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^^ ^
REVUE
DES
LANGUES ROMANES
REVUE
LANGUES ROMANES
PUBLIÉE
PAR LA aOClËTÉ
POUR l/ÉTUDE DliS LANGUES ItOMANICS
Quatrième Série
TOME QUATRIÈME
TOJiIB XXXIV DE M COLLECTION
MONTPELLIER
Kne da l'Ancian-Cciarrier, n
PARIS
JEAN MAISONNEUVE
25, gUAl VOLTAIRE
REVUE
DES
LANGUES ROMANES
POÉSIES PROVENÇALES INÉDITES
>.
TIREES DES MANUSCRITS D ITALIE
BarUch, GrundrisSy ii«> 2, 2. — Ms. D 142.— Les vers 1 à 12, 25 à 32 sont
imprimés dans Rayn. Choix 5, 1; Malin, Werke 3, 348.
N' AIMARS JORDANS
Sj tôt m'ai estât loniamenz
guerreian ab mon mal seingnor,
e pert lai entre mos parenz,
c'uns no me'n acor,
5 ges non lais per tan
qe solaz e chan
no sega e domnei,
si tôt me guerrei.
Ane guerra no*m fo espavenz
10 ni mais traitz, per so c'a honor
>
pogues estar entre las genz,
ses maldich de fol parlador ;
c'als non vei qe n'an
10 traies.
TOME IV DE LA QUATRIÈME SÉRIE. — Janvier-Février-MaFs 1890.
16/912
6 POESIES PROVENÇALES INEDITES
li rie, qant se*n van,
15 per q'eu o plaidei
segon so qe'n vei.
Bons cavals e bons garnimenz
am mais qe non faz ioc d'austor ;
mas dels deseretaz sostrenz,
20 qui, •! malvaz, no*m fan paor,
mi torn* ad affan
qui me*n van parlan,
e non am ni crei
lor aunidalei.
25 Puois qe'l vescoms m*es avinenz
e*m rete per son servidor,
molt li serai obedienz ;
e llo coms non aura peior
. guerrer a son dan,
30 q'eu non ai talan
mas de far qeûll grei,
on q'an ni estey.
21 tor.
4 . Vers trop court de trois syllabes .
19. Il y a bien sostrenz dsiUB le manuscrit . Je ne sais ni expliquer
ce mot ni le remplacer, avec quelque certitude, par un autre .
20. Vers trop court. Corr. qui, li m. 'i
22. Faut-il corriger vaj). ?
Quant à l'auteur de cette pièce, rien n'est plus vraisemblable que la
supposition de M. Chabaneau (Histoire de Languedoc, X, 327j, qui
reconnaît le troubadour dans le chevalier Azemar Jordan, fait prison-
nier en 1212 par Simon de Montfort à Saint- An ton in. Les deux poésies
attribuées dans les chansonniers à Raimond Jordan sont pleines
d'un esprit belliqueux, ce qui s'accorde parfaitement avec le vers 2367
de la Chanson de la Croisade, qui parle du chevalier de Saint-
Antonin :
Cel de Sant Antoni se prezon a enardir
Per n' Azemar Jorda; mas cant venc al partir,
Ane non i ac negu que' s ne poguesjauzir.
TIREES DES MANUSCRITS d'iTALIE 7
L*identité admise, il est probable que le vescoms dont parle le vers
25 est le vicomte Pons, qui fut fait prisonnier avec le chevalier, et le
comSf au vers 28, ne serait autre, dans ce cas, que Simon de Montf ort.
Le sirventesfut donc probablement écrit vers 1212, pendant les prépa-
ratifs du combat.
Il y a deux poésies qui suivent le même compas : Bertran de Born
20 et Peire Cardenal 40 (celle-ci faite sur le modèle de celle-là) ;
mais les rimes sont différentes de celles d*Azemar Jordan (sauf la
dernière, en ei) et la forme de la strophe étant assez simple, il n*est
pas sûr que le son des trois poésies ait été le même. Il est pourtant
à remarquer que le sirventes de Peire Cardenal date précisément du
temps que nous avons cru pouvoir assigner à celui de notre troubadour.
Grundnss, n*» 10, 16. — Ms. c 50
N' AIMERIG DE PEGUGNAN
Chautar vuilh. — per qe? — ia'm platz.
iate'n eras tu laichatz? —
0 eu. — fols es tu. qin' es
de oui chantas ? — fola res,
5 de la gensor q*el mon sia. —
oc, benleu; mas si tu'l cres,
altre no'l te ereiria ges. —
per deu, si faria
toz hom qe vis sas beutatz. —
10 es tan pros cora lo'm lauçaz? —
la melher q'anc dieus feçes. —
doncs fas tu ben qe certes. —
et eu, fol, no t'o diçia? —
si be. — doncz, de qe'm mescres? —
15 sai, si es, platz mi e sos bes. —
no'm entremetria,
1 . qera ia pladz. — 5. fia. — 9. sa.
8 POESIES PROVENÇALES INEDITES
sai, si no fos la vertatz. —
era, vos, qar me digaz ! —
e qe? — ama'us tan niqan? —
20 vai tu, mensongier truan ;
ela per qe m'ameria?
en tant qant soleilhs resplan,
n'a tan pro ni tan preçan.
fol, co's tanheria
25 a mi sos genz cors hondratz? —
Ben es doncs nesis e fatz. —
cum? — car as mes tôt afan,
a guisa de fol aman,
la on ga res no*t valdria. —
30 cre me tu qe merseian
aman sirven e preian
conqer hom amia
tost 0 tard, don. . .' — er auiatz
qe be*n es hom enguanafz. —
35 non es ges. Saps qe m'a sors? —
eu no. — us conortz : q'amors
restaura tôt en un dia
qant qe a mesfait alhors,
per qe*m sofri sas dolors
40 en paç tota via
e-ls afans qe m'a tardatz.
las, eu mur! — cum ? — soi nafratz. —
qui't nafret? — del mon la flors. —
qe flors es? — de las melhors. —
45 per qe fetz? — qar se volia. —
be*l cre ; don atens socors? —
de leis, qe sa granz valors
m'es suaus medgia.
garir ses leis no poiria
50 per re de mas greus dolors,
29. Ce vers est placé à la fin du couplet, après 30 â 83. — 36. conorl,
- 43. flor. — 44. la. — 46. atea. — 47. gran. — 48. raedgria.
TIRÉES DES MANUSCRITS D'ITALIE
q'asrm nafret gent s'amors,
no'n sai con m'estia.
Na Beatrix, cui iois guia,
d'Est, q'es flors de las gensors
55 e mellier de las meillors,
raeillura tôt dia.
51. naifret. —54. la.
1. On pourrait lire aussi sans interi-uption : Chantar vuilh per qe
ia'm pîatz,
3. qin' = quina, « quelle, de quelle sorte. » Diez fait venir ce pro-
nom, qui se trouve sous les formes quin, quinh et quanh&u masculin,
quina, quinha et quanha au féminin, du \ai'm quinam. Alors la forme
masculine devrait avoir été faite sur le féminin, en prenant l'a de quina
pour tenninaison du genre. Encore resterait-il à expliquer Vn mouillée
de quinh,etc. Peut-être vaut-il mieux dériver le mot du latin quine.
Quiiie donnerait qui dans les régions où tombe Vn entre deux voyelles.
En ce cas, le pronom quine ne pourrait plus être distingué du pronom
intcrrogatif qui, et il est remarquable que, d'après Mistral, quin,
quinh ne semble guère se trouver que dans les régions où Vn « mobile »
persiste. Dans cette partie delà France méridionale, g'winô donnerait
donc quin et^ en se méprenant sur la nature de la terminaison n, on
aurait formé le féminin quina sur quin d'après l'analogie de fin :
fina. Dans quinh, je suis disposé à voir un exemple de « Satz-pho-
netik », principe qui peut s'appliquer avec un peu plus de vraisem-
blance à l'explication des formes pronominales qu'ailleurs. Quine-
est? pouvait donner quinh-es? comme ille-est a pu donner elh-es , à
côté de el es, en provençal et, ce qui est plus concluant, egli-è en
italien. Du reste il semble que ce pronom se soit confondu avec l'inler-
rogatif quant, puisque nous trouvons en provençal moderne qulnf,
forme qui, à ma connaissance, n'existe pas dans la vieille langue : mais
on pourrait vouloir expliquer par une confusion pareille la vieille forme
quan, quanh,
7. Une syllabe de trop. On peut corriger n'ot creiria ou no'l te
creira .
10. Il ne semble pas nécessaire de lire Ztï'm au lieu àelo'tn.
15. Sai (^ « je sais ») semble être employé ici et au vers 17 pres-
que comme une sorte d'interjection. De même, en provençal moderne,
sai, hessai sont devenus une sorte d'interjection dans quelques locu-
10 POESIES PROVENÇALES INEDITES
lions, voy. Mistral. — La leçon du vers 15 ne pourrait guère être
acceptée. Il faut, je pense, supprimer e, et, probablement, lire tos au
lieu de sos.
27. Corr. ton a/an.
41. Lisez cargatz au lieu de tardatzf II était plus usuel de dire
don m'a carz/ate, mais la construction ^'we vi'a cargatz n'est pas impos-
sible.
63. Pour Beatrîx d'Esté voy. Diez, Lében tind WerJce, seconde
édition, p. 353.
Grundriss,n^ 94, t. Ms.D 197. — V. 9 à 16 imprimés Rayn. 55, 14.
LO VE^SQUES DE BASAZ
Cor, poder, saber e sen
ai de chantar e d'amor
c de servir gai seignor
que prez e valor enten';
5 q'esters es obra perduda,
e « 'ill mort son greu per garir »,
e si*m volguesson auzir,
mel traissera de secuda.
Bella dompn' ab cors plazen
10 triât co'l grans de la flor
am eu, del mont la genzor :
que negun' ab lois no*s pren
oilz de falcon trait de muda,
bocha rien per ben dir,
15 e*l cors plus dolz per sentir
c'uns prims ranzans sus char nuda.
Bona dompna et avinen
am, e no ges per amor.
mas en luoc de bon seignor
20 servirai son bel cors gen, —
15. cor.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 11
ar es tost causa saubuda, —
e pren per luoc de iauzir
qant li plai que'm faz'auzir.
allais, domna, vos saluda.
24. doonae.
8. secuda, cigu'è =i cïcuda dans Raynouard. Prov. mod. cigtido,
12. « Nulle ne peut se comparer à elle. »
Le compas de cette poésie ayant été imité dans la tenHon de Blacatz
et d'en Raimbaut (Gr. 97, 4), et Blacatz étant mort en 1237, il ne
peut s'agir, pour Tauteur de cette pièce, que de Gaillard de la Mothe,
qui était évêque de Basaz de 1186 à 1213, ou d'Arnaud des Pins,
1220-26, ou encore, à la rigueur, de Rairaond, que l'on trouve évêque à
partir de 1230 jusqu'en 1261. Voy. GalUa christ , , I, c. 1197,Chabaneau
dans Hist. de Languedoc, X, c. 334,
Gvwidriss, no 167, 13 (comp. 136, 2. 3)
Robert Meyer {Dos Leben des Trohadors Gaticelm Faidit, p. 16 s.)
et Cbabaneau [Histoire de Languedoc, X, p. 246 s.) ont fait impri-
mer, d'après le ms. H, trois couplets qui ont été échangés entre Elias
d'Uisel et Gaucelm Faidit. Il faut y en ajouter un quatrième, qui ne
se trouve pas dans H, mais qui est dans D (fol. 210). C'est la réponse
de Gaucelm Faidit au couplet d'Elias : Manens forai fraruis pelegris *.*
A juzamen de sos vesis
raena grant de sa honor
n'Elias sa meia seror;
ço diz n'Ebles, q'es lef cosis.
5 Non
. . . .qar parlet de graissa fez no-sen,
* Robert Meyer n'a pas remarqué que les mots qui suivent ce premier cou-
plet, et qu'il a imprimés comme de la prose, sont une toimada de deux vers :
Aqestz motz fetz n'Elias, qe'ls saup far
miels q'en Gauselms, q'es plus gros d'un pilar.
Ces mots ne sont donc pas une interpolation, comme le croit Cbabaneau.
12 POESIES PROVENÇALES INEDITES
q'andui em gros, mas el o es, cho*m par,
de clara fam, et eu per pro maniar.
2. Une syllabe au moins manque. Y avait'il en vieux prov une phrase
menar a grant comme en vieux franc, estre en grant, metre en grant?t'oy.
Tobler, li dis dou vrai aniel, v. 2 note, — 5-6. Le copide a sauté une
ligne. — 7. em] en.
GARIN D'APCHIER ET TORCAFOL
Les poésies de Garin d'Apcliier et de Torcafol, son adversaire,
offrent assez de difficultés, tant pour leur texte, qui est souvent
obscur, et pour les événements historiques dont il y est parlé, qui
sont difficiles à éclaircir, que pour la question de propriété litté-
raire, puisque nous verrons que les poésies n'appartiennent pas
toujours à celui des deux auteurs à qui les manuscrits les attribuent.
Pour deux pièces, les attributions ne sont pas d'accord : Le sirventes
Comunal vielh ma tor appartiendrait à Torcafol selon IK, à Garin
selon D ; le couplet Memhrarius del jornal se trouve deux fois dans
D, une fois comme poésie de Garin, la seconde fois comme poésie
de Torcafol. Pour les autres pièces, les mss. sont unanimes à les
attribuer ou à l'un ou à l'autre des deux poètes, mais les attributions
ne sont pas pour cela plus incontestables.
Pour éclaircir la question, il faut partir d'une pièce dont l'auteur
soit bien certain, c'est-à-dire du sirventes Comtor d'Apchier rehuzat,
qui est naturellement l'œuvre de l'adversaire de Garin, de Torcafol.
Il se trouve dans les mss. DR, et a été publié par Rayn. 4, 253 et
réimprimé par Mahn, W.^, 277. Bien que, dèslors, il n'entre pas dans
le plan de mon travail, je ne crois pas superflu de le publier encore
une fois, avec toutes les autres pièces des deux troubadours, sauf
Comunal en rima clansa, imprimé récemment dans mes Provenxa-
lische Jnedita ans parîser Handschriften, p. 305 ss. Ce qui m'en
donne le droit, c'est que ces pièces difficiles ne sont pas publiées p;»r
Raynouard d'après tous les manuscrits, et que, par conséquent leur
texte réclame quelquefois des corrections. Je ne me flatte pa.«,
pourtant, de fournir moi-même un texte définitif. Il n'y reste que
trop d'obscurités.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 13
Gr. 443, 1. Mss. D 139, R 23. Rayn. 4, 253; Mahn W. 3,277.
Comtor d'Apchier rebuzat,
pos del chan vos ai laissât,
recrezut vos lajs et mat,
luenh de tota benaoansa,
5 vencut de guerr* e sobrat,
comtor mal encompanhat,
ab pauc de vi e de blat,
plen d'enuey e de carn ransa.
Aisi prenc de vos comjat,
10 pos.
e de vostre vielh barat,
c de vostra vielha pansa,
e del nas tort mal talhat,
e del vezer biaisât,
15 que tal vos a dieus tornat
c'anas co escut e lansa.
Beus a breuiat lo coril
Moiilaurs, que ténias vil,
que de maj tro en abril
20 vos fai estar en balansa ;
e non aves senhoril
tant aut son dur cor apil,
que ia*us trobon en planil,
per que'm pren de vos pezansa.
25 Et an vos claus lo cortil
sil que'us son deus lo capil,
e tornat de brau humil
Oftogvaphe d'après R. — 2. de R ; es laissatz R. - 5. guerre e D. — G acom-
paignat D. — 7. A D. — 9. pren D. — 10. oimais de mi chaotat D, may de
mi DO chantatz R. — 11. del R. — 14. baissât D. — 15. Ca D. — 17 briuat
D ; corrilh R. — 18. Mos laurs D, Montlaur R ; qi tenez D. — 19. tro
quin R. ^^ 22, so dun D. — 23. iaus] uos D; plau rail R — 25. Can
V. R — 26. que s. daus D.
14 POESIES PROVENÇALES INEDITES
e tout chant et alegransa ;
e s'anc raubes loc mongil,
30 ara-us faitz dire a mil
que dieus e Torde clergil
vos an tout pretz et onransa.
Pos del chantar em al som,
aisieus desampar lo nom.
35 totz votr' argens toru' en plom
e vostr* afars desenansa.
vilhet pus blanc d'un colom,
bo'us menon de tom en tom,
e no sabetz qui ni com.
40 tart seres mais reis de Fransa !
m
30. dir R. — 31. lorde de glognil D. — 32. a R. — 33. de chanta ho
D. — 34. desain per D. — 35. Tôt v. argen R; toroa D. — 36 afar R ;
desenassa D. — 37, Viellz D; blancs D. — 38. Vos D. — 39. saiibes I).
— 40. FarzD.
10. La leçon n'est pas sûre. Ni l'un ni l'autre manuscrit ne peut
avoir le texte correct. Il semble que le vers doive dire à peu près
ce que disait le vers 2 : pos de chan vos ai laissât. En partant de
la leçon de D, on pourrait lire pos ai mais de miei chantât « puisque j'ai
chanté plus qu'à demi », c'est-à dire « puisque j'ai chanté tout à fait,
puisque j'ai fini de chanter » (voy. Zeitschrift, XI, 133). Mais l'expres-
sion serait bien peu naturelle.
17. Raynouard a traduit (Lex. II, 490): « Monlaur vous a bien
abrégé le chemin. » Mais cette traduction est-elle correcte ? S'il faut
dériver cor'd de currere, il vaut peut-être mieux encore lire « brivat lo
coril [corr'dh, qui est dans R, ^ curricidum) « il vous a activé la
course, il vous a fait courir. » Mais il semble que Torcafol distingue
dans la rime l d'avec Ih. Voy. plus loin la note du vers 2 de 162, 7.
21 à 23. Vers assez obscurs. Je ne connais pas d'autre exemple de
X)lanil, mot qui doit signifier pays plat : « On vous trouve en pays
plat, réduit au pays plat. »
26. essera alcu deus lo capil. Encore une exi3ression dont je ne con-
nais pas d'autre exemple.
37. Le diminutif vilhet manque dans Rayn.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 15
La pièce précédente est placée dans les deux manuscrits entre Mos
ComunaU fai hen parer et Veillz Comunals ma tor. Ces deux poésies
étant réunies aussi dans les mss. IK, on peut supposer qu'elles étaient
voisines dans le manuscrit qui était la source commune de D I K R.
En effet on voit qu'il y est parlé des mêmes événements (comp.
les vv. 36 à 38 de Mos Comunals aux deux premiers couplets de Vielhs
Comunals ma tor), et, bien que les compas ne soient pas les mêmes,
on peut dire que la seconde répond à la première.
Gr. 162, 5. Mss. D 139, I 192, K 177, R 23 (Malin Gcd. iO^i:.
Imprimée Rayn. 4, 250; Mahn "W. 3, 275.
Mos Comunals fai ben parer
que, si el pogues dir ni far
causa que'm degues enoiar,
ill en faria son poder ;
5 mas paubrieira e veillencs Tassaill
e poders e iovenz 11 faill,
per qu'aïs guerriers non fai paor ;
e non a amie ni seignor
que no'l teingna per enoios
10 mas tant quant ditz nostras tensos.
E s'ieu lo voill ben dechazer,
que*l vuoilla tolre mon chantar,
ia non er qui'l don a maniar
ni'l voilla albergar un ser ;
15 per que metrai'l chan dinz seraill,
per qu'el sovent trembFe badaill ;
que la verchiera de sa oissor
vendet, dont son gai maint pastor,
car lai vivi, ab sos lairos
20 emblan las fedas e*ls moutos.
Oi'tographe d'après K. — 1. Pos comioal R. — 2. sil DIK; saubes IK. —
3. Se qua mi IK. — 4. Quel IK. — 5. vilenc R. — 5, 6. Mas iouenz e
j)oders len faill E paubrieira e ueillors lasaill IK. — 6. la f. D. — 7. cal
R; Per qua home IK; nom R. — 9. enueyos R. — 11. Mas seul u. D. — 12.
Quill D, Que IK; uoiU la t. IK. — 15. Perquel ch. métrai d. lo s. IK; Mas
metray lo R; metraiU canzD. — 17. Quel u. IK; uergiera de soisor D; sa
sor R. —18. dont] deR.— 19. Que IK; uenia D ; los D.— 20. EmblarD.
16 POESIES PROVENÇALES INEDITES
Ane ab armas non saup valer
hom meinz, tant se*n volgues lauzar,
ni als guerriers, mas ab parlar,
no saup hom meinz de dan tener ;
25 mas sovent mou guerra et assaill
a cels que an croz e sonaill,
don mil monge dinz refeitor
pregan plorant nostre seingnor
qu'en Pons-tortz e'n Sainz-Laurenz fos
30 si cum es, viellz e soffraitos.
Leiautat sol molt mantener
e falsetat totz temps blasmar,
mas al tornell la*i vim laissar
e del tôt mètre e non caler ;
35 per que ditz lo pair d'en Eraill
que home qui nafre ni taill
ni prenda son lige seingnor
ni que'l toilla castel ni tor,
no'l deu mantener nuls hom bos,
10 per qu'el no'l mante ni'n Randos.
Ja nuill marit non cal tenier
de lui ni sa moiller gardar,
anz lo po laissar domneiar
et estar ab leis a lezcr ;
45 ([ue quais que-1 debois ni*ll cntaill,
deboissar lo po d'aital taill :
ses pel, ses carn e ses color
e ses ioven et ses vigor;
e d'ome qu'es d'aitals faichos,
50 non deu esser raaritz gelos.
21. sap IK. —22. sen] en IK ; guabar IK. — 23. guerres D, gerres K. —
24. sap D ; de mam/ue R. — 25. trebaill IK. — 26. qan c. D ; o R ; soniail I,
soniails K. — 27, refreyior R. — 29. Que p. t. D ; pons totz e son 1. R. — 30.
es]el D. — 31. Leialtaz D; mo't manque D ;— 32. falsitaz D. — 33. Mal R,
lorneill D lornei R;laill IK. — 35. paire D, par IK, payre R; d. E.] nerralli
R. — 36.qes naure D; e DR. — 37. E DR; pren IK. — 38. E D ; Nil renou
ia c. R. — 39. No d. D. — 40. no m. D ; ui r. K ; rasos D — 41 uuillz
mariz D; nom R. — 42. ni de s. R. — 44. a] en D. — 45. cal DR; uill 1,
— 46. Debossar 1 K . -- 49, daylal R. —50. deo D; marritz IKR.
TIRÉES DES MANUSCRITS lUïALIE 17
Gr. 162, 8. Mss. D 139, I 192, K 177, R 23. V. 25 à 32; Rayn. 5,449;
Mahn W. 3,347.
Veill Comunal, ma tor
ai «"obrad' ad honor,
car bon envaidor
non pot hom leu faidii*;
5 qu'a vos o auzi dir ;
per que 'm mis en la via
e fi'n cellui issir
que a tort la ténia;
don sapchon mei amie,
10 tuich, li paubr'e li rie,
qu'ieu guerrai so que die,
puois sus son, don issic.
Qui m'apela traichor,
el men per mieg lo mor;
15 mas quar al meu seignor
podion ren laich dir,
eu non o vole sofPrir ;
ni voill que tracher sia ;
e saup lo meillz garrir
20 qu'el eus no se*n garia,
qu'en aissise*n partie
qu'anc colbe noû feric,
et eu fi so qu'ieu die,
que*l pris e no'l retic.
25 Ben viu a grant honor
Ortographe d'après K. — 1. Veillz D; Cominal R; Comunal ueill I K;
cor R. — 3.Qua b. csuaidor IK. — 4. Nos D. — 5. Car D; ausai I K. —
6. mes D. —7. Eo Q IK; fi D. — 8. ter DIK, cor R; temia R. — 9 à 12
ont échangé leurs places, dans I K, avec 21 à 24. — 9. Esaupchon IK. — 10.
p. eill r. IK, — 11 manque D. — 12. P. sui d. il i. U. -— 13. Sui I,
CuiK; man pela IK, — 14. m. denan pel m. IK. — 15. a mon s. 1 K. —
16. Podiom IK; laidir D, lay dir R. — 17. no lo D; vuelh R. — 18. trai-
chers D. — 19 et 20 manquent R. — 19. saubil D; grazir I, garzirK. —
21 à 24, voy. 9 à 12. — 21. issic DR.— 22. colpe D. — 23. fi magique
IK; f. s. q, d.] si fo que d R. —24. que p. R — 25 à 36 manquent DR.
18 POESIES PROVENÇALES INEDITES
qui pert son mal seignor,
qu'ieu perdei lo peior
qu'anc morz pogues aucir,
mas eu non, puois moric;
30 ni non voill qu'om m'aucia ;
per ma vida gandir
garni la maison mia
35
Si be's fan gabador
lifillat e*ill oissor,
Monlaurs fai sobre lor
40 SOS honraz faiz auzir ;
e quant Tauzon venir,
no'lserron ges la via,
anzlor a faich gequir
Torgoill e*ill gaillardia;
45 e parec a Nou-Vic,
on preiron tal destrie
que quan Testors partie,
el remas près en gic.
Ges no me don paor
50 per lor dig de folor,
si tôt quatre comtor
mi menasson d' aucir ;
quar en els po venir
* anz qu'e mi la moria ;
55 et yen, podes lor dir,
30. quel. — 33 à 36 manquent aussi IK; espace laissé libre. — 37.
beus R; cabador DT. — 38. e lorsor R, — 39. Monlaur R. — 40. Ses I; hon-
rar fai grazir T K. — 42. seron D, saron 1 K. — 43. An D ; an DR; gechir I K.
44. e la feonia 1 K. — 45. en R ; non uic IK, vau vie R. — 46 à 48 quant
la chocha partie. On preiron tal destric. Quancar lan iai en gic IK. — 46,
prezon R. — 47. lestorn R. — 48. Lay R. — 49 à 60 manquent D. —49.
nom d. gran p. IK. — 50. Ni ira ni dolor IK. — 52. Me mes sen daucir I K.
— 54, li moria I K, la murria R. — 55 à 57. Queu en prec îam e fie I K.
TIRÉES DES MANUSCîlITS D ITALIE 19
prec dieu a cascun dia
que gotela me fie
el lag mal don moric
uns comtois, qu'ieu ausic
60 qu'anc preveire non vie.
58. laie I K. — 59. aussic R.
5. J'ai suivi la leçon de DR, qui, généralement, ont le meilleur
texte, mais eu égard aux vers 1 1 et 23, on pourrait préférer ici ausai.
1 1 . guerrai dans tous les mss. ; on aimerait mieux farai.
25. Ce fragment d'un troisième couplet n'est que dans I K. C'est un
travestissement curieux d'un couplet de P. Vidal (Gr. 364, 13) :
Ben viu a gran dolor
qui pert son bon senlior.
q eu perdei le melhor
qu'anc mortz pogues aucir:
e quar non pose morir
ni es dreitz qu'om s'aucia,
per ma vida gandir
m'en anei en Ongria, etc.
La rime du vers 29 n'est pas correcte. Mais il n'est guère permis
de lire comme dans le sirventes de P. Vidal : Mas eu non pose morir.
Cela n'aurait pas de sens ici. Tout ce fragment me paraît bien suspect.
45. J'ai choisi la leçon de D, qui me paraît la plus vraisemblable;
mais je n'ai trouvé aucun Neuvic où il y ait eu un combat en ces
temps-là.
48. Gic est-il substantif verbal de gequir ? et signifie-t-il, par con
séquent, « abandon ? » Je ne trouve le mot qu'ici .
54. Moria, murria, voy. Grodefroy, morie, mourie, mur le ^ « mort,
massacre. » Il semble que le mot français désigne la mort causée par
une maladie contagieuse.
57. Autre vers difficile que je ne comprends pas sans des change-
ments trop considérables.
Il est évident que ces deux pièces ne sont pas du même auteur, et
on ne peut douter que Mos Comunah n'appartienne à Torcafol, puis-
qu'on y retrouve le portrait de Garin, comme il était tracé dans
Comtor d'Apchier, portrait d'un pauvre vieillard, décrépit, mais qui
20 POESIES PROVENÇALES INEDITES
est toujours acharné contre les religieux. La seule difEéionce est
qu'il est désigné ici par son senlial, dans l'autre pièce par son nom
réel ; et ceci s'explique, si j'ai bien compris les vers 33, 34 du premier
sirventes (p. 14). Ces vers semblent dire que Torcafol voulait cesser
désormais d'appeler Garin par son nom poétique : « je vous quitte le
nom ^ » Il en résulterait que le sirventes Comtor fut postérieur à ^foa
Comunaîs et peut-être aussi postérieur à Veill Comunal ma tor, puisque
Garin y appelle encore son adversaire Comunal, ce qu'il n'aurait pro-
bablement pas fait après le sirventes Comtor. Mais alors il faut sup-
poser que Garin avait nouvellement perdu le château dont il était en
possession au temps de la pièce Veill Comunal.
Les trois poésies dont nous avons parlé jusqu'ici forment, nous
l'avons vu, une sorte de groupe dans les mss. qui les renferment. Un
autre groupe est formé par Comunal ve'dl Jlac plaides et Comunal en
rima clausa. La seconde de ces deux pièces est attribuée dans tous
les mss. à Torcafol. En effet, nous y retrouvons tous les traits qui
caractérisaient le portrait de Garin d'Apchier : sa vieillesse qui le ren-
drait impropre, d'après l'opinion de son adversaire, à être drut, son
hostilité envers les religieux et envers les pauvres paysans, dont il
aime à voler les moutons, etc. Il est donc évident que cette pièce est
bien de Torcafol. (Voyez Inedita aus pariser Hdss, p. 305.)
L'autre pièce est attribuée dans les mss. à Garin d'Apchier.
Ur. 162, 2. Mss. D 138, 1 191, K 177, R 8. - Rayo. 4, 249;
Mahn W. 3, 274.
Comunal veill, flac, plaides,
paubre d'aver et escas,
tant faitz malvais serventes
que del respondre sui las ;
5 e'I vostra cavalaria
venra tota ad un dia
quant er cho denan detras,
Tavols bos e'I ])0s malvas.
Orthographe d'après K. — 1. uiellz flacs D. — 2. escars I K. — 5. Sil
R; vostre l K. — 6. Vendra D.— 7. Car R ; se D R. — 8. Lauol ben eill pro
m. IK, Lauol bo el bo m. R.
1 Ce nom a été, conformément à un usage bien connu, commun à tous les
deux, ce qui explique la confusion dans les attributions de leurs poésies.
TIREES DES MANUSCRITS D^ITALlE 21
Ane un bon mot non fezes
10 non i âges dos malvas,
per qu'ie'us tolrai vostre ses :
mon chan, ah que* us formias ;
quar chantatz ab vilania,
que-ill comtessa me*n chastia
15 que ten Beders e Burlas,
que ditz que vos rebusas.
Ane sagramen non tangues
del tornel, quant Tavias ;
ni nuill temps ver non disses,
20 si mentir non cuidavas ;
et anatz queren tôt dia
qu'om se û; e qui se ûa,
tenetz lo taulier e*ls das,
e del ioc sabetz assas.
25 Qui -us tolia Vivares,
TArgentieira e-1 Solas,
on lor comtatz mainz orbes,
mesures vos hom lo vas ;
que quant Pons-tortz vos passia
30 e Sainz-Laurens vos vestia,
siatz totz paubres e ras,
que sieus es anquer, si* os plas.
Et avez tanz de mais près
aras e d'aissi en tras
35 que non sai cum vos tolgues
qui'l pe no'us tolli * o'I nas
10. dti D, des T; maluatz IK. — 11. queus D; fes R. — 12. Mos R; quieus
K ; formais IK; E m. ch. ab formas D. — 13. Can R. — 14. El R; me R;
Qui cortesamen ch. D. — 15. Beders] lobresD, lombes R. — 17 à 24 api'ès
25 à 32 D R. — 18. t.] tort uey R; lamas D. — 19. nuillz D. — 22. Cusi fi e
cussi fana D, Conssi e per mayslria R. — 23. Tener D. — 24. assatzIK. —
25. Quieus R. — 27. comtes R. — 28. Mesuresoa D . — 29. tort R, torstz I K,
manque D; vos manque D ; passai I K. — 30. san laures qeus v R. — 31.
molt DR. — 32. ED ; sius D IK ; er D; sieus R. — 33. tans de mal D; laos
mais après R. — ^. Qeu D; com D, col R. — 36. Si D,Sil R; pel D.
2
\
22 POESIES PROVENÇALES INEDITES
0 del tôt no* us aussizia.
si ho fos la cofrairia
de Chasiers e de Carias,
40 ab los pecols anaras.
37. DOS auzizia IK ; Ois oillz o nous a. DR. — 38. coffaria D. — 39. cha-
tiers IK, cbassierR; o D ; carals IK.
15. Beders e Burîas est la leçon de IK, qui, pour cette pièce, ont
généralement le meilleur texte. D a lohres au lieu de Beders, R lombes,
ce qui donnerait la comtessa que ten Lomhers (dép. du Tarn, plutôt que
Lomhez dép. du Gers) e Burlas, Outre que la leçon de Beders est
mieux attestée, la biographie d'Arnautde Maruelh nous dit expressément
qu'il y avait une comtesse qui fut appelée par les troubadours comtesse
de Béziers et de Burlats, c'est-à-dire Azalaïs de Toulouse.
26. Il y a plusieurs lieux du nom de Soulage, Solage, Soulatge,
Solaise, Soulages. Je n'en connais aucun qui soit nommé Soûlas. Mais
est-ce bien de noms de lieux réels qu'il s'agit ici, ou n'est-ce plutôt un
exemple de cette sorte de jeux de mots dont parle Tobler dans « Ver-
bluemter Ausdruck und Wortspiel in altfranzosischer Kede », p. 2 ss. ?
27. orbes n'est pas dans Rayn. Je ne comprends pas le sens du
vers. Peut-on corriger ordes=ordescs « ordures »?
32. « Vous êtes encore le sien », c'est-à-dire : « Vous appartenez
toujours encore au tombeau, à la mort » ?? Cela ne donne pas de sens
satisfaisant. Y a-t-il un jeu de mots entre vas «tombeau» et va-s «vain» ?
« vous appartenez encore toujours à la vanité ; tant elle vous plaît » ?
Dans les vers 29, 30 il faut peut-être lire no* us au lieu de vos,
39. Probablement Chassiers, département de l'Ardèche, et Carias,
département du Cantal.
40. pecol «menu bétail », manque dans Rayn. ; jfj^cow, pecoul,
pecoulh dans Mistral « niais, imbécile. »
Si nous rapprochons ce sirventes des poésies précédentes, nous ne
douterons pas que les mss. n'aient tort de l'attribuer à Garin d'Apchier,
(Outre le portrait de celui qui y est attaqué, comp. particulièrement
les vers 17, 18 et 29, 30 de cette pièce-ci aux vers 33 et 29 de Mos
Comunalsfai ben parer.) QqHq pièce encore est sans doute Pœuvre de
Torcafol.
TIRÉES DES MANUSCRITS d' ITALIE 23
Il nous reste quelques poésies qui ne se trouvent que dans le ms D .
Gr. 162, 4. D 202, attribuée à Garin.
Mais albergiers dinarada de fen
DO vendet anc mielz qe el a vendut
la verchiera e de Tautre gran ren ;
mas e mal iuoc 11 faill, si dieus m'aîut.
5 vieil enoios rebussat Comunal^
mon oliver vert e foillat brancut
cossi m'ausses anc retraire per mal ?
1. fen rimant avec ren, l'w à la fin doit être Tnobile, « Denrée de
foin » ne donne pas de sens satisfaisant. Faut-il livefe : re et traduire
« denrée de foi, denrée conmiise à sa bonne foi, pour la garder » ?
Nous avons vu que dans Mos Comunals, vers 17, on reprochait à
Grarin d'avoir vendu la dot de sa femme. Ce reproche étant répété
dans les premiers vers de ce couplet-ci, nous conclurons qu'ici encore
c'est Garin qui est attaqué, et que c'est probablement Torcafol qui est
l'agresseur.
Après avoir trouvé que tant de pièces attribuées à Garln par les
mss. ne sont pas de lui, nous hésiterons aussi à lui accorder celles
qui ne démentent pas aussi clairement le témoignage des mss. Nous
nous déciderons probablement à reconnaître Torcafol pour l'auteur de
la pièce Vielks Comunals plaides, où l'on remarque à peu près le même
style et le même genre d'injures que dans les autres sirventes de ce
troubadour.
Gr. 162, 7. Msc. D. 139. Jmpr. Klein, die DichtuDgen des Mœnchs voo
Moniaudon, p. 107. V. 1, 3 à 9, 11 et 12. Rayo. 5, 156. Mahn W. 3, 276.
Veillz Cumunals plaides,
ver brivat lo corves ;
e*ill malvatz serventes
qe vos auch far e dir,
5 me tornon en azir,
e*ill vostra ianglosia,
1. cumunal.
24 POESIES PROVENÇALES INEDITES
don vos faiz escarnir,
me desplaz chascun dia,
e*m n'es vos enoios,
10 que limars d'esperos,
gais esems e falcos
am mais auzir que vos.
Mas sobrebe vos près
car viella no volges,
15 c' ab autra foraz mes
e fera'us greu soffrir. ,
e non a obs que* us tir
tossa sa drudaria,
se iase*n voliauzir;
20 qe no se'n iauziria,
c'outra doas messos
non auria drut de vos ;
e de nuUa'l ianglos
no sera ia cogos.
10. des esperos. — 11. falcons.
2. La leçon semble corrompue. Mais comment faut-il corriger?
Corves pourrait être le cortves vfr. corvois « cordouan », constaté
récemment par Tobler dans la Chansoneta îeu e plana de Guillem de
Berguedan (Zts. 13, 546). Alors corves serait probablement par méto-
nymie pour sotlars de corves, peut-être aussi pour braiasdecoi^ves. Ou
doit-on y substituer plutôt corres, corretz « courroie» et lire breuiar
(Ve'us hreuiatf) îo corres (briuar D = breuiar R aussi dans Comtor
d'Apchier,y, 17), ce qui serait le contraire de alounga la courreja
« donner des libertés » dans Mistral ? On est tenté aussi de rapprocher
les deux expressions briuar lo corres ici et breuiar {briuar D) lo corHl
dans 443, 1. v. 17 ; mais je ne vois pas alors comment dériver corriL
En somme, je ne sais pas expliquer ce vers.
3. Le malvaz serventes dont parle ce vers sera Veill Comunal, ma
tor, qui a le même compas que cette pièce -ci et qui la précède, chro-
nologiquement, puisqu'il a adopté non seulement le compas de Pierre
Vidal Be vîu a gran dolor, mais encore ses rimes, tandis que Ve'illz
Comunals plaides n'en suit que la forme métrique sans en adopter
les rimes.
14. Corr. viella vos volges.
TIRÉES DES MANUSCRITS d' ITALIE 25
22. Vers trop long. Corr. aura,
23. Corr. gelosf
H ne me semble pas aussi sûr que les trois poésies qui restent
appartiennent à Torcafol. Le style m'en paraît un peu différent, et le
fait que la personne attaquée y est caractérisée comme un pauvre
gueux et comme un vieillard ne suffit pas pour y reconnaître Garin.
Les pièces Uautrier trobei et Aissi con hom sont attribuées à Garin
seul ; le couplet Membrari'us del iornal est attribué, nous l'avons dit,
aux deux auteurs.
Gr. 162, 3. Mss. D 202, irapr. Klein, p. 107. V. 17 à 24 Raya. 5, 155.
MahQ W. 3, 276.
L'autrier trobei lonc un fogier
un cror, onn era us efas mes
e la olet' e dos conres
e la noirissa en un gat nier.
5 aquest ostals fon d'un parier,
Comunal, qu'i veieli dechaier;
e qant lui vi, cuidei vezer
Ruqet, un viel ioglar lanier.
D 140 : L'autrier trobei tras un fogier
un croille ab dos enfanz mes
en un leit ab dos cures
0*1 nuirissa, un cbat nier.
5 aqest ostals fo d'un parier,
Cumunal, qu'i vei deschazer;
e quant lui vi, cuidei vezer
tu, lait veill iuglar lainier.
8. lais.
Gel, s'es paubres, mal no l'en mier,
10 q'ieu no-ill tulc ren mas las pares
e*l moli donrendia ses
al paire d'en Poisson Gaifier ;
qe'n dis un tal enuich l'autrier,
donmen, qe no 'm dis point de ver;
2. un — 5. 800. — 14. poinz.
2 6 POESIES PROVENÇALES INEDITES
15 mas no 'S pode mal dir tener.
an vos los maiors colps q'el fier !
Eu no m'apel ges Olivier
ni Rothlan, qe q'el se* n dises ;
mas valer los cre maintas ves,
20 quant cossir de leis q'eu enquer;
e non sai el mon cavalier
q'euadoncs no • 1 crezes valer;
e volria tal fieu aver
a partir regisme o enpier.
23. sicu. —24. regierae.
La forme métrique et les rimes sont les mêmes que dans Peire
Cardinal Ane no vi Breio ni Baivier,
3. Pour coures, cures, voy. la note du vers 2 de la pièce précé-
dente. Oleta n*est pas dans Rayn. Le mot sera le diminutif de ola,
1 1 . Corr. del moli f
12. Corr. Ponsonf
13. 14. Lire gwe'm, TWn.*
16. An est-il le même que ecf v. Mistral an-nous-aqui « nous
voici » (à Castelnaudary) .
Gr. 162, i. Msc. D. 202.
Aissi con hom tra Testam
as envers, q'era adreich,
e si cum meno'l carreich
li bon, qanttrao'l legnam,
5 un non sirventes ailluc
de mon Comunal astruc,
qui chaschus torna en desdeing
e destorz son entresseing.
la no Mil cal gardar cho clam
10 per si ni per son arneich,
7. descleing. — 8. e.] au tresseing.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 27
ni per bon astre qeûl veich
nipel sieu corren volam,
pel ioglareiar faduc,
ni per las canas del suc,
15 ni per las cordas del seing
qui son el sieu col susteing.
4. legnam manque dans Rayn. ; voy. it. legname, catal. lenyam,
8. Lire^'w?
12. volam manque dans Rayn.; je ne le comprends pas.
16. Le dernier mot du vers ne peut être sostenh « soutien ». Peut-
on corriger sotz tenh ? « pour les cordes de cloches qui sont à son col,
au-dessous de la teinte », c'est-à-dire « sa barbe ressemblerait à des
cordes de cloches, si elle n'était pas teinte » ?
Gr. 443, 3. Msc. D 202, 140. Impr. Rayn. 5, 156. Mahn W. 3,217,
Klein, p. 106.
Membrari-us del iornal
qant perdes vostres cussos
a Montfort, e meses vos
dinzen la boissera?
5 granz esmais
vos i crée e grans esglais,
qe'ls draps vos trauqes denan.
be'us garitdieus, per semblan,
car no * us toqes en carn nuda.
10 « savis apren e fols quda. »
D' (202) : 4. D.una b.
D* (140) : 2. cuisses. — 3. messes. — 6. Vos uieng. — 7. traisses. — P,
torqes. — 10. flos cuida.
4, 5. Ces deux vers sont sans doute incomplets. Il est probable qu'ils
ont eu sept syllabes comme tous les autres, et que le quatrième finissait
en al comme le premier vers du couplet.
En somme, des huit pièces qui se trouvent dans les mss. sous le nom
de Garin, nous ne pouvons lui attribuer avec certitude qu'une seule
28 POESIES PROVENÇALES INEDITES
trois ne sont certainement pas de lui, une quatrième probablement
non plus ; trois sont douteuses .
Du reste, Garin n'a pas beaucoup à se plaindre du résultat de nos
recherches. S'il ne lui reste qu'une seule pièce, c'est du moins
la meilleure, et pour la vivacité du style, et pour le genre de la satire,
moins grossière et plus ironique que dans les compositions de son
adversaire, et pour les sentiments qui y sont exprimés. Auteur de
cette pièce et, surtout, inventeur du descort, Garin occupera encore
une place honorable dans la littérature provençale.
Mais qui est donc ce Garin d'Apchier? Il semble impossible qu'avec
tant de noms de personnes et de lieux, qu'il y a dans les sirventes
des deux troubadours, on ne puisse retrouver Garin dans l'histoire. Il
me le faut confesser, pourtant, je n'ai pas été plus heureux à présent
que la première fois que j'ai essayé de résoudre la question (Zeitschr.
/. rom, Phil.,i. XI, 221 ss.). Ce n'est pas l'impossibilité de trouver
des noms identiques dans les documents qui fait la difficulté, c'est
plutôt l'embarras de choisir parmi toutes les personnes du même nom.
11 y a un assez grand nombre de Garin d'Apchier, et s'il est vrai que
presque tons ceux que nous connaissons ont vécu dans un temps trop
moderne pour notre troubadour, il est bien probable aussi que le nom
de Garin était fréquent dans la famille dès le commencement du XII®
siècle. Du moins je crois qu'il s'agit d'un membre de cette famille (qui
est appelée dans les documents « de Apcherio » ou « de Castronovo »,
c'est-à-dire de Châteauneuf-de-Randon, département de la Lozère),
dans l'extrait suivant d'une charte de 1126.
Noturn sit. . . quod ego Raymundus cornes Barchinonae et Provinciae mar-
chio et coDJux raea Dulcia et filii nostri Raymundus et Berengarius donatores
sumus vobis Garino et Odiloni fidelibus nostris et uxoribus veslris et filiis
et filiabus vestris in perpetuum castrurn quod vocalur Rando, ut habealis et
teneatis illud per feudum... {IHst. de Languedoc, V, 886.)
Il y a donc à trouver parmi les divers Garin d'Apchier celui qui
peut avoir été notre troubadour.
Il n'en est pas autrement des noms d'Eralh, de Monlaur et de
Randon . Le nom d'Eralh est commun dans les familles des vicomtes
de Polignac (nous trouvons des Héraclius de PoJignac déjà au ix« siè-
cle, voy. Hist. de Languedoc, t. IV, Registre) et des seigneurs de
Monlaur, qui tous les deux étaient du voisinage des seigneurs
d'Apchier et qui se trouvent souvent ensemble avec eux dans les
documents.
Les hostilités de Garin envers les religieux ne nous aident pas non
plus à fixer le temps où il vivait, puisque, aux xiie etxiii® siècles, les
TIRÉES DES MANUSCRITS D'iTALIE 29
évêques deMende et du Puy étaient presque toujours en guerre avec
les barons de leurs diocèses, et entre autres avec les seigneurs d'Apchier,
de Polignac et de Montlaur'. En 1 165, nous voyons le roi Louis le Jeune
entreprendre une expédition pour protéger TEglise contre les vexations
de ces seigneurs (Rist. de Languedoc, t. VII, 8 ss.), expédition qui
fut suivie d'une autre en 1171. L'évêquedeMende, Aldebertde Tournel
(1 151-87), reconnaissait alors la suzeraineté des rois de France {Gallia
christ. 1, 90), de sorte que, dès lors, les ennemis de Tévêché de Mende
étaient aussi les ennemis de la France. Les comtes d'Apchier étant
feudataires des évêques de Mende, mais combattant toujours contre
eux, cette circonstance pourrait peut-être servir à expliquer les vers
A pauc apchiers no'usfo Fransa {Comunal, en rima cîausa^v. 12) et
tart seres mais reis de Fransa (^Comtor d'Apchier, v. 40).
L'époque où florissait le troubadour serait fixée, jusqu'à un certain
point, si la comtessa qiie ten Beders e Burlas était en effet Azalaïs de
Béziers, surnommée de Burlats dans la biographie d'Arnaut de Maruelh.
Elle était fille de Raimon V de Toulouse, épousa, en 1171, le comte
Roger V de Béziers et mourut avant 1201 [w.Eist. de Languedoc, Y I
156, X 220). Mais il n'est pas bien certain que ce soit la même comtesse.
Dans la Zeiisch,f, rom. Phil. t. XI, p. 223, j'ai dit que les deux sir-
ventes Gr. 162, 7 et 8 devaient avoir été composés après 1 196, puisqu'ils
suivent le compas d'une poésie de Pierre Vidal qui est de cette année-
là. Ce n'est peut-être pas exact. La pièce de Vidal étant un sirventes,
toutes les trois peuvent avoir imité un original aujourd'hui perdu.
Mais le sirventes de Garin serait naturellement une imitation de celui
de Vidal, si le fragment du couplet, dont nous avons parlé à la page
19, était vraiment de lui. La chanson de Raimbaut de Vaqueiras,
dont le compas est imité par 162, 5, est probablement à placer entre
1180 et 1190. Le genre poétique du descort, inventé, selon la biogra-
phie de Garin, par ce dernier, existait déjà avant 1 180. Si la notice de
la biographie est exacte, ce dont nous n'avons pas le droit de douter,
* Une charte de 1223 peut, en quelque manière, servir d'illustratiçn aux
reproches faits à Garin de voler les moutons aux paysans. Gallia christ.^
1, 92: « In schedis R. P. Andreae a S. Nicolao... lego hune Stephanum
(évéque de Meode) strenuum se ostendisse in compescendis nobilium vexa-
tiouibus erga rusticos, quibus arare non nisi dominicis et solemnioribus
diebus permittebant. Ut eorum superbiam frangeret, multos équités et du-
ceotos milites accersivit, maxime ex Arvernia, qui ducibus domino de Mer-
corio, comité de Bononia, etc. Randonem de Castronovo debellarunt, et 18
castra tam de feudo et retrofeudo, quam de proprietate Raudonis ceperunt
et destruxerunt. » Empêcher les paysans de labourer ou leur voler les mou-
tons, il n'y a pas grande différence.
30 POESIES PROVENÇALES INEDITES
la carrière deGarin doit avoir commencé vers 1175, au plus tard. Il
me faut abandonner les recherches ultérieures à ceux qui disposent
d'une bibliothèque historique plus riche que la mienne. Je ne doute
pas qu'on n'arrive à déterminer les dates de quelques-uns des événe-
ments dont il est fait mention dans ces poésies.
Grundriss, no 167, 20«». Ms. T i4i.
GIAUSEM FADITZ
D'un 'amer on s'es asis
mes ferms cors fis,
movon tuit miel certes saber;
c'amors m'ensegna
5 cansons far e'm maïstris
e-m esbaudis
cor e sen e geng e poder,
per c'ieu devegna
e gais SOS
10 coindes e bos;
qe s'ill non fos,
gia per autra isciensa
mes trebars,
qi es fins e clars,
15 non fora cai^s
ni agra gran valensa.
Ni non cre qu'om gia'l graisis
ni abelis
gia, tant non o sabr' eu voler,
20 s'amors, ce régna
* J'avais oublié de publier celte pièce, omise par Bartsch, dans mes hie-
dita aus pariser Handschriften. Je profite de roccasion qui s'offre pour la
publier ici, bien que cette poésie, n'étant contenue dans aucun des manu-
scrits d'Italie, sorte du cadre du présent travail .
2. mon ferm; fins. — 4. camor. — 5. nais bis, —9. sons. — i5. clars, —
18, Mabelis. — 20. samor.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 31
e me giors e sers e matis,
no*m crecis
de vos, ce*m fatz viur 'e valer,
domna, on c'ieu tegna.
25 tant es pros
ce mas cansos
an pretz pros.
per so non bistensa
merceiars
30 e mos cautars
ni gens prechars
ab cor d'umil parven?a.
Donc non es gies vers devis
aicell ce dis
35 c'ieu cant per aver ;
ch'en re no*l degna
mon cor tant per ccn mentis
\^ lei, c'obesis,
e mos cantz, on no fas parer
40 ce-m desovegna
SOS gioios
cors amoros ;
es esraisos;
qu'en tant, ses faglensa,
45 c'enclau mars
no es sa pars;
per qie'/lausars
de leis e'I pretz m'agenssa.
Soau e gient nie concis,
50 can vole c'ieu vis
son bell cors blanc gioios giaser,
don bes me vegna.
e no cresatz ce ieu partis,
s'il m'o sofris
21. E] el. — 23. fat; ualens. — 31. Nigus p. — 33. uer. — 39, caot, -
40. Com. — 41, Son. 44. Con clau. — 47. Por quieu lausors.
32 POÉSIES PROVENÇALES INEDITES
55 so qu'ieu plus vole veser.
trop eut qe-m fegna!
c'a sasos
notz bon al pros
paue' oeiaisos.
60 par so'm fai temensa
fols vanars
e trop parlars,
ee mans afars
en assi's desavinensa.
65 tan be*l soi aclis,
ear so que*ll quis,
me de/, qe ges no*m po/ plaser
c*autra'm retegna.
ans no lais Lemosis,
70 un dotz pais,
perlieis, en oui ai bon esper
ee giois me*nvegna;
don ganglos
contraries
75 fais ni gelos
no i ay' entendensa
cil ganglars
ni'l eridars
braus : a fais amars ! »
80 nos ni nostr' amer vensa.
E per aiso m'esgausis
ear s'afortis
mes bels Sobiras ab cor ver
en pretz revegna,
85 q'era, s'ell no Vaculhis,
ia meg-aueis
per tais qui'll degran mantener.
55. Camu(8o)oM Comai(so). — 59. ociaisons. — 64. enaseis. — 65. o t.;
aclins. — 67. der;poc. — 72. gioi. — 73. sanglos. — 76. ag. — 78. cridar.
— 79. Brau. —83. sobirar, — 85. Géra; nola cug uis. —87. tal.
TIRÉES DES MANUSCRITS d'iTALIE 33
e cal qu'estregna
son cor blos
90 flac enoîos
vas gioi duros,
a lui a tenensa
pretz, donars,
ses faitz avars,
95 e gens ondrars
ab francha captenensa.
Ma cansos
ab ditz gioîos
va dir
100 n'Agout en Provenssa
ce*«l presclars
de vos m'es cars
e'I gerears
de Santongier m'agensa. »
88. que stregha. — 89. cors. — 90. noios. — 94. Sos. — 95. gems. —
102. mos c. — 104. santangier.
5. J'ai introduit maïstris, bien que le verbe maïstrir n'existe pas
dans Raynouard. On y trouve pourtant enmaistrit « habile »:
12. Ou ce vers-ci est trop long d'une syllabe, ou les vers 28, 44,
60, 92 sont trop courts. La mesure du dernier vers de chaque cou-
plet, vers correspondant à celui-ci, rend probable qu'il doit y avoir
six syllabes dans tous; mais alors il faudrait corriger quatre vers sur
six, tandis qu'on n'aurait à en changer qu'un seul, si Ton acceptait pour
ces six vers la mesure de cinq syllabes.
22. crecis. Il paraît qu'il faut corriger enrecis = enrequïs,
27. Vers trop court. Il faudra remplacer pros, qui est déjà au
v. 25, par un adjectif de deux syllabes, peut-être ricos.
31. Corr. preghars,
35. Vers trop court de trois syllabes.
36 ss. : o puisque mon cœur ne l'estime point (c.-à-d. l'avoir) à un
tel point que je mente pour cela, dans mes chansons, à elle, à qui
j'obéis. »
37. Pour mon cor au lieu de mos cors, voy. Inedita aus pariser
Handschrifterif p. xv, xvi et Mushacke, AUprov, Marienklage, p. 57.
55. Lisez Cane vis, etc. ?
â
34 POESIES PROVENÇALES INEDITES
65. Lisez Ja ? mais il manque encore une syllabe.
69 . Lisez ne l. f
69, 78. Vers trop courts.
77. cil = que-ill.
83, 100, 104. VowT Sohira, n'Agout, Santongier, voy. Hist. de Lan-
guedoc X, p. 246, et Robert Meyer, Leben des Trobadars Gaucelm
Faiditf p. 56, 57.
99. Vers trop court de deux syllabes, qui devaient contenir aussi
la rime en os.
Gr. 231, 2. Msc. D 260.
GUILLELMS RANOLS
Laissatz m'era de chantar,
mas per esqivar los danz
qe prenia ioiâ e chanz,
m'erper eus pas atornar.
5 e no • m chai s'entrels maritz
non es mos chanz achoillitz,
tan gen s'acord' ab los gais ;
mas trop n'i trob de savais
abrigatz sotz bel parer,
10 quais qez ill cuion saber
de prez com vai ni don mou,
ezunsno tastec del brou.
Malvestat vei trop poiar
e prez decazer a panz,
15 e per colpa dels truanz
vei tôt lo segle torbar,
qe*l bocs es al lop arditz
e Taustor sec la perdiz,
Fagnels garda e*l pastre pais
20 e'I muls cavalca son fais,
e vei lo frevol tener
4. a]o.— Le$ couplets 2 e^ 3 soJit intervertis dans le manuscrit,^ 15.delz.
TIRÉES DES MANUSCRITS D ITALIE 35
e'I fort bruzar e cazer
e*l carre denan lobou
e nadal segrent an nou.
25 Si 'm qers ni -m vols demandar
don es traitz aquest semblanz :
dels ries, qar per lor enganz
losvol deus tant abaissar
q'us frevols pobols petitz,
30 armatz de sobrepelitz,
q'anc mais az enan no*s trais,
lor tolon tors e palais,
e's fan contr'els tan temer
. qe contra lor fais poder
35 han bastit un segle nou,
e no son mas oitz o nou.
24. El.
Ud beau sirventes de Guillem RaiDol, dirigé comme celui-ci contre
le clergé, mais plus encore contre Simon de Montfort et les Français,
date des années 1216 à 1218. Voy. Stimming, Bertran de Born, pp.
82, 136.
2. esqivar, dans le sens de « détourner », manque dans Rayn.
12. hrou, y oy, bro dans Rayn.
22. Corr. hrucar «broncher ». Raynouard n'a que la forme burcar.
24. segrent par métathèse pour segv^ntre .
Cari Appel,
(A 8um*e.)
/
LE LIBRE DE MEMORIAS
DE
JAGMB HASGARO
AVANT-PROPOS
On ne connaît de Jacme Mascaro que son nom, Tépoque approxi-
mative de sa naissance et ses fonctions. Né probablement à Béziers
au commencement du xiv* siècle, il fut élu écuyer du consulat en
1348, ainsi qu'il nous l'apprend lui-même: « E van elegir que fos
lur escudier Jacme Mascaro. » (folio 4 verso). Chaque consul avait
à son service un écuyer, et Técuyer du premier consul, outre les
charges habituelles de cette fonction (exploits pour le recouvrement
des impôts, exécution de la justice consulaire, etc.), devait tenir un
registre des affaires de la commune : telle est sans doute Torigine
du Libre de memorias.
Ce livre contient, année par année, la liste des fonctionnaires
principaux de la ville de Béziers, Texposé sommaire des faits qui
intéressent directement la cité (montant des impôts, privilèges, tra-
vaux publics, pestes, disettes, phénomènes météorologiques, passages
de rois ou de grands personnages, entrée des évoques, dissensions
intestines, etc.), des événements les plus saillants de l'histoire géné-
rale, comme la mort et la naissance des princes de la maison royale,
les principaux épisodes de la guerre de Cent Ans, et notamment la
pnse par les Anglais des localités de la région. 11 s'étend de l'année
1336 à Tannée 1390 inclusivement*. En dehors de son intérêt histo-
rique, cette chronique constitue un document important pour l'étude
de la langue d'oc, et particulièrement du dialecte biterrois, au xiv»
siècle.
Le manuscrit de Mascaro est conservé à la Bibliothèque munici
pale de Béziers, salle des Archives, armoire 8, no 1. C'est un grand
* La chronique s'ouvre par la mention, en l'an 1247, de rabdicalion du
dernier des Trencavel, c'est-à-dire d'un des faits les plus importants pour
riiistoire de la cité ; Mascaro passe ensuite sans transition à Tannée 1336.
LE «LIBRE DE MEMORIAS» 3 7
volume (40 X 29 X 4 cent.) relié à laide de deux planches de bois
recouvertes de cuir, ornées chacune de cinq gros clous de cuivre ; la
face supérieure porte eu outre un anneau de fer rectangulaire qui
était destiné à enchaîner le manuscrit. La tranche est peinte en bleu,
mais la couleur a disparu en grande partie. Le papier est du papier
d'ouate. Il y a deux sortes de foliotation, l'une à droite, en chiffres
romains, qui a le plus souvent disparu par le fait de la rognure, l'au-
tre à gauche, en chiffres arabes, conforme à la précédente, qui sub-
siste entière ; nous l'indiquons dans notre copie. L'écriture, très
espacée, est à Tencre noire, sauf quelques lettres initiales, titres ou
signes à l'encre rouge. C'est une gothique assez régulière, d'une lec-
ture facile, à part quelques rares additions au texte, faites par une
autre main et que nous signalons en note. Les abréviations sont peu
nombreuses et aucune ne présente de difficulté.
Le Libre de Memorias a déjà été publié en 183G dans le Bulletin
de la Société archéologique de Béziers, l*'e série, 1er volume, page
67-146. L'auteur de cette publication n'a pas toujours reproduit le
texte avec fidélité. C'est pourquoi nous ne croyons pas inutile d'en
donner une seconde édition, rigoureusement conforme à l'original.
Nous avons cru devoir respecter jusqu'aux caprices même de l'ortho-
graphe, souvent variable pour un même mot.
Ch. Barbier.
[F. 1 recto] AYSSO ES LO LIBRE DE MEMORIAS, LO QUAL
Jacme Mascaro, escudier dels honorables senhors cossols de la
viela de Beses, a fach e hordenat de niotas e diverssas causas que
son endevengudaSf aissi quan se ceq :
Premieramen :
L'an MCCXLVii, el seten jour del mes d'abriel, Trencavelh,
viscomte de Bezes, fes carta et instrumen d'absolucio als se-
nhors cossols de Bezes, del sagramen de fizeltat, que los ditz
senhors cossols et la viela de Bezes li farian et eran tengutz de
far, et yschamen del servisi e servitut, que los sieutadas de
la dicha viela li farian. Esta ne carta piiblica, la quai es en la
gran cayscha de la mayo coinuna.
[1 V.] Item Tan dessus digMCCXLVii, e la novena calenda de
jun, se comenset lo tractamen de far lo comensamen de la
font del mercat de Bezes, per los honorables senhors cossols,
3
38 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
e per lot lur honorable cosselh de la dicha viela de Bezes, en
la manieira que podes vezer hobrada.
So son loa senhors cossols sobreditz que en aquel temps
eron^ so es a saber :
Sen Bernât de Pradas; sen Pejre Panta Salada; sen
Esteve de Bajas; sen Pejre de Santa Aularie ; sen Guilhem
Daynha; sen Bertran Sayschac; sen Peyre Molinier.
Losquals senhors cossols dessus nominatz van apelar los
senhors de jus escrigz, e motas genz de la viola de Bezes, per
saber si degun y volia deguna cauza dir.
[2 r.] Premieyramen van appelar los sobreditz senhors
cossols :
Mossen Johan Eranha, senescalc de Carcassona e de Bezes ;
pus van apelar mossen Ramon, evesque de Bezes ; pus mos-
sen Guilhem, abat de mossenhor Saut Jacme; pus mossen
Jacme, abat de mossenhor Sant Afrodisi ; pus van far venir lo
sen Bernât Caus, el sen Guilhem Guitart, los quais dos sen-
hors van perpenre Tobra de la dicha fon, aissi quant vezer se
pot hobrada.
L'an Mcccxxxvi foron cossols :
Mossen Pejre Desmas, savi en dreg, per taulas; sen Ber-
nât Gibeli, per mercadies ; maystre Guilhem Danha, notari ;
sen Ramon Laures, per parayres ; sen Johan do Sant Andrieu,
per sabaties; sen Peyre Seriiiha, per pelicies ; sen Andrieu
Galhart, per lahor.
[2 V.] Item Tan sobredich mcccxxxvi, el xvii jour de
genoyer, los sobreditz senhors cossols van manlevar de
mossen Andrieu Frezols, filh que fo saentras de mossen P.
Prezols, cavalier, del castel de la Veruna, vu*' xi libr, vi d.
torn., contan lo tomes xii d.
Item Tan dessus escrich mcccxxxvi, dijous que fo lo viii^ jour
de febrier, a hora de vespras, venc a Bezes lo rey de Franssa
nostre senhor, que avie nom mossen Phelip de Valoys. Et
anava amb el madama la regina, sa molher. Els senhorscos-
sols de la dicha viela feron li présent de belcop de bêla vais-
sela d'argent. Et feron mantos los ditz senhors cossols, que
degun temps no fouc vist qu'en portesso davan '.
* Daus le manuscrit, le mot davan, écrit à l'encre noire, est rayé d'un trait
à l'encre rouge.
DE JACME MASCARO 39
Et van venir am nostre senhor lo rej sobre dig, so es a
saber : lo rej de Navarra et motz d'autres dux, princeps,
comtes, baros, et tanta de nobleza que non se pojria nomnar.
[3 r.] L'an mcccxli foron cossols :
Sen Guilhem Augie de Pauiha ; sen Sicart Roart ; sen Jolia
Barrieyra; sen Amalric Lieura; sen Miquel Folcran ; sen
Johan Nadal; sen Mathieu Vilar.
Aquel an mezeis dessus dig foron autriadas letras per lo
rej de Franssa, nostre senhor, lo rey Phelip, als senhors
cossols dessus ditz et a lur honorable cosselh de la viela de
Bezes, que son en la manieyra que es aissi escrig. Et en la
manieyra que se seq es estât publicat et cridat a vos de
trompa, que los sobreditz senhors cossols, que la hora eron,
aguezon et empetrezo las letras dessus digchas, que aguesso
fiejra en la viela de Bezes per tostemps. Et sus aysso los
sobreditz senhors cossols feron gracias, et a votz de trompa las
crideron a totas vicias e castels, et a totz merchans, aissi quan
se seq:
[3 V.] Premieyramen, autriam per nos e per nostres suc-
cessors cossols, que per tostemps seraft en la dicha viela de
Bezes, als senhors merchanz, comprados et vendedos de Nar-
bona, la Grassa, Carcassona, Ljmos, Fangaus, Montolieu,
Vielapencha, Avinhonet, Tholosa*, Sant Paul, Sant Felis,
Monrial, Sozere, Trebes, Belpuech, Mazeras, Pamias, Mira-
pejs, Albi, Castras, Sant Pons de Thomieyras, Sant Amans de
Valthoza, Lodeva, Ginhac, Clarmon, Montanhac, Castelnou-
darri, Sant Paragori, Monpeylier*, Nemze, Belcaire, Vivies,
Avinho, Aies, Aycx, Tarasquo, Masselha, Aurenga, Carpen-
tras, et de totz autres merchans, et de totz los autres lox e
castels, vielas et ciutatz del rialme de Fransa, e de foras lo
rialme d'on que sian, que vengan a las fîeyras, que nostre
senhor lo -rey de Fransa ha autreiadas a nos ditz cossols, et
a la viela de Bezes, et a nostres successors perpetualmen, las
quais fieyras son e seran d'aisi avan perpetualmen, al xx*
jour del mes de may, am vi jorns prodanamens enseguens.
Item donam et autriam nos ditz cossols, e nom de nos e dels
' Lp manuscrit porte Thola, avec un tilde sur l'o.
' Le manuscrit porte Monplr, avec un tilde sur le p.
i
40 LE « LI»RE DE MEMORIAS »
autres successos nostres cossols, que per tostemps seran en
la dicha viela de Bozes, ;i totz mercadies, comprados e ven-
dedos dels lox sobreditz, et de totz autres, quais quesian, que
vengan en las dichas fieyras de Hezes^que siaii quittis e franx
de pagar deniers ny autra causa, de botigas, de liegz e d'es-
tacas, de un*™ ans esseguens, tenguda la premiejra fieyra.
Item volem et autriam et l'iometeni a totz comprados e ven-
dedos, (tenguda la premieyra fieyra), qu'els puesco totas las
horas que se volraii elej^ir, mètre et establir * ses ape-
lar nos ditz cossols iij autres de la viela de Bezes, per lo
temps aveuen, segon que lor sera avist de far, et segon que
en las autras iievras de Pezcnas e de Montanhac son escri-
nadas.
Item volem et autriam iids ditz cossols, e nom de nos e de
nostres successos, que per tostemps sei'an, de tener et de gar-
dar lo for de vis, de civadas et de^fes aissi quan valra i mes
davan las fieyras de Bezes.
Item volem et autriam nos ditz cossols, et prometem, e
nom de nos et de nostres successors cossols, que per temps
seran de la dicha viela de Bezes, de encartar, tener e gardar
Testima do las botigas que per alcus prosomes dessus ditz,
elegidos por las alas dois merclians avenidos, sera fâcha, els
bes de la majo comuna e de la universitat de Bezers obligar,
per las cauzas contengudas en aquestas letras atendre e no
contravenir, totas las horas que per los sobre pauzatz o
alcus d'aquelas alas no seran requistz.
Item fam a saber e manifostani nos ditz vossols, a totz qui
aquestas [4 r.] letras veyraii, ([ue totz mereadier que porte o
fassa portar draps, o aver de pes, o autras mercadarias en
las dichas fieyras, es e sera quittis d'intrada, do leuda e de
barra, et si tant es que tenga botiga e taula en la dicha viela
e on las fieyras dessus diclias de Bezes, no pagara deguna
leuda de las mercadaries que vendra, sino tant solamen un d.
per taulier e de botiga al rey, aisi coma es acostumat en las
fit\vras de Perenas e de Montanhac e en la dicha viela de
Bezes. Et si tant es que vendre no puesco, que cascu las ne
puesca tornar vas son hostal ses pagar leuda ny peratge.
Ml y a ici uoe lacune d'une ligne dans le manuscrit.
DE JACME MASCAKO 4 1
Item autriam et volem que las mercadarias et totz los autres
homes e femnas, que venran a las fieyras de la davan dicha
viela de Bezes, seran quittis de pagar vara viii jorns davan
las dichas fiejTas, e viii jorns après, et aj^tant quant las dichas
fieyras duraran. Et per so que aquestas gracias et promesas e
las autras cauzas, en aquestas presens letras contengudas,
sian veras, e fermas, et estabblas pei' tostemps perpetualmen,
ses jamaj neguna cauza franher ny amermar,
Nos Guilliem Augie, Sicart Roart, Jolia Bariejra, Amalrlc
Lieura, Miquel Folcran, Johan Nadal, Mathieu Vilar, cossols
dessus ditz de la viela de Bezes, per nos et e nom de nostres
successors cossols, que per tostemps seran en la viela de
Bezes, pausam lo sagel del coinu de la dicha viela de Bezes
en pendent, de volantat et de cossentimen del cosselh nostre
gênerai, Tan de la nativitat de nostre senhor Dieu mil
cccxLi, el ters jorn del mes de may.
[4 V.] E en Tan mil cccxi.viii, la premiejra semmana de
carema, comenset a Bezes la gran mortalitat, et comenset
Costa lo porge d'en Sicart Taborieg, meicadier, costa en P.
Peruc, qu'es de pejra al cap de la cariejra franceza, et
moriron totz los senhors cossols, els clavaris, els escudiers,.
et après tanta de gent, que de mil non y remanian cent.
En après estet tota la majo comuna desolada, que no fouc
home que lay trêves ny rodes; et va venir lo sen Guilhem
Augie de Fauiha, borzes, et anet per la viela parlar als hos-
tals d'aquels que eron malautes, e que hom volgues provesir
sus lo fach del cossolat, et ajustet tant de bos homes quant
poc trobar, et aneron far regens per los cossols, so es a
saber:
Sen Johan Guitart , per taulas; sen Steve Barba, per
mercadiers ; sen Johan Corregie , per marel ; sen Bernât
de Serez, per sabatiers; sen Ramon Hue, per aludies; sen
Steve Portai, per lahorayres.
E van elegirque fos lur escudier Jacme Mascaro.
Pus van elegir clavaris, a xx de may, coma regisson :
Sen Aymerie Barbât, per taulas; sen Olivier Paulinha, per
pararia ; sen Guilhem Raynes, per lahor.
[5 r.] Et van levar una talha, que era endicha per los
senhors cossols, que mortz eron, que valie lo d. vi sols.
«2 LE w MBKK DK MEMOHIAS »
Pu3 feron caritadies mages :
Sen B. Guitart, per taulas ; sen Razols Sira, per merca-
Hier3;8en B. Olivier, per mesies: sen Guilhem Roma. per
lahorayres.
Et feron encantajres lo jorn que mossen P. Desmas moric,
et aiso fouc a xxiiii de may, davan la porta mage de Sant
Felis :
Vices Cruvelier, Steve Raynaut, Berihomieu Bonafos.
L'an MCCCXLviiiJo jorn de sant Andrieu, que era dimergue,
se va endevenir que lo comte dWrmanhac, que era adonx loc-
tenen del rej nostre senhor en Lengadoc, venc aBezes; et
I cavalier seu s'en anet deportar al bore del Rejforas los murs,
et anet en una cariejra près del bordel, en que avia una
novia, en que balavon e dansavon. El cavalier regardan lur
estât, van li dir que s'en ânes. El cavalier no s'en vole anar,
et els van lo batre etnafrar ; el cavalier va s'en anar al'ostal
del comte, de que lo comte ne fouc trop corrossat. Et mandet
que aquels que ho avian fach fosson près, e que s'en feres jus-
ticia. Et va lo hom mettre a la cort, e fouc jujat a pendre.
May lo poble menut se va escomoure, et aneron a la cort, e
van dir que aquel que era jujat a pendre lo laycesson anar,
sino els romperon las portas de la cort. Et la una partida
[5 v.] de las gens aneron a la hostalaria del comte, et van li dir
que feres revocar la sentencia, e lur bayles lo prionier, sino
que pesses de mori. El comte mandet a la cort que tantost
lur fos baylat.
Ben valgra may non ho aguesso fach, que pueysas ne
foron pendutz trops, et aquel que ho avia fach no perdet may
lo ponh.
L'an McccxLix foron cossols :
Sen Johan Bigot, per taulas; sen Guilhem Escardavilha,
per mercadies; maystre P. Pastre, per notaris; sen Jacme
Betinha, per marel ; sen Nicholau Pojol, per mersies; sen
B. Rog, per coyraties; sen Guilhem Capelie, per orgies, e
moric aquel an. Els senhors cossols feron sonar lo gros cen
de Sant Nazari.
[6 r.] Foron clavaris :
Sen Razols Sira, per mercadiers ; maystre Miquel Sedel,
per notaris; sen Pey. Segui, per messiers; sen P. Gavasto,
DE JACME MASCARO 4 3
per coyratiers.
Et feron de talha en aquel an x sols per denier.
Foron caritadiers :
Bernât de Badonas, per taulas ; Jacme Vaniejra, per mer-
cadiers; Benezeg Bru, per marel ; Bernât Amielh, per coyra-
tiers.
[6 V.] L'an mcccl foron cossols :
Sen Guilhem Augie de Fauiha, per taulas ; sen Razols Sira,
per mercadiers ; sen Esteve Emengau, per pararia; sen Johan
Cotelier, per peliciers; sen Pons Ros, per sabatiers ; sen
Esteve Sabatie, per molinies ; sen Johan Cortinals, per lahor^
Foron clavaris :
Hue Cabot, per taulas; Ramon Gayschac, per mercadiers ;
Ramon Yslan, per lahor.
[7 r.] Feron aquel an de talha per testa i fiori.
Pus per denier ii sols.
Pus per denier m sols.
Pus per denier m sols, et v sols per testa.
Foron caritadiers :
Guilhem Audi, per taulas; Johan Benezeg, per mercadiers;
maystre Bernât Cornelh, per notaris ; Johan Visme, per
pelicies.
L'an sobredich, lo jorn de sant Berthomieu, moric lo rev
de Fransa, que avia nom mossen Philip de Valoys. Dieu del
cel li aia la sua arma.
[7 V.] L'an mccou foron cossols :
Mesier Guilhem Morut, per taulas; sen P, Astrebo, per
mercadiers; sen Guilhem Rossilho, per niarel; sen B. Abelha,
per messiers ; sen P. Bonct, per fabres; sen Ramon Folcran,
per lahor ; sen Johan Baudriga, per sabatiers, et moric cossol.
Foron clavaris :
Johan Benezeg, per mercadiers ; Ramon Ortz, per saba-
tiers; Johan Andrieu, per messiers; Bernât Rajnes, per fa-
bres.
[8 r.] Foron caritadiers :
Brenguie Augie, per taulas ; Pons Amielh, per mercadiers;
Ramon Navar, per mesiers; Pey. Ramon Revel, per fabres.
Aquel an feron de talha per testai fiori.
Pus per denier i seyre d'escut.
4 4 LE « LIRUE DE MEMOHIAS »
Pus per denier i ters de floi'i. ^
I/an sobredich, fouc una gran qiiestio entre la cortde Car-
cassona et la cort de Bezes, so es a saber, que per manda-
men de mossenbor lo senescalc de Carcassona, venc a Bezes
majstre Ramon Rogie per comossari, e ben xii sirvens de
Carcassona, per trajre alcus sirvens riais, que se dirie que
avian fach una gran enjuria al jutge de crims de Carcassona.
El dig mossenhor senescalc, volen far justicia, volia que lo
dich coméssari les ne gites de la cort de Bezes, els ne menés
a Carcassona. E sobre aisso, los senhors cossols de Bezes
foron requitz que lor [8 v.] plagues que, per la vertut dels
privilèges qu'els avian de nostre senbor lo rej, qu'els no sos-
tenguesso que la cort de Carcassona non los trenquesso, quar
els volian que, si els agucsso res fuch, que la cort de Bezes ne
feres justicia. Els senhors cossols, veren et regardan la enju-
ria, van perpenre la dicha causa, el quas que los ditz prioniers
aguesso fâcha causa mal a ponch, que lo dig mossenhor senes-
calc ne feres justicia, quant se vengra a las siras, en aisi
coma lo cosselh de la cort de Bezes ordenera.
L'an MCCCLii foron cossols :
Sen Frances Bofat, per taulas ; sen Andrieu Astrebo, per
mercadies ; sen Olivier Paulinha, per pararie; sen Guilhem
Boq, per notaris ; sen Bernât Rog, per coyratiers; sen Johan
Gangi, per policiers; sen Augie Nicholau, per fustiers.
[9 r.] Foron clavaris :
Sen Guilhem de Badonas, per taulas ; sen Foie Girona, per
pararie ; sen Ramon Boquet, per fustiers.
Feron de talha aquel an per d. mieg flori.
Pus per denier i quart de flori.
Pus per testai flori, et i quart de flori per denier.
Aquel an valc lo carto del vi i gros.
Foron carrayries :
Sen B. de Badonas, per taulas ; sen P. Boquie, per merca-
diers ; sen Guilhem Duran Sicart, per parayres ; sen G".
Marti, per fustiers.
[9 V.] Foron caritadies :
Sen Ramon Brenguie, per taulas; sen Esteve Barba, per
mercadies ; majstre Guilhem Salât, per notaris.
Aquel an comenset la pladeiaria d'Aygas Mortas.
DE J'ACMK MASCARO 4 5
Et en ^quel an meteis, lo dimecres davan nadal, fouc près
Sant Anthoni per lo captai de Bucg, que era engles.
Lo senhor de Sant Guiraut es tengut de pagar casciin an,
a la festa de Totz Santz, al cornu de Bezes xxx sols. Près ne
carta maj'stre B. Pons, alias Sabatier, notari rial, Tan mccclii,
a XXV del mes de jun.
L'an MCCCLII, a xxv de jun, feron donacio als senhors cos-
sols de Bezes e a tota la nniversitat totz aquels que son en
aquest cartel escrigz, so es a saber de la parso que avian en
la fon del mercat de Bezes, aisi quant se conte en las notas
de majstreB. Pons Sabatie, notari rial :
[10 r.] Lo sen Johan Bigot, borzes, i carto d'ayga,
Sen P. Cabot, mercadior, m cartos,
Sen Guilhem Honelha, fustie, v cartos e mieg, a xxvi de jun,
Mossen Guiraut Buadela, ix cartos, quar el ne cantava en
la capela de la Majre de Dieu de la INIagdaleria, quar lo sen
P. Aludie laj donet, [)er so que, pregues Dieu per l'arma de
si e de sos pajros ;
Sen P. Ginieys hj remes tôt lo dreg que y avia;
Sen Jacme Bedos, parajre, y remes ii quartes que y avia.
L'an MCCCLiii foron cossols :
Sen Cabot Cabot % per taulas; sen P. Raynols, per merca-
dies; sen Johan Coregie, per raarel ; sen Brenguie Laures,
per sabaties ; sen Johan Garnit, per aludies ; sen Johan
Rossel, per peyralies ; sen Guilhem Roma, per lahor.
[10 V.] Foron clavaris :
Jacme Vanuieyra, per mercadiers; Peyre Thomas, per sa-
baties; Ramon Hue, per aludies ; Johan Costans, per peyra-
liers.
Feron de talha aquel an per testa mieg escut, et i quart
d'escut per denier.
Pus mieg escut per testa, e i quart d'escut per d.
Pus una talha, ad ops dels murs, vi d. per d., et levet se
per XV sempmanas.
Foron levayres de bans :
Johan Raynaut, per marel ; Peyre Romieu, per lahor;
Bernât de Badonas, per taulas.
* Le mot est répété dans le manuscrit.
4 6 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
[11 r.] Foron carriejries :
Guilhem Audi, per taulas ; Peyre Cabot, per mercadies ;
Peyre Segui, per mesies ; Ramon Vilar, per peyralies.
ForoD caritadiers :
Guilhem de Badonas, per taulas ; Ramon de Mars, per mer-
cadiers; Johan Baudriga, persabaties; Jacme Betinha, per
marel.
Aquel an fouc mes seti davan Sant Anthoni, per lo comte
d'Armanhac, lo dimergue davan Cararaantran, quar los En-
gles, dels quais era capitanis lo captai de Bucg, avian près
lo dig loc, e lo tengro entro près de Sant Miquel, que lo de-
zamparero de lur bon grat, e s'en aneron en Bordales *.
[11 V.] Aquel an meteis, intret mossen Hue, evesque de
Bezes, et intret al portai de la costa del pon. Els senhors
cossols van far claure lo lo ^ dich portai, entro que agues
jurât las libertatz e las franquezas de la viela; e Tarcivesque
de Narbona, son frajre, va li dir que levés la ma sus aut al
portai en senhal de juramen, a un del mes de maj. Près ne
carta maystre Esteve Vices, et maystre Johan de Camplonc.
Et aquel jour fes sobre gran freg e sobre gran ven, qu-e toni-
bavan los teules dels hostals, que hom non aura va anar per
cai'ieyras.
L'an MCCCLiui foron cossols :
Messie Pons Peyre, per taulas; sen Jacme Vanieyra, per
mercadiers; sen Duran Sicart, per pararie ; sen Peyre Tho-
mas, per sabaties; sen Johan Rial, per policiers : sen Ramon
Yrlan, per lahor; sen Johan Seinhier, per fabres. Mays fouc
y mes coma regen per sen [12 r 1 Pey. Revel, que los notaris,
quant venc a la cort per far lo sagramen, los ditz notaris li
aneron enpauzar alcus crims, de que el no dévie esser cossol.
Foron clavaris :
Sen Brenguie Bertran, per taulas ; sen Johan Folcran, per
pararie ^ ; sen Ramon Geli, per lahor.
* Cet alinéa, à partir de lo diuienjue davan.., jusqu'à en Bordales est
écrit d'une autre main.
^ L'article est répété dans le manuscrit.
3 Le mot Folcran a été écrit par une autre main, la même qui a etîacé le
mot pararie écrit deux fois.
DE JAGME MASGARO 47
Feron de talha en aquest an i quart d'escut per d.
Pus I autre quart d'escut per d.
[12 V.] Foron carrieyries :
Hue Cabot, per taulas ; Peyre Genieys, per mercadies ;
Ramon Jori, per parayres ; Ramon Ortz, per sabaties.
Foron caritadies :
Ymbert de Montadi, per taulas ; Peyre Esteve, per mer-
cadies ; maystre Bernât Cornelh, per fabres ; Johan Cote-
lier, per pelicies.
[13 r.] Foron ievayres de bans :
Peyre Cabot, per mercadies ; Johan Baudriga, per saba-
ties ; Maystre Santz, per fabres ; Brenguie Bayle, per pelicies.
En aquest an cremet lo cloquier de Sant Nazari, so es a
saber la nueg de nadal.
Aquel an meteys foron fâchas justas lo jorn de* Caraman-
tran, que tenie la taula maystre Pey. Fabre, el castela de
Cesseno, en que era mossen Hue d'Archas, et mossen Sicart
de Murvielh, e Guilhem de Mezo, que tenc taula a ^ Celas Raras
Tendema, e se portet mot noblamen et esperta et a Celas
Cubas et a Celas Razas, de que Lac gran renom. Dieus, per
sa dossa piatat, aia merce de la sua arma^.
[13 V.] L'an mccclv foron cossols :
Sen Bernât Guitart, per taulas; sen Daunis Serinha, per
mercadies; sen Benezeg Bru, per marel; maystre Ramon
Bertran, per notaris ; sen Pey. Gavasto, per coyraties; sen
Johan Andrieu, per messies ; sen Bernât Salvayre per orgies.
El dich sen Bernât Salvayre se va rebellar contra lo cossolat,
per que li feron despolhar las raubas tro que se fos reconce-
liat, car el era de la partida dels Reformados.
Foron clavaiis :
Sen Johan Esteve, per mercadies ; maystre Guilhem Roma,
per notaris ; sen Jacme Bernât, per coyraties ; sen Johan
Emengau, per mesies.
1 Où avait d'abord écrit e7i tovn. Ces mois ont été rayés et remplacés
par les mots lo jorn de écrits au-dessus de la ligne par une autre main.
2 Le mot a a été ajouté en surcharge par une autre main.
3 La fin de l'alinéa à partir de Vendema est d'une autre main, la même
«jui a fait les corrections mentionnées dans les deux notes précédentes.
18 Î.K « r.lBHK DE MKMOKIAS »
[14 r.] E feron de talha per denier i ters de flori. Pus
per denier i quart de flori. Pus ad ops dels murs i quart de
gros. Et no se levet majs per vi sempmanas.
Foron levajrcs de bans :
Sen P. Estaci, per taulas ; Ramon Gaudel, per marel ;
Guilhem Trencavelli, per orgies.
Foron carajries :
Ramon Cotelier, i)cr tanlas ; Veria Scrinha, per mcrcadies ;
maystre Guilhem Revel , per notaris : Jacme Vidal, per
mesies.
[14 v.J Foron caritadiers :
Sen Hue Cabot, i)er taulas ; sen Ramon Gayschac, per
mercadies ; sen Pons Veria, per cojraties ; sen Jolian Cor-
regie, per marel.
L'an MCCCLV, davan las Totz Sanz, venc en aquest pays lo
princep de Galas. E vengueron los coredos entro a Bezes.
Mais quant el saup que en Bezes avia grans gens d'armas, no
vole pus avant passar ; e venc ta grau neu que si no s'en
fos tornat, non y aguera engles no fos remangut en las
plassas.
[15 r.] L'an mccclvi foron cosï^oIs :
Sen Razols Sira, per l'escala de taulas ; sen P. Astrebo,
per mercadies ; sen Foie Girona, per pararie ; sen Ramon
Ortz, per sabaties ; sen P. Aymoy, per pelicies ; sen Esteve
Sabatie, per monies ; sen Jolian Cortinals, per lahor.
Foron clavaris :
Aymeric Barbât vielli, per taulas ; Guilhem Mauri, per
pararie ; Peyre Bragayrie, per laor.
[15 V.] Feron de talha en aquest an davan dich mieg flori per
denier. Pus per denier i flori.
Foron levayres de bans :
Veria Serinha, [/er mercadies; Johan Bial, per pelicies ;
Brenguie Laures, per sabaties.
Foron caritadies :
Peyre Boquie, per mercadies; Ramon de Puzac, per peli-
cies ; Esteve Gautier, per monies ; Ramon Yrlan, per lahor.
[16 r.] Foron carrieyries :
Ramon Cotelier, per taulas ; Jacme Gautaroia, per merca-
dies ; Peyre Boyer, per parayres ; Bernât Miralhie, per
sabaties.
DE JACME MASCARO 49
L'an dessus dig mccclvi, a viii del mes de setembre, fouc
près nostre senhor lo vey de Fransa, que avie nom mossen-
hor Johan. Et aisso davaii la viela de Pe;yties, don ne fouc
tût lo rialme en tristor. Et près lo en batalha rengada lo
princep de Galas, filh del rey d^Anglaterra, e pueys menet
Ion en Anglaterra.
Aquelanmezeis c'omenset hom a bastir la muralha de Bezes.
Els capitols de las glieysas et totz los autres clergues comen-
seron a pagar a las dichas muralhas.
Pus en aquel an se comenseron a mètre e enpauzar las
imposicios sus totas las mercadarias, las quais emposicios
foron autreiadas al cornu per lo rey nostre senhor, o son
loctenen, en ajutori de bastir la muralha ; e las dichas empo-
sicios montavan gran soma ^
[16 V.] E foron clavaris dels ditz murs, que jamay non
avie fag pus lo cossolat :
Sen Peyre Amielh, canabasier; sen Nicholau Pojol, espe-
ciayre ; sen Andrieu Galhart, lahorayre.
La venue desjuifz^
L'an dessus dig mccclvi, venguero a Bezes los jurieus en
tal ponch, que despueys en sa la viela ny los castelsno ferem
nostre pro.
[17 r.] L'an mccclvii foron cossols :
Mesie Bertran Andrieu, per taulas ; sen Ramon Gaysac,
per mercadies ; sen Ramon Gaudel, per marel ; sen Johan
Baudriga, per sabaties ; sen Nicholau Pojol, per mesies ;
sen Andrieu Galhart, per laor ; sen Guilhem Fabre^, per
fabres.
Foron clavaris :
Esteve Desmas, per mercadiers ; Jacme Vidal, per mesies;
Bernât Redorta, per sabaties.
]17 V.] Feron de talha aquel an i flori per denier.
• La fia de l'alinéa à partir de las quais emposicios est d'une autre main.
* Cette ligne a été écrite après coup, bien postérieurement au reste du
manuscrit.
^ Le mol est répété dans le maouscrit.
4,. ■
50 LE a LIBRE DE MExMORIAS »
Pusters de flori per dénie.
Pus ad ops dels murs i gros per d., e levet se per vi meses.
Foron levajres de bans :
Hue Cabot, per taulas ; Benezeg Bru, per marel ; Johan
Cortes, per laor.
Foron caritadies :
Brenguie Augie, per taulas ; Daunis Serinha, per merca-
dies ; Jaome Majstre, per marel ; Pons Ros, per sabaties.
[18 r.] Foron carrieyries :
Guilhem de Badonas, per taulas ; Jacme Vanieyra, per
mercadies ; Bernât Abelha, per mesies ; Ramon Garoti, per
fabres.
L'an dessus dig mccclvii, fouc trames sen Johan Bigot,
})orzes, per embaj'sador, am lo sen Johan Servia, parajre de
Bezes, al rey de Fransa nostre senhor,que era près en Engla
terra.
[18 V.] L'an mccclviii foron cossols :
Sen Johan Bigot, per taulas ; sen P. Raynols, per merca-
dies ; sen Guiraut Blanquier, per parayres ; sen Johan Cote-
lier, per pelicies ; maystre P. Fabre, per notaris ; sen Ramon
Boquet, per fusties ; sen Bernât Rog, per coyraties.
E feron raubas la i partit de vay.
Foron clavaris :
Guilhem Audi, per taulas ; Ramon Guiraut, per pararie ;
Johan Pastre pus vielh, per fusties.
[19 r.] E feron de talha aquel an per denier i ters de flori.
Aquel an se leveron los portais de la viela de Bezes, e se
caveron las cavas.
Aquel an meteis passet a Bezçs lo cardenal de Boluenha.
Foron levayres de bans :
Andrieu Gaso, per taulas; Benezeg Bru, per marel ; Ramon
Yrlan, per lahor.
Foron carrayries :
Ramon Cotelier, per taulas ; Jacme Lombart, per merca-
daria ; Peyre Pelegri , per fusties ; Peyre Bechier, per
messies.
[19 V.] Foron caritadies :
Hue Cabot, per taulas : Esleve Fabre, per mercadies :
Guilhem Rossilho, per marel ; Bernât Miralhier, per saba-
ties.
DE JACME MASCARO 51
Aquel an comenset hom a far las cossieyras dels murs de
Bezes, tôt entorn la viela, e comenseron a plareiar am los
clercz.
[20 r.] L*an dessus mccclviii, fouc mot gran descencio
entre los senliors cossols de Bezes, mossen Tibaut de Bar-
bara, raossel senesjalc de Carcassona, lo jutge mage, lo
jutge de crims, lo avocat del rey, el procurajre del rej.
Totz aquestz officiers de Carcassona foron requisitz per los
ditz senhors cossols, que venguesson jurar las libertatz e
franquezas o privilèges de la viela. Et els recuran qu'els non
ho volian far, los sobreditz senhors cossols agueron letras del
rey de Franssa nostre senhor, que fosson totz aquetz officies
ajornatz davan lo rey. Et els, vezen Tajornamen, volgron
far lo dig sagramen non pas dins la viela de Bezes. Et sus
aiso mossenhor Tarcivesque de Narbona e Tavesque de
Bezes van s'en entremetre, et van ne parlar al dig mossenhor
senescalc et als autres officies de Carcassona, e van los ditz
senhors oberi, e feron totz lo sagramen. Près ne carta
maystre Frances Causenuejols, notari rial de Bezes. dedins
la viela de Narbona.
[20 V.] L'an mccclix foron cossols :
Sen Brenguie Augie, per taulas ; sen Jacme Gautaroia,
per mercadies ; sen Johan Coregie, per marel ; sen Pons
Ros, per sabaties ; sen Johan Garnit, per aludies ; sen
Mathieu Lombart, per peyralies, e mori aquel an cossol ;
sen Johan Folcran, per lahor.
Foron clavaris :
Pons Amielh, canabassie ; Ramon Vielar, per peyralies ;
Argant * Barrieyra, per sabaties; Symon Savayda, per alu-
dies.
[21 r.] Feron de talha aquel an m quartz de flori per denier.
Foron levayres de bans :
Andrieu Gasc, per taulas ; Beneze^: Bru, per marel ; Ramon
Yrlan, per lahor.
Foron caritadies :
Sen Hue Cabot, per taulas; sen Esteve Fabre, per merca-
* Ce nom remplace Bernât, écrit d^abord et exponclué. Avgant est au-
dessus dans Vinterligae.
52 LE a LIBRE DE MKMORIAS »
dies ; sen Guilhem Rossilho, per marelies ; sen Bernât
Miralhie, per sabaties.
[21 V.] Foron carrayries dediiis la viela :
Ramoii Cotelier, per taulas ; Jacme Lombart, per merca-
dies ; Peyre Bechie, per messies; Pons Vit4ar, per peyra-
lies.
Aquel an los clergues de las gliejas de Bezes, de voluntat
de lur capitols, so es a saber : del capitol de Sant Nazari e de
totz los senhors canoiiges, del capitol de Sant Afrodisi, e de
Tabat de Sarit Jacme*, et de totz los canorgues, el prior de
Cassa ^ e de totz los canorgues de Cassa, e la viela de Bezes
am totz son cosselh ancron mètre en compromes lo débat et
questio, que era entr'els ^ , en los honorables senhors cosse-
Ihiers de mossenhor lo comte de Peyties, aisi cum fo mossen
Pey. de Carato, cavalier, e mossen R. la Roqua d'una part,
e mossen R. Barot, canonge de la glieya de Sant Just de
Narbona, e a maystre R. Malpel e al sen P. Dorimnis,
merchan de Narbona, et en lo sen Pey. del Lac, cossols de la
viela de Narbona. E van ordenar que los senhors de las
glieyas dessus nommadas paguosson lo fach de la muralha
de so que era fach nys feres per tostemps, très melia tioris
0 dos cens floris ; e que d'aqui avan non aguesso pus des-
cencio.
Item may ordenero que el quas que d'aqui avan agues res
a far, tant a.pons, a fons, quant a mais passes, que paguesso
la novena part de tôt quan costera. Près ne carta maystre R.
Bertran o maystre Bernât Agel, notaris riais*.
[22 r.] I/an mccclx foron cossols :
Mesie Bernât Garra, per taulas ; sen Peyre Cabot, per
mercadies, et mori cossol en la viela de Monpeylier ; sen
Johan Servia, per pararie ; sen Pey. Thomas, per sabaties ;
' Le mot Jacme est rayé, et au-dessus est écrit un mot à demi effacé et
illisible.
* Les mots de Cassa sont écrits en surcharge dans l'interligne.
^ Les mots en compromes lo débat et questio que era etitr'els sont en
renvoi dans la marge du manuscrit, à droite.
* En face de cet alinéa il y a dans la marge du manuscrit, à gauche, uoe
main grossièrement dessinée, au-dessus de laquelle sont écrits les mots : de
la fontayna.
DE JACME MASGARO 53
sen Johan Cabrajressa per canabassies. Et aquest an comen-
sero aver cossol que encaras non avian ahut, et agron lo
que los pelicies los aqulhiro.
Sen Bernât Rajnes, per fabres ; sen Ramon Gili, per
lahor.
Foron clavaris :
Ajmeric Estaci, per taulas ; Pejre Mauri, per parajres ;
Guilhem Pages, per lahor.
Feron de talha per denier m. franc.
Pus per denier autre mieg franc.
[22 V.] Foron levajres de bans :
Jacme Lombart, per mercadies ; mesie Jaques Qoch, per
canabasies ; Griiilhem Fabre, per fabres ; Bernât Miralhie,
per sabaties.
Foron caritadies :
Andrieu Gasc, per taulas ; Daunis Serinha, per mercadies ;
Peyre Segui, per canabassies ; Pejre Fabre, per lahor.
[23 r.] Foron carrajries :
Jacme Botho, per taulas ; Pons Amielh, per mercadies ;
Bernât Promit, per parajres ; Bernât Arnaut, per sabaties.
Aquel an dessus dich se cpmenset à far lo compes, mais los
grans rix homes de la viela non lo layssero aternir, ny vol-
gro que se feres, per sso que hom no saupes lur estât.
[23 V.] L'an mccclxi foron cossols :
Sen Brenguie Bertran, per taulas ; sen Ramon Gajschac,
per mercadies, e mori estan cossol ; sen Benezech Bru, per
mazel, e mori estan cossol ; sen Pons Veria, per coiraties ;
maistre Esteve Vices, per notnris ; sen Pey. Massas per
messies, e mori estan cossol ; sen Arnaut Fornie, per orgies.
Foron clavaris :
Pejre de Badonas, per mercadies ; maistre Bernât Sebeli,
per notaris ; Peyre Gaubart, per mesies ; Johan Marti, per
coyrafies.
Feron de talha, per d. i franc.
[24 r.] Foron levayres de bans :
Sen Jacme Botho, per taulas ; sen Peyre Arnaut, per
orgies ; sen Peyre Acde, per marelies.
Foron carayries :
Ramon Cotelie, per taulas; Esteve Fabre, per mercadies ;
4
à
54 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
maystre Guilhem Revel, per notaris ; Ramon Massas, per
messies.
[24 V.] Foron caritadies:
Arnaut Barbât, per taulas ; Johan Esteve, per mercadies ;
Guilhem Rossilho, per marel ; Brenguie Cambavielha, per
coiraties.
ËQ aquel an dessus dicli fouc fâcha la portalieira nova de
la majo comuna.
Item aquel an mezeis feq hom genz d'armas per estar en-
establida contra Gassiot del Castel, que era engles, lo quai
avie près en carema per escala lo luoc de Cesseras*.
Pus aquel an mezeis Vf ne el pais de Lengadoc lo comte de
Tustaraera, que era frayre del rey de Castela.
Pus en quel an venc en lo dich pais mossen Segui de Bada
fol, que era engles, et près lo luoc de Frontinha.
Mays non triguet gaire que la vigarie de Bezes y anet
provesir, et fes motas de genz d* armas tant que gaires no y
esteron, e los feron passar tôt lo pays.
[26 r.* ] Foron levayres de bans :
Jacme Lombart, per mercadies ; Ramon Ortz, per sabaties;
Peyre Catala, per pelicies ; Bernât Fabre, per monies.
Foron caritadies :
Ramon Cotelier, per taulas ; Andrieu Amielh, per merca-
dies ; Ramon de Puzac, per pelicies ; Esteve Sabatie, per
monies.
Foron carrayries :
Jacme Boto, per taulas ; Daunis Serinha, per mercadies ;
Peyre Mauri, per parayres ; Bernât Golfi, per marel.
[26 v]. L'an mccclxiii foron cossols :
Mesie Pons Peyre, per taulas ; sen Jacme Gautaroia, per
mercadarie ; sen Guilhem Rossilho, per marel; sen Jacme
Vidal, per mesies ; sen Ramon Ortz, per sabaties ; sen Johan
Sahonier, per fabres ; sen Ramon Roqua, per lahorayres.
Foron clavaris :
Esteve Fabre, per mercadies ; Johan Coyra, per me.-ies ;
Bernât Bermon, per fabres ; Daude Albi, per sabaties.
Feron de talha très miegz floris per d..
i Ms. Cecesseras. — 2 La feuille 25 du manuscrit est en blanc.
DE JACME MASGARO 55
[27 r.] Poron levajres de bans ;
Guilhem Audi, per taulas ; Frances Barriejra, per marel ;
Pons Ermengau, per lahor.
Foron carrayries :
Ramon Gotelier, per taulas ; Ramon Massas, per mesies ;
Ramon Viguier, per mercadies ; Raynaut Passavan, per
fabres.
Foron caritadies :
Jacrae Botho, per taulas ; Peyre de Badonas, per mer-
cadies ; Jacme Maistre, per marel; Peyre Bragayrie, per
. laor ; B. Miralhier, per sabaties.
[27 V.] L'an dessus mccclxiii, venc a Nemze lo rey Johan,
et aiso quant ysit fouc de prio, so es a saber d'Anglaterra.
E covidet totz los cossolatz a dirnar lo jorn de nadal.
Item Tan dessus dich, a xi de novembre, la nueg de Saut
Marti, fouc près lo luoc de Peyriac per Bertrugui et sos
companhos *.
Aquel an meteis % fouc près lo castel de Linha per avol
garda, la nueg de Sant Nazari, per Loys Roinbaut, que era
engles, de que n'ac, avans que laysses ni desampares lo dig
luoc, de Tavesque de Bezes e dels senhors cossols de la dicha
viela, X milia floris.
Item costet pus d'autres x milia floris per tener gens d'ar-
mas et autres en establida contra lo sobredich Roinbaut et
sos companhos; et las establidas estavan en très luox, so es
a Maraussa, a Thesa et a Cornelha.
[28 r.] L'an mccclxiiii foron cossols :
Sen Jacme Boto, per taulas ; sen Jacme Lombart, per mer-
cadies; sen Ramon Promit, per parayres ; maystre Johan de
Fontaynas, per notaris ; sen Bernât Promit, per coyraties ;
sen Ramon de Puzac, per pelicies ; sen Johan Pastre, per
fusties.
Foron clavaris :
Sen Peyre Vilar, per taulas ; sen Jacme Genestas, per
parayres ; sen Pons Laurens, per fusties.
Feron de talha aquel an per denier i flori e mieg.
^ Dans le manuscrit cet alioéa est barré.
* Le mot meteis a été barré, et au-dessus on a écrit : lxiii.
56 LE u LIBRE DE MFMORIAS »
[28 V.] Foron levayres de bans :
Sen Andrieu Amielh, per mercadies ; maystre Quilhem
Boquie, per notaris; sen Pey. Gavasto, per coyraties ; sen
Bertran Pratz, per pelicies.
Foron carrayries :
Guilhem Cotelier, per taulas ; Guilhem Carie, per mer-
cadies ; Ramon Sabatie, per parayres; Arnaut Fromit, per
coyraties; Bernât Porquie, per fusties.
[29 r.] Foron caritadies :
Mesie Esteve Crotz, per taulas ; Jacme Emengau ; majstre
Berthomieu Saynier, per notaris ; Johan Rial, per pelicies.
L'an sobredich, fec ta gran freg que totz los olivies
moriron, ny non se trobavo ges de cauls, e vendie se la
lieura dels cauls xv deniers.
Item l'an dessus dig fouc près lo luoc de Bederieus per
alcus engles.
Et aquel an fouc près lo luoc de Peyriac.
Item aquel an meteis, a xvi de may, fouc mes ceti per
davan lo dich luoc de Peyriac.
[29 V.] En après Tan dessus dich mil ccclxuii, fouc donada
la crozada per nostre senhor lo papa, papa Urba, contra
aquels que tenian et occupavan lo dich luoc de Peyriac, et
generalmencontra totz aquels que raubavan, pilhavan et des-
cipavan lo reyalme de Franssa, dont non triguet gayres de
temps, que totz ho la major partida foron mortz e tlestrutz a
mala mort.
Es a saber que l'an dessus escrig mil ccclxuii, avie en la
senescalcia de Carcassona ciiii milia fuox.
Item avie ne en la senescalcia de Belcayre lxx milia
fuox.
Pus avie ne en la senescalcia de Tholoza l milia fuox.
Somma las très senescalcias ii^ e xxiiii milia fuox.
[30 r.] L'an dessus mil ccclxuii mossen Guilhem Arnaut,
morgue de Sant Gili, prior de Malsa, de Tavescat d'Uzes, ven-
det tôt quant avie a Bezes ni en lo termenal de la dicha vila,
so es a saber, totz los bes que eron estatz de mossen Bertran
de Monpezat, cavalier, a nostre senhor lo papa, papa Urba,
ad ops del monestier de sant Girma de Monpeylier, et ayso
per pretz de mil iiu^' libras.
DE JAGMK MASCARO 57
[30 V.] L'an mccclxv foron cossols :
Sen Brenguie Bertran, pertaulas; sen Pej. Boquie, per
mercadies ; sen Ramon Gaudel, per marel ; sen Bernât Mira-
Ihier, per sabaties ; sen Pej. Cambavielha, per laor; sen Johan
Garnit, par aludies; sen Guilhem Barta, per pejralies.
Foron clavaris:
Andrieu Amielh, per mercadies ; Johan Bonservisi, per
mesies; Bernât Arnaut, per sabaties; Helias Geli, per pey-
ralies.
Feron de talha per d. i franc e mieg.
[31 r.] Foron levayres de bans:
Ramon Brenguie, per taulas; Peyre Acde, per marel; Johan
Certes, per laor.
Foron carrayries:
Ramon Alari, per taulas; Peyre Lunas, per mercadies;
Benezeg Guitart, per aludies ; Paul Bossela, per peyralies.
[31 V.] Foron caritadies :
Guilhem Cotelier, per taulas; Guilhem Carie, per merca-
dies; Johan Dolha, per sabaties; Johan Corregie, per marel.
Af|uel an dessus dich mccclxv se comenset ad empauzar la
gabela de la sal.
Item aquel an mezeis fouc fagacort entre los senhors clercz
els senhors cossols de Bezes,que totas las mesuras, quais que
fosson, dels capitols de Monflores, de l'Almorna, de Sant
Afrodisi, e de Sauma Longa, tornesso a mesura quer es de la
peyra en lo capitol de Sant Nazari.
Aquel an mezeys mcculxv, a xviii de febrier, comenset a
venir a Bezes lo duc d'Ango, frayre et loctenen del rey
Karles, rey de Franssa, fiUi del bon rey Johan, en Lengadoc.
. [32 r.] Item aquel an dessus dich vengueron tantas de lan-
gostas, que a penas veria hom l'ayre del cel.
Item en aquel an fouc tractât et ordenat, per los ditz sen-
hors cossols e la cort de Bezes, que tota femnaque se aja-
gues d'effant, al batejar del dich enfant non ânes ni agues
sino VI ho vil homes et atrestant de femnas. Et aiso sur la
pena de i franc.
En* Tan mil ccclxv dessus escrig, pagava la vila de Bezes
als subsidis et talhadas per xu^ menhs v fuox, e duret entro
Tan MCCCLXxviii, que tornezon los fuox de Bezes a vie fuox.
i ■ ■
rv
58 LE « LIBRE DE MEMORLVS »
Et en aquel au mccclxxviii, trobet se que de cent melia
fuox,que avieenla senescalcia de Carcassona, Tan mccclxiiii,
fouc tornat et amermat axvi melia fuox.
Item es tornada la senescalcia de Belcayre de lxx melia
fuox que y avie a xii melia fuox.
Item la senescalcia de Tholoza de l melia fuox, que j solie
aver, coma dessus es dich, es tornada a viii melia fuox.
Somma las très senescalcias xxxvi melia fuox.
. Et solie ne aver iic e xxiiii melia fuox.
[32 V.] L'an mccclxvi foron cossols :
Mesie Ramon Fabre, per taulas ; sen Bernât Laur, per
raercadies; sen Ramon Guiraut, per parajres;majstre Ramon
Geniejs, per canabassies ; sen Bernât Redorta, per sabaties;
maystre Guilhem Rossel, perfabres; sen P. Agel, per lahor.
Foron clavaris:
Ramon Alari, per taulas; Ramon Rog, per parayres; Gui-
lhem Bonet, per lahorayres.
[33 r.] Feron de talha aquel an per denier ii floris.
Pus autriet hom a mossenhor lo duc d'Ango i subsidi de
V gros per fuoc.
Foron levayres de bans :
Peyre de Badonas, permercadies; Jacme Fabre, per cana-
basies; Ramon Ortz, per sabaties; Raynaut Passavan, per
fabres.
Foron caritadies :
Ramon Brenguie,per taulas ; Johan Pradas, permercadies;
Rayrolet Trenquie, per canabasies; Ramon Garoti, per
fabres.
[33 V.] Foron carrayries:
Jacme Emengau, per mercadies; Arnaut Bonet, per para-
rie ; Jacme Laures, per sabaties.
Aquel an passet a Bezes mossen Bertran de Clequi, cava-
lier, que s'en anava en Castela, am gran cop de gens d'armas,
et la viela li fes gran yssida am totz los bos homes de la viela.
E feron li grans presens, elh doneron gf an cop de bêla vay-
sela d'argent.
[34 r.] L'an mcccixvii foron cossols :
Sen Bernât Guitart, per taulas ; sen Andrieu Astrebo, per
mercadies; maystre Guilhem Boquie, per notaris; sen Johan
DE JACME MASCARO 59
Paralops, per mesies ; sen Jacme Betinha, per marel ; sen
Esteve Albanhana, per coyraties ; sen Pejre Arnaut, per
orgies.
Foron clavaris :
Sen Jacme Emengau, per mercadies; maystre Guilhem
Ramon, per notaris; sen Anric Malras, per mesies ; sen Gui-
lhem Salvayre, per cojraties.
Feron de talha aquel an per denier i franc.
[34 V.] Foron levajres de bans :
Sen P. Vilar, per taulas; sen Johan Corregie jove, per
marel; sen Esteve Campanha, per orgies.
Foron carrajries :
Sen Ramon Brenguie, per taulas; sen Johan Pradas, per
mercadies; maystre Guiraut Teysejre, per notaris; Vesia
Gobi, per mesies.
Foron caritadies :
Johan Teron, per taulas; Peyre Lunas, per mercadies;
Guilhelmes, per marelies ; Jacme Bonaric, per coyraties.
[35 r.] En aquel an se venderon totz los arquibanx de las
glieyas de Sant Felis et de la Magdalona.
L'an dessus mccclxvii, a xi de genoier, los senhors cossols
de Bezes, am motz d'autres bos homes de la dicha vila,
aneron a Monpeylier, per far la reverencia a nostre senhor
lo papa, papa Urba, que era vengut a Moiipeylier, lo premier
jorn de genoier.
[35 V.] L'an mccclxviii foron cossols :
Sen Guilhem de Badonas, per taulas; sen Peyre Lunas,
per mercadies; sen Bernât Gibeli, per parajres ; sen Jacme
Laures, per sabaties ; sen Bertran Pratz, per pelicies ; sen
Bernât Fabre, per monies ; sen Ramon Roqua, per lahor.
Foron clavaris :
Johan Teron, per taulas; Arnaut Bonet, per pararie ; Pons
Emengau, per lahor.
Feron de talha aquel an per denier i flori.
Pus per denier i franc.
[36 r.] Foron levayres de bans :
Guilhem Carie, per mercadies; Bernât Redorta, per sabaties;
Ramon de Puzac, per pelicies ; Esteve Gautie, per monies.
Foron caritadies :
60 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Ramon Cabot, per taillas ; Loys Vayssa, per mercadies ;
Paul Bajas, per parajres; Bernât Miralbie, per sabaties.
[36 V.] Foron carrajries :
Bernât de Golbias, per taulas ; Ramon Viguier, per merca-
dies; Pejre Laures, per lahorayres ; Duran Canier, per monies.
A quel an foron mot grans aygadas, so es a saber la nueg
de Sant Guiraut.
Item passeron tantas de gens d'armas entorn Bezes, que
era ses nombre, que hom no podia vendemiar ni semenar.
Et aquel an meteis autriet hom a mossenhor d'Ango, en lo
mes d'octobre, a Tholosa, ii franx per fuoc.
[37 r.] L'an dessus mccclxviii fouc mot gran secada. Els
senhors cossols e tota la viela de Bezes ho los habitans
d'aquela, totz pes nutz, s'en anezon vigolar am grans proces-
sios a la Mayre de Dieu de Serinha. Et aportet hom lo crocific
de Sant Felis, e motas d'autras emaginas de sans.
L'an dessus mccclxviii, a m de desembre, vengueron a
Bezes letras de part madama la regina de Fransa, farens a
saber que ela se era ajaguda de i bel filh, lo quai lo comte
Marti lo avie batejat. Et avie nom Caries; de la quai causa
tota la viela n'ac mot grant gaug, en feron mot gran festa.
E fouc mandat et cridat a vos de trompa per los senhors
cossols, que tôt home vengues am lur banieyras a la majo
comuna. Et anezon de dos en dos a la glieja de mossenhor
Sant Nazari, et aqui foron totas las processios de las gliejas
de Bezes, e partiron se d'aqui e venguero s'en am grans ora-
tios a la glieia de la Maria Magdalena, hont se fes mot sol-
lempne sermo, pregan totz, petitz e grans, que nostre senhor
Dieus li dones bona vida e longa.
[37 V.]. L'an mccclxix foron cossols :
Mesie Esteve Cros, per taulas; sen Jacme Lombart, per
mercadies; sen Johan Coregie, per marel; sen Jehan DoJha,
per sabaties; sen Pevre Gaubart, per mesies ; sen P. Ramon
Revel, per fabres ; sen Johan Menerbes, coma regen, que loj
mes hom per l'escala de laor.
Foron clavaris :
Sen Johan Pradas, per mercadies; sen Johan Evesque, per
messies; sen Esteve Rozievra. per sabaties; sen Ramon Ga-
roti, per fabres.
DE JACME MASCARO 61
Feron aquel an de talha per d. ii franx.
[38 r.] Foron kvayres de bans :
Bernât de Golbias, per taulas ; sen Guilhem Rossilho, per
marel; sen Ramon Geli, per lahor.
Foron caritadies :
Sen Pej. Vilar, per taulas; sen Loys Vayssa,per mercadies;
sen Johan Cabrel, per marel; sen Johan Cruzi, per sabaties.
Foron carrayries :
Ramon Cotelier, per taulas; Johan Benezeg, per mercadies;
Johan de Boservisi, per mesies.
[38 V.] Aquel an dessus dig fouc autriat per los cornus, en
la viela de Carcassona, a mossenhor d'Ango ii franx per fuoc.
Pus, aquel an meteis, i autre subsidi de ii franx per fuoc.
L'an dessus mccclxix fouc mot gran carestia de blat, que a
penas s'en trobàva ges, e valc lo sestie de) fromen ii franx.
[39 r.] L'an mccclxx foron cossols :
Sen Peyre Vilar, cambiador, per taulas; sen Pejre Boquie,
per mercadies; maystre Ramon de Fuelhval, per notaris ; sen
P. Vidal, per pararie ; sen P. Gavasto, coyratie ; sen Pey.
Catala, pelicie, e mori estan cossol; sen Johan Augie, fustier.
Foron clavaris :
Ramon Brenguie, per taulas; Peyre Barot, parayre; Peyre
Porquie, fustier.
Feron de talha aquel an per denier i franc.
[39 V.] Foron levayres de bans :
Sen Jacme Emengau, mercadie; maistre Ramon Catala,
notari; sen Guilhem Aymoy, pelicie; sen Bernât Promit,
coyratie.
Foron carrayries :
Sen Bernât de Golbias, per taulas ; sen Ramon Viguie, per
mercadies ; sen Symon Dalmas, per parayres ; sen Bernât
Sedada, per coyraties ; sen Bernât Porquie, per fusties*.
[40 r.] Foron caritadies :
Pey. Genieys, per mercadies ; Paul Glieyas, per taulas ;
maystre Bernât Agel, per notaris; sen Pey. Esteve, per peli-
cies.
* Il n'y a pas en général de réclames dans ce manuscrit. Cependant au
bas de la feuille 39 verso on lit la réclame : foron caritadies.
6 2 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
En aquel an comprezon los ditz senhors cossols la part
pertoquan ad Ymbert de Montadi, so es a saber totz los
vigayrals, exceptât las copas e las lengas del mazel.
Près ne carta majstre Bernât Sebeli, notari rial de Bezes.
L'nn dessus mccclxx, vendet Guilhem Pejre, filh que fo
d'en Sicart de Pauli, als sindix de Lespinha, lo bandejratge els
erbatge> del terraenal de Bajscha per tostemps, per pretz de
11^ Lx franx. Els senhors cossols dessus ditz, non saben aquesta
venda, van tantost provesi d'anar a mossenhor d'Ango, que
era loctenen del rey, e van aver letras mandans al viguier
del rej, que si los sobreditz sindix de Lespinha venguesso
ho no venguesso foriscapia, [40 v.] quez el prezes tota la dicha
compra a la man del rej, e tantost que Tagues presa, que
la feres forescapia als senhors cossols de Bezes. Totas ves
los sobreditz sindix de Lespinha sauperon que los dilz senhors
cossols ho volian, van ho tantost remetre als ditz senhors
cossols. Els ditz senhors cossols van la foriscapiade raaistre
Ramon Pascal, clavari de Bezes, per lo rej nostre senhor.
Et costet lo foriscapi xliii franx vi sols vin d. Près ne carta
raaistre Pejre Salvayre, notari rial, l'an mccclxx, a xxiii
del mes de mars.
Item aquel an meteis, las donas morgas de Bezes, coma
heretiejras del sen Frances Boffat saentras de Bezes, ven-
deron aïs senhors cossols de Bezes totz los usatges que pre-
nie lo dig sen Frances Boffat, per pretz de mil franx. E près
ne carta maistre Esteve Prunet e maystre Bernât Sebeli,
notaris riais.
Item en aquel an dessus dig fouc fâcha la gran cajscha,
en la quai estan totas las letras et privilèges, que son de la
majo comuna de Bezes. E costei xx floris d'aur.
L'an dessus mccclxx comprerou los sobreditz senhors cos-
sols de Bezes las très partz de Bajssa d'en Guilhem Peyre
de Pauli, per pretz de iiii^ lx franx. Près ne carta maistre
Guiraut Got, notari reval.
Pus fouc foriscapiat de niaystre Ramon* Pascal, clavari
de Bezes per lo rey nostre senhor.
1 Le mot Ramon est écrit en surcharge au-dessus du mot Peyre qtii a
été effacé.
DE JACME MASGARO 63
Près ne carta lo dig maistre Guiraut Got a i d'abriel.
[41 r.] L'an mccclxxi foron cossols :
Seri Johan Teron, per taulas ; sen Jacme Emengau, per
mereadies ; sen Johan Cabrel , per marelies * ; sen Pey.
Thomas, per sabaties ; maistre Alias Geli, per peyralie< ;
sen Johan Garnit, per aludies; sen Pey. Messier, per lahor.
Foron clavaris :
Pejre Genieys, per mereadies ; Hue del Bosc, per sabaties ;
Duran Canie, per monies ; Ramon Savola, per aludies.
[41 V.] Aquel an feron de talha per denier i flori.
Pus aquel an meteis per denier i franc.
Aquel an meteys comessero de far i moli de sanc al verdie
de la mayo comuna, mais non valc res.
Foron levayres de bans :
Guilhem Cotelie, per taulas ; Ramon Gaudel, per marel ;
Ramon Roqua, per lahor.
Foron caritadies :
Ramon Cabot, per taulas ; Peyre de Badonas, per merea-
dies ; Brenguie Audran, per marel ; Johan Barrieyra, per
sabaties.
[42 r.] Foron carrayries :
Ramon Cotelie, per taulas ; Esteve Desmas, per mereadies ;
Pons Vilar, per peyralies ; Peyre del Truelh, peralurlies.
En Tan sobredich venc a Bezes madama Johana, filha del
bon rey Philip de Franssa, e dévie esser molher del duc de
Girona, premier rat del rey d'Arago. dont fo grandamen
malauta, de la quai malautia ela vay raori. E fouc sebelida
al pe de Tautar mage de raossenhor Sant Nazari de Bezes.
Et après a cap de i temps mossenhor lo duc d'Ango ne fes
portar la hossa en Franssa.
En après lo duc de Girona, saubut que ac las novelas que
la sus dicha madama Johana era venguda a Bezes, e que ela
era malauta, veiic a Bezes en manieyra qu'el no fos conogut,
mais ben se saup tantost, dont fouc mandat als senhors cos-
sols, que per muralha e per viela e tôt entorn Testai, on
era la dicha madama Johana, agues gran multitut de gens
ben armadas, e tôt entorn on lo duc tornava, et fouc fach.
Ml y a dans le maDuscrit : marelinies, avec Vn et Vi suivant exponctués.
64 LE « LIBRE DE MEMORL\S »
Tota3 de vetz lo dig duc yssic â las fenestras, et ac mot gran
meravilhas, quan vie aquelas gens armadas.
[42 V.] L*an dessus mccclxxi, a iiii de dezembre^ mossen
Sicart d'Ambres, evesque de Bezes, près sa pocession, et
intret per lo portai de la Sors Menos, e juret les privilèges
de la vija. Près ne carta maistre Johan de Fontajnas et
maystre Pey. Comte, notaris reials.
Item en aquel an se mes lo soquet en lo quarto del vi, que
montava la octava part del quarto.
Item aquel an meteis comprezo los ditz senhors cossols
Testai, que solia esser d'en P. Saseno, que es al Segares. Cos-
tet Lfloris.
Item comprezo los sobreditz senhors cossols aquel an de
maistre Johan de Camplonc i autre hostal aqui meteis. Cos-
tet xxiiii franx.
Item comprezo i autre hostal aqui meteis dVn Jacme Régi
Ortola, per pretz de xx franx.
Et[es]a saber que totz aquestz hostals foron comprafz per far
escorjados, en que escorgesso los marelies.
Aquel an dessus digpaguet hom a mossenhor lo duc d'Ange
I subsidi de dos franx per fuoc
[43 r.] L'an mccclxxii foron eossols :
Mossen Bertran de la Garda, doctor en leys, per taulas ;
sen Bernât Lanr, per mercadies ; sen Ramon Rog, per para-
rie ; sen Johan Criizi, per sabaties ; mesie Jaques Gog, per
canabàsies ; sen Johan Cortes, per lahor ; maistre Raynaut
Passavan, per fabres.
Foron clavaris :
Sen Ramon Cabot per taulas ; sen Peyre Promit, per para-
rie ; sen Ramon Agel, per lahor.
Feron de talha aquel an i franc per d.
Item mieg flori per denier.
[43 V.] Foron levayres de bans :
Duran Selie, per mercadies ; sen Ramon Coregie, per
canabassies ; sen Johan Dolha, per sabaties ; sen Anric
Goroti, per fabres.
Foron carayries :
Andrieu Gasc, per taulas ; Johan Benezeg, per mercadies ;
Jacme Paulinha, per pararie; Guilhem Benquelh, per sabaties.
DE JACiME MASGARO 65
[44 r.] Foron caritadies :
Ramon Alari, per taulas ; Andrieu Astrebo jove, per mer-
cadies ; Jacme Fabre, per canabasies ; maistre P. Rogie, per
fabres.
Paguet hom aquel an a mossenhor d'Anjo v franx per
fuoc.
L'an sobredig MCCCLXxii, coraprezo los ditz senhors cossols
Tamenlayreda, qu'es foras lo portai de Presicadors, dels ditz
Presicados.
[44 V.] L'an mccclxxui foron cossols :
Sen Johan Bermon, per taulas ; sen Guilhem Karle, per
mercadies ; majstre Esteve Prunet, per notaris ; sen Pejre
Acde , per marel ; sen Ramon Massas , per mesies ; sen
Brenguie Graza, per cojraties ; sen Guiraut Portel, per
orgies. Totas ves l'escala dels ditz orgies non ho volian. Totz
aneron s'en a la cort, e van far qu'el no jures ni fereslol
sagramen coma los autres senhors cossols, e van li enpauzar
quer el era lebros et mezel. D'aiso lo dig sen Guiraut Portel
s'en defendet, en feq la proha qu'el era sa e net. Totas ves,
atant quan duret la pladeiarie, la cort y mes regen en son
luoc, so es a saber, io sen Jacme Lombes, lo quai fouc vestit
del tros de las raubas dels ditz senhors cossols ; e fenida la
pladeiarie, fouc mes et receubut en cossolat coma cossol et
régie coma cossol, don las escalas de orjarie, defustarie e
del lahor lo van vestir d'unas raubas semblans ad aquelas
dels autres senhors cossols. El sobredig sen Jacme Lombes
fouc foras, mays el non perdet per so sas raubas.
[45 r.] Forons clavaris :
Esteve Desraas, per mercadies ; maystre Ramon Catala,
per notaris; Guilhem Castras, per mesies; Johan Promit,
per cojraties.
Aquel an feron de talha per denier ii franx.
Foron levayres de bans :
Andrieu Gasc, per taulas; Jacme Causenuejols, per marel ;
Guilhem Miquel, per orgies.
[45 V.] Foron caritadies :
Guilhem Cotelier, per taulas; Pons Floyra, per mercadies;
Steve Campanha, per orgies: Jacme Sicre, per marel.
Foron carayries :
66 LE « LIBRE DE MEiMOÇJAS »
Sen Ramon Cotelie, per taulas; sen Esteve Fabre, per
mercadies ; maystre Ramon Seguie, per notaris ; sen Johan
Emengau, per mesies.
[46 r.] L'an sobredig, a ii joins del mes de mars,lo premier
dimercres de carema, a miega nueg, fouc gran terratremol
per tôt aquest pais, e fouc dos ves en aquest an.
L'an sobredig fouc fâcha la cambra de costa la clavarie els
setis que son dedlns la porta de la majo comuna.
Aquel an meteis los ditz senhors cossols venderon lo soquet
del vi, que era la octava part, ixc i libras ; la pejssonarie,
une libras ; lo pes del blat, xviii( libras; lo mazel, iic libras ;
la polarie, lx libras.
Pus lo quart de la sal prezeron los clavaris de la majo,
lo quai mossenlior d'Anjo donet à la viola de Bezes.
[46 V.] Pus douet lo sobredig mossenhor d'Ango a la dicha
viela de Bezes lo quart de las emposicios.
Aquel meteis an autrieron los cornus de las très senescal-
cias de Carcassona, de Tholosa e de Belcayre al sobredig
mossenhor d'Ango un franx per fuoc.
Transaction faite dacord par messieurs les conseuls et les
juifs ^
L'an dessus MCCCLXxni, a xnii de novembre, fouc fâcha la
iransactio et Tacordi dels senhors cossols de Be^s e dels
Juzieus, 80 es a saber, que d'aqui avan los ditz Juzleus no
prestesse ni aguesso a prestar a degunà persona, quai que
fos, de la dicha viela, aur ni argent am carta, ni sus gatge,
et en quas que, ho feresso ^ qu'els non preresso degun renou.
Près ne carta maistre Johan de Fontaynas.
[47 r.] L'an McccLXvnn foron cossols :
Sen Bernât Guitart, per taulas ; sen Andrieu Astrebo, per
mercadies ; sen P. Mauri, per parayres ; sen Guilhem Ajmoj,
per pelicies; sen Johan Barrieyra, per sabaties; sen Duran
Canie, per monies ; sen Ramon Yrlan, per lahor.
Foron clavaris :
Andrieu Gasc, per taulas; Symon Dalmas, per pararie ;
Johan Boyer, per lahor.
i Cette ligne a été écrite par une autre main, bien postérieurement au reste
du manuscrit. — ^ Ms. ferosso.
DE .TACMK MASCAKO 67
Aquel an feron de talha per d. i franc.
[47 V.] Foron levayres de bans:
Pons Floyra, per mercadies ; Bertran Pratz, per pelicies;
Frances Bechieu, per sabaties ; Estove Gautie, per monies.
Foron cara jries :
Ramon Cabot, per taulas ; Esteve Desmas, per mercadies;
Daude Aibi, per sabaties ; Johan Blanquet, per parayres.
[48 r.] Foron caritadies :
Mesie Loys Blonde, per taulas; Pejre Esteve, per pelicies;
Ramon Emengau, per mercadies; Jacme Fabre, per monies.
L'an dessus mccclxxiiii, sen Pey. de Mozere ena Margarida,
sa molher, amdos essemps, venderon als senhors cossols de
Bezes tôt lo dreg que els avian en los molis del rec. Près ne
carta maistre Guiraut Got, notari rial de Bezes. Et fouc foris-
capiat de maistre Ramon Pascal, clavari de Bezes, per lo rey
nostre senhor.
[48 V.] L'an mccclxxv foron cossols:
Mesie Pons Pejre, per taulas ; sen Feyre Geniejs, per mer-
cadies;-sen Ramon Gaudel, per marelics; sen Johan Emen-
gau, permesies; sen Bernât Golfi, per sabaties ; sen Anric
Garoti, per fabres ; sen Johan Folcran, per lahor.
Foron clavaris :
Pons Floyra, per mercadies; Ramon Betizac. per mesies ;
Varia Londras, per sabaties ; Mathieu Rossant, per fabres.
P'eron de talha aquel an i franc per denier.
[49 r.] Foron levayres de bans :
Bernât de Golbias, per taulas ; Frances Barrieyra, per
niarel ; Pons Cavalie, per lahor.
Foron carrayries :
Ramon Cotelie, per taulas ; Guilhem P. Trenquavelh, per
mercadies ; Johan Laures, per mesies ; Daude Creyschieu, per
fabres.
[49 V.] Foron caritadies :
Andrieu Gasc, per taulas; Paul Barba, per mercadies; Ber-
nât Roquacels, per marel ; Bernât Redorta, per sabaties.
L'an dessus mccclxxv fouc mot gran carestia de blat, que
valie lo sestie de torela vi franx ; el sestie del fromen v franx ;
el sestie del ordi un floris.
Els senhors cossols dessus ditz s'en anezo a la gleysa de
l: ^
68 LE « LIBRE DE MEMOUIAS »
mossenhor Sant Nazari, e van esplicar als senhors canonges
de la dicha glieja, que las genz de la viela eron paubres, e
que, per amor de Dieu, volguesso aver misericordia ad aquels
que lur farian usatge. Els ditz senhors canonges feron ho, so
es a saber, que paguesso per lo sestie del fromen dos franx,
e pel sestie del ordi i flori e mieg.
[50 r.] L'an sobredich, trames hom una gale en Serdenha
per[que] portes de blat, e non aportet ges, quar lo jutge
d'Arboreya non vole permetre que degun blat no salhis foras
del pais.
L'an dessus venderon los ditz senhors cossols lo pes del
blat xvi^ libras ; item vendero lo soquet del vi xim° libras;
pus ordeneron que se levés per cadasaumada de vi per intrada
m sols.
[50 V.] L'an mccclxxvi foron cossols :
Sen Johan Teron, per taulas; sen Andrieu Astrebo jovc,
per mercadies ; sen Frances Rog, per pararie; maystre
Ramon Seguie,per notaris ; sen Johan Promit, per cojTaties ;
sen Bertran Pratz, per pelicies; sen Johan Pastre jove, per
fusties. .
Foron clavaris :
Sen Guilhera Cotelie, per taulas; sen Johan Estassi, per
pararie ; sen Jacme Boquet, per fusties.
[51 r.] Feron de talha aquel an per denier i franc.
Pus paguet per saumada de vendemia mieg gros.
Pus per saumada de vendemia d'avol bestia un patatz.
Pus per saumada de careta viii patatz.
Foron levajres de bans :
Sen Pejre G-eniejs vielh, per mercadies; maystre Jacme
Hejraut, per notaris ; ArnautFromit, per cojraties; Guilhem
Aymoy, per pelicies.
[51 V.] Foron carrayries:
Aymeric Barbât, per taulas ; Johan de Pradas, per merca-
dies; Peyre Gorgori, per coyraties ; Jacme Vedel, per fusties.
Foron caritadies :
Johan Gordo, per taulas : Peyre Gautaroia, per merca-
dies ; maystre Ramon Peno, per notaris ; Ramon de Puzac,
per pelicies.
L'an dessus mccclxxvi, a xiiii de setembre, papa Gregori
DE JAGME MASGARO 69
partie de la ciutat d'Avinho per anar en Roma, de que des-
pueys ensa la glieja nil pais non fes son pro ni son ben.
[52 r.j Aquel an dessus dig mccclxxvi fouc mot gran
sequada, que lo poble se pessava que non nasques ges de
blat, dont no se farian majs plorar. E fes hom motz grans
processios a Bezes, que aportero lo crocific de la glieya de
Sant Felise lo cors sans de mossenhor Sant Afrodisi. E faren
la dicha processio, venc tanta de plueia que lot home fouc ben
banhat. Benezettes en sie nostre senhor Dieus Jhesu Christ, e
lauzat e grazit ne sie lo sieu santé nom.
En aqael an raezeis mccclxxvi, se trenquet e sse talhet per
fortuna d'alcunas genz de Bezes, la ribieyra qu'es de la molher
de mesie Guilhem de Taurel, que es en la ribiej[ra] d'Orp de
jus los molis del ga de Bezes, de que ne paguet la viela de
Bezes v^' franx, dont fo gran pecat, quar la viela non mesia
mal. E ben fora estât pus razonabla causa que ho aguesso
pagat cels que la feron talhar ni rompre.
[52 V.] L'an mccclxxvii foron cossols:
Sen Guilhem Cotelier, per taulas ; sen Lojs Vajscha, per
mercadies; majstre Johan de Fontajnas, per notaris ; sen
Johan Coregie, permarel; sen Bernât Miralhier, persabaties;
sen Ramon Sahola, per aludies; sen Ramon Roqua, per laor.
Foron clavaris:
Sen P. Gautaroia, per mercadies ; sen P. Fons, per saba-
ties; sen Arnaut Guinho, per pejralies; sen P. Truelh, per
aludies.
[53 r.] Aquel an paguet la viela de talha ii franx per denier.
Pus paguet hom per l'intrada de cascuna saumada de bona
bestiade vendemia i gros.
Foron levayres de bans :
Paul Glieyas, per taulas ; Jacme Mauri, per mercadies;
Pejre Ajmoy, per aludies; Esteve Gautie, per monies.
Foron caritadies :
Andrieu Gasc, per taulas; Peyre Genieys pus vielh, per
mercadies ; Jacme Lauzes, per marel ; Johan Dolha, persaba-
ties.
[53 V.] Los senhors cossols dessus digz dobleron aquel an
lo pes del blat.
L'an dessus mccclxxvii, mossenhor Tevesque de Bezes donet
5
70 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
licencia als sobreditz senhors cossols de Bezes qu'els poguesso
far cantar messas et celebrar lo cor de Dieu en la capela, que
es dins la mayo comuna, totas las vegadas qu'els se vol-
guesso.
Lo premier capela que cantet en ladicha capela, so fo mos-
sen Pey. Dolha, capela de la glieya de mossenhor Sant Felis
de Bezes.
Aquel an dessus dig, paguet la viela de Bezes a mossenhor
d'Ango I subside de vi franx e mieg per fuoc.
En aquel an dessus dig mccclxxvii, los dessus ditz senhors
cossols de Bezes se vestiron, e feron raubas d'una fina escar-
lata vermelha, que costava la cana x franx, don d'aqui avan
los cossols ny los escudies no son estatz vestitz sino a taxa,
so es a saber, que cascun senhor cossol agues per raubas del
cossolat xxim franx, els escudies vi franx.
[54 r.] L'an mccclxxviu foron cossols :
Mesie Jacme Bru, avocat, per taulas ; sen Jacme Gautaroia,
per mercadies ; sen Johan Estaci, per pararie ; sen Pey. Fons,
per sabaties; sen Jacme Fabre, per canabasies; sen Ramon
Garoti, per fabres ; sen Johan Certes, per lahor.
Foron clavaris :
Sen Johan de Camplonc, per taulas ; sen Daude Comte, per
pararie ; sen Peyre Trobat, per lahor.
[54 V.] En aquel an dessus dig feron de talha per d. ii
franx.
Pus ordeneron que tota persona que molgues o feres moire
blat pagues xx blancas, que eron vu gros menhs nu patatz.Et
aiso per cascun saq. E duret da xii de genoier entro lo pre-
mier jorn d'abriel.
Foron carrayries :
Ramon Cotelie, per taulas ; Paul Barba, per mercadies ;
Peyre Biro, per parayres ; Johan Dolha, per sabaties.
Foron levayres de bans :
Jacme Mauri, per mercadies ; Daude Creysieu, per fabres ;
Daude Albi, per sabaties ; Peyre Lieura, per canabasies.
[56 r.*] Aysso son los subsides inditz e levatz per monsen-
hor lo duc d'Anjou, frayre e loctenen del rey de Franssa, nos-
^ La feuille 55 du manuscrit est en blanc.
DE JAGME MASGARO 71
tre senhor, en las partidas de Lengadoc, en las très senes-
calcias de Tholoza, de Carcassona e de Belcayre, aissi quant
se seq :
Premieyramen :
L*an MCCCLXVi, i subside de v gros per fuoc ; item Tan après
Lxvii, autre subside de v gros per fuoc ; item Tan lxviii, i sub-
side, autriat a Tholoza, en octobre, de ii franx per fuoc; item
Tan LXix, a Tholoza, i subside de ii franx per fuoc ; itemaquel
an mezeis, a Carcassona, i subside : ii franx per fuoc ; item Tan
Lxx, el mes de mars, i subside : m franx per fuoc; pus aquel
an mezeis, en abriel, i subside de i franc per fuoc ; pus aquel
au mezeis, en novembre, i subside de i franc e quart per fuoc ;
item Tan lxxi, i subside : ii franx per fuoc ; item Tan lxxii,
I subside : ii franx per fuoc ; pus aquel an mezeis, i subside :
I franc per fuoc; pus l'an meteis, a Carcassona, en octobre,
1 subside : n franx per fuoc ; [56 v.] item Tan lxxiu, a Narbona,
en mars, i subside : nu franx per fuoc ; pus Tan mezeis, en
desembre, a Nemze, i subside : ii franx per fuoc ; item Tan
Lxxim, en abriel, a Tholoza, i subside : ii franx per fuoc ; pus
aquel an meteis, el mes de jun, i subside : m franx per fuoc ;
item Tan lxxv, i subside: ii franx per fuoc; item Tan lxxvi,
en ahost, i subside : ii franx per fuoc ; item Tan lxxvii, per tôt
I an, I subside : vi franx per fuoc ; item Tan lxxviii, i subside :
XII franx per fuoc ; pus aquel an mezeis que indit sus cada
saumada de vendemia i gros que valc plus de i franc per
fuoc ; item Tan lxxix, i subside de xii franx per fuoc.
Soma LXii franx xiiii gros * .
[57 r.] L'an mccclxxix foron cossols :
Sen Ramon Alari, borzes, pertaulas; sen Jacme Emengau,
per mercadies; sen Peyre Bru, per mazel; maystre Guilhem
Boquie, per notaris; sen Anric Malras, per mesies ; Arnaut
BYomit, per coyraties; Guilhem Miquel, per orgies.
Foron clavaris:
Sen Jacme Mauri, per mercadies ; maystre Ramon Peno,
per notaris ; sen Johan Navas, per mesies ; sen Bernât Cam-
bavielha, per coyraties.
Feron de talha aquel an, ad ops de la muralha, un gros per
denier.
A Cette ligne difficile à lire est écrite d'une autre main.
- i]B-*>r. • \
7 2 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
[57 V.] Foron levajres de bans :
Sen Johan Gordo, per taulas ; seu Frances Barieyra, per
mazel; sen Jacme Lombes, per orgies.
Foron caritadios:
Ramon Cotelie, per taulas; Pejre de Badonas, per merca-
dies ; Jacme Caucenuejols, per marel ; Guilhem Salât, per
orgies.
Foron carrayries:
Ymbert Aynart, per laulas ; Ramon Emengau, per merca-
dies ; majstre Bernât Ferrier, per notaris ; Johan Evesque,
per mesies.
[58 r.] L'an dessus mccclxxix, a xxiiii jorns del mes d'oc-
tobre, fouc mot gran decencio entre la viela de Monpeylier
els senhors cosselhiers de mossenhor lo duc d'Anyo, so es a
saber : lo chancelier del dig mossenhor d'Ango ; maystre Johan
Perdiguie ; maistre Arnaut del Lar, governador de Monpey-
lier ; mossen Guy Gonestaria*, senescal de Roergue; Pabina
de Gontaut, e motz d'autres, e demandavo i franc per fuoc
quascun mes, per tôt i an, e la dicha viela^ non y vole cos-
senti; els ditz comessaris e los cosselhiers feron liar los cos-
sols de la dicha viela de Monpeylier, per menar a Someyre.
El poble, vezen tal fag, vay se levar et escomoure en armas,
e van los totz aussir, et mezeron los en diverses pozes foras de
la viela. Per lo quai fach mossenhor d'Anyo ne vole far gran
justicia, mays mossenhor lo cardenal d'Albana, frayre que
fouc de papa Urba, venc a Monpeylier et tractet la pas e la
concordia entre lo dig mossenhor d'Anyo e la viela de Mon-
peylier. Totas de vetz lo dig mossenhor d'Anyo n'ac una gran
somma d'aur, e foron perdonatz.
[58 V.] L'an mccclxxx foron cossols:
Johan de la Gariga, per taulas , sen Peyre Boquie, permer-
cadies ; sen Peyre Fromit, per paraj^es ; sen Johan Barrieyra,
per sabatios ; sen Peyre Esteve, per pelicies; sen Esteve
Gautie, per monies; sen Johan Boyer, per lahor.
Foron clavaris:
* Ce mot a élé corrigé par une autre main en: Lestaria; la première syl
labe a été rayée et i'n transformée en L.
2 Ces quatre derniers mots sont répétés dans le manuscrit.
DE JACME MASCARO 73
Ajmeric Barbât, per taulas; Peyre Girona, per pararie;
Jacme Estaci, per lahor.
Aquel an feron de talha per denier ii franx.
Pus, ad ops de la muralha, per denier iiii gros.
[59 r.] Foron levajres de bans:
Paul Barba, per mercadies; Guilhem Barriejra, per saba-
ties ; Peyre Rodie, per pelicies; Guilhem Bedos, per monies.
Foron caritadies :
Anthoni de la Garda, per taulas; Ramon Emengau, per
mercadies; Esteve Cornuejol, per pelicies; Bernai Catala,per
monies.
[59 V.] Foron carrayries:
Ramon de Monestie, per taulas ; Jacme Mauri, per merca-
dies; Duran Canie, per monies; Jacme Lauzes, per sabaties.
L'an dessus, a xvi de genoier, partiron de Bezes los
senhors deputatz per anar en Franssa, so es a- saber : sen
Ramon Alari, borzes ; maystre Bernât Sebeli, notari ;
sen P. Promit, parayre e cossol ^ ; sen Anric Malras, mesie ;
sen Bernât Promit, coyratie. Et aiso per monstrar, dize e
notificar a nostre senlior lo rey los grans greuges que lo
poble el pays sostenian, tant de subsides quant d'autras
opressios.
L'an dessus mccclxxx, la nueg de Santa Lucia, fouc près
et escalat lo castel de Cabrieyra per Benezeg Chipparel et pel
Bastart de Landorra, capitanis d'alcunas rotas de genz d'ar-
mas, et d'aqui en foras [60 r.] donezon al pays motz grans
dampnages. Totas de vetz lo pays, so es a saber, la vigaria
de Bezes, de Ginhac e de Narbona, lor donet xiii^ franx, et
aneron s'en. Empero lo pais avia donat a mossenhor d'Anyo
u^ franx que lor ne gites, mays el non fec res.
E costet mays d'atrestant de gatges a genz d'armas qu'es-
tavan en establida a Fontes, a Pezet, et a Perenas, et ad
Aspira de Cabrayres^
L'an dessus mccclxxx, lo xvi jorn de setembre, a xi horas,
moric e trespasset lo rey de Franssa nostre senhor, que avia
nom Karles, filh que fo del bon rey Johan.
* Les mots e cossol ont été ajoutés par une autre main.
- Les mots ad Aspira de Cab7'ayres sont d'une autre main, écrits au-
dessus d'uQ grattage.
74 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Aquel an passet a Bezes madama la duguessa d'Ango, que
venie de Tholoza e s'en anava vas Avinho, am son bel filh,
que avie nom mossen Loys. Els senhors cossols anezon li fa
la reverencia, e deron li vi tassas d'argent.
L'an dessus dig mccclxxx, dimenge a v de novembre, fouc
coronat en la viela de Rems lo rey de Franssa, que avia nom
Karles, fllh del dessus dig mossen Karles.
[60 V.] L'an mccclxxxt foron cossols :
Mesie Esteve Gros, per taulas ; sen Duran de Guirgols,
per mercadies ; sen Frances Barrieyra , per mazel ; sen
Johan de Bonservisi, per mesies ; sen Johan Dolha, per saba-
ties; maystre Sans Symeon, per fabres ; sen Bernât Jolia,
per lahor.
Foron clavaris :
Ramon Emengau, per mercadies ; Peyre.Puech, per mes-
sies ; Hue Miquel, per sabaties ; maystre Johan Ayraut, per
fabres.
[61 r.] Feron de talha aquel an i franc per denier.
Pus feron autra talha, ad ops de la muralha, un gros per d.
Foron levayres de bans :
Ramon Cotelie, per taulas ; Jacme Sicre, per mazel ; Esteve
Cambavielha, per laor.
Foron carrayries :
Ramon Brenguie, per taulas ; Johan Benezeg, per merca-
dies ; Johan Masens, per mesies ; maistre P. Rogie, per
fabres.
[61 V.] Foron caritadies :
Mesie Bertran Andrieu, per taulas ; Paul Barba, per mer-
cadies ; Bernât Roquacels, per marel ; Johan Crusi, per
sabaties.
L'an dessus dig mil ccclxxxi, à viii de setembre, que fouc
lo jour de Nostra Dona de setembre, se ajusteron los senhors
cossols de Bezes am tôt lur honorable cosselh a la mayo
comuna, per consulta sus la intrada de mossenhor lo duc de
Berri, que era loctenen del rey de Fransa, nostre senhor,
en las partidas de Lengadoc, et en lo dugat de Guiayne.
Et els estan en lo cosselh, venguezo motas genz plenas de
mais esperitz, etesperezo que lo cosselh fos defenitz, et quant
las portas foron ubertas, comesseron a far mot gran rumor,
DE JACME MASCARO 7 5
tant que totz aquels del cosselh agùezo gran paor, e tornezon
a reyre dedins la mayo comuna, e tanquero las portas. E
aquels de totasmalas enequitatz comessero a cridar ad armas,
e la horas totz aquels que eron dins la mayo comuna van se
totz esbayr. E totz aquels pies de mais esperitz trenquero
las portas amb abchas et am conhassas. Et alcus bons senhors
van s'en montar sus la tor de la dicha majo, affin que fosso
pus segurs. Els ditz pies de totz mais esperitz van venir am
fuoc, e van lo mètre a la tor, en tal guiza que totz aquels que
laj eron van ardre et cremar, exeptat alcus senhors que per
paor del fuoc sauteron de la tor aval, los quais senhors aisi
mezeis foron mortz.
[62 r.] Ayso son los noms de quels senhors que arderon en
la tor :
Sen Bernât Guitart, borzes ; mesie Guilhem de Taurel,
licenciât en leys ; sen Jacme Boto, borzes; maystre Ramon
Genieys ; maystre Guiraut Got, notari de la mayo comuna ;
Paul Barba, mercadie ; lo filh d'en Jacme Salamo de Thesa ;
mossen Esteve Carbonie, capela del sobre dig sen B. Guitart.
Aquels que sautero de la tor per paor del fuoc :
Sen Ramon Alari, borzes; Johan Sabatie, que era bothe-
Ihier del sen B. Guitart.
[62 V.] En après quant agron fach aquest horrible fach,
los ditz pies de totz mais esperitz van s'en anar per la viela e
per los hostals, e van aussir et pessejar aquels que se segon:
Sen Brenguie Ferrier, sirven d'armas, et son gros vaylet
am el * ; sen Ramon Bermon, borzes ; sen Johan Teron, bor-
zes ; sen Andrieu Astrebo jove ; sen Peyre Genieys ; Pey.
Gava, conhat del sen Johan Bermon; Bona Grassia,lo sirven ;
Guiraudo, lo sirven.
Et quant aguezon mortz et aussitz totas aquestas bonas
gens, s'en van anar per la viela, rauban e pilhan los hostals
dels bos homes, e mesclet si tanta de gent que non se poyrie
nommar, mal a lur ops que pueysas ne fouc fâcha gran justi-
cia,que ne foron escapitatz ependutz totz aquels dejotzescrigz,
e foron fâchas las forchas de la peyra que son foras lo portai
* Les mots et son gros vaylet am el ont été ajoutés par une autre
mai 11.
>#iki.
76 LE « LIBRE DE MEMORTAS »
de Presicadors, hont foron messes totz. Et devise! las dichas
forchas e las fes far maistre Pej. Fabre, notari, que era loc-
tenen de viguier adonx. Et si el agues i pauc mais viscut. . .
{la suite manqué).
[63 r.] Aquels que foron escapitatz en la plassa sus una
vit de truelh :
Johan Huguet, sirven del bore de Sant Jacme; Cabot, alias
Bonet, lahoraire; Guilhem Amat, teisseyre ; Peyre Amat,
teissejre.
Aquels que foron pendutz son aquestes * :
Esteve Boia, teissejre ; Pons Tantusel, teisseyre ; Johan
Pastre, teysseyre ; Bernât Gontart, teisseire ; Guilhem Reme-
nie, teisseyre ; Johan Sonie, teisseire ; Pons Pepi, teisseyre ;
Johan Sauze, teissej^re ; Peyre Bira, teisseyre ; Emengau
Andrieu, teisseire, e son frayre ; Bernât Emengau, teisseire;
Bernât Vezola, teisseire; Peyre Trebes, sabatie; Peyre Bra-
conet e son âlh, sabaties; Bernât Massai, lahoraire; P. Salvayre,
laorayre ; Guilhem Masselha, laorayre ; Duran Bedos, laorayre;
Johan Caramanh et son filh; Guilhem Peyrie, que farie las taver-
nas; Pej^re Raynie, lahorayre; Johan Labana, parayre; Guilhem
Caratie, sirven ; Peyre Lombes, trompaire ; Andrieu Nycholau,
crida; Ramon lo Rog, laoraire ; Johan Botagrais, laorayre;
Guilhem lo fustie ; Guilhem Sabatie, fustie ; Gamot e sa molher,
laorayre ; Esteve Balhot, laoraire; Johan Auriac, teisseire ;
G. del Bosc, laoraire ; Girart lo frances; Gasco; Johan Gau-
tie, laoraire; lo genre de G. B., monie ^.
[63 V.] Et sia memoria a totz qui aquestas cauzas dessus
dichas ausiran ny legiran, que aion a dir e manifestar a lur
enfans, et a totz aquels que ho demandaran, per tal que se aion
a castiar de esser rebelles contra nostre senhor lo rey de
Franssa ni als sens que regiran son reialmo, ny a sos officiers,
e non re menhs vuelho esser hobedions a mossenhor Tevesque
de Bezes ^, als senhors cossols, et az aquels que regiran los
cossolatz. E per tal que cascun y prenga yssample, regarde
* Le mot aquestes a été ajouté par une autre main.
* Sur trois colonnes dans le manuscrit.
3 Les mots a mossenhor Vevesque de Bezes sont écrits en renvoi dans la
marge, à droite.
DE JAGME MASCARO 7 7
la gran destruccio el dampnatge, que la viela de Bezes et lo
poble n'a près e suffertat, ny la gran justicia que s'en es fâcha,
que plus de cent personas ne son estatz destrutz e justiciatz,
qui descapitatz, qui escartajratz, qui pendutz. E qui aytal
fara aital périra. Per que cascun et cascuna s'en aia a gardar
QUE VUELHAN BEN FAH, ET LO MAL LAYSSAR.
[66 r.] * L'an mccclxxxii foron cossols :
Sen Pey, Vilar, pertaulas; Guilhem Carie, per mercadies ;
Jacme Genestas, per pararie; maistre Guilhem Ramon, per
notaris; sen Hue Pomajrols, per fusties; sen Esteve Cor-
nuejol, per pelicies; sen Bernât Promit, per coyraties.
Foron clavaris :
Johan Gordo, per taulas ; Pey. Bechie, per pararie; Jacme
Guiraut, per fusties.
Feron de talha aquel an vi franx per fuoc.
[66 V.] Foron levayres de bans :
Sen Johan de Pradas ; sen Jacme Gorgori, per coiraties.
Foron caritadies :
Sen Ramon Cotelie, per taulas; sen Jacme Mauri, per
mercadies; maistre Guilhem Fenassa, per notaris; sen Peyre
Rodie, per pelicies.
L'an dessus dig mccclxxxii, el iiii jorn del mes de gen-
oier, intret premieiramen a Bezes monsenhor lo duc de Berri,
loctenen del rey de Fransa nostre senhor, et intrezon amb el
lo comte de Sant Surra, el comte de Stampas, el cardenal
d'Amiens. Et esteron a Bezes entroia festa de Panthacosta, et
paguet la viela de Bezes al dig mossenhor de Berry per l'en-
sult que si era fach, e per so que tôt fos remes e perdonat
xii** franx.
[67 r.] L'an dessus dich mccclxxxi, el segon jour del mes
de novembre, los senhors cossols sobreditz de la viela de
Bezes, de voluntat de lur honorable cosselh de la ma,yo co-
muna, anezon aremprar la molher del sen Bernât Guitart,
saentras borzes de Bezes, quez elalor volgues prestar e bailar
alcuna somma de moneda que avien bezonh, per pagar a mos-
senhor lo duc de Berry la finanssa de xii^^ franx, la quai avien
fâcha per l'ensult que lo pobolar de la dicha viela avie fach
' Les feuilles G4 et 65 du manuscrit sont en blanc.
78 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
dedins la vielae de foras, en contra el ni contra tota autra
persona.
A las quais paraulas per los sobre ditz senhors cossols
dichas, la dicha dona molher del sobredig sen B. Guitart vay
respondre et dir quez ela non avie ges.
Els senhors cossols sobreditz, sabens et entendens que
alcuna quantitat de vajschela d'argent obrada del dig saen-
tras sen B. Guitart s'era atrobada resconduda en la glie^^a
de mossenhor Sant Affrodizi de Bezes, la quai vaissela era
estada bailada al sacrista de mossenhor Sant Afrodisi a la
man del rey, van asemprar la dicha dona autra vegada, que
d'aquela vaissela dessus dicha, que era estada atrobada, lor
volgues prestar et baylar.
Et la dicha dona, coma tutrix de ssos enfans, va lor prestar
et baylar la vajssela que s'enseq :
Premieyramen très tassas d'argen dauradas pezans v marx
uonsas; item dos tassas dauradas d'argen, pezans iiimarxionsa
m* III d.; item m tassas d'argent dauradas, pezans iiii marx
VII onsas i quart d'onsa ; item ii tassas d'argent dauradas pe-
zans II marx vi onsas m d. ; item ii pintas d'argent, pezans
VI marx vi onsas e ma.; [67 v.] item una pinta d'argent pezant
vimarxe mieg e vi onsas; item una autra pinta d'argent pezant
VI marx i onsa; item una copa d'argent daurada am son co-
bessel pezan m marx ii onsas; item vi gobels am sa pinta pe-
zans V marx e v onsas; item xxx qulhiers d'argent pezero
m marx v onsas m quartz ; item d'argent trenquat i marc
menhs ii d.; item i drage d'argent am son culhier perans
311 marx v onsas menhs m d.; item una tassa fâcha a forma de
nau pezet v onsas menhs ii d. ; item m tassas d'argent daura-
das am las armas de l'ostal, pezans m marx x onsas m d.;
item m tassas d'argent dauradas am las dichas armas: vimarx
i quart d'onsa; item i tassa sobre daurada am son coberto pe-
zan m marx v onsas xxi d . ; item xii escudelas d'argent pezans
XV marx e m quartz d'onsa.
Soma tota aquesta vayschela dessus dicha daurada et no
daurada, la quai fouc pezada en presencia de la molher del
sen Bernât Guitart dessus dicha, e de sa dona mayre, et de
la molher de messie G. de Taurel, e del sacrista de Sant Afro-
disi, e de motz bos homes : iiif^xii marx v onsas m d.
DE JACME MASCARO 79
Et van la recebre los clavaris de Tan sobredig, dont es
estada bon pagada la major partida sus lo pas del blat, estans
cossols senhor Johan de la Garriga. Près ne carta maistre R.
Peno, notari rial.
[68 r.] Item* las escalas de lahorados, e defusties,e d'orgies,
queeraniii escalas ensemps ajustadas, serancoma davanero,
que rçs non si mou ny si ajusta nj se devesis res en lur cos-
solat, aisi quan se seq, so es a saber, que los lahorados au-
ran d'aisi avan dos ans a ro cossol, el ters orgies, el quart el
sinque lahorajres, el seyre fusties. Et aisi torno a cap d'aisi
avan. Et auzanx cosselhiers so es a saber, lahorayres vii cos-
selhiers, e fusties dos cosselhies, e orgies i cosselbier.
Item las escalas de sabataria e de coyrataria que non eron
maj dos, son ajustadas am iiii autras escalas, so es a saber
sabatiers, coyratiers ^, pelicies, fabres, molinies e peyralies.
E d'aisi avan seran vi escalas. Emperono faran may très cors,
so es a saber: sabatarie fara per si i cors; e coyratarie e pelis-
saria I autre cors; molinies, fabres e peyralies i autre cors. E
devisizan lur cossolat, aisi quant se seq, so es a saber, que la
I an auzan cossol los sabaties ; el segon auzan cossol los coi-
raties el pelicies ; el tes an auzan cossol tes fabres, molinies
e peyralies. Et aisi torno a cap d'aisi avan. Et auzan x cos-
selhiers, so es a saber: sabatarie m. cosselhiers, coyratarie
et pelissarie m cosselhies, fabres ii cosselhies, am ^ molinies
I cosselbier e peyralies i autre.
[68 V.] Et es a saber que, en lo quas que en lo nombre de
cascuna de las dichas escalas, al quai membre pertocaria
d'aver cossol justa son torn, e no si atrobes persona sufâcien
per esser cossol, quehom ne deu penre dels autres membres
amb aquel ajustatz, sens prejudici del dig membre. Et en lo
quas que en temps endevenidor si atrobes hom sufâcien per
esser cossol, que hom elegigues quant venria autra vegada
son torn, e fos cossol.
Item dels cosselhies se deu servar en la dicha manieyra e
* Le commencement de la charte consulaire que Ton va lire manque.
' Les mots sabatiers, coyratiers sont écrits en surcharge dans l'inter-
ligne, par une autre main.
^ Le mot am a été rayé dans le manuscrit par une autre main.
80 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
forma coma dels cossols, et sens prejudici dels membres, coma
es dig.
Es a saber que cascun an davan la festa de Sant Andrieu,
los ditz cossols ho lur plus propda predecessor cossol de sa
escala, en quas que n'y agues degun mort, o absen de la viela,
et que autramen no y pogues essor, auran cascun de totz sinq
los plus propdas très cossols predecessors lurs cascu de
sas escalas, per far la eleccio d'autres sinq cossols per Tau
aladoncas seguen los quais seran quinze elegidos en nombre.
E en lo quas que degun d'aqucls que deura esser elegidor fos
mortz, ho séria absems de la viela, o autramen non y pogues
esser, que hom prenga d'aquela escala meteissa i autre cossol
plus propdanamen davant aquel passât en loc d'aquel mort e
que autramen non poirie es>!er.
Item juraran los sobreditz xv elegidos, on las mas dels sen-
hors curials del rey nostre senhor, e de mossenhor Tavesque
de Bezes, que ben e lialmen se auran en la elecxio dels ditz
sinq cossols, totas pregarias, totz pretz, tota temor, amor,
favor, odi, rancor, enequitat, [69 r.] malavoluntat e perentat
foras gitat. E que els eligiran los plus sufficiens els plus nota-
bles personas que trobaran en aquelas escalas, a qui pertocara
d*aver cossol, et lo cas, coma dessus es dig, *
membre a qui pertocara de aver cossol non auzia persona suf-
ficien per esser cossol, que els ne penran dels autres membres
amb aquel ajustât dels plus sufficiens e plus notables, els ne
eligiran i cossol.
Item juraran si son estatz sobornatz ni pregatz per deguna
persona, ny si lur es estât res pronies, ny donat, remes, quitat
ny absolt, ny ad els, ny autres per els, e que aqui o aian a
revelar als ditz senhors curials per so quez els ne prengan tal
correxio, que d'aqui avan sie yssimple als autres.
Item,fach lo dich sagramen, los ditz xv elegidos e los sen-
hors cossols d'aquel an s'en tizaran en la mayo comuna. E los
senhors cossols se seyran ad una part, et auran aqui davant
els lo notari de la mayo comuna, et i nota ri de la cort del rey,
et autre de mossenhor Favesque. Els sobreditz elegidos se
seyran ad autra part. E la i dels senhors cossols apelara la
' Il y a ici une lacune dans le manuscrit.
DE JACME MASCAUO 81
I dels ditz elegidos davan senhors autres cossols els ditz très
notaris, et enterogara lo en son sagramen quai te el per plus
sufâcien de esser cossol de Tescala, a la quai perthocara ad
aver cossol. E donada per aquel sa votz ad aquel que li pla-
zera, los ditz très notaris la escriuran, et aquel se anara sezer
en autra part, que non tornara ponch sezer la ont es partitz,
per so que nonpuesca enformarlos autres, a qui aura donada
sa votz. Et après aquel ne apelara i autre cossol per la dicha
forma, et après i autre, entro que totz xv sian passatz, et aion
cascun donadas lur votz az aquels que lur sera vist faredor
al cossol d'una escala, et après se fara d'un' autra escala per
la dicha forma e maniera, et après d'un* autra, tro que los
ditz sinq cossols sian elegitz.
[69 V.] E quar se poyrie cndevenir que y aurie dos o très
personas elegidas en cossols que serien engals en vorzes, que
cascu ne aurie sinq, o vi, o majs, o menhs, es ahordenat que
en aquel cas los noms d'aquels se escriuran, so es a saber lo
nom de cascu d'aquels, en i petit albara per los ditz notaris,
et après aquels ditz albaras metran los ditz notaris en una
borsa, o en una brostia, et après lo sambotaran be per so
que los albaras se mesclo; e fach aquo, de coutenen aura
hom I enfant petit, c bayli li hom la dicha borsa o brostia, e
que la hubrisca, en traga i dels ditz albaras, aquel que li pla-
zera, ses aiso que deguna persona li diga qu'en prenga majs
I que autre, et aquel que sera escrig en lo dig albara sia cos-
sol, et autre no.
E fâcha la dicha elexio en la forma dessus dicha, los ditz
V cossols sian aqui nomnatz en presencia dels ditz senhors e
dels XV elegidos per los ditz notaris, o la un d'els, e s'en fassa
carta. E fach aiso, que hom los ane nomnar e notifficar a las
cortz del rey nostre senhor e de mossenhor l'avesque de
Bezes, lo die meteis, o al menhs la vespra de Sant Andrieu ; e
pueys anaran jurar en las mas dels senhors curials de las
dichas cortz, quant als senhors cossols plazera.
Et es a saber que dogun home menor de xxv ans non pot
ny deu esser cossol, quar non pot per si meteis estar en juziri,
et si per si meteis non pot estar, doncas menhs per autre.
Item que degun home que sie estât clavari et encaras non
82 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
aja rendutz sos comptes ny no sie quitât ben e lialmen de sa
ministracio non pot ny deu esser cossol*. •
Item que deguna persona que sie estât cossol non pot ny
deu esser cossol autravegada, sino que sian passatz m ans a
prop la fi de son cossolat premier.
[71 r. ^] L'an que dessus, dilus, a vu d'abriel, fouc fach
mandamen de part monsenhor de Berri als senhors cossols
dessus, qu'els venguesso far sagramen de fizeltat a nostre sen-
horlo rey de Franssa. Puoys en après fouc fâcha crida a votz
de trompa que tôt home, de qualque estât e condicio que fos,
entro Tatge de xiui ans, vengues a Tavescat far lo dich sagra-
men, ont era monsenhor lo duc de Berry présent, el cardenal
d'Amyes, el comte de Sansurra, et Tavesque de Bezes, et mais
Tavesque de Masquo, et motz d'autres. Près ne carta maistre
Johan de Bezuenha, notari de Carcassona.
[71 V.] L'an mccclxxxiu foron cossols:
Sen Ramon Cabot, per taulas et per mesies; sen Andrieu
Astrebo, per mercadies, notaris et canabassies.; sen Jacme
Sicre,per mazel, pararie et aludies; senDaude Albi, persaba-
ties, coyraties, pelicies, fabres, monies e peyralies; sen P.
Brenguie, per laor, fusties e orgies.
Foron clavaris :
Sen Johan Reynaut, per canabasies; sen Bernât Fabre,
sabatie.
Et feron de talha aquel an mieg franc per denier.
[72 r.] Foron levayres de bans:
Aymeric Barbât, per taulas ; Frances Barrieyra, per marel ;
Johan Jotglar, per laor.
Foron carrayries:
Ramon Cotelie, per taulas ; Veria Londras, per sabaties.
Foron caritadies:
Berthomieu P % per taulas ; Jacme Emengau, per mercadies ;
Perrin de Rems, per sabaties; Brenguie Cesseno, per mazel.
* En face de cet alinéa, il y a dans la marge, à gauche, une main grossière-
ment dessinée, au-dessus de laquelle sont écrits les mots de clavariis,
* La feuille 70 du manuscrit est en blanc.
8 La place du nom est restée vide sur le manuscrit ; seule la première
lettre a été écrite.
DE JAGME MASGARO 83
[72 V.] L'an sobredig los senhors cossols se vestizo d'un
drap blau de melinas, e foron taxatz axxiiii franx per cossol,
els escudies a vi franx.
Aquel an mezeis davan dich, passèt a Bezes lo rey d'Ermi-
nia, que s'en era fugit de son pais, per so que los Sarrarys li
avian près tôt son reialme, et li avian presa sa molher e sos
effans, et anava al rey de Franssa.
Aquel an mereis moric et trespasset mossenhor Sicart
d'Ambres, evesque de Bezes, lo jour de Santa Maria Magda-
lena, a hora de terssia.
Aquel an mezeis mccclxxxiii, fouc fach evesque de Bezes
mossenhor Symon de Grimoart, frayre de mossenhor Sant
Anthoni^ Et près la pocessio de l'avesquat lo segon jour de
setembre .
En aquel an dessus dig los sobreditz senhors cossols de
Bezes, venderon lo pes del blat, et vendet se iim e u^ libras.
Et comprezo ho los eretiers, enfans del sen Bernât Guitart,
per so que se paguesso dels iiii^^ e xii marx v honssas e m
deniers d'argent, que avian prestat e lur mayre al comu de
Bezes, aissi cum dessus es dig^.
Item aquel an mezeis paguet tôt hom de la dicha viela de
Bezes per caacuna saumada de vendemia que mezes dins viela,
so es a saber, de bona bestia mieg gros, et de careta vm patatz,
et d'aze uu patatz.
[73 r.] L'an mccclxxxiiii foron cossols :
Sen Johan de la Gariga, per taulas : sen Pey. Gautaroia,
per mercadies ; sen Guilhem Revel, per pararie ; sen Bernât
Sedada, per coyratarie ; sen Esteve Cambavielha, per lahor.
Foron clavaris :
Sen Ramon Sira, per taulas ; sen Guilhem Catala, per para-
rie ; sen Pey. Cartolha, per lahor.
Feron de talha aquel an que paguet per testa d'orne vm
gros.
Pus per testa de femna nu gros.
Pus una blancha per libr.
* Les mots Grimoart, frayre de mossenhor Sant Anthoni sont rayés dans
le manuscrit, et au dessus est écrit d'une autre main le mot Cramant.
2 Cf. folio 67 verso.
84 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
[73 V.] Foroii levayres de bans :
Sen Bernât Laur, per mercadies ; sen Brenguie Camba-
vielha, per coiraties.
Foron caritadies :
Sen Pos Gordo, per taulas ; sen P. de Badonas, per mer-
cadies ; sen Jacme Estaci, per lahor.
Foron carrajzies :
0
Sen Johan de Camplonc, per taulas; sen Peyze Trenqua-
velh, per mercadies ; sen Guilhem Peyrie, per coyraties.
[74 r.] L'an dessus mccclxxxiiii, a xvi del mes de may,
intret à Bezes, per lo portai de 'as Sors Menos, mossen Simon
de Grimoart *, evesque de Bezes, lo quai, avans que intres
dedins la viela,promes etjuret de tener et servar las libertatz
e franquezas delà diclia viela, en la forma et manieira que sos
predecessors avian acostumat. Près ne cirta maistre Johan
de Fontainas et maistre P. Estaci, notaris riais.
Es a saber que lo sen Johan de la Gariga cossol, e lo sen
P. Gautaroya cossol, et totz sos companhos anezo dissendre
de lurs cavalgaduras a terra. El ditz sen Johan de la Gariga
el sen Peyre Gautaroia prezeron lo sobredig mossenhor l'aves-
que per las régnas de son caval. Els autres senhors cossols
anezon tôt entorn e destrezon el nienezon entro al pe de Sant
Salvayre, et aqui el descavalguet, car aqui foron vengutz los
senhors canonges et los autres capelas, portans las santas reli-
quias, e van lo recebre coma senhor evesque. Erapero los
sobreditz senhos cossols sen Johan de la Gariga e sen
P. Gautaroia lo destrezon el menezon perlas régnas tôt a pe,
coma es dich. Totas de vetz els non ho feron de voluntat del
cosselh de la mayo comuna, sino de lur propria auctoritat
et voluntat, quarjamay non se erafach a degun autre senhor
evesque.
Aquel an mezeis, la nueg de Sant Mathieu, a dos horas de
la nueg, raoric lo duc d'Anyo en Ytalia, en la viela de Bar.
Item l'an sobredig, dijous, a xxvi de may, moric lo comte
d'Armanhac a Vinho,
[74 V.] L'an dessus mccclxxxiiii, los sobreditz senhors
* Le mot Grimoart est rayé dans le manuscrit, et au-dessus est écrit d'une
autre main le mot Cramaut. Cf. la note 1 de la page 83.
DE JAGME MASCARO 85
cossols de Bezes venderon per hun an lo pes del blat, per
pretz de ii» ii^ libras.
Pus vendero los ditz senhors cossols lo soquet del vi, per i
autre an, per pretz de m franx.
Pus vendero la intrada de la vendemia, per i autre an, per
pretz de xiii*^ libras.
Pus vendero lo bosc de Baischa, per mit" ans, per près de
XXX franx.
[75 r.] L'an que dessus mccclxxxiui, se fes lo compes de la
viela de Bezes per los senhors dessotz escrigz, los quais
foron deputatz per los sobreditz senhors cossols pt per lur
honorable cosselh.
Premieyraraen :
Mesie Esteve Gros, per taulas; sen Jacme Gautaroia, per
mercadies; sen Ramon Guiraut, parayre; sen Johan Estaci,
paraire ; sen Ramon Corregie, canabassie ; sen Ramon Mas-
sas, especiayre ; sen Pej. Fons, sabatie ; sen Ramon Roqua,
laoraire ; sen P. Brenguie, laoraire ; sen Guilhem Salvayre,
coyratie.
Cascun d'aquestz senhors sobreditz comperayres.n'aguezon
per trebalh xxx franx. Dieus vuelha quels aion leialment
gazanhatz, a profiech et salvacio de la lur arma.
[75 V.] L'an mccclxxxv foron cossols :
Mesie Ramon Seguie, avocat, per taulas ; maistre Pey.
Pabre, notari, e moric estan cossol ; sen Brenguie Audran,
mazelie ; sen Ramon Emeric, per monies ; sen Jacme Lom-
bes, per orgies.
Foron clavaris :
Maystre Pons Trebes, per notaris ; sen Daude Creysieu,
per fabres.
Feron de talha aquel an i denier per libra.
Item per testa d'ome iiii gros.
Pus per testa de dona e d'enfan pupil n gros.
Pus una autra talha per libra ii dénies.
Pus per testa aysi coma dessus.
[76 r.] Fozon levayzes de bans :
Pons Floyza, per taulas ; Guilhem Rigaut, per mazel ;
Johan Campanha, per monies.
Foron carrayzies :
6
86 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
Ymbert Aynart, per taulas; Guilhem Miquel, orgie;
maystre Olivie Paulinha, notari ; Esteve Gautie, molinie,
Foron caritadies :
Majstre Sicart Boquas, notari ; Pons Vedel, marelie ; Symon
de Gaholhiac, orgie.
[76 v]. L'an dessus dig, mossenhor le duc de Berry, que era
adonx en la viela de Bezes, va mandar en i roUe alcus rix
homes de la dicha viela, que li prestesso iiii^ franx. Et aquels
rix homes van s'en anar al cossolat, e van adordenar que tôt
home que pogues prestar que prestes. E presteron li los
iiii** franx.
Pus donezo los sobreditz senhors cossols de Bezes a mosse-
nhor de Berry ii conquas d'argent, que avian d'ample ii palmps
e mieg, fâchas au formas de Damas.
Item may li doneron e li i)resteron los ditz senhors cossols
II potz d'argent dauratz graiitz an dos brocz, e portavo davan
1 escut fach de las armas de mossenhor lo duc.
Et pezet lot lui^^ marx d'argen, de que paguet la viela de
Bezes mil franx en Avinho.
Aquel an mezeis dessus dig, se baylet a près fach la fon del
mercat de la mayo del Tor entro lo portai de las Sos Menos,
a frayre B. Maistre, de l'orde dels Prezicados, del coven de
Clarmon, per près de iii^lxx franx, mays non ferom lur pro
que tôt, quan fec no valc res. Près ne carta maistre R. Peno.
L'an dessus se trenquet et cancelet la carta de l'obliganssa,
. que era entre los senhors cossols e frayre B. Maistre, quar
avie adobat la fon del mercat, mais foron ne ben enganatz, que
valgra mais non y aguesso toquât.
[77 r]. L'an dessus escrig mccclxxxv, a xxiii d'abriel se sa-
gret la ymagina de la mayre de Dieu, quez es en Torde dels
Carmes, de Bezes. Etsagretla l'avesque d'Alboreya qu'es pre-
sicador.
Pus l'an sobredich se gitet e se fec lo sen de Santa Maria
Magdalena de Bezes, dijous a ix de novembre.
Pus aquel an et el mes dessus dig de novembre, que era
dilus xiii, se bateget lo dig sen, et bateget lo maistre Johan
de Betizac. Et foron aquel an obriers de la gliea de Santa
Magdalena lo sen Peyre Fons, el sen Johan Barrieyra, saba-
ties, et Johan Tomas, cordie, e Bernât delTelh, los quais feron
far aquesta bona hobrar
DE JACME MASGARO 87
[77 v]. L'an mccclxxxvi foron cossols :
Sen Johan Coyra per mesies, borzes et avocatz ; sen Johaii
de Pradas, per mercadies, notaris et canabassies ; sen Guilhem
Nicholau paraire, per para(ra)rie, mazel et aludarie; sen P.
Fons, per sabaties, coiraties, fabres, monies e peyraliers; sen
Ramon Roqua, per laor, fusties e horgies.
Foron clavaris :
Sen Johan Orthola, per mesies; sen Estaci Duran, per pa-
raires ; sen Ramon Marti, per lahor.
E feron de talha aquel an per testa cascun dimergue una
blancha.
Pus feron i dénie per libra.
Pus feron de talha per testa viii gros e viii patatz.
Pus feron per libra i patat*.
[78 r.] Fozon levajzes de bans :
Johan Gajschac, per mercadies; Bernât Miralhie, per sa-
baties.
Fozon carrayries :
Johan Betinha, per messies ; Ramon Emengau, per merca-
dies.; Esteve Gaucelm, per pararie.
Foron caritadies :
Johan Avesque, per mesies ; Peyre Trenquavelh, per mer-
cadies; Johan Barriejra, per sabaties; sen Peyre Brenguier,
per lahor.
[78 V.] L'an sobre dich, a xvii dezembre, venc a Bezes
l'enquisidor de Carcassona, et fec ajornar los senhors cossols
que venguesson davaut el. Et los ditz senhors cossols anezon
lay, am mesie Ramon Fabre e mesie Jacme Bru, avocatz, et
am motz d'autres bos homes de la viela. Efes lur far sagramen
de l'enquisicio. Près ne carta maistre P. Estaci, notari rial.
Aquel an sobre dig mccclxxxvi, a xxiii de dezembre, fes
mot gran neu que ne carec tanta que totz los olivies tren-
quava et arabava, per lo gran pes que avie.
Aquel an mezeis, item lo an aprop lxxxvii^, lo premier
jour de genoier, que fouc a dilus, ad hora de tercia, fouc
* Au bas de la feuille 77 verso on lit la réclame : for^n levayres de
bans,
^ Les mots item lo an aprop lxxxvu sont écrits d'uue autre main, au-
dessas de la ligue, en renvoi.
88 LE «LIBRE DE MEMORTAS »
eclipsi que semblet que lo jour fos tornat nuech negra, don
motas genz de pahor s'en fugiron a la glieyza.
En aquel mezeis an mccolxxxvi, a xviii del mes geli, près
molher nostre senhor lo rey de Franssa, mossen Karles jove,
que era del état de xviii ans, so es a saber, la filha del duc de
Bavaria d'Alamanha. Et non jac amb ela mais très nuegz, que
venguezo li novelas, que la viela de Dam s'era fâcha englera,
la quai viela es en Flandres. Per la quai causa lo rey vay far fa
motz grans provesios, so es de ii^ melia saumadas de besquech,
et 111^ naus car-[79 r.]-gadas de fustas e de castels per tremetre
en Englaterra, am lo conestable mossen Olivie de Clisson,
las quais provisios foron totas cremadas per los Engles et per
las genz de Gans.
Kl rey de Franssa, aiizen las novelas dessus dichas, tantost
montet en armas, et anet s'en en Flandres, et vay mettre loseti
davan la viela de Dam, e tenc bi lo ceti xxxv jours, et après
va penre per fach d'armas la dicha viela, en que avie dedins
M e v^ bassinetz d'Engles e de Gans, e fes los totz niori e
mètre a Tespaza, que no y demoret home ny femna ny enfans
que tôt no moris a Tespaza, exeptat los Engles d'Anglaterra,
que no vole que morisson. Et en après fes ardre tota la viela.
L'an dessus dig, a xxv d'octobre, vengro letras de part la
regina de Fransa, que fouc filha del duc de Bavaria en Ala-
manha, quez ela s'era ajaguda d'un bel filh, lo quai avia batejat
10 comte Marti, et avie li mes nom Karles. Dieus del cel lo
nos salve.
Et ahudas aquestas letras, los senhors cossols sobre ditz
van ordenar que hom ne fezes grans processios, e van man-
dar totas las escalas dels mesties, que cascun vengues am lur
banieyra a la mayo comuua. E van ho fa. E d'aqui partizo et
s'en anezo a la glieya catredal de mossenhor Sant Nazari en
la maniera que se sec :
Premieyramen foron mandatz totz los relegios et totas las
autras glieyas de Bezes, que venguesso a la glieia de mos-
senhor Sant Narazi, per far preguieyras a Jhesu Christ*, que
11 dones bona vida e longa^.
' Il y a dans le manuscrit : ihu x.
2 Au bas de la feuille 79 recto on lit la note suivante écrite d'une autre
DE JACME MASGARO 89
[79 V.] Item partie tota premiejra a caval de la majo
comuna tota solala baniejra del rej ;
Pus après anet la baniejra de la mayo comuna tota sola a
caval ;
Item anet après la banieyra de taulas, am la baniera de
mercadies essemps, tôt a pe ;
Pus la baniera de pararie, amb aquela de mazel essemps,
tôt a pe ;
Pus la baniera de notaris, amb aquela de messies;
Pus la baniera de sabaties, amb aquela del bore de Sant
Afrodisi ;
Pus la baniera de canabasies, amb aquela del bore de Sant
Johan ;
Pus la baniera de coyraties, amb aquela del bore de Sant
Jacme ;
Pus la baniera de fustiefi, amb aquela de pelicies;
Pus la baniera de fabres, amb aquela del bore del Rey ;
Pus la baniera d'orgies, amb aquela del bore de Montibel;
Pus la baniera de Campnou, amb aquela de pejralics;
Pus la baniera de sartres, amb aquela de peyssonies;
Pus la baniera de molinies, amb aquela de candelies;
Pus la banieyra de tejssejres, amb aquela de tenheyres;
Pus la baniera de eardayres, amb aquela de messatges.
[81 r. ] * Et après totas las banieyras, anezon los senhors
cossols am tôt lo poble de la viela de Hczes, et partizo de la
mayo comuna en la manieyra dessus dicha, et- anezo totz a la
glieya eatredal de mossenhor Sant Nazari. E van yssir totas
las processios e aporteron davan las diehas proeessios la ba-
niera del Capitol de Sant Nazari, e d'aqui partiron las ban-
dieyras de dos en dos, anezon per la viela, e venguero totz
al sementeri de Santa Magdalena, et aqui se feq mot gran
sollempnitat, e lii feron mot gran sermo, que presiquet i
frayre mono, maistre en santa theolegia.
[81 V.] L'an mccclxxxvii fozon cossols :
Sen Ramon Cabot, borzes, per taulas; sen Jacme Mauri,
main : a L'an m. une e xxiii a m de juli, nasquet Loys, filh del rey de Fransa,
nostre sobran senhor, que avia nom Karles seleme. »
* Les feuilles 80 et 81 du manuscrit ont été transposées.
90 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
per mercadies ; sen Raraon Raynes, per pararie, e de fauta
de aludies, e moric cossol ; els senhors cossols feron ne sonar
lo gros sen de Sant Nazari; sen Bertran Pratz, per pelicies ;
sen Bernât Jolia, per lahor.
Fozon clavaris :
Johan Gayschac, per mercadies; Andrieu Lieura, per coj-
raties.
Aquel an feron de talha xxu gros per testa.
Pus II patatz et mieg per libra.
[80 r.] * Foron levajres de bans :
Ymbert Ajnart, per taulas ; Johan Rogie, per pararie;
Peyre Cartholha, per laor.
Foron carairies :
Aj^meric Baibat, per taulas ; Guilhem P. Trencavelh, per
mercadies; Johan de la Gros, per pelicies.
Foron caritadies :
Johanet Cotelie, per taulas; Ramon Emengau, per merca-
dies; Guilhem Fabre, per parayres ; Pej^e Ajmoy, per peli-
cies ; Ramon Marti, per lahor.
[80 V.] Aquel an dessus dig mccclxxxvii, fouc portât lo cap
de mossenhor Sant Felis de Bezes a Linha, ont era mossenhor
Bcrthomieu de Montolieu, evesque de Bezes, e senhet lo.
Aquel an mezeis, dijous lo derrier jour d'abriel, a hora
de vespras, venc a Bezes mossenhor Berthomieu, evesque de
Bezes, e dirneron se amb el los senhors cossols davan ditz.
Item aquel an mezeis, lo jorn de TAcencio, que s'apela las
Caritatz a Bezes, ont se faria mot gran festa e jocz, carec
plueia e pejra mesclada mot granda ; maj, la merce de Dieu,
no feq degun dampnatge.
Item Tan sobredig mccclxxxvii, fouc aportada a Linha al
sobredig mossenhor Tavesque de Bezes una bêla crotz d'aur
e d'argent de la glieja de mossenhor Sant Felis de Bezes,
am una espina, que era cadastada en la dig cros, la quai
Paul Triquart de Bezes avia donada, la quai espina es estada
de la corona de la testa de Jhesu Christ ^. E fay tal senhal
que lo jour del(s) Venres Sanz torna tota vermelha coma sanc.
E lo dig mossenhor Tavesque va ho tôt senhar e benezir.
* Voir la note de la page précédente.
> 11 y a dans le manuscrit : ihu xst.
DE JACME MASCARO 91
L*an dessus dig, a xix dezembre, venc a Bezes mossen
Rotgier d'Espanha, senescalc de Carcassona e de Bezes, per
tener las sims, aisi coma es acostumat. Els senhors cossols
van lo requesi que jures las franqiiezas e libertatz de la dicha
viela, e juret las en la maniera que sos predecessors avian
fuch. Près ne carta maistre B. Ferrier, notari rial de Bezes,
e maistre G. Sicart, notari de Carcassona.
[82 r.] * L'an mcoclxxxviii foron cossols :
Sen Johan de la Gatriga, per taulas, per avocatz et per
mesies ; sen Ramon CoiTegie, per canabasies, mercadies et
notaris ; sen Pej. Golfi, per mazel, pararie et aludies ; sen
Johan Pastre jove, per fusties, lahor e orgies ; sen Mathieu
Rossaut, per fabres, coiraties, sabaties, monies et pejraliers.
Foron clavaris :
Sen Anthoni de la Garda, per taulas ; sen Guilhem Vayssa,
per mazel ; sen Jacme Nicholau, per fusties.
Feron de talha aquel an per testa i franc.
Pus II patatz per libra.
[82 V.] Foron levayres de bans :
Johan Raj^naut, per canabasies; Anric Garoti, per fabres.
Foron caritadies :
Peyre Flojra, per taulas ; Bernât Cornelh, per canabasies ;
Brenguie Cesseno, per mazel ; Peyre Rotgie, per fabres.
Foron carrayries :
Johan de Camplonc, per taulas; Johan Bru, per canabasies;
Bernât Roquacels, per mazel; Guilhem Espauol, per fabres.
[83 r.] Aquel an dessus dig paguet la viela de Bezes e tôt
l'autre pays i subsidi, que era estât endich e eni)auzat per
raossenhor de Berr3% Tan Lxxxvii, i franc e ters per fuoc.
Pus aquel an meteis paguet la dicha viela e tôt lo pais très
franx per fuoc, que dizie hom e farie entendre que lo comte
d'Armanhac dévia far hoiar las plassas et los lox, que tenian
los Engles en Roergue, et en autre pais, e los dévie gitar
foras del realme de Franssa, malalag s'es enseguit.
Item aquel an mezeis paguet la dicha viela de Bezes e
Tautre pais.i autre subsidi de ii franx e quart per fuoc, per
lo quai ne vendero los senhors cossols de Bezes lo emolimen
1 Voir la note de la page 89.
92 LE a LIBRE DE MEMORIAS »
del pes del blat e de las farinas, et compret lo maistre Johan
de Betizac per près de xvii^ libras.
L'an dessus dig mccclxxxviii, dimenge que fo lo v«jour
del mes de geli, se sagret la capela apelada de la Majre de
Dieu de Pietat, que es en Tordre dels Carmes de Bezes, e
??agret la Tavesque de Malhares, ont fouc Tavesque de Cotze-
rans atressi. Et fes si mot grau sollempnitat, dont Tavesque
de Malhares hi donet de perdo xl jours, e mossenhor Faves-
que de Bezes autres xl jours, e Tavesque de Cotzerans autres
XL jours de verav perdo.
[83 V.] L'an mccclxxxix foron cossols :
Mesie Ramon Fabre jove, licenciât en lejs, per Tescala
dels senhors avocatz, de taulas e de mesies ; majstre Bernât
Ferrier, notari, per Tescala de uotaris, mercadies et canaba-
sies; sen Guilhem Catala, parayre, per Tescala de pararie,
d'aludies et de mazel ; sen P. Cartholha, lahorajre, per l'es-
cala de lahor, de fusties et d'orgies; sen Esteve Vanieyra,
sabatie, per sabatarie, pelicies, cojraties, fabres, monies et
peyralies.
Foron clavaris :
Majstre Olivier Paulinha, notari ; sen Brenguie Sedada,
coyratie, en de fauta de sabaties.
Aquel an feron una talha, que paguethom per testa i franc.
Pus feron ii patatz per libra.
[84 r.] Pus paguethom per cascuna saumada de vendemia
que fos de carreta d'intrada : iiii patatz ; pus per saumada
de bona bestia : m patatz ; pus per saumada d'aze : u patatz ;
item per cada saumada de vi que intres : viii gros.
Item aquel an raeteis denan dig se vendet lo xii* de la
pej^ssonarie, del premier divenres de carema entro lo jour
de Pascas, per près de lxvii libras.
Item Tan dessus dig, a xvii d'abriel, se vendet lo xii® de la
peysonarie en i an per * de ii^vi libras. Compret lo Peyre
Fons, sabatie : ii^vi libras.
Pus se vendet lo mazel; compret lo sen Ramon Cabot: v^'lx
libras.
Pus venderon lo pes del blat e de las farinas, de xv jours
' Le mol près a été omis dans le manuscrit.
DE JÂCME MÂSCAHO 93
d'octobre en i an, a maistre Johan de Fonta\nas, notari, et
a Guilhem Revel, parayre, per près de xviii^' libras a pagar
tantost : xvjii*' libras.
Item aquel an dessus dig fouc endig per mossenhor de
Berry i subsidi de v franx per fuoc. Et fouc pagat a nostre
senhor lo rej per son novel avenimen en Lengadoc.
[84 V.] Fozon levayzes de bans :
Mesie Bertran Andrieu, savi eh dreg, per avocatz ; sen
P. Girona^ parajre ; sen Johan de Sas, per lahor.
Foron carraj-ries :
Mesie Jacme Bedos, per taulas ; majstre P. Estaci, per
notaris ; sen Johan Rogie , per pararie ; sen Guilhem de
Mojschac, per sabaties.
Foron caritadies :
Mesie B. Costa, per taulas ; sen Bernât Gibeli, per merca-
dies ; [85 r.] maistre Jacme Bena, per notaris ; Arnaut
Barriejra, per sabaties ; Pons Cavalie,per lahor.
Aquel an meteis, dijous a xui de may, passet a Bezes la
filha del comte de Boluenha, molher de mossenhor lo duc
de Berry, que venie del comte de Foys.
E la viela de Bezes fec li la honor que se seq :
So es a ssaber que del cap del portai del pont fouc tôt
empaliat de doblas e de tendas, entre a Testai de maistre
Johan de Betizac, que es aras del rey, et aqui se aloget.
Item anezo li yssir los senhors cossols de la viela, am lo
raielhs de tota la viela a caval.
Item van li donar i vayssel de vi.
Pus li donezo xii entortas de cera.
Pus de doblos de cera xii libras.
Pus xiï tassas d*argen pezans xviii niarx.
Item aquel [an] mezeis mccciiii^^ e ix, los sobreditz senhors
eossols feron far e mètre sus cada portai de la viela i escut am
très flors de li en cascun esqut, quar las très flors de li son
las armas proprias de nostre senhor lo rey, et sus cascun esqut
avie una bêla corona d'aur. Et aisso fouc fach per honor del
rey de Franssa nostre senhor, e per so quar novelamen venie
en lo pays de Lengadoc.
[85 V.]. Item may feron far los sobredigz senhors cossols per
honor et reverencia del rey sobredig nostre senhor un belpava-
pi
94 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
Iho d'un drap d'aur, que eron las angardas d'un sendat d'azur,
tôt obrat de flors da lis d'aur fin batut, pendens tôt en torn
lo pavalho. Et aisso per mètre sus lo rey quant intrera a Bezes.
Item feron far penos ad ops de las trompas et dels autres
menestries.
Pus feron far raubas los ditz senhors cossols a xii menes-
tries de mieg partit d'un drap vayr e d'un drap de mesclat .
Item los sobreditz senhors cossols, am tôt lur honorable
cosselh, van ordenar que per la novela venguda del rey las
escalasdels meslies feresson liureja. En après los ditz senhors
cossols anezo a las cortz del rey e de mossenhor l'avesque, per
saber am los senhors curials, si volian esser de las linrey[a]s
de las cscalas dels mesties; els ditz senhors curials et notaris
van dirque volian, et foron tolz vestitzd'unalieureya vermelha.
Itom quant los senhors cossols sentizo ni saupro que lo rej'
fouc vengut a Sant Thiberi, van mandar que tôt home que
agues fâcha lienreya vengues tantost a la maj'O comuna, tôt a
caval, per anar far yssida et reverencia al rey nostre senhor.
Item plus ordenezo los ditz senhors cossols, e tôt lur hono-
rable cosselh, qu'els no fossou pas vestitz de neguna lieureya,
sino d'aquela del cossolat, per tal que lo rey los conogues a
las raubas mieg partidas.
[87 r.]* En après los ditz senhors cossols van s'en anar al
rey. E foron pus de iiic homes a caval vestitz de la lieureya
vermelha. E anezo entro la cros de lalega, e van li fa la reve-
rencia. E fâcha la reverencia, van s'en venir al hostal dels
tiradors, et estenderon lo pavalho sus lo rey. Et intrezon per
lo portai de Presicados, portan tôt a pe los senhors cossols lo
dig pavalho.
E es a saber que quant lo rey fouc vengut al cap de la Mer-
cadaria, van gizar ves la maj^o comuna, et van gizar de la
part de la Orgaria, anan vas la sieutat. E quant lo rey fouc
a Sant Salvayre, va descavalgar, et a qui fouc mossenhor Tavcs-
que de Bezes tôt revestit am tôtas las reliquias, el rey anet
las adorar. Et anet tôt a pe adorar a mossenhor Sant Nazari.
Et après montet a caval, et anet s'en en son hostal, que es
Costa lo portai d'en Grindas.
1 Les feuilles 86 et 87 du maDuscrit ont été transposée».
DE JACME MASCARO 95
L'an MOCCLXviii a iiii del mes de dezembre, nasquet mossen
Karles, filh que fo de mossen Karles, rej de Franssa, nastre
senhor, al quai Dieus fassa veray perdo.
L'an Mccciiii^'^ e ix, lo jour de la Santa Trenitat, que fo lo
XX® jour de novembre, a hora de compléta, venc et intret
novelamen a Bezes nostre senhor lo rey de Franssa dessus
dig, et avie nom Karles, et era del état de xxii ans.
Et venc amb el mossen Loys, son frayre, que era duc de
Thorena ; [87 v.] pus monsenhor lo duc de Borbon ; pus
mossen P. de Navarra, frayre del rey de Navarra ; pus lo
filh del duc de Bar; pus lo conestable de Fianssa; pus
mossen Loys de Sansuerra, marescal de Franssa; pus lo
senhor de Lebret; pus lo senhor de Corsi.
Item tanta de bêla nobleza et de cavalarie, que era sens
nombre. E jac lo rey aquela nueg a Bezes, e Tendema que
fouc dilus après dirnar s'en anet jazer a Narbona, e d'aqui
en fora s'en anet a Tholosa.
Ensegon se los presens que la viela de Bezes feq a nostre
senhor lo rey dessus dig :
Premieyramen dos bassinas d'argent totas dauradas, que
avian d'ample cascuna ii palras.
Item I flesco d'argent tôt daurat, tenen très quartos; pus
dos justas d'argent, tenen cascuna i quarto e mieg.
[86 r.]* Item viii tassas d'argent pezan cascuna i^ marc o
mieg, e la una era am son cobessel.
Pus donero los ditz senhors cossols a mossen Loys, duc de
Tozena, frayrc de nostre senhof lo rey, una bêla nau d'argen
tota daurada, que li fouc presentada a taula, quar lo dig
mossen Loys se dirnava ab lo rey, de que nostre senhor
lo rey n'ac mot gran joya et plazer.
L'an Mccciiii^ e x foron cossols :
Sen Johan Navas, messier, per l'escala de messaria, d'a-
vocatz et de taulas; sen P. Gautaroia, mercadier, per Tescala
de mercadaria, de notaris et de canabasies ; sen Jacme Cau-
cenuejol, marelie, per l'escala del mazel, de pararie et d'alu-
darie ; sen Ramon Roqua, lahoraire, per l'escala de lahor,
' Voir la note de la page précédente.
* Une autre main a corrigé, et on lit : « ii marc {au singulier), »
1 .
96 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
de fustarie et orgarie ; sen P. Aymoyr, pelicie, per Fescala de
pelissarie, coyratarie, sabatarie, fabres, monies e peyralies.
[86 V.] Foron clayaris :
Sen Ramon Gilabert, per Fescala de messarie ; sen Bernât
Roquacels, per Tescala de mazel ; sen Johan da Sas, per
Tescala de lahor.
Feron de talha aquest an un d. per libra *.
Foron levayres de bans :
Jacme Mauri, perTescala de mercadarie ; sen Brenguie Cam-
bavielha, coyratie, per Tescala de cojratarie e de^ pelissarie.
Foron carrajries :
Johanneri Gueyraut, per messarie e per taulas ; Bernet
Laur jove, per mercadarie; Guilhem Rigaut, per mazel;
Guilhem Pejrie, coyratie, per pelicies.
[88 r.] ^ Foron caritadies :
Joban Laures, per Tescala de taulas; Andrieu de Fon-
taynas, per mercadies ; Daude Raynaut, per coyraties ;
Peyre Jorda, marelie, per mazel; Johan Faberza, per lahor.
Kan dessus dig mccclxxxx, dimas a xviii de genoier, venc
a Bezes nostre senhor lo rey de Franssa que venia de Tho-
losa. Et anet prener conget de nostre senhor lo papa aAvinho,
e pueys s'en anet a Paris.
Item aquel an sobredig et aquela venguda de nostre senhor
lo rey derieyra, los senhors cossols davan ditz Johan Navas
els autres sos companhos foron per lo rey desapausatz et
amerraatz del nombre, so es a saber que de v cossols que y
avie los tornet a un. Et en aqui meteis ho fes per tôt lo pais
de Lengadoc.
E es a ssaber que los senhors cossols dessus noranatz so
vestiro las raubas del cossolat lo jour de nadal, e non las
portero, sino de nadal entre lo divenres a xxi de genoier, que
y intrezon los autres senhors cossols desotz. escrigz.
[88 V.] Item Tan dessus dig mccciiii'^ e x, a xx de genoier,
fes cridar a votz de trompa nostre senhor lo rey per totas las
vielas, que d'aqui enan non agues per las vielas, sino un
* Uoe autre main a ajouté: et viii d. per testa.
'^ Les mots coyratarie e de sont rayés dans le manuscrit.
5 Voir la oote de la page 94.
DE JACME MASCARO 97
cossols. E fâcha aquesta crida, los senhors cossols sobreditz,
que eron davan la crida, van relaxar lo cossolat, quar no
sabian quai de totz sinq fos foras, e non fazen enjuria de la i
a l'autre, foron d'acort que totz ensemps non y remangues
degun de totz sinq.
Pus lo jour e Tan dessus ditz, a xx de genoyer*, fes far una
autia crida en la viela de Bezes, aissi quant se seq :
Aujatz que vos fa hom a saber de part lo rey de Franssa
vostre seiihor, e vos notiffiqua hom, que lo dig nostre senhor
lo rey de Franssa, aven pietat e compacio al poble de son
rialme, a volgut e ordenat per certanas causas sus aisso la
sua gracia moven, que tota persona, quai que sia, ni quai que
no de Lengadoc, que se sia partit del rialme de Franssa per
talhas niezas el temps passât, o per doutes per els degutz al
qnalque persona que sia, sia juzieu ho crestia, que puesca
retornar en lo pais, estar, demorar francamen e quitia e pari-
blamon de tôt so quez els poyran de ver a las dichas talhas o a
crededors, an condicio que els aian a pagar lor ditz doutes
enfra un*'® ans contados de la data de las letras sus aisso
autriadas, cascun del ditz iiii iuis la quarta partida dels dou-
tes, e que seran tengutz an prestan caucio de pagar los deutes
aquela que poyran prestar.
[89 r.] Encaras may vos fa hom a saber que lo rey nostre
senhor a ordenat, per lo reaime ^ relevamende son poble, que
dels bes que foron de maistre Johan Betizac saeutras de
Bezes confiscatz al rey nostre senhor se convertisca sus lo
fag de la hueia dels Engles la somma de xx melia franx.
Encaras may vos fa hom a saber que lo rey nostre senhor,
per lo ben del poble et de la causa publica, a hordenat que lo
nombre e la quantitat dels capitols, cossols, governados de
cascuna viela de Lengadoc majore pasan lo nombre de quatre
sia apetisat, destreg et remes al dig nombre de un, los quais
capitols, cossols, ho autres governados no se puescon asem-
blar, ny congregar, ny deguna causa far, sino que lo senes-
calc, ho viguier, ho jutge de las dichas violas hy sia présent.
Item vol e ordena lo rey nostre senhor, que totas aydas,
* Lesmotsaxx de g etioyer sont d'une autre main, écrits au-dessus de la ligne.
* Le mot reaime est exponctué et doit être négligé dans la lecture.
98 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
carges, messios, presas al temps passât per los ditz capitols,
cossols, governados en las dichas vielas, empauzatz sus fari-
nas, carns, pejs et autras denajradas o bes sessen de tôt e no
sian plus levatz, nv los ditz capitols, cossols, ho governados
no puescan los ditz carges mettre, nj enpauzar, uy far culhir,
nj levar d'aisi enan, sens exprès mandamen ho ordenansa del
rey nostre senhor ho de son cosselh.
L'an dessus escrig MCCCLXXXX,divenres a xxi de genoier, io
sen Caries del Templier, raesie Bernât Audran, el sen Jacquet
de Bencjerget* vengueron a la mayo comuna de las partz de
nostre senhor lo rey de Franssa, per ordenar cossols novels
an cossentiraen de tôt lo cosselh de la mayo comuna. E feron
cossols novels, so es a ssaber:
[S9 V.] Sen Guilhem Cotelie ; sèn Duran de Guirgols, mer-
cadie ; sen Johan Estaci, parayre; sen Peyre Brenguie, laho-
rsiyre.
Item fouc autriat als ditz senhors cossols per lo gran cos-
selh de la mayo comuna, en presencia de mossenhor lo
viguier del rey, que aguesso raubas del cossolat. Et feron ho.
Pus los ditz senhors cossols se vestiron las raubas dimer-
gue, que fouc lo xiiijour de febrier, que fouc lo jorn de Cara-
mantran ^
Item Tan dessus dich mcccii^'^ii e x, dimars a xx del mes de
setembre, lo jour de las asiras, juret los privilèges, las fran-
quezas e libertatz de la viela e vigarie de Bezes mossen
Peyre de Mornay, cavalier, senescalc de Caicassona e de
Bezes, et mossen Guilhem del Bruelh, doctor en decretz,
jutge mage de Carcassona, en l'ostal del cabiscol mage de la
glieia quatredal de mossenhor Sant Nazari de Bezes. Prezero
ne carta maistre Bernât Ferrier, notari de Bezes, et maistre
Johan Hue, notari de Carcassona.
* Les mots de Bencyerget soDt dans la marge, à droite, presque effacés
par le temps* «,
* Les mots que fouc lo jorn de Caramantran sont d'une autre main.
DE JÂCME MÂSCAHÛ 99
APPENDICE
Le volume sur lequel est éciit le Libre de Memorias de Jacme
Mascaro contient en outre (feuille 92, recto et verôo *) la copie d'un
privilège accordé en 1371 à la ville de Béziers par le roi Charles V.
Cet acte, rédigé en latin, est précédé du titre suivant:
Aysso es lo privilège de la viela de liezers sus lo fach de la vin-
demia e del vi estranha *.
Dans le même volume se trouvent aussi les deux pièces suivantes,
que nous publions in-extenso:
I
[93 r.]. JJAN MIL CCCC E JSOU, A DETZ JOR \S DEL
mes de feùrier, intret a Dezers, per lo portai de las Soi*s Me-
nors, mossen DERTRAN DE MALMONT, ovesque de Besers,
lo qualy avans que hel intrvs dedins la vila, al intran del portai,
promes etjuret de tener et servar las libcrtaiz e franquesas de la
dicha vila y enta forma e maweyra que sos predecessors avian acos-
tumat, E près ne carta maistre Bernât Raynaut, maisfre Peijre
Marinier e maistre P. Eslassi. Empero maistre B, Raynaut
recitet la carta. Et es a ssaber que en aquel an cran cossolz
maistre Domerane^ de Cucuro, maistre en medccina, scn P,
Laierety canabassier, sen Guillem Conort, parayre, sen Andrieu
Rama, lauraire, e sen Ramon Yvern, peyralier. E fouc azorde-
nat per lo grant coiiselh, que hom dones e présentes al dig
mossenhor lo avesque quant fora pausat lo raust entro a xx
G a xviii marx de argent obrat, de que los senhors sobre ditz
cossolz compreron dotze tassas obradas, que pezavan entre
totas entorn quinze marx, que costava lo marc de las siejs set
franx e mieg, e de las autras siejs set franx, quar en las siejs
non avia de obratge. E majs Ihi presenteron ab las dichas xii
tassas liun gobel daurat, ab sa cuberta, e ben hobrat, que
pezava très marx, e costava lo marc detz iibras, dos solz, siejs
deniers torues.
• Les feuilles 93 et 91 du manuscrit Bont en blanc.
' Il y a là sans doute uae faute du copiste ; il faut lire : estranh,
^ La dernière syllabe du nom est d'une autre main.
100 LE « LIBRE DE M E MO RI A S »
II
L'an Miii^ e xv, divenres a vu de junh, fes eclipsi que
tornet lo die nueg, e vit hom las stelas en lo cel,com si fos de
tôt nueg; estet a passar lo solelh sos la luna, que fouc novela
aquel die a hora de vi horas de jorn, ben Tespari de m. quart
de hoza en scurtat; e fouaben freg lo temps ; e fouc lo signe
cranc.
Item en Tan desus dig, a xv de ahost, venc en Bezes Tera-
perador, lo quai avia nom Seguimon, et ajsso perfar la unio
de santa glieya; et aquel jorn partie, et anet jazer aNarbona,
et aqui tenc son cosselh, e lo senhor emperador, aven pre-
guarias dels senhors consenhors de Perpinha, que el ^
[93 V.]. E cant fouc de part de la, y fouc lo senhor rey de
Araguo, am très donas reginas, so es a ssaber : la regina
Violan, e la regina Marguarida, e la regina molher del senhor
rey e fouc alotgat en Torde delz frayres menos, e mossenhor
P. de Luna al castelh de Perpinha, ont el y avie per sa guarda
mot grans gens d'armas de sasanh et autres; et entre venc y
molt gran scandol que los Catalas feron et aussigron de gens
d'un senhor avesque trames al cosselh, que era de Castela,
ont cremeron hun hostal en lo dig loc de Perpinha, e de las
gens en que eran alutgatz, que fouc jutgat a paguar, per lo
dampnatge que si fes, xxx melia floris, dont mot stet esbayt
lo senhor emperador, e fec arma ben e tostz sas gens d'armas,
cum si entresso en batalha arenguada, tro que ac novelas del
rey de Araguo bonas, que non ly qualia ponh aver (a)neguna
pavor de re ; et aqui fes mot gran procès del fag de la unio
de santa glieya am mossenhor P. de Luna, e non y fes negun
aponhiamen que hom sertanamen ne pogues saber sertana
causa. Et aqui venc lo compte de Armanhac, et après venc lo
compte de Foix et autres baros ; e cant aqui agron pro stat, lo
senhor emperador s'en tornet a Narbona, a vi de novembre.
(A suivre.) Ch. Barbier.
^ Cette deuxième pièce, dont le commencement est sur la même page que la
précédente, n'en est séparée que par un léger intervalle en blanc; comme la
précédente, elle ne porte pas de titre ; elle est d'une écriture bien différente,
beaucoup moins régulière, beaucoup plus difficile à déchiffrer.
2 La feuille du manuscrit a été rognée de telle sorte qu'une ou plusieurs
lignes ont été enlevées.
NOTES DE PHILOLOGIE ROUERGATE
TABLE DES NOTES
AVEC SOMMAIRE, CORRECTIONS ET ADDITIONS
Note I. — T. VII (1882), p. 62
Sommaire. — Double traitement des J, s, t primitifs entre deux
voyelles, donnant lieu à une série de doublets dont il est produit de
nombreux exemples. — Genèse phonétique de/àw, je fais, et de/âw,
ils font ; de vàuy je vais, et vàu, ils vont.
Corrections, — A la page 63, dernier alinéa, lire: BosX.s et BoXs,
au lieu de : bossa et Bosa. — Page 66, ligne 2 de la note, lire : assu.
rément, au lieu de : assuréméent.
Additions, — Page 66, entre les exemples n'' 9 et n° 10, introduire
le suivant, sous le n** 9 bis: crus, crusa, et cru, crua, adj., du lat.
crudus, a. — P. 68, à la fin de la page, en note, il est dit : « estau,
avec a ouvert pour la l^^ personne du singulier, et estau avec a fermé
pour la 3® du pluriel, sont entièrement oubliés. » A cette remarque
il. convient d'ajouter que la 3^ personne du singulier de l'indicatif
présent, estai, hors d'usage, s'est conservée dans le proverbe suivant :
Que trepa, leca,
Qu^estai, seca.
Note II. — T. VII (1882), p. 71
Sommaire. — Discussion sur les formes jumelles vila, vïlar et
nala, vïalar, — Autres doublets analogues en il et ial.
Corrections. — P. 74, avant-dernier alinéa, au lieu de : Ce type
ioZ, lire : Le type iol.
Note III. — T. VII (1882), p. 218
Sommaire, -— Dissertation sur l'étymologie du mot trahalh, fr. tra-
vail.
Correction. — P. 219, 3e alinéa, au lieu de : An American Dic-
tionary ofthe englisk language, lire : An American Dictionary of the
English language.
7
I
102 NOTES
Note IV. — T. VIII (1882), p. 221
Sommaire. — Analyse de proverbes rouergats à double sens dont
on obtient le sens caché en restituant à certains de leurs mots Vn
terminale caduque, tombée dans les parlers du Kouergue, mais qui
existe encore dans les patois de l'Elst. Cette particularité phonétique
date les dictons auxquels elle appartient en fixant leur origine avant
l'époque très reculée de la chute de la lettre en question.
Addition. — P. 225, 2® alinéa. Ajouter, à ce qui est dit du nh
terminal, que dans certains patois, notamment celui du Gers, il pos-
sède encore sa prononciation première de n mouillée. Ainsi on y dit
castanh, en donnant à nh le même son que dans Castanha, et comme
nom propre on l'écrit aujourd'hui Castaing, tandis qu'en Rouergue le
même mot s'écrit de nos jours Castan.
NoTB V. — T. VIII (1882), p. 20
Sommaire. — De certains diminutifs épenthétiques en oeit pour oet.
— Les verbes torrelhar et eslorrelhar.
Correction. — P. 21, note, au lieu de: extorricaîare, lire: extorri-
culare ; et, au lieu de : èstoiTUCulare, lire : extorruculare.
Note VI. — T. VIII (1882). p. 21
Sommaire. — Discussion du jugement de M. P. Meyer sur les
racines romanes cail et cair. — Cailus et cailar, de casthis et ca^st-
lar par caslus et caslar, variante barbare de castellus et castelîar, qui
a dû prendre naissance parmi les habitants d'origine germaine.
Note VII. — T. X (1883), p. 157
Sommaire. — Caire, au sens de rocher fortifié et de château-fort,
n'est pas le même mot que caire signifiant carreau. Ce dernier procède
dn latin quadrum; le premier tire son origine du celtique, où l'on
observe kaer avec la même signification, — Preuves à l'appui de
de cette thèse.
Note VIII. — T. X (1883), p. 159
Sommaire, — Doublets par différence de position de l'accent toni-
que, et doublets par concurrence de contraction et de non-contraction,
sans difiiérence de tonalité. — Ces dichotomies phonétiques ne peu-
vent s'expliquer que par Thypothèse de la superposition de deux
romans contemporains, tous deux directement issus du latin, mais
parlés par des catégories sociales distinctes, l'un étant à l'usage des
hautes classes, l'autre de la classe inférieure.
DE PHILOLOGIE ROUERGATE 103
Note IV.— T. X (1883), p. 210
Sommaire. — Étude sur les noms d'arbres et d'arbustes et leurs
collectifs de divers types observés dans le rouergat. — Une nouvelle
étymologie du mot garric, chêne. — Inductions sur l'histoire agricole,
économique et politique du pays tirées des collectifs d'arbres usités
à diverses époques.
Corrections. — P. 215, 2e alinéa, 2® ligne, au lieu de; besoniia,
lire : besonia. — P. 220, fin de la page, au lieu de:
La penche de bois
A la rusca se conoit.
lire :
La pcDche de bois
A la rusca se cooois.
P. 226, 2e alinéa, Se ligne, au lieu de : fagcta, lire : fageta . — P. 230,
fin de la page, au lieu de:
Quod natura est
S'arraba pas com' un ginest.
lire :
Quod natura est
S'arra pas coma 'n ginest.
P. 238, 5« alinéa, au lieu de: visus est mancere, lire: vlsus est
manere.
Dans le tableau synoptique :
lie mot de la l'e colonne, au lieu de : acklaris, lire : aceralis ; —
17« mot -de la l'« col., au lieu de : XURUS, lire : buxus ; — 19* et
20« mots de la 7« colonne, au lieu de : Fraissinet Fraxinetum, lire :
Fraissinet (?) Fraxinetum (?) ; — 22® mot de la 5® colonne, au lieu
de : Mespularium, lire : Mespularium (?) ; — 2« colonne, à la suite du
mot RUMEX de la 1^* colonne, ajouter Ruhus ; — 7" colonne, au lieu
de: Tremolet TremuUtum, lire: Tremolet(?) Tremuletum (?)
Additions. — P. 212, au 6® alinéa, il est dit: « Le français litté-
raire moderne n'a pas l'homonyme de notre albar et de ses dérivés. »
Il convient de compléter cette observation en ajoutant que, d'après
Littré (au mot Aubier), le vocabulaire berrichon a aubier avec le
même sens que le rouergat albar ou aubar, — P. 215, 2« alinéa,
ajouter au mot besonîa, comme autre exemple de dérivés de bes, le
moi Besbna (par o ouvert), nom d'un village des environs de Rodez.
— Deux lignes plus bas, je cite le mot Besorg, en déclarant que je ne
puis l'expliquer ; je crois que l'explication s'offre dans un primitif
latin possible betionicum. — P. 217, 4® ligne, ajouter que le mot Bes-
104 NOTES
8ola est par o ouvert. — P. 228, à la 12« ligne du 2® alinéa, après
Euthenensis j ajouter : farrar, atarrar, jaîar, pour Et après ces
mots ajouter comme autres exemples : Clamens et Clamensa pour
Clemens et Clemensa, — P. 231, dernière ligne, ajouter que dans
mespola, nespola, Vo est fermé.
Note X. — T. XI (1884), p. 77
Sommaire, — De diverses causes de corruption phonétique. — Réac-
tions différenciatrices des parlers en contact s'exerçant de l'un sur
l'autre (corruption des bs, chs, es, ds, ps, ts, x, organiques en ch ; — id,
du suffixe iâ = lat. ianus, en ier; — id. de ou organique en au; —
id. de oa organique en o ouvert ; — id. de obbe = oc be, en apé; — id. de
la voyelle française eu en u, et consécutivement de la v. îr.ueneu dans
la prononciation du français chez les hommes de langue d*oc ; — sub-
stitution du ba,uv, et consécutivement du v au 6 chez les mêmes gens
de langue d'oc dans leur prononciation française). — Influence de la
rédaction française sur l'orthographe de la langue d'oc chez les scri-
bes bilingues du xvi« siècle. — La grande différence que l'on croit
observer entre le provençal écrit du xvi« siècle et nos patois à par-
tir du xvii® siècle est une pure illusion résultant de ce que les vieux
textes provençaux sont lus par nous à la française, c'est-à-dire bien
autrement qu'ils n'étaient lus par les « Provençaux » contemporains,
et que d'un autre côté, quand nous écrivons nos patois, c'est également
à la française, c'est-à-dire avec une orthographe tout autre que celle
qui leur aurait été appliquée par les vieux Provençaux.
Corrections. — P. 80, dernier alinéa, au lieu de : excellents, lire :
excellent, — P. 81, 3® ligne, au lieu de acaptar, lire : acapsar, — P. 83,
13® ligne, au lieu de : le féminin bizarre , lire : ce féminin bizarre. —
P. 88, 12« ligne, au lieu de : les mots à la provençale, lire : ces mots
à la provençale.
Note XI. — T. XI (1884), p. 189
Sommaire : Formation des mots Roergue (Rouerg^e) et Roergas,
et de leurs analogues Auvemhe et Auvernhas. — Le mot Rosergas,
lu Rosengas par M. P. Meyer, et laissé en blanc dans sa traduction
de Flamenca . — L'histoire et l'anthropologie du Rouergue éclairées
par la philologie. — Solution du problème anthropologico-historique
du contraste entre le type moyen de la population française moderne
et le portrait classique du Gaulois.
Corrections et additions : P. 189, 15© ligne, au lieu de: introduit,
lire: intraduit. — P. 193, 7« vers de la citation, au lieu de: cinq,
lire : cinc. — P. 194, 3« alinéa. Ce qui est dit de l'acception
DE PHILOLOGIE ROUERGATE 105
première de Roergue comme adjectif s'appliquant aux habitants et
choses du pays, ainsi qu'au pays lui-même, trouve une confirmation
intéressante dans le mot rudergue employé dans la partie septen-
trionale du département de l'Hérault pour désigner le vent du Nord.
Cet exemple établit l'emploi d'une variante de Roergue comme adjec-
tif, et cette variante est remarquable d'ailleurs en ce qu'elle nous
offre une forme intermédiaire entre le prototype latin rutenicus et la
forme rouergate la plus archaïque, rosergue, forme intermédiaire
où la dentale primitive existe encore quoique adoucie. Enfin cette
variante est digne d'intérêt en ce qu'elle diverge de la filiation de
roergue, Vu de rutenicus y étant resté m, tandis qu'il s'est transformé
en 0 dans notre mot indigène. — Même page, dernières lignes, il est
dit que Auvernhas est formé d'un adjectif primitif, auvemhe, répon-
dant à un prototype latin arvemius. Cette hypothèse se trouve véri-
fiée par les mots suivants de la Charte vi® (année 930) du Cartu-
laire de l'abbaye de Conques : in pago arvemio .
Note XII. —T. XII (1884), p. 226
Sommaire : Les mots hrôa et randa et leurs origines .
Correctum : P. 227, 6® ligne, au lieu de : english language, lire :
English kmguage.
Note XIII. —T. XIII (1885), p. 85
Sommaire : Noms propres de langue d'oc transformés en génitifs
latins. — Noms propres de langue d'oc, d'abord fiancisés, et puis
ramenés au provençal par une fausse interprétation qui les défigure .
— Noms propres de langue d'oc passés dans le français avec une
fausse orthographe, résultant de ce que, au lieu d'être transcrits d'après
leur orthographe provençale, ils ont été écrits sur audition par des
plumes a françaises » sous la dictée de bouches « provençales » .
Addition: P. 85, aux exemples de noms rouergats sous forme de
génitifs latins, ajouter les suivants : Bertrandy (Bertrandi), pour
Bertrand ; Casàlis, pour Casai ; Comitis, pour Comte ; Dominici, pour
Domergue; Fabry (Fàbri), pour Fabre; Fauvety (Fouvéti), pour
Fouvet ; Marcilhacy (Marcilhàci), pour Marcilhac ; Maurandy (Mau-
ràadi), pour Maurand.
Note XIV. — T. IV (-1885), p. 44
Sommaire : Étymologie du mot marrà.
Note XV. — T. XIV (1885), p. 44
Sommaire : Les mots lerla et Revoit, Revàlta, de la toponymie
cadastrale du Rouergue ; leur origine et leur formation .
106 NOTES
Correction : P . 46, les deux vers qui terminent la page ne doivent
en faire qu'un ; on doit donc lire :
Tan l'exemple del raestre entancha les variais.
Notes XVI et XVII. — Avril -mai-juin 1887, p. 296
Sommaire : Réponse à des diatribes de M. P. Meyer. — Substantifs
rouergats en o fermé atone ; ils paraissent être d'origine espagnole. —
Les Rouergats savent distinguer Tun de l'autre, dans les mots espa-
gnols, l'o et l'a atones désinentiels ; ils les prononcent respective
ment comme o et a fermés, ce qui prouve que l'a fermé provençal a
un son distinct de Vo vrai et qu'il ne doit pas être exprimé par ce
signe. — L'auteur revendique la priorité de l'assimilation de Vo
estrech des grammaires provençales à Vou de la graphie des patoisants
et félibres. — Réplique à M. P. Meyer au sujet de sa leçon Rosengas
pour Rosergas. — Rudergue, variante de Roergue, encore employé .
comme adjectif. — Discussion avec M. C. Chabaneau, à propos du
mot rudergue^ sur les transformations de Vo et de Vu latins dans le
provençal .
Corrections : P. 301, 15« ligne, au lieu de : le c dur, lire un c dur.
— P. 308, 5® ligne, au lieu de : exiologiques, lire : lexiologiques . —
P. 305, 4« alinéa, au lieu de: Cadurceus, lire : Cadurciens.
Note XVIII. — 4« Série, T. III (1889), p. 45
Sommaire : Examen critique de la thèse de MM. Paul Meyer et
Gaston Paris de la non-existence de dialectes dans le gallo-roman.
— D'après ces auteurs, il n'y a pas de langues filles, il n'y a pas de
langues mères, et le gallo-roman est une masse linguistique com-
pacte, indivisible en'dialectes, qui ne se déversifie d'un lieu à un
autre que par des « traits linguistiques » discordants. Ces proposi-
tions sont démenties par l'observation, et l'on peut dire d'ailleurs
que si elles étaient vraies elles seraient également applicables à tous
les groupes de langues, et aussi à l'histoire naturelle, chez qui toute
tentative de classification serait dès lors chimérique. — C'est le latin
classique seul qui s'est établi dans les Gaules, c'est par les hautes
classes seules qu'il a été d'abord employé, et c'est d'elles qu'il est
passé plus tard au peuple. — Le germanique de l'invasion a eu au
contraire son premier contact, en Gaule, avec les masbes rurales, et,
simultanément ou successivement, par ses différents dialectes de peu-
plade. — Qu'est-ce qu'une langue, et qu'est-ce qu'un dialecte? —
Langues génériques et langues individuelles. — La langue latine est
la mère des divers idiomes romans, et la langue romane en est le
genre, dont ces idiomes sont les espèces ou les individus. — Dialec-
DE PHILOLOGIE ROUERGATE 107
tes chronologiques ou dans le temps, et dialectes géographiques ou
dans Tespace. — Chacun des dialectes géographiques du gallo-roman
dérive du latin par une ligne directe et distincte à lui propre ; ils
sont enti'e eux dans un rapport de parenté purement collatérale, et ne
peuvent par conséquent pas se prêter à une classification généalogi -
que. — Exemples de classification généalogique dans les langues.
MM- P. Meyer et G. Paris soutiennent que les « traits linguisti-
ques » ne coïncident jamais avec « les limites anciennes ou moder-
nes )>; faits à l'encontre de cette assertion, principalement tirés de
l'histoire linguistique du Rouergue. — Un atlas de différents traits
phonétiques dont les cartes ont été dressées par l'auteur il y a qua-
rante ans. Ces cartes sont consacrées aux traits phonétiques sui-
vants : 1<* lat. CA, GA, = ca, ga, et ^ cha,ja; 2^ lat. ct z= ch et =
it; 3« lat V = V et = & ; 4° lat. f =/ et = ^. / 5° prov. ch.j\ = ch,
j et = t8 ; 6° prov. o lare ^ uo et = io. — Particularités caracté-
ristiques du rouergat et de ses diverses variétés locales. — Reprise
de la question de cailar et cailus, et des influences locales du ger-
manique. — Liste de noms germains de femme relevés d'après les
vieilles chartes rouergates.
Réponses de MM. P. Meyer et G. Paris aux critiques de l'auteur,
et réplique de ce dernier.
Corrections. — P. 267, avant-dernière ligne, au lieu de: Tun de
l'autre, lire: l'une de l'autre. — P. 280, l*"® et 2« ligne, au lieu de:
féminime, lire : féminine. — Même page, 11« ligne, supprimer la pre-
mière virgule. — P. 437, 1'® ligne de la note 2, supprimer la pre-
mière virgule. — P. 444, 17® ligne, au lieu de : fut portée, lire : fut
parlée. — Même page, 24« ligne, au lieu de : des manses les plus écar-
tées, lire : des raanses les plus écartés.
Additions. — P. 278, 3*^ alinéa, mentionner encore comme trait
caractéristique du parler local la corruption de la désinence ia en ié,
donnant, par exemple, àhadié pour ahadia, malautié pour malautia
P. 437, aux exemples du suffixe uss (en note) énumérés ajouter les
suivants: cantussier^ lutrin, qui suppose un verhe, cantussar, lat.
caniutiare, fréquentatif de cantare, qui se rencontre en composition
dans le rouergat cantussejar, chsintonner ; capussat, participe passé, se
disant pour huppé, par allusion de la tête du chapon, capô, qui est
garnie d'une touffe de plumes au lieu de crête.
P. 440, une rectification et une addition sont à faire au passage
relatif à la contraction du lat. vetulum en veclum. Il paraît que
VAppendix Probi, que j'ai cité d'après Litlré, n'est pas do Probus, ce
que j'aurais dû voir tout d'abord, et que cet appendice daterait du
III® siècle. Incompétent sur ces questions d'érudition, je me bornerai
108 NOTES
à faire observer que plus le texte dont il s'agit est ancien, et plus il
vient à l'appui de ma thèse comme quoi le groupe tl répugnait à la
phonétique latine, et non pas seulement à la phonétique gallo-romane.
Cela dit, voici une autre observation qui me paraît intervenir à propos,
c'est que dans les langues romanes de l'Occident (j'ignore ce qu'il en
est du moldo-valaque) les métaphonies de vetuhis visent toutes une
forme intennédiaire vecîus, témoins l'ital. recchio et le castil. viejo,
respectivement formés à l'instar de occhio ci ojo, de ocw^w», tout comme
le prov. vielh et le fr. vieil, analogues de uelh et œil.
Les mots cailar et caïlus, sur lesquels j'ai glosé dans les Notes VI
et XV m, appellent encore quelques observations. Ces deux mots
constituent un phénomène de tératologie linguistique des plus remar-
quables, digne d'une étude approfondie. J'ai constaté que cette
curieuse anomalie ne se montre que sur le territoire de la langue
d'oc et même que sur une section restreinte de ce territoire. Partout
ailleurs les mêmes mots se retrouvent sous leur forme normale, qui
est ca^^^r et castelua pour le domaine provençal, cJiâtelier et châtelux
pour le domaine français ; et l'italien et l'espagnol, qui ne les ont
pas seulement conservés comme noms propres de lieu, mais les possè-
dent jusqu'à présent, du moins partiellement, dans le vocabulaire de
la langue, nous offrent,*le premier, castellnre et castelluccio, le second,
casiellar seulement. On a contesté que le Châlelier des pays français
répondît à notre Castelar, c'est-à-dire au lat. castellare, en se fondant
sur ce que la désinence française ier procède du suffixe latin arius.
D'après cette opinion, Châtelier procéderait do castellarius. A cela
je répondrai d'abord que castellarius, dans Du Gange, a la significa-
tion de châtelain : « Castellarius, Ugotioni, Dominus Castri, velqui
prœest castris. » En second lieu, je ferai observer que le suffixe lat.
aris fait le plus souvent ier en français ; témoins : aubier, de albaris ;
collier, de collare ; familier, de familtaris ; sanglier et singulier,
de siNGULARis ; soulier, de subtelaris ; villier, de yillare.
Le dictionnaire de Raynouard cite un texte provençal du xiii®
siècle où castelar et caslar figurent concurremment comme deux
mots de signification distincte : « E'I caslar e'I castelar (Arch. du Roy.
J. 323). )) Je vois là un nouvel indice à relever à l'appui de ma
thèse comme quoi les formes anomales caslar et caslus seraient des
barbarismes romans de facture germaine. On peut très pi ausiblement
supposer que castelar, dénaturé en caslar par les Barbares, fut en
même temps détourné par eux de sa signification rigoureuse, qui était
celle d'un adjectif employé substantivement, et désignant ce qui
appartient au Castellum, ses appartenances, ses diverses fortifications.
« Castellare, castrum, ipsa castelli munitio », dit Du Cange. les
Barbares, en ceci comme dans nombre d'autres cas, n'ayant pas
DE PHILOLOGIE ROUERGATE 109
saisi la nuance des appellations latines, auront appliqué à l'habitation
du fort, au château proprement dit, ce qui se disait de l'ensemble
(les fortifications environnantes ; puis le mot, ainsi altéré par eux de
façon à rendre son identification avec le type original difficile, aura
été accepté par les « Romains » comme une expression tudesque, telle
que la sala, qui a à peu près la même acception, et les deux termes
castelar et caslar, qui n'en formaient d'abord qu'un seul, auront
ainsi vécu côte à côte, chacun avec son usage propre.
Il est à remarquer que nos Cailar, Cailua (Caylar, Chaylar, Caylus,
Chaylus) se présentent invariablement, dans les textes les moins an-
ciens du moyen âge, à l'état de caslar^ caslus, qui ne se rencontre plus
dans la prononciation actuelle.
J.-P. Durand (de Gros).
DEUX POÉSIES EN PATOIS NORMAND
Notre confrère, M. Henri Bsiilleul, docteur en droit, directeur de la
4« circonscription pénitentiaire, à Rouen, nous communique les pièces
suivantes en patois normand contemporain .
Elles sont l'œuvre d'un vieux curé né en 1803, mort il y a quelques
années à peine. L' une, !& Notre-Dame d^Auti-etot, composée vers 1830,
est une poésie réellement populaire, véritable photographie des
réjouissances en usage dans la plupart des villages lors des fêtes
patronales, assemblées en Normandie, pardons en Bretagne, Ker-
messes dans les pays flamands, voto en Provence, festas tout court
dans une grande partie du Languedoc.
L'autre, composée vers 1847, pour la fête d'un confrère de l'auteur,
est une œuvre littéraire, moins intéressante à la rigueur pour les lec-
teurs de notre Revue, mais qui montre avec quelle facilité l'auteur
avait su, dans un sujet plus sérieux, s'assimiler la langue populaire.
A. E.
LA NOTRE-DAME D'AUTRETOT
(Vers 1830)
Air : la Comète.
La Noter-Dame d'Autertot
Est eunne superbe assemblaye !
Lés pu grands Yiolonnneux d'Yv'tot
Et lous les râcleux d'ia tornaye
Y violonnent si bien
Q'cha vo' z'enleuve (bis) ;
Y violonnent si bien
Q'cha vo met tout le monde en train !
La veuiir lès homm* vont cheux Tboucher
Fair' couper gigots et cot'lettes ;
De là no s'rend cheux l'épicier.
Pou' l'café no fait ses emplettes.
DEUX POESIES EN PATOIS NORMAND 1 1 1
L' marchand qui n'en revient point
Dit : « Cha m'enleuve (bis), d
L'marchand qui n'en rVient point
Dit : (( Cha m'enleuv', tant q'cha va bien ! »
N'y a point besoin d'avé d'iergent*
I suffit d'êt' eunn' vieull' pratique ;
L'marchand est oco bien cotent
D'vo vair choisi dans sa boutique.
No dit : « Ecrisez cha. » •
Pi no z'enleuve (bis)
No dit : « Ecrisez cha :
L'ergent viendra quantt cha s'pourra. »
Pendant cha, la maîtresse, au four,
Pétrit des gatiaux, des galettes ;
E chaque marmot, à son tour,
Veut des douillons et des boulettes.
No cuit du galuchon
Qui vo' z'enleuve (bis);
No cuit du galuchon
Qui vo' z'enleuv' tant qu'cha sent bon !
Le jou' d'ia faîte, un bon daînné
Met en gaîté chaque famille,
No prend un bon quart ed'café
Pi dans les verr' l'iau dVie pétille ;
Quand cha vient à passer
Cha vo' z'enleuve (bis)
Quand cha vient à passer,
Cha z'enleuv' la piau du gosier.
Cha n'est pas tout, i faut danser,
Car, sans la dans' n'iérait point de faîte ;
Stilà qui voudrait s'en passer
S'rait bien sûr d'en pédre la taîte.
C'te flûte, ces violons
Cha vo' z'enleuv' (bis);
C'te flûte, ces violons,
Cha vo' z'enleuv' fill' et garchons.
112 DEUX POÉSIES EN PATOIS NORMAND
C'est là q' chacun mont' sen talent,
Surtout quanttno dans' la gavotte.
Noz est joyeux, noz est cotent,
L'moins dégourdi s'y ravigotte ;
Mais quantt no crie « l'galot » !
Cha vo* z'enleuve (bis)
Mais quantt no crie « Tgalot « !
Cha vo* z'enleuve ! no va l'grand trot.
Souvent il tonne, il grêle, il pleut;
Pour cha quitt' ra-t-on l'assemblaye,
Contre Tmauvais temps, qu'est qu'no peut?
No brave l'vent et la grêlaye.
Su tambour, seu flûtiau,
Cha vo' z'enleuve (bis)
Su tambour, su flûtiau
Cha fait danser les pieds dans l'iau.
Su plaisi-la vo sembl' si doux
Q'no l'fait duai toute eun' semaine :
Chaq' soué no s'réunit tertous ;
No saut', no danse àpédre haleine.
Su tambour, su crin-crin
Cha vo' z'enleuve (bis) ;
Su tambour, su crin-crin,
Cha vo fait omblier l'chagrin.
I n'y a point d'bonheur qui n'prenne fin-.
N'y a point d'si biau jou' qu' la nuit n'vienne.
Bintôt ne change de refrain
Et chacun répète c't' antienne :
C'te flûte, su tambourin
Cha vo' z'enleuve (bis) ;
C'te flûte, su tambourin
Cha vo' z'enleuv' l'argent et l'pain.
A quelqu'un qui s'était, pour ainsi direj attribué cette chanson
Plus d'un s'est prétendu l'auteur
De cette pauvre chansonnette ;
DEUX POESIES EN PATOIS NORMAND 1 1 »
Mais il faut être bien menteur
Pour nous conter cette sornette.
S' vanter d'avai fai cha,
Chavo' z' enlenve fbisj ;
SVanter d'avai fait cha,
Cha vo' z'enleuv' le droit d'papa.
bis,
POUR LA FETE DE M. L'ABBÉ PIERRE BOSSEL
CURB d'hARFLEUR *
(Vers 1847)
Bien ï bonjour, nof bon Maîte,
No v' nous pou vu faîter.
C'est aujourd'y vot' fête
J'allons la célébrer
Ah 1 mais, oui-dà
Comment peut-on trouver du mal à cha?
Bravant tout' réprimande,
Dans un charmant bosquet
Pour vos en faire offrande,
J'ai volai un bouquet.
Ahl mais, etc.
Pour vo s'haiter vot' fête,
J' veux faire un copliment ;
No m' dit que j' sieux trop bête,
Que c' n'est point m'n' élément.
Ah ! mais, etc.
Quandj' veux fair' vot' éloge
Et chanter vos vertus.
' Le jour de sa fête, cette anaée-là, il souffrait beaucoup d'un accès de
goutte à laquelle il était très sujet. — L'auteur se présentait accompagné des
membres du clergé paroissial.
►-_.«■ _
1 1 4 DEUX POESIES EN PATOIS NORMAND
Men pauvre esprit déloge
Et ma mémoir' n'y est plus
Ah ! mais, etc.
Vous avez trop d' mérite
Et nous trop p'tieu d' talent;
Ma cervelle s'en irrite,
Mon cœur en est adolent.
Ah l mais, etc.
ËhbienI chantons l'histoire
De votre saint patron ;
No dit qu' vos li fait' gloire
En bien portant son nom.
Ah ! mais, etc.
Saint Pierre avait du zèle,
Il aimait le Sauveur ;
Le prenant pour modèle
Nous aimons not' pasteur.
Ahl mais, etc.
— M'aimez, m'aimez-vous, Pierre,
Lui demanda le Sauveur?
— Mon ardeur est entière,
Dit Pierre avec humeur.
Ah ! mais, etc.
L'apôtre à sa parole
Certatns jour fit faux bond ;
A la sienn' gloriole
Chacun d* nous tiendra bon.
Ah! mais, etc.
Pierr' trembla, faisant route
Sur la moite élément;
Sur terre avec la goutte.
Eut-il fait autrement?
Ah 1 mais, etc.
DEUX POESIES EN PATOIS NORMAND 115
Pierre, no dit Thistoire,
Mourut la tête en bas :
Il fut donc à la gloire
Sans avoir fait un pas.
Ah! mais, etc.
Quittez donc votre chaise
Et changez votre sort ;
Pour vivre enfin à Taise,
Marchez comme il est mort.
Ah ! mais, etc.
Pierre, ajout' la chronique.
Vécut quatre-vingts ans ;
Si Dieu veut d' ma supplique,
vos vivrez p'u longtemps.
Ah! mais, oui-dà ■
/ bis
Qui pourrait donc trouver du mal à cha?
IL PANE DI AMORE
(dal provenzale DI a. de gagnaud)
Ben saporoso il pane de Vamore
Ma non si assagia afTatto in tutte Tore.
T. Aubanbl.
I
Si vorrebbe gustare in tutte Fore
Il saporoso pane de Tamore !
L'amor tàlora dal ciel scende solo,
E a noi di attorno svolazzando va;
Ma se ghermirlo vogliamo per Tala,
Verso le azzure altezze ei vola già,
E per sempre da noi piglia il suo volo.
Ma non si gode affatto ciascun di
Il pan gustoso de Tamore, oh si!
LOU PAN D'AMOUR
A Teodor Aubanèu
MaDjas d'aise lou pan d'amour :
Se n'en manjo pas chasque jour.
T. Aubanel.
I
N'en voudrian tasta cade jour — dôu pan sabourous de l'amour!
L'amour, perfés, dôu cèu davalo — e voulastrejo à noste entour;
— mai se voulen i' aganta l'alo, — vers lis auturo celestialo, — cate
cant lando, e pèr toujour !
Se n'en pasto pas cade jour — d'aquéu pan goustous de l'amour.
IL PANE DI AMORE 1 1 7
II
In mezzo a mille lacrime del core,
Chi mai non fa i suoi sogni di amore?
Vediàm talora che una Stella brilla
Di chiarezza abbagliante in suo fulgore :
Il suo splendore brucia la pupilla,
Ma al mane impallidisce Tastro adorno
Per estinguersi allor che spunta il giorno.
L'eterno amore è un sogno, un vago incanto;
Solo eterno è quaggiù Taffanno e il pianto!
III
Si vorrebbe ascoltarla in tutte le ore
Quella dolce canzone de l'amorc.
Talor tua voce dolce e chiara scende,
0 poeta, a Tabisso : esulta il core
Per tutta udirla ; al suo poter si arrende
L'aima più dura ; tu ben disacerbi
Sue pêne un' ora, o cantico di amore.
II
Entre-mitan de milo plour — quau noun fai soun pantai d'amour?
Vesen, de fes, coume uno estello — qu'esbrihaudo pèr sa clarour
— soun trelus abro la parpello ; — mai, lou matin, vèn palinello, —
e s'amosso quand vèn lou jour.
Es un pantai Teterne amour: — i' a d'eterne, eici, que li plour!
HI
Li voudrian ausi cade jour, — li dôuci cansoun de Tamour.
De fes, claro e siavo, descende — ta voues, pouèto,dins lou gourg:
— lou cor tressauto quand l'entôude ; — Tarmo la mai duro se rende ;
— esvarto, imo ouro, si doulour.
8
118 IL PANE DI AMORE
0 signore, co' tuoi versi di amore,
Deh, cuUa ciascun giorno il nostro corel . . . .
Cav. G. Spera.
Monte Cassino, 1 décembre 89.
0 mèstre, emé ti vers d'amour, — brèsso nôsti cor cade jour !
A. DE Gagnaud.
Pourchiero (B.-Aup).
LOU POURQUET DE LAIT
Francomen m'estounariot pla
Qu'ajèssets pas ausit parla
Dal ritou que bau mètre en scèno :
Brabas, apetissat, se pourtabo à rabi,
Car, se cantabo pla Tantièno,
Fiulabo milhou lou boun bi.
Ero pas flèsc ; quand coufessabo
Las fennos, que benion à bols !
« Passats à Tacroucho I cridabo,
D Que daissariot ruma 's fabols ! »
El, quand la salço se broussabo,
Ou bé que lou roustit abio dous tours de trop,
Birabo d'èls coumo 'no crabo,
Diguent : « Acô bal pas uno bato d'esclop ! »
LE PETIT COCHON DE LAIT
Je serais franchement étonné — que vous n'eussiez pas entendu
parler — du curé que je vais mettre en scène ; — brave homme,
jouissant d'un bon appétit, il se portait à ravir ; — et, s'il chantait
bien les antiennes, — il sifflait encore mieux le bon vin.
11 n'était pas mielleux ; quand il confessait — les femmes, qui
venaient en foule : — « Prenez le plus court chemin, leur criait-il ;
— vous laisseriez brûler vos haricots ! »
Lui, quand la sauce était manquée, — ou que le rôti avait deux
tours de broche de trop, — il tournait les yeux comme une chèvre,
— disant : « Ça ne vaut pas le cuir d'un sabot ! »
i
120 LOU POURQUET DE LAIT
Amé tout acô, caritable :
A sous paures malauts mandabo de boulhoun.
Tabé, rebiscoulats, dision : « Qun ome afable !
« Coussi 's pas riche d'un milhoun ! »
Soun soûl défaut, fort perdounable,
Au mens à moun moudeste abis,
Es qu'escoupissio pas sus lous bounis boussis.
L'autre an dal gros ibèr, per la fèsto loucalo,
Coubidèt cinq ou sièis ritous.
« Arribats amé la fringalo,
» Fabio *scrit, éi de-que fa tiba lous cintous. »
De fèt, on besio à la tendilho
E de gibiè de plumo e de bourro, abenat
Qu'atendio que la dent ; mes lou tal mai presat,
Qu'ai ritou fa dansa la cilho,
Es uu pichot pourquet, poulit coumo 'n amour,
Lusent, tout roso-blanc de la cougueto al mour.
Es digne, sa-fasio, d'uno taulo papalo !
En babant de plasé ! Wpp ! quand aquel legum
Sara ûambat e quèit à punt,
Avec tout cela, charitable : — à ses pauvres malades il envoyait
du bouillon. — Aussi, une fois ressuscites, ils disaient: « Quel
homme affable ! — Que n'est-il riche à millions! » — Son seul défaut,'
très pardonnable, — au moins à mon humble avis, — c'est qu'il ne
méprisait pas les bons morceaux.
L'année du rigoureux hiver, à l'occasion de la fête locale, il invita
sept ou huit curés. — « Arrivez avec la fringale, leur avait-il écrit ;
— j'ai de quoi tendre vos ceinturons. »
En effet, on voyait au garde-manger — du gibier à plume et du
gibier à poil, faisandé, — attendant le coup de dent; mais la plus
précieuse pièce, — celle qui faisait reluire l'œil de notre curé, —
c'était un petit cochon de lait, joli comme un amour, — luisant, tout
rose et blanc de la queue au groin.
« 11 est digne d'une table papale! — disait le curé, en bavant de
plaisir. — Vpp ! quand ce légume — sera flambé et cuit à point, —
LOU POURQUET DE LAIT 121
Âuren mai fantesiè d'atrapa la cigalo
Que de predica la mouralo!
Lou sant jour dal Patrou se mostro ensoulelhat.
Moussu l'abat Jalard, — bous Tabio pas noumat,
Mes Tabiots toutis à la bouco,
A soun bièl cousiniè Jaquet,
Lurrat e sourd coumo 'no souco,
Recoumandabo soun pourquet.
En presenço de sous coullègos,
Qu'abion fait très ou quatre lègos
Am'un frech que tenio tout lou mounde arroupit,
I disio, d'uno boues sereno ;
Jacou, de temps en tems unto-si la coudeno,
Mes sans arresta Tast ! Ten-te bo pla por dit,
E sustout t'anes pas endourmi sul roustit !
Lou darniè de la messo souno ;
Lous chantres soun al cor prèstis à fa tampon no ;
Ta très ou quatre gargalhols
Que fan boula las tatiragnos.
Picounèl, Jan-Francés soun de bièlhis rascagnos
Al constat d'aqués roussignols.
nous serons plus enclins à prendre un plumet — que désireux de
prêcher la morale. »
Le saint jour de la fête patronale arrive, ensoleillé. — Monsieur
Tabbé Jalard (je ne vous l'avais pas nommé, — mais vous aviez tous
son nom sur les lèvres), — à son vieux cuisinier Jacquet, — stupide
et sourd comme une souche, — recommandait le friand morceau.
En présence de ses confrères, — qui avaient fait trois ou quatre
lieues, — par un froid qui tenait tout le monde pelotonné, — il disait
d'une voix douce au gâte-sauces : — « Jacquet, de temps en temps,
il faut oindre la couenne, — mais sans arrêter la broche. Ne l'oublie
pas, — et surtout ne va pas t'endormir sur le rôti.
On sonne le dernier pour la messe. — Les chantres sont au chœur,
prêts à s'égosiller. — Il y a, parmi eux, trois ou quatre voix —
qui enlèvent les toiles d'araignées. — Picounèl, Jean-François, sont
des grillons — à côté de ces rossignols.
122 LOU POURQUET DE LAIT
Moussu Jalard ouficiàbo :
Coumprendrets amé iéu sas sicrètos rasous.
Toujours, dins soun esprit, lou porc de lait troutabo
E, de Tauta, soun èl flambejant surbelhabo
Lou roustit dabant lous tisouns,
Car la capelaniè besinabo de sorto
Qu'on besio la cousino à trabèts uno porto.
Tout d'un cop, paure abat Jalard !
Dal sancôpi ne perd très liuros de soun lard !
Jaquet, Tanimalas ! ben de fa cap-in-pocho.
Uno minuto après s'endourmits e la brocho
Rodo pas pus, noum d'un pétard !
Ai, moun Dius ! lou pourquet se rumo
La coudeno, lous coustelous !
La fumatièro mounto'n brumo,
Lou grais rajo azimant lou foc das estelous !
Moussu Jalard se descrestiano ;
Pousso quatre ou cinq hèms ! sans èstre enraumassat ;
S'enfregounits e chasuble et soutane.
Se debigosso encrispassat ;
Se mouco 'n faguent la troumpeto,
Monsieur Jalard officiait. — Vous comprendrez avec moi ses
secrètes raisons: — 11 était toujours préoccupé par le cochon de lait;
— et de Tautel son œil vigilant pouvait surveiller — le rôti devant
le feu, — car la disposition du presbytère était telle, — qu'on voyait
la cuisine par une porte entr'ouverte.
Tout à coup, pauvre abbé Jalard, — du coup, il en maigrit de trois
livres : — Jacques, ce gros animal! vient de saluer; son nez touche
à sa poitrine. — 11 s'endort, et, une minute après, — la broche —
ne tourne plus, nom d'un pétard !
Ah! mon Dieu! le cochon se brûle — la couenne, les côtelettes !
La fumée monte en nuage : — la graisse ravive les flammes.
Monsieur Jalard se donne au diable ; — il pousse trois ou quatre
hum! sans être enrhumé ; — il chiffonne sa chasuble et sa soutane ;
— il fait mille contorsions, tant il est crispé ; — il se mouche avec
un bruit de trompette ; — il tousse encore : — il crache de nouveau ;
LOU POURQUET DE LAIT 123
Tourno toussi,
Tourno 'scoupi ;
Pato das dous talous à toumba la barreto.
Mes tant bal que cante Malbrouc,
Jaquet ausits pas res, roupiiho coumo 'n souc.
Zan I uno espiraciu subito
Illumino nostre ritou ;
Coumo 'n pétard de dinamito
Bous fa *sclata 'queste sermou
Court e bou.
« Mous fraires, es pas sus la fèsto
» Que celebran aqueste jour
» Que bau parla; Tabat Ginèsto,
)) Das ouratous la âno flour,
» A bèspros prechara *80un tour.
Téu soulomen béni bous faire
Quaucos oubserbacius que tendran dins sièis mots.
Podi pas mai demeura 'staire
Al sutjèt das pourquets que flsats as marmots,
Lous daissouu en pertout ronda la patantèino,
Tout i deben planiè, digus pus nou se gèino ;
— il frappe du pied, au point de laisser tomber sa barrette ; — mais
autant vaudrait chanter Malhorough: — Jacques n'entend rien, —
il dort comme un billot.
Crac! une inspiration subite — illamine notre curé. — Comme une
explosion de dynamite, — il lance le sermon qui suit, — court et
bon :
« Mes frères, ce n'est point sur la fête — célébrée aujourd'hui —
que je vais parler. L'abbé Gineste, — des orateurs la fine fleur, —
aux vêpres prêchera à son tour.
» Je viens seulement vous faire — quelques observations en peu
de mots. — Je ne puis garder plus longtemps le silence — au sujet
des jeunes cochons dont vous confiez la garde à vos enfants, — qui
les laissent partout courir la prétantaine. — Tout est permis à ces
animaux, et ils ne se gênent pas — pour piétiner et farfouiller dans
les champs ensemencés. — Et pas de danger que vous criiez : —
124 LOU POURQUET DE LAIT
Lous besèts mousilha, trepeja semenats,
Mes Tase quilhe se cridats I
a Digos I biro louporcf,,, » Nostre ouratou s'arrèsto.
4 Abio talomen naut gisclat :
c( Biro lou porc », que ne sioguèt engargassat
Coumo s'abio 'ngoulit pel trabès uno arèsto.
Coumo 'n cop de fusil dreit lou sermou pourtèt ;
Jaquet, estrementit, bitomen s'espertèt,
Poussèt un loun badal e la brocho roudèt.
20 de Mars 1889.
A. MiR.
« Hé I là-bas I gare au cochon ! » Notre orateur s'arrête. — 11 avait
crié si fort : — Gare au cochon I qu'il en eut le gosier malade, —
comme après avoir avalé de travers une arête de poisson.
Comme un coup de fusil, le sermon alla droit au but. — Jacques,
quoique sourd, secoué, s'éveilla, — poussa un long bâillement, et
remit la broche en train.
CONGRÈS DE PHILOLOGIE ROMANE
(26-27 mai 1890)
COMPTE RENDU
Le Congrès de philologie romane organisé par la Société
pour Tétude des Langues Romanes a eu lieu à Montpellier,
dans le grand amphithéâtre de la Faculté des Lettres (Palais
de l'Université), le 26 et le 27 mai 1890, à la suite des fêtes du
sixième centenaire de l'Université de Montpellier, célébrées
du 22 au 25 mai.
Une circulaire adressée à tous les romanisants et dont on
trouvera le texte dans la Revue des Langues romanes * avait
indiqué les principales questions qui seraient traitées (dialec-
tes, cours d'amour, épopée provençale). Un avis, inséré plu-
sieurs jours à l'avance dans les journaux montpeliiérains,
priait tous les hôtes de l'Université qui n'avaient pu être
invités personnellement dé venir honorer le Congrès de leur
présence. Comme on pourra en juger par la liste des membres
du Congrès, que nous donnons plus loin, les auditeurs ont été
assez nombreux. Malheureusement, plusieurs circonstances
défavorables ont empêché beaucoup de philologues de venir
se joindre à nous. Le congrès annuel des Sociétés savantes
ouvrait en même temps ses sessions à Paris et le quatrième
congrès des philologues modernes d'Allemagne se réunissait
à Stuttgart et nous privait de la plupart des maîtres de la
science.
Les personnes qui assistaient au Congrès étaient les sui-
vantes : Monseigneur de Cabrières, évêque de Montpellier ;
M. le général Borson, commandant la 31^ division d'infan-
terie ; M. Maurice Faure, député du département de la
Drôme ; M. Daubian-Delisle , directeur des contributions
directes; MM. Gaudenzi, professeur à l'Université de Bolo-
1 T. XXXUI, ann. 1889, p. 629.
;.-•■•* .
126 CONGRES
gne, Harvej, délégué du Candian Institute de Toronto,
M™® Harvej, Lévj, professeur à l'Université de Fribourg-en-
Brisgau , Nyrop , professeur à TUniversité de Copenhague,
Sôderhjelm, professeur à l'Université d'Helsingfors, Trojel,
professeur au Ljcée de Copenhague, Van Hamel, professeur
à l'Université de Groningue, Wahlund, professeur à l'Univer-
sité d'Upsal ; M. Frédéric Mistral, M. Mariéton, chance-
lier du Félibrige, M. Roumieux, assesseur de la Maintenance
de Languedoc ; M. Bréal, membre de l'Institut, professeur au
au Collège de France ; MM. Clédat, professeur à la Faculté
des lettres de Lyon, Constans, professeur à la Faculté des
lettres d'Aix, Devaux, professeur à l'Université catholique de
Lyon, Thomas, professeur à la Faculté des lettres de Paris;
D*^ Dejeanne, délégué de la Société Ramond (Bagnères-de-
Bigorre), D"" Durand de Gros, D'' Garrigou, directeur de V As-
sociation pyrénéenne et de la Revue des Pyrénées et de la France
méridionale \ MM. le D^ Balestier, G. de Bosc, D'Fr. Cazalis,
D' E. Claparôde, A. d'Espous, Farrouch, Fontenay, Le Bars,
De Possac-Génas, E. Sahut,Tédenat, Tempié, de Montpellier;
L. Mangeot, de Paris ; MM. Bonnet, Pélîssier et Dauriac,
professeurs à la Faculté des lettres de Montpellier; Glaize,
professeur à la Faculté de droit de Montpellier; Méon, profes-
seur au Collège d'Agde : Bousquet, Braguin, L. Castets, Falk,
Rivoire, Thomas, étudiants ; MM. Castets, Chabaneau, D*"
Espagne, Grand, Lambert, Ré villout, de Tourtoulon, membres
du Comité directeur de la Société pour l'étude des Langues
Romanes.
Séance du 26 mai 1890
La séance est ouverte à deux heures et demie de Faprès-
midi.
Le Congrès est inauguré par l'allocution suivante de
M. Castets, président de la Société pour l'étude des Langues
Romanes :
Messieurs,
A roccasion de la célébration du VI® Centenaire de l'Université de
Montpellier, nous vous avons priés de vous réunir dans cette ville où
DE PHILOLOGIE ROMANE 127
fut fondée, il y a vingt ans, la Société pour l'étude des langues
romanes. Quel moment était plus opportun pour inviter les romani-
sants à se réunir en un Congrès, que celui où Tune des plus anciennes
Universités latines, celle qui pendant des siècles a jeté un si vif éclat
sar notre Languedoc, reçoit la visite de nombreux savants de toutes
les nations ? Quel lieu pouvait être mieux choisi que celui où la lan-
gue des troubadours est restée une langue vivante ? Vous avez bien
voulu répondre à notre appel : nous vous en sommes reconnaissants
et nous vous en remercions.
Je regrette vraiment que nous ne puissions espérer de vous retenir
plusieurs jours. Mais, quelle que soit la durée de ce Congrès, il
n*aura pas été inutile. Sans parler des résultats immédiats que don-
neront vos discussions sur les différents points que nous vous avons
soumis, votre présence, cette sorte de manifestation de Tintérêt que
vous portez aux recherches et aux progrès de la philologie romane,
ce témoignage de votre foi dans ses destinées, est en soi un fait d'une
importance considérable.
Notre Congrès aura enfin des conséquences qui, pour n'être pas
d'ordre scientifique, ne nous en touchent pas moins. 11 réunit des
hommes qui ne se connaissaient que par leurs travaux. Au lien qu'éta-
blissait entre eux la communauté des études, il ajoute celui d'une
confraternité amicale et durable. Soyez les bienvenus. Messieurs,
et puissent ces assises de la philologie romane se renouveler souvent!
La tâche de la Société est terminée, et il ne me reste plus qu'à
vous prier de nommer le bureau qui présidera à vos travaux.
L'assemblée élit pour président M. Castbts, pour vice-
présidents MM. Chabaneau et Révillout et pour secrétaire
M. E.-D. Grand.
M. Chabaneau donne les renseignements suivants sur les
convocations adressées à l'occasion du Congre? :
Messieurs,
J'ai d'abord à vous donner lecture d'une lettre que je viens de rece-
voir de M. Gaston Paris, membre de l'Institut, professeur au Collège
de France, de qui plusieurs de ceux qui sont dans cette salle ont eu
l'heureuse fortune de recevoir les leçons.
Paris, dimanche 25 mai 1890.
Cher Monsieur,
Voulez-vous dire aux membres du Congrès des romanistes combien, en
d'autres circonstances, j'aurais été heureux d'être avec eux et combien je
12S CONGRES
regrette de ne pas y être? Vous inaugurez des réunions qui, je Tespère, se
multiplieront et dont la Société des Langues romanes aura toujours l'hon-
neur d'avoir pris l'iaitiative.
Croyez-moi bien siacèrement votre dévoué,
G. Paris,
Cette lettre pour la plupart d'entre vous n'a pas besoin d'explication.
Je n'y ajouterai que quelques mots. M. Gaston Paris, lorsqu'il apprit
que la Société avait l'intention de réunir un Congrès de philologie,
accueillit cette idée avec une grande faveur et il se faisait une vérita-
ble *fête d'y prendre part. Dans l'intervalle, il a été frappé dans ses
affections du coup le plus cruel : il a perdu sa femme, et c^est ce funeste
événement qui nous prive de sa présence. Je propose que le Congrès
envoie à M. Gaston Paris une dépêche lui exprimant les regrets que nous
éprouvons tous de ne pas le voir aujourd'hui, parmi nous, à la place
d'honneur que nous lui réservions (Approbations) *.
M. Chabaneau ajoute :
Nous avions adressé des invitations, en Europe et en Amérique, à
tous ceux qui ont une certaine notoriété dans nos études, sans compter
lés maîtres, que nous ne pouvions pas oublier. Beaucoup de ceux
qui n'ont pu venir nous ont exprimé les sentiments de la plus pro-
fonde sympathie, en même temps que des regrets très vifs de ne pou-
voir se joindre à nous. Nous avons reçu des lettres de ce genre des
différents départements 2, d'Allemagne 3, d'Italie *, des pays scandi-
* A l'issue de la séance du 26 mai, la dépêche suivante a été envoyée à
M. Gaston Paris : « Le Congrès de philologie romane de Montpellier vous
exprime à l'unanimité ses regrets de ne pas vous avoir à sa tête.
» Castets, président. »
' MM. Charmes, directeur du Secrétariat, Liard, directeur de l'Enseigne-
ment supérieur, Rabier, directeur de l'Enseignement secondaire, et Buisson,
directeur de l'Enseignement primaire au Ministère de Plnstruct on publique;
Delisle, directeur de la Bibliothèque Nationale ; Gaston Paris, dont on trou-
vera la lettre ci-dessus, Renan, Boissier, du Collège de France ; Crouslé,
professeur à la Faculté des letlres (Paris) ; Joret, professeur à la Faculté des
lettres d'Aix ; Condamin, professeur à l'Université catholique de Lyon ;
Leroux, archiviste de la Haute- Vienne ; D>^ Vincent, de Guéret ; Du Puitspelu,
de Lyon ; Bailleul, directeur des prisons de Rouen ; Chenu, instituteur à
Montgirod (Savoie), Chiron, inst*tuteur à Saint-Just (Ardèche) ; Mazat, insti-
tuteur à Coubon (Haute -Loire), Ranc, instituteur au Colombier -Saint-Pierre
(Lozère); Viguier, instituteur à Maus.^ans (Tarn).
3 MM. Appel (Kônigsberg), Behrens (léna), Fôrster (Bonn), Gaspary (Bres-
lau), Grôber (Strasbourg), Koschwitz (Greifswald), Settegast (Leipzig), Sten-
gel (Marbourg), Tobler (Berlin),
* MM. d'Ancona (Pise), Ascoli (Milan), Cesare de LoUis (Rome), Rajna
DE PHILOLOGIE ROMANE 129
naves*, de Suisse*, de Belgique', d'Espagne*, et de Russie ^ Je les
dépose sur lo bureau ^ I
M. Castets rend un hommage spécial à M. Harvey, délégué
du Canadian Institute de Toronto (Canada), qui, pour arriver
à temps au Congrès, a dû changer de ligne de paquebots et
arriver par Bordeaux (Applaur/issementsJ.
M. Harvey remercie M. le Président dans les termes sui-
vants :
Monsieur,
C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai accepté cette invitation. 11
y a très longtemps que je n'ai pas l'habitude de parler français. Si
je ne m'explique pas bien, acceptez mes excuses. Nous avons chez
nous deux sociétés où l'on étudie les langues romanes : une société
pour l'étude des langues romanes, *Socie/î//br the study of Romances
Languages, qui s'inspire de la même idée qu'ici et veut étudier la
langue française canadienne, l'espagnol, puis le portugais et toutes
les langues d'origine latine, mais la langue française surtout ; l'/n-
stitut Canadien, qui est une société plus connue: elle est divisée en
sections, et nous avons une section qui est consacrée à l'étude des
langues romanes et à leurs diverses transformations, aussi bien dans
le Valais que dans la Roumanie, la Croatie ou la Dalmatie. Elle s'est
efforcée, dans ces dernières années, de se mettre en rapports avec
les sociétés d'ailleurs, la vôtre, celle de Liège, qui nous envoient leurs
publications. Elle m'a prié de venir ici pour faire hommage à votre
Société et lâcher de savoir de quelle manière vous étudiez les langues
(Florence\ Spera (Mont-Cassin). Ce dernier a envoyé à la Société deux articles
sur l'Epopea provenzale et la Lirica provenzale^ extraits des 4« et 5° parties
d'un Saggio di letteratura comparata greco-latiîio-italiana, qui paraîtra
prochainement, et deux pièces de vers : Omaggio alla Cor le di Amore et
Salutoa' confratelli provenzali.
* MM. Sundby (Copenhague), Slorm (Chrisliania), Geijer (Upsal), Visiog
(Lund).
* MM. Bonnard (Lausanne), Morf (Zurich), Rabiet (Fribourg), Ritter (Genève).
3 M. Wilmotte (Liège).
* M. Castelar.
8 MM. Fieury, Wesselofsky (Saint-Pétersbourg).
« Dans des lettres reçues après le Congrès, MM. Monaci(Rorae), H. Suchier
(Halle) et Schuchhardt (Graz) ont aussi exprimé le regret de n'avoir pu y
assister.
130 CONGRES
romanes . Je viens ici pour apprendre et non pour tâcher d'enseigner
quelque chose: c'est tout à fait pour apprendre (Applaudissements).
Si quelqu'un d'entre vous voulait savoir quelque chose de la race et
de la langue française au Canada, je serai très heureux de le faire
connaître (Applaudissements) .
M. Harvey est appelé à siéger au bureau.
Le bureau s'occupe du programme et du nombre des séan-
ces du Congrès.
M. DE TouiiTOULON fait la communication suivante sur la
classification des dialectes :
MONBEIQNEUR, MESSIEURS,
Je regrette, dans la communication que je vais faire, d'avoir à
m'attaquer aune autorité bien forte; mais j'y suis en quelque sorte obligé.
Puisque le Congrès a posé la question des dialectes, il faut d'abord
savoir s'il y a des dialectes. Un homme que tout le monde ici connaît,
respecte et aime, M. Gaston Paris, a nié l'existence des dialectes : je
ne puis guère me dispenser de donner mon avis pour les raisons que
je ferai connaître tout à l'heure.
Le Congrès des Sociétés savantes, tenu à la Sorbonne en mai 1888,
fut clôturé par un discours plein d'intérêt, mais tout à fait déconcer-
tant. M. Gaston Paris, avec le charme et l'autorité qu'on lui connaît,
s'y proposait de « dire très brièvement ce qu'on sait aujourd'hui sur
les idiomes parlés dans notre pays, ce qu'il reste à découvrir, à com-
prendre et à préciser, et les points sur lesquels l'activité des travail-
leurs, surtout de ceux de province, pourrait se porter avec le plus de
chances de succès *. »
Il y a dans ce discom-s, — personne n'en sera surpris, — des par-
ties absolument parfaites ; il y en a qui renversent les idées reçues,
non seulement dans la science du langage, mais dans toutes les
sciences connues.
S'il s'agissait d'une circonstance moins solennelle, on pourrait voir
dans ces passages de simples boutades servant à donner le relief du
paradoxe à des idées qu'il fallait imprimer fortement dans l'esprit
des auditeurs. On n'a eu que trop, — c'est certain, — de délimitations
de dialectes sans étude intrinsèque des dialectes à délimiter, de con-
* Les Parlers de France^ lecture faite à la séance générale de clôture du
Congrès des Sociétés savantes, le 26 mai 1888, par M. Gaston Paris (Extrait
du Bulletin du Comité des ti^avaux historiques, année 1887). Paris,
1889.
DE PHILOLOGIE ROMANE 131
clasions prématurées Bur la concordance des circonscriptions linguis-
tiques .et des anciennes circonscriptions politiques, de recherches
vaines de radicaux celtiques dans le vocabulaire des patois de la
France ; aussi comprendrait-on qu'afin de couper court, avec éclat,
à d'inutiles travaux, un maître se soit écrié, dans un moment de
mauvaise humeur : n H n'y a pas de dialectes Les limites lin-
guistiques n'ont rien de commun avec les limites politiques
Nous parlons latin et rien que latin. » On admettrait peut-être
encore qu'obéissant d'instinct à une de ces vagues craintes patrioti-
ques qui peuvent obséder même un esprit sain, il ait laissé échapper
à propos de patois, cette phrase : « Il n'y a pas deux Frances
Aucune limite réelle ne sépare les Français du Nord de ceux du
Midi. »
Mais, faut-il ne voir dans les paroles de l'éminent philologue que
des exagérations de forme ? Je n'ose le penser. Lorsqu'un homme de
ce caractère déclare à un auditoire sérieux qu'il veut « donner une
idée du point où en est arrivée aujourd'hui l'exploration linguistique
de la France, » il n'avance rien qui ne doive être pris à la lettre et
qu'on ne soit disposé à accepter comme acquis à la science. Il semble
difficile cependant de reconnaître cette valeur aux propositions sui-
vantes que je copie textuellement:
« Les parlers populaires de toute la France se perdent les uns dans
les autres par des nuances insensibles.
» Dans une masse linguistique de même origine, comme la nôtre,
il n'y a réellement pas de dialectes; il n'y a que des traits linguisti-
ques qui entrent respectivement dans des combinaisons diverses. . .
Il ne faut même pas excepter de ce jugement la division fondamen-
tale qu'on a cru, dès le moyen âge, reconnaître entre le français et
le provençal ou la langue d'oui et la langue d'oc. Ces mots n'ont de
sens qu'appliqués à la production littéraire.
» Nous parlons latin Il ne faut plus répéter, comme on le fait
trop souvent, que les langues romanes viennent du latin, qu'elles sont
les filles dont la langue latine est la 7nère.
» Si le développement naturel (du latin) n'avait pas été entravé par
des actions politiques et littéraires, il n'y aurait sans doute pas
aujourd'hui deux communes qui parlassent le même latin.
» Les limites des traits linguistiques ne coïncident pas avec les
limites politiques anciennes ou modernes. »
Tout "^ela est-il rigoureusement démontré, et peut-on accepter ces
cinq propositions comme autant de vérités acquises? Les deux der-
nières, par exemple, ne gagneraient-elles pas à être émises sous la
forme du doute, les preuves manquant aussi bien dans un sens que
dans l'autre ? Dans celle qui les précède immédiatement, faut-il voir
*;' ; . ■
132 CONGRES
rexpresBÎon paradoxale, — non pans danger scientifique, — d'une
Térité courante, j'allais dire banale. Enfin les affirmations relatives
à la fusion graduelle des parlers de toute la France les uns dans les
autres, à l'impossibilité de les diviser même en deux groupes, sont-
elles appuyées sur un assez grand nombre d'observations concor-
dantes, et n'y trouve-t-on pas un déconcertant oubli des procédés en
usage dans toutes les sciences?
Simple curieux des choses de la philologie, je n'aurais aucun droit
de prendre la parole en ce débat, si je ne m'y trouvais depuis longtemps
engagé. M. G. Paris a rappelé en termes bienveillants la recherche
des limites communes aux langues d'oil et d'oc commencée par moi en
1873 avec la collaboration de mon regretté confrère et ami Octavien
Bringuier. Je n'ai pas renoncé à ce travail, malgré les circonstances,
parfois bien douloureuses, qui, depuis des années, l'ont trop souvent
interrompu. On comprendra sans peine mon embarras à la lecture du
discours de M.G.Paris. Devais- je abandonner ma tâche, puisqu'elle
était déclarée inutile par un juge dont personne ne songe à contes-
ter l'autorité? Mon devoir était-il de m'incliner devant l'affirmation
du maître, ou de ne renoncer à l'œuvre entreprise qu'après m'être con-
vaincu par moi-même de son inutilité? On me pardonnera peut-être
d'avoir pris ce dernier parti, et de m'être mis aussitôt au dépouille-
ment des travaux de toute sorte où pouvaient se rencontrer quelques
données propres à étayer le système que patronne M. G. Paris, tout en
reportant à M. Paul Meyer l'honneur de la découverte.
Deux questions m'intéressent surtout :
La fusion graduelle des idiomes vulgaires les uns dans les autres,
si souvent afiirmée à priori, si souvent démentie par l'observation,
est- elle enfin démontrée ?
Cette fusion, en la supposant prouvée, s'opposerait-elle à la distinc-
tion des langues entre elles, à leur subdivision en dialectes et sous-
dialectes, en un mot à la classification morphologique ^ des parlers et
à leur délimitation géographique ?
J'ai parcouru avec soin tout ce qui a été publié depuis quinze ans
sur les parlers vulgaires de la France, et j'y ai vainement cherché
1 J'emploie ce mot afin d'indiquer qu'il ne s'agit pas ici d'une classification
empirique qui grouperait, par exemple, sous le nom de languedocien tous les
parlers en usage dans l'ancienne province de Languedoc; sous celui depro-
vençal tous ceux de Provence, etc. On a distingué la classification morpholo-
gique des langues de leur classification généalogique. En fait de parlers
romans, Nf. G. Paris n'admet pas plus l'une que l'autre ; mais il est vrai de
dire que, lorsqu'il s'agit d'idiomes aussi intimement appai^entés, la classification
généalogique n'est qu'une classification morphologique dans le temps.
DE PHILOLOGIE ROMANE 133
rensemble d'observations précises, la série de faits noncluants néces-
saire à la confirmation de la nouvelle théorie. Je ne connais pas, il
est vrai, le mémoire, de M. Paul Meyer sur les dialectes. Ce ti-avail
couronné par F Académie des Inscriptions, est resté manuscrit.
Malgré le nom de l'auteur, malgré la récompense obtenue, des conclu-
sions dont les prémisses n'ont pas été rendues publiques et ne peu-
vent, par conséquent, être utilement discutées, ne sauraient être reçues
comme des vérités incontestées. De sorte que, jusqu'à nouvelles preu-
ves, le système de M\f. P. Meyer et G. Paris repose uniquement sur
cette double affirmation : 1° Qu'une « observation bien simple, que
chacun peut vérifier, » démontre la fusion des parlers de toute la
France les uns dans les autres par nuances insensibles ; 2° que cette
fusion rend impossible tout groupement des idiomes locaux et régio-
naux. Mais si, d'une part, l'observation dont il s'agit n'était pas aussi
simple, aussi facile à vérifier qu'on pourrait le croire au premier abord ;
si elle avait conduit tous ceux qui vivent au milieu des parlers po-
pulaires à des conclusions opposées à celles de MM. P. Meyer et
G. Paris ; si, d*autre part, la nécessité d'une classification était reconnue
dans toutes les sciences, quels que soient l'entrecroisement des carac-
tères et la difficulté-des déterminations ; si, en un mot, les deux affir-
mations, sur lesquelles la nouvelle théorie a été édifiée, étaient sérieuse-
ment contestées, il faudrait conclure que cette théorie n'est pas acquise
à la science, qu'elle est simplement une opinion personnelle des plus
respectables, étant donnée l'autorité de ceux qui l'ont mise en circu-
lation ; mais qu'il est permis de la combattre à l'aide des faits et du
bon sens, c'est-à-dire avec des armes qui ne sont pas à l'usage
exclusif des philologues.
On trouvera sans doute un peu longues les pages qui suivent ; mais
il y a trop longtemps qu'on escarmouche autour de la question sans
jamais l'attaquer de front, au moins en public. Si je dois être battu,
je ne veux pas que ce soit sans avoir mis tous mes arguments en
ligne et en bonne posture pour vaincre ou tomber avec honneur *.
Le passage suivant renferme l'exposé du système que j'examine :
w En disant partir d'un point central plusieurs longues chaînes
d'hommes dont chacun comprendrait son voisin de droite et son voi-
* Je n'ai pas besoin de dire que le discours de M. G. Paris a soulevé bien
des pretestatioDs. Je signalerai, entre autres réponses, celles de M. le pro-
fesseur Caslets et de M. Durand de Gros, l'une et l'autre dans la Revue des
Langues romanes.
l>.«_ .- ^I E J.
134 CONGRES
sin de gauche, on arriverait à couvrir toute la France d*une étoile dont
on pourrait de même relier les rayons par des chaînes transversales
continues. Cette observation bien simple, que chacun peut vérifier,
est d'une importance capitale ; elle a permis à mon savant confrère et
ami, M. Paul Meyer, de formuler une loi qui, toute négative qu'elle
soit en apparence, est singulièrement féconde, et doit renouveler
toutes les méthodes dialectologiques : cette loi, c'est que, dans une
masse linguistique de même origine, comme la nôtre, il n'y a réelle-
ment pas de dialectes; il n'y a que des traits linguistiques qui entrent
respectivement dans des combinaisons diverses, de telle sorte que
le parler d'un endroit contiendra un certain nombre de traits qui lui
seront communs, par exemple, avec le parler des quatre endroits les
plus voisins, et un certain nombre de traits qui différeront du parler
de chacun de ces quatre endroits Il suit de là que tout le travail
qu'on a dépensé à constituer, dans l'ensemble des parlers de la France,
des dialectes et ce qu'on a appelé des sous-dialectes , est un travail à
peu près complètement perdu.
» Il ne faut même pas excepter de ce jugement la division fonda-
mentale qu'on a cru, dès le moyen âge, reconnaître entre le français
et le provençal ou la langue d'oui et la langue d'oc. Ces mots n'ont de
sens qu'appliqués à la production littéraire C'est bien autre
chose si on essaie, comme l'ont fait il y a quelques années deux vail-
lants et consciencieux explorateurs, de tracer de l'Océan aux Alpes une
ligne de démarcation entre- les deux prétendues langues. Ils ont eu
beau restreindre à un minimum les caractères critiques qu'ils assi-
gnaient à chacune d'elles, ils n'ont pu empêcher que tantôt l'un, tan-
tôt l'autre des traits soi-disant provençaux ne sautât par-dessus la
frontière qu'ils élevaient, et réciproquement. Et comment, je le
demande, s'expliquerait cette étrange frontière qui, de l'Ouest à l'Est,
couperait la France en deux en passant par des points absolument
fortuits ? Cette muraille imaginaire, la science, aujourd'hui mieux
armée, la renverse, et nous apprend qu'il n'y a pas deux Franccs,
qu'aucune limite réelle ne sépare les Français du Nord de ceux du
Midi, et que, d'un bout à l'autre du sol national, nos parlers populaires
étendent une vaste tapisserie dont les couleurs variées se fondent
sur tous les points en nuances insensiblement dégradées. »
M. Paul Meyer aurait donc découvert une loi linguistique. Il serait
plus exact de dire que le savant directeur de l'Ecole des Chartes a
constaté l'application à la linguistique d'une loi déjà formulée depuis
longtemps : « Natura non facitsaltus ». Cette application pouvait être
supposée à priori, puisque le langage, fonction d'un être organisé,
appartient, par un certain côté, au domaine de l'histoire naturelle.
Mais, tandis que les naturalistes de tous les pays ont tiré de la grande
DE PHILOLOGIE ROMANE 135
loi que je viens de rapporter, cette conclusion qu'il faut faciliter Tétude
des êtres en s'efforçant de les classer aussi exactement que le permet
rentrecroisêment des caractères, MM. P. Meyer et G. Paris concluent,
en sens inverse, qu'il faut renoncer à toute classification. Ils n'admettent
même pas la division des parlers de la France en deux groupes : l'un
septentrional ou langue d'oil, l'autre méridional ou langue d'oc. Ces
mots, d'après eux, n'ont de sens qu'appliqués à la production littéraire.
Mais, si tout groupement des parlers de la France est rendu impos-
sible par ce fait que ces parlers se perdent les uns dans les autres
par des nuances insensibles ; s'il n'y a même pas de ligne de démar-
cation entre ce qu'on appelle encore la langue d'oil et la langue d'oc,
il n'y en a pas davantage entre les parlers de la France et ceux de
l'Italie et de l'Espagne, entre les parlers de l'Espagne et ceux du Por-
tugal. C'est la conséquence inévitable delà loi « Naturanonfacit saltus »
interprétée par M. P. Meyer. Cette conséquence n'effraie pas M. G.
Paris : « Si nous examinons, dit-il, le vocabulaire et la grammaire qui
leur sont en très grande partie communs (aux parlers de la Fiance),
nous y découvrons sans peine la plus visible affinité avec les langues
qui se parlent en Espagne, en Italie et dans la lointaine Roumanie
La langue que nous parlons, que parlent les autres peuples que je
viens de nommer, c'est le roman, la langue des Romani, c'est-à-dire
le latin. » Et le savant professeur, remarquant avec raison que « la
nature ne fait paô plus de sauts dans le temps quo dans l'espace »,
mais persistant dans sa manière d'interpréter cette vérité, n'admet
pas que l'on distingue le latin parlé aux temps antiques dans les rues
de Rome des idiomes vulgaires de nos jours, qui sont le « résultat de
l'évolution spontanée, variée suivant les lieux, du latin importé par
la conquête romaine. » D'où cette conclusion assez inattendue que les
langues romanes ne viennent pas du latin, ne sont pas les filles du latin,
niais sont le latin même. Je cite : « Nous parlons latin Il ne faut
pins, en effet, répéter, comme on le fait trop souvent, que les langues
romanes viennent du latin, qu'elles sont las filles dont la langue latine
68t la mère. Il n'y pas de langues mères et de langues filles. Le lan-
Ç^ge, sous l'empire d'impulsions encore mal connues, les unes d'or-
dre physiologique, les autres d'ordre psychologique, va sans cesse en
86 modifiant, mais ses états successifs ne se séparent pas avec plus
"6 netteté que ses variations locales. »
Comme personne n'a jamais soutenu que la naissance d'une langue
**t quelque rapport avec la naissance d'un animal, ou qu'un parler
Populaire ait jamais été créé un beau jour de toutes pièces et aussitôt
aaopté, les paroles qui précèdent ne peuvent avoir qu'un sens : c'est
q^eles langues romanes et le latin ne font réellement et absolument
quune même langue. Si l'orateur pensait, en effet, que l'évolution
136 CONGRES
spontanée du latin eût produit peu à peu, par un travail aussi insen-
sible qu*on voudra le supposer, des langues nouvelles, il ne pourrait
nier que ces langues viennent du latin, et qu'il est permis de les
appeler, par une métaphore qui n'a rien de forcé, ^/Ze« du latin. Cette
façon de parler ne peut être inexacte que si l'évolution spontanée du
latin n'a pas produit de nouvelles langues, si les langues romanes
ne doivent pas être séparées du latin et ne font absolument qu'un
avec lui, car on ne peut naître de soi-même, être la fille de soi-même.
Ainsi, après avoir affirmé qu'il n'y a pas de dialectes en France,
pour cette raison que le langage vulgaire se modifie graduellement
d'un point à un autre, M. G. Paris reste conséquent avec lui-même et,
pour une raison analogue, nie qu'il existe scientifiquement des langues
romanes distinctes entre elles et distinctes du latin. Langues roma-
nes actuelles et latin parlé du haut moyen âge et de l'antiquité ne
forment pour lui qu'une « masse linguistique » dans laquelle il n'y a
de subdivision possible ni dans le temps ni dans l'espace, et qui doit
s'appeler le latin. Il ne s'arrête pas là: « Si les formes principales de la
langue indo-européenne, ajoute-t-il, l'indien, le grec, le latin, le cel-
tique, le germanique, le slave, nous apparaissent comme parfaitement
distinctes les unes des autres, cela tient à ce que nous ne possédons
sur l'évolution de chacune d'elles que des notions absolument frag-
mentaires. » Rien de plus exact que cette constatation, mais rien de
plus étrange que la conclusion à laquelle conduit l'inexorable logique.
La langue indo-européenne n'est donc à son tour qu'une « masse lin-
guistique » dans laquelle le hasard a produit des subdivisions artifi-
cielles, mais qui, si elle était mieux connue, serait aussi indivisible
que l'est le latin. On juge de la clarté qui se répandrait sur l'étude des
langues le jour où la science n'admettrait plus que des « masses lin-
guistiques » et des « traits linguistiques », étudiant ceux-ci pris iso-
lément, proscrivant l'emploi des mots qui servent à distinguer ou à
rapprocher les idiomes suivant leurs dissemblances et leurs analogies.
Tel paraît être cependant l'idéal de M. G. Paris, puisqu'il ne veut
entendre parler ni de la distinction entre les langues romanes et le
latin, ni de la division des parlers de France en deux groupes, le
groupe d'oil et le groupe d'oc. Si tout ce qu'il dit de l'unité et de
l'indivisibilité du latin dans le temps comme dans l'espace, n'est
qu'une explication philosophique de la formation des langues, l'étude
sur le vif des idiomes vulgaires doit en être influencée de la même
façon que les travaux de classification des animaux et des végétaux
le sont par la théorie qui considère tous les êtres organisés comme le
résultat de l'évolution spontanée, — variée suivant les milieux, —
de la cellule. Rien ne s'oppose donc à ce que, dans la pratique, on
distingue entre elles les langues romanes, comme on distingue les
DE PHILOLOGIE ROMANE 137
diverses classes d'êtres vivants, sous la réserve des modifications que
les progrès de la science peuvent apporter aux classifications actuelles.
Mais alors, rien ne s'oppose non plus à ce qu'on sépare la langue d'oc
de la langue d'oil, et à ce qu'on groupe, suivant certaines règles, les
diverses modifications locales ou régionales de chacune de ces langues.
Si, au contraire, M. G. Paris fait passer sa théorie dans la pratique
au point de nier la possibilité de distinguer entre elles les deux
langues de la France et les modifications locales ou régionales de ces
deux langues, la logique le force à étendre ces conséquences de son
principe à tous les parlers romans et même à tous les parlers indo-
européens, c'est-à-dire à tomber dans l'étrangeté et la confusion que
je viens de signaler.
II
MM. G. Paris et P. Meyer me paraissent errer gravement en ne te-
nant aucun compte du besoin qui s'impose à l'homme de tout classer, ce
qu'il voit et ce qu'il entend, les choses et les idées, les êtres et leurs
manifestations. Il est facile de constater que ce besoin de classifica-
tion s'étend jusqu'au langage.
Supposons cinq hommes en présence : l'un est né à Paris, le second
à Rome, le troisième à Madrid, le quatrième à Lisbonne, le cinquième
à Bucarest *. Chacun d'eux ne connaît que la langue de son pays
d'origine; ils essaient vainement de se comprendre. Cependant, d'après
M. G. Paris, ils parlent tous latin. Ils ne parlent pas des langues qui
viennent du latin, des langues filles du latin, ils parlent latin. Si l'on
demande à mon éminent contradicteur pourquoi ces cinq hommes
qui parlent tous latin, ne peuvent s'entendre, il sera bien forcé de ré-
pondre que cela tient à ce que l'évolution spontanée du latin parlé
dans Tancienne Rome et importé en divers points de l'Europe par la
conquête, ayant varié suivant les lieux, le latin parlé aujourd'hui à
Paris diffère du latin actuel de Rome, comme celui-ci diffère du latin
de Madrid, de Lisbonne et de Bucarest. Cette explication seule est
une classification; car définir une chose, la différencier d'une autre, la
rapprocher d'une troisième, c'est classer, et pour éviter des répétitions
* Il serait mieux de dire: aux environs de Paris, de Rome, de Madrid,
etc.; car, suivant une remarque de M. G. Paris, qu'il convient cependant de
ne pas trop généraliser, les langues littéraires enseignées à l'école ont souvent
modiflé et parfois remplacé les parlers locaux dans les villes. Il reste donc
entendu que, lorsque, pour plus de concision et de clarié géographique, je
désigne les parlers par le nom d'une ville, il s'agit du langage populaire de
la campagne environnant cette ville.
138 CONGRES
fatigantes en classant, on se sert de mots qui, une fois leur sens con-
ventionnel connu, rappellent ces définitions, ces distinctions, ces rap-
prochements .
Dès que vous admettez que les parlers de Paris, de Home, de Ma-
drid, de Lisbonne, de Bucarest diffèrent aujourd'hui entre eux et
diffèrent également du latin, il devient d'une subtilité presque puérile
de nier que ce ne soient là six parlers distincts dont le dernier, le latin,
a produit les cinq premiers. Il est beaucoup plus rationnel et surtout
plus commode d'appliquer à ceux-ci une dénomination qui indique à
la fois ce double fait incontestable, qu'ils diffèrent entre eux de nos
joiu-8 et qu'ils n'étaient autrefois qu'une même langue, le latin ; en
un mot d'appeler chacun d'eux d'un nom particulier: français, italien,
espagnol, portugais, roumain, et de les grouper sous l'appellation
commune de langues romanes.
Si maintenant nous mettons en présence deux hommes, dont l'un
est né à Tours, l'autre à Marseille, et qui ne connaissent que la langue
de leur pays d'origine, ils ne se comprendront pas mieux que le Pa-
risien de tout à l'heure ne comprenait l'Italien, l'Espagnol, le Portu-
gais ou le Roumain. Or, d'après M. G. Paris, non seulement ils par-
lent latin tous les deux, mais leurs langages appartiennent à la même
masse linguistique résultant de l'évolution spontanée du latin importé
en Gaule par la conquête romaine, masse dans laquelle il n'y a réel-
lement pas de dialectes, pas de subdivision possible, même en deux
parts.
L'éminent philologue sera cependant forcé d'avouer que le latin
importé en Gaule ayant évolué d'un^ façon à Tours et d'une autre
façon à Marseille, le résultat n'a pas été le même aux deux endroits
et que, pour cette raison, le Tourangeau et le Marseillais ne peuvept
se comprendre. Dire que l'évolution du latin à Tours n'a pas été la
même que l'évolution du latin à Marseille, c'est constater deux résul-
tats distincts, l'existence de deux parlers, c'est faire œuvre de clas-
sificateur.
Mais M. G. Paris ne nie pas qu'il y ait des parlers divers ; ce qu'il
nie, c'est qu'on puisse les grouper, les classer. D'après lui, le patois
de chaque commune est un patois distinct, plus ou moins différencié
du patois de telle autre commune. Dès que vous essayez de rapprocher
ces langages, ils se fondent et ne forment plus un groupe de parlers
divers, mais un bloc unique, une masse linguistique. Entre le patois
d'une commune et la masse linguistique à laquelle il appartient, il n'y
a place pour aucune division intermédiaire. C'est bien là, je crois, le
vrai sens du système que j'examine.
Il est cependant évident que si l'on considère ces patois séparés les
uns des autres en les prenant village par village, il en est qui ont
DE PHILOLOGIE ROMANE 139
entre eux plus d'affinité qu'ils n'en ont avec d'autres patois de la
même masse linguistique. Que, par exemple, le parler de Toulouse a
plus de ressemblance avec celui de Marseille ou le parler de Rouen
avec celui de Tours que celui de Tours avec celui de ^larseille. Enon-
cer ce fait indiscutable, c'est faire un pas de plus dans la voie de la
classification. Car aussitôt cette vérité connue, la personne à qui vous
la révélez, — l'élève en philologie par exemple, — en vertu de la
acuité classificatrice de l'esprit humain et du fonctionnement normal
de la mémoire, rapproche par la pensée le parler de Rouen de celui de
Tours, le parler de Toulouse de celui de Marseille. Que vous le vouliez
ou • non, voilà deux groupes constitués. Toutes les fois que l'élève
entendra parler d'un nouveau patois de France, il le rapprochera
instinctivement soit du groupe Rouen-Tours, soit du groupe Toulouse-
Marseille. Que vous donniez à ces groupes les noms de langue d'oil
et de langue d'oc ou tout autre nom, peu importe ; la division que
vous refusiez de reconnaître est faite par vous-même et malgré vous.
On objectera qu'à un moment donné, Télève se trouvera en présence
de parlers qui réuniront assez de caractères empruntés à la fois aux
parlers du Nord et aux parlers du Midi pour qu'il ne sache plus dans
quel groupe les classer. Ce sera une difficulté comme il s'en rencontre
à chaque pas dans l'histoire naturelle et ailleurs ; ce ne sera pas un
argument contre la nécessité d'une classification.
A quel moment de sa transformation insensible le germe cesse-t-il
d'être germe pour devenir l'être qu'il renfermait en lui? A quel
moment l'œuf cesse-t-il d'être œuf pour devenir l'animal qui doit en
briser l'enveloppe ? Et, dans un autre ordre d'idées, ne dit-on pas,
précisément pour obéir à la nécessité de classification dont je parlais
tout à l'heure, qu'un bâton a deux bouts et un milieu ? Il serait impos-
sible cependant de marquer le point précis où finissent les bouts et où
le milieu commence. Direz-vous pour cela que le bâton n'a ni bouts
ni milieu? Proscrirez-vous l'emploi de ces mots qui représentent
évidenament une réalité, une subdivision de ce tout appelé bâton ;
mais une subdivision dont les limites ne sont pas marquées par la
nature de l'objet?
Donc, alors même que toute délimitation nette des langues et des
dialectes serait impossible, il n'en serait pas moins nécessaire de les
distinguer, de les grouper, en un mot de les classer.
III
Jusqu'au discours de M. G. Paris, j'avais compris ainsi qu'il suit
les objections que M. P. Meyer avait bien voulu faire à mes essais
de délimitation géographique des langues et des dialectes :
140 CONGRES
« Il est certain, disait à ce qu'il me semble l'éminent directeur de
rÉcoledes Chartes (je n'ai pas sous les yeux ses paroles textuelles), il
est certain qu'il existe des familles de langues, par exemple la famille
romane. Ces familles se subdivisent naturellement en langues, ainsi les
diverses langues romanes ou néo-latines, parmi lesquelles on distingue,
depuis des siècles, la langue d'oil et la langue d'oc. Les langues elles-
mêmes se fractionnent en dialçctes, si l'on prend pour types lespar-
1ers nettement caractérisés de certaines régions ; mais si, non content
de classer ces parleis types, choisis sur des points divers du territoire
relativement éloignés les uns des autres, vous voulez tracer exacte-
ment leurs limites respectives, ou même la limite qui sépare la langue
d'oil de la langue d'oc, vous verrez ces parlers se fondre les uns
dans les autres d'une manière tellement insensible qu'il vous sera
impossible de marquer par un trait sur la carte les contours de leurs
domaines respectifs. Contentez- vous donc de vous référer à ces dia-
lectes types sans essayer de les délimiter, à peu près comme vous
parlez des bouts et du milieu d'un bâton sans vouloir tracer les limi-
tes de ces bouts et de ce milieu. »
Réduite à ces proportions, l'objection n'a rien de paradoxal, rien
qui choque l'évidence. Klle n'est pas nouvelle : Bringuier et moi
l'avons signalée dans les observations préliminaires de notre rapport.
11 y a plus de trente ans, cette croyance à la fusion des idiomes
m'avait frappé lorsque, après l'obtention d'un très modeste diplôme
scientifique, la pensée me vint qu'il ne serait sans doute ni impossi-
ble ni inutile d'importer dans le domaine linguistique les méthodes
de classification claires et précises qu'on m'avait appris à appliquio
à l'histoire naturelle. Cette pensée est d'ailleurs celle de bien des
maîtres de la philologie ; Max Miiller, entre autres, a dit à ce sujet: « La
philologie comparée est une des sciences de la nature, et, par con-
séquent, sa méthode doit être identique à celle qui a été suivie avec
tant de succès en botanique, en géologie, en anatomie et dans les
autres branches de l'étude de la nature » ( Lectures sur la science
du langage). Bien que, durant de longues années, je n'aie pu tenter
une application méthodique de ces principes à Pétude des dialectes,
j'étais cependant comme hanté par cette idée dans mes fréquentes
excursions à travers la France, la Belgique, la Suisse, l'Espagne et
un tout petit coin de l'Italie. Je me suis trouvé un jour avoir recueilli
assez d'observations pour que mon hypothèse m'apparut comme une
vérité. Depuis longtemps, j'ai la conviction que la classification des
idiomes, même locaux, et la classification des êtres ofi'rent les mêmes
avantages etles mêmes difficultés, que toutes les objections qui peuvent
être adressées à l'une ont été résolues par l'autre, et que si les natu-
ralistes de tous les temps et de tous les pays ont trouvé utile de se
t^
DE PHILOLOGIE ROMANE 141
diriger dans leurs travaux au moyen de méthodes de plus en plus
perfectionnées, les philologues et les historiens ne retireraient pas
un moindre profit d'un procédé qui permettrait de grouper les parlers
suivant leurs affinités et d'en préciser V habitat; car en linguistique
la classification doit aboutir à une délimitation géographique.
Je viens de rapprocher les historiens des philologues. On ne peut,
en effet, isoler le langage du milieu où il se développe, des cerveaux
qui Tont conçu, des sociétés dont il est le lien. Étudié soit dans ses
grandes manifestations, dans ce qu'on pourrait appeler sa physiolo-
gie, soit dans les menus détails de son anatomie, chaque idiome fait
partie de l'histoire même des races qui le parlent, des territoires sur
lesquels il s'étend.
Revenant à l'opinion que je combats, je constate qu'elle repose non
seulement sur une observation imparfaite, mais aussi sur une erreur
théorique énoncée par M. P. Meyer à titre d'objection à mon adresse
et qui peut se traduire ainsi : « L'histoire naturelle classe des êtres,
c'est-à-dire des individus parfaitement distincts, en tant qu'unités,
des autres êtres de même espèce ou d'espèce différente qui les
entourent. Il peut y avoir doute sur la place à assigner à l'individu
que vous avez sous les yeux, jamais sur son entité. Quand il s'agit
de langage, au contraire, la difficulté est de déterminer l'unité à
classer. L'idiome que vous entendez ou dont vous lisez un échantillon
écrit, se perd dans l'idiome voisin, vous ne pouvez y voir une vérita-
ble unité, ce qu'en histoire naturelle on appelle un individu. »
L'argument est spécieux. La réponse est cependant facile et je suis
étonné de ne l'avoir rencontrée nulle part*. L'unité, Vindividu à clas-
ser en matière de langage, c'est le parler de chaque homme. Nous
avons tous une langue apprise dès le berceau, dans laquelle nous
pensons, que nous employons dans l'intimité de i)référence à toute
autre. C'est ce langage naturel à chaque homme qui constitue l'unité
linguistique. Le langage de deux hommes ayant même parler ^ peut
ne pas être exactement pareil; mais les différences ne sont pas plus
grandes que celles qui existent souvent entre deux êtres de même
* MM. Van Hamel, professeur à l'Université de Groniogue, et Kristoffer
Nyrop, professeur à l'Université de Copenhague, ont eu l'obligeance de me
signaler certains passages des Principien der Sprachgeschichte de M. Her-
mann Paul et de VEinleitung in das Spvachstiidium de M. B. Delbrûck rela-
tifs au rôle de l'individu dans le développement du langage. (Voir Kr. Nyrop,
Adjektivemes Kônsbôjning i de romanske sprog, Copenhague, 1886). Ce
point de vue diffère quelque peu du mien. J'aurai l'occasion d'y revenir dans
rintroduction de mou Essai de géographie de la langue d'oc.
2 Je ne dis pas: deux hommes nés dans le même village, puisqu'il y a des
villages où se parlent deux idiomes distincts.
10
142 CONGRES
espèce. Que si Ton remarque chez quelqu'un une altération réelle
du langage local par suite de l'introduction d'éléments étrangers ou
pour toute autre cause, c'est le pendant exact en linguistique soit de
l'hybridité, soit de la monstruosité en histoire naturelle. Les règles
de l'hybridité et de la tératologie végétales et animales s'appliquent
à l'hybridité et à la tératologie linguistiques, de telle sorte que la
méthode n'en reçoit, dans son ensemble, aucune atteinte.
M. G. Paris me semble regarder le parler de chaque commune
comme une sorte d'unité linguistique. On rencontre cependant en
France des communes composées de plusieurs villages et hameaux où
sont parlés des idiomes différents S et même des agglomérations plus
ou moins importantes dont tous les habitants n^ont pas le même
patois. Tout le monde connaît le provençal particulier du quartier
Saint-Jean de Marseille. Bringuier et moi avons recueilli quelques
observations, restées inédites, sur le parler du quartier de Montpel-
lier appelé le Plan de l'Olivier; nous avons aussi constaté dans
notre rapport l'existence de plusieurs patois dans une même ville et
parfois dans un même petit village 2, Pour M. G. Paris cependant le
parler de la commune n'est pas à proprement parler Punité lin-
guistique, et il se croit obligé de chercher celle-ci dans le « trait
linguistique. » C'est de Tanatomie; ce n'est pas l'observation de la
nature telle qu'elle se présente à nous, pas plus que l'étude des
tissus et des organes considérés en eux-mêmes, indépendamment des
êtres dans la constitution desquels ils entrent, n'est l'étude complète
de ces êtres. Je ne nie pas l'utilité scientifique de cette façon de pro-
céder; mais toute science serait faussée qui s'en tiendrait à cette
méthode unique.
IV
L'unité linguistique une fois déterminée, le philologue doit grouper
les individus suivant les règles qui lui paraissent les plus ration-
nelles. Il n'y a pas plus de difficultés à ce groupement qu'au groupe-
ment des êtres.
M. G. Paris semble croire qu'une classification est quelque chose
d'absolu qui ne prête à aucun doute et ne doit être, suivant ses
expressions, ni « arbitraire » ni « factice. » Personne n'ignore cepen-
dant que la répartition des êtres en espèces, genres, familles, ordres,
classes, règnes, n'est pas une loi de la nature, qui « ne fait jamais de
sauts. ))Ce qui est une loi, c'est la nécessité pour l'homme de classi-
1 Rapport sur la limite géographique de la Langue d'oc et de la langue
d'oil, p. 20, 23, 27 à 33, 35, 37, 41, 42, 51, 52, 54, 55, 57, 59.
2 /rf , p. 24, 29, 31, 32, 34, 35, 59.
DE PHILOLOGIE ROMANE 143
fier tout ce qui lui tombe sous les sens. Cette classification est tan-
tôt purement instinctive, tantôt raisonnée ; elle peut être plus ou
moins rationnelle^ plus ou moins scientifique; mais il y a toujours en
elle, dans des proportions variables, quelque chose d'arbitraire et de
factice.
Dans les sciences, on a voulu tirer parti de la faculté classifica-
trice de Fesprit humain, la rendre plus féconde en la réglementant de
façon à ce qu'elle s'exerçât au moyen de mots qui rappellent les traits
les plus caractéristiques et les rapports réciproques des objets à clas-
ser, et c'est précisément ce procédé qu'il ne serait pas inutile d'intro-
duire dans l'étude des parlers locaux et régionaux. Supposer qu'il
existe quelque part au monde un groupe d'êtres ou d'objets dont aucun
des caractères ne se retrouve dans un autre groupe est une erreur
des plus évidentes et des plus graves. Mais tous les caractères n'ont
pas la même valeur; la tâche du classificateur est de rechercher
ceux qui paraissent les plus saillants, qui donnent à l'objet sa vraie
physionomie, point sur lequel les opinions peuvent varier et ont varié
en effet dans toutes les sciences .
L'antique classification des êtres d'après la Genèse, — végétaux
« herbes vertes et bois portant des fruits », animaux subdivisés en
reptiles aquatiques, reptiles terrestres, grands cétacés, poissons,
animaux « volant sous le firmament », animaux « se mouvant sur la
terre » — est basée sur des caractères qui frappent les yeux de l'ob-
servateur le plus superficiel. C'est quelque chose comme la réparti-
tion des parlers humains en grandes classes, en familles, en langues,
en dialectes ; quelque chose comme la distinction de la langue d'oil
et de la langue d'oc, du dialecte gascon et du dialecte provençal, du
normand et du picard, pris d^ns leurs types les plus caractérisés.
L'existence de ces groupes tombe sous les sens ; il n'y a pas de sub-
tilité philosophique qui puisse prévaloir contre cette évidence. Sur
ce point un paysan a le droit d'en remontrer an plus savant philolo-
gue, comme il aurait le droit de rappeler à la vérité l'anatomiste qui
affirmerait que les oiseaux ont quatre pattes sous le prétexte qu'on
retrouve dans leurs ailes tous les éléments des membres antérieurs
des quadrupèdes.
Mais lorsque, après avoir constitué des groupes suivant certains
types, on prend chaque unité soit d'histoire naturelle, soit de linguis-
tique et qu'on veut la faire entrer dans le groupe qui lui convient,
on rencontre des unités qui, par l'ensemble de leurs caractères, sont
comme à cheval sur une des limites tracées. On trouve, par exemple,
des végétaux doués de mouvement et de sensation, du moins appa-
rente, qui se nourrissent ou paraissent se nourrir d'insectes vivants,
tandis que certains animaux sont fixés au sol ou se reproduisent
1 4 \ CONGRES
par boutures. Et dans le règne animal seulement, tel classificateur,
qui a voulu prendre pour caractère les sécrétions des téguments, poils,
plumes, écailles, test, s'est vu forcé de réunir dans. le même groupe
des poissons, des reptiles, les papillons et le mammifère appelé tatou.
Tel autre, se basant sur le mode de locomotion, a dû mettre le
poisson volant et la chauve-souris à côté de l'oiseau et de la mou-
che. On a vu longtemps le lézard et le cheval figurer l'un et l'autre
dans Tordre des quadrupèdes, et les mammifères englobent aujour-
d'hui le singe et la baleine. Je me borne aux grands traits ;
M. Durand de Gros a donné, dans la Revue des langues romanes,
des détails fort instructifs sur les incertitudes de classification en bo-
tanique. On peut donc appliquer à l'histoire naturelle aussi bien qu'à
la linguistique ces paroles de M. G. Paris : « Les groupes qu'on est
tenté de former se dissolvent et se recomposent autrement suivant
le critérium qu'on emploie à les constituer. »
Malgré les difficultés, les imperfections, les erreurs mêmes ; mal-
gré des disciissions qui ne sont pas près de finir, qui ne finiront
jamais, les méthodes empiriques, artificielles ou naturelles, ont rendu
suivant les temps .des services inappréciables à la science, et per-
sonne n'a songé à nier l'utilité même des plus imparfaites. En ce
moment, les découvertes de l'embiyo génie semblent destinées à
amener la refonte complète de la classification zoologique ; mais
tant que le nouveau moule ne sera pas formé dans son entier, on
se gardera de briser l'ancien. La classification, qui n'est pas le but
de la science, mais un simple procédé d'études, doit forcément se
perfectionner à mesure que de nouvelles connaissances sont acquises,
de sorte que, pour arriver à la meilleure méthode dans une branche
quelconque des connaissances humaines, il faudrait que la science
fût définitivement arrêtée et qu'il n'y eût plus rien à découvrir, ce qui
est impossible aussi bien en linguistique comme en histoire naturelle.
Quatre conclusions résultent de ce qui vient d'être dit:
1° L'unité est facile à reconnaître en linguistique, aussi bien que
dans les sciences naturelles, l'unité linguistique étant le langage
maternel de chaque homme ;
2° En vertu du principe Natura non facii saltus, il est impossi-
*ble, dans quelque science que ce soit, de former des groupes absolu-
ment tranchés, ne présentant que des caractères leur appartenant en
propre, à l'exclusion de tout autre groupe ;
3° Toutes les objections que l'on peut faire à la classification des
langues peuvent être adressées à la classification des êtres, d'où il
résulte que celle-ci étant universellement reconnue indispensable, il
n'y a aucune raison pour ne pas travailler au perfectionnement de
celle-là ;
DE PHILOLOGIE ROMANE 145
«
4° Cette classification ne sera jamais définitive et immuable ; elle
doit an contraire varier plus ou moins à mesure que s'étendront les
connaissances en matière d'idiomes.
La possibilité d'une classification linguistique ainsi établie en théo-
rie, montrons quels procédés peuvent être employés pour y parvenir
dans la pratique.
Pour se faire une idée juste d'un être quelconque il ne suffit pas,
— on ne saurait trop le répéter, — de l'étudier à l'aide du scalpel et
du microscope ; il faut aussi l'observer à l'état vivant et agissant.
Pour juger de l'importance et du rôle d'un organe, il faut voir cet
organe en jeu. Or il arrive trop souvent que les philologues n'ont
pas vu assez vivre le parler qu'ils étudient sur des échantillons
écrits, c'est-à-dire dans un état voisin de la moit.
Je n*ai pas besoin d'insister sur les altérations que les copistes de
tous les temps ont fait subir aux textes en langue vulgaire ; mais
je rappellerai que dans toutes ou presque toutes les langues, litté-
raires ou non, il s'est établi par tradition des formes graphiques
qui n'ont aucune raison d'être acceptable, rapprochant par l'écriture
ce qui est distinct en tant que son, et réciproquement. J'ai été
témoin, par exemple, de l'étonnement de bien des philologues lors-
qu'ils apprennent que la désinence ac des noms de lieux est géné-
ralement en France prononcée comme la désinence at, c'est-à-dire a
accentué non suivi d'une consonne. Pendant longtemps, des hommes
très instruits dans les patois de langue d'oc ont rangé le parler de
Nice au nombre des patois italiens parce que, sous la domination pié-
montaise, on a pris l'habitude d'orthographier le niçois à la manière
italienne: gl pour l mouillé ; ch pour qii = k ; f/i pour J = dj^ etc.
11 est superflu, je crois, de faire remarquer que les caractères ne
doivent pas être comptés, mais pesés ; et (qu'on pardonne l'étrangeté
de l'expressionj on ne peut les peser qu'à l'oreille, la langue étant
faite d'abord pour être parlée. Les traits que la prononciation ne mar-
que pas doivent être comptés pour rien ou à peu près rien dans la
classification. Parmi ceux qu'elle marque, il en est qui modifient plus
ou moins profondément la physionomie du langage, et auxquels les
indigènes ne se trompent jamais lorsqu'ils veulent distinguer leur
parler de ceux des régions voisines.
Je rappellerai ici, comme corollaire de ce qui précède, ce qui a été
dit dans le rapport sur la limite géographique de la langue d'oc et
de la langue d'oil au sujet de la nécessité d'étudier les patois dans les
pays même où ils sont parlés, et des précautions à prendre pour être
146 CONGRES
assuré qu'on s'adresse à des personnes parlant le vrai langage indi-
gène. Je ne saurais trop le redire, c'est dans le peuple, parmi les
illettrés, qu'il faut chercher des renseignements exacts et sur l'idiome
local et sur les traits qui le distinguent des idiomes voisins. Mais
tout le monde n'est pas apte à recueillir de bonnes observations pho-
nétiques; la science acquise dans les écoles et dans les livres est pour
cela d'un bien faible secours. J'ai connu plus d'un philologue distin-
gué qui, n'ayant pas été familiarisé dès l'enfance avec les langues à
paroxytons et à proparoxytons, était incapable de reconnaître, autre-
ment qu'en théorie, la place de l'accent tonique et encore plus de le
marquer en parlant. M G. Paris, dans son Traité du rôle de V accent
latin, a signalé cette « incapacité de l'organe des Français à porter
l'accent autre part que sur la dernière syllabe ». L'incapacité de
parole piovient souvent d'une incapacité d'ouïe et se remarque chez
les plus lettrés. Ce n'est pas un des moindres obstacles que rencon-
trent les Français du Nord dans la pratique des langues étrangères.
Pour démontrer d'une manière absolue la possibilité de délimiter
les dialectes et les sous-dialectes, il faudrait procéder au tracé géo-
graphique de tous les parlers dépendant d'une même langue, de tous
les patois d'oc, par exemple, ce qui serait tout à fait hors de propor-
tion avec le cadre du présent travail. Je dois me borner ici à établir,
en premier lieu, que les gens du peuple classent d'instinct les parlers
qu'ils comprennent ; en second lieu, que l'observation scientifique
justifie ce classement tout au moins dans ses principaux traits. Je vais
donc faire connaître tout d'abord quelques-unes des observations qui
m'ont conduit à réclamer l'application à l'étude des patois d'une
méthode naturelle de classification ; puis, prenant pour exemple une
région peu étendue, mais intéressante, du midi de la France, j'essaierai
de montrer les caractères distinctifs les plus saillants de chacun des
parlers qu'on y rencontre, et de prouver qu'en cet endroit, du moins,
il existe des limites bien tranchées entre deux langues romanes,
entre deux dialectes et même entre deux sous-dialectes.
Première Observation. — La femme P..., née en 1810, à Montpel-
lier ; d'intelligence moyenne ; sait lire, presque pas écrire ; connaît par-
faitement le patois de sa ville natale et malheureusement assez bien
le français pour une femme du peuple de ce pays. Pendant plus de
trente ans, cette femme est restée attachée successivement à deux
personnes de ma famille avec qui j'ai voyagé en France et en
Espagne .
A Nice, la femme P..,. est un peu surprise par l'idiome local et
demande tout d'abord qu'on le lui parle lentement. Après quelques
heures, elle le comprend facilement et se fait comprendre d'un assez
DE PHILOLOGIE ROMANE 147
grand nombre de Niçois sans trop de difficulté en leur parlant
montpelliérain. Dès que son oreille est habituée aux sons niçois, les
flexions, les tournures de phrase, la grammaire en un mot, ne lui
offrent à peu près aucune difficulté. Le vocabulaire est ce qui la
gêne le plus. Bien qu'en contact, durant près de trois ans, avec des
personnes parlant l'italien officiel, le génois et le piémontais, la
femme P... ne parvient à comprendre aucun de ces trois idiomes;
elle en apprend quelques mots isolés, mais ne parvient jamais à
construire ni à comprendre une phrase. 11 faut reconnaître que,
n'étant pas absolument obligée de communiquer à l'aide de ces lan-
gues, mon sujet ne fait aucun effort sérieux pour se familiariser
avec elles.
Je crois pouvoir affirmer que la femme P... comprend également
toutes les variétés de niçois parlées depuis Sospel * jusqu'au Var,
limite de ce sous-dialecte. Du Var, en suivant le littoral jusqu'aux
limites du catalan et, plus haut, jusqu'aux parlers gascons carac-
térisés par l'emploi de h pour f initial, elle entend aisément tous
les idiomes, à quelques vocables près aussitôt expliqués. Dans les
conversations entre femmes, la volubilité méridionale ne souffre nulle-
ment de la différence des parlers. Vers Toulouse et vers Foix, il est
nécessaire cependant de quelques heures d'accoutumance ; la femme
P... doit « se mettre dans l'oreille » les sons, l'accent dans le sens
vulgaire de ce mot. Je ne parle pas des divergences du vocabulaire
qui commencent plus ou moins à quelques lieues de Montpellier et
ne constituent jamais une vraie difficulté.
En pays gascon, la femme P... a assez de peine à s'habituer à l'A
tenant la place de 1'/"; mais il est facile de voir que c'est à peu près
tout ce qui la gêne dans ce nouveau dialecte. Si l'on remet Vf à la
place de Yh, toute hésitation disparait.
Sur les limites de l'ancien Roussillon, entre Leucate et Salces,
petites villes qui ne sont séparées que par une distance de 13 kilo-
mètres, le catalan succède brusquement au languedocien. Ici deux
des principes posés par M. G. Paris sont nettement contredits par
les faits : il n*y a pas de fusion entre les deux idiomes juxtaposés et
la limite linguistique coïncide avec une limite politique. C'est une
exception, dira-t-on. 11 y aurait à vérifier si les exceptions de ce
genre ne se renouvellent pas si souvent qu'elles finissent par deve-
* Je prends Sospel comme point frontière et non Vintimille parce qu'entre
cette dernière ville et Nice, se trouve, outre le génois de Monaco, le dialecte
mentonais sensiblement différent du niçois, et sur lequel Tattenlion de la
femme P... n'a jamais été appelée. J'étudierai plus loin l'idiome de Menton
comparé aux parlers de Vintimille et de Nice,
1 i 8 CONGRES
nir plas fréonentes qae la prétendae règle. Cette limite franchie,
notre voyageuse et les indigènes ne se comprennent qn'avec de grands
efforts d'attention. J'essaie de prononcer des phrases catalanes avec
Taccent (sens vulgaire) de Montpellier, et des phrases de montpel-
liérain en imitant de mon mieux Taccent catalan, je suis à peu près
compris des deux côtés. Après quelques jours passés à Barcelone, le
catalan courant n'a plus guère de difficutés pour la femme P... 11
en est tout autrement du catalan littéraire et même en général du
catalan écrit. Tandis qu'elle éprouve toujours une véritable joie à
lire ou à entendre lire les œuvres du montpelliérain Favre, du tou-
lousain Gondouli, du rouergat Peyrot, du niçois Rancher et des
félibres provençaux, le reclor de Vallfogona et les contes en prose
catalane lui donnent trop de peine à comprendre pour qu'elle les
écoute avec plaisir. Cependant, pour tout ce qui est usuel, elle com-
munique parfaitement avec les personnes de Barcelone, de Valence,
d'Alicante et de Lerida.
Entre le catalan et Taragonais, la transition est aussi brusque
qu'entre le languedocien et le catalan. Sur la route de Barcelone à
Sarragosse, le petit village d'Alraacellas marque l'extrême limite du
catalan, et, après un intervalle à peu près inhabité de 18 kilomètres,
on rencontre Binefar, premier village aragonais. Sur ce nouveau ter-
ritoire, il est impossible à la femme P... de communiquer avec les
habitants autrement que par signes. « Ce n*est plus, dit-elle, le même
espagnol qu'à Barcelone ». J'essaie quelques explications ; elles servent
de peu : il aurait fallu faire un cours complet de langue espagnole.
Après un séjour à Madrid de plus de deux mois, la bonne femme ne
fait d'autres progrès dans la langue de Cervantes que l'acquisition
d'un certain nombre de vocables, à l'aide desquels elle essaie de parler
petit nègre en castillan.
Si, partant de Montpellier, nous nons dirigeons vers le Nord, la
femme P... comprend très aisément le parler des Cévennes, le lozé-
rien, le rouergat; avec un peu plus de peine, mais encore assez bien,
le dauphinois, l'auvergnat, le limousin de la Creuse.
Sur les confins de la langue d'oil, l'expérience devient plus difficile:
le français appris rend le contraste des langues moins appréciable.
Cependant ce que Bringuier et moi avons appelé le sous-dialecte
marchois est traité de franchiman (français du Nord) par mon
sujet. En revoyant et classant d'anciennes notes relatives à cette
observation, je constate que la femme P. . . appelle franchiman tout
parler où les paroxytons d'oc sont devenus oxytons, soit par le.
déplacement de l'accent tonique, soit par la substitution de Ve muet
aux voyelles post-toniques. Dans le limousin bien parlé, elle recon-
naît la place de. l'accent tonique même lorsque la finale post-tonique
DE PHILOLOGIE ROMANE 149
est longue, puisqu'elle range ce dialecte dans la catégorie des pap-
iers gahachs, 11 faut noter encore que, pour Tusage courant, le fran-
çais lui est aussi familier que le montpelliérain ; mais, tandis que rien
ne lui échappe des idées les plus hautes exprimées dans les beaux
vers de Mirèio, la lecture du français lui laisse beaucoup d'impressions
incertaines et souvent fausses; elle ne paraît jamais bien assurée
d'avoir compris tout ce qui n'est pas terre à terre, et en effet elle se
trompe sur le sens de phrases assez simples.
En résumé, pour cette femme, les langages sur lesquels son atten-
tion a été appelée se divisent ainsi : 1° son patois montpelliérain;
2® le provençal ; 3° le niçard (niçois) ; 4<' les parlers gahachs (patois
de Béziers, de l'Aude, de Toulouse, de TAriège, cévenol, lozérien,
rouergat, auveignat, dauphinois, limousin), qu'elle distingue presque
tous les uns des autres; 5° le parler de Bordeaux {h pour /"initial);
6° le catalan; 7° les parlers franchimans ; 8° les langues qu'elle ne
comprend pas. espagnol et italien, dans lequel elle englobe le génois
et le piémontais. Tout ce qui n'est pas langue étrangère, catalan ou
franchiman, est pour elle « notre patois ou un patois qui ressemble
au nôtre. »
Je sais avec quels sourires dédaigneux et quelles fines plaisante-
ries certains théoriciens vont accueillir cette classification des par-
Ws par une femme du peuple. Mais les gens de bon sens, qui savent
combien d'indications précieuses sur des nuances de structure ani-
ntiale ou végétale les naturalistes doivent à des remarques de pay-
sans, ne seront pas étonnés de me voir donner cet exemple de classe-
^6nt instinctif des langages. Ils savent que, pour saisir l'allure et la
Physionomie des parlers populaires vivants qu'elle comprend, une
<^0i8iniôre vaut dix élèves de l'Ecole des Chartes, comme pour relever
première vue certaines particularités de la faune ou de la flore locales
° Paysan vaut dix citadins, fussent-ils membres de l'Institut.
^* Obskrva.tion. — Augustine R. . ., âgée de douze ans, née dans
° pôtit village de la Lozère, éloigné de tout grand centre et de
^^ Voie importante de communication ; n'a jamais quitté son vil-
S®' Instruction de l'école primaire; intelligence au-dessus de la
"doyenne; parle presque toujours patois; sait bien lire.
'^^^^ a sous les yeux un conte en dialecte de Montpellier et le lit
couramment en transformant sans hésitation les formes du texte en
termes lozériennes, n'ayant pas l'air de se douter que les mots
vmpiinaés sont sensiblement différents de ceux qu'elle prononce. Elle
ht, pav exemple : peèe pour pioi, fremigeto \)o\ir fournigueta, sou-
9^^^ ^(i\iv sourel, anal pour awà^. Elle comprend parfaitement tous
lesmots pris isolément et toutes les nuances des phrases. Elle trans-
../ ■
150 CONGRES
forme ainsi en lozérien tous les textes de langue d'oc de diverses
régions, toutes les fois qu'elle les comprend à première lecture. Jamais
d'hésitation pour les désinences ; elle les remplace toutes par les dési-
nences exactement correspondantes de son parler lorsqu'elle saisit
le sens du mot. Le vocabulaire la fait souvent hésiter; mais l'absence
d'un mot n'obscurcit jamais le sens grammatical de la phrase. Elle
lit ainsi le provençal des bords du Rhône [Oiihrelo en proso de Rou-
manille), le dauphinois, le toulousain, le rouergat, l'auvergnat, le
limousin. Pour plusieurs, il est nécessaire de lui expliquer parfois
le vocabulaire, jamais la grammaire. L'^ initial des parlers pyrénéens
la déroute, ainsi que l'orthographe italienne du niçois. Si je remplace
Vh par f, et si j'écris le niçois à la manière provençale, elle n'y voit
pas plus de difficulté que pour les autres dialectes d'oc. Elle renonce
à lire le catalan et le comprend peu si je le lui parle. Elleest décon-
certée par les textes en langue d'oil vulgaire qu'on lui met sous les
yeux. Ne pouvant plus les lire à sa manière, et ne reconnaissant pas
le français de l'école, elle demande quelle est cette langue. Elle saisit
bien tous les contes en langue d'oc, quel que soit le dialecte, et y
piend grand plaisir. Les contes en français nécessitent chez elle de
grands efforts d'intelligence. Alors même qu'elle comprend bien tous
les mots pris isolément, elle se trompe souvent sur le sens de la
phrase.
3« Observation. — La veuve A..., née en 1850, à Saint-Girons
(Ariège), parlant médiocrement le français usuel, ne sachant ni lire
ni écrire ; intelligence au-dessous de la moyenne.
On lui parle le langage de Saint-Girons qu'elle reconnaît pour celui
de son pays. Puis, prenant pour centre la région où domine cet
idiome, on lui parle successivement les patois des régions environ-
nantes, en procédant par cercles concentriques. Si, comme on le pré-
tend, les parlers de toute la France se pjerdent les uns dans les
autres par des nuances insensibles, la différence entre un parler quel-
conque pris pour centre, et chacun des patois qui l'entourent à la
même distance, devra être égale en intensité bien que ne portant pas
sur les mêmes traits. En d'autres termes, si l'on prend successive-
ment chacun des hommes formant les longues chaînes imaginées par
M. G. Paris, chacun doit comprendre avec la même facilité son voi-
sin de droite et son voisin de gauche. Mais si, en quelques points,
le voisin de gauche est mieux compris que celui de droite ou réci-
proquement, la fusion ne sera plus insensible et ce point marquera
une limite linguistique. Or, c'est ce qui arrive pour la veuve A. . .; elle
considère l'idiome du Médoc, éloigné de plus de 350 kilomètres de
Saint-Girons, comme plus voisin de son parler que celui de Foix, qui
DE PHILOLOGIE ROMAN R 151
commence à quatre ou cinq lieues de chez elle. Je ne dis pas que la
femme A... comprend mieux le premier que le second; car, d'une
part, le langage de Foix et celui de Saint-Girons sont parlés concur-
remment, mais non mêlés, à Saint-Girons même et par conséquent
également compris ; et, d'un autre côté, il y a dans le dialecte du
Médoc des mots inconnus dans TAriège; mais la veuve A. . . recon-
nait la parenté du médocain et do son propre idiome, s'étonnant qu'on
parle presque comme chez elle dans un pays aussi éloigné. C'est Vh
initial pour f, la vocalisation du b dans certains cas qui m'ont semblé
constituer aux yeux de cette femme la ressemblance entre son dia-
lecte et celui du Médoc. Elle distingue les patois de Foix, ceux de
Pamiers et de Cintegabelle (Haute-Garonne) ; elle donne à tous le
nom de toulousain. Elle comprend un peu le catalan de Perpignan,
qu'elle a entendu parler par des colporteurs ; mais pas du tout l'espa-
gnol. Elle distingue, parmi les dialectes d'oc, le provençal et le mont-
pelliérain du toulousain et de son patois ; le limousin lui paraît un
parler gahach ; elle le comprend avec quelque difficulté. Ellle n'en-
tend à peu près rien aux dialectes d'oil, elle les appelle du franchi-
man ; c'est l'accent tonique qui paraît la dérouter. Le français d'école,
qu'elle comprend tant qu'il exprime des idées qui lui sont familières,
lui échappe complètement sinon quaut à la signification des mots
isolés, du moins quant au sens des phrases, même quand on lui lit
de simples faits -divers.
Les trois observations qui précèdent, données à titre d'exemple,
sont corroborées par des centaines d'autres. Le procédé qui consiste
à prendre comme centre l'idiome d'une localité et à lui comparer
successivement, en suivant des cercles concentriques de plus en plus
grands, les parlers qui l'environnent, m'a toujours donné le même
résultat sur divers points des pays d'oc et des pays mixtes. Jamais
1 idiome central n'a été en se dégradant également dans toutes les
directions. Tandis que ses caractères saillants se prolongeaient sou-
vent fort loin dans un sens, ils s'arrêtaient brusquement à une
courte distance dans un autre sens. Ce fait a été signalé dans le
rapport sur la limite des deux langues de France ^ : il a servi de
°^8e à la délimitation de ces langues et des dialectes mixtes. C'est
1« résultat absolument contraire à celui que M, G. Paris donne comme
constant. D'où vient cette divergence radicale sur un point de fait
qu'il semble facile de véiifier? C'est, je crois, que MM. P. Meyer et
"• Paris dissèquent dans leur cabinet des échantillons écrits des
parlers vulgaires, les décomposent, en séparent les éléments et con-
' Voir notamment la note 2 de la page 16 du rapport.
152 CONGRES
cluent, par exemple, que si Tidiome a renferme dix traits qui lui
sont communs avec l'idiome b, dix traits qui se retrouvent dans
l'idiome c et dix traits qu'on remarque également dans Tidiome dy
il y a parenté égale" entre a e^t chacun des idiomes b, c, d. C'est là
une erreur que l'observation sur le vif rend évidente. La physionomie
d'un parler est constituée par les traits les plus saillants, c'est-à-dire
qui se reproduisent le plus souvent dans le discours et frappent à
chaque instant l'oreille.
Je reviendrai tout à l'heure sur cette question du choix des carac •
tères. Pour le moment, je constate les résultats suivants des trois
observations que je viens de résumer et qu'un très grand nombre d'au-
tres, je le répète, pourraient confirmer au besoin :
1° Les gens du peuple du midi de la France distinguent très nette-
ment la langue d'oc des parlers étrangers environnants ,'piémon-
tais, génois, italien, espagnol) et aussi des patois d'oil ou fran-
chimans ;
2° Ils reconnaissent une parenté intime entre tous les parlers qui
s'étendent de la frontière italienne à Salces (Pyrénées-Orientales),
à l'Océan et à Guéret, avec certaines différences suivant les régions.
Ils reconnaissent une parenté moins rapprochée entre les patois du
midi de la France et le catalan ;
3** Ils distinguent les principaux dialectes d'oc considérés dans
leurs types (provençal, niçois, languedocien, gascon, rouergat, etc.),
bien qu'ils ne sachent pas toujours le nom qu'il convient de donner
à chacun de ces dialectes ;
4° Ils distinguent leur parler des parlers d'oc qui l'entourent et,
parmi ces derniers, ils signalent ceux qui sont plus ou moins appa-
rentés avec leur propre parler. Ils constatent qu'il n'y a pas de rap-
port constant entre le degré do parenté et la distance géographique ;
5** Ils ne sont point déroutés par les différences grammaticales entre
les idiomes d'oc. Les principales difficultés proviennent pour eux du
vocabulaire. Lorsqu'il s'agit de langues étrangères et même du fran-
çais d'école, c'est la grammaire qui les déconcerte surtout ; de là leur
tendance à parler petit nègre les langues étrangères et même le fran-
çais, ce qui ne leur arrive jamais lorsqu'ils veulent se faire compren-
dre dans un dialecte d'oc qui ne leur est pas familier ;
6^ Le vocabulaire ne fournit probablement aucun caractère pour
la distinction des dialectes. 11 importe peu, en effet, qu'un radical ait
disparu d'une région et se soit conservé dans une autre; les faits de
ce genre ne sont jamais assez nombreux pour influer sur l'ensemble
du langage, sur sa physionomie.
DE PHILOLOGIE ROMANE 153
VI
Je crois utile de rapprocher de ces conclusions les remarques sui-
vantes qui les confirment.
La plupart des faits révélés par l'instinct des gens du peuple con-
cordent avec les observations des personnes éclairées qui ont vécu
au milieu des parlers populaires, du moins en pays d'oc. On a signalé
ailleurs * cette particularité que tous les auteurs qui se sont occupés
de la délimitation de la langue d'oc et de la langue d'oil pour la
région qu'ils habitaient et dont ils connaissaient l'idiome, ont tracé
une limite très nette. Mais, parmi ceux mêmes qui, vivant loin de la
frontière, ne paraissent pas admettre la possibilité d'un pareil tracé,
il n'en est aucun, je crois, qui soit disposé à reconnaître la fusion
insensible des parlers, telle que la comprennent MM. P. Meyer et
G. Paris. Je prends pour exemple l'abbé de Sauvages, auteur d'un
Dictionnaire languedocien estimé (1756), où il a traité la question
avec quelque étendue. Pour lui, la langue d'oc, qu'il appelle le gascon,
se perd par nuances dans le français, l'italien et l'espagnol ; mais il
ajoute que « les nuances du gascon vont par des bandes parallèles »
à la limite de la langue d'oil, « en sorte que le bas peuple et les habi-
tants d'une même bande qui traverse en ce sens le royaume, parlent
tous à peu près le même langage, ou sont du même dialecte, et s'en-
tendent mieux entre eux qu'avec ceux de la bande voisine, mais plus
éloignée de la frontière 11 suit de là que les habitants des Cévenues,
du Rouergue, de l'Agenois, etc., doivent s'entendre mieux entre eux
qu'un Cévenol et un Toulousain, et c'est ce que l'expérience confir-
me'.» Voilà bien la négation de lafusion insensible des dialectes, puis-
que les idiomes situés sous un même parallèle diffèrent moins entre eux,
à distance égale, que ceux qui se trouvent sous le même méridien.
L'auteur avait dit, dans son Discours préliminaire ;« Les Cévenois
qui ont fait quelque séjour à Toulouse ne trouvent de différence dans
le langage courant du peuple de cette ville d'avec celuiqui est propre
aux Cévennes que dans une douzaine d'expressions qu'ils ont coutume
de rassembler dans une phrase qui contient les termes de GoM5,-Bré'5-
palia, Engranéro, Goujho ^, etc. Si, dans des cantons plus éloignés
l'un de l'autre, il se rencontre un plus grand nombre de ces termes
* Rapport sur la limite géographique de la langue d*oc et de la langue
d'oil, p. 5.
' L'abbé de Sauvages, Dictionnaire languedocien, verbe Frannhiman.
3 Ces mots soat orthographiés d'après le système un peu étrange de l'abbe
de Sauvages.
1 5 4 CONGRES
que n'entendent pas ceux d'un centre plus éloigné, on en doit con-
clure tout au plus que ces termes caracténsent un dialecte parti-
culier et non un langage tout différent. » Et encore : « La diversité
de langage dans ces différents endroits (le Languedoc et les pro-
vinces voisines) ne se trouve le plus souvent que dans quelques
changements de lettres, dans la terminaison des mots et dans le ton
de leur prononciation : la plupart des expressions y sont communes,
le ^tour de phrase peu différent ; nous nous en sommes assurés en
traversant les provinces qui s'étendent de l'une à l'autre mer, et en
parcourant un bon nombre de petites feuilles imprimées dans les
différents dialectes de ces provinces. Il en est à peu près comme de
la langue grecque dans ses différents dialectes ; on y trouve le même
ton, le même accent, le même fond de langage. C'est pour cela que
nous tombons tous dans les mêmes gasconismes *. » Donc, unité de
la langue d'oc dans ses variétés dialectales, facilité pour les Méri-
dionaux de comprendre les divers parlera d'oc, peu d'importance des
variations grammaticales, puisque le « Cévenois » ne relève que des
divergences de vocabulaii'e entre son parler et celui du Toulousain,
qui sont pourtant notablement différents.
On objectera que l'abbé de Sauvages n'était pas un philologue.
C'est vrai; il était naturaliste, et, comme tel, mieux préparé qu'un
philologue à l'observation rigoureuse de la nature.
11 est donc avéré que, pour les illettrés comme pour les lettrés qui
savent entendre et comprendre les parlers d*une région de quelque
étendue, les dialectes existent. Ils ne sont niés que par des philolo-
gues de profession, habitués à l'analyse minutieuse des langues écri-
tes, et qui, — je ne saurais trop insister sur ce point, parce que là
est l'origine du malentendu, — procèdent comme le ferait un savant
qui refuserait de distinguer les êtres vivants autrement que par les
éléments de leur organisme, tissus et cellules, liquides et gaz. Par
ce système, on trouverait de telles affinités entre tous les êtres
vivants, même les moins apparentés, qu'on arriverait à douter de la
possibilité d'une classification. Et cependant, le premier homme qui a
ouvert les yeux sur les animaux et les végétaux dont la terre est
peuplée, en a fait un classement instinctif, que la science a confirmé,
du moins dans les grandes lignes.
Le problème de la classification en histoire naturelle ne s'est point
posé ainsi : « Chercher par l'étude de la structure intime des organis-
mes vivants, s'il y a des êtres distincts et s'il est possible de les
grouper suivant certaines règles;» mais' bien de cette manière:
« Etant donné qu'il existe des êtres distincts qui, à première vue,
1 Dict. langued.. Discours préliminaire, p. xv.
DE PHILOLOGIE ROMANE 155
peuvent être groupés suivant des affinités évidentes, rechercher d'où
proviennent ces affinités, marquer avec plus de rigueur les limites de
chaque groupe et préciser les rapports des divers groupes entre eux.»
De même en linguistique, étant donné qu'il existe des idiomes distincts
qui, à première vue, peuvent être groupés suivant des affinités évi-
dentes, il convient de rechercher d'où proviennent ces affinités, de
marquer avec plus de rigueur les limites de chaque groupe et de pré-
ciser les rapports des divers groupes entre eux.
Qu'il y a des idiomes distincts entre lesquels on remarque dès
l'abord, — à la condition de les comprendre, — des affinités plus ou
moins étroites, c'est ce qui résulte des observations rapportées plus
haut et de bien d'autres qui les confirment. Ce point étant acquis, la
tâche du classificateur consiste à reconnaître les traits qui donnent à
chaque idiome sa physionomie et peuvent servir de base à un grou-
pement méthodique. Il n'est pas indispensable pour cela d'avoir la
grammaire complète de chaque parler, pas plus qu'il n'a été néces-
saire de connaître dans ses détails la structure anatomique de chaque
animal et de chaque végétal pour procéder au premier classement des
êtres organisés. Il importe de ne pas perdre de vue l'objet principal
de toute classification, qui est de mettre de l'ordre dans les résultats
acquis, afin de les rendre à la fois plus accessibles et plus profitables
aux ignorants de bonne volonté, pour lesquels en somme la science
est faite. Il s'agit donc de connaître suffisamment chaque idiome pour
en distinguer les caractères les plus frappants ; c'est dire qu'il est
nécessaire de le comprendre à 1 audition et non pas seulement à la
lecture. M. Paul Meyer a dit que l'aptitude à l'étude scientifique d'une
langue est en raison inverse de la connaissance pratique que l'on a
de cette langue ; d'où il faudrait conclure que les Français seraient le
plus mal préparés à l'étude de la langue française. Je n'ai pas à dis-
cuter cette opinion en ce qui touche à l'anatomie pure du langage ;
mais lorsqu'il s'agit d'observer les parlers sur le vif, il semble difficile
d'admettre que la première condition à remplir soit de ne pas les
comprendre.
Voici maintenant, à titre d'exemple, comment j'ai cru pouvoir pro-
céder pour reconnaître les traits caractéristiqnes des parlers popu-
laires en usage entre Vintimille et Antibes. Sur ce parcours de 50
kilomètres, nous rencontrons deux langues romanes, l'italien et la
langue d'oc ; un dialecte mixte, le mentonais, et deux sous-dialectes,
le niçois et le marseillais, d'un même dialecte, le provençal.
Je n'ai pas besoin d'ajouter que, fidèle à la règle que je me suis
imposée, j'ai étudié ces idiomes sur les lieux où on les parle ^
* Je ne crois pas nécessaire de donner ici, comme il a été fait dans le rap-
port sur la limite de la langue d'oc, le nom de toutes les personnes aux-
* ^1 ■* I» r^rr B^'i i . V
156 CONGRES
VII
En suivant la rivière de Gênes dans la direction de la France, on
remarque, — pour peu que l'on connaisse Titalien et le provençal, —
que le génois, dialecte évidemment italien, renferme quelques traits
provençaux s'accentuant d'autant plus qu'on approche davantage delà
frontière française. La langue semble aller en se dégradant insensi^
blement, suivant la théorie de MM. G. Paris et P. Mever, c'est-à-dire
que les limites des diverses variétés ne sont pas facilement appré-
ciables pour qui n'a pas une connaissance approfondie du dialecte.
Vers Savone, le langage subit comme un ressaut, marquant une limite
que des recherches spéciales arriveraient à déterminer exactement.
On entre là sur le domaine d'un parler qui s'étend, sans variations
notables, jusqu'à la frontière de France. C'est le parler de Vintimille.
Mais, dès qu'on a franchi les falaises de la pointe de la Murtola, limite
du territoire français, la langue, qui s'était peu modifiée depuis Gênes
et presque pas depuis Savone, change brusquement. Il n'est pas pos-
sible de méconnaître' qu'on se trouve en présence d'un nouvel idiome
mélangé sans doute d'italien et de provençal, mais dans des propor-
tions telles que la physionomie du langage en est tout à coup trans-
formée; c'est l'idiome de Menton*. Quels traits ont produit cette
quelles j'ai eu recours pour mes renseignements ; mais je ne saurais passer
sous silence l'utile et obligeant concours que je dois à M. le professeur Giro-
lamo Rossi, de Vintimille ; à mon excellent ami et confrère delà Société des
Langues romanes, M. Paul Glaize, consul de France à Monaco, à M. le
baron Eugène de iVJilo, secrétaire du consulat; à M. Sardou, le très distingué
président honoraire de la Société des lettres, sciences et arts des Alpes-Mari-
times ; à M. l'abbé Tombarel, curé de Gagnes, à MM. Louis Funel, institu-
teur à Vence, et Roque, instituteur-adjoint à Gagnes. Un mémoire de M. Louis
Funel sur les dialectes de la région des Alpes-Maritimes a été couronné, il
y a plusieurs années, par la Société des Langues romanes. Ce travail est
malheureusement re.^té manuscrit et il m'a été impossible jusqu'ici de le
consulter; mais l'auteur, dont tous les amis des études méridionales connais-
sent la compétence et l'intelligente activité, a bien voulu me donner des
indications précieuses, que je n'ai pu cependant accepter en tous les points.
1 M. James Bruyn Andrews a publié, en 1875, un Essai de grammaire du
dialecte mentonais, et, en 1877, un Vocabulaire français mentonais, dans
lesquels on trouve d'utiles indications. Mais l'auteur, qui, dans une très
modeste préface, reconnaît ce que son travail a d'incomplet, n'a pas toujours
bien entendu. Il donne comme certaine Id transformation de 1'/ en r, qui est
souvent douteuse, du moins à Menton, et n a pas remarqué que l'accent
tonique se déplace parfois dans les mêmes cas qu'en provençal; facile et
non pas facile.
DE PHILOLOGIE ROMANE 157
transformation? Pour répondre à cette question, qui se pose à chaque
frontière linguistique, je procède de la manière suivante :
Je prends au hasard une phrase du nouveau dialecte et je me de-
mande à quels caractères je reconnais que cette phrase appartient
à un parler dijBTérent de celui que je viens de quitter; en d'au-
tres termes, je recherche en quoi cette phrase diffère de la phrase
exactement correspondante du précédent idiome, et je note avec soin
toutes les différences. Je renouvelle la même expérience sur un très
grand nombre de phrases toutes usuelles, recueillies pour la plupart
de la bouche de gens du peuple dont j'ai préalablement constaté l'ori-
gine indigène, et j'ai ainsi le plus grand nombre des caractères qui,
dans Vusage, servent à distinguer ce parler du parler voisin, carac-
tères que je classe d'après leur fréquence et non d'après leur valeur
intrinsèque. Une flexion du verbe peut avoir scientifiquement plus
(Vimportance que la transformation d'une voyelle ; mais s'il s'agit d'une
voyelle d'un usage fréquent, a ou o, par exemple, et si la trans-
formation est constante, ce caractère frappera dès la première phrase
entendue et marquera le changement d'idiome, tandis que le temps
ou la personne du verbe affectée d'une flexion spéciale se présentera
peut-être si rarement dans le discours que, si ce caractère était le
seul, on pourrait entendre une longue conversation sans se douter
qu'on a changé de dialecte. Découvrira-t-on un rapport plus ou moins
étroitentre les particularités de structure intime qui constituent les ca-
ractères plus spécialement scientifiques de chaque parler, et les traits
plus superficiels, mais plus souvent répétés, qui marquent la physio-
nomie du langage? C'est ce qu'il est impossible d'affirmer en l'état de
la science des parlers populaires; mais il pourrait bien se passer ici
quelque chose d'analogue à ce qui s'est produit en histoire naturelle,
où l'apparence extérieure a servi tout d'abord à grouper les êtres;
après quoi l'anatomie est venue démontrer que la masse de chaque
groupe ainsi formé, présentait un caractère scientifique de la plus
haute importance jusque-là méconnu ou négligé. De ces démonstra-
tions résultent presque toujours des modifications vers les limites de
la classe, l'élimination de quelques genres ou de quelques espèces,
l'accession de genres ou d'espèces piis à d'autres groupes; mais le
noyau reste le même, parce qu'il est rare que l'apparence extérieure ne
se l'attache point, par des liens souvent invisibles, à des caractères
de structure intime. Le groupe des roses a existé avant que les bota-
nistes eussent délimité la famille des rosacées ; les poissons ont
formé une classe avant qu'on en eût séparé la baleine et le phoque.
Il fallait qu'il en fût ainsi pour que la science pût progresser sans
confusion, et jeter dans la grande circulation, — à laquelle en somme
ils sont destinés, — les résultats utiles de ses découvertes. C'est fausser
11
158 CONGRES
la science que d*y voir la négation et non l'explication de ce que la
nature montre clairement à tous les hommes ; c'est la stériliser pen-
dant des années ou pendant des siècles, que d'en faire, durant une
période plus ou moins longue, un ramassis de matériaux où ne pour-
ront utilement puiser ceux qui, sans être ses initiés ou ses piètres,
ont cependant besoin de son secours.
Appliquant le procédé que je viens de faire connaître au langage
de Menton comparé à celui de Vintimille, je remarque entre ces deux
parlers, appelés respectivement dans leur pays mentànasch * et ven-
timigliosOf des dissemblances que je vais énumérer par ordre de
fréquence. 11 m'a paru que les cinq premiers des caractères qui
suivent frappaient à peu près également dès qu'on franchissait la
frontière française ; que les trois suivants étaient moins appréciables
dès l'abord, et enfin que les deux derniers influaient encore moins sur
la physionomie générale du langage men tenais, en tant qu'on le com-
pare au parler de Vintimille.
1. — Le vintimillois, à l'exemple de l'italien littéraire, conserve à
presque tous les mots le nombre de syllabes qu'ils avaient en latin ;
le mentonais supprime ou contracte certaines syllabes et produit ainsi
des diphthongues inconnues aux idiomes de l'Italie, du moins dans
cette région: veni, venir, au lieu du vintimillois venire; vende, ven-
dre, au lieu de vendere; gioue 2, jeune homme, au lieu de zùvano ;
paure, pauvre, au lieu de pôvero ; aurar, tu auras, au lieu de avérai.
2. — A Vintimille, comme dans toute ou presque toute l'Italie,
tous les mots, à Fexceplion de quelques monosyllabes, sont terminés
par une voyelle, toutes les fois que l'euphonie n'exige pas la snppre-
sion accidentelle de cette voyelle linale. A Menton, il y a de nombreux
substantifs et adjectifs qui, au singulier, se terminent par une consonne,
et la même particularité se remarque à certaines personnes des ver-
bes : gat, chat ; dent, dent, capelàs, grand chapeau ; omenet, petit
homme ; caud, chaud ; prudent, prudent ; est, tu es et vous êtes ;
avent, ayant ; parlerian, nous parlerions. On dit à Vintimille : gato,
dente, cappellasso, omette, caudo, prudente, sei (tu es), se (vous
* A Menton, suivant l'orthographe italienne, ch = c guttural C fînal se pro-
nonce tch. Je conserve aux deux parlers de Vintimille et de Menton leur
forme orthographique usuelle, qui est celle des dialectes de Tltalie. Je marque
Taccent tonique lorsque cela me paraît nécessaire.
s A Menton, u aie son ou après une voyelle, comme dans la langue d'oc;
mais ici Vi n'a d'autre fonction que d'adoucir la consonne g (yi =z j d'oc).
Une faut donc pas le considérer comme une voyelle; c'est pourquoi, au lieu
de giue, j'écris gioue, qui serait plus logiquement orthographié joue, si,
comme c'est mon avis, on classait le mentonais dtuis les dialectes d'oc.
DE PHILOLOGIE ROMANE 159
êtes), avendo, parleremmo ou ciarleremmo. Ce dernier idiome, il
est vrai, termine par une consonne les troisièmes personnes du plu-
riel des verbes : eli i son, ils sont ; eli i partcn, ils partent ; et il y
a en mentonais des adjectifs avec voyelle finale au singulier : helo,
beau ; caro, cher ; vero, vrai ; qui cependant ont aussi la forme pro-
vençale, usitée lorsque le verbe les précède : ti vende cà, vous le
vendez cher ; acô es vé, c'est vrai. Mais ces exceptions n'ont pas
plus dlmportance, quant à l'ensemble du langage, que l'habitude des
Mentonais d'appuyer sur la consonne finale de telle sorte qu'on la
croirait parfois suivie d'un e muet français.
3. — Vu latin a le son ou à Vintimille et le son de ii français à
Menton comme dans toute la langue d'oc. Le son ou provient presque
toujours à Menton d'une consonne vocalisée après une voyelle ou de
Va latin qui a donné Vo estreit en langue d'oc ; on l'écrit o. 11 est
un peu plus fermé que Vo chiuso des Italiens.
4. — La conjugaison mentonaise est presque toute de langue d'oc.
Je viens d'en donner quelques exemples. Il faut diviser les formes
de cette conjugaison en quatre catégories : 1» celles qui sont com-
munes à la langue d'oc et aux dialectes italiens, particulièrement au
vintimillois ; 2<> celles qui sont italiennes ou vintimilloiscs et ne se
retrouvent pas dans la langue d'oc, du moins dans les régions voisi-
nes : 3o celles qui sont de langue d'oc et ne se rencontrent pas en
vintimillois ; 4° celles qui, jusqu'à plus ample informé, doivent être
considérées comme exclusivement mentonaises, puisque nous ne
les retrouvons ni dans les dialectes italiens, ni dans les dialectes
d'oc en contact avec le mentonais. Je considère comme semblables
les formes dont les parties essentielles sont identiques et ne se distin-
guent tout au plus que par une légère altération de certaines voyelles;
ainsi, son et su, saremo et serema, eira et era sont semblables ; ho
et hai, sarô et serai, avessa et aghessa sont différents.
Les formes de la première catégorie, c'est-à-dire qui se rencon-
trent à la fois dans le mentonais, le vintimillois et la langue d'oc des
régions voisines, sont nombreuses. Elles ne peuvent évidemment
fournir aucun indice pour distinguer le premier de ces idiomes des
deux autres ; mais ces caractères venant s'ajouter à de nombreux
traits exclusivement provençaux, alors que les traits exclusivement
italiens sont insignifiants, me permettent de dire que la conjugaison
mentonaise est presque toute de langue d'oc.
Dans la deuxième catégorie, celle des formes exclusivement italien
nés ou tout au moins particulièrement vintimilloises, — je constate
seulement : 1° le changement en e, au futur et au conditionnel de la
voyelle caractéristique de la première et de la deuxième conjugaison,
160 CONGRES
et le maintien de la même voyelle à la 3® : caterai (de ca^à) j'achè-
terai ; senterian (de senti) nous sentirions ; perderiar (de perde), vous
perdriez ; 2° la terminaison en ema (amo et emo à Vintimille) de
la première personne du pluriel de l'indicatif présent, du futur et
de l'impératif de toutes les conjugaisons. Mais la terminaison d'oc
est très souvent employée : anén à Mentan, au lieu de anema à
Mentan, allons à Menton ; avén fam, au lieu de acema fam, nous
avons faim.
La troisième catégorie, exclusivement de langue d'oc, comprend,
sauf quelques exceptions et irrégularités :
La première personne du singulier de l'indicatif présent du verbe
avoir {hai) ;
La deuxième personne du singulier de l'imparfait de l'indicatif
du même verbe {avié) ;
La première personne du pluriel de l'imparfait de l'indicatif de
tous les verbes [aviarif parlavan, vendian) ;
Le futur du verbe avoir {aurai), moins la deuxième personne du
singulier, qui est exclusivement mentonaise (aurar), et la première
du pluriel, qui est de la deuxième catégorie (aurema) ;
La]|ipremière personne du singulier du futur de tous les verbes,
moins le verbe avoir (parlerai, senterai, perderai);
Le conditionnel présent de tous les verbes de la deuxième et de
la troisième conjugaisons, moins la deuxième personne du pluriel, ex-
clusivement mentonaise (venderiar vous vendriez) ; et la troisième du
pluriel, qui est de la première catégorie (venderianj ;
L'impératif du verbe avoir (aighej, moins la deuxième personne
du pluriel qui est de la quatrième catégorie (aigar), et la troisième,
qui est de la première catégorie (aigan) ; mais y compris la pre-
mière personne du pluriel, pour laquelle la désinence ema n'est pas
usitée (aigan) ;
L'impératif de tous les autres verbes moins la première personne
du pluriel qui est de la deuxième catégorie (parlema) et la troisième
qui se range dans la première catégorie (parlan) ;
Le présent du subjonctif du verbe être et du verbe avoir (sieghe,ai'
ghe); moins la deuxième personne du pluriel, exclusivement mentonaise ;
L'imparfait du subjonctif du verbe être sous une de ses formes
(foghessa) ; l'autre forme (fossa) étant analogue à la forme vintimil-
loise fossi; moins la deuxième personne du pluriel, qui est de la qua-
trième catégorie dans les deux formes;
La première personne du pluriel de l'imparfait du subjonctif de tous
les autres verbes (calessan, vendessan) ;
Le participe présent (calent, vendent) et le participe passé (agu,
cata, vendu) de tous les verbes.
DE PHILOLOGIE ROMANE 161
La quatrième catégorie comprend :
La deuxième personne du singulier de Tindicatif présent du verbe
être (est) ;
La deuxième personne du singulier du présent de l'indicatif du
verbe avoir (har) ;
La deuxième personne du singulier du futur de tous les verbes
(caterar, venderar) ;
La deuxième personne du pluriel de l'impératif et du subjonctif pré-
sent des verbes être et avoir (siegnr, aigar) ;
La deuxième personne du pluriel de l'imparfait de l'indicatif, du
conditionnel et de l'imparfait du subjonctif des autres verbes {cata-
var , vous achetiez; venderiar , vous vendriez; venghessar, que
vous vinssiez) .
Le passé défini n'existe pas en mentonais.
5. — Le vintimillois a à peu près tous les proparoxytons (sdruc-
cioîi) italiens et notamment ceux que j'appellerai artificiels, formés par
Tadjonction, — on pourrait dire l'agglutination, — de mots enclitiques,
de telle sorte que l'accent est quelquefois reculé jusqu'à la cinquième
syllabe avant la dernière : mândamivisene, portàndomivelo, date-
lomi. Menton ne connaît pas cette espèce de sdruccioli. Si, par une
imitation maladroite de l'italien, on y a pris l'habitude d'écrire par
exenjple donamelo, menamely, les mots ajoutés au verbe ne sont pas
enclitiques et l'on prononce dona me lo, mena me hj. Quant aux pro-
paroxvtons proprement dits, ils paraissent importés d'Italie. Ainsi
princij>e existe concuremment dcvec prinse ; mùgero , mulet (poisson) ;
médico, médecin, sont d'origine italienne comme l'indique leur termi-
naison en 0 au singulier et i au pluriel (mî/^cri, médichi). Quelques
adjectifs en évole sont absolument italiens, par exemple amichécole,
amical, à côté duquel on trouve amistôs *. Ces importations italiennes
sont aussi évidentes que les emprunts nu français tels que marapropô»
mal à propos ; d'emblée grenadié, etc. Les adjectifs sdruccioli en
bile : ainàbile, bevibile, etc , sont en réalité prononcés amahle, bevi-
ble, Mônego est le nom de Monaco emprunté à la langue monégasque,
variété du vintimillois. Je ne connais à Menton qu'un proparoxyton
qui paraisse indigène : dtiménighe, dimanche, que nous retrouverons
à Nice, avec une légère modification. On pourrait y ajouter péssigo,
pêche (fruit), malgré sa terminaison italienne. En somme, le mento-
nais a peu de goût pour les sdruccioli, la preuve en est dans le
déplacement de l'accent do certains mots (facile et non facile)^
* On a aussi spaventôs, et non spaventevole, épouveiitable ; compatiaaeiit
et non compassionevole, compatissant; et quelques aulres qui prouvent Tori-
gioe étrangère des adjectifs en evole.
102 CONGRES
dans la contraction ordinaire des adjectifs en bilis : amable, bevible,
et dans la disparition de ce que j'appelle les proparoxytons artificiels,
formés par l'adjonction de mots enclitiques au mot principal.
6. — A Vintimille, comme dans toute Fltalie, c palatal (^c^) provient
du c latin devant e, i, œ, œ; cas dans lequel la langue d'oc pure
n'admet que la sifflante. A Menton, à côté du c italien {cède, facile,
celo) on trouve le c palatal de la langue d'oc provenant de et : nuec
(pron. nuetch*), nuit; ^ec,toit ; liée, lit ; faç, fait; beaucoup plus rare-
ment dé c devant a : ciarmant, (pron. tcharmant), charmant, et une
vingtaine de mots analogues, tous empruntés au français : ciagrin,
chagrin ; ci amb élan, cha,mhe\\sint ; ciarcularia, etc. Les mots incon-
testablement indigènes ont tous le c guttural dans ce cas : cambi,
cardo, canià, caussina, chaux ; etc. Dans quelques mots, le mento-
nais a adopté la sifflante au lieu du c palatal italien : ausse, oiseau ;
prinse, prince.
7. — Les groupes bl, pi, cl, gl, fl, que la langue d'oc pure res-
pecte, se transforment à Vintimille en bi et quelquefois gi, ci, gi, sci.
Exemples : biondo, blond ; gianco, blanc ; ciassa, place ; ciave^ clé ;
giassa, glace; sciura, fleur. A Menton, bl ne devient jamais ^e; pi
devient pi; cl, chi : gl est traité comme à Vintimille ; fl se transforme
en fi. Exemples : biond, bianc, piassa, chiau, giassa, fiou.
8. — A Menton comme à Vintimille, s initial suivi d'une consonne
ne s'appuie jamais sur une voyelle antécédente. On y dit ; spirilo ou
mieux speril ; stacà, attacher ; spacentà, épouvanter ; strec (prononcé
stretch) étroit, etc. ; et non esperit ou esprit, estacà, espaventà,
estrech, comme dans tous ou presque tous les dialectes d'oc. Mais
pour renverser le sens d'un mot ou pour exprimer une idée de sépa-
ration, de destruction, de dépréciation, le mentonais n'emploie 1'*^
initial qu'exceptionnellement ; il se sert d'ordinaire, comme toute la
langue d'oc, du préfixe de. On trouve smenti, démentir ; sbarassà,
débarrasser: sconsiderà, inconsidéré; scoret, incorrect, etc., mais
plus fréquemment des formes comme celles-ci: rfe^ooronà, découron-
ner, étêter; desdegnà, dédaigner; descaussà, déchausser; despiega,
déplier; à Vintimille : scalzare, spiegare, scoronare, sdegnare.
9 — Le pluriel des substantifs et des adjectifs se termine par une
voyelle à Menton comme à Vintimille; mais, dans cette dernière
ville, cette voyelle est i pour le masculin, e pour le féminin. Elle est
uniformément e pour les deux genres en mentonais : o gat, le chat ;
u gâte, les chats ; a noas, la noix ; u noase, les noix ; prudent, pru-
dent ; prudente, prudents et prudentes. Le plus souvent e s'ajoute
1 (7 ne se prononce ou à Menton que lorqu'il est précédé d'une voyelle.
DE PHILOLOGIE ROMANE 163
simplement au singulier pour former le pluriel, comme dans les
exemples qui précèdent; mais, si le singulier est terminé par une
voyelle, Ve se substitue à cette dernière : rauca, l'oie ; Vauche, les
oies. La plupart des substantifs terminés en n font le pluriel par la
simple suppression de cette consonne, et parfois modifient la voyelle
qui la précède : o can, le chien ; u ca, les chiens ; o pigian *, le pigeon;
u pigiôj les pigeons. Les adjectifs helo, beau: caro, cher; vero,
vrai, font au pluriel masculin helu^ caru, veru. Cet u très fermé
est presque un i, d'où Ton peut conclure que ces adjectifs, déclinés
comme en italien, ont été empruntés à cette langue. De même
quelques rares substantifs masculins en o ont le pluriel en i :
medico, medichi. Il ne serait probablement pas impossible de reti'ou-
ver la forme mentonaise de ces substantifs, ainsi que des exemples
de belo, caro, vero, ou plutôt bel, ca, i?eV déclinés à la manière men-
tonaise.
10. — L médiane tombe à Vintimille : a scaa, Tescalier: a saa, la
salle; elle est remplacée à Menton par r très douce: a scara^ a sara.
Dans cette dernière ville, l initiale de l'article, qui persiste devant
une voyelle et dans certains cas réglés par l'euphonie, tient le milieu
entre l et r. Quelques villages ont Vr bien marquée, qui se retrouve
d'ailleurs en génois. On ne peut donc considérer comme un vrai carac-
tère cette nuance de prononciation.
L'article, lùalgré des différences de graphie, est sensiblement le
même en vintimillois et en mentonais.
En résumé, à la limite du territoire français commencent les traits
suivants, qui ne se rencontrent pas sur le territoire italien limitrophe:
Contraction d'un grand nombre de mots qui, en Italie, ont le même
nombre de syllabes qu'en latin;
Nombreux substantifs et adjectifs terminés au singulier masculin
par une consonne;
U latin prononcé à la française ;
Conjugaison presque entière d'oc ;
Disparition complète des proparoxytons formés par l'adjonction
de mots enclitiques, et presque complète des autres proparoxytons ;
C palatal d'oc Çnuec, ciarmont) ;
Traitement différent des groupes pi, cl, fl ;
Pluriels masculins en e;
Persistance de l médiane.
Ces caractères sont plus que suffisants pour permettre d'affirmer
que Tidiome de Menton est différent de celui de Vintimille. Faut-il le
* Le vrai son de cette nasale est entre an et on; il n'y a donc pas là,
à proprement parler, changement, mais modification de la voyelle.
1 6 4 CONGRES
•
ranger parmi les dialectes d*oc ? Je le crois ; mais ce n'est pas là ce
qu'il s'agit d'établir aujourd'hui. Je veux seulement prouver que le
raentonais, qu'on le classe parmi les dialectes italiens, les mixtes ou
les pravençaux, est bien un idiome distinct de ceux qui l'entourent.
Les caractères que j 'ai fait connaître apparaissent brusquement à
Garavan, faubourg de Menton situé près de la frontière, où l'on
retrouve encore quelques indigènes noyés dans une foule d'étrangers
aux langages divers et souvent fort composites. Les communes de
Roquebrune, Gorbio, Sainte-Agnès, Castelar et les hameaux de Cabrol
et de Monti * parlent comme Menton. C'est entre ces villages qu'on
pourrait noter des nuances à peine sensibles, donnant l'illusion d'une
fusion graduelle du langage ; mais, dès qu'on franchit en un point
quelconque la limite du parler mentonais, la transition est tout aussi
marquée que celle que nous avons constatée en quittant le territoire
vintimillois .
Nous allons nous en convaincre en comparant le mentonais au
niçois qui l'entoure de tous les côtés sur le territoire français, excepté
du côté de Monaco.
VIII -
Le domaine du parler mentonais, dont je viens d'indiquer les limi-
tes, est borné du côté de la terre par un demi-cercle de montagnes
la plupart fort élevées, ce qui explique comment cet idiome a pu
conserver ou acquérir une physionomie distincte de celle des parlers
environnants. Juxtaposé à ce demi-cercle s'en trouve un de moins
grandes dimensions qui renferme la principauté actuelle de Monaco.
Là encore on entend les langages les plus divers ; le niçois y domine
parmi les petits marchands , les ouvriers et les domestiques de la
Condamine et de Monte-Carlo. Il faut aller chercher le langage indi-
gène dans la vieille ville, où un millier de personnes tout au plus
représentent aujourd'hui la race du pays. Ce langage est à peu près
celui de Vintimille. M. le professeur Rossi explique cette particula-
rité par l'arrivée sur le rocher de Monaco, vers l'an 1000, d'une colo-
nie vintimilloise. D'autres prétendent que les Monégasques ont tou-
* Je n'ai pu visiter tous ces villages, mais j'ai eu l'occasion d'interroger des
gens du peuple qui étaient originaires de trois d'entre eux. En outre, quelques
personnes connaissant bien Je pays m'ont confirmé cette délimitation donnée
déjà par M. Andrews dans son Essai de grammaire du dialecte mentonais.
Je n'ai pas d'ailleurs pour but, dans le présent travail, de délimiter les idio-
mes dont jft m'occupe, mais seulement de marquer leurs points de séparation
le long du littoral .
DE PHILOLOGIE ROMANE IG5
jours eu des relations suivies avec Gênes et Yintimille. Mais pour-
quoi Menton, qui a fait longtemps partie de la principauté, aurait-il
eu moins de relations avec Monaco que celui-ci avec Gênes ? Com-
ment la capitale et la ville la plus peuplée n*ont-elles pas exercé
Tune sur Tautre une influence appréciable au point de vue du lan-
gage, alors que Menton adoptait Tidiome de villages qui n'ont point
fait partie de la principauté ou leur imposait son parler ? Serait-ce
parce que, — suivant l'opinion de M. G. Paris, — le développement
naturel du latin à Monaco et à Menton, n'a pas été entravé par des
actions politiques et littéraires que la première de ces deux villes au
lieu de parler le latin de la seconde, parle le latin de Vintimilie?
Ou bien seraient-ce, au contraire, des influences politiques qui
auraient imposé à Monaco le parler de Vintimilie et de Gênes?
Je me borme à poser ces questions, qu'à défaut de preuves directes
il semble impossible de résoudre pour le moment, et je constate qu'à
la Turbie, sur la frontière même de la principauté, se rôvèle brusque-
ment un ensemble de traits linguistiques qui ne permettent de confon-
dre le parler de ce village ni avec celui de Monaco, ni avec celui de
Menton. Ce nouvel idiome est celui de Nice*, encore en usage même
dans la haute bourgeoisie.
Le monégasque, je viens de le dire, est, à peu de choses près, le
vintimillois, et je n'aurais qu'à répéter à son sujet les remarques
faites plus haut à propos du langage de Vintimilie. Je vais montrer
en quoi l'idiome de Nice, qui commence brusquement à la Turbie,
diffère de celui de Menton, dont il est morphologiquement plus rappro-
ché que de celui de Monaco.
Le caractère le plus frappant est que tous les mots, à très peu
d'exceptions près, ont la forme d'oc : contractions, aphérèses, diph-
thoDgaison, tout est provençal. On remarque dans certains quartiers
de Nice et dans plusieurs communes des environs une tendance à
ajouter à la consonne finale, particulièrementà la dentale et à la gut-
turale, un son assez analogue tantôt à Ve, tantôt à ïou: es vengule,
' MM. A.-L. Sardou et J.-B. Calvino ont publié, en 1881, une Grammaire
de Vidiome niçois, pour laquelle ils ont malheureusement adopté la méthode
pédagogique. Au père de l'illuslre auteur de Théodora et de La lïuiJie
revient l'honneur d'avoir entrepris la première campagne sérieuse cor)tr«
l'orthographe italienne si maladroitement appliquée à un idiome d'oc. Par
une singulière contradiction, ce parler, ainsi travesti à l'italienne, est, de
tous ses congénères, celui qui a accepté les plus choquantes importations
françaises, de telle sorte que la pittoresque langue niçoise presque mécon-
naissable sous ses oripeaux italiens et /rawcA/mons, dépouillée de ses vieilles
formes qu'il faut aller chercher aujourd'hui chez les paysans et les marins, a
pris, dans les publications de la ville, des allures vraiment carnavalesques.
166 CONGRES
il est venu; amicou, B-mi. Mais le plus souvent cette voyelle finale est
à peine perceptible; elle n'a d'ailleurs jamais été écrite.
Le c palatal italien, c'est-à-dire venant du c latin devant e, œ, œ,
a complètement disparu ; il ne reste que le c palatal d'oc.
Les groupes 6Z, pi, cl, gl, fl ne subissent aucune altération.
L'^ suivi d'une consonne est toujours précédé d'une voyelle, et
l'on ne met jamais cette lettre au commencement des mots pour en
changer le sens ou pour marquer une idée de disjonction, de destruc-
tion ou de dépréciation. On emploie pour cela, comme dans toute la
langue d'oc, le préfixe de.
Le verbe est entièrement de langue d'oc : aiman, nous aimons, et
non ametna; venguessias,que vous vinssiez et non v en gue s sar. Toute
trace exclusivement mentonaise a disparu. 11 ne reste comme ves-
tige de la conjugaison italienne, que le futur et le conditionnel avec e
au radical; aimerai, j'aimerai ; senterii, je sentirais ; venderion, ils
vendraient. Mais Timpaifait de l'indicatif des deux verbes auxiliaires
et des verbes de la deuxième et de la troisième conjugaison, qui
était à peu près d'oc en mentonais, revient, pour les deux premières
personnes du pluriel, à une forme voisine de l'italien : e7^avanf era-
vas, aviavan, aviavas, sentavan, nous sentions ; sentavas ; renda-
van, nous rendions ; rendavas.
Comme caractère spécial à la conjugaison niçoise, il faut encore
noter la première personne du singulier de l'imparfait de l'indicatif du
verbe avoir, des verbes de la deuxième et de la troisième conjugai-
son et du conditionnel présent de tous les verbes, qui est en ii dis-
syllabe avec l'accent sur le premier i : avil, j'avais ; sentit, je sen-
tais; aimerii, j'aimerais.
Le passé défini existe ; il est en éri, ères, et, eriàn, erîàs, éron.
De même qu'à Menton, il n'y a à Nice aucun sdrucciolo formé par
des mots enclitiques, malgré la graphie vicieuse laissemi, pour/aw^e-
mi, laisse-moi ; regarjaluj pour ra^rar^a-Zw, regarde-le. Nous ne trou-
vons ici que quatre proparoxytons : péssegue, pêche (fruit), diméne-
gue , anima et âninio * .
Les substantifs n'ont pas de marque du pluriel en niçois, non plus
que les adjectifs masculins 2. Les adjectifs féminins font le pluiiel en
i: una filha saja, une fille sage ; de filha saji, des filles sages.
L médiane et initiale est conservée dans les mêmes cas qu'en langue
• M. Sardou m'a signalé les deux proparoxytons péssegue et ànimo,en fai-
sant remarquer le vrai sens de ce dernier mot, qui est ardeur, courage et
non âme.
* Les quatre adjectifs masculins bèUy beau; bouon, hou ;pichoun, petit et
tout, tout, font, par exception, au pluriel, bèiy bouoi, pichoûi et tout.
DE PHILOLOGIE ROMANE 167
d'oc : escala, échelle ; lou, le ; la, la : lu, les (masculin) ; li, les
(féminin).
Le pronom personnel sujet est, à la première personne, mi à Men-
ton comme à Vintimille ; il est iéu à Nice comme en Provence. Mais
comme dans aucun de ces idiomes il n'est d'usage de faire précéder le
verbe du pronom personnel, ce caractère passe souvent inaperçu.
A ces traits il faut ajouter les deux suivants, vestiges de l'italien :
Emploi du pronom possessif pour l'adjectif possessif : lou miéu
capèu, mon chapeau ; ranima mieuva, mon âme.
Distinction de l'ablatif et du génitif : véni da la vila, je viens de
la ville ; la pouorta de la vila, la porte de la ville. Les génitifs con-
tractés dôu, du ; dei, des (masculin) doivent rigoureusement être
distingués des ablatifs dau et dai; mais on les confond le plus souvent
dans la pratique.
11 faut noter encore comme apparaissant sur la limite du comté de
Nice :
1° La nasalisation de certaines voyelles finales : cen que, pour ce
ou ço que, ce que ; pen pour ;9e, pied ; nen pour nautre ou nous,
nous ;
2° La chute fréquente, mais non constante, de s doux : maïoun,
maison ; caua, chose ; afroua, affreuse ; gria, grise ; ou son rem-
placement par V : afrouva, cauva ;
3° L'addition d'un v initial ou médial : vuech, huit ; miejiva,
mienne. On dit aussi mieva ; dans ce cas v est une transformation
de u.
En résumé, au village de la Turbie se trouve la limite précise des
traits linguistiques suivants, qui suffisent à marquer très nettement la
physionomie respective des dialectes de Menton et de Nice :
Disparition des caractères mentonais et italiens de l'article, du
substantif, de l'adjectif, du pronom personnel et du verbe, à l'excep-
tion de l'ablatif pour l'article, du futur et du conditionnel pour le .^
verbe;
Disparition complète du c palatal italien et de Vs initiale suivie
d'une consonne, quelle qu'en soit l'origine ou la fonction ;
Apparition des groupes bl, pi, cl, gl, fl, sans modification ;
Absence du signe du pluriel pour les substantifs des deux genres
et pour presque tous les adjectifs masculins.
L'idiome niçois domine dans une région beaucoup plus étendue
que celle où se parle l'idiome mentonais. Il règne dans la plus grande
partie de l'arrondissement de Nice. Il se subdivise en variétés; mais,
comme je l'ai déjà fait remarquer, les variétés d'un même sous-dia-
lecte se distinguant entre elles par des traits peu accentués, semblent
168 CONGRES
donner raison, en certains endroits, à la théorie de la fusion insensible
des parlers. Je ne crois pas utile, pour le moment, de démontrer la
possibilité d*une subdivision des sous-dialectes.
Si nous continuons à suivre le littoral dans la direction de l'ouest,
nous rencontrons, dès que nous posons le pied sur la rive droite
du Var, un parler nouveau sensiblement distinct du niçois, que nous
ne quittons qu'avec les derniers hameaux de la rive gauche. Mais ici
nous passons simplement d'un sous-dialecte à un autre sous- dialecte ;
car, malgré ses légers vestiges d'italien, le niçois est incontestable-
ment provençal, à la différence du mentonais qu'on pourrait consi-
dérer comme un dialecte intermédiaire entre les parlers italiens et les
parlers de langue d'oc, bien que très nettement distinct des uns et
des autres. Les parlers des deux rives du Var, vers l'embouchure du
fleuve, différent par des traits de second ordre qui caractérisent deux
subdivisions du dialecte provençal, c'est-à-dire ce qu'on a appelé avec
raison, selon moi, deux sous-dialetes.
Le caractère le plus saillant qui soit commun à tou tes les variétés
du dialecte me parait être la répugnance pour les finales sifflantes
surtout dans les substantifs et les adjectifs. On la remarque à la fois
sur les deux rives du Var inférieur.
Comme le niçois, le mentonais et les dialectes italiens, le parler
de la rive droite offre la diphthongaison de Vo tonique : vouastre
ou vouostre, votre ; founrço ou fouorço, force ; bouen, bon. En niçois :
vouoslre, fouorça, bouon. En mentonais : voasc ou voastre (pronon-
cez : vouasc et iwuastre), foarza; mais ban, Vo nasal à la fin des mots
se transfqrmant, à Menton, en une sorte d'à nasal. La diphthongaison
de Vo n'a pas lieu dans le sous-dialecte provençal rhodanien.
Voici maintenant quelles sont les principales différences entre le
niçois et le parler de la rive droite, qui n'est autre qu'une variété du
sous-dialecte marseillais :
Disparition des dernières traces d'italien, c'est-à-dire : 1° des
rares proparoxytons niçois ( dimenge, amo, et non plus diménegue,
anima) ; 2° de l'ablatif de l'article {veni de la vilo, et non da la
vilo) ; 3° de l'imparfait de l'indicatif, du futur et du conditionnel
italiens erian, avian, sentian, rendian, aiwarai, rendriéu, et non
eravan, aviavan, senlavan, rendavan, aimerai, renderii) ; 4® du
pronom possessif employé comme adjectif possessif {moun capèu, et
non lou m,iéu capèu) ;
Première personne du singulier de l'imparfait de l'indicatif du verbe
avoir, des verbes delà deuxième et de la troisième conjugaison et du
conditionnel de tous les verbes en iéu monosyllabe ( triphthongue à
peine sensible, presque iou diphthongue) et non plus en il dissyllabe;
DE PHILOLOGIE ROMANE 169
Pluriel de Tarticle leis, dont Vs se fait sentir en certains endroits,
pour les deux genres devant une voyelle ; jamais devant une con-
sonne : leis orne,, les hommes ; leis aigo, les eaux ; et non, comme à
Nice, lu orne, li aiga.
J'ai noté en o la finale féminine atone des parlers de la rive droite
du Var; elle est en réalité entre Va et Vo sourd, presque eu ou e muet
français; mais elle est si indécise qu'on ne peut guère y voir un carac-
tère du sous-dialecte. 11 en est de même de la finale provenant de tio
ou cio latin, qui est ioun à Nice : admiracioxmy coumpassioun ; et
un son intermédiaire entre ioun fet ien à Gagnes et à Saint-Laurent-
du-Var ; à peu près admiracien, coumpassien.
Le sous-dialecte qui commence à la rive droite du Var inférieur
s'étend sur le littoral à travers l'arrondissement de Grasse, dans les
Alpes-Maritimes, le département du Var et l'ouest des Bouches-du-
Rhône. 11 se subdivise en plusieurs variétés.
IX
Il résulte des constatations qui précèdent :
Qu'un dialecte italien, dont le domaine se continue à une distance
notable vers l'est, cesse brusquement à la frontière française actuelle,
qui fut jadis la frontière du comté de Nice et de la principauté de
Monaco ;
Qu'un dialecte mixte, ayant des rapports très étroits avec la langue
d'oc, commence à la frontière de France et s'arrête net à la frontière
occidentale de la principauté, enclavant Monaco, où les indigènes
parlent le dialecte italien dont il vient d'être question ;
Que le provençal avec ses caractères essentiels apparaît au village
de la Turbie, situé sur la frontière de la principauté, et qui fut dans
l'antiquité la limite entre l'Italie et la Gaule;
Que les caractères distinctifs du provençal se prolongent considé-
rablement vers l'ouest; mais que, sur le Var, à l'ancienne frontière
du comté de Nice et de la France, il se })roduit tout à coup des modi-
fications secondaires qui différencient sensiblement le parler de Nice
de celui de la rive droite du Var inférieur, do telle sorte que le parler
de Nice s'étend sur une partie de l'ancien comté de ce nom, et le par-
ler de la rive droite se continue vers Antibes, Toulon, Marseille, avec
quelques variations de moindre importance que celles que l'on remar-
que entre le langage de Nice et celui de Gagnes.
Dans la région dont je viens de m'occuper, il n'y a donc pas de
fusion insensible des parlers locaux les uns dans les autres, et les
limites des traits linguistiques coïncident avec des limites politiques
anciennes oy modernes.
^^
1 7 0 CONGRES
On m'objectera que nous sommes en présence d'une série d'excep-
tions. Il serait intéressant de savoir combien d'exceptions de ce genre
on rencontrerait sur le territoire de la France. J'ai voulu seulement
indiquer comment on peut procéder, — en l'état des connaissances sur
les patois et sans attendre des études qui ne seront jamais complètes,
— à une délimitation des dialectes et sous-dialectes de notre pays.
Parmi les caractères que j'ai assignés à chacun des parlers obser-
vés par moi, il en est qui ne se continuent probablement pas surtout
le territoire du dialecte. D'autre part, certains traits notables peu-
vent m'avoir échappé. J'ai donné ceux qui, — indépendamment de
leur valeur intrinsèque et de leur persistance, — impriment à ces
parlers leur physionomie ,et indiquent, sans qu'on puisse s'y mépren-
dre, qu'on passe du domaine d'un idiome dans le domaine d'un autre
idiome ; c'est là ce qui constitue une vraie limite linguistique.
Le point où le dialecte change n'est pas toujours celui où s'arrête
un trait linguistique important. Il suffit parfois qu'un trait saillant
perde de son relief, de sa fréquence, on qu'un trait jusqu'alors
secondaire devienne prépondérant pour modifier l'aspect de la lan-
gue. Ainsi, en histoire naturelle, un organe cesse d'être un carac-
tère essentiel dos qu'il ne se présente plus qu'à l'état rudimentaire.
La confusion entre la persistance d'un trait linguistique et son inten-
sité est une des causes d'erreur auxquelles on doit la croyance à la
fusion des parlers. Prenons pour exemple la région que nous venons
de parcourir:
Les caractères italiens s'y prolongent jusqu'au Var, de telle sorte
qu'à Nice on retrouve encore des traces de proparoxytons, les futurs
aimerai, venderai ; les conditionnels senteriï, renderii; les impar-
faits erax>an, aviavan; l'ablatif vetti da la vila; la tournure lou miéu
capèu. Si l'on compte ces traits sans avoir une idée nette de leur fré-
quence, de ce que j'appelle leur intensité; si l'on remarque, d'un
autre côté, que le mentonais offre encore plus de caractères italiens
mêlés à un certain nombre de traits provençaux, et que le vintimillois
se restent, jusqu'à un certain point, du voisinage de la langue d'oc;
si, enfin, on observe qu'entre Savone et Vintimille, entre Menton et
Roquebrune, entre la Turbie et l'embouchure du Var, il y a, du parler
d'un village, parfois d'un quartier, au parler du village ou du
quartier voisin, des nuances à peine perceptibles, entre lesquelles il
semble impossible de tracer une limite, on sera disposé à conclure
que, de Savone à l'embouchure du Var, tous les parlers du littoral se
fondent les uns dans les autres par des nuances insensibles, et que
ces parlers intermédiaires entre l'italien et la langue d'oc, ne peu-
vent être légitimement classés dans l'une ou l'autre de ces deux
langues. C'est par des observations de ce genre qu'on est arrivé à
DE PHILOLOGIE ROMANE 171
la théorie que je combats. Or, rieu n'est plus [inexact qu'une pareille
conclusion. En effet, entre Savone et Vintimille, le langage est presque
tout italien : les quelques noms, les quelques formes d'oc, sont
comme noyés dans la masse des sons et des formes étrangers à
la France. Sur la frontière, on se heurte brusquement au flot pro-
vençal qui, refoulant la plupart des formes italiennes, se laissant
pénétrer cependant par quelques-unes d'entre elles, constitue le lan-
gage de Menton, assez distinct à la fois de celui de Vintimille et de
celui de Nice, pour qu'il ne puisse y avoir discussion sur ses limites
et sur son entité, bien qu'il soit permis d'hésiter sur la place à lui
assigner dans un classement des dialectes. A la Turbie, un nouveau
flot provençal vient délayer ce qui restait d'éléments italiens, au
point qu'on n'eu aperçoit plus que quelques traces. Qu'importe,
par exemple, qu'il subsiste dans le parler de Nice de rares proparo-
xytons? M. Sardou et moi n'en avons constaté que quatre. En quoi
la physionomie générale de ce langage en est-elle influencée? Et si,
dans une carte des traits linguistiques, on prolonge le trait mar-
quant les proparoxytons jusqu'au Var, ce qui est rigoureusement
exact, peut-on dire que ce trait a la même valeur à Nio«, où il ne
représente que quatre mots, et à Vintimille, où sdruccioU proprement
dits et sdruccioU par adjonction d'enclitiques paraisssent à peu près
dans toutes les phrases?
On me permettra de faire ressortir par une comparaison la diffé-
rence qui existe entre l'opinion que je combats et la mienne.
On sait qu'en peinture le mélange du bleu et du jaune donne le
vert. Rien n'est plus facile que de passer par des nuances absolu-
ment insensibles du bleu au jaune, le vert franc se trouvant à égale
distance de l'un et de l'autre. Dans ce cas, ou ne peut indiquer le
point précis où commence chaque couleur ou chaque nuance. M. G.
Paris conclurait de là qu'il n'y a sur la surface peinte de cette façon
ni jaune ni vert, ni nuances intermédiaires ; mais seulement une cou-
leur unique, une masse colorée dans laquelle il est impossible d'éta-
blir des séparations. D'autres, ne s'élevant pas jusqu'à cette concep-
tion philosophique de l'unité, reconnaissent dans cet ensemble trois
couleurs tranchées et des nuances intermédiaires, dont les limites
respectives ne peuvent être tracées d'une manière précise, mais qu'il
est utile de distinguer par des noms divers. Telle était, transportée
dans le domaine linguistique, l'opinion de tous ceux qui, il y a peu
d^années encore, croyaient à la fusion graduelle des parlers.
Mais au lieu de fondre les nuances les unes dans les autres, on
peut juxtaposer par bandes les principales d'entre elles. L'addition du
jaune au bleu, au lieu de se faire par doses imperceptibles insensi-
blement augmentées, peut avoir lieu par quantités notables, de telle
î 7 2 CONGRES
sorte que, côtoyant le bleu franc et bien distincte sur la ligne de con-
tact, se trouve une bande bleu-vert, puis une bande verte, puis du
vert-jaune et enfin du jaune franc. On peut même supposer entre ces
cinq nuances des nuances intermédiaires suffisamment nettes, ne se
confondant pas avec leurs voisines. Ici, comme dans le premier cas,
il y a transition du bleu au jaune ; mais non pins transition insensi-
ble. Chaque bande est bien limitée ; plusieurs sont composées des
•
mêmes éléments, mais combinés en proportions diverses, ce qu^
donne des nuances parfaitement distinctes. Le bleu-vert, le vert, le
vert-jaune et leurs intermédiaires sont également composés de bleu et
de jaune, et n'en constituent pas moins autant de bandes différentes
qui commencent et finissent en des points précis. Les parlers locaux
sont, à mon avis et suivant mes constatations, disposés d'une manière
analogue. Nous venons de voir, de Vintimille à Antibes, le vinti-
millois, le mentonais, le niçois, se nuancer, dans des proportions
diverses et suffisamment tranchées, d'italien et de langue d'oc, puis
le marseillais éliminer les derniers vestiges de la langues italienne,
et j'espère qu'il me sera possible de prouver bientôt que les choses se
passent ainsi sur tout le territoire de la langue d'oc.
En attendant, j'ai pu constater que la prétendue fusion insensible,
que nous avons cherchée vainement vers la frontière italienne, n'existe
pas davantage entre le languedocien et le catalan sur la limite du
Roussillon, ou entre le catalan et l'espagnol sur la limite de l'Ara-
gon. Sur la limite de la langue d'oc et de la langue d'oil, on ne sau-
rait nier que la démarcation ne soit nette sur un parcours d'au moins
200 kilomètres. Pour le surplus de cette limite, je crois avoir établi
que, s'il y a doute sur la place à assigner, il n'y a pas fusion, ce qui
concorde avec ce fait que les idiomes d'oil voisins de la limite sont
traités à première vue de langages franchimans par les gens du
Midi.
N'en déplaise à M. G. Paiis, il y a bien deux langues françaises
séparées par une frontière non imaginaire." Et comment, dit-il, s'expli-
querait cette étrange frontière qui, de l'est à l'ouest, couperait la
France en deux, en passant par des points absolument fortuits? »
Explicable ou non, un fait est ou n'est pas, et lorsqu'il s'agit seule-
ment de constater s'il existe ou n'existe pas, c'est une déplorable
disposition d'esprit pour un observateur que de se préoccuper de
l'explication à donner. Il serait un étrange savant celui qui élimi-
nerait de la science tout ce qu'il n'explique pas. Le fait incompris
aujourd'hui paraîtra peut-être tout naturel demain. Nous trouvons au
delà des Pyrénées l'analogue de ce que M. G. Paris considère comme
inexplicable en France. La péninsule ibérique est partagée du nord
au sud eu trois bandes linguistiques inégales : à l'est le catalan, au
DE PHILOLOGIE ROM AXE 173
centre le castillan, à Touest le gallego ou portugais. Aucune des
trois langues ne se fond dans la langue voisine. A-t-on quelque
explication de cette étrange té? J'en ai hasardé une: la conquête
musulmane, en refoulant les chrétiens vers les Pyrénées, les frac-
tionna en trois groupes restés longtemps tout à fait séparés et peut-
être inconnus les uns des autres. Le parler de chaque groupe évo-
lua dans un sens différent pendant cette période d'isolement ; il en
résulta trois langues, qui, la reconquista venue, s'étendirent peu à
peu, à mesure que les peuples qui les parlaient refoulaient devant
eux les musulmans dans la direction du Midi. Puis, le domaine de
chaque peuple ou groupe dépeuples s'élargissant, les idiomes en vin-
rent à se toucher; mais leur développement était trop avancé pour
qu'ils aient pu s'influencer notablement aux points de contact. Ce
n'est là qu'une hypothèse dont je ne me dissimule pas les côtés fai-
bles ; mais une hypothèse est une explication provisoire qui prouve
tout au moins la possibilité d'une explication définitive. Or, une
supposition analogue n'est-elle pas acceptable pour la France? Ne
peut-on pas admettre que de larges espaces boisés et inhabités aient
longtemps séparé les populations du Nord de celles du Midi, que
les parlers des unes et des autres se soient développés dans des sens
différents, et que, le défrichement ayant progressivement rétréci,
puis supprimé la zone déserte, les idiomes se soient rencontrés à
une époque où leur développement ne leur permettait plus de se fon-
dre les uns dans les autres. L'analogie plus ou moins grande des
parlers en contact indiquerait la plus ou moins grande ancienneté de
leur rapprochement*.
Si maintenant on met en présence des affirmations, jusqu'ici
dénuées de preuves, de MM. P. Meyer et G. Paris, les faits et les
arguments que nous devons d'une part à l'observation, d'autrs part
aux principes posés dans toutes les sciences par des maîtres dont
l'autorité ne le cède à nulle autre, il me semble difficile de ne pas
modifier ainsi qu'il suit les cinq propositions de M. G. Paris que j'ai
relevées en commençant :
P Les parlers populaires de la France paraissent se fondre les uns
dans les autres sur certains points; mais il n'a pas été prouvé encore
que ce soit par nuances insensibles, et qu'il n'y ait pas toujours un
ou plusieurs caractères saillants qui marquent la physionomie de
chaque idiome et serrent à le déterminer ;
2° Dans une masse linguistique de même origine, comme la nôtre,
qui a été et est encore soumise à tant d'influences variées, ethniques,
» Voir Rapport sur la limite. .. -, p. 85 et 49, note 1 ,
-/.' .. .
174 CONGRES
climatologiques, économiques, politiques, etc., il y a des parlers qui
sont des types de dialectes, autour desquels se rangent d'autres par-
lers plus ou moins ressemblants. Parmi ces parlers d'un même dia-
lecte, on peut distinguer des groupes secondaires, qui constituent
les sous-dialectes, des variétés et même des sous-variétés de sous-
dialectes ; mais la divergence est surtout marquée entre la masse des
dialectes du Nord et celle des dialectes du Midi, c'est-à-dire entre la
langue d'oil et la langue d'oc ;
3° Nous parlons latin ; mais un latin qui a évolué de diverses
façons suivant les lieux, de telle sorte que le latin actuel est non
seulement fort éloigné du latin vulgaire de l'antiquité, mais se divise
en langues tout à fait distinctes. Ces langues, qu'on appelle langues
romanes, viennent du latin par une suite de transformations insen-
sibles, et c'est pour indiquer par un mot clair et commode cette ori-
gine qu'on les appelle filles du latin*;
40 Si le développement naturel, du latin n'avait pas été influencé
par des actions politiques, littéraires et autres, il se serait produit
autre chose que ce qui existe aujourd'hui. Mais l'expérience de ce
développement libre n'ayant pu être faite nulle part, et les impulsions
d'ordre physiologique et d'ordre psychologique, auxquelles le langage
obéit, étant mal connues, on ignore absolument ce qui serait arrivé
si les peuples romans avaient pu soustraire leur parler à toute
influence extérieure;
5** Il ne paraît pas que les limites des traits linguistiques coïnci-
dent toujours avec des limites politiques anciennes ou modernes ;
mais, en gardant sur chaque cas particulier une prudente réserve,
il est permis de croire que les actions politiques, qui ont influencé le
développement du latin, ont pu avoir quelquefois pour résultat de
rapprocher la limite linguistique de la limite politique.
' Max Miiller a défini très nettement le sens des mots langue mère et langue
fille: «Je ne vois pas d'inconvéDÎeot, a-t-il dit, à appliquer aux langues ces
noms de mère et de filU, pourvu que nous ne laissions pas des termes eu
apparence si clairs et si simples couvrir des conceptions vagues et obcures.
Or, si nous appelons la langue italienne fille du latin, nous ne voulons nulle-
ment attribuer à l'italien un nouveau principe de vie, car pas un seul radical
nouveau n'a été créé pour le former ; c'est du latin sous une nouvelle forme,
du latin moderne, ou bien encore le latin est de l'italien ancien. Les noms de
mère et de fille ne marquent que des périodes dans le développement d'une
langue dont le fonds est le même. » Ces quatre mots : « sous une nouvelle
forme », sont tout ce qui distingue l'opinion de Max Mûller de celle de
M. G. Paris ; ils marquent entre elles toute la distance qui sépare la vérité du
paradoxe.
DE PHILOLOGIE ROMANE 175
Ce n'est qu'en tremblant que je me permets de retourner ainsi les
axiomes du maître. Il faut que je sois bien convaincu de mon bon
droit ; car je ne me dissimule pas le danger que je cours. Je sais com-
bien il sera toujours plus malaisé de s'entendre en linguistique qu'en
tout autre science. Un cas de phonétique est moins aisé à vérifier,
pour la généralité de ceux qu'il intéresse, que la plupart des faits scien-
tifiques d'un autre ordre. Qu'un naturaliste prenne pour un mammifère
un reptile exotique, qu'il ne connaît qu'à l'état de squelette incom-
plet ; qu'un historien diplômé place en Champagne une localité de la
Touraine, il sera facile à un simple amateur mieux renseigné de
prouver l'erreur en quelque pays qu'elle se soit produite. Qu'un phi-
lologue parisien persiste à nier des constatations phonétiques évi-
dentes à Marseille ou à Toulouse, mais difficilement perceptibles
pour son oreille d'homme du Nord, l'ignorant qui essaiera de le
détromper sera tenu en suspicion par tous ceux qui ne peuvent véri-
fier par eux-mêmes le point en litige. Et pourtant l'ignorant aura rai-
son. 11 aura raison, non seulement lorsqu'il affirmera ce qui est
l'évidence pour des millions d'individus, mais aussi lorsqu'il dira que
le devoir de la science est d'expliquer ce qui tombe sous les sens et
non de le nier, que ses résultats appartiennent à tous, qu'ils doi-
vent concorder, pour être justes et féconds, avec ce que l'observation
et le bon sens apprennent à tous, et que l'on aura beau philosopher
sur le moi et le non moi, sur la matière et la forme, sur l'évolution
de la cellule, sur l'unité du latin dans les temps anciens et modernes,
chacun de nous continuera, dans la pratique de la vie et dans la pra-
tique scientifique, à avoir conscience de sa personnalité, à confondre
dans ce qu'il voit la matière et la forme, à regarder la cellule deve-
nue herbe comme différente delà cellule devenue homme, et la lan-
gue parlée des Alpes à l'Océan comme distincte, dans son unité essen-
tielle et dans ses variétés régionales, de la langue également une et
variée qui se parle dans la moitié septentrionale de la France.
Une discussion s'engage entre divers membres au sujet des
limites géographiques des dialectes du midi de la France et
du caractère d'unité qu'ils peuvent présenter par rapport aux
dialectes d'Italie et d'Espagne.
M. Mistral , qui entre à ce moment, est appelé à la
présidence d'honneur du Congrès.
M. CoNSTANS, après avoir rendu hommage aux efforts faits
par MM. de Tourtoulon et Bringuier pour donner des bases
àl'étude scientifique des patois et rappelé dans quelles condi-
-_.» *■*
1 7 G CONGRES
lions rigoureuses de méthode et d'observation sur place cette
étude se fait aujourd'hui, propose au Congrès d'émettre le
vœu que, en raison de la disparition possible et de Faltération
progressive des patois de la France et en particulier des
patois de la région intermédiaire entre la langue d'oc et la lan-
gue d'oil, le Ministre de Tlnstruction publique encourage
Tétude sur place des patois et spécialement de ceux de cette
dernière région.
MM. Castets, RÉviLLOUT et db Tourtoulon appuient le
projet de M. Constans.
M. Chabaneau fait valoir l'importance des recherchas que
M. de Tourtoulon a entreprises sur les patois intermédiaires
entre la langue d*oc et la langue d'oil et dont il doit bientôt
publier la suite.
M. Maurice Faure signale tout particulièrement à l'atten-
tion des membres du Congrès l'importance philologique des
patois modernes pour Tétude des dialectes anciens et propose
l'adoption du vœu suivant:
Considérant que, notamment en ce qui concerne les dialectes de la
langue d'oc, l'enseignement officiel, dans les Facultés, ne s'applique
presque exclusivement qu'aux anciennes formes de ces dialectes ; —
considérant qu'un dialecte ne peut être bien connu et étudié que s'il
est envisagé à tous les degrés de son évolution ; — considérant que,
spécialement en ce qui touche la plupart des dialectes d'oc, les élé-
ments vivants et actuels d'étude abondent, soit parmi les populations
qui les parlent, soit dans les livres des auteurs qui ont écrit dans ces
dialectes, — le Congrès émet le vœu : que, dans renseignement offi-
ciel, l'étude des anciens dialectes romans ne soit pas séparée de celle
des dialectes actuels et, au contraire, y soit étroitement rattachée,
même au besoin par la création de cours spéciaux.
M. Chabaneau fait remarquer que précisément il applique
toujours, dans son enseignement, la méthode préconisée par
M. Faure, et il pense que ses collègues n'agissent pas autre-
ment.
Une discussion s'engage sur la rédaction définitive du vœu
à adopter. MM. Castets, Chabaneau, Rbvillout, Constans,
Faure, Clédat, Thomas, etc., y prennent part. On parle de
l'avenir des patois et de l'utilité ou de l'inconvénient de leur
DE PHILOLOGIE ROMANE 177
maintien. On traite la question de savoir si Tétude des patois
doit être recommandée de préférence pour les patois intermé-
diaires entre la langue d*oc et la langue d'oil, c'est-à-dire
ceux de la Marche, du Bourbonnais, du Lyonnais, etc., qui
s'altèrent beaucoup plus rapidement que les autres, ou, au
contraire, pour les patois qui sont encore presque intacts ,
comme ceux du Languedoc, de la Gascogne et de la Pro-
vence.
M. Durand de Gros est partisan du maintien des patois. Il
donne quelques exemples des altérations subies par le dialecte
rouergat: des sons nouveaux s'introduisent, comme le ch (dans
machine)^ et une foule de mots tombent du vocabulaire. Le
patois est en train d'être remplacé par un jargon.
M. l'abbé Devaux donne quelques renseignements sur les
patois de l'Isère (environs de La-Tour-du-Pin). Ces patois
subissent très fortement Tinfluence du français, qui les refoule
vers le sud. Le provençal se maintient par îlots, isolés les uns
des autres, où la caractéristique du patois est la persistance
du son aou.
M. RÉviLLouT propose qu'on émette le vœu que l'on rédi-
geât, pour l'étude des parlers locaux, des questionnaires des-
tinés à ceux qui, se trouvant sur place, tels que les instituteurs,
les percepteurs, les contrôleurs, les facteurs, etc., pourraient
travailler à l'inventaire de ces parlers.
Le Congrès se décide à adopter le vœu suivant, rédigé par
M. CONSTANS :
Le Congrès émet le vœu :
Que le Ministre de rinstruction publique favorise, par des missions
et des encouragements, l'étude sur place des patois de France, et en
particulier des patois qui n'ont pas encore été suffisamment étudiés.
M. Castets donne lecture de la communication suivante,
envoyée par M. le docteur Garrigou :
Le docteur Garrigou, qui n'est nullement linguiste, mais qui est le
collaborateur de Julien Sacaze, comme rédacteur de la Revue des
Pyrénées et de la France méridionale^ a l'honneur de rappeler que ce
regretté savant a fait faire, dans toute la région pyrénéenne, par les
hommes les plus compétents du pays et par les instituteurs, la traduc-
1 7 8 CONGRES
tion d'une légende dans tous les dialectes pyrénéens, de manière à ce
que cette traduction serve à l'étude des langues.
Ce travail constitue une œuvre considérable, collectionnée dans
trente volumes, qui furent exposés en 1887 à l'Exposition internatio-
nale de Toulouse. Ils sont aujourd'hui la propriété de la bibliothèque
de Toulouse, où l'on vient souvent les consulter.
M. Mistral fait une communication sur les effets intellec-
tuels de la suppression du patois dans l'enseignement primaire.
Le petit paysan, auquel on enseigne les éléments des sciences
naturelles en français, perd la notion d'une foule de termes
patois correspondant à des désignations précises. Il n'em-
ploiera plus le terme patois prègue-DifiU'de-restouble, mais il
n'appellera pas cet insecte de son nom français, la sauterelle,
et ne fera plus usage que d'un terme vague, une bête. Le.
pêcheur marseillais, qui n'a pas oublié son patois et qui con-
naît les termes précis des noms des poissons et de tout ce qui
a rapport à son métier, présente un développement intellec-
tuel beaucoup plus grand que le petit gamin qui a désappris
son dialecte à l'école primaire, qui ne connaît plus les expres-
sions de sa propre langue et qui, lorsqu'il a besoin d'une épi-
thète, ne trouve plus que les mots français rigollot, chic, ou
un machiriy une chose.
Une discuvssion s'engage sur l'opportunité de l'interdiction
de l'enseignement du patois à l'école primaire. MM. Durand
DE Gros, Mistral et Castets défendent les patois, contre
M. RÉviLLOUT, qui souhaite leur amoindrissement.
M. Castets déclare que la pensée de M. Mistral est que le
patois soit considéré, dans l'enseignement primaire, comme un
instrument pour l'étude plus complète de la langue française.
Le Midi sait parler français et a produit des orateurs qui
sont là pour le prouver, mais il possède aussi une langue qui
sait exprimer des sentiments intimes et délicats et qui a le
droit d'exister.
La séance est levée à cinq heures du soir.
DE PHILOLOGIE ROMANE 179
Séance du 27 mai 1890
La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin.
MM . Bréal et Harvey sont appelés à la présidence d'hon-
neur du Congrès.
M . Harvey fait une communication sur l'Université de
Toronto et Tétude de la langue française au Canada. L'Uni-
versité de Toronto vient d'être détruite par un incendie, ce
qui sera, dit-il, une occasion de faire mieux, en reconstruisant
un bâtiment mieux adapté au progrès. Les étudiants de l'Uni-
versité forment une association, divisée en sections, qui se
réunissent presque tous les jours. Ils publient une petite
gazette.
M . Harvey communique au Congrès diverses publications
canadiennes*.
M. Trojel fait la communication suivante sur les Cours
d'amour :
Messieurs,
D'abord je vous demande bien pardon, si je ne m'explique pas assez
bien en français : je suis étranger. Puis je vous prie d'excuser ce
que mon discours pourra avoir de leste: ce caractère est inhén nt au
sujet, et je ne saurais l'en exclure. Afin de ne rien laisser dans l'obscu-
rité, je vais expliquer d'abord en peu de mots mon opinion sur la ques-
tion des Cours d'amour. Il y a de nos jours trois opinions diiférentes
sur cette question: une qui rejette tout ce qui en a été dit comme
faux, une qui suppose vrai tout ce qui en a été dit, et enfin une qui
se tient au milieu des deux, qui rejette bien l'idée des tribunaux de
dames, mais qui n'ose pourtant nier que des dames n'aient jugé par-
fois des différends d'amour réels; seulement, il ne faut pas supposer
des tribunaux siégeant et fonctionnant comme les tribunaux ordi-
naires : la dame qui juge est choisie comme arbitre par les parties
en litige et, si elle veut, elle peut demander le conseil d'autres
dames. C'est là mon opinion et, quoi qu'on en ait dit, elle n'est pas
conforme à celle de Raynouard. Après cette introduction qui m'a paru
nécessaire, j'appellerai votre attention sur quelques faits, bien connus
à la vérité, mais qui n'ont pas été mis en rapport avec cette question,
* Ces publications feront l'objet d'une notice ultérieure.
^^ÊJSSi \.^
180 CONGRES
que je sache. Ils me semblent confirmer mon opinion en affaiblissant
la force de quelques remarques très judicieuses qu*on y a opposées.
Dans son intéressant article sur les Cours d'amour, M. Paris dit
ce qui va suivre :
H Que des personnes engagées réellement dans une liaison illégitime
(on a déjà vu qu*il ne s'agissait pas d'autre amour) aient jamais
soumis à un jugement de ce genre un différend survenu entre elles
(sauf peut-être pour quelques discussions sur la théorie de Tamour,
comme le comte et la dame qui éciivent à Marie de Champagne et en
reçoivent la lettre citée plus haut), c'est ce qui n'a aucune espèce de
vraisemblance, pour des raisons sur lesquelles il semble vraiment inu-
tile d'insister. Je dirai même que cette intrusion d'une autorité pour
ainsi dire légale dans les rapports des amants aurait été directement
contre les idées les plus essentielles de l'amour, tel que le définissait
le XII* siècle. Si en effet cet amour ne peut exister dans le mariage,
c'est, dit la comtesse de Champagne, parce que les amants s'accordent
librement et volontairement tout ce qu'ils se donnent, tandis que les
époux ont l'un envers l'autre des droits et. des devoirs mutuels. L'amour
peut bien créer aux amants des obligations, mais elles ne sauraient
avoir d'autre sanction que leur propre vouloir, d'autres juges et exé-
cuteurs qu'eux-mêmes. Une femme qu'un arrêt d'amour aurait forcée
à se donner à l'amant qu'elle écartait aurait été moins libre qu'une
épouse ne l'est envers son époux, et l'amant qui aurait joui par ce
moyen de faveurs non volontaires aurait à coup sûr manqué à toutes
les règles de l'amour « honnête^ ».
Quoique ces objections, tirées de la nature de l'amour, soient faites
presque pour clore la bouche à toute discussion ultérieure, j^ose me
mettre sur la brèche pour les combattre. Quelques passages des écrits
du moyen âge me semblent prouver qu'on voyait ces liaisons d'un
autre œil qu'on ne le pense, et qu'on n'avait pas peur d'invoquer l'aide
d'un tiers en cas de différend survenu entre les amants, ni de réta-
blir, d'après l'avis de celui-ci, les relations antérieures.
Mes auditeurs se souviendront d'un épisode de l'histoire de Ber-
tran de Born. Le fameux troubadour entretenait une liaison avec
Maeuz de Montignac. A l'arrivée dans le pays d'une dame, célèbre
par sa beauté, le poète invite tous (je n'ai pas besoin, je pense, d'af-
firmer qu'il ne s'agit, dans tout ce qui appartient à l'amour galant,
que de la chevalerie, non pas de toutes les classes de la société}, il
invite donc tous à faire la cour à cette dame, et il semble vouloir se
mettre lui-même sur les rangs pour obtenir ses faveurs. Aussitôt
* Journal des savants, ann. 1888, p. 783 (décembre).
DE PHILOLOGIE ROMANE 181
Maeuz lui donne congé et né veut plus le voir. Irrité, Bertran ne
l'épargne pas dans une autre chanson, où il se tourne encore vers
l'astre levant de la nouvelle enchanteresse. Mais, n'ayant rien obtenu
de celle-ci ou n'ayant rien voulu obtenir, il cherche par quelques chan-
sons bien flatteuses et ingénieuses à regagner l'amour perdu. La dame
ne veut pas lui pardonner ; elle fait la sourde oreille. Enfin, il va
rendre visite à une dame connue dans tout le pays pour sa beauté,
sa courtoisie, sa prudence; elle s'appelait Tiburge de Montausier.
Après s'être plaint devant elle de la conduite de Maeuz deMontignac,
il la prie de le prendre pour serviteur et chevalier. Tiburge lui répond
qu'elle est bien sensible à l'honneur qu'il lui fait, mais que, s'il a dit
ou fait ce que lui impute Maeuz, elle ne saurait nullement l'approu-
ver : ni elle, ni aucune autre dame ne saurait en ce cas ni le recevoir
chez elle, ni accepter ses services; cependant elle prendra des ren-
seignements et, au cas qu'il n'ait pas commis de faute, elle lui fera
ravoir la faveur de sa bien-aimée ; si elle ne réussit pas, elle promet
de le prendre pour serviteur et chevalier, et lui, de son côté, jure de
n'en jamais aimer aucune autre. Peu après, Maeuz se laisse convain-
cre, et tout rentre dans l'ordre. Seulement, elle exige que Bertran prenne
congé de Tiburge et qu'ils se rendent mutuellement leurs promesses.
Le biographe n'a pas inventé ce récit en brodant sur les vers du trou-
badour. Certains passages appuient ses paroles; mais tous les détails,
les noms, tout ce qu'on apprend sur la visite de Bertran à Tiburge, ne
s'y trouvent pas. On ne saurait donc prétendre que ce soit un conte
postérieur fait d'après les vers.
On voit que les dames et le conteur prennent la liaison bien au
sérieux. Personne n'en parle comme d'une relation illégitime, et,
quoique les trois personnes agissantes soient mariées, aucune allusion
n'y est faite. On pourrait supposer que Tiburge se réjouît de voir
cesser une telle liaison ; mais non, elle prend à tâche de la restituer,
et même, si elle n'y réussit pas, elle a bien envie de s'engager elle-
même dans une liaison pareille. 11 faut remarquer aussi la menace
d'expulser Bertran de la bonne société, et avant tout l'intervention
de Tiburge dans la querelle et le désir des autres de se conformer à
son vouloir.
Si nous n'avions que ce fait unique, on n'en tiendrait pas compte ;
mais le biographe de Pons de Capdeuil raconte sur celui-ci une his-
toire tout à fait analogue. Lui aussi, ayant excité le courroux de sa
dame, cherche à la radoucir par des chansons pleines d'humilité et de
galanterie. Désespérant de réussir, il s'adresse à trois dames de la
plus haute aristocratie, pour les prier de lui servir d'intermédiaires,
et c'est par leur secours qu'il obtient à la fin son pardon. Aussi il
w. 'li.ji--'-'
182 CONGRES
nomme dans une chanson deux de ces dames, bien connues dans le
monde des troubadours, et prie le Ciel de les garder.
Enfin, nous trouvons dans la biographie de Guillaume de Balaun
un cas pareil. Seulement, le médiateur est cette fois un homme, en
tous points considéré, à ce qu'il semble, qui s'offre lui-même pour
rétablir une liaison pas tout à fait innocente.
On pourrait citer d'autres exemples encore; ceux-là suffisent pour
montrer qu'on ne refusait pas les services d'un intermédiaire, qu'on
les recherchait même. Et c'est ce que nous voyons confirmé par les
vers de Jacques de Baisieu, qui dit qu'un amant, s'il se sent mal-
mené, doit s'adresser à d'autres pour obtenir une réconciliation par
leur moyen, qu'il faut porter plainte devant ceux qui sont les fidèles
de l'amour. 11 faut avouer, ce me semble, que nous avons ici affaire
à un usage du xiie siècle. Et si cela est, quelle différence y a-t-il
en réalité entre cet usage et ce que raconte, dans sa nouvelle,
Raimon Vidal, des deux dames qui demandaient à Ugon de Mataplana
de décider sur leur querelle? Si les dames de Bertran de Bom, de'
Pons de Capdeuil, de Guillaume de Balaun, et celles de la nouvelle
de Raimon Vidal ont pu se laisser fléchir et accorder aux amants les
faveurs qu'elles leur avaient refusées, il me semble qu'on en pourrait
conclure que cela n'était pas contraire aux lois de l'amour galant et
qu'on n'avait pas peur de s'adresser à de grandes dames et de leur
parler sans façon d'une liaison de cette sorte, ni d'invoquer leur
secours pour la rétablir.
Dans les biographies des troubadours, nous voyons donc un amant
s'adresser à une ou à plusieurs dames, les priant de vouloir bien
intervenir auprès de sa bien-aimée pour lui faire entendre raison.
Dans la nouvelle de Raimon Vidal, deux dames, sous le sceau du
secret, font demander à un homme expert en matière d'amour de
juger entre elles; de même, dans la lettre de Guillaume de Bergue-
dan ; Jacques de Baisieu recommande aux amants maltraités de
s'adresser aux fidèles de l'amour pour qu'ils ramènent la bonne intel-
ligence entre les amants ; il n'exige pas expressément le secret, seu-
lement, les paroles doivent être couvertes, de sorte qu'elles soient
inintelligibles à tous ceux qui n'y sont pas intéressés. Il me paraît
très vraisemblable que nous avons dans tout cela les traces d'un usage
qui aura existé sous des formes quelque peu différentes, au fond
pourtant analogues.
Dans tout ce qui précède, je n'ai pas nommé André le Chapelain.
C'est que cet auteur n'offre peut-être pas de base solide. Cependant,
en comparant avec les exemples cités les règles qu'il donne, s'il faut,
comme il dit, s'adresser aux dames, il me semble encore y trouver
une confirmation de ce que je viens de dire. On sait que lui aussi
DE PHILOLOGIE ROMANE 183
recommande aux amants de faire vider leurs querelles par d'autres,
qui seront d'après lui des dames, et qu'il exige le secret quant aux
noms des personnes en litige, lesquelles devront se faire représenter
par des confidents. S'il fallait voir, dans les lois de l'amour courtois,
un obstacle à l'usage de provoquer un jugement entre les amants,
comment André, ce maître expert, peut-il donner ces jugements
en exemples à son disciple ? Si l'idée d'un jugement était contraire
à l'amour courtois, dont il ne cesse de prêcher les règles, il n'au-
rait que faire de ces jugements. On a dit que les cas de controverse
qui s'y trouvent ne sont pas d'autre nature que les tensons. Je le
veux bien, les Judicia amoris d'André n'ont d'autre contenu que
des tensons, et comment l'auraient-ils ? Mais ce qui est d'antre
nature, ce sont les règles qu'il donne pour ces controverses, les
mêmes règles qui semblent suivies dans les autres exemples que
j'ai cités. Je ne connais pas de tenson ni de jeu d'esprit où il soit
dit qu'il faille garder le secret quant aux noms des personnes, ni
qu'il faille envoyer des confidents pour traiter l'affaire. Les person-
nes étant sans réalité, on n'a que faire de garder le secret. Le
jugement du roi de Bohême et les jeux dans le Filocolo me sem-
blent appartenir à la même catégorie que les tensons. Ce sont des
cas fictifs et personne ne songe à donner des règles pour la conduite
de ceux qui y prennent part et qui ne sont pas même des amants.
J'ai cité dans mon livre * Pépisode du jugement d'amour dans
Méraugis de Portlesguez. Comme on se le figure bien, je l'ai fait,
parce qu'il me semble y voir une certaine ressemblance avec une
telle -assemblée de dames voulant juger une querelle d'amants; d'ail-
leurs, certaines paroles, comme celles de la reine, qui dit que les
jugements d'amour lui appartiennent, m'ont semblé mériter quel-
que attention ; enfin, cette affaire est représentée par le poète comme
quelque chose de sérieux et non pas comme un amusement des dames.
II y a d'autres vers du moyen âge où sont racontés des jeux et des
amusements ; on en conclut que ces jeux et ces amusements ont été
d'usage en ces temps-là, même si aucun chroniqueur n'en parle ; si
nous trouvons des vers où sont représentés des usages pris au sérieux,
ne serait-il pas permis d'en conclure que de tels usages aient pu
exister, quand même les chroniqueurs ne nous en apprendraient rien?
(Applaudissements.)
M. Chabaneau félicite M. Trojel de sa communication et
lui offre de publier, sous les auspices de la Société des langues
^ Middelalderens Elskovskoffer, Copenhague, 188.S, in-S», p. 173.
I •:• ^' .
1 8 l CONGRÈS
romanes, une traduction française de son ouvrage sur les
Cours d^amour.
L'ordre du jour appelle la question de Tépopée provençale.
M. CoNSTANS s'excuse que ses occupations Talent empêché
de préparer aucune communication sur ce sujet.
M. Tabbé Devaux fait une communication sur l'origine
du Fragment (T Alexandre, dit de Besançon ou de Briançon.
M.Ascoli Ta rattaché au franco-provençal, M. l'abbé Devaux
croit pouvoir le considérer comme appartenant aux dialectes
provençaux, parlés au sud de la ligne séparative du provençal
et du franco-provençal (Drôme ou Hautes-Alpes).
M. A. Thomas fait une communication sur la légende de
Saint- Vidian, honoré à Martres-Tolosanes (Haute-Garonne).
Il montre que cette légende reproduit les traits essentiels de
deux chansons de geste françaises, les Enfances Vivien et Alis-
cans.
Cette communication donne lieu à quelques observations de
MM. RÉviLLOUT et Constans sur l'étymologie du nom de
Martres,
M. BRÉALfait une communication surl'étymologie du verbe
toucher. Il compare ce mot, dont Tétjmologie est inconnue,
au verbe grec zvyyxvoi, qui signifie arriver, mais qui a pour
sens primitif toucher : un guerrier d'Homère, lorsqu'il est
manqué par le dard que lui lance son adversaire, lui crie :
ouy. eru^sî, tu ne m'as pas touché. L'idée de toucher a donné
naissance à celle d'arriver au but par fortune, de réussir :
Tvxn est en grec le nom de la Fortune. Il est possible que tou-
cher, tocar, toquer, soit le frère jumeau de TV7;^av&).
M. RÉVILLOUT fait une communication sur les moyens pra-
tiques à employer pour Tétude des patois et appelle l'atten-
tion sur les secours que peuvent donner pour cette étude tous
les fonctionnaires que leurs occupations retiennent dans les
campagnes.
M. Chabaneau parle de l'expérience qu'il a acquise, en ce
genre, dans l'administration des postes, du parti qu'il tirait des
facteurs ruraux, et cite quelques exemples d'étjmologie popu-
laire.
M. le docteur Espagne fait part au Congrès de la mort de
DE PHILOLOGIE ROMANE 185
M. le docteur Noulet, de Toulouse, dont il vient d'apprendre
là nouvelle.
M. Chabaneau fait Téloge de M. le docteur Noulet et rap-
pelle ses études sur la littérature provençale et sa connais-
sance des dialectes modernes.
M. Chabaneau proclame les lauréats du prix Boucherie,
dont le sujet était un travail philologique sur un texte pro-
vençal ancien, imprimé ou inédit*. Ce prix a été partagé entre
MM. Charles Barbier et Georges Reynaud, boursiers d*agré-
gation près la Faculté des lettres de Montpellier.
M. Bréal prononce une allocution sur le rôle, de TUniver-
sité de Montpellier, sur l'importance et l'activité ininterrom-
pue de ses Sociétés savantes et sur la création de chaires spé-
ciales pour renseignement du provençal. (Applaudissements,)
M. Chabaneau distribue aux membres du Congrès un cer-
tain nombre d'exemplaires d'une publication offerte par
M. Stengel, de Marbourg, qui n'a pu se rendre au Congrès
(Kleinere Schriften von Ferdinnnfl Wolf... zusammengestellt
von Edmund Stengel..., Marbourg, Klwert, 1890, in S'', 16 pp.).
La séance est levée à onze heures et demie du matin.
Une dernière réunion a eu lieu le même jour, sous forme
d'un banquet, auquel assistaient 21 membres du Congrès et
qui s'est terminé par un certain nombre d'allocutions.
E. -Daniel Grand.
* Voy. le programme du concours dans la Revue des Langues romanes^
T. XXXIII, d889, p. 468.
c-_ .r^ ."I
PÉRIODIQUES
Zeitschrift fttr romanische Philologie, XIII, 1-2 — P. 1.
H. Werth. Traités sur la chasse en ancien français et la bibliogra-
phie générale des manuscrits de la littérature cynégétique en Occi-
dent (suite et fin). — P. 35. E. Bechmann. Trois Dits de Tâme, tirés
du manuscrit Ms, GalL Oct. 28 de la bibliothèque royale de Berlin.
Ces trois dits n'ont pas encore été signalés ailleurs, à l'exception de
quelques couplets du troisième, qu'on retrouve dans un ms. de Bru-
xelles. Le ms. de Berlin, nouvellement acquis, contient un assez
grand nomb^'e d'opuscules pieux dont M. B. nous donne les rubriques,
mais non, sauf pour le traité do la Messe, les premiers mots du texte.
Pour les mss. de ce dernier ouvrage, voy. Rom, VI, 10 et Bulletin
de la Soc, des anc. textes, 1885, p. 50.— P. 85. H. Andresen. Fragment
durom^n en ancfr. rf'Amadas et Ydoine. Il s'agit de deux feuillets de
parchemin tirés d'une vieille reliure et qui renferment le premier 140,
le second 14G vers appartenant à deux passages distincts. — P. 98.
R. Otto. Ordonnance sur le duel judiciaire à Barcelone, Elle est tirée
du ms. du Vatican. Ott. 3058, dont deux extraits ont été récemment
publiés par M. 0. dans les Modem Language Notes (Voy. Rom. XVIII,
187). — P. 115. A. Feist (récemment décédé). Extraits de vieux
recueils de poésies religieuses en italien. L'auteur a dressé une table
alphabétique du ou des premiers vers de 1,381 pièces empruntées à
onze recueils imprimés et à trente-huit manusciits. — P. 186.
A. Tobler. Mélanges de grammaire française (nouvelle série). 10.
Nouvelles observations sur ce fait depuis longtemps signalé par l'au-
teur (Gottinger Gelehrten Anzeigen, 1875, p. 1065 sqq.), que Tancien
français n'emploie la forme atone des pronoms personnels ni devant un
infinitif, ni devant un gérondif, ni devant un participe passé. Les
exemples anciens que l'on allègue de l'usage moderne s'expliquent
par l'enclise du pronom sur le verbe qui régit l'infinitif (etc.), et non
par la proclise du même pronom sur l'infinitif. — 11. Explications
de phrases conditionnelles comme celle-ci : S'il t eiissent tous
jours mis leur aviSt s'est (= si est) l'uns de l'autre noblernent envaïs,
où la proposition principale est introduite par si = sic. — 12. Sup-
PERIODIQUES 187
pression de Tarticle devant certaines catégories de noms, principale-
ment dans l'ancienne langue. — 13. Emploi de que dans les propo-
sitions de sens temporel concessif, etc. : on essayait encore de le retenir
qu'il était déjà dans l'antichambre ; je ne l'écoute jamais qu'il ne me
fasse peur ; nous nous égarerions que nous finirions bien par arriver
ailleurs, etc. — P. 213. H. R. Lang. Notes de philologie portugaise.
— P. 217. H. R. Lang. Traditions populaires des Açares, — P. 225.
C. Appel. Le Lucidarius provençal (Voy. Rom. XIX, 628). — P. 253.
F. Schulze. Ritomelli romains. Ils sont au nombre de 410 et se rappor-
tent principalement à l'amour ou aux femmes.
MÉLANGES. I. Histoire littéraire. — 1. P. 291. A. Feist. Sur
\q Poème inédit de Martin Le Franc de Gaston Paris (Voy. Rom. XIX,
628). — 2. P. 294. R. Zenker. Sur Guilhem Ademar, Ehle d'Uisel et
Cncahnon. — II. Textes. P. 300. F. Lauchert. Fragment d'un rema-
niement du Trésor de Brunetto Latini (trouvé à Strasbourg dans une
reliure). Au f* 2*, 1. 4, En^i est li dechiaus, où l'éditeur corrige est
en sont, il faut lire : Fnsi est il de chiaus. — 111. Exégèse. 1. P. 307.
A. Gaspary. P/oier lecorjon. Essai d'explication de cette locution, qui
se trouve dans Ivain, v. 5916 et qui a des analogues en provençal et
en italien. — 2. P. 309. H. R. Lang. San Secreto. Explication de
cette expression plaisante, que l'on trouve dans Calderon {La vida
es sueno, III, I) et ailleurs. — 3. P. 310. E. Levy. Sur la nouvelle
de Raim,on Vidal : Ahr'ûs issi'e mays intrava (jBaî'fscA, Denkmaeler,
p. 144-192). Corrections au texte. — IV. Grammaire. 1. P. 317.
H. Schuchardt. Hiatustilgung . Explication de ce terme (Cf. Zeits-
chrift, XII, 442 sqq.). — 2. P. 319. W. Sander. Passage du j espagnol
du son sifflant au son râpant (son spécial difficile à émettre pour les
étrangers). — 3. P. 322. D. Behrens. Normand non, nou, no = n'on.
Ces formes viendraient de un hon, (u)n'on, ce qui semble difficile, à
cause de leur ancienneté. — V. Ktymologie. 1. P. 323. A. Horning.
Etymologies françaises : suie = *sûd\ca pour sûcida; courtier, rattaché
à currere. — 2. P. 325. A. Gaspary. Ancien fr. pec, « pitié ». Ce
serait le nom verbal de pechier ; on sait que « péché » et « malheur»
sont synonymes dans l'ancienne langue (cf. encore aujourd'hui pecaire
= peccator, dans les patois du Midi). L'idée de « pitié » semble bien,
en effet, se rencontrer déjà très anciennement, du moins pour l'ad-
jectif. Cf. Alexis, 79 d : ^ las! pechable . La forme seule pourrait
faire difficulté, à cause de Ve bref.
Comptes rendus. — P. 327. Ed. Montet, La noble leçon{E. Levy).
— P. 338. Romania, n°« 68 et 69 (W. Mejer, A. Tobler). — P. 331.
Revue des langues romanes, t. XXXI, juillet -décembre 1887,
t. XXXII, janvier-septembre 1888 (E. Levy). —P. 340. Giomale
■ ê
188 PERIODIQUES
storico délia Letteratura italiana, anno VI, vol. xii, fasc. 3 (A. Gaspary)-
— P. 343. Livres nouveaux annoncés sommairement par M . Grober.
3-4. — P. 353. B. Eggert. Développement du dialecte normand dans
le département de la Manche et dans les îles de Guernesey et Jersey.
Etude méthodique basée sur de nombreux documents (textes littérai-
res et chartes) et qui semble bien conduite. — P. 404. D. Behrens.
Etymologie: 1. patois de l'Est zwayi (audirej (le z provient des pro-
noms noz, voz,ez) ; 2. pat. de l'Est zway' (auca) etc., (le z provient
de l'article pluriel); 3. fr. sépoule;A. fr. étnette (le même que tenettes ;
revient de l'article pi.) > 5. fr. om«, 08 pour vow*/ 6. pat. de l'Est
deto d' ( = d'atout de, atout de) ; 7. fr. itou ( = ancien atout, a tout,
« avec »} ; 8. dauphinois councou pour ouncou, ouncle (Cf. tante = fante);
9. anc. pr. avaissa, avais (l'a provient de l'article la)\ 10. fr. coche,
« truie » ; 11. morvan aum, « graisse de porc » ; 12. fr. annille ( =
anaticula); 13. fr. hallope; 14. anc. fr. bracon; 15. ital. guanto ;
16. ital. bricco; 17. prov. brac. — P. 416. H. R. Lang. Traditions
populaires des Açores (suite). — P. 431. Ch. Bonnier. Étude critique
des chartes de Douai de 1203 à 1275. l*"® partie : Recherches sur l'an-
tagonisme des chartes et du langage vulgaire. Cette étude est précédée
d'une discussion où l'auteur, combattant les idées généralement reçues,
cherche à démontrer qu'il n'y a presque rien à tirer des chartes pour
l'étude des dialectes, et qu'il faut partir des patois modernes : c'est
ce que fait l'auteur. Nous croyons, pour notre part, qu'il y a lieu de
tenir grand compte de l'état actuel des patois, mais qu'on ne saurait
se passer des chartes, qui peuvent être d'un utile secours, dans les
parties qui ne constituent pas des formules savantes. — P. 463. H.
Schuchardt Contribution à l'étude du créole roman.
MÉLANGES. I. Er-ihiOLOGiE. y H. Schuch3iTdt.Ety mologies romaTies:
1. port, eirôj eiroz; esp. chorizo, port. chouriço,~a; 2. esp. port. /o/"© /
3. fr. aller ; esp. lerdo, etc. ; port ardégo; esp. port, lôbrego ;
port, manteiga, esp. manteca; port, vadio ; 4. Aliboron ( ^ lat.
elleborum) ; 5. ital. disio; fr. reproche (ne doit pas être séparé de
l'ital. rimprôvero et de ohbrobrio) . — ii.Gra.mm aire. P.533, W. Fœrs-
ter. 1. Volsintiers et volontiers; 2. lieu de locum (Vi développé
d'abord dans gieu par la palatale, s'est étendue ensuite par analogie
à lùu, leu, etc. ; feu est resté tel, sans doute pour éviter la confusion
&YecJieu, « fief»); 3. fr. /issu de -d-. — III. Lexicologie. P.
546. A. Tobler. prov. cortves (= cuir de Cordoue), meliana(s= anc
fr. meruenne, « milieu du jour »).
Comptes rendus. — P. 548. Giovanni Sercambi, Novelle inédite.,,
per curadi R. Renier (A. Gaspary). — P. 556. A. Stimming, Ueber
den provenzalischen Girart von Rossillon (A. Pakscher). — P. 567.
A. Malmignati, Il Tassoa Padova, suo primo amore e poésie giovanili.
CHRONIQUE 189
etc (V. Crescini). — P. 571. A. Ebert, Allgemeine Geschichte der
Literatur des MittelaUeni im Abendlande bis zum Beginne des XI
lahrhunderts, l, 2« édition (G. Grœber). Rappelons que cet excel-
lent ouvrage, arrivé à son troisième volume, est traduit au fur et à
mesure en français par MM. Aymeric et Condamin et paraît à Paris,
à la librairie E. Leroux. — 572. // Projptt^rwa tore, nouvelle série, I,
2-6 (A. Gaspary). — P. 580. Archiv fur das Studium derneueren
Sjrrachen, LXXVII-IX (E. Schwan). — P. 587. Giornale storico
délia Letteratura italiana, XIII, 1 (A. Gaspary). — P. 596. Romania
(n°» 70 et 71 W. Meyer-Lùbke, A. Tobler). — P. 600. Additions
à Zeitschrift, XIII, 213 et 330. — P. 601 . Livres annoncés sommai-
rement par M. G. Grœber.
L. CONSTANS.
CHRONIQUE
Congrès d'études languedociennes. — Le Congrès d'études
languedociennes organisé par le Comité félibréen (sous-section de la
Maintenance de Languedoc du Félibrige), sous la direction de MM.
Roque-Ferrier et De Lapouge, a eu lieu à Montpellier, du 28 mai
au 2 juin 1890. Parmi les communications qui ont été faites à ce Con-
grès, un certain nombre ont porté sur des sujets philologiques.
M. Roque-Ferrier a traité la question des rapports des limites
des dialectes avec les limites des anciens diocèses de la France
méridionale et il a constaté une corrélation étroite entre ces diverses
limites, sur une foule de points.
Le même a étudié quelques mots gaulois conservés dans la langue
d'oc, ainsi que les diminutifs et les augmentatifs pendant l'époque
gallo-romaine. Il a examiné en particulier les noms topographiques
Alzoun, Auzoun, Ausonnet, appliqués à divers cours d'eau et qui
signifient rivière. II l'a cité les équivalents provençaux de Mosa et
Mosella.
M. E.-D. Grand a expliqué et commenté une proclamation d'un
héraut du roi de Majorque, en dialecte montpelliérain, faite à l'occa-
sion de la publication de lettres de sauvegarde accordées par le roi de
France à l'Ecole de Droit. Ce document est inséré dans un acte notarié
du 8 février 1336, publié dans le Cartulaire de V Université de
Montpellier (t. I, p. 709).
M. Savinibn, des Écoles Chrétiennes d'Arles, majorai du Féli-
brige, a fait une communication sur l'enseignement du français
13
190 CHRONIQUE
par le provençal, sur les facilités que la connaissance des patois donne
au maître d'école pour l'enseignement et sur Fusage des versions en
provençal, dont il a publié un recueil qui lui sert pour ses élèves. A la
suite de cette communication, un voeu a été émis en faveur de l'ensei-
gnement du français par la langue d'oc dans les écoles primaires .
M. le D"^ Espagne a proposé une interprétation du mot rouergat
joura, signifiant dormir et, en particulier, faire la méridienne ou la
sieste, dans l'expression Moussu Antoni jour a. Il l'a rapproché
de la 3« p. pi. pf. jurent, en citant un exemple emprunté à la chanson
de Roland.
M. Roque-Fbrkier a lu diverses communications de M. Lapont de
Sentenac, sur le poisson d'avril, rapproché de l'tx^uc des chrétiens
des Catacombes, et de M. Elzéar Jouveau, sur le conte provençal de
Cendroulet, où Cendrillon se transforme en jeune gascon, qui épouse
la fille du roi.
M. J. Laurès a exposé la biographie des deux poètes montpellié-
rains Cyrille et Auguste Rigaud.
M. le D^ Marignan, de Marsillargues, a fait une communication
sur les sirènes gravées sur des cornes de taureaux de la Camargue
(ourguenas, serenas, serenelas).
M. C. Brun a fait une communication sur les troubadours à la cour
des Guilhems, seigneurs de Montpellier (Guilhem de Balaun, Folquet
de Lunel, Arnaut Peire de Ganges, Gormonda, Peire Raimon de
Toulouse, Gui Guerrejat, Folquet de Marseille, Arnaut de Ma-
reuil, etc.).
M. Roque-Ferrier a expliqué l'origine de la légende biterroise de
Pépézuc, qui est un nom donné à une statue de Béziers. Le nom du
capitaine Montpezuc, qui défendit Béziers contre les Anglais en 1355,
a été tranformé en Pechpezuc, comme dans le nom de lieu Montau-
beroUf quelquefois appelé Pechauberou (pech = mont).
M. Varlet a communiqué quatre romances montpelliéraines, dont
deux des frères Rigaud et une de Benoît Gaussinel, en les faisant
accompagner d'une exécution instrumentale.
M. Roque-Ferrier a étudié les comparaisons, les métaphores, les
énigmes, les proverbes, les dits et les ternaires du languedocien, en
les comparant à leurs analogues en Bretagne, Sicile, Chypre, Grèce
et Italie.
M. FoNTENAY a signalé des proverbes biterrois.
M. C. Brun a communiqué deux fragments de comptes des consuls
de mer de 1372, en langue d'oc, de Montpellier, appartenant à une
collection particulière.
M. Roque-Ferrier a fait l'histoire de la substitution, qui a eu lieu
à Nimes, des articles provençaux lei et li aux articles lous et las.
CHRONIQUE 191
Cette substitution est déjà achevée, au xvii® siècle, dans VEmbarras
de la fieiro de Beucaire de Michel de Nîmes, qui n'emploie plus
lous et las, et apparaît déjà, par intervalles, dans les Actes du
synode de la sainte Reformations de Guillaume do Reboul (1599).
M. J. Laurès a donné la bibliographie des poésies languedociennes
de Peyrottes, de Clermont-rHérault, publiées dans des journaux vers
1850.
M. Lafont de Sentbnac a envoyé un recueil de noëls de l'Ariège .
M. DoUMSRGUff, instituteur, adonné une traduction languedocienne
d'un acte latin de 1535, dans une monographie de l'église de Saint-
Martinde-Londres .
M. l'abbé Doumenjou, curé de Saurat (Ariège), a envoyé une série
de documents sur le père Amilia, poète de Pamiers au xviie siècle.
M. Roquk-Fkrrikr a étudié les poésies montpelliéraines de Tou-
chy, qui vivait au commencement du xix® siècle et dont les manu-
scrits se trouvent à la bibliothèque de la ville de Montpellier.
Le même a communiqué une fable en vers, le Sonneur et VArai-
gnée, attribuée à La Fontaine, dans le recueil des Mémoires de
l'Académie des sciences et belles-lettres de Béziers (1736).
Le même a signalé des variantes inédites des Méditations de
Lamartine, qui se trouvent à la bibliothèque de la ville de Montpellier.
Le même a fait connaître quatre sonnets français et un sonnet
toulousain sur la pose de la première pierre du canal des Deux-Mers,
contenus dans un Mémoire imprimé du xvii® siècle, adressé aux
capitouls de Toulouse par Arquier.
Le même a traité la question des légendes dracontiaques de la
Provence (la Tarasque de Tarascon; légendes de Draguignan, Mé-
thamis, Vaucluse, Montdragon, Rochemaure), qu'il a rattachées à
une origine gauloise.
M. le D' Vincent, de Guéret, a envoyé les conclusions d'un travail
relatif à la géographie dialectale de la Creuse, comparée à celle des
anciens diocèses de la Marche et des pays circonvoisins.
M. Roque-Ferrier a lu une étude sur la Roumanie dans la litté-
rature du midi de la -France et le Languedoc dans celle de la Rou-
manie. 11 a, en particulier, analysé la tragédie La Fontaine de Blan-
dusie, d'Alecsandri.
Le même a fait connaître deux poésies avignonnaises de Royer et
deux versions languedociennes du conte de Mitât de Gai.
Parmi les seize vœux spéciaux émis par le Congrès d'études lan-
guedociennes, plusieurs ont un objet philologique : introduction des
versions languedociennes-françaises dans l'enseignement primaire,
de la langue d'oc parmi les matières des examens des instituteurs et
d'un thènae ou d'une version en langue d'oc, roussillonnais, basque
: .zut nin* : .noue jl'î ~.:
ZIESSSCS: -r "rr.T.n -^
"ICZLIZIZIIS. -: "^ !-T— !-.7T.g ._ ■ ' TTt'^SiTIL. ttS- .JUDS .lè .ItriZ
"1.* ..-dt ^ -■"?!■ -iiu -r- iti^w lii Tninnrri'rf ~M*rnniT id i tttî-
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rOUlii^Tm — t^rr* . . yjZL -r anB- .e ."±1
rasa ^a: "^Ar^S-rTT-.-X.^ rSiEza :s. '.H'Vr^^srrFTR
i La Tiiir î«* ?^n3 *îtt in -atiftat iaïasor «a urne in ei» « .in ht* siècles
et coatenaat «i Ari^m^es snmcoaies ie Mamçâlier.
CHRONIQUE 193
L'inaugaration avait été précédée de la cérémonie de la bénédic-
tioa du marbre de Jacme dans la cathédrale par Monseigneur TEvê-
que de Montpellier, le 22 mai*. Une allocution sur Jacme-le- Conqué-
rant fut prononcée à la cathédrale par Monseigneur TEvéque, le
dimanche 25 mai*.
Les invités, qui étaient très nombreux, avaient reçu la lettre sui-
vante :
« COMITfiE PBLIBRIN DB MONTPELLIER
» 17 mai 1890.
» Monsieur,
» La ville de Montpellier fêtera, le 22 mai et les jours suivants, le
sixième centenaire de la fondation de son Université et la naissance
de Jacme-le-Conquérant.
» M. le Président de la République et plusieurs de ses ministres,
MM. Mistral, Roumanille, Henri de Bornier et les félibres provençaux ;
les délégués et les Etudiants des principales Universités de l'Europe
et du Nouveau Monde honoreront de leur présence la commémoration
de ces dates capitales de Thistoire languedocienne, méridionale et
latine.
» Le Comité félibrin de Montpellier vient, Monsieur, vous prier de
vouloir bien assister à l'allocution que Sa Grandeur Monseigneur
l'Evêquede Montpellier prononcera sur Jacme-le-Conquérant le diman-
che delà Pentecôte, dans la cathédrale de Saint-Pierre,
» Il vous convie également à l'inauguration solennelle du marbre
sur les vieilles murailles de la Tour des Pins (26 mai) et aux Jeux
Floraux latins de Jacme-le-Conquérant et du Félibrige montpellié-
rain.
» Le Languedoc et la Couronne d'Aragon ont été longtemps deux
mains jointes ensemble. Les souvenirs de cette vieille union, la fra-
ternité d'aspirations, de gloires et de périls communs qu'elle rappelle
ne s'effaceront point de la mémoire des Catalans, des Montpellié-
rains et des Languedociens. Vous fortifierez, Monsieur, la persistance
de ces grands souvenirs en acceptant notre invitation et en ajoutant
ainsi une page nouvelle et pacifique à l'histoire que les Languedo-
ciens, les Catalans et les Provençaux écrivirent sur les champs de
bataille où les conduisait le fils à jamais glorieux de Pien*e II et de
Marie de Montpellier.
» Daignez agréer. Monsieur, l'expression de la considération très
J Voy. le journal l'Éclair des 23, 24, 25 et 26 mai 1890.
» Voy. le même journal, n© du 27 mai 1890,
/
194 CHRONIQUE
respectueuse avec laquelle j'ai l'houneurde me dire votre bien dévoué
serviteur.
» Pour le Président du Comité félibrin du VI® Cente-
naire de l'Université de Montpellier,
» Le Délégué général,
» A. Roque-Ferrikr,
» Secrétaire de la Maintenance de Languedoc.
» P. -S. — Cette lettre servira de carte d'entrée personnelle à l'inau-
guration du marbre de la Tour des Pins et à la séance des Jeux Flo-
raux. »
Cette lettre d'invitation avait été envoyée aux alcades des villes de
Barcelone, Sarragosse, Valence, Palma, Murcie, Lérida, Girone et
Vich et aux principaux poètes et lettrés de la Catalogne. Plusieurs
alcades (ceux de Barcelone, de Valence, de Murcie et de Lérida) ont
adressé au président du Comité félibrin des lettres où, tout en s'ex-
cusant de ne pouvoir se rendre à la cérémonie de l'inauguration du
marbre de Jacme-le-Conquérant, ils glorifient en termes abondants
et éloquents le passé du Languedoc et rappellent les liens de frater-
nité qui l'unissent à l'Aragon et à l'Espagne.
M. J. Verdaguer, qui a envoyé une poésie que nous reproduisons
plus loin, avait adressé les lettres d'excuses qui suivent :
« 1° S^^ D. A, Roque-Ferrier.
» Mon estimât amich y confrare, molt plasent me seriâ assistir à
les festes celebradores en Montpeller en lo sise centenari de sa Uni-
versitat, mes ab molta recansa vos ho dich, no m'es posible per no
trobarme be des de la influenza. Si Deu ho vol, vos enviaré un verset ;
poca cosa, mes preneune la bona voluntat.
» Gloria al gran rey En Jaume lo Conqueridor !
» Queda vostre de cor.
» Jacinto Verdaguer, Pbre.
» 15 maig. 90. »
« 2° S^^ D. A . Roque- Février.
» Mon respectable amich y S**' : no se si m sera posible animar
algun de nostres lletrats à venir â la festa de Don Jaume. Cutxet
esta invalit, Aguilo, Collell y Calvet malalts, Mateu estd espérant un
altre fill aquestos dias. D. Anton Rubio, fill del Gayter del Llobregat,
esta d'examens , com d catedratich.
» No obstant jo cerco y empenyo y tendrià un sentiment de que
CHRONIQUE 105
Catalunya no estigues representada en aqueix acte que tant Thonra.
» Demà vos tomaré à escriure, mentres tant quedo vostre de cor,
» Jacinto Verdaguer, Pbre.
» 22 maig. 90. »
« 3° M, Roque-Fevrier,
» Mon ilustre y estimât amich : avuy estan mes animats mos amichs
Catalanistes y espero que'n vindrau algunes, acompanyant los très
regidores de nostre ajuntament que venen à la festa del rey don
Jaume. Ajunt li envio un retall de la Renaixensa, que'n parla y un
pobre sonet meu dedicat al assumpto.
» Prengan V. la bona voluntat y cregam de cor ab tots vostés
» seu afîm y. y. a.
» Jacinto Verdaguer, Pbre. »
M. J. Collell s*était également excusé par la lettre suivante :
« Jhs. — AD. Alfons Roque-Ferrier.
» Barcelona, 23 Maig de 1890.
» Molt apreciat senyor meu y amich : quan, très anys ha, m'anun-
cidreu lo propôsit de dedicar â Montpeller un monument à la memoria
del ait Rey en Jaume, jo propos! no faltar à la solemnitat de la inau-
guraciô.
» Mes una llarga dolencia, que'm te quasi impossibilitat de tôt
treball me privan del gust, que quasi puch anomenar un deber sagrat,
de assis tir à la ceremonia, y cregau que es ab gran recansa de mon
cor, que tinch de renunciarhi. Aquest monument que axecau â la
memoria del nostre gran Rey, ha de ser com una pedra termenal ô
miliaria plantada en eixa gloriosa carrera del renaxement, sino de las
velles nacionalitats, del esperit que les informava, que es lo que'ns
mou als que cerquem la uniô dels pobles llatins en altres rahons que
en les dels costosos exércits y en les fortificacions de les fronteres.
La memoria que plantaréu en les antigues muralles de Montpeller,
sia també recordansa de la nostra germa.ndat.
» VuUau ser présent mos sentiments â tots los companys de Man-
tenensa y Uetrats de la vostra Cort de Amor, y vos, compteu ab la
seguritat del afecte que vos professa
» vostre aff™ SS. y AA.
» Jaume Collell pbre. »
On pourra juger, par l'extrait suivant de la Renaixensa de Barce-
lone, envoyé par M. Verdaguer, de l'intérêt que la Catalogne prenait
à l'inauguration du marbre de Jacme :
é
196 CHRONIQUE
« En las darrerîas d'aquest mes se celebraràn en la ciutat de Mont-
pellier solemnfssimas festas en conmemoraciô del sise 'centenari de
la fundaciô de la famosa Universitat de la ciutat llenguadociana.
» Los organisadors de la gran festa recordantse bé de que la historia
de Montpellier fou un temps llarch y gloriôs part de la historia de
Catalunya, han dirigit â varias corporacions y â distingidas persona-
litats catalanas efectuosas esquelas de convit, pregântloshi que hi
concorrin y procurin ferhi concorrer la major numéro possible de
catalans.
» També nosaltres desitjariam que aixis fos, y que, sobre tôt, dels
catalanistas n'hi anés una bona representaciô , puig apart del interés
que ja hem indicat te per nosaltres la festa montpellerina, s'hi reali-
sarâ un altre acte que per si sol exigeix lo concurs dels catalans.
Aprofîtant la ocasiô d'aquestas festas, la Comissiô encarregada de
posar una Idpida en recort del naixement de nostre gran rey En
Jaume '1 Conqueridor, en la ciutat que fou son gloriôs bressol, ha
decidit celebrar la festa de sa colocaciô en las murallas de la iorre
dels pins, lo prôxim dilluns de Pasqiietas Com diumenge y dilluns
son festas, es de creure que aquesta bona ocasiô decidirâ à alguns
catalans â assistir d la glorificaciô del gran Rey. »
{La Renaixensa, p. 3166, an. 1890, in-8°.)
«
La cérémonie de l'inauguration a été ouverte par un discours de
M. Roque-Ferrier. Ce discours rappelait que l'idée première du marbre
de Jacme revenait à^Verdaguer, qui composa à ce sujet une poésie,
lue aux Jeux floraux de la Maintenance de Languedoc le 18 juillet
1886».
Le palmarès des Jeux Floraux de Jacme-le- Conquérant et du Féli-
hrige montpelliérain a été ensuite proclamé. Pour le concours sur
Jacme, les récompenses suivantes ont été décernées : 1®' prix, à
M. W.-C. Bonaparte-Wyse, pour son ode triomphale en provençal
(reproduite ci-dessous); médailles d'argent, ex-œquo, à M. l'abbé Mali-
gnon (poésiereproduiteci-dessous)'etàM. Hubert Fabre, deLansargues
(Hérault), pour sa poésie la Roumansa dau rei Jaume e de dona
Tresa; mention honorable, à M. Alexandre Roux, de Laroque.près
Ganges (Hérault), pour VEfant del miracle, pièce en un acte et en
vers. Pour les sujets libres ou indiqués et le concours de versions
en langue d'oc, 41 pièces ont été citées, dont 18 avec récompenses.
Parmi ces pièces, on remarque plusieurs éloges de Montpellier, deux
éloges de Marseille et de la Provence, des traductions de Dante, de
Virgile, de Cervantes, etc. Les dialectes languedocien, provençal,
i Voy. le jouroal l'Éclair, n» du 27 mai 1890.
CHRONIQUE 197
gascon, dauphinois, roumanche, sicilien, macédo-roumain, etc., y sont
représentés*.
Un certain nombre de pièces récompensées et divers autres mor-
ceaux ont été ensuite lus, quelques-uns par leurs auteurs mêmes.
1 . Un monument pel rey don Jaume, par J. Verda.guer
Tria l'arbre mes bell de tes campanyes
Per l'estatua del gran Conqueridor,
Oh Montpeller : tu que en la mar te banyas,
Traune, gentil Mallorca, arènes d'or.
Dona '1 marbre mes fi de tes montanyes,
Valencia, y de ton pla roses y amor :
Tu '1 ferro virginal de tes entranyes,
Catalunya, y tos brassos y ton cor.
Voltau son ample front d'im raig de gloria,
Armau son bras del llamp de la Victoria.
Mes perqué 't veja d'Avinyé â Alineria,
Bella garba de pobles que ha lligat,
La estatua del gegant tallada sia
Del penyal mes altiu del Montserrat.
2. Lou grand Rèi, Ion bon Rèi ! Odo à la lausour de Vilustre
Moiint-pelieren, En Jaume lou Counquis taire, Per William-C,
Bona.parte-Wyse.
Composée au Manor of St-John's, Waterford (Irlande), en 1887.
« Le manuscrit de l'auteur avait l'épigraphe suivante : « Lo pus
bell princep del mon, é lo pus savi, é lo pus gracios, é lo pus dretu-
rer, é cell que fos araat de totas gents, que rey, que hanch fos : que
aytant com lo mon dur se dira lo bô Rey en Jacme Daragô (Chron,
de Ramon Muntaner, chap. VII, fol vi), accompagnée d'une abeille
sur une fleur, avec la devise : « Me pause ounte fleuris. » qui est celle
de M. Bonaparte-Wyse
Dôu grand Rèi, dôu bon Rèi.
D6u nistoun dôu Clapas, dôu famous Counquistaire,
Sarén tôutis iuei lis enfant, li coumpaire;
A la lausour dôu Rèi
D'Aragoun, Valènço e Maiorco,
Largaren nôsti cant, bèn amourousamen ;
* Voy. le journal Y Eclair, no du 28 mai 1890.
.> . -r.
10? CHRONIQUE
Coumblaren nôsti plaço e nôsti bastimen
De lausié, de roso e de torco !
Lou bon Rèi, lou grand Rèi !
Dedins aqueste siècle inchaiènt e trufaire,
Este tèms d'amaresso e de nègre desaire,
L'eisemple soûl d'un rèi
Tant grand coume lou sies. En Jaume;
0 mignot de Barcino, o car Mount-pelieren,
Me lusis i vistoun coume un azur seren,
A moun cor coulo coume un baume.
0, cantèn lou grand Rèi,
L'enfant de Mount-pelié, bèus amis, mi counfraire !
0 dono i clàri voués ! o melicous troubaire !
Car aquéu rèi di rèi,
Esbrihant jout l'or de si floto *,
Que l'istôri a quiha sus lou mai a ut cresten
Dôu renoum miejournau, es, veritablamen,
Nosto eros e coumpatrioto.
0, canten lou bon Rèi,
Qu'èro -uno souleiado en mitan de si fraire.
Un rivau soubeiran di mai fiers emperaire,
Di mai sublimi rèi ;
Que, fèr aigle, sus lis abisme
E li roco e li ro , voulant superbamen.
De vitôri en vitôri, esbaudissié li gen.
Sus soun pit la crous de l'Autisme.
Lou bon Rèi, lou grand Rèi,
Qu'èro di Catalan lou pastour e lou paire,
La gau di bèlli dono e di Muso l'amaire ;
Qu'èro i reiaume, i rèi.
Un nivas e pièi uno estello ;
1 nemi de la Glèiso un uiau cerulen ;
A milo e milo ami un delicious alen ;
Tour à tour, tron, voués cantarello !
1 « Havie bells cabells e rossos que semblavon fil d'aur », nous dit le chro-
niqueur d'Èsclot, dans son histoire de la Conquista de Mallorca, J'en suis
témoin, ayant en raa possession une mèche de ses cheveux très authentique,
que M. Hernandez, Tarehéologue bien connu de Tarragone (qui la coupa
lui-même sur la tête du roi à l'occasion de l'ouverture de son tombeau à Poblet),
voulut bien m'offrir. (Note de M Bonaparte- Wyse.)
CHRONIQUE 199
Loii grand Rèi, lou bon Rèi !
La floup di cavalié, lou lum dis escalaire,
Di Maugrabia lou dôu, di catau l'aclapaire,
La perlo entre li rèi ;
Au councile, au coumbat font flôri,
Di païs souleious li serre, lis aven,
De la mar di Latin li flot, li caraven,
Fasièn tôuti clanti sa glôri.
Lou grand Rèi, lou bon Rèi,
Mai bèu qu'un bèu paumié, dret, savi, de bon aire,
Qu èro ama de soun tôms coume un fiéu de sa maire ;
Un rèi subre li rèi.
Qu'à travès la mar e la terro
Castelan e prélat seguissièn touis ensen,
A la gàrdi de Dieu sèmpre invinciblamen.
Au crit de soun « Desperto ferro I »
Lou bon Rèi, lou grand Rèi I
Coume un pinas brounzènt au mistrau boulegaire,
L'aguste tregen siècle, en tout constat e caire,
Resounavo dôu rei :
I nacioun de raço latino,
D'eila li Dardanello i Pilas Erculen,
Soun regard enaura, soun iue paradisen
Ero un calèu dins l'escurino.
Lou grand Rèi, lou bon Rèi,
Noun calas de canta, dôu Peirou li trevaire !
Fasès boumbi lèu-lèu fin qu'i toumple de l'aire
Lou renoum dôu grand rèi
D'Aragoun, Maiorco e Valènço,
Que soun fres souveni, sempiternalamen,
Espandira 'n perfum, un dous rebatrosen
Dessubre soun nis de neissènço !
Lou bon Rèi, lou grand Rèi !
Sa glôri espetaclouso aura sèmpre un esclaire,
Tant que lou Mount-serrat dentelejara Taire !
E, rèi entre li rèi,
Soun noun sara cen de l'aimenço
De Barcino la bello e di Mount-pelieren,
Tant que lou soulèu d'or, sus soun trône azuren,
Is ome fara lumenenço !
-i»!-'-
200 CHRONIQUE
MANDADIS A JACINTK VERDAGUKR
Pouèto, grand pouèto !
A tu premiè moun odo en l'ounour dôu grand rèi,
Que belavo soun pople, estent jouve, estent vièi...
Qu'èro perèu pouèto,
Se coumplasènt dedins li vers.
Li troubaire d'elèi soun de raço reialo :
An, coume li grand rèi, au cor de bèllis alo
E counsacre aquest cant à tu, grand Verdaguer !
3, Au Rèi Jaume d'Aragouriy par M. l'abbé C. Malignon
S'amount, quand vèn Sant-Jan, s'entre-vèi fiô d'estello,
Que, dins Ter fasènt farfantello,
Lampejon un moumen, pièi s'esperdon subran,
Manco pas d'estello lusènto
A l'iue badant toujour presènto,
Pourgissènt àplasé soun rebat soubeiran.
Coume uno estello majo, au clar cèu de l'istôri,
Rèsto giganto, ta memôri,
0 Jaume : sies-ti pas lou rèi Conquistador f
Parié titre es proun de requisto
Pèr jamai se perdre de visto,
É pèr cencha toun noum d'uno auriolo d'or.
Mai pèr nàutri es pas tout, aquéu titre de marco :
Se tant d'amour chascun te marco,
Es que sies clapassié, Jaume ; vaqui perqué
luèi la ciéuta mount-pelierenco,
Urouso maire, en cor atrenco.
Autour de ta bressolo, e cansoun e bouquet ;
E perqué, de pertout, clantisson crit de joio.
Que t'ôufris elo, pèr beloio,
Au grand jour festenau qu'enauro à soun enfant.
Sies dôu Clapas, o moun bèu Jaume ;
A vans d'ajougne toun reiaume,
Es eici qu'as passa, jouinet, ti premiès an.
Es eici lou palai mounte ta pauro maire,
Souleto, liuencho de toun paire.
Te bressavo, enfantoun, pèr çal4 soun mau-cor.
CHRONIQUE 201
r as vîsca ta primo jouvènço,
E, pèr t'ensigaà la valènço,
Te counûsè, ta maire, à Simoun de Mount-fort.
Pèire toumbo à Muret e ta maire es à Roumo :
L'Aragoun alor rèi te noumo
En plaço de toun paire, e tant lèu que Simoun
N'en aprend li novo, te mando
Au légat que te redemando,
E partiguères pièi au pais d'Aragoun.
Eres bèn jouvenet, ansin quand nous quitères,
E que, de forço, counquistères
Toun reiaume espagnôu, que dous ouncle marrias,
Vesènt toun âge e ta fiblesso,
Gueiravon : ta soulo prouësso,
Derrôutant si calcul, te sauvé de si las .
Es pau après Muret, qu'en l'ardour que t'aflamo,
Escriucelères sus ta lamo
Ta deviso inmourtalo, o rèi: aVincre o mouri! >y
E l'as coumplido touto entiero :
Jamai, en piano bataiero.
Desastre n'es vengu toun cor endoulouri.
Counquistant toun reiaume, em lou sang de ti veno.
Ferme, alor, tenguères li reno.
E quand li pus catiéu, te vesènt rèi titra,
Te jurer on pas e councôrdi,
Bèn mens pèr ta misericôrdi.
Que pèr ta glôri, à tu li faguères vira.
Seculàri nemi de tôuti lis Espagne,
Li Mouro tenièn la campagno,
Toujour Içst à doumta li Crestian si vesin.
Déjà, luchant pèrsapatrio,
Lou rèi Ferdinand de Gastiho
A vie, souvènti-fes, batu lou Sarrasin.
En Jaume, de segur, istara pas en resto
E noun fugira la batesto.
D6u tèms que soun cougnat, dins sa bouiènto ardour,
Rambaio lou creissènt sus terro,
le déclarant nouvello guerro.
Eu sounjo, dins sis isclo, à lou jougne à soun tour.
202 CHRONIQUE
Vès-lou I passant la mar, s*esmarrant vers l'estrange,
S'en vai au païs dis arange,
Plen d'ardidesso, abordo, e, Jeu, l'espaso au poung,
Après rùdi courabat s'eraparo
Di vilo -e fort di Balearo,
E Maiorco e Minorco à sa courouno apound.
S'en torno triounflant, e PAragoun Taclamo.
Mai en repaus tant bono lamo,
Noun se rouvihara, segur, dins soun fourrèu.
Valènço, la gènto Valènço,
Tento de longo sa valènço
E partis pèr n'ana cousseja Tlnfidèu.
Rèn ie pôu rèsisti : e pau à pau tout croulo,
Barri, tourre, annado emai foulo ;
Enfin tant cranaraen se dis que bataiè,
Que pèr Sant-Jôrgi lou prenguèron
Si soudard, e qu'atribiièron
Tant famouso vitôri au patroun di guerriè.
E Valènço fugue prouvinço aragouneso.
0 Jaume, après tant richo preso,
Aviès gagna toun noun de rèi Conquislador ;
Eres fidèu à ta- deviso,
E l'istôri, que tout reviso,
Souto aquéu noum d'elèi t'a liéura passo-port.
Mai, s'ères pèr toun pople un valent counquistaire,
Eres tamben amenis traire
E juste e religions e de longo au devé.
A Valènço la Musulmane,
Fères presica fe crestiano ;
La doutères d'evesque e de prèire à souvet.
»
Jusquo dins ti desbord ta fe demeuré vivo,
E, pèr tancà l'ardour cativo
Que transissié toun cor, en cerco d*un èr pur,
Penitènt, quitères lou mounde.
Avide de trouva 'n abounde.
Au founs d'un mounastié, de perdoun, de bonur.
Oublidaren pas, iuei, ta noblo bènfasènço :
Mount-pelié, per dré de neissènço,
Ero tiéu, d'Aragoun èro fièu e coumtat.
CHRONIQUE 203
Après pau tèms, lou deliéurères,
Au Lengadô lou rendeguères,
E mai i'aguères voués, o celebro ciéuta ;
D'aqui tant qu'un bèu jour, coume flume e ribiero,
Deverson sis oundo pleniero
Pèr coungreia l'ampleur de l'inmense Oucean,
Emé ti sorre miejournalo,
Pèr unioun douço e leialo,
Pensères de te jougne au mage pople franc.
le dounères toun sang, mai, pèr ie faire arengo,
Vouguères counserya ta lengo.
Sauva lou parauli dôu bon vièi tèms passa.
Franco, t'aiman de cor e d'amo,
Pèr t'apara sian tout de flamo ;
Vengon li marrit jour, contre toun sen preissa,
Fidèu nous troubaras sènso pôu ni reproche,
Sèmpre, de tu marcharen proche,
Laissent lis esprit court à si deliramen.
Noun, es pas tu. Patrie, o maire,
Que de nàutri as pouscu mau-traire ;
Hou sabes que t'aman, te sufis que t'amen.
Mai, tu, ciéuta d'elèi, s'a l'euro d'iuei t'agrado
D'èstre vilo franceso astrado,
A Jaume, de segur, deves un grameci.
léu, la vese, ta gratitude.
Sus lou front de ti multitude,
En aquéu jour seren, gaiamen trelusi,
E vaqui perdeqné, fier de ta remembranço,
Enfant d'Espagno, enfant de Franco,
Urous, iuèi, t'oufrissèn lou maubre de Tounour,
E Lengadoc e Catalougne,
Ardit ! fan clanti si zambougne
Pèr enaurà toun noum e lausa ta valeur.
0 Jaume, ligaras mai que mai lou deus liame
Que rend fraire deus pople flame !
De Pirenèu, n'i'a plus ! Di mountagno, en cantant,
Nosto voués, trespassant l'auture,
Crido pèr cime e pèr planuro :
— « Vivo la lengo d'O î Vive lou Catalan!...»
,-tt
204 CHRONIQUE
4. Strophes extraites de la cantate écrite en Vhonneur de Jacme-le-
Conquérant, poésie languedocienne couronnée en 1889 à la fêli
hrée de Lengarran, par M. Xavier Peyre, de Bédarieux.
Jaume devotament aimava
La vila à-n-ounte era nascut:
A Moimt-peliè tout lou menava,
Disoun lous que Tan counougut,
Maugrat lou sagan treboulaire,
Qu*aviè'mé lous Mùrous d'enlai,
La dessoublidet pas jamai :
Lou fil aimet toujour sa maire.
Dins lou prince que festam ara,
A part lou sourdat aguerrit
E lou grand gênerai encara,
l'aviè tabé lou bel esprit,
Lou savant que de pouësia
Aimava de se regalà ;
E, quand vouliè s'en enmesclà,
Fasiè pas ges de gabusilha.
E coussi la cieutat famousa.
Que de tout tems a jitat lum,
Demourariè dessoublidousa,
D'un fil que menet tant de fum ?
Sus unas de sas permenadas,
Per de que n'a pas mes quicom
Que se deviste de ben lion?
Série tems après tant d'annadas.
D'aquesta festa un pau tardieira,
Au grand felibre catalan.
N'en devem l'ideia premieira ;
Es el qu'a bailat lou balan.
loi, Verdaguer, lou fier can taire,
A fach segui sa lira d'or,
Emb el per cantà de bon cor,
A tour, Jaume lou Counquestaire I
Pioi que s'agis d'un tant grand prince,
Cau fa las causas grandament.
Aquel moucel de malbre mince,
CHRONIQUE 205
Aco's bon per en atendent ;
Fau pas una peira fragilla,
Fau un mounument defenit,
Siegue de brounze ou de granit,
Digne d'aquesta nobla vila.
Mais carguen pas à la bravoura
Un abilhage trop destrech ;
Una estatua, à la bona oura !
En Jaume d*Aragoun i'a drech.
La plaça n es touta marcada,
En lioc mai série pas milhou :
Louvis Quatorze es au Peirou,
Que Jaume siegue à TEsplanada.
Refrin
Après tant d'ans passats de fila,
Que Jaume âge soun ped-estal,
Plantât au pus bèu de la vila !
Que lèu lou vegem à chival.
Estudiants, jouinessa galoia
D'aquestas quatre Facultats,
0 vautres que menas la joia
Per tout à-n-ounte vous moustràs,
Venès, mesclàs-vous embé nautres
Per cantà Jaume d'Aragoun
E mountà naut lou diapasoun.
Tout Mount-peliè comta sus vautres.
Véni, lusenta Estudiantina,
Tus tabé, seguis lou courrènt.
Enfants de la raça latina,
Cantàs Jaume lou Counquerrent.
Touta aquesta vila s'apresta
A rendre un oumage pious
— Degus deu pas estre de resta —
A Jaume lou Vitourious.
Dins lous acesses de la febre,
Aicj tout crida à plen gousiè :
— « De Maria de Mount-peliè,
Viva l'enfant vint cops célèbre ! »
14
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206 CHRONIQUE
E, zou ! couraetas e musetas !
Zou, lou tambourin e l'auboi !
Que se parle dins las gasetas
De la festa que fasem ioi I
5 . A Mount'pelié, sus lou sieisèn centenàri de soun universita, par
L. M. Bard. Épigraphe ; « Lou passa ensegno l'aveni. »
Ero la guerro aièr, e lou canoun brutau
Fasié trambla lou sôu, desoundrant lis oustau,
Chaplant lis orne pèr centeno.
Aièui, en pleno pas, la joio e li cansoun,
Mount-pelié, de toun cèu esbrandon li ressoun
E proumeton d'ouro sereno !
Pèr s'ajougne à ti fèsto, à toun trefoulimen,
S'amano à toun entour, de vint despartamen,
Dins uno coumuno alegrio,
Tout ço qu'aimo l'utile e lou vrai e lou bèu,
Tout ço qu'aimo d'amour aquel double simbèu :
La grando e pichoto patrie !
Car lou pople es fidèu, maugrat si divisioun,
I grand revieutamèn, i vièhi tradicioun,
A la poulpro de soun istôri !
Quand un d'aquéli jour se lèvo, un sant desbord
Lou barbèlo, l'estrèn, e saludo em tresport
Lou revieure d'aquéli glôri !
Alor, vengue de biôu ! Alor, fau que l'auboi,
Maride si refrin au tambourin galoi !
Zou I de danso e de farandouno !
Pèr iue jour à l'oustau, laisse peno e soucit,
E s'afresco lou sang dins d'ouneste plesi,
Car la joio veraio es bouno I
Car la joio, l'a dich un de ti majourau *,
De l'amo es lou besoun e dôu cor es la sau.
Quand lou pople ris emai canto,
Counèis ges de maucor, tout à fiéu d'aigo vai ;
Pièi quand s 'es esbaudi, mai drud, torno au travai,
Plen de voio fourtificanto !
i Antonin Glaize, Li sèt vertu de la joio.
CHRONIQUE 207
E vejaqui perqué, bourgés, oubrié, pacan,
Ari'ibon d'en pertout, à Tapèl di Decan,
Pèr célébra lou centenàri
De rUniversita qu'a 'spandi toun renoum I
Es pèr glourifîcà, pèr enaussa toun noum
Que s'amoulounon dins ti barri I
Quand, pièi, estrambourdà, farandoulejaran,
Quand si crid, si vivat dins toun cèu vibraran
Coume un tron que boumbo e reboumbo J
Li doutour, li letru qu'en glôri t'an aussa,
Qu'i cimo de la sciènço, en luchant, t'an quiha,
Tresanaran dedins si toumbo !
E la Gleiso, perèu, elo te benirà !
Car toun escolo es nado à soun alen sacra ;
Es fièro de l'agué creado !
E souto soun afiat, au sortre de si man,
De longo a couneigu que d^irous lendeman,
De jour sens ges de mau-parado!
E nautre, li felèn dis encian troubadour,
Venèn, la flamo au front, d'Espagno e dôu Miejour,
Lauseja tis obro inmourtalo,
T'auboura mai-que-mai, car sies un di fougau
Ounte a recaliva l'èngèni patriau
E flouri la lengo meiralo !
Nous abéura venèn au pouèti rajôu,
Ounte an déjà begu, dôu tèms dis grans aujôu,
Li mèsfcre de la pouësio
E dôu cop te prouva qu'oublidarèn jamai
Qu'empures aquel fiô crèmadis tournamai,
En ounourant nôsti sesiho!
Es ta glôri qu'aièui s'alargo e bat soun plèn !
Mostro au pople afouga qu'as encaro d'alèn,
Que te trufes di mau-disènço !
Qu'à v6u lis escoulan, sus ti banc empreissa,
Te fan un aveni digne de toun passa.
Digne perèu de sajouvènço I
Mai-que-mai, fai-te bello I Alando ti pourtau !
En l'ounour de tis oste, enflouris toun lindau !
..'^ '
208 CHRONIQUE
E que ta courouno coumtalo,
Esbrihaude lis iue coume au tèms di Guihèm
E cantaren, ravi, Talleluia maièn
Que marco ti triounfle, o rèino miejournalo !.
6. Vers en l'honneur de Jacme-le-Conquérant , par M. Hippolyte
GuiLLiBKRT. Datés d'Aix-en-Provence, le 25 mai 1890.
Ounour à Jaume, au Counquistaire,
Qu' esbleugissé Tage miejan ;
Que pèr lou pople e si can taire
Fugué subre-nouma lou Grand.
D'autres morceaux, qui n'avaient pas de rapport direct avec l'inau-
guration du marbre de Jacme, ont été lus à cette cérémonie : la Chan-
son de VEnfant, poésie de M. Henri de Bornier, en français ; Jeanne
d'Arc, poésie de M. Martin, de Nimes, en provençal; Li Moitsco,
conte en prose provençale, par le même.
E.-Daniel Grand.
Le Gérant responsable: E. Hamelin.
Montpellier, Imprimerie centrale du Midi. — Hamblin Frâres.
LÉGENDES PIEUSES EN PROVENÇAL
Parmi les manuscrits jadis volés dans nos bibliothèques, dont la
France est rentrée en possession, grâce au zèle et aux habiles négo-
ciations de M. Léopold Delisle, figure unms. provençal, ainsi décrit
dans le Catalogue des mss, des fonds Lihri et Barrois, p. 119 :
« Nouv. acq. franc. 4505 (Libri, 107).
» LÉGENDES PIEUSES, en provençal Volume en parchemin.
44 feuillets. 187 millim. sur 130. Ecriture à longues lignes du xiii® siè-
cle. Une note frauduleusement ajoutée au bas de la dernière page :
« Iste liber est conventus Sancti Dominici de Mantua », permet de
supposer que le volume a été dérobé dans une de nos bibliothèques.
Le manuscrit a perdu les cinq feuillets du commencement*, et peut-
être plusieurs cahiers à la fin, ce qui en rend jusqu'à présent l'identi-
fication très incertaine, comme l'a fait remarquer M. Meyer dans la
Uomania, t. XII, p. 341. — Reliure en ais de bois, avec dosen cuir 2. »
Ce ms. a été en effet volé dans une de nos bibliothèques, et cette
bibliothèque n'est autre que celle de Carpentras. Les 44 feuillets qui
constituent le ms. 107 de Libri ont été arrachés au commencement
du ms. 461 de Carpentras, dont la reliure, qui n'a pas été réparée
depuis, conserve la trace trop évidente de cette mutilation. J'avais eu
de ce méfait un vague soupçon dès le premier jour (il y aura bientôt
dix ans) où j'ai pu examiner ce dernier ms., grâce à la comparaison
que l'extrait publié par M. Paul Meyer ^ du ms. Libri permettait d'é-
tablir entre les deux, au point de vue de la langue et du contenu ^. Ce
> C'est neuf feuillets, et non cinq, qu'il a perdus au commencemeDt, comme
on le verra plus loin.
^ Cette reliure est récente. Le titre, enlor, sur le dos, est Vite | di \ santi
et, plus bas, in provenzale.
3 Recueil d'anciens textes^ p. 136.
* Mon soupçon pourtant, je dois le dire, était contrarié par l'absence, dans
Textrait publié par M. Meyer, de l'un des traits caractéristiques les plus fré-
quents du texte de Carpentras, je veux dire de la forme fe?i {= fidem), due,
comme plusieurs autres qu'on y remarquera, à riafluence analogique de mots
en n instable, tels que ren, ben, etc. (cf. fan, mercen, sen, min, sin, etc.,
TOME IV DE LA QUATRIÈME SÉRIE. — A vril-Maî-Juln i890..
15
'.i,
208 CHRONinuF.
E que ta courouno coumlo! . . . '*.^ ^^^^^^^ ^"^
Esbrihaude lis iue coume nv ^■'''■'' ^^ ^''^' ^"'"
E cantaren, ravi, l'all.l.; ■-"^ ^^ ^^^^^^^^''^ l'^"^'
Que marco ti tiiouiiiio. ■ ^ -..Miuicricée par moi,
-. 'îounôes par M. I)e-
e. Vers en l'hoiv^r... -^"^ ^^^ reconnut idon-
GuiLLiBKRT. ' ■ '1'/" ^^'^^^^-^^ présente au
: ^liliots, nombre de ceux
<•■ •• îiiljlor.
.: i-iîi'Mno, grâce à l'obligeance
. ; .''S. avoir à la fois sous les
l'i.^ir; ot aucun doute ne me
. . Lii)ii. C'est bien, comme je l'ai
■ i i .ivoo une certitude absolue, un
■.' ,: ^ciiiî-ts. aiiaehé au commencement de
--. .1 :uio:"otôs rt'oomnicnt en chiffres arabes, dont se
.>. i/ibri. que j'appellerai désormais ms. de Paris, se
. -> ..Kiiao et peuvent paraître au premier abord former un
.v'i, j;r;ioe au soin qu'on a piris de gratter les chiffres
, 10 i'.uioiouuo foliotationqui n'étaient pas déjà devenus illisi-
i.i.îi »u ou distingue encore çà et là, plus ou moins vaguement
..>. de Carpontras se compose dans son état actuel de 123
. v-,v. la tVuillo do garde, en papier, sur laquelle on lit, d'une
.»».u.o».\ oo qu'il semble, do Tavant-dernier siècle: DcmonsLraUo |
Cvi;: >\ï<i'ijr. I aUquot, a été comprise dans la nouvelle folio -
v„. y\\ii\ vicvvf, *r, mi, si)^ la forme fe se reucontraot au contraire trois
■. . il 1^ \\ pul»li\Mlion de .M. Meyer. Mais il se trouve justement que le ms.
....• -i Si'uloauHit l'/i est ou parait exponctuée, ce que M. xMeyer, contre
: lalniuiU», a iu\i;iigt' île constater. Voir ci-après, p. 267, n. 1 et 4.
' \iii: MU' ioH folios actuels il, 12, 20, 21, 22, 35, 37, 43, il ost encore
■ . î.«:»» d»' doviuor, do reconstituer à l'aide de ce qui r<jste apparent (37), ou
• II.» lU» ihsliii^ui'r entièrement (22, -43; les chiffres primitifs xx, xxj, xxix,
\\\. wvi. nlùijt "^'^'j' l'J* — Di*"5 'e passage de la Homania cité plus haut,
>( l'.iiil .Moy»'r sis'uaie, parmi les numéros de l'ancienne foliation qui ont échappé
,.i malla^i', lo n" i i, lequel, dit-il, correspond au folio 9 actuel. Ce folio 9
« .1 Mï ooulruiiv, aujourd'hui du moins, l'un de ceux où l'ancien chiffre a été
:.< i>la.i ^nitU'. Maison y distingue encore trois petits traits qui probablement
juiiiioiihiioiil autant d*/. Or le chiffre primitif était certainement xviij, comme
tl lo.iullii dii lu l'oncordanoc d<)s autres indications, et non xiiij, que M. Paul
W«»^ui' avuil cru lin*, d'où sou erreur, répétée par M. DeUse, sur l'étendue de
U liKuiio du l'ouniieacement.
LEGENDES PIEUSES 211
tatioQ en chiffres arabes, ce qui réduirait à 122 le nombre effectif des
feuillets du ms., si un même numéro (60j n'avait pas été inscrit sur
deux feuillets consécutifs.
La lacune du commencement, comblée, en partie seulement d'ail-
leurs, par le ms. de Paris, n'est pas la seule qu'on y remarque ; il y
en a plusieurs, plus ou moins considérables, à Tintérieur, et une
encore à la fin, résultant toutes, comme la première, de mutilations
récentes, postérieures dans tous les cas à la reliure actuelle, — qui
ne paraît pas très ancienne *, — comme l'indique clairement le misé-
rable état de celle-ci. La plus considérable de ces lacunes (26 feuil-
lets) se trouve entre les folios actuels 22 et 23. Provient elle aussi
d'un vol de Libri?
Grâce aux indications fournies par les restes encore nombreux ^ de
l'ancienne foliotation, par les feuillets doubles du milieu des cahiers,
qui devaient en comprendre chacun quatre, soit huit feuillets simples,
et par ce qui subsiste encore des numéros d'ordre des chapitres, on
peut arriver sans trop de difficulté à se représenter Tétat primitif du
ms. et à marquer avec précision la place et l'étendue des lacunes.
C'est ce que nous avons essayé de faire dans le tableau suivant^.
!«' cahier. F©* j-viij. Manque entièrement.
^^ , . ( F° ix. Manque.
ca le . ^ — [x-xvj] = Ms. de Paris f^» 1-7
3** cahier . — [xvij-xxiv] 8-15
4« cahier . — [xxv-xxxij] 16-23
5« cahier. — [xxxiij-xl] 24-31
6« cahier. — [xlj-xlviij] 32-39
* Elle o*est pas, d'un autre côté, postérieure aux neuf premières années
du XVIII* siècle, car sur le plat intérieur sont collées les armoiries gravées
d'André Joseph de Brancas, personnage que l'on sait être mort ea 1709, à
Beaucaire, dont il était gouverneur depuis 1697.
' Dans le ms. de Carpent:as seulement, car celui de Paris, comme on Ta
déjà remarqué, n*en a conservé que des traces rares et peu distinctes. Dans
celui de Carpentras même, on n'en trouve plus aucune à partir du f* 106 de
la nouvelle foliotation, probablement parce que les anciens chiffres romains, au
lieu d'être seulement plus ou moins entamés par le couteau du relieur, comme
il est arrivé à plusieurs des précédents, ont été à partir de là entièrement
rognés.
' J'imprimerai en italique les numéros d'ordre afférents aux feuillets per-
dus, en romain ceux des feuillets subsistants, sauf à placer ceux-ci entre cro-
diets, en tout ou en partie, selon qu'ils auront disparu en entier, par grat-
tage ou autrement, ou qu'ils seront seulement mutilés.
î
2 12
7« cahier. )
8« cahier.
9® cahier,
10« cahier.
ll« cahier.
12« cahier.
13* cahier.
14° cahier.
15« cahier. S —
16" cahier.
]?• cahier,
(Complet.)
LEGENDES PIEUSES
— [xlvix-lj]
— [lij-liij*] (feuillet double du milieu)
— liv-lvj = Ms. de Carpentras f*»
— Ivij'lviij. Manquent.
— Iix2
— Ix-lxi (feuillet double du milieu)
— Ixij'lxiv, Manquent.
— Ixv-lxxij
— [Ixxiij'lxxx]. Manque.
— Ixxxj -Ixxxvij
— Ixxxviîj. Déchiré^.
— IxxxiX'lxxxxoj. Manque entièrement.
— Ixxxxvij'Civ . là.
— cv-cxij\ Id.
— cxiij (^). Manque.
cxiij *-cxiv
cxv-cxvj (feuille double du milieu)
— cxvii-cxviij
— cxix . Manque
— cxx. Manque .
— cxxj- cxxij
— cxxiij-cxxiv (feuille double du milieu). .
— cxxv-cxxvj
— cxxvij
— cxxviij
— cxxviij (bis;
— cxxix
— cxxx-cxxxj
— cxxxij-cxxxiij . .
— cxxxv^.
40-42
43-44
2-4
20
21-22
5-12
13-19
23-24
25-26
27-28
29-30
31-32
33-34
35
36
37
38
39-40
41-42
43
* Pour ce qui peut eucore se distinguer ou se deviner des numéros x à liij
(= Paris 1-44), voir ci- dessus, p. 210 n. \.
2 Feuillettransposé, ainsi que les deux quisuivent, depuis la mu lilaiion dums.
'^ U reste deux minces fragments du bord extrême de la marge.
* Ce no ou l'un de ceux qui précédent, à partir de Ixxxvij, a du être répéié
par erreur, comme il est arrivé plus bas pour quatre autres. De là l'irrégularité
dans la série des nombres et l'anomalie que présente le feuillet double intérieur
du 15^ cahier dont la première partie devrait porter un nombre pair et qui
est foliotée cxv, au lieu de cxvj .
5 Sic, au lieu de cxxxiv, erreur qui compense celle du feuillet 2 de ce cahier
et laisse par conséquent subsister l'irrégularité signalée dans la note précé-
dente.
19* cahier.
LEGKNDES PIEUSES
— cxxxvj
— cxxxv[ij]
— cxxxvi[ij]
18® cahier. ( — cxxxvi[iij]
— cxxxix*
— cxxxx
— cxxxxj'Cocxxxij, Déchirés 2.
— ''*i'y • [ Déchirés 3
— cxliv . )
— [cxlv?]
— cxlv (bis*)
— cxlvj
— cxlvij-cxlix. ,
— cL Déchiré ^
— clj-clij
— cliij-cliv
— clv
— clvj
— clvij
— clviij-clxv
— clxvj-clxxiij
— clxxiiij-clxxxj
— clxxxi[ij].. .
— clxxx[iij].
— clxxx[iv]
— clxxxv
— clxxxv[i]
— clxxxv[ii]
— clxxx [viii]
— clxxxix. Déchiré ^
20« cahier.
21 • cahier.
22« cahier.
23« cahier.
24« cahier.
213
44
45
46
47
48
49
50
51
52
53-55
56-57
58-59
60
60 bis
61
62-69
70-77
78-85
86
87
88
89
90
91
92
* Ce feuillet devrait porter le n© cxxxx ; l'un des 4 nombres précédents,
136, 137, 138 ou 139, a donc été répété à tort.
'Il reste à chacun un morceau de l'extrémité supérieure de la marge. Quelques
lettres se lisent encore sur le premier débris, moins étroit que le second.
* Reste à chacun un morceau, en forme de coin, du milieu de la marge ou à
peu près. On y lit quelques lettres et même quelques mots, mais d*où il n'y a
rien à tirer pour l'intelligence de ce qui est perdu.
* Ce peut être aussi bien l'un des nombres compris entre 140 et 144 inclus,
qui a été répété, puisque le feuillet précéden* a perdu son n« d'ordre et que
quatre antres ont disparu avant ce dernier.
^ Il ne reste que deux tout petits et très étroits morc'^aux de la marge.
B Reste UQ morceau de la marge, vers la partie supérieure, où se voient
seulement quelques lettrep.
i
25* cahier.
21 i LEGENDES PIEUSES
— clxxxx 93
— cxc (bis) 94
— clxxx[xj] 95
— clxxx[xij] 96
— clxxxxi[ij] 97
— clxxxx[iiij] 98
— clxxxxv 99
— clxxxxvj 100
— clxxxx[vij] 101
— clxxxxv[iij] 102
, — [clxxxxix] 103
26* cahier. ^ _ ^^ ^^4
— ccj 105
— [ccij-cciv] 106-108
27« cahier. — [ccv-ccxij] 109-1 16
i— [ccxiij-ccxix] « 117-123
— ccxx. Déchiré ou coupé » .
Entre ce 28e cahier et la feuille de garde, il y a la place d'au moins
un autre cahier, qui a dû être enlevé, mais avec plus de précautions
que ceux du commencement, car la reliure n'est pas de ce côté aussi
maltraitée.
Ainsi, en admettant, comme nous le supposons, que le ms. dans son
état primitif se composât de 39 cahiers complets, il devait avoir
232 feuillets, dont il reste aujourd'hui 167, ainsi répartis:
Paris : 44 ;
Carpentras : 123 ;
Il en aurait donc perdu 65.
J'ai parlé plus haut de n°» d'ordre de chapitres, encore subsistants.
On remarque, en effet, de loin en loin, sur la marge gauche du verso
de quelques feuillets, tant du ms.de Paris que de celui de Carpentras,
à la hauteur de la première ou de la seconde ligne de la page, des
chiffres romains qui ont évidemment cette destination. Ces chiffres
n'apparaissent que lorsque un nouveau chapitre commence, soit sur le
verso où ils figurent, soit sur le recto suivant, c'est-à-dire sur l'une ou
l'autre des deux pages que le lecteur a simultanément sous les yeux,
1 L'extrémité de la marge subsiste dans les deux tiers de sa hauteur; une
ou deux lettres au plus des dix dernières ligues sont encore apparentes, mais
seulement au rectoavec netteté; au verso on n'en distingue plus aucune, bien
qu'il soit évident, par les traces qu'elle a laissées, que l'écriture se continuait
jusqu'à la fia de la page et que le manuscrit ne se terminait pas là.
LEGENDES PIEUSES 215
et ils se suivent dans un ordre régulier. C'est ce que montrera la table
suivante, dans laquelle je place entre crochets et les numéros qui man-
quent entièrement aujourd'hui pour une cause quelconque, et les
chiffres retranchés par le couteau du relieur des numéros partielle-
ment conservés.
[1]. Le premier cahier, dans lequel ce n° devait se trouver, avec la
légende correspondante, a disparu en entier.
[11]. Même observation.
[III]. Folio ix v° (disparu). — Passio imaginis Domini nostriJesu
Christi, F° x r® (= Paris 1 r»),
[IV]^ F° xvij v°. — Chapitre sans rubrique. Ibid, (== Paris 8 v°).
[V]*. F°xxv°. — In dedicatione saacti Michaelis , Ibid. ( = Pa-
ris llv°).
VI. F° XXV v°.— In festivitate sancti Pétri. Ibid. (= Paris 16 v®).
VII. F* xxxiij v°. — In commemoratione sancti Pauli, Ibid, (=
Paris 24 v^).
[VIII]*. F° xlj v*». — Passio sanctarum virginuni Fidei, Spei et
Caritatis et ma'ris earum Sapientie. F° xlij r° (= Paris 33 r<»).
[VIIII]*. Fo Ij vo.— Obitus sancte Petronille et Felicule. F° lij r» (=
Paris 43 r^).
[X]2. F** liij v^^'sss Paris 44 w°).— Passio sancti Adriani, Foliv r^
(= Carpentras 2 r°) .
XI. Fo Ixviij vo. — Vita sancti leronimi. Ibid. [= Carp. 8 Vo).
XII. Fo Ixxj vo. — Passio sancti Maximi. Ibid. (= Carp. Il vo).
XIII. Fo Ixxij vo. — ? — Huit feuillets (Ixxiij-lxxx) manquent après
celui-ci. C'est au recto du premier de ces huit feuillets que com-
mençait ce chapitre XIII, perdu en entier.
[XIV]. Au verso de Tun des feuillets perdus qui précédaientlc n<*lxxxj
(= Carp. 13). — [Passio sancti Thomœ']. Manquent de ce chapitre le
commencement et la fin. Ce qui en reste occupe les folios Ixxxj-Ixxxvij
(==Carp. 13-19).
[[XV] et [XVI]. Ces deux chapitres, dont le sujet ne peut être de-
viné, occupaient, avec la fin de la vie de S. Thomas et le com-
mencement de celles de S. Simon et S. Jude, les feuillets Ixxxviij à
cxij, dont la perte a produit la lacune la plus considérable de notre ms.
[XVII] Au verso d*un des feuillets perdus qui précédaient le n° cxiij
(sas Carp. 23). — [Passio sancti Simonis et sancti Judœ,] Manquent
de ce chapitre le commencement et la fin. Ce qui en reste occupe les
feuillets cxiij à cxviij.
*■ Gratté, mais se distingue encore sous le grattage.
8 L'angle du folio liij, où devait se trouver ce n© d'ordre, est déchiré.
i
•-» .<-
2 I 6 LÉGENDES PIEUSES
[XVIII]. Sur Vun des feuillets perdus cxix ou cxic.— [Pas^eo sancU
Andreœ'].F'' cxxj r» (= Carp. 29 r°). I.e commencement fait défaut
[K]VIIII. F° cxxxvj v°. — Passio sancti Jacohi. F° cxxxvij r°
(= Carp. 45 r°).
[XXJ. Sur l'un des folios disparus entre cxl et cxliij. — Le peu
qui reste de ce chapitre au recto du folio cxliv ne permet pas d'en
deviner le sujet.
[XXI]. Po cxliij s^ (disparu). - Sancti Johannis evangeliste.
po cxliv ro (= Carp. 50 r°).
[X]XIÏ. F*> cxlv v°. — Vita sancti Silvestri. F« cxlvj r<» (= Carp.
52 ro).
XXIII. F» clvij v«. — Passio sancti Bartolomei apostoli Ibid. (=
Carp. 61 vo).
[XJXIIII. F° clxiv vo.— Passio san-li Mathei. F^ clxv r» (= Carp.
69 ro) .
XXV. Fo clxxxj v". — Passio sancti Sixti et sancti Laurentii.
po clxxxij ro (= Carp. 79 ro).
[X]XVI. P<> clxxx v».— Passio sancti Stephani martyris, Ibid. (=
Carp . 84 v°) .
[X]XVII. F» clxxxij vo. - Vita sancti Panthaleonis. F° clxxxiij
ro (= Carp . 86 r<>) .
[X]XV11I F° clxxxxij v«. — Vita sancti Martini. F° clxxxxiij i*"
(= Carp . 97 r*>) .
XXVIlII.Po ccj v».— Vita sancti Benedicti. Ibid. (= Carp. 105 v»).
Manque la fin.
Le no 405 des nouvelles acquisitions de la Bibliothèque Nationale et
le n" 461 de l'Inguimbertine étant donc, comme il résulte de ce qui
précède, deux fragments d'un seul et même manuscrit, il était naturel
de les réunir dans une seule et même publication. C'est ce que nous
faisons ici. Je suis seul responsable de la copie et de l'impression des
44 feuillets du manuscrit de Paris Le reste a été transcrit parM. Geor-
ges Reynaud; mais j'en ai corrigé moi-même les épreuves sur le ms.
La perte du premier et du dernier feuillet du manuscrit, par con-
séquent de Vincipit et de V explicita nous laisse ignorer le titre que
l'auteur ou du moins le copiste avait donné au recueil dont nous pu-
blions les restes. Celui de Vitœ sanctorum, inscrit sur la feuille de
garde et au dos du manuscrit de Carpentras et que Libri s'est borné
à traduire en italien, paraît convenir moins que celui de Légendes
pieuses, du catalogue de M. Delisle. puisque dans les deux premiers
des récits conservés, ce qui était peut-être aussi le cas de ceux qui
précédaient et qui sont perdus, c'est de Jésus-Christ qu'il est ques-
LEGENDES PIEUSES 217
tion. Nous croyons, en conséquence, devoir adopter ce dernier titre,
non sans faire remarquer toutefois qu'au point de vue de la forme,
c'est, dans la plupart des cas du moins, à de véritables homélies que
nous avons ou paraissons avoir à faire ^ Le tout est, du reste, comme
on le verra dans les notes qui suivent le texte, traduit, plus ou moins
fidèlement, du latin.
C. C.
LÉGENDES PIEUSES
EN PROVENÇAL DU XIII» SIÈCLE.
[I]
[H]
[III]
[ a po 1 ro] INCIPIT PASSIO IMAGINIS DOMINI NOSTRÏ
JESU CHRISTI
El temps que 11 fes de Jesu Christ acomensava a florir per
lo mont & a creisser, s*ajosterontuh li evesque d'Asia & ven-
gron en Capadocia, en una gran ciutat qued hom appellava
Cesarea^ per confermar los establimenz de sancta Gleisa. E
can se foron tiih ajostat ensemps en un lue, levet sus le ves- 5
ques de Nicomedia & acomenset a parlar e dis:« Si a toz vos
autres, sennors', plazia, saintre ha un libret de saint Athana-
sii, la patriarcha d'Alexandria, e poiria lo hom legir. » Res-
ponderon tuh essemps & disseron que mot lur plazia que fos
legitz. Ab aitant acomenset a legir & dis : 10
» Cela ressort encore, pour les no^ V, VI et VII, de lenr rubrique même.
2 Ms. de Paris. — 3 Ms. sennols.
218 LEGENDES PIEUSES
«Una ciùtatz es en'Ciria, denfra los termes de Tjri & Sjdo-
nis, qued es appellada B^ritus ; & en aquesta ciutat estavan
moût Judeu, car en aquella ciutat avia major synagoga qued
en nengun loc autre de la terra. Josta aquesta sjnagoga
15 estava uns bos hom christians en una maison que logava.
Aquest bos hom avia fah far una image de nostre Seinnor
Jesu Christ aici con fo mes en cros, & avia la messa en sa
cambra on jazia, sagellada en la p9,ret, denant lo leg on jacia.
Per la figura d' aquella magestat el pregava nostre Sennor
20 de jornz e de noh. Cant ac estât lonc temps aquel pros hom
en aquella maison,. .* loguet el corn de la ciutat [1 v®] una
autra maison, caraquil li era trop pauca ad el & a sa mainada.
Meiret se la ab tota sa rauba & ab tôt quant avia, estiers
aquesta majestat qued oblidet. Aquist magestas remas per la
25 voluntat de Deu, qui vult omnes homines salvos fieri et ad agni-
cionem veritatis venire; le qualz volria totz los homes del mont
esser salz, & que venguessan a la fe de veritat. Apres, quant
aquest bos hom s'en fon eissitz, intreti us juzeus per estar. E
quant iac estât gran pessa,non se fon donatz garda d'aquesta
30 magestat; car aquil cambra, on aquist magestatz era, era locs
escurs, e non la podia hom vezer fort clar. Cant venc un jorn
aquest juzeus envidet un autre juzeu, e manjeron laintre en
la cambra on aquist magestatz estava; e domenz qe manjavan,
aquest juzeus autre qued era envidatz esgarda en la^ paret
35 e vi aquesta magestat de nostre Sennor Jesu Christ sagellada
intre ; e cant Tac vista, fon moût iratz e marritz, e regarda se
vers céllui que l'avia envidat, & comenset lo a rasonar moût
asprament, & dis li: « En per que tenes esconduda en ta
maison la figura de Jesu Nazaretz? » Ab aitant aquest folz
40 acomenset a dir tan foJlas paraulas e tant malas de notre
Seinnor Jesu Christ que nuilz bos hom qued crezensa ni espe-
ransa agues en Deu [2 r°] soffrir ni escoutar per nuilla ren
non 0 pogra. L'autre juzeus, qued aquel trachoravia envidat,
acomenset se arazonar <k far raout granz sagramenz qued el
45 non s'era ancar donaz soin d'aquella magestat. Ab aitan
aquest tracher se calet & non parlet adonx plus. Manjeron,
1 Deux lettres illisibles [el?).
* Ms. sa.
LEGENDES PIEUSES 219
•
e quant agron manjat, aquest autre comandet Ta Deu e tenc
sa carrera. & va s'en alz sabis & alz princes do lur gent e dis
lur qued «aitalz judeus qued era de nostre linnatge & de nos-
tra lei avia & t 'nia en sa maison rescondudamenz la mages- 50
tat de Jesu de Galilea. » Eil, cant ausiron aquesta paraula,
foron moût irat & moût marrit; & erà ja vespres, & non vol-
gron parlar de tôt aquel seras tro al matin.
Item.
» Quant venc lo matin, li princep e tuh li major, ab tôt 55
l'autre pobol delz judeus, ab aquest qued avia aici trahit son
conpainno, anneron a sa maison d'aquest. Intreron laintre, e
troberon la magestat aici con aquest lur avia comtat. E van
penre aquest mesqui de juzeu, irat & marrit per la magestat,
e bateron lo e tormenteron lo moût asprament ; e pois van lo 60
penre e me[ne]ron lo denaut la synagoga dimei mort. Pois
van penre la majestat de nostre Sennor Jesu Christ, e gelant
la en terra & acomenseron la a batre ab los pes & a escarnir
éi adiré; [2 v®] « Totas aquellas causas que nostre pairon
feron a Jesu Nazaretz, & nos fassara, per lo seu despecg, 65
ad aquesta soa magestat e non nos en triguem. Car aici
con hom leg en la soa passion que nostre pairon meseron
sobre son cap corona d'espinas & Tabeureron de vinaigre
mescle ab fel, el meseron en cros, el fiqueron clavelz en las
mans & elz pes, & pois feron li passar una lansa per lo seu 70
latz, e nos, car non fom ad aquo, fassam, al seu despech,
tôt aizo ad aquesta soa magestat. » Adonx, ab aquestas
malas paraulas, tôt so que fon fah a Jesu Christ el temps
de la soa passio eil renovelleron e feron ad aquesta soa
magestat, et a dererelegiron un delz plus fortz trachors qued 75
aqui era, e meseron li una lansa en las mas e feron li foire lo
latz. E can le tracher ac fah aquesta maleza, per lo manda-
ment delz autres judeus, repente 07*bis terre elementa snnt
mutata et alta signa renovantur antiqua, quia ab jectu ferientis
lancée^ tanquam ex materia sensMlt, aqua et sanguis distillai^e 80
cepit ad laudem et gloriam eferni Dei patris. En eus pas li élé-
ment del segle foron mudat & las signas antiqnas foron reno-
220 LEGENDES PIEUSES
•
velladas. E de quai manera foron* renovelladas las antiquas
sein lias & Ji élément de la terra mudat? Car, quan le tracher
85 trais la lansa del costat de la imagen, e lo [3 r°] n'issi sanx &
aigua, con fera de nuil home carnal, & [comenset] a rajar moût
fort, ad laudem et glon'am eierni Dei patris,
Itbm de imagine.
» Tibi igitur, Christe, cura Pâtre Sanctoque Spiritu gloria sit
90 perpes honorque per hennis ac virtus tndeficiens per indeficientia
temporum secula. Amen, A te, Senner Jesu Christ, ab lo Paire
& ab lo Saint Esperit, sia gloria & durabla honors & vertuz
non defallenz per totz temps. Amen. Seinnér, qui es aici con
tu? Car autre Deus non es mas tu ; tu fas meraveillas sus el
95 cel e miraclas granz sa aval en terra. A! Seinner Jesu
Christ, con granz es en homilitat, qui^ cum deus esses invisibilis
et tmpassibilis,de supernis monfïbus inhanc convallem lacrimarum
descendendo et morticinum^ nostre carnis assumendo apparuisti
tocius mundi salvator. Tu, qued eras Deus non soffrens mort,
100 & qued non podias esser vist, descendest delz sobeiras pohg
en aquest val de lagrimas, & presist la nostra carn mortal &
apparegnist salvaire d'aquest mont. Otu, Senner, quan granz
e quan misericordios &quan sennorilz es, car tu, el temps que
dévias esser trahiz, non vediest que le tracher que te traie
105 non te b lises, & al serv reddest Taureilla que li fon taillada,
quan tu per los nostres peccatz eras menaz, quais agnelz
soaus, a la mort. 0 quam pins es homousion^ I 0 tu, Senner
Deus, quan bons & quan soaus [3 v^] es! car, domenz que tu
eras en la cros, preguiest lo tieu paire, qued es poderos de tôt
i Ms. /bn, avec le signe abréviatif qui vaut er au dessus de Vo
' Lecture incertaine; le mot a été corrigé; il semble qu'on avait d'abord
ôcrit morciu, avec le signe de la nasale au dessus de Vu; on parait ensuite
avoir fait de l'r un groupe indistinct (/-f) el exponctué Vi; au dessus de lo
dans l'interligne on a ajouté un r et au dessus de !'/ un n. Le tout ferait bien
mortici?ium (= charogne, métaphoriquement), si l'on considérait comme invo-
lontaire le point placé au-dessus de Vi et qu'on lût ou suppléât la même lettre
après le t. C'est, du reste, la leçon du texte latin ici reproduit.
3 Ms. hoo, avec un tilde au dessus, séparé de nsion^ comme 8*11 y avait là
deux mots. La traduction montre d'ailleurs que l'auteur provençal n'a pas com-
pris.
LEGENDES PIEUSES 221
quant es, per aquelz que te crucifiavan & dissist : « Pater, 1 10
tgnosce illis, quia nesciunt. Paire, percîona lur, car eil non
sabon que se fan. » Senner, tu nos laisseist eissemple &
demonstrament de la toa sancta bontat, que nos aguessarn
vers nostres enemix. 0 tu, Jesu Christ, bénigne reformaire de
Tuman linnatge, qued en aquella carn, que tu presist de la 115
sancta vergen Maria, te laissest tener & liar & flagellar &
granz anctas far, & a derrier te laisseist mètre en cros per
la nostra fragilitati A! Senner Reis d'Israël, quan glorios te
sezes en la cadera del tieu règne, lo quai li fello & li non cre-
zevol, quant te viron amermat un pauc ménz delz angelz, non 120
te tempserôn far morir ad espanteol mort & que non te pie-
guesson a salvatga sentencia. E tu, bons mejers de Deu e
delz homes, filzde Deu lo viu,vec te que, per aqui mezeis, per
la humana salut as suffert que li serpentina genz delz juzeus
ajan mes la toa image en la cros, non solaraent per reprenne- 125
ment delz non fizelz, mas a confermament de tos fizelz. Per
aquest dos & per toz los autres bens fagh de la toa gracia, que
tu donas & as donat a Tuman linnatge, per la toa misericordia
te rendem* nos granz laus& granz gracias, [4 r'] nos tei serve
e tei serven, aoras &pe?' infinita secula seculorvm. Amen. 130
» Audite, seinnor, zo que De us vole e sufferc que n'esdeven-
gues puis. Per la soa voluntat n'esdevenc zo que vos anem
comtar aici. Aquil juzeu qued eran aqui, quan viron aquesta
meravilla, * alz princes & ad aquelz majors qued eran aqui:
« Sennor, nos auzem dir ad aquelz de Galilea que crezon en 135
Jesu que, quant annava per terra, el fazia seinnas e meravillas
el pobol. Aporte om una amola de veire & pause Tom a la bocca
de la naffra de la magcstat, & vejam si i donara ni i degotara
seinna del sanc») Ab aitant aporteron una ampolla de veire
& meseron la a la bocca de la naffra ; & aqui eis fon plena 140
del sanc entre sus a la bocca. Quan li juzeu viron aizo,comen-
set a dir Tus a Tautre : a Porte om aquesta ydria a nostra
synagoga, e fassahom venir toz los malautz e totz los frevolz
qued hom poira atrobar, & oinna los hom d'aquest sanc; et
en eis pas seran sanat, si veras son aquellas causas que nos 145
* Ms. renden.
2 Suppl. van dir?
222 LEGENDES PIEUSES
auzem dir de Jesa Christ.» Et fon aventura qued en la* vila
avia jazeu malaut, qued avia estât lonc temps que non s'era
levaz de son leg ni se podia girar de Tun latz en Tautre, qui
nol girava; & avia una malautia qued hom appellava parali-
150 sin; & destren-[4 v*>]-nialo tan fort que po(r)der non avia nen-
gum, mas solament en la lengua. Van penre aquest li autre
juzeu, epoiteron lo a li sjnagoga, & oisseron lo d'aquest
sanc ; & en eus pas qued aquest fon oins d'aquest sanc, a laus
& a la gloria de nostre Seinnor Jesu Christ, el levet sus del
155 leg en que jazia, e fon aici sans & alegres con si mal non agues
agut, & acomenset a saillir et a trepar, co fa le sers en la
forest. Le pobolz toz, cant auzi aquesta meravilla, aduzian los
cex, & oinnia lur hom los oilz^ & eran enluminât & recobra-
van lo vezer aicel que non avian veut' . Lo[s] contragh & los
160 mangs & totz los malauz de qualque malautia qued aguessant
en eus pas eran sanat e garit, quant eran oinzh d'aquel sanc ;
e recobravan lur menbres celz que non avian; li sort reco-
bravan lur auzi r ; li mut recobravan lur parlar ; li lebros i eran
sanat; las plantas delz clops i son refermadas ; et alieinfirmi-
165 (ates diverse ad laudem et gloHam fabricatoris mundi remediwn
consecuntur salutis; e de las autras enfermetatz a laus & a la
gloria d'aquel seinnor que fab reguet lo mont i recebiant re-
medi de salut.
» Igitur kebrei, dum talia fièrent^ compuncti corde, omnes pa-
170 riter crediderunt in Dominum Jesum Christum et cum lacrimis
incredulitatem sue mentis [5 r°] deflebant dicentes : Gloria tibi,
domine Deus patrum nostrorum, qui nobis miseris et indignis pec-
catoribus revelasti Jesum Christum, filium tuum, quemut Esaya-
num cecinit vaticinium virgo ante partum genitrix Maria edidit et
175 non solum in par tu, verum etiam post partum, eadem mater
inviolata permansit, Li ebreu, canviron aquestas causas, cre-
zeron tuh ensemps en nostre Sennor Jesu Christ, & osteron
lur non crezensa de sobre se ; & dizian ab lagrimas& ab plors:
a Senner Deus de nostres pairons, a te sia gloria & laus,
180 qued a nos, mesquis peccadors, as révélât lo tieu fil Jesu Christ,
1 Ms. sa.
a Le mot est surchargé; il semble qu'oQ ait voulu corriger vht; mais IV,
daos ce cas, a été omise.
LEGENDES PIEUSES 223
lo quai avia propbetizat lonc temps adenant Ysayas, & avia
dih quo verges lo concebria & vergens Tenfantaria & aprop
Teufantamen remanria vergens. 0 tu, Jesu Christ, filz de Deu
viu, a te sia gloria & laus, car tu as fag conoisser la toa gran
vertut en ganren pobolz, & as révélât lo tieu glorios* in Israël 185
& as sostrah los filz de Jacob de la foUa crezensa^ en que esta-
van. 0 tu, Sainz Esperiz, a te sia granz gloria, qued es vivi-
fiaire & restauraire del human linnatge, le qualz donas ad un
cada un, per Faigua del sant baptisme, remission del peccat
original (peccat), te manifestem nos per sennor e per Deu ; a te 190
reddem granz gracias & grand laus. Seinner, perdona a nos,
peccadors escumenegatz, car nos [5 v**] nos tornem a te de
totz nostres coratges. Senner, recep nos en la confession del
tieu saint nom, car nos fugem a te per penitencia »
» Eo tempore, apud eandem civitatem, v[i]r religiosus et per 195
cuncta laudabilis Adeodatus preera[t] metropolitanus. Ad quem
accedentes hebreiyCum lacrimiset gemittibus, universa inpropatu-
lo que acta fuerant pandunt per ordinem. En aquel temps era
en aquela ciutat uns arcivesques moût bons hom e moût reli-
gions & en totz afars temenz Deu. Ad aquest saint homen ven- 200
gron tuh li hébreu, qued estavan en la ciutat, e comteron li
tôt per orde de quai manera era esdevengut. Quan le bons
hom auzi aizo, rendet granz laus e granz gracias a nostre
Sennor ; après demandet lur le bos hom de cui avian agut
aquella image de la figura de nostre Sennor. Eil responderon 205
e disseron qued aitalz hom avia estât en aquella maison, &
avia la oblidada per aventura laintre en aquella cambra en
que jazia. Aqui mezeis Tarcivesques trames querre aquest bon
home; & quant aquel bons hom fon venguz denant el, le bons
hom Tarcivesques demandet li de quai manera era esdeven- 210
gut ni qui podia aver formada tan meravillosament aquella
imagen. El respondet & dis qued aquel [6 r^] Nichodemus Tavia
pencha, le qualz era discipolz de Jesu Christ rescondudamenz,
car a sauput non osava ^ esser, per paor delz juzeus ; le qualz
parlet ab Jesu Christ de noh, aici con diz li Escriptura: Qui 215
* Sic, Supp. wow?
* Substitué à lei^ par un renvoi à la marge.
3Corr. o awava?
2zl LEGEXDKS PIECSES
vénérai noete ad Dominum Jesum, quia discifMhi» ejai erat m
ffCC»4Uf^ propter metum judei^rum ; qoed era Tengurz parLar an
Jeiïa Christ v,e oohg, car soâ discipolz era rescoadadamenz.
per la paor deU juzeua. Ar|aeât avîa depeacha ia imagen, e
22r) quai) vole morir, laisse! la a Gamaliel. Aqaest Gamalielz tba
i]Qai.%tre de saint Pau], e can venc a fin, laisset la ad Acheu ;
ai Aehens liuret la a Jacme; et Jacmes a Sjmeon, et Svmeonz
ad un qued avia nom Matheu. Et enaici de pairon' ede gène-
racion en génération, estet en Jérusalem tro al quaranteu an
225 qued nvia que nostre Senne r Jesu Christ s'en era pnjatz en
ceL l'ois do.^t »nz enanz que Titus ni Vespasianus li emperador
de Rorna destruissessan Jhenisalemni messessanen caitivitat
los juzcus que i troberon *, li âdel de Jesu Christ, qued esta van
en l;i<nutat, foron amonestar del Saint Esperit qued eissessan
230 d'aqu^dla ciutat, ah toz los saiictuaris qued apertenian a la
nostra religion À a la nostra feii, cl annessan s'en en la terra
ffun rei (\\vn\ :ivia nom Âgi'i()a, qued avian elegit <k establit
li Roman. En H<juel temps aquist âgura de la imagen de nostre
S<;nnor venc [0 v**] «n nostra lena, cl eu ac la de mon paire e
2^r> (le m:i maire que la me laisscron, Ci eu ai la enaici aguda e ten-
gnda per hcretat. Ilec vera racio esse manifestissime compro^
/mlur. Aquist razons es proada manifestament veraia,aici con
eu vos ai comtat d'aquesta imagen de nostre Senuor Jesu
Christ, salvaire del mont, de quai mariera fon meirada de
240 Judea en la terra de SiriM. »
» Audiens talia beatissimm pontifex, magnanimus redditus,ad
judeos converti tur, dicens: « Queso vos ut confiteamini quid de
Chrisio nostro sentitis.)) Le benazuratz archivesques, quant ac
auzit aquosta paraula, ac moût gran gauh e giret se deus los
245 juzeus, & comenset lur a dir: « Prec vos que vos me diguas
.si vos crezos el nostre Jesu Christ. » Ab aitan eil responderou
ttih onsemps o disseron: « l/nus est Deus pnter et ipse ingen[iy
tus, Unus est Jésus Christ us, ejus filius, et ipse unigenftus, Unus
Spiritus Sanctus et ipse ab utroque procedens. Uns es Deus
250 le paire 6i el non es engenratz. Uns es Jésus Christ, le seus
fllz, & aquel es solz engenratz. Uns es le Sainz Esperitz &
aquel eis de Tun & de Tautre. Aquest Deu crezem nos un
* Suppl. e?i fil'?. — 2 Substitué à i eran, écrit d*abord.
LEGENDES PIEUSES 225
en trinitat & trin in unitat. Aquest manifestem ; aquest lau-
zem; aquest beuezizem; aquest glorifiam. » En après, quant
agron dih aizo, getan se tuh ensemps en terra, & ab plorj^ & 255
[7 r**] ab lagrimas pregueron li qued el, per la soa merce, zo
es Tarcivesques, los deinnesbatejar. Le sanz evesques, segon
lup peticion e lur preguera, lavet los totz elz renovellet(z) del
saint baptisme. Factum est autem magnum gaudium in illa
cîvitate, super tanta reuocata multitudine stirpis judaice diabolica 260
prctvitale et ad gratiam supetme hereditatis intrante, Granz
gauh, zo diz, fon fah per tota la ciutat per aquella gran com-
painna delz juzeus, car se foron tout d'aquella error en que
eran, e se foron tuh tornat a la fez & a la crezensa de Jesu
Christ. Gant venc aprop que foron tuh batejat, pregueron tuh 265
ensemps aquel saint evesque que totas lur synagogas recon-
silies * e sagres, en la honor de nostre Sennor Jesu Christ, lo
salvaire del mont. Ab aitant Tarcivesques, josta lurpregueira,
ab gran gauh nedejet e fe mundar e lavar las sjnagogas, e
sagret las e fez en gleisas en la honor de nostre Sennor Jesu 270
Christ. Aquil fama fon saupuda en loin & en près, per tôt lo
segle & per totas las terras, e fou conseilz que tuh li eves-
que & li arcivesque de la fen catholica, on quo fossan, bas-
tissan gleisas & oratoris el sagressan & autars', en la honor
de nostre Seinnor Jesu Christ, lo salvaire del mont. Car tro 275
ad aquel temps, li nostre saint pairon & li nostre major non
s'en eran ausat presumir de far que fezessan gleissas.
» Venerabilis [7, v°] autem pontifex, etc. L'onratz evesques
acomenset a pensar de jornz e de noh & a tractar en son cor
que faria ni que poiria esser fah d'aquesta ydria, qued era 280
piena del sanc & de Taigua qued era^ eissit dellatz de la ima-
gen, qued era fâcha a la figura de nostre Sennor Jesu Christ.
Pero trobet conseil bon &.profechaol, a salut de la fen ca-
tholica & de sancta Gleisa. Près ampollasde veire e d'evori e
de cristal e d'argent (& d*aur, e mes en cada una d' aquel sanc, 285
e trames las per totas las terras en las gleisas, e trames escrih
en carta de quai manera era esdevenguda aquist granz mera-
1 Ms. r consilietz.
2'Corr. e sagressan autars? Ou seulement els?
^ Corr. ei^an ?
16
226 LEGENDES PIEUSES
villa, e que fostotz temps maissauput e récitât en sancta Gleisa.
Pois establi que trastuh li fizel de sancta Gleisa que cad'an
290 fesessan festa, en remenbransa de la passion d'aquella gloriosa
imagen de la figura de nostre Sennor Jesu Christ, e la onres-
san e la colguessan aitan fort con farian lo jorn de Pascas o
de Calendas .v°. idus novembris. Per amor d'aizo, conoscan
tuh cil que son de la nostra religion & coledor de la nostra fen
295 qued aquist relations es certa e veraia, qued aici eissi sanx
& aigua del latz de nostre Sennor Jesu Christ sus en la cros
con a fah de la soa sancta imagen, en la ciutat de Berit ; &
d'aquel sanc troba hom ancar en montas gleisas. E per aizo
volem vos pregar & amonestar que [8 r**] nuil sanc non cre-
300 zaz autre que sia de Jesu Christ mas aquest & aquel que per
las mas delz preveires e per la obra del Saint Esperit le vis
esdeven sanx, sus en la ara de Tautar. E qui aquestas causas
creira d'autra manera senz dopte es loin de la veritat. Sennor
fraire, car eu sabia aizo, ai moût désirât qued eu o fezes saber
305 a la vostra amor & a la vostra caritat, qued vos per aquestas
causas puscas saber quan granz es li misericordia de Deu, qued
ell a ab nos. Per aizo, sennor, annaz per la via delz seus man-
damenz sen tota triga, & rendes li trastotas horas laus &
canz, e pregaz la soa longuanimitat e la soa pietat benigna,
310 manifestant ab la Psalmista que diz: « Magnificate eum et
exaltate nomen ejus per cuncta secula secw/orww. A mbn .
Magnifiatz & eissaussaz lo seu nom per totz temps.
Amen. »
Item.
315 Cant sainz Peire, evesques de Nichomedia, ac legit totas
aquestas causas, qued ac trobadas escrichas el libre de nos-
tre paire saint Athanasii, & ac las recitadas en concili, en
Capadocia la terra, en una ciutat qued avia nom Cesarea,
humilment redderon tuh ensemps gracias a nostre Seinnor
320 Jesu Christ ; pois comanderon se tuh ensemps a Deu,& tornet
s'en cada us la don era, lauzant nostre [8 v°] Sennor. Aquist
leissons fon pois tornada de grecx, en qued era, en lati, zo
es en aquesta nostra lengua ; & es esgricha en mouz libres
nostres. Unde sit laus et honor Palriet Filio^ Sanctoque Spiri-
325 tui, ab utroque procedenii, per secula indeficientia . A m b n .
* Après filio, et (en abrégé) exponctué.
LEGENDES PIEUSES 827
[IV] «
Le nostre salvaire & le nostre rezemeire Jésus Christ,
davant que receupes mort ni passion sus en la cros, per la
rezemzo de Tuman linnatge, trames una pistola, escriclia ab
las soas saintas mas, al rei d'una ciutat qued avia nom Ëdis- 5
sena, qued era caps de tota Mesopotaraia Syria. Aquest reis
volgra moût vezer Jesu Christ, per malautia qued avia gran,
de que volgra esser sanatz. Aquest reis desirava & avia mot
gran talent de vezer Jesu Christ corporalmenz^. Nam idem rex,
audi[ti\s signis miraculorum ejus, per Ananiam cursorem in Ilie-
rosolimis ad eum direxit epistolam. Carie reis, quant ac auzit 10
las seinnas e las granz meravillas que Jésus Christ fazia,
trames li leiras per un messatge, qued avia nom Anania, en
la terra de Jherusalem on Jésus Christ estava ; en las qualz
letras li fez saber lo gran talent qued el avia dé lui a vezer
6 la gran voluntat. 15
Epistola quam misit rex Jesu Christo.
[9 r®] « Agarus, toparcha, Uchane filius,JesUjSalvatori bono,
qui in locis apparuit Iherosolimorum, salutem dirigimus ma-
ximam, Agarus toparcha, le fils d'Ucha, a Jesu lo bon Salvador,
le qualz es apparegutz en la terra de Iherosolima, trametem
moût granz salutz. Eu ay auzit de te & de la sanitat que tu fas, 20
que senz herbas & senz totz autres metjamenz sanas et curas
las enferme tatz delz homes ; & per aizo eu sai en mon coratge
que tu est us d' aquest dos: 0 tu es Deus, o tu eist filz de Deu.
Per amord' aizo, eu,desirans moût te vezer, aitrames atehumil-
menz aquestas letras, que tu, si li toa merces es, deinnes venir 25
ad me,& que tu me sanes d*aquesta mena mala malautia & me
desliures,li qualz m'a tengut& tormentat per mouz anz en mon
legh. Eu ai auzit que li fellon juzeu t'agachan & se trabaillan
mont conte poscan delir & aucire & ostar la toa memoria de
sobre terra. Senner, eu ai una ciutat, jacia zo qued a te sia 30
pauca, a nos autres es granz, e ven t'en estar aqui ; e fai en
^ Sans rubrique dans le ms.
* Ms. corpalmenz, avec p simplement barré.
^28 LÉGENDES PIEUSES
a ta voluntat & a ta guiza. Vale, Jesu àone, salvutor oràis terre,
semperque nostri digneins memor esse, Deus te salv, Jésus bons,
salvaire del mont, menbre te, si te platz, lotas horas de nos. »»
«^5 EpISTOLA DOMINI QUAM MISIT REGI.
[ 9 V** ] a Beatus es qui in me credidisti, cum ipse non videris.
Benazuratz es tu que non m'as vist <k as crezut en me ; car
escrih es de me que cil que me veiran non me creiran <S:
cil que non me veirau, cil creiran en me, per tal que sian
40 salv. D^aizo que tu m'as escrihg, qued eu vengues ad te,
primeîrament conven qued eu âdimplisca zo per qued eu soi
trames aissi ; e pois, quant o aurai tôt complit, conven que
cel que m'a trames merecepia per aqui mezeis; epuis, quant
eu m'en serai pujatz, eu te trametrai un de mos discipolz,
45 que te sanara <k te curara de ta enfermetat <k salvara tôt
ton pobol. Mas, car tu as talent que me vejaz corporalment,
vec te qued eu ti tramet drap Une, el quai eu ai pausat la
figura e la image de la mia cara e de tôt mon cors ; e quant
tu voiras aquella image ni aquella figura, lo talent qued as de
50 la mia vista se refrezira. Benazuratz es e tuh aioil seran bena-
zurat que non auran ira en me. Ben aiaz tu en la sapieza de
Deu lo paire per toz temps. »
A ! quan lauzevolz e quan nobles fon le prex del just e del
sanctisme reî Agari, le qualz ameritet que le salvaire del
55 mont lo lau-[10 r°]-zes ni l'onros, e non solament en sa pistola,
mas ab sa propria bocca diz que benezuraz era,car el 11 plazia
moût, e qued el mezeis le filz de Deu li vole far son plazer en
totas causas, en tant que se luezeis afiguret en un drap blanc,
e pois trames lo li, que, car el non podia vezer el mezeis,
60 vis la soa imagen e la soa figura en aquel drap en qued el s'era
transformatz et avia pausat sa semblansa, et ad el <k a tôt
autre home que non aguest vist nostre Sennor en carn, can
veiria aquella transformatio, li aondes. Aquel draps es gardaz
per la divina gracia, que per veilleza de temps non pot enveiU
65 lezir ni corrumpre, 6i es en la major gleisa de la eiutat de
Ëdissa, qued es caps de tota Mesopotamia Sjria, <k aqui es
tenguz <k gardaz ; et a totas las granz festas de Tan, aici con
son Calendas e Pascas, sol Tom traire de Tescrin de Taur en
i
LEGENDES PIEUSES 2 29
qued es, & ab gran reverencia totz le pobolz venia e baizava
os pes de la âgura de la magestat. 70
Ancar dizon cil qued an vist aquesta raajestat de iiostre
Seinnor, qued es afiguradaen latoailla, que, quan venia cad'an
lo jorn de Pascas, se solia mudar en diversas etatz, per las
diversas horas del jorn ; aici con es a la prima hora del jorn,
la viras en enfansa; la tercia, puricia; la quinta, adolescentia; 75
[10 V®] la septima demonstrava juventut ; la nona tota sa état,
en la quai Jésus Christ sufferc mort et passion, en la ara de la
cros, per los nostres peccatz.
Parlât vos avem de la toailla & de la transformation, con
Jesu Christ la i fez. Ara a obs que vos diguam aizo que plus 80
necessari es, de quai manera li promessions que nostre Senner
avia fah al rei s'esdevenc pois ni fon adimplida. Car el mezeis
nostre Seinner diz en Tavangeli: « Ego sum via, veritas^ e[t]
vita; eu soi via, veritaz e vida. »
Apres quan nostre Seinner Jésus Christ s'en fon pujatz sus 85
el cel, unum ex septuaginta discipuliSy Tadeum nomine, ad se-
minandum divinum verbum in corde credentium misit Mesopotha-
miam Syrie ad Agarum regem, sicut ei olimper epistole sue tex-
tum mandaverat. Trames un delz setanta discipolz, Tadeu
per nom,persemenarla divinaparaula elz cors del[z] crezenz, 90
en Mesopothamia Sjria, al rei Agar, aici con el li avia man-
dat sa en reire, en sa pistola. Aquest discipolz, quan venc en
la ciutat de Edissa, venc a la maiso d'un prohome deia vila,
qued avia nom Thobia, & laintre alberguet & estet, & rendet
sanitat ad un fil seu, qued era moût malautz, per sa oration. 95
Venc a saber al rei qued uns hom de Galilea era venguz en
la ciutat, que dizia que sers e discipolz era de [11 r"] Jesu
Christ, loqual avian li juzeu crucifiât, & el cui nom el podia
sanar totz los malautz. Trames lai le reis pros homes de sa
cort, qued ab gran reverencia & ab gran honor lo li aduissessan 100
denant. ^Mirf /:>/Mra ? Anneronlo querrae^ & atroberon lo & ad-
duisseron lo davan lo rei. E can Tapostolz ac fâcha sa oration,
vai penre lo rei per la man e levet lo del paviment on jacia
San & salv & desliure de tota sa malautia, al laus de nostre
Sennor Jesu Christ, & reformet lo a sa sanitat, & rendet lo a 105
* Ms. veritatz.^ * Sic.
Vvsr «^>« ,n^>ftwr5# «s; i v,'^;! ^ *>»:rra-. lui laed -ira veiiz. ranr jffvnc
* *;f^'' iw:i.:r.'.:îîïi* "> ^ T^ir-iî tô ars^tir^ Seaaor a ne loais
/,T* A^m 5^n. ï^ r*ti^, 'taû vi a«^i«sta aurscia. ac zrauiz aiera-
»>. îi< ^ ^f*A ;r;iîih * ^^ tùfififi^^^ <;x\xt hea 5a:ip aaed ai*n coa
;iK Vr*'/ i^s ;• X !ir»«^ ai ah t/>tA la ^eaî de 3a terra : e d^aq^ai
^.rkunl *'A îou m;^*iàf^*i e predi-^aîre de La fea de Jesu Christ.
(mii vj .^l J6m en îia no^irre Seîaaer ooft âofferc nue^l ea la
^/ihfA.t ^"Kdi^^a vi'sl/'jne^ nnlzjazen.^ ni pognes estar, ni nail
M'/ Afif.f/sj h//rr»<î ^joe ^.rfi7A% idola ni naiila error, mas La vera fen
d^ /f^'.iiii Christ, Ni anCf pois qiie le reîi9 ac receapada la pis-
f//U de la rnari de nostre Sennor Jesu Christ, nnila genz
fmtmïrtufi hou poc envazir la cin-^ll v*]-tat ni far nnil mal.
A<f ffi^t U'/innonn e» translatada de la lengaa de Svria en latina
lî^; fit t,fff',r\it^ «ancta Oiei«a. aici con peira preciosa resplandens
con Jiiif'H, ^/n^^r nimjflex Trinita$ et triplex Vnitas benetUcta sit
in Mffm/nifirna nemda,f^ui Muam ecclesiamita mirifice dianm^ pro-
vfikU fit lumorifimi. Amen.
[VJ
IN l)KI)K:ATI'»NIt: SANCTI MICHAELIS ARCHANGELî.
lltiH cititAty, ON on las On» de Campainna, qued es appellada
Hnporit.ina, k oh prop de dotze millas d'un puhg qued hom
a|)polla mon (hirfçan. Sus en aquestpughauna gleisa de saint
MIcJH*], (pio non fon fâcha per mans d'omens carnalz ; e direm
h voM (•() ni (lo (pial manora aquist gleisa fon atrobada.
Mil a(|U0Hta ciutat quod eu vos ai dicha, avia un rie home
(pUMl ora appollat/. Gargan. Aquest avia moulas bestias, bous
iSi vHoouM, K^dovono un jorn que sos vacquers menet paisser
MUN bostius on a(iuost. pugh. Ab aitan uns taurs quais per gail-
10 lanlla part «o do iotas las autras bestias, & pujet s'en sus el
pug« on lui luo on mais bostia ni nuil home non avia agut. Can
vono lo soras quoil aquest acampet sas bestias, reconoc las
0 vi ijuoil aquost taurs non i era. Quer d'amont e quer d'aval,
* CvMi\ /;? ou Au? Ou lirt* Un't — * SiV; ou du moios dia + cioq j»m-
lm^\*H, i\MT. \{\y\mK\t*.\<^\s iiiiitntVY dans Du Caoge.
LEGENDES PIEUSES 231
e non Tatrobet. E cant [12 r°] Tac gran pessa quesit, esgarda
e vi Testar sus el som del pugh, a la bocca d'una balma. 15
Vi que non la poc annar ; fon moût iratz ; e va penre son arc
6 tendet lo, e met sus una sageta entoisegada, e laissa la li
annar. Li sagetta, quan fon près del taur que lo vole ferir,
torna atras e va ferir celui que l'avia tracha. Annet s'en
aquest hom a la ciutat, e comtet a la gent con 11 era esdeven- 20
gat. Li home, cant o auziron, agron granz meravillas & anne-
ron a Tevesque de la ciutat, e comteron li o, e demanderon
li que poiria esser. El fez venir tôt lo pobol de la ciutat denant
se, e comandet lur a totz que dejunessan très jornz, que nos-
tre Seinner, per la soa merce, lur demonstres que volia esser 25
aizo. Cant agron fah lo dejuni, sainz Michelz apparec una
noh a Tevesque e dis li : « Jam bene fecisti quod homines late-
bat a Deo guerendo mystetium, vide lice t hominis percussi suo
telo, Ben e gent as fah zo qued as fahg, car tu faras saber
alz homes aizo qued eil an quist a Deu, de Tome qued ha 30
naffrat li soa sageta. Sabchas que per la mia voluntat es
esdevengut. Eu soi sainz Michelz, Tangelz qued estauc totas
horas davant Deu ; et en terra garde aquel loc on era le taurs ;
e voil monstrar e far saber alz homes qualz [12 v®] causas son
fâchas aqui e qued eu soi garda d'aquel lue. » Cant venc Ten- 35
deman que Tevesques ac vista aquesta révélation, retrais o al
pobol de la ciutat ; & anneron s'en tuh ensemps la al puh, e
feron carrera con pogron pujar entro sus ; e vengron ad
aquella balmeta, e troberon la fâcha en loc de gleisa, e trobe-
ron i doas rejas, aici con deu aver en gleisa ; & la una era 40
majer que li autra, aici con en gleisa. Mas pero en la gleisa
non auseron intrar, mas de foras a la reja esterou, e pregue-
roD saint Michel.
Non triguet gaire que li sarrazin d'una ciutat qued era
appellada Neopolita agron granz mesclas e granz tensos ab 45
aquest d'aquesta ciutat Sepontina, si que ne * s'escomeseron
de batailla e doneron en jorn e preseron très jornz d'espazin.
Cantlos agron près, aquelz très jornz, anneron & aconseilleron
se ab Tevesque. L'evesques conseillet lur que dejunessan
aquelz très jornz e que preguessan sainz Michel qued el lur 50
1 M 8. plutAt ne; corr. be?
232 LEGENDES PIEUSES
fos capdelz e guis. Li pagan atressi pregueron lur ydolas e
lurs falz deus que lur ajudessan. Ab aitan, en aquella noh
que Tendeman degron far la batailla, sanz Miquelz apparec
a revesque(s), e dis li que las pregueiras e bis orations eran
55 auzidas e que Tendeman, la quarta hora del jorn, intressan en
la batailla, car toz lur enemix vencerian [13 r°] & aucirian, &
el séria lur en aj utoris. Quan venc lo matin, e Tevesques retrais
e dizal pobol zo que sainz Miquelz li avia dih lo seras, que lur
pregueras eran auzidas e qued eil vencerian la batailla. Eil,
60 quant o auziron,agron gauh e foron moût alegre ; & acerman
lur bataillas, e comenseron s'en ad annar encontra als sarrazfs;
& el primer cap de la batailla, le pog de Garga se crollet per
gran tremor. Fuhjura crehra volant et qualigo tenebrosa totum
montis cacumen obduxit, [et] impleta [est] prophetia Dominum
65 laudans qui facit angelos suos spiritus et ministi^os suos flammam
ignis. Una nuz tenebrosa cuberc tôt lo som del puhg e li fouzer
voleron espes e cazegron, e fon adimplida li prophetia que diz :
« Gel que fa los sens angelz esperiz e delz seus ministres fa flamâ
de foc. » Li pagan, can viron aizo, agron gran paor e comen-
70 seron a fugir, una partida, per los fouzers quelz aucian, e li
cristian quelz apreissavan moût fort; et en aici fugiron entro
a lur ciutat cil que n'escaperon ; e can foron laintre en lur
ciutat, reconogron se e disseron que Tangelz de nostre Sennor
era vengutz en aitori alz cristians, e que fouzer avian ben
75 mort delz lur set cenz. Et en eus pas tota aquil ciutatz se
tornet a Jesu Christ, e vestiron las armas de la soa fen. Li
Christian, cant agron vencut la batailla, torneron s'en [13 v**]
a lur ciutat & vengron al pug, «d aquella gleisa, & renderon
granz gracias a Deu & a Tarchangel saint Michel, e regar-
80 deron, e viron denant la menor reja pezadas quais d'ome,
inz en la rocha sagelladas, & sanpron e conogron que sainz
Michelz volia monstrar & far saber qued el era aguz en aquel
loc; & en aquel loc feron pois Tautar & lo bastiron, & per
aquellas pezadas li gleisa fon pois appellada Ipodoraa. Pois
85 fon granz doptansa entre los homes de la ciutat, que séria fah
d'aquel lue, si ausarian intrar laintre e sagrar, aici con gleisa
deu esser sagrada. Pois prezeron conseil enfr'elz mezeis, e
fon lur conseilz que fezessan gleisa de saint Peire, deus soleil
levant. E feron o & edifieron i autars de madonna sancfa
LEGENDES PIEUSES 233
Maria é de saint Joan Baptista. Pois Tevesques de la ciutat 90
près conseil a se mezeis e trames mesatges a Tapostoli, que
li dones conseil que faria d^aquest afar, qued era esdevengutz
d'aital manera. L'apostolis estava adonx défera Roma, el
pug de Sjmptim, que n'es loin cinquanta millas, lo quai pug
appellan cil qued estan entorn sobre nom de saint Salvestre, 95
car el estava aqui quan Temperaire lo getet de Roma, car
predicava la fen de Jesu Christ ; e man-[14 r°]-det li aizo, si
hom carnalz dévia sagrar aquella gleisa, e marjorment ad
aquel jorn que li Victoria fou fâcha ; si non que bastis hom
gleisa en autre loc, a la honor de sant Michel, qued es gar- loo
daire d'aquel loc, si ad el venia a plazer, L'apostolis, cant ac
auzit aizo, fez li saber per letras & entreseinnet li très jornz
que dejunessan amdui, e preguessan nostre Seinnor e saint
Michel qued el lur fezes saber que volria que fos fah d'aquest
afar. Can venc la derrera noh qued agron complit lur dejuni, 105
e sanz Michelz apparec a Tevesque de Sepontina e dis li : « Non
est, inquit, vos opus hanc quam ego hedificavi dedicare ecclesiam ,
Non es obs, dis el, qued aquesta gleisa qued eu ai hedificada
vos autre sagres. Mas intratz laintre, & frequentatz lo loc
per orations, qued eu serai guarda e capdelz del loc; e tu, 110
canta dema laintre messa e comenega lo pobol, aici con cons-
tumna es ; et eu demonstrarai de quai manera eu ai sagrat
aquel lue. » Can venc Tendeman, venc Tevesques ab totz los
clergues, ab gran procession & ab tôt lo pobol de la vila, &
intreron en aquella gleisa ; & aici con intreron, atroberon un 115
gran portegue que tenc entre a Tautra re-[14 v°]-ja, don
foron atrobadasla< pezadas, aici con dih vos ai ; e pois intre-
ron laintre et atroberon deus orient una grant gleisa plus aut
non sai quantas grazas ; et entre la gleisa e lo portegue
pogron caber entre a cincxenz homes ; & atroberon laintre 120
un moût bel autar, cubert d'un pâli vermeil moût bel, prop '
del meg de la paret deus megh jorn. Aquil gleisa era raout
angulosa ; e per que ? Car eil non era fâcha ab mans d'ornes
carnalz, ni las paretz non eran polidas ni hetlilîcadas a lei
d'omes carnalz ; mas aici con roca es aspra & en un loc auta 125
& en autre bassa, aici era aqui ; car en un lue pogras tocar
* }&s.pprop, le premier p bouclé.
234 LEGENDES PIEUSES
ab Ja testa <k en l'autre non pogras tochar ab la man. E par
aizo eu crez ben, aici con l'angelz o a monstrat & esseinuat,
rjuo Deus nostre Senner non vol ni quer hornament de bellas
130 peiras, mas de coratge ; puritat e neteza de coratge vol e
quer. E sus el som d'aquel pugh a, des Tuna part, una gran
selva de corniers, e des l'autra, un gran plan en que non ha
arbres. Can Tevesques ac celebra[t] la messa e le mestiers
fon compliz, cada us s'en tornet ab gran gauh & ab gran
135 alegreza on lur maisons. L'evesques fez far aqui maisons &
estars granz, & establi i preveires e clergues, que servissan
la gleisa. Nuilz hom, zo diz, de nogh non ausava intrar den-
fra aquesta [15 r°] gleisa, mas, cant li alba era clara, cantava
hom laintre matinas. D'aquella rocha, qued es sobre Tautar
140 deus cers, degota una aigua moût clara e moût dousa ; et a
i un orzol de veire que pent ab una cadena d'argent, que
recep aquella gotta. Et es constumna & usatges que, quan
le pobolz a cumoneguat, qued aici con cada us cumenegua,
puja ad aquest orzol per grazas, e vai beure d'aquella aigua,
145 car moût douza e moût soauz es a beure e dona salut d'eu-
fermetatz, car ja nulz hom non aura agut ta mala febre qued,
quant ha begut de Taigua, non sia gueriz e sanatz. Aquestas
meravillas de sanar los malautes, ed autras montas de qued
eu non sai nombre, i son esdevengudas per la podestat delz
150 angelz, e majorment ad aquest jorn quant hom fa la festa, car
totas las genz d'aquella vila i venian ad aquel jorn. E per zo
que tuh crezas plus fermament que li angel an poder en terra
de soccorre los amix de Jesu Christ, direm vos zo qued en
diz Tapostolz, qued el en vi esperitalment. In Jesu Christo
155 Domino nostro. Amen,
Angélus Domini descendit de celo cum Azaria et sociis ejus in
fornacem et excussit flammam ignis de fornace et fecit médium
fornacis quasi ventum roris fiante m. L'angelz de nostre Sennor
descendet de cel & venc ad Azaria & a sos compainnos, qued
H>0 eran en una fornaz [15 v°] ardent, e fez del meg de la fornaz
eissir un vent que sofâet la ûama sa e la; et anc le fox e
nuilla guisa non toquet elz, ni lur fez malz ni nuUa re que
grou lur fos. Adonx aquist très quais ab unabocca acomense-
rou a lausar <k a benezir nostre Seinnor & a dir en la fornatz :
165 « Benedictu^ es, Domine Deus palrum nostrorum et laudabilis et
LEGENDES PIEUSES 235
gloriosus et supereœaltatus in secula. Benezegh es, Senner Deus
de nostres paires, & lauzevolz & glorios & eissausevolz sobre
totz los segles. »
En autre lue trobem* que Tangelz venc a la propheta Daniel
e diz li : « Non aias, paor, Daniel, quia ex die primo, quo oppo- 170
suisti cor tuum ad intelligendum ut te affligeres (ad inteUigen-
dumj in conspectu Domini, exaudita sunt verba tua, et ego veni
propter sei^mones tuos» Cardes lo primer jorn que tu pausest
ton cor ad entendre, & t'afflechezist davant la fatz de nostre
Sennor, las tieuas paraulas son auzidas, et eu soi venguz per 175
aco aici a te. Le princes del règne de Persa a estât encontra
me vin & un jorn ; e vec te que saiuz Miquelz, us de nostres
majors princeps, es venguz per adjutori a me. Ven en & eu
esseinnarai te aizo tôt qued esdevenra a ton pobol elz derrers
jornz, car tu es ancar en Syon^. Veruntamen annun-{\Q v^]'Ciabo 180
tibi quod expressum est in scriptwis veritatis, Ancar t'anuncia-
rai zo qued es escrih en Tescriptura de veritat, & en tôt aîso
non ai adjutori mas saint Michel, lo nostre prince. »
Item.
fn tempore autem illo consurget Michael^ princeps magnus 185
qui stat pro filiis populi sui, et veniet tempus quale non fait, ab
eo quo gentes esse ceperunt usque ad tempus illud. Eu aicel temps
se levara sainzMichelz, le granz princes, le qualzesta per los
filz de son pobol, & venra aquel temps le qualz non era aguz,
d'aicella sazon que las genz acomenseron ad esser entro 190
adonx; et en aicel temps se salvara le tiens pobolz. Tuh aquil
que seran atrobat escrih el libre de vida & moût d'aquelz que
dormon en lapolz de la terra s'esveillaran, e li un annaran en
la vida durabla, & li autri annaran en torment per toz temps
mais. Qui autem docti fuerint fulgebunt sicut splendor firma- 195
menti, E cil que seran sapi resplandran aici con li resplandors
del firmament, e cil qued auran esseinnat drechura seran aici
con las este las perpétuai <k eternal.
* Corr. ti'obatn? — 2 Le texte de la Vulgale, dans le livre de Daniel
(X, 14), d'où est pris ce passage est ici : « Quoniam adhuc visio in dies. »
/
tSe LÉGENDES PIEUSES
Item.
200 In diebus illis factum est prelium magnum in cela : Michael
et angeli ejuspreliahantur cum drackone. En aicelz jornz fon
[16 v°] fâcha una granz batailla en cel : Sainz Michelz e sei
angel se combatian ab lo dragon, e le dragons e sei angel se
combatian ab el, e fon vencuz, e d'aqui adenant non ac plus
205 loc en cel, e fon getaz aicel granz dragos fora dal cel, serpenz
antix, qued era appellatz diabolz e Sathanas, que torbava tôt
lo segle; & fon getatz en terra e cei angel ab el. Et auzi una
gran voz pois sus el cel que dis : Nunc facta est salus et virtus
et regnum Dei nostri et potestas Chnsti ejus, quia projectus est
210 accusator fratrum nostrorum, qui accusabat illos ante conspec-
tum Dei nostri die ac nocte. Ara es fâcha salutz & vertutz & le
règnes de nostre deu & le poders dei seu Christ, quar Tacu-
saire de nostres fraires es getaz a terra, que los accusava de
jornz et de noh davant Deu; e sanz Michelz e sei angel an lo
215 vencut per lo sanc de Tainnel & per la paraula de la soa gua-
rentia. Propterea letamini, celi et qui habitatis in eis. E per
aizo alegra[tz] vos, cel, & tuh cil qued habitatz en elz.
VI
IN FESTIVITATE SANCTI PETRI
Jgitur post corporeum domim'ce nalivitatis adventum, cum
ipse dominus Jésus ChristuSy vera lux mundi, mundanis tenebris
illuxisset, ambulans juxta mare Galilée, vidit duos fraires,
Symonem, qui vocatur Petrus, et Andream fratrem ejus, mit-
5 tentes recia in mare. Erant enim [17 r°l piscatores. Et ait illis
« Venite post me ; faciam vos fieri piscatores kominum. » Et
conlinuo relictis retibus, secuti sunt eum. Aprop lo corpo-
ral esdeveniment de la nativitat de nostre Sennor, cant el
mezeis nostre Senner Jésus Christ, lumnera dei mont, luzi en
10 las tenebras dei mont, el, annanz de josta la mar de Galilea,
vi dos fraires, Simon, qued era appellatz Peire, & Andreu son
fraire, que mettian filatz en la mar, car eil eran pescador. E
dis lur nostre Senner: « Venez e segues me, qued eu vosfarai
LEGENDES PIEUSES 237
pescadors d'omes, zo es que penres homes. » Et aqui eis lais-
seron lur filatz & seguiron lo. Et anneron, e quan foron en la 15
terra d'una ciutat qued hom appellava Cesarea Philipi, deman-
det a SOS discipolz e dis lur: « Quem dicunt homines esse filium
hominis? )^ At illi dixerunt : « Alii Johannem Baptistam, alii
autem Heliam, alii vero Jeremiam aud unum ex prophelis.n
« Li home, que dizon de me, que soi filz de la vergena ? » 20
Eil responderon e disseron: « Li un dizon que vos es Johans
Baptista, qued Héros ha degollat, li autre dizon d'Elias la
propheta, Ji autri de Jheremias, li autri d'un de las autras
prophetas. » — « E vos autre, diz nostre Seinner, qu'en
dizes? » Respondet sainz Peire e dis : « Tu es [17 v°] Christ, 25
filz de Deu lo viu. » Respondet nostre Seinner e dis li ; « Bena-
zuratz es, S;ymon, car zo qued tu as dih non t'a révélât carnz
ni sanx, mas le meus paire qued es el cel; et eu die te que tu
es Peire, e sobre aquesta peira eu bastirai la mia gleisa, e las
portas d'enfern non seran fortz escontra te, e darai te las 30
claus del règne celestial, e tôt zo que tu liaras sobre terra
sera liât el cel(z), et zo que tu desliaras sobre terra sera des-
liat el cel(z). »
Sciens autem Doymnus Jésus quia omnia dedit ei pater in
manus et quia a Deo exivit et ad Deum vadit, surrexit a cena et 35
ponit veslimenta sua, et cum acceptisset linteum, precinxit se,
et cetera. Laissarem vos estar la razon que vos aviam moguda
de sus, e penrem vos d'autre lue, car qui tôt o volia dire per
orde, aici con annet, longas no vas serian trop.
Nostre Senner Jésus Christ, sabens que le paire avia totas 40
las causas del mont pausadas enfre sas mas, & aiei con el era
oiscis de Deu lo paire, convenia que tornes ad el, levet, zo
diz, de la cena, e vai penre un drap line & seis s'en entorn
se, si que, pausatz sos vestirs, pois mes d'aigua en una conca,
& comenset a lavar los pes a sos discipolz, & pois a terzer ab 45
aquel drap de que era ceinz. E cant venc [18 ro] a saint Peire,
dis li sainz Peire: « Seinner, lavarias me tu doux los pes? »
Respondet Jésus e dis : « Tu non sas mingua aoras per qued
eu o fatz, mas sabras o aprop.» Adonx li dis sainz Peire : « Sen-
ner, ja non me lavaras pes a tota ma vida. » Respondet Jésus 50
e dis li : « E si eu non te lau los pes, tu non auras part en
me. )) Respondet sanz Peire e dis li: « Senner, non tan sola-
238 LEGENDES PIEUSES
ment los pes, mas la mans e lo cap.» Adonx dis nostre Senner :
« Zo qued es net non cal lavar . »
55 Pois can nostre Senner ac receuput morft] e passion, el ap-
parec a saint Peire e dis li : « Symon Johannis, diligis me ?
Symon,amas me?» Respondet li sainz Peire e dis: «Seinner,
tu sabes ben qued eu t'am. » Adonx dis li nostre Senner:
« Pais mos agnelz. » E pois demandet li per aqui mezeis :
60 « Symon, amas me? » Respondet sainz Peire e dis: « Senner,
tu sabes qued eu t'am. » — « Pais doux, zo diz nostre Senner,
mas fedas. » Demandet li la terza vegada si Tamava. Sainz
Peire acomenset s*en ad iraiscer, caji tant li o demandalva,
e respondet li: « Senner, tu conoisses e sas tôt cant es e
65 sabes* ben qued eu t*am. » — « Pais, dis nostre Senner, mas
fedas. Et eu die te verament qued aici con tu te ceinnias, cant
erasjoves homet annavas on te volias, aici can tu seras veilz,
& tu estendras [18 v°] tas mas, & autre te ceinnera & te menara
la on tu non voiras. » Aizo li dis, car demostrar li vole de quai
70 mort dévia morir ni annar a Jesu Christ.
Postquam autem dominus Jésus assumptus est in celum, Petrus
et Johannes ascenderunt in templwn ad hoy^am orationis nonatn.
Pois que nostre Senner Jésus Christ s'en fon pujatz en cel,
sainz Peire & sainz Johanz intreron un join al temple ad
75 hora nona, per preguar nostre Seinnor; et atroberon un
contrah alaportadel temple, qued era appellada speciosa,
qued 0 avia trah del ventre de la maire, & estava aqui per
querre almorna a celz qued intravan ni eissian del temple.
Aquest contrah, cant vi saint Peire e saint Johan intrar lain-
80 tre, acomenset lur a pregar que li fezessan almorna. Regardet
se sanz Peire & sainz Johanz vers aquest e dis li sanz Peire :
« Regarda te vers nos. » Regardet se vers elz e cujet que li
volguessan quedocom donar. « Nos non avem aur ni argent
que te puscam donar, mas zo qued avem te donarem, el nom
85 de Jesu Christ de Nazaretz; leva sus e vai t'en. » E va lo
penre perlaman dextra e levet lo sus, & en eus pas las join-
chas de las cambas e las plantas delz pes foron fermadas,
[19 r°] e comenset a saillira a correr, & intret ab elz el tem-
ple, saillenz & trepanz & lauzans Deu. Aquest hom era d'état
* Ms. sabas.
LEGENDES PIEUSES 239
de caranta anz o de plus. Augebatar autem numerus creden- 90
tium in Domino multitudo virorum ac muh'erum. Le nombres
delz homes e de las femenas que crezian en nostre Sennor se
creissia ades cada jorn, si qued en las plassas jetavan los
malautz elz pausavan en leg & en colgas, que^ can i passaria
salnz Peire, sivalz li soà umbra los pogues tocar, quar en eus 95
pas eran sanat e guérit de lur malautias. Totas las genz de
la terra & de las ciutatz d'entorn Jherusalem aportavan lur
malautz aqui en Jherusalem & los demoniaix, & en eus pas
queli apostol los tocavan, eil eran guarit& sanat. Can li apostol,
aquil qued eran en Iherosolima, auziron que li terra de Samaria 100
avia receuput la paraula deDeu, trameseron la dos delz apos-
tolz, saint Peire & saint Johan. Li quai, quan vengron en la
terra, pregueron per aquelz que Deus lur trameses lo Saint
Esperit. Ancar en nengun d'elz le Sainz Esperitz non era ven-
guz, mas batejat eran tan solament el nom de Jesu Christ. 105
Adonx sanz Peire e sainz Johanz pausavan lur mas sobre elz, e
recebian lo Saint Esperit. En la terra avia un encantador qued
avia nom Symon. Aquest, can vi que perlo pausament de las
mans delz [19 v^] apostolz, recebian Saint Esperit, près gan-
ren de deniers & aportet los alz apostolz e dis lur :« Prennez 110
aques deners, & donatz me aquest poder qued a tôt home
qued eu pause mas mans de sobre, recepia lo Saint Esperit. »
Sainz Peire respondet e dis li: « Ta pecunia sia ensemps ab
te en perdicion, car tu lo don de Deu as adermat a peccunia.
El mont non* es aquel hom qued aizo degues aver dih. Mas 115
le tieus cors non es drechuriers davant Deu. Fa penitencia
d'aquesta toa nequicia, & prega nostre Sennor, & per aven-
tura perdonara te aquesta mala cogitacion qued as en ton
coratge, car eu vehg que tu es en fel d'amaror & en deleg
de iniquitat. » Respondet aquel Sjmon e dis : «Pregas per me 120
nostre Sennor que non me vengua de sobre zo qued aves
dih. » Et illi quidem testificati et locuti verbum Domini reddi-
bant lerosolimam. Et eil, cant agron guarentida & fah saber
la paraula de nostre Seinnor, torneron s'en en Iherosolima.
E moût d'aquella région delz Samaritans acomenseron annun- 125
ciar & a predicar ab los apostolz nostre Seinnor Jesu Christ
< Le me. répète non.
24 0 LEGENDES PIEUSES
(ab los apostolz). Can sans Peire passava per las ciutatz ab
aquelz seus discipolz que lo seguian, venc ad una vila una
vegada, qued avia nom Lidda. Trobet aqui un home qued
130 avia nom Enea, [20 r°] le qualz avia jagut oc^o anz malautz
en son legh, & era paraliticus, zo es una malautia avia que
non avia poder en se meseis. Sainz Peire venc ad aquest
malaut e dis li : « Enea, Jesu Christ te sane ; vai sus & esta
en pes. » Et en eus pas levet sus e fon sanatz e guaritz. E tuh
135 aquil d'aquella vila Lidda & (da)d'una autra qued avia nom
Sarone, can viron aquesta meravilla, se tdrneron a nostre
Sennor.
En' una vila autra qued avia nom Joppe, prop d'aquestas
vilas Lidda e Farone, on sainz Peira si bistentava, per predi-
140 car laparaula de Deu, avia una donna, discipula delz apostolz,
qued avia nom Tabitas, Aquist donna fazia moût voluntiers
îilmorna e vestia paupres & era plena de totas bonas obras.
Esdevenc qued en aquelz jornz, cant sainz Peire era en Lidda,
qued aquist donna près malautia e mori. E presseron la donna
145 li amie e laveron la & acermeron la, aici con tain a mort, e
meseron la en un portegue. Lidiscipol qued eran aqui, can au-
ziron que sanz Peire era en Lidda, tramesseron li dos messat-
ges que non se trigues que vengues tost. Annet sainz Peire e
venc s'en ab aques mesatges. E can fon vengutz, van lo penre
150 li discipol e menero[nlo] ^ la on era aquist donna morta, Ab ai-
[20 v°]-tan vengron las vezinas e las vezoas, plorant et fazent
moût grand dol, e monstravan li las gonnellas e los vestirs qued
aquist donna lur fazia. E sainz Peire dis lur e lur monstret
que s'en eissessan tuh, e cant foron tuh fora, getet se ad ora-
155 tion e preguet nostre Sennor; & quan ac fâcha sa oration,
giret se deus lo cors e disli: a Tabita, sur g e, Tahita,, leva
sus. » Ab aitant ella uberc los oilz, e cant ac vist saint Peire,
asetet se elleg; e sanz Peire va la penre per la man e dreis-
set la sus, e sonet celz que s'en eran eissit, e rendet la lur
160 viva. Aizo fon sauput per tota la ciutat de Jopen, e crezeron
en nostre Senner Jesu Christ. En aquel temps trames le
' Ms. VUf par une erreur du rubricaleur.
* vi E meneroQ lo la » ; en renvoi à la marge à l'encre bleue ; les lettres
suppléées ont été rognées par le relieur.
LEGENDES PIEUSES 241
reis Héros sos mesatges per las terras qued afOiichezes celz
de sancta Gleiza, et aucis saint Jacme, lo fraire de saint
Johan^ ab gladi; e vi que mot plazia alz juzeus e fez penre
saint Peire. Et erant li jorn de Pascha. E can ac près saint 165
Peire, fez lo mètre (&) en carcer & mes i catre compainnas
de bacallars que lo gardessan, e vole lo rendre aprop Pasca,
per justiziar, al pobol delz juzeus. E domens que sainz Peire
era en la carcer, sancta Gleiza pregava nôstre Sennor assi-
dualment per el. Can venc en aquella noh que Tendeman 170
lo vole Héros liurar al pobol delz juzeus, e sainz Peire se dor-
mia entre doas [21 r**] gardas, liatz de doas cadenas, e las
autras gardas esta van davan Tuis, que gardavanla carcer. E
vec vos Tangel de nostre Seunor, & estet laintre, & tota li
maisons de la carcer resplandic* moût fort. E va s'en a saint 175
Peire e toque t lo al latz, & esprec lo & dis 11 : « Levatost sus.»
Et ab ai tant las cadenas 11 cazegron de las mans. Ë dis li Tan-
gelz : « Pren ton vestir e met lo entorn te e causa tas caus-
sas. » E fez o. E quan o ac fah : « Ar, zo diz Tangelz, me
sec. » Et li carcer s'aobri ab aitan, e Tangelz met se primers e 180
comensa s'en ad eicir e sainz Peire comenset lo a seguir; e
non sabia que fos vers aizo qued era fah per Tangel, mas ader-
mava se que fos somnes. Passeron la primera garda e la
segonna, e vengron a la porta de la ciutat, qued era de ferre,
& obère se ad elz per sa voluntat. Et eissiron foras & passeron 185
una carrera, <k aqui eis Tangelz se parti d'el. Et Petrus ad se
reversus dixit: o jNunc scio vere quia misit Dominus angelum
suum et eripuit me de manu Herodis et de omni expectatione
plebis Judeorum. » Adonx se reconoc sanz Peire e dis : « Ara
sai eu verament que nostre Senner m'a trames son angel & a 190
me trah de la man d'Eron e de tôt Tatent que le pobolz del[s]
Juzeu[s] en fazia. »
Bis itp. gestis, surrexit quidam Symon Samarim génère qui
dudum visis miraculis Pétri peccunia compa'[2i y^yrare voluit
donum spiritale, Cant tôt aizo fon esdevengut aici, levet se 195
as hom qued avia nom Sjmon, qued era del linnatge dels
Samaritans,le qualz, cant ac vist tanta meravilla co sainz Peire
fazia, volgra compra[r] lo don esperital ab deners. El aquest
i Ck>rngé àe resplandac, écrit d'abord.
ri
r2i2 LEGENDES PIEUSES
dizia e fazia encrezent a las genz qued el era filz de Deu e
200 que totz temps viuria, e prometia e dizia que cil qued en el
oreirian viurian totz temps atressi e ja morir non poirian.
Aquest encantaire se penava moût que zo que sainz Peire
esseinnava ni las meravillas que fazia pogues desfar e trastor-
nar e far encrezent a las gens que res non era. E cant venc
205 un jorn, acomenset a tensonar ab saint Peire e dis li que
presessan (e) jorn et aquel jorn fos i totz le pobols, & auzent
tôt lo pobol, desputessan ; e cel que séria vencutz non fos ja
pois crezutz. Aquestas paraulas foron en unà ciutat qued avia
nom Cesarea Stratonis. Preseron jorn, e cant venc ad aquel
210 jorn qued agron près, Zacheus, qued era bailles d'aquella
ciutat, venc a saint Peire o dis li : « Peire, oi es le jornz que
tu deves venir a desputacion ab Sjmon. » Adonx aquel Zacheus
fez ajostar tôt lo pobol de la vila en la plassa e venc aquel
Simon aqui. Sainz Peire, [22 r*] quant o vi, diz a sos com-
215 painnos:<( Orem, fraire,e preguem nostre Sennor Jesu Christ
que, per la soa misericordia, done salut a son pobol & lur tolla
la error en que son & estan. » Cant agron lur oratio com-
plida, annet s'en sainz Peire ab sos compainnos en la plassa,
on totz le pobolz Tatendia ab aquest Sjmon. Et aici con el
220 intret, el feron tuh ensemps gran silensi,& saludet los d'aital
manera: « Pas sia a toz aquelz que son appareillât de donar
lur dextras a la veritat. Cil qued obezisson a la veritat obe-
disson a Deu per la soa gracia, e nostre Senner rendra lur en
225 lo sobeira guizardon, car eil van per las soas vias. Per aizo
nos es obs a cada un que nos queiram primerament lo règne
de Deu e la soa drechura. Drechura, per zo que puscam far
drechurerament zo que farem ; lo règne, que nos puscam
conoiscer qualz er le guizardos de trabail qued aurem suflfert
230 P^"^ T>eu^ le qualz es bons guizardonaire delz eternalz bens.
Ad aquest qued annaran contra sa voluntat rendra digna
pena, per aizo qued auran fah. Nos autri, qued em pausat en
aquesta présent vida, conven que conoscam & sapiam qualz.
es li soa voluntatz. E si alcuns volia saber ni far la voluntat
235 de Deu, davant qued lia-[22 v°]-gues emendat sos avolz fah,
non 0 poiria saber, e séria vans aquel sabers ni aquel deman-
dars. Aquist vida es breus en que nos estem*, e non sabem
1 Sic. Corr. esiam.
LEGENDES PIEUSES 243
cora se venra le juizis de Deu sobre nos. E per zo a nos obs
que demandem, davan totas causas, que nos coven a far con
aiam vida durabla, car 11 sentencia de la propheta es aitalz:
Cil que dizon qued aman Deu coven que tengan drechura ; e 240
per zo a obs que cil que auran ni sabran dechura en se qued
o digan, o cant autre o dira, qued o aujan bonamenz & en
pas. Per qued eu vos dis el comensament de la salutation que
pas vos dones Deus a trastotz. » Adonx respondet Symon e
dis: « Li toa pas non nos es obs ; car si entre me & te era pas 245
& concordia a trobar la veritat ren non auriam fah ; car li
lairon e li raubador e li mal fazedor an pas e concordia entr'
elz ; mas entre me e te non a obs que sia patz, car si era
patz entre me e ten, aquist que son ajostat aici non auzirian
la meua razon ni la toa. Per zo non diguas qued aia pas entre 250
me & te, mas guerra; car entre drechura & non drechura non
aura ja patz ni concordia, mas davant te voil far saber, cant
du! se combaton e Tus es vencuz, adonx es pas entr' elz dos.»
Adonx respondet sainz [23 r°] Peire e dis : « Caitiu, per que
ternes auzir pas ? Non sas tu doux que Tadimplimenz de la Lei 255
es pas e que de peccatz eisson tenson & bataillas, et aqui on
non ha peccat aqui es pas ? En desputacion deu esser veritatz
& en obras drechura. » Adonx respondet Sjmon : « Aizo que tu
dis non esplega ren ; mas eu te farai ades conoisser las mias
vertutz e lo meu poder e la mia divinitat, per zo que tu t'age- 260
noilles ades aici davant me e que m'adores. Eu intrei el ven-
tre de Rachel & nasquei d'ella con hom, per tal que li home
me poguessan vezer. Eu volei per Taer, mesclatz ab fuec* e
fui semblanz a fuec* & ac cors de fuec*. Eu fiz moure las
images & lur donei armas & las lur tolc. Eu ûz de las peiras 265
pan. Eu volei d'un pug en autre. Eu fui suffertz per mas d'an-
gelz. Eu soi deiscenduz a las terras. Et aici con eu ai fah aizo,
aici o pois ancar faire, per tal qued tuh sapian e conoscan per
aquestas causas qued eu soi filz de^Deu e le meus poders
estara totz temps, e celz que creiran en me farai totz temps 270
durables. Mas tu e las toas paraulas son vanas e non son
d'obra de veritat plus que de cellui que t'a trames, de cui tu
es discipolz, le qaalz era encantaire, qued anc se mezeis non
• On avait d'abord écrit fuc, Ve a été ajouté au-dessus, dans Tlnterligoe.
244 LEGENDES PIEUSES
poc desUurar de la pena de la cros. Eu pois far, si me ^ oil,
275 que cil que [23 v°] me volrian penre non me poirian vezer, e
per aqui mezeis, cant me voirai, eil me poiran vezer. E si eu
fugir volia, eu tranforaria los poh e passaria inz per roca^,
aie! con per fane. Si eu me laissava cader de sus d'un aut puh
en terra, eu non me faria mal plus que si era portatz enfre
280 mas. Si eu era liatz, eu mezeis me desliaria e rendria liaiz
celz que m'aurian liât. Si eu era encarceratz en carcer, las
clausuras de la carcer faria obrir de lur voluntat per ellas
mezeissas. Imagens farai semblar homes tan fort que tuh cil
que las veiran cujaran que sian vivas. Arbres novelz farai
235 subtanament naiscer & aqui eis portar frucg. Me mezeis
getarai en foc <& non ardrai. Ma cara mudarai de guisa que ja
non serai conogutz e farai sembblant alz homes qued eu aia
doas caras; o me mudarai en cabra, o en feda, on en enfant,
o(n) en home viel. Sus per Taer annarai volant. Moût aur
290 monstrarai. Reis e princes farai. Serai adoratz aici con Déus.
Vezent lo pobol, me sserau * fâchas montas honors, de guisa
qued una imagen faran a ma semblansa <& aquella adoraran
aici con deu. E que voles que vos diga mais? Tôt quant voil
far pois far. Tôt zo que pot esser fah, tôt ai fah. Un' autra
295 vegada quan [24 r°] ma maire Rachel me comandet qued, eu
annes el camp per meire, eu annei lai e vi a la terra una serra
colgada; anuet sus 11 serra e mezet dez aitanz que nenguns
delz autres messors. Moutz arbres ai fah eissir de terra & en
una hora & en un moment lur fiz getar fruc. Aquest puhg qued
300 es aici prop ai traucat doas vegadas. d
Cant aquest encan taire ac tôt aiso dih, sainz Peire respon-
det e dis : « Tu es encantaire & as confessât <k manifestât
aquellas causas qued has fâchas per encantament. Le nostre
maistre, ûlz de Deu, manifestet e dis aquellas causas que co-
305 venian que fossan dichas, e seran totz temps mais dichas. Mas
tu, Sjmon, qued es encantaire, volz qued eu t'oprove, vezent
totz aques que son aici ? Si volz qued eu t'o prove, annen^ a ta
maison, ab totz aques que son aici, e farai o saber a totz &
adonx parra qui es tu. » Can sainz Peire ac dih tôt aizo,
310 Sjmon Tacomenseta maldir & a blatesmar; à fon granz ten-
1 Ms. mes seran*
LEGENDES PIEUSES 245
SOS el pobol. Sainz Peire non s'en vole gequir per las blasthe-
mas, anz ades lo repres plus fort. Totz le pobolz cuminalmenz
cridet sobre aquest Sjmon, car tuh conogron que bausaire era;
e van lo penre tuh essemps e geteron l[o]* fora las portas d'a-
quel parlador^, en que eran. E can Tagron getat foras, [24 v°j 315
unsdiscipolz seus aoomensetlo a seguir totz soletz. Sainz Peire
seinnet a tôt lo pobol que fezessan pas. Ë can se foron tuh
calât acomenset lur a parlar d'aital manera : « Sennor ô*aire,
pacienment devem soffrir los malz e devem saber que Deus
los poiria aucire, si se volia, e laissa los durar e viure, entre 320
ad aicel jorn qued es establitz, el quai sera fah juzizis de tôt
quant es. Per que non soffrirem nos donx zo que Deus vol
soffrir? Vos autri, que vos tornatz a nostre Seinnor per pa-
ciencia, agenoilla[tz] vos adel. » Can sainz Peire ac dih aizo,
tuh doneron de genoilz en terra, e sainz Peire regardet se 325
vers lo cel e preguet nostre Sennor per aquelz, que per la soa
bonitat los receupes, car eil fugian ad el. Can venc la noh,
le tracher encantaire se mes en mar en una nau et fugi s'en a
Roma.
VII
IN COMMEMORATIONE SANCTI PAULI
Fuit vir quidam in Jherusalem de tribu Benjamin, nomme
Saulus, eruditissimus in libris Moysi et cunctis Legis cerimo-
niis, que tune secundum litteram gerebantur, nichil in his sen^
ciens aud advertens. Uns hom fon en Jherusalem, del trip de
Benjamin, qued avia nom Saul, sabis el[s] libres de Mojsen 5
& en totz los autres mandamenz de la Lei, qued adonx segon
la letra simpla eran portât. A-[25 r°]-quest destruia & annava
tant cant podia contra la gleisa de Deu. Intrava en las mai-
sos e trazia en homes e femenas, que per Jesu Christ se cla-
mavan, ô mena[va] los en carcer. Can venc un jorn, el se 10
penset con ' pogues aucir ni destruire de tôt los apostolz de
* geteron lo en renvoi à la marge ; l'o suppléé a été rogné.
* Lecture incertaine ; le mot est presque effacé.
3 Après ce mot se expooetué.
246 LEGENDES PIEUSES
nostre Sennor, & annet s'en alz princes de la Lei, & quasi lur
letras que portes a Domas a las synagogas, que si i trobava
homes ni femenas d*aquesta lei, que liatz los aduisses en
15 Jherusalem. E domenz que s'en annava, esdevenc que venc
prop de Domas, e vec vos subtanament qued una lutz de cel
resplandic tôt entorn el subtanament, & ab aitant el cadec en
terra & auzi una vos que diz : « Saule , Saule, quid me perse-
5'werîs? Saul, Saul, perque me persegues?)) Saulz ac gran
20 paor & respondet: « Qualz es tu, Senner, que m'apellas? » —
« Eu soi aquel Jésus, oui tu persegues. Mas leva sus, & intra
t'en en la ciutat, & dira te hom zo que conven que tu fassas. »
Aquil compainnon seu, qued annavan ab el, estavan estabo-
sit & auzian la vos & non vezian nuil homen. Surrexit autem
25 Saulus de tei^a; levet se Saulz de terra & obère los oils e non
vi ren. Van lo penre sei compainnon enfre lur mas, e porteron
lo a la ciutat de Damasc ; <k estet très jornz e très noh que non
vi ni anc non bec ni manjet.
[25 V*] En la ciutat de Damasc avia un discipol de Jesu Christ,
30 qued avia nom Anania^. E nostre Senner venc li en vesion e
dis li : « Anania ! » El respondet e dis li : « Senner, vec te me
aici. » — « Leva sus e vai t'en en aital carrera, qued hom
appella rectus, & quer en la maison d'una juzeua Saul* de
Tarsensem. Vec te qued ades prega. E vai, pausa li desobre
35 la man, per tal que recobre lo vezer. » Respondet Ananias
& dis : « Senner, eu ai auzit dir a mouz qued aquest hom a
fag & fai tan granz malz alz tieus sainz en Jherusalem, et en
esta vila ha pouder delz princes delz preveires que totz aquelz
que se clamon per lo teu nom lie e meta en preison. » Adonx
40 diz nostre Senner : « Vade, Ananias, quia vas electionis est
michi iste, ut portet nomen meum coram gentihus et regibus et
filiis Israël. Vai, Ananias, carvaicelz d'élection es a me aquest,
qued el porte lo ^ meu nom davan lo[s] reis e las genz & los
fllz d'Irael. Et eu demonstrarai li quanz malz coven que sofra'
45 per lo meu nom. » Annet Ananias en aquella carrera, & intret
en la maison, et atrobet Saul & pauset li sa man desobre e
dis li : « Fraire Saul, nostre Senner Jésus, que apparec [26 r°]
a te en la via, m'a trames aici a te, que recobres ton vezer e
* Ms. Salu» — 2 Mb. /e. — ^ Ms. so/^ia (l'i expontué).
LEGENDES PIEUSES 24 7
sias adimpliz del Saint Ësperit. » Et en eus pas cazegron 11
delz oilz cais «scauma de peis, & recobret son vezer e levet 50
sus aqui eis, & fez se batejar ; e poiz manjet un pauc & con-
fortet se. Et estet ab aquelz discipolz qued eran en Damasc
non sai quanz jornz ; et en eus pas intret en las synagogas
delz judeus, e predicava aquest Jesu Christ, e dizia que vera-
ment era filz de Deu. Tuh aquil que Tauzian parlar se mera- 55
villavan moût e dezian : « Non es doux aizo aquel que destruia
en Jherusalem aicelz qued appellavan aquest nom, e per aizo
era venguz en esta vila qued aicelz ques i* atrobaria en menés
liatz en Jherusalem alz princes de la Lei? » Saulz, zo dis,
adonx plus fort desputava ab los juzeus elz confondia, aquelz 60
qued estavan en Damasc, & affermava qued aquest era
•Christ filz de Deu. Cant ac aici estât moutz jornz, el juzeu viron
qued aici desputava elz confundia, preseron conseil entr'elz
mezeis con Taucizessan. E cant venc una noh, meseronli agah.
Cusiodiebant autern (et) portas civitatù die et nocte ut eum inter- 65
ficerent, Garderon las portas [26 v^] de la ciutat e meseron i
gardas, col poguessan aucire. Li discipol de saint Paul, cant
o auziron, van penre saint Paul e geteron lo de noh ab una
corda foras de la ciutat per los murs. E venc en Jherusalem;
et volia se ajostar ab los discipolz de Jesu Christ; e tuh temian 70
lo, car non podian creire que fos convertitz. Barnabas, uns
delz discipolz, va lo penre & aduis lo alz apostolz, et comtet lur
con avia vist nostre Sennor Jesu Christ en la via & qued el
parlet ab el, e con avia prédicat fizelment en Damasc lo nom
de Jesu Christ. D'aqui en la fon appellatz Paul en lue de Saul. 75
Esdevenc, quant ac prédicat en montas ciutaz Jesu Christ, lo
fil de Deu, qued el venc en una vila qued avia nom Listris.
En aquella vila avia un malaut, qued era contrah delz pes,
le qualz non avia annat des que fon natz. Aquest, cant auzi
parlar saint Paul,, acomenset lo moût fort ad esgardar. Sainz 30
Paulz se regarda vers el, e vi e conoc que fez e crezensa avia
qued el lo podia sanar. Et ab aitan acomenset li fort a dire :
« Leva sus planament sobre tos pes. » Ab aitant le malautz sail
en pes, sans & salz, & acomenset ad annar. Las genz, can
viron aquesta meravilla que sainz Paulz avia fah, crideron 85
* Ms que si.
24 8 LEGENDES PIEUSES
[27 r**] merce a nostre Sennor e torneron se a la fen del seu
fil Jesu Christ.
Esdevenc pois qued el annet al) saint Peire a la cîutat de
Roma. Et aqui atroberon ambedui un encantador qued avia
90 nomSyraon, le qualz era fugitz, per paop de saint Peire, de la
terra d'outramar, et era s'en vengutz aqui estar. Sainz Peire
e sainz Paulz acoraenseron a predicar la fen de Jesu Christ,
e per lur prédication moutz pobolz se tornet a la fen de Jesu
Christ. En eis esdevenc que per lur prédication Libia, li
95 moiller de Nero, & Agripina, li moiller del baille, non vol-
gron plus estar ab lur maritz e volgron tenir castitat. Per
lur prédication laissavan li home maleza e tornavan se a
Deu. Li cavalier se tollian de la cort del rei e fazian se
Christian e non volian pois tornar a la maleza ni al palais
100 del rei. Per aizo le pobolz acomenset moût a parlar mala-
ment de saint Peire e de saint Paul. L'encantaire Sjmon,
cant 0 auzi, acomenset malament a parlar d'aques dos, zo es
de saint Peire e de saint Paul, e dizia qued encantador eran
e quel pobol fazian tornar en error. Ganren i avia d'aquelz
105 qu6 crezian Symon, per aquo que li vezian far; car el fazia
moure serpent de coure per encantament, & cans de peira
fazia lairar, et i - (27 v**] - mages de coure e de peira fazia
rire e moure e corre davan se. Escontra aizo sainz Paulz
e sainz Peire, pregant nostre Sennor, curavan malautz, enlu-
110 minavan cex, encausavan e getavan diabolz delz cors delz
homes, resuscitavan mortz, e dizian al pobol que non cre-
zessan Symon Mag, ni las obras qued el fazia, car filz era
de diabol & zo qued el fazia era deus part de diabol, e cil *
qued el avia convertiz amonestava^ que lo fugissan e se tol-
115 guessan de las obras soas, & que las descubreguessan & fezes-
san saber que des part de diabol las fazia. Esdevenc que li
religions home, que crezian la prédication de saint Peire,
dizian alz autres qued encantaire^ e zo que fazia era des part
de diabol & escumenegatz era. Et encontra li mal home e li
120 fellon, cil que le bauzaire avia convertiz, dizian de saint Peire
e de saint Paul qued encantador eran, e zo qued eil predi-
cavan era errors. Et aquist tensons era el pobol. Aquist ten-
1 Corr. celz.— 2 Corr. amonestavan. — 3 Sic. Suppl. era (à savoir Symon).
LEGENDES PIEUSES •?4 9
sons venc a saber a Nero Temperador, e trames querre
aquest encantador Symon. El, can fon denant el, acomenset
S03 encantamenz a far; et era sub - [28 r*] - danament en 125
guisa d'enfant & aqui eis esdevenia veilz, e pois tornava
jovens hom. Et aici mudava se en quai qued état se volia,
per montas figuras, diabolo opérante, si que, lo diabol obrant,
cant Nero Temperaipe vi aizo, cujet se verament que fos filz
de Deu. Sainz Peire e sainz Paulz vengron denant Tempe- 130
rador e disseron: « Emperaire, non crezas aquest lairon, car
el es messoneguiers & encantaire, e fa lagezas, et es felz e
reneguatz, et en totas causas qued a Deu apertenon es con-
traris de veritat. Nuilla causa de mal non es qued en el non
sia. » Adonx diz Tencantaire a Nero : « Audi me, bone impe- 135
rator; autz me, bons emperaire; eu soi filz de Deu, que so
vengutz de cel ; avia soffert entro aci ; ara i es vengutz aquest
Paulz & es doblatz le malz; e tu, emperaire, si non pessas
con aquist dui sian mort, le tieus règnes non pot estar. »
L'emperaire, cant auzi aizo, crezet o, e can venc Tendeman, 140
fez los venir a se.
Cant venc Tendeman, qued eil foron denant el, Simon diz
a Temperador : « Aquist son discipol d'aquel Nazaretz. »
L'emperaire diz : « Qued es Nazareth ? » Simon dis : [28 v®]
« Una ciutatz es en Judea, que totz temps es aguda contra 145
vos & contra vostres mandamenz, ed'aquesta Nazaretz fon lur
maistre d'aquest. » Nero Temperaire respondet : « Deusja
ama(va) tôt homen & Tamonesta. Tu per que persegues aques?»
— « Aquist dui an tota Judea convertida e tornada que non
crezessan en me. » Nero, cant auzi aizo, diz a saint Peire & 150
a saint Paul : « Per que es tan trachor vos ni vostre lin-
natge ? » Adonx diz sanz Peire a Symon : « Sjmon, aquelz
avîas deceuputz que crezessan en te ; mi non as pogut dece-
bre * ; mas Jesu Christ aquelz qued avias deceupuz a trah
d'aquella error per me. E pois car tu saps que nos autres 155
apostolz de Christ non pos convertir per la toa art encantai-
ritz, meravil me con auzas parlar davan Temperador. » Adonx
dis Nero Temperaire : « Qui es Christ? » Sainz Peire res-
pondet : « Aquel es Jesu Christ, de cui aquest bauzaire
^ Soivent immédiatement cinq mots biffés: me no?i poguist anc deceère.
250 LEGENDES PIEUSES
160 afferma e diz qued el es. Aquest es malz hom e las soas obras
son de diabol ; mas tu, bons emperaire, volz saber aquellas
causas que Jesu Christ fez en Judea ? vejas las letras [que]
Ponz Pilatz trames a Claudium & adonx [29 r°] conoisseras
o & sabras o. » Adonx Nero fez se aportar las letras & fez
165 la[s] se legir davan; e dlsseron en aici ; « Ponz Pilatz a son
amie Claudi, montas salutz. Voil vos far saber zo qued es
esdevengut novellarment en la terra delz juzeus, li quai per
enveja an dampnat se & aquelz que venran aprop elz, car eil
trobavan escrili en lur libres, et a lur pairons era promes,
170 que Deus lur trametria lo seu fil de sus del cel, le qualz nais-
ceria de la vergen & appareisseria en terra. Aquest, domenz
qued eu era bailes en Judea, trames Deus en la terra. Li
Juzeu, cant lo viron fazent meravillas, qued enluminava los
cex, elz lebros mundava, los malauz curava de qualque enfer-
175 metat qued agues, los diabolz cassava delz cors delz homes,
los mortz resuscitava, las auras fazia venir o remaissar, sobre
las undas de la mar annava per essuh pes, e moutas autras
meravillas que fazia; li juzeu, cant o viron, agron gran enveja
car le pobolz crezia en el. E van lo penre li fellon prince de
180 la Lei, e liureron lo me. E dizian me mesoneguas e so que
res [29 v®] non era, e dizian qued encontra lur lei annava.
Eu crezei o, e liât e batut e flagellât rendei lo lur. Eil van
lo penre e meseron lo en cros, & aqui feron lo morir ; e pois
pauset Tom en un sepulchre, e disseron qued hom gardes lo
185 sépulcre très jornz, e meseron i gardas cavaliers me[u]s e
resuscitet al(z) ters dia, non remas per garda. Li enveja e Ir
fellonia delz juzeus crée tant qued aver doneron alz caval-
iers, que dissessan que sei discipol avian emblat lo cors. Cant
li cavalier agron receuput la peccunia, zo que fon fah non
190 pogron celar, car eil disseron a tôt lo pobol que resuscitatz
era e qued eil o avian vist e que li juzeu lur n'avian donat
aver que non o dissessan. Aizo esdevenc enaici, et en autra
guisa hom non o diz que non menc/a^wr; e las messonegas
delz juzeus non devon esser crezudas. »
195 Cant aquist carta fon legida aici, Nero l'emperaire dis :
« Diguas me, Peire, fon aici fah aizo con o diz li carta? »
Sainz Peire respondet e dis : « Bos emperaire, crezas ben
qued aici fon, e non fon d'autra guisa. Et aquest Sjmon,
I LEGENDES PIEUSES 251
plens de mesoneguas e d'engan, <k hom carnalz qued es, fai
se deus. Aici con en Jesu Christ ha doas sustancias, zo es 200
sustancia de Deu <k d'orne : en la sustancia de Deu avia to-
[30 r**]-ta pleneza de divinitat ; en la sustancia qued avia
d*ome, rezemet la humanitat ; aici en aquest Sjmon haautras
doas sustancias : sustancia d'orne & substancia de diabol,
le qualz s'esforssa de dampnar los homens e de mètre en error, 205
per la sustancia d'aquest homen. » Adonx respondet Symon :
u Meravil me, bons emperaire, con pos auzir ni escoutar
aquest fol home pescador e messoneguier, qued en paraula
ni en linnatge ni en nulla ren poder non ha. Mas ja plus non
soflfrirai aquest enemic, car ades farai venir mos angelz e
dirai lur que m'en venjon. » Sanz Peire dis : « Eu non tem 210
te ni los tiens angelz ; mas eil podon temer me, en la vertut
et en la fizansa de Jesu Christ. » Adonx diz Nero : « Peire,
non ternes tu donx la divinitat de Sjmon qued a tan gran
poder que tôt cant vol fa ? « Sainz Peire dis : « Si aquil 215
divinitatz es en el, li qualz conois los secretz delz coratges,
digua me zo qued eu pes ni que farai ; et eu dirai te prime-
rament a Taureilla zo qued eu pes ni que farai, per tal que tu
conoscas si ment de zo que dira, w Adonx diz Nero : « Ara
te fa en sa, Peire, & diguas me ta cogitation. » Annet sanz 220
Peire e dis li : « Fa me aportar un pan d'ordi & fa lo me
donar a ce-[30 v**]-lat, qued hom non o sapia. » Fez li aportar
un pan d'ordi; e cant Tac près sainz Peire, benezis lo e frais
lo e pois mes lo en sas manegas. Ë cant o ac fah, & el dis :
« Ara digua Symon oimais zo qued eu pes ni ai fah. » Respon- 225
det Nero Temporaire e dis : « Cujas donx, dis Temperaire,
qued eu creza que Sjmon non sapia aizo que tu pensas^ le qualz
resuscitet lo mort & el mezeis, can ac perdut lo cap, resusci-
tet al terz dia, e tôt cant eu li ai dih tôt a fah ? » Adonx dis
sanz Peire : « Davan me non n'a ren fah. » Nero l'empe- 230
raire dis : « Eu li port ben guarentia d'aizo, qued el coman-
det a SOS angelz de cel que venguessan, e vengron.» Respondet
sainz Peire : « Pois qued aco qued es tan granz causa ha fah,
per que non fa aizo que non es tan granz causa, qued el digua
zo t|ued eu pes ni qued ai fah ? » L'emperaire dis : « Que 235
dis tu d'aizo, Symon ? Eu non sai en que me tengua de vos
dos. » Adonx dis Symon : « Peire digua zo qued eu pes. w
252 LEGENDES PIEUSES
Respondet sanz Peire : « En aizo qued eu ai fah farai saber
240 a totz zo que tu pensas. » Adonx dis Simon : a Be sapias,
bons emperaire, que las pensas delz homens non conois ni
sap mas solament Deus. » Sainz Peire respondet e dis : « Ja
dis tu que tu es Deus ; diguas doux zo qued ai fabg ni qued
eu pens, & fai o saber a totz. » Adonx Sy-[31 r^]-mon ac gran
245 dol & gran ancta, car non poc dir lo secret de Tapostol ; e
comenset a cridar & a dir : « Vengan gran can e dévorent
te e te manjon, davan Temperador qued aici es. » Et en eis
pas apparegron can a desmesura gran, <k abrivan se vers
saint Peire. Sainz Peire trais lo pan de sas maneguas, & en
250 eis pas eil avalisson & anc pois non apparegron, cant agron
vist lo pan que sainz Peire lur monstret. Adonx dis sainz
Peire a Nero : a Emperaire, vec te qued eu t'ai monstrat,
non per paraulas, mas per fah, qued eu sabia zo qued el pen-
sava ; et el qued avia dih que sos angelz faria venir & ad
255 aquelz faria me devorar, a los fah venir ; e par ben que aquil
angel non aian poder de la divina gloria, car en semblansa
de cans e de diabolz son vengut, e non a * agut poder de
mal far a me. » Adonx dis Nero Temporaire a Sjmon : « Qued
es aizo, Symon ? Ar euh eu ben que tu sias vencutz. » Res-
260 pondet Symon e dis : « Aquest m'a fah aizo en la terra de
Judea & en tota Palestina & en Cesarea, & domenz qued el
tensonava ab me, après aizo, car a las soas obras era contra-
ria^ ; e per aizo qued el escapes a me, après aizo, car las
pensas delz homes non sap mas soletament Deus. » Sainz
265 Peire respondet : « E tu, que diz qued es Deus, per que non
dis las co-[31 v'^J-gitations delz homes? » Adonx se giret
l'emperaire a saint Paul e dis li : « Tu, Paul, perque non dis
quedocom? » Saiiiz Pauls respondet: « Ben sapias, empe-
raire, que si tu laissas ad aquest encantador tan tas causas
270 faire, gran mal fara a ton pais, & creissera tant li maleza que
tôt lo regnum getara de son luc^ » Nero respondet e dis a
Sjmon : a Qu'en dis tu, Symon? » Symon dys : « Si eu non
manifest verament qued eu soi Deus, ja non voil que li home
me fassan la honor que devon. » Nero dis : a E qued atten-
des que non o fas ades, per tal qued aquist sian tormentat? »
1 Sic. Corr. ûfn? — * Sic, Corr. contrari'i
LÉGENDES PIEUSES 253
Symon dis : « Fai me far una torre autha de fust, & pojarai 275
sus & farai venir mos angelz, e, vezent tôt io pobol, pujaran
m'en en cel a mon paire, et ad aizo poiras saber qued aquist
home son fol. » L'emperaire respondet : « Qu'en dis tu,
Peire ? En aizo pareissera * li soa vertutz & aquil del tieu deu.»
Sainz Peire dis : « Bons emperaire, si tu te volz, tu poiras 280
conoisser que deus part de diabol es. » Nero dis : « Deman
sabrem qualz de vos dis ver. » Sjmon respondet: « Cres* tu
doux, bons emperaire, qued eu sia encantaire ? Ja fui eu
mortz e resusoitei. » Le tracher Sjmon avia fah un encanta-
ment, car el avia dih a Nero i'emperador : « Fai me taillar 285
la testa en [32 r*^] un lue escur, e laissa me aqui estar mort,
e si eu non resuscite al terz dia, sapias qued eu soi encantaire ;
et si eu resuscite, sapias qued eu soi ôl de Deu. » E Nero avia
lo fah penre e mètre en un lue escur, e comandet ad un que
li tolgues sa testa. E can le tracher fon laintre, ac un aret ser- 290
mat & fez son encan tament ; e fon vejaire a cel que li volia
tolre lo cap de Taret qued el fos. Mas pero, cant li ac tout
lo cap, près lo & annet lo regardar déferas alla ' clairor, e vi
e conoc que caps d'aret era, e non o vole dir a l'emperador,
per paor de se mezeis, qued el non fos encolpatz, qu'om non 295
disses que per safoUia era esdevengut, car el Tenu avia^ aici
enfollit qued un aret li avia fah aucir en son lue ; e per aiso
non o vole descobrir. E per aizo dizia Simon qued al tertz jorn
era resuscitatz, car el n'avia portât lo cap el(z) cors, & avia
fah recebre lo sanc en una conca. Cant venc al terz jorn el 300
se demonstrete dis que resuscitatz era; et adonx dis a Tem-
perador : « Fai ostar lo meu sanc d'aqui on es escampatz,
car eu que fui degoUatz, aici con o avia promes soi resusci-
tatz al terz jorn. » Car Nero Temperaire avia dih : « Deman
sabrem qualz de vos autres dira ver ni er vertadiers », dis a 305
saint Paul : « Tu per que non parlas, [32 v°] Paul ?» Sainz
Paulz respondet e dis : « Zo que Peire diz, crezas qued eu
die atressi; una causa dizem, car ambedui prediquem un
^ lis. pareinsara.
• Ce mot est précédé de non, exponctaé et biffé.
3 Ms. al la.
^ Ms. len nauia.
254 LEGENDES PIEUSES
seinnor, Jesu Christ. » Symon respondet : « Entent me,
310 César. Per zo que tu sapias qued aquist son falz & eu soi
trames de sus de oel, deman m'en pujarai sus el cel, per tal
qued eufassabenazuratz aquelz que crezon en me, et en aques
que me deneguan demonstrarai ma ira. Et aujas me, César.
Part aques dos de te, que cant eu serai ab mon paire el cel,
315 qued eu te pnscha esser bons. » Nero respondet : « Con
sabrem nos que tu t'en pujes en cel ? » Sjmon dis : « Fai
far una torre de fust e de granz traus,et eu pujarai en aquella,
e can serai sus, li mei angel venran sus en Taer e portaran
me ; car a terra non poirian venir a me antre los peccadors. »
320 Nero respondet : a Ben voil vezer si poiras far zo que tu
dis. »
Adonx Nero fez far una torre el Camp de Martz gran &
auta. E cant li terres fo fâcha, fez venir tôt lo pobol e totas
las genz delà vila per vezer aquesta meravilla. Cant totas las
325 genz foron acampadas, e sainz Peire et sainz Paulz i fon, e lo
diz Nero : «Ara apareissera li veritatz. » Sainz Peire e sainz
Paulz disseron : « Nos non lo descobrirem, mas nostre Sen-
ner Jesu Christ, fils de Deu, cui el se fa, cel lo descobrira. »
Adonx Sjmon, vezent tôt lo pobol, [33 r°]. s'en pujet en la
330 tor, et fon coronatz de laurier, & estendet las mans & acomen-
set a volar. Nero, cant o vi, dis a saint Peire & a saint Paul :
« Aquest hom es verais; vos au(s)tri es bauzador delz homes
e del pobol. » Adonx respondet sainz Peire : « Sofri te un
pauc, que tu sabras e conoisseras * ades que nos autri em mes-
335 satge de Christ & el es messoneguiers & encantaire. » Nero
respondet qued « ancar persévéras en vostra dureza ; vec vos
qued el es ja sus el cel. » Adonx esgardet sainz Paulz* sus el
cel e dis : « Paul, dreissa ton cap et vejas. » Sanz Paul dreissa
son cap contra sus e vi lo volar, & comenset a plorar e dis :
340 « Peire, que fas ? Monstra aquel poder que Jesu Christ t'a
donat. » Adonx sanz Peire esgardet el cel e dis : n Eu vos
conjur, angel de Sathanas, que lo portas en l'aire, per dece-
bre los coratges delz non fizels homes, per Deu lo creator de
totas causas e per Jesu Christ lo seu fil, que resuscitet al
345 tertz jorn de mort, que vos d'aici enant non lo portes, e làis-
* Ms. sabres e conoisseres. — * Sic. Corr. Peire.
LEGENDES PIEUSES 255
sas lo. » Et en eis pas li diabol lo laissan e cadec en terra, e
parti en catre parz, e cada una de las partz esdevenc peira,
las qualz son guarentia d'aizo entro en aquest jorn. Adonx
Nero Temperaire fez penre saint Peire e saint Paul. Saint
Peire fez mètre en cros & a saint Paul fez taillar lo cap. Et 350
adonx totz le pobolz de la vila fon iratz, e corregron [33 v**]
al palais de Temperador e volgron cremar lo palais e Tempe-
rador. Can a saint Paul taillet hom la testa, en lue de sanc
n'eissi lahg. Sainz Peire fon mes en croz, lo cap deus terra e
los pes contra mont; e domenz qued el era en la cros, el aco- 355
menset a dir : « Senner Jesu Christ, bons pastre, a te faz eu
gracias, car las fedas que tu m'as liuradas non sian ni
estian oimais senz latoa garda.» E cant acdihaizo, transpasset.
Et aqui eis apparegron aqui dui saint home, los qualz non avia
hom vist desenanz ni anc pois non fez, & dizian que per aquest 360
eran vengut de la terra de Jherusalem. Aquist dui van penre
lo cors de saint Peire, essemps ab autre saint home, qued
avia nom Marcel, le qualz era agutz decipolz de Symon Mag e,
per la prédication de saint Peire, avia laissât aquella error &
avia seguit saint Peire, de Jherusalem entro aqui a Roma. 365
Aquist van penre lo cors e sebeliron lo en un lue qued hom
appella Vaticanus. Aquist dui bon home dizian que vengut
eran de Jherusalem & dizian a tôt lo pobol : « Alegras vos,
car gran gauh deves aver que sainz pairos aves ameritat ad
aver & amix de notre Sennor Jesu Christ; e sapias que Nero, 370
aquest fêlions reis vostre, non pot gaire tener Temperi aprop
la mort d'aquestz dos apostolz. » Esdevenc alo que le po[bo]lz
de Roma eniret Temperador, [34 r°] et acorderon enfre elz
quel presessan el liessan ad un pilar e qued hom lo bâtes tant
entre que fos mortz, aici con gazainnat o avia. Venc a saber 375
ad el, e cant o auzi, ac tan gran paor que non saup que se
fezes ; e fugi s'en de noh elz bosc & en las selvas, & aqui mori
de fam et de freh, e lop manjeron lo. Cant venc pois, li grec
vengron e preseron lo[s] cors dele apostolz e cujeron losportar
en Orient ; & en eus pas li terra acomenset moût fort a tremo- 380
lar, & venc totz le pobolz de Roma e seguiron los aprop, &
acosegueron los ad un lue qued hom appella Catacombas,
& aqui tolgron lo[s] lur e garderon los aqui un an & set
mens, entro qued agron fah gleisas, en quel[s] sebeliron pois
256 LEGENDES PIEUSES
385 honestament. Ubi prestanlur bénéficia usque in hodiernum diem
et in secula seculorum. Amen,
[VIII]
PASSIO SANCTARUM VIRGINUM FIDEI, SPEI
& CARITATIS & MATRIS EARUM SAPIENTIE *
Mulier igitur quedam nomine Sapientia, de génère primoy
valde dives, Romam advenit, cum filiabus suis, et hee decons-
sime ntmium fuerunt. Una femena era, qued avia nom Sapien-
tia, de gran linnatge, et era moût riqua. Aquist femena venc
5 estar a Roma, ab très fillas qued avia ; & eran moût bellas.
Cant foron aqui, las très donzellas anneron e preseron lo sen-
nal de nostre Sennor Jesu Christ, zo es que batejar se feron.
Lur maire las [34 v»] avia esseinnadas desenanz que ferma-
meuz e bona tenguessan lo nom de la christianitat. Elias creis-
10 clan cada jorn en la obra & en la fen de Jesu Christ, aici con
lur avia esseinnat/ Lur maire s'alegrava en Deu nostre Sen-
nor Jesu Christ, e pregava lo que major fen e major crezensa
dones a sas ûllas, con ellas estessan & annessan en la vertut
de paciencia. Las donzellas eran joves de jornz, viellas de
15 senz. Zo que las prophetas avian dih tractavan en lur corat-
/ ges & alegravan se en nostre Sennor. Ellas annavan cada
jorn moutvoluntiers a lagleisa, e pregavan cada jorn nostre
Seianor qued el volgues & soffergues qued ellas soffrissan ^
martyre per el. Esdevenc un jorn qued uns malz hom de la ^
20 vila, quan vi qued aquestas donzellas annavan tan soven a la
gleisaper pregar nostre Sennor, annets'en aTemperadore dis
11: u Senner, una femena es venguda en esta vila, abtres ûllas
soas, non sai don, & amonesta e predicanostras moillers que
crezan en Jesu Christ, lo fil de Deu e fa las partir de nos; et
25 a lias* aici convertidas'& tornadas ad aquella fen qued apostot^
non volon manjar ni heure ab nos. » Cant Temperaire Adrians
auzi aizo, trames la messatges que li aduissessan aquesta
femena ab sas fillas. Anneron la & aduisseron las ; e cant las
1 Ms. SapiUf avec un tilde sur Tt. — * Ms. soffrissam. — 3 Ms. sa. —
* Ms. allas, — « Sic, Corr.?
LEGENDES PIEUSES 257
donzellas foron prop del palais del rei, ellas se senneron el
nom del Paire e del Fil e del Saint Esperit. Li gracia de Christ 30
era en ellas, que las conferma-[35 r'^J-va. Cant ellas intreron
el palais, Adrians Tempérai re las acomeasa ad agardar, e vi
las tan bellas e tan gloriosas, car li gloria de Deu era en
ella[s], qued anc ren non lur poc dir. Pois cant ac estât un
pauc, & el sonet lur maire e fez la venir a se, & acomenset la 35
a demandar & a dire : « De quai dignitat ni de quai lei es, ni
per que venguist en esta vila e denejas nostres deus. que son
sennor d'estaciutat e quelabastiron? E diguas me ton nom.»
Li donna respondet e dis : « Christiana soi. » Adrians Tem-
peraire dis :« Eu te demant aquel nom ab qued hom t'apella.» 40
— « Le meiller noms qued eu aia es que soi christiana. Le
noms que mos paire ni ma maire me doneron es que m'apel-
leron Sapientia ; et en aici m^apella hom ; e soi delz meillors
homes e delz plus autz de Lombardia. Mas le meus senner
Jesu Christ, bons & misericordions m'a aducha en aquesta 45
ciutât de Roma, ab aquestas très fillas meuas, qued el m'a
donadas, e gart las en castitat & eu fatz li d'ellas offrenna e
don. n Cant Adrians Temperaire auzi aquestas paraulas,
comandet las ad un rie home seu entro ajorn qued hom la
demandes. Menet las hom a la' maison d'aquest rie homen, 50
qued avia nom Palladii. Can foron laintre en Talberc, li donna
acomenset sa[s] fillas ad amonestar & ad apellar en Saint
Esperit e dis lur : « Fillas meuas, eu vos ai [35 v^j esseinnat
bonas letras ; gardas aquellas en cellui en cui avez pausat
vostra esperansa, cel vos appella a la vostra fen. Non vuUas 55
atendre-a la vostra joventut ; mas garnes vos de las armas de
nostre Sennor Jesu Christ, <k coronatz vostra maire de vostre
enemic^, e desliuras me de celui que m'a cargada de peccat,
zo es del diabol ; car si eu vos tramet davan me a la cavalla-
ria del verai rei, graii légation lai m'acabares. Fillas, tenez 60
perfechament la via, qued eu per la vostra fen sia renovel-
lada del règne celestial; et appcllaran me a vos cil que pla-
zôn a Deu et eu estarai lai ab vos totz temps mais. Et vos, fil-
las meuas, las qualzporteien mon ventre, aias merce de vos-
tra maire, & tensouatz contra las artz del maligne maistre, 65
* Ms. la a. — ' Sic; lacune ?
Iî5
£
258 LEGENDES PIEUSES
zo es del diabol, qued escoraou contra vos autras tormens elz
acerma. Claraa[tzJ vos per Deu lo Paire et per nostre Sennor
Jesu Christ, lo seii unial fil, qued vos rendra coronas e gui-
zardon per la vostra paciencia. » Cant 11 donna ac semenat
70 aqiiesta esperital semensael cor(s) de sa.[s] fillas, las donzellas
non oblidavan minga la senna do Jesu Christ, car tota hora
fazian lo seinnal de la cros en lur cara, e pregavan nostre
Sennor qued el las corones porfechament e qued el lur dones
forsa contra lur enemic, e pois dizian a lur maire: « Donna
75 maire, alegra [36 v°] te en nostre Seinnor e mena nos davan
Temperador Adrian, e veiras nostra forsa e la confession de
la nostra fen. Le nostre salvaire Jesu Christ, del quai nos em
essennadas, el concis la nostra fen e nos donara respons a zo
qued hom nos demandara. » Adonx lur dis lur maire : «B'illas,
80 6u vos engenrei ; nuilla rens non es en aquest mont que vida
aia ni longamen pusca durar, que non sia destermenat. Per zo
soffres un pauc temporalz* penas, que vos aias la vida dura-
bla ; et eu, cant vos aurai offertas a nostre Sennor perfeh
sacrifizi, segrai vos. )) Tribusque ita diebus transactis, jussit
85 imperator Adrianus adduci eas. Que cum ducerentu7\ sequebatur
eas mater gaudens et cxultans. Can foron passât très jorn,
Adrias Temperaire trames querre las donzellas, e domenz
qued hom las en menava, lur maire las seguia, lauzant nostre
Seinnor. Can foron el palais intradas e foron davan Tempe-
90 rador Adrian, acomenset lur a dir : « 0 vos, bonas tozetas,
gran pietat ai de vos, car eu vos vei tan bellas. Prec vos qued
aias pietat de vostra maire, & non vullas perdre la flor de
vostra juventut. Crezes me aici con farias a vostre paire, à
sacrifiatz alz nostre[s] deus, que son sennor de tôt lo segle ;
95 e si d'aizo me voletz creire, eu vos tenrai en lue de mas fillas
et estares en las mias rique-[36 v°]-zas, e sera vos granz
honors que vos sias appelladas fillas d'emi)erador; et eu farai
venir toz mos rix homes, mos dux & mos princes & tôt lo
scenat, & afiUarai vos denant totz ; e si vos non me voles
100 creire, eu vos farai far mouz tormenz, 6i vostres cors petitz
e vostra gran beutat destruirai malament e degastarai per
tormenz, e zo que remanra de vostres menbres donarai alz
* Ms. temperalz (per en abrégé: p barré et non bouclé).
LÉGENDES PIEUSES ^59
cans. Crezes me, avan qued eu vos fassa aizo. » Las sanctas
vergenas responderon totas ensemps e disseron :« Reis, aitalz
promessions non nos an ren a far. Nos avem paire, Jesu 105
Chrisf, & aquel recebra nos aici con perfechas fillas. En aizo
avem près armas de veritat, con puscam contrastar alz
enganz de la toa bauzia & intrar en la maiso de celui que
pujet el cel, car las portas son ubertas ; e fai nos aquelz tor-
menz que far voiras, car per aquelz conoisseras la vertut de 110
nostre Sennor Jesu Christ qued es en nos. » L'eraperaire, cant
auzi aizo, fon enrabiatz; e sonet la maire d'ellas e dis 11 :
«Diguas me lo nom de tas ôllas ni de canz de jornz son. ))Res-
pondet 11 donna e dis : « Li majer de mas fillas a nom E'«pe-
ransa & es d'état de .xii. anz ; li autraha nom Fez & es de dez 115
anz ; li autra ha nom Caritat & ha nou anz. » Adonx Tempe-
raire sonet la primera e dis 11 : « Esperansa, sacrifia a la gran
Diana. » Esperansa respondet e dis : « 0 tu, [37 r®] acomen-
samenz de la huraana cecitat, per que me mandas laissar lo
meu sennor, que fez lo cel e la terra e toi cant es, e mandas 120
me adorar las ydolas,que son senz armae son fâchas de peira
e non han poder plus qued una peira?» Audiens imperator hos
sermoneSy ira i^epletus, jussù eam expoltari et virgis cedi, donec
consentiret immolare. Can Temporaire auzi aquestas paraulas,
fon moût iratz, e comandet qued hom la despoilles e donnes 125
Tom tantas ab vergas & qued hom la bâtes tan entro que
sacrifizes alz deus.E quan i agron frag dotze manadas de ver-
guas, plaga nuillanon li parec en sa carn. Adonx Temporaire,
cant 0 vi, comandet qued hom li tailles las possas. Adonx totz
le pobolz, qued era vengutz aqui per vezer aquella justizia, 130
vezian* la tosa tan jove et tan bella e tan soffrent, avian gran
pietat quan la vezian batre ni taillar las possas, e dizian: « Quai
mal an fah, Deus 1 aquestas donzellas, qued aital pena soffron? »
D'aquel lue don foron tailladas las possas eissia lahg en lue
de sanc. Sancta Esperansa acomeftset a dir : « 0 tu fêlions, 135
aizo son las toas menassas ! Vec te que tanz homes as fah
lassar en me batre, e li miâ carnz non o sent, ni le tocamenz
nilasplagas de las toas vergas non son apparvent el meu cors.
Mos menbres m'as taillatz, mas vejas, fellon, cazer [37 v**] lahg
* Corr. vezent ?
260 LEGENDES PIEUSES
140 a la terra en lue de sanc. Tu cujas per aizo vencer lo meu
prepausament e la mia confession, qued ai de la fen de Jesu
Christ. Ancar tu, tjrant fellon, si tu coraandavas a taillar ma
cara, eu non séria confunduda ; eu soi ferma en Jesu Christ
& non renegarai mon sennor. » L^emperaire Adrians, cant
145 auzi aizo, fon enrabiatz e fez aportar una grazilla e far foc
desotz, tant tro li grazilla fon tota blanca; e pois fa penre la
donzella e getar desobre. Ella non temps lo foc, anz se
repausava sus en la grazilla con fa li naus en la mar, cant
esta soau, que las ondas non la bâton. Ab aitant li donzella
150 acomenset a cridar moût fort : « Seinner Jesu Christ, regarda
la toa ancilla, e non me fassas morir en aquest fuc, qued eu
pusca contrastar alz tormenz d'aquest tarant, & confunt la
soa temporal * vertut. » Estet très horas sus en la grazilla,
qued anc le fux non la toquet. L'emperaire, cant o vi, fez
155 aportar una sartaja e mètre pez e ceu e cera e fondre tôt
ensemps, & eissia en tan granz flaors que nuillz hom soffrir
non 0 podia; e fez getar intre la donzella. Ella, can fon intre,
acomenset aici estar sana e salva sus, con fera en rosada que
fos cazucha do cel. Adrians, cant o vi, ac moût gran dol, car
160 won li podia far creire sas ydolas, ni per nuil torment non
[38 r°] la podia destruire, ni per aquestas penas qued el li
fazia ; et acomenset a pensar a quai pena la poiria far morir,
e fon aitalz sos conseilz que li fezes taillar lo cap. Cant sancta
Esperansa ac auzit del rei lo terme de sa fin, acomenset a
165 pregar sa maire & a dire: u Maire donna, si le tieus plazers
es, prega lo meu sennor qued el me lais aici persuirà afônar
lo prepausament qued eu avia de la soa fen & cui eu ai totz
temps désirât. » Pois annava e dizia a sas serors : « Sorres
meuas, aconseillas vos ab cellui de cui es en(s)tresseinnadas ;
170 vec vos que li nostra maire a gaug de las nostras passions,
per tal qued ella nos pusca vezer en l'autre segle perfechas.-
Sorres douzas, non voillam far irada la nostra sancta maire,
que nos portet nou mes en son ventre, e que n'ac dolor eau
nasquem, & que nos allachet ab lo lagh de sas possas, et que
175 nos essennet en la sapieza de nostre Seinnor, & ara nos
appella a la vida durabla. Et eu, serors, vauc aquella via,
1 Ms. tempei^al (pei^ en abrégé, comme plus haut, p. §58 n. 1)
LEGENDES PIEUSES 261
laquai nostre Seinner me vol donar, et eu prec vos, dousas .
sorres, que vos fassas atretal, que me seguias per aqui on eu
annarai, per tal que nos aiam & uzera ensemps los bens que
nos son promes del règne celestial, » Et cant ac dih aizo, vai 180
enbrassar sa maire & baisar, & quis li que pregues per ella.
Pois annet [38 v®] a sas serors e baiset las. E pois part se
d'ellas, et annet s'en a cellui que ténia lo glazi & estendet lo
col. Sa maire e sas serors *, cant o viron, acomenseron a cri-
dar & a dire : « Donna, alegrament vai a la passion & non 185
temias lo glazi ; mas perfecharaent vai per la bona via, per tal
que nos n'aiam plus fort coratge d'annar per aquella eissa
via e puscam plus fort contrastar al tjrant. Nos vencerem la
soa forsa & seguirem te al cel. » Et cant cel que ténia lo
glazi, levet la man per ferir la donzella sancta Esperansa, 190
ella levet sas mas contra mont e dis : « Benezeh Senner Jesu
Christ, a te ren eu gracias e recep me, peccairis, ta serva,
que m'as appellada ad aquest martjri. Senner, menbri te de
la mia casta maire e de mas bonas serors, que tu las fassas
partir d*aquest segle per passion. Senner, recep la mia arma 195
e non voillas soffrir aquest mal home, mas castia lo sieu forsen
e la soa ira. » E cant ac dih aizo, e cel que ténia lo glazi la
fer, 6 taillet li son cap. Ab âitan sa maire va la penre & (e)
baisar. Le pobolz, qued era aqui, acomenset moût fort a plo-
rar, de pietat qued avian de las donzellas. Aquist consumet 200
enaici sa vida.
Pois i'emperaire Adrians fez a si venir Tautra, qued avia
nomFides, & acomenset li a dir : a Filla, crez me & adora e
sacrifia a la gran Diana, que tu vivas & reman-[39 r**]-gas
sana & salva. » Fides respondet : « Sapias, reis, qued aques- 205
tas paraulas que tu me dis non profechan ren, car vanas e
follasson. Aquella via que masorre ha fah aquella voil eu far,
e non voillas escarnir te mezeis ; mas fai zo que te voiras de
me, car aici con eu & aicil qued es morta siam serors de paire
ede maire, aici voil que siam serors el[s] tormenz. » Can Tem- 210
peraire Adrians auzi aquestas paraulas qued ella dizia, saup
ben e conoc que ja ren qued el li disses non auziria nil
creiria. Comandet qued hom la despoilles & la bâtes ab nervis.
* Ms. serorors.
262 LEGENDES PIEUSES
. Can Tagron longament batuda, que si n'i foron lassât seis de
215 batre, li donzella sofria ades douzament los tormenz; sa maire
Tesgardava de loin & ab gran pietat pregava nostre Sennor e
dizia : « Senner Jesu Christ, dona suffrensa a la mia filla qued
eu la veja perfechament annar en la toa via, aici con ai la
miaôlla primera Esperansa. » Li donzella, cant auzi aizo dir
220 a sa maire, acomenset a cridar merce a nostre Sennor et a
dire : « Senner, que m'as donat crezensa en te, dona me suf-
frensa e Victoria » Pois respondat al rei e dis : « 0 tu, fêlions
tyrans, lo pejor torment que tu pensaras, aquel me fa, car ben
sapias verament que li vertutz de Deu es en me. » Can l'em-
225 peraire auzia aizo, avia lo sen perdut, e pensava a quai pena
la poiria far morir ; e dis li sos [39 v®] conseilz que la crèmes.
El ab aitant comandet qued hom fezes un gran foc, e can fon
fah, fez sancta Fidem getar intre. Ella cant intret el foc, en eus
pas li flarama fon estencha; e sancta Fez estava el meh del f uc e
230 preguava nostre Sennor e dizia: « Seinner, laissa aquesta toa ser-
va en pas, &en paciencia fai estar lamiaarma, e pusca trobar
la toa gracia e la toamisericordiadavant lo tieu esgardament.
Al fellontjrant laissa far sa voluntat. » Can Temperaire Adri-
ans auzi aizo, comandet qued hom la getes del foc e qued hom
235 la pendes e la tormentes. E dom^z qued hom la tormentava,
de sos raenbres degotavan en lue de suzor oinnemenz raeilz
flairanz de nuilespessi. Et acomenset a dir : a Tu, tjran, que
me vez tormentar malament en aquestas penas, en aquest
segle & en l'autre tormentara tu Deus ; mas li mia arma non
240 sent ren de dolor; anz soi salva en cors & en arma, aici con tu
pos vezer. » Adonx comandet Adrians qued hom aportes un
par, e fez lo implir de pes e de cera e de résina, e pois fez
li mètre fuc desotz; e cant le pars boilli fort, comandet Adrians
qued hom getes intre sancta Fez. Et en eis pas qued ella fon
245 intre el par, le pars leguet aici con cera, e de la âamma del
fuc cil qued eran tôt entorn, qued fazian [40 r®] ni aminis-
travan aquella maleza, foron cremat. Ab tota aquesta mera-
villa, Adrians Temperaire non temps que non comandes qued
hom li tolgues lo cap. Li donzella sancta Fes, can auzi aquesta
250 sentencia, correc * tost a sa maire, e vai la baisar et dis li :
* Ms. corroc.
LEGENDES PIEUSES 263
« Pax tibiy mater; vade et mémento hujus quam genuisti filie.
Maire, pas sia ab te & vai e menbre ti de mi, cui tu engen-
rest. » Pois vai abrassar sa seror pauca, e dis li: « Sorre
doussa, eu vauc a la vida durabla, que Deus nos a promessa;
e tu cocha te de venir aprop nos. E tu, sorre Cari tat, non 255
aias paor, que cel que nos ha donat caritat, cel es nostre
deffendeire. » E cant ac dih aizo, acoraenset a pregar nostre
Sennor & a dire : « Deus Seinner, qued es perfeh e verais &
vius paire, conferma et recep me. » Sa- maire, cant auzi aizo,
acomenset a dir : « Filla bona & dousa, cui eu ai portada en 260
mon ventre, aias fort coratge e menbre te de me, que te en-
genrei. » E domens que sa maire dizia aizo, & hom li taillet
la testa. Li maire va penre lo saint cors de sa filla e comenset
lo a baisar e dis : a Oimais aj tramessas doas fillas davan me
a nostre Seinnor. » Pois regarda se deus sa pauca filla, e vi 265
que sa cara non li fon mudada, per ren qued agues vist far
de sasserors, & ac gran gauh, e dis li : a Filla Caritaz, [40 v°]
sias de fort coratge & aias gran paciencia & esgarda la
via li qualz te menara al cel. Las toas doas serors an receu-
pudas lur coronas, e li toa t'es appareillada. Pren la de bon 270
cor 6 de bona voluntat. Gran gauh ai, car eu vci prop lo tieu
cors, & eu correrai aprop te. D'aici adenant, filla dousa, con-
forta te el nom de nostre Sennor Jesu Christ. » Ab aitan Adrias
Temperaire appellet aquesta pauca donzella & essaiava la en
totas guizas con la pogues far sacrifiar e creire sas ydolas. 275
Mas Caritatz respondia el dizia perfechament : « Non cretz tu
donx que cel per cui son mortas mas doas serors semenes
atressi sas paraulas en me con en ellas, & aici con ma maire
avia eissennat ellas ha esseinnat me? Et aici con nos siam*
d'una conversion e d'una doctrina e d'una lei, enaici volem 280
far una via. » L'emperaire, can l'auzi aici parlar, fon moût
iratz ; e fez moût tost cermar con la fezes tormentar, e coman-
det qued hom la mezes sus en una post e qued hom Testendes
sus e qued hom la tyres tan que menbre cada menbre la des-
menbres hom tota. E can Tac longament fah tjrar en aici, et 285
el Ten fez ostar; e can fon ostada d'aquel torment, comandet
qued hom la bâtes ab vergas. Edomenzque la batian, Caritatz
* Ms. sian.
264 LEGENDES PIEUSES
levet SOS oilz verslo cel e dis : a Tyrant, per que te trebaillas
en van, car eu per lo meu seinnor non sent aquestas toas
290 penas? » Cant Adrias Tomperairo vi que per [41 r®] nuilla re
qued el lur fozes, non las podia convertir e qued aici Tavian
vcncut, fon cais forsenuatz, e comandet qued hom appareilles
un foru e fezes Tora cremar très jornz e très noh. Can venc a
cap de très jornz, venc Temporaire denant lo forn e fez venir
295 Caritat e dis li : « Diguas tan solament que granz es uostra
divessa Diana, e laissaraite. d Respondet Caritatz e dis : «FoU
cec, & senztotsens, per quejanglas enbadanime dis tangran
follia?» L'eraperaire, cant auzi aizo, fez la gitar entre elforn.
Karitatz, cant intret el fort, seinnet se en croz el nom de
300 Christ et intret el forn. E domenz qued intret, li flamma eis
del forn 6: va s'en la on eran lur ydolas e lur deu e cremet o
tôt. Ella annava laintre per lo forn e lauzava e glorificava
nostre Sennor, car non avia donat al diabol poder encontra
ella. Adrians l'emperaire, quan vezia aizo, era moût iraz &
305 avia gran meravilla con podia esser, e meravillava se fort.
Comandet alz menistios del forn que Fen traissessan. Ven-
gron al forn li ministre, 6i agardan laintre, e viron annar &
estar ab Caritat très homes, vestitz de blanx vestirs plus blanx
de neu, & lur esgardamenz era plus clars qe le soleilz, e lur
310 ^^P ^^^" P^^^ resplandent qued aurs. Eil, cant o viron, agron
granz meravillas e cazegron abauzos, pois dreisseron se. E
can se [41 v**] foron dreissat, soneron ladonzella e disseronli:
« Ve sai fora, ancilla de Deu, que Temperaire te demanda.»
Annet fora li donzella e ve[n]c denant Teraperador. L'empe-
315 raire era totz berusclatz del fuc, cant eissi del forn; e can vi
que d'autra guisa non podia nafrar la donzella, comandet qued
hom Taucizes ab espaza, aici con avia hom fah sas serors. Can
Karitatz o auzi, acomenset a glorifiar nostre Seinnor e dis :
« Gratia[s] tibi ago, Domine, quodcumsororummearumsocietate
320 d^Q^^t^s ^5 ^^ adunare el replesii me deliciis Paradist. A te
rent eu gracias, Senner, car voles qued eu sia compainna de
mas serors, 6: as me repleta delz deleh de paradis. Prec te
Seinner, que tu adrechures la mia sancta maire Sapientia,
que tu ab pas & ab gauh aprop très jornz de la nostra mort
325 la nos trametas, e que se repause ab nos en la nostra sopou-
tura, e dona nos essempslo durable repaus,on nosteglorifiem &
LEGENDES PIEUSES 265
lauzem. «Samtiire, cant o auzi, acomenset raout fort a plorar
e pregava Deu qifel li dones perfechament persuir <k consumar
son cors e dizia : « Filla douza, aias fort coratge & esgarda la
bona via, car eu ai totz temps.desirat e quis anostre Seinnor * 330
con eu vos pogues offrir ad el, con fosses esposas [de Jesu
Christ. Ara vei la toa corona que t'es appareillada. » E do-
menz que sa maire dizia aizo, aicel que toriia lo glazi feri la
donzella e tôle [42 r"] li lo cap. Ab aitant sa maire va embras-
sar sa pauca filla, e portet la ab las] autras serors soas, & 335
arezet las e vesti las, aici con atain a mort, & oins las totas
très de precions enguent ; car usatges era el temps antic que
los morz oinnia hom de basme, celz quel podian aver, par tal
que verms ni nulla mala bestia non i vengues nil toques. Can
li donna ac appareillât sas fiUas 6l acermadas, mes las sus en 340
un carre]& portet las loin de Roma m miliarium vicesimum,
& aqui sebeli las ; e comandet alz christians elz preguet qued
i fezessan gleisa, e feron o aprop. Ab ella]eran annadas profe-
menas^ e donnas moutas de la ciutat, que portavan precios
unguenz, que meseron en la sepoltura de las sanctas vergenas. 345
E pois, cant las agron sebelidas, torneron s'en a Roma, lau-
zans nostre Sennor e rendens gracias. Can venc al terz jorn,
venc lur maire al sépulcre on jacian, per far lo septeme, e
venc ab ella granz compainna de femenas. Can foron aqui,
pauset se sobre lo monument e dis : « Baillas mias, perfechas 350
e coronadas, recebez me eusemps ab vos. » E cant ac dih
aizo, tôt soau, cais que s'adormis, transpasset del segle. Las
femenas qued eran^vengudas'ab ella, canviron que morta era,
acomenseron moût fort a plorar, e mes >ron [42 v**] la el monu-
ment,*el quai era[n] sas sanctas fillas. Et d'aital manera trans- 355
passeron d'aquest segle a nostre Sennor las fillas & li maire*
Pois non triguet guaire que l'angelz percuciens feri Adrian
Temperador, & cazec en caitivetat, en tan gran qe las pal-
perllas delz oilz li cazegron e sas carnzse partjron delz os, de
guisa qued ab pauc li os non se partion li un delz autres. Li 360
det li cazian de las mas & li arteil del pes. De la bocca li eissia
carnz poirida ab verms. Can venc un jorn, qued ac aici estât
longamenz, acomenset a'cridar moût forte dis : a Seinner
* Ms. .s. — * yis. proro femenas (p bouclé).
266 LEGENDES PIEUSES
Deus de las très vergenas, las qualz eu tormentei, e de lur
365 maire, jeta tost l'arma d'aquest cors, car eu sai ben que per
ellas son vengut sobre mi tuh aquiat mal. » E[t] cum hec
dixisset in magno ejulatu exclamans crepuit, et dissipate sunt
carnes ejus et ossa et comminûtus est, secundum sanctarum pro-
pketiam, E domenz qued el dizia aizo, p'orant & cridant,
370 crebet, & sas carnz foron dissipadas e sei os atrissat, e fon
esdevenguda li prophetia de las sanctas verges, que li avian
dih : « En aquest segle & en l'autre te tormentara Deus. »
Las sanctas vergens Esperansa e Fens e Caritatz foron mar-
tirias e receupron mort, ab lur maire Sapiencla, lo primer
375 jorn de jul, en la ciutat de Roma, sotz Temperador Adrian.
Régnante J)o-[i3 r°]-mino nostro in perpétua Jesu Christa, Cui
est honor et glariaper cuncta seculorum secula. Amen.
[IX]
OBITUS SANGTE PETRONILLE & FELICULE
Sainz Peire avia una filla, qued avia nom Peironella, & era
moût bella femena. E per la belleza qued avia sainz Peire
vole e suflferc qued agues una malautia qued hom appella
paralisin. Aquist malautia es aitalz qued en quai que menbre
5 que toque, jamais poder non 1 aura hom. Aquist jacia malauta
e non avia poJer en se mezeissa. Esdevenc un jorn que
sainz Peire se disnava laintre, ab discipolz seus. Et us delz
discipolz qued avia nom Tito, acomenset a dir a saint Peire :
(( Tu ja salvas totz los autres malautz : per que laissas jasser
10 Peironella malauta al leg? » Sainz Peire respondet e dis:
« Car aici li conven e li tain qued estia. Mas per zo qued
vos non aias doptansa que per las mias paraulas pusca esser
sanada, voil que levé* sus. » E dis li : « Peironella, leva sus
& ser nos. » En eis pas ella se leva sus, sana e salva, e servi
15 lur. E can se feron disnat, comandet li que tornes al legh.
E des aqui adenant ella fon perfecha en Famor de nostre
Seinnor, & fon sanada 6i garida, e prediquet la fen ^ de Jesu
ï On avait d'abord écrit leu; Ve final a été ajouté en renvoi dans l'interligne,
2 L'n a été exponctuée, mais d'une encre plus noire, et, à ce qu'il semble,
assez récemment.
LEGENDES PIEUSES 267
Christ, & sanet atressi moutz malautz, con sos paire fazia,
ei[s] tornet a la fen * de Jesu Christ per sas orations. Car
era tan bella, venc un jorn ad ella le coms [43 v**] Flaccus, 25
ab ganren de^ cavaliers, e dis li que be' la penria per moiller.
Sancta Peironella respondet e dis li : a A me, que soi don-
zella, es vengutz ab tos cavaliers armatz. Si penre me vols
per moiller, tramet me, a cap de très jornz, profemenas 6l
donzellas honestas, ab cui eu m'en pusca aunar a ton alberc 30
honestament. » Annet s'en le coms. Sancta Peironella en
aquelz très jornz qued ac près d'espazi, estet en orations
& en dejunis ; & estava ab ella una vergena qued avia nom
Felicula, qued era sa cosina & era perfecha en la fen* de
Deu. Can venc ad aquel jorn, qued avia donat respegh al 35
comte, & ella fez venir a se un preveire, qued avia nom
Nichomedi, & fez se cumenegar & adordenar. Et en eis pas
que fon cumenegada, & ella clina son cap el leg e traspasset
del segle. Esdevenc qued aquellas donnas & aquellas profe-
menas, qued eran vengudas per ella menar alla cort del 40
comte, Taonderon a sebelir. Flaccus le coms gira se ^ pois a
sancta Felicula, e dis li : « Pren una d'aquestas doas : o tu
seras ma moiller, o tu sacriflca a nostres deus. » Sancta
Felicula respondet e dis : « Eu non serai ta moiller, car
sagrada soi a Jesu Christ, ni sacrifizarai a las jdolas, que 45
christiana soi. » Adonx le coms fez la penre & liuret la a
son [44 r°] haillon e fez la mètre en una cercer esct/?% senz *
draps e senz conduh, et estet laintre ,\u. jornz ^' qaed anc
1 Même observation que dans la note précédente.
* Ajouté après coup dans l'interligne. — 3 Ms. i^e^
* Un est ou paraît exponctuée ; mais ici Texponctualion est peut-être aucienae
et d*une encre de même teinte. M. Paul Meyer imprime partout fe, sans aver-
tir de cette particularité, bien qu'il signale plus loin l'exponctuatioa de Ve dans
gira se. Voir la note suivante.
5 Ue est exponctué; mais le poiot paraît n'avoir pas été mis Là avec inten-
tion. Ce doit être un accident, comme il y en a d'autres pareils çà et là dans
le ms. (cf. fos 20 ro, 1. 6; 22 ro, I. 14; 41 ro, 1. 8 du bas); il est d'ailleurs
beaucoup plus maigre que ceux dont la signification est certaine, p. ex. fos 8 vo,
1. 4, 25 ro, 1. 5, 31 yo, 1. 5 du bas. Même observation pour celui qui fait l'objet
de la note précédente .
* Les lettres imprimées en italique ici et au commencement du verso du
même feuillet 44 sont suppléées par conjecture. Le ms. est déchiré en cet
endroit.
268 LEGENDES PIEUSES
non bec ni manjet. E venian li motVlers * de celz que la gar-
50 davan e dizian li : « Per que vols^ raorir a ta mala mort?
Pren aquest ric home, le qualz es de gran(z) paratge & es
compse belz joves hom 6i amix de Temperador. » Can sancta
Felicula auzi aizo, non lur respondia nuiila ren aire, mas
solament aizo : « Vjrges soi de Clirist, & estier el non aurai
55 autre marit. » Gant ac estât set jornz en la carcer, fez Ten
jetar le comps, e fez Ten menar a son alberc, ab vsas autras
donzellas. Laintre estet autres set jornz, senz conduh, car
en nulla guisa non la pogron ad aizo adurre que preses nuil
conduh de lur raan. Can le comps o vi, fez la pendre en una
60 trau, & aqui fazia la tormentar. Et aiceil que la tormentavan
dizian li : « Digas tan solament que non es christiana, & lais-
sarem te. » Sancta Felicula respondia : « En non reneguarai
pas lo meu seinnor, qe per me fon abeuratz de fel mesclat
ab vin aigre, & fon coronatz d'espinas & fon clavellatz en
65 la croz. » Cant ac aizo dih, deissenderon la d'aqui e getseron^
la en una pozaraca lo cap primer. Sainz Nichomedis le preire
venc la noh et trais la d'aqui, e portet l'en en una balmeta
on estava tôt rescondudamenz, e sebeli la [44 v®] lai'ntve ;
& es fora de la ciutat de Roma, en un lue qued hom appella
70 via ardiatina, et en aquel lue fcz^ hom puis gleisa, on nostre
Seinner, per la preguera de sancta Felicula, fez pois montas
meravillas. Venc a saber a Flaccum, qued aici o avia fah le
preire Nichomedis, e trames lo querre e fez lo venir davan
se e dis li : « Sacrifia a nostres deus. » Nichomedis res-
75 pondet e dis : « Eu non sacrifiarai mas solament al deu qued
es poderos de tôt cant es, e non alz vostres deus, lo[s] qualz
vos tenes enclaus elz temples, aici con en una carcer. » Cant
ac aizo dih, fez lo penre Flaccus e fez li tantas donar ab
massas de plump, entro que fon mortz; e pois fez getar lo
80 cors en flum de Tyber. Le clergues d'aquest preveire, qued
avia nom Justus, ques tant lo cors per Taigua entro quel
trobet; e cant Tac trobat, vesti lo & arezet lo, & pauset lo
* Voir la note précédeute. — 2 sic. — 3 m. Paul Meyer, dont j'ai adopté
toutes les restitutions au recto de ce feuillet, supplée ici Aûs^îs; mais, outre que
c'est là une forme que son incorrection rend inadmissible, le mot serait trop
loDg pour le vide à remplir. Il n'y a pas place pour plus de trois lettres.
LEGENDES PIEUSES 26 9
en un legh, e portet lo en un orfc seu, fora los murs de la
ciutat, & aqui sebeli lo honestament. In quo loco orantes
Dominum consecuntur que postulant interventu martyris^ ejus. El 85
quai lue zo quedhom quer anostre Seinnor drechurerament,
per la preguera del martyr, li es donat. Ad honorent Domini
Nostri JesuChristipro cujus nomme passus est, El nom de nos-
tre Sennor Jesu Christ, per cui nom el sufferc martyri. Qui
cum Pâtre etSpiritu Sancto vivit et régnât per secula seculorum* 90
Ajnen,
[X]
PASSIO SANCTl ADRIANI MARTYRIS
j-2 po 2 l'O] Factura est in secunda interrogatione tyranni Ma-
ximiani, ut ingcntes persecutores ad Nichomediorum mitteret
civitatem, ad interficiendos per singula loca eos qui in Christo
crederent, Uiis emperaire, qued avia nom Maximia, trames
messatges per tota la terra de Nichomedia, pér los castelz e 5
per las ciutatz, que totz aquelz qued hom trobaria que predi-
carian la lei de Christ, que totz los aucizes hom. Esdevenc
un jorrn qued el mezeis le reis intret en una ciutat, & annet
s'en tost al temple, & agenoillet se & adoret zos deus, &
comandet qued hom lur fezes sacrifizi.Las genz de la ciutat, 10
can auzirou alzo, aporteron, li un taurs, li autri vedelz ; e
fazian lur sacrifizi a lur deus. Las cridas estavan aqui, que
cridavan que tuh venguessan &: aportessan offerendas & sacri-
fizessan alz dieus; e cil que non o farian, que mespresarian
lo mandament del rei, serian tormentat ; e si atrobava hom 15
nengun Christian, aquel séria tormentatz e crematz. Esta-
bliron cerquas, qued anneron per la région e per las ciutatz,
que quesissan curosament, si i atrobaria hom nuil Christian ni
nuilla christiana, qued hom los aduices al jutge e que fossan
tormentat aigrament o cremat en fuc. E donet en le reis ren- 20
[2 v<>]-dezas et aver a celz que los esseinnarian. Cant las genz
0 auziron, li un vezin trahiant los vezis, e li amie los amix, li
* Ma. mris avec un signe abréviatif au-dessus. M. Meyer a lu matris. Mais
cf. la traduction qui suit.
' Manuscrit de Carpentras .
270 LEGENDES PIEUSES
parent los parens, por los dons que le reis lur avia promes; li
autri, non per dons, mas per la paor qued avian del rei ; car
25 moût greu pena e greu turment devian aver cil que los celavan.
Anneron cil qued eran eleh per cerquar, & cerqueron laciutat
el regisme, e pois torneron al rei, e disseron 11 a celât :« Sein-
ner, la ciutat avem cerquada, & avem atrobat christians qued
estan rescondut en una balma, <k aqui cantan tota nohg. »
30 Comandetle reis a sos bailos que la annessan. Preseron caval-
iers ab elz, et anneron s'en la, e meseron se entorn la balma,
e preseron los. Et aduisseron los a la ciutat on era le reis,
liatz per lo cors ab cadenas de ferre. Can venc lo matin,
qued annava al temple le reis, per adorar sos folz deus & per
35 far sacrifizi, aduiseron li aques christians denant liatz, e
disseron li : « Reis, vec que nos avem cercat tota la région e
la ciutat, et avem vist que tuh li home de la terra adoran los
tiens granz deus & obedisson alz tieus mandamenz ; solamenz
avem aques atrobat, que mesprezan los tieus cotnandamenz,
40 & neis blastemian los tieus deus. » Can le reis auzi aquesta
paraula, fez estan-[3 r°]-car lo carre en que annava, e fez
los venir davan se, e dis lur : « Don es vos autri? » Respon-
deron * tuh essemps, e disseron: « En esta terra em nat; mas
secundum^ nostra fen em de Galilea.» Adonx lur dis le reis:
45 «Vos non avez auzit cal pena devon aver cil que son d'aquesta
vostra religion (son), ne que van contra mon mandament?»
— «Reis, ben o avem auzit; et diz(i)èm que folz es aquest
vostres mandamenz; & avem escarnit lo diabol que met sas
obras elz filz non fizelz, del[z] qualz tu es senner et princes.»
50 Adonx lur dix le reis : « Et auzas dir que le meus mandamenz
sia folz ! Per los meus deus ! eu consomarai los vostres cors
per amars tormenz. » E diz a sos princes : a Sian estendut al
sol, & bâta los hom ab bastos; et veirem si lur venra ajudar
lur deus, ni los desliurara d' aquesta mia ira.» E fez hom
55 venir très bacallars que los bateron ab nervis crutz. E do-
menz qued hom los batia, li martir de Deu disseron : « 0 tu,
felz ennemix de Deu, fai nos plus fort tormentar, qued on
mais nos tormentaras, on majors coronas aurem. » Le reis
Maximias dis: a 0 vos, caitiu, ja vos farai(s) ades taillar sos
* iMs. l'osponderon, — ^ En abrégé {scd'm).
LEGENDES PIEUSES 271
caps. Et atendes coronas ! Desamparas aquella trachoressa 60
doctrina vostra & non vullas vos mezeis [3 v°] aici perdre en
van! » Li saint martyr responderon : « Deus destruia te ! car
tu tormentas senz iicaison los sers de Deu, li quai son senz
culpa. » Maximias Temperaire dis : « Bâtes lur me sas boccas
en redon ab peiras. » Ab aitan li tormentador preseron peiras 65
e fraisseron lur las gingivas. Li saint martyr disseron: « Aici
nos as liuratz a torment senz misericordia, con si nos avias
atrobat mal fazent. Per amor d'aizo Pangelz de Deu te ferra.
Ancar non es sadolz d'aques tormenz que tu nos faz venir
desobre, ni non nos ternes far tôt jorn tan fellonessa pena 70
traire, ni ta greu marture. Per que non te pensas tu qued
atressi em de carn e de sanc, con tu es, ja zia zo que tu aias
mais de fellonia en tu? Reconois te e vejas car las toas peiras
agudas non an pogut atrissar las nostras maxillas. » Can
Maximias auzi aizo, fon moût iratz, e dis :« Per los meus granz 75
deus ! farai vos taillar sas lengas, que tuh sapian qe non
deves contrastar a vostre sennor. » Li martir de Christ disse-
ron : a 0 tu, fellon tyrant, si tu aquelz, que segon lo segle
mespresan lur sennor, adiras ni fas tormentar, per que nos
cujas far contradir al nostre deu, que nos pot donar aquelz 80
tormenz que te son appareillât ? » L'emperaire Maximias res-
pondet, e dis : « Qualz tormenz m'es lo appareillatz? » Li
martyr disseron : a Aquel cui Deus appareillet al diabol e alz
seus menbres, qued es vos autrl [4 r°] fellon. Zo es fox que
ja non esteinnera^ <k verms que ja non morra, e torment que 85
ja non auran fin, e pena durabla, lac de perdicion, tenebras
soteiranas, on es plors & estreinnemenz de denz, & autres
tormenz de que non es nombres, aici con Deus los a appa-
reillatz al sieus enemix, qued es vos. » Maximias Temperaire
dis : aAdes vos farai taillar las lengas. » Li saint martir res- 90
ponderon : « E si tu taillas lo son de la nostra lauzor, le gemi-
menz de nostre coratge poira meilz pujar a nostre Sennor, et
nostre coratges cridara plus fort a Deu ; car le nostre sanx,
cui tu as escampat de badas, a major son d'un corn, e crida a
nostre Sennor, per lo quai nos soifrem aizo. » Cant le reis 95
auzia aquestas paraulas, fon plens de gran ira, e dis : « Aujas
* Ms. esteinnara.
272 LEGENDES PÎEUSES
lo respons d'un cada un, e cargas los me totz de ferre, e metez
los me en lapejor carcer, e totz los tormenz que ja far lur
poires, lur fazes; car eu los farai morir greument aici con
100 eil 0* desiran. Car eil non son digne solament que moiran ab
glazi. Anz es obs granz que, per Teissemple d'aques, tota li
terra se convertisca. » Adrians per nom, qued era majer en
tormentar aques, can vi la gran suffrensa e la gran fen qued
avlan contra los tormenz, dis lur: « Eu vos conjur per lo vos-
105 tre Deu, per lo quai vos sofres aquestz tormentz, que vos me
digas la veritat, qualz [4 v°] es lo guizardos que vos esperatz
ad aver per aques tormenz, car semblanz m'es que granz
guizardos & rix n'esperatz ad aver. » Responderon 11 saint
martyr e disseron : a Li nostra bocca non es aondosa a com_
110 tar ni las nostras aureillas non o poirian auzir. » Adrias dis:
« E de tanz bens non aves ren auzit per propheta ni per autra«
escriptura? » Responderon li martyr: « Las prophetas eran
home simi)le, aici con nos autri era, e non saupron ren plus
que nos autri fazem. Mas aizo que Sainz Esperiz lur essein-
115 net, aizo disseron. Scriptum enim de gloria illa sic est. Et es
en aici escrih d'aicella gloria : Occufus non vidtt, nec auris
audivif, nec in cor hominis ascendit, que preparavit Deus dili'
genlibus se, Oilz non poc vezer, ni aureilla auzir, ni cors d'ome
pensar zo que'Deus ha appareillât a celz que lo temon n
120 Taman. » Cant Adrians auzi aizo, en eis pas vai estar elm'egh
d'elz e dis : « Escrives ^ me ab aques sainz de Deu, & notàz
ma confession, qued eu soi christians. » Et aqui eis movon
s'en dui d'aquelz que los guardavan & anneron s'en al palais,
e disseron o al rei, e porteron li la carta. Can Maximians vi
125 la carta, penset se qued Adrians agues escrih alcuna accu-
sation contra los christians & dis: a Leges tost aizo que m'a
trames le meus amix Adrians. » Cil que li avian aportat l'es,
crig disseron : « Reis ^, »
130 [20 r°] ac aizo dih, agenoillet se denant elz & adorava la ca-
* Ms. los; mais 17 et Vs sont exponctuées.
2 Mot à peine lisible, comme quelques-uns des deux ou trois lignes suivan-
tes.
3 Lacune de deux feuillets {Ivij-lviij), Voir l'introduclion p. 212.
LEGENDES PIEUSES 273
dena ab que erant liât ; e pois tornet a son marit Adrian ;
car el estava en autra maison, estendutz en una trau ; e
dis li : « Vejas, seinner meus, non esgardes la belleza de
ton cors ni la beutat de ta joventut, car tôt es conduh
de verms. Non te tempte Taurs, ni Targenz, ni li precions 135
vestirs, ni las possessions, ni nuilla res terrenals, car al jorn
del juizi non sera ja res, que tôt reman aici, ni adonx non
poira hom ja ren donar per s'arma, car non sera qui o proses;
solament recebra Deus los dons de las sanctas armas. » E
cant ac dih aizo, comandet lo a Deu, et annet s'en a sa mai- 140
son. Cant venc aprop non sai canz jornz, Maximiaa comandet
qued hom li aduisses los martyrs de Deu denant. Cant Adrians
o auzi, & el dis alz autres : « Sennor, si vos autri o coseilla-
vas, eu annaria a la mia maison & adurria la mia moiller,
vostra serva, que vis la nostra passion. Car l'autre jorn loi 145
covinc, elo li plevi, qued eu lifariasaber cant hom nos appel-
laria. » Autrejeron lo li li saint martyr. E cant 0 agron autre-
jat, donet loguier a las gardas que los gardavan, quel laisses-
san annar, e donet lur fermansas los sainz qued eran aqui
qued ades tornaria. E domenz que s'en annava, vi lo uns 150
d'aquels delà ciutat, e conoc lo [20 v°] & annet corenz a sa
moiller e dis l'o :'« Tos mariz es deliures e ven s'en. Eu l'ai a-
des laissât aici prop. » Nathalia, cant auzi aizo, non 0 crezet,
e dis : « Et qui lo poc desliurar d'aquesta preison ? Ja Deus non
voilla qued el se parta d'aques sainz. » Et domens qued ella 155
dizia aizo, vec vos un parent seu, ben tost, e dis li : « Donna,
mos senner es desliures, e ven s'en. » E cant Nathalia auzi
aizo, penset se qued agues fugit lo martyre ; e fon moût trista
e dolenta, & acomenset a plorar. Et ab aitant vi lo venir, e
getet purre zo que ténia en sas mas, e vai tost claure la porta 160
de sa maison, e comenset a cridar : « Ja non vengas a me tu
que t'es partiz de Deu &li as mentit ta fen I Ja aquil lengua
non parlara ab me, ab la quai tu as renégat noste Seinnor ;
ni eu non l'auzirai, carengan afah en l'esgardamen de nostre
Seinnor. » E pois gira se deus el e dis li : « 0 tu hom sen deu 165
davan totz autres, qui te fez penre obra que non poguessas
persuir? Qui t'a fah partir delz sainz? 0 qui t'a enfoUit, que tu
te sias partitz del conven de pas? Diguas me per que as fugit
davan que fossas en la batailla ! Con as getat porre tas armas,
19
274 LEGENDES PIEUSES
170 davan que vissas ton enemic ab cui te dévias corabatre? Ni
con es naffratz davan qued hom Vagues getat cairel ni sagetta?
Eu avia lo meravillas, si [21 r*] de la gent qued es senz Deu,
ni de la ciutat delz fêlions podia esser res offert a nostre
Seinnor, ni de quai manera podia esser sagratz de gent homi-
175 cidasacrifizis a Deu. Eu que farai, mesquina que soi, ajostada
ab aquest(a) fellon del linnatge delz malz? Ni autreiat non
m'es qued eu sia apellada una hora moiller de martyr. Anz
serai appellada moiller de mal home. Un petit ai agut gauh;
mas oimais aurai totz temps mais dol. » Adrians auzia moût
180 voluntiers aquestas paraulas, e donava s'en gran cura & gran
gauh & ades avia major talent d'adimplir zo qued avia promes.
Avia se granz meravillas, con de bocca de femena podian
aitalz paraulas eissir, per zo car era joves & non avia gaire
que Tavia presa per moiller, car mas tretze mes non avia que
185 la près per moiller, ni mais non avia estât ab el. Ad[r]ians,
can la vi aici irada, coraenset la a conortar, e dis li : « Donna
Nathalia, obri me, car non es aici con tu cujas, qued eu aia
fugit lo martjri. Ja Deus non vuilla qued eu lo fuja! Mas per
zo zai soi vengiitz, qued eu t'en mené e que sias a la nostra
190 passion e que la vejas aici con eu t'avia promes. » Ella non
crezia zo qued el li dizia, e respondet e dis : a Vejas co me
cuja engannar aquest bausaire ! Aquest contrafai Judas I Toi
te de me, hom, qued ades au-[21 v.] cirai me mezeissa, e seras
t'en adonx ben venjatz. » Et domenz qued ella se triguava
195 d'obrir, el dis « Obri tost, que si eu m'en vauc, d'aici enant
non me veiras ; e ploraras pois car non m'auras vist davant
qu'eu moira. Fermansas ai donat los sainz. E cant querrant,
si non m'atroban, li saint martir, cui ai donat per fermansa,
soffriran los tormenz qued eu deuria aver essemps ab lo lur ;
200 e sera granz peccatz, qued eil non podon a penas soffrir los* lur :
car eil son cais mort, per los tormenz que le malz hom lur a
fah far. » Can Nathalia auzi aquestas paraulas, annet ben
tost a la porta & uberc, e getet se a sos pes. E sanz Adrians
dis li : « Beneita es entre totas femenas, car tu es appareguda
205 soleta sobre terra, qued amas ton marit. Benezeita es li toa
corona; tu es frucs de Victoria* & compainnera delz martirs,
* Ms. las, — * Ms. victaria.
LEGENDES PIEUSES 275
jacia zo que tu non sias raarturiada. » E près la & acomense-
ron s'en ad annar amdui. Domenz qued eran en la via, que
s'en annavan, e lo dis Adrians : « Diguas me, donna, con as
adordenat ta sustancia ni zo qued as. » Ella respondet e dis 210
li : « Seinner, non te membre de las causas d'aquest mont,
per zo que non te tjron a se. Solament te membre d'aizo en
que es appelatz. Toi te de totas las causas cor-[22 ro]-rum-
pudas d'aquest segle ! Mas cocha te de vezer aquellas causas
que ja non transpassaran, que te son appareilladas, & ad 215
aquelz sainz que van ab te en la via de nostre Sennor. » E
cant intreron en la carcer, li ancilla de Deu se va getar alz
pes delz sainz martyrs & baisava la cadena ab que eran liât.
Trobet lur cors poiritz per los tormenz, tan que verm lur
cazian de las naffras, e clinava se e terzia lur tôt aquel poiri- 220
guier. Pois trames donzellas soas a sa maison, que li aportes-
san delz belz draps que lai eran pro : ella era moût riqua
femena e de gran linnatge. E cantl'agron aportat los draps,
ella los vai penre,e torquavalur ab sas mans proprias las naf-
fras, & ab los draps faissava lur pois los pes e las mas. Erant 225
enim dissoluta menbra pondère ferri, Lur menbre eran desjoinh,
per lo gran fais del ferre de que eran cargat. Estet laintre ab
elz en la carcer set jornz e cura las naffras del[z] sainz martirs.
Can venc lo jorn que Temperaire avia douât, comandet qued
hom 11 aduisses denant los sainz. Et anneron a la carcer cil 230
qued en foron mandat. E can foron laintre^ getavan los en ad
enpenchas; e car eran tuh desfah per los tormenz, que non
podian annar, cargavan los a lur costas, con feiran en ases,
& aici portavan [22 v°] los liatz ab una cadena. Adrians venia
aprop elz, liatz las mas detras lo dos. E cant foron prop de la 235
cort, vi los aquelz que n'e[ra] maistre davant los autres, &
annet o dir al rei : « Senner, aici son aquil dampnat. » Maxi-
mians dis ^ : a Despoille los hom nutz en lur bragas, que Tuns
veja los tormenz de Tautre e las penas. » Li ministre respon-
deron : « Senner, aicelz que foron primerament tormentat, 240
* Oa diz. Ce mot, écrit après coup dans riolerligne, est d'une lecture dou-
teuse. Lés deux premières lettres seules sont sûres ; Vs, si elle existe, est
absolument indistincte ; on croit voir à la fin un t ou un r. Faudrait-il lire
dist?
276 LEGENDES PIEUSES
non pot hom ren demandar. Mas Adrian fassa hom venir
sainz, que non ha an car gran mal. Car le cors delz autres
son tant poirit deus totas partz que las costas lur pareisson,
e si hom lur demandava, non poirian respondre, car li un
245 espiran, li autri volon fenir lur vida, e non poirian recebre
aquest tormenz que lur son appareillât. E nos non volem que
moiran tan tost; anz devon recebre gran pena, car fort col-
pable son. Mas comanda qued Adrians intre. n Ë comandet le
reis qued hom Taduisses. Anneron lai & despoilleron lo, e
250 feron lo intrar laintre, & portava el mezeis sos grillons. E
domenz qued el s'en intrava, li saint martyr li disseron :
« Adrian, vec te que tu es dignes que tuleus ta cros e seguias
Christ. Vejas que per paor non sias desliatz ni tomes atras,
que le tiens guizardons non sia fah vans, e le diabolz non
255 te tolla ton thesaur. Aquil que veiras non te espauton ; mas
agarda ad aquellas causas que * , »
[fe]-[5 r°] - menas que li martyr, que volian ja raorir per la
preiso, eran ja guarit per Tamenistrament, fez aportar una
260 gran colonna de coure e mètre sus en lur pes, que per lo
gran fais e per la gran pesantura lur fraissessan las cambas,
e dizia: «Tant lur farai sofFrir de penas, que ja non morran
aici co moron li autri a mort cominal. » Anneron li ministre
e feron o aici con Maximians lur ac comandat. Aporteron lur
265 arezament, e vengron en la carcer. Can Nathalia los vi, annet
ves elz, e preguet lur qued o acoraensessan primerament ad
Adrian, per tal que, can veiria primerament tormentar los
autres, non n'agues paor. Feiron o aici con ella lur preguet.
Vengron primerament ad Adrian et estenderon li las cambas
270 en aquel estrument, e tailleron li los pes. Pois Nathalia dis li :
« Senner, eu te prec, si le tiens plazers es, domens que tu
vins ancara, que tu estendas la toa man, qued eil la te taillon,
que tu puscas esser esgalz alz autres sainz martirs, car eil
an soflfers majors turmenz. » Sainz Adrians estendet sa man,
275 e li questionari feriron sus e tailleron la li. Et en eis pas el
transpasset del segle. Pois van s'en aquil menistre alz autres
sainz martirS; e frainnion lur las cambas e las coissas. Li
* Lacune de trois feuillets {Ixij'lxiv), Voir l'introduction, p. 212.
LEGENDES PIEUSES 27 7
saint martyr, can los veziaa venir ves elz, estendian lur pes
e dizian: « Senner Jesu [5 v°] Christ, recep lo nostre esperit! »
E cant avlan dih aizo, reddian las arnaas a Deu. Le reis Maxi- 280
mians comandet qued hom crames los cors; e dizia : a Per
aventura venrian aquil de Qalilea & portarian los en. »
Sancta Nathalia avla resconduda la man d'Adria, so marit,
en son sen, que non fos crenmda ab l'autre cors. Li ministre
portavan los cors delz sainz cremar, aici con le reis o avia 285
comandat, car uns fornz ardens era appareillatz. Sancta
Nathalia seguia los cors delz sainz e recebia lo sanc ; e mou-
tas autras femenas seguian los atressi ab ella, e recebion lo
sanc en lur draps & en lur vestirs, que degotava delz sainz
cors delz martirs. Los vestirs d'aquelz que los portavan, qued ^^^
eran tuh sanguenent, compravan las sanctas femenas moût
carament & rescondian los & tenian los moût car. Can foron
vengut al forn, geteron los inz de sus de la sobeirana bocca.
Las femenas qued estavan aqui ploravan e dizian : « Senner,
membre vos de nos el vostre repaus ! » Sancta Nathalia ^^
abrivet se e vole se getar el foc. En eus pas [que li cors
foron getat el fuc, e lo venc subtanament pluia, & eslauci,
& t^o^, e tempesta, & fon terratremolz tan granz que tro ad
aquelz temps non era aguda majers. Totz aquel lues e tota
li ciutatz nadet en aigua, & aici esteis li fornaz ardens per ^^
la gran pluia. Li ministre, can o viron, agron gran paor e
fugiron s'en. Li autri de [6 r"*] paor cazian a la terra, & estein-
nian. Nathalia e las autras sanctas femenas, qued eran aqui,
anneron de cors penre los cors delz martirs, e troberon los
entiers, de guisa que sol uns pelz non lur fon crematz. Aqui 305
ae un religions home, & venc ab sa moiller, & getet se alz pes
de Nathalia e delz autres sainz fraires, qued eran aqui, et
acomenset lur a pregar & a dir : « Seinnor, nos soliam estar
aqui deforas, lonc los barris d'esta ciutat, tôt privadament,
e vim e conoguem la maleza del rei, & con escampava lo 310
sanc de celz que se clamavan per Deu. Fugem d'aici, & annem
nos en Bezanci, & desamparem aquest lue. E per aizo vol-
riam vos pregar que vos nos donasses los cors delz sainz ;
e levariam los en la nostra naveta, e portariam los en, e
sebeliriam los la on estem ; & estarian la, entro qued aquest 315
malz emperaire fos mortz. Car si nos los laissem aici, venra
278 LEGENDES PIEUSES
aquest malz reis, e comandara qued hom los crome per
aqui eis, aques que Deus a desliuratz per la pluia e per lo
tron^ » E plac moût aquist paraula a totz aquelz qued eran
320 aqui, e leveron los cors delz sainz en la nau, & porteron los
en Bezanti. Nathalia remas en sa maison e retenc ab si la
raan de son marit Adrian. E dizia : u Si per aventura li cors
delz sainz lur eran tout, Senner*Deus, cal conseil penria eu,
ni on auria eu oimais ma esperansa? » Près la man de son
325 marit, & envolopet la de polpra et [6 v®] ois la de mirra, e
pois pauset la al capsal de son leg, qued anc hom non o saup.
Pois can venc aprop non sai quanz jornz, domenz que sancta
Nathalia era en la ciutat, venc uns rix hom al palais de Maxi-
mian, e preguet lo rei que li dones Nathalia per moiller. Ella
330 era moût riqua femena, & valia mais que las autras qued eran
de la ciutat, & era trop bella. Trames li aquest rix hom hones-
tas femenas & bonas, que U parlessan d'aquest maridatge.
Sancta Nathalia, cant auzi aquestas paraulas, respondet en
aici : « Moût ai gran gauh, car eu auh aquestas paraulas.
335 Qui me poira lo acermar, qued eu sia moiller d'aital home ?
Mas prec vos que me dones espazi de très jornz, con eu me
pusca appareillar, car eu non cujava penre marit. » Aizo
dizia per tal que fugir s'en voila et annar la on jazian li saint
martir. E per aquestas paraulas eil deceup las femenas, que
340 li avia trames le rix hom. Can las femenas s'en foron eissidas,
& ella s'en intret en sa cambra, on era li mans de son marit
Adrian ; & gotet se a la terra, & acomenset a pregar nostre
Sennor ab plors & ab lagriraas & a dire : a Senner Deus,
qued es Deus de celz qued an tribulation, &]es de josta a
345 celz que son tribulat per cor, regarda en me la toa ancilla,
e non me laisses bautugar ab la man del tieu saint martir
Adrian. E prec te, Senner, que non oblides lo lieu martir.
Senner, aias merce [7 r°] de me e de lui, e non oblidar los
liamps qued el sostenc per lo tieu nom ! Tu, Senner, es mise-
350 ricordios, & non laisses los sens tormens en van, e los caiti-
vers qued el sofferc per te. Senner, menbre te de lui ; sostrai
me, Seinner, de la compainna del diabol, e que Fenemix non
bautugue lo legh d'Adrian I Tu, Senner, que desliurest los
tieus sers del fuc, desliura me de Tatent d'aquest fellon. »
355 E cant ac ganren pregat ab plors & ab lagrimas & ab gran
LEGENDES PIEUSES 279
tristicia, & ella s'adormi, & ve vos un d'aquelz sainz martirs,
&. estet denant ella, e dis 11 : « Pas sia ab te, Nathalia,
ancilla de Christ! Aias esperansa, car Deus non t'a despresada,
ni a oblidat los tiens trabailz, que as fah en nos. Car aqui eis
can nos appareguem * denant Christ, nos lo preguem que ven- 360
guessas tost a nos. » Respondet sancta Nathalia e dis :
(( Diguas me, sainz, si le meus senner Adrians esta essemps
ab vos denant Christ. » E respondet le sainz : « Verament
apparec & annet davan tostz nos davan la fas de Christ. Mas
leva sus & intra en aquesta nau: & vai t'en la on son li nostre 365
cors, & aqui te visitara nostre Senner, e te menara lai on
nos em. » Et ab aitan Nathalia reissidet ; e can se fon reco-
noguda, levet sus, e près solament la man d'Adrian, e laisset
tôt cant avia ; e portet la essemps ab se & acomenset s'en
ad annar. E domens que s'en annava & volia intrar en la nau, 370
& ella atrobet una gran compainna [7 v°] d'omes e de femenas,
que s'en fugian per paor del rei ; et ab elz ella intret en la
nau, & annet s'en. Quan le rix hom, que la dévia penre per
moiller, saup que Nathalia s'en fugia, annet el palais e ques
al rei adjutori de cavaliers, & intret en una nau, & acomeu- 375
set a segu[i]r Nathalia. E cant ac annat ben mil millas, venc
uns venz contraris, e tornet lo lai don era vengutz. E li un
delz compainnos sens foron mort, e li autre cazegron en las
ondas de la mar. Can venc entorn meja noh, e le diabolz se
meiret en semblansa d'una nau ab ganren homes & venc 380
encontra aquesta nau, on era Nathalia, e comenset a cridar
cais que fos le nauclers : « Don es eissi(s)t, ni on annares? »
Aquil de la nau responderon e disseron : « Nos em eissit de
la ciutat de Nichomedia, & volem annar en Bezancium. »
E le diabolz acomenset lur a dir: « Vos erras, car vos non 385
navigatz ad aquellas partidas. Tenes a la senestra part. »
E volia los mètre en la mar. Eil se cujavan verament qued
aco fossan verament nautonier d'Orient. Et acomenseron ja
amudar lur vêlas, per annar lai on le diabolz lur avia dih.
E vec vos que sainz Adrians lur apparec subtanament, e dis 390
lur: « Venez, qued aizo es vostres viatges; e non vuillas
seguir aquel que vos parlla, car aquel vos cujava destruire,
* Ms. appareguen
280 LEGENDES PIEUSES
epersec vos ades. » Et d*aqui enant le diabolz non lurapparec.
Levet sus [8 r°] Nathalia e conoc qued Adrias los guizava, &
395 ac moût gran gauh. Et en eis pas levet se uns bons venz e
menet los a Bezanci davan que fos jornz. Et eissiron de la nau,
can foron a Bezanci, & anneron s'en en la maison on eran
li cors delz sainz martirs. Can foron laintre, sancta Nathalia
se val agenoillar davan los cors delz martyrs, li quai avian
400 soffert pacienment lo marturi, e près la man qued era aguda
taillada, e pauset la de lonc lo cors de saint Adrian & agenoil-
let se & acomenset a pregar. E cant ac preguat, intret s'en
en la maison, e saludet tos los fraires e las serors, e dis lur
que preguessan per ella. Aqui avia gran compainna de ôzelz,
405 que li pregavan que se pauses uu pauc, car moût era aguda
trabaillada en la nau. Et annet se pausar et adormi se. E can
se fon adormida, en eus pas e lo li apparec sainz Adrians, e
dis li: « Ben es venguda en pas, ancilla de Christ ! Ven el
nostre repaus, ven e recep los guizardos que te son appareil-
410 lat ! » Et en eis pas ella reissidet, & comtet o a totz. E cant o
ac comtat, adormi se, & aqui eis ella transpasset del segle.
Vengron li fraire e las serors qued eran aqui, e cujeron la
espreisser, e troberon la morta. Van la penre & arezeron la,
aisi con costumna es de mort, e feron lur oration, e pauserou
415 la ah los martirs. E can to agron tôt complit, establiron fraires
e serors, que servissan totz temps mais la-[8 v**]-intre a nos-
tre Sennor, & [desamparessan] las causas terrenalz d'aquest
segle, & servissan totz temps mais a nostre Sennor. Cui est
honor et gloria in secula seculorum. Amen.
XI
VITA SANCTI lERONIMI
Impossibile est omnino et longum de isto viro ejusque dts-
tricta vïta et illius moribus retexere omnia, Sainz leronimes
fon uns bons hom, e fez moutaz meravillas en sa vida, e
direm vos n'una ; car si dire las vos voliam totas, longas
5 no vas seriau. Aici con nos trobam escrih, qued o [esjcriuseron
LEGENDES PIEUSES 2 81
li saint home qued o viron & o auziron en la terra de Betli-
leen, on era le monestiers de saint Iheronime, can venc un
jorn que sanz leronimus ab toz los fraires eran a colleta, aici
con usatges es de morgues, e legia hom la leisson, e lo
intra laintre un[s] granz leons en la claustra, e venc moût 10
fort dolent, et annel ab très pes e lo cart portet pendent. Can
li fraire lo viron, acomenseron s'en a fugir de paor qued
agron. Sainz leronimes, can lo vi, non ac anc nuilla paor. &
vai li encontra,aici con fera ad un hoste. Can le leons fon en-
contra el, monstret a saint leronime la planta del pen, car 15
parlar non podia. Can sainz leronimes o vi, appellet los frai-
res, e dis lur que li lavessan lo pen de que annava clopeian,
& vissan curosamen per que se dolia. Li fraire van penre lo
leon et laveron li lo pen moût curosament, e viron & atro-
beron qued uns escotz Tavia naffrat en sa planta. Sanz [9 r®] 20
leronimes fez li oinner la naffra & fez s'en donar cura & fez
Testar laintre entro que fon(s) guaris. Le leons laisset estar
la maleza & acomenset estar laintre, aici con una bestia au-
tra domestegua, entre los fraires. Can sainz leronimes o vi,
del leon qued aici estava, acomenset a dir alz fraires: <( Frai- 25
res, pree vos totz, que vos diguas, e doties conseil, quai mes-
tier poirem far far ad aquest leon, car eu sai ben qued el fara
zo qued hom li mandara que far pusca. Car eu crez e sai que
nostre Senner lo(s) nos a trames mais perla nostra fen acreis-
ser, que per la salut de son pen, car el lo pogra ben garir, 30
ja non intres ni vengues en aquest monestier. Mas per zo lo
nos a trames qued el nos adjude a las nostras necessitatz. »
Adonx responderon tuh essemps himilment, e disseron aital
x-espons: < Tu, senner, sas que Tases, que nos aporta la leinna
del bosc, non ha mingua de guarda, & avem gran paor qued 35
silcuna mala bestia non lo manje e non lo dévore. Per zo, si a
"te platz, senner, si vejaire t'es que drechurera causa sia, met
l*ase en sa guarda e qued el lo menés a la pastura, e lo guar-
ciesla, e pois lo seras tornes l'en. » E fon fah en aici. Carguet
"hom al leon l'asen que lo menés en pastura, e que lo guardes 40
la, e pois lo seras tornes l'en a maison. Fez o aici le leos :
xnenava lo cada jorn en pastura, el seras tornaval'en. E cant el*
' Sic. Corr. le.
282 LEGENDES PIEUSES
leons era ab el, non avia gaire [9 v»] de regart d'autras malas
bestias. Et en aiei tenc o gran passa. Can venc un jorn que Tases
45 Tac menât en pastura, et el s'adormi, e dormi moût fort. E
domenz que dormia, e lo passeron mercader per la via, qued
annavam comprar oli en Egipte; & eran i passât moût soven
autras vegadas, e vezian ades aqui paisser Tasen e vezian
qued hom nonlo gardava. Van penre Tasen, e meneron lo ab
50 se. Can le leos reisidet, regardet se e non vi Tase e non saup
que se fos devengutz. Fon moût iratz & acomenset annar de
sa e de la, e non lo trobet aqui on lo solia laissar per paisser
& acomenset a rugir, e quis lo tôt lo jorn de sa e de la.E can
se fon ben aseguratz del trobar e vi qued en tôt aquel encon-
55 tre non era, annet s'en lo seras el monestier & estet a la
porta, e non auzet intrar, e fon moût vergoinnos quar non
aduzia son ase aici con solia. Can sainz leronimus e 11 autri
fraire lo viron estar a la porta e non i viron Tasen, penseron
se que per fam, qued agues agut, Tagues manjat. E non li
60 volgron donar a manjar aici con solian. E dizian li : « Val e
manja zo que t'es sobrat de Tasen & impie en ton ventre.»
Si tôt eil li se dizian aizo, eil non eran ^pero cert si el lo
s'agues manjat 0 non. E per aizo anneron li fraire la on paissia
Tases & on le leos lo solia menar, per vezer si ja ren i tro-
65 barian de las remasillas ; e can la foron, non n'i atroberon
nuilla ren, e torneron s'en, et [10 r°] anneron o dire a saint
leronime. Sainz leronimes, cant o auzi, acomenset a pregar
& a dir alz fraires : « Praires, prec vos soflfrias lo dan de
Tasen, el leon non vuillas esfraidar ne getar de saintre. Mas
70 aici con Taves tengut entro aici de mangar e de beure, aici
lo tenes ancara, et estacas lo e menas lo al bosc, et aportela
leinna aici con Tases solia far, e fassa totlo seu mestier. » Van
penre lo leon, & enbasteron lo & adrezeron lo aici con fazian
Tasen, & acomenset* a portar la leinna & a far lo mestier
75 que Fases fasia. Can le leons ac aizo tengut non sai canz
jornz, e fon venguz le termes que li mercadier torneron, cant
venc un jorn qued ac complit sa obra, ja fos zo que bestia
muda fos, eu me pes que de Saint Esperit o ac, annet s'en
la on avia perdut son compainno & acomenset a corre de sa
^ Ms. acomenseron.
LEGENDES PIEUSES 283
e de la, per saber si ja trobaria * nuilla riovella de son asen. 80
Can se fon aitan lassas de querre, venc el cami, per on passa-
van las mercadarias. Can fon aqui elcamin, acomenset a gardar
de sa et de la, e vi venir de moût loin homes qued aduzian
camelz cargatz ; & ab aques venia l'ases toz primers cargatz
atressi. Mas car li eran tan loin, non lo poc guaire ben conois- 85
ser. Mas pero annet s'en tôt soau encontra elz. Et era aitalz
usatges en la terra que, can camelz menava hom loin en mer-
cadarias, prennia hom un asen, e metia li hom una corda al
col, e metia Tom primer, & estacava [10 v°] hom los camelz
après a la corda e seguian Tase. Gant aquil raercader appro- 90
benqueron del leon, & el connoc Tasen & abriva se en elz, &
acomenset a rugir & ^a bramar & annar moût malament
enfr*elz;e non toquet pero mingua. Eil li mercadier agron
paor, can viron lo leon, e fugiron s'en e laisseion estar los
camelz e tôt cant i avia. Le leos can lo[s] en vi aici fugir, aco- 95
menset moût fort a rugir & a ferir de sa coza en terra moût
fort atressi(t), elz camelz totz espautatz, aici con eran car-
gat, acomenset los en a menar a Tabadia. Li fraire, can viron
aici venir Tase cargat elz camelz cargatz e lo leon aprop, que
los menet, van s'en de cors & anneron o dir a saint leronime. 100
Can sainz leronimes o auzi, eissi foras, e fez obrir las portas
del monestier, qued hom las meses laintre, & qued hom las
descargues, e qued hom laves a lasbestias los pes e las cambas
e pois lur dones hom a manjar: «E veirem que nos voira nos-
tre Senner demonstrar enaizo; » Feron o en aici con el o ac 105
comandat. Le leos annet laintre perla claustra, menan sa coza
efazen moût grand gauh ; & annava bai?an los pes alz fraires,
que conoguessan que non avia fah aizo qued eil se pensavan.
Li fraire, canto vezian, avian moût gran gauh, et avian granz
pendensas de la maleza que li metian sus. Sainz leronimus 110
dis alz fraires : « Appareillatz a manjar, qued hoste nos ven-
ran.» Appareilleron a [11 r®] manjar. E cant agron appareillât,
& parlavan essemps ab saint leronime, e vec vos un messatge,
que dis qued a.las portas del monestier avia hostes, que dizian
que parlar volian ab lo paire del monestier. Cant saint leroni- 115
* Ou i atrobaria; mais le ms., bien que la séparation ne soit pas trop
nette, indique pIuLôt ia trobaria.
284 LEGENDES PIEUSES
mus o auzi, comandet qued hom los laisses intrar. E can foron
intrat, e viron saint leronirae, & eil se van getar a sos pes,
moût vergoinnos, e quiseron perdon de zo qued avian fah de
Tasen. Sainz leronimes va los penre e levet los sus & amones-
120 tet los que non volguessan penre las autrui causas e que de las
lur se tenguessan por pagat, e d'aioi adenant estessan en la
temor de Deu. E cant sanz leronimes ac complit aici sas
paraulas, comandet qued annessan manjar ; e cant aurian
manjat, qued presessan lur camelz ab tota lur causa, e qued
125 s'en annessan. Adonx acomenseron tuh essemps a dire: « Nos
te pregam, paire, qued, al lum de la gleisa & a la[s] necessitatz
del[s] fraires, reten la meitat de Toli, car nos em cert e sabem
verament que per los vostres obs mais que per los nostres
annem en Egipte per coraprar, » Respondet sainz leronimes
130 e dis: « Non queresdrechurerament zoque queres; car non es
bon que nos, que devem valer alz autres &soccorre a lur obs,
&em tengut al pobol de Deu, que nos los gravem ni prennam
lur causas, de que nos non avem soflfracha. » Responderon
eil e disseron: « Ja re que non si aiam non portarem ni en
135 trairem, [11 v°] si non fas aizo que nos te dizem, que prennas la
meitat de l'oli. E prometem vos que d'aici adenant toz temps
mais vos donem cad'an, nos e nostre enfant, una mesura
d'oli. n Et aici sainz leronimes totz constreh, e mal grat seu,
li avenc a far penre la meitat de Toli. E pois cant agron
140 manjat, preseron lur camelz e lur autri oli, & anneron s'en ab
bénédiction.
XII
PASSIO SANCTI MAXIMI
Uns emperaire, qued avia nom Decius, volia sobrepujar e
destruire la lei delz christians & establi sa lei per tôt lo segle,
que tuh li Christian se partissan del Deu viu e verai, e sacrifi-
zessan alz diabolz. En aquel temps era uns bons hom en la terra
5 d'Asia, qued avia nom Maximus. Aquest vole far saber qe chris-
tians era. Mestier avia e d'aquel volia viure. Cant hom saup
que christians era, près lo hom e menet Ten al baille de la vila.
Can fon deiiant el, demandet li; « Con as tu nom? » Respon-
LEGENDES PIEUSES 285
det e dis : « Maximus. » Adonx dis le bailes : « Quais * hom es?»
— « Eu son, dis el, franx per linnatge ; mas sers soi de Christ, 10
e de mon afan vive, e soi christians, jacia zo qued eu sia pec-
caire. » Respondet le viguiers : «Tu non as donx auzitla lei que
11 emperador sai an tramessa aoras novellarment? » — « E
qualz ? » zo dis Maximus. Respondet le veguiers : « Que tuh
li Christian laisson aquella folla vida que tenon & obediscan 15
ad elz, que an tôt lo mon en poder, & adoron tuh lur de.us. »
Bespondet Maximus: « Car eu conuc aquesta sentencia, qued
era folla & avolz, me voil demons-[12 r**]-trar qued eu sia
christians. » Adonx dis le bailes : « Sacrifia alz dieus. » Res-
pondet Maximus : « Eu non sacrifiarai mas solament al Deu 20
viu e verai, a oui ai totz temps sacrifiât. » Le veguiers dis :
« Sacrifia, per tal que non moiras; si non, eu te farai morir
ad aigres tormenz. » Maximus respondet :« Aizo voil eu moût.
E per zo me soi descobertz, qned eu defailla d'aquesta mes-
quina vida, e recepia la vida durabla.» Adonx lo fez penre 25
le veguiers e fez lo batre ab fustz ; e dome[n]z qued hom lo
batia, e le bailles li dizia : « Sacrifia alz deus, e seras esca-
patz d'aquestz tormenz. » Maximus respondet : « Aizo qued
eu soffrl per lo nom de nostre Sennor non son torment, anze
son ben oinnement. Mas si eu me partia delz comandamenz 30
del meu seinnor ni del seu avangeli, del quai eu son essein-
natz, adonx soffriria tormenz perpetualz. » Adonx comandet
le veguiers qued hom lo pendes. E can fon pendutz, & hom
lo turmentava, & el li dizia : « Maxime, laissa aquesta toa
foUia e sacrifia alz deus, que salves la toa arma. » Maximes 35
respondet : « Si eu non sacrifize, aizi gazainnarai m'arma ;
e si eu sacrificava, eu la perdria. Aquist fust, ni aquist
vercant, ni nuUa res que tu me fassas, non m'es tormenz
ni pena, car li gracia de Christ [es en me] que me fara saul
en l'autre segle, per las pregueiras de totz aquelz sainz que 40
son passât per martiri & an vengut los vostres forsenz e las
vostras iras. j> Adonx comandet le veguiers qued hom li fezes
la sententia que li empera-[12 v^j-dor avian establida, car
non volia sacrifiar a la gran Diana. Fez lo lapidar, per zo que
tuh li autri Christian i presessan eissemple e n'aguessan paor. 45
1 Ms. Quais.
286 LEGENDES PIFUSES
Et en aici lo sers do Christ [en fo menatz] per los nienistres
del diabol, gracias rendens a Deu lo paire, per Jesu Christ,
lo seu fil, que volia e soffria, qued el en aici soffren venquest
lo diabol &aquest mont. Menet Tom foras los murs de laciutat
50 & lapidet Tom ab peiras 6l aici transpansset d'aquest segle a
nostre Sennor, pridie idus maii, E sofferc passion en la terra
d'Asia, quan reinnava Temperaire Dacians; & aquest que lo
martirizet era bailles en Asia. Moutz tormenz an soffert 11
martir de nostre Sennor, qued a nos autres serian moût greu
55 a soffrir. E pero si diz nostre Senner en Tavangeli: a Qui non
bajulat crucem suam & venit post me, non potest meus esse disci-
pulus. Qui non soffrira martire per me, aici con eu perel,
non pot esser mos discipolz. » Nos podem ben soffrir martjri
sens aucizement de nostres cors, si far volem lo seu servize.
60 E con? Que venguara a sancta gleisa volontiers, e fassam
almornas, vesitem malautz, e fassam obras de misericordia,
et en aici soffrirem raarturi per el, & serem esgalz delz martirs
& aurem soffert martire. E nostre [Seinner] lais nos far de
tal guisa lo seu comandament, que, cant las armas partiran
65 d'aquest cors, puscam venir a la soa celestial gloria, on es
gauh senz dolor e vida que ja non aura fin. Quod ipse prestare
dignelur, qui cum Pâtre et Spiritu Sancto vivit et régnât in
trinitate. et irinitas in unitate, per secula * [seculorum. Amen.]
[XIII]
[XIV]
[PASSIO SANCTI THOM^]
[13 r**] nos in omm verùate, ut nichilnobis desi{t)t de scientia Dei.
Conforma nos en tota veritat, que de la sciencia de Dea non
(l) Lacune de huit feuillets entre les folios actuels 12 et 13. Voir l'introduc-
tion, p. 212.
LEGENDES PIEUSES 287
nos failla res. » — « Eu venrai a vos, a Tautra nohg, et estruirai 5
vos plus plenerament, e que meil zo entendatz.» Can venc ad
aquella nohg, & el venc ad elz, aici con lur o avia promes, &
estruis los de lafe de Jesu Christ & baptiset los e sanctifiet los.
E parti se d'elz, e mes se en la nau e tengron lur carera. Pois
can s'en fon annatz, non triguet guaire qued el adordenet a 10
preveire un de sos discipolz, e trames lo en la ciutat, que
estes aqui, & i bastis gleisa. E fez o en aici con Tapostolz o
comandet : basti gleisa, en laquai mouz pobolz fon convertiz
a nostre Sennor, & aqui es le setges de saint Thomas Tapos-
tol, & li fes catholica entro al jorn d'oi. De l'enfant qued avia 15
presa la fiUa del rei, Dionisius que avia nom, fez hom eveç-
que, et el mezeis sagret sa moiller, Pelàsgia per nom, e fez
en monegua, li qualz soflferc pois martiri aprop la mort de
son marit, e sobre son sépulcre, et en aici fon escrih sobre so
sépulcre per letras de grex & d'ebraic e de latin : « Aici se 20
repausa li espoza de Dionisi l'evesque, fiUa de saint Thomas
l'apostol. »
Can sainz Thomas intret en la ciutat d'India, intret Abba-
nes' al rei Gondafre, e dis li qued aduhg li avia maistre. Le
reis, can vi saint Thomas, acomenset li a dir :« Foiras me far 25
un palais ? » Respondet sainz Thomas e dis qued hoc ben. Val
le reis e monstret li lo lue, e dis : « Ar me diguas de quai
manera lo me bastiras aici en aquest lue. » Sanz Tho-[13 v"]-
mas respondet e dis : « Eu te dirai ben con lo farai. » E val
penre una vergua, e deguizet lo, e dis : « Aici farai la porta 30
deus Orient, e pois farai aici la sala, & aici aprop lo consistori,
&aici las maisos d'uvern & aici las maisons d'estiu, et aici la co-
zina, &aici las cambras en qued hom jaira.» Et aici déchet li lo
palais. Le reis, cant o vi, comenset lo ad esgardar, e dis : « "Ve-
rament es bons maistre, e tain ben qued obres alz reis. » Près 35
moût gran aver, tant que non ac nombre, e laisset lo li,
&annet s'en le reis en autras terras. Sainz Thomas annet per
las ciutatz e per las vilas, e prediquet la paraula de Deu &ba-
tejet los crezenz, & donava larguament alz paupres l'aver & a
toz celz qued obs era.E cant ac mot gran pobol convertit, basti 40
gleisas & adordenet clergues. E can venc a cap de dos anz,
qued estet le reis que non i fon, ac tôt l'aver despendut. Can
le reis fon vengutz, & ac après zq que l'apostolz avia fah,
288 LEGENDES PIEUSES
comandet qued hom lo preses 6i Abbanes e lies los hom ab
45 cadenas, e pois getes los hom en la carcer. E car le fraire del
rei era malautz, alonguet se car non foron aucis; car elles
cujava totz vins far escortegar e pois cremar.'Esdevenc que
mori le fraire del rei, qued avia nom Gatz, e fon fah moût
granz dolz, car le reis Tarnava mais que nuilla ren que fos.
50 Arezet Tom e vesti Tom de polpra e de bis, & adornet Tom
tôt lo cors de peiras preciosas. Comandet le reis qued hom
li fezes vas de peiras vermeillas e qued hom lo pauses intre.
[14 r°] Domenz que li maistre appareillavan la sopoutura, &
agron i ja poinnat quatre jorns, can venc al cart jorn entorn
55 hora prima, & Gaz qued era mortz resuscitet. Li maistre e
cil tuh que lo ploravan agron moût gran paor e moût gran
meravilla, e non poc anc nulz hom mo(u)t sonar de la paor
qued agron. E domenz qued eil se meravillavan aici, Gaz diz
al rei Gondafre, son fraire : « Enten me, fraire. Aquest hom,
60 que tu volias far escortegar e cremar, es amix de Deu ; e
li angel de Deu li servon. Et eil li àngel porteron la mia arma
sus el cel e montreron me lo palais que Tapostolz Thomas
fa bastit sus el cel d'aital maneira con el t'a monstrat en
terra. Mas totz es fahg de peiras preciosas, de maragdes e de
65 jacinctes & de cerauneis ; et aici es estruh e dedinz e défera.
E domenz qued eu pensava la gran belleza qued avia le palais,
e li angel me disseron : a Aizo es le palais que Thomas Tapos-
tolz a bastit a ton fraire. » Et eu dis lur : « Per la mia volontat
eu séria portiers d'aquest bel palais. » Adonx me disseron li
70 angel : « Le tiens fraire s*es fah non dignes d'aquest palais; e,
si tu lo volz aver, nos preguarem nostre Sennor Jesu Christ,
|0 fil de Deu, qued el te fassa resuscitar; & tu compra lo de ton
fraire, e ren li totala peccunia qued el cujava aver perduda.»
E cant ac dih aizo, acomenset s'en ad annar ben tost vers la
75 carcer. Et intra laintre & vai se getar alz pes de Tapostol, e
pregava li que perdones a son fraire, car el non conoissia ni
sabia qued [14 v°] el fos apostolz. E vai penre aqui eis los
liamps de que era liatz, e pregava li que vestîs bos vestirs e
precios. Respondet sainz Thomas e dis : « Pensas te doux
80 ancara que cel, que vol aver las celestials causas, aia cura de
las terrenalz ni de las carnalz? Aquist mena gannacha & aquest
meus mantelz, que tu me vez aici, m'aondara pro, & aquestas
LEGENDES PIEUSES 289
sandalias ; car ja non saran usadas aitan con eu viurai. » E
domenz que Tapostolz eissia de la carcer, venc li acontra le
reis Gondafres*, e va se getar a sos pes, e pregava li que li 85
perdones. Sainz Thomas respondet : « Moût vos a donat le
meus senner Jesu Christ, car vos a deinnat monstrar los seus
secretz. Vec vos que vostra terra & vostras ciutatz son plenas
de gleisas. E vos appareillas vos, que sias sanctifiât & lavât
en Taigua de la font del sant baptisme, e sias fahg parzoner 90
del perpétuai règne. » Adonx dis Gaz : « Lo palais, que tu as
bastit a mon fraire, pregueron Fangel a nostre Seinnor qued
eu pogues comprar. » Respondet saint Thomas : a Aizo es en
la volontat de ton fraire. » Gondafres le reis dis; « Eu euh
qued aquel palais qued es fah per mos obs sera meus ; e Thomas 95
fassa en a te autre. E si far non t'en pot autre, d'aquest aurem
pro amdui. )) Sainz Thomas respon.let: « Eu vos voil far
conoisser e saber que li palais, que son bastit en cel, non an
nombre, e desTacomensament del mont en sa son bastit, e son
comprat per près de fe e de crezensa. E si vos voles aver las 100
ce-[15 r**]-lestialzriquezas,nil règne, ni lo palais, obs ha que lo
compre-» davan que moiras. Carja pois non lo poirias comprar.
Et aquel aver de que lo comprai'es a obs que lo doues alz
paupres & en servas los tribulanz & a ceiz que soffriran
desaize, alz malautz, a las vetzoas <k alz orphes, <k en pascas 105
celz qued auran fam, <k n'abeures celz qued auran set, & en
vestias celz que seran nuz ; & aici comprares lo palais. E sias
segur e cert qued aqui vos seran cent vegadas dobladas las
vostras riquesas, las qualz non auran jafin.» Li fama de
l'apostol eissi per tota la teira d'India. E saupron las genz 110
qued en la terra avia un home, que can pausava sa man sobre
los malautz, eran sanat : li cec recobravan lur vezer, li sort
lur auzir, los diabolz encausava, los mortz resuscitava. E
cujavan se totas las genz que fos Deus. E venian de totas
la ciutatz de la terra <S: aportavan li coronas d'aur e peiras 115
preciosas e rix vestirs, e volian los li vestir, & volian li sa-
crifiar bous & aretz, atressi con a Deu. L'apostolz quis al rei
Gondafre que se sufFergues un mes de batejar, entre que
totas la genz de la terra i fossan. Can venc a cap de trenta
' Ms. GondrafreSj avec la première r exponcluée.
20
290 LEGENDES PIEUSES
120 jornZf fou se acampat tan de gent, que non caupron denfra
vila, ni denfra nuil cu])crt. Can Tapostolz vi que non trobava
hom nuilla plassa en que poguessan caber, comandet q\i^ s^a-
campessan tuh en un camp de josta lo puhg de Gozi. E can se
foron tuh acampat, ac i mot [15 v"] malautz de diversas ma-
125 lautias. E fez los Tapostolz totz mètre ad una part. E cantlos
ac hom totz ajostatz, éi el se mes el meg d'elz, e dis: « Deus,
Seiiner, cui hom non pot vezer, 6i quedesnon prennevolz e
non mudevolz, c que totz temps es e totz temps seras, e que
nos tramesist lo tieu fil nostre Sennor Jesu Christ, enlu-
130 minador del mont, le qualz, can venc, donet a nos, sos
apostolz, que nos el seu nom tota dolor e tota malautia sanas-
sem, e dis nos: « Quodcnmque pecierttis Patrem in nomine
meo, prestahit vobis ; qualque causa que vos queiras al meu
Paire per me, el vos donara », per aizo eu te prec, Senner,
135 el seu nom, que trametas ad aquest malautz la metcina de la
toa majestat, que sane las malautias e las dblors e las febres
(raques. Alz cex sia renduz lur vezers, alz sortz lur auzirs.
Li clop sian redreissat e las autras diversas enfermetatz sian
encausadas de sobre cada un ; que totz le pobolz qued aici
140 es conosca que tu es Deus e non es autres deus te enfora &
uns Jésus Christ nostre Senner, per cui as fah tôt cant es,
zo qued hom pot vezer e zo qued hom non pot vezer ; & us
Sainz Esperitz enluminaire & sanctiûaire de tôt, et nunc et in
perpétua secula seculorum. » Cant tuh aquil qued eran ba-
145 tejat 6i esseiimat vespondevou: a Amen / », e lo venc una
resplandors sobre elz, talz que tuh cujeron esserferit de colp
de fouzer. Trastuh jagron essemps ab Tapostol a la terra,
ben una meja hora. Dreisset se Tapostolz, e cridet a totz :
« Levaz sus ! Car le [16 r»] meus senner Jesu Christ es ven-
150 gutz aici con fonzers, et a vos sanatz totz. » Eil leveron sus
tuh san, e glorifieron nostre Seinnor& Thomas, lo seu apos-
tol. Adonx pujet sainz Thomas en una peira, que los pogues
vezer totz e que tuh poguessan vezer el,e sennet lur que
fezessan pas, e dis lur : « Aujaz me tuh & entendes zo qued
155 eu vos dirai. Le meus senner, de cui eu soi sers, qued es
appellatz Jesu Christ, m'a trames a vos, & el a aquest pobol
visitât e curât de sa malautia. Eu soi hom, aici con us de vos
autres, trames ad aizo qued eu vos csseinne e que vos fassa
LEGENDES PIEUSES 291
partir d'aquestasydolas, que son senz entendement e senz tôt
sen, e que colas un creator vostre, qued es Deus sus el cel & que 160
vol sanartotz celz que creiran en el. Aujatz, horaee femenas,
enfant e donzellas, joven home e vergenas, veil e joven, & un
& autre, si voles venir a la vida durabla, crezes en un Deu, lo
Paire, lo quai anc nuilz hom non poc vezer, e lo sieu unial fil
nostre Seinnor Jesu Christ, per lo quai totas causas son fâchas, 165
per la voluntat del Paire, las causas qued hom pot vezer e cellas
qued hom non pot vezer, las celestialz e las terenalz; & el
Saint Esperit qued es non vezevolz e senz acomensament, aici
con le Paire e le Fils. E tuh très son d'una sustancia, e d'un
poder. Le SainzEsperiz enlumina las armas d*aquelz que cre- 170
zon en Deu, ab los qualz vos autri seres, si crezes en Deu, &
despoillas lo veil home ab totz sos fah, e destruies las ydolas
del [16 v° ] diabol e trastotas sas festas èi calcigas. Laissas
tenebras, que puscas trobar lutz ! Fuges mort et atrobares
vida ! Toiles vos de totz malz e totas blastemias. Si croire 175
voles en nostre Seinnor Jesu Christ, lo primer fruc aures en
vos, si ben crezes; lo segon, si vos fais batejar; lo ters, que
vos abstenguas de fornication ; lo cart, que non aias avari-
cia; lo quint, que aias poder en la gola, zo es que non vuillas
trop manjar ni trop heure, lo seize, que tengas paciencia; lo 180
seten, qued en aquestas obras observes especialment pacien-
cia ;roctau, qued albergueslospaupres ; lo noven,que veillas
saber qualz es li voluntatz de Deu & que aquella fassas ; lo
dezen, que demandes zo qued a Deu non plas e qued aco non
vuillas far; Tonzen, que aias xîaritat e non solament ab vos- 185
très amix, anz ab vostres enemix ; lo dotzen fruc aures, si
aves pensament con puscas gardar las riquezas de totas
aquestas vertuz. Car cel que mais ha de lascelestials riquezas,
plus las deu gardar, que non las perda. En aquestas dot-
zen vertutz es tota li perfections de celz que volon esser 190
coiedor del verai Deu. Aquest dons <k aizo que m'avias apor-
tat donas alz paupres. Car eu non soi Deus, anz zoi ben
sers de Deu. Et appareillaz vos con cada us vos batejes. » Can
venc lo ditmenegue aprop, & el los batejet; et ac n'i nou
niilia homes, deus las femenas elz petitz enfanz. Pois comandet 195
los a Deu Tapostolz, e moc se d'aquella terra, <k annet s'en en
la [17 r*] sobeirana India, per amonestament de Saint Esperit.
292 LEGENDES PIEUSES
Can le pobolz d'aqucUa terra vi las meravillas qued el fazia
e las vertutz, auzian raout voluntiers sa prédication. Car el
200 decassavalos diabolz delcors delz homes, raortz resuscitava,
cex enluminava, los lebros mondava, totas dolors e totas
enfermetatz decassavadelz cors delz homes. Esdevonc qued una
donna, qued avia nom Sinthica, qued avia estât seis anz cega,
recobret son vezer per l'apostol.Et venc ad una autra donna
205 qued avia nom Magdonia, qued era moût s'amigua & era moil-
1er del coinnat del roi. Aquist donna, quan vi Sinthica qued
avia aici recobrat son vezer, qued aici clarament & aici sana
era garida, e vezia ben, con si ja mal non i agues agut, et
acomenset a dir : « Aquest es verament Deus o angelz de
210 Deu, qued aici, senz tota medicina fa rendut ton vezer. »
Respondet Sinthica e dis : « Con ! E non a doux sanat mas
solament me? Quanz homes e cantas femenas e quanz enfanz
a sanatz de diversas malautias, el nom d'aquel qued hom
appella Jesu Christ!» Adonx dis Micdonia : « Pensas sija
215 lo poirai vezer?» Respondet Sinthica : a Deman deu far ser-
mon al pobol, e si te volz, poiras lo vezer. Muda ton ves-
tir e cobri ton cap, e met te entre las autras femenas, e ja
non seras conoguda. » Aquist Migdonia era moiller de Ca-
risi, coinnada del rei Misdeu, qued aici avia nom. Cant ac
220 mudat aici son vestir (k se fon [17 v°] messa enfre las autras
femenas, & ella venc aqui on Tapostolz predicava lo fil de
Deu. E dizia : « Aquist vida, en que nos autri em nat, es
mesquina e jaz per aventura, que can nos la cujam tener,
ella s'en fuhg e se part de nos. Aventura la nos toi subda-
225 nament, e ja pois non er acoseguda, tan fort s'en fug. E
per aizo venc entre nos li hitz del cel, zo es le filz de Deu,
que nos monstret & nos esseinnet autra vida, en la quai non
aura ja mort, ni dolor, ni gemiment, ni tristicia, mas toz
temps i a gauh & alegreza, e toz temps i es hom sadolz e
230 repletz, e totz temps i a clardat senz tenebras. Per aizo
trames Deus son fil en aquest mont, que los homes, qued
erant nat en mort, & fossan per aqui eis nat a la vida, et
fossan fah fil de Deu per la doctrina delz apostolz aquist que
son peccador e fil de peccadors. Car li fil delz homes mortalz
235 non podian esser fah non mortal, si per aigua hoc e per
Saint Esperit; e per aco son renat e son fah fil de Deu. Et
LEGENDES PIEUSKS 293
per aizo qued aquist prédications pusca esser crezuda, cel
que nos comandet aizo a predicar nos donet poder qued al
seu nom iliumenassem cex, rendessam auzir alz sortz, alz
clops annar, encausassem diabolz, mondassem lebros, resus- 240
citassem mortz, per tal qued totz hom conosca e digua que,
si aquist predicacions non era veraia, ja non fariam aquestas
meravillas ni aquestas vertutz. E per aizo, fil mei, hier & a sel
autre • fost appellat que li vostre cors sian sanat. Et hoi
avem establit, qued al metjament de la parau-[18 r°]-la de 245
Deu las vostras armas sian salvadas, cant auran receuput
la paraula de Deu. Car aici con li oil, que non recebon col-
liri, non podon esser sanat per metges, ni li malaut, que non
volon beure las poisons ni recebre los emplastres, non podon
esser curât per metges, en aici las armas de celz non podon 250
esser curadas ni sanadas per apostols ni per doctors, li quai
non recebon la paraula de Deu ni crezon la veritat, & de
tôt lur entendement non gardan castitat, ni se gardan de
glotonia & a\aricia non parton de lur, ni temon gravar
nengun homen , e que non s'esforsan d'auzir e de gardar 255
la paraula de Deu. Mas tuh aicil que gardaran aizo, lur
armas son "curadas e sanadas & acomensan a querre lo
conduh de la paraula de Deu, las qualz, davan que fossan
sanadas, non lo podian manjar. Car aici con li malautia del
cors non laissa Tomen carnal manjar ni recebre conduh, 260
aici li malautia de Tarma non la laissa sadollar de Tespe-
rital conduhg.. Car totz hom, que met s'amor e so senz en
Tamor de la carn, non pot amar en nulla manera Tarma.
Per que dis li antigua propheta : a Quoniam qui diligit iniqui-
tatem, odit animam suam. Car cel qued ama iniquitat, adira 265
s'arma. » Et dis àqui eis aprop : « Pluet super peccatores la-
queosignis. Sobre los peccadors ploura latz de fuc. » Aujaz
qualz es aquist ploja, & entendes las penas delz peccadors.
Vejatz la ploja qued es aiguadouza, que si vos es en un camp,
e plou, e non aves de que vos cobrias, moût vos er mal e 270
greu a sof-[18 v°]-frir. E pois qued er annat en una hora, o en'
un jorn, que faran aquil mosqui sobre los qualz caira totz
temps, senz fin e senz repaus, pluja de foc e de fouzer ?
Crezas que li peccador auran veraias penas en enfern, e li
just auran veraias riquezas el cel. Per aco son veraias, car 275
uu-rt,it t:t -il''!, i.tc '. '.i *="= i:ie-: la i::. r»« -^mjitîiaz» v^aai: es
miïin'..^ ''irî a- 1 «fi.i i:j'ï::t. * .ar / i:iM*r,. ^ ii« nii lizj e
Tirt»iri-»?i iiir.'ij* :;i::sïi>, :l'-::::^'■ ". 'j r? Ti'i».,..: *îi jo?irr^ Seaaoc.
2i>fi ■ t.; l'u!'! •■■.:k.l' .:ii:-'.' àl ■ '1 Tl:kL"' : À ::in î ••mOC *?* ati-
-I *n i. .'^i -li. s. :.''!. î :,.•* i. * y.'^-z'v^'' .: iii* fe.:^*:» penre l'upt^s-
v>i -i .11»*'/* *'i ui.i'L'. J::.: .n îtfi/i ..-r ."^ir; ^ M La aaecre en
.U.jr it>'.i:i " i ^•î j-ir.i.' i.j Te:» ie .'ini:sroL o: jtiooien^iC Lo- &
>r*'j.t.' X i ::.*^: t A:''»-:^ ie Z»fïi. ii ".à ir*:. vrar aer me
-forf/-..^ i.ii-r'', ' >.*'. . : t " i :.L.-.-*:i* - -a.r .;i .i-i :■* Z»e*i sobre ai^-n
Rx*^>-> iiirr* ."i;.:-^': : ; • T:7d.-L "rj. "L-r -^ii "a aiaisoa. car ea
2^/0 7-în 'lu . t. i ''^- ;-' : - .. 1-: i-i. . i. j - : .i:-?'ia^ rie ea volL «oc-
: ■:.' ;.•*? ai.i 7-.. :.:m- l. m. ^1 3.-:ai ir. .-nf i -i^nn-ic. e «^oaiL gran
:;•->•: ir .-.a .. :■:::-"» . i^ : i<. -t^ zi-i-^-t S-r 1:1.:. • Trsa CliriàT:. • Toraeî
^'>r. .. : :;.:::». ri*, i.i :l..K7:. >i. -^-ii.xiii *e ^1 sa '.'uaibra. «k. aco-
meri.^e': a .^r-ej*.^ 2. >*.*-ï Se-z.:.* c. i i^^^r : i Se.iaer Deas po-
2rf5 i'»r'js «i-î '.''A '\iAcr. i.*-' • \ -e^. 1: vil! ir-jiiM T.ioaLis Tapos-
W.z, fii rû>. peiCi ::•:.-. ;.ir-i.:r>eri ie ..i >.:a .i>:frica- ^ Can
V'>n^ a m-=:ja ri. h. -=: '.-'. .: i::-ir'r: .'lo-?*.:!: -ienint, e dis li :
t ML;i .riiâ, ai;*.* i::itr^.v-*. :-ir al_: -oa :!i venr^à per me a la
virià durahla. «^n aici vrrnrji ei 1^7 le al ceii seîaaor Jesa
y/> Ciihit per coroni ie mârtiin. .j C;^^.: o a-iz: Mljrdonîa ac gran
paor, ft'-iis: 'i I>jrr;on*Ta:rede la :Lra'..la .uniaera^eu te prec,
(\n^fl ai ;i con tu uber-T'iist los oara.i'.z oLz delz cer, en aici
a lohrias loi oi.z de la meua arma, qued eu pasea vezer e co-
noi.^iîer la via drecha, e non caja en la fossa. » Sainz Thomas
'*/)Ty f}\n 11 : H Kita set jornz en dejunis. ûc a i'ootau jorn eu Tenrai
a tfj e bateja: ai te, e 3agrarai le en i'oiiJa <lel saint baptisme,
e totz aquelz que creiran per te. >» Carisius, le eoinuatz del rei,
la cm seror avia le rei.s per moiller, preguet lo rei e dis:
« Senriftr reis, eu te preg^aria, si te plazia,que tu fessas annar
.'îlO vezer Mi^donia a ma donna la regina, per vezer si la poiria far
tornar a ho «en, ni a sa pensa. Car eu per pregueras, e per
mcnafli^as, e per prometemeus, e per amix, e per amiguas, e
< Sic. - » Mh. la .
LEGENDES PIEUSES 295
per vezis e per parenz, Tai pregada e fah pregar, & en nuUa
maneira non la pois far tornar a son leg, ni per nuilla razon
non la pusc far manjar ni beure ab me, ni neis non la pois 315
far esgardar en sa raeua cara. » Respondet le reis e dis :
« Annatz lai vos a vostra seror, e pregas Ten, & annara lai
voluutiers. » Annet Carisius a sa seror Trepicia, la moiller del
rei, & acomenset la a pregar e dis [19 v°] li: « Aniicdonia»
[li meua] moller, se part de me e non l'en pois tornar. Annas- 320
ses lai & amonestases la. « Annet la li regina & acomenset la
a pregar &. a dir : a 0 Amigdona, cara amiga e cara sorre, eu
te prec, si te platz, que tu laisses aquest fol coratge, e non
laisses las ^rechuras de ton maridatge, e non voillas annar
contra los deus ni contra ton linnatge ni contra Tarma de ton 325
mafit. Car le reis es moût iratz, e tuh tei parent e tei amie en •
parlan. Trastuh te plainnon e te queron e ploran, car tu tan
subtanament es cambiada ni eissida de ton sen. « Respondet
Migdonia e dis: « 0 tu, sorre Trepicia, si tu sabias zo qued
eu ai après, tu annarias ades vezer aquel home. Car li meua 330
amiga Sinthica, qued avia estât cega per moutz annz, a reco-
brat per el son vezer. E que te diria ? Li sort recobran lur
vezer* & a totz los malautz dona salut; los mortz resuscita e
torna a vida. Aquest monstra & esseinna qued autra vida es,
on ja non aura mort, ni ja non sentira hom dolor, ni aura hom 335
dol ni tristicia. E si non m'en crezes, can venc est' autra noh,
le filz del duc Sjmforus fon mortz, annet s'en Symforus a la
carcer, e près lo delz carceriers en sa fen, e menet lo a sa
maison ; e can la fon, fez sa oration, e resuscitet lo. Et ancar
es en la maison & esseinna toz aquelz qued intran laintre ad 340
el e cura las enfermetatz. » Respondet Trepicia: « Si en aici
es con tu dizes, annem ad el, e si eu vehg que vers sia ni o
pois provar, eu creirai en el. Folz es qui non vol aver vida
du ^ -[rabîa]
* Sic; corr. auzir.
* Ici s'ouvre une lacune de 2Q feuillets. Voir TintroductioD, p. 212. — Les
feuillets actue's 20, 21 et 22, comme on l'a déjà remarqué (ibid., note 2), ont
été déplacés et par suite mal foliotés; leur place véritable, qui leur a été ici
restituée, est après les folios actuels 4 et 5.
2 or, r.EiiExr.'ES pif: l' ses
XV
-xvr
wvir
EW.-SIO SANCTI SIMONIS ET SANlTI JUD.E'
- - 1 . • •
r2.*> r«' E ':ar;î fi^-ion lali i»a?, SLiinz Svmon acomenset lup
d'aital mariera u pîtrltr : a Sovennerament esdeven, seinnor,
5. que flenfra h'i-lz escri:;hs, cube: r 7. ri'aur e d'argent e de peiras
preciosas, son onc!a:i<as montas re< que non son profechaolz.
Et atressi esdeven que denfra en usas de fust, que son rilz e
vilment fâchas, ha montas bonris causas e preciosas rescos-
tas. Bel vjissel ?oIon esser |Ȕen montas vegadas de vinaigre,
10 e d'avol, c do tornat: et avol vaicel, de foras poirit e lag,
solon esser plen dedinz de hons vis. En aici o fan li homen
e las genz, car si eil non vezon las bellas personas e qued
hom sia ben vestitz non lo presan nuilla, e son i mont engan-
nat. C'ar si hom vol aver una causa, en tota manera^ deu
15 pcnsar con Taia. E per aizo li nostra persona ni le nostres
vilz vestirs non vos deu offendre ; car denfra nos ha aquel-
las causas que nos faran atrobar durabla vida. Trastuh nos
au tri fom nat. d'un [)aii'e e d'una maire, li quai, can foron fah
0 pausat on la région delz vins, transpasseron la lei quedavian
20 re'îouput rie lur creator, e foron fah serv de cellui oui crezeron
por sons ainonestamenz. Pois foron getat d'aicella région delà
durabla vi(laô:foron mcseissillaten aquesta terra. E Deusesta-
bli en aquesta partida d'aital manera la soa misericordia alz eis-
. sillaiz, que totz hom que colria son creator, aicel angelz ene-
25 uiix non li pogues nozer. Aquest malz angelz ha 0 fah en aici,
qued el fa adorar alzfolz homes las ydolas,pertal que los [23 v**]
^ Ms. vKint'tas ; mais Vs est pxponcluée.
-«.
LEGENDES PIEUSES 297
fassa partir de lur creator, & adoran los elemenz, e dizon a
la peira & al fust : « Dens meus es tu. Tu es le meus Deus. »
Cant hom s'es partitz del |seu Deu, & el sec la error, & es
obediens a son enemic. Aquest angelz , princes d'enveja, 30
noiris per aizo aquesta error elz homes, qued el pusca esser
lur seinner & fassa d'elz aizo qued el se voira ; car le verais
Deus, lo quai temp aquest angelz malignes, non esab elz.E per
aquesta causa aquest angelz, per aques encantadors seus, a
vos fah estar mutz, aitant can se vole ; c pois fez vos estar 35
que non vos poguest moure ni annar, pois que non poguest
vezer; & aici per aquestas falsezas enganna los homes. E per
zo que vos sapias e i>roves qued aizo es vers, aici con nos o
dizem, venes a nos, e prometes nos a partir d'aquellas follas
ydolas, e coles & adoras solament lo verai Deu viu, le qualz 40
non pot esser vist per los carnalz hoilz. Et cant aures aizo fah,
nos vos pausarem las mas sobre vostres caps & farem vos lo
seinnal de Christ en vostres fronz ; e si non los confondes,
sapias & entendes qued escarnitz vos avem. » Adonx tuh aquil
qued eran aqui saupron qued aquist paraula era vera ; e van se 45
getar alz pes delz apostolz e disseron : « Vos o fais de guisa
que non nos puscan nostras lengas liar, ni nuilencobolament
mètre en nostres menbres. E li ira de Deu venga sobre
nos, si nos jamais crezem las ydolas ! » Adonx acomenseron
ad orar 11 apostol e disseron : « Senner, Deus d'Israël, qued 50
en-[24 r**]-vanezist los encantamenz elz enfeinnemenz de Jam-
iies e de Mambres, e fezist los tornar en confusion, e fezist
iiaiscer en lur carn nafras & poiriguer, en aici vengua li toa
ira sobre aquelz encantadors. Et aques sers tiens, que se pro-
méron partir de colre las ydolas, fai fortz e permanenz encon- 55
tra aques ; que tuh conoscan e sapian, que tu es Deus poderos,
& non es autres mas solament tu, que reinnas m secula
seculorum. Amen, » Cant tuh ensemps agron respondut :
« Amen », feron tuh cros en lur fronz &. anneron. Vengron
ensemps ab lo duc davan lo rei ; e foron i atressi li encanta- 60
dor, e volgron o atressi far d'aques con o avian fah a Tautra
vegada ; et en nuil sénz ni en nuilla manera far non o pogron.
Uns d'aquelz sapis, qued avia nom Zebedeu, acomenseta dire:
«Reis, aquist dui son merdas, e deuria los liom getar d'aquest
tieu règne ; car paors es qued alz homes non engenron poi- 65
é
298 LEOIîNnKS IMKUSKS
riguer. Eil han ensemps ab lur Taugel, qued es eiiemix de
l'aman linnatgc ; cV ab aquol escarnisson los homes, los qualz
aquel malz angelz pot aversubjocs, per zo car non volon esser
siibjec a! podorosDcu. Anz volon aver per Deu celz cui eil
70 gardan, zo sun las ydola^s, las (jualz non los podon gardar ni
doftendre de nuilni:il. E per aizo, reis, tlizian aquist encanta-
dor que 11 apostol adorossun las jdolas, qued aquel malignes
angelz los agues on son i)oder. Et eil, li apostol, an nos fah
lo signe de lur [2i v°] Deu en nostres fronz & an sai nos
75 trames e disseron nos, que si cil nos apoderavan aprop aquest
signe, qued tôt aizo, «jued eil nos avian esseinnat ni dih, era
mesonega. E vec vos quod el nom de Deu nos los cofondem. »
Trastoz le pobolz, qued era aqui acampatz, cridavan sobr'elz e
dizian : « Ara fais, si podos, zo que fezest her ! d Can li encan-
80 tador auziron aizo, foron moût irat e non se volgron partir de
lur engan ni de lur bauzia. Et a ici con eran fugit d'Ethiopia
davan la faz de saint Matheu Tapostol, en aici fugiron davant
aques dos autres apostolz. Et anneron per la terra de Persida,
& venian alz temples e movian enemistatz antre los coledors
85 de las ydolas encontra los apostolz, e dizian : « Dui enemic
de nostres deus venran a vos aici ; e si .voles aver ad amix
nostres deus, constroinnet los, elz forsas que lur sacriâzen e
los adoren ; et si non o volon far, aucizes los. » Aquist en-
cantador annavan per totz los temples, e fazian lur sacriâzes
90 alz fliabolz; e fazian subdanament los homes liatz, e desliatz; e
fazian los cex, e per aqui mezeis vezer; e fazian los mutz, e
per aqui mezeis parlar. Li apostol esteron en la ciutat de
Babelonia per amonestament del rei, & aqui facian moutas
miraclas e montas meravillas. Eil avian moutz discipolz-, &
95 avian*' delz uns preveires, e delz autres diaques ; & aquil ser-
vian las gleisas qued eil avian bastidas&enstruchas. Esdevenc
qued ad un d'aquelz diaques, qued eil avian adordenat, mes
hom un gran blas-[25 r°]-me de sobre. Aquest diaques era vezis
d'un rie home. Et aquest rix hom avia unafilla mont bella. Et us
100 jovens hom de sa vila avia li tout sa vergenitat, & avia la
penreinnada. Can venc al jorn que dec enfantar, e sas dolors
la meneron, e lo venc sos paire e sa maire, e sei anaic, e
* Suppl. adordenat?
LEGENDES PIEUSES 299
demandavan li qui Tavia enpreinnada. Ella respondet e dis
lur que le bons hora, le diaques Eufrosinus, Tavia enprein-
nada. Cant 0 auziron li paren, foron moût irat & acomenserbn 105
acermar con presessan venjansa d'aquest. Venc a saber aizo
alzapostolz; e cant o saupron, anneron alz parenz de la don-
zella. Can le paire e li maire viron los apostolz, acomenseron
•se moût fort clamar d'aquest diaque, & fort ad encusar & a
dir qued aital blasme avia fah & aital lajeza. Can li apostol 110
o auziron, acomenseron lur a demandar amdui cora era natz
Tenfas.Responderon li parent e dissseron : « Hoi nasque(s)t, la
primera hora del jorn. » Disseron li apostol : « Aportas l'en-
fant & adduzes lo diaque, cui encolpas. » Can foron tuh
ajostat denant los apostolz, et eil demanderon : «El nom 115
de nostre Sennor Jesu Christ, parla, enfas, e diguas si
aquest diaques t'a engenrat, ni ha fâcha aquesta eniquitat. »
L'enfans pnrlet & respondet moût espertament e dis : « Iste
diaconus vir sanctus et castus est et nwnquam inquinavit car-
nem suam, Aquest diaques es lo sâinz hom & castz, & anc non 120
bautuguet sa carn.» Can li parent o auziron, pregavan [25 v°]
los apostolz que li demandessan quin'era colpaolz ni de cui era
el* Tenfanz. Responderon li apostol e disseron : «A nos autres
conven que solvam celz que non son colpable, e non coven
mingua que destruiam cel[zj qued auran colpa. » 125
Can venc autravegada, le reisannetenbatailla,&adun amie
seu, un rie home qued avia nom Nicanor, nafret hom en
sogenoil ab una sagitta, la quai nuilz hom, per art niper gein
qued agues, traire non la li poc, & essageron s'i moût home.
Fez hom venir saint Symon Tapostol, et en eis pas qued el 130
toquet ab la man la sagetta el nom de nostre Seinnor Jesu
Christ, e li sagetta va fora & aqui eis fon aici sanatz e garitz,
que neis li plaga non li fon aparvent. Esdevenc per aqui
mezeis que doas malas tigres, qued hom ténia enclausas en
cavas desotz terra, s'escaperon; e tôt cant atrobar podian ni 135
aconsegre, tôt devoravan e destruian. Venc totz le pobolz et
tota li genz, & anneron alz apostolz, e disseron lur: « Sein-
nor, soccoretz nos, car las tjgres nos devoran e nos man-
jan.» Can li apostol o auziron, anneron s'en la on estavan las
1 Dans rinterligne, au-dessus de ra.
300 LEGENDES PIEUSES
140 tygres, e comanderon lur el nom de nostre Seinnor Jesu
Christ que los seguissan en la maison on eil estavan; e feron
0 et esteron ab elz très jornz. Can venc a cap de très jornz,
feroh venir tôt lo pobol aqui, e disseron : « Aujatz, vos autri,
fil delz homes, qued es fahg a la image de Deu, et alz qua'z
145 Deusa donatengein e memoriaeten-[26r°]-tendement! Regar-
das vos ad aquestasbestias salvatgas, qued anc mais non pogron
esser domptadas; et aras, cant auziron lo nom de nostre Seinnor
Jesu Christ, son tornadas plus domesteguas qued uns ainneiz.
E li home son endurzit en tan gran follia, à. en tan granz
150 tenebras, qued eil non podon conoisser que las ydolas, que
son fâchas per agin d'omen d'aur e d'argent e de peiras e de
fust, non sian lur deu. Aquel Deu que vos a fah e creatz,
aquel non conoisses, le qualz vos dona la ploja del cel & vos
fa eissir lo pa de la terra, e lo vin e Foli de las soccas del
155 fust. E per zo que vos sapias qued el es vers Deus, aquestas
tigres vos estaran en garentia, que per aquesta manera vos
amoneston que vos non colatz ni crezas autre deu, mas nos-
tre Sennor Jesu Christ, per lo cui nom aquestas bestias son
fâchas soaus, & estaran e conversaran el mei de vos autres,
160 aici con fedas, e lo seras ellas tornaran en lur maisons. A nos
autres coven a predicar perlas ciutatz e per las terras, qe
li prédications de Favangeli de nostre Seinnor Jesu Christ
posca esser connoguda. » Totz le pobolz, cant auziron qued
annar s'en volian, acomenseron moût fort a plorar, e prega-
165 van lur que non se partissan d'aqui. Li apostol, can viron la
volontat del pobol, e que tan fort los pregavan, remaseron
un an e très mes. Et en aquest meja batejeron ben seissanta
milia homes, estiers los petitz enfanz e las femenas, si que,
bate-[26 v°]-jat primerament lo rei ab tota sa mainada, ab sa
170 moiller 6: ab sos enfanz 6c ab totz sos rix homes, car eil
vezian que solament per para.ula curavan totas las enferme -
tatz, los cex illuminavan, elz mortz resuscitavan el nom de
nostre Seinnor Jesu Christ, tuh li pobol eran tornat a la fen
de Jesu Christ, & destruian los temples de las ydolas, & bas-
175 tian gleisas.
Li apostol adordeneron en la ciutat un evesque qued avia
non Abdiam, le qualz era vengutz ab elz de la terra de Judea,
e qued avia vist nostre Seinnor Jesu Christ carnalment ab sos
LEGENDES PIEUSES 301
oilz. E tota li ciutatz fon adimplida de gleisas. E can H apostol
las agron adordenadas aici con degron, aiineron s'en per las 180
terras predicar la fe de Jesu Christ; e seguiron los ben dozen
discipol o d'aqui en sus. Et annavan per las terras de Persia e
predicavan pertotas las ciutatz e per totz los castelz, e cover-
tiron moutz pobôlz et torneron a la fen de Jesu Christ. E tôt
can feron e totz los malz e las penas que sofergron, Craton, 185
us lur discipolz, o escrius en des libres, en lengua d'ebraic.
E pois uns bons clergues, qued avia nom Affrican, translatet o
enaquesta nostra lengua latina, êtes moût 1 on ga narrations.
Mas nos avem en près breument. Car totz hom que voira saber
Tacomensament de lur prédication ni la fin, con li saint 190
apostol laisseron aquest mont ni transpasseron alz celestialz
palais, aquist breus legenda que nos avem tracha de tan gran
libre loi monstrara e loi esseinara.
Li [27 r°] encantador que nos vos aviam dihs de sobre, Zo-
roes & Arfaxat, fazian lur lajezas, per las ciutatz e per los 195
castelz, e dizian qued eil eran del linnatge delz deus, e fugian
ades davan los apostolz, & estavan tan en cada una ciutat, en-
tro que sabian que li apostol i devian venir. Li apostol, en
qualque ciutat qued intressan, descobrian los lahg fag delz
encantadors, e demonstravan que lur doctrina avia atrobada 200
le diabolz, enemix de Tuman linnatge. Vengron en la ciutat
de Suasis, en la quai avia setanta evesques del[z] temples, on
eran las y'dolas que colian en lue de deu. Aquist evesque fazian
quatre granz festas Fan de la jdola del soleil : a Tintrar d'es-
tiu en fazian una, & a Tintrar d'hivern en fazian autra, & a 205
rintrar de primavera autra, & a Tintrar d'auton autra; & a
cada una festa, le reis donava a cada un evesque una liura
d'aur. Ab totz aques evesques avian parlât li encantador, per
tal que moguessan contraria alz apostolz, e disseron lur : c Dui
Ebreu venran aici a vos, que son enemic de totz los deus, et 210
acomensaran a predicar qued autre deu deu om adorar, e non
lo vostre. Et aqui eis creira los hom, e tolra vos hom tôt cant
aves, 6 getara vos hom foras a cent diabolz. Parlatz ab tôt lo
pobol, qued, aqui eis cant intraran en aquesta ciutat, hom los
prenna elz fassa hom sacrifiar alz deus. E si adorar ni sacrifiar 215
lur volon, aian pas ab vostres deus. Si far non o vol[on], ben
sapiatz qued eil non son [27 v°] vengut mas per vostra mort e
par vostre destruiement. »
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LEGENDES PIEUSES 303
a la corona del martjri. » Aizo auzian e vezian solament li
apostol, e li autri qued aqui eran non sabian ren, &. li evesque
cochavan los ades d'azorar las ydolas del soleil e de la luna.
Adonx lur disseron li apostol: « Fais far pas, qued auja totz
le pobolz lo respons que nos vos farem. » E can se foron tuh 2ôO
calât, e li saint apostol disseron : « Aujas trastuh e vejas ! Nos
sabem certamenz e conoisseni que le soleilz es creatura de
Deu, e li luna es atressi en sa subjection ; e sabem ben que
sus el firmament del cei estan, e séria granz torfz si vos autri
los enclausias saintre en aquest temple, li quai nos donan 265
gran clardat de sus del cel. E per zo que vos autri [28 v°]
conoscas e sapiatz qued en aquesta ydola non es le soleilz ni
li luna, anz son amdoas plenas de diabolz, eu comandarai al
diabol, qued es en la ydola del soleil, & mos fraire comandara
atressi ad aquel qued es en la jdola de la luna, qued escan 270
foras, e cada uns atressi la soa^ » Can le pobolz auzi aquesta
paraula, meravillet se moût. E va sanz Sjmonz, & acomenset
adir a la jdola del soleil: « Eu te comant, escarnire d'aquest
pobol, fêlions diabolz, que tu escas d'aquesta ydola del soleil,
& espessa la, e la carreta en qued esta atressi.» Can Judas 275
ac dih atretal a laydola de la luna, e lo eissi de cada una le
diabolz, vezent tôt lo pobol, en forma de dos sarrazis nuz,
raout nègres e moût fers, & ab horrible esgardament, e cada
uns vai penre sa ydola, en que estava, & frais & atrisset
trastot canmalay ac, ab granz bramps, <k ab critz que fazian. 280
Adonx tuh ensemps li evesque corregron sobre los apostolz
& aucizeron los. E domenz qued eil los aucizian, el eran ale-
grae e gaujos, e rendian gracias a nostre Seinnor Jesu Christ,
quar eil eran digne de recebre mort per lo seu nom. Eil
receupron passion drehlojorn delà caleuda dejuil;efon 285
atressi martirizatz ab elz Sennetz,lur estes, car non vole sacri-
fiar a las ydolas. En aquella hora, can foron martirizat, era
le celz moût serens e clars, e vengron subtanament fouzer e
fox de cel, e feriron el temple, e fenderon lo tôt, des amont
entro aval el fondament. Aquelz encantadors, Zoroes et 290
Arfaxat, feri le fouzers, e cremet los totz,e foron tor *-[nat]...
(A suivre.)
* Sic; manque le verbe {espesse ou fraissa?)
* Lacune de deux feuillets. Voir riiitroduction, p. 212
BIBLIOGRAPHIE
Chrestomattaie de l'ancien français (IX^-XV<> siècles), précédée d*iin
tableau sommaire de la littérature française au moyen ftge et
suivie d'un glossaire étymologique détaillé. Nouvelle édition soi-
gjiewtemoit revue et awjmeiitée avec le supplément refondu^ par L. Coos-
lans, professeur à la Faculté des lettres d'Aix. Ouvrage couronné par
l'Académie française. Paris, Bouillon, 1890; in-S®, XLvn[-497 p.
Nous avons déjà loué ici comme il convenait la première édition
et \q Supplément (Xe, la Chrestomalhie ; nous ne voulons aujourd'hui
qu'annoncer l'édition nouvelle. Tout d'abord, le Supplément a été
fondu dans l'ouvrage primitif, de sorte que chaque texte à étudier est
maintenant accompagné de ses notes et que les plus difficiles sont
immédiatement suivis de leurs traductions ; seules, les vai'iantes,
auxquelles ne s'intéresse qu'une certaine catégorie de lecteurs, ont
été rejetées à la fin du recueil. Mais M. Constans ne s'est pas contenté
de réunir les deux parties de son travail, il a tenu à les améliorer.
Aussi a-t-il ajouté un millier de vers environ, pour mieux faire connaî-
tre les genres littéraires les plus importants ; le glossaire et les notes
ont été soigneusement revus et complétés ; quelques textes ont été
améliorés, grâce à de nouvelles publications, comme les extraits de la
Chanson de Roland de AL. G. Paris, la deuxième édition du Voyage
de Charlemagne à Jérusalem de M. Koschwitz, le Cligès de Chrétien
de Troyes, publié par M. Fœrster. Deux morceaux surtout sont faits
pour piquer la curiosité des romanisants : un fragment du Roman de
Troie que M. Constans a essayé de reconstituer d'une façon critique
d'après tous les manuscrits (n<* XVI), et un extrait de l'édition criti-
que du Roman de Thèhes à laquelle M. Constans travaille depuis si
longtemps (n» XVII).
Nous souhaitons de bon cœur une troisième édition à la Chrestoma-
tliie de M. Constans, sûr que ce travailleur infatigable saura encore
ajouter quelque mérite à un ouvrage utile et excellent.
E. R.
Le Gérant responsable: E. IIamelin.
LÉGENDES PIEUSES
EN PROVENÇAL DU XIH° SIÈCLE
(Suif-eJ
[XVIII]
[PASSIO SANCTI ANDREA]
[29 r°] Pois sainz Andreus tornet s'en en sa région don era
niogutz. Can veftc un jorn, & el annava per la vila e sei discipol
aiinavan ab el, & venc li uns cex e dis li : « Andreu, apostol
de Christ, eu * sai ben que tu me pos rendre vezer ; mas eu non
lo voii recobrar, entro que tu m'aias fah donar ad aques, que 5
van ab te, tan de lur peccunia, de qued eu pusca totz temps
mais aver vestir e causar e manjar e beure.» Respondet sanz
Andreus, e dis : « Ben sai veramenz e conosc qued aquist vos
non es d'orne, anz es ben del diabol, le qualz non laissa ad
aquest home recobrar son vezer. » Et ab aitan gira se deus el 10
& toquet li sos oilz; e recobret son vezer, e glorificava nostre
Seinnor. Sos vestirs era moût veilze raout avolz, e dis Tapos-
tolz : « Tollez li aquestz vestirs horres, e donaz los li totz
nous. » E domenz quedhom lo despoillava, e lo disl'apostolz:
0 Aitalz vestirs con obs li son, aitalz los li donatz. » E feron 15
o. E cant ac son vestir receuput, annet s'en a sa maison,
gracias rendons a nostre Seinnor.
Uns delz plus rix homes d'aquesta ciutat, eu qued era sainz
Andreus, avia un enfant, cui amava aitant con hom Tama can
non n'a mas un. Venc granz malautia ad aquest enfant, e 20
mori. Aquest rix hom, Demetri qued avia nom, paire de Ten-
fant, auzi las meravillas que sainz Andreus fazia.Venc ad el e
getet se a sos pes & acomenset moût fort a plorar, e dis :
i Ms. fu.
TOME IV DE LA QUATRIÈME SÉRIE. — JuiUet-Août-Septembre 1890. 21
306 LÉGENDES PIEUSES
« 0 ministres e messatges de Deu, eu me fiz moût en te. Vec
25 te qued uns meus enfans, oui eu amava aitant, es mortz ; e
prec te eu, si le teus plazers es, que tu vauguas [29 v*] a la
mia maiso, e que lo me rcndas. » Cau sainz Andréas auzi aizo,
ae en pietat, et anuet s'en ab el en sa maison, on Tenfans jacia
mortz. Et can fon laintre, acomenset a predicar zo qued aper-
30 ténia a lur salut. Ecant ac ganren prédicat e dih, giret se
deus lo leg on jazia Tenfans, e dis : « 0 tu, enfans, eu te die,
el nom de nostre Seinnor Jesu Christ, que tu vaugas sus
sans (k alegres. » Et en eis pas Tenfans se levet sus sans et
alegres, (k rendet lo a son paire. Gant aquil qued eran aqui^
35 non crezent, viron aquesta meravilla, crezeron en nostre
Seinnor e feron se tuhg batejar a Tapostol.
Can venc autra vegada, venc ad el uns enfas christians, qued
avia nom Sustrat, & dis li eu secret: « Seinner, ma maire s'es
adautada de me e volria qued eu jagues ab ella & a m'o dih.
40 Eu, cant o auzi, ac dol e vergoinna ; & respondei 11 moût ma-
lamenz, e soi m'en fugiz. Ella, cant o auzi^ fc^n moût irada; et
es s'en annada al jutge, e cuja tornar lo blasme desobre me.
Et eu am mais esser mortz qued eu descobria ma maire« Et
eu die te aizo en celât, que tu pregues nostre Seinnor per me,
45 qued eu per aizo non moira. » E domenz qued el dizia aizo a
saint Andreu, vengron li metssage dcl jutge, e van penre
Tenfant. Sainz Andreus fez sa oration, e can Tac fâcha, vai
penre Tenfant per la man, & annet s'en ab el. Sa maire estava
denan lo jutge à: accusava ades Tenfant, e dizia : « Seinner,
50 aquest avia oblidat la pietat de [30 r°] sa maire, e volia se tor-
nar ^ si qued apenas m'en pue desliurar.» Adonx disle jutges:
« Diguas, enfas, es aici vers con o dis ta maire ? » Le tozetz
de vergoinna non volia respondre. Le jutges demandava li
per aqui meseis, e li demandava & el non volia ren respondre.
55 Le jutges, cant o vi, demandava conseil qu'en poiria far. Ma-
ter autem pueri cepit flere, Li maire del tozet plorava. A la
quai sanz Andreus acomenset a dir : a O tu, femena malas-
truga, que getas los plors d'amareza per lo blasme que volias
far far a ton fil, e li toa cobezeza ha te tant enpencha, e ta
60 luxuria te crema tant, que tu non temes far aucire aquest fil
tieu solet ! » Domenz qued sainz Andreus dizia aizo, li femena^
1 Sic, — * Ms. f émana.
LEGENDES PIEUSES 307
respondia : « Escouta me, seinner jutges. Pois que le meus
filz vole far aizo e non poc, mes se ab aquesthome & anc pois
d'el non se partie. » Le jutges, cant auzi aizo, fon mot iratz,
e comandet qued hom li lies los pes e las mas, el meses hom 65
en un sac, et que lo getes hom en un fluvi. E saint Andreu
comandet qued hom meses en una carcer, entre que s'agues
pensât a quai mort lo poiria far morir. Ab aitant sainz Andreus
acomenset a pregar nostre Seinnor, & en eis pas tota li terra
se moc, e venc uns moût granz trons, si que le jutges cadec 70
de la cadera e trastuh li autri cadegron a terra. Venc fouzers,
e feri la maire del tozet & fon morta. Le jutges, can vi aizo,
[30 V®] vai se jetar alz pes de Tapostol, e dis : a 0 tu, sers de
Deu, aias merce de nos autres que non periscam, ni li terra
non nos deglutisca ! » Ab aitant Tapostolz acomenset ad orar, 75
e li terra, que se movia,e li fouzer e li tron remaisseron. Sainz
Andreus annet entorn aquelz que jacian a la terra dimei mort,
per los colps delz trons e del[z] fouzers, e fez los levar sus sans
& alegres. Le jutges receup la paraula de Deu e crezet en
Jesu Christ ab tota sa mainada, & Tapostolz batejet los totz. 80
Esdevenc qued en una autra ciutat avia un rie home,
qued avia nom Grati, & aquel rix hom avia un fil, e domenz
qued aquel filz se bainnava una vegada eil bain on se lavavan
las femenas, intret li le diabolz el cors, e perdet lo sen, e
tormentet lo le diabolz moût malamenz. Va Gratins e fez far 85
una carta, e trames la ad aquest jutge, que, si ad el plazia,
pregues saint Andreu que vengues entre ad el. Et el mezeis
Gratis era mot malautz de febre, e sa moiller d'una autra
malautia, qued hom appella jdropysi. Annet sainz Andreus
per lo prec del jutge, e pujet en una bestia e tenc ad aquel- 90
la ciutat, e venc a la maison d' aquest rie home Grati ; et
aqui eis cant intret laintre *, le malz esperiz acomenset moût
fort a tormentar Tenfant. E vai se getar davan los pes deTa-
postol. Sainz Andreus acomenset a menassar lo diabol,e dis:
<c 0 tu, enemix de Tuman linnatge, part te d'aquest famol de 95
Deu I M Et en eis pas, cridan e bramant, parti se d'el. [31 r°]
Pois venc s'en sainz Andreus al legh on jacia Gratins, e dis
li : « Polz es. Gratin, car per gran drehg t'es venguda aquist
Ms. laintretf et, après ce mot, laintre, biffé à Tencre rouge.
308 LEGENDES PIEUSES
malaatia, qae ta desamparavas lo leg de ta moiller, & aiina-
100 Tas jacer ab putas. Leva sus el nom de nostre Seinnor Jesu
Christ. 6i sias sans ; e non voilias d^aici adenant peccar, per
tal que non cajas en major malautia. » Et en eis pas el fon
sans 6i alegres. Pois annet s'en aqui on jacia li donna, e dis
li: (( 0 tu, femena, li cobezeza de tos oilz t'a deceupuda;
105 car tu laissavas ton marie e mesclavas te ab autres. » £ pois
acomenset a pregar, e dis; a 0 tu, Seinner Jesu Christ, eu
prec la toa gran misericordia que tu m'aujas e veillas que,
si aquist femena a corni voluntat de tornar el peccat, queda
fah sa en reirc, ja non sia sanada ni guarida; car, Seinner,
1 10 per lo gran poder tieu conoisses las causas que son ad avenir;
e si ella se pot tener d'aquest peccat. qued ella sia sana e
salva. » Domenz que Tapostolz dizia aizo, ella fon sanada de
sa malautia. E va penre sainz Andreus de pan. e frais lo, e
donet Teii a manjar el nom de Deu. Ella receup lo, éi lenilet
115 gracias, e crezet en nostre Seinnor ab tôt son alberc. E d'aqui
enant ella ni sos maritz non torneron el peccat. Pois Gratis
trames per sos sers (pois) gianz dons a Tapostol. Et el mezeis
e sa moiller anneron la, e geteron se a sos pes e pregavan li
que preses aquel aver. Respondet sainz Andreus, e dis: « Eu
120 non dei mingua recebre aizo ; car non o dei far ; mas major-
ment aperten a vos qued o dones alz paupres. [31 v°] Et anc
ren non vole penre de zo que li aportavan.
Pois annet s'en sainz Andreus a la ciutat de Nicea, on
estavan set diabol en un cementeri, entre los sépulcres del[z]
125 homes mortz ; et era aquest cementeris de josta una via peron
hompassava. E can venia entorn mehg jorn, celz que passa-
vau per aqui lapidavan, & aiicizian en ganres. Can saupron
en la ciutat que sainz Andreus i venia, totz le pobolz eissi li
encontra ab ramps d'olivers, lauzant nostre Seinnor e di-
130 zent: « 0 tu, hom de Deu, tota nostra esperansa e nostra
salutz es en la toa man. » Et esposeron li tôt Tafarper orden,
aici con li diabol o fazian. Can Tapostolz o auzi, & el lur dis :
« Si vos crezes en nostre Seinnor Jesu Christ, lo fil de Deu,
e lo Saint Esperit en un Deu, vos seres desliure -per la soa
135 aj'ifla d'aquest engan que vos fan li diabol. » Eil acomenseron
tuh a cridar et a dir : « Tôt cant tu nos predicaras, tôt crei-
rem, & obedirem alz tieus mandamenz, sol tan solament nos
LEGENDES PIEUSES 309
desliura d'aquesta persécution. « Ab aitan sainz Andreus ren-
det gracias a Deu, per la fe qued avia atrobada en elz, e co-
raandet alz diabolz que venguessan aqui davan tôt lo pobol, 140
e vengron en semblansa de cans. Giret se deus olz Tapostolz,
e dis : « Vec vos los diabolz que vos an fahg tanta contraria.
E si vos crezes qued eu los pusca ostar de sobre vos, el nom
del raeu seinnor Jesu Christ, manifestas o aici davan me. »
Ab aitan acomensan tuhg essemps [32 r°] a cridar : « Nos cre- 145
zem que Jésus Christ es filz de Deu, lo quai tu predicas. »
Adonx coraandet sainz Andreus alz diabolz, e dis lur. «Annatz
en lux sex & non fructifiaolz, e jamais non vos appropies de
nuil home, ni mal non lur fassas, ni jamais nonvenguasen lue
on hom me [njtauga lo nom de nostre Seinnor Jesu Christ, en- 150
tro al jorn del juzizi, que recebres lo torment el fuc d'enfern
e vostre guizardo ! » E cant ac aizo dihg Tapostolz, li diabol
acomenseron moût fort a rugir & evanuiron davan los oilz
d'aquelz qued estavan aqui. Et aici li ciutaz fon desliura delz
diabolz. E feron se trastut batejar a Tapostol. E pois establi 155
lur gleisa & adordenet lur evesque, qued avia nom Celestum,
moût sapi home e moût bon homen, e que lur esseinnet pois
fizelment la doctrina de saint Andreu.
Pois cant o ac adordenat, tornet s'en a la ciutat de Nico-
media. E can fon a la porta de la ciutat, e vec vos qued hom 160
aportava un mort sus en un lehg, e seguia lo moût granz
pobolz, e SOS paire qued era tan veilz que non podia annar,
e suffria Tom de sa e de la enfre lur bratz, car a penas podia
seguir lo cors. Sa maire era atressi d'aquesta eissa état, e
seguia lo plorant e tirant sos cabeilz, e dizia : « Eu, mes- 165
quina, per que ai tan visent qued eu veja sebelir lo meu fil ?
Moût estaera meilz, qued el me vis sebelir. » Cumque hec et
his similia [32 v°] deplorando cadaver vociférantes prosequeretur,
ad fuit apostoius Dei, condolensque lacrimis eorum ait» Domens
que li donna dizia aizo e seguia aprop celz queploravan, esde- 170
venc que Tapostolz fon vengutz aqui & ac pietat, can los vi
aici plopar, e dis: a Baron, eu vosprec que vos me diguas que
esdevenc ad aquest, per que sia mortz. » Can aquil qued eran
aqui auziron aizo, agron granz meravillas, e li servent respon-
deron, cil qued eran de Talberc, e disseron : « Domenz qued 175
aquest se jacia soletz en un leg, vengron subtanamenz set
•7
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vTj^a,^ i*-. i--** II-*: : T*-L'-ti :L.it*»:a sk -ssm-: ie js j~£oïa* e tor-
-.•^r.-arjt. vi^ ,uti:« 1:1 fLia «l'i;»»" & 3L':'rLiiLi^ per la loa
yrMzrxr, yi.^\^z. iTir^-irir -^-■::i iiracli. t El<!:$94»LierMi tru-
'izr. : ':^î r*^ c Ax.-*« . i Z." siz.: irroa ri«>«Mii«î. lornet se
-é^i .0 .Tisr:, •* iu : t £ -:ai ii Jri-^ri rart*;:. te eotmaint eu
!^, ç-î^ i*T« \z.^. : À *T'«i *:'".?* *o-i :«r*. » En *a eiâ pas el leTet
f^r'i^l^a .'j i«::i^ »e:^ As.:?-»?!*. ^ Le p*îre e 1 maire doneron a
iefan xti'^nK çrr^riz ^ons. a lar dl. r^aei ap>?rte4 a Tapostol; mas
2^/> «1 non To*c naii^a reo penre. Maâ a Teniaziï oonoandet que lo
nej^i» À annes ab el entro a Mace-loaia: & esâeinnet lo Âc
eatmi» io de ia fen de Jeaa Christ.
Moc .96 d*aqai sainz Andréas de intret en ana nau, e vole
annar en Bizanti. E li mars, can fon eupele^at. acomenset se
2()T} a rnoure, e levet se mont granz venz, e li naus acomensava a
plumbiar tant fort que tugh dizian e cajaran esser mort.
Sain// Andréas comandet alz venz qae secalessan; <k en eis
paH fo fâcha granz soavitatz, e li mars e li vent se caleron.
(/an foron escapat d'aqael péril, vengron a Bizanti. Pois par-
210 tiron ne d^aqui, e vengron en Tracia sainz Andréas ab sos
compainnos. E domenz qaed eil s'en annavan, & eil viron
venir une gran compainna d'ornes; & tengron lurespazas tra-
oliaM ft lur lansas en lur mas, & vengron vers saint Andreu &
LEGENDES PIEUSES 311
vers lur compainnos, perelz ad aucire. Sainz Andreus, can los
vi venir de loin aici ves se & vers sos compainnos, fez signe 215
de cros encontra elz, e dis : « Eu te prec, Seinner, que le dia-
bolz lur paire, que lur fa far aizo, [33 v**] sia destruhg e caja.»
E cant ac dihg aizo, l'angelz de nostre Seinnor passet per
aqui ab gran resplandor, e toquet totz lur glazis & ab aitant
cazegron tuhg en terra. Passet per elz Tapostolz ab totz los 220
seus, & anc nengus motz non li soiiet, ni agron poder que li
fezessan mal, car tuhg getavan por lur glazis & annavan lo
adorar.
En la ciutat de Thesalonica era uns jovenshom moût rix e
de gran paratge, qued avia nom Exosus. Aquest venc moût 225
celadament a l'apostol, qued anc non o saupron sei parent,
e getet^se a sos pes, e pregava lo e dizia li :« Eu te prec, sers
de Deu, que tu me monstres la via de veritat ; car eu conosc
ben e sai que tu es verais ministre de celui que t'a trames. »
L'apostolz prediquet li nostre Seinnor Jesu Christ ; crezet le 230
jovens hom &acomenset ad annarab lo saint apostol, & anc
non li membret de sos parens, ni anc de reu qued el agues
non ac cura. Anneron lo querent sei parent, e troberon lo en
la ciutat de Philippis, qued estava ab Tapostol, & vengron &
aporteron li gran aver, e pregavan li que se partis de l'apos- 235
toi. Mas el non o volia far, e dizia : « Per lo meu grat vos
non aurias nenguna d'aquestas riquezas, per tal que cono-
guesses lo fazedor del mont, qued es verais Deus, que vos
poguesses sostraire las vostras armas de dampnation.»
L'apostolz descendet foras ad els, <k predicava lur la paraula 240
de Deu. Mas eil non la volian auzir. Can Tapostolz o vi, intret
s'en intre & claus la porta. Eil cant o viron, feron acam-[34
r®]-par aqui denaut Testar moût gran gent, e volgron lo cre-
mar, e saint Andreu e lo mancip qued era intre ; & dizian :
« Moira aquest tracher enfas, qued ha laisat e desamparat 245
sos parenz e sa terra î » Van penre faillas e pailla e leinna, e
meton fuc entorn Testar; e volgron cremar tôt cant i ac. Can
Tenfans qued era laintre ab saint Andreu o vi, va penre una
botriga plena d'aigua, e dis : « Seinner Jesu Christ, en cui
ma son totas las naturas delz elemenz, le qualz fas reverdir 250
las seccas causas, e pois las verz fas seccar, lo fuc fas refre-
zir, e cant es esteinz lo fas avivar, tu fa esteinner aquest
r
312 LEGENDES PIEUSES
fuc, per tal que cil que son tieu non s^entebeziscan, anz
sian mais enbrasat en la toa fen.» E cant ac dih aizo, escam-
255 pet Taiga de FampoUa sobre lo fuc, & en eis pas le fon aici
amorâat, con si fuc non i agues agut. Can li parent de Tenfant
o viron, dizian : « Vec vos que nostre filz es ja fah encair-
tairel » E van penre escalas e volian pujar sus el scier, per
tal que Taucizessan ab glazi. Dominas autem excecavit eos, ne
260 vidèrent ascensum scalarum . Mas nostre Seinner essequet lur
oilz, que non podian vezer pujar per las escalas. E domenz
qued eil estavan en aquesta error, uns d'aquelz qued eran
aqui, qued avia nom Lis[i]machus, acomenset a dir : « Baron,
per que vos trabaillas de badas? Car nostre Seinner se combat
265 per aques & vos non o conoisses. Laissa[s] vos d'aquesta fol-
lia, que li ira del cel non vos vengua desobre. » Cant aquest
[34 V®] ac dih aizo, trastuhaquil, qued eran aqui, acomenseron
moût fort a plorar à. dizian : « Verais es aquest Dieus qued
aquist colon, cui nos cujavam persegre. » E domenz qued eil
270 dizian aizo, vec vos subtanamenz que venc una granz lutz
de sus del cel, car adonx eraja nohg,& li oil de totz aquelz
foron enluminât. E pujeron sus el soler on era Tapostolz de
Christ, e troberon lo orant, e van se tuh getar aqui el sol, &
acomenseron a cridar & a dire : « Seinner, nos te preguam
275 qu® ^^ ^^^^ V^^ ^^^ tiens sers, que siam envolopat en error. »
Tan gran compunction avian tuh qued aquel Lisimachus dizia:
« Verament Jesu Christ es filz de Deu, lo quai predica le sens
sers Andreus. » Adonx va Tapostolz e dreisset los, e foron aqui
eis ferm en fen, mas solament li parent de Tenfant que non
280 crezeron. Mas menasseron moût fort l'enfante torneron s'en
en lur terra. Cant venc aprop cincanta jornz, sos paire e sa
maire de Tenfant moriron amdui ensemps, en un moment &
en una hora. Et aprop aizo, car li home de la ciutat amavan
Tenfant, le seinner de la ciutat desamparet li e li autrejet
285 tôt quan sos paire ni sa maire avian ni tenian, e Tenfans receup
0, e non desamparet mingua Tapostol; mas tôt cant aisia
de la honor, tôt o donava alz paupres, e tôt o despendia en
la nécessitât de las vezoas e delz orfes. Le mancips preguava
Tapostol que lo menés ab se en Thesalonica E can foron
290 aqui, feron acampar lo pobol. Le pobolz, can vezia l'enfant,
avia [35 r°] moût grau gauh. E can foron tuhg acampat al
LEGENDES PIEUSES 313
théâtre, Tenfans predicava la paraula de Deu, e Tapostolz non
volia rnotz sonnar, per tal que tuhg aguessan meravillas de
la savieza de Tenfant. Acomenseron trastuh a cridar & a
dire: « Seinner, salva lo fil d'un prohome d'esta vila, qued ha 295
nom Carprian, car fort es malautz, e nos creirem trastuh en
aquest Jesu Christ cui tu predicas. » Respondet lur Tapos-
tolz e dis: « Nuilla res non es que Deus non pusca far. Mas
per tal que vos crezas, aduzes lo denant nos, & nostre Sein-
ner Jesu Christ sanara lo. » Can le paire de Tenfant auzi 300
aizo, annet s'en a sa maison, e dis a Tenfant, zon fil : « Car
filz Adimant, encoi seras guaritz. » Respondet Tenfas e dis :
« Ara sai euben verament que mos sompnes es vers. Car eu
avia somniat qued uns hom me guaria de ma raalautia. » R
cant ac flih aizo, vestic se tost, e levet del leg & annet s'en 305
tost e de cors ab son paire al theathre. Et aqui eis, can fon
aqui, va se getar alz pes de Tapostol, e pregava lo fort que
li rendes sanitat. Et en eis pas Tapostolz mes li la man deso-
bre, et fon sanatz. Le pobolz, totz aqiiel qued eraaqui, agron
granz meravillas, car el avia estât vint e très anz malautz, à: 310
glorifiavan Deu e dizian car non era Deus aitalz con le Deus
que predicava sainz Andreus. Ab aitant uns d'aquelz autres
homes, qued eran aqui, acomenset a preguar l'apostol, 6i
dizia: a 0 tu, hom de Deu, eu te prec que tu sanes lo meu
fil, car le diabolz lo trabailla malament. » Le diabolz, cant 315
Gonoc qued eissir de-[35 v*»J-via del cors de Tenfant, menet
lo en un secret lue, e fez lo pendre en un.latz, e fez lo morir
aqui. Venc lo paire de l'enfant e trobet lo mort, e can vi qued
aici s'era mortz, acomenset moût fort a plorar, e dis a sos
amix: « Portaz lo cors de mon fil qued aici es mortz. Eu me 320
fiz en Deu qued aquel hostes, que predica Jesu Christ, lo resus-
oitara. » Can l'agron aportat, pauseron lo denant l'apostol, e
comteron li tôt de quai manera le diabolz l'avia mort. « Et eu
crozben, zo diz le paire de l'enfant, o tu, hom de Deu, que tu
lo nae puscas rendre. » Tornet se l'apostolz deus lo pobol, e 325
dis: « 0 vos, baro de Thesalonica, qua'z profehg vos er, si
vos vezes aquesta meravilla d'aquest, que sia resuscitatz, e
non crezes en Jesu Christ? » Respondet totz le pobolz, e dis:
<c Hom de Deu, non aias doptansa, que, cant auras aquest
resusoitat, nos creirem tugh a toa paraula. » Cant agron aizo 330
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jLr.-i" m.i 3Li.xi'..i: i ::-' i .■uo?r:L: frOTi- îlobi de Z>ea, en
:•* >?»: :x-^ :K r' ~i *ïui*j n^ia i> : ar îoa es desfidig de
»•',". î:?^ -i l'i *•:■§ 11*»!! " p^w. ï E t:au!xz ii*! eL ii dîzia aîio,
•*. s.:n~i a-:* f:r:. Ir* *:i-2-: w»:'?':.:-^ TersiA l*s nfttas, e te-
':C -'..i -. -^ -^i- ^'1^ i- ii;. ^ i— :.i: c FlL:. -roafjcta te e crezu,
* Mr^ î::::!:.. :i .: T:i -r :\ iz'.jl'z. • Eî ab &icaac ra lo penre
p^r * mri-. i \z:Lr', *'-»a i" *. -i^ «4 Tîla. E domenz qaed eil
Ven ir.'ntTin ç-*:» 1:>? :.:r:jL.z t^ .i îiaîat. e :o lar rené encon-
i:r* Q-'n pro* h:ii t:*:.z. i i::zieaaet a pregmr saint Andréa
///) p^p io-^ tîiX «e*:». 1: V :ii!; teaia près en sa carcer aqaest
M-^rliâ-^. s^Tiz :o:a -lolpa. i eraa cahe plea de naffras, las
f^fi^iZ per la lonza preis^jn lar eran poiridas. Gaa rapostolx
aazi fi'izo, tomet ^e dei^^ Media?, e dis li : •< O ta hom, aiyas
7/} qae 1 ea te dirai. Ta pregas que to3 ôlz sia sanaz, e tu te-
'ATjSy ïtfsn homes en ta prei^on, de qualz lar carnz son poiridas. Ë
]>f:r aizo, si ta volz nue las toas pregaeiras sia[n] profechaolz
a Deij, largua primei'ament aqaes mesquis de ta preison, que
Ui tiouri fil/ ^ia largatz de sa malautia. Careu vei encobolament
a laff mias preg'ueras, zo es aquist maleza que tu fas. b Adonx
;'^'/) MerliaH cadec a sos pes & baisava les li, À dis: « Aquil dui,
Moinner, HJan desliure, & autre set que lai n*a, de que tu non
HfiH rori ni as auzit, sol le meus filz sia sanatz. » E comandet
Main?: Andréas qued hom li aduises los près denant. E canfo-
rori douant el, pauset lur sa man desobre, e lavet lur las naf-
fWîT) f'^'i^i «î^i on ois pas foron sanat e guarit. Can venc Tendeman,
unnot s'en aqui on jacia Tenfas, e dis li : « Ijeva sus el nom
do [îJOv"] noHtre Seinnor Jesu Christ, que m*a trames aici,
i|und ou Hano la toa enfermetat. » E va lo penre i'apostolz per
la ma, o lovot lo sus. Et en eis pas el fon sanatz e guaritz, &
LEGENDES PIEUSES 315
acomenset âd annar, lauzanz Deu. Aquel mancips eraappellatz 370
Philionedis & avia estât malautz vint e dos anz. Adonx totz
le pobolz acomenset cominalmenz a cridar & a dire : et 0 tu
Andreu, sers de Deu, val per nostras maisons & sana nostras
enfermetatz. » Respondet Tapostolz, e dis a Tefant cui avia
sanat: « Vai per las maisons delz malautz, et el nom de Jesu 375*
Christ, per cui tu es sanaz, e digas lur que levon sus san &
salv. » Le pobolz, cant auzi aizo, ac granz meravillas ; e le
mancips annet per las maisos delz malautz, et el nom de Je-
su Christ sanava los. Trastoz le pobolz crezet, & aportavan
granz dos a Tapostol, & el non los volia penre, anz lur pre- 380
gava qued auzissan la paraula de Deu, & fasia lur sermo.
E domenz qued el predicava, venc li denant uns rix hom de
la vila, qued havia nom Nicholau, & aduis una carreta sobre
daurada, ab qu[a]tre muls blanx & ab quatre cavalz atressi totz
blanx; &disa l'apostol: « 0 tu, sers de Deu, pren aizo, car en 385
tôt Tafar qued eu ai, non pois trobar ren plus precios ni meil-
lor d'aizo ; sol tan solament me sana ma fiUa, qued es moût
malauta. » Can Tapostolz o auzi, acomenset a somrire, e dis :
(( 0 tu, Micholau, eu recebi los tieus dos, mas non mingaaques
que tu m'as aportatz aici. Mas tu aici con as aportat per tan 390
fiUa la plus [37 r**] cara causa qued avias en ton alberc, aici
deves donar moût plus preciosa causa per Tarma. Eu voil de te
aver que tu conoscas de tôt ton coratge lo Deu que t'a fahg,
e ton Creator, le qualz non vol las terrenalz causas, mas las
celestialz, e mespresa aquesta vida défaillent, per Tautra que 395
ja non faillira. » Pois amonestet a tôt lo pobol cuminalment
que laissessan la errorde lasydolas,e crezessan el verai Deu.
E va penre la fiUa de Micholau, e sanet la de sa malautia. E
totz lepobolz acomenset alauzar Deu; e li fama de las vertutz
que fazia Tapostolz annet per tota la terra de Macedonia. 400
Cant venc Tendema, qued el parlava al pobol, e lo li venc
denant us joves hom, & acomenset a cridar <k a dire : « 0 tu,
Andreu, sers de Deu, que t'avem forfah, per que tu nos vens
getar de nostres propris setges?» Adonx Tapostolz respondet
al raancip, e dis : a 0 tu, diabolz, eneraix de l'uma linnatge, 405
que parlas el cors del joven home, digas me qualz es li toa
obra. » Respondet le diabolz inz el cors del joven home : «Eu,
dis el, ai estât el cors d'aquest joven home, des que era paux
/
316 LEGENDES PIEUSES
enfans, & pensava me que jamais non m'avengues a partir
410 d'el. Mas can venc oi a très jornz, & eu auzi dir al paire
d'aquest: « Annarai m'en a Tome de Deu, e sanara mon fil. »
Eu, cant o auzi, tiras los tormenz que vos autri, apostol, nos
lais ; soi: vengutz aici, per tal qued eu esca del cors aici deriant
te.» Etaqui eis lejoves hom cadec alz pesde Tapostol, [37 v®]
415 e le diabolz eissi li del cors; e fon sanatz, e levet sus e glo-
rifiava nostre Seinnor. Tan gran gracia avia nostre Seinner
donnât a Tapostol, que tuh venian adel per auzir la paraula
de, Deu, e dizian : « 0 tu, hom de Deu, fai nos connoiser
qualz es le verais Deus, en cui nom tu curas los malautz. »
420 E venian li sapi d'aquella lei, e desputavan ab el, & non
podian constrastar a la soa doctrina.. E domens qued eil des-
putavan ab Tapostol, levet se us d'elz, et venc al jutge de la
vila e dis li (aquest avia nom Viri) : « Seinner, uns hom s'es
levatz moût malz en aquestaciutat de Tessalon[ic]a, le qualz
425 predica qued hom destruia los temples delz deus, & comanda
a laissar los sacrifizis (k totz los mandamenz de nostra lei. Un
Deu comanda solaraent a colre, del quai el dis e manifesta
qued es hom e sers. » Can le jutges auzi aizo, trames la ca-
valiers ab cavalz, & ab garnimenz, que lo li aduisessan
430 denant. E can foron a la porta de la maiso, demanderon si
era laintre e dis lur hom qued hoc, & intneron s'en; 6i can
viron saint Andreu, viron que sa cara getettan gran res[)lan-
dor, que de paor cazegron tuh a sos pes. E can toron cazuh,
Tapostolz acomenset a comtar a toz aicelz qued eran aqui,
435 de quai manera era fah encrezent d'el al jutge. E venc totz le
pobolz ab glazis, e volian toz* los cavaliers aucire, mas Ta-
postolz non o laisset far. Ab aitant li cavalier torneron s'en.
Le jutges, cant vi que non aduzian Tapostol, frémi totz aici
con leos, [38 r'^] e trames la autres vint cavaliers. E cant foron
440 laintre en la maison, e viron saint Andreu, foron tan torbat
qued hanc re non saupron dir ni pogron, e torneron s'en.
Le jutges, cant o auzi, fon moût iratz, e trames la una gran
compainna de cavaliers, que per plana forsa Taduissessan.
Quan sainz Andreus los vi, acomenset lur a dir: « Non est
1 Ou tos ? La dernière lettre est indistincte et surchargée. On paraît avoir
fait un z d'un s.
LÉGENDES PIEUSES 317
donx vos autri vengut per me? » Responderon eil : « Par te 445
em nos vengut, si tu es encantaire que predicas qued hom non
cola los deus. Il Adons dis sanz Andreua : « Eu non soi en-
cantaire, anz soi apostolz del nieii Seinnor Jesu Crist, oui
predico. >i E domeriK quod âl dlzia aizo, e le diabolz intret el
cors ad un d'aquelz cavaliers, & perdet lo sen. Si trais s'espaza 450
à aoomenset a cridar et a dire : « 0 tu, jutges, que t'avem
forfahg, que m'as trames ad aquest home, que solament non
me pot getar d'aquest vaisel, anz me art tôt e me crema per
las vertuz qued en el son. Per mon grat tu mezeis sai vearias,
e ja iiuil mal non li farias. » E caiit ao aizo dih, le diabolz 455
eissi del cors del cavalier, e le cavaliers cadec, e fon mortz.
Ab aiian venc le jutges moût Jratz, et estet denant l'apostol &
anc vezer non io poc, Adocix dis li l'apoatolz: n 0 tu jutges,
eu son aquel que tu queres. » Et en eis pas li sei oil del jutge
foron ubert, e vi Tapostol, e dis li moût ergoillosament ; JGO
« Qualz es aquest tieus forsenz, qued aici mospresas mon
mandament, e de mos meuistres t'as aizo que te voJzî Eu sai
ben verament & entent que tu es m»lz liom & encantaire ;
[38 VJ&eufarai te manjar abestias salvatgas, perlo raespresa-
ment que tu fas de nos e de uostres deus ; e veiras si aquel 465
deus que tu predicas, que fon cruciflatz, te poira dealiupar de
la noatra man. » Respondet Tapostolz e dis: « 0 jutges, lo
eoveu que tu crezas lo verai Deu, & lo seu fil Jesu Christ, que
m'a trames ; car tu vezes prezent aici un de tos cavaliers
mort, & eu el seu nom resuscitarai lo. » Et ab aitant l'apostolz 470
getet se ad oration ; & cant ac fâcha sa oration, toquet lo ca-
valier e dis: « Leva susl Nostre Seinner Jesu Christ te res-
suscite, lo quai eu prediqiie. » Ab aitau totz le pobolz aco-
menset a rendre gracias a Deu, e le jutges acomenset a dire :
[i 0 vos, pobol, non vullas croire Tencantador. ii Respondet 475
le pobolz, e dis : u Aizo non es encantamenz, anz es ben doc-
trina aana e veraia. » Adonx dis le jutges: '(Aquest home
farai devorar a raaias hestias, e de vos autres escriurai a
César que totz vos fassa aucir, car vos aves despresadas las
Boas leis. 11 Eil van tuh eiisemps penre peuaa e volian lo la- 480
pidar e dizian : a Ara escriu a César que li Macedonenc an re-
ceupuda la paraula de Deu & mesprezan las ydolas & adoran
lo verai Deu. »
À
318 LEGENDES PIEUSES
Adonx annet s*en totz iratz le jutges, e parti se d*aqoi. E
cant venc lo matin, el fez mètre bestias salvatgas el teatre,
485 e comandet qued hom aduisses saint Andreu. Van lo penre
per los cabeilz li menistre, e tiravan lo, e 11 autre lo ferian
detras ab bastos & ab fustz ; & aici bâtent meseron lo en
Tarena ; e pois laisseron li [39 r°] annar un porc cenglar, moût
mal e moût horrible ; & annet tôt entorn très vegadas a
400 saint Andreu & ren plus non li nohc. Can le pobolz qued era
aqui viron aizo, renderon gracias a Deu. Pois le jutges, can
vi aizo, fez adurre un taur; & aduiseron lo trenta home, &
meseron lo en Tarena ab saint Andreu ; & anc nol toquet; mas
vai penre dos delz ministres, et escoicendet los totz, e mes.
495 los mortz ; pois cant o ac fahg, acomenset a mugir e cadec
mortz. Et ab aitant acomenset a cridar toz le pobolz & a dire :
« Verais Deus es Jesu Christ.» E domenz qued eil eran en aizo,
et eil viron descendre l'angel de nostre Seinnor del t;el, que
confortavarapostol en Tarena. Le jutges, can viqued aquellas
500 bestias non li avian tengut dan, fez adurre un laupart mot
cruzel, e fez lo larguar a Tapostol. Le laupartz laissa estar
Tapostol e sail.sus al setge del jutge, e va penre son fil, &
aucis lo. Tant avi[a] le diabolz encecat los oilz del jutge que
sol son fil non plainnia, ni ren non dizia. Adonx giret se
505 Tapostolz deus lo pobol e dis : « Ara podes tuhg conoisser
que vos coles lo verai Deu, per la cui vertut totas aquestas
bestias malas son vencudas e sobradas, lo quai Virinus, le jut-
ges, non conois. E perzo que vos autri o crezas meilz, elnom
de nostre Seinnor Jesu Christ, resuscitarai lo seu fil, lo quai
510 eu predique, e per zo que li foUia del seu fol paire de l'enfant
sia cofunduda. » Et ab aitant Tapostolz getet [39 v°] se ad
oration. E cant ac orat, levet sus, et annet lo penre per la
man, e resuscitet lo. Can le pobolz vi aizo, ag gran gauh, e
lauzeron nostre Seinnor, e renderon li gracias, e feron se
515 batejar a Fapostol. Le jutges cofundutz parti se d'aqui totz
iratz, & annet s'en.
Ab aitant us joves hom, qued era aqui ab Tapostol, can vi
aquestas meravillas que fazia, part se d'aqui ; & annet o dir
a sa maire, e pregava li qued annes veslo bon home. Ab aitan
520 li donna levet sus & annet s'en la on l'apostolz era ; e va se
getar a sos pes, e pregava li que li monstres e li disses la
LEGENDES PIEUSES 319
paraula de Deu. Ë Tapostolz acomenset li a monstrar la fen
de Jesu Christ; e can Tac gran pessa predicada, li donna
acomenset li a pregar que, se le sens plazers era, qued annes
ad un camp seu, on avia un trop gran serpent, que degas- ^^5
ta va tota aquella région. Annet s'en la Tapostolz. E can fon
el camp, le serpenz acomenset a venir encontra a Tapostol, e
portet lo cap moût aut, e siblet moût horriblament.De lon-
geza avia cincanta cobdadas; tant era granz qued aquil,
qued eran aqui ab saint Andreu, agron tan gran paor, qued 530
tuh se geteron a terra. AdonxTapostolz dis al serpent : « Otu,
bestia salvatga, clina lo cap qued bas dreissat per destruire
Tuman linnatge, & sias subjex alz sers de Deu, e moiras ades !»
Etaquieis le serpens getet un moût gran bram, e pois mes
se entorn un gran rover, qued [40 r°] era aqui de prop, et 535
liet se tôt entorn el, e getet un grand riu de vérin ab sanc
mescle per la bocca, et cazec mortz. Pois Tapostolz tornet
s'en, e venc a la maison de la donna, et atrobet que tenian
aqui un enfan mort, le qualz era mortz per lo sufflament del
serpent. E cant sainz Andreus vi plorar aici sos parenz de 540
l'enfant, acomenset lur a dir: a Le nostre Deus, que vol que
vos autri sias salv, m'a trames aici a vos, que crezas en el.
Annas foras el camp, e trobares mort cellui qued ha mort
vostre fil. » Eil responderon e disseron : « Ja non plainneriam
la mort de nostre fil, si podiam vezer venjansa de Tenemic. » 545
Anneron s'en per vezer si era en aici con Tapostolz o avia
dih. E can foron foras, Tapostolz dis a la moiller del jutge :
« Val, e resuscita l'enfant. » Ella non doptet anc en ren, e
venc al cors de l'enfant, e dis : a Vai sus, enfans, sans e salz,
el nom de Jesu Christ. » Et en eis pas el levet sus. Ab aitant 550
sos paires et sa maire vengron ab gran gauh, car agron
atrobat lo serpent mort ; e can foron a lur alberc, troberon
lur enfant viu e san. E van se getar alz pes de Tapostol e ren-
dîan 11 montas gracias, e torneron se a la fen de Jesu Christ.
Can venc la nohg, e sainz Andreus somniet un somne, e 555
retrais lo l'endeman a sos discipolz, e dis : « Aujaz, fraire, lo
pantais qued eu ai a nohg fah: So m'era vejaire qued eu vezia
denan me un gran puhg, qued esta-[40 v°]-va sus entrenant
moût aut & non avia nuilla causa terrenal de sobre se, mas
tan solament resplandia per gran lutz, de guisa que toi lo mon 560
•'^^O LÉGENDES PIEUSES
enluminava. Et ab aitan esteron denant me nostre dui fraire,
Peire & Johanz, apostol, e sairiz Johanz estendet sa man a
saint Peire, e levet lo sus el som del pugh. Pois tornet se deus
me, e pregava me qued eu m'en pujes après saint Peire, &
565 acomenset me a dir : « Andreu, tu beuras ab aquel enap, jque
Peire a begut. » Et estendet sa man, e dis me : « Appropia te
de me, & estent tas mas, & ajosta las a las meuas, e lo tieu
cap ajosta ab lo meu. » E fiz o e non fui tan granz con saioz
Johanz. E pois dis me : « Volz conoisser ni saber que vol dir
570 aquist figura, que tu vezes, o qui son eu que parle ab te? »
Respondei eu, e dis que moût o volria conoisser. E dis me:
« Eu soi li paraulacle la cros, en la quai tu pendras breument,
per lo nom de celui cui tu predicas. » E montas autras causas
me dis, que non coven qued eu las diga aoras ; car can eu
575 m'api'opiarai de la mort, & ellas seran manifestas. E vos autri,
fais ajostar totz aicelz qued an receupuda la paraula de Deu,
ai eu comandarai los a nostre Seinnor Jesu Christ, qued el los
gart de tôt bautugament, e los conserve en la soa doctrina.
Car eu transpassarai d'aquest segle & annarai ad aicella pro-
580 raessio, que m'a promes le reis del cel e de la terra, qued es
filz do Tautisme Deu, ab lo Saint Esperit permanens m secula
sempllerna, »
Can li fraire e li discipol, qued eran [41 r°] aqui, auziron
aizo, acomenseron moût fort a plorar, e batian lur fronz ab
585 lur palmas, ab granz gemps & ab granz plors. Vengron tuh
aquilque crezian,e,can toron tuhacampat, acomenset lur a dir
sanz Andreus : a Fraire e serors, eu sai qued eu me partirai
de vos. Mas eu me fiz el meu Seinnor, la cui paraula eu pre-
dique, qued aquesta semensa, qued eu ai semeaada en vos,
590 non laisse arancar a Tenemic, zo es li conoissensa e li doctrina
del meu Seinnor Jesu Christ. Vos autri, oras ades assidual-
ment, & estas fort en fe, que nostre Seinner aranque la zizania
mala & aici con bon froment e mont el vos deiune mètre el
celestial graner. » Et aici sainz Andreus per cinc jornz es-
595 seinnava lo pobol, el confermava el[z] comandamenz de Deu.
Can venc a derrer, & el estendet sas mas a nostre Seinnor, e
dis : « Seinner, eu te prec que tu gardes aquest pobol, cui
as fah conoisser la toa salut, que Tenemix non lur pusca tener
dan; mas aquellas causas, qued ou lur ai esseinnadas per lo
LEGENDES PIEUSES 321
tieu mandament, poscan tener complidament, senz tôt failli- 600
ment, in secula seculorum, » E cant ac dih aizo, tuh aquil
qued eran aqui, responderon: « Ameni. » E pois près un pan
e rendet gracias a nostre Seinnor, e frais lo, e comeneguet
los totz, e dis : « Recebez la gracia que nostre Seinner Jésus
Christ vos a donada per lo seu serv. » E poisbaisava los totz, 605
e comandava los a Deu. Et cl annet s'en en Tesalonica. E moût
home de Mascedonia anneron s'en ab el, delz qualz [41 v°]
foron doas naus plenas. Trastuhg querian qued hom per
amor de Deu los laisses intrar en la nau, on era sanz Andreus,
quar moût desiravan con Tauzissan parlar, que li paraula de 610
Deu non lur failles en mar ni en terra.
Aqui eis, can foron intrat tuh en las naus, venc venz bons ;
<k enpeis los a la ciutat de Patras, de la quai era bailles Egeas.
E can foron aribat aqui, eissiron de las naus, & intreron s'en
en la ciutat. E sainz Andreus acomenset a predicarla parau- 615
la de Deu; e domenz quepredicava, vencli una femena, qued
avia nom Ephidima, e getet se a sos pes, & acomenset li a
dir : u 0 tu, sainz hom, apostolz de Deu, li mia donna Maxi-
milla eg moût malauta de febre, e pregava te, si le tiens pla-
zers era, que tu Tanessas vezer ; car eil désira moût auzir la 620
toa doctrina e la toa paraula ; car le jutges sos maritzesta de-
nant son leg, s'espaza tracha, qued, alo cant eil morra, el se
cuja aucir. » Vai sainz Andreus & annet s'en la ; e venc al
leg on jacia li donna, e vi son marit que l'estet denant, s'es-
paza tracha, e dis li sainz Andreus : « Tu non te fassas mal ab 625
aquel glazi, mas estoja lo en son lue ; car encar venra temps
que tu lo trairas per nos.» Le jutges, cant auzi la paraula, es-
tojet son glazi, e laisset lo venir entro al legh. Venc Fapos-
tolz denant lo leg de la malauta, e fez sa oration, e pois va la
penre perla man, et en eis pas ella acomenset a suzar, e li 630*
febres laisset la, e comandet Tapostolz [42 r°] qued hom li do-
nes a manjar. Vai le jutges e fez aportar a Tapostol cent
marx d'argent ; mas el sol non los vole tocar niesgardar. Ma-
ximilla venia cada jorn al teatre, can sos maritznon i era, e
trametia querre Tapostol & auzia ades volontiers la paraula 635
de Deu. Le jutges non era en la ciutat de Patras, anz era an-
naz en Macedonia , e li donna annava mot volontiers vers
Tapostol, que, can sos maritz i era, non ausava venir en lue
22
i
322 LEGENDES PIEUSES
qued el fos; car mot portava gran enemistat a Tapostol, per
040 aizo quar anc, pois que sa moiller Maximiila ac auzit sa pré-
dication, non se vole ajostarab el.
Domenz que sainz André us conversava en la vila, e predi-
cava la paraula de Deu, Ëgeas, le jutges de laciutat de Patras,
lo fez penre & adurre dcnant se, e dis li : « Tu es Andréas,
045 que destruis los temples delz deus & amonestas alz homes
aquesta folla sexta per colre, li qualz es atrobada novellar-
menz?» Respondct sainz Andreus,e dis: « Eu soi benaquelque
predique la paraula de la veritat e nostre Seinnor Jesu Christ,
e que li home se partan de la error de las jdolas, que son fa-
050 chas per mas carnalz, e conoscan lo verai Deu, per lo quai
totas causas son fâchas. » Egeas dis : « Aquestas paraulas,
que tu dis, son follas e vanas. Car aquel Jésus, que fon cruci-
fiatz, 0 dizia & o esseinnava atressi. » Respondet sainz An-
flreus, e dis : a El, qued ara seinner de magestat, descendet
055 per aizo del cal, qued el pre-[42 v°]-zes e receupes la forma de
rome, le qualz era perdutz per la transgression qued avia
fahg. De son grat vole sofrir mort, qued el desliures de mort
cellui qued avia fahg. » Adoiix comandet le jutges qued hom
lo meses en carcer, e dis que Tendeman lo faria aucire. E can
000 foii enclaus en la carcer, venia le pobolz aqui déferas ad el,
e parlava lur e dizia : « Eu soi apostolz del meu Seinnor Jesu
Christ, que m*a trames a vos, sennor fraire, que vos, qued es
pausat en tenebras & en umbra de mort, per la paraula del
meu Seinnor, sias tornat a lumnera & a la via de veritat.
005 D'aizo non me cessarai qued eu non vos digua& amonesti vos,
que vos partias del coutivament delz diabolz; & queres e de-
mandas lo verai Deu, e persévéras el[s] seus mandamenz, que
vos puscas esser haras de la soa gran promession. Et eu,
seinnor fraire, die vos, e vos amonesti, que la vostra fen,
070 qued aves pausada sobre la fondamenta del meu Seinnor Jesu
Christ, que vos la fassas creiscer en esperansa & en lauz del
meu Seinnor Jesu Christ. Eu non vos dirai, ni vos farai saber
aqueilas causas que a me esdevenran, per talque vos non sias
irat. Car tôt aizo m'a proruas le meus Seinner Jesu Christz,
075 aici con es escrih: Quia pro nomine illius oportetnosmulùa pati.
Car per lo seu nom conven que nos soffriam motz tormenz,
que siam flagellât & aduh denan los reis e los comtes, e que
LEGENDES PIEUSES 323
portera guarenti[a] d'el. Et qui perseveraverit usque in finem,
hic salvus erit, E cel que perse ve- [43 r®]-rara entro a la fin,
cel sera salz. Per aizo ha obs qued ores senz tota cessation, 680
quar le diabolz que vos environa senz repaus, aici con leons,
volria alcun de vos devorar, et vos autri captenez vos de
guisa qued el jassa subjetz et apoderatz per vos autres. »
Aquestas causas e moufas autras lur monstret tota la nohg.
E can venc lo ben matin, levet se Egeas le jutges & annet se 685
sezer en sa tribu[n]a*, & comandet qued hom li aduisses saint
Andreu. Aduis Tom. E can fon denant el, acomenset li a dir :
« Andreu, eu comandei qued hom te mezes en carcer, qued
eu conogues e saupes certanamenz alcuna causa de te. Eu ai
auzit dir, mas non sai si se sia vers, qued a nohg tota noh as 690
parlât & amonestat a la gent tas vanas paraulas e tas follas. »
Sainz Andreus respondet : « Eu non me ce ssarai, ni me dei
cessar d'obrar zo que le meus Seinner m'a esseinnat ni cargat
qued eu fassa, qued aquest pobolz sia getatz de la via d'error
e sia tornatz a la vera conoissensa. » Le jutges dis : « Toi te 695
d'aquesta foUia, & non veillas celz que ben vivon tornar
atras ni mètre en error. » Sainz Andreus respondet : « Le
meus Seinner Jesu Christ me carguet qued eu en totz senz
prediques la soa paraula, e que non m'en cesses, e qued eu
demonstres penitencia alz erranz. » Egeas dis : « Si tu non 700
prometes que te partas d'aquesta follia & d'aquesta avol doc-
trina, eu comandarai qued hom te auciza. » Sainz Andreus
respondet : « Eu soi appareillatz de recebre [43 v°] mort e
totas maneras de tormenz, per lo meu Seinnor J^su Christ,
enanz qued eu me parta de la soa paraula a predicar. » Va le 705
jutges e comandet qued hom lo bâtes ab flagelz, e pois lo
meses hom en cros. E comandet alz ministres qued hom li lies
les pes e las mas en la cros, e qued hom non los li clavelles
per tal que plus longament e mais poinnes en morir.
E domenz que li carnificer lo menavan per mètre en la cros, 710
una gran compainna delz fizelz los seguia aprop, cridan e di-
zent : « Le drechuriers hom, & l'amix de Deu, el bons maistre
es menatz a mort I » Sainz Andreus los amonestava, e lur dizia
moutas bonas paraulas, entro que venc el lue on hom lo dévia
* On peut lire aussi bien tribna que tribua .
i
32 4 LEGENDES PIEUSES
715 mètre en croz. E can vi la croz, d'aitan loin con la vi, acomen-
set a cridar&adire : « Deus te salv, croz, qued eras enohiada
del lonc atent qued has fah de me. Certament sai que tu as
gauh e t'alegras, car tu recebras lo discipol de celui que pen-
det en te. Per qued eu totz alegres vauc vers te, quar eu
720 conosc e sai lo tieu secret, ni per cal causa tu es ficada. Recep
cellui cui tu desiras, car eu ai longament disirada la toa beu-
tat. Eu conosc en te aquellas causas que le meus Seinner
m'a promessas. 0 tu, benezeita cros, per Deu recep mi himil
& transpassa me al meu Seinnor Jesu Christ ! » E can Tapos-
725 tolz acaizo dih, despoillet se, eliuret sos vestirs alz menistres.
Et eil van lo penre, e lieron li los pes e las mas, aici con lur
fon comandat a far, e penderon lo en la cros. [44 r®] Aqui era
vengutz totz le pobolz per vezer, tant que ben eran entro a
vînt milia, entrelz qualz era Stratocleus, fraire d'Egeas lo
730 jutge. Uberc saboccasainz Andreusetamonestava los tan fort
qued aquil, que non crezian, tornavan a la vera fen de Jesu
Christ. Tôt lo jorn e tota la nohg los amonestet, qued banc
nengus non fon las d'estar aqui.
Can venc Tendeman, toz le pobolz vi la soa paciencia, e lo
735 seu sen, e la gran forsa de sa pessa. Vengron tuh ensemps ad
JEgeas, lo jutge, et acomenseron li a dir : « 0 tu, jutges, qualz
es aquist toa sentencia? Malamenz has jutgat. Cruzel senten-
tia as donada. Fellon son tuh li tieu juzizi. Cal mal avia fah
aquest sainz hom ? Ni qued avia dih? Tota aquist ciutatz es
740 torbada e tuh deuriam périr. 0 tu, jutges, non voillas des-
truire aquesta ciutat de César. Liura nos aquest drechurier
home. Ren nos aquest saint home. Non voillas aucir aquest
car home de Deu. Non voler destruire aquest bon home,
ni aquest mansuet. Dos jornz ha estât penduz & ancar es
745 ^ius, & non se cessa de parlar ni d'amonestar sanctas parau-
las; & trastuh amem lo mais escoutar que manjar ni heure.
Rent nos aquest saint home, que non periscam e puscam viure.
Laissa annar aquest cast home, e tota li terra er en pas.
Desliura aquest home sapi, e tota Achaia aura misericordia.»
750 Egeas non volia auzir ni escoutar nulla re que li dissessan.
Cant eil o viron, mogron se tuh ensemps e volgron aucire lo
jutge. Can lo jutges o [44 v®] vi, ac gran temensa que non Tau-
cizessan, e levet se de sa cadera, & acomenset s'en ad annar
LEGENDES PIEUSES 325
la on era sainz Andreus en cros.Le pobolz, can lo viron moure,
agron gran gauh tuh, car se penseron qued annes per des- 755
liurar saint Andreu. Can fon vengutz en aquel lue on era
sainz Andreus, & el vi lo jutge, acomenset ii a dir : « Qued
es vengutz far, Egea? Es me vengutz desliurar? 0 as penden-
sas de zo que fas, e voles tornar a la fe de Jesu Crist? Non me
digas ni me amonestes nuilla error, queja non t'en creiria. 760
Car eu ren gracias al meu Deu & al meu Seinnor, car m'a
liurat en las toas mas, que per la bona confession eu aia la
perpétuai gloria e sia fah sos amix e sos conogutz. E tu non
t'apropies de me, qued eu sia fah proprias del meu Seinnor
toz temps mais, & en la soa gloria pusca habitar, e qued el 765
me renda las promessions que m'a fâchas. » Lejutges, cant
auzia aquestas paraulas, estava toz esbaiz, e non li podia ren
dire, ni sabin. Toz le pobolz acomenset a crïdar : « Desliura^lo
saint home, el drechurer, el cast, & home de Deu. » Apro-
piet se Egeas de la cros, e vole saint Andreu desliar. Can 770
sainz Andreus, o vi, que desliurar lo volia, acomenset a dir :
c( Seinner Jesu Christ, non laisses lo tieu serv desliurar de
la cros, que per lo tieu nom i es pendutz. Seinner, eu te prec
que, eu qued acomenz a tocar alz tiens secretz, non me laisses
tornar a la humana conversation. Seinner, eu que conosc la 775
toa granneza per la croz, non veillas qued eu plus viva en
aquest segle. Seinner Jesu Crist, maistre, cui eu am, e cui
[45 r®] conosc, e cui tenc, e cui désire vezer, & en cui es tota
ma esperansa, Seinner, recep mon esperit. » Et hec dicens
glorificans Dominum, et gaudens, et populo fiente, reddidit spi- 780
7*itum,Et cant ac aizo dih,totz le pobolz plorava moût fort; et
ab aquestas paraulas, glorifianz Deu, rendet Tesperit sanz
Andreus a nostre Seinnor.
Maximilla, li raoiller d'Egeas, sancta femena e bona, va penre
lo cors de saint Andreu ab gran diligencia, et ois lo de rix 785
oinneraenz, e sebeli lo en un moût bon lue. Le jutges en
aquella eissa noh enrabiet, & uns diabolz intret li en son cors,
e d'unu auta torre deroquet s'en, e fon mortz. Can Strato-
cleus, sos fraire, auzi qued aici era mortz Egeas, non vole
ren tocharde sasubstancia ni de ren qued agues,e dis : «Tôt 790
cant m os fraire avia ni tonia, tôt sia en perdicion, aici con
el es ! Eu ai pro, ab que le meus Seinner Jesu Christ me voilla
/
3 26 LEGENDES PIEUSES
ajudar, lo quai eu conosc & ai conogut per lo [seu] serv
Andreu. » Le qualz es martirizatz un jorn enant la calenda de
795 dezembre, en Acaia, en la eiutat do Patras, cant Egeas n'era
bailles. Rengnante * Domino nostro Jesu Christo, cm est honor
et gloria in secula seculorum. Amen.
XVIIII
PASSIO SANCTI JACOBI APOSTOLI, PRATRIS
JOHANNIS
[Jacobu\s^, frnter Johannis, apostoli et evangeliste^ [omnem]
Judeam et Smnariam visitabat, fngrediens per st/[nagogà]s,8ecun-
dum scripturas sanclas, ostendebat omnia que [a prophetis pre}-
dicta erant, in Domino Jesu Christo esse impieta.
5 [Sainz J]acraea, fraire de saint Johan evangelista, aQ[nava
per tota la] terra de Jiidea e de Samaria & intrava en [las
synag]ogas delz juzeus, e monstrava, segon las [45 v*] escrip-
turas, que zo quedavian dih las prophetas era complit en Jesu
Christ.
10 Esdevenc que domenz qued el predicava, uns encantaire,
qued avia nom Ermogene, li trames un seu discipol, quedavia
nom Pliilet. Aquest Philez mcnet ab se ganre de phariseus, &
afFermava e dizia que Jesu Christz de Nazarethz non era ve-
ramentfilz de Deu, del quai Jacmes dizia qued era discipolz.
15 Sainz Jacmes desputava ab el e per Saint Esperit vencia totas
las questions qued el li fazia, e per sancta escriptura falsava
totz SOS argumenz e monstrava qued aquest era âlz de Deu.
Aquest Philetus, can vi que re non li valian sas questions,
tornet s'en ad Hermogene, son maistre , e dis li: «Ben
20 sapias, maistre, qued aquestz Jacmes, que diz& afferma qued
apostolz e sers es de Jesu Christ de Nazaretz, non poira
ja esser vencutz per home. Car el nom d'aquel Jesa li ai
1 Sic,
' La lettre initiale de ce chapitre a été coupée. Il résulte de cette muti-
lalion quo- l^is sept dernière => lignes du recto et du verso ont chacune perdu
quelques lettres, celles-là au commeucemcnti celles-ci à la fin. On a placé ici
entre crochets les lettres qu'on a cru pouvoir suppléer.
LEGENDES PIEUSES 327
vistencaussar diabolz del cors delz homes & li ai vist en-
luminar cex, lebros li ai vist sanar. E cil neis que son mei
amie m'an dih verament qued eil li an vist morz resuscitar. 25
Et que voles qued eu vos digua mais? Totas las sanctas
escripturas(sanctas) sap etenmemorialment, perlas[qualzde]-
monstra que non es autre fil de Deu, ma[s aicel] que li juzeu
crucifizeron. E non me te zo qued eu te dirai, e
crezmon conse[l] [ad] elequerliperdon que sinon o 30
fas i jamais li toa artz encantaritz non
... ni ren valer. E sapias ben qued e [u tornarai m'en] [46 r°]
ad el e querrai li perdon e d'aici adenant serai sos discipolz. />
CantHermogenus auzi aizo, fon moût iratz e fez Phileton estar
en un lue per encantament, de guisa qued hanc non se poc 35
moure, e dizia li: « Ara veirem si le tieus Jacmes te poira des-
liurar d'aquestzliamps. » Adonx Philetz diz ad unjoven home
seu : « Vai 0 dir a Jacme, qued aici me fa estar Hermogenus. »
Annet s'en la on era sanz Jacmes e comtet li de quai manera
era près ni liatz Philetz. Can sainz Jacmes 0 auzi, donet li al 40
messatge un de sos vestirs e dis li : « Ara prenna aquest ves-
tir e digua : Dominus Jésus Christus erigït elizos et ipse solvit
compeditos. Nostre Seinner Jesu Christz dreissa los abaisatz
e deslia los liatz.» Annet s'en le messatges, et en eis pas que
toquet Philet del drap, & el fon soutz delz liamps del encan- 45
tador, & annet s'en de cors a saint Jacme & acomenset escar-
nir losencantamenz d'aquel maistre seu Hermogene. Hermo-
genus, can saup qued aici l'escarnia, fez venir per encanta-
ment los diabolz e trames los a saint Jacme, e disluriaAnnas
& aduzes me Jacme e Philetum, lo meu discipol, e venjarai 50
m'en, per tal que li mei discFpol autre non me escarniscan
airessi. » Anneron s'en li diabol la on era sainz Jacmes, e vo-
lavan sus per l'aer, e dizian: « 0 tu, Jacme, apostolz de Deu,
aias merce de nos, car, davan que le nostres jornz sia ven-
guz, nos cremam* tuh per granz flammas.» Respondet sainz 55
Jacmes, e dis lur : a Per que es vengut aisai a me ? » Dis-[46 v°]-
seron li diabol: « Ermogenus nos a trames aisai a te, que te
& Philet aduissessam ad el. Et en eis pas can fom aici, Tan-
gelz de nostre Seinnor nos ha liatz ab cadenas de fuc et em
^ Ms. cremem.
3 28 LEGENDES PIEUSES
60 mout fort tormentat. » Respondet lur sainz Jacmes, e dis:
« El nom del Paire e del Fil e del Saint Esperit, vos desliure
Tangelz de nostre Seinnor, que puscas tornar ad Hermoge-
nume senz naframent de son cors Fadugas aici denant me
liât. » Ab atant torneron s'en li diabol ad Hermogenum, e
65 Héron li las mas ab retz detras lo dos, & adduisseron lo a
saint Jacme, e dizian ad Hermogenum: « Tu nos has trames
aqui on em tormentat & cremat e degastat malament. » Ab
aitan foron vengut denant saint Jacme. E can sainz Jacmes
lo vi, acomenset a dir ad Hermogenum : « 0 tu,hom folz, per
70 que mantenes en paraula ni en razon Tenemic de Tuman lin-
natge? Car en aici con tu pregues lo diabol qued el trameses
SOS angelz a me, per destruire e per aucire, aici los tenc eu
près e liaz q«e non lur don poder qued eil estendan en te
lur ira. » Li diabol cridavan ades e dizian :« Jacme, dona nos
75 poder con puscam venjar en aquest los tiens tortz e lo crema-
mentque nos a fah penre.» Respondet sainz Jacmes, e dis:
« Philetz,le seusdiscipolz, es aici; ad aquel, pois que comandat
vos 0 avia, per que non fais mal?» Responderon li diabol:
« Nos non possumus nec formicam contingere que in cubiculo tuo
80 est. Nos non avem poder de tocar nuilla ren qued en ton
poder sia, neis una formiga. » Adonx dis sainz Jacmes ad Phi-
let: « Per tal que tu e tuhli autri [47 r°]home del mont sapian
e conoscan que li leis el comandamenz del meu seinnor Jesu
Christ es qued hom renda ben per mal, tu, aici con elte liet,
85 en aici lo deslia tu. Et aici con el te fez liar alz diabolz &
adurre a se, en aici lo desliura de la preison delz diabolz. «
Vai emPhiletz e desliet lo. E cant Tac desliat, Hermogenus
estet mout himilz e mout vergoinnos. Adonx li dis sainz Jac-
mes : « Vai la on te plazera souz e desliures, car non es en la
90 nostra disciplina que nengus hom mal gratseu se convertisca. »
Respondet Hermogenus: «Senner, euconoscben lasiras del[z]
diabolz ; e si tu non me donas quedhocom del tieu que port
essemps ab me, eil me penran & auciran me per divers tor-
menz eper diversas penas. » Adonx li dis sainz Jacmes: « Pren
95 aquest baston qued eu port, & vai segurament la on te voiras
ab aquest. » Vai penre Hermogenus lo baston de Tapostol &
annet s'en a son alberc, e près totz sos libres & impli en ma-
letas, 0 carguet en se e sos discipolz, et aportet los davan Ta-
LEGENDES PIEUSES 329
postol, &acomensetli a pregar q.ue los cremessan. Respon-
det sainz Jacmes e dis : a Per tal que le fums non fassa mal 100
a la gent, metganre de peiras e de plump intre en las maletas,
e fcii las getar intre en la mar. wFez o aici Hermogenus co Ta-
postolz lui comandet; e cant o ac fah, tornet a Tapostol e val
se getar a sos pes *, & acomenset lo a pregar et a dire: « 0
tu, desliuraire & capdelaire de las arnaas, recep aquest pêne- 105
dent, le qualz es agutz falz e desleialz entro aci! » Sainz
Jacmes dis : « Si tu offris a nostre Seirinor vera [47 v°] pe-
nitencia, el te fara vera perdonansa. » Respondet Hermoge-
nus : « Si eu non offris vera penitencia a nostre Seinnor,
mos codis ni mos libres, en qued eran escrichas moutas pre- 110
sumptions, non agra eu getat en mar, ni ja non agra renegada
las artz del enemic. » Adonx li dis l'apostolzf « Vai per las
maisons de celz qued as convertiz,e torna los ad aquel sein-
nor a oui los as toutz; e fai lur saber & entendre qued aizo
es verai,quelur avias dih quedera falz; et aizo es falz, que 115
lurfazias entendre qued era verai. Las ydolas que tu adora-
vas et los devinamenz, que tu pensavas qued ellas te respon-
dessan, tôt o frain & o delis. Las peccunias qued has de mala
obra conquestadas, totas las despent en bonas obras; qued
aici con es agutz filz de diabol, fazent sas obras, aici sias filz 120
de Deu, fazent las soas obras. Car el dona los sieus bens cada
jorn a celz que non li son agradevol, & a celz que lo blasman
dona, per la gran misericordia qued en el es, dona lur viure.
Car domenz que tu eras malz escontra Deu, el, que te pogra
delir en un moment & en una hora, fon bons escontra te, 125
car anc non te vole delir ; & encar te sera plus bénignes, si
te volz gequir que non sias encantaire, e li voles plazer per
bonas obras. » De totas aquestas causas e de moutas autras
que l'apostolz li dis lo crezet Hermogenus, & acomenset tan
fort esser perfebg en la temor de Deu que nostre Seinner 130
fazia pois moutas vertutz per el.
Can li juzeu viron qued [48 r°] aquest encantador avia aici
convertit, lo quai eil pessavan que ja non séria vencutz,
e sos discipolz e toz sos amix, li quai solian venir a lur sjna-
goga, qued aici los avia tornatz a la fe de Jesu Christ, foron 135
1 VLs.peis,Vi expoïïHué.
mnnr. irar. * acr^na ztul p«i::iaaia i. ia» rrr cm mes ♦& Is
Irt •»!! îar'?»*r. E^t^ .o pohoi. i^ leT^^ aiûiit zrsnz ûea:i(M^ c
14*1 iiîweî-îa i ii»*i, -îimnz ri«»<î mm L'iniiizas. 1*3 ieiirii& lit: m. adnrre
jk lasr Zii vie •ier!a. K:r'3a !a .i^i. :liiiz JauL: e ,*a3. fiTO. ^p^^
•»a n i!as?ia, j. loa^réen .1 uooiezLseraa a <iir : i Pisr qae
preftleasi i«ijid. jotne J-^ii. 1*» ^aa^ foa «mciâaxz «acre laîros I •
Sainz Jiiîrn»», reoLerz iei Saut Esperit. reâppaaiiec e dû :
145 « Aa;aî», ?eiaaoc fîn;r», i;-!: uto. ■** *::iji iei. llimaigç «f^AbrsÎLUL:
I><(ii.'9 proTneii ^1 20!?rr<î pair*î H^ibriaiiai. aoeii «îd. ÛLSOftsen&easa
l'^r'^tar^a 'ora:3 .as r^ox. Abrnh:iniga hai ir.â dlz. Ismahel 4
Yia^'î. Y^maatiri. a.: :e ?a «rvaa'ij, Ajar ol Tsaa«: ae de n
moiller Sarra. Yîm;i**LZ -* «i m ai?!* A-rar f:roa secas de wt lo
:.">j pep':i*aeai»*!ir. fAbraji. E il.'? Deii* i-: Ai rajam. i^aifti ea Tssie
s*i r^ia aç 7* •* . L a. : a i 3*: a *i .•n»» n *a. Ab raî iza iioatre paire fan a^
p«*i.ari ^aux i-» I»*îîi. iaTaa :Ti-îii ^L reoeap*» La cîreaitcisKWy
a. 'Zij-.jTi'*^ lo *:ip*iî^. aï <aape* aiL escabaoLea;: de la diriai
>i. Am. :: i-* D«'i foa ap"eLaz. aoa per la cirtroaeisoiu mas
L55 '17'iz^z an Den . *ii. iizo foa T'îre'aaieiLS Tue to^^is îa^j genz '48 f*j
f-*r :a ea ^a «eai-insa. E poii ^tî-îî Habraham.-* foa amix de
E^îa. car i*. crezer. iea e*«er. ç«*r razoa 'eafsniix de Dea^ cel
l'i^ n îa l-> irez. ■> Rasçoa i^rca L: jazea: i E -loalz e$ »iniel que
aoa ir*iz Dei ? i Dis «aiaz Ja^ai-r:? : c CeL '^^le noa jrea qaed
IrO ea [a ?oa semeiLaa her^rtoa ^o'j,^ ia§ seai. e cel q^ae non crei
Mo^îea. qae diz : Sn^j.'iht D'iriiiauLi €o6û propà^tam MO^moiy
iptHm auiiietU tanquam me p»>T ooiniti quacumque preeepfrit
«ro^'-i. f>ôa« «rî-fe^ara «rucre vis a^iires ona grau propheta;
-i'â'^.iiftl aczire-S' tôt caat to* diri, ai'*L eoa îfarias me. e lares
1*55 tôt oaa to-» iomaniara. D'acaesta pr^pheta dis Ysajas de quai
maaftra venria: £'^« ctr^o j« fU^îro CK-ncpî^t et fMÊrùftMiimm et
KO^oMtur nomen ej^ Hemanuhely quoi ett î/iterpretsiiMm mobis-
cum Devs. Tec to« qae U Teri^es eoacebra en son ventre &
enfantara on eafant. d^ le seas nomps sera appellatz Hemanael,
17Q que es interpretaz qae Deas es ab nos. E Jereos^îas dis atressi:
£cee Kemiet rede?nf,tor tuus, Jherusalem^ et A#c ejms stgnwn erii :
retr/rum ocuio^ arperiet^ mrdU rtddet auditum ei roee sua exci--
tatdl m&rtum, O ta Jhenxsaiem. le tieas reiemeire Tenra, et
aizo er le seos signes : el adubhra losjoilz delà eex, • rendra
LEGENDES PIEUSES 331
auziment alz sortz, & ab sa paraula resuscitara los mortz. 175
D'aquest adsignet Ezechiel, e dis o en aici : Veniet rex tuns,
Syon, humilis veaiet et restaurabit te, 0 tu Sjon, le tieus reis
venra himilz & restaurara te. Danielz dis atressi : Sicut filius
hominis, ita veniet et ipse obtinebit principatus et potestates. Le
filz de la vergen venra & tenra en son poder los princes e las 180
podestas. David dis atressi per la bocca del fil de Deu : Domi-
nus dixit ad me : [49 r®] Filius meus es tu. Nostre Seinner dis
a me : Tu es le meus filz. E li vos del paire dis del fil : Ipse
mvocabit me : pater meus es tu. El m'apellet, e dis me : Tu es
le meus paire. Et ego primogenitum ponam illum excetsum pro 185
regibus terre. Et eu pausarai mon primer engenrat davant
totz los reis de la terra. E nostre Seinner dis a David : De
fructu ventris tui ponam super sedem meam. Del fruc de ton
ventre pausarai sobre ma cadera.Delasoa passion disEsayas :
Sicut ovis ad occisionem ductus est, et cetera. Aici con fedasera 190
menatz per aucire. Et David dis en la soa persona: Foderunt
manus meas et pedes meos [et] dinumeraverunt omnia ossa mea,
Eil han fos mas mas & mos pes & an nombratz totz mos os.
Ipsi vero consideraverunt et conspexerunt me ; diviserunt sibi
vestimenta mea, et super vestem meam miserunt sortem, Eil se 195
penseron entre lur; & esgarderon me, & entre lur partiron
mos vestimenz, e sobre mon vestir meseron sort. Et en autre
lue dis atressi David ; « Dederunt in escam meam fel, et in siti
mea potaverunt meaceto. Eil me doneron amanjarfel & a beure
vin aigre. De la soa mort dis atressi : Caro mea requiescet in 200
spe. Li mia carnz se repausara en esperansa. Quoniam non dere-
lingues animam meam in inferno, nec dabis sanctum tuum videre
corruptionem. Car tu non laissaras la mia arma en enfern, ni
laîssaras vezer al tieu sant corruption. Li vos del fil dis al
paire : Exurgam adhuc et tecum sum. Eu m'en pujarai ancar 205
a te, e serai ab te. Et en autre lue : Propter miseriam inopum
et gemitum [49 \°]pauperum nunc exurgam, dicit Dominus, Per
lo caitiver delz sofrachos & per lo gemement delz paupres,
en me levarai, zo diz nostre Seinner. De la soa ascention dis
li propheta : El s'en pujet en aut, & escaitivet la caitivitat. ^10
Et per aqui mezeis dis : Et^ ascendit super Chérubin et volavit.
i iAs.E8.
332 LEGENDES PIEUSES
Deus pujet sobre Chérubin À volet. Aona, li maire de Samu-
bel, dis atresài : Dominus ascendtt ceios et ionat, Nostre Sein-
ner pujet sobre los celz <k tonet. Â(|uesta8 causas e moutas
215 autras son trobadas en la lei, que portan guarentia de la soa
ascencion. E per zo car el sez a la dextra del seu paire aoras,
diz David : Dixit Dommus Domino meo : Sede a dextris mets»
Nostre Seinner dis al meu Seinnor : Sez a la mia dextra. E
venrajutgartot lo segle perfuc; per que dizli autrapropheta:
220 Deus manifeste ventet, Deus noster, et non silebit. Deus veora
raanifestameiit, le nostre Deus venra, e non se quezara. Ignis
in conspeclu ejus exardescet, et in circuitu ejus tempes tas valida.
Davau lo seu os^^ardament cremara fux, & tôt entorn el caira
granz tempesta. Tôt aizo qued eu vos ai en aici dih es adim-
225 plit en nostre Seinnor Jesu Christ, e zo que non es ancar
fah, zo er (er) ancar adimplit, aici con es prophetizat. Car li
propheta Ysayas dis: Surgent mortaiet résurgent qui in monur
mentis siint. Li mort levarant sus, ai resuscitaran cil que son
elz monumenz. En aquelia résurrection, rendra a cada un
230 son guizardon, aici con diz li Escriptura : Quia tu reddes
unicuique secundum *
[XX]
[50 r°] fazemenz escomou lo deleh, e le deleh la frequentaciou.
Aizo sun doas cordas, scilicet transgressoria voluntas et transito-
ria voluptaSf ab las qualz cobezeza tira lo mesqui de peccador
5 & enlassa. Deprecemur tgitur Dominum ut nos ab istis funibus
illaqueare non permittat, Preguem nostre Sennor que per la
soa pietat non nos gequa enlassar en aquestas cordas, ab las
qualz nos fossem tyrat ad aquestas nossas & ad aquest conduh
del enfernal espos, ubi erit fletus et stridor dentium. Mas el nos
10 fassa intrar ab las vergenas sapias a las seuas nossas. Ubi erit
gaudium sine fine in secula seculorum. Amen,
1 Lacune de quatre feuillets. Voir l'iatroduction, p. 213.
LEGENDES PIEUSES 333
[XXI]
SANCTI JOHANNIS EVANGELISTE
In illo tempore ïgitur, cum sancti apostoU Domini et Salva-
toris nostri Jesu Christi cetenque discipuli ad predicandum
verbum Dei per singulas quasque provincias orbis terre dirigun-
tur. En aicel temps, quan nostre Senner trames sos apostolz
per lo mont, per predicar la soa paraula, elegi saint Johan 5
apostol & evangelista, fil de Zebedeu, fraire de saint Jacme,
le qualz era vergens. Aquest amava mais nostre Senner delz
autres discipolz, & Tadormi desobre son pegh, & aqui bec de
la sancta font de Tavangeli de nostre Seinnor. Aquest sainz
Johanz, domenz qued an-[50 v°]-nava predicantravangeli de 10
nostre Seinnor [50 v°] Jesu Christ en la terra d'Asia, venc en
una ciutat qued avia nom Effesum ; & aqui predicava la pa-
raula de Deu. Venc a saber al seinnor de la vila e fez lo penre;
e dizia li que crezes la lei de l'emperador e tolgues se de la
prédication d'aquel Jesu Christ, qued el annava annunciant. 15
Sainz Johanz respondet e dis : « Oportet obedh^e Deo magis
quant hominibus, Meilz es qued hom obedisca a Deu qued alz
homes. Et eu, diz el, non reneguarai mon sennor Jesu Christ,
ni me laissarai de la prédication, entre qued aia consummat
lo cors qued eu ai acomensat. » Cant aquel bailes de sa vila 20
auzi aizo, fez escalfar unaplenachaudera d'oli, &, domenz que
buillia, fez lo gitar intre. El estet aici sans et salz, en Toli,
con si fons aigua en que se bainnes. Aquel bailles, quan vi
aquesta meravilla, estet esperduz, e fez Ten getar san e salv,
e vole lo far estar franc ; mas temps lo mandament de Tempe- 25
rador e non vole annar contra la soa lei. Mas comandet qued
hom lo menés en eisseil, en una isla qued era appellada Path-
mos. En la quai el escrius Apoca-[51 r°]-lipsin, e quan Tac es-
crih, trames lo a las set gleisas, qued avia bastit en Asia.
Primerament i escrius aici con avia vist lo fil de la ver- 30
gêna, sedent en sa cadera, & vint & quatre veils & quatre bes-
tias qued estavan denan el. Aquellas quatre bestiassignifiavan
las quatre evangelistas, e non vos direm Testoriaminga aoras,
car trop serian longas novas. Pois escrius los dotzc milia
334 LEGENDES PIEUSES
35 tribps del[z] sers de Deo, qued eran entreseinna[t] elzfronz; e
pois con li set angel canteron cada us ab un corn, si que tem-
pesta, e fox, e sanx en cadia en terra. Aqui vicon li tersapartz
de la terra dévia cremar, e li tersa partz de la mar esdevenia
sanx, e con li tersa partz de las estelas perdian lur clartat.
40 Aqui vi e conoc de quai manera eissia fums del pos d^eufern,
& con le fumps engenravaligostas. FoUas ligostas aviaen ai-
talz; certe nichil aliudnisi demones; nulla autra res non era
mas diabol; & aquestas ligostas avian poder de nafrar totzcels
que non eran seinnat del sanc de Tainnel en lur fronz. Aizo
45 deu tôt esdevenir & esdevenra a la fin del segle.
Li libre qued vos avem dih desobre, era cada uns [51 v*J .
claus de set sennalz; & en aquelz libres era escrih le caitivers,
e li mortz, e li clamors delz aucis, e li fins del segle. Tôt aizo
escrius sainz Jobanz aici con o avia vist. Et escrius con sainz
50 Miquelz se combatet ab lo serpent, zo es ab Lucifer*, le qualz
era le plus autz angelz el plus belz de totz los autres, e con
esdevenc aici fers & aici espautevolz, per Torguil que fez. Car
can Deus Tac fah aici bel & aici precions, & el se sentit tan
autz e tan poderos, en la gloria, dis a se meis : « Ponam sedem
55 meam ad aquilonem et similis ero Altissimo. Eu pausarai ma
cadera el plus aut lue del cel, e serai semblanz al Autisme.»
Per aquesta paraula, aici con era plus belz, esdevenc lag &
horribles & dragos granz & antix ; & sanz Miquels getet lo del
cel a la terra. Tôt aizo escrius en son libre, e la figura de
60 TAntechrist que venra a la fin del [segle], lo quai afiguraqued
aura set caps del règne & des corns de poder. Si eu aici con
dih vos ai vos volia aplanar Testoria, non séria oi en aquest
jorn dicha. Pois escris Tesdeviniment del juizi, e la mort de
l'Antéchrist, el gran torment del diabol que sofrira en [52 r*}
65 enfern, ab aquelz que per lur peccat seran sei parzoner, e con
resuscitarem tuh, e pois con Deus fara cel nou & terra nova,
e con nostre Senner faralojutjament, e con se voira demons-
trar aici con li juzeu lo meseron en la cros. Tôt aizo escris
sainz Johanz en aquella ysla on estava eissillatz.
70 Pois esdevenc que le consolatz de Roma aucis Temperador
de Roma, Domicia qued avia nom, le calzdecassavatotz aioelz
« Ms. lutifer.
LEGENDES PIEUSES 335
que predicavan lo nom de Jesu Christ. Car toUia lur drechu-
ras al consolât, auciseronlo. E tuh li près qued el ténia nisei
bâillon par lo mon foron desliure ; e li eissillat foron restaurât
en lur pais. Sainz Johanz & tuh aquil qued eran ab el eissillat 75
en la isla de Pathmos s'en torneron en la ciutat d'Effesum.
En aquella ciutat prediquet lo pobol ; e cant Tac tôt tornat a
la fen de Jesu Christ, li evesque qued el avia establit en Asia
li pregueron qued escriuses los fah de Jesu Christ e que par-
les esperitalment, car li autri evangeliste avian escrih los fah 80
de Jesu Christ carnalment. Adonx sainz Johanz acomensetson
avangeli, e dis : « In prmcipio erat verbum, » Aizo fon Taco-
mensamenz [52 v°] de son avangeli.
Aprop lonc temps, can sainz Johanz ac visent lonc temps,
venc nostre Seinner* & dis li : « Veniyquia tempus est ut epuleris 85
in convivio meo cum fratribus tuis, Venen, car temps es oimais
que tu manjes el meu conduh ab tos fraires. » Sainz johanz,
cant auzi la paraula, ac gran gauh. E can venc lo ditmenegue
aprop, el fez ajostar tôt lo pobol de la ciutat d'EfFesum a la
gleiza, e prediquet los, & amonestet los, e diz lur que nostre 90
Senner Tavia appellat, & qued el non podia plus estar en
aquest segle. El cant ac dig aizo, totz le pobolz acomenset a
plorar & ac gran pietat del seu departiment; car en el avian
tan bon paire & tan bon capdel de lur armas. Adonx sainz
Johanz acomenset a pregar nostre Seinnor & a dire : « Sen- 95
ner, tu qui es solz salvaire, le qualz as conquestat aquest
pobol per la gloriosa passion del teu fil, que perman en las
toas obras, tu, Senner, lo capdella totas horas, el garda de
totz malz, & voilla qued eil permainnan elz tiens mandamenz.
Seinner, autz la mia preguera& esdreisa aquest pobol teu. ». 100
Cant sainz Johanz ac aici prédicat e [53 r°] dih tôt aizo, fez
se cumenegar, e puis cumeneguet tôt lo pobol ; e fez far sa
sopoutura davanTautar, e davan lo pobol colguetse intre totz
vius, e fez se cobrir; et en eis pas li sopoutura fon plena de
nianna que fon cais farina, e moût granz claritaz resplandi 105
laintre en la gleisa, de guisa qued anc nuilz hom non poc es-
tar en pes. Et aici sainz Johanz transpasset d^aquest segle.
Aizo es aquel sainz Johanz del quai nostre Senner avia dih
i Ms. .s.
336 LÉGENDES PIEUSES
a saint Peire. « Sic eum volo manere quoadusque veniam. Tu
110 vero, sequere me. Eu voil qued aquest estia en carn entro qued
eu lo vengua querre ; mas tu penras marture per me, aici con
eu fiz per tu. » Ara preguem nostre sennor saint Johan, que
per la soa merce & per la soa pietat, pregue nostre Sennor
qued el nos lais far en aquest segle aquellas obras per que
115 puscam aver la soa gloria perpétuai. Quod ipse prestare digne-
tur, qui vivit et régnât,
XXII
VITA SANCTI SILVESTRl, PAPE ET CONFESSORIS
Silvester igitur, nrbis Rome episcopus, cum essel infantulus, a
vidua matre sua, Justina nominey traditus esc Cinno presôytero,
Cnjus [53 v°] et vitam iminitatus et mores ad summum apicem
Chris tiane religionis attigit. Factus juvenis (juvenis), hospitali-
5 tatem tota nnimi diligent i a exhibebat, Can sainz Selvestres, que
fon apostolis de Roma, era enfans, sos paire mori, & sa maire
remas, e comandet lo per esseinnar ad un bon home preveire,
qued avia nom Cjrin. Aquest preire essennet lo & estruis lo
de bonas costumnas e de bona vida e de bons fahg.
10 Esdevenc qued, en aquel temps que fon ja talz qued granz
& avengutz fon, venc en aquella ciutat on el era uns bons hom,
qued avia nom Timotieu ; et era venguz de la terra d'outra
mar, d'Antiocha, e predicava la fen de Jesu Christ. En aquelz
temps era granz persécutions delz messatges de Deu,que neis
15 li evesque non los auzavan recebre en lur alberx. Sainz Sal-
vestres non laisset, per nuilla paor ni per nuillatemensa, qued
aquest non receupes en son alberc <k que la soa bona vida e la
soa predicatio non lauzez e non manifestes al pobol. Aquest Ti-
motheus prediquet en aquesta [54 r°] vila un au & très mes la
20 fen e le veritat de nostre Sennor Jesu Christ, & converti moutz
pobolz e montas genz.
Venc a saber al veguier de la vila qued aquest Timotheus
predicava e convertia aici las gens. Trames la messatges, e
fez lo penre e mètre en carcer ; e fez lo tormentar & destrein-
25 ner, que se tolgues d'aquella prédication e se tornes a lur
deus e sacriâzes a las jdolas. El, aici con fortz messatges de
LEGENDES PIEUSES 337
Deu, estet ferms en fen, e per nuil torment quedeilli fezessan
non lo pogron moure de la vera fen de Jesu Christ. Cant le
bailles o vi, fez li taillar sa testa. Cant venc la nogh, sainz
Silvestre, ab totz los christians qued el i poc aver, lo 30
portet a sa maison, e pois fez o saber a l'evesque Melchiadem,
e preguet li qued i vengucs. L'evesques canto auzi, venc i ab
toz SOS preveires & ab sos clergues, e sagret son martir.
Pois preguet Tevesqne unabona fenaena, una christiana qued
avia non Therone, que li laisses lo cors, e sebeliria lo en son 35
ortjuxta la sepultura de saint Paul. Cant li Christian qued
eran aqui auziron aizo, plac [54 v°] moût a totz, & sebeliron
aqui lo cors moût honestament; puis us cada uns tornet a sou
alberc. Tarquinius, aquest veguiers, comandet e fez penre
saint Silvestre, quar el se pensava qued el agues agut aver de 40
saint Thimothieu, e fez lo venir davan se : « Si tu non me
rendes Taver d'aquest escumeneguat, cui tu albergavas, eu te
farai tormentar moût aigrament. » Sainz Salvestres dis li, e
monstret li per mout[z] guarenz qued el non avia agut d'el
dener ni mezailla. Cant Tarquinius 0 auzi, dizli que, si non lais- 45
sava aquella fen christiana, e que [non] sacrifizes a lasjdolas,
qued el lofariamorira greu mort. Sainz Salvestres respondet,
e dis li:« Tu, mesqui, sapias lo que seras tormentatz en dura-
ble torment, si non creses en nostre Sennor Jesu Christ. »
Adonx fon Iratz Tarquinius e fez lo mètre en carcer, e dis li : 50
« A greus tormenz te farai ades morir. » Sainz Salvestres
respondet, e dis : « Eu te parlarai per la sentencia de l'avan-
geli : StuHe, liac nocte auferetur anima tua a le, ut tormentar
que christianis temporalia ivrogasti, tu eterna recipias, et inter
ipsa tormenta hune esse Deum^ quem christiani colimus, reco- 55
ffnos-[55 v°]'Cas, Fol, en aquesfca noh te sera touta li toa
arma, qued aquelz tormenz temporalz* que tu fas alz christians,
que tu lo[s] recepias lai durablament; e domenz que tu seras en
aquelz tormens tu reconoisseras qued aquest es verais Deus
lo quai nos au tri Christian colem e crezem. Et adonx prova- 60
ras e conoisseras qued aquest Thimotheus non es escumene-
guatz, aici con tu Fapellas ; anz es martyr de Deu. » Ab ai tan
el fez liar saint Salvestre & mètre en la carcer; & el annet
* Ms. tempérais (p simplement barré).
23
33? LEGENDES PIEUSES
manjar. E dorn-ssz -[nei e'. nLinJava, li renjansa de Deu fon
^>5 rriani testai:!. Car ii:i ■:::i sîi:.z Si-vestres li a via dih, uns os
entraniverà-E:'. *; en sa j j.î, le 'lalz per :milla art de metge non
Ji pO'i ei-er irah. E: C'y "et à-? ;? aque-la hora, ^ sufferc moût
grarj 'îoior entro a la ri^e; \ non: et a ionx» segon la sentencia
do saint Salvêatre, qued el li avia dih, transpasset del segle.
70 K la primera hora del Jorn, eu la quai el avia menassat ad
aucir saint Salvestre, el fou portatz a la sopoutura e fon
scbeliz.
Âdonx annet sainz Melchiades Tevesques a la carcer, ab totz
lo.s christiaus, 6i traisseron en suiut Salvestre ab gran gauh
75 6i ab gran [55 v*^ houor. Vengron denant el tuh aquil que
pcr lo rnandaïuent de Tarquinii li avian fah mal, e geteron se
a gonoillos davau sos pe?:, e pregavan li que per la soa merce
pregues nostre Sennor per elz, qued aitalz causa non lur
esdevengiies, quo era esdevengut a Tarquini.
80 Sainz Salvestres, can fon d'état de xxxa anz, Melchades
Tevesfqjues en fez diaque. Toz los autres clergues passavade
totas bonas costumnas. Pois non triguet guaire que fon ador-
denatz a preveire. Adonx li donet nostre Senner tan gran gra-
cia, qued totz le pobolz can lo vezia n'avia gauh, e dizian tuh:
«5 « Aquest es sers de Deu. » Fî^at aulem aspectu angeltcus, set*-
moue nilldus, opère saiictus, corpore integet*, ingénia oplimus,
consiiio magnuSy fide catkolicus, spe pacientissimus , caritatedif-
fufsjsus. Esgart avia d'angol, en paraula era resplandens, en
obra era sainz, en cors era entiers, per engien era bons, en
\)i) conseil era granz, en fez era catholicus, en esperansa sapis,
en cîiritat larx. Mas car lioin non pot dir totas las bonas
costumas (lucd el avia en se, diguam en una partida.
h]s(lovenc que sainz Melchiades Tevesques mori, e trans-
passet d'aquost segle a nostre Semnor *
\)Ty [5() r° J la salut dclz homes ; e per lo poder del seu nom, le
diabolz, aquest diabolz, fos confondutz.
Can venc lo torz jorn, Tapostolz sainz Peire appareca
saint Sahvstro, o dis li : « Pren aquestz très preveires ab te,
Thooiloruni & Dionisium & Kelicissimum & aquest dos dia-
UM) quos, Ilonoratum «is: llomanum ; «k enanz quedescendas aldra-
» l.aouniMl'iin ftHiill«-l. Voir ci-dessu?, p, 213.
LEGENDES PIEUSES 339
gon, fa sacriûzî a Deu e canta messa. E pois cant auras can-
tat, penra[s] aquest cadenat, e venras laintre & atrobaras la
luga on jatz le dragos; & ha i portas de coure, et en aquellas
portas ha anelz. Ë cant i seras, clauras las portas, e passaras
la cadena per aquelz hanelz, e pois pestellaras la ab aquesta 105
clau, e diras : « Aquestas portas non sian mais ubertas entro
al jorn del juizi. » Pois pren la clau, e sotterra la aqui on te
voiras. Levet sus Tapostolis, e fez o aici con sainz Peire
lui ac dihen vezion.Le serpenz estetpois enclausetotz temps
mais la estera entro al jorn del juizi. Can venc a cap de Tan, 110
li pagan agron prohat que le serpenz era vencuz e crezeron
en nostre Seinnor Jesu Christ, e feron se batejar.
En aquel temps Constantis Temperaire reinnava, e trames
SOS messatges per totas las terras que prezes hom los cristians,
per tôt aqui on hom los trobaria, e qued los fezes hom sacrifiar 1 15
mal grat d*elz a las ydolas ; e comandet que cil que non volrian
sacriôar fossan tormentat ; e fez n'aucir tanz per aquest co-
mandamenz que non fon nombres ; e per aizo nostre Seinner
feri lo de lebrosia. E per aizo sainz Salvestres escondet se ab
totz los sieus sus [56 v**] en un pug, en una balma.
D'aquella lebrosia non poc garir remperaire,per nuilla 120
medicina que metges li fezes, ni per nuilla art d'encantador.
Can venc tôt a derrier, li evesque d'aquest capitoli doneron
li aital conseil que fezes far una piscina laintre el mehg del
capitoli, e que fezes [aucire] tant d'efanz vergens que delsanc
fos plena aquil piscina, e pois qued hom Tescalfes, e que se 125
bainnes inz;' & en eis pas séria sanatz e gueritz. Et ab aitan
l'emperaire fez penre totz los enfanz qued hom poc trobar que
tetessan. Cant venc ad aquel jorn qued hom hac establit per
aucir los enfanz e que l'emperaire se dec bainnar el sanc, el
s'en annava al palais, e domenz qued el s'ennanava, e lo li venc 130
encontra una granz compainna de femenas ; & ac n'i tant que
non fon nombres ; e vengron tiran lur pelz, & escoissendent
lur caras e lur pehg e tôt cant agron, e ploreron e crideron
tan fort qued aco fon eissit de tota auzida. L'emperaire e tuh
li rie home qued eran ab el, can viron aizo, agron gran fereza, 135
& acomenset a demandar l'emperaire qued era aizo. Dis li
hom qued aco eran las maires delz enfanz qued hom dévia
aucire, del cui sanc hom dévia implir la piscina. L'emperaire,
340 LEGENDES PIEUSES
140 cant o auzi, ac gran fereza e refuget, e dis que ja aqaist
fellonia non séria fâcha, e dis qued aitanz peccatz anria fah
vers Deu, quanz enfanz anria mortz. Et aici II pietatz del
emperador venquet la crueleza d'aquelz eyesques d^aqnella
lei. E can fon al palais, appellet totz celz [57r**] qued eran
145 aqui, e dis lur: « Aujas me trastuh aici co es. Per que auciria
eu los etifanz que mal non me meron ni peccan de ma ma-
lautia? Ni per que escamparai lo sanc del non nozent pobol
per la mia salut? Ja es lo nostra leis, que, cant nos em en
batailla ab nostres ennemix, que totz hom qued i auciza*
150 enfant de nostres enemix deu perdre la testa. E pois que nos-
tra leis veda qued hom non auciza los enfanz de nostres ene-
mix, ben sembla que plus fort déjà esser delz nostres tengut.
E si nos autri, de oui eisson las leis, las frainniam, deuriam
esser colpavol e subjet a la lei. »
155 Can Tcmperaire lur ac dih aquestas paraulas et montas au-
tras, e moût granz pobolz ora vengutz aqui par vezer aqaest
marturiameiit, dis l'emperaire : « Redda hom los enfanz a las
maires & a cada una doue hom gran aver, qued, aici coneran
vengudas iradas |)cr la mort que lur enfant devian recebre,
160 aici s'en tornonalcgras e pagadas per lur enfanz e perTaver.»
Et aici fez rendre los enfanz a las maires ab gran aver aoada
una.
Can venc la nohg de seguentre, el vi en vision qued esteron
denant el dui apostol e disseron li ; « Nos dui em Paire &
165 Paulz. Car tu non as volgut far tan gran maleza, qued as
tempsut escampar lo sanc delz non nozenz, nostre Seinner
Jesu Christ nos ha trames aici a te, que te donem conseil de
recobrar sanitat. Et aujas zo que nos te direm. Salvestres
Tapostolis s'en es fugitz, per las toas [57 v**] persécutions^ à
170 esta rescondutz ab totz sos clergu«s en una cava, sus el puhg
de Syrap. Tramet lo querre. Ecant er vengutz, aqueltemons*
trara la piscinade Deu, en la quai can te seras plu mbiatz très
vez, & auras rennegat las jdolas e croiras en nostre Seinnor
Jesu Christ, tu recebras sanitat de ton cors e tei peccat te se-
175 ran perdonat. »
* Après ce mof, la fm de la ligne, une douzaine de lettres environ, a été
grattée. On n'en dislingue plus rien.
I
LEGENDES PIEUSES 341
Can Temperaire reisidet, trames cavaliers al puh g deSjrap,
on sainz Salvestres estava en oration. Can sainz Salvestres vi
los cavaliers, crezet que fos vengutz a la corona de marturi,
& acomenset a dir a sos clergues : « Ecce nunc tempus accep-
tabile ; ecce nunc dies salutis. Vec vos lo temps acceptable e 180
vec vos los dias de salut. Nostre Seinner vai per aqui mezeis
entre los homes ; e, si nengus lo vol seguir, denegue se me-
zeis e leu sa cros, e seguia nostre Seinnor I » E cant ac fâ-
cha sa oration, près pas de totz. E vec vos que li cavalier foron
vengut, que li disseron que J'eraperaire lo demandava. 185
Ab aitan sainz Salvestres s'en acomensa ad annar, e sei
clergue acomenseron lo a seguir, xxx. preveire qued iavia&
cinc diaque, ab autra gran compainna de clergues ; e dizian
que maisamavan recebre mortab el que visquessan en aquest
segle senz el. Et en aici venc el palais de Letras. Can fon aqui, 190
annethom dira Temperador que Salvestres era venguz & es-
tava a la porta ab sos clergues. Comandet Teraperaire qued
hom lo laisses intrar ab très preveires ck ab dos diaques. E
can fon intratz e Temperaire lo vi, [58 1°] & el se leva ben
tost, e va li encontra, e saludet lo primers, e dis : « Ben sias 195
tu vengutz, car gran gauh ai car eu te veih. » Respondet
sanz Salvestres : « Pas e Victoria te sia donada de cel ! » Can
l'emperaire Tac aici bonament receuput, comtet li tôt con li
era révélât, & pois acomenset li a demandar quai eran aquil
deu qued aici Tavian visitât. Respondet sainz Salvestres, e 200
dis li ; « Uns Deus es totz solz, lo quai nos colem, que fez tôt
cant es. Sanz Peire e sainz Paulz, que te son apparegut, non
son miga deu, mas sers de Deu son ; e per la fez qued agron,
plagron tant a nostre Seinnor qued el vole que mais agues-
san de sancteza que li autri; e son primer el nombre delzapos- 205
tolz e de totz los autres sainz, e primerament prediqueron la
lei de Deu a las genz e sancta gleisa près comensament
d'elz ; e cant agron complit tôt lur offici de Tapostolat, & eil
transpasseron d'aquest segle ab corona de martiri, & son ao-
ras amie del poderos Deu. » 210
Can l'emperaire auziaizo, fon li moût bon, &preguet li que
si eL avia en la soa gleisa las images d'aques penchas eu al-
cun lue, que las li monstres, qued el pogues conoisser e sa-
ber si aco eran aquil que li eran apparegut. Adonx l'apostolis
3(3 LEGENDES PIEUSES
215 comandet a un de sos diaques qued annes qnerre las images
delz apostolz. E cant las ac aportadas. e Temperaire las vi,
acomenset adir : a Ben saicertament qned aizoeslisemblansa
d'aquelz que m'aparegron en vezion. Aquist me disseron :
« Tramet querre Salves-[58 V^J-tre Tapostoli, & aquel te mons-
220 trara la piscina de Deu. E cant te seras lavatz en aquella pis-
cina, e tu seras sanatz de ta malautia. 0 RespondetsaînzSal-
vestres, e dis ; a Auz me, reis, e demanda la piscina e ]a
quer, qued es necessaria a la toa salut, per aital manera: pri-
merament crez Jesu Christ, lo âl de Deu, que par aîzo veno
225 del cel, qued en aquesta piscina se manifestes a celz que Jo
creirian. d Respondet Constantis, e dis : « Si eu non o crezes,
ja non te agra trames querre.» Adonx li dis sainz Salvestres;
((Ara tota aquesta senmana dejuna, & toi aquest(z) vestir de
polpra, Si vest un celitz, & non escas de ta cambra, e prega
230 ades nostre Seinnor ; e manifesta lo peccat e la error en qued
has estât, car perseguias los christians et Jesu Christ, lo Sal-
vador de las armas. Los temples comanda qued hom clausa,e
qued hom non sacrifîze a las ydolas. Totz los preisoners e
totz celz que tens en eissil, o de calque manera sian en ta
235 preison, tu los desliura, & per tota aquesta senmana fa gran
aliflorna . » L'emperaire dis : (( Verament crez eu que las
ydolas non an en se nuilla deitat, e toz hom es mesonegniers
que diz ni crez que li ydola sia deus. Et eu sai verament qued
aquel Deus poderos, que sana los cors, lava las armas delz
240 psccatz. »
Can l'emperaire ac dih aizo, sanz Salvestres li pauset laman
sus el cap, e crestianet lo.Et fez venir totz los christians, e dis
lur que dejunessan 6l estessan en abstinencia: 0 Aici con feron
aquil de [59 r**] la ciutat de Niniven per la prédication de Jo-
245 nas la propheta, que dejuneron très jornz à aici escaperon de
la ira de Deu, e nos escaparem de la persécution delz malz
homes.»
Cant tuh agron fah lur dejuni e complit, sainz Salvestres
venc a Temperador, e disli: (( Auz me, reis : aquist piscin^fc'
250 es tota aigua ; mas tant granz es li vertutz del nom de Jesm
Christ que li aigua lava los peccatz e dona sanitat. » Can.
venc al sapte al seras, e sainz Salvestres comandet a Tempe-
rador que s'en intres el palais, e fez acermar aigua, e seinnet
LEGENDES PIEUSES 34 3
la; e cant Tac seinnada, comandet aTemperador qued intres
intre. Ecan fon intre, el nom del Paire e d^l Fil e del Saint 255
Esperit, plumblat lo très vegadas en Taigua & oinz lo de
cresma, e dis: « Seinner Deus, que mundiest la lebrozia de
Nahaman Siro en flum Jorda, e per aigua oberguist losoilz de
cellui qued era natz cex, et a saint Paul Tapostol per lo bap-
tisme rendest lo vezer, e de perseguedor qued era de la toa 260
sancta gleisa en fezist maistre & esseinnador de las genz,
Seinner, tu munda aquesttieu sers Constantin per Taigua e
perlo Saint Esperit, qued aici conel erapersegueired'aquesta
toa sancta gleisa, aici sia d'aici enant defendeire de totz celz
que mal i volrian far, per nostre Seinnor Jesu Christ, lo tieu 265
fil, qui tecum vivit et régnât Deus in unitate Spiritus Sancti per
omnia secula seculorum, »
Can tuhg agron respondiit : a Amen n^ e lo venc subtaria-
menz una lus de cel e resplandi moût [59 v^*] fort, e tota li ai-
gua acomenset aici a frémir con fa li sartais cant es sobrel 270
fuc. Et aqui eis cant Constantis eissi de Taigua, fon aici monz
& aici sans con lo jorn que fon natz, e diz e confesset qued
el el baptisme avia vist Jesu Christ.
Can venc Tendeman, & el donet aquesta lei que tuhgado"
ressan e crezessan Jesu Christ, le qualz Favia mondât de la 275
lebrosia. Al segon jorn donet que totz hom que no lo creiria
fos tormentatz. A.I tertz jorn donet que totz hom, que faria tort
alz christians, perdes totas las causas qued auria. Al cart
jorn donet privilegi a Fapostoli que tuh li preveire del mont
Tobezissan, aici con fan li rie home los reis. Al cinque jorn 280
donet que cada una gleisa agues aquest poder, que si nuilz
hom colpaolz podia venir ad ella, d*aquella colpa fos soutz e
disliures. A Toctau jorn & el laisset sas albas e venc s'en
sans e salz a la confession de saint Peire e de saint Paul, e tolc
sa corona, & agenoillet se, & acomenset moût piatosament a 285
dire que non era dignes d'intrar en tant saint lue, & fez aqui
sa oration ; & aici cant ac receuput lo ben fah de nostre Sen-
nor, tornet s'en ab gran gauhg en son palais.
Can venc Tendeman, & el felz acomensar denant son palais
Una gleisa en honor delz dotze. apostolz. Can venc a l'autre 290
jorn, el capitoli, qued era el seu palais de Letras, acomenset
a bastir una gleisa en honor de saint Johan ; e donet aquesta
34 4 LEGENDES PIEUSES
loi : « Conogut sia a toz que [60 r*] nos em tornat coledor de
Christ, (!y: avem f^^h una gleisa el mei de nostrsd palais el seu
205 nom, per tal que plus cert en sias, en la qufil toz le pobolz li
renda gracias essemps ab nos. »
En aquel temps li juzeu e 11 phariseu agron desputaiioDS
ab saint Salvcstre. K cant agron desputat li un e 11 autri, e lo
se levet uns oncantaire, qued avia nom Zambn\ & acomenset
300 a dir : «Si Salvestres nos pot vencer per zos argumenz, nos
laissarem nostras paternalz lois e segrem la lei d*aquel en-
cantador Jesii Christ, cui nostre pairo crucifieron. Mas ta,
seinner emperaire, auz me de zo qued eu te dirai : Fai querre
un taur fort brau, el quai demonstrem la vertut del poderos
:^05 Deu. Et aqui poires saber e conoisser qualz de noz diz ver;
car eu non voil ab el contendre per paraulas. »
•Ë vai l'emperaire, e fez lo querre. Et en aquel meja, sainz
Salvestres acomenset a demandar a Zambri per que fazia de-
mandar aquest taur. Respondet aquest encantaire Zambris, e
310 dis : « Car nnilla vertutz non pot ren valer contra lo nom de
nostre Seinnor. Car nostre primer paire, can fazian sacriûze
a Deu, et ofFrian taurs braus, dizian aquest gran nom de Deu
en Taureilla del taur, 6: en eis pas getava un bram, e cazia
mortz. Nuilla res non es qued aquest nom auja, que viure
.315 pusca. )) Sainz Salvestres respondet : a E con Taprezist tu
donx, si non Tauzist? *> Zambris dis : « Cujas tu donx qued
eu Taprezes per auzir rlire, zo que nuilla res humana, sia
l)e3tia o aucelz, sofFrir non pot? » Sainz Salvestres respon-
det: « Diguas 0 a Tempera-fôO v**]-(]or, de quai manera Tapre-
320 zist, si non Fauzist. » Zambris dis : « A te non tain qued o
sapias, car enemix es d i\z juzeus. » Respondet l'emperaire:
(( Con non Fapresist donx legent? » Zambris dis : « Aquest
nomps non pot esser escrih en pel, ni en carta, ni en peira, ni
en fust; car cel que Tescriu alo mor,& aquo en qued es escrih
325 es dissipât. « Respondet l'emperaire e dis : « Diguas nos tôt
simplament con Tapresist. » Zambris Tencantaire dis : « Set
jornz dejunei. Cant venc a cap de set jornz, & eu hac una
conca d'argent tota nova, en la quai non avia hom fah nuill«i
ren, & impli Tom tota do Taigua d'unafont. E can fon plena,
330 benezi l'om. E pois ab lo det fez hom las letras, qued essein-
nan lo nom, e reten l'om en son coratge. Et eu en aici,deus
LEGENDES PIEUSES 345
lo matin entro al seras, fazent ades las letras, poînnei en
apenre, si qued a penas lo pue retener en mon coratge. Et
aici poira hom conoisser si eu die ver, o qualz de nos dos deu
esser crezutz. Car tensonar poiriam pro a dir aco e Taire. » 335
E domenz qued Zambris dizia aquestas paraulas, e vec vos
qued hom aduis liât lo taur ab cordas. Adonx Zambris aco-
menset a dir a saint Salvestre : a Ara, Salvestre, penran fin
li argument de las toas paraulas. Ara diguas lo nom del tieu
deu en Taureilla del taur, e poiras saber si tu coles lo pode- 340
ros Deu. 0 eu lo dirai, e trastuh tornon se pois a la nostra
religion. » Can li fizel de Deu auziron aquesta paraula, ab
pauc tuh non foron torbat ; [60 bis r°] mas sainz Salvestres
estet ades ferras & alegres, e dizia qued on majors enpachers
aurian del diabol, e nostre Seinner majors a'toris lur faria, o 345
plus fort losacorreria, con eillosvenquessant; car necessitatz
era qued en Tacomensament li fez de celz que creirian en
Jesu Christ fons fermada per miracles.
Trastuh acomenseron a dire qued Zambris disses lo nom
del seu deu en Taureilla del taur, per vezer si era vers aici 350
con el o avia promes. Vai s'en al taur e dis li lo nom a Fau-
reilla, & en eis pas le taurs cazec, & getet un bramp, e li oil
sailliron li de la testa, e fon mortz. E can li juzeu 0 viron, le-
veron se tuh, & acomensenseron ad escarnir saint Salvestre
& a dir queben era raesoneguatot cant dizia; et acomenseron 355
lo moût fort a repenre. Sainz Salvestres quis ajuda a nostre
Seinnor et acomenset a pregar a Temperador que fezes far
pas. Can fon tôt calât, sainz Salvestres acomenset a dir : « 0
vos, prince e pozestatz, e totz le pobolz romans cuminalment,
aujaz me ! Le meus seinner Jesu Christz, cui eu predique, en- 360
luminet los cex, alz sortz rendet auzir, alz mutz parlar ; a celz
que non avian poder en lur mas rendet sanitat; alz clops
rendia annar ; los lebros mundava ; lo[s] paralitices sanava, e
los mortz resuscitava ; per que es ben semblanz qued aquest
nomps no sia de Deu, si de diabol hoc, qued aquest taur aia 365
mort, si non lo pot far reviure. Cel es enemix de vida e de
salut, qui [60 bis v°] zo que viu aucis, e, cant es mort, non o
pot resuscitar. » Adonx Zambris escoissendet se totz, & aco-
menset a dir : « Seinner emperaire, car aquest Salvestre non
pot hom vencer per paraulas, comanda li que fassa quedo- 370
34 6 LEGENDES PIEUSES
com e qe non o parle tôt. » Siiinz Salvestres respondet : cVolz
qued eu el nom del meu Seinnor Jesu Christ resuscite aquest
taur, que tu as mort? » Adonx dis Zambris: «Totatressi con
tu poirias volar, tôt atressi poiras resuscitar aquest taur. »
ri75 L'emperaire respondet : « Meravil me d'aquesta engressesa
que tu as, que tu as dih qued hoi mais non tensonasses & que
per fah monstrasses qualz deuria es-ïer crezntz. Et el diz e
promet que resuscitaralo, e tu dis & affermas que non o poi-
ra far; per qued es drechurera causa que, si el resuscita lo
380 bou, que tu crezas qued aquest es verais Deus per lo quai le
mortz er resuscitatz, 6i aquel es verai diabolz, perlo quai nom
le taurs es mortz et non pot reviure. » Adonx Zambrls res-
pondet, e dis e covenc a Temperador que, si Salvestres podia
resuscitar lo taur, qned el laissaria tota la lei delz juzeus e
385 tornaria se a la religion delz christians.
Vai sainz Salvestres, & estendet sas mas vers lo cel, & aco-
m[en]set a pregar nostre Seinnor <Sl a dire : « O tu, Seinner
Jesu Christ, eu nianifest lo tieu nom, auzent totz, & auz me,
que soi tos sers, qued aquest taurs reviva per l'apellament del
3'iO tieu saint nom, le qualz es mortz per Tapellament del diabol;
qued totz aquest pobolz te conosca o ma-[61 r**]-nifeste la vertut
del tieu gran poder, qued ara es temps e sazos que li vertutz
del tieu nom se demonstre. » Pois cant ac dih aizo,& el s'ap-
propiet del taur, e dis li : « El nom del meu Seinnor Jesu
395 Christ, lo cal crucifieron li juzeu sotz Ponz Pilât, te die eu
que tu levés sus. » Et aqui eis le bous levet sus sans e salz. E
vai ves el sainz Salvestres, e desliet lo, e comandotli que s'en
annes bonament a las autras bestias don era mogutz e que
non fezes mal ad home, ni hom non fezes mal ad el. E cant ac
400 dih aizo, laisset Tannar, & annet s'en tôt bonament & soau.
Et aqui eis tuh li juzeu van se getar a sos pes & clamavan li
merce, que lur perdones, e que pregues nostre Seinnor per
elz. Et Elena, li maire de l'emperador, vezent tôt lo pobol,
se vai atressi getar a sos pes & acomenset li a pregar que li
405 dones penitencia. Et aici totz le pobolz de Roma, e li juzeu,
foron convertit e tornat a la fez de Jesu Christ. E car serian
longas novas de comtar zo qued Helena fez, prennam deus la
fin de la legenda.
En aquella hora aduisseron a saint Salvestre le pobolz
LÉGENDES PIEUSES 34 7
moutz demoniaix, e per lo mandament de saint Salves tre 410
eissian delz cors delz homes li diabol. Pois fez escriure lo nom.
de cada un e nol vole far batejar entro a Pascas, don eran
prop, carli intradade martzera. Aquestfon letrentae cincques
apostolis aprop saint Peire, e tenc la cadera vint e très anz
& des mes & unze jornz. E cant ac complit drechurerament 415
son cors, transpas-[61 v*]-set a nostre Seinnor; e fon sebelitz
el sementeri de Priscilla, qued es a via Salaria, .m. kalendas
januarii. Régnante Domïno nostro Jesu Christo, qui cum Pâtre
et Spiritu Sancto vivit et régnât in secula seculorum. Amen.
XXIII
PASSIO SANCTI BARTOLOMEI APOSTOLI
Seinnor, nos autri sabem, aici con li escriptura o diz, que
très Indias son. Li primera es aquil que se ten ab Ethiopia.
Li autra India s'en ten ab una autra terra, qued ha nom
Medos. Li autra India es al corn del mont, car d'aqui en la
non ha terra, mas li granz mars, que li tocha des l'una part, 5
e des Tautra li régions escura. En aquesta India intret sainz
Bertalmeus l'apostolz. Cant venc un jorn qued el era en una
ciutat d'India, intret en un temple, on avia una ydola qued
appellavan Astaroth ; & acomenset aici con romeus estar aqui.
En aquesta ydola avia un diabol aital que donava respos, e 10
dizia que sanaria los malauz. Los cex, los qualz el essecava,
dizia qued el senz dopte los enluminaria. Tuh aquil home
erant, zo diz, senz lo verai deu, per qued era necessitatz que
le falz deus los escarnis. Per aquest art escarnis le falz
deus aquelz que non crezon lo ver deu : el lur fa venir dolors 15
& enfermetatz & danz & mouz perilz, e dona lur respons que
crezan en el &que li sacrifizon,& quais qued eil sian sanat per
el. Et era semblanz alz folz homes, qued el los sanetz. Aquil dia-
bol non sanan, mas del mal que faut, can s'en [62 r°]laissan,
es vejaire a la foUa gent que los guariscan. 20
Esdevenc que, domenz que sainz Bertalmeus estava aqui,
Astaroth non poc donar nuil respons, ni poc acorre celz
qued avia naffratz. Cant totz aquel temples fon ja plens de
malautz, & cada jorn sacrifiavan ad Astaroth, e non lur
t:ii î-s v.ij-t* T*-r '.\^ . -!■ Eli TLrrit i»* 3(«r pree mi per
■ i-:*r.±i.» :i-r' *. :^t**Li i-m i? t*^^* ?«»x. laed Astarotli
:• ::i'*4 •*■ :.:i* i. --» rxi.-* :* .i? tuLaxza^ asBeroa s'eo
i.: :i.t ti-'i 1. L--f. :i :•; ti l* r*i^ xa Axm dîftbo! qaed
.*. iT-t i:2. B»:.-*: ■: :t*:i . *;L:r±:i: * su* ii a^roa sacri-
iiT 1.1: 2i*:L*^r: 1 .. i if*2Li.i:-.' T-rr :t-» îsr "îess Astaroht
- - ■ -: r vr. \ : : z. l: rr* ; -_ ?. rLr^ :•: x . r: Ixr 1* lix-boix Beiiitz,
* : * : t 7*.? .* t:-*--^^ :-ri- ** i: ri '.eusti pî>» « lîatz que
r.>> •::» .-ir 1. zi-.tr 1:1 l.**:. f-a^ ï-^C'»!^ kor& *)iie Ber-
.'v> li -..*--*. .'i: :•»:.:.! î* I-r:. f - 1:1:. > E»isser»>a aqail qoed
^r-ii i\..: ?îl mIi r^ i:;-?^* 3*r:j.Izie!î5?» Respondei îc
■r.ivoiz : Krz^.z. -r* i-r. ::::*r':5 r»-»i. E' per jiio es vengatz
-^rri a.': -.-r-î'-i :,::TrL?i. :ir: àû^rli ^-eas, cae vos an tri coles,
î.» r.r.a a-.T^»^:'::. 1. *oi. I:- p^is^Aai tririr: c^r entre tan gran
j^,:.\ lo farîi rc^l o - nciss-er. n Res:oadet le diabolz, e dis:
« L car^e!. de «o:. c vT- 5.::i i.ejrre e creps : sa carnz es blan-rfô
V* -ca: .i -ei oil ^on jr/k:.:: .0 :i:is a e^gal e dreh e ben fahg;
«ei cabeii ii cobroa la.* airei.Ia^: !a barba ha un pa:ri f«*ranDa
J5 â' esta Ii moût gent: et es moût bea fahg per cors. Vestitï
va d'^ifia ganîiacha de polpra blanc la; sos mantelz atressi
blarr;x. ab peinai f^re^iosas vermeiilas. Vint e seis anz a portatz
a'fij'-'.z vestimenz. e ja non s'enlagesiran ni s'enveilleziran,
mas totz temps s^^ran aitan b.»! con lo jorn que foron fah.
i9) Atressi a portât sas sendali.is .xivj. anz. que ja non seran si
novas hoc. Cent veg lias s'aqenoilla lo jorn o cent vegadas
la nohg per pregar nostre Seiiinor. Li soa paraula es moût
dousa, e moût auta. Li angel de Deu van ab el, que non lo
laissan lassar ni aver nu il fam ni nuil desaise. Aitalz con es ei^
•V) la cara, aitalz es per coratg \ Nuilz enganz el seu cors* noi^
os. Totas horas es alegres e gauzenz Tôt cant es vez, e to^
cant es conois. Los lengatges de totas las genz parla & ententr •
Kt ancara vos die mais aizo que vos non me demandas: ï ^
an gel de Deu parlan ab el, e fan li saber tôt cant es , & lu- ^
r,0 annun(nan. P] can vos lo querres, si el se vol, el se démons ^^
frara a vos; 0 si se vol, ja non lo poires vezer. Et eu prec^
* Mh. iOTB.
LEGENDES PIEUSES 349
vos que cant Taures trobj,t, que vos li pregues que non venna
sa, per tal que li angel, que son ab el, non fassan atrestal de
me con an fahg de mon fraire Astaroht. » E can le diabolz ac
dih tôt aizo, & el se calet. 65
Torneron s*en aquist, e can s'en foron tornat, acomenseron
[cercar] totz los ostalz delz pelle-[63 r"]-gris ; & totz agardavan
en sas caras e lur vestirs, per tal si conoisserian saint Bertal-
raeu. Et ai ci de dos jornz non feron anc si querre hoc, & anc
trobar non lo pogron. 70
Can venc un jorn, & uns qued avia lo diabol el cors aco-
menset a cridar & a dire : a 0 tu, Bartolraeu, apostolz de
Deu, tas orations me creman tôt. »Adonxdis Tapostolz: a 0
tu, diabolz, eis foras ! » Et en eis pas Tom fon desliures d*aquel
diabol que Tavia tengut près e liât per moutz anz. Pôle- 75
mius, le reis d'aquella terra, avia una fillaqued era lunatica.
E fon li dih qued en la vila era un home, qued avia nom
Bertalmeu, et avia aici getat lo diabol del cors de Tome. E
trames li messatgesle reis que vengues ad el.Vencsainz Ber-
talmeus; e cant fon deuant lo rei, acomenset li a dir le reis : 80
«Ma filla es malament trabaillada ; et eu prec te, se le tiens
plazers es, qued aici con tu as desliurat Seustium, qued avia
estât moutz anz trabaillatz, que tu desliures e sanes la mena
ÛUa. » Ab aitant levet se le reis, & annet ab saint Bertal-
meu la on era sa filla. Can foron laintre on ella era, sainz 85
Bertalmeus Tacomenset ad esgardar, e vi la que fon liada ab
cadenas moût fort, car tôt cant podia penre ni tener, tôt o
escoissendia,&o taillava, & o mordia; per que nuilz hom non
s'ausava appropiar d'ella. Adonx comandet Tapostolz qued
hom la deslies. Responderon aquil qued eran aqui : « E qui 90
ausaria pausar sa man sobre ella?» L'apostolz dis: « Non vos
cal temer, [63 v°] car eu tenc liât Tenemic qued es en ella;
e desliatz la, e pois tolletz li son vestir e lavatz la; e lo
matin e vos la m'aduzes. » E feron o tôt en aici con Tapostolz
lurac comandat. E d*aqui enant le diabolz non la poc tra- 95
baillar ni tener dan.
Tune rex honeravit camelos auro et argento, e de peiras pre-
ciosas, e de rix vestirs, e trametia o lot a Tapostol. Mas anc
tant nol quiseron, de sa ni de la, qued banc atrobar lo po-
guessan ; & pois cant li messatge viron que nol podian atro- 100
350 LKGRNDKS PIEUSES
bar, torneron o al palais. Passet aquel jornz e li nohgr. Gsn
venc rcndeman^ que li alba acomensct a pareisser, & le reis
cra tût soletz en sa cambra, e Fuis era serratz, e Tapostolz
li apparec davant. E foron tuh sol laintre eil dui. Et aco-
H)5 menset li a dir sainz Bertalmeus: « Per que me fezist er tôt
so dia querre ab ton aur & ab ton argent & ab tas peiras pre-
ciosas <k ab tos vestirs? Aquist don son necessari a celz que
queron las terrenalz causas. Eu non voil ni quer nuilla causa
terrenal ni carnal. Mas ai/o te voil annunciar e far saber,
110 que le filz de Deu deinnet venir en aquest mont, e près cani
huraana el ventre de la vergen, e d'aqui nasque(s)t ensemps
deus 6i hom^ que fez lo cel e la terra e tôt cant en elz es. Aizo
fon aquil vergcna que non vole aver paria ab nuil home del
mont. Ella fon primera que vodet al poderos Deu que tenria
115 virginitat. Per aizo die primera que vodet, car deus Tacomen-
sament del segle, ni deus qued [64 r®] hom fon fahg, nuilla
femena non avia fahg aquest vot a Deu ; car ella establi en
son coratge, e dis : a Domine, offero tibi virginitatem meam,
Seinner, eu offri a te ma vergenitat. » Ane aizo non fez saber
120 per paraula ni per semblant ad home, mas solament a Deu,
qued ella estes totz temps vergens per amor de Deu. Can venc
un jorn qued ella estava enclausa en sa cambra, e loresplandi
laintre subtanamenz una clartatz quais de soleil, & apparec
li davant sainz Gabrielz Fangelz. Ella, can lo vi, ac moutgran
125 paor, e dis li Tangelz: « Non aias paor, Maria, car tu conse-
bras un enfant. » Ella cant o auzi, pauset la paor, & dis moût
ardidamenz e moût coratjosa : « Quomodo in me fiet hoc, quor
niam virum non cognosco ? Con poira aizo en me esdevenir,
qued eu non conosc home?» Respondet Fangelz e dis: « Per
130 zo car tu avias promes a Deu verginitat, le Sainz Esperitzso-
brevenra en te, e li vertutz de TAutisme se solombrara ea
te. E zo que naiscera de te sera sainta causa, & appellatz fil^
de Deu.» Aquest, can fon natz, sofferc que le diabolzlo temp^
tes, acel diabolz qued aviavencutloprimerhome, amonestant^
135 que presumis manjar de Talbre queDeus li avia vedat. Aquest
diabol laisset appropiar de se ; car aici con el avia dih al pri-
mer home Adam, per la bocca de la femena : « Manja d'aquest
fruc », e manjet en, & en eis pas el fo getatz de paradis, &
eissillatz en aquest mont, et en [64 v°] aquest peccatengenret
LEGENDES PIEUSES 351
tôt ruhman linnatge, aici sofferc aquest filz de Deu qued 140
aquest diabolz li disses : « Die lapidibus ut panes fiant et man-
duca, ut non esurias, Diguas a las peirasque sian pan & manja,
que non aias fam. » Respondefc el, e dis : « Non in pane tan-
tum vivit homo, sed in omni verbo Dei, Tan solament non viu
hom per pan, mas en la paraula de Deu.» Aquest diabolz, que 145
manjant avia vencut homen, per cel que lo mesprese(s)t deju-
nant perdet sa Victoria. Per aizo era digna causa que cel qued
avia vencut lo fil de la vergen fossa vencutz perlo fil de la
vergen. »
Respondet le reis, e dis : a E cou podes tu donx dire qued ai- 150
so sia li primera vergens, de la quai nasque(s)t ensemps Deus &
hom?» Adonx dis Tapostolz : « A Deu faz eu gracias, car tu
as entendut zo qued eu t'ai dih.Le primers hom fon appellatz
Adam, & aquel fon fah de terra. Aquil terra, de que fon fahg,
era vergens, car ancar non era bautugada per huma sanc, 155
ni non era ancar uberta per soboutura d'alcun mort. E per
aco era digna causa, aici con eu t'ai dih, que cel, qued avia
vencut lo fil de la vergen, fos vencutz per lo fil de la vergena.
Et el, qued avia estât venceire el primer home, tramet ancar
SOS compainnos en totz lux, qued aqui on.poiran vencer, ni 160
conquerre ren, pauson lo titol de la Victoria e del règne
d'aquest tirant. Aici Jesu Christ, qued ha vencut aquest tirant,
princep de mort, a trames nos autres per totaslas terras, que
nos [65 r°] decassem los menistres del diabol, li quai habi-
tant per los temples inz en las ymages, et aquelz homes que 165
los colon getem del poder de cçllui qued es liatz. E per aizo
nos non volem aur,ni argent, nil prenciem, anz lo mesprezem
aici con Jesu Christz lo mespreset. Car nos non volem esser
rie, mas aqui on es le sens emperis e le sens règnes. Car aqui
non aura ja malautia, ni enfermetat, ni mort, ni dolor, ni 170
tristicia, ni ja lue non i poiran aver. Aqui es perpetualz feli-
citatz, & durabla benazuranza, & gauhg senz fin, e durable
delehg. Per zo, reis, te die eu que, pois qued eu intrei el
vostre temple, le diabolz, que vos donava respons inz en la
ydola, tenc liât per los angelz de cellui que m'a trames. Et eu 1*75
farai lo te vezer, e conoisser quan granz penas sofFri, si tu te
laisses batejar, que sias enluminatz del Saint Esperit. Car
totz aquelz malautz, que jazon el temple, devian esser curât
352 LEGENDES PIEUSES
per Tart del «ii;ibol. Le qaalz a via yeacac lo primer home aici
180 con eu t'ai dîii iesobre: ^:ar ..er a.{ueLla rictoria a encar a-
quest mal po>ier sobre ai^aeiz ^ue veacer pot. Et en los us
ha maiâ de poderqaed ea ios ancres. Eln aquelzque maispec-
caut, en aquelz ha mais de poder. En aquelz qae meinz peccant,
en aqaelz ha meinz de poder. \qaest diabolz fa per sa art los
lâo homeâ malaatz ol amoaesta lur qae crezan en las jdolas. Ë
per zo qued aia poder en las armas, se cessa que non lur fa
mai, cant dizon a la peira. o a qaalque metail : a Deus meus
es tu. [(jô y^] Tu es le meus deus. o Per aizo Tenon 11 home
cada joru, e dizon al métal : a Tu es le meus deus. » Mas per
100 zo car eu teDc liât lo diabol qued es enla jrdola, non pot donar
respons a celz que li sacriûan ni i azoran. Et si tu volz saber
ni proar qued aiso sia en aici con eu t'ai dih, eu comandarai
al diabol, qued es en la vdola, qued el digua e manifeste, au-
zent torz. si el es en aici liatz que non posca donar respons.»
105 Respoudet le reis e dis : a Cant venra deman la primera hora
del jorn, serari appareiil.it li evesque. b: eu venrai i, que
vejam aquest meravillos fahg. »
Can venc lo matin la primera hora del jorn, e lo venc le
reis, e foron tuh aquil evesque appareillât, éi acomenseron a
200 far lur sacrifizis. Ab allant le diabolz acomenset a cridar inz
en la ydola : a Caitiu, cessa[s] vos de sacriôar a me, que non
soffrias majors tormenz qued eu fatz, que soi liatz per los
angelz de Jesu Christ ab cadenas de fuc, lo quai crucifieron
juzeu, car lo pessavan aucire ; mas el morent escaitivet la
205 mort, qued es nostra regina ;.ô: mezesme nostre prince, qued
es maritz de la mort, liet ab liamps de fuc. Et al terz jorn el,
venceire de la mort, resuscitet, &. donet Tantreseinna de sa
cros a SOS apostolz, & ha los trames per totas las partz del
mont. Et aquest Bertalmeus, qued es aici, es en uns, le qualz
210 me ten liât. Et eu die vos que lo pregues que me laisse an-
nar en autra terra. » Adonx dis sainz Bertalmeus : « O tu,
horres enemix, manifesta e diz qualz [66 r**] es aquel que fa
aver aquestas diversas malautias qued sofTron ni an aquist
home. )) Respondet le diabolz : a Le nostre princes, qued es
215 liatz, nos tramet alz homes, que naffrem primerament lur carn
per que eil nos sacrifian, que si non nos sacrifiavan, ja non
auriam poder en lur armas. E [cant] per salut de lur cors sa^
LEGENDES PIEUSES 353
crifîân nos, e nos cessem nos que non lur fazem mal, car lur
armas acomensem ad aver en nostre poder. E cant nos nos
cessem que non lur fazem mal, es lur semblanz que los curem 220
de lur malautia, e per aizo colon nos atressi con deus. E pois
que tu, apostolz Bertolmeus, & discipolz de Jesu Christ, fust
ni venguist aici, eu soi liatz e consumitz per cadenas de fuc.
E per aizo parle car tu m'o as comandat; car eu ni neis4e nos-
tre princes non ausera parlar que tu i fessas presenz. » Adonx 225
dis Tapostolz : « Per que non sanas totz aquestz que son aici
vengut ad te ? » Respondet le diabolz : a Nos cant nafrem
los cors, si non naffravam las armas, li cors serian sanat. »
Adon dis sainz Bertalmeus a tôt lo pobol : « Ar podes auzir
novellas del verai Deu, le qualz habita sus el cel ; e non o 230
crezas per paraulas vanas, mas per veras. E si voles qued eu
pregue per vos, que trastuh rescipiatz sanitat, pausatz aquesta
ydola a terra, etfrainnetz la. E cant o aures fahg, eu sagrarai
aquest temple el nom de Jesu Christ, e pois totz vos autres
sagrarai en aquest temple del baptisme de Christ. » Adonx 235
comandet le reis qued hom aportes cordas. E cant foron [66 v°]
aportadas, e lieron la ydola, & anc en nuilla manera ni en
nuilla guisa moure ni trastornar non la pogron. Can sainz
Bertalmeus o vi, dis lur que la desliessan & ostessan aquellas
cordas. E cant o agron fah, dis al diabol qued era en la jdola : 240
« Si tu volz, diabol, qued eu non te metta en habis, eis
d'aquesta ydola e frain la ; et pois vai t'en en tal désert, on
îvucelz non vola, ni voz d'orne non i es auzida. » Et en eis pas
el eissi de la ydola, et trisset la tota, aquella e las autras
qued eran per las pares del temple, de guisa que néis penchura 245
non i parec. Adonx acomenset totz le pobolz cumilnament a
cridar : « Uns deus es soletamént poderos, lo quai predica le
seus apostolz Bertalmeus ! » Adonx estendet sas mas Tapos-
tolz a nostre Seinnor, e dis : « Deus d'Abraham, e Deus de
Jacob, e Deus d'Isahac, que per la nostra rédemption trame- 250
sist lo tieu unial fil, nostre Seinnor Jesu Christ, que totz nos
autres, que siam serv de peccat, rezesmes de son sanc & en
fezes los tieus filz ; qui per aizo es conogutz verais Deus, car
totz temps es uns, e persévéras non mudevolz, tu es uns Deus
Paire non engenratz, & us Filz tos engenratz, nostre Seinner 255
Jesu Christ, et uns Sainz Esperitz, enluminaire & guizaire de
24
1 : rru kr=.s.* . : -r i : • :.i : : ii: ; l'ttT ice siÙTem io* malaoïz.
'^'.< :î"-.r:» 2 j-z.- î ■'.' . . >.: : . .'f*. Vcr-iLien: ]oT r*^ vos die eo,
tir ::: .ml •:• '.'.-rrrri & — :■- i-àire el mea nom. tôt tos
'- -j-'-irà. Pc: i.i :. S--.-Lrr. , -*:* cu, il $*u noai. que lah aqoist
:;*à-i*j: .-t: ?::. i._. iiii. î^lâ:. ,-e :ulz oonos.^an qae in es
'^";^j u:.- L'rr'-î -,:. .r. «JL ri "-rrri «a ^l siât. 1* qaftlz doDas salot
;^r a*ez-.-i:Le ::-î::c Sc.:.-.r Jrsu Ciirisi. ab lo quai es a te
L-j'^.Ti. D_--5 Pi.:e. û gl.iii i": .o SâId; Esperii, per inmorta-
«Jar.t fj;^ a:::- j:. r-rs: :i:iu' : l .4'>i?n 3, ^ îi malaute foron tuh
$^<j sanat. o i:uer;:. oc a:-: are:- a :u: /aaj'elz de nostre Seînnor,
rcs^y^an j-:.s ai-jl :• ou le s.lci.z. oc a: alas. éa volet per lo tem-
p!e, a a caia -^n itrl;: cc:lz el es^rlus ab son det en la paret si-
irue 'ie ■::•;;•?,•-- i.s: -. Le ineu< S-inaer, «j'ie m'a trames, me dis
a>.v. 'i^ej, aiji oon vos auiri es sanai e guérit de vostra ma-
275 Ia-.t;a. «.•;! ai':i nrm les eu a;iiesi teijii»le de tôt lo bautugament
doi »:iiitoo* e dd las yiolji^ 0:1 el estava, al quai aquest apoa-
loiz du ijeu a eoiaauJat que s'en vauja el désert. Mas enauz
i{n*ii\ i:\ iai vauga, eu lo vos demonstrarai manifestamenz, e
cani io veires, non aias paor, mas ab lo det fais en yostres
280 fronz aquol .«signe qued eu ai fali en las pares, <k tuh mal seraii
en'^aussat de sobre vos.» Adonx apparec lur eu guisa d'un gran
sarraziii, niout nigre plus que niella. La carra ac aguda, la
barba ferranila, li cabel li toqueron entre alz pes, los oilz ac
aici vermeilzcon es ferres cautz, bellugas cremanzli eissiron
285 per la bocca e per lo natz [01 v®] 6i flamma de solpre, alas
ac ùi fon totz empennatz cais d'espinas, 6i ac liât las mas detras
lo dos ab cadenas de fuc. E dis Tangelz de nostre Seinnor:
« Car tu as auzit la vos de Tapostol, et bas mondât aquest
temple do totz los tiens enganz, segon la promession de Tapos-
21)0 ^^U ^^ desliarai ; e vai t'en en aquel lue on non ha nuUa con-
version d'ornes ni de nuilla bestia, & aqui esta entre al joru
(loi juzizi. » K cant l'angelz Tac desliat, acomenset a getarle
diabolz un moût fer bram, <k acomenset s'en a volar, & anc
pois non apparec en nengun lue. L'angelz de nostre Seinnor
il'Jo s'(Mi volt'tol col, vezent totz. Adonx le reis, ab sa moiller & ab
dos lllz sous 6: ab toz sos rix homes ai ab tôt lo pobol d'aquella
LEGENDES PIEUSES 355
ciutat e de totas las autras, qued a son regisme apertenian, e
que crezeron en la fen de Jesu Christ, se batejet. E tolc la
corona de son cap & la polpra de qued era vestitz, & acomen-
set a segu[i]r Tapostol.
Entre aizo H evesque de totz los temples s'ajosteronensemps 300
& anneron s'en al major rei, fraire d'aquest, qued avia nom
Strage, e disseron li : a Le tiens fraire s'es fahg discipolz
d'aquel encantador, que torna los nostres temples a sa lei e
totz nostres deus frain. » Domenz qued aquist dizian aizo al
roi plorant, & vec vos los evesques d'una autra ciutat, & aco- 305
menseron moût fort a plorar, & acomenseron se a clamar al
rei d'aizo eis que li autri s'eran clamât. Gant le reis auzi aizo,
fon li [68 r°] moût mal, e trames mil homes armatz ab los
evesques ; e mandet qued, on qued atrobessan Tapostol, lo li
aduissessan liât. Anneron s'en la, e preseron saint Bertalmeu 310
& aduisseron liât al rei Strage. E can fon denant el, le reis li
acomenset a dir : « ïu es aquel qued has mon fraire aici tras-
tornat ? » Respondet Tapostolz : « Eu non l'ai minga trans-
tornat, mas convertit Tai ben. » Le reis dis : « Et es aquel
qued has fah atrissar totz nostres deus ? » Respondet sainz 315
Bertalmeus : « Eu soi ben aquel que donei poder alz diabolz,
qued eran en elz, que totas las ydolas vanas cassessan e frais-
sessan, en las qualz eil permanian <k estavan, per zo que tuh 11
home laissessan aquella error e crezessan al poderos Deu,
qued es & habita sus elz celz. » Le reis dis : « Aici con tu as 320
fah qued eil aian laissât lur deu e crezon lo tieu, en aici farai
eu a te laissar lo tieu deu e creire en lo meu, e que tu li sa-
crifiaras. » Respondet Tapostolz, e dis : « Aquel deu, que tos
fraire colia, ai monstrat a totz liât las mans detras lo dos, &
ad el ai fahg frainner la ydola en que estava ; e si tu podes far 325
aizo al meu deu, tu me poiras ben far sacrifiar al tieu. E si tu
non o pos far, razos es que tu crezas al meu deu, et qued eu
frainna totz lo[s] tiens.» Domenz que Tapostolz dizia aizo, e lo
venc uns messatges, que dis al rei que sos deus era cazuhg &
era tornatz polz. Can le reis o auzi, fon moût iratz, & escois- 330
sendet la polpra de [68 v"] qued era vestitz, e fez escortegar
saint Bertalmeu ; e pois can fon escortegatz, comandet qued
hom li tailles la testa. Abreujarai mas paraulas, car qui volia
tôt comtar per orden, aici con o trobam escrihg, non séria de
>:'. LI>ÏE?fMS MEr$E5
*ir^ ;-f*i p-f^Bk t :s.ikT r- i-t- Cki. fiiTMi eteonegmi. e Imli^ Bout
1 t»'L*<rf v.-rzLti:;. th..^; .: ii>a.:* c&;«. £ eui o saaproa per Ii
^tr-*. '. -ti i. .. *:c il: r-: i^l-i^ B*nâlae«§, TeDC loi îe pobolz
'. c t'.'i^^ :.-^fc*;. :-_ -r. Lt.i : :iT*rL:i ab 3o reî Polemiam, e
y.r.'r::'.!, *l .: :-:r*- 4,: 73.1..$ a: *.•• Iah* À ab gioria, qoeren-
rjfr'.' c^;vi k Lv*::c Sr.ir.:.-. L» c:ft't-^li ÎDtret ei cor» del rw
A»'.r.?**. Ci i.'-Lcî §>:. & ^-.Zi :*iap!e. cnâ el eolia; e foron la-
,:.:r> .: *:Tev\ -^e. <k ii-tr*: il \ire5*î J diabok el cors de cadaoo.
h*. 4;:-. foroi iî.:: e^rav-:.:. ^ic marjife^iaTan^e dizian qaed Bcr-
t&lfLeii^ era aiovx.z «ie L*eT3. Pois aucizeron te toli entr^elz,
y^iTj H r:'a.!&l IL a liera -e:;. iLorlroa.
FnctuM ett aut^rm iimor e'i' tremor fyptr omnes tneredulaSt et
rredidfT^nt unt'cerû.et bijtt'Zfiti iunt a pretbytertSj quo$ordi'
uac*r/'ot apfj* toi tt§ Biriftoi') ntus. CaiiX aizo fon aîei esdeTengat,
ffrariZ paors e fr:<jLz ie:uors Ûju sobre aquelz que non creziao,
'/jT/) e c r*rz •• r o n • u ii a - ^ y i e i s . e 1 e ro a se î lale j ar alz p re veîres que
«HHiz li-rfTdimeus a via adorienatz. Pois, per rerelament de
rjaint K-perit, tuh li cler^ue e totz le pobolz cuminalment
'('A'Aftvou que fezes hom eve^que del rei Polesmi ; & aici fon
H'ioîdc'ijatzade's' ve<oue,'o9 r^" ô: acomenset a far, el nom del
.T;5 rajioslo!, las meraviilas que-i el fazia cant era vius.
.Sainz HcrtMimeus estet en son evescat vint anz ; et cant ac
aici perfecliament adordenat tôt son afar <k ben & estantural-
ment a la fen de Jesu Christ, ca el transpasset d*aquest segle,
aici con vos avem dih desobre, ab corona de martiri, & annet
'M'A) ab nostre Seinnor, cum quo per secula régnât. Amen,
XXIIII
PASSIO SANCTI MATHEI
Quoniam Deo cura est de hominibus et plus animarum curant
ijcrit quam corporum. Nostre Seinner ha cura de totz homes,
mas mais ha cura de las armas que delz cors. Car mainta^
V(}f,Mdas csdeven que le gauh del cors e le deleh, qued e^
5 tomporalz 0 traspassanz, enganna home, e fai aver a l'arma 1^
durabhi trihulation ; car del deleh del cors naisson ligranpec^
cat, (piod aucizon l'arma. E per zo die que nostre Seinner hm^
mais curas do las armas que del cors, qued el fa venir tem-
LEGENDES PIEUSES 357
poralz iras, qued afflichezisson lo cors, que non podon aver
los temporalz * gauh, que toUon los eternalz. E car nostre 10
Seinne[rl a cura del cors e de l'arma, las granz enfermetatz
cura ab granz medicinas.
En la terra de Ethiopia avia dos encantadors : Tus avia
nom Zoroes e Tautre Arfaxat, & estavan en una gran ciutat
qued avia nom Nadaven, en la quai estava le reis Eglippus. 15
Aquest rei escarnian aici aquistdui encantador, qued encre-
zent li fazian qued [69 v°] eil eran deu ; e le reis crezia o, e
totzle pobolz de la ciutat. Et eraannada aquist fama lur per
tota Ethiopia, si que de montas longas régions venian ad
aquesta ciutat, & adoravan los. Eil fazian subtanamenz estar 20
los homes en un lue, qued en nuilla manera non se podian
moure, entro que eil se volian. Et aici per encantament tol-
lian ad home Tannar, el vezere Tauzir; e pois lo rendian cora
se volian. Comandavan alz serpenzquemorsessan los homes; e
cant los avian mors, venian ad aques encantadors, e aqui eis 25
per lur encantament curavan los. Et aici con dis li escriptura,
major reverencia sol om portar alz malz per paor, que non
fa alz bons per amor. E car Deus ha cura delz homes, que non
se perdan, trames saint Matheu encontra aques. Cant sainz
Matheusintret en la ciutat, acomenset a descobrir los enganz 30
d'aquest dos encantadors. E totz aquelz homes qued aquist
dui encantador fazian que non se podian moure, sainz Matheus
los desliava, el nom de Jesu Christ; e totz aquelz qued eil
encecavan, sainz Matheus enluminava; et aquelz cui eiltollian
lo vezer, sainz Mathieus lo lur rendia. Los serpenz qued eil 35
escomovian per los homes aucir, aquest los fazia adormir, e
celz qued avian mors, celz sanava de la nafra, ab lo signe de
la cros de Jesu Christ.
Can vi saint Matheu uns Ethiops crestatz qued avia nom
Candatis, lo quai avia batejat uns diaques, qued avia nom 40
[70 r"] Phelip, & tornat a la fen de Jesu Christ, vai se getar
a SOS pes & acomenset lo a pregar & a dire : « Deus ha reguar-
dat aquesta ciutat, quar desliurarla vol de la man d'aques dos
encantadors, delz qualz cujan li fol home que sian Deu.» E
receup saint Matheu en sa maison. E venian laintre tuh li amie 45
* Ms. temperalz {p barré).
35^ LEGENDES PIEUSES
rie Candace 6: auziaii la paraula de Dea predicar a saint Ma-
theu, e crezian en Jcsu Christ, e fazian se batejar. e cmr reziaii
atressi ({ue tôt zo que H encantadorfiiiziao alz home?. eTapos*
to]z dcsfazia tôt. Per aco nafravan totz celz qae podian, qaed
50 aquelz naffratz tornessan a lur lei. SaiDz Matheas enrara
aquelz qued eil naffraTaD, e totz lo3 autres qued hom li apor-
tava, de lur diversas malantias. El predicara a tôt lo pobol la
veritat de Deu. de guisa que tuh cil que Tauzian merarilIaTan
la soaeloqiiencia. Adoux Candaces, cel que Tavia receoputen
55 son alberc, acomenset li a demandar ii a dir : « En te pree,
Beinner, que tu me dig'as, tu queJ eshebrens, coq apresistlo
Icngatge delz grex, ni delz egiptienx, ni d'aquesta terra de
Ethiopia, que cil neis que son naten esta terra non laparian
tan ben ni tan drehg con tu fas. » Respondet li Matheos
60 Tapostolz, c dis : '< En tôt lo mon non solia aver mas od
lengatge, mas nasquet i una presumptions aitalz, que 11 home
ciijeroii far una torre tan auta que le somps toques al cel.
Mas aquesta presumption tornet nostre Seinner d*altal ma-
nera en '70 v*] reire que Tus non poc entendre Tautre. Et
65 aici con aquil presumptions era fâcha per un lenguatge, eo
aici remas per montas lenguas. Bona fon aquil Toluntatz que
fezessan la torre, que le somps toques al cel. Mas mala fon li
presumptions, car eil non volian annar ab bona volontat ni
ab sainta el saint lue. Venc le filz de Deu, lo poderos, et
70 demonstret de quai manera dévia hom bastir la tor, ab qne
hom pujes al cel, e trames lo Saint Esperit a nos autres, qne
siam dotze discipol seu de sus del cel, quan nosseziam en una
maison enclaus; ck yenc sobre cadaun de nos en semblansa
(le lenguas de fuc «k fom enaici enflamat <k escalfat, con es le
75 ferres per lo fuc. E cant aquil paors & aquil resplandors se
fon partida de nos, e nos acomensem a parlar ab totz loslen-
gatges las meravillas de la nativitat de Christ, e de quai
manera el, filz de Deu, nasquet en aquest mont, le qualz era
natz enant Tacomensament del segle, e de quai manera el
80 nasquet del ventre de la vergen, nos o annunciem & o fam
saber e con li vergen Talachet, e lo noiri, e l'esseinnet, &
pois con fon batejatz, ni temptatz, e con sufferc passion, e
con fon mortz <k sebelitz, e pois resuscitet al terz jorn,
pois s'en pujet elFz] celz, <k aqui sez a la dextra de[l] seu
LEGENDES PIEUSES 359
paire, e d'aqui venra jutgar a la fin del mont tôt lo segle per 85
fuc. Non solament aici con tu pessas eu sai parlar aquestas
quatre lenguas, an sai totas aquellas del mont parlar plana-
mente perfecha, et eu e li autri onze qued [71 r°] em sei dis-
cipol. Et ad qualque gent que nos venguam, entendem e par-
lam* perfechament lur lengatgc. Et ara es bastida li torres, 90
non perpeiras, mas per la vertut de Christ. Et atotz celz que
son batejat el nom del Paire e del Fil e del Saint Esperit,
aquist torres li es uberta, la quai ha estrucha Jesu Christ. E
per aquesta hedificantes, zo es cil que la bastisson, pujaran
tant, entro que tocharan al règne del cel. » 95
Domens que sainz Matheus dizia aizo e montas autrasparau-
las, venc uns messatges, que dis que li encantador venian ab
sengles drachos. Aquist dragon avian helmes en lur cap ; fox
e flama lur eissia per la bocca; per las nars lur eissia aura
de solpre, li odors de la quai aucizia los homes. Adonx sainz 100
Matheus seinnet se & eissi foras moût seguramenz. Candaces
olaus son uis, e vedava li que non lai issis, mas que per las
fenestras parles ad aquelz encantadors. Adonx dis sainz Ma-
theus : « A me obri, mas tu esta sus en la fenestra, e d'aqui
esgarda Tardiment delz encantadors. » Uberc l'uis sainz Ma- 105
theus, & aqui eis can fon eissitz deforas, e vec vos que li
encantador foron vengut, & aduisseron lur dragosdenant elz.
En eis pas que li dragon foron denant los pes de Tapostol, e
eil s'adormiron. Adonx dis Tapostolz alz encantadors: « On
esaoras li vostra artz? Ar los espreises, si podes ! Si eu non 110
agues preguat lo meu seinnor Jesu Christ, tota aquella ma-
leza que vos avias escomoguda, qued fezessan en me, tôt o
feran en vos autres, e tôt vos [71 v°] tornera de sobre. Mas
aquist serpent estaran tant adorrnit, entro que totz le pobolz
sia vengutz, et adonx eu lur comandarai qued eil s'en tornon 115
en lur lue. » Li encantador s'esforsavan ades con los espre-
guessanab lur encantament, & en nenguna manera solament
non lur podian far obrir los oilz ni moure nuilla ren. Totz le
pobolz pregava Tapostol e dizia : « Nos te pregam, seinner,
que tu comandës qued aqucst pobolz & aquist ciutatz sia des- 120
liura d'aquestas bestias. » Respondet Tapostolz, e dis: « Non
* M s. ^arlnn.
iiu'.*f €>u'si» il'. »»tîtt^i»*^iifL !iii* a STiirritdniTL.. ^ lumij dbc
<yo./itiitK: V u ^^'r .ivm •'twii;»^j i;*r Ut mtrr jt snrwaeaBŒC jkI»
i<vM «tt.(#«i^ <,v«r ci^^•::îrv^:: ri .n>n;:. * i»: iii«^ -eiTttnin*!E BniiBraff
{^ i*iiM?rf/ -'. .iV'tv. tivrt.*< »*î:Aîir * VI l'K*^ *Jr. Bas:, ^seom
^<;i; -tM*vv . V* vf.',t o v-^ti.?-,: -', "L* :* a arucL -si fine givs
,."/'*.* )'/<•**< ^r^'wAu^ 'îit, i.k,'rj, H -:>_ frszws. Xr^scpe Seiaawr
^4/y ^/# * 'ri^v^^r* * ';:■ * rv* \^\t^\ ;^^? T-'>r.r* iAlct. «iw t«cw haïsses
//*<««, ';;>o» A^; fit'i'/ îo y'ïînHr hoai«, lo p:aiiset ei deSehg de pa-
iw^î%, ifU ^Hi mhMt'.r Kvai, f:»i format d'ana costa soa. Paradis
i;4 Imji 'J<? 4*ii*iUif, à tt% \9iii'^ âiut loe de terra, si qoe prop es
\\U iM rM, SM\h, rti non Un an paradis, que sia contra salai
tVnm^'U, \éh\uU'h tuni Un aucel^qucd aia paor d^ome. Laintre
uuu u^\ii^hn itn\iUMt% ni hoiMxon. Uosas ni lili non lai seccaran
ju, ni nnilia /lor4 non lai f/crdra sa color. Ja tanz anz non
uMi'ii liom <jUM hiititro piiHca i^nveillesir. Lainz non aura ira-
l^'O ImiII, ni liuM<4/Mr, ni ira, ni rnarrimcnt, ni nuilla malautia, mas
Mi|»i4 Miiniùii H \rm\\, Ja mori/i non la trobara* son lue. Las
iUii'iiM. qnn liiinit'i) Hon, r.orron rnout soau, e donan durabletat
|Mir liiM ntii'rt lui Itomo. (Jar alui oon le fumps de Tenceâ de-
ttM«Na lart inaluM llairorH, aie! aquollas auras espiran per las
Ihh iiurM vida diiralila, ((uo non laissait homo lassar ni cazer en
iiiillla \\\\\\\\\ inaH loi/, iomps viu jovos & alegres, e ja non
140 «Muulilnru. Imihtro Honaiit las orguenas delz angelz, e las
tl«M)iii>iar« vi)M ^\\\\ aportadas on las aureillas. Serpens ni es-
* \U, /niAonf.
LEGENDES PIEUSES 361
corpions non aura ja laintre lue, ni escaravais, ni mosca,
ni nuilla res que sia encontra home. Li leon, e las tj-[72 v*]- 160
grès, e li laupart, e li aucel, e totas las bestias salvatgàs autras
obezisson aqui ad homen, e fan toison mandament, aici con
al car amie de Deu. De laintre eisson quatre fluvi. L'uns d'a-
quelz fluvis es appellatz Gizon, l'autre Fizon, e l'autre Eu-
frates, e l'autre Tjgris. Aquist fluvi son plen de totas mane- 165
ras de peiras preciosas. Ja laintre non rugira leons; car totas
las bestias de laintre son soaus, emansuetas, e totas estan en
gran repaus. Ja laintre li cara del cel non s'enumbrara per
cobriment de nutz. Ja laintre non resplandran fouzer, ni sons
de thron non lai sera auzitz. Laintre ha totz temps gauhsenz 170
fin, e li festa que ja non aura terme. Per aco vos ai dih de
sus del serpent queja lue non lai aura, carper lo serpent obret
primerament lo rovil de la soa enveja le diabolz, & en eis pas
ol fon malezehz. E per aco en lue benezihg non pot esser ni
estarcausa malezeita. Enveja nasque(s)t primerament d'aquest 175
angel de Sathanas. Car el vi la imagen de Deu sagellada en
home, e car hom* podia parlar en aquesta benazurada région
ab totas bestias, aquest angelz, qued avia eoneeuput enveja,
intret el serpent & amonestet a la moiller d'Adam^ que manjes
del pom que Deus li avia vedat, que ja tan tost non manjaria, 180
que el séria mortz. Manjet en li moiller, pois fez en œanjar al
marit. Et aqui eis cant ambedui agron aici traspassat lo man-
dament de nostre Seinnor, foron eissiliat en aquesta terra.
Et el mezeis le diabolz, atrobaire e fazeire de tan gran fellonia,
[73 r<»] fon atrobatz ancar el serpent, que non n'era eissitz, 185
e receup en malédiction durabla. Aquest filz de Deu que, per
lo mandament de son paire, fez homen, per lanostra fragilitat
deinnet penre persona d'orne & nan perdet sa deitat. Aquest
hom Jesu Christ recobret aquest home qued era perdutz, sof-
frent lo torment de la cros, elz batemenz elz esquernz que li 190
juzeu li fazian. El venquet la mort morent, que resuscitant
adobris paradis. Car nenguns non deves aver doptansa que
tuh aquilque ereiran en Jesu Christ la intraran.En[aquest pa-
radis mes Jesu Christz primerament lo lairon, a cui donet signe
del fust en qued el era pausatz; e per aquest fust li prevari 195
1 Ms. ad home.
:^h2 LEGENDES PIEUSES
cations dcl fruli^ fo(s) dcstruchâ, & obère paradis a ]as sanctas
armas, cant cissirian dcl cors. Et al derrier jorn.can tuh
resuscitaran, (k cl Jesu Christ obrîra los celestialz règnes,
que puscan intrar. Por aizo totz hom, que la voira intrar, esca
200 do mort, e corra a la vida, con pusca tornar en paradis, don
le nostre paire carnalz Adamps fou getatz en aquest eissil. on
ha totz nos autres engenratz. Nostre Seinner nos ha ubertas
las portas do paradis, que nos lai, don em eissit, puscam to^
nar, cl quai lue mortz non ha lue, mas gauh perpetualz la
205 persévéra. »
Domcnz que Tapostolz dizia aizo e predicava al pobol, vec
vos subtanamenz que vencuns moutgranz dolz, e granzplorSi
que tota li genz plorava; car le filz del rei era mortz, e
plainnia Tom moût fort, Et cran la annat [73 v*^] li encanta-
210 dor, et cran se moût penat con lo poguessan resuscitar. E
caut viron que reii non lur valia, acomenseron a dir al rei
qncli deu Tavian raubit c mes en lur compainna, que sia uns
•
dous aici con uns dclz es : c E conven, reis, que tu li fassas
temple ai imagen.» Adonx venc Candacis a la regina, maire
215 d'a([uest enfant, edisli: « Donna, fui penre aquestz dos en-
cantadors c fai los gardar fort, e pregatz que vengua aici a
vos Tapostolz do Deu Matheus; e si el pot resuscitar vostre
fil, fais cremar aquest dos encantadors, car tuh li mal que ve-
non en aquesta ciutat, tôt ven per aquestz dos falz encanta-
220 dors.» Vai li regina, e près onratz homes e coseillers del
rei, e trames los a saint Matheu, e pregueron li qued annes
parlar ah lo rei. Annet s'en ab elz sainz Matheus. Et aqui eis
cant intret, li regina se va getar a sos pes, e dis : a Eu sai
0 conosc, apostolz, que Deus t'a tramés per la salut delz
225 homes, & tu es sos discipolz de cellui qued ha resuscitatz los
mortz e totas las malautias ha decassat delz cors delz homes.
Per amor d'aiso, seinner, ven aizai & appella lo seu nom
sobre mon fil, qued es mortz; & eu crez que, si tu o fas, el
reviura ben». Respondet l'apostolz, e dis li: « Encar non as
230 auzit la prédication del meu seinnor Jesu Christ per la mia
bocca, e dizes que be * lo crezes. Per amor d'aizo sapias ben
qued eu te rendrai ton fil.» Intret Tapostolz laintre on era
* Ms. ue.
LEGENDES PIEUSES 363
le raortz, & estendet sas mas al cel, e dis: « Deus [74 r°]
d'Abraham, e Deûs d'Isaac, & Deus de Jacob, que per lo
nostre restaurament tramesist lo tieu unial fil del cel a las 235
terras, le qualz nos tornes de la error en que siam, e nos fez
conoisser te qued es verais Deus, membre te de zo que nos dis
nostre Seinner Jesu Christ, le tieus cars filz : Amen dico
vobis quia omnia, que in nomine meo pecieritis a pâtre meo,
dabit vobis. Verament vos die que tôt cant vos querres almeu 240
paire per lo meu nom, tôt vos donara. E per zo que totas
las genz crezan que non es autre deus poderos, mas solament
tu, & que * li paraula de la mia bocca qued eu afferme de te sia
vera, aquest enfans resuscite ! » Et ab aitant va penre sainz
Matheus la ma de Tefant mort, e dis & appellet lo per so 245
nom:« Eufranon, leva sus el nom del meu Seinnor Jesu
Christ. » Et aqui eis Tenfas levet sus, sans e salz.
Cant le reis vi aquest gran fahg, ac gran fereza e gran
gauh en son cor, & comandet aqui eis qued hom aportes coro-
nas d'aur & riquas polpras, & aver moût, qued hom dones a 250
saint Malheu, & trames mesatges per totas las autras ciutatz
e per totas las terras, que tuh venguessan ad aqiiesta ciutat
on el estava, per vezer Deu, qued i era vengutz en semblansa
d'ome. Venc totz le pobolz de la terra, ab candelas & ab lam-
pezas & ab encens & ab lur offerendas & ab lur sacriûzis ; & 255
can fon totz le pobolz acampatz, sainz Matheus lur acomenset
a parlar [74 v°] en aici : « Praire e serors, eu non soi mingua
deus, mas sers soi del meu seinnor Jesu Christ, fil de Deu
omnipotent, que m'a trames aici a vos, que laisses la error de
las ydolas que coles, e vos tornes al verai Deu. E si vos autre 260
cujas e crezes qued eu sia deus, que soi hom aitalz con huns
de vos autres, majorment deves^creire en aquest deu, del
quai eu soi hom e sers, & en cui nom eu ai resuscitat aquest
mort, lo fil del roi. Et vos tuh qued entendetz aquesta sainta
razon, aquest aur & aquest argent & aquestas coronas estas 265
denant mos oilz, e fais en un temple a nostre Seinnor, el quai
nos puscam acarapar per auzir la paraula de Deu. »
Can le pobolz totz auzi aizo, preseron tôt Taver qued avian
aqui aportat, e feron en una gleisa, & ac i ben caranta milia
homes qued i obreron, & agron la en meinz de trenta jornz 270
compliJa. E can fon fâcha, apellet la sainz Matheus Resur-
1 Ms. qui.
^h\ LÉGENDES PIEUSES
If: t ion, c.'ir li n\surrec lions del mort fon ucaîsons de b&?tir
St'flil fin f fin Mat heu» in ecclesia annos viginii e'j\ //'et, et «w<-
titult /ireshijti'rosvt (liacnnes per civilates et caêtelias, elordinatit
f'fiinf'opoXfft mu/fns fabricavit ecclesia». Sainz Matheos tenc la
srt/. do la ^^loisa vint 6: très anz, ai establi preveîres À dia-
<|U<*s, cv adordoiiot ovosqiies per las ciutatz, e basti moatis
^'icisa-; pcr la^< vihi.s a perlos castelz. Fon se fahg batejar le
'.'H) ivis K;;lipptis (X sa iiioillcr Kuphanisia e ses filz Ëaphranoo,
t\\u\ fon rcâiisc.itat/,, c sa illla [75 r^] Epigenia, qued estet Ter-
p'iis ijo Ciirist, (^ (|uo fez far un monestier, en qaed esUbli
sain/, M allions dozonUs donnas. Can li encantador Zoroes À
Arfaxat viron a i/o, a<^n*on paor c fugiron s'en en Persia. £
-js.") rar sorian U'o]) l(>n^^'ls no vas de comlar quanz cex enluminet
sain/. MatliiMis, ni (^nan/ paralites curet, ni quanz homes des*
linipt, (Ici po(l(>r (i(d diabol, ni quanz mortz resuscitet, ni quan
hons lioin ni canl christiaiis fon pois le reis, ni sa moillercaot
lioiia fiMnona, ni cant dovota fon a Deu totali compainnadel
\*\)') l'iM, ni con dostrnissoron totz los temples, ni fraisseron totas
las y«i()las, toi ai/o aici con vos ai dili laissarem estar per las
loii^^Ms novas ({no tson, <x dironi vos de qualmanera el celebrdt
(? l'iMîcînj» passion.
Ijo rcîis Kj^lippus cant ac complit sos jornz e fon veilz, et
.?'.).■) ol iranspassot d'a([aost sojjflo, ûc annet s'en a nostre Seinnor;
cN: IlvriMis t«'no pois son renj^nio. Aqucst Yrcus volgra penre
por nioilloi* l<][)i,LriM)ia, la filla dol rci qued era mortz, qued era
njont'fjfna sa^^rala a Deu cV avia roceuput lo saint vel de la
nian do Tapostoi cV ostava bon ah dozentas moneguas. Et avia
!U)i) ^^ran osporansa a(|nost folz rcis que Tapostolz sainz Matheus
li poj^uos son ooralijro tornar atras ad aquesta Epigenia, con
ol la popfuos avor por moillor. E dizia li : « Tota la meitat del
nuMi roj^no to «lonarai, si solanient la pos convertir con eu
Taia por moillor. » llospondot Tapostolz e dis : a Rëis,prega
1^05 clrooliuroramontz zo [75 v"] douras ', o fai ajostar en aquel lue,
on ou soil pivdicai' la paraula do Dou al pobol, totas las mo-
noguaâ dol nionostor, on os Epigenia, <k. ella sia i ab ellas,
cVl adonx au/iras can granz bons lur dirai de bon maridatgo.
Car Dous recep bon maridatge, e moût 11 es agradavolz. »
• SiV. Suppb que après so?
LEGENDES PIEUSES 365
Cant Yrtacus auzi aizo, ac moût gran gauh, e comandet que 310
venguessant totas las vergens & Epigenia ab ellas, per auzir
la paraula de la bocca de Tapostol, quais qued Epigenia vol-
gues que fos moiller d'Yrtaci. Cant totas las vergens foron
vengudas, e totz le pobolz, e feron pas, Tapostolz uberc sa
bocca, e dis : « 0 vos totas, fillas de sancta Gleisa, aujatz ma 315
paraula, aujatz & entendetz zoque eu vos dirai, que remangua
escrich en vostres coratges. Le nostre Deus benezi primera-
ment nossas. E totz raatrimonis, cant es ajostatz, deu esser
leialment e bona fah, e que sia adornatz d'onestat, de bona
obra, que vivan saintament & justa, & qued hom non los 320
pusca de ren repenre, & aquel maridatges es adonx bons.
Mas si uns reis ha hoi una moiller, & ha un sers que sia tan
tirditz que la li auze malviziar, non solaraent fai failliment
vers ella, anz fa vers son seinnor tan gran lageza e tan gran
blasme que totz vins deuria esser cremalz. Non per zo car 325
hapreza moiller, mas per zo car era moiller de son seinnor lo
rei & ha la preza per meillurar, o per zo car vol lo matrimoni
de so seinnor offendre, e que li vol malviziar sa moil-[76 r°]-
1er. En aici es de te, o tu, reis Yrtacus, que tu sas que Epi-
genia fon fiUa del rei ton ancesser, & es se fâcha espoza del 330
rei celestial & es sagrada e cuberta del saint vel. De quai
manera poiriastu penre ni tolre per razon sa moiller ad aquel .
rei, qued es plus poderos que tu, e que la prezessas a tos obs
per moiller ? »
Cant le reis Yrtacus auzi aquesta paraula, fon moutiratz,e 335
parti se d'aqui. L'apostolz non temps anc ren; anz estet plus
alegres, & acomenset adir : « Aujatz tuh vos que temes Deu!
Totz terrenalz reis conoissem tuh, e sabem que ten pauc sa
seinnoria, e non pot gaire durar. L'emperis del rei celestial
es durables; et aici con elfai aver gauh tan granz que cors 340
d'orne non los pot pensar, a toz celz que gardan la soa fen,
en aici dona tormenz, que son eissit de tôt nombre, a celz que
se parton de la soa fen e de la soa sancteza. E pois qued hom
temp la ira del rei, per que non temera hom mais la ira de(l)
Deu? Car li ira de Tome es consumada per tormenz temporalz, 345
& es complit en un pauc d'ora. Mas li ira de Deu, aquil abrasa
alz peccanz durabla flamma, que ja fin non aura. Per que
nostre Seinnor Jesu Christ e nostre Maistre nos dis presen-
3G6 LEGENDES PIEUSES
ment : Apud reges stabitis, qui cum flagellaf)€i*mt vos aud occi-
350 derint, post hec non habent quid facient. Et ideo dico vobis ne
timueritis eos. Vos es tares davan los reis, e los princed, à
flagellarant vos, & auciran vos ; mas pois [76 v®] sera annatz
totz lur poders. Et eu die vos o per aizo que noa los temias.
Mas cellui ternes que, pois qued hom es mortz, ha poder de
355 mètre Tarma e lo cors en la flamma & el fuc durable. Et eu
die a totz vos autres que temias aquel. n
Ab aitant Epigenia se leva,e val se getar alz pes de Tapos-
tol, e dis li : a Eu te prec, per cellui de cul tu es apostolz &
messatges^ que tu pauses sobre aquestas vergens tans mans,
360 e per la toa paraula sian sagradas a nostre Seinnor, que nos
puscam esçapar las meuassas d'aquest Yrtaci.Car domenz que
mos paire e ma maire eran viu, el lur prometia moût con
aquest fah s'esdevengues ; e car eil non o volian far, mena-
sava los moût. E domenz qued eil eran viu, el auzava aizo far
365 ni essajar ; que fara el aoras que son mort? » Gant Tapostolz
auzi aizo,ac gran fizansa en Deu & apostot non temps anc ren
Yrtacum, mas pauset lo vel sobre lo cap d'Epigenia e de las
autras vergens, qued aqui eran, & dis aquesta benedictio :
« Deus, plasmaire delz cors & parlaire ab las armas, le qualz
370 non mesprezas état ni refugas nuil home, ni nuilla re, que
tu aias fah, non fas non digne de la toa gracia, & es creaire
de tût cant es & rezesmeire, tu, bons pastre, tria aquestas
toas ancillas de ton foie, a conservar & a gardar la corona de
la perpétuai castitat, e cobri las de Tescut de la toa protectio,
375 a tota obra de la toa vertut e de la toa gloria, & appareilla
lur que Ir toa sapieza luresseinnae a vencerlas fail-[77 r**]-lidas
de la carn, con ellas refujon los maridatges de peccat, e qued
ameriton ad aver lo maridament que ja non se partira, zo es
del lieu fil, nostre Seinnor Jesu Christ. Senner, eu te quer
380 que tu las garniscas d'armas non carnalment, mas del poder
e de la vertut del tieu esperit, que, cant auras garnit lur
menbres e lur sen, peccatz non pusca reinnar en lur cors, e
qued ellas vuillan totz temps viure sotz la toa gracia, quô
cel, qued es deffendeire delz malz & enemix delz bons, non
385 pusca penre venjansa en aquestas, que son sagradas en lo tieu
nom. Tota la calor de luxuria esteinna en ellas li pluja de la
LEGENDES PIEUSES 367
celestial gracia ; e li perpetualz castitâtz enlumene en ellas
son lum, e li failla casta sia enbrasada en ellas ; e negli-
gencia non lur don ucaison de laissar. Verginitatz siaen ellas,
armada & ornadad'entera fen, d'esperansacertana, do caritat 390
pura, e que lur coratge sian appareillât de recebre la gran
vertut de continencia, qued ellas poscan vencer los sobrepu-
jamenz del diabol e los divers enfeinnemenz, e qued ellas
mespreson las presenz causas, & aian la[s] futuras. Aian
abstinencias de carnalz conduh ; & en lue de manjar e de 395
heure, aujan las sanctas leissos, que per orations sian pagu-
das, e per éruditions sian repletas; enluminadas sian de vigi-
lias, que puscan far la obra de la virginal gracia. D'aquestas
armas de vertutz aquestas toas ancillas sian garnidas dedinz
e déferas, qe senz tota contra-[77 v°l-ria puscan * adimplir lo 400
cors de virginitat per nostre Seinnor Jesu Christ, rezesraeire
de nostras armas, ab lo quai es a te honors, Deus paire, & glo-
ria ab lo Saint Esperit, aoras & totas autras oras, & per inmor-
talia secula seculorum! » Responderon tuh : « Amen. » Ab ai-
tant celebret la messa, e curaeneguet tôt lo pobol, de josta 405
Tautar on avia sagrat lo cors de Christ ; & aqui receup mar-
tyri. Car cant ac son mestier coraplit, et le reis Yrtacus tra-
mes sons carnificers armatz ; e van penre saint Matheu, e
iieron li las mans detras lo dos, e pois tailleron li la testa,
& d'aital manera l'apostolz de Jesu Christ receup martiri. 410
Cant le pobolz o saup, acomenseron tuh ensemps ad annar
ab fuc al palais del rei, e volgron cremar lo palais el rei
intre. Can li preveire e li clergue e li discipol de saint Ma-
theu viron aici correr lo pobol ves lo palais, & eillur acomen-
seron a pregar, & a dire : « Seinnor fraire, non veillas far 415
contra lo mandament de nostre Seinnor; car can li juzeu lo
prezerou, e sainz Peire trais son glazi, e taillet l'aureilla ad
un d'aquelz que tenian nostre Seinnor, qued avia nom Malc,
e can nostre Seinner o vi, non vole qued hom rendes mal per
mal, e dis (qued) a saint Peire que tornes l'aureilla en son lue ; 420
& aqui eis can li ac pausada, fon sanada e guerida. E dis
nostre Seinner a saint Peire: « Peire, si eu me volia, non
me trametria le meus Paire dotze légions d'angelz [ 78 r° ] o
* Ms. puscam.
3G8 LEGENDES PIEUSES
plus, qued aucirian toz aquestz? « Mas per amor d*aizo, cele-
425 brem tuh ab gran gauh lo martiri de Tapodiol, & aguardem
cui Deus voira adordenar en son lue. » Epigenia, qued era sa-
crada vcrgena de Christ, lot cant avia en aur & en argent &
en peiras preciosas, ni aver poc, tôt o portet alz preveires, e
dis lur qued en bastissan gleisa, en honor de Tapostol, e laa
430 sobras donessan totas alz paupres. « Me laisas estar ab Yrco,
car lo conven qued eu aia gucrra ab el &. tenson. » Aprop
aizo Yrtacus le reis fez venir a se las moillers de totz los rix
homes, e cujava se que per alcuna razon ellas poguessan con-
vertir Epigenia, con el Tagues per moiller, e trames lai las
435 donnas on ella era. Et anc per nuilla ren convertir non la
pogron. Cant Yrtacus o vi, fezappareillar el mehg de la plassa
un gran fuc, e fez inz mètre Epigenia. Cant le fux fon atj-
satz tôt entorn ella, e Tangelz de nostre Seinnor apparec li
ab saint Matheu, e dis li : « Epigenia, sias ferma, e non temias
440 aquestz fux, car ad aquelz que lo fan mes, ad aquelz tornara
de sobre. » Et ab aitant can le fux fon abrasatz tôt entorn Iji
vergen, e Deus fez levar un vent moût fort, et ostet li fuc, e
fez Tannar al palais del rei Yrtaci, e cremet lo, de guiza que
nuilla ren, que laintre fons, non poc hom acorre ni traire,
445 qued a penas soletament le reis ab un fil seu s'en poc eissir.
[ 78 v° ] Mas meilz li vengra que fos crematz laintre, carlo
diabolz intret aqui eis al cors a Tenfant & acomenset lo moût
fort a trabaillar, & el mezeis le diabolz liet li las mas detras
lo dos, e pois de gian cors menet loa la sopoutoura de l'apos-
450 toi, et dizia aqui e manifestava el mezeis las tracions elz engaï^*
de son paire. Mezesrae Yrtacum feri de lebrozia deus lo »^^
entre alzpes. Et el, can vi que non poc esser curatz per m^^^'
cina nuilla de metge, ni per nuil encantament, vai el me^ ^^
penre un glazi & aucis se. Et aici con el avia fahg transf(^ ^'^
455 lo cors de Tapostol, en aici transforet lo seu ventreil ab ^^^
glazi. g
Totz le pobolz ac gran gauh, car en aissi se fon mortz
van penre lo fraire d'Epigenia, qued avia nom Behor, loq "^^
avia batejat sainz Matheus e tornat a la fen de Jesu Chr-^ ^ ♦
460 per la predicacion d'Epigenia sa seror, e feron en rei; & ^^^
joves hom, d'état de vint e cinc ans ; & acomenset a reinn ^^>
e rengnet seissanta e très anz. Et aici visquet oitanta & .vi V*
LEGENDES PIEUSES 369
anz ; e domenz qued el vivia, establi e fez d'un seu fil rei.
E vi los filz de sos filz entro en la carta génération, et establi
per tota sa terra gran pas e ferma delz Romas & d'aquelz de 465
Persia. Totas las terras d'Ethiopia foron adimplidas de
gleisas, las qualz i son ancar entro al jorn d'oi, e fan ancar
gran festa per Epigenia, la filla del rei. E D jus fa ancar granz
meravillas a la confession de saint Mallieu Tapostol, le qualz
escrius primeraraent Favangeli de nostre Seinnor Jesu 470
Christ en Ebreu. Cui est honor et gloria, per tnfi'[79i'^]-7iita
secula seculorum. Amen.
XXV
PASSIO SANCTI SIXTI & SANCTI LAURENTII
MARTYRUM.
Decius imperator tenuit beathsimum senem Sixtutn, episco-
pum romanum, cum omniclero suo et reclusit in custodia publica,
et fuerunt ibi clausi multisdiebas, Decius, Temperaire de Roma,
près saint Sixst, qued era apostolis ab totz sos clergues, e fez
lo mètre en carcer.Can venc un jorn, qued eilagronlongament 5
estât près, e Decius Temporaire & Valerians, qued era jutges,
comanderon qued hom lur aduisses davan en la plassa, vezent
lo pobol, Fevesque ab sos clergues. E can fon denaut elz, e
Decius César, Temperaire, li dis : « Sas tu per qued es près,
ni aduh aici davan nos, vezent tôt lo pobol? » Respondet 10
saint Sixst, e dis : « Eu o sai lo ben. » Decius Temperaire dis :
« Ara 0 fai de guisa que tulig aquist o sapian, per zo que tu
vivas e ta clerzia puscha creiscer. » Sainz Sixst respondet :
« Verament o ai eu fah, et o farai, e li meu clergue seran cre-
gut. » L'emperaire dis: « Per amor d'aizo, sacrifia alz deus 15
non mortalz, e seras princes e seinner de totz los autres pre-
veires. » Respondet le sainz evesques : « Eu ai totas horas
sacrifiât e sacrifiarai a Deu lo Paire poderos & a nostre Sein-
nor Jesu Christ & al Saint Esperit sacriflzi pur e net.» Adonx
comandet Temperaire qued hom lo menés al temple d'en 20
Mart, e que lo fezessan aqui sacrifiar. Mas el, per nuil tor-
ment qued eil li fezessau, non lo pogron far sacrifiar ; e
cant eil o viron, raeseron lo en una carcer ab diaques seus,
25
370 LEGENDES PIEUSES
Felicissi-[79v°]-mura <k Agapitum.E can l'en menavan, sainz
25 Laurenz Tarchidiaques li acomenset a dir aitalz paraulas :
« 0 tu, paire, on annaras seii ton fil? 0 tu, sainz preire, on
tenras senz ton diaque? Tu non avias lo usât, qued offrissas
ton sacrifizi senz servidor. 0 tu paire, que t'es desplagut en
me? As doux après qued eu forIinne?0 as près autre sirvedor,
30 que sia plus fizelz, a cui as comandat lo sagrament del sanc
de nostre Seinnor? Aici con soi agutz to-î compainz el sacri-
fizi del cors de Jesu Christ, deuria eu esser tons compainz el
sacrifizi del tieu cors. Vejas, seinner, que le tieus juizis sia
drechuriers, car mal o fale maistre, can raespresalo discipol.
35 Abrahamps oiTerc son fil; sainz Peire trames saint Esteven
denant se a nostre Seinnor. E tu, paire, demonstra el tieu fil
latoavertut. Offre primerament mo cui asesseinnat, e tramet
me primer, que plus segurament puscas annar per la via on
deves annar a la corona de martiri. » Adonx li dis sainz
40 Sixst : « Filz, eu non te laisse pas ni te desampare. Masmajer
corona de raartire t'es dcguda. Nos, car em veil, recebrem
plus leu batailla; et a te, qued esjovens hom, coven qued aias
major Victoria del tjrant, que soffrias major torment. E non
veillas plorar, qued ades venras a me. Apres très jornz me
45 segras. Car primerament deu vencer le maistre la batailla,
e pois tu deves li querre adjutori. Mas pren tôt Taur e l'ar-
gent e tôt [80 ro] lo thesaur de la gleisa, e départ o a celz
que vejaire ti er )).
Cant sainz Sixst ac donat aquest poder a saint Laurens, an-
50 net sainz Laurenz per la terra, & aqui on sabia los clergues
paures, qued estavan escondut, per la fen de Jesu Christ, por-
ta va lo thesaur, e donava en a cada un zo qued obs li era. Can
venc aprop, l'emperairc dis qued hom li menés davant saint
Sixst. Cant fon aqui davant el en la plassa, & Felicissimus &
55 Agapitus ab el, e Temperaire Decius, pies d'ira, li acomenset
a dir: « Tu es veilze nos dariam te bon conseil. Auz, e fa nos-
tre mandament, & sacrifia alz deus. » Respondet sainz Sixst e
dis : « Caitiu, tu acoseilla te mezeis, & non voillas tas paraulas
getar en va. Mas fai penetencia del sanc delz sanz, qued as
00 escampat. » Adonx Decius, per lo conseil de Valerian lo
jutge, comandet qued hom lo menés al temple d'en Mart, e si
non volian sacrifiar qued hom aqui eis lur tolgues laS testas.
i
LEGENDES PIEUSES 371
Menet los hom foras de la ciutat, ad un temple d'en Mart ; e
can foron aqui, sainz Sixst acomenset a dir al temple : « Des-
truet te C hrtstus filius Deivivil Destruia te Christ, le filz de Deu 65
viu!» Canttuhgli Christian agronrespondut: aAm^w», aquieis
cadec una granz partida del temple, & fon tota atrissada. Adonx
sainz Laurenz acomenset a cridar : « Sainz paire, non me
laisses, car aquelz tresaurs, que tu m'avias comandatz, ai totz
despendutz. » 70
Li ministre, cant auziron delz thesaurs, prese-[80 v**]-roa
saint Laurenz, Tarquidiaque Saint Sixst, & Felicissimon & Aga-
pitum meneron davan lo temple d'en Mart, & aqui taillet lur
hom las testas, ,viij, idiis augvsH. Can venc la nohg, e lo ven-
gron li clergue e li Christian & coilliron los cors del[z] sainz 75
martirs, e sebeliron saint Sixst en una crota el cimenteri de
Calixti, enmesesmala via ; los autres martirs, Felicissimum&
Agapitum, sebeliron atressi en mezesrae lo sementeri. Ab
aquest foron atressi martiriat autre quatre, aici con hom o
troba legent en la gesta delz evesques, Januarius, Magnus, 80
Vincencius& Stephanus, & atressi fon martirizatz ab elz Beatus
Quartus, aici con o escrius sainz Cjprians. Aquest sainz Sistz
fon natz & esseinnatz ad Athenas, e fon primerament philoso-
pus, e pois fon discipolz de Christ. Et estet un an en Tevescat
et .X. mes & .xxij. jornz*. 85
Aici con dih vos avem desobre, sainz Sixst, can annet amar-
tire, comandet los thesaurs de la gleisa a sant Laurenz. Annet
s'en sainz Laurenz en un poi qued avia nom Celion, on estava
una donna qued avia estât .xxx.ij. anz vezoa; e ténia escondutz
en sa maison moutz crestians e moutz clergues e motz pre- 90
veires. Venc s'en laintre sainz Laurenz & aportet los thesaurs
de la gleisa, e vestimenz, e donet lur o a cada u, segon qued
obs li era, & lavet a totz los pes. Aquil donna, Ciriaca qued
avia nom, vai se getar a sos pes de saint Laurenz, & acomenset
li a dir : « Senner, eu te conjur per Jesu Christ que tu pauses 95
[tas mas] sobre mon [81 r°] cap, car moutgrandolore moût gran
enfermetat i sofri. » Sainz Laurenz seinnet la e pauset li sas
mas desobre lo cap, & lo ^ drap ab que terzia los pes del sainz,
<& aqui eis fon sanada e guerida.
* Oa avait d'abord écrit .xxx.iij. Le dernier x et le second i ont été grattés.
2 Ms la.
372 LEGENDES PIEUSES
100 Ciint 0 ac falig, moc se craqui ai annet s'en en una carrera
qued hom appellava Canarius, éi venc a la maison d'un qued
avia nom Narcissi & era cliristians, Si atrobet laintre moutz
christians ajostatz,ques'escondian per Temperador, &lavetlos
pes a totz, <k pois donet lur del tresaur. Laintre en aquella mai-
105 son, avia un home cec qued avia nom Crcscencius, & acomen-
set a pregar saint Laurentz que li pauses sa man sobre sos oilz.
Sainz Laurenz, cant o auzi, acomenset a plorar, e dis: « Nos-
tre Seinner Jesu Christz,qaed uberc los oilz de celui qued era
natz cex, el enlumine los teus oilz ! » E fez li cros sobre los
110 oilz, <k en eis pas foron enluminât, o vi clarament. Cant sainz
Sixst Tevesques fon menatz a martire ab dos diaques sens, e
domenz que l'en menavan, e lo venc sainz Laurenz & acomenset
moût fort a cridar : « Sainz paire, non me voillas laissar, car
los thesaurs, que tu m'avias comandat, ai totz despendutz. m
115 Cant li cavalier de Temperador, qued eran aqui, auziron del
tresaur, van penre saint Laurenz & liureron lo al veguier,
qued avia nom Pateriiion. Et aquel mandet a Temperadore
fez saber que près avia l'arquidiaque Laurenz, qued avia rescos
los thesaurs de l'evesque [81 v°] Sixst. L'emperaire, canto
120 auzi, ac gran gauh, e comandet qued hom lo li aduisses
davant. E cant fon denant el, (k ac auzit sa razon, liuret loal
jutge Valerian. Valerians donet lo en garda ad un qued avia
nom Ypolite. Aquest Ypolites mes lo en sa carcer, ab moutz
autres que n'i avia.
125 Laintre en la carcer avia un home, qued avia nom Lucillus,
& era cex. E dis li sainz Laurenz : « Lucille, crez en Jesu
Christ, lo fil de Deu, 6i bateja te, & recobraras ton vezer. »
Respondet Lucilliis, e dis : « Totz temps ai désirât con ea
fons batejatz el nom de nostre Seinnor Jesu Christ. » Ab ai-
130 tant sainz Laurenz christianet lo, e pois fez se aportar d'aigua,
e batejet lo ; et aqui eis sei oil foron enluminât. Can saupron
per la vila aquesta meravilla, qued ac fahg sainz Laurenz»
venian moût cec en la carcer on era sainz Laurenz, e pausava
lur las mans sobre los oilz, & eran enluminât, Cant Ypolitus,
135 quel ténia en sapreizo,vi aizo, crezet en Jesu Christ, e dis a
saint Laurenz que lo batejes. Pois mandet Valerianus le jut-
ges qued hom li aduisses saint Laurenz denant. E can fon de-
nant el, et el li dis : « Laurenz, laissa aquesta follia, et rent
LEGENDES PIEUSES 37 3
nos lo thesaur de Sixst, que nos sabem qued tu as rescost. »
Respondet li sainz Laurenz, e dis : « Dona me espazi de dos 140
jornz o de très, e pois aportarai los te davant. » Larguet
Tom ; e can fon largatz, annet per la ciutat, & acampet los
paupres, [82 r°] elz frevolz, elz cex, elz clops, e mes los en la
maison d'Ypolite. Valerians fez saber a Temperador que Lau-
renz avia quist espazi de très jornz, e pois rendria los the- 145
saurs.
Aprop très jornz, sainz Laurenz venc al palais de Salusti, e
dis li Decius l'emperaire : « On son li thesaur qiie tu avias
promes que rendrias? » Ab ai tant sainz Laurenz eis s'en foras,
& ac acampatz totz los paupres, & fez los toz intrar el palais, 150
e dis : a Emperaire, aizo son li thesaur durable, que ja non
amermaran, anz creisson cadajorn; e tuhg podon lo aver,
aquest thesaur, e cada uns hom pot Taver tôt. » Valerians le
jutges acomenset a dir : « Q[uid] varias^ permulta ? Per que
nos vas aici essajant? Sacrifia alz deus & oblida aquestas 155
artz encantairitz en que te fizas! » Respondet sainz Laurenz,
e dis : « Per que vos destrein tant le diabolz que vos diguas alz
christians : Sacrifiatz alz diabolz ? » Gant Temperaire Decius
auzi aizo, coraandet qued hom lo despoilles, & qued hom
lo bâtes ab aguilensiers. E domenz qued hom lo batia, & el 160
dizia : « Eu ren gracias al meu Seinnor Jesu Christ, que vol
qued eu sia en la compainna delz seus sainz martirs. Mas tu,
mesqui, zo dis a l'emperador, tormenta ta ira e tos forssenz. »
Adonx dis Temperaire : « Levatz lo, & tormentatz lo en totas
maneras qued hom pot nuil home tormentar. » Van penre 165
sanz Laurenz e lieron lo ab cadenas, e meneron lo al [82 v®]
palais de Tiberii. L'emperaire fon en un temple d'en Jupiter,
qued era laintre el palais, & sez se en una cadera, e menet li"
hom denant saint Laurenz. Cant fon denant el, acomenset li a
dir : « Sacrifia alz deus, & non te voler fizar el[z] thesaurs qued 170
has rescondutz. » Sanz Laurenz respondet desliuramenz :
« Veramentme fiz eu en mos thesaurs, & en soi ben segurs. »
L'emperaire, cant o auzi, fon moût iratz, e comandet qued
hom lo bâtes ab fustes. E domenz qued hom lo batia, el cri-
dava a l'emperador, e dizia : a Ar podes conoiscer, mesqui, 175
^ Ms. Quarias.
374 LEGENDES PIEUSES
qued eu me fitz tant el[z] thesaurs de Christ que los tieus tor-
menz non senti. » Can Temperaire o auzi, comandet qued hom
li aj estes al latz platas de ferre ardens ; e cant o agron fahg,
sainz Laurenz acomenset a dire : « Domine Jesu Christe, Deusde
180 Deo, miserere met servo tuo, quia accusatus non negavi nomen
sanctum tuum, int^rroyatus te Chrislum dominum J(^sum confes-
SU8 sum, Seinner Jesu Christz, Filz de Deu, aias raerce de me,
que soi tos sers, car eu accusatz non ai denegat lo tieu saint
nom,& ai ades^onfessat, cant eil me demandavan, te, Seinner
185 Jesu Christ. » Ab aizo eil Tacomensavan moût fort a batre
ab massas de piump. E domenz qued eil lo batian,el acomen-
set a dir : « Seinner Jesu Christ, que per la nostra salut dein-
niest recebre la forma deto sers, que nos desliuressas delser-
vizi del diabol, recep lo meu espcrit ! » Ab aitant e vec vos
190 una votz de cel, que li dis: « Laurenz, ancar te son degu(s)t
ma-[83 r^]-jor torment. » Ab aitant va l'om penre, & esteudet
Fom en un estrument, e liet Tom aqui, & acomenset Tom meut
malament a batre. E domenz qued hom lo batia, & el aco-
menset gracias a rendre a nostre Sennor, <k dizia : « Benezeihg
195 sias tu, Seinner Deus, Paire de nostre Seinnor Jesu Christ,
que nos has donat la toa misericordia, que non aviam ameri-
tada. Mas tu, Seinner, per la toa pietat, dona nos aquella gra-
cia, qued aicel, que son aioi entornme, conoscan que confor-
tas los tieus sers. »
200 Aqui eis uns delz cavaliers qued estavan aqui, qued avia nom
Roman, crezet en nostre Seinnor Jesu Christ, e dis a saint
Laurenz : « Eu vei qued uns hom trop belz esta aqui ab te, fî
ten un drap ab que torca tos menbres del sanc. Et eu conjur
te per Jesu Christ, que t'a trames son angel, que tu non me
205 laisses. » Ab aitant levet hom saint Laurenz d'aquel estru-
ment, & desliet Tom e rendet Tora ad Ypolite laintre al palais.
Venc Romas & aportet aigua en una conca, e pauset la alz pes
de saint Laurenz, e preguet lo que lo batejes. "Vai sainz Lau-
renz e benezi Taigua, e batejet lo. Cant l'emperaire auzi que
210 Romans s'era aici fahg batcjar a saint Laurenz, fon mout
iratz, e comandet qued hom lo bâtes ab fustes & ab paiz. Et
enanz qued hom Tapelles, el acomenset a cridar : « Christian^
soi, » Ab aitant Temporaire comandet qued homlo menés foras
de la ciutat, e qued hom li tailles lo cap. MaenetTom foras de
LEGENDES PIEUSES 375
laciutat, e tailletlihom latesta, segonlo coman-[83v**]-dament 215
de Temperador, v, idus augusti. Cant venc la nohg, e lo venc
le praire Justis, e près lo cors e sebeli lo en una crota en
camp Vera.
Can venc en aquella eissa nohg, Decius Temperaire venc en 220
la plassa, josta lo palais de Salusti, e comandet per aqui eis
qued hom li aduisses saint Laurenz davant; & aduis lo li hom,
& aportet hom ab el montas maneras de tormenz, plumbate,
fusteSy lamin€y ungues, lecti, baculi, E dis a saint Laurenz Tera-
peraire : « Pausa Tengan de la toa art encantairiz, & digas
nos ton linnatge, ni don est. » Respondet sainz Laurenz, e 225
dis : « Mos linnatges fon d'Espainna. Esseinnatz e noiritz soi
en Roma, & des qued era el brez soi christians ; e des qued
acomensei a parlar, ai après la sancta lei e la divina. » L'em-
peraire dis : « Sacrifiza alz deus, que si non o fas, totaaquesta
nohg seras tormentatz.» Respondet sainz Laurenz, e dis : « Mea 230
nox obscurum non habet^ sed omnia in luce clarescunt. Li mia
nox non ha d'escur, mas tôt cant i a resplandis per gran lutz.»
Vai Temperaire, e comandet qued hom li bâtes sa bocca, e
domenz qued hom la li batia, sainz Laurenz rizia, e se con-
fortava» e dizia: « A te, Seinner, qued es Deus de totas eau- 235
sas, rent eu gracias. » Ab aitant aportet hom una grazilla ab
très costas de ferre, e despoillet hom saint Laurenz de sos
vestimenz, & estendet l'om desus, & ab forquetas de ferre &
hom Festreis de sobre que non se po-[84 r*^]-gues moure.
Adonx can fon aici estendutz, & el acomenset a dir a Tem- 240
perador : « Ego me obstuli sacrificinm Deo, in odorem suavi-
talis, quia sacrificium Deo est spiritus contribulatus. Eu me soi
offertz sacrifizis a Deu en odor de suavitat ; car sacrifizes es a
Deu esperitz contribulatz. » Li carnificer, que lo destreinnian,
acermavan las brasas, e metian las desotz la grazilla, e de 245
Sobre prennian saint Laurenz ab forquas de ferre. Ab aitant
Sainz Laurenz acomenset a dire : « Mesquin, ara vejas can
g^ranz es li vertuz del meu Seinnor, car li tieu carbon me
donan refrisreri ; & a te daran durable torment. Car le meus
Seinner Jesu Christz sap ben que, cant eu fui accusatz, non 250
lo deneguei, anz ades ai confessât qued el es mos seinner. E
domenz qued hom me raustis, eu li rent gracias. » Et ab
xnout gran gauh & ab alegre vont el dizia: « Gratias ago
376 LEGENDES PIEUSES
tibi. Domine Jesu Christe, qui me confortare dignaliis es, A te
255 fatz eu gracias, Seinner Jesu Christ, car tu m*as deinnat con-
Ibrtar. » Et ah aitant levet sos oilz, e regardet se vers rem-
perador, e dis H : « Majsqui, vec te qued as raustit Tuna par-
tida; gira me deus Tautra part, e manja. » Et acomenset a
glorifiar & a lauzar nostre Seinnor, e dis : « A te rent gra-
260 cias, Senner, car eu ai ameritat ad iutrar per las toas portas.»
Et ab aitant Tesperitz li eissi del cors. E cant venc a la prima
alba del jorn, <i: Ypolitus emblet lo cors e portet Ten, et
envolopet lo en moût belz draps, et [84 v°] maudet o al pre-
veire Justin, que saintLaurenz avia aicifahgaucir Temperaire.
265 Venc le preire Justis, <k Ypolitus, moût trist & plorant, e por-
teron en lo cors del benazurat martir in via Tiburtina, en la
maison d'aquesta donna vetzoa Ciriaca, m campo Verano, a
cui alberc sainz Laurenz avia portât de nohg alz paupres
que lainz erau del thesaur, ai ad ella avia donat per la dolor
270 del cap lo drap, ab qued avia ters los pes alz paupres ; & cant
venc lo seras sebeliron lo aqui, . iiij'^, idus agusti. Aqui
vengron li Christian, & dejuneron, k feron i vigiliastres nohg.
Sainz Justis le preire cantetsasmessas, e cumeneguetlopobol,
e rendet son sacrifizi a nostre Seinnor.
XXVI
PASSIO SANCTI STEPHANI MARTYRIS
In diebus illis, crescente numéro discipulorum, factus est ihw*^
mur in ter apostolos, eo quod non haberent qui ministrarent ac^
mensam Dei Can li apostol annavan predicant la paraula d^
Deu, & eil acomenseron a dir un jorn entr'elz, & acomensero
5 se a rancurar, car non avian discipolz adordenatz que lur cir
vessan a la taula de Deu; e disseron: «Elejam* de nos autre
talz. vij., que sian bon & util & plen de Saint Esperit e d
sapieza; &. aquestz establam sobre aquesta obra. » Plac mou
aquist paraula a tota la compainna. Et elegiron Esteven, pie
10 de fez e de Saint Esperit, & Philipum & Prochorum & Nicha —
norem, & Thimotheum & Parmenara & Nicholaum advenanc^
1 Ms. eleian.
LEGENDES PIEUSES 377
Anthioce-[85 r°]-num, Aquest establiron davan los apostolz.
E cant los agron elegitz, pauseron lur mas de sobre, e pregue-
ron nostre Seinnor, e receupron Saint-Esperit. Li paraala
de nostre Seinnor Jesu Christ creiscia ades, e multipliava, et 15
le nombres atressi delz discipolz en Jherusalem moût fort.
Moût preveire de la lei delz Juzeus obedian a la t'en de Jesu
Christ e s'i tornavan. Slephanus plenus gratia et fortitudine
faciebat prodigia et signa magyia in populo, Esteves, plens de
gracia e de forsa, fazia signes e granz meravillas el pobol. 20
Can li Juzeu o viron, leveron se encontra saint Esteve aquil
do la sjnagoga, qued era appellada tlelz Libertiencx, e delz
Cirenenx, & delx Alexandrienx, & d'aicelz qued eran de Cilicia
e d*Azia, desputanz ab saint Esteven. Mas non podian con-
trastara la sapieza de lui ni al Saint E-^perit qued era en el. 25
El lur dizia de lur lei con la degran tener, si con Deus la
donet a Mojson, e cal amor portet al pobol d'Israël, can lur
passet mare rubrum e xi. anz los pac de la manna el désert,
el mesprezeron, e laisseron la leiel[z] comandame[n]z de Deu,
e feron ydola en semblansa de vedel, et adoreron lo en lue de 30
Deu; per zo foron perdut eil e tuhg aquil que segon la lur
leig obravan. Per aquestas paraulas qued el lur dizia e per
los malz captenemenz de que los reprennia, irasqueron se ab
el per gra'n ira, à. amonesteron a de talz n'i ac que deissan e
fezessan encrezent al pobol qued aquest Esteves blathesmava 35
Deu & Mojsen.
Ab aitant feron ajostar tôt lo po-[85 v°]-bol e totz los sapis
homes de la lei, e corregron tuhg ensenjps, & van lo penre,
<k adduisseron lo. el conseil, et establiron a sos nian falz
guarenz que deisseron: a Aquest hom non 5^e cessa de parlar 40
paraulas contra aquest lue & escontra la sanctalei. Nos
avem auzit qued el a dih qued aquest Jésus Nazaretz des-
truira aquest lue, e muda aquelz comandamenz que nos ha
liuratz Moyses. « Et ab aitant tuhg aquil, que se sezian el
concili, acomenseron ad agardar saint Esteve e viron sa fatz 45
aital con fatz d'angel. Mas sainz Esteves, plens de Saint Es-
perit, esgardet vers lo cel e vi la gloria de Deu, o dis: « Eu
vei los celz ubertz, e Jesu Christ estar a la dextra del seu
Paire. » Eil non voigron entendre la paraula qued el dizia.
Mas tuhg ensemps s'abriveron moût malament en el & aco- 50
378 LÉiiEXDES PIEUSES
menseron a cridar: cPrenna fom. «> El ab aitant encaasseron
lo foras de ia oiutHt, e lojiiaQ I^ir vesiimenz, per zo que plas
fort lo poguessaii eneaussar e lapidar. e pausavan \os aiz pes
d*un enfant, que i avia nom Sa'.u. Aquest enfans qoe gardava
55 lur vestimenz. domentre q-ied eii lapidavan saint Esteve, zo
fon sainz Paulz .'aposiolz, que non era ancar convertitz. E li
nieserezent Juzeu ia^idavan saint Esteve, et el pregava À di-
zia : « Seinner Je>u Christ. re:ep lo mea esperii, e non lur
queras aquest peeeat. car eii non sabon que se fan. • E cant
60 a 0 aizo diligr, a ei î'eni en Crist, zo es en bona obra. Ad quant
finem nos perducat ùorninm nos ter Jr:8us Chris ins, qui cum
pâtre * civit et régnât.'
XXVII
S*}!** VITA SANCTI PANTHALEONIS ik PASSIO
In fiieffus iflis, rengninte impf\'<yimo Maximiano, plun'mi, hanc
r.'fam despicr'entff^. per fi-iem D^:i et Domini nostri Jesu Christi,
tn montiôus se abscondehmt , Eu a«'uel temps, cant reinnava
le malz reis Maximians. e cil que crezian en Jesu Christ, per
5 paor del mai emi>era :or, eseondian se elV puhg. li autre en
lascavas sotz la terra, con po^uessari fugir las penas e les
trabailz d'aquesi z; segle.Li autre non se volian moure, anz
attendianlos tonnenz de!z malz princes, ôc a:ci fenian lur vida,
el nom de nostre Seinn-r Jesu Christ. AJonx sanctitas e fez
10 probava per sapieza los messatires de Deu, los qualz menava
Victoria a vida durabia. Le fe.lons reis Maximiansse trabail-
lava ab los messatges de l)eu, lo s] qualz podia atrobar en la
ciutat de NichomeJia, on el os:ava; e li saint constrastavan
ab el entro a la mort.
15 En aquelz jornzera uns rix hom en la ciutat de Nichomedia,
qued avia nom Eustorgius, ôc avia un fil qued avia nom Pan-
thali, e liuret lo per esseinnar ad un qued avia nom Eufrosin,
que servia al rei eu son palais. Près 'lo] aquest maistre & es-
soinnet li Tart de metgia : ce menava lo moutsovent le maistre
» Tin do IsH lij;;:^' et de Ki i»i^e: c'est pour«iuoi sans doute le scribe n'a pas
rtrliovi» la formule.
LEGENDES PIEUSES 379
ab se el palais del rei. Cantle reis e tuh li rie home de la cort 20
viron aquest enfant, dizian at maistre Eufrosin : « De cui es
aquest belz enfans? » Aquest Panthalis era talz quenuil[86 v°]
home non podia hom atrobar de la soa belleza, car tota bel-
ieza que nuilz hom degues aver ni pogues, deiis lo suc entro
alz pes, tota l'avia el. Eufrosinus respondet lur, e dis: « Filz 25
es d'Eustorgio lo consol, & sa maire ha nom Envola. Et ha lo
me liurat qued eu Tessein Fart de metgia. » Le reis e cil qued
eran ab el acomenseron a dir : « Per la vertut delz deus, dignes
es qued estia davan rei. » Venian cada jorh al maistre tuh li
rie home, e dizian lique l'esseinnes fort. Le reis atressi con- 30
jurava moût Eufrosin, qued en fos moût pregatz, con l'es-
seinnes fort, car pausar lo volgra en son lue, si saupes de la
ôsica.
En sa vila avia un prohome qued avia nom Hermelau & era
se escondutz en una maison ab dos christians autres, per paor 35
del rei ; & denant aquella maison passava moût soven aquest
Panthalis. Hermelaus, eant vi aquest un jorn passar per aqui,
aici con solia, e vi la gran belleza e la gran reverentia de Fen-
fant, conoe per Saint Esperit que vaicelz d'élection dévia es-
ser, aici con fon Sainz Paulz l'apostolz. Nengus hom non li 40
podia tant dire qued el se volgues appariar ab femena, nil
podia hom far aniiar en plassa, ni jugar, ni rire, aici con es
usatges d'autres enfauz. Caiit venc un jorn, e lo lo sonet
aquest veilz Hermelaus, cant passava, aici con solia, per la car-
rera, e fez rintrar laintre en la masoneta on s'era escondutz. 45
E cant Pan-[87 r°]-thalis intret, saludet lo Hermelaus, e
dis : « Deus te don gauh, enfans. » Respondet Tenfans, e dis :
(( Et a te don gauh e te fassa digne de tota honor. » Ab aitant
le veilz va lo penre per la man, e dis li que se sezes. E pois
acomenset lo mètre en novas, e dis li: « Filz con estas tu? 0 ^0
de quai doctrinaes? 0 quai disciplina segues ? » Respondet
Panthalis, e dis : a Eu soi filz del sénat Eustorge, e ma maire
fon Euvola, qued ancar non ha gaire qued es morta. » Le
v[ejilz li dis: a De quai sexta es?» Respondet Panthalis :« Can
ma maire era viva, volgra qued eu estes ades ab ella. Mas 55
mos paire non o vole e volgra qued eu estes el palais del Rei,
& aqui apreses cavallaria. Mas pois que ma maire fon moi ta,
mos paire a me liurat aqui on se vole. » Hermelaus le vielz li
a. il r i. ;- - . '. . .r.t .-sir Hrr S*:»* HllUFLri: C_I1*'., MOi* -PI
>oi'.*r-. :..-•';..- ... 1- Ir -r ■- •Lirt^ iXrkî "LI'Tt 1&^ -fiUDS:^
- r
!«.•> \m '.'j\--x< .\.- '.: .. .1*: -r. ± ;-r.i le errz>n en e;, hi
.1 ■:i.i*. , .-z : ... .'j." ;- , -." - i-r7-iv_^i.i .-■*•= 1 e: non fazia.*
7.^ A ;. • ^.': ^.. x * ■" - -r . j. ^ :ii-f-^i e rent per an gran
î:-..'iir.i, 'i ;'■::- x ,'.:■ -. <z.^-x:r i. r :-r: i-.:re ceat. aici sainz Pan-
i . i i^ !v: ;:«:. ' -•;,•. r. i:.^-.. e:. >:2 2or. a fructiôamcnt d^ a
N.iuiz .i«; fij'/;^*/. V. > 'JL : i{-r:*:ï.-.ii lo preveîre: «Senner, si
îii lo w^M^, ':'i •'-' î'.'.'X tao-^:- i riiori p:iire. Car aizo que ta
so ili^; a!]/.i '?!! 'Aï<) i' •< M/w.s i.r-; a riii maire, <k qued ella orava
c* pic^:tva J^î'iu ^'i; s', qi».' vx r^i'edi^a?. </ Respondet le preire
t* ilis: '.( Civ/ <*M J'-'su C:iri:i% e faras tôt aizo qued eu t*ai
(lili ; o.ir cl \v)\\ <^\ {i a-r. î'i <;< sers. » De jorn en jorn annava
l*;inili:ilis ;il pivv«î;r<* u tiff'jrmiva se de ta fen de Jesu
H5 Clii'ist; v;v j.i Mon veni^'ni a son alberc, entro qued avia vist
priiiioruiiuMit lo [»i"<*v«;ir.» ; Cv ai'ji fon repletz de la gracia de
iKistro Sciiiiior .Jo>ii Clirist.
('an vono un jorn, t; <os niaistre laisset annar Panthali a
Hoti alborcî, o (lonnMi/ f[in?<l cl s'en annava, <k el setroba ab un
U(» onl'jinl, (iui> jac nioi't/ [xt un serpent que li era de lonc, que
\\\K\ njors. ('iuii I*antbalis lo vi, ac paor, e loinnet se un petit;
K\\ pois rocono.î se, (\ inonbrot li de las paraulas que [88 r*»] le
pi'oiro li ac dii^lias, «S: aconionset a (iir a se mezeis: « Ar pois
conoissor si son voras las paraulas que m'a dichas Hermelaus
1*') lo priMro. »> Vi ro"j:arilot so vers lo cel, e dis: « Seinner Jesu
Cbrisl, si eu soi dij^nos (piod ou te appelle, & volz qued eu sia
los sors, ol tieu nom resusv'ito aquost onfaus.» Et aqui eis
LEGENDES PIEUSES 381
Tenfans resuscitet, e le serpens esclatet per lo mehg.
Adonx receup major gracia Panthaleons e dis: « Benegh
sias tu, Seinner Jesu Christ, que m'as d[e]innat ajostar ab tos 100
sers! » Vai s'en ab aitan ab moût gran gauh, e vai se getar
alz pes d'Ermelau, lo preveire, e dis li : « Eu te prec, seinner
sers de Deu, que tu me batejes, car eu ai oi en aquest jorn
conogut que non es autres Deus, mas solament nostre Seinner
Jesu Christ, cui tu predicas, per lo cui nom li mort resusci- 105
tant. » E comtet li tôt con li era près, de quai manera, per
l'apellament del nom de Christ, Tenfas era suscitatz de mort e
le serpenz era esclatatz. Can Hermelaus le preire auzi aizo,
ac moût gran gauh, e dis li : «Sai ven, filz, e monstra me lo
serpent mort.» Et anhet ab Panthaleon, e vi lo serpent mort. 110
E cant Hermelaus lo vi, esgardet verslo cel, e dis : « Seinner
Jesu Christz,- benezehg sias tu, e benezeita sia li toa gloria de
la toa pietat, e li gracia de la toa misericordia! Car la toa
gloria non pot nuilz hom comtar ; car tu as donat al tieu fa-
mol Panthali los tieus sagramenz. » Cant ac dicha sa oratiori, ^^
torneron* amdui en la maison d'Ermelau, e feron segon la
lei [88 v^] de sancta gleisa. Donet li ^Hermelaus le preire lo
saint batisme & estet laintre ab el .vij. jornz. Can venc a
Tootau jorn, annet s'en Panthalis a son alberc. Et cant sos
paire lo vi, acomenset li a dir:((On as estât, filz, aitanz 120
jornz?» Panthaleon dis li : « Paire, un home qued era moût
malautz avem sanat el palais. Et per zo car era delz meillors
homes de laintre, amix del rei, avem la estât set jornz ab el,
entro qued es ben sanatzde sa malautia. » Ab aitan sos paire
se quezet. 125
Cant venc Tendeman, annet s'en a son maistre Eufrosi-
num ; e cant Eufrosinus lo vi, acomenset li a dir : «Diguas
me, Panthaleon, on as estât tanz jornz?» Respondet el e dis:
«Mos paire a comprat un camp, & trames lai me, per vezerlos
termes ; & ai la estât set jornz, entro qued el venc e vi qualz 130
era aquilz possessions. E val moût mais aquil possessions de
nuilla peira preciosa, la quai ha comprat mos paire.» Aizo
dizia per lo enluminament del baptisme. E cant Eufrosinus
auzi aizo, non li vole plus demandar. Panthalis, repletz de la
1 Ms. totmerom. •
382 LÉGENDES PIEUSES
1:î5 gloria de Christ, conqueria adeslo thesaur de Christ, e donava
se ades gran cura con pogues tornar son paire a la fez & a la
crezensade Christ. Cada jorn parlavaa son paire, e lli diziala
vertut de Christ e la vana gloria de las ydolas. E dizia li :
« Paire, per queappella hom aques deus que totz temps estan
140 e ja non se mouran, e totz temps se sezon e ja non se moa-
ran, ni se levaran?» Respondet sos paire, e dis li : « Per
ma fez, te die eu qued [89 r°] aquist paraulaque tu dis es moût
greus, e non te sai respondre.)^ Sainz Panthalis, cant auzi
aizo, ac moût gran gauh, e rendet gracias a Deu, car sol per
145 una paraulaavia appellat son paire a la sciencia de Deu. Des
aquella hora fon ades pois sos paire doptans en las ydolas, car
el non lor * volia offrir ni far sacrifizi. & avia en son alberc
moutas ymagens. Panthalis volia las frainner maintas vega-
das, e pois pensava se que sos paire en séria iratz ; per que
150 non o volia far, mas fizava se en nostre Seinnor Jesu Christ,
que doues voluntat a son paire, qued el volgues que fossan
frac h as.
Domenz que Panthalis era en aquestas paraulas, e vec vos
que soneron a la porta homen qned aduisseron un cec, e de-
155 manderon si la era Panthalis le metges. E can saupron que
lainz era, pregavan li qued eisses deforas, e sanes aquel cec.
Can Panthalis auzi aizo, eissi ben tost foras, per vezer lo cec,
& eissi sos paire essemps ab el. E cant Panthaleon vi lo cec, e
le cex li acomenset a dir: «Eu auz la toa douza paraula, mas
100 la lutz non vei. Tuhg li metge an obrat en me, & nuilla ren
non m'a[n] profechat ; Si aquo eus pauc que vezia, aco eis m' an
tout. Ara soi remasuz cex e paupres. » Panthalis dis li : a Alz
autres as donat ta sustancia tota. A me que donaras, si pos
recobrar ton vezer?» Respondet le cex: «Aquo de ma sus-
165 tancia que m'es remasut, aquo te donarai.» Panthalis dis li:
« Lo don de lutz te donara per me [89 v°] Jesu Christz. Evai,
6i aquella part que tu me donarias dona alz paupres.» Le
paire de Panthali li vedava ades, e li dizia: « Filz, toi te d'a-
quest home e non t'en entrametas.Tu non podes essermingua
170 plus sapisd'aques metges, que non l'an pogut curar, per poinna
qued i aian mes. » Sainz Panthalis dis a son paire :« Seinner,
1 Ms. los.
LEGENDES PIEUSES 383
la cura qued eu done ad aquest homen, nenguns delz autres
metges nonlali pot donar. Le meus maistre sana solament ab
sa paraula aicelz que crezon en el.» Le paire cujava qued o
disses d'Eufrosino, son maistre. Panthalis tenc la man del cec, 175
6 fez li cros sus elz oilz, e dis li : « El nom del meu Seinnor
Jesu Christ, qued enluminet aquellas causas qued eran denant
escuras, e sana las estrechas malautias, e coil aquellas causas
que son escampadas, & convertis los erranz a sa voluntat,
veiras totz temps mais aquesta lutz, aitant can viuras, & en 180
l'autre segle veiras majorment, si crezes en Jesu Christ. » E
domenz qued el dizia aizo, e sei oil foron ubert. E cant le
paire de saint Panthali vi aquesta meravilla, crezet en Jesu
Christ, e cel atressi que recobret lo vezer. Et anet aqui eis
Panthalis e comtet o al preveire, quant granz causas avia 185
nostre Seinner fahgperel. Et estset pois raainz jornz cel que
fon guaritz ab Panthali, & annava ab el & ab son paire al
preveire cada jorn, que los confermava en fen, & [90 r**] lur
donet lo baptisme de la celestial gracia.
Aprop non tarzet guaire que mori sos paire de Panthali. E 190
tôt Taver e tota la sustancia, que sos paire 11 laisset, donet alz
paupres; &a celz qued eran en carcer ni en tormenz per lo
nom de nostre Seinnor, el lur servia, e lur aministrava, e
los curava. Nostre Seinner obrava ensemps ab el en totas
causas, e li autre metge avian moût gran enveja de zo qued 195
el fazia. Cant venc un jorn e tuhg li metge foron ensemps, e
fon aqui denant elz aquel cex cui avia Panthalis sanat. E can
lo viron, acomenset a dir Tus a l'autre: « Non es donx aizo
aquel cex que nos autri non poguem anc sanar ni guérir?
Qualz es aquel que Ta ai ci sanat?» Et appelleronlo, e disseron 200
li: 0 Qualz es aquest que t'a sanat ni guérit? » E dis lur:
«Panthalis, le filz d'Eustorgii, m'a curât. » Li metge disseron
ad Eufrosinum :« Aquest Panthalis non es donx tos discipolz?»
E dizian pois entre lur : «Per Deu, discipolz es de rie metge.»
Mas aizoprophetizeron, non sabent, de Christ. 205
Gran enveja avian li metge encontra Panthali, & annavan
ades querent ucaison con lo poguessan encusar & dire alcuna
ucaison encontra el. Cant venc aprop lonc temps, agarderon e
viron un d'aquelz que sainz Panthalis ac guaritz, e confesset
e disia qued el nom de Jesu Christ Tavia guarite sanat. Et 210
3S4 LEGENDES PIEUSES
anneron s'en li metge al rei, e disseron li : « Reis, aquel que
tu comandest [90 v'] qued apreses tost Tart de medicina, per
tal qued estes ab te en ta cort, aquest vai ab aquelz que van
encontra aquesta ait, e lo3 cura, & consent a las lur paraulas.
215 E si tu tost non l'on toiles, moutz homes fara tolre de sacri-
fiar alz deus ; e la sanitat que dona Asclepis transportar fara
a Jesu Christ. >> E pregueron al rei que fezes venir lo cec, qued
avia sanat Panthalis, e que li demandes per quai art era
sanatz. K can fon vengutz denant lo rei, acomenseron li a dir
220 li metgo : « Diguas per quai cura, ni per quai medicina es
sanatz ? » Dis sel qued era agutz cex : a Lo nom de Jesu
Christ appellet Panthalis & seinnet mos oilz, & aqui eis eu vi
clarament. » Le reis dis li : « E tu qued en dis ? Es sanatz
per la vertut delz deus, o per aquel qued es appellatz Christ?»
225 Respondet el e dis : « Reis, tuhg aquist metge, que tu ves,
an obrat montas causas en me 6l an agut tôt cant eu avia, &
anc nuilla ren noa me profecheron ; anz aco eis petit qued eu
vezia, aco m'avian tout. E non val doux mais aquest que m'a
rendut mon vezer que non fa Asclepis, que non me pogron anc
230 pro tener ? » Ab aitant le reis dis li : « Vai, e non voillas
esser folz, que diguas que Christz o aia fah ; car li deu t'an
rendut ton vezer. » Aquel respondet e dis : « Mas tu, reis,
non voillas esser folz ; car Jesu Christz m'a rendut lo vezer
per lo scu sers Panthali ; car el m'a adubert los oilz & m'a
235 enluminât lo sen de l'arma, per lo renovellament de Saint Espe-
rit. Rcis,li tieu deu que ren [91 r"] non vezon, con me pogran
rendre lo vezer ? » Cant le reis'^auzi aizo, acomenset a dir:
a Per la fen qued eu dei alz meus deus, vers es en aici- con
hom me dizia. Car si gaire viu, moutz homes tolra de la cre-
240 zensa delz meus deus. » E comandet qued hom getes aquel
foras, e qued hom li tailles la testa. E cant li agron taillât la
testa, sainz Panthalis donet aver a celz que l'agron degoUat,
que li aportessan lo cors. E cant lo li agron aportat, presloe
sebeli lo honestament dejosta son paire.
245 Pois comandet le* reis qued hom annes*querre Panthali. E
domens qued hom Taduzia, el annava dizent : « Deus, laudem
meam ne tacueris, quia os peccatoris et os dolosi super me aperlum
est, Loculi sunt adoersum me lingua dolosa. Senner Deus, non
laisses la mia lauzor, car li bocca del peccador e de Tengan-
LEGENDES PIEUSES 38 5
nador es uberta sobre me. Eil an parlât encontra me ab lenga 250
engannairitz, & an me environat de paraulas d'azirament, &
combateron se encontra me de lur grat. E per zo qued eil me
degran amar & eil me trahian, & eu pregava ; e pauseron
encontra me malz en lue de bens, & azirament per Tamor qued
eu lurportava. Seinner Deus meus, ajudame e faimesalvper 255
la toa gran misericordia ! Cil que me traisson sian vestit de
vergoinna e de reverentia, & sian cobert de lur confusion ; e
le tiens sers s'alegrara. » Et ab aitan Pantalis fon aduhg
déliant lo rei, & avia ades sos oilz [91 v°] a nostre Seinnor.
Ab aitant le reis li acomenset a dir : « Diguas me, Panthali, 260
si aizo es vers qued eu ai auzit dir de te. Non avia eu donx
pregat ton maistre qued ab gran diligencia t'esseinnes, car eu
te volia aver per ta belleza en mo palais ? » Panthalis res-
pondet . « Qued es aizo que n'as auzit, reis ? » Le reis dis :
« Eu non crez zo qued eu n'ai auzit, car ben poiria esser mes- 265
sonegua. Eu ai auzit dir que tu vas ab los crestians ; & celz
que nos tormentem per la non crezensa deiz deus, tu los sa-
nas, e lur fas lur obs de manjar e de beure ; e tu manifestas
essemps ab elz lo nom de Jesu. » Panthalis respondet :
« Scriptum est : Dii qui celiim et terram non fecerunt dispereant ; 270
a terra enim dii non sunt, Escrihg es : Li deu que non feron lo
cel ni la terra sian confondut. Diguas me, reis, si li tieu deu
an resuscitat mortz, ni rend ut vezer alz cex ; & si vers es
qued 0 aian fah, eu creirai en elz. Tu qu'en dis, reis ? » Le reis
dis : a Con pot donx far aizo aquel Jesu Christz que colon li 275
Christian ? » Panthalis respondet : « Cel que colon li Christian
fai aizo. E comanda qued hom aporte aici un d'aquelz malautz
que jazon en la plassa & fa venir, reis, aquelz que tu voiras ;
& appellon los tiens deus, & eu appellarai lo meu, & adonx
conoisseras per cui vertut sera sanatz ; et d'aqui adenant 280
devem creire a cellui que sera plus poderos. » Adonx dis le
reis : « Per deu, ben as dihg. Sia fahg en aici. » Comandet le
reis qued hom aportes un delz malautz de la plassa, & annet
l'om quer-[92 r**]-re, & aportetl'om en un legh. E fez venir le
reis los preveires de sa lei, e dis lur qued el nom de lur deus 285
sanessan aquest malaut. Ab aitant aquil horre preveire & li
philosophia acomenseron ad aver tuhg una crezensa. Li un
d'elz acomenseron a cridar Asclepium, e li autri Ypocrat, e li
26
386 LEGENDES PIEUSES
autri Jupiter, e li autri Diana, e li autri Herculem, & totz lur
290 deas autres, qued eran diabol, <k totz lur appellamenz era vans.
Panthalis estet, &agardavalur vanitat e lur trabail; e fazi* en
son esquern.
Can le reis vi que ren non podian far, acomenset a dir :
(( Passa Panthalis son appellament. » Panthalis reguardet
295 el cel, e dis : u Domine Jesu C /triste, exaudi orationcm meatriy
et clamor meus ad te veniat, Seinner Jesu Christ, autz la mia
pregueira, e li mia cridors vengua a te. Seinner non me tras-
vires ta cara ; e cora qued eu t*apelle, auz me tost ! Car eu ai
levada a te la mia arma, Seinner, demonstra ad aques noR
300 dignes & horres preveires, que tu es Deus, que sanas acelz
qued esperan en te. » E vai penre ab aitant la man del malaut,
e dis : « El nom del meu Seinnor Jesu Christ, esta sans e
salz d'aquesta hora enant. » & aqui eis le malautz vai sus sans
e salz & annet s'en a sa maison alegres & lauzans nostre Sein-
305 nor. Ac n'i moût d'aquelz que crezeron en Jesu Christ, can
viron aquella meravilla, & se partiron de la vanitat de las
ydolas. Li horre pre-[92 v**]-veire e li metge eran moût iratz
encontra Panthali, e dizian al rei : « Reis, li vertutz delz tieus
deus es destrucha, si tu lo mantens. Totz los homes fara tolre
310 de sacrifiar alz deus. Reis, non voillas creire en el(z), car
aquest malautz es sanatz per las vertutz delz deus. » E crezet
los le reis d'aizo, et acomenset a dir a Panthali : « Crez me
de zo qued eu te dirai, Panthali, e sacrifia alz deus. Non vez
tu doux cant home son mort, car non lur volian sacrifiar? n
315 Panthalis respondet, e dis : « Cil que moron per Jesu Christ
vivon durablament, quar per lo seu nom sunt mort. » Le reis
dis : « Panthali, non voillas appellar lo nom de Christ, et aias
merce de te mezeis, e de ta joventut, & ven & sacrifia alz
deus, que, si non o fas, montas granz penas te agardant, si
320 persévéras en aquesta non crezensa. » Panthalis respondet:
€ Reis, aquestas penas, que tu dis, tost son annadas, & eu
soi appareillas de recebre per nostre Sennor Jesu Christ.»
Maximians le reis dis : « Non sans tu donx quantas penas
sofferc l'autre jorn le preire Artemius ? » Panthalis dis : « Tu
325 sas cant granz tormenz soôerc, & anc per aco non laisset sa
fe, anz liuret ardidament & ab gran gauhg son cors veil al
ïnartiri, confortans en fez. Et eu que soi joves, dei moût plus
LEGENDES PIEUSES 387
ardidament appropiar a la fen, qued eu sia fahg dignes de la
corona de martiri.» Vi le reis que ja non lo poiria hom moure
de sa fez ni de sa crezensa ; comandet qued hom *, 33.0
[93 r°] saint Panthali per la man, e menet lo entro a la riba,
glorifianz e lauzanz nostre Seinnor, e dizia : « Confiteàor tiùt,
Domine f in ioto corde meo, narrabo omnia mirabiUa iua, Sein-
ner, eu te confessarai de tôt mon coratge, e comtarai tota[s] 335
las toas meravillas. Eu aurai gauhg, & alegrarai me en te, Au-
tismes, et saillirai per lo teu nom glorios. Li meu enemic sian
torna[tJ atras, & sian enferm, & periran davan la toa fas. Car
tu que sezes sobre lo tron, e jutgas la drechura, as jutgat lo
meu juzizi e lo meu plahg. E menasses las genz, e le fêlions 340
peric,e tu, Seinner, permanes durablament. » E cant fon ven-
gutz a terra, acomenset li a dir le reis : a Con an li tieu encan-
tamentsobrada la mar? » Panthalis respondet: « Eu non o ai
fahg, mas cel qued es ab me, cel o fez, del quai tu non es di-
gnes que lo vejas. » , 345
Le reis, cant auzi aizo, fon dessennatz e plens de gran ira, .
e comandet qued hom aduisses las bestias salvatgas qued el
ténia enclausas, que lo devoressan. Et acomenset li a dir le
reis : a Vejas, Panthali, totas aquestas bestias : totas son
appareilladas per te a devorar. E crez me, e sacrifia alz deus, 350
& aias merce de ta belleza, car es joves, que non moiras, aici
con son mort li autre sa en reire. » Panthalis dis al rei : « De
tota error es repletz e pies ; e per aizo faz me appareillar
majors tormenz et plus fortz. D'aquelz que tu dis que son
périt, aquil [93 v°] an vencut totz los tiens atrobamenz. Per 355
Je nom de nostre Seinnor, serai atressi eu enbellezitz per corona
con son li autri. Et eu, per lo seu nom, ai estenh las toas lam-
pezas, & ai dessipatz tos ministres, e ton plomp ai fahg frehg,
e tas cruzelz bestias ai fâchas soaus, que per ta plana ira
sias tormentatz e moiras. » 360
Can le reis auzi aizo, comandet qued hom lo meses en Tare-
na ; & aqui eis can fon intre, e lo li apparec Jesu Christz en
semblansa d'Ermelau lo preveire, e dis li: a Panthali, bons e
fizelz m'est auguz en paucas causas : sobre montas te establi-
* Lacune d'un feuillet. Voir ci-dessus, p. 213,
3f»8 LÉGENDES PIEUSES
:^ rai. *» Et comandet le reis qued hom laisses annar las bestias
laJDtre en l'are iia ab saint Pantali. E can foron laintre, aco-
menseron li annar entorn. Lileon venian & aMatavan iarcara
a S03 pens. Li laupart venian e licavan los li. Las autras bes*
tias ce pelegaran entr'eilas mezeissas, qualz primera pogaes
^0 ^6Dir a SOS pes, <k pois can li avian baisât los pes, partian s*eD,
cais ab lur vos laozant Deu. Gant totz le pobols vi aizo, ae
granz meravillas. et acomenset a cridar èi a dire : « Granz
es le Deus delz christians. O tu, tyrant, disseron al rei, laissa
estar lo jast. » Vai le reis, e fez penre aquelz que cridavan,
375 e fez en aucire ben entro a mil, e fazia los getar a las bestias,
mas elias non los volian tocar. Le reis, caut o vi, comandet
qued hom auzizes las bestias, ab^los homes essemps, car non
los tocavan.
Âdoux [94 r^] sainz Panthalis acomenset a glorifiar nostre
380 Sennor et a dire : « Gloria sia a te, Seinner Jesu Christ, per
las toas granz meravillas, car per te non mor solament Tumaos
linnatges, anz las Ij^stias saivatgas aman mais morîr que to-
con un delz tieus sers. » Tuhg aquil que foron mort foron se-
belit rescondudamenz la nohg per los christians. Mas peroel,
385 le reis, avia comandat qued hom fezes uuagran fossa, e qued
hom mezes intre los homes ab las bestias, et aici sotteres o
hom tôt essemps. E pois acomenset a d[i]r a celz qued eran
entorn el : « Que poirem far d*aquest enfant, qued aici per
son encan tament a fah convertir aitanta gent, que non Yolran
390 sacrifiaralz meus deus ? » Et acomenseron li a dire : «Coman-
da qued hom fassa una gran roda, e qued hom la puje sus en
un aut puh, et pois qued hom i lie ben <kfort Panthali; epois
laisse i'om annar d'aqui en aval per la costa, & aici li roda
dissipara totas sas carnz, À morra, voilla o non. » Et coman-
395 det le reis qued hom o fezes eu aici. E comandet le reis qued
hom mezes Panthali en la carcer, entro que li roda fosfaeha*
Can li roda fon fâcha el théâtre, et hom la pujet sus en un
puhg ; e cant fon sus, À hom la menet atressi saint Panthali;
e fez cridar atressi le reis per tota la vila, e per tota la cia-
400 tat, que vengues totz lepobolz, per vezer la mort de Pantalii
que tuhg aquil, que creirian en Jesu Christ, n'agiuBSsan pen-
densas, e se tornessan alz sens folz deus. [94 v*] E comandet
le reis qued hom aduisses Panthali. E domenz qued hom Tado-
LEGENDES PIEUSES 389
zia, et el pregava nostre Sennor e dizia : « Senner, clina ta
aureilla & auz me, car eu soi paupres e soflfrachos. Senner, 405
garda la mia arma & salva me, car eu ai espérât en te. Aias
merce de me, car eu t'ai cridat tôt zo dia. Alegra Tarma del
tieu sers, car eu l'ai levada a te,;Soinner. Car tu, Seinner, es
soaus e bons & es moût misericordios a celz que t'apellan en
veritat. Seinner, recep la mia oration en tas aureillas & en- 410
tent a la vos de la mia preguera. Seinner, eu ai cridat ad te
& auz me, car tu, Seinner, m'as ajudat& m'as consolât. »
Cant ac aici complida sa oration, meneron lo aqui on era li
roda, e lieron lo sus. E cant acomenseron a volver la roda,
en eis pas las liguaduras foron desjoinchas, eli roda fon dissi- 415
pada e desfacha. Sainz Pantalis remas sans e salz ; et Jesu
Christz era ades ab el, quel capdelava.
Can tubg aquil qued eran aqui viron aquest fahg, agron
gran paor e granz meravillas, Mezeis le reis ac gran paor &
gran meravilla, & acomenset a dir qued hom li aduisses 420
Panthali denant. E cant fon denant el, acomenset li a dir. Li
roda, aici con correc un pauc, aucis delz ministres qued aco-
seguet cincanta. Et acomenset a dir lo reis a sant Panthali :
a Per que fas aizo, car tu convertisses lo pobol a la toa lei, e
celz que non pos convertir aucis ? » [95 r°] Sainz Panthalis 425
respondet, e dis : a 0 tu folz e tracher filz de diabol, ben diz
de vos li propheta : Convertantur dolores eorum in captid, e^
in vertice eorum descendat iniquitas eorum. Las dolors d'elz lur
tornon sobre lur cap, & en lur vertitzdescenda lur iniquitatz!»
Maximias le reis acomenset li a dir : « Qui(s) es aquest que t'a 430
esseinnat aizo ? » Sainz Panthalis respondet e dis : « Le meus
seinner Hermelaus, le preire, m'a esseinnat aizo & tota la fen
de Jesu Christ. » Le reis dis : « Poiria l'eu vezer ? qued eu vol-
ria aizoapenre d'el.» Aizo dizia per engan e per bauzia. Sainz
Panthalis respondet, e dis : « Reis, laissa lai me annar & 435
eu adurrai lo te. » Le reis comandet li que la annes; e donet
li gardas qued anneron ab el per gardar. Annet Panthalis &
venc a la maison on Hermelaus le preire s'era escondutz&
intret intre. Et can fon inz, & vi Hermelau, & el Panthalis li
acomenset a dire : « Senner paire, le reis te demanda. » Le 440
preire respondet, e dis : « Bene venisti, fili : tempus enim meum
est. Ben sias tu vengutz, ûlz : le meus temps sai ben qued es
r^rurvz. Zat -m j*i ii^w-a l'^air rie*: -î» innafs. ai"Mar»tî le
ji»*'Lt 'i'iî JOi^r J'H'Ti Vir.^TL-i lis ail» : I- ti «t» auns. « i»Hiii«a
vi«» •»'îJ*T:w 3i.ir*^T». *«t»aij# in .a met **rï ?ïàa£uLL i &
AyiL •»'..4. vi.1 'ina im :mi ieaan." ji rei Maxiaiiaa, iei Itir
ii-trt 'in.i.z Tz "^^ Vî:i.z ■»-? 'i* lomn* ? i Risg^îa-ieçleireire:
« Con %a a'>!ii ivi.. ri»*'i -«'aa lâ Te? i L* prêtre re^poajet,
ft i:.-» ; « £•! *i :•:•» r'.-tiT** : .'is •*« i^g-è.likrz BraLvias, ÀFantre
H^rTmorraiiiî . s. laiii: 5«:a. iar!.*r"aa- > I»tj iereL* 'iced bon
l'S"» ir.:i*»s ■'l^•*^r■*. £ îan* looi lo^i i* i»i-i!L^ i<*iLiiLî el. et le rws
în-*n.^ i-i-.^? » Ri*i :':2.:-*7':!i eil, e ::-*c:rca : « Œrtst Fa hhz
•l^ra* i* «•*. » Li* r^..< il:* : « Ars.or.-îstia--:: q^^-ï sacrlâie alz «feus,
À s*r*^ x^i îkin:^ Mr. > R*»po2.ieroa rah^ eas^^nrps ti home de
lyen : f Pr^sriiçai "i-ib. ei^îs-p-? !L-:-5tre Seinnor. que ta, reis,
4if5»'> ^T-e:^*.^ ^n î*ll i: en "ii-* n:* «îrezeai, «jt ea el eoasamem noetn
rHa, A R dom^nz C'iei •*:! e^ravin ^î oraran tuhç qoatre. e Jcsa
Oiri-^tz l^ir appareî. ic en ^i- pas *:otz a.:/iei lax en qued estavan
s* mrr'î, E le reîs acoateaset lara -iir :< Yejas con se iraisson U
^^o, '^j^e tota la terra fan moire, i Pantalis respondet, c dis:
4^ « Li t^rra «"ea mogada, reîs, e î: liea deo son cazohg, e sontubg
atri«3iat. Car fa, rei:», non dis ren de zo qoe ta dis. » E domenî
<|ri^ «ainz ParithaîU dîzia aizo, e lo Tenc uns messatges, edis
al rei ; c Kein, lideuson cazuhgesontahfrahg. » Lereisdis:
" l>r ma fen, si en non aacisto^t aqaes^eil penran conseil qu^
470 d^^imiari los deus.» Etotz ie poboîz acomenset li annar en-
rjtuiv^, K comandet qued hom tornes Panthali en la carcer.
Kloniren autres comandet qued hom tormentes, et[96r*]
qne hjn menés om foras de la ciutat, e que lur tolgues homlfts
testas «
475 Peron o aici li ministre, con le reis o ac comandat. E can
foron foras de la ciutat, eil acomenseron a pregar ; e cant
agron fahg lur oration, e li ministre lur tailleron los caps. B
pois vcngron li Christian, e sebeliron los honestament. E pois
' \)ti preire, écrit d'abord on a fait *'eis, en exponctuaot la première et 1*
dernière lettre, et en changeant en s la deuxième r.
LEGENDES PIEUSES 391
comandet le reis qued hom aduisses Panthali. E can fon denant
el, acomenset li a parlar le reis & a dire: «Cujas me tu donx 480
aici escapar, Panthali, si non sacrifizas alz deus? »/ Respondet
sainz Panthalis e dis: « Eu non ai obsde respondre ad aquesta
paraula. » Le reis dis : a Vec te que tei maistre, Hermelaus,
& Ermicus, & Ermogradus, m'an crezut & an sacrifizat alz
deus, et ai los mes en mon palais, e son li meillor amie qued 485
eu aia.» Sainz Panthalis respondet e dis: « Fais los me vezer,
qued eu pusca estar ab els en vida durabla & el celestial
palais.)) Le reis dis: a Per granz obs los ai trames ad autra
ciutat, & aqui ai los estab[l]iz. » Sainz Panthalis respondet:
« O tu fêlions, ben diz aizo que dis ; e volz mentir, mas tu 490
dis la veritat. Car eil sont verament asetgat & aluguat en la
celestial ciutat del meu Seinnor Jesu Christ. »
Cant le reis auzi aizo, comandet qued hom lo tormentes
fort, e qued hom li tailles la testa, e qued hom lo crèmes.
Van lo penre li ministre, & acomensan l'en a menar. Sainz 495
Panthalis annava s'en moût alegres, lauzant Deu, e dizent :
« Des ma jo-[96 v°]-ventut m'an ades combatut mei enemic,
& ancar non i anren conquis. Lipeccador fabregueron sobre
mon dons, & an alonguada lur iniquitat. Nostre Sennnerdre-
churers taillara las servilz delz peccadors.» Ab aitant uns delz 500
ministres s'apropiet d'el, e cujet lo ferrir ab una ancona, e
lo ferres pleguet, aici con si fons cera, e non toquet anc
Tome de Deu. Cantli cavalier, qued eran aqui, viron aquest
fahg, acomenseron a dir entr'elz : « Granz e poderos es le
Deus delz christians.» E van se getar alz pes de saint Panthali, 505
e disseron li : «Sers de Christ, nos te preguam quetupregues
per nos, & crezam essemps ab te, &recepia nos Jesu Christz.»
Et ab aitan sainz Panthalis reguardet se vers lo cel, e dis :
€ Domine Deus meus, compte desiderium meum m loco isto, Sen-
ner Deus meus, adimple mon désirer en aquest lue, e dona 510
remission de lur peccatz ad aques homes, & dona lur part el
tieu rengne.» Et ab aitant venc una vos de cel, e dis : « Pan-
thali, le tieus desiriers es compUtz, car li cel te son ubert, &
Deua ha te donat la gracia de sanitat. Et d'aici adenant non
seras appellatz Panthalis, mas Pauthalamon, per zo car a 515
moutz as donat misericordia, elz as sanatz, à. appellatz al ren-
gne de Deu.» Sainz Panthalis pregava alz ministres quel feris-
392 LEGENDES PIEUSES
san ; mas eil non o volian far. Sainz Panthalis dis Inr : o Si
vos non fais aizo, vos non aures part essemps ab me. » Cant
520 auzirou aizo aquil que s'eran convertit, aco-[97 r*]-men8eron
lo a<lorar, & aici tolgron li la testa. Et en lue de sane, eissi en
lahg de son cors. Et uns olivers qued era aqui fou aqni eis totz
carguatz e plens de frucg. Montas genz de la ciutat de Nico-
media, can viron qued en lue de sanc era eissis lahg del cors
525 del benaznrat martir, éi que Tolivers era aici adimplis de frnc,
crezoron en nostre Seinnor, e renderon li laus e gracias.
Can Maximias le reis auzi qued aici era esdevengut,
oomandet qued hom tailles Toliver, e qued hom en crèmes lo
cors de sant Panthali Vengron autre ministre e feron o aici
530 con le reis o ac comandat : tailleron l'arbre e feron en leinna,
e cremeron en lo cors de saint Pantali ; e pois laisseron lo
en aquel eis lue. Can venc la noh, e lo vengron li Christian,
e leveron en lo cors del saint martir, e sebeliron lo honesta-
ment. Pr estante Domino nostro Jesu Càn'sto, eut est honor.
XXVIII
VITA SANCTI MARTINI
Igitur Martinus Sabbarie Panoniorum oppido oriundus fuit;
sed intra Italiam Ticini alitus est, So dis que sainz Martins
fon de Sabbaria, mas noiriz fon en Lombardia. Segon la
dignitat del segle, fon moût d'autz homes e de gran paratge,
5 maspagan eran.Sos paires fon primerament cavaliers, e pois
fon tribuns, zo es comandaire del[z] cavaliers, zo es qued ac
en son poder tota la cavallaria. Domenz que saintz Martis
fon petiz, e sos paires li fez apenre letras, e can [97 v©] fon
talz que poc portar armas, & el en fez far cavalier, e non de
10 son grat. Car deus qued era paux ni acomenset ad aver
reconoissement, fon sos coratges cou fons cavaliers de Jesu
Christ, & en el avia tôt son ooratge, con li servis. Car qant
aprennia letras, & ac entorn x. anz, & el s'en annet, mal grat
de son paire e de sa maire, a la gleisa, & quis qued hom en
15 fezes Christian. Et can viron li preveire qued aici o queria,
christianeron lo. Et aqui eis can fon christianatz, fon aici con
LEGENDES PIEUSES 393
vertitz del tôt en la obra de Deu, que cant ac dotz' anz vol-
gra estar ermitas el désert; mas li joventutzloi defendia. Son
coratge avia ades entorn las gleisas & entorn los monestiers,
e pensava, domenz qued era enfans, zo qued adimpli pois bona- 20
ment, can fon d'état qued o poc soffrir.
Can venc en aquel temps, comandet le reis que li fil delz
rix homes fossan escrihg, que deurian esser cavalier. Vole le
paire de Martin que fons escrihg sos filz ; escrius Tom. Can
venc qued ac quinze ans, & le reis en fez cavalier. Caval- 25
guet & annet ades pois ab cavaliers. A sos compainnos totz
fon moût himilz e bénignes, & ac gran caritat en se meteis,
pacientia & humilitat, outra tota manera. Tant ac de totas
bonas bonas constumnas en se que, deus pois que fon caval-
iers, fazia abstinencias e ténia vida aitan estrecha con fera 30
nuils monegues: per que tuh sei compainnon Tonravan moût.
Car deus pois qued el fon re-FOS r°]-geueratz en Christ, aco-
menset ad obrar zo qued Jesu Christ dis en Tavangeli : qued
hom sotzleves los trabaillatz, alz caitius portes * hom ajuda,
alz bezoinnos acorregues hom, los paures vestis hom. Nuilla 35
rende zo que li escazia de sa cavallaria per conduh non volia
servar tro Tendeman, mas tôt escassament son conduh en
retenia, car non volia annar encontra l'avangeli, que diz :
iiNolite cogitare de crastino: non veillas pensar de l'endeman.»
Quoddam itaque tempore, cum jam nichil prêter arma et sinr 40
plicem vestem milicie haberet, média hijeme, Can venc uns
temps, & el cavalguava ab lo rei, à. non ac mas solament
sas armas & son vestir, aital con tain a cavalier, e fon en
mehg d*uvern, e fazia tan gran freh que moût homen n'eran
mort. Esdevenc que domenz qued eil intravan en una ciutat, 45
& eil se troberon ab un paupre tôt nutz, & acomenset lur
a querre beu aici con passavan, & anc mingua non n'i ac que
ren li dones. Esdevenc qued venc alz derriers sainz Martins,
& can vi aquest paupre aici estar nutz, ac en pietat, & non
ac nulla ren que li pogues donar ; mas trais s'espaza, e parti 50
so mantel per lo megh, e donet lo li ; car tôt cant avia al-
ren avia atressi donat a paupres. Can sei compainnon viron
aici annar saint Martin (annar) envout ab la meitat de son
* }is, portez.
DES PIEUSES
395
'lias qued eu d'aici adenant sia
, que tu me volias donar, part entre
ntran per te. En soi cavaliers d« 95
^d eu mi coiubata. » Cant l'emperaire
lomenset li a dir que per paor
' rendeman, o dizia, e non per
ttiil bon sor qued aguea vei-s Deu. Res-
tent 0 segura:« Ëmperaire, si ta 100
Idiyua per bonafen, [99 V] caa venra
ivaii tota ta ost, can deura osser
c l'arKi lo signe de nostre Seinnor
ja gai'oitz d'escut, ni d'elrae, ni de
?rc, ni de iiuilla garnizo ; & estarai 105
' totK ]iriiners lo3 enemix, e ja nuil
Bniperaii'H, cant auzi aizo, fez lo mètre
■ jiroaP si aizo, qued el dizîa, séria
^nt de t'ez qued estes aicî desgaraitz
110
D, que dec esser li batailla, e li enonilc
i a l'eraperador per pas, e qae H ren-
I près d'el ni de sa terra, & eil estarian
^er aizo nuilz liom non deu aver doptansa
z aijuesta Victoria per so saint, qued el 115
Fia batailla ilesgarnitz. Car nostre Seinner
los glazis delz enemix, o per
r vole las maa del seu satot,
bautugudas del sanc d'alcun borne. Adonx
{ Martina sa cavallaria, & annet sen [ad] Ylari, 120
eveaquea de Peitieus; & adonx era conoguda
ler las terras li sancta fez de saint Ylari: per
ns s'en annet ab^ el, & estetab el gran pesaa.
ab sant Ylari gran pessa, & el conoc la bona
artin, fez n'arcbidiaque, volgues o non. Car 125
r°]-tins se deffendia ades, e dizia que non era
■an lionor, ni de tau grau dignitat. Cant veno
gran pe^sa son arquidiaquenat, e lo li venc
annes vezer sos parenz, qued eran aacar pa-
394 LEGENDES PIEUSES
mantel, acomenseron a rire & ad escarnir, car lahg li estava,
55 car portava aquel man-[98 v°]-tel aici desfahg. Alz autres era
mal, qued avian maia de vestirs que lipogran donar, car non
avian tan fah de lur gent estar. Carit venc la nohg, que sainz
Martins se fon colgatz, e lo li apparec Jesu Christz, domenz
que dormia, e portet vestit lo mantel qued el avia donat al
60 paupre, e portet lo deus aquella part vestit, qued el n'avia
cubert lo mesquin. Sainz Martins acomenset moût bonament
a gardar Jesu Christ, e conoc lo mantel qued el avia donat
10 jorn. E fon una gran compainna d'angelz entorn nostre
Seinnor, & acomenset a dir Jesu Christz, ab clara votz :« Mar-
65 iinuSy adhuc cathecuminus, hac me veste contexit. Martins, que
non es ancar mans christianatz, m'a cubert deus aquesta
part. » Vole remembrar nostre Seinner zo qued avia dih a sos
discipolz : c Quod U7ii ex minïmis mets fecistis, mihi fecistis,
Zo que vos fares ad un delz meus paupres, fares a me
70 mezeis. » E per confermar la guarentia de tan bona obra, vole
se demonstrar nostre Seinner en aquel habite que le paupres
avia receuput.
Cant sainz Martins ac vista aquesta vision, non s'en donet
humana gloria, mas la boneza de Deu reconoc en sa obra. E
75 cant fon d'état de .xx. anz, & el se fez batejar. Mas aqui eis
non laisset minga sa cavallaria. Car domenz que sons paire
tenc lo tribut, vole e li preguet que non se partis de lui. Mas
el, Martins, li prometia ben a son paire que, [99 r°] cant el
auria laissât lo tribunat, qued el desampararia lo segle. Can
80 venc aprop dos anz qued el fon batejatz, tenc cavallaria. En
aquel meja cavalgueron li barbarin en la terra de Fransa.
Ab aitan l'eraperaire Julius César acomenset a far so man-
dament, con getes aquellas genz de la terra. Et trames son
tribut e sos dons alz cavaliers d'una ciutat qued avia nom
85 Vuagionum. Et aici con era constumna, nomnava los hom
toz per lur nomps, & venc hom a saint Martin & escrius
l'om, aici con un delz autres cavaliers, per recebre lo don
de l'emperador. Sainz Martins, can saup qued Temperaire
11 daria aver per lo cavalgar, penset s'en a se mezeis : « Si
90 eu recebi lo don que l'eraperaire me fara e non cavalgui,
mal estara. » Vai el, & annet a l'emperador César, e dis li :
« Seinner, eu ai estât tos cavaliers entro assi ; prec te,* si
LEGENDES PIEUSES 395
te platz, que tu voillas e soffrias qued eu d'aici adenant sia
cavaliers de Deu. Et aizo, que tu me volias donar, part entre
los autres que se combatran per te. Eu soi cavaliers de 95
Christ, e non conven qued eu mi combata. » CantTemperaire
auzi aizo, fon moût iratz, & acomenset li a dir que per paor
de la batailla, que dévia esser Tendeman, 0 dizia, e non per
nuilla boneza ni per nuil bon cor qued agues vers Deu. Res-
pondet sainz Martins fermament e seguraiw Emperaire, si tu 100
cujas qued eu aizo non digua per bonafen, [99 y°] can venra
deman, eu me métrai davan tota la ost, can deura esser
batailla, totz desgarnitz; e farai lo signe de nostre Seinnor
Jesu Christ ; e non serai ja garnitz d'escut, ni d'elrae, ni de
capel de ferre, ni d' aubère, ni de nuilla garnizo ; & estarai 105
seguraraent & envazirai * totz primers los enemix, e ja nuil
mal non penrai. » L'emperaire, cant auzi aizo, fez lo mètre
en preison & gardar, per proar si aizo, qued el dizia, séria
vers, ni se el auria tant de fez qued estes aici desgarnitz
deman en la batailla. 110
Can venc Tendeman, que dec esser li batailla, e li enemic
trameseron messatges a Temperador per pas, e que li ren-
drian tôt can avian près d'el ni de sa terra, & eil estarian
pois en sa merce. Per aizo nuilz hom non deu aver doptansa
que nostre Seinner fez aquesta Victoria per so saint, qued el 115
non fos trames en la batailla desgarnitz. Car nostre Seinner
vole gardar son cavalier denfra los glazis delz enemix, 0 per
zo vole que fos li pas, car gardar vole las mas del seu saint,
que non fossan bautugudas del sanc d'alcun home. Adonx
laisset aqui sainz Martins sa cavallaria, & annet sen [ad] Ylari, 120
qued era adonx evesques de Peitieus; & adonx era conoguda
e renomenada per las terras li sancta fez de saint Ylari : per
que sainz Martins s'en annet ab^ el, & estetab el gran pessa.
Can ac estât ab sant Ylari gran pessa, & el conoc la bona
fan de saint Martin, fez n'archidiaque, volgues 0 non. Car 125
sainz Mar-[100 r°]-tins se deffendia ades, e dizia que non era
dignes de tan gran honor, ni de tan gran dignitat. Cant venc
qued ac tengut gran pessa son arquidiaquenat, e lo li venc
en vision qued annes vezer sos parenz, qued eran ancar pa-
* Ms. envazarai.
• Sic. Corr. ad ?
^9^ LEGENDES PIEUSES
1^) if.^n. Bfïtrai4 o a fiaint Ylari, èc ab sa volontat aftsroiefr i'ai
À anrmt Von la. Kt moût plorant À ab lagrimad prwi«c li
sariz Ylari» rpie toriie.^, e dis li sanz Ylaria e fez li fober ^œ»
rnoiif^M adviTAitat/ Hoffrîria en la via. E cant foa sainz
tins »iM é^ri Ia"« ^mn/ mon tain na.H, e lo It venjçroa lairoa e
irc> lo pirnro. K Tih dulz lairog levet una destral, e cnj^iz ha ferir
RiM por lo «!a|>, éi, us autrtMi va li penre lo bratz e r««;ii-î le
<*nlp Mha van lo ponre, À lieron li las mas detras lo 'io^. e
inoAcron lo on carcer, Kdomens que l'en menavan^ eîl Li de-
ninndnvan ((iii ora. Kl respondet, e dis lur que ckrîstîans en.
I4() K dtMnandavan li aï avia paor. Sainz Martins respoadia I«r
qii«*d hanr iiimIh tan tiogurament non estet, car el sabîa beB
qu«) no4tro S<Miinor* trametia majorment sa misericordia a sos
nf^rn vn lur touiptarion». Pois acomenset a dire & a monstrar
al/. lairOM lo4 ainoiioMtamonz de Tavangeli, tant qaed un delz
MTy lairofi noiivrrti ; <ii a(M>uionMet s'en ad annar ab saint Martin,
0 pro^ava li quo pro^çue^' nodtre Seinnor per el, que Tostes
d'.iqnolla niala vida. Kt aquost converset pois ades ab el. B
rorntava quo donion/ que s'en annavan, & agron passât la
[100 v"] riutat. do Modiolatia, e lo li apparec en la Tia le dîa-
l.V) bol/ on HomMauMa d'orao, éi dis li on annaria. Respondet li
sainz Marlin.^, o di.M quo la on Deus volria, la annaria. Res-
pond«Yt lo d in bol/, o di» li : « Quocumque ieris, vel quocumque
tpmpfarefhf dinhnlun tihi advermbitur. On que tu vaugas, ni on
que tu tornos, In diabol/ te sera ades encontra, qne te fara
155 ados enobg. » Kospondot sainz Martins, e dis: u Dominusmi-
chi ndjutor est, non timeho quid faciat michi homo. Nostre
Seinner m'es adjutorin, & non temerai nuilla ren qued hom
me fassa. i> Kn ei.s pas Tenemix envanezi davant sos oilz, &
anc pois non fon vistz.
160 Venc aqui on ora sos paire e sa maire; e converti sa maire, e
tornet de la error on era del[z] pagans; son paire non poc anc
convertir, et remas en la error. Moutz homes salvet, per son
bon eissemple, e tornet a la via de veritat. Cant venc approp
non triguet gaire, e sainz Martis basti un monastier en la
165 vila don era oppida. Et can ac bastit son monestier & ado^
< Ms. .8,
* Mil prigues (pri eo abrégé : p surmonté d'un trait droit, au lieu d'un trait
nontourné, comme dans pregava, qui précède.)
LEGENDES PIEUSES 397
denat, e lo venc ad el, al monestier, uns que s'era fahg chris-
tianar, mas non era ancarbatejatz*, & era i per aco vengutz
que pogues esser entroduhg de la disciplina de saint Martin.
Cant venc aprop non sai canz jornz, & aquestjoves hom près
malautia, e fon moût malautz de febre. Et adonx fon aitalz 170
aventura que sainz Martins era annatz, & non i fon ni venc
pois de très jornz. E cant venc, atrobet [101 r®] lo mancip
mort ; et avia lo aici dessubtat ii mortz que senz baptisme
s'en era annatz. Cant sainz Martins venc, agron Ii fraire lo
cors acermat, aici con coven a mort, & estet el mehg del sol, 175
e Ii fraire esta van entopn, que Ii fazian son mestier, aici con
Ii tainnia ; et ploravan & eran moût irat e marrit, car aici era
mortz senz baptisme. Can saintz Martis vi lo mort & saup qued
aici era transpassatz, acomenset moût fortaplorar, e coman-
det qued eississan tuhg foras la porta de la cella & qued hom 180
la sarres*, cant serian tuhg foras. Et aqui eis el se va getar
sobre lo mort, e fez sa oration a nostre Seinnor ; e cantac
orat, Tesperitz tornet al cors, & uber[c] los oilz, & acomenset
se a moure. Can saintz Martins o vi, ac gran gauhg, & ren-
det gracias a nostre Seinnor, & uberc la porta, e fez intrar 185
totz los fraires ; & ab tant intran inz cal melz e melz, per vezer
cellui viu, cui avian laissât mort. Et aqui eus batejeron lo, e
pois visque(s)t moutz anz. Aizo fon le primers miracles que
sainz Martins fez en aquella terra.
Le joves hom qued era agutz morz comtava pois que cant 190
Ii arma Ii fon eissida del cors, qued ella fon menada davan
lo durable jutge, nostre Seinnor, e fon per plan juzizi depu-
tatz en moût escurs lucx, & ab moût fera gent & ab moût
trista. E domenz que dui moût fer diabol l'en menavan per
moût escurs lux, e lo vengron subtanament dui angel, e dis- 195
seron que lo tornessan al [101 v**] cors, car Martins pregava
per el. Et aici per lo comant delz angelz, le mortz fon tornatz a
vida, per las or[a]tions de saint Martin. Des aqui enant Ii fama
de saint Martin e 11 sainteza fon saupuda & annet ades creis-
sent per lo segle. Cant venc aprop non triguet guaire que 200
sainz Martins passava per la vila d'un rie homen, qued avia
nom Lupicin ; e domenz que passava, & el auzi un moût gran
* Ms. batejar — ' On avait d'abord écrit serres,
398 LEGENDES PIEUSES
plor e gran plainhg. Et aqui eis cant o auzic, & el se restan-
quet & acomenset a demandar qued era aquel plors, e dis li
205 hom qoed uns sers de la mainada d'aqoest rie home s^era es-
teinhg ab un latz. Cant sainz Martis o auzi, diz qued hom \o
menés la on era le mortz. E menet lai Tom. E can fon en la
maison on le mortz era, fez n'eissir totz aquelz qued eranlain-
tre, e pois acomenset ad orar sobre lo mort. Et en eis pas le
210 joves hom fon vius, & uberc los oilz, & esforset aici con poc
de levar sus, e vai penre saint Martin per la'man, & annet
per lo sol, vezent tôt lo pobol qued era aqui.
En aquel temps esdevenc que fon .mortz Tarcivesques de
Tors. Et totz le pobolz acomenset a cridar ad una vos qued
215 hom fezes de Martin arcivesque, et appelieron saint Martin.
El respondia e dizla que per nuilla manera non poiria laissar
son monester. Cant viron que nuilla ren non i podian con-
querre, venc us hom de la vila, qued avia non Ruritus, e getet
[102 r^j se a sos pes, et acomenset li moût fort a preguar
220 qued annes & eisses foras del monestier, que sa moiller era
moût malautha, 6i que Tannes vczer. Ab aitant sainz Martins
prepauset son monestier & mes i garga, entro qued el fos yen-
gutz de la ciutat. Annet s'en la a Tors.E can fon en la ciutat,
venc totz le pobolz, e non solament aquel de la vila, mas de
225 totas las autras ciutatz qued entorn aqui eran, & acomenseron
tuh a dir cuminalment que ben era dignes aitan sainz hom &
aitan granz de l'arcivesquat.Aqui s'eran ajostatmout evesque
per l'élection e per establir l'arcivesque; à acomenseron ad
esser de talz n'i ac encontra saint Martin éi a dire que non
230 era dignes de Tevesquat, car pauca persona era & non era
belz hom, ni granz, ni ben vestitz, ni ben cermatz, sei cabeil
eran lagh ;et en aici despresavan lo. Et antre aquestz evesques
avia en un, qued annava mais encontra que tuhg 11 autre.
Avenc li una prophetia aitalz. Car le leitre que dévia legir ad
23^ aquel jorn non i poc esser, car le pobolz era tan granz qued
avenir non i podia, cant li clergue viron que le leitre non i
era, vai penre uns delz clergues un psauteri, & uberc lo, &
acomenset a legir lo primer vers qued i atrobet, & fon aizo le
vers : « Ex ore infancium et lactenciumpei'fecisti laudem prop^
240 ter inimicos tuos, ut desCruas inimicum et defensorem. De la
bocca, zo diz le vers, delz enfanz que taetan, [102 v**] as fahg
i
LEGENDES PIEUSES 399
essir lauzor per tos enemix, que destruias Tenemic deffende-
dor. »
Cant ac aizo dih le leitre, e totz le pobolz acomenset a cri-
dar que dignes era de l'evescat, & tota \i partz qued annava 245
encontra fon aici confunduda. E van penre saint Martin, &
aici per establiment de Deu fon elegh. Fon seinriatz ad arci-
vesque. Ane per aco non mudet son habite ni ren quedagues.
Ades portet himilitat en son cor, & fon ades vestitz paupra-
ment, & tenc ades vida de monegue, aici con solia ni avia pre- 250
pausat. Et estava ades enclaus en una cella de josta la gleisa.
Venia tan granz pobolz, per el ad vezer laintre cada jorn, que
anc soffrir non o poc, & annet s'en foras de la ciutat doas legas,
en un lue moût secret, & moût loin de tota autra gent, car el
mont non era aquel lux plus taisses ad hermitatge. De Tuna 255
part avia una* rocha moût auta, que clauziade Tuna part, &
solament per una via moût estrechaorn intrava intrae en aquel
lue ; & avia al pe de la rocha fahg una cella de rama, & aqui
el estava.
Moût autre morgue & discipol avian fâchas lur cellas en la 260
rocha, atressi con sainz Martins, car non se volian partir d'el
ni de sa doctrina. Et eran oitanta discipol, qued a Teissemple
de lur maistre vivian & estavan. Nuilz hora non avia aqui
propri, car tôt cant avian aportavan al mehg, & partia o hom
a totz zo qued obs lur [103 r°] n'era a cada un. Nuilz no i 265
comprava ren ni i vendia, mas aici con es constumna de
morgues quedestian, aici estavan. Nuil mestier del mont,de8
escriure en foras, aqui non fazia hom ; et aquo era donat alz
joves homes qued o podian far. Li major eil plus ancian, aquil
estavan en orations. Tart eissia cada us de sa cella, mas sola- 270
ment cant s'ajostavan per dire lur mestier. Lo jorn non man-
javan mas una vegada. Nuilz non i bevia vin, si malautz non
era. Ganren i avia d'aquelz qued eran vestit de cédas de ca-
melZ; & aquo era le plus molz vestirs qued eil aguessan. Et
avia i antre aques moût de rix homens, li quai eran agut 275
davant moût fort en la error, que pois torneron ai[ci] ferm *
^ Ms. uno.
2 Oq avait d'abord écrit aicevm. Du c od a fait une f, mais en oubliant de
compléter le mot précédent.
400 LEGENDES PIEUSES
qued a la vida de saint Martin eran pujat ; e d*aques ac en
ganren pois d'evesques.
280 S car serian longuas novas, qui totas la meravillas de saint
Martin volria comtar per orden, abreujarem o. Un monestier
avia de prop de la ciutat, & avia i un sépulcre, e dizian
follas genz que saint martir(s)jacian aqui ; e per aco ara moût
sainz lux e cars ; & avian i establit autar e gleisa li evesque
285 qued vos aviam dih do sobre. Cant sainz Martins auzi aizo, e
vi que pobolz i venia per veillolar, acomenset a demandar
a preveires & alz majors d'aquelz, qued estavan ab el en
aquel hermitatge, qualz raartirs jacia en aquel lue, [103 v®]
ni cora fon martiriatz. Ane nenguns non li saup dir qualz
290 martirs era, ni qui era. Cant venc un jorn & el se près ab
pauc de fraires, & annet s'en la ad aquel lue, on era aquel
sépulcres ; e can fon aqui, & el se getet sobre lo sépulcre, &
acomenset a pregar nostre Seinnor qued el, se le seus plazers
era, qued el li demonstres qui era aquel que jacia aqui, ni de
295 quai mérite era. Cant ac fahg sa oration, & el se giret deus
la senestra part, & el vi una umbra moût horreza e mont
cruzel. Ë cant sainz Martins la vi, acomenset li a dir que
parles e que disses son nom. Et en eis pas& el li dis so nom,
e manifestet li que malz hom era aguz e laire, e per las ma-
300 lezas que fazia fon aucis, & per la error del pobol era cele-
bratz aici con martir ; mas el non avia ren a far a martirs de
Deu, ni part non avia ab elz, car aquil eran en la gloria de .
Jesu Christz & el era en la[s] penas d'enfern. Meraviilosa
causa, car aquil, qued eran aqui ab saint Martin, auzian la
305 paraula et auzian la vos, e non vezian la causa que parlava
ab el. Adonx sainz Martins espons lur la paraula, e lur dis zo
qued avia vist, e comandet aqui eis qued hom penses * l'autar,
& fetz tornar tôt lo pobol d'aquella error.
Ësdevenc pois en aquel temps, domenz que sainz Martis
310 annava per una via, & el esgardet, e vi qued aportet hom un
cors d'un home mort qued era paganz, e por-[104 r®]-tava
Tom per sebelir, e venia per aquella via per on sanz Martins
ann[a]va. Cant sanz Martins lo vi de loin, e vi la compainna
qued i era, non saup veraraent que se fons, & estanquet se
1 Sic. Corr. prenses, pour preses ?
LEGENDES PIEUSES 4 01
un pauc. Et era tant loin del cors qued a penas poc cpnoisser
qued era, & ab aitant vec vos una aura, e levet lo suzari 315
de que le cors era cubertz ; e cant sainz Martis vi aici levar
lo suzari, pesset se qued fossan las propcessions que fazian li
vilan de Fransa, quan portavan lur jdolas per los camps e
per lur blatz, e penset sen qued aco fossan las toaillas, de que
annavan cubertas aquellas ydolas et aquellas ymagens delz 320
diabolz, a cui fazian lur sacrifizis li pagan. E vai sainz Mar-
tins e fez lur encontra lo signe de cros, e conjuret los sainz
Martis que non se poguessan moure d'un lue, entro qued
aguessan pausat zo que portavan. Aqui viras meravillas, quar
aquil mesquin s'enregezian aici con rocha, que plus non se 325
podian moure. Can li autri, qued eran aqui, vezian qued
aquil, que portavan lo cors, non se podian en nuilla guisa
moure, fazian en lur esquern e rizian s'en, entro que mal grat
lur pausavan lo cors. Cant, viron aizo, esteron tuh esbait, &
esgardavan Tus Tautre, & avian se meravillas que podiaesser. 330
Ab aitant sainz Martis fon prop vengutz d'elz, e conoc que
prossessions de mort eran, que portava le pobolz. [104 v°] Vai
sainz Martis e seinnet los per aqui mezeis, & en eis pas agron
licencia d'annar & de penre lo cors e de portar. Et aici sainz
Martis, tant can li plac, los fez estar ; e pois can li plac, fez 335
los annar.
Autra vegada esdevaenc que sainz Martis venc en una vila,
& aviai un temple moût antic, en que li paga colian las ydo-
las; e sainz Martis fez lo derrocar ; & avia aqui de prop aquel
temple un pin, e diz sainz Mart's qued hom tailles aquel arbre. 340
Li pagan acomenseron a contrastar, e disseron que lo temple
avian laissât derrocar, e ja per ren non soffririan que Tarbres
fos taillatz ni crematz. Sanz Martis acomenset lur amonestar
moût bonament qued en aquel arbre non avia nuilla reli-
gion, e covenia qued eil servissan ad aquel Deu, a cui el 345
servia ; & covenia qued hom tailles aquel arbre, car sacrada
era al diabol. Adonx uns d'aquelz qued eran aqui, qued era
plus arditz de parlar que tuh li autri, acomenset a dir : « Si
tu bas nuUa fizansa del tieu Deu, que tu dis que coles, nos
taillarem aquest arbre ; e tu, can caira, recep lo ; e si le tiens 350
Deus es essemps ab te, aici con tu dis, tu escaparas, que ja
mal non te fara. » Adonx sainz Martis se ôzet moût en nostre
27
402 LEGENDES PIEUSES
Seinnor, e promes que faria o. Cant tiih li pagan, qued eran
aqui, auziron aizo, plac lur moût, e disseron tuh que bon era,
355 e bon conseil avia donat aquel, & agron moût [105 r**] gran
gauh, e disseron entr' e[lz] que, si per aital aventura ni per
aital conseil podian aucir Tenemic de lur deus, moût cujarian
aver esplegat. Ab aitant acampant se aqui vila per taillar
Tarbre, & ader[man] un poiria caser, et estava moût dis deus
35Q la una part, e non era doptes que can séria taiJlatz ad aquella
part cairia ; e feron aqui mètre saint Martin, e lieron lo aqui,
que non se pogues moui'e. E van li vilan, & acomenseron a
taillar deus Tautra part Tarbre, moût ab gran gauh & ab ale-
gricia. Li autri qued eran aqui se meravillavan moût, car sainz
3Q5 Martis avia tan de fen qued aqui se metia. E cant agron esple-
gat alques de taillar lo pin, et el acomenset alques a tremolar
per cazer vers la on sainz Martins era. Li morgue qued eran
ab el foron moût cspautat, & agron gran dol, & agron tota lur
fez e lur esperansa perduda de saint Martin, et non n' atende-
370 ron ren mas sol la mort. Mas sainz Martis se âzet moût en nos-
tre Sennor, e non ac nuilla paor. E cant le pins acomenset a
frainner, que vole cazer sobre sa servitz, e sainz Martiâ levet
sa man e fez li signe de cros. Adonx venc una granz aura, e
sozlevet lo e fez lo tornar atras, & aconsec aquelz vilas que
375 cujavan estar en lue segur, 6i ab pauc non los mes mortz.
Sainz Martis remas sanz e salz. Adonx se levet uns moût
granz bruhg : li monegue acomenseron a plorar de gauhg, li
pa-[105 v°]-gan cridavan que non era autre Deus, mas aquei
que Martis predicava.
380 En aquel jorn donet Deus salvament a tota aquella région.
Car anc non i ac tan pauc enfant, que neis têtes, qued non
li aportes bom a saint Martin denant, e per lo pausament de
sa man laissavan la error, e tornavan se a nostre Seinnor
Jesu Christ, & tuh feron se batejar ad el, & anc en tota la
385 région non remas hom que non se fezes batejar. Aici fenirem
nostre sermon, car si eu volia tôt comtar can fez en tan can
visque(s)t, ni aprop sa mort canz miracles fez nostre Seinner
per el, non nos aondaria le jornz.
/ i
/
)
LEGENDES PIEUSES 4t)3
XXVIIII
VITA SANCTI BENEDICTI ABBATIS
Fuit vir vite venerabilis gratia benedictus et nomme, ab ipso
puericie sue [tempore] cor gerens senile. Etatem quippe moribus
transsiens ^ nulli animum voluptati dédit. Uns hom fon, zo dis li
escriptura, moût d'onrada vida, qued ac nom Benezehg, per
nom e per gracia. Des lo temps qued era enfans, portet ades 5
coratge de veil home, sa état transpasset ades per costumnas,
a [nuil delegh non vole donar son coratge. Mas car era de
terra, non podia de tôt laissar las temporalz causas, car
aquest mont desprezet ab sa flor. El fon moût de gran lin-
natge, de la terra de Mursia natz, e pois fon esseinnatz en 10
las escolas de Roma. Mas car el vi e conoc que moût d'aquelz
qued eran el segle annavan perillan, son pe, qued avia quais
pausat el segle, trais areire, que per [106 r®] la vanitat qued
i era non fos de tôt sobrepres. Laisset las escolas e los estu-
dis de las letras, & la maison de son paire ; & vole plazer 15
solament a nostre Seinnor, e ques Tabite de la sancta con-
versation.
Cant aquest ac laissât las escholas, e vole intrar el désert,
una noirissa soa, que Tamava mais que tuhg l'autre, segui
lo tota soleta ; e domenz que s'en annavan, vengron ad un 20
lue, on avia moût de bons homes ; & lainz, per doctrina e per
instruction apenre, estet, & ad una gleisa de saint Peire
qued i avia. Cant venc un jorn aquil norissa seua de saint
Benezehg ques un cruvel per mondar blat ad una vezina soa ;
e cant n'ac fahg, vai penre aquest cruvel e mes lo sus en 25
una taula. E per aventura aital, cazec le cruvelz e frais. Can
venc aquil profemena & atrobet son cruvel en doas partz, ac
gran dol & acomenset a plorar, car aquel cruvel qued avia
emprumptat vezia frahg. Sainz Benezehg, can vi aici sa noi-
rissa plorar, ac en pietat, e vai penre ambas las parz del cru- 30
vel, e getet se ad oration. E cant ac fâcha sa oration, & el
levet sus & atrobet son cruvel san & entier. Et en eis pas
portet lo a sa noirissa, & acomenset la a conortar, & aici
rendet lo li san & entier. Et aizo saupron tuhg aquil qued
4 • r.F.'^rriNr?:? ?!?:l'5Es
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. i-ï : -rs b-rzi l:.r. i-= R.^ii il. r-il.i? »i :'i':.i-?I \\ii eisson
.v.:m* :r-ri'i> air-î*: er j ir. .-s v.^'l^s ican-pan sen. e fan
::- iTin .&:. e *_ :.? l::*- ::. -er. :*i .u: f ::rr::.. o: fan un riu
45 i-rar,:. E i.TLr'z .ue «ai:.-. B-rn-rz-ri^* -"en f:i^*ia n . que s'en
i:.:.iva. -rr. >t . ,r. . : ;. â -r. «'er. ::L:rr: a": un mo2.egue qued
i.'^ii r.-.x R :...'::. . o. i-r:.. "i.r. If: !: a/i-rs: aïo.'^ues on anna-
r!3.. a ï'i[:i-z^ Br^vz-r':.^" ::-■ i. e L.ii.;:f ^'.r: Il «jn. mont secre-
niLr::.'. Car. if L-:rçu-r= v: s:- Mra"^-^ e conoe sa Tolontat,
'0 r. '.:. .: i-r=j-r!f'. ?.r.z 1 r'fz i/iel aiJMMi'i -^^i^ j.»oj. Donet U
l's^.!*.:- :-i ■j:..vf:^a':;:L. :>:. er: nîZT^ue. :? fez li aquel ben ik
a'.uel ad"--.c:l .le i:;. V-j.. .- -iir.z BfLiL^ ai aauesî Josert.
e me? s-îri vn ir.^ 'la.r. \ ::. •.;•: -rsrrf :ha. «k ester aqui très
ar.z. '-le i f-...: :."..z :.:::. :. :i l'i saup. mas solament aquest
A^^•:■i=r. R;rï. !..'.5 esta-ra ^r. un mones:ier. que non era
rr.^r.S'ua fort loi:, i'a.ui. de oui era abbas un mot bous hom
'. ,-r i a via n-Hi Dec le^": o: z? y.:ei ai au est morgue Roman
'1 ..-ava :. jii. a r.-a:..;ar oaia ;.:rn. ik el : artia per lo mehg. ui
»';ô >-■. 'jUe ^e:.rr: i '.- .la. e caia joiM p-'r-^ava r, a saint Benezehg.
Ij-:-. a .uei'.a cei.a or. cs'ava a.ues: Rm^ai^s, avia una vieta
e:.::o sus e:. u:.û rcoa or. estava desoz sainz Benezehg ; &
ei.'.io aqui ver. 'a. -aJa jori; 107 i*^" e iiava son pan en una
i'ji.^b. corda, tk -'er.ava lo a saiLi Beriezehjr. oc avia fermada
(j-j ^ir: u corda unu esquellera. qued al son d'aquella esi^uelleta
ven^'ues sainz Benezehg. on que fos. e que preses lo pan.
Mas can le dialolz vi la gran caritat, ac en enveja, car l'autre
acorr.a de maiijai*. E can venc un jorn. qued el li aportava
>on pan, e îo vene le diabolz, e iaisset correr una peira, e
Tu friiâ Tesquella. Ane per aco Romans le morgues non Iaisset
qued en totasmaneras non 11 aministres aioi conpoc.
CanT venc quj nostre Seinner vole que Romans se pauses
liei iiabail, •-■ vole denionstrai* alz homes la vida de saint Be-
LEGENDES PIEUSES 4 05
nezehg en eissemple, e que li lumnera, pausada sobre lo
c andelabre, rendes clardat, e que luzes ad aquelz que son en 75
la maison de nostre Seinnor, apparec nostre Seinner ad un
preveire qued estava loin d'aqui, & avia acermat lo jorn de
Pascas a disnar, & apparec li en vision, e dis li: «Tu appa-
reillas bons manjars a tos obs, & le meus sers es tormentatz
defam en aital lue. » Et aqui eis levet sus le preire, & can ac 80
fahgson mestier, & acermat so manjar, &el 0 va tôt penre, &
annet s'en la on nostre Senner li avia dih, ab tôt son acerma-
raent, e questan lo sers de Deu, per los puhg e per las valz,
e de sae de la, entro que lo trobet en aquella balmeta on
estava. E can fon laintre ab el, saluderon se, e feron lurora- 85
tion, &pois asseteron se & agrou bonas pa-[107 v°]-raulas en-
semps. ^ cant agron parlai una pessa, et le preire, qued era
vengutz, acomenset li a dir : « Leva sus, e disnem nos, car oi
eslejornz de Paschas. » Respondet sainz Benezehg, e dis:
« Ben sai qued oi es Pnscha, car eu t'ai ameritat a vezer. » 90
De tota autra geiit era loin aquel lux, per (]ue non sabia que
fos Pascha. Et-affermet li per aqui eis le preire que le jornz
de la résurrection de nostre Seinnor era verament ad aquel
jorn, e que non covenia que dejunes. « Et eu soi trames per
aco aici a te, qued amdui essemps recipiam los dons de nostre 95
Seinnor». Beneziron amdui nostre Seinnor, e pois disneron
se. E cant seforon disnat, comandet Tus Tautre a Deu, & aici
partiron se. Le preire s'en tornet e sainz Benezehg remas en
sa balma<
En aquel temps vengron aqui pastor ab lur bestias, et 100
atroberon lo en aquella balraa. D'aqui adenant saup Tom lain-
tre ; e vengron ganre de genz pastor, & un & autre, e venian
lo vezer moût sovent, & aportavan li condulig e zo qued obs
li era; & aici estet. Can venc un jorn, & el estava soletz en
sa sella, & vec vos lo diabol que li venc,e venc li en guisa d'un 105
aucel nègre que nos autri appellem merlle, et acomenset li a
volar denant la carra, & estar a plan ennohg tôt entorn el, &
a volar de sa e de la, de guisa qued ab su man lo pogra pen-
re, si se volgues. Mas cant sainz Benezehg o vi, seinnet se, à
en eis pas Taucelz evanizi, e d'aqui enant nol vi. Et en eis pas no
que Taucelz s'en fon partitz, e lo [108 r°] li venc tan granz
temptacions de sa carn, qued anc mais le sainz hoin, des qued
406 LEGENDES PIEUSES
anc natz fon, non avia agut: que, quant era el segle, avia vist
una femena, & aquella le malignes esperitz li avia mes en son
115 coratge, e fazi[a] Ten menbra[r]. E fez lo serv de Deu ea
tant embrasar en la beutat d'aquesta femena que, per la vo-
lontat de la carn, ab pauc non desamparet Termitatge e non
tenc en la. Mas adonx sobtanamenz lo regardet li sobeirana
gracia, e tornet en son coratge & en so senz, e regardet se
120 e vi aqui prop de se un boisson, plen d'urtigas e d'espinas, &
ab aitant despoilletse tos nutz, e getet se intre el boisson, &
aici entre las espinas e las urtigas voludet se moût fort et
moût aigrament. E can se fon aqui grau penssa voludatz, e
fon ben per tôt lo cors naffratz per las espinas e per las urti-
125 gas, eissi s'en, & aici per las naffras del cors guari las nafiras
de la pensa, zo es de Tarma. D'aqui enant pois non li aveno
aitalz causa. Aprop aizo, acomeuseron a venir moût ad el, e
laissavan lo segie, e volian esser sei discipol & estruh^de la
soa doctrina.
130 Prop d'aquel lue on el, sainz Benezehg, esta va, avia un mo-
nestier, & era mortz Tabbas d'aquel monestier, e tota aquil
congrégations, qued aqui era, vcnc a saint Benezehg, et aco-
menseron li a pregar qued el fon s abbas e paire del mones-
tier, et qued el lo capdelles. Sainz Benezegh dizia e vedava
135 moût fort qued el non dévia esser lur abbas ni lur paire,
car el non [108 v^] poiria tener la estrecha régla qued eil te-
nian. E pregueron lur* tant que fez lur voluntat. Annets'enab
elz el monestier & establiron lo per abbat. El estet e tenc
moût estrecha vida, & guardct moût fort sa régla, e la fez
140 tenir a sos fraires laintre ; e tenc los moût en destrehg, si que
nuilz non ausava eissir del monestier, si per granz obs oc. E
cil, que n'avian fahg abbat, aeomenseron ad encusar elz me-
zeis, car eil n'avian fahg paire del monestier, et agron en mot
granz pelejas laintre entr'elz, e penseron & acorderon entr'elz
145 con poguessan aucir saint Benezehg. E preseron un jorn vé-
rin & meseron lo en son vin. E cant sainz Benezehg fon a la
taula, que vole manjar un jorn a^ssemps ab los autres fraires,
& hom li aportet la copa, en qued era aquest vis entoissegaz,
primerament ad el per seinnar. E sainz Benezehg estendet la
4 Sic. Corr. /i.
LEGENDES PIEUSES 407
man e seinnaet la. Et en eis pas li copa, qued hom li ténia de- 150
nant, fon aici fracha con si, en lue del seinnar, 1 agues ferit
ab una gran peira. Saup alo sainz Benezehg qued en aquel
vin avia vérin, le qualz non poc soffrir ni atendre lo signe de
vida. Et en eis pas el levet sus alegramenz, e non fez anc
semblant que mal li fons, & acomenset moût bonament amo- 155
nestar los fraires & a dir : « Seinnor fraire, le poderos Deus
aia merce de vos. Per que volias far aizo en me ? Non vos
dis eu donx,davan qued vos en fezesses abbat, que las meuas
[109 r**] constumnas non s'acordavan ab la vostra, ni li mia
régla ab la vostra? Annatz e segon vostras costumnas queres 160
abbat, car mi non podes aver d'aici enant. » Vai sainz Bene-
zehg e tornet s'en la don era mogutz, en son hermitatge, &
aqui converset pois, & Deus fon ab el.
Can le sainz hom ac aici estât longament en la solitut, &
Deus fazia montas meravillas e montas vertutz per el, moût 165
home vengron per el en aquel lue, & volgron estar en la ser-
vitut de Deu, et acamperon s'en i tanz que dotze monestiers
n'establic sainz Benezehg a nostre Seinnor. Et en cada un
delz monestiers establi dotze monegues, & Tabbat, que fo lo
tretzes; e retenc ab se mot pauc de fraires, qued esteron ab 170
el, e cui el estruis de sa doctrina. Gant li rie home de Roma
0 saupron e li religions, acomenseron li ad adurre lur enfanz
per noirir e per esseinnar. Adonx li liuret Equicius son fil
Maurum & Tertullus Patricius, Placidum. E d'aques dons
enfanz, le filz d'Equicius, Maurus, acomenset a resplandir 175
per las bonas constumnas de son maistre saint Benezeit. Pla-
cidus era atressi paciens.
En un d*aques monestiers que sainz Benezehg avia cons-
truhg, era uns morgues que per nulla ren non podia estar ad
oration. Car aqui eis can li fraire se clinavan per orar, & el 180
s'en eissia foras & acomensava ad arezar los afars deforas, &
annava vanejant. Et sos abbas avia lo moût soven amonestat
que non o fezes. Can Tabbas vi que ren non li valia, me-[109 v**]
-net lo a saint Benezehg. Can fon denant el,e sainz Benezehg
lo vi, & el racomense[t] moût fort a menassar. Respondet li 185
le morgues que castiaria s'en, e tornet s'en ab son abbat. E
can s'en fon tornatz a so monestier, a penas poc ben tener
Tencaut très jornz, que li avia fah sainz Benezehg. Can l'abbas
4 08 LEGENDES PIEUSES
del monestier o vi, maiidct o a saint Benezebg, que le mor-
190 gués era tornatz en aquo cis que solia. Dis sainz Benezeh :
(( Eu lai irai, et farai lo csmendar. » Can sainz Benezegh fon
al monestier, et venc ad una hora qued hom dis, e que 11
. fraire se ^etcron ad oration, can foiun complit li psalme, e
sainz Benehg csguarda, e vi aquost morgue que non podia es-
195 tar en oration, qued us paux enfas nègres lo tirava foras per
lo somp de son vestir. Vai sainz Benezehg, e sonet Tabbaidel
monestier, Pompeiano, tx a Maur, qued era vengutz ab el, dis
en secret ad una part : « Vos non vezes donx qui es aquest
que tira aquest morgue foras? » Responderon eil e disseron:
200 a Nos non vczem ren.» Adonx dis lur : «Orem tuhg très que
vos 0 puscas vezer.» Cant venc a cap de dos jornz, Mauruso
vi, èi Pompeians non o poc vezer. Can venc al ters jorn, que
sainz Benezehg eisïji de la gleisa, cV el atrobet aquest morgue
estant deforas, <ii: ab una veigua, per la cocitat de son coratge,
205 sainz Benezehg lo ftîi'i. K d'aqui enant non lo cale anc amo-
nestar, car ades pois estet plus immobilis en orations que
tuh li autri. Et aici Tantix enemix non auset pois sen-[110 r®]
-norejar en aquest morgue, aici con si fos batutz ben e fortab
la vergua.
210 IVaques monestiers, que sainz Benezehg avia bastitz, eran 11
très sus en la rocha, ai era lur moût de gran trabail d'aportar
aigua d'aval del lau(s), e niajorment car, per lo derroc del
puhg,era fort greus perilz, e granz perilz de mort, a celz qued
i descendian. Acorderon se tuh li fraire d'aquelz très mones-
215 tiers, e vengron a saint Benezehg, e disseron li: a Senner,
granz trabailz nos es moût de descendre cada jorn sa aval
per aigua, ad aquest lac, e per zo conven que mudem les mo-
nestiers d'aqui on son.» Cant sainz Benezeh o auzi, conortet
los moût gent, e pois dis lur que s'en tornessan. E can venc la
220 nohg, e sainz Benezehg s'en pujet sus en la roca del puhg,
ab Placidum Tenfant, e mes sus en la rocha très peiras per
seinnal, e fez i sa oration. E cant ac orat, & el s'en tornet tôt
secretament a son monestier. K cant venc l'endeman, e li
fraire torneron ad el, per plana soffracha d'aigua. Adonx dis
225 lur sainz Benezehg : a Annatz, à aquella rocha, on atrobares
très peiras desobre, cavas unpauc. Car nostre Seinner, qued
es poderos de tôt cant^ es, vos pot ben donar aigua el som
/
LEGENDES PIEUSES 4 09
d'aquel puhg, e toire lo trabail que vos en ternes tant. »
Anneron s'en lifraire, <k atroberon aquella rocha que suzet.
Van se penre, & acomenseron a cavar la rocha, e feron i un 230
moût ample cros, & en eis pas agron pro aigua, que lur adon-
det a totz très los monestiers, & qued en correc [110 v*>] pro,
entro al pe de la montaiiina.
Cant [venc] unasazon, e lo venc ad el uns hom paupres per
esperit, per ucaison de sancta conversation, e sainz Benezehg 235
receup lo mont volontiers. E can venc un jorn, & sainz Bene-
zehg comandet qued hom li dones un ferrament, qued hom
appella falcastre, car es fahg aici con faus, ab que tailles una
gran boissonada, en qued hom dévia far ort. Aquel lux jacia
sobre la riba del lac. Domenz que Tom taillava, aitan canpo- 240
dia, la boissonada, e le ferres li eissi del margue c cazec inz
el gorc. Et aqui era tan granz li pregonneza de Taigua que
nuilla esperansa non era de querre lo ferrament, ni de trobar.
Et aici cant ac perdut lo ferre, le gotz annet s'en moût pavo-
ros a Maur, e comtet li qued aici avia perdut lo ferre, & en 245
aici li eia cazuhg inz en Taigua. Annet Maurs & annet o dir
a saint Benezehg. Et aqui eis sainz Benezehg leva sus, e près
lo margue de la man de Tome, e getet lo intre en Taigua,
encontra aqui on le ferres era donatz. Et en eis pas le ferres
eis del pregon de Taigua & intret el margue, e va lo penre 250
sainz Benezehg e rendet lo al got, e dis li que labores, e
non agues ira ni se constristes per aizo.
Can venc un jorn,e sainz Benezehg estava en sa cella, co-
mandet a Tenfant Placidum qued annespozar del'aigua ellac.
Annet s'en la le tozetz. E can fon a l'aigiia, et el acomenset 255
moût abrivadament a mètre intre en l'aigua aquel aize que
portava; & ab aitan li aigua apode -[111 r'^J-ret lo, e vai intre
ab tôt, & aqui eis li onda acomensa Ten a tirar, e tiret lo ben
loin de terra lo trah d'un arc. Sainz Benezehg, qued era den-
fra sa cella, conoc aizo per Saint Esperit, & sonet Maur e dis 260
li : « Praire Maure, cor, cor, quar Tenfant, qued aviam tra-
mes per querre d'aigua, es cazuhg intre, e li onda tira l'en
& ha lo moût loin tirât. » Vai sainz Benezehg e seinnet Maur;
6l acomenset s'en ad annar, e venc ben tost a Taigua & venc
entro aqui on li onda avia tirât l'enfan, & annava intre per 265
l'aigua e cujava certamenz annar per terra, <S: aici correnz
410 LEGENDES PIEUSES
sobre Taigua va jienre Tenfant per los pelz, e de gran cors
gotet le do Paiga. Et aqui eis can fou a terra*, el se reconoc,
& reguardet detras se e conoc que sobre las aiguas avia
270 corregut, & ac en fereza a se mezeis, que se se reconogues,
ja non o agra fali. R can fon tornatz a saint Benezehg, comtet
li lot cou o avia fahg ni con li era près. Sainz Benezehg
non pensava mingua que per lo seu mérite fos esdevengut,
mas per la obediencia de Maur; mas Maurs dizia que sola-
275 ment per lo seu mandamcnt era esdevengut, car nuilla ver-
tutz non era per celluiquo faziazo que non cujava far. Mas do-
menz qued eil eran en aquest bon contrast & en aquesta ami-
cabili contencione^ é: lo venc Tenfans qued era eissis de Tai-
gua; & dis que domenz qued hora lo tira va fora per los pelz ,
280 que semblanz li era qued el vis lo vestir de son paire Bene-
zehg [111 V**] et qued el lo traisses de Taigua. Aquil mones-
tier creissian cada jorn en la fez de nostre Seinnor & en la
soa amor & en la soa obra; e moût home seglar laissavan to-
tas las causas seculars, e venian aqui a saint Benezehg e do-
285 navan se ad el <S: a la soa doctrina, & sozraetian lur colz al
jo(s) de Christ, qued es leus e soaus.
Can venc una sazoïi, aici con es usatges que li mal home an
enveja de las vertutz c de las bonas obras que li bon home fan
e de las abstinencias, zo qued eil non volon retener ni aver
290 a lur obs, uns prcire que ténia una gleisa prop d'aqui, qued
avia nom Florens, fon feritz de la maleza del diabol, & aco-
menset aver granz iras oscontra los fahg e la vida de saint
Benezehg ; & era li mot mal, car vezia annar las genz la on
sainz Benezehg estava, per el a vezer, & acomenset mot mal
295 a dire d'el,& amoncstava lur que non la annessan e que se
tolguessan d'el a vezer ni a visitar. Can le preire vi que ren
non li valia, qued on mais el en dizia de mal e li soa vertatz
creiscia mais e plus era conoguda, adonx fon plus enbra-
satz, et mais pensava en son cor de cal manera pogues aver
300 la lauzor de bona vida, aquella cui el non volia aver ni tener.
Et ac tant de mala volontat en se, que ve se penset con pogues
aucir saint Benezehg. E can venc un jorn, & el fez far un pan
e mesclet i veri, e pois trames lo a saint Benezehg, cais per
* Ma. terre.
LEGENDES PIEUSES 411
bona amor. Vai sainz Benezeg e receup lo pan, & rendet li
moutas gracias, e conoc lo vérin qued era denfra. Can venc 305
que sainz Benezegh se vole disnar, e vec vos un corp de la
selva, que venia [112 r**] cada jorn aqui ad el, can se volia
disnar, e donava li sainz Benezehg a manjar de zo qued el
manjava. Venc le cors, can sainz Benezehg fon a la taula; e
vai penre sainz Benehg lo pan, que le preire li avia trames, 310
e getet lo al corp, e dis li : « El nom de nostre Seinnor te
cornant eu que tu prennas aquest pan, e geta lo en tal lue on
nuilz hom trobar non lo pusca.» Adonxle corps acomenset ad
annar tôt entorn lo pan,boccauberta,<S: volatejava tôt entorn,
quais que volgues far lo mandament de saint Benezehg, mas 315
semblanz li era que non o pogues complir. Adonx sainz Bene-
zehg acomenset li a dir : a Leva, leva seguramenz, e getalo en
tal lue on non pusca esser atrobatz. » Vai aqui eis le corps e
met lo pan en sa bocca, e leva lo, &: acomensa s'en ad annar. E
cant ac estât* una pessa & ac getat purre lo pan,& el tornet, 320
& donet li a manjar sainz Benezehg aici con solia. Sainz Be-
nehg vi lo preveire qued aital enveja li portava e qued aici
lo cujava au cire ; saup li pejor per lo peccat qued el fazia
que non fez del dan qued el i avia.
Mas cant le preire Florencius vi que non avia pogut aucire 325
lo cors del maistre, penset con pogues aucire las armas delz
dicipolz. Can venc un jorn, e le preire près set donzellas e
totas nuzas trames las la on sainz Benezehg estava ; e van se
mètre en Tort, que*d era(n) davan sa cella ; e, cnnforon intre,
preseron se per las mans, & acomenseron totas set a ballar & 330
ajoguar, per tal que li discipol de saint Benezehg las vissan, e
que s'abrases lur coratges per luxuria. Can [112 v»] sainz Bene-
zehg o vi de sa cella on era, temps que sei discipol, cil qued
eran joven, non fossan sobrepres, et saup ben e conoc que
per mal d'el era fahg. Donet sainz lue a Tenvejos, & mes & 335
establi capdelladors en aquel lue on el estava, & pois ab totz
SOS joves morgues annet s'en en autre lue. Et aqui eis can sainz
Benezehg ac aizi vencut himilment Tenemistat del preveire,
Deus aucis lo preveire moût espautavolment. Car domenz
que Florenz estava en un soler, e saup que sainz Benezehg 340
* Corrigé de ^reto/, écrit d'abord.
41? LÉGENDES PIEUSES
s'era partitz d'a([ui. acomenset a meuar moût gran gauh, et
en ois pas tota li maisons s'acomenset a moure, & le solers
cazcc cV: aiicis lo preveire. Can Maurus, us delz morgues qued
tM'a roniasutz en la cella, auzi que lo preire era mortz, man-
'^A:^ dot o a saint Bonozolitr, que s'era loinnatz des legas d'aqui,
0 dis * (|Uo le proiro, que lo perseguia, era mortz, et que s'en
tornos. Caiit sainz Benozeh^ o auzi, acomenset a plorar, car
Toiu ton p[o;ris en aitalohra, e car sos disoipolz avia gauh de
la mort, o donot l'en peniîenoia.
;C»0 Moc se d'aqui sainz Benezehir, «& mudot sa estaja el castel
de mont Cassin, qued es sus el som d'un moût aut puhg. Et
aqui avia un temple, on solian adorar li pagan una ydola, qued
appellavan Apol!on. Et a ben. des lo pe del puhg entro sus
01 som. très mi lias. K neis an c ara can sainz Benezegh i venc,
:Cv» li pagan. qued est a van en las vilas d'eutorn, i venian adorar.
Vai sainz Bene.ehg, can f« n sus. *k atrobet aquol temple.
Frais la ydola. e trastornet ^113 r^] los autars, & cremet totas
las Y mages .[ued a: robot laint: e. en aquel temple d'en ApoUo,
e te; d'aquel Tom:'".e g'eisa de sa.nt Martin, ô: aqal on fon
;>(V"> Tautars d'eu Aj^llo. :\ . airar de saint Jo'nan. Et estet aqui,
0 te; i SA es:.î:ga. V.i M\:.y. i-redioa:!: enîorn aqui, et, per sa
i^re,::eAî:o". :v^:':;o: los a la fe:i de Cl.ris:
Mas oar.t l'a:.: a c::o:*^:x ^: y:e.: aLi era destruhg, non poc
so:*-.".:' vV.ie r.o:i o .::s>es. 1-- uci: res .-"j.iudamenz. ai per sommîe,
îfVN îv.as arertaîv.e::: avvaroj a si.::: B-:i:rzeh e li veii,- davan sos
0 1:. wV. o:"dava :v. .-*::: :".:: à s,.:.: Lvj::fj-:.g .ue îo.-t li lazia, e
;. : ; : a ,^ ,: e c :: : sa :: : : :: :: 1 : :". :\ y -: ■ e 1 ;. i :: : : e o a u z i a n . m as non
% m
.* . » V . „ . ..* ^» — î^i'... A»,-.> > _ ^>-. ^•. „■ ..^ ..ur ...z.a oen que
» .^. . K . ;»....; ^ i .. ,1 ....'.....>.> e..rS-:i. a.'_t nègres 6
.^ , ••>.••• .«.^, vV . ... .......4'.i .._, ..•. ... ... ...... ? ^ " » Ocl if U vCCl
î .i ■• . ..'..■. . i >>.,-. ...1 -. _.i .:..-.. IL. .-...o Ow.eJ el oiZiB
^. ... -^ i. i,,. ..:.. >. .. .-. >A.... rJr— ez?ii Der ^0Il
";:v. V .:^v > . :>. i : . ç .; . . . :l:a rfs :iire. a;:^mensava
,* ;i l.i': c :-..i' .* . .:v. ,. ..: . ...^ : : s:LÀ..i * Bf-vz^he! Be-
.^ .-» ..; -i ..j» #;',..•. ..i . i . . i • . ..j» Tr?. -ILJI. r. «X ei il Stir
LEGENDES PIEUSES 413
mensava a dir : « Malazehg ! Malazehg ! e non ja Benezeh,
qued as a partir ab me? Ni per que me persegues ? Con devon
se combatre aoras novellarment li saint de Deu ab los dia-
bolz? » Vai le diabolz, & ynnava ades aginnant con 11 pogues
far enogh; mas cant el o cujava far, & el li donava Victoria 380
encontra se mezeis.
[113 v°] Can venc un jorn, e li fraire de laintre fazian una
maison, & el mehg del comprennement on volian far aquesta
maison avia una peira, e volgron la levar sus en esta paret,
e van la penre dui êtres e quatre, & anc moure non la po- 385
gron, & pois van se n'i penre ganres,& aco valc meinz, qued
anc per ren moure la poguessan ; & estet aici enrazigada en
terra con si hom Vi agues plantada, car le diabolz s'era ase-
tatz desus, e per aco non la podian tant home moure. Can
si foron aici essagat, trameseron a sant Benezehg que ven- 390
gués ; e can fon vengutz, pregueron li que pregues nostre
Seinnor qued hostes d' aqui 1' enemic, qued eil se pensavan
qued el tengues la peira tant apremsa, per que eil non la
poguessan moure. Et aqui eis sainz Benezehg fez sa preguera
e seinnet la peira, et aqui eis van penre la peira, et leveron 395
la aici leu(s)ment con si nuil fais non i agues. Adonx plac a
saint Benezehg qued hom fosses aqui la terra, e cantli fraire
agron fos aqui moût pregon, & eil atroberon aqui una ydola
de coure, e van la penre, e geteron la fora , e pois meseron la en
la cozina ; e can Fagron messa laintre, fon semblanz a totz los 400
fraires, qued eran aqui, que li eissis tan granz fux per la
bocca a la ydola que tota li cozina crèmes. Van t«h ensemps
cant o viron, et acomenseron a cridar : « aigua! » per amorsar
aquel fuc. Can sainz Benezegh auzi la bruia, venc ben tost; e
can fon aqui, non vi anc lo fuc, & acomenset a demandar qued 405
era. Responderon tuhg ensemps e disseron : [114 r°] « Non
ves tu donx que li cozina vol cremar del fuc qued eis d'à.
questa ydola ? » Aqui eis sainz Benezehg getet se ad oration, e
tornetlos oilz delz fraires, qued encantava le diabolz, alz sens
oilz, e saupron que le diabolz los annava aici escarnent, & 410
d*aqui adenant non viron las falsas flammas del diabol. Per
aqui mezeis can li fraire bastian e levavan un pauc plus autla
paret, e sainz Benezehg estava en sa cella, e lo li apparec le
diabolz, & acomenset li a dir qued annaria s'en alz fraires
4n LEGENDES PIEUSES
415 que laboravan. Can sainz Benezehg o auzi, mandet tost per
un messatge alz fraires, que fazian Testar, que fezessan
sapiament zo que fariuii, quar le diabolz lur dévia venir
ades. A penas cel que portet lo messatge ac ben dicha la
paraula, que le diabolz derroquet la paret qued avian fâcha,
420 6i aconseguet un pauc morguec. qued era fîlz d'un rie home de
la cort de V eniperador, <>: irisset lo tôt. Li fraire agron
moût gran dol e gran marriment, oant aizo fon avengut, &
manderon o aqui cis a saint Beuezehg. Adonx sainz Benezehg
comandet qued liom li aportes lo mort. Van penre lo tos, e
425 coilliron lo, <>: anc non lo li poo hom aportar, si en un sac oc,
tan fon atrissas : car aici con li pares cazec, non solament la
carn, mas totz los os li atrisset. E can Tagron aportat aqui
denant saint Benezelig, fez lo pausar el sol laintre en sa cella,
e comandet alz fraires que s'en eississan tuhg ; e cant foron
430 tuhg foras, acomensct ad on»!' : et a-^ui eis le morgues [114 v*]
fon sans e salz ; e trames lo sainz Benezehg ab los antres
fraires al laor, la on fazian la maison.
Adonx acomenset sainz Benezehg per Saint Ësperit a pro-
phetizar; car el dizia ù: annunciava zo qued era ad avenir & zo
435 qued era fahg, ja nono a<j:ues vist ni auzit. Constumna era del
monestiere régla que. can li fraire eissian foras, peralcun afar,
non devian manjar ni heure foras del monestier. Et aizo era
moût fort gardât per la régla. Can venc un jorn, e li fraire
anueron per afar del n.onesiier deforas, o: esteron la tant que
4-10 prop fon de nohg. Eil cant o viron. anneron s'en a maison
d'una mot religiosa fomena. e disneron se laintre ab ella. E can
se foron disnat, mogron se : e fon nogh, can foron al monestier;
c: can foron intre. anneron s'en davan lur paire saint Benezehg,
per penre benedietiun. aici con usatges e régla es que, cant
445 morgues va ni torna deforas. que prenna bénédiction. E cant
foron denant el. el lur acomenset a demandar on avian man-
jat. Eil responJeron qued en nengun lue. Dis sainz Bene-
zehg : « Ara per que mentes en aici? Non aves donx manjat,
ad alberc d'aital femena. aiîal conduh o: aital, «s: aves begut
450 ai tan ta veguada ? » Cani li fraire auziron qued aici
lur dizia Talberc on avian manjat, e qualz conduhg, conogron
qui- mal o avian fahg : e van se getar a sos pes, e confesse-
ron lur oolpa. Et aqui eis sainz Benezehg perdonet lur, e
LEGENDES PIEUSES 415
<îomniandet lur que per nuil-[115 r**]-la ren d'aqui adenant
non fos fagh. 455
Aquel morgues, qued avia nom Valentin, del quai nos vos
avem dih desobre que fon niortz, avia un fraire qued era
laix, & era moût religions hom, & annava cad'an ad aquest
monestier, que recoupes la oration de sain Benezehg, & per
vezer son fraire; e cad'an avia en usatge que mogues de 460
son alberc dejus, e non agues manjat entro que fos al mo-
nestier & agues vist saint Benezehg. Can venc un jorn que
vole far son viatge al monestier, & el atrobet un compain-
non que vole atressi annar la, & ajosteron se essemps, &
acomensan s'en ad annar ;<k aquest autre portet conduhg. 465
Cant venc que fon ja granz hora, e lo dis aquest que portava
lo conduhg: « Ven en fraire, e manjem lo conduh qued avem,
que non lassem en la via. » Respondet l'autre e dis: « Non
farai, fraire, qued acosturaat ai que vengua cad'an dejuns
denant Tabbat saint Benezehg. » Cant o auzi le compainz qued 470
aici o dizia, callet se ab aitant, e non sonet plus motz. Mas
cant agrori annat autre pauc, acomenset li a dir per aqui me-
zeis que manjessan. MasTautrenon Ten vole anc creire. Ecant
el o vi, non Ten sonet plus motz. Cant agron annat una gran
pessa, & eran ja las*, & eil atroberon un prat & una font. E 475
cant 0 agron atrobat, acomenset li a dir le compainz : « Vec
te aici lo prat e la font, e tan bel lue : manjem aici, e pois fa-
rem [115 V**] meilz nostre viatge. » L'autre, per las paraulas e
per lo bel lue qued era aqui, obezic li, e manjeron. Cant venc
lo seras, & eil foron al monestier, venc aquest denant saint 480
Benezehg, e quis li bénédiction. Mas aqui eis can fon denant
el, & el li acomenset a dir: « Qued es aizo, fraire ? Le diabolz,
que te parlava per ton compainnon, non te poc vencer la pri-
mera vegada, ni la segonna; mas la tersa vegada te sobret
ad aizo que se vole. » Adonx el conoo sa colpa, e va se jetar 485
a SOS pes, e ploran dizia a saint Benezegh que pregues per el.
El temps que reinnavan li Goth, can lur reis, qued avia
nom Totila, auzi que sainz Benezehg dizia aizi per Saint Espe-
rit zo qued era fahg, e zo que dévia venir, annet s'en a so
monestier, e can fon de prop del monestier, & el mandet que 490
^ Ms. latz.
41 . r.EJÎENDKS PIF.USFS
ve i venria. Mandei ii hoDi arressi del monestier que vengues
eora ad el plazeria. Aquest. ai..i con el era de tracion e de
lagli fagh plos, o fazia per essai ar saint Benezehg, si el dizia,
aici con las genz dizian, j-er Saint E<iierii, zo que dévia ave-
495 nir. Vai penre un de so< oaval. ers qued avja nom Rigo, & fez
ii causar son eausament e vo-tir so-s vestirs reialz, e coman-
det Ii qued annes en son hic al nionesiier, e vengues al bon
homen saint Beneglig: e donei 11 très rix homes qued anne-
ron ab el, e que lo sosten^-ron de sa et de la: Vulifrich <k
o-'O Rudercli o: Bliniin: ik U* moneron davan saint Beuezeih en
lu: dei rei : ù: jiensot se ;ne.î el cujes que, per los vestirs e
per los compainnos «^ue j al» e'. annavan. lo preses en lue de
se. (k cujava lltj v] iii aici <• l'repenre. Can aquest Rigo fon
aici vestitz, per los vestirs luii iLnut beiz, ô: annet moût gent
ô<J5 aoompainnatz : e oân fon a! imiiestier. e <ainz Benezehg se
sezia. ce aici con e'. lo vi :;.t:' r. t>: i'ulî i!i loin con el lo vi, Ii
âcomenset a dir: . F:'/.. : a'.:-:i zo :ue tu portas, car non es
tieu. )) Aquel Rigiio. Oi.ii: o ;..U/:i. ao izvam paor, car volia aici
escarnir lo h ai h-m^. e vi s..- getar a >os pes, e tuh uquil,
510 qued eian atressi ab ei. ^o- jer^-ron nM^essi a terra. Pois leve-
ron sus. ù: non s'aiizavuii ii:.; roi-iar 'i'ol; mas torneron s'en
l-en tost, e comteroîï ■:« tôt ni rei aiii con sainz Beuezegh o
avi]a] digh, cv aj:o:: inoiit ^ra:: paor per lo sobreprennement
que sainz Benezeiit: :ur a: lali. A îonx cant o auzi le reis,
515 aoomenset s'en : cr se m-i-z-is ai annar la. E cant fon al
monestier evi cie loiii s-zer saint Beiiez^gh. non s'auzet appro-
piar d'e', e getet >e ei. îfrra. Ab aitan fon vengutz aquî le
bos hom sainz Benezcir".., o dis Ii .uc Lves sus. e dis loi una
vegada o doas. cv. si.o ie reis levar non auset sus ; & vai lo
520 î'Onre sainz BcnezOi:!!. o levé: lo sus '.er la m an. Et cant Tac
• V. A
levât, acomensot lo î;;out a re: o:.:ê 6: a castiar de sos malz
fuiiiT Gue fazia; ci. en i-auc de Viara :las. toi can liera ad ave-
r.ir 11 annunciet. e ils Ii : .. Moutz malz fas e moutz malz as
faeh. e toi te i'aouosta toa ::::■. ul: t. Tu intraras en Roma,
Ô23 e pois passaras mar, no:: a::: roi :.r. aras, <>: al detze, e tu
morras. * Car.: lo rois au.:: a .:o. fou moût espautatz, e dis Ii
o.ue pi'ogues :or ol. o pois v>avù ,i'a .ni. Ed*aqui adenant non
fo . ta II llo v^' 11. a\: ::i î"o/ a:.:ol.a> inaiezas que solia. Can
Vv.-:ij pois non t: i^:io' guàii'e qued el intret en Roma, e pois
i
LEGENDES PIEUSES 417
passet mar. Cant venc al dezen an, & el perdet son regesme
& mori. 530
L'evesques de Casuna avia aconstumnat que cad'an annes
vezer saint Benezehg, e sainz Benezelig amava lo moût, car
era hom de sancta vida e de bona. Cant venc que foron amdui
ensemps, acomenseron a parlar d'aquest rei Totila e del des-
truiement de la ciutat de Roma. Acomenset a dir Tevesques : 535
« Per aquest rei sera destrucha tota aquist ciutatz, e jamais
hom non i habitara, » Respondet li sainz Benezehg, e dis li :
« Roma non sera ja destrucha per nuilla gent, mas per tem-
pestas e per torbilz d'auras, e per terratremol, e per fouzers
se destruira e s'afollara moût. » Aizo esdevenc pois aici con 540
sainz Benezehg o dis ; car, per aquelz torbeilz qued el dis,
s'afoUet Roma, e se destruis.
En aquel temps, uns clergues de la gleisa d'Aquina era moût
trabaillatz per un diabol que li era el cors. E Tevesques de la
ciutat, Constanz qued avia nom, mot bos hom e mot cars, 545
avia lo trames per montas gleisas de martirs, que Deus li ren-
des sanitat, <k auc li saint de Deu non lo volgron sanar, car
demonstrar volian la gracia qued era en saint Benezehg. Cant
venc tôt a derrer, menet l'om a saint Benezehg. Sainz Benezehg
acomenset a pregar nostre Seinnor, aqui eis cant fon denant 550
el, & en eis pas getet li lo diabol del cors; e dis al clergue:
« Vai, fraire, e d'aici enant non [117 r^] manjes carn, e non
sias jamais preire. Car si tu presumias jamais que t'apro-
piessas del saint orden, ni de manjar carn, le diabolz auria
atressi sennoria en te con a agut entre assi. » Annet s'en le 555
clergues sans e salz. Et aici con pena novellars sol espautar
lo coratge, temps o moût de primer, e gardet moût lo coman-
dament de saint Benegh. Can venc aprop lonc temps, tuh sei
major e sei prier de la gleisa moriron, & el esguardet e vi
qued aquil, quederan mener qued el, pujavan alz sainz ordes 560
desobre se : temps o moût, & ac en grau enveja, e mes en
oblit las paraulas de saint Benezegh, & pujet s'en al saint
orden, e fon preire. & aqui eis le diabolz, que Tavia laissât, lo
tenc, & trabaillet lo tant, entre que Tarma li getet del cors.
Uns hom qued era moût de gran linnatge, qued avia nom 565
Theoprobus, que per Tamonestament de saint Benezehg s' era
convertitz, & avia moût gran fizansa en el, & era li en totz
28
41S LÉGENDES PIEUSES
seiiz moût familiars, aquest Theoprobus iutret un jorn en la
ceîla de saint Bonezegh, e cant ton laintre, atrobet lo moût
570 fort e moût amarament ploranr. E<iet aqui una gran pessa
davant el, e oan vi qued en niiilla nianera non se geqnia de
piorar, ni anc non l'au/i planner, aici con solia cant era en
oration, mas ades assidualment plorava, non se poc solTrir
que non li demandes qued avia, ni perque plo-|^117 voj-rava.
575 Sainz Benezehg respondct li ben tost : « Totz aques mones-
tiers, qued eu ai construhg, e totas aquellas causas, qued eu
L ai appareilladas ad obs delz fraires sou liuradas al jnzizi de
" Deu, û: appenas :ii pogut acabar ab nostre Seinnor, que sola-
ment cil qued i esiion n'escapon, o Aizo li auzi dir aquest
5^0 Theoprobus. Po:< esdevenc «jue li Longobart destruisseron lo
monestier. Cant venc una nohg, domenz que li fraire se dor-
inian, intreron laintre li Lonj^obart, e destruiseron tôt cant
lâintre al nionosti»?r avia. Anc nengu home penre non la po-
gion, car nostr».* Seinnei* vole complir zo qued avia promes a
5vS5 son saint, que nenguns delz fraires non i dévia périr.
Cant venc autra vegada, uns pros hom trames par un ser-
vent seu dos boiz plos «le vin a saint Benezegh. Annet aquest
que portava los botz ; esooiidet l'un en la via, ô: Tautre el por-
te t a saint Bonozeh. E cant lo li ac aportat, receup lo moût
500 ab gninz gracias. E cant s'en vole annar le joves hom, dis li
sainz Benezegh : « Yejas, lilz, que non bevas d'aquel flasoon
qued as escondut. mas clina lo sapiament, e veiras qued ha
intre. » Annet s*en le messatges, iratz e vergoinnos, e vole
provar zo que suinz Benezehg li ac dih: venc al flascon e
5^»5 clinet lo, e domenz qued el lo clinava, e lo n'issi una serps.
Cant aquest messatges o vi, ae gran paor, ô: penedi se moût
del mal qued avia fahg. Aquil vila non era fort loin del mones-
tier, <k estavan 118 r°' i moût granz genz que s'eran con-
vertit a la fen de Christ e s'eran tout de colre las ydolas.
W) En aquella vila avia un monesiier de morguas, e sainz
Benezehg trameiia la sovent los fraires, per amonestar e * con
si tornessan de tôt lur eoratge a nostre Seinnor. Can venc
uu jorn, e sainz Benezegh la trames un morgue par amones-
tar; e cant ac fâcha sa prédication, porteron li las sanctas
* Après ce mol, /^er tno?i-tru)', qu'où a biffé.
LEGENDES PIEUSES 419
fcmenas doas toailletas, e pregueion li que las preses. Près 605
las per lur preguera, e pois mes las en so ?en, e tornet s'en.
E cant fon tornatz a son monestier, e venc denant saint Bene-
zehg, acomenset lo moût fort a raenassar sainz Benezehg, &
a dire : « Per que es intrada iniquitatz en ton sen ? » Le mor-
gues, cant auzi aizo, ac granz meravillas, e non li menbret 610
per que zo volia dir. Sanz Benezegh acomenset li adiré : « Eu
non era lo mingua la, cant tu presist las toaillas de las an-
cillas de Deu, e las mesist en ton sen? » Le morgues vai se
getar a sos pes, & quis li penitencia de la transgression qued
avia fahg, & trais las toaillas de son sen e getet las porre. 615
Cant venc un jorn, que sainz Benezegh so disnava, & era ja
noh, uns morgues paux, filz d'un rie home, ténia una candela
davant el, & acomenset a dir a se mezeis, domenz que ténia la
candela : « Seinner, qui es aquest a cui eu servi & este de-
nant endomenz que manja? » & avia en moût gran desdein. 620
Et aqui eis sainz Benezehg acomenset li a [1 18 v^] dir : a Seinna
te, fraire ; qued es aizo que tu dis? Senna te! » Ab aitant
sonet sainz Benezegh los fraires, c comandet lur que presessan
la candela, & ad aquel morgue dis que se ostes davant el, &
que se annes sezer. Et acomenseron li a demandar li fraire 625
qued avia, & el dis lur tôt per orden que pensava ni qued
avia.
Can venc autre temps, <k lo fon moût granz famps per tota
aquella région, & el monestier de saint Benezehg failli blatz,
Tuhg li pan foron manjat & degastat, qued anc plus de cinc 630
non n'ac en tôt lo monestier, ad obs de disnar alz fraires. E
foron tuhg moût irat et marrit. E can sainz Benezegh los vi
aici annar marritz & iratz, acomenset los a menassar & a
repenre moût, car annavan aici ; e pois acomenset lur apro-
metre & a dire : « Per que es aici tristz le vostre coratges 635
per pan? Si oi n'aves pauc, dcma n'aures pro. » Cant venc
Tendeman, & eil atroberon, davan las portas del monestier,
dozens mois de farina, en sax ; et anc hom non saup ni poc
saber de quai manera vengron ni i foron aportat. Can venc
lo mati que li fraire los atroberon, agron gran gauhg, e ren- 640
deron montas gracias a nostre Seinnor.
Can venc autra sazon, et uns rix hom venc a saint Bene-
zehg, e preguet 11 qued en un terrador qued era propis sens,
420 LEGENDES PIEUSES
de jostala ciutat de Terrassona, trameses de sos [119 r^] discî-
645 polz e qued i fezes bastir un monestier. Annet sainz Bene-
zehg, e, per lo prec del rie home, près morgues seus, & de
l'un fez capdel de totz los autres, & trames lai los. E domenz
que s'en annavan, & el lur acomenset a dir : « Annatz, & eu
serai la ad aital jorn, ùi monstrarai vos en quai lue fares la
650 gleisa, ni en quai lo refector, ni en quai Testai, ni on deures
far aquellas maisons qued ohs seran al monestier. » E cant
agron receuput bénédiction, & eil s'en anneron. E can venc
ad aquel jorn que sainz Benezehg lur ac tlonat, à eil asserme-
ron amanjar tôt can pogron. Can venc la nohg que Tendeman
655 dec venir, aici con promes lur avia, & el apparec a cellui, de
cui avia fahg paire & comandador,<k a Tautre, que venc après
el, & mostret lur totz los lux en vesion, on devian bastir.
Can venc Tendeman, e lo acomenset a comtar Tus a Tautre la
vision qued avia vista. Non crezeron minga per aizo la vision,
660 mas ades attendian saint Benezeh, aici con promes lur avia.
Non venc anc plus sainz Benezegh. Cant eil viron que non
venia, torneron vers el, moût irat, e disseron li : « Paire,
nos t'aviam aguardat que venguessas, aici con promes o
avias, & que nos monstressas on bastissem, & non es ven-
665 gutz. » Respondet sainz Benegli e dis lur : « Praire, vos per
que dizes aizo? Non vinc eu doux, aici con eu vos avia pro-
mes? [119 v°] Non vos apparie donx ad aquel jorn ad amdos,
can dormîas, e vos monstre! las lugas on bastisses? Annatz,
& aici con o aves vist en vision, aici o construies. » Eil, cant
670 auziron aizo, agron granz meravillas, e torneron s'en la don
eran vengut, et acomenseron a bastir, aici con avian vist en
vision.
Doas donnas moneguas, de moût granparatge, conversavan
prop del monestier de saint Benezegh, & eran en lur propria
675 vila. Ad aquestas donnas s'era donatz us moût religions hom,
per servir totz temps mais aitan cant viuria. Aquestas doas
donnas non eran a[n]car perfechas, ni lur lenguas non avian
ancar restrechas, per fren de lur habiten. Car aquest bon ho-
men, que s'era donatz laintre per totz temps mais a far lur
680 servizi, fazian per lur malas paraulas moût soven iraiscer. Cant
aquest bons hom o ac gran pensa soffert, & el s'en annet a
saint Benezeh, & comtet li totz los enogh e totas las iras
,»• •» i.» - ,.,
f
4
LEGENDES PIEUSES 4 21
qued aquestas donnas lifazian. Gant sainz Benezehgauzi aizo,
mandet lur e dis : « Capdellas vostras lenguas, que, si non o
fais, eu vos escumenegue. » Aquesta sentencia lur trames. 685
Elias per aquo non s'en capdelleron anc. E non triguet guaire
pois que moriron amdoas, e moriron en aquest vet. E can fo-
ron mortas, sebeli las liom en la gleisa. Gant hom cantava en
la gleisa messa, e le diaques cridava aici con usatges era :
a Gil que non comeneguan donon lue alz [120 r**] autres ! », 690
una noirissa, que las avia noiridas amdoas, qued offria cada
jorn per ellas, las vezia eissir de lur sépulcres cada jorn, can
le diaques dizia aizo. Gant aquist noirissa o ac vist ganre ve-
guadas, qued aici s'en eissian a la vos del diaque, e que per ren
non podian remanir en la gleisa, nembret li del vet, que sainz 695
Benezehg lur avia mandat : car si non se capdellavan de far
Tenogh del bon home, fossan escumenegadas. E fez o hom
saber a saint Benezehg, cant li femena o ac manifestât. Annet
(sanz) sainz Benezehg, e donet lur ab sa propria man una ora
tion, e dis lur : « Annatz & offres aquesta oflTrenda a nostre 700
Seinnor per ellas, e ja pois non seran vedadas. » E cant aquil
orations fon dicha, e le diaques cridet aici con solia, que cil
que non comeneguarian eississan de la gleisa, d'aqui enant
aquellas doas moneguas non foron vistas eissir. Per aizo non
deu nuilz aver doptansa que per la oration de saint Benezeh(z)g 705
eissiron del vet.
Can venc una veguada, unsenfans qued era morgues an-
nava trop soven vezer sos parenz, elz amava outra tota
mesura. Gant venc un jorn, & el eissi del monestier & annet
elz vezer, e non près bénédiction de son abbat saint Benezehg 710
ni annet per sa voluntat ni per son comant. Et en aquel eis
jorn, aqui eis can fon a sons parenz, & el fon mortz. Van lo
penre sei amie e foron moût irat, e sebeliron lo. Gan venc
[120 v°] Tendeman, & eil atroberon lo cors de sobre terra.
Van lo penre per aqui mezeis, e sebeliron lo. Gant venc 715
l'autre jorn, & eil Tatroberon atressi déferas. Gant eil o viron,
anneron s'en a saint Benezegh, moût trist e moût marrit,
que per la soa merce dones ad aquest sa gracia. Gant sainz
Benezehg o auzi, donet lur ab sa propria man cuminion, e dis
lur: a Annas e pausas li sobre lo pehg lo cors de nostre Sein- 720
ror, e sebeles lo. » Anneron, e feron o aici con el lur acdihg.
Sebeliron lo, & anc pois non fon vistz.
r:2 LEGENDES Plî-.USES
Aîrra v^rj.x-ia. u*; n.-.rffîies <ejs n:n po.iia per nuillamanera
r-rmanir ^; mo.'i-îSM-;r. e ii/.:a aies ine ve ?'en annaria. Sainz
725 B-rnez-.i.' ci^tiava V/ .v^-Iâ ji-rn. e Tamoneatuva crue non o
f:z»';5, rio:; vr/::iie.s eissii' -i-:-! liionesuer. El. per nnil prec qued
i;om ii :•?/.•:■•:. r.on vcl; •:rr?îî-e '\U'}\ estes iaintre ab los autres.
A:izpr'"f;r iava fi Ivs -j?! • i hom ii dones licencia con s'en pogues
annar. Cari?: «?ii.'i7 Boii-îz-i-he o vi. qued aici Tenojava ades, fon
730 un jorn irav. pci- i'enoh^-iu* t ol l'en tazia de querre licencia,
e dis li moût iit'lamerit un Jorn que s'en annes e s'ostes de
Iaintre, poi< q-ie ron no:i li vaiia nuilz amonestimenz qued el
li f.'ze«. ftit aqui oi> an net s'en lo morgues. E can fon foras del
monestier. cv el ?*a*roba aqui eis a*» un gran dragon que tenc
735 la bocca uberti, e vole Taiinar penre. Can le morgues lo vi,
ao mont gran paor, et [121 r®" acomenset moût fort a cridar :
« Corretz, corroz, qued aquest dragos me vol devorar. » Cant
0 auziron li fraire. corregron beii tost foras, e non viron anc
minguadel dragon : mas lo n"u»rgue atroberon, moût paoros e
740 tremolant, e va:i lo iienre. e toineron lo al monestier. Et aqui
eis el promes que jamais del monestier non cissiria; e d'aqui
enant attendet o, aici con promes o avia.
En aquel temps que veno li earestia per tota la terra, sainz
Benezehg donava tôt cant podia aver ni penre a la paura
745 gent, <k tôt cant avia ol monestier, qued el pogues penre, tôt
lur 0 donava ; à ac o de guisa donat qued anc res non fon
rcmasut ol coll'ir, mas solameut un pauc d'oli. Adonx venc us
siibdiaquoH, qued avia nom Agapite, e preguet moût fort a
saint n(îH(î/.<*gli, que si le sens plazers era, que li dones un
750 pauo d'oli. Annet sainz Benezehg, que s'esforsava de donar
tôt cant podia avor en terra, qued el pogues aver trasaur en
col ; comandet qued lioni li dones aco eis d'oli qued era Iaintre.
Lo morgues qnod ora desposaire, cant auzi aizo, fon li mal, e
non o vole far, Ce alonguet o aitant cant poc. Cant agron estât
755 un pauc, e sainz Houczchg li dis si avia fali zo qued el li avia
fomandat. Le morgues respondet e dis que non linn avia
ron donat, que si lin donava, non lin remanria res ad obs
(bdz frairos. Adonx fon iratz sainz Benezegh, e coiumandet
(juod aquoUa [121 v"J amola de veire, en qued era Tolis, ab tôt
700 roli,gotcssan per una fenestra foras, qued el monestier non
romasos nuilh res por inobediencia. E fon aici fahg con el o
LEGENDES PIEUSES 423
comandet. Li fenestra, per on hom la getet, era mot auta, e
desotz, aqui on cazec 11 amola, avia roca moût aspra e dura.
E cant cazec li amola sus en la rocha, e remas aici entera, con
si i fos pausada tôt soau, ai anc Tolis eissir non poc. Can 765
sainz Benezehg o vi, comandet qued hom levés Tamola d'aqui
on era cazucha, e qued hom dones Toli a cel que lo queria. E
cant o agron fahg, sainz Benezehg ab totz los fraires getet se
ad oration, aqui on era li amola ; & avian en vojat Toli, & avian
lo cubert ab lo cubercel. Aqui eis can sainz Benezehg acomen- 770
set ad orar, & aquil amola fon aici plena d'oli que lo cubercel
acomenset a soslevar, e crée tan que foras lo getet, & aco-
menset a correr Tolis per tôt aqui on li fraire eran. Adonc
sainz Benezehg acomenset lo fraire a menassar, auzent totz,
de la inobediencia e de Torguil, auzent totz, & acomenset li 775
ad admonestar qued apreses ad aver fe & humilitat. Le morgues
fon castiatz. ab aitant, & ac vergoinna, car sainz Benezehg li
ac demonstrat la vertut de Deu per miracle, la quai el li co-
mandava far.
Can venc un jorn, sainz Benezehg s'en annava ad una gleisa 780
de saint Johan, qued era [122 r°] prop de son monestier, sus
eis en aquel puhg. E domenz qued el s'en annava la per orar,
& le diabolz s'encontra ab el, en semblansa de metge,& portet
sas boissezas e son arezament. Et aqui eis cant sanz Benezegh
lo vi, & el li acomenset a demandar : « On volz tu annar?» 785
Respondet le diabolz e dis : << Eu vauc alz fraires, per donar
pozon.x) Ab aitant sainz Benezehg s'en acomenset ben tost
ad annar a sa oration on annava, e, can la fon, fez tost sa ora-
tion, e pois tornet s'en al plus tost que poc. Le diabolz fon
vengdz al monestier, & atrobet (ad *) u morgue prohome de 790
laintre posant d'aigua, et en eis pas le diabolz li intret el cors
& acomenset lo moût a tormentar, e fez lo getar a terra, &
fazia lo trabaillar moût fort. Cant sainz Benezeh tornet de sa
oration, & el atrobet aici aquest morgue envoludant per la
terra, car moût cruzelment lo trabaillava le diabolz. E vai 795
vers el sainz Benezehg, e donet li a sa gautha, & en eis pas -
le diabolz 11 eissi del cors.
* On avait d'abord écrit al ; Vu qui suit a été ajouté, dans l'interligne, au
dessus du ^. Corr. /a?
42 i LEGENDES PIEUSES
Gan venc una sazon, uns gotz erctges qued avia nom Gallas,
el temps que rcinnava Totiia le reis, aquest Gallas, totz aquelz
800 que eran de la fen de Christ, fossan clergue o laie, o morgue
0 preveire; qued en las soas mas venguessan^ non podian
escapar senz mort. Can venc un jorn, k aquest malz hom,
aquest Gallas, près un vilan pcr rapina e per raubaria, et
destreis lo moût, e vole lo far rezesmer, e tormentet lo moût
805 fort per son [122 v®] aver. Can le vilas vi qued aici lotormen-
tava, non saup anc aire que se disses ni que se fezes, e dis qued
a saint Benezehg avia comandat tôt cant aver podia en tôt lo
mont. Âb aizo le malz liom non lo tormentet plus, mas, sas
mas liadas ab las rengnas de son caval, lo fez ades trotar
810 davan se per monstrar calz era aquestz Benezegh. Annet le
vilas, e, totz liatz, menet aquest Gallas al monestier, on era
sainz Benezehg, e trobct lo sezent tôt solet davan sa cella,
que legia, e dis le vilas a Gallas : « Vec te aizi Tabbat Bene-
zehg, )) Cant aquest malz hom lo vi, acomenset lo mot mala-
815 ment e mot cruzel a gua[r]dar, aici con en us o avia, & dis li
moût asprament : « Leva sus, leva, et rent ad aquest vila zo
qued has d'el. » Cant sainz Benezehg auzi aizo, levât sos oilz
vers el, e pois regarde t se vers lo vila qued era liatz, &
aqui eis las rengnas, qued eran environadas entorn sos braz,
820 s'acomenseron tan fort per ellas mezeissas a desplegar & a
desvolver que nuilz hom en nuilla guisa, per poder qued
agues, non las pogra tan fort desvolver. Ab aitant le vilas
acomenset ad estar totz desliatz davan saint Benezehg. Cant
aquest Totiia* vi que per aitan gran poder era desliatz le vilas,
825 ac moût gran paor, e descent ben tost de son caval a terra, e
sa regeza cervitz de maleza clinet alz pes de saint Benezehg,
e preguet li que, si [123 r®] le seus plazers era, que 11 perdo-
nes, 6l que Tacoillegues en sas orations. Anc sainz Benezehg
non se moc de sa Icison, ni se levet, mas sonet los fraires e
830 comandet lur que ^ messan hiintre aquelz dos^ e que donessan
bénédiction ad aquest. E cant o agron fah, & el tornet denant
el, & acomenset li amonestar que se tolgues d'aquella maleza
en qued era. Annet s'en, 6: anc d'aqui enant non ques ren al
• :>/t\ Gorr. Gallas.
* Après ce mot, j^e, exponctué.
LÉGENDES PIEUSES 425
vila, lo quai avia sainz Benezehg sol ab son esgardament des-
liat. 835
Cant venc un jorn, sainz Benezehg s'en era eissitz ab los
fraires fora el[z] camps, per vezer los labors. E domenz qued
el era la, & us vilas aportet enfre sos bratz un fil seu mort al
monestier a saint Benezehg. E cant ton laintre, acomenset a
demandar on era sainz Benezehg. Di^^seron li aquil de laintre 840
que fora s'en era eissitz elz camps, ab los fraires, obrar elz
camps. Can le vilas o auzi, pauset tost son enfant davan las
portas del monestier, & acomenset a corre ben tost vers la on
era sainz Benezehg. E domenz que s'en annava, & el s'encon-
tra ab saint Benezehg, que venia de laor ab los fraires. E cant 845
le vilas lo vi, acomenset li a dir : « Rent me mon fil I Rent
me mon fil î » Sainz Benezehg, cant auzi aizo, arestet se &
acomenset a dir: « Con ai fou donx tout ton fil ? » Respondet
le vilas e dis : « Non. Mas mortz es, e resuscita lo ! » Cant
sainz Benezeh auzi aizo, fon iratz, & acomenset a dir : « Toi 850
te de [123 v°] sobre nos. Car aizo que tu queres es delz sainz
apostolz e non mingua nostre. Per que nos carguas tu aquel
fais que non poiriam* portar ? » Le vilas, a cui cozia mais
qued a totz los autres, acomenset a jurar que ja non se par-
tria d'el, entro que son fil li agues resuscitat. Ab aitant sainz 855
Benezehg li acomenset a demandar on era le mortz. Respon-
det le vilas e dis : « Le cors jatz a las portas del monestier. »
Cant sainz Benezegh fon vengutz aqui, agenoillet se, & getet
se sobre lo cors de l'enfant, & estendet sas palmas verslo cel
e dis : a Senner, non regardes mos peccatz, mas la fen 860
fraquesthoraen,que pregua que sos filz sia resuscitatz, e rent
ad aquest cors l'arma que li as touta ! » A penas ac complida
sa paraula sainz Benezehg, que li arma fon tornada, e le cors
de l'enfant acomenset a tremolar, & en eis pas l'enfans fon
vius ; & vai lo penre sanz Benezehg, e rendet lo per la man 865
a son paire.
Sa sorre de saint Benezehg, Scolastica qued avia nom,
qued era aguda monegua des qued era tozeta, avia aconstumat
d'annar vezer son fraire saint Benezehg cad'an una vegada.
Cant venc una vegada, & eP venc, aici con o avia en usatge, 870
* yis. poirias, avec un tilde sur Va et un point sous Va.
« Sic. Corr, il. ^9
4 2<î KTYMOLO(ilES f.IKGEOISES
e descend ia iidos de foras las portas del monestier, ad una
maison qued i avia. Sanz Benezchg, canf. saup que sa sorre era
venguda, descendet ad elhi, ab dos de sos naorgues. Cant
foron laintre ab clla, tôt lo jorn mezoron en lauzor
(A iuivrej
KTVMOLOGIP]S LIÉGEOISES
Les étymologies qui suivent ne se trouvent pas, sauf men-
tion au cours de Tétude, dans le Dictionnaire de la langue tcal-
lonne de Grandgagnage, dans la dissertation d'Àltenburg,
Versuch einer Darstellung der trallonischen Mundart. ... II et
III (je n'ai pas eu le fascicule I à ma disposition), dans la pho-
nétique du patois de Seraing de M. Horning (voyez plus loin),
ni dans les deux ou trois monographies (fort inégales) qui ont
été publiées sous les auspices de la Société de Littérature wal-
lonne. Il serait, en effet, sans aucun intérêt de reproduire des
solutions déjà admises ou au moins déjà proposées.
Dans la graphie du wallon, les lettres ont la même valeur
qu'en français^ sauf ^ qui est toujours dur. X = le ck alle-
mand dur.
1. — Markott\ f., belette.
Paraît être une forme féminine, formée avec le suffixe —
otta, de markou, m., matou, chat mâle (a Liège). Celui-ci n'est
autre que le nom propre Marculphus^ voyez mes Etymologi^
îoa/lonnes, /lev. des pat. g.-rom,, III, 272, au mot djèra^ geai
( = Gérard J
Zeliqzon, Loihringische Mundarlen^ au Glossaire, p. 94, a
la forme margolalV (avec le suff. — itta), Adam, Les patois
lorrains, mentionne markolotV à Laneuville-sous-Montfort,
morkolott' à Rehérey ( p. 303. )
D'après le même, p. 310, le chat s'appelle à Rehérey morkou
ETYMOLOGIES LIEGKOISKS 427
(remarquez le parallélisme), à Grandvillers margo (avec la
transformation de c en g comme dans margolatf).
Certaines formes ont changé d'une façon insolite Vm ini-
tiale en h : bèrkolètt, cité comme usité en Belgique, par De-
PRECHBUX, Faune wallonne, s. v. mai^kotte; baskolèU\ à Saint-
Hubert (Luxembourg), )^o\jlv barkolèlt* 1 \ bakouf k Bouillon-
ville et bakal' à Landremont ( Adam, 310) pour barkouP et
barkal' ?. Sur la transformation insolite de m initiale en b,
voyez un autre exemple dans mes Ftym, wallonnes, loc cit,,
s. v. hèrau {bèmu, bélier = mas, maris -j- suffixe).
2. — Bawî intr., bayer, bawî, intr., épier; bawèW, f., lucarne.
Cf. Diez, I s. v. badare : « italien badarCj provençal et
catalan badar, a-franç. baer, béer, fr. moderne bayer. La filia-
tion des sens est : avoir la bouche ouverte, rester fixe, atten-
dre (avec la bouche bée) ; considérer avec attention ; puis
enfin considérer avec envie, désirer, convoiter. »
Bawîy bayer a le premier sens. Bawî, épier et le provençal
bada, sentinelle, sont dérivés du second. Bawètt\ lucarne,
peut être une ouverture qui bée (cf. fr. baie, ouverture) ou
l'endroit par où Ton épie.
Metbr, Gramm, des langues romayies, traduction Rabiet, I,
50, rattache ces mots à la racine onomatopée ba,
3. — Bourse, poursêj m., bosse, contusion à la tête.
C'est le fr. non académique bourseau, dérivé de bourse,
vieilli dans le sens de gonflement produit par un coup, mais
signifiant « par analogie, grosse moulure qu'on forme sur
rareté supérieure ou les arêtes latérales des toits d'ardoise,
et que l'on recouvre de plomb, de zinc. » Hatzfeld et Dah-
MESTETER, Dictionnaire général de la langue française* De byrsa,
bourse -|- ellum.
Lie b initial, qui persiste en wallon, se change sans doute,
en p pour prêter à une confusion plaisante avec poursê, pour-
ceau.
Pour le rapport entre bourse et tumeur, comparez le fr,
jjocAe, sac et pocher, meurtrir.
4 28 KTVMOLOGIFS LIEGEOISES
4. — El\ f.j cimetière.
L'êt'' è plinC di djin, le ciFiietière est plein de gens. Comme
on le voit dans le Dictionn.de la langue toalL de Grandgagnage,
s. V. aide (graphie avec un d ?), ce mot correspond à atrium,
ou plutôt à alria, comme l'indique le genre.
Le fr, non académique connaît aitre, terrain libre servant
de cimetière autour d'une église ; cour, parvis. Voy. Hatzfeld
(ît Darmesteter, Dictionnaire.
Ces mots sont de formation demi-savante ; cela s'explique
par le milieu clérical d'où ils sont sortis. Dans la langue
populaire, tr est réduit à ?•.• cf. lyér-=. latro.
A Saint-Hubert, on dit êt7nj/\ f., {aî/re + suff. mam), cf.
pour comparaison Im Malndriy = La Maladrene^ lieu dit à
Saint-Hubert.
En messin, on trouve âtréy, formé avec le suffixe -eilum
d'après Zeliqzon, op. cit. p. 79. Je crois que cette explication
est le résultat d'une erreur : La finale franc, -ie devient èy à
Metz;(§37).
5. — Grèvt m., vairon.
En Lorraine, grèvir au Tholy, grèvèl à Dejcimont, gravèlk
La Chapelle (Adam, 379). Toutes ces formes viennent de
Tanc. fr. grave, fr. moderne grève -\- suff. -arium ou -ellam.
Le vairon est le poisson qui se tient sur la grève.
6. — Mavé, trans ., racler, éplucher.
= à Saint-Hubert chavé, éplucher, écorcer, skauf\ f.,
écale, skafyott\ f., petite écale. Dans la région à Test de Saint-
Hubert (Marchot, Bev. des pat. g.-rom.y IV, 19), châf, f.,
écale. A Landremont, kâfi, écosser (Adam, 237). Dans Frois-
sart, escafotte, écale de noix ou écaille de moule (Schblbr,
Diclionn, d'étymoL, s. v. escafignon.)
Tous ces vocables paraissent se rattacher au germanique,
si Ton considère que l'ail, moderne à Schelfe, écaille^ ëcosse.
Ecale y écaille sont eux-mêmes german. : ail. Sckale^.
* J*ai relevé^dans Godefroy les exemples v,-fr. suivants;
2 Escafe, -affe, cscraffe, coquille, cosse.
ETYMOLOGIES LIEGEOISES 429
7. — Arègn krin, arinkrlnt arinkrè ou arîkrè, m., toile d'araignée
= araignée-crin (araignée se dit arègn')-^ cf. en fr. l'expres-
sion analogue /?/ d'araignée.
Pour le procédé propre aux langues germaniques employé
dans la composition du mot, comparez le même mot à Mons
arnitwaVy littér. araignée-toile, et encove pisint' , f.,littér. pied-
sente ^ sentier, à Liège.
8. — Dm', f., dinde
On dit également poy' dm ou poy' dii\ littér. poule d'île.
Dîn' = donc d^île^ cf. diyide = d'Inde,
Le dindon en français s'appelle aussi coq d'Inde et en lié-
geois kok din\
9. — Pâw\ m., paon
S'expliqueramieuxpar le nominatif /jayo que parTinfluence
germanique (néerlandais paamo, allem. Pfau\ à laquelle
recourt Grandgagnage, Dictionn., s. v. 2. Pawe. Le liégeois
présente également à côté de paioou, f,, pavorem, \s. forme
paw', f., plus rare, qu'il faut rattacher à pavor, voj. Grandga-
gnage, 1. Pawe ; à côté de lyér, m., latrOy il a de même lâron,
m., lalronem^.
10. — Froumix* ou frumix\ f., fourmi
Semble bien représenter un type *formice7n, proposé par
M. Horning, Ziir Kunde des Nemoallonischen, dans la Zeitschr,
escrefe, -effe, -affe^^-ofe (avec r épenthétique), écaille, saleté, ordure.
escafelote^ coquille de noix.
escafotie, petite coquille.
1. escafiUon, escarpin.
escafignon, escarpin, chaussui-e légère.
2. escafiUon, coquille de noix.
escafosse^ coquille, écaille.
escafote, -otte, id id.
M. Horning me parait faire erreur eu rattachant les mots lorrains analogues
(dans GrenzdiaL, 113) au fr, escoffion (= coiffure de femme), del'ital. scuf-
fione^ tiré lui-même de cuffia. coiffe (scheler). Il n'y a pas de rapport, à mon
1 La forme pawoîi a pris une portée diminutive et signifie paonneau.
4 30 ETYMOLOGIES LIEGEOISES
f. rom, Philol., IX, 489, et ne devoir pas être expliqué par
nne contamination avec le wallon kopicli,f,j fourmi (voy.
Tétymol. dans la /{ev* de phiL franc,, Y ^ p. 41), comme je
l'ai fait dans mes Étt/m. loall.,- loc. cit., III, 273. Car si Ton
dit à Liège bèrbi (berbivem), son {^soricemj, djini (juvcnicem),
pyètri (perdicem), on y rencontre également bien les formes
djinix'y djènix\ dfnix* et pyè(rfx\
1 1. — Bossîf m., bélier
Représente le latin bassus^ gras, qui a de l'embonpoint (dans
les Gloses d'Isidore, voy. Quichrrat, Dictionn, latin- français)
-|- arium. Voy. pour les preuves historiques Grandgagnage
s. V. basî.
Pour comparaison, je citerai les formes bèdo, m., agneau,
mouton (suff.-o^^«5) et bèdéy* (Nainur), f., jeune brebis qui
n'a pas encore été tondue (suff. -a/a), voy. Dbfrechbux, Faune
walL, 24, qui paraissent bien se rattacher à la même racine
que le fr. bedon, bedaine, etc. Voy. à ce sujet mes Et» walL,
loc. cit., m, 271.
12. — Pité, ÎQtr., ruer
Doit remonter directement à un type *peditare (dérivé de
pes, pedis) et ne peut pas se tirer de pi, pied, à cause de Vi
qui est bref (/iité), E initial devient assez souvent i en wal-
lon : cf. mitan, milieu (*inedietantein), finyèss\ fenêtre, etc.,
voy. des exemples do Seraing dans Horning, loc, cit., § 17.
A St-Hubert, on a pitalè, intr., s'enfuir au plus vite, déta-
ler, à Landremont/>?'/a/6?, piétiner (Adam, 276). C'est* peditel-
/are? En tout cas, ce pitaléne peut pas s'assimiler au pèstèlé,
piétiner, de Couvin, où M. G. Paris a vu fort ju licieusement
pistillwn, pilon -f- û^'^- (Romania, XIX, 508/ S médiale devant
^subsiste à St-Hubert: on sait que c'est un caractère du wallon.
Paul Marchot.
VARIANTES AU TEXTE
DES
REMONTRANCES DE MONIER DE CHATEAUDEUIL
La Reçue historique de Provence a publié récemment (T. I, p. 135)
un texte savamment annoté de cet intéressant document, curieux pour
l'histoire des Juifs et pour l'histoire de la civilisation en Provence.
Mais on n'indique pas la provenance de ce texte, on y a fait des cou-
pures arbitraires, et il est fort incorrect.
L'éditeur n'a pas connu une autre version de la même pièce, con-
servée dans le manuscrit n*^ 777 de la Bibliothèque Méjanes, à Aix en
Provence. Cette autre version lui aurait fourni nombre do variantes,
dont quelques-unes sont nécessaires pour donner un sens à certaines
phrases du texte publié par la Revue historique. L'existence de cette
autre version, qui n'est sans doute pas la seule, semble un argument
en faveur de l'hypothèse de la non-authenticité au discours de l'avo-
cat général Monier. Du moins faut-il penser que le discours prononcé,
s'il l'a été, n'a pas été rédigé par lui, mais seulement d'après des
souvenirs de ses auditeurs.
L'éditeur a donné quelques renseignements très brefs, soit sur l'au-
teur supposé du morceau, soit sur les personnages dont il y est
question. Le recueil inédit de Fauris Saint-Vincens (Méjanes, ms.
902) lui aurait fourni divers renseignements complémentaires.
Le père de Monier de Chateaudeuil, « Manant Maunier fut, dit
Fauris, pourvu à Boulogne dans le mois d'aoust 1573 de l'office d'ad-
vocat général qui vacquait par la mort de Jean Puget, et fut reçu le
10 octobre suivant. » Pendant la Ligue, il fut du parti royaliste et suivit
le Parlement royal à Pertuis, àManosque et à ÎSisteron. Il présida sou-
vent les États, en chef ou avec le président de Saint-André. Il fut
nommé conseiller le 2 novembre 1599. Sa femme Perrette Guiard,
d'une famille noble de Beaucaire, lui donna deux enfants: l'un fut
président à la chambre des comptes ; l'autre, Jean-Louis, fut avocat
g-énéral au Parlement (Méjanes, ms. 902, p. 804).
«Ce fils, Jean-Louis de Maunier, succéda dans l'office de président
à Marc- Antoine d'Escalis, quand celui-ci fut nommé^premier président
fpar lettres du 7 septembre 1616, et reçu le 25 octobre suivant). Il
était avocat général par résignation do son père depuis 1595. Il avait
4 32 DR MONIER DE OHATEAUDEUIL
épousé Anne de Garron, fille de Jean de Garron, auditeur à la cham-
bre des comptes. Il eu eut deux enfants, un fils et une fille qui
épousa Ch. de Sabran, seigneur d'Aiguigues. Il mourut âgé de
soixante-deux ans, le 13 octobre 1G38. Moissac dit qu*il a laissé un
recueil imprimé des harangues qu'il avait faites tant aux ouvertures
du Parlement qu'en d'autres occasions {ilnd, p. 657). » L'éloge de Jean-
Louis de Monier de Cliateîiudeuil est dans Nostradanms, Histoire de
Provence^ partie viii, p. 1081.
L'éditeur conteste, d'après Barcilon de Mauvans, Torigine juive
des Thomassiu. Il aurait pu dire que, d'après le même recueil de Saint-
Vincens, les Thomassin ne seraient pas d'origine juive, mais provien-
draient de Th. de Thomassin, chevalier du roi René, du 5 septembre
1479 (cf. reg» Aqu'da, fol. 149), descendant d'une famille noble de
Bourgogne. Jean-André Thomassin, seigneur d'Einac, pourvu de l'un
des quatre offices créés par lettres d'octobre 1568, serait le petit-fils de
ce Th. de Thomassin.
L'éditeur 80 borne à dire que« les Thomassin et les Aimar surtou*
étaient alliés aux Kstienne. «Guillaume Aymar, Jean-André Thomas-
sin et le président d'Estienne de Saint- Jean étaient beaux- frère s, les
deux premiers ayant épousé Antoinette et Catherine, sœurs du troi-
sième.
Voici maintenant les variantes du ms. 777 de la Méjanes. Le texte
donné avant les = est celui de la Revue historique, celui qui les suit
est le texte du manuscrit.
Liy . 1 : Avant que la l'rovencc fût unie à cet État, du temps de
Philippe-le-Bel.= Après que la Provence fut réunie à cet État, d'au-
tant que le roi. Lig , 2 : chassa = avait chassé. Lig . 3: honneur 8=
humeur. Llg . 5 : toujours, suppléez secrètement (p. 136) Lig . 6.* dans
Alger, fâchés = en Avignon, marris. Lig. 9: des synagogues = do
la synagogue de Constantinople. L'ig , 10: religion chrétienne, en
apparence pour se rétablir: mettre la virgule après en apparence,
Lig. 12: laver des eaux du baptême = baptiser. Lig, 14: nom «=
surnom ; de la famille d'Ademar qu'il nomma Aimar = de sa famille
qui est Aimar. Lig, 15: Estienne, etc., jusqu'à Mimet = le seigneur
de Venelles. Lig . 16 : et lui fit donner jusqu'à la fin de cette phroêé :
= et tout de même lui imposa le surnom d'P^stienne. Lig, 18: de la
maison de Saint-André = de Provence. Lig. 20 : bien que les = bien
que depuis les. Lig, 20: qui en viennent = qui vivent. Lig, 21:
ayant pris le nom de = se font appeler Thomassins.Zi^. 22, 23, 24 :
à supprimer. Lig. 26: conversion = confession. Lig. 31: quatre-vingt
mille = cent mille. Lig . 32 : chrétiens = baptiser. Lig , 34 : néo-
phytes en ce pays = néophytes, c'est-à-dire nouveaux chrétiens.
Lig, 34: nouveaux chrétiens = chrcbtianos novos. Lig. 38 : quelques
VARTANTKS DU TEXTE DES REMONTRANCES 4 33
offres = des offres. Lig. 40 : de la guerre qu'il avait en Italie = des
guerres d'Italie. LigAX : qu'il fut lever sur tous = qui fut levée et
tous. Lig. 43 : la chambre = la cour.
Le texte depuis lig, 44: et d'autant qu'on avait résolu jusqu'à
lig. 56 : enfin la vénalité des charges, — est remplacé dans notre
copie par:
Et d'autant qu'on avait résolu de les exterminer et cependant de
continuer sur eux de grandes impositions, et qu'ils étoient méprisés
et détestés, publiquement pleins d'opprobres et «l'ignominies, qu'ils
ne pouvaient parvenir à aucunes dignités ecclésiastiques, parce que
les anciennes constitutions canoniques et les conciles y résistent, ni
aussi à la moindre charge publique de quelques villes qu'ils habitent
et quoiqu'ils n'aient manqué de brigue ni de coiruption, jamais ils
n'y ont été élevés, tant ils y sont odieux pour leur malice et perfidie,
après avoir longuement recherché quelque moj^en pour s'établir, s'af-
franchir de ces impositions pour s'acquérir quelque sorte d'honneur
et d'autorité.
Lig. 56: charges = offices. Lig. 57: planche pour arriver aux =
planches aux. Lig. 58: qui sont plus = qui sont les plus.Zii/. 59 :
doivent = devroient. IJg. 69 : exclus encore plus que des autres =
exclus plutôt que des autres. Lig. 61: par conséquent = conséquem-
ment. Lig. 62 : moyen = moyens. Lig. 62 : d'exercer leur avarice =
d'exercer les effets de leur avarice. Lig. 62 : usure supprimé. Lig. 62 : et
vengeance sur eux = et de leur vengeance. Lig, 63 : sous le règne
de Charles IX = sous le roi Charles IX.Zfî^.65: du = audit.Z?5'. 66:
été baptisé = été fraîchement baptisé. Lig. 67: et après lui ses
enfants. Et les deux autres, savoir Stéphane et André ou dit Tho-
massin furent aussi = et après lui les enfants des deux autres fi'ères
baptisés savoir d'Estienne et d'André dits Thomassiu.Z/^. 69: = au
même temps, ou supprimé. Lig. 70 : soit par argent, soit par faveur
ou intérêt de la parenté = par argent et faveur de leurs parents.
Lig, 71: des mêmes = de sembhibles. Lig. 72 : composaient = com-
posent. Lig.73 : Parlement, ajoutez ainsi qu'il appert par la liste ci-des-
sous transcrite. Lig. 76 :mais pour couvrir leur parenté = pour couvrir
leurs parantelles.Zi5'.77 : parmi eux= ensemble. Li<7. 79: Thomassin,
ajoutez conseiller.
Le passage supprimé par la Revue historique de Provence est
celui-ci :
« Les trois cousins, germains d'origine et beaux-frères d'alliance,
ne se contentèrent pas d'être entrés au Parlement et d'en avoir intro-
duit quelques autres de leur famille ; mais parce qu'ils ne pouvaient
exercer leur avarice et leur industrie, d'autant que tous les autres y
réfiistoient et veîU oient sur leurs actions, ils ont dessein de s'établir
i:^i 1)K MOXIEU OK nHATIîAUDKUlL
au Parlemeut en tel nombre qu'ils y soient les plus fort» et puissent
y exercer leur tyrannie .
" Et pour parvenir à leur dessein ils ont fait tous leurs enfants de
leur robbe, espérant par argent de les établir avec offices et bénéfices
les plus importants de la Provence et s'emparer du grand et du petit
sceau de S. M. pour se faire honorer et adorer.
Lir/. 80 : Ledit Aymar = Kn exécution de ce, ledit Aymar. Zi^r. 80:
aujfpr. Joseph Aymar. Lig . 82 : 8*opposa= s'étant opposée. Lig. 84 :
(qyrès remontrances an Uoi, lire les troubles qui survinrent en ce
royaume en l'année 1588 lui ont donné moyen de s'établir en ladite
charge. Ledit Etienne a établi un de sa famille et surnom greffier
civil, lors de la vente du domaine, de sorte etc. Lig. 88 : svppr, civil,
Lig.SO: suppr. du palais. Lig.Sd: entre leurs mains =le8 mains de
cette race. Lig . dO lire cav il vaut plus de 2,00(3 écus de rente et il
n'a pas été payé 10,000 écus.
Il faut suppléer entre les lignes 91 et 92 un paragraphe tout entier
omis par la Revue historique de Provence :
Lig. 91-92. Cette charge leur donne ungrand moyen d'exercer leurs
méchancetés ; car tous les commis du greffe qui escrivent aux cham-
bres sont de leur famille ; ils savent par ce moyen tous les secrets de
Provence, en font tomber les procès entre les mains de ceux que bon
leur semble, font esgarer les requcstes et autres procédures, falsifient
les arrêts et décrets de la cour et tourmentent les sujets du roy en
mille façons dont il y a des plantes améres.
Lig. 92 : nommé Andréas = qui était maître Andréas. Lig, 94 :
d'avocat général du Koy = du second avocat général. Lig, 97 : il a
poursuivi = ayant poursuivi. Lig. 97 : laquelle lui ayant été = et lui
ayant été. Lig. 99 : il lui en a présenté = lui en présenta. Lig, 100 :
aucun des degrés de parenté = aucun des degrés de parentelle. Lig,
101 : d'y avoir jeté de l'encre = d'y avoir tombé d'encre. Lig. 104 : ce
qui est une faute grandement = qui est grandement.
Les lignes 106 à 111 différent «absolument :
«Fault remarquer en passant qu'il y a deux procureurs généraux au
Parlement de Provence, l'un civil et l'autre crinnnel, et qu'auparavant
que lesdits Aymard et Thomassin entrassent au parquet, le premier
procureur général ja receu estoit le sieur Rabasse, leur oncle d'alliance^
de sorte que de quatre ils étoient trois proches parents. Chose si
étrange, qui fut cause, etc. »
Lig. 116 : demeuroient = demeurent. Lig. 116 : ce qui est cause
que les plaintes en révocation sont si fréquentes contre eux, = et les
plaintes et accusations contre eux sont si fréquentes. Lig, 1 19 : seule
personne = autre personne privée, lig. 120. Ils ne sont pas= encore
ne se sont ils pas. Lig. 122. composent = soient. Lig. 123. moyenne « '
4 35 VARIANTES DU TEXTE DES REMONTRANCES
proeuvé. Lig. 124, 125, 126, depuis sans dispenses à toutes fois, rem-
placer par. Et bien qu'il ne pouvoit être reçu audit office de Président
sans dispense, ayant son père et plusieurs autres parents dans le Par-
lement, toutefois par les brigues et artifices des siens il l'a obtenu.
Lig. 127 : mais ça été à condition = mais c'est à condition. Lig. 128:
office = état. Lig. 129: autre = aucun. Lig. 129: qu'au degi'é = au
degré. Lig. 130: néanmoins = toutes fois. Lig. 130 : api'ès résigné,
ajoutez son dit état et office de procureur général. Lig. 131 : et par sur-
sis s= et poursuivi Lig. 133: y fait = y fit. Lïg. 135: compagnie =»
petite compagnie. Lig. 136 : et des parents qui excéderont = outre
plusieurs parents qui excèdent. L\g. 139 : aussi = davantage. Lig. 140:
remettroit son office =résigneroit son ^ioXLig. 143 : 12.000 =plus de
dix mille. Lig. 145 : d'autant qu'il s'est = d'autant plus qu'il s'en est.
Lig. 146 : jointe à la = jointe avec sa. Lig. 147 : forfait = forfaiterie
Lig. 147 : un office = son office. Lig. 148: Et d'ailleurs = Il y a plus
car. Lig, 149 : après enfants, ajoutez auxdits offices de Président et
de procureur général. Lig. 149: mais il se trouve = mais il s'est
trouvé. Lig. 150 : avoit = avoit obtenu. Lig. 150: del'année 1688 =
dès l'an 1588. Lig. 152: pendant = durant. Lig. 153: bien que =
combien que, Lig. 154: par lettres patentes = par les patentes.
Lig, 154 : 1598 = 1588. Lig. 157. de son état = de l'exercice de son
état Lig. 158 : après réception, ajoutez et installation. Lig. 159 : à
cause des lettres patentes = à cause «les parantelles et alliances. Lig.
160 : pour être reçu = pour être les survivances révoquées. Lig, 162:
et l'on a fait remettre aux parties = et a fait mettre ledit office. Lig ,
164. grandes parentés = desdites parentelles. Lig. 165. car dès qu'il =
car aussitôt qu'il. Lig, 167 suppr. de cette charge. Lig. 167. lui être in-
terdit = être interdit au père. lig. 170. faudroit = faut Lig. 172. qui
chassa cette mauvaise race = il chassât cette vermine gens [sic), Lig.
173. et principalement de cette province = et morne de celles de
Provence. Lig. 175. d'autant plus = autant et plus volontiers. Lig. 175.
après disposée, lire que la conscience y est obligée par les lois et par
la raison. Lig. 180. en leurs chapitres généraux = en leurs chapitres
et assemblées. Lig. 180. de ne recevoir aucun néophyte qu'il n'aj'^e
passé la neuvième race, = de n'en recevoir aucun qui n'aye passé
la septième race et ceux-ci n'ont pas encore passé la troisième.
Lig, 182. ils ne sont admis = ils ne les admettent point. Lig. 183. qu'-
après la sixième génération et hors de cela, ils les tiennent = qu'après
la septième race, les tenant désormais. Lig. 185. suppr. la phrase. Dans
la ville d'Aix jMS^'M'fi qu'ils soyent. Lig. 188. après recevoir, ajoutez
ancuns en l'administration de la justice. Lig. 188. glisser de = glisser
denx de. Lig. 190. y furent = y ont été. Lig. 191. suppr. de conseillers
et de procureur général. Lig, 192. soit le seul rempli la plupart de
4 3ri 1)K MONIEK HE CHATEAUDEUir.
cette maudite race = soit rempli de cette ordure. Lig. 193. et que des
boDs = et les. Llg» 104. être à leur = soient soumis à leur. Lig, 196.
à aucune charge publique, parce que leurs = à leurs desseins. Leurs.
Lig. 197. et méchancetés = et autres méchancetés. Lig. 198. autorisés
bOus les règnes des Uoys = tolérés et favorisés sous le roy. Lig.^00.
grandes = bien grandes. Preniièremont. Lig,20l, loy = religion. Lig,
201. ils foot= ont. Lig. 202. cérémonies particulières, tntervtfrfir. Lig.
202. parmi eux = entre eux. Lig. 203. entrelien = entretènement.
Lig, 204. allé par niéganle chez un = entré par mescoute dans la
maison d'un. lig. 206. suppr. de quoi. Lig . 207. mais aussitôt = et
aussitôt. Lig. 207. artifices = artifices et corruptions. Lig. 207. aisé==
facile. Lig. 209. vains = unis. Lig. 210. de se venter = de s'avancer.
Lig. 210. ils se cotisent = tous se cotisent. Lig. 214. font tous une ca-
bale et si étroite liaison = ont leur cabale en si étroite liaison qu'ils
n'ont. Lig. 215. la conscience = la confiance. Lig. 218. suppr, mau-
vaise conscience. Lig. 219 suppr. la phrase. Ils ont cette maxime
'jusqu'à hors de leur rate. Lig. 222. Enfin ils n'oublient rien pour leur
établissement et pour parvenir à toutes leschai'ges = en sorte qu'avec
l'argent ils s'établiront eu toutes les charges qui viendront à vacquér.
Lig. 224. ce qu'ils revendent = puisqu'ils vendent. Lig. 226. se rem-
bourser = se reiiiplacer. Lig. 229. maison ou les greniers ne fussent
remplis que d'or = maison d'or. Lig. 231. ce qui se passe dans les villes
comme aussi dans la province = ce qui se fait en toute la Provence
Lig, 232. et même dans = jusque dans. Lig. 2,33. d'obliger = pour
obliger. Lig. 236. avec leurs parents et leurs alliés = et leurs parents
et alliances. Lig. 237. qu'on n'entend = qu'on n'ouït. Lig. 237. plaintes
contre les conseillers juifs du Parlement de Provence = plaintes et
évocations contre le ditParlement. Lig 2^^. suppr. e^é^t^is ce qui oblige
jusqu'à outre les usures. Lig. 240. avant outre les usures, ajoutez :
ceux même qui sont magistrats. Lig, 242. métiers mécaniques et sor-
dides = métier sordide. Lig . 243. remjdacer depuis C'est qu'ayant le
prétexte jusqu'à {lig. 246) perdre la province, 2^^^^ qu'ayant la reli-
gion et la volonté du tout étrangères et l'alliance de la France et du
Christianisme, ils se rendent si forts qu'ils perdront la Provence Lig.
247. les y pousse = les possède. Lig. 248. : vendroient aussi faci-
lement leur liberté et fidélité pour se venger et se mettre = vendront
aisément leur fidélité et eux-mêmes pour se mettre. Z.*^. 249.de l'étran-
ger = des étrangers. Lig. 250. pendant les divers troubles delà Li*
gue = durant les derniers troubles. Lig. 251. suppr. bon et ny deson
parti. Lig. 251. se sont = s'est ans. Z?^'. 252. ajouter après Avignon^
lieu ancien de leur origine. Lig. 252. n'affectent rien tant = n'affec-
tionnent rien plus. Lig. 252 du pape = des papes. Lig. 256. suppr, la
plupart portent sur leur visage les pâles couleurs. Lig» 257, du grand
/ i
VARIANTES DU TEXTE DES REMONTRANCES 4â7
vendredi == de vendredi. Lig. 260. autorisés dans = autoriser à, Lig.
261. trop dangereuse =>» très dangereuse. Lig. 262. cette race judaïque
dans = ces gens-là à. Lig, 264. qu'ils s'établissent = de s'établir. Lig,
265 suppr, partout où ils habitent. Lig, 266. prévenir tous les abus
= pourvoir aux abus. Lig. 267. de cette apréhension = de tant d'op-
pressions. Zi^. 267. suppr, et très nécessaire Zi^. 268. province = Pro-
vence. Lig. 269. qui sont immenses ^ qui valent plus d'un million
d'or. Lig, 270. de leurs charges et offices = des charges publiques
qu'ils exercent. Lig. 270. 500.000 = 300.000. Lig. 272. charges places.
Lig. 272. suppr. et de probité. Lig. 273. plus de la moitié = plus de
deux cent mille écus. Lig. 274. de très humbles remontrances = des
remontrances et très humbles supplications. Lig. 275. Il faudroit en-
core •« en ce cas il faudrait. Lig. 276. établi à prendre = établies et
prendre. Lig. 276. tant par tant = tant pour cent Lig. 279. il est cer-
tain qu'il en tireroit = il en pourroit tirer. Lig. 280. des galères et
garnisons de la Provence de ses galères et garnisons Lig. 2S2. parentés
= parentelles et alliances. Lig. 282. dangereuses en = les plus dange-
reuses à. Lig. 283. suppr pour ainsi dire qu'une Ame et. Lig. 287. re-
ligion prétendue réformée = bonne religion.
Les deux derniers paragraphes du texte de la Revue historique sont
remplacés dans notre texte par :
Rôle de ceux qui sont officiers au Parlement.
M« Guillaume Aymar, conseiller.
M® Joseph Aymar son fils, Président.
M® Jean Augustin Thomassin son neveu, conseiller.
M* Jean Estienne Thomassin, avocat général, son frère, neveu dudit
Aymar.
M® Honoré Agut, conseiller, cousin desdits Thomassins.
M. Joseph Mazargues, conseiller, cousin desdits Aymars et Tho-
massins.
M® Honoré Saint-Marc, conseiller, aussi leur cousin.
M" Honoré Rabasse, procureur général, neveu desdits Aymars et
cousin-germain desdits Thomassins.
M* Paul Chailan, conseiller, son beau frère.
Outre ce, il y a M* Thoron, conseiller, et plusieurs autres leurs
proches parents. S'il est nécessaire, le rolle cy-dessus [sera] transcrit
et tout le contenu au présent mémoire. Par extrait des registres de
la Cour des Comptes et autres pièces authentiques.
L.-G. PÉLISSIEB.
VARIÉTÉS
CANAPÉ
Littré a donné, après les Bénédictins, la véritable étymologie du
mot canapé. Il le fait dériver du bas -latin canapeum, par corruption
du grec xojvcaTrsIov mais il ne dit pas comment xcavoirelov est devenu
canapeum .
Voici l'explication que nous proposons : la transcription latine régu-
lière de xwvwireîoy est conopeum que donnent les écrivains classiques.
Isidore de Séville n'a pas reconnu l'identité de ces deux mots, et il a
fait dériver conopeum. du nom de la ville égyptienne de Canope.
« Conopeunï : Retes qua culices excluduntur in niodum tentorii quo
magis Alexandrini utuntiir, quia ibi ex Nilo culices copiosi nascun-
tur ; unde et conopeum dicitur ; nam Canopea iEgyptus est*. » Où
sait en quelle estime l'ouvrage d'Isidore a été tenu au moyen âge ;
son étymologie a fait fortune, et, sous son influence, conopeum est
devenu successivement canopeum. canapeum. Le mot français canapé^
qui n'est évidemment pas de fonnation populaire, reproduit simple-
ment cette dernière forme.
Le lexicographe Ugutio de Pise 2, qui a beaucoup emprunté a
Isidore, écrit bien conopeum ^ ; mais déjà Papias, antérieur à Ugutio,
paraît avoir écrit canopum *. La Bibliothèque Nationale possède deux
copies manuscrites d'un vocabulaire provençal-latin du xiv® siècle, qui
doit beaucoup à Isidore de Séville et à Ugutio. La meilleure de ces
copies, qui paraît remonter à la Un du xve siècle, écrit s. v. Cortina:
canopeum^. Un glossaire latin, cité par D. Carpentier, confirme
même directement notre hypothèse: « Canopeum dicitur reticulum
subtile circa Icctuni poaituui ad defensionem muscarum, et dicitur a
Canopo civitate *» . » L'italien C<rmo;;g remonte bien évidemment à cette
forme. M. Brachot croit que le mot français a été emprunté àPitalien
au cours du xvi» siècle. Nous sommes plus disposé à croire que le
< Etymologice, XIX, v. 4.
« Mort en 1212.
3 Cf. Du Gange, S. v. zinzaia.
* Du Gange, s. v. Canopeum.
8 Bibl. Nal., fonds lalin, ms. 7685.
« B'bl. Nat., fonds latin, ms. 4120, cité par Du Gange, s. v, Canopeum.
i
BIBLIOGRAPHIE 4 39
français a fait, comme l'italien, un emprunt direct au bas-latin. Sous
l'influence de l'a initial, canopeum était devenu canapeum. Nous trou-
vons cette dernière forme dans la plus ancienne des copies du voca-
bulaire provençal-latin dont nous venons de parler *. Il est à noter que
ce ms. du xv® siècle est dû à un copiste fort ignorant qui s'est très
vraisemblablement conformé dans sa graphie du mot latin à la pro-
nonciation courante autour de lui .
Rabelais, cité par M. Brachet, a employé la forme Conope ^, qui
n'est certainement pas empruntée à l'italien. Nous pensons que Rabe-
lais se sera rendu compte de la véritable origine du mot et aura voulu
se rapprocher de la forme grecque .
Il nous paraît inutile d'insister sur le sens de ce mot, qui, après
avoir désigné un moustiquaire et le lit que le moustiquaire protège, ne
sert plus aujourd'hui qu'à désigner un siège.
Alphonse Blanc.
BIBLIOGRAPHIE
Le latin de Grégoire de Tours, par Max Bonnkt, professeur de littérature
latine à la Faculté des lettres de Montpellier. Paris, Hachette, l v. 752
pages, avec une table des passages commentés et une table alphabétique.
Quelle place occupe Grégoire de Tours dans Thistoire de la littéra-
ture latine? Que faut-il penser du latin parlé en Gaule au VIesiècle?
Est-ce une nouvelle langue qui se crée ou bien est-ce l'ancienne langue
qui vit encore, plus ou moins transformée ? Quelles sont les modifica-
tions subies et où ont-elles été le plus fortes? Est-ce dans le vocabu-
laire, dans la flexion ou dans la syntaxe ? Comment prononçait-on
alors le latin ? Quels sont les caractères distinctifs du style de Gré-
goire ? Telles sont les principales questions auxquelles l'auteur de cet
ouvrage se propose de répondre directement. Mais, comme il nous en
avertit lui-même, son étude à un intérêt plus général. Elle doit con-
tribuer à faire la lumière «sur ce qu'on appelle la décadence du latin
* Bibl. Nat., fonds latin, ms. 7657. Le ras. 7685 permet de corriger la cita-
tion incompréhensible empruntée par Dom Carpentier au ras 7657, s. v.
Canopeum, Il faut lire : Pro culkibus et muscis veticulata cortina,
^ Pantagruel j 111, 18.
440 HIBLIOGRAPHIK
et la naissauce des idiomes nouveaux, sur la part qu'ont eue «laus ces
événements chaque siècle, chaque pays, peut-être môme chaque in-
dividu.» Elle complète de la manière la plus utile la série des travaux
de Hagen, de lîœnsch sur la Vulgate, de KofFmane sur l'histoire du
latin de l'Eglise, de II. Gœlzer sur la latinité de S. Jérôme et sur
Sulpice Sévère, de Mohr sur Sidoine Apollinaire, de H. d'Arbois de
Jubain ville sur la déclinaison latine en Gaule à l'époque mérovin-
gienne, etc... Ce ne serait pas déjà un mince mérite d'avoir fourni à
d'autres des matériaux préparés de preinière main, d'avoir soumis le
texte de Grégoire à une critique minutieuse, d'avoir collationné plu-
sieurs manuscrits de ses ouvrages, et de s'être astreint à vérifier scru-
puleusement les nombreux textes cités. Cette part, qui pourrait rai-
sonnablement satisfaire une honnête ambition, M. Bonnet a raison de
croire qu'elle n'est pas la seule qui lui revienne. Il a fait plus. Non
seulement il a établi une base solide en triant avec autant de soin
que de compétence les documents, non seulement il a donné un bel
exemple de ce qu'on peut appeler la probité scientifique, mais grâce
à lui plus d'une erreur a été rectifiée, plus d'une idée fausse redressée ;
il a corrigé et expliqué bien des passages de Grégoire, en philologue
rompu àlacritique verbale et à l'interprétation des textes.
Une idée généralement reçue est qu'il y a en latin deux langues dis-
tinctes, le latin littéraire et le latin vulgaire, celui-ci ayant son vo-
cabulaire, ses riexions, sa syntaxe, sa prononciation, pouvant avoir
par conséquent sa grammaire comme tout autre idiome. De Diez cette
idée a passé en s'exagérant dans l'ouvrage de Fuchs sur les langues
romanes, plus récemment dans celui de W. ]^Ieyer sur le même su-
jet : elle se retrouve un peu partout, en France, dans la « Gram-
maire française « de F. Brunot et dans « les I^arlers de France » de
M. Gaston Paris. Déjà un savant d'une haute compétence E. Wôlfflin,
en distinguant six ou sept degrés dans le latin vulgaire, avait mis
plus de précision dans la conception de ce latin et tempéré la
théorie régnante. Mais c'est M. Bonnet qui a su le mieux se dégager
de l'opinion courante et qui, en soumettant la question à un nouvel
examen, est arrivé à conclure qu'il pouvait bien en être de ce latin
vulgaire, en tant qu'idiome, comme de la « langue indo-européenne»
reconstruite par Schleicher. L'un ne parait pas avoir plus de réalité
que l'autre. La vérité est qu'il pouvait y avoir pour le peuple une
certaine façon de s'exprinier, un langage, mais non une langue à
part, distincte de la langue latine proprement dite. On peut donc par*
1er de la langue du peuple mais non du latin du peuple. Le fond de
la langue était le même pour ceux qui se servaient de termes ou de
tours populaires, du «sermoplebeins», que pour ceux qui,plu8 instruits,
d'un rang plus élevé, parlaient un latin pur, le «sermo urbanus». Ce
BIBLIOGRAPHIE 4 41
n'est pas un prétendu latin populaire qu'il faut opposer à ce qu'on
pourrait appeler le bon latin, le latin littéraire : ce qui est vrai, c'est
que le latin, un au fond, comportait une infinité de variétés, suivant
qu'il était parlé par telle catégorie de gens ou par telle autre, et
par la même catégorie, dans telle circonstance ou dans telle autre.
Comme M. Schuchardt l'avait déjà finement fait remarquer dans son
ouvrage sur le vocalisme du latin vulgaire: «le même homme se ser-
vait d'un latin différent, quand il se consultait avec son esclave sur
les emplettes à faire pour un repas, ou quand il envoyait un billet à
un ami pour le prier de venir à sa villa, ou quand il composait une
ode pour célébrer un prince ou une maîtresse.» Il y avait donc des nu-
ances infiniment variées, adaptées au caractère des personnes, aux
besoins du moment, à la langue écrite et à la langue parlée : diffé-
rences dans la manière de parler la même langue, voila ce qui répond
aux faits et à la nature des choses, mais non pas dualité de langues
vraiment distinctes. Le latin, importé dans les provinces à la suite de
la conquête, n'était pas, comme on le lit partout, ce prétendu latin
vulgaire d'où serait venu, ici le français, là l'espagnol, ailleurs l'ita-
lien ; c'était le latin tout court, c'est-à-dire le latin de tout le monde,
plus ou moins altéré dans le vocabulaire ou la prononciation par des
influences aussi diverses que l'origine, le rang, l'éducation, la position
des immigrants ; car c'est encore une légende que celle du légionnaire
apportant le latin en Gaule, en Espagne, et l'enseignant aux provin-
ciaux. Outre les gens du négoce, chaque nouvelle annexion amenait
dans les provinces nombre de fonctionnaires publics, dont quelques-
uns appartenaient aux plus hautes classes de la société, étaient ins-
truits et gens du monde non moins qu'élevés en dignité, et de-
vaient par conséquent parler le sermo eruditus^ perpolitus^ urhanus. De
même, en Gaule, à côté des marchands, des artisans, des paysans, il
y avait ceux qui, par leur situation, leur instruction, leur éducation,
appartenaient à un milieu plus élevé : ceux-ci échangeaient entre eux
des idées que la généralité des Gaulois n'avait que rarement ou plutôt
même jamais l'occasion d'exprimer, comme eux-mêmes n'étaient pas
amenés ordinairement à se servir des termes et des tournures propres
aux illettrés ; si bien qu'il faut se représenter chez les Gaulois non
moins que chez les Romains de nombreuses différences dans la ma-
nière de parler le latin, les besoins et les moyens de chacun variant
snivAnt son rang et son instruction.
Ces réserves faites sur la distinction qu'on établit ordinairement en-
tre le latin littéraire et le latin vulgaire, M Bonnet n'admet pas que
chez les Romains, les Gallo -Romains, pas plus que chez nous, il y ait
eu un abîme entre la langue parlée et la langue écrite, comme on l'a
prétendu, l'une restant immobile, l'autre suivant une marche indépen -
30
M 2 lîinUOGllAPHlF:
(lanto, l'îiiic arn'téo dans son (lévoloppoment, raiitro continuant «le
\ ivre. La langue littéraire elle aussi change : elle subit, comme un or-
ganisme vivant, une évolution, pour la plus grande partie, incons-
ciente. Elle exerce aussi, et c'est ce qu'il faut bien voir, son influence
sur la langue parlée. Les Gallo- Romains, comme les Romains, comme
nous autres Français, cherchaient, soit en parlant, soit en écrivant, à
reproduire, comme ils pouvaient, la langue littéraire classique. Lebon
latin était leur modèle, leur idéal, comme pour nous le français de
nos classiques du XVII« et du XYIII» siècle. C'est encore l'ancienne
langue qu'on j)arlc au VI* siècle ou qu'on écrit, quelque altérée qu'elle
soit. Ce n'est pas une langue nouvelle qu'on crée.
Ce qui s'écarte le plus du modèle suivi, c'est la syntaxe avec le vo-
cabulaire. « Sur la plupart des points c'est un état de transition entre
la règle ancienne ébranlée et la nouvelle non encore établie ». « On
pèche par ignorance; c'est l'ancienne langue qu'on parle incorrecte-
ment. » M. Bonnet, en effet, ne partage pas, avec juste raison, l'opi-
nion de ceux qui ne veulent pas qu'on parle de fautes ni d'incorrections.
S'il est vrai que c'est l'usage qui a fait la grammaire et non la gram-
maire qui a établi l'usage, la grammaire une fois faite n'en a pas
moins eu force de loi : elle est devenue un code, accepté et reconnu
par tous, transgressé seulement par ceux qui l'ignorent ou le connais-
sent mal. C'est le cas de Grégoire comme de ses contemporains.
«Le vocabulaire, extrêmement riche, doit son abondance, après la
conservation de l'immense majorité des mots anciens, non seulement
ù l'emploi qu'il fait de termes empruntés àtoutesles variétés du latin,
au giec, et parfois aux langues barbares, mais surtout à l'adoption d'ac-
ceptions nouvelles très diverses et souvent très inattendues.» Dans le
second, livre qui traite du vocabulaire, les Romanistes verront avec
intérêt et proiit comment dans ce latin de Grégoire certains mots pré-
sentent déjà les significations et l'emploi qu'on retrouve dans les mots
français dérivés : ainsi merces (merci) hostis (ost) gentes (gens) direc-
tusdirectum (droit) ingenium (engin) crepare (crever) coUocare (cou-
cher) necare (noyer) computare (compter, avoirl'iutention, le projet de)
fortis, grandis, diversus, qui ont déjà le môme sens qu'en français.
« La prononciation du latin n'était plus conforme à l'écriture.»
«Nombre de consonnes sont affaiblies sinon supprimées ; l'assibilation
de ci et ti est un fait accompli ; etc. »
«La flexion, en somme, est conservée. Cependant des brèches y sont
battues, et par l'altération phonétique, qui naturellement s'étend a
tout, et par la fausse analogie, qui ne se manifeste que très capricieu-
sement : un même mot suivra dix fois l'ancienne flexion, et la onzié-
•
me, séduitpar une ressemblance quelconque, il s'égarera dans une voie
nouvelle. La dérivation et la composition sont relativement peupro-
BIBLIOGRAPHIE 44 3
ductivcs.» Quant au phénomène nommé la recomposition (obtenere,
resedere, tradedit) M. Bonnet a corrigé une erreur de M. E. Seelmann,
dont nous avons déjà analysé dans cette revue l'ouvrage sur la pronon-
ciation du latin*. Ce n'est pas au peuple qu'il faut attribuer la recom-
position, c'est aux savants ou plutôt aux demi-savants. Elle n'est pas
née spontanément : elle est l'œuvre des lettrés qui connaissent les mots
par les livres aussi bien que par la conversation, etqui, d'une manière
réfléchie, voulue, ont fait revivre les divers éléments dont le mot était
étymologiquement formé: obaudire au lieu de obœdire. Ces mots re-
composés ont passé des livres dans la langue vivante, où leur exis-
tence est prouvée, entre autres, par le témoignage des langues ro-
manes.
. Quant au style de Grégoire, les tendances auxquelles il cède, les
procédés dont il se sert «sont ceux d'un autodidacte qui voudrait faire
comme les écrivains du métier, mais qui sent son impuissance à les
imiter : tour à tour il s'y applique et il y renonce. Il en résulte un
étrange contraste entre des formes oratoires usées et une fraîche et
rude originalité.» L'écueil, quand on traite du style d'un écrivain, est
de tomber dans le vague des épithètes, faute d 'avoir suffisamment
analysé l'impression d'ensemble qu'on a ressentie. Aussi bien le savoir
n'y suffit pas. Il faut aussi une délicatesse de goût sensible aux moin-
dres nuances comme aux traits plus fortement marqués. Lorsque la
connaissance exacte des faits se joint à un sentiment fin de tout ce
qui fait le caractère distinctif d'un style, on peut écrire cinquante pa-
ges sur un pareil sujet sans vaine rhétorique, sansj« ornare paginam »
ni «dilatare, extendere», comme s'exprime Grégoire pour dire «déve-
lopper une matière.» N'est-ce pas un chapitre vraiment littéraire,
dans le meilleur sens du mot, que le cinquième du dernier livre, sur
le mélange des couleurs dans le style de Grégoire? Nuances poétiques,
vulgarismes, Grégoire, dans son inexpérience, mêle tout, sans savoir
fondre les tons, se préoccupant avant tout d'ennoblir son style. A cet
effet il emprunte beaucoup à la Bible. « Ces expressions bibliques con-
tribuent à rendre son style pittoresque et à lui donner cette teinte de
naïveté grave et légèrement exotique que les peuples dotés d'une
traduction nationale de la Bible, les Anglais et les Allemands, par
exemple, connaissent bien dans leurs langues aussi. ]i>
On pourra peut-être dans l'étude, pourtant si complète, de M. Bon-
net sur le latin de Grégoire de Tours relever quelques omissions, con-
seiller quelques retouches. Mais ces imperfections, de quelque nature
qu'elles soient, une fois signalées, ou plutôt avant de les signaler, il
faudra toujours, pour être juste, insister sur le mérite rare qui les
i Rev. d. l. vom., t. XXXI, p. 00.
44 4 PERIOniQUlilS
excuse largement et qui place l'ouvrage au premier rang. On devra
louer la méthode de M. Bonnet qui a soin de nous dire dès le début
ce qu'il veut faire, les principes de critique qu'il compte appliquer à
sou étude, et de résumer à la fin les résultats auxquels il est arrivé.
On ne perdra pas de vue l'importance de ces résultats pour This-
toirc de la langue et de la littérature latines, comme aussi pour la
solution du problème de la transforn.ation d'une langue en plusieurs
autres langues. On fera ressortir la difficulté de la tâche que s'était
imposée M. Bonnet cjui, philologue et latiniste, mais nullement dé-
paysé, dans le domaine de la lingustique ni dans celui des langues
romanes, était tout désigné pour la remplir. Ce qu'il ne faudra pas
moins faire ressortir (pie cette rare compétence, c'est la passion de
la vérité qui anime l'ouvrage tout entier ; ne reconnaître pour "vrai
que ce qu'on a puisé aux sources même de la vérité, penser par soi-
même, sans ignorer ce que les autres ont pensé, telle est la règle à
laquelle M. Bonnet se conforme strictement et constamment ; c'est
un devoir dont Taccomplissement lui fait accepter vaillamment les
fatigues et les déboires de la recherche personnelle. Cette rectitude
d'esprit, cette probité scientifique donnent une autorité singulière à
ses démonstrations, présentées avec cette logique qui s'impose. Les
faits qu'il étudie, bien que prodigieusement nombreux, sont si scru-
puleusement vérifiés, si bien classés, grâce à un rare sens grammati-
cal, qu'ils ne causent aucune gène au lecteur. Enfin, dans une revue
française, on ne saurait passer sous silence la forme qui est en tout
digne du fond : la précision fait le charme de cette langue où rien
n'est vague et qui est l'expression toujours fidèle d'une pensée tou-
jours nette a Le livre est bon et fait de main d'ouvrier. »
J. Bbbnous.
PÉRIODIQUES
Zeitschrift fdu romanisciie PiiiLOLoaiE. XIV, 1-2. — p. 1.
J. Wieprecht. Les Homélies latines d'Aymon d'JIaîherstadt, source de
la iraductio7i d'Aymoji en ancien lorrain. Cette traduction, faite sarun
excellent manuscrit du texte latin, va être publiée par M. SucLîer.—
P. 21. E. Gessner. Développement de l'espagnol dans la période hypo-
thétique. — P. G6. Ch. Bonnier. Étude cri.ique des chartes de Douai
de 1203 à 1275. Deuxième partie : Caracténstique des chartes de Douai.
Nous persistons à croire, après la lecture de la seconde partie du tra-
■(
PERIODIQUES 445
vail de M. Bonnier, que l'auteur abonde par trop dans pon sens, et
qu'il s'est laissé entraîner trop loin par le désir de combattre les opi-
nions reçues. Cf. Romania, XIX, 617. — P. 89. G. Schiavo. Croyances
et Superstitions d'après l'ancienne poésie française. Complément du tra-
vail analogue de Schrœder à l'aide des fabliaux et des contes dévots,
que ce dernier n'avait pas utilisés. Ce travail, qui sera continué, est
loin d'épuiser la question: il n'est d'ailleurs pas tout à fait au courant.
— P. 128. V. Crescini. Azalais d'Altier, L'auteur montre que le
salut Canz salulz et tantas amors, qu'il publie d'apivs le Chansonnier V
de Bartsch, fut adressé par Azalaïs à Clara d'Anduze, qu'elle ne con-
naissait pas, pour l 'engager à se montrer clémente envers son amant,
Uc de Saint-Cire. — P. 133. E. Goua. Phonétique du dialecte de
Plaisance.
MÉLANGES, i. Histoire LITTÉRAIRE. 1. P. 159. G. Baist. Le Pont
des âmes. — 2. P. 160. C. Appel. Guillem Ademar, Grimoart Gaus-
mar et Guillem Gasmar. Édition diplomatique des trois textes de la
fameuse satire de Pierre d'Auvergne contre les troubadours de son
temps, destinée à réfuter une opinion exprimée par Zenker. Cf. Zeits-
chrift, XIII, 294 sqq. et Eomania, XIX, 61S. — 3. P. 169. E.
Kœppel. Bice Portinari est-elle la Beatrix de Dante ? — II. Textes.
G. Binz. L'Évangile aux femmes. Nouvelle édition de ce texte pro-
téiforme d'après un manuscrit du xv*^ siècle appartenant à la biblio-
thèque universitaire de Bâle (14 couplets). Cf. Mail, Zeiischrift, I,
ê
377 sqq. et VIII, 449 sqq. , et L. Constans, Marie de Compiègne
d'après VÉvangile aux femmes (Paris, Vieweg, 1876), et Zeitschrift,
VIII, 24 sqq. Le ms. de Bâle est très proche parent de notre ms. D
(Bibl. munie, de Dijon, 298); il a le même nombre de couplets, qui
se suivent le plus souvent [dans le même ordre. Le couplet 3 de D
manque; il est remplacé par le couplet 18 de i^, qui occupe ici le
dixième rang. Ce couplet commun à i^ et au manuscrit de Bâle (qu'il
conviendrait d'appeler G) fait difficulté, aussi bieu pour le classement
de M. Mail que pour le nôtre. Il faut admettre une contamination, ou
une transcription de ce couplet d'après une tradition orale : cela n'a
rien qui doive surprendre pour un texte qui a eu une grande popula-
rité, comme l'atteste le grand nombre de couplets qui se sont succes-
sivement ajoutés aux 11 ou 12 couplets primitifs.— III. Critique des
TEXTES. P. 175. 11. Suchier. Sur Aucassin. M. S. montre que dans
Aucassin, 14, 20, il faut lire : le tateron de sa mamèle, au lieu de le
cateron. Il faut sans doute aller plus loin et lire avec M. G. Paris
(Voy. Romania, XIX, 618): le teteron. — IV. Histoire des mots.
P. 176. H. Schuchardt. 1. Espagnol dengue (maladie). — 2. Mimus,
moraus. — 3. Malandria, fr. malandre. — 4. Fr. gilet = esp. gileco,
turc yelekf grec ye>£x() etc. — 5. Esp.-port. tomar se rattacherait
4 4^> PEaiODlQUKS
comme le fr. tomber, l'anc. fr. tumer,etc. au r^idictA tomb-(tuln')'
tom-(tu7n), qui a donué dans toutes les langues romanes des verbes
de la première conjugaison. — 6. Fr. //{aurais, une. fr. mauve. Le
premier viendrait de malifutius, que donne une inscription ; le second,
de *7iiaUfatus. Il y a «Ilï» diflicultés d'ordre phonétique (voy. Roma-
nia, XIX, GIO). — P. 183. G. Baist. Esp. manera = lat. mannus,
et non goth. manna, comme le veut W. Meyer fvoy. ZeitsehrifU
XI, 25fi;.
Comptes rendus. P. 185 A. Thomas, Poénies complètes de Bertran
de Born ( Andresen ; comparaison détaillée avec l'édition de M. Stim-
ming). — P. 118. M. du Puitspelu, Dictionnaire étymologique du
patoia lyonnais (A. Horning; ; nombreuses corrections). — P. 223.
ï^gailez y Janguas, Glossario etimolôgico de las palabras espaAolas
(castellanos, etc.) de oHgen oriental Baist). — P. 226. A. Eressner,
Bihliothek npanhcher Schriftsteller (Lang). — P. 218. Jarnik, Daine
si Strigàturi din Ardeal ; Marian, Descântece poporane romane (Rn-
<lo\v). — P. 235. M. SvAi\\'nr/.îeh\jPoe8iilepopularecolectiaAlecsandri
sau cuni trebue culese si publicate canticele populare (Rudow ; Vauteur
s'est montré injuste pour le grand poète national de la Roumanie). —
P. 242. A. Xenepol, Storla Romlnilor din Dacia Traiana (Rndosf),
P. 244. J. Bédior, le Lai de l'Ombre (Suchier; cf. Romania, XIX,
619). — P. 240. Giorunle storico délia letteratura italiana, XIV, 1-2,
3; XV, 1-2 (Gaspary). — P. 255. // Propugnatore, II, 1-2, 3, 4
(GaHpary). — P. 260. Romania, XV III, 4; XIX, 1 (Meyer-Lûbke et
Tobler). — P. 263.Archivio glottologico italiano, X, 3 (Meyer-Lnbke).
— P. 266. Livres nouveaux.
XIV, 3-4. — P. 7. G. Schiavo. Croyances et superstitions dans Vtn-
ctenne poésie française (suite). III. Les Saints, IV. Les Anges, Ily
a dans les textes de cette seconde partie un assez grand nombre de
fautes, qui ne sont peut-être pas toutes des fautes d'impression»'
j). 279, sauz pour sanz, grenous pour grenons ; p. 280, BertdsBM»
(avec le vers faux) j)our Bertelemieu, ou plutôt Berte{le)mieu; p,^.
Une poz pour an poz ; ose pour os ou os{e) / 295, secorciez pour eww-
ciez, etc. — P. 298. Ch. Bonnier. Étude critique des chartes de DcMf»
de 1203 à 1275 (suite et fin); cf. Zeitschn/t, XIII, 431 et XIV, 66.
M. B. donne ici le texte des chartes qu'il avait étudiées dans Ttf"
ticle précédent. — P. 344. G. Osterhage. Études sur Us traâi^f^
héroïques de la France . A rapprocher des articles publiés dans »
Zeitschrift, XI, 1, 185, 327, et XII, 365, sur les rapports des légendes
carolingiennes avec la mythologie germanique. L'auteur persiste dans
ses conclusions précédentes qu'il formule ainsi: « L'Épopée carolin-
gienne a presque partout un, noyau historique: le nom du héros, 1»
lutte et son issue sont des faits réels, mais la tradition populaire y a
/
PERIODIQUES 447
mis un rayon divin. Sou origine divine entraîne pour ses enfants une
mère divine ; ses gueiTes rapprochées sont dirigées contre des puis-
sances obscures, ses guerres lointaines ressemblent aux voyages des
dieux.»— P. 363. D. Behrens. Éfi/mologie (suite) : 18. fr. niazette :
même radical que dans mésange (bien douteux). — 19. berrichon sener,
cener, « châtrer » = sanare. Cf. languedocien «a7ià^ rouergat sonà. —
20. ancien fr. maufé. — 21. fr. accon = anc. fr. aque, hollandais
âk. — 22. fr. flétrir, de lanc. îr.Jlestre = Jistula, —23. nonn.^6/,
« fosse, canal. » — 24. esp.-port. tepe, — 25. port, gomo, — 26. fr.
mat = madidus (on attendrait made (cf. tiède = tepidus); il faudrait
alors admettre une forme populaire par dissimilation matidus, identi-
que knitidus, qui a donné 7ief), — 27. ital. calafatare, fr. calfeutrer.
Un trait à signaler dans cette série d'étymologies, c'est Tusage qui est
fait du dictionnaire de Mistral, non seulement comme source de rap-
prochements, mais encore comme base étymologique. — P. 371. C.
Salvioni. Sur la source de la séquence en langue vulgaire de sainte
Eulalie. L*auteur croit que la plus grande partie des traits du mar-
tyre de sainte Agnès, très vénérée dans le nord de la France ont été
attribués à sainte Eulalie, plus connue dans le Midi, parce qu'elle
était de Barcelone. Cette hypothèse semble un peu hasardée ;durestej
l'auteur lui-même dans une note additionnelle (586), se demande si
le triple martyre qu'il a constaté dans la vie de sainte Agnès et dans
celle de sainte Lucie n'était pas en France un lieu commun pour les
vierges martyres . — P. 376 . A. Horning, Histoire des sons dans les
dialectes français de VEst, Critique pénétrante, basée sur une con-
naissance approfondie des patois, de plusieurs opinions émises sur la
matière par M. W. Meyer-Liibke, dans sa remarquable Grammaire des
langues romanes, en cours de publication. — P. 397. L. Gauchat. Le
Patois de Dompierre [Buyart). Dans ce mémoire, écrit en français,
Pauteur, qui semble bien au courant de la science, étudie minutieuse-
ment Pun des patois les plus intéressants de la Suisse romande. Sera
continué. — P. 467. 0. Schultz. Le Pseudo-Turpin provençal. Le texte,
imprimé diplomatiquement, d'après le manuscrit unique de Londres
(Musée britannique, Addit. 17920) estprécédé de courtes et judicieuses
remarques. Cette traduction àxn Pseudo-Turpin latin a certainement,
comme le croit l'éditeur, été écrite en Rouergue : P. 472, bas. San
Bauszilii ne représente pas 5. Basilius, mais S. Baudilïus. Cf. au-
jourd'hui encore Sen Bôuzèli (Saint-Beauzély), chef -lieu de canton du
département de l'Aveyron, S.-Beauzile (Ardèche), S.-Beauzire, etc.
(Haute-Loire, Puy-de-Dôme) et saint Baudile, honoré dans le diocèse
de Nimes. — P. 521. A. Schmidt. Sur quelques manuscrits en ancien
français de la Bibliothèque grand-ducale de Darmstadt. Il s'agit: 1°
d'un ms. contenant les trois romans en prose intitulés : Le grand saint
4 4.<» ERRATA
Graal, Merlin et U Roman d'Artus; 2" de fragments assez consicié-
rables et offrant îles vîiriaritos irnportuiites de Gui de Bourgogne, que
l'auteur publie; 3o d'un fragment ù'Htrris de Metz qui contient
112 vers.
Comptes rkniius P. r>40. Jofio Ribriro, Grammatica portugueza
f3* anno) (Lani;). — P. 542. W. Stortk, Luin' de Camoens Leben (von
Reinbardytrittu»r . — P. 543. Ed. Sc-liwan, Grammatik des Altfran"
zôsischen, Laut und Formnilehre (F. Neuniunn; compte rendu déme-
surément lon^, où presque chaque paragraphe de cette importante
grammaire donne lieu à des observations pour la plupart judicieuses
et utiles). — P. 586. Post-scriptum à l'article de C. Salvioni.
Léopold CONSTANS.
Errata du n" de janvier- février-mars 1890
P. 38, 1. 34-35, " senhorscossols ». Lis. senhors cassais.
• P. 41,1. 3, « vara >k Lis. hara,
P. 49, 1. 21, «en sa». Lis. ensa.
P. 54, 1. 0, « en- ». Lis. en.
P. 56, 1. 23, « gencnilmencontra ». Lis generahnen contra,
P. 65, 1. 10, « fereslol ». Lis. feres la.
P. 66, 1. 28, « forons ». Lis. foron,
P. 78, 1. 21, «ma». Lis. »><« (= miega),
P. 70, 1. 21, « cl tes an auzan cossol tes fabres ». Supprimez le
second tes et lisez el tes an auzan cossol fabres.
P. 80, 1. 20, «foras gitat. K que els.. . » Lis. foras gitat, e que
els
P. 80, 1. 6, « le ». Lis. lo.
P. 100, 1. 1. L'an miii e xv . Lis. Va» miiïi« e xv
Le Gérant responsable : E. Hamkltn.
i
LA LEGENDE DE BOILEAU
Je me plais à relire Boileau, pourquoi craindre de Tavouer?
Comme critique je Taime beaucoup, comme poète, je l'estime
encore plus, car dans les parties où il excelle il se place au
rang des meilleurs. Ses flatteurs, au XVII® siècle, disaient
qu'il avait donné autant de chefs-d'œuvre que d'ouvrages * ;
il faut bien rabattre de cet éloge emphatique : mais toutes
ses œuvres, ou du moins presque toutes, renfei'ment des
morceaux exquis, modèles durables de notre langue, expres-
sion vivante et pittoresque de notre humeur et de notre es-
prit. Son flair est d'une sensibilité surprenante ; un solitaire
d'Egypte, reconnaissait, dit la légende, un hérétique à la
seule odeur ; lui sent, pour ainsi dire, dès qu'ils l'approchent,
les auteurs médiocres, les plats rimeurs, les écrivains affectés.
D'autre part,, son Art poétique, malgré les lacunes, les er-
reurs et les injustices qu'on peut y signaler, est une œuvre
magistrale, où fourmillent des vers faits de main d'ouvrier,
où les principes essentiels du bon sens, du goût et de la raison
se trouvent formulés avec un relief original et inoubliable.
Boileau figure donc, à mes jeux, dans un rang très hono-
rable à côté de ses grands contemporains, et, comme il le dit
lui-même, a droit «de se mettre de la partie ^ » : seulement,
s'il ace droit, il en use à l'excès, jusqu'à l'outrecuidance ; il
se prt^sente à la postérité comme ayant seul endoctriné son
siècle, dirigé, sinon formé, les écrivains de génie qui en font
la gloire. A l'entendre, ils lui doivent tous quelque chose de
leur mérite et de leur succès; lui ne doit rien à personne,
mais est le créancier de tout le monde. Resté le dernier
* Mercure gâtant, Dec. 16"^, p. 224.
' Ce grand homme (Molière) l'emporte beaucoup sur Corneille, sur Racine
et sur moi, car, ajoutait- il en riant, il faut bien que je nae mello de la partie.
Anecdotes iittéraires, nouvelle édit. Paris, 1752, t. ii, p. 46 et 47.
T03IE IV DE LA QUATRIÈME SÉRIE.— Octobrc-Novembre-Décenibre 1890. 31
4^. L\ I.h'iEM.'E I>E i;0:LEAU
■'•^2 b-^î'-ï es.'-riré •.':: vîit i..iî'S!i'é le iviTLe îe Lou:> XIV. ix a
f'r'd:. ]: .-•:•:: roi»:; r !.;:>,- inesurr?. Soi: •'. ;";'. ooa;:i*u:ii:ue -.lirecte-
TLf::.*. avrr; i»; l'ùblic, > it i.:i"ii i'f îirreiîei.ne ou corresponde
avoo *'--•: f.i:i.ii:ei'«, Morieiieiiuv, livo<se\ie, Marais. J.-B. Rous-
.s*-aîj. .e* liis ci»-' Raci:i»?. il tr^n-i n:iturel!eme:.t a ramener à lui,
coUàiùK- ix un Cintre, '.:< ►jvt'iieniehts litrt'Taiî'es de son temps.
La joie 'ju'ii éprou. uii ii ro*. ivre ainsi, parle souvenir.au
rfji.ieu 'Jun»; ^'ioii-u<'-' «Ji/Oiii-^. ijtait «ans doute très légi-
Tif/i", et persoriM»: ue iui ropio.hera d'avoir répété, en par-
Ihii» de « '.e siccie fortuné », les nïOT< d'Enée : a El moi aussi
j'y eu? lin»; jrran i»? purt». tf (quorum pars magna fui. Mais
a^\arjT a jn^^er <e< amis et iui-njênje il a. défaut ordinaire aux
vieiiiard-i. un peu mis dan^' l'omlne et diminué les autres,
tandis qu'il se donnait une importance hors de proportion
avec i'exîi';te ré;diié. N'est-ce pas le cas de dire avec le pro-
verbe espa^rnol : Parfe yicolas , para si io mas .'Nicolas fait
les parts, il pr«jn i pour lui la plus grosse?
Le mal ne sei-air pas grand si ces prétentions séniles étaient
restées sans écho, si la postérité n'avait point aveuglément
accepté ces confidences avantageuses. Par malheur, elles
n'ont jamais été discutées sérieusement, et, depuis deux
siècles, amis et ennemis de Boileau l'ont cru sur parole. A
Tenvi, les critiques et les historiens de la littérature ont redit
et commenté sur tous les tons, en l'exagérant encore, cette
assertion placée en tcte d'une édition de VArt poétique:
« C'est à M. Despréaux principalement que la France est
redevable de cette justesse et de cette solidité qui se font
remarquer dans les ouvrages de nos bons écrivains *. n
Et comme si l'auteur de l'ArZ/Jo^/egMe représentait à lui seul
toute Técole française, V. Hugo a écrit cette boutade cé-
lèbre :
« Les autres peuples disent Homère, Dante, Shakespeare,
nous disons Boileau ^. »
* Avertissenvmt de Vauteur des Remarques, sw l'Art poétique, CEuvres
de M. Boileau Despréaux avec des éclaircissements historiques donnez par
lui-même, A Genève, chez Fabri et Barillon, 1716, ia-4o, t. I, p. 2^«
L'éditeur et l'auteur des remarques est Cl. Brossette.
2 Orientales, préf. de 1829; édit. Haclielle, in-lS, 1882, p. 7.
i
LA LEGENDE DE BOILEAU 451
A son tour, et tout en opposant l'éloge à ces paroles dédai-
gneuses, Sainte-Beuve adoptait et résumait, dans quelques
lignes bien connues, la légende trop promptement accréditée
parmi les contemporains de Despréaux et trop facilement
admise par leurs descendants.
« Saluons et reconnaissons aujourd'hui la noble et forte
harmonie du grand siècle. Sans Boileau et sans Louis XIV...
que serait-il arrivé? Les plus grands talents eux-mêmes
auraient-ils rendu également tout ce qui forme désormais
leur plus solide héritage de gloire? Racine, je le crains, aurait
fait plus souvent des Bérénice. La Fontaine moins de fables
et plus de contes; Molière lui-même auraitdonné davantage
dans les Scapins et n'aurait peut-être pas atteint aux beau-
tés sévères du Misanthrope, En un mot, chacun de ces beaux
génies aurait abondé dans ses défauts. Boileau, c'est-à-dire
le bon sens du poète critique, autorisé et doublé de celui
d*un grand roi, les contint tous et les contraignit, par sa pré-
sence respectée fi leurs meilleures et à leurs plus grandes
œuvres *. »
Non pas que cette page brillante ne présente que de fausses
couleurs : mais Timagination du critique, sur des renseigne-
ments provenant presque tous de Boileau seul, exagère singu-
lièrement le rôle et l'action de ce judicieux écrivain. Avant
de croire Tun et l'autre aussi prépondérants, il fallait exami-
ner avec plus d'attention, non pas la bonne foi, mais l'autorité
du témoignage que le poète satirique se rend à lui-même. De
tous les classiques de son temps, il est certainement celui
dont le moi se met le plus en dehors. Jeune et presque à ses
débuts, il a dans son infaillibilité littéraire une confiance in-
trépide : dans son âge mûr et dans sa vieilles.'^e, il y croit
plus robustement encore. Pourquoi d'ailleurs en douterait-il?
N'entend-il pas répéter à satiété autour de lui, par les hom-
mes les plus sérieux qu'il est le grand justicier du Parnasse,
le souverain arbitre du Pinde^ ?
1 Sainte-Beuve, Causeries du lundi; Z^ édit t. VF, p. 512.
' Expressions deRollin, Ode in expugnationem Namnrcœ ex gallica Ode
Nicolai B*** D**' in latinam conversa. Paris Thierry, 1693, in-l6 de 27
pages.
-.5:^ I.A I.ttiENHK HE BOILEAL*
I/a'it^riir 'les chœurs (V£*fh^r ei r\'At/talie u"ava:i-i; j/as
app.au li rt .'olo su:- la i-rise «ie Nani'ir - e: trois des meiî'.eurs
po»":rf;s !a*iri.s 'ia Terii|.s n*avai:-rit-:!s j.as j r:> ce'.îe froiJe er
inintelIifL'eiite «joiitre:açoii, ji -u:- un véritable srécimen de la
poéjîie pindari'jue: no .s*iit;tient-i:s pas évertues, à Tenvi,
à la iraluire «ans la Iîiîjjiiu d'Horace? - Aussi que d'orgueil,
tantôt dyco'iV'jrt, tanr-V •ajhé <ous les apparences d'une dé-
fi an c e ni o i o s t e , '^l r. i ; < < o n /:'/> îlre n s e* v^rs :
J'allai fVnn pns hardi par iiioi-mvn.o gui-;»?.
Kt do rnm seul ir*';n\e en rn.iroliaii: se?.fîidé,
Stiidi'; ixariiîiteiir et 'ie Perse et d'H-jrace,
Assez pr;s 'le Régnier in'asseùir su:- le Parnasse,
Qrio d'orgueii encore dans ces réflexions mélancoliques :
Nos lieaiix joiir.s ^ont finis, n>s honneurs sont passés !
Dans jieu vous allez voir vos froides rêveries
Kx'iiter dri public les justes moqueries,
Kt hinv auteur, jadis à Régnier préféré,
A Piii':hêne, à Liniore, à Ferrin comparé •*.
La conscience décourageante et de moins en moins confuse
de TafFaiblissement qu'apportait « la vieillesse chenue m le ren
dait même de jour en jour plus soucieux et plus jaloux de sa
gloire d'autrefois. Il était désormais le vieillard morose et
chagrin qui,
Toujours plaint le présent et vante le passé.
Ne vivant plus que de ses souvenirs, à mesure qu'il avan-
çait en âge, il se grandissait avec son temps, à ses propre»
yeux.
En vérité, le siècle et le poète ont été grands ; mais ce der-
nier vivait dans une illusion certaine, lorsqu'il s'attribuait sur
ses compagnons de gloire une influence si prépondérante. Son
action est indéniable, elle fut môme prodigieuse et décisive,
^ Lettre de Racine à Boileau d'i 9 juin 1693. ~ CEuvres de Boileau, éd.
Gidel. Paris, Garnier frères, 187H, t. IV, p. 380.
« Roliin, Fraguier, Lenglet. Œuvres diverses du S'D**'. Paris, Thierry,
1694, in-12, t. II, 3« partie.
3 Épîire X, V. 99 à 102 ; — 32 à 36.
1
LA LEGENDE DE BOILEAU 4 53
mais elle s'exerça principalement sur ceux qui vinrent après
lui. Pédagogue en titre de la postérité, il le fut à peine de son
temps, et moins encore des écrivains avec lesquels il a vécu.
Là, comme ailleurs, la question de date et de succession
s'impose, pour empêcher les confusions. En Tétudiant avec
soin, on arrive à se convaincre de deux faits également cer-
tains. D'abord le goût de Boileau fut lent à se former, et se
développa sous des influences qu'il oublia et méconnut plus
tard, et dont il ne parlait plus dans sa vieillesse. En] second
lieu, si son autorité s'étendit avec sa renommée, cllejne fut
pas, à beaucoup près, aussi considérable sur ses amis qu'on
le croit communément.
En deux mots, il est fort redevable à ses grands contempo-
rains, et ceux-ci sont loin de lui devoir autant qu'il a bien
voulu le dire.
I. — DÉBUTS DE Boileau, 1658-1663
Boileau s'imagina de très bonne heure que le sens critique
avait chez lui devancé l'âge, que le goût, pour ainsi dire, était
inné dans son esprit. Déjà dans la satire IX, son chef-d'œuvre
en ce genre, il disait de la muse satirique:
C'est elle qui m'ouvraut le chemin qu'il faut suivre.
M'inspira dès quinze ans la haine d'un sot livre *.
A cet âge, encore si voisin de l'enfance, la haine existait
peut-être, le discernement n'était pas venu. La preuve n'en est-
elle pas dans cet aveu, échappé beaucoup plus tard: «Comme
j'étais fort jeune dans le tempsquo tous ces romans, tant ceux
de Mademoiselle de Scudérj, que ceux de la Calprenède et de
tous les autres faisoient le plus d'éclat, je les lus ainsi que les
lisait tout le monde, avec beaucoup d'admiration et je les
regardai comme des chefs-d'œuvre de notre langue. Mais
enfin mes années étant accrues, et la raison m'ayant ouvert
les jeux, je reconnus la puérilité de ces ouvrages*.»
Boileau se garde bien de dire ici que la raison n'a pas été
'Sat.IX, V. 279, 280.
« Ed. Gidel, t. m, p. 176, 177.
454 r.A r.EGKXDE OK BOILEAU
seule à lui ouvrir les yeux : il omet ou bien il oublie des cir-
constances extérieures qui aidèrent puissamment l'effet des
années. Quand le jeune Nicolîxs Despréaux naissait à la poésie
dans la poudre du greffe, rôcole du naturel et du bon senst
dont il devint bientôt le poite-diajïcau et dont il ne devait
pas tarder à se proclamer lo chef, n'était plus à fonder. Elle
avait fait dans les l^rrrintHca riflicu/es ses débuts éclatants :
elle les continuait, avec un bruit tous les jours plus reten-
tissant, dans les pièces de Molière. Kt, tandis que recoller,
qui s'essayait à traduire la troisième satire de Juvénal et re-
mettait vingt fois son ouvrage sur le métier, restait tout à
fait inconnu, le nom du comédien de génie, que ses ennemis
s'efforçaient en vain d'abaisser au dessous de l'Orviétan et de
Scaramouche, allait déjà par de là «Rome» *. Boileau s'at-
tardait encore à la satire morale quand Molière avait livré et
gagné des batailles pour le naturel et le bon sens. Ses comé-
dies, ses farces môme, œuvres de combat, pleines d'actua-
lité et d'enseignements, révélaient au poète naissant les con-
ditions auxquelles peuvent durer les ouvrages de l'esprit. Et
ces conditions, un autre subitement éclairé, lui aussi , les
avait, dès Tannée 16(31, exprimées et résumées dans deux vers
simples et sans prétention:
Et désormais il ne faut pas
Quitter la nature d'un pas *.
Et non seulement les pièces de Molière éclairèrent de cette
vive lumière de l'exemple le jeune satirique, encore hésitant
et embarrassé, mais elles lui inspirèrent plus de confiance en
lui-môme, elles le fixèrent sur la nature et la destination de
sentaient. Non pas qu'il les ait attendues pour faire des vers,
encore moins que les Précieuses ridicules, ou même Y École des
femmes aient été la cause de la rectitude de son esprit et
de la solidité de sa raison. Nicolas, dès le collège, est porté
vers la satire. Écolier, nous dit un de ses contemporains,
1 La FoDtaine, lettre à Maucroir, 22 août 1061 .
2 Ibidem. Il résuUe des vers qui précèdent que l'admiration de La Fon-
taine pour Moiière était déjà ancieune. Il dit à Mancroix: « Te souvient-il
bien qu'aw^/'e/b<s,nous avons conclu d'une voix qu'il allait ramener en France
le bon goût et Taii' de Téreuce?»
LA LEGENDE DE BOILEAU 4 55
Favocat Guéret, il a toujours à la bouche les noms d'Horace,
de Perse ou de Juvénal ^ Si, comme tout bon élève de rhé-
torique, il met un moment une tragédie sur le métier' : le
genre dramatique ne saurait l'arrêter longtemps ; il aban-
donne sa pièce aux premiers vers, et se tourne avec ardeur
vers rimitation de ses poètes favoris. Presque à la sortie des
classes, sa verve naissante produit sa première saillie dans
une épigramme contre la puce :
Du repos des humains implacable ennemie^.
A peu près vers la même époque, une dejses nièces meurt
à dix-huit ans entre les mains d'un charlatan de la Faculté,
et voilà, si Ton en croit ses souvenirs, sa colère allumée con-
tre un faux Esculape, à cervelle ignorante :
Oui, j'en fis dès quinze ans, ma plainte à l'Univers.
Et l'ardeur de venger ce barbare homicide
Fut le premier démon qui m'inspira des vers.
malheureusement sa fureur juvénile contre les médecins n'est
qu'une fiction de son âge mûr ; il avait plus de quinze ans *
quand il eut à pleurer sa nièce, et le sonnet dans lequel il
exhalait alors sa douleur était purement élégiaque et pas du
tout satirique.
C'est, au contraire, une satire que la pièce de vers, dans
laquelle il s'arme en guerre contre les Anglais et leur montre
la main d'une jeune bergère,
* (îuérel, la Promenade de Saint-Cloud, dans les Mémoires de Brueys.
Pars, Thomas Hérissant, 1751, t.I, p. 282-283.
* Si l'on en croyait les échos de Boileau, l'écolier n'aurait pas attendu sa
rhétorique pour faire une tragédie. Il l'aurait entreprise pendant ses basses
classes qu'il fit, dit-il, au collège de Saint-Jean de Beauvais. Bécréations lit-
téraires (de Cizeron-Ri val), Lyon, 17o6, p 197. M. Berriat Saint-Prix, Essai
sur Boileau^ no 16, croit qu'il était en quatrième, quand il entreprit sa tra-
gédie (1647). Il aurait alors eu onze ans. Mais Boileau a fait ses basses classes
à Harcourt et non à Saint-Jean de Beauvais. Il y a donc, au moins dans
Taoecdote, soit une inexactitude de celui qui la rapporte, soit, ce qui est fort
possible, pn défaut de mémoire de la part de Boileau lui même.
3 Ed.Gidel, t. III, Poésies div., XXIV, p 52.
* Ou voit qu'il aime à faire dater sa vie littéraire de cet âge de quinzeans.
L'histoire des deux sonnets sur la mort d'une parente est un exemple du
4 5fi I.A I.KftKNDK DE HOII.KAU
Konvci's.int tons leurs bataillons*.
Ni rôpi<rrainmo sur la puce, ni le sonnet sur la mort de
sîi parent.' ', ni l'o.lo niômo contre les Anglais n'annonçaient
co ijifil (IcviiMidrait plus tard : mais ces pièces dont il était
satisfait, puis.ju'il los laissait é<:liap[»er de son porte-feuille,
nianifVstaJLMit claironuMit sa vocation littéraire. Il n*osait pas
eni^oro s'v livrer «•onipU'îteinont, car son père, ayant sur lui
crautros viséos, \o destinait au barreau et Tavaitfait recevoir
avo(^aT le 4 déccnibro 1 ♦».")«). Nicolas ne parut au milieu des
honinios do loi (|ne pour montrer son aversion de la chicane
et ainuseï' los clorcs du i)alais par ses malices^. La mort de
son pôro, arrivée lo 2 février 1G57, le laissa libre de s'ndonner
avec plus d'entrain à ses goûts poétiques. Logé choz son frère
pp[i (It> [tnVision c)>ronolo^M<|U(' d^.s ronBeignemenls fournis par Boileau. Il ne
s*a{;il point iri dViT nrs commises par Hrossette ou par un autre intermé-
(iii'iini, tout cti «{lit* l'on i^uil sur cps pii';ci's «'mane directement de Tau leur lui-
môm*'. Or, on premier li''u, dans l«^s doux Ieltro«» qu'à cinq ans d'inter-
terva'le, !<; 15 juill»*!. 1702, et 1^21 novembre 1707, il écrivit à ce sujet, il ne
semble pas iraccord avec lui-même sur la date du second sonnet. £o 1707,
il afflrmo qu'il Ta rofiil >< dans le temps de sa plus grande force poétique»8n
1707, il pnUend l'avoir coniposé il y a quinze ou Si'ize ans, c*est-à-dire vers
1691.11 avait à colto date ciDqnanlP-cintf ans; était-ce bien le temps de
sa plus grande forcti poétique ? Apn>s toul/J'auteur de YOde^sur la prife de
Namur, pouvait le croire. En second lieu, dans le sonnet raccommodé, non
seulement il dénature, comme nous l'avons vu,l«' caractère du sonnet primitif,
mais il donne à celte o'uvre une rJate Iri's inexacte. Sa nièce avait dix-huit
ans, elle était environ de même ûge que lui. De plus, Berriat Saint- Prix (tome
IH.p. 4r)0, note 3) semble établir qu'elle se nommait Anne Dongois et était
née le 20 juin ir^^7. A réfiocjne de sa mort, arrivée vers 1(kS5, son oncle au-
rait donc eu dix-neufanset non quinze. Que serait-ce sMl s'agissait de sa sœur
Marie, la seule dont Berriat ait trouvé l'acte de décès, et qui, née le 3 sep-
tembre 1640, serait morte le 18 septembre 1G60? Despréaux aurait eu alors
près de vingt-quatre ans, ce (]ui s'accomoderait assez bien, avec la booté re-
lative du sonnet publié en se[iLeml)re 100,3, <ldns les Délices de la poésie ga-
lante des plus célèhrea mdeurs de ce temps, Paris, \Ribou, in-l2, p. lUS.
* Je n'avais encore que dix-huit ans, quand je fis cette ode, mais jeM'ai
raccommodée. Boileau, 1713. Éd. Gidel, Odes, t. 111, p. 27.
2 Ed. Gide!, t. III, Poèsiex diverses, VI et Vil, p. 36 et 37.
* Dans sa première jeunesse, (il) n'avoit point de plus agréable exercice que
de faire rire les clercs du palais, ii/fponsrà VAverfissenieyit, qui a été afouté
à la nouvelle édition des Œuvres de M. Despreaux, éd. Brossette 1716,
t. II, p. 409.
/.
^Irt .«'JL V ■ c:
LA LÉGENDE DE BOILEAU 457
Jérôme, le greflSer, au dessus du grenier, dans une guérite
exposée à tous les vents, il dédaigna Tutile liasse dont il au-
rait pu charger son bras et ne songea plus qu'au Parnasse :
La famille en pâlit et vit en frémissant
Dans la poudre du greffe un poète naissant * .
La famille pourtant devait être faite à de pareilles surpri-
ses. Il y avait, en effet, déjà quelques années que Gilles, frère
de Nicolas, et son aîné de cinq ans et demi.
Courait du bel esprit la carrière épineuse.
Comment ne pas penser que la fortune littéraire de ce
« petit Boileau », ainsi que rappelaient ses contemporains,
avait excité la verve et encouragé les espérances de son
cadet ? Malicieux, effronté, ne doutant de rien, se croyant
également propre à la prose et aux vers, il s'était attaqué
follement à Ménage, avec un succès étourdissant. Ses écrits,
au témoignage de Tallemant, se vendaient comme du pain.
Chapelain en avait peur, le courtisait lâchement et devait, en
1659, favoriser son entrée à l'Académie française, à l'âge de
vingt-huit ans^. C'était précisément l'époque où le jeune
Despréaux s'ossavait dans une œuvre sérieuse. Les deux
frères habitaient alors sous le môme toit, Tun au grenier,
l'autre dans la mansarde, et vivaient encore, tout le prouve,
dans les termes de l'amitié fraternelle. Le plus jeune doit à
Juvénal sa i)reniière œuvre d'un peu longue haleine, il s'ap-
plique à tourner en français la troisième satire du poète à
la mordante hyperbole, et fait à son exemple des adieux
déclamatoires à une ca[)itale corrompue.
Cette pièce qui commença sa renommée, il mit longtemps
à la composer, plus longtemps encore à la polir et à la repo-
lir. Il l'entreprit à ce qu'il paraît en 1658, à l'âge de vingt-
deux ans, il en acheva peut être la première ébauche en 1660,
mais il ne la fit imprimer lui-même qu'en 1666, et^dans l'in-
• Épitre K, V. 115 et 116.
2 Voir Tallemant, t. V. Ménage, p. 235, 238, 240. — t., ni Chapelain p.
276, 278. — Lettres de Jean Chapelain, t. ii, p. 37 et suiv., lettres à Hein-
sius du lor mai 1659. — Les frèrts de Boileau- Despréaux, par M. Gaston
Bizos, Aix, 18S0, p. 37 à 101.
4r,fi r.A r^EGENUE DE BOILEAU
î<^rrvalie fie o--? huit rir.n»'os. la refon Ut plusieurs fois *. Encore
';et-.e r»i'Jy rMon -i fi-aV;ii'.I''e no fur-e'.le pas définitive et reçut-
f:V.^: Mans \fi< ♦-■•iifioiis sniv.iriu-.s «les rao lifi.-ations notables. Il
rravai» ji?ij?. as5iir».*-r-on. uîil» irran-le estime pour cette pro-
ducîioii T,trit i»: foi? i..-niarii'e. Fourrant elle révélait déjà,
niémo^iansce 'in'on iiout e:oir»? s-jn 'i-rar primitif, les principales
f|»jaiî';< du Jf*une safirique : elle nïontrri't surtout Tintelli-
;:en :<-• avoc laf|uel!t:r il saurait user des Anciens II pouvait dire
prosquo avec autant d'assurance que La Fontaine :
Mon irnitatiou n'est point un esclavage.
li n'empruntait point, en eli'ot, au hasard et ne traduisait
p;is srMvilemont, mais il choisissait et adaptait ; il savait
donner un air fran<;;ais aux pensées antiques. Avec une ori-
;:inaliré piquante de tour et d'expression, il accommodait à nos
usHf^os, à notre esprit, comme aux circonstances présentes,
ce que son modèle « avait dit en latin. ^)) Et non seulement il
se distin^ruait de la foule des imitateurs stériles par ce don
d'assimilation, mais il s'en séparait encore plus par le soin
scrupuleux qu'il apportait à la forme. Il aime déjà le travail
difficile, et la sévérité que dans la suite il imposera aux au-
tres, il Ta dès ce moment pour lui-même. Le désir de la per-
fection le talonne et le tourmente. Aussi, ne montre-t-il qu'en
trcm])lant ces vers forgés avec tant de peine ; il semble ne
les communiquer à ses amis les plus intimes qu'à son corps
défendant. Toutefois, s'il aime à se faire prier, il aime aussi
qu'on le prie ; car, au fond, il a conscience de son mérite, il
sait do plus qu'il fait valoir son ouvrage en le récitant. Per-
sonne ne le lirait avec autant d'art et d'amour; il lui donne
du prix par le seul prestige de sa voix claire et sonore, par
* I-a dHle est difficile à dutennincr, car les témoignages varient. L'édition
de 1718, dont les notos paraissent être de Boileau lui-même, donne Tannée
16r)8, Tédition de 1740 porte 1G60. La première indication semble la vraie.
Despréaux dans une noteécrile de sa main, et qui figure à la suite de sa Cor-
rpspo?idancc avec lirofisefte (Éd. Laverdet. p. i70) dit « Ma satire estoit
faicte plus de six ans avant la Chambre de Justice. » Cette Chambre fui éta-
blie on lfi(>5.
^ Snf. IX, y. i'Z>).
LA LEGENDE DE BOILEAU 459
le ton, par le geste, par une mimique intelligente et sentie';
Si bien qu'à force de lectures arrachées en apparence à sa
modestie, il arrive insensiblement à sortir de son obscurité.
Vienne enfin un auditeur plus indiscret, plus remuant, plus
répandu que les autres, cet audacieux se fera le prôneur de
Tœuvre, en prendra des copies, la colportera partout et finira
par la lancer. De sorte que, bien avant d'être imprimé, le
poète entendra son nom répété de bouche en bouche, par les
uns, avec enthousiasme, par les autres, avec indignation,
mais toujours avec le bruit et le retentissement des choses
qui font sensation. Cela se passa de la sorte pour la première
satire, et Tannée 1662 vit commencer la renommée de Nico-
las*. Mais laissons-le parler, sinon lui-même, au moins par
la voix de celui dont il a fait, dans sa vieillesse, le principal
confident de sa vie littéraire.
« Il ne faisait pas, dit Brossette, dans ses Hemarques sur
la première satire, grand cas de cette pièce A peine avait-il
pu se résoudre à la lire à quelques amis particuliers, lors-
qu'un jour Tabbé Furetière, qui avait été reçu depuis peu à
l'Académie française, rendit une visite au frère de M. Des-
préaux, qui était son ami et son confrère. Comme M. Boi-
leau l'académicien était sorti, Furetière s'arrêta avec M. Des-
préaux et lut cette satire. Il en fut fort content, et, quoiqu'elle
fût assez éloignée de la perfection à laquelle l'auteur Ta por-
tée depuis, il convint de bonne foi qu'elle valait mieux que
toutes celles qu'il avait faites lui-même. Il encouragea ce
jeune poète à continuer, et lui demanda même une copie de
la nouvelle satire, qui devint bientôt publique par les autre
copies qu'on en fit. Cette satire était alors dans un état bien
différent de celui auquel l'auteur la mit avant de la faire im-
primer, car de 212 vers qu'elle contenait, il n'en a conservé
qu'environ 60 : tout le reste a été ou supprimé ou changé ^ »
* Louis Racine. Mém. sur la vie de J. Racine. Tome I de Tédition de
J. Racine. Hachette, p. 224.
' C*e8t à torique I'oq doone 1660 comme la date de la publication de cette
Satire. Berriat St-Prix (t. I, p. 35, note 1) a déjà fail remarquer qu'elle par-
lait de Mazario, mort le 9 mars 1661, comme n'existant plus.
3 Brossette, « Œuvres do M. Boiieau Desprèaux », avec des éclaircisse-
ments donnés par lui-même. Genève, 1716. t. 1, p. 9.
LA LEGENDE DE BOÎLEAU 461
maudire. Damon, « le grand auteur » en partance, ne se don-
nait pas ce plaisir. Toute sa mauvaise humeur se borne à rire
du pauvre Colletet crotté jusqu'à Téchine*, des sonnets flat-
teurs de Pelletier^, ou bien deSt-Amand, qui n'eut du Ciel que
sa veine en partage ^. De tous les favoris de la fortune
aveugle, qu'il diffame, un seul, à la rigueur, pourrait être
rangé parmi les genà de lettres. C'est Barbier de la Rivière,
le secrétaire ambitieux et sans pudeur, qui vendit cent fois
son maître Gaston, duc d'Orléans. Encore ce pédant, dont un
sort burlesque a fait un duc et pair*, est un vil et méchant
politique, et non pas un ennuyeux et méchant auteur. Et
quanta Chapelain qui figurait dans l'édition de 1666, il n'était
pas, nous le prouverons plus tard, dans la composition primi-
tive^. La première satire, dans saforme originelle, appartenait
donc entièrement à la peinture morale, et le rimeur novice s'y
essayait seulement, sur les brisées de Juvénal, à pourchasser
les vices et les travers de la société, sans viser encore les ridi-
cules du bel esprit. Du reste, c'est moins la profondeur de la
pensée et la solidité des vues, le bien fondé des jugements qui
le distinguent alors. Son originalité consiste surtout dans sa
malice ingénieuse et pittoresque et surtout dans sa verte fran-
chise. Il prend à partie les particuliers et non les ridicules, et,
s'il ne nomme pas encore^, ses victimes sont reconnaissables:
on les voit sans peine au travers de ses déguisements et des
allusions, et personne n'y est trompé. Procédé hardi, non
moins habile que courageux, qui suscita contre l'audacieux
• Satire.l. V. 77. Colletet, désigné par une initiale C dans Tédit. mons-
trueuse, devient Pelletier dans Tédition authentique.
2 Ibid., V. 47. Ce vers ne contient qu'une allusion. Pelletier n'y est pas
nommé.
3 Ibid., V. 97.
♦ Ibid., V. 64.
s Berriat le fait déjà remarquer: on n'y trouve, dil-il, aucun trait direct
contre Chapelain. Essai sur Boileau,nri. X\, ri" 72, p. Ix.
8 A vrai dire, il n'a pas. dans sa première édition de 1666 suivi de règle
générale. Tantôt il nomme, tantôt il dcligure un peu, Pucelain, Kinaut, Scu-
fariy Chassaigne, Kautain, etc. D'antre fois il d<;sigiie par un nom grec ou
latin Arisfe pour Chapelain (Sat. IV, v. 90). Dans les éditions subreptices se
produit la même variété, quoique les noms ne soient pas souvent les mômes
que dans l'édition authentique. Le lecteur ne se laissait pourtant pas dérouter.
462 LA LEGENDE HE BOILEAU
poète des réclamations furibondes et des inimitiés ardentes,
mais donna une saveur particulière et un attrait irritant à ses
malices :
Je ne sais i-ien nommer, si ce n'est par son nom.
J'appelle un chat un chat, et Rolet un fripon*.
Ainsi, dès son premier essai, Boileau déployait sa force
dominante, cette franchise quasi brutale, cet amour intraita-
ble du vrai qui fait le fond de son caractère. Plus tard, il
s'en faisait, à bon droit, son principal titre de gloire, quand
il écrivait à Seignelay, fils de Colbert :
Sais-tu pourquoi mes vers sont lus dans les provinces.
Sont recherchés du peuple et reçus chez les princes ?
Ce n'est pas que leurs sons, agréables, nombreux,
Soient toujours à roreille également heureux ;
Qu'en plus d'un lieu le sens n'y gène la mesure.
Et qu'un mot quelquefois n'y brave la césure ;
Mais c'est qu'en eUx le vrai, du mensonge vainqueur,
Partout se montre aux yeux et va saisir le cœur 2.
La franchise est, en effet, la première et la plus puissante
recommandation du nouveau satirique ; mais ce que je cherche
dans cette production d'essai, sans l'y trouver, c'est le motif
et la justification de ses sévérités. Il juge d'instinct, et cet ins-
tinct est ordinairement sûr et d'accord avec le bon sens. Ne
lui demandez pas la raison de ses arrêts, il a prononcé, cela
suffit: il paraît infaillible parce qu'il est décisif et cassant,
parce que ses coups, bien assénés, portent toujours. Néan-
moins, quand on y regarde, on n'aperçoit pas encore que
son discernement soit bien formé, qu'il aille au-delà du lieu
commun et ne s'arrête pas à la surface. Rien, surtout n'an-
nonce qu'il deviendra, dans la suite, un arbitre souverain du
goût.
A l'époque où le satirique, né dans la poudre du greffe,
est encore à la période des essais, et ne laisse pas prévoir le
* Sat. l, V. 51 et 52. — Il est à remarquer cependaiit, que dans les édi-
tions de 1667 et de 1668, Boileau mit une note destinée à dépayser les lec-
teurs: «C'était un hôtelier du pays blaisois.»
« Épître\y., V. 47 à 54.
LA LEGENDE DE BOILEAU 46 3
grand rôle littéraire auquel il est destiné , Molière est au
plus fort de sa lutte avec le bel esprit et le méchant goût du
siècle. Les Précieuses dataient déjà de trois ans; à V École des
Maris, aux fâcheux, allait succéder VEcole des Femmes, Le
génie du grand comique était contesté sans doute : avec la
foule des dramaturges médiocres, il avait contre lui les par-
tisans de Corneille, et Corneille lui-même qui supportait ma-
laisément un rival dans la faveur publique. Mais sMl était con-
testé, ses succès ne pouvaient pas Têtre.
Cet écrivain par sa manière
Charme déjà toute la Cour,
affirmait La Fontaine, dès 1661 ^ . Et l'approbation de la Cour,
celle du Roi surtout, entraînait hautement celle de tout le
monde. 'L'Ecole des Femmes déchaîna cependant de nouveau
toutes les colères, et en particulier celle du grand poète qui
depuis plus d'un quart de siècle, charmait la France. Pour
nous servir des expressions maladroitement pédantesques de
l'abbé d'Aubignac, ce fut un autre trophée de Miltiade qui
empêcha Thémistocle de dormir^. Boileau choisit ce moment
pour proclamer haut et ferme son admiration pour la nou-
velle pièce et pour son auteur.
En vain mille jaloux esprits,
Molière, osent avec mépris
Censurer ton plus bel ouvrage.
Sa charmante naïveté
S'en va pour jamais d'âge en âge
Enjouer la postérité.
Tant que l'Univers durera,
Avecque plaisir on lira
Que, quoi qu'une femme complote,
Un mari ne doit dire mot,
Et qu'assez souvent la plus sotte
Est habile pour faire un sot^.
^ Lettre à Maucroix.
' D'Âubigoac. Quatrième dissertation concernant le poème dramatique,
1663, p. 119 et 120.
3 Cette seconde strophe a été omise en 1682 par les éditeurs de Molière, et
®n 1701, par Boileau lui-mêrae, lorsqu'il joignit les Stances à ses œuvres.
4 64 LA LK(iENDE DE BOILEAU
On a beaucoup loué Boileau de s'être ainsi déclaré hardi-
ment pour Molière, et dans Tadmiration que l'on avait pour
son courngc, c'est à pcino si Ton a tenu compte d'une appro-
bation antérieure, et beaucoup plus précise assurément, celle
de La Fontaine. N'a-t-on pas exagéré tout à la fois et Taudace
(lu jeune poète et la portée de son témoignage? On ne courait
])ns alors grand péril à se prononcer hautement pour Molière ;
on était on bonne et puissante compaj^nio. Ne craignons pas
même de le dire, au risque de soulever des protestations, il y
avait tout avantage à le faire. Outre que Ton se plaçait,
comme Ton dit vulgairement, du côté du manche, on donnait
peu de chose, pour avoir beaucoup. Il ne faut pas l'oublier,
comme on Ta fait trop souvent, le nouveau venu n'apportait
r
point à V Ecole des femmes l'appui d'une autorité consacrée :
il le dira lui-même quelque temps plus tard :
Personne ne connaît ni mon nom, ni ma veine*.
En était-il ainsi de Molière? Objet de contradiction, sans
doute, il avait le ])ruit, la renommée, un parti puissant, des
protecteurs hors ligne, et pardessus tout les amours du
public. Parler de lui avec éloge, c'était donc sortir de robs-
curité, attirer l'attention, s'attacher à un homme illustre
Et planter son lierre au pied de ses lauriers 2.
Le mérite de Boiloau n'est pas dans son courage: il n*est
même pas dans son discernement. Chapelain, lui-même, ren-
dait justice à Molière^. Mais le jeune satirique sut, dans ses
Stances, réduire à leur juste valeur les critiques soulevées par
VÊcole des femmes, il le fit, en termes nets, tranchants, avec
une fermeté de ton, un accent d'autorité que l'on ne devait
pas attendre d'un jeune homme de vingt-six ans :
Mais elle figure dans les impressions de 1663 et 1666 qui sont les premières,
et a été réimprimée dans le Molière Hachelle, l. I, p. xx, bien que, dit l'é-
diteur, «elle nous paraisse suspecte ». — Pourquoi?
« Sat, , VIIl, V. 82.
* Régnier, Aq de la Satyre I.
3 Camuzat, Mélanges de littérat.^ p. 192
LA LEGENDE DE ROILEAU 465
Ta muse avec utilité
Dit plaisamment la vérité,
Chacun profite à ton École,
Tout en est beau, tout en est bon,
Et ta plus burlesque parole
Est souvent un docte sermon.
Et parlant d'avance le langage de la postérité, il proclame
ce qu'il n'osera affirmer dans la suite, et met Molière sur le
même rang que l'écrivain, reconnu par tout le XVIP siècle
comme le modèle achevé de la comédie :
Que tu ris agréablement,
Que tu badines savamment !
Celui qui sut vaincre Numance,
Qui mit Carthage sous sa loi.
Jadis sous le nom de Térence,
Sut-il mieux badiner que toi ?
Voilà ce qui dans cette occasion constitue le vrai mérite
du nouveau venu ; mais il faut dire la vérité tout entière, ces
stances contribuent plus à sa gloire, qu'elles n'ont contribué
jadis à celle de Molière. Certainement on les a connues, on
en a répandu des copies, on les a même imprimées sans nom
d'auteur dès 1663* ; mais combien faible était leur bruit, à
côté de l'éclatant retentissement de la pièce elle-même. Le
prôneur le plus écouté, le plus efficace, n'était-il pas le suc-
cès ? «Je trouve aussi difficile,» avait dit l'auteur des Fâchmx,
dans son Avertissement, « de combattre un ouvrage que le
public approuve, que d'en défendre un qu'il condamne. »
Et, puisque je suis en veine de paradoxe, pourquoi ne pas
dire toute ma pensée? Les Stances ne me paraissent pas pro-
duites par l'élan spontané d'un jeune enthousiaste qui ne sait pas
contenir son admiration et, dans son ardeur naïve, s'adresse
à un auteur sans le connaître. A mon avis, Boileau n'a pas
attendu les cris poussés contre ï Ecole des femmes^ pour se
* Elles parurent pour la première fois, p. 176 et 198 du recueil intitulé:
les Délices de la poésie galante des plus célèbres auteurs de ce temps.
In-12 de 883 pages, l^aris, Ribou, 16G3. — Le privilège de ce recueil est du 14
et l'achevé d'imprimer du 2b septembre 1663. V. ledit de Berriat- Saint-Prix,
Notices bibliographiques, no 1, t. 1, p. cxxx.
4 66 LA LEGENDE DE HOILEAU
rapprocher de Molière. Lui, qui, riait tant en lisant Térence
et laissait à la porte des comédiens italiens sa raison et son
argent', n'a pu demeurer trois ans, sans manifester son adnai-
ration pour la troupe de Monsieur, et, quand il crie courage
au chef de cette troupe, c'est à un ami, et non pas à un
inconnu qu'il adresse ses vers. Je ne dirai pas qu'il écrit par
ordre; ni Molière n'était homme à en donner, ni Boileau d'hu-
meur à en recevoir. Mais le grand comique avait à soutenir
une guerre acharnée ; ceux qui l'approchaient ne devaient
avoir rien de plus à cœur que de le seconder et de rendre à
ses ennemis les coups avec usure. Quelle bonne occasion pour
le malicieux satirique de décocher des épigrammes? Au nom-
bre des adversaires est Corneille ^
Et qui dit Corneille dit tout.
Suivant l'avis de Loret, le gazetier poète^ Mais l'âme « libre
et fière » qui nommait Rollet un fripon, était-elle faite pour
s'effrayer? L'auteur du Cid cabalait, elle dira son fait à l'auteui!
du Cid, et sans commettre l'irrévérence de le désigner autre-
ment que par desépithètes vagues, elle le confondra parmi les
« mille jaloux esprits », les envieux qu'il faut laisser gronder»
et finira parle percer jusqu'au fond du cœur de cette atteinte
imprévue :
Si tu savais un peu moins plaire.
Tu ne leur déplairais pas tant ^.
L'allusion était transparente pour tous ceux qui entou-
raient Molière. Il avait trouvé Corneille dans l'intrigue formée
contre V Ecole des Maris^ et il avait accepté le combat^ ren-
dant blessure pour blessure *. Ne s'était-il pas, dans V Avertis-
ment des Fâcheux^ ouvertement moqué des Examens que ve-
nait de publier Pierre Corneille? « Le temps viendra, avait-il
dit, de faire imprimer mes remarques sur les pièces que j'au-
» La Fontaine, les Amours de Psyché, livre I (Êdit. Lefevre, Paris, 1838,
t. I, p. 399.
2 II en avoit de la jalousie, ne pouvant s'empêcher de le témoigner. Segrai-
siana, Paris, P. Prault, 1722, p. 212.
^ Muze historique, 20 janvier 1663, v. 256.
*Cf Guéret, Promenade de St-Cloiid. Mém. de Bruys, t. 11. p. 213.
LA LEGENDE DE BOILEAU 4 07
rai faites et je ne désespère pas de faire voir un jour, en grand
Auteur, que je puis citer Aristote et Horace. »
Dans V Ecole des Femmes^ poussant la provocation plus avant,
il avait parodié ces vers de Sertorius :
C'est assez.
« Je suis maître, je parle, allez, obéissez ^
Enfin il allait, dans la Critique opposer hardiment la comé-
die à la tragédie, et parler presque avec dédain des person-
nages cornéliens. « Lorsque vous peignez des héros, fera-t-il
dire à Dorante , vous faites ce que vous voulez. Ce sont des
portraits à plaisir où Ton ne cherche point de ressemblance
et vous n'avez qu'à suivre les traits d'une imagination qui se
donne l'essor et laisse souvent le vrai pour attraper le mer-
veilleux*. »
Assurément, venant de [)areils hommes, de tels procédés
nous étonnent et nous affligent. C'étaient ceux du temps, et les
luttes littéraires avaient gardé quelque chose de la rudessse
des vieux âges. Dans cette guerre peu courtoise, les Stances
de Boileau nous paraisent une arme dirigée contre la poitri-
ne de Corneille. Aussi ces vers de combat, colportés par des
lectures et des copies, furent-ils avidement accueillis par les
adversaires déclarés du vieux tragique. L'abbé d'Aubignac,
alors engagé dans une discussion acharnée avec l'auteur de
Sophonisbe, invoqua leur témoignage dans la dernière et la
plus violente de ses diatribes: « Il j' a longtemps, disait-il,
qu'Aristophane l'a dit, il se ronge de chagrin quand un seul
poète occupe Paris depuis plusieurs mois . . et les vers que
M. des Préaux a faits sur la dernière pièce de Molière nous
en ont assez appris ^. »
Ces derniers mots ne nous fixent-ils pas sur la véritable por-
tée des Stances; ne nous induisent-ils point en outre à ad-
mettre une sorte d'entente, une espèce d'accord tacite entre le
satirique débutant et le vieil abbé? Tous deux luttaient contre
la jalousie et l'esprit de domination du grand Corneille, cha-
* École des Femmes^ II, 6. SevtoriuSf v. 6.
2 Critique de l'École des Femmes^ scène Vil.
'^ "Ù^Anblf^QdiC^ quatrième dissertation, p. H9, 120,
468 LA LKGENUE DE BOÎLEAU
cun de son côté probablement, mais étaient-ils étrangers Tun
à Tautre? D* Aubignac préparait alors un roman philosophi-
que sur la morale des Stoïciens et lui avait donné le nom de
Macarisse, Suivant l'usage du temps, il demanda, pour les met-
tre en tête de son livre, des vers louangeurs à ses amis. Tous
se firent un plaisir de satisfaire à son désir, sauf à s'en rail-
ler plus tard comme Tavocat Richelet. Boileau fut du nom-
bre de ces preneurs poétiques, mais non des plus empressés ^
Sa pièce n'arriva qu'après la mise en vente. On ne saurait di-
re qu'elle pèche par excès d'enthousiasme, mais enfin elle loue
une œuvre insipide. Pouvait-on moins faire pour un homme
dont les attaques contre Corneille opéraient, en faveur de Mo-
lière, une diversion si utile ?^
Peut-être les faits que nous venons de grouper n'ont-ils
que des rapports éloignés ? Ce qui est certain du moins, c'est
qu'au commencement de 1663 l'auteur, encore peu connu,
d'une satire sur les vices et les embarras de Paris, comptait
parmi les amis et les partisans déclarés de Molière.
Ce fait, à nos yeux d'une importance capitale, a décidé
peut-être des destinées littéraires de Boileau.
II. — Boileau dans la société de molière 1663-1666.
A peu près en même temps qu'il se liait avec Molière,
Boileau connut La Fontaine et devint l'ami de Racine. Et
sans quitter encore la cour du Palais et la maison de son
frère Jérôme, il s'égara plus souvent loin de la de-
meure paternelle, avec cette compagnie joyeuse, qui pre-
1 Boileau, dans sa vieillesse est assez embarrassé pour expliquer cet éloge
d'un ouvrage qui « ne fit de chez Sercy qu un saut chez l'épicier. » — 11 le
composa, comme les autres amis de l'auteur pour le faire valoir. <i Heureuse-
ment je lui porîai Tépigramme trop tard, et elle ne fut pas mise. » Dieu soit
Joué, Lettre àBrosselte, 9 avril, l'702. Éd. Laverdet, p. 106.
« «J'ai connu, écrivait plus tard Boileau, M. l'abbé d'Aubignac. Il était
homme de beaucoup de mérita et fort habile en matière poétique.... » iJle
Héfléx. critiques sur Longin, éd. Gidel, t. III, p. 310. L'abbé d'Aubignac
est déjà appelé « mon cher amy » par Gilles Boileau, Vie d'Epictète, 3" éd.
1667, p. 19.
LA LEGKNDE DE BOILEAU 469
nait volontiers le cabaret pour une succursale du Parnasse.
A cette époque le bagage poétique de Nicolas était encore
bien mince, une seule pièce qu'il retouchait sans cesse, mais
il avait fait preuve dans cette œuvre unique d'un talent tout
particulier pour la satire.
Trop attaché, sans doute, à l'imitation de son modèle latin,
il n'avait pas accentué l'originalité de son propre génie. Mais
il avait montré qu'il s'entendait à adapter les peintures des
Anciens aux usages modernes, à les mettre au point de son
temps.
On savait qu'il excellait à rendre agréablement les petites
choses de la vie commune, à parodier avec une malice pitto-
resque les ridicules du jour. Ces qualités qu'allait-il en faire,
cet esprit satirique contre qui devait-il le tourner? Il semble
que les leçons et l'exemple de Molière lui aient révélé sa
vocation critique ; qu'en écoutant le bruit immense fait
autour des nouveautés du grand observateur de la nature, il
ait deviné l'usage à faire de son propre bon sens, de sa rai-
son malicieuse.
Entre lui et l'auteur des Précieuses ridicules et des deux
Ecoles u'a-t-il pas aperçu un lien mystérieux, n'a-t-il passent!
qu'ils devaient l'un et l'autre avoir les mêmes ennemis, que
par suite l'œuvre particulière de chacun d'eux, tout en res-
tant différente de forme, devait s'allier et se confondre avec
celle de l'autre dans un même effort? Jusque-là, nous l'avons
vu, il n'avait guère abordé que la satire morale ; à partir de
cette date, il étend son cadre, il entre eu plein dans la satire
littéraire.
Ce .changement de front est très sensible dans la seconde
pièce qu'il a composée et placée, je ne sais trop pourquoi,
la septième dans son recueil *. Dans cette œuvre, faite à la fin
de 1663, c'est-à-dire de l'année même qui suivit sa liaison
avec Molière, il se décide résolument pour le genre satirique.
Ni considération, ni crainte ne peuvent l'arrêter.
Enfin, c'est mon plaisir, je veux me satisfaire
* Cet arrangement s'explique par ce motif que Boileau voulait faire de la
pièce 80 question la conclusion de sou premier recueil de 1666, composé seu-
lement de sept satires.
470 LA LEGENDE DE IJOILEAU
Je ne puis bien parler et ne saurois me taire.
Je ne résiste point au torrent qui m'entraîne \
Est-il téméraire de penser que Texemple du comique cou-
rageux qui, depuis cinq ans, bravait héroïquement toutes les
inimitiés n'a pas été étranger à cette détermination du jeune
poète- ? En même temps qu'il se consacre à la satire, il change
de modèle ; ce n'est plus Juvénal, c'est Horace qu'il prend
pour maître. Passer ainsi du déclamateur hyperbolique au
moraliste charmant et sensé, si mesuré de ton et de pensée,
c'est indiquer l'orientation plus sérieuse qu'il va donner à
sa verve médisante. Mais ce qui caractérise surtout cette
pièce nouvelle, et la différencie plus nettement de la pre-
mière, c'est l'abondance de malices littéraires dont elle four-
mille. Il semble que le satirique n'ait plus en vue que les mau-
vais auteurs. A peine s'il va s'occuper des travers moraux ;
s'il rappelle que Juvénal gourmandait en courroux tout le
peuple latin, s'il se couvre du nom respecté d'Horace, lors-
que celui-ci
Exhalait en courroux les vapeurs de sa bile,
Ety vengeant la Vertu par des traits éclatants ^
Allait ôter le masque aux Vices de son temps.
les vices du sien peuvent pour le moment se déguiser sans
frayeur, il les laisse en paix. 11 est vrai que l'année suivante,
il fit contre eux un retour offensif, en voulant prouver que
tous les hommes étaient fous. Mais dans cette satire morale,
écrite d'ailleurs à la suite d'une conversation entre Molière,
l'abbé le Vayer et Boileau ^, la malignité littéraire trouve sa
place et la manie de rimer est rangée parmi les folies humai-
nes \ La même année, du reste, le poète moraliste revenait à
la critique, et achevait de s'engager dans la lutte contre le bel
esprit. 11 composait et dédiait à Molière la satire sur la rime.
N'était-ce pas en même temps le prendre pour chef de file et
le proclamer son maître dans l'art d'écrire? Les premiers vers
« Sat. Vil, V. 89, 90 et 94.
2 Sat. VU, V. 79,7 et 76.
8 Bolœana, et Brosetle, t I, p. 44.
* Sat. IV, F,90et suiv.
LA LEGENDE DE BOILEAU 471
de la pièce contiennent, en effet, un hommage éclatant au
génie comme au goût de « ce rare et fameux esprit, »
Pour qui tient Apollon tous ses trésors ouverts
Et qui sait à quel coin se marquent les bons vers.
Dans les combats d'esprit, savant maître d'escrime*.
Dix ans plus tard, lorsque Boileau, passé maître à son tour,
jugeait de haut tous les écrivains de son temps, et l'auteur
de y Ecole des femmes lui même, ses ennemis ont travesti et
défiguré ce noble et sincère témoignage de son admiration
première. Desmarets Saint-Sorlin, évoquant contre lui Tombre
de Molière, lui fait adresser, par elle, des reproches indignés:
Cœur lâche, qui poursuis les vivants et les morts,
Tu m'adorais vivant; maintenant quand je dors.
Du titre de bouffon tu noircis mon génie ;
Autrefois à genoux, forcé de m'estimer,
Tu t'adressais à moi pour apprendre à rimer 2.
Certainement Boileau n'était pas un cœur lâche et ne se mit
jamais à genoux. Cependant en 1664, il avait avec Molière
une attitude qu'il ne garda pas dans la suite. Nouveau venu
dans la carrière poétique, il s'inclinait devant la supériorité
de ce puissant et fécond génie et lui demandait respectueuse-
ment desleçons. En le consultant sur une question aussi vitale
à ses yeux que l'accord de la rime avec la raison, il le prenait
pour guide dans le combat du bon sens et du naturel contre
le bel-esprit et l'affectation, et se ralliait pour ainsi dire à lui,
dans la mêlée. Du reste, cette lutte est désormais pour Des-
préaux la « chose nécessaire. » Et, s'il revient encore par-
* Sat, //, V. 3 à 5. La satire à Molière a été la première imprimée, elle
parut, p. 125 à 128 de la seconde partie des Délices de la poésie galante^
ia-12 de 265 pages. Paris, Ribou, 1664. L'achevé d'imprimer est du 12 juillet
1664.
' La deffense du poème heroïqice avec quelques remarques sur les œuvres
satiriques du sieur /)**, dialogues en vers et eu prose (S* Sorlin Desmarets).
Paris, Jacques le Gras, 1674. VU" dialogue (en vers p. 134. — Cf. Boileau
Despréaux, im Urtheile seines zeitgenosse?i Jean Desmarets de Saint
Sorlin, von Wilhelm Bornemann. Heilbronn, 1883. ia-80 de 148 pages,
p. 143.
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Fi'oii-ï.- iâ'.î Pir.-î 1 ir :. :: es: r-^ivers-?.
A'j rr*o:-::e '.::i: .il :: ir: i l'in ii:-?::r I-?s menace
Poir 'rix '::* t'îi o ^vr^j-e -rs: ul :.. iis:: * odieux,
Ce*'. offrUî-i:- ie-! lii^, :"r5: à'i::.: v:^:- i'ix cie'ii.
Mais. oieL oie i'^r. fa ;x zel-i- :'.< :.--is:j lent leur faiblesse,
Ch^cm V'..:: ; î'eri eif-r: la v..-;::- les vlesïe.
Eu vain d'-xn. lâ?he jT? :e':l lej:- espiit revêtu
Se couvre du manteau d'iine austère veitu,
I^ur cœur qui se connaît et qui fuit la lumière.
S'il se moque de Dieu, craint Tartuffe et Molière *.
Deux ans plus tard, quand il s'agira de défendre la comédie
de V Imposteur contre les préventions de Lamoignon, Boileau
ne tiendra pas un langage aussi ferme. Il conduira bien son
* Satires III et V, Ces deux satires sont de 1665.
2 Leri historiens sont ma droicte balle. Montaigne, livre U^ cb. 10.
V Le discours au Roi est également de 166r>. li parut pour la première fois,
avec les Satires II et IV, p. S2 à 86, de la Suiite d>i 7iouveau recueil de
plusieurs et diverses pièces valantes de ce temps. A la sphère, 1665. (Se
trouve à la Dibl. dfj la vill«i de xMonlpeliier, BhIIcs Lettres, no 1914).
* Discours au lioi V. 89 à 102. — Boileau, V, 103, convient lui-même qu'il
.•<Vc^/rrefur en point. — Il îiviiit déjà parlé de Tartuffe dans \9l Satire III,
LA LEGENDE DE BOILEAU 473
ami chez le Premier Président, mais il n^osera pas le soutenir
et, sous cape, je le crains bien, tant est fort eu lui le penchant
satirique, il rira presque de l'embarras et de la confusion du
grand comédien, mille fois plus mal à son aise avec le chef
du Parlement de Paris qu'avec le roi de France en personne *.
Mais en 1667, après le succès de plusieurs éditions de son
livre, Tauteur des Satires commence à sentir son importance:
il n'a plus besoin d'appui pour marcher. De 1663 à 1665, au
contraire, il se tient plus près de Molière ; il comprend
davantage que les ennemis du faux goût sont solidaires et
doivent se prêter un mutuel secours.
Cependant, à la date de 1665, la réputation du nouveau
poète n'était plus à faire. Il n'a rien imprimé, du moins on
n'a rien encore imprimé de son aveu, mais il est déjà connu
et recherché dans les meilleures compagnies : ses satires pi-
quent et défraient la malignité publique, et le bruit com-
mence à se faire autour de son nom. C'est qu'à cette époque,
l'on n'avait pas besoin de faire travailler la presse pour arri-
ver à la célébrité. Il se passait quelque chose de semblable à
ce que l'on vojait autrefois à Rome, au temps des déclama-
tions et des lectures publiques. Les auteuis tâtaient le goût
et l'opinion en lisant leurs œuvres devant leurs amis et leurs
connaissances. Etaient-ils applaudis, ils trouvaient bientôt de
nouveaux auditeurs. Et tandis que des copies plus ou moins
fidèles répandaient leurs écrits de proche en proche, eux-
mêmes allaient les réciter à qui désirait les entendre. On les
invitait dans les salons, dans les conférences et les académies
particulières, alors fort nombreuses ; on voulait les avoir aux
festins d'apparat. Cette communication par des lectures était
pour eux la première étape de la gloire. Les Femmes savantes
et la satire du Festin peuvent nous donner l'idée de ce qui se
passait alors. Plus d'un Trissotin a trouvé des Bélise pour lui
dire de ses sonnets :
* « Quelques efforts que pût faire Molière, il ne fit que bégaier et ne pût
point calmer le trouble où l'avait jeté Monsieur le premier Président
Molière se retira, peu satisfait de lui-même sans se plaindre pourtant de M.
de Lamoignon, car il se rendit justice. « Correspondance de Boileau-Des-
préaux et Brossette, édit. Laverdet, 1>^58. Appeîidice, p. 565.
C-: *■::.: ~*...\* f-^tiicf at :»L âMiZkf a mon oreille
r*\":r^ .*.- : ; '. * i.., " ; :.-r tLs rjeiles. aux tables
H:eii souver.: l:. i..n:j*.* as:: :..": v li alléchait ses invités
l'Ai* oottt* j^r.-^:Lf>î«f >vi-.*fi.:.:f :
M.*.::rf s\t^: Tiri-f-. t v.: ' i-uer »oa rôle
F; K'i:! ':»e-:. . .:. : [.:• e>î. :..':. ■::nné sa parole *.
l.o mu> ,.ie:î Li:i.":.f:;. :l .e ^ :■:; : at les Jeux vers qui pré-
l'filtMii, pariAireai: av-. . M.^e:-. .^ . riu.ège d*amuser et d'at-
îiivr li»s hv>n:u';e> jT. ..>: ? = : ;.:urr-x :«r:viiêffe. nous le savons
ii*ailli'»r:î, luvleâu .-. : :>>e.iA:: iive.- e-;x. Brossette, dans son
i-ouuiieiiiiUîv, :;.v.> le ni.LTre iaii> une réunion à lafoismon-
iliiiiu' 01 iitUT.iire. rViisar.: .Lez M. d\i Broussin, une lecture
rtvoi- MoliiMv ■ . Coîin r-ir: mC-me de ces invitations faites à
heâpii'.Hux jiour /.i-.user .-."î-tie un vil parasite, un baladin
que Ton so pro.uro a ; rix darjrenl ?omme un objet de curio-
sité; ille Cv^mpAie ;\ Fra::c Tau pin.
Ou ïes d.'uue à Pahs qiiand on fait chère entière
i\Mmne on donne a la Cour et Tartuffe et Molière.
11 uVsi v.»omie vîanois ni OAron allemand
Qui u'aii à ses repas -a v:ouple si charmant,
El dans la oivix de fe:- eux seuls en valent mille
Pour faire aux étrangers l'honneur de cette ville *.
Laissons à des ennemis maladroits et exaspérés [le ridicule
de ces plates caricatures, mais servons-nous en pour montrer
quelle était alors la vogue du malicieux satirique. Le fait est
qu'on Tadmettait, qu'on le recherchait dans les compagnies
les plus relevées. Arnauld de Pomponne, au retour de son
exil, rendant une visite empressée à ses amis, le jour même
de son arrivée, le trouve avec Racine, le soir du 3 février
* Femmes savantes^ Acte, lll, scène !'• et scène V.
3 Satire lll, x. 24 et 25.
* Avis sur la deuxième satire.
* Satyre de.^ Satyres (1666) citée dans la Critique désintéressée^ etc., p. 52.
LA LEGENDE DE BOILEAU 4 75
1665, à rhôtel de Nevers, chez madame la comtesse Du Plessis-
Guénégaud * Les deux poètes y sont venus pour lire, Tun
quelques-unes de ses satires, l'autre, trois actes et demi de
sa tragédie d'Alexandre. Et parmi les auditeurs réunis pour
les entendre figurent, avec trois prélats, Mme et Mlle de
Sévigné, Mme de Lafajette et le duc de La Rochefoucauld,
Fauteur des Maximes.
C'est à cette époque où Nicolas, déjà fort en vue, n'avait
pas encore osé courir a le hasard de Timpression d, qu'il faut
rapporter les additions et les changements introduits dans la
satire par laquelle il s'était fait d'abord connaître. Il la di-
vise alors en deux parties et en détache les Embarras de Pa-
ris^ pour en faire une œuvre à part^. En même temps, il enri-
chit les deux pièces de censures littéraires qui n'étaient
pas entrées dans la composition primitive. La plus sérieuse,
la plus fertile en conséquences, de ces additions, est, sans
contredit, le passage concernant Chapelain et les pensions
accordées aux gens de lettres. Évidemment ce morceau, mo-
difié, d'ailleurs, plusieurs fois dans les éditions successives
que donne le satirique, ne faisait pas partie de la première
ébauche. Avant 1663, il ne pouvait être question de «la bonté
secourable du Roi», puisqu'elle ne jeta sur la muse un regard
favorable qu'à partir de cette année '.On s'aperçoit, du reste,
en l'examinant avec attention, que le passage tout entier n'a
été intercalé qu'après coup dans le texte. Il rompt, en effet,
la suite des idées et semble en contradiction avec ce qui pré-
cède et surtout avec ce qui suit *. C'est donc seulement vers
' Lettre d'Arnauld de Pomponne à son père, M. d'Andilly, du 4 février
1665, à la suite des Mémoires de M. de Coulanges, Paris, Biaise 1820, in-S»,
p. :-«2 à 384.
* L'édition de 1713 donne Tannée 1661 pour la composition de la satire VI,
n'est-ce pas la date à laquelle l'auteur s'est décidé à couper son œuvre en
deux? La satire VI ne parut, du reste, la première fois, que dans l'édition ori-
ginale et authentique de 1666, dont le privilège est du 6 mars, et fut accordé
à Claude Barbin.
3 Sat* I, V, U, — Les gratifications, dit le commentateur, commencèrent
en 1663.
* Dans la rédaction actuelle de la première satire, ce passage s'étend du vers
81 au vers 96. Le vers 97, oîi il est question de saint Amant, formait une suite
toute naturelle au vers "79, qui raillait le parasite Montmaur.
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A- ' rii^iuf.
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j.. i '.' ..i j. -i^ ']'.'.'•: f h',':",' h '',',::.* r. S' ce vers a Irait aux listes des
!'' •'' ''.'.'.j/' u*-r.r. '.' r rif;'l>; «:)-t déc. are daDâ ces listeau le premier poète
'J(»ii.ii»,-j.,« -j.j ii,ofj«ji- i;i f/htienl 2///J livres, et Boycr n'en a qae 800.
LA LEGENDE DE BOILEAU 47 7
Une nouvelle liste, arrêtée au mois d'août 1664, péchait par
les mêmes omissions. Les oubliés se fâchèrent tout de bon et
s'en prirent à l'auteur de la Pucelle. Alors fut composée, dans
un cabaret et le verre en main, la parodie célèbre du Cid^
connue sous le nom de Chapelain décoiffé, La Serre, dépité
comme don Gormas, attaque le vieux poète au sortir de l'Aca-
démie, et finit par lui arracher sa perruque qu'il jette dans la
boue. Chapelain, désespéré, appelle son disciple Cassagne à
son secours, et l'écolier, en nouveau Rodrigue, va provoquer
le terrible La Serre. Cette satire eut un grand succès et, dès
l'année 1665, fut publiée dans un Recueil de pièces galantes,
sous le nom de Comédie * . Quels en étaient les auteurs ^ ? Notre
Boileau, je le sais, s'efforça dans la suite de dégager sa res-
ponsabilité de cette plaisanterie d'assez mauvais goût. « Cet
ouvrage, écrivait-il à Brossette, n'est ni de moi, ni digne de
moi». Mais le désaveu n'est pas complet, et lorsque le badinage
parut, l'opinion publique lui donna dans cette méchanceté
beaucoup plus de part qu'il ne s'en attribuait plus tard. La paro-
die, du reste, n'avait pas reçu du premier coup la forme qu'elle
a gardée. Une version dont le texte ne nous est point parvenu
tout entier était peut-être plus offensante encore que la ver-
sion actuelle ^. Chapelain, j était accusé d'avoir été archer et
recors dans sajeunesse *. La parodie, sous sa première forme,
fut mise sur le compte, non pas de Furetière, mais des fils du
greffier Boileau, Gilles et Nicolas. Les deux frères vivaient
donc alors, c'est-à-dire en 1664, en bonne intelligence, comme
semblent le prouver, du reste, plusieurs anecdotes et quel-
ques passages des premières satires. Le cadet n'avait-il pas
épousé l'animosité de l'aîné contre Ménage et contre Pellis-
son? n'avait-il pas les mêmes amitiés, ne fréquentait-il pas les
mêmes sociétés? ne vivait-il pas familièrement, comme lui, par
' Nouveau Recueil de plusieurs et diverses pièces galantes de ce temps,
A la sphère 16(55. Le Chapelain décniffé est au coimnencemeal, de la pre-
mière partie, p. là 15.
â Lettre à Brossette, du 10 décembre 1701. édil. Laverdct, p 95 à 96.
8 Boileau le dit lui-même dans la lettre précitée. « Il n'était pas comme celui
que vous m'avez envoyé, qui a été vraisemblahlemeut composé après coup,
par des gens qui avaient retenu quelques-unes de nos pensées^ etc., p 96.
* JUienagiana^ 11, p. 78.
i'\iMii|»!v\ Ax.v- .l" ■...;.• ie Vnr\ . François-Marie de i*HôpitaIW
UuMj A\'\ ^:\'\a::\ \\\r .■ ::i*c ;i:ent, dans cette association de$
ili'ux ùvo*. ; ■'•^*'' ^" ^-.l'-ï* tous les deux, contre Chapelain.
l/.u'iu' .4\ .1 :. :" «.'<' vrtr. à'.*s oli'.iiTAtions à i*:iuteui* de la f'ueelk:
il iuL .!i'\ 4; ..■■•. 'ii'.o, <oii oMtrôi^ à rAcadémie française.
M »iN . .-m;' •::: 'O'.: .• ':i.'':u:ue lo^er, présomptueux, qui ne se
!;*'M III n .'v- :x:<.'\"..' *^:i s.iit -ju'il n*êpargnait guère son pro-
U'%'ii'ut .•'. ;^" . V-: : -.1 ■ '. ' vîtitu"> ilumalavooFuretière et ces
luiro^ /•• <.'«•*. : .:o ■• :. ui :.' ^'î oiivoiispect Chapelain ménageait
AU j'.»i!ïi vio <.' tU.'.'o :;■,.• [■: :■ io lai »îan3 le public *. II ne devait
,L»ii,' p.i* u. .:: V- Vv':- î.» isonnop en parodiant le Cid une
iiouM'iL» |ii\'u\.* .;*:î:^:\i::îii lo. Chapelain était alors fort ma-
lavlt' »l%» Il a:i':i\v\^o '. ::îa:<so< aini:? le vengèrent. A leur tour.
iN !iMw»xi)iv:r r.îio ::i^v i:o io ^.'orneille et tournèrent contre
l'i lierai .iv'.uiv':n v'o-.i "..i s-i'îu* ta me use du pardon accordé
|i if \u^:usu' .1 v'::i::.i. 1 n iiuitulôrent cette parodie Boileau
l'f* ..; i \t"t •/ ■ ■ (.•'. ('■ .■ •; *. iuiU*s o;?i sur la sellette, mais sa
l.iinilU» l't smuni: <vni p-'ic* lîi» :?orii pas épargnés, et le niinis-
!io »Mi plutO^i Ciï r.u'!.i;ii so moiiire encore plus dur qu'Auguste
\\\ \vMH lo lOviv. lvMslo.ia. mais ceux dont tu le tiens
t'inont s^otM .ii* luMîîr. <.ins hoiiueur et sans biens.
:\»*olas lin iiuMuo i»sr mis onoause : on Taccuse d'avoir aidé
non iw'vc a v'omposor lo lihoilo outrr.geant, et Ton fait dire à
l'iiulrur Jo lji /*Jii'c:'/V ;
Pi'NpiiMu\ iju'.ij'ivs tout jVstiaiais davantage
V\\ NOïxi «K» ^-oiupUoo on 00 laoohant ouvrage.
' ( o iUw vl«' \ lU'N «tait iu- u\iv llillos. Tiillemaot. M. d'Esmery, t. V, p. 89.
.^•lu^ li\>u\oi>rt en li'nii iV^pvèaux dans sa société. BrosseUe, Avis sur la
II' ^'itirr,
•■•■ rullt'iiiaiil. iUsty^ritttt' tie Chapelain, i. III, p. 276, S78.
» l.rllrrs kW Joaii r.liapelaiii. ^^ décembre 16(54. t. II. p. 376, noie 1.
^ lirosscMc. Comm. ^u>' la sit/. //«, v. 17, dit que dans cette parodie,
M. C.uihrrl i*iMivHiiu|uuil hosprôaux d'(>tre l'auteur de quelques libelles qui
pnniiMsnirnt iilttrs. Klli- est surtout faite contre Gilles. V. Tallemant« éd. Pau-
lin l'iin^, t. IV. p. -ii. — Boileau avait attribué cette parodie à de Pure.
LA LEGENDE DE BOILEAU 479
Le frère, médisant autant et plus que toi.
N'a pas craint de vomir son venin contre moi ^.
Ainsi les deux fils de Gilles Boileau, l'ancien greffier du
Parlement, étaient accusés d'avoir pris part au Chapelain
décoiffé^ y et tous deux étaient en butte à l'animosité furieuse
du vieux rimeur et à la colère de Colbert. Un autre membre
de la famille, Pierre Boileau, sieur dePnimorin, s'était égale-
ment compromis dans cette lutte contre a le Roi des Au-
teurs*^». Plus âgé que Gilles et Nicolas, puisqu'il était leur
frère du premier lit et qu'il était né le 5 avril 1625, il n'était
pas resté dans la poudre du greffe, mais il ne cultivait pas la
poésie. Mondain, gourmand et paresseux, et point du tout
homme de lettres, enjoué, malin et spirituel toutefois, il ai-
mait à plaisanter dans les compagnies contre la Pucelle et la
présence même de l'auteur ne gênait pas la liberté de son
langage. Un jour le vieux poète, accoutumé aux respects et
aux adulations, perdit patience et lui dit d'un ton méprisant:
a C'est bien à vous à en juger, vous qui n'êtes qu'un igno-
rant et ne savez pas lire ! » — « Hélas ! répartit vivement
Puimorin, je ne sais que trop lire depuis que vous faites im-
primer *. » Voilà riposter en homme d'esprit qui n'a pas peur
de ses opinions et n'abandonne pas ses parents. Gilles n'eut
pas ce courage. Recula-t-il devant le courroux de Chapelain,
céda-t-il à la jalousie qui commençait à l'animer contre Ni-
colas? « Ce petit drôle, disait-il, avec un air de mépris et de
* Recueil manuscrit provenant de M. Alexis Monleil, et cité, dans une note
de l'édition de Talleraant par Paulin Paris, 1855, t. IV, p. 44.
^ C'est bien cette pièce qui a donné lieu à la parodie de Cinna ; ces trois
vers le prouvent: Au mépris du public ta satire m'immole. Et le Percé m'a
peint d'une couleur si noire, Que toute ma faveur n'a pu sauver ma gloire. » —
On sait que la scène IV, du Chapelain décoiffé^ commence par ces mots :
Perce' jusqu'au profond du cœur.
3 Sur Puimorin. V. M. Gaston Bizos, Les frères de Hoileau-Despréaux,
p. 27 à 36.
* On ne sait pas la date précise de cette anecdote, rapportée par le Bolœanay
Brossfttte. {Comment, sur le vers 90 de la satire IV, et les mémoires de Louis
Racine, p. 226. Mais le fait a dû se passer avant la brouille de Racine et de
Molière. En effet, les mêmes auteurs nous apprennent que les deux poètes
travaillèrent à frais communs à mettre en quatrain la spirituelle réponse de
Puimorin. C'est après le 18 décembre 1665, que Racine et Molière se brouil-
lèrent.
- . -■ - ..'*. :.. 11*:.: a :i la
-rSL •-.-" -=._ . .«êiine frère.
»- - - .. ■ >-.._■ -. -.-5 ;.-.n le ov-
- -. ' - .-^.v .- Tra::a «on
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N.i > - .- -•t — i.: "35 frelons qui
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s.-.i V . - - -" - - i:..î • :'ra.i-per le pro-
Z ITt.I.
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i. l\ . . >
* P..': ;• .' • :.--^ aV Colteti, l. V, p. 469.
1:> ». > >.- A vv ■ -. ::-.■... !i fjveur à l'importunitèM.
uesv-.-: iÂ> :■:.":■ : - . • ' -=■ ' r :ir B:-: '-au el qui parut, soit à la
tiii d-: \'yX\ -. .. A.: : ;■■-•..:• l ô-^
' Cos V: >. >-;.:■ "■ - ■ ■ > ■ '. . "■ ■ r -* - ^* 1674. Pari?. Tbiem*. iD-4",
paruiv.r. : c-i- a l ::' . :. ■- ? i-îc- -.-....- lie loG6. Ils nélaient pas encore
ilan^ "t- il. .0:1, -i-.e "e H:.:rv. q.:" B:- -rii j;:p-îile « moDstrueuse ».
y
n
LA LEGENDK DE BOILEAU 481
Ce n'est pas tout, poussant encore plusloin l'audace, il inséra
dans son Discours au Roi des vers où Chapelain, sans être
nommé, était désigne par une de ses œuvres :
L'autre en vain se lassant de polir une rime
Et reprenant vingt fois le rabot et la lime,
Grand et nouvel effort d'un esprit sans pareil,
Dans la fin d'un sonnette compare au soleil^.
Et non content de cette allusion transparente, il ajoute
ensuite :
Sur le haut Hélicon leur veine méprisée
Fut toujours des neuf sœurs la fable et la risée,
Calliope jamais ne daigna leur parler
Et Pégase pour eux refuse de voler.
Ces attaques, à la vérité, n'étaient pas les premières. Déjà,
en 1663, deux vers, assez bénins du reste, avaient été déco-
chés contre Chapelain :
Je ne puis arracher du creux de ma cervelle
Que des vers plus forcés que ceux de la Pucelle *.
L'année suivante, avait paru dans la satire IV le charmant
passage qui commence par ces mots :
Chapelain veut rimer et c'est là sa folie •*.
Toutes ces malices ont le tort d'être postérieures à 1663,
c'est-à-dire à l'époque où le roi
Jette enfin sur la Muse un regard favorable ^
* Disc, au Roi, v.25 à 28. Ces quatre vers, ainsi que les quatre qui précè-
dent el les quatre qui suivent, ne sont pas dans la suite du nouveau Recueil
de plusieurs et diverses pièces galantes de ce temps, (A la sphère) 1665, où
le Discours au l'oi a été publié pour la première fois (p. 82 à 86). Les douze
vers (21 à 3*?) ne sont pas non plus dans Tédiliou monstrueuse.
«Sû^ Ky/, v.29et30.
3 Sat. IV, V. 90 à 102. Au lieu de Chapelain qu'on lisait dans Téd. de 1665
(à la sphère), Nouveau Rec de plusieurs et diverses pièces galantes^ etc.,
p. 59, il y avait dans Téd. monstrueuse Lisiraon, et dans i'éd. authentique
de 1666 Ariste.
^Sat, F,v. 82.
33
LA r.EGENDE HK BOILEAU 483
Interdire à mes vers, dont peut-être il fait cas,
L'entrée aux pensions, où je ne prétends pas *.
Mais je vois aussi dans la même pièce un sentiment d*hu-
meur et de dépit qu'il ne cherche pas même à dissimuler,
lorsqu'il s'écrie à propos de Chapelain:
Qu'il soit le mieux rente de tous les beaux esprits,
Comme roi des auteurs qu'on l'élève à l'empire.
Ma bile alors s'échauffe et je brûle d'écrire :
Et s'il ne m'est permis de le dire au papier.
J'irai creuser la terre et comme ce barbier
Faire dire aux roseaux, par un nouvel organe :
Midas, le Roi Midas a des oreilles d'âne -,
Ce que j'aime moins encore, ce sont les détours qu'il em-
ployait pour faire passer ses railleries contre Chapelain, quand
il les lisait dans certaines compagnies. A l'entendre dire, il
ne récitait pas son œuvre, mais celle d'un bel esprit deCaen,
nommé Delasson, tout à fait inconnu d'ailleurs^. Sans doute
il n'avait pas recours à cette sut)ercherie, pour décliner la
responsabilité de ses malices, mais pour leur donner plus de
saveur et de crédit; confessons pourtant que sa victime et les
amis de sa victime avaient quelque droit de s'en indigner '.
C'était en tout cas, une ruse indigne de lui et je comprends
que i)lus tard, il n'en ait rien dit à Brossette. Et si d'autre
part, son commentateur n'a été que son écho, en répétant
que Chapelain supporta patiemment les railleries*, Tauteur
* Sat. IX V. 307 à 310.
'Sut. IX. V. 218 à 224. M. Perrault le médecin voulut faire à notre au-
teur un crime d'Etat de ce vers (le 224*) comme d'une maligne allusion au
Roi. Brossette. — Il est certiin que dans ce vers, imité de Perse, Boileau ne
songeait qu'à Ciiupelain, mais il faut avouer que le sens qui seprés'^nte d'abord
à la pensée, c'est de voir dans Midas, non pas Chapelain, mais ceux qui
rélevaient à l'empire et, sinon le Roi lui même, au moins Colbert.
3 Lettres de Jea?i Chapelain. CCXXII, à M. de Grentemesnil, 13 mars 1665,
t. I, p. 38. Si c'était dans un écrit public que Chapelain eût produit une pa-
reille accusation, on pourrait en douter; mai«< c'est dans une lettre inlirae que
Je vieil académicien, sortant à peine de maladie et naturellement inquiet de
ces attaques, articule le fait : il mérite donc toute confiance. — Aurait-il été
trompé? C'est peu probable.
* uj'ay assHz de grandeur de courage pour regarder au dessous de moy
4 84 TA LKGF.XDE UV. lîOILKAU
(le3 satires était bien mal informé ou sa mémoire était sin-
gulièrement infi'lèle. Le vieux rimeur manifeste, au con-
traire, flans sa correspondance une indi^rnation qui ne prend
pasla peine de se contenir. C'est d'abord une lettre du mois
de février à M. de Grontemesnil contre certains libelles qu'ont
fails contre lui quelques ['Oètes du Pont- Neuf, quelques chan-
tres de ténèbres qui se veulent faire connaître en s'adressant
à lui, quoiqu'ils ne soient pas seulement de sa connaissance. —
La plus grande partie de la lettre est perdue, mais elle dé-
signait certainement par son nom Boileau-Despréaux et de-
mandait au gentilhomme normand ce qu'il fallait penser des
allégations du jeune satiiique. Surla réponse de Grentemesnil
qui démentait cette calomnie, Chapelain s'emporte avec vio-
lence contre «le nommé Despréaux », qu'il traite de farceur et
de fiipon, et confond avec la basse canaille des poètastres af-
famés. Le roi des beaux esprits n'otait pas tendre, lors que
Ton froissait sa vanité, confite en apparente modestie, mais
quand il accusait Despréaux de a vilaine envie » avait-il tou-
àfait tort? Il faut convenir néanmoins que l'attaquer ouvert
tement était un acte de courage et d'un courage téméraire.
La lettre même que nous venons de citer en fournit la preuve.
Non pas qu'il y eût en 1663 beaucoup de hardiesse et d'ori-
ginalité à penser du mal de la Pucelle. Sur ce point depuis
l'apparition du poème, si longtemps attendu, >i solennellement
annoncé, la Mesnardière et Linière n'avaient rien laissé à
oser et à inventer. On connait la jolie épigramme quîe le der-
nier fit alors courir :
La France attend de Chapelain,
Ce rare et fameux écrivain,
Une merveilleuse Pucelle.
La Cabale en dit force bien ;
Depuis vingt ans on parle d'elle.
Dans six mois on n'en dira rien^.
«Je ne m'amuserai point, écrivait Tallemant à critiquer ce
tous ces traits envenimés que me tire la basse canaille et la vilaine envie des
poètastres affamés.» làid, p. 388. Voilà comment il supportait patiemment.
1 Tallemant, Chapelain, t. IV, p. 166.
LA LEGENDE DE BOILKAU 485
livre, je trouve qu'on lui fait honneur*.» Tant était grand le
nombre des gens désabusés.
Boileau en convient lui-même avec plus de malice encore
que de sincérité :
Mais, lorsque Chapelain met une œuvre en lumière,
Chaque lecteur d'abord lui devient un Linière^.
Le courage ne consistait pas à penser, mais à dire et à pro-
clamer. Vaniteux à Texcès, gonflé de suffisance par l'encens
de ses flatteurs, le vieux poète, doux, complaisant, officieux,
sincère^, cessait d'être un a si bon homme» quand on ne parlait
pas de lui pour le louer. Les gros motjs et les injures se pres-
saient sous sa plume, nous Tavons vu, mais son courroux ne
s'évaporait pas seulement en paroles : il déchaînait contre le
téméraire qui avait osé l'outrager» tout le haut et tout le bas
Parnasse, * il armait pour sa vengeance tous ses amis de la
ville et de la Cour. Et il en avait de fort puissants et de très
peu endurants qui facilement auraient passé de la colère aux
menaces et des menaces aux coups de bâton ^. De ce nombre
était Montausier, esprit austère et farouche, dont les colères,
môme littéraires, n'étaient pas tendres. Ce vertueux et rude
personnage ne parlait rien moins que d'envoyer l'audacieux
satirique rimer, la tête en bas, dans la rivière ou de l'expédier
aux galères couronné de lauriers ^. Moins vive dans l'expres-
sion, mais plus dangereuse au fond était la rancune d'un autre
protecteur de Chapelain, l'impassible Colbert. Celui que Ma-
dame de Sévigné appelait l'homme de marbre, virum marmo-
reum^ ne faisait point de menaces ridicules ; mais il agissait.
1 /rf., ib. p. 164.
2 Sa^/X, V. 235 et 236.
3 Ib. V. 215.
^ Bolœana,
» Chapelain le dit au moins dans sa lettre à M. de GrentemesDil,et quoique les
procédés violents répugnent à son humeur pacifique il n'est pas au fond fâché
de voir ses amis dans ces brutales dispositions: « l'aveu du libelle lui (à Boi-
leau) pouvait attirer une distribution qui seroit bien autrement la risée du
monde que ces impertinentes compositions, ceux qui lui parloient estant tout
propres à l'en chastiersur le champ, sans m'en demander ;ivh\€t mesme contre
mon intention . Lettres de Jean Chapelain^ t. Il, p. 387, 388.
« Brosselte, Cornm. du v. 136 de la Sat. IX.— et du Disc, sur la satire.
LA LEGENDE DE BOILEAU 487
jà vieilles et passées au nombre des vérités acquises. Il est
i moins certain qu'autour de lui, on essayait de le retenir
1 lui montrant le danger de ses railleries*. Il s'y obstinait,
lalgré ces remontrances, mettant un point d'honneur litté-
aire à ne pas avoir Tair d'approuver des sottises par son
ilence, mais aussi pour ne pas abandonner une mine qu'il
.'entendait si bien à exploiter. L'animosité dont il fit preuve
ians cette guerre impitoyable a plus tard trompé les con-
temporains et la postérité, et commencé par le tromper lui-
même. Il a cru qu'au moment où il l'entreprenait, il avait un
plan et une tactique. Je crois avoir montré quelle avait été
l'occasion de cette guerre : elle est d'abord venue du hasard.
Et quant à un système formulé, précis, entrevu d'avance,
lorsque, sans parti-pris, l'on examine ce que Boileau, dans
les premiers temps, a dit non seulement contre Chapelain,
mais contre ses autres victimes, on est tout étonné. Sous ces
jugements si nets, si tranchants, l'on ne ti'ouve ni doctrine
accusée, ni enseignement clairement exprimé. Racine, il est
vrai, reconnaissait à son ami un génie merveilleux pour la
satire, un jugement excellent qui lui taisait discerner ce qu'il
fallait louer de ce qu'il fallait reprendre ^. Ce discernement
précieux, Boileau l'eut de bonne heure, en effet, mais il le
devait plutôt à l'instinct qu'à des principes arrêtés. Rarement
dans ses premières œuvres, il donne la raison de ses éloges
ou de ses injures. 11 attaque, il déchire, il emporte souvent
la pièce, mais de quel droit et pourquoi ? il n'a garde de le
dire. Il excelle à trouver des épithètes dénigrantes, il a le
tour qui tue : on est condamné dès qu'il a parlé : mais le
public doitle croire sur parole. Lui-même a parfaitement dé-
peint et caractérisé son rôle :
Le mérite pourtant m'est toujours précieux,
Mais tout fat me déplait et me blesse les yeux.
Je le poursuis partout comme un chien fait sa proye,
Je ne le sens jamais qu'aussitôt je n'aboyé ^.
* Récréatiom littéraires^ note ras. de Brossetté, p. 24. C'est Molière qui
« vouîoit le détourner de racharnement qu'il faisoit paroitre. »
' Racine, édit. Hachette, in-8", t. VU. — Lettre 113 à J.-B. Rarine du
3 juin 1693.
3 Satire VU, v. 55 à 5S.
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' •- . v<,<, ••. ^'r/.' -,- : :■.■:: i.\'>ry r ">• ^./rv^tr. comédie par
■'■'■'' ■■ ■■ '■'■< '. -r V. i'- '. 1-::-: ■:;..::►: r: ."i-is au iecieur. Paris.
't . ' * \^Ah. l.f, y. i . ..t-'j^i: *:v. ■. . IT â".-;:", . iciev- d'iinpcmer du 17 mai.
LA LÉGENDE DE BOILEAU 489
quand il épouse encore les inimitiés de son frère Gilles, veut-il
parler d*un pédant,
Sa plume pour rimer rencontrera Ménage*.
Plus tard, il se brouille avec son frère et se raccommode
avec le docte auteur de la Requête des Dictionnaires y il n'a
qu'à changer de rime et de victime, et le sens restera le
même.
Si je veux d'un galant dépeindre la figure,
Ma plume pour rimer trouve Tabbé de Pure.
Que lui importe le nom, pourvu qu'il soit celui d'un écri-
vain médiocre, et qu'il s'ajuste bien avec la mesure. Les
exemples de cette indifférence abondent. Se trouve-t-il trop
serré autour d'une table carrée, il trouve tout de suite une
malice à double entente, et dont l'équivoque déplaisait si
fort à Boursault.
Jugez en cet état, si je pouvais me plaire.
Moi qui ne compte rien, ni le vin ni la chère,
Si l'on n'est plus au large, assis en un festin.
Qu'aux sermons de Cassaigne...
Mais la rime avec festin se dérobe, où la découvrir? — Vous
voilà bien embarrassé, lui dit Furetière, que ne placez-vous
là l'abbé Cotin ^ ? Et sans autre raison que ce hasard, le vieil
académicien, à la fois prédicateur et faiseur de vers galants,
entre dans un hémistiche, qui doit
Faire siffler Cotin chez nos derniers neveux 3,
A quoi tient donc la destinée? A son tour, Molière, prendra
1 Sut. II f V. 18. La substitution se fît dans la première édition authen-
tiqua .
' Commentaire de Brossette sur le vers 60 de la Sat.IlI . — Notez que
Boileau ne raille point Colin comme mauvais poète, mais comme prt^dicateur
peu couru. Or, à cette époque, l'abbé avait renoncé à la chaire. Il se fait
dire, en effet dans la critique desintéressée sur les Satires du temps :
u Vous qu'il traîLe de prédicateur d'aujourd'huy, quoy que vous ayiez cessé
» de prescher avant qu'il commi^nça (sic) d'escrire.^ P. 12.
3 Sat. /A', V. 82.
490 ls\ LEGENDE DE BOILEAU
celte vi«:time J'ocoasioii, la mettra sur la scène sous le nom
de Trissotin, et cotnme pour se justifier de cette personnalité
cruelle, renverra à T.» Auteur des Satires '. »
Ainsi procède le ni'^rlant critique. Les médiocrités pré-
somptueuses, les demi-talents arrivés à une sorte de célébrité
s'offrent pêle-mêle à ses rejrards. avec la foule des oubliés et
des obscurs. Il ne choisit pas, il saisit au hasard, persuadé
qu'en s'altaquant au premier venu, il ne peut manquer de
tomber sur un mauvais auteur. Frapper plus fort que juste,
étonner par la hardiesse et le redoublement de ses coups,
plutôt que par leur parfait à-propos, voilà sa méthode et sa tac-
tique. Et il en convient sans honte.
Faut-il d'uu froid rimeur dépeindre la niauie ?
Mes vers comme un torrent coulent sur le papier,
Je rencontre à la fois Perrin et Pelletier,
Bardou, Mauroy, Boursault, Colletet, Titreville,
Et pour un que j'en veux, j'en trouve plus de mille.
Aussitôt je triomphe, et ma muse en secret
S'estime et s'applaudit du beau coup qu'elle a fait *.
«
Que la tête lui tourne, Bonnecorse et Pradon prendront la
place laissée vide par Bardou, Mauroy et Boursault ^. Pour-
quoi rougirait-il de cette versatilité, se refuserait-il le plaisir
de changer de proie. 11 s'est fait un devoir de conscience de
n'épargner personne.
En vain, je veux au moius faire grâce à quelqu'un,
Ma plume aurait regret d'en épargner aucun ^
Je voudrais pouvoir convenir que ces exécutions en masse
ont été d'un salutaire effet, et que la cause du bon goût y a
gagné tout autant que la célébrité de l'exécuteur. Plusieurs
raisons m'empêchent de suivre entièrement sur ce point l'opi-
nion commune. La première, c'est que Boileau n'a rien ou
1 Femmes savantes, acte III, se. 5.— Il faut observer pourtant, que la
partie odieuse du rôle de Trissotio ne pouvaitconvenirà l'abbé Cotin. Celui-ci
a fourni seulement Toriginal du poète ridicule.
« Sat, VII, V. 42 à 48.
^ Ces trois noms ne disparurent qu'après 168*2.
* Sflf/. V7/, V. 51 i'tr)2.
LA LEGENDE DE BOILEAU 491
presque rien appris au public sur le mérite de ses victimes.
Le plus souvent il s'en prend à des auteurs décriés ou ou-
bliés. Il le reconnaît en plus d'un passage.
Ceux qui sont morts, sont morts.
Le tombeau contre vous ne peut-il les défendre * ?
Ma principale raison , c'est que dans cette guerre d'épi-
grammes, de bons mots, d'épithètes déshonorantes, il n'a
presque jamais édifié ses lecteurs sur la justice de ses con-
damnations.
y y vois des malices heureusement tournées, qui portent
larement à fuux, je n'y vois pas de leçons. De nos jours
Sainte-Beuve, pour montrer l'utilité littéraire de ces premiè-
res attaques, a dit finement : « 11 f<illait beaucoup d'audace
et de courage pour tenter son entreprise. Il ne s'agissait rien
moins que de dire aux littérateurs les plus en vogue, aux
académiciens les plus en crédit : t Vous êtes de mauvais au-
teurs, ou du moins des auteurs très mélangés. Vous écrivez
au hasard ; sur dix vers, sur vingt et sur cent, vous n'en avez
qu'un ou deux de bons et qui se noient dans le mauvais goût,
dans le style relâché et dans la fadeur ^. » A merveille, c'est
parler d'or, mais qui parle ainsi? C'est Sainte-Beuve et non
Boileau. Peut-on même employer le mot d'entreprise, dire
qu'il eut dès lors un plan concerté d'avance, qu'il a débuté
par une guerre en règle? Il obéit à son humeur grondeuse,
il exerce sa verve satirique ; c'est plus tard seulement, après
le grand bruit fait autour de ses premières œuvres, qu'il en
verra l'effet et en mesurera la portée. Ce qu'il a fait d'abord
par instinct, il le fera par dessein ; la « fureur extrême » à
laquelle il obéissait dans le principe deviendia dès lors une
entreprise poursuivie avec une ténacité passionnée : de sim-
ple ferrailleur il deviendra, encore plus et mieux que Molière,
Dans les combats d'esprit savant maître d'escrime '.
Désormais, critique de profession, il attaquera ceux qui
riment contre Minerve, au nom de Minerve et de la vérité.
1 Saf. IX, V. 94, 95.
* Sainte-Beuvo, Causrricn du lundi, o* édit., tome VJ, p. 5U0.
4S'* -VA LEGENDE DE BOILEAL"
Mais '/est ja seulement sa seconde manière : au dcbat.
Il Le rê&iîie point aj torrent qii ît-niraine-
pai«. et cela ne tai'Jj |>oint à arriver, quand il se rii applaudi,
ij prit, avec la conscience de «a force, le sentiment plus clair
de sa i'iiission : i. vo'i.ut v-.re *-i ûr. «.-m rcàliiî le grand jus-
ticier du Parr^asse.
On ne saurait trop insister sur ce point : iî n'en était pas là
dans ses premières satires. Il a. du reste, dans son Discours
an Roi, exprimé, beaucoup mieux i|u'on ne saurait le faire,
cette façon d'allor à l'aventure, sans dessein prémédité :
Des sottises dj teuip» je comi. -se mon fiel.
Je vais de to'Jtes narts où ri.e :."iide ma veine.
Sans tenir en marchant «me r.'«ite certaine
Et sans ^êner ma pliime en ce libre métier.
Je la laisse au hasard courir sur le papier-.
Un instinct, mal défini, mais généralement sûr. lui fait sen-
tir la médiocrité er les mots pour la signaler lui arrivent sans
peine: peu précis, mais forts et expressifs, arrangés dans un
cadre heureux, ils frappent vivement Timagination et entrent
dans la mémoire pour n'en plus sortir. Tantôt il représente
Colletet
ciotté jusqu'à l'échiné,
Allant chercher son (lain de cuisine en cuisine,
Tantôt, lassé du travail de la rime, il s'écrie piteusement :
J'envie en écrivant le sort de Pelletier,
de ce Pelletier qu'il a cependant tout entier
Roulé dans son office en cornets de papier.
D'autrefois, se souvenant, à propos, d'une exclamation de
Balzac, il admire le bienheureux Scudéry :
Ses écrits, il est vrai, sans art et languissants
Semblent élre formés en dépit du bon sens'.
« Sat. VIL, V. 94.
^ Discours au roi^ v. 76 à 80.
3 Sat, 1. V. 77 et7«. — Sat. Il, v.76. — Snt IlL v 127, 128. — Sat.
//, V. 77 à ST).
.■:l
LA LEGENDK DE BOILEAU 493
Ces jugements mordants semblent beaucoup dire: en réa-
lité, ils n^apprennent pas grand cbose au lecteur qui pour-
tant les accepte bon gré mal gré, et condamne ce que con-
damne le poète, pour ne pas se condamner lui-même et se
confondre dans la foule des sots, toujours prêts à lire un mau-
vais ouvrage * .
Une épithète et tout est dit : l'auteur est à la mer; c'est le
coup de balai du marin qui nettoie le pont et jette par dessus
bord tout ce qui Fencombre. Boileau n'a pas même besoin,
pour pousser dédaigneusement les uns sur les autres les écri-
vains médiocres en dehors du Parnasse, de chercher des quali-
fications outrageantes, il a Tart de faire des injures de leurs
noms même, par la façon dont il sait les grouper :
Je rencontre à la fois Perrin et Pelletier,
Bardou, Mauroy, Boursault, Colletât, Titreville^.
A la même époque, Molière déblayait aussi le Parnasse,
mais comme il procédait avec plus de précision et de doc-
trine ! Sans en avoir Tair, il donne des leçons,
Et sa plus burlesque parole
Est souvent un docte sermon ^,
Quelle finesse et quelle sûreté de critique, même dans la
farce des Précieuses I Comme les travers et les dangers du bel
esprit éclatent à tous les yeux ! M'^« de Scudéry n'est pas nom-
mée, mais pourrait-on mieux, par la seule manière plaisante
de Pexposer, livrer au ridicule «la filophie du grand Cyre*?»
Et quand le bonhomme Gorgibus, àla fin de cette inestimable
bagatelle, fait sa fameuse sortie : « Et vous.... sottes billeve-
sées, pernicieux amusements des esprits oisifs, romans, vers,
chansons, sonnets et sonnettes, puissiez-vous être à tous les
diables » ! le spectateur sait à quoi s'en tenir et sort de cette
leçon littéraire, instruit et édifié. Le fond est le même, mais
* Mais ils trouvent pourtant, quoiqu'on en puisse dire, un marchand pour
les vendre et des sots pour les lire. Sat. IT, v. 81-82.
2 Sat. VIL V. 44-45.
3 Boileau, Stances sur l'Ecole des femmes.
^ C'est là le point de départ des plaisanteries contenues dans le Dialogue
des héros de roman.
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til •';•.;':. .'r'j; -,-; \ii\i-.': a..-';r a î.:--? hv-.-.: I-'iilint»' :
^>/fr.r.'.'- <;fi t.^.-n.'':-: ishlnni:-. ios oh-j-ïCS-là sont mises.
ioiH:i\(,t il lion^Jit îiV';-; Aî':o>te et s'écrie :
• Ar.L I, :.r. 2
' \I. JiiW-f. I,"!ni;iiir»-, Annales polit, ft lift, «lu 8 septembre 1889. Cf.
A,irr,l..f liftrrn, ,'■':. \. ]\\^ p. 36.
LA LEGENDK DK BOII.EAU 4 95
Kt quoi, vil complaisant, vous louez des sotises !
et, quand il a qualifié de cette rude manière tous les faux bril-
lants où chacun se récrie, il donne, avec un emportement
magistral, la preuve de son dire :
Ce style figuré dont on fait vanité
Sort du bon caractère et de la vérité ;
Ce n'est que jeu de mots, qu'aff^ectation pure,
Et ce n'est point ainsi que parle la nature.
La preuve peut ne pas paraître évidente à nos yeux, mais
elle a fini par le devenir à ceux des contemporains et long-
temps la postérité s'en est contentée. Pour Molière, c'était
Tessentiel, et le but était atteint.
Ainsi le grand maître, que les apôtres de Vart nouveau ^^ro-
clament encore aujourd'hui « celui dont les dramaturges
modernes, doivent s'inspirer * », ne s'était pas contenté de
donner le signal de la lutte contre le bel esprit et de la com-
mencer. 11 poursuivait et achevait la victoire en exposant des
théories et des raisons claires et précises. Boileau, auquel il
avait montré le chemin, ainsi qu'aux autres, en faisait-il
autant ?
Le Misanthrope qui contenait cette leçon de goût parut en
1666 : la même année Despréaux publiait la première édition
de ses sept premières satires. Si Ton demande lequel des deux
poètes est le maître, le chef d'école, le législateur du Parnasse,
n'aura-t-on pas toute raison de répondre avec assurance, c'est
Molière ?
Il ne faudrait pas pourtant ne voir dans Despréaux qu'un
simple imitateur. Dans cette voie du bon sens et du naturel,
où l'auteur des Précieuses l'a devancé et l'a fait entrer, le
jeune satirique apporte quelque chose de personnel, un prin-
cipe régulateur qui manque un peu, soit à Molière, soit à ses
autres amis. Disciple sévère des grammairiens et des stylistes
de l'âge précédent ^, il est passionné pour la pureté et la cor-
* Conférence de M. Henry Bauer, sur l'art nouveau au théâtre, du
12 avril 1890.
' Bossuet, dans son discours de réception disait à l'Académie « la justesse
est devenue par vos soins, le partage de notre langue. »
4S^f\ LA LKriRNDF DE HOU-EVr
rection de la forme. Ci? ([u\\ enseignera dans /M/7 puétique
avec tant d'insistance.
Surtout qu'on Vos ôoîits I.i langrie révérée
Dans vos idus grands excès vous soit toujours sacrée, *
il est le premier à le pratir[uer pour son compte. Avec le souci
dé la langue, il a celui de la versification : il s^inquiète in-
cefisaoïment de la rime :
Dans ce rude métier où mon esprit se tue.
Eu vain, pour la trouver, je travaille et je sue.
Ce qui le tourmente, c'est qu'il s'acharne à la mettre d'ac-
cord avec la raison, à concilier l'expression et le bon sens. Il
l'a dit, dans des vers inoubliables :
Mais mon esprit, tremblant sur le choix de ses mots,
N'en dîra jamais un. s'il ne tombe à propos.
Et ne saurait souffrir qu'une phrase insipide
Vienne à la fiu d'un vers remplir la place vide.
Ainsi recommençant un ouvrage vingt fois,
Si j'écris quatre mots, j'en effiicerai trois.
Ou le voit : il est tout entier à cette œuvre ingrate ; per-
sécuté par un désir inassouvi de perfection,
Il plaît à tout le monde et ne saurait se plaire ^
Sur ce point, ses convictions ne sont plus à faire : il est,
dès le début, ce (|u*il sera toujours, le maïayr ou le confesseur
du travail difficile- Voilà son originalité, son lot dans l'œuvre
commune. Il me semble cependant qu'en cela même, il subit
l'influence du génie fécond et inspiré qu'il a pris d'abord pour
guide. 11 sent, peut-être mieux et plus largement qu'il ne le
sentira plus tard, que l'art ne consiste pas uniquement dans
l'effort soutenu, et qu'à la retenue qui est Teffet du jugement,
il faut joindre la hardiesse qui convient à la liberté '. C'est
* Art poétique^ I, 155.
« Satire II, v. 13 et 14, — v. 47 à 53, — v. 94.
3 Ou y voit la hardiesse qui coDvieot à la liberté mêlée à la retenue qui est
l'efTel du jugeineat et du choix. Bossuet, Disc, de réception à VAcadémi^t
8 juin 1671,
LA LEGENDE DE BOILEAU 497
alors qu'il demande les" secrets de Tinspiration spontanée au
Rare et fameux esprit dont la fertile veine
Ignore, en écrivant, le travail et la peine *.
11 n'enferme pas encore la poésie dans des limites trop
étroites, dans un petit nombre de cadres fermés qui ne peu-
vent pas s'élargir. Comme le conseillera plus tard Voltaire,
il donne des préférences et non des exclusions •. Celui qui
devait reprocher à ce même Molière, avec une sévérité à la
fois si timorée et si dédaigneuse, d'avoir sans honte allié
Tabarin à Térence ^, n'était point alors, si Ton en croit La
Fontaine, aussi scrupuleux. « Vous savez », lui fait dire l'au-
teur de Psyché, « combien nous avons ri en lisant Térence
et combien je ris, en voyant les Italiens ; je laisse à la porte
ma raison et mon argent, et je ris tout mon soûl *.» Ses amis
qui l'étonnent et l'éblouissent par leur fécondité lui laissent
à peine le temps de réfléchir sérieusement aux conditions de
l'art. 11 assiste émerveillé aux enfantements de leur imagina-
tion, et, comme il a pour ainsi dire sous les yeux le génie en
action, il voit, il sent qu'il y a des beautés qui se dérobent
aux règles, que les poétiques n'enseignent pas, qu'elles n'ai-
dent même pas à expliquer et à comprendre. Un instinct con-
fus lui révèle que, dans les affaires de goût, le sentiment,
c'est-à-dire quelque chose d'indéfinissable, est souvent le seul
et dernier juge : un juge qui, semblable au peuple souverain
de Rousseau, n'a pas besoin d'avoir raison. 11 le dit du moins,
en termes excellents, dans la dissertation qu'il composa sur
la Joconde de La Fontaine. « Bouillon, méchant poète » , écrit
Brossette, aavaitaussimisen vers français la même aventure...
tirée de l'Arioste * ». Les beaux esprits n'étaient pas d'accord
sur la préférence à accorder aux deux ouvrages. Parmi
les amis de Molière, l'abbé le Vayer était pour l'un, un
nommé Saint-Gilles se déclarait pour l'autre. Despréaux fut
peut-être chargé de tenir la plume par les arbitres choisis
* Sat, II, v. 1 et 2.
' Lettre du 15 avril 1743, à Vauvenargues.
3 Artpoét, m, V. 398.
* La Fontaine, Psyché^ livre I, éd. Lefèvre, t. I, p. 399.
* Comment, sur le vers 52 de la satire X.
31
♦ -
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y. : ' .. . .- -. -• . . - .1 ,'.'. ; L.L l'^s ie Boileau
: .: ' "* •. ■ - " ■ ^ ■ -- ^ frj.L.îe heure, lel
-r .....::.: : — -. . . i.-. r: ;: -::,.»l;e:' de Molière,
■/t ?....--..--.. :.. : :- j_: .... :.f ?..: lis résistera i'eni-
vrfuiri.: ;... *.....-. '. .._i..... r if ji surériorité comme
c: :. ".■.. >- . . .. .■.--:.-....-?.■■: ijres '.a première édi-
:..:. ..'..-•. : -. - .^ •- ".'.•.•.. Uiiiii ression. qui est
s.-v. :.: ..;... - : ... .* :..--.:. jjres. avait été un
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c'j.t':::T. I .. . -. ....:. .. .".. . Y ..t' r:e éiAit accomplie.
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lu::', i:. -.riT":: .\: -.- : .:*t>::î':- r.-./rrent les applaiidis-
.SL:i.c:-:> '. : "..= - : : .[..:l..:.: ;.>. I-:S j?r.< î'-.SM'it et le vulpraire
ma'.::i io.iorc:.: .wo. ■:.-.:.-; ::-. : .r? :t .vj-jr? iiiiéressés protes-
te reii: ave." i::..? - . !l: •: :.i; sj-use. L*;.l':.'é Cot in. entre autres,
fit uue sa'ti'.e vi e:.: ■ ... ::: .0 ::a:::-.;: Mi^not assura le débit,
en rempl.van: :\ er.vel. : :- : '."êx:e!!eîits biscuits, recherciiés
de tout l\iri< ". Bour>:-. ;!: :■ oïl: os a la Satyre des Satyres,
' Les fp'aml>' é'."i ■'.:.'?!> t/*: F?'i.r-. '.£.'.?v^ de Jean de La Fontaioe, t. I.
Sotke tio'jraphiqu'^, par M. P. Me-^iri. p. 72.
^ CEuvres .:e Bo! e^u. ei. Gi Ir". i.III. p. 15S. — Bjileau. dans sa Préfdce
de 1*01, dit encore : 'Jue si on :îi? deiaaaie ce que c'est que cet agrément
et ce Sri, je rôpo:) iiài <|u-? •:>-: i-;» j? ae siis qu •! qu'on peut beaucoup mieu.\
.se>///r que dirii ■' . .Mu.- 1. t's-d ^ri de Toxpliquer. « A mon avis, néanmoios,
il consifsle pri:ic!pa:eîiie::l à n'.* .j uîiais présenter au lecteur que des pensées
vraies et des expie ■pi'jîi> JustP?. ^» Ce nV.st plu? la même cho-^e.
* Le vers célèbre : Et de lart inô:ne apprend à franchir leurs limites (Art.
poét. IV,77) est un précepte émis par Molière dans une conversation avec ses
amis. Voy. Comment, de la Sat. IV, vers 91.
* Satire VII, note du vers 8S.
" Est-ce comme Je croit Berriat, CEuvres de Boileau, tom. 1. Notices 6*-
LA LEGENDE DE BOILEAU 499
plate et ennuyeuse contrefaçon de la critique de V Ecole des
Femmes ; enfin, sous prétexte de tenir la balance égale entre
Boileau et Tun de ses adversaires*, le même abbé Cotin re-
vint à la charge et publia, sous le voile de Tanonjme, une
brochure intitulée : la Critique désintéressée des Satyres du
temps^. Boileau, traité sans gêne comme il avait traité les
autres, appelait ces publications des « libelles diffamatoires.»
En réalité, sauf quelques interprétations fort malveillantes ',
mais auxquelles se prêtaient facilement quelques vers assez
imprudents de Despréaux, on u*allait pas plus loin que lui
dans les censures. 11 affectait, d'ailleurs, de regarder ces « pe-
tites vengeances avec des jeux assez stoïques »; dans le fond,
il était plus irrité et plus troublé qu'il ne veut le dire. Il fit
même d'activés démarches pour interdire la représentation
de Tinsipide comédie de Boursault, et pour arrêter la vente
de l'impression qui en avait été faite. Il y réussit par la pro-
tection du premier président de Lamoignon*; mais il se garda
bien de se vanter de ce succès devant le public etla postérité.
C'est toujours l'éternelle histoire du cœur humain:
Nous nous pardonnons tout et rien aux autres hommes,
On se voit d'un autre œil qu'on ne voit son prochain ^.
« Dans le même temps, disait plus tard Perrault, qu'il fait
défendre à tout le monde de l'attaquer, il se donne la permis-
sion d'attaquer tout le monde ® » . Il aurait pu cependant se
bliograph., § 2, n»» 5 et 6. Despréaux ou laSafyre des Satyres^ gr. ia-12,
pièce anoDjTue sans date ni lieu.
< Suivant Berriat, cet adversaire serait Cotin lui-même.
*63 pp. in 8. Chez l'Hermite de Paris, à la correction fraternelle. Bibl.nat.
12805.
3 Discours sui* la satire, 1668.
* Voir Avis de la Satire des Satires de Boursault, — Plachesne, Éloges
du satirique français, p. 19. Recueil de pièces choisies, etc. La Haye,
1714, t. 1 Préface, p. VI.
* Lafontaine, Fables, I, 7.
« Préface de l'apologie des Femmes. OEuvres de Boileau, Amsterdam,
1775, t. l, p. 334-335; d'Alembert (///6'^oiVe des membres de l'Académie
française, t. III, p. 189} et Berriat, Essai sur Boileau, xlviij, veulent jus-
tifier cette contradiction, mais la distinction qu'ils font entre les ouvrages çt
la personne me semble subtile.
■f ; u-t-
,— •■-
■ _ ■» « .
LTt : .f-? t-lrr?.
. .•.•^. ^ :. ' :z. ii' i ;?
r T_i C'.ue. il é privai:
l.âa-er ies audaces
e: laisse, au travers
;>.Li'jn qu'il a de sa
:>.. r
F
1.-. i:.Lî vis liores caprices.
:-=s vr:: .5 e: des vices.
• lh.",ii,i, n, i'j "^'iT^iii, :.:r:. -Tr
■• '"I/."! r ^ •.'.•■• ' .'i, .•', r. ;•..•* JA. -v J= Cr:
T --=r<. Ce discours fuL d'abord publié
■.::r- : SVl res du sieur D***, in-4» de 2,
. ■'.«.-jiiard et Barbio, 1668.
/
LA LÉGENDE DE BOILEAU 501
Décider du mérite et du prix, des auteurs
Et faire impunément la leçon aux docteurs,
Qu'étant seul à couvert des traits de la satire,
Vous avez seul pouvoir de parler et d'écrire*.
]1 n'a pas la prétention de s'imaginer qu'il ait ce pouvoir,
mais il est fermement convaincu qu'il a celui de décider sou-
verainement du mérite des auteurs. Volontiers, n'était l'igno-
minie du rapprochement, il laisserait dire de lui, comme le
disait M™* Pernelle du critique zélé qui contrôlait tout dans
la maison d'Orgon :
Et tout ce qu'il contrôle est fort bien contrôlé ^ .
N'avait- il pas auparavant, dans son Discours au roi, osé,
sous une forme adroite, mais au grand scandale des poètes
courtisans', comparer l'œuvre politique de Louis XIV à la
sienne propre ?
Et tandis que ton bras, des peuples redouté,
Va, la foudre à la main, rétablir l'équité
Et retient les méchants par la peur des supplices.
Moi, la plume à la main, je gourmande les vices*.
Ne dirait-on pas qu'à l'exemple du prince justicier, le
poète tient ses grands jours.
Pour venger la raison des attentats d'un sot^ ?
L'instinct satirique d'autrefois se transforme en mission
expresse, officielle, reçue de Minerve; il ne rime plus au
hasard et par fantaisie, il est le représentant de l'ancienne
satire, le soldat assermenté du goût et de la vérité.
C'est pour elle, en un mot, que j'ai fait vœu d'éciire®.
Désormais aux condamnations vagues vont se mêler, en
* Satire IX, v. 7à22.
* Molière, Tartufe, acte I, se. 2.
^ Boursault, Satyre des Satyres, se. 6, p. 409. « C'est un petit poète et
le plus grand des rois. »
* Disc, au roif v. 67à70.
^SatJX, T. 274.
^Ihid., V. 283.
r>02 LA LEGENDE DE BOTLEAU
(>hjM fçrand nombre, des jugements motivés: il dira parfois à
i^M victimes la cause précise de leur réprobation : il instruira
Mon HJèclo par des leçons didactiques. Non pas qu'il renonce
jarnaÎM îï la prcmiôro manière moins équitable, bien autre-
rn^înt HÙre et efficace : il prodigue encore les traits moqueurs,
Ui4 r.\)\i\iti\o.A qui tuent. Seulement aux simples injures s'asso-
''i'întplus souvent des formes moins brutales, mais non moins
iri«urtfi(;res, Tironie, la conces>ion perfide, la louange qui
préparc un nouvel outrage :
Je le déclare donc, Qiiinault est un Virgile.
Pradon comme un soleil à nos yeux a paru. . .
Pelletier écrit mieux qu'Ablancourt ou Patru. . .
Cotin à ses sermons, traînant toute la terre,
Fend des flots d'auditeurs pour aller à sa chaire. . .
ou bien encore :
Attaquer Chapelain ! Ah î c'est un si bon honçime
Balzac en fait l'éloge en cent endroits divers.
Il est vrai, s'il m'eût cru, qu'il n'eût point fait de vers ' .
Pourquoi, d'ailleurs, aurait-il abandonné son ton tranchant,
sa façon leste d'exécuter sommairement ses adversaires, le
public ne Tavait-il pas cru, sans [)reuve, sur sa simple affir-
mation ?
Ch. Revillout.
(à Suivre)
* Satire /X, v. 288 à 292, v. 204 à 206. — Â-t-OQ remarqué combien la fia
dci dernier passage rappelle une tirade d'Alceste: «Je le tiens, etc. n Misan-
thrope^ IV.
OURDOUNANÇO DE POULIÇO
DE SANT-MAHTIN-DE-CRAU
Dins lou librihoun counserva is archiéu di Bouco-dôu-Rose * e que
l'en ai estracho, aquesto ourdounanço porto ges de dato. Paraens
coume, dins soun proumier article, es fa mencioun d'un mèstre
Ounourat Bastoun, dôutour en tôuti dre, alor juge de Sant-Martin,
e qu'un verbau ^ latin apoundu au teste prouvençaunous apren qu'ei-
cestesiguè legi au pople de Sant-Martin-de-Crau, lou 11 de Nouvèm-
bre 1526, à la requèsto dôu même Ounourat Bastoun, es decrèire que
li dos pèço soun estado redegido la mémo annado, senoun lou même
jour.
Pamens lou teste de Tourdounanço es, de tout segur, mai encian
qu'acô, coume lou provon clararaen li mot : proclamata annis sin^
gulis fieri assiieta, emai la fînalo femenino a que se ié capitosou-
leto alor qu'adeja à la fin dôu socle XV s'emplegavo, quouro Va ar-
caïque, quouro Vo mouderne, de que veici dous eisêmple :
« Senhe payre^ a vous de bon cor mi recomandi, la présent es
per'vous avisar conio y eu ai resauput vostra letro en laquai mi
mandas del cap de Besonhos, yeu ai resauput ma raubo amhe mas
camysos^. »
« Que non si ausa vendre outra la soma de très florins la sau~
mado de très quintals del pes provensal * . »
La lengo de noste doucumen es curiouso. Lou même mot i'es our-
tougrafica de plusiour biais diferènt : Martin e Martim, palun e pa-
htm, jour e jourt, ause e auze etc.... Lou mot mouderne mita se ié
capito même emé très formo 'mitât, mitla e mittat. Aquelo varia-
cioun ourtougrafico-qu'cs d'aiours causo pau raro dins li doucumen
« B. 1413.
^ Veire à la fin aquel encartanien justificatiéu.
3 sÈcLE XV : Letro d'un fiéu à soun paire (bouche e estatistico di bouco-
DÔa-ROSB, vol. 3. p. 178).
* Ate de 1473 (Archiéu di B. dôu R. reg. Potentie, B. 49): Es de reraarca
qu'aquelo marcho dôu proveoçau vers l'uoificaciouD de la fioalo femeDino se
countùoio encaro. Aro lou pople dis sciènço, inoucènço^ ourtougrafo, liogo
de sciènci, inoucèncif ourtougrdfi, etc.
504 OUUDOUNANÇO HE POUUÇO
paleougrafi — pren eici uno graiulo iinpoiirtanço pèr ço que, di dos
formo emplegado, i'a toiijour uno formo arcaïco cm*uno formo en trin
<]t? sa nioii'ioniisa. I a liifho entpoli «los e aquelo hicho provo que noate
(loiioMiiien roiiioiiiitu à-n*-mi tùsns que la Icngo se transfouiinavo pau»
à- cha-pau. à-n-uno op»»co do transioioun.
Do rnîû 5<? ro?contr«) (;ai-e-lai <|uàu(jui mot trespourta dôu francés,
quouro tau o (juau, quouro prouvoiiçalisa, counie malvaysa e ntau-
vni/sa, ço que me fai oiicivire que lou ooupiste carga de la transcri-
ciouii «le 1520 a vouiru nioudernisa soun teste, lou fig^ioula, pèr lou
mètre à l'autour de suun sècle.
Aquéubraveescribo avié belèudeja contre nostolengoU prevenciouii
injusto e ridioulo que fan flùri, vue cucaro, encù di moussiirot e dins
aquelo Universita de quau an jamai pouscu dire que l'Uropo nousn*èro
envejouso.
« «
Farai remarca la justo proupourcioun di peno fîssado dins noste
manuscri, counseiant à-n-aquéli que talo ôusservacioun poudrié es-
panta, d'ana oounsulta is archiou di Houco-dou-Rose li registre di
Clavaire de Prouvènço ; ié veiran de quinte biais espetaclous se
rendié la justiço dins rajre-mejan.
Un oi8''im[)le à l'asai'd : Jaunie Gautiô, passant un jour dins la grand
carriern de l'isolo Snnt-Geniés, douno un oop de luehet sus la teste
au cliin de Hortriaid, fiéu d'Rimoun ; os coundana pèr acô à 5. ,^ôm
d'emèndo, entandôuinensquo Fèire Kafin, prés en flagrant délit d'adul-
tèri emé Bertrando, mouié de Tùulié, e coundana déjà dès an avans
pèrlou même crime i)ôr lou juge di Font, pago uno emèndo de 6 sbu *.
La majo part dôu tcms lis orne soun counvincu de cop e blessa-
duro facho emé d'espaso, de pougnard e même de taravello; de s'èsse
tira lis auriho o pessuga à ti'enploura (!;, d'agué pourta d'arme ene-
bido. Li femo, éli^ soun coupable de s'éstre estrassa lou peu e, subre-
que- tout, de s'èsse di de marri di rosoun. Avien i)as la lengo an
i'ouissiu, vous Tafourtisse, ei'aaqui de cause que farien trefouli Zola.
JJraca, rascassa, hayassa, piitct, ribundella, merdosa, etc. . . soun
li terme amistadous que s'entre-baion, d'un biais que-noun-sai larp
li persouno dôu bèu sèisse. Urous encaro quand camiuon pas sus li
piado de Marieto Costo e de Clareto de Mount-pelié; dôumaci la
première aguè 15 s6u d'emèndo pèr a gué dich à-n-Azalaïs Durando :
Va-if-en vèire dins Veslahle d'Isnard Pèire ubi puer Omtolani
1 Comtft fie Guihèn Renaud de Varcio, Baile et Clavaire de l'Isclo Sanl-
Geniès ruei (loo Marteqdb) B. dôu R. b 1627.
DK SANT-MARTIN-DE-GUAU 505
ASCENDiT SUPER VENTREM filietue', 6 la segoundo n'en siguè pèr
8 SÔU, QUARE GiRAUDE GuILLELMETE, MULIERI FALHITE, ANUM SUUM
MONSTRAVIT ^ .
Sèmblo pas de crèire coume li gènt d'aquest tèms amavon de plei-
deja. Ansin, une noumado Janetoun a 5 sôa d'emèndo pèr agué trata
de pawro soun amigo Beloto que i'avié garça'n lavo-dènt; ^ Janeto
Canibalo n'a 3 flouiin pèr agué mes uno boto davans l'oustau de la
fiho de Louvis Bertin ; * enfin Jaquelino Goge e Jaquelino Sicardo
pagon 13 SÔU, 4 dénié ; eicesto avié apela la pronmiero parpella e
l'autre i'avié di: qu'ella aviaemprintada la gruescha ° que portava *.
Ero un bèu tèms pèr H juge e lis avouent, senoun pèr lou pople.
Fan bèn dire pamens que s'aqueste se vesié manja la lano sus l'es-
quino èro mai qu'un pan sa faute.
Uno cause remarcablo es de vèire aquelo ourdounanço evalna lis
emèndo en lièuro couronna emai en sbu conroima, quaranto-cinq an
après l'unioun de Prouvènço à la Franco, unioun que de doucumen
autenti dis archiéudi Bouco-dôu Rose, provon s'èstre facho en 1481 e
noun en 1486, coume lou creson coumunamen.
Un passage de Papon que m'es esta signala pèr lou moudèste e
saberu archivaire de la prefeituro de Marsiho. M. Fèlis Ileynaud, m'a
donna Tesplicacioun d'aquén fèt. Papon dis efetivamen qu'en 1517 lis
Estât de Prouvènço, veulent faire cala li proucès que neissien cade
jour, preguèron lou rèi Francés \é de permetre: « que V ancienne
forme et coutume de forger tnonnoie fut gardée audit pays, même-
ment touchant la m,onnoie noire "^ ; c'est à savoir: des deniers dits
couronnais dont les 4 valent un liard et aussi patacs valant les 2
un liard et chacun patac 2 deniers dits couronnais et 8 patacs
valant 16 deniers couronnais; les dits 16 couronnais valant un gros
provençal qui est un sol tournois; laquelle petite monnoie est néces-
saire afin que l'on puisse toujours payer les cens et services; les
changemens de laquelle monnoie, si les redevables n'en pouvoient
fixer la valeur, leur tourneroient à grands frais. »
1 Vincèpl BasUrd, clavaire d'Arles, ~b-174.
* Jean Maurouo, clavaire de z-Ais — b-1598.
3 B. 1721.
* Josse Rouget, jusiou clavaire de Berro, b 1636
' Dourgo. De gruescha vèn lou mot- francés cruche.
« Catheri, clavaire d'At, B-1696.
' Monnedo negro èro lou non m douna au bihoun.
.-.'-' i ••»•": .1 ; ; . i. v i :■. m i: i.^ :< ti: : -niTi-siiTie lajcerçsîaac s.i5
!'■.■: -.i-iM .; i..:-. . ■ :.•: :.u.:';' -^ .-f,r-Ti- m :•» la ii >:'_:Ie ie 5aint-
,-,::• ^A .1 fz\z.: :»* Sij.>if i.*7.j.. -..iT.:.: :• : vùija. A l'oir-j de
'i -, i-î 'îi.-. :-Mî.'-..i. -,'^z.- ■/.•'■ î ; * :.i e-s-ii :.i:it i-* f:*:!;:- recui-
' •. .'l-i . î.f 1 *.-«■ "-.1 r'..— I-i TtLI. '
f »-...^^ . __»...
v^.v. . . .'5l'>- e - :-^ :-r.*^iv. 1: : t-^- ai i-r li sesiii:-, L:--: signa vo, e
^,'j »r.\.'j hin -i-i J -: :■. ;v.ià. ..-:i i'i. . :t1; :. irsiiLL* en cOad aquéli que
V*::>; l: -^^,c,i s .H I: : v^roi: :•? lô'ZO i: in:- .:;iaie a^^i-eai préspart
0 r; N o r: r \t B AiîTO »r.v . •: j i : j i r ^ n i re . j i ^ e o :: r ii n àri j^è r lo u capite
'i'ArIfr. a la ^oirt tempouralo de Sant- Martin de la Palud-Majour ;
Li R. p. lyjL'vrs -SANi^ouN. pro'joint'iciri aîioustoali, Antôm de li
ToL'RRE, toati dous canounge 'i'Arlee coîjnsegnour dôuvilage;
Olacde Fourtié, di Mîch-\j:llis, olavaire :
Or.iHKN Ma.n'doun. noutari e grefiè.
JoHA.xNOLN SaDjU, Antom SadOli paire e fiéu, e Doumergue
Clkrici abitantde Sant Martin:
P^nfin Jan Maye, Uc Dedolne Glaude Boltâri, prèire.
« Cornnat, monnaie de billon romaine qui avait cours sotfs le pape
IJon X. ADsin dis lou Dicioaoàri de Larrousse. fa pan mot de juste aqui
dediris!
2 Founrionnàri que gardavo li clau dôu trésor e tiravo ii taio.
DE SANT-MARTIN-DE-CRAU 507
Prohibitiones et dkffensiones ac proclamata annis singulis,
IN DIE FESTI SaNCTI MaRTINI, FIERl ASSUETA IN LOCO SaNCTI
Martini- DE -Palude Majori *, pro venerabili capitulo
SANCTE ARELATENS1S ECCLESIE, DOMINO DICTI LOCI ^.
Mandameiit cie par lou vénérable capitol de la Sancta esglisa
(i'Arle, segnour del luoc de Saiict-Martin de laPalun-Maieur,
et per lou commatidament del noble et egrege segnour, Mes-
s®' Honorât Baston, doctour en tous dres, Juge del dict luoc,
soun fâchas prohibitions et defensas a touta persona de qual-
que grad, stat ^ ou condiction que sie, que non auze ne pre-
sumisca jurar ne blasphemar lou non [sic) de Dieu, ne de sa
REVIRAGE
EN PROUVENÇAU DE VUEI
Mandamen de p^ lou vénérable capitô de la Santo glèiso d'Arle,
segnour dôu Uô de Saut-Martin de la Palini-Màjour e pèr lou cou-
inandamen^dou noble e egrogi segnour, M. Ounourat Baston, dôutour
en tôuti dre, juge dôu di liô, soun facho prouïbicioun e defènso à
touto persouno, dequauque grade, estât o coundicioun que sié, que
ïioim ause e noun ague la presoumcioun de jura ni blasfema lou noum
y • Aquéu noum : SantMartin delà Palun-Majoiir, veoié à-n aquéu vilage
de Tavesioanço cJe l'estang de Desèume, uo di priocipau de la Crau.
• Lou terradou de Sant-Martin-de-Crau siguè, coume aquéu de Gaiignan,
baia en 1052, au capite d'Arle, pèr Guihèn, viacomte de Marsiho. (C autert"
tique dôu capite d^Arle^ fo 74, vo).
3 Aquéu mot de stat provo que Ve ioiciau que s'atrobo dins il mot
acoumeoçant en fraocés pèr a {estacioun, espetacle, etc. ...), es relativamea
mouderne.
508 OURDOCXANgO \>E POULIÇO
glorieusa Mayre. ni <îels snnctz et sanctas de Paradis, et
aquo surs la pena de des lieuras per la premiera fes et, per la
segondafes, de estar très horas al colaret, perla tercia fes,
aber la lenga persaHa embe ung ferri cault, coma obstinas, et
la mitât de Tenquesia sera de la court. Tautra mitât de Tacu-
sant *.
Item, que denguna persona non auzo transportar la juri-
diction del dict capitoul, segnour del présent luoc, surs lapena
arbitria del dict monsenhor lo Juge.
Item, que dungun non ause portar espasa ny autre arnes
per lou dict luoc de Sanct-Mariim, surs la pena de centsoulz
de jour et X lieuras de coronat de nuech, per chascum et
chasque vegada ^.
Ttem, que dengum non auze extrayre del dict luoc denguns
de Dieu, ni de sa glouriouso Maire, ni di Sant e Santo de Paradis e
acô sus la peno de dès liéuro, pèr la premièro fes, e pèr la segoundo
fes d'ista très ouro au coulas e, per la tresenco fes, avé la lengo per-
sado em' un fèrri caud, coume ôustina, e la mita de Tenquèsto sera
de la court, l'autro mita de l'acusant.
Item, que deguno * persouno noun ause trespourta la juridicioun
dou di capito, segnour dou présent liô, sus la peno arhitràri dou di
mounsegnour lou juge.
Item, que degun noun ause pour- -'gj^^;*^^ ni autre arnés, pèr lou
di liô de Sant-Martin, sus \^^i;;^ de cent sôu-^y^"" ^ ^ ^'^""^ ^'
couronna, jlejiutôy^per chascun c chasco vegado. ^V^
Item, que degun noun ause estraire dôu di liô deguni^^^' '
Ji-
* Aquéli peno erapachavon pas force li blastèime. Ai trouba proun coirl^
nacioun de gèn qu'avien jura pei' lo ventre de Dieu o per lo vetitre de y
Verges. Un certan Jaume Caloto, arlateo, vai même juscoà dire: Yeu rener^i^
la Ferd/es, e es coundana pèr acô à i2 sôii,6denié d'emèndo (B. dôuR. B-^^^i^î
1714). Preisèmple ai pas trouba d' obstinas Es de crèire que lou fèrri caud
fasié mai d'efèt que lou restant. A Marsiho, 11 qu'avien blasteiraa pagavon uno
emèodo de 12 dénié, mita pèr i'acusèire, e mita pèr la vilo. Se d'asard pou-
dièn pas paga èron coulouma, autant de cop qu'avien jura, dios lou porto diu^
un valat qu'èro prôchi Sant-Martin. {Estatut de Marsiho. Lib. V, Cap. X^
Fan espéra, pèr li maiurous que se mcticn dins aqueste cas, que lou port \
Marsiho èro pancaro ço qu'es encuei.
DE SANT-MAHTIN-LE-CHAU 509
blas, leumes ny autres frucs, que non ayon pagat preiuicra-
ment lou drech del dict capitoul, surs la peno deLsoulzcoro-
nas per chaseun et chasque fes, et confiscation dels dicts
fructs.
Item, que denguna personanon auze, de jour ny de'nuech,
en public ny en secret, jogar a datz ny a cartas, surs la pena
de X lieuras de coronat per chaseun et chasque vegada.
Item, que dengum carretier non auze passar perlas carrieras
del dict luocde Sanct-Martin, ^urs lous ohivals de la carreta,
ou la dicta carreta, quant sera cargada, surs la pena de sine
soulz cha[s]que fes.
Item, que dengum non auze tenir al dict luoc de Sanct-Mar-
tin, ny en son terradour, denguna malvaysa fema malfamada,
su[rls la pena de X lieuras de coronat ''.
ni autre fru, que noun agon paga premieramen lou dre dou di capito,
sus la peno de l sôu coiirouna pèr chaseun e chasco ^ fes e counfisca-
cioun di di fru.
Item, que deguno persouno noun ause, de jour ni de niue, en publi
ni en secret, jouga à dat ni à carto, sus la peno de x liéuro de cou-
rouna per chaseun e chasco vegado.
Item, que degun carreté noun ause passa pèr li carriero dôu di liù
de Sant-Martin, sus li chivau delà carreto o la dicho carreto quand
sara cargado, sus la peno de cinq sou chasco fes.
Item, que degun noun ause teni au di liù de Sant-Martin, ni en soun
terradou, deguno marridofemo, mau-famado,susla peno de x liéuro
de couronna.
* En Arle même lis arrao èroa autourisado, mais la loungour n'èro regle-
mentado. Glaude Leroy, signe coundana à-de-rèng, à 20 sôu e à5 sôu d*emèn-
do par agué pourla, jour e niue, uno espaso mai longo que n'èro permés.
(B. dôuR. B— 1718).
• Emai lou Trésor dou Felibrige h^ia quàuqui^ eisèmplederfe-^MM ansinprés
dins lou sens de nullus^ aquéu mot a quasi toujour vuei lou sens de nemo
e s'eroplego soulet.
' Lou capite d'Arle èro mai catouli que lou papo que barravo lis iue sus un
mau pèr n'eu pas agué un piège.
8 Lou leste prirailiéu porto chasque, qu'es lou masculin e lis eisèmple ié
soun Qoumbroûs de Toublit dôu femeniu.
510 OURDOUNANÇO DE POULIÇO
Item, que denguna fema publica, malfamada, non auze pas-
sar* per lou dict luoc, que non ajo lou segnat *" al bras drech,
que es acostumat de portar a tais femas, que es una agulheta
roja, surs la pena de X soulz per chasque fes.
Item, que denguna tal malvajsa fema publica, impudica et
diffamada, non auze demorar al dict luoc de Sanct-Martiu,
sinon una nuech **, surs la pena de X soulz coronas.
Item, que denguna persona non auze coupar nj rompre
denguns aubres *^ al dict luoc, sinon que sien sieus, uy den-
guna herba segar, surs la pena de L lieuras de coronat per
chascum et per chasque fes, la mitât a la court et Tautra a
l'acusant.
Item, que deguno femo publico, mau-famado, noun ause passa
pèr lou di liô que noun ague lou signau au bras dre, qu'es coustumo
de pourta à tàli femo, qu'es uno. aguïeto roujo, sus la peno de x sôu
chasco fes.
Item, que deguno talo marrido femo publico, impudico, e difa-
mado, noun ause demoura au di liô de Sant-Martin, senoun uno
niue, sus la peno de x sôu courouna.
Item, que deguno persouno noun ause coupa ni roumpre degun
aubre au di liô, senoun que sigon siéu, ni deguno erbo sega, sus la
peno de l liéuro de courouna, pèr chasciin e pèr chasco fes, la mita
k la court e l'autro à l'acusant.
* Es de crèire qu'à-n-aquelo epoco èsti donc èron proun barrularello, dôu-
raaci se trovo dins li piage que toucavo lou segnour di Peno : pertouta carga
de putans, un mountaiit allegrament {Anfos Michel. Us e coustomo di
Prouveuçau. Ll Pa?iturlo.
10 L'idèio de fourça li panturlo à se distiogui di femo ounèslo pèr l'abihage
remounto à la pus auto antiqueta. En Greço pourlavon de raubo pintourlejado.
Pèr i'aguïeto, sabe pas quouro a couraença de s'emplega eu Prouvèoço. Tout
ço que pode dire es que Carie Vil l'establiguè en Franco e que Fraacés de-
z-Ais la douno coumo estent encaro forço en usage, en 1556, à Toulouso em à
Marsiho, Dins esto darriero vilo èro enebi i femo de marrido vido, de carga
certans abihage, li foururo, li beloio d'or, e aquéli que se n'en paravoo èron
fustigado.
D'aquelo aguïeto vèn la loucucioun : connue Vaguieto qu'aplicon i jouvèni
que gourrinejon. Larrousse, dins soun Diciounàri, esplico aquelo espressioun
d'in autre biais que me sèmblo pas d'ametre. Dis que la vueio de Tinagura-
DE SANT-MARTlN-DE-CtlAU olî
Item, que denguna persona non auze cassar, bousquejrar
ny pasturgar dedins lou devens del dict luoc apartenent au
dict capitoul, de jourt ny de nuech, surs la pena de cent
soulz per chascum et pe[r] chasque vegada, de jourt et dous
cent soulz de nuech, la mitât à la court et Tautra mitât à
l'acusant, et auci confiscation de retz, filas, pans, panels, fu-
rons, chins, chivals, conilhs, aussels et autra cassa, cotels,
dextraus et autres engins et arnes a bosquejrar ou cassar.
Item, que denguna persona, privada'^ ou extrange, non
auze mètre dedins las terras, pras, pasturas, boscz, devens et
paluns del dict luoc de Sanct Martin, de jourt ny de nuech,
dengum bestiari, surs la pena ayssy dessouta scripta.
Item, que deguno persouno noun ause cassa, bousqueira ni pas-
turga dedins lou devens dôu di liô apartenent au di capito, de jour ni
de niue, sous la peno de cent sôu pèr chascun e pèr chasco vegado,
de jour, e dous cent sôu de niue, la mita à la court e Tautro mita à
l'acusant, e aussi counfiscacioun d'arrêt, fielat, pan, panèu, furoun,
chin, chivau, couniéu, aucèu e autro casso, coutôu, destrau e àutris
engen e armo pèr bousqueira e cassa.
Item, que deguno persouno privado o estranjo, noun ause mètre dedins
li terro, prat, pasturo, bos, devens e palun dôu di liô de Sant-Martin,
de jour ni de niue, degun bestiari, sus la peno cici-dessouto escricho :
E premieramen, pèr chascun biôu o vaco, chivau o rosso, mibu o
cioun de la fiero de Bèu-caire, li paoturlo d'aquelo vilo festejavon sa patrouno,
Santo Madaleno. e fasien en soun ODoour ùno courso que la joio o'èro un paque-
touQ d'aguieto.
Se l'esplicacioun de Larrousse èro la vertadiero, cowTe l'aguieto se dirié di
tiho que fan m^slié de sa car e que, pèr counsequènt, poudrien prène part à
la courso de Bèu-caire. Mai, au countràri, es di jouvènt que trèvon aquéli
femo qu'acôse dis, di drôle que courron noun soulamen raguieto^ mai encaro
aquéli que la porton o qu'aurieu dre de la pourta.
** A Sisteroun poudien resia très niue, mai i'cro eiicbi dt^ rèn louca de ço
qu'èro estalouira i boutigo, pan, car, etc., à peno d'èstre fourçado de lou
croumpa. {Anfos Michel, id).
*' A Marsiho la peno èro diferèuto segound l'espèci d'aubre chaplado. (V.
Estatut de Marsiho .
*» Persona privada^ oupousa à extrange, a eici la significacioun de per-
souno dôu païs*
512 OUUDOUNANÇO DE POULIÇO
Et preiuierainent per chascum buou ou vaca, chival ou
rossa **, mullet ou mula, et per chasque fes, de jourt surs la
pena de X soulz et, do nuoch, de XX soulz coronas, la mitât
a la court et Tautra mitât a Tacusant.
Item, per chascum aze ou sauma, de jourt, surs la pena de
sine soulz coronas et, de nuech, x soulz coronas, la mitât a
la court, Tautia mitta a Tacusant.
Item, pei' chascum porc ou trueja, ctibra bouc,menon, feda,
mouton et autre bestiari ianut '^, surs la pena de ii soulz de
miolOj e pèr chasco fes, de jour, sus la peno de x sôu e, de niue, de
XX sùu courouna, la mita à la court c Tautro mita à Tacusant.
Item, pèr chascun ase o saumo, de jour, sus la peno de cinq sôu
courouna, e de niue, x sùu courouna, la mita à la court, Tautro mita
à l'acusant.
Item, pèr chascun porc o trueio, cabro, hou, menoun, fedo, môu-
toun e autre bestiari lanu, sus la peno de n sùu, de jour, e demi, e
** Noura douna i cliivau camargueu ; a la significaciouD dôu mot fraDcés
roiissin e noun de 7'osse.
'* Couine FC vèi li porc an lambèn bénéficia de la Revouliicioun. i^outoren-
cian régime pourtavon lano, arc soun vesti de sedo.
lô Li Marsihés, grand negoiiciant, èron mai sévère pèr aqueste délit: leissa-
von la peno à la voulounla dôu juge. (Estatut de MarsihOy Lib. I, cap lij.)
17 Lou ligèire courapreudra proun qu'es pas la dilîculta dôu teste que m'a
fach i' apoundre aquesle revinige. Ai agu tant soulamen pèr toco de faire vèire
quéli pichot cambiamen la lengo dôu sècle XIV a subi pèr veni noste dialèite
ciassi mouderne.
Ai vougu de mai moustra i fenat de rourtougràfi di Bellot e Benedit qu'a-
DE SANT-MARTIN-DK-CRAU 513
jourt et dimi, e sine soulz coronas de imech, la mittat a la
court et Faiitra à Tacusant et per chasque fes.
Item, que dengunapersona non auze vendre al dict luoc de
Sanct-Martim, blat, vin, olj, lieumes, lana, ny autra mar-
chandisa sinon al[s] pes et mesuras del dict capitoul et las
dictas mesuras et pes siam alielas per lous oufficiers [juxta
lous] pes et mesuras del dict capitoul, et aquo surs la pena de
cent soulz coronas et conQscation dels pes, mesuras et mar-
chandisa *^.
cinq sôu courouna de niue, la mita à la court e Taiitro à l'acusant e
pèrchasco fes.
Item, que deguno persouno noun ause vendre au di liù de Sant-
Martin, blad, vin, ôli, liéume, lano, ni autro marchandiso, senoun i
pes e mesuro dôu di capito, e li dicho raesuro e pes sien aliela pèr lis
ôuficié [segound li] pes e mosuro dôu di capito, e acô sus la peno de
cent sôu courouna e counfiscacioun di pes, mesuro e marchandiso *^ .
quelo di Felibre èro pas tant pau naturalo que ço que volon dire. Aquito
Gunte aurien mes: Diou, liouro, aoubres, siou, destraou, saoumou, etc.,
l^escrivèire de noste manuscri boulo fort bèo ; Dieu, lieura, aubres, sieu, des-
trau, sauraa.
Li quàuqui forrao qu'an dispareigudela lengoarlatenco: nuech,dich,drech,
se retrovon dinsd'autri dialéite, lou marsihés preiseraple.
Basto! n'en vaqui proun aqui-sus. Li testard que se volon pas rendre à
Vouitougràfî felibrenco, soun de très meno; lis ascla que n'en dirai rèn ; li
saberu que voudrien tourna à l'ourlougràfi di troubadour, e que n'en parla-
rai pas mai; enfin li viéi qu'aquéu biais d'escriéure ié sèmblo lou pus flame
de tôuti per ço que soulet èro couneigu dôu teras qu'èron jouve e que soun
vuei coume toujour: laudatores temporis acti.
35
514 OURDOUNANÇO DE POULIÇO
ENCARTAMEN JUSTFIFICATIRU
Verhau de la leituro de Vourdounanço de poidiço de Sant-Martin-
de-Crau, facho au pople d'nqtiéu vilage, lou II de Nouvèmbre 1526,
pèr G. Mandoun, noutàri.
Anno incarnationis Domini millesimo quingentesimo vicesimo sexto
et die undecima mensis Novembris, qua die celebratur festum Sancti
Martini, hora vesperarum (sic), seu circa, in predicto loco Sancti Mar-
tini de Palude majori et in carreria publica an te domum habitationis
Dominici • Clerici, coram que nobili et egregio viro, domino Hono-
rato Bastoni, juriiim doctore, judice ordinario curie temporalis castri
Sancti Martini de Palude majori pro capitulo Sancte Arelatensi ec-
clesie, ibidem supra quodam bancum fusteum, pro tribunali, sedenti,
in presencia que etconspectu R. P. dominorum Ludovici Sansonis,
Sancte sedis apostolice prothonotarii, et Anthonii de Turre, canoni-
corum dicte Sancte Arelatensis ecclesie, ccndominorum ejusdem loci,
comparuit probus vir Glaudius Porteri, alias Michaellis, clavarius dic-
te curie, qui eidem domino judici exhibuit et présenta vit prescripta,
édita, sive proclamata et prohibitiones in vulgari sermone descripta
seu descriptas, petens et requirens illa et illas, presentibus habitato-
ribus ejusdem loci, ibidem congregatis specialiter et expresse, adac-
tum hujusmodi celebrandum seu celebrari vendendum, per me, nota-
rium infrascriptum, alta voce et inteligibili publicari, legi et promul-
gari, juxta laudabilem consuetudinem, ut inde habitantes alii in dicto
* loco pro tempore existentes et per locum illum transeuntes, a malo et
prohibitionibus abstineant, et tune dictus dominus judex, dicta edicta,
prohibitiones et proclamata ordinavit ibidem in sui presencia per me
legi et publicari, que lecta et publicata per me extiterunt ad jussum
ejusdem domini judicis.
De quibus probi viri Joannnonus Sadoli, Anthonius Sodoli, pater et
filius ; dictus Dominicus Clerici, habitatores dicti loci, peciernnf (51c)
de premissis instrumentum, eisdem prohibitionibus gratis et sponte
acquiescentes .
Dictus vero dominus clavarius etiam peciit (sic) instrumentum .
Acta fuerunt hec ubi supra, presentibus ibidem venerabilibus do-
* La transcricioun que m'es esfado coumunicado pér lis Archiéu di Bouco-
dôu-Rose porto dominice Clerici, mai es uno déco pèr Pôminici Clerici
ansin qu'hôu provo aquéu tros de l'avans-darrié paragrafo: dictus Dominicus
Clerici. . . . P6u èstre qu'uno erreur dôu coupisto.
LE «LIBRE DE MEMORLVS» DE JACME MASCARO 515
minus Johanne Maye, Hugone Dedonis, Claudio Botarii, presbyteris,
etpluribus alis testibus ibidem congregatis et rogatis, et me, Guil-
helmo Mandoni, notario publico et dicte curie scriba, qui de premissis
acta sumpsi prout supra desterbitur * ; in quorum fidem hic me sub-
scripsi et signo meo manuali signavi .
Signa: G. Mandoni, notarius.
LE LIBRE DE MEMORIAS
DE
JAGME MASCARO
(Suite^)
NOTES
1. — Page 37, ligne 28. « Trencavelh ». Raymond Trencavel, dernier
vicomte de Béziers. Cf. Bulletin de la Société Archéologique de Bé-
zierSf 2* série, tome XIII, p. 409-440 : Raimond Trencavel, par L.
Noguier.
2. — 37, 29. « fes carta et instrumen d'absolucio ». On peut lire
Tacte de renonciation de Raymond Trencavel dans Andoque : His-
toire du Languedoc ^j liv. Xï, p. 359-360.
3. — 37, 37. (( la font del mercat de Bezcs ». Sur cette ancienne
fontaine, cf. Bull. Soc, Arch, d. B, , 1^ série, tome 1 V^ p. 35 et sq. :
Les Fontaines de Béziers^ par E. Sabatier. Voy. aussi sur cette
fontaine et sur le traité conclu avec Bernât Caus et Guilhem Guitart
(p. 38, lign. 17) : Sabatier: Histoire de la ville et des évêques de
Béziers *, p. 450, note 15.
1 Sic pèr describitur,
* Voy. ci-dessus, p. 36 et suiv.
* Histoire du Languedoc avec VEstat des Proviîices voisines, par M.
Pierre Andoque, conseiller du Roy au Sénéchal et siège présidial de Béziers^
A Béziers, par Jean et Henry Martel, et Guillaume Besse, MDCXLVlU, avec
privilège du roy. lo fo.
* Histoire de la ville et des évêques de Béziers, par E. Sabatier, avocat.
Béziers, Carrière, et Paris, Dumoulin, 1854.
51C LE « LIHRE DE MEMOUIAS «
4. — 38, 13. < Johan Kranha ». .)e«in <le Cranis, scoéchal de Car-
cassonue et de Bcziers. Cf. Iliat. gèn. de Lang,, éd. Privât, tome IV,
p. 727.
5. — 38, 14. « mossen Ramon ». Raymond de Valhauquez, évêqne
de Béziers en 1242, mort en 1261. Cf. Andoquc : Catalogue des évê'
ques de Béziers *, p. 99, et Sabaticr : Ilist. d. l. ville et d. év. d. B.,
p. 263-264.
6. — 38, 15. « mossen Guilhein ». Giiilhuime II Arnaud, abbé de
St-Jacques à Béziers. Cf. Bull. Soc. Arch, d. B., 2e série, tome XIV,
p. 300, et Hist, gèn. de Lang.^ éd. Privât, tome IV, p. 585.
7. — 38, 15. « Sant Jacme ». Saint-Jacques, église paroissiale de
Béziers. Cf. Bull. Soc. Arch. d. B., 1" série, tome IV, p. 193-210 :
L'Eglise Saint- Jacques, par Sabaticr; ibid.^ 2*-' série, tome VI, p. 303-
307 : Saint-Jacques de Béziers, par L. Nogiiier; Sabatier : Hist. d.
l. ville et d. év. de J5., p. 102-107.
8. — 38, 10. <i mossen Jacme ». Jacques I^r, abbé de Saint-Aphro-
dise à Béziers. Cf. Bull. Soc. Arch. d. B., 2* série, tome XIV, p. 291,
et Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IV, p. 497.
9. — 38, 10. « Sant Afrodisi ». Saint-Aphrodise, église paroissiale
de Béziers. Cf. Bull. Soc. Arch. d. B., V"" série, tome I, p. 11-24 :
Notice sur V église iSainl-A'phrodise de Béziers, par Sabatier; ihid,,
2e série, tome V, p. 211-217 : L'Eglise de Saint- Aphrodise à Béziers,
par L. Noguier ; Sabatier : Hist. d, l. ville et d. év. d, JB., p. 94-
98.
10. — 38, 28-29. « mossen P. Frezols, cavalier, del castel de la
Veruna ». Ce personnage est sans doute Frcdol 1 de la Vérune (près
Montpellier). Hist. gén, de Lang., éd. Privât, tome IV, p. 559.
11. — 38, 32. a venc a Bezes lo rey de Franssa ». Philippe VI de
Valois (1328-1350). Sur son passage à Béziers, cf. Hist. gén. de Lang.,
éd. Privât, tome IX, p. 486.
12. — 38, 34. « madamala regina ». Jeanne de Bourgogne, fille de
Robert 11 de Bourgogne et d'Agnès de France, dernière fille de Saint-
Louis.
13. — 39, 2. « lo rey de Navarra ». Philippe, roi de Nayarre.
14. — 39, 8. « Aquel anmezeis ». Sur l'établissement de la foire
de Béziers, cf. Henri Julia : Histoire de Bcziers *, p. 324-325. La
charte d'institution de cette foire a été publiée dans le Bull. Soc.
Arch. d. B.j \^ série, tome III, p. 30.
* Catalogue des évéques de Béziers, par Pierre Andoque. Béziers, Martel,
1650-1651. In.40.
« Paris, Maillet, 1845.
DE JAGME MASCARO 51t
15. — 39, 21-29. Voici les noms français de ces diverses localités :
Narbonne, la Grasse, Carcassonne, Limoux, Fanjeaux, Montolieu,
Villepinte (Aude), — Avignonet, Toulouse, Saint- Paul, Saint-
Félix-de-Caraman (Haute-Garonne), — Montréal (Aude), — Sorèze
(Tarn), — Trèbes, Belpech (Aude), — Mazères, Pamiers, Mirepoix
(Ariège), — Albi, Castres (Tarn), — Saint- Pons de Thomières (Hérault),
— Saint-Amant de Valtoret(Tarn), - Lodève, Gignac, Clermont-rHé-
rault, Montagnac (Hérault), — Castelnaudary (Aude), — Saint-Par-
goire, Montpellier (Hérault), — Nimes, Beaucaire (Gard), - Viviers
(Ardèche), — Avignon (Vaucluse\ — Alais (Gard), — Aix, Tarascon,
Marseille (Bouches-du- Rhône), — Orange, Carpentras (Vaucluse).
16. — 39, 26-27. « Castelnoudarri ». Ms. Castel non darri,
17. — 40, 7. « volem ». Ms. volez ; mais 2 ici vaut m. Cf. Revue des
Langues romanes j tome X, p. 278, ligne 25, et C. Chabaneau : Pa-
raphrase des litanies en vers provençaux (Paris, Maisouneuve et
Leclerc, 1886), page 9, note 1.
18. — 40, 14. « volem ». Ms. volez. Voy. la note précédente.
19. — 40, 27. « manifestam ». Ms. manifestaz . Voy. la note 17.
20. — 41, 18. « la gran mortalitat ». 11 s'agit de la peste dite de
Florence^ dont Boccace a immortalisé le souvenir. Cf. Hist. gén, de
Lang,, éd. Privât, tome IX, p. 009, note 2.
21. — 41, 19-20. « en P. Peruc ». Ily a à Béziers, à l'entrée de la
rue Française {al cap de la carieyra franceza)^ une vieille statue de
marbre blanc, que la tradition populaire appelle Pépéziic. Cf. Bull,
Soc. Arch. d. B.j U- série, tome II, p. 23-41 : La Statue de Pépézuc,
par Ladurelle, et Sabatier: Hist. d. l. ville et d. év. d. B.^ p. 67-70.
Une des pièces du Théâtre de Béziers porte le titre de : L^^ ^
ou furieuse indignation de Pépésuc sur la discontinu' uiituae presque
quelques années du Triomphe de Béziers au .r *"^ ^' ^^ P^^^ ^^^® ^®
c'est-àdire de la fête de Cari to/15 (cf. not-«^^^« et Sautz. La même
dans le Bull. Soc. Arch. d. B--- autres noms propres. Ainsi on peut
22. — 42, 3. « Rom^«"Cre Caus et Cans, p. 41, 1.32, entre Serez et
ce nom est écrite d'y entre Morut et Morue, p. 67, 1. 24, entre Rossant
23. — 42, 6-7 ^-c.
ziers, qui étai/ 15-21, « Aquel an meteys. . .». Tout cet alinéa est assez
;Cf. Bull. On voit bien qu'il s'agit de joutes (du de tournois) célébrées
^ur réûCLV de carême entrant (c'est-à-dire le 25 février 1354), auxquelles
2^istent Pierre Fabre, châtelain de Cessenon, Hue d'Archas (per-
ma^nnage j nommé dans une charte Hugone de Archiau), Sicard de
5Murviel et Guillaume de^Mèze. Mais que faut-il entendre par Tex-
5fi pression tener la taula ou tener taula ? S'agit-il de la présidence
^ du tournoi, laquelle aurait été dévolue le jour de carême entrant
? à Pierre Fabre, et le lendemain à Guillaume de Mèze ? Et que signi-
520 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
fieat les mots Celas Raras (ou Razas par mutation fréquente dans
notre texte de r en » et récipro(|uemeiit) et Celas Cubas f Nous pen-
sons que ce sont des noms propres do localités (faut-il songer à Cei-
Ihes et Kocosels dans l'Hérault, arrondissement de Lodève, ou à
Celeiran dans l'Aude?). Mais peut-être pourrait-on n'y voir que des
noms communs désignantdes«e//t?5dG formes différentes, usitées dans
le tournoi.
49. — 47, 29 « la partida dels Reformados ». Nouvelle obscurité.
Qu'était-ce que le parti des réformateurs ? 11 est difficile de le dire
aujourd'hui. Il faut voir là sans doute une allusion à quelque querelle
locale bien connue des contemporains de Mascaro et dont le souvenir
s'est perdu. Bornons-nous à regretter que Mascaro soit ici, comme
c'est malheureusement sou habitude, aussi peu explicite,
9
50. — 48, 16. « lo princep de Galas» . Sur cette irruption d'Edouard»
prince de Galles, dans le Bas Languedoc, cf. Hist. gén, de Lang,f
éd. Privât, tome IX, p. G50-653 et notamment la note 2 de la p. 651.
51. — 49, 2. «lo rey de Fransa ». Jean II le Bon fait prisonnier par
le prince de Galles à la bataille de Poitiers.
52. — 50, 13. « L'an dessus dig. . .». Sur l'envoi de cette députation
à Jean II le Bon, prisonnier en Angleterre, woy. Hist. gén, de Lang.,
éd. Privât, tome IX, p. 687-688, ch. lxxxiv, et p. 695, fin du ch
LXXXIX.
53. — 50, 28. « se caveron las cavas ». Il s'agit des fossés autour
des fortifications.
54. — 50, 29. «lo cardenal de Boluenha». Guy de Boulogne, dit
aussi G. d'Auvergne ou G. de Montfort, fils de Robert VII, comte de
Boulogne et d'Auvergne, archevêque de Lyon, cardinal de Sainte-
Cécile, puis cardinal-évôque de Porto et Sainte-Rufine, mort à
Lérida le 25 novembre 1373. Il fut chargé de nombreuses missions.
Cf. Mas -Latrie, Trésor de chronologie, col. 1 197.
55. — 51, 2-3. « comenseron a plareiar am los clercz». Il s'agit du
procès entre les consuls de Béziers et le clergé de cette ville au sujet
de la contribution que devaient payer les clercs pour la recons-
truction des remparts: la solution de ce procès est indiquée au fol.
21 v°. Voy. ci-après la note 59.
56. — 51, 4. «fouc mot gran descencio ». Cette dissension est men-
tionnée (p. 264) par M. L. Noguier dans ses Recherches sur les
anciennes judicatures de la ville de Béziers (Bull, Soc, Arch. d.
B,, 2« série, tome X, p. 241-343).
57. — 51, 5-6. « niosscn Tibaut de Barbara, mossel senescalc de
Carcassona». Les mots mossel senescalc de Carcassona sont- ils en
apposition à Tibaiit de Barbara, owh'iQW s'agit-il de deux personnages
différents? Thibaut de Barbazan est sénéchal de Carcassonne en 1357
DE JACME MASGARO 521
(Hist, gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 635, 654, 660, 675).
D'autre part, Andoqne, Catal. d. év, d, 5.,?- H6, mentionne com-
me sénéchal de Carcassonne en 1358 Arnaud de Montespan, de la mai-
son d'Espagne (sur cet Arnaud d'Espagne, seigneur de Montespan,
sénéchal de Carcassonne et de Béziers, oî.Hisi, gén. de Lang., éd.
Privât, tome X, col. 369, 1502, 1573, 1584). En 1359, le sénéchal de
Carcassonne est Artaud de Beausemblant {Hist. gén, de Lang.,
éd. Privât, tome IX, p. 698).
58. — 51, 21 et sq. « L'an mccclix foron cossols: Sen Brenguie
Augie. . . .». Voici en latin les noms des consuls de cette année, tels
qu'on les lit dans l'acte de transaction passé entre ces consuls et le
clergé de Béziers {Bull. Soc. Arch. d. B., 2« série, tome VII, p. 21-
37) : « Berengarius Augerii, burgensis, Jacobiis * Gauterubeœ, Jo-
hannis ^ Corrigera, Johannes Garnitï, Pontius Rupho et Malheus
Lombardij consules villœ Bitteri ^ pro se et Johanne Fulcrandi,
conconsule eorumdem absente. . . »
59 — 52, 7. « Aquel an los clergues. . . » On peut lire le texte de la
Transaction entre les consuls de Béziers et les chapitres de Saint-
Nazaire et de Saint- Aphrodise, l'abbé de Saint- Aphrodise et le prieur
de Cassan, touchant leur contribution à la construction ou réparation
des murs de lu ville (2 juin 1359) dans le Bull. Soc. Arch. d, B,,
2^ série, tome VII, p. 21-37. Cet acte se trouve aussi mentionné dans
VHist. gén. de Lang ., éd. Privât, tome V, col. 1454. Voy. aussi ibid.,
tome IX, p. 695-696, ch. xc : Dispute entre les ecclésiastiques et les
habitants de Béziers.
60. — 52, 10. « l'abat de Sant-Jacme». Pierre III, abbé de Saint-
Jacques (1328-1363). Cf. Eist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IV,
p. 585, et Bull. Soc. Arch. d. B., 2© série, tome XIV, p. 300. Dans
le n>s. le mot Jacme est rayé et remplacé par un mot illisible (voy.
la note 1 au bas de la page 52) : ce mot illisible doit être probable-
ment: Afrodisi, Voici, en effet, ce qu'on lit au début de l'acte men-
tionné dans la note précédente: « Noverint universi quod cum quœs-
tio, seu debatum, subortse fuissent et amplius suboriri sperarentur
inter consules et universitatem hominum civitatis Biterris ex una
parte, et capitula sanctorum Nazarii et Aphrodisii ac dominos abba-
tem sancti Aphrodisii et priorem de Cassiano, conjunctim vel divi-
sim, seu raembra eorumdem ex altéra. ... » Il s'agirait donc de Ber-
nard VI de Mandagout ou de Mandagaches, abbé de Saint-Aphro-
• Jacobiis est sans doute une faute de lecture. Lisez Jacobus.
2 Johannis est sans doute une faute de lecture. Lisez Johannes.
3 Bitteri est sans doute une faute de lecture. Lisez Bitteris.
o22 LE « LIBRE DE MEMORIAS »
dise (1353-1370). Cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IV, p.
498, et Bull. Soc. Arch. d. B., 2« série, tome XIV, p. 291.
61. — 52, 10-11. « el prior de Cassa». Cassan était un prieuré très
important, situé près de Roujan (Hérault). Cf. dans le Bull, Soc.
Arch. r^. 5., 1" série, tome VllI, p. 53-79: Le Prieuré de Cassan,
monograplne locale, par A. Crouzat, et Hïst. gén. de Lang., éd.
Privât, tome IV, p. 732-733.
62. — 52, 14. « lo comte de Peyties » . Jean, comte de Poitiers, et
plus tard duc de Berry : c'était le plus jeune fils du roi Jean.
63. — 52, 15. « Pey. deCarato». Dans l'acte mentionné dans la note
59, ce personnage est nommé Petrus de Cazacone et Petits de Casa-
cône*, et dans VBïst. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 696:
Pierre de Caseton.
64. — 52, 15. (f R. la Roqua ». Dans l'acte mentionné dans la
note 59, ce personnage est appelé Raymundus de Rupe, et dans VHist,
de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 696: Raimond de la Roche.
65. — 52, 16-18. « R, Barot, R. Malpel, P. Dorimnis, Pey. del
Lac ». Dans l'acte mentionné dans la note 59, ces personnages sont
respectivement appelés : Hugo Barroti^prœcentorecclestœnarbonensis,
— Petrus Raymundus Malpili et Petrus Raymundus Malapilï, — Pe-
trus de Oriwnis, — Petrus de Lacu .
66. — 52, 24. « Item may ordenero. . ». L'acte de transaction passé
entre les consuls de Béziers, les chapitres de Saint-Nazaire et de
Saint- Aphrodise et le prieur de Cassan, au sujet de la réparation des
ponts, chaussées et fontaines, acte par lequel les religieux s'engagent
à donner le neuvième, se trouve dans la collection Doat, 60, folios
123-162. Cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome V, col. 1454.
67. — 53, 1-3. Voici la disposition du ms. :
sen Johan Cabrayressa per canabassies. Etaquestan comêsero aver \
I cossol g êcaras ( aqulhiro
no avian ahut. Et agrô lo q Jos pelicies los\
68. — 53, 9. « m. franc *>. Au lieu de m. frange {-^zmieg franc) le
ms. porte : z. franc. Cf. note 17.
69. — 53, 23. « persso ». Inutile de dire que le ms., ici et dans tous
les cas semblables, écrit, comme un seul mot, persso. Le redouble-
ment de r« marque qu'elle doit être prononcée dure. Pour la commo-
* Cazacone et Casacone sontsans^doute des fautes de lecture pour Caza"
tone et Casatone. Mascaro appelle ce personnage Carato pour Cazato par
suite du phénomène fréqueut/dans notre texte de la mutaMon de r en z et
réciproquement. Dans l'édition^ de la Soc. Arch. d. B., la leçon P. de
Carcito est évidemment fautive.
DE JACME MASCÂRO 523
dite de la lecture nous avons séparé les mots ainsi réunis, mais en
conservant les deux s..
70. — 54, 5. M Guilhem ». Ms. Guilhez. Cf. note 17.
71. — 54, 10. tt Gassiot del Castel ». Garcion del Castel, chef de
routiers. Cf. Hist. gén. de Lang.^ éd. Privât, tome IX, p . 726.
72. — 54, 11. « Cesseras ». Village de l'arrondissement de Saint-
Pons (Hérault).
73. — 54, 12-13. « lo comte de Tustamera, que era frayre del rey
de Castela ». Henri, comte de Transtamare, frère de Pierre le Cruel,
roi de Castille.
74. — 54, 14-15. « Segui de Badafol ». Sur Seguin de Badefol,
chevalier gascon, et la prise de Frontignan, cf. Hist. gén. de Lang.,
éd. Privât, tome IX, p. 724 et p. 775, note 1. 11 est à remarquer que
Mascaro l'appelle anglais : on englobait alors sous cette dénomina-
tion tous les ennemis.
75. — 54, 16-18. « Mays non triguet gaire que la vigarie de Be-
zes ,.». Jean de Villaines, viguier de Béziers, fut chargé par son
frère, Pierre de Villaines, dit le Bègue^ sénéchal de Carcassonne, de
pourvoir à la fortification et à la défense de Béziers, le 15 juin 1362.
Cf. Hist. gén. de Lang.^ éd. Privât, tome IX, p. 718, note l.
76. — 55, 12. « venc a Nemze lo rey Johan ». Sur le voyage du
roi Jean à Nimes, cf. Hist. gén. de Lang. ^ éd. Privât, tome IX, p.
751 et sq.
77. — 55, 16. « lo luoc de Peyriac ». Le château de Peyriac dans
le Minervois. Sur ce château, cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât,
tome IX, p. 761, note 1.
78. — 55, 16. « Bertrugui ». Dans VHïst. gén. de Lang., éd.
Privât, tome IX, p. 755, ce chef de routiers est appelé Bertaquin.
79. — 55, 17. « companhos ». Ms. côpanh. 11 faut lire companhos
et non companhs, car au folio 74 r. on lit dans le ms. companhos en
toutes lettres.
80.— 55, 18. « lo castel de Linha ». Lignan, village près de Béziers.
Le château de Lignan était la résidence des évêques de Béziers.
81. — 55, 19. « Loys Roinbaut ». Louis Raimbaud, chef d'un
parti d'anglais» Cf. Sabatier: Hist. d. l. ville et d. év. d. B., ^. 290,
et Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 776. Sur la prise de
Lignan, le 28 juillet 1363, cf. ibid., tome IX, p. 756, note 1.
82. — 55, 21. « l'avesque de Bezes ». Hugues 1^' de la Jugie. Cf.
note 44.
83. — 55, 25. « companhos ». Ms. Côpanh. Cf. note 79.
84. — 55,26. (c Maraussa, Thesa, Cornelha ». Maraussan,jThézan
et Corneilhan, villages près de Béziers.
85. — 56, 8. « Bernât Porquie ». Sur ce personnage voyez la mo-
524 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
nographie de M. Augunte Baluffe: Bernard Pourquier (\3S\ -1397),
étude d'histoire locale. Béziers, 1878.
86. — 50, 15. « lo luoc de Bederious ». Bédarieux, ch.-l. de can-
ton (Hérault).
87. — 5(3, 19. « lo luoc de Peyriac ». Cf.uote 77. C'est le maréchal
d'Audenehain qui assiégea et reprit le château de Peyriac. Cf. Ilist.
gén. deLang.y éd. Privât, tome IX, p. 763-764.
88. — 56, 21. « papa Urba ». Urbain V, sixième pape d'Avignon
(1362-1370).
89. — 56, 33-34. « Guilhem Arnaut, morgue deSantGili ». S'agit-
il d'Arnaud, abbé de Saint-Gilles de 1301 à 1367? Cf. Hist, gén.
de Lang éd. Privât, tome IV, p. 519. Sur Tabbaye de Saint-Gilles,
cf. ihid., tome IV, note CI, p. 514-522.
90. — 56, 34. « prier de Malsa ». Nous n'avons pas réussi à décou-
vrir quel était le prieuré de « Malsa».
91 . — 56, 36-37. « Bcrtran de Monpezat »>. Il s'agit probablement
de Bertrand de Montpezat, chevalier, seigneur de Fons, gouverneur de
Nimes, en 1361. Cf. Hist. gén. de Lang. , tome IX, p. 721.
92. — 56, 38. « sant Girma de Monpeylier ». Sur Saint-Germain
de Montpellier et sa fondation ])ar Urbain V, cf. Hisi. gén. de Lang.
éd. Privât, tome IV, p. 820-821.
93. — 57, 24. « Monflores ». Voyez ci-dessous note 95.
94. — 57, 24. « l'Almorna ». Voyez ci-dessous note 95.
95. — 57, 25. « Sauma Longa ». Nous n'avons pas pu découvrir,
malgré nos recherches, quels étaient les trois chapitres ainsi nom-
més par Mascaro.
96. — 57, 28. « lo duc d'Ango ». Louis l*"^, duc d'Anjou, né en
1339, mort en 1384, deuxième fils du roi Jean, lieutenant du roi Char-
les V en Guyenne et en Languedoc.
97. — 57, 37 39 et 58, 1-9. Sur la diminution du nombre des feux
dans le Languedoc, cf. Hisi. gén. de Lang,, éd. Privât, tome IX, p.
738-739, ch. XI : Réparation des feux dans la Province, et notamment
la note 4 de la p. 739.
98. — 58, 7. « coma dessus es dich ». Cf. folio 29 v.
99. — 58, 32. « Bertran de Clequi ». Bertrand du Guesclin. Dans
les actes en français, il est nommé: Glecquin, Gléaquin, Glayaquin,
Glesquin, Cleyquin, Claikin, etc. Cf. Michelet : Histoire de France,
édit. Lacroix, tome V, p. 3, note 1.
100. — 59, 24. <( papa Urba, que era vengut a .Monpeylier ». Sur
le voyage du pape Urbain V à Montpellier, cf. Hist, gén. de Lang,
éd. Privât, tome IX, p. 785 et sq , ch. XXXIX: Voyage du pape Ur-
bain V à Montpellier j où il fonde le monastère de Saint-Benoît,
loi. — 60, 8. « tantas de gens d'armas d. Il s'agit ici des com-
DE JACME iVIASGARO 525
pagnies de Perrin de Savoie et du Limousin qui, de retour de leur
expédition en Espagne, campèrent dans le Bas Languedoc où elles
commirent de grands ravages au moment des vendanges et des se-
mailles : que liom no podia vendemiar ni semenar.
102. — 60, 15. « la Mayre de Dieu de Serinha ». Sainte-Marie,
église de Sérignan, village situé près de l'embouchure de l'Orb, était
au moyen âge, l'objet d'une grande dévotion. Cf. Carou : Géographie
de V arrondissement de Béziers, p. 287, art. Sérignan, dans Bull. Soc.
Arch. d. B., 2^ série, tome 111.
103. — 60, 18. « la regina de Fransa >. Jeanne de Bourbon,
femme de Charles V.
104. — 60, 20. « lo comte Marti. » Charles de Trie, comte de
Dammartin, qui fut en effet l'un des parrains de Charles VI, (voy.
Moréri), et qui plus tard (cf. p. 88, 1. 24-25) tint aussi sur les fonts
le premier né de ce prince. »
105. — 60, 20. wCarles ». Charles VI, né à Paris, en l'hôtel Saint-
Pol, le 3 décembre 1368.
106. — 60, 27. « la Maria Magdalena ». L'église de la Madeleine,
à Béziers. Cf. note 42.
107. — 61, 10. « Johan de Boservisi ». M s. Johan de ho servisi.
108. —61, 32. « Bernât Porquie ». Cf. note 85.
109. — 62, 2. « Ymbert de Montadi. » Montady, canton de Capes-
tang (Hérault), village près de Béziers. Cf. Carou: Géographie de
l'arrondissement de Béziers, 1^. 243, art. Montady, àams Bull. Soc.
Arch. d. B.,2^ série, tome III.
110. — 62, 6. « Lespinha ». Lespignan, village près de Béziers.
Cf. Carou ; op. cit. p. 234.
111. — 62, 7. « Bayscha ». Baissan ouBaissOy ferme dans la com-
mune de Béziers. Cf. Carou : op. cit. p. 198.
112. — 62, 32. <t Bayssa ». Cf. la note précédente.
113. — 63, 12. « moli de sanc ». Cf. Lexique^ art. moli de sanc.
114 — 63, 24-30. « En l'an sobredich... ». « Hugues de Rieux
logea dans son palais épiscopal la princesse leanne, aagée de vingt-
vn an, fille de Philippe de Valois et de Blanche de Nauarre, laquelle
alloit en Espagne espouser lean. Duc de Gyrone, fils de Pierre, Roy
d'Aragon, et cette leanne y fut accueillie d'vne griefue maladie, dont
elle mourut en dix ou douze iours. d Andoque, Catal. d, év. d. B.,
p. 118.
115. — 64, 4. « Sicart d'Ambres ». Sicard d'Ambres, de la maison
de Lautrec en Albigeois, évêque de Béziers en 1371, mort en 1383.
Cf. Andoque: Catal. d. év. d. 5., p. 120-121, et Sabatier : Hist.
d. l. ville etd. év. d. B., i^. 292-299.
116. — 64, 5. « lo portai de las Sors Menos ». La Porte des
526 LE c( LIBRE DE MEMOHIAS »
Minorettes ; cf. Buîl. i^oc. Arch. iL B., 2"^ série, tome VII, p. 255.
Sur les Minorettes, cf. ihUL, ke sôrie, tome II, p. 191-226 : Notice
sur les Sœurs Minorettes de S^^ Claire de Béziers, par Azaïs.
117. — 64, 8. « lo soquet ». Sur Je soquetsur le vin, cf. llist. gén
de Lang.j éd. Privât, tome IX. p. 765.
118. — 64, 11. « Segares ». Le sens du mot segares' est difficile à
déterminer. Nous supposons que c'est un nom propre, le nom, par
exemple, du quartier de la ville où est située la maison du sieur
P. Saseno, achetée par les consuls. Peut-être aussi ce nom désigne-
t-il l'endroit, (serait-ce un couvent?), où réside ledit P. Saseno.
119. — 64, 32. « Item ». Ms. Itez. Cf. note 17.
120. — 65, 8. « lo portai dePresicadors ». Sur cette porte, cf. Bull.
Soc. Arch. d, B.^ 2« série, tome VII, p. 262. Sur l'emplacement de
l'ancien couvent dos frères prêcheurs, cf. ibid., p. 259-260.
121 ,, — 67, 11 . « Pey. de Mozere ». Pierre de Mourèze. Mourèze
est un petit village du canton de Clermont (Hérault).
122. — 67, 36. « fouc mot gran carcstia deblat ». Sur cette disette,
cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 841, note 7.
123. — 68, 8-9. (( lo jutge d'Arboreya ». Le juge d'Arborée, en Sar-
daigne; les marchands de Montpellier allaient également s'approvi-
sionner dans ses domaines. Hist, gén. de Lang., éd. Privât, tome
IX, p. 841, note 7.
124. — 68, 39. « papa Gregori ». Grégoire XI, 7® pape d'Avignon.
VHist. gén. de Laug.^éd. Privât, tome IX, p. 853, donne comme
date de son départ pour Rome le 13 (et non le 14, comme Mascaro)
septembre 1376.
125. — 69, 11. « e sse ». Ms. es se. Cf. note 69.
126. — 69, 13. « la ribieyra d'Orp ». L'Orb, rivière qui passe à
Béziers.
127. — 69, 14. « los molis del ga». c. à. d. les moulins du gué, sur
rOrb, ainsi nommés à cause de la proximité du gué appelé guadus
franciscus. Cf. Carou : Géographie de l arrondissement de Béziers, p. 247,
art. Moulins Neufs, dans Bull, Soc. Arch. d. B. 2« série, tome III.
128. — 69, 39. «« l'evesque de Bezes ». Sicard d'Ambres. Cf.
note 115.
129. — 70, 2. « lo cor de Dieu » . Corr. cors ?
130. — 70, 2-3. « la capela, que es dins la mayo comuna. » La
chapelle, aujourd'hui disparue, de l'ancien hôtel de ville, est men-
tionnée, p. 222, dans la Statistique des églises et chapelles dans la ville
de Béziers et son territoire, en 1789, par M. Sabatier {Bull. Soc. Arch.
d. B., 2'- série, tome X, p. 221-239).
131. —72, 13. c( fouc mot gran decencio ». Sur cette sédition de
Montpellier, cf. Andoque : Hist. du Lang.^ liv. XIII, p. 425-427, —
DE JAGME iMARCARO 527
Hist, gén, de Lang.^ éd. Privât, tome IX, p. 872 et sq., ch. XCV :
Révolte des habitans de Montpellier ^ et p. 885, — ■ et Chronique d'Esto-
rîac, p. 107-108 dans Bulh Soc. Arch. d. B., 2« série, tome IV.
132. — 72, 15. « lo chancelier del dig mossenhor d'Ango ». Guil-
laume de Pointel, chancelier du duc d'Anjou Cf. Andoque : Hist. du
Lang,, liv, XIII, p. 425, et Hist, gén, de Lang., éd. Privât, tome
IX, p. 872.
133. — 72, 15-16. « maystre Johan Perdiguie ». Jean de Perdiguier.
Cf. Hist. gén. de Lang.^ éd. Privât, tome IX, p. 872. Etienne Es-
toriac l'appelle Me Jean Perdeguis. {Bull. Soc. Arch. d. B., 2© série,
tome IV, p. 107).
134. — 72, 16. « maistre Arnaut del Lar ». Arnaud de Lair, gou-
verneur de Montpellier (Andoque': Hist. du Lang., \iy. XIII, p. 425). —
Arnaud de Lar (Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 872). —
M® Arnaud Deles (Etienne Estoriac. Bull. Soc. Arch. d. B., 2® sé-
rie, tome IV, p. 107).
135. — 72, 17. « Guy Gonestaria ». Guy de Scery, sénéchal de
Rouergue (Andoque : Hist. du Lang., liv. XIII, p. 425). — Gui de
Lestaire ou Lestayrie, originaire du Limousin, sénéchal de Rouergue
(Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 872). — Guy Lescuri
(Etienne Estoriac. Btill. Soc, Arch. d. J5., 2" série, tome IV, p. 107).
136. — 72, 17-18. « Pabina de Gontaut. ». Ce personnage est pro-
bablement Julien Gontheri, secrétaire du duc d'Anjou. Hist. gén
de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 798.
137. — 72, 21. « Someyre ». Sommières, dans le Gard.
138. — 72, 25-26. « lo cardenal d'Albana, frayre quefouc de papa
Urba ». Grimoard, cardinal d'Albano, frère du pape Urbain V.
139. — 73, 15-22. « L'an dessus, a XVI de genoier ». Sur
cette députation, cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX>
p. 878, note 3.
140. — 73,24. « lo castel de Cabrieyra ». Surla prise du château
de Cabrières (canton de Montagnac, Hérault), le 13 décembre 1380,
cf. Hist. gén. de Lang , éd. Privât, tome IX, p. 878, note 3 et p. 891.
141. — 73, 24. « Benezeg Chipparel ». Benezeg, Benezeit ou
Benoît Chipparel ouChapparel, chef de routiers. Hist. gén. de Lang.,
éd. Privât, tome IX, p. 803,871, 878, 891 et 892.
142. — 73, 25. « lo Bastart de Landorra ». Le Bâtard de Lan-
dorre, chef de routiers. Hist. gén. de Lang, éd. Privât, tome IX,
p. 878 et 892.
143 — 73, 28. « Ginhac ». Gignac, ch.-l. de canton, arrond* de
Lodève (Hérault) .
144. — 73, 32. « Fontes », Fontes, village du canton de Monta-
gnac (Hérault).
528 LE « J.ÎHRK I)K MKAIOIUAS »
145. — 73, 32, « Pezet ». Porct, villaue du canton de Montagnac
(Hérault).
146. — 73, 32. w Perenas ». Pézénas, ch.-l. de canton, arrond*de
Béziers (Hérault).
147. — 73,33. « Aspira de Cabrayres». Aspiran de Cabrières,
canton de Montagnac (Hérault).
148 . — 73, 36. « Karles, filh que fo del bon rey Johan». Charles V
le Sage, né le 21 janvier 1337, mort le 16 septembre 1380, fils du
roi Jean II le Bon.
149. — 74, 1 . « madaraa la duguessa d'Ango ». Jeanne de Blois,
dite de Bretagne. Cf. Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IX p. 768.
150. — 74, 3. « mossen Loys ». Louis II, duc d'Anjou, né en 1377,
mort en 1417.
151. — 74, 7. « Karles, filh del dessus dig mossen Karles »,
Charles VI le Bien-aimé, fils de Charles V le Sage, né le 3 décem-
bre 1368, mort le 21 octobre 1422.
152. — 74, 31 et sq. « L'an dessus dig mil ccclxxxi. ... ». Voici
comment Andoque, Catal. d. év. d. B., p. 120-121, raconte cette sé-
dition. « Dans les manuscrits d'Estienne Storriac, qui viuoit alors,
on trouue qu'il arriua dans cette Ville le 8 d'octobre * 1381, vne
•grande sédition sur le sujet de l'entrée du Duc de Berry; les vns
disoient qu'il la faloit faire extrêmement belle, afin d'appaiser par ce
moyen vn Prince qui auoit sujet d'estre irrité contre eux : mais les mu-
tins et séditieux crioient deuant la porte de la maison comune qu'il
se faloit bien garder de faire de si grandes despences pour un
Gouuerneur qui auoit désia désolé son gouuernement, et comme ces
derniers estoient en très grand nombre, ils mirent si soudainement
le feu à la maison commune, où les autres qui estoient d'vn auis con-
traire estoient assemblez, que la plus grand part de ceux-là s'y brusla;
le Duc de Berry, ainsi que l'on trouue dans ces manuscrits, entra
dans Béziers bien-tost après, et dès qu'il y fut, il fit esleuer des
gibets à cinq ou six cens pas hors de la Ville, où il fit pendre deux
cens de ces séditieux, et sans les prières et intercessions de Sicard ^,
il en eut fait mourir vn plus grand nombre. » On peut lire le récit
original d'Etienne Estoriac dans le Bull. Soc. Arch. d. B.,
2« série, tome IV, p, 109-110. Cette sédition est aussi racontée par
Sabatier : Jïî5^. d. l. ville et d. év. d. B., p. 295-299, et dans VHîst.
gén. de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 899-900. ch. VllI : Sédition
à Béziers: voy. notamment la note 6 de la p. 900. Voy. aussi Aug.
* Mascaro dit le 8 septembre et Étienoe Estoriac est d'accord avec lui. Il y
a donc ici une erreur d'Andoque.
2 Sicard d'Ambres, alors évêque de Béziers. Cf. note 115,
DE JAGME MASGARO 529
Baluffe : Bernard Pourquier (1381-1397), étude d'histoire locale,
Béziers, 1878.
153. — 74, 34-35. « lo duc de Berri ». Jean, duc de Berry, 3® fils
du roi Jean et de Bonne de Luxembourg, né en 1340, mort en 1416.
154. — 77, 6. Les mots imprimés en capitales sont mis en vedette
et écrits à Tencre rouge dans le ms.
155. — 77, 22. « L'an dessus dig mccclxxxii. . . ». Sur l'entrée du
duc de Berry, cf. ITist. gén. deLang., éd. Privât, tome IX, p. 905-
906, ch. XII: Le duc de Ben*y est enfin reçu dans Béziers^ et la noteS
de la p. 906.
156. — 77, 25. «lo comte de Sant Surra ». Louis de Sancerre, né
vers 1342, mort en 1402 ; il fut nommé maréchal de France en 1369 et
reçut le titre de connétable en 1397. Mascaro écrit aussi Sansurra
(82, 13) et Sansuerra (95, 12).
157. — 77, 25. «lo comte de Stampas». Louis, duc d'Anjou, deu-
xième fils du roi Jean, comte d'Étampes depuis 1381, mort le 21 sep-
tembre 1384. Ses enfants abandonnèrent le comte d'Etampes à leur
oncle Jean, duc de Berry.
158. — 77, 25-26. « lo cardenal d'Amiens». Jean de la Grange,
évêque d'Amiens jusqu'en 1373 (Jean 11), cardinal -évêque de Tuscu-
lum-Frascati (Jean IV) depuis 1373, mort à Avignon le 24 avril 1402.
11 ne faut pas le confondre avec son successeur à l'évêché d'Amiens,
Jean Roland (Jean IIl), qui mourut le 17 décembre 1388 et qui refusa
la pourpre le 12 juillet 1385.
159. — 77, 30. « L'an dessus dich mccclxxxi. . .». Mascaro revient
en arrière d'un an. L'alinéa qui précède celui-ci commence, en effet,
par les mots : L'an dessus dig mccclxxxii. . .
160. — 78, 14. « de ssos ». Ms. dessos. Cf. note 69.
161. — 78, 17-18. « I onsa m» ». Au lieu de m« (= miega) le ms.
porte :««. Cf. note 17.
162. — 78, 21 . « VI onsas e ma ». Ms. VI ornas e za, Voy.la note
précédente.
163. — 79, 5 et sq. « Item las escalas. . .». On peut lire une courte
analyse de la charte consulaire qui se trouve intercalée ici, et dont le
début manque, dans le Bull. Soc. Arch. d. B., 2" série, tome IX, p.
327-328.
164. — 79, 9. « dos ans a re », c. à d. deux ans de suite.
165. — 79, 28 et 31 . « si atrobes » . Il faut lire sH atrohes = s*y
trouvât.
166. — 80, 7. « los plus pTopdas très cossols predecessors lurs ».
Ms. los plus propdas cossols très cossols predecessors lurs. Le premier
cossols est souligné (on a souligné au lieu d'exponctuer) et doit évi-
S6
530 LE «LIBRE DE MEMOIUAS »
demment être négligô dans la lecture. Mascaro veut dire que les trois
prédécesseurs immédiats do cliaci:u dos oiiiq consuls sortants doivent
former les quinze électeurs chargés de l'élection de cinq nouveaux
consuls.
167. — 82, 12-13, « lo cardcnal d'Amyes ». Le cardinal d'Amiens.
Cf. note 158.
168. — 82, 13. « lo comte do Sansurra ». Le comte de Sancerre.
Cf. note 156.
169. — 82, 13. « Tavesque de Bezes ». Sicard <!' Ambres. Cf. note
115.
170. — 82, 14. « l'avesque de Masque ». L'évêque de Mâcon
(Saône-et-Loire).
171. — 83, 4-5. <^ lo rey d'Erminia ». Léon VI de Lusignan, roi
d'Arménie (1365-1393).
172. — 83, 5. « los Sarrarys ». Les Sarrasins. Il faut entendre par
là les Mameluks qui dévastèrent TArménie et forcèrent Léon VI de
Lusignan à capituler en 1345^ après une résistance de neuf mois dans
la forteresse de Gaban. Fait prisonnier avec toute sa famille, il fut
envoyé au Caire et ne put être délivré que par l'entremise de Jean 1«',
roi de Castille, en 1382. Il alla alors successivement à Jérusalem, à
Rome, en Castille et à Paris où il mourut: c'est au cours de ce dernier
voyage qu'il passa à Béziers.
173. — 83, 8-9. « Sicart d'Ambres ». Cf. note 1 15.
174. — 83, 12. « Svmon de Grimoart». Il s'agit sans doute de Si-
mon de Cramaud, évêque de Béziers, qui succéda à Sicard d'Ambres
et non pas, comme le veut Audoque, à Barthélémy de Montcalve, le-
quel fut au contraire le successeur de Simon de Cramaud. Nous avons
fait observer dans une note au bas de la p. 83 que Grmoart avait
été, dans le ms., corrigé en Cramant. Sur Simon de Cramaud, cf.
Andoque, Catal. cl. év. d, B., p. 124-125 et Sabatier : Hist. d. l.ville
etd. év. d. B.,\i 299-300.
175. — 83, 25. « L'an mccclxxxiiii. . . ». Pour l'histoire de Béziers
à partir de cette année 1384, on peut consulter : Aug. Baluffe : Dix
ans de consulat à Béziers, de 1384 à 1394, étude d'histoire locale, Bé-
ziers, 1877.
176. — 84, 1 1. « lo portai de las Sors Menos ». Cf. note 116.
177. — 84, 11-12. « Simon de Grimoart >». Cf. note 174.
178. — 84, 22-23. « Sant Salvayre ». Saint-Sauveur, ancienuo
église de Béziers, sur l'emplacement do laquelle cf. Bull. Soc. Arch.
d, B., 2e série, tome VII, p. 270-271.
179. — 84, 33. « moric lo duc d'Anyo en Ytalia en laviela de Bar».
Louis le', duc d'Anjou et enfin roi de Sicile mourut à Bari, en ItaUe,
le 29 septembre 1384.
DE JACME MASCARO 531
180 — 84, 34-35. « moric lo comte d'Armanhac a Vinho». Le comte
d'Armagnac mourut à Avignon le 26 mai 1384,
181. — 85, 7. a Baischa ». Cf. note 111 .
182. — 86, 20-21. « la fon del mercat ». Cf. note 3.
183. — 86, 21. « la mayo del Ton ». Tor masculin (avec o ouvert)
rt^pond au latin to7*us et signifie éminence, partie élevée d'un
terrain^ comme lorus lui-môme. La mayo del Tor signifie donc
littéralement la maison de Véminence. Mais je ne serais pas étonné
que la mayo del Tor fût une corruption de la mayo de la Tor {tor
féminin, avec o fermé, du latin turris) : il faudrait alors traduire
la maison de la Tour^ et entendre par là la tour dont était munie la
porte de l'Évêque qui n'était autre que la porte des Minorettes {Bull.
Soc. Arch. d. B.y 2« série tome VIII, p. 41), ou quelque autre des
nombreuses tours qui se dressaient sur cette partie des remparts. Pour
tout ce qui concerne l'ancienne topographie de Béziers, on peut
consulter l'appendice et le plan joints à VHist, d, l. ville et d. év,
d, B., par Sabatier, et les bulletins de la Soc. Arch, d, B,,
notamment : 2« série, tome VII, p. 253-290, L. Noguier : Enceinte
murale de Béziers à l'époque gallo-romaine et au moyen-âge (avec qua-
tre plans), — 2« série, tome VIII, p. 35-58, Sabatier : La Porte de
Ghrindes et le palais du roi, — 2« série, tome IX, p. 129-160,
Sabatier : Les Bourgs de Béziers .
184. — 86, 21. « lo portai de las Sos Menos ». Cf. note 116.
185. — 86, 23. « ferom». Ferom est ^tonrferon { = ils firent, on fit),
Le mot lur qui suit immédiatement empêche de lire ferom pour/e« om
( =fit on) par changement fréquent dans Mascaro de z enr. Le sens
serait du reste le même .
186. — 86, 31. « Carmes ». Sur l'emplacement de l'ancien couvent
des Carmes de Béziers, cf. Bull. Soc. Arch. d. B. 2« série, tome
VII, p. 286-287.
187. — 86, 31. «l'avesque d'Alboreya ». L'évêque d'Arborée, en
Sardaigne.
188. — 86, 36-37. «Johan deBétizac^.Le fameux Jean de Bétizac
confident du duc de Berry, bien connu par ses exactions et par son
supplice, était né à Béziers. Sur ce personnage, cf. Hist. gén. de
Lang. éd. Privât, tome IX, p. 923, 933 et 941-943, et Aug.
Baluffe : Dix ans de consulat à Béziers^ de 1384 à 1394^ étude
d'histoire locale^ Béziers, 1877. Le procès et le supplice de Bétizac
sont racontés par Froissard dans ses Chroniques^ liv. IV., ch. VI
et VII (tome III, p. 23-28 de l'éd. Buchon).
189. — 88, 3. (( En aquel mezeis an mccclxxxi, ... ». Il y a ici une
erreur de Mascaro. C'esten 1385etnon en 1386 que Charles VI épousa
Isabeau de Bavière. Mascaro ne s'aperçoitpas de la contradiction de ses
532 LE «LIBUE DE MEMOIUAS »
dates. Il donne pour date du mariage de Charles VI le ISjuillet 1386, et
le 25 octobre de la inônic année la reine Isabeau (même page, ligne
22) annonce la naissance de son fils : cet enfant serait donc né après
moins de trois mois et demi de mariage. Sur le ms., la même main qui,
à ravant-dernière ligne de la page 87, (voy. la note 2 au bas de la
p. 87), a ajouté les mots ite/n lo anaprop lxxxvii a corrigé p. 88. 1.
3, McccLxxxvi en mccclxxxvii; mais cette correction malheureuse ne
fait qu'aggraver l'erreur de Mascaro, sans faire disparaître la con-
tradiction que nous venons do signaler.
190. — 88, 4. « Karles ». Charles VI le Bien-aimé.
191. — 88, 5. « del état de xviii ans ». 11 y a ici encore une légère
erreur. A l'époque de son mariage, Charles VI avait non pas dix-
huit ans, mais seulement seize ans ; Isabeau, qu'il épousa, n'avait
elle-même que quatorze ans. Même en admettant pour le mariage du
roi la date de Mascaro, et nous avons démontré (note 189) qu'elle est
erronée, Charles VI, né le 3 décembre 1368, n'aurait eu le 18 juillet
1386 que dix-sept ans et demi.
192. — 88, 5-6. «la filha del duc de Bavaria d'Alamanha ». Isa-
beau de Bavière (1371-.1435), fille d'Etienne II, duc de Bavière.
193. — 88, 7. « Dam ». Dam ou Damme, ville de Belgique (Flandre
occid.), à5kil. N.-E. de Bruges.
194. — 88, 11. «Olivie de Clisson». Olivier de Clisson (1336-1407),
connétable de France sous Charles VI.
195. — 88, 13. « Gans ». Gand, ville de Belgique, ch.-l. de la
Flandre orientale.
196. — 88, 22. — M L'an dessus dig, a xxv d'octobre ». Cf. note
189.
197.— 88, 25. « lo comte Marti ». Cf. note 104.
198. — 88, 25. « Karles ». Charles, fils aîné de Charles VI, ne sur-
vécut pas à son père. Des douze enfants que Charles VI eut de la
reine Isabeau, il ne laissa qu'un fils, qui fut Charles VII (né en 1403,
mort en 1461) et cinq filles.
199. — 89, 10-11. « del bore de Sant Afrodisi » . Sur le Bourg de
Saint-Aphrodise, cf. Bull. Soc. Arch. d,B., 2» série, tome IX, p. 146.
200. —89, 12-13. « del bore de Sant Johan ». Sur le Bourg de
Saint-Jean, cf. Bull. Soc. Arch. d. B., 2^ série, tome IX, p. 144.
201. — 89, 14-15. « del bore de Sant Jacme ». Sur le Bourg de
Saint- Jacques, cf. Bull. Soc. Arch. d. B., 2° série, tome IX, p. 146.
202. — 89, 17. (( del bore del Rey ». Cf. note 25.
203. — 89, 18. « del bore de Montibel ». Sur le Bourg de Monti-
bel, cf. Bail, Soc. Arch. d. B., 2" série, tome IX, p. 141, et aussi
la note 3 delà p. 44 du tome Vlll.
304. — 89, 19. <( Campnou ». Sur le Bourg de Campnou (Campum
DE JACME MASGARÔ 533
novum), cf. Bull. Soc. Arch. d. B,, 2' série, tome IX, p. 141-142.
205. — 89, 36. « Loys ». Louis XI, fils de Charles Vil h Victorieux,
né à Bourges en 1423, roi en 1461, mort en 1483.
206. — 90, 21. « Linha >». Cf. note 80.
207. — 90, 22. « Berthomieu de Montolieu ». Barthélémy de Mon-
calve, évoque de Béziers eu 1384, mort en 1402. Cf. Andoque: Caial.
d. év, d. B.f p. 121 et 124, et Sabatier : Ilist. d. L ville et d, év,
d. B., p. 300-304.
208. — 90, 27. « Caritatz ». La fête dite de Caritachs, d'institution
très-ancienne, était célébrée à Béziers le jour de l'Ascension. Cf. jBmZZ.
Soc. Arch,d. B.f 1"^' série, tome 1, p. 323-343 : La fête de Caritachs
par Fabregat et Sabatier.
209. — 91, 2. « Rotgier d'Espanha ». Roger d'Espagne, seigneur
de Montespan, sénéchal de Carcassonne et de Béziers. — Hiat. gén.
de Lang., éd. Privât, tome X, col. 1682, 1694, 1749, 1831.
210. — 91, 34. « malalag ». Telle est la leçon du manuscrit
que nous avons reproduite purement et simplement. La correction
mas a lag {aimais laidement^ c. à d. de triste ou honteuse façon) sem-
ble s'imposer. On pourrait aussi songer à corriger mal e lag : les deux
mots seraient adverbes.
211. —92, 1-2. « Johan de Betizac. » Cf. note 188.
212. — 92, 4-5. « laMayre de Dieu de Pietat ». La chapelle, au-
jourd'hui disparue, des Carmes de Béziers, est mentionnée, p. 222,
dans la Statistique des églises et chapelles dans la ville de Béziers et
son territoirey en 1789., par M. Sabatier (5w/Z. Soc. Arch. d. B. 2« sé-
rie, tome X, p. 221-239).
213. — 92, 5. « Carmes ». Cf. note 186.
214. — 92,6. « l'avesque de Malhares ». Pierre de Turey, évêquede
Maillezais (Vendée).
215. — 92, 6-7. ol'avesque de Cotzerans ». Pierre IV, évêque de
Conserans. — Hist. gén. de Lang., éd. Privât, tome IV, p. 381.
216. — 92, 7. « fes si ». 11 faut lire fes s'i = il s'y fit. Cf. note 165.
217. — 92, 8-9. « l'avesque de Bezes ». Barthélémy de Moncalve.
Cf. note 207 .
218. — 93, 19. « la filhadel comte de Boluenha ». Jeanne de Bou-
logne, fille unique de Jean 11, comte de Boulogne et d'Auvergne et
d'Éléonor de Comminges, nièce à la mode de Bretagne de Gaston
Phœbus, comte de Foix ; elle était femme du duc de Berry. — Hist,
gén, de Lang.^ éd. Privât, tome IX, p. 937.
219. — 93, 22. «a ssaber», Ms. assaher. Cf. note 69.
220. r— 93, 22. « del portai del pont ». Cette porte est la même
que Mascaro appelle ailleurs la portai de la costa del pon. Cf.
note 45.
534 LE «LIBRE DE MEMORIAS »
221. — 93, 23-24. « l'ostal de maietre Johan de Betizac ». Sur
l'emplacement de l'hôtel de Bétizac, cf. Bull. Soc. Arch. d. B., 2^
série, tome VII, p. 8(T-81, et tome VllI, p. 53-54.
222 — 94, 16. « Sant Thiberi ». Saint-Thibéry, canton de Péze-
nas (Hérault).
223. — 94, 20-27. « al hostal dois tirâdors ». On appelait tiradors
les châssis, aujourd'hui désignés sous le nom de rames ^ dont les pa-
reurs se servent pour tendre et sécher les pièces de drap. Vhostal
deh tiradors était donc apparemment la maison des pareurs ou peut-
être la demeure du garde d'un enclos d'étendage ; elle était située
près du chemin de Béziers à Saint-Thibéry. — Cf. Bull. Soc, Arch.
d. B., 2« série, tome Vlll, p. 39.
224.-94, 28. « le portai de Presicados ». Cf. note 120.
225. — 94, 30-31 . « la Mercadaria » . C'était la place du marché à la
viande. Cf. Bull. Soc, Archd, B., 2» série, tome IX, p. 153.
226. — 94, 32. « la Orgaria». C'était la place du marché aux grains.
Cf. Bull» Soc. Arch» d B., 2» série, tome IX, p. 153.
227.-94, 33. « Sant Salvayre » . Cf. note 178.
228. — 94, 37. « lo portai d'en Grindas ». Voy, dans Bull, Soc,
Arch. d. B., 2« série, tome VllI, p. 50 et sq. et tome IX, p. 157 et
sq. diverses hypothèses sur le sens du mot Grindas, La présence de
l'article honorable en devant ce mot me semble démontrer que c'est
là un nom d'homme. Sur la porte de Grindes, cf. Bull. Soc, Arch, d,
B. 2* série, tome VlU, p. 35-58, Sabatier : la porte de Chrindea et le
palais du roi.
229. — 95, 2. « Karles, filh que fo de mossen Karles ». Charles,
second fils de Charles VI et d'Isabeau de Bavière.
230. — 95, 4 et sq. « L'an Mccciiii^x e ix.. . ». Sur ce voyage
de Charles VI à Béziers, voyez Froissard, Chroniques, liv. IV, ch. VI
et Vil ( tome 111, p. 23-28 del'éd. Buchon).
231 . — 95, 8-9. « mossen Loys, que era duc deThorena ». Louis,
duc d'Orléans, frère de Charles VI, né en 1371, mort en 1407. Charles
VI lui donna le duché de Touraine en 1386.
232. — 95, 9. « lo duc de Borbon ». Louis II, duc de Bourbon, dit
le Bon, oncle maternel de Charles VI, né en 1337, mort en 1410.
233. — 95, 10. « P. de Navarra, frayre del rey de Navarra »,
Pierre de Navarre, frère de Charles 111 le Noble^ roi de Navarre de
1387 à 1425.
234. — 95, 11. «lofilh del duc de Bar ». Henri ou Charles de Ban
cousins germains de Charles VI.
235. — 95, 11. « lo conestable de Franssa ». Olivier de Clisson.
Cf. note 194.
236. — 95, 12. ((Loys de Sansuerra ». Cf. note 156.
DE JAGMR MASGARO 535
237. — 95, 13. «lo senhor de Lebret». Le sire d'Albret.
238. — 95, 13. « lo senhor de Corsi ». Le sire de Ooucy, ffiat, gén.
de Lang., éd. Privât, tome IX, p. 939, note 4.
239. — 96, 21. «lo papa aAvinho ». L'an tipape Clément VII (1378-
1394) qui résidait à Avignon, tandis que les papes Urbain VI (1378-
1389) et Grégoire XI (1389-1404) siégeaient à Rome. .
240. — 96, 29. « a ssaber ». Ms. assaber. Cf. note 69.
241 . — 97, 12-13. « quai que sia, ni quai que no de Lengadoc ». 11
faut entendre: (toute personne) quelle qu'elle soit^ de Languedoc ou
non.
242. —97, 25. « Johan Betizac ». Cf. note 188.
243. — 98, 26. « Peyre de Mornay ». Pierre de Mornay, sire de
Gaulnes, sénéchal de Carôassonne et de Béziers. — Hist. gén» de
Lang., éd. Privât, tomeX, col. 1828, 2064.
244. — 99, 7-8. « Aysso es lo privilège, ... », Ce titre est écrit à
l'encre rouge, en très-grandes lettres gothiques d'une régularité par-
faite.
245. - 99, 12-23. « L'AN MIL CGC E NOU. . . .». Nous avons
imprimé en italique la partie de cette pièce qui, dans lems., est écrite
engrosse gothique très soignée et très régulière; le reste de la pièce
est en petite gothique, presque cursive. Quant à la pièce 11 de l'ap-
pendice, elle est tout entière écrite en cursive.
246. —99, 13-14. « lo portai de las Sors Menors. » Cf. note 116.
247. — 99, 14. « BERTRAN DE MALMONT ». Bertrand de
Maumont, évêque de Béziers en 1408, mort en lil8. Cf. Andoque:
Catal. d. év. d. B,, p. 125-127 et Sabatier : Hist. d. l. ville ei
d. év. d. B. p. 304-311.
248. — 99, 20. « a ssaber ». Ms. assaber. Cf. note 69.
249. — 99, 25. « quant fora pausat lo raust ». m. à m. quand au-
rait été imsé (servi) le rôti. Les pièces d'argenterie dont il s'agit de-
vaient être offertes au prélat pendant le dîner, après qu'on aurait -
servi le rôti.
250. — 100, 4. « m. quart. » Au lieu de m. quart {=: mieg quart),
le ms. porte: z quart. Cf. note 17.
251. — 100,5-6. « c fouc lo signe cranc ». 11 s'agit du signe du
zodiaque, le cancer.
252. — 100, 8. « Seguimon ». Sigismond, empereur d'Allemagne,
né en 1366, mort en 1437.
253. — 100, 7 et sq. — Sur le voyage de l'empereur Sigismond à
Béziers et en Languedoc, cf. Hist. gén. de. Lang,, éd. Privât, tome
IX, p. 1026. VHist. gén. de Lang. ne mentionne pas la rencontre de
Sigismond avec les princes d'Aragon et se contente de dire que le
roi d'Aragon envoya des ambassadeurs.
536 LK « LIIUIK DE MEMOHIAS »
254. — 100, HA). « j)cr far la iinio de santa glîeya », c.-à-d. pour
amener la fin du ^rand schisme d'Occident qui durait depuis 1378.
255. — 100, 12-1!^. « lo sonlu^rroy de Araguo». Le « senhor rey »
d'Aragon en 1415 est Ferdinand de Castille, dit le Juste (roi le
28 juin 1412, mort le 2 juin 1410). neveu de Juan I d'Aragon (1387-
131'5) et dȔ Dnm Martin (l.'i*.>5-31 mai 1410) Sa femme est Dona
Léonore d'Alhuijueniue, appelée à tort par quelques-uns Dona San-
che. Cî. Ferreras, Histoire <V Espagne, VI, 31.
25<). — 100, 13-14. « la regina Violan ». Dona Violante (Yolande),
veuve du roi Juan I d'Aragon (1387-1305), belle-mère par sa fille
Dona Violante du duc d'Anjou.
257. — 100, 14. « la regina Marguarida ». Dona Marguerite, fille de
Don Pedre, comte de Pradcs, de la famille royale d'Aragon, épousée
par le roi Dom Martin (1305-31 mai 1410), frère de Juan I d'Ara-
gon (1387-1305', en septembre 1409, après la mort de son fils et
héritier, Dom Martin de Sicile.
258. — 100, 14-15. « la regina molher del senhor rey ». Dona
Léonore d'Albuquerque. Cf. note 255.
259. — 100; IG. « P. de Luna». Pierre (le Lune, plus connu sous le
nom deBenoîtXIIl, antipape (1394-1424).
200. — 100, 29. « lo compte de Armanhac ». Bernard VII, comte
d'Armagnac, no vers le milieu du XIV*^ siècle, mort en 1418.
261. — 100, 30. « lo compte de Foix ». Jean, fils d'Archambaud de
Grailly, comte de Foix depuis 1412, capitaine général pour le roi
en Languedoc et en Guyenne, mort en 143G. Cf. Il'ist. gén, de Lang,
éd. Privât, tome IX, p. 1015.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES NOMS PROPRES
13 de psyi, de villes, d'è;
. imprimés en caraclèreg ordinaires;
., sont imprimés ea pelilea oKpitales.
Abelha(B.)-— 7v.Voy. Abelha
(Bernât).
Abelha {Bernât). —18 r. Voy.
Abelha (8.).
Acde (Pejre). — 24 r , 31 r,,
44v.
Agel (Bernât).— Slv., 40 r.
Agel(P.).— 32v.
Agel (RamoD). — 43J-.
Alamanha. — 78v., TJt.
Alari (Ramon). — 31 r., 32 v.,
44r.,57r.,59v., 62 r.
Albana (locardenal d'), — 58r.
Albanhana (Esteve) — 34r.
Albi. — 3v.
Albi (Daude). — 26 v., 47 v.,
54*
, 71 V
Alboreya (l'avesque d'). — 77 r
Ales, — 3 V,
Alias Geli. — 41 r. Voj. Helia
Geli.
Almobna(L'). —31 V.
Aludie(P.). — lOr.
Amalrio Lieura, — 3r., 4r.
Amat (Guilhem). — 63r,
Amat(Peyre) —&3r.
Ambres (Sicartd') — 42v,, 72v
Amielh (Andiieu),— 26 r.,28 v.
30 V.
Amielh (Bernât). —6 r.
Amieth(Pejre).— .16v.
Amielh (Potia). - 8 r., 20 v.,
23r.
Amib.ns (lo cardenal d'). — 66 v.
Voy, Amïks.
Amyks (lo cardenal d'). — 71 r.
Voy. Amiens.
Andrieu Amielh. ^26r.,28v.,
30v.
Andrieu Astrebo. —8 v., 34 r.,
44r,, 47r.,50v.,62v.,71v.
AndrieLi(Bertran).- I7r.,61 v.,
84 ï.
Andrieu de Fontaynas.— 88r.
Andrieu (Emengau). — 63 r.
Andrieu Frezols — ,2v
Andrieu Galhart. — 2 r., I6v.,
17 1-.
Andrieu Gasc. —
22v.,43v.,45r., 47r.,49v.,
53 r.
Andrieu (Johan), — 7v., 13v.
Andrieu Lieura. — 81 v.
Andrieu Nycholau. — 63 r.
Andrieu Roma. — 93 r.
Anglatkhh.\ - I6r. , 27v. , 79 r.
Voy. Ekolatkrra.
Ango fia duguessa d'). — 60r.
ANeo(lo dued']. — 31v..33r.,
38v.,40r ,42r.,42v.,46v.,
53 V. , 58 r. Voy. Anjo, Anjoi;
et Anïo.
Awo (lo ducd'). — 44r., 46 r,
Voy. Akgo, Anjou etAKYo.
19 r
538
LE « LIBRE DE MEMOKLVS »
Anjou (lo duc d'). — 56 r. Voy.
Ango, Anjo et Anyo.
Anric Garoti . — 48 v . , 82 v . Vo v .
Anric Goroti.
Anric Goroti. — 43 v. Voy. Anric
Garoti.
Anric Malras. — 34 r., 57 r.,
59 V.
Anthoni de la Garda. — 59 r.,
82 r.
Anyo (lo duc d'). — 58 r., 60 r.,
74 r. Voy. Anqo, Anjo et
Anjou .
Arago (lo rey d'). — 42 r. Voy»
Araguo.
Araguo (lo rey d') . — 93 v . Voy .
Arago.
Arboreya (lo jutge d'). — -SOr,
Archas (Hue d'). — 13 r.
Argant Barrieyra. — 20 v.
Armanhac (lo comte d'). — 5r.,
11 r., 74 r., 83 r., 93 v.
Arnaut Barbât. — 24 v.
Arnaut Barrieyra. — 85 r.
Arnaut Bernât. — 23 r., 30 v.
Arnaut Bonet. — 33 v., 35 v,
Arnaut del Lar. — 58 r,
Arnaut Fornie. — 23 v.
Arnaut Promit. — 28v.,51 r.,
57 r.
Arnaut (G-dilhem). — 30 r.
Arnaut Guinho. — 52 v.
Arnaut (Peyre). — 24 r., 34 r.
Aspira de Cabrayres. — 60 r.
Astrebo (Andrieu). — 8v.,34r.,
44 r.,47r.,50v.,62v.,71v.
Astrebo (P.). — 7 v., 15 r,
Audi (Guilhem). — 7r., 11 r.,
18v.,27r.
Audran (Bernât). — 89 r.
Audran(Brenguie). — 41 v.,75v.
Augie Brenguie. — 8 r., 17 v.,
20 V.
Augie (Guilhem). — 4 r.
Augie (Guilhem) de Fauiha. —
3 r., 4v., 6 V.
Augie (Johan). — 39 r.
Augie Nicholau. — 8v.
AURKNGA. — 3 V.
Auriac (Johan). — 63 r.
Avesque (Johan). — 78 r. Voy.
Evesque (Johan).
Ayinho. — 3 V., 51 V., 60 r.,
76 V , 88 r. Voy. Vinho.
Avinhonet. — 3 V.
Aycx. — 3 V.
Aygas mortas. — 9 V.
Aymeric Barbât. — 4 v., 15 r.,
51 V., 58 V., 72 r., 80 r.
Aymeric Estaci. — 22 r.
Aymoy (Guilhem). — 39 v., 47 r.,
51 r.
Aymoy (P.). — 15 r. Voy. Ay-
moy (Peyre) et Aymoy r (P.).
Aymoy (Peyre). — 53 r., 80 r.
Voy. Aymoy (P.) et Aymoyr
(P.).
Aymoyr (P.). — 86r. Voy. Ay-
moy (P.) et Aymoy (Peyre).
Aynart (Ymbert). -57v., 76r.,
80 r.
Ayraut (Joh^n). — 60 v.
B. Abelha. — 7 v. Voy. Bernât
^AbeJha.
BadafoffS^Sjide). ;— 24 v.
Badonas (B^dS^i^ 9 r. Yoj,
Badonas (Bernât
Badonas (Bernât de) . ^Wft/^.t
10 V. Voy. Badcnas(B;
Badonas (Guilhem de). — 9 ^
1 1 r., 18 r., 35 V.
Badonas (P. de). — 73 v.. Voy.
Badonas (Peyre de).
k
DE JACME
Badonas (Peyre de). — 23 v.,
'27r., 33r., 41 v , 57 v. Voy.
Badonas (P . de) .
Baischa. — 74 V. Voy. Bayscha
et Bayssa.
Bajas (Estève de). — l v.
Bajas(Paulj. — 3ô r.
Balhot (Estève). — 63 r.
Bar. -— 74 r.
Bar (lo duc de). — 87 v.
Barba (Estève). — 9 v. Voy.
Barba (Steve) .
Barba (Paul). —49 v., 54 v., 59
r., 61 V., 62 r.
Barbara (Tibaut de). — 20 r.
Barba (Steve). — 4 v. Voy.
Barba (Estève).
Barbât (Arnaut). — 24 v.
Barbât (Ayraeric). — 4 v., I5r.,
51 v.,58 v.,72 r., 80 r.
Barieyra (Frances). — 57 v.Voy.
Barrieyra (Frances).
Barot (Peyre) . — 39 r.
Barot (R.). —21 v.
Barrieyra (Argant). — 20 v.
Barrieyra (Arnaut). — 85 r.
Barrieyra (Frances). — 27 r ,
49 r., 60 V., 72 r. Voy. Ba-
rieyra (Frances).
Barrieyra (Guilhem) . — 59 r.
Barrieyra (Johan) — 41 v.,
47 r , 58 V., 77 r., 78 r.
Barrieyra (Jolia). — 3 r., 4 r.
Barta (Guilhem). — 30v.
Bastartde Landorra (lo). — 59v.
Baudriga (Johan). — 7 v., 11 r. ,
13r., 17 r.
Ba varia (lo ducde).— 78 v, 79r
Bayle Brenguie. — 13 r.
Bayscha. — 40 r. Voy. Baischa
et Bayssa .
3ay8sa. — 40v. Voy. Baischa
et Bayscha.
MASCARO 539
B. Costa. — 84 V.
B. de Badonas. — 9 r. Voy.
Bernât de Badonas.
Bechie (Pey.). — 66 r. Voy.
Bechie ( Peyre ) et Bechier
(Peyre).
Bechie (Peyre). — 21 v. Voy.
Bechie (Pey. )et Bechier (Peyre)*
Bechier (Peyre). — 19 r. Voy.
Bechie (Pey.) et Bechie (Peyre}.
Bechieu (Frances). — 47 v.
Bederieus. — 29 r ,
Bedos (Duran). — 63 r.
Bedos (Guilhem). — 59 r.
Bedos (Jacme). — 10 r., 84 v.
Belcaire . — 3 v . Voy. Belcayre .
Belcayre. — 29 V., 32 r., 46 V.,
56 r. Voy. Belcaire.
Belpuech. — 3 V.
Bena (Jacme). — 85 r.
Bencyerget (Jacquet de). — 89 r.
Benezech Bru . — 23 v . Voy . Bene-
zeg Bru.
BenezegBru. — 6 r., 13 v., 17 v.,
19 r., 21 r. Voy . Benezeg Bru .
Benezeg Chipparel. — 59 v.
Benezeg Guitart. — 31 r.
Benezeg (Johan). — 7 r., 7 v.,
38 r., 43 v.,61 r.
Benquelh (Guilhem). — 43 v.
Bermon (Bernât). — 26 v.
Bermon (Johan). — 44 v., 62 v.
Bermon (Ramon). — 62 v.
Bernât Abelha. — 18 r.
Bernât Agel. — 21 v., 40 r.
Bernât Amielh. — 6 r.
Bernât Arnaut. — 23 r. , 30 v.
Bernât Audran. — 89 r.
Bernât Bermon. — 26 v.
Bernât Cambavielha. — 57 r.
Bernât Catala. — 59 r.
Bernât Caus. — 2 r.
Bernât Cornelh. — 7r., 12v.,82v.
540
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Bernât de Badonas.— 6, r., 10 v.
Bernât de Golbias . — 36 v . , 38
r., 39 V., 49 r.
Bernât del Thelh. —77p.
Bernât de Pradas. — 1 v.
Bernât de Serez. — 4 v.
Bernât Emengau. — 63 r.
Bernât Fabre. — 26 r., 35 v.,
71 V.
Bernât Ferrier. — 57 v., 83 v.,
89 V. Voy. B. Ferrier.
Bernât Fromit. — 23 r., 28 r.,
39 V., 59 V., 66 r.
Bernât Garra. — 22 r.
Bernât Gibeli. — 2 r.,35v.,
84 V.
Bernât Golfi. — 26 r., 48 v.
Bernât Gontart. — 63 r.
Bernât Guitart. — 13 v., 34 r. ,
47 r., 62 r, 67 r., 67 v. 72 v.
Voy. B. Guitart.
Bernât (Jacme). — 13 v.
Bernât (Jolia). — 60 v., 81 v.
Bernât Laur. — 32 v., 43 r.,
73 V. Voy. Bernet Laur.
Bernât Massai. — 63 r.
Bernât Miralhie. — 16 r., 21 r.,
22 V., 36 r., 78 r. Voy. Bernât
Miralhier et B . Miralhier .
Bernât Miralhier. — 19 v., 30 v.,
52 V. Voy. Bernât Miralhie et
B. Miralhier.
Bernât Porquie. — 28 v., 39 v.
Bernât Raynaut. — 93 r. Voy.
B. Raynaut.
Bernât Raynes . — 7 v . , 22 r. ,
Bernât Redorta. — 17r., 32v,,
36 r., 49 V.
BernatRog. — 8v., 18 v., Voy.
B. Rog.
Bernât Roquacels. — 49 v., 61
v.,82 V., 86 V.
Bernât Salvayre. — 13 v.
Bernât Sebeli. - 23 v., 40 P.,
40 v.,59 V.
Bernât Sedada. — 39 v., 73 r.
Bernât Vezola. — 63 r.
Bernet Laur. — 86 v. Voy. Ber-
nât Laur.
Berri (lo duc de). — 61 v., 66
V . , 7 1 r . Voy . Berry .
Berry (lo duc de). — 66 v., 67
r., 71 r., 76 V., 83 r., 84r.,
85 r. Voy. Berri.
Berthomieu Bonafos. — 5 r,
Berthomieu de Montolieu . — 80 v .
Berthomieu P. — 72 r.
Berthomieu Saynier. — 29 r.
Bertran Andrieu. — 17 r., 61 v.,
84 V.
Bertran (Brenguie) . — 12 r., 23
V., 30 V.
Bertran de Clequi. — 33 v.
Bertran de la Garda. — 43 r.
Bertran de Malmont. — 93 r.
Bertran de Monpezat. — 30 r.
Bertran Pratz. — 28 v., 35 v.,
47v.,50 V., 81 V.
Bertran (R.).— 21 v. Voy. Ber-
tran (Ramon).
Bertran (Ramon). — 13 v. Voy.
Bertran (R.).
Bertran Sayschac. — 1 v.
Bertrugui — 27 v.
Besers. — 93 V. Voy. Beses,
Bezers et Bezbs.
Besers Cavesque de). — 93 r.
Voy. Bezes (avesque ou eves-
que de).
Beses. — 1 r. Voy. Besers, Be-
zers et Bezes.
Betinha (Jacme). — 5 v., 11 r.,
34 r.
Betinha (Johan). — 78 r.
Betizac (Johan). — 89 r. Voy.
Betizac (Johan de).
DE JACMR MASCARO
541
Betizac (Johan de) — 77 r., 83r.,
85 r. Voy. Betizac (Johan).
Betizac (Ramon). — 48 v.
BEZERS.-3v.,92r.,93r.Voy.
Bksers, Beses et Bezes.
Bezes. — 1 r., 1 V., 2 r., 2 v.,
3r.,3 V., 4r., 4v.,5r., 8 r.,
8v., 9v., Il V., 14 V., 16 r.,
16v.,18r., 19r., 19v.,20r.,
21 V., 24 V., 27 v.,30r.,31 V.,
32 r., 33 v.,35r., 36v.,37r.,
40r., 40 V., 42 r., 42 v , 46 r.,
46v.,48r., 52 r, 53 v.,59v.,
60r.,61 V., 63v., 66v.,67r.,
68v.,69v.,7l r.,72v.,74r.,
74v.,75r.,76v.,77r.,78v.,
79r.,80v.,81r.,83r.,85r.,
85v.,87r.,87v.,88r.,88v.,
89 r., 89 v.,93 r. Voy. Besers,
BesES et Bezers.
Bezes (avesqueouevesquede). —
2r., 11 v.,20 r., 27 v., 42 v.,
53 V., 63 V., 68 v, 69 V., 71 r.,
72 V., 74 r., 80 v., 83 r., 87 r.
Voy. Besers (avesque de).
Bezes (cort de) — 8 r., 8 v. 32 r.
Bezes (senescalc de Carcassona
e de). —2 r., 80 v., 89 v.
Bezes (vigarie de). — 24 v.
Bezes (viscomte de). — 1 r.
Bezuenha (Johan de). — 71 r.
B. Ferrier. — 80 v. Voy. Bernât
Ferrier.
B. (G.), monie. — 63 r.
B. Guitart. — 5 r., 62 r., 67 r.
Vov. Bernât Guitart.
Bigot (Johan). — 5 v, 10 r.,
18 r., 18 V.
Bira (Peyre). — 63 r. Voy. Biro
(Peyre).
Biro (Peyre). — 54 v. Voy. Bira
(Peyre).
Blanquet (Johan). — 47 v.
Blanquier (Guiraut). — 18 v.
Blonde (Loys). — 48 r.
B. Maistre. — 76 v.
B. Miralhier. — 27 r. Voy. Bernât
Miralhie et Bernât Miralhier.
Bofat (Frances) — 8 v. Voy.
BofFat (Frances).
Boffat (Frances). — 40 v. Voy.
Bofat (Frances).
Boia (Esteve). — 63 r.
B. Olivier. — 5 r.
BoLUENHÀ (lo cardenal de). —
19 r.
BoLUENHA (lo comte de) — 85 r.
Bonafos (Berthomieu). — 5r.
Bona Grassia. — 62 r.
Bonaric (Jacme). — 34 v.
Bonet (Arnaut). — 33 v., 35 v.
Bonet (Cabot, alias). — 63 r.
Bonet (Guilhera). — 32 v.
Bonet (P). — 7 V.
Bonservisi (Johan), — 30 v. Voy.
Bonservisi (Johan de) et Boser-
visi (Johan de) .
Bonservisi (Johan de). — 60 v.
Voy. Bonservisi (Johan) et Bo-
servisi (Johan de).
Boq (Guilhem). — 8 v. Voy. Bo-
quie (GiiilhemJ.
Boquas (Sicart) . — 76 r.
Boquet (Jacme). — 50 r.
Boquet (Ramon). — 9 r., 18 v.
Boqnie (Guilhem). — 28 v., 34r.,
57 r. Voy. Boq (Guilhem).
Boquie (P.). — 9 r. Voy. Bo-
quie(Pey.)et Boquie (Peyre).
Boquie (Pey.). — 30 v. Voy. Bo-
quie (P.) et Boquie (Peyre).
Boquie (Peyre). — 15 v., 39 r.,
58 v. Voy. Boquie (P.) et Bo-
quie (Pey.).
Borbon (lo duc de) . — 87 r .
BORDALES. — 11 r.
542
LE « LIBRE DE MKMORTAS »
Bosc(G. del). ~ 63 r.
Bosc (Hue del) — 41 r.
Boservisi (Johan de). — 38r.Voy.
Bonservisi (Johan) et Bonser-
visi (Johan de).
Bossela (Paul). —31 r.
Botagrais (Johan) . — 63 r.
Botho (Jacme). — 23 r., 24 r.,
27 r. Voy. Boto (Jacme).
Boto (Jacme) . — 26 r. , 28 r . , 62 r.
Voy. Botho (Jacme).
Boyer (Johan). — 47 r., 58 v.
Boyer (Peyre). — 16 r.
B. Pons, alias Sabatier. — 9 v.
Voy. B. Pons Sabatie.
B. Pons Sabatie. — 9 v Vov.
B. Pons, alias Sabatier.
Braconet (Peyre). — 63 r.
Bragayrie (Peyre). — 15 r., 27 r.
B. Raynaut. — 93 r. Voy. Ber-
nât Raynaut.
Brenguie Audran. — 41 v. , 75 v.
Brenguie Augie. — 8 r., 17 v.»
20 V.
Brenguie Bayle. — 13 r.
Brenguie Bertran. — 12r., 23v.,
30 V.
Brenguie Cambavielha. — 24 v.,
73 V., 86 V.-
Brenguie Cesseno. — 72 r.,
82 V.
Brenguie Ferrier. — 62 v.
Brenguie Graza. — 44 v.
Brenguie Laures. — lOr., 15v.
Brenguie (P.) — 71 v., 75 r.
Voy. Brenguie (Peyre) etBren-
guier (Peyre).
Brenguie (Peyre) — 89 v. Voy.
Brenguie (P.) et Brenguier
(Peyre) .
Brenguie (Ramon). — 9 v.,
31 r., 33r.,34 v., 39r.,61 r.
Brenguier (Peyre). — 78 r. Voy.
Brenguie (P.) et Brenguie
(Peyre).
Brenguie Sedada. — 83 v.
B Rog. — 5 V. Voy. Bernât
Rog.
Bru (Benezech) . — 23 v. Voy.
Bru (Benezeg).
Bru Benezeg. — 6 r., 13 v.,
17 V., 19 r., 21 r. Voy. Bru
(Benezech).
Bruelh (Guilhem del). — 89 v.
Bru (Jacme) . — 54 r . , 78 v .
Bru (Johan). — 82v.
Bru (Peyre). — 57 r.
Buadela (Guiraut). — 10 r.
Bucg (lo captai de). — 9 v.,
11 r.
Cabot alias Bonet. — 63 r.
Cabot Cabot. — lOr.
Cabot(Huc). — 6 r., 12v., 14v.,
17 V., 19 V., 21 r.
Cabot (P.). — 10 r. Voy. Cabot
(Peyre).
Cabot (Peyre). — 11 r., 13 r.,
22 r. Voy. Cabot (P.).
Cabot (Ramon). — 36r.,41 v.,
43r.,47v., 71 v.,81v., 84r.
Cabrayres (Aspira de). — 60 r.
Cabrayressa (Johan). — 22 r.-
Cabrel (Johan). — 38r., 41 r.
Cabrieyra. — 59 V.
Cambavielha (Bernât). — 57 r.
Cambavielha (Brenguie). — 24 v.,
73 V., 86 V.
Cambavielha (Esteve). — 61 r.,
73 r.
Camb a vielha ( Pey . ) . — 30 v .
Campanha (Esteve) . -— 34 v . Voy .
Campanha (Steve).
Campanha (Johan). — 76 r.
DE JACME MASCAHO
543
Campanha (Steve) — 45 v.Voy.
Campanha (Esteve).
Caraplonc (Johan de). — 11 v.,
42v.,54r., 73 v.,82v.
Campnou. — 79 V.
Canie (Duran). — 41 r., 47 r.,
59 V. Voy. Canier (Duran).
Canier (Duran). — 36 v. Voy.
Came (Duran).
Capelie (Guilhem). — 5 v.
Caramanh (Johan). —63 r.
Caratie (Guilhem) . — 63 r.
Carato (Pey. de). — 21 v.
Carbonie (Esteve). — 62 r.
Carcassona. — 2 r., 3 v., 8 r.,
20 r., 29v.,32r,,38v.,46v.,
56 r., 78 v., 80 v., 89 v.
Carcassona (cort de). — 8r.,
8 v.
Carcassona (l'enquisidor de). —
78 V.
Carcassona (lo jutge de crims
de). — 8r.
Carcassona (senescalc de). —
2 r., 8r., 80 v.,89 v.
Carcassona (senescalcia de). —
29v., 32r.,46v., 56 r.
Carie (Guilhem).— 28 v., 31 v.,
36 r., 66 r. Voy. Karle (Gui-
lhem) .
Caries . — 37 r . (Charles VI) . Voy.
• Karles .
Caries del Templier. — 89 r.
Carmes (los). — 77 r., 83 r.
Carpentras . — 3 v .
Cartholha(P.). — 83 v.Voy. Car-
tolha(Pey . ) et Cartolha (Peyre)
Cartholha (Pey.).— 73 r. Voy.
Cartholha (P.) et Cartolha
(Peyre) .
Cartolha (Peyre). — 80 r. Voy.
Cartolha (P.) et Cartolha
(Peyre).
Cassa. — 21 v.
Castela.— 24v., 33v.,93v.
Castela(1o rey de). — ^^24v.
Castel (Gassiot del). — 24 v,
Castelnoudarri — 3 v .
Castras. — 3 v.
Castras (Guilhem). — 45 r.
Catala (Bernât). — 59 r.
Catala (Guilhem).— 73 r., 83 v.
Catala (Pey.).— 39 r. Voy. Ca-
tala (Peyre).
Catala (Peyre).— 26 r. Voy. Ca-
tala (Pey . ) .
Catala (Ramon). — 39v.,45r.
Catalas (losj.— 93 v.
Caucenuejol (Jacme). — 86 r.
Voy. Caucenuejols (Jacme) et
Causenuejols (Jacme).
Caucenuejols (Jacme), — 57 v.
Voy. Caucenuejol (Jacme) et
Causenuejols (Jacme).
Caus (Bernât). — 2 r.
Causenuejols (Frances). — 20 r.
Causenuejols (Jacme). — 45 r.
Voy. Caucenuejol (Jacme) et
Caucenuejols (Jacme).
Cavalie (Pons) . — 49 r. , 85 r.
Cava (Pey.).— 62 v.
Celas Cubas. — 13 r.
Celas Rar.\s. — 13 r. Voy. Celas
Raz\s.
Celas Razas. — 13 r. Voy. Celas
Raras.
Cesseno. — 13 r.
Cesseno (Brenguie). — 72 r.,
82 v.'
Cesseras. — 24 v.
Chipparel (Benezeg) . — 59 v .
Clarmon . — 3 v , 76 V .
Clequi (Bertran de) — 33 v.
Clisson (Olivie de). — 79 r.
Comte (Daude). — 54 r.
Comte (Pey.).— 42 y.
544
LE (c LIBRE DE MEMORIAS »
Conort (Guilhem) — 93 r.
Coregie (Johan). — 10 r., 20 v.,
37 V., 52 V. Voy. Corregie
(Johan) .
Coregie (Ramon). — 43 v. Voy.
Corregie (Ramon).
CORNELHA. — 27 V.
Cornelh (Bernât). — 7 r., 12 v.,
82 V.
Cornuejol (Esteve). — 59 r ,
66 r.
Corregie (Johan). — 4 v , 14 v.,
31 V., 34 V. Voy. Coregie (Jo-
han).
Corregie (Ramon). — 75 r., 82 r.
Voy. Coregie (Ramon),
Corsi (lo senhorde). — 87 v.
Certes (Johan). — 17 v., 31 r.,
43 r., 54 r.
Cortinals (Johan). — 6 v., 15 r.
Costa (B.).— 84 v.
Costans (Johan) . — 10 v.
Cotelie (Guilhem). — 41 v.,50v.,
89 V. Voy. Cotelier (Guilhem).
Cotelie (Johanet). — 80 r.
Cotelie (Ramon). — 24 r., 42 r.,
45 V., 54 V , 57 v., 61 r.,
66 V., 72 r. Voy. Cotelier (Ra-
mon).
Cotelier (Guilhem).— 28 v., 31 v.,
45 V., 52 V. Voy. Cotelie (Gui-
lhem) .
Cotelier (Johan). — 6 v., 12 v ,
18 V.
Cotelier (Ramon). - 14r.,16r.,
19r., 21v., 26r., 27 r., 38r.
Voy. Cotelie (Ramon).
CoTZER\Ns(ravesque de). — 83 r.
Coyra (Johan). — 26 v., 77 v.
Cramaut (Symon de). — Page 83
note 1 et page 84 note 1.
Creyschieu (Daude). — 49 r.Voy.
Creysieu (Daude).
Creysieu (Daude). — 54 v., 75 v.
Voy. Creyschieu (Daude).
Cros (Esteve). — 37v., 60 v.,
75 r. Voy. Crotz (Esteve).
Cros (Johan de la). — 80 r.
Crotz (Esteve). — 29 r.Voy. Cros
(Esteve).
Crusi (Johan). — 61 v.Voy. Cruzi
(Johan)
Cruvelier (Vices). — 5 r.
Cruzi (Johan). — 43r. Voy. Crusi
(Johan).
Cubas (Celas). — 13 r.
Cucuro ; Domerane de). — 93 r.
Dalmas (Symon). — 39 v., 47 r.
Dam. — 78 v.,79 r.
Damas. — 76 v.
Danha (Guilhem). — 2 r. Voy.
Dajnha (Guilhem).
Daude Albi. —26 V., 47v.,54
v.,71 V.
Daude Comte. — 54 r.
Daude Creyschieu. — 49 r. Voy.
Daude Creysieu.
Daude Creysieu. — 54 v., 75 v.
Voy. Daude Creyschieu.
Daude Raynaut. — 88 r.
Daunis Serinha. 13 v., 17 v., 22 v.,
26 r.
Daynha (Guilhem) — 1 v.Voy.
Danha (Guilhem).
Desmas (Esteve) . — 17 r., 42 r. ,
45 r.^ 47 V.
Desmas (P.). — 5 r. Voy» Des-
mas (Peyre).
Desmas (Peyre). — 2 r. Voy.
Desmas (P.) .
Dieu de Pietat (la Mayre de).
— 83 r.
DE JAGME MASCARO
545
Dolha (Johan). — 31 v., 37 v., 43
V., 53 r., 54 v., 60 v.
Dolha (Pey.). —53 v.
Domerane de Cucuro. — 93 r.
Dorimnis (P.)* — 21 v.
Duran Bedos. — 63 r.
Duran Canic. — 41 r., 47 r.,
59 V. Voy. Duran Canier,
Duran Canier. — 36 v. Voy.
Duran Canie.
Duran de Guirgols. — 60 v.,
89 V.
Duran (Estaci) . — 77 v .
Duran Selio . — 43 v.
Duran Sicart. — 11 v.
Duran Sicart (Guilhem). — 9 r.
E
Emengau Andrieu. — 63 r.
Emengau (Bernât). — 63 r.
Emengau (Esteve). — 6 v.
Flmengau (Jacme). — 29 r., 33 v.,
34 r., 39 V., 41 r., 57 r., 72 r.
Emengau (Johan). — 13 v., 45
V., 48 V.
Emengau (Pons). — 35 v. Voy.
Ermengau (Pons).
Emengau (Ramon). — 48 r., 57
V., 59 r., 60 V., 78 r., 80 r.
Emoric (Ramon). — 75 v.
ENGLA.TERRA. — 18 r., 79 r. Voy.
Anglaterra .
Engles (los). — 79 r. , 83 r., 89 r.
Eranha (Johan). — 2 r.
Ermengau (Pons). — 27 r. Voy.
Emengau (Pons).
ïCrminia (lo rey d'). — 72 v.
Escardavilha (Guilhem). — 5 v.
Espanha (Rotgier d'). — 80v.
Espanol (Guilhem). — 82 v.
Estaci (Aymeric) . — 22 r .
Estaci Duran. — 77 v.
Estaci (Jacme). — 58 v., 73 v.
Estaci (Johan). — 54 r , 75 r.,
89 V. Voy. Estassi (Johan).
Estaci (P.). — 14 r., 74 r., 78
v.,84 V. Voy. Estassi (P.).
Estassi (Johan). — 50 v. Voy.
Estaci (Johan).
Estassi (P.). — 93 r. Voy. Es-
taci (P.).
Esteve Albanhana. — 34 r.
Esteve Balhot. — 63 r.
Esteve Barba. — 9 v. Voy. Steve
Barba.
Esteve Boia. -63r.
Esteve Cambavielha. — 61 r., 73
r.
Esteve Campanha. — 34 v. Voy.
Steve Campanha.
Esteve Carbonie. — 62 r.
Esteve Cornuejol. — 59 r., 66 r.
Esteve Cros. — 37 v., 60 v., 75 r.
Voy Esteve Crotz.
Esteve ( rotz. — 29 r. Voy. Es-
teve Cros.
Esteve de Bajas. — 1 v.
Esteve Desmas. — 17 r., 42 r.,
45 r., 47 V.
Esteve Emengau. — 6 v.
Esteve Fabre. — 19 v., 21 r.,
24r., 20 V.. 45 v.
Esteve Gaucelm. — 78 r.
Esteve Gautie. — 36 r., 47 v.,
53r.,58v.,76r. Voy. Esteve
Gautier.
Esteve Gautier. — 15 v. Voy. Es-
teve Gautie .
Esteve (Johan). — 13 v., 24 v.
Esteve (Pey.) . — 40 r. Voy. Es-
teve (Peyre).
Esteve (Peyrc). -- 12 v., 48 v. ,
58 V. Voy. Esteve (Pey.).
Esteve Prunet. — 40v., 44v.
Esteve Rozieyra. — 37 v.
37
54C
LE « LIBRE DÉ MEMOMAS »
Esteve Sabatie. — ôv., 15 r.,
26 r.
Esteve Vanieyra. — 83 v.
Esteve Vices. — Il v., 23 v.
Evesque (Johan). — 37 v., 57 v.
Voj. Avesque (Johan).
Faberza (Johan) . — 88 r .
Fabre (Bernât). — 26 r., 35 V.,
71 V. .
Fabre (Esteve). — 19 v., 21 r.,
24r.,26 V., 45 v.
Fabre (Guilhem).— 17 r., 22 v.,
80 r.
Fabre (Jacme). — 33 r., 44 r.,
48 r.,54r.
Fabre (P.). — 18 v. Voy. Fa-
bre (Pey.) et Fabre (Peyre).
Fabre (Pey.). — 13 r., 62 y.,
75 V. Voy. Fabre (P.) et
Fabre (Peyre) .
Fabre (Peyre). — 22 v. Voy.
Fabre (P.) et Fabre (Pey.).
Fabre (Ramon). — 32 v., 78 v.,
83 V.
Fangaus. — 3 V.
Fauiha (Guilhem Augie de). — 3
r., 4 v., 6 v.
Fenassa (Guilhem). — 66 v.
Ferrier (B.). — 80 v. Voy. Fer-
rier (Bernât).
Ferrier (Bernât). — 57 v., 83 v.,
89 y., Voy. Ferrier (B.).
Ferrier (Brenguie) . — 62 y .
Flandres. — 78 y . , 79 r.
Floyra (Peyre). — 82 y.
Floyra (Pons). — 45 y., 47 y.,
48y. Voy. Floyza (Pons).
Floyza (Pons). — 76 r. Voy.
Floyra (Pons).
Foix (lo compte de). — 93 v.
Vov. FOYS.
Folc Girona. — 9 r. . 15 r.
Folcran (Johan). — 12 r., 20
y , 48 r.
Folcran (Miquel). — 3 r., 4 r.
Folcran (Ramon). — 7 v.
Fons (P.).— 52v.,77 v. Voy.
Fons (Pey.) et Fons (Peyre;.
Fons (Pey.). — 54 r., 75 r. Voy.
Fons (P.) et Fons (Peyre).
Fons (Peyre). — 77 r., 84 r.
Voy. Fons (P.) et Fons (Pey.).
Fontainas (Johan de), — 74 r.
Voy. Fontaynas (Johan de).
Fontaynas (Andiieu de). — 88 r.
Fontaynas (Johan de). — 28 r.,
42 y., 46 y.. 52 y., 84 r. Voy.
Fontainas (Johan de).
Fontes . — 60 r.
Fornie (Arnaut). — 23 y.
FoYS (lo comte de). — 85 r.
Voy. Foix.
Frances Barieyra. — 57 y. Voy.
Frances Barrieyra.
Frances Barrieyra. — 27 r., 49
p., 60 y., 72 r. Voy. Frances
Barieyra.
Frances Bechieu. — 47 y .
Frances Bofat. — 8 v. Voy. Fran-
ces Boffat.
Frances Boffat. — 40 y. Voy.
Frances Bofat.
Frances Causenuejols . — 20 r.
Frances Rog. — 50 y.
Fransa. — 3 y., 7 r., 16 r,,
18 r., 37 r., 61 y., 66 v.,
79 r., page 61, en note. Voy.
Franssa.
Fransa (la regina de). — 37 r. ,
79 r.
Fransa (lo rey de).— 3 y., 7 r.,
16 r., 18 r., 61 v., 66 v., page
DE JACME MASGARO
547
89, en note. Voy. Franssa (lo
rey de).
Franssa. —2 V., 3 r., 20 r., 29
V., 31 V., 42 r., 56 r., 59 v.,
60r.,63v., 71r.,72v.,78 V.,
79r., 83r.,85r.,87r., 87 v.,
88r.,88 V., 89 r. Voy. Fransa.
Franssa (lo conestable de)^ —
87 V.
Franssa (lo rey de). — 2 v., 3 r.,
20 r., 42r.,56r.,60r.,63 V.,
71 r.,72v.,78v., 79r., 85r.,
87 r., 88 r., 88 v., 89 r. Voy.
Fransa (lo rey de).
Frezols (Andrieu). — 2 v .
Frezoh (P.). — 2 v.
Fromit (Arnautj. — 28 v., 51 r.,
57 r.
Fromit (Bernât). — 23 r., 28 r.,
39 V., 59 v.,66 r.
Fromit (Johan). — 45 r., 50v.
Fiomit (P.). — 59 V. Voy. Fro-
mit (Peyre).
Fromit (Peyre). — 43 r., 58 v.
Voy. Fromit (P.)
Fromit (Ramon). — 28 r.
Frontinha. — 24 V.
Fuelhval (Ramon de). — 39 r.
G
Gaholhiac (Symon de). — 76 r.
Galas (lo princep de). — 14 v.,
16 r.
Galhart (Andrieu) . — 2 r . , 16 v . ,
17 r.
Gamot. — 63 r.
Gangi (Johan). — 8 v.
Gans.— 79r.
Garda (Anthoni delà). — 59 r.,
82 r.
Garda (Bertran de la). — 43 r.
Gariga (Johan de la). —58 v.,
73 r., 74 r. Voy. Garriga (Jo-
han de la) .
Garnit (Johan). -- 10 r., 20 v.,
30 V., 41 r.
Garoti (Anric). — 48 v., 82 v.,
Voy. Goroti (Anric) .
Garoti (Ramon). — )8 r., 33 r.,
37 V., 54 r.
Garra (Bernât). — 22 r.
Garriga (Johan de la). — 67 v.,
82 r. Voy. Gariga (Johan de la).
Gasc (Andrieu). — 19r., 21 r.,
22 v.,43 v.,45 r.,47r., 49 v.,
53 r.
Gasco . — 63 r .
Gassiot del Castel. — 24 v.
Gaubart (Peyre).— 23 v., 37 v.
Gaucelm (Esteve) . — 78 r.
Gaudel (Ramon). — 14 r., 17 r.,
30 V., 41 v.,48v.
Gautaroia (Jacme). — 16 r. , 20 v.,
26 V., 54 r., 75 r.
Gautaroia (P.). — 52v.,74r.,
86 r. Voy. Gautaroia (Pey.),
Gautaroia (Peyre) et Gautaroya
(P.).
Gautaroia (Pey.). — 73 r. Voy.
Gautaroia (P.), Gautaroia (Pey-
re) et Gautaroya (P . ) .
Gautaroia (Feyre) . — 51 v . , 74 r.
Voy. Gautaroia (P.), Gauta-
roia (Pey.) et Gautaroya (P.).
Gautaroya (P.). — 74 r. Voy.
Gautaroia (P.), Gautaroia
(Pey.) et Gautaroia (Peyre).
Gautie (Esteve). — 36 r., 47 v.,
53r.,58v., 76 r. Voy. Gau-
tier (Esteve).
Gautie (Johan). — 63 r.
Gautier (Esteve). — 15 v. Voy.
Gautie (Esteve).
Gavasto(P.).— 6 r.,39r.Voy.
Gavasto (Pey.).
548
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Gavasto (Pey.). — 13 v., 28 v.
Voy. Gavasto (P.)»
Gaysac (Ramon). — 17 r. Voy.
Gayschac (Ramon).
Gayschac(Johan). — 78 r., 81 v.
Gayschac ( Ramon ). — 6 v.,
14 V., 23 V. Voy. Gaysac (Ra-
mon).
G. B., monie. — 63 r.
G. del Bosc— 63r.
G. de Taurel.— 67 v.Voy. Gui-
Ihem de Taurel.
Geli (Alias). — 41 r. Voy. Geli
(Helias).
Geli (Helias). — 30 v.Voy. Geli
(Alias).
Geli (Ramon).— 12 r.,38r.Voy.
Gili (Ramon).
Genestas (Jacme). — 28 r., 66 r.
Genieys (Pey,). — 40 r. Voy. Ge-
nieys (Peyre) et Ginieys (P.)-
Genieys (Peyre). — 12 v., 41 r.,
48 v.,51 r., 53 r., 62 v.Voy.
Genieys (Pey.) et Ginieys
(P.).
Genieys (Ramon). — 32 v. , 62 r.
Gibeli (Bernât). — 2 r., 35 v.,
84 y.
Gilabert (Ramon). — 86 v.
Gili (Ramon). — 22 r. Voy. Geli
(Ramon) .
GiNHAC. — 3 V., 60 r.
Ginieys (P.). — 10 r. Voy. Ge-
nieys (Pey.) et Genieys
(Peyre).
Girart lo frances. — 63 r.
Girona (Foie). — 9 r., 15 r.
GiRONA (lo duc de). — 42 r.
Girona (P.). — 84 v. Voy. Gi-
rona (Peyre) .
Girona (Peyre). — 58 v.Voy. Gi-
rona (P.).
Glieyas (Paul).— 40 r. , 53 r.
G" Marti.— 9 r.
Gobi(Vesia).— 34v.
Goch (Jaques).— 22v.Voy.Gog
(Jaques).
Go g (Jaques). — 43 r.Voy. Goch
(Jaques) .
Golbias (Bernât de). — 36 v.,
38r.,39 V., 49 r.
Golfi (Bernât).— 26 r., 48 v.
Golfi(Pey.).— B2r.
Gonestaria (Guy). — 58 r.
Gontart (Bernât). — 63 r.
Gontaut (Pabina de)! — 58 r.
Gordo (Johan). — 51 v., 57 v.,
66 r.
Gordo (Pos).— 73 v.
Gorgori (Jacme). — 66 v.
Gorgori (Peyre) . — 51 v .
Goroti (Anric).^ 43 v.Voy. Ga-
roti (Anric).
Got (Guiraut) . — 40 v . , 48 r ,
62 r.
Grassa (la). — 3 V.
Grassia (Bona). — 62 v.
Graza (Brenguie) — 44 v .
Gregori (papa). — 51 v.
Grimoart (Simon de). — 74 r.
Voy. Grimoart (Symon de).
Grimoart (Symon de). — 72 v.
Voy . Grimoart (Simon de) .
Grindas (^lo portal d'en). —
87 r.
G. Sicart. — 80 v.
Gueyraut (Johannei^i) . —86 v.
GUIAYNE (lo DUGATDE). — 61 V.
Guilhelmes. — 34 v.
Guilhem Amat — 63 r.
Guilhem Arnaut. — 30 r.
Guilhem Audi. — 7 r., 11 r.,
18 V., 27 r.
Guilhem Augie . — 4 r .
Guilhem Aymoy. — 39 v., 47 r.,
51 p.
DE .TACME MASCARO
549
Guilhem Barrieyra. — 59 r.
Guilhem Barta. — 30 v.
Guilhem Bedos. - 59 r.
Gnilhera Benquelh. — 43 v.
Guilhem Bonet. — 32 v.
Guilhem Boq. — 8 v. Voy. Gui-
lhem Boquie.
Guilhem Boquie. — 28 v., 34 r.,
57 r. Voy. Guilhem Boq.
Guilhem Capeiie. — 5 v.
Guilhem Caratie . — 63 r.
Guilhem Carie. —28 v., 31 v.,
36 p., 66 r. Voy. Guilhem Karle.
Guilhem Castras. t— 45 r.
Guilhem Catala. — 73 r, 83 v.
Guilhem Conort. — 93 r.
Guilhem Cotelie. — 41 v., 50 v.,
89 V. Voy. Guilhem Cotelier.
Guilhem Cotelier. — 28 v., 31 v.,
45 V., 52 V. Voy. Guilhem Co-
telie .
Guilhem Danha. — 2 r. Voy.
Guilhem Daynha.
Guilhem Daynha. — 1 v Voy.
Guilhem Danha.
Guilhem de Badonas. — 9 r., Il
r., 18 r., 35 v.
Guilhem del Bruelh — 89 v.
Guilhem de Mezo. — 13 r.
Guilhem de Moyschac — 84 v.
Guilhem de Taurel. — 52r.,62
r. Voy. G. de Taurel.
Guilhem DuranSicart. — 9 r.
Guilhem Escardavilha. — 5 v.
Guilhem Espanol. — 82 v.
Guilhem Fabre. — 17 r., 22 v.,
80 r.
Guilhem Fenassa. — 66 v.
Guilhem Guitart. — 2 p.
Guilhem HonMha. — 10 r.
Guilhem Karle. — 44 v. Voy.
Guilhem Carie.
Guilhem lo fustie. — 63 r.
Guilhem Masselha. — 63 r.
Guilhem Mauri. — 15 r.
Guilhem Miquel. — 45 r., 57 r.,
76 r.
Guilhem Morut. — 7 v.
Guilhem (mossen), abat de Sant
Jacme. — 2 r.
Guilhem (Nicholau). — 77 v.
Guilhem Pages.— 22 r.
Guilhem Peyre. — 40 r.
Guilhem Peyre de Pauli.— 40 v.
Guilhem Peyrie. — 63 r., 73 v.,
86 V.
Guilhem P. Trenquavelh.— 49 r.,
80 r.
Guilhem Ramon. — 34r., 66 r.
Guilhem Raynes — 4 v.
Guilhem Remcnie.— 63 r.
Guilhem Revel. — 14 r., 24 r. ,
73r.,84 r.
Guilhem Rigaut. — 76 r., 86 r.
Guilhem Roma. — 5 r , 10 r.,
13 V.
Guilhem Rossel. — 32 v.
Guilhem Rossilho. — 7 v., 19 v.,
21 r.,24v., 26v., 38 r.
Guilhem Sabatie. — 63 r.
Guilhem Salât. — 9 v, 57 v.
Guilhem Salvayre. — 34 r., 75 r.
Guilhem Trenquavelh. — 14 r.
Guilhem Vayssa. — 82 r.
Guinho (Arnaut). — 52 v.
Guiraudo. — 62 v.
Guiraut Blanquier. — 18 v.
Guiraut Buadela. — 10 r.
Guiraut Got. — 40 v., 48 r., 62 r.
Guiraut (Jacme). — 66 r.
Guiraut Portel. — 44 v.
Guiraut (Ramon). — 18 v., 32 v.,
75 r.
Guiraut Teyseyre. — 34 v.
Guirgols (Duraride). — 60 v.,
89 V.
550
LE «LIBRE DE MEMORIAS »
Guitart(B.).— 5 r., 62 r., 67 r.
Voy. Guitart (Bernât). •
Guitart (Benezeg).— 31 r,
Guitart (Bernât).— 13r.,34r.,
47 r., 62r.,67r., 67v.,72v.,
Voy. Guitart (B.).
Guitart (Guilhem) . — 2 r.
Guitart (Johan). — 4 v.
Guy de Lestaria. — page 72^ note
1.
Guy Gonestaria. — 58 r.
Helias Geli. — 30 v. Voy.
Alias Geli.
Heyraut (Jacme) . — 51 r.
Honelha (Guilhem).— 10 r.
Hue Cabot. — 6 v., 12 v., 14 v.,
17 V., 19v.,21 r.
Hue d'Archas. — 13 r.
Hue delBosc. — 41 r.
Hue (Johan). — 89 v.
Hue Miquel.— 60 v.
Hue (mossen), avesque. — 11 v.
Hue Pomayrols. — 66 r.
Hue (Ramon). — 4 v., 10 v.
Huguet (Johan). — 63 r.
JaemeBedos. — 10r.,84v.
Jaeme Bena. — 85 r.
Jaeme Bernât. — 13 v.
Jacme Betinha. — 5 v., 11 r.,
34 r.
Jacme Bonaric . — 34 v .
Jacme Boquet. — 50 v.
Jacme Botho. — 23 r., 24 r.,
27 r. Voy. Jacme Boto.
Jacme Boto.— 26 r., 28r.,62r.
Voy. Jacme Botho.
Jacme Bru. — 54 r. , 78 v.
Jacme Caucenuejol. — 86 r. Voy.
Jacme Caucenuejols et Jacme
Causenuejols.
Jacme Caucenuejols. — 57 v.
Voy. Jacme Caucenuejol et
Jacme Causenuejols.
Jacme Causenuejols. — 45 r.
Voy. Jacme Caucenuejol et
Jacme Caucenuejols.
Jacme Emengau. — 29 r., 33 v.,
34 r., 39v.,41 r., 57 r., 72 r.
Jacme Estaci — 58 v., 73 v.
Jacme Fabre. — 33 r., 44 r., 48
r., 54 r.
Jacme Gautaroia. — 16 r.,20v.,
26 V., 54 r., 75 r.
Jacme Gène s tas. — 28 r., 66 r.
Jacme Gorgori . — 66 v .
Jacme Guiraut. — 66 r.
Jacme Heyraut. — 51 r.
Jacme Laures. — 33 v., 35 v.
Voy. Jacme Lauzes.
Jacme Lauzes. — 53 r, 59v.
Voy. Jacme Laures.
Jacme Lombart, — 19 r., 21 v.,
22 V., 26r.,28r., 37 v.
Jacme Lombes. — 44 v., 57 v.,
75 V.
Jacme Maistre. — 27 r. Voy Jac-
me Maystre.
Jacme Mascaro. — 1 r., 4v.
Jacme Mauri. — 53 r., 54 v., 57
r., 59 V., 66 V., 81 v., 86 v
Jacme Maystre. — 17 v. Voy.
Jacme Maistre.
Jacme ( mossen), abat de Sant
Afrodisi. — 2 r.
Jacme Nicholau. — 82 r.
Jacme Paulinha. — 43 v.
Jacme Régi Ortola — 42 v.
Jacme Salamo de Thesa. — 62 r.
Jacme Sicre. — 45 v., 61 r.,
71 V.
DE JACME MASCABO
551
Jacme Vanieyra. — 6r., Il v.,
18 r.Voy. Jacme Vanuieyra.
Jacme Vanuieyra. — 10 v. Voy,
Jacme Vanieyra.
Jacme Vedel. — 51 v.
Jacme Vidal. — Ur., i;r.,26v.
Jacquet de Bencyorget. — 89 r.
Jaques Goch. — 22 v. Voy. Ja-
quel Go g.
Jaques Gog. — 43r. Voy. Jaques
Goch.
Johaaa (madama). — 42 r.
{ Jeanne , fille de Philippe de
Valois).
JohaD Andrieu.— 7 v.. I3v,
Johan .\ugie- — 39 r.
Johan Auriac. — 63 r.
Johan Aveaque, — 78 r. Voy,
Johan Evesque,
Johan Ayraut, — 60 v.
Johan Barrieyca, — 41 v., 47r,,
58v.,77r.,78 r.
Johan Baudriga. — 7 v., Il r.,
13 r.
Johan Benezeg. — 7 r., 7»,,
38 r., 43 v.,61 r.
Johan Bermon. — 44 v., 62v.
Johan Betinha. — 78 r.
Johan Betizac. — 89 r. Voy.
Johan de Betizac.
Johan Bigot,— 5 v., 10 r., 18 r.,
18 V.
Johan Blanquet. — 47v.
Johan Bonaerviai. — 30 v. Voy.
Johan de Bonservisi et Johan
deBoservisi.
Johan Botagrais, — 63 r.
Johan Boyer. — 47 r,, 58 v.
Johan Bi'u. -=-82 1'.
Johan Cabrayreasa. — 22 r.
Johan Cabrel, — 38 r., 41 r
Johan Campanha. — 76 r.
Johan Caramanh.— 63 r.
Johan Corcgie. — 10 r,, 20 v.'
37 V., 52 V. Voy. Johan Cor-
regie.
Johan Coi'regie. — 4 v., 14 v., 31
V , 34 V. Voy. Johan Coregie,
Johan CortOB. - 17 v., 31 r.,
43 r.,54 r.
Johan CorOnala. — 6 v., I5r.
Johan Costans, — 10 v.
Johan Cotelier. — 6 v., 12 v.,
18 V.
Johan Coyra.— 26 v., 77 v.
Johan Cruai.— 61 v. Voy. Johan
Cruzi.
Johan Crud.— 38 r., 43 r. Voy.
Johan Cruai,
Johan da Sas. — 86 v. Voy.
Johan de Siia.
Johan do Betizac. — 77 r., 83 r.,
85 T. Voy. Johan Betizac.
Johan do Bezueuha. — 71 r.
Johan de Bonservisi.— 60 v. Voy.
Johan Bonservisi et Johan de
BosflPvUi.
JohandeBosciTlsi. — 38r, Voy,
Johan Bonsei'visi et Johan de
Bonaervisi.
Johan de Camplonc. — Il v.,
42 V., 54 r.,73 v., 82 v.
Johan de Fontrimas,— 74 r.Voy.
Johan de Fontaynas.
Johan do Fontaynas. — 28 r., 42
V., 46 V., 52 V., 84 r. Voy.
Johan de Fontflinaa.
Johan de la Gros. —80 r.
Johan de la Gariga.— 58 v., 73
I'., 74 r. Voy. Johan de la Gar-
riga.
Johan de la Garriga.— 67 v., 82
r. Voy. Johan de la Gariga.
Johan de Pradas.^ 51 v.,66 v.,
77 V. Voy. Johan Pradaa.
Johan de Sant Andrieu. — 2 r.
552
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Johan de Sas. — 84 v. Voy. Johan
da Sas.
Johan Dolha. — 31 v., 37 v., 43
V., 53 r., 54 V., 60 v.
Johan Emengau. — 13 v., 45v.,
48 V.
Johan Eranha. — 2 r.
Johanneri Gueyraut. — 86 v.
Johan Estaci. — 54 r., 75 r.,89 v.
Voy. Johan Estassi.
Johan Estassi.— 50 v. Voy. Johan
Estaci.
Johan Esteve. — 13 v., 24 v.
Johanet Cotelie. — 80 r.
Johan Evesque. — 37 v., 57 v.
Voy. Johan Avesque.
Johan Faberza. — 88 r.
Johan Folcran. 12 r., 20 v.,
48 V.
Johan Promit. — 45 r., 50 v.
Johan Gangi. — 8 v.
Johan Garnit. — 10 r., 20 v.,30
V., 41 r.
Johan Gautie. — 63 r.
Johan Gayschac. — 78 r., 81 v,
Johan Gordo. — 51 v., 57 v., 66 r.
Johan Guitart. — 4 v.
Johan Hue. — 89 v.
Johan H u guet. — 63 r.
Johan Jotglar. — 72 r.
Johan Labana. — 63 r.
Johan Laures. — 49 r., 88 r.
Johan (lo rey). — 16 r., 27 v.,
31 V., 60 r. (Jean II le Bon).
Johan Marti. — 23 v.
Johan Masens. — 61 r.
Johan Menerbes — 37 v.
Johan Nadal. — 3 r., 4r.
Johan Navas. — 57 r.,86r.,88 r.
Johan Orthola. — 77 v.
Johan Paralops. — 34 r.
Johan Pastre. — 18 v., 28 r.,
50v.,63 r., 82 r.
Johan Perdiguie. — 58 r.
Johan Pradas — 33 r., 34 v.,
37 V. Voy. Johan de Pradas.
Johan Raynaut. — 10 v., 82 v.
Voy. Johan Reynaut.
Johan Reynaut. — 71 v. Voy.
Johan Raynaut.
Johan Rial. — 11 v., 15 v.,29 r.
Johan Rogie, — 80 r., 84 v.
Johan Rossel. — 10 r.
Johan Sabatie. — 62 r.
Johan Sahonier. — 26 v.
Johan Sauze. — 63 r.
Johan Seinhier. — 11 v.
Johan Servia. — 18 r., 22 r.
Johan Sonie. — 63 r.
Johan Teron. —34 v., 35 v.,
41 r., 50 V., 62 V.
Johan Tomas. — 77 r.
Johan Visme. — 7 r.
Jolia Barrieyra. — 3 r., 4 r.
Jolia Bernât. — 60 v., 81 v.
Jorda(Peyre). — 88 r.
Jori (Ramon). — 12 v,
Jotglar (Johan). — 72 r.
Karle (Guilhem). — 44 v. Voy.
Carie (Guilhem).
Karles. — 31 v., 60 r., 87 r.
(Charles V) .
Karles. — 60 r., 78 v., 87 v.
(Charles VI). Voy. Caries.
Karles. — 79 r. (Charles, fils
aîné de Charles VI).
Karles se terne. — pag. 89, en
note. (Charles VII).
Labana (Johan). — 63 r.
Lac(Pey. del). — 21 v.
DE JACME MASCARO
553
Laieret(P.). — 93 r.
Landorra (lo Bastart de). — 59 v.
Lar (Arnaul del). — 58 r.
Laur (Bernât). — 32 v., 43 r.,
73 V. Voy. Laur (Bernet).
Laur (Bernet). — 86 v. Voy.
Laur (Bernât) .
Laurens (Pons). — 28 r.
Laures (Brenguie). — 10 r. , 15 v.
Laures (Jacme), — 33 v., 35 v.
Voy. Lauzes (Jacme).
Laures (Johan). — 49 r., 88 r.
Laures (Peyre). — 36 v.
Laures (Ramon). — 2 r.
Lauzes (Jacme). — 53 r., 59 v.
Voy. Laures (Jacme),
Lebret(lo senhor de). — 87 v.
Lexgadoc. — 5 r., 24 V., 31 V.,
56 r., 61 V., 84 r., 85 r.,
88 r.,88v., 89 r.
Lespinha. — 40 r., 40 v.-
Lestaria (Guy de). ~ pag. 72,
note 1.
Lieura (Amalric). — 3 r., 4 r.
Lieura (Andrieu). — 81 v.
Lieura (Peyre). — 54 v.
LiNHA. — 27 V., 80 V.
LODEVA. — 3 V.
Lombart (Jàcme). — 19 r., 21 v.,
22 V., 26 r., 28 r., 37 v.
Lombart (Mathieu). — 20 v.
Lombes (Jacme). — 44 v., 57 v.,
75 V.
Lombes (Peyre). — 63 r.
Londras (Veria). — 48 v.
Loys. — pag.89,ennote. (Louis XI).
Loys. — 86 r., 87 r. (Louis, duc de
Touraine, frère de Charles VI).
Loys. — 60 r. (Louis, filg du duc
d'Anjou).
Loys Blonde. — 48 r.
Loys de Sansuerra. — 87 v. Voy.
Sansurra et Sant Surra.
Loys Roinbaut. — 27 v.
Loys Vayscha. — 52 v. Voy.
Loys Vayssa.
Loys Vayssa. — 36 r., 38 r.Voy.
Loys Vayscha.
Luna (P. de). — 93 v.
Lunas (Peyre). — 31 r., 34 v.,
35 V.
Lymos. — 3 V.
M
Magdalena (la), église. — 35 r.
Voy. Magdalena (la Maria),
Magdalena (la MayRe de Dieu
DE la) et Magdalena (Santa).
Magdalena (la Maria), église.
— 37 r. Voy. Magdalena (la),
Magdalena (la Mayre de Dieu
de la) et Magdalena (Santa).
Magdalena (la Mayre de Dieu
delà), église.— lOr.Voy. Mag-
dalena (la), Magdalena (la
Maria) et Magdalena (Santa).
'Magdalena (Santa), église. —
71 r., 81 r. Voy. Magdalena
(la), Magdalena (la Maria)
et Magdalena (la Mayre de
Dieu de la).
Maistre (B.). — 76 v.
Maistre (Jacme). — 27 r. Voy.
Maystre (Jacme).
Malhares (l'avesque de). — 83 r.
Malmont (Bertran de). - 93 r.
Malpel(R.). —21 v.
Malras (Anric). — 34 r., 57 r.,
59 V.
Malsa. — 30 r.
Maraussa. — 27 r.
Margarida (na). — 48 r.
Marguarida (la regina) . — 93 v .
Maria Magdalena (la), église.
— 37 r. Voy. Magdalena (la),
554
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Magdalena(la Mayre dk Dieu
DE la) etMAGDALENA (SaNTa).
Maria MagdaleiNa (Santa), égli-
se. — 77 r . Voy . Magdalkna
(la), Magdalena (lv Mayre
DE Dieu de la), Maria Mag-
DALENA (la) et MaGDALENA
(Santa) ,
Marinier (Peyre). — 93 r.
Mars (Ramon de). — 11 r.
Marti (G"). — 9 r.
Marti (Johan). — 23 v.
Marti (lo comte). — 37 r., 79r.
Marti (Ramon). — 77 v., 80r.
Mascaro (Jacme). — 1 r.,4v.
Masens (Johan). — 61 r.
Masquo (l'avesque de). — 71 r.
Massai (Bernât). — 63 r.
Massas (Pey.). — 23 v.
Massas (Ramon), — 24 r., 27 r.,
44 V., 75 r.
Masselha. — 3 V.
Masselha (Guilhem). — 63 r.
Mathieu Lombart. — 20 v.
Mathieu Rossant. — 48 v., 82 r.
Mathieu Vilar. — 3r., 4r.
Mauri (Guilhem). — 15 r.
Mauri (Jacme). — 53 r., 54 v.,
57 r., 59 V., 66 v., 81 v.,86 v.
Mauri (P.). — 47 r. Voy. Mauri
(Peyre).
Mauri (Peyre). — 22 r., 26 r.
Mayre de Dieu de la Magda-
lena, église. — 10 r. Voy.
Magdalena (la), Magdalena
(la Maria) et Magdalena
(Santa).
Mayre de Dieu de Pietat (la),
chapelle — 83 r.
Mayre de Dieu de Serinha {l\),
église. — 37r.
Maystre (Jacme). — 17 v. Voy.
Maistre (Jacme).
Maystre Santz. — 13 r.
Mazeras. — 3 V.
Menerbes (Johan) . — 37 v .
Mkrcadaria (la), place. — 87 r.
Messier (Pey . ) . — 41 r.
Mezo (Guilhem de). — 13 r.
Miquel Folcran. — 3 r., 4 r.
Miquel (Guilhem). — 45 r.,57 r. ,
76 r.
Miquel (Hue), — 60 v.
Miquel (Sedel). — 6 r.
Miralhie (Bernât). — 16 r.,21 r.,
22 V., 36 r. , 78 r. Voy. Mira-
Ihier (B.) et Miralhier (Bernât).
Miralhier (B.).— 27 r. Voy. Mi-
ralhie (Bernât) et Miralhier
(Bernât).
Miralhier (Bernât). — 19 v., 30 v.,
52 V. Voy. Miralhiç (Bernât)
et Miralhier (B.).
MiRAPEYS. — 3 V.
Molinier (Peyre). — 1 v.
Monestie (Ramon de). — 59 v.
MONFLORES. — 31 V.
MoNPEYLiER. — 3 V., 22 r., 30 r.
35 r., 58 r.
MONPEYLIER (sANTGiRMA De), COU-
vent. — 30 r.
Monpezat (Bertran de)^ — 30 r.
Monrial. — 3 V.
Montadi ( Ymbert de). — 12 v.,
40 r.
MONTANHAC. — 3 V., 4 r.
MoNTIBEL ( BORC DE). — 79 V.
Montolieu. — 3 V.
Montolieu (Berthomieu de). —
80 V.
Mornay (Peyre de). — 89 v.
Morut (Guilhem). — 7 v.
Moyschac (Guilhem de). — 84 v.
Mozere (Pey. de). — 48 r.
Murvielh (Sicart de). — 13 r.
DE JAGME MASGARO
555
N
Nadal (Johan).— 3r., 4 r.
Narbona. — 3 V., 11 V., 20 r.,
21 V., 56 r., 60r., 87v.,93r.,
93 V.
Narbona (rarcivesque de). — 11
V., 20 r.
Narbona (Sant Just de), église.
— 21 V.
Navarra (lo rey de). — 2 v., 87 v.
Navar (Ramon). — 8 r.
Navarra (P. de). — 87 v.
Navas (Johan). —57 r., 86r. , 88 r.
Nemze. — 3 V., 27 V., 56 r.
Nicholau (Augie). — 8 v.
Nicholau(Guilhera). — 77 v.
Nicholau (Jacme). — 82 r.
Nicholau Pojol. — 5v., 16v. , 17r.
Nycholau (Andrieu). — 63 r.
Olivie de Clisson. — 79 r.
Olivie Paulinha. — 76 r. Voy.
Olivier Paulinha.
Olivier (B.). — 5 r.
Olivier Paulinha. — 4 v., 8 v.,
83 V. Voy. Olivie Paulinha.
Orgaria (la), place. — 87 r.
Orp (la ribieyrad'). — 52 r.
Orthola (Johan). — 77 v.
Ortola (Jacme Régi). — 42 v.
Ortz (Ramon). — 7v.,12v., 15r.,
26 r., 26 V., 33 r.
Pabina de Gontaut. — 58 r.
P. Agcl. — 32 V.
Pages Guilhem. — 22 r.
P. Aludie. — 10 r.
Pamias. — 3 V.
Panta Salada (Peyre). — 1 v.
Paralops (Johan). — 34 r.
Paris. — 88 r.
Pascal (Ramon). — 40 v., 48 r.
Passavan (Raynaut). — 27 r.,
33 r., 43 r,
P. Astrebo. — 7 v., 15 r.
Pastre (Johan). — 18v , 28 r.,
50v.,63r.,82r.
Pastre (P.). — 5v.
Paul Bajas. — 36 r.
Paul Barba.— 49v.,54 v.,59r.,
61 V., 62 r.
Paul Bossela. — 31 r.
Paul Glieyas. — 40 r., 53 r.
Pauli (Guilhem Peyre de) . — 40 v .
Paulinha (Jacme) . — 43 v.
Paulinha (Olivie). —76 r. Voy.
Paulinha (Olivier) .
Paulinha (Olivier). — 4 v., 8 v.,
83 V. Voy. Paulinha (Olivie) .
Pauli (Sicart de). — 40 r.
Paul Triquart. — 80 v.
P. Aymoy. — 15 r. Voy. P.
Aymoyr et Peyre Aymoy.
P. Aymoyr. — 86 r. Voy. P.
Aymoy et Peyre Aymoy.
P. (Berthomieu) . — 72 r.
P. Bonet. —7 v.
P. Boquie. — 9 r. Voy. Pey. Bo-
quie et Peyre Boquie.
P. Brenguie. — 71 v., 75 r. Voy.
Peyre Brenguie et Peyre Bren-
guier.
P. Cabot. — 10 r. Voy. Peyre
Cabot.
P. Cartholha.— 83 v. Voy. Pey.
Cartolha et Peyie Cartolha.
P. de Badonas. — 73 v. Voy.
Peyre de Badonas.
P. de Luna. — 93 v.
P. de Navarra. — 87 v.
556
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
P. Desmas. — 5 r. Voy. Peyre
Desraas.
P. Donmnis. — 21 v.
Pelegri (Peyre). ■— 19 r.
Peno (R.). — 67 V., 76 v. Voy.
Peno (Ramon).
Peno (Ramon). — 51 v., 57 r«
Voy. Peno (R.).
Pepi (Pons). — 63 r.
Perdiguie (Johan). — 58 r.
Perenas. — 4 r., 60 r. Voy. Pe-
ZEiNAS.
Perpinha.— 93 r., 93 v.
Perrin de Rems. — 72 v.
P. Estaci. — 14 r., 74 r., 78 v.,
84 V. Voy. P. Estassi.
P. Estassi.— 93 r. Voy. P. Estaci.
Pey. Bechie. —'661'. Voy. Peyre
Bechie et Peyre Bechier.
Pey. Boquie. — 30 v. Voy. P.
Boquie et Peyre Boquie.
Pey. Cambavielha. — 30 v.
Pey. Cartolha.— 73 r. Voy. P.
Caitholha et Peyre Cartolha.
Pey. Gatala. ~ 39 r. Voy. Peyre
Catala.
Pey. Cava. — 62 v.
Pey. Comte. — 42 v.
Pey. de Carato. — 21 v.
Pey. del Lac. — 21 v.
Pey. de Mozere. — 48 r.
Pey. Dolha. — 53 v.
Pey. Esteve. — 40 r. Voy. Peyre
Esteve.
Pey. Fabre.— 13 r., 62 v.,75 v.
Voy. Peyre Fabre et P. Fabre.
Pey. Fons. — 54 r., 75 r. Voy.
Peyre Fons et P. Fons.
Pey. Gautaroia. — 73 r. Voy.
Peyre Gautaroia, P. Gautaroia
et P. Gautaroya.
Pey. Gavasto. — 13 v., 28 v.
Voy. P. Gavasto.
•>
Pey. Genieys. — 40 r. Voy. Peyre
Genieys et P. Ginieys.
Pey. Golfi. — 82 r.
Pey. Massas. — 23 v.
Pey. Messier. — 41 r.
Pey. Ramon Revel. — 8 r. Voy.
P. Ramon Revel.
Peyre Acde. — 24 r., 31 r., 44 v.
Peyre Amat. — 63 r.
Peyre Amielh. — 16 v.
Peyre A ma ut. — 24 r., 34 r.
Peyre Aymoy. — 53 r., 80 r. Voy.
P. Aymoy et P. Aymoyr.
Peyre Barot. — 39 r.
Peyre Bechie. — 21 v. Voy. Pey.
Bechie et Peyre Bechier.
Peyre Bechier. — 19 r. Voy. Pey.
Bechie et Peyre Bechie.
Peyre Bira. — 63 r. Voy. Peyre
Biro.
Peyre Biro. — 54 v. Voy. Peyre
Bira.
Peyre Boquie. — 15v., 39r., 58v.
Voy. P. Boquie et Pey. Boquie.
Peyre Boyer. — 16 r.
Peyre Braconet. — 63 r.
Peyre Bragayiie. — 15 r., 27 r.
Peyre Brenguie. — 89 v. Voy.
P.Brenguie et Peyre Brenguier.
Peyre Bi-enguier. — 78 r. Voy.
P.Brenguie et Peyre Brenguie.
Peyre Bru. — 57 r.
Peyre Cabot. — 11 r., 13 r.,
22 r. Vov. P. Cabot.
Peyre Cartolha. — 80 r. Voy. P.
Cartholha et Pey. Cartolha.
Peyre Catala. — 26 r. Voy. Pey.
Catala.
Peyre de Badonas. — 23v.,27r.,
33 r., 41 V., 57 v. Voy. P. de
Badonas.
Peyre del Truelh. — 42 r. Voy.
P. Truelh.
DE JÂ-CME MASCARO
Peyre de Momay. — 89 v,
Peyre dePauli(Guilhem). — 40 v.
Peyre de Santa Aularie. — 1 v.
Peyre Desmas. — 2 i-. Voy. P.
DesnijSs.
Peyre Esteve. — 12 v., 48 r.,
58 V. Voy. Pey. Esteve.
Peyre Pabve. — 22 v. Voy. Pey.
Fabre et P. Fabre.
Peyi'e Floyra. — 82 v.
Peyre Fons. — 77 t., 84 r. Voy.
Pey. Fona et P. Fona.
Peyre Promit.— 43 r., 58v.Voy.
P. Fi'omit.
Peyre Gaubart.— 23 v., 37 v.
Peyre Gautaroia,— 51 v., 74 r.
Voy. Pey. Gautarola, P. Gau-
taroia et P. Gautaroya.
Peyre Genieya.— 12 v., 41 r.. 48
V., 51 r., 53 r., Ii2 v. Voy.
Pey. Genieya et P. Gialeys.
Peyre Qirona.— 58 v. Voy. P.
Giroiia.
Peyre Gorgori.— 51 v.
Peyre (Guiihem).— 40 r.
Peyre Jorda.— 88 r.
Peyre Laurea. — 36 v.
Peyre Lieura. — 54 v.
Peyre Lombes. — 63 r.
Peyre l.unaa.— 31 v., 34 v., 35 v.
Peyre Marinier. — 93 r,
Peyre Mauri. — 22 r., 26 r. Voy.
P. Mauri.
Peyre Molinier. — 1 v,
Peyre Panta Salada. — I v.
Peyre Pelegri.— 19 r.
Peyre (Pons).— 11 v.,26v„48v.
Peyre Porquie. — 39 p.
Peyre Pueeh.- 60 v.
Peyre Raynie.— 63 r.
Peyre Rodie. — 59 r., 66 v.
Peyre Romieu. — 10 v.
PeyreRotgie.-82v.Voy.P.Rogie.
Peyre Salvayre. — 40 v. Voy. P-
Salvayre.
Peyre Segui.— Il r., 22 v. Voy.
Pey. Segui.
Peyre Serinha.— 2 r.
Peyre Thomas.— 10 v., H v. Voy.
Pey. Thomaa.
Peyre Trebea.— 63 r.
Peyre Trenquavelh. — 78 r. Voy.
Peyze Trenquavelh et P. Tren-
quavelh (Guiihem).
Pevre Trobat.- 54 r.
Pey. Revel.— 12 r.
Peyre Vilar.— 28 r., 39 r. Voy,
Pey. Vilar et P. Vilar.
Pbtruc— 27 V.. 29 r., 29 v.
Peyrie (GuilhemJ.— 63 r., 73 v.,
86 V.
Pey. Segui.— 6p. Voy.Peyre Segui.
Pey. Thomas.- 22 r., 41 r.Voy.'
Peyre Thomaa.
pRïTiEa.— 16 r., 21 v.
Petties (lo comte de). — 21 v.
Pey. Vilar.- 38 r., 66 r. Voy.
Peyre Vilar -et P. Vilar,
Peyze Trenquavelh.- 73 v. Voy.
Peyre Trenquavelh et P. Tren-
quavelh (Guiihem).
PazËNAS.— 3 v. Voy. Perbnas.
Pbzbt.— 60 p.
P. Fabre. — 18 v. Voy. Pey.
Fabre et Peyre Fabre.
P. Fona.— 52 V., 77 V. Voy. Pey.
Fons et Peyre Fona.
P. Frezola. - 2 V.
P. Ftomit.— 59 v. Voy. Peyre
Promit.
P. Gautaroia. — 52 v., 74 p., 86
p. Voy. Pey. Gautaroia, Peyre
Gautaroia et P. Gautapoya.
P. Gautaroya. — 74 p. Voy. Pey.
Gautaroia, Peyre Gautaroia et
P. Gautaroia.
558
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
P. Gavasto. — 6 r., 39 r. Voy.
Pey. Gavasto.
P. Ginieys. — 10 r. Voy. Pey.
Genieys et Peyre Genieys.
P. Girona . — 84 v. Voy. Peyre
Girona.
Phelip de Valoys. — 2 v. Voy,
Phelip (lo rey),!Philip de Frans-
sa et Philip de Valoys.
Phelip (lo rey). — 3 r. Voy. Phe-
lip de Valoys, Philip de Frans-
sa et Philip de Valoys.
Philip de Franssa. — 42 r. Voy
Phelip de Valoys, Phœlip (lo
rey) et Philip de Valoys.
Philip de Valoys. — 7 r. Voy.
Phelip de Valoys, Phelip (lo
rey) et Philip de Franssa.
PlETAT (la MaYRE DE DiEU DE),
chapelle — 83 r.
P. Laieret. — 93 r.
P. Mauri.— 47 r. Voy. Peyre
Mauri.
Pojol (Nicholaii). — 5 v., 16 v.,
17 r.
Pomayrols (Hue). — 66 r.
Pons Amielh. — 8 r., 20 r.^
23 r.
Pons (B.) alias Sabatier.— 9 v.
Voy. Pons (B.) Sabatie.
Pons (B.) Sabatie. — 9 v. Voy.
Pons (B.) alias Sabatier.
Pons Cavalie. — 49 r. 85 r.,
Pons Emengau. — 35 v. Voy.
Pons Ermengau.
Ppns Ermengau. — 27 r. Voy.
Pons Emengau.
Pons Floyra.— 45 v., 47 v., 48
V. Voy. Pons Floyza.
Pons Floyza. — 76 r. Voy. Pons
Floyra.
Pons Laurens. — 28 r.
Pons Pepi.— 63 r. ,
Pons Peyre.— 11 v., 26 v., 48 v.
Pons Ros.— 6 V., 17 v., 20 v.
Pons Tantusel.— 63 r.
Pons Trebes. — 75 v.
Pons Vedel.— 76 r.
Pons Veria. — 14 v., 23 v.
Pons Vielar. — 21 v. Vov. Pons
Vilar.
Pons Vilar. — 42 r. Voy. Pons
Vielar.
Porquie (Bernât). — 28 v., 39 v.
Porquie (Peyre). — 39 r.
Portai (Steve).— 4 v.
Portel (Guiraut).— 44 v.
Pos Gordo.— 73 v.
P. Pastre. — 5 v.
P. Peruc.— 4 v. (Pépézuc).
Pradas (Bernât de).—- 1 v.
Pradas (Johan).— 33 r., 34 v.
37 V. Voy. Pradas (Johan de).
Pradas (Johan de).— 51 v., 66 v.,
77 V. Voy. Pradas (Johan).
P. Ramon Revel. — 37 v. Voy.
Pey. Ramon Revel.
Pratz (Bertran). — 28 v., 35 v.,
47 V., 50 v., 81 V.
P. Raynols. — 10 r., 18 v.
Presioadors (lo portal de). —
44 r., 62 v. Voy. Presicados
(lo portal de).
Presicados (lo portal de). — 87
r. Voy. Presioadors (lo portal
de).
Presicados (los). — 44 r. Voy.
Prezicados (los).
Prezicados (los). — 76 v. Voy.
Presicados (los).
P. Rogie. — 44 r., 61 r. Voy.
Peyre Rotgie.
Prunet (Esteve). — 40 v., 44 v.
P. Salvayre. — 63 r. Voy. Peyre
Salvayre.
P. Saseno. — 42 v.
DE JACME MASCARO
P. Trenquavelh (Guilhem]. — 49
r., 80 r. Voy. Peyre Trenqua-
velh et Pcjze Trenquavelh.
P. Traelh. — 52 V. Voy. Peyre
del Truelh.
Puech (Peyre). ~ 60 v.
Puzac (Ratûon de). — 15 v., 26
r,, 28 r., 36 r., 51 v.
P. Vidal. — 39 r.
P. Vilar. — 34 v. Voy. Peyie
Vilar et Pey. Vilar.
Ramon Age). — 43 r,
Ramon Alsri. ~ 31 r., 32 v.. 44
r., 57 r., 59 v., 62 r.
Ramon BermoD. — 62 v.
Ranaon Bertran. — 13 v.
RaniOD Retizac. — m v.
Ramon Boquet. — 9 r., 18 v.
Ramon Bienguie. — 9 v., 31 r.,
33 r., 34 V., 39 r., 61 r.
Ramon Cabot. — 30 r., 41 v., 43
r., 47 V., 71 V., 81 v.,84r.
Ramon Catala. — 39 v., 45 r.
Ramon Coregie. — 43 v. Voy.
Ramon Coi régie.
Ramon Corregie. — 75 r., 82 r.
Voy. Ramon Coregie.
Ramon Cotelie. — 24 r., 42 r.,
45 V., 54 V., 57 v., 61 r., CCv..
72 r. Voy. Ramon Coteiier.
Ramon Coteiier. — 14 r., 16 r.,
I9r., 21 V., 26r., 27r.,38r,
Voy. Ramon Cotelie.
Ramon de Fuelhval. — 39 r.
Ramon de Mars. — 1 1 !■.
Ramon de Monesde. — 59 v.
Ramon de Puzac. — 15 v., 26 r.,
28 r., 36 r., 51 v.
Ramon Emengau. — 48 r., 57 v.,
59 r., 60 V., 78r.,80r.
Ramon Emerio.
Ramon Fabre.
83 V.
Ramon Folcran.
Ramon Promit. — 28 i
Ramon Garoti. — 18
37 V., 54 r.
Ramon Gaudel. — 14
7 V.
, 41 ¥
48v
Ramon Gnjsac. — 17 r. Voy, Ra-
mon Gayachac.
Ramon Gayschac. — 6 v., 14 v..
23 V. Voy. Ramon Gaysac.
Ramon Geli. — 12 r., 38 r. Voy
Ramon Gili.
Ramon Genieys, — 32 v., 02 r.
Ramon Gilabert. — 80 v.
Ramon Gili. — 22 r. Voy. Ramon
Geli.
Ramon (Guilhemj. — 34 r., 66r.
Ramon Guiraut. — 18 v., 32 v.,
75 r.
Ramon Hue. — 4 v., 10 v.
Ramon Jori. — 12 v.
Ramon Laures. — 2 i-.
Ramon lo Kog.— 03 r. Voy. Ra-
Ramon Marti. —77 v
Ramon Mass:
44 V., 75 r.
Rnmon (moasen), eveeque.
Ramon Navar. — 8 r.
Ramon Ortz. — 7 v., 12 v.,
26 r.,26 v., 33 r.
Ramon Pascal. — 40 v.. 4
Ramon Peno. — 51 v., 57
Ramon Raynes. — 81 v.
Ramon Revel (P.). — 37 v.
Kamon Hm'gI (Pey.).
Ramon Revel (Pey.). —8 r
Ramon Revel (P.).
Ramon Rog, ~ 32 v., 43 r
Ramon lo Rog.
- 24 r
Voy.
Voy,
Voy.
DE JAGME MASCARO
561
Roinbaut (Loys). — 27 v.
ROMA. — 51 V.
Roma (Andrieu). — 93 r.
Roma (Guilhem). — 5 r., 10 r.,
13 V.
Romieu (Peyre). — 10 v.
Roqua (Ramon). — 26 v., 35 v.,
41 V., 52v.,75r., 77v.,86r.
Roqua (R. la). — 21 v.
Roquacels (Bernât). — 49 v.,61v.,
82 V., 86 V.
Ros (Pons). — 6 V., 17 v., 20 v.
Rossant (Mathieu). — 48 v., 82 r.
Rossel (Johan). — 10 r., 32 v.
Rossilho (Guilhem). — 7 v., 19
V., 21 1'., 24 V., 26 V., 38 r.
Rotgie (Peyre). — 82 v. Voy.
Rogie (P.).
Rotgler d'Espanha. — 80 v.
Rozieyra (Esteve). — 37 v.
R. Peno. — 67 v., 76 v.
S
Sabatie (B. Pons). — 9 v. Voy.
Sabatier (B. Pons, alias).
Sabatie (Esteve). — 6 v.,15r.,26r.
Sabatie (Guilhem). — 63 r.
Sabatie (Johan). — 62 r.
Sabatie (Ramon). — 28 v.
Sabatier(B. Pons, alias). — 9 v.
Voy. Sabatie (B. Pons).
Sahola (Ramon). — 52 v. Voy.
Savola (Ramon).
Sahonier (Johan). — 26 v.
Salamo de Thesa (Jacme). — 62 r.
Salât (Guilhem). — 9 v., 57 v.
Salvayre (Bernât). — 13 v.
Salvayre (Guilhem). — 34 r., 75 r.
Salvayre (P.). — 63 r. Voy. Sal-
vayre (Peyre).
Salvayre (Peyre). — 40 v. Voy.
Salvayre (P.).
Sans Symeon.-— 60 v.
Sansuerra (Loys de). — 87 v. Voy.
Sansurra et Sant Surra.
Sansurra (lo comte de).— 71 r.
Voy. Sansuerra et Sant Sur-
ra.
Santa Aularie (Peyre de). — 1 v.
Sant Affrodizi, église. — 67 r.
Voy. Sant Afrodisi.
Sant Afrodisi, église.— 2 r., 21
V., 31 v.,52r.,67r„67v.Voy.
Sant Affrodizi.
Sant Afrodisi (boro de). — 79 v.
Santa Magdalena, église. — 77 r.
81 r. Voy. Magdalena (la),
Magdalena (la Maria), Mag-
dalena (la Mayre de Dieu de
la) et Santa Maria Magdale-
na.
Sant Amans de Valthoza. — 3 v.
Santa Maria Magdalena, église.
— 77 r. Voy. Magdalena (la),
Magdalena (la Maria), Mag-
dalena (la Mayre de Djeu de
la) et Santa Magdalena.
Sant Andrieu (Johan de). — 2r.
Sant Anthoni. — 9 v., 11 r.
Sant Felis, église. — 5 r. ,35 r.,
37 r., 52r.,53 v., 80 v.
Sant Felis, village. — 3 v.
Sant Gili, abbaye. — 30 r.
Sant Girma de Montpeylieb.
couvent. — 30 r.
Sant Guiraut. — 9 v.
Sant Jacme, église. — 2 r., 21 v,
Sant Jacme (borc de). — 63 r.
79 V.
Sant Johan (borc de). — 79 v.
Sant Just de Narbona, église.—
21 V.
Sant Narazi, église. — 79 r.
Voy. Sant Nazari.
Sant Nazari, église. — 5 v., 13r.,
38
562
LE a LIBRE DE MEMORIAS »
21 V., 31 V., 37r.,42 r., 49 v.,
79 r., 81 r., 81 v., 87 r., 89 v.
Voy. Sant Narazi.
Sant Pakagori. — 3 v.
Sant Paul. — 3 v.
Sant Pons de Thomieyras. — 3 v.
Sant Salvayre, église. — 74 r.
87 r.
Saxt Surra (lo comte de). —
66 V. Voy. Sansuerra et San-
SURRA.
Sant Thiberi. — 85 v.
Santz (Maystre). — 13 r.
Sarrarys (los). — 72 v.
Saseno (P.).— 42 v.
Sas (Johan da). — 86 v. Voy. Sas
(Johan de).
Sas (Johan de). — 34 v. Voy. Sas
(Johan da).
Sauma Longa. — 31 V.
Sauze (Johan). — 63 r.
Savayda (Symon). — 20 v.
Savola (Ramon). — 41 r. Voy.
Sahola (Ramon).
Saynier (Berthomieu). — 29 r.
Sayschac (Bertran). — 1 v.
Sebeli (Bernât). — 23 v., 40 r.,
40 V., 59 V.
Sedada (Bernât).— 39 v., 73 r.
Sedada (Brenguie). — 83 v.
Sedel (Miquel). — 6 r.
Segares. — 42 V.
Segui de Badafol. — 24 v.
Seguie (Ramon). — 45 v., 50 v.,
75 V.
Seguimon (l'emperador). — 93 r.
Segui (Pey.). — 6 r. Voy. Segui
(Peyre).
Segui (Peyre).— 1 1 r., 22 v. Voy.
Segui (Pey.).
Seinhier (Johan). — 11 v.
Selie (Duran). — 43 v.
Serez (Bernât de). — 4 v.
Serdenha. — 50 r.
Serinha (Daunis). — 13v., 17 v.,
22 V., 26 r.
Serinha (la Mayre de Dieu de),
église. — 37 r.
Serinha (Peyre). — 2 r.
Serinha (Veria). — 14 r., 15 v.
Servia (Johan). — 18 r., 22 r.
Sicart Boquas. — 76 r.
Sicart d'Ambres. — 42 v., 72 v.
Sicart de Murvielh. — 13 r.
Sicart de Pauli. — 40 r.
Sicart (Duran). — 11 v. Voy. Si-
cart (Guilhem Duran).
Sicart (G.).— 80 v.
Sicart (Guilhem Duran). — 9r.
Voy. Sicart (Duran).
Sicart Roart. — 3 r., 4 r.
Sicart Taborieg. — 4 v.
Sicre (Jacme). — 45 v., 61 r., 71 v.
Simon de Grimoart. — 74 r. Voy.
Symon de Grimoart.
Sira (Ramon). — 73 r.
Sira (Razols). — 5 r., 6 r., 6 v.,
15 r.
Someyre. — 58 r.
Sonie (Johan). — 63 r.
SorsMenors (lo portalde las).
— 93r.Voy. Sors Menos etSos
Menos.
Sors Menos ( lo portal de
las). — 42 V., 74 r. Voy. Sors
Menors et Sos Menos.
Sos Menos (lo portal de las).
— 76 V. Voy. Sors Menors et
Sors Menos.
Sozere. — 3 V.
Stampas (lo comte de). — 66 v.
Steve Barba. — 4 v. Vot. Esteve
Barba.
Steve Campanha. — 45 v. Voy,
Esteve Campanha.
Steve Portal . — 4 v.
DE JAGME MASCARO
563
Steve Raynaut. — 5 r.
Symeon (Sans). — 60 v.
Symon Dalmas. — 39 v., 47 r.
Symon de Çramaut. — pag 55,
note 1 et pag. 56, note 1.
Symon de Gaholhiac. — 76 r.
Symon de Grimoart. — 72 v. Voy.
Simon de Grimoarf.
Symon Savayda. — 20 v.
Taborieg (Sicart). — 4 v.
Tantusel (Pons).— 63 r.
Tarasquo. — 3 V.'
Taurel (G. de).— 67 v. Voy. Tau-
rel (Guilhem de).
Taurel (Guilhem de).— 52 r., 62
r. Voy. Taurel (G. de).
Telh (Bernât del). — 77 r..
Templier (Caries del). — 89 r.
Teron (Johan).— 34 v., 35 v., 41
r., 50 V., 62 V.
Teyseyre (Guiraut).— 34 v.
Thesa.— 27 v.,62r.
Thesa (Jacme Salamo de). — 62 r.
Tholosa.-— 3 V., 36 v., 46 y., 87
V., 88 r.Voy. Tholoza.
Tholosa (sknescalcia de). — 46
V. Voy. Tholoza (senescalcia
de).
Tholoza. - 29 v., 32 r., 56 r.,
60 r. Voy. Tholosa.
Tholoza (senescalcia de). — 29
V., 32 r., 56 r. Voy. Tholosa
(senescalcia de).
Thomas (Pey.). — 22 r., 41 r.
Voy. Thomas (Peyre)*
Thomas (Peyre). — 10 v., 11 v.
Voy. Thomas (Pey.)
Thorena (duc de). — 87 v. Voy.
TozENA (duc de).
Tibaut de Barbara. — 20 r.
Tomas (Johan). — 77r.
Tok (la mayo del).— 76 v.
TozENA (duc de). — 86 r. Voy.
Thorena (duc de).
Trebks. — 3v.
Trebes (Peyre).— 63 r.
Trebes CPons).— 75 v.
Trencavelh, viscomte deBezes. —
1 r.
Trencavelh (Guilhem). — 14 r.
Trenquavelh (Guilhem P.).-^ 49
r., 80 r. Voy. Trenquavelh
(Peyre) et Trenquavelh (Pey-
ze).
Trenquavelh (Peyre). — 78 r. Voy.
Trenquavelh (Guilhem P.) et
Trenquavelh (Peyze).
Trenquavelh (Peyze).— 73 v. Voy.
Trenquavelh (Guilhem P.) et
Trenquavelh (Peyre).
Trenquie (Rayrolet).— 33 r.
Triquart (Paul).— 80 v.
Trobat (Peyre). — 54 r.
Truelh (P.).— 52 v. Voy. Truelh
(Peyre del).
Truelh (Peyre del).— 42 r. Voy.
Truelh (P.).
Tustamera (lo comte de). — 24 v.
U
Urba (papa).— 29 v., 30 r., 35
r., 58 r. (Urbain V).
UzES. — 30 r.
Valoys (Phelip de). — 2 v. Voy.
Phelip (lo rey), Philip de
Franssaet Valoys (Philip de).
Valoys (Philip de). — 7 r. Voy.
Phelip (lo rey), Philip de
Franssa et Valoys (Phelip de).
564
LE « LIBRE DE MEMORIAS »
Vanieyra (Esteve). — 83 v.
Vanieyra (Jacme). — 6 r., 11 v.,
18 r.Voy.Vanuieyra(Jacrae).
Vanuieyra (Jacme). — 10 v. Voy.
Vanieyra (Jacme).
Vayscha (Loys). — 52 v. Voy.
Vayssa (Loys).
Vayssa (Guilhem).— 82 r.
Vayssa (Loys). — 36 r., 38 r.
Voy. Vayscha (Loys).
Vedel (Jacme). — 51 v.
Vedel (Pons).— 76 r.
Veria Londras. — 48 v., 72 r.
Veria (Pons). — 14 v., 23 v.
Veria Serinha. — 14 r., 15 v.
Vkruna (castkl de la). — 2 V.
Vesia Gobi. — 34 v.
Vezola (Bernât). — 63 r.
Vices Cruvelier. — 5 r.
Vices (Esteve). — 11 v.,23 v.
Vidal (Jacme). — 14 r., 17 r., 26 v.
Vidal (P.).— 39r.
ViELAPENCHA. — 3 V.
Vielar (Pons). — 21 v. Voy. Vi-
lar (Pons).
Vielar (Ramon). — 20 v. Voy.
Vilar (Ramon).
Viguie (Ramon). — 39 v. Voy.
Vigaier (Ramon).
Viguier (Ramon). — 27 r., 36
V. Voy. Viguie (Ramon).
Vilar (Mathieu). — 3 r., 4 r.
Vilar (P.). — 34 v. Voy. Vilar
(Pey.) et Vilar (Peyre).
Vilar (Pey.). — 38 r., 66 r. Voy.
Vilar (P.) et Vilar (Peyre).
Vilar (Peyre). —28 r.,39 r. Voy.
Vilar (P.) et Vilar (Pey.).
Vilar (Pons). — 42 r. Voy. Vie-
lar (Pons).
Vilar (Ramon). — 11 r. Voy.
Vielar (Ramon).
ViNHO. — 74 r. Voy. Avinho.
Violan (la regina). — 93 v.
Visme (Johan). — 7 r.
ViVIES. — 3 V.
YmbertAynart.— 57v.,76r:,80r.
Ymbert de Montadi.— 12 v.,40r.
Yrlan (Ramon). — 11 v., 15 v.,
19 r., 21 r., 47 r. Voy. Yslan
(Ramon).
Yslan (Ramon). — 6 v. Voy. Yr-
lan (Ramon).
Ytalia. — 74 r.
Yvern (Ramon). — 93 r.
(A suivre.)
Ch. Barbier.
CONTES POPULAIRES DE L'AGENAIS '
La fillo que bouillo se marida
Uno fenno bouillo bien marida sa fillo, mes elo troubabo
cap de galans.— Te, li diguet, ses ta soto coum' un panier ;
iou t'en bau cerca n'un, pei ou mins faj li na bouno soupo,
na soupo bourrado dans qu'un poulet dedins.
Lou jouin' orne arribo. — A, se dit, adisias, fillo ! — Boun-
jour, jouin'ome, si-selo ; ma may m'o dit de fa na soupo bour-
rado; bous respounde que bous n'en planjorei pas. Bau la
trempa, pei nous metoren a taulo.
Abio metut soun poulet tout bourrud à la soupo ; coumenço
de lou sourti e de lou mètre dessus qu'un plat. Quand lou
jouin'ome bi quéu poulet, bourguet re, li diguet qu'abio soupa,
que la remerciabo. — Ane, se dit, boun sei, fillo ! — Pei s'en
tournet.
La may arribo: — E bé, as bien reçu quéu jouin' ome? —
Oh ! oui là, si, qu'o bourgu minjare. Li ei feit na soupo, gueitas
lou poulet que i ei metut dedins, n'o pas bourgu, se dit, pei
m'o dit re, s*ei' nana. — La may se met' en coulèro : — Oh î
la betasso ! fôu que siasquei bien soto de l'ôuguéi tau reçu,
se dit. Te, si, t'en bau cerca n'autre, mes 6u mins sisquéi pas
ta soto dan queuqui. Dono li heure au mins de loui en loui.
Ah ! malérous ! se dit la fillo, quand fusquet touto soulo,
coumo farei per li donna heure de loui en loui .^ Ah! se dit,
bau querre la palo qu'enfournen, y metorei lou goubelet^ pei
a loungour de bras lou presentorei ou jouin' ome.
Quand lou jouin' ome fusquet bengu, selo li diguet : — là,
jouin' ome, ma may m'o dit de bous fa heure de loui en loui,
* Recueillis à Cambes, canton de Seyches, Lot-et-Garonne. Ces contes
ont été écrits sous la dictée dé Mesdemoiselles Rivière et de M. Séverin
Beaubiac. Cf. Bladé, Contes populaires de la Gascogne, 1886. *■/•.
566 CONTES POPULAIRES DE l'AGENAIS
tanes, pode pas g&yre de pus loui, bubets, se dit. — E pei li
presentabo lou goubelet au cap de la palo. — Ma fi, quéu
jouin' ome bourguet pas beure : — là, jouino fillo, n'ei pas mei
lesei de damoura, boun sei, se dit.
La may arribo : — E be, ma fillo, se dit, queste cop, queu
jouin' ome, coumo co baj? Li a dounat beure de loui en loui,
se dit? — 0, si, bostei jouin' ome, n'en bole pus, se dit, à
la fin que toujours s*eu ban. M'abia dit de li donna beure;
n'i ei bailla a la çimo de nosto palo qu'enfournen, e mei n'o
pas bourgu ! — Te, se dit la may, grando beto que ses, jamei
te maridaras; t'en bau cerca'n autre ; pei sisquei pas ta soto,
dono li quauque cop d'ei de tens en tens, se dit.
Baqui que quelo pauro fillo ero enquieto ; — e cqumo fa-
rci, se dit per li donna quauque cop d'ei ? Bau tira les ei de nos-
tos ôuillos, pei les i jitorei trabers. — Les i curet les ei, pei
s'en garnit Ici pochos.
Lou jouin'ome arribo: — Boun sei, jouino fillo, se dit; bosto
may m'o enbia eici, ra'o dit, se dit, que bouilla bous marida*
— L'autre diguet: Oh ! oui, se dit; mes coy 'gau, sitas bous,
ma may m'o dit que bous dounesse quauque cop d'ei de tens
en tens. — D'abord selo couraenço de mètre lei man à la po-
che, pei queu praube jouin 'ome estant qui sitat, fliu, flau,
li jitabo ses ei d'ôuillo trabers ; lou tannet. Alors seu se lebo
en disent que bouille pas se marida dans elo. — Atendet,
se dit la fillo, nei d'autre.— Pei curet sei pochos e n'in jitabo
taloment qu'ero tout saunons la figure. — Maridas-bous dans
quu bourrei, se dit seu; pei s'enfugit en se bénissant.
La may arribo: — E bé, ma fillo, coum' as feit, se dit? —
Ah ! bostei diable de gouiat, m'en cerquei pus ; m'abias dit de
li donna dei cop d'ei, ei tira tout'o lei des ôuillos, pei les y ei
jitat. — 0 si sa may, la grande falourdo, t'en tournorei pus
cerca. — Pei la sabet de patats.
Lou meitadier
Y abio 'n cop un moussu qu'abio 'n meitadier. Lou meita-
dier n'ero pa sot, en tout quero tort.
Un cop lou moussu damandet : *— Ent' ei lou tort? — E,
''ssu, garde sei porc, li digueren. — Lou moussu y bay ;
CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS 567
trobo lou meitadier ôuprès d'un riou. — Te, dit, petit, queu
riou ei bien prigound? — 0, nani, moussu, mes aucos y ban
iiouma dins qu'au quiou. Seu y sauto dedins ; soun chibau se
neguet e seu cutet sou fa. — Petit, petit, se dit, me n'as feit
uno bien belo, mes me n'en fara pas dios.
Anguet trouba sa mamet. — A, mamet, dit, bosle gouiat,
dit, me n'o fei n'uno bien belo, mes digas li que m'en faro pas
dios. Digas li que douman mati bengue tira la proufitolo dôu
four.
Lou dessei abeillaben la proufitolo. Perqui enta mejonei,
diguet lou moussu : o, m'en bau, adaro bendoro pas. Pei coj
a la doun qu'arribet. S'enguillet dins la fourniero, tiret la prou-
fitolo, la rampliguet de bouso debaco. — Lou mati, lou moussu
diguet 'n da sa gouio: — Au, gouio, se dit, anas gousta la prou-
fitolo. — 0, moussu, n'ei pas gajre bouno. — Ah ! té, diguet,
tant que soun esta ou liet, nous l'o minjado. Ah! petit, petit,
me n'as feit dios bien belos, mes m'en faras pas trei. — An-
guet trouba sa mamet ; li diguet : — Ah I boste drôle me
n'o feit dios bien belos, mes m'en faro pas trei. Digas li que
douman ou sei bengue derôuba mei chibau à moun escudo.
Lou dessei, quand anguerensoupa, sei s'endrumian, l'autre
beillabo. S'enguillet dins l'escurio, liprenguet sei trei chibau,
mei sei sellos, sei bridos e sabouaturo. Pei se'nanguet. — Te,
gouio, bay pensa lei chibau a l'escurio. — Moussu, y soun
pas. — Ah ! petit, petit, me n'as feit trei bien belos, mes m'en
fara pas quatre. — Baj trouba sa mamet : — Ah ! se dit, boste
drôle me n'o feit trei bien belos, mes digas li que m'en faro
pas quatre. Digas li que douman mati bengue derôuba lei lin-
çôu dôu quiou de ma fenno. — Lou mati, lou meitadier planto
n'ome de paillo daban sa porto. Lou moussu cresio que coro
lou tort, se lebo : — Te, fenno, se dit, coj lou tort ; fôu lou
tia. — Tant que l'autre se lebo, lou meitadier bay au liet dans
selo. ^ — Pousso te 'n lay, si, que n'ei pas de plaço ; bene d'en-
tarra lou tort, sei jalat de fre. — Liestiro lei linçôu, les em-
porto, pei s'en baj. — Lou moussu tiet Tome de paillo ; ero
jalat de fre. Anguet trouba sa fenno : — Pousso te'n laj que
n'ei pas de plaço, se dit. — Foutut narrions, ses bengu nouma
tout aro, si selo, pei ma'stira touto lei linçôu, que n'ei cap de
brigo. — Te, dit, coy lou meitadier, seu qu'ei bengut. — Ah!
568 CONTES POPULAIRES DE l'AGENAIS
s'abisôugu, se dit, me sioy pas poussado. — L'orne diguet: —
E dei linçôu, ente n'en prendoren ? — La fenno diguet : fôu
n'en prene ou gabinet.
Lou jouin^ome que vay a la fiero *
Tabio 'n cop na fenno qu'ero bien bieillo, bien praubo.
Abio'n gouiat qu'ero bien sot. Bequi que samay li diguet: —
Moun Diou, se n'erei pas ta sot, t'embioioy a la fiero bendre
dei cojffo. — Ey anirei, may, se dit, farei iço que bourrei,
n'ajei pas pôu. — Li dono dios coyffos ; li diguet : — T'en
soubendoras que n i o dios.
Lou jouin'ome en se'n anan toujours disio : — dios, dios,
dios, — per s'en soubeni. Trobo de mounde que plantaben dei
fabos, pei toujours eu disio : dios, dios, dios. — E que disei,
malerous, dios, dios, que n i aje que dios ! — pei lou saber-
ende trucs : où le de dire : Atau bouns pies sacs, atau bounos
plenos carretados !
En se n'anan toujours disio : — Atau boun pie sacs, atau
bounos plenos carretados, atau bouns pies sacs, atau bounos
plenos carretados ! — Trobo dei gens que pourtaben un
mort. — Tau bouns pies sacs, tau bounos plenos carretos,
si seu. — Les autre pausen lour mort e li toumben dessus,
en li disent : — Malerous que ses, ou le de dire : lou boun
Diou lou mete en PaiTadis, lou boun Diou li repause soun
amo 1
En s'en anan purabo, poudes creire, e disio : Lou boun Diou
li. repause soun amo, lou boun Diou lou mete en Paradis 1 —
Ane, baqui que trobo dei gens que treinaben na cagno. —
Lou boun Diou la mete en Paradis, se dit. — Ê que disei, ma-
lerous que ses, ou le de dire : Treino dins qu'un foussat, treino
lo, la bieillo cagnasso. — Pei lou saberen.
Pus loun trobo de mounde que menaben na nobio. — Treino
lo, si seu, treino lo dins qu'un foussat, la bieillo cagnasso ! —
* Cf. Bladé, Contes et proverbes populaires recueillis en Armagnac,
1867 (p. 18).
CONTES POPULAIRES DE l'AGENAIS 569
Lei gens de noço lou saberen : — ou le de dire, se dit: Fussen
tau toutos, fussen tau toutes.
Eu se n'anabo : — Fussen tau toutos, si, fussen tau toutos !
Toujours ou credabo. Trobo na granjo qu'ero a f è : — A,
malerous, li digueren lei que Tentendian, ou le de dire : Lou
boun Diou lou tiose, lou boun Diou Fescantisse. — Lou sabe-
ren.
Ane, en se 'n anant, se boto a dire : — lou boun Diou lou
tiose, lou boun Diou l'escantisse. — Rencountro na fenno
que bouillo luma soun four, pei poudio pas; li anguet canta es
ôureillo : — Lou boun Diou lou tiose, lou boun Diou Tescam-
tisse ! — La bieillo lou sabet de cops de fergou : — où le de
dire, se dit : Lou boun Diou bous Talume, bous fasque la graço
de fa de bèu pan !
Seu se meto a dire : — Lou boun Diou bous Talume, bous
fasque la graço de fa de bcù pan ! — Trobo 'n cassayre que
pôusabo culoto darrei na sego. — En passant darrei seu, li
diguet : — lou boun Diou bous fasque la graço de fa de bèu
pan ! — Lou cassayre en coulero li fouitet un cop de fusil, lou
tiet.
Lou renard e lou loup ^
Lou renard e lou loup entreprengueren un prix feit a na
fose deibignos. — Lou loup coumençabo d'ôugueitalen. Abio
pourta na toupino de greisso dins qu'un foussat. Fasquet creire
ou renard que lou sounaben. — Diguet : — Te, me sonen, se
d.it. — L'autre diguet : E que coy? — Coy 'n batème., se dit. —
Me diras coumo s'apelo, si lou renard. — Te, dit, s'apelo : cou-
mença. — Abio couniença la toupino.
Quand n'ôuguet feit un pau raei, lou loup diguet : — Te, me
tornen souna, se dit. — I/autre diguet : — Que coy, se dit? —
Te, dit, coy un batème. — A, diable, tei batème, se dit. — 0,
pourtan, fou que y angue. — E me diras coumo s'apelo. —
Te, dit, s'apelo : — Abança.
Un moument après, lou loup diguet : — Te, dit, me tornen
* Bladé, Contes populaires recueillis e?i A gênais, 1874 (p. 26 et s.).
570 CONTES POPULAIRES DE i/aGENAIS
souna, coy 'n batème ; fôu que y angue. — Quand arriboras,
me diras coumo s'apelo, se dit. — Lou loup torno : — te,
dit, s'apelo : — Feni. — Ah î tant miliour, l'autre diguet ; tau
noste prix feit siro lèu cabat.
Lou prix feit acabat : — Oh ! dit lou loup, n'as pas bien ta-
len, fôu na n'entreprene 'n autre. — Pourtant, dit lou renard,
bien lèu ei temps de deijuna. — Nou,dit, n'eipas tardenquero;
fôu 'na fendre dei busquos. — N i abio uno que bouillo pas
fendre. — Te, dit, renard, meto qui ta couéto ; belèu fendro
bien. — Lou renard sou fay. Lou loup daisso na la busquo,
pei s'en bay cacha dins qu'un trauc de taupo. — Lou renard
a la fin s'escapo ; s'en bay dins lou trauc de taupo. — Ah !
ah ! dit, te tene, se dit. — Coy pas bray, dit lou loup, coy na
racino, pei s'enfilet pus loun.
Lou jouin*ome ôa marca *
l'abio na fenno qu'abio 'n gouiat, re qu'un. Li diguet : —
Escouto, moun ami,fôu pas estre ta sot, se dit, fôu que t'eilebe
'n pau. Baqui na toupino de greisso que te fôu pourta ou
marca, pei la bendoras, se dit.
Queu jouin'ome la pren e s'en bay. Coro dins l'estieu, que
lei prats eren toui fenduts e y pasabo dedins. — Praube
prat, tu as bien set, se dit ; ou le de bendre ma greisso, te la
bau douna. — Se boto dans soun coutèu a mettre sa greisso
dins lei fendos, pei s'en torno. — Adisias, may, si. — Adiou,
moun ami, as be lèu ja feit toun marca. — Oh ! may, se dit,
n'oi pas befidut la greisso ; l'ei baillado 'n da 'n paure male-
rous qu'abio bien set. — Oh ! la grando beto, besei be que
l'as perdudo. Ei qui, se dit, un pau defiou, mes gause pas te
lou fa pourta. — Oh ! may, si, n'ajei pas pôu, lou bendorei,
se dit, farei pas coumo de la greisso.
E be, se dit porto lou, pei lou donei pas 'n da quei que soun
ta babard, se dit, que parlen tant. — N'ajei pas pôu, se dit.
S'en bay, porto soun fiou ou m^rca, li damandaben : Ebt,
* Cf. Bladé, Co7it€S et proverbes populaires recueillis en Armagnac,
1867 (p. 21).
CONTES POPULAIRES DE l'AGENAIS 5:1
jouin'ome, coumbien boules de bostefiou? — Parlas trop, se dit
bous, ses trop babard, bous lou bole pas bendre. — Un autre
y bay, li damando enquero : — Coumbien boules de boste
flou? — Aqui n'autre babard, se dit, Tôurei pas. — Ni abio n'un
que li diguet : iou bau bous n'ensegna nun que parloro pas
trop. Anas bous en dins quelo gleiso, lou trouborei lay dedins.
— Grameci, moun ami, si Tautre. — Bay beire dei grand'
estatudos dins quelo gleiso. Daraande 'n da uno : — Boules
moun flou, bous ? — Li respoundio re. — Oùrei moun flou,
parlas pas trop, bous, se dit. — Li estaquo soun flou ou côu.
L'estatudo lou pagabo pas : Pago me, se dit. — Lou bequi en
coulèro ; la truquo, li fay touraba 'n so. — Boun, se dit, te ses
bien feit prega, mes m'a paga, se dit. — S'en torno trouba
sa may, countent coumo 'a orne. — E be, moun ami, as bien
bendut, si selo ? — Oli ! oui, may, mei sirei countento, bous
respounde. Eren qui toujours ques einoujous : e coumbien
boules de boste flou, e coumbien boules de boste flou? L'ei
douna 'n da un que m'o dit re. — Ah ! moun Diou, moun
ami, si, e perte fa paga? — Me bouille pas paga, se dit,
Tei bien batut, mes coy'gau, gueytats ço que li ei bendut,
trapats co, se dit. — Sa may se boto a pura. — Ah ! moun
Diou, sei perdudo d'ôuguei un gouiat ta sot, me métro a la
misèro ; ah ! sei perdudo ! Sei bien malerouso, i o qui na
peço de telo, te lafari bendre, si, mes sôuras pas. — Sôurei, se
dit, seu. — E be, bay la bendre, mes damando n'en la rasou ;
tiro n'en la nxsou ou mins, se dit; sôuras ? — Oui, may, si.
Lou bequi partit, s'en bay a la fiero. Li damandaben : — E
be, jouin'ome, boules bendre bosto telo ? — Oui, si seu. —
Coumbien n'en boules ? — N'en bole la rasou. — Mes que
coy que boules dire ? — N'en bole la rasou, bous dise. —
Un ome enbeta d'aco, li plego dins quun bouci de papier, un
pesoui pei na piouse. — Coy bien petit, si seu. — Coy gau,
si l'autre, coy la rasou. — S'en bay trouba sa may en disent
que siio bien deûcilo se n'ero pas countento. Sa may li diguet :
— E be, se dit, coum'as feit ? — Tanes, se dit, gueytas sus
queu bouci de papier. — Sa may lou dret, la piouse li sauto
trabers ; lou pesoui damoro dessus lou papier. — Ah ! sei per-
dudo, se dit, que farei, se dit, te bole tia, te, couqui, se dit.
— Un moumen après: — Te, se dit, fou que me n angue ou
572 CONTES POPULAIRES DE l'AGENAIS
marca, tu sabei pas fa les affa, fay lou pan, se dit, tu, pei la
soupo.
Sa may part ; seu coumenço de bourguei fa sa soupo. Bay
bouta na gabelo en da chaque pe de côulet, pei les engreis-
so bien en da toui, pei bay tirabeure per que tout sisquesse
preste quand sa may arriboyo. Bay s'en soubeni que lei
mousqui minjoyan sa greisso sui côulet. Aladounabio lou dou-
zil de sa barriquo à la man, lou tiro, pei lei bay bira dans
soun douzil. En atendent, sa barriquo se'nanguet touto. Ar-
ribo : touto sa barriquo s'ero'nanado. — A, que farei iou, ma
may bay me batre, ma may bay me tia ! Sabe ço que bau fa,
se dit; n'ei pas feit de pan, bau y bouita moun sac de farino,
pei sou bouissorei. — Lou deibiro qui dedins.
Sa may arribo : — E be, se dit, as feit ta soupo, si, e toun
pan ? — Oh ! m'en parlei pas, si, benêts minja la soupo, anas
ou casau, lei côulets soun toui cueits ; n'en pourrei minja tant
que bourrai. — Sa may se boto a creda qu'ouro bi touto
co : Ah ! malerous, se dit, m'en bau, te, mes i o qui 'n pau de
farrin farraillo ou plancha, se dit, sou toquei pas ou mins, se
dit, te sou défende.
La may s'en bay. Y arribo 'n marchand de beisselo ; li
damando beire se n'abio re a bendre ou a fa arrenja. L'au-
re diguet : — 0, nani, n'ei re, se dit, io qui *n pau de farrin
farraillo que ma may m'o defendut de la touca: coy re, se
dit. — Beire lo, se dit l'autre. — Trapo sa farrin farraillo,
pei li fay beire sans la gueyta. Coro na belo saqueto de louis
d'or. — Abias rasou, si lou marchand, coy re, se dit, tout du
mémo, bous 'n bau bailla na doujeno de sietos. — Eu bien
content, lei pren, lei trauco toutei ou quiou, pei lei pendillo
toutei ou plancha ent'ero sa farrin ferraillo. — Crese que ma
may bay esta bien countento, se dit. — Sa may torno. —
May, gueytas ou plancha, Bosto farrin farraillo que coro re,
se dit. — Sa may y gueyto ; pei quand bi pas sa farrin far-
raillo, se boutet a pura, a creda qu'eren perduts,que n'abian
re pus. — Ent'o passât, se dit? — D'aqueu constat. — Passo-
s-y, si sa may, iou passorei de l'autre, pei lou pus lèu que
lou trouboro sounoro l'autre, se dit. — Selo galoupabo d'un
bord, seu de l'autre. A la fin seu ero fatigat, la sono. — Où»
may, benêts, benêts, se dit ! — L'as troubat? l'as troubat? —
V
CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS 573
Benêts, oui, benêts, se dit. — Sa may ben. — Ent'ei, si ? —
Quau miracle, si seu. — E que coy ? — Coument un si petit
ôusèu 0 feit na ta grosso croto ? — Coro 'n rei crouchet,
qu*èro pôusa sus qu'uno bouso de baco.
La fillo Malaaso
Y abio 'n cop dei gens. — En se n'anant prumena, troben
un petit agnèu blanc. La flllo Tatrapo. Bê, bê, lou poudio
pas tene. — Où, maj, benêts m'eida à tene quee petit agnèu
blanc. — Li angueren eida. Lou meteren dins Testable de
porcs ; lou porc lou minje. Coro Tagnèu d'un orne que Tabio
derôuba ; Quel orne ben : — Dounats me, se dit, moun petit
agnèu blanc. — E, dit, questo neit Taben metut dans lou porc;
lou porc o minja lou petit agnèu. — Dounats me moun agnèu
ou lou porc. — Li dounerenlou porc.
Se 'nanguet pus loun. Tome pei lou porc. Quand sisquet
neit : digats donne, si seu ou mestre d*uno meisou, bouriats
pas me louja, iou pei moun porc ? — 0, si fet, bous loujoren.
— Lou meteren dans lei crabo 'nd*ôu porc; qu'our'y fusquet,
lei minjet toutes, otro uno. Li fasqueren creire que lei crab'o
abian minja lou porc. Lendouman mati en se lebant : — Dou-
nats me moun porc, se dit. — 0, dit, questo neit uno crabo l'o
minjat. — Dounats me lou porc ou na crabo. — Li douneren
la crabo.
Pei après se 'nanguet cba d'autrei mounde : — Me bouriats
pas louja 'n da iou pei à ma crabo ? — 0, si fet, se dit, bous
loujoren. — Lou meteren per dessus lei bèuse sa crabo tra-
bers ei. Un brau la minjet. Lou mati, en se lebant, Tome di-
guet : — Dounats me ma crabo. — E lou bèu To minjado. —
Dounats me ma crabo ou lou bèu. — Li douneren lou bèu.
Se 'nanguet dins qu'uno meisou que y abio 'na fillo ma-
lauso. Lou loujeren seu pei soun bèu. La fillo pe la neit : —
Où, may, dounats me 'n bouci d'aqueu bèu, douman sirei
garido. — Estriperen queu bèu, li douneren un bouci de
feje. Leudouman mati signe garido. — L'ome, en se re-
beillant : — Dounats me, dit, moun beù. — 0, dit, nosto
fillo èro malauso, o dit que siio garido 'se li baillaben un bouci
574 CONTES POPULAIRES DE t/AGENAIS
d'aqueu bèu, n*i ei baillât. — Y abio na petite cagnoto ou près
dôu fe. — E be, dit la maj, bous dounoren quelo petito ca-
gnoto qu'ai ôupres dôu fe. — Nani, diguet, me fôu la fillo. —
E be, diguei re, bous Tanen bailla. — Meteren quelo petiot
cagnoto dins qu'un sac, la barreren bien, pei li bailleren : —
Baqui ma fillo, li diguet la may, que bous donc.
L'orne, soun sac sus Tesquino, se 'n anguet loui, brabo-
ment loui. Tout d'un cop s'arrestet : — E, ma fillo, si, dumpei
lou temps quête porte, te pourioy be bica ! — Pei dret lou sac
— Per un agnèu, un porc, per un porc 'na crabo, par 'na
crabo, un bèu, per un bèu 'na fillo, per'na fillo
'na cagnolo
Lou nas t'emporte
Li empourtetlou nas, enlabicant.
Robert e Fourtet
Y abio 'n cop un pourcatier que poudio garda cap de bei-
lets. Y angue 'n jouin'ome ; se y alouguet. Lendouman li da-
mandet ente coro que pourio 'na ou champ. Lou mestre li
diguet que fouillo 'na à la gareno besino.
Quand un cop fuguct ou champ, y arribo 'n orne que li
diguet : — Adiou, hôu ! — Lou beilet li respoundet : — Adiou,
hôu 1 — L'ome li damandet : — Coumo t'apelei-tu ? — Lou
beilet li respound tabe : — coumo t'apelei-tu ?
Lomé se 'n anguet trouba sa may. Li diguet : — May, se
dit, l'ôurei pas 'n da queu. — La may li diguet : — Perque ?
^ E li ei dit: — Adiou, hôu! m'o respoundut: adiou, hôu;
li ei dit: coumo t'apelei-tu, m'o dit tabe, coumo t'apelei-tu?
— La may li diguet : — Torno-s-y douman, digo li que
t'apelei Robert.
Lendouman y anguet, manquet pas. Li diguet: Adiou, hôu!
— L'autre li respoundet: — Adiou, hôu ! — Coumo t'apelei-tu ?
— Coumo t'apelei-tu? — Robert, si, m'apele. — E pei iou,
Fourtet.
L'ome s'entorno trouba sa may. — May, se dit, l'ôurei pas ;
li ei dit: Adiou, hôu, m'o dit : Adiou, hôu ; li ei dit : Coumo
CONTES POPUr.AIHES DE l'aGENAIS 575
t'apelei-tu? m'o dit: Coumo t'apelei-tu? li ei dit que m'a-
pelabe Robert, seu m'o dit que s'apelabo Fourtet. — La maj
11 diguet : — Torno-s-y douman. Debertissez-bous, se dit.
Y torno lendouman. — Adiou, Fourtet, si ! — Adiou, Ro-
bert! — Bos que nous debertissen aneit ? — Coumo bourras.
— Que bos que fasquen? — Ça que bourras. — Bos que fas-
quen lou millour que sôuleboro quelo douillo ? — La douillo
tenio quinze barriquos d'aygo. — Coumo bourras. — Cou-
menco, tu. — Coumenco, tu. — Robert la fasio souna entre sei
cambos coumo 'na cloclio. — Fourtet li diguet: — Deisso me
fa tourna mei porcs. — Trobo'na fenno que filabo; li damando
'na fusado de fiou. Oùtour de la douillo y abio un riou, 'na
fount, pei des aubre e dans sa fusado estacabo touto co ensem-
ble. Robert li diguet : — Que coy que bolei fa? — Ah ! tu lebei
quelo douillo! lou bole leba la douillo, lou riou, la fount mei
les aubre, tout sans dessus debas que jamei y augue cap de
gouto d'aygo. — Robert diguet : — Où bole pas ; diatre, se
dit, ma may s'affachoyo be ; ente bourias qu'anguesse querre
d'aygo ?
Torno trouba sa may. — May, se dit, Tôurei pas. Lie! dit:
bolei que nous debertiguen ? — M'o dit : Coumo bourras. Li ei
dit : Bolei que fasquen lou millour que sôuleboro quelo douillo?
— M'o dit : Coumo bourras. — lou n'ei pousquut sôuleba que
la douillo, e seu bouillo leba la douillo, lou rio, la fount, mei
les aubre tout sans dessus debas, que n'y ôuguesse james
'na gouto d'aygo. lou sei pas bourgu, si. — As bien feit, se
dit sa may. Torno-s-y douman, fases qôucare mei.
Lendouman y torno. — Adiou, Fourtet ! — Adiou, Robert.
— Bolei que nous debertissen ? — Coumo bourras. — Que bo-
lei que fasquen? — Ça que bourras. — Bos que fasquen lou
millour que sarroro 'n casse ? — Coumo bourras. — Coumen-
co, tu. — Coumenco, tu. — Robert Tatrapo a brassa ; fasio
mouilla la mousso de frin que lou sarrabo. Fourtet diguet : —
Bau fa tourna mei porcs.
Abio 'na cujodebin ; la buguet, la remplit d'aygo et la
metet debas soun gilet. Pei li diguet : — Lou sarrei pas mei
qu'en tau ; bas beire, iou, — Te li baillo 'na sarrado ; sa cujo
se coupet ; Taygo coulabo cap bas. — Te, biei, si, coy tau
que fôu lou sarra.
576 CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS
Tournet trouba sa may. — May, se dit, Tôurei pas. — E
perque, si ? — Oh ! si, ei bien fort, là, si. Aben feit à lou que
sarroio lou millour un casse ; iou n*ei pousquut que fa mouilla
la mousso ; seu fasio coula Taygo cap bas, — Torno-s-y dou-
man, si selo, fasès quôucare mei.
Y bay. — Adiou, Fourtet. — Adiou, Robert. — Bos que
fasquen lou millour que jitoro 'napeiro. ! — Coumo bourras.
— Coumenço, tu. — Commenço, tu. — Robert jitet la peiro
bien loui. — Deisso me na fa tourna mei porcs, se dit Fourtet.
— Abio dei fiiats de perderi ; les estendet, pei n'en trapetn'uno.
Quand un cop fusquet tourna, diguet : — Beire, iou, se la jito-
rei loui. — Jitet la perderi. Sabès se rouncabo ; la tourneren
pus beire. — Te, biei, si, coy tau que fôu jita lei peiros.
L'ome torno trouba sa may. — May, se dit, l'ôurei pas. Aben
feit 6u pus loun quejitoyo na peiro; iou Tei jitado bien loun,
mes eu, la siono, Tan pas pousquudo beire, talomen ei nado
loui. — Coy gau, si selo, torno-s-y douman, fasesnautre je.
Lendouman y torno. — Adiou, Fourtet. — Adiou, Robert.
— Bos que fasquen ou rigalet ? — Coumo bourras. — Robert
coumenço ; tirabo dans dei peços de cinq francs. — Fourtet
li diguet : — Presto me tei peços. — 0, bitoun, se dit, bole
pas te lei presta, que me lei tournoyas pas. — Y abio dios
molos de mouli Tuno sus Tautro ; li diguet : — E be, meisei,
bau prene quei caillau. — Y abio dôu mounde qu'eren bien
loui ; les y credet : — tiras bous, tiras bous, se dit. — E que
bos fa, se dit Robert. — De que, si, cresei que se lei toucabe
dans quei caillau, les adouboioy? e per lei tourna querre, tu
pourras ou fa, o, si. — 0, deisso lei qui, lei mestre s'affa-
choyan, diguet Robert.
Lou beilet se nanguet barra, lou dessei. Diguet: Mestre, si,
moun temps eicabat. — E be, meisei, si lou mestre, te fôu
béni douman a la fiero per bendre lei porcs. — Meno lei
porcs a la fiero. Li damandaben coumWen n'en bouillo ; seu
disio : des escuts, pei lou bout de la coueto. — Escapitet la
coueto en da toui, pei damouret bien neit a arriba.
Où dessus de cha soun mestre y abio un grand précipice que
poudian pas fa found. Yplanto touto sei couetos de porcs,
l'uno dabant Tautro, pei se meto a creda qu'ero perdut. Lou
mestre y anguet ; pei trapaben quei couetos per darrega lei
CONTES POPULAIRES DE L AGENAIS 577
porcs; lei couetos se darregaben e lei porcs restaben.
Lou mestre diguet que fouillo sou deissa, que lei tiroyan dou-
man. Pei se n'angueren. Lou beilet trapignet la coueto d'un rat
Que fit cui, cui;
Qui moun counte fenit !
Lou Galant
Y'abio'n cop un jouin'ome qu'anabo beire trèifilios. — Un
dessei que beillaben, uno d'aquei fillo sourtiguet*. Restabo
loungtemps sans tourna. Sa sor, la pus jouino, diguet: — Fôu
pourtant qu'angue beire ça que faj ma sor, sap pas que penso
de resta ta loungtemps. Se nanguet defor, selo tabe. — Aten-
deren, atenderen, anfin, quand la birenpas tourna en da selo
tapau, sasor Teinado diguet: — Sap pas que fan, se dit, mei dio
sors, se dit, que tornen pas. — Y bay beire, selo tabe.
Ane, n'y restabo pus que la may pei queu galant. Atenderen,
atenderen loungtemps ; jaraes besian tourna cap d'aquei
fillos. La may s'enquietabo: — A, moun Dieu, si, que coy que
fan quei drolos? Quôucare les y siro arriba, ôutramen sian
tournados. Sei ôublijado de y ana beire, là, si, jouin'ome. —
Part, selo tabe. Baqui que tournabo pas; lou galant s'ei-
noujabo de gueyta lei caminau, anabo beire sus la porto,
tournabo dedins, james besio re : — Coy pas mei qu'en tau,
si, a la fin, ma fi, fôu que y angue beire, iou ta be. — Fasquet
lou tour de la meisou e, coumo la luno raiabo, tout d'un cop
bi lei quatre fennos dins lou cami. — Que diantre y o donne,
si seu, que ses qui toutei quatre dumpei ta loungtemps? —
Ah ! moun Diou, là, li digueren, soun bien en peno. — Ah !
si seu, y ei arriba quauque malur ? — Nous n'en parlei pas,
si selei, gueytats l'oumbro d'aqueu casse que bay deibouilla
nosto meisou ; benêts nous eida, si, a l'arresta *. — Se fôu
* Variante. — Bay ou chay tira de heure.
* Variante. — Quand on a dit au début : bay ou chay tira de heure,
on doit dire que le jeune homme va au chai, qu'il demande aux femmes
qui sont là, Tair songeur : Qu'y a-t-il, etc.? Gelles-ci répondent :
Quand ôuren de meinajous,
De que faren de peillous ?
89
578 CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS
que siasquei tougnassos, dit lou jouin'ome; là, si, m'en bau,
bous souate bien lou bouiisei, tournorei nouma quand n'ônrei
trouba trei tasotos coumo bous au.
Lou jouin'ome s'en bay loui, bien loui. En passant darre
qu'une granjo, rancountro na fenno que susabo e galoupabo
dans qu'un crubèu a la man. — E que coj que fases, si, fen-
no, que ses ta preissado ? — Là, jouin'ome, si, sei bien en
peno. — E perque ? — Se sabias, se dit. — Digas me sou, si
seu, belèu pourrei bous eida. — Fôu, si, que rempligue queu
grand tounèu, e pei moun aygo s'en bay touto. — Sou crese
be, diguet lou jouin'ome, se la pourtas dans qu'un crubèu. Bau
bous tira d'embarras, là, se dit. — Me randorei un grand
service, là, diguet quelo fenno. — E be, dit, prenès ma seillo,
pei na basto, bau bous eida, siro lèu pie, beirei, si.
L'oubraje feit, lou jouin'ome s'en bay bien loun, bien loun.
Abio set; tusto 'n da qu'une meisou e damando a beure 'n
cop. Y abio qui na fenno que mountabo sei cacau ou granier
dans qu'une fourco. N'abio qui na doujeno de sacs. — N'en
pode pus, se dit, sap pas coumo farei, toumbe touto mei ca-
cau. — Ah ! si, lou jouin'ome, e coumo fasès ? — Coumo fau,
dit,lei trapeagrandosplenosfourcos,mei tout juste se n'inpode
pourta un ou dus tout lei cop. — Lou jouin'ome se boutet a
rire. — Abès rasou, se dit, iou crcsc que cabajas pas d'anei.
— Prenès, si, un panier, ôurei pus lèu feit. N'atendent, iou
bau bous douna 'n cop de man. Eidas me a carga, se dit. —
Cargo lei sacs sus soun espanlo, lei porto ou granier. — Co
bôu bien na begudo, dit la fenno. — Li dounet un pie goube-
let de bounbin.
Lou jouin'ome se nanguet pus loun, enquero pus loun.Tra-
bersabo un cami prigound : y abio 'n gran tarier e dessus un
petit drôle que sôutabô ôupres de sa may en bas. — Sauto
bien, se dit, boste drôle, fenno, si. N'abes pas pou que se fas-
que de mau ? — Ah! se dit, la, sei bien en peno, ei enquero
a la raubo, bourioy lou mètre ei culotos, james po y sôuta
dedins. — Coy qu'aco, si lou jouin 'ome, bous carçinei pas
mei, anats beire que les ôuro lèu presos. Dounats me quei
culotos, se dit. Tu, petit, se dit, dabalo eiçi. Dibei be estre
jalat de fre dumpeilou temps que ses en camiso. — 0, si sa
may, lou paure drôle, coy be bray. — Lou jouin 'ome li fay
CONTES POPULAIRES DE i/aGENAIS 579
prene sei culotos : — Beses, si, qu'ei escasit ou prumier cop.
— Oh! bous ei bien d'ôubligatioun, là, se dit, bous bau pa-
ga, si, per aqueu serbiçe. — Nani, se dit seu, bole re, sei ôu-
blijut de m'en tourna.
Lou jouin'ome s'en baj : Pode, se dit, tourna cha quei be-
tassos, n'ei troiiba trei qu'eren pus soto que sei. — Marchet,
marchet:, pci, en birant, ou countour d'uno routo, passetsus la
coueto
D'un rat que fit, cui, cul ;
Aqui moun counte fenit.
Variante,* — Lou gouiat se 'nanguet pus loun, enquero pus
loun. Dins qu'un bilaje a quauco lego d'aqui troubet nafalour-
dasso que gardabo natrejo, pei na troupo de petits porcs, ou
miel dei champs. Lou jouine ome pus deigourdit que la bar-
•
giero, li faguet coumpliment sans ôublida la trejo, que prenio
per sa meirino e lei petits porcs per sei cousis. Diguet 'n da
la trejo que benio Terabita per na 'n da ^a festo, que dans doui
jour anabo se marida, e qu'anfin deissesse cap de sei cousi,
que li faian tan de ])lasei. La bargiero prou soto creset touto
co e li deisset enmena la trejo e touto sa famille. Lou jouin'ome
s'en baj countent coumo de tout. La fillo, despachado de touto
sei bestios, s'en bay a la meisou e en entrant: — sei tour-
nado, si, dôu champ. — Soun pay li diguet: — E qu'as feit
de tei porcs? — Que n'ei feit, diguet la bargiero? Les ei em-
bouja 'n festo, lou fillôu de la trejo Tei bengudo querre pei
en da sei petits cousis ; eren toui bien countents, la, bous
proumete.
A, falourdasso, dit soun pay, ôuren [lerdunostei porcs. Fôu
na, un d'un bord, Tautre de l'autre, pei lou prumier que lei
trouboro credoro es autre, pei y aniran toui.
Se' nangueren bien loui cerca la trejo pei lei porcs. La bar-,
giero tout d'un cop s'arrestet ou miei d'un prat e se metet a
creda : Ep ! Ep ! Benes biste, bencs biste. — L'as troubado?
— Benes biste. — Toui y galouperen. Fjcsy fit beire narussio
sus qu'uno bouso de baco: — Sap pas, dit, cOumo 'n ta petit
ôusèu 0 pousquu fa na ta belo croto !.
Fusqueren ôublija de s'en tourna sans ôuguey trouba re.
580 CONTES POPULAIRES DE L AGENAIS
La gato engreissado
Yabio deigens que bouillan engreissana gato per carnabal
Selo que s'entendet, se 'nanguet.
En se 'nanant, purabo. Rancountret lou jau. — E que coj
que as, gato, diguet, a tantpura? — Oh! se sabias, si, me bou-
rian engreissa per carnabal. — E iousei be de mémo I Bolei
qu'angue dans tu, se dit? — 0 ! diguet la gato, pourias pas
marcha.
Quand sisqueren un pan pus loun : — Sei bien fatigat, si
lou jau ! — La gato diguet : — Trapo-te a ma coueto, diguet,
te menorei.
Rancountren la crabo: — Eque coj qu'abes, dit, à marcha
ta biste ? — E coj que coumenço de fa nègre ; pei, si, se sa-
bias, nous bouillan engreissa per carnabal ; tabe nous enfujen
ta biste que pouden. — E iou sei be de mémo ! Bolei qu'an-
gue dans tu ? — 0 ! n6u, diguet la gato, fajas coumo lou jau,
pourias pas marcha ; Testire tarede que pode, mei pode pas
lou mena. — 0, dit, marchorei, dit, iou.
Quand fusqueren un pau pus loun : — 0 malerous ! si la
crabo, sei bien fatigado ! Tu, dis, que ses bien forto, podei
be me treina.
Q u and fasquet nègre, lou jau diguet: —Te, dit, tu, gato, que
mountei bien, mounto à la cimo d'aquel aubre per beire se
beiras cap de meisouneto : — N'en bese be n'uno, si la gato,
mes ei bien loun, bien loun, — Coj gau, diguet lou jau, fôu y
ana.
Coro des Espagnôu que fasian la noço .
Quand arriberen. — Pan, pan, dit, à la porto ! — Les Es-
pagnôu digueren re. La gato digue 'n da la crabo : — Te, tu,
crabo, qu'as dei grosso corno, deifounço la porto. — Tous les
Espagnôu sourtiren per fenestro e porto.
La taulo ero bien garnido. — Te, la gato diguet, iou, .dit,
bau fa lei part : Tu, jau, qu'eimei bien lei brigaillo, meto te
debas la taulo peilei massaras; tu, crabo, qu'eimei à brousta,
leco la sauço ; iou, dit, qu'ei lei dents finos, minjc la car.
Pei fousquet naôu liet. — Te, dit la gato, tu, crabo, qu'ei-
i
CONTES POPULAIRES DE L*AGENA1S 581
mei a estre fresco, bay-t-en à l'yero ; — Te, tu, jau, qu'eimei
a canta, bay-t-en à la cimo de rescalo ; — te, iou qu*eirae a
estre caudo, m'en bau ou cendrier.
Un espagnôu diguet : — Fôu qu'anguebeire, se dit, ànosto
petite meisouneto. — Quand arribet, bourguetna à Tjeroper
se laba lei m an ; fasio negrc ; la crabo 11 fourro 'n cop de
corno. S'en bay ou granier, Iou jau li fourro na becado. S'en
baj ou cendrier, la gato li fourro n'engrôugnado. — A, la,
iay, se dit, m'an feit bien demau, m'entorne, se dit.
Qu'ouro les autre Iou biren arriba : — A! raalerous ! di-
gueren, coumo bay nosto petito meisouneto. — 0! la, diguet,
bay bien mau. Sei bourgut na à Tyero per me laba lei man,
m'an fouita 'n cop de corno ; n'en sei enquero tout sannous.
Sei bourgut na ou granier, y abio quôucare que m'o becat. Sei
bourgut na ou cendrier beire se la cendre ero caudo, m'an
fourra n'engrôugnado. Ei clabat la porto, me sei en bengut
tout en jurant, se dit. — E be, digueren les autre, fôu na 'n
quôucale mei.
Finetto
Y abio 'n moussu qu abio na fillo pei un beilet. Quelo fiUo
s'apelabo Finetto. Dins qu'un moument n'abio n'autro; s'ape-
labo Ledo. Dins qu'un moument n'abio n'autro qu'ero'n pau
pigaillouso.
Lou mestre diguet : — Te, dit, petit, te bole fa marida dans
qu'uno de mei fillo.
La Finetto lou bouillo bien : — Te, dit, quand moun pay
te faro côusi, te fourro dire, quand na mousco te sautoro
pôu nas : Coy quelo.
Lou mestre lou meno dins qu'uno cranbo negro e lei fay
mètre toutei trei de reng. Tastabo, tastabo: tout d'un cop na
mousco li sauto pôu nas. — Bole quelo, se dit. — A, dit, mei
m'o prei ma Finetto; li ei proumeso, sabi sôugut, li'ôuioy
pas proumeso. Te, meisei que t'ei donnât quelo, te bau
douna inKdedau troucat,pei na seillo de papier; te fôu na cura
la mej^
95and sisque qui ôupres de la mer, l'estoumac li manquet.
V
5S2 CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS
— Sa fenno n'en passabo raau. Uno d'aquei trei fillo dubio li
pourta la soupo. Lou pay diguet: — Qualo coy, dit, que bôu
y ana? — Coy iou, dit la Ledo. — Meisei que tu bolei y ana,
y aniras pas. Etu, bolei y ana, digue'n da sa fenno ? — Nou,
dit, ybole pas na. — Ebe meisei, y aniras. — La Finetto ero
countento d'ôuguei (iitau.
Quand y arribet, bi soun orne presque mort. — Te, dit,
moun ami, minjo ta soupo, beirats que diris qu'un moument
ta mer siro touto curado. — L*ome minjo sa soupo.
Quand arribet a la meisou : — E be, petit, as cabat? — 0
oui! — Ane, ses bien baillent. E be, dit, te fôu na coupa la
fouret, te baillorei na sarpo de boy e na marro de cartou.
Lou beil et fasio coumo Tautre cop ; se couchet qui. Sa
fenno arribet : — Que coy que as ? — Pode pas fa moun
oubraje. — E be, dit, te, moun ami, minjo ta soupo, beiras
que dins qu'un moument ta fouret siro coupado e touto
afagoutado.
Quand arribet: — E be, petit, as bien trabailla ! — Tant
qu'ei bourgut. — Ses bien baillent, se dit, — te fourro na
trapa des ôusôu dans qu'uno cordo 'n mati, se dit. Estiroras
la cordo, les ôusèu se randoran toui.
Estirabo be prou la cordo, re ne benio. Sa fenno arribo.
Abio 'n petit siôulet : — Turlututu. les ôusèu arribaben. —
Sa fenno n'en trapet na pleno cordo.
Quand arribet: — E be, petit, as trapat bien d ôusèu ? —
Tant qu'ei pousquut. — Ses bien baillent, se dit. E be dou-
man mati* se ses pas couart, te fourro na leba un niou de
bergau.
A chaque pougna que trapabo : — A, ia, iay, me pinquen!
— Sa fenno arribet : — E que coy que as, se dit, moun ami ?
E, dis, coy que lou biel m'o coumanda de trapa des abeillo,
pei, se dit, me pinquen. — Ses bien sot, se dit, fouillo trapa
lou niou e tout. — Te, si, iou y bau mounta. — Lei dabalet.
Quand arribet, escapet lei bergau ; se meteren après lou
mestre. — A, ia, iay, se dit, me pinquen. Ebe, si, meisei que
m'abes feit pinqua, baqui bosto pagomen, — pei les y baillet
re. — Se 'nangueren. '^^
\
CONTES POPULAIRES DE L'AGENAIS 583
Lou jau pei la bieillo
Y abio un cop un jau pei na bieillo. La bieillo prenguet *n
saquet ou jau. Lou jaun'eropascountent,mountet sus Toustau
delà bieillo e diguet: Cacaraca, rend me moun saquet. Pei fas-
quetuncountour per tourna'n dalameisou de la bieillo. S'enbay
bien loun e trobo un loup;li dit : Adisias,loup! — adisias, jau,
se dit ? — Ent'anas, se dit ? — Bau bien loun, bien loun, en-
quero pus loun. — Menas me dans bous, se dit lou loup. —
Entras dins moun quiou, pei sou sôurei. — Bay bien loun,
bien loun, enquero pus loun. — Trobo 'nriou. — Adisias, riou.
— Adisias, jau. — Ent'anas ? — Bau bien loun, bien loun,
enquero pus loun. — Menas me dans bous. — Entras dans
moun quiou,pei sou sôurei. — Bay bien loun, bien loun, enquero
pus loun. — Trobo dei bergau. — Adisias, bergau, se dit. —
Adisias, jau ! — Ent'anas, se dit. — Bau bien loun, bien
loun, bien loun, enquero pus loun, — Menas me dans bous.
— Entras dens moun quiou, pei sou sôurei. — Arribo cha
la bieillo, mountet sus la teulado e fit : — Cacaraca, rend me
moun saquet. — Aqueu diatre de jau, se dit la bieillo. — L'at-
trapo, lou meto dins Testable des ôuillo. Cresio que les ôuillo
lou minjoyan. E quand y estet, diguet : — Loup, sors de moun
quiou e minjo toutes ques ôuillo. Lou loup sourtit e pei minjet
toutos les ôuillo. Lou jau pei lou loup sourtigueren de Tous-
tau de la bieillo. Lou jau tournet mounta sus la teùlado : Ca-
caraca, rend me moun saquet. — Aqueu diatre de jau, se
dit la bieillo. — Meto na bourreio ou four. Quand lou four
Biguet bien caud, trapet lou jau, pei li metet dedins. Quand y
sisquet, lou jau diguet : — Riou, sors de moun quiou, pei tio
lou fe. — Lou riou sourtit e lou tiet. Lou jau sourtit dôu
four et tournet mounta sus Toustau de la bieillo e diguet :
— Cacaraca, rend me moun saquet. — Queu diantre de jau, se
dit.L'attrapo e bôu lou sanna. Diguet : — Bergau, bergau, sour*
têts de moun quiou e pinquas lo. — La bieillo deisset lou jau
e pei li dounet soun saquet e lou jau mountet sus Toustau de
la bieillo e fit : Kikiriki !
Qui moun counte fenit.
584 CONTES POPULAIRES DE L*AGENAIS
L^ome que saco sa fenno
Y abio un cop 'n orne que s'ero maridat mei cFun cop. Abio
feit péri sei prumièros fennos à forço de lei saba. Ta bien .
bouillo n'en preiie *n autro. Mes lei que ni en parlabo abian
pôu dei cop de pun. La gouio d'un moussu sou diguet en da
soun mestre. Qu'as pôu, si lou moussu. Fay bouta sôu con-
trat qu'ôuro pas lou dret de te batre. Se sou bôu fa, n'ôuras
qu'a tira toun papier de la pocbo e qu'a li bouta dabant lou
nas : co faro coumo ei porcs que lei farren per les empacba
de founilla. — Tau fasqueren e lou maridage se fit. Fusque-
ren pas sourtit de la gleiso e tournât à l'oustau que l'orne bôu
bica sa fenno; se pinquo 'n da espinlo. Co lou rend fôu : Ah !
sacredi, gusasso, s' as feit esprès, se dit. h brôuillado : Garo a
tu, te bau saba. — Bistomen la fenno tiro soun countrat de la
pocho. — N'as pas lou dret de me batre, si, meissanto bes-
tio. — E be, si l'ome, se pode pas te batre, te bau saca. —
En disent aco, trapo sa fenno, laplanto dabant lou pan de
boy, se recule e li cour dessus coumo 'n brau. Noun pas elo,
se biro 'n pau de constat. L'ome la manco, trauco lou pan
de boy e sauto chau besi. — Escusas, se dit, bene querre de
grano de fe. — Tout du mémo, si lou besi, ôuias pousquut
passa per la porto. — Que boules, si l'ome, quand l'un ei
preissat, l'un passo 'n te l'un pot.
Gniquo gnaquo
Y abio 'n cop na fenno que se *nanabo confessa 'n da un.
curé e queu curé toujours li disio : — Gniquo I
Selo diguet 'n da soun orne : — Moun Dion, se dit, sap pas
que coy, noste curé me dit toujours: Gniquo. — A, si soun
ome, e be, qu'ouro tournoras te confessa, respounli: Gnaquo.
— Coy suffit, se dit selo.
Lou prumier cop qu'y tournet, lou curé manquet pas de li
dire : — Gniquo ! — Gnaquo, se dit selo ! — E be, dit lou
curé, y anirei dessei.
CONTES POPULAIRES DE L*AGENAIS 585
Lafenno ero bien embarrassado. Anfin torno cha selo e dit
'n da soun orne : — lou curé m*o dit quand 11 ei respoundut
Guaquo, que bendoyo des sei. — A, se dit seu, que bengue;
lou receborei bien !
Lou curé y anguet. — Pei quand entende béni Tome, selo
lou û cacha dins qu'un crofe; Tome tarabastejabo tout. — En-
tei la clau d'aqueu crofe, se dit? — E sou sabe pas, diguet la
fenno. — Labau querre, si seu.
Tant que la çercabo, selo diguet ou curé: — Fôu bous mè-
tre dins qu'un sac ou granier. — Pasque soun orne li abio dit.
L*ome torno. N'abio pas trouba la clau. — E be, se dit, bau
counta mei sacs de blad. — Pren 'n gros barrou, mounto ou
granier e a cade sac de blad tustabo 'n disent : un, dus, trei,
quatre Quand sisquet ou darrie, ent'ero lou curé, lou
moulât de cops.
Lou curé bessinous e la fenno petouso
Y abio 'n cop la fenno d'un cassajre que lou curé bouillo
pas la confessa, se li pourtabo pas 'aa lèbre. Baquinosto fenno
bien en peno : gôusabo pas ou dire 'n da soun orne, pourtant
bouillo bien 'na se coufessa.
Anfin n'en parle cha selo. — E be, diguet Tome, n'in fôu
bailla n'uno.
Coj sufit, n'estripen uno, la ramplissen de fe, pei la fenno
la porto ou curé.
Bay ou coufessiounal ; — tanes, se dit, moussu, se dit, ei
deissa na lebre à bosto cousiniero. — Coj boun, se dit seu, e
be bau bous coufessa.
Selo s'accusabo e disio qu'abio peta. Lou curé que li atri-
gabo de se' nana, disio toujours : — bous donc Tabsolutioun,
bous donc Tabsolutioun !
A forço s'en baj, quelo fenno, e lou curet bistoment galopo
à soun oustau. Mes quand bi la lebre touto pleno de fe, se
boutet a courre sus la routo per trapa la fenno e de loun li
credabo ; — Te descoufesso, petouso, te descoufesse.
Ni 0 per uno fcissou,
Biel bessinous !
li respounde selo en s'en anaiit.
586 CONTES POPULAIUES DE L*AGENAIS
Lia piou e lou pesoui
Te, dit la piou, fôu nous *n'ana massa de boj. Abian metut
la sauço ou fe. Lou pesoui diguet : Lou puslèu qu'ôuro cabat
soun fagot aniro beire la sauço, aniro la goiista. La piou sôu.
tabo bien, lou pesoui poudio pas marcha. Seloôuguet pus lèu
caba soun fagot. Quand arribet, tiro lou cabessau darrei la
porto per trapalou peirôu. Selo que n'ero pas bienbello, lou
peirôu li toumbet dessus.Lou pesoui, quand arribet : Ah ! ma-
lerous, enV ei ma piou, enf ei ma pion, se dit? Baj sôu carai,
se meto à pura.
Ent 'ei ma piou ? — Y passo un cagnot : — E que coy qu'a-
bes, pesoui, à tant pura? — Et se sabias, se dit, quau grand
malur, ma piou ei morto,pei iou pure. — E iou pode be jappa,
se dit lou cagnot.
Ypasso'n jau. — Et que coy que as, cagnot, a tant jappa ?
— Ah ! se sabias quau grand malur ? La piou ei morto, lou
pesoui puro e iou jappe, — E iou pode be canta, se dit lou
jau.
Y passo dios agassos. — E que coy que as, jau, a tant canta?
— Ah! se sabias, se dit, quau grand malur? La piou ei morto,
lou pesoui puro, lou cagnot jappo e iou cante. — E nous au
poden be nous despluma.
Y passo na carreto. — Que coy qu'abes, agassos, si, à tant
bous despluma? — Oh! se sabias quau grand malur, etc....,
etc.,... — E iou pode be recula. — Et se boto à recula, à re-
cula, à recula.
Y passo nafouret... Que coy qu'abes, dit, carreto, à tant re-
cula? — Oh ! se sabias quau grand malur? etc., etc....
K iou pode be toumba.
Y passo na fount. — Que coy qu'as, fouret, à tant toumba ?
— Ah! se sabias quau grandmalur ?etc. , etc. — E iou pode
be perdre touto moun aygo.
Y passo na fenno qu'anabo querred'aygo.— Que coy qu'as,
se dit, fount, à perdre touto tounaygo. — Ah ! se sabias
etc., etc.. — E iou pode be cassa toutes meicrugos.
CONTES POPULAIUKS DE L'AGENAIS 58 7
Mara
Y abio na bigno ; dins quelo bigno n i abio qu'un pe ; sus
queu pe n i abio qn'uno ramo, sus quelo ramo n i abio qu'un
rasin, sus queu rasi n i abio qu'uno gruno, e Mara qu'ei dins
la bigno couchât.
Bau trouba lou can : — Can, boudas pas japa Mara qu'ei
dins la bigno couchât ? — Monn ami, ne po le pas.
Bau trouba lou loup : — Loup, pourias pas minja lou can,
lou can bôu pas japa Mara qu'ei dins la bigno couchât ? —
Moun ami, ne podo pas.
Bau trouba la barro : — Barro, pourias pas tia lou loup ;
lou loup bôu pas minja lou can, lou can bon pas japa Mara
qu'ei dins la bigno couchât ? — Moun ami, ne pode pas.
Bau trouba lou fe : — Fe, pourias pas burla la barro, bôu
pas tia lou loup, lou loup bôu pas minja lou can, lou can bôu
pas japa Mara qu'ei dins la bigno couchât ? — Moun ami, ne
pode pas.
Bau trouba lou riou : — Riou, pourias pas tia lou fe, bôu
pas burla la barro, la barro bôu pas tia lou loup, lou loup bôu
pas minja lou can, lou can bôu pas japa Mara qu'ei dins la
bigno couchât? — Moun ami, ne pode pas.
Bau trouba lou bèu : — Bèu, pourias pas heure Taigo, bôu
pas tia lou fe, lou fe bôu pas burla la barro, la baiTo bôu pas
tia|lou loup, lou loup bôu pas minja lou chi, lou chi bôu pas
japa Mara qu'ei dins la bigno couchât. — Moun ami. ne pode
pas.
Bau trouba lou joug : — Joug, pourias [)as liga lou bôu, lou
bèu bôu pas heure l'aygo, Taj'go bôu pas tia lou fe, lou fe bôu
pas burla la barro, la barro bôu pas tia lou loup, lou loup bôu
pas minja lou can, lou can bôu pas japa Mara qu'ei dins la
bigno couchât? — Moun ami, ne pode pas.
Bau trouba la juillo : — Juillo, pourias pas staca lou joug,
lou joug bôu pas liga lou bèu, lou bèu bôu pas heure Taygo,
Taygo bôu pas tia lou fe, lou fe bôu pas burla la barro, la
barro bôu pas tia lou loup, lou loup bôu pas minja lou can, lou
can bôu pas japa Mara qu'ei dins la bigno couchât ? — Moun
ami, ne pode pas.
588 CONTES POPULAIRES DE l'aGENAIS
Bau trouba lou rat : — Rat, pourias pas minja la juillo, la
juillo bôu pa'staca lou joug, lou joug bôu pas ligalou bèu, lou
bèu bôu pas beure l'aygo, Tajgo bôu pas tia lou fe, lou fe
bôu pas burla la barro, la barro bôu par tia lou loup, lou loup
bôu pas minja lou can, lou can bôu pas japa Mara qu*ei dins
la bigno couchât. — Moun ami, ne pode pas.
Bau trouba lou gat : — Gat, pourias pas minja lou rat, lou
rat bôu pas minja la juillo, la juillo bôu pa'staca lou joug, lou
joug bôu pas liga lei bèus, lou bèu bôu pas beure lou riou,
lou riou bôu pas tia lou fe, lou fe bôu pas burla la barro, la
barro bôu pas tia lou loup, lou loup bôu pas minja lou can,
lou can bôu pas japa Mara qu'ei dins la bigno couchât I
Lou gat minjet lou rat, lou rat minjet la juillo, la juillo esta-
quet lou joug, lou joug liguet lou bèu, lou bèu buguet Tajgo,
Taygo tiet lou fe, lou fe burlet la barro, Ta barro tiet lou loup,
lou loup minjet lou can, lou can japet Mara qu'ei dins la
bigno couchât.
Cansou
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil I
lou n'ei bi lou loup
Per minja la crabo,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n'ei bi la barro
Per tia lou loup,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n*ei bi lou fe
Per burla la barro,
Fe de barro,
^
\ ...
CONTES POPULAIRES DE l'aGENaIS 589
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun,[ma crabo m*o minja moun mil!
lou n'ei bi i'ajrgueto
Per tia lou fe,
Ajgueto de fe,
Fe de barro,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n'ei bi lou bèu
Per beure Taygueto,
Bèu d*aygueto,
Ajgueto de fe,
Fe de barro,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n'ei bi la cordo,
Per estaca lou bèu,
Cordo de bèu,
Bèu d'aygueto,
Aygueto de fe,
Fe de barro,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n'ei bi lou rat
Per coupa la cordo.
Rat de cordo,
590 CONTES POPULAIRES DE L AGENAIS
Cordo de bèu,
Bèu d'aygueto,
Ajgueto de fe,
Fe de barro,
Barro de lonp,
Loup de'crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
lou n'ei bi lou gat
Per trapa lou rat,
Grat de rat.
Rat de cordo,
Cordo de bèu,
Bèu d'ajgueto,
Aygueto de fe,
Fe de barro,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil !
Se n'ei bi lou chapitoy
Per minja lou gat,
Cliapitoj de gat,
Gat de rat,
Rat de cordo.
Cordo de bèu,
Bèu d'ajgueto,
Ajgueto de fe,
Fe de barro,
Barro de loup,
Loup de crabo,
Crabo de mil,
Maledicioun, ma crabo m'o minja moun mil 1
J. Brissaud.
(A suivre.)
BEATRICE PORTINARI
l'idéale DELLA DIVIXA GOMMEDIA
CANZONE
Ne la città de' Fiori,
De l'Arno in riva, un mesto garzonccllo,
Dal cui nero occhio di celesti ardori
Lampeggiava Tamor santo del bollo,
Ne la infantile etade,
Portava il segno génial sublime,
Che le grandi aime invade
Per sollevarle a invidiate cime.
E la Pesta de' Fiori e de' Bambini.
Danzan tia' fiori ingénue fanciullette
Ne la fresca beltà de l'innocenza.
Ma una fra lor da gli occhi suoi divini
Raggiava lampi di sue grazie elette,
Bianco vestita, celestial parvcnza.
Un suo sgardo ferîo
Il poeta fanciullo e a Dio rapîo !
E queir aima bambina
Sfavillô di una luce ardente e nova :
Si accese nel suo cor face divina,
Che il trasfigura, lo féconda e innova.
Or de' suoi sogni di oro
L'immagine rivede un di sognata
Di angeletti fra un coro,
Fra la terra ed il cielo a vol librata.
Da queU'ora ti fu sorella e amica,
Dante, l'eteroa c pudica fanciulla,
Che di un tuo sgiiardo al lampo impallidîa.
Oh quai vita innocente a l'aura aprica
De fiorenti sontieri, ove trastulla
592 BEATRICE PORTINAHI
La fanciullezza ! Oh casta poesia,
Che in due candidi cuori
Sboccia quai fior del sole a' vivi ardori!
Il Buo dolce sorriso
La vita ti fîoria di amore e speme ;
E volavi fidente a l'almo Eliso,
Chetando il turbo che nel cor ti freme.
E morta la sognavi,
0 divin, nel delirio : e soavemente
Salir tu la miravi
Al Cielo ; si turbô tua eccelsa mente,
E ti destava un tremito funesto.
Ma ti assecuri : e' viva : allegra ancora
Tua vita quella pura giovinetta,
Che l'aima ti rapiva e ti feo mesto,
Irradiando di ridente aurora
Tua balda giovinezza ! Oh^la diletta
Creatura di amore
Ti piove raggi di grandezza in core !
E tu bevi spirato
Da la diva fancîulla, in cima assisa
Del tuo pensiero, un amor profumato
Di Fede e patria che ti imparadisa.
Oh quai dolce favella
Con le sorrise brevi parolette,
Quai nuovo cielo, quai sovrana e bella
Immago si âpre con sue forme elette !
E venue Tora che Tamata donna
Spiegô da questo suolo a Dio le piume :
Fu un' ora di dolor cupo e profonde,
Che del tuo cor per sempre allor si indonna.
Sparito è il raggio, di tua vita il lume,
Che ti guidava in questo cieco mondo.
Tu pensoso, o Alighiero,
Resti e nudri un dolor perenne altero !
0 Béatrice, mira
L'amico tuo e non de la ventura, .
Gli sorridi. mentre ei sogna e délira,
A te pur desiando in sua sventura.
A quei che amasti tanto
BEATRICE PORTINARI 593
E uscio per te da la volgare schiera,
Col tuo divino încanto
Sorridi in sogno bellamente austera,
E il gran poeta la sognô : la vide
la cielo tanto gloriosa accolta,
Di un nembo di bei fîor tutta ricinta.
Bella raggiù nel sogno e gli sorride,
llosso vestita, in verde manto avvolta.
Sovra candido vel d'oliva cinta.
La sogn6) quai bambina
La vide un dl, corne angiola divina I
Da quel di Taspro esiglio
Fu men duro per te, padre Alighieri;
Tu asciugasti la lacrima sul ciglio
E levasti su al Cielo i tuoi pensieri.
Tua vita riconforta
E afforza una virtù che vien da Dio :
Ti è via, ti è luce e scorta
Un angelo che appura il tuo desio.
Ei ti ritempra a la battaglia il core,
Sotto r usbergo del sentirsi puro;
Ei fa più grande il nobile tuo sdegno,
Che germoglia il tuo canto alto d'amore,
Che ti leva del suol dal lezzo impuro,
Facendoti a salir leggiero e degno.
Ei ti tempra le piume,
Ti squaderna de' mondi il gran volume.
E non fosti più solo :
11 Sogno de' tuoi sogni è a te di accanto
Invisibile spirto. Esso il rio duolo
De gli Abissi ti schiude : arma il tuo canto
Di forza portentosa.
11 cantore di Enea prudente e saggio
Per la via lacrimosa
De' veri morti è guida al tuo viaggio.
E vinci la pilura e lo sgomento
Del regno oscuro; che una diva luce
A gli occhi e ne la mente ti balena : .
Ella ti regge il piede in ogni evento
E schiara il rio sentiero al savio duce.
Montre ti tréma il cor per ogni vena,
40
594 BEATRICE PORTINARl
Ella le cose belle
Ti mostra e torni a riveder le stelle.
Pel faticoso Monte,
Che sorge iii mezzo al pelago fremente,
Sali pietoso e con dimessa fronte,
Gémi al pregar de la pudica gente.
E plori e preghi pio :
E raggiar miri de la luce i fîgli ;
Arcano favellio
Ascolti di profondi alti consigli.
Per ardue scale pénitente sali
E più lieve si fa la mortal salma
E si accende di Bice il gran desio,
Che ti attira, ti attrae, ti mette le ali.
Vedi un Trionfo che rapisce l'aima,
Dove fulge la scienza al ta di Dio.
La miri ne l'Edenne
E disbrami la tua sete decenne I
Da Dio trasumanato
Con Béatrice vai di stella in stella,
Che vide a te del suc fulgor beato ;
E di astro in astro ognor si fa più bella
La casta Béatrice.
Che ti bea del suo eterno almo sorriso.
E tu puro e felice
Ti disseti de' Santi al grato riso ,
Che è raggio e canto, luce e melodia.
Ma, oh meraviglia I oh prodigio sovrano,
Che ne Tempireo cielo a te si schiude !
Ivi miri tra gli angioli Maria.
La Rosa, che giammai pregasti invano,
E il Fiume circolar, cui in sua virtude
Impronta l'Uno e Trino;
E ti confondi a quel Mister divino!
Padre Alighieri , in Cielo
Or che, congiunto a la céleste Idea,
A la tua Béatrice, e sciolto il vélo
Arcano, quella Luce, che ridea
Al tuo pensiero, intendi ;
Or che ti incieli santamente in Dio,
.-.- ..-v5
A DANTE ALIGHIERI 59 5
Quaggiù tuo guardo stendi
E sorridi al fuo bello Ovil natio.
La tua Fiorenza e Italia tua festeggia
Oggi il tuo nome a Béatrice unito,
Che, angelo e vision, sogno e fanciulla,
A te sorrise al mondo ! Oggi fîammeggia
La gloria tua da Tuno al'altro lito
Del bel piiese, che infiorô tua culla.
Raggia dal Paradiso
Con Bice, a noi plaudenti un dolce riso !
Giuseppe Spbra.
A DANTE ALIGHIERI E BEATRICE PORTINARI
LA DIVINA GOMMEDIA
Tra le lotte di un secolo perverse,
Da la patna, da Dio, dal ben svïato,
Tu lo sollevi, mentre era sommerso
Nel pelago del mal freinente irato.
Sonimo Vate, con dir sublime e terso,
Con nobil core ed animo sdegnato
Descrivi fondo a tutto l'universo
Con altissimo volo invidïato.
E lotti e aneli e santamente aspiri
Umanità ritrar da Fempia valle,
Ove tra falli avvolgesi deliri.
Movi per novo inusitato calle
A luce a civiltà, cui sol sospiri,
Dando a le cupe ténèbre le spalle.
596 E BEATRICE PORTINARI
II
« Amor che ne la mente ti ragiona
Ti leva a Dio per le superne spere
E lena e core e incanto al ben ti dona,
T'imparadisa de le gioie vere.
» Amor che nuUo amalo amar perdona
Ti vinse Talma con delizie altère :
Amor che dolce in ogni petto suona
Ti assunse al Ciel de le letizie mère.
Più e men che donna a te raggiô Béatrice,
Sovrana idea, parvenza alta di Dio,
Scienza che il vero a Tuni verso dice.
•
Italia e umanitade in un desio
Si accentra in lei : e tu ti incieli in Bice,
Che a vol di stella in Stella ti rapio !
III
' Di donna, patria e gloria immenso amore
A l'alto volo ti vesti lo piume :
Scendi gli Abissi de Teterno orrore,
Del duolo, dove tace il divo lume.
Dal gemito a la speme va il tuo core :
E sali allor del Monte il bel cacume,
Dove l'aima se purga nel dolore :
E prece e pace parla il tuo volume.
Un savio Vate, la scïenza umana.
Pel regno de la vita e di natura
Ti scorge e sua virtù diventa vana.
Béatrice, di Dio scienza, or guida e appura
Pel regno de lo spirto e trasumana
Ne la luce e nel riso tua figura.
BEATUIGE E LAURA 597
IV
Su la schiera volgar, su tutti î vati
Tu ti innalzi su Tali de la Fede,
Che il cor ti infiamma co' suoi rai beati,
Che novo cielo s vêla a chi ben crede.
E ti levi, ti levi : ne obbliati
Son gli umani destini : il cor ti fiede,
Né tre regni di morte, pe* sviati
Fratclli amor ; che i mesti e i falli vede.
E lijcvi, ti levi, almo poeta,
A un idéale immenso, a Tlnfinito,
Che del fînito è à te pur scala e meta.
Superba aiuola a te par questo lito,
Mentre nuoti in un mar de luce lieta,
Nanti a Dio, ne l'Empireo, annichilito ! . . .
BEATRICE E LAURA
L'una de TAlighier l'anima ispira
A platonico amor sublime e santo :
Ed ei trattô civil pietosa lira,
E Fede e patria celebrô nel canto.
L*altra Peirarca accese di délira
Fiamma, che 6 vivo ardor, purezza e incanto ;
Ed ei per lei, per la virtù sospira
E sederle desia sempre di accanto.
Oh questo amore è nobile e terreno :
É amor di donna a la virtù nutrita,
Che signoreggia ne* Trionfi appieno.
Quello è sovrano affetto, che la vita
Umana obblia in cielo alto e sereno,
In alba eterna di gioir fîorita!
598 lïALIA E FRANCIA
ITALIA E FRANCIA
Italiae Francia gareggiàr di ardore
Ed ingemmàr di luce gloriosa
La bella Laura e il suo divin cantore,
Che gentilezza a leggiadria disposa.
E or Francia e Italia insiem rendono onore
A Béatrice, eletta aima pietosa,
Che il cor di Dante di céleste amore
Avvinse e lo beô pura amorosa.
Splendida generosa e nobil gara
E quella che due genti insieme annoda,
Che tra lor pace in ayvenir prépara !
Or Gallia e Ausonia un sol desio rannoda :
Risplenda la lor gloria ognor più chiara,
Che or la mistica Bice ammira e loda !
Giuseppe Spkra.
DANTE E BEATRIX
Lou malur e Texil, las passieus enemigos,
L'ôdi crudel que jaupo, asseguto e mourdis,
Las necios jalousies e las traitos entrigos,
Lou sounge enfebrejat d*infer ou paradis,
Aqui toun lot, o Dante ! idealos amigos :
Oumbro e pas, fougissès davans Tentravadis
Del poudé soucitous, de las guerrieiros liguos,
Del baral e de tout so qu'ai cor re noun dis !
Pamens s'as tout dounat, toun repaus e ta vido,
Pèr un noum, un grand noum de glorio couronnât,
L'amarou d'assaval un jour s'es avalido,
L'amour de Beatrix que t'aviô counsoulat
Davans Dieus pondérons t'a fach bello finido,
E vous ses rejounguts dins l'immourtalitat !
(Dialecte languedocien bilerrois).
Frédéric Donnadieu.
DANTE ET BEATRIX
Le malheur et l'exil, les passions ennemies, — la haine cruelle qui
aboie, poursuit et mord — les jalousies imbéciles et les intrigues traî-
tresses, — les rêves enfiévrés de l'enfer ou du paradis.
Voilà ton lot, o Dante ! idéales amies : — ombre et paix, fuyez
devant la lourde chaîne — du pouvoir soucieux, des ligues guerrières,
— ^ de l'agitation confuse et de tout ce qui ne dit rien au cœur!
Pourtant, si tu as tout donné, ton repos et ta vie — pour un nom»
un grand nom de gloire couronné, — l'amertume d'ici-bas un jour s'est
abolie.
L'amour de Béatrix qui t'avait consolé, — devant Dieu puissant
t'a procuré une belle mort, — et vous vous êtes réunis dans l'immor-
talité !
Frédéric Donnadieu.
VARIÉTÉS
ATALANTE ET HIPPOMENE
Le manuscrit de la Bibliothèque nationale nouvelles acquisitions^
3650 (XV* siècle), incomplet du commencement et de la fin, commence
au f** xlviij de Tancienne pagination par les lignes qui suivent :
.... Si se hasta de courre, si que tantost se fut au devant de lui
mise. A celle foys getta il la .ij* pomme pour plus la belle en la voye
délayer. Mes oncques si haste de courir ne fut que pour la pomme d'or
prendre ne se arrestast, car bien petit le cours d'ung jouvcncel crain-
gnoit. De ce que ainsi sVresta la pucelle f a ja Ypomenès devant elle
courus ; mais Athalente, qui roydement alloit, l'adevancha sans guères
lui couster. Lors se senty le (sic) jeunes homs lassez, et bien vit que la
bonne forment aprochoient. Icy ne se sceut plus en son fait con-
seillier, se non prendre la troisime pomme et devant elle jetter ; et lors
la jetta devant la pucelle, a fin que le premier peûst venir a la bourne.
Comme lors Atlialente regarda la bourne qui près d'elle estoit, et la
pomme d'or qui en sa voye fut, ne sceut doncques que faire du pren-
dre ou dulaissier ; mais tant s'arresta elle en celle penssée que Ypo-
menès fut premier a la bourne venus. Lors que par cellui cours se
trouva desconfite et que les pommez d'or ainsi l'eurent decheûe, a cel
Ypomenès se voult accorder et lui anteriner toute sa promesse ; sy
allèrent au temple du dieu Saturnus, et selon leur loy furent espousez.
Comme par mariage ainsi furent conjoings, pour eulx aller en Thèbes
d'illec se partirent. Et comme longuement orent cheminé, trouvèrent
une lande entre forest enclose. Sy avoit en ce lieu ung temple bel et
riche, ou quel le dieu Cibelles estoit aourez. Adoncques pour refrain-
dre l'ardeur du soleil, qui a celle houre forment les arguoit, en cellui
temple entrèrent pour eulx umbrayer (sic) et pour repos prendre du
travail qu'ilz avoient. Après que bonnement se furent reposez, eulx
qui furent remplis d'amours et de joye, en remirant leurs beautez et
jeunessez furent lors de l'un l'aultre si prins et embrasez que charnel-
lement ou temple l'ung l'aultre habitèrent. De ce fait leur sourd i si
grand malaventure que tantost vint sur eulx ung lyon affamé, qui en
VARIETES 601
brief temps les list honteusement morii-. Et pom* ce est ce mal des
temples Dieu despire et interdire par polution, car qui ce fait vers Dieu
est desplaisant et en la fin en est confusément pugoi.
COMMENT THIDe'Ûs VINT AU LIEU OU POLINICEZ ESTOIT RETRAIT ET DE
LEUR DÉBAT
Retourner nous convient a Thydeiis. Celle nuyt meïsme %ie vous
avez oy. oit il chevauchié par la f orest antie, et oit souffert grant dou-
leur et grant paine, tant qu'il vit la tour, ainsi comme avoit fait Poli-
nicès, en la cité d'Arges. Lors se mist en la maistre rue, etc.
La suite représente, à quelques variantes près, la première rédaction
du Roman de Thèhes en prose * ; puis viennent les autres parties de
V Histoire ancienne jusqu'à César, les Faits des Romains et une
continuation qui, dans l'état du manuscrit, va jusqu'au temps d'Ala-
ric 2.
Le récit, incomplet, qu'offre notre manuscrit de l'histoire d'Ata-
lante et d'Hippomène ne se trouve, croyons-nous, dans aucun des
autres manuscrits de V Histoire ancienne : c'est ce qui nous a décidé à
le publier, en y joignant quelques observations qu'il suggère.
A quel propos l'auteur, qui est sans doute le copiste d'un manus-
crit d'où dérive plus ou moins directement le nôtre ', a-t-il inséré
cette digression dans le passage du Roman de Thèhes en prose où
est racontée la querelle de Tydée et de Polynice devant le palais
d'Adraste? Ce ne peut être qu'à propos des causes de l'exil de Tydée,
et par suite d'une confusion entre l'Atalante béotienne, fille de Schœ-
née, à qui l'on attribue ordinairement l'aventure des pommes d'or,
et l'Atalante arcadienne, fille d'Iasus et mère de Parthénopée, fameuse
par la chasse du sanglier de Calydon *. Méléagre, qui fit admettre
* Voyez notre édition critique du Roman de Thèbes en vers (Paris,
F. Didot et Cie, 1890 ; publication de la Société des anciens textes fran-
çais)^ introduction, p. cxxiii sqq.
2 P. Meyer, Romania, XIV, 51, n. 4.
* Ce n'est évidemment pas le copiste du manuscrit lui-même, qui ne
date que de la seconde moitié du XV" siècle : les traces de déclinaison
qui subsistent encore s'y opposent.
* Cette confusion est, du reste, fort ancienne, et les légendes arca-
diennes et béotiennes au sujet d'Atalante semblent avoir une origine
commune et se rapporter à une même personne (Voy. Saglio, Dict. des
Antiquités grecques et romaines, s. v.). Le scholiasLe de Stace, à pro-
pos de ces vers de la Thébaïde, VI, 563-5 ; Nota parens {PavtheJiopœi)
cursu: quis Mœnaliœ Atalantes Nesciat egi^egium decus et vestigia cunc-
tis Indeprensa procis, reproche au poète son erreur ; mais il confond à
602 VARIETES
VAtalante arcadienne parmi les chasseurs, l'épousa quand elle eut
tué le monstre, et en eut, suivant certaines traditions *, Parthéno-
pée 2, l'un des sept chefs de la guefre de Thèbes, était fils d'Œnée et
d'Althée, par conséquent frère consanguin de Tydée, qu'Œnée avait
eu de sa concubine Péribée.
D'après le Roman de Thèbes en prose, qui diffère ici du poème ',
Tydée aurait été obligé de s'exiler de son pays pour avoir tué ses
deux frèlfes, Menalipus et Meleagès. Le premier de ces noms est con-
forme à la tradition ; le second est évidemment une altération de
Meleayer, Méléagre, et constitue une simple addition, dont il est dif-
ficile de deviner la source. L'auteur du Roman de Thèbes en prose
ignorait évidemment Thistoire du tison fatal, dont la combustion
amena la mort de Méléagre, lorsque Althée l'eut jeté au feu, pour pu-
nir son fils du meurtre de ses oncles maternels, qni voulaient enlever
à Atalante la dépouille du sanglier de Calydon. L'incertitu le sur le
nom de la victime de Tydée '* a peut-être aussi contribué à favoriser
cette adjonction de Méléagre, mais le plus probable, c'est que nous
avons affaire ici à une en*eur provenant d'une phrase latine cor-
son tour Atalante et Hippodamie, comme on peut le voir : « Atalantae
confundit historiam. Hanc enim Atalantam, Hippomenis uxorem, dixi-
mus filiam Schœnei fuisse. Illam autem, quse cumprociscursu contendit,
Œnomaifiliam, uxoremPelopis. » Il est plus exact dans sa glose à VII,
267 : « Duas Atalaiitas esse certissimum est, unam Arcadam, cujus Par-
thenopseus est filius, aliam de Scyro, nobilem cursu, quam Hippomenes
cursu superavit projiciendo tria mala. » Le mythologue fantaisiste du
VI" siècle, Fulgentius Planciades {Argum. Metamorphoseon^ VIII, f. 4),
fait la même confusion que Stace : d'après lui, la fille de Schœnée était
arcadienne et prit part à la chasse du sanglier de Calydon. Ce sont là,
sans doute, les sources principales du récit inséré dans le Roman de
Thèbes en prose.
1 Voyez, en particulier, Hygin, fab. 70 et 99.
* D'autres lui donnent pour père Mélanion, fils d'Athamas, qui, dans
la légende arcadienne, est substituée à Hippomène comme vainqueur
d'Atalante à la course, à l'aide de trois pommes d'or que lui avait don-
nées Venus. On voit combien il était facile d'attribuer à une jeune fille
à laquelle les traditions s'accordaient à donner la légèreté et le goût des
exercices violents, et la lutte à la course avec les prétendants en vue
d'éviter le mariage, et la victoire sur le sanglier de Calydon.
3 Le poème dit simplement que Tydée avait tué un de ses frères, qu'il
ne nomme pas. Il se conforme donc à la tradition classique, qui n'ad-
met qu'un meurtre.
< Cf. Lactantius Placidus, ad Statil Theb, I, 402 : « Tydeus enim fra-
trem Aphareiun, quem alii Menalippum vocant, occidisse dicitur, alii
Thoantem avunculum, fratrem suae matris. »
VARIETES 603
rompue ou mal comprise, d'après laquelle l'auteur du roman en prose
aura voulu corriger le poème qui^ comme nous l'avons démontré ail-
leurs *, lui a certainement servi de base.
Le fait de l'intercalation de l'histoire d'Atalante dans un des ma-
nuscrits n'a, du reste, aucune importance pour la solution de la ques-
tion qui se pose naturellement, de savoir si le Roman de Thèbes en
prose, a eu une existence indépendante, ou s'il est l'œuvre de l'auteur
de VHistoire ancienne 2.
Un mot maintenant du récit en lui-môme. Le début manquant,
nous ne pouvons savoir si c'est de Vénus qu'Hippomène tenait les
trois pommes d'or, mais c'est d'autant plus douteux que, dans la se-
conde partie du récit, il n'est point dit ici que les deux amants aient
été poussés à profaner le temple de Cybèle par Vénus, irritée de leur
ingratitude envers elle ^ : c'est seulement leur amour mutuel et la
contemplation de leur beauté qui amènent le sacrilège. La punition
n'a rien de merveilleux : ils ne sont pas changés en lions et obligés
de traîner le char de Cybèle, comme le veut Fulgence, ou en lion et
lionne condamnés à ignorer Taniour, comme le disent Hygin et Ser-
vius^, mais simplement dévcrés par un lion. On peut donc supposer
que Vénus a été absolument écartée par l'auteur, attentif à supprimer
ce qui pouvait choquer des chrétiens scrupuleux. Remarquons, d ail-
leurs, que Cybèle est devenu un dieu. Notons, à ce propos, que la
source directe du récit n'est ni Hygin ni Fulgeuce, puisque le pre-
mier place la scène dans le temple de Jupiter sur le mont Parnasse,
et que le second la place, il est vrai, dans un bois consacré à la
Terre, mère des dieux, par Echion, son fils, mais n'emploie pas le nom
de Cybèle ; or notre auteur ne pouvait guère savoir que la Terre et
Cybèle désignaient une seule et même déesse.
D'autre part, il n'est question, ni dans l'un ni dans l'autre des
mythographes, du temple de Saturne où se célèbrent les noces d'Ata-
lante et d'Hippomène. Il faut donc admettre pour le récit français
une source indépendante, probablement, comme nous l'avons déjà
* Roman de Thèbes ^ t. II, p. cxxxv sqq.
* Voy Roman de Thèbes, t. II, p. cxxxviii.
^ Cf. Hygin, fab. 185 : « Hanc cum in patriam duceret, oblitus béné-
ficie Veneris se vicisse, grates ei non egit. Irata Venere, in monte Par-
nasso cum sacrificaret Jovi victori, cupiditate incensus, cum ea in fano
concubuit » ; et Fulgentius Planciades, Argum. Metamorph., fab. 11.
« Cujus monitis Hippomenes conseciitus victoriam, postea ingratus ad-
versus deam cognilus est. Itaque impulsu ejusdem deœ, etc.
* Les anciens croyaient que les lions n'avaient de rapports sexuels
qu'avec des animaux d'une autre espèce. Cf. Servius, aJQBwezrfalII, 113.
604
VARIETES
dit, un texte latin qui a mis à contribution, pour certains détails,
Hygin et Fulgence.
Léopold CONSTANS.
USAGE DU COMTÉ DE NICE
A Nice, quand viennent les roses, chaque soir on tourne le mai.
Sous une couronne de fleurs suspendue au carrefour des rues, femmes,
hommes et enfants forment une ronde, en chantant le vieux refrain
du rossignol.
LOU ROUSSIGNOU
— « D'oun ven anàs, filletta ?
Lou roussignôu que vola,
Lou cavagnôu au bras.
Lou roussignôu que vola, vola,
Lou cavagnôu au bras,
Lou roussignôu que volera. »
— « Moussu, puorti d'ouranges,
Lou roussignôu que vola,
Prene-ven, se ven plas.
Lou roussignôu que vola, vola,
Prene-ven, se ven plas,
Lou roussignôu que volera. »
S'en pren miegïa douzena,
Lou roussignôu que vola,
Senza la li pagà,
Lou roussignôu que vola, vola,
Senza la li pagà,
Lou roussignôu que volera.
La filla qu'es sagetta,
Lou roussignôu que vola.
Si va mettre à plourar,
Lou roussignôu que vola, vola
Si va mettre à plourar,
Lon rousi^ignôu que volera.
— « Que n'avez-vous, filletta,
Lou roussignôu que vola
Que non fez que plourar ?
Lou roussignôu que vola, vola.
Que nous fez que plourar,
Lou roussignôu que volera, w
— « N'en plouri mes ouranges,
Lou roussignôu que vola,
N'en plouri mes ouranges,
Que non m'avez pagà,
Lou roussignôu que vola, vola.
Que non m'avez pagà,
Lou roussignôu que volera. »
Si mette man en boursa,
Lou roussignôu que vola.
Cent escus ni a dounà,
Lou roussignôu que vola.
Cent escus nia dounà,
Lou roussignôu que volera. »
— « Donnas à vostre pero,
Lou roussignôu que vola, vola.
Que vous la gardera
IjOU roussignôu que volera. »
— « Moun pero es capitani,
Lou ronssignôu que vola,
Pagariè lu sourda,
Lou roussignôu que vola,
Pagariè lu sourda,
Lou roussignôu que volera. »
VARIETES 605
Dounàs à vostre f rero
Lou roussignôu que vola, vola
Que nous lai gardera
Lou roussignôu que volera.
— « Dounàs à vostra mera,
Lou roussignôu que vola, vola,
Que vous lu gardera
Lou roussignôu que volera. »
— « Ma mèro n' a de filla,
Lou roussignôu que vola,
Pourrie li maridar,
Lou roussignôu que vola, vola.
Pourrie li maridar,
Lou ronssignôu que volera. »
-- <t Moun frère es un giugaire,
Lou roussignôu que vola.
Lu mi pourrie giugar
Lou roussignôu que vola, vola.
Lu mi pourrie giugar
Lou roussignôu que volera. »
— « Ma ici que sui sagetta,
Lou roussignôu que vola.
Ma ici que sui sagetta,
Lou roussignôu que vola, vola,
Lu mi suprar gardar,
Lou* roussignôu que volera. »
Ou encore cet autre chant populaire, très ancien :
« Jeu vau au bois touta sou-
Madama la renà,
[letta,
Jeu vau au bois touta souletta. »
— « Si lo rei li t'atrovà,
Vilena pouitoua,
Si lo rei li t'atrovà I >>
— « Che mi porria faire,
Madama la renà,
Che mi porria faire ? »
— « Ti f aria coupar la testa,
Vilena pouitoua,
Ti faria coupar la testa. »
— » Lo rei es mon compera,
Madama la renà,
Lo rei es mon compera !
— « E jeu seu sa comera,
Vilena pouitoua,
E jeu seu sa comera. »
— « M'an di qu'aviàs de fia,
Vilena pouitoua,
M'an di qu'aviàs de fia. »
— « Si n'ai, li mi manteni,
Madama la renà.
Si n'ai, li mi manteni. »
— « M'en deuriàs dona una,
Vilena pouitoua.
M'en deuriàs dona una. »
— « Manco la mitan d'una,
Madama la renà,
Manco la mitan d'una.»
— <ï Li vou rauberai touti,
Vilena pouitoua,
Li vou rauberai touti. »
— « Eu passan, piaven una,
Madama la renà,
En passan pia ven una. »
Vte DE COLLEVILLE.
606 VARIETES
CORRECTIONS APPORTEES AU DICTIONNAIRE
DE GODEFROY,
A l'aide du dialecte wallon
« Argaise, agaisCf s. f ., broussailles ? »
Et puis après si s'en tornerent
Par un cassai molt ancien
Que destruit avoient payen ;
1j argaise, molt Irez haute estoit,
Nus hom de car n'i heritoit,
Car. I . lions l'ot si gastee
Et le pays et la contrée,
D'une lieuè tout environ
N'i avoit borde ni maison.
{Gilles de Chin, 2747,Reiff.)
De deles une roce s'est li bers apuies,
Voit les mons et les vais, les regorsetles bies
Et les fieresa^ats<?5 et lesdesrubes gries.
[Les Chetifs, Richel., 12.558. f> I26«)
Et les fieres agaises et les pendans rochers.
{Ih., 255, Hippeau).
Faire copper a ses frais touttes les rouisses, espines et argaises,
qui sont et seront aval le prêt a lui loué.
(1445. Valenciennes, ap La Fons. Gloss. ms,, Bibl. Amiens) ».
A Liège, on dit agâ, voy. le Dictionnaire de Grandgagnage, à St-
Hubert agôôch', f. pL, au sens de scîhiste, roche schisteuse. Les
exemples de Godefroy appuient parfuiteuicnt cette interprétation.
L'origine du mot n'est pas encore élucidée dans l'état actuel de la
dialectogie wallonne. Sous sa forme vieux-française, il manqqe dans
le dict. de Korting.
II
« EssAUPiR, V. n., s'enflammer » :
Aies l'eschaufent (le cœur) après et anbresent, et ses funt plux
malement essaupir et ardoir. {Li Epislre Saint-Bernard a Mont
Deu, ms. Verdun, 72, f» 34, v".) »
VARIÉTÉS 607
Ce mot ne signifie pas « s'enflammer ». C'est le même que « es-
COPIR. V. n., démanger », cité par Godefroy à un autre endroit. Wall,
de Liège haupi, de Couvin (prov. de Namur) chaupilli (suJï.-iller),
même sens. L'origine du mot n'est pas encore définitivement établie,
voy. KôRTiNG, Lat.'Voman. WorCerbuchj art. 2921.
III
« EsBLARÉ, adj., exprime la même idée que bouffi » :
Il se faut abstenir des viandes fort froides et humides, pour ce
qu'elles font le visage eshlaré et bouffi pour la quantité d'humeurs
phlegmatiques qu'elles engendrent (La Framboisière, Œuv., p. 199,
éd. 1631) ».
Ici encore Godefroy s'est trop laissé guider par le contexte. Le
mot existe en Wallon, par exemple à Couvin sblariy au sens delivide,
pâle. Cette signification convient parfaitement à l'unique exemple
mentionné. L'étymologie n'est pas élucidée : il convient peut-être de
faire un rapprochement avec l'ital. shiadito, pâle (dérivé comme shia-
(lato de blanc). Mais IV est difficilement explicable : elle pourrait être
parasite comme dans le fr. sureau (KôhTi'mG, art. 7055) et dans l'a.
fr. esbarir, ébahir, étonner (Godefroy). Le mot manque encore dans
KÔRTING.
Paul Marchot.
St-Hubert (Belgique).
UNE BÉVUE AMUSANTE
Faisant dernièrement une recherche dans les Archives historiques
de la Gironde, j'ai rencontré dans la table chronologique du tome
Xïl, l'article suivant, bien fait pour piquer la curiosité :
« 1483. Le tiers des manchots et des bossus périt cette année. »
Car pourquoi une telle mortalité sur ces malheureux ?
Or, recourant au texte indiqué, qui est la Chronique de Blaye,
voici ce que j'ai trouvé (p. 18) :
« En l'an m. iiii^ iiii***. m. courut en si grande persécution de
manchault et de bosse que bien le tiers du monde mourut. »
Où mauchauU, car c'est ainsi évidemment qu'il fallait lire, signifie
mal chaud, et bosse, peste, proprement bubon pestilentiel. Voyez
Du Canere, sous Morbus calidas et bossia.
ce.
BIBLIOGRAPHIE
Les Fables de La Fontaine, par A. Delboulle ^.
Il vient de paraître un utile complément à l'édition savante des
Fables de La Fontaine que la maison Hachette a publiée: M. Del-
boulle a réuni dans un petit livre (Paris, Bouillon, 1891) un certain
nombre de traits et de textes qui avaient échappé aux annotateurs.
Nous nous permettrons de faire, au courant de la plume, quelques
additions à son travail.
Pourquoi n'avoir pas glané le récit de l'aventure du Loup et de
l'A gneau"dtins le Par/e disgracié de Tristan qui imagine avec bon-
homie un dénouement moral? Ne fallait-il pas mentionner aussi l'al-
lusion faite par Bruscambille à la fable au Renard qui a la queue
coupée et à celle du Renard et du Corbeau, et le tour original que
le célèbre farceur donne à l'histoire du Pot de terre et du Pot de
fer^?
Une satire analogue à celle de la Grenouille qui veut se faire aussi
grosse que le bœuf on de la Montagne qui accouche est renfermée
dans ces vers de Corneille {Clitandre, A, III, se. 5):
IjO courroux d'une femme, impétueux d'abord,
Promet tout ce qu'il ose à son impétueux transport;
Mais comme il n'a pour lui que sa seule impuissance,
A force de j^rrossir il meurt en sa naissance,
Ou, s'étoull'ant lui-même, à la fm ne produit
Que peu ou point d'efl'et après beaucoup de bruit.
L'Homme entre deux âges (I, 17)
Avait du comptant
Et parlant
De quoi choisir; toutes voulaient lui plaire.
Les galants cavaliers de Joconde se fient, autant qu'à d'autres, à ce
moyen de conquête :
' * In-18. Paris, Kmile Bouillon.
2 Voir Revue des langues romanes^^^ série, t. XIII, p. 145, et t. XV,
p. 305, articlos de M. Riyfal).
BIBLIOGRAPHIE 609
Nous sommes beaux, nous avons de l'esprit ;
Avec cela bonnes lettres de change:
Il faudrait être bien étrange
Pour résister à tant d'appas,
Et ne pas tomber dans les lacs
De gens qui sèmeront l'argent et la fleurette.
Ce n'est pas la seule fois que La Fontaine s'imite lui-même. Com-
parez le Chêne et le Roseau (1, 22), et ce passage d'une lettre à sa
femme, où il parle des rampes qui descendent jusqu'au pied du château
d'Amboise : « Elles touchent ainsi que les chênes dont parle Virgile
d'un bout au ciel, d'autre bout aux enfers. »
Victor Hugo (Légende des siècles, 1" série, La trompelte du ju-
gement) repi'ésente par une image semblable un séraphin qui
Plongeait profondément sous les ténébreux voiles,
Du pied dans les enfers, du front dans les étoiles.
La fable de la Besace (I, 7) remet en mémoire ces lignes de Mon-
taigne (1. Ilï, ch. 8) : « Nos yeux ne voient rien en arrière: cent fois
le jour nous nous moquons de nous sur le sujet de notre voisin, et dé-
testons en d'autres les défauts qui sont en nous plus clairement et
les admirons d'une merveilleuse impudence et inadvertance *. »
Voyez encore sur ce point La Bruyère {des Jugements) :« Les mê-
mes défauts qui, dans les autres, sont lourds et insupportables,
sont chez nous comme dans leur centre ; ils ne pèsent plus, on ne les
sent pas. Tel parle d'un autre et en fait un portrait affreux qui ne voit
pas qu'il se plaint de lui-même. »
Ne saurais-je achever mon conte?
s'écrie le poète impatienté contre ceux qui ont le goût difficile (II,
1). ;Même indépendance de Perrault à l'égard de la critique dans la
lettre à M*** en lui envoyant Griselidis : «J'ai eu soin de corriger
les choses qu'on m'a fait voir être mauvaises en elles-mêmes; mais
à l'égard de celles que j'ai troJivées n'avoir pas d'autre défaut que de
n'être pas au goût de quelques personnes, peut-être un peu trop dé-
licates, j'ai cru n'y devoir pas toucher.
Est-ce une raison décisive
D'ôter un bon mets d'un repas,
Parce qu'il s'y trouve un convive
1 V. aussi cette fable de la Besace dans le livre de la Royale Prêtrise
de Pierre de Besse.
41
::!.- --?> « -ul*.
.:*— •■« ifurrages de T esprit, 26;:
_ .::: itf fwikBdît toai entier au mi-
. — ij: a. croire tous les censeurs
. * r. liu.çy^ A- IV, se. 5
i> -• ;-r lilrr peur
zjL-z zsJxrt^ une vaj»eiir.
- ^-. «_ _ r-. :li r T-. : «: 1:^ i -unait la fièvre.
; > . . __- - ■ ..s :. ■ ^- **r n:^ r&mi Téritable (VIII,
'. -_ ^. _-:- -I. r-:i_ i xt 1^ fait pfur
..j.ï.-cj î: ^.> .. .. .. .^-.." . '-r .••.-lI*--5^ 11,20 et les contes
,..ï.-..^..\ .--i^ . .. :-> ijLi* li -¥. 1 if.-vs I. 2, 541, sqq et t, 3, 141).
1,-. ..■.. -.. '..*.:-. .11. * cl Le p« lit conte de La Fontaine
:a;.;^-c L. ij»*,..-. . >= .>:>*c!r.:*-.:i: ijt Li fjrnie do trait final.
Nv* .' v..->.-:-.:i .i> , i«= :. .:r< !•?< n^iLi'il^s sont le privilège delà
1.-. . . ■ ; ^ --..rr: " uJT'. TJ : -Ut in^it *e l^irer
> »j>«»
ci ..V »ci;.x? Jt 5s.i-Ji;-c.'« r^nr^-jii .> ^i;?.'. i'.«^«
■>.-*.:....>::.:. Ti-;-<:. ; ^nl^-je t-n hérita j^e?
X -»- - ■ " • r^'lji *
K:i îtioutio J'.à.i:!c»,* ies 5e«i.L':d?ns w U mer sont le berger de La
Ko:t'w.i:ue IV. :.^ e; le iiiar-àduii ie Guez de Balzac .Entrelien VIU)
^^ l :i • a^vîo lioi!::!îe inf Si .île menait à Païenne une barque qu'il
a\.i.; criir-irvo vie ?U-es : :iiJL:> Avunt e:è surpris de l'orage à la vue du
j-.»:c, t. ;: ce .; i il v -:c l'iire fic ce se saiver en perdant sa barque.
i^uel;ue toiui's a: re<, ecaiit assis au Icrd de la mer, qui était si calme
et >L riauce quVlie seiii-.'laiC le clavier a un nouveau vovage : je sais
bien ce que tu veux» dit le Sicilien à la mer; tu demandes encore des
figues. "
BIBLIOGRAPHIE 611
Le dernier vers, dans le Cheval s'étant voulu venger du Cerf [lY^
13):
Quel que soit le plaisir que cause la rengeance,
C'est l'acheter bien cher que Tacheter d'un bien
Sans qui les autres ne sont rien,
semble être une réminiscence de Corneille {l'Illusion comique A
III, se. 8):
C'est trop prendre de soin pour empêcher ma perte,
dit un personnage, et Tautre de répondre :
Je n'en puis prendre trop pour assurer un bien
Sans qui tous autres biens à mes yeux ne sont rien.
II y a quelque parenté entre certain animal de la fable le Cochet,
le Chat et le Souriceau (VI, 6 ) et certains galants de VÉcole des
femmes (A. III, se. I):
De tous ces damoiseaux on sait trop les coutumes :
Ils ont de beaux canons, force rubans et plumes.
Grands cheveux, belles dents et des propos fort doux,
Mais, comme je vous dis, la griife est là-dessous;
Et ce sont vrais Satans, dont la gueule altérée
De l'honneur féminin cherche à faire curée.
Quîmper-Corentin est donné comme le plus détestable lieu dans
le Chartier embourbé (VI, 18) et dans les Mémoires chronologiques
pour servir à Vhistoire du clergé de 1600 à 1716: un jésuite ayant
désobéi anx ordres de sa Compagnie et mécontenté Tarcbevêque de
Rouen (1698), le P. Ayraut, vice-provincial, annonce au prélat la
punition du coupable : il est « envoyé à Kimper-Corentin . . . peine la
plus grande qu'il soit en mon pouvoir de lui imposer. »
Le mariage est pareillement déconseillé par \eMal marie (VII, 2) ;
J'ai vu beaucoup d'hymens; aucuns d'eux ne me tentent,
et par les Filles des Minée :
Fuyons ce nœud, mes sœurs, je ne puis trop le dire :
Jugez par le meilleur quel peut être le pire.
Les élèves ne comprenant pas, en général, dans la fable précitée,
l'expression quatre parts, il était nécessaire de la leur expliquer:
Cependant des humains presque les quatre parts
S'exposent hardiment au plus grand des hasards ;
Les quatre parts aussi des humains se repentent.
612 BIBLIOGRAPHIE
Quatre parts signifie les quatre cinquièmes; on entend toujours
quand il s'agit, comme ici, de la plus grande partie d'un tout, qu'on
n'en excepte qu'une seule division, et que le tout se compose de
toutes les parties nommées, plus une. C'est ce que prouvent les ex-
emples suivants :
Mais, Monseigneur, ce que demander j'ose
De quatre parts n'est pas si grande chose.
(Marot, ép. xliii. Au Dauphin du temps de son exil à Fçrrare);
Des trois les deux sont morts
(Corneille, Horace) ;
« des robes trop amples do quatre parties » (Pascal, art. III) ; « il
peut consulter les trois parties des écrits de nos plus grands hom-
mes » (Jurieu, Eclaircissement de quelques passages condamnés
dans Vexamen du livre de la réunion]) « peut-on trouver mauvais
que les évêques de France... ferment la porte à des livres qui tra-
vaillent à convaincre les trois parties des ecclésiastiques et des pré-
lats d'être des extravagants et des impies » (Jurien, VEsprit de
M, Arnaud).
La Fontaine parle plaisamment dans cette fable
De certaines Philis qui gardent les dindons.
Dans une lettre à sa femme, il poétise aussi des femmes sordides
en les nommant « Phillis d'Egypte. »
Dieu prodigue ses biens
A ceux qui font vœu d'être siens,
écrit La Fontaine d'un air libertin dans le Rat retiré du monde
(VII, 3). Cette vérité, Bossuet la prêche du ton le plus grave dans le
Sermon sur Vambition (rédaction de 1666) : « Et ce prince (Josaphat)
s'agrandissait tous les jours, parce que Dieu était avec lui ; tant il
est vrai que Dieu prend plaisir à protéger la puissance qui lui rend
hommage et qu'il est le rempart de ceux qui le servent. »
Les choses d'ici-bas ue me regardent plus,
prétexte doucement le solitaire pour ne pas écorner son avoir.
Tous les biens de ce monde ont pour moi peu d'appas,
soupire Tartuffe pour arrondir le sien en captant celui d'Orgon.
Enfin nous avons beau être avertis qu'il s'agit dans cette fable d'un
BIBLIOGRAPHIE 613
dcrvis et non d'un moine, elle nous fait penser aux vers de Rutebeuf
contre ces dévots personnages
Qui vivent des biens du Seigneur.
Tls n'en doivent, selon la Bible,
Prendre que le suffisant vivre,
Et pour tout le reste humblement
Ils devraient, comme biens communs,
Aux pauvres gens le départir;
Mais ils verront briser le cœur
Du pauvre, par maie aventure,
Par grand faim et par grand froidure,
Quand chacun a chape fourrée,
Et de deniers de grandes bourses,
Ses pleins coffres, la pleine huche.
il est riche du bien de Dieu,
Et Dieu n'en peut aumône avoir.
(Vers cités par M. Clédat dans son récent livre sur Rutebeuf. Paris,
Hachette, 1891).
Apres les Souhaits (Vil, 6), après Jupiter et le Métayer {Y,4)y
on relit encore avec plaisir le conte de Perrault, les Souhaits ridi'
cules, et Ton en tire la même moralité.
Dans la seconde lettre à sa femme, La Fontaine avait esquissé, en
prose, quelques traits de son récit poétique le Coche et la Mouche
(VII, 9) :« Dieu voulut enfin que le carrosse passât : le valet de pied
y était ; point de moines, mais en récompense trois femmes, un mar-
chand qui ne disait mot, et un notaire qui chantait toujours et qui
chantait très-mal : il reportait en son pays quatre volumes de chan-
sons. » Au bas d'une montagne, « tout ce que nous étions d'hommes
dans le carrosse, nous descendîmes afin de soulager les chevaux.»
Gens d'église et femmes formaient la compagnie que d'ordinaire on
rencontrait en voyage ; c'est ce que nous apprend à son tour Jean
Rou, dans un passage de ses Mémoires (t. II, p. 321): il est ques-
tion des barques de la Loire, « qui, aussi bien que les coches et les
carrosses sont toujours plus remplis de femmes et de prêtraille que
d'autre sorte de gens. »
A l'épilogue de la Laitière et le Pot au lait (VII, 10):
Qui ne fait châteaux en Espagne?
Chacun songe en veillant, etc.
reliez ces mots que Vergier en souriant écjivait à La Fontaine et
qui dépeignent le poète : « Vous êtes le premier homme du monde
614 BIBLIOGRAPHIE
pour faire des châteaux en Espagne, et puisque vos rêveries sont si
agréables, je ne m'étonne plus que vous vous y plaisiez. » Bossuet
lui-même fournit un beau commentaire des réflexions dont La Fon-
taine fait suivre cette fable et les deux Chiens et l'Ane mort (VIII,
25) : « L'espérance dont le monde parle n'est autre chose, à le bien
entendre, qu'une illusion agréable ; et ce philosophe l'avait bien
compris, lorsque ses amis le priant de leur définir l'espérance, il leur
répondit en un mot: « C'est un songe de personnes qui veillent:»
Somnium vigilantium. Considérez, en effet, Messieurs, ce que c'est
qu'un homme enflé d'espérance. A quels honneurs n'aspire-t-il pas ?
Quels emplois, quelles dignités ne se donne-t-il pas à lui-même? 11
nage déjà parmi les délices, et il admire sa grandeur future. Rien ne
lui paraît impossible : mais lorsque, s'avançant dans la carrière qu'il
s'est proposée, il voit naître de toutes parts des difficultés qui l'ar-
rêtent à chaque pas, lorsqueja vie lui manque, comme un faux ami
au milieu de ses entreprises ou que, forcé par la rencontre des cho-
ses, il revient à son sens rassis, et ne trouve rien en ses mains de
toute cette haute fortune dont il embrassait une vaine image, que
peut-il juger de lui-même , sinon qu'une espérance trompeuse le
faisait jouir pour un temps de la douceur d'un songe agréable? Et
ensuite ne doit il pas dire, selon la pensée de ce philosophe, que l'es-
pérance peut être appelée « la rêverie d'un homme qui veille. » Som^
nium vigilantium? »
Perdait-on un chiffon, avait-on un amant ?
.... chez la devineuse on courait
Pour se faire annoncer ce que l'on désirait.
(Les Devineresses (VII, 15.)
Ainsi fait le personnage du Florentin, se. 8, v. 388-89:
Il voulut consulter une devineresse
Pour voir s'il serait seul maître de mes appas.
Ajoutez à la note de l'édition Régnier sur le mot méchant, dans le
Rieur et les poissons (VIII, 8), un renvoi à l'histoire de ce terme, que
M. Revillout a insérée dans la Revue des Langues romanes (3® série,
t. XV, p. 77).
Ce tableau encadré dans le Rat et V éléphant (VIII, 15) :
Sur l'animal à triple étage,
Une sultane de renom,
Son chien, son chat et sa guenon,
Son perroquet, sa vieille et toute sa maison
S'en allait en pèlerinage,
BIBLIOGRAPHIE 615
La Fontaine n'en a-t il pas fait comme un premier crayon dans
cette lettre à sa femme (lett. 4) où est décrit un cortège de « héros
gusraanesques », accompagnés de quelques « Phillis d'Egypte
traînant après elles des douegnas détestables à^iroportion. . . Le ba-
gage marchait en queue, partie sur chariots, partie sur bêtes de somme;
puis quatre carrosses vides et quelques valets à l'entour,
Non sans écureuils et turquets (1),
Ni, je pense, sans perroquets. »
Malgré les protestations de La Fontaine dans VHoroscope (VIII,
16) et dans les derniers vers de V Astrologue qui se laisse tomber
dans un puits (II, 13j :
Charlatans, faiseurs d'horoscope.
Quittez les cours des princes de l'Europe,
ses contemporains faisaient grand état de l'art de prédire. Mazarin
avait donné l'exemple de cette superstition. La comtesse de Soissons,
dont le jeune roi s'était épris, avait cru pouvoir aspirer au trône ; Ma-
zarin, « son oncle, qui l'aimait fort, n'avait pas été éloigné du dessein
de l'y faire monter ; mais tous les faiseurs d'horoscope l'avaient tel-
lement assuré qu'elle ne pourrait y parvenir, qu'il en avait perdu la
pensée et l'avait mariée au comte de Soissons. 9 (Vie d'Henriette
d'Angleterre par Mme de La Fayette.)
Le XVII* siècle a connu le métier de couturier. Le gros bourgeois
(rAvantage de la science, VII, 19) se vantait d'enrichir
Celui qui fait la jupe
Et celle qui la porte.
Une des femmes compromises dans l'enquête de l'affaire des poi-
sons, M™e Vigoureux, était mariée précisément à un « tailleur d'habits
de femme. «
Le dédain du financier de La Fontaine (même fable) pour les sa-
vants :
Ils sont toujours logés à la troisième chambre,
était professé et motivé de même au XVIII® siècle par le maréchal de
Castries qui s'écriait avec indignation : « Mon Dieu ! partout où je
vais, je n'entends parler que de ce Rousseau et de ce Diderot. Con-
çoit-on cela? Des gens de rien, qui n'ont pas de maison, qui sont
logés au troisième étage ! »
(1) Petits chiens.
G16 BIBLIOGRAPHIE
A propos de la fable Le Dépositaire infidèle (IX, l)et des hâbleurs
dont chaciiD a vu plus gros que l'autre pourraient être citées partie de
la lettre du 15 juillet 1G71, où Mme de Sévigné se moque si joliment
d'une « exagéreuse >», et cette anecdote prise dans Talleraant des
Réaux : • Un chevalier menteur disait avoir vu une église de mille
pas de long : son valet voulant l'interrompre par un démenti, il dit
aussitôt pour raccommoder la chose : et deux de large. Comme il vit
qu'on riait: C'est ce coquin qui en est cause, savs lui je Tallais faire
carrée. »
Dans VEcolier le pédant et le maître d\in jardin (IX, 5), La Fon
taine s*anime contre
le privilège
Qu'ont les pédants de gâter la. raison ^
Marot (ép. 43) malmène aussi fort ses maîtres :
En effet c'estoient de grans bestes
Que les régens du temps jadis.
N'est-ce pas comme une ébauche de Jupiter et le passager (IX,
13) que ce récit de La Fontaine à sa femme (lett. 3) : « J'avais pro-
mis de sacrifier aux vents du midi une brebis noire, aux zéphirs, une
brebis blanche et à Jupiter, le plus gros bœuf que je pourrais rencon-
trer dans le Limousin ; ils nous furent tous favorables. Je crois, tou-
tefois, qu'il suffira que je les paie en chansons, car les bœufs du Li-
mousin sont trop chers, et il y en a qui se vendent cent écus dans le
pays. » Rapprochez de la même fable cette lettre de Nicaise à Huet
(l*^»" août 1697. Documents inédits publiés par L'-G. Pélissier) : « 11
(Santeuil) ne se souviendra plus de nous, lorsqu'il sera à Paris, et
qu'on lui aura donné ce qu'il demande : du vin et de l'argent. Il sera
comme ceux qui ont reçu des grâces d'un saint et qui, après avoir
échappé au péril, s'en moquent : passato il pericolo, garbato il
santo. »
Sans ressembler le moins du monde à Raton, La Fontaine n'a-t-il
pas été joué par Lulli, comme Raton par Bertrand ? (IX, 16.) Le mu-
sicien avait proposé au poète de faire de concert un opéra:
Voici comment il nous faudra
Partager le gain de l'affaire.
Nous en ferons deux lots, l'argent et les chansons :
L'argent pour moi, pour toi les sons ;
Tu t'entendras chanter, je prendrai les testons;
Volontiers je paye en gambades,
J'ai huit ou dix trivelinades
BIBLIOGRAPHIE 617
Que je sais sur mon doigt ; cela joint à l'honneur
De travailler pour moi, te voilà grand seigneur.
Peut-être n'est-ce pas tout à fait sa harangue:
Mais s'il n'eut ces mots sur la langue,
Il les eut dans le cœur. Il me persuada.
Même répugnance à admettre rautomatisme des bêtes dans le
Discours à M^- de La Sablière, les Deux Eats^ le Renard et l'œuf
(fin du livre IX), et la lettre de ]VP^® de Scudéry à M^'c Descartes
(éd. Rathery) :« Ma croyance en faveur de mon chien n'ôte rien de
l'estime infinie que j'ai pour feu M. votre oucle. Ce n'est pas l'ami-
tié que j'ai pour les animaux qui me prévient à leur avantage, c'est
celle qu'ils ont pour moi qui me prévient en leur faveur. »
Voyez encore cette lettre à Huet: « Il y a longtemps que je me
suis déclarée contre certaines machines extérieures, sans employer
pourtant contre le philosophe que mon chien, ma guenon et mon per-
roquet. »
Ajoutez l'épitaphe de la petite chienne de M^^« de Scudéry :
Ci-gît la célèbre Badine,
Qui n'eut ni beauté ni bonté,
Mais dont l'esprit a démonté
Le système de la machine.
Aux exemples énumérés par La Fontaine, joignez aussi celui que
rapporte son presque homonyme Fontaine dans ses Mémoires sur
Port-Royal (t. 11, p. 470) : « M. Arnauld, qui était entré dans le sys-
tème de Descartes sur les bêtes, soutenait que ce n'était que des
horloges M. de Liancourt lui dit : « J'ai là-bas deux chiens qui
tournent la broche chacun leur jour ; l'un s'en trouvant embarrassé se
cacha lorsqu'on l'allait prendre, et on eut recours à son camarade
pour tourner au lieu de lui. Le camarade cria et fit signe de la queue
qu'on le suivit. Il alla dénicher l'autre dans le grenier et le houspilla.
Sont-ce là des horloges? dit-il à M. Arnauld, qui trouva cela si plai-
sant qu'il ne put faire autre chose que d'en rire. »
Bossuet [Sermon sur les démons, 1653) sert une nouvelle fois à
commenter La Fontaine : « Et de même que ce qui nous paraît quel-
quefois de si subtil et si inventif dans les animaux n'est qu'une om-
bre des opérations immortelles de l'intelligence des hommes, ainsi
pouvons nous dire en quelque sorte que les connaissances humaines
ne sont qu'un rayon imparfait de la science de ces esprits purs dont
la vie n'est que rayon et intelligence. »
Consultez enfin l'ouvrage de Meunier sur les Animaux perfecti-
bles et celui de Romanes sur rintcllir/'?nce des animaux.
«18 BIBLIOGRAPHIE
I>a piquante histoire du berger devena ministre et de sa disgrâce
'X, 0; invite à se défier de la faveur des rois. Avec plus de force en-
core, Bossuet met en garde contre les dangers de la cour par le ta-
bleau qu'il en fait dans le premier panégvriqîie de Franc :)is de Paale:
t' La cour qu*il a surmontée a des flammes plus dévorantes, elle a des
écueiU plus dangereux ; et bien que les inventions hardies de Tex-
preuion poétique niaient pu nous représenter la mer de Sicile si
horrible que la nature Ta faite, la cour a des vagues plus furieuses,
des abimes plus creux et des tempêtes plus redoutables. Comme c'est
de la cour que dépendent toutes les affaires et que c'est aussi là
qu'elles aboutissent, Tenncmi du genre humain y jette tous ses appas,
y étale toute sa pompe. Là est Tempire de l'intérêt ; là est le théâ-
tre des passions ; là elles se montrent les plus violentes; là elles
«ont les plus déguisées. Voici donc François de Paule dans un nou-
veau monde. Il regarde ce mouvement, ces révolutions, cet empres-
sement éternel, et uniquement pour des biens périssables et pour une
fortune qui n'a rien de plus assuré que sa décadence; il croit que
Dieu ne l'a amené en ce lieu que pour connaître mieux jusqu'où se
peut porter la folie des hommes. »
L'explication du mot drille dans le Fermier, le Chien et le Re^
nard (XI, 3):
On vous sangla le pauvre drille
est savamment donnée par M. Revillout dans la Revue des langues
romanes (t. 2, p. 38).
Voyez aussi les vers en ille, où M""' Deshoulières parle du
divin drille
Qui vient, au sortir des combats,
Se délasser entre tes bras.
Et enfin relisez dans le Roman comique de Scarron (2® partie,
ch. VI) ces lignes sur un homme qui revient dans son village après
avoir longtemps porté les armes : « Ses cheveux de drille plus longs
que ceux des autres paysans du village, ses serments à la soldate. . .
et une vieille épée rouillée qui lui battait de vieilles bottes,
donnèrent dans la vue d'une vieille veuve qui tenait rhôtellerie. »
11 ne faut point juger des gens sur l'apparence, La Fontaine nous
on avertit dans Le Paysan du Danube (XI, 7) et Pline dans la lettre
25 du liv. Vil : « Sunt enim ut iu castris sic etiam in litteris nostris
plures cul ta pagano, quos cinctos et armatos, et quidem ardentis-
simo ingcnio, diligenter scrutatus invenies. »
Le sentiment de la vie universelle se ti'aduit dans l'épilogue du
livre XI dos Fables,
BIBLIOGUAPHIE 619
Car tout parle dans l'univers ;
Il n'est rien qui n'ait son langage,
et dans le Pâtre et le Lion (VI, I) et non moins dans ces vers de
Victor Hugo [l'Art d'être grand-père, IV, 2) :
Les bêtes, cela parle
C'est dans Perrault un fait, dans Homère un prodige ;
Phèdre prend leur parole au vol et la rédige ;
La Fontaine, dans l'herbe épaisse et le genêt
Rôdait, guettant, rêvant, et les espionnait ;
Esope, ce songeur bossu comme le Pinde,
Les entendait en Grèce, et Pilpaï dans l'Inde,
Les clairs étangs le soir offraient leurs noirs jargons
A monsieur Florian, officier de dragons ;
Et l'àpre Ézéchiel, l'affreux prophète chauve,
Homme fauve écoutait parler la bête fauve.
Les animaux naïfs dialoguent entre eux.
Et toujours, que ce soit le hibou ténébreux.
L'ours qu'on entend gronder, l'àne qu'on entend braire,
Ou l'oie apostrophant le dindon son grand-père.
Ou la guêpe insultant l'abeille sur l'Hybla,
Leur bêtise à l'esprit de l'homme ressembla.
L*exeraple d'Harpagon tendant un piège à Cléante pour savoir s'il
aime Mariane ei la lui refusant prouve, comme le Chat et le vieux
Rat (XII, 6), que
La vieillesse est impitoyable,
surtout celle d'un avare.
Au commentaire de la fable le Renard, les mouches et le hérisson
(XII, 13) s'ajouterait tout naturellement ce passage d'une lettre de
P. Bayle à Minutoli (éd. Gigas. Paris, Didot, 1890): «Je quitte un
chicaneur pour me sauver de son impunité, et je me jette entre les
bras d'un opiniâtre qui me fit cent fois plus de mal que n'aurait fait
le chicaneur. Je me repens encore de n'avoir pas imité ce gueux qui
avait la main effroyablement galeuse et qui ne chassait pourtant point
les mouches qui y venaient faire curée, parce que, disait-il, s'il les
eût chassées, il en serait venu d'autres à jeun, et l'auraient plus tour-
menté » (17 sept. 1674).
A la fin de la fable le Corbeau, la gazelle, la tortue et le rat
(XI r, 15) La Fontaine distingue /'amii/e violente de Ta mowr. Cepen-
dant il ne laisse pas de parler de son amitié violente à Mme Uhrich,
qui lui avait inspiré une forte passion, bien qu'il eût passé le temps
d'aimer.
620 BIBLIOGHAPIIIE
Après l'éloge de l'amitié par La Fontaine (môme fable et les
Deux amis, VIII, 11), écoutez les belles paroles deCicéron sur ce
sujet : « quid dulcius qnam habere quicum omnia audeas sic loqui ut
tecum, etc » (de Amicilia, ch. VI).
Le sage que met en scène le poète dans le Philosophe scythe (XII,
20)
De SCS arbres à fruit retranchait l'inutile,
Ebranchait, émondait, ôtait ceci, cela,
Le reste en profite d'autant :
Le chrétien ne perdra pas à se régler sur ce modèle, témoin Bos-
suet [Sermon sur la soumission à la loi de Dieu, 1666) . « Celui-là est
un homme fait et un véritable sage qui, comme dit le docte Synésius,
ne se fait pas une obligation du soin de contenter ses désirs, mais qui
sait régler ses désirs suivant ses obligations, et qui, sachant peser
mûrement combien la nature est féconde en mauvaises inclinations,
retranche de çà et de là, comme un jardinier soigneux, tout ce qui est
gâté et superflu, afin de ne laisser croître que ce qui est capable de
porter les fruits d'une véritable sagesse.
» Mais les arbres ne se plaignent pas quand on les coupe pour re-
trancher et diminuer l'excès de leurs branches, et la volonté réclame
quand on retranche ses désirs. »
A la vérité La Fontaine ne s'accordait pas avec Bossuet sur les
passions à retrancher; l'amour lui semblerait singulièrement bon à
garder, pourvu qu'il n'apportât pas trop de trouble dans l'âme.
La comparaison qui se trouve chez le prédicateur et chez le fabu-
liste avait été faite en 1665 dans une oraison funèbre du roi d'Espagne:
*c M. l'évêque de Mâcon, ci-devant le Père Le Boultz, évêque d'Acqs,
l'avait loué de prudence d'avoir retranché une partie de ses
états pour conserver le reste, et l'avait comparé à un jardinier qui
coupait les branches superflues d'un arbre pour le rendre plus beau.»
[Journal d'Olivier d'Ormesson,t. II, p. 411. Édit. Chéruel.)
Comme le poète, Vauvenargues(voir VÉlude de Paléologue, p. 105),
dans une lettre à Mirabeau, tient les passions pour le principe de
toute activité: « C'est une folie de les combattre, car la vie sans pas-
sions ressemble à la mort, et je compare un homme sans passion à
un livre de raisonnements: il n'a pas la vie en lui, il ne sent point,
il ne jouit de rien, pas même de ses pensées. »
Puisqu'il s'agissait de compléter l'édition Régnier, peut-être M. Del-
boulle eut-il bien fait de recueillir les exemples que nous avons cités.
Mais les livres comme le sien sont toujours susceptibles d'être aug-
mentég, et c'est un défaut à éviter que de les farcir de détails oiseux.
CHRONIQUE 621
M. Delboulle, aussi heureusement servi par son goût que par son
érudition, a présenté à ses lecteurs plusieurs textes peu connus, cu-
rieux, intéressants et propres à faire plus justement apprécier par la
comparaison les fables de La Fontaine.
Gaston Rabaud.
CHRONIQUE
L'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, dans sa séance du
28 mars 1890, a décerné le prix Jean Keynaud, le plus considérable de
ceux dont elle dispose, à Frédéric JMistral, pour son dictionnaire pro-
vençal-françîiis, Lou Trésor dôu Felibrige. Félicitons l'Acadéniie
d'une décision qui l'honore. Mais combien plus ne s'honorerait-elle pas
eu appelant dans son sein l'érudit et le philologue qu'elle a couronné,
et en donnant ainsi un exemple et une leçon à l'Académie française,
qui s'obstine à traiter le poëte de Mlrèio et du Tambour iVArcole
comme un étranger?
Nous sera-t-il permis d'exprimer, à propos du Trésor du Felibrige,
puisque l'occasion s'en présente, le vœu de voir publier à l'usage des
étudiants, et en général du grand public, un abrégé de cet admirable
répertoire, dans le genre de celui qu'on a fait du dictionnaire de Lit-
tré ? On pourrait, pensons-nous, en sacrifiant la plus grande partie des
exemples, et peut-être un certain nombre de mots d'un caractère sur-
tout scientifique, dont leur ressemblance avec le français assure l'intel-
ligence immédiate, condenser l'indispensable en un volume grand
in-8", d'un prix abordable aux petites bourses. Il y a tant à apprendre
dans le Trésor, et nos études peuvent en retirer un si grand profit
que tous nos lecteurs, nous n'en doutons pas, comme tous les roma-
nistes, s'associeront au vœu que nous prions ici notre cher maître de
vouloir bien réaliser. C'est un lieu commun chez les anciens poètes
provençaux qu'un trésor caché est un trésor perdu. Or n'est-ce pas un
trésor caché aux yeux des neuf dixièmes de ceux qui auraient besoin
d'y puiser, que celui dont on ne peut approcher qu'au prix d'un sacri-
fice pécuniaire que leurs ressources leur interdisent ?
o
o o
L'Aibli, tel est le titre d'un journal provençal, fondé par Frédéric
Mistral, et auquel nous souhaitons longue vie et prospérité. Ce journal
doit paraître trois fois par mois à partir du 7 janvier 1891 .
« 11 coûtera lOfr. par an et aura pour directeur M. Folco de Baron-
celli et pour collaborateurs les meilleurs écrivains de la renaissance
provençale.
y^liAibli, indépendant de tous les partis, n'aura d'autre programme
que le maintien et la défense de la cause du Midi, de ses coutumes, de
sa langue, de ses traditions ethniques, et même de ses intérêts, il
sera loyalement, gaiement autant que possible, un redresseur de torts,
le chevalier de la Reine Jeanne et de la Belle Maguelone. »
Et puisqu'il est question de la Reine Jeanne, n'oublions pas d'ins-
622 CHRONIQUE
dire ici la bonne nouvelle de la publication, si impatiemment attendue,
de la tragédie la Rèino Jano (l^aris, Alphonse Lemerre. petit în-8®).
Ce beau poëme dramatique de Tauteur do Calendal sera d'ailleurs
l'objet d'un compte -rendu détaillé, de la part d'un de nos collabora-
teurs, dans un des prochains numéros de la Revue,
o
o o
Almanach'Anyiuaire limousin 1891. Limoges, H. Ducour-
tieux, inl2. Cet almanach, outre les renseignements administratifs,
commerciaux et autres, que l'on demande aux publications pareilles,
contient sous le titre général de Partie historique, des travaux de
genres variés, dont plusieurs sont de nature à intéresser nos lecteurs.
{Signalons en premier lieu un article plein d'attrait de M. C, Leymarîe
sur les chansons rustiques du Limousin (pp. 144-172), qui fait vive-
ment désirer que l'auteur, comme il en manifeste d'ailleurs le dessein,
reprenne un jour ce beau sujet pour le traiter avec l'ampleur qu'il
mérite. On y lira encore avec profit, p. 103-108, un bon chapitre d'his-
toire de M, Louis Guibert, intitulé les Syndics de commerce à Li-
moges ^ et p. 118-126, des considérations pleines de justesse de
M. Leroux sur la situation géographique de Limoges et ses consé-
quences. Mentionnons de plus, p. 133, un conte en patois signé Ma-
nicou et intitulé l'Étang du lait (VEitan dôu la),
c
o o
Almanach' Annuaire de la Creuse. 1891. Guéret, Pierre Lestang,
in-12. — Dans la partie littéraire et scientifique de cet almanach
(pp. 129-176), nous avons à signaler et à recommander tout particu-
lièrement un conte en patois d'Aliun, signé de notre collaborateur
M. le docteur Vincent, et qui a pour titre le Mearle dou Carnavas.
Mentionnons, en outre, une chanson patoise anonyme intitulée lou
choix dUn gendre (p. 153).
Errata des deux numéros précédents
P. 213, 1. 22, lire clxxii[ij].
P. 213, l 23, lire clxxxiQ].
P. 216,1. 26, a 405 »; lis. 4505.
P. 218, 1. 34, rétablir sa et supprimer la note.
P. 220, n. 2. 1. 3, mettre un? après t.
P. 222, p. 1. 146, rétablir sa et suppr. la note.
P. 232, 1. 65, lis. laudans : Qui facit. . .
P. 231, 1. 46. Lire ve et supprimer la note.
P. 231, 1. 71, lis. crestian,
P. 231, 1. 74, lis. crestians.
P. 243, 1 241, lis. drechura.
P. 246, 1. 246, virgule après concordia,
* Nous y voyons, p. 107, que la grande salle du tribunal était (Pest-
elle toujours?) « dénommée la Cati de la Bourse. » M. Louis Guibert
écrit encore ainsi le môme mot à la page suivante. C'est au substantif
masculin acamp (assoml)l<''c) que l'on a ici aiiaire. Il faudrait donc
écrire Vacan,
EAItATA. 623
P. 249, 1. 136, Us. que soi.
P.254, !. 315, lis. iiiisctia.
P. S56, I, 19, rétablir ja, et auppr. la noie.
P. 250, 1. 26, : ■■ apostot ••; auiiprimer la note.
P. 257, i. 49, lis. ho», lo[s].
P. 261, 1. 207, virgule api'ès/'aA.
P. 265.1. 301, Us. delipes.
F. 267, 1. 26, lis. que ve, et auppr. la note 3.
P. 270, 1. 50, "dix )i ; lis. dis.
P. 270, 1.57, lis. emniix.
P. 271, l. 92,118. Sennor. et.
. P. 272, 1. lOO, Us. désira», car.
P. 272, I. 106, lis. le guixardos .
P 273,1. ICIÎ. lis. noslre.
P. 278, 1. 347, lis. lieu «tarlir.
P. 280, 1. 415, lia. caiil o.
P. 280,1 3, lia. moulas.
P. 281,1. 22, lia. fous.
P. 281, note, après " Coir. «. ajouter:., (ou siip|.l.ï] «.
P. 282, 1. 47, lis. annavan.
P. 282, I. 70, lis. tnanjar.
P. 285, 1. 29, lia. anz.
P. 286, Il [xiii] ». Supprimer les ciochels.
P. 287, I. 6, lis. meili o.
P. 288, 1. 62. lis. mortslreron.
P. 289, 1. 83, lis. sei-an.
P. 298, 1. 101, Us. enpreinnada.
P. 3.^6,1. 20, lis. la tei-ilal.
P. 357, 1. 25, lis. etaqui
P. 360, I. 133, lia. don.
V. 362,1. 213, lis. d'eh.
F. 362, 1. 231, lis. que ne et suppr. la note.
P, 3T7,1. 23, lis. delà
P. 379, 1. 31, lis. preffuali.
P. 380,1. 78, lia. salut.
P. 381, I, 131'. lis. aguilh).
P. 386,1. 307, lU. irai.
P. 390, 1. 468, Us. casuk ... luhg.
V. 392,1. 521, lia. ad orar.
P. 397, 1, 182, lia, canlac.
P. 40O. Tous les nombres placés en marge doivent être abaissés
d'une ligne.
F. 404, l. 69. lis. venc.
P. 405, i. 83, lis. ques tan.
P. 406, 1. 115, lis.fleu en.
P. 418,1. 603, lis. unjorn.
P. 422, 1. 747, lis. solamenl.
Le Gérant responsable : E, Hamelin.
TARLK r)I']S MATII^RKS
DU TOMK yU.VTRIKMIi: DE LA yUATKIKME SÉRIE
(XXXIV DR LA COLLErnON)
Pages.
Carl Appel. — Poésies provençales inédites tirées des manus-
crits d'itîdîe. 5
CuARLES lUuBiER. — Le Libre de Memorias de Jacmo Mas-
caro. 37, 515
J.-P. Durand, — Notes de philologie rouergate {suite). 101
H. Bailleul. — Deux poésies en patois normand. 110
G. Spmra. — 11 pane di Amore. 116
A, MiR. — Lou pourqufft de lait. 110
K Danikl-(îra\d. — Congrès de philologie romane. 125
0. Chaiîankau et G. UiCYXAUD. — Légendes pieuses en pro-
vençal. 200,805
Paul m.vkciiot. — Étymologies liégeoises. 42(3
L.-G. Pellssikr. — Variantes du texte des Remontrances do
Monier de Chatt-andcuil. 4)U
Ch. Hevillout. — La légende deBoiloau. 440
Kaimiîaud. — Ourdounanço de pouliço de San ^îartin de Grau. 5'''i5
A. IhiissAUD. — Contes populaires de l'AgL-nais. 505
G. Speka. — P>eatrice Portinari. — A Dante Alighieri. —
Ik^atriee e Laura. — Italia e Francia. 501
F. Donnadieu. — Dante e Beatrix. 500
VAIUÉTÉS
A. Blanc. — Canapé. 438
L. CoNSTANS. — Atalante et llippouiène. * 000
Vicomte de Collkvilm:. — Usage i\\\ Comté de Nice. ()()4
Paul Marciiot. — Corrections au dictioniuiire de (îodefro5\ (îOG
C. C. — Une Bévue amusante. G07
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Chronique. 180. «'.21
Errata. 44K, 622
MOMPtLLIER, rMPRIMEniK CEIS'TnALE DU .MIUI. — HA.MELIN FKÈitES.
/ .