti  un  monastier  en  la 

165  vila  don  era  oppida.  Et  can  ac  bastit  son  monestier  &  ado^ 

<   Ms.  .8, 

*  Mil  prigues  (pri  eo  abrégé  :  p  surmonté  d'un  trait  droit,  au  lieu  d'un  trait 
nontourné,  comme  dans  pregava,  qui  précède.) 


LEGENDES   PIEUSES  397 

denat,  e  lo  venc  ad  el,  al  monestier,  uns  que  s'era  fahg  chris- 
tianar,  mas  non  era  ancarbatejatz*,  &  era  i  per  aco  vengutz 
que  pogues  esser  entroduhg  de  la  disciplina  de  saint  Martin. 
Cant  venc  aprop  non  sai  canz  jornz,  &  aquestjoves  hom  près 
malautia,  e  fon  moût  malautz  de  febre.  Et  adonx  fon  aitalz  170 
aventura  que  sainz  Martins  era  annatz,  &  non  i  fon  ni  venc 
pois  de  très  jornz.  E  cant  venc,  atrobet  [101  r®]  lo  mancip 
mort  ;  et  avia  lo  aici  dessubtat  ii  mortz  que  senz  baptisme 
s'en  era  annatz.  Cant  sainz  Martins  venc,  agron  Ii  fraire  lo 
cors  acermat,  aici  con  coven  a  mort,  &  estet  el  mehg  del  sol,  175 
e  Ii  fraire  esta  van  entopn,  que  Ii  fazian  son  mestier,  aici  con 
Ii  tainnia  ;  et  ploravan  &  eran  moût  irat  e  marrit,  car  aici  era 
mortz  senz  baptisme.  Can  saintz  Martis  vi  lo  mort  &  saup  qued 
aici  era  transpassatz,  acomenset  moût  fortaplorar,  e  coman- 
det  qued  eississan  tuhg  foras  la  porta  de  la  cella  &  qued  hom  180 
la  sarres*,  cant  serian  tuhg  foras.  Et  aqui  eis  el  se  va  getar 
sobre  lo  mort,  e  fez  sa  oration  a  nostre  Seinnor  ;  e  cantac 
orat,  Tesperitz  tornet  al  cors,  &  uber[c]  los  oilz,  &  acomenset 
se  a  moure.  Can  saintz  Martins  o  vi,  ac  gran  gauhg,  &  ren- 
det  gracias  a  nostre  Seinnor,  &  uberc  la  porta,  e  fez  intrar  185 
totz  los  fraires  ;  &  ab  tant  intran  inz  cal  melz  e  melz,  per  vezer 
cellui  viu,  cui  avian  laissât  mort.  Et  aqui  eus  batejeron  lo,  e 
pois  visque(s)t  moutz  anz.  Aizo  fon  le  primers  miracles  que 
sainz  Martins  fez  en  aquella  terra. 

Le  joves  hom  qued  era  agutz  morz  comtava  pois  que  cant   190 
Ii  arma  Ii  fon  eissida  del  cors,  qued  ella  fon  menada  davan 
lo  durable  jutge,  nostre  Seinnor,  e  fon  per  plan  juzizi  depu- 
tatz  en  moût  escurs  lucx,  &  ab  moût  fera  gent  &  ab  moût 
trista.  E  domenz  que  dui  moût  fer  diabol  l'en  menavan  per 
moût  escurs  lux,  e  lo  vengron  subtanament  dui  angel,  e  dis-    195 
seron  que  lo  tornessan  al  [101  v**]  cors,  car  Martins  pregava 
per  el.  Et  aici  per  lo  comant  delz  angelz,  le  mortz  fon  tornatz  a 
vida,  per  las  or[a]tions  de  saint  Martin.  Des  aqui  enant  Ii  fama 
de  saint  Martin  e  11  sainteza  fon  saupuda  &  annet  ades  creis- 
sent  per  lo  segle.  Cant  venc  aprop  non  triguet  guaire  que  200 
sainz  Martins  passava  per  la  vila  d'un  rie  homen,  qued  avia 
nom  Lupicin  ;  e  domenz  que  passava,  &  el  auzi  un  moût  gran 

*  Ms.  batejar    —  '  On  avait  d'abord  écrit  serres, 


398  LEGENDES   PIEUSES 

plor  e  gran  plainhg.  Et  aqui  eis  cant  o  auzic,  &  el  se  restan- 
quet  &  acomenset  a  demandar  qued  era  aquel  plors,  e  dis  li 

205  hom  qoed  uns  sers  de  la  mainada  d'aqoest  rie  home  s^era  es- 
teinhg  ab  un  latz.  Cant  sainz  Martis  o  auzi,  diz  qued  hom  \o 
menés  la  on  era  le  mortz.  E  menet  lai  Tom.  E  can  fon  en  la 
maison  on  le  mortz  era,  fez  n'eissir  totz  aquelz  qued  eranlain- 
tre,  e  pois  acomenset  ad  orar  sobre  lo  mort.  Et  en  eis  pas  le 

210  joves  hom  fon  vius,  &  uberc  los  oilz,  &  esforset  aici  con  poc 
de  levar  sus,  e  vai  penre  saint  Martin  per  la'man,  &  annet 
per  lo  sol,  vezent  tôt  lo  pobol  qued  era  aqui. 

En  aquel  temps  esdevenc  que  fon  .mortz  Tarcivesques  de 
Tors.  Et  totz  le  pobolz  acomenset  a  cridar  ad  una  vos  qued 

215  hom  fezes  de  Martin  arcivesque,  et  appelieron  saint  Martin. 
El  respondia  e  dizla  que  per  nuilla  manera  non  poiria  laissar 
son  monester.  Cant  viron  que  nuilla  ren  non  i  podian  con- 
querre,  venc  us  hom  de  la  vila,  qued  avia  non  Ruritus,  e  getet 
[102  r^j  se  a  sos   pes,  et  acomenset  li  moût  fort  a  preguar 

220  qued  annes  &  eisses  foras  del  monestier,  que  sa  moiller  era 
moût  malautha,  6i  que  Tannes  vczer.  Ab  aitant  sainz  Martins 
prepauset  son  monestier  &  mes  i  garga,  entro  qued  el  fos  yen- 
gutz  de  la  ciutat.  Annet  s'en  la  a  Tors.E  can  fon  en  la  ciutat, 
venc  totz  le  pobolz,  e  non  solament  aquel  de  la  vila,  mas  de 

225  totas  las  autras  ciutatz  qued  entorn  aqui  eran,  &  acomenseron 
tuh  a  dir  cuminalment  que  ben  era  dignes  aitan  sainz  hom  & 
aitan  granz  de  l'arcivesquat.Aqui  s'eran  ajostatmout  evesque 
per  l'élection  e  per  establir  l'arcivesque;  à  acomenseron  ad 
esser  de  talz  n'i  ac  encontra  saint  Martin  éi  a  dire  que  non 

230  era  dignes  de  Tevesquat,  car  pauca  persona  era  &  non  era 
belz  hom,  ni  granz,  ni  ben  vestitz,  ni  ben  cermatz,  sei  cabeil 
eran  lagh  ;et  en  aici  despresavan  lo.  Et  antre  aquestz  evesques 
avia  en  un,  qued  annava  mais  encontra  que  tuhg  11  autre. 
Avenc  li  una  prophetia  aitalz.  Car  le  leitre  que  dévia  legir  ad 

23^  aquel  jorn  non  i  poc  esser,  car  le  pobolz  era  tan  granz  qued 
avenir  non  i  podia,  cant  li  clergue  viron  que  le  leitre  non  i 
era,  vai  penre  uns  delz  clergues  un  psauteri,  &  uberc  lo,  & 
acomenset  a  legir  lo  primer  vers  qued  i  atrobet,  &  fon  aizo  le 
vers  :  «  Ex  ore  infancium  et  lactenciumpei'fecisti  laudem  prop^ 

240  ter  inimicos  tuos,  ut  desCruas  inimicum  et  defensorem.  De  la 
bocca,  zo  diz  le  vers,  delz  enfanz  que  taetan,  [102  v**]  as  fahg 


i 


LEGENDES  PIEUSES  399 

essir  lauzor  per  tos  enemix,  que  destruias  Tenemic  deffende- 
dor.  » 

Cant  ac  aizo  dih  le  leitre,  e  totz  le  pobolz  acomenset  a  cri- 
dar  que  dignes  era  de  l'evescat,  &  tota  \i  partz  qued  annava  245 
encontra  fon  aici  confunduda.  E  van  penre  saint  Martin,  & 
aici  per  establiment  de  Deu  fon  elegh.  Fon  seinriatz  ad  arci- 
vesque.  Ane  per  aco  non  mudet  son  habite  ni  ren  quedagues. 
Ades  portet  himilitat  en  son  cor,  &  fon  ades  vestitz  paupra- 
ment,  &  tenc  ades  vida  de  monegue,  aici  con  solia  ni  avia  pre-  250 
pausat.  Et  estava  ades  enclaus  en  una  cella  de  josta  la  gleisa. 
Venia  tan  granz  pobolz,  per  el  ad  vezer  laintre  cada  jorn,  que 
anc  soffrir  non  o  poc,  &  annet  s'en  foras  de  la  ciutat  doas  legas, 
en  un  lue  moût  secret,  &  moût  loin  de  tota  autra  gent,  car  el 
mont  non  era  aquel  lux  plus  taisses  ad  hermitatge.  De  Tuna  255 
part  avia  una*  rocha  moût  auta,  que  clauziade  Tuna  part,  & 
solament  per  una  via  moût  estrechaorn  intrava  intrae  en  aquel 
lue  ;  &  avia  al  pe  de  la  rocha  fahg  una  cella  de  rama,  &  aqui 
el  estava. 

Moût  autre  morgue  &  discipol  avian  fâchas  lur  cellas  en  la  260 
rocha,  atressi  con  sainz  Martins,  car  non  se  volian  partir  d'el 
ni  de  sa  doctrina.  Et  eran  oitanta  discipol,  qued  a  Teissemple 
de  lur  maistre  vivian  &  estavan.  Nuilz  hora  non  avia  aqui 
propri,  car  tôt  cant  avian  aportavan  al  mehg,  &  partia  o  hom 
a  totz  zo  qued  obs  lur  [103  r°]  n'era  a  cada  un.  Nuilz  no  i  265 
comprava  ren  ni  i   vendia,  mas  aici  con  es  constumna  de 
morgues  quedestian,  aici  estavan.  Nuil  mestier  del  mont,de8 
escriure  en  foras,  aqui  non  fazia  hom  ;  et  aquo  era  donat  alz 
joves  homes  qued  o  podian  far.  Li  major  eil  plus  ancian,  aquil 
estavan  en  orations.  Tart  eissia  cada  us  de  sa  cella,  mas  sola-  270 
ment  cant  s'ajostavan  per  dire  lur  mestier.  Lo  jorn  non  man- 
javan  mas  una  vegada.  Nuilz  non  i  bevia  vin,  si  malautz  non 
era.  Ganren  i  avia  d'aquelz  qued  eran  vestit  de  cédas  de  ca- 
melZ;  &  aquo  era  le  plus  molz  vestirs  qued  eil  aguessan.  Et 
avia  i  antre  aques  moût  de  rix  homens,  li  quai  eran  agut  275 
davant  moût  fort  en  la  error,  que  pois  torneron  ai[ci]  ferm  * 

^  Ms.  uno. 

2  Oq  avait  d'abord  écrit  aicevm.  Du  c  od  a  fait  une  f,  mais  en  oubliant  de 
compléter  le  mot  précédent. 


400  LEGENDES   PIEUSES 

qued  a  la  vida  de  saint  Martin  eran  pujat  ;  e  d*aques  ac  en 
ganren  pois  d'evesques. 

280  S  car  serian  longuas  novas,  qui  totas  la  meravillas  de  saint 
Martin  volria  comtar  per  orden,  abreujarem  o.  Un  monestier 
avia  de  prop  de  la  ciutat,  &  avia  i  un  sépulcre,  e  dizian 
follas  genz  que  saint  martir(s)jacian  aqui  ;  e  per  aco  ara  moût 
sainz  lux  e  cars  ;  &  avian  i  establit  autar  e  gleisa  li  evesque 

285  qued  vos  aviam  dih  do  sobre.  Cant  sainz  Martins  auzi  aizo,  e 
vi  que  pobolz  i  venia  per  veillolar,  acomenset  a  demandar 
a  preveires  &  alz  majors  d'aquelz,  qued  estavan  ab  el  en 
aquel  hermitatge,  qualz  raartirs  jacia  en  aquel  lue,  [103  v®] 
ni  cora  fon  martiriatz.  Ane  nenguns  non  li  saup  dir  qualz 

290  martirs  era,  ni  qui  era.  Cant  venc  un  jorn  &  el  se  près  ab 
pauc  de  fraires,  &  annet  s'en  la  ad  aquel  lue,  on  era  aquel 
sépulcres  ;  e  can  fon  aqui,  &  el  se  getet  sobre  lo  sépulcre,  & 
acomenset  a  pregar  nostre  Seinnor  qued  el,  se  le  seus  plazers 
era,  qued  el  li  demonstres  qui  era  aquel  que  jacia  aqui,  ni  de 

295  quai  mérite  era.  Cant  ac  fahg  sa  oration,  &  el  se  giret  deus 
la  senestra  part,  &  el  vi  una  umbra  moût  horreza  e  mont 
cruzel.  Ë  cant  sainz  Martins  la  vi,  acomenset  li  a  dir  que 
parles  e  que  disses  son  nom.  Et  en  eis  pas&  el  li  dis  so  nom, 
e  manifestet  li  que  malz  hom  era  aguz  e  laire,  e  per  las  ma- 

300  lezas  que  fazia  fon  aucis,  &  per  la  error  del  pobol  era  cele- 
bratz  aici  con  martir  ;  mas  el  non  avia  ren  a  far  a  martirs  de 
Deu,  ni  part  non  avia  ab  elz,  car  aquil  eran  en  la  gloria  de  . 
Jesu  Christz  &  el  era  en  la[s]  penas  d'enfern.  Meraviilosa 
causa,  car  aquil,  qued  eran  aqui  ab  saint  Martin,  auzian  la 

305  paraula  et  auzian  la  vos,  e  non  vezian  la  causa  que  parlava 
ab  el.  Adonx  sainz  Martins  espons  lur  la  paraula,  e  lur  dis  zo 
qued  avia  vist,  e  comandet  aqui  eis  qued  hom  penses  *  l'autar, 
&  fetz  tornar  tôt  lo  pobol  d'aquella  error. 

Ësdevenc  pois  en  aquel  temps,  domenz  que   sainz  Martis 

310  annava  per  una  via,  &  el  esgardet,  e  vi  qued  aportet  hom  un 
cors  d'un  home  mort  qued  era  paganz,  e  por-[104  r®]-tava 
Tom  per  sebelir,  e  venia  per  aquella  via  per  on  sanz  Martins 
ann[a]va.  Cant  sanz  Martins  lo  vi  de  loin,  e  vi  la  compainna 
qued  i  era,  non  saup  veraraent  que  se  fons,  &  estanquet  se 

1  Sic.  Corr.  prenses,  pour  preses  ? 


LEGENDES   PIEUSES  4  01 

un  pauc.  Et  era  tant  loin  del  cors  qued  a  penas  poc  cpnoisser 
qued  era,  &  ab  aitant  vec  vos  una  aura,  e  levet  lo  suzari  315 
de  que  le  cors  era  cubertz  ;  e  cant  sainz  Martis  vi  aici  levar 
lo  suzari,  pesset  se  qued  fossan  las  propcessions  que  fazian  li 
vilan  de  Fransa,  quan  portavan  lur  jdolas  per  los  camps  e 
per  lur  blatz,  e  penset  sen  qued  aco  fossan  las  toaillas,  de  que 
annavan  cubertas  aquellas  ydolas  et  aquellas  ymagens  delz  320 
diabolz,  a  cui  fazian  lur  sacrifizis  li  pagan.  E  vai  sainz  Mar- 
tins  e  fez  lur  encontra  lo  signe  de  cros,  e  conjuret  los  sainz 
Martis  que  non  se   poguessan  moure  d'un   lue,  entro  qued 
aguessan  pausat  zo  que  portavan.  Aqui  viras  meravillas,  quar 
aquil  mesquin  s'enregezian  aici  con  rocha,  que  plus  non  se  325 
podian  moure.  Can    li  autri,  qued   eran    aqui,  vezian  qued 
aquil,  que  portavan  lo  cors,  non  se  podian  en  nuilla  guisa 
moure,  fazian  en  lur  esquern  e  rizian  s'en,  entro  que  mal  grat 
lur  pausavan  lo  cors.  Cant,  viron  aizo,  esteron  tuh  esbait,  & 
esgardavan  Tus  Tautre,  &  avian  se  meravillas  que  podiaesser.  330 
Ab  aitant  sainz  Martis  fon  prop  vengutz  d'elz,  e  conoc  que 
prossessions  de  mort  eran,  que  portava  le  pobolz.  [104  v°]  Vai 
sainz  Martis  e  seinnet  los  per  aqui  mezeis,  &  en  eis  pas  agron 
licencia  d'annar  &  de  penre  lo  cors  e  de  portar.  Et  aici  sainz 
Martis,  tant  can  li  plac,  los  fez  estar  ;  e  pois  can  li  plac,  fez  335 
los  annar. 

Autra  vegada  esdevaenc  que  sainz  Martis  venc  en  una  vila, 
&  aviai  un  temple  moût  antic,  en  que  li  paga  colian  las  ydo- 
las;  e  sainz  Martis  fez  lo  derrocar  ;  &  avia  aqui  de  prop  aquel 
temple  un  pin,  e  diz  sainz  Mart's  qued  hom  tailles  aquel  arbre.  340 
Li  pagan  acomenseron  a  contrastar,  e  disseron  que  lo  temple 
avian  laissât  derrocar,  e  ja  per  ren  non  soffririan  que  Tarbres 
fos  taillatz  ni  crematz.  Sanz  Martis  acomenset  lur  amonestar 
moût  bonament  qued  en  aquel  arbre  non  avia  nuilla  reli- 
gion, e  covenia  qued  eil  servissan  ad  aquel  Deu,  a  cui  el  345 
servia  ;  &  covenia  qued  hom  tailles  aquel  arbre,  car  sacrada 
era  al  diabol.  Adonx  uns  d'aquelz  qued  eran  aqui,  qued  era 
plus  arditz  de  parlar  que  tuh  li  autri,  acomenset  a  dir  :  «  Si 
tu  bas  nuUa  fizansa  del  tieu  Deu,  que  tu  dis  que  coles,  nos 
taillarem  aquest  arbre  ;  e  tu,  can  caira,  recep  lo  ;  e  si  le  tiens  350 
Deus  es  essemps  ab  te,  aici  con  tu  dis,  tu  escaparas,  que  ja 
mal  non  te  fara.  »  Adonx  sainz  Martis  se  ôzet  moût  en  nostre 

27 


402  LEGENDES   PIEUSES 

Seinnor,  e  promes  que  faria  o.  Cant  tiih  li  pagan,  qued  eran 
aqui,  auziron  aizo,  plac  lur  moût,  e  disseron  tuh  que  bon  era, 
355  e  bon  conseil  avia  donat  aquel,  &  agron  moût  [105  r**]  gran 
gauh,  e  disseron  entr'  e[lz]  que,  si  per  aital  aventura  ni  per 
aital  conseil  podian  aucir  Tenemic  de  lur  deus,  moût  cujarian 
aver  esplegat.  Ab  aitant  acampant   se   aqui  vila  per  taillar 
Tarbre,  &  ader[man]  un  poiria  caser,  et  estava  moût  dis  deus 
35Q  la  una  part,  e  non  era  doptes  que  can  séria  taiJlatz  ad  aquella 
part  cairia  ;  e  feron  aqui  mètre  saint  Martin,  e  lieron  lo  aqui, 
que  non  se  pogues  moui'e.  E  van  li  vilan,  &  acomenseron  a 
taillar  deus  Tautra  part  Tarbre,  moût  ab  gran  gauh  &  ab  ale- 
gricia.  Li  autri  qued  eran  aqui  se  meravillavan  moût,  car  sainz 
3Q5  Martis  avia  tan  de  fen  qued  aqui  se  metia.  E  cant  agron  esple- 
gat alques  de  taillar  lo  pin,  et  el  acomenset  alques  a  tremolar 
per  cazer  vers  la  on  sainz  Martins  era.  Li  morgue  qued  eran 
ab  el  foron  moût  cspautat,  &  agron  gran  dol,  &  agron  tota  lur 
fez  e  lur  esperansa  perduda  de  saint  Martin,  et  non  n'  atende- 
370  ron  ren  mas  sol  la  mort.  Mas  sainz  Martis  se  âzet  moût  en  nos- 
tre  Sennor,  e  non  ac  nuilla  paor.  E  cant  le  pins  acomenset  a 
frainner,  que  vole  cazer  sobre  sa  servitz,  e  sainz  Martiâ  levet 
sa  man  e  fez  li  signe  de  cros.  Adonx  venc  una  granz  aura,  e 
sozlevet  lo  e  fez  lo  tornar  atras,  &  aconsec  aquelz  vilas  que 
375  cujavan  estar  en  lue  segur,  6i  ab  pauc  non  los  mes  mortz. 
Sainz  Martis  remas  sanz  e  salz.  Adonx  se  levet  uns  moût 
granz  bruhg  :  li  monegue  acomenseron  a  plorar  de  gauhg,  li 
pa-[105  v°]-gan  cridavan  que  non  era  autre  Deus,  mas  aquei 
que  Martis  predicava. 
380       En  aquel  jorn  donet  Deus  salvament  a  tota  aquella  région. 
Car  anc  non  i  ac  tan  pauc  enfant,  que  neis  têtes,  qued  non 
li  aportes  bom  a  saint  Martin  denant,  e  per  lo  pausament  de 
sa  man  laissavan  la  error,  e  tornavan  se  a   nostre  Seinnor 
Jesu  Christ,  &  tuh  feron  se  batejar  ad  el,  &  anc  en  tota  la 
385  région  non  remas  hom  que  non  se  fezes  batejar.  Aici  fenirem 
nostre  sermon,  car  si  eu  volia  tôt  comtar  can  fez  en  tan  can 
visque(s)t,  ni  aprop  sa  mort  canz  miracles  fez  nostre  Seinner 
per  el,  non  nos  aondaria  le  jornz. 


/    i 


/ 
) 


LEGENDES  PIEUSES  4t)3 

XXVIIII 
VITA  SANCTI  BENEDICTI  ABBATIS 

Fuit  vir  vite  venerabilis  gratia  benedictus  et  nomme,  ab  ipso 
puericie  sue  [tempore]  cor  gerens  senile.  Etatem  quippe  moribus 
transsiens ^  nulli  animum  voluptati  dédit.  Uns  hom  fon,  zo  dis  li 
escriptura,  moût  d'onrada  vida,  qued  ac  nom  Benezehg,  per 
nom  e  per  gracia.  Des  lo  temps  qued  era  enfans,  portet  ades  5 
coratge  de  veil  home,  sa  état  transpasset  ades  per  costumnas, 
a  [nuil  delegh  non  vole  donar  son  coratge.  Mas  car  era  de 
terra,  non  podia  de  tôt  laissar  las  temporalz  causas,  car 
aquest  mont  desprezet  ab  sa  flor.  El  fon  moût  de  gran  lin- 
natge,  de  la  terra  de  Mursia  natz,  e  pois  fon  esseinnatz  en  10 
las  escolas  de  Roma.  Mas  car  el  vi  e  conoc  que  moût  d'aquelz 
qued  eran  el  segle  annavan  perillan,  son  pe,  qued  avia  quais 
pausat  el  segle,  trais  areire,  que  per  [106  r®]  la  vanitat  qued 
i  era  non  fos  de  tôt  sobrepres.  Laisset  las  escolas  e  los  estu- 
dis  de  las  letras,  &  la  maison  de  son  paire  ;  &  vole  plazer  15 
solament  a  nostre  Seinnor,  e  ques  Tabite  de  la  sancta  con- 
versation. 

Cant  aquest  ac  laissât  las  escholas,  e  vole  intrar  el  désert, 
una  noirissa  soa,  que  Tamava  mais  que  tuhg  l'autre,  segui 
lo  tota  soleta  ;  e  domenz  que  s'en  annavan,  vengron  ad  un  20 
lue,  on  avia  moût  de  bons  homes  ;  &  lainz,  per  doctrina  e  per 
instruction  apenre,  estet,  &  ad  una  gleisa  de  saint  Peire 
qued  i  avia.  Cant  venc  un  jorn  aquil  norissa  seua  de  saint 
Benezehg  ques  un  cruvel  per  mondar  blat  ad  una  vezina  soa  ; 
e  cant  n'ac  fahg,  vai  penre  aquest  cruvel  e  mes  lo  sus  en  25 
una  taula.  E  per  aventura  aital,  cazec  le  cruvelz  e  frais.  Can 
venc  aquil  profemena  &  atrobet  son  cruvel  en  doas  partz,  ac 
gran  dol  &  acomenset  a  plorar,  car  aquel  cruvel  qued  avia 
emprumptat  vezia  frahg.  Sainz  Benezehg,  can  vi  aici  sa  noi- 
rissa plorar,  ac  en  pietat,  e  vai  penre  ambas  las  parz  del  cru-  30 
vel,  e  getet  se  ad  oration.  E  cant  ac  fâcha  sa  oration,  &  el 
levet  sus  &  atrobet  son  cruvel  san  &  entier.  Et  en  eis  pas 
portet  lo  a  sa  noirissa,  &  acomenset  la  a  conortar,  &  aici 
rendet  lo  li  san  &  entier.  Et  aizo  saupron  tuhg  aquil  qued 


4   •  r.F.'^rriNr?:?  ?!?:l'5Es 

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4;  P:.«  siinz  B-=:.^zeig  n-iiî-r  :a.:;*;i.  v:ei  îno  non  û  saup 
=*.  rr.îirt:.  a  f-i*.  -î  ■rr.  -tl  -r.  :r?rr:.  vie:  la  n.ii  S.:b'.a.us. 
.  i-ï  :  -rs  b-rzi  l:.r.  i-=  R.^ii  il.  r-il.i?  »i  :'i':.i-?I  \\ii  eisson 
.v.:m*  :r-ri'i>  air-î*:  er  j  ir.  .-s  v.^'l^s  ican-pan  sen.  e  fan 
::-   iTin  .&:.  e  *_  :.?  l::*-  ::.  -er.  :*i  .u:  f  ::rr::..  o:  fan  un  riu 

45  i-rar,:.  E  i.TLr'z  .ue  «ai:.-.  B-rn-rz-ri^*  -"en  f:i^*ia  n  .  que  s'en 
i:.:.iva.  -rr.  >t  .  ,r.  .  :  ;.  â  -r.  «'er. ::L:rr:  a":  un  mo2.egue  qued 
i.'^ii  r.-.x  R  :...'::. .  o.  i-r:..  "i.r.  If:  !:  a/i-rs:  aïo.'^ues  on  anna- 
r!3..  a  ï'i[:i-z^  Br^vz-r':.^"  ::-■  i.  e  L.ii.;:f ^'.r:  Il  «jn.  mont  secre- 
niLr::.'.  Car.  if  L-:rçu-r=  v:  s:-    Mra"^-^  e  conoe  sa  Tolontat, 

'0  r. '.:.  .:  i-r=j-r!f'.  ?.r.z  1  r'fz  i/iel  aiJMMi'i  -^^i^  j.»oj.  Donet  U 
l's^.!*.:-  :-i  ■j:..vf:^a':;:L.  :>:.  er:  nîZT^ue.  :?  fez  li  aquel  ben  ik 
a'.uel  ad"--.c:l  .le  i:;.  V-j.. .-  -iir.z  BfLiL^  ai  aauesî  Josert. 
e  me?  s-îri  vn  ir.^  'la.r.  \  ::.  •.;•:  -rsrrf  :ha.  «k  ester  aqui  très 
ar.z.  '-le  i  f-...:   :."..z  :.:::.  :.  :i  l'i  saup.  mas  solament  aquest 

A^^•:■i=r.  R;rï.  !..'.5  esta-ra  ^r.  un  mones:ier.  que  non  era 
rr.^r.S'ua  fort  loi:,  i'a.ui.  de  oui  era  abbas  un  mot  bous  hom 
'.  ,-r  i  a  via  n-Hi  Dec  le^":  o:  z?  y.:ei  ai  au  est  morgue  Roman 
'1  ..-ava  :.  jii.  a  r.-a:..;ar  oaia  ;.:rn.  ik  el  :  artia  per  lo  mehg.  ui 

»';ô  >-■.  'jUe  ^e:.rr:  i '.-  .la.  e  caia  joiM  p-'r-^ava  r,  a  saint  Benezehg. 
Ij-:-.  a  .uei'.a  cei.a  or.  cs'ava  a.ues:  Rm^ai^s,  avia  una  vieta 
e:.::o  sus  e:.  u:.û  rcoa  or.  estava  desoz  sainz  Benezehg  ;  & 
ei.'.io  aqui  ver. 'a.  -aJa  jori;  107  i*^"  e  iiava  son  pan  en  una 
i'ji.^b.  corda,  tk  -'er.ava  lo  a  saiLi  Beriezehjr.  oc  avia  fermada 

(j-j  ^ir:  u  corda  unu  esquellera.  qued  al  son  d'aquella  esi^uelleta 
ven^'ues  sainz  Benezehg.  on  que  fos.  e  que  preses  lo  pan. 
Mas  can  le  dialolz  vi  la  gran  caritat,  ac  en  enveja,  car  l'autre 
acorr.a  de  maiijai*.  E  can  venc  un  jorn.  qued  el  li  aportava 
>on  pan,  e  îo  vene  le  diabolz,  e  iaisset  correr  una  peira,  e 

Tu  friiâ  Tesquella.  Ane  per  aco  Romans  le  morgues  non  Iaisset 
qued  en  totasmaneras  non  11  aministres  aioi  conpoc. 

CanT  venc  quj  nostre  Seinner  vole  que  Romans  se  pauses 
liei  iiabail,  •-■  vole  denionstrai*  alz  homes  la  vida  de  saint  Be- 


LEGENDES   PIEUSES  4  05 

nezehg   en  eissemple,  e  que  li   lumnera,  pausada   sobre  lo 
c  andelabre,  rendes  clardat,  e  que  luzes  ad  aquelz  que  son   en     75 
la  maison  de   nostre  Seinnor,  apparec   nostre  Seinner  ad  un 
preveire  qued  estava  loin  d'aqui,  &  avia  acermat  lo  jorn  de 
Pascas  a  disnar,  &  apparec  li  en  vision,   e  dis  li:  «Tu  appa- 
reillas bons  manjars  a  tos  obs,  &  le  meus  sers  es  tormentatz 
defam  en  aital  lue.  »  Et  aqui  eis  levet  sus  le  preire,  &  can  ac     80 
fahgson  mestier,  &  acermat  so  manjar,  &el  0  va  tôt  penre,  & 
annet  s'en  la  on  nostre  Senner  li  avia  dih,  ab  tôt  son  acerma- 
raent,  e  questan  lo  sers  de  Deu,  per  los  puhg  e  per  las  valz, 
e  de  sae  de  la,  entro  que   lo  trobet  en   aquella  balmeta  on 
estava.  E  can  fon  laintre  ab  el,  saluderon  se,  e  feron  lurora-    85 
tion,  &pois  asseteron  se  &  agrou  bonas  pa-[107  v°]-raulas  en- 
semps.  ^  cant  agron  parlai  una  pessa,  et  le  preire,  qued  era 
vengutz,  acomenset  li  a  dir  :  «  Leva  sus,  e  disnem  nos,  car  oi 
eslejornz  de  Paschas.  »  Respondet  sainz  Benezehg,  e  dis: 
«  Ben  sai  qued  oi  es  Pnscha,  car  eu  t'ai  ameritat  a  vezer.  »     90 
De  tota  autra  geiit  era  loin  aquel  lux,  per  (]ue  non  sabia  que 
fos  Pascha.  Et-affermet  li  per  aqui  eis  le  preire  que  le  jornz 
de  la  résurrection  de  nostre  Seinnor  era  verament  ad  aquel 
jorn,  e  que  non  covenia  que  dejunes.  «  Et  eu  soi  trames  per 
aco  aici  a  te,  qued  amdui  essemps  recipiam  los  dons  de  nostre     95 
Seinnor».  Beneziron  amdui  nostre  Seinnor,  e  pois  disneron 
se.  E  cant  seforon  disnat,  comandet  Tus  Tautre  a  Deu,  &  aici 
partiron  se.  Le  preire  s'en  tornet  e  sainz  Benezehg  remas  en 
sa  balma< 

En  aquel  temps  vengron  aqui  pastor  ab  lur  bestias,    et  100 
atroberon  lo  en  aquella  balraa.  D'aqui  adenant  saup  Tom  lain- 
tre ;  e  vengron  ganre  de  genz  pastor,  &  un  &  autre,  e  venian 
lo  vezer  moût  sovent,  &  aportavan  li  condulig  e  zo  qued  obs 
li  era;  &  aici  estet.  Can  venc  un  jorn,  &  el  estava  soletz  en 
sa  sella,  &  vec  vos  lo  diabol  que  li  venc,e  venc  li  en  guisa  d'un    105 
aucel  nègre  que  nos  autri  appellem  merlle,  et  acomenset  li  a 
volar  denant  la  carra,  &  estar  a  plan  ennohg  tôt  entorn  el,  & 
a  volar  de  sa  e  de  la,  de  guisa  qued  ab  su  man  lo  pogra  pen- 
re, si  se  volgues.  Mas  cant  sainz  Benezehg  o  vi,  seinnet  se,  à 
en  eis  pas  Taucelz  evanizi,  e  d'aqui  enant  nol  vi.  Et  en  eis  pas   no 
que  Taucelz  s'en  fon  partitz,  e  lo  [108  r°]  li  venc  tan  granz 
temptacions  de  sa  carn,  qued  anc  mais  le  sainz  hoin,  des  qued 


406  LEGENDES  PIEUSES 

anc  natz  fon,  non  avia  agut:  que,  quant  era  el  segle,  avia  vist 
una  femena,  &  aquella  le  malignes  esperitz  li  avia  mes  en  son 

115  coratge,  e  fazi[a]  Ten  menbra[r].  E  fez  lo  serv  de  Deu  ea 
tant  embrasar  en  la  beutat  d'aquesta  femena  que,  per  la  vo- 
lontat  de  la  carn,  ab  pauc  non  desamparet  Termitatge  e  non 
tenc  en  la.  Mas  adonx  sobtanamenz  lo  regardet  li  sobeirana 
gracia,  e  tornet  en  son  coratge  &  en  so  senz,  e  regardet  se 

120  e  vi  aqui  prop  de  se  un  boisson,  plen  d'urtigas  e  d'espinas,  & 
ab  aitant  despoilletse  tos  nutz,  e  getet  se  intre  el  boisson,  & 
aici  entre  las  espinas  e  las  urtigas  voludet  se  moût  fort  et 
moût  aigrament.  E  can  se  fon  aqui  grau  penssa  voludatz,  e 
fon  ben  per  tôt  lo  cors  naffratz  per  las  espinas  e  per  las  urti- 

125  gas,  eissi  s'en,  &  aici  per  las  naffras  del  cors  guari  las  nafiras 
de  la  pensa,  zo  es  de  Tarma.  D'aqui  enant  pois  non  li  aveno 
aitalz  causa.  Aprop  aizo,  acomeuseron  a  venir  moût  ad  el,  e 
laissavan  lo  segie,  e  volian  esser  sei  discipol  &  estruh^de  la 
soa  doctrina. 

130  Prop  d'aquel  lue  on  el,  sainz  Benezehg,  esta  va,  avia  un  mo- 
nestier,  &  era  mortz  Tabbas  d'aquel  monestier,  e  tota  aquil 
congrégations,  qued  aqui  era,  vcnc  a  saint  Benezehg,  et  aco- 
menseron  li  a  pregar  qued  el  fon  s  abbas  e  paire  del  mones- 
tier, et  qued  el  lo  capdelles.  Sainz  Benezegh  dizia  e  vedava 

135  moût  fort  qued  el  non  dévia  esser  lur  abbas  ni  lur  paire, 
car  el  non  [108  v^]  poiria  tener  la  estrecha  régla  qued  eil  te- 
nian.  E  pregueron  lur*  tant  que  fez  lur  voluntat.  Annets'enab 
elz  el  monestier  &  establiron  lo  per  abbat.  El  estet  e  tenc 
moût  estrecha  vida,  &  guardct  moût  fort  sa  régla,  e   la  fez 

140  tenir  a  sos  fraires  laintre  ;  e  tenc  los  moût  en  destrehg,  si  que 
nuilz  non  ausava  eissir  del  monestier,  si  per  granz  obs  oc.  E 
cil,  que  n'avian  fahg  abbat,  aeomenseron  ad  encusar  elz  me- 
zeis,  car  eil  n'avian  fahg  paire  del  monestier,  et  agron  en  mot 
granz  pelejas  laintre  entr'elz,  e  penseron  &  acorderon  entr'elz 

145  con  poguessan  aucir  saint  Benezehg.  E  preseron  un  jorn  vé- 
rin &  meseron  lo  en  son  vin.  E  cant  sainz  Benezehg  fon  a  la 
taula,  que  vole  manjar  un  jorn  a^ssemps  ab  los  autres  fraires, 
&  hom  li  aportet  la  copa,  en  qued  era  aquest  vis  entoissegaz, 
primerament  ad  el  per  seinnar.  E  sainz  Benezehg  estendet  la 

4  Sic.  Corr.  /i. 


LEGENDES  PIEUSES  407 

man  e  seinnaet  la.  Et  en  eis  pas  li  copa,  qued  hom  li  ténia  de-  150 
nant,  fon  aici  fracha  con  si,  en  lue  del  seinnar,  1  agues  ferit 
ab  una  gran  peira.  Saup  alo  sainz  Benezehg  qued  en  aquel 
vin  avia  vérin,  le  qualz  non  poc  soffrir  ni  atendre  lo  signe  de 
vida.  Et  en  eis  pas  el  levet  sus  alegramenz,  e  non  fez  anc 
semblant  que  mal  li  fons,  &  acomenset  moût  bonament  amo-   155 
nestar  los  fraires  &  a  dir  :  «  Seinnor  fraire,  le  poderos  Deus 
aia  merce  de  vos.   Per  que  volias  far  aizo  en  me  ?  Non  vos 
dis  eu  donx,davan  qued  vos  en  fezesses  abbat,  que  las  meuas 
[109  r**]  constumnas  non  s'acordavan  ab  la  vostra,  ni  li  mia 
régla  ab  la  vostra?  Annatz  e  segon  vostras  costumnas  queres   160 
abbat,  car  mi  non  podes  aver  d'aici  enant.  »   Vai  sainz  Bene- 
zehg e  tornet  s'en  la  don   era  mogutz,  en  son  hermitatge,  & 
aqui  converset  pois,  &  Deus  fon  ab  el. 

Can  le  sainz  hom  ac  aici  estât  longament  en  la  solitut,  & 
Deus  fazia  montas  meravillas  e  montas  vertutz  per  el,  moût  165 
home  vengron  per  el  en  aquel  lue,  &  volgron  estar  en  la  ser- 
vitut  de  Deu,  et  acamperon  s'en  i  tanz  que  dotze  monestiers 
n'establic  sainz  Benezehg  a  nostre  Seinnor.  Et  en  cada  un 
delz  monestiers  establi  dotze  monegues,  &  Tabbat,   que  fo  lo 
tretzes;  e  retenc  ab  se  mot  pauc  de  fraires,  qued  esteron  ab   170 
el,  e  cui  el  estruis  de  sa  doctrina.  Gant  li  rie  home  de  Roma 
0  saupron  e  li  religions,  acomenseron  li  ad  adurre  lur  enfanz 
per  noirir  e  per  esseinnar.  Adonx  li  liuret  Equicius  son  fil 
Maurum  &   Tertullus  Patricius,  Placidum.  E  d'aques   dons 
enfanz,  le  filz  d'Equicius,  Maurus,  acomenset  a  resplandir  175 
per  las  bonas  constumnas  de  son  maistre  saint  Benezeit.  Pla- 
cidus  era  atressi  paciens. 

En  un  d*aques  monestiers  que  sainz  Benezehg  avia  cons- 
truhg,  era  uns  morgues  que  per  nulla  ren  non  podia  estar  ad 
oration.  Car  aqui  eis  can  li  fraire  se  clinavan  per  orar,  &  el  180 
s'en  eissia  foras  &  acomensava  ad  arezar  los  afars  deforas,  & 
annava  vanejant.  Et  sos  abbas  avia  lo  moût  soven  amonestat 
que  non  o  fezes.  Can  Tabbas  vi  que  ren  non  li  valia,  me-[109  v**] 
-net  lo  a  saint  Benezehg.  Can  fon  denant  el,e  sainz  Benezehg 
lo  vi,  &  el  racomense[t]  moût  fort  a  menassar.  Respondet  li  185 
le  morgues  que  castiaria  s'en,  e  tornet  s'en  ab  son  abbat.  E 
can  s'en  fon  tornatz  a  so  monestier,  a  penas  poc  ben  tener 
Tencaut  très  jornz,  que  li  avia  fah  sainz  Benezehg.  Can  l'abbas 


4  08  LEGENDES  PIEUSES 

del  monestier  o  vi,  maiidct  o  a  saint  Benezebg,  que  le  mor- 

190  gués  era  tornatz  en  aquo  cis  que  solia.  Dis  sainz  Benezeh  : 

((  Eu  lai  irai,  et  farai  lo  csmendar.  »  Can  sainz  Benezegh  fon 

al  monestier,  et  venc  ad  una  hora  qued  hom  dis,  e  que  11 

. fraire  se  ^etcron  ad  oration,  can  foiun  complit  li  psalme,  e 

sainz  Benehg  csguarda,  e  vi  aquost  morgue  que  non  podia  es- 

195  tar  en  oration,  qued  us  paux  enfas  nègres  lo  tirava  foras  per 
lo  somp  de  son  vestir.  Vai  sainz  Benezehg,  e  sonet  Tabbaidel 
monestier,  Pompeiano,  tx  a  Maur,  qued  era  vengutz  ab  el,  dis 
en  secret  ad  una  part  :  «  Vos  non  vezes  donx  qui  es  aquest 
que  tira  aquest  morgue  foras?  »  Responderon  eil  e  disseron: 

200  a  Nos  non  vczem  ren.»  Adonx  dis  lur  :  «Orem  tuhg  très  que 
vos  0  puscas  vezer.»  Cant  venc  a  cap  de  dos  jornz,  Mauruso 
vi,  èi  Pompeians  non  o  poc  vezer.  Can  venc  al  ters  jorn,  que 
sainz  Benezehg  eisïji  de  la  gleisa,  cV  el  atrobet  aquest  morgue 
estant  deforas,  <ii:  ab  una  veigua,  per  la  cocitat  de  son  coratge, 

205  sainz  Benezehg  lo  ftîi'i.  K  d'aqui  enant  non  lo  cale  anc  amo- 
nestar,  car  ades  pois  estet  plus  immobilis  en  orations  que 
tuh  li  autri.  Et  aici  Tantix  enemix  non  auset  pois  sen-[110  r®] 
-norejar  en  aquest  morgue,  aici  con  si  fos  batutz  ben  e  fortab 
la  vergua. 

210  IVaques  monestiers,  que  sainz  Benezehg  avia  bastitz,  eran  11 
très  sus  en  la  rocha,  ai  era  lur  moût  de  gran  trabail  d'aportar 
aigua  d'aval  del  lau(s),  e  niajorment  car,  per  lo  derroc  del 
puhg,era  fort  greus  perilz,  e  granz  perilz  de  mort,  a  celz  qued 
i  descendian.  Acorderon  se  tuh  li  fraire  d'aquelz  très  mones- 

215  tiers,  e  vengron  a  saint  Benezehg,  e  disseron  li:  a  Senner, 
granz  trabailz  nos  es  moût  de  descendre  cada  jorn  sa  aval 
per  aigua,  ad  aquest  lac,  e  per  zo  conven  que  mudem  les  mo- 
nestiers  d'aqui  on  son.»  Cant  sainz  Benezeh  o  auzi,  conortet 
los  moût  gent,  e  pois  dis  lur  que  s'en  tornessan.  E  can  venc  la 

220  nohg,  e  sainz  Benezehg  s'en  pujet  sus  en  la  roca  del  puhg, 
ab  Placidum  Tenfant,  e  mes  sus  en  la  rocha  très  peiras  per 
seinnal,  e  fez  i  sa  oration.  E  cant  ac  orat,  &  el  s'en  tornet  tôt 
secretament  a  son  monestier.  K  cant  venc  l'endeman,  e  li 
fraire  torneron  ad  el,  per  plana  soffracha  d'aigua.  Adonx  dis 

225  lur  sainz  Benezehg  :  a  Annatz,  à  aquella  rocha,  on  atrobares 
très  peiras  desobre,  cavas  unpauc.  Car  nostre  Seinner,  qued 
es  poderos  de  tôt  cant^  es,  vos  pot  ben  donar  aigua  el  som 


/ 


LEGENDES   PIEUSES  4  09 

d'aquel  puhg,  e  toire  lo  trabail  que  vos  en  ternes  tant.  » 
Anneron  s'en  lifraire,  <k  atroberon  aquella  rocha  que  suzet. 
Van  se  penre,  &  acomenseron  a  cavar  la  rocha,  e  feron  i  un  230 
moût  ample  cros,  &  en  eis  pas  agron  pro  aigua,  que  lur  adon- 
det  a  totz  très  los  monestiers,  &  qued  en  correc  [110  v*>]  pro, 
entro  al  pe  de  la  montaiiina. 

Cant  [venc]  unasazon,  e  lo  venc  ad  el  uns  hom  paupres  per 
esperit,  per  ucaison  de  sancta  conversation,  e  sainz  Benezehg  235 
receup  lo  mont  volontiers.  E  can  venc  un  jorn,  &  sainz  Bene- 
zehg comandet  qued  hom   li  dones  un  ferrament,  qued  hom 
appella  falcastre,  car  es  fahg  aici  con  faus,  ab  que  tailles  una 
gran  boissonada,  en  qued  hom  dévia  far  ort.  Aquel  lux  jacia 
sobre  la  riba  del  lac.  Domenz  que  Tom  taillava,  aitan  canpo-  240 
dia,  la  boissonada,  e  le  ferres  li  eissi  del  margue  c  cazec  inz 
el  gorc.  Et  aqui  era  tan  granz  li  pregonneza  de  Taigua  que 
nuilla  esperansa  non  era  de  querre  lo  ferrament,  ni  de  trobar. 
Et  aici  cant  ac  perdut  lo  ferre,  le  gotz  annet  s'en  moût  pavo- 
ros  a  Maur,  e  comtet  li  qued  aici  avia  perdut  lo  ferre,  &  en   245 
aici  li  eia  cazuhg  inz  en  Taigua.  Annet  Maurs  &  annet  o  dir 
a  saint  Benezehg.  Et  aqui  eis  sainz  Benezehg  leva  sus,  e  près 
lo  margue  de   la  man  de  Tome,  e  getet  lo  intre  en  Taigua, 
encontra  aqui  on  le  ferres  era  donatz.  Et  en  eis  pas  le  ferres 
eis  del  pregon  de  Taigua  &  intret  el  margue,  e  va  lo  penre  250 
sainz  Benezehg  e  rendet  lo  al  got,  e  dis  li  que  labores,  e 
non  agues  ira  ni  se  constristes  per  aizo. 

Can  venc  un  jorn,e  sainz  Benezehg  estava  en  sa  cella,  co- 
mandet a  Tenfant  Placidum  qued  annespozar  del'aigua  ellac. 
Annet  s'en  la  le  tozetz.  E  can  fon  a  l'aigiia,  et  el  acomenset  255 
moût  abrivadament  a  mètre  intre  en  l'aigua  aquel  aize  que 
portava;  &  ab  aitan  li  aigua  apode -[111  r'^J-ret  lo,  e  vai  intre 
ab  tôt,  &  aqui  eis  li  onda  acomensa  Ten  a  tirar,  e  tiret  lo  ben 
loin  de  terra  lo  trah  d'un  arc.  Sainz  Benezehg,  qued  era  den- 
fra  sa  cella,  conoc  aizo  per  Saint  Esperit,  &  sonet  Maur  e  dis  260 
li  :  «  Praire  Maure,  cor,  cor,  quar  Tenfant,  qued  aviam  tra- 
mes per  querre  d'aigua,  es  cazuhg  intre,  e  li  onda  tira  l'en 
&  ha  lo  moût  loin  tirât.  »  Vai  sainz  Benezehg  e  seinnet  Maur; 
6l  acomenset  s'en  ad  annar,  e  venc  ben  tost  a  Taigua  &  venc 
entro  aqui  on  li  onda  avia  tirât  l'enfan,  &  annava  intre  per  265 
l'aigua  e  cujava  certamenz  annar  per  terra,  <S:  aici  correnz 


410  LEGENDES  PIEUSES 

sobre  Taigua  va  jienre  Tenfant  per  los  pelz,  e  de  gran  cors 
gotet  le  do  Paiga.  Et  aqui  eis  can  fou  a  terra*,  el  se  reconoc, 
&  reguardet  detras  se  e  conoc  que    sobre  las  aiguas  avia 

270  corregut,  &  ac  en  fereza  a  se  mezeis,  que  se  se  reconogues, 
ja  non  o  agra  fali.  R  can  fon  tornatz  a  saint  Benezehg,  comtet 
li  lot  cou  o  avia  fahg  ni  con  li  era  près.  Sainz  Benezehg 
non  pensava  mingua  que  per  lo  seu  mérite  fos  esdevengut, 
mas  per  la  obediencia  de  Maur;  mas  Maurs  dizia  que  sola- 

275  ment  per  lo  seu  mandamcnt  era  esdevengut,  car  nuilla  ver- 
tutz  non  era  per  celluiquo  faziazo  que  non  cujava  far. Mas  do- 
menz  qued  eil  eran  en  aquest  bon  contrast  &  en  aquesta  ami- 
cabili  contencione^  é:  lo  venc  Tenfans  qued  era  eissis  de  Tai- 
gua;  &  dis  que  domenz  qued  hora  lo  tira  va  fora  per  los  pelz , 

280  que  semblanz  li  era  qued  el  vis  lo  vestir  de  son  paire  Bene- 
zehg [111  V**]  et  qued  el  lo  traisses  de  Taigua.  Aquil  mones- 
tier  creissian  cada  jorn  en  la  fez  de  nostre  Seinnor  &  en  la 
soa  amor  &  en  la  soa  obra;  e  moût  home  seglar  laissavan  to- 
tas  las  causas  seculars,  e  venian  aqui  a  saint  Benezehg  e  do- 

285  navan  se  ad  el  <S:  a  la  soa  doctrina,  &  sozraetian  lur  colz  al 
jo(s)  de  Christ,  qued  es  leus  e  soaus. 

Can  venc  una  sazoïi,  aici  con  es  usatges  que  li  mal  home  an 
enveja  de  las  vertutz  c  de  las  bonas  obras  que  li  bon  home  fan 
e  de  las  abstinencias,  zo  qued  eil  non  volon  retener  ni  aver 

290  a  lur  obs,  uns  prcire  que  ténia  una  gleisa  prop  d'aqui,  qued 
avia  nom  Florens,  fon  feritz  de  la  maleza  del  diabol,  &  aco- 
menset  aver  granz  iras  oscontra  los  fahg  e  la  vida  de  saint 
Benezehg  ;  &  era  li  mot  mal,  car  vezia  annar  las  genz  la  on 
sainz  Benezehg  estava,  per  el  a  vezer,  &  acomenset  mot  mal 

295  a  dire  d'el,&  amoncstava  lur  que  non  la  annessan  e  que  se 
tolguessan  d'el  a  vezer  ni  a  visitar.  Can  le  preire  vi  que  ren 
non  li  valia,  qued  on  mais  el  en  dizia  de  mal  e  li  soa  vertatz 
creiscia  mais  e  plus  era  conoguda,  adonx  fon  plus  enbra- 
satz,  et  mais  pensava  en  son  cor  de  cal  manera  pogues  aver 

300  la  lauzor  de  bona  vida,  aquella  cui  el  non  volia  aver  ni  tener. 
Et  ac  tant  de  mala  volontat  en  se,  que  ve  se  penset  con  pogues 
aucir  saint  Benezehg.  E  can  venc  un  jorn,  &  el  fez  far  un  pan 
e  mesclet  i  veri,  e  pois  trames  lo  a  saint  Benezehg,  cais  per 

*  Ma.  terre. 


LEGENDES  PIEUSES  411 

bona  amor.  Vai  sainz  Benezeg  e  receup  lo  pan,  &  rendet  li 
moutas  gracias,  e  conoc  lo  vérin  qued  era  denfra.  Can  venc  305 
que  sainz  Benezegh  se  vole  disnar,  e  vec  vos  un  corp  de  la 
selva,  que  venia  [112  r**]  cada  jorn  aqui  ad  el,  can  se  volia 
disnar,  e  donava  li  sainz  Benezehg  a  manjar  de  zo  qued  el 
manjava.  Venc  le  cors,  can  sainz  Benezehg  fon  a  la  taula;  e 
vai  penre  sainz  Benehg  lo  pan,  que  le  preire  li  avia  trames,  310 
e  getet  lo  al  corp,  e  dis  li  :  «  El  nom  de  nostre  Seinnor  te 
cornant  eu  que  tu  prennas  aquest  pan,  e  geta  lo  en  tal  lue  on 
nuilz  hom  trobar  non  lo  pusca.»  Adonxle  corps  acomenset  ad 
annar  tôt  entorn  lo  pan,boccauberta,<S:  volatejava  tôt  entorn, 
quais  que  volgues  far  lo  mandament  de  saint  Benezehg,  mas  315 
semblanz  li  era  que  non  o  pogues  complir.  Adonx  sainz  Bene- 
zehg acomenset  li  a  dir  :  a  Leva,  leva  seguramenz,  e  getalo  en 
tal  lue  on  non  pusca  esser  atrobatz.  »  Vai  aqui  eis  le  corps  e 
met  lo  pan  en  sa  bocca,  e  leva  lo,  &:  acomensa  s'en  ad  annar.  E 
cant  ac  estât*  una  pessa  &  ac  getat  purre  lo  pan,&  el  tornet,  320 
&  donet  li  a  manjar  sainz  Benezehg  aici  con  solia.  Sainz  Be- 
nehg vi  lo  preveire  qued  aital  enveja  li  portava  e  qued  aici 
lo  cujava  au  cire  ;  saup  li  pejor  per  lo  peccat  qued  el  fazia 
que  non  fez  del  dan  qued  el  i  avia. 

Mas  cant  le  preire  Florencius  vi  que  non  avia  pogut  aucire  325 
lo  cors  del  maistre,  penset  con  pogues  aucire  las  armas  delz 
dicipolz.  Can  venc  un  jorn,  e  le  preire  près  set  donzellas  e 
totas  nuzas  trames  las  la  on  sainz  Benezehg  estava  ;  e  van  se 
mètre  en  Tort,  que*d  era(n)  davan  sa  cella  ;  e,  cnnforon  intre, 
preseron  se  per  las  mans,  &  acomenseron  totas  set  a  ballar  &  330 
ajoguar,  per  tal  que  li  discipol  de  saint  Benezehg  las  vissan,  e 
que  s'abrases  lur  coratges  per  luxuria.  Can  [112  v»]  sainz  Bene- 
zehg o  vi  de  sa  cella  on  era,  temps  que  sei  discipol,  cil  qued 
eran  joven,  non  fossan  sobrepres,  et  saup  ben  e  conoc  que 
per  mal  d'el  era  fahg.  Donet  sainz  lue  a  Tenvejos,  &  mes  &  335 
establi  capdelladors  en  aquel  lue  on  el  estava,  &  pois  ab  totz 
SOS  joves  morgues  annet  s'en  en  autre  lue.  Et  aqui  eis  can  sainz 
Benezehg  ac  aizi  vencut  himilment  Tenemistat  del  preveire, 
Deus  aucis  lo  preveire  moût  espautavolment.  Car  domenz 
que  Florenz  estava  en  un  soler,  e  saup  que  sainz  Benezehg  340 

*  Corrigé  de  ^reto/,  écrit  d'abord. 


41?  LÉGENDES   PIEUSES 

s'era  partitz  d'a([ui.  acomenset  a  meuar  moût  gran  gauh,  et 
en  ois  pas  tota  li  maisons  s'acomenset  a  moure,  &  le  solers 
cazcc  cV:  aiicis  lo  preveire.  Can  Maurus,  us  delz  morgues  qued 
tM'a  roniasutz  en  la  cella,  auzi  que  lo  preire  era  mortz,  man- 
'^A:^  dot  o  a  saint  Bonozolitr,  que  s'era  loinnatz  des  legas  d'aqui, 

0  dis  *  (|Uo  le  proiro,  que  lo  perseguia,  era  mortz,  et  que  s'en 
tornos.  Caiit  sainz  Benozeh^  o  auzi,  acomenset  a  plorar,  car 
Toiu  ton  p[o;ris  en  aitalohra,  e  car  sos  disoipolz  avia  gauh  de 
la  mort,  o  donot  l'en  peniîenoia. 

;C»0  Moc  se  d'aqui  sainz  Benezehir,  «&  mudot  sa  estaja  el  castel 
de  mont  Cassin,  qued  es  sus  el  som  d'un  moût  aut  puhg.  Et 
aqui  avia  un  temple,  on  solian  adorar  li  pagan  una  ydola,  qued 
appellavan  Apol!on.  Et  a  ben.  des  lo  pe  del  puhg  entro  sus 

01  som.  très  mi  lias.  K  neis  an  c  ara  can  sainz  Benezegh  i  venc, 
:Cv»   li  pagan.  qued  est  a  van  en  las  vilas  d'eutorn,  i  venian  adorar. 

Vai  sainz  Bene.ehg,  can  f«  n  sus.  *k  atrobet  aquol  temple. 
Frais  la  ydola.  e  trastornet  ^113  r^]  los  autars,  &  cremet  totas 
las  Y  mages  .[ued  a:  robot  laint:  e.  en  aquel  temple  d'en  ApoUo, 
e  te;  d'aquel  Tom:'".e  g'eisa  de  sa.nt    Martin,  ô:  aqal  on  fon 

;>(V">  Tautars  d'eu  Aj^llo.  :\ .  airar  de  saint  Jo'nan.  Et  estet  aqui, 
0  te;  i  SA  es:.î:ga.  V.i  M\:.y.  i-redioa:!:  enîorn  aqui,  et,  per  sa 
i^re,::eAî:o".  :v^:':;o:  los  a  la  fe:i  de  Cl.ris: 

Mas  oar.t  l'a:.:  a  c::o:*^:x  ^:  y:e.:  aLi  era  destruhg,  non  poc 
so:*-.".:'  vV.ie  r.o:i  o  .::s>es.  1--  uci:  res  .-"j.iudamenz.  ai  per  sommîe, 

îfVN  îv.as  arertaîv.e:::  avvaroj  a  si.:::  B-:i:rzeh  e  li  veii,-  davan  sos 
0  1:.  wV.  o:"dava  :v.  .-*:::  :".::  à  s,.:.:  Lvj::fj-:.g  .ue  îo.-t  li  lazia,  e 
;.  :  ;  :  a  ,^  ,:  e  c  ::  :  sa    ::  :  :  ::  ::  1  :  :".  :\  y  -:   ■  e  1  ;.  i  ::  :  :  e  o  a  u  z  i  a  n .  m  as  non 

%  m 

.*  .  »  V .  „ .  ..*  ^»  — î^i'...  A»,-.>  > _  ^>-.  ^•.  „■  ..^  ..ur  ...z.a  oen  que 

»  .^. .  K . ;»....; ^  i ..  ,1  ....'.....>.> e..rS-:i.  a.'_t  nègres  6 

.^       ,  ••>.•••      .«.^,  vV      .     ...       .......4'.i         .._,     ..•.      ...      ...      ......     ?     ^   "  »      Ocl     if  U  vCCl 

î   .i ■•  .    ..'..■.    .  i  >>.,-.  ...1  -.  _.i .:..-..  IL.  .-...o  Ow.eJ  el  oiZiB 

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";:v.   V  .:^v  >  .       :>.    i   : .  ç   .;  .  .    .  :l:a  rfs   :iire.  a;:^mensava 
,*  ;i  l.i':  c  :-..i'   .*  .  .:v.  ,.  ..:    .    ...^   :  :  s:LÀ..i  *  Bf-vz^he!  Be- 

.^    .-»      ..;  -i  ..j»     #;',..•.      ..i    .  i  .    .  i •  .  ..j»  Tr?.  -ILJI.  r.  «X  ei  il  Stir 


LEGENDES   PIEUSES  413 

mensava  a  dir  :  «  Malazehg  !  Malazehg  !  e  non  ja  Benezeh, 
qued  as  a  partir  ab  me?  Ni  per  que  me  persegues  ?  Con  devon 
se  combatre  aoras  novellarment  li  saint  de  Deu  ab  los  dia- 
bolz?  »  Vai  le  diabolz,  &  ynnava  ades  aginnant  con  11  pogues 
far  enogh;  mas  cant  el  o  cujava  far,  &  el  li  donava  Victoria  380 
encontra  se  mezeis. 

[113  v°]  Can  venc  un  jorn,  e  li  fraire  de  laintre  fazian  una 
maison,  &  el  mehg  del  comprennement  on  volian  far  aquesta 
maison  avia  una  peira,  e  volgron  la  levar  sus  en  esta  paret, 
e  van  la  penre  dui  êtres  e  quatre,  &  anc  moure  non  la  po-  385 
gron,  &  pois  van  se  n'i  penre  ganres,&  aco  valc  meinz,  qued 
anc  per  ren  moure  la  poguessan  ;  &  estet  aici  enrazigada  en 
terra  con  si  hom  Vi  agues  plantada,  car  le  diabolz  s'era  ase- 
tatz  desus,  e  per  aco  non  la  podian  tant  home  moure.  Can 
si  foron  aici  essagat,  trameseron  a  sant  Benezehg  que  ven-  390 
gués  ;  e  can  fon  vengutz,  pregueron  li  que  pregues  nostre 
Seinnor  qued  hostes  d'  aqui  1'  enemic,  qued  eil  se  pensavan 
qued  el  tengues  la  peira  tant  apremsa,  per  que  eil  non  la 
poguessan  moure.  Et  aqui  eis  sainz  Benezehg  fez  sa  preguera 
e  seinnet  la  peira,  et  aqui  eis  van  penre  la  peira,  et  leveron  395 
la  aici  leu(s)ment  con  si  nuil  fais  non  i  agues.  Adonx  plac  a 
saint  Benezehg  qued  hom  fosses  aqui  la  terra,  e  cantli  fraire 
agron  fos  aqui  moût  pregon,  &  eil  atroberon  aqui  una  ydola 
de  coure,  e  van  la  penre,  e  geteron  la  fora ,  e  pois  meseron  la  en 
la  cozina  ;  e  can  Fagron  messa  laintre,  fon  semblanz  a  totz  los  400 
fraires,  qued  eran  aqui,  que  li  eissis  tan  granz  fux  per  la 
bocca  a  la  ydola  que  tota  li  cozina  crèmes.  Van  t«h  ensemps 
cant  o  viron,  et  acomenseron  a  cridar  :  «  aigua!  »  per  amorsar 
aquel  fuc.  Can  sainz  Benezegh  auzi  la  bruia,  venc  ben  tost;  e 
can  fon  aqui,  non  vi  anc  lo  fuc,  &  acomenset  a  demandar  qued  405 
era.  Responderon  tuhg  ensemps  e  disseron  :  [114  r°]  «  Non 
ves  tu  donx  que  li  cozina  vol  cremar  del  fuc  qued  eis  d'à. 
questa  ydola  ?  »  Aqui  eis  sainz  Benezehg  getet  se  ad  oration,  e 
tornetlos  oilz  delz  fraires,  qued  encantava  le  diabolz,  alz  sens 
oilz,  e  saupron  que  le  diabolz  los  annava  aici  escarnent,  &  410 
d*aqui  adenant  non  viron  las  falsas  flammas  del  diabol.  Per 
aqui  mezeis  can  li  fraire  bastian  e  levavan  un  pauc  plus  autla 
paret,  e  sainz  Benezehg  estava  en  sa  cella,  e  lo  li  apparec  le 
diabolz,  &  acomenset  li  a  dir  qued  annaria  s'en  alz  fraires 


4n  LEGENDES  PIEUSES 

415  que  laboravan.  Can  sainz  Benezehg  o  auzi,  mandet  tost  per 
un  messatge  alz  fraires,  que  fazian  Testar,  que  fezessan 
sapiament  zo  que  fariuii,  quar  le  diabolz  lur  dévia  venir 
ades.  A  penas  cel  que  portet  lo  messatge  ac  ben  dicha  la 
paraula,  que  le  diabolz  derroquet  la  paret  qued  avian  fâcha, 

420  6i  aconseguet  un  pauc  morguec.  qued  era  fîlz  d'un  rie  home  de 
la  cort  de  V  eniperador,  <>:  irisset  lo  tôt.  Li  fraire  agron 
moût  gran  dol  e  gran  marriment,  oant  aizo  fon  avengut,  & 
manderon  o  aqui  cis  a  saint  Beuezehg.  Adonx  sainz  Benezehg 
comandet  qued  liom  li  aportes  lo  mort.   Van  penre  lo  tos,  e 

425  coilliron  lo,  <>:  anc  non  lo  li  poo  hom  aportar,  si  en  un  sac  oc, 
tan  fon  atrissas  :  car  aici  con  li  pares  cazec,  non  solament  la 
carn,  mas  totz  los  os  li  atrisset.  E  can  Tagron  aportat  aqui 
denant  saint  Benezelig,  fez  lo  pausar  el  sol  laintre  en  sa  cella, 
e  comandet  alz  fraires  que  s'en  eississan  tuhg  ;  e  cant  foron 

430  tuhg  foras,  acomensct  ad  on»!'  :  et  a-^ui  eis  le  morgues  [114  v*] 
fon  sans  e  salz  ;  e  trames  lo  sainz  Benezehg  ab  los  antres 
fraires  al  laor,  la  on  fazian  la  maison. 

Adonx  acomenset  sainz  Benezehg  per  Saint  Ësperit  a  pro- 
phetizar;  car  el  dizia  ù:  annunciava  zo  qued  era  ad  avenir  &  zo 

435  qued  era  fahg,  ja  nono  a<j:ues  vist  ni  auzit.  Constumna  era  del 
monestiere  régla  que.  can  li  fraire  eissian  foras,  peralcun  afar, 
non  devian  manjar  ni  heure  foras  del  monestier.  Et  aizo  era 
moût  fort  gardât  per  la  régla.  Can  venc  un  jorn,  e  li  fraire 
anueron  per  afar  del  n.onesiier  deforas,  o:  esteron  la  tant  que 

4-10  prop  fon  de  nohg.  Eil  cant  o  viron.  anneron  s'en  a  maison 
d'una  mot  religiosa  fomena.  e  disneron  se  laintre  ab  ella.  E  can 
se  foron  disnat,  mogron  se  :  e  fon  nogh,  can  foron  al  monestier; 
c:  can  foron  intre.  anneron  s'en  davan  lur  paire  saint  Benezehg, 
per  penre  benedietiun.  aici  con  usatges  e  régla  es  que,  cant 

445  morgues  va  ni  torna  deforas.  que  prenna  bénédiction.  E  cant 
foron  denant  el.  el  lur  acomenset  a  demandar  on  avian  man- 
jat.  Eil  responJeron  qued  en  nengun  lue.  Dis  sainz  Bene- 
zehg :  «  Ara  per  que  mentes  en  aici?  Non  aves  donx  manjat, 
ad  alberc  d'aital  femena.  aiîal  conduh  o:  aital,  «s:  aves  begut 

450  ai  tan  ta  veguada  ?  »  Cani  li  fraire  auziron  qued  aici 
lur  dizia  Talberc  on  avian  manjat,  e  qualz  conduhg,  conogron 
qui-  mal  o  avian  fahg  :  e  van  se  getar  a  sos  pes,  e  confesse- 
ron  lur   oolpa.  Et  aqui  eis  sainz  Benezehg  perdonet  lur,  e 


LEGENDES  PIEUSES  415 

<îomniandet  lur  que  per  nuil-[115  r**]-la  ren  d'aqui  adenant 
non  fos  fagh.  455 

Aquel  morgues,  qued  avia  nom  Valentin,  del  quai  nos  vos 
avem  dih  desobre  que  fon  niortz,  avia  un  fraire  qued  era 
laix,  &  era  moût  religions  hom,  &  annava  cad'an  ad  aquest 
monestier,  que  recoupes  la  oration  de  sain  Benezehg,  &  per 
vezer  son  fraire;  e  cad'an  avia  en  usatge  que  mogues  de  460 
son  alberc  dejus,  e  non  agues  manjat  entro  que  fos  al  mo- 
nestier &  agues  vist  saint  Benezehg.  Can  venc  un  jorn  que 
vole  far  son  viatge  al  monestier,  &  el  atrobet  un  compain- 
non  que  vole  atressi  annar  la,  &  ajosteron  se  essemps,  & 
acomensan  s'en  ad  annar  ;<k  aquest  autre  portet  conduhg.  465 
Cant  venc  que  fon  ja  granz  hora,  e  lo  dis  aquest  que  portava 
lo  conduhg:  «  Ven  en  fraire,  e  manjem  lo  conduh  qued  avem, 
que  non  lassem  en  la  via.  »  Respondet  l'autre  e  dis:  «  Non 
farai,  fraire,  qued  acosturaat  ai  que  vengua  cad'an  dejuns 
denant  Tabbat  saint  Benezehg.  »  Cant  o  auzi  le  compainz  qued  470 
aici  o  dizia,  callet  se  ab  aitant,  e  non  sonet  plus  motz.  Mas 
cant  agrori  annat  autre  pauc,  acomenset  li  a  dir  per  aqui  me- 
zeis  que  manjessan.  MasTautrenon  Ten  vole  anc  creire.  Ecant 
el  o  vi,  non  Ten  sonet  plus  motz.  Cant  agron  annat  una  gran 
pessa,  &  eran  ja  las*,  &  eil  atroberon  un  prat  &  una  font.  E  475 
cant  0  agron  atrobat,  acomenset  li  a  dir  le  compainz  :  «  Vec 
te  aici  lo  prat  e  la  font,  e  tan  bel  lue  :  manjem  aici,  e  pois  fa- 
rem  [115  V**]  meilz  nostre  viatge.  »  L'autre,  per  las  paraulas  e 
per  lo  bel  lue  qued  era  aqui,  obezic  li,  e  manjeron.  Cant  venc 
lo  seras,  &  eil  foron  al  monestier,  venc  aquest  denant  saint  480 
Benezehg,  e  quis  li  bénédiction.  Mas  aqui  eis  can  fon  denant 
el,  &  el  li  acomenset  a  dir:  «  Qued  es  aizo,  fraire  ?  Le  diabolz, 
que  te  parlava  per  ton  compainnon,  non  te  poc  vencer  la  pri- 
mera vegada,  ni  la  segonna;  mas  la  tersa  vegada  te  sobret 
ad  aizo  que  se  vole.  »  Adonx  el  conoo  sa  colpa,  e  va  se  jetar  485 
a  SOS  pes,  e  ploran  dizia  a  saint  Benezegh  que  pregues  per  el. 

El  temps  que  reinnavan  li  Goth,  can  lur  reis,  qued  avia 
nom  Totila,  auzi  que  sainz  Benezehg  dizia  aizi  per  Saint  Espe- 
rit  zo  qued  era  fahg,  e  zo  que  dévia  venir,  annet  s'en  a  so 
monestier,  e  can  fon  de  prop  del  monestier,  &  el  mandet  que  490 

^  Ms.  latz. 


41  .  r.EJÎENDKS    PIF.USFS 

ve  i  venria.  Mandei  ii  hoDi  arressi  del  monestier  que  vengues 
eora  ad  el  plazeria.  Aquest.  ai..i  con  el  era  de  tracion  e  de 
lagli  fagh  plos,  o  fazia  per  essai ar  saint  Benezehg,  si  el  dizia, 
aici  con  las  genz  dizian,  j-er  Saint  E<iierii,  zo  que  dévia  ave- 

495  nir.  Vai  penre  un  de  so<  oaval. ers  qued  avja  nom  Rigo,  &  fez 
ii  causar  son  eausament  e  vo-tir  so-s  vestirs  reialz,  e  coman- 
det  Ii  qued  annes  en  son  hic  al  nionesiier,  e  vengues  al  bon 
homen  saint  Beneglig:  e  donei  11  très  rix  homes  qued  anne- 
ron  ab  el,  e  que  lo  sosten^-ron  de  sa  et  de  la:  Vulifrich  <k 

o-'O  Rudercli  o:  Bliniin:  ik  U*  moneron  davan  saint  Beuezeih  en 
lu:  dei  rei  :  ù:  jiensot  se  ;ne.î  el  cujes  que,  per  los  vestirs  e 
per  los  compainnos  «^ue  j  al»  e'.  annavan.  lo  preses  en  lue  de 
se.  (k  cujava  lltj  v]  iii  aici  <•  l'repenre.  Can  aquest  Rigo  fon 
aici  vestitz,  per  los  vestirs  luii  iLnut  beiz,  ô:  annet  moût  gent 

ô<J5  aoompainnatz  :  e  oân  fon  a!  imiiestier.  e  <ainz  Benezehg  se 
sezia.  ce  aici  con  e'.  lo  vi  :;.t:'  r.  t>:  i'ulî  i!i  loin  con  el  lo  vi,  Ii 
âcomenset  a  dir:  .  F:'/..  :  a'.:-:i  zo  :ue  tu  portas,  car  non  es 
tieu.  ))  Aquel  Rigiio.  Oi.ii:  o  ;..U/:i.  ao  izvam  paor,  car  volia  aici 
escarnir  lo  h  ai  h-m^.  e  vi  s..-  getar  a  >os  pes,  e  tuh  uquil, 

510  qued  eian  atressi  ab  ei.  ^o-  jer^-ron  nM^essi  a  terra.  Pois  leve- 
ron  sus.  ù:  non  s'aiizavuii  ii:.;  roi-iar  'i'ol;  mas  torneron  s'en 
l-en  tost,  e  comteroîï  ■:«  tôt  ni  rei  aiii  con  sainz  Beuezegh  o 
avi]a]  digh,  cv  aj:o::  inoiit  ^ra::  paor  per  lo  sobreprennement 
que    sainz    Benezeiit:  :ur  a:  lali.  A  îonx  cant  o  auzi   le  reis, 

515  aoomenset  s'en  :  cr  se  m-i-z-is  ai  annar  la.  E  cant  fon  al 
monestier  evi  cie  loiii  s-zer  saint  Beiiez^gh.  non  s'auzet  appro- 
piar  d'e',  e  getet  >e  ei.  îfrra.  Ab  aitan  fon  vengutz  aquî  le 
bos  hom  sainz  Benezcir"..,  o  dis  Ii  .uc  Lves  sus.  e  dis  loi  una 
vegada  o  doas.  cv.  si.o  ie    reis  levar  non  auset  sus  ;  &  vai  lo 

520   î'Onre  sainz  BcnezOi:!!.  o  levé:   lo  sus  '.er  la  m  an.  Et  cant  Tac 

•  V.  A 

levât,  acomensot  lo  î;;out  a  re:  o:.:ê  6:  a  castiar  de  sos  malz 
fuiiiT  Gue  fazia;  ci.  en  i-auc  de  Viara  :las.  toi  can  liera  ad  ave- 
r.ir  11  annunciet.  e  ils  Ii  :  ..  Moutz  malz  fas  e  moutz  malz  as 
faeh.  e  toi  te  i'aouosta  toa  ::::■. ul:  t.  Tu  intraras  en  Roma, 
Ô23  e  pois  passaras  mar,  no::  a:::  roi :.r. aras,  <>:  al  detze,  e  tu 
morras.  *  Car.:  lo  rois  au.::  a  .:o.  fou  moût  espautatz,  e  dis  Ii 
o.ue  pi'ogues  :or  ol.  o  pois  v>avù  ,i'a  .ni.  Ed*aqui  adenant  non 
fo  .  ta  II  llo  v^'  11.  a\:  ::i  î"o/  a:.:ol.a>  inaiezas  que  solia.  Can 
Vv.-:ij  pois  non  t:  i^:io'  guàii'e  qued  el  intret  en  Roma,  e  pois 


i 


LEGENDES   PIEUSES  417 

passet  mar.  Cant  venc  al  dezen  an,  &  el  perdet  son  regesme 
&  mori.  530 

L'evesques  de  Casuna  avia  aconstumnat  que  cad'an  annes 
vezer  saint  Benezehg,  e  sainz  Benezelig  amava  lo  moût,  car 
era  hom  de  sancta  vida  e  de  bona.  Cant  venc  que  foron  amdui 
ensemps,  acomenseron  a  parlar  d'aquest  rei  Totila  e  del  des- 
truiement  de  la  ciutat  de  Roma.  Acomenset  a  dir  Tevesques  :  535 
«  Per  aquest  rei  sera  destrucha  tota  aquist  ciutatz,  e  jamais 
hom  non  i  habitara,  »  Respondet  li  sainz  Benezehg,  e  dis  li  : 
«  Roma  non  sera  ja  destrucha  per  nuilla  gent,  mas  per  tem- 
pestas  e  per  torbilz  d'auras,  e  per  terratremol,  e  per  fouzers 
se  destruira  e  s'afollara  moût.  »  Aizo  esdevenc  pois  aici  con  540 
sainz  Benezehg  o  dis  ;  car,  per  aquelz  torbeilz  qued  el  dis, 
s'afoUet  Roma,  e  se  destruis. 

En  aquel  temps,  uns  clergues  de  la  gleisa  d'Aquina  era  moût 
trabaillatz  per  un  diabol  que  li  era  el  cors.  E  Tevesques  de  la 
ciutat,  Constanz  qued  avia  nom,  mot  bos  hom  e  mot  cars,  545 
avia  lo  trames  per  montas  gleisas  de  martirs,  que  Deus  li  ren- 
des sanitat,  <k  auc  li  saint  de  Deu  non  lo  volgron  sanar,  car 
demonstrar  volian  la  gracia  qued  era  en  saint  Benezehg.  Cant 
venc  tôt  a  derrer,  menet  l'om  a  saint  Benezehg.  Sainz  Benezehg 
acomenset  a  pregar  nostre  Seinnor,  aqui  eis  cant  fon  denant  550 
el,  &  en  eis  pas  getet  li  lo  diabol  del  cors;  e  dis  al  clergue: 
«  Vai,  fraire,  e  d'aici  enant  non  [117  r^]  manjes  carn,  e  non 
sias  jamais  preire.  Car  si  tu  presumias  jamais  que  t'apro- 
piessas  del  saint  orden,  ni  de  manjar  carn,  le  diabolz  auria 
atressi  sennoria  en  te  con  a  agut  entre  assi.  »  Annet  s'en  le  555 
clergues  sans  e  salz.  Et  aici  con  pena  novellars  sol  espautar 
lo  coratge,  temps  o  moût  de  primer,  e  gardet  moût  lo  coman- 
dament  de  saint  Benegh.  Can  venc  aprop  lonc  temps,  tuh  sei 
major  e  sei  prier  de  la  gleisa  moriron,  &  el  esguardet  e  vi 
qued  aquil,  quederan  mener  qued  el,  pujavan  alz  sainz  ordes  560 
desobre  se  :  temps  o  moût,  &  ac  en  grau  enveja,  e  mes  en 
oblit  las  paraulas  de  saint  Benezegh,  &  pujet  s'en  al  saint 
orden,  e  fon  preire.  &  aqui  eis  le  diabolz,  que  Tavia  laissât,  lo 
tenc,  &  trabaillet  lo  tant,  entre  que  Tarma  li  getet  del  cors. 

Uns  hom  qued  era  moût  de  gran  linnatge,  qued  avia  nom  565 
Theoprobus,  que  per  Tamonestament  de  saint  Benezehg  s' era 
convertitz,  &  avia  moût  gran  fizansa  en  el,  &  era  li  en  totz 

28 


41S  LÉGENDES   PIEUSES 

seiiz  moût  familiars,  aquest  Theoprobus  iutret  un  jorn  en  la 
ceîla  de  saint  Bonezegh,  e  cant  ton  laintre,  atrobet  lo  moût 
570  fort  e  moût  amarament  ploranr.  E<iet  aqui  una  gran  pessa 
davant  el,  e  oan  vi  qued  en  niiilla  nianera  non  se  geqnia  de 
piorar,  ni  anc  non  l'au/i  planner,  aici  con  solia  cant  era  en 
oration,  mas  ades  assidualment  plorava,  non   se  poc   solTrir 
que  non  li  demandes  qued  avia,  ni  perque  plo-|^117  voj-rava. 
575  Sainz  Benezehg  respondct  li  ben  tost  :  «  Totz  aques  mones- 
tiers,  qued  eu  ai  construhg,  e  totas  aquellas  causas,  qued  eu 
L  ai  appareilladas  ad  obs  delz  fraires  sou  liuradas  al  jnzizi  de 
"  Deu,  û:  appenas  :ii  pogut  acabar  ab  nostre  Seinnor,  que  sola- 
ment   cil   qued  i  esiion  n'escapon,  o  Aizo  li  auzi  dir  aquest 
5^0  Theoprobus.  Po:<  esdevenc  «jue  li  Longobart  destruisseron  lo 
monestier.  Cant  venc  una  nohg,  domenz  que  li  fraire  se  dor- 
inian,  intreron  laintre   li  Lonj^obart,  e  destruiseron  tôt  cant 
lâintre  al  nionosti»?r  avia.  Anc  nengu  home  penre  non  la  po- 
gion,  car  nostr».*  Seinnei*  vole  complir  zo  qued  avia  promes  a 
5vS5  son  saint,  que  nenguns  delz  fraires  non  i  dévia  périr. 

Cant  venc  autra  vegada,  uns  pros  hom  trames  par  un  ser- 
vent seu  dos  boiz  plos  «le  vin  a  saint  Benezegh.  Annet  aquest 
que  portava  los  botz  ;  esooiidet  l'un  en  la  via,  ô:  Tautre  el  por- 
te t  a  saint  Bonozeh.  E  cant  lo  li  ac  aportat,  receup  lo  moût 
500  ab  gninz  gracias.  E  cant  s'en  vole  annar  le  joves  hom,  dis  li 
sainz  Benezegh  :   «  Yejas,  lilz,  que  non  bevas  d'aquel  flasoon 
qued  as  escondut.  mas   clina  lo  sapiament,  e  veiras  qued  ha 
intre.  »  Annet  s*en  le  messatges,  iratz  e  vergoinnos,  e  vole 
provar  zo  que   suinz   Benezehg  li   ac  dih:  venc  al  flascon  e 
5^»5  clinet  lo,  e  domenz  qued  el  lo  clinava,  e  lo  n'issi  una  serps. 
Cant  aquest  messatges  o  vi,  ae  gran  paor,  ô:  penedi  se  moût 
del  mal  qued  avia  fahg.  Aquil  vila  non  era  fort  loin  del  mones- 
tier,  <k  estavan    118  r°'  i    moût   granz  genz  que  s'eran  con- 
vertit a  la  fen  de  Christ  e  s'eran  tout  de  colre  las  ydolas. 
W)       En  aquella  vila  avia  un   monesiier  de  morguas,  e   sainz 
Benezehg  trameiia  la  sovent  los  fraires,  per  amonestar  e  *  con 
si  tornessan  de  tôt  lur  eoratge  a  nostre  Seinnor.  Can  venc 
uu  jorn,  e  sainz  Benezegh  la  trames  un  morgue  par  amones- 
tar; e  cant  ac  fâcha  sa  prédication,  porteron  li  las  sanctas 

*  Après  ce  mol, /^er  tno?i-tru)',  qu'où  a  biffé. 


LEGENDES   PIEUSES  419 

fcmenas  doas  toailletas,  e  pregueion  li  que  las  preses.  Près  605 
las  per  lur  preguera,  e  pois  mes  las  en  so  ?en,  e  tornet  s'en. 
E  cant  fon  tornatz  a  son  monestier,  e  venc  denant  saint  Bene- 
zehg,  acomenset  lo  moût  fort  a  raenassar  sainz  Benezehg,  & 
a  dire  :  «  Per  que  es  intrada  iniquitatz  en  ton  sen  ?  »  Le  mor- 
gues, cant  auzi  aizo,  ac  granz  meravillas,  e  non  li  menbret  610 
per  que  zo  volia  dir.  Sanz  Benezegh  acomenset  li  adiré  :  «  Eu 
non  era  lo  mingua  la,  cant  tu  presist  las  toaillas  de  las  an- 
cillas  de  Deu,  e  las  mesist  en  ton  sen?  »  Le  morgues  vai  se 
getar  a  sos  pes,  &  quis  li  penitencia  de  la  transgression  qued 
avia  fahg,  &  trais  las  toaillas  de  son  sen  e  getet  las  porre.       615 

Cant  venc  un  jorn,  que  sainz  Benezegh  so  disnava,  &  era  ja 
noh,  uns  morgues  paux,  filz  d'un  rie  home,  ténia  una  candela 
davant  el,  &  acomenset  a  dir  a  se  mezeis,  domenz  que  ténia  la 
candela  :  «  Seinner,  qui  es  aquest  a  cui  eu  servi  &  este  de- 
nant endomenz  que  manja?  »  &  avia  en  moût  gran  desdein.  620 
Et  aqui  eis  sainz  Benezehg  acomenset  li  a  [1 18  v^]  dir  :  a  Seinna 
te,  fraire  ;  qued  es  aizo  que  tu  dis?  Senna  te!  »  Ab  aitant 
sonet  sainz  Benezegh  los  fraires,  c  comandet  lur  que  presessan 
la  candela,  &  ad  aquel  morgue  dis  que  se  ostes  davant  el,  & 
que  se  annes  sezer.  Et  acomenseron  li  a  demandar  li  fraire  625 
qued  avia,  &  el  dis  lur  tôt  per  orden  que  pensava  ni  qued 
avia. 

Can  venc  autre  temps,  <k  lo  fon  moût  granz  famps  per  tota 
aquella  région,  &  el  monestier  de  saint  Benezehg  failli  blatz, 
Tuhg  li  pan  foron  manjat  &  degastat,  qued  anc  plus  de  cinc  630 
non  n'ac  en  tôt  lo  monestier,  ad  obs  de  disnar  alz  fraires.  E 
foron  tuhg  moût  irat  et  marrit.  E  can  sainz  Benezegh  los  vi 
aici  annar  marritz  &  iratz,  acomenset  los  a  menassar  &  a 
repenre  moût,  car  annavan  aici  ;  e  pois  acomenset  lur  apro- 
metre  &  a  dire  :  «  Per  que  es  aici  tristz  le   vostre  coratges  635 
per  pan?  Si  oi  n'aves  pauc,  dcma  n'aures  pro.  »  Cant  venc 
Tendeman,  &  eil  atroberon,  davan  las  portas  del  monestier, 
dozens  mois  de  farina,  en  sax  ;  et  anc  hom  non  saup  ni  poc 
saber  de  quai  manera  vengron  ni  i  foron  aportat.  Can  venc 
lo  mati  que  li  fraire  los  atroberon,  agron  gran  gauhg,  e  ren-  640 
deron  montas  gracias  a  nostre  Seinnor. 

Can  venc  autra  sazon,  et  uns  rix  hom  venc  a  saint  Bene- 
zehg, e  preguet  11  qued  en  un  terrador  qued  era  propis  sens, 


420  LEGENDES   PIEUSES 

de  jostala  ciutat  de  Terrassona,  trameses  de  sos  [119  r^]  discî- 
645  polz  e  qued  i  fezes  bastir  un  monestier.  Annet  sainz  Bene- 
zehg,  e,  per  lo  prec  del  rie  home,  près  morgues  seus,  &  de 
l'un  fez  capdel  de  totz  los  autres,  &  trames  lai  los.  E  domenz 
que  s'en  annavan,  &  el  lur  acomenset  a  dir  :  «  Annatz,  &  eu 
serai  la  ad  aital  jorn,  ùi  monstrarai  vos  en  quai  lue  fares  la 

650  gleisa,  ni  en  quai  lo  refector,  ni  en  quai  Testai,  ni  on  deures 
far  aquellas  maisons  qued  ohs  seran  al  monestier.  »  E  cant 
agron  receuput  bénédiction,  &  eil  s'en  anneron.  E  can  venc 
ad  aquel  jorn  que  sainz  Benezehg  lur  ac  tlonat,  à  eil  asserme- 
ron  amanjar  tôt  can  pogron.  Can  venc  la  nohg  que  Tendeman 

655  dec  venir,  aici  con  promes  lur  avia,  &  el  apparec  a  cellui,  de 
cui  avia  fahg  paire  &  comandador,<k  a  Tautre,  que  venc  après 
el,  &  mostret  lur  totz  los  lux  en  vesion,  on  devian  bastir. 
Can  venc  Tendeman,  e  lo  acomenset  a  comtar  Tus  a  Tautre  la 
vision  qued  avia  vista.  Non  crezeron  minga per  aizo  la  vision, 

660  mas  ades  attendian  saint  Benezeh,  aici  con  promes  lur  avia. 
Non  venc  anc  plus  sainz  Benezegh.  Cant  eil  viron  que  non 
venia,  torneron  vers  el,  moût  irat,  e  disseron  li  :  «  Paire, 
nos  t'aviam  aguardat  que  venguessas,  aici  con  promes  o 
avias,  &  que  nos  monstressas  on  bastissem,  &  non  es  ven- 

665  gutz.  »  Respondet  sainz  Benegli  e  dis  lur  :  «  Praire,  vos  per 
que  dizes  aizo?  Non  vinc  eu  doux,  aici  con  eu  vos  avia  pro- 
mes? [119  v°]  Non  vos  apparie  donx  ad  aquel  jorn  ad  amdos, 
can  dormîas,  e  vos  monstre!  las  lugas  on  bastisses?  Annatz, 
&  aici  con  o  aves  vist  en  vision,  aici  o  construies.  »  Eil,  cant 

670  auziron  aizo,  agron  granz  meravillas,  e  torneron  s'en  la  don 
eran  vengut,  et  acomenseron  a  bastir,  aici  con  avian  vist  en 
vision. 

Doas  donnas  moneguas,  de  moût  granparatge,  conversavan 
prop  del  monestier  de  saint  Benezegh,  &  eran  en  lur  propria 

675  vila.  Ad  aquestas  donnas  s'era  donatz  us  moût  religions  hom, 
per  servir  totz  temps  mais  aitan  cant  viuria.  Aquestas  doas 
donnas  non  eran  a[n]car  perfechas,  ni  lur  lenguas  non  avian 
ancar  restrechas,  per  fren  de  lur  habiten.  Car  aquest  bon  ho- 
men,  que  s'era  donatz  laintre  per  totz  temps  mais  a  far  lur 

680  servizi,  fazian  per  lur  malas  paraulas  moût  soven  iraiscer.  Cant 
aquest  bons  hom  o  ac  gran  pensa  soffert,  &  el  s'en  annet  a 
saint  Benezeh,  &  comtet  li  totz  los  enogh   e  totas  las  iras 


,»•  •»  i.» -  ,., 


f 


4 


LEGENDES  PIEUSES  4  21 

qued  aquestas  donnas  lifazian.  Gant  sainz  Benezehgauzi  aizo, 
mandet  lur  e  dis  :  «  Capdellas  vostras  lenguas,  que,  si  non  o 
fais,  eu  vos  escumenegue.  »  Aquesta  sentencia  lur  trames.  685 
Elias  per  aquo  non  s'en  capdelleron  anc.  E  non  triguet  guaire 
pois  que  moriron  amdoas,  e  moriron  en  aquest  vet.  E  can  fo- 
ron  mortas,  sebeli  las  liom  en  la  gleisa.  Gant  hom  cantava  en 
la  gleisa  messa,  e  le  diaques  cridava  aici  con  usatges  era  : 
a  Gil  que  non  comeneguan  donon  lue  alz  [120  r**]  autres  !  »,  690 
una  noirissa,  que  las  avia  noiridas  amdoas,  qued  offria  cada 
jorn  per  ellas,  las  vezia  eissir  de  lur  sépulcres  cada  jorn,  can 
le  diaques  dizia  aizo.  Gant  aquist  noirissa  o  ac  vist  ganre  ve- 
guadas,  qued  aici  s'en  eissian  a  la  vos  del  diaque,  e  que  per  ren 
non  podian  remanir  en  la  gleisa,  nembret  li  del  vet,  que  sainz  695 
Benezehg  lur  avia  mandat  :  car  si  non  se  capdellavan  de  far 
Tenogh  del  bon  home,  fossan  escumenegadas.  E  fez  o  hom 
saber  a  saint  Benezehg,  cant  li  femena  o  ac  manifestât.  Annet 
(sanz)  sainz  Benezehg,  e  donet  lur  ab  sa  propria  man  una  ora 
tion,  e  dis  lur  :  «  Annatz  &  offres  aquesta  oflTrenda  a  nostre  700 
Seinnor  per  ellas,  e  ja  pois  non  seran  vedadas.  »  E  cant  aquil 
orations  fon  dicha,  e  le  diaques  cridet  aici  con  solia,  que  cil 
que  non  comeneguarian  eississan  de  la  gleisa,  d'aqui  enant 
aquellas  doas  moneguas  non  foron  vistas  eissir.  Per  aizo  non 
deu  nuilz  aver  doptansa  que  per  la  oration  de  saint  Benezeh(z)g  705 
eissiron  del  vet. 

Can  venc  una  veguada,  unsenfans  qued  era  morgues  an- 
nava  trop  soven  vezer  sos  parenz,  elz  amava  outra  tota 
mesura.  Gant  venc  un  jorn,  &  el  eissi  del  monestier  &  annet 
elz  vezer,  e  non  près  bénédiction  de  son  abbat  saint  Benezehg  710 
ni  annet  per  sa  voluntat  ni  per  son  comant.  Et  en  aquel  eis 
jorn,  aqui  eis  can  fon  a  sons  parenz,  &  el  fon  mortz.  Van  lo 
penre  sei  amie  e  foron  moût  irat,  e  sebeliron  lo.  Gan  venc 
[120  v°]  Tendeman,  &  eil  atroberon  lo  cors  de  sobre  terra. 
Van  lo  penre  per  aqui  mezeis,  e  sebeliron  lo.  Gant  venc  715 
l'autre  jorn,  &  eil  Tatroberon  atressi  déferas.  Gant  eil  o  viron, 
anneron  s'en  a  saint  Benezegh,  moût  trist  e  moût  marrit, 
que  per  la  soa  merce  dones  ad  aquest  sa  gracia.  Gant  sainz 
Benezehg  o  auzi,  donet  lur  ab  sa  propria  man  cuminion,  e  dis 
lur:  a  Annas  e  pausas  li  sobre  lo  pehg  lo  cors  de  nostre  Sein-  720 
ror,  e  sebeles  lo.  »  Anneron,  e  feron  o  aici  con  el  lur  acdihg. 
Sebeliron  lo,  &  anc  pois  non  fon  vistz. 


r:2  LEGENDES    Plî-.USES 

Aîrra  v^rj.x-ia.  u*;  n.-.rffîies  <ejs  n:n  po.iia  per  nuillamanera 
r-rmanir  ^;  mo.'i-îSM-;r.  e   ii/.:a  aies  ine  ve    ?'en  annaria.  Sainz 

725  B-rnez-.i.'  ci^tiava  V/  .v^-Iâ  ji-rn.  e  Tamoneatuva  crue  non  o 
f:z»';5,  rio:;  vr/::iie.s  eissii'  -i-:-!  liionesuer.  El. per  nnil  prec  qued 
i;om  ii  :•?/.•:■•:.  r.on  vcl;  •:rr?îî-e  '\U'}\  estes  iaintre  ab  los  autres. 
A:izpr'"f;r  iava  fi  Ivs  -j?!  •  i  hom  ii  dones licencia  con  s'en  pogues 
annar.  Cari?:  «?ii.'i7  Boii-îz-i-he  o  vi.  qued  aici  Tenojava  ades,  fon 

730  un  jorn  irav.  pci-  i'enoh^-iu*  t  ol  l'en  tazia  de  querre  licencia, 
e  dis  li  moût  iit'lamerit  un  Jorn  que  s'en  annes  e  s'ostes  de 
Iaintre,  poi<  q-ie  ron  no:i  li  vaiia  nuilz  amonestimenz  qued  el 
li  f.'ze«.  ftit  aqui  oi>  an  net  s'en  lo  morgues.  E  can  fon  foras  del 
monestier.  cv  el  ?*a*roba  aqui  eis  a*»  un  gran  dragon  que  tenc 

735  la  bocca  uberti,  e  vole  Taiinar  penre.  Can  le  morgues  lo  vi, 
ao  mont  gran  paor,  et  [121  r®"  acomenset  moût  fort  a  cridar  : 
«  Corretz,  corroz,  qued  aquest  dragos  me  vol  devorar.  »  Cant 
0  auziron  li  fraire.  corregron  beii  tost  foras,  e  non  viron  anc 
minguadel  dragon  :  mas  lo  n"u»rgue  atroberon,  moût  paoros  e 

740  tremolant,  e  va:i  lo  iienre.  e  toineron  lo  al  monestier.  Et  aqui 
eis  el  promes  que  jamais  del  monestier  non  cissiria;  e  d'aqui 
enant  attendet  o,  aici  con  promes  o  avia. 

En  aquel  temps  que  veno  li  earestia  per  tota  la  terra,  sainz 
Benezehg  donava  tôt   cant  podia  aver  ni  penre  a  la  paura 

745  gent,  <k  tôt  cant  avia  ol  monestier,  qued  el  pogues  penre,  tôt 
lur  0  donava  ;  à  ac  o  de  guisa  donat  qued  anc  res  non  fon 
rcmasut  ol  coll'ir,  mas  solameut  un  pauc  d'oli.  Adonx  venc  us 
siibdiaquoH,  qued  avia  nom  Agapite,  e  preguet  moût  fort  a 
saint  n(îH(î/.<*gli,  que  si  le  sens  plazers  era,  que  li  dones   un 

750  pauo  d'oli.  Annet  sainz  Benezehg,  que  s'esforsava  de  donar 
tôt  cant  podia  avor  en  terra,  qued  el  pogues  aver  trasaur  en 
col  ;  comandet  qued  lioni  li  dones  aco  eis  d'oli  qued  era  Iaintre. 
Lo  morgues  qnod  ora  desposaire,  cant  auzi  aizo,  fon  li  mal,  e 
non  o  vole  far,  Ce  alonguet  o  aitant  cant  poc.  Cant  agron  estât 

755  un  pauc,  e  sainz  Houczchg  li  dis  si  avia  fali  zo  qued  el  li  avia 
fomandat.  Le  morgues  respondet  e  dis  que  non  linn  avia 
ron  donat,  que  si  lin  donava,  non  lin  remanria  res  ad  obs 
(bdz  frairos.  Adonx  fon  iratz  sainz  Benezegh,  e  coiumandet 
(juod  aquoUa  [121  v"J  amola  de  veire,  en  qued  era  Tolis,  ab  tôt 

700  roli,gotcssan  per  una  fenestra  foras,  qued  el  monestier  non 
romasos  nuilh  res  por  inobediencia.  E  fon  aici  fahg  con  el  o 


LEGENDES  PIEUSES  423 

comandet.  Li  fenestra,  per  on  hom  la  getet,  era  mot  auta,  e 
desotz,  aqui  on  cazec  11  amola,  avia  roca  moût  aspra  e  dura. 
E  cant  cazec  li  amola  sus  en  la  rocha,  e  remas  aici  entera,  con 
si  i  fos  pausada  tôt  soau,  ai  anc  Tolis  eissir  non  poc.  Can  765 
sainz  Benezehg  o  vi,  comandet  qued  hom  levés  Tamola  d'aqui 
on  era  cazucha,  e  qued  hom  dones  Toli  a  cel  que  lo  queria.  E 
cant  o  agron  fahg,  sainz  Benezehg  ab  totz  los  fraires  getet  se 
ad  oration,  aqui  on  era  li  amola  ;  &  avian  en  vojat  Toli,  &  avian 
lo  cubert  ab  lo  cubercel.  Aqui  eis  can  sainz  Benezehg  acomen-  770 
set  ad  orar,  &  aquil  amola  fon  aici  plena  d'oli  que  lo  cubercel 
acomenset  a  soslevar,  e  crée  tan  que  foras  lo  getet,  &  aco- 
menset  a  correr  Tolis  per  tôt  aqui  on  li  fraire  eran.  Adonc 
sainz  Benezehg  acomenset  lo  fraire  a  menassar,  auzent  totz, 
de  la  inobediencia  e  de  Torguil,  auzent  totz,  &  acomenset  li  775 
ad  admonestar  qued  apreses  ad  aver  fe  &  humilitat.  Le  morgues 
fon  castiatz.  ab  aitant,  &  ac  vergoinna,  car  sainz  Benezehg  li 
ac  demonstrat  la  vertut  de  Deu  per  miracle,  la  quai  el  li  co- 
mandava  far. 

Can  venc  un  jorn,  sainz  Benezehg  s'en  annava  ad  una  gleisa  780 
de  saint  Johan,  qued  era  [122  r°]  prop  de  son  monestier,  sus 
eis  en  aquel  puhg.  E  domenz  qued  el  s'en  annava  la  per  orar, 
&  le  diabolz  s'encontra  ab  el,  en  semblansa  de  metge,&  portet 
sas  boissezas  e  son  arezament.  Et  aqui  eis  cant  sanz  Benezegh 
lo  vi,  &  el  li  acomenset  a  demandar  :  «  On  volz  tu  annar?»   785 
Respondet  le  diabolz  e  dis  :   <<  Eu  vauc  alz  fraires,  per  donar 
pozon.x)  Ab  aitant  sainz  Benezehg  s'en  acomenset  ben  tost 
ad  annar  a  sa  oration  on  annava,  e,  can  la  fon,  fez  tost  sa  ora- 
tion, e  pois  tornet  s'en  al  plus  tost  que  poc.  Le  diabolz  fon 
vengdz  al  monestier,  &  atrobet  (ad  *)  u  morgue  prohome  de  790 
laintre  posant  d'aigua,  et  en  eis  pas  le  diabolz  li  intret  el  cors 
&  acomenset  lo  moût  a  tormentar,  e  fez  lo  getar  a  terra,  & 
fazia  lo  trabaillar  moût  fort.  Cant  sainz  Benezeh  tornet  de  sa 
oration,  &  el  atrobet  aici  aquest  morgue  envoludant  per  la 
terra,  car  moût  cruzelment  lo  trabaillava  le  diabolz.  E  vai   795 
vers  el  sainz  Benezehg,  e  donet  li  a  sa  gautha,  &  en  eis  pas    - 
le  diabolz  11  eissi  del  cors. 

*  On  avait  d'abord  écrit  al  ;  Vu  qui  suit  a  été  ajouté,  dans  l'interligne,  au 
dessus  du  ^.  Corr.  /a? 


42  i  LEGENDES   PIEUSES 

Gan  venc  una  sazon,  uns  gotz  erctges  qued  avia  nom  Gallas, 
el  temps  que  rcinnava  Totiia  le  reis,  aquest  Gallas,  totz  aquelz 

800  que  eran  de  la  fen  de  Christ,  fossan  clergue  o  laie,  o  morgue 
0  preveire;  qued  en  las  soas  mas  venguessan^  non  podian 
escapar  senz  mort.  Can  venc  un  jorn,  k  aquest  malz  hom, 
aquest  Gallas,  près  un  vilan  pcr  rapina  e  per  raubaria,  et 
destreis  lo  moût,  e  vole  lo  far  rezesmer,  e  tormentet  lo  moût 

805  fort  per  son  [122  v®]  aver.  Can  le  vilas  vi  qued  aici  lotormen- 
tava,  non  saup  anc  aire  que  se  disses  ni  que  se  fezes,  e  dis  qued 
a  saint  Benezehg  avia  comandat  tôt  cant  aver  podia  en  tôt  lo 
mont.  Âb  aizo  le  malz  liom  non  lo  tormentet  plus,  mas,  sas 
mas  liadas  ab   las   rengnas  de  son  caval,  lo  fez  ades  trotar 

810  davan  se  per  monstrar  calz  era  aquestz  Benezegh.  Annet  le 
vilas,  e,  totz  liatz,  menet  aquest  Gallas  al  monestier,  on  era 
sainz  Benezehg,  e  trobct  lo  sezent  tôt  solet  davan  sa  cella, 
que  legia,  e  dis  le  vilas  a  Gallas  :  «  Vec  te  aizi  Tabbat  Bene- 
zehg, ))  Cant  aquest  malz  hom  lo  vi,  acomenset  lo  mot  mala- 

815  ment  e  mot  cruzel  a  gua[r]dar,  aici  con  en  us  o  avia,  &  dis  li 
moût  asprament  :  «  Leva  sus,  leva,  et  rent  ad  aquest  vila  zo 
qued  has  d'el.  »  Cant  sainz  Benezehg  auzi  aizo,  levât  sos  oilz 
vers  el,  e  pois  regarde t  se  vers  lo  vila  qued  era  liatz,  & 
aqui  eis  las  rengnas,  qued  eran  environadas  entorn  sos  braz, 

820  s'acomenseron  tan  fort  per  ellas  mezeissas  a  desplegar  &  a 
desvolver  que  nuilz  hom  en  nuilla  guisa,  per  poder  qued 
agues,  non  las  pogra  tan  fort  desvolver.  Ab  aitant  le  vilas 
acomenset  ad  estar  totz  desliatz  davan  saint  Benezehg.  Cant 
aquest  Totiia*  vi  que  per  aitan  gran  poder  era  desliatz  le  vilas, 

825  ac  moût  gran  paor,  e  descent  ben  tost  de  son  caval  a  terra,  e 
sa  regeza  cervitz  de  maleza  clinet  alz  pes  de  saint  Benezehg, 
e  preguet  li  que,  si  [123  r®]  le  seus  plazers  era,  que  11  perdo- 
nes,  6l  que  Tacoillegues  en  sas  orations.  Anc  sainz  Benezehg 
non  se  moc  de  sa  Icison,  ni  se  levet,  mas  sonet  los  fraires  e 

830  comandet  lur  que  ^  messan  hiintre  aquelz  dos^  e  que  donessan 
bénédiction  ad  aquest.  E  cant  o  agron  fah,  &  el  tornet  denant 
el,  &  acomenset  li  amonestar  que  se  tolgues  d'aquella  maleza 
en  qued  era.  Annet  s'en,  6:  anc  d'aqui  enant  non  ques  ren  al 

•  :>/t\  Gorr.  Gallas. 

*  Après  ce  mot,  j^e,  exponctué. 


LÉGENDES   PIEUSES  425 

vila,  lo  quai  avia  sainz  Benezehg  sol  ab  son  esgardament  des- 
liat.  835 

Cant  venc  un  jorn,  sainz  Benezehg  s'en  era  eissitz  ab  los 
fraires  fora  el[z]  camps,  per  vezer  los  labors.  E  domenz  qued 
el  era  la,  &  us  vilas  aportet  enfre  sos  bratz  un  fil  seu  mort  al 
monestier  a  saint  Benezehg.  E  cant  ton  laintre,  acomenset  a 
demandar  on  era  sainz  Benezehg.  Di^^seron  li  aquil  de  laintre  840 
que  fora  s'en  era  eissitz  elz  camps,  ab  los  fraires,  obrar  elz 
camps.  Can  le  vilas  o  auzi,  pauset  tost  son  enfant  davan  las 
portas  del  monestier,  &  acomenset  a  corre  ben  tost  vers  la  on 
era  sainz  Benezehg.  E  domenz  que  s'en  annava,  &  el  s'encon- 
tra  ab  saint  Benezehg,  que  venia  de  laor  ab  los  fraires.  E  cant  845 
le  vilas  lo  vi,  acomenset  li  a  dir  :  «  Rent  me  mon  fil  I  Rent 
me  mon  fil  î  »  Sainz  Benezehg,  cant  auzi  aizo,  arestet  se  & 
acomenset  a  dir:  «  Con  ai  fou  donx  tout  ton  fil  ?  »  Respondet 
le  vilas  e  dis  :  «  Non.  Mas  mortz  es,  e  resuscita  lo  !  »  Cant 
sainz  Benezeh  auzi  aizo,  fon  iratz,  &  acomenset  a  dir  :  «  Toi  850 
te  de  [123  v°]  sobre  nos.  Car  aizo  que  tu  queres  es  delz  sainz 
apostolz  e  non  mingua  nostre.  Per  que  nos  carguas  tu  aquel 
fais  que  non  poiriam*  portar  ?  »  Le  vilas,  a  cui  cozia  mais 
qued  a  totz  los  autres,  acomenset  a  jurar  que  ja  non  se  par- 
tria  d'el,  entro  que  son  fil  li  agues  resuscitat.  Ab  aitant  sainz  855 
Benezehg  li  acomenset  a  demandar  on  era  le  mortz.  Respon- 
det le  vilas  e  dis  :  «  Le  cors  jatz  a  las  portas  del  monestier.  » 
Cant  sainz  Benezegh  fon  vengutz  aqui,  agenoillet  se,  &  getet 
se  sobre  lo  cors  de  l'enfant,  &  estendet  sas  palmas  verslo  cel 
e  dis  :  a  Senner,  non  regardes  mos  peccatz,  mas  la  fen  860 
fraquesthoraen,que  pregua  que  sos  filz  sia  resuscitatz,  e  rent 
ad  aquest  cors  l'arma  que  li  as  touta  !  »  A  penas  ac  complida 
sa  paraula  sainz  Benezehg,  que  li  arma  fon  tornada,  e  le  cors 
de  l'enfant  acomenset  a  tremolar,  &  en  eis  pas  l'enfans  fon 
vius  ;  &  vai  lo  penre  sanz  Benezehg,  e  rendet  lo  per  la  man  865 
a  son  paire. 

Sa  sorre  de  saint  Benezehg,  Scolastica  qued  avia  nom, 
qued  era  aguda  monegua  des  qued  era  tozeta,  avia  aconstumat 
d'annar  vezer  son  fraire  saint  Benezehg  cad'an  una  vegada. 
Cant  venc  una  vegada,  &  eP  venc,  aici  con  o  avia  en  usatge,  870 

*  yis.  poirias,  avec  un  tilde  sur  Va  et  un  point  sous  Va. 

«  Sic.  Corr,  il.  ^9 


4  2<î  KTYMOLO(ilES    f.IKGEOISES 

e  descend ia  iidos  de  foras  las  portas  del  monestier,  ad  una 
maison  qued  i  avia.  Sanz  Benezchg,  canf.  saup  que  sa  sorre  era 
venguda,  descendet  ad  elhi,  ab   dos  de  sos  naorgues.  Cant 

foron  laintre  ab  clla,  tôt  lo  jorn  mezoron  en  lauzor 

(A  iuivrej 


KTVMOLOGIP]S    LIÉGEOISES 


Les  étymologies  qui  suivent  ne  se  trouvent  pas,  sauf  men- 
tion au  cours  de  Tétude,  dans  le  Dictionnaire  de  la  langue  tcal- 
lonne  de  Grandgagnage,  dans  la  dissertation  d'Àltenburg, 
Versuch  einer  Darstellung  der  trallonischen  Mundart. ...  II  et 
III  (je  n'ai  pas  eu  le  fascicule  I  à  ma  disposition),  dans  la  pho- 
nétique du  patois  de  Seraing  de  M.  Horning  (voyez  plus  loin), 
ni  dans  les  deux  ou  trois  monographies  (fort  inégales)  qui  ont 
été  publiées  sous  les  auspices  de  la  Société  de  Littérature  wal- 
lonne. Il  serait,  en  effet,  sans  aucun  intérêt  de  reproduire  des 
solutions  déjà  admises  ou  au  moins  déjà  proposées. 

Dans  la  graphie  du  wallon,  les  lettres  ont  la  même  valeur 
qu'en  français^  sauf  ^  qui  est  toujours  dur.  X  =  le  ck  alle- 
mand dur. 

1.  — Markott\  f.,  belette. 

Paraît  être  une  forme  féminine,  formée  avec  le  suffixe  — 
otta,  de  markou,  m.,  matou,  chat  mâle  (a  Liège).  Celui-ci  n'est 
autre  que  le  nom  propre  Marculphus^  voyez  mes  Etymologi^ 
îoa/lonnes,  /lev.  des  pat.  g.-rom,,  III,  272,  au  mot  djèra^  geai 
(  =  Gérard J 

Zeliqzon,  Loihringische  Mundarlen^  au  Glossaire,  p.  94,  a 
la  forme  margolalV  (avec  le  suff.  —  itta),  Adam,  Les  patois 
lorrains,  mentionne  markolotV  à  Laneuville-sous-Montfort, 
morkolott'  à  Rehérey  (  p.  303.  ) 

D'après  le  même,  p.  310,  le  chat  s'appelle  à Rehérey  morkou 


ETYMOLOGIES  LIEGKOISKS  427 

(remarquez  le  parallélisme),  à  Grandvillers  margo  (avec  la 
transformation  de  c  en  g  comme  dans  margolatf). 

Certaines  formes  ont  changé  d'une  façon  insolite  Vm  ini- 
tiale en  h  :  bèrkolètt,  cité  comme  usité  en  Belgique,  par  De- 
PRECHBUX,  Faune  wallonne,  s.  v.  mai^kotte;  baskolèU\  à  Saint- 
Hubert  (Luxembourg),  )^o\jlv  barkolèlt*  1  \  bakouf  k  Bouillon- 
ville  et  bakal'  à  Landremont  (  Adam,  310)  pour  barkouP  et 
barkal'  ?.  Sur  la  transformation  insolite  de  m  initiale  en  b, 
voyez  un  autre  exemple  dans  mes  Ftym,  wallonnes,  loc  cit,, 
s.  v.  hèrau  {bèmu,  bélier  =  mas,  maris  -j-  suffixe). 

2.  —  Bawî  intr.,  bayer,  bawî,  intr.,  épier;  bawèW,  f.,  lucarne. 

Cf.  Diez,  I  s.  v.  badare  :  «  italien  badarCj  provençal  et 
catalan  badar,  a-franç.  baer,  béer,  fr.  moderne  bayer.  La  filia- 
tion des  sens  est  :  avoir  la  bouche  ouverte,  rester  fixe,  atten- 
dre (avec  la  bouche  bée)  ;  considérer  avec  attention  ;  puis 
enfin  considérer  avec  envie,  désirer,  convoiter.  » 

Bawîy  bayer  a  le  premier  sens.  Bawî,  épier  et  le  provençal 
bada,  sentinelle,  sont  dérivés  du  second.  Bawètt\  lucarne, 
peut  être  une  ouverture  qui  bée  (cf.  fr.  baie,  ouverture)  ou 
l'endroit  par  où  Ton  épie. 

Metbr,  Gramm,  des  langues  romayies,  traduction  Rabiet,  I, 
50,  rattache  ces  mots  à  la  racine  onomatopée  ba, 

3.  — Bourse,  poursêj  m.,  bosse,  contusion  à  la  tête. 

C'est  le  fr.  non  académique  bourseau,  dérivé  de  bourse, 
vieilli  dans  le  sens  de  gonflement  produit  par  un  coup,  mais 
signifiant  «  par  analogie,  grosse  moulure  qu'on  forme  sur 
rareté  supérieure  ou  les  arêtes  latérales  des  toits  d'ardoise, 
et  que  l'on  recouvre  de  plomb,  de  zinc.  »  Hatzfeld  et  Dah- 
MESTETER,  Dictionnaire  général  de  la  langue  française*  De  byrsa, 
bourse  -|-  ellum. 

Lie  b  initial,  qui  persiste  en  wallon,  se  change  sans  doute, 
en  p  pour  prêter  à  une  confusion  plaisante  avec  poursê,  pour- 
ceau. 

Pour  le  rapport  entre  bourse  et  tumeur,  comparez  le  fr, 
jjocAe,  sac  et  pocher,  meurtrir. 


4  28  KTVMOLOGIFS   LIEGEOISES 

4.  —  El\  f.j  cimetière. 

L'êt''  è plinC  di  djin,  le  ciFiietière  est  plein  de  gens.  Comme 
on  le  voit  dans  le  Dictionn.de la  langue  toalL  de  Grandgagnage, 
s.  V.  aide  (graphie  avec  un  d  ?),  ce  mot  correspond  à  atrium, 
ou  plutôt  à  alria,  comme  l'indique  le  genre. 

Le  fr,  non  académique  connaît  aitre,  terrain  libre  servant 
de  cimetière  autour  d'une  église  ;  cour,  parvis.  Voy.  Hatzfeld 
(ît  Darmesteter,  Dictionnaire. 

Ces  mots  sont  de  formation  demi-savante  ;  cela  s'explique 
par  le  milieu  clérical  d'où  ils  sont  sortis.  Dans  la  langue 
populaire,  tr  est  réduit  à  ?•.•  cf.  lyér-=.  latro. 

A  Saint-Hubert,  on  dit  êt7nj/\  f.,  {aî/re  +  suff.  mam),  cf. 
pour  comparaison  Im  Malndriy  =  La  Maladrene^  lieu  dit  à 
Saint-Hubert. 

En  messin,  on  trouve  âtréy,  formé  avec  le  suffixe  -eilum 
d'après  Zeliqzon,  op.  cit.  p.  79.  Je  crois  que  cette  explication 
est  le  résultat  d'une  erreur  :  La  finale  franc,  -ie  devient  èy  à 
Metz;(§37). 

5.  —  Grèvt  m.,  vairon. 

En  Lorraine,  grèvir  au  Tholy,  grèvèl  à  Dejcimont,  gravèlk 
La  Chapelle  (Adam,  379).  Toutes  ces  formes  viennent  de 
Tanc.  fr.  grave,  fr.  moderne  grève  -\-  suff.  -arium  ou  -ellam. 
Le  vairon  est  le  poisson  qui  se  tient  sur  la  grève. 

6.  —  Mavé,  trans  .,  racler,  éplucher. 

=  à  Saint-Hubert  chavé,  éplucher,  écorcer,  skauf\  f., 
écale,  skafyott\  f.,  petite  écale.  Dans  la  région  à  Test  de  Saint- 
Hubert  (Marchot,  Bev.  des  pat.  g.-rom.y  IV,  19),  châf,  f., 
écale.  A  Landremont,  kâfi,  écosser  (Adam,  237).  Dans  Frois- 
sart,  escafotte,  écale  de  noix  ou  écaille  de  moule  (Schblbr, 
Diclionn,  d'étymoL,  s.  v.  escafignon.) 

Tous  ces  vocables  paraissent  se  rattacher  au  germanique, 
si  Ton  considère  que  l'ail,  moderne  à  Schelfe,  écaille^  ëcosse. 
Ecale  y  écaille  sont  eux-mêmes  german.  :  ail.  Sckale^. 

*  J*ai  relevé^dans  Godefroy  les  exemples  v,-fr.  suivants; 
2  Escafe,  -affe,  cscraffe,  coquille,  cosse. 


ETYMOLOGIES  LIEGEOISES  429 

7. —  Arègn  krin,  arinkrlnt  arinkrè  ou  arîkrè,  m.,  toile  d'araignée 

=  araignée-crin  (araignée  se  dit  arègn')-^  cf.  en  fr.  l'expres- 
sion analogue  /?/ d'araignée. 

Pour  le  procédé  propre  aux  langues  germaniques  employé 
dans  la  composition  du  mot,  comparez  le  même  mot  à  Mons 
arnitwaVy  littér.  araignée-toile,  et  encove pisint' ,  f.,littér.  pied- 
sente  ^  sentier,  à  Liège. 

8.  — Dm',  f.,  dinde 

On  dit  également  poy'  dm  ou  poy'  dii\  littér.  poule  d'île. 
Dîn'  =  donc  d^île^  cf.  diyide  =  d'Inde, 

Le  dindon  en  français  s'appelle  aussi  coq  d'Inde  et  en  lié- 
geois kok  din\ 

9.  —  Pâw\  m.,  paon 

S'expliqueramieuxpar  le  nominatif /jayo que  parTinfluence 
germanique  (néerlandais  paamo,  allem.  Pfau\  à  laquelle 
recourt  Grandgagnage,  Dictionn.,  s.  v.  2.  Pawe.  Le  liégeois 
présente  également  à  côté  de  paioou,  f,,  pavorem,  \s.  forme 
paw',  f.,  plus  rare,  qu'il  faut  rattacher  à  pavor,  voj.  Grandga- 
gnage, 1.  Pawe  ;  à  côté  de  lyér,  m.,  latrOy  il  a  de  même  lâron, 
m.,  lalronem^. 

10. —  Froumix*  ou  frumix\  f.,  fourmi 

Semble  bien  représenter  un  type  *formice7n,  proposé  par 
M.  Horning,  Ziir  Kunde  des  Nemoallonischen,  dans  la  Zeitschr, 

escrefe,  -effe,  -affe^^-ofe  (avec  r  épenthétique),  écaille,  saleté,  ordure. 
escafelote^  coquille  de  noix. 
escafotie,  petite  coquille. 

1.  escafiUon,  escarpin. 
escafignon,  escarpin,  chaussui-e  légère. 

2.  escafiUon,  coquille  de  noix. 
escafosse^  coquille,  écaille. 
escafote,  -otte,  id     id. 

M.  Horning  me  parait  faire  erreur  eu  rattachant  les  mots  lorrains  analogues 
(dans  GrenzdiaL,  113)  au  fr,  escoffion  (=  coiffure  de  femme),  del'ital.  scuf- 
fione^  tiré  lui-même  de  cuffia.  coiffe  (scheler).  Il  n'y  a  pas  de  rapport,  à  mon 

1  La  forme  pawoîi  a  pris  une  portée  diminutive  et  signifie  paonneau. 


4  30  ETYMOLOGIES   LIEGEOISES 

f.  rom,  Philol.,  IX,  489,  et  ne  devoir  pas  être  expliqué  par 
nne  contamination  avec  le  wallon  kopicli,f,j  fourmi  (voy. 
Tétymol.  dans  la  /{ev*  de  phiL  franc,,  Y ^  p.  41),  comme  je 
l'ai  fait  dans  mes  Étt/m.  loall.,-  loc.  cit.,  III,  273.  Car  si  Ton 
dit  à  Liège  bèrbi  (berbivem),  son  {^soricemj,  djini (juvcnicem), 
pyètri  (perdicem),  on  y  rencontre  également  bien  les  formes 
djinix'y  djènix\  dfnix*  et  pyè(rfx\ 

1 1.  —  Bossîf  m.,  bélier 

Représente  le  latin  bassus^  gras,  qui  a  de  l'embonpoint  (dans 
les  Gloses  d'Isidore,  voy.  Quichrrat,  Dictionn,  latin- français) 
-|-  arium.  Voy.  pour  les  preuves  historiques  Grandgagnage 
s.  V.  basî. 

Pour  comparaison,  je  citerai  les  formes  bèdo,  m.,  agneau, 
mouton  (suff.-o^^«5)  et  bèdéy*  (Nainur),  f.,  jeune  brebis  qui 
n'a  pas  encore  été  tondue  (suff. -a/a),  voy.  Dbfrechbux,  Faune 
walL,  24,  qui  paraissent  bien  se  rattacher  à  la  même  racine 
que  le  fr.  bedon,  bedaine,  etc.  Voy.  à  ce  sujet  mes  Et»  walL, 
loc.  cit.,  m,  271. 

12.  —  Pité,  ÎQtr.,  ruer 

Doit  remonter  directement  à  un  type  *peditare  (dérivé  de 
pes,  pedis)  et  ne  peut  pas  se  tirer  de  pi,  pied,  à  cause  de  Vi 
qui  est  bref  (/iité),  E  initial  devient  assez  souvent  i  en  wal- 
lon :  cf.  mitan,  milieu  (*inedietantein),  finyèss\  fenêtre,  etc., 
voy.  des  exemples  do  Seraing  dans  Horning,  loc,  cit.,  §  17. 

A  St-Hubert,  on  a  pitalè,  intr.,  s'enfuir  au  plus  vite,  déta- 
ler, à  Landremont/>?'/a/6?,  piétiner  (Adam,  276).  C'est* peditel- 
/are?  En  tout  cas,  ce  pitaléne  peut  pas  s'assimiler  au  pèstèlé, 
piétiner,  de  Couvin,  où  M.  G.  Paris  a  vu  fort  ju  licieusement 
pistillwn,  pilon  -f-  û^'^-  (Romania,  XIX,  508/  S  médiale  devant 
^subsiste  à  St-Hubert:  on  sait  que  c'est  un  caractère  du  wallon. 

Paul  Marchot. 


VARIANTES   AU  TEXTE 

DES 

REMONTRANCES  DE  MONIER  DE  CHATEAUDEUIL 


La  Reçue  historique  de  Provence  a  publié  récemment  (T.  I,  p.  135) 
un  texte  savamment  annoté  de  cet  intéressant  document,  curieux  pour 
l'histoire  des  Juifs  et  pour  l'histoire  de  la  civilisation  en  Provence. 
Mais  on  n'indique  pas  la  provenance  de  ce  texte,  on  y  a  fait  des  cou- 
pures arbitraires,  et  il  est  fort  incorrect. 

L'éditeur  n'a  pas  connu  une  autre  version  de  la  même  pièce,  con- 
servée dans  le  manuscrit  n*^  777  de  la  Bibliothèque  Méjanes,  à  Aix  en 
Provence.  Cette  autre  version  lui  aurait  fourni  nombre  do  variantes, 
dont  quelques-unes  sont  nécessaires  pour  donner  un  sens  à  certaines 
phrases  du  texte  publié  par  la  Revue  historique.  L'existence  de  cette 
autre  version,  qui  n'est  sans  doute  pas  la  seule,  semble  un  argument 
en  faveur  de  l'hypothèse  de  la  non-authenticité  au  discours  de  l'avo- 
cat général  Monier.  Du  moins  faut-il  penser  que  le  discours  prononcé, 
s'il  l'a  été,  n'a  pas  été  rédigé  par  lui,  mais  seulement  d'après  des 
souvenirs  de  ses  auditeurs. 

L'éditeur  a  donné  quelques  renseignements  très  brefs,  soit  sur  l'au- 
teur supposé  du  morceau,  soit  sur  les  personnages  dont  il  y  est 
question.  Le  recueil  inédit  de  Fauris  Saint-Vincens  (Méjanes,  ms. 
902)  lui  aurait  fourni  divers  renseignements  complémentaires. 

Le  père  de  Monier  de  Chateaudeuil,  «  Manant  Maunier  fut,  dit 
Fauris,  pourvu  à  Boulogne  dans  le  mois  d'aoust  1573  de  l'office  d'ad- 
vocat  général  qui  vacquait  par  la  mort  de  Jean  Puget,  et  fut  reçu  le 
10  octobre  suivant.  »  Pendant  la  Ligue,  il  fut  du  parti  royaliste  et  suivit 
le  Parlement  royal  à  Pertuis,  àManosque  et  à  ÎSisteron.  Il  présida  sou- 
vent les  États,  en  chef  ou  avec  le  président  de  Saint-André.  Il  fut 
nommé  conseiller  le  2  novembre  1599.  Sa  femme  Perrette  Guiard, 
d'une  famille  noble  de  Beaucaire,  lui  donna  deux  enfants:  l'un  fut 
président  à  la  chambre  des  comptes  ;  l'autre,  Jean-Louis,  fut  avocat 
g-énéral  au  Parlement  (Méjanes,  ms.  902,  p.  804). 

«Ce  fils,  Jean-Louis  de  Maunier,  succéda  dans  l'office  de  président 
à  Marc- Antoine  d'Escalis,  quand  celui-ci  fut  nommé^premier  président 
fpar  lettres  du  7  septembre  1616,  et  reçu  le  25  octobre  suivant).  Il 
était  avocat  général  par  résignation  do  son  père  depuis  1595.  Il  avait 


4  32  DR  MONIER   DE  OHATEAUDEUIL 

épousé  Anne  de  Garron,  fille  de  Jean  de  Garron,  auditeur  à  la  cham- 
bre des  comptes.  Il  eu  eut  deux  enfants,  un  fils  et  une  fille  qui 
épousa  Ch.  de  Sabran,  seigneur  d'Aiguigues.  Il  mourut  âgé  de 
soixante-deux  ans,  le  13  octobre  1G38.  Moissac  dit  qu*il  a  laissé  un 
recueil  imprimé  des  harangues  qu'il  avait  faites  tant  aux  ouvertures 
du  Parlement  qu'en  d'autres  occasions  {ilnd,  p.  657).  »  L'éloge  de  Jean- 
Louis  de  Monier  de  Cliateîiudeuil  est  dans  Nostradanms,  Histoire  de 
Provence^  partie  viii,  p.  1081. 

L'éditeur  conteste,  d'après  Barcilon  de  Mauvans,  Torigine  juive 
des  Thomassiu.  Il  aurait  pu  dire  que,  d'après  le  même  recueil  de  Saint- 
Vincens,  les  Thomassin  ne  seraient  pas  d'origine  juive,  mais  provien- 
draient de  Th.  de  Thomassin,  chevalier  du  roi  René,  du  5  septembre 
1479  (cf.  reg»  Aqu'da,  fol.  149),  descendant  d'une  famille  noble  de 
Bourgogne.  Jean-André  Thomassin,  seigneur  d'Einac,  pourvu  de  l'un 
des  quatre  offices  créés  par  lettres  d'octobre  1568,  serait  le  petit-fils  de 
ce  Th.  de  Thomassin. 

L'éditeur  80  borne  à  dire  que«  les  Thomassin  et  les  Aimar  surtou* 
étaient  alliés  aux  Kstienne.  «Guillaume  Aymar, Jean-André  Thomas- 
sin et  le  président  d'Estienne  de  Saint- Jean  étaient  beaux- frère  s,  les 
deux  premiers  ayant  épousé  Antoinette  et  Catherine,  sœurs  du  troi- 
sième. 

Voici  maintenant  les  variantes  du  ms.  777  de  la  Méjanes.  Le  texte 
donné  avant  les  =  est  celui  de  la  Revue  historique,  celui  qui  les  suit 
est  le  texte  du  manuscrit. 

Liy .  1  :  Avant  que  la  l'rovencc  fût  unie  à  cet  État,  du  temps  de 
Philippe-le-Bel.=  Après  que  la  Provence  fut  réunie  à  cet  État,  d'au- 
tant que  le  roi.  Lig ,  2  :  chassa  =  avait  chassé.  Lig .  3:  honneur 8= 
humeur.  Llg .  5  :  toujours,  suppléez  secrètement  (p.  136)  Lig .  6.*  dans 
Alger,  fâchés  =  en  Avignon,  marris.  Lig.  9:  des  synagogues  =  do 
la  synagogue  de  Constantinople.  L'ig ,  10:  religion  chrétienne,  en 
apparence  pour  se  rétablir:  mettre  la  virgule  après  en  apparence, 
Lig.  12:  laver  des  eaux  du  baptême  =  baptiser.  Lig,  14:  nom  «= 
surnom  ;  de  la  famille  d'Ademar  qu'il  nomma  Aimar  =  de  sa  famille 
qui  est  Aimar.  Lig,  15:  Estienne,  etc.,  jusqu'à  Mimet  =  le  seigneur 
de  Venelles.  Lig .  16  :  et  lui  fit  donner  jusqu'à  la  fin  de  cette  phroêé  : 
=  et  tout  de  même  lui  imposa  le  surnom  d'P^stienne.  Lig,  18:  de  la 
maison  de  Saint-André  =  de  Provence.  Lig.  20  :  bien  que  les  =  bien 
que  depuis  les.  Lig,  20:  qui  en  viennent  =  qui  vivent.  Lig,  21: 
ayant  pris  le  nom  de  =  se  font  appeler  Thomassins.Zi^.  22,  23,  24  : 
à  supprimer.  Lig.  26:  conversion  =  confession.  Lig.  31:  quatre-vingt 
mille  =  cent  mille.  Lig .  32  :  chrétiens  =  baptiser.  Lig ,  34  :  néo- 
phytes en  ce  pays  =  néophytes,  c'est-à-dire  nouveaux  chrétiens. 
Lig,  34:  nouveaux  chrétiens  =  chrcbtianos  novos.  Lig.  38  :  quelques 


VARTANTKS  DU  TEXTE  DES  REMONTRANCES        4  33 

offres  =  des  offres.  Lig.  40  :  de  la  guerre  qu'il  avait  en  Italie  =  des 
guerres  d'Italie.  LigAX  :  qu'il  fut  lever  sur  tous  =  qui  fut  levée  et 
tous.  Lig.  43  :  la  chambre  =  la  cour. 

Le  texte  depuis  lig,  44:  et  d'autant  qu'on  avait  résolu  jusqu'à 
lig.  56  :  enfin  la  vénalité  des  charges,  —  est  remplacé  dans  notre 
copie  par: 

Et  d'autant  qu'on  avait  résolu  de  les  exterminer  et  cependant  de 
continuer  sur  eux  de  grandes  impositions,  et  qu'ils  étoient  méprisés 
et  détestés,  publiquement  pleins  d'opprobres  et  «l'ignominies,  qu'ils 
ne  pouvaient  parvenir  à  aucunes  dignités  ecclésiastiques,  parce  que 
les  anciennes  constitutions  canoniques  et  les  conciles  y  résistent,  ni 
aussi  à  la  moindre  charge  publique  de  quelques  villes  qu'ils  habitent 
et  quoiqu'ils  n'aient  manqué  de  brigue  ni  de  coiruption,  jamais  ils 
n'y  ont  été  élevés,  tant  ils  y  sont  odieux  pour  leur  malice  et  perfidie, 
après  avoir  longuement  recherché  quelque  moj^en  pour  s'établir,  s'af- 
franchir de  ces  impositions  pour  s'acquérir  quelque  sorte  d'honneur 
et  d'autorité. 

Lig.  56:  charges  =  offices.  Lig.  57:  planche  pour  arriver  aux  = 
planches  aux.  Lig.  58:  qui  sont  plus  =  qui  sont  les  plus.Zii/.  59  : 
doivent  =  devroient.  IJg.  69  :  exclus  encore  plus  que  des  autres  = 
exclus  plutôt  que  des  autres.  Lig.  61:  par  conséquent  =  conséquem- 
ment.  Lig.  62  :  moyen  =  moyens.  Lig.  62  :  d'exercer  leur  avarice  = 
d'exercer  les  effets  de  leur  avarice.  Lig.  62  :  usure  supprimé.  Lig.  62  :  et 
vengeance  sur  eux  =  et  de  leur  vengeance.  Lig,  63  :  sous  le  règne 
de  Charles  IX  =  sous  le  roi  Charles  IX.Zfî^.65:  du  =  audit.Z?5'.  66: 
été  baptisé  =  été  fraîchement  baptisé.  Lig.  67:  et  après  lui  ses 
enfants.  Et  les  deux  autres,  savoir  Stéphane  et  André  ou  dit  Tho- 
massin  furent  aussi  =  et  après  lui  les  enfants  des  deux  autres  fi'ères 
baptisés  savoir  d'Estienne  et  d'André  dits  Thomassiu.Z/^.  69:  =  au 
même  temps,  ou  supprimé.  Lig.  70  :  soit  par  argent,  soit  par  faveur 
ou  intérêt  de  la  parenté  =  par  argent  et  faveur  de  leurs  parents. 
Lig,  71:  des  mêmes  =  de  sembhibles.  Lig.  72  :  composaient  =  com- 
posent. Lig.73  :  Parlement,  ajoutez  ainsi  qu'il  appert  par  la  liste  ci-des- 
sous transcrite.  Lig.  76  :mais  pour  couvrir  leur  parenté  =  pour  couvrir 
leurs  parantelles.Zi5'.77  :  parmi  eux=  ensemble.  Li<7.  79: Thomassin, 
ajoutez  conseiller. 

Le  passage  supprimé  par  la  Revue  historique  de  Provence  est 
celui-ci  : 

«  Les  trois  cousins,  germains  d'origine  et  beaux-frères  d'alliance, 
ne  se  contentèrent  pas  d'être  entrés  au  Parlement  et  d'en  avoir  intro- 
duit quelques  autres  de  leur  famille  ;  mais  parce  qu'ils  ne  pouvaient 
exercer  leur  avarice  et  leur  industrie,  d'autant  que  tous  les  autres  y 
réfiistoient  et  veîU oient  sur  leurs  actions,  ils  ont  dessein  de  s'établir 


i:^i  1)K  MOXIEU  OK  nHATIîAUDKUlL 

au  Parlemeut  en  tel  nombre  qu'ils  y  soient  les  plus  fort»  et  puissent 
y  exercer  leur  tyrannie . 

"  Et  pour  parvenir  à  leur  dessein  ils  ont  fait  tous  leurs  enfants  de 
leur  robbe,  espérant  par  argent  de  les  établir  avec  offices  et  bénéfices 
les  plus  importants  de  la  Provence  et  s'emparer  du  grand  et  du  petit 
sceau  de  S.  M.  pour  se  faire  honorer  et  adorer. 

Lir/.  80  :  Ledit  Aymar  =  Kn  exécution  de  ce,  ledit  Aymar.  Zi^r.  80: 
aujfpr.  Joseph  Aymar.  Lig .  82  :  8*opposa=  s'étant  opposée.  Lig.  84  : 
(qyrès  remontrances  an  Uoi,  lire  les  troubles  qui  survinrent  en  ce 
royaume  en  l'année  1588  lui  ont  donné  moyen  de  s'établir  en  ladite 
charge.  Ledit  Etienne  a  établi  un  de  sa  famille  et  surnom  greffier 
civil,  lors  de  la  vente  du  domaine,  de  sorte  etc.  Lig.  88  :  svppr,  civil, 
Lig.SO:  suppr.  du  palais.  Lig.Sd:  entre  leurs  mains  =le8  mains  de 
cette  race.  Lig .  dO  lire  cav  il  vaut  plus  de  2,00(3  écus  de  rente  et  il 
n'a  pas  été  payé  10,000  écus. 

Il  faut  suppléer  entre  les  lignes  91  et  92  un  paragraphe  tout  entier 
omis  par  la  Revue  historique  de  Provence  : 

Lig.  91-92.  Cette  charge  leur  donne  ungrand  moyen  d'exercer  leurs 
méchancetés  ;  car  tous  les  commis  du  greffe  qui  escrivent  aux  cham- 
bres sont  de  leur  famille  ;  ils  savent  par  ce  moyen  tous  les  secrets  de 
Provence,  en  font  tomber  les  procès  entre  les  mains  de  ceux  que  bon 
leur  semble,  font  esgarer  les  requcstes  et  autres  procédures,  falsifient 
les  arrêts  et  décrets  de  la  cour  et  tourmentent  les  sujets  du  roy  en 
mille  façons  dont  il  y  a  des  plantes  améres. 

Lig.  92  :  nommé  Andréas  =  qui  était  maître  Andréas.  Lig,  94  : 
d'avocat  général  du  Koy  =  du  second  avocat  général.  Lig,  97  :  il  a 
poursuivi  =  ayant  poursuivi.  Lig.  97  :  laquelle  lui  ayant  été  =  et  lui 
ayant  été.  Lig.  99  :  il  lui  en  a  présenté  =  lui  en  présenta.  Lig,  100  : 
aucun  des  degrés  de  parenté  =  aucun  des  degrés  de  parentelle.  Lig, 
101  :  d'y  avoir  jeté  de  l'encre  =  d'y  avoir  tombé  d'encre.  Lig.  104  :  ce 
qui  est  une  faute  grandement  =  qui  est  grandement. 

Les  lignes  106  à  111  différent  «absolument  : 

«Fault  remarquer  en  passant  qu'il  y  a  deux  procureurs  généraux  au 
Parlement  de  Provence,  l'un  civil  et  l'autre  crinnnel,  et  qu'auparavant 
que  lesdits  Aymard  et  Thomassin  entrassent  au  parquet,  le  premier 
procureur  général  ja  receu  estoit  le  sieur  Rabasse,  leur  oncle  d'alliance^ 
de  sorte  que  de  quatre  ils  étoient  trois  proches  parents.  Chose  si 
étrange,  qui  fut  cause,  etc.  » 

Lig.  116  :  demeuroient  =  demeurent.  Lig.  116  :  ce  qui  est  cause 
que  les  plaintes  en  révocation  sont  si  fréquentes  contre  eux,  =  et  les 
plaintes  et  accusations  contre  eux  sont  si  fréquentes.  Lig,  1 19  :  seule 
personne  =  autre  personne  privée,  lig.  120.  Ils  ne  sont  pas=  encore 
ne  se  sont  ils  pas.  Lig.  122.  composent  =  soient.  Lig.  123.  moyenne  «  ' 


4  35        VARIANTES  DU  TEXTE  DES  REMONTRANCES 

proeuvé.  Lig.  124,  125,  126,  depuis  sans  dispenses  à  toutes  fois,  rem- 
placer par.  Et  bien  qu'il  ne  pouvoit  être  reçu  audit  office  de  Président 
sans  dispense,  ayant  son  père  et  plusieurs  autres  parents  dans  le  Par- 
lement, toutefois  par  les  brigues  et  artifices  des  siens  il  l'a  obtenu. 
Lig.  127  :  mais  ça  été  à  condition  =  mais  c'est  à  condition.  Lig.  128: 
office  =  état.  Lig.  129:  autre  =  aucun.  Lig.  129:  qu'au  degi'é  =  au 
degré.  Lig.  130:  néanmoins  =  toutes  fois.  Lig.  130  :  api'ès  résigné, 
ajoutez  son  dit  état  et  office  de  procureur  général.  Lig.  131  :  et  par  sur- 
sis s=  et  poursuivi  Lig.  133:  y  fait  =  y  fit.  Lïg.  135:  compagnie  =» 
petite  compagnie.  Lig.  136  :  et  des  parents  qui  excéderont  =  outre 
plusieurs  parents  qui  excèdent.  L\g.  139  :  aussi  =  davantage.  Lig.  140: 
remettroit  son  office  =résigneroit  son  ^ioXLig.  143  :  12.000  =plus  de 
dix  mille.  Lig.  145  :  d'autant  qu'il  s'est  =  d'autant  plus  qu'il  s'en  est. 
Lig.  146  :  jointe  à  la  =  jointe  avec  sa.  Lig.  147  :  forfait  =  forfaiterie 
Lig.  147  :  un  office  =  son  office.  Lig.  148:  Et  d'ailleurs  =  Il  y  a  plus 
car.  Lig,  149  :  après  enfants,  ajoutez  auxdits  offices  de  Président  et 
de  procureur  général.  Lig.  149:  mais  il  se  trouve  =  mais  il  s'est 
trouvé.  Lig.  150  :  avoit  =  avoit  obtenu.  Lig.  150:  del'année  1688  = 
dès  l'an  1588.  Lig.  152:  pendant  =  durant.  Lig.  153:  bien  que  = 
combien  que,  Lig.  154:  par  lettres  patentes  =  par  les  patentes. 
Lig,  154  :  1598  =  1588.  Lig.  157.  de  son  état  =  de  l'exercice  de  son 
état  Lig.  158  :  après  réception,  ajoutez  et  installation.  Lig.  159  :  à 
cause  des  lettres  patentes  =  à  cause  «les  parantelles  et  alliances.  Lig. 
160  :  pour  être  reçu  =  pour  être  les  survivances  révoquées.  Lig,  162: 
et  l'on  a  fait  remettre  aux  parties  =  et  a  fait  mettre  ledit  office.  Lig , 
164.  grandes  parentés  =  desdites  parentelles.  Lig.  165.  car  dès  qu'il  = 
car  aussitôt  qu'il.  Lig,  167  suppr.  de  cette  charge.  Lig.  167.  lui  être  in- 
terdit =  être  interdit  au  père.  lig.  170.  faudroit  =  faut  Lig.  172.  qui 
chassa  cette  mauvaise  race  =  il  chassât  cette  vermine  gens  [sic),  Lig. 
173.  et  principalement  de  cette  province  =  et  morne  de  celles  de 
Provence.  Lig.  175.  d'autant  plus  =  autant  et  plus  volontiers.  Lig.  175. 
après  disposée,  lire  que  la  conscience  y  est  obligée  par  les  lois  et  par 
la  raison.  Lig.  180.  en  leurs  chapitres  généraux  =  en  leurs  chapitres 
et  assemblées.  Lig.  180.  de  ne  recevoir  aucun  néophyte  qu'il  n'aj'^e 
passé  la  neuvième  race,  =  de  n'en  recevoir  aucun  qui  n'aye  passé 
la  septième  race  et  ceux-ci  n'ont  pas  encore  passé  la  troisième. 
Lig,  182.  ils  ne  sont  admis  =  ils  ne  les  admettent  point.  Lig.  183.  qu'- 
après la  sixième  génération  et  hors  de  cela,  ils  les  tiennent  =  qu'après 
la  septième  race,  les  tenant  désormais.  Lig.  185.  suppr.  la  phrase.  Dans 
la  ville  d'Aix  jMS^'M'fi  qu'ils  soyent.  Lig.  188.  après  recevoir,  ajoutez 
ancuns  en  l'administration  de  la  justice.  Lig.  188.  glisser  de  =  glisser 
denx  de.  Lig.  190.  y  furent  =  y  ont  été.  Lig.  191.  suppr.  de  conseillers 
et  de  procureur  général.  Lig,  192.  soit  le  seul  rempli  la  plupart  de 


4  3ri  1)K   MONIEK  HE   CHATEAUDEUir. 

cette  maudite  race  =  soit  rempli  de  cette  ordure.  Lig.  193.  et  que  des 
boDs  =  et  les.  Llg»  104.  être  à  leur  =  soient  soumis  à  leur.  Lig,  196. 
à  aucune  charge  publique,  parce  que  leurs  =  à  leurs  desseins.  Leurs. 
Lig.  197.  et  méchancetés  =  et  autres  méchancetés.  Lig.  198.  autorisés 
bOus  les  règnes  des  Uoys  =  tolérés  et  favorisés  sous  le  roy.  Lig.^00. 
grandes  =  bien  grandes.  Preniièremont.  Lig,20l,  loy  =  religion.  Lig, 

201.  ils  foot=  ont.  Lig.  202.  cérémonies  particulières,  tntervtfrfir.  Lig. 

202.  parmi  eux  =  entre  eux.  Lig.  203.  entrelien  =  entretènement. 
Lig,  204.  allé  par  niéganle  chez  un  =  entré  par  mescoute  dans  la 
maison  d'un.  lig.  206.  suppr.  de  quoi.  Lig .  207.  mais  aussitôt  =  et 
aussitôt.  Lig.  207.  artifices  =  artifices  et  corruptions.  Lig.  207.  aisé== 
facile.  Lig.  209.  vains  =  unis.  Lig.  210.  de  se  venter  =  de  s'avancer. 
Lig.  210.  ils  se  cotisent  =  tous  se  cotisent.  Lig.  214.  font  tous  une  ca- 
bale et  si  étroite  liaison  =  ont  leur  cabale  en  si  étroite  liaison  qu'ils 
n'ont.  Lig.  215.  la  conscience  =  la  confiance.  Lig.  218.  suppr,  mau- 
vaise conscience.  Lig.  219  suppr.  la  phrase.  Ils  ont  cette  maxime 
'jusqu'à  hors  de  leur  rate.  Lig.  222.  Enfin  ils  n'oublient  rien  pour  leur 
établissement  et  pour  parvenir  à  toutes  leschai'ges  =  en  sorte  qu'avec 
l'argent  ils  s'établiront  eu  toutes  les  charges  qui  viendront  à  vacquér. 
Lig.  224.  ce  qu'ils  revendent  =  puisqu'ils  vendent.  Lig.  226.  se  rem- 
bourser =  se  reiiiplacer.  Lig.  229.  maison  ou  les  greniers  ne  fussent 
remplis  que  d'or  =  maison  d'or.  Lig.  231.  ce  qui  se  passe  dans  les  villes 
comme  aussi  dans  la  province  =  ce  qui  se  fait  en  toute  la  Provence 
Lig,  232.  et  même  dans  =  jusque  dans.  Lig.  2,33.  d'obliger  =  pour 
obliger.  Lig.  236.  avec  leurs  parents  et  leurs  alliés  =  et  leurs  parents 
et  alliances.  Lig.  237.  qu'on  n'entend  =  qu'on  n'ouït.  Lig.  237.  plaintes 
contre  les  conseillers  juifs  du  Parlement  de  Provence  =  plaintes  et 
évocations  contre  le  ditParlement.  Lig  2^^.  suppr.  e^é^t^is ce  qui  oblige 
jusqu'à  outre  les  usures.  Lig.  240.  avant  outre  les   usures,  ajoutez  : 

ceux  même  qui  sont  magistrats.  Lig,  242.  métiers  mécaniques  et  sor- 
dides =  métier  sordide.  Lig .  243.  remjdacer  depuis  C'est  qu'ayant  le 
prétexte  jusqu'à  {lig.  246)  perdre  la  province,  2^^^^  qu'ayant  la  reli- 
gion et  la  volonté  du  tout  étrangères  et  l'alliance  de  la  France  et  du 
Christianisme,  ils  se  rendent  si  forts  qu'ils  perdront  la  Provence  Lig. 
247.  les  y  pousse  =  les  possède.  Lig.  248.  :  vendroient  aussi  faci- 
lement leur  liberté  et  fidélité  pour  se  venger  et  se  mettre  =  vendront 
aisément  leur  fidélité  et  eux-mêmes  pour  se  mettre.  Z.*^.  249.de  l'étran- 
ger =  des  étrangers.  Lig.  250.  pendant  les  divers  troubles  delà  Li* 
gue  =  durant  les  derniers  troubles.  Lig.  251.  suppr.  bon  et  ny  deson 
parti.  Lig.  251.  se  sont  =  s'est  ans.  Z?^'.  252.  ajouter  après  Avignon^ 
lieu  ancien  de  leur  origine.  Lig.  252.  n'affectent  rien  tant  =  n'affec- 
tionnent rien  plus.  Lig.  252  du  pape  =  des  papes.  Lig.  256.  suppr,  la 
plupart  portent  sur  leur  visage  les  pâles  couleurs.  Lig»  257,  du  grand 


/  i 


VARIANTES  DU  TEXTE  DES  REMONTRANCES       4â7 

vendredi  ==  de  vendredi.  Lig.  260.  autorisés  dans  =  autoriser  à,  Lig. 
261. trop  dangereuse  =>»  très  dangereuse.  Lig.  262.  cette  race  judaïque 
dans  =  ces  gens-là  à.  Lig,  264.  qu'ils  s'établissent  =  de  s'établir.  Lig, 
265  suppr,  partout  où  ils  habitent.  Lig,  266.  prévenir  tous  les  abus 
=  pourvoir  aux  abus.  Lig.  267.  de  cette  apréhension  =  de  tant  d'op- 
pressions. Zi^.  267.  suppr,  et  très  nécessaire  Zi^.  268.  province  =  Pro- 
vence. Lig.  269.  qui  sont  immenses  ^  qui  valent  plus  d'un  million 
d'or.  Lig,  270.  de  leurs  charges  et  offices  =  des  charges  publiques 
qu'ils  exercent.  Lig.  270.  500.000  =  300.000.  Lig.  272.  charges  places. 
Lig.  272.  suppr.  et  de  probité.  Lig.  273.  plus  de  la  moitié  =  plus  de 
deux  cent  mille  écus.  Lig.  274.  de  très  humbles  remontrances  =  des 
remontrances  et  très  humbles  supplications.  Lig.  275.  Il  faudroit  en- 
core •«  en  ce  cas  il  faudrait.  Lig.  276.  établi  à  prendre  =  établies  et 
prendre.  Lig.  276.  tant  par  tant  =  tant  pour  cent  Lig.  279.  il  est  cer- 
tain qu'il  en  tireroit  =  il  en  pourroit  tirer.  Lig.  280.  des  galères  et 
garnisons  de  la  Provence  de  ses  galères  et  garnisons  Lig.  2S2.  parentés 
=  parentelles  et  alliances.  Lig.  282.  dangereuses  en  =  les  plus  dange- 
reuses à.  Lig.  283.  suppr  pour  ainsi  dire  qu'une  Ame  et.  Lig.  287.  re- 
ligion prétendue  réformée  =  bonne  religion. 

Les  deux  derniers  paragraphes  du  texte  de  la  Revue  historique  sont 
remplacés  dans  notre  texte  par  : 

Rôle  de  ceux  qui  sont  officiers  au  Parlement. 

M«  Guillaume  Aymar,  conseiller. 

M®  Joseph  Aymar  son  fils,  Président. 

M®  Jean  Augustin  Thomassin  son  neveu,  conseiller. 

M*  Jean  Estienne  Thomassin,  avocat  général,  son  frère,  neveu  dudit 
Aymar. 

M®  Honoré  Agut,  conseiller,  cousin  desdits  Thomassins. 

M.  Joseph  Mazargues,  conseiller,  cousin  desdits  Aymars  et  Tho- 
massins. 

M®  Honoré  Saint-Marc,  conseiller,  aussi  leur  cousin. 

M"  Honoré  Rabasse,  procureur  général,  neveu  desdits  Aymars  et 
cousin-germain  desdits  Thomassins. 

M*  Paul  Chailan,  conseiller,  son  beau  frère. 

Outre  ce,  il  y  a  M*  Thoron,  conseiller,  et  plusieurs  autres  leurs 
proches  parents.  S'il  est  nécessaire,  le  rolle  cy-dessus  [sera]  transcrit 
et  tout  le  contenu  au  présent  mémoire.  Par  extrait  des  registres  de 
la  Cour  des  Comptes  et  autres  pièces  authentiques. 

L.-G.    PÉLISSIEB. 


VARIÉTÉS 


CANAPÉ 

Littré  a  donné,  après  les  Bénédictins,  la  véritable  étymologie  du 

mot  canapé.  Il  le  fait  dériver  du  bas -latin  canapeum,  par  corruption 

du  grec  xojvcaTrsIov  mais  il  ne  dit  pas  comment  xcavoirelov  est  devenu 
canapeum . 

Voici  l'explication  que  nous  proposons  :  la  transcription  latine  régu- 
lière de  xwvwireîoy  est  conopeum  que  donnent  les  écrivains  classiques. 
Isidore  de  Séville  n'a  pas  reconnu  l'identité  de  ces  deux  mots,  et  il  a 
fait  dériver  conopeum.  du  nom  de  la  ville  égyptienne  de  Canope. 
«  Conopeunï  :  Retes  qua  culices  excluduntur  in  niodum  tentorii  quo 
magis  Alexandrini  utuntiir,  quia  ibi  ex  Nilo  culices  copiosi  nascun- 
tur  ;  unde  et  conopeum  dicitur  ;  nam  Canopea  iEgyptus  est*.  »  Où 
sait  en  quelle  estime  l'ouvrage  d'Isidore  a  été  tenu  au  moyen  âge  ; 
son  étymologie  a  fait  fortune,  et,  sous  son  influence,  conopeum  est 
devenu  successivement  canopeum.  canapeum.  Le  mot  français  canapé^ 
qui  n'est  évidemment  pas  de  fonnation  populaire,  reproduit  simple- 
ment cette  dernière  forme. 

Le  lexicographe  Ugutio  de  Pise  2,  qui  a  beaucoup  emprunté  a 
Isidore,  écrit  bien  conopeum  ^  ;  mais  déjà  Papias,  antérieur  à  Ugutio, 
paraît  avoir  écrit  canopum  *.  La  Bibliothèque  Nationale  possède  deux 
copies  manuscrites  d'un  vocabulaire  provençal-latin  du  xiv®  siècle,  qui 
doit  beaucoup  à  Isidore  de  Séville  et  à  Ugutio.  La  meilleure  de  ces 
copies,  qui  paraît  remonter  à  la  Un  du  xve  siècle,  écrit  s.  v.  Cortina: 
canopeum^.  Un  glossaire  latin,  cité  par  D.  Carpentier,  confirme 
même  directement  notre  hypothèse:  «  Canopeum  dicitur  reticulum 
subtile  circa  Icctuni  poaituui  ad  defensionem  muscarum,  et  dicitur  a 
Canopo  civitate  *» .  »  L'italien  C<rmo;;g  remonte  bien  évidemment  à  cette 
forme.  M.  Brachot  croit  que  le  mot  français  a  été  emprunté  àPitalien 
au  cours  du  xvi»  siècle.  Nous   sommes  plus  disposé  à  croire  que  le 

<  Etymologice,  XIX,  v.  4. 

«  Mort  en  1212. 

3  Cf.  Du  Gange,  S.  v.  zinzaia. 

*  Du  Gange,  s.  v.  Canopeum. 

8  Bibl.  Nal.,  fonds  lalin,  ms.  7685. 

«  B'bl.  Nat.,  fonds  latin,  ms.  4120,  cité  par  Du  Gange,  s.  v,  Canopeum. 


i 


BIBLIOGRAPHIE  4  39 

français  a  fait,  comme  l'italien,  un  emprunt  direct  au  bas-latin.  Sous 
l'influence  de  l'a  initial,  canopeum  était  devenu  canapeum.  Nous  trou- 
vons cette  dernière  forme  dans  la  plus  ancienne  des  copies  du  voca- 
bulaire provençal-latin  dont  nous  venons  de  parler  *.  Il  est  à  noter  que 
ce  ms.  du  xv®  siècle  est  dû  à  un  copiste  fort  ignorant  qui  s'est  très 
vraisemblablement  conformé  dans  sa  graphie  du  mot  latin  à  la  pro- 
nonciation courante  autour  de  lui . 

Rabelais,  cité  par  M.  Brachet,  a  employé  la  forme  Conope  ^,  qui 
n'est  certainement  pas  empruntée  à  l'italien.  Nous  pensons  que  Rabe- 
lais se  sera  rendu  compte  de  la  véritable  origine  du  mot  et  aura  voulu 
se  rapprocher  de  la  forme  grecque . 

Il  nous  paraît  inutile  d'insister  sur  le  sens  de  ce  mot,  qui,  après 
avoir  désigné  un  moustiquaire  et  le  lit  que  le  moustiquaire  protège,  ne 
sert  plus  aujourd'hui  qu'à  désigner  un  siège. 

Alphonse  Blanc. 


BIBLIOGRAPHIE 


Le  latin  de  Grégoire  de  Tours,  par  Max  Bonnkt,  professeur  de  littérature 
latine  à  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier.  Paris,  Hachette,  l  v.  752 
pages,  avec  une  table  des  passages  commentés  et  une  table  alphabétique. 

Quelle  place  occupe  Grégoire  de  Tours  dans  Thistoire  de  la  littéra- 
ture latine?  Que  faut-il  penser  du  latin  parlé  en  Gaule  au  VIesiècle? 
Est-ce  une  nouvelle  langue  qui  se  crée  ou  bien  est-ce  l'ancienne  langue 
qui  vit  encore,  plus  ou  moins  transformée  ?  Quelles  sont  les  modifica- 
tions subies  et  où  ont-elles  été  le  plus  fortes?  Est-ce  dans  le  vocabu- 
laire, dans  la  flexion  ou  dans  la  syntaxe  ?  Comment  prononçait-on 
alors  le  latin  ?  Quels  sont  les  caractères  distinctifs  du  style  de  Gré- 
goire ?  Telles  sont  les  principales  questions  auxquelles  l'auteur  de  cet 
ouvrage  se  propose  de  répondre  directement.  Mais,  comme  il  nous  en 
avertit  lui-même,  son  étude  à  un  intérêt  plus  général.  Elle  doit  con- 
tribuer à  faire  la  lumière  «sur  ce  qu'on  appelle  la  décadence  du  latin 

*  Bibl.  Nat.,  fonds  latin,  ms.  7657.  Le  ras.  7685  permet  de  corriger  la  cita- 
tion incompréhensible  empruntée  par  Dom  Carpentier  au  ras  7657,  s.  v. 
Canopeum,  Il  faut  lire  :  Pro  culkibus  et  muscis  veticulata  cortina, 

^  Pantagruel  j  111,  18. 


440  HIBLIOGRAPHIK 

et  la  naissauce  des  idiomes  nouveaux,  sur  la  part  qu'ont  eue  «laus  ces 
événements  chaque  siècle,  chaque  pays,  peut-être  môme  chaque  in- 
dividu.» Elle  complète  de  la  manière  la  plus  utile  la  série  des  travaux 
de  Hagen,  de  lîœnsch  sur  la  Vulgate,  de  KofFmane  sur  l'histoire  du 
latin  de  l'Eglise,  de  II.  Gœlzer  sur  la  latinité  de  S.  Jérôme  et  sur 
Sulpice  Sévère,  de  Mohr  sur  Sidoine  Apollinaire,  de  H.  d'Arbois  de 
Jubain ville  sur  la  déclinaison  latine  en  Gaule  à  l'époque  mérovin- 
gienne, etc...  Ce  ne  serait  pas  déjà  un  mince  mérite  d'avoir  fourni  à 
d'autres  des  matériaux  préparés  de  preinière  main,  d'avoir  soumis  le 
texte  de  Grégoire  à  une  critique  minutieuse,  d'avoir  collationné  plu- 
sieurs manuscrits  de  ses  ouvrages,  et  de  s'être  astreint  à  vérifier  scru- 
puleusement les  nombreux  textes  cités.  Cette  part,  qui  pourrait  rai- 
sonnablement satisfaire  une  honnête  ambition,  M.  Bonnet  a  raison  de 
croire  qu'elle  n'est  pas  la  seule  qui  lui  revienne.  Il  a  fait  plus.  Non 
seulement  il  a  établi  une  base  solide  en  triant  avec  autant  de  soin 
que  de  compétence  les  documents,  non  seulement  il  a  donné  un  bel 
exemple  de  ce  qu'on  peut  appeler  la  probité  scientifique,  mais  grâce 
à  lui  plus  d'une  erreur  a  été  rectifiée,  plus  d'une  idée  fausse  redressée  ; 
il  a  corrigé  et  expliqué  bien  des  passages  de  Grégoire,  en  philologue 
rompu  àlacritique  verbale  et  à  l'interprétation  des  textes. 

Une  idée  généralement  reçue  est  qu'il  y  a  en  latin  deux  langues  dis- 
tinctes, le  latin  littéraire  et  le  latin  vulgaire,  celui-ci  ayant  son  vo- 
cabulaire, ses  riexions,  sa  syntaxe,  sa  prononciation,  pouvant  avoir 
par  conséquent  sa  grammaire  comme  tout  autre  idiome.  De  Diez  cette 
idée  a  passé  en  s'exagérant  dans  l'ouvrage  de  Fuchs  sur  les  langues 
romanes,  plus  récemment  dans  celui  de  W.  ]^Ieyer  sur  le  même  su- 
jet :  elle  se  retrouve  un  peu  partout,  en  France,  dans  la  «  Gram- 
maire française  «  de  F.  Brunot  et  dans  «  les  I^arlers  de  France  »  de 
M.  Gaston  Paris.  Déjà  un  savant  d'une  haute  compétence  E.  Wôlfflin, 
en  distinguant  six  ou  sept  degrés  dans  le  latin  vulgaire,  avait  mis 
plus  de  précision  dans  la  conception  de  ce  latin  et  tempéré  la 
théorie  régnante.  Mais  c'est  M.  Bonnet  qui  a  su  le  mieux  se  dégager 
de  l'opinion  courante  et  qui,  en  soumettant  la  question  à  un  nouvel 
examen,  est  arrivé  à  conclure  qu'il  pouvait  bien  en  être  de  ce  latin 
vulgaire,  en  tant  qu'idiome,  comme  de  la  «  langue  indo-européenne» 
reconstruite  par  Schleicher.  L'un  ne  parait  pas  avoir  plus  de  réalité 
que  l'autre.  La  vérité  est  qu'il  pouvait  y  avoir  pour  le  peuple  une 
certaine  façon  de  s'exprinier,  un  langage,  mais  non  une  langue  à 
part,  distincte  de  la  langue  latine  proprement  dite.  On  peut  donc  par* 
1er  de  la  langue  du  peuple  mais  non  du  latin  du  peuple.  Le  fond  de 
la  langue  était  le  même  pour  ceux  qui  se  servaient  de  termes  ou  de 
tours  populaires,  du  «sermoplebeins»,  que  pour  ceux qui,plu8 instruits, 
d'un  rang  plus    élevé,  parlaient  un  latin  pur,  le  «sermo  urbanus».  Ce 


BIBLIOGRAPHIE  4  41 

n'est  pas  un  prétendu  latin  populaire  qu'il  faut  opposer  à  ce  qu'on 
pourrait  appeler  le  bon  latin,  le  latin  littéraire  :  ce  qui  est  vrai,  c'est 
que  le  latin,  un  au  fond,  comportait  une  infinité  de  variétés,  suivant 
qu'il  était  parlé  par  telle  catégorie  de  gens  ou  par  telle  autre,  et 
par  la  même  catégorie,  dans  telle  circonstance  ou  dans  telle  autre. 
Comme  M.  Schuchardt  l'avait  déjà  finement  fait  remarquer  dans  son 
ouvrage  sur  le  vocalisme  du  latin  vulgaire:  «le  même  homme  se  ser- 
vait d'un  latin  différent,  quand  il  se  consultait  avec  son  esclave  sur 
les  emplettes  à  faire  pour  un  repas,  ou  quand  il  envoyait  un  billet  à 
un  ami  pour  le  prier  de  venir  à  sa  villa,  ou  quand  il  composait  une 
ode  pour  célébrer  un  prince  ou  une  maîtresse.»  Il  y  avait  donc  des  nu- 
ances infiniment  variées,  adaptées  au  caractère  des  personnes,  aux 
besoins  du  moment,  à  la  langue  écrite  et  à  la  langue  parlée  :  diffé- 
rences dans  la  manière  de  parler  la  même  langue,  voila  ce  qui  répond 
aux  faits  et  à  la  nature  des  choses,  mais  non  pas  dualité  de  langues 
vraiment  distinctes.  Le  latin,  importé  dans  les  provinces  à  la  suite  de 
la  conquête,  n'était  pas,  comme  on  le  lit  partout,  ce  prétendu  latin 
vulgaire  d'où  serait  venu,  ici  le  français,  là  l'espagnol,  ailleurs  l'ita- 
lien ;  c'était  le  latin  tout  court,  c'est-à-dire  le  latin  de  tout  le  monde, 
plus  ou  moins  altéré  dans  le  vocabulaire  ou  la  prononciation  par  des 
influences  aussi  diverses  que  l'origine,  le  rang,  l'éducation,  la  position 
des  immigrants  ;  car  c'est  encore  une  légende  que  celle  du  légionnaire 
apportant  le  latin  en  Gaule,  en  Espagne,  et  l'enseignant  aux  provin- 
ciaux. Outre  les  gens  du  négoce,  chaque  nouvelle  annexion  amenait 
dans  les  provinces  nombre  de  fonctionnaires  publics,  dont  quelques- 
uns  appartenaient  aux  plus  hautes  classes  de  la  société,  étaient  ins- 
truits et  gens  du  monde  non  moins  qu'élevés  en  dignité,  et  de- 
vaient par  conséquent  parler  le  sermo  eruditus^  perpolitus^  urhanus.  De 
même,  en  Gaule,  à  côté  des  marchands,  des  artisans,  des  paysans,  il 
y  avait  ceux  qui,  par  leur  situation,  leur  instruction,  leur  éducation, 
appartenaient  à  un  milieu  plus  élevé  :  ceux-ci  échangeaient  entre  eux 
des  idées  que  la  généralité  des  Gaulois  n'avait  que  rarement  ou  plutôt 
même  jamais  l'occasion  d'exprimer,  comme  eux-mêmes  n'étaient  pas 
amenés  ordinairement  à  se  servir  des  termes  et  des  tournures  propres 
aux  illettrés  ;  si  bien  qu'il  faut  se  représenter  chez  les  Gaulois  non 
moins  que  chez  les  Romains  de  nombreuses  différences  dans  la  ma- 
nière de  parler  le  latin,  les  besoins  et  les  moyens  de  chacun  variant 
snivAnt  son  rang  et  son  instruction. 

Ces  réserves  faites  sur  la  distinction  qu'on  établit  ordinairement  en- 
tre le  latin  littéraire  et  le  latin  vulgaire,  M  Bonnet  n'admet  pas  que 
chez  les  Romains,  les  Gallo -Romains,  pas  plus  que  chez  nous,  il  y  ait 
eu  un  abîme  entre  la  langue  parlée  et  la  langue  écrite,  comme  on  l'a 
prétendu,  l'une  restant  immobile,  l'autre  suivant  une  marche  indépen - 

30 


M  2  lîinUOGllAPHlF: 

(lanto,  l'îiiic  arn'téo  dans  son  (lévoloppoment,  raiitro  continuant  «le 
\  ivre.  La  langue  littéraire  elle  aussi  change  :  elle  subit,  comme  un  or- 
ganisme vivant,  une  évolution,  pour  la  plus  grande  partie,  incons- 
ciente. Elle  exerce  aussi,  et  c'est  ce  qu'il  faut  bien  voir,  son  influence 
sur  la  langue  parlée.  Les  Gallo- Romains,  comme  les  Romains,  comme 
nous  autres  Français,  cherchaient,  soit  en  parlant,  soit  en  écrivant,  à 
reproduire,  comme  ils  pouvaient,  la  langue  littéraire  classique.  Lebon 
latin  était  leur  modèle,  leur  idéal,  comme  pour  nous  le  français  de 
nos  classiques  du  XVII«  et  du  XYIII»  siècle.  C'est  encore  l'ancienne 
langue  qu'on  j)arlc  au  VI* siècle  ou  qu'on  écrit,  quelque  altérée  qu'elle 
soit.  Ce  n'est  pas  une  langue  nouvelle  qu'on  crée. 

Ce  qui  s'écarte  le  plus  du  modèle  suivi,  c'est  la  syntaxe  avec  le  vo- 
cabulaire. «  Sur  la  plupart  des  points  c'est  un  état  de  transition  entre 
la  règle  ancienne  ébranlée  et  la  nouvelle  non  encore  établie  ».  «  On 
pèche  par  ignorance;  c'est  l'ancienne  langue  qu'on  parle  incorrecte- 
ment. »  M.  Bonnet,  en  effet,  ne  partage  pas,  avec  juste  raison,  l'opi- 
nion de  ceux  qui  ne  veulent  pas  qu'on  parle  de  fautes  ni  d'incorrections. 
S'il  est  vrai  que  c'est  l'usage  qui  a  fait  la  grammaire  et  non  la  gram- 
maire qui  a  établi  l'usage,  la  grammaire  une  fois  faite  n'en  a  pas 
moins  eu  force  de  loi  :  elle  est  devenue  un  code,  accepté  et  reconnu 
par  tous,  transgressé  seulement  par  ceux  qui  l'ignorent  ou  le  connais- 
sent mal.  C'est  le  cas  de  Grégoire  comme  de  ses  contemporains. 

«Le  vocabulaire,  extrêmement  riche,  doit  son  abondance,  après  la 
conservation  de  l'immense  majorité  des  mots  anciens,  non  seulement 
ù  l'emploi  qu'il  fait  de  termes  empruntés  àtoutesles  variétés  du  latin, 
au  giec,  et  parfois  aux  langues  barbares,  mais  surtout  à  l'adoption  d'ac- 
ceptions nouvelles  très  diverses  et  souvent  très  inattendues.»  Dans  le 
second,  livre  qui  traite  du  vocabulaire,  les  Romanistes  verront  avec 
intérêt  et  proiit  comment  dans  ce  latin  de  Grégoire  certains  mots  pré- 
sentent déjà  les  significations  et  l'emploi  qu'on  retrouve  dans  les  mots 
français  dérivés  :  ainsi  merces  (merci)  hostis  (ost)  gentes  (gens)  direc- 
tusdirectum  (droit)  ingenium  (engin)  crepare  (crever)  coUocare  (cou- 
cher) necare  (noyer)  computare  (compter,  avoirl'iutention,  le  projet  de) 
fortis,  grandis,  diversus,  qui  ont  déjà  le  môme  sens  qu'en  français. 

«  La  prononciation  du  latin  n'était  plus  conforme  à  l'écriture.» 
«Nombre  de  consonnes  sont  affaiblies  sinon  supprimées  ;  l'assibilation 
de  ci  et  ti  est  un  fait  accompli  ;  etc.  » 

«La  flexion,  en  somme,  est  conservée.  Cependant  des  brèches  y  sont 
battues,  et  par  l'altération  phonétique,  qui  naturellement  s'étend  a 
tout,  et  par  la  fausse  analogie,  qui  ne  se  manifeste  que  très  capricieu- 
sement :  un  même  mot  suivra  dix  fois  l'ancienne  flexion,  et  la  onzié- 

• 

me,  séduitpar  une  ressemblance  quelconque,  il  s'égarera  dans  une  voie 
nouvelle.  La  dérivation  et  la  composition  sont  relativement  peupro- 


BIBLIOGRAPHIE  44  3 

ductivcs.»  Quant  au  phénomène  nommé  la  recomposition  (obtenere, 
resedere,  tradedit)  M.  Bonnet  a  corrigé  une  erreur  de  M.  E.  Seelmann, 
dont  nous  avons  déjà  analysé  dans  cette  revue  l'ouvrage  sur  la  pronon- 
ciation du  latin*.  Ce  n'est  pas  au  peuple  qu'il  faut  attribuer  la  recom- 
position, c'est  aux  savants  ou  plutôt  aux  demi-savants.  Elle  n'est  pas 
née  spontanément  :  elle  est  l'œuvre  des  lettrés  qui  connaissent  les  mots 
par  les  livres  aussi  bien  que  par  la  conversation,  etqui, d'une  manière 
réfléchie,  voulue,  ont  fait  revivre  les  divers  éléments  dont  le  mot  était 
étymologiquement  formé:  obaudire  au  lieu  de  obœdire.  Ces  mots  re- 
composés ont  passé  des  livres  dans  la  langue  vivante,  où  leur  exis- 
tence est  prouvée,  entre  autres,  par  le  témoignage  des  langues  ro- 
manes. 

.  Quant  au  style  de  Grégoire,  les  tendances  auxquelles  il  cède,  les 
procédés  dont  il  se  sert  «sont  ceux  d'un  autodidacte  qui  voudrait  faire 
comme  les  écrivains  du  métier,  mais  qui  sent  son  impuissance  à  les 
imiter  :  tour  à  tour  il  s'y  applique  et  il  y  renonce.  Il  en  résulte  un 
étrange  contraste  entre  des  formes  oratoires  usées  et  une  fraîche  et 
rude  originalité.»  L'écueil,  quand  on  traite  du  style  d'un  écrivain,  est 
de  tomber  dans  le  vague  des  épithètes,  faute  d 'avoir  suffisamment 
analysé  l'impression  d'ensemble  qu'on  a  ressentie.  Aussi  bien  le  savoir 
n'y  suffit  pas.  Il  faut  aussi  une  délicatesse  de  goût  sensible  aux  moin- 
dres nuances  comme  aux  traits  plus  fortement  marqués.  Lorsque  la 
connaissance  exacte  des  faits  se  joint  à  un  sentiment  fin  de  tout  ce 
qui  fait  le  caractère  distinctif  d'un  style,  on  peut  écrire  cinquante  pa- 
ges sur  un  pareil  sujet  sans  vaine  rhétorique,  sansj«  ornare  paginam  » 
ni  «dilatare,  extendere»,  comme  s'exprime  Grégoire  pour  dire  «déve- 
lopper une  matière.»  N'est-ce  pas  un  chapitre  vraiment  littéraire, 
dans  le  meilleur  sens  du  mot,  que  le  cinquième  du  dernier  livre,  sur 
le  mélange  des  couleurs  dans  le  style  de  Grégoire?  Nuances  poétiques, 
vulgarismes,  Grégoire,  dans  son  inexpérience,  mêle  tout,  sans  savoir 
fondre  les  tons,  se  préoccupant  avant  tout  d'ennoblir  son  style.  A  cet 
effet  il  emprunte  beaucoup  à  la  Bible.  «  Ces  expressions  bibliques  con- 
tribuent à  rendre  son  style  pittoresque  et  à  lui  donner  cette  teinte  de 
naïveté  grave  et  légèrement  exotique  que  les  peuples  dotés  d'une 
traduction  nationale  de  la  Bible,  les  Anglais  et  les  Allemands,  par 
exemple,  connaissent  bien  dans  leurs  langues  aussi. ]i> 

On  pourra  peut-être  dans  l'étude,  pourtant  si  complète,  de  M.  Bon- 
net sur  le  latin  de  Grégoire  de  Tours  relever  quelques  omissions,  con- 
seiller quelques  retouches.  Mais  ces  imperfections,  de  quelque  nature 
qu'elles  soient,  une  fois  signalées,  ou  plutôt  avant  de  les  signaler,  il 
faudra  toujours,  pour  être  juste,  insister  sur  le  mérite  rare    qui  les 

i  Rev.  d.  l.  vom.,  t.  XXXI,  p.  00. 


44  4  PERIOniQUlilS 

excuse  largement  et  qui  place    l'ouvrage  au  premier  rang.  On  devra 
louer  la  méthode  de  M.  Bonnet  qui  a  soin  de  nous  dire  dès  le  début 
ce  qu'il  veut  faire,  les  principes  de  critique  qu'il  compte  appliquer  à 
sou  étude,  et  de  résumer  à  la  fin  les  résultats  auxquels    il  est  arrivé. 
On  ne  perdra  pas  de  vue  l'importance   de    ces  résultats  pour  This- 
toirc  de  la  langue    et   de  la  littérature  latines,  comme  aussi  pour  la 
solution  du  problème  de  la  transforn.ation  d'une  langue  en  plusieurs 
autres  langues.  On  fera  ressortir  la  difficulté  de  la  tâche  que  s'était 
imposée  M.  Bonnet  cjui,  philologue  et  latiniste,  mais  nullement  dé- 
paysé, dans  le  domaine  de  la  lingustique  ni  dans  celui  des  langues 
romanes,  était  tout  désigné  pour  la  remplir.  Ce  qu'il  ne  faudra  pas 
moins  faire  ressortir  (pie   cette  rare  compétence,  c'est  la   passion  de 
la  vérité   qui  anime  l'ouvrage  tout  entier  ;  ne  reconnaître  pour  "vrai 
que  ce  qu'on   a  puisé  aux  sources  même  de  la  vérité,  penser  par  soi- 
même,  sans  ignorer  ce  que   les  autres  ont  pensé,  telle  est  la  règle  à 
laquelle    M.  Bonnet  se  conforme  strictement   et  constamment  ;  c'est 
un  devoir  dont  Taccomplissement  lui  fait   accepter  vaillamment  les 
fatigues  et  les  déboires  de  la  recherche  personnelle.  Cette  rectitude 
d'esprit,  cette  probité  scientifique   donnent  une  autorité  singulière  à 
ses  démonstrations,  présentées  avec  cette  logique   qui  s'impose.  Les 
faits  qu'il  étudie,  bien  que  prodigieusement  nombreux,  sont  si  scru- 
puleusement vérifiés,  si  bien  classés,  grâce  à  un  rare  sens  grammati- 
cal, qu'ils  ne  causent  aucune  gène  au  lecteur.  Enfin,  dans  une  revue 
française,  on  ne  saurait  passer  sous  silence  la  forme  qui  est  en  tout 
digne  du  fond  :  la  précision  fait  le  charme  de  cette   langue  où  rien 
n'est  vague  et  qui  est  l'expression   toujours  fidèle  d'une  pensée  tou- 
jours nette    a  Le  livre  est  bon  et  fait  de  main  d'ouvrier.  » 

J.  Bbbnous. 


PÉRIODIQUES 


Zeitschrift  fdu  romanisciie  PiiiLOLoaiE.  XIV,  1-2.  — p.  1. 
J.  Wieprecht.  Les  Homélies  latines  d'Aymon  d'JIaîherstadt,  source  de 
la  iraductio7i  d'Aymoji  en  ancien  lorrain.  Cette  traduction,  faite  sarun 
excellent  manuscrit  du  texte  latin,  va  être  publiée  par  M.  SucLîer.— 
P.  21.  E.  Gessner.  Développement  de  l'espagnol  dans  la  période  hypo- 
thétique. —  P.  G6.  Ch.  Bonnier.  Étude  cri.ique  des  chartes  de  Douai 
de  1203  à  1275.  Deuxième  partie  :  Caracténstique  des  chartes  de  Douai. 
Nous  persistons  à  croire,  après  la  lecture  de  la  seconde  partie  du  tra- 


■( 


PERIODIQUES  445 

vail  de  M.  Bonnier,  que  l'auteur  abonde  par  trop  dans  pon  sens,  et 
qu'il  s'est  laissé  entraîner  trop  loin  par  le  désir  de  combattre  les  opi- 
nions reçues.  Cf.  Romania,  XIX,  617. —  P.  89.  G.  Schiavo.  Croyances 
et  Superstitions  d'après  l'ancienne  poésie  française.  Complément  du  tra- 
vail analogue  de  Schrœder  à  l'aide  des  fabliaux  et  des  contes  dévots, 
que  ce  dernier  n'avait  pas  utilisés.  Ce  travail,  qui  sera  continué,  est 
loin  d'épuiser  la  question:  il  n'est  d'ailleurs  pas  tout  à  fait  au  courant. 
—  P.  128.  V.  Crescini.  Azalais  d'Altier,  L'auteur  montre  que  le 
salut  Canz  salulz  et  tantas  amors,  qu'il  publie  d'apivs  le  Chansonnier  V 
de  Bartsch,  fut  adressé  par  Azalaïs  à  Clara  d'Anduze,  qu'elle  ne  con- 
naissait pas,  pour  l 'engager  à  se  montrer  clémente  envers  son  amant, 
Uc  de  Saint-Cire.  —  P.  133.  E.  Goua.  Phonétique  du  dialecte  de 
Plaisance. 

MÉLANGES,  i.  Histoire  LITTÉRAIRE.  1.  P.  159.  G.  Baist.  Le  Pont 
des  âmes.  —  2.  P.  160.  C.  Appel.  Guillem  Ademar,  Grimoart  Gaus- 
mar  et  Guillem  Gasmar.  Édition  diplomatique  des  trois  textes  de  la 
fameuse  satire  de  Pierre  d'Auvergne  contre  les  troubadours  de  son 
temps,  destinée  à  réfuter  une  opinion  exprimée  par  Zenker.  Cf.  Zeits- 
chrift,  XIII,  294  sqq.  et  Eomania,  XIX,  61S.  —  3.  P.  169.  E. 
Kœppel.  Bice  Portinari  est-elle  la  Beatrix  de  Dante  ? —  II.  Textes. 
G.  Binz.  L'Évangile  aux  femmes.  Nouvelle  édition  de  ce  texte  pro- 
téiforme  d'après  un  manuscrit  du  xv*^  siècle  appartenant  à  la  biblio- 
thèque universitaire  de  Bâle  (14  couplets).  Cf.  Mail,  Zeiischrift,  I, 

ê 

377  sqq.  et  VIII,  449  sqq.  ,  et  L.  Constans,  Marie  de  Compiègne 
d'après  VÉvangile  aux  femmes  (Paris,  Vieweg,  1876),  et  Zeitschrift, 
VIII,  24  sqq.  Le  ms.  de  Bâle  est  très  proche  parent  de  notre  ms.  D 
(Bibl.  munie,  de  Dijon,  298);  il  a  le  même  nombre  de  couplets,  qui 
se  suivent  le  plus  souvent  [dans  le  même  ordre.  Le  couplet  3  de  D 
manque;  il  est  remplacé  par  le  couplet  18  de  i^,  qui  occupe  ici  le 
dixième  rang.  Ce  couplet  commun  à  i^ et  au  manuscrit  de  Bâle  (qu'il 
conviendrait  d'appeler  G)  fait  difficulté,  aussi  bieu  pour  le  classement 
de  M.  Mail  que  pour  le  nôtre.  Il  faut  admettre  une  contamination,  ou 
une  transcription  de  ce  couplet  d'après  une  tradition  orale  :  cela  n'a 
rien  qui  doive  surprendre  pour  un  texte  qui  a  eu  une  grande  popula- 
rité, comme  l'atteste  le  grand  nombre  de  couplets  qui  se  sont  succes- 
sivement ajoutés  aux  11  ou  12  couplets  primitifs.—  III.  Critique  des 
TEXTES.  P.  175.  11.  Suchier.  Sur  Aucassin.  M.  S.  montre  que  dans 
Aucassin,  14,  20,  il  faut  lire  :  le  tateron  de  sa  mamèle,  au  lieu  de  le 
cateron.  Il  faut  sans  doute  aller  plus  loin  et  lire  avec  M.  G.  Paris 
(Voy.  Romania,  XIX,  618):  le  teteron.  —  IV.  Histoire  des  mots. 
P.  176.  H.  Schuchardt.  1.  Espagnol  dengue  (maladie).  —  2.  Mimus, 
moraus.  —  3.  Malandria,  fr.  malandre.  —  4.  Fr.  gilet  =  esp.  gileco, 
turc  yelekf  grec  ye>£x()  etc.    —  5.  Esp.-port.  tomar  se   rattacherait 


4  4^>  PEaiODlQUKS 

comme  le  fr.  tomber,  l'anc.  fr.  tumer,etc.  au  r^idictA  tomb-(tuln')' 
tom-(tu7n),  qui  a  donué  dans  toutes  les  langues  romanes  des  verbes 
de  la  première  conjugaison.  —  6.  Fr.  //{aurais,  une.  fr.  mauve.  Le 
premier  viendrait  de  malifutius,  que  donne  une  inscription  ;  le  second, 
de  *7iiaUfatus.  Il  y  a  «Ilï»  diflicultés  d'ordre  phonétique  (voy.  Roma- 
nia,  XIX,  GIO).  —  P.  183.  G.  Baist.  Esp.  manera  =  lat.  mannus, 
et  non  goth.  manna,  comme  le  veut  W.  Meyer  fvoy.  ZeitsehrifU 
XI,  25fi;. 

Comptes  rendus.  P.  185  A.  Thomas,  Poénies  complètes  de  Bertran 
de  Born  (  Andresen  ;  comparaison  détaillée  avec  l'édition  de  M.  Stim- 
ming).  — P.    118.    M.  du  Puitspelu,  Dictionnaire  étymologique  du 
patoia  lyonnais  (A.  Horning;  ;  nombreuses  corrections).   —  P.  223. 
ï^gailez    y  Janguas,   Glossario  etimolôgico  de  las  palabras  espaAolas 
(castellanos,  etc.)  de  oHgen  oriental   Baist).   — P.  226.  A.  Eressner, 
Bihliothek  npanhcher  Schriftsteller  (Lang).   —  P.  218.  Jarnik,  Daine 
si  Strigàturi  din  Ardeal  ;  Marian,  Descântece    poporane  romane  (Rn- 
<lo\v). —  P.  235.  M.  SvAi\\'nr/.îeh\jPoe8iilepopularecolectiaAlecsandri 
sau  cuni  trebue  culese  si  publicate  canticele  populare  (Rudow  ;  Vauteur 
s'est  montré  injuste  pour  le  grand  poète  national  de  la  Roumanie). — 
P.  242.  A.  Xenepol,   Storla  Romlnilor  din  Dacia  Traiana  (Rndosf), 
P.  244.  J.  Bédior,  le  Lai   de  l'Ombre   (Suchier;  cf.   Romania,  XIX, 
619). —  P.  240.  Giorunle  storico  délia  letteratura  italiana,  XIV,  1-2, 
3;   XV,  1-2  (Gaspary).    —  P.  255.  //  Propugnatore,  II,  1-2,  3,  4 
(GaHpary).  — P.  260.  Romania,  XV III,  4;  XIX,  1  (Meyer-Lûbke  et 
Tobler).  —  P.  263.Archivio  glottologico  italiano,  X,  3  (Meyer-Lnbke). 
—  P.  266.  Livres  nouveaux. 

XIV,  3-4. —  P.  7.  G.  Schiavo.  Croyances  et  superstitions  dans  Vtn- 
ctenne  poésie  française  (suite).   III.  Les  Saints,   IV.  Les  Anges,  Ily 
a  dans  les  textes  de  cette  seconde  partie  un  assez  grand  nombre  de 
fautes,  qui  ne  sont    peut-être  pas   toutes  des    fautes  d'impression»' 
j).  279,  sauz  pour  sanz,  grenous  pour  grenons ;  p.  280,   BertdsBM» 
(avec  le  vers  faux)  j)our  Bertelemieu,  ou  plutôt  Berte{le)mieu;  p,^. 
Une  poz  pour  an  poz  ;  ose  pour  os  ou  os{e)  /  295,  secorciez  pour  eww- 
ciez,  etc.  —  P. 298.  Ch.  Bonnier.  Étude  critique  des  chartes  de  DcMf» 
de  1203  à  1275  (suite  et  fin);  cf.  Zeitschn/t,  XIII,  431  et  XIV,  66. 
M.  B.  donne  ici  le  texte  des  chartes  qu'il  avait  étudiées  dans  Ttf" 
ticle  précédent.   — P.  344.  G.  Osterhage.  Études  sur  Us  traâi^f^ 
héroïques  de  la   France .   A  rapprocher  des  articles  publiés  dans  » 
Zeitschrift,  XI,  1,  185,  327,  et  XII,  365,  sur  les  rapports  des  légendes 
carolingiennes  avec  la  mythologie  germanique.  L'auteur  persiste  dans 
ses  conclusions  précédentes  qu'il  formule  ainsi:  «  L'Épopée  carolin- 
gienne a  presque  partout  un,  noyau  historique:  le  nom  du  héros,  1» 
lutte  et  son  issue  sont  des  faits  réels,  mais  la  tradition  populaire  y  a 


/ 


PERIODIQUES  447 

mis  un  rayon  divin.  Sou  origine  divine  entraîne  pour  ses  enfants  une 
mère  divine  ;  ses  gueiTes  rapprochées  sont  dirigées  contre  des  puis- 
sances obscures,  ses  guerres  lointaines  ressemblent  aux  voyages  des 
dieux.»— P.  363.  D.  Behrens.  Éfi/mologie  (suite)  :  18.  fr.  niazette  : 
même  radical  que  dans  mésange  (bien  douteux). —  19.  berrichon  sener, 
cener,  «  châtrer  »  =  sanare.  Cf.  languedocien  «a7ià^  rouergat  sonà. — 
20.  ancien  fr.  maufé.  — 21.  fr.  accon  =  anc.  fr.  aque,  hollandais 
âk. —  22.  fr.  flétrir,  de  lanc.  îr.Jlestre  =  Jistula,  —23.  nonn.^6/, 
«  fosse,  canal.  »  — 24.  esp.-port.  tepe,  —  25.  port,  gomo,  — 26.  fr. 
mat  =  madidus  (on  attendrait  made  (cf.  tiède  =  tepidus);  il  faudrait 
alors  admettre  une  forme  populaire  par  dissimilation  matidus,  identi- 
que knitidus,  qui  a  donné  7ief), —  27.  ital.  calafatare,  fr.  calfeutrer. 
Un  trait  à  signaler  dans  cette  série  d'étymologies,  c'est  Tusage  qui  est 
fait  du  dictionnaire  de  Mistral,  non  seulement  comme  source  de  rap- 
prochements, mais  encore  comme  base  étymologique. — P.  371.  C. 
Salvioni.  Sur  la  source  de  la  séquence  en  langue  vulgaire  de  sainte 
Eulalie.  L*auteur  croit  que  la  plus  grande  partie  des  traits  du  mar- 
tyre de  sainte  Agnès,  très  vénérée  dans  le  nord  de  la  France  ont  été 
attribués  à  sainte  Eulalie,  plus  connue  dans  le  Midi,  parce  qu'elle 
était  de  Barcelone.  Cette  hypothèse  semble  un  peu  hasardée  ;durestej 
l'auteur  lui-même  dans  une  note  additionnelle  (586),  se  demande  si 
le  triple  martyre  qu'il  a  constaté  dans  la  vie  de  sainte  Agnès  et  dans 
celle  de  sainte  Lucie  n'était  pas  en  France  un  lieu  commun  pour  les 
vierges  martyres .  —  P.  376 .  A.  Horning,  Histoire  des  sons  dans  les 
dialectes  français  de  VEst,  Critique  pénétrante,  basée  sur  une  con- 
naissance approfondie  des  patois,  de  plusieurs  opinions  émises  sur  la 
matière  par  M.  W.  Meyer-Liibke,  dans  sa  remarquable  Grammaire  des 
langues  romanes,  en  cours  de  publication. —  P.  397.  L.  Gauchat.  Le 
Patois  de  Dompierre  [Buyart).  Dans  ce  mémoire,  écrit  en  français, 
Pauteur,  qui  semble  bien  au  courant  de  la  science,  étudie  minutieuse- 
ment Pun  des  patois  les  plus  intéressants  de  la  Suisse  romande.  Sera 
continué. —  P.  467.  0.  Schultz.  Le  Pseudo-Turpin  provençal.  Le  texte, 
imprimé  diplomatiquement,  d'après  le  manuscrit  unique  de  Londres 
(Musée  britannique,  Addit.  17920)  estprécédé  de  courtes  et  judicieuses 
remarques.  Cette  traduction  àxn  Pseudo-Turpin  latin  a  certainement, 
comme  le  croit  l'éditeur,  été  écrite  en  Rouergue  :  P.  472,  bas.  San 
Bauszilii  ne  représente  pas  5.  Basilius,  mais  S.  Baudilïus.  Cf.  au- 
jourd'hui encore  Sen  Bôuzèli  (Saint-Beauzély),  chef -lieu  de  canton  du 
département  de  l'Aveyron,  S.-Beauzile  (Ardèche),  S.-Beauzire,  etc. 
(Haute-Loire,  Puy-de-Dôme)  et  saint  Baudile,  honoré  dans  le  diocèse 
de  Nimes.  —  P.  521.  A.  Schmidt.  Sur  quelques  manuscrits  en  ancien 
français  de  la  Bibliothèque  grand-ducale  de  Darmstadt.  Il  s'agit:  1° 
d'un  ms.  contenant  les  trois  romans  en  prose  intitulés  :  Le  grand  saint 


4  4.<»  ERRATA 

Graal,  Merlin  et  U  Roman  d'Artus;  2"  de  fragments  assez  consicié- 
rables  et  offrant  îles  vîiriaritos  irnportuiites  de  Gui  de  Bourgogne,  que 
l'auteur  publie;  3o  d'un  fragment  ù'Htrris  de  Metz  qui  contient 
112  vers. 

Comptes  rkniius  P.  r>40.  Jofio  Ribriro,  Grammatica  portugueza 
f3*  anno)  (Lani;). —  P.  542.  W.  Stortk,  Luin'  de  Camoens  Leben  (von 
Reinbardytrittu»r  .  —  P.  543.  Ed.  Sc-liwan,  Grammatik  des  Altfran" 
zôsischen,  Laut  und  Formnilehre  (F.  Neuniunn;  compte  rendu  déme- 
surément lon^,  où  presque  chaque  paragraphe  de  cette  importante 
grammaire  donne  lieu  à  des  observations  pour  la  plupart  judicieuses 
et  utiles).  — P.  586.  Post-scriptum  à  l'article  de  C.  Salvioni. 

Léopold  CONSTANS. 


Errata  du  n"  de  janvier- février-mars   1890 

P.  38,  1.  34-35,  "  senhorscossols  ».  Lis.  senhors  cassais. 
•  P.  41,1.  3,  «  vara  >k  Lis.  hara, 

P.   49,  1.  21,  «en  sa».  Lis.  ensa. 

P.  54,  1.  0,  «  en-  ».  Lis.  en. 

P.  56,  1.  23,  «  gencnilmencontra  ».  Lis    generahnen  contra, 

P.  65,  1.  10,  «  fereslol  ».  Lis.  feres  la. 

P.  66,  1.  28,  «  forons  ».  Lis.  foron, 

P.  78,  1.  21,  «ma».  Lis.  »><«  (=  miega), 

P.  70,  1.  21,  «  cl  tes  an  auzan  cossol  tes  fabres  ».  Supprimez  le 
second  tes  et  lisez  el  tes  an  auzan  cossol  fabres. 

P.  80,  1.  20,  «foras  gitat.  K  que  els.. .  »  Lis.  foras  gitat,  e  que 
els 

P.  80, 1.  6,  «  le  ».  Lis.  lo. 

P.    100,  1.  1.  L'an  miii  e  xv  .  Lis.  Va»  miiïi«  e  xv 


Le  Gérant  responsable  :  E.  Hamkltn. 


i 


LA  LEGENDE  DE  BOILEAU 


Je  me  plais  à  relire  Boileau,  pourquoi  craindre  de  Tavouer? 
Comme  critique  je  Taime  beaucoup,  comme  poète,  je  l'estime 
encore  plus,  car  dans  les  parties  où  il  excelle  il  se  place  au 
rang  des  meilleurs.  Ses  flatteurs,  au  XVII®  siècle,  disaient 
qu'il  avait  donné  autant  de  chefs-d'œuvre  que  d'ouvrages  *  ; 
il  faut  bien  rabattre  de  cet  éloge  emphatique  :  mais  toutes 
ses  œuvres,  ou  du  moins  presque  toutes,  renfei'ment  des 
morceaux  exquis,  modèles  durables  de  notre  langue,  expres- 
sion vivante  et  pittoresque  de  notre  humeur  et  de  notre  es- 
prit. Son  flair  est  d'une  sensibilité  surprenante  ;  un  solitaire 
d'Egypte,  reconnaissait,  dit  la  légende,  un  hérétique  à  la 
seule  odeur  ;  lui  sent,  pour  ainsi  dire,  dès  qu'ils  l'approchent, 
les  auteurs  médiocres,  les  plats  rimeurs,  les  écrivains  affectés. 
D'autre  part,,  son  Art  poétique,  malgré  les  lacunes,  les  er- 
reurs et  les  injustices  qu'on  peut  y  signaler,  est  une  œuvre 
magistrale,  où  fourmillent  des  vers  faits  de  main  d'ouvrier, 
où  les  principes  essentiels  du  bon  sens,  du  goût  et  de  la  raison 
se  trouvent  formulés  avec  un  relief  original  et  inoubliable. 

Boileau  figure  donc,  à  mes  jeux,  dans  un  rang  très  hono- 
rable à  côté  de  ses  grands  contemporains,  et,  comme  il  le  dit 
lui-même,  a  droit  «de  se  mettre  de  la  partie  ^  »  :  seulement, 
s'il  ace  droit,  il  en  use  à  l'excès,  jusqu'à  l'outrecuidance  ;  il 
se  prt^sente  à  la  postérité  comme  ayant  seul  endoctriné  son 
siècle,  dirigé,  sinon  formé,  les  écrivains  de  génie  qui  en  font 
la  gloire.  A  l'entendre,  ils  lui  doivent  tous  quelque  chose  de 
leur  mérite  et  de  leur  succès;  lui  ne  doit  rien  à  personne, 
mais   est  le  créancier  de  tout  le  monde.   Resté  le  dernier 

*  Mercure  gâtant,  Dec.  16"^,  p.  224. 

'  Ce  grand  homme  (Molière)  l'emporte  beaucoup  sur  Corneille,  sur  Racine 
et  sur  moi,  car,  ajoutait- il  en  riant,  il  faut  bien  que  je  nae  mello  de  la  partie. 
Anecdotes  iittéraires,  nouvelle  édit.  Paris,  1752,  t.  ii,  p.  46  et  47. 

T03IE  IV  DE  LA  QUATRIÈME  SÉRIE.—  Octobrc-Novembre-Décenibre  1890.        31 


4^.  L\    I.h'iEM.'E    I>E    i;0:LEAU 

■'•^2  b-^î'-ï  es.'-riré  •.'::  vîit  i..iî'S!i'é  le  iviTLe  îe  Lou:>  XIV.  ix  a 
f'r'd:.  ]:  .-•:•::  roi»:;  r  !.;:>,-  inesurr?.  Soi:  •'.  ;";'.  ooa;:i*u:ii:ue  -.lirecte- 
TLf::.*.  avrr;  i»;  l'ùblic,  >  it  i.:i"ii  i'f îirreiîei.ne  ou  corresponde 
avoo  *'--•:  f.i:i.ii:ei'«,  Morieiieiiuv,  livo<se\ie,  Marais.  J.-B.  Rous- 
.s*-aîj.  .e*  liis  ci»-'  Raci:i»?.  il  tr^n-i  n:iturel!eme:.t  a  ramener  à  lui, 
coUàiùK-  ix  un  Cintre,  '.:<  ►jvt'iieniehts  litrt'Taiî'es  de  son  temps. 
La  joie  'ju'ii  éprou.  uii  ii  ro*.  ivre  ainsi,   parle  souvenir.au 
rfji.ieu  'Jun»;  ^'ioii-u<'-'   «Ji/Oiii-^.  ijtait   «ans  doute  très   légi- 
Tif/i",  et  persoriM»:  ue  iui  ropio.hera  d'avoir  répété,  en  par- 
Ihii»  de  «  '.e  siccie  fortuné  »,  les  nïOT<  d'Enée  :  a  El  moi  aussi 
j'y  eu?    lin»;  jrran  i»?  purt».  tf  (quorum  pars  magna  fui.  Mais 
a^\arjT  a  jn^^er  <e<  amis  et  iui-njênje  il  a.  défaut  ordinaire  aux 
vieiiiard-i.  un   peu   mis  dan^'  l'omlne  et  diminué    les  autres, 
tandis  qu'il  se  donnait  une   importance   hors   de  proportion 
avec  i'exîi';te  ré;diié.  N'est-ce  pas  le  cas  de  dire  avec  le  pro- 
verbe espa^rnol  :  Parfe  yicolas ,  para  si  io  mas  .'Nicolas  fait 
les  parts,  il  pr«jn  i  pour  lui  la  plus  grosse? 

Le  mal  ne  sei-air  pas  grand  si  ces  prétentions  séniles  étaient 
restées  sans  écho,  si  la  postérité  n'avait  point  aveuglément 
accepté  ces  confidences   avantageuses.    Par  malheur,  elles 
n'ont  jamais  été  discutées   sérieusement,    et,  depuis    deux 
siècles,  amis  et  ennemis  de  Boileau  l'ont  cru  sur  parole.  A 
Tenvi,  les  critiques  et  les  historiens  de  la  littérature  ont  redit 
et  commenté  sur  tous  les  tons,  en  l'exagérant  encore,  cette 
assertion   placée   en  tcte   d'une  édition   de  VArt  poétique: 
«  C'est  à   M.  Despréaux  principalement  que  la  France  est 
redevable  de  cette  justesse  et  de  cette  solidité  qui  se  font 
remarquer  dans  les  ouvrages  de  nos  bons  écrivains  *.  n 

Et  comme  si  l'auteur  de  l'ArZ/Jo^/egMe  représentait  à  lui  seul 
toute  Técole  française,  V.  Hugo  a  écrit  cette  boutade  cé- 
lèbre : 

«  Les  autres  peuples  disent  Homère,  Dante,  Shakespeare, 
nous  disons  Boileau  ^.  » 

*  Avertissenvmt  de  Vauteur  des  Remarques,  sw  l'Art  poétique,  CEuvres 
de  M.  Boileau  Despréaux  avec  des  éclaircissements  historiques  donnez  par 
lui-même,  A  Genève,  chez  Fabri  et  Barillon,  1716,  ia-4o,  t.  I,  p.  2^« 
L'éditeur  et  l'auteur  des  remarques  est  Cl.  Brossette. 

2  Orientales,  préf.  de  1829;  édit.  Haclielle,  in-lS,  1882,  p.  7. 


i 


LA  LEGENDE    DE    BOILEAU  451 

A  son  tour,  et  tout  en  opposant  l'éloge  à  ces  paroles  dédai- 
gneuses, Sainte-Beuve  adoptait  et  résumait,  dans  quelques 
lignes  bien  connues,  la  légende  trop  promptement  accréditée 
parmi  les  contemporains  de  Despréaux  et  trop  facilement 
admise  par  leurs  descendants. 

«  Saluons  et  reconnaissons  aujourd'hui  la  noble  et  forte 
harmonie  du  grand  siècle.  Sans  Boileau  et  sans  Louis  XIV... 
que  serait-il  arrivé?  Les  plus  grands  talents  eux-mêmes 
auraient-ils  rendu  également  tout  ce  qui  forme  désormais 
leur  plus  solide  héritage  de  gloire?  Racine,  je  le  crains,  aurait 
fait  plus  souvent  des  Bérénice.  La  Fontaine  moins  de  fables 
et  plus  de  contes;  Molière  lui-même  auraitdonné  davantage 
dans  les  Scapins  et  n'aurait  peut-être  pas  atteint  aux  beau- 
tés sévères  du  Misanthrope,  En  un  mot,  chacun  de  ces  beaux 
génies  aurait  abondé  dans  ses  défauts.  Boileau,  c'est-à-dire 
le  bon  sens  du  poète  critique,  autorisé  et  doublé  de  celui 
d*un  grand  roi,  les  contint  tous  et  les  contraignit,  par  sa  pré- 
sence respectée  fi  leurs  meilleures  et  à  leurs  plus  grandes 
œuvres  *.  » 

Non  pas  que  cette  page  brillante  ne  présente  que  de  fausses 
couleurs  :  mais  Timagination  du  critique,  sur  des  renseigne- 
ments provenant  presque  tous  de  Boileau  seul,  exagère  singu- 
lièrement le  rôle  et  l'action  de  ce  judicieux  écrivain.  Avant 
de  croire  Tun  et  l'autre  aussi  prépondérants,  il  fallait  exami- 
ner avec  plus  d'attention,  non  pas  la  bonne  foi,  mais  l'autorité 
du  témoignage  que  le  poète  satirique  se  rend  à  lui-même.  De 
tous  les  classiques  de  son  temps,  il  est  certainement  celui 
dont  le  moi  se  met  le  plus  en  dehors.  Jeune  et  presque  à  ses 
débuts,  il  a  dans  son  infaillibilité  littéraire  une  confiance  in- 
trépide :  dans  son  âge  mûr  et  dans  sa  vieilles.'^e,  il  y  croit 
plus  robustement  encore.  Pourquoi  d'ailleurs  en  douterait-il? 
N'entend-il  pas  répéter  à  satiété  autour  de  lui,  par  les  hom- 
mes les  plus  sérieux  qu'il  est  le  grand  justicier  du  Parnasse, 
le  souverain  arbitre  du  Pinde^  ? 


1   Sainte-Beuve,  Causeries  du  lundi;  Z^  édit    t.  VF,  p.  512. 

'  Expressions  deRollin,  Ode  in  expugnationem  Namnrcœ  ex  gallica  Ode 
Nicolai  B***  D**'  in  latinam  conversa.  Paris  Thierry,  1693,  in-l6  de  27 
pages. 


-.5:^  I.A    I.ttiENHK    HE    BOILEAL* 

I/a'it^riir  'les  chœurs  (V£*fh^r  ei  r\'At/talie  u"ava:i-i;  j/as 
app.au  li  rt  .'olo  su:- la  i-rise  «ie  Nani'ir  -  e:  trois  des  meiî'.eurs 
po»":rf;s  !a*iri.s  'ia  Terii|.s  n*avai:-rit-:!s  j.as  j  r:>  ce'.îe  froiJe  er 
inintelIifL'eiite  «joiitre:açoii,  ji -u:-  un  véritable  srécimen  de  la 
poéjîie  pindari'jue:  no  .s*iit;tient-i:s  pas  évertues,  à  Tenvi, 
à  la  iraluire  «ans  la  Iîiîjjiiu  d'Horace?  -  Aussi  que  d'orgueil, 
tantôt  dyco'iV'jrt,  tanr-V  •ajhé  <ous  les  apparences  d'une  dé- 
fi an c e  ni o  i  o  s t e ,  '^l  r.  i ;  <  <  o n  /:'/> îlre  n  s e*  v^rs  : 

J'allai  fVnn  pns  hardi  par  iiioi-mvn.o  gui-;»?. 
Kt  do  rnm  seul  ir*';n\e  en  rn.iroliaii:  se?.fîidé, 
Stiidi';  ixariiîiteiir  et  'ie  Perse  et  d'H-jrace, 
Assez  pr;s  'le  Régnier  in'asseùir  su:-  le  Parnasse, 

Qrio  d'orgueii  encore  dans  ces  réflexions  mélancoliques  : 

Nos  lieaiix  joiir.s  ^ont  finis,  n>s  honneurs  sont  passés  ! 
Dans  jieu  vous  allez  voir  vos  froides  rêveries 
Kx'iiter  dri  public  les  justes  moqueries, 
Kt  hinv  auteur,  jadis  à  Régnier  préféré, 
A  Piii':hêne,  à  Liniore,  à  Ferrin  comparé  •*. 

La  conscience  décourageante  et  de  moins  en  moins  confuse 
de  TafFaiblissement  qu'apportait  «  la  vieillesse  chenue  m  le  ren 
dait  même  de  jour  en  jour  plus  soucieux  et  plus  jaloux  de  sa 
gloire  d'autrefois.  Il  était  désormais  le    vieillard   morose  et 
chagrin  qui, 

Toujours  plaint  le  présent  et  vante  le  passé. 

Ne  vivant  plus  que  de  ses  souvenirs,  à  mesure  qu'il  avan- 
çait en  âge,  il  se  grandissait  avec  son  temps,  à  ses  propre» 
yeux. 

En  vérité,  le  siècle  et  le  poète  ont  été  grands  ;  mais  ce  der- 
nier vivait  dans  une  illusion  certaine,  lorsqu'il  s'attribuait  sur 
ses  compagnons  de  gloire  une  influence  si  prépondérante.  Son 
action  est  indéniable,  elle  fut  môme  prodigieuse  et  décisive, 

^  Lettre  de  Racine  à  Boileau  d'i  9  juin  1693.  ~  CEuvres  de  Boileau,  éd. 
Gidel.  Paris,  Garnier  frères,  187H,  t.  IV,  p.  380. 

«  Roliin,  Fraguier,  Lenglet.  Œuvres  diverses  du  S'D**'.  Paris,  Thierry, 
1694,  in-12,  t.  II,  3«  partie. 

3  Épîire  X,  V.  99  à  102  ;  —  32  à  36. 


1 


LA  LEGENDE   DE  BOILEAU  4  53 

mais  elle  s'exerça  principalement  sur  ceux  qui  vinrent  après 
lui.  Pédagogue  en  titre  de  la  postérité,  il  le  fut  à  peine  de  son 
temps,  et  moins  encore  des  écrivains  avec  lesquels  il  a  vécu. 

Là,  comme  ailleurs,  la  question  de  date  et  de  succession 
s'impose,  pour  empêcher  les  confusions.  En  Tétudiant  avec 
soin,  on  arrive  à  se  convaincre  de  deux  faits  également  cer- 
tains. D'abord  le  goût  de  Boileau  fut  lent  à  se  former,  et  se 
développa  sous  des  influences  qu'il  oublia  et  méconnut  plus 
tard,  et  dont  il  ne  parlait  plus  dans  sa  vieillesse.  En]  second 
lieu,  si  son  autorité  s'étendit  avec  sa  renommée,  cllejne  fut 
pas,  à  beaucoup  près,  aussi  considérable  sur  ses  amis  qu'on 
le  croit  communément. 

En  deux  mots,  il  est  fort  redevable  à  ses  grands  contempo- 
rains, et  ceux-ci  sont  loin  de  lui  devoir  autant  qu'il  a  bien 
voulu  le  dire. 

I.  —  DÉBUTS  DE  Boileau,  1658-1663 

Boileau  s'imagina  de  très  bonne  heure  que  le  sens  critique 
avait  chez  lui  devancé  l'âge,  que  le  goût,  pour  ainsi  dire,  était 
inné  dans  son  esprit.  Déjà  dans  la  satire  IX,  son  chef-d'œuvre 
en  ce  genre,  il  disait  de  la  muse  satirique: 

C'est  elle  qui  m'ouvraut  le  chemin  qu'il  faut  suivre. 
M'inspira  dès  quinze  ans  la  haine  d'un  sot  livre  *. 

A  cet  âge,  encore  si  voisin  de  l'enfance,  la  haine  existait 
peut-être,  le  discernement  n'était  pas  venu.  La  preuve  n'en  est- 
elle  pas  dans  cet  aveu,  échappé  beaucoup  plus  tard:  «Comme 
j'étais  fort  jeune  dans  le  tempsquo  tous  ces  romans,  tant  ceux 
de  Mademoiselle  de  Scudérj,  que  ceux  de  la  Calprenède  et  de 
tous  les  autres  faisoient  le  plus  d'éclat,  je  les  lus  ainsi  que  les 
lisait  tout  le  monde,  avec  beaucoup  d'admiration  et  je  les 
regardai  comme  des  chefs-d'œuvre  de  notre  langue.  Mais 
enfin  mes  années  étant  accrues,  et  la  raison  m'ayant  ouvert 
les  jeux,  je  reconnus  la  puérilité  de  ces  ouvrages*.» 

Boileau  se  garde  bien  de  dire  ici  que  la  raison  n'a  pas  été 

'Sat.IX,  V.  279,  280. 

«  Ed.  Gidel,  t.  m,  p.  176,  177. 


454  r.A    r.EGKXDE    OK    BOILEAU 

seule  à  lui  ouvrir  les  yeux  :  il  omet  ou  bien  il  oublie  des  cir- 
constances extérieures  qui   aidèrent  puissamment  l'effet  des 
années.  Quand  le  jeune  Nicolîxs  Despréaux  naissait  à  la  poésie 
dans  la  poudre  du  greffe,  rôcole  du  naturel  et  du  bon   senst 
dont  il  devint  bientôt  le  poite-diajïcau    et  dont  il  ne   devait 
pas  tarder  à  se  proclamer  lo  chef,  n'était  plus  à  fonder.    Elle 
avait  fait  dans  les  l^rrrintHca   riflicu/es  ses   débuts  éclatants  : 
elle  les   continuait,  avec  un  bruit  tous  les  jours    plus  reten- 
tissant, dans  les  pièces  de  Molière.  Kt,  tandis  que   recoller, 
qui  s'essayait  à  traduire  la  troisième  satire  de  Juvénal  et  re- 
mettait vingt  fois  son  ouvrage  sur  le  métier,  restait  tout  à 
fait  inconnu,  le  nom  du  comédien  de  génie,  que  ses  ennemis 
s'efforçaient  en  vain  d'abaisser  au  dessous  de  l'Orviétan  et  de 
Scaramouche,  allait  déjà  par  de  là  «Rome»  *.  Boileau  s'at- 
tardait encore  à  la  satire  morale  quand  Molière  avait  livré  et 
gagné  des  batailles  pour  le  naturel  et  le  bon  sens.  Ses  comé- 
dies, ses   farces  môme,  œuvres  de  combat,  pleines  d'actua- 
lité et  d'enseignements,  révélaient  au  poète  naissant  les  con- 
ditions auxquelles  peuvent  durer  les  ouvrages  de  l'esprit.  Et 
ces  conditions,  un  autre  subitement  éclairé,  lui  aussi ,  les 
avait,  dès  Tannée  16(31,  exprimées  et  résumées  dans  deux  vers 
simples  et  sans  prétention: 

Et  désormais  il  ne  faut  pas 
Quitter  la  nature  d'un  pas  *. 

Et  non  seulement  les  pièces  de  Molière  éclairèrent  de  cette 
vive  lumière  de  l'exemple  le  jeune  satirique,  encore  hésitant 
et  embarrassé,  mais  elles  lui  inspirèrent  plus  de  confiance  en 
lui-môme,  elles  le  fixèrent  sur  la  nature  et  la  destination  de 
sentaient.  Non  pas  qu'il  les  ait  attendues  pour  faire  des  vers, 
encore  moins  que  les  Précieuses  ridicules,  ou  même  Y  École  des 
femmes  aient  été  la  cause  de  la  rectitude  de  son  esprit  et 
de  la  solidité  de  sa  raison.  Nicolas,  dès  le  collège,  est  porté 
vers  la  satire.  Écolier,  nous   dit  un   de   ses  contemporains, 

1  La  FoDtaine,  lettre  à  Maucroir,  22  août  1061 . 

2  Ibidem.  Il  résuUe  des  vers  qui  précèdent  que  l'admiration  de  La  Fon- 
taine pour  Moiière  était  déjà  ancieune.  Il  dit  à  Mancroix:  «  Te  souvient-il 
bien  qu'aw^/'e/b<s,nous  avons  conclu  d'une  voix  qu'il  allait  ramener  en  France 
le  bon  goût  et  Taii'  de  Téreuce?» 


LA  LEGENDE  DE  BOILEAU  4  55 

Favocat  Guéret,  il  a  toujours  à  la  bouche  les  noms  d'Horace, 
de  Perse  ou  de  Juvénal  ^  Si,  comme  tout  bon  élève  de  rhé- 
torique, il  met  un  moment  une  tragédie  sur  le  métier'  :  le 
genre  dramatique  ne  saurait  l'arrêter  longtemps  ;  il  aban- 
donne sa  pièce  aux  premiers  vers,  et  se  tourne  avec  ardeur 
vers  rimitation  de  ses  poètes  favoris.  Presque  à  la  sortie  des 
classes,  sa  verve  naissante  produit  sa  première  saillie  dans 
une  épigramme  contre  la  puce  : 

Du  repos  des  humains  implacable  ennemie^. 

A  peu  près  vers  la  même  époque,  une  dejses  nièces  meurt 
à  dix-huit  ans  entre  les  mains  d'un  charlatan  de  la  Faculté, 
et  voilà,  si  Ton  en  croit  ses  souvenirs,  sa  colère  allumée  con- 
tre un  faux  Esculape,  à  cervelle  ignorante  : 

Oui,  j'en  fis  dès  quinze  ans,  ma  plainte  à  l'Univers. 
Et  l'ardeur  de  venger  ce  barbare  homicide 
Fut  le  premier  démon  qui  m'inspira  des  vers. 

malheureusement  sa  fureur  juvénile  contre  les  médecins  n'est 
qu'une  fiction  de  son  âge  mûr  ;  il  avait  plus  de  quinze  ans  * 
quand  il  eut  à  pleurer  sa  nièce,  et  le  sonnet  dans  lequel  il 
exhalait  alors  sa  douleur  était  purement  élégiaque  et  pas  du 
tout  satirique. 

C'est,  au  contraire,  une  satire  que  la  pièce  de  vers,  dans 
laquelle  il  s'arme  en  guerre  contre  les  Anglais  et  leur  montre 
la  main  d'une  jeune  bergère, 

*  (îuérel,  la  Promenade  de  Saint-Cloud,  dans  les  Mémoires  de  Brueys. 
Pars,  Thomas  Hérissant,  1751,  t.I,  p.  282-283. 

*  Si  l'on  en  croyait  les  échos  de  Boileau,  l'écolier  n'aurait  pas  attendu  sa 
rhétorique  pour  faire  une  tragédie.  Il  l'aurait  entreprise  pendant  ses  basses 
classes  qu'il  fit,  dit-il,  au  collège  de  Saint-Jean  de  Beauvais.  Bécréations  lit- 
téraires (de  Cizeron-Ri val),  Lyon,  17o6,  p  197.  M.  Berriat  Saint-Prix,  Essai 
sur  Boileau^  no  16,  croit  qu'il  était  en  quatrième,  quand  il  entreprit  sa  tra- 
gédie (1647).  Il  aurait  alors  eu  onze  ans.  Mais  Boileau  a  fait  ses  basses  classes 
à  Harcourt  et  non  à  Saint-Jean  de  Beauvais.  Il  y  a  donc,  au  moins  dans 
Taoecdote,  soit  une  inexactitude  de  celui  qui  la  rapporte,  soit,  ce  qui  est  fort 
possible,  pn  défaut  de  mémoire  de  la  part  de  Boileau  lui  même. 

3  Ed.Gidel,  t.  III,  Poésies  div.,  XXIV,  p  52. 

*  Ou  voit  qu'il  aime  à  faire  dater  sa  vie  littéraire  de  cet  âge  de  quinzeans. 
L'histoire  des  deux  sonnets  sur  la  mort  d'une  parente  est  un  exemple  du 


4  5fi  I.A   I.KftKNDK    DE    HOII.KAU 

Konvci's.int  tons  leurs  bataillons*. 

Ni  rôpi<rrainmo  sur  la  puce,  ni  le  sonnet  sur  la  mort  de 
sîi  parent.'  ',  ni  l'o.lo  niômo  contre  les  Anglais  n'annonçaient 
co  ijifil  (IcviiMidrait  plus  tard  :  mais  ces  pièces  dont  il  était 
satisfait,  puis.ju'il  los  laissait  é<:liap[»er  de  son  porte-feuille, 
nianifVstaJLMit  claironuMit  sa  vocation  littéraire.  Il  n*osait  pas 
eni^oro  s'v  livrer  «•onipU'îteinont,  car  son  père,  ayant  sur  lui 
crautros  viséos,  \o  destinait  au  barreau  et  Tavaitfait  recevoir 
avo(^aT  le  4  déccnibro  1  ♦».")«).  Nicolas  ne  parut  au  milieu  des 
honinios  do  loi  (|ne  pour  montrer  son  aversion  de  la  chicane 
et  ainuseï'  los  clorcs  du  i)alais  par  ses  malices^.  La  mort  de 
son  pôro,  arrivée  lo  2  février  1G57,  le  laissa  libre  de  s'ndonner 
avec  plus  d'entrain  à  ses  goûts  poétiques.  Logé  choz  son  frère 

pp[i  (It>  [tnVision  c)>ronolo^M<|U(' d^.s  ronBeignemenls  fournis  par  Boileau.  Il  ne 
s*a{;il  point  iri  dViT  nrs  commises  par  Hrossette  ou  par  un   autre    intermé- 
(iii'iini,  tout  cti  «{lit*  l'on  i^uil  sur  cps  pii';ci's  «'mane  directement  de  Tau  leur  lui- 
môm*'.   Or,    on  premier  li''u,   dans   l«^s   doux  Ieltro«»  qu'à  cinq    ans  d'inter- 
terva'le,  !<;  15  juill»*!.  1702,  et  1^21  novembre  1707,  il  écrivit  à  ce  sujet,  il  ne 
semble  pas  iraccord  avec  lui-même  sur  la  date  du  second  sonnet.  £o  1707, 
il  afflrmo  qu'il  Ta  rofiil  ><  dans  le  temps  de  sa  plus  grande  force  poétique»8n 
1707,  il  pnUend  l'avoir  coniposé  il  y  a  quinze  ou  Si'ize  ans,  c*est-à-dire  vers 
1691.11   avait    à   colto   date  ciDqnanlP-cintf  ans;   était-ce   bien  le  temps  de 
sa  plus  grande  forcti  poétique  ?  Apn>s  toul/J'auteur  de  YOde^sur  la  prife  de 
Namur,  pouvait  le  croire.  En  second  lieu,  dans  le  sonnet  raccommodé,  non 
seulement  il  dénature,  comme  nous  l'avons  vu,l«'  caractère  du  sonnet  primitif, 
mais  il  donne  à  celte  o'uvre  une  rJate  Iri's  inexacte.   Sa  nièce  avait  dix-huit 
ans,  elle  était  environ  de  même  ûge  que  lui.  De  plus,  Berriat  Saint- Prix  (tome 
IH.p.  4r)0,  note  3)  semble  établir  qu'elle  se  nommait  Anne  Dongois    et  était 
née  le  20  juin  ir^^7.  A  réfiocjne  de  sa  mort,  arrivée  vers  1(kS5,  son  oncle  au- 
rait donc  eu  dix-neufanset  non  quinze.  Que  serait-ce  sMl  s'agissait  de  sa  sœur 
Marie,  la  seule  dont  Berriat  ait  trouvé  l'acte  de  décès,  et  qui,  née  le  3  sep- 
tembre 1640,  serait  morte  le  18  septembre  1G60?  Despréaux  aurait  eu  alors 
près  de  vingt-quatre  ans,  ce  (]ui  s'accomoderait  assez  bien,  avec  la  booté  re- 
lative du  sonnet  publié  en  se[iLeml)re  100,3,  <ldns  les  Délices  de  la  poésie  ga- 
lante  des  plus  célèhrea  mdeurs  de  ce  temps,  Paris, \Ribou,  in-l2,  p.  lUS. 

*  Je  n'avais  encore  que  dix-huit  ans,  quand  je  fis  cette  ode,  mais  jeM'ai 
raccommodée.  Boileau,  1713.  Éd.  Gidel,  Odes,  t.  111,  p.  27. 

2  Ed.  Gide!,  t.  III,  Poèsiex  diverses,  VI  et  Vil,  p.  36  et  37. 

*  Dans  sa  première  jeunesse,  (il)  n'avoit  point  de  plus  agréable  exercice  que 
de  faire  rire  les  clercs  du  palais,  ii/fponsrà  VAverfissenieyit,  qui  a  été  afouté 
à  la  nouvelle  édition  des  Œuvres  de  M.  Despreaux,  éd.  Brossette  1716, 
t.  II,  p.  409. 


/. 


^Irt  .«'JL  V  ■  c: 


LA  LÉGENDE  DE   BOILEAU  457 

Jérôme,  le  greflSer,  au  dessus  du  grenier,  dans  une  guérite 
exposée  à  tous  les  vents,  il  dédaigna  Tutile  liasse  dont  il  au- 
rait pu  charger  son  bras  et  ne  songea  plus  qu'au  Parnasse  : 

La  famille  en  pâlit  et  vit  en  frémissant 
Dans  la  poudre  du  greffe  un  poète  naissant  * . 

La  famille  pourtant  devait  être  faite  à  de  pareilles  surpri- 
ses. Il  y  avait,  en  effet,  déjà  quelques  années  que  Gilles,  frère 
de  Nicolas,  et  son  aîné  de  cinq  ans  et  demi. 

Courait  du  bel  esprit  la  carrière  épineuse. 

Comment  ne  pas  penser  que  la  fortune  littéraire  de  ce 
«  petit  Boileau  »,  ainsi  que  rappelaient  ses  contemporains, 
avait  excité  la  verve  et  encouragé  les  espérances  de  son 
cadet  ?  Malicieux,  effronté,  ne  doutant  de  rien,  se  croyant 
également  propre  à  la  prose  et  aux  vers,  il  s'était  attaqué 
follement  à  Ménage,  avec  un  succès  étourdissant.  Ses  écrits, 
au  témoignage  de  Tallemant,  se  vendaient  comme  du  pain. 
Chapelain  en  avait  peur,  le  courtisait  lâchement  et  devait,  en 
1659,  favoriser  son  entrée  à  l'Académie  française,  à  l'âge  de 
vingt-huit  ans^.  C'était  précisément  l'époque  où  le  jeune 
Despréaux  s'ossavait  dans  une  œuvre  sérieuse.  Les  deux 
frères  habitaient  alors  sous  le  môme  toit,  Tun  au  grenier, 
l'autre  dans  la  mansarde,  et  vivaient  encore,  tout  le  prouve, 
dans  les  termes  de  l'amitié  fraternelle.  Le  plus  jeune  doit  à 
Juvénal  sa  i)reniière  œuvre  d'un  peu  longue  haleine,  il  s'ap- 
plique à  tourner  en  français  la  troisième  satire  du  poète  à 
la  mordante  hyperbole,  et  fait  à  son  exemple  des  adieux 
déclamatoires  à  une  ca[)itale  corrompue. 

Cette  pièce  qui  commença  sa  renommée,  il  mit  longtemps 
à  la  composer,  plus  longtemps  encore  à  la  polir  et  à  la  repo- 
lir. Il  l'entreprit  à  ce  qu'il  paraît  en  1658,  à  l'âge  de  vingt- 
deux  ans,  il  en  acheva  peut  être  la  première  ébauche  en  1660, 
mais  il  ne  la  fit  imprimer  lui-même  qu'en  1666,  et^dans  l'in- 

•  Épitre  K,  V.  115  et  116. 

2  Voir  Tallemant,  t.  V.  Ménage,  p.  235,  238,  240.  —  t., ni  Chapelain  p. 
276,  278.  —  Lettres  de  Jean  Chapelain,  t.  ii,  p.  37  et  suiv.,  lettres  à  Hein- 
sius  du  lor  mai  1659.  —  Les  frèrts  de  Boileau- Despréaux,  par  M.  Gaston 
Bizos,  Aix,  18S0,  p.  37  à  101. 


4r,fi  r.A   r^EGENUE  DE    BOILEAU 

î<^rrvalie  fie  o--?  huit  rir.n»'os.  la  refon  Ut  plusieurs  fois  *.  Encore 
';et-.e  r»i'Jy  rMon  -i  fi-aV;ii'.I''e  no  fur-e'.le  pas  définitive  et  reçut- 
f:V.^:  Mans  \fi<  ♦-■•iifioiis  sniv.iriu-.s  «les  rao  lifi.-ations  notables.  Il 
rravai»  ji?ij?.  as5iir».*-r-on.  uîil»  irran-le  estime  pour  cette  pro- 
ducîioii  T,trit  i»:  foi?  i..-niarii'e.  Fourrant  elle  révélait  déjà, 
niémo^iansce  'in'on  iiout  e:oir»?  s-jn  'i-rar  primitif,  les  principales 
f|»jaiî';<  du  Jf*une  safirique  :  elle  nïontrri't  surtout  Tintelli- 
;:en  :<-•  avoc  laf|uel!t:r  il  saurait  user  des  Anciens  II  pouvait  dire 
prosquo  avec  autant  d'assurance  que  La  Fontaine  : 

Mon  irnitatiou  n'est  point  un  esclavage. 

li  n'empruntait  point,  en  eli'ot,  au  hasard  et  ne  traduisait 
p;is  srMvilemont,  mais  il  choisissait  et  adaptait  ;  il  savait 
donner  un  air  fran<;;ais  aux  pensées  antiques.  Avec  une  ori- 
;:inaliré  piquante  de  tour  et  d'expression,  il  accommodait  à  nos 
usHf^os,  à  notre  esprit,  comme  aux  circonstances  présentes, 
ce  que  son  modèle  «  avait  dit  en  latin.  ^))  Et  non  seulement  il 
se  distin^ruait  de  la  foule  des  imitateurs  stériles  par  ce  don 
d'assimilation,  mais  il  s'en  séparait  encore  plus  par  le  soin 
scrupuleux  qu'il  apportait  à  la  forme.  Il  aime  déjà  le  travail 
difficile,  et  la  sévérité  que  dans  la  suite  il  imposera  aux  au- 
tres, il  Ta  dès  ce  moment  pour  lui-même.  Le  désir  de  la  per- 
fection le  talonne  et  le  tourmente.  Aussi,  ne  montre-t-il  qu'en 
trcm])lant  ces  vers  forgés  avec  tant  de  peine  ;  il  semble  ne 
les  communiquer  à  ses  amis  les  plus  intimes  qu'à  son  corps 
défendant.  Toutefois,  s'il  aime  à  se  faire  prier,  il  aime  aussi 
qu'on  le  prie  ;  car,  au  fond,  il  a  conscience  de  son  mérite,  il 
sait  do  plus  qu'il  fait  valoir  son  ouvrage  en  le  récitant.  Per- 
sonne ne  le  lirait  avec  autant  d'art  et  d'amour;  il  lui  donne 
du  prix  par  le  seul  prestige  de  sa  voix  claire  et  sonore,  par 

*  I-a  dHle  est  difficile  à  dutennincr,  car  les  témoignages  varient.  L'édition 
de  1718,  dont  les  notos  paraissent  être  de  Boileau  lui-même,  donne  Tannée 
16r)8,  Tédition  de  1740  porte  1G60.  La  première  indication  semble  la  vraie. 
Despréaux  dans  une  noteécrile  de  sa  main,  et  qui  figure  à  la  suite  de  sa  Cor- 
rpspo?idancc  avec  lirofisefte  (Éd.  Laverdet.  p.  i70)  dit  «  Ma  satire  estoit 
faicte  plus  de  six  ans  avant  la  Chambre  de  Justice.  »  Cette  Chambre  fui  éta- 
blie on  lfi(>5. 

^  Snf.  IX,  y.  i'Z>). 


LA  LEGENDE    DE    BOILEAU  459 

le  ton,  par  le  geste,  par  une  mimique  intelligente  et  sentie'; 
Si  bien  qu'à  force  de  lectures  arrachées  en  apparence  à  sa 
modestie,  il  arrive  insensiblement  à  sortir  de  son  obscurité. 
Vienne  enfin  un  auditeur  plus  indiscret,  plus  remuant,  plus 
répandu  que  les  autres,  cet  audacieux  se  fera  le  prôneur  de 
Tœuvre,  en  prendra  des  copies,  la  colportera  partout  et  finira 
par  la  lancer.  De  sorte  que,  bien  avant  d'être  imprimé,  le 
poète  entendra  son  nom  répété  de  bouche  en  bouche,  par  les 
uns,  avec  enthousiasme,  par  les  autres,  avec  indignation, 
mais  toujours  avec  le  bruit  et  le  retentissement  des  choses 
qui  font  sensation.  Cela  se  passa  de  la  sorte  pour  la  première 
satire,  et  Tannée  1662  vit  commencer  la  renommée  de  Nico- 
las*. Mais  laissons-le  parler,  sinon  lui-même,  au  moins  par 
la  voix  de  celui  dont  il  a  fait,  dans  sa  vieillesse,  le  principal 
confident  de  sa  vie  littéraire. 

«  Il  ne  faisait  pas,  dit  Brossette,  dans  ses  Hemarques  sur 
la  première  satire,  grand  cas  de  cette  pièce  A  peine  avait-il 
pu  se  résoudre  à  la  lire  à  quelques  amis  particuliers,  lors- 
qu'un jour  Tabbé  Furetière,  qui  avait  été  reçu  depuis  peu  à 
l'Académie  française,  rendit  une  visite  au  frère  de  M.  Des- 
préaux,  qui  était  son  ami  et  son  confrère.  Comme  M.  Boi- 
leau  l'académicien  était  sorti,  Furetière  s'arrêta  avec  M.  Des- 
préaux et  lut  cette  satire.  Il  en  fut  fort  content,  et,  quoiqu'elle 
fût  assez  éloignée  de  la  perfection  à  laquelle  l'auteur  Ta  por- 
tée depuis,  il  convint  de  bonne  foi  qu'elle  valait  mieux  que 
toutes  celles  qu'il  avait  faites  lui-même.  Il  encouragea  ce 
jeune  poète  à  continuer,  et  lui  demanda  même  une  copie  de 
la  nouvelle  satire,  qui  devint  bientôt  publique  par  les  autre 
copies  qu'on  en  fit.  Cette  satire  était  alors  dans  un  état  bien 
différent  de  celui  auquel  l'auteur  la  mit  avant  de  la  faire  im- 
primer, car  de  212  vers  qu'elle  contenait,  il  n'en  a  conservé 
qu'environ  60  :  tout  le  reste  a  été  ou  supprimé  ou  changé  ^  » 

*  Louis  Racine.  Mém.  sur  la  vie  de  J.  Racine.  Tome  I  de  Tédition  de 
J.  Racine.  Hachette,  p.  224. 

'  C*e8t  à  torique  I'oq  doone  1660  comme  la  date  de  la  publication  de  cette 
Satire.  Berriat  St-Prix  (t.  I,  p.  35,  note  1)  a  déjà  fail  remarquer  qu'elle  par- 
lait de  Mazario,  mort  le  9  mars  1661,  comme  n'existant  plus. 

3  Brossette,  «  Œuvres  do  M.  Boiieau  Desprèaux  »,  avec  des  éclaircisse- 
ments donnés  par  lui-même.  Genève,  1716.  t.  1,  p.  9. 


LA  LEGENDE    DE  BOÎLEAU  461 

maudire.  Damon,  «  le  grand  auteur  »  en  partance,  ne  se  don- 
nait pas  ce  plaisir.  Toute  sa  mauvaise  humeur  se  borne  à  rire 
du  pauvre  Colletet  crotté  jusqu'à  Téchine*,  des  sonnets  flat- 
teurs de  Pelletier^,  ou  bien  deSt-Amand,  qui  n'eut  du  Ciel  que 
sa  veine  en  partage  ^.  De  tous  les  favoris  de  la  fortune 
aveugle,  qu'il  diffame,  un  seul,  à  la  rigueur,  pourrait  être 
rangé  parmi  les  genà  de  lettres.  C'est  Barbier  de  la  Rivière, 
le  secrétaire  ambitieux  et  sans  pudeur,  qui  vendit  cent  fois 
son  maître  Gaston,  duc  d'Orléans.  Encore  ce  pédant,  dont  un 
sort  burlesque  a  fait  un  duc  et  pair*,  est  un  vil  et  méchant 
politique,  et  non  pas  un  ennuyeux  et  méchant  auteur.  Et 
quanta  Chapelain  qui  figurait  dans  l'édition  de  1666,  il  n'était 
pas,  nous  le  prouverons  plus  tard,  dans  la  composition  primi- 
tive^. La  première  satire,  dans  saforme  originelle,  appartenait 
donc  entièrement  à  la  peinture  morale,  et  le  rimeur  novice  s'y 
essayait  seulement,  sur  les  brisées  de  Juvénal,  à  pourchasser 
les  vices  et  les  travers  de  la  société,  sans  viser  encore  les  ridi- 
cules du  bel  esprit.  Du  reste,  c'est  moins  la  profondeur  de  la 
pensée  et  la  solidité  des  vues,  le  bien  fondé  des  jugements  qui 
le  distinguent  alors.  Son  originalité  consiste  surtout  dans  sa 
malice  ingénieuse  et  pittoresque  et  surtout  dans  sa  verte  fran- 
chise. Il  prend  à  partie  les  particuliers  et  non  les  ridicules,  et, 
s'il  ne  nomme  pas  encore^,  ses  victimes  sont reconnaissables: 
on  les  voit  sans  peine  au  travers  de  ses  déguisements  et  des 
allusions,  et  personne  n'y  est  trompé.  Procédé  hardi,  non 
moins  habile  que  courageux,  qui  suscita  contre  l'audacieux 

•  Satire.l.  V.  77.  Colletet,  désigné  par  une  initiale  C  dans  Tédit.  mons- 
trueuse, devient  Pelletier  dans  Tédition  authentique. 

2  Ibid.,  V.  47.  Ce  vers  ne  contient  qu'une  allusion.  Pelletier  n'y  est  pas 
nommé. 

3  Ibid.,  V.  97. 

♦  Ibid.,  V.  64. 

s  Berriat  le  fait  déjà  remarquer:  on  n'y  trouve,  dil-il,  aucun  trait  direct 
contre  Chapelain.  Essai  sur  Boileau,nri.  X\,  ri"  72,  p.  Ix. 

8  A  vrai  dire,  il  n'a  pas.  dans  sa  première  édition  de  1666  suivi  de  règle 
générale.  Tantôt  il  nomme,  tantôt  il  dcligure  un  peu,  Pucelain,  Kinaut,  Scu- 
fariy  Chassaigne,  Kautain,  etc.  D'antre  fois  il  d<;sigiie  par  un  nom  grec  ou 
latin  Arisfe  pour  Chapelain  (Sat.  IV,  v.  90).  Dans  les  éditions  subreptices  se 
produit  la  même  variété,  quoique  les  noms  ne  soient  pas  souvent  les  mômes 
que  dans  l'édition  authentique.  Le  lecteur  ne  se  laissait  pourtant  pas  dérouter. 


462  LA  LEGENDE    HE    BOILEAU 

poète  des  réclamations  furibondes  et  des  inimitiés  ardentes, 
mais  donna  une  saveur  particulière  et  un  attrait  irritant  à  ses 
malices  : 

Je  ne  sais  i-ien  nommer,  si  ce  n'est  par  son  nom. 
J'appelle  un  chat  un  chat,  et  Rolet  un  fripon*. 

Ainsi,  dès  son  premier  essai,  Boileau  déployait  sa  force 
dominante,  cette  franchise  quasi  brutale,  cet  amour  intraita- 
ble du  vrai  qui  fait  le  fond  de  son  caractère.  Plus  tard,  il 
s'en  faisait,  à  bon  droit,  son  principal  titre  de  gloire,  quand 
il  écrivait  à  Seignelay,  fils  de  Colbert  : 

Sais-tu  pourquoi  mes  vers  sont  lus  dans  les  provinces. 
Sont  recherchés  du  peuple  et  reçus  chez  les  princes  ? 
Ce  n'est  pas  que  leurs  sons,  agréables,  nombreux, 
Soient  toujours  à  roreille  également  heureux  ; 
Qu'en  plus  d'un  lieu  le  sens  n'y  gène  la  mesure. 
Et  qu'un  mot  quelquefois  n'y  brave  la  césure  ; 
Mais  c'est  qu'en  eUx  le  vrai,  du  mensonge  vainqueur, 
Partout  se  montre  aux  yeux  et  va  saisir  le  cœur  2. 

La  franchise  est,  en  effet,  la  première  et  la  plus  puissante 
recommandation  du  nouveau  satirique  ;  mais  ce  que  je  cherche 
dans  cette  production  d'essai,  sans  l'y  trouver,  c'est  le  motif 
et  la  justification  de  ses  sévérités.  Il  juge  d'instinct,  et  cet  ins- 
tinct est  ordinairement  sûr  et  d'accord  avec  le  bon  sens.  Ne 
lui  demandez  pas  la  raison  de  ses  arrêts,  il  a  prononcé,  cela 
suffit:  il  paraît  infaillible  parce  qu'il  est  décisif  et  cassant, 
parce  que  ses  coups,  bien  assénés,  portent  toujours.  Néan- 
moins, quand  on  y  regarde,  on  n'aperçoit  pas  encore  que 
son  discernement  soit  bien  formé,  qu'il  aille  au-delà  du  lieu 
commun  et  ne  s'arrête  pas  à  la  surface.  Rien,  surtout  n'an- 
nonce qu'il  deviendra,  dans  la  suite,  un  arbitre  souverain  du 
goût. 

A  l'époque  où  le  satirique,  né  dans  la  poudre  du  greffe, 
est  encore  à  la  période  des  essais,  et  ne  laisse  pas  prévoir  le 

*  Sat.  l,  V.  51  et  52.  —  Il  est  à  remarquer  cependaiit,  que  dans  les  édi- 
tions de  1667  et  de  1668,  Boileau  mit  une  note  destinée  à  dépayser  les  lec- 
teurs: «C'était  un  hôtelier  du  pays  blaisois.» 

«  Épître\y.,  V.  47  à  54. 


LA  LEGENDE  DE  BOILEAU  46  3 

grand  rôle  littéraire  auquel  il  est  destiné  ,  Molière  est  au 
plus  fort  de  sa  lutte  avec  le  bel  esprit  et  le  méchant  goût  du 
siècle.  Les  Précieuses  dataient  déjà  de  trois  ans;  à  V École  des 
Maris,  aux  fâcheux,  allait  succéder  VEcole  des  Femmes,  Le 
génie  du  grand  comique  était  contesté  sans  doute  :  avec  la 
foule  des  dramaturges  médiocres,  il  avait  contre  lui  les  par- 
tisans de  Corneille,  et  Corneille  lui-même  qui  supportait  ma- 
laisément un  rival  dans  la  faveur  publique.  Mais  sMl  était  con- 
testé, ses  succès  ne  pouvaient  pas  Têtre. 

Cet  écrivain  par  sa  manière 
Charme  déjà  toute  la  Cour, 

affirmait  La  Fontaine,  dès  1661  ^ .  Et  l'approbation  de  la  Cour, 
celle  du  Roi  surtout,  entraînait  hautement  celle  de  tout  le 
monde.  'L'Ecole  des  Femmes  déchaîna  cependant  de  nouveau 
toutes  les  colères,  et  en  particulier  celle  du  grand  poète  qui 
depuis  plus  d'un  quart  de  siècle,  charmait  la  France.  Pour 
nous  servir  des  expressions  maladroitement  pédantesques  de 
l'abbé  d'Aubignac,  ce  fut  un  autre  trophée  de  Miltiade  qui 
empêcha  Thémistocle  de  dormir^.  Boileau  choisit  ce  moment 
pour  proclamer  haut  et  ferme  son  admiration  pour  la  nou- 
velle pièce  et  pour  son  auteur. 

En  vain  mille  jaloux  esprits, 
Molière,  osent  avec  mépris 
Censurer  ton  plus  bel  ouvrage. 
Sa  charmante  naïveté 
S'en  va  pour  jamais  d'âge  en  âge 
Enjouer  la  postérité. 

Tant  que  l'Univers  durera, 
Avecque  plaisir  on  lira 
Que,  quoi  qu'une  femme  complote, 
Un  mari  ne  doit  dire  mot, 
Et  qu'assez  souvent  la  plus  sotte 
Est  habile  pour  faire  un  sot^. 


^  Lettre  à  Maucroix. 

'  D'Âubigoac.  Quatrième  dissertation  concernant  le  poème  dramatique, 
1663,  p.  119  et  120. 

3  Cette  seconde  strophe  a  été  omise  en  1682  par  les  éditeurs  de  Molière,  et 
®n  1701,  par  Boileau  lui-mêrae,  lorsqu'il   joignit   les   Stances   à  ses  œuvres. 


4  64  LA  LK(iENDE    DE    BOILEAU 

On  a  beaucoup  loué  Boileau  de  s'être  ainsi  déclaré  hardi- 
ment pour  Molière,  et  dans  Tadmiration  que  l'on  avait  pour 
son  courngc,  c'est  à  pcino  si  Ton  a  tenu  compte  d'une  appro- 
bation antérieure,  et  beaucoup  plus  précise  assurément,  celle 
de  La  Fontaine.  N'a-t-on  pas  exagéré  tout  à  la  fois  et  Taudace 
(lu  jeune  poète  et  la  portée  de  son  témoignage?  On  ne  courait 
])ns  alors  grand  péril  à  se  prononcer  hautement  pour  Molière  ; 
on  était  on  bonne  et  puissante  compaj^nio.  Ne  craignons  pas 
même  de  le  dire,  au  risque  de  soulever  des  protestations,  il  y 
avait  tout  avantage  à  le  faire.  Outre  que  Ton  se  plaçait, 
comme  Ton  dit  vulgairement,  du  côté  du  manche,  on  donnait 
peu  de  chose,  pour  avoir  beaucoup.  Il  ne  faut  pas  l'oublier, 
comme  on  Ta  fait  trop  souvent,  le  nouveau  venu  n'apportait 

r 

point  à  V Ecole  des  femmes  l'appui  d'une  autorité  consacrée  : 
il  le  dira  lui-même  quelque  temps  plus  tard  : 

Personne  ne  connaît  ni  mon  nom,  ni  ma  veine*. 

En  était-il  ainsi  de  Molière?  Objet  de  contradiction,  sans 
doute,  il  avait  le  ])ruit,  la  renommée,  un  parti  puissant,  des 
protecteurs  hors  ligne,  et  pardessus  tout  les  amours  du 
public.  Parler  de  lui  avec  éloge,  c'était  donc  sortir  de  robs- 
curité,  attirer  l'attention,  s'attacher  à  un  homme  illustre 

Et  planter  son  lierre  au  pied  de  ses  lauriers  2. 

Le  mérite  de  Boiloau  n'est  pas  dans  son  courage:  il  n*est 
même  pas  dans  son  discernement.  Chapelain,  lui-même,  ren- 
dait justice  à  Molière^.  Mais  le  jeune  satirique  sut,  dans  ses 
Stances,  réduire  à  leur  juste  valeur  les  critiques  soulevées  par 
VÊcole  des  femmes,  il  le  fit,  en  termes  nets,  tranchants,  avec 
une  fermeté  de  ton,  un  accent  d'autorité  que  l'on  ne  devait 
pas  attendre  d'un  jeune  homme  de  vingt-six  ans  : 


Mais  elle  figure  dans  les  impressions  de  1663  et  1666  qui  sont  les  premières, 
et  a  été  réimprimée  dans  le  Molière  Hachelle,  l.  I,  p.  xx,  bien  que,  dit  l'é- 
diteur, «elle  nous  paraisse  suspecte  ».  —  Pourquoi? 

«  Sat, ,  VIIl,  V.  82. 

*  Régnier,  Aq  de  la  Satyre  I. 

3  Camuzat,  Mélanges  de  littérat.^  p.  192 


LA  LEGENDE    DE    ROILEAU  465 

Ta  muse  avec  utilité 

Dit  plaisamment  la  vérité, 

Chacun  profite  à  ton  École, 

Tout  en  est  beau,  tout  en  est  bon, 

Et  ta  plus  burlesque  parole 

Est  souvent  un  docte  sermon. 

Et  parlant  d'avance  le  langage  de  la  postérité,  il  proclame 
ce  qu'il  n'osera  affirmer  dans  la  suite,  et  met  Molière  sur  le 
même  rang  que  l'écrivain,  reconnu  par  tout  le  XVIP  siècle 
comme  le  modèle  achevé  de  la  comédie  : 

Que  tu  ris  agréablement, 
Que  tu  badines  savamment  ! 
Celui  qui  sut  vaincre  Numance, 
Qui  mit  Carthage  sous  sa  loi. 
Jadis  sous  le  nom  de  Térence, 
Sut-il  mieux  badiner  que  toi  ? 

Voilà  ce  qui  dans  cette  occasion  constitue  le  vrai  mérite 
du  nouveau  venu  ;  mais  il  faut  dire  la  vérité  tout  entière,  ces 
stances  contribuent  plus  à  sa  gloire,  qu'elles  n'ont  contribué 
jadis  à  celle  de  Molière.  Certainement  on  les  a  connues,  on 
en  a  répandu  des  copies,  on  les  a  même  imprimées  sans  nom 
d'auteur  dès  1663*  ;  mais  combien  faible  était  leur  bruit,  à 
côté  de  l'éclatant  retentissement  de  la  pièce  elle-même.  Le 
prôneur  le  plus  écouté,  le  plus  efficace,  n'était-il  pas  le  suc- 
cès ?  «Je  trouve  aussi  difficile,»  avait  dit  l'auteur  des  Fâchmx, 
dans  son  Avertissement,  «  de  combattre  un  ouvrage  que  le 
public  approuve,  que  d'en  défendre  un  qu'il  condamne.  » 

Et,  puisque  je  suis  en  veine  de  paradoxe,  pourquoi  ne  pas 
dire  toute  ma  pensée?  Les  Stances  ne  me  paraissent  pas  pro- 
duites par  l'élan  spontané  d'un  jeune  enthousiaste  qui  ne  sait  pas 
contenir  son  admiration  et,  dans  son  ardeur  naïve,  s'adresse 
à  un  auteur  sans  le  connaître.  A  mon  avis,  Boileau  n'a  pas 
attendu  les  cris  poussés   contre  ï Ecole  des  femmes^  pour  se 

*  Elles  parurent  pour  la  première  fois,  p.  176  et  198  du  recueil  intitulé: 
les  Délices  de  la  poésie  galante  des  plus  célèbres  auteurs  de  ce  temps. 
In-12  de  883  pages,  l^aris,  Ribou,  16G3.  —  Le  privilège  de  ce  recueil  est  du  14 
et  l'achevé  d'imprimer  du  2b  septembre  1663.  V.  ledit  de  Berriat- Saint-Prix, 
Notices  bibliographiques,  no  1,  t.  1,  p.  cxxx. 


4  66  LA  LEGENDE    DE  HOILEAU 

rapprocher  de  Molière.  Lui,  qui,  riait  tant  en  lisant  Térence 
et  laissait  à  la  porte  des  comédiens  italiens  sa  raison  et  son 
argent',  n'a  pu  demeurer  trois  ans,  sans  manifester  son  adnai- 
ration  pour  la  troupe  de  Monsieur,  et,  quand  il  crie  courage 
au  chef  de  cette  troupe,  c'est  à  un  ami,  et  non  pas  à  un 
inconnu  qu'il  adresse  ses  vers.  Je  ne  dirai  pas  qu'il  écrit  par 
ordre;  ni  Molière  n'était  homme  à  en  donner,  ni  Boileau  d'hu- 
meur à  en  recevoir.  Mais  le  grand  comique  avait  à  soutenir 
une  guerre  acharnée  ;  ceux  qui  l'approchaient  ne  devaient 
avoir  rien  de  plus  à  cœur  que  de  le  seconder  et  de  rendre  à 
ses  ennemis  les  coups  avec  usure.  Quelle  bonne  occasion  pour 
le  malicieux  satirique  de  décocher  des  épigrammes?  Au  nom- 
bre des  adversaires  est  Corneille  ^ 

Et  qui  dit  Corneille  dit  tout. 

Suivant  l'avis  de  Loret,  le  gazetier  poète^  Mais  l'âme  «  libre 
et  fière  »  qui  nommait  Rollet  un  fripon,  était-elle  faite  pour 
s'effrayer?  L'auteur  du  Cid  cabalait,  elle  dira  son  fait  à  l'auteui! 
du  Cid,  et  sans  commettre  l'irrévérence  de  le  désigner  autre- 
ment que  par  desépithètes  vagues,  elle  le  confondra  parmi  les 
«  mille  jaloux  esprits  »,  les  envieux  qu'il  faut  laisser  gronder» 
et  finira  parle  percer  jusqu'au  fond  du  cœur  de  cette  atteinte 
imprévue  : 

Si  tu  savais  un  peu  moins  plaire. 
Tu  ne  leur  déplairais  pas  tant  ^. 

L'allusion  était  transparente  pour  tous  ceux  qui  entou- 
raient Molière.  Il  avait  trouvé  Corneille  dans  l'intrigue  formée 
contre  V Ecole  des  Maris^  et  il  avait  accepté  le  combat^  ren- 
dant blessure  pour  blessure  *.  Ne  s'était-il  pas,  dans  V Avertis- 
ment  des  Fâcheux^  ouvertement  moqué  des  Examens  que  ve- 
nait de  publier  Pierre  Corneille?  «  Le  temps  viendra,  avait-il 
dit,  de  faire  imprimer  mes  remarques  sur  les  pièces  que  j'au- 

»  La  Fontaine,  les  Amours  de  Psyché,  livre  I  (Êdit.  Lefevre,  Paris,  1838, 
t.  I,  p.  399. 

2  II  en  avoit  de  la  jalousie,  ne  pouvant  s'empêcher  de  le  témoigner.  Segrai- 
siana,  Paris,  P.  Prault,  1722,  p.  212. 

^  Muze  historique,  20  janvier  1663,  v.  256. 

*Cf  Guéret,  Promenade  de  St-Cloiid.  Mém.  de  Bruys,  t.  11.  p.  213. 


LA  LEGENDE    DE  BOILEAU  4  07 

rai  faites  et  je  ne  désespère  pas  de  faire  voir  un  jour,  en  grand 
Auteur,  que  je  puis  citer  Aristote  et  Horace.  » 

Dans  V Ecole  des  Femmes^  poussant  la  provocation  plus  avant, 
il  avait  parodié  ces  vers  de  Sertorius  : 

C'est  assez. 
«  Je  suis  maître,  je  parle,  allez,  obéissez  ^ 

Enfin  il  allait,  dans  la  Critique  opposer  hardiment  la  comé- 
die à  la  tragédie,  et  parler  presque  avec  dédain  des  person- 
nages cornéliens.  «  Lorsque  vous  peignez  des  héros,  fera-t-il 
dire  à  Dorante  ,  vous  faites  ce  que  vous  voulez.  Ce  sont  des 
portraits  à  plaisir  où  Ton  ne  cherche  point  de  ressemblance 
et  vous  n'avez  qu'à  suivre  les  traits  d'une  imagination  qui  se 
donne  l'essor  et  laisse  souvent  le  vrai  pour  attraper  le  mer- 
veilleux*. » 

Assurément,  venant  de  [)areils  hommes,  de  tels  procédés 
nous  étonnent  et  nous  affligent.  C'étaient  ceux  du  temps,  et  les 
luttes  littéraires  avaient  gardé  quelque  chose  de  la  rudessse 
des  vieux  âges.  Dans  cette  guerre  peu  courtoise,  les  Stances 
de  Boileau  nous  paraisent  une  arme  dirigée  contre  la  poitri- 
ne de  Corneille.  Aussi  ces  vers  de  combat,  colportés  par  des 
lectures  et  des  copies,  furent-ils  avidement  accueillis  par  les 
adversaires  déclarés  du  vieux  tragique.  L'abbé  d'Aubignac, 
alors  engagé  dans  une  discussion  acharnée  avec  l'auteur  de 
Sophonisbe,  invoqua  leur  témoignage  dans  la  dernière  et  la 
plus  violente  de  ses  diatribes:  «  Il  j' a  longtemps,  disait-il, 
qu'Aristophane  l'a  dit,  il  se  ronge  de  chagrin  quand  un  seul 
poète  occupe  Paris  depuis  plusieurs  mois  . .  et  les  vers  que 
M.  des  Préaux  a  faits  sur  la  dernière  pièce  de  Molière  nous 
en  ont  assez  appris  ^.  » 

Ces  derniers  mots  ne  nous  fixent-ils  pas  sur  la  véritable  por- 
tée des  Stances;  ne  nous  induisent-ils  point  en  outre  à  ad- 
mettre une  sorte  d'entente,  une  espèce  d'accord  tacite  entre  le 
satirique  débutant  et  le  vieil  abbé?  Tous  deux  luttaient  contre 
la  jalousie  et  l'esprit  de  domination  du  grand  Corneille,  cha- 

*  École  des  Femmes^  II,  6.  SevtoriuSf  v.  6. 

2  Critique  de  l'École  des  Femmes^  scène  Vil. 

'^  "Ù^Anblf^QdiC^  quatrième  dissertation,  p.  H9,  120, 


468  LA  LKGENUE  DE    BOÎLEAU 

cun  de  son  côté  probablement,  mais  étaient-ils  étrangers  Tun 
à  Tautre?  D*  Aubignac  préparait  alors  un  roman  philosophi- 
que sur  la  morale  des  Stoïciens  et  lui  avait  donné  le  nom  de 
Macarisse,  Suivant  l'usage  du  temps,  il  demanda,  pour  les  met- 
tre en  tête  de  son  livre,  des  vers  louangeurs  à  ses  amis.  Tous 
se  firent  un  plaisir  de  satisfaire  à  son  désir,  sauf  à  s'en  rail- 
ler plus  tard  comme  Tavocat  Richelet.  Boileau  fut  du  nom- 
bre de  ces  preneurs  poétiques,  mais  non  des  plus  empressés  ^ 
Sa  pièce  n'arriva  qu'après  la  mise  en  vente.  On  ne  saurait  di- 
re qu'elle  pèche  par  excès  d'enthousiasme,  mais  enfin  elle  loue 
une  œuvre  insipide.  Pouvait-on  moins  faire  pour  un  homme 
dont  les  attaques  contre  Corneille  opéraient,  en  faveur  de  Mo- 
lière, une  diversion  si  utile  ?^ 

Peut-être  les  faits  que  nous  venons  de  grouper  n'ont-ils 
que  des  rapports  éloignés  ?  Ce  qui  est  certain  du  moins,  c'est 
qu'au  commencement  de  1663  l'auteur,  encore  peu  connu, 
d'une  satire  sur  les  vices  et  les  embarras  de  Paris,  comptait 
parmi  les  amis  et  les  partisans  déclarés  de  Molière. 

Ce  fait,  à  nos  yeux  d'une  importance  capitale,  a  décidé 
peut-être  des  destinées  littéraires  de  Boileau. 


II.  —  Boileau  dans  la  société  de  molière  1663-1666. 

A  peu  près  en  même  temps  qu'il  se  liait  avec  Molière, 
Boileau  connut  La  Fontaine  et  devint  l'ami  de  Racine.  Et 
sans  quitter  encore  la  cour  du  Palais  et  la  maison  de  son 
frère  Jérôme,  il  s'égara  plus  souvent  loin  de  la  de- 
meure paternelle,  avec   cette   compagnie  joyeuse,  qui  pre- 

1  Boileau,  dans  sa  vieillesse  est  assez  embarrassé  pour  expliquer  cet  éloge 
d'un  ouvrage  qui  «  ne  fit  de  chez  Sercy  qu  un  saut  chez  l'épicier.  »  — 11  le 
composa,  comme  les  autres  amis  de  l'auteur  pour  le  faire  valoir.  <i  Heureuse- 
ment je  lui  porîai  Tépigramme  trop  tard,  et  elle  ne  fut  pas  mise.  »  Dieu  soit 
Joué,  Lettre  àBrosselte,  9  avril,  l'702.  Éd.  Laverdet,  p.  106. 

«  «J'ai  connu,  écrivait  plus  tard  Boileau,  M.  l'abbé  d'Aubignac.  Il  était 
homme  de  beaucoup  de  mérita  et  fort  habile  en  matière  poétique....  »  iJle 
Héfléx.  critiques  sur  Longin,  éd.  Gidel,  t.  III,  p.  310.  L'abbé  d'Aubignac 
est  déjà  appelé  «  mon  cher  amy  »  par  Gilles  Boileau,  Vie  d'Epictète,  3"  éd. 
1667,  p.  19. 


LA  LEGKNDE  DE    BOILEAU  469 

nait  volontiers  le  cabaret  pour  une  succursale  du  Parnasse. 
A  cette  époque  le  bagage  poétique  de  Nicolas  était  encore 
bien  mince,  une  seule  pièce  qu'il  retouchait  sans  cesse,  mais 
il  avait  fait  preuve  dans  cette  œuvre  unique  d'un  talent  tout 
particulier  pour  la  satire. 

Trop  attaché,  sans  doute,  à  l'imitation  de  son  modèle  latin, 
il  n'avait  pas  accentué  l'originalité  de  son  propre  génie.  Mais 
il  avait  montré  qu'il  s'entendait  à  adapter  les  peintures  des 
Anciens  aux  usages  modernes,  à  les  mettre  au  point  de  son 
temps. 

On  savait  qu'il  excellait  à  rendre  agréablement  les  petites 
choses  de  la  vie  commune,  à  parodier  avec  une  malice  pitto- 
resque les  ridicules  du  jour.  Ces  qualités  qu'allait-il  en  faire, 
cet  esprit  satirique  contre  qui  devait-il  le  tourner?  Il  semble 
que  les  leçons  et  l'exemple  de  Molière  lui  aient  révélé  sa 
vocation  critique  ;  qu'en  écoutant  le  bruit  immense  fait 
autour  des  nouveautés  du  grand  observateur  de  la  nature,  il 
ait  deviné  l'usage  à  faire  de  son  propre  bon  sens,  de  sa  rai- 
son malicieuse. 

Entre  lui  et  l'auteur  des  Précieuses  ridicules  et  des  deux 
Ecoles  u'a-t-il  pas  aperçu  un  lien  mystérieux,  n'a-t-il  passent! 
qu'ils  devaient  l'un  et  l'autre  avoir  les  mêmes  ennemis,  que 
par  suite  l'œuvre  particulière  de  chacun  d'eux,  tout  en  res- 
tant différente  de  forme,  devait  s'allier  et  se  confondre  avec 
celle  de  l'autre  dans  un  même  effort?  Jusque-là,  nous  l'avons 
vu,  il  n'avait  guère  abordé  que  la  satire  morale  ;  à  partir  de 
cette  date,  il  étend  son  cadre,  il  entre  eu  plein  dans  la  satire 
littéraire. 

Ce  .changement  de  front  est  très  sensible  dans  la  seconde 
pièce  qu'il  a  composée  et  placée,  je  ne  sais  trop  pourquoi, 
la  septième  dans  son  recueil  *.  Dans  cette  œuvre,  faite  à  la  fin 
de  1663,  c'est-à-dire  de  l'année  même  qui  suivit  sa  liaison 
avec  Molière,  il  se  décide  résolument  pour  le  genre  satirique. 
Ni  considération,  ni  crainte  ne  peuvent  l'arrêter. 

Enfin,  c'est  mon  plaisir,  je  veux  me  satisfaire 

*  Cet  arrangement  s'explique  par  ce  motif  que  Boileau  voulait  faire  de  la 
pièce  80  question  la  conclusion  de  sou  premier  recueil  de  1666,  composé  seu- 
lement de  sept  satires. 


470  LA  LEGENDE    DE  IJOILEAU 

Je  ne  puis  bien  parler  et  ne  saurois  me  taire. 
Je  ne  résiste  point  au  torrent  qui  m'entraîne  \ 

Est-il  téméraire  de  penser  que  Texemple  du  comique  cou- 
rageux qui,  depuis  cinq  ans,  bravait  héroïquement  toutes  les 
inimitiés  n'a  pas  été  étranger  à  cette  détermination  du  jeune 
poète-  ?  En  même  temps  qu'il  se  consacre  à  la  satire,  il  change 
de  modèle  ;  ce  n'est  plus  Juvénal,  c'est  Horace  qu'il  prend 
pour  maître.  Passer  ainsi  du  déclamateur  hyperbolique  au 
moraliste  charmant  et  sensé,  si  mesuré  de  ton  et  de  pensée, 
c'est  indiquer  l'orientation  plus  sérieuse  qu'il  va  donner  à 
sa  verve  médisante.  Mais  ce  qui  caractérise  surtout  cette 
pièce  nouvelle,  et  la  différencie  plus  nettement  de  la  pre- 
mière, c'est  l'abondance  de  malices  littéraires  dont  elle  four- 
mille. Il  semble  que  le  satirique  n'ait  plus  en  vue  que  les  mau- 
vais auteurs.  A  peine  s'il  va  s'occuper  des  travers  moraux  ; 
s'il  rappelle  que  Juvénal  gourmandait  en  courroux  tout  le 
peuple  latin,  s'il  se  couvre  du  nom  respecté  d'Horace,  lors- 
que celui-ci 

Exhalait  en  courroux  les  vapeurs  de  sa  bile, 

Ety  vengeant  la  Vertu  par  des  traits  éclatants  ^ 

Allait  ôter  le  masque  aux  Vices  de  son  temps. 

les  vices  du  sien  peuvent  pour  le  moment  se  déguiser  sans 
frayeur,  il  les  laisse  en  paix.  11  est  vrai  que  l'année  suivante, 
il  fit  contre  eux  un  retour  offensif,  en  voulant  prouver  que 
tous  les  hommes  étaient  fous.  Mais  dans  cette  satire  morale, 
écrite  d'ailleurs  à  la  suite  d'une  conversation  entre  Molière, 
l'abbé  le  Vayer  et  Boileau  ^,  la  malignité  littéraire  trouve  sa 
place  et  la  manie  de  rimer  est  rangée  parmi  les  folies  humai- 
nes \  La  même  année,  du  reste,  le  poète  moraliste  revenait  à 
la  critique,  et  achevait  de  s'engager  dans  la  lutte  contre  le  bel 
esprit.  11  composait  et  dédiait  à  Molière  la  satire  sur  la  rime. 
N'était-ce  pas  en  même  temps  le  prendre  pour  chef  de  file  et 
le  proclamer  son  maître  dans  l'art  d'écrire? Les  premiers  vers 

«  Sat.  Vil,  V.  89,  90  et  94. 
2  Sat.  VU,  V.  79,7  et  76. 
8  Bolœana,   et  Brosetle,  t  I,  p.  44. 
*  Sat.  IV,  F,90et  suiv. 


LA  LEGENDE    DE  BOILEAU  471 

de  la  pièce   contiennent,  en  effet,  un  hommage  éclatant  au 
génie  comme  au  goût  de  «  ce  rare  et  fameux  esprit,  » 

Pour  qui  tient  Apollon  tous  ses  trésors  ouverts 
Et  qui  sait  à  quel  coin  se  marquent  les  bons  vers. 
Dans  les  combats  d'esprit,  savant  maître  d'escrime*. 

Dix  ans  plus  tard,  lorsque  Boileau,  passé  maître  à  son  tour, 
jugeait  de  haut  tous  les  écrivains  de  son  temps,  et  l'auteur 
de  y  Ecole  des  femmes  lui  même,  ses  ennemis  ont  travesti  et 
défiguré  ce  noble  et  sincère  témoignage  de  son  admiration 
première.  Desmarets  Saint-Sorlin,  évoquant  contre  lui  Tombre 
de  Molière, lui  fait  adresser,  par  elle,  des  reproches  indignés: 

Cœur  lâche,  qui  poursuis  les  vivants  et  les  morts, 
Tu  m'adorais  vivant;  maintenant  quand  je  dors. 
Du  titre  de  bouffon  tu  noircis  mon  génie  ; 
Autrefois  à  genoux,  forcé  de  m'estimer, 
Tu  t'adressais  à  moi  pour  apprendre  à  rimer  2. 

Certainement  Boileau  n'était  pas  un  cœur  lâche  et  ne  se  mit 
jamais  à  genoux.  Cependant  en  1664,  il  avait  avec  Molière 
une  attitude  qu'il  ne  garda  pas  dans  la  suite.  Nouveau  venu 
dans  la  carrière  poétique,  il  s'inclinait  devant  la  supériorité 
de  ce  puissant  et  fécond  génie  et  lui  demandait  respectueuse- 
ment desleçons.  En  le  consultant  sur  une  question  aussi  vitale 
à  ses  yeux  que  l'accord  de  la  rime  avec  la  raison,  il  le  prenait 
pour  guide  dans  le  combat  du  bon  sens  et  du  naturel  contre 
le  bel-esprit  et  l'affectation,  et  se  ralliait  pour  ainsi  dire  à  lui, 
dans  la  mêlée.  Du  reste,  cette  lutte  est  désormais  pour  Des- 
préaux la  «  chose  nécessaire.  »    Et,  s'il  revient  encore  par- 

*  Sat,  //,  V.  3  à  5.  La  satire  à  Molière  a  été  la  première  imprimée,  elle 
parut,  p.  125  à  128  de  la  seconde  partie  des  Délices  de  la  poésie  galante^ 
ia-12  de  265  pages.  Paris,  Ribou,  1664.  L'achevé  d'imprimer  est  du  12 juillet 
1664. 

'  La  deffense  du  poème  heroïqice  avec  quelques  remarques  sur  les  œuvres 
satiriques  du  sieur  /)**,  dialogues  en  vers  et  eu  prose  (S*  Sorlin  Desmarets). 
Paris,  Jacques  le  Gras,  1674.  VU"  dialogue  (en  vers  p.  134.  —  Cf.  Boileau 
Despréaux,  im  Urtheile  seines  zeitgenosse?i  Jean  Desmarets  de  Saint 
Sorlin,  von  Wilhelm  Bornemann.  Heilbronn,  1883.  ia-80  de  148  pages, 
p.  143. 


3-1  "*'»•'        ~i         ■«  i'  1^^  i'i  ■-,.■  t--  --  i-~  ~        ^^   ^.  ■•  ~    »  *      - 

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C^  ^M*  *  iz  '*  i-î  1  ".  1  viî".  i  iz.  ii-szrirs  î"5-?;is5. 

Fi'oii-ï.-  iâ'.î  Pir.-î  1  ir  :.  ::  es:  r-^ivers-?. 

A'j  rr*o:-::e  '.::i:   .il  ::  ir:  i  l'in  ii:-?::r  I-?s  menace 

Poir  'rix  '::*  t'îi  o  ^vr^j-e -rs:  ul  :..  iis::  *  odieux, 

Ce*'.  offrUî-i:- ie-!  lii^,  :"r5:  à'i::.:  v:^:- i'ix  cie'ii. 

Mais.  oieL  oie  i'^r.  fa  ;x  zel-i-  :'.<  :.--is:j  lent  leur  faiblesse, 

Ch^cm  V'..::   ;  î'eri  eif-r:  la  v..-;::-  les  vlesïe. 

Eu  vain  d'-xn.  lâ?he  jT?  :e':l  lej:-  espiit  revêtu 

Se  couvre  du  manteau  d'iine  austère  veitu, 

I^ur  cœur  qui  se  connaît  et  qui  fuit  la  lumière. 

S'il  se  moque  de  Dieu,  craint  Tartuffe  et  Molière  *. 

Deux  ans  plus  tard,  quand  il  s'agira  de  défendre  la  comédie 
de  V Imposteur  contre  les  préventions  de  Lamoignon,  Boileau 
ne  tiendra  pas   un  langage   aussi  ferme.  Il  conduira  bien  son 

*  Satires  III  et  V,  Ces  deux  satires  sont  de  1665. 

2  Leri  historiens  sont  ma  droicte  balle.  Montaigne,  livre  U^  cb.  10. 

V  Le  discours  au  Roi  est  également  de  166r>.  li  parut  pour  la  première  fois, 
avec  les  Satires  II  et  IV,  p.  S2  à  86,  de  la  Suiite  d>i  7iouveau  recueil  de 
plusieurs  et  diverses  pièces  valantes  de  ce  temps.  A  la  sphère,  1665.  (Se 
trouve  à  la  Dibl.  dfj  la  vill«i  de  xMonlpeliier,  BhIIcs  Lettres,  no  1914). 

*  Discours  au  lioi  V.  89  à  102.  —  Boileau,  V,  103,  convient  lui-même  qu'il 
.•<Vc^/rrefur  en  point.  —   Il  îiviiit  déjà  parlé  de   Tartuffe  dans   \9l  Satire  III, 


LA    LEGENDE  DE   BOILEAU  473 

ami  chez  le  Premier  Président,  mais  il  n^osera  pas  le  soutenir 
et,  sous  cape,  je  le  crains  bien,  tant  est  fort  eu  lui  le  penchant 
satirique,  il  rira  presque  de  l'embarras  et  de  la  confusion  du 
grand  comédien,  mille  fois  plus  mal  à  son  aise  avec  le  chef 
du  Parlement  de  Paris  qu'avec  le  roi  de  France  en  personne  *. 

Mais  en  1667,  après  le  succès  de  plusieurs  éditions  de  son 
livre,  Tauteur  des  Satires  commence  à  sentir  son  importance: 
il  n'a  plus  besoin  d'appui  pour  marcher.  De  1663  à  1665,  au 
contraire,  il  se  tient  plus  près  de  Molière  ;  il  comprend 
davantage  que  les  ennemis  du  faux  goût  sont  solidaires  et 
doivent  se  prêter  un  mutuel  secours. 

Cependant,  à  la  date  de  1665,  la  réputation  du  nouveau 
poète  n'était  plus  à  faire.  Il  n'a  rien  imprimé,  du  moins  on 
n'a  rien  encore  imprimé  de  son  aveu,  mais  il  est  déjà  connu 
et  recherché  dans  les  meilleures  compagnies  :  ses  satires  pi- 
quent et  défraient  la  malignité  publique,  et  le  bruit  com- 
mence à  se  faire  autour  de  son  nom.  C'est  qu'à  cette  époque, 
l'on  n'avait  pas  besoin  de  faire  travailler  la  presse  pour  arri- 
ver à  la  célébrité.  Il  se  passait  quelque  chose  de  semblable  à 
ce  que  l'on  vojait  autrefois  à  Rome,  au  temps  des  déclama- 
tions et  des  lectures  publiques.  Les  auteuis  tâtaient  le  goût 
et  l'opinion  en  lisant  leurs  œuvres  devant  leurs  amis  et  leurs 
connaissances.  Etaient-ils  applaudis,  ils  trouvaient  bientôt  de 
nouveaux  auditeurs.  Et  tandis  que  des  copies  plus  ou  moins 
fidèles  répandaient  leurs  écrits  de  proche  en  proche,  eux- 
mêmes  allaient  les  réciter  à  qui  désirait  les  entendre.  On  les 
invitait  dans  les  salons,  dans  les  conférences  et  les  académies 
particulières,  alors  fort  nombreuses  ;  on  voulait  les  avoir  aux 
festins  d'apparat.  Cette  communication  par  des  lectures  était 
pour  eux  la  première  étape  de  la  gloire.  Les  Femmes  savantes 
et  la  satire  du  Festin  peuvent  nous  donner  l'idée  de  ce  qui  se 
passait  alors.  Plus  d'un  Trissotin  a  trouvé  des  Bélise  pour  lui 
dire  de  ses  sonnets  : 


*  «  Quelques  efforts  que  pût  faire  Molière,  il  ne   fit  que   bégaier  et  ne  pût 

point  calmer  le  trouble  où   l'avait  jeté  Monsieur  le    premier    Président 

Molière  se  retira,  peu  satisfait  de  lui-même  sans  se  plaindre  pourtant  de  M. 
de  Lamoignon,  car  il  se  rendit  justice.  «  Correspondance  de  Boileau-Des- 
préaux  et  Brossette,  édit.  Laverdet,  1>^58.  Appeîidice,  p.  565. 


C-:  *■::.:  ~*...\*  f-^tiicf  at  :»L  âMiZkf  a  mon  oreille 

r*\":r^  .*.-  :  ; '.    *    i..,   "  ;  :.-r    tLs  rjeiles.  aux  tables 

H:eii  souver.:  l:.  i..n:j*.*  as::  :..": v  li  alléchait  ses  invités 
l'Ai*  oottt*  j^r.-^:Lf>î«f  >vi-.*fi.:.:f  : 

M.*.::rf  s\t^:  Tiri-f-.  t  v.:  '  i-uer  »oa  rôle 

F;  K'i:! ':»e-:.  . .:.  :  [.:•  e>î.  :..':.  ■::nné  sa  parole  *. 

l.o  mu>  ,.ie:î  Li:i.":.f:;.  :l  .e  ^  :■:;  :  at  les  Jeux  vers  qui  pré- 
l'filtMii,  pariAireai:  av-.  .  M.^e:-.  .^  .  riu.ège  d*amuser  et  d'at- 
îiivr  li»s  hv>n:u';e>  jT.  ..>:  ?  =  :  ;.:urr-x  :«r:viiêffe.  nous  le  savons 
ii*ailli'»r:î,  luvleâu  .-.  :  :>>e.iA::  iive.-  e-;x.  Brossette,  dans  son 
i-ouuiieiiiiUîv,  :;.v.>  le  ni.LTre  iaii>  une  réunion  à  lafoismon- 
iliiiiu'  01  iitUT.iire.  rViisar.:  .Lez  M.  d\i  Broussin,  une  lecture 
rtvoi-  MoliiMv  ■ .  Coîin  r-ir:  mC-me  de  ces  invitations  faites  à 
heâpii'.Hux  jiour  /.i-.user  .-."î-tie  un  vil  parasite,  un  baladin 
que  Ton  so  pro.uro  a  ;  rix  darjrenl  ?omme  un  objet  de  curio- 
sité; ille  Cv^mpAie  ;\  Fra::c  Tau  pin. 

Ou  ïes  d.'uue  à  Pahs  qiiand  on  fait  chère  entière 
i\Mmne  on  donne  a  la  Cour  et  Tartuffe  et  Molière. 
11  uVsi  v.»omie  vîanois  ni  OAron  allemand 
Qui  u'aii  à  ses  repas  -a  v:ouple  si  charmant, 
El  dans  la  oivix  de  fe:-  eux  seuls  en  valent  mille 
Pour  faire  aux  étrangers  l'honneur  de  cette  ville  *. 

Laissons  à  des  ennemis  maladroits  et  exaspérés  [le  ridicule 
de  ces  plates  caricatures,  mais  servons-nous  en  pour  montrer 
quelle  était  alors  la  vogue  du  malicieux  satirique.  Le  fait  est 
qu'on  Tadmettait,  qu'on  le  recherchait  dans  les  compagnies 
les  plus  relevées.  Arnauld  de  Pomponne,  au  retour  de  son 
exil,  rendant  une  visite  empressée  à  ses  amis,  le  jour  même 
de  son  arrivée,  le  trouve  avec  Racine,  le  soir  du  3  février 

*  Femmes  savantes^  Acte,  lll,  scène  !'•  et  scène  V. 
3  Satire  lll,  x.  24  et  25. 

*  Avis  sur  la  deuxième  satire. 

*  Satyre  de.^  Satyres  (1666)  citée  dans  la  Critique  désintéressée^  etc.,  p.  52. 


LA  LEGENDE   DE  BOILEAU  4  75 

1665,  à  rhôtel  de  Nevers,  chez  madame  la  comtesse  Du  Plessis- 
Guénégaud  *  Les  deux  poètes  y  sont  venus  pour  lire,  Tun 
quelques-unes  de  ses  satires,  l'autre,  trois  actes  et  demi  de 
sa  tragédie  d'Alexandre.  Et  parmi  les  auditeurs  réunis  pour 
les  entendre  figurent,  avec  trois  prélats,  Mme  et  Mlle  de 
Sévigné,  Mme  de  Lafajette  et  le  duc  de  La  Rochefoucauld, 
Fauteur  des  Maximes. 

C'est  à  cette  époque  où  Nicolas,  déjà  fort  en  vue,  n'avait 
pas  encore  osé  courir  a  le  hasard  de  Timpression  d,  qu'il  faut 
rapporter  les  additions  et  les  changements  introduits  dans  la 
satire  par  laquelle  il  s'était  fait  d'abord  connaître.  Il  la  di- 
vise alors  en  deux  parties  et  en  détache  les  Embarras  de  Pa- 
ris^ pour  en  faire  une  œuvre  à  part^.  En  même  temps,  il  enri- 
chit les  deux  pièces  de  censures  littéraires  qui  n'étaient 
pas  entrées  dans  la  composition  primitive.  La  plus  sérieuse, 
la  plus  fertile  en  conséquences,  de  ces  additions,  est,  sans 
contredit,  le  passage  concernant  Chapelain  et  les  pensions 
accordées  aux  gens  de  lettres.  Évidemment  ce  morceau,  mo- 
difié, d'ailleurs,  plusieurs  fois  dans  les  éditions  successives 
que  donne  le  satirique,  ne  faisait  pas  partie  de  la  première 
ébauche.  Avant  1663,  il  ne  pouvait  être  question  de  «la  bonté 
secourable  du  Roi»,  puisqu'elle  ne  jeta  sur  la  muse  un  regard 
favorable  qu'à  partir  de  cette  année '.On  s'aperçoit,  du  reste, 
en  l'examinant  avec  attention,  que  le  passage  tout  entier  n'a 
été  intercalé  qu'après  coup  dans  le  texte.  Il  rompt,  en  effet, 
la  suite  des  idées  et  semble  en  contradiction  avec  ce  qui  pré- 
cède et  surtout  avec  ce  qui  suit  *.  C'est  donc  seulement  vers 

'  Lettre  d'Arnauld  de  Pomponne  à  son  père,  M.  d'Andilly,  du  4  février 
1665,  à  la  suite  des  Mémoires  de  M.  de  Coulanges,  Paris,  Biaise  1820,  in-S», 
p.  :-«2  à  384. 

*  L'édition  de  1713  donne  Tannée  1661  pour  la  composition  de  la  satire  VI, 
n'est-ce  pas  la  date  à  laquelle  l'auteur  s'est  décidé  à  couper  son  œuvre  en 
deux?  La  satire  VI  ne  parut,  du  reste,  la  première  fois,  que  dans  l'édition  ori- 
ginale et  authentique  de  1666,  dont  le  privilège  est  du  6  mars,  et  fut  accordé 
à  Claude  Barbin. 

3  Sat*  I,  V,  U,  —  Les  gratifications,  dit  le  commentateur,  commencèrent 
en  1663. 

*  Dans  la  rédaction  actuelle  de  la  première  satire,  ce  passage  s'étend  du  vers 
81  au  vers  96.  Le  vers  97,  oîi  il  est  question  de  saint  Amant,  formait  une  suite 
toute  naturelle  au  vers  "79,  qui  raillait  le  parasite  Montmaur. 


12-  ...  :  — _.i^:    iiiâ. 

-  '-'  'ii^r  loxr 
A-  '  rii^iuf. 
..-     -    r^'v-îiij 

r...    =11..-.  '■:"!-  f*" 

-      -■-   '  ani-rf 

...         .^^4m      ^TT     _^r« 

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•'.'*'.*         -t  -  y    ....  *    :. . .  -.   . .  î...  ■ .  ^i.;.  -r .  z  i  f  I  :■:    fcrec  Priîe  eiipbi» 

//'.'//  .'^i/  /'  'M'-,  .<w  *.•  /     :    ,.•*   ;•...!.  l:.z-.   -?.  17S5.  :.l.  p.  l97. 

■  **.  /♦'.-  '.^'.f  .  r»;  •,-.  ir/tCo:.'''.!*^-.fr  -'i:  '-.l's  d  une  <i;atrbe  contre  la 
'>.,■  « '.  Y*.u*.iii  *■'  f.irt.i  c^  *^ç  /.*•*:::.  r  M;.  Ou  y  préfère,  dit  l'aateur.  ]« 
j..  i  '.'  ..i  j.  -i^  ']'.'.'•:  f  h',':",'  h  '',',::.*  r.  S'  ce  vers  a  Irait  aux  listes  des 
!''  •''  ''.'.'.j/'  u*-r.r.  '.' r  rif;'l>;  «:)-t  déc. are  daDâ  ces  listeau  le  premier  poète 
'J(»ii.ii»,-j.,«  -j.j  ii,ofj«ji-     i;i  f/htienl  2///J  livres,  et  Boycr  n'en  a  qae  800. 


LA  LEGENDE    DE  BOILEAU  47  7 

Une  nouvelle  liste,  arrêtée  au  mois  d'août  1664,  péchait  par 
les  mêmes  omissions.  Les  oubliés  se  fâchèrent  tout  de  bon  et 
s'en  prirent  à  l'auteur  de  la  Pucelle.  Alors  fut  composée,  dans 
un  cabaret  et  le  verre  en  main,  la  parodie  célèbre  du  Cid^ 
connue  sous  le  nom  de  Chapelain  décoiffé,  La  Serre,  dépité 
comme  don  Gormas,  attaque  le  vieux  poète  au  sortir  de  l'Aca- 
démie, et  finit  par  lui  arracher  sa  perruque  qu'il  jette  dans  la 
boue.  Chapelain,  désespéré,  appelle  son  disciple  Cassagne  à 
son  secours,  et  l'écolier,  en  nouveau  Rodrigue,  va  provoquer 
le  terrible  La  Serre.  Cette  satire  eut  un  grand  succès  et,  dès 
l'année  1665,  fut  publiée  dans  un  Recueil  de  pièces  galantes, 
sous  le  nom  de  Comédie  * .  Quels  en  étaient  les  auteurs  ^  ?  Notre 
Boileau,  je  le  sais,  s'efforça  dans  la  suite  de  dégager  sa  res- 
ponsabilité de  cette  plaisanterie  d'assez  mauvais  goût.  «  Cet 
ouvrage,  écrivait-il  à  Brossette,  n'est  ni  de  moi,  ni  digne  de 
moi».  Mais  le  désaveu  n'est  pas  complet,  et  lorsque  le  badinage 
parut,  l'opinion  publique  lui  donna  dans  cette  méchanceté 
beaucoup  plus  de  part  qu'il  ne  s'en  attribuait  plus  tard.  La  paro- 
die, du  reste,  n'avait  pas  reçu  du  premier  coup  la  forme  qu'elle 
a  gardée.  Une  version  dont  le  texte  ne  nous  est  point  parvenu 
tout  entier  était  peut-être  plus  offensante  encore  que  la  ver- 
sion actuelle  ^.  Chapelain,  j  était  accusé  d'avoir  été  archer  et 
recors  dans  sajeunesse  *.  La  parodie,  sous  sa  première  forme, 
fut  mise  sur  le  compte,  non  pas  de  Furetière,  mais  des  fils  du 
greffier  Boileau,  Gilles  et  Nicolas.  Les  deux  frères  vivaient 
donc  alors,  c'est-à-dire  en  1664,  en  bonne  intelligence,  comme 
semblent  le  prouver,  du  reste,  plusieurs  anecdotes  et  quel- 
ques passages  des  premières  satires.  Le  cadet  n'avait-il  pas 
épousé  l'animosité  de  l'aîné  contre  Ménage  et  contre  Pellis- 
son?  n'avait-il  pas  les  mêmes  amitiés,  ne  fréquentait-il  pas  les 
mêmes  sociétés?  ne  vivait-il  pas  familièrement,  comme  lui,  par 

'  Nouveau  Recueil  de  plusieurs  et  diverses  pièces  galantes  de  ce  temps, 
A  la  sphère  16(55.  Le  Chapelain  décniffé  est  au  coimnencemeal,  de  la  pre- 
mière partie,  p.  là  15. 

â  Lettre  à  Brossette,  du  10  décembre  1701.  édil.  Laverdct,  p  95  à  96. 

8  Boileau  le  dit  lui-même  dans  la  lettre  précitée.  «  Il  n'était  pas  comme  celui 
que  vous  m'avez  envoyé,  qui  a  été  vraisemblahlemeut  composé  après  coup, 
par  des  gens  qui  avaient  retenu  quelques-unes  de  nos  pensées^  etc.,  p    96. 

*  JUienagiana^  11,  p.  78. 


i'\iMii|»!v\  Ax.v- .l"   ■...;.•  ie  Vnr\ .  François-Marie  de  i*HôpitaIW 
UuMj  A\'\  ^:\'\a::\  \\\r  .■  ::i*c  ;i:ent,  dans  cette  association  de$ 
ili'ux  ùvo*.  ;     ■'•^*''  ^"  ^-.l'-ï*  tous  les  deux,  contre  Chapelain. 
l/.u'iu'  .4\  .1  :.  :"  «.'<'  vrtr.  à'.*s  oli'.iiTAtions  à  i*:iuteui*  de  la  f'ueelk: 
il  iuL  .!i'\  4;     ..■■•.    'ii'.o,  <oii  oMtrôi^  à  rAcadémie  française. 
M  »iN  .  .-m;'   •:::  'O'.:   .•  ':i.'':u:ue  lo^er,  présomptueux,  qui  ne  se 
!;*'M  III  n  .'v-  :x:<.'\"..'  *^:i  s.iit  -ju'il  n*êpargnait  guère  son  pro- 
U'%'ii'ut  .•'.  ;^"  .  V-:     :  -.1  ■  '.    '  vîtitu">  ilumalavooFuretière  et  ces 
luiro^  /••  <.'«•*.   :  .:o  ■•  :.  ui  :.'  ^'î  oiivoiispect  Chapelain  ménageait 
AU  j'.»i!ïi  vio  <.'  tU.'.'o  :;■,.•  [■:  :■  io  lai  »îan3  le  public  *.  II  ne  devait 
,L»ii,'  p.i*    u.  .::   V-    Vv':-    î.»  isonnop  en  parodiant   le  Cid  une 
iiouM'iL»  |ii\'u\.*  .;*:î:^:\i::îii  lo.   Chapelain  était  alors  fort  ma- 
lavlt'  »l%»  Il  a:i':i\v\^o  '.  ::îa:<so<  aini:?  le  vengèrent.  A  leur  tour. 
iN  !iMw»xi)iv:r  r.îio  ::i^v  i:o   io  ^.'orneille  et  tournèrent  contre 
l'i  lierai   .iv'.uiv':n  v'o-.i  "..i  s-i'îu*    ta  me  use  du   pardon  accordé 
|i  if    \u^:usu'  .1   v'::i::.i.   1  n  iiuitulôrent  cette  parodie  Boileau 
l'f*  ..;  i  \t"t  •/  ■  ■  (.•'.  ('■  .■    •;  *.  iuiU*s  o;?i  sur  la  sellette,  mais  sa 
l.iinilU»  l't  smuni:  <vni  p-'ic*  lîi»  :?orii  pas  épargnés,  et  le  niinis- 
!io  »Mi  plutO^i  Ciï  r.u'!.i;ii  so  moiiire  encore  plus  dur  qu'Auguste 

\\\  \vMH  lo  lOviv.  lvMslo.ia.  mais  ceux  dont  tu  le  tiens 
t'inont  s^otM  .ii*  luMîîr.  <.ins  hoiiueur  et  sans  biens. 

:\»*olas  lin  iiuMuo  i»sr  mis  onoause  :  on  Taccuse  d'avoir  aidé 
non  iw'vc  a  v'omposor  lo  lihoilo  outrr.geant,  et  Ton  fait  dire  à 

l'iiulrur  Jo   lji    /*Jii'c:'/V  ; 

Pi'NpiiMu\  iju'.ij'ivs  tout  jVstiaiais  davantage 
V\\  NOïxi  «K»  ^-oiupUoo  on  00  laoohant  ouvrage. 


'  (  o  iUw  vl«'  \  lU'N  «tait  iu-  u\iv  llillos.  Tiillemaot.  M.  d'Esmery,  t.  V,  p.  89. 
.^•lu^  li\>u\oi>rt  en  li'nii  iV^pvèaux  dans  sa  société.  BrosseUe,  Avis  sur  la 
II'  ^'itirr, 

•■•■   rullt'iiiaiil.  iUsty^ritttt'  tie  Chapelain,  i.  III,  p.  276,  S78. 

»  l.rllrrs  kW  Joaii  r.liapelaiii.  ^^  décembre  16(54.  t.  II.  p.  376,  noie  1. 

^  lirosscMc.  Comm.  ^u>'  la  sit/.  //«,  v.  17,  dit  que  dans  cette  parodie, 
M.  C.uihrrl  i*iMivHiiu|uuil  hosprôaux  d'(>tre  l'auteur  de  quelques  libelles  qui 
pnniiMsnirnt  iilttrs.  Klli-  est  surtout  faite  contre  Gilles.  V.  Tallemant«  éd.  Pau- 
lin l'iin^,  t.  IV.  p.  -ii.  —  Boileau  avait  attribué  cette  parodie  à  de  Pure. 


LA  LEGENDE    DE  BOILEAU  479 

Le  frère,  médisant  autant  et  plus  que  toi. 

N'a  pas  craint  de  vomir  son  venin  contre  moi  ^. 

Ainsi  les  deux  fils  de  Gilles  Boileau,  l'ancien  greffier  du 
Parlement,  étaient  accusés  d'avoir  pris  part  au  Chapelain 
décoiffé^ y  et  tous  deux  étaient  en  butte  à  l'animosité  furieuse 
du  vieux  rimeur  et  à  la  colère  de  Colbert.  Un  autre  membre 
de  la  famille,  Pierre  Boileau,  sieur  dePnimorin,  s'était  égale- 
ment compromis  dans  cette  lutte  contre  a  le  Roi  des  Au- 
teurs*^». Plus  âgé  que  Gilles  et  Nicolas,  puisqu'il  était  leur 
frère  du  premier  lit  et  qu'il  était  né  le  5  avril  1625,  il  n'était 
pas  resté  dans  la  poudre  du  greffe,  mais  il  ne  cultivait  pas  la 
poésie.  Mondain,  gourmand  et  paresseux,  et  point  du  tout 
homme  de  lettres,  enjoué,  malin  et  spirituel  toutefois,  il  ai- 
mait à  plaisanter  dans  les  compagnies  contre  la  Pucelle  et  la 
présence  même  de  l'auteur  ne  gênait  pas  la  liberté  de  son 
langage.  Un  jour  le  vieux  poète,  accoutumé  aux  respects  et 
aux  adulations,  perdit  patience  et  lui  dit  d'un  ton  méprisant: 
a  C'est  bien  à  vous  à  en  juger,  vous  qui  n'êtes  qu'un  igno- 
rant et  ne  savez  pas  lire  !  »  —  «  Hélas  !  répartit  vivement 
Puimorin,  je  ne  sais  que  trop  lire  depuis  que  vous  faites  im- 
primer *.  »  Voilà  riposter  en  homme  d'esprit  qui  n'a  pas  peur 
de  ses  opinions  et  n'abandonne  pas  ses  parents.  Gilles  n'eut 
pas  ce  courage.  Recula-t-il  devant  le  courroux  de  Chapelain, 
céda-t-il  à  la  jalousie  qui  commençait  à  l'animer  contre  Ni- 
colas? «  Ce  petit  drôle,  disait-il,  avec  un  air  de  mépris  et  de 

*  Recueil  manuscrit  provenant  de  M.  Alexis  Monleil,  et  cité,  dans  une  note 
de  l'édition  de  Talleraant  par  Paulin  Paris,  1855,  t.  IV,  p.  44. 

^  C'est  bien  cette  pièce  qui  a  donné  lieu  à  la  parodie  de  Cinna  ;  ces  trois 
vers  le  prouvent:  Au  mépris  du  public  ta  satire  m'immole.  Et  le  Percé  m'a 
peint  d'une  couleur  si  noire,  Que  toute  ma  faveur  n'a  pu  sauver  ma  gloire.  » — 
On  sait  que  la  scène  IV,  du  Chapelain  décoiffé^  commence  par  ces  mots  : 
Perce' jusqu'au  profond  du  cœur. 

3  Sur  Puimorin.  V.  M.  Gaston  Bizos,  Les  frères  de  Hoileau-Despréaux, 
p.  27  à 36. 

*  On  ne  sait  pas  la  date  précise  de  cette  anecdote,  rapportée  par  le  Bolœanay 
Brossfttte.  {Comment,  sur  le  vers  90  de  la  satire  IV,  et  les  mémoires  de  Louis 
Racine,  p.  226.  Mais  le  fait  a  dû  se  passer  avant  la  brouille  de  Racine  et  de 
Molière.  En  effet,  les  mêmes  auteurs  nous  apprennent  que  les  deux  poètes 
travaillèrent  à  frais  communs  à  mettre  en  quatrain  la  spirituelle  réponse  de 
Puimorin.  C'est  après  le  18  décembre  1665,  que  Racine  et  Molière  se  brouil- 
lèrent. 


-  .       -■  -      ..'*.  :..  11*:.:  a   :i    la 

-rSL  •-.-"  -=._  .  .«êiine  frère. 

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■      *  -  -  :         ;:?■::.•  zl-:..eau.  pour 

-    -  .    l'.iz  a.ix    bëi.c5 

■--     •..::.r.:^    un    bouc 

.  •   ^-^  -  .  ■._■.■-:.••-.  s:e   no-ivelle. 

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N.i  >  -        .-  -•t  —  i.:  "35  frelons  qui 

:S  -.   f .  ". :-  i:.-.  ses  vais- 
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:   X-    ,  .       ■-.<:..■  ...   -.:-.:.  ff;-r.-r.  de  M    d'Etmery^ 

i.  l\     .  .  > 

*  P..':  ;•  .'                        •  :.--^  aV  Colteti,  l.  V,  p.  469. 

1:>  ».  >  >.-  A  vv         ■        -.  ::-.■...  !i  fjveur  à  l'importunitèM. 

uesv-.-:  iÂ>  :■:.":■  :  -  .  •  '  -=■  '  r  :ir  B:-:  '-au  el  qui  parut,  soit  à  la 
tiii  d-:  \'yX\  -.  ..  A.:  : ;■■-•..:•  l  ô-^ 

'  Cos  V:  >.  >-;.:■  "■  -  ■  ■  >  ■  '.  .  "■  ■  r  -*  -  ^*  1674.  Pari?.  Tbiem*.  iD-4", 
paruiv.r.  :  c-i-  a  l ::'  .  :.  ■-  ?  i-îc-  -.-....-  lie  loG6.  Ils  nélaient  pas  encore 
ilan^   "t- il. .0:1,  -i-.e  "e  H:.:rv.  q.:"  B:-  -rii  j;:p-îile  «  moDstrueuse  ». 


y 


n 


LA  LEGENDK    DE  BOILEAU  481 

Ce  n'est  pas  tout,  poussant  encore  plusloin  l'audace,  il  inséra 
dans  son  Discours  au  Roi  des  vers  où  Chapelain,  sans  être 
nommé,  était  désigne  par  une  de  ses  œuvres  : 

L'autre  en  vain  se  lassant  de  polir  une  rime 
Et  reprenant  vingt  fois  le  rabot  et  la  lime, 
Grand  et  nouvel  effort  d'un  esprit  sans  pareil, 
Dans  la  fin  d'un  sonnette  compare  au  soleil^. 

Et  non  content  de  cette  allusion  transparente,  il  ajoute 
ensuite  : 

Sur  le  haut  Hélicon  leur  veine  méprisée 

Fut  toujours  des  neuf  sœurs  la  fable  et  la  risée, 

Calliope  jamais  ne  daigna  leur  parler 

Et  Pégase  pour  eux  refuse  de  voler. 

Ces  attaques,  à  la  vérité,  n'étaient  pas  les  premières.  Déjà, 
en  1663,  deux  vers,  assez  bénins  du  reste,  avaient  été  déco- 
chés contre  Chapelain  : 

Je  ne  puis  arracher  du  creux  de  ma  cervelle 

Que  des  vers  plus  forcés  que  ceux  de  la  Pucelle  *. 

L'année  suivante,  avait  paru  dans  la  satire  IV  le  charmant 
passage  qui  commence  par  ces  mots  : 

Chapelain  veut  rimer  et  c'est  là  sa  folie  •*. 

Toutes  ces  malices  ont  le  tort  d'être  postérieures  à  1663, 
c'est-à-dire  à  l'époque  où  le  roi 

Jette  enfin  sur  la  Muse  un  regard  favorable  ^ 


*  Disc,  au  Roi,  v.25  à  28.  Ces  quatre  vers,  ainsi  que  les  quatre  qui  précè- 
dent el  les  quatre  qui  suivent,  ne  sont  pas  dans  la  suite  du  nouveau  Recueil 
de  plusieurs  et  diverses  pièces  galantes  de  ce  temps,  (A  la  sphère)  1665,  où 
le  Discours  au  l'oi  a  été  publié  pour  la  première  fois  (p.  82  à  86).  Les  douze 
vers  (21  à  3*?)  ne  sont  pas  non  plus  dans  Tédiliou  monstrueuse. 

«Sû^  Ky/,  v.29et30. 

3  Sat.  IV,  V.  90  à  102.  Au  lieu  de  Chapelain  qu'on  lisait  dans  Téd.  de  1665 
(à  la  sphère),  Nouveau  Rec  de  plusieurs  et  diverses  pièces  galantes^  etc., 
p.  59,  il  y  avait  dans  Téd.  monstrueuse  Lisiraon,  et  dans  i'éd.  authentique 
de  1666  Ariste. 

^Sat,  F,v.  82. 

33 


LA   r.EGENDE    HK    BOILEAU  483 

Interdire  à  mes  vers,  dont  peut-être  il  fait  cas, 
L'entrée  aux  pensions,  où  je  ne  prétends  pas  *. 

Mais  je  vois  aussi  dans  la  même  pièce  un  sentiment  d*hu- 
meur  et  de  dépit  qu'il  ne  cherche  pas  même  à  dissimuler, 
lorsqu'il  s'écrie  à  propos  de  Chapelain: 

Qu'il  soit  le  mieux  rente  de  tous  les  beaux  esprits, 
Comme  roi  des  auteurs  qu'on  l'élève  à  l'empire. 
Ma  bile  alors  s'échauffe  et  je  brûle  d'écrire  : 
Et  s'il  ne  m'est  permis  de  le  dire  au  papier. 
J'irai  creuser  la  terre  et  comme  ce  barbier 
Faire  dire  aux  roseaux,  par  un  nouvel  organe  : 
Midas,  le  Roi  Midas  a  des  oreilles  d'âne  -, 

Ce  que  j'aime  moins  encore,  ce  sont  les  détours  qu'il  em- 
ployait pour  faire  passer  ses  railleries  contre  Chapelain,  quand 
il  les  lisait  dans  certaines  compagnies.  A  l'entendre  dire,  il 
ne  récitait  pas  son  œuvre,  mais  celle  d'un  bel  esprit  deCaen, 
nommé  Delasson,  tout  à  fait  inconnu  d'ailleurs^.  Sans  doute 
il  n'avait  pas  recours  à  cette  sut)ercherie,  pour  décliner  la 
responsabilité  de  ses  malices,  mais  pour  leur  donner  plus  de 
saveur  et  de  crédit;  confessons  pourtant  que  sa  victime  et  les 
amis  de  sa  victime  avaient  quelque  droit  de  s'en  indigner  '. 
C'était  en  tout  cas,  une  ruse  indigne  de  lui  et  je  comprends 
que  i)lus  tard,  il  n'en  ait  rien  dit  à  Brossette.  Et  si  d'autre 
part,  son  commentateur  n'a  été  que  son  écho,  en  répétant 
que  Chapelain  supporta  patiemment  les  railleries*,  Tauteur 

*  Sat.  IX  V.  307  à  310. 

'Sut.  IX.  V.  218  à  224.  M.  Perrault  le  médecin  voulut  faire  à  notre  au- 
teur un  crime  d'Etat  de  ce  vers  (le  224*)  comme  d'une  maligne  allusion  au 
Roi.  Brossette. —  Il  est  certiin  que  dans  ce  vers,  imité  de  Perse,  Boileau  ne 
songeait  qu'à  Ciiupelain,  mais  il  faut  avouer  que  le  sens  qui  seprés'^nte  d'abord 
à  la  pensée,  c'est  de  voir  dans  Midas,  non  pas  Chapelain,  mais  ceux  qui 
rélevaient  à  l'empire  et,  sinon  le  Roi  lui  même,  au  moins  Colbert. 

3  Lettres  de  Jea?i  Chapelain.  CCXXII,  à  M.  de  Grentemesnil,  13  mars  1665, 
t.  I,  p.  38.  Si  c'était  dans  un  écrit  public  que  Chapelain  eût  produit  une  pa- 
reille accusation,  on  pourrait  en  douter;  mai«<  c'est  dans  une  lettre  inlirae  que 
Je  vieil  académicien,  sortant  à  peine  de  maladie  et  naturellement  inquiet  de 
ces  attaques,  articule  le  fait  :  il  mérite  donc  toute  confiance.  —  Aurait-il  été 
trompé?  C'est  peu  probable. 

*  uj'ay  assHz  de  grandeur  de  courage  pour  regarder  au  dessous  de  moy 


4  84  TA  LKGF.XDE    UV.    lîOILKAU 

(le3  satires  était  bien  mal  informé  ou  sa  mémoire  était  sin- 
gulièrement  infi'lèle.  Le    vieux  rimeur  manifeste,  au    con- 
traire, flans  sa  correspondance  une  indi^rnation  qui  ne  prend 
pasla  peine  de  se  contenir.  C'est  d'abord  une  lettre  du  mois 
de  février  à  M.  de  Grontemesnil  contre  certains  libelles  qu'ont 
fails  contre  lui  quelques  ['Oètes  du  Pont- Neuf,  quelques  chan- 
tres de  ténèbres  qui  se  veulent  faire  connaître  en  s'adressant 
à  lui,  quoiqu'ils  ne  soient  pas  seulement  de  sa  connaissance. — 
La  plus  grande  partie  de   la  lettre  est  perdue,  mais  elle  dé- 
signait certainement  par  son  nom  Boileau-Despréaux  et  de- 
mandait au  gentilhomme  normand  ce  qu'il  fallait  penser  des 
allégations  du  jeune  satiiique.  Surla  réponse  de  Grentemesnil 
qui  démentait  cette  calomnie,  Chapelain  s'emporte  avec  vio- 
lence contre  «le  nommé  Despréaux  »,  qu'il  traite  de  farceur  et 
de  fiipon,  et  confond  avec  la  basse  canaille  des  poètastres  af- 
famés. Le  roi  des  beaux  esprits  n'otait  pas   tendre,  lors  que 
Ton  froissait  sa  vanité,   confite  en  apparente  modestie,  mais 
quand  il  accusait  Despréaux  de  a  vilaine  envie  »  avait-il  tou- 
àfait  tort?  Il  faut  convenir  néanmoins  que  l'attaquer  ouvert 
tement  était  un  acte  de  courage  et  d'un   courage  téméraire. 
La  lettre  même  que  nous  venons  de  citer  en  fournit  la  preuve. 
Non  pas  qu'il  y  eût  en  1663  beaucoup  de  hardiesse  et  d'ori- 
ginalité à  penser  du  mal  de  la  Pucelle.  Sur  ce  point  depuis 
l'apparition  du  poème,  si  longtemps  attendu,  >i  solennellement 
annoncé,   la  Mesnardière  et  Linière  n'avaient  rien  laissé  à 
oser  et  à  inventer.  On  connait  la  jolie  épigramme  quîe  le  der- 
nier fit  alors  courir  : 

La  France  attend  de  Chapelain, 
Ce  rare  et  fameux  écrivain, 
Une  merveilleuse  Pucelle. 
La  Cabale  en  dit  force  bien  ; 
Depuis  vingt  ans  on  parle  d'elle. 
Dans  six  mois  on  n'en  dira  rien^. 

«Je  ne  m'amuserai  point,  écrivait  Tallemant  à  critiquer  ce 


tous  ces  traits  envenimés  que  me  tire  la  basse  canaille  et  la  vilaine  envie  des 
poètastres  affamés.»  làid,  p.  388.  Voilà  comment  il  supportait  patiemment. 
1  Tallemant,  Chapelain,  t.  IV,  p.  166. 


LA  LEGENDE   DE   BOILKAU  485 

livre,  je  trouve  qu'on  lui  fait  honneur*.»  Tant  était  grand  le 
nombre  des  gens  désabusés. 

Boileau  en  convient  lui-même  avec  plus  de  malice  encore 
que  de  sincérité  : 

Mais,  lorsque  Chapelain  met  une  œuvre  en  lumière, 
Chaque  lecteur  d'abord  lui  devient  un  Linière^. 

Le  courage  ne  consistait  pas  à  penser,  mais  à  dire  et  à  pro- 
clamer. Vaniteux  à  Texcès,  gonflé  de  suffisance  par  l'encens 
de  ses  flatteurs,  le  vieux  poète,  doux,  complaisant,  officieux, 
sincère^,  cessait  d'être  un  a  si  bon  homme»  quand  on  ne  parlait 
pas  de  lui  pour  le  louer.  Les  gros  motjs  et  les  injures  se  pres- 
saient sous  sa  plume,  nous  Tavons  vu,  mais  son  courroux  ne 
s'évaporait  pas  seulement  en  paroles  :  il  déchaînait  contre  le 
téméraire  qui  avait  osé  l'outrager»  tout  le  haut  et  tout  le  bas 
Parnasse,  *  il  armait  pour  sa  vengeance  tous  ses  amis  de  la 
ville  et  de  la  Cour.  Et  il  en  avait  de  fort  puissants  et  de  très 
peu  endurants  qui  facilement  auraient  passé  de  la  colère  aux 
menaces  et  des  menaces  aux  coups  de  bâton  ^.  De  ce  nombre 
était  Montausier,  esprit  austère  et  farouche,  dont  les  colères, 
môme  littéraires,  n'étaient  pas  tendres.  Ce  vertueux  et  rude 
personnage  ne  parlait  rien  moins  que  d'envoyer  l'audacieux 
satirique  rimer,  la  tête  en  bas,  dans  la  rivière  ou  de  l'expédier 
aux  galères  couronné  de  lauriers  ^.  Moins  vive  dans  l'expres- 
sion, mais  plus  dangereuse  au  fond  était  la  rancune  d'un  autre 
protecteur  de  Chapelain,  l'impassible  Colbert.  Celui  que  Ma- 
dame de  Sévigné  appelait  l'homme  de  marbre,  virum  marmo- 
reum^  ne  faisait  point  de  menaces  ridicules  ;  mais  il  agissait. 

1  /rf.,  ib.  p.  164. 

2  Sa^/X,  V.  235  et  236. 

3  Ib.  V.  215. 
^  Bolœana, 

»  Chapelain  le  dit  au  moins  dans  sa  lettre  à  M.  de  GrentemesDil,et  quoique  les 
procédés  violents  répugnent  à  son  humeur  pacifique  il  n'est  pas  au  fond  fâché 
de  voir  ses  amis  dans  ces  brutales  dispositions:  «  l'aveu  du  libelle  lui  (à  Boi- 
leau) pouvait  attirer  une  distribution  qui  seroit  bien  autrement  la  risée  du 
monde  que  ces  impertinentes  compositions,  ceux  qui  lui  parloient  estant  tout 
propres  à  l'en  chastiersur  le  champ, sans  m'en  demander  ;ivh\€t  mesme  contre 
mon  intention .  Lettres  de  Jean  Chapelain^  t.  Il,  p.  387,  388. 

«  Brosselte,  Cornm.  du  v.  136  de  la  Sat.  IX.—  et  du  Disc,  sur  la  satire. 


LA  LEGENDE   DE   BOILEAU  487 

jà  vieilles  et  passées  au  nombre  des  vérités  acquises.  Il  est 
i  moins  certain  qu'autour  de  lui,  on  essayait  de  le  retenir 
1  lui  montrant  le  danger  de  ses  railleries*.  Il  s'y  obstinait, 
lalgré  ces  remontrances,  mettant  un  point  d'honneur  litté- 
aire  à  ne  pas  avoir  Tair  d'approuver  des  sottises   par  son 
ilence,  mais  aussi  pour  ne  pas  abandonner  une  mine  qu'il 
.'entendait  si  bien  à  exploiter.  L'animosité  dont  il  fit  preuve 
ians  cette  guerre  impitoyable  a  plus  tard  trompé  les  con- 
temporains et  la  postérité,  et  commencé  par  le  tromper  lui- 
même.  Il  a  cru  qu'au  moment  où  il  l'entreprenait,  il  avait  un 
plan  et  une  tactique.  Je  crois  avoir  montré  quelle  avait  été 
l'occasion  de  cette  guerre  :  elle  est  d'abord  venue  du  hasard. 
Et  quant  à  un    système  formulé,  précis,  entrevu  d'avance, 
lorsque,  sans   parti-pris,  l'on  examine   ce  que  Boileau,  dans 
les  premiers  temps,  a  dit   non  seulement  contre  Chapelain, 
mais  contre  ses  autres  victimes,  on  est  tout  étonné.  Sous  ces 
jugements  si  nets,  si  tranchants,  l'on  ne  ti'ouve  ni  doctrine 
accusée,  ni  enseignement  clairement  exprimé.  Racine,  il  est 
vrai,  reconnaissait  à  son  ami  un  génie  merveilleux    pour  la 
satire,  un  jugement  excellent  qui  lui  taisait  discerner  ce  qu'il 
fallait  louer  de  ce  qu'il    fallait  reprendre  ^.  Ce  discernement 
précieux,  Boileau  l'eut  de   bonne  heure,  en  effet,  mais  il  le 
devait  plutôt  à  l'instinct  qu'à  des  principes  arrêtés.  Rarement 
dans  ses  premières  œuvres,  il  donne  la  raison  de  ses  éloges 
ou  de  ses  injures.  11  attaque,  il  déchire,  il  emporte   souvent 
la  pièce,  mais  de  quel  droit  et  pourquoi  ?  il  n'a  garde  de  le 
dire.  Il  excelle  à  trouver  des  épithètes    dénigrantes,  il  a  le 
tour  qui  tue  :  on  est   condamné  dès  qu'il   a   parlé  :    mais  le 
public  doitle  croire  sur  parole.  Lui-même  a  parfaitement  dé- 
peint et  caractérisé  son  rôle  : 

Le  mérite  pourtant  m'est  toujours  précieux, 
Mais  tout  fat  me  déplait  et  me  blesse  les  yeux. 
Je  le  poursuis  partout  comme  un  chien  fait  sa  proye, 
Je  ne  le  sens  jamais  qu'aussitôt  je  n'aboyé  ^. 

*  Récréatiom  littéraires^  note  ras.  de  Brossetté,  p.  24.  C'est  Molière  qui 
«  vouîoit  le  détourner  de  racharnement  qu'il  faisoit  paroitre.  » 

'  Racine,  édit.  Hachette,  in-8",  t.  VU.  —  Lettre  113  à  J.-B.  Rarine  du 
3  juin  1693. 

3  Satire  VU,  v.  55  à  5S. 


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îî', .'  ;, ,  •    -V.'   . .  .,  *,    %.  •     ,.    _  ^=    _  .■■......  .ir  j.é.  es  choisies  tant 

'    •-         .    v<,<,  ••.  ^'r/.'    -,-      :  :■.■::  i.\'>ry  r  ">•  ^./rv^tr.  comédie  par 
■'■'■''  ■■         ■■  '■'■<  '. -r  V.       i'- '.  1-::-:    ■:;..::►:   r:   ."i-is  au  iecieur.  Paris. 
't .  '  *     \^Ah.  l.f,  y.  i . ..t-'j^i:  *:v.  ■. .  IT  â".-;:",  .  iciev-  d'iinpcmer  du  17  mai. 


LA  LÉGENDE   DE   BOILEAU  489 

quand  il  épouse  encore  les  inimitiés  de  son  frère  Gilles,  veut-il 
parler  d*un  pédant, 

Sa  plume  pour  rimer  rencontrera  Ménage*. 

Plus  tard,  il  se  brouille  avec  son  frère  et  se  raccommode 
avec  le  docte  auteur  de  la  Requête  des  Dictionnaires  y  il  n'a 
qu'à  changer  de  rime  et  de  victime,  et  le  sens  restera  le 
même. 

Si  je  veux  d'un  galant  dépeindre  la  figure, 
Ma  plume  pour  rimer  trouve  Tabbé  de  Pure. 

Que  lui  importe  le  nom,  pourvu  qu'il  soit  celui  d'un  écri- 
vain médiocre,  et  qu'il  s'ajuste  bien  avec  la  mesure.  Les 
exemples  de  cette  indifférence  abondent.  Se  trouve-t-il  trop 
serré  autour  d'une  table  carrée,  il  trouve  tout  de  suite  une 
malice  à  double  entente,  et  dont  l'équivoque  déplaisait  si 
fort  à  Boursault. 

Jugez  en  cet  état,  si  je  pouvais  me  plaire. 
Moi  qui  ne  compte  rien,  ni  le  vin  ni  la  chère, 
Si  l'on  n'est  plus  au  large,  assis  en  un  festin. 
Qu'aux  sermons  de  Cassaigne... 

Mais  la  rime  avec  festin  se  dérobe,  où  la  découvrir?  —  Vous 
voilà  bien  embarrassé,  lui  dit  Furetière,  que  ne  placez-vous 
là  l'abbé  Cotin  ^  ?  Et  sans  autre  raison  que  ce  hasard,  le  vieil 
académicien,  à  la  fois  prédicateur  et  faiseur  de  vers  galants, 
entre  dans  un  hémistiche,  qui  doit 

Faire  siffler  Cotin  chez  nos  derniers  neveux  3, 

A  quoi  tient  donc  la  destinée?  A  son  tour,  Molière,  prendra 

1  Sut.  II f  V.  18.  La  substitution  se  fît  dans  la  première  édition  authen- 
tiqua . 

'  Commentaire  de  Brossette  sur  le  vers  60  de  la  Sat.IlI .  —  Notez  que 
Boileau  ne  raille  point  Colin  comme  mauvais  poète,  mais  comme  prt^dicateur 
peu  couru.  Or,  à  cette  époque,  l'abbé  avait  renoncé  à  la  chaire.  Il  se  fait 
dire,  en  effet  dans  la  critique  desintéressée  sur  les  Satires  du  temps  : 
u  Vous  qu'il  traîLe  de  prédicateur  d'aujourd'huy,  quoy  que  vous  ayiez  cessé 
»  de  prescher  avant  qu'il  commi^nça  (sic)  d'escrire.^  P.  12. 

3  Sat.  /A',  V.  82. 


490  ls\  LEGENDE   DE   BOILEAU 

celte  vi«:time  J'ocoasioii,  la  mettra  sur  la  scène  sous  le  nom 
de  Trissotin,  et  cotnme  pour  se  justifier  de  cette  personnalité 
cruelle,  renverra  à  T.» Auteur  des  Satires  '.  » 

Ainsi  procède  le  ni'^rlant  critique.  Les  médiocrités  pré- 
somptueuses, les  demi-talents  arrivés  à  une  sorte  de  célébrité 
s'offrent  pêle-mêle  à  ses  rejrards.  avec  la  foule  des  oubliés  et 
des  obscurs.  Il  ne  choisit  pas,  il  saisit  au  hasard,  persuadé 
qu'en  s'altaquant  au  premier  venu,  il  ne  peut  manquer  de 
tomber  sur  un  mauvais  auteur.  Frapper  plus  fort  que  juste, 
étonner  par  la  hardiesse  et  le  redoublement  de  ses  coups, 
plutôt  que  par  leur  parfait  à-propos,  voilà  sa  méthode  et  sa  tac- 
tique. Et  il  en  convient  sans  honte. 

Faut-il  d'uu  froid  rimeur  dépeindre  la  niauie  ? 
Mes  vers  comme  un  torrent  coulent  sur  le  papier, 
Je  rencontre  à  la  fois  Perrin  et  Pelletier, 
Bardou,  Mauroy,  Boursault,  Colletet,  Titreville, 
Et  pour  un  que  j'en  veux,  j'en  trouve  plus  de  mille. 
Aussitôt  je  triomphe,  et  ma  muse  en  secret 

S'estime  et  s'applaudit  du  beau  coup  qu'elle  a  fait  *. 

« 

Que  la  tête  lui  tourne,  Bonnecorse  et  Pradon  prendront  la 
place  laissée  vide  par  Bardou,  Mauroy  et  Boursault  ^.  Pour- 
quoi rougirait-il  de  cette  versatilité,  se  refuserait-il  le  plaisir 
de  changer  de  proie.  11  s'est  fait  un  devoir  de  conscience  de 
n'épargner  personne. 


En  vain,  je  veux  au  moius  faire  grâce  à  quelqu'un, 
Ma  plume  aurait  regret  d'en  épargner  aucun  ^ 

Je  voudrais  pouvoir  convenir  que  ces  exécutions  en  masse 
ont  été  d'un  salutaire  effet,  et  que  la  cause  du  bon  goût  y  a 
gagné  tout  autant  que  la  célébrité  de  l'exécuteur.  Plusieurs 
raisons  m'empêchent  de  suivre  entièrement  sur  ce  point  l'opi- 
nion commune.  La  première,  c'est  que  Boileau  n'a   rien  ou 

1  Femmes  savantes,  acte  III,  se.  5.—  Il  faut  observer  pourtant,  que  la 
partie  odieuse  du  rôle  de  Trissotio  ne  pouvaitconvenirà  l'abbé  Cotin.  Celui-ci 
a  fourni  seulement  Toriginal  du  poète  ridicule. 

«  Sat,  VII,  V.  42 à 48. 

^  Ces  trois  noms  ne  disparurent  qu'après  168*2. 

*  Sflf/.    V7/,  V.  51  i'tr)2. 


LA    LEGENDE  DE   BOILEAU  491 

presque  rien  appris  au  public  sur  le  mérite  de  ses  victimes. 
Le  plus  souvent  il  s'en  prend  à  des  auteurs  décriés  ou  ou- 
bliés. Il  le  reconnaît  en  plus  d'un  passage. 

Ceux  qui  sont  morts,  sont  morts. 
Le  tombeau  contre  vous  ne  peut-il  les  défendre  *  ? 

Ma  principale  raison ,  c'est  que  dans  cette  guerre  d'épi- 
grammes,  de  bons  mots,  d'épithètes  déshonorantes,  il  n'a 
presque  jamais  édifié  ses  lecteurs  sur  la  justice  de  ses  con- 
damnations. 

y  y  vois  des  malices  heureusement  tournées,  qui  portent 
larement  à  fuux,  je  n'y  vois  pas  de  leçons.  De  nos  jours 
Sainte-Beuve,  pour  montrer  l'utilité  littéraire  de  ces  premiè- 
res attaques,  a  dit  finement  :  «  11  f<illait  beaucoup  d'audace 
et  de  courage  pour  tenter  son  entreprise.  Il  ne  s'agissait  rien 
moins  que  de  dire  aux  littérateurs  les  plus  en  vogue,  aux 
académiciens  les  plus  en  crédit  :  t  Vous  êtes  de  mauvais  au- 
teurs, ou  du  moins  des  auteurs  très  mélangés.  Vous  écrivez 
au  hasard  ;  sur  dix  vers,  sur  vingt  et  sur  cent,  vous  n'en  avez 
qu'un  ou  deux  de  bons  et  qui  se  noient  dans  le  mauvais  goût, 
dans  le  style  relâché  et  dans  la  fadeur  ^.  »  A  merveille,  c'est 
parler  d'or,  mais  qui  parle  ainsi?  C'est  Sainte-Beuve  et  non 
Boileau.  Peut-on  même  employer  le  mot  d'entreprise,  dire 
qu'il  eut  dès  lors  un  plan  concerté  d'avance,  qu'il  a  débuté 
par  une  guerre  en  règle?  Il  obéit  à  son  humeur  grondeuse, 
il  exerce  sa  verve  satirique  ;  c'est  plus  tard  seulement,  après 
le  grand  bruit  fait  autour  de  ses  premières  œuvres,  qu'il  en 
verra  l'effet  et  en  mesurera  la  portée.  Ce  qu'il  a  fait  d'abord 
par  instinct,  il  le  fera  par  dessein  ;  la  «  fureur  extrême  »  à 
laquelle  il  obéissait  dans  le  principe  deviendia  dès  lors  une 
entreprise  poursuivie  avec  une  ténacité  passionnée  :  de  sim- 
ple ferrailleur  il  deviendra,  encore  plus  et  mieux  que  Molière, 

Dans  les  combats  d'esprit  savant  maître  d'escrime  '. 

Désormais,  critique  de  profession,  il  attaquera  ceux  qui 
riment  contre  Minerve,  au  nom  de  Minerve  et  de  la  vérité. 

1  Saf.  IX,  V.  94,  95. 

*  Sainte-Beuvo,  Causrricn  du  lundi,  o*  édit.,  tome  VJ,  p.  5U0. 


4S'*  -VA  LEGENDE  DE   BOILEAL" 

Mais  '/est  ja  seulement  sa  seconde  manière  :  au  dcbat. 

Il  Le  rê&iîie  point  aj  torrent  qii  ît-niraine- 

pai«.  et  cela  ne  tai'Jj  |>oint  à  arriver,  quand  il  se  rii  applaudi, 
ij  prit,  avec  la  conscience  de  «a  force,  le  sentiment  plus  clair 
de  sa  i'iiission  :  i.  vo'i.ut  v-.re  *-i  ûr.  «.-m  rcàliiî  le  grand  jus- 
ticier du  Parr^asse. 

On  ne  saurait  trop  insister  sur  ce  point  :  iî  n'en  était  pas  là 
dans  ses  premières  satires.  Il  a.  du  reste,  dans  son  Discours 
an  Roi,  exprimé,  beaucoup  mieux  i|u'on  ne  saurait  le  faire, 
cette  façon  d'allor  à  l'aventure,  sans  dessein  prémédité  : 

Des  sottises  dj  teuip»  je  comi.  -se  mon  fiel. 
Je  vais  de  to'Jtes  narts  où  ri.e  :."iide  ma  veine. 
Sans  tenir  en  marchant  «me  r.'«ite  certaine 
Et  sans  ^êner  ma  pliime  en  ce  libre  métier. 
Je  la  laisse  au  hasard  courir  sur  le  papier-. 

Un  instinct,  mal  défini,  mais  généralement  sûr.  lui  fait  sen- 
tir la  médiocrité  er  les  mots  pour  la  signaler  lui  arrivent  sans 
peine:  peu  précis,  mais  forts  et  expressifs,  arrangés  dans  un 
cadre  heureux,  ils  frappent  vivement  Timagination  et  entrent 
dans  la  mémoire  pour  n'en  plus  sortir.  Tantôt  il  représente 
Colletet 

ciotté  jusqu'à  l'échiné, 

Allant  chercher  son  (lain  de  cuisine  en  cuisine, 

Tantôt,  lassé  du  travail  de  la  rime,  il  s'écrie  piteusement  : 

J'envie  en  écrivant  le  sort  de  Pelletier, 
de  ce  Pelletier  qu'il  a  cependant  tout  entier 

Roulé  dans  son  office  en  cornets  de  papier. 

D'autrefois,  se   souvenant,  à  propos,  d'une   exclamation  de 
Balzac,  il  admire  le  bienheureux  Scudéry  : 

Ses  écrits,  il  est  vrai,  sans  art  et  languissants 
Semblent  élre  formés  en  dépit  du  bon  sens'. 

«  Sat.   VIL,  V.  94. 
^  Discours  au  roi^  v.  76  à  80. 

3  Sat,  1.  V.  77  et7«.  —  Sat.  Il,  v.76.  —   Snt    IlL  v    127, 128.  —  Sat. 
//,  V.  77  à  ST). 


.■:l 


LA  LEGENDK    DE  BOILEAU  493 

Ces  jugements  mordants  semblent  beaucoup  dire:  en  réa- 
lité, ils  n^apprennent  pas  grand  cbose  au  lecteur  qui  pour- 
tant les  accepte  bon  gré  mal  gré,  et  condamne  ce  que  con- 
damne le  poète,  pour  ne  pas  se  condamner  lui-même  et  se 
confondre  dans  la  foule  des  sots,  toujours  prêts  à  lire  un  mau- 
vais ouvrage  * . 

Une  épithète  et  tout  est  dit  :  l'auteur  est  à  la  mer;  c'est  le 
coup  de  balai  du  marin  qui  nettoie  le  pont  et  jette  par  dessus 
bord  tout  ce  qui  Fencombre.  Boileau  n'a  pas  même  besoin, 
pour  pousser  dédaigneusement  les  uns  sur  les  autres  les  écri- 
vains médiocres  en  dehors  du  Parnasse,  de  chercher  des  quali- 
fications outrageantes,  il  a  Tart  de  faire  des  injures  de  leurs 
noms  même,  par  la  façon  dont  il  sait  les  grouper  : 

Je  rencontre  à  la  fois  Perrin  et  Pelletier, 
Bardou,  Mauroy,  Boursault,  Colletât,  Titreville^. 

A  la  même  époque,  Molière  déblayait  aussi  le  Parnasse, 
mais  comme  il  procédait  avec  plus  de  précision  et  de  doc- 
trine !  Sans  en  avoir  Tair,  il  donne  des  leçons, 

Et  sa  plus  burlesque  parole 
Est  souvent  un  docte  sermon  ^, 

Quelle  finesse  et  quelle  sûreté  de  critique,  même  dans  la 
farce  des  Précieuses  I  Comme  les  travers  et  les  dangers  du  bel 
esprit  éclatent  à  tous  les  yeux  !  M'^«  de  Scudéry  n'est  pas  nom- 
mée, mais  pourrait-on  mieux,  par  la  seule  manière  plaisante 
de  Pexposer,  livrer  au  ridicule  «la  filophie  du  grand  Cyre*?» 
Et  quand  le  bonhomme  Gorgibus,  àla  fin  de  cette  inestimable 
bagatelle,  fait  sa  fameuse  sortie  :  «  Et  vous....  sottes  billeve- 
sées, pernicieux  amusements  des  esprits  oisifs,  romans,  vers, 
chansons,  sonnets  et  sonnettes,  puissiez-vous  être  à  tous  les 
diables  »  !  le  spectateur  sait  à  quoi  s'en  tenir  et  sort  de  cette 
leçon  littéraire,  instruit  et  édifié.  Le  fond  est  le  même,  mais 

*  Mais  ils  trouvent  pourtant,  quoiqu'on  en  puisse  dire,  un  marchand  pour 
les  vendre  et  des  sots  pour  les  lire.  Sat.  IT,  v.  81-82. 

2  Sat.  VIL  V.  44-45. 

3  Boileau,  Stances  sur  l'Ecole  des  femmes. 

^  C'est  là  le  point  de  départ  des  plaisanteries  contenues  dans  le  Dialogue 
des  héros  de  roman. 


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t"îr.':  :  .'.'^  .:-:.'  ■;*  :  ...  .-•  *.  -:. .  •.  ît.s  0  -.inc'.r's  dont  le  bon 
.•■.':/i-:  r/,'.r.;i  .:»;.  .i  •;;.  -'i  v-.^j  :  --;:•.  _  ■■■::■  >:,  foouriïutitre  la  gen- 
til •';•.;':.   .'r'j;  -,-;  \ii\i-.':  a..-';r  a   î.:--?  hv-.-.:  I-'iilint»' : 

^>/fr.r.'.'-  <;fi  t.^.-n.'':-:  ishlnni:-.  ios  oh-j-ïCS-là  sont  mises. 
ioiH:i\(,t  il  lion^Jit  îiV';-;  Aî':o>te  et  s'écrie  : 

•   Ar.L  I,  :.r.   2 

'  \I.  JiiW-f.  I,"!ni;iiir»-,  Annales  polit,   ft   lift,  «lu  8  septembre  1889.  Cf. 

A,irr,l..f      liftrrn, ,'■':.  \.    ]\\^  p.  36. 


LA  LEGENDK    DK   BOII.EAU  4  95 

Kt  quoi,  vil  complaisant,  vous  louez  des  sotises  ! 

et,  quand  il  a  qualifié  de  cette  rude  manière  tous  les  faux  bril- 
lants où  chacun  se  récrie,  il  donne,  avec  un  emportement 
magistral,  la  preuve  de  son  dire  : 

Ce  style  figuré  dont  on  fait  vanité 

Sort  du  bon  caractère  et  de  la  vérité  ; 

Ce  n'est  que  jeu  de  mots,  qu'aff^ectation  pure, 

Et  ce  n'est  point  ainsi  que  parle  la  nature. 

La  preuve  peut  ne  pas  paraître  évidente  à  nos  yeux,  mais 
elle  a  fini  par  le  devenir  à  ceux  des  contemporains  et  long- 
temps la  postérité  s'en  est  contentée.  Pour  Molière,  c'était 
Tessentiel,  et  le  but  était  atteint. 

Ainsi  le  grand  maître,  que  les  apôtres  de  Vart  nouveau  ^^ro- 
clament  encore  aujourd'hui  «  celui  dont  les  dramaturges 
modernes,  doivent  s'inspirer  *  »,  ne  s'était  pas  contenté  de 
donner  le  signal  de  la  lutte  contre  le  bel  esprit  et  de  la  com- 
mencer. 11  poursuivait  et  achevait  la  victoire  en  exposant  des 
théories  et  des  raisons  claires  et  précises.  Boileau,  auquel  il 
avait  montré  le  chemin,  ainsi  qu'aux  autres,  en  faisait-il 
autant  ? 

Le  Misanthrope  qui  contenait  cette  leçon  de  goût  parut  en 
1666  :  la  même  année  Despréaux  publiait  la  première  édition 
de  ses  sept  premières  satires.  Si  Ton  demande  lequel  des  deux 
poètes  est  le  maître,  le  chef  d'école,  le  législateur  du  Parnasse, 
n'aura-t-on  pas  toute  raison  de  répondre  avec  assurance,  c'est 
Molière  ? 

Il  ne  faudrait  pas  pourtant  ne  voir  dans  Despréaux  qu'un 
simple  imitateur.  Dans  cette  voie  du  bon  sens  et  du  naturel, 
où  l'auteur  des  Précieuses  l'a  devancé  et  l'a  fait  entrer,  le 
jeune  satirique  apporte  quelque  chose  de  personnel,  un  prin- 
cipe régulateur  qui  manque  un  peu,  soit  à  Molière,  soit  à  ses 
autres  amis.  Disciple  sévère  des  grammairiens  et  des  stylistes 
de  l'âge  précédent  ^,  il  est  passionné  pour  la  pureté  et  la  cor- 

*  Conférence  de  M.  Henry  Bauer,  sur  l'art  nouveau  au  théâtre,  du 
12  avril  1890. 

'  Bossuet,  dans  son  discours  de  réception  disait  à  l'Académie  «  la  justesse 
est  devenue  par  vos  soins,  le  partage  de  notre  langue.  » 


4S^f\  LA    LKriRNDF    DE  HOU-EVr 

rection  de  la  forme.  Ci?  ([u\\  enseignera  dans  /M/7  puétique 
avec  tant  d'insistance. 

Surtout  qu'on  Vos  ôoîits  I.i  langrie  révérée 

Dans  vos  idus  grands  excès  vous  soit  toujours  sacrée,  * 

il  est  le  premier  à  le  pratir[uer  pour  son  compte.  Avec  le  souci 
dé  la  langue,  il  a  celui  de  la  versification  :  il  s^inquiète  in- 
cefisaoïment  de  la  rime  : 

Dans  ce  rude  métier  où  mon  esprit  se  tue. 
Eu  vain,  pour  la  trouver,  je  travaille  et  je  sue. 

Ce  qui  le  tourmente,  c'est  qu'il  s'acharne  à  la  mettre  d'ac- 
cord avec  la  raison,  à  concilier  l'expression  et  le  bon  sens.  Il 
l'a  dit,  dans  des  vers  inoubliables  : 

Mais  mon  esprit,  tremblant  sur  le  choix  de  ses  mots, 
N'en  dîra  jamais  un.  s'il  ne  tombe  à  propos. 
Et  ne  saurait  souffrir  qu'une  phrase  insipide 
Vienne  à  la  fiu  d'un  vers  remplir  la  place  vide. 
Ainsi  recommençant  un  ouvrage  vingt  fois, 
Si  j'écris  quatre  mots,  j'en  effiicerai  trois. 

Ou  le  voit  :  il  est  tout  entier  à  cette  œuvre  ingrate  ;  per- 
sécuté par  un  désir  inassouvi  de  perfection, 

Il  plaît  à  tout  le  monde  et  ne  saurait  se  plaire  ^ 

Sur  ce  point,  ses  convictions  ne  sont  plus  à  faire  :  il  est, 
dès  le  début,  ce  (|u*il  sera  toujours,  le  maïayr  ou  le  confesseur 
du  travail  difficile-  Voilà  son  originalité,  son  lot  dans  l'œuvre 
commune.  Il  me  semble  cependant  qu'en  cela  même,  il  subit 
l'influence  du  génie  fécond  et  inspiré  qu'il  a  pris  d'abord  pour 
guide.  11  sent,  peut-être  mieux  et  plus  largement  qu'il  ne  le 
sentira  plus  tard,  que  l'art  ne  consiste  pas  uniquement  dans 
l'effort  soutenu,  et  qu'à  la  retenue  qui  est  Teffet  du  jugement, 
il  faut  joindre  la  hardiesse  qui  convient  à  la  liberté  '.   C'est 

*  Art  poétique^  I,  155. 

«  Satire  II,  v.  13  et  14,  —  v.  47  à 53,  —  v.  94. 

3  Ou  y  voit  la  hardiesse  qui  coDvieot  à  la  liberté  mêlée  à  la  retenue  qui  est 
l'efTel  du  jugeineat  et  du  choix.  Bossuet,  Disc,  de  réception  à  VAcadémi^t 
8  juin  1671, 


LA   LEGENDE   DE    BOILEAU  497 

alors  qu'il  demande  les" secrets  de  Tinspiration  spontanée  au 

Rare  et  fameux  esprit  dont  la  fertile  veine 
Ignore,  en  écrivant,  le  travail  et  la  peine  *. 

11  n'enferme  pas  encore  la  poésie  dans  des  limites  trop 
étroites,  dans  un  petit  nombre  de  cadres  fermés  qui  ne  peu- 
vent pas  s'élargir.  Comme  le  conseillera  plus  tard  Voltaire, 
il  donne  des  préférences  et  non  des  exclusions  •.  Celui  qui 
devait  reprocher  à  ce  même  Molière,  avec  une  sévérité  à  la 
fois  si  timorée  et  si  dédaigneuse,  d'avoir  sans  honte  allié 
Tabarin  à  Térence  ^,  n'était  point  alors,  si  Ton  en  croit  La 
Fontaine,  aussi  scrupuleux.  «  Vous  savez  »,  lui  fait  dire  l'au- 
teur de  Psyché,  «  combien  nous  avons  ri  en  lisant  Térence 
et  combien  je  ris,  en  voyant  les  Italiens  ;  je  laisse  à  la  porte 
ma  raison  et  mon  argent,  et  je  ris  tout  mon  soûl  *.»  Ses  amis 
qui  l'étonnent  et  l'éblouissent  par  leur  fécondité  lui  laissent 
à  peine  le  temps  de  réfléchir  sérieusement  aux  conditions  de 
l'art.  11  assiste  émerveillé  aux  enfantements  de  leur  imagina- 
tion, et,  comme  il  a  pour  ainsi  dire  sous  les  yeux  le  génie  en 
action,  il  voit,  il  sent  qu'il  y  a  des  beautés  qui  se  dérobent 
aux  règles,  que  les  poétiques  n'enseignent  pas,  qu'elles  n'ai- 
dent même  pas  à  expliquer  et  à  comprendre.  Un  instinct  con- 
fus lui  révèle  que,  dans  les  affaires  de  goût,  le  sentiment, 
c'est-à-dire  quelque  chose  d'indéfinissable,  est  souvent  le  seul 
et  dernier  juge  :  un  juge  qui,  semblable  au  peuple  souverain 
de  Rousseau,  n'a  pas  besoin  d'avoir  raison.  11  le  dit  du  moins, 
en  termes  excellents,  dans  la  dissertation  qu'il  composa  sur 
la  Joconde  de  La  Fontaine.  «  Bouillon,  méchant  poète  »  ,  écrit 
Brossette,  aavaitaussimisen  vers  français  la  même  aventure... 
tirée  de  l'Arioste  *  ».  Les  beaux  esprits  n'étaient  pas  d'accord 
sur  la  préférence  à  accorder  aux  deux  ouvrages.  Parmi 
les  amis  de  Molière,  l'abbé  le  Vayer  était  pour  l'un,  un 
nommé  Saint-Gilles  se  déclarait  pour  l'autre.  Despréaux  fut 
peut-être  chargé  de  tenir  la  plume  par  les  arbitres  choisis 

*  Sat,  II,  v.  1  et  2. 

'  Lettre  du  15  avril  1743,  à  Vauvenargues. 
3  Artpoét,  m,  V.  398. 

*  La  Fontaine,  Psyché^  livre  I,  éd.  Lefèvre,  t.  I,  p.  399. 

*  Comment,  sur  le  vers  52  de  la  satire  X. 

31 


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ir  --r       .            :    .-     .  :.     :"  -:.. f  .-    ut.  .i  beauté    même 

:'..:■-:-:.:  — f   -.  rrS  :: -:  j'est  ua  jf^  ne 

1=1-  ....            >  .   — :  .  .-.:-.:-■... z.  i^ui  se  fie   au 

y.  :  '  ..  . .-       -.  -•  .  .  -  .1 ,'.'.  ;  L.L  l'^s  ie  Boileau 

:       .:          '    "*  •.  ■  -     "  ■  ^  ■  --  ^  frj.L.îe  heure,  lel 

-r  .....::.:    :  — -.    .  .  i.-.   r:  ;:  -::,.»l;e:'  de  Molière, 

■/t  ?....--..--..  :..   :   :- j_:    ....  :.f  ?..:  lis  résistera  i'eni- 

vrfuiri.:  ;...  *.....-.  '.       .._i.....  r    if  ji  surériorité  comme 

c:  :.  ".■..  >- .     .     ..    .■.--:.-....-?.■■:  ijres  '.a  première  édi- 

:..:.  ..'..-•.      :    -.  -   .^         •-         ".'.•.•..   Uiiiii  ression.  qui  est 
s.-v. :.:  ..;...  -       :     ...  .*  :..--.:.  jjres.  avait  été  un 

;  or:  :  .  ..:  ....  .  .    .   ■  :  .  ■  .  ..*:.:  .-.  :le!r.e5  voiles  dans  la 

c'j.t':::T.  I  ..    . -.    ....:.   ..  ."..      .  Y  ..t'  r:e  éiAit  accomplie. 

uV::!:.  .:.  -. -:  ...  :..  .f  .r...  :"  :.»  ' .:  :  ■.;!:•.  ■■  Beau.'oup  de 
lu::',  i:. -.riT"::  .\:  -.-  :  .:*t>::î':-  r.-./rrent  les  applaiidis- 
.SL:i.c:-:> '.  :  "..=  -  :  :  .[..:l..:.:  ;.>.  I-:S  j?r.<  î'-.SM'it  et  le  vulpraire 
ma'.::i  io.iorc:.:  .wo.  ■:.-.:.-;  ::-.  :  .r?  :t  .vj-jr?  iiiiéressés  protes- 
te reii:  ave."  i::..?  - .  !l:  •:  :.i;  sj-use.  L*;.l':.'é  Cot in.  entre  autres, 
fit  uue  sa'ti'.e  vi  e:.:  ■  ...  :::  .0  ::a:::-.;:  Mi^not  assura  le  débit, 
en  rempl.van:  :\  er.vel.  :  :-  :  '."êx:e!!eîits  biscuits,  recherciiés 
de  tout    l\iri<  ".  Bour>:-.  ;!:   :■  oïl:  os  a  la  Satyre  des  Satyres, 

'  Les  fp'aml>'  é'."i  ■'.:.'?!>  t/*:  F?'i.r-.  '.£.'.?v^  de  Jean  de  La  Fontaioe,  t.  I. 
Sotke  tio'jraphiqu'^,  par  M.  P.  Me-^iri.  p.  72. 

^  CEuvres  .:e  Bo!  e^u.  ei.  Gi  Ir".  i.III.  p.  15S.  —  Bjileau.  dans  sa  Préfdce 
de  1*01,  dit  encore  :  'Jue  si  on  :îi?  deiaaaie  ce  que  c'est  que  cet  agrément 
et  ce  Sri,  je  rôpo:)  iiài  <|u-?  •:>-:  i-;»  j?  ae  siis  qu  •!  qu'on  peut  beaucoup  mieu.\ 
.se>///r  que  dirii  ■' .  .Mu.-  1.  t's-d  ^ri  de  Toxpliquer.  «  A  mon  avis,  néanmoios, 
il  consifsle  pri:ic!pa:eîiie::l  à  n'.*  .j  uîiais  présenter  au  lecteur  que  des  pensées 
vraies  et  des  expie ■pi'jîi>  JustP?.  ^»  Ce  nV.st  plu?  la  même  cho-^e. 

*  Le  vers  célèbre  :  Et  de  lart  inô:ne  apprend  à  franchir  leurs  limites  (Art. 
poét.  IV,77)  est  un  précepte  émis  par  Molière  dans  une  conversation  avec  ses 
amis.  Voy.  Comment,  de  la  Sat.   IV,  vers  91. 

*  Satire  VII,  note  du  vers  8S. 

"  Est-ce  comme  Je  croit  Berriat,  CEuvres  de  Boileau,  tom.  1.  Notices  6*- 


LA   LEGENDE    DE   BOILEAU  499 

plate  et  ennuyeuse  contrefaçon  de  la  critique  de  V Ecole  des 
Femmes  ;  enfin,  sous  prétexte  de  tenir  la  balance  égale  entre 
Boileau  et  Tun  de  ses  adversaires*,  le  même  abbé  Cotin  re- 
vint à  la  charge  et  publia,  sous  le  voile  de  Tanonjme,  une 
brochure  intitulée  :  la  Critique  désintéressée  des  Satyres  du 
temps^.  Boileau,  traité  sans  gêne  comme  il  avait  traité  les 
autres,  appelait  ces  publications  des  «  libelles  diffamatoires.» 
En  réalité,  sauf  quelques  interprétations  fort  malveillantes  ', 
mais  auxquelles  se  prêtaient  facilement  quelques  vers  assez 
imprudents  de  Despréaux,  on  u*allait  pas  plus  loin  que  lui 
dans  les  censures.  11  affectait,  d'ailleurs,  de  regarder  ces  «  pe- 
tites vengeances  avec  des  jeux  assez  stoïques  »;  dans  le  fond, 
il  était  plus  irrité  et  plus  troublé  qu'il  ne  veut  le  dire.  Il  fit 
même  d'activés  démarches  pour  interdire  la  représentation 
de  Tinsipide  comédie  de  Boursault,  et  pour  arrêter  la  vente 
de  l'impression  qui  en  avait  été  faite.  Il  y  réussit  par  la  pro- 
tection du  premier  président  de  Lamoignon*;  mais  il  se  garda 
bien  de  se  vanter  de  ce  succès  devant  le  public  etla  postérité. 
C'est  toujours  l'éternelle  histoire  du  cœur  humain: 

Nous  nous  pardonnons  tout  et  rien  aux  autres  hommes, 
On  se  voit  d'un  autre  œil  qu'on  ne  voit  son  prochain  ^. 

«  Dans  le  même  temps,  disait  plus  tard  Perrault,  qu'il  fait 
défendre  à  tout  le  monde  de  l'attaquer,  il  se  donne  la  permis- 
sion d'attaquer  tout  le  monde  ®  »  .  Il  aurait  pu  cependant  se 


bliograph.,  §  2,  n»»  5  et  6.  Despréaux  ou  laSafyre  des  Satyres^  gr.  ia-12, 
pièce  anoDjTue  sans  date  ni  lieu. 

<  Suivant  Berriat,  cet  adversaire  serait  Cotin  lui-même. 

*63  pp.  in  8.  Chez  l'Hermite  de  Paris,  à  la  correction  fraternelle.  Bibl.nat. 
12805. 

3  Discours  sui*  la  satire,  1668. 

*  Voir  Avis  de  la  Satire  des  Satires  de  Boursault,  —  Plachesne,  Éloges 
du  satirique  français,  p.  19.  Recueil  de  pièces  choisies,  etc.  La  Haye, 
1714,  t.  1    Préface,  p.  VI. 

*  Lafontaine,  Fables,  I,  7. 

«  Préface  de  l'apologie  des  Femmes.  OEuvres  de  Boileau,  Amsterdam, 
1775,  t.  l,  p.  334-335;  d'Alembert  (///6'^oiVe  des  membres  de  l'Académie 
française,  t.  III,  p.  189}  et  Berriat,  Essai  sur  Boileau,  xlviij,  veulent  jus- 
tifier cette  contradiction,  mais  la  distinction  qu'ils  font  entre  les  ouvrages  çt 
la  personne  me  semble  subtile. 


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l.âa-er  ies  audaces 
e:  laisse,  au  travers 
;>.Li'jn  qu'il  a  de  sa 


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1.-.  i:.Lî  vis  liores  caprices. 
:-=s  vr::  .5  e:  des  vices. 


•  lh.",ii,i,    n,   i'j  "^'iT^iii,  :.:r:. -Tr 

■• '"I/."! r ^ •.'.•■•  '  .'i,  .•',    r.      ;•..•*  JA.   -v  J=  Cr: 


T  --=r<.  Ce  discours  fuL  d'abord  publié 
■.::r-  :  SVl  res  du  sieur  D***,  in-4»  de  2, 
.  ■'.«.-jiiard  et  Barbio,  1668. 


/ 


LA  LÉGENDE    DE  BOILEAU  501 

Décider  du  mérite  et  du  prix,  des  auteurs 
Et  faire  impunément  la  leçon  aux  docteurs, 
Qu'étant  seul  à  couvert  des  traits  de  la  satire, 
Vous  avez  seul  pouvoir  de  parler  et  d'écrire*. 

]1  n'a  pas  la  prétention  de  s'imaginer  qu'il  ait  ce  pouvoir, 
mais  il  est  fermement  convaincu  qu'il  a  celui  de  décider  sou- 
verainement du  mérite  des  auteurs.  Volontiers,  n'était  l'igno- 
minie du  rapprochement,  il  laisserait  dire  de  lui,  comme  le 
disait  M™*  Pernelle  du  critique  zélé  qui  contrôlait  tout  dans 
la  maison  d'Orgon  : 

Et  tout  ce  qu'il  contrôle  est  fort  bien  contrôlé  ^ . 

N'avait- il  pas  auparavant,  dans  son  Discours  au  roi,  osé, 
sous  une  forme  adroite,  mais  au  grand  scandale  des  poètes 
courtisans',  comparer  l'œuvre  politique  de  Louis  XIV  à  la 
sienne  propre  ? 

Et  tandis  que  ton  bras,  des  peuples  redouté, 
Va,  la  foudre  à  la  main,  rétablir  l'équité 
Et  retient  les  méchants  par  la  peur  des  supplices. 
Moi,  la  plume  à  la  main,  je  gourmande  les  vices*. 

Ne  dirait-on  pas  qu'à  l'exemple  du  prince  justicier,  le 
poète  tient  ses  grands  jours. 

Pour  venger  la  raison  des  attentats  d'un  sot^  ? 

L'instinct  satirique  d'autrefois  se  transforme  en  mission 
expresse,  officielle,  reçue  de  Minerve;  il  ne  rime  plus  au 
hasard  et  par  fantaisie,  il  est  le  représentant  de  l'ancienne 
satire,  le  soldat  assermenté  du  goût  et  de  la  vérité. 

C'est  pour  elle,  en  un  mot,  que  j'ai  fait  vœu  d'éciire®. 

Désormais   aux   condamnations  vagues  vont  se  mêler,  en 

*  Satire  IX,  v.  7à22. 

*  Molière,  Tartufe,  acte  I,  se.  2. 

^  Boursault,  Satyre  des  Satyres,  se.  6,  p.  409.  «  C'est  un  petit  poète  et 
le  plus  grand  des  rois.  » 

*  Disc,  au  roif  v.  67à70. 
^SatJX,  T.  274. 
^Ihid.,  V.  283. 


r>02  LA    LEGENDE    DE   BOTLEAU 

(>hjM  fçrand  nombre,  des  jugements  motivés:  il  dira  parfois  à 
i^M  victimes  la  cause  précise  de  leur  réprobation  :  il  instruira 
Mon  HJèclo  par  des  leçons  didactiques.  Non  pas  qu'il  renonce 
jarnaÎM  îï  la  prcmiôro  manière  moins  équitable,  bien  autre- 
rn^înt  HÙre  et  efficace  :  il  prodigue  encore  les  traits  moqueurs, 
Ui4  r.\)\i\iti\o.A  qui  tuent.  Seulement  aux  simples  injures  s'asso- 
''i'întplus  souvent  des  formes  moins  brutales,  mais  non  moins 
iri«urtfi(;res,  Tironie,  la  conces>ion  perfide,  la  louange  qui 
préparc  un  nouvel  outrage  : 

Je  le  déclare  donc,  Qiiinault  est  un  Virgile. 
Pradon  comme  un  soleil  à  nos  yeux  a  paru. . . 
Pelletier  écrit  mieux  qu'Ablancourt  ou  Patru. . . 
Cotin  à  ses  sermons,  traînant  toute  la  terre, 
Fend  des  flots  d'auditeurs  pour  aller  à  sa  chaire. . . 

ou  bien  encore  : 

Attaquer  Chapelain  !  Ah  î  c'est  un  si  bon  honçime 

Balzac  en  fait  l'éloge  en  cent  endroits  divers. 

Il  est  vrai,  s'il  m'eût  cru,  qu'il  n'eût  point  fait  de  vers  ' . 

Pourquoi,  d'ailleurs,  aurait-il  abandonné  son  ton  tranchant, 
sa  façon  leste  d'exécuter  sommairement  ses  adversaires,  le 
public  ne  Tavait-il  pas  cru,  sans  [)reuve,  sur  sa  simple  affir- 
mation ? 

Ch.  Revillout. 

(à  Suivre) 

*  Satire  /X,  v.  288  à  292,  v.  204  à  206.  —  Â-t-OQ  remarqué  combien  la  fia 
dci  dernier  passage  rappelle  une  tirade  d'Alceste:  «Je  le  tiens,  etc.  n  Misan- 
thrope^ IV. 


OURDOUNANÇO  DE  POULIÇO 

DE    SANT-MAHTIN-DE-CRAU 


Dins  lou  librihoun  counserva  is  archiéu  di  Bouco-dôu-Rose  *  e  que 
l'en  ai  estracho,  aquesto  ourdounanço  porto  ges  de  dato.  Paraens 
coume,  dins  soun  proumier  article,  es  fa  mencioun  d'un  mèstre 
Ounourat  Bastoun,  dôutour  en  tôuti  dre,  alor  juge  de  Sant-Martin, 
e  qu'un  verbau  ^  latin  apoundu  au  teste  prouvençaunous  apren  qu'ei- 
cestesiguè  legi  au  pople  de  Sant-Martin-de-Crau,  lou  11  de  Nouvèm- 
bre  1526,  à  la  requèsto  dôu  même  Ounourat  Bastoun, es  decrèire  que 
li  dos  pèço  soun  estado  redegido  la  mémo  annado,  senoun  lou  même 
jour. 

Pamens  lou  teste  de  Tourdounanço  es,  de  tout  segur,  mai  encian 
qu'acô,  coume  lou  provon  clararaen  li  mot  :  proclamata  annis   sin^ 

gulis fieri  assiieta,  emai  la  fînalo  femenino  a  que  se  ié  capitosou- 

leto  alor  qu'adeja  à  la  fin  dôu  socle  XV  s'emplegavo,  quouro  Va  ar- 
caïque,  quouro  Vo  mouderne,  de  que  veici  dous  eisêmple  : 

«  Senhe  payre^  a  vous  de  bon  cor  mi  recomandi,  la  présent  es 
per'vous  avisar  conio  y  eu  ai  resauput  vostra  letro  en  laquai  mi 
mandas  del  cap  de  Besonhos,  yeu  ai  resauput  ma  raubo  amhe  mas 
camysos^.  » 

«  Que  non  si  ausa  vendre  outra  la  soma  de  très  florins  la  sau~ 
mado  de  très  quintals  del  pes  provensal  * .  » 

La  lengo  de  noste  doucumen  es  curiouso.  Lou  même  mot  i'es  our- 
tougrafica  de  plusiour  biais  diferènt  :  Martin  e  Martim,  palun  e  pa- 
htm,  jour  e  jourt,  ause e  auze  etc....  Lou  mot  mouderne  mita  se  ié 
capito  même  emé  très  formo  'mitât,  mitla  e  mittat.  Aquelo  varia- 
cioun  ourtougrafico-qu'cs  d'aiours  causo  pau  raro  dins  li  doucumen 

«  B.  1413. 

^  Veire  à  la  fin  aquel  encartanien  justificatiéu. 

3  sÈcLE  XV  :  Letro  d'un  fiéu  à  soun  paire  (bouche  e  estatistico  di  bouco- 
DÔa-ROSB,  vol.  3.  p.  178). 

*  Ate  de  1473  (Archiéu  di  B.  dôu  R.  reg.  Potentie,  B.  49):  Es  de  reraarca 
qu'aquelo  marcho  dôu  proveoçau  vers  l'uoificaciouD  de  la  fioalo  femeDino  se 
countùoio  encaro.  Aro  lou  pople  dis  sciènço,  inoucènço^  ourtougrafo,  liogo 
de  sciènci,  inoucèncif  ourtougrdfi,  etc. 


504  OUUDOUNANÇO    HE    POUUÇO 

paleougrafi  —  pren  eici  uno  graiulo  iinpoiirtanço  pèr  ço  que,  di  dos 
formo  emplegado,  i'a  toiijour  uno  formo  arcaïco  cm*uno  formo  en  trin 
<]t?  sa  nioii'ioniisa.  I  a  liifho  entpoli  «los  e  aquelo  hicho  provo  que  noate 
(loiioMiiien  roiiioiiiitu  à-n*-mi  tùsns  que  la  Icngo  se  transfouiinavo  pau» 
à-  cha-pau.  à-n-uno  op»»co  do  transioioun. 

Do  rnîû  5<?  ro?contr«)  (;ai-e-lai  <|uàu(jui  mot  trespourta  dôu  francés, 
quouro  tau  o  (juau,  quouro  prouvoiiçalisa,  counie  malvaysa  e  ntau- 
vni/sa,  ço  que  me  fai  oiicivire  que  lou  ooupiste  carga  de  la  transcri- 
ciouii  «le  1520  a  vouiru  nioudernisa  soun  teste,  lou  fig^ioula,  pèr  lou 
mètre  à  l'autour  de  suun  sècle. 

Aquéubraveescribo  avié  belèudeja  contre  nostolengoU  prevenciouii 
injusto  e  ridioulo  que  fan  flùri,  vue  cucaro,  encù  di  moussiirot  e  dins 
aquelo  Universita  de  quau  an  jamai  pouscu  dire  que  l'Uropo  nousn*èro 
envejouso. 


«  « 


Farai  remarca  la  justo  proupourcioun  di  peno  fîssado  dins  noste 
manuscri,  counseiant  à-n-aquéli  que  talo  ôusservacioun  poudrié  es- 
panta,  d'ana  oounsulta  is  archiou  di  Houco-dou-Rose  li  registre  di 
Clavaire  de  Prouvènço  ;  ié  veiran  de  quinte  biais  espetaclous  se 
rendié  la  justiço  dins  rajre-mejan. 

Un  oi8''im[)le  à  l'asai'd  :  Jaunie  Gautiô,  passant  un  jour  dins  la  grand 
carriern  de  l'isolo  Snnt-Geniés,  douno  un  oop  de  luehet  sus  la  teste 
au  cliin  de  Hortriaid,  fiéu  d'Rimoun  ;  os  coundana  pèr  acô  à  5.  ,^ôm 
d'emèndo,  entandôuinensquo  Fèire  Kafin,  prés  en  flagrant  délit  d'adul- 
tèri  emé  Bertrando,  mouié  de  Tùulié,  e  coundana  déjà  dès  an  avans 
pèrlou  même  crime  i)ôr  lou  juge  di  Font,  pago  uno  emèndo  de  6  sbu  *. 

La  majo  part  dôu  tcms  lis  orne  soun  counvincu  de  cop  e  blessa- 
duro  facho  emé  d'espaso,  de  pougnard  e  même  de  taravello;  de  s'èsse 
tira  lis  auriho  o  pessuga  à  ti'enploura  (!;,  d'agué  pourta  d'arme  ene- 
bido.  Li  femo,  éli^  soun  coupable  de  s'éstre  estrassa  lou  peu  e,  subre- 
que- tout,  de  s'èsse  di  de  marri  di  rosoun.  Avien  i)as  la  lengo  an 
i'ouissiu,  vous  Tafourtisse,  ei'aaqui  de  cause  que  farien  trefouli  Zola. 
JJraca,  rascassa,  hayassa,  piitct,  ribundella,  merdosa,  etc. . .  soun 
li  terme  amistadous  que  s'entre-baion,  d'un  biais  que-noun-sai  larp 
li  persouno  dôu  bèu  sèisse.  Urous  encaro  quand  camiuon  pas  sus  li 
piado  de  Marieto  Costo  e  de  Clareto  de  Mount-pelié;  dôumaci  la 
première  aguè  15  s6u  d'emèndo  pèr  a  gué  dich  à-n-Azalaïs  Durando  : 
Va-if-en  vèire   dins   Veslahle  d'Isnard  Pèire   ubi  puer   Omtolani 

1  Comtft  fie  Guihèn  Renaud  de  Varcio,  Baile  et  Clavaire  de  l'Isclo  Sanl- 
Geniès  ruei  (loo  Marteqdb)  B.  dôu  R.  b  1627. 


DK   SANT-MARTIN-DE-GUAU  505 

ASCENDiT  SUPER  VENTREM  filietue',  6  la  segoundo  n'en  siguè  pèr 

8    SÔU,   QUARE    GiRAUDE    GuILLELMETE,    MULIERI  FALHITE,    ANUM    SUUM 
MONSTRAVIT  ^ . 

Sèmblo  pas  de  crèire  coume  li  gènt  d'aquest  tèms  amavon  de  plei- 
deja.  Ansin,  une  noumado  Janetoun  a  5  sôa  d'emèndo  pèr  agué  trata 
de  pawro  soun  amigo  Beloto  que  i'avié  garça'n  lavo-dènt;  ^  Janeto 
Canibalo  n'a  3  flouiin  pèr  agué  mes  uno  boto  davans  l'oustau  de  la 
fiho  de  Louvis  Bertin  ;  *  enfin  Jaquelino  Goge  e  Jaquelino  Sicardo 
pagon  13  SÔU,  4  dénié  ;  eicesto  avié  apela  la  pronmiero  parpella  e 
l'autre  i'avié  di:  qu'ella  aviaemprintada  la  gruescha  °  que  portava  *. 

Ero  un  bèu  tèms  pèr  H  juge  e  lis  avouent,  senoun  pèr  lou  pople. 
Fan  bèn  dire  pamens  que  s'aqueste  se  vesié  manja  la  lano  sus  l'es- 
quino  èro  mai  qu'un  pan  sa  faute. 


Uno  cause  remarcablo  es  de  vèire  aquelo  ourdounanço  evalna  lis 
emèndo  en  lièuro  couronna  emai  en  sbu  conroima,  quaranto-cinq  an 
après  l'unioun  de  Prouvènço  à  la  Franco,  unioun  que  de  doucumen 
autenti  dis  archiéudi  Bouco-dôu  Rose,  provon  s'èstre  facho  en  1481  e 
noun  en  1486,  coume  lou  creson  coumunamen. 

Un  passage  de  Papon  que  m'es  esta  signala  pèr  lou  moudèste  e 
saberu  archivaire  de  la  prefeituro  de  Marsiho.  M.  Fèlis  Ileynaud,  m'a 
donna  Tesplicacioun  d'aquén  fèt.  Papon  dis  efetivamen  qu'en  1517  lis 
Estât  de  Prouvènço,  veulent  faire  cala  li  proucès  que  neissien  cade 
jour,  preguèron  lou  rèi  Francés  \é  de  permetre:  «  que  V ancienne 
forme  et  coutume  de  forger  tnonnoie  fut  gardée  audit  pays,  même- 
ment  touchant  la  m,onnoie  noire  "^ ;  c'est  à  savoir:  des  deniers  dits 
couronnais  dont  les  4  valent  un  liard  et  aussi  patacs  valant  les  2 
un  liard  et  chacun  patac  2  deniers  dits  couronnais  et  8  patacs 
valant  16  deniers  couronnais;  les  dits  16  couronnais  valant  un  gros 
provençal  qui  est  un  sol  tournois;  laquelle  petite  monnoie  est  néces- 
saire afin  que  l'on  puisse  toujours  payer  les  cens  et  services;  les 
changemens  de  laquelle  monnoie,  si  les  redevables  n'en  pouvoient 
fixer  la  valeur,  leur  tourneroient  à  grands  frais.  » 

1  Vincèpl  BasUrd,  clavaire  d'Arles,  ~b-174. 

*  Jean  Maurouo,  clavaire  de  z-Ais  —  b-1598. 
3  B.   1721. 

*  Josse  Rouget,  jusiou  clavaire  de  Berro,  b  1636 

'  Dourgo.  De  gruescha  vèn  lou  mot- francés  cruche. 

«  Catheri,  clavaire  d'At,  B-1696. 

'  Monnedo  negro  èro  lou  non  m  douna  au  bihoun. 


.-.'-' i  ••»•": .1  ;  ; .  i.  v  i  :■. m  i:  i.^  :<  ti:   :  -niTi-siiTie  lajcerçsîaac  s.i5 
!'■.■:  -.i-iM   .;  i..:-.  .  ■  :.•:    :.u.:';'    -^  .-f,r-Ti-  m  :•»  la  ii  >:'_:Ie  ie  5aint- 

,-,::•   ^A   .1  fz\z.:  :»*  Sij.>if i.*7.j..   -..iT.:.:    :•  :  vùija.    A   l'oir-j    de 
'i  -,  i-î  'îi.-.  :-Mî.'-..i.  -,'^z.-  ■/.•'■    î  ;  *  :.i  e-s-ii  :.i:it  i-*  f:*:!;:- recui- 

'     •.  .'l-i    .  î.f  1   *.-«■    "-.1    r'..—     I-i    TtLI.        ' 

f  »-...^^        .        __»... 

v^.v.  .  .  .'5l'>-  e   -  :-^  :-r.*^iv.  1:  :  t-^-   ai  i-r  li  sesiii:-,  L:--:  signa vo,  e 
^,'j  »r.\.'j  hin  -i-i  J  -:  :■.  ;v.ià.  ..-:i  i'i. .  :t1;  :.  irsiiLL*  en  cOad  aquéli  que 

V*::>;  l:  -^^,c,i  s  .H  I:  :  v^roi:   :•?  lô'ZO  i:  in:-  .:;iaie  a^^i-eai  préspart 

0  r;  N  o  r: r  \t  B  AiîTO  »r.v .  •:  j  i  :  j  i r  ^ n  i  re .  j  i  ^  e  o  :: r  ii n àri  j^è r  lo u  capite 
'i'ArIfr.  a  la  ^oirt  tempouralo  de  Sant- Martin  de  la  Palud-Majour  ; 

Li  R.  p.  lyjL'vrs  -SANi^ouN.  pro'joint'iciri  aîioustoali,  Antôm  de  li 
ToL'RRE,  toati  dous  canounge  'i'Arlee  coîjnsegnour  dôuvilage; 

Olacde  Fourtié,  di  Mîch-\j:llis,  olavaire  : 

Or.iHKN  Ma.n'doun.  noutari  e  grefiè. 

JoHA.xNOLN  SaDjU,  Antom  SadOli  paire  e  fiéu,  e  Doumergue 
Clkrici  abitantde  Sant  Martin: 

P^nfin  Jan Maye,  Uc  Dedolne    Glaude  Boltâri, prèire. 

«  Cornnat,  monnaie  de  billon  romaine  qui  avait  cours  sotfs  le  pape 
IJon  X.  ADsin  dis  lou  Dicioaoàri  de  Larrousse.  fa  pan  mot  de  juste  aqui 
dediris! 

2  Founrionnàri  que  gardavo  li  clau  dôu  trésor  e  tiravo  ii  taio. 


DE   SANT-MARTIN-DE-CRAU  507 


Prohibitiones  et  dkffensiones  ac  proclamata  annis  singulis, 

IN    DIE    FESTI  SaNCTI  MaRTINI,    FIERl  ASSUETA  IN  LOCO  SaNCTI 

Martini- DE -Palude   Majori  *,  pro  venerabili  capitulo 

SANCTE  ARELATENS1S  ECCLESIE,  DOMINO  DICTI  LOCI  ^. 


Mandameiit  cie  par  lou  vénérable  capitol  de  la  Sancta  esglisa 
(i'Arle,  segnour  del  luoc  de  Saiict-Martin  de  laPalun-Maieur, 
et  per  lou  commatidament  del  noble  et  egrege  segnour,  Mes- 
s®'  Honorât  Baston,  doctour  en  tous  dres,  Juge  del  dict  luoc, 
soun  fâchas  prohibitions  et  defensas  a  touta  persona  de  qual- 
que  grad,  stat  ^  ou  condiction  que  sie,  que  non  auze  ne  pre- 
sumisca  jurar  ne  blasphemar  lou  non  [sic)  de  Dieu,  ne  de  sa 


REVIRAGE 

EN  PROUVENÇAU  DE  VUEI 


Mandamen  de  p^  lou  vénérable  capitô  de  la  Santo  glèiso  d'Arle, 
segnour  dôu  Uô  de  Saut-Martin  de  la  Palini-Màjour  e  pèr  lou  cou- 
inandamen^dou  noble  e  egrogi  segnour,  M.  Ounourat  Baston,  dôutour 
en  tôuti  dre,  juge  dôu  di  liô,  soun  facho  prouïbicioun  e  defènso  à 
touto  persouno,  dequauque  grade,  estât  o  coundicioun  que  sié,  que 
ïioim  ause  e  noun  ague  la  presoumcioun  de  jura  ni  blasfema  lou  noum 

y  •  Aquéu  noum  :  SantMartin  delà  Palun-Majoiir,  veoié  à-n  aquéu  vilage 
de  Tavesioanço  cJe  l'estang  de  Desèume,  uo  di  priocipau  de  la  Crau. 

•  Lou  terradou  de  Sant-Martin-de-Crau  siguè,  coume  aquéu  de  Gaiignan, 
baia  en  1052,  au  capite  d'Arle,  pèr  Guihèn,  viacomte  de  Marsiho.  (C  autert" 
tique  dôu  capite  d^Arle^  fo  74,  vo). 

3  Aquéu  mot  de  stat  provo  que  Ve  ioiciau  que  s'atrobo  dins  il  mot 
acoumeoçant  en  fraocés  pèr  a  {estacioun,  espetacle,  etc. ...),  es  relativamea 
mouderne. 


508  OURDOCXANgO    \>E   POULIÇO 

glorieusa  Mayre.  ni  <îels  snnctz  et  sanctas  de  Paradis,  et 
aquo  surs  la  pena  de  des  lieuras  per  la  premiera  fes  et,  per  la 
segondafes,  de  estar  très  horas  al  colaret,  perla  tercia  fes, 
aber  la  lenga  persaHa  embe  ung  ferri  cault,  coma  obstinas,  et 
la  mitât  de  Tenquesia  sera  de  la  court.  Tautra  mitât  de  Tacu- 

sant  *. 

Item,  que  denguna  persona  non  auzo  transportar  la  juri- 
diction del  dict  capitoul,  segnour  del  présent  luoc,  surs  lapena 
arbitria  del  dict  monsenhor  lo  Juge. 

Item,  que  dungun  non  ause  portar  espasa  ny  autre  arnes 
per  lou  dict  luoc  de  Sanct-Mariim,  surs  la  pena  de  centsoulz 
de  jour  et  X  lieuras  de  coronat  de  nuech,  per  chascum  et 
chasque  vegada  ^. 

Ttem,  que  dengum  non  auze  extrayre  del  dict  luoc  denguns 


de  Dieu,  ni  de  sa  glouriouso  Maire,  ni  di  Sant  e  Santo  de  Paradis  e 
acô  sus  la  peno  de  dès  liéuro,  pèr  la  premièro  fes,  e  pèr  la  segoundo 
fes  d'ista  très  ouro  au  coulas  e,  per  la  tresenco  fes,  avé  la  lengo  per- 
sado  em'  un  fèrri  caud,  coume  ôustina,  e  la  mita  de  Tenquèsto  sera 
de  la  court,  l'autro  mita  de  l'acusant. 

Item,  que  deguno  *  persouno  noun  ause  trespourta  la  juridicioun 
dou  di  capito,  segnour  dou  présent  liô,  sus  la  peno  arhitràri  dou  di 
mounsegnour  lou  juge. 

Item,  que  degun  noun  ause  pour- -'gj^^;*^^ ni  autre   arnés,   pèr  lou 

di  liô  de  Sant-Martin,  sus  \^^i;;^  de  cent  sôu-^y^""  ^  ^  ^'^""^  ^' 


couronna,  jlejiutôy^per  chascun  c  chasco  vegado.    ^V^ 

Item,  que  degun  noun  ause  estraire  dôu  di  liô  deguni^^^'  ' 


Ji- 

*  Aquéli  peno  erapachavon  pas  force  li  blastèime.  Ai  trouba  proun  coirl^ 

nacioun   de  gèn  qu'avien  jura  pei'  lo  ventre  de  Dieu  o  per  lo  vetitre  de  y 
Verges.  Un  certan  Jaume  Caloto,  arlateo,  vai  même  juscoà  dire:  Yeu  rener^i^ 
la  Ferd/es,  e  es  coundana  pèr  acô  à  i2  sôii,6denié  d'emèndo  (B.  dôuR.  B-^^^i^î 
1714).  Preisèmple  ai  pas  trouba  d' obstinas    Es  de  crèire  que  lou  fèrri  caud 
fasié  mai  d'efèt  que  lou  restant.  A  Marsiho,  11  qu'avien  blasteiraa  pagavon  uno 
emèodo  de  12  dénié,  mita  pèr  i'acusèire,  e  mita  pèr  la  vilo.  Se  d'asard  pou- 
dièn  pas  paga  èron  coulouma,  autant  de  cop  qu'avien  jura,  dios  lou  porto  diu^ 
un  valat  qu'èro  prôchi  Sant-Martin.  {Estatut  de  Marsiho.  Lib.  V,  Cap.  X^ 
Fan  espéra,  pèr  li  maiurous  que  se  mcticn  dins  aqueste  cas,  que  lou  port  \ 
Marsiho  èro  pancaro  ço  qu'es  encuei. 


DE   SANT-MAHTIN-LE-CHAU  509 

blas,  leumes  ny  autres  frucs,  que  non  ayon  pagat  preiuicra- 
ment  lou  drech  del  dict  capitoul,  surs  la  peno  deLsoulzcoro- 
nas  per  chaseun  et  chasque  fes,  et  confiscation  dels  dicts 
fructs. 

Item,  que  denguna  personanon  auze,  de  jour  ny  de'nuech, 
en  public  ny  en  secret,  jogar  a  datz  ny  a  cartas,  surs  la  pena 
de  X  lieuras  de  coronat  per  chaseun  et  chasque  vegada. 

Item,  que  dengum  carretier  non  auze  passar  perlas  carrieras 
del  dict  luocde  Sanct-Martin,  ^urs  lous  ohivals  de  la  carreta, 
ou  la  dicta  carreta,  quant  sera  cargada,  surs  la  pena  de  sine 
soulz  cha[s]que  fes. 

Item,  que  dengum  non  auze  tenir  al  dict  luoc  de  Sanct-Mar- 
tin, ny  en  son  terradour,  denguna  malvaysa  fema  malfamada, 
su[rls  la  pena  de  X  lieuras  de  coronat  ''. 


ni  autre  fru,  que  noun  agon  paga  premieramen  lou  dre  dou  di  capito, 
sus  la  peno  de  l  sôu  coiirouna  pèr  chaseun  e  chasco  ^  fes  e  counfisca- 
cioun  di  di  fru. 

Item,  que  deguno  persouno  noun  ause,  de  jour  ni  de  niue,  en  publi 
ni  en  secret,  jouga  à  dat  ni  à  carto,  sus  la  peno  de  x  liéuro  de  cou- 
rouna  per  chaseun  e  chasco  vegado. 

Item,  que  degun  carreté  noun  ause  passa  pèr  li  carriero  dôu  di  liù 
de  Sant-Martin,  sus  li  chivau  delà  carreto  o  la  dicho  carreto quand 
sara  cargado,  sus  la  peno  de  cinq  sou  chasco  fes. 

Item,  que  degun  noun  ause  teni  au  di  liù  de  Sant-Martin,  ni  en  soun 
terradou,  deguno  marridofemo,  mau-famado,susla  peno  de  x  liéuro 
de  couronna. 


*  En  Arle  même  lis  arrao  èroa  autourisado,  mais  la  loungour  n'èro  regle- 
mentado.  Glaude  Leroy,  signe  coundana  à-de-rèng,  à  20  sôu  e  à5  sôu  d*emèn- 
do  par  agué  pourla,  jour  e  niue,  uno  espaso  mai  longo  que  n'èro  permés. 
(B.  dôuR.  B— 1718). 

•  Emai  lou  Trésor  dou  Felibrige  h^ia  quàuqui^  eisèmplederfe-^MM  ansinprés 
dins  lou  sens  de  nullus^  aquéu  mot  a  quasi  toujour  vuei  lou  sens  de  nemo 
e  s'eroplego  soulet. 

'  Lou  capite  d'Arle  èro  mai  catouli  que  lou  papo  que  barravo  lis  iue  sus  un 
mau  pèr  n'eu  pas  agué  un  piège. 

8  Lou  leste  prirailiéu  porto  chasque,  qu'es  lou  masculin  e  lis  eisèmple  ié 
soun  Qoumbroûs  de  Toublit  dôu  femeniu. 


510  OURDOUNANÇO  DE   POULIÇO 

Item,  que  denguna  fema  publica,  malfamada,  non  auze  pas- 
sar*  per  lou  dict  luoc,  que  non  ajo  lou  segnat  *"  al  bras  drech, 
que  es  acostumat  de  portar  a  tais  femas,  que  es  una  agulheta 
roja,  surs  la  pena  de  X  soulz  per  chasque  fes. 

Item,  que  denguna  tal  malvajsa  fema  publica,  impudica  et 
diffamada,  non  auze  demorar  al  dict  luoc  de  Sanct-Martiu, 
sinon  una  nuech  **,  surs  la  pena  de  X  soulz  coronas. 

Item,  que  denguna  persona  non  auze  coupar  nj  rompre 
denguns  aubres  *^  al  dict  luoc,  sinon  que  sien  sieus,  uy  den- 
guna herba  segar,  surs  la  pena  de  L  lieuras  de  coronat  per 
chascum  et  per  chasque  fes,  la  mitât  a  la  court  et  Tautra  a 
l'acusant. 


Item,  que  deguno  femo  publico,  mau-famado,  noun  ause  passa 
pèr  lou  di  liô  que  noun  ague  lou  signau  au  bras  dre,  qu'es  coustumo 
de  pourta  à  tàli  femo,  qu'es  uno.  aguïeto  roujo,  sus  la  peno  de  x  sôu 
chasco  fes. 

Item,  que  deguno  talo  marrido  femo  publico,  impudico,  e  difa- 
mado,  noun  ause  demoura  au  di  liô  de  Sant-Martin,  senoun  uno 
niue,  sus  la  peno  de  x  sôu  courouna. 

Item,  que  deguno  persouno  noun  ause  coupa  ni  roumpre  degun 
aubre  au  di  liô,  senoun  que  sigon  siéu,  ni  deguno  erbo  sega,  sus  la 
peno  de  l  liéuro  de  courouna,  pèr  chasciin  e  pèr  chasco  fes,  la  mita 
k  la  court  e  l'autro  à  l'acusant. 


*  Es  de  crèire  qu'à-n-aquelo  epoco  èsti  donc  èron  proun  barrularello,  dôu- 
raaci  se  trovo  dins  li  piage  que  toucavo  lou  segnour  di  Peno  :  pertouta  carga 
de  putans,  un  mountaiit  allegrament  {Anfos  Michel.  Us  e  coustomo  di 
Prouveuçau.  Ll  Pa?iturlo. 

10  L'idèio  de  fourça  li  panturlo  à  se  distiogui  di  femo  ounèslo  pèr  l'abihage 
remounto  à  la  pus  auto  antiqueta.  En  Greço  pourlavon  de  raubo  pintourlejado. 
Pèr  i'aguïeto,  sabe  pas  quouro  a  couraença  de  s'emplega  eu  Prouvèoço.  Tout 
ço  que  pode  dire  es  que  Carie  Vil  l'establiguè  en  Franco  e  que  Fraacés  de- 
z-Ais  la  douno  coumo  estent  encaro  forço  en  usage,  en  1556,  à  Toulouso  em  à 
Marsiho,  Dins  esto  darriero  vilo  èro  enebi  i  femo  de  marrido  vido,  de  carga 
certans  abihage,  li  foururo,  li  beloio  d'or,  e  aquéli  que  se  n'en  paravoo  èron 
fustigado. 

D'aquelo  aguïeto  vèn  la  loucucioun  :  connue  Vaguieto  qu'aplicon  i  jouvèni 
que  gourrinejon.  Larrousse,  dins  soun  Diciounàri,  esplico  aquelo  espressioun 
d'in  autre  biais  que  me  sèmblo  pas  d'ametre.  Dis  que  la  vueio  de  Tinagura- 


DE   SANT-MARTlN-DE-CtlAU  olî 

Item,  que  denguna persona  non  auze  cassar,  bousquejrar 
ny  pasturgar  dedins  lou  devens  del  dict  luoc  apartenent  au 
dict  capitoul,  de  jourt  ny  de  nuech,  surs  la  pena  de  cent 
soulz  per  chascum  et  pe[r]  chasque  vegada,  de  jourt  et  dous 
cent  soulz  de  nuech,  la  mitât  à  la  court  et  Tautra  mitât  à 
l'acusant,  et  auci  confiscation  de  retz,  filas,  pans,  panels,  fu- 
rons,  chins,  chivals,  conilhs,  aussels  et  autra  cassa,  cotels, 
dextraus  et  autres  engins  et  arnes  a  bosquejrar  ou  cassar. 

Item,  que  denguna  persona,  privada'^  ou  extrange,  non 
auze  mètre  dedins  las  terras,  pras,  pasturas,  boscz,  devens  et 
paluns  del  dict  luoc  de  Sanct  Martin,  de  jourt  ny  de  nuech, 
dengum  bestiari,  surs  la  pena  ayssy  dessouta  scripta. 


Item,  que  deguno  persouno  noun  ause  cassa,  bousqueira  ni  pas- 
turga  dedins  lou  devens  dôu  di  liô  apartenent  au  di  capito,  de  jour  ni 
de  niue,  sous  la  peno  de  cent  sôu  pèr  chascun  e  pèr  chasco  vegado, 
de  jour,  e  dous  cent  sôu  de  niue,  la  mita  à  la  court  e  Tautro  mita  à 
l'acusant,  e  aussi  counfiscacioun  d'arrêt,  fielat,  pan,  panèu,  furoun, 
chin,  chivau,  couniéu,  aucèu  e  autro  casso,  coutôu,  destrau  e  àutris 
engen  e  armo  pèr  bousqueira  e  cassa. 

Item, que  deguno  persouno  privado  o  estranjo,  noun  ause  mètre  dedins 

li  terro,  prat,  pasturo,  bos,  devens  e  palun  dôu  di  liô  de  Sant-Martin, 

de  jour  ni  de  niue,  degun  bestiari,  sus  la  peno  cici-dessouto  escricho  : 

E  premieramen,  pèr  chascun  biôu  o  vaco,  chivau  o  rosso,  mibu  o 


cioun  de  la  fiero  de  Bèu-caire,  li  paoturlo  d'aquelo  vilo  festejavon  sa  patrouno, 
Santo  Madaleno.  e  fasien  en  soun  ODoour  ùno  courso  que  la  joio  o'èro  un  paque- 
touQ  d'aguieto. 

Se  l'esplicacioun  de  Larrousse  èro  la  vertadiero,  cowTe  l'aguieto  se  dirié  di 
tiho  que  fan  m^slié  de  sa  car  e  que,  pèr  counsequènt,  poudrien  prène  part  à 
la  courso  de  Bèu-caire.  Mai,  au  countràri,  es  di  jouvènt  que  trèvon  aquéli 
femo  qu'acôse  dis,  di  drôle  que  courron  noun  soulamen  raguieto^  mai  encaro 
aquéli  que  la  porton  o  qu'aurieu  dre  de  la  pourta. 

**  A  Sisteroun  poudien  resia  très  niue,  mai  i'cro  eiicbi  dt^  rèn  louca  de  ço 
qu'èro  estalouira  i  boutigo,  pan,  car,  etc.,  à  peno  d'èstre  fourçado  de  lou 
croumpa.  {Anfos  Michel,  id). 

*'  A  Marsiho  la  peno  èro  diferèuto  segound  l'espèci  d'aubre  chaplado.  (V. 
Estatut  de  Marsiho . 

*»  Persona  privada^  oupousa  à  extrange,  a  eici  la  significacioun  de  per- 
souno  dôu  païs* 


512  OUUDOUNANÇO    DE    POULIÇO 

Et  preiuierainent  per  chascum  buou  ou  vaca,  chival  ou 
rossa  **,  mullet  ou  mula,  et  per  chasque  fes,  de  jourt  surs  la 
pena  de  X  soulz  et,  do  nuoch,  de  XX  soulz  coronas,  la  mitât 
a  la  court  et  Tautra  mitât  a  Tacusant. 

Item,  per  chascum  aze  ou  sauma,  de  jourt,  surs  la  pena  de 
sine  soulz  coronas  et,  de  nuech,  x  soulz  coronas,  la  mitât  a 
la  court,  Tautia  mitta  a  Tacusant. 

Item,  pei'  chascum  porc  ou  trueja,  ctibra  bouc,menon,  feda, 
mouton  et  autre  bestiari  ianut  '^,  surs  la  pena  de  ii  soulz  de 


miolOj  e  pèr  chasco  fes,  de  jour,  sus  la  peno  de  x  sôu  e,  de  niue,  de 
XX  sùu  courouna,  la  mita  à  la  court  c  Tautro  mita  à  Tacusant. 

Item,  pèr  chascun  ase  o  saumo,  de  jour,  sus  la  peno  de  cinq  sôu 
courouna,  e  de  niue,  x  sùu  courouna,  la  mita  à  la  court,  Tautro  mita 
à  l'acusant. 

Item,  pèr  chascun  porc  o  trueio,  cabro,  hou,  menoun,  fedo,  môu- 
toun  e  autre  bestiari  lanu,  sus  la  peno  de  n  sùu,  de  jour,  e  demi,  e 

**  Noura  douna  i  cliivau  camargueu  ;  a  la  significaciouD  dôu  mot  fraDcés 
roiissin  e  noun  de  7'osse. 

'*  Couine  FC  vèi  li  porc  an  lambèn  bénéficia  de  la  Revouliicioun.  i^outoren- 
cian  régime  pourtavon  lano,  arc  soun  vesti  de  sedo. 

lô  Li  Marsihés,  grand  negoiiciant,  èron  mai  sévère  pèr  aqueste  délit:  leissa- 
von  la  peno  à  la  voulounla  dôu  juge.   (Estatut  de  MarsihOy  Lib.  I,  cap  lij.) 

17  Lou  ligèire  courapreudra  proun  qu'es  pas  la  dilîculta  dôu  teste  que  m'a 
fach  i'  apoundre  aquesle  revinige.  Ai  agu  tant  soulamen  pèr  toco  de  faire  vèire 
quéli  pichot  cambiamen  la  lengo  dôu  sècle  XIV  a  subi  pèr  veni  noste  dialèite 
ciassi  mouderne. 

Ai  vougu  de  mai  moustra  i  fenat  de  rourtougràfi  di  Bellot  e  Benedit  qu'a- 


DE  SANT-MARTIN-DK-CRAU  513 

jourt  et  dimi,  e  sine  soulz  coronas  de  imech,  la  mittat  a  la 
court  et  Faiitra  à  Tacusant  et  per  chasque  fes. 

Item,  que  dengunapersona  non  auze  vendre  al  dict  luoc  de 
Sanct-Martim,  blat,  vin,  olj,  lieumes,  lana,  ny  autra  mar- 
chandisa  sinon  al[s]  pes  et  mesuras  del  dict  capitoul  et  las 
dictas  mesuras  et  pes  siam  alielas  per  lous  oufficiers  [juxta 
lous]  pes  et  mesuras  del  dict  capitoul,  et  aquo  surs  la  pena  de 
cent  soulz  coronas  et  conQscation  dels  pes,  mesuras  et  mar- 
chandisa  *^. 


cinq  sôu  courouna  de  niue,  la  mita  à  la  court  e  Taiitro  à  l'acusant  e 
pèrchasco  fes. 

Item,  que  deguno  persouno  noun  ause  vendre  au  di  liù  de  Sant- 
Martin,  blad,  vin,  ôli,  liéume,  lano,  ni  autro  marchandiso,  senoun  i 
pes  e  mesuro  dôu  di  capito,  e  li  dicho  raesuro  e  pes  sien  aliela  pèr  lis 
ôuficié  [segound  li]  pes  e  mosuro  dôu  di  capito,  e  acô  sus  la  peno  de 
cent  sôu  courouna  e  counfiscacioun  di  pes,  mesuro  e  marchandiso  *^ . 


quelo  di  Felibre  èro  pas  tant  pau  naturalo  que  ço  que  volon  dire.  Aquito 
Gunte  aurien  mes:  Diou,  liouro,  aoubres,  siou,  destraou,  saoumou,  etc., 
l^escrivèire  de  noste  manuscri  boulo  fort  bèo  ;  Dieu,  lieura,  aubres,  sieu,  des- 
trau,  sauraa. 

Li  quàuqui  forrao  qu'an  dispareigudela  lengoarlatenco:  nuech,dich,drech, 
se  retrovon  dinsd'autri  dialéite,  lou  marsihés  preiseraple. 

Basto!  n'en  vaqui  proun  aqui-sus.  Li  testard  que  se  volon  pas  rendre  à 
Vouitougràfî  felibrenco,  soun  de  très  meno;  lis  ascla  que  n'en  dirai  rèn  ;  li 
saberu  que  voudrien  tourna  à  l'ourlougràfi  di  troubadour,  e  que  n'en  parla- 
rai  pas  mai;  enfin  li  viéi  qu'aquéu  biais  d'escriéure  ié  sèmblo  lou  pus  flame 
de  tôuti  per  ço  que  soulet  èro  couneigu  dôu  teras  qu'èron  jouve  e  que  soun 
vuei  coume  toujour:  laudatores  temporis  acti. 


35 


514  OURDOUNANÇO   DE   POULIÇO 


ENCARTAMEN  JUSTFIFICATIRU 


Verhau  de  la  leituro  de  Vourdounanço  de  poidiço  de  Sant-Martin- 
de-Crau,  facho  au  pople  d'nqtiéu  vilage,  lou  II  de Nouvèmbre  1526, 
pèr  G.  Mandoun,  noutàri. 

Anno  incarnationis  Domini  millesimo  quingentesimo  vicesimo  sexto 
et  die  undecima  mensis  Novembris,  qua  die  celebratur  festum  Sancti 
Martini,  hora  vesperarum  (sic),  seu  circa,  in  predicto  loco  Sancti  Mar- 
tini de  Palude  majori  et  in  carreria  publica  an  te  domum  habitationis 
Dominici  •  Clerici,  coram  que  nobili  et  egregio  viro,    domino   Hono- 
rato  Bastoni,  juriiim  doctore,  judice  ordinario  curie  temporalis  castri 
Sancti  Martini  de  Palude  majori  pro  capitulo  Sancte  Arelatensi  ec- 
clesie,  ibidem  supra  quodam  bancum  fusteum,  pro  tribunali,   sedenti, 
in  presencia  que  etconspectu  R.  P.  dominorum  Ludovici  Sansonis, 
Sancte  sedis  apostolice  prothonotarii,  et  Anthonii  de  Turre,  canoni- 
corum  dicte  Sancte  Arelatensis  ecclesie,  ccndominorum  ejusdem  loci, 
comparuit  probus  vir  Glaudius  Porteri,  alias  Michaellis,  clavarius  dic- 
te curie,  qui  eidem  domino  judici  exhibuit  et  présenta  vit  prescripta, 
édita,  sive  proclamata  et  prohibitiones  in  vulgari  sermone  descripta 
seu  descriptas,  petens  et  requirens  illa  et  illas,  presentibus  habitato- 
ribus  ejusdem  loci,  ibidem  congregatis  specialiter  et  expresse,  adac- 
tum  hujusmodi  celebrandum  seu  celebrari  vendendum,  per  me,  nota- 
rium  infrascriptum,  alta  voce  et  inteligibili  publicari,  legi  et  promul- 
gari,  juxta  laudabilem  consuetudinem,  ut  inde  habitantes  alii  in  dicto 
*  loco  pro  tempore  existentes  et  per  locum  illum  transeuntes,  a  malo  et 
prohibitionibus  abstineant,  et  tune  dictus  dominus  judex,  dicta  edicta, 
prohibitiones  et  proclamata  ordinavit  ibidem  in  sui  presencia  per  me 
legi  et  publicari,  que  lecta  et  publicata  per  me  extiterunt  ad  jussum 
ejusdem  domini  judicis. 

De  quibus  probi  viri  Joannnonus  Sadoli,  Anthonius  Sodoli,  pater  et 
filius  ;  dictus  Dominicus  Clerici,  habitatores  dicti  loci,  peciernnf  (51c) 
de  premissis  instrumentum,  eisdem  prohibitionibus  gratis  et  sponte 
acquiescentes . 

Dictus  vero  dominus  clavarius  etiam  peciit  (sic)  instrumentum . 

Acta  fuerunt  hec  ubi  supra,  presentibus  ibidem  venerabilibus  do- 

*  La  transcricioun  que  m'es  esfado  coumunicado  pér  lis  Archiéu  di  Bouco- 
dôu-Rose  porto  dominice  Clerici,  mai  es  uno  déco  pèr  Pôminici  Clerici 
ansin  qu'hôu  provo  aquéu  tros  de  l'avans-darrié  paragrafo:  dictus  Dominicus 
Clerici. . . .  P6u  èstre  qu'uno  erreur  dôu  coupisto. 


LE  «LIBRE  DE  MEMORLVS»  DE  JACME  MASCARO    515 

minus  Johanne  Maye,  Hugone  Dedonis,  Claudio  Botarii,  presbyteris, 
etpluribus  alis  testibus  ibidem  congregatis  et  rogatis,  et  me,  Guil- 
helmo  Mandoni,  notario  publico  et  dicte  curie  scriba,  qui  de  premissis 
acta  sumpsi  prout  supra  desterbitur  *  ;  in  quorum  fidem  hic  me  sub- 
scripsi  et  signo  meo  manuali  signavi . 

Signa:  G.  Mandoni,  notarius. 


LE  LIBRE  DE  MEMORIAS 

DE 

JAGME  MASCARO 

(Suite^) 


NOTES 

1.  —  Page 37,  ligne  28.  «  Trencavelh  ».  Raymond  Trencavel,  dernier 
vicomte  de  Béziers.  Cf.  Bulletin  de  la  Société  Archéologique  de  Bé- 
zierSf  2*  série,  tome  XIII,  p.  409-440  :  Raimond  Trencavel,  par  L. 
Noguier. 

2.  —  37,  29.  «  fes  carta  et  instrumen  d'absolucio  ».  On  peut  lire 
Tacte  de  renonciation  de  Raymond  Trencavel  dans  Andoque  :  His- 
toire du  Languedoc  ^j  liv.  Xï,  p.  359-360. 

3.  —  37,  37.  ((  la  font  del  mercat  de  Bezcs  ».  Sur  cette  ancienne 
fontaine,  cf.  Bull.  Soc,  Arch,  d.  B, ,  1^  série,  tome  1 V^  p.  35  et  sq.  : 
Les  Fontaines  de  Béziers^  par  E.  Sabatier.  Voy.  aussi  sur  cette 
fontaine  et  sur  le  traité  conclu  avec  Bernât  Caus  et  Guilhem  Guitart 
(p.  38,  lign.  17)  :  Sabatier:  Histoire  de  la  ville  et  des  évêques  de 
Béziers  *,  p.  450,  note  15. 

1  Sic  pèr  describitur, 

*  Voy.  ci-dessus,  p.  36  et  suiv. 

*  Histoire  du  Languedoc  avec  VEstat  des  Proviîices  voisines,  par  M. 
Pierre  Andoque,  conseiller  du  Roy  au  Sénéchal  et  siège  présidial  de  Béziers^ 
A  Béziers,  par  Jean  et  Henry  Martel,  et  Guillaume  Besse,  MDCXLVlU,  avec 
privilège  du  roy.  lo  fo. 

*  Histoire  de  la  ville  et  des  évêques  de  Béziers,  par  E.  Sabatier,  avocat. 
Béziers,  Carrière,  et  Paris,  Dumoulin,  1854. 


51C  LE    «  LIHRE    DE    MEMOUIAS  « 

4.  —  38,  13.  <  Johan  Kranha  ».  .)e«in  <le  Cranis,  scoéchal  de  Car- 
cassonue  et  de  Bcziers.  Cf.  Iliat.  gèn.  de  Lang,,  éd.  Privât,  tome  IV, 
p.  727. 

5.  —  38,  14.  «  mossen  Ramon  ».  Raymond  de  Valhauquez,  évêqne 
de  Béziers  en  1242,  mort  en  1261.  Cf.  Andoquc  :  Catalogue  des  évê' 
ques  de  Béziers  *,  p.  99,  et  Sabaticr  :  Ilist.  d.  l.  ville  et  d.  év.  d.  B., 
p.  263-264. 

6.  —  38,  15.  «  mossen  Guilhein  ».  Giiilhuime  II  Arnaud,  abbé  de 
St-Jacques  à  Béziers.  Cf.  Bull.  Soc.  Arch,  d.  B.,  2e  série,  tome  XIV, 
p.  300,  et  Hist,  gèn.  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IV,  p.  585. 

7.  —  38,  15.  «  Sant  Jacme  ».  Saint-Jacques,  église  paroissiale  de 
Béziers.  Cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  1"  série,  tome  IV,  p.  193-210  : 
L'Eglise  Saint- Jacques,  par  Sabaticr;  ibid.^  2*-'  série,  tome  VI,  p.  303- 
307  :  Saint-Jacques  de  Béziers,  par  L.  Nogiiier;  Sabatier  :  Hist.  d. 
l.  ville  et  d.  év.  de  J5.,  p.  102-107. 

8.  —  38,  10.  <i  mossen  Jacme  ».  Jacques  I^r,  abbé  de  Saint-Aphro- 
dise  à  Béziers.  Cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2*  série,  tome  XIV,  p.  291, 
et  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IV,  p.  497. 

9.  —  38,  10.  «  Sant  Afrodisi  ».  Saint-Aphrodise,  église  paroissiale 
de  Béziers.  Cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  V""  série,  tome  I,  p.  11-24  : 
Notice  sur  V église  iSainl-A'phrodise  de  Béziers,  par  Sabatier;  ihid,, 
2e  série,  tome  V,  p.  211-217  :  L'Eglise  de  Saint- Aphrodise  à  Béziers, 
par  L.  Noguier  ;  Sabatier  :  Hist.  d,  l.  ville  et  d.  év.  d,  JB.,  p.  94- 
98. 

10.  —  38,  28-29.  «  mossen  P.  Frezols,  cavalier,  del  castel  de  la 
Veruna  ».  Ce  personnage  est  sans  doute  Frcdol  1  de  la  Vérune  (près 
Montpellier).  Hist.  gén,  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IV,  p.  559. 

11.  —  38,  32.  a  venc  a  Bezes  lo  rey  de  Franssa  ».  Philippe  VI  de 
Valois  (1328-1350).  Sur  son  passage  à  Béziers,  cf.  Hist.  gén.  de  Lang., 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  486. 

12.  —  38,  34.  «  madamala  regina  ».  Jeanne  de  Bourgogne,  fille  de 
Robert  11  de  Bourgogne  et  d'Agnès  de  France,  dernière  fille  de  Saint- 
Louis. 

13.  —  39,  2.  «  lo  rey  de  Navarra  ».  Philippe,  roi  de  Nayarre. 

14.  —  39,  8.  «  Aquel  anmezeis ».  Sur  l'établissement  de  la  foire 

de  Béziers,  cf.  Henri  Julia  :  Histoire  de  Bcziers  *,  p.  324-325.  La 
charte  d'institution  de  cette  foire  a  été  publiée  dans  le  Bull.  Soc. 
Arch.  d.  B.j  \^  série,  tome  III,  p.  30. 

*  Catalogue  des  évéques  de  Béziers,  par  Pierre  Andoque.  Béziers,  Martel, 
1650-1651.  In.40. 
«  Paris,  Maillet,  1845. 


DE   JAGME   MASCARO  51t 

15.  —  39,  21-29.  Voici  les  noms  français  de  ces  diverses  localités  : 
Narbonne,  la  Grasse,  Carcassonne,  Limoux,  Fanjeaux,  Montolieu, 
Villepinte  (Aude),  —  Avignonet,  Toulouse,  Saint- Paul,  Saint- 
Félix-de-Caraman  (Haute-Garonne),  —  Montréal  (Aude),  —  Sorèze 
(Tarn),  —  Trèbes,  Belpech  (Aude),  —  Mazères,  Pamiers,  Mirepoix 
(Ariège), — Albi,  Castres  (Tarn), — Saint- Pons  de  Thomières  (Hérault), 
—  Saint-Amant  de  Valtoret(Tarn),  -  Lodève,  Gignac,  Clermont-rHé- 
rault,  Montagnac  (Hérault),  —  Castelnaudary  (Aude),  —  Saint-Par- 
goire,  Montpellier  (Hérault),  —  Nimes,  Beaucaire  (Gard),  -  Viviers 
(Ardèche),  —  Avignon  (Vaucluse\  —  Alais  (Gard), — Aix,  Tarascon, 
Marseille  (Bouches-du- Rhône),  —  Orange,  Carpentras  (Vaucluse). 

16.  —  39,  26-27.  «  Castelnoudarri  ».  Ms.  Castel  non  darri, 

17.  —  40,  7.  «  volem  ».  Ms.  volez  ;  mais  2  ici  vaut  m.  Cf.  Revue  des 
Langues  romanes j  tome  X,  p.  278,  ligne  25,  et  C.  Chabaneau  :  Pa- 
raphrase des  litanies  en  vers  provençaux  (Paris,  Maisouneuve  et 
Leclerc,  1886),  page  9,  note  1. 

18.  —  40,  14.  «  volem  ».  Ms.  volez.  Voy.  la  note  précédente. 

19.  —  40,  27.   «  manifestam  ».  Ms.  manifestaz .  Voy.  la  note  17. 

20.  —  41,  18.  «  la  gran  mortalitat  ».  11  s'agit  de  la  peste  dite  de 
Florence^  dont  Boccace  a  immortalisé  le  souvenir.  Cf.  Hist.  gén,  de 
Lang,,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  009,  note  2. 

21.  —  41,  19-20.  «  en  P.  Peruc  ».  Ily  a  à  Béziers,  à  l'entrée  de  la 
rue  Française  {al  cap  de  la  carieyra  franceza)^  une  vieille  statue  de 
marbre  blanc,  que  la  tradition  populaire  appelle  Pépéziic.  Cf.  Bull, 
Soc.  Arch.  d.  B.j  U-  série,  tome  II,  p.  23-41  :  La  Statue  de  Pépézuc, 
par  Ladurelle,  et  Sabatier:  Hist.  d.  l.  ville  et  d.  év.  d.  B.^  p.  67-70. 
Une  des  pièces  du  Théâtre  de  Béziers  porte  le  titre  de  :  L^^  ^ 

ou  furieuse  indignation  de  Pépésuc  sur  la  discontinu'  uiituae  presque 
quelques  années  du  Triomphe  de  Béziers  au  .r  *"^  ^'  ^^  P^^^  ^^^®  ^® 
c'est-àdire  de  la  fête  de  Cari to/15  (cf.  not-«^^^«  et  Sautz.  La  même 
dans  le  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B---  autres  noms  propres.  Ainsi  on  peut 

22.  —  42,  3.  «  Rom^«"Cre  Caus  et  Cans,  p.  41,  1.32,  entre  Serez  et 
ce  nom  est  écrite  d'y  entre  Morut  et  Morue,  p.  67, 1.  24,  entre  Rossant 

23.  —  42,  6-7  ^-c. 

ziers,  qui  étai/  15-21,  «  Aquel  an  meteys.  . .».  Tout  cet  alinéa  est  assez 
;Cf.  Bull.  On  voit  bien  qu'il  s'agit  de  joutes  (du  de  tournois)  célébrées 
^ur  réûCLV  de  carême  entrant  (c'est-à-dire  le  25  février  1354),  auxquelles 

2^istent  Pierre  Fabre,  châtelain  de  Cessenon,  Hue  d'Archas  (per- 
ma^nnage  j  nommé  dans  une  charte  Hugone  de   Archiau),  Sicard  de 

5Murviel  et  Guillaume  de^Mèze.  Mais  que  faut-il  entendre  par  Tex- 

5fi  pression  tener  la  taula  ou  tener  taula  ?  S'agit-il  de  la  présidence 

^   du    tournoi,  laquelle  aurait  été  dévolue  le  jour  de  carême    entrant 

?     à  Pierre  Fabre,  et  le  lendemain  à  Guillaume  de  Mèze  ?  Et  que  signi- 


520  LE    «LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

fieat  les  mots  Celas  Raras  (ou  Razas  par  mutation  fréquente  dans 
notre  texte  de  r  en  »  et  récipro(|uemeiit)  et  Celas  Cubas  f  Nous  pen- 
sons que  ce  sont  des  noms  propres  do  localités  (faut-il  songer  à  Cei- 
Ihes  et  Kocosels  dans  l'Hérault,  arrondissement  de  Lodève,  ou  à 
Celeiran  dans  l'Aude?).  Mais  peut-être  pourrait-on  n'y  voir  que  des 
noms  communs  désignantdes«e//t?5dG  formes  différentes,  usitées  dans 
le  tournoi. 

49. —  47,  29  «  la  partida  dels  Reformados  ».  Nouvelle  obscurité. 
Qu'était-ce  que  le  parti  des  réformateurs  ?  11  est  difficile  de  le  dire 
aujourd'hui.  Il  faut  voir  là  sans  doute  une  allusion  à  quelque  querelle 
locale  bien  connue  des  contemporains  de  Mascaro  et  dont  le  souvenir 
s'est  perdu.  Bornons-nous  à  regretter  que  Mascaro  soit  ici,  comme 
c'est  malheureusement  sou  habitude,  aussi  peu  explicite, 

9 

50. —  48, 16.  «  lo  princep  de  Galas»  .  Sur  cette  irruption  d'Edouard» 
prince  de  Galles,  dans  le  Bas  Languedoc,  cf.  Hist.  gén,  de  Lang,f 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  G50-653  et  notamment  la  note  2  de  la  p.  651. 

51. —  49,  2.  «lo  rey  de  Fransa  ».  Jean  II  le  Bon  fait  prisonnier  par 
le  prince  de  Galles  à  la  bataille  de  Poitiers. 

52.  —  50,  13.  «  L'an  dessus  dig. . .».  Sur  l'envoi  de  cette  députation 
à  Jean  II  le  Bon,  prisonnier  en  Angleterre,  woy.  Hist.  gén,  de  Lang., 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  687-688,  ch.    lxxxiv,  et  p.  695,  fin  du  ch 

LXXXIX. 

53. —  50,  28.  «  se  caveron  las  cavas  ».  Il  s'agit  des  fossés  autour 
des  fortifications. 

54.  — 50,  29.  «lo  cardenal  de  Boluenha».  Guy  de  Boulogne,  dit 
aussi  G.  d'Auvergne  ou  G.  de  Montfort,  fils  de  Robert  VII,  comte  de 
Boulogne  et  d'Auvergne,  archevêque  de  Lyon,  cardinal  de  Sainte- 
Cécile,  puis  cardinal-évôque  de  Porto  et  Sainte-Rufine,  mort  à 
Lérida  le  25  novembre  1373.  Il  fut  chargé  de  nombreuses  missions. 
Cf.  Mas  -Latrie,  Trésor  de  chronologie,  col.  1 197. 

55.  —  51,  2-3.  «  comenseron  a  plareiar  am  los  clercz».  Il  s'agit  du 
procès  entre  les  consuls  de  Béziers  et  le  clergé  de  cette  ville  au  sujet 
de  la  contribution  que  devaient  payer  les  clercs  pour  la  recons- 
truction des  remparts:  la  solution  de  ce  procès  est  indiquée  au  fol. 
21  v°.  Voy.  ci-après  la  note  59. 

56. —  51,  4.  «fouc  mot  gran  descencio  ».  Cette  dissension  est  men- 
tionnée (p.  264)  par  M.  L.  Noguier  dans  ses  Recherches  sur  les 
anciennes  judicatures  de  la  ville  de  Béziers  (Bull,  Soc,  Arch.  d. 
B,,  2«  série,  tome  X,  p.  241-343). 

57.  —  51,  5-6.  «  niosscn  Tibaut  de  Barbara,  mossel  senescalc  de 
Carcassona».  Les  mots  mossel  senescalc  de  Carcassona  sont- ils  en 
apposition  à  Tibaiit  de  Barbara, owh'iQW  s'agit-il  de  deux  personnages 
différents?  Thibaut  de  Barbazan  est  sénéchal  de  Carcassonne  en  1357 


DE  JACME   MASGARO  521 

(Hist,  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  635,  654,  660,  675). 
D'autre  part,  Andoqne,  Catal.  d.  év,  d,  5.,?-  H6,  mentionne  com- 
me sénéchal  de  Carcassonne  en  1358  Arnaud  de  Montespan,  de  la  mai- 
son d'Espagne  (sur  cet  Arnaud  d'Espagne,  seigneur  de  Montespan, 
sénéchal  de  Carcassonne  et  de  Béziers,  oî.Hisi,  gén.  de  Lang.,  éd. 
Privât,  tome  X,  col.  369,  1502,  1573,  1584).  En  1359,  le  sénéchal  de 
Carcassonne  est  Artaud  de  Beausemblant  {Hist.  gén,  de  Lang., 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  698). 

58.  —  51,  21  et  sq.  «  L'an  mccclix  foron  cossols:  Sen  Brenguie 
Augie. . . .».  Voici  en  latin  les  noms  des  consuls  de  cette  année,  tels 
qu'on  les  lit  dans  l'acte  de  transaction  passé  entre  ces  consuls  et  le 
clergé  de  Béziers  {Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2«  série,  tome  VII,  p.  21- 
37)  :  «  Berengarius  Augerii,  burgensis,  Jacobiis  *  Gauterubeœ,  Jo- 
hannis  ^  Corrigera,  Johannes  Garnitï,  Pontius  Rupho  et  Malheus 
Lombardij  consules  villœ  Bitteri  ^  pro  se  et  Johanne  Fulcrandi, 
conconsule  eorumdem  absente. . .  » 

59  — 52,  7.  «  Aquel  an  los  clergues. . .  »  On  peut  lire  le  texte  de  la 
Transaction  entre  les  consuls  de  Béziers  et  les  chapitres  de  Saint- 
Nazaire  et  de  Saint- Aphrodise,  l'abbé  de  Saint- Aphrodise  et  le  prieur 
de  Cassan,  touchant  leur  contribution  à  la  construction  ou  réparation 
des  murs  de  lu  ville  (2  juin  1359)  dans  le  Bull.  Soc.  Arch.  d,  B,, 
2^  série,  tome  VII,  p.  21-37.  Cet  acte  se  trouve  aussi  mentionné  dans 
VHist.  gén.  de  Lang .,  éd.  Privât,  tome  V,  col.  1454.  Voy.  aussi  ibid., 
tome  IX,  p.  695-696,  ch.  xc  :  Dispute  entre  les  ecclésiastiques  et  les 
habitants  de  Béziers. 

60.  —  52, 10.  «  l'abat  de  Sant-Jacme».  Pierre  III,  abbé  de  Saint- 
Jacques  (1328-1363).  Cf.  Eist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IV, 
p.  585,  et  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2©  série,  tome  XIV,  p.  300.  Dans 
le  n>s.  le  mot  Jacme  est  rayé  et  remplacé  par  un  mot  illisible  (voy. 
la  note  1  au  bas  de  la  page  52)  :  ce  mot  illisible  doit  être  probable- 
ment: Afrodisi,  Voici,  en  effet,  ce  qu'on  lit  au  début  de  l'acte  men- 
tionné dans  la  note  précédente:  «  Noverint  universi  quod  cum  quœs- 
tio,  seu  debatum,  subortse  fuissent  et  amplius  suboriri  sperarentur 
inter  consules  et  universitatem  hominum  civitatis  Biterris  ex  una 
parte,  et  capitula  sanctorum  Nazarii  et  Aphrodisii  ac  dominos  abba- 
tem  sancti  Aphrodisii  et  priorem  de  Cassiano,  conjunctim  vel  divi- 
sim,  seu  raembra  eorumdem  ex  altéra. ...  »  Il  s'agirait  donc  de  Ber- 
nard VI  de  Mandagout  ou  de  Mandagaches,  abbé  de  Saint-Aphro- 

•  Jacobiis  est  sans  doute  une  faute  de  lecture.  Lisez  Jacobus. 

2  Johannis  est  sans  doute  une  faute  de  lecture.  Lisez  Johannes. 

3  Bitteri  est  sans  doute  une  faute  de  lecture.  Lisez  Bitteris. 


o22  LE    «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

dise  (1353-1370).  Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IV,  p. 
498,  et  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2«  série,  tome  XIV,  p.  291. 

61. —  52,  10-11.  «  el  prior  de  Cassa».  Cassan  était  un  prieuré  très 
important,  situé  près  de  Roujan  (Hérault).  Cf.  dans  le  Bull,  Soc. 
Arch.  r^.  5.,  1"  série,  tome  VllI,  p.  53-79:  Le  Prieuré  de  Cassan, 
monograplne  locale,  par  A.  Crouzat,  et  Hïst.  gén.  de  Lang.,  éd. 
Privât,  tome  IV,  p.  732-733. 

62.  — 52,  14.  «  lo  comte  de  Peyties  »  .  Jean,  comte  de  Poitiers,  et 
plus  tard  duc  de  Berry  :  c'était  le  plus  jeune  fils  du  roi  Jean. 

63. — 52,  15.  «  Pey.  deCarato».  Dans  l'acte  mentionné  dans  la  note 
59,  ce  personnage  est  nommé  Petrus  de  Cazacone  et  Petits  de  Casa- 
cône*,  et  dans  VBïst.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  696: 
Pierre  de  Caseton. 

64.  —  52,  15.  (f  R.  la  Roqua  ».  Dans  l'acte  mentionné  dans  la 
note  59,  ce  personnage  est  appelé  Raymundus  de  Rupe,  et  dans  VHist, 
de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  696:  Raimond  de  la  Roche. 

65.  —  52,  16-18.  «  R,  Barot,  R.  Malpel,  P.  Dorimnis,  Pey.  del 
Lac  ».  Dans  l'acte  mentionné  dans  la  note  59,  ces  personnages  sont 
respectivement  appelés  :  Hugo  Barroti^prœcentorecclestœnarbonensis, 
—  Petrus  Raymundus  Malpili  et  Petrus  Raymundus  Malapilï,  —  Pe- 
trus de  Oriwnis,  —  Petrus  de  Lacu . 

66.  —  52,  24.  «  Item  may  ordenero. .  ».  L'acte  de  transaction  passé 
entre  les  consuls  de  Béziers,  les  chapitres  de  Saint-Nazaire  et  de 
Saint- Aphrodise  et  le  prieur  de  Cassan,  au  sujet  de  la  réparation  des 
ponts,  chaussées  et  fontaines,  acte  par  lequel  les  religieux  s'engagent 
à  donner  le  neuvième,  se  trouve  dans  la  collection  Doat,  60,  folios 
123-162.  Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  V,  col.  1454. 

67.  —  53,  1-3.  Voici  la  disposition  du  ms.  : 

sen  Johan  Cabrayressa  per  canabassies.  Etaquestan  comêsero aver \ 

I    cossol  g  êcaras      (  aqulhiro 

no  avian  ahut.  Et  agrô  lo  q  Jos  pelicies  los\ 

68.  —  53,  9.  «  m.  franc  *>.  Au  lieu  de  m.  frange  {-^zmieg  franc)  le 
ms.  porte  :  z.  franc.  Cf.  note  17. 

69. —  53,  23.  «  persso  ».  Inutile  de  dire  que  le  ms.,  ici  et  dans  tous 
les  cas  semblables,  écrit,  comme  un  seul  mot,  persso.  Le  redouble- 
ment de  r«  marque  qu'elle  doit  être  prononcée  dure.  Pour  la  commo- 

*  Cazacone  et  Casacone  sontsans^doute  des  fautes  de  lecture  pour  Caza" 
tone  et  Casatone.  Mascaro  appelle  ce  personnage  Carato  pour  Cazato  par 
suite  du  phénomène  fréqueut/dans  notre  texte  de  la  mutaMon  de  r  en  z  et 
réciproquement.  Dans  l'édition^  de  la  Soc.  Arch.  d.  B.,  la  leçon  P.  de 
Carcito  est  évidemment  fautive. 


DE    JACME   MASCÂRO  523 

dite  de  la  lecture  nous  avons  séparé  les  mots  ainsi  réunis,  mais  en 
conservant  les  deux  s.. 

70.  —  54,  5.  M  Guilhem  ».  Ms.  Guilhez.  Cf.  note  17. 

71.  — 54,  10.  tt  Gassiot  del  Castel  ».  Garcion  del  Castel,  chef  de 
routiers.  Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IX,  p .  726. 

72.  —  54,  11.  «  Cesseras  ».  Village  de  l'arrondissement  de  Saint- 
Pons  (Hérault). 

73.  —  54,  12-13.  «  lo  comte  de  Tustamera,  que  era  frayre  del  rey 
de  Castela  ».  Henri,  comte  de  Transtamare,  frère  de  Pierre  le  Cruel, 
roi  de  Castille. 

74.  — 54,  14-15.  «  Segui  de  Badafol  ».  Sur  Seguin  de  Badefol, 
chevalier  gascon,  et  la  prise  de  Frontignan,  cf.  Hist.  gén.  de  Lang., 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  724  et  p.  775,  note  1.  11  est  à  remarquer  que 
Mascaro  l'appelle  anglais  :  on  englobait  alors  sous  cette  dénomina- 
tion tous  les  ennemis. 

75.  —  54,  16-18.  «  Mays  non  triguet  gaire  que  la  vigarie  de  Be- 
zes  ,.».  Jean  de  Villaines,  viguier  de  Béziers,  fut  chargé  par  son 
frère,  Pierre  de  Villaines,  dit  le  Bègue^  sénéchal  de  Carcassonne,  de 
pourvoir  à  la  fortification  et  à  la  défense  de  Béziers,  le  15  juin  1362. 
Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  718,  note  l. 

76.  —  55,  12.  «  venc  a  Nemze  lo  rey  Johan  ».  Sur  le  voyage  du 
roi  Jean  à  Nimes,  cf.  Hist.  gén.  de  Lang. ^  éd.  Privât,  tome  IX,  p. 
751  et  sq. 

77.  —  55,  16.  «  lo  luoc  de  Peyriac  ».  Le  château  de  Peyriac  dans 
le  Minervois.  Sur  ce  château,  cf.  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât, 
tome  IX,  p.  761,  note  1. 

78.  —  55,  16.  «  Bertrugui  ».  Dans  VHïst.  gén.  de  Lang.,  éd. 
Privât,  tome  IX,  p.  755,  ce  chef  de  routiers  est  appelé  Bertaquin. 

79.  —  55,  17.  «  companhos  ».  Ms.  côpanh.  11  faut  lire  companhos 
et  non  companhs,  car  au  folio  74  r.  on  lit  dans  le  ms.  companhos  en 
toutes  lettres. 

80.—  55,  18.  «  lo  castel  de  Linha  ».  Lignan,  village  près  de  Béziers. 
Le  château  de  Lignan  était  la  résidence  des  évêques  de  Béziers. 

81.  — 55,  19.  «  Loys  Roinbaut  ».  Louis  Raimbaud,  chef  d'un 
parti  d'anglais»  Cf.  Sabatier:  Hist.  d.  l.  ville  et  d.  év.  d.  B.,  ^.  290, 
et  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  776.  Sur  la  prise  de 
Lignan,  le  28  juillet  1363,  cf.  ibid.,  tome  IX,  p.  756,  note  1. 

82.  —  55,  21.  «  l'avesque  de  Bezes  ».  Hugues  1^'  de  la  Jugie.  Cf. 
note  44. 

83.  —  55,  25.  «  companhos  ».  Ms.  Côpanh.  Cf.  note  79. 

84.  — 55,26.  (c  Maraussa,  Thesa,  Cornelha  ».  Maraussan,jThézan 
et  Corneilhan,  villages  près  de  Béziers. 

85.  —  56,  8.  «  Bernât  Porquie  ».  Sur  ce  personnage  voyez  la  mo- 


524  LE   «LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

nographie  de  M.  Augunte  Baluffe:  Bernard  Pourquier  (\3S\ -1397), 
étude  d'histoire  locale.  Béziers,  1878. 

86.  —  50,  15.  «  lo  luoc  de  Bederious  ».  Bédarieux,  ch.-l.  de  can- 
ton (Hérault). 

87.  —  5(3,  19.  «  lo  luoc  de  Peyriac  ».  Cf.uote  77.  C'est  le  maréchal 
d'Audenehain  qui  assiégea  et  reprit  le  château  de  Peyriac.  Cf.  Ilist. 
gén.  deLang.y  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  763-764. 

88.  —  56,  21.  «  papa  Urba  ».  Urbain  V,  sixième  pape  d'Avignon 
(1362-1370). 

89.  — 56,  33-34.  «  Guilhem  Arnaut,  morgue  deSantGili  ».  S'agit- 
il  d'Arnaud,  abbé  de  Saint-Gilles  de  1301  à  1367?  Cf.  Hist,  gén. 
de  Lang  éd.  Privât,  tome  IV,  p.  519.  Sur  Tabbaye  de  Saint-Gilles, 
cf.  ihid.,  tome  IV,  note  CI,  p.  514-522. 

90.  —  56,  34.  «  prier  de  Malsa  ».  Nous  n'avons  pas  réussi  à  décou- 
vrir quel  était  le  prieuré  de  «  Malsa». 

91 .  —  56,  36-37.  «  Bcrtran  de  Monpezat  »>.  Il  s'agit  probablement 
de  Bertrand  de  Montpezat,  chevalier,  seigneur  de  Fons,  gouverneur  de 
Nimes,  en  1361.  Cf.  Hist.  gén.  de  Lang. ,  tome  IX,  p.  721. 

92.  —  56,  38.  «  sant  Girma  de  Monpeylier  ».  Sur  Saint-Germain 
de  Montpellier  et  sa  fondation  ])ar  Urbain  V,  cf.  Hisi.  gén.  de  Lang. 
éd.  Privât,  tome  IV,  p.  820-821. 

93.  —  57,  24.  «  Monflores  ».  Voyez  ci-dessous  note  95. 

94.  —  57,  24.  «  l'Almorna  ».  Voyez  ci-dessous  note  95. 

95.  —  57,  25.  «  Sauma  Longa  ».  Nous  n'avons  pas  pu  découvrir, 
malgré  nos  recherches,  quels  étaient  les  trois  chapitres  ainsi  nom- 
més par  Mascaro. 

96.  —  57,  28.  «  lo  duc  d'Ango  ».  Louis  l*"^,  duc  d'Anjou,  né  en 
1339,  mort  en  1384,  deuxième  fils  du  roi  Jean,  lieutenant  du  roi  Char- 
les V  en  Guyenne  et  en  Languedoc. 

97.  — 57,  37  39  et  58,  1-9.  Sur  la  diminution  du  nombre  des  feux 
dans  le  Languedoc,  cf.  Hisi.  gén.  de  Lang,,  éd.  Privât,  tome  IX,  p. 
738-739,  ch.  XI  :  Réparation  des  feux  dans  la  Province,  et  notamment 
la  note  4  de  la  p.  739. 

98.  —  58,  7.  «  coma  dessus  es  dich  ».    Cf.  folio  29  v. 

99.  —  58,  32.  «  Bertran  de  Clequi  ».  Bertrand  du  Guesclin.  Dans 
les  actes  en  français,  il  est  nommé:  Glecquin,  Gléaquin,  Glayaquin, 
Glesquin,  Cleyquin,  Claikin,  etc.  Cf.  Michelet  :  Histoire  de  France, 
édit.  Lacroix,  tome  V,  p.  3,  note  1. 

100.  —  59,  24.  <(  papa  Urba,  que  era  vengut  a  .Monpeylier  ».  Sur 
le  voyage  du  pape  Urbain  V  à  Montpellier,  cf.  Hist,  gén.  de  Lang, 
éd.  Privât,  tome  IX,  p. 785  et  sq  ,  ch.  XXXIX:  Voyage  du  pape  Ur- 
bain  V  à  Montpellier j  où  il  fonde  le  monastère  de  Saint-Benoît, 

loi.  —  60,  8.   «  tantas  de  gens  d'armas  d.  Il  s'agit  ici  des  com- 


DE   JACME    iVIASGARO  525 

pagnies  de  Perrin  de  Savoie  et  du  Limousin  qui,  de  retour  de  leur 
expédition  en  Espagne,  campèrent  dans  le  Bas  Languedoc  où  elles 
commirent  de  grands  ravages  au  moment  des  vendanges  et  des  se- 
mailles :  que  liom  no  podia  vendemiar  ni  semenar. 

102.  —  60,  15.  «  la  Mayre  de  Dieu  de  Serinha  ».  Sainte-Marie, 
église  de  Sérignan,  village  situé  près  de  l'embouchure  de  l'Orb,  était 
au  moyen  âge,  l'objet  d'une  grande  dévotion.  Cf.  Carou  :  Géographie 
de  V arrondissement  de  Béziers,  p.  287,  art.  Sérignan,  dans  Bull.  Soc. 
Arch.  d.  B.,  2^  série,  tome  111. 

103.  —  60,  18.  «  la  regina  de  Fransa  >.  Jeanne  de  Bourbon, 
femme  de  Charles  V. 

104.  —  60,  20.  «  lo  comte  Marti.  »  Charles  de  Trie,  comte  de 
Dammartin,  qui  fut  en  effet  l'un  des  parrains  de  Charles  VI,  (voy. 
Moréri),  et  qui  plus  tard  (cf.  p.  88,  1.  24-25)  tint  aussi  sur  les  fonts 
le  premier  né  de  ce  prince.  » 

105.  —  60,  20.  wCarles  ».  Charles  VI,  né  à  Paris,  en  l'hôtel  Saint- 
Pol,  le  3  décembre  1368. 

106.  —  60,  27.  «  la  Maria  Magdalena  ».  L'église  de  la  Madeleine, 
à  Béziers.  Cf.  note  42. 

107.  —  61,  10.  «  Johan  de  Boservisi  ».  M  s.  Johan  de  ho  servisi. 

108.  —61,  32.  «  Bernât  Porquie  ».  Cf.  note  85. 

109.  —  62,  2.  «  Ymbert  de  Montadi.  »  Montady,  canton  de  Capes- 
tang  (Hérault),  village  près  de  Béziers.  Cf.  Carou:  Géographie  de 
l'arrondissement  de  Béziers,  1^.  243,  art.  Montady,  àams  Bull.  Soc. 
Arch.  d.  B.,2^  série,  tome  III. 

110.  —  62,  6.  «  Lespinha  ».  Lespignan,  village  près  de  Béziers. 
Cf.  Carou  ;  op.  cit.  p.  234. 

111.  —  62,  7.  «  Bayscha  ».  Baissan  ouBaissOy  ferme  dans  la  com- 
mune de  Béziers.  Cf.  Carou  :  op.  cit.  p.  198. 

112.  —  62,  32.  <t  Bayssa  ».  Cf.  la  note  précédente. 

113.  —  63,  12.  «  moli  de  sanc  ».  Cf.  Lexique^  art.  moli  de   sanc. 
114    —  63,  24-30.  «  En    l'an  sobredich...  ».  «  Hugues   de  Rieux 

logea  dans  son  palais  épiscopal  la  princesse  leanne,  aagée  de  vingt- 
vn  an,  fille  de  Philippe  de  Valois  et  de  Blanche  de  Nauarre,  laquelle 
alloit  en  Espagne  espouser  lean.  Duc  de  Gyrone,  fils  de  Pierre,  Roy 
d'Aragon,  et  cette  leanne  y  fut  accueillie  d'vne  griefue  maladie,  dont 
elle  mourut  en  dix  ou  douze  iours.  d  Andoque,  Catal.  d,  év.  d.  B., 
p.  118. 

115.  —  64,  4.  «  Sicart  d'Ambres  ».  Sicard  d'Ambres,  de  la  maison 
de  Lautrec  en  Albigeois,  évêque  de  Béziers  en  1371,  mort  en  1383. 
Cf.  Andoque:  Catal.  d.  év.  d.  5.,  p.  120-121,  et Sabatier  :  Hist. 
d.  l.  ville  etd.  év.  d.  B.,  i^.  292-299. 

116.  — 64,   5.  «  lo  portai  de  las    Sors  Menos  ».  La  Porte  des 


526  LE    c(  LIBRE    DE    MEMOHIAS  » 

Minorettes  ;  cf.  Buîl.  i^oc.  Arch.  iL  B.,  2"^  série,  tome  VII,  p.  255. 
Sur  les  Minorettes,  cf.  ihUL,  ke  sôrie,  tome  II,  p.  191-226  :  Notice 
sur  les  Sœurs  Minorettes  de  S^^  Claire  de  Béziers,  par  Azaïs. 

117.  —  64,  8.  «  lo  soquet  ».  Sur  Je  soquetsur  le  vin,  cf.  llist.  gén 
de  Lang.j  éd.  Privât,  tome  IX.  p.  765. 

118.  —  64,  11.  «  Segares  ».  Le  sens  du  mot  segares'  est  difficile  à 
déterminer.  Nous  supposons  que  c'est  un  nom  propre,  le  nom,  par 
exemple,  du  quartier  de  la  ville  où  est  située  la  maison  du  sieur 
P.  Saseno,  achetée  par  les  consuls.  Peut-être  aussi  ce  nom  désigne- 
t-il  l'endroit,  (serait-ce  un  couvent?),   où  réside   ledit  P.  Saseno. 

119.  —  64,  32.  «  Item  ».  Ms.  Itez.  Cf.  note  17. 

120.  — 65,  8.  «  lo  portai  dePresicadors  ».  Sur  cette  porte,  cf.  Bull. 
Soc.  Arch.  d,  B.^  2« série,  tome  VII,  p.  262.  Sur  l'emplacement  de 
l'ancien  couvent  dos  frères  prêcheurs,  cf.  ibid.,  p.  259-260. 

121 ,, —  67,  11 .  «  Pey.  de  Mozere  ».  Pierre  de  Mourèze.  Mourèze 
est  un  petit  village  du  canton  de  Clermont  (Hérault). 

122. —  67,  36.  «  fouc  mot  gran  carcstia  deblat  ».  Sur  cette  disette, 
cf.  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  841,  note  7. 

123.  — 68,  8-9.  ((  lo  jutge  d'Arboreya  ».  Le  juge  d'Arborée,  en  Sar- 
daigne;  les  marchands  de  Montpellier  allaient  également  s'approvi- 
sionner dans  ses  domaines.  Hist,  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome 
IX,  p.  841,  note  7. 

124.  —  68,  39.  «  papa  Gregori  ».  Grégoire  XI,  7®  pape  d'Avignon. 
VHist.  gén.  de  Laug.^éd.  Privât,  tome  IX,  p.  853,  donne  comme 
date  de  son  départ  pour  Rome  le  13  (et  non  le  14,  comme  Mascaro) 
septembre  1376. 

125.  — 69,  11.  «  e  sse  ».  Ms.  es  se.  Cf.  note  69. 

126. —  69,  13.  «  la  ribieyra  d'Orp  ».  L'Orb,  rivière  qui  passe  à 
Béziers. 

127.  —  69,  14.  «  los  molis  del  ga».  c.  à.  d.  les  moulins  du  gué,  sur 
rOrb,  ainsi  nommés  à  cause   de    la  proximité  du  gué  appelé  guadus 

franciscus.  Cf.  Carou  :  Géographie  de  l  arrondissement  de  Béziers,  p.  247, 
art.  Moulins  Neufs,  dans  Bull,  Soc.   Arch.  d.  B.  2«  série,  tome  III. 

128.  —  69,  39.  ««  l'evesque  de  Bezes  ».  Sicard  d'Ambres.  Cf. 
note  115. 

129.  —  70,  2.  «  lo  cor  de  Dieu  »  .  Corr.  cors  ? 

130.  —  70,  2-3.  «  la  capela,  que  es  dins  la  mayo  comuna.  »  La 
chapelle,  aujourd'hui  disparue,  de  l'ancien  hôtel  de  ville,  est  men- 
tionnée, p.  222,  dans  la  Statistique  des  églises  et  chapelles  dans  la  ville 
de  Béziers  et  son  territoire,  en  1789,  par  M.  Sabatier  {Bull.  Soc.  Arch. 
d.  B.,  2'-  série,  tome  X,  p.  221-239). 

131.  —72,  13.  c(  fouc  mot  gran  decencio  ».  Sur  cette  sédition  de 
Montpellier,  cf.  Andoque  :  Hist.  du  Lang.^  liv.  XIII,  p.  425-427,  — 


DE   JAGME   iMARCARO  527 

Hist,  gén,  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  872  et  sq.,  ch.  XCV  : 
Révolte  des  habitans  de  Montpellier ^  et  p.  885, — ■  et  Chronique  d'Esto- 
rîac,  p.  107-108  dans  Bulh  Soc.  Arch.  d.  B.,  2«  série,  tome  IV. 

132.  —  72,  15.  «  lo  chancelier  del  dig  mossenhor  d'Ango  ».  Guil- 
laume de  Pointel,  chancelier  du  duc  d'Anjou  Cf.  Andoque  :  Hist.  du 
Lang,,  liv,  XIII,  p.  425,  et  Hist,  gén,  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome 
IX,  p.  872. 

133.  —  72,  15-16.  «  maystre  Johan  Perdiguie  ».  Jean  de  Perdiguier. 
Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  872.  Etienne  Es- 
toriac  l'appelle  Me  Jean  Perdeguis.  {Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2©  série, 
tome  IV,  p.  107). 

134.  —  72,  16.  «  maistre  Arnaut  del  Lar  ».  Arnaud  de  Lair,  gou- 
verneur de  Montpellier  (Andoque':  Hist.  du  Lang., \iy.  XIII,  p.  425). — 
Arnaud  de  Lar  (Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  872).  — 
M®  Arnaud  Deles  (Etienne  Estoriac.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2®  sé- 
rie, tome  IV,  p.  107). 

135.  — 72,  17.  «  Guy  Gonestaria  ».  Guy  de  Scery,  sénéchal  de 
Rouergue  (Andoque  :  Hist.  du  Lang.,  liv.  XIII,  p.  425).  —  Gui  de 
Lestaire  ou  Lestayrie,  originaire  du  Limousin,  sénéchal  de  Rouergue 
(Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  872).  —  Guy  Lescuri 
(Etienne  Estoriac.  Btill.  Soc,  Arch.  d.  J5.,  2"  série,  tome  IV,  p.  107). 

136. —  72,  17-18.  «  Pabina  de  Gontaut.  ».  Ce  personnage  est  pro- 
bablement Julien  Gontheri,  secrétaire   du   duc   d'Anjou.  Hist.  gén 
de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  798. 

137.  —  72,  21.  «  Someyre  ».  Sommières,  dans  le  Gard. 

138.  — 72,  25-26.  «  lo  cardenal  d'Albana,  frayre  quefouc  de  papa 
Urba  ».  Grimoard,  cardinal  d'Albano,  frère  du  pape  Urbain  V. 

139.  —  73,  15-22.  «  L'an   dessus,  a  XVI  de  genoier ».  Sur 

cette  députation,  cf.    Hist.    gén.  de  Lang.,   éd.    Privât,   tome    IX> 
p.  878,  note  3. 

140.  — 73,24.  «  lo  castel  de  Cabrieyra  ».  Surla  prise  du  château 
de  Cabrières  (canton  de  Montagnac,  Hérault),  le  13  décembre  1380, 
cf.  Hist.  gén.  de  Lang  ,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  878,  note  3  et  p.  891. 

141.  — 73,  24.  «  Benezeg  Chipparel  ».  Benezeg,  Benezeit  ou 
Benoît  Chipparel  ouChapparel,  chef  de  routiers.  Hist.  gén.  de  Lang., 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  803,871,  878,  891  et  892. 

142.  —  73,  25.  «  lo  Bastart  de  Landorra  ».  Le  Bâtard  de  Lan- 
dorre,  chef  de  routiers.  Hist.  gén.  de  Lang,  éd.  Privât,  tome  IX, 
p.  878  et  892. 

143  —  73,  28.  «  Ginhac  ».  Gignac,  ch.-l.  de  canton,  arrond*  de 
Lodève  (Hérault) . 

144.  —  73,  32.  «  Fontes  »,  Fontes,  village  du  canton  de  Monta- 
gnac  (Hérault). 


528  LE    «  J.ÎHRK    I)K    MKAIOIUAS  » 

145.  —  73,  32,  «  Pezet  ».  Porct,  villaue  du  canton  de  Montagnac 
(Hérault). 

146.  —  73,  32.  w  Perenas  ».  Pézénas,  ch.-l.  de  canton,  arrond*de 
Béziers  (Hérault). 

147.  — 73,33.  «  Aspira  de  Cabrayres».  Aspiran  de  Cabrières, 
canton  de  Montagnac  (Hérault). 

148 .  —  73,  36.  «  Karles,  filh  que  fo  del  bon  rey  Johan».  Charles  V 
le  Sage,  né  le  21  janvier  1337,  mort  le  16  septembre  1380,  fils  du 
roi  Jean  II  le  Bon. 

149.  —  74,  1 .  «  madaraa  la  duguessa  d'Ango  ».  Jeanne  de  Blois, 
dite  de  Bretagne.  Cf.  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX p.  768. 

150.  —  74,  3.  «  mossen  Loys ».  Louis  II,  duc  d'Anjou,  né  en  1377, 
mort  en  1417. 

151.  —  74,  7.  «  Karles,  filh  del  dessus  dig  mossen  Karles  », 
Charles  VI  le  Bien-aimé,  fils  de  Charles  V  le  Sage,  né  le  3  décem- 
bre 1368,  mort  le  21  octobre  1422. 

152.  —  74,  31  et  sq.  «  L'an  dessus  dig  mil  ccclxxxi.  ...  ».  Voici 
comment  Andoque,  Catal.  d.  év.  d.  B.,  p.  120-121,  raconte  cette  sé- 
dition. «  Dans  les  manuscrits  d'Estienne  Storriac,  qui  viuoit  alors, 
on  trouue  qu'il  arriua  dans  cette  Ville  le  8  d'octobre  *  1381,  vne 
•grande  sédition  sur  le  sujet  de  l'entrée  du  Duc  de  Berry;  les  vns 
disoient  qu'il  la  faloit  faire  extrêmement  belle,  afin  d'appaiser  par  ce 
moyen  vn  Prince  qui  auoit  sujet  d'estre  irrité  contre  eux  :  mais  les  mu- 
tins et  séditieux  crioient  deuant  la  porte  de  la  maison  comune  qu'il 
se  faloit  bien  garder  de  faire  de  si  grandes  despences  pour  un 
Gouuerneur  qui  auoit  désia  désolé  son  gouuernement,  et  comme  ces 
derniers  estoient  en  très  grand  nombre,  ils  mirent  si  soudainement 
le  feu  à  la  maison  commune,  où  les  autres  qui  estoient  d'vn  auis  con- 
traire estoient  assemblez,  que  la  plus  grand  part  de  ceux-là  s'y  brusla; 
le  Duc  de  Berry,  ainsi  que  l'on  trouue  dans  ces  manuscrits,  entra 
dans  Béziers  bien-tost  après,  et  dès  qu'il  y  fut,  il  fit  esleuer  des 
gibets  à  cinq  ou  six  cens  pas  hors  de  la  Ville,  où  il  fit  pendre  deux 
cens  de  ces  séditieux,  et  sans  les  prières  et  intercessions  de  Sicard  ^, 
il  en  eut  fait  mourir  vn  plus  grand  nombre.  »  On  peut  lire  le  récit 
original  d'Etienne  Estoriac  dans  le  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B., 
2«  série,  tome  IV,  p,  109-110.  Cette  sédition  est  aussi  racontée  par 
Sabatier  :  Jïî5^.  d.  l.  ville  et  d.  év.  d.  B.,  p.  295-299,  et  dans  VHîst. 
gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  899-900.  ch.  VllI  :  Sédition 
à  Béziers:  voy.  notamment  la  note  6  de  la  p.  900.  Voy.  aussi  Aug. 

*  Mascaro  dit  le  8  septembre  et  Étienoe  Estoriac  est  d'accord  avec  lui.  Il  y 
a  donc  ici  une  erreur  d'Andoque. 
2  Sicard  d'Ambres,  alors  évêque  de  Béziers.  Cf.  note  115, 


DE  JAGME   MASGARO  529 

Baluffe  :    Bernard  Pourquier  (1381-1397),    étude    d'histoire  locale, 
Béziers,  1878. 

153.  — 74,  34-35.  «  lo  duc  de  Berri  ».  Jean,  duc  de  Berry,  3®  fils 
du  roi  Jean  et  de  Bonne  de  Luxembourg,  né  en  1340,  mort  en  1416. 

154.  — 77,  6.  Les  mots  imprimés  en  capitales  sont  mis  en  vedette 
et  écrits  à  Tencre  rouge  dans  le  ms. 

155.  —  77,  22.  «  L'an  dessus  dig  mccclxxxii.  . .  ».  Sur  l'entrée  du 
duc  de  Berry,  cf.  ITist.  gén.  deLang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  905- 
906,  ch.  XII:  Le  duc  de  Ben*y  est  enfin  reçu  dans  Béziers^  et  la  noteS 
de  la  p.  906. 

156.  —  77,  25.  «lo  comte  de  Sant  Surra  ».  Louis  de  Sancerre,  né 
vers  1342,  mort  en  1402  ;  il  fut  nommé  maréchal  de  France  en  1369  et 
reçut  le  titre  de  connétable  en  1397.  Mascaro  écrit  aussi  Sansurra 
(82,  13)  et  Sansuerra  (95,  12). 

157.  —  77,  25.  «lo  comte  de  Stampas».  Louis,  duc  d'Anjou,  deu- 
xième fils  du  roi  Jean,  comte  d'Étampes  depuis  1381,  mort  le  21  sep- 
tembre  1384.  Ses  enfants  abandonnèrent  le  comte  d'Etampes  à  leur 
oncle  Jean,  duc  de  Berry. 

158.  —  77,  25-26.  «  lo  cardenal  d'Amiens».  Jean  de  la  Grange, 
évêque  d'Amiens  jusqu'en  1373  (Jean  11),  cardinal -évêque  de  Tuscu- 
lum-Frascati  (Jean  IV)  depuis  1373,  mort  à  Avignon  le  24  avril  1402. 
11  ne  faut  pas  le  confondre  avec  son  successeur  à  l'évêché  d'Amiens, 
Jean  Roland  (Jean  IIl),  qui  mourut  le  17  décembre  1388  et  qui  refusa 
la  pourpre  le  12  juillet  1385. 

159.  —  77,  30.  «  L'an  dessus  dich  mccclxxxi.  . .».  Mascaro  revient 
en  arrière  d'un  an.  L'alinéa  qui  précède  celui-ci  commence,  en  effet, 
par  les  mots  :  L'an  dessus  dig  mccclxxxii.  . . 

160.  —  78,  14.  «  de  ssos  ».  Ms.  dessos.  Cf.  note  69. 

161.  —  78,  17-18.  «  I  onsa  m»  ».  Au  lieu  de  m«  (=  miega)  le  ms. 
porte  :««.  Cf.  note  17. 

162.  —  78,  21 .  «  VI  onsas  e  ma  ».  Ms.  VI ornas  e  za,  Voy.la  note 
précédente. 

163.  —  79,  5  et  sq.  «  Item  las  escalas. . .».  On  peut  lire  une  courte 
analyse  de  la  charte  consulaire  qui  se  trouve  intercalée  ici,  et  dont  le 
début  manque,  dans  le  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2"  série,  tome  IX,  p. 
327-328. 

164.  —  79,  9.  «  dos  ans  a  re  »,  c.  à  d.  deux  ans  de  suite. 

165.  —  79,  28  et  31 .  «  si  atrobes  »  .  Il  faut  lire  sH  atrohes  =  s*y 
trouvât. 

166.  —  80,  7.  «  los  plus  pTopdas  très  cossols  predecessors  lurs  ». 
Ms.  los  plus  propdas  cossols  très  cossols  predecessors  lurs.  Le  premier 
cossols  est  souligné  (on  a  souligné  au  lieu  d'exponctuer)  et  doit  évi- 

S6 


530  LE    «LIBRE   DE   MEMOIUAS  » 

demment  être  négligô  dans  la  lecture.  Mascaro  veut  dire  que  les  trois 
prédécesseurs  immédiats  do  cliaci:u  dos  oiiiq  consuls  sortants  doivent 
former  les  quinze  électeurs  chargés  de  l'élection  de  cinq  nouveaux 
consuls. 

167.  —  82,  12-13,  «  lo  cardcnal  d'Amyes  ».  Le  cardinal  d'Amiens. 
Cf.  note  158. 

168.  —  82,  13.  «  lo  comte  do  Sansurra  ».  Le  comte  de  Sancerre. 
Cf.  note  156. 

169.  — 82,  13.  «  Tavesque  de  Bezes  ».  Sicard  <!' Ambres.  Cf.  note 
115. 

170.  —  82,  14.  «  l'avesque  de  Masque  ».  L'évêque  de  Mâcon 
(Saône-et-Loire). 

171.  —  83,  4-5.  <^  lo  rey  d'Erminia  ».  Léon  VI  de  Lusignan,  roi 
d'Arménie  (1365-1393). 

172.  —  83,  5.  «  los  Sarrarys  ».  Les  Sarrasins.  Il  faut  entendre  par 
là  les  Mameluks  qui  dévastèrent  TArménie  et  forcèrent  Léon  VI  de 
Lusignan  à  capituler  en  1345^  après  une  résistance  de  neuf  mois  dans 
la  forteresse  de  Gaban.  Fait  prisonnier  avec  toute  sa  famille,  il  fut 
envoyé  au  Caire  et  ne  put  être  délivré  que  par  l'entremise  de  Jean  1«', 
roi  de  Castille,  en  1382.  Il  alla  alors  successivement  à  Jérusalem,  à 
Rome,  en  Castille  et  à  Paris  où  il  mourut:  c'est  au  cours  de  ce  dernier 
voyage  qu'il  passa  à  Béziers. 

173.  —  83,  8-9.  «  Sicart  d'Ambres  ».  Cf.  note  1 15. 

174.  —  83,  12.  «  Svmon  de  Grimoart».  Il  s'agit  sans  doute  de  Si- 
mon  de  Cramaud,  évêque  de  Béziers,  qui  succéda  à  Sicard  d'Ambres 
et  non  pas,  comme  le  veut  Audoque,  à  Barthélémy  de  Montcalve,  le- 
quel fut  au  contraire  le  successeur  de  Simon  de  Cramaud.  Nous  avons 
fait  observer  dans  une  note  au  bas  de  la  p.  83  que  Grmoart  avait 
été,  dans  le  ms.,  corrigé  en  Cramant.  Sur  Simon  de  Cramaud,  cf. 
Andoque,  Catal.  cl.  év.  d,  B.,  p.  124-125  et  Sabatier  :  Hist.  d.  l.ville 
etd.  év.  d.  B.,\i    299-300. 

175.  —  83,  25.  «  L'an  mccclxxxiiii.  . .  ».  Pour  l'histoire  de  Béziers 
à  partir  de  cette  année  1384,  on  peut  consulter  :  Aug.  Baluffe  :  Dix 
ans  de  consulat  à  Béziers,  de  1384  à  1394,  étude  d'histoire  locale,  Bé- 
ziers, 1877. 

176.  —  84,  1 1.  «  lo  portai  de  las  Sors  Menos  ».  Cf.  note  116. 

177.  —  84,  11-12.  «  Simon  de  Grimoart  >».  Cf.  note  174. 

178.  —  84,  22-23.  «  Sant  Salvayre  ».  Saint-Sauveur,  ancienuo 
église  de  Béziers,  sur  l'emplacement  do  laquelle  cf.  Bull.  Soc.  Arch. 
d,  B.,  2e  série,  tome  VII,  p.   270-271. 

179. — 84,  33.  «  moric  lo  duc  d'Anyo  en  Ytalia  en  laviela  de  Bar». 
Louis  le',  duc  d'Anjou  et  enfin  roi  de  Sicile  mourut  à  Bari,  en  ItaUe, 
le  29  septembre  1384. 


DE  JACME  MASCARO  531 

180 — 84,  34-35.  «  moric  lo  comte  d'Armanhac  a  Vinho».  Le  comte 
d'Armagnac  mourut  à  Avignon  le  26  mai  1384, 

181.  —  85,  7.  a  Baischa  ».  Cf.  note  111 . 

182.  —  86,  20-21.  «  la  fon  del  mercat  ».  Cf.  note  3. 

183.  —  86,  21.  «  la  mayo  del  Ton  ».  Tor  masculin  (avec  o  ouvert) 
rt^pond  au  latin  to7*us  et  signifie  éminence,  partie  élevée  d'un 
terrain^  comme  lorus  lui-môme.  La  mayo  del  Tor  signifie  donc 
littéralement  la  maison  de  Véminence.  Mais  je  ne  serais  pas  étonné 
que  la  mayo  del  Tor  fût  une  corruption  de  la  mayo  de  la  Tor  {tor 
féminin,  avec  o  fermé,  du  latin  turris)  :  il  faudrait  alors  traduire 
la  maison  de  la  Tour^  et  entendre  par  là  la  tour  dont  était  munie  la 
porte  de  l'Évêque  qui  n'était  autre  que  la  porte  des  Minorettes  {Bull. 
Soc.  Arch.  d.  B.y  2«  série  tome  VIII,  p.  41),  ou  quelque  autre  des 
nombreuses  tours  qui  se  dressaient  sur  cette  partie  des  remparts.  Pour 
tout  ce  qui  concerne  l'ancienne  topographie  de  Béziers,  on  peut 
consulter  l'appendice  et  le  plan  joints  à  VHist,  d,  l.  ville  et  d.  év, 
d,  B.,  par  Sabatier,  et  les  bulletins  de  la  Soc.  Arch,  d,  B,, 
notamment  :  2«  série,  tome  VII,  p.  253-290,  L.  Noguier  :  Enceinte 
murale  de  Béziers  à  l'époque  gallo-romaine  et  au  moyen-âge  (avec  qua- 
tre plans),  —  2«  série,  tome  VIII,  p.  35-58,  Sabatier  :  La  Porte  de 
Ghrindes  et  le  palais  du  roi,  —  2«  série,  tome  IX,  p.  129-160, 
Sabatier  :  Les  Bourgs  de  Béziers . 

184.  —  86,  21.  «  lo  portai  de  las  Sos  Menos  ».  Cf.  note  116. 

185.  —  86,  23.  «  ferom».  Ferom  est  ^tonrferon  {  =  ils  firent,  on  fit), 
Le  mot  lur  qui  suit  immédiatement  empêche  de  lire  ferom  pour/e«  om 
(  =fit  on)  par  changement  fréquent  dans  Mascaro  de  z  enr.  Le  sens 
serait  du  reste  le  même . 

186.  — 86,  31.  «  Carmes  ».  Sur  l'emplacement  de  l'ancien  couvent 
des  Carmes  de  Béziers,  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.  2«  série,  tome 
VII,  p.  286-287. 

187.  —  86,  31.  «l'avesque  d'Alboreya  ».  L'évêque  d'Arborée,  en 
Sardaigne. 

188.  — 86,  36-37.  «Johan  deBétizac^.Le  fameux  Jean  de  Bétizac 
confident  du  duc  de  Berry,  bien  connu  par  ses  exactions  et  par  son 
supplice,  était  né  à  Béziers.  Sur  ce  personnage,  cf.  Hist.  gén.  de 
Lang.  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  923,  933  et  941-943,  et  Aug. 
Baluffe  :  Dix  ans  de  consulat  à  Béziers^  de  1384  à  1394^  étude 
d'histoire  locale^  Béziers,  1877.  Le  procès  et  le  supplice  de  Bétizac 
sont  racontés  par  Froissard  dans  ses  Chroniques^  liv.  IV.,  ch.  VI 
et  VII  (tome  III,  p.  23-28  de  l'éd.  Buchon). 

189.  —  88,  3.  ((  En  aquel  mezeis  an  mccclxxxi,  ...  ».  Il  y  a  ici  une 
erreur  de  Mascaro.  C'esten  1385etnon  en  1386  que  Charles  VI  épousa 
Isabeau  de  Bavière.  Mascaro  ne  s'aperçoitpas  de  la  contradiction  de  ses 


532  LE    «LIBUE    DE    MEMOIUAS  » 

dates.  Il  donne  pour  date  du  mariage  de  Charles  VI  le  ISjuillet  1386,  et 
le  25  octobre  de  la  inônic  année  la  reine  Isabeau  (même  page,  ligne 
22)  annonce  la  naissance  de  son  fils  :  cet  enfant  serait  donc  né  après 
moins  de  trois  mois  et  demi  de  mariage.  Sur  le  ms.,  la  même  main  qui, 
à  ravant-dernière  ligne  de  la  page  87,  (voy.  la  note  2  au  bas  de  la 
p.  87),  a  ajouté  les  mots  ite/n  lo  anaprop  lxxxvii  a  corrigé  p.  88.  1. 
3,  McccLxxxvi  en  mccclxxxvii;  mais  cette  correction  malheureuse  ne 
fait  qu'aggraver  l'erreur  de  Mascaro,  sans  faire  disparaître  la  con- 
tradiction que  nous  venons  do  signaler. 

190.  —  88,  4.  «  Karles  ».    Charles  VI  le  Bien-aimé. 

191.  —  88,  5.  «  del  état  de  xviii  ans  ».  11  y  a  ici  encore  une  légère 
erreur.  A  l'époque  de  son  mariage,  Charles  VI  avait  non  pas  dix- 
huit  ans,  mais  seulement  seize  ans  ;  Isabeau,  qu'il  épousa,  n'avait 
elle-même  que  quatorze  ans.  Même  en  admettant  pour  le  mariage  du 
roi  la  date  de  Mascaro,  et  nous  avons  démontré  (note  189)  qu'elle  est 
erronée,  Charles  VI,  né  le  3  décembre  1368,  n'aurait  eu  le  18  juillet 
1386  que  dix-sept  ans  et  demi. 

192.  —  88,  5-6.  «la  filha  del  duc  de  Bavaria  d'Alamanha  ».  Isa- 
beau  de  Bavière  (1371-.1435),  fille  d'Etienne  II,  duc  de  Bavière. 

193.  —  88,  7.  «  Dam  ».  Dam  ou  Damme,  ville  de  Belgique  (Flandre 
occid.),  à5kil.  N.-E.  de  Bruges. 

194.  —  88,  11.  «Olivie  de  Clisson».  Olivier  de  Clisson  (1336-1407), 
connétable  de  France  sous  Charles  VI. 

195.  —  88,  13.  «  Gans  ».  Gand,  ville  de  Belgique,  ch.-l.  de  la 
Flandre  orientale. 

196.  —  88,  22.  —  M  L'an  dessus  dig,  a  xxv  d'octobre  ».  Cf.  note 
189. 

197.—  88,  25.  «  lo  comte  Marti  ».  Cf.  note  104. 

198.  — 88,  25.  «  Karles  ».  Charles,  fils  aîné  de  Charles  VI,  ne  sur- 
vécut pas  à  son  père.  Des  douze  enfants  que  Charles  VI  eut  de  la 
reine  Isabeau,  il  ne  laissa  qu'un  fils,  qui  fut  Charles  VII  (né  en  1403, 
mort  en  1461)  et  cinq  filles. 

199.  — 89,  10-11.  «  del  bore  de  Sant  Afrodisi  » .  Sur  le  Bourg  de 
Saint-Aphrodise,  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d,B.,  2»  série,  tome  IX,  p.  146. 

200.  —89,  12-13.  «  del  bore  de  Sant  Johan  ».  Sur  le  Bourg  de 
Saint-Jean,  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2^  série,  tome  IX,  p.    144. 

201.  —  89,  14-15.  «  del  bore  de  Sant  Jacme  ».  Sur  le  Bourg  de 
Saint- Jacques,  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2°  série,  tome  IX, p.  146. 

202.  —  89, 17.  ((  del  bore  del  Rey  ».  Cf.  note  25. 

203.  —  89,  18.  «  del  bore  de  Montibel  ».  Sur  le  Bourg  de  Monti- 
bel,  cf.  Bail,  Soc.  Arch.  d.  B.,  2"  série,  tome  IX,  p.  141,  et  aussi 
la  note  3  delà  p.  44  du  tome  Vlll. 

304.  — 89,  19.  <(  Campnou  ».  Sur  le  Bourg  de  Campnou  (Campum 


DE  JACME   MASGARÔ  533 

novum),  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B,,  2'  série,  tome  IX,  p.  141-142. 

205.  —  89,  36.  «  Loys  ».  Louis  XI,  fils  de  Charles  Vil  h  Victorieux, 
né  à  Bourges  en  1423,  roi  en  1461,  mort  en  1483. 

206.  —  90,  21.  «  Linha  >».  Cf.  note  80. 

207.  —  90,  22.  «  Berthomieu  de  Montolieu  ».  Barthélémy  de  Mon- 
calve,  évoque  de  Béziers  eu  1384,  mort  en  1402.  Cf.  Andoque:  Caial. 
d.  év,  d.  B.f  p.  121  et  124,  et  Sabatier  :  Ilist.  d.  L  ville  et  d,  év, 
d.  B.,  p.  300-304. 

208.  —  90,  27.  «  Caritatz  ».  La  fête  dite  de  Caritachs,  d'institution 
très-ancienne,  était  célébrée  à  Béziers  le  jour  de  l'Ascension.  Cf.  jBmZZ. 
Soc.  Arch,d.  B.f  1"^'  série,  tome  1,  p.  323-343  :  La  fête  de  Caritachs 
par  Fabregat  et  Sabatier. 

209.  — 91,  2.  «  Rotgier  d'Espanha  ».  Roger  d'Espagne,  seigneur 
de  Montespan,  sénéchal  de  Carcassonne  et  de  Béziers.  —  Hiat.  gén. 
de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  X,  col.  1682,  1694,  1749,  1831. 

210.  —  91,  34.  «  malalag  ».  Telle  est  la  leçon  du  manuscrit 
que  nous  avons  reproduite  purement  et  simplement.  La  correction 
mas  a  lag  {aimais  laidement^  c.  à  d.  de  triste  ou  honteuse  façon)  sem- 
ble s'imposer.  On  pourrait  aussi  songer  à  corriger  mal  e  lag  :  les  deux 
mots  seraient  adverbes. 

211.  —92,  1-2.  «  Johan  de  Betizac.  »  Cf.  note  188. 

212.  —  92,  4-5.  «  laMayre  de  Dieu  de  Pietat  ».  La  chapelle,  au- 
jourd'hui disparue,  des  Carmes  de  Béziers,  est  mentionnée,  p.  222, 
dans  la  Statistique  des  églises  et  chapelles  dans  la  ville  de  Béziers  et 
son  territoirey  en  1789.,  par  M.  Sabatier  (5w/Z.  Soc.  Arch.  d.  B.  2«  sé- 
rie, tome  X,  p.  221-239). 

213.  —  92,  5.  «  Carmes  ».  Cf.  note  186. 

214.  —  92,6.  «  l'avesque  de  Malhares  ».  Pierre  de  Turey,  évêquede 
Maillezais  (Vendée). 

215.  — 92,  6-7.  ol'avesque  de  Cotzerans  ».  Pierre  IV,  évêque  de 
Conserans.  —  Hist.  gén.  de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IV,  p.  381. 

216.  — 92,  7.  «  fes  si  ».  11  faut  lire  fes  s'i  =  il  s'y  fit.  Cf.  note  165. 

217.  —  92,  8-9.  «  l'avesque  de  Bezes  ».  Barthélémy  de  Moncalve. 
Cf.  note  207 . 

218.  — 93,  19.  «  la  filhadel  comte  de  Boluenha  ».  Jeanne  de  Bou- 
logne, fille  unique  de  Jean  11,  comte  de  Boulogne  et  d'Auvergne  et 
d'Éléonor  de  Comminges,  nièce  à  la  mode  de  Bretagne  de  Gaston 
Phœbus,  comte  de  Foix  ;  elle  était  femme  du  duc  de  Berry.  —  Hist, 
gén,  de  Lang.^  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  937. 

219.  —  93,  22.  «a  ssaber»,  Ms.  assaher.  Cf.  note  69. 

220.  r—  93,  22.  «  del  portai  del  pont  ».  Cette  porte  est  la  même 
que  Mascaro  appelle  ailleurs  la  portai  de  la  costa  del  pon.  Cf. 
note  45. 


534  LE    «LIBRE   DE   MEMORIAS  » 

221.  — 93,  23-24.  «  l'ostal  de  maietre  Johan  de  Betizac  ».  Sur 
l'emplacement  de  l'hôtel  de  Bétizac,  cf.  Bull.  Soc.  Arch.  d.  B.,  2^ 
série,  tome  VII,  p.  8(T-81,  et  tome  VllI,  p.  53-54. 

222  —  94,  16.  «  Sant  Thiberi  ».  Saint-Thibéry,  canton  de  Péze- 
nas  (Hérault). 

223. —  94,  20-27.  «  al  hostal  dois  tirâdors  ».  On  appelait  tiradors 
les  châssis,  aujourd'hui  désignés  sous  le  nom  de  rames ^  dont  les  pa- 
reurs  se  servent  pour  tendre  et  sécher  les  pièces  de  drap.  Vhostal 
deh  tiradors  était  donc  apparemment  la  maison  des  pareurs  ou  peut- 
être  la  demeure  du  garde  d'un  enclos  d'étendage  ;  elle  était  située 
près  du  chemin  de  Béziers  à  Saint-Thibéry.  —  Cf.  Bull.  Soc,  Arch. 
d.  B.,  2«  série,  tome  Vlll,  p.  39. 

224.-94,  28.  «  le  portai  de  Presicados  ».  Cf.  note  120. 

225.  —  94,  30-31 .  «  la  Mercadaria  » .  C'était  la  place  du  marché  à  la 
viande.  Cf.  Bull.  Soc,  Archd,  B.,  2»  série,  tome  IX,  p.  153. 

226.  —  94,  32.  «  la  Orgaria».  C'était  la  place  du  marché  aux  grains. 
Cf.  Bull»  Soc.  Arch»  d  B.,  2»  série,  tome  IX,  p.  153. 

227.-94,  33.  «  Sant  Salvayre  » .  Cf.  note  178. 

228.  —  94,  37.  «  lo  portai  d'en  Grindas  ».  Voy,  dans  Bull,  Soc, 
Arch.  d.  B.,  2«  série,  tome  VllI,  p.  50  et  sq.  et  tome  IX,  p.  157  et 
sq.  diverses  hypothèses  sur  le  sens  du  mot  Grindas,  La  présence  de 
l'article  honorable  en  devant  ce  mot  me  semble  démontrer  que  c'est 
là  un  nom  d'homme.  Sur  la  porte  de  Grindes,  cf.  Bull.  Soc,  Arch,  d, 
B.  2*  série,  tome  VlU,  p.  35-58,  Sabatier  :  la  porte  de  Chrindea  et  le 
palais  du  roi. 

229.  —  95,  2.  «  Karles,  filh  que  fo  de  mossen  Karles  ».  Charles, 
second  fils  de  Charles  VI  et  d'Isabeau  de  Bavière. 

230.  —  95,  4  et  sq.  «  L'an  Mccciiii^x  e  ix..  .  ».  Sur  ce  voyage 
de  Charles  VI  à  Béziers,  voyez  Froissard,  Chroniques,  liv.  IV,  ch.  VI 
et  Vil  (  tome  111,  p.  23-28  del'éd.  Buchon). 

231 .  —  95,  8-9.  «  mossen  Loys,  que  era  duc  deThorena  ».  Louis, 
duc  d'Orléans,  frère  de  Charles  VI,  né  en  1371,  mort  en  1407.  Charles 
VI  lui  donna  le  duché  de  Touraine  en  1386. 

232.  —  95,  9.  «  lo  duc  de  Borbon  ».  Louis  II,  duc  de  Bourbon,  dit 
le  Bon,  oncle  maternel  de  Charles  VI,  né  en  1337,  mort  en  1410. 

233.  —  95,  10.  «  P.  de  Navarra,  frayre  del  rey  de  Navarra  », 
Pierre  de  Navarre,  frère  de  Charles  111  le  Noble^  roi  de  Navarre  de 
1387  à  1425. 

234.  — 95,  11.  «lofilh  del  duc  de  Bar  ».  Henri  ou  Charles  de  Ban 
cousins  germains  de  Charles  VI. 

235.  — 95,  11.  «  lo  conestable  de  Franssa  ».  Olivier  de  Clisson. 
Cf.  note  194. 

236.  —  95,  12.  ((Loys  de  Sansuerra  ».  Cf.  note  156. 


DE  JAGMR  MASGARO  535 

237.  —  95, 13.  «lo  senhor  de  Lebret».  Le  sire  d'Albret. 

238.  —  95,  13.  «  lo  senhor  de  Corsi  ».  Le  sire  de  Ooucy,  ffiat,  gén. 
de  Lang.,  éd.  Privât,  tome  IX,  p.  939,  note  4. 

239.  —  96,  21.  «lo  papa  aAvinho  ».  L'an tipape Clément VII  (1378- 
1394)  qui  résidait  à  Avignon,  tandis  que  les  papes  Urbain  VI  (1378- 
1389)  et  Grégoire  XI  (1389-1404)  siégeaient  à  Rome.     . 

240.  —  96,  29.  «  a  ssaber  ».  Ms.  assaber.  Cf.  note  69. 

241 .  —  97,  12-13.  «  quai  que  sia,  ni  quai  que  no  de  Lengadoc  ».  11 
faut  entendre:  (toute  personne)  quelle  qu'elle  soit^  de  Languedoc  ou 
non. 

242.  —97,  25.  «  Johan  Betizac  ».  Cf.  note  188. 

243.  — 98,  26.  «  Peyre  de  Mornay  ».  Pierre  de  Mornay,  sire  de 
Gaulnes,  sénéchal  de  Carôassonne  et  de  Béziers.  —  Hist.  gén»  de 
Lang.,  éd.  Privât,  tomeX,  col.  1828,  2064. 

244.  — 99,  7-8.  «  Aysso  es  lo  privilège, ...  »,  Ce  titre  est  écrit  à 
l'encre  rouge,  en  très-grandes  lettres  gothiques  d'une  régularité  par- 
faite. 

245.  -  99,  12-23.  «  L'AN  MIL  CGC  E  NOU. . . .».  Nous  avons 
imprimé  en  italique  la  partie  de  cette  pièce  qui,  dans  lems.,  est  écrite 
engrosse  gothique  très  soignée  et  très  régulière;  le  reste  de  la  pièce 
est  en  petite  gothique,  presque  cursive.  Quant  à  la  pièce  11  de  l'ap- 
pendice, elle  est  tout  entière  écrite  en  cursive. 

246.  —99,  13-14.  «  lo  portai  de  las  Sors  Menors.  »  Cf.  note  116. 

247.  —  99,  14.  «  BERTRAN  DE  MALMONT  ».  Bertrand  de 
Maumont,  évêque  de  Béziers  en  1408,  mort  en  lil8.  Cf.  Andoque: 
Catal.  d.  év.  d.  B,,  p.  125-127  et  Sabatier  :  Hist.  d.  l.  ville  ei 
d.  év.  d.  B.  p.  304-311. 

248.  —  99,  20.  «  a  ssaber  ».  Ms.  assaber.  Cf.  note  69. 

249.  —  99,  25.  «  quant  fora  pausat  lo  raust  ».  m.  à  m.  quand  au- 
rait été  imsé  (servi)  le  rôti.    Les  pièces  d'argenterie   dont  il  s'agit  de- 
vaient être  offertes  au  prélat  pendant  le    dîner,  après  qu'on  aurait   - 
servi  le  rôti. 

250.  —  100,  4.  «  m.  quart.  »  Au  lieu  de  m.  quart  {=:  mieg  quart), 
le  ms.  porte:  z quart.  Cf.  note  17. 

251.  —  100,5-6.  «  c  fouc  lo  signe  cranc  ».  11  s'agit  du  signe  du 
zodiaque,  le  cancer. 

252.  —  100,  8.  «  Seguimon  ».  Sigismond,  empereur  d'Allemagne, 
né  en  1366,  mort  en  1437. 

253.  —  100,  7  et  sq.  —  Sur  le  voyage  de  l'empereur  Sigismond  à 
Béziers  et  en  Languedoc,  cf.  Hist.  gén.  de.  Lang,,  éd.  Privât,  tome 
IX,  p.  1026.  VHist.  gén.  de  Lang.  ne  mentionne  pas  la  rencontre  de 
Sigismond  avec  les  princes  d'Aragon  et  se  contente  de  dire  que  le 
roi  d'Aragon  envoya  des  ambassadeurs. 


536  LK    «  LIIUIK    DE   MEMOHIAS  » 

254.  —  100,  HA).  «  j)cr  far  la  iinio  de  santa  glîeya  »,  c.-à-d.  pour 
amener  la  fin  du  ^rand  schisme  d'Occident  qui  durait  depuis  1378. 

255.  —  100,  12-1!^.  «  lo  sonlu^rroy  de  Araguo».  Le  «  senhor  rey  » 
d'Aragon  en  1415  est  Ferdinand  de  Castille,  dit  le  Juste  (roi  le 
28  juin  1412,  mort  le  2  juin  1410).  neveu  de  Juan  I  d'Aragon  (1387- 
131'5)  et  dȔ  Dnm  Martin  (l.'i*.>5-31  mai  1410)  Sa  femme  est  Dona 
Léonore  d'Alhuijueniue,  appelée  à  tort  par  quelques-uns  Dona  San- 
che.  Cî.  Ferreras,  Histoire  <V Espagne,  VI,  31. 

25<). —  100,  13-14.  «  la  regina  Violan  ».  Dona  Violante  (Yolande), 
veuve  du  roi  Juan  I  d'Aragon  (1387-1305),  belle-mère  par  sa  fille 
Dona  Violante  du  duc  d'Anjou. 

257.  —  100, 14.  «  la  regina  Marguarida  ».  Dona  Marguerite,  fille  de 
Don  Pedre,  comte  de  Pradcs,  de  la  famille  royale  d'Aragon,  épousée 
par  le  roi  Dom  Martin  (1305-31  mai  1410),  frère  de  Juan  I  d'Ara- 
gon (1387-1305',  en  septembre  1409,  après  la  mort  de  son  fils  et 
héritier,  Dom  Martin  de  Sicile. 

258.  —  100,  14-15.  «  la  regina  molher  del  senhor  rey  ».  Dona 
Léonore  d'Albuquerque.  Cf.  note  255. 

259. —  100;  IG.  «  P.  de  Luna».  Pierre  (le  Lune,  plus  connu  sous  le 
nom  deBenoîtXIIl,  antipape  (1394-1424). 

200.  —  100,  29.  «  lo  compte  de  Armanhac  ».  Bernard  VII,  comte 
d'Armagnac,  no  vers  le  milieu  du  XIV*^  siècle,  mort  en  1418. 

261. —  100,  30.  «  lo  compte  de  Foix  ».  Jean,  fils  d'Archambaud  de 
Grailly,  comte  de  Foix  depuis  1412,  capitaine  général  pour  le  roi 
en  Languedoc  et  en  Guyenne,  mort  en  143G.  Cf.  Il'ist.  gén,  de  Lang, 
éd.  Privât,  tome  IX,  p.  1015. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  DES    NOMS  PROPRES 


13  de  psyi,  de  villes,  d'è; 


.  imprimés  en  caraclèreg  ordinaires; 
.,  sont  imprimés  ea  pelilea  oKpitales. 


Abelha(B.)-— 7v.Voy.  Abelha 

(Bernât). 
Abelha  {Bernât).  —18  r.  Voy. 

Abelha  (8.). 
Acde    (Pejre).  —  24  r  ,  31  r,, 

44v. 
Agel (Bernât).—  Slv.,  40  r. 
Agel(P.).—  32v. 
Agel  (RamoD).  — 43J-. 
Alamanha.  — 78v.,  TJt. 
Alari  (Ramon).   —  31  r.,  32  v., 

44r.,57r.,59v.,  62  r. 
Albana  (locardenal  d'),  — 58r. 
Albanhana  (Esteve)  — 34r. 
Albi.  —  3v. 
Albi  (Daude).  —  26  v.,  47  v., 


54* 


,  71  V 


Alboreya  (l'avesque  d').  —  77  r 

Ales,  —  3  V, 

Alias  Geli.  —  41  r.  Voj.  Helia 

Geli. 
Almobna(L').  —31  V. 
Aludie(P.).  —  lOr. 
Amalrio  Lieura, — 3r.,  4r. 
Amat  (Guilhem).  — 63r, 
Amat(Peyre)  —&3r. 
Ambres  (Sicartd')  — 42v,,  72v 
Amielh  (Andiieu),— 26  r.,28  v. 

30  V. 
Amielh  (Bernât). —6  r. 
Amieth(Pejre).— .16v. 


Amielh  (Potia).  -  8  r.,  20  v., 

23r. 
Amib.ns  (lo  cardenal  d').  — 66  v. 

Voy,  Amïks. 
Amyks  (lo  cardenal  d'). —  71  r. 

Voy.  Amiens. 
Andrieu  Amielh.  ^26r.,28v., 

30v. 
Andrieu  Astrebo.  —8  v.,  34  r., 

44r,,  47r.,50v.,62v.,71v. 
AndrieLi(Bertran).-  I7r.,61  v., 

84  ï. 
Andrieu  de  Fontaynas.— 88r. 
Andrieu  (Emengau).  —  63  r. 
Andrieu  Frezols  — ,2v 
Andrieu  Galhart.   —  2  r.,  I6v., 

17  1-. 
Andrieu  Gasc.  — 

22v.,43v.,45r.,  47r.,49v., 

53  r. 
Andrieu  (Johan), — 7v.,  13v. 
Andrieu  Lieura. —  81  v. 
Andrieu  Nycholau. — 63  r. 
Andrieu  Roma.  —  93  r. 
Anglatkhh.\  -  I6r. ,  27v. ,  79  r. 

Voy.  Ekolatkrra. 
Ango  fia  duguessa  d').  —  60r. 
ANeo(lo  dued'].  —  31v..33r., 

38v.,40r  ,42r.,42v.,46v., 

53  V. ,  58  r.  Voy.  Anjo,  Anjoi; 

et  Anïo. 
Awo  (lo  ducd').  — 44r.,  46  r, 

Voy.  Akgo,  Anjou  etAKYo. 


19  r 


538 


LE    «  LIBRE   DE   MEMOKLVS  » 


Anjou  (lo  duc  d').  —  56  r.  Voy. 

Ango,  Anjo  et  Anyo. 
Anric  Garoti .  —  48  v . ,  82  v .  Vo v . 

Anric  Goroti. 
Anric  Goroti. —  43 v.  Voy.  Anric 

Garoti. 
Anric  Malras.  —  34  r.,  57  r., 

59  V. 
Anthoni  de  la  Garda.  —  59  r., 

82  r. 
Anyo  (lo  duc  d').  —  58 r.,  60 r., 

74  r.   Voy.    Anqo,    Anjo    et 

Anjou  . 
Arago  (lo  rey  d'). — 42  r.  Voy» 

Araguo. 
Araguo  (lo  rey  d') . —  93  v .  Voy . 

Arago. 
Arboreya  (lo  jutge  d').  — -SOr, 
Archas  (Hue  d'). —  13  r. 
Argant  Barrieyra. —  20  v. 
Armanhac  (lo  comte  d').  — 5r., 

11  r.,  74  r.,  83  r.,  93  v. 
Arnaut  Barbât.  —  24  v. 
Arnaut  Barrieyra. — 85  r. 
Arnaut  Bernât. — 23  r.,  30  v. 
Arnaut  Bonet. —  33  v.,  35  v, 
Arnaut  del  Lar. —  58  r, 
Arnaut  Fornie.  —  23  v. 
Arnaut  Promit.  — 28v.,51  r., 

57  r. 
Arnaut  (G-dilhem). —  30  r. 
Arnaut  Guinho. —  52  v. 
Arnaut  (Peyre). —  24  r.,  34  r. 
Aspira  de  Cabrayres.  —  60  r. 
Astrebo  (Andrieu). — 8v.,34r., 

44  r.,47r.,50v.,62v.,71v. 
Astrebo  (P.).  — 7  v.,  15  r, 
Audi  (Guilhem).  — 7r.,    11  r., 

18v.,27r. 
Audran  (Bernât). —  89  r. 
Audran(Brenguie). —  41  v.,75v. 
Augie  Brenguie.  —  8  r.,  17  v., 

20  V. 


Augie  (Guilhem). —  4  r. 

Augie  (Guilhem)  de   Fauiha.  — 

3  r.,  4v.,  6  V. 
Augie  (Johan).  — 39  r. 
Augie  Nicholau. — 8v. 

AURKNGA. —  3   V. 

Auriac  (Johan). —  63  r. 

Avesque  (Johan).  —  78  r.  Voy. 
Evesque  (Johan). 

Ayinho.  —  3  V.,  51  V.,  60  r., 
76  V  ,  88  r.  Voy.  Vinho. 

Avinhonet.  —  3  V. 

Aycx.  — 3  V. 

Aygas  mortas.  —  9  V. 

Aymeric  Barbât.  —  4  v.,  15  r., 
51  V.,  58  V.,  72  r.,  80  r. 

Aymeric  Estaci.  —  22  r. 

Aymoy  (Guilhem). —  39 v.,  47  r., 
51  r. 

Aymoy  (P.).  —  15  r.  Voy.  Ay- 
moy (Peyre)  et  Aymoy  r  (P.). 

Aymoy  (Peyre).  —  53  r.,  80  r. 
Voy.  Aymoy   (P.)  et  Aymoyr 

(P.). 

Aymoyr  (P.).  —  86r.  Voy.  Ay- 
moy (P.)  et  Aymoy  (Peyre). 

Aynart  (Ymbert).  -57v.,  76r., 
80  r. 

Ayraut  (Joh^n).  —  60  v. 


B.  Abelha.  —  7  v.  Voy.  Bernât 
^AbeJha. 

BadafoffS^Sjide). ;—  24  v. 
Badonas  (B^dS^i^  9  r.  Yoj, 

Badonas  (Bernât 
Badonas  (Bernât  de) .  ^Wft/^.t 

10  V.   Voy.  Badcnas(B; 
Badonas  (Guilhem  de).  —    9  ^ 

1 1  r.,  18  r.,  35  V. 
Badonas  (P.  de).  —  73  v..  Voy. 

Badonas  (Peyre de). 


k 


DE  JACME 

Badonas   (Peyre  de). —  23  v., 
'27r.,  33r.,  41  v  ,  57  v.  Voy. 

Badonas  (P .  de) . 
Baischa.  —  74  V.  Voy.  Bayscha 

et  Bayssa. 
Bajas  (Estève  de).  —  l  v. 
Bajas(Paulj.  —  3ô  r. 
Balhot  (Estève).  —  63  r. 
Bar.  -—  74  r. 
Bar  (lo  duc  de).  —  87  v. 
Barba  (Estève).  —   9    v.  Voy. 

Barba  (Steve) . 
Barba  (Paul).  —49  v.,  54  v.,  59 

r.,  61  V.,  62  r. 
Barbara  (Tibaut  de).  —  20  r. 
Barba   (Steve).    —    4    v.    Voy. 

Barba  (Estève). 
Barbât  (Arnaut).  —  24  v. 
Barbât  (Ayraeric).  —  4  v.,  I5r., 

51  v.,58  v.,72  r.,  80  r. 
Barieyra  (Frances). —  57  v.Voy. 

Barrieyra  (Frances). 
Barot  (Peyre) .  —  39  r. 
Barot  (R.).  —21  v. 
Barrieyra  (Argant).  —  20  v. 
Barrieyra  (Arnaut).  —  85  r. 
Barrieyra  (Frances).  —    27   r  , 

49  r.,  60  V.,  72  r.   Voy.  Ba- 
rieyra (Frances). 
Barrieyra  (Guilhem) .  —  59  r. 
Barrieyra   (Johan)     —    41     v., 

47  r  ,  58  V.,  77  r.,  78  r. 
Barrieyra  (Jolia).  —  3  r.,  4  r. 
Barta  (Guilhem).  —  30v. 
Bastartde  Landorra  (lo). —  59v. 
Baudriga  (Johan).  —  7  v.,  11  r. , 

13r.,  17  r. 
Ba  varia  (lo  ducde).— 78  v,  79r 
Bayle  Brenguie.  —  13  r. 
Bayscha.  —  40  r.  Voy.  Baischa 

et  Bayssa  . 
3ay8sa.  —  40v.  Voy.  Baischa 

et  Bayscha. 


MASCARO  539 

B.  Costa.  —  84  V. 

B.  de    Badonas.   —  9   r.   Voy. 

Bernât  de  Badonas. 
Bechie   (Pey.).  —  66   r.  Voy. 

Bechie    (  Peyre  )    et    Bechier 

(Peyre). 
Bechie  (Peyre).  —   21  v.    Voy. 

Bechie  (Pey. )et  Bechier  (Peyre)* 
Bechier  (Peyre).  —  19  r.  Voy. 

Bechie  (Pey.)  et  Bechie  (Peyre}. 
Bechieu  (Frances).  —  47  v. 
Bederieus.  —  29  r , 
Bedos  (Duran).  —  63  r. 
Bedos  (Guilhem).  —  59  r. 
Bedos  (Jacme).  —  10  r.,  84  v. 
Belcaire  .  —  3  v  .  Voy.  Belcayre . 
Belcayre. —  29  V.,  32  r.,  46  V., 

56  r.  Voy.  Belcaire. 
Belpuech.  —  3  V. 
Bena  (Jacme).  —  85  r. 
Bencyerget  (Jacquet de).  —  89  r. 
Benezech  Bru .  —  23  v .  Voy .  Bene- 

zeg  Bru. 
BenezegBru. — 6  r.,  13  v.,  17  v., 

19  r.,  21  r.  Voy . Benezeg  Bru . 
Benezeg  Chipparel.  —  59  v. 
Benezeg  Guitart.  —  31  r. 
Benezeg  (Johan).  —  7  r.,  7  v., 

38  r.,  43  v.,61  r. 
Benquelh  (Guilhem).  —  43  v. 
Bermon  (Bernât).  —  26  v. 
Bermon  (Johan).  —  44  v.,  62  v. 
Bermon  (Ramon).  — 62  v. 
Bernât Abelha. —  18  r. 
Bernât  Agel.  —  21  v.,  40  r. 
Bernât  Amielh.  —  6  r. 
Bernât  Arnaut.  —  23  r. ,  30  v. 
Bernât  Audran.  —  89  r. 
Bernât  Bermon.  —  26  v. 
Bernât  Cambavielha.  —  57  r. 
Bernât  Catala.  —  59  r. 
Bernât  Caus.  —  2  r. 
Bernât  Cornelh. —  7r.,  12v.,82v. 


540 


LE    «  LIBRE   DE    MEMORIAS  » 


Bernât  de  Badonas.—  6,  r.,  10  v. 
Bernât  de  Golbias .  —  36  v . ,  38 

r.,  39  V.,  49  r. 
Bernât  del  Thelh.  —77p. 
Bernât  de  Pradas.  —  1  v. 
Bernât  de  Serez.  — 4  v. 
Bernât  Emengau.  —  63  r. 
Bernât   Fabre. —  26  r.,  35  v., 

71  V. 
Bernât  Ferrier.  —  57  v.,  83  v., 

89  V.  Voy.  B.  Ferrier. 
Bernât  Fromit.  —  23  r.,  28  r., 

39  V.,  59  V.,  66  r. 
Bernât  Garra.  —  22  r. 
Bernât   Gibeli.    —   2    r.,35v., 

84  V. 
Bernât  Golfi.  —  26  r.,  48  v. 
Bernât  Gontart.  —  63  r. 
Bernât  Guitart.  —  13   v.,  34  r. , 

47  r.,  62  r,  67  r.,  67  v.  72  v. 

Voy.  B.  Guitart. 
Bernât  (Jacme).  —  13  v. 
Bernât (Jolia).  —  60  v.,  81  v. 
Bernât  Laur.  —  32  v.,    43  r., 

73  V.  Voy.  Bernet  Laur. 
Bernât  Massai.  —  63  r. 
Bernât  Miralhie.  —  16  r.,  21  r., 

22  V.,  36  r.,  78  r.  Voy.  Bernât 

Miralhier  et  B .  Miralhier . 
Bernât  Miralhier.  —  19  v.,  30 v., 

52  V.  Voy.  Bernât  Miralhie  et 

B.  Miralhier. 
Bernât  Porquie.  —  28  v.,  39  v. 
Bernât  Raynaut.  —  93  r.  Voy. 

B.  Raynaut. 
Bernât  Raynes .  —  7  v . ,  22  r. , 
Bernât  Redorta.  —  17r.,  32v,, 

36  r.,  49  V. 
BernatRog. —  8v.,  18  v.,  Voy. 

B.  Rog. 
Bernât  Roquacels.  —  49  v.,  61 

v.,82  V.,  86  V. 
Bernât  Salvayre.  —  13  v. 


Bernât  Sebeli.  -  23  v.,  40  P., 
40  v.,59  V. 

Bernât Sedada.  —  39  v.,   73  r. 

Bernât  Vezola.  —  63  r. 

Bernet  Laur.  —  86  v.  Voy.  Ber- 
nât Laur. 

Berri  (lo  duc  de).  —  61  v.,  66 
V . ,  7 1  r .  Voy .  Berry  . 

Berry  (lo  duc  de).  — 66  v.,  67 
r.,  71  r.,  76  V.,  83  r.,  84r., 
85  r.  Voy.  Berri. 

Berthomieu  Bonafos.  —  5  r, 

Berthomieu  de  Montolieu .  —  80  v . 

Berthomieu  P.  —  72  r. 

Berthomieu  Saynier.  —  29  r. 

Bertran  Andrieu.  —  17  r.,  61  v., 
84  V. 

Bertran  (Brenguie) .  —  12  r.,  23 
V.,  30  V. 

Bertran  de  Clequi.  —  33  v. 

Bertran  de  la  Garda.  —  43  r. 

Bertran  de  Malmont.  — 93  r. 

Bertran  de  Monpezat.  —  30  r. 

Bertran  Pratz.  —  28  v.,  35  v., 
47v.,50  V.,  81  V. 

Bertran  (R.).—  21  v.  Voy. Ber- 
tran (Ramon). 

Bertran  (Ramon).  —  13  v.  Voy. 
Bertran  (R.). 

Bertran  Sayschac.  —  1  v. 

Bertrugui    —  27  v. 

Besers.  —  93  V.  Voy.  Beses, 
Bezers  et  Bezbs. 

Besers  Cavesque  de).  — 93  r. 
Voy.  Bezes  (avesque  ou  eves- 
que  de). 

Beses.  —  1  r.  Voy.  Besers,  Be- 
zers et  Bezes. 

Betinha  (Jacme).  —  5  v.,  11  r., 
34  r. 

Betinha  (Johan).  —  78  r. 

Betizac  (Johan).  —  89  r.  Voy. 
Betizac (Johan  de). 


DE  JACMR  MASCARO 


541 


Betizac  (Johan  de)  —  77  r.,  83r., 

85  r.  Voy.  Betizac  (Johan). 
Betizac  (Ramon).  —   48  v. 
BEZERS.-3v.,92r.,93r.Voy. 

Bksers,  Beses  et  Bezes. 

Bezes.  —  1  r.,  1  V.,  2  r.,  2  v., 
3r.,3  V.,  4r.,  4v.,5r.,  8  r., 
8v.,  9v.,  Il  V.,  14  V.,  16  r., 
16v.,18r.,  19r.,  19v.,20r., 
21  V., 24  V., 27  v.,30r.,31  V., 
32  r.,  33  v.,35r.,  36v.,37r., 
40r.,  40  V.,  42  r.,  42  v  ,  46  r., 
46v.,48r.,  52  r,  53  v.,59v., 
60r.,61  V.,  63v.,  66v.,67r., 
68v.,69v.,7l  r.,72v.,74r., 
74v.,75r.,76v.,77r.,78v., 
79r.,80v.,81r.,83r.,85r., 
85v.,87r.,87v.,88r.,88v., 
89  r.,  89  v.,93  r.  Voy.  Besers, 
BesES  et  Bezers. 

Bezes  (avesqueouevesquede). — 
2r.,  11  v.,20  r.,  27  v.,  42  v., 
53  V.,  63  V.,  68  v,  69  V.,  71  r., 
72  V.,  74  r.,  80  v.,  83  r.,  87  r. 
Voy.  Besers  (avesque  de). 

Bezes  (cort  de) —  8  r.,  8  v.  32  r. 

Bezes  (senescalc  de  Carcassona 
e  de).   —2  r.,  80  v.,  89  v. 

Bezes  (vigarie  de).  —  24  v. 

Bezes  (viscomte  de).  —  1  r. 

Bezuenha  (Johan  de).  —  71  r. 

B.  Ferrier.  —  80  v.  Voy.  Bernât 
Ferrier. 

B.  (G.),  monie.  —  63  r. 

B.  Guitart.  —  5  r.,  62  r.,  67  r. 
Vov.  Bernât  Guitart. 

Bigot  (Johan).  —  5  v,  10  r., 
18  r.,  18  V. 

Bira  (Peyre).  —  63  r.  Voy.  Biro 
(Peyre). 

Biro  (Peyre).  —  54  v.  Voy.  Bira 
(Peyre). 

Blanquet  (Johan).  — 47  v. 


Blanquier  (Guiraut).  —  18  v. 

Blonde  (Loys).  —  48  r. 

B.  Maistre.  —  76  v. 

B.  Miralhier. —  27  r.  Voy.  Bernât 

Miralhie  et  Bernât  Miralhier. 
Bofat  (Frances)     —    8  v.   Voy. 

BofFat  (Frances). 
Boffat  (Frances).  —  40  v.  Voy. 

Bofat  (Frances). 
Boia  (Esteve).  —  63  r. 
B.  Olivier.  —  5  r. 
BoLUENHÀ  (lo  cardenal  de).   — 

19  r. 
BoLUENHA  (lo  comte  de)  —  85  r. 
Bonafos  (Berthomieu).  —  5r. 
Bona  Grassia.  — 62  r. 
Bonaric  (Jacme).  —  34  v. 
Bonet  (Arnaut).  —  33  v.,  35  v. 
Bonet  (Cabot,  alias).  —  63  r. 
Bonet  (Guilhera).  —  32  v. 
Bonet  (P).  —  7  V. 
Bonservisi  (Johan),  —  30 v.  Voy. 

Bonservisi  (Johan  de)  et  Boser- 

visi  (Johan  de) . 
Bonservisi  (Johan  de).  —  60  v. 

Voy.  Bonservisi  (Johan) et Bo- 

servisi  (Johan  de). 
Boq  (Guilhem). —  8  v.  Voy.  Bo- 

quie  (GiiilhemJ. 
Boquas  (Sicart) .  — 76  r. 
Boquet  (Jacme).  — 50  r. 
Boquet  (Ramon).    —  9  r.,  18  v. 
Boqnie  (Guilhem).  — 28  v.,  34r., 

57  r.  Voy.  Boq  (Guilhem). 
Boquie  (P.).  —  9  r.   Voy.  Bo- 

quie(Pey.)et  Boquie  (Peyre). 

Boquie  (Pey.).  —  30  v.  Voy.  Bo- 
quie (P.)  et  Boquie  (Peyre). 

Boquie  (Peyre).  — 15  v.,  39  r., 

58  v.  Voy.  Boquie  (P.)  et  Bo- 
quie (Pey.). 

Borbon  (lo  duc  de) .  —  87  r . 
BORDALES.  —  11  r. 


542 


LE    «  LIBRE   DE   MKMORTAS  » 


Bosc(G.  del).  ~  63  r. 
Bosc  (Hue  del)  —  41  r. 
Boservisi  (Johan  de). —  38r.Voy. 

Bonservisi  (Johan)  et  Bonser- 

visi  (Johan  de). 
Bossela  (Paul).  —31  r. 
Botagrais  (Johan) .  —  63  r. 
Botho  (Jacme).  —  23  r.,  24  r., 

27  r.  Voy.  Boto  (Jacme). 
Boto  (Jacme) .  —  26  r. ,  28  r . ,  62  r. 

Voy.  Botho  (Jacme). 
Boyer  (Johan).  —  47  r.,  58  v. 
Boyer  (Peyre).  —  16  r. 
B.  Pons,  alias  Sabatier.  —  9  v. 

Voy.  B.  Pons  Sabatie. 
B.  Pons    Sabatie.  — 9  v    Vov. 

B.  Pons,  alias  Sabatier. 
Braconet  (Peyre).  —  63 r. 
Bragayrie  (Peyre).  —  15  r.,  27 r. 
B.  Raynaut.  — 93  r.  Voy.  Ber- 
nât Raynaut. 
Brenguie  Audran.  —  41  v. ,  75  v. 
Brenguie  Augie.  —  8  r.,  17  v.» 

20  V. 
Brenguie  Bayle.  —  13  r. 
Brenguie Bertran.  —  12r.,  23v., 

30  V. 

Brenguie  Cambavielha.  —  24  v., 

73  V.,  86  V.- 
Brenguie    Cesseno.    —    72    r., 

82  V. 
Brenguie  Ferrier.  —  62  v. 
Brenguie  Graza.  —  44  v. 
Brenguie  Laures.   — lOr.,  15v. 
Brenguie  (P.)  —  71    v.,  75  r. 

Voy.  Brenguie  (Peyre)  etBren- 

guier  (Peyre). 
Brenguie  (Peyre)  —  89  v.  Voy. 

Brenguie    (P.)  et    Brenguier 

(Peyre) . 
Brenguie   (Ramon).     —    9    v., 

31  r.,  33r.,34  v.,  39r.,61  r. 
Brenguier  (Peyre).  —  78  r.  Voy. 


Brenguie    (P.)   et    Brenguie 

(Peyre). 
Brenguie  Sedada.  —  83  v. 
B    Rog.  —  5  V.    Voy.    Bernât 

Rog. 

Bru  (Benezech) .  —  23  v.  Voy. 

Bru  (Benezeg). 
Bru  Benezeg.  — 6    r.,     13    v., 

17  V.,  19  r.,  21  r.    Voy.    Bru 

(Benezech). 
Bruelh  (Guilhem  del).  —  89  v. 
Bru  (Jacme) .  —  54  r . ,  78  v . 
Bru  (Johan).  —  82v. 
Bru  (Peyre).  —  57  r. 
Buadela  (Guiraut).  —  10  r. 
Bucg   (lo  captai   de).    — 9    v., 

11  r. 


Cabot  alias  Bonet.  —  63  r. 
Cabot  Cabot.  —  lOr. 
Cabot(Huc).  — 6  r.,  12v.,  14v., 

17  V.,  19  V.,  21  r. 
Cabot  (P.).  —  10  r.  Voy.  Cabot 

(Peyre). 
Cabot  (Peyre).  —   11  r.,  13  r., 

22  r.  Voy.  Cabot  (P.). 
Cabot  (Ramon). — 36r.,41  v., 

43r.,47v.,  71  v.,81v.,  84r. 
Cabrayres (Aspira  de).  —  60  r. 
Cabrayressa  (Johan).  —  22  r.- 
Cabrel  (Johan).  —  38r.,  41  r. 
Cabrieyra.  —  59  V. 
Cambavielha  (Bernât).  —  57  r. 
Cambavielha  (Brenguie). —  24  v., 

73  V.,  86  V. 
Cambavielha  (Esteve).  —  61  r., 

73  r. 
Camb  a vielha  (  Pey .  ) .  —  30  v . 
Campanha  (Esteve) .  -—  34  v .  Voy . 

Campanha  (Steve). 
Campanha  (Johan). — 76  r. 


DE  JACME  MASCAHO 


543 


Campanha  (Steve)  —  45  v.Voy. 

Campanha  (Esteve). 
Caraplonc  (Johan  de).  — 11  v., 

42v.,54r.,  73  v.,82v. 
Campnou. —  79  V. 
Canie  (Duran).  —    41  r.,    47  r., 

59  V.  Voy.  Canier  (Duran). 
Canier  (Duran).  —  36  v.   Voy. 

Came  (Duran). 
Capelie  (Guilhem).  —  5  v. 
Caramanh  (Johan).  —63  r. 
Caratie  (Guilhem) . —  63  r. 
Carato  (Pey.  de).  —  21  v. 
Carbonie  (Esteve).  —  62  r. 
Carcassona. —  2  r.,  3  v.,  8  r., 
20  r.,  29v.,32r,,38v.,46v., 
56  r.,  78  v.,  80  v.,  89  v. 
Carcassona  (cort  de).  —  8r., 

8  v. 
Carcassona  (l'enquisidor  de). — 

78  V. 
Carcassona  (lo  jutge  de  crims 

de).  — 8r. 
Carcassona    (senescalc  de).  — 

2  r.,  8r.,  80  v.,89  v. 
Carcassona  (senescalcia  de). — 

29v.,  32r.,46v.,  56  r. 
Carie  (Guilhem).— 28  v.,  31  v., 
36  r.,  66  r.   Voy.  Karle  (Gui- 
lhem) . 
Caries .  —  37  r .  (Charles  VI) .  Voy. 
•  Karles . 

Caries  del  Templier.  —  89 r. 
Carmes  (los).  — 77  r.,  83  r. 
Carpentras  .  —  3  v . 
Cartholha(P.).  — 83  v.Voy.  Car- 
tolha(Pey .  )  et  Cartolha  (Peyre) 
Cartholha  (Pey.).—  73  r.  Voy. 
Cartholha    (P.)    et    Cartolha 
(Peyre) . 
Cartolha  (Peyre).  —  80  r.  Voy. 
Cartolha    (P.)    et      Cartolha 
(Peyre). 


Cassa. —  21  v. 

Castela.— 24v.,  33v.,93v. 
Castela(1o  rey  de). — ^^24v. 
Castel  (Gassiot  del). —  24  v, 
Castelnoudarri    —  3  v . 
Castras.  —  3  v. 
Castras  (Guilhem). —  45  r. 
Catala  (Bernât). —  59  r. 
Catala  (Guilhem).—  73  r.,  83  v. 
Catala  (Pey.).—  39  r.  Voy.  Ca- 
tala (Peyre). 
Catala  (Peyre).—  26  r.  Voy.  Ca- 
tala (Pey .  ) . 
Catala  (Ramon). —  39v.,45r. 
Catalas  (losj.—  93  v. 
Caucenuejol    (Jacme).  —  86  r. 
Voy.   Caucenuejols  (Jacme)  et 
Causenuejols  (Jacme). 
Caucenuejols  (Jacme),  —  57  v. 
Voy.   Caucenuejol  (Jacme)  et 
Causenuejols  (Jacme). 
Caus  (Bernât). —  2  r. 
Causenuejols  (Frances). — 20  r. 
Causenuejols    (Jacme).  —  45  r. 
Voy.    Caucenuejol  (Jacme)   et 
Caucenuejols  (Jacme). 
Cavalie  (Pons) .  —  49  r. ,  85  r. 
Cava  (Pey.).— 62  v. 
Celas  Cubas.  — 13  r. 
Celas  Rar.\s. — 13  r.  Voy.  Celas 

Raz\s. 
Celas  Razas. —  13 r. Voy.  Celas 

Raras. 
Cesseno.  — 13  r. 
Cesseno     (Brenguie). —  72    r., 

82  v.' 
Cesseras. —  24  v. 
Chipparel  (Benezeg) . — 59  v . 
Clarmon  .  —  3  v  ,  76  V . 
Clequi  (Bertran  de)  —  33  v. 
Clisson  (Olivie  de).  —  79  r. 
Comte  (Daude). —  54  r. 
Comte  (Pey.).— 42  y. 


544 


LE    (c  LIBRE   DE    MEMORIAS  » 


Conort  (Guilhem)  — 93  r. 
Coregie  (Johan). —  10  r.,  20 v., 

37  V.,    52  V.   Voy.    Corregie 

(Johan) . 
Coregie  (Ramon).  — 43  v.  Voy. 

Corregie  (Ramon). 

CORNELHA.  —  27  V. 

Cornelh  (Bernât). —  7  r.,  12  v., 
82  V. 

Cornuejol  (Esteve).  —  59  r  , 
66  r. 

Corregie  (Johan). —  4  v  ,  14  v., 
31  V.,  34  V.  Voy.  Coregie  (Jo- 
han). 

Corregie  (Ramon). — 75  r.,  82  r. 
Voy.  Coregie  (Ramon), 

Corsi  (lo  senhorde).  — 87  v. 

Certes  (Johan).  —  17  v.,  31  r., 
43  r.,  54  r. 

Cortinals  (Johan). —  6  v.,  15 r. 

Costa  (B.).— 84  v. 

Costans  (Johan) . —  10  v. 

Cotelie  (Guilhem). — 41  v.,50v., 
89  V.  Voy.  Cotelier  (Guilhem). 

Cotelie  (Johanet). —  80  r. 

Cotelie  (Ramon).  —  24  r.,  42  r., 
45  V.,  54  V  ,  57  v.,  61  r., 
66  V.,  72  r. Voy.  Cotelier  (Ra- 
mon). 

Cotelier  (Guilhem).—  28  v.,  31  v., 
45  V.,  52  V.  Voy.  Cotelie  (Gui- 
lhem) . 

Cotelier  (Johan).  —  6  v.,  12  v  , 
18  V. 

Cotelier  (Ramon).  -  14r.,16r., 
19r.,  21v.,  26r.,  27  r.,  38r. 
Voy.  Cotelie  (Ramon). 

CoTZER\Ns(ravesque  de).  —  83 r. 

Coyra  (Johan).  — 26  v.,  77  v. 

Cramaut  (Symon  de). —  Page  83 
note  1  et  page  84  note  1. 

Creyschieu  (Daude).  —  49  r.Voy. 
Creysieu  (Daude). 


Creysieu  (Daude).  —  54  v.,  75 v. 

Voy.  Creyschieu  (Daude). 
Cros   (Esteve).  —  37v.,  60  v., 

75  r.  Voy.  Crotz  (Esteve). 
Cros  (Johan  de  la). —  80  r. 
Crotz  (Esteve). —  29  r.Voy.  Cros 

(Esteve). 
Crusi  (Johan). —  61  v.Voy. Cruzi 

(Johan) 
Cruvelier  (Vices).  — 5  r. 
Cruzi  (Johan).  —  43r.  Voy.  Crusi 

(Johan). 
Cubas  (Celas).  —  13  r. 
Cucuro  ;  Domerane  de).  — 93  r. 


Dalmas  (Symon).  —  39  v.,  47  r. 

Dam.  —  78  v.,79  r. 

Damas.  —  76  v. 

Danha  (Guilhem).  — 2  r.    Voy. 

Dajnha  (Guilhem). 
Daude  Albi. —26  V.,   47v.,54 

v.,71  V. 
Daude  Comte.  —  54  r. 
Daude  Creyschieu.  — 49  r.  Voy. 

Daude  Creysieu. 
Daude  Creysieu.  —  54  v.,  75  v. 

Voy.  Daude  Creyschieu. 
Daude  Raynaut.  —  88  r. 
Daunis  Serinha.  13  v.,  17  v.,  22  v., 

26  r. 
Daynha  (Guilhem)    — 1    v.Voy. 

Danha  (Guilhem). 
Desmas  (Esteve) .  —  17  r.,  42  r. , 

45  r.^  47  V. 
Desmas  (P.).  —  5  r.  Voy»  Des- 
mas (Peyre). 
Desmas   (Peyre).  — 2  r.    Voy. 

Desmas  (P.) . 
Dieu  de  Pietat  (la  Mayre  de). 

—  83  r. 


DE  JAGME   MASCARO 


545 


Dolha  (Johan).  —  31  v.,  37  v.,  43 

V.,  53  r.,  54  v.,  60  v. 
Dolha  (Pey.).  —53  v. 
Domerane  de  Cucuro.  —  93  r. 
Dorimnis  (P.)*  —  21  v. 
Duran  Bedos.  —  63  r. 
Duran   Canic.    — 41   r.,    47  r., 

59  V.  Voy.  Duran  Canier, 
Duran  Canier.    —  36  v.    Voy. 

Duran  Canie. 
Duran  de    Guirgols.  —  60   v., 

89  V. 
Duran  (Estaci) .  —  77  v . 
Duran  Selio .  —  43  v. 
Duran  Sicart.  —  11  v. 
Duran  Sicart  (Guilhem).  —  9  r. 

E 

Emengau  Andrieu.  —  63  r. 
Emengau  (Bernât).  —  63  r. 
Emengau  (Esteve).  —  6  v. 
Flmengau  (Jacme).  —  29  r.,  33  v., 

34  r.,  39  V.,  41  r.,  57  r.,  72  r. 
Emengau  (Johan).  —  13  v.,  45 

V.,  48  V. 
Emengau  (Pons).  —  35  v.  Voy. 

Ermengau  (Pons). 
Emengau  (Ramon).  —  48  r.,  57 

V.,  59  r.,  60  V.,  78  r.,  80  r. 
Emoric  (Ramon).  —  75  v. 
ENGLA.TERRA.  —  18  r.,  79  r.  Voy. 

Anglaterra  . 
Engles  (los).  —  79  r. ,  83  r.,  89  r. 
Eranha  (Johan).  —  2  r. 
Ermengau  (Pons).  —  27  r.  Voy. 

Emengau  (Pons). 
ïCrminia  (lo  rey  d').  —  72  v. 
Escardavilha  (Guilhem).   —  5  v. 
Espanha  (Rotgier  d').  —  80v. 
Espanol  (Guilhem).  — 82  v. 
Estaci  (Aymeric) .  —  22  r . 
Estaci  Duran.  —  77  v. 


Estaci  (Jacme).  —  58  v.,  73  v. 

Estaci  (Johan).  —  54  r  ,  75  r., 
89  V.  Voy.  Estassi  (Johan). 

Estaci  (P.).  —  14  r.,  74  r.,  78 
v.,84  V.  Voy.  Estassi  (P.). 

Estassi  (Johan).    —  50  v.   Voy. 
Estaci  (Johan). 

Estassi  (P.).  —  93  r.    Voy.  Es- 
taci (P.). 

Esteve  Albanhana.  — 34  r. 

Esteve  Balhot.  —  63  r. 

Esteve  Barba.  —  9  v.  Voy. Steve 
Barba. 

Esteve  Boia.  -63r. 

Esteve  Cambavielha.  —  61  r.,  73 
r. 

Esteve  Campanha.  —  34  v.  Voy. 
Steve  Campanha. 

Esteve  Carbonie.  —  62  r. 

Esteve  Cornuejol.  —  59  r.,  66  r. 

Esteve  Cros.  —  37  v.,  60  v.,  75  r. 
Voy  Esteve  Crotz. 

Esteve  (  rotz.  —  29  r.  Voy.  Es- 
teve Cros. 

Esteve  de  Bajas.  —  1  v. 

Esteve  Desmas.  —  17  r.,  42  r., 
45  r.,  47  V. 

Esteve  Emengau.  —  6  v. 

Esteve  Fabre.  —  19  v.,  21  r., 
24r.,  20  V..  45  v. 

Esteve  Gaucelm.  —  78  r. 

Esteve  Gautie.  —  36  r.,  47  v., 
53r.,58v.,76r.  Voy.  Esteve 
Gautier. 

Esteve  Gautier.  —  15  v.  Voy.  Es- 
teve Gautie . 

Esteve  (Johan).    —  13  v.,  24  v. 

Esteve  (Pey.) .  —  40  r.  Voy.  Es- 
teve (Peyre). 

Esteve  (Peyrc).  --  12  v.,  48  v. , 

58  V.  Voy.  Esteve  (Pey.). 
Esteve  Prunet.  —  40v.,  44v. 
Esteve  Rozieyra.  —  37  v. 

37 


54C 


LE   «  LIBRE  DÉ   MEMOMAS  » 


Esteve  Sabatie. —   ôv.,    15  r., 

26  r. 
Esteve  Vanieyra.  —  83  v. 
Esteve  Vices.  —  Il  v.,  23  v. 
Evesque  (Johan).  —  37  v.,  57  v. 

Voj.  Avesque  (Johan). 


Faberza  (Johan) .  —  88  r . 
Fabre  (Bernât).  —  26  r.,  35  V., 

71  V.  . 
Fabre  (Esteve).  —  19  v.,  21  r., 

24r.,26  V.,  45  v. 
Fabre  (Guilhem).— 17  r.,  22  v., 

80  r. 
Fabre  (Jacme).  —  33  r.,  44  r., 

48  r.,54r. 
Fabre  (P.).  —  18  v.  Voy.  Fa- 

bre  (Pey.)  et  Fabre  (Peyre). 
Fabre  (Pey.).  —  13  r.,  62  y., 

75  V.  Voy.  Fabre  (P.)  et 

Fabre  (Peyre) . 
Fabre   (Peyre).  —  22  v.    Voy. 

Fabre  (P.)  et  Fabre  (Pey.). 
Fabre  (Ramon).  —  32  v.,  78  v., 

83  V. 
Fangaus.  —  3  V. 
Fauiha  (Guilhem  Augie  de).  —  3 

r.,  4  v.,    6  v. 
Fenassa  (Guilhem).  —  66  v. 
Ferrier  (B.).  —  80  v.  Voy.  Fer- 

rier  (Bernât). 
Ferrier  (Bernât).  —  57  v.,  83  v., 

89  y.,  Voy.  Ferrier  (B.). 
Ferrier  (Brenguie) .  —  62  y . 
Flandres.  —  78  y . ,  79  r. 
Floyra  (Peyre).  —  82  y. 
Floyra  (Pons).  —  45  y.,  47  y., 

48y.  Voy.  Floyza  (Pons). 
Floyza  (Pons).   —   76   r.    Voy. 

Floyra  (Pons). 


Foix  (lo  compte  de).   —  93   v. 

Vov.    FOYS. 
Folc  Girona.  —  9  r. .  15  r. 
Folcran  (Johan).   —   12  r.,   20 

y  ,  48  r. 
Folcran  (Miquel).  —  3  r.,  4  r. 
Folcran  (Ramon).  — 7  v. 
Fons  (P.).— 52v.,77  v.  Voy. 

Fons  (Pey.)  et  Fons  (Peyre;. 
Fons  (Pey.).  — 54  r.,  75 r.  Voy. 

Fons  (P.)  et  Fons  (Peyre). 
Fons  (Peyre).  —  77  r.,    84  r. 

Voy.  Fons  (P.)  et  Fons  (Pey.). 
Fontainas  (Johan  de),  —   74   r. 

Voy.  Fontaynas  (Johan  de). 
Fontaynas  (Andiieu  de). —  88  r. 
Fontaynas  (Johan  de).  —   28  r., 

42  y.,  46  y..  52  y.,  84  r.  Voy. 

Fontainas  (Johan  de). 
Fontes  .  —  60  r. 
Fornie  (Arnaut).  —  23  y. 
FoYS  (lo  comte  de).    —  85   r. 

Voy.  Foix. 
Frances  Barieyra.  —  57  y.  Voy. 

Frances  Barrieyra. 
Frances  Barrieyra.  —   27  r.,  49 

p.,  60  y.,  72  r.  Voy.  Frances 

Barieyra. 
Frances  Bechieu.  —  47  y . 
Frances  Bofat.  —  8  v.  Voy.  Fran- 
ces Boffat. 
Frances  Boffat.  —  40  y.    Voy. 

Frances  Bofat. 
Frances  Causenuejols .  —  20  r. 
Frances  Rog.  —  50  y. 
Fransa.  —   3  y.,  7  r.,   16  r,, 

18  r.,  37  r.,  61    y.,  66    v., 

79  r.,  page  61,  en  note.  Voy. 

Franssa. 
Fransa  (la  regina  de).  —  37  r. , 

79  r. 
Fransa  (lo  rey  de).—  3  y.,  7  r., 

16 r.,  18  r.,  61  v.,  66  v.,  page 


DE   JACME  MASGARO 


547 


89,  en  note.  Voy.  Franssa  (lo 
rey  de). 

Franssa.  —2  V.,  3  r.,  20  r.,  29 
V.,  31  V.,  42  r.,  56  r.,  59  v., 
60r.,63v.,  71r.,72v.,78  V., 
79r.,  83r.,85r.,87r.,  87  v., 
88r.,88  V.,  89  r.  Voy.  Fransa. 

Franssa  (lo  conestable  de)^  — 
87  V. 

Franssa  (lo  rey  de).  —  2  v.,  3  r., 
20  r.,  42r.,56r.,60r.,63  V., 
71  r.,72v.,78v.,  79r.,  85r., 
87  r.,  88  r.,  88  v.,  89  r.  Voy. 
Fransa  (lo  rey  de). 

Frezols  (Andrieu).  —  2  v . 

Frezoh  (P.).  —  2  v. 

Fromit  (Arnautj.  —  28  v.,  51  r., 
57  r. 

Fromit  (Bernât).  —  23  r.,  28  r., 
39  V.,  59  v.,66  r. 

Fromit  (Johan).  — 45  r.,  50v. 

Fiomit  (P.).  —  59  V.  Voy.  Fro- 
mit (Peyre). 

Fromit  (Peyre).  —  43  r.,  58 v. 
Voy.  Fromit  (P.) 

Fromit  (Ramon).  —  28  r. 

Frontinha.  —  24  V. 

Fuelhval  (Ramon  de).  —  39  r. 


G 


Gaholhiac  (Symon  de).  —  76  r. 
Galas  (lo  princep  de).  —  14  v., 

16  r. 

Galhart  (Andrieu) .  —  2  r . ,  16  v . , 

17  r. 
Gamot.  —  63  r. 
Gangi  (Johan). —  8  v. 
Gans.— 79r. 

Garda  (Anthoni  delà).  —  59  r., 

82  r. 
Garda  (Bertran  de  la). — 43  r. 
Gariga  (Johan  de  la).  —58  v., 


73  r.,  74  r.  Voy.  Garriga  (Jo- 
han de  la) . 
Garnit  (Johan).  --  10  r.,  20  v., 

30  V.,  41  r. 
Garoti   (Anric).  —  48  v.,  82  v., 

Voy.  Goroti  (Anric) . 
Garoti  (Ramon). —  )8  r.,  33  r., 

37  V.,  54  r. 
Garra  (Bernât). —  22  r. 
Garriga  (Johan  de  la).  — 67  v., 

82  r.  Voy.  Gariga  (Johan  de  la). 
Gasc  (Andrieu).  — 19r.,  21  r., 

22  v.,43  v.,45  r.,47r.,  49  v., 

53  r. 
Gasco .  —  63  r . 
Gassiot  del  Castel.  —  24  v. 
Gaubart  (Peyre).—  23  v.,  37  v. 
Gaucelm  (Esteve) .  —  78  r. 
Gaudel (Ramon). —  14  r.,  17  r., 

30  V.,  41  v.,48v. 
Gautaroia  (Jacme). — 16  r. ,  20 v., 

26  V.,  54  r.,  75  r. 
Gautaroia  (P.).  — 52v.,74r., 

86  r.  Voy.    Gautaroia  (Pey.), 

Gautaroia  (Peyre)  et  Gautaroya 

(P.). 
Gautaroia  (Pey.).  —  73  r.  Voy. 

Gautaroia  (P.),  Gautaroia  (Pey- 
re) et  Gautaroya  (P .  ) . 

Gautaroia  (Feyre) .  —  51  v . ,  74  r. 
Voy.  Gautaroia  (P.),  Gauta- 
roia (Pey.)  et  Gautaroya  (P.). 

Gautaroya  (P.).  —  74  r.  Voy. 
Gautaroia  (P.),  Gautaroia 
(Pey.)  et  Gautaroia  (Peyre). 

Gautie  (Esteve). —  36  r.,  47 v., 
53r.,58v.,  76  r.  Voy.  Gau- 
tier (Esteve). 

Gautie  (Johan). —  63  r. 

Gautier  (Esteve).  — 15  v.  Voy. 
Gautie  (Esteve). 

Gavasto(P.).— 6  r.,39r.Voy. 
Gavasto  (Pey.). 


548 


LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 


Gavasto  (Pey.).  —  13  v.,  28  v. 

Voy.  Gavasto  (P.)» 
Gaysac  (Ramon).  — 17  r.  Voy. 

Gayschac  (Ramon). 
Gayschac(Johan).  —  78  r.,  81  v. 
Gayschac  (  Ramon  ).    —  6  v., 

14  V.,  23  V.  Voy.  Gaysac  (Ra- 
mon). 
G.  B.,  monie. —  63  r. 
G.  del  Bosc— 63r. 
G.  de  Taurel.—  67  v.Voy.  Gui- 

Ihem  de  Taurel. 
Geli  (Alias).  —  41  r.  Voy.  Geli 

(Helias). 
Geli  (Helias).  —  30  v.Voy.  Geli 

(Alias). 
Geli  (Ramon).— 12  r.,38r.Voy. 

Gili  (Ramon). 
Genestas  (Jacme).  —  28  r.,  66  r. 
Genieys  (Pey,).  — 40  r.  Voy.  Ge- 

nieys  (Peyre)  et  Ginieys  (P.)- 
Genieys  (Peyre). —  12  v.,  41  r., 

48  v.,51  r.,  53  r.,  62  v.Voy. 

Genieys    (Pey.)    et     Ginieys 

(P.). 

Genieys  (Ramon). —  32  v. ,  62  r. 

Gibeli  (Bernât).  —  2  r.,  35  v., 
84  y. 

Gilabert  (Ramon). —  86  v. 

Gili  (Ramon).  —  22  r. Voy.  Geli 
(Ramon) . 

GiNHAC. —  3  V.,  60  r. 

Ginieys  (P.).  —  10  r.  Voy.  Ge- 
nieys (Pey.)  et  Genieys 
(Peyre). 

Girart  lo  frances. —  63  r. 

Girona  (Foie).  —  9  r.,  15  r. 

GiRONA  (lo  duc  de). —  42  r. 

Girona  (P.).  —  84  v.  Voy.  Gi- 
rona (Peyre) . 

Girona  (Peyre). —  58  v.Voy.  Gi- 
rona (P.). 

Glieyas  (Paul).—  40  r. ,  53  r. 


G"  Marti.—  9  r. 

Gobi(Vesia).— 34v. 

Goch  (Jaques).—  22v.Voy.Gog 

(Jaques). 
Go  g  (Jaques). —  43  r.Voy.  Goch 

(Jaques) . 
Golbias    (Bernât    de).  —  36  v., 

38r.,39  V.,  49  r. 
Golfi  (Bernât).—  26  r.,  48  v. 
Golfi(Pey.).— B2r. 
Gonestaria  (Guy).  —  58  r. 
Gontart  (Bernât). —  63  r. 
Gontaut  (Pabina  de)! —  58  r. 
Gordo  (Johan).  —  51  v.,  57  v., 

66  r. 
Gordo  (Pos).—  73  v. 
Gorgori  (Jacme).  —  66  v. 
Gorgori  (Peyre) .  —  51  v . 
Goroti  (Anric).^  43  v.Voy.  Ga- 

roti  (Anric). 
Got  (Guiraut) .  —  40  v . ,    48  r  , 

62  r. 
Grassa  (la). —  3  V. 
Grassia  (Bona). —  62  v. 
Graza  (Brenguie)  —  44  v . 
Gregori  (papa). —  51  v. 
Grimoart    (Simon  de).   —  74  r. 

Voy.  Grimoart  (Symon  de). 
Grimoart    (Symon  de).  —  72  v. 

Voy .  Grimoart  (Simon  de) . 
Grindas    (^lo   portal  d'en).  — 

87  r. 
G.  Sicart.  — 80  v. 
Gueyraut  (Johannei^i) .  —86  v. 

GUIAYNE   (lo   DUGATDE). —  61  V. 

Guilhelmes. —  34  v. 
Guilhem  Amat  — 63  r. 
Guilhem  Arnaut.  —  30  r. 
Guilhem   Audi.  —   7  r.,    11  r., 

18  V.,  27  r. 
Guilhem  Augie .  —  4  r . 
Guilhem  Aymoy. — 39  v.,  47  r., 

51  p. 


DE   .TACME  MASCARO 


549 


Guilhem  Barrieyra. —  59  r. 

Guilhem  Barta. —  30  v. 

Guilhem  Bedos.  -  59  r. 

Gnilhera  Benquelh.  —  43  v. 

Guilhem  Bonet. —  32  v. 

Guilhem  Boq.  —  8  v.  Voy.  Gui- 
lhem Boquie. 

Guilhem  Boquie.  — 28  v.,  34  r., 
57  r.  Voy.  Guilhem  Boq. 

Guilhem  Capeiie. —  5  v. 

Guilhem  Caratie .  —  63  r. 

Guilhem  Carie.  —28  v.,  31  v., 
36 p., 66  r.  Voy.  Guilhem  Karle. 

Guilhem  Castras. t—  45  r. 

Guilhem  Catala.  —  73  r,  83  v. 

Guilhem  Conort. —  93  r. 

Guilhem  Cotelie.  —  41  v.,  50  v., 
89  V.    Voy.  Guilhem  Cotelier. 

Guilhem  Cotelier. —  28  v.,  31  v., 
45  V.,  52  V.  Voy.  Guilhem  Co- 
telie . 

Guilhem  Danha.  —  2  r.  Voy. 
Guilhem  Daynha. 

Guilhem  Daynha.  —  1  v  Voy. 
Guilhem  Danha. 

Guilhem  de  Badonas.  —  9  r.,  Il 
r.,  18  r.,  35  v. 

Guilhem  del  Bruelh  —  89  v. 

Guilhem  de  Mezo. —  13  r. 

Guilhem  de  Moyschac  —  84  v. 

Guilhem  de  Taurel.  —  52r.,62 
r.  Voy.  G.  de  Taurel. 

Guilhem  DuranSicart. —  9  r. 

Guilhem  Escardavilha.  —  5  v. 

Guilhem  Espanol. —  82  v. 

Guilhem  Fabre.  —  17  r.,  22  v., 
80  r. 

Guilhem  Fenassa.  —  66  v. 

Guilhem  Guitart. —  2  p. 

Guilhem  HonMha. —  10  r. 

Guilhem  Karle.  —  44  v.  Voy. 
Guilhem  Carie. 

Guilhem  lo  fustie. —  63  r. 


Guilhem  Masselha.  —  63  r. 
Guilhem  Mauri. —  15  r. 
Guilhem  Miquel.  —  45  r.,  57  r., 

76  r. 
Guilhem  Morut.  —  7  v. 
Guilhem  (mossen),  abat  de  Sant 

Jacme. —  2  r. 
Guilhem  (Nicholau). —  77  v. 
Guilhem  Pages.—  22  r. 
Guilhem  Peyre. —  40  r. 
Guilhem  Peyre  de  Pauli.—  40  v. 
Guilhem  Peyrie.  —  63  r.,  73  v., 

86  V. 
Guilhem  P.  Trenquavelh.—  49  r., 

80  r. 
Guilhem  Ramon.  —  34r.,  66  r. 
Guilhem  Raynes  —  4  v. 
Guilhem  Remcnie.—  63  r. 
Guilhem   Revel.  —  14  r.,  24  r. , 

73r.,84  r. 
Guilhem  Rigaut.  —  76  r.,  86  r. 
Guilhem  Roma.  —    5  r  ,  10  r., 

13  V. 
Guilhem  Rossel. —  32  v. 
Guilhem  Rossilho.  —  7  v.,  19  v., 

21  r.,24v.,  26v.,  38  r. 
Guilhem  Sabatie.  —  63  r. 
Guilhem  Salât.  —  9  v,  57  v. 
Guilhem  Salvayre. —  34  r.,  75  r. 
Guilhem  Trenquavelh.  —  14  r. 
Guilhem  Vayssa.  —  82  r. 
Guinho  (Arnaut). —  52  v. 
Guiraudo. —  62  v. 
Guiraut  Blanquier. —  18  v. 
Guiraut  Buadela. —  10  r. 
Guiraut  Got.  —  40  v.,  48  r.,  62  r. 
Guiraut  (Jacme). —  66  r. 
Guiraut  Portel. —  44  v. 
Guiraut  (Ramon). —  18  v.,  32  v., 

75  r. 
Guiraut  Teyseyre. —  34  v. 
Guirgols  (Duraride).  —  60  v., 

89  V. 


550 


LE   «LIBRE    DE   MEMORIAS  » 


Guitart(B.).—  5  r.,  62  r.,  67  r. 

Voy.  Guitart  (Bernât).  • 
Guitart  (Benezeg).—  31  r, 
Guitart  (Bernât).—  13r.,34r., 

47  r.,  62r.,67r.,  67v.,72v., 

Voy.  Guitart  (B.). 
Guitart  (Guilhem) . —  2  r. 
Guitart  (Johan). —  4  v. 
Guy  de  Lestaria. —  page  72^  note 

1. 
Guy  Gonestaria. —  58  r. 


Helias    Geli.    —     30    v.   Voy. 

Alias  Geli. 
Heyraut  (Jacme) . —  51  r. 
Honelha  (Guilhem).—  10  r. 
Hue  Cabot.  — 6  v.,  12  v.,  14  v., 

17  V.,  19v.,21  r. 
Hue  d'Archas.  —  13  r. 
Hue  delBosc. —  41  r. 
Hue  (Johan). —  89  v. 
Hue  Miquel.—  60  v. 
Hue  (mossen),  avesque. —  11  v. 
Hue  Pomayrols. —  66  r. 
Hue  (Ramon). —  4  v.,  10  v. 
Huguet  (Johan).  —  63  r. 


JaemeBedos. —  10r.,84v. 
Jaeme  Bena. —  85  r. 
Jaeme  Bernât. —  13  v. 
Jacme  Betinha.  —  5  v.,  11   r., 

34  r. 
Jacme  Bonaric .  —  34  v . 
Jacme  Boquet.  —  50  v. 
Jacme  Botho.  —   23  r.,  24  r., 

27  r.  Voy.  Jacme  Boto. 
Jacme  Boto.— 26  r.,  28r.,62r. 

Voy.  Jacme  Botho. 
Jacme  Bru.  —  54  r. ,  78  v. 


Jacme  Caucenuejol. —  86  r.  Voy. 

Jacme  Caucenuejols  et  Jacme 

Causenuejols. 
Jacme  Caucenuejols.  —  57     v. 

Voy.    Jacme    Caucenuejol    et 

Jacme  Causenuejols. 
Jacme    Causenuejols.    —   45    r. 

Voy.     Jacme    Caucenuejol    et 

Jacme  Caucenuejols. 
Jacme  Emengau.  —  29  r.,  33  v., 

34  r.,  39v.,41  r.,  57  r.,  72  r. 
Jacme  Estaci    —  58  v.,  73  v. 
Jacme  Fabre.  —  33  r.,  44  r.,  48 

r.,  54  r. 
Jacme  Gautaroia.  —  16  r.,20v., 

26 V.,  54  r.,  75  r. 
Jacme  Gène  s  tas.  —  28  r.,  66  r. 
Jacme  Gorgori .  —  66  v . 
Jacme  Guiraut.  —  66  r. 
Jacme  Heyraut. —  51  r. 
Jacme  Laures. —  33  v.,  35  v. 

Voy.  Jacme  Lauzes. 
Jacme  Lauzes.  —  53   r,  59v. 

Voy.  Jacme  Laures. 
Jacme  Lombart,  —  19  r.,  21  v., 

22  V.,  26r.,28r.,  37  v. 
Jacme  Lombes.  —  44  v.,  57  v., 

75  V. 
Jacme  Maistre.  —  27  r.  Voy  Jac- 
me Maystre. 
Jacme  Mascaro. —  1  r.,  4v. 
Jacme  Mauri. —  53  r.,  54  v.,  57 

r.,  59  V., 66  V.,  81  v.,  86  v 

Jacme  Maystre.  —  17  v.  Voy. 
Jacme  Maistre. 

Jacme   (  mossen),  abat  de  Sant 

Afrodisi. —  2  r. 
Jacme  Nicholau. —  82  r. 
Jacme  Paulinha. —  43  v. 
Jacme  Régi  Ortola  —  42  v. 
Jacme  Salamo  de  Thesa.  —  62  r. 
Jacme    Sicre.  —    45  v.,    61    r., 

71  V. 


DE   JACME  MASCABO 


551 


Jacme  Vanieyra.  —  6r.,  Il  v., 

18  r.Voy.  Jacme  Vanuieyra. 
Jacme  Vanuieyra.  —  10  v.  Voy, 

Jacme  Vanieyra. 
Jacme  Vedel. — 51  v. 
Jacme  Vidal. —  Ur.,  i;r.,26v. 
Jacquet  de  Bencyorget.  —  89  r. 
Jaques  Goch.  —  22  v.  Voy.  Ja- 

quel  Go g. 
Jaques  Gog. —  43r.  Voy.  Jaques 

Goch. 
Johaaa    (madama).    —    42  r. 

{ Jeanne ,  fille  de  Philippe  de 

Valois). 
JohaD  Andrieu.—  7  v..  I3v, 
Johan  .\ugie- —  39  r. 
Johan  Auriac. —  63  r. 
Johan  Aveaque,   —   78  r.   Voy, 

Johan  Evesque, 
Johan  Ayraut, —  60  v. 
Johan  Barrieyca, —  41  v.,  47r,, 

58v.,77r.,78  r. 
Johan  Baudriga.  —  7  v.,  Il  r., 

13  r. 
Johan  Benezeg.  —  7   r.,  7»,, 

38  r.,  43  v.,61  r. 
Johan  Bermon. —  44  v.,  62v. 
Johan  Betinha.  — 78  r. 
Johan  Betizac.  —  89  r.    Voy. 

Johan  de  Betizac. 
Johan  Bigot,—  5  v.,  10  r.,  18  r., 

18  V. 
Johan  Blanquet. —  47v. 
Johan  Bonaerviai.  —  30  v.  Voy. 

Johan  de  Bonservisi  et  Johan 

deBoservisi. 
Johan  Botagrais,  —  63  r. 
Johan  Boyer.  —  47  r,,  58  v. 
Johan  Bi'u. -=-82  1'. 
Johan  Cabrayreasa.  —  22  r. 
Johan  Cabrel,  —  38  r.,  41  r 
Johan  Campanha.  —  76  r. 
Johan  Caramanh.—  63  r. 


Johan  Corcgie.  —  10  r,,  20  v.' 

37  V.,  52  V.  Voy.  Johan  Cor- 

regie. 
Johan  Coi'regie. — 4  v.,  14  v.,  31 

V  ,  34  V.  Voy.  Johan  Coregie, 
Johan  CortOB.    -    17  v.,  31   r., 

43  r.,54  r. 
Johan  CorOnala. —  6  v.,  I5r. 
Johan  Costans,  —  10  v. 
Johan  Cotelier.  —  6  v.,    12  v., 

18  V. 
Johan  Coyra.—  26  v.,  77  v. 
Johan  Cruai.— 61  v.  Voy.  Johan 

Cruzi. 
Johan  Crud.—  38  r.,  43  r.  Voy. 

Johan  Cruai, 
Johan  da  Sas.  —    86  v.   Voy. 

Johan  de  Siia. 
Johan  do  Betizac.  —  77  r.,  83  r., 

85  T.  Voy.  Johan  Betizac. 
Johan  do  Bezueuha. —  71  r. 
Johan  de  Bonservisi.—  60  v.  Voy. 

Johan  Bonservisi  et  Johan  de 

BosflPvUi. 
JohandeBosciTlsi.  — 38r,  Voy, 

Johan  Bonsei'visi  et  Johan  de 

Bonaervisi. 
Johan  de  Camplonc.    —  Il  v., 

42  V.,  54  r.,73  v.,  82  v. 
Johan  de  Fontrimas,— 74  r.Voy. 

Johan  de  Fontaynas. 
Johan  do  Fontaynas. —  28  r.,  42 

V.,   46   V.,  52  V.,  84  r.  Voy. 

Johan  de  Fontflinaa. 
Johan  de  la  Gros.  —80  r. 
Johan  de  la  Gariga.—  58  v.,  73 

I'.,  74  r.  Voy.  Johan  de  la  Gar- 

riga. 
Johan  de  la  Garriga.—  67  v.,  82 

r.  Voy.  Johan  de  la  Gariga. 
Johan  de  Pradas.^  51  v.,66  v., 

77  V.  Voy.  Johan  Pradaa. 
Johan  de  Sant  Andrieu. — 2  r. 


552 


LE    «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 


Johan  de  Sas. —  84  v.  Voy.  Johan 

da  Sas. 
Johan  Dolha.  —  31  v.,  37  v.,  43 

V.,  53  r.,  54  V.,  60  v. 
Johan  Emengau.  —  13  v.,  45v., 

48  V. 
Johan  Eranha.  —  2  r. 
Johanneri  Gueyraut. — 86  v. 
Johan  Estaci.  —  54  r.,  75  r.,89  v. 

Voy.  Johan  Estassi. 
Johan  Estassi.—  50  v. Voy.  Johan 

Estaci. 
Johan  Esteve. —  13  v.,  24  v. 
Johanet  Cotelie.  —  80  r. 
Johan  Evesque.  —    37  v.,  57  v. 

Voy.  Johan  Avesque. 
Johan  Faberza.  —  88  r. 
Johan  Folcran.         12  r.,   20  v., 

48  V. 
Johan  Promit.  —  45  r.,  50  v. 
Johan  Gangi.  —  8  v. 
Johan  Garnit.  —  10  r.,  20  v.,30 

V.,  41  r. 
Johan  Gautie. —  63  r. 
Johan  Gayschac.  —  78  r.,  81  v, 
Johan  Gordo. — 51  v.,  57  v.,  66  r. 
Johan  Guitart. —  4  v. 
Johan  Hue.  —  89  v. 
Johan  H u guet.  —  63  r. 
Johan  Jotglar. —  72  r. 
Johan  Labana.  —  63  r. 
Johan  Laures.  —  49  r.,  88  r. 
Johan  (lo  rey).  —  16  r.,  27  v., 

31  V.,  60  r.  (Jean  II  le  Bon). 
Johan  Marti.  —  23  v. 
Johan  Masens.  —  61  r. 
Johan  Menerbes   — 37  v. 
Johan  Nadal.  — 3  r.,  4r. 
Johan  Navas.  —  57  r.,86r.,88  r. 
Johan  Orthola.  —  77  v. 
Johan  Paralops.  —  34  r. 
Johan   Pastre.  —  18  v.,  28  r., 

50v.,63  r.,  82  r. 


Johan  Perdiguie.  — 58  r. 
Johan   Pradas —  33  r.,  34  v., 

37  V.  Voy.  Johan  de  Pradas. 
Johan  Raynaut.  —  10  v.,  82  v. 

Voy.  Johan  Reynaut. 
Johan    Reynaut.  —  71  v.  Voy. 

Johan  Raynaut. 
Johan  Rial.  —  11  v.,  15  v.,29  r. 
Johan  Rogie,  —  80  r.,  84  v. 
Johan  Rossel.  —  10  r. 
Johan  Sabatie.  —  62  r. 
Johan  Sahonier.  —  26  v. 
Johan  Sauze.  —  63  r. 
Johan  Seinhier.  —  11  v. 
Johan  Servia.  —   18  r.,  22  r. 
Johan  Sonie.  —  63  r. 
Johan   Teron.  —34  v.,  35   v., 

41  r.,  50  V.,  62  V. 
Johan  Tomas.  —  77  r. 
Johan  Visme.  —  7  r. 
Jolia  Barrieyra.  —  3  r.,  4  r. 
Jolia  Bernât.  —  60  v.,  81  v. 
Jorda(Peyre).  — 88  r. 
Jori  (Ramon).   —  12  v, 
Jotglar  (Johan).  —  72  r. 


Karle  (Guilhem).  —  44  v.   Voy. 

Carie  (Guilhem). 
Karles.  —  31  v.,   60  r.,  87  r. 

(Charles  V) . 
Karles.  —  60  r.,  78  v.,   87  v. 

(Charles  VI).  Voy.  Caries. 
Karles.    —   79   r.   (Charles,  fils 

aîné  de  Charles  VI). 
Karles  se  terne.    —  pag.  89,   en 

note.  (Charles  VII). 


Labana  (Johan).  — 63  r. 
Lac(Pey.  del).  —  21  v. 


DE   JACME   MASCARO 


553 


Laieret(P.).  —  93  r. 
Landorra  (lo  Bastart  de).  —  59  v. 
Lar  (Arnaul  del).  —  58  r. 
Laur  (Bernât). —   32  v.,  43  r., 

73  V.  Voy.  Laur  (Bernet). 
Laur  (Bernet).    —   86  v.    Voy. 

Laur  (Bernât) . 
Laurens  (Pons).  —  28  r. 
Laures  (Brenguie).  —  10  r. ,  15  v. 
Laures  (Jacme),  — 33  v.,  35  v. 

Voy.  Lauzes  (Jacme). 
Laures  (Johan).  — 49  r.,  88  r. 
Laures  (Peyre).  —  36  v. 
Laures  (Ramon).  — 2  r. 
Lauzes  (Jacme).  —  53  r.,  59  v. 

Voy.   Laures  (Jacme), 
Lebret(lo  senhor  de). —  87  v. 
Lexgadoc.  —  5  r.,  24  V.,  31  V., 

56  r.,   61   V.,  84   r.,   85   r., 

88  r.,88v.,  89  r. 
Lespinha.  —  40  r.,  40  v.- 
Lestaria    (Guy  de).   ~  pag.    72, 

note  1. 
Lieura  (Amalric).  —  3  r.,  4  r. 
Lieura  (Andrieu).  —  81  v. 
Lieura  (Peyre).  —  54  v. 
LiNHA.  —  27  V.,  80  V. 

LODEVA.  —  3  V. 

Lombart  (Jàcme).  —  19 r.,  21  v., 

22  V.,  26  r.,  28  r.,  37  v. 
Lombart  (Mathieu).  —  20  v. 
Lombes  (Jacme).  —  44  v.,  57  v., 

75  V. 
Lombes  (Peyre).  —  63  r. 
Londras  (Veria).  — 48  v. 
Loys. — pag.89,ennote. (Louis  XI). 
Loys. —  86  r.,  87  r.  (Louis,  duc  de 

Touraine,  frère  de  Charles  VI). 
Loys.  —  60  r.  (Louis,  filg  du  duc 

d'Anjou). 
Loys  Blonde.  —  48  r. 
Loys  de  Sansuerra.  —  87  v.  Voy. 

Sansurra  et  Sant  Surra. 


Loys  Roinbaut.  —  27  v. 

Loys   Vayscha.    —  52   v.    Voy. 
Loys  Vayssa. 

Loys  Vayssa.  —  36  r.,  38  r.Voy. 

Loys  Vayscha. 
Luna  (P.  de).  —  93  v. 
Lunas  (Peyre).  —  31  r.,  34  v., 

35  V. 
Lymos.  —  3  V. 


M 

Magdalena  (la),  église.  —  35  r. 
Voy.  Magdalena  (la  Maria), 
Magdalena  (la  MayRe  de  Dieu 
DE  la)  et  Magdalena  (Santa). 

Magdalena  (la  Maria),  église. 
—  37  r.  Voy.  Magdalena  (la), 
Magdalena  (la  Mayre  de  Dieu 
de  la)  et  Magdalena  (Santa). 

Magdalena  (la  Mayre  de  Dieu 
delà),  église.—  lOr.Voy. Mag- 
dalena (la),  Magdalena  (la 
Maria)  et  Magdalena  (Santa). 

'Magdalena  (Santa),  église.  — 
71  r.,  81  r.  Voy.  Magdalena 
(la),  Magdalena  (la  Maria) 
et  Magdalena  (la  Mayre  de 
Dieu  de  la). 

Maistre  (B.).  —  76  v. 

Maistre  (Jacme).  —  27  r.  Voy. 
Maystre  (Jacme). 

Malhares  (l'avesque  de). —  83  r. 

Malmont  (Bertran  de).  -  93  r. 

Malpel(R.).  —21  v. 

Malras  (Anric).  —  34  r.,  57  r., 
59  V. 

Malsa.  —  30  r. 

Maraussa.  — 27  r. 

Margarida  (na).  —  48  r. 

Marguarida  (la  regina) .  —  93  v . 

Maria  Magdalena  (la),  église. 
—  37  r.  Voy.  Magdalena  (la), 


554 


LE   «  LIBRE  DE   MEMORIAS  » 


Magdalena(la  Mayre  dk  Dieu 

DE  la)  etMAGDALENA  (SaNTa). 

Maria  MagdaleiNa  (Santa),  égli- 
se. —  77  r .  Voy .  Magdalkna 
(la),  Magdalena  (lv  Mayre 
DE  Dieu   de  la),  Maria  Mag- 

DALENA     (la)     et     MaGDALENA 

(Santa)  , 
Marinier  (Peyre).  —  93  r. 
Mars  (Ramon  de).  —  11  r. 
Marti  (G"). —  9  r. 
Marti  (Johan).  —  23  v. 
Marti  (lo  comte).  —  37  r.,  79r. 
Marti  (Ramon).  —  77  v.,  80r. 
Mascaro  (Jacme). —  1  r.,4v. 
Masens  (Johan).  —  61  r. 
Masquo  (l'avesque  de).  —  71  r. 
Massai  (Bernât).  —  63  r. 
Massas  (Pey.).  —  23  v. 
Massas  (Ramon),  —  24  r.,  27  r., 

44  V.,  75  r. 
Masselha.  —  3  V. 
Masselha  (Guilhem).  —  63  r. 
Mathieu  Lombart.  —  20  v. 
Mathieu  Rossant.  —  48  v.,  82  r. 
Mathieu  Vilar.  —  3r.,  4r. 
Mauri  (Guilhem).  —  15  r. 
Mauri  (Jacme).  —  53  r.,  54  v., 

57  r.,  59  V.,  66  v.,  81  v.,86  v. 
Mauri  (P.).  —  47  r.  Voy.  Mauri 

(Peyre). 
Mauri  (Peyre).  —  22  r.,  26 r. 
Mayre  de  Dieu  de   la    Magda- 

lena,  église.   —   10   r.   Voy. 

Magdalena  (la),  Magdalena 

(la     Maria)     et    Magdalena 

(Santa). 
Mayre  de  Dieu   de  Pietat  (la), 

chapelle   —  83  r. 
Mayre  de  Dieu  de  Serinha  {l\), 

église.  —  37r. 
Maystre  (Jacme).  —    17  v.  Voy. 

Maistre  (Jacme). 


Maystre  Santz. —  13  r. 

Mazeras.  —  3  V. 

Menerbes  (Johan) .  —  37  v . 

Mkrcadaria  (la),  place.  —  87  r. 

Messier  (Pey .  ) .  —  41  r. 

Mezo  (Guilhem  de).  —  13  r. 

Miquel  Folcran.  —  3  r.,  4  r. 

Miquel  (Guilhem). —  45  r.,57  r.  , 
76  r. 

Miquel  (Hue),  —  60  v. 

Miquel  (Sedel).  —  6  r. 

Miralhie  (Bernât). —  16  r.,21  r., 
22  V.,  36  r. ,  78  r.  Voy.  Mira- 
Ihier  (B.)  et  Miralhier  (Bernât). 

Miralhier  (B.).—  27  r.  Voy.  Mi- 
ralhie (Bernât)  et  Miralhier 
(Bernât). 

Miralhier  (Bernât).  — 19  v.,  30  v., 
52  V.  Voy.  Miralhiç  (Bernât) 
et  Miralhier  (B.). 

MiRAPEYS.  —  3  V. 

Molinier  (Peyre).  —  1  v. 
Monestie  (Ramon  de).  —  59  v. 

MONFLORES. —  31  V. 

MoNPEYLiER.  —  3  V.,  22  r.,  30  r. 
35  r.,  58  r. 

MONPEYLIER  (sANTGiRMA  De),  COU- 

vent.  —  30  r. 
Monpezat  (Bertran  de)^  —  30  r. 
Monrial.  —  3  V. 
Montadi  (  Ymbert  de).  —  12  v., 

40  r. 

MONTANHAC.  —  3  V.,  4  r. 
MoNTIBEL  (  BORC  DE).   —  79  V. 

Montolieu.  —  3  V. 

Montolieu   (Berthomieu  de).    — 

80  V. 
Mornay  (Peyre  de).  —  89  v. 
Morut  (Guilhem).  —  7  v. 
Moyschac  (Guilhem  de).  —  84  v. 
Mozere  (Pey.  de).  —  48  r. 
Murvielh  (Sicart  de).  —  13  r. 


DE  JAGME   MASGARO 


555 


N 


Nadal  (Johan).—  3r.,  4  r. 
Narbona.   —  3  V.,   11  V.,  20  r., 

21  V.,  56  r.,  60r.,  87v.,93r., 

93  V. 
Narbona  (rarcivesque  de).  —  11 

V.,  20  r. 
Narbona  (Sant  Just  de),  église. 

—  21  V. 
Navarra  (lo  rey  de). —  2  v.,  87  v. 
Navar  (Ramon).  —  8  r. 
Navarra  (P.  de).  —  87  v. 
Navas  (Johan). —57  r.,  86r. ,  88  r. 
Nemze.  —  3  V.,  27  V.,  56  r. 
Nicholau  (Augie).  —  8  v. 
Nicholau(Guilhera).  — 77  v. 
Nicholau  (Jacme).  —  82  r. 
Nicholau  Pojol. —  5v.,  16v. ,  17r. 
Nycholau  (Andrieu).  —  63  r. 


Olivie  de  Clisson.  —  79  r. 
Olivie  Paulinha.  —   76   r.    Voy. 

Olivier  Paulinha. 
Olivier  (B.).  —  5  r. 
Olivier  Paulinha.  —  4  v.,   8  v., 

83  V.  Voy.  Olivie  Paulinha. 
Orgaria  (la),  place.  —  87  r. 
Orp  (la  ribieyrad').  —  52  r. 
Orthola  (Johan).  —  77  v. 
Ortola  (Jacme  Régi).  —  42  v. 
Ortz  (Ramon). —  7v.,12v.,  15r., 

26  r.,  26  V.,  33  r. 


Pabina  de  Gontaut.  —  58  r. 
P.  Agcl.  —  32  V. 
Pages  Guilhem.  —  22  r. 
P.  Aludie.  —  10  r. 


Pamias.  —  3  V. 

Panta  Salada  (Peyre).  —  1  v. 

Paralops  (Johan).  —  34  r. 

Paris.  —  88  r. 

Pascal  (Ramon).  —  40  v.,  48  r. 

Passavan  (Raynaut).  —  27  r., 

33  r.,  43 r, 
P.  Astrebo.  —  7  v.,  15  r. 
Pastre  (Johan).  —  18v  ,  28  r., 

50v.,63r.,82r. 
Pastre  (P.).  —  5v. 
Paul  Bajas.  —  36  r. 
Paul  Barba.— 49v.,54  v.,59r., 

61  V.,  62  r. 
Paul  Bossela.  —  31  r. 
Paul  Glieyas.  —  40  r.,  53  r. 
Pauli (Guilhem  Peyre  de) .  —  40  v . 
Paulinha  (Jacme) .  —  43  v. 
Paulinha  (Olivie).  —76  r.  Voy. 

Paulinha  (Olivier) . 
Paulinha  (Olivier).  —  4  v.,  8  v., 

83  V.  Voy.  Paulinha  (Olivie) . 
Pauli  (Sicart  de).  —  40  r. 
Paul  Triquart.  —  80  v. 
P.   Aymoy.    —  15  r.    Voy.  P. 

Aymoyr  et  Peyre  Aymoy. 
P.   Aymoyr.   —    86   r.  Voy.  P. 

Aymoy  et  Peyre  Aymoy. 
P.  (Berthomieu) .  —  72  r. 
P.  Bonet.  —7  v. 
P.  Boquie.  —  9  r.  Voy.  Pey.  Bo- 

quie  et  Peyre  Boquie. 
P.  Brenguie.  —  71  v.,  75  r.  Voy. 

Peyre  Brenguie  et  Peyre  Bren- 

guier. 
P.  Cabot.  —   10  r.    Voy.  Peyre 

Cabot. 
P.  Cartholha.—  83  v.  Voy.  Pey. 

Cartolha  et  Peyie  Cartolha. 
P.  de    Badonas.    —  73  v.    Voy. 

Peyre  de  Badonas. 
P.  de  Luna.  —  93  v. 
P.  de  Navarra.  —  87  v. 


556 


LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 


P.  Desmas.  —  5  r.   Voy.  Peyre 

Desraas. 
P.  Donmnis.  —  21  v. 
Pelegri  (Peyre).  ■—  19  r. 
Peno  (R.).  —  67  V.,  76  v.  Voy. 

Peno  (Ramon). 
Peno  (Ramon).  —  51    v.,  57  r« 

Voy.  Peno  (R.). 
Pepi  (Pons).  —  63  r. 
Perdiguie  (Johan).  —  58  r. 
Perenas.  — 4  r.,  60  r.  Voy.  Pe- 

ZEiNAS. 

Perpinha.—  93  r.,  93  v. 

Perrin  de  Rems.  —  72  v. 

P.  Estaci.  —  14  r.,  74  r.,  78  v., 

84  V.  Voy.  P.  Estassi. 
P.  Estassi.—  93  r.  Voy.  P. Estaci. 
Pey.  Bechie.  —'661'.  Voy.  Peyre 

Bechie  et  Peyre  Bechier. 
Pey.  Boquie.  —   30   v.  Voy.  P. 

Boquie  et  Peyre  Boquie. 
Pey.  Cambavielha.  —  30  v. 
Pey.  Cartolha.—  73  r.   Voy.  P. 

Caitholha  et  Peyre  Cartolha. 
Pey.  Gatala.  ~  39  r.  Voy.  Peyre 

Catala. 
Pey.  Cava.  —  62  v. 
Pey.  Comte.  —  42  v. 
Pey.  de  Carato.  —  21  v. 
Pey.  del  Lac.  —  21  v. 
Pey.  de  Mozere.  —  48  r. 
Pey.  Dolha.  —  53  v. 
Pey.  Esteve.  —  40  r.  Voy.  Peyre 

Esteve. 
Pey.  Fabre.—  13  r.,  62  v.,75  v. 

Voy.  Peyre  Fabre  et  P.  Fabre. 
Pey.  Fons.  —  54  r.,  75  r.  Voy. 

Peyre  Fons  et  P.  Fons. 
Pey.  Gautaroia.  —  73   r.   Voy. 

Peyre  Gautaroia,  P.  Gautaroia 

et  P.  Gautaroya. 
Pey.    Gavasto.  —    13   v.,  28  v. 

Voy.  P.  Gavasto. 


•> 


Pey.  Genieys. —  40  r.  Voy.  Peyre 

Genieys  et  P.  Ginieys. 
Pey.  Golfi.  —  82  r. 
Pey.  Massas.  —  23  v. 
Pey.  Messier.  —  41  r. 
Pey.  Ramon  Revel.  —  8  r.  Voy. 

P.  Ramon  Revel. 
Peyre  Acde.  —  24  r.,  31  r.,  44  v. 
Peyre  Amat.  —  63  r. 
Peyre  Amielh.  —  16  v. 
Peyre  A  ma  ut.  —  24  r.,  34  r. 
Peyre  Aymoy.  —  53 r.,  80  r.  Voy. 

P.  Aymoy  et  P.  Aymoyr. 
Peyre  Barot.  —  39  r. 
Peyre  Bechie.  —  21  v.  Voy.  Pey. 

Bechie  et  Peyre  Bechier. 
Peyre  Bechier.  —  19  r.  Voy. Pey. 

Bechie  et  Peyre  Bechie. 
Peyre  Bira.  —  63  r.  Voy.  Peyre 

Biro. 
Peyre  Biro.  —  54  v.  Voy.  Peyre 

Bira. 
Peyre  Boquie. —  15v.,  39r.,  58v. 

Voy.  P.  Boquie  et  Pey.  Boquie. 
Peyre  Boyer.  —  16  r. 
Peyre  Braconet.  —  63  r. 
Peyre  Bragayiie.  —  15  r.,  27  r. 
Peyre  Brenguie.  —  89  v.   Voy. 

P.Brenguie  et  Peyre  Brenguier. 
Peyre  Bi-enguier.  —  78  r.  Voy. 

P.Brenguie  et  Peyre  Brenguie. 
Peyre  Bru.  —  57  r. 
Peyre    Cabot.  —    11    r.,    13  r., 

22  r.  Vov.  P.  Cabot. 
Peyre  Cartolha.  —  80  r.  Voy.  P. 

Cartholha  et  Pey.  Cartolha. 
Peyre  Catala.  —  26  r.  Voy.  Pey. 

Catala. 
Peyre  de  Badonas.  —  23v.,27r., 

33  r.,  41  V.,  57  v.  Voy.   P.  de 

Badonas. 
Peyre  del  Truelh.  —  42  r.  Voy. 

P.  Truelh. 


DE   JÂ-CME   MASCARO 


Peyre  de  Momay.  —  89  v, 
Peyre  dePauli(Guilhem).  —  40  v. 
Peyre  de  Santa  Aularie.  —  1  v. 
Peyre  Desmas.  —  2  i-.  Voy.  P. 

DesnijSs. 
Peyre  Esteve.  —  12  v.,   48    r., 

58  V.  Voy.  Pey.  Esteve. 
Peyre  Pabve.  —  22  v.  Voy.  Pey. 

Fabre  et  P.  Fabre. 
Peyi'e  Floyra.  —  82  v. 
Peyre  Fons.  —  77  t.,  84  r.  Voy. 

Pey.  Fona  et  P.  Fona. 
Peyre  Promit.—  43  r.,  58v.Voy. 

P.  Fi'omit. 
Peyre  Gaubart.—  23  v.,  37  v. 
Peyre  Gautaroia,—  51   v.,   74  r. 

Voy.  Pey.  Gautarola,   P.  Gau- 

taroia  et  P.  Gautaroya. 
Peyre  Genieya.—  12  v.,  41  r..  48 

V.,  51  r.,   53  r.,  Ii2   v.    Voy. 

Pey.  Genieya  et  P.  Gialeys. 
Peyre  Qirona.—  58  v.  Voy.  P. 

Giroiia. 
Peyre  Gorgori.—  51  v. 
Peyre  (Guiihem).—  40  r. 
Peyre  Jorda.—  88  r. 
Peyre  Laurea. —  36  v. 
Peyre  Lieura.  —  54  v. 
Peyre  Lombes. —  63  r. 
Peyre  l.unaa.— 31  v.,  34  v.,  35  v. 
Peyre  Marinier. —  93  r, 
Peyre  Mauri.  —  22  r.,  26  r.  Voy. 

P.  Mauri. 
Peyre  Molinier. —  1  v, 
Peyre  Panta  Salada. —  I  v. 
Peyre  Pelegri.—  19  r. 
Peyre  (Pons).— 11  v.,26v„48v. 
Peyre  Porquie. —  39  p. 
Peyre  Pueeh.-  60  v. 
Peyre  Raynie.—  63  r. 
Peyre  Rodie. —  59  r.,  66  v. 
Peyre  Romieu. —  10  v. 
PeyreRotgie.-82v.Voy.P.Rogie. 


Peyre  Salvayre.  —  40  v.  Voy.   P- 

Salvayre. 
Peyre  Segui.—  Il  r.,  22 v.  Voy. 

Pey.  Segui. 
Peyre  Serinha.—  2  r. 
Peyre  Thomas.—  10 v.,  H  v.  Voy. 

Pey.  Thomaa. 
Peyre  Trebea.—  63  r. 
Peyre  Trenquavelh.  —  78  r.  Voy. 

Peyze  Trenquavelh  et  P.  Tren- 
quavelh (Guiihem). 
Pevre  Trobat.-  54  r. 
Pey.  Revel.—  12  r. 
Peyre  Vilar.—  28  r.,  39  r.  Voy, 

Pey.  Vilar  et  P.  Vilar. 
Pbtruc— 27  V..  29  r.,  29  v. 
Peyrie  (GuilhemJ.— 63  r.,  73  v., 

86  V. 
Pey.  Segui.— 6p.  Voy.Peyre  Segui. 
Pey.  Thomas.- 22  r.,  41  r.Voy.' 

Peyre  Thomaa. 
pRïTiEa.—  16  r.,  21  v. 
Petties  (lo  comte  de).  — 21  v. 
Pey.  Vilar.- 38  r.,  66  r.  Voy. 

Peyre  Vilar -et  P.  Vilar, 
Peyze  Trenquavelh.-  73  v.  Voy. 

Peyre  Trenquavelh  et  P.  Tren- 
quavelh (Guiihem). 
PazËNAS.—  3  v.  Voy.  Perbnas. 
Pbzbt.—  60  p. 
P.  Fabre.  —   18  v.  Voy.  Pey. 

Fabre  et  Peyre  Fabre. 
P.  Fona.— 52  V., 77  V.  Voy.  Pey. 

Fons  et  Peyre  Fona. 
P.  Frezola.  -  2  V. 
P.  Ftomit.—  59  v.  Voy.   Peyre 

Promit. 
P.  Gautaroia.  —  52  v.,  74  p.,  86 

p.  Voy.  Pey.  Gautaroia,  Peyre 

Gautaroia  et  P.  Gautapoya. 
P.  Gautaroya. —  74  p.  Voy.  Pey. 

Gautaroia,  Peyre  Gautaroia  et 

P.  Gautaroia. 


558 


LE    «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 


P.  Gavasto. —  6  r.,  39  r.  Voy. 
Pey.  Gavasto. 

P.  Ginieys. —  10  r.  Voy.  Pey. 
Genieys  et  Peyre  Genieys. 

P.  Girona  . —  84  v.  Voy.  Peyre 
Girona. 

Phelip  de  Valoys. —  2  v.  Voy, 
Phelip  (lo  rey),!Philip  de  Frans- 
sa  et  Philip  de  Valoys. 

Phelip  (lo  rey). —  3  r.  Voy.  Phe- 
lip de  Valoys,  Philip  de  Frans- 
sa  et  Philip  de  Valoys. 

Philip  de  Franssa. —  42  r.  Voy 
Phelip  de  Valoys,  Phœlip  (lo 
rey)    et  Philip  de  Valoys. 

Philip  de  Valoys. —  7  r.  Voy. 
Phelip  de  Valoys,  Phelip  (lo 
rey)  et  Philip  de  Franssa. 

PlETAT    (la  MaYRE  DE  DiEU  DE), 

chapelle  —  83  r. 
P.  Laieret. —  93  r. 
P.   Mauri.—  47    r.  Voy.    Peyre 

Mauri. 

Pojol  (Nicholaii). —  5  v.,  16  v., 

17  r. 
Pomayrols  (Hue). —  66  r. 

Pons    Amielh.  —    8  r.,  20   r.^ 

23  r. 
Pons  (B.)  alias  Sabatier.—  9  v. 

Voy.  Pons  (B.)  Sabatie. 
Pons  (B.)  Sabatie. —  9   v.  Voy. 

Pons  (B.)  alias  Sabatier. 
Pons  Cavalie. —  49  r.  85  r., 
Pons  Emengau. —  35  v.    Voy. 

Pons  Ermengau. 
Ppns  Ermengau. —   27    r.    Voy. 

Pons  Emengau. 
Pons  Floyra.—  45  v.,  47  v.,  48 

V.  Voy.  Pons  Floyza. 
Pons  Floyza. —  76  r.  Voy.  Pons 

Floyra. 
Pons  Laurens. —  28  r. 
Pons  Pepi.—  63  r.  , 


Pons  Peyre.—  11  v.,  26  v.,  48  v. 
Pons  Ros.—  6  V.,  17  v.,  20  v. 
Pons  Tantusel.—  63  r. 
Pons  Trebes. —  75  v. 
Pons  Vedel.—  76  r. 
Pons  Veria. —  14  v.,  23  v. 
Pons  Vielar. —  21  v.  Vov.  Pons 

Vilar. 
Pons  Vilar. —  42  r.    Voy.  Pons 

Vielar. 
Porquie  (Bernât). —  28  v.,  39  v. 
Porquie  (Peyre). —  39  r. 
Portai  (Steve).—  4  v. 
Portel  (Guiraut).—  44  v. 
Pos  Gordo.—  73  v. 
P.  Pastre. —  5  v. 
P.  Peruc.—  4  v.  (Pépézuc). 
Pradas  (Bernât  de).—-  1  v. 
Pradas  (Johan).—   33    r.,   34   v. 
37  V.  Voy.  Pradas  (Johan  de). 
Pradas  (Johan  de).— 51  v.,  66  v., 

77  V.  Voy.  Pradas  (Johan). 
P.  Ramon  Revel.  —  37  v.  Voy. 

Pey.  Ramon  Revel. 
Pratz  (Bertran).  —  28  v.,  35  v., 

47  V.,  50  v.,  81  V. 
P.  Raynols.  —  10  r.,  18  v. 
Presioadors  (lo  portal  de).  — 
44  r.,  62  v.   Voy.  Presicados 
(lo  portal  de). 
Presicados  (lo  portal  de).  —  87 
r.  Voy.  Presioadors  (lo  portal 
de). 
Presicados  (los).  —   44  r.  Voy. 

Prezicados  (los). 
Prezicados  (los).  —  76  v.   Voy. 

Presicados  (los). 
P.  Rogie.  —  44  r.,  61   r.  Voy. 

Peyre  Rotgie. 
Prunet  (Esteve).  —  40  v.,  44  v. 
P.  Salvayre.  —  63  r.  Voy.  Peyre 

Salvayre. 
P.  Saseno.  —  42  v. 


DE   JACME   MASCARO 


P.  Trenquavelh  (Guilhem].  —  49 
r.,  80  r.  Voy.  Peyre  Trenqua- 
velh  et  Pcjze  Trenquavelh. 

P.  Traelh.  —  52  V.  Voy.  Peyre 
del  Truelh. 

Puech  (Peyre).  ~  60  v. 

Puzac  (Ratûon  de).  —  15  v.,  26 
r,,  28  r.,  36  r.,  51  v. 

P.  Vidal.  —  39  r. 

P.  Vilar.  —  34  v.  Voy.  Peyie 
Vilar  et  Pey.  Vilar. 


Ramon  Age).  —  43  r, 

Ramon  Alsri.  ~  31  r.,  32  v..  44 

r.,  57  r.,  59  v.,  62  r. 
Ramon  BermoD.  —  62  v. 
Ranaon  Bertran.  —  13  v. 
RaniOD  Retizac.  —  m  v. 
Ramon  Boquet.  —  9  r.,  18  v. 
Ramon  Bienguie.  —  9  v.,  31  r., 

33  r.,  34  V.,  39  r.,  61  r. 
Ramon  Cabot.  —  30  r.,  41  v.,  43 

r.,  47  V.,  71  V.,  81  v.,84r. 
Ramon  Catala.  —  39  v.,  45  r. 
Ramon  Coregie.  —  43  v.  Voy. 

Ramon  Coi  régie. 
Ramon  Corregie.  —  75  r.,  82  r. 

Voy.  Ramon  Coregie. 
Ramon  Cotelie.  —  24  r.,  42  r., 

45  V.,  54  V.,  57  v.,  61  r.,  CCv.. 

72  r.  Voy.  Ramon  Coteiier. 
Ramon  Coteiier.  —  14  r.,   16  r., 

I9r.,  21  V.,  26r.,  27r.,38r, 

Voy.  Ramon  Cotelie. 
Ramon  de  Fuelhval.  —  39  r. 
Ramon  de  Mars.  —  1 1  !■. 
Ramon  de  Monesde.  —  59  v. 
Ramon  de  Puzac.  —  15  v.,  26  r., 

28  r.,  36  r.,  51  v. 
Ramon  Emengau.  —  48  r.,  57  v., 

59  r.,  60  V.,  78r.,80r. 


Ramon  Emerio. 
Ramon  Fabre. 

83  V. 
Ramon  Folcran. 
Ramon  Promit.  —  28  i 
Ramon  Garoti.  —  18 

37  V.,  54  r. 
Ramon   Gaudel.  —  14 


7  V. 


,  41  ¥ 


48v 


Ramon  Gnjsac.  —  17  r.  Voy,  Ra- 
mon Gayachac. 

Ramon  Gayschac.  —  6  v.,  14  v.. 
23  V.  Voy.  Ramon  Gaysac. 

Ramon  Geli.  —  12  r.,  38  r.  Voy 
Ramon  Gili. 

Ramon  Genieys,  —  32  v.,  02  r. 

Ramon  Gilabert.  —  80  v. 

Ramon  Gili.  —  22  r.  Voy.  Ramon 
Geli. 

Ramon  (Guilhemj.  —  34  r.,  66r. 

Ramon  Guiraut.  —  18  v.,  32  v., 
75  r. 

Ramon  Hue.  —  4  v.,  10  v. 

Ramon  Jori.  —  12  v. 

Ramon  Laures.  —  2  i-. 

Ramon  lo  Kog.—  03  r.  Voy.  Ra- 


Ramon  Marti.  —77  v 
Ramon  Mass: 

44  V.,  75  r. 
Rnmon  (moasen),  eveeque. 
Ramon  Navar.  —  8  r. 
Ramon  Ortz.  —  7  v.,  12  v., 

26  r.,26  v.,  33  r. 
Ramon  Pascal.  —  40  v..  4 
Ramon  Peno.  —  51  v.,  57 
Ramon  Raynes.  —  81  v. 
Ramon  Revel  (P.).  —  37  v. 

Kamon  Hm'gI  (Pey.). 
Ramon  Revel  (Pey.).  —8  r 

Ramon  Revel  (P.). 
Ramon  Rog,  ~  32  v.,  43  r 

Ramon  lo  Rog. 


-  24  r 


Voy. 
Voy, 
Voy. 


DE  JAGME   MASCARO 


561 


Roinbaut  (Loys).  —  27  v. 

ROMA.  —  51  V. 

Roma  (Andrieu).  —  93  r. 

Roma   (Guilhem).  —  5  r.,  10  r., 

13  V. 
Romieu  (Peyre). —  10  v. 
Roqua  (Ramon).  —  26  v.,  35  v., 

41  V.,  52v.,75r.,  77v.,86r. 
Roqua  (R.  la).  —  21  v. 
Roquacels  (Bernât). — 49  v.,61v., 

82  V.,  86  V. 
Ros  (Pons).  —  6  V.,  17  v.,  20  v. 
Rossant  (Mathieu).  —  48  v.,  82 r. 
Rossel  (Johan). —  10  r.,  32  v. 
Rossilho    (Guilhem).   —  7  v.,  19 

V.,   21  1'.,   24  V.,    26  V.,  38  r. 
Rotgie  (Peyre).  —  82   v.    Voy. 

Rogie  (P.). 
Rotgler  d'Espanha.  —  80  v. 
Rozieyra  (Esteve).  —  37  v. 
R.  Peno.  —  67  v.,  76  v. 

S 

Sabatie  (B.  Pons).  —  9  v.  Voy. 
Sabatier  (B.  Pons,  alias). 

Sabatie  (Esteve). — 6  v.,15r.,26r. 

Sabatie  (Guilhem). —  63  r. 

Sabatie  (Johan). —  62  r. 

Sabatie  (Ramon). —  28  v. 

Sabatier(B.  Pons,  alias). —  9  v. 
Voy.  Sabatie  (B.  Pons). 

Sahola  (Ramon).  —  52  v.  Voy. 
Savola  (Ramon). 

Sahonier  (Johan).  —  26  v. 

Salamo  de  Thesa  (Jacme). — 62  r. 

Salât  (Guilhem). —  9  v.,  57  v. 

Salvayre  (Bernât).  —  13  v. 

Salvayre  (Guilhem). —  34  r.,  75  r. 

Salvayre  (P.).  —  63  r.  Voy.  Sal- 
vayre (Peyre). 

Salvayre   (Peyre).  —  40  v.  Voy. 
Salvayre  (P.). 


Sans  Symeon.-—  60  v. 

Sansuerra  (Loys  de). —  87  v.  Voy. 
Sansurra  et  Sant  Surra. 

Sansurra  (lo  comte  de).—  71  r. 
Voy.  Sansuerra  et  Sant  Sur- 
ra. 

Santa  Aularie  (Peyre  de).  —  1  v. 

Sant  Affrodizi,  église.  —  67  r. 
Voy.  Sant  Afrodisi. 

Sant  Afrodisi,  église.—  2  r.,  21 

V.,  31  v.,52r.,67r„67v.Voy. 
Sant  Affrodizi. 

Sant  Afrodisi  (boro  de).  —  79  v. 

Santa  Magdalena,  église. — 77  r. 
81  r.  Voy.  Magdalena  (la), 
Magdalena  (la  Maria),  Mag- 
dalena (la  Mayre  de  Dieu  de 
la)  et  Santa  Maria  Magdale- 
na. 

Sant  Amans  de  Valthoza. —  3  v. 

Santa  Maria  Magdalena,  église. 
—  77  r.  Voy.  Magdalena  (la), 
Magdalena  (la  Maria),  Mag- 
dalena (la  Mayre  de  Djeu  de 
la)  et  Santa  Magdalena. 

Sant  Andrieu  (Johan  de).  —  2r. 

Sant  Anthoni. —  9  v.,  11  r. 

Sant  Felis,  église. —  5  r.  ,35  r., 
37  r.,  52r.,53  v.,  80  v. 

Sant  Felis,  village. —  3  v. 

Sant  Gili,  abbaye.  —  30  r. 

Sant  Girma  de  Montpeylieb. 
couvent.  —  30  r. 

Sant  Guiraut.  —  9  v. 

Sant  Jacme,  église.  —  2  r.,  21  v, 

Sant  Jacme  (borc  de).  —  63  r. 
79  V. 

Sant  Johan  (borc  de). —  79  v. 

Sant  Just  de  Narbona,  église.— 
21 V. 

Sant  Narazi,  église.  —  79  r. 
Voy.  Sant  Nazari. 

Sant  Nazari,  église. — 5  v.,  13r., 

38 


562 


LE    a  LIBRE  DE   MEMORIAS  » 


21  V.,  31  V.,  37r.,42  r.,  49  v., 

79  r.,  81  r.,  81  v.,  87  r.,  89  v. 

Voy.  Sant  Narazi. 
Sant  Pakagori. —  3  v. 
Sant  Paul.  —  3  v. 
Sant  Pons  de  Thomieyras. — 3  v. 
Sant  Salvayre,  église.  —  74  r. 

87  r. 
Saxt  Surra   (lo   comte   de).  — 

66  V.  Voy.  Sansuerra  et  San- 

SURRA. 

Sant  Thiberi. —  85  v. 

Santz  (Maystre).  —  13  r. 

Sarrarys  (los).  —  72  v. 

Saseno  (P.).—  42  v. 

Sas  (Johan  da). —  86  v.  Voy.  Sas 

(Johan  de). 
Sas  (Johan  de).  —  34  v.  Voy.  Sas 

(Johan  da). 
Sauma  Longa. —  31  V. 
Sauze  (Johan). —  63  r. 
Savayda  (Symon).  —  20  v. 
Savola  (Ramon).  —  41  r.  Voy. 

Sahola  (Ramon). 
Saynier  (Berthomieu).  —  29  r. 
Sayschac  (Bertran). —  1  v. 
Sebeli  (Bernât).  —  23  v.,  40  r., 

40  V.,  59  V. 
Sedada  (Bernât).—  39  v.,  73 r. 
Sedada  (Brenguie).  —  83  v. 
Sedel  (Miquel).  —  6  r. 
Segares.  —  42  V. 
Segui  de  Badafol.  — 24  v. 
Seguie  (Ramon).  —  45  v.,  50  v., 

75  V. 
Seguimon  (l'emperador).  —  93  r. 
Segui  (Pey.).  —  6  r.  Voy.  Segui 

(Peyre). 
Segui  (Peyre).—  1 1  r.,  22  v.  Voy. 

Segui  (Pey.). 
Seinhier  (Johan). —  11  v. 
Selie  (Duran). —  43  v. 
Serez  (Bernât  de).  —  4  v. 


Serdenha.  —  50  r. 

Serinha  (Daunis).  —  13v.,  17  v., 

22  V.,  26  r. 
Serinha  (la  Mayre  de  Dieu  de), 

église.  —  37  r. 
Serinha  (Peyre).  —  2  r. 
Serinha  (Veria). —  14  r.,  15  v. 
Servia  (Johan).  —  18  r.,  22  r. 
Sicart  Boquas. —  76  r. 
Sicart  d'Ambres.  —  42  v.,  72  v. 
Sicart  de  Murvielh.  —  13  r. 
Sicart  de  Pauli. —  40  r. 
Sicart  (Duran).  —  11  v.  Voy.  Si- 
cart (Guilhem  Duran). 
Sicart  (G.).—  80  v. 
Sicart  (Guilhem  Duran).  —  9r. 

Voy.  Sicart  (Duran). 
Sicart  Roart.  —  3  r.,  4  r. 
Sicart  Taborieg.  —  4  v. 
Sicre  (Jacme). —  45  v.,  61  r.,  71  v. 
Simon  de  Grimoart. —  74  r.  Voy. 

Symon  de  Grimoart. 
Sira  (Ramon). —  73  r. 
Sira  (Razols).  —  5  r.,  6  r.,  6  v., 

15  r. 
Someyre.  —  58  r. 
Sonie  (Johan). — 63  r. 
SorsMenors  (lo  portalde  las). 

— 93r.Voy.  Sors  Menos  etSos 

Menos. 
Sors    Menos   (  lo     portal    de 

las).  —  42  V.,  74  r.  Voy.  Sors 

Menors  et  Sos  Menos. 
Sos  Menos  (lo  portal  de  las). 

—  76  V.  Voy.  Sors  Menors  et 

Sors  Menos. 
Sozere.  —  3  V. 
Stampas  (lo  comte  de). —  66  v. 
Steve  Barba. —  4  v.  Vot.  Esteve 

Barba. 
Steve  Campanha. —  45  v.  Voy, 

Esteve  Campanha. 
Steve  Portal . —  4  v. 


DE  JAGME   MASCARO 


563 


Steve  Raynaut. —  5  r. 
Symeon  (Sans).  —  60  v. 
Symon  Dalmas.  —  39  v.,  47  r. 
Symon   de   Çramaut.  —  pag  55, 

note  1  et  pag.  56,  note  1. 
Symon  de  Gaholhiac. —  76  r. 
Symon  de  Grimoart. —  72 v.  Voy. 

Simon  de  Grimoarf. 
Symon  Savayda. —  20  v. 


Taborieg  (Sicart). —  4  v. 
Tantusel  (Pons).—  63  r. 
Tarasquo. —  3  V.' 
Taurel  (G.  de).—  67  v.  Voy.  Tau- 

rel  (Guilhem  de). 
Taurel  (Guilhem  de).—  52  r.,  62 

r.  Voy.  Taurel  (G.  de). 
Telh  (Bernât  del).  — 77  r.. 
Templier  (Caries  del). —  89  r. 
Teron  (Johan).—  34  v.,  35 v.,  41 

r.,  50  V.,  62  V. 
Teyseyre  (Guiraut).—  34  v. 
Thesa.— 27  v.,62r. 
Thesa  (Jacme  Salamo  de). — 62 r. 
Tholosa.-— 3  V.,  36  v.,  46  y.,  87 

V.,  88  r.Voy.  Tholoza. 
Tholosa  (sknescalcia  de).  —  46 

V.  Voy.  Tholoza  (senescalcia 

de). 
Tholoza.  -  29  v.,  32  r.,  56  r., 

60  r.  Voy.  Tholosa. 
Tholoza  (senescalcia  de).  —  29 

V.,  32  r.,  56  r.  Voy.  Tholosa 

(senescalcia  de). 
Thomas  (Pey.).  —   22   r.,  41    r. 

Voy.  Thomas  (Peyre)* 
Thomas  (Peyre).  —  10  v.,  11  v. 

Voy.  Thomas  (Pey.) 
Thorena  (duc  de). —  87  v.  Voy. 

TozENA  (duc  de). 
Tibaut  de  Barbara. —  20  r. 


Tomas  (Johan).  —  77r. 
Tok  (la  mayo  del).—  76  v. 
TozENA  (duc  de). —  86  r.   Voy. 

Thorena  (duc  de). 
Trebks. —  3v. 
Trebes  (Peyre).— 63  r. 
Trebes  CPons).—  75  v. 
Trencavelh,  viscomte  deBezes. — 

1  r. 
Trencavelh  (Guilhem). —  14 r. 
Trenquavelh  (Guilhem  P.).-^  49 

r.,   80  r.    Voy.     Trenquavelh 

(Peyre)   et  Trenquavelh  (Pey- 

ze). 
Trenquavelh  (Peyre). — 78  r.  Voy. 

Trenquavelh    (Guilhem  P.)  et 

Trenquavelh  (Peyze). 
Trenquavelh  (Peyze).— 73  v.  Voy. 

Trenquavelh  (Guilhem  P.)    et 

Trenquavelh  (Peyre). 
Trenquie  (Rayrolet).—  33  r. 
Triquart  (Paul).—  80  v. 
Trobat  (Peyre). —  54  r. 
Truelh  (P.).—  52  v.  Voy.  Truelh 

(Peyre  del). 
Truelh  (Peyre  del).—  42  r.  Voy. 

Truelh  (P.). 
Tustamera  (lo  comte  de). —  24  v. 

U 

Urba  (papa).—  29  v.,  30  r.,  35 
r.,  58  r.  (Urbain  V). 

UzES.  —  30  r. 


Valoys  (Phelip  de).  —  2  v.  Voy. 
Phelip  (lo  rey),  Philip  de 
Franssaet  Valoys  (Philip  de). 

Valoys  (Philip  de).  —  7  r.  Voy. 
Phelip  (lo  rey),  Philip  de 
Franssa  et  Valoys  (Phelip  de). 


564 


LE   «  LIBRE   DE   MEMORIAS  » 


Vanieyra  (Esteve).  —  83  v. 
Vanieyra  (Jacme).  —  6  r.,  11  v., 

18  r.Voy.Vanuieyra(Jacrae). 
Vanuieyra  (Jacme). —  10  v.  Voy. 

Vanieyra  (Jacme). 
Vayscha  (Loys).  —  52  v.   Voy. 

Vayssa  (Loys). 
Vayssa  (Guilhem).—  82  r. 
Vayssa  (Loys).   —  36   r.,  38  r. 

Voy.  Vayscha  (Loys). 
Vedel  (Jacme). —  51  v. 
Vedel  (Pons).— 76  r. 
Veria  Londras. —  48  v.,  72  r. 
Veria  (Pons).  —  14  v.,  23  v. 
Veria  Serinha.  —  14  r.,  15  v. 
Vkruna  (castkl  de  la).  —  2  V. 
Vesia  Gobi.  —  34  v. 
Vezola  (Bernât). —  63  r. 
Vices  Cruvelier.  —  5  r. 
Vices  (Esteve).  —  11  v.,23  v. 
Vidal  (Jacme).  — 14  r.,  17 r.,  26 v. 
Vidal  (P.).— 39r. 

ViELAPENCHA.  —  3  V. 

Vielar  (Pons).  —  21  v.  Voy.  Vi- 
lar (Pons). 

Vielar  (Ramon).  —  20  v.  Voy. 
Vilar  (Ramon). 

Viguie  (Ramon).  —  39  v.  Voy. 
Vigaier  (Ramon). 


Viguier  (Ramon).  —  27  r.,  36 
V.  Voy.  Viguie  (Ramon). 

Vilar  (Mathieu).  —  3  r.,  4  r. 

Vilar  (P.).  —  34  v.  Voy.  Vilar 
(Pey.)  et  Vilar  (Peyre). 

Vilar  (Pey.).  —  38  r.,  66  r.  Voy. 
Vilar  (P.)  et  Vilar  (Peyre). 

Vilar  (Peyre).  —28  r.,39  r.  Voy. 
Vilar  (P.)  et  Vilar  (Pey.). 

Vilar  (Pons).  —  42  r.  Voy.  Vie- 
lar (Pons). 

Vilar  (Ramon).  —  11  r.  Voy. 
Vielar  (Ramon). 

ViNHO.  —  74  r.  Voy.  Avinho. 

Violan  (la  regina).  —  93  v. 

Visme  (Johan).  —  7  r. 

ViVIES.  —  3  V. 


YmbertAynart.— 57v.,76r:,80r. 

Ymbert  de  Montadi.— 12  v.,40r. 

Yrlan  (Ramon).  —  11  v.,  15  v., 
19  r.,  21  r.,  47  r.  Voy.  Yslan 
(Ramon). 

Yslan  (Ramon).  —  6  v.  Voy.  Yr- 
lan (Ramon). 

Ytalia.  —  74  r. 

Yvern  (Ramon).  —  93  r. 


(A  suivre.) 


Ch.  Barbier. 


CONTES  POPULAIRES  DE  L'AGENAIS  ' 


La  fillo  que  bouillo  se  marida 

Uno  fenno  bouillo  bien  marida  sa  fillo,  mes  elo  troubabo 
cap  de  galans.—  Te,  li  diguet,  ses  ta  soto  coum'  un  panier  ; 
iou  t'en  bau  cerca  n'un,  pei  ou  mins  faj  li  na  bouno  soupo, 
na  soupo  bourrado  dans  qu'un  poulet  dedins. 

Lou  jouin'  orne  arribo.  —  A,  se  dit,  adisias,  fillo  !  — Boun- 
jour,  jouin'ome,  si-selo  ;  ma  may  m'o  dit  de  fa  na  soupo  bour- 
rado; bous  respounde  que  bous  n'en  planjorei  pas.  Bau  la 
trempa,  pei  nous  metoren  a  taulo. 

Abio  metut  soun  poulet  tout  bourrud  à  la  soupo  ;  coumenço 
de  lou  sourti  e  de  lou  mètre  dessus  qu'un  plat.  Quand  lou 
jouin'ome  bi  quéu  poulet,  bourguet  re,  li  diguet  qu'abio  soupa, 
que  la  remerciabo.  —  Ane,  se  dit,  boun  sei,  fillo  !  —  Pei  s'en 
tournet. 

La  may  arribo:  —  E  bé,  as  bien  reçu  quéu  jouin'  ome?  — 
Oh  !  oui  là,  si,  qu'o  bourgu  minjare.  Li  ei  feit  na  soupo,  gueitas 
lou  poulet  que  i  ei  metut  dedins,  n'o  pas  bourgu,  se  dit,  pei 
m'o  dit  re,  s*ei'  nana.  —  La  may  se  met'  en  coulèro  :  —  Oh  î 
la  betasso  !  fôu  que  siasquei  bien  soto  de  l'ôuguéi  tau  reçu, 
se  dit.  Te,  si,  t'en  bau  cerca  n'autre,  mes  6u  mins  sisquéi  pas 
ta  soto  dan  queuqui.  Dono  li  heure  au  mins  de  loui  en  loui. 

Ah  !  malérous  !  se  dit  la  fillo,  quand  fusquet  touto  soulo, 
coumo  farei  per  li  donna  heure  de  loui  en  loui  .^  Ah!  se  dit, 
bau  querre  la  palo  qu'enfournen,  y  metorei  lou  goubelet^  pei 
a  loungour  de  bras  lou  presentorei  ou  jouin'  ome. 

Quand  lou  jouin'  ome  fusquet  bengu,  selo  li  diguet  :  —  là, 
jouin'  ome,  ma  may  m'o  dit  de  bous  fa  heure  de  loui  en  loui, 

*  Recueillis  à  Cambes,  canton  de  Seyches,  Lot-et-Garonne.  Ces  contes 
ont  été  écrits  sous  la  dictée  dé  Mesdemoiselles  Rivière  et  de  M.  Séverin 
Beaubiac.  Cf.  Bladé,  Contes  populaires  de  la  Gascogne,  1886.  *■/•. 


566  CONTES    POPULAIRES   DE   l'AGENAIS 

tanes,  pode  pas  g&yre  de  pus  loui,  bubets,  se  dit.  —  E  pei  li 
presentabo  lou  goubelet  au  cap  de  la  palo.  —  Ma  fi,  quéu 
jouin'  ome  bourguet  pas  beure  :  —  là,  jouino  fillo,  n'ei  pas  mei 
lesei  de  damoura,  boun  sei,  se  dit. 

La  may  arribo  :  —  E  be,  ma  fillo,  se  dit,  queste  cop,  queu 
jouin'  ome,  coumo  co  baj?  Li  a  dounat  beure  de  loui  en  loui, 
se  dit?  —  0,  si,  bostei  jouin'  ome,  n'en  bole  pus,  se  dit,  à 
la  fin  que  toujours  s*eu  ban.  M'abia  dit  de  li  donna  beure; 
n'i  ei  bailla  a  la  çimo  de  nosto  palo  qu'enfournen,  e  mei  n'o 
pas  bourgu  !  —  Te,  se  dit  la  may,  grando  beto  que  ses,  jamei 
te  maridaras;  t'en  bau  cerca'n  autre  ;  pei  sisquei  pas  ta  soto, 
dono  li  quauque  cop  d'ei  de  tens  en  tens,  se  dit. 

Baqui  que  quelo  pauro  fillo  ero  enquieto  ;  —  e  cqumo  fa- 
rci, se  dit  per  li  donna  quauque  cop  d'ei  ?  Bau  tira  les  ei  de  nos- 
tos  ôuillos,  pei  les  i  jitorei  trabers.  —  Les  i  curet  les  ei,  pei 
s'en  garnit  Ici  pochos. 

Lou  jouin'ome arribo:  —  Boun  sei,  jouino  fillo,  se  dit;  bosto 
may  m'o  enbia  eici,  ra'o  dit,  se  dit,  que  bouilla  bous  marida* 
—  L'autre  diguet:  Oh  !  oui,  se  dit;  mes  coy  'gau,  sitas  bous, 
ma  may  m'o  dit  que  bous  dounesse  quauque  cop  d'ei  de  tens 
en  tens.  —  D'abord  selo  couraenço  de  mètre  lei  man  à  la  po- 
che, pei  queu  praube  jouin  'ome  estant  qui  sitat,  fliu,  flau, 
li  jitabo  ses  ei  d'ôuillo  trabers  ;  lou  tannet.  Alors  seu  se  lebo 
en  disent  que  bouille  pas  se  marida  dans  elo.  —  Atendet, 
se  dit  la  fillo,  nei  d'autre.—  Pei  curet  sei  pochos  e  n'in  jitabo 
taloment  qu'ero  tout  saunons  la  figure.  —  Maridas-bous  dans 
quu  bourrei,  se  dit  seu;  pei  s'enfugit  en  se  bénissant. 

La  may  arribo:  —  E  bé,  ma  fillo,  coum'  as  feit,  se  dit?  — 
Ah  !  bostei  diable  de  gouiat,  m'en  cerquei  pus  ;  m'abias  dit  de 
li  donna  dei  cop  d'ei,  ei  tira  tout'o  lei  des  ôuillos,  pei  les  y  ei 
jitat.  —  0  si  sa  may,  la  grande  falourdo,  t'en  tournorei  pus 
cerca.  —  Pei  la  sabet  de  patats. 

Lou  meitadier 

Y  abio  'n  cop  un  moussu  qu'abio  'n  meitadier.  Lou   meita- 
dier n'ero  pa  sot,  en  tout  quero  tort. 
Un  cop   lou  moussu  damandet  :  *—  Ent'  ei  lou  tort?  —  E, 
''ssu,  garde  sei  porc,  li  digueren.  —  Lou  moussu  y  bay  ; 


CONTES    POPULAIRES    DE   l'aGENAIS  567 

trobo  lou  meitadier  ôuprès  d'un  riou.  —  Te,  dit,  petit,  queu 
riou  ei  bien  prigound?  —  0,  nani,  moussu,  mes  aucos  y  ban 
iiouma  dins  qu'au  quiou.  Seu  y  sauto  dedins  ;  soun  chibau  se 
neguet  e  seu  cutet  sou  fa.  —  Petit,  petit,  se  dit,  me  n'as  feit 
uno  bien  belo,  mes  me  n'en  fara  pas  dios. 

Anguet  trouba  sa  mamet.  —  A,  mamet,  dit,  bosle  gouiat, 
dit,  me  n'o  fei  n'uno  bien  belo,  mes  digas  li  que  m'en  faro  pas 
dios.  Digas  li  que  douman  mati  bengue  tira  la  proufitolo  dôu 
four. 

Lou  dessei  abeillaben  la  proufitolo.  Perqui  enta  mejonei, 
diguet  lou  moussu  :  o,  m'en  bau,  adaro  bendoro  pas.  Pei  coj 
a  la  doun  qu'arribet.  S'enguillet  dins  la  fourniero,  tiret  la  prou- 
fitolo, la  rampliguet  de  bouso  debaco. —  Lou  mati,  lou  moussu 
diguet  'n  da  sa  gouio:  —  Au,  gouio,  se  dit,  anas  gousta  la  prou- 
fitolo. —  0,  moussu,  n'ei  pas  gajre  bouno. —  Ah  !  té,  diguet, 
tant  que  soun  esta  ou  liet,  nous  l'o  minjado.  Ah!  petit,  petit, 
me  n'as  feit  dios  bien  belos,  mes  m'en  faras  pas  trei.  —  An- 
guet  trouba  sa  mamet  ;  li  diguet  :  —  Ah  I  boste  drôle  me 
n'o  feit  dios  bien  belos,  mes  m'en  faro  pas  trei.  Digas  li  que 
douman  ou  sei  bengue  derôuba  mei  chibau  à  moun  escudo. 

Lou  dessei,  quand  anguerensoupa,  sei  s'endrumian,  l'autre 
beillabo.  S'enguillet  dins  l'escurio,  liprenguet  sei  trei  chibau, 
mei  sei  sellos,  sei  bridos  e  sabouaturo.  Pei  se'nanguet.  — Te, 
gouio,  bay  pensa  lei  chibau  a  l'escurio.  —  Moussu,  y  soun 
pas.  —  Ah  !  petit,  petit,  me  n'as  feit  trei  bien  belos,  mes  m'en 
fara  pas  quatre.  —  Baj  trouba  sa  mamet  :  —  Ah  !  se  dit,  boste 
drôle  me  n'o  feit  trei  bien  belos,  mes  digas  li  que  m'en  faro 
pas  quatre.  Digas  li  que  douman  mati  bengue  derôuba  lei  lin- 
çôu  dôu  quiou  de  ma  fenno.  —  Lou  mati,  lou  meitadier  planto 
n'ome  de  paillo  daban  sa  porto.  Lou  moussu  cresio  que  coro 
lou  tort,  se  lebo  :  —  Te,  fenno,  se  dit,  coj  lou  tort  ;  fôu  lou 
tia.  — Tant  que  l'autre  se  lebo,  lou  meitadier  bay  au  liet  dans 
selo.  ^ —  Pousso  te  'n  lay,  si,  que  n'ei  pas  de  plaço  ;  bene  d'en- 
tarra  lou  tort,  sei  jalat  de  fre.  —  Liestiro  lei  linçôu,  les  em- 
porto,  pei  s'en  baj.  —  Lou  moussu  tiet  Tome  de  paillo  ;  ero 
jalat  de  fre.  Anguet  trouba  sa  fenno  :  —  Pousso  te'n  laj  que 
n'ei  pas  de  plaço,  se  dit. —  Foutut  narrions,  ses  bengu  nouma 
tout  aro,  si  selo,  pei  ma'stira  touto  lei  linçôu,  que  n'ei  cap  de 
brigo.  —  Te,  dit,  coy  lou  meitadier,  seu  qu'ei  bengut.  —  Ah! 


568  CONTES  POPULAIRES   DE   l'AGENAIS 

s'abisôugu,  se  dit,  me  sioy  pas  poussado.  —  L'orne  diguet:  — 
E  dei  linçôu,  ente  n'en  prendoren  ?  —  La  fenno  diguet  :  fôu 
n'en  prene  ou  gabinet. 


Lou  jouin^ome  que  vay  a  la  fiero  * 

Tabio 'n  cop  na  fenno  qu'ero  bien  bieillo,  bien  praubo. 
Abio'n  gouiat  qu'ero  bien  sot.  Bequi  que  samay  li  diguet:  — 
Moun  Diou,  se  n'erei  pas  ta  sot,  t'embioioy  a  la  fiero  bendre 
dei  cojffo.  —  Ey  anirei,  may,  se  dit,  farei  iço  que  bourrei, 
n'ajei  pas  pôu.  —  Li  dono  dios  coyffos  ;  li  diguet  :  —  T'en 
soubendoras  que  n  i  o  dios. 

Lou  jouin'ome  en  se'n  anan  toujours  disio  :  —  dios,  dios, 
dios,  —  per  s'en  soubeni.  Trobo  de  mounde  que  plantaben  dei 
fabos,  pei  toujours  eu  disio  :  dios,  dios,  dios.  —  E  que  disei, 
malerous,  dios,  dios,  que  n  i  aje  que  dios  !  —  pei  lou  saber- 
ende  trucs  :  où  le  de  dire  :  Atau  bouns  pies  sacs,  atau  bounos 
plenos  carretados  ! 

En  se  n'anan  toujours  disio  :  —  Atau  boun  pie  sacs,  atau 
bounos  plenos  carretados,  atau  bouns  pies  sacs,  atau  bounos 
plenos  carretados  !  —  Trobo  dei  gens  que  pourtaben  un 
mort.  —  Tau  bouns  pies  sacs,  tau  bounos  plenos  carretos, 
si  seu. —  Les  autre  pausen  lour  mort  e  li  toumben  dessus, 
en  li  disent  :  —  Malerous  que  ses,  ou  le  de  dire  :  lou  boun 
Diou  lou  mete  en  PaiTadis,  lou  boun  Diou  li  repause  soun 
amo  1 

En  s'en  anan  purabo,  poudes  creire,  e  disio  :  Lou  boun  Diou 
li. repause  soun  amo,  lou  boun  Diou  lou  mete  en  Paradis  1  — 
Ane,  baqui  que  trobo  dei  gens  que  treinaben  na  cagno.  — 
Lou  boun  Diou  la  mete  en  Paradis,  se  dit.  —  Ê  que  disei,  ma- 
lerous que  ses,  ou  le  de  dire  :  Treino  dins  qu'un  foussat,  treino 
lo,  la  bieillo  cagnasso.  —  Pei  lou  saberen. 

Pus  loun  trobo  de  mounde  que  menaben  na  nobio.  —  Treino 
lo,  si  seu,  treino  lo  dins  qu'un  foussat,  la  bieillo  cagnasso  !  — 

*  Cf.  Bladé,  Contes  et  proverbes  populaires  recueillis  en  Armagnac, 
1867  (p.  18). 


CONTES   POPULAIRES    DE   l'AGENAIS  569 

Lei  gens  de  noço  lou  saberen  :  —  ou  le  de  dire,  se  dit:  Fussen 
tau  toutos,  fussen  tau  toutes. 

Eu  se  n'anabo  :  —  Fussen  tau  toutos,  si,  fussen  tau  toutos  ! 
Toujours  ou  credabo.  Trobo  na  granjo  qu'ero  a  f è  :  —  A, 
malerous,  li  digueren  lei  que  Tentendian,  ou  le  de  dire  :  Lou 
boun  Diou  lou  tiose,  lou  boun  Diou  Fescantisse.  —  Lou  sabe- 
ren. 

Ane,  en  se  'n  anant,  se  boto  a  dire  :  —  lou  boun  Diou  lou 
tiose,  lou  boun  Diou  l'escantisse.  —  Rencountro  na  fenno 
que  bouillo  luma  soun  four,  pei  poudio  pas;  li  anguet  canta  es 
ôureillo  :  —  Lou  boun  Diou  lou  tiose,  lou  boun  Diou  Tescam- 
tisse  !  —  La  bieillo  lou  sabet  de  cops  de  fergou  :  —  où  le  de 
dire,  se  dit  :  Lou  boun  Diou  bous  Talume,  bous  fasque  la  graço 
de  fa  de  bèu  pan  ! 

Seu  se  meto  a  dire  :  —  Lou  boun  Diou  bous  Talume,  bous 
fasque  la  graço  de  fa  de  bcù  pan  !  —  Trobo  'n  cassayre  que 
pôusabo  culoto  darrei  na  sego.  —  En  passant  darrei  seu,  li 
diguet  :  —  lou  boun  Diou  bous  fasque  la  graço  de  fa  de  bèu 
pan  !  —  Lou  cassayre  en  coulero  li  fouitet  un  cop  de  fusil,  lou 
tiet. 


Lou  renard  e  lou  loup  ^ 

Lou  renard  e  lou  loup  entreprengueren  un  prix  feit  a  na 
fose  deibignos.  —  Lou  loup  coumençabo  d'ôugueitalen.  Abio 
pourta  na  toupino  de  greisso  dins  qu'un  foussat.  Fasquet  creire 
ou  renard  que  lou  sounaben.  —  Diguet  :  —  Te,  me  sonen,  se 
d.it. —  L'autre  diguet  :  E  que  coy?  —  Coy 'n  batème.,  se  dit. — 
Me  diras  coumo  s'apelo,  si  lou  renard. —  Te,  dit,  s'apelo  :  cou- 
mença.  —  Abio  couniença  la  toupino. 

Quand  n'ôuguet  feit  un  pau  raei,  lou  loup  diguet  :  —  Te,  me 
tornen  souna,  se  dit. —  I/autre  diguet  :  —  Que  coy,  se  dit?  — 
Te,  dit,  coy  un  batème.  — A,  diable,  tei  batème,  se  dit.  — 0, 
pourtan,  fou  que  y  angue.  —  E  me  diras  coumo  s'apelo.  — 
Te,  dit,  s'apelo  :  —  Abança. 

Un  moument  après,  lou  loup  diguet  :  —  Te,  dit,  me  tornen 

*  Bladé,  Contes  populaires  recueillis  e?i  A  gênais,  1874  (p.  26  et  s.). 


570  CONTES   POPULAIRES    DE   i/aGENAIS 

souna,  coy 'n  batème  ;  fôu  que  y  angue.  —  Quand  arriboras, 
me  diras  coumo  s'apelo,  se  dit.  —  Lou  loup  torno  :  —  te, 
dit,  s'apelo  :  —  Feni.  —  Ah  î  tant  miliour,  l'autre  diguet  ;  tau 
noste  prix  feit  siro  lèu  cabat. 

Lou  prix  feit  acabat  :  —  Oh  !  dit  lou  loup,  n'as  pas  bien  ta- 
len,  fôu  na  n'entreprene  'n  autre. —  Pourtant,  dit  lou  renard, 
bien  lèu  ei  temps  de  deijuna. —  Nou,dit,  n'eipas  tardenquero; 
fôu  'na  fendre  dei  busquos.  —  N  i  abio  uno  que  bouillo  pas 
fendre.  —  Te,  dit,  renard,  meto  qui  ta  couéto  ;  belèu  fendro 
bien.  —  Lou  renard  sou  fay.  Lou  loup  daisso  na  la  busquo, 
pei  s'en  bay  cacha  dins  qu'un  trauc  de  taupo.  —  Lou  renard 
a  la  fin  s'escapo  ;  s'en  bay  dins  lou  trauc  de  taupo.  —  Ah  ! 
ah  !  dit,  te  tene,  se  dit.  —  Coy  pas  bray,  dit  lou  loup,  coy  na 
racino,  pei  s'enfilet  pus  loun. 


Lou  jouin*ome  ôa  marca  * 

l'abio  na  fenno  qu'abio  'n  gouiat,  re  qu'un.  Li  diguet  :  — 
Escouto,  moun  ami,fôu  pas  estre  ta  sot,  se  dit, fôu  que  t'eilebe 
'n  pau.  Baqui  na  toupino  de  greisso  que  te  fôu  pourta  ou 
marca,  pei  la  bendoras,  se  dit. 

Queu  jouin'ome  la  pren  e  s'en  bay.  Coro  dins  l'estieu,  que 
lei  prats  eren  toui  fenduts  e  y  pasabo  dedins.  —  Praube 
prat,  tu  as  bien  set,  se  dit  ;  ou  le  de  bendre  ma  greisso,  te  la 
bau  douna.  —  Se  boto  dans  soun  coutèu  a  mettre  sa  greisso 
dins  lei  fendos,  pei  s'en  torno.  —  Adisias,  may,  si.  —  Adiou, 
moun  ami,  as  be  lèu  ja  feit  toun  marca.  —  Oh  !  may,  se  dit, 
n'oi  pas  befidut  la  greisso  ;  l'ei  baillado  'n  da  'n  paure  male- 
rous  qu'abio  bien  set.  —  Oh  !  la  grando  beto,  besei  be  que 
l'as  perdudo.  Ei  qui,  se  dit,  un  pau  defiou,  mes  gause  pas  te 
lou  fa  pourta.  —  Oh  !  may,  si,  n'ajei  pas  pôu,  lou  bendorei, 
se  dit,  farei  pas  coumo  de  la  greisso. 

E  be,  se  dit  porto  lou,  pei  lou  donei  pas  'n  da  quei  que  soun 
ta  babard,  se  dit,  que  parlen  tant.  —  N'ajei  pas  pôu,  se  dit. 

S'en  bay,  porto  soun  fiou  ou  m^rca,  li  damandaben  :  Ebt, 

*   Cf.  Bladé,  Co7it€S  et  proverbes  populaires  recueillis  en   Armagnac, 
1867  (p.  21). 


CONTES    POPULAIRES   DE    l'AGENAIS  5:1 

jouin'ome,  coumbien  boules  de  bostefiou? — Parlas  trop,  se  dit 
bous,  ses  trop  babard,  bous  lou  bole  pas  bendre.  —  Un  autre 
y  bay,  li  damando  enquero  :  —  Coumbien  boules  de  boste 
flou? —  Aqui  n'autre  babard, se  dit,  Tôurei  pas. —  Ni  abio  n'un 
que  li  diguet  :  iou  bau  bous  n'ensegna  nun  que  parloro  pas 
trop.  Anas  bous  en  dins  quelo  gleiso,  lou  trouborei  lay  dedins. 

—  Grameci,  moun  ami,  si  Tautre.  —  Bay  beire  dei  grand' 
estatudos  dins  quelo  gleiso.  Daraande  'n  da  uno  :  —  Boules 
moun  flou,  bous  ? —  Li  respoundio  re.  —  Oùrei  moun  flou, 
parlas  pas  trop,  bous,  se  dit.  —  Li  estaquo  soun  flou  ou  côu. 
L'estatudo  lou  pagabo  pas  :  Pago  me,  se  dit.  —  Lou  bequi  en 
coulèro  ;  la  truquo,  li  fay  touraba  'n  so. —  Boun,  se  dit,  te  ses 
bien  feit  prega,  mes  m'a  paga,  se  dit.  —  S'en  torno  trouba 
sa  may,  countent  coumo  'a  orne.  —  E  be,  moun  ami,  as  bien 
bendut,  si  selo  ?  —  Oli  !  oui,  may,  mei  sirei  countento,  bous 
respounde.  Eren  qui  toujours  ques  einoujous  :  e  coumbien 
boules  de  boste  flou,  e  coumbien  boules  de  boste  flou?  L'ei 
douna  'n  da  un  que  m'o  dit  re.  —  Ah  !  moun  Diou,  moun 
ami,  si,  e  perte  fa  paga?  —  Me  bouille  pas  paga,  se  dit, 
Tei  bien  batut,  mes  coy'gau,  gueytats  ço  que  li  ei  bendut, 
trapats  co,  se  dit.  —  Sa  may  se  boto  a  pura.  —  Ah  !  moun 
Diou,  sei  perdudo  d'ôuguei  un  gouiat  ta  sot,  me  métro  a  la 
misèro  ;  ah  !  sei  perdudo  !  Sei  bien  malerouso,  i  o  qui  na 
peço  de  telo,  te  lafari  bendre,  si,  mes  sôuras  pas. —  Sôurei,  se 
dit,  seu.  —  E  be,  bay  la  bendre,  mes  damando  n'en  la  rasou  ; 
tiro  n'en  la  nxsou  ou  mins,  se  dit;  sôuras  ?  —  Oui,  may,  si. 

Lou  bequi  partit,  s'en  bay  a  la  fiero.  Li  damandaben  :  —  E 
be,  jouin'ome,  boules  bendre  bosto  telo  ?  —  Oui,  si  seu.  — 
Coumbien  n'en  boules  ?  —  N'en  bole  la  rasou. —  Mes  que 
coy  que  boules  dire  ?  —  N'en  bole  la  rasou,  bous  dise.  — 
Un  ome  enbeta  d'aco,  li  plego  dins  quun  bouci  de  papier,  un 
pesoui  pei  na  piouse.  —  Coy  bien  petit,  si  seu.  —  Coy  gau, 
si  l'autre,  coy  la  rasou.  —  S'en  bay  trouba  sa  may  en  disent 
que  siio  bien  deûcilo  se  n'ero  pas  countento.  Sa  may  li  diguet  : 

—  E  be,  se  dit,  coum'as  feit  ?  —  Tanes,  se  dit,  gueytas  sus 
queu  bouci  de  papier.  —  Sa  may  lou  dret,  la  piouse  li  sauto 
trabers  ;  lou  pesoui  damoro  dessus  lou  papier. —  Ah  !  sei  per- 
dudo, se  dit,  que  farei,  se  dit,  te  bole  tia,  te,  couqui,  se  dit. 

—  Un  moumen  après:  —  Te,  se  dit,   fou  que  me  n  angue  ou 


572  CONTES  POPULAIRES   DE   l'AGENAIS 

marca,  tu  sabei  pas  fa  les  affa,  fay  lou  pan,  se  dit,  tu,  pei  la 
soupo. 

Sa  may  part  ;  seu  coumenço  de  bourguei  fa  sa  soupo.  Bay 
bouta  na  gabelo  en  da  chaque  pe  de  côulet,  pei  les  engreis- 
so  bien  en  da  toui,  pei  bay  tirabeure  per  que  tout  sisquesse 
preste  quand  sa  may  arriboyo.  Bay  s'en  soubeni  que  lei 
mousqui  minjoyan  sa  greisso  sui  côulet.  Aladounabio  lou  dou- 
zil  de  sa  barriquo  à  la  man,  lou  tiro,  pei  lei  bay  bira  dans 
soun  douzil.  En  atendent,  sa  barriquo  se'nanguet  touto.  Ar- 
ribo  :  touto  sa  barriquo  s'ero'nanado.  —  A,  que  farei  iou,  ma 
may  bay  me  batre,  ma  may  bay  me  tia  !  Sabe  ço  que  bau  fa, 
se  dit;  n'ei  pas  feit  de  pan,  bau  y  bouita  moun  sac  de  farino, 
pei  sou  bouissorei.  —  Lou  deibiro  qui  dedins. 

Sa  may  arribo  :  —  E  be,  se  dit,  as  feit  ta  soupo,  si,  e  toun 
pan  ?  —  Oh  !  m'en  parlei  pas,  si,  benêts  minja  la  soupo,  anas 
ou  casau,  lei  côulets  soun  toui  cueits  ;  n'en  pourrei  minja  tant 
que  bourrai.  —  Sa  may  se  boto  a  creda  qu'ouro  bi  touto 
co  :  Ah  !  malerous,  se  dit,  m'en  bau,  te,  mes  i  o  qui  'n  pau  de 
farrin  farraillo  ou  plancha,  se  dit,  sou  toquei  pas  ou  mins,  se 
dit,  te  sou  défende. 

La  may  s'en  bay.  Y  arribo  'n  marchand  de  beisselo  ;  li 
damando  beire  se  n'abio  re  a  bendre  ou  a  fa  arrenja.  L'au- 
re  diguet  :  —  0,  nani,  n'ei  re,  se  dit,  io  qui  *n  pau  de  farrin 
farraillo  que  ma  may  m'o  defendut  de  la  touca:  coy  re,  se 
dit.  —  Beire  lo,  se  dit  l'autre.  —  Trapo  sa  farrin  farraillo, 
pei  li  fay  beire  sans  la  gueyta.  Coro  na  belo  saqueto  de  louis 
d'or.  —  Abias  rasou,  si  lou  marchand,  coy  re,  se  dit,  tout  du 
mémo,  bous  'n  bau  bailla  na  doujeno  de  sietos.  —  Eu  bien 
content,  lei  pren,  lei  trauco  toutei  ou  quiou,  pei  lei  pendillo 
toutei  ou  plancha  ent'ero  sa  farrin  ferraillo.  —  Crese  que  ma 
may  bay  esta  bien  countento,  se  dit.  —  Sa  may  torno.  — 
May,  gueytas  ou  plancha,  Bosto  farrin  farraillo  que  coro  re, 
se  dit.  —  Sa  may  y  gueyto  ;  pei  quand  bi  pas  sa  farrin  far- 
raillo, se  boutet  a  pura,  a  creda  qu'eren  perduts,que  n'abian 
re  pus.  — Ent'o  passât,  se  dit? —  D'aqueu  constat. —  Passo- 
s-y,  si  sa  may,  iou  passorei  de  l'autre,  pei  lou  pus  lèu  que 
lou  trouboro  sounoro  l'autre,  se  dit.  —  Selo  galoupabo  d'un 
bord,  seu  de  l'autre.  A  la  fin  seu  ero  fatigat,  la  sono.  — Où» 
may,  benêts,  benêts,  se  dit  !  —  L'as  troubat?  l'as  troubat?  — 


V 


CONTES    POPULAIRES   DE  l'aGENAIS  573 

Benêts,  oui,  benêts,  se  dit.  —  Sa  may  ben. —  Ent'ei,  si  ?  — 
Quau  miracle,  si  seu.  —  E  que  coy  ?  —  Coument  un  si  petit 
ôusèu  0  feit  na  ta  grosso  croto  ?  —  Coro  'n  rei  crouchet, 
qu*èro  pôusa  sus  qu'uno  bouso  de  baco. 


La  fillo  Malaaso 

Y  abio  'n  cop  dei  gens.  —  En  se  n'anant  prumena,  troben 
un  petit  agnèu  blanc.  La  flllo  Tatrapo.  Bê,  bê,  lou  poudio 
pas  tene.  —  Où,  maj,  benêts  m'eida  à  tene  quee  petit  agnèu 
blanc.  —  Li  angueren  eida.  Lou  meteren  dins  Testable  de 
porcs  ;  lou  porc  lou  minje.  Coro  Tagnèu  d'un  orne  que  Tabio 
derôuba  ;  Quel  orne  ben  :  —  Dounats  me,  se  dit,  moun  petit 
agnèu  blanc.  —  E,  dit,  questo  neit  Taben  metut  dans  lou  porc; 
lou  porc  o  minja  lou  petit  agnèu.  —  Dounats  me  moun  agnèu 
ou  lou  porc.  —  Li  dounerenlou  porc. 

Se  'nanguet  pus  loun.  Tome  pei  lou  porc.  Quand  sisquet 
neit  :  digats  donne,  si  seu  ou  mestre  d*uno  meisou,  bouriats 
pas  me  louja,  iou  pei  moun  porc  ?  —  0,  si  fet,  bous  loujoren. 
—  Lou  meteren  dans  lei  crabo  'nd*ôu  porc;  qu'our'y  fusquet, 
lei  minjet  toutes,  otro  uno.  Li  fasqueren  creire  que  lei  crab'o 
abian  minja  lou  porc.  Lendouman  mati  en  se  lebant  :  —  Dou- 
nats me  moun  porc,  se  dit.  —  0,  dit,  questo  neit  uno  crabo  l'o 
minjat.  —  Dounats  me  lou  porc  ou  na  crabo.  —  Li  douneren 
la  crabo. 

Pei  après  se  'nanguet  cba  d'autrei  mounde  :  —  Me  bouriats 
pas  louja  'n  da  iou  pei  à  ma  crabo  ?  —  0,  si  fet,  se  dit,  bous 
loujoren.  —  Lou  meteren  per  dessus  lei  bèuse  sa  crabo  tra- 
bers  ei.  Un  brau  la  minjet.  Lou  mati,  en  se  lebant,  Tome  di- 
guet  :  —  Dounats  me  ma  crabo.  —  E  lou  bèu  To  minjado.  — 
Dounats  me  ma  crabo  ou  lou  bèu.   —  Li  douneren  lou  bèu. 

Se  'nanguet  dins  qu'uno  meisou  que  y  abio  'na  fillo  ma- 
lauso.  Lou  loujeren  seu  pei  soun  bèu.  La  fillo  pe  la  neit  :  — 
Où,  may,  dounats  me  'n  bouci  d'aqueu  bèu,  douman  sirei 
garido.  —  Estriperen  queu  bèu,  li  douneren  un  bouci  de 
feje.  Leudouman  mati  signe  garido.  —  L'ome,  en  se  re- 
beillant  :  —  Dounats  me,  dit,  moun  beù.  —  0,  dit,  nosto 
fillo  èro  malauso,  o  dit  que  siio  garido 'se  li  baillaben  un  bouci 


574  CONTES   POPULAIRES   DE    t/AGENAIS 

d'aqueu  bèu,  n*i  ei  baillât.  —  Y  abio  na  petite  cagnoto  ou  près 
dôu  fe.  —  E  be,  dit  la  maj,  bous  dounoren  quelo  petito  ca- 
gnoto qu'ai  ôupres  dôu  fe.  —  Nani,  diguet,  me  fôu  la  fillo.  — 
E  be,  diguei  re,  bous  Tanen  bailla.  —  Meteren  quelo  petiot 
cagnoto  dins  qu'un  sac,  la  barreren  bien,  pei  li  bailleren  :  — 
Baqui  ma  fillo,  li  diguet  la  may,  que  bous  donc. 

L'orne,  soun  sac  sus  Tesquino,  se  'n  anguet  loui,  brabo- 
ment  loui.  Tout  d'un  cop  s'arrestet  :  — E,  ma  fillo,  si,  dumpei 
lou  temps  quête  porte,  te  pourioy  be  bica  !  —  Pei  dret  lou  sac 
—  Per  un  agnèu,  un  porc,  per  un  porc  'na  crabo,  par  'na 
crabo,  un  bèu,  per  un  bèu  'na  fillo,  per'na  fillo 

'na  cagnolo 
Lou  nas  t'emporte 

Li  empourtetlou  nas,  enlabicant. 


Robert  e  Fourtet 

Y  abio  'n  cop  un  pourcatier  que  poudio  garda  cap  de  bei- 
lets.  Y  angue  'n  jouin'ome  ;  se  y  alouguet.  Lendouman  li  da- 
mandet  ente  coro  que  pourio  'na  ou  champ.  Lou  mestre  li 
diguet  que  fouillo  'na  à  la  gareno  besino. 

Quand  un  cop  fuguct  ou  champ,  y  arribo  'n  orne  que  li 
diguet  :  —  Adiou,  hôu  !  —  Lou  beilet  li  respoundet  :  —  Adiou, 
hôu  1  —  L'ome  li  damandet  :  —  Coumo  t'apelei-tu  ?  —  Lou 
beilet  li  respound  tabe  :  —  coumo  t'apelei-tu  ? 

Lomé  se  'n  anguet  trouba  sa  may.  Li  diguet  :  —  May,  se 
dit,  l'ôurei  pas  'n  da  queu.  —  La  may  li  diguet  :  —  Perque  ? 
^  E  li  ei  dit:  —  Adiou,  hôu!  m'o  respoundut:  adiou,  hôu; 
li  ei  dit:  coumo  t'apelei-tu,  m'o  dit  tabe,  coumo  t'apelei-tu? 

—  La  may  li  diguet  :  —  Torno-s-y  douman,  digo   li  que 
t'apelei  Robert. 

Lendouman  y  anguet,  manquet  pas.  Li  diguet:  Adiou,  hôu! 

—  L'autre  li  respoundet:  — Adiou,  hôu  !  —  Coumo  t'apelei-tu  ? 

—  Coumo  t'apelei-tu?  —  Robert,  si,  m'apele.  —  E  pei  iou, 
Fourtet. 

L'ome  s'entorno  trouba  sa  may.  —  May,  se  dit,  l'ôurei  pas  ; 
li  ei  dit:  Adiou,  hôu,  m'o  dit  :  Adiou,  hôu  ;  li  ei  dit  :  Coumo 


CONTES   POPUr.AIHES   DE    l'aGENAIS  575 

t'apelei-tu?  m'o  dit:  Coumo  t'apelei-tu?  li  ei  dit  que  m'a- 
pelabe  Robert,  seu  m'o  dit  que  s'apelabo  Fourtet.  —  La  maj 
11  diguet  :  —  Torno-s-y  douman.  Debertissez-bous,  se  dit. 

Y  torno  lendouman.  —  Adiou,  Fourtet,  si  !  —  Adiou,   Ro- 
bert! —  Bos  que  nous  debertissen  aneit  ?  —  Coumo  bourras. 

—  Que  bos  que  fasquen?  —  Ça  que  bourras.  —  Bos  que  fas- 
quen  lou  millour  que  sôuleboro  quelo  douillo  ?  —  La  douillo 
tenio  quinze  barriquos  d'aygo.  —  Coumo  bourras.  —  Cou- 
menco,  tu. — Coumenco,  tu.  — Robert  la  fasio  souna  entre  sei 
cambos  coumo  'na  cloclio.  —  Fourtet  li  diguet:  —  Deisso  me 
fa  tourna  mei  porcs.  —  Trobo'na  fenno  que  filabo;  li  damando 
'na  fusado  de  fiou.  Oùtour  de  la  douillo  y  abio  un  riou,  'na 
fount,  pei  des  aubre  e  dans  sa  fusado  estacabo  touto  co  ensem- 
ble. Robert  li  diguet  :  —  Que  coy  que  bolei  fa?  —  Ah  !  tu  lebei 
quelo  douillo!  lou  bole  leba  la  douillo,  lou  riou,  la  fount  mei 
les  aubre,  tout  sans  dessus  debas  que  jamei  y  augue  cap  de 
gouto  d'aygo.  —  Robert  diguet  :  —  Où  bole  pas  ;  diatre,  se 
dit,  ma  may  s'affachoyo  be  ;  ente  bourias  qu'anguesse  querre 
d'aygo  ? 

Torno  trouba  sa  may.  — May,  se  dit,  Tôurei  pas.  Lie!  dit: 
bolei  que  nous  debertiguen  ? —  M'o  dit  :  Coumo  bourras.  Li  ei 
dit  :  Bolei  que  fasquen  lou  millour  que  sôuleboro  quelo  douillo? 

—  M'o  dit  :  Coumo  bourras.  —  lou  n'ei  pousquut  sôuleba  que 
la  douillo,  e  seu  bouillo  leba  la  douillo,  lou  rio,  la  fount,  mei 
les  aubre  tout  sans  dessus  debas,  que  n'y  ôuguesse  james 
'na gouto  d'aygo.  lou  sei  pas  bourgu,  si.  —  As  bien  feit,  se 
dit  sa  may.  Torno-s-y  douman,  fases  qôucare  mei. 

Lendouman  y  torno.  — Adiou,  Fourtet  !  — Adiou,  Robert. 

—  Bolei  que  nous  debertissen  ?  —  Coumo  bourras.  —  Que  bo- 
lei que  fasquen?  — Ça  que  bourras.  —  Bos  que  fasquen  lou 
millour  que  sarroro  'n  casse  ?  —  Coumo  bourras.  —  Coumen- 
co, tu.  —  Coumenco,  tu.  —  Robert  Tatrapo  a  brassa  ;  fasio 
mouilla  la  mousso  de  frin  que  lou  sarrabo.  Fourtet  diguet  :  — 
Bau  fa  tourna  mei  porcs. 

Abio  'na  cujodebin  ;  la  buguet,  la  remplit  d'aygo  et  la 
metet  debas  soun  gilet.  Pei  li  diguet  :  —  Lou  sarrei  pas  mei 
qu'en  tau  ;  bas  beire,  iou,  —  Te  li  baillo  'na  sarrado  ;  sa  cujo 
se  coupet  ;  Taygo  coulabo  cap  bas.  —  Te,  biei,  si,  coy  tau 
que  fôu  lou  sarra. 


576  CONTES    POPULAIRES    DE  l'aGENAIS 

Tournet  trouba  sa  may.  —  May,  se  dit,  Tôurei  pas.  —  E 
perque,  si  ?  —  Oh  !  si,  ei  bien  fort,  là,  si.  Aben  feit  à  lou  que 
sarroio  lou  millour  un  casse  ;  iou  n*ei  pousquut  que  fa  mouilla 
la  mousso  ;  seu  fasio  coula  Taygo  cap  bas,  —  Torno-s-y  dou- 
man,  si  selo,  fasès  quôucare  mei. 

Y  bay.  —  Adiou,  Fourtet. —  Adiou,  Robert.  —  Bos  que 
fasquen  lou  millour  que  jitoro 'napeiro.  !  —  Coumo  bourras. 

—  Coumenço,  tu.  —  Commenço,  tu.  —  Robert  jitet  la  peiro 
bien  loui. —  Deisso  me  na  fa  tourna  mei  porcs,  se  dit  Fourtet. 
— Abio  dei  fiiats  de  perderi  ;  les  estendet,  pei  n'en  trapetn'uno. 
Quand  un  cop  fusquet  tourna,  diguet  :  —  Beire,  iou,  se  la  jito- 
rei  loui.  — Jitet  la  perderi.  Sabès  se  rouncabo  ;  la  tourneren 
pus  beire. —  Te,  biei,  si,  coy  tau  que  fôu  jita  lei  peiros. 

L'ome  torno  trouba  sa  may. —  May,  se  dit,  l'ôurei  pas.  Aben 
feit  6u  pus  loun  quejitoyo  na  peiro;  iou  Tei  jitado  bien  loun, 
mes  eu,  la  siono,  Tan  pas  pousquudo  beire,  talomen  ei  nado 
loui.  —   Coy  gau,  si  selo,  torno-s-y  douman,  fasesnautre  je. 

Lendouman  y  torno.  —  Adiou,  Fourtet.  —  Adiou,  Robert. 

—  Bos  que  fasquen  ou  rigalet  ?  —  Coumo  bourras. —  Robert 
coumenço  ;  tirabo  dans  dei  peços  de  cinq  francs.  —  Fourtet 
li  diguet  :  —  Presto  me  tei  peços.  —  0,  bitoun,  se  dit,  bole 
pas  te  lei  presta,  que  me  lei  tournoyas  pas.  —  Y  abio  dios 
molos  de  mouli  Tuno  sus  Tautro  ;  li  diguet  :  —  E  be,  meisei, 
bau  prene  quei  caillau.  —  Y  abio  dôu  mounde  qu'eren  bien 
loui  ;  les  y  credet  :  —  tiras  bous,  tiras  bous,  se  dit.  —  E  que 
bos  fa,  se  dit  Robert.  —  De  que,  si,  cresei  que  se  lei  toucabe 
dans  quei  caillau,  les  adouboioy?  e  per  lei  tourna  querre,  tu 
pourras  ou  fa,  o,  si.  —  0,  deisso  lei  qui,  lei  mestre  s'affa- 
choyan,  diguet  Robert. 

Lou  beilet  se  nanguet  barra,  lou  dessei.  Diguet:  Mestre,  si, 
moun  temps  eicabat.  —  E  be,  meisei,  si  lou  mestre,  te  fôu 
béni  douman  a  la  fiero  per  bendre  lei  porcs.  —  Meno  lei 
porcs  a  la  fiero.  Li  damandaben  coumWen  n'en  bouillo  ;  seu 
disio  :  des  escuts,  pei  lou  bout  de  la  coueto.  —  Escapitet  la 
coueto  en  da  toui,  pei  damouret  bien  neit  a  arriba. 

Où  dessus  de  cha  soun  mestre  y  abio  un  grand  précipice  que 
poudian  pas  fa  found.  Yplanto  touto  sei  couetos  de  porcs, 
l'uno  dabant  Tautro,  pei  se  meto  a  creda  qu'ero  perdut.  Lou 
mestre  y  anguet  ;  pei  trapaben  quei  couetos  per  darrega  lei 


CONTES  POPULAIRES  DE  L  AGENAIS       577 

porcs;  lei  couetos  se  darregaben  e  lei  porcs  restaben. 
Lou  mestre  diguet  que  fouillo  sou  deissa,  que  lei  tiroyan  dou- 
man.  Pei  se  n'angueren.  Lou  beilet  trapignet  la  coueto  d'un  rat 

Que  fit  cui,  cui; 

Qui  moun  counte  fenit  ! 


Lou  Galant 

Y'abio'n  cop  un  jouin'ome  qu'anabo  beire  trèifilios.  —  Un 
dessei  que  beillaben,  uno  d'aquei  fillo  sourtiguet*.  Restabo 
loungtemps  sans  tourna.  Sa  sor,  la  pus  jouino, diguet:  — Fôu 
pourtant  qu'angue  beire  ça  que  faj  ma  sor,  sap  pas  que  penso 
de  resta  ta  loungtemps.  Se  nanguet  defor,  selo  tabe.  — Aten- 
deren,  atenderen,  anfin,  quand  la  birenpas  tourna  en  da  selo 
tapau,  sasor  Teinado  diguet:  —  Sap  pas  que  fan,  se  dit,  mei  dio 
sors,  se  dit,  que  tornen  pas.  —  Y  bay  beire,  selo  tabe. 
Ane,  n'y  restabo  pus  que  la  may  pei  queu  galant.  Atenderen, 
atenderen  loungtemps  ;  jaraes  besian  tourna  cap  d'aquei 
fillos.  La  may  s'enquietabo:  —  A,  moun  Dieu,  si,  que  coy  que 
fan  quei  drolos?  Quôucare  les  y  siro  arriba,  ôutramen  sian 
tournados.  Sei  ôublijado  de  y  ana  beire,  là,  si,  jouin'ome.  — 
Part,  selo  tabe.  Baqui  que  tournabo  pas;  lou  galant  s'ei- 
noujabo  de  gueyta  lei  caminau,  anabo  beire  sus  la  porto, 
tournabo  dedins,  james  besio  re  :  —  Coy  pas  mei  qu'en  tau, 
si,  a  la  fin,  ma  fi,  fôu  que  y  angue  beire,  iou  ta  be. —  Fasquet 
lou  tour  de  la  meisou  e,  coumo  la  luno  raiabo,  tout  d'un  cop 
bi  lei  quatre  fennos  dins  lou  cami.  —  Que  diantre  y  o  donne, 
si  seu,  que  ses  qui  toutei  quatre  dumpei  ta  loungtemps?  — 
Ah  !  moun  Diou,  là,  li  digueren,  soun  bien  en  peno.  —  Ah  ! 
si  seu,  y  ei  arriba  quauque  malur  ?  —  Nous  n'en  parlei  pas, 
si  selei,  gueytats  l'oumbro  d'aqueu  casse  que  bay  deibouilla 
nosto  meisou  ;  benêts  nous  eida,  si,  a  l'arresta  *.  —   Se  fôu 

*  Variante.  —  Bay  ou  chay  tira  de  heure. 

*  Variante.  —  Quand  on  a  dit  au  début  :  bay  ou  chay  tira  de  heure, 
on  doit  dire  que  le  jeune  homme  va  au  chai,  qu'il  demande  aux  femmes 
qui  sont  là,  Tair  songeur  :  Qu'y  a-t-il,  etc.?  Gelles-ci  répondent  : 

Quand  ôuren  de  meinajous, 
De  que  faren  de  peillous  ? 

89 


578  CONTES  POPULAIRES   DE  l'aGENAIS 

que  siasquei  tougnassos,  dit  lou  jouin'ome;  là,  si,  m'en  bau, 
bous  souate  bien  lou  bouiisei,  tournorei  nouma  quand  n'ônrei 
trouba  trei  tasotos  coumo  bous  au. 

Lou  jouin'ome  s'en  bay  loui,  bien  loui.  En  passant  darre 
qu'une  granjo,  rancountro  na  fenno  que  susabo  e  galoupabo 
dans  qu'un  crubèu  a  la  man.  —  E  que  coj  que  fases,  si,  fen- 
no, que  ses  ta  preissado  ?  —  Là,  jouin'ome,  si,  sei  bien  en 
peno.  —  E  perque  ?  —  Se  sabias,  se  dit.  —  Digas  me  sou,  si 
seu,  belèu  pourrei  bous  eida.  —  Fôu,  si,  que  rempligue  queu 
grand  tounèu,  e  pei  moun  aygo  s'en  bay  touto.  —  Sou  crese 
be,  diguet  lou  jouin'ome,  se  la  pourtas  dans  qu'un  crubèu.  Bau 
bous  tira  d'embarras,  là,  se  dit.  —  Me  randorei  un  grand 
service,  là,  diguet  quelo  fenno. —  E  be,  dit,  prenès  ma  seillo, 
pei  na  basto,  bau  bous  eida,  siro  lèu  pie,  beirei,  si. 

L'oubraje  feit,  lou  jouin'ome  s'en  bay  bien  loun,  bien  loun. 
Abio  set;  tusto 'n  da  qu'une  meisou  e  damando  a  beure 'n 
cop.  Y  abio  qui  na  fenno  que  mountabo  sei  cacau  ou  granier 
dans  qu'une  fourco.  N'abio  qui  na  doujeno  de  sacs.  —  N'en 
pode  pus,  se  dit,  sap  pas  coumo  farei,  toumbe  touto  mei  ca- 
cau. —  Ah  !  si,  lou  jouin'ome,  e  coumo  fasès  ?  —  Coumo  fau, 
dit,lei  trapeagrandosplenosfourcos,mei  tout  juste  se  n'inpode 
pourta  un  ou  dus  tout  lei  cop.  —  Lou  jouin'ome  se  boutet  a 
rire.  —  Abès  rasou,  se  dit,  iou  crcsc  que  cabajas  pas  d'anei. 
—  Prenès,  si,  un  panier,  ôurei  pus  lèu  feit.  N'atendent,  iou 
bau  bous  douna  'n  cop  de  man.  Eidas  me  a  carga,  se  dit.  — 
Cargo  lei  sacs  sus  soun  espanlo,  lei  porto  ou  granier.  —  Co 
bôu  bien  na  begudo,  dit  la  fenno.  —  Li  dounet  un  pie  goube- 
let  de  bounbin. 

Lou  jouin'ome  se  nanguet  pus  loun,  enquero  pus  loun.Tra- 
bersabo  un  cami  prigound  :  y  abio  'n  gran  tarier  e  dessus  un 
petit  drôle  que  sôutabô  ôupres  de  sa  may  en  bas.  —  Sauto 
bien,  se  dit,  boste  drôle,  fenno,  si.  N'abes  pas  pou  que  se  fas- 
que  de  mau  ?  —  Ah!  se  dit,  la,  sei  bien  en  peno,  ei  enquero 
a  la  raubo,  bourioy  lou  mètre  ei  culotos,  james  po  y  sôuta 
dedins.  —  Coy  qu'aco,  si  lou  jouin  'ome,  bous  carçinei  pas 
mei,  anats  beire  que  les  ôuro  lèu  presos.  Dounats  me  quei 
culotos,  se  dit.  Tu,  petit,  se  dit,  dabalo  eiçi.  Dibei  be  estre 
jalat  de  fre  dumpeilou  temps  que  ses  en  camiso.  —  0,  si  sa 
may,  lou  paure  drôle,  coy  be  bray.  —  Lou  jouin  'ome  li  fay 


CONTES    POPULAIRES  DE  i/aGENAIS  579 

prene  sei  culotos  :  —  Beses,  si,  qu'ei  escasit  ou  prumier  cop. 

—  Oh!  bous  ei  bien  d'ôubligatioun,  là,  se  dit,  bous  bau  pa- 
ga,  si,  per  aqueu  serbiçe.  —  Nani,  se  dit  seu,  bole  re,  sei  ôu- 
blijut  de  m'en  tourna. 

Lou  jouin'ome  s'en  baj  :  Pode,  se  dit,  tourna  cha  quei  be- 
tassos,  n'ei  troiiba  trei  qu'eren  pus  soto  que  sei.  —  Marchet, 
marchet:,  pci,  en  birant,  ou  countour  d'uno  routo,  passetsus  la 
coueto 

D'un  rat  que  fit,  cui,  cul  ; 
Aqui  moun  counte  fenit. 

Variante,* —  Lou  gouiat  se  'nanguet  pus  loun,  enquero  pus 
loun.  Dins  qu'un  bilaje  a  quauco  lego  d'aqui  troubet  nafalour- 
dasso  que  gardabo  natrejo,  pei  na  troupo  de  petits  porcs,  ou 
miel  dei  champs.  Lou  jouine  ome  pus  deigourdit  que  la  bar- 

• 

giero,  li  faguet  coumpliment  sans  ôublida  la  trejo,  que  prenio 
per  sa  meirino  e  lei  petits  porcs  per  sei  cousis.  Diguet  'n  da 
la  trejo  que  benio  Terabita  per  na  'n  da  ^a  festo,  que  dans  doui 
jour  anabo  se  marida,  e  qu'anfin  deissesse  cap  de  sei  cousi, 
que  li  faian  tan  de  ])lasei.  La  bargiero  prou  soto  creset  touto 
co  e  li  deisset  enmena  la  trejo  e  touto  sa  famille.  Lou  jouin'ome 
s'en  baj  countent  coumo  de  tout.  La  fillo,  despachado  de  touto 
sei  bestios,  s'en  bay  a  la  meisou  e  en  entrant:  —  sei  tour- 
nado,  si,  dôu  champ.  —  Soun  pay  li  diguet:  —  E  qu'as  feit 
de  tei  porcs?  —  Que  n'ei  feit,  diguet  la  bargiero?  Les  ei  em- 
bouja  'n  festo,  lou  fillôu  de  la  trejo  Tei  bengudo  querre  pei 
en  da  sei  petits  cousis  ;  eren  toui  bien  countents,  la,  bous 
proumete. 

A,  falourdasso,  dit  soun  pay,  ôuren  [lerdunostei  porcs. Fôu 
na,  un  d'un  bord,  Tautre  de  l'autre,  pei  lou  prumier  que  lei 
trouboro  credoro  es  autre,  pei  y  aniran  toui. 

Se'  nangueren  bien  loui  cerca  la  trejo  pei  lei  porcs.  La  bar-, 
giero  tout  d'un  cop  s'arrestet  ou  miei  d'un  prat  e  se  metet  a 
creda  :  Ep  !   Ep  !   Benes  biste,  bencs  biste.  —  L'as  troubado? 

—  Benes  biste.  —  Toui  y  galouperen.  Fjcsy  fit  beire  narussio 
sus  qu'uno  bouso  de  baco:  —  Sap  pas,  dit,  cOumo  'n  ta  petit 
ôusèu  0  pousquu  fa  na  ta  belo  croto  !. 

Fusqueren  ôublija  de  s'en  tourna  sans  ôuguey  trouba  re. 


580  CONTES   POPULAIRES   DE   L  AGENAIS 


La  gato  engreissado 

Yabio  deigens  que  bouillan  engreissana  gato  per  carnabal 
Selo  que  s'entendet,  se  'nanguet. 

En  se  'nanant,  purabo.  Rancountret  lou  jau.  —  E  que  coj 
que  as,  gato,  diguet,  a  tantpura?  — Oh!  se  sabias,  si,  me  bou- 
rian  engreissa  per  carnabal.  — E  iousei  be  de  mémo  I  Bolei 
qu'angue  dans  tu,  se  dit? —  0  !  diguet  la  gato,  pourias  pas 
marcha. 

Quand  sisqueren  un  pan  pus  loun  :  —  Sei  bien  fatigat,  si 
lou  jau  !  —  La  gato  diguet  :  —  Trapo-te  a  ma  coueto,  diguet, 
te  menorei. 

Rancountren  la  crabo:  —  Eque  coj  qu'abes,  dit,  à  marcha 
ta  biste  ?  —  E  coj  que  coumenço  de  fa  nègre  ;  pei,  si,  se  sa- 
bias, nous  bouillan  engreissa  per  carnabal  ;  tabe  nous  enfujen 
ta  biste  que  pouden.  —  E  iou  sei  be  de  mémo  !  Bolei  qu'an- 
gue dans  tu  ?  —  0  !  n6u,  diguet  la  gato,  fajas  coumo  lou  jau, 
pourias  pas  marcha  ;  Testire  tarede  que  pode,  mei  pode  pas 
lou  mena.  — 0,  dit,  marchorei,  dit,  iou. 

Quand  fusqueren  un  pau  pus  loun  :  —  0  malerous  !  si  la 
crabo,  sei  bien  fatigado  !  Tu,  dis,  que  ses  bien  forto,  podei 
be  me  treina. 

Q  u  and  fasquet  nègre,  lou  jau  diguet:  —Te,  dit,  tu,  gato,  que 
mountei  bien,  mounto  à  la  cimo  d'aquel  aubre  per  beire  se 
beiras  cap  de  meisouneto  :  — N'en  bese  be  n'uno,  si  la  gato, 
mes  ei  bien  loun,  bien  loun,  —  Coj  gau,  diguet  lou  jau,  fôu  y 
ana. 

Coro  des  Espagnôu  que  fasian  la  noço . 

Quand  arriberen.  —  Pan,  pan,  dit,  à  la  porto  !  —  Les  Es- 
pagnôu digueren  re.  La  gato  digue  'n  da  la  crabo  :  —  Te,  tu, 
crabo,  qu'as  dei  grosso  corno,  deifounço  la  porto.  —  Tous  les 
Espagnôu  sourtiren  per  fenestro  e  porto. 

La  taulo  ero  bien  garnido.  —  Te,  la  gato  diguet,  iou, .dit, 
bau  fa  lei  part  :  Tu,  jau,  qu'eimei  bien  lei  brigaillo,  meto  te 
debas  la  taulo  peilei  massaras;  tu,  crabo,  qu'eimei  à  brousta, 
leco  la  sauço  ;  iou,  dit,  qu'ei  lei  dents  finos,  minjc  la  car. 

Pei  fousquet  naôu  liet.  —  Te,  dit  la  gato,  tu,  crabo,  qu'ei- 


i 


CONTES   POPULAIRES    DE   L*AGENA1S  581 

mei  a  estre  fresco,  bay-t-en  à  l'yero  ;  — Te,  tu,  jau,  qu'eimei 
a  canta,  bay-t-en  à  la  cimo  de  rescalo  ;  —  te,  iou  qu*eirae  a 
estre  caudo,  m'en  bau  ou  cendrier. 

Un  espagnôu  diguet  :  — Fôu  qu'anguebeire,  se  dit,  ànosto 
petite  meisouneto. —  Quand  arribet,  bourguetna  à  Tjeroper 
se  laba  lei  m  an  ;  fasio  negrc  ;  la  crabo  11  fourro  'n  cop  de 
corno.  S'en  bay  ou  granier,  Iou  jau  li  fourro  na  becado.  S'en 
baj  ou  cendrier,  la  gato  li  fourro  n'engrôugnado.  —  A,  la, 
iay,  se  dit,  m'an  feit  bien  demau,  m'entorne,  se  dit. 

Qu'ouro  les  autre  Iou  biren  arriba  :  —  A!  raalerous  !  di- 
gueren,  coumo  bay  nosto  petito  meisouneto. —  0!  la,  diguet, 
bay  bien  mau.  Sei  bourgut  na  à  Tyero  per  me  laba  lei  man, 
m'an  fouita  'n  cop  de  corno  ;  n'en  sei  enquero  tout  sannous. 
Sei  bourgut  na  ou  granier,  y  abio  quôucare  que  m'o  becat.  Sei 
bourgut  na  ou  cendrier  beire  se  la  cendre  ero  caudo,  m'an 
fourra  n'engrôugnado.  Ei  clabat  la  porto,  me  sei  en  bengut 
tout  en  jurant,  se  dit.  —  E  be,  digueren  les  autre,  fôu  na  'n 
quôucale  mei. 


Finetto 

Y  abio  'n  moussu  qu  abio  na  fillo  pei  un  beilet.  Quelo  fiUo 
s'apelabo  Finetto.  Dins  qu'un  moument  n'abio  n'autro;  s'ape- 
labo  Ledo.  Dins  qu'un  moument  n'abio  n'autro  qu'ero'n  pau 
pigaillouso. 

Lou  mestre  diguet  :  —  Te,  dit,  petit,  te  bole  fa  marida  dans 
qu'uno  de  mei  fillo. 

La  Finetto  lou  bouillo  bien  :  —  Te,  dit,  quand  moun  pay 
te  faro  côusi,  te  fourro  dire,  quand  na  mousco  te  sautoro 
pôu  nas  :  Coy  quelo. 

Lou  mestre  lou  meno  dins  qu'uno  cranbo  negro  e  lei  fay 
mètre  toutei  trei  de  reng.  Tastabo,  tastabo:  tout  d'un  cop  na 
mousco  li  sauto  pôu  nas.  —  Bole  quelo,  se  dit.  —  A,  dit,  mei 
m'o  prei  ma  Finetto;  li  ei  proumeso,  sabi  sôugut,  li'ôuioy 
pas  proumeso.  Te,  meisei  que  t'ei  donnât  quelo,  te  bau 
douna  inKdedau  troucat,pei  na  seillo  de  papier;  te  fôu  na  cura 
la  mej^ 

95and  sisque  qui  ôupres  de  la  mer,  l'estoumac  li  manquet. 


V 


5S2  CONTES    POPULAIRES    DE   l'aGENAIS 

—  Sa  fenno  n'en  passabo  raau.  Uno  d'aquei  trei  fillo  dubio  li 
pourta  la  soupo.  Lou  pay  diguet:  —  Qualo  coy,  dit,  que  bôu 
y  ana?  —  Coy  iou,  dit  la  Ledo.  —  Meisei  que  tu  bolei  y  ana, 
y  aniras  pas.  Etu,  bolei  y  ana,  digue'n  da  sa  fenno  ?  —  Nou, 
dit,  ybole  pas  na.  — Ebe  meisei,  y  aniras.  —  La  Finetto  ero 
countento  d'ôuguei  (iitau. 

Quand  y  arribet,  bi  soun  orne  presque  mort.  —  Te,  dit, 
moun  ami,  minjo  ta  soupo,  beirats  que  diris  qu'un  moument 
ta  mer  siro  touto  curado.  —  L*ome  minjo  sa  soupo. 

Quand  arribet  a  la  meisou  :  —  E  be,  petit,  as  cabat?  —  0 
oui!  —  Ane,  ses  bien  baillent.  E  be,  dit,  te  fôu  na  coupa  la 
fouret,  te  baillorei  na  sarpo  de  boy  e  na  marro  de  cartou. 

Lou  beil  et  fasio  coumo  Tautre  cop  ;  se  couchet  qui.  Sa 
fenno  arribet  :  —  Que  coy  que  as  ?  —  Pode  pas  fa  moun 
oubraje.  —  E  be,  dit,  te,  moun  ami,  minjo  ta  soupo,  beiras 
que  dins  qu'un  moument  ta  fouret  siro  coupado  e  touto 
afagoutado. 

Quand  arribet:  —  E  be,  petit,  as  bien  trabailla  !  —  Tant 
qu'ei  bourgut.  —  Ses  bien  baillent,  se  dit,  —  te  fourro  na 
trapa  des  ôusôu  dans  qu'uno  cordo 'n  mati,  se  dit.  Estiroras 
la  cordo,  les  ôusèu  se  randoran  toui. 

Estirabo  be  prou  la  cordo,  re  ne  benio.  Sa  fenno  arribo. 
Abio  'n  petit  siôulet  :  —  Turlututu.  les  ôusèu  arribaben.  — 
Sa  fenno  n'en  trapet  na  pleno  cordo. 

Quand  arribet:  —  E  be,  petit,  as  trapat  bien  d  ôusèu  ?  — 
Tant  qu'ei  pousquut.  —  Ses  bien  baillent,  se  dit.  E  be  dou- 
man  mati*  se  ses  pas  couart,  te  fourro  na  leba  un  niou  de 
bergau. 

A  chaque  pougna  que  trapabo  :  —  A,  ia,  iay,  me  pinquen! 

—  Sa  fenno  arribet  :  —  E  que  coy  que  as,  se  dit,  moun  ami  ? 
E,  dis,  coy  que  lou  biel  m'o  coumanda  de  trapa  des  abeillo, 
pei,  se  dit,  me  pinquen.  —  Ses  bien  sot,  se  dit,  fouillo  trapa 
lou  niou  e  tout.  —  Te,  si,  iou  y  bau  mounta.  — Lei  dabalet. 
Quand  arribet,  escapet  lei  bergau  ;  se  meteren  après  lou 
mestre.  —  A,  ia,  iay,  se  dit,  me  pinquen.  Ebe,  si,  meisei  que 
m'abes  feit  pinqua,  baqui  bosto  pagomen, —  pei  les  y  baillet 
re.  —  Se 'nangueren.  '^^ 


\ 


CONTES   POPULAIRES   DE   L'AGENAIS  583 


Lou  jau  pei  la  bieillo 

Y  abio  un  cop  un  jau  pei  na  bieillo.  La  bieillo  prenguet  *n 
saquet  ou  jau.  Lou  jaun'eropascountent,mountet  sus  Toustau 
delà  bieillo  e  diguet:  Cacaraca,  rend  me  moun  saquet. Pei  fas- 
quetuncountour  per  tourna'n  dalameisou  de  la  bieillo.  S'enbay 
bien  loun  e  trobo  un  loup;li  dit  :  Adisias,loup! — adisias,  jau, 
se  dit  ? —  Ent'anas,  se  dit  ?  —  Bau  bien  loun,  bien  loun,  en- 
quero  pus  loun.  —  Menas  me  dans  bous,  se  dit  lou  loup.  — 
Entras  dins  moun  quiou,  pei  sou  sôurei.  — Bay  bien  loun, 
bien  loun,  enquero  pus  loun. —  Trobo  'nriou. —  Adisias,  riou. 

—  Adisias,  jau.  —  Ent'anas  ?  —  Bau  bien  loun,  bien  loun, 
enquero  pus  loun.  —  Menas  me  dans  bous.  —  Entras  dans 
moun  quiou,pei  sou  sôurei. —  Bay  bien  loun, bien  loun, enquero 
pus  loun.  —  Trobo  dei  bergau.  —  Adisias,  bergau,  se  dit.  — 
Adisias,  jau  !  —  Ent'anas,  se  dit. — Bau  bien  loun,  bien 
loun,  bien  loun,  enquero  pus  loun,  —  Menas  me    dans  bous. 

—  Entras  dens  moun  quiou,  pei  sou  sôurei.  —  Arribo  cha 
la  bieillo,  mountet  sus  la  teulado  e  fit  :  —  Cacaraca,  rend  me 
moun  saquet.  —  Aqueu  diatre  de  jau,  se  dit  la  bieillo.  — L'at- 
trapo,  lou  meto  dins  Testable  des  ôuillo.  Cresio  que  les  ôuillo 
lou  minjoyan.  E  quand  y  estet, diguet  :  — Loup, sors  de  moun 
quiou  e  minjo  toutes  ques  ôuillo.  Lou  loup  sourtit  e  pei  minjet 
toutos  les  ôuillo.  Lou  jau  pei  lou  loup  sourtigueren  de  Tous- 
tau  de  la  bieillo.  Lou  jau  tournet  mounta  sus  la  teùlado  :  Ca- 
caraca, rend  me  moun  saquet.  —  Aqueu  diatre  de  jau,  se 
dit  la  bieillo.  —  Meto  na  bourreio  ou  four.  Quand  lou  four 
Biguet  bien  caud,  trapet  lou  jau,  pei  li  metet  dedins.  Quand  y 
sisquet,  lou  jau  diguet  :  —  Riou,  sors  de  moun  quiou,  pei  tio 
lou  fe.  —  Lou  riou  sourtit  e  lou  tiet.  Lou  jau  sourtit  dôu 
four  et  tournet  mounta  sus  Toustau  de  la  bieillo  e  diguet  : 

—  Cacaraca,  rend  me  moun  saquet. —  Queu  diantre  de  jau,  se 
dit.L'attrapo  e  bôu  lou  sanna. Diguet  :  —  Bergau,  bergau,  sour* 
têts  de  moun  quiou  e  pinquas  lo.  — La  bieillo  deisset  lou  jau 
e  pei  li  dounet  soun  saquet  e  lou  jau  mountet  sus  Toustau  de 
la  bieillo  e  fit  :  Kikiriki  ! 

Qui  moun  counte  fenit. 


584  CONTES   POPULAIRES    DE   L*AGENAIS 


L^ome  que  saco  sa  fenno 

Y  abio  un  cop  'n  orne  que  s'ero  maridat  mei  cFun  cop.  Abio 
feit  péri  sei  prumièros  fennos  à  forço  de  lei  saba.  Ta  bien  . 
bouillo  n'en  preiie  *n  autro.  Mes  lei  que  ni  en  parlabo  abian 
pôu  dei  cop  de  pun.  La  gouio  d'un  moussu  sou  diguet  en  da 
soun  mestre.  Qu'as  pôu,  si  lou  moussu.  Fay  bouta  sôu  con- 
trat qu'ôuro  pas  lou  dret  de  te  batre.  Se  sou  bôu  fa,  n'ôuras 
qu'a  tira  toun  papier  de  la  pocbo  e  qu'a  li  bouta  dabant  lou 
nas  :  co  faro  coumo  ei  porcs  que  lei  farren  per  les  empacba 
de  founilla.  —  Tau  fasqueren  e  lou  maridage  se  fit.  Fusque- 
ren  pas  sourtit  de  la  gleiso  e  tournât  à  l'oustau  que  l'orne  bôu 
bica  sa  fenno;  se  pinquo  'n  da  espinlo.  Co  lou  rend  fôu  :  Ah  ! 
sacredi,  gusasso,  s' as  feit  esprès,  se  dit.  h  brôuillado  :  Garo  a 
tu,  te  bau  saba.  —  Bistomen  la  fenno  tiro  soun  countrat  de  la 
pocho.  —  N'as  pas  lou  dret  de  me  batre,  si,  meissanto  bes- 
tio.  —  E  be,  si  l'ome,  se  pode  pas  te  batre,  te  bau  saca.  — 
En  disent  aco,  trapo  sa  fenno,  laplanto  dabant  lou  pan  de 
boy,  se  recule  e  li  cour  dessus  coumo  'n  brau.  Noun  pas  elo, 
se  biro  'n  pau  de  constat.  L'ome  la  manco,  trauco  lou  pan 
de  boy  e  sauto  chau  besi.  —  Escusas,  se  dit,  bene  querre  de 
grano  de  fe.  —  Tout  du  mémo,  si  lou  besi,  ôuias  pousquut 
passa  per  la  porto.  —  Que  boules,  si  l'ome,  quand  l'un  ei 
preissat,  l'un  passo  'n  te  l'un  pot. 


Gniquo  gnaquo 

Y  abio  'n  cop  na  fenno  que  se  *nanabo  confessa  'n  da  un. 
curé  e  queu  curé  toujours  li  disio  :  — Gniquo  I 

Selo  diguet  'n  da  soun  orne  : —  Moun  Dion,  se  dit,  sap  pas 
que  coy,  noste  curé  me  dit  toujours:  Gniquo.  —  A,  si  soun 
ome,  e  be,  qu'ouro  tournoras  te  confessa,  respounli:  Gnaquo. 
—  Coy  suffit,  se  dit  selo. 

Lou  prumier  cop  qu'y  tournet,  lou  curé  manquet  pas  de  li 
dire  :  —  Gniquo  !  —  Gnaquo,  se  dit  selo  !  —  E  be,  dit  lou 
curé,  y  anirei  dessei. 


CONTES   POPULAIRES   DE   L*AGENAIS  585 

Lafenno  ero  bien  embarrassado.  Anfin  torno  cha  selo  e  dit 
'n  da  soun  orne  :  —  lou  curé  m*o  dit  quand  11  ei  respoundut 
Guaquo,  que  bendoyo  des  sei.  —  A,  se  dit  seu,  que  bengue; 
lou  receborei  bien  ! 

Lou  curé  y  anguet.  —  Pei  quand  entende  béni  Tome,  selo 
lou  û  cacha  dins  qu'un  crofe;  Tome  tarabastejabo  tout.  —  En- 
tei  la  clau  d'aqueu  crofe,  se  dit?  —  E  sou  sabe  pas,  diguet  la 
fenno.  —  Labau  querre,  si  seu. 

Tant  que  la  çercabo,  selo  diguet  ou  curé:  —  Fôu  bous  mè- 
tre dins  qu'un  sac  ou  granier.  —  Pasque  soun  orne  li  abio  dit. 

L*ome  torno.  N'abio  pas  trouba  la  clau.  — E  be,  se  dit,  bau 
counta  mei  sacs  de  blad.  —  Pren  'n  gros  barrou,  mounto  ou 
granier  e  a  cade  sac  de  blad  tustabo  'n  disent  :  un,  dus,  trei, 

quatre Quand  sisquet  ou  darrie,  ent'ero  lou  curé,  lou 

moulât  de  cops. 


Lou  curé  bessinous  e  la  fenno  petouso 

Y  abio  'n  cop  la  fenno  d'un  cassajre  que  lou  curé  bouillo 
pas  la  confessa,  se  li  pourtabo  pas  'aa  lèbre.  Baquinosto  fenno 
bien  en  peno  :  gôusabo  pas  ou  dire  'n  da  soun  orne,  pourtant 
bouillo  bien  'na  se  coufessa. 

Anfin  n'en  parle  cha  selo.  —  E  be,  diguet  Tome,  n'in  fôu 
bailla  n'uno. 

Coj  sufit,  n'estripen  uno,  la  ramplissen  de  fe,  pei  la  fenno 
la  porto  ou  curé. 

Bay  ou  coufessiounal  ;  —  tanes,  se  dit,  moussu,  se  dit,  ei 
deissa  na  lebre  à  bosto  cousiniero.  —  Coj  boun,  se  dit  seu,  e 
be  bau  bous  coufessa. 

Selo  s'accusabo  e  disio  qu'abio  peta.  Lou  curé  que  li  atri- 
gabo  de  se'  nana,  disio  toujours  :  —  bous  donc  Tabsolutioun, 
bous  donc  Tabsolutioun  ! 

A  forço  s'en  baj,  quelo  fenno,  e  lou  curet  bistoment  galopo 
à  soun  oustau.  Mes  quand  bi  la  lebre  touto  pleno  de  fe,  se 
boutet  a  courre  sus  la  routo  per  trapa  la  fenno  e  de  loun  li 
credabo  ;  —  Te  descoufesso,  petouso,  te  descoufesse. 

Ni  0  per  uno  fcissou, 
Biel  bessinous  ! 

li  respounde  selo  en  s'en  anaiit. 


586  CONTES   POPULAIUES   DE    L*AGENAIS 


Lia  piou  e  lou  pesoui 

Te,  dit  la  piou,  fôu  nous  *n'ana  massa  de  boj.  Abian  metut 
la  sauço  ou  fe.  Lou  pesoui  diguet  :  Lou  puslèu  qu'ôuro  cabat 
soun  fagot  aniro  beire  la  sauço,  aniro  la  goiista.  La  piou  sôu. 
tabo  bien,  lou  pesoui  poudio  pas  marcha.  Seloôuguet  pus  lèu 
caba  soun  fagot.  Quand  arribet,  tiro  lou  cabessau  darrei  la 
porto  per  trapalou  peirôu.  Selo  que  n'ero  pas  bienbello,  lou 
peirôu  li  toumbet  dessus.Lou  pesoui,  quand  arribet  :  Ah  !  ma- 
lerous,  enV  ei  ma  piou,  enf  ei  ma  pion,  se  dit?  Baj  sôu  carai, 
se  meto  à  pura. 

Ent  'ei  ma  piou  ?  —  Y  passo  un  cagnot  :  —  E  que  coy  qu'a- 
bes,  pesoui,  à  tant  pura?  — Et  se  sabias,  se  dit,  quau  grand 
malur,  ma  piou  ei  morto,pei  iou  pure.  —  E  iou  pode  be  jappa, 
se  dit  lou  cagnot. 

Ypasso'n  jau.  —  Et  que  coy  que  as,  cagnot,  a  tant  jappa  ? 

—  Ah  !  se  sabias  quau  grand  malur  ?  La  piou  ei  morto,  lou 
pesoui  puro  e  iou  jappe,  —  E  iou  pode  be  canta,  se  dit  lou 
jau. 

Y  passo  dios  agassos.  —  E  que  coy  que  as,  jau,  a  tant  canta? 

—  Ah!  se  sabias,  se  dit,  quau  grand  malur?  La  piou  ei  morto, 
lou  pesoui  puro,  lou  cagnot  jappo  e  iou  cante.  —  E  nous  au 
poden  be  nous  despluma. 

Y  passo  na  carreto.  —  Que  coy  qu'abes,  agassos,  si,  à  tant 
bous  despluma?  —  Oh!  se  sabias  quau  grand  malur,  etc...., 
etc.,...  —  E  iou  pode  be  recula.  —  Et  se  boto  à  recula,  à  re- 
cula, à  recula. 

Y  passo  nafouret...  Que  coy  qu'abes,  dit,  carreto,  à  tant  re- 
cula? —  Oh  !  se  sabias  quau  grand  malur?  etc.,  etc.... 

K  iou  pode  be  toumba. 

Y  passo  na  fount.  —  Que  coy  qu'as,  fouret,  à  tant  toumba  ? 

—  Ah!  se  sabias  quau  grandmalur  ?etc. ,  etc.  —  E  iou  pode 
be  perdre  touto  moun  aygo. 

Y  passo  na  fenno  qu'anabo  querred'aygo.—  Que  coy  qu'as, 

se  dit,  fount,  à  perdre  touto  tounaygo.  — Ah  !    se  sabias 

etc.,  etc..  —  E  iou  pode  be  cassa  toutes  meicrugos. 


CONTES   POPULAIUKS   DE   L'AGENAIS  58  7 


Mara 

Y  abio  na  bigno  ;  dins  quelo  bigno  n  i  abio  qu'un  pe  ;  sus 
queu  pe  n  i  abio  qn'uno  ramo,  sus  quelo  ramo  n  i  abio  qu'un 
rasin,  sus  queu  rasi  n  i  abio  qu'uno  gruno,  e  Mara  qu'ei  dins 
la  bigno  couchât. 

Bau  trouba  lou  can  :  —  Can,  boudas  pas  japa  Mara  qu'ei 
dins  la  bigno  couchât  ?  —  Monn  ami,  ne  po  le  pas. 

Bau  trouba  lou  loup  :  —  Loup,  pourias  pas  minja  lou  can, 
lou  can  bôu  pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la  bigno  couchât  ?  — 
Moun  ami,  ne  podo  pas. 

Bau  trouba  la  barro  :  —  Barro,  pourias  pas  tia  lou  loup  ; 
lou  loup  bôu  pas  minja  lou  can,  lou  can  bon  pas  japa  Mara 
qu'ei  dins  la  bigno  couchât  ?  —  Moun  ami,  ne  pode  pas. 

Bau  trouba  lou  fe  :  —  Fe,  pourias  pas  burla  la  barro,  bôu 
pas  tia  lou  loup,  lou  loup  bôu  pas  minja  lou  can,  lou  can  bôu 
pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la  bigno  couchât  ?  —  Moun  ami,  ne 
pode  pas. 

Bau  trouba  lou  riou  :  —  Riou,  pourias  pas  tia  lou  fe,  bôu 
pas  burla  la  barro,  la  barro  bôu  pas  tia  lou  loup,  lou  loup  bôu 
pas  minja  lou  can,  lou  can  bôu  pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la 
bigno  couchât?  —  Moun  ami,  ne  pode  pas. 

Bau  trouba  lou  bèu  :  —  Bèu,  pourias  pas  heure  Taigo,  bôu 
pas  tia  lou  fe,  lou  fe  bôu  pas  burla  la  barro,  la  baiTo  bôu  pas 
tia|lou  loup,  lou  loup  bôu  pas  minja  lou  chi,  lou  chi  bôu  pas 
japa  Mara  qu'ei  dins  la  bigno  couchât.  —  Moun  ami.  ne  pode 
pas. 

Bau  trouba  lou  joug  :  —  Joug,  pourias  [)as  liga  lou  bôu,  lou 
bèu  bôu  pas  heure  l'aygo,  Taj'go  bôu  pas  tia  lou  fe,  lou  fe  bôu 
pas  burla  la  barro,  la  barro  bôu  pas  tia  lou  loup,  lou  loup  bôu 
pas  minja  lou  can,  lou  can  bôu  pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la 
bigno  couchât?  —  Moun  ami,  ne  pode  pas. 

Bau  trouba  la  juillo  :  —  Juillo,  pourias  pas  staca  lou  joug, 
lou  joug  bôu  pas  liga  lou  bèu,  lou  bèu  bôu  pas  heure  Taygo, 
Taygo  bôu  pas  tia  lou  fe,  lou  fe  bôu  pas  burla  la  barro,  la 
barro  bôu  pas  tia  lou  loup,  lou  loup  bôu  pas  minja  lou  can,  lou 
can  bôu  pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la  bigno  couchât  ?  —  Moun 
ami,  ne  pode  pas. 


588  CONTES   POPULAIRES   DE   l'aGENAIS 

Bau  trouba  lou  rat  :  —  Rat,  pourias  pas  minja  la  juillo,  la 
juillo  bôu  pa'staca  lou  joug,  lou  joug  bôu  pas  ligalou  bèu,  lou 
bèu  bôu  pas  beure  l'aygo,  Tajgo  bôu  pas  tia  lou  fe,  lou  fe 
bôu  pas  burla  la  barro,  la  barro  bôu  par  tia  lou  loup,  lou  loup 
bôu  pas  minja  lou  can,  lou  can  bôu  pas  japa  Mara  qu*ei  dins 
la  bigno  couchât.  —  Moun  ami,  ne  pode  pas. 

Bau  trouba  lou  gat  :  —  Gat,  pourias  pas  minja  lou  rat,  lou 
rat  bôu  pas  minja  la  juillo,  la  juillo  bôu  pa'staca  lou  joug,  lou 
joug  bôu  pas  liga  lei  bèus,  lou  bèu  bôu  pas  beure  lou  riou, 
lou  riou  bôu  pas  tia  lou  fe,  lou  fe  bôu  pas  burla  la  barro,  la 
barro  bôu  pas  tia  lou  loup,  lou  loup  bôu  pas  minja  lou  can, 
lou  can  bôu  pas  japa  Mara  qu'ei  dins  la  bigno  couchât  I 

Lou  gat  minjet  lou  rat,  lou  rat  minjet  la  juillo,  la  juillo  esta- 
quet  lou  joug,  lou  joug  liguet  lou  bèu,  lou  bèu  buguet  Tajgo, 
Taygo  tiet  lou  fe,  lou  fe  burlet  la  barro,  Ta  barro  tiet  lou  loup, 
lou  loup  minjet  lou  can,  lou  can  japet  Mara  qu'ei  dins  la 
bigno  couchât. 


Cansou 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  I 

lou  n'ei  bi  lou  loup 
Per  minja  la  crabo, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n'ei  bi  la  barro 
Per  tia  lou  loup, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n*ei  bi  lou  fe 
Per  burla  la  barro, 
Fe  de  barro, 


^ 


\ ... 


CONTES   POPULAIRES   DE   l'aGENaIS  589 

Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,[ma  crabo  m*o  minja  moun  mil! 

lou  n'ei  bi  i'ajrgueto 
Per  tia  lou  fe, 
Ajgueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n'ei  bi  lou  bèu 
Per  beure  Taygueto, 
Bèu  d*aygueto, 
Ajgueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n'ei  bi  la  cordo, 
Per  estaca  lou  bèu, 
Cordo  de  bèu, 
Bèu  d'aygueto, 
Aygueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n'ei  bi  lou  rat 
Per  coupa  la  cordo. 
Rat  de  cordo, 


590  CONTES   POPULAIRES    DE    L  AGENAIS 

Cordo  de  bèu, 
Bèu  d'aygueto, 
Ajgueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  lonp, 
Loup  de'crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

lou  n'ei  bi  lou  gat 
Per  trapa  lou  rat, 
Grat  de  rat. 
Rat  de  cordo, 
Cordo  de  bèu, 
Bèu  d'ajgueto, 
Aygueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  ! 

Se  n'ei  bi  lou  chapitoy 
Per  minja  lou  gat, 
Cliapitoj  de  gat, 
Gat  de  rat, 
Rat  de  cordo. 
Cordo  de  bèu, 
Bèu  d'ajgueto, 
Ajgueto  de  fe, 
Fe  de  barro, 
Barro  de  loup, 
Loup  de  crabo, 
Crabo  de  mil, 

Maledicioun,  ma  crabo  m'o  minja  moun  mil  1 

J.  Brissaud. 

(A  suivre.) 


BEATRICE  PORTINARI 


l'idéale  DELLA   DIVIXA  GOMMEDIA 


CANZONE 

Ne  la  città  de'  Fiori, 

De  l'Arno  in  riva,  un  mesto  garzonccllo, 

Dal  cui  nero  occhio  di  celesti  ardori 

Lampeggiava  Tamor  santo  del  bollo, 

Ne  la  infantile  etade, 

Portava  il  segno  génial  sublime, 

Che  le  grandi  aime  invade 

Per  sollevarle  a  invidiate  cime. 

E  la  Pesta  de'  Fiori  e  de'  Bambini. 

Danzan  tia'  fiori  ingénue  fanciullette 

Ne  la  fresca  beltà  de  l'innocenza. 

Ma  una  fra  lor  da  gli  occhi  suoi  divini 

Raggiava  lampi  di  sue  grazie  elette, 

Bianco  vestita,  celestial  parvcnza. 

Un  suo  sgardo  ferîo 

Il  poeta  fanciullo  e  a  Dio  rapîo  ! 

E  queir  aima  bambina 

Sfavillô  di  una  luce  ardente  e  nova  : 

Si  accese  nel  suo  cor  face  divina, 

Che  il  trasfigura,  lo  féconda  e  innova. 

Or  de'  suoi  sogni  di  oro 

L'immagine  rivede  un  di  sognata 

Di  angeletti  fra  un  coro, 

Fra  la  terra  ed  il  cielo  a  vol  librata. 

Da  queU'ora  ti  fu  sorella  e  amica, 

Dante,  l'eteroa  c  pudica  fanciulla, 

Che  di  un  tuo  sgiiardo  al  lampo  impallidîa. 

Oh  quai  vita  innocente  a  l'aura  aprica 

De  fiorenti  sontieri,  ove  trastulla 


592  BEATRICE  PORTINAHI 

La  fanciullezza  !  Oh  casta  poesia, 

Che  in  due  candidi  cuori 

Sboccia  quai  fior  del  sole  a'  vivi  ardori! 

Il  Buo  dolce  sorriso 

La  vita  ti  fîoria  di  amore  e  speme  ; 

E  volavi  fidente  a  l'almo  Eliso, 

Chetando  il  turbo  che  nel  cor  ti  freme. 

E  morta  la  sognavi, 

0  divin,  nel  delirio  :  e  soavemente 

Salir  tu  la  miravi 

Al  Cielo  ;  si  turbô  tua  eccelsa  mente, 

E  ti  destava  un  tremito  funesto. 

Ma  ti  assecuri  :  e'  viva  :  allegra  ancora 

Tua  vita  quella  pura  giovinetta, 

Che  l'aima  ti  rapiva  e  ti  feo  mesto, 

Irradiando  di  ridente  aurora 

Tua  balda  giovinezza  !  Oh^la  diletta 

Creatura  di  amore 

Ti  piove  raggi  di  grandezza  in  core  ! 

E  tu  bevi  spirato 

Da  la  diva  fancîulla,  in  cima  assisa 

Del  tuo  pensiero,  un  amor  profumato 

Di  Fede  e  patria  che  ti  imparadisa. 

Oh  quai  dolce  favella 

Con  le  sorrise  brevi  parolette, 

Quai  nuovo  cielo,  quai  sovrana  e  bella 

Immago  si  âpre  con  sue  forme  elette  ! 

E  venue  Tora  che  Tamata  donna 

Spiegô  da  questo  suolo  a  Dio  le  piume  : 

Fu  un'  ora  di  dolor  cupo  e  profonde, 

Che  del  tuo  cor  per  sempre  allor  si  indonna. 

Sparito  è  il  raggio,  di  tua  vita  il  lume, 

Che  ti  guidava  in  questo  cieco  mondo. 

Tu  pensoso,  o  Alighiero, 

Resti  e  nudri  un  dolor  perenne  altero  ! 

0  Béatrice,  mira 
L'amico  tuo  e  non  de  la  ventura, . 
Gli  sorridi.  mentre  ei  sogna  e  délira, 
A  te  pur  desiando  in  sua  sventura. 
A  quei  che  amasti  tanto 


BEATRICE  PORTINARI  593 

E  uscio  per  te  da  la  volgare  schiera, 

Col  tuo  divino  încanto 

Sorridi  in  sogno  bellamente  austera, 

E  il  gran  poeta  la  sognô  :  la  vide 

la  cielo  tanto  gloriosa  accolta, 

Di  un  nembo  di  bei  fîor  tutta  ricinta. 

Bella  raggiù  nel  sogno  e  gli  sorride, 

llosso  vestita,  in  verde  manto  avvolta. 

Sovra  candido  vel  d'oliva  cinta. 

La  sogn6)  quai  bambina 

La  vide  un  dl,  corne  angiola  divina  I 

Da  quel  di  Taspro  esiglio 

Fu  men  duro  per  te,  padre  Alighieri; 

Tu  asciugasti  la  lacrima  sul  ciglio 

E  levasti  su  al  Cielo  i  tuoi  pensieri. 

Tua  vita  riconforta 

E  afforza  una  virtù  che  vien  da  Dio  : 

Ti  è  via,  ti  è  luce  e  scorta 

Un  angelo  che  appura  il  tuo  desio. 

Ei  ti  ritempra  a  la  battaglia  il  core, 

Sotto  r  usbergo  del  sentirsi  puro; 

Ei  fa  più  grande  il  nobile  tuo  sdegno, 

Che  germoglia  il  tuo  canto  alto  d'amore, 

Che  ti  leva  del  suol  dal  lezzo  impuro, 

Facendoti  a  salir  leggiero  e  degno. 

Ei  ti  tempra  le  piume, 

Ti  squaderna  de'  mondi  il  gran  volume. 

E  non  fosti  più  solo  : 

11  Sogno  de'  tuoi  sogni  è  a  te  di  accanto 

Invisibile  spirto.  Esso  il  rio  duolo 

De  gli  Abissi  ti  schiude  :  arma  il  tuo  canto 

Di  forza  portentosa. 

11  cantore  di  Enea  prudente  e  saggio 

Per  la  via  lacrimosa 

De'  veri  morti  è  guida  al  tuo  viaggio. 

E  vinci  la  pilura  e  lo  sgomento 

Del  regno  oscuro;  che  una  diva  luce 

A  gli  occhi  e  ne  la  mente  ti  balena  :  . 

Ella  ti  regge  il  piede  in  ogni  evento 

E  schiara  il  rio  sentiero  al  savio  duce. 

Montre  ti  tréma  il  cor  per  ogni  vena, 

40 


594  BEATRICE  PORTINARl 

Ella  le  cose  belle 

Ti  mostra  e  torni  a  riveder  le  stelle. 

Pel  faticoso  Monte, 

Che  sorge  iii  mezzo  al  pelago  fremente, 

Sali  pietoso  e  con  dimessa  fronte, 

Gémi  al  pregar  de  la  pudica  gente. 

E  plori  e  preghi  pio  : 

E  raggiar  miri  de  la  luce  i  fîgli  ; 

Arcano  favellio 

Ascolti  di  profondi  alti  consigli. 

Per  ardue  scale  pénitente  sali 

E  più  lieve  si  fa  la  mortal  salma 

E  si  accende  di  Bice  il  gran  desio, 

Che  ti  attira,  ti  attrae,  ti  mette  le  ali. 

Vedi  un  Trionfo  che  rapisce  l'aima, 

Dove  fulge  la  scienza  al  ta  di  Dio. 

La  miri  ne  l'Edenne 

E  disbrami  la  tua  sete  decenne  I 

Da  Dio  trasumanato 

Con  Béatrice  vai  di  stella  in  stella, 

Che  vide  a  te  del  suc  fulgor  beato  ; 

E  di  astro  in  astro  ognor  si  fa  più  bella 

La  casta  Béatrice. 

Che  ti  bea  del  suo  eterno  almo  sorriso. 

E  tu  puro  e  felice 

Ti  disseti  de'  Santi  al  grato  riso , 

Che  è  raggio  e  canto,  luce  e  melodia. 

Ma,  oh  meraviglia  I  oh  prodigio  sovrano, 

Che  ne  Tempireo  cielo  a  te  si  schiude  ! 

Ivi  miri  tra  gli  angioli  Maria. 

La  Rosa,  che  giammai  pregasti  invano, 

E  il  Fiume  circolar,  cui  in  sua  virtude 

Impronta  l'Uno  e  Trino; 

E  ti  confondi  a  quel  Mister  divino! 

Padre  Alighieri  ,  in  Cielo 

Or  che,  congiunto  a  la  céleste  Idea, 

A  la  tua  Béatrice,  e  sciolto  il  vélo 

Arcano,  quella  Luce,  che  ridea 

Al  tuo  pensiero,  intendi  ; 

Or  che  ti  incieli  santamente  in  Dio, 


.-.-  ..-v5 


A  DANTE  ALIGHIERI  59  5 

Quaggiù  tuo  guardo  stendi 

E  sorridi  al  fuo  bello  Ovil  natio. 

La  tua  Fiorenza  e  Italia  tua  festeggia 

Oggi  il  tuo  nome  a  Béatrice  unito, 

Che,  angelo  e  vision,  sogno  e  fanciulla, 

A  te  sorrise  al  mondo  !  Oggi  fîammeggia 

La  gloria  tua  da  Tuno  al'altro  lito 

Del  bel  piiese,  che  infiorô  tua  culla. 

Raggia  dal  Paradiso 

Con  Bice,  a  noi  plaudenti  un  dolce  riso  ! 

Giuseppe  Spbra. 


A  DANTE  ALIGHIERI  E  BEATRICE  PORTINARI 


LA   DIVINA  GOMMEDIA 


Tra  le  lotte  di  un  secolo  perverse, 
Da  la  patna,  da  Dio,  dal  ben  svïato, 
Tu  lo  sollevi,  mentre  era  sommerso 
Nel  pelago  del  mal  freinente  irato. 

Sonimo  Vate,  con  dir  sublime  e  terso, 
Con  nobil  core  ed  animo  sdegnato 
Descrivi  fondo  a  tutto  l'universo 
Con  altissimo  volo  invidïato. 

E  lotti  e  aneli  e  santamente  aspiri 
Umanità  ritrar  da  Fempia  valle, 
Ove  tra  falli  avvolgesi  deliri. 

Movi  per  novo  inusitato  calle 
A  luce  a  civiltà,  cui  sol  sospiri, 
Dando  a  le  cupe  ténèbre  le  spalle. 


596  E  BEATRICE   PORTINARI 


II 


«  Amor  che  ne  la  mente  ti  ragiona 
Ti  leva  a  Dio  per  le  superne  spere 
E  lena  e  core  e  incanto  al  ben  ti  dona, 
T'imparadisa  de  le  gioie  vere. 

»  Amor  che  nuUo  amalo  amar  perdona 
Ti  vinse  Talma  con  delizie  altère  : 
Amor  che  dolce  in  ogni  petto  suona 
Ti  assunse  al  Ciel  de  le  letizie  mère. 

Più  e  men  che  donna  a  te  raggiô  Béatrice, 
Sovrana  idea,  parvenza  alta  di  Dio, 

Scienza  che  il  vero  a  Tuni verso  dice. 

• 

Italia  e  umanitade  in  un  desio 

Si  accentra  in  lei  :  e  tu  ti  incieli  in  Bice, 

Che  a  vol  di  stella  in  Stella  ti  rapio  ! 


III 


'  Di  donna,  patria  e  gloria  immenso  amore 
A  l'alto  volo  ti  vesti  lo  piume  : 
Scendi  gli  Abissi  de  Teterno  orrore, 
Del  duolo,  dove  tace  il  divo  lume. 

Dal  gemito  a  la  speme  va  il  tuo  core  : 
E  sali  allor  del  Monte  il  bel  cacume, 
Dove  l'aima  se  purga  nel  dolore  : 
E  prece  e  pace  parla  il  tuo  volume. 

Un  savio  Vate,  la  scïenza  umana. 
Pel  regno  de  la  vita  e  di  natura 
Ti  scorge  e  sua  virtù  diventa  vana. 

Béatrice,  di  Dio  scienza,  or  guida  e  appura 
Pel  regno  de  lo  spirto  e  trasumana 
Ne  la  luce  e  nel  riso  tua  figura. 


BEATUIGE    E   LAURA  597 


IV 


Su  la  schiera  volgar,  su  tutti  î  vati 
Tu  ti  innalzi  su  Tali  de  la  Fede, 
Che  il  cor  ti  infiamma  co'  suoi  rai  beati, 
Che  novo  cielo  s  vêla  a  chi  ben  crede. 

E  ti  levi,  ti  levi  :  ne  obbliati 
Son  gli  umani  destini  :  il  cor  ti  fiede, 
Né  tre  regni  di  morte,  pe*  sviati 
Fratclli  amor  ;  che  i  mesti  e  i  falli  vede. 

E  lijcvi,  ti  levi,  almo  poeta, 

A  un  idéale  immenso,  a  Tlnfinito, 

Che  del  fînito  è  à  te  pur  scala  e  meta. 

Superba  aiuola  a  te  par  questo  lito, 
Mentre  nuoti  in  un  mar  de  luce  lieta, 
Nanti  a  Dio,  ne  l'Empireo,  annichilito  ! . . . 


BEATRICE  E  LAURA 


L'una  de  TAlighier  l'anima  ispira 
A  platonico  amor  sublime  e  santo  : 
Ed  ei  trattô  civil  pietosa  lira, 
E  Fede  e  patria  celebrô  nel  canto. 

L*altra  Peirarca  accese  di  délira 

Fiamma,  che  6  vivo  ardor,  purezza  e  incanto  ; 

Ed  ei  per  lei,  per  la  virtù  sospira 

E  sederle  desia  sempre  di  accanto. 

Oh  questo  amore  è  nobile  e  terreno  : 
É  amor  di  donna  a  la  virtù  nutrita, 
Che  signoreggia  ne*  Trionfi  appieno. 

Quello  è  sovrano  affetto,  che  la  vita 
Umana  obblia  in  cielo  alto  e  sereno, 
In  alba  eterna  di  gioir  fîorita! 


598  lïALIA  E  FRANCIA 


ITALIA  E  FRANCIA 


Italiae  Francia  gareggiàr  di  ardore 
Ed  ingemmàr  di  luce  gloriosa 
La  bella  Laura  e  il  suo  divin  cantore, 
Che  gentilezza  a  leggiadria  disposa. 

E  or  Francia  e  Italia  insiem  rendono  onore 
A  Béatrice,  eletta  aima  pietosa, 
Che  il  cor  di  Dante  di  céleste  amore 
Avvinse  e  lo  beô  pura  amorosa. 

Splendida  generosa  e  nobil  gara 

E  quella  che  due  genti  insieme  annoda, 

Che  tra  lor  pace  in  ayvenir  prépara  ! 

Or  Gallia  e  Ausonia  un  sol  desio  rannoda  : 
Risplenda  la  lor  gloria  ognor  più  chiara, 
Che  or  la  mistica  Bice  ammira  e  loda  ! 

Giuseppe  Spkra. 


DANTE  E  BEATRIX 


Lou  malur  e  Texil,  las  passieus  enemigos, 
L'ôdi  crudel  que  jaupo,  asseguto  e  mourdis, 
Las  necios  jalousies  e  las  traitos  entrigos, 
Lou  sounge  enfebrejat  d*infer  ou  paradis, 

Aqui  toun  lot,  o  Dante  !  idealos  amigos  : 
Oumbro  e  pas,  fougissès  davans  Tentravadis 
Del  poudé  soucitous,  de  las  guerrieiros  liguos, 
Del  baral  e  de  tout  so  qu'ai  cor  re  noun  dis  ! 

Pamens  s'as  tout  dounat,  toun  repaus  e  ta  vido, 
Pèr  un  noum,  un  grand  noum  de  glorio  couronnât, 
L'amarou  d'assaval  un  jour  s'es  avalido, 

L'amour  de  Beatrix  que  t'aviô  counsoulat 
Davans  Dieus  pondérons  t'a  fach  bello  finido, 
E  vous  ses  rejounguts  dins  l'immourtalitat  ! 

(Dialecte  languedocien  bilerrois). 

Frédéric  Donnadieu. 


DANTE  ET  BEATRIX 


Le  malheur  et  l'exil,  les  passions  ennemies,  —  la  haine  cruelle  qui 
aboie,  poursuit  et  mord  —  les  jalousies  imbéciles  et  les  intrigues  traî- 
tresses, —  les  rêves  enfiévrés  de  l'enfer  ou  du  paradis. 

Voilà  ton  lot,  o  Dante  !  idéales  amies  :  —  ombre  et  paix,  fuyez 
devant  la  lourde  chaîne — du  pouvoir  soucieux,  des  ligues  guerrières, 
— ^  de  l'agitation  confuse  et  de  tout  ce  qui  ne  dit  rien  au  cœur! 

Pourtant,  si  tu  as  tout  donné,  ton  repos  et  ta  vie  —  pour  un  nom» 
un  grand  nom  de  gloire  couronné,  —  l'amertume  d'ici-bas  un  jour  s'est 
abolie. 

L'amour  de  Béatrix  qui  t'avait  consolé,  —  devant  Dieu  puissant 
t'a  procuré  une  belle  mort,  —  et  vous  vous  êtes  réunis  dans  l'immor- 
talité ! 

Frédéric  Donnadieu. 


VARIÉTÉS 


ATALANTE  ET  HIPPOMENE 


Le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  nationale  nouvelles  acquisitions^ 
3650  (XV*  siècle),  incomplet  du  commencement  et  de  la  fin,  commence 
au  f**  xlviij  de  Tancienne  pagination  par  les  lignes  qui  suivent  : 

....   Si  se  hasta  de  courre,  si  que  tantost  se  fut  au  devant  de  lui 
mise.  A  celle  foys  getta  il  la  .ij*  pomme  pour  plus  la  belle  en  la  voye 
délayer.  Mes  oncques  si  haste  de  courir  ne  fut  que  pour  la  pomme  d'or 
prendre  ne  se  arrestast,  car  bien  petit  le  cours  d'ung  jouvcncel  crain- 
gnoit.  De  ce  que  ainsi  sVresta  la  pucelle  f  a  ja  Ypomenès  devant  elle 
courus  ;  mais  Athalente,  qui  roydement  alloit,  l'adevancha  sans  guères 
lui  couster.  Lors  se  senty  le  (sic)  jeunes  homs  lassez,  et  bien  vit  que  la 
bonne  forment  aprochoient.  Icy  ne    se   sceut  plus  en  son  fait  con- 
seillier,  se  non  prendre  la  troisime  pomme  et  devant  elle  jetter  ;  et  lors 
la  jetta  devant  la  pucelle,  a  fin  que  le  premier  peûst  venir  a  la  bourne. 
Comme  lors  Atlialente  regarda  la  bourne  qui  près  d'elle  estoit,  et  la 
pomme  d'or  qui  en  sa  voye  fut,  ne  sceut  doncques  que  faire  du  pren- 
dre ou  dulaissier  ;  mais  tant  s'arresta  elle  en  celle  penssée  que  Ypo- 
menès fut  premier  a  la  bourne  venus.  Lors  que  par  cellui  cours  se 
trouva  desconfite  et  que  les  pommez  d'or  ainsi  l'eurent  decheûe,  a  cel 
Ypomenès  se  voult  accorder  et  lui  anteriner  toute  sa  promesse  ;  sy 
allèrent  au  temple  du  dieu  Saturnus,  et  selon  leur  loy  furent  espousez. 
Comme  par  mariage  ainsi  furent  conjoings,  pour  eulx  aller  en  Thèbes 
d'illec  se  partirent.  Et  comme  longuement  orent  cheminé,  trouvèrent 
une  lande  entre  forest  enclose.  Sy  avoit  en  ce  lieu  ung  temple  bel  et 
riche,  ou  quel  le  dieu  Cibelles  estoit  aourez.  Adoncques  pour  refrain- 
dre  l'ardeur  du  soleil,  qui  a  celle  houre  forment  les  arguoit,  en  cellui 
temple  entrèrent  pour  eulx  umbrayer  (sic)  et  pour  repos  prendre  du 
travail  qu'ilz  avoient.  Après  que  bonnement  se  furent  reposez,  eulx 
qui  furent  remplis  d'amours  et  de  joye,  en  remirant  leurs  beautez  et 
jeunessez  furent  lors  de  l'un  l'aultre  si  prins  et  embrasez  que  charnel- 
lement ou  temple  l'ung  l'aultre  habitèrent.  De  ce  fait  leur  sourd i  si 
grand  malaventure  que  tantost  vint  sur  eulx  ung  lyon  affamé,  qui  en 


VARIETES  601 

brief  temps  les  list  honteusement  morii-.  Et  pom*  ce  est  ce  mal  des 
temples  Dieu  despire  et  interdire  par  polution,  car  qui  ce  fait  vers  Dieu 
est  desplaisant  et  en  la  fin  en  est  confusément  pugoi. 

COMMENT    THIDe'Ûs   VINT   AU    LIEU    OU   POLINICEZ  ESTOIT  RETRAIT  ET    DE 

LEUR   DÉBAT 

Retourner  nous  convient  a  Thydeiis.  Celle  nuyt  meïsme  %ie  vous 
avez  oy.  oit  il  chevauchié  par  la  f  orest  antie,  et  oit  souffert  grant  dou- 
leur et  grant  paine,  tant  qu'il  vit  la  tour,  ainsi  comme  avoit  fait  Poli- 
nicès,  en  la  cité  d'Arges.  Lors  se  mist  en  la  maistre  rue,  etc. 

La  suite  représente,  à  quelques  variantes  près,  la  première  rédaction 
du  Roman  de  Thèhes  en  prose  *  ;  puis  viennent  les  autres  parties  de 
V Histoire  ancienne  jusqu'à  César,  les  Faits  des  Romains  et  une 
continuation  qui,  dans  l'état  du  manuscrit,  va  jusqu'au  temps  d'Ala- 
ric  2. 

Le  récit,  incomplet,  qu'offre  notre  manuscrit  de  l'histoire  d'Ata- 
lante  et  d'Hippomène  ne  se  trouve,  croyons-nous,  dans  aucun  des 
autres  manuscrits  de  V Histoire  ancienne  :  c'est  ce  qui  nous  a  décidé  à 
le  publier,  en  y  joignant  quelques  observations  qu'il  suggère. 

A  quel  propos  l'auteur,  qui  est  sans  doute  le  copiste  d'un  manus- 
crit d'où  dérive  plus  ou  moins  directement  le  nôtre  ',  a-t-il  inséré 
cette  digression  dans  le  passage  du  Roman  de  Thèhes  en  prose  où 
est  racontée  la  querelle  de  Tydée  et  de  Polynice  devant  le  palais 
d'Adraste?  Ce  ne  peut  être  qu'à  propos  des  causes  de  l'exil  de  Tydée, 
et  par  suite  d'une  confusion  entre  l'Atalante  béotienne,  fille  de  Schœ- 
née,  à  qui  l'on  attribue  ordinairement  l'aventure  des  pommes  d'or, 
et  l'Atalante  arcadienne,  fille  d'Iasus  et  mère  de  Parthénopée,  fameuse 
par  la  chasse  du  sanglier  de   Calydon  *.  Méléagre,  qui  fit  admettre 

*  Voyez  notre  édition  critique  du  Roman  de  Thèbes  en  vers  (Paris, 
F.  Didot  et  Cie,  1890  ;  publication  de  la  Société  des  anciens  textes  fran- 
çais)^ introduction,  p.  cxxiii  sqq. 

2  P.  Meyer,  Romania,  XIV,  51,  n.  4. 

*  Ce  n'est  évidemment  pas  le  copiste  du  manuscrit  lui-même,  qui  ne 
date  que  de  la  seconde  moitié  du  XV"  siècle  :  les  traces  de  déclinaison 
qui  subsistent  encore  s'y  opposent. 

*  Cette  confusion  est,  du  reste,  fort  ancienne,  et  les  légendes  arca- 
diennes  et  béotiennes  au  sujet  d'Atalante  semblent  avoir  une  origine 
commune  et  se  rapporter  à  une  même  personne  (Voy.  Saglio,  Dict.  des 
Antiquités  grecques  et  romaines,  s.  v.).  Le  scholiasLe  de  Stace,  à  pro- 
pos de  ces  vers  de  la  Thébaïde,  VI,  563-5  ;  Nota  parens  {PavtheJiopœi) 
cursu:  quis  Mœnaliœ  Atalantes  Nesciat  egi^egium  decus  et  vestigia  cunc- 
tis  Indeprensa  procis,  reproche  au  poète  son  erreur  ;  mais  il  confond  à 


602  VARIETES 

VAtalante  arcadienne  parmi  les  chasseurs,  l'épousa  quand  elle  eut 
tué  le  monstre,  et  en  eut,  suivant  certaines  traditions  *,  Parthéno- 
pée  2,  l'un  des  sept  chefs  de  la  guefre  de  Thèbes,  était  fils  d'Œnée  et 
d'Althée,  par  conséquent  frère  consanguin  de  Tydée,  qu'Œnée  avait 
eu  de  sa  concubine  Péribée. 

D'après  le  Roman  de  Thèbes  en  prose,  qui  diffère  ici  du  poème  ', 
Tydée  aurait  été  obligé  de  s'exiler  de  son  pays  pour  avoir  tué  ses 
deux  frèlfes,  Menalipus  et  Meleagès.  Le  premier  de  ces  noms  est  con- 
forme à  la  tradition  ;  le  second  est  évidemment  une  altération  de 
Meleayer,  Méléagre,  et  constitue  une  simple  addition,  dont  il  est  dif- 
ficile de  deviner  la  source.  L'auteur  du  Roman  de  Thèbes  en  prose 
ignorait  évidemment  Thistoire  du  tison  fatal,  dont  la  combustion 
amena  la  mort  de  Méléagre,  lorsque  Althée  l'eut  jeté  au  feu,  pour  pu- 
nir son  fils  du  meurtre  de  ses  oncles  maternels,  qni  voulaient  enlever 
à  Atalante  la  dépouille  du  sanglier  de  Calydon.  L'incertitu  le  sur  le 
nom  de  la  victime  de  Tydée  '*  a  peut-être  aussi  contribué  à  favoriser 
cette  adjonction  de  Méléagre,  mais  le  plus  probable,  c'est  que  nous 
avons  affaire  ici  à  une  en*eur  provenant  d'une  phrase  latine  cor- 
son  tour  Atalante  et  Hippodamie,  comme  on  peut  le  voir  :  «  Atalantae 
confundit  historiam.  Hanc  enim  Atalantam,  Hippomenis  uxorem,  dixi- 
mus  filiam  Schœnei  fuisse.  Illam  autem,  quse  cumprociscursu  contendit, 
Œnomaifiliam,  uxoremPelopis.  »  Il  est  plus  exact  dans  sa  glose  à  VII, 
267  :  «  Duas  Atalaiitas  esse  certissimum  est,  unam  Arcadam,  cujus  Par- 
thenopseus  est  filius,  aliam  de  Scyro,  nobilem  cursu,  quam  Hippomenes 
cursu  superavit  projiciendo  tria  mala.  »  Le  mythologue  fantaisiste  du 
VI"  siècle,  Fulgentius  Planciades  {Argum.  Metamorphoseon^  VIII,  f.  4), 
fait  la  même  confusion  que  Stace  :  d'après  lui,  la  fille  de  Schœnée  était 
arcadienne  et  prit  part  à  la  chasse  du  sanglier  de  Calydon.  Ce  sont  là, 
sans  doute,  les  sources  principales  du  récit  inséré  dans  le  Roman  de 
Thèbes  en  prose. 

1  Voyez,  en  particulier,  Hygin,  fab.  70  et  99. 

*  D'autres  lui  donnent  pour  père  Mélanion,  fils  d'Athamas,  qui,  dans 
la  légende  arcadienne,  est  substituée  à  Hippomène  comme  vainqueur 
d'Atalante  à  la  course,  à  l'aide  de  trois  pommes  d'or  que  lui  avait  don- 
nées Venus.  On  voit  combien  il  était  facile  d'attribuer  à  une  jeune  fille 
à  laquelle  les  traditions  s'accordaient  à  donner  la  légèreté  et  le  goût  des 
exercices  violents,  et  la  lutte  à  la  course  avec  les  prétendants  en  vue 
d'éviter  le  mariage,  et  la  victoire  sur  le  sanglier  de  Calydon. 

3  Le  poème  dit  simplement  que  Tydée  avait  tué  un  de  ses  frères,  qu'il 
ne  nomme  pas.  Il  se  conforme  donc  à  la  tradition  classique,  qui  n'ad- 
met qu'un  meurtre. 

<  Cf.  Lactantius  Placidus,  ad  Statil  Theb,  I,  402  :  «  Tydeus  enim  fra- 
trem  Aphareiun,  quem  alii  Menalippum  vocant,  occidisse  dicitur,  alii 
Thoantem  avunculum,  fratrem  suae  matris.  » 


VARIETES  603 

rompue  ou  mal  comprise,  d'après  laquelle  l'auteur  du  roman  en  prose 
aura  voulu  corriger  le  poème  qui^  comme  nous  l'avons  démontré  ail- 
leurs *,  lui  a  certainement  servi  de  base. 

Le  fait  de  l'intercalation  de  l'histoire  d'Atalante  dans  un  des  ma- 
nuscrits n'a,  du  reste,  aucune  importance  pour  la  solution  de  la  ques- 
tion qui  se  pose  naturellement,  de  savoir  si  le  Roman  de  Thèbes  en 
prose,  a  eu  une  existence  indépendante,  ou  s'il  est  l'œuvre  de  l'auteur 
de  VHistoire  ancienne  2. 

Un  mot  maintenant  du  récit  en  lui-môme.  Le  début  manquant, 
nous  ne  pouvons  savoir  si  c'est  de  Vénus  qu'Hippomène  tenait  les 
trois  pommes  d'or,  mais  c'est  d'autant  plus  douteux  que,  dans  la  se- 
conde partie  du  récit,  il  n'est  point  dit  ici  que  les  deux  amants  aient 
été  poussés  à  profaner  le  temple  de  Cybèle  par  Vénus,  irritée  de  leur 
ingratitude  envers  elle  ^  :  c'est  seulement  leur  amour  mutuel  et  la 
contemplation  de  leur  beauté  qui  amènent  le  sacrilège.  La  punition 
n'a  rien  de  merveilleux  :  ils  ne  sont  pas  changés  en  lions  et  obligés 
de  traîner  le  char  de  Cybèle,  comme  le  veut  Fulgence,  ou  en  lion  et 
lionne  condamnés  à  ignorer  Taniour,  comme  le  disent  Hygin  et  Ser- 
vius^,  mais  simplement  dévcrés  par  un  lion.  On  peut  donc  supposer 
que  Vénus  a  été  absolument  écartée  par  l'auteur,  attentif  à  supprimer 
ce  qui  pouvait  choquer  des  chrétiens  scrupuleux.  Remarquons,  d  ail- 
leurs, que  Cybèle  est  devenu  un  dieu.  Notons,  à  ce  propos,  que  la 
source  directe  du  récit  n'est  ni  Hygin  ni  Fulgeuce,  puisque  le  pre- 
mier place  la  scène  dans  le  temple  de  Jupiter  sur  le  mont  Parnasse, 
et  que  le  second  la  place,  il  est  vrai,  dans  un  bois  consacré  à  la 
Terre,  mère  des  dieux,  par  Echion,  son  fils,  mais  n'emploie  pas  le  nom 
de  Cybèle  ;  or  notre  auteur  ne  pouvait  guère  savoir  que  la  Terre  et 
Cybèle  désignaient  une  seule  et  même  déesse. 

D'autre  part,  il  n'est  question,  ni  dans  l'un  ni  dans  l'autre  des 
mythographes,  du  temple  de  Saturne  où  se  célèbrent  les  noces  d'Ata- 
lante et  d'Hippomène.  Il  faut  donc  admettre  pour  le  récit  français 
une  source  indépendante,  probablement,  comme  nous  l'avons   déjà 

*  Roman  de  Thèbes ^  t.  II,  p.  cxxxv  sqq. 

*  Voy  Roman  de  Thèbes,  t.  II,  p.  cxxxviii. 

^  Cf.  Hygin,  fab.  185  :  «  Hanc  cum  in  patriam  duceret,  oblitus  béné- 
ficie Veneris  se  vicisse,  grates  ei  non  egit.  Irata  Venere,  in  monte  Par- 
nasso  cum  sacrificaret  Jovi  victori,  cupiditate  incensus,  cum  ea  in  fano 
concubuit  »  ;  et  Fulgentius  Planciades,  Argum.  Metamorph.,  fab.  11. 
«  Cujus  monitis  Hippomenes  conseciitus  victoriam,  postea  ingratus  ad- 
versus  deam  cognilus  est.  Itaque  impulsu  ejusdem  deœ,  etc. 

*  Les  anciens  croyaient  que  les  lions  n'avaient  de  rapports  sexuels 
qu'avec  des  animaux  d'une  autre  espèce.  Cf.  Servius,  aJQBwezrfalII,  113. 


604 


VARIETES 


dit,  un    texte  latin   qui  a  mis  à  contribution,   pour  certains  détails, 
Hygin  et  Fulgence. 

Léopold  CONSTANS. 


USAGE  DU  COMTÉ  DE  NICE 


A  Nice,  quand  viennent  les  roses,  chaque  soir  on  tourne  le  mai. 
Sous  une  couronne  de  fleurs  suspendue  au  carrefour  des  rues,  femmes, 
hommes  et  enfants  forment  une  ronde,  en  chantant  le  vieux  refrain 
du  rossignol. 


LOU  ROUSSIGNOU 


—  «  D'oun  ven  anàs,  filletta  ? 
Lou  roussignôu  que  vola, 
Lou  cavagnôu  au  bras. 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola, 
Lou  cavagnôu  au  bras, 
Lou  roussignôu  que  volera.  » 

—  «  Moussu,  puorti  d'ouranges, 
Lou  roussignôu  que  vola, 
Prene-ven,  se  ven  plas. 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola, 
Prene-ven,  se  ven  plas, 
Lou  roussignôu  que  volera.  » 

S'en  pren  miegïa  douzena, 

Lou  roussignôu  que  vola, 

Senza  la  li  pagà, 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola, 

Senza  la  li  pagà, 

Lou  roussignôu  que  volera. 

La  filla  qu'es  sagetta, 
Lou  roussignôu  que  vola. 
Si  va  mettre  à  plourar, 
Lou  roussignôu  que  vola,  vola 
Si  va  mettre  à  plourar, 
Lon  rousi^ignôu  que  volera. 


—  «  Que  n'avez-vous,  filletta, 
Lou  roussignôu  que  vola 
Que  non  fez  que  plourar  ? 
Lou  roussignôu  que  vola,  vola. 
Que  nous  fez  que  plourar, 
Lou  roussignôu  que  volera,  w 

—  «  N'en  plouri  mes  ouranges, 
Lou  roussignôu  que  vola, 
N'en  plouri  mes  ouranges, 
Que  non  m'avez  pagà, 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola. 

Que  non  m'avez  pagà, 

Lou  roussignôu  que  volera.  » 

Si  mette  man  en  boursa, 
Lou  roussignôu  que  vola. 
Cent  escus  ni  a  dounà, 
Lou  roussignôu  que  vola. 
Cent  escus  nia  dounà, 
Lou  roussignôu  que  volera.  » 

—  «  Donnas  à  vostre  pero, 
Lou  roussignôu  que  vola,  vola. 
Que  vous  la  gardera 

IjOU  roussignôu  que  volera.  » 


—  «  Moun  pero  es  capitani, 

Lou  ronssignôu  que  vola, 

Pagariè  lu  sourda, 

Lou  roussignôu  que  vola, 

Pagariè  lu  sourda, 

Lou  roussignôu  que  volera.  » 


VARIETES  605 

Dounàs  à  vostre  f rero 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola 

Que  nous  lai  gardera 

Lou  roussignôu  que  volera. 


—  «  Dounàs  à  vostra  mera, 
Lou  roussignôu  que  vola,  vola, 
Que  vous  lu  gardera 

Lou  roussignôu  que  volera.  » 

—  «  Ma  mèro  n'  a  de  filla, 
Lou  roussignôu  que  vola, 
Pourrie  li  maridar, 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola. 

Pourrie  li  maridar, 

Lou  ronssignôu  que  volera.  » 


--  <t  Moun  frère  es  un  giugaire, 

Lou  roussignôu  que  vola. 

Lu  mi  pourrie  giugar 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola. 

Lu  mi  pourrie  giugar 

Lou  roussignôu  que  volera.  » 

—  «  Ma  ici  que  sui  sagetta, 

Lou  roussignôu  que  vola. 

Ma  ici  que  sui  sagetta, 

Lou  roussignôu  que  vola,  vola, 

Lu  mi  suprar  gardar, 

Lou*  roussignôu  que  volera.  » 


Ou  encore  cet  autre  chant  populaire,  très  ancien  : 


«  Jeu  vau  au  bois  touta  sou- 


Madama  la  renà, 


[letta, 


Jeu  vau  au  bois  touta  souletta.  » 

—  «  Si  lo  rei  li  t'atrovà, 
Vilena  pouitoua, 

Si  lo  rei  li  t'atrovà  I  >> 

—  «  Che  mi  porria  faire, 
Madama  la  renà, 

Che  mi  porria  faire  ?  » 

—  «  Ti  f  aria  coupar  la  testa, 
Vilena  pouitoua, 

Ti  faria  coupar  la  testa.  » 

—  »  Lo  rei  es  mon  compera, 
Madama  la  renà, 

Lo  rei  es  mon  compera  ! 

—  «  E  jeu  seu  sa  comera, 
Vilena  pouitoua, 

E  jeu  seu  sa  comera.  » 


—  «  M'an  di  qu'aviàs  de  fia, 
Vilena  pouitoua, 

M'an  di  qu'aviàs  de  fia.  » 

—  «  Si  n'ai,  li  mi  manteni, 
Madama  la  renà. 

Si  n'ai,  li  mi  manteni.  » 

—  «  M'en  deuriàs  dona  una, 
Vilena  pouitoua. 

M'en  deuriàs  dona  una.  » 

—  «  Manco  la  mitan  d'una, 
Madama  la  renà, 

Manco  la  mitan  d'una.» 

—  <ï  Li  vou  rauberai  touti, 
Vilena  pouitoua, 

Li  vou  rauberai  touti.  » 

—  «  Eu  passan,  piaven  una, 
Madama  la  renà, 

En  passan  pia  ven  una.  » 

Vte  DE  COLLEVILLE. 


606  VARIETES 


CORRECTIONS  APPORTEES  AU  DICTIONNAIRE 

DE  GODEFROY, 

A  l'aide  du  dialecte  wallon 


«  Argaise,  agaisCf  s.  f .,  broussailles  ?  » 

Et  puis  après  si  s'en  tornerent 
Par  un  cassai  molt  ancien 
Que  destruit  avoient  payen  ; 
1j  argaise,  molt  Irez  haute  estoit, 
Nus  hom  de  car  n'i  heritoit, 
Car.  I .  lions  l'ot  si  gastee 
Et  le  pays  et  la  contrée, 
D'une  lieuè  tout  environ 
N'i  avoit  borde  ni  maison. 

{Gilles  de  Chin,  2747,Reiff.) 

De  deles  une  roce  s'est  li  bers  apuies, 

Voit  les  mons  et  les  vais,  les  regorsetles  bies 

Et  les  fieresa^ats<?5  et  lesdesrubes  gries. 

[Les  Chetifs,  Richel.,  12.558.  f>  I26«) 

Et  les  fieres  agaises  et  les  pendans  rochers. 
{Ih.,  255,  Hippeau). 

Faire  copper  a  ses  frais  touttes  les  rouisses,  espines  et  argaises, 
qui  sont  et  seront  aval  le  prêt  a  lui  loué. 

(1445.  Valenciennes,  ap    La  Fons.  Gloss.  ms,,  Bibl.  Amiens)  ». 

A  Liège,  on  dit  agâ,  voy.  le  Dictionnaire  de  Grandgagnage,  à  St- 
Hubert  agôôch',  f.  pL,  au  sens  de  scîhiste,  roche  schisteuse.  Les 
exemples  de  Godefroy  appuient  parfuiteuicnt  cette  interprétation. 
L'origine  du  mot  n'est  pas  encore  élucidée  dans  l'état  actuel  de  la 
dialectogie  wallonne.  Sous  sa  forme  vieux-française,  il  manqqe  dans 
le  dict.  de  Korting. 

II 

«  EssAUPiR,  V.  n.,  s'enflammer  »  : 

Aies  l'eschaufent  (le  cœur)  après  et  anbresent,  et  ses  funt  plux 
malement  essaupir  et  ardoir.  {Li  Epislre  Saint-Bernard  a  Mont 
Deu,  ms.  Verdun,  72,  f»  34,  v".)  » 


VARIÉTÉS  607 

Ce  mot  ne  signifie  pas  «  s'enflammer  ».  C'est  le  même  que  «  es- 
COPIR.  V.  n.,  démanger  »,  cité  par  Godefroy  à  un  autre  endroit.  Wall, 
de  Liège  haupi,  de  Couvin  (prov.  de  Namur)  chaupilli  (suJï.-iller), 
même  sens.  L'origine  du  mot  n'est  pas  encore  définitivement  établie, 
voy.  KôRTiNG,  Lat.'Voman.  WorCerbuchj  art.  2921. 

III 

«  EsBLARÉ,  adj.,  exprime  la  même  idée  que  bouffi  »  : 
Il  se  faut  abstenir  des  viandes  fort  froides   et  humides,    pour  ce 
qu'elles  font  le  visage  eshlaré  et  bouffi  pour  la  quantité   d'humeurs 
phlegmatiques  qu'elles  engendrent  (La  Framboisière,  Œuv.,  p.  199, 
éd.  1631)  ». 

Ici  encore  Godefroy  s'est  trop  laissé  guider  par  le  contexte.  Le 
mot  existe  en  Wallon,  par  exemple  à  Couvin  sblariy  au  sens  delivide, 
pâle.  Cette  signification  convient  parfaitement  à  l'unique  exemple 
mentionné.  L'étymologie  n'est  pas  élucidée  :  il  convient  peut-être  de 
faire  un  rapprochement  avec  l'ital.  shiadito,  pâle  (dérivé  comme  shia- 
(lato  de  blanc).  Mais  IV  est  difficilement  explicable  :  elle  pourrait  être 
parasite  comme  dans  le  fr.  sureau  (KôhTi'mG,  art.  7055)  et  dans  l'a. 
fr.  esbarir,  ébahir,  étonner  (Godefroy).  Le  mot  manque  encore  dans 

KÔRTING. 

Paul  Marchot. 
St-Hubert  (Belgique). 


UNE  BÉVUE  AMUSANTE 


Faisant  dernièrement  une  recherche  dans  les  Archives  historiques 
de  la  Gironde,  j'ai  rencontré  dans  la  table  chronologique  du  tome 
Xïl,  l'article  suivant,  bien  fait  pour  piquer  la  curiosité  : 

«  1483.  Le  tiers  des  manchots  et  des  bossus  périt  cette  année.  » 

Car  pourquoi  une  telle  mortalité  sur  ces  malheureux  ? 

Or,  recourant  au  texte  indiqué,  qui  est  la  Chronique  de  Blaye, 
voici  ce  que  j'ai  trouvé  (p.  18)  : 

«  En  l'an  m.  iiii^  iiii***.  m.  courut  en  si  grande  persécution  de 
manchault  et  de  bosse  que  bien  le  tiers  du  monde  mourut.  » 

Où  mauchauU,  car  c'est  ainsi  évidemment  qu'il  fallait  lire,  signifie 
mal  chaud,  et  bosse,  peste,  proprement  bubon  pestilentiel.  Voyez 
Du  Canere,  sous  Morbus  calidas  et  bossia. 

ce. 


BIBLIOGRAPHIE 


Les  Fables  de  La  Fontaine,  par  A.  Delboulle  ^. 

Il  vient  de  paraître  un  utile  complément  à  l'édition  savante  des 
Fables  de  La  Fontaine  que  la  maison  Hachette  a  publiée:  M.  Del- 
boulle a  réuni  dans  un  petit  livre  (Paris,  Bouillon,  1891)  un  certain 
nombre  de  traits  et  de  textes  qui  avaient  échappé  aux  annotateurs. 

Nous  nous  permettrons  de  faire,  au  courant  de  la  plume,  quelques 
additions  à  son  travail. 

Pourquoi  n'avoir  pas  glané  le  récit  de  l'aventure  du  Loup  et  de 
l'A  gneau"dtins  le  Par/e  disgracié  de  Tristan  qui  imagine  avec  bon- 
homie un  dénouement  moral?  Ne  fallait-il  pas  mentionner  aussi  l'al- 
lusion faite  par  Bruscambille  à  la  fable  au  Renard  qui  a  la  queue 
coupée  et  à  celle  du  Renard  et  du  Corbeau,  et  le  tour  original  que 
le  célèbre  farceur  donne  à  l'histoire  du  Pot  de  terre  et  du  Pot  de 
fer^? 

Une  satire  analogue  à  celle  de  la  Grenouille  qui  veut  se  faire  aussi 
grosse  que  le  bœuf  on  de  la  Montagne  qui  accouche  est  renfermée 
dans  ces  vers  de  Corneille  {Clitandre,  A,  III,  se.  5): 

IjO  courroux  d'une  femme,  impétueux  d'abord, 
Promet  tout  ce  qu'il  ose  à  son  impétueux  transport; 
Mais  comme  il  n'a  pour  lui  que  sa  seule  impuissance, 
A  force  de  j^rrossir  il  meurt  en  sa  naissance, 
Ou,  s'étoull'ant  lui-même,  à  la  fm  ne  produit 
Que  peu  ou  point  d'efl'et  après  beaucoup  de  bruit. 

L'Homme  entre  deux  âges  (I,  17) 

Avait  du  comptant 
Et  parlant 
De  quoi  choisir;  toutes  voulaient  lui  plaire. 

Les  galants  cavaliers  de  Joconde  se  fient,  autant  qu'à  d'autres,  à  ce 
moyen  de  conquête  : 

'     *  In-18.  Paris,  Kmile  Bouillon. 

2  Voir  Revue  des  langues  romanes^^^  série,  t.  XIII,  p.  145,  et  t.  XV, 
p.  305,  articlos  de  M.  Riyfal). 


BIBLIOGRAPHIE  609 

Nous  sommes  beaux,  nous  avons  de  l'esprit  ; 

Avec  cela  bonnes  lettres  de  change: 

Il  faudrait  être  bien  étrange 

Pour  résister  à  tant  d'appas, 

Et  ne  pas  tomber  dans  les  lacs 

De  gens  qui  sèmeront  l'argent  et  la  fleurette. 

Ce  n'est  pas  la  seule  fois  que  La  Fontaine  s'imite  lui-même.  Com- 
parez le  Chêne  et  le  Roseau  (1,  22),  et  ce  passage  d'une  lettre  à  sa 
femme,  où  il  parle  des  rampes  qui  descendent  jusqu'au  pied  du  château 
d'Amboise  :  «  Elles  touchent  ainsi  que  les  chênes  dont  parle  Virgile 

d'un  bout  au  ciel,  d'autre  bout  aux  enfers.  » 


Victor  Hugo  (Légende  des  siècles,  1"  série,  La  trompelte  du  ju- 
gement) repi'ésente  par  une  image  semblable  un  séraphin  qui 

Plongeait  profondément  sous  les  ténébreux  voiles, 
Du  pied  dans  les  enfers,  du  front  dans  les  étoiles. 

La  fable  de  la  Besace  (I,  7)  remet  en  mémoire  ces  lignes  de  Mon- 
taigne (1.  Ilï,  ch.  8)  :  «  Nos  yeux  ne  voient  rien  en  arrière:  cent  fois 
le  jour  nous  nous  moquons  de  nous  sur  le  sujet  de  notre  voisin,  et  dé- 
testons en  d'autres  les  défauts  qui  sont  en  nous  plus  clairement  et 
les  admirons  d'une  merveilleuse  impudence  et  inadvertance  *.  » 

Voyez  encore  sur  ce  point  La  Bruyère  {des  Jugements)  :«  Les  mê- 
mes défauts  qui,  dans  les  autres,  sont  lourds  et  insupportables, 
sont  chez  nous  comme  dans  leur  centre  ;  ils  ne  pèsent  plus,  on  ne  les 
sent  pas.  Tel  parle  d'un  autre  et  en  fait  un  portrait  affreux  qui  ne  voit 
pas  qu'il  se  plaint  de  lui-même.  » 

Ne  saurais-je  achever  mon  conte? 

s'écrie  le  poète  impatienté  contre  ceux  qui  ont  le  goût  difficile  (II, 
1).  ;Même  indépendance  de  Perrault  à  l'égard  de  la  critique  dans  la 
lettre  à  M***  en  lui  envoyant  Griselidis  :  «J'ai  eu  soin  de  corriger 
les  choses  qu'on  m'a  fait  voir  être  mauvaises  en  elles-mêmes;  mais 
à  l'égard  de  celles  que  j'ai  troJivées  n'avoir  pas  d'autre  défaut  que  de 
n'être  pas  au  goût  de  quelques  personnes,  peut-être  un  peu  trop  dé- 
licates, j'ai  cru  n'y  devoir  pas  toucher. 

Est-ce  une  raison  décisive 
D'ôter  un  bon  mets  d'un  repas, 
Parce  qu'il  s'y  trouve  un  convive 

1  V.  aussi  cette  fable  de  la  Besace  dans  le  livre  de  la  Royale  Prêtrise 
de  Pierre  de  Besse. 

41 


::!.-  --?>  «  -ul*. 

.:*—  •■«  ifurrages  de  T esprit,  26;: 
_  .:::  itf  fwikBdît  toai  entier  au  mi- 
.  — ij:  a.  croire  tous  les  censeurs 

.  *  r.  liu.çy^   A-  IV,  se.  5 

i>  -•  ;-r  lilrr  peur 

zjL-z    zsJxrt^  une  vaj»eiir. 


-  ^-.     «_       _  r-.  :li  r  T-.  :  «:  1:^  i  -unait  la  fièvre. 

; >  . .  __-   -  ■  ..s  :.  ■  ^-  **r  n:^  r&mi  Téritable   (VIII, 


'.  -_  ^.  _-:-     -I.  r-:i_  i  xt  1^  fait  pfur 

..j.ï.-cj    î:  ^.>  ..  ..  ..   .^-.."  .  '-r   .••.-lI*--5^    11,20    et  les  contes 

,..ï.-..^..\  .--i^ .  ..  :->  ijLi*  li  -¥.  1  if.-vs    I.  2,  541,  sqq  et  t,  3,  141). 

1,-.    ..■..  -..     '..*.:-.     .11.  *    cl  Le  p«  lit  conte  de  La  Fontaine 

:a;.;^-c  L.  ij»*,..-.  .  >=  .>:>*c!r.:*-.:i:  ijt  Li  fjrnie  do  trait  final. 

Nv*  .'  v..->.-:-.:i  .i>  ,  i«=  :.  .:r<  !•?<  n^iLi'il^s  sont  le  privilège  delà 

1.-.  .     .  ■  ;   ^  --..rr:  "  uJT'.  TJ  : -Ut  in^it  *e  l^irer 


>  »j>«» 


ci  ..V  »ci;.x?  Jt  5s.i-Ji;-c.'« r^nr^-jii    .>  ^i;?.'.  i'.«^« 


■>.-*.:....>::.:.  Ti-;-<:.  ;  ^nl^-je  t-n  hérita j^e? 


X    -»-  - ■     "    •  r^'lji  * 


K:i  îtioutio  J'.à.i:!c»,*  ies  5e«i.L':d?ns  w  U  mer  sont  le  berger  de  La 
Ko:t'w.i:ue  IV.  :.^  e;  le  iiiar-àduii  ie  Guez  de  Balzac  .Entrelien  VIU) 
^^  l  :i  •  a^vîo  lioi!::!îe  inf  Si  .île  menait  à  Païenne  une  barque  qu'il 
a\.i.;  criir-irvo  vie  ?U-es  :  :iiJL:>  Avunt  e:è  surpris  de  l'orage  à  la  vue  du 
j-.»:c,  t.  ;:  ce  .;  i  il  v  -:c  l'iire  fic  ce  se  saiver  en  perdant  sa  barque. 
i^uel;ue  toiui's  a:  re<,  ecaiit  assis  au  Icrd  de  la  mer,  qui  était  si  calme 
et  >L  riauce  quVlie  seiii-.'laiC  le  clavier  a  un  nouveau  vovage  :  je  sais 
bien  ce  que  tu  veux»  dit  le  Sicilien  à  la  mer;  tu  demandes  encore  des 
figues.  " 


BIBLIOGRAPHIE  611 

Le  dernier  vers,  dans  le  Cheval  s'étant  voulu  venger  du  Cerf  [lY^ 
13): 

Quel  que  soit  le  plaisir  que  cause  la  rengeance, 
C'est  l'acheter  bien  cher  que  Tacheter  d'un  bien 
Sans  qui  les  autres  ne  sont  rien, 

semble  être  une  réminiscence    de   Corneille   {l'Illusion   comique  A 
III,  se.  8): 

C'est  trop  prendre  de  soin  pour  empêcher  ma  perte, 

dit  un  personnage,  et  Tautre  de  répondre  : 

Je  n'en  puis  prendre  trop  pour  assurer  un  bien 
Sans  qui  tous  autres  biens  à  mes  yeux  ne  sont  rien. 

II  y  a  quelque  parenté  entre  certain  animal  de  la  fable  le  Cochet, 
le  Chat  et  le  Souriceau  (VI,  6  )  et  certains  galants  de  VÉcole  des 
femmes  (A.  III,  se.  I): 

De  tous  ces  damoiseaux  on  sait  trop  les  coutumes  : 
Ils  ont  de  beaux  canons,  force  rubans  et  plumes. 
Grands  cheveux,  belles  dents  et  des  propos  fort  doux, 
Mais,  comme  je  vous  dis,  la  griife  est  là-dessous; 
Et  ce  sont  vrais  Satans,  dont  la  gueule  altérée 
De  l'honneur  féminin  cherche  à  faire  curée. 

Quîmper-Corentin  est  donné  comme  le  plus  détestable  lieu  dans 
le  Chartier  embourbé  (VI,  18)  et  dans  les  Mémoires  chronologiques 
pour  servir  à  Vhistoire  du  clergé  de  1600  à  1716:  un  jésuite  ayant 
désobéi  anx  ordres  de  sa  Compagnie  et  mécontenté  Tarcbevêque  de 
Rouen  (1698),  le  P.  Ayraut,  vice-provincial,  annonce  au  prélat  la 
punition  du  coupable  :  il  est  «  envoyé  à  Kimper-Corentin . . .  peine  la 
plus  grande  qu'il  soit  en  mon  pouvoir  de  lui  imposer.  » 

Le  mariage  est  pareillement  déconseillé  par  \eMal  marie  (VII,  2)  ; 

J'ai  vu  beaucoup  d'hymens;  aucuns  d'eux  ne  me  tentent, 

et  par  les  Filles  des  Minée  : 

Fuyons  ce  nœud,  mes  sœurs,  je  ne  puis  trop  le  dire  : 
Jugez  par  le  meilleur  quel  peut  être  le  pire. 

Les  élèves  ne  comprenant  pas,  en  général,  dans  la  fable  précitée, 
l'expression  quatre  parts,  il  était  nécessaire  de  la  leur  expliquer: 

Cependant  des  humains  presque  les  quatre  parts 
S'exposent  hardiment  au  plus  grand  des  hasards  ; 
Les  quatre  parts  aussi  des  humains  se  repentent. 


612  BIBLIOGRAPHIE 

Quatre  parts  signifie  les  quatre  cinquièmes;  on  entend  toujours 
quand  il  s'agit,  comme  ici,  de  la  plus  grande  partie  d'un  tout,  qu'on 
n'en  excepte  qu'une  seule  division,  et  que  le  tout  se  compose  de 
toutes  les  parties  nommées,  plus  une.  C'est  ce  que  prouvent  les  ex- 
emples suivants  : 

Mais,  Monseigneur,  ce  que  demander  j'ose 
De  quatre  parts  n'est  pas  si  grande  chose. 

(Marot,  ép.  xliii.  Au  Dauphin  du  temps  de  son  exil  à  Fçrrare); 

Des  trois  les  deux  sont  morts 

(Corneille,  Horace)  ; 

«  des  robes  trop  amples  do  quatre  parties  »  (Pascal,  art.  III)  ;  «  il 
peut  consulter  les  trois  parties  des  écrits  de  nos  plus  grands  hom- 
mes »  (Jurieu,  Eclaircissement  de  quelques  passages  condamnés 
dans  Vexamen  du  livre  de  la  réunion])  «  peut-on  trouver  mauvais 
que  les  évêques  de  France...  ferment  la  porte  à  des  livres  qui  tra- 
vaillent à  convaincre  les  trois  parties  des  ecclésiastiques  et  des  pré- 
lats d'être  des  extravagants  et  des  impies  »  (Jurien,  VEsprit  de 
M,  Arnaud). 

La  Fontaine  parle  plaisamment  dans  cette  fable 

De  certaines  Philis  qui  gardent  les  dindons. 

Dans  une  lettre  à  sa  femme,  il  poétise  aussi  des  femmes  sordides 
en  les  nommant  «  Phillis  d'Egypte.  » 

Dieu  prodigue  ses  biens 
A  ceux  qui  font  vœu  d'être  siens, 

écrit  La  Fontaine  d'un  air  libertin  dans  le  Rat  retiré  du  monde 
(VII,  3).  Cette  vérité,  Bossuet  la  prêche  du  ton  le  plus  grave  dans  le 
Sermon  sur  Vambition  (rédaction  de  1666)  :  «  Et  ce  prince  (Josaphat) 
s'agrandissait  tous  les  jours,  parce  que  Dieu  était  avec  lui  ;  tant  il 
est  vrai  que  Dieu  prend  plaisir  à  protéger  la  puissance  qui  lui  rend 
hommage  et  qu'il  est  le  rempart  de  ceux  qui  le  servent.  » 

Les  choses  d'ici-bas  ue  me  regardent  plus, 

prétexte  doucement  le  solitaire  pour  ne  pas  écorner  son  avoir. 

Tous  les  biens  de  ce  monde  ont  pour  moi  peu  d'appas, 

soupire  Tartuffe  pour  arrondir  le  sien  en  captant  celui  d'Orgon. 
Enfin  nous  avons  beau  être  avertis  qu'il  s'agit  dans  cette  fable  d'un 


BIBLIOGRAPHIE  613 

dcrvis  et  non  d'un  moine,  elle  nous  fait  penser  aux  vers  de  Rutebeuf 
contre  ces  dévots  personnages 

Qui  vivent  des  biens  du  Seigneur. 
Tls  n'en  doivent,  selon  la  Bible, 
Prendre  que  le  suffisant  vivre, 
Et  pour  tout  le  reste  humblement 
Ils  devraient,  comme  biens  communs, 
Aux  pauvres  gens  le  départir; 
Mais  ils  verront  briser  le  cœur 
Du  pauvre,  par  maie  aventure, 
Par  grand  faim  et  par  grand  froidure, 
Quand  chacun  a  chape  fourrée, 
Et  de  deniers  de  grandes  bourses, 
Ses  pleins  coffres,  la  pleine  huche. 


il  est  riche  du  bien  de  Dieu, 
Et  Dieu  n'en  peut  aumône  avoir. 


(Vers  cités  par  M.  Clédat  dans  son  récent  livre  sur  Rutebeuf.  Paris, 
Hachette,  1891). 

Apres  les  Souhaits  (Vil,  6),  après  Jupiter  et  le  Métayer  {Y,4)y 
on  relit  encore  avec  plaisir  le  conte  de  Perrault,  les  Souhaits  ridi' 
cules,  et  Ton  en  tire  la  même  moralité. 

Dans  la  seconde  lettre  à  sa  femme,  La  Fontaine  avait  esquissé,  en 
prose,  quelques  traits  de  son  récit  poétique  le  Coche  et  la  Mouche 
(VII,  9)  :«  Dieu  voulut  enfin  que  le  carrosse  passât  :  le  valet  de  pied 
y  était  ;  point  de  moines,  mais  en  récompense  trois  femmes,  un  mar- 
chand qui  ne  disait  mot,  et  un  notaire  qui  chantait  toujours  et  qui 
chantait  très-mal  :  il  reportait  en  son  pays  quatre  volumes  de  chan- 
sons. »  Au  bas  d'une  montagne,  «  tout  ce  que  nous  étions  d'hommes 
dans  le  carrosse,  nous  descendîmes  afin  de  soulager  les  chevaux.» 
Gens  d'église  et  femmes  formaient  la  compagnie  que  d'ordinaire  on 
rencontrait  en  voyage  ;  c'est  ce  que  nous  apprend  à  son  tour  Jean 
Rou,  dans  un  passage  de  ses  Mémoires  (t.  II,  p.  321):  il  est  ques- 
tion des  barques  de  la  Loire,  «  qui,  aussi  bien  que  les  coches  et  les 
carrosses  sont  toujours  plus  remplis  de  femmes  et  de  prêtraille  que 
d'autre  sorte  de  gens.  » 

A  l'épilogue  de  la  Laitière  et  le  Pot  au  lait  (VII,  10): 

Qui  ne  fait  châteaux  en  Espagne? 

Chacun  songe  en  veillant,  etc. 

reliez  ces  mots  que  Vergier  en  souriant  écjivait  à  La  Fontaine  et 
qui  dépeignent  le  poète  :  «  Vous  êtes  le  premier  homme    du  monde 


614  BIBLIOGRAPHIE 

pour  faire  des  châteaux  en  Espagne,  et  puisque  vos  rêveries  sont  si 
agréables,  je  ne  m'étonne  plus  que  vous  vous  y  plaisiez.  »  Bossuet 
lui-même  fournit  un  beau  commentaire  des  réflexions  dont  La  Fon- 
taine fait  suivre  cette  fable  et  les  deux  Chiens  et  l'Ane  mort  (VIII, 
25)  :  «  L'espérance  dont  le  monde  parle  n'est  autre  chose,  à  le  bien 
entendre,  qu'une  illusion  agréable  ;  et  ce  philosophe  l'avait  bien 
compris,  lorsque  ses  amis  le  priant  de  leur  définir  l'espérance,  il  leur 
répondit  en  un  mot:  «  C'est  un  songe  de  personnes  qui  veillent:» 
Somnium  vigilantium.  Considérez,  en  effet,  Messieurs,  ce  que  c'est 
qu'un  homme  enflé  d'espérance.  A  quels  honneurs  n'aspire-t-il  pas  ? 
Quels  emplois,  quelles  dignités  ne  se  donne-t-il  pas  à  lui-même?  11 
nage  déjà  parmi  les  délices,  et  il  admire  sa  grandeur  future.  Rien  ne 
lui  paraît  impossible  :  mais  lorsque,  s'avançant  dans  la  carrière  qu'il 
s'est  proposée,  il  voit  naître  de  toutes  parts  des  difficultés  qui  l'ar- 
rêtent à  chaque  pas,  lorsqueja  vie  lui  manque,  comme  un  faux  ami 
au  milieu  de  ses  entreprises  ou  que,  forcé  par  la  rencontre  des  cho- 
ses, il  revient  à  son  sens  rassis,  et  ne  trouve  rien  en  ses  mains  de 
toute  cette  haute  fortune  dont  il  embrassait  une  vaine  image,  que 
peut-il  juger  de  lui-même  ,  sinon  qu'une  espérance  trompeuse  le 
faisait  jouir  pour  un  temps  de  la  douceur  d'un  songe  agréable?  Et 
ensuite  ne  doit  il  pas  dire,  selon  la  pensée  de  ce  philosophe,  que  l'es- 
pérance peut  être  appelée  «  la  rêverie  d'un  homme  qui  veille.  »  Som^ 
nium  vigilantium?  » 

Perdait-on  un  chiffon,  avait-on  un  amant  ? 

....  chez  la  devineuse  on  courait 
Pour  se  faire  annoncer  ce  que  l'on  désirait. 

(Les  Devineresses  (VII,  15.) 

Ainsi  fait  le  personnage  du  Florentin,  se.  8,  v.  388-89: 

Il  voulut  consulter  une  devineresse 
Pour  voir  s'il  serait  seul  maître  de  mes  appas. 

Ajoutez  à  la  note  de  l'édition  Régnier  sur  le  mot  méchant,  dans  le 
Rieur  et  les  poissons  (VIII,  8),  un  renvoi  à  l'histoire  de  ce  terme,  que 
M.  Revillout  a  insérée  dans  la  Revue  des  Langues  romanes  (3®  série, 
t.  XV,  p.  77). 

Ce  tableau  encadré  dans  le  Rat  et  V éléphant  (VIII,  15)  : 

Sur  l'animal  à  triple  étage, 

Une  sultane  de  renom, 
Son  chien,  son  chat  et  sa   guenon, 
Son  perroquet,  sa  vieille  et  toute  sa  maison 
S'en  allait  en  pèlerinage, 


BIBLIOGRAPHIE  615 

La  Fontaine  n'en  a-t  il  pas  fait  comme  un  premier  crayon  dans 
cette  lettre  à  sa  femme  (lett.  4)  où  est  décrit  un  cortège  de  «  héros 

gusraanesques  »,  accompagnés  de  quelques  «  Phillis   d'Egypte 

traînant  après  elles  des  douegnas  détestables  à^iroportion. . .  Le  ba- 
gage marchait  en  queue,  partie  sur  chariots,  partie  sur  bêtes  de  somme; 
puis  quatre  carrosses  vides  et  quelques  valets  à  l'entour, 

Non  sans  écureuils  et  turquets  (1), 
Ni,  je  pense,  sans  perroquets.  » 

Malgré  les  protestations  de  La  Fontaine  dans  VHoroscope  (VIII, 
16)  et  dans  les  derniers  vers  de  V Astrologue  qui  se  laisse  tomber 
dans  un  puits  (II,  13j  : 

Charlatans,  faiseurs  d'horoscope. 
Quittez  les  cours  des  princes  de  l'Europe, 

ses  contemporains  faisaient  grand  état  de  l'art  de  prédire.  Mazarin 
avait  donné  l'exemple  de  cette  superstition.  La  comtesse  de  Soissons, 
dont  le  jeune  roi  s'était  épris,  avait  cru  pouvoir  aspirer  au  trône  ;  Ma- 
zarin, «  son  oncle,  qui  l'aimait  fort,  n'avait  pas  été  éloigné  du  dessein 
de  l'y  faire  monter  ;  mais  tous  les  faiseurs  d'horoscope  l'avaient  tel- 
lement assuré  qu'elle  ne  pourrait  y  parvenir,  qu'il  en  avait  perdu  la 
pensée  et  l'avait  mariée  au  comte  de  Soissons.  9  (Vie  d'Henriette 
d'Angleterre  par  Mme  de  La  Fayette.) 

Le  XVII*  siècle  a  connu  le  métier  de  couturier.  Le  gros  bourgeois 
(rAvantage  de  la  science,  VII,  19)  se  vantait  d'enrichir 

Celui  qui  fait  la  jupe 
Et  celle  qui  la  porte. 

Une  des  femmes  compromises  dans  l'enquête  de  l'affaire  des  poi- 
sons, M™e  Vigoureux,  était  mariée  précisément  à  un  «  tailleur  d'habits 
de  femme.  « 

Le  dédain  du  financier  de  La  Fontaine  (même  fable)  pour  les  sa- 
vants : 

Ils  sont  toujours  logés  à  la  troisième  chambre, 

était  professé  et  motivé  de  même  au  XVIII®  siècle  par  le  maréchal  de 
Castries  qui  s'écriait  avec  indignation  :  «  Mon  Dieu  !  partout  où  je 
vais,  je  n'entends  parler  que  de  ce  Rousseau  et  de  ce  Diderot.  Con- 
çoit-on cela?  Des  gens  de  rien,  qui  n'ont  pas  de  maison,  qui  sont 
logés  au  troisième  étage  !  » 

(1)  Petits  chiens. 


G16  BIBLIOGRAPHIE 

A  propos  de  la  fable  Le  Dépositaire  infidèle  (IX,  l)et  des  hâbleurs 
dont  chaciiD  a  vu  plus  gros  que  l'autre  pourraient  être  citées  partie  de 
la  lettre  du  15  juillet  1G71,  où  Mme  de  Sévigné  se  moque  si  joliment 
d'une  «  exagéreuse  >»,  et  cette  anecdote  prise  dans  Talleraant  des 
Réaux  :  •  Un  chevalier  menteur  disait  avoir  vu  une  église  de  mille 
pas  de  long  :  son  valet  voulant  l'interrompre  par  un  démenti,  il  dit 
aussitôt  pour  raccommoder  la  chose  :  et  deux  de  large.  Comme  il  vit 
qu'on  riait:  C'est  ce  coquin  qui  en  est  cause,  savs  lui  je  Tallais  faire 
carrée.  » 

Dans  VEcolier  le  pédant  et  le  maître  d\in  jardin  (IX,  5),  La  Fon 
taine  s*anime  contre 

le  privilège 
Qu'ont  les  pédants  de  gâter  la.  raison  ^ 

Marot  (ép.  43)  malmène  aussi  fort  ses  maîtres  : 

En  effet  c'estoient  de  grans  bestes 
Que  les  régens  du  temps  jadis. 

N'est-ce  pas  comme  une  ébauche  de  Jupiter  et  le  passager  (IX, 
13)  que  ce  récit  de  La  Fontaine  à  sa  femme  (lett.  3)  :  «  J'avais  pro- 
mis de  sacrifier  aux  vents  du  midi  une  brebis  noire,  aux  zéphirs,  une 
brebis  blanche  et  à  Jupiter,  le  plus  gros  bœuf  que  je  pourrais  rencon- 
trer dans  le  Limousin  ;  ils  nous  furent  tous  favorables.  Je  crois,  tou- 
tefois, qu'il  suffira  que  je  les  paie  en  chansons,  car  les  bœufs  du  Li- 
mousin sont  trop  chers,  et  il  y  en  a  qui  se  vendent  cent  écus  dans  le 
pays.  »  Rapprochez  de  la  même  fable  cette  lettre  de  Nicaise  à  Huet 
(l*^»"  août  1697.  Documents  inédits  publiés  par  L'-G.  Pélissier)  :  «  11 
(Santeuil)  ne  se  souviendra  plus  de  nous,  lorsqu'il  sera  à  Paris,  et 
qu'on  lui  aura  donné  ce  qu'il  demande  :  du  vin  et  de  l'argent.  Il  sera 
comme  ceux  qui  ont  reçu  des  grâces  d'un  saint  et  qui,  après  avoir 
échappé  au  péril,  s'en  moquent  :  passato  il  pericolo,  garbato  il 
santo.  » 

Sans  ressembler  le  moins  du  monde  à  Raton,  La  Fontaine  n'a-t-il 
pas  été  joué  par  Lulli,  comme  Raton  par  Bertrand  ?  (IX,  16.)  Le  mu- 
sicien avait  proposé  au  poète  de  faire  de  concert  un  opéra: 

Voici  comment  il  nous  faudra 

Partager  le  gain  de  l'affaire. 
Nous  en  ferons  deux  lots,  l'argent  et  les  chansons  : 

L'argent  pour  moi,  pour  toi  les  sons  ; 
Tu  t'entendras  chanter,  je  prendrai  les  testons; 

Volontiers  je  paye  en  gambades, 

J'ai  huit  ou  dix  trivelinades 


BIBLIOGRAPHIE  617 

Que  je  sais  sur  mon  doigt  ;  cela  joint  à  l'honneur 
De  travailler  pour  moi,  te  voilà  grand  seigneur. 
Peut-être  n'est-ce  pas  tout  à  fait  sa  harangue: 
Mais  s'il  n'eut  ces  mots  sur  la  langue, 
Il  les  eut  dans  le  cœur.  Il  me  persuada. 

Même  répugnance  à  admettre  rautomatisme  des  bêtes  dans  le 
Discours  à  M^-  de  La  Sablière,  les  Deux  Eats^  le  Renard  et  l'œuf 
(fin  du  livre  IX),  et  la  lettre  de  ]VP^®  de  Scudéry  à  M^'c  Descartes 
(éd.  Rathery)  :«  Ma  croyance  en  faveur  de  mon  chien  n'ôte  rien  de 
l'estime  infinie  que  j'ai  pour  feu  M.  votre  oucle.  Ce  n'est  pas  l'ami- 
tié que  j'ai  pour  les  animaux  qui  me  prévient  à  leur  avantage,  c'est 
celle  qu'ils  ont  pour  moi  qui  me  prévient  en  leur  faveur.  » 

Voyez  encore  cette  lettre  à  Huet:  «  Il  y  a  longtemps  que  je  me 
suis  déclarée  contre  certaines  machines  extérieures,  sans  employer 
pourtant  contre  le  philosophe  que  mon  chien,  ma  guenon  et  mon  per- 
roquet. » 

Ajoutez  l'épitaphe  de  la  petite  chienne  de  M^^«  de  Scudéry  : 

Ci-gît  la  célèbre  Badine, 
Qui  n'eut  ni  beauté  ni  bonté, 
Mais  dont  l'esprit  a  démonté 
Le  système  de  la  machine. 

Aux  exemples  énumérés  par  La  Fontaine,  joignez  aussi  celui  que 
rapporte  son  presque  homonyme  Fontaine  dans  ses  Mémoires  sur 
Port-Royal  (t.  11,  p.  470)  :  «  M.  Arnauld,  qui  était  entré  dans  le  sys- 
tème de  Descartes  sur  les  bêtes,  soutenait  que  ce  n'était  que  des 

horloges M.  de  Liancourt  lui  dit  :  «  J'ai  là-bas  deux  chiens  qui 

tournent  la  broche  chacun  leur  jour  ;  l'un  s'en  trouvant  embarrassé  se 
cacha  lorsqu'on  l'allait  prendre,  et  on  eut  recours  à  son  camarade 
pour  tourner  au  lieu  de  lui.  Le  camarade  cria  et  fit  signe  de  la  queue 
qu'on  le  suivit.  Il  alla  dénicher  l'autre  dans  le  grenier  et  le  houspilla. 
Sont-ce  là  des  horloges?  dit-il  à  M.  Arnauld,  qui  trouva  cela  si  plai- 
sant qu'il  ne  put  faire  autre  chose  que  d'en  rire.  » 

Bossuet  [Sermon  sur  les  démons,  1653)  sert  une  nouvelle  fois  à 
commenter  La  Fontaine  :  «  Et  de  même  que  ce  qui  nous  paraît  quel- 
quefois de  si  subtil  et  si  inventif  dans  les  animaux  n'est  qu'une  om- 
bre des  opérations  immortelles  de  l'intelligence  des  hommes,  ainsi 
pouvons  nous  dire  en  quelque  sorte  que  les  connaissances  humaines 
ne  sont  qu'un  rayon  imparfait  de  la  science  de  ces  esprits  purs  dont 
la  vie  n'est  que  rayon  et  intelligence.  » 

Consultez  enfin  l'ouvrage  de  Meunier  sur  les  Animaux  perfecti- 
bles et  celui  de  Romanes  sur  rintcllir/'?nce  des  animaux. 


«18  BIBLIOGRAPHIE 

I>a  piquante  histoire  du  berger  devena  ministre  et  de  sa  disgrâce 
'X,  0;  invite  à  se  défier  de  la  faveur  des  rois.  Avec  plus  de  force  en- 
core, Bossuet  met  en  garde  contre  les  dangers  de  la  cour  par  le  ta- 
bleau qu'il  en  fait  dans  le  premier  panégvriqîie  de  Franc :)is  de  Paale: 
t'  La  cour  qu*il  a  surmontée  a  des  flammes  plus  dévorantes,  elle  a  des 
écueiU  plus  dangereux  ;  et  bien  que  les  inventions  hardies  de  Tex- 
preuion  poétique  niaient  pu  nous  représenter  la  mer  de  Sicile  si 
horrible  que  la  nature  Ta  faite,  la  cour  a  des  vagues  plus  furieuses, 
des  abimes  plus  creux  et  des  tempêtes  plus  redoutables.  Comme  c'est 
de  la  cour  que  dépendent  toutes  les  affaires  et  que  c'est  aussi  là 
qu'elles  aboutissent,  Tenncmi  du  genre  humain  y  jette  tous  ses  appas, 
y  étale  toute  sa  pompe.  Là  est  Tempire  de  l'intérêt  ;  là  est  le  théâ- 
tre des  passions  ;  là  elles  se  montrent  les  plus  violentes;  là  elles 
«ont  les  plus  déguisées.  Voici  donc  François  de  Paule  dans  un  nou- 
veau monde.  Il  regarde  ce  mouvement,  ces  révolutions,  cet  empres- 
sement éternel,  et  uniquement  pour  des  biens  périssables  et  pour  une 
fortune  qui  n'a  rien  de  plus  assuré  que  sa  décadence;  il  croit  que 
Dieu  ne  l'a  amené  en  ce  lieu  que  pour  connaître  mieux  jusqu'où  se 
peut  porter  la  folie  des  hommes.  » 

L'explication  du  mot  drille  dans  le  Fermier,  le  Chien  et  le  Re^ 
nard  (XI,  3): 

On  vous  sangla  le  pauvre  drille 

est  savamment  donnée  par  M.  Revillout  dans  la  Revue  des  langues 
romanes  (t.  2,  p.  38). 
Voyez  aussi  les  vers  en  ille,  où  M""'  Deshoulières  parle  du 

divin  drille 
Qui  vient,  au  sortir  des  combats, 
Se  délasser  entre  tes  bras. 

Et  enfin  relisez  dans  le  Roman  comique  de  Scarron  (2®  partie, 
ch.  VI)  ces  lignes  sur  un  homme  qui  revient  dans  son  village  après 
avoir  longtemps  porté  les  armes  :  «  Ses  cheveux  de  drille  plus  longs 
que  ceux  des  autres  paysans  du  village,  ses  serments  à  la  soldate. . . 

et  une  vieille  épée  rouillée  qui  lui  battait  de  vieilles  bottes, 

donnèrent  dans  la  vue  d'une  vieille  veuve  qui  tenait  rhôtellerie.  » 

11  ne  faut  point  juger  des  gens  sur  l'apparence,  La  Fontaine  nous 
on  avertit  dans  Le  Paysan  du  Danube  (XI,  7)  et  Pline  dans  la  lettre 
25  du  liv.  Vil  :  «  Sunt  enim  ut  iu  castris  sic  etiam  in  litteris  nostris 
plures  cul  ta  pagano,  quos  cinctos  et  armatos,  et  quidem  ardentis- 
simo  ingcnio,  diligenter  scrutatus  invenies.  » 

Le  sentiment  de  la  vie  universelle  se  ti'aduit  dans  l'épilogue  du 
livre  XI  dos  Fables, 


BIBLIOGUAPHIE  619 

Car  tout  parle  dans  l'univers  ; 
Il  n'est  rien  qui  n'ait  son  langage, 

et  dans  le  Pâtre  et  le  Lion  (VI,  I)  et  non  moins  dans  ces  vers  de 
Victor  Hugo  [l'Art  d'être  grand-père,  IV,  2)  : 

Les  bêtes,  cela  parle 


C'est  dans  Perrault  un  fait,  dans  Homère  un  prodige  ; 

Phèdre  prend  leur  parole  au  vol  et  la  rédige  ; 

La  Fontaine,  dans  l'herbe  épaisse  et  le  genêt 

Rôdait,  guettant,  rêvant,  et  les  espionnait  ; 

Esope,  ce  songeur  bossu  comme  le  Pinde, 

Les  entendait  en  Grèce,  et  Pilpaï  dans  l'Inde, 

Les  clairs  étangs  le  soir  offraient  leurs  noirs  jargons 

A  monsieur  Florian,  officier  de  dragons  ; 

Et  l'àpre  Ézéchiel,  l'affreux  prophète  chauve, 

Homme  fauve  écoutait  parler  la  bête  fauve. 

Les  animaux  naïfs  dialoguent  entre  eux. 

Et  toujours,  que  ce  soit  le  hibou  ténébreux. 

L'ours  qu'on  entend  gronder,  l'àne  qu'on  entend  braire, 

Ou  l'oie  apostrophant  le  dindon  son  grand-père. 

Ou  la  guêpe  insultant  l'abeille  sur  l'Hybla, 

Leur  bêtise  à  l'esprit  de  l'homme  ressembla. 

L*exeraple  d'Harpagon  tendant  un  piège  à  Cléante  pour  savoir  s'il 
aime  Mariane  ei  la  lui  refusant  prouve,  comme  le  Chat  et  le  vieux 
Rat  (XII,  6),  que 

La  vieillesse  est  impitoyable, 

surtout  celle  d'un  avare. 

Au  commentaire  de  la  fable  le  Renard,  les  mouches  et  le  hérisson 
(XII,  13)  s'ajouterait  tout  naturellement  ce  passage  d'une  lettre  de 
P.  Bayle  à  Minutoli  (éd.  Gigas.  Paris,  Didot,  1890):  «Je  quitte  un 
chicaneur  pour  me  sauver  de  son  impunité,  et  je  me  jette  entre  les 
bras  d'un  opiniâtre  qui  me  fit  cent  fois  plus  de  mal  que  n'aurait  fait 
le  chicaneur.  Je  me  repens  encore  de  n'avoir  pas  imité  ce  gueux  qui 
avait  la  main  effroyablement  galeuse  et  qui  ne  chassait  pourtant  point 
les  mouches  qui  y  venaient  faire  curée,  parce  que,  disait-il,  s'il  les 
eût  chassées,  il  en  serait  venu  d'autres  à  jeun,  et  l'auraient  plus  tour- 
menté »  (17  sept.  1674). 

A  la  fin  de  la  fable  le  Corbeau,  la  gazelle,  la  tortue  et  le  rat 
(XI r,  15)  La  Fontaine  distingue /'amii/e  violente  de  Ta mowr.  Cepen- 
dant il  ne  laisse  pas  de  parler  de  son  amitié  violente  à  Mme  Uhrich, 
qui  lui  avait  inspiré  une  forte  passion,  bien  qu'il  eût  passé  le  temps 
d'aimer. 


620  BIBLIOGHAPIIIE 

Après  l'éloge  de  l'amitié  par  La  Fontaine  (môme  fable  et  les 
Deux  amis,  VIII,  11),  écoutez  les  belles  paroles  deCicéron  sur  ce 
sujet  :  «  quid  dulcius  qnam  habere  quicum  omnia  audeas  sic  loqui  ut 
tecum,  etc  »  (de  Amicilia,  ch.  VI). 

Le  sage  que  met  en  scène  le  poète  dans  le  Philosophe  scythe  (XII, 
20) 

De  SCS  arbres  à  fruit  retranchait  l'inutile, 
Ebranchait,  émondait,  ôtait  ceci,  cela, 


Le  reste  en  profite  d'autant  : 


Le  chrétien  ne  perdra  pas  à  se  régler  sur  ce  modèle,  témoin  Bos- 
suet  [Sermon  sur  la  soumission  à  la  loi  de  Dieu,  1666)  .  «  Celui-là  est 
un  homme  fait  et  un  véritable  sage  qui,  comme  dit  le  docte  Synésius, 
ne  se  fait  pas  une  obligation  du  soin  de  contenter  ses  désirs,  mais  qui 
sait  régler  ses  désirs  suivant  ses  obligations,  et  qui,  sachant  peser 
mûrement  combien  la  nature  est  féconde  en  mauvaises  inclinations, 
retranche  de  çà  et  de  là,  comme  un  jardinier  soigneux,  tout  ce  qui  est 
gâté  et  superflu,  afin  de  ne  laisser  croître  que  ce  qui  est  capable  de 
porter  les  fruits  d'une  véritable  sagesse. 

»  Mais  les  arbres  ne  se  plaignent  pas  quand  on  les  coupe  pour  re- 
trancher et  diminuer  l'excès  de  leurs  branches,  et  la  volonté  réclame 
quand  on  retranche  ses  désirs.  » 

A  la  vérité  La  Fontaine  ne  s'accordait  pas  avec  Bossuet  sur  les 
passions  à  retrancher;  l'amour  lui  semblerait  singulièrement  bon  à 
garder,  pourvu  qu'il  n'apportât  pas  trop  de  trouble  dans  l'âme. 

La  comparaison  qui  se  trouve  chez  le  prédicateur  et  chez  le  fabu- 
liste avait  été  faite  en  1665  dans  une  oraison  funèbre  du  roi  d'Espagne: 
*c  M.  l'évêque  de  Mâcon,  ci-devant  le  Père  Le  Boultz,  évêque  d'Acqs, 

l'avait  loué  de  prudence  d'avoir  retranché  une  partie  de  ses 

états  pour  conserver  le  reste,  et  l'avait  comparé  à  un  jardinier  qui 
coupait  les  branches  superflues  d'un  arbre  pour  le  rendre  plus  beau.» 
[Journal  d'Olivier  d'Ormesson,t.  II,  p.  411.  Édit.  Chéruel.) 

Comme  le  poète,  Vauvenargues(voir  VÉlude  de  Paléologue,  p.  105), 
dans  une  lettre  à  Mirabeau,  tient  les  passions  pour  le  principe  de 
toute  activité:  «  C'est  une  folie  de  les  combattre,  car  la  vie  sans  pas- 
sions ressemble  à  la  mort,  et  je  compare  un  homme  sans  passion  à 
un  livre  de  raisonnements:  il  n'a  pas  la  vie  en  lui,  il  ne  sent  point, 
il  ne  jouit  de  rien,  pas  même  de  ses  pensées.  » 

Puisqu'il  s'agissait  de  compléter  l'édition  Régnier,  peut-être  M.  Del- 
boulle  eut-il  bien  fait  de  recueillir  les  exemples  que  nous  avons  cités. 
Mais  les  livres  comme  le  sien  sont  toujours  susceptibles  d'être  aug- 
mentég,  et  c'est  un  défaut  à  éviter  que  de  les  farcir  de  détails  oiseux. 


CHRONIQUE  621 

M.  Delboulle,  aussi  heureusement  servi  par  son  goût  que  par  son 
érudition,  a  présenté  à  ses  lecteurs  plusieurs  textes  peu  connus,  cu- 
rieux, intéressants  et  propres  à  faire  plus  justement   apprécier  par  la 

comparaison  les  fables  de  La  Fontaine. 

Gaston  Rabaud. 


CHRONIQUE 


L'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  dans  sa  séance  du 
28  mars  1890,  a  décerné  le  prix  Jean  Keynaud,  le  plus  considérable  de 
ceux  dont  elle  dispose,  à  Frédéric  JMistral,  pour  son  dictionnaire  pro- 
vençal-françîiis,  Lou  Trésor  dôu  Felibrige.  Félicitons  l'Acadéniie 
d'une  décision  qui  l'honore.  Mais  combien  plus  ne  s'honorerait-elle  pas 
eu  appelant  dans  son  sein  l'érudit  et  le  philologue  qu'elle  a  couronné, 
et  en  donnant  ainsi  un  exemple  et  une  leçon  à  l'Académie  française, 
qui  s'obstine  à  traiter  le  poëte  de  Mlrèio  et  du  Tambour  iVArcole 
comme  un  étranger? 

Nous  sera-t-il  permis  d'exprimer,  à  propos  du  Trésor  du  Felibrige, 
puisque  l'occasion  s'en  présente,  le  vœu  de  voir  publier  à  l'usage  des 
étudiants,  et  en  général  du  grand  public,  un  abrégé  de  cet  admirable 
répertoire,  dans  le  genre  de  celui  qu'on  a  fait  du  dictionnaire  de  Lit- 
tré  ?  On  pourrait,  pensons-nous,  en  sacrifiant  la  plus  grande  partie  des 
exemples,  et  peut-être  un  certain  nombre  de  mots  d'un  caractère  sur- 
tout scientifique,  dont  leur  ressemblance  avec  le  français  assure  l'intel- 
ligence immédiate,  condenser  l'indispensable  en  un  volume  grand 
in-8",  d'un  prix  abordable  aux  petites  bourses.  Il  y  a  tant  à  apprendre 
dans  le  Trésor,  et  nos  études  peuvent  en  retirer  un  si  grand  profit 
que  tous  nos  lecteurs,  nous  n'en  doutons  pas,  comme  tous  les  roma- 
nistes, s'associeront  au  vœu  que  nous  prions  ici  notre  cher  maître  de 
vouloir  bien  réaliser.  C'est  un  lieu  commun  chez  les  anciens  poètes 
provençaux  qu'un  trésor  caché  est  un  trésor  perdu.  Or  n'est-ce  pas  un 
trésor  caché  aux  yeux  des  neuf  dixièmes  de  ceux  qui  auraient  besoin 
d'y  puiser,  que  celui  dont  on  ne  peut  approcher  qu'au  prix  d'un  sacri- 
fice pécuniaire  que  leurs  ressources  leur  interdisent  ? 

o 
o  o 

L'Aibli,  tel  est  le  titre  d'un  journal  provençal,  fondé  par  Frédéric 
Mistral,  et  auquel  nous  souhaitons  longue  vie  et  prospérité.  Ce  journal 
doit  paraître  trois  fois  par  mois  à  partir  du  7  janvier  1891 . 

«  11  coûtera  lOfr.  par  an  et  aura  pour  directeur  M.  Folco  de  Baron- 
celli  et  pour  collaborateurs  les  meilleurs  écrivains  de  la  renaissance 
provençale. 

y^liAibli,  indépendant  de  tous  les  partis,  n'aura  d'autre  programme 
que  le  maintien  et  la  défense  de  la  cause  du  Midi,  de  ses  coutumes,  de 
sa  langue,  de  ses  traditions  ethniques,  et  même  de  ses  intérêts,  il 
sera  loyalement,  gaiement  autant  que  possible,  un  redresseur  de  torts, 
le  chevalier  de  la  Reine  Jeanne  et  de  la  Belle  Maguelone.  » 

Et  puisqu'il  est  question  de  la  Reine  Jeanne,  n'oublions  pas  d'ins- 


622  CHRONIQUE 

dire  ici  la  bonne  nouvelle  de  la  publication,  si  impatiemment  attendue, 
de  la  tragédie  la  Rèino  Jano  (l^aris,  Alphonse  Lemerre.  petit  în-8®). 
Ce  beau  poëme  dramatique  de  Tauteur  do  Calendal  sera  d'ailleurs 
l'objet  d'un  compte -rendu  détaillé,  de  la  part  d'un  de  nos  collabora- 
teurs, dans  un  des  prochains  numéros  de  la  Revue, 

o 
o  o 

Almanach'Anyiuaire   limousin 1891.  Limoges,  H.  Ducour- 

tieux,  inl2.  Cet  almanach,  outre  les  renseignements  administratifs, 
commerciaux  et  autres,  que  l'on  demande  aux  publications  pareilles, 
contient  sous  le  titre  général  de  Partie  historique,  des  travaux  de 
genres  variés,  dont  plusieurs  sont  de  nature  à  intéresser  nos  lecteurs. 
{Signalons  en  premier  lieu  un  article  plein  d'attrait  de  M.  C,  Leymarîe 
sur  les  chansons  rustiques  du  Limousin  (pp.  144-172),  qui  fait  vive- 
ment désirer  que  l'auteur,  comme  il  en  manifeste  d'ailleurs  le  dessein, 
reprenne  un  jour  ce  beau  sujet  pour  le  traiter  avec  l'ampleur  qu'il 
mérite.  On  y  lira  encore  avec  profit,  p.  103-108,  un  bon  chapitre  d'his- 
toire de  M,  Louis  Guibert,  intitulé  les  Syndics  de  commerce  à  Li- 
moges ^  et  p.  118-126,  des  considérations  pleines  de  justesse  de 
M.  Leroux  sur  la  situation  géographique  de  Limoges  et  ses  consé- 
quences. Mentionnons  de  plus,  p.  133,  un  conte  en  patois  signé  Ma- 
nicou  et  intitulé  l'Étang  du  lait  (VEitan  dôu  la), 

c 
o  o 

Almanach' Annuaire  de  la  Creuse.  1891.  Guéret,  Pierre  Lestang, 
in-12. —  Dans  la  partie  littéraire  et  scientifique  de  cet  almanach 
(pp.  129-176),  nous  avons  à  signaler  et  à  recommander  tout  particu- 
lièrement un  conte  en  patois  d'Aliun,  signé  de  notre  collaborateur 
M.  le  docteur  Vincent,  et  qui  a  pour  titre  le  Mearle  dou  Carnavas. 
Mentionnons,  en  outre,  une  chanson  patoise  anonyme  intitulée  lou 
choix  dUn  gendre  (p.  153). 


Errata  des  deux  numéros  précédents 

P.  213,  1.  22,  lire  clxxii[ij]. 

P.  213,  l   23,  lire  clxxxiQ]. 

P.  216,1.  26,  a  405  »;  lis.  4505. 

P.  218,  1.  34,  rétablir  sa  et  supprimer  la  note. 

P.  220,  n.  2. 1.  3,  mettre  un?  après  t. 

P.  222,  p.  1.  146,  rétablir  sa  et  suppr.  la  note. 

P.  232,  1.  65,  lis.   laudans  :  Qui  facit. . . 

P.  231,  1.  46.  Lire  ve  et  supprimer  la  note. 

P.  231,  1.  71,  lis.  crestian, 

P.  231,  1.  74,  lis.  crestians. 

P.  243,  1    241,  lis.  drechura. 

P.  246,  1.  246,  virgule  après  concordia, 

*  Nous  y  voyons,  p.  107,  que  la  grande  salle  du  tribunal  était  (Pest- 
elle  toujours?)  «  dénommée  la  Cati  de  la  Bourse.  »  M.  Louis  Guibert 
écrit  encore  ainsi  le  môme  mot  à  la  page  suivante.  C'est  au  substantif 
masculin  acamp  (assoml)l<''c)  que  l'on  a  ici  aiiaire.  Il  faudrait  donc 
écrire  Vacan, 


EAItATA.  623 

P.  249,  1.  136,  Us.  que  soi. 

P.254,  !.  315,  lis.  iiiisctia. 

P.  S56,  I,  19,  rétablir  ja,  et  auppr.  la  noie. 

P.  250, 1.  26,  :  ■■  apostot  ••;  auiiprimer  la  note. 

P.  257,  i.   49,  lis.  ho»,  lo[s]. 

P.  261,  1.  207,  virgule  api'ès/'aA. 

P.  265.1.  301,  Us.  delipes. 

F.  267,  1.  26,  lis.  que  ve,  et  auppr.  la  note  3. 

P.  270,  1.  50,  "dix  )i  ;  lis.  dis. 

P.  270,  1.57,  lis.  emniix. 

P.  271,  l.  92,118.  Sennor.  et. 
.    P.  272, 1.  lOO,  Us.  désira»,  car. 

P.  272,  I.  106,  lis.  le  guixardos . 

P    273,1.   ICIÎ.  lis.  noslre. 

P.  278,  1.  347,  lis.  lieu  «tarlir. 

P.  280,  1.  415,  lia.  caiil  o. 

P.  280,1    3,  lia.  moulas. 

P.  281,1.  22,  lia.  fous. 

P.  281,  note,  après  "  Coir.  «.  ajouter:.,  (ou  siip|.l.ï]  «. 

P.  282,  1.  47,  lis.  annavan. 

P.  282,  I.  70,  lis.  tnanjar. 

P.  285,  1.  29,  lia.  anz. 

P.  286,  Il  [xiii]  ».  Supprimer  les  ciochels. 

P.  287,  I.  6,  lis.  meili  o. 

P.  288,  1.  62.  lis.  mortslreron. 

P.   289,  1.  83,  lis.  sei-an. 

P.  298,  1.  101,  Us.  enpreinnada. 

P.  3.^6,1.  20,  lis.  la  tei-ilal. 

P.  357,  1.  25,  lis.  etaqui 

P.  360,  I.   133,  lia.  don. 

V.  362,1.  213,  lis.  d'eh. 

F.  362, 1.  231,  lis.  que  ne  et  suppr.  la  note. 

P,  3T7,1.  23,  lis.  delà 

P.  379,  1.  31,  lis.  preffuali. 

P.  380,1.  78,  lia.  salut. 

P.  381,  I,  131'.  lis.  aguilh). 

P.  386,1.  307,  lU.  irai. 

P.  390,  1.  468,  Us.  casuk  ...  luhg. 

V.  392,1.  521,  lia.  ad  orar. 

P.  397,  1,  182,  lia,  canlac. 

P.  40O.  Tous  les  nombres  placés  en  marge  doivent  être  abaissés 
d'une  ligne. 

F.  404,  l.  69.  lis.  venc. 

P.  405,  i.  83,  lis.  ques  tan. 

P.  406,  1.  115,  lis.fleu  en. 

P.  418,1.  603,  lis.  unjorn. 

P.  422, 1.  747,  lis.  solamenl. 


Le  Gérant  responsable  :  E,  Hamelin. 


TARLK  r)I']S  MATII^RKS 

DU   TOMK   yU.VTRIKMIi:    DE    LA    yUATKIKME    SÉRIE 
(XXXIV    DR    LA    COLLErnON) 


Pages. 

Carl  Appel.  —  Poésies  provençales  inédites  tirées  des  manus- 
crits d'itîdîe.  5 
CuARLES  lUuBiER.  —   Le  Libre  de  Memorias  de  Jacmo  Mas- 

caro.  37,  515 

J.-P.  Durand,  —  Notes  de  philologie  rouergate  {suite).  101 

H.  Bailleul.   —  Deux  poésies  en  patois  normand.  110 

G.  Spmra.  — 11  pane  di  Amore.  116 

A,   MiR.  —  Lou  pourqufft  de  lait.  110 

K     Danikl-(îra\d.  — Congrès  de  philologie  romane.  125 
0.  Chaiîankau  et  G.   UiCYXAUD.   —  Légendes  pieuses  en  pro- 
vençal.                                                                                 200,805 

Paul  m.vkciiot.  —  Étymologies  liégeoises.  42(3 
L.-G.  Pellssikr.  —  Variantes  du  texte  des  Remontrances  do 

Monier  de  Chatt-andcuil.  4)U 

Ch.  Hevillout.  —  La  légende  deBoiloau.  440 

Kaimiîaud. —  Ourdounanço  de  pouliço  de  San  ^îartin  de  Grau.  5'''i5 

A.  IhiissAUD.  —  Contes  populaires  de  l'AgL-nais.  505 
G.   Speka.   —   P>eatrice  Portinari.  —  A   Dante   Alighieri.  — 

Ik^atriee  e  Laura.  —  Italia  e  Francia.  501 

F.  Donnadieu.  —  Dante  e  Beatrix.  500 

VAIUÉTÉS 

A.  Blanc.  — Canapé.  438 

L.  CoNSTANS.  —  Atalante  et  llippouiène.                                       *  000 

Vicomte  de  Collkvilm:.  —  Usage  i\\\  Comté  de  Nice.  ()()4 

Paul  Marciiot. —  Corrections  au  dictioniuiire  de  (îodefro5\  (îOG 

C.  C. —  Une  Bévue  amusante.  G07 

BIBLIOGRAPHIE 

E.   HiGAL.  —  Chreslomathie  de  l'ancien  français, par  L.  Cons- 

tans.  304 

J.  Brenous.  —  Le  latin  de  Grégoire  de  Tours,  par  Max  Bon- 
net.                                                ^  431  » 

G.  llAUAun.  —  Los  fables  de  Lafonlaiue.  GOS 

PÉRlODlQUEvS 

L.  CoNSTANS.  —  Zeitschril't  fur  romanische  philologie  XIII, 

XIV.                                  186,  444 

Chronique.                                 180.  «'.21 

Errata.                                    44K,  622 

MOMPtLLIER,    rMPRIMEniK    CEIS'TnALE    DU   .MIUI.    —   HA.MELIN    FKÈitES. 


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