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| ῳ Δ΄
4
Barbard College Library
FROM THE
CONSTANTIUS FUND
Established by Professor E. A. SoPnocLas of Harvard
University for “ the purchase of Greek and Latin
books, (the ancient classics) or of Arabic
books, or of books illustrating or ex.
plaining such Greek, Latin, or
Arabic books.” (Will,
dated 1880.)
REVUE
DES
ÉTUDES GRECQUES
Les réunions du Comité ont lieu à l'École des Beaux-Arts, à quatre heures, le
premier jeudi non férié de chaque mois; tous les membres de la Société ont le
droit d'y assister et ont voix consultative. Elles sont interrompues pendant les
mois d'août, de septembre et d'octobre.
L'Assemblée générale annuelle a lieu le premier jeudi qui suit la fête de
Pâques. .
La bibliothèque de l'Association (42, rue de l'Abbaye) est ouverte le jeudi
de 3 h. 1/2 à 4 h. 1/2, et le samedi de 2 à 5 heures.
Les communications à l'Association, les demandes de renseignements, les
ouvrages offerts à la bibliothèque doivent être adressés, franc de port, à
l'École des Beaux-Arts, 14, rue Bonaparte.
Les manuscrits destinés à la Revue ainsi que [65 ouvrages envoyés pour
compte rendu doivent être adressés à M. Théodore Renaca, rédacteur en chef
gérant de la Revue, librairie Leroux, 28, rue Bonaparte.
Les membres de l'Association sont priés de bien vouloir envoyer le montant de
leur cotisation, en un mandat de poste, à M. Henri LeBèGus, agent bibliothécaire
de l'Association, 12, rue de l’Abbaye, vie.
Tout membre qui, après deux ans, n'aura pas payé sa cotisation, sera consi-
déré comme démissionnaire.
REVUE
DES
ÉTUDES GRECQUES
PUBLIÉE PAR
L'ASSOCIATION POUR L'ENCOURAGEMENT DES ÉTUDES GRECQUES
(Rocemnue établissement d'utilité publique par décret du 7 juillet 1869)
TOME XVI
ANNÉE 19083
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
28, RUE BONAPARTE, VI°
1903
| HCROFILMED
T HARVARD
ASSOCIATION
POUR L'ENCOURAGEMENT
DES ÉTUDES GRECQUES
EN FRANCE ©
τ
᾿ς 4
(Reconnue établissement d’utilité publique
SR MBRILCE ve
par décret du 7 juillet 1869). — ——_—_— '- ΄
STATUTS
81. OBJET DE L'ASSOCIATION.
Art. 4“. L'Association encourage la propagation des meilleures
méthodes et la publication des livres les plus utiles pour le pro-
grès des études grecques. Elle décerne, à cet effet, des récom-
penses,
2. Elle encourage, par tous les moyens en son pouvoir, le zèle des
maitres et des élèves.
3. Elle propose, s’il y a lieu, des sujets de prix.
À. Elle entretient des rapports avec les hellénistes étrangers.
5. Elle publie un annuaire ou un bulletin, contenant l'exposé
de ses actes et de ses travaux, ainsi que l'indication des faits et
des documents les plus importants qui concernent les études grec-
ques.
ὃ IT. NOMINATION DES MEMBRES ET COTISATIONS.
6. Le nombre des membres de l'Association est illimité. Les
Français et les étrangers peuvent également en faire partie.
7. L'admission est prononcée par le Comité, sur la présentation
d'un membre de l'Association.
8. Les cinquante membres qui, par leur zèle et leur influence, ont
particulièrement contribué à l'établissement de l'Association, ont le
titre de membres fondateurs.
— li —
- . Q.Le taux de la cotisation annuelle est fixé au minimum de
.dix francs.
= 40. La cotisation annuelle peut être remplacée par le payement,
une fois fait, d'une somme décuple. La personne qui a fait ce verse-
sement reçoit le titre de membre donateur.
8 III. DIRECTION DE L'ASSOCIATION.
41. L'Association est dirigée par un Bureau et un Comité, dont le
Bureau fait partie de droit. |
12. Le Bureau est composé de :
Un Président,
Deux Vice-Présidents,
et de au moins :
Un Secrétaire-Archiviste, .
Un Trésorier.
Il est renouvelé annuellement de la manière suivante :
41° Le Président sortant ne peut faire partie du Bureau qu'au bout
d’un an;
2° Le premier Vice-Président devient Président de droit;
3° Les autres membres sont rééligibles ;
4° Les élections sont faites par l'Assemblée générale, à la plura-
lité des suffrages.
43. Le Comité, non compris le Bureau, est composé de vingt et un
membres. Il est renouvelé annuellement par tiers. Les élections
sont faites par l'Assemblée générale. Les sept membres sortants ne
sont rééligibles qu'après un an.
44. Tout membre, soit du Bureau, soit du Comité, qui n'aura pas
assisté de l’année aux séances, sera réputé démissionnaire.
45. Le Comité se réunit régulièrement au moins une fois par
mois. Il peut être convoqué extraordinairement par le Président.
Le Secrétaire rédige les procès-verbaux des séances; ils sont
régulièrement transcrits sur un registre.
Tous les membres de l'Association sont admis aux séances ordi-
naires du Comité et ils y ont voix consultative.
Les séances sont suspendues pendant trois mois, du 1“ août
au 1°" novembre.
16. Une Commission administrative et des Commissions de corres-
pondance et de publication sont nommées par le Comité. Tout mem-
bre de l'Association peut en faire partie.
— Il —
17. Le Comité fait dresser annuellement le budget des recettes et
des dépenses de l'Association. Aucune dépense non inscrite au bud-
get ne peut étre autorisée par le Comité que sur la proposition ou
bien après l'avis de la Commission administrative.
18. Le compte détaillé des recettes et dépenses de l’année écoulée
est également dressé, présenté par le Comité à l'approbation de
l'Assemblée générale et publié.
ὃ IV. ASSEMBLÉE GÉNÉRALE.
49. L'Association tient, au moins une fois chaque année, une
Assemblée générale. Les convocations ont lieu à domicile. L’Assem-
blée entend le rapport qui lui est présenté par le Secrétaire sur
les travaux de l'Association et le rapport de la Commission admi-
nistrative sur les recettes et les dépenses de l'année.
Elle procède au remplacement des membres sortants du Comité et
du Bureau. |
Tous les membres de l'Association résidant en France sont admis
à voter, soit en personne, soit par correspondance.
8 V.
20. Les présents statuts ne pourront être modifiés que par un vote
du Comité, rendu à la majorité des deux tiers des membres pré-
sents, dans une séance convoquée expressément pour cet objet, huit
jours à l'avance. Ces modifications, après l'approbation de l'Assem-
blée générale, seront soumises au Conseil d'État.
LA MÉDAILLE DE L'ASSOCIATION
Cette médaille, œuvre de notre confrère M. J.-C. Chaplain, membre de l'Institut
(Académie des Beaux-Arts), porte au droit une tête de Minerve, dont le casque,
décoré de fleurons, de feuilles d'olivier et d'une figure de Sphinx, rappelle à
la fois les anciennes monnaies d'Athènes et les belles monnaies de Thurium. Le
module est de 55 millimètres.
Elle pourra être décernée avec une inscription spéciale, par un vote du
Comité, aux personnes qui auront rendu à l'Association des services excep-
tionnels.
Le Comité a décidé aussi qu'elle serait mise à la disposition de tous les
membres de l'Association qui désireraient l'acquérir. Dans ce cas, elle portera,
sur le revers, le nom du possesseur avec la date de son entrée dans l'Asso-
ciation. Le prix en a été fixé comme il suit :
L'exemplaire en bronze. . ... 40 fr.
- en δΔέρεοῃῖ.. ... 80 --
Ceux de nos confrères qui voudraient posséder cette œuvre d'art devront
adresser leur demande à M. Lebègue, agent et bibliothécaire de l'Association,
12, rue de l'Abbaye, Paris. Ils sont priés d'envoyer d'avance la somme fixée,
suivant qu'ils préfèrent la médaille en argent ou en bronze, afin que l'on
puisse y faire graver leur nom. Ils voudront bien, de plus, joindre à cet envoi
l'indication des noms et prénoms qui doivent former la légende. Les membres
qui habitent la province ou l'étranger devront désigner en mème temps la per.
sonne de confiance par laquelle ils désirent que la médaille soit retirée pour
eux, ou le mode d'envoi qui leur convient. Les frais d'expédition seront naturel-
lement à leur charge.
SOUSCRIPTION PERMANENTE
POUR L'ILLUSTRATION DE LA REVUE
Les conditions de la souscription sont les suivantes :
ART. 4°. — La souscription pour l'illustration de la Aevue est
fixée au minimum de 100 francs une fois versés.
ART. 9. — Les souscripteurs pour l'illustration de la Revue des
études grecques recevront le titre de Membres fondateurs pour les
Monuments grecs et l'illustration de la Revue (1). Leurs noms forme-
ront une liste à part, qui sera imprimée en tête de chaque volume
de la Revue des études grecques.
ART. ὃ. — S'il y a des renouvellements de souscription, ils seront
indiqués sur cette liste par la mention des années où la souscription
aura été renouvelée.
ART. À. — Les souscriptions qui dépasseront le chiffre de 100 fr.
seront naturellement l'objet d'une mention spéciale dans le rapport
annuel du trésorier et dans la liste des souscripteurs.
LE COMITÉ DE L'ASSOCIATION.
Nora. — Les souscriptions devront être adressées à M. Max. Egger, trésorier,
71, rue de Vaugirard.
(1) Par suite de l’achèvement des Monuments grecs, l'illustration de la Revue
représente seule désormais dans l'œuvre de l'Association l'objet, si important,
de la reproduction des monuments figurés légués par l'antiquité hellénique.
Appelée à prendre sans cesse de nouveaux développements, elle appelle instam-
ment de nouveaux concours.
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU 7 ΜΑΙ 1903
DISCOURS
PRONONCÉ PAR
M, SALOMON REINACH
PRÉSIDENT
MESSIEURS,
J'ai vivement ressenti la marque d'estime que vous m'avez
donnée en m'appelant à présider notre Association. Je veux
d’abord vous en dire ma gratitude; je veux ensuite remercier
notre excellent secrétaire et les fidèles habitués de nos séances
d'avoir facilité ma tâche ou point de ne m'en laisser con-
naître que l'honneur. J’appartiens à plusieurs sociétés savantes
qui jouissent d'une réputation enviable; mais celle-ci est peut-
_ être la seule où l'on est certain d'être écouté de tous quand
on parle, où les rappels à l'ordre et les appels au silence sont
ignorés, où les communications scientifiques sont presque
toujours suivies d’une discussion qui apporte aux orateurs cette
satisfaction plus précieuse que des éloges, la preuve qu'on
les a suivis attentivement. Cela tient sans doute à ce que nos
goûts individuels sont dominés par un goût plus général qui
nous est commun et qui est notre raison d'être : la noble
curiosité des choses de la Grèce, de toutes les formes et de
tous les aspects de l’hellénisme. Assurément, il n’y a plus de
savants qui puissent embrasser l'hellénisme tout entier, comme
aux beaux jours de la Renaissance ; mais quel savant voudrait
— VII ---
méconnaître les liens indissolubles qui en rattachent ‘toutes
les manifestations? Quel est celui dont l'intérêt ne passe pas
volontiers de l’une à l’autre, alors même que sa compétence
est restreinte à une petite partie d’un aussi vaste domaine ὃ
Nous sommes ici pour nous éclairer les uns les autres sur des
questions qui nous attirent tous, bien que chacun n’en ait
approfondi que quelques-unes. Si j'en juge par les séances
déjà bien nombreuses auxquelles j'ai assisté, nous y réussissons
fort bien. Depuis le jour lointain, où, en 1878, élève récem-
ment admis à l'École Normale, je fus conduit ici par mon
maître M. Paul Foucart, qui présidait alors l'Association, je
ne suis jamais sorti de cette belle salle sans avoir appris
quelque chose et, j'ajoute, sans avoir formé le dessein de mieux
apprendre une chose que je savais mal. Mais le profit de nos
réunions n'est pas réservé à ceux, Parisiens privilégiés, qui
peuvent suivre nos séances et s'y instruire. Notre Annuaire
d’abord, puis notre Revue, gardent de notre activité un sou-
venir durable et nous autorisent même à en tirer quelque
orgueil. Qu'on me cite, en France ou à l'étranger, une publi-
cation périodique aussi propre que la nôtre à tenir informés
ceux que réunit le culte de la Grèce antique! Inscriptions,
papyrus, œuvres des arts plastiques, tout ce que met en lumière
le zèle des chercheurs de tous pays, nous est presque aussitôt
_ présenté sous une forme claire, concise et attrayante. Faut-il
rappeler que la Grèce byzantine et la Grèce moderne reçoivent
aussi l'attention qui leur est due? Les correspondances
d'Athènes, publiées dans la Revue des Études grecques, seront
un jour considérées comme une source pour l’histoire de l’hel-
lénisme moderne. Je n'ignore pas, Messieurs, qu'il reste des
progrès à réaliser, que les ressources de notre Association sont
encore restreintes, que l'illustration de la Revue pourrait être
plus abondante; mais je ne crois pas céder à uneillusion en
me faisant ici, sur les effets de notre activité commune, l'écho
d'un sentiment qui a souvent été exprimé au dehors.
Quelle reconnaissance ne devons-nous pas à ceux de nos
— VII —
confrères qui, après nous avoir témoigné leur sympathie par
un concours assidu, nous la prouvent encore par des bienfaits
dont nous ne pouvons remercier que leur mémoire ! Dans les
premiers jours du mois d'avril, M* André Faroux, notaire à
Paris, nous avisa que M. Paul-Jules Pélicier, en son vivant
archiviste de la Marne, décédé à Châlons, avait légué 6,000 francs
à l'Association des Études grecques, sans autre condition pour
elle que d’en disposer au mieux de la science. M. Pélicier était
membre donateur depuis 1867; il avait versé, outre sa cotisa-
tion, deux sommes de 100 francs; il était membre fondateur
pour les Monuments grecs et l'illustration de la Revue. Tou-
chante pensée, Messieurs, que celle de ce savant modeste, fami-
lier, par ses fonctions, avec les sources de l’histoire de France,
qui donne aux études grecques, non seulement une part de ses
loisirs, mais de son aisance, et nous laisse libres de les hono-
rer en son nom sans même l'attacher à la fondation d’un prix
nouveau! Nous envoyons à M. Jules Pélicier un souvenir
reconnaissant et ému; l'hellénisme mérite d'être aimé ainsi
et votre président peut dire avec le poète :
Δέχομαι, φίλον γε δῶρον Ex φίλης χερός.
L'année 1903 a νὰ s’éteindre deux de nos doyens,
MM. Alexandre Bertrand, membre fondateur, et Marius-Jean
Dupuis, qui était des nôtres depuis 1881. M. Bertrand, ancien
membre de l'École d'Athènes, avait débuté par des études de
géographie et de mythologie grecque; puis ce fut la Gaule
qui l'attira et j'ai à peine besoin de vous rappeler la grande
œuvre de sa vie, le Musée des Antiquités Nationales, dont il
m'a laissé la direction après y avoir guidé mes études. Ber-
trand porta, dans les ténèbres préhistoriques et celtiques, la
rectitude d'esprit et le goût de la clarté qu'il devait à son édu-
cation d'humaniste. Il avait un peu oublié le grec, mais point
la Grèce; au terme de sa vie, il se sentit attiré plus vivement
vers elle et le Platon de Cousin redevint un de ses livres fami-
licrs. M. Dupuis fut un proviseur modèle, en même temps
-- ΙΧ —
qu'un des rares adeptes de la science hellène dans notre pays;
la géométrie de Platon, qu'il tenta d'élucider par divers mémoi-
res, l'occupait encore en ces derniers temps, alors qu'entré dans
sa quatre-vingt-sixième année il venait prendre place à nos
séances et discuter avec M. Tannery. À ces noms respectables
j'ai le regret de joindre celui de M. l'abbé Follioley, ancien
proviseur du lycée de Nantes, où il a laissé, comme à Laval et
ailleurs, le souvenir d’un pédagogue expert et d’un ami éclairé
de la jeunesse. Permettez-moi de dire que cet homme excel-
lent me témoigna, il y a plus de vingt-cinq ans, au début de
mes études, une bienveillance qui a fait de moi son obligé.
Tout récemment, nous avons appris la mort d'un autre vété-
ran, M. Gaspard, qui professa, pendant vingt-trois ans, la
rhétorique au lycée Louis le Grand. Il a terminé dans le repos
une longue carrière toute d'honneur et de dévouement à l’Uni-
versité. Soixante-dix élèves, formés par lui, sont entrés à
l'École normale supérieure; il élait ainsi le père d’une nom-
breuse famille universitaire où son souvenir et ses exemples ne
périront point.
L’Association a également perdu M. Boucherie, ancien chef
de bataillon de la légion étrangère, qui était sociétaire
depuis 1881.
La mort, seul repos qu'il ait connu, a frappé le travailleur
infatigable qui fit plus qu'aucun savant de nos jours pour
éclairer les divers aspects de la Renaissance, — notre éminent
confrère Eugène Müntz. On dit {a Renaissance tout court, mais on
entend celle de l'hellénisme. N'est-ce pas alors, et alors seu-
lement, que l’hellénisme a commencé cette conquête du monde
qu’il n’est pas loin d’avoir achevée aujourd'hui? Désormais,
les limites de son empire seront celles de la civilisation elle-
même; il régnera partout où Homère et Platon trouveront des
interprètes et des lecteurs. Un jour, des vastes contrées que la
Grèce ne soupçonna point, il reviendra comme en pèlerinage
vers la Grèce. Ainsi, l’on a vu les États-Unis d'Amérique fonder
une école d'archéologie à Athènes, école dont le troisième
—… Y .....»
directeur, le professeur Van Benschoten, est un des confrères
que nous avons perdus cette année. M. Van Benschoten était
professeur de grec à l'Université Wesleyenne de Middletown
(Connecticut). Pendant l’année qu'il passa à la direction de la
nouvelle école, il obtint du Gouvernement grec la concession
d'un terrain sur lequel s’est élevé l’édifice de la mission per-
manente américaine. Vous savez tous ce que cette mission a
déjà fait pour la science : des fouilles comme celles de l'He-
raion d'Argos et de Corinthe suffisent à la gloire de la jeune
institution et sont des gages assurés de son avenir. Quoi de plus
flatteur, pour la vieille Hellade, que des hommages venus de
si loin ?
Plusieurs Grecs de nationalité ou d’origine, amis de notre
société et bons juges de ses travaux, figurent malheureusement
sur notre long nécrologe : le prince Mavrocordato, ancien mi-
nistre de Grèce, le prince Grégoire Soutzo, sénateur de Rou-
manie, le peintre Xydias, M. Jean Scaramangs, consul de Bel-
gique à Taganrog, M. Vucina, d'Odessa, qui avait écrit des
articles remarqués dans un grand nombre de journaux grecs
et fondé une école grecque à Odessa, où il fut pendant vingt-
cinq ans, à titre gracieux, consul général de son pays. Un
des professeurs les plus distingués de notre Faculté de méde-
cine, M. Panas, n'avait pas oublié son origine hellénique et
comptait, depuis plus de vingt-cinq ans, parmi nos membres;
il laisse, à côté d’une œuvre scientifique considérable, le sou-
venir d’un infatigable dévouement.
La jeunesse, hélas! n'a pas été épargnée et c’est avec une
profonde tristesse que je nomme, parmi nos membres décédés,
M. Pierre Lebocq, licencié ès lettres, qui donnait à ses amis les
plus belles espérances, et deux professeurs de notre Université,
MM. Baron et Edet. M. Baron avait imprimé dans notre Revue
des travaux ingénieux et solides sur la composition du Phèdre
et la candidature politique à Athènes ; M. Edet, un des maîtres
les plus aimés du lycée Henri IV, s'était fait honorablement
connaître par son histoire sommaire, mais bien pensée et bien
écrite, de la littérature grecque, ainsi que par diverses publi-
cations classiques qui témoignent de la sûreté de son goût.
L'un et l’autre avaient pris rang parmi les philologues d'avenir
et promettaient de compter parmi les meilleurs; nous adres-
sons à leur mémoire l'hommage attristé de notre estime.
Messieurs, e’est le douloureux privilège de votre président
d'avoir ainsi à vous rappeler vos pertes et à indiquer, trop
brièvement, les motifs qui nous les rendent plus sensibles. Il se
console avec vous à la pensée des adhésions qui nous viennent
et que l’on voudrait, dans l'intérêt des bonnes lettres, plus nom-
breuses encore. Assurément, l'enseignement de la langue
grecque est aujourd'hui menaeé en France, comme dans les
autres pays; notre Association, en 1902, a dû faire une
démarche pour le sauvegarder et a trouvé, dans cette occur-
rence, auprès des pouvoirs publics, l'accueil sympathique qui ne
lui a jamais fait défaut. Mais, quoi qu’il advienne, nous ne con-
fondrons pas l'étude du grec, qui n’est qu'un moyen, avec celle
de la pensée grecque, qui est un but. Désiré Nisard disait un
jour : « Quel roman ne vaut mieux que Virgile lu en traduc-
tion ? » Je ne sais si cette boutade vaut pour Virgile, et je crois
au moins prudent d’en douter; mais, en ce qui concerne les pen-
seurs, les poètes, les historiens de la Grèce, il me semble que
leur influence civilisatrice est assez indépendante de la langue
sous laquelle ils s'offrent à nous. Le livre qui a exercé la plus
grande action sur l'esprit humain, la Bible, n'est-il pas surtout
familier aux hommes dans des langues autres que l’hébreu ?
Est-ce sous leur forme grecque originale que les Évangiles ont
porté le christianisme à travers le monde? Or, l'hellénisme, lui
aussi, est une religion, une religion de raison et de beauté ;ila
eu ses apôtres dès l'antiquité, comme lorsque Dion Chrysostome
le prêchait parmi les Gètes ; il en a retrouvé à Byzance, dans
l'Italie de la Renaissance, dans l'Europe moderne ; alors même
que le grec ne serait compris que de quelques doctes, il se
trouverait encore des propagateurs de l’hellénisme, et de plus
en plus, pour des motifs qu’on a dits mille fois et qui n’ont rien
— XI ---
perdu de leur force. Les sociétés contemporaines, qu'elles le
sachent ou non, sont toutes pénétrées d'esprit grec; elles vou-
draient s’en défaire qu'elles n'y réussiraient point ; c’est le fond
même et le ressort de leur vie laïque. Notre rôle, Messieurs,
est de maintenir, d'élargir si possible le cercle de ceux qui
peuvent remonter aux sources de la civilisation dont ils
jouissent, tant pour en connaître plus exactement les origines
que pour en seconder avec plus d'intelligence les progrès ; c’est
un rôle modeste, mais utile et honorable, auquel nous ne fail-
lirons pas. |
Salomon Reinacu.
RAPPORT DE M. AM. HAUVETIE
SECRÉTAIRE
SUR LES TRAVAUX ET LES CONCOURS DE L'ANNÉE 1902-1903
Messieurs,
Un exposé de la grammaire comparée du grec, du latin et
du sanscrit; une traduction française de l’Orestie d'Eschyle ;
une étude sur l'architecture civile et l'habitation privée des
Grecs pendant la période byzantine : tel est, cette année, le
sujet des livres que votre Commission des prix a couronnés,
et il se trouve ainsi, par hasard, que vous récompensez trois
ouvrages du genre le plus différent, un traité de linguistique,
un essai purement littéraire, un travail d'archéologie. Jamais
occasion meilleure ne s'est offerte à nous, Messieurs, d'expri-
mer publiquement notre reconnaissance envers nos généreux
donateurs, Zographos et Zappas : grâce à eux, l'Association,
tout en ménageant comme elle le doit ses propres ressources,
a la satisfaction de pouvoir encourager, par l’attrait de récom-
penses modestes mais enviées, le goût des recherches scienti-
fiques, dans quelque domaine qu'il s'exerce, et la publication
des livres qui contribuent en quelque manière au progrès des
études grecques.
M. Hatzidakis, professeur à l'Université d'Athènes, n’a
encore donné que le tome 1 de l'ouvrage qu'il a entrepris
d'écrire sous le titre de Lectures académiques, ‘Axaônperxà
“-ΧΙΝ —
ἀναγνώσματα (1). Mais votre Commission pouvait sans danger
lui faire crédit du reste : en couronnant, il y a quelques années,
le premier volume des Proverbes de M. Politis, nous savions
que l'historien des traditions populaires de la Grèce ne s'arrè-
terait pas dans la voie où il s'’engageait, et nous avons vu
depuis se poursuivre régulièrement une publication que nous
pouvons être fiers d'avoir signalée dès le premier jour à l'atten-
tion des érudits. M. Hatzidakis ne faillira pas davantage à la
tâche qu'il a entreprise : pour mener à bonne fin ces leçons
de grammaire comparée, qui s’annoncent comme une œuvre
de longue haleine, il a le savoir (et c’est la première de toutes
les conditions), mais il a aussi, comme M. Politis, le précieux
concours de cette Bibliothèque Marasiy, qui compte déjà tant
de bons livres, tant de services rendus à la Grèce. Aussi bien
les six cents pages du présent volume contiennent-elles facile-
ment la matière de plusieurs ouvrages : ce n’est que le début
d’une grammaire, mais c'en est la base, l'exposé des principes,
et le savant professeur a réuni dans ces douze chapitres quel-
ques-unes des doctrines fondamentales de.son enseignement.
Un résumé lucide et méthodique des théories grammaticales
dans l’antiquité sert d'introduction, et c'est encore une sorte de
préface que l'étude des sources anciennes. Dès ces premiers
chapitres apparaît l'importance prépondérante que l'auteur
accorde au grec, et cette tendance naturelle s’accentue encore
dans la suite : si le chapitre IIL (Phonétique physiologique) a
nécessairement le caractère d’une théorie générale, 16 chapitre
suivant, sur la Phonétique figurative, développe avec complai-
sance l'histoire de l'alphabet grec. S'agit-il ensuite des lois pho-
nétiques, de l’analogie ou des phénomènes d'apophonie? Les
exemples, empruntés à toutes les périodes de la langue
grecque, se présentent à la mémoire de l’auteur avec une
abondance et une variété qu’on ne trouverait dans aucun autre
ouvrage du même genre. Les derniers chapitres enfin, et les
(1) Hatzidakis (G.), ᾿Ακαδημεικὰ ἀναγνώσματα. ᾿Ελληνικὴ, λατινιχὴ καὶ ἱνδικὴ
γραμματιχή, t. 1 (Bibl. Marasly, n° 115-118), Athènes, 1902, χχυπι- 608 pages in-8.
plus considérables, ne regardent, pour ainsi dire, que le grec.
esprit doux et esprit rude, accentuation, et surtout prononciation
du grec ancien. Ne nous plaignons pas, Messieurs, de ce point
de vue manifestement exclusif : si le grec est à bien des égards
le plus pur des idiomes indo-européens, ne peut-il pas servir
mieux que tout autre à la démonstration des lois qui régissent
toutes les langues de la même famille? Et puis, écrites en grec,
pour un auditoire d'étudiants à l'Université d'Athènes, . ces
belles leçons de grammaire comparée ont encore un intérêt
d'un autre ordre : c'est en Grèce peut-être qu’il est le plus
nécessaire aujourd'hui de faire entendre quelques-unes de ces
vérités scientifiques qui ne soulèvent plus d'objection dans nos
écoles d'Occident. La prononciation du grec ancien est un de
ces problèmes que trouble et ‘obscurcit encore dans l'opinion
de nombreux Hellènes un amour-propre national bien excu-
sable. M. Hatzidakis combat, sans trop le dire, les sentiments
instinctifs de ses auditeurs, quand il démontre, suivant les
saines doctrines, la transformation naturelle des sons et l’'évo-
lution du langage à travers les siècles. Il multiplie les exem-
ples, les arguments, à l'appui d'une thèse dont il veut faire
éclater l’évidence ; et cette chaleur de conviction, cette élo-
quence contenue, mise au service d'une juste cause, ajoute un
singulier attrait à ces auslères leçons de phonétique. Pourquoi
faut-il que l'auteur ait parfois cédé lui-même à des préjugés
qui ne sont pas les siens? Cette prononciation du grec ancien,
dite érasmienne, dont il justifie au fond le principe, il ne veut
pas admettre que, dans l’histoire, elle soit née d'un progrès
scientifique, d'une recherche plus exacte de la vérité, d'une
connaissance plus sûre des origines, et 1] attribue en cette
matière aux événements politiques du xv° siècle, à la prise de
Constantinople, une influence décisive qu'ils n’ont point eue.
Même si l'empire grec avait survécu, rien ne prouve que l'Occi-
dent eût adopté alors dans ses écoles la prononciation moderne :
la grammaire de Constantin Lascaris date de 1476, et Jean
Lascaris apprit le grec à Budé bien avant que parût le traité
— XVI —
d'Érasme (1528). Regrettons aussi que, dans un livre de pure
science, la polémique, mauvaise conseillère, ait trouvé moyen
de se glisser, au moins dans une note; mais, ces réserves
faites, proclamons bien haut que ce bel ouvrage, plein de
faits intéressants, d'observations pénétrantes et d'idées neuves,
comptera parmi les meilleurs que l’Association ait eu jamais
le plaisir de couronner.
M. Paul Mazon, qui partage avec M. Hatzidakis le prix
Zographos, est un helléniste bien informé, en même temps
qu'un lettré délicat : ce double mérite donne à sa traduction
de l'Orestie d'Eschyle (4) une valeur peu commune. Plusieurs
d'entre vous, Messieurs, ont gardé peut-être, comme moi,
l'impression d’une lecture qui leur révéla jadis, sur les bancs
du collège, un Eschyle inconnu : la traduction Bouillet, assez
récente encore quand j'étais en rhétorique, m'inspira d'abord,
je l’avoue, une surprise mêlée d’admiration; c'était étrange,
mais nouveau et attachant : les jeux de scène, les évolutions
du chœur m'apparaissaient pour la première fois; les person-
nages, minutieusement décrits dans leur attitude et leur cos-
tume, se dressaient à mes yeux comme des êtres surhumains,
et parlaient une langue assez conforme à leur aspect extraor-
dinaire. Des membres de phrase heurtés, entrecoupés, et
comme convulsifs: des inversions hardies, des alliances de
mots bizarres, tout contribuait à produire une sorte de vision
fantastique qui frappait étrangement l'esprit. Un peu plus tard
il me fallut reconnaître que ces effets de style rappelaient de
fort loin l'original, que ces hardiesses d'expression provenaient
trop souvent d’une leçon fausse ou d’une interprétation fantai-
siste, que ces prétendues évolutions du chœur n'étaient rien
moins que démontrées, et que le costume et la mise en scène
ne tenaient pas devant les découvertes nouvelles de la science.
Une pareille déception n'attend pas les lecteurs de M. Mazon :
si l'image qu’il évoque est moins saisissante peut-être, elle est
(1) Mazon (Paul), L'Orestie d’Eschyle, Paris, Fontemoing, 1902.
aussi plus près de la vérité. Il connaît Eschyle pour l'avoir étu-
dié avec toutes les préoccupations d’un philologue, pour en
avoir discuté le texte selon les règles de la critique verbale,
pour avoir examiné aussi la question de la mise en scène
d’après les données les plus récentes de l'archéologie. Il a
enfin, pour comprendre le lyrisme du vieux maître, des con-
naissances techniques de métricien qui s'associent heureusc-
ment aux qualités non moins indispensables du lettré.
Ainsi préparé à sa tâche, comment M. Mazon y a-t.il réussi ?
Je voudrais, Messieurs, pouvoir vous citer en entier le rapport
que votre Commission des prix a entendu : permettez-moi du
moins d’en détacher quelques passages. Après avoir loué les
scrupules de l’auteur dans 16 choix du texte à traduire, dans la
discussion des variantes, et dans la méthode à suivre en pré-
sence de lacunes incontestables, le rapporteur continue ainsi :
« Ces observations montrent déjà que nous avons ici affaire à
un esprit qui possède à un haut degré le sens de la précision
et du respect qu'on doit aux grandes œuvres. Ces qualités se
retrouvent partout dans l'interprétation. Celle-ci, on peut le
dire, est, d'un bout à l'autre, l'effort incessant d’une intelli-
gence pénétrante et vigoureuse pour élucider jusque dans le
détail les intentions du poète. On peut évidemment, en plus
d'un passage, différer d'opinion avec le traducteur ; mais je ne
crois pas que, nulle part, il soit possible de le prendre en fla-
grant délit de légèreté ni de lui reprocher un acquiescement
docile à la routine. Toutes les difficultés ont été aperçues,
étudiées, et toutes ont été résolues d’une manière person-
nelle, par des raisons qui méritent d'être prises en sérieuse
considération. 11] en résulte que la traduction de M. Mazon a vrai-
ment, au point de vue de l'interprétation, la valeur d'un com-
mentaire très attentif, très serré, très précis, dû en outre à
quelqu'un qui sait le grec et qui a un sentiment délicat de la
poésie.
« Car il faut maintenant insister sur ce mérite, vraiment lit-
téraire, et qui seul, à mon avis, pouvait donner aux autres
b
— ΧΥΠῚ -
toute leur valeur. M. Mazon ἃ voulu faire sentir la force, la
grandeur, la puissance d'effet de la poésie d’'Eschyle comme il
les sentait lui-même, et il y a réussi dans une large mesure...
Toutes les fois qu'il le peut, il rend l'expression synthétique du
poète par une expression analogue en français, et il ne craint
pas qu'elle soit hardie, pourvu qu'elle ne devienne ni barbare
ni inintelligiblé. Sa langue est souple et forte, saine et vigou-
reuse ; je n'ai rencontré, pour mon compte, dans ces trois tra-
gédies qu'un bien petit nombre d'expressions que j'aurais voulu
éliminer ou modifier. Lorsque les mots du poète, trop conden-
sés ou trop hardis, ou trop purement grecs pour passer dans
une autre langue, se refusent absolument à être traduits,
M. Mazon se résigne à n’en donner, pour ainsi dire, que le con-
tenu; mais il le fait toujours avec une adresse particulière,
sachant être bref lorsqu'il paraphrase, et s'arrangeant pour
nous donner en quelque sorte la compensation de ce qu'il ne
peut reproduire exactement. La valeur des tours et des cons-
tructions ne l’a pas laissé plus indifférent que celle des expres-
sions. Autant qu'il le peut, il suit le mouvement de la phrase
grecque, et il ne s’applique pas seulement à en faire sentir
l'allure générale, à détacher ce que le poète a voulu mettre en
lumière, et à laisser pour ainsi dire chaque chose à son plan,
mais 1l essaie encore d’en marquer le rythme οἱ d’en reproduire
dans une certaine mesure la mélodie. »
Un tel éloge me dispense, Messieurs, d’insister sur d’autres
mérites par où se recommande encore le travail de M. Mazon :
nous attendons maintenant avec impatience la suite promise
de cette traduction si bien commencée, et nous remercions
l'auteur d’avoir largement contribué pour sa part à l’œuvre
essentielle de notre Société, qui est de propager en France l’in-
telligence et le goût des chefs-d’œuvre du génie grec.
Le prix Zappas est décerné à l'Habitation byzantine de M. le
général de Beylié (4). Ce n’est pas ici l'ouvrage d’un érudit de
(4) Beylié (Général de), L'habitalion bysantine. Paris, Leroux, 1902, 1 volume
_ in-folio, avec supplément.
-- XIX —
profession, rompu aux habitudes de la méthode scientifique,
soucieux de poser et de résoudre Îles problèmes avec une abso-
lue rigueur. « Si notre étude, dit l'auteur lui-même dans son
Avant-propos, ne satisfait pas complètement le spécialiste, elle
pourra cependant être consultée avec fruit par les romanciers,
les auteurs dramatiques et les artistes, qui auront ainsi sous la
main une mine précieuse et condensée de renseignements peu
connus ou inédits. » M. de Beylié est trop modeste : les histo-
riens mêmes trouveront en lui un amateur curieux, avisé,
perspicace, et, une fois avertis qu'ils n'ont pas affaire à un
livre de pure science, ils jugeront équitable de féliciter l'au-
teur de son zèle généreux pour l'archéologie byzantine, de le
louer surtout du grand effort qu'il a fait pour rassembler et
publier à ses frais tant de matériaux épars.
Ce n’est pas méconnaître l'esprit de cet ouvrage que d'en
signaler d’abord la riche illustration. On ne saurait assez dire
l'intérêt de ces planches hors texte (il y en a 100 dans le volume
principal, 25 dans le Supplément) et de ces innombrables gra-
vures qui se pressent à chaque page. Sans doute beaucoup de
documents connus y figurent, et ceux-là même, il est commode
encore de les trouver réunis en une sorte de Corpus; mais
d'autres planches font connaître des choses vraiment toutes
nouvelles. Je citerai en particulier les reproductions des minia-
tures du Skylitzès de Madrid, exemple presque unique d'un
manuscrit byzantin orné de peintures à sujets historiques.
M. de Beylié a fait photographier toutes ces miniatures, et il a
de mème subventionné la mission où M. Chesnay a relevé en
Macédoine la maison byzantine de Melnic. Vous ne serez pas
surpris, Messieurs, qu'une collection ainsi formée offre un
ensemble incomparable de documents, la série la plus com-
plète et la plus instructive qu'on puisse désirer.
Que faut-il penser maintenant du texte lui-même, et de l'his-
toire que M. de Beylié a racontée d’après ces documents ? Cer-
tains chapitres ont une valeur qui sera durable, notamment la
γ᾽ partie tout entière, sur la décoration et le mobilier. Dans le
-.. ἊΝ .-.
reste du livre aussi, l’auteur, au cours de son exposé histo-
rique, a exprimé bien des vues intéressantes et justes, quelque-
fois empruntées d’ailleurs à un travail encore inédit de M. Ga-
bricel Millet, un manuel de l’art byzantin, dont il a pu consulter
les bonnes feuilles. Mais on peut se demander pourtant ce que
vaut, dans l’ensemble, la méthode ici employée. N'y a-t-il
pas quelque imprudence à chercher des renseignements précis
dans les architectures assez vagues qui décorent l'arrière-plan
des mosaïques et des miniatures ? N'y a-t-il pas surtout quelque
danger à reconstituer les maisons byzantines d'après les palais
de Venise et du Kremlin ἢ D'autre part, s’il faut féliciter M. de
Beylié de son zèle et de son habileté à interroger les monu-
ments, avouons qu'un historien ne se fût pas aussi camplète-
ment désintéressé des textes : il y aurait trouvé beaucoup à
prendre, ne fût-ce que pour ce Palais impérial de Constanti-
nople, que M. de Beylié décrit d'après l'ouvrage de Labarte,
au lieu d'en faire lui-même une analyse personnelle. Ces
lacunes ne laissent pas que de diminuer un peu la valeur des
résultats de ce beau travail. Aussi bien une étude si délicate et
si nouvelle demanderait-elle une connaissance que nous
n'avons guère de la date exacte des monuments, et un crité-
rium sûr du style de chaque époque durant celte longue période
de l’histoire de l'art. Si quelque incertitude plane encore, même
après le livre de M. le Général de Beylié, sur le sujet qu'il a
traité, n'est-ce pas que peut-être il était bien hardi d'embrasser
d’un seul et même coup d'œil toute l'habitation civile et privée
des Grecs du vi° au xv: siècle ?
Je ne m'éloignerai pas, Messieurs, de cette période byzan-
tine de l’histoire de la Grèce en vous entretenant de l’un des
plus beaux ouvrages qui aient enrichi cette année notre biblio-
thèque. Notre confrère M. Henri Omont ne nous oublie jamais
dans la distribution des précieux volumes qu'il publie. Les
Fac similés des miniatures des plus anciens manuscrits grecs de
la Bibliothèque Nationale ont, comme toutes ses œuvres précé-
dentes, un caractère scientifique : plutôt que de faire un choix
|
— XXI ---
parmi les miniatures les plus belles ou 168 mieux conservées
du dépôt dont il a la garde, il a préféré reproduire intégrale-
ment toutes les peintures qui décorent cinq de nos plus vieux
manuscrits grecs. Aussi les soixante-dix planches phototy-
piques qui composent ce magnifique album n'offrent-elles pas
toutes des images également intactes : quelques-unes ont beau-
coup souffert ; mais du moins la série est complète, et c’est ce
qui augmente l'intérêt historique des pièces, fort nombreuses
‘encore, qui conservent, après dix ou quinze siècles, la pureté
Φ
de leurs lignes et l’éclat de leurs couleurs. L'Évangile de saint
Matthieu, du νι" siècle, copié en lettres d'or sur parchemin
pourpré, appartient aux plus récentes acquisitions de la Biblio-
thèque Nationale ; trois autres manuscrits, le Psautier, le Saint-
Grégoire de Naziance, le Saint-Jean Chrysostome proviennent
des anciennes collections royales ; le Nicandre nous est venu
en 1795 de l’ancienne abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Cha-
cun de ces manuscrits est ici l'objet d'une description et d’une
bibliographie rigoureusement exactes. En outre, dans une
introduction des plus instructives, M. Omont met en lumière
les efforts tentés par le grand érudit français Peiresc pour
reproduire par la gravure toutes les miniatures de la célèbre
Genèse de Cotton : ce manuscrit, que Peiresc eut trop peu de
tempsentre les mains, fut détruit dans un incendie un siècle
plus tard, et des 250 peintures qu'il contenait aucune ne nous
serait aujourd'hui connue si Peiresc n’en avait fait exécuter des
copies par le peintre Daniel Rabel. Deux de ces copies seule-
ment subsistent encore, à notre connaissance, et ces spécimens
inappréciables de la plus ancienne illustration de la Bible sont,
Dieu merci, en lieu sûr, dans le fonds des manuscrits français
de la Bibliothèque Nationale. M. Omont les a reproduits dans
une planche hors texte qui a bien droit à une place d'honneur
en tête de cette série si précieuse de documents iconogra-
phiques.
Combien d'efforts n’a-t-il pas fallu pour former, au xvn° et au
xvin” siècle, ces collections royales de manuscrits et d'an-
tiques! C'est le récit de ces persévérantes recherches que nous
donne encore M. Omont dans deux volumes intitulés : Missions
archéologiques françaises en Orient : ce recueil de pièces et de
lettres inédites, a presque l'intérêt d’un roman, du moins pour
ceux qui, comme votre secrétaire, Messieurs, ont eu le bonheur
de suivre, à un siècle ou deux de distance, les mêmes routes
de Grèce et d’Asie-Mineure que Nointel, Paul Lucas, Four-
mont et tant d'autres. Les conditions du voyage, les difficultés
de toutes sortes n'ont pas beaucoup changé depuis lors; que
dis-je? les mêmes noms se rencontrent, aujourd’hui comme
autrefois, de familles françaises établies dans le Levant, et pro-
fondément dévouées à la France : nous nous rappelons, M. Pot-
tier et moi, l'accueil que nous fit, en 1879, à Mételin, le bon
M. Roboly, et je n'ai pas été surpris d'apprendre dans le
livre de M. Omont, qu'un autre Roboly, drogman du Con-
sulat de France à Alexandrie, en 1751, avait, au prix de
mille épreuves, assuré au Roi l'envoi de trois statues antiques.
Une chose pourtant a changé, dont je n'aurai pas, Messieurs,
le courage de me plaindre : jadis un de nos consuls au Caire,
Benoît de Maillet, adressait mémoire sur mémoire à ses chefs
pour effectuer le transport en France de la fameuse colonne -
de Pompée, gigantesque piédestal destiné à une statue de
Louis XIV; de nos jours, nos ministres vont inaugurer sur
place à Delphes, au pied des roches Phédriades, le musée que
décorent les magnifiques découvertes de l’École française
d'Athènes! |
C'est que depuis longtemps la Grèce, rendue à la liberté,
s’est acquis des droits, je ne dis pas seulement au respect de
l’Europe, mais à l'estime et à la reconnaissance du monde
savant tout entier. Chaque année nous apporte de nouvelles
preuves d'une activité qui s'exerce dans la découverte et la
conservation des monuments anciens, comme aussi dans [6
domaine de la philologie et de l'histoire. Les publications sa-
vantes, ou du moins utiles à la science, se multiplient en
Grèce : il nous en vient d'Athènes et de Constantinople, voire
— XXII —
même des provinces et des plus petites villes de l’Asie-Mineure
et des îles. Et, à côté d'écrits originaux, il en paraît d'autres
qui font connaître au public grec les plus importants ouvrages
de la littérature ou de la science occidentale : les livres clas-
siques de Droysen et de Hertzberg sur l'hellénisme ont trouvé
à Athènes des traducteurs éclairés, ainsi que l'Histoire d’An-
gleterre de Macaulay, et l'Introduction aux éludes historiques de
nos compatriotes Langlois et Sceignobos. En même temps, des
écrivains fort différents les uns des autres s'appliquent à
répandre dans le peuple des notions utiles, et les partisans du
grec usuel ou vulgaire ne le cèdent plus sur ce terrain même
aux défenseurs d'une langue savante ou puriste. Les œuvres
d'imagination, poésie, roman, théâtre, continuent à se produire .
volontiers dans cette langue populaire que des écrivains
célèbres ont depuis longtemps consacrée, sans réussir encore à
la fixer d’après des règles incontestées : un concours, dû à l’ini-
tiative de notre confrère M. Psichari, nous a valu cette année
la publication de plusieurs nouvelles (Διαγωνισμὸς γιὰ τὴ γλώσσα)
qui joignent à leur mérite propre celui d'offrir un spécimen
intéressant d'un vocabulaire, d'une morphologie et d’une ortho-
graphe homogènes. L'exemple aura toujours plus d'effet que la
théorie, et c’est bien en proposant eux-mêmes des modèles
que les promoteurs du nouveau mouvement littéraire auront
chance de se faire entendre et imiter. C’est ce que vient de
faire M. Psichari lui-même, pour le théâtre, dans deux essais,
un drame et une comédie, Γιὰ τὸ ‘Poualixo θέατρο, et, pour la
« nouvelle », dans quelques pièces réunies sous le titre gracieux
de ‘Péôa. À ces « roses » l’auteur a Joint, sous le titre de Μῆλα,
une série d'articles divers, toujours précieux quand ils traitent
de science pure, instructifs encore, comme documents, quand
ils nous initient aux polémiques passionnées que soulève en
Grèce, la question terrible et complexe du langage. C'est au
même titre que l'Association a accueilli l'hommage d'un livre
inspiré du même esprit : To γλωσσικὸν ζήτημα, de M. Ph. D.
Photiadis. D’autres ouvrages encore dérivent du mème désir de
— XXIV —
créer une langue à la fois littéraire et usuelle pour l'expression
des idées générales, historiques, philosophiques et religieuses :
il me suffira de nommer ici la Grammaire de la langue ro-
maïque de Philintas, le premier volume d'une Histoire de l'hel-
lénisme romaïque, Ἱστορία τῆς Ρωμαιοσύνης, par Argyris Ephta-
liotis, enfin, les traductions de Marchétis, Économie politique,
Πλουτολογία, et de Pallis, le Nouveau Testament, objet de Mmémo-
rables querelles...
Mais j'ai hâte, Messieurs, de quitter le terrain brûlant de
l'actualité, pour vous signaler en finissant quelques bons livres
d'histoire ou de littérature ancienne, offerts cette année à notre
bibliothèque, et qui peuvent servir de modèle aux futurs lau-
réats de nos concours. De M. Bodin, mon prédécesseur M. Paul
Girard a déjà loué naguère un excellent choix des Orateurs
attiques ; le même auteur nous a donné, en collaboration avec
notre lauréat d'aujourd'hui, M. Paul Mazon, des Extraits d'Aris-
tophane, qui méritent peut-être encore de plus grands éloges :
à la correction du texte, à la finesse de l'interprétation, à la
variété du commentaire, on reconnaît bien l'œuvre de deux
agrégés des lettres, venus l’un de l'École normale, l’autre de la
Sorbonne, mais formés en outre tous les deux à l'École pra-
tique des Hautes-Études. C'est aussi à cette école de science
désintéressée que nous devons une savante étude de M. Beasley
sur le Cautionnement dans l’ancien droit grec, et les recherches
de M. Haussoullier sur l'Histoire de Milet et du Didymeion. Les
documents épigraphiques forment la base de ces deux ouvrages;
car, si les discours des orateurs attiques, les lexiques ct les
textes littéraires en général nous renscignent sur la nature du
contrat qu'est le cautionnement, c’est dans les inscriptions que
nous en saisissons la pratique, avec les différents termes usités
selon les villes pour telle ou telle des opérations qu'il com-
porte; et, dans la période où s’enferme M. Haussoullier pour
retracer l’histoire du sanctuaire prophétique d’Apollon Didy-
méen, c’est-à-dire de l’époque d'Alexandre au 1°" siècle de notre
ère, les détails feraient défaut, les grandes lignes même appa-
— XXV —
raîtraient à peine, si des fouilles récentes, faites par M. Haus-
soullier lui-même et ensuite par la Direction des musées
royaux de Prusse, n'avaient mis au jour une série d'inscriptions
singulièrement instructives pour l’histoire de la domination des
Macédoniens, des Séleucides et des Romains en Îonie.
La numismatique est une source non moins abondante de
renseignements historiques : notre dévoué confrère, M. Théo-
dore Reinach a bien mis cette vérité en lumière dans plusieurs
articles réunis en un volume sous le titre : L'histoire par les
monnaies. Au lieu de se borner à décrire, classer, expliquer les
monpaies antiques, il montre le moyen de les interroger sur
tous les problèmes politiques, économiques, artistiques ou reli-
gieux, que rencontre sur sa route l'historien de l'antiquité. Vous
connaissez déjà, Messieurs, la plupart de ces articles, et je n'ai
pas besoin d’en faire ressortir ici la haute valeur scientifique ;
mais je tenais à vous signaler ce beau livre, orné de six planches
hors texte et de nombreuses gravures. Tant de travaux person-
nels, et la direction toujours si active de notre Revue, n'em-
pêchent pas M. Théodore Reinach de continuer sa traduction
française de Flavius Josèphe : le traité contre Apion, paru en
1902, par les soins de M. Léon Blum, fournit à notre savant
confrère l’occasion de discuter en note les nombreuses ques-
tions de chronologie grecque que soulève cet écrit sur l’ancien-
neté du peuple juif.
Enfin, Messieurs, c'est aussi une traduction, mais une tra-
duction accompagnée d'importants préliminaires et de notes
critiques fort étendues, que vient de nous offrir notre secré-
laire-adjoint, M. Puech. Le Discours aux Grecs de Tatien est
une de ces œuvres que l’on entend quelquefois citer, que l’on
cite volontiers soi-même, et qu’on lit peu. En elle-même pour-
tant, et sans parler des informations intéressantes qu'elle con-
tient pour l’histoire profane, elle vaut la peine d'être connue,
et nous devrons à M. Puech de pouvoir désormais eu entre-
prendre la lecture sous la direction du plus sûr des guides :
parfaitement informé des difficultés philologiques que présente
— XXVI —
le texte, et non moins préparé par ses travaux antérieurs à
l'étude de l’apologétique chrétienne au n° siècle de notre ère,
M. Puech examine, à propos de ce discours, tous [65 problèmes
qui se posent, et notamment le sens de cette désignation de
Grecs, Ἕλληνες, qui embarrasse encore la critique. Auteur
d’une thèse jadis remarquée sur Prudence, et, quelques années
plus tard, d’un beau livre sur Saint Jean Chrysostome et les
mœurs de son temps, M. Puech représente parmi nous, Mes-
sieurs, un domaine important de l’hellénisme, et il apporte à
ces études une largeur d'idées, une sûreté de connaissances,
une impartialité et un talent, qui le placent parmi les meilleurs
historiens de la littérature chrétienne des premiers siècles.
RAPPORT
DE LA
COMMISSION ADMINISTRATIVE
MESSIEURS,
La tâche du trésorier dans une société savante est bien déli-
cate. S'il déclare que sa caisse est la meilleurcet la plus pros-
père que l'on puisse souhaiter, s’il ne se plaint de rien, on l’ac-
cuse de mollesse dans la défense des intérêts dont il est
chargé. S'il ose dire que les temps sont difficiles et la caisse
médiocrement garnie, s’il prêche l’économie, s'il cherche à
capitaliser, s'il se plaint beaucoup, on l’accuse de troubler la fête
et d'écarter les hommes de bonne volonté par son pessimisme.
La sagesse lui conseille donc d’être sobre en ses discours et de se
fier non seulement à l’éloquence des chiffres, qui le dispensera
lui-même de tout effort oratoire, mais à l'esprit de ses audi-
teurs et lecteurs, qui liront entre les lignes et les chiffres, et
qui, dans le cas'actuel, puisqu'ils sont tous hellénistes ou phil-
hellènes, ne sauraient manquer d'apporter à cette lecture la
finesse de l'atticisme le plus pur.
Sans autre préambule, je vais donc vous présenter, Mes-
sieurs, les tableaux habituels de nos recettes et dépenses avec
notre projet de budget pour 1903, en y joignant tout au plus
— ΧΧΥΤῚ —
quelques notules que je tâcherai de rendre aussi brèves et dis-
crètes que possible.
I. État comparatif des Recettes en 1901 et 1902,
. A. Intérêts de capitaux.
1901 1902
je Rente Deville 3 0/0.............. . 500 » 7 500 »
2° Coupons de 154 obligations Ouest. 2,212 12 2,212 15
3° Coupons de 18 obligations Midi.... 259 20 » 3,120 62 259 20 } 342 »
4o Coupons de 9 obligations Est...... 129 60 129 60
5° Intérêts du compte courant...... 49 70 | 20 05
B. Subventions οἱ dons divers.
6° Subvention du Ministère de l'Ins-
truction publique......,.....,... 500 » 500 »
70 Don de l'Université d'Athènes (500
drachmes)...............,....... 298 οἱ 9810 998 45, 198 45
8° Dons pour l'illustration de la Revue. 100 » » »
9° Don sans affectation spéciale....., 100 » » »
C. Cotisations, ventes, recettes diverses.
100 Cotisations des membresordinaires. 3,110 » 3,947 80
119 Souscriptions de membres dona-
teurs ........,.. sonne soc 200 » ? 4,344 85 200 » ? 4,472 75
12° Vente de publications et médailles. 264 85 304 95
139 Location d'une cave............... 10 » : 20 »
8,363 51 8,392 20
Il. É‘tat comparatif des Dépenses en 1901 et 1902.
A. Publications.
190! 1902
“ππΠππ͵ Πρὸ,
49 Revue des Études grecques........ 4,181 30 ᾿ 2,504 »
99 Bibliographie (rédaction de la)... 800 "ἡ 81 30 opp , { 2708 Ὁ
B. Encouragements.
3° Prix Zographos.............. ... 41,000 » 1,000 »
4 Prix classiques........,.....,.,.... 94 50 » 1,394 50 88 30 ἰ 1,088 30
ὅο Concours typographique........…. 300 » » »
-- χχιχ --
C. Frais généraux.
60 Impressions diverses............. 115 65 78 60
Te Loyer, impositions et assurance. 904 » 904 10
8° Service du palais des Beaux-Arts... 27 » 213 »
99 Indemnité de l'agent bibliothécaire. 1,000 » 1,000 »
10° Droits et frais divers à la Société
générale .........,............. 33 20 34 90
119 Distribution de publications..... 532 14 » 3,223 33 469 64 » 3,251 50
12° Recouvrement des cotisations..... 148 99 101 90
130 Frais de bureau, commis, corres-
pondance et divers.....,....... 216 40 211 46
14o Nettoyage, éclairage et chauffage. ΤΊ 85 ΤΊ 30
159 Médailles. .........,.............. 9 35 » »
16° Reliure de livres........... uses 158 75 100 60
8,999 13 1,043 80
III. Budget sur ressources spéciales ou fondation Zappas.
(La dépense affectée chaque année au prix Zappas est égale au revenu de Ja
fondation pendant l’année précédente.)
Recettes en 1901 : 336 fr.
Dépenses en 1902 : 336 fr.
Recettes de l'exercice 1902 (encaissées seulement en 1903) :
337 fr. 50.
- Montant du prix en 1903 : 337 fr. 50.
IV. Mouvement des fonds en 19092.
Solde en caisse au 15 janvier 4902...,......... 3,088 92
Recettes en 1902 (tableau ci-dessus n° D)....... 8,392 20
11,481 12
Sorties de caisse (tableau n° IT)...... 7,043 80
Prix Zappas...................... 336 »
7,319 80 7,379 80
Il reste donc en caisse au 31 décembre 1902, là σπτΠΒ τ΄ -
solde à la Société Générale.
“- XXX —
De tout ce qui précède, Messieurs, il ressort que notre exer-
cice 1902, comparé à l'exercice 1901, accuse une plus-value de
Recettes de 28 fr. 63, et dans les Dépenses une diminution de
1,955 fr. 33. Sur les Recettes, il faut vous signaler qu’en dehors
des subventions habituelles du Ministère de l’Instruction
publique et de l'Université d'Athènes nous n'avons encaissé
aucun don, etque, si le chiffre des cotisations s’est relevé, c’est
moins par une augmentation du nombre des membres que par
une plus grande régularité dans l'apport de quelques cotisa-
tions étrangères payées avant le 31 décembre 1902. Quant à
la diminution des Dépenses, elle provient, pour 300 francs, de
l'absence de concours typographique en 1902, ct, pour le reste,
d'une diminution passagère et fortuite dans les frais d'illustra-
tion et d'impression de la Revue, où il est difficile d'éviter les
retards et d’arriver à faire les paiements dans l’année pour
laquelle ils ont été prévus.
Nous remarquerons aussi que, les Recettes s'étant élevées à
8,392 fr. 20 et les Dépenses à 7,043 fr. 80, l'exercice 1902 se
solde par une différence en plus de 1,348 fr. 40, ou de 1,148 fr. 40
déduction faite de deux rachats de cotisations, ceux-ci étant
toujours destinés en principe à être capitalisés ou mis en
réserve pour parer à quelque dépense extraordinaire. Mais vous
venez de voir que la cause principale de cet important reliquat
est une diminution exceptionnelle dans un de nos chapitres de
Dépenses. Il ne faut donc pas en conclure précipitamment que
nous n'avons plus besoin d'augmenter nos ressources.
Voici muntenant de quelle manière nous vous proposons
d'établir le budget de 1903.
V. Recettes prévues pour 1903. -
A. Intérêts de capitaux.
1° Rente Deville 30/0............. 500 »
2° Coupons de 154 obligations Ouest. 2,212 20
3° Coupons de 18 obligations Midi... 259 20
À reporter......... 2,971 40 2,971 40
Report........,........ 2,971 40
&° Coupons de 9 obligations Est. ... 129 60
5° Intérêts du compte courant....... 20 449 60
6° Pris sur le reliquat de l'exer-
cice 1902.................... 300 »
B. Subventions et dons.
6° Subvention du Ministère de l’Ins-
truction publique............ 500 » 702
1° Don de l’Université d'Athènes ! "
(418 drachmes) (1)............ 292 »
C. Cotisations et ventes.
8° Cotisations des membres ordi-
DATES. .........,...........e 4,000
9° Vente des publications et mé-
dailles. ..................... 250 »
ΤΟΤΑΙ, 8,463 »
VI. Dépenses prévues pour 1903.
A. Publications.
1° Arriéré de 1902 : impression du
n° 67, supplément, brochage... 1,216 »
2° Année 1903 : impression, moins le 9 956
dernier numéro de l’année..... 2,240 ν᾽ ?
3° Illustration.................... 300 »
&° Rédaction de la Bibliographie. 200 »
B. Encouragement.
5° Prix Zographos................. 1,000 »
6° Prix classiques. ........ nos. 100 »}1,400 »
1° Concours typographique......... 300 »
À reporler........,...... . D,356 »
(1) Au lieu de 500 ; nous avons été informés que l'Université d'Athènes rédui-
sait de 5 0/0 £oules ses subventions.
C. Frais généraux.
8° Loyer, impositions, assurance... 9140 »
9° Indemnité del’agent-bibliothécaire. 1,000 »
10° Service du palais des Beaux-Arts. 120 »
11° Impressions diverses............ 67 »
12° Frais divers et droits à la Société
Générale..................... 35 »
13° Distribution de publications..... 470 »\3.107 »
14° Frais de recouvrement........... 110 »
45° Frais de bureau, de commis, de
correspondance et divers...... 220 »
46° Nettoyage, éclairage, chauffage …… 15 »
17° Reliure de livres pour la biblio-
thèque....................... 400 »
8,463 »
Nous prévoyons donc pour 1905 en Recettes et en Dépenses
un chiffre égal de 8,463 francs. Votre fidélité et votre zèle assu-
reront et au-delà, nous n'en doutons pas, la réalisation des
Recettes. Comptez d'autre part sur votre Commission adminis-
trative pour assurer avec vigilance la bonne gestion et l'emploi
judicieux de ce que vous nous confez pour l’encouragement et
le progrès des études qui vous sont chères.
Pour les membres de la Commission administrative,
Le trésorier, Max Eccer.
— XXXII —
MEMBRES FONDATEURS DE L'ASSOCIATION GG COTE D
(4867) F fe
Ÿ MAR 9 1904 “
* ,
ΜΝ. | | CAMBRipge, MAS:
+ ADER, ancien professeur de littérature grecque à l'Académie de
Genève, rédacteur en chef du Journal de Genève (1).
+ ALEXANDRE (Oh. membre de l'Institut.
BERTRAND (Alexandre), membre de l'Institut, directeur du Musée des
antiquités nationales de Saint-Germain.
+ BEULÉ, secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts.
BRÉAL (Michel), membre de l'Institut, professeur au Collège de
France.
+ BRUNET DE PRESLE, membre de l'Institut.
Burnour (Émile), ancien directeur de l'École française d'Athènes.
CampAUx, professeur honoraire à la Faculté des lettres de Nancy.
CaASSANG, inspecteur général de l'Instruction publique.
Τ DAREMBERG, conservateur de la bibliothèque Mazarine.
Τ Davi (baron Jérôme), ancien vice-président du Corps législatif.
Γ DERÈQUE, membre de l'Institut. |
DELYANNI (Théodore-P.), ancien président du Conseil des ministres à
Athènes.
- Device (Gustave), membre de l'École d'Athènes.
+ Dinor (Ambroise-Firmin), membre de l'Institut.
Ι DüBnER, helléniste.
Duruyx (Victor), de l'Académie française, ancien ministre de
l'Instruction publique.
+ Eccer, membre de l'Institut, professeur à la Faculté des lettres
de Paris. .
+ EicaTHaL (Gustave d'}, membre dela Société asiatique.
GEL, ancien proviseur du lycée Condorcet.
GirarD (Jules), membre de l’Institut, ancien professeur à la Fa-
culté des lettres de Paris, directeur de l’Institut Thiers.
Gouxy, rédacteur en chef de la Revue de l’Instruction publique.
GUIGNIAUT, secrétaire perpétuel de l’Académie des Inscriptions.
Haver (Ernest), membre de l'Institut, professeur au Collège de
rance.
Heuzey (Léon), membre de l'Institut, professeur à l’École des
Beaux-Arts.
Hicnar», professeur à la Faculté des lettres de Lyon.
HizLEBRAND, ancien professeur à la Faculté des lettres de Douai.
Jourpan (Charles), membre de l’Institut.
LEGOUvÉ, de l’Académie Française.
(1) La eroix indique les membres fondateurs décédés.
— XXXIV —
LONGPÉRIER (Adrien de), membre de l’Institut.
Maury (Alfred), membre de l'Institut.
MÉLAS (Constantin), à Marseille.
Mizzer (Emm.), membre de l'Institut.
NauDeT, membre de l'Institut.
À Parin, de l'Académie française, doyen de la Faculté des lettres
de Paris.
PERROT (Georges), membre de l’Institut, directeur de l'École nor-
male supérieure.
Ravaisson (Félix), membre de l’Institut.
RENAN (Ernest), de l'Académie française.
RENIER (Léon), membre de l'Institut.
SAINT-MARC GiRARDIN, de l'Académie française.
THENON (l'abbé), directeur de l'École Bossuet. |
TauroT, membre de l'Institut, maître de conférences à l'École
normale supérieure.
VALETTAS (J.-N.), professeur à Londres.
VILLEMAIN, secrétaire perpétuel de l'Académie française.
VINCENT (A.-J.-H.), membre de l'Institut.
WaADDINGTON (W.-Henry), membre de l'Institut, sénateur.
Wiz (Henri), membre de l'Institut.
WeEscHEer (Carle), ancien professeur d'archéologie près la Biblio-
thèque nationale.
+ WiTTE (baron J. de), membre de l'Institut.
ἰ vers (Charles), membre de l'Institut.
|
SOUSCRIPTIONS EXCEPTIONNEELES
POUR LES MONUMENTS GRECS & L'ILLUSTRATION DE LA REVUE
M. Zocraruos, déjà fondateur du prix qui porte son nom, a sous-
crit à l'œuvre des Monuments grecs pour une somme de cinq mille
francs. — M. le baron DE Wrrte et M. G. ν᾽ EircaraaL ont souscrit cha-
cun pour une somme de quatre cents francs. — M. le baron E. DE
RoTSCHILD, pour deux cents francs. — M. BIRÉLAS, pour cent francs
(outre sa cotisation). — De même M. LAPERCHE pour cent francs. —
M. PÉLICIER, pour cent francs. — M. Jean Dupuis, pour deux cent cin-
uante francs. — M. Adolphe CRÉVRIER, déjà fondateur pour les
Monuments grecs, a versé cent francs pour l'illustration de la Revue.
— M. Vasnier et M. Εἰ. D'EIcHTHAL, dans les mêmes conditions, ont
versé chacun cent francs. — Mlle Ponsor ἃ versé cent francs. —
M. le duc DE LOUBAT a versé neuf cents francs.
2
-- XXXV ---
MEMBRES FONDATEURS POUR LES MONUMENTS GRECS
ET POUR L’ILLUSTRATION DE LA REVUE
Le Ministre de l'Instruction publique.
Le Musée du Louvre.
L'École nationale des Beaux-Arts.
L'Université d'Athènes.
Le Syllogue d'Athènes pour la propagation des études grecques.
Le Syllogue littéraire hellénique du Caire. l'Union.
Le Gymnase A véroff à Alexandrie (Egypte).
MM. | MM.
BARTHÉLEMY SAINT-HILAIRE. Lougar (duc de).
Basizy (Demetrius). + Misro (H.-P.).
BIKÉLAS (D.) NEGROPONTIS.
BRAULT (Léonce). + OCHER DE BEAUPRÉ (colonel).
BRUNET DE PRESLE. ARMENTIER (général).
CARATHÉODORY-EFFEND: (Étienne). + PéLictER (P.).
Τὰ Casrorcui (Euthymios). PÉPIN-LEHALLEUR.
CaasLes (Michel). PERROT (Georges).
VRIER Adolphe). PIAT (A.).
CoziGNon (Maxime). PoTTIER (Edmond).
CoROMILAS. + QuEux DE SAINT-HILAIRE (mar-
Dmor (Amb.-Firmin). quis de)
DRÊXE. REINACH (Salomon).
+ Dumonr (Albert). Reinacx (Théodore).
ΐ Dupuis (Jean). + Ropocanacui (P.).
Τ ÉGGER El. Rorascxii (baron Edmond de).
7 ErcaTHaL (Gustave d'). =? SaræoLos (Nicolas).
ÉICHTHAL ἌΝ d'). SYMVOULIDIS.
FoucarT (Pau Ι SYNGROS (A.).
GRAUX Hour VANEY.
HAcuETTE et Cie, libraires édi- VASNIER.
teurs. VERNA (baron de).
+ HANRIOT. WiTTE (baron J. de).
Heuzey (Léon). WynpxAm (Charles).
LAPERCHE. WynpHAM (George).
+ LAPRADE (V. de). ZAFIROPULO (E.).
LECOMTE (Ch.).
Zocrarnos (Christaki Effendi).
LEREBOULLET (Léon).
«-
— χχχνὶ --
ANCIENS PRÉSIDENTS DE L'ASSOCIATION
4867. MM. PATIN, membre de l’Institut.
1868. Id.
EGGEr,
1869. BEULÉ, Id.
1870. BRUNET DE PRESLE, 716.
1871. EGcer, Id.
1872. THUROT, Id.
1873. MILLER, Id.
1874. HEUZEY, Id.
1878. PERROT, Id.
1876. EGGEr, Id.
1871. CaAssANG, inspecteur général de l'Université.
1878. FoucarT, membre de l’Institut.
1879. GIbEL, proviseur du Lycée Condorcet.
1880. DARESTE, membre de l'Institut.
1881. EIL, Id.
1882. MILLER, Id.
1883. Queux-DE-SAINT-HILAIRE (marquis de).
1884. GLACHANT, inspecteur général de l'Université.
1885. JourDAN, membre de l'Institut.
1886. GRÉARD, Id.
1887. GIRARD 9 ules), 14.
1888. MÉZIÈRES, Id.
1889. CROISET (A.), Id.
1890. MASPERO, Id.
1894. RENAN (Ernest), Τά.
1892. Ηουύβϑϑαγε (Henry),
1893. COLLIGNON ( μὰν AN
Id
1896. BRÉAL M membre de l'Institut.
1897. DECHARME (P.), professeur à la Faculté des
lettres.
1898. Croiser (M.), membre de l'Institut.
1899. HÉRON DE VILLEFOSSE, 16.
1900. D'ErcaTHAL (Eugène).
1904. GIRARD (P.), professeur à l'Ecole Normale supé-
rieure.
1902. Renacx (Salomon), membre de l'Institut.
ΜΜ.
MM.
MM.
MM.
MM.
— XXXVIL —
MEMBRES DU BUREAU POUR 1905-1904
Président : M. POTTIER.
der Vice-Président : M. TANNERY.
® Vice-Président : M. GuIRAuUD.
Secrétaire-archiviste : M. Am. HAUVETTE.
Secrétaire-adjoint : M. Purcs.
Trésorier : M. Max EGcEr.
MEMBRES DU COMITÉ POUR 1903-1904
Nommés en 1901.
BABELON. _ MM. Houssaye.
BRÉAL. RUELLE.
D'EIcHTHAL. MicRoN. -
DARESTE.
Nommés en 1902.
CroIseT (Alfred). MM. Omonr.
COLLIGNON. WEIL.
GIRARD. BERNÈS.
DECHARME.
Nommés en 1908.
CroiseT (Maurice). MM. Lecrann (Émile).
REINACH (S.). GLACHANT (Victor).
SCALUMBERGER. ΒΟΡΙΝ.
Monceaux (Paul).
COMMISSION ADMINISTRATIVE
BIKÉLAS. MM. MASPERo.
CRoISET {Alfred). PorrIER (E.).
DARESTE. RuELLE (C.-Ém.).
D'ErcarHar (Eug.). VASNIER.
Houssaye (Henry).
COMMISSION DE PUBLICATION
BIKÉLAS. ᾿ς MM. Remacx (Théodore), rédac-
HAUSSOULLIER. teur en chef-gérant de la
HoussaYye (Henry). Revue.
MASPERO. Les anciens PRÉSIDENTS de :
l'Asssociation.
COMMISSION ARCHÉOLOGIQUE
CoLLIGNON (Max... MM. MaRTHA (J.
GUILLAUME. PERROT (G. |
HAUSSOULLIER. PoTTIER (E.).
HÉRON DE VILLEFOSSE. REINACH (TE, ).
HEuzEY (L.). SAGLIO.
HOMOLLE.
— XXXVII —
MEMBRES DONATEURS
MM.
+ ACHILLOPOULO, à Paris.
Apau (M"° Juliette), à Paris.
ALPHERAKIS (Achille), à Saint-Pétersbourg (Russie).
+ ANQUETIL, inspecteur d'Académie honoraire, à Versailles.
ANTROBUS (Fr.), à Londres.
+ ATHANASIADIS (Athanasios), à Taganrog.
AuvrAY (l'abbé Emmanuel), à Rouen.
+ AVIERINO (Antonin), à Taganrog.
BALTAZZI, député, à Athènes.
BANQUE NATIONALE de Grèce, à Athènes.
BARENTON (Arm. de), à Paris.
+ BARET, avocat à Paris.
+ Basranis (Hiéroclès-Constantin), à Constantinople.
Βαβι (Michel G. Α.), docteur en droit, à Athènes.
BassiA (Typaldo), avocat à la Cour suprême à Athènes.
BEaupouIN (Mondry), correspondant de l'Institut, professeur à la
Faculté des lettres de Toulouse.
Beer (Guillaume), à Paris.
BERRANGER (l'abbé H. de), à Trouville.
BERTHAULT (E. A.), docteur ès lettres, à Paris.
BeuLé (Ernest), secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-
Arts.
+ BIENAYMÉ (Jules), membre de l'Institut.
BIKÉLAS D à Athènes (1).
ΒΙΜΡΟΒ (Th.) archevêque de Mantinée.
Bisris (Michel-L.), à Corthion (d'Andros), Grèce.
BLAMPIGNON (l'abbé), à Vanves.
+ Bounos (Élie), à Paris.
BousquET (l'abbé), maître de conférences à l'Institut catholique
de Paris.
+ BOUTROUE, à Paris.
BraïLAs (Armenis), ministre de Grèce, à Londres.
+ BRAULT (Léonce), ancien procureur de la République, à Paris.
BROSSELARD (Paul), lieutenant-colonel en retraite, à Vendôme.
+ BRUNET DE PRESLE (Wladimir), membre de l'Institut.
BRYENNIOS ! Philothéos). archevêque de Nicomédie (Turquie).
+ CALVET-ROGNIAT (le baron Pierre), licencié ès lettres, à Paris.
CARAPANOS (Constantin), correspondant de l’Institut, à Athènes.
CARATHEODORY-ÉFFENDI {Ét.), ancien ministre de Turquie, à Bruxelles.
CARTAULT Sr professeur à la Faculté des lettres de Paris.
Casso (Μὴ, à Kischeneff (Russie).
+ CasrorcgIs (Euth.), professeur à l'Université d'Athènes.
CERCLE HELLÉNIQUE d'Alexandrie (Égypte).
CHAPLAIN (J.-C.), membre de l'Institut.
+ CHaramiS (Adamantios), professeur à Taganrog.
(1) Don d'une somme de 200 francs.
— XXXIX —
+ CHasLes (Michel), membre de l'Institut.
CHASLEs (Henri), à Paris.
CHASSIOTIS vi fondateur du lycée de Péra, à Paris.
CHÉVRIER (Ad.), avocat-général, à Paris.
CHÉVRIER Maurice , attaché au Ministère des affaires étrangères.
Caoisy (Auguste), inspecteur général honoraire des ponts et chaus-
sées, à Paris.
+ CBRISTOPOULOS, ministre de l’Instruction publique en Grèce.
CHRYSOVELONI (Léonidas), négociant, à Athènes.
Crano (Costa), à Londres.
CLapo, docteur, à Paris.
CoLARDEAU, professeur à l'Université de Grenoble.
Cou (Armand et Ci°), libraires-éditeurs, à Paris.
CoMBoTHECRAS (Sp.), à Odessa.
ConsTaNTINIDIS (Zanos), à Constantinople.
Consras (H. Lysandre), directeur de l'Ecole hellénique, Odessa.
CorGIALEGNO (Marino), banquier, à Londres.
+ Coronio (Georges), à Paris.
f Coumanoupis (Et.-A.), correspondant de l’Institut, professeur à
l'Université d'Athènes.
Courcez (baron Alphonse de), sénateur, ancien ambassadeur à
Londres.
CousTÉ (E.), ancien directeur de la manufacture des tabacs, à Paris.
Couve (L.), professeur à la Faculté des lettres, à Nancy
Croitser (Alfred), membre de l'Institut, doyen de la Faculté des
lettres de Paris.
Crorser (Maurice), membre de l’Institut, professeur au Collège de
France, à Versailles.
CucaevaL (Victor), professeur honoraire au lycée Condorcet, à Paris.
DaLzMEYDA (G.), professeur au lycée Michelet, à Paris.
+ DAMASCHINO, professeur à la Faculté de médecine de Paris.
DARESTE (Rod.), membre de l'Institut, à Paris.
DECHARME (Paul), professeur à la Faculté des lettres de Paris.
DELLAPORTA (Brasidas), à Taganrog. ; :
DELYANNI (N.), ministre de Grèce, à Paris.
DEMETRELIAS (C.), à Odessa.
DessaRDins (Charles-Napoléon), membre de l’Institut.
DESJARDINS (Μ 9 veuve Charles-Napoléon), à Versailles (1).
+ DEvizze (Gustave), docteur ès lettres, membre de l'École fran-
çaise d'Athènes.
Device (M®° veuve), à Paris (2).
Diniow, inspecteur général des ponts et chaussées.
Dior (Ambroise-Firmin), membre de l'Institut.
Dinor (Alfred), libraire-éditeur, à Paris.
Dieux, professeur au lycée de Nantes.
+ Dorisas (rh à Odessa.
Dossros (N.), professeur à l’école commerciale supérieure de Iassy.
(ς Don d'une somme de 150 francs.
(2) Don d'une rente annuelle de 500 franes,
— XL —
Doupas Ge); à Constantinople.
DouLcer (Mgr), évèque de Nicopoli, à Paris.
Dozon (Aug.), ancien consul de France,
DRÊME, président de la Cour d'appel d'Agen.
Dumonr (Albert), membre de l'Institut.
Dupuis, proviseur honoraire, à Paris.
DürRBACH, professeur à la Faculté des lettres de Toulouse.
+ Duruy (Victor), de l'Académie française.
DussoucET, professeur au lycée Henri IV, à Paris.
Écore Bossuel, à Paris.
Écoce Hellénique d'Odessa.
Écoces publiques orthodoxes de Chios.
Éper, professeur au lycée Henri IV, à Paris.
EGGEr (Émile), membre de l'Institut.
ÉGGEr (M=° veuve Ém.), à. Paris.
EGcer (Max), professeur au lycée Henri IV.
EGGEr EVictor), professeur-adjoint à la Faculté des lettres de Paris.
+ ErcaTaaL (Gustave d”’), membre de la Société asiatique, à Paris.
EIcHTHAL (Eugène d'), à Paris.
ESTOURNELLES DE CONSTANT (baron Paul d’), député, à Paris.
ExPErT (Henry), publiciste, à Paris.
FALIEROS (Nicolas), à Taganrog (Russie).
FALLEx (Eug.), proviseur honoraire du lycée Charlemagne.
FALLIÈRES, président du Sénat, ancien ministre de la Justice et des
ultes.
+ FERRY (Jules), ancien président du Sénat.
Fix (Théodore), colonel d'état-major, à Paris.
FoucarT (Paul), membre de l'Institut.
Fournier (M®° veuve Eugène), à Paris.
GENNADIUS (J.), ancien ministre de Grèce, à Londres.
GEVAERT (F.-Aug.), directeur du Conservatoire royal de musique
à Bruxelles.
GIANNAROS (Thrasybule), négociant, à Constantinople.
GIDEL (Ch.), ancien proviseur du Lycée Condorcet.
GiLzLon (Félix), magistrat à Bar-le-Duc.
ILLON (G.), à Paris.
+ GIRARD b ules), membre de l'Institut, directeur de l’Institut Thiers.
GiRARD (Paul), maitre de conférences à l'École normale supérieure.
+ GIRAUD (Ch.), membre de l'Institut.
+ GLACHANT (Ch.), inspecteur général de l'Instruction publique.
ŒLZER, maître de conférences à l'École normale supérieure.
Gorranp (Léonce), avoué près la Cour d'appel de Paris.
GorrAnD (Léopold), avoué près le tribunal civil de la Seine, à Paris.
GozpscamiT (Léopold, à Paris.
GonnET (l'abbé), docteur ès lettres, à Écully, près Lyon.
GRANDIN (A.), à Paris.
Graux (Henri), à Vervins (Aisne). :
GRÉARD, de l’Académie française, recteur honoraire de l'Université de
aris.
Τ GRÉGOIRE, archevèque d'Héraclée, à Constantinople.
Γ GUMUCHGUERDANE (Michalakis), à Philippopolis.
- XLI —
GryPARIS (N.), consul de Grèce, à Sébastopol.
GYMNASE AVÉROFF, à Alexandrie (Égypte).
GYMNASE DE JANINA.
HAcuETTE (L.\ et C!°, libraires-éditeurs, à Paris.
+ HaNRIOT (H.), professeur honoraire de Faculté, à Chartres.
HauverTE (Amédée), maître de conférences à l'École normale supé-
rieure.
+ HAvET (Ernest), membre de l'Institut, professeur au Collège de
France.
+ HAver (Julien), bibliothécaire à la Bibliothèque nationale.
HaveT (Louis), membre de l'Institut, professeur au Collège de France.
HÉRIOT-BUNOUST (l'abbé L.), à Toulouse.
+ HEUZEY, conseiller à la cour d'appel de Rouen.
HeuzeYy (Léon), membre de l'Institut.
Hopçt ErFFENDi (Jean), conseiller d'État, à Constantinople.
Houssaye (Henry), de l'Académie française.
+ INGzEssIS (Alex.), à Odessa.
INGLEssis (P.), à Marseille.
JAMOT (Paul), conservateur-adjoint au musée du Louvre.
Jasonrpis, à Limassol (île de Chypre).
Joanniis (Emmanuel), scholarque, à Amorgos (Grèce).
? JOLLY JUS" (D.-M.) au château de Crazannes (Charente-Infé-
rieure).
JornAN (Camille), membre de l'Institut, à Paris.
JorET (Ch.), membre de l'Institut, à Paris.
+ Kazvocoressis (J. Démétrius), négociant, à Constantinople.
KoNTOSTAvLoOs (Alexandre), ancien ministre à Athènes.
KonrosravLos (Othon), à Marseille.
KosTÈs (Léonidas), à Taganrog.
Kounpourt (Panaghi), à Marseille.
Krivrzorr (M°*°), en Russie.
LABITTE (Adolphe), libraire à Paris. |
Lacroix (Louis), professeur à la Faculté des lettres de Paris.
LAFAYE (Georges), professeur-adjoint à la Faculté des lettres de Paris.
LALoy, agrégé des lettres, à Paris.
+ Lamy (Ernest), à Paris.
LANDELLE (Charles), peintre, à Paris.
LAPERCHE, à Paris (1).
LATTRY (A.), à Odessa.
LaTrry (Georges), président du musée et de la bibliothèque de
l'École évangélique, à Smyrne.
+ LATTRY (D' Pélopidas), à Odessa.
LazzaRO (Périclès-H.), vice-consul des Etats-Unis, à Salonique.
LEBÈGUE (Henri), chef des travaux paléographiques à l’École des
Hautes Études.
LE Brer (M®°), à Paris.
LecaT, chargé de cours à la Faculté des lettres, Lyon.
LEcouTE (Ch.), négociant à Paris.
(1) Don d'une somme de 100 franes,
— XLII —
LEGANTINIS GE) négociant à Odessa.
+ LEGRAND (Émile), professeur à l'Ecole des langues orientales
vivantes, à Paris.
LEREBOULLET (D° Léon), membre de l’Académie de médecine.
+ Lessers (Ferdinand de), de l'Académie française.
LeunEeT (M*° Ve), à Piencourt, par Thiberville (Eure).
+ Leviez (Ernest), à Paris.
LouBarT (duc de), à Paris.
+ Lupcow (Th.-W.), à New-York.
Lur-SALUCES (comte de), à Paris.
MaAcniLLan (Georges-A.), éditeur, à Londres.
MaGclar (Octave), négociant, à Paris.
MAISONNEUVE (Jean), libraire-éditeur, à Paris.
+ MALLORTIE Ἢ de), principal du collège d'Arras.
Manoussi (Démétrivs de), à Paris.
MANUSSIs (Conetantin de), à Athènes.
MANZAviINosS (R.), à Odessa.
MARANGO (Mer), archevêque latin d'Athènes.
MARCELLUS (comte Édouard de), ambassadeur de France à Cons-
tantinople.
+ MarTIN (Th.-Henri), membre de l'Institut.
ΜΑΒΡΕΒῸ (G.), membre de l'Institut, directeur général du service
des antiquités et des musées Égyptiens, au Caire.
+ MauRICE (M° Ch.) née Vincent.
Maurice (Jules), associé correspondant national de la société des
Antiquaires, à Paris.
Mavro (Sp.), à Athènes.
+ Mavrocorparo (le prince Nicolas), ancien ministre de Grèce à Paris.
MAVROCORDATO (le colonel Alexandre-Constantin).
MAVROGORDATO (Μ.), à Odessa.
MaAVROMICHALIS (Kyriacoulis Petrou), ministre, à Athènes.
Maxmos (P.), à Odessa.
+ MAZEROLLE (Joseph), artiste peintre, à Paris.
+ MELAS (B.), à Athènes.
MELAs (Léon), à Athènes.
+ METAXAS (Stavro), à Marseille.
MEYER (Paul), membre de l'Institut, directeur de l’École des Chartes.
Micuox (Étienne), conservateur-adjoint au Musée du Louvre.
MizieT (Paul), à Paris.
+ Misro (H.-P.), négociant, à Smyrne (1).
Μονοξαῦχ (Paul), professeur au lycée Henri IV, à Paris.
MoncinoT (Alfred), professeur au lycée Condorcet, à Paris.
MouRiIER (A.), vice-recteur honoraire de l'Académie de Paris.
7 NEGROPONTE (Michel), négociant à Paris.
NEGROPONTE (Démétrios), à Taganrog.
+ NEGROPONTE (Jean), à Paris.
NEGROPONTES NE) à Paris.
NicoLAÏDÈS (G.), de l’île de Crète, homme de lettres, à Athènes.
(1) Don d'une somme de 800 francs.
— XLIII —
NicoLaïpEs (Nicolas), à Taganrog.
NicocoPpouLo (Jean-G.), à Paris.
NicOLOPOULO Nicolas ἃ.) à Paris.
Nozuac (P. de), conservateur du Palais de Versailles.
Omonr (Henri), membre de l'Institut, conservateur à la Bibliothèque
nationale.
PAISANT (A.), Président du tribunal civil, à Versailles.
PAPADIMITRIOU (Sinodis), professeur à l’Université d’Odessa.
PARASKEvAS (Wladimir), à Odessa.
PARISSI, à Paris.
PARMENTIER (le général Théodore), à Paris.
+ PASPATI (J.-F.), à Odessa.
PAspaT1 (Georges), à Athènes.
+ PATIN, secrétaire perpétuel de l'Académie française.
+ PÉLICIER, archiviste de la Marne, à Châlons (1).
PERRARD (Emile), professeur au Collège Stanislas, à Paris.
PERRIN (Ernest.
PERRIN (Hippo te)
PErsoPOULO (N.), à Trébizonde (Turquie d'Asie).
+ PEsson, ingénieur en chef des ponts et chaussées, à Paris.
PEYRE (Roger), professeur au Lycée Charlemagne, à Paris.
+ Paarpys (Nicolas B.), à Samothrace.
Pispas (Dr. B.), à Odessa.
Ponsor (Mademoiselle), à Alfortville (Seine).
PoTTIER (Edmond), membre de l'Institut, professeur à l'École du
Louvre, à Paris.
+ PsicHA (Étienne), à Athènes.
+ QuEux DE SAINT-HILAIRE (marquis de), à Paris
RAGon (l'abbé), professeur à l’Institut catholique, à Paris.
RAMBAUD (led) sénateur, membre de l'Institut.
REINACH (Joseph), ancien député, à Paris.
REINAcH (Salomon), membre de l'Institut, conservateur au musée
gallo-romain de Saint-Germain.
REINACE (Théodore), directeur de la Revue des Études grecques, à
aris.
RENAULD, professeur au lycée, à Montauban.
+ ΒΈΝΙΕΒΙ (Marc), gouverneur honoraire de la Banque nationale,
à Athènes.
+ RIANT (comte Paul), membre de l'Institut et de la Société des
antiquaires de France, à Paris.
+ RICHARD-KŒNIG, à Paris.
Riper (de), professeur à la Faculté des Lettres d'Aix.
RISTELHUBER, ancien bibliothécaire, à Strasbourg.
RoBERTET, licencié ès lettres, chef de bureau au ministère de
l'Instruction publique.
RocHEMONTEIx (Mi de), à Paris.
Ropocanacai (Th.-P.), à Odessa.
+ Ropocanacxi (Pierre), à Paris.
(1) Don d'une somme de 6,100 francs.
-- XLIV -
Ropocaxacai (Michel-E.), ἃ Marseille.
+ Romanos (J.), proviseur du Gymnase de Corfou.
Rorascaip (le baron Edmond de), à Paris.
RuELLE (Ch.-Émile), administrateur de la bibliothèque Sainte-
Geneviève.
SARAKIOTIS (Basile), à Constantinople.
SARAPHIS (Aristide), négociant, à Mételin.
+ SaRIPOLOS (Nicolas), professeur à l'Université d'Athènes.
SATHAS (Constantin), à Paris.
SAYCE, professeur à l’Université d'Oxford.
SCARAMANGA (Pierre-Jean), à Neuilly-sur-Seine.
SCARAMANGA (Jean-E.), à Marseille.
SCARAMANGA (Jean-A.), à Taganrog.
SCARAMANGA (Doucas-J.), à Taganrog.
Ÿ SCARAMANGA (Jean-P.), à Taganrog.
SCARAMANGA (Stamatios), à Taganrog.
SCHLIEMANN (H.), à Athènes.
ScRLUMBERGER (Gustave), membre de l'Institut, à Paris.
+ ScLavo (Michel), à Odessa.
SIBIEN (Armand), architecte, à Paris.
SINADINO (Michel), à Paris.
SINADINO (Nicolas), à Paris.
SINANO (Victor), à Paris.
Soxaxis (M° Hélène), à Paris.
Soucau-SERVINIÈRE, à Laval.
SouTzo (prince Grégoire C.), ancien sénateur de Roumanie, à
Bucarest. |
+ SourTzo (prince Constantin D.), à Slobosia-Corateni (Roumanie).
SouvanzoGLou (Basile), banquier, à Constantinople.
+ STEPRANOvIC (Zanos), négociant, à Constantinople.
SULLY-PRUDHOMME, de l’Académie française.
+ Svoronos (Michel), négociant, à Constantinople.
SYLLOGUE littéraire Hermès, à Manchester.
SYMVOULIDÈS, conseiller d'État, à Saint-Pétersbourg.
SYNGROS A+ à Athènes.
FRE PR ), directeur de la manufacture de tabacs, à Pantin
eine).
+ TARLAS (Th.), à Taganrog.
+ TELry, professeur à l'Université de Pesth.
THEOCHARIDES (Constantinos), à Taganrog.
TILIÈRE (marquis de), à Paris.
Toucanrp (l'abbé), professeur honoraire au petit séminaire de Rouen.
+TourniER (Éd.), maitre de conférences à l'École normale supé-
rieure, à Paris. -
TOURTOULON (baron de), à Valergues (Hérault).
TRAVERS, directeur des postes et télégraphes, à Montpellier.
TSACALOTOS (E.-D.), professeur à Athènes.
UNIVERSITÉ d'Athènes (1).
(1) L'Université d'Athènes s'inscrit annuellement pour une somme de quatre cents francs.
VALIERI (Jérôme), ἃ Marseille.
VALIERI (N.), à Odessa
VALIERI (Oct.), à Londres.
VASNIER, greffier des bâtiments, à Paris.
+ VENIERI (Anastase), ancien directeur de l'Institut héllénique à
Galatz (Roumanie), à Constantinople. |
VLasTo (Antoine), à Paris.
+ VLasro (Ernest), à Paris.
VLasro (Et.-A.), à Ramleh San Stephano, Alexandrie (Égypte).
VLASTO (Th.), à Liverpool.
VouLISMAS ( δ, archevêque de Corfou.
+ Vucina (Al.-G.), à Odessa.
Vucina (Emm.-G.), à Athènes.
Vucina (J.-G.), à Odessa.
WADDINGTON (W. Henry), membre de l'Institut, sénateur.
WescHEer (Carle), ancien professeur d'archéologie près la Biblio-
thèque nationale, à Paris.
XANTHOPOULOS pen Ὁ), à Odessa.
+ Xypias (Nicolas), artiste peintre à Paris.
Xyp14S (Sp.), à At ènes.
ZAPPAS ( onstantin) fondateur du prix Zappas.
ΖΑΒΙΡΗΙ (Geo rges) , négociant.
ZAVITZIANOS, octeur-médecin, à Corfou.
Zxro (L.), négociant, à Londres.
ZoGrApxos (C ristaki Effendi), fondateur du prix Zographos, à
Paris.
+ Zocrapgos (Xénophon), docteur-médecin, à Paris.
LISTE GÉNÉRALE DES MEMBRES AU 1* DÉCEMBRE 1903
Nora. Les astérisques désignent les membres donateurs.
MM.
ACKERMANN (l'abbé), professeur de philosophie au collège Stanislas,
51, rue Madame. — 1892.
* Ana (M*° Juliette), 498, boulevard Malesherbes. — 1883. |
ALBEAR (J. F. de), docteur, professeur de langue grecque à l'Uni-
versité de la Havane, île de Cuba. — 1894.
ALEXANDRE (le R. P.), du monastère Lavra, au Mont-Athos. — 1891.
ALLÈGRE, professeur à la Faculté des lettres de Lyon. — 1892.
* ALPHERAKIS (Achille). à Saint-Pétersbourg, Galernaïa 13. — 1869.
ANDREADÉS (M"°), fondatrice et ex-directrice de la maison d'éducation
franco-grecque du Caire, 9, rue Château-Fadaise, à Nîmes.— 1867.
ANTHONAY (d'}, ingénieur, 41, rue d'Assas. — 1903.
* ANTROBUS (Fr.), oratory, ὃ. W., à Londres. — 1879.
APOSTOLIDIS Gb à Constantinople. — 1880.
ARDAILLON, professeur à la Faculté des lettres de Lille. — 1899.
ASTERIADES, au consulat de Grèce à Salonique. — 1893.
ATHANASSAKI (Jean), avocat, au Caire . — 1880.
AupouIn (Ed.), professeur à la Faculté des lettres, 14, rue Le Cesve,
Poitiers. — 1895.
AUTIÉ (Fernand), professeur au lycée de Montpellier, 33, boulevard
Louis-Blanc. — 1893.
"AUVRAL, (l'abbé), curé de Saint-Joseph, à Rouen, 4, rue Bihorel.
— 1892.
BABELON (Ernest), conservateur au Cabinet des médailles, membre
de l'Institut, 30, rue de Verneuil, — 1890.
BAGUENAULT DE PUCHESSE (Gustave), docteur ès lettres, 156, rue
Bannier, à Orléans. — 1867.
BaizLy (Anatole), correspondant de l'Institut, professeur honoraire de
l'Université, à Orléans, 94, rue Bannier. — 1867.
* BacrTazz (Georges), député, 35, rue Acharnon, Athènes. — 1895.
* BANQUE NATIONALE DE GRÈCE, à Athènes. — 1868.
* BARENTON (Arm. de), 9, place du Palais-Bourbon. — 1877.
BarTE (A.), membre de l'Institut, 10, rue Garancière. — 1898.
* Basici (Michel G.-A.), docteur en droit, rue des Muses, à Athènes.
Βαβι (Alexandre de), 15, rue Lesueur. — 1894.
* BASSIA (ΤΥρΑ 60), avocat à la Cour suprême, agrégé de l’Université,
23, rue Philhellènes, Athènes. — 1895,
— XLVI —
BAYET (Ch.), directeur de l'enseignement supérieur au ministère de
l'Instruction publique, rue de Grenelle, 110. — 1875.
* BeaupouIN (Mondry), correspondant de l'Institut, professeur à
la Faculté des lettres de Toulouse. — 1884.
BEu et C', libraires-éditeurs, 52, rue de Vaugirard. — 1884.
BELLANGER (L.), docteur ès lettres, professeur au Lycée d'Auch. —
1892
BéraRD (Victor), maître de conférences à l'Ecole pratique des Hautes
Etudes, 58, rue de Vaugirard. — 1892.
BERGER. professeur au Lycée Voltaire, 72, avenue de la République.
— 1896.
BERNARD (Camille), architecte diplômé du Gouvernement, 21, rue
de l’Odéon. — 1902.
BERNÈS (Henri), professeur au Lycée Lakanal, membre du Conseil
δυρότιουν de l'Instruction publique, 127, boulevard Saint-Michel.
— 1893.
* BERRANGER (l'abbé H. de), curé de Saint-Mihiel, à Trouville
(Calvados). — 1869.
BERTRAND-GESLIN (M®° la baronne), 47, rue de Courcelles. — 1899.
BEURLIER (l'abbé), docteur ès lettres, chanoine honoraire, curé de
Notre-Dame-d'Auteuil, 4, rue Corot. — 1886.
BÉvorTE (ὦ. de), 51, rue Duplessis, à Versailles. — 1896.
Bisesco (prince Alexandre), 69, rue de Courcelles. — 1888.
BIBLIOTHÈQUE ALBERT DUMONT, à la Sorbonne. — 1890.
BIBLIOTHÈQUE de l'Université de Liège. — 1894.
BIBLIOTHÈQUE de l’Université de Tubingue. — 1900.
Bioez, professeur à l’Université, 39, boulevard Léopold, Gand. —
BiGNAULT (Ed.), 74, rue de la Victoire. — 1898.
* BIÉLAS (D.), 4, rue Valaoritis, Athènes. — 1867.
*“ Brmpos (Théoclète), archevêque de Mantinée (Grèce). — 1868.
* Bisris (Michel), ancien sous-directeur du Lycée hellénique de
Galatz, à Corthion (d’Andros), Grèce. — 1883.
* BLAMPIGNON (l'abbé), ancien professeur à la Faculté de théologie de
Paris, 17, rue d’Issy, à Vanves. — 1869.
BLANCHET (J.-Adrien), bibliothécaire honoraire au Cabinet des
médailles, 40, avenue Bosquet, Paris, vr*. — 1894.
BLocn (G.), maître de conférences à l'École normale supérieure,
12, rue d’Alésia. — 4871.
Boni, agrégé de l'Université, professeur au Collège Stanislas,
1, rue d’Assas. — 1894.
BoissiER (Gaston), de l'Académie française et de l’Académie des
inscriptions et belles-lettres, secrétaire perpétuel de l’Académie
française, au palais de l’Institut, 23, quai Conti. — 1869.
BonNassies (Jules), Marina dei Ronchi Massa, provincia di Massa
Carrara, Villa Anna (Italie). — 1893.
ΒΟΡΡΕ (Auguste), consul général de France, à Jérusalem — 1885.
BoRDEAUX (P.), 98, boulevard Maillot, à Neuilly-sur-Seine. — 1894.
Boucé-LECLERCQ (λ membre de l'Institut, professeur d'histoire
ancienne à la Faculté des lettres, 26, avenue de la Source, à Nogent-
sur-Marne (Seine). — 1902.
-- XLVIN —
Boupuors (Ch.-Henri), professeur au Lycée Henri IV, 12, rue du
Sommerard. — 1895.
BouprEAUx (Pierre), élève de l’école pratique des Hautes Etudes, 1,
rue des Poitevins. — 1904.
BouLAY DE LA MEURTRE (comte Alfred), 93, rue de l'Université. — 1895.
BourcauzT-Ducounray, professeur d'histoire musicale au Conser-
vatoire, 16, Villa Molitor, Paris Auteuil. — 1874.
BOURGUET (Émile), maître de conférences de littérature grecque
à la Faculté des lettres, à Montpellier. — 1897.
* BousqueT (abbé), professeur à l’Institut catholique, 41, rue d'Assas.
— 1897.
BourTuy (Émile), membre de l'Institut, directeur de l'École libre
des sciences politiques, 27, rue Saint-Guillaume. — 4870.
Bouvier, professeur de rhétorique au Lycée d'Orléans, 5, rue des
Huguenots. — 1
Bouvy (le R.-P. Edmond), docteur ès lettres, demi-rue à Louvain
(Belgique) — 1891.
BRÉAL (Michel), membre de l’Institut, professeur au Collège de
France, 87, boulevard Saint-Michel. — 1868.
BRENOUS (Joseph), professeur à la Faculté des lettres 36, boulevard
du Roi-René, Aix (Bouches-du-Rhône). — 1899.
BRÉTON (Guillaume), docteur ès lettres, éditeur, 79, boulevard Saint-
Germain. — 1898.
Brisac (le général), 8, rue Rougemont. — 1898.
BRIZEMUR, professeur au Lycée d'Angers. — 1903.
BROGLIE (duc de), député, 9, square de Messine. — 1888.
“ BRoSsELARD (Paul), lieutenant-colonel en retraite, officier de la
Légion, d'honneur, 8, 8, grand Faubourg, Vendôme (Loir-et-Cher).
* BRYENNIOS (Fhilothéos), archevêque de Nicomédie, membre du
synoge œcuménique de Constantinople, à Ismid (Turquie d'Asie).
— 187
BuISsoN Paule avc directeur du Collège Alaoui, Tunis. — 1870.
BUREAU ( aul,, avocat à la cour d'appel, 59, rue de Turenne. —
BuRILEANU, professeur à l'Université, 3 bis, str. Sevastopol, à Bucarest.
CAHEN, ancien élève de l’école d'Athènes, chargé de conférences à la
Faculté des Lettres, rue du Quatre-Septembre, à Aix (Bouches-du-
Rhône). — 1900.
CAILLEMER (Exupère), doyen de la Faculté de droit de Lyon. — 4867.
CaLzipoLiTi (Georges), docteur-médecin à Adramytte, Turquie d'Asie.
— 1893.
CALOGEROPOULO, député, à Athènes. — 1891.
CamBas (N.), avocat, à Alexandrie (Égypte). — 1904,
* CARAPANOS (Constantin), député, correspondant de l'Institut de
France, à Athènes. — 1868.
* CARATHEODORY-EFFENDI (Ét.), docteur en droit, ancien ministre de
Turquie, à Bruxelles. — 1872.
CARATHEODORY (Alexandre), chez M. Cazaubon, 151, rue Saint-Jac-
ques. — 1903.
— XLIX --
CARATHEODORY (Télémaque), ingénieur des ponts et chaussées, à
(Corinthe) Isthmie (Grèce). — 1876.
Cara vias (docteur S.) Russie. — 1894.
CARPENTIER (Paul), avocat, rue Jacquemart-Gielée, 35, à Lille. — 41893.
CaRRA DE VAUX (baron), professeur à l’Institut catholique, 5, rue de
la Trémoïlle. — 1903.
* CARTAULT (Augustin), professeur à la Faculté des lettres, 96, rue de
Rennes. — 1875.
* Casso (M°), à Kischeneff (Russie). — 1875.
CASTELLANI (Giorgio), 55, Via Palestro, Rome. — 1895.
Carziëras (Cosmas\, négociant, 24, cours Devilliers, à Marseille.
— 1861.
Cavaicnac (Eugène), licencié ès lettres, 47, rue de Verneuil. — 19083.
CERCLE de la librairie, représenté par M. Chatrousse, 147, boule-
vard Saint-Germain. — 1896.
* CERCLE HELLÉNIQUE d'Alexandrie (Égypte). — 1903.
CHABANEAU, correspondant de l’Institut, professeur honoraire à la
Faculté des Lettres, villa Marie, Montpellier. — 1873.
Caacornac (C.), proviseur du Lycée de Rodez. — 1895.
CHAMONARD (J.), agrégé de l'Université, professeur au Lycée de
Marseille. — 1895.
CHANTEPIE (de), administrateur de la bibliothèque de l'Université.
— 1867.
* CHAPLAIN (J το membre de l'Institut, graveur en médailles, à
l'Institut. — 1876.
Cuapor (V.), docteur en droit, ancien membre de l’École d'Athènes,
66, rue de Rennes vi’. — 1899.
ΟΒΑΡΒΟΝ (André), sous-préfet de Boulogne-sur-Mer. — 1893.
“ Cuasees (Henri), 34, rue de la Baume. — 1881.
* CHASSIOTIS Cd professeur, fondateur du lycée grec de Péra, à
Paris. — 1872.
CuaTez (Eug.), ancien archiviste du département du Calvados, 5,
rue Vavin. — 1867.
* CRÉVRIER (Adolphe), conseiller à la Cour de cassation, 43 rue de
Téhéran, Paris var. — 1873.
* CHÉVRIER (Maurice), attaché au ministère des Affaires étrangères,
35, rue Jacob. — 1880.
* Cuoisy (Aug.), inspecteur général honoraire des ponts et chaus-
sées, 9, rue de Poitiers. — 1867.
* CHRYSOVELONI (Léonidas), négociant, 4, place Saint-Denys, à
Athènes. — 1869.
CToLeux, professeur au Lycée du Havre, 6, — 1872.
* Capo (docteur), 6, rue de Berri. — 1894.
CLÉMENT (J.-Louis), docteur ès lettres, chargé de cours au lycée
Saint-Louis, 52, faubourg Saint-Honoré. — 1902.
Czerc (Michel), professeur à la Faculté des lettres, Château Borély,
Marseille. — 1893.
Cocorpan (Georges), directeur des affaires politiques au ministère
des affaires étrangères — 1873.
* CoLARDEAU, docteur ès lettres, professeur de littérature grecque à
l'Université, 24, cours Berriat, Grenoble. — 1894.
d
— L --
* Cou (Armand et Ci), libraires-éditeurs, 5, rue de Mézières. —
1891.
Coutn (Gaston), ancien membre de l'École française d'Athènes, maitre
de conférences à la Faculté des lettres, Bordeaux. --- 1899.
CocarD (F.), professeur à l'Université, 109, rue de la Station,
Louvain. — 1879.
Cozcienon (Maxime), membre de l'Institut, professeur à la Faculté
des lettres, 88, boulevard St-Germain. — 1875.
* COMBOTHECRAS (S.-J.), rue Tyraspolscaya, à Odessa. — 1873.
ConpoLéoN (Alexandre-Emmanuel), éphore des antiquités à Delphes,
Grèce. — 1901.
* ConsTAs (Lysandre H.), directeur de l'Ecole hellénique, rue Nadej-
dinska, maison Schimiakine, à Odessa. — 1885.
* ConsTANTINIDIS (Zanos), négociant, à Constantinople, Pera, 6, rue
Journal. — 1873. |
* CoRGIALEGNO (Marino), banquier à Londres, 53, Mount Street, Gros-
venor Square, — 1867.
Cosmao Dumanom (Marcel), avocat, 3, rue de la Néva. — 1893.
Cossounis (Thémistocle), négociant, à Constantinople. — 1868.
* CourcEL (baron Alphonse de), sénateur, ancien ambassadeur à
Londres, au château d'Athis-sur-Orge, à Athis-Mons (Seine-et-
Oise), et à Paris, 10, boulevard Montparnasse. — 1886.
CRÉPIN (Victor), professeur au Lycée Lakanal, 2, rue Boulard, Paris.
891
* CRoISET (Alfred), membre de l'Institut, doyen de la Faculté des
lettres, 13, rue Cassette. — 1873.
*“ CRoiser (Maurice), membre de l’Institut, professeur au Collège de
France, 26, rue Saint-Louis, à Versailles. — 1873.
* CucaevaL (Victor), professeur honoraire, au Lycée Condorcet, 21,
rue d'Aumale. — 1876.
CumonT (Franz), conservateur aux musées royaux, professeur à
l’Université de Gand, 75, rue Montoyer, à Bruxelles. — 1892.
DALET (J.), professeur au lycée de Châteauroux. — 1900.
* DALMEyDA (Georges), professeur au Lycée Michelet, 123, rue de
la Tour, Paris-Passy. — 1893.
* DARESTE (Rodolphe), membre de l'Institut, conseiller honoraire à
la Cour de cassation, 9, quai Malaquais. — 1867.
DARGENT (J.), professeur à l'Institut Catholique, 108, boulevard Vau-
ban, Lille. — 1898.
* DECHARME (Paul), professeur à la Faculté des lettres, 95, boulevard
Saint-Michel. — 1868.
DÉCHELETTE, conservateur du Musée, rue de la Sous-Préfecture,
Roanne. — 1902.
DELAcRoIX (Gabriel), professeur au lycée Condorcet, 4, rue de
Sèvres. — 1883.
DELAGRAVE, libraire-éditeur, 45, rue Soufflot. — 1867.
DELAMARRE (Jules), 51, rue de la Pompe, Paris Passy. — 1893.
DELISLE (Léopold), membre de l’Institut, administrateur général de
la Bibliothèque nationale, 8, rue des Petits-Champs.— 1874.
* DELLAPoORTA (Bresidas), à Taganrog. — 1873,
— Li —
DELyaNnI (Théodore-P.), ancien président du Conseil des ministres,
à Athènes. — 1867.
* DELYanNNI (N.), ministre de Grèce à Paris, 3, rue Anatole de la Forge.
— 1815. .
DEMARGNE (Joseph), professeur à la Faculté des lettres, 24, cours de
la Trinité, Aix-en-Provence. — 1903.
ΠΕΡΙΝΑΥ (Joseph), 81, rue de Miromesnil. — 1900.
DEPREZ Michel), conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale,
2, rue de Fleurus. — 1888.
DERENSOURG (Hartwig), membre de l’Institut, professeur à l'École
des Hautes Études, 30, avenue Henri Martin. — 1890.
Descuamps (Gaston), ancien membre de l’École d'Athènes, 13, rue
Cassette. — 1901.
DESCHEMŒCHER (abbé Stanislas), professeur au Collège des Joséphites,
Melle-les-Gand (Belgique). — 1904.
* Dessarpins (M"° v° Charles-Napoléon), 2, rue Sainte-Sophie, à
Versailles. — 1883.
DEvin, avocat au conseil d'État et à la Cour de Cassation, 66, rue
Pierre-Charron. — 18617.
DezetMErISs (Reinhold), correspondant de l'Institut, 44, rue Vital
Carles, à Bordeaux. — 1869.
DIAMANTOPOULO (M!i), ancienne élève de l'Ecole normale de Fon-
tenay-aux-Roses, au Pirée (Grèce). — 1895.
* Dinor (Alfred), 56, rue Jacob. — 1876.
DrœuL (Charles), chargé de cours à la Faculté des lettres de Paris,
67, rue de Seine. — 1891.
DTEUDONNÉ (A.), attaché au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque
Nationale, 41, boulevard de Clichy. — 1898.
* Dieux, professeur au lycée de Nantes. — 1889.
Diico (Jean-Micher). octeur, professeur de langue grecque à
l'Université de la Havane, 110, San Ignacio, île de Cuba. — 1894.
Dorison (L.), docteur ès lettres, doyen de la Faculté des lettres de
Dijon, 4, rue Piron. — 1894.
* Dossios (Nic.), professeur à l'école commerciale, strada Golia, 19,
lassy (Roumanie). — 1881.
DorrTi (Georges), docteur ès lettres, professeur-adjoint à la Faculté
des lettres, 10, rue du Thabor, Rennes. — 1897.
Doucet (Georges), ancien membre de l’école d'Athènes, professeur
de rhétorique au lycée, villa Minerve, rue du Soleil, Saint-Barthé-
lemy, Nice. — 1894.
* DouLCET (Mgr), évêque de Nicopoli (Bulgarie), 83, rue de Lille. —
1881
Draçouxis (Etienne), ancien ministre des affaires étrangères, à Athè-
nes. — 1888.
Dracoumis (Marc), ancien ministre plénipotentiaire à Athènes. —41896.
Drosinis, (Georges), à Athènes. — 1888.
Droz (Alfred), avocat, 7, rue Saint-Florentin. — 1908.
DucHATAUX, avocat, président de l’Académie nationale de Reims, 12,
rue de l'Échauderie. — 1879.
Ducuesne (Mgr), protonotaire apostolique, directeur de l'Ecole
française d'archéologie, palais Farnèse, Rome. --- 1877.
— LI —
DurAŸ (Auguste), 54, avenue Hoche. — 1896.
Durour (Médéric), professeur de littérature grecque à l'Université,
3, rue Jeanne d'Arc, Lille. — 1904.
DuJanDin (P.), héliograveur , 28, rue Vavin. — 1891.
ὈΟΜΟΝΤΙΕΕ, commandant du génie en retraite 75, rue de Rennes. ---
1882.
DurAND, maître de conférences à l'école Normale, avenue Galois, à
Bourg-la-Reine. — 1898.
DuRAND-GRÉ VILLE, 3, rue de Beaune, Paris. — 1892.
* Dürrsacu (F.), professeur à la Faculté des lettres de Toulouse, 40,
rue du Japon. — 1892.
* Dussoucer, professeur au Lycée Henri IV, 12, rue de Tournon.—
1874.
DuvizLaR» (J.), ancien directeur du Gymnase de Genève, 24, Bourg de
Four, Genève. — 1893.
* Ecoce BoSsuET, représentée par M. l'abbé Balland, directeur, 51, rue
Madame. — 1890.
EcoLe DES CARMES, représentée par M. l'abbé Guibert, supérieur, 74,
rue de Vaugirard. — 1890.
* Ecoe HELLÉNIQUE d'Odessa. — 1873.
ECOLE NORMALE SUPÉRIEURE, 45, rue d’'Ulm. — 1869.
* ÉCOLES PUBLIQUES ORTHODOXES de Chios (Turquie d'Asie). — 1893.
Epow, professeur honoraire du lycée Henri IV, 12, rue du Pré-aux-
Clercs. — 1882. .
* EGGER NT v'e Émile), 68, rue Madame. — 1885.
* ÉcGrn (Max), professeur au Lycée Henri IV, 71, rue de Vaugirard.
* Eccer (Victor), professeur-adjoint à la Faculté des lettres de Paris,
12, rue d'Assas. — 1872.
ΕΘΙΝΙΤῚΒ (M.), professeur à l'Université et directeur de l'observatoire
royal d'Athènes. — 1890.
* ErcaTaAL (Eugène d'), 144, boulevard Malesherbes. — 1871.
ELÈvESs (les) de rhétorique du Collège Stanislas, rue Notre-Dame-des-
Champs. — 1869.
EumaANuEL (Maurice), docteur ès lettres, 42, rue de Grenelle. — 1893.
ENGez (Arthur), ancien membre de l’Ecole d'Athènes, 66, rue de
l'Assomption. — 19083.
Enocs, professeur au lycée de Rochefort. — 1899.
ERLANGER (Emile), banquier, 35, boulevard Haussmann. —— 1869.
ERRERA (Paul), avocat, 14, rue Royale, à Bruxelles. — 1889.
* ESTOURNELLES DE CONSTANT (baron Paul d’), député, 131, rue de la
Tour, Paris-Passy. — 1872.
EumorroPouros (Nicolas-A.), 33, Gloucester Square, Hyde Park,
London W. — 1897.
*“ ExperT (Henry), publiciste, 97, boulevard Arago. — 1900.
* FALIEROS (Nicolaos), à Taganrog (Russie). — 1873.
* FaLLex (E.), proviseur honoraire du Lycée Charlemagne, 18, quai de
Béthune. — 1873.
* FALLIÈRES, président du Sénat. — 1886
— LUI —
FEUARDENT, antiquaire, 4, place Louvois. — 1871.
* Fix (colonel Théodore), 59, rue Boissière. — 4877.
FLAMAND-DUVAL (Félix), 41, rue de Londres. — 1894.
FLORISOONE, professeur au Lycée, 22, rue Charles Dubois, à Amiens.
886
Fossey (Ch.), docteur ès lettres, chargé de cours à l'Ecole des Hautes
Etudes, 1, avenue de l'Observatoire. — 19083.
Forius (Alcibiade), agent aux chemins de fer égyptiens, au Caire
(Egypte). — 1896.
* FoucarT (Paul), membre de l’Institut, directeur honoraire de l’École
française d'Athènes, professeur au Collège de France, 19, rue
Jacob. — 1867.
FoucËREs, maître de conférences à la Faculté des lettres de Paris,
6, rue d Ulm, Paris, ve — 1886.
FouicLéE (Alfred), membre de l'Institut, Villa Fouillée, boulevard
de Garavan, à Menton (Alpes-Maritimes). — 1884.
FOoURDRIGNIER (Ed.), 5, Grande Rue, Sèvres. — 1904.
FOURNIER, maître de conférences à la Faculté des lettres, Bordeaux.
— 1903.
FRANCE (Anatole), de l’Académie française, ὅ, villa Saïd, avenue du
Bois de Boulogne. — 1897.
FRINGNET: inspecteur de l’Académie de Paris, 62, rue Claude-Bernard.
— 1885.
GACHON, professeur à la Faculté des lettres de Montpellier. — 1893.
GANDERAX (Louis), directeur de la Revue de Paris, 25, rue Galilée. —
1891
GARDICAS (D.), professeur au gymnase Averoff, Alexandrie (Egypte).
— 1903.
GarNAULT (Docteur), 64, rue de Miromesnil. — 1003.
GarorALo (Francesco), professeur à l'Ecole des Etudes supérieures
de Madrid, S. Felice, alla Sanité, 26, Naples. — 1901.
Gaspar (Camille), docteur en philosophie et lettres, 61, rue Madame.
01
GAUDIER (Charles), professeur de rhétorique au Lycée, 75, rue
Libergier, à Reims. — 1893.
Gaucr (Ch.-Maurice), docteur en droit, avocat au Conseil d’Etat et à
la Cour de Cassation, 75, boulevard Malesherbes. — 1878.
* GENNADIUS (Jean), ancien ministre de Grèce, Londres. — 1878.
ΟΕΌΒΟΙΝ, professeur au Lycée Henri IV, 30, avenue des Gobelins. —
GEorGrou (Paléologue), directeur du Gymnase Averoff et de l'École
Tossitsée, 12, rue Masguid el Attarine, à Alexandrie (Égypte). —
“ GEVAERT (F.-Aug.), associé étranger de l’Académie des Beaux-Arts,
directeur du Conservatoire royal de musique, à Bruxelles. — 1881.
Gaexis (Georges), Turnul Severin (Roumanie). — 1903.
Gaixas (Jean), professeur à Alexandrie (Egypte). — 1899.
” GizLoN {G.), 18, rue Malher. — 1904.
“ GIRARD (Paul), maitre de conférences à l'École normale supé-
rieure, 55, rue du Cherche-Midi. — 1880.
— LIV ---
GIRONDE (comte de), 25, rue François 1°". — 1900.
GLACHANT (Paul-Gabriel), professeur au Lycée Condorcet, 34 rue
Notre-Dame-de-Lorette. — 1886.
GLAcHANT (Victor), professeur de première au lycée Louis-le-Grand,
90, rue d’Assas. — 1884.
GLorTz (Gustave), professeur au Lycée Louis-le-Grand, 73, rue du
Cardinal-Lemoine. — 1895. |
GzyrTi (Georges), professeur au gymnase Averoff, Alexandrie
(Egypte). — 1902.
* GOELZER, maître de conférences à l'École normale supérieure, 32, rue
Guillaume Tell. — 1892.
* GorrAnD (Léonce), avoué près la Cour d'appel de Paris, 145, rue de
Lonchamp. — 1883.
* GoRAND (Léopold), avoué près le tribunal civil de la Seine, 8, rue
d'Anjou, — 1883.
* GozpscamIDT (Léopold), 19, rue Rembrandt, Paris. — 1876.
* GonnET (l'abbé), docteur ès lettres, professeur à l'Institut catholique
de Lyon, à Ecully, maison de Sainte-Catherine, près Lyon. —
1878.
GounouIzHou, imprimeur à Bordeaux, 8, rue de Cheverus. — 1893.
GRaAILLOT (H.), ancien membre de l'École française de Rome, chargé
de cours à la Faculté des Lettres de Toulouse. — 1898.
* GRANDIN (A.), 46, rue Lafontaine, 6, hameau Béranger, Auteuil.
— 1890.
* GRaux (Henri), propriétaire, à Vervins (Aisne). — 1882.
GrAvaRIs (Gr.), docteur, à Salonique. — 1902.
*“ GRÉARD (Octave), de l'Académie française, vice-recteur honoraire
30, rue du Luxembourg, Paris. — 1867.
GRÉGORE (Henri), docteur en philosophie et lettres, Huy (Belgique).
— 1904.
GRoLLIER (de), 28, rue Godot de Mauroi. — 1901.
GRoUSSET (Henri), 8, rue Laromiguière. — 1887.
GRouvÈLE (Ὁ). 44, avenue de la Dame-Blanche, Fontenay-sous-Bois.
” — 41898.
* GrypaARIS (N.), consul de Grèce, à Sébastopol. — 1886.
GseLr, docteur ès lettres, professeur à l'École supérieure des lettres,
inspecteur du service des antiquités de l'Algérie, à Alger. — 1893.
GUILLAUME (Eugène), membre de l'Institut, directeur de l'Académie de
France à Rome, 15, rue de l'Université. — 1867.
GuirauD (Paul), professeur-adjoint à la Faculté des lettres, 30, rue du
Luxembourg. — 1891. ΕΞ
* GYMNASE AVÉROFF à Alexandrie (Égypte). — 1891.
“ GYMNASE DE JANINA (Turquie). — 12.
* HACHETTE et Ce, libraires-éditeurs, 79, boulevard Saint-Germain. —
Haïras frères, banquiers, à Bucarest (Roumanie). — 4904.
HaLcays (André), homme de lettres, 110, rue du Bac.— 1880.
HALPHEN (Eugène), avocat, 69, avenue Henri Martin. — 1869.
HarMAND, (R.), docteur ès lettres, professeur au Lycée, 20 rue Grand-
ville, à Nancy. — 1892, |
HARTER, professeur au Lycée, Chaumont (Haute-Marne). --- 1898.
HaurY, professeur au lycée de Vesoul, 41, rue du Centre. — 1883.
HaussouLuER (B.), directeur-adjoint à l'École des Hautes-Études, 8,
rue Sainte-Cécile. —- 1884.
* HAUVETTE (Amédée), maître de conférences à l'École normale supé-
rieure, 28, rue Racine. — 1883.
* Haver (Louis), membre de l'Institut, professeur au Collège de
France et à l'Ecole des Hautes-Etudes, 5, avenue de l'Opéra. —
1869.
Hemerc (le d'J “Le professeur à l'Université, à Copenhague, 13,
Classensgade. — 1891
Henry (Victor), professeur à la Faculté des lettres, 95, rue Hou-
dan, à Sceaux. — 1884.
* HÉrioT-Bunousr (l’abbé Louis), aux soins de M. Stanislas Plonc-
zynski, 33, rue de Cugnaux, Toulouse. — 1889.
HÉRON DE VILLEFOSSE, membre de l’Institut, conservateur des anti-
quités grecques et romaines du musée du Louvre, 15, rue Was-
hington. — 1872.
* Heuzey (Léon), membre de l'Institut, conservateur des antiquités
orientales au musée du Louvre, 90, boulevard Exelmans, Paris-
Auteuil. — 1867.
HocarT, 22, rue de l'Église-Saint-Seurin, à Bordeaux. — 1893.
“ Hoper ΕΡΡΕΝΌΙ (J.), conseiller d'Etat, 101, Grande rue de Péra,
Constantinople. — 1876.
HozLEeaux (Maurice), chargé de cours à la Faculté des lettres, 22,
rue du Juge de Paix, Lyon. — 1889.
HomoLce (Th.), membre de l'Institut, directeur de l'École française
d'Athènes. — 1876.
* HOUSSATE (Henry), de l’Académie française, 49, avenue Friedland.
86 -
Huserr (Henri), agrégé d'histoire, 14, rue Claude-Bernard. — 4897.
σε (Paul), notaire, 83, boulevard Haussmann. — 1814. |
Hurr (GR), docteur ès lettres, professeur honoraire à l'Institut ca-
tholique de Paris, 74, rue Bonaparte. — 1878.
HuMBERT (Louis), professeur au Lycée Condorcet, 207, boulevard
Saint-Germain. — 1875.
ΠΌΝΤΙΝΘΤΟΝ (Henry Alonzo), 7, rue Maurepas, à Versailles. —
ὅ
HyPÉRIDIS (G.-C.), directeur du journal 'AMAASEIA, Smyrne. — 1903.
Iconomopouros (Léonidas-D.), ingénieur aux chemins de fer égyp-
tiens, au Caire. — 1890.
Iunoor-BLUMER (D° F.), correspondant de l'Institut, à Winterthur
(Suisse). — 1890. (Deux cotisations).
* INGLESSIS Een docteur-médecin, 58, cours Pierre Puget, à Mar-
seille. — 1888.
TSERENTANT, professeur de rhétorique à l'Athénée royal de Malines
(Belgique). — 1880.
Jacos (Alfred) maitre de conférences à l'Ecole des Hautes Études,
This, rue Laromiguière, —- 1902.
— LVI —
. * JAMOT (Paul), ancien membre de l'École française d'Athènes, con-
servateur-adjoint au musée du Louvre, 11 bis, avenue de Ségur,
νη". — 1890.
* Jasonis, à Limassol (île de Chypre). — 1870.
JENKINS (M!!e), Paddenswick Road, Ravenscourt Park, London W (ἃ
Paris, rue de Chevreuse, 4). — 1899.
* Joanninis (Emmanuel), scholarque, à Amorgos (Grèce). — 1869.
JonnsToN (M"° Nathaniel), au château de Beaucaillou, par Saint-
Julien (Gironde). — 1894.
* JorDAN (Camille), membre de l'Institut, 48, rue de Varenne.—1874.
* JORET (Ch.), membre de l'Institut, professeur honoraire de
Faculté, 59, rue Madame. — 1879.
Joux (André), ancien membre de l'École française d'Athènes,
docteur ès lettres, professeur-adjoint à l'Université de Montpellier.
Joucuer (Pierre), maitre de conférences à la Faculté des Lettres,
1, rue du Sec Arembault, Lille. — 1898.
Kann (Arthur), 58, avenue du Bois de Boulogne. — 1893.
KaARPELËS (Μὴ, 143, rue de la Pompe. — 1897.
KeBEDJY (Stavro-M.), à Athènes. — 1868. |
Kinca (K.-F.), docteur, à Rhodes, postes françaises.— 1898.
KoecgLiN (Raymond), 32, Quai de Béthune. — 1898. |
* KonrosTavLos (Alexandre), ancien ministre, à Athènes. — 1876.
* Kounpouri (Panaghi), 23, rue de l'Arsenal, Marseille. — 1897.
KRERS (Adrien), professeur à l’École Alsacienne, 89, avenue d'Orléans.
LABASTE, professeur de première au lycée de Tourcoing, à Paris, 48,
rue des Abbesses. — 1902.
* LAFAYE (Georges), professeur-adjoint à la Faculté des lettres, 105,
boulevard Saint-Michel. — 1892
LAFoONT (Charles), professeur de rhétorique au Lycée Louis-le-Grand,
13, rue du Cardinal Lemoine. — 1901.
LAFoNT (M!i Renée}, licenciée ès lettres, 73, rue du Cardinal Le-
moine. — 41901.
LAGOUDAKIS (Socrate), docteur médecin, 103, avenue de Villiers, —
1
* LALOY (Louis), agrégé des lettres, 33, avenue des Gobelins. —
1897.
Lamsros (Spyridon), professeur à l'Université d'Athènes. — 1873.
* LANDELLE (Charles), peintre, 17, quai Voltaire. — 1868.
LAPRADE (Paul de), licencié ès lettres, avocat, 10, rue de Castries, à
Lyon. — 1884.
LAURENT (Joseph), maître de conférences à la Faculté des lettres, 12-
14, rue Jeanne d'Arc, à Nancy. — 1895.
LA Vice DE Minmonr (de), docteur ès lettres, professeur à la Faculté
des lettres, 30, rue de l'Eglise-Saint-Seurin, à Bordeaux. — 1888.
* LazzARO (Périclès-H.\, vice-consul des États-Unis, à Salanique.
LE BÈGUE (Stéphan), architecte, 12, rue de Castellane. — 1899.
* LEBÈGUE (Henri), chef des travaux paléographiques à l'École des
Hautes Études, 95, boulevard Saint-Michel --- 1888.
— LVII —
“Le ΒΒΕῚ Madame), 148, boulevard Haussmann. — 1899.
* LECHAT, chargé d’un cours d'histoire de l’art à la Faculté des lettres,
41, rue du Plat, Lyon. — 1891.
* LECOMTE (Ch.), négociant, 5, rue d'Uzès. — 1875.
LE Foyer (H.), avocat, 252, rue de Rivoli. — 1892.
* LEGANTINIS ἡ -E.), négociant ἃ Odessa. --- 1873.
LEGENDRE (l'abbé), professeur au petit séminaire, 30, rue de Pon-
toise. — 1899.
LEGRAND (Adrien), agrégé de l'Université, 15, rue du Château, Neuilly-
sur-Seine. — 1890.
LEGRAND (Philippe-Ernest), docteur ès lettres, professeur-adjoint à la
Faculté des lettres, 30, rue Duquesne, Lyon. — 1892.
LELIOUx (Armand), chef-adjoint du service de la sténographie au
Sénat, 21, rue de l'Odéon. — 1879.
LEMERCIER, do en de la Faculté des lettres, 12, rue Sainte-Anne, à
Caen. — 1893.
* LEREBOULLET (D' Léon), membre de l'Académie de médecine, 44,
rue de Lille. — 1872.
Le Roux (Henri), ancien directeur des affaires départementales à
la préfecture de la Seine, 7, rue de Passy. — 1897.
LEROUX (Ernest), éditeur, 28, rue Bonaparte. — 1887.
LEROY-BEAULIEU (Anatole), membre de l'Institut, 69, rue Pigalle. —
0.
* Leuper (Me Vre), ἃ Piencourt, par Thiberville (Eure). (En hiver, 11,
rue Longchamp, Nice). — 1887.
LÉvY (Georges-Raphaël), 80, boulevard de Courcelles. — 1888.
LrARD, vice-recteur de l'Académie de Paris. — 1884.
LIMPRITIS, avocat, à Alexandrie (Egypte). — 1877.
* LouBarT (duc de) 53, rue Dumont-Durville. — 1903.
* Lur-SaLucEs (comte de), 10, rue Dumont-Durville, — 1895.
LYcéE CHARLEMAGNE, 101, rue Saint-Antoine. — 1896.
Lycée MoNTAIGNE, 17, rue Auguste Comte. — 1885.
* MACMILLAN (George-A.), éditeur, St Martin’s Street London, W.-C.
— 1818.
Macnis (Constantin), rue Bertrand, 27 bis. — 1904.
*“ MAGGIAR (Octave), négociant, 28, rue Saint-Lazare. — 1868.
* MAISONNEUVE (Jean), libraire-éditeur, 26, rue Madame. — 1875.
MaLcer (Ad.), chef du 4° bureau de l'enseignement secondaire, au
ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, 83, rue
Notre-Dame-des-Champs. — 1897.
MALLINGER (Léon), professeur à l'Athénée royal, 26, rue de Saint-
Pétersbourg, Ostende (Belgique). — 1898.
* Manoussi (Démétrios de), à Paris, 4, rue Christophe-Colomb.— 1869.
MANTADAIS (P.), professeur au gymnase Averoff, Alexandrie (Égypte).
— À
MaNTZzURANY (N), professeur de langues, 15, rue Champollion. — 1900.
*“ Manussr (Constantin de), à Athènes. — 1869.
MarcBEIx, bibliothécaire de l'École des Beaux-Arts, 47, rue de Vau-
girard. — 1885.
MARESTAING, 17, boulevard Flandrin. — 1902.
— LVII —
MARGUERITE DE LA CHARLONIE, ingénieur des arts et manufactures,
21, rue Bonaparte, 1903.
Marino (Miltiade), rue de Patissia, à Athènes. — 1873.
MarTHA (Jules), professeur à la Faculté des Lettres, 16, rue de
Bagneux. — 1881.
MARTIN (Albert), correspondant de l'Institut, doyen de la Faculté des
lettres de Nancy, 9, rue Sainte-Catherine. — 1887.
MaRTIN (abbé J.-B.), professeur aux Facultés catholiques, place de
Fourvière, Lyon. — 1897.
MaRTIN (abbé Fernand), professeur de grec au séminaire de Montlieu
(Charente-[nférieure). — 1903.
* Maspero (G.), membre de l’Institut, professeur au Collège de France,
directeur général du service des antiquités et des musées Égyp-
tiens, Le Caire. — 1877.
MasqueraY (P.), docteur ès lettres, professeur à la Faculté des let-
tres de Bordeaux, 36, rue Rodrigues-Péreire. — 1893.
MATARANGAS (docteur), 42, rue Balagny, xvne. — Paris.
MaucomLe (Émile), avoué honoraire, 2, rue Pigalle. — 1876.
* Maurice (Jules) associé correspondant national de la Société des
Antiquaires de France, 33, rue Whashington. — 1902.
MaurouARD (Lucien), premier secrétaire d'ambassade près la légation
de France en Grèce, 56, rue de Solon à Athènes, et 110 boulevard
Haussmann, Paris. — 1891.
Maury, professeur à la Faculté des lettres, 75, avenue de Lodève,
Montpellier. — 1894.
* Mavro (Spiridion), Athènes. — 1873.
* MavromicHauis (Kyriacoulis P.), ministre, à Athènes. — 1888.
MAvROYENI-BEY (Démétrius), ancien consul général de Turquie, à
Marseille, rue Breteuil, 61. — 1891.
. * Maximos (P.), à Odessa. — 1879.
May, professeur de droit à la Faculté de Nancy, agrégé à la Faculté
de Droit, Paris, 12, rue de Longchamp. — 1904.
MazoN (Paul), agrégé des lettres, 18, rue du Vieux Colombier. —41902.
MÉGAcLES (Athanase), archevêque de Cyzique, Dardanelles, Turquie.
— 1895.
MELAS (Constantin), 67, cours Pierre Puget, à Marseille. — 1867.
* MELASs (Léon), à Athènes. — 1893.
MéLy (F. de), 26, rue de la Trémoïlle. — 1894.
MENDEL (Gustave), ancien membre de l'École Française d'Athènes,
maître de conférences à la Faculté des lettres de Bordeaux. —
— 1902.
MENGoLA (D.), avocat, à Alexandrie (Egypte). — 1887.
Messinesi (Léonce), 17, rue Hamelin, xvi*. — 1903.
ΜΈΤΑΧΑΒ { erasimos), docteur-médecin, 4, rue Diendé, à Marseille.
— 1887. |
MEUNIER (l'abbé J.-M.), professeur à l'Institution Saint-Cyr, rue
Jeanne d'Arc, à Nevers. — 1895.
* MEYER (Paul), membre de l’Institut, directeur de l'École des Chartes,
16, avenue Labourdonnais. — 1884.
MEYNIAL (Edmond), professeur à la Faculté de droit de Montpellier,
4, rue des Trésoriers-de-la-Bourse, — 1893,
— LIX —
Mézières (Alfred), de l’Académie française, professeur honoraire de
la Faculté des lettres, sénateur, 57, boulevard Saint-Michel. —
1867.
MicuaELipis C. C. Esq., chez MM. Ralli frères, Liverpool. — 1890.
MiciEL (Ch.), professeur à l'Université de Liège, 110, avenue de
d'Avroy. — 1893.
* Micuon (Etienne), Conservateur-adjoint au Musée du Louvre, 26, rue
Barbet-de-Jouy. — 1893.
M1GEoN (Gaston), conservateur au Musée du Louvre, 450, rue du Bois
de eur Meudon (Seine-et-Oise). — 1904.
MARAEIS ta. ) homme de lettres, 48, rue Pinacoton à Athènes. —
MLLer (Gabriel), maître de conférences à l'école des Hautes Études,
34, rue Hallé, xiv°. — 1896.
* MEET (Paul), 95, boulevard Saint-Michel. — 1889.
* MonceaUx (Paul), professeur au Lycée Henri IV, 12, rue de Tournon.
— 1885.
MonFERRATO (Antoine), ancien ministre des cultes et de l'instruction
publique, à Athènes. — 1890.
MONNIER, professeur à la Faculté de droit, 15, rue Bardineau, Bor-
deaux. — 1893.
MonNIER (Jean), professeur à la Faculté de théologie protestante,
9, rue du Val-de-Grâce. — 1902.
Monon (Gabriel), maître de conférences à l'École normale supérieure,
membre de l'Académie des sciences morales et politiques, 18, rue
du Parc de Clagny, Versailles. — 1869.
MORATTIS (Démétrius), professeur à Londres, 72, Ashmore-Road. —
187
Monet (Alexandre), maître de conférences à l'école des Hautes
Études, 114, avenue de Wagram. — 1901.
Mossor, professeur honoraire, 20, rue de Verneuil. — 1887.
Mor (Jean de), attaché aux musées de Bruxelles, au Musée du
Cinquantenaire, Bruxelles. — 1904.
Muriaux (E.), 66, rue de la Pompe, Paris-Passy. 1898.
NAVARRE (0.), docteur ès lettres, professeur à la Faculté des lettres
de Toulouse. — 1895.
" NEGROPONTE (Dimitrios), à Taganrog (Russie). — 1869.
" NEGROPONTES (Ulysse), 50, avenue du Bois de Boulogne. — 1890.
* NicoLaïns (G.), de l'ile de Crète, homme de lettres, près de l’orphe-
linat des ; A filles, à Athènes. — 1868.
NICOLE, professeur à la Faculté des lettres 6, rue Petitot, Genève. —
* NicocoPouo (Jean-G.), 66, rue de Monceau. — 1884.
* NicocopouLo (Nicolas-G.), 66, rue de Monceau. — 1884.
* Nozuac (Pierre de), conservateur du Musée national de Versailles,
au Palais de Versailles. — 1888.
NORMAND (Ch.), directeur de la revue L’ami des monuments et des arts,
secrétaire général de la Société des Amis des monuments pari-
siens, 98, rue de Miromesnil. — 1889.
Onni(F.-F. }, professeur de langues, à Alexandrie (Égypte). — 1880.
— LX —
* Ouonr (H.), membre de l'Institut, conservateur du département
. des manuscrits de la Bibliothèque nationale, 17, rue Raynouard.
— 1884.
OPPERT Quies), membre de l'Institut, 2, rue de Sfax. — 1901.
OursEL (Paul), Consul général de France, 144, boulevard Haussmann.
— 1867.
Paconis (C.-Th.) professeur au gymnase Avéroff, à Alexandrie
(Egypte). — 1899.
* ParSANT (Alfred), Président du tribunal, 35, rue Neuve, à Versailles
— 1871.
Paix-SÉAILLES (Charles) étudiant, 278, boulevard Raspail. — 1896.
* PAPADIMITRIOU (Sinodis), professeur “ἃ l'Université d'Odessa. —
1893
PAPAVASSILIOU (G.), professeur à Athènes. — 1889.
Paris (Pierre), professeur à la Faculté des lettres, correspondant de
l'Institut, 26, rue Méry, à Bordeaux. — 1894. |
PARMENTIER (Léon), professeur à l'Université de Liège (Belgique).
— 1895.
* PARMENTIER (le général Théodore), 5, rue du Cirque. — 1872.
PascuaLis (D.-P.), île d'Andros (Grèce). — 1899.
* PasparTi (Georges), à Athènes. — 1888.
Passy (Louis), député de l'Eure, membre de l'Académie des sciences
morales et politiques, 81, rue Taitbout. — 1867.
PAToN (W.-R.), maison Camis, place Maze, Viroflay (Seine-et-Oise).
— 1896.
ῬΕΙ͂ΝΕ (Louis), professeur au lycée Louis le Grand, 5, rue Latran. —
1894
PELLETIER (François), professeur à l'Université de Laval, Québec
(Canada). — 1902.
PEPIN-LEHALLEUR (Adrien), 7, rue Nitot. — 4880.
PERDRIZET (Paul), maître de conférences à la Faculté des lettres 9,
rue Désiles, Nancy, — 1889.
PEREIRE (Henry), 33, boulevard de Courcelles. — 1890.
PERNoT (Hubert), répétiteur de grec moderne à l'Ecole des langues
orientales vivantes, 9, rue Galilée. — 1900.
PERROT (Georges), membre de l'Institut, directeur de l'École nor-
male supérieure, 45, rue d'Ulm. — 1867.
PERSON (Émile), professeur honoraire au lycée Condorcet, 8, rue
du Havre. — 1877.
* PersopouLo (Nicolas), à Trébizonde (Turquie d'Asie). —1873.
PESSONNEAUX (Raoul), professeur au lycée Henri IV, 80, rue Bona-
parte. — 1888.
PETITIEAN (J.), professeur au Lycée Condorcet, 32, rue Ernest Renan.
93
PETRIDÉS (Dr A.), médecin à l'hôpital hellénique d’Alexandier
(Égypte). — 1903.
* PEYRE (Roger) professeur d'histoire au lycée Charlemagne, 18, rue
Jacob. — 1879.
PBARMAKOWSEY (B.), membre de la commission impériale archéolo-
gique, Palais impérial d'hiver, à Saint-Pétersbourg. — 1898.
Ῥβοτιαθὲβ (Etienne), À, rue Coray, à Athènes. — 1900.
PicarD (Alph.), libraire-éditeur, 82, rue Bonaparte. — 1879.
PicarD (Georges), 2 bis, rue de Benouville. — 4903.
Picuon (René), docteur ès lettres, professeur au Lycée Henri IV,
142, boulevard Montparnasse. — 1903.
PTERROTET (Paul), directeur de Sainte‘Barbe, place du Panthéon, v°.
— 1903.
Ρῃμετ- πα, (M: la comtesse), 33, rue Paucquet. — 1904.
Pisanis (Jean), professeur à Alexandrie (Egypte). — 1899.
* Pispas (B.), rue Richelieu, à Odessa. — 1879.
Pocgro, avocat à Alexandrie (Egypte). — 1899.
* Ponsor (Μ}}5), 5, rue de Vitry, Alfortville (Seine). — 1901.
PoITRINEAU, inspecteur d'Académie honoraire à Rennes. — 1869.
PozyParont Polyphroniou. Turnul Sererin (Roumanie). — 1903.
* Porrr (Edmond), professeur à l'École du Louvre, conservateur-
adjoint des Musées nationaux, membre de l'Institut, 72, rue de la
Tour, Paris Passy. — 1884.
Poyann., professeur honoraire au Lycée Henri IV, 14, rue de Tour-
non. — 1900.
PRAROND (Ernest), 42, rue du Lillier, Abbeville. — 4871.
PrazzcA (Aristote), à Alexandrie (Égypte). — 1904.
PRéÉvosr, professeur au Lycée de Constantine. — 1904,
PROVELEGH10S (Aristomène), à Athènes. — 1889.
PsicHari (Jean), agrégé de l'Université, directeur-adjoint à l'École
des Hautes-Études, 16, rue Chaptal. — 1879.
Puecu (Aimé), maître de conférences ἃ la Faculté des lettres de
Paris, 9, rue du Val-de-Grâce. — 1892.
QuizLanp (Pierre), homme de lettres, 40, rue Nollet, Paris. — 1902.
RADET (G.), doyen de la Faculté des lettres, 7, rue de Cheverus, Bor-
deaux. — 1890.
* RaGon (l'abbé), professeur à l’Institut catholique, 77, rue de Vau-
girard. — 1888.
ΑΙ frères, négociants, 12, allées des Capucines, à Marseille. —
7
* RAMBAUD (Alfred), sénateur, membre de l'Institut, 76, rue d'Assas.
— 1870.
Ravaisson (Charles), conservateur-adjoint au musée du Louvre, 39,
rue Vital. — 1898.
* Reiace (Joseph), ancien député, 6, avenue Van-Dyck.— 1888.
* ReINAcu (Salomon) membre de l'Institut, conservateur au musée
gallo-romain de Saint-Germain-en-Laye, à Paris, 38, rue de Lis-
bonne. — 1878.
* REINACH (Théodore), directeur de la Revue des É'tudes grecques, 9,
rue Hamelin. — 1884.
" RENAULD, professeur au lycée, 11, rue Lasserre, Montauban. —
REYNAUD, professeur au lycée Louis-le-Grand, 28, avenue de l'Obser-
vatoire. — 1893.
RaeinarT (Ferdinand, 14, rue du Regard, Paris. — 1903.
---Ο͵χῖι —
ΒΙΒΙΕᾺ (Eug. de), professeur au Lycée Janson-de-Sailly, 6, rue
Sainte-Beuve. — 1895.
Ricci (Seymour de), 30, avenue Henri Martin. — 1901.
RicHARD (Louis), sous-bibliothécaire à la Bibliothèque Sainte-Gene-
viève, 50, rue des Belles-Feuilles. — 1888.
* Riner (de), professeur en congé à la Faculté des lettres d'Aix, à
Paris, 22, avenue de Marignan. — 1894.
ROBERT (A); professeur honoraire, 43, rue de l’Abbatiale, à Bernay.
* Ropocanacai (Michel-E.), négociant, 10, allées des Capucines, à
Marseille. — 1867.
RomaANos (A.), député, Athènes. — 1894.
Rorascuin (baron Alphonse de), 2, rue Saint-Florentin. — 1867.
* RorascaiLp (baron Edmond de), 41, faubourg Saint-Honoré. —
1884.
RouIon (Henry), secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-Arts,
au Palais de l'Institut, quai Conti. — 1904.
Rousseau (Paul), licencié ès lettres, étudiant d'agrégation, 79, bou-
levard Saint-Michel. — 1904.
Roux (Ferdinand), ancien magistrat, avocat, à Javode par Issoire.
7
* RUELLE Ch.-Émile), administrateur de la Bibliothèque Sainte-Gene-
viève, 6, place du Panthéon. — 1869.
SAGLIO (Edmond), membre de l'Institut, 85, rue de Sèvres. — 1868.
SAKELARIDIS (Dimitri), à Alexandrie (Egypte). — 1888.
SALA (M®° la comtesse), 22, rue Clément Marot. — 1904.
SALVAGO (Pantéli), 433, boulevard Malesherbes. — 4902.
SANSON (Ernest), architecte, 25, rue de Lübeck. — 1888.
* SARAKIOTIS (Basile), docteur-médecin, à Constantinople. — 1872.
* SARAPIS (Aristide), négociant à Mételin (Turquie). — 1868.
* SATHAS (Constantin), boulevard Saint-Germain, 91. — 1874.
SAVvAS-PacuA, 36, rue Desbordes-Valmore, Paris-Passy. — 1892.
* SAYCE, professeur à l'Université d'Oxford, Queen's College. — 1879.
” SCARAMANGA (Doucas), à Taganrog, (Russie). — 1870.
* SCARAMANGA (Pierre-J.), 36, avenue du Roule, à Neuilly-sur-Seine.
SCHLIEMANN (Μ 5), à Athènes. — 1895.
* SCHLUMBERGER (Gustave), membre de l'Institut, 37, avenue d'Antin.
SÉGUIER (comte de), à Son Serra, Casa Rey, Palma de Majorque. —
1895
SENART (Emile), membre de l’Institut, 18, rue François 1°". — 1867.
SERRUYS (Daniel), ancien membre de l'Ecole française de Rome, 29,
rue Saint-Louis-en-l'Ile. — 1902.
SESTIER (J.-M.), avocat à la Cour d'appel, 24, rue Nicole. — 1881.
SEURE, ancien membre de l'Ecole Εἰ Athènes, professeur au lycée
Carnot, 135, rue Saint-Charles. — 1904.
SÈZE (Romain de), 76, rue de Seine. — 1893.
* SIBIEN (Armand), architecte, 14, rue du Quatre-Septembre. — 1904.
SINOIR, professeur de rhétorique au Lycée de Laval. — 1892.
- LXII —
SIPHNAIOS (Jean), négociant, à Constantinople. — 1868.
Sx1AS (André N.), 6, rue Cantacuzène, à Athènes. — 1892.
SELIROS (Georges-Eustache), 289-291, Regent Street, à Londres. —
1876.
SoririADiIS, éphore des antiquités et des musées, 24, rue Lucien,
Athènes. — 1902.
* Sourzo (prince Constantin-D.), officier du Sauveur de Grèce, à
Slobosia-Corateni, district de Phimnic (Roumanie). — 1888.
* SouvADZOGLoOU (Basile), banquier, à Constantinople. — 1878.
SPANDONIDES (Pierre), boulevard Pake, 12, Bucarest. — 1903.
STAMOULIS (Anastase), négociant, à Silyvrie (Turquie). — 1874.
STEPHANOS ( D" Con 20, rue Solon, à Athènes. —— 1879,
STICKNEY Grumbas ), docteur ès lettres, Harvard University Cam-
bridge, Mass. (Etats-Unis d'Amérique), Prescott Hall, 4. — 1896.
STREIT (Georges), professeur de droit international à l'Université
d'Athènes. — 1894.
STRONG (Μη Arthur), 36, Grosvenor Road, Westminster 5. W.,
à Londres. — 1899.
* SuLLY-PRUDHOMME, de l’Académie française, 82, rue du Faubourg-
Saint-Honoré. — 1883.
Svoronos (J.-N.), directeur du musée numismatique, Athènes.
— 1903. |
SwaRTE (Victor de), trésorier payeur général à Lille (Nord). — 1903.
* TANNERY (Paul), directeur de la manufacture des tabacs, à Pantin
(Seine).— 1885.
TERNAUXx-ComPaNs, député, 25, rue Jean-Goujon. — 1878.
TERRIER, professeur honoraire au lycée Condorcet, 10, rue d'Aumale.
THALIS (le d' M.), à Athènes. — 1890.
T&EODORIDÈS (Jean), docteur à Serrès. — 1895.
“ ToucarD (l'abbé Alb.), docteur ès lettres, professeur honoraire
au petit séminaire du Mont-aux-Malades, à Rouen. — 1867.
* TounTouLoN (baron de), 43, rue Roux-Alphéran, Aix-en-Provence.
* TRAVERS (Albert) directeur des postes et télégraphes de l'Hérault, à
Montpellier. — 1885. .
TRAWINSKI (F.), chef du secrétariat des musées nationaux, au musé
du Louvre. — 1898. .
. TRÉVERRET (Armand de), professeur à la Faculté des lettres, 170,
rue de Pessac, Bordeaux, — 1869.
TRIANTAPHYLLIDIS, 127, boulevard Malesherbes. — 1894.
: TSAcALOTOS (E.-D.), professeur au 1°" gymnase Varvakion, à Athènes
* UNIVERSITÉ D'ATHÈNES. — 1868.
UNIVERSIEN LisrARY (représentée par M. Langton), à Toronto, Canada.
ν VALIERI (Octave), 2, Kensington Park Gardens, à Londres. —
* VASNIER, greffier des bâtiments, 20, rue de la Terrasse. — 1894,
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— LXIV —
VENDRYÈS (Joseph), professeur à la Faculté des lettres de Clermont-
Ferrand. — 1903.
VENETOCLES ({ Dém.), directeur du Lycée grec, à Alexandrie (Egypte). —
1879
VianEY (J.), docteur ès lettres, professeur à la Faculté des Lettres,
rue Marcel de Serres, à Montpellier. — 1894.
VipAL DE LABLACHE, professeur de géographie à la Faculté des Lettres,
6, rue de Seine — 1870.
VIZERIE, 13, rue du Cherche-Midi. — 1904.
* VLasro (Antoine), 104, avenue Malakoff. — 1884.
* VLASTO (Étienne-A.), à Ramleh San Stephano, Alexandrie (Égypte).
— 1875.
VocüÉé (marquis de), de l’Académie française, ancien ambassadeur, 2,
rue Fabert. — 1875.
* VucINA (Emmanuel-G.), 1, rue Xanthippe, à Athènes. — 1873.
WALLON (Henri), sénateur, secrétaire perpétuel de l'Académie des
Inscriptions et Belles-Lettres, au palais de l’Institut. — 1869.
WAaTEL, professeur honoraire au lycée Condorcet, 42, rue du Bras-
d'Or, à Boulogne-sur-Mer. — 1874.
WEIL (Henri), membre de l'Institut, maître de conférences hono-
raire à l'École normale supérieure, 16, rue Adolphe Yvon, Paris-
Passy. — 1867.
WeiLe (Raymond), capitaine du génie, 23, rue Gay-Lussac. — 1904.
WELTER (H.), libraire, #4, rue Bernard-Palissy. — 1894.
* WESCHER (Garie ancien professeur d'archéologie près la Biblio-
thèque nationale, 27, rue Notre-Dame des Champs. — 1867.
* XANTHOPOULOS (Démétrius), rue Sophie, maison Mavro, à Odessa. —
* Xypias (S.), chez MM. Mavro, Valabrity, Athènes. — 4873.
Zaïmis (Assemakis), à Athènes. — 1891.
ΖΑΪΜΙ5 (Panaghiotis), officier de l'armée grecque, à Athènes. — 1890.
ZasA (Louis), avocat, à Alexandrie. Egypte. — 1880.
ZALOCOSTA (Pierre-N.), à Athènes. — 1886.
Zantrl (Georges), chez M. Léonidas Zarifi, banquier, à Constantino-
ple. — 1902.
ΖΑΒ (Périclès), banquier, 20, allées des Capucines, à Marseille. —
1867.
Zicavinos (Grégoire), archimandrite, 23, rue de la Grande-Armée, à
Marseille, — 1891.
— LXV —
SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES
Athènes.
École française d'Athènes.
Institut archéologique allemand.
Société archéologique.
Syllogue des amis de l'instruction, le Parnasse.
Auxerre.
Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne.
Baltimore (États-Unis).
John Hopkins University.
Besançon.
Société d'émulation du Doubs.
Boston.
Archæological Institute of America.
Bruxelles.
Société des Bollandistes.
Constantine.
Société archéologique du département de Constantine.
Constantinople.
Syllogue littéraire hellénique.
Le Havre.
Société havraise d'études diverses.
Londres.
Society for the promotion of Hellenic studies.
Montpellier.
Académie des sciences et lettres de Montpellier.
Nancy.
Académie de Stanislas.
Rome.
École française de Rome.
Senlis.
Comité archéologique.
Smyrne.
Musée et bibliothèque de l'École évangélique.
Washington.
Smithsonian Institution.
PÉRIODIQUES
échangés avec les publications de l'Assoeiation.
Paris,
Annales du musée Guimet.
Bulletin administratif du Ministère de l'Instruction publique.
Bulletin critique.
Revue critique d'histoire et de littérature.
Athènes.
᾿Αγών.
Διάπλασις τῶν παίδων.
Ἕστία.
Baltimore.
American Journal of philology.
Bordeaux.
Revue des Études anciennes.
Bruxelles.
Revue de l'Université de Bruxelles.
Bucharest.
Ἶρις.
Constantinople.
ἙΚωνσταντινούπολις.
Leipzig.
Byzantinische Zeitschrift.
New York.
American Journal of Archæology.
Padoue.
Rivista di Storia antica e Scienze affini.
Rome.
Bessarione.
Bullettino dell’ Istituto di diritto romano.
Triesle.
Νέα ἡμέρα.
— LXVI --
PRIX DÉCERNÉS
DANS LES CONCOURS DE L'ASSOCIATION
(1868-1903)
. Prix de 500 fr. M. Tourner, Édition de Sophocle.
Mention honorable. M. Borsség, 99 vol. de l'édition, avec traduction fran-
caise, de Dion Cassius.
Prix de l'Association. M. H. Weuz, édition de sept tragédies d'Euripide.
Prix Zographos. M. A. Barzcy, Manuel des racines grecques et latines.
Mention très honorable. M. Bernanpauis, Ἑλληνιχὴ γραμματιχή.
. Prix de l'Association. M. Alexis PrerroN, Édition de l'Iliade.
Prix Zographos. M. PAPARRIGOPOULOS, Histoire nationale de la Grèce.
Prix de l'Association. M. Ch.-Émile RueLie, Traduction des Éléments
harmoniques d'Aristoxène.
Prix Zographos. Partagé entre M. SatHas (’Avéxôota ἔλληνιχά, Χρονιχὸν
ἀνέκδοτον Γαλαξειδίου, Toupxoxpatoupévn Ἑλλάς, Νεοελληνιχὴ φιλολογία,
Νεοελληνιχῇῆς φιλολογίας παράρτημα) et M. VAaLETTAS (Δονάλδσωνος ἰστο-
(a τῆς ἀρχαίας ἑλληνιχῆς φι ολογίας ἐξελληνισθεῖσα μετὰ πολλῶν προσ-
κῶν καὶ διοοθώσεων).
. Médaille de 500 fr. M. Pozrris, Μελέτη ἐπὶ τοῦ βίου τῶν νεωτέρων Ἑλλήνων.
Prix de l'Association. M. Amédée Τάμοιευ, Traduction de la Géographie
de Strabon, tomes 1 et II.
Médaille de 500 fr. M. A. Boucaerte, Ἑρμηνεύματα et Καθημερινὴ ὁμιλία,
lexles inédits attribués à Julius Pollux.
Médaille de 500 fr. M. A. de Rocnas D'AIGLUN, Poliorcétique des Grecs;
Philon de Byzance.
Prix Zographos. M. Couwanoupis (É.-A.), ᾿Αττικῆς ἐπιγοαφαὶ ἐπιτύμδιοι.
Médaille de 500 fr. M. C. Sarnas, Bibliotheca graeca medii aevi.
. Prix de l'Association. M. C. Wescner, Dionysii Byzantii de navigatione
Bospori quae supersunt, graece et latine.
Prix Zographos. M. Émile Lecrann, Recueil de chansons populaires grecques
publiées et traduites pour la première fois.
Mention très honorable. M. E. Frzceur, Histoire du siècle de Périclès.
Mention très honorable. M. Alfred Cnotser, Xénophon, son caractère et
son talent.
Prix de l'Association. Partagé entre M. C. Sarnas (Mich. Pselli Historia
byzantina et alia opuscula) et M. Perir De Juicevizes, Histoire de la
èce sous la domination romaine.
Prix Zographos. Partagé entre M. Mrcranaris QEuraaërd) et M. Margaritis
Drmrrza (Ouvrages relatifs à l'histoire de la Macédoine),
Prix de l'Association. Partagé entre M. Lazzier (Thèses pour le doctorat
ès lettres : 19 De Critiae {yranni vita ac scriptis; 30 Condition de la
femme dans la Jamille athénienne au νὸ et au 1v° siècles avant l'ère chré-
. tienne) et M. Phil. Bryxennios (Nouvelle édition complétée des lettres de
Clément de Rome).
1883.
1884.
— LXVILI —
Prix Zographos. MM. Coumanouis et Casrorceis, directeurs de 1 ᾿Αθήναιον.
. Prix Zographos. MM. Bayer et Ducassne. Mission au mont Athos.
. Prix de l'Association. Partagé entre M. Ausé (Restitution du Discours
Véritable de Celse traduit en français) et M. Victor Prou (Édition et
traduction nouvelle de la Chirobaliste d'Héron d'Alexandrie).
Prix Zographos. Le Bulletin de Correspondance hellénique.
. Prix de l'Association. M. E. SacLio, directeur du Dictionnaire des antiqui-
tés grecques el romaines.
Prix Zographos. M. P. Decuanue, Mythologie de la Grèce antique.
. Prix de l'Association. M. Ex. Caïzemer, Le droit de succession légitime
à Athènes.
Prix Zographos. M. Henri Vasr, Études sur Bessarion.
. Prix de l'Association. M. F. Aug. Grvagrr, Histoire et théorie de la mu-
sique dans l'antiquité.
Prix Zographos. M. A. CARTAULT, La trière athénienne.
. Prix de l'Association. Partagé entre M. Max. Coccioxon (Manuel d'archéolo-
gie grecque) et M. V. Prou (Les théâtres d'aulomates en Grèce, au n°
siècle de notre ère).
Prix Zographos. Partagé entre M. 1. Marrua (Thèse pour le doctorat ès
lettres sur les Sacerdoces athéniens) et M. P. GirarD (Thèse pour le doc-
torat ès lettres sur l'Asclépiéion d'Athènes).
Prix de l'Association. Partagé entre M. Maurice Crorser (Essai sur la vie
et les œuvres de Lucien) et M. Couar (La poésie alexandrine sous les
trois premiers Ptolémées).
Prix Zographos. Partagé entre M. Coxros ἡ λωσσικοὶ παρατηρήσεις ἀναφε-
ρόμεναι εἷς τὴν νέαν ἑλληνικὴν γλῶσσαν) et M. Emile Lecrann (Bibliothèque
grecque vulgaire, t. I, II, IT).
Prix de l'Association. Partagé entre M. Max Bonxer {Acta Thomae, partim
inedila) et M. Victor Henry (Thèse pour le doctorat ès lettres sur l'Ana-
logie en général et les formations analogiques de la langue grecque).
Prix Zographos. Partagé entre M. Auguste Cuoisy (Études sur l'architecture
grecque), et M. Edmond Porrier (Thèse pour le doctorat ès lettres sur les
cythes blancs attiques).
. Prix de l'Association. M. Salomon Reinacx, Manuel de philologie classique.
Prix Zographos. M. Olivier Ravyer, Monuments de l'art antique.
. Prix de l'Association. Le Syllogue littéraire hellénique de Constantinople.
Recueil annuel.
Prix Zographos. Partagé entre M. Amédée Hauværrz (De archonte rege; —
Les Siratèges athéniens. Thèses pour le doctorat ès lettres) et M. Boucnt-
LECLERCQ L Traduction des ouvrages d’Ernest Curtius, J.-G. Droysen et
G.-F. Hertzberg sur l’histoire grecque).
. Prix de l'Association. Partagé entre M. Albert Manrin (Thèse pour le
doctorat ès lettres sur les Cavaliers athéniens) et M. Paul Moncraux
(Thèses De Comriuni Asiae provinciae et sur les Proxénies grecques).
Prix Zographos. Partagé entre M. PapanopouLos KERAMEUS (Ouvrages divers
sur l'antiquité grecque) et Paul Taxwery (Ouvrages et opuscules sur l'his-
toire de la science grecque).
archives de l’intendance sacrée à Délos. —
cris deliacis).
Prix Zographos. Ἑστία, revue hebdomadaire dirigée par M. Cazdonis.
Mention très honorable. M. Cucuez, Essai sur la langue et le style de
corateur Antiphon; Œuvres complètes de l’orateur Antiphon, traduction
rançaise.
Mention très honorable. M. l'abbé Rourr, Grammaire grecque de Koch, tra-
duction française.
. Prix de l'Association. M. Homoze, Thèses peur le doctorat ès lettres {Les
e
antiquissimis Dianae simula-
— LXIX —
1889. Prix de l'Association. M. Henri Omonr, Inventaire sommaire des manuscrils
grecs de la Bibliothèque nationale.
— Prix Zographos. Partagé entre M. Ch. DrenL (Études sur l'administration
byzantine dans l’exarchat de Ravenne) et M. Spyridon Lamsros (Katé\oyoc
τῶν ἐν ταῖς βιδλιοθήχαις τοῦ ᾿Αγίου "Opous ἑλληνιχῶν χωδίκων).
1890. Prix de l'Association. M. G. SCHLUMBERGER, Un empereur byzantin au
x° siècle. Nicéphore Phocas.
— Prix Zographos. M. Micraraxis, Νεοελληνικὴ γεωγραφιχὴ φιλολογία (1800-
1889).
1891. Prix de l'Association. M. Edmond Porræn, Les Statuettes de terre cuite dans
l'antiquité.
— Prix Zographos. Partagé entre M. SaxxéLion (Βιδλιοθήχη πατμιαχή), et
M. Laryscuev (Inscriptiones graecae orae septentrionalis Ponti Euxini).
1892. Prix de l'Association. Partagé entre M. Cosrouris (Livre XII d’Aétius
inédit), M. P. Mnurr (Étu es sur les premières périodes de la céra-
mique grecque), et M. A.-N. Sxras (Περὶ τῆς κρητιχῆς διαλέκτου).
— Prix Zographos. Partagé entre M. l'abbé Barirro (Thèse sur l’abbaye
de Rossano, et autres travaux de paléographie grecque), et M. Svoronos
{(Numismatique de la Crète ancienne).
— Prix Zappas. MM. les abbés Auvray et Toucarp (Édition critique de la petite
catéc de de St Théodore Studite).
1898. Prix Zographos. Partagé entre M. Georges Raper (De coloniis a Macedonibus
in Asiam cis Taurum deductis et La Lydie et le monde grec au temps des
Mermnades. Thèses pour le doctorat ès lettres) et M. Jean Dupuis
(Théon de Smyrne, texte et traduction).
- Prix, rep Pese M. Nicozz, Les scolies genevoises de l'Iliade et Le Livre du
préfet.
1894. Prix Zographos. Partagé entre M. Tsounras (Muxñvat χαὶ puxnvaios πολι-
τισμός) et M. CLerc “De rebus Thyatirenorum et Les Mélèques athé-
niens. Thèses pour le doctorat ès lettres).
— Prix Zappas. M. Cavvapras. (Γλυπτὰ τοῦ ἐθνικοῦ Μουσείου, κατάλογος
περιγραφιχός, 1 et Fouilles d’Epidaure, Î).
1895. Prix Zographos. M. A. Barzcy, Dictionnaire grec-français.
— Prix Zappas. M. V. Bénann, De l'erigine des cultes arcadiens (Bibl. Ec.
fr. de Rome et d'Athènes, fasc. 61). Thèse pour le doctorat ès lettres.
1896. Prix Zographos. S. E. Hamnyx Bsy et M. ΤῊ. Rerxaca (Une nécropole
royale à Sidon).
— Prix Zappas. M. Paul Masquerav (De tragica ambiguitate apud Euri-
idem et Théorie des formes lyriques de la iragédie grecque. Thèses pour
e doctorat és lettres).
4897. Prix Zographos. Partagé entre MM. Dernasse et LecHAT (Épidaure,
restauralion et description des principaux monuments du sanctuaire
nee et M. Braucuer (Histoire du droit privé de la république
athénienne
— Prix Zappas. M. Maurice ἔμμανυει, (De saltationis disciplina apud Graecos
et Essai sur l’orchestlique grecque. Thèses pour le doctorat ès lettres).
— Médaille d'argent. M. De Ripoer (De rctypis quibusdam quae falso vocan-
ἔων argivo-corinthiaca et De l’idée de la mort en Grèce à l’époque classi-
que. Thèses pour le doctorat ès lettres) et Catalogue des bronzes irouvés
sur l’Acropole d'Athènes.
1898. — Prix Zographos. Partagé entre M. D. C. Hessezino. Les cinq livres de la
loi (le Pentuteuque), traduction en néo-grec et M. Hilaire VanDAgLe, Essai
de Syntaxe historique : l’optatif grec.
— Prix Zappas. Le Δελτίον τῆς ἱστορικῆς καὶ ἐθνολογικῆς ἑταιρίας τῆς “Ελλάδος.
1899. --- Prix Zographos partagé entre M. ΑΚΌΛΙΠΠΟΝ (Les mines du Laurion dans
— LXX —
l'antiquité. Thèse pour le doctorat ès lettres) et M. Ph.-E. LecraxD
(Etude sur Théocrile. Thèse pour le doctorat ès lettres).
Prix Zappas. M. Mairrarais Ἱστορία τοῦ βασιλείου τῆς Νιχαίας καὶ τοῦ
δεσποτάτου τῆς Ἠπείρου. Ι
. Prix Zographos. Partagé entre M. Charles MicuxL, Recueil d'inscriplions
grecques, et M. Gustave Foucères, De Lyciorum communi et Mantinée et
’Arcadie orientale. Thèses pour le doctorat ès lettres.
Prix Zappas. M. PoLrris, Mehétar περὶ τοῦ βίου καὶ τῆς γλώσσης τοῦ ἑλληνικοῦ
λαοῦ. Παροιμίαι. Τόμος A’ (fascicules 68-71 de la bibliothèque Marasiy).
. Prix Zographos. Partagé entre M. Navarre, Essai sur la rhétorique grec-
ue. Thèse pour le doctorat ès lettres, et M. Ouvré. Les formes litléraires
la pensée grecque.
Prix Zappas. M. G. Miver, Le Monastère de Daphni.
. Prix Zographos. Partagé entre M. Couvreur, Hermiae Alerandrini in Pla-
tonis Phaedrur1 scholia et M. À. Jouix. La sculpture grecque entre les
guerres médiques et l’époque de Périclès (Thèse pour le doctorat ès lettres).
Prix Zappas. M. Svoronos, ‘Epunvela τῶν μνημείων τοῦ Ἐλευσινιαχοῦ μυστιχοῦ
κύχλου καὶ τοπογραφία ᾿Ἐλευσῖνος καὶ ᾿Αθηνῶν.
. Prix Zographos. Partagé entre M. Harzipauis, ᾿Ακαδημξιχὰ ἀναγνώσματα
T. 1. (Bibl. Marasly fascicules 115-118) et M. Pau
d'Eschyle.
Prix Zappas. Le général pe Βευι, L'Habilation byzantine.
Mazon, L'Orestie
PRIX DÉCERNÉS PAR L'ASSOCIATION
DANS LES LYCÉES ET COLLÈGES
Année 19083.
CONCOURS GÉNÉRAL DES LYCÉES ET COLLÈGES DE PARIS, DE SCEAUX,
DE VANVES, DE VERSAILLES (HOCHE).
Rhétorique (Version grecque). — Vaillant (Casimir), élève du Lycée Henri IV.
Seconde (Version grecque). — Massigli (René), élève du Lycée Louis-le-Grand.
CONCOURS GÉNÉRAL DES LYCÉES ET COLLÈGES
DES DÉPARTEMENTS.
Rhétorñique (Version grecque). — Anglès (Raoul), élève du Lycée de Marseille
REVUE
ÉTUDES GRECQUES
\
'ς
Ἂ
L'ASSOCIATION POUR L'ENCOTRAGEMENT DES ÉTUDES GRECQUES cr.
TOME XVI
Ν᾽" 68-69
Janvier-Avril 1903
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
28, RUE BONAPARTE, VI°
Toutes les communications concernant la Redaction doivent être adressées
à M. Tuaéopork R£gINACH, rédacteur en chef-gérant, à la librairie Leroux.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
RUE BONAPARTE, 28, PARIS (vit)
A. DE BOISSIEU. — Inscriptions antiques de Lyon, reproduites d'après les
monuments ou recueillies dans les auteurs. In-4.. ..... ses 40 fr. »
R. CAGNAT, membre de l’Institut, — L’Année épigraphique, Revue des pu-
blications épigraphiques relatives à l’antiquité romaine. 1888-1902. 15 volumes
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gie orientale. Tomes I à IV. In-8, figures et planches. Chaque vol.. 25fr. »
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temple de Séti à Abydos, publiées et traduites. In-4, 4 planches... 5 fr. »
CAPITAINE ESPÉRANDIEU. — Recueil de cachets d'oculistes romains.
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R. DE LA BLANCHÈRE. -- Histoire de lépigraphie romaine, depuis les
origines jusqu'à la publication du Corpus. In-8. uses. 3 fr. »
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cicules I à III, in-4, avec planches. Chaque................. 25 fr, »
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l’Institut, Haussoullier et Théodore Reinach. Première série, en 3 fascicules
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tutions de la Grèce ancienne jusqu'à la conquête romaine, par Ch. Michel, pro-
fesseur à l'Université de Liège. Un fort volume in-8..............,... 20 fr. »
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miae inscriptionum et litterarum humaniorum collectae et editae. Tomus pri-
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mestrielle. In-8. Abonnement..... ΠΝ Ψῃᾳ0.ῃ. vossossossss 3 fr. »
L'AGAMEMNON D'ESCHYLE
JUGÉ PAR GŒTHE () tr
\
À Monsieur le ministre d’État Humboldt (2) à Francfort
sur le Main.
Tennstedt, le 4er septembre 1616.
Le grand ouvrage (3) auquel, très cher ami, vous avez consacré
une belle partie de votre vie, ne pouvait me parvenir mieux à
propos : il me trouve ici à Tennstedt, petite villégiature et
station de bains de la Thuringe, qui ne vous est sans doute pas
inconnue, et où je suis resté seul depuis que l'ami Meyer m'a
quitté.
Je me suis permis d’abord une lecture rapide de la préface,
puis de la pièce même, à me grande édification. Maintenant,
après m'être délecté plusieurs fois à l’ensemble comme aux
détails, je ne veux pas tarder plus longtemps à vous remercier.
(4) Cette lettre inédite de Gœthe a été publiée dans la Gazette de Francfort du
31 décembre 1902 par M. Bernhard Suphan. Elle doit être réimprimée dans le
tome XXVII de la correspondance de Gæœthe que prépare M. Schüddekopf. On
n'en possède que le brouillon dicté au secrétaire Schreiber.
(2) Guillaume de Humboldt (1767-1835). 11 était, à cette époque, membre de la
commission siégeant 4 Francfort qui s'occupait du règlement des modifications
territoriales résultant du traité de Paris.
(3) Æschylos Agameninon, metrisch übersetzt von Wilhelm von Humboldt, Leip-
zig; 1816 in-4°. — La traduction avait été composée entre 1196 et 1804. Elle est
précédée d’une introduction considérable et suivie de Notes critiques, concernant
l'établissement du texte, par Godefroi Hermann. L’exemplaire envoyé à Gœthe
est conservé au Gœthehaus à Weimar.
1
2 J. W. GOËTHE
On ἃ beau passer sa vie à s’occuper avec un bienveiïllant inté-
rêt de tout ce que l'antiquité ou les temps les plus modernes
nous apportent de bon et de beau : lorsqu'un de ces géants du
vieux passé se dresse devant vous, taillé en prodige, on en est
tellement saisi, qu'il faut rassembler toutes ses idées pour être
tant soit peu digne de l’affronter. Sous cette sensation immé-
diate, on n’a pas un moment de doute : on se sent en présence
de l’œuvre des œuvres, ou, si l'on veut parler avec plus de
modération, devant un chef-d'œuvre du tout premier rang.
C'est à vous que nous devons de pouvoir aisément faire cette
constatation ; aussi votre effort, qui porte en lui-même déjà sa
récompense, mérite-t-il de continuels remerciments.
La pièce me parut toujours une des plus dignes d'attention
et me fut, grâce à votre entremise, plus vite accessible que d'au-
tres. Mais aujourd’hui plus que jamais j'admire la trame de ce
tapis primordial (1) : le passé, le présent, l'avenir si heureu-
sement ourdis ensemble que l’on devient, à le lire, soi-même
un voyant, c'est-à-dire semblable à Dieu. Et n'est-ce pas là, en
somme, le triomphe de toute poésie dans ses plus grandes
corame dans ses plus infimes manifestations ?
Si maintenant nous considérons à quel point le poète est
maître de tous les moyens nécessaires pour produire un aussi
prodigieux effet, nous ne pourrons nous défendre d'un profond
respect. Avec quel bonheur sont mis en œuvre les éléments
épique, lyrique et dramatique, de manière à nous amener, non
par violence, muis par séduction, à nous intéresser à de si hor-
ribles destinées ! Et comme les réflexions didactiques, d’ailleurs
peu nombreuses, siéent bien au chœur! Tout cela dépasse tout
éloge.
Pardonnez-moi d'apporter des chouettes à Athènes en sacri-
fice de grâces : je pourrais, en vérité, continuer indéfiniment sur
ce ton et vous raconter ce que vous savez depuis longtemps
mieux que moi.
(1) Das Gewebe dieses Urleppichs.
L'AGAMEMNON D'ESCHYLE 3
Par exemple, j'ai été de nouveau frappé par-ce fait que, à
l'exception de Clytemnestre, enchaîneuse des fatalités (1), cha-
que personnage a son Aristeia à soi (2); chacun remplit un
poème entier et ne revient plus ensuite pour nous importuner
à nouveau de ses affaires. Dans chaque bon poème on doit
trouver toute la poésie; et celui-ci est un chef de file.
Ce que vous dites dans votre préface sur la synonymie est
exquis (3) : puissent les épurateurs de notre langue s’en péné-
trer ! Mais ne mêlons pas à des sujets aussi élevés 105 malheu-
reuses aberrations par lesquelles la nation allemande est en
train d’abîmer sa langue : désastre dont on ne se rendra compte
que dans trente ans.
Quant à vous, mon bon ami, soyez béni à jamais pour le bien
que vous nous avez fait. Votre Agamemnon ne me quittera plus.
Eu ce qui concerne le mérite rythmique de votre traduction,
je ne puis en juger, mais je crois le sentir. Notre ami Wolf, si
plein de mérite, de talent et d'esprit, mais que sa manie de
contradiction est en train d’ensauvager (4),'est resté quelques
(1) Unheilverkelterin.
(2) Allusion aux chants de l'Iliade consacrés aux prouesses (ἀριστεία) d'Aga-
memnon, de Diomède, etc. Gœthe ne veut pas dire que chaque partie de la trilo-
gie d'Eschyle a un héros unique, mais bien chaque épisode de l'Agamemnon
(Agamemnon, Cassandre, etc.). Le poète ne l'oublions pas, ne disposait que de
deux acteurs.
(3) Humboldt avait développé cette thèse que chaque langue ne peut reproduire
qu'une des « facettes » de l'idée contenue dans un mot et généralement une
facette différente. Connaître plusieurs langues, c'est posséder plusieurs aspects
d'une idée, et par conséquent en mieux pénétrer l'essence; d'où l'utilité des syno-
nymes empruntés à des idiomes étrangers et les précautions à prendre dans l'épu-
ration du vocabulaire. En 1816, par un contrecoup du réveil national de l’Alle-
magne, le purisme sévissait à l'excès parmi les pédants, au grand regret de
Gœthe. Sur ce point Schopenhauer partageait les répugnances de son illustre
contemporain. « Der Deutschthümlerei, écrit-il quelque part, muss man keine
Concessionen machen. »
(4) Der im Widerspruch verwildernder Wolf. F. A. Wolf, le fameux philo-
logue. Gæthe se plaint à plusieurs reprises de sa manie de contradiction : « Tout
ce qu’on dit, écrit-il, tout ce qui existe, Wolf le nie obstinément ; on a beau y
être préparé, cela finit par vous exaspérer. Ce défaut s'aggrave d'année en
année; il rend son commerce, qui pourrait être si instructif et profitable, inutile
et intolérable. A la longue, on est soi-même contaminé de sa folie et l'on trouve
plaisir à dire le contraire de ce que l'on pense. »
ᾷ 3. W. GŒTHE
jours avec moi et a fait le plus grand éloge de votre soigneux
travail. Il sera instructif de voir comment se comporteront les
gens d'Heidelberg (1).
Envoyez-moi encore un mot avant d'aller à Paris, et recom-
mandez-moi à votre chère épouse. Combien j'aurais désiré vous
voir cet été! Tant de questions s’agitent en tous sens, qu'il fau-
drait des journées pour discuter ce qui vaut la peine d’être encou-
ragé et comment. Heureusement pour moi, rien de tout ce qui
m'est soumis ne mérite d'être désapprouvé complètement bien
que tout ne soit pas commencé ni dirigé selon mes préférences.
Et c’est justement ce mélange de douceur et d’amertume dont
on ne peut causer que de vive voix (2).
J. W. GoETue.
(4)3. H. Voss (le traducteur d'Homère etc.) et ses fils. Humboldt l'avait cou-
vert de fleurs dans sa préface, tout en ajoutant que la forme métrique introduite
par lui était susceptible d'améliorations.
(2) La formule de politesse terminale manque ; elle a dû être rajoutée sur la
copie, de la main de Gœthe.
L'ANNÉE DE MÉTON
Nous ne possédons qu'un seul passage antique relatif au com-
mencement du cycle de Méton, c’est celui de Diodore de Sicile
(XIT, 36) dont la teneur dans les manuscrits et les éditions est
ainsi CONÇUE :
Er’ ἄρχοντος δ᾽ ᾿Αθήνησιν ᾿Αψεύδους, Ῥωμαῖοι κατέστησαν ὑπά-
τους Τίτον Μενήνιον καὶ Πρόχλον Γεγάνιον Μαχερῖνον. "Ent δὲ τοῦ-
των Σπάρταχος μὲν ὁ ἐν Βοσπόρῳ βασιλεὺς ἐτελεύτησεν ἄρξας ἔτη
δεχάεπτα, διεδέξατο δὲ τὴν ἀρχὴν Σέλευχος καὶ ἐδασίλευσεν ἔτη τεσ-
capäxovta. ᾽ν δὲ ταῖς ᾿Αθήναις Μέτων ὁ Παυσανίου μὲν υἱὸς, δεδοξασ--
μένος GE ἐν ἀστρολογίᾳ ἐξέθηχε τὴν ὀνομαζομένην ἐννεακαιδεχαετη-
ρίδα, τὴν ἀρχὴν ποιησάμενος ἀπὸ μηνὸς ἐν ᾿Αθήναις Σχιροφοριῶνος
τρισκαιδεχάτης. ᾿Εν δὲ τοῖς εἰρημένοις ἔτεσι τὰ ἄστρα τὴν ἀποκατάσ-
τάσιν ποιεῖται, καὶ καθάπερ ἐγιαυτοῦ τινος μεγάλου τὸν ἀνακυχλισμὸν
Aaubaver " διὸ καί τινες αὐτὸν Μέτωνος ἐνιαυτὸν ὀνομάζουσιν.
Quand commença l’année de Méton, ὁ Μέτωνος ἐνιαυτός
Dans ce passage, il y a une phrase qui depuis longtemps a
confondu et déconcerté tous les commentateurs. Les mots :
τὴν ἀρχὴν ποιησάμενος ἀπὸ μηνὸς ἐν ᾿Αθήναις Σχιροφοριῶνος τρισκαι-
δεκάτης, « après avoir pris pour point de départ le treizième
jour du mois que dans Athènes on appelle Scirophorion. » On
& fait observer d'abord que les mots ἐν ᾿Αθήναις, « dans Athè-
nes, » étonnent, que le vrai terme ᾿Αθήνησιν se trouve deux
lignes plus haut et que la mention de lieu est au moins super-
flue. Puis, comment expliquer que Méton aurait commencé son
6 J. OPPERT
cycle avec le treizième jour du mois? cela ne se comprend pas,
Des éditeurs complaisants et très faciles à satisfaire ont suggéré
que ce treizième du mois de Scirophorion était le jour où la loi
consacrant le nouveau système aurait été votée, c'est-à-dire
dix-sept jours avant la fin de l’archonte d’Apseudès, et que le
nouveau calendrier aurait été inauguré seulement sous l'ar-
chonte Pythodoros. Cette façon d'expliquer les choses, quelque
inadmissible qu'elle soit, a trouvé des défenseurs éminents, et
cet expédient a été la cause de toutes les erreurs dont la ques-
tion du cycle de Méton a été la victime. Jamais on ne date une
ère quelconque du moment où on s'est décidé à l'appliquer,
mais on la commence avec son époque véritable, le jour même
où l'on inaugure son existence. Les calendriers julien et gré-
gorien datent du premier janvier de l'an 45 avant J.-C. et du
15 octobre 1582, et non pas des dates où l'on décida de pro-
mulguer ces réformes; 6618 ne se discute même pas. D'ail-
leurs, une pareille interprétation est en contradiction avec le
texte de Diodore qui affirme énergiquement que le système de
Méton a été appliqué dès l'archontat d'Apseudès (433 avant
J.-C.), c'est-à-dire que le fonctionnement en coïncide entière-
“ment avec celui de ce magistrat éponyme de la ville d'Athènes.
L'assertion est formelle, ne soulève aucun doute, ne tolère
aucune contradiction. |
Il ne peut donc être question ici du treizième jour du dernier
mois de l’année, ni du terme bien embarrassant « dans Athè-
nes ». Mais qu'est-ce qu'il faut mettre à la place de ces absur-
dités ? La réponse est facile.
Le chiffre treize a une grande importance dans le calendrier
lunaire, c’est le mois embolime ou intercalaire dont on se ser-
vait, dès le cinquième millennium, pour égaliser les différences
résultant des périodes incommensurables des révolutions men-
suelles et annuelles. Méton avait trouvé bien établi l'emploi du
treizième mois dans l'octaétéride -de Solon, qu'il entreprit de
remplacer par un système moins imparfait : cette période de
huit années ou de quatre-vingt-dix-neuf mois synodiques em-
L'ANNÉE DE MÉTON 7
ployait trois fois le treizième mois, dans la troisième, sixième
et huitième année de chaque période octennale. Il s’agit ici du
treizième mois et, au lieu de τρισκαιδεκάτης, il faut lire τρισκαιδε--
xärou, c'est-à-dire μηνός. Ce mois treizième était le Sciropho-
rion, le dernier mois de l’année. Mais de quelle année s’agit-
il? Certainement pas de la première année de son propre cycle,
puisque celle-ci ne pouvait sous aucun prétexte être embolime,
ear il manquait onze jours aux douze mois pour compléter
l'année; le mois de Scirophorion n’y était pas le treizième,
mais le douzième mois, par lequel on ne commence guère
l'année. Ce ne put être que le Scirophorion, treizième mois
de l'archontat précédent, celui de Charès, sur lequel il empiéta
en le supprimant, pour égaliser le commencement de l'Héca-
tombéon avec le cours du soleil, et pour faire reculer le com-
mencement du premier mois de l’an; en effet, l’irrégula-
rité de l'octaëtéride devait forcément faire retarder le mois
d'Hécatombéon. Nous en donnerons plus tard les raisons; pour
le moment il s'agit de savoir ce qu ‘il pouvait y avoir à la place
des mots ἐν ᾿Αθήναις.
Évidemment, d’après tout ce qui précède, ces mots cachent
l'idée du mois de l’année précédente, sur laquelle Méton devait
prélever le retard causé par l'emploi trop prolongé de l'octaété-
ride : c'était une expression peut-être insolite, à la place de
laquelle le copiste ignorant mit les mots ἐν ᾿Αθήναις, vides de sens,
Car, pour que le mot μηνὸς fut séparé de Σχιροφοριῶνος͵ il fallait
une épithète exprimant la qualité de ce mois, peut-être ἐνιαυ-
τοῦ ἐμπροσθίου ou ἄνωθεν, enfin un mot sur lequel nous revien-
drons οἱ qui pouvait donner lieu à la corruption ἐν ᾿Αθήναις.
Le sens de la phrase était donc : |
« En commençant son cycle par le dernier mois de l’année
précédente, le Scirophorion, le treizième mois. »
| "
8 J. OPPERT
IT
L'exactitude de notre traduction portera la conviction chez
tous ceux qui se sont rendu compte de la signification d’une
réforme de cette nature et de celle de Méton en particulier.
Une mesure de cette sorte impose ou l'addition d’un laps de
temps, ou le retranchement d'un certain intervalle. Jules César
dut corriger la négligence des augures romains en ajoutant
quatre-vingts jours, Grégoire XIII supprima dix jours, pour
pouvoir exécuter les prescriptions du concile de Nicée con-
cernant l'époque de Pâques. Méton fut obligé de retrancher
un mois du calendrier athénien.
. Avant Solon, on comptait, à Athènes, par triétérides ou
époques triennales de 37 mois synodiques. Ce laps de temps
comprend {1,092 jours, 15 heures, 9 minutes, 45 secondes,
tandis que 3 ans font 1,095 jours, 17 heures, 26 minutes,
27 secondes. Cette différence fait que dans la période triété-
rique, les années solaires sont de 3 jours, 2 heures, 16 minutes,
40 secondes en avance sur les 37 lunaisons, et, si l'on ne
compte que par lunes, on se trouve forcément en arrière sur
les saisons de l’année; tous les trente ans la computation
d’après la lune se trouve d’un mois en retard.
Pour remédier à cet inconvénient, Solon appliqua l'octaété-
ride, ou 99 mois, égalant huit ans dont trois années embolimes
de treize mois, les troisième, sixième et huitième années de
chaque période. On obtenait ainsi 2,921 jours, 22 heures,
30 minutes, 30 secondes, pour la période solaire, mais 2,923
jours, 12 heures, 40 minutes, 45 secondes pour les 99 mois,
soit un surplus, en faveur de cette dernière durée, d'un jour,
44 heures, dix minutes, 15 secondes; donc depuis l’année 593,
où l'on place généralement la réforme de Solon, on se trouva
en avance de 31 jours, 19 heures, 25 minutes, 40 secondes,
c'est-à-dire d’une lunaison, plus deux jours.
L'ANNÉE DE MÉTON 9
Nous avons tenu à donner aux chiffres la plus grande exacti-
tude. Il est très probable que l'octaétéride fut en usage constant
depuis la réforme de Solon, et le passage d’une inscription
mentionnant un oracle de Délos, qui conseillait aux Athéniens
d'insérer un second Hécatombéon doit se rapporter à une pé-
riode antérieure; il ne peut s'expliquer pendant une période
de cycle octennal, mais seulement pendant une époque où
l’ensemble des années restait en arrière sur les saisons. Le
fait dont il est question dans l'inscription mentionnée ne peut
donc être qu'une citation d’un fait ancien avant l'application de
l’octaétéride, où l'insertion d'un mois en surplus était complè-
tement irrationnelle et ne pouvait que déterminer un désordre
dans le calendrier. |
Dans l’année de Charès (434 à 433 avant J.-C.), l'année finit
le 26 août, un mois seulement avant l'équinoxe d'automne,
landis que dans la législation en cours elle aurait dà finir un
mois après le solstice de l'été. C'est alors qu'intervint Méton
fils de Pausanias. Géminus s'explique longuement sur les
défauts de l’octaétéride que Méton réforma, non pas en réunis-
sant deux périodes octennales, ce qui n'aurait fait que seize
années, mais en introduisant, entre ces deux périodes, une troi-
sième de trois ans seulement qui devait compenser le surplus
des 198 lunaisons. Or, les deux octaétérides donnaient un
surplus de 3 jours, 11 heures, 20 minutes, que le déficit de
la période triennale compensait à 2 heures, 4 minutes près : tel
est, en effet, le bilan de la période de Méton de 235 lunaisons,
équivalant à 6,939 jours, 16 heures, 38 minutes, alors que
19 ans tropiques font 6,939 jours, 14 heures, 28 minutes.
L'astronome athénien combina les deux périodes octennales
et la période triennale, de manière que celte dernière compen-
sation changeât le premier surplus lunaire de 38 heures en défi-
cit de 36 heures (38 — 74 — — 36), et que les divisions furent
exactes à deux heures près, en accord avec le cours du soleil, par
la seconde octaétéride finale. Il eut soin de ne pas faire naître
une avance de 76 heures, en faisant se succéder les deux octaété-
10 ΠΣ, OPPERT
rides, ce qui aurait obligé à compenser une trop grande difié-
rence. Îl évita ce grand écart, en n'ajoutant pas à la fin, mais
au milieu, la période triennale qui aurait seulement égalisé les
années à l'extrême fin de son enneskaïdécaétéride. Cette sage
précaution, méditée par le grand astronome, donna le système
suivant ‘où nous exprimons les années embolimes par des chif-
fres romains : 4, 2, III, 4, 5, VI, 7, VIII, 9, 10, XI, 12, 43, XIV,
45, 16, XVII, 18, XIX.
Cette suite des années intercalaires a été signalée par le P.
Petau qui admet, avec raison, que les Juifs, qui emploient ce
système, n'avaient fait qu'imiter l'exemple donné par Méton;
il ne faut pas oublier qu'aucun passage antique ne nous a
transmis l'ordre de Méton, et que beaucoup d’hypothèses erro-
nées ont été émises à ce sujet. Ce qui confirme absolument la
supposition du P. Petau, c'est la circonstance que le cycle pascal
du concile de Nicée conserva les mêmes années embolimes que
Méton, tout en commençant le cycle six ans plus tard, et obte-
nait ainsi l'intercalation pour les années 2, 5, 8, 11, 13, 16 οἱ 19.
Pour comprendre l'agencement du cycle de Méton, il ne faut
jamais oublier qu'il ne fut qu’un cycle purement lunaire, et qu'il
ne s’occupa de l’année solaire que pour établir que 19 ans
équivalaient à 235 lunaisons, ce que les Chaldéens avaient déjà
observé. Son parapegma ou calendrier ne visa que la réparti-
tion de 6940 jours en 235 lunaisons qu'il distribua en 19 grou-
pes, dont douze avaient douze mois, et sept treize mois. Après
ce laps de 235 lunaisons le soleil et la lune revenaient au même
point, ils avaient opéré une apocatastasis. Mais 235 mois syno-
diques ne sont que 6939 2/3 jours; ce que Callippe savait. Pour
produire cette apocatastasis, il se contenta donc de diminuer la
période de Méton de 6 heures, et établit un cycle de 76 ans ou
940 lunaisons ou 27759 jours, fondé sur une année de 365
1/4 jours, la longueur de l’année julienne.
Le grand Hipparque qui savait que l’année était plus courte
que 365 1/4 jours, proposa un cycle de 304 années ou 3760
lunaisons, ou de 110,035 jours, quatre périodes de Callippe
L'ANNÉE DE MÉTON 11
moins un jour. 1] aurait dû retirer plus d’un jour pour égaliser
165 deux périodes : la vraie proportion serait d'établir un cycle
de 334 années tropiques égalant 4131 lunaisons.
Nous avons dû insister sur le caractère absolument lunaire
du parapegma de Méton pour faire comprendre l'absurdité du
texie actuel de Diodore.
III
Nous allons voir que l'année de Méton étant l'archontat d’Ap-
seudès, l'ordre des années embolimes est bien celui que nous
avons fixé : 3, 6, 8, 41, 44, 17, 19. Nous n'avons pour résoudre
ce problème que trois données, trouvées dans les auteurs, dont
l'une même est contradictoire, mais les deux autres, incontes-
tables, suffisent pour établir la vérité.
Aristophane, dans les Nuées (v. 584), parle d'une éclipse
lunaire : ἡ σελήνη δ᾽ ἐξέλειπε τὰς ὁδούς. Le scholiaste dit que ce
phénomène était arrivé sous l’archonte Stratoclès, au mois de
Boédromion; ce fut la grande éclipse totale du 9 octobre 425
(9, 576), peu de temps après le coucher du soleil, ainsi que déjà
Calvisius l’a déterminé et que les calculs modernes ont con-
firmé. Le premier Hécatombéon coïncida donc avec la néoménie
du 30 juillet, c’est-à-dire tomba à la date la plus tardive qu'il
peut atteindre. Il s'ensuit de là forcément, que l’année précé-
dente, celle de l’archonte Euthymos (426-425), avait été une
année embolime. Or, celle-ci fut ἐκ huitième année du cycle
commençant avec l'archontat d'Apseudès; c'est donc la hui-
tième année de l'anacyclismus (4) qui fut embolime.
B. La seconde donnée est celle de l'Almageste où Ptolémée
(IV, 10, 275 d'Halma) cite avec deux autres éclipses celle de
(1) On ne comprendra jamais pourquoi M. Auguste Mommsen, qui admet l’an-
née 433 comme époque de Méton, ἃ pu reléguer l'intercalation à la neuvième
année.
12 J. OPPERT
l’archontat d'Evandre, du premier Posidéon. Donc, cette année
fut embolime. Cette éclipse étant consignée dans les catalogues
chaldéens utilisés par Hipparque, Ptolémée en donne l'équi-
valence babylonienne : la nuit du 16 au 17 Choïac de l’an 367 de
Nabonassar, équivalant au 12 décembre julien de 382 avant
J.-C. (9, 619). Le P. Petau l'a déjà calculée, et évalue sa gran-
deur à 17 doigts. Donc l’année 52 de Méton, ou l’an 14 du
3° cycle, était embolime. Quant aux deux autres phénomènes,
dont l'un fut invisible à Athènes, nous ne nous en occupe-
rons pas.
C. La troisième donnée est relative à la bataille d’Arbèles
livrée onze jours après l’éclipse lunaire totale du 20 au 21 sep-
tembre 331 avant J.-C. (9,670). Arrien l'a placée sous l'archonte
Aristophane, äu mois de Pyanepsion, ce qui est évidemment
une erreur, Plutarque, dans la vie d'Alexandre, la place avec
plus de raison en Boédromion. L'année avait commencé le
43 juillet et ce fut elle qui vit la correction du calendrier méto-
nien exécutée par Callippe. La modification consiste d'abord à
reporter le commencement de l'année avant le solstice d'été,
tandis qu’elle débutait jusque-là postérieurement à cette époque,
et de réduire d’un jour quatre cycles de Méton qui avait donné à
sa période 6940 Jours au lieu de 6939 2/3 qu'elle dure effecti-
vement.
Une inscription athénienne cite le second Posidéon de l’ar-
chonte Néarque (320 avant J.-C. 9, 681). Cela aurait été la
19° année du 6° cycle de Méton que Callippe avait modifié
onze ans auparavant. Sans changer, comme le dit Geminus,
l'ordre existant des intercalations, on est donc en droit de
regarder ce témoignage épigraphique comme militant pour
le caractère embolime de l’année 49 du cycle métonien. Nous
avons donc les preuves matérielles que les années huit, qua-
torze, dix-neuf avaient treize mois. Mais qui dit Auf ct qua-
0726 dit naturellement onze. ἃ près Autt, ou l’octaétéride accom-
plie, voilà onze et quatorze, ou des triétérides consécutives
dont au moins une devra se retrouver dans la première octaé-
L'ANNÉE DE MÉTON 43
téride du cycle métonicen, donc nous arrivons à trois. Resle-
raient donc comme douteux soit cing ou six et seize ou dix-
sept. Mais la vraisemblance (1) et la comparaison avec le
comput pascal nous invitent à accepter six et dix-sept, et nous
avons la série complète des années embolimes
3, 6, 8, 11, 14, 47, 49,
IV
Ainsi, et contrairement à la légende que le cycle de Méton
aurait été appliqué d'abord au temps d’Alexandre, c'est à
cette époque que le parapegma de Méton fut modifié. Aucun
texte d’un autcur quelconque, aucune inscription d'aucun
genre ne nous fournit même un commencement de preuve
en faveur de cette légende. Pour achever la discussion et
pour l’écarter à jamais comme une de ces inventions gratuites
par lesquelles les esprits les plus distingués croient parfois
faire impression sur des âmes plus candides, on a besoin
de peu de mots. Tous les auteurs parlent de l’existence réelle
et de l'application du cycle de Méton : Aristophane qui s'en
moque, Geminus qui en montre les avantages et les défec-
tuosités, Diodore qui insiste expréssement sur son application;
on peut sans peine trouver d’autres témoignages concluants.
Cette invention gratuite de la non application du cycle de Méton
ne fut pas la seule dont aurait pu se plaindre le grand astro-
nome athénien. On a répandu le bruit que son calendrier ou
parapegma aurait été gravé sur une table de marbre en lettres
d'or, d'où proviendrait encore le nom de nombre d'or donné aux
épactes du cycle pascal. Or, jamais un pareil honneur n'a été
rendu à Méton : aucun auteur ancien n’en dit mot, et tout ce
conte est d’une invention récente.
(1) En effet, 62 lunaisons sont de qualre jours 41 heures plus longues que cinq
années tropiques.
14 4. OPPERT
Pour expliquer l'inobservation imaginaire du cycle de
Méton, on se rabattait sur l'emploi de l’octaétéride qui est
attesté au moins par un auteur de plus ou moins d'autorité.
Africanus dit que les Juifs et les Grecs se servaient de l’oc-
taétéride. Quels Grecs et quels Juifs? Ce n’est ni les Grecs
d'Europe ni ceux de Syrie, qui se servaient du système des
49 ans. Si l'on devait prendre les passages du Talmud, de
la Mischnah (Sanhedrin, I, 9) et de la Gemarah jérusalemi-
taime (Nasser sch'ent V, 6) à la lettre, il s'agit de l'insertion
des mois, parce que le calendrier aurait été en avance sur la
nature, la naissance du bétail et la maturité des blés. Mais, en
admettant la nécessité de l'insertion du mois pour égaliser
l'état naturel de l’agriculture avec les dates du calendrier,
pareille exigence n’aurait pu se produire avec l’octaétéride dont
l'emploi aurait produit l'effet contraire : le calendrier aurait
été en uvance sur la nature. Le sens de ces passages, comme
l'indique d’ailleurs le texte original, est de permettre que des
fêtes et autres institutions puissent, dans des cas déterminés
et limités, être retardés d'un mois, de manière à célébrer la
Pâque au mois d'Iyar, au lieu de Nisan, et la Pentecôte au
mois de Thammuz, au lieu de Sivan. On ne touchait pas au
calendrier qui était celui des Séleucides jusqu’à la réforme du
Rabi Hillel en 363. Cette modification portait surtout sur
l'introduction des jours prohibés, ordonnant que le preriier
Nisan ne tombât pas sur un lundi, un mercredi ou un ven-
dredi, et qu'un dimanche, un mercredi ou un vendredi ne ‘püt
coïncider avec Le premier Tischri.
Admettre que pendant quatre siècles on se serait servi de
l'octaétéride, c'est prétendre que les saisons furent en retard
de quatre-vingts jours sur le calendrier; on devait alors retran-
cher près de trois mois. Si l’octaétéride a été véritablement
employée, cela n’a pu être que pendant une période relativement
courte : Méton en avait déjà reconnu les grands inconvénients.
Les Juifs qui fixaient le mois synodique moyen à une durée
de 29 jours 6 heures 794 halagim, c'est-à-dire ἀξ minutes
L'ANNÉE DE MÉTON 45
3 1/3 secondes, étaient exacts à 4/9 de secondes près. Ils ne se
_trompèrent donc pour la période octennale que de #4 secondes.
Comme ils pouvaient savoir, par les découvertes d'Hipparque,
que l’année était plus courte que 365 jours et un quart, ils
pouvaient 86 rendre compte de l'écart de 38 heures 10 minutes
entre 165 99 lunaisons et les huit ans tropiques. Cela suffira
pour apprécier à sa juste valeur l'assurance que, cinq siècles
après Méton, les Juifs et les Grecs se servaient encore de
l'octaétéride.
IV
L'année d'Apseudès est également celle dans laquelle, selon
Ptolémée, les écoles de Méton et d'Euctémon (οἷ περὶ Μέτωνα
xat Εὐκτήμονα) observèrent l'époque du solstice d'été. Comme
celte observation est complètement indépendante du commen-
cement de l’année lunaire, qui devait primitivement être fixé
après le solstice d'été, Méton ne pouvait pas se tromper sur
le fait que la fin de son archontat tomba réellement vingt jours
après cette époque qui avait précédé l'année du susdit archonte
de trente et un jours. Callippe trouva cette date tardive, et rac-
courcit l'an 331 en lui enlevant son mois intercalaire. Mais cela
ne touche qu'indirectement la question du commencement du
cycle de Méton ; l'Almageste mentionne cette circonstance, pour
trancher-une question regardant l’année solaire seule et n'in-
téressant en rien la fraction de l'année initiale du calendrier
Janaire athémien. |
Cette année fut, on ne le peut répéter trop souvent, l’année
d’Apseudès (433) et non pas l'année de. Pythodoros (432). L'’hy-
pothèse contraire, qui est le πρῶτον ψεῦδος de toute la question, a
été l'origine de toutes les fâcheuses bévues enfantées depuis
deux siècles. En fixant à tort comme année initiale l’archontat
de Pythodore, on était dans la nécessité de créer la théorie de
la continuation imaginaire de l’octaétéride et d'émettre, sans
aucune espèce de preuve, l'idée que le système de Méton n'au-
16 J. OPPERT
rait été appliqué que du temps d'Alexandre. Le cycle de Méton
a été en vigueur dès l’archonte Apseudès, et c'est justement
pendant le règne du grand Macédonien qu'il ἃ été modifié par
Callippe.
Et où faut-il chercher l’origine de cette erreur? précisé-
ment dans la corruption du passage défiguré de Diodore de
Sicile, dont personne, tout en le signalant, n'a voulu écarter
l’absurdité. On s’est, depuis des siècles, ingénié à expliquer
cette donnée insensée, sans se demander si elle était authen-
tique. Cette manière de procéder rappelle la plaisanterie de
Charles ΠῚ, roi d'Angleterre, qui demanda à une réunion de
savants, comment il se faisait qu’un vase étant rempli d'eau
jusqu'en haut et prêt à déborder, on en voyait baisser le
niveau aussitôt qu'on y plongeait un poisson. On discuta, et
chacun donna une raison différente pour rendre compte du
phénomène surprenant. Un seul demanda si le fait était avéré.
On mit un poisson dans le vase et l’eau déborda.
Le même fait s’est présenté au sujet du passage de Diodore.
Comment expliquer cette phrase que Méton commença son
cycle par le treizième jour du mois de Scirophorion ? Mais le
texte en question disait-il réellement que Méton avait com-
mencé son système en comptant par mots lunaires treize jours
après la nouvelle lune et seize jours avant l'expiration de
l’année ? On ne doit pas regarder comme authentiques les mots :
τὴν ἀρχὴν ποιησάμενος ἀπὸ μηνὸς ἐν ᾿Αθήναις Σχιροφοριῶνος τρίσχαι-
δεκάτης : le dernier mot doit se corriger en τρισκαιδεχάτου, et au
lieu de ἐν ᾿Αθήναις, ce qui est vide de seùs, Diodore avait écrit une
expression équivalant à « dans l’année précédente », soit ἐνιαυ-
τοῦ ἐμπροσθίου, soit ἐν ἔτει τῷ ἔμπροσθεν, « après avoir pris pour
point de départ le mois de Scirophorion, le treizième de l'année
précédente. »
Tout le chapitre se traduit donc ainsi : « Sous l’archonte
« Apseudès à Athènes, les Romains choisirent pour consuls
« T. Menenius et Proclus Geganius Macerinus.
« Dans ce temps, Spartacus, roi du Bosphore, mourut, après
L'ANNÉE DE MÉTON 17
« avoir régné dix-sept ans ; Séleucus lui succéda et régna qua-
« rante ans.
« Dans Athènes, Méton fils de Pausanias, célèbre dans l'astro-
« nomie, établit la période nommée Ennéacaidécaétéride, après
« avoir pris pour époque de départ le mois de Scirophorion,
« treizième mois de l'année précédente. Dans le nombre
« d'années mentionné les astres opèrent leur retour au même
« point et reprennent leur cours cyclique, comme celui d'une
« grande année quelconque : c’est pour cela que quelques-uns
« nomment cette période l'année de Méton. »
Les astres revenant au même point ne sont que le soleil et
la lune ; la grande année, dont parle Diodore, est une fiction
plutôt mythologique que scientifique : Sextus Empiricus donne
à chaque planète une grande année différente, et d'autres,
tel que Cicéron (chez Tacite, De claris oratoribus, c. 16), nous
donnent pour cette échéance le même nombre de 12,954 ans
qui est également attribué à la période du Phénix, évaluée de
différentes manières. La période de 19 ans est donc bien courte
pour une « grande année » ; aussi cette expression n'est-elle
attribuée par Diodore qu'à « quelques-uns »; M. Th. Reinach
me fait remarquer qu’elle se retrouve chez Censorinus (c. 18).
Le commencement de l’année de la réforme métonienne
tombe le mardi, 28 juillet julien, 23 juillet grégorien, de
l'an 433 avant J.-C. (— 432 des astronomes), 9,568 du Comput
myriadique (ou mieux 39,658), le 22 Pharmouthi de l'an 315
de Nabonassar, le jour de Scaliger 1,563,480, jour myriadique
14,452,056.
Jules ΟΡΡΕΆΤ.
- à
ee
LES TRÉPIEDS DE GÉLON ET DE SES FRÈRES
Φημὶ Γέλων᾽ ἹἹέρωνα Πολύζηλον Θρασύθδουλον,
παῖδας Δεινομένευς, τοὺς τρίποδας θέμεναι
ἐξ ἑκατὸν λιτρῶν καὶ πεντήχοντα ταλάντων
δαρειχοῦ χρυσοῦ, τᾶς δεκάτας δεκάταν.
Telle est la rédaction la plus probable de l’épigramme, altri-
buée à Simonide (4), qui aurait accompagné l'offrande du tré-
pied, — ou de l’un des trépieds — consacré à Apollon Pythien
par Gélon et ses frères, après leur victoire d'Himère sur les
Carthaginois.
Le texte que je donne est celui de l'Anéhologie Palatine (2).
Toutefois, au second vers, j’ai écrit avec le scholiaste de Pindare
τοὺς τρίποδας θέμεναι, au lieu de τὸν τρίποδ᾽ ἀνθέμεναι. Car il y
avait, sûrement, plusieurs trépieds. Φασὶ δὲ τὸν Γέλωνα, dit le
scholiaste, ποὺς ἀδελφοὺς φιλοφρονούμενον (3) ἀναθεῖναι τῷ θεῷ
χρυσοῦς τρίποδας ἐπιγράψαντα ταῦτα. Effectivement M. Homolle
(1) Τοῦ αὐτοῦ Σιμωνίδου ἀνάθημα (Anth. Pal.).
(2) Anth. Pal. VI, 214; Schol. Pind. Pyth. I, 155 (Le texte de l'Anthologie est
reproduit depuis τὸν τρίποδα par Suidas 5. v. Aapstlou). L'épigramme porte le
n° 141 dans Bergk, 83 dans Preger (Inscr. graecae metricae), 65 dans Hauvette,
Épigrammes de Simonide. Elle a été commentée notamment par Hultsch, De
Damareteo, Dresde 1862 (progr.) ; Bergk dans Verhandl. der 25ten Philologenvers.
(Halle, 4867), p. 25-37; Hultsch, ib. p. 37 et suiv.; Holm, Geschichte Siciliens, I,
417. La controverse avec ces savants méuerait trop loin. L'évaluation du poids du
trépied par Bergk est celle qui se rapproche le plus de la mienne.
(3) Mauvaise explication. En réalité, les fréres de Gélon étaient associés à son
pouvoir : c’est la famille qui régnait, comme les Pisistratides à Athènes.
LES TRÉPIEDS DE GÉLON ET DE SES FRÈRES 19
a retrouvé à Delphes quatre socles de trépieds, deux en place;
réunis sur un même soubassement, deux à quelque distance (1).
Ces quatre socles sont taillés dans la même matière (un cal
caire noir bleu); ils sont du même type, mais de grandeur
inégale. Sur l’un des deux plus grands on lit l'inscription :
Γέλον ὁ Δεινομέν[εος] ἀνέθεκε τὀπόλλονι Συρααόσιος. Τὸν τρίποδα καὶ
τὲν νίχεν ἐργάσατο Blov Διοδόρο υἱὸς Μιλέσιος. De l'inscription de
la seconde base il ne subsiste que les lettres
veoc avelexe .ελ
Ὠεπτα μναι
que M. Homolle restitue ainsi :
Ηιάρον ὁ Δεινομέ]νεος ἀνέθεχε - [μ]ελ- | .
χε δὲ τάλαντα δέκα Ὁ] Ὠεπτὰ μναῖ, |
Si douteuse que soit cette restitution, il paraît au moins très
probable que le second socle appartient bien à Hiéron ; les deux
autres, de moindre dimension, auraient supporté les offrandes
des deux plus jeunes Deinoménides, Polyzélos et Thrasyboulos.
Les offrandes de Gélon et d'Hiéron sont rappelées dans un
texte d'Athénée, qui s’appuie sur l'autorité de Théopompe et
de Phainias d’Erésos (2). L'une et l’autre, dit-il, consistaient en
uu trépied et une Victoire d’or. Ce renseignement est confirmé,
en ce qui concerne l’offrande de Gélon, par la base delphique ;
il y a donc tout lieu de l'accepter également pour celle d'Hiéron.
Si Hiéron n'avait consacré qu'un trépied, on pourrait croire
(1) Mélanges H. Weil, p. 206 suiv.
(2) Athénée VI, 231 F : ἱστοροῦσι γὰρ οὗτοι (Phainias et Théopompe, livre 40 des
Philippiques) κοσμηθῆναι τὸ Πυθιχὸν ἱερὸν — ὑπό τε Γέλωνος καὶ Ἱέρωνος τῶν Etxe-
λιωτῶν, τοῦ μὲν τρίποδα καὶ Νίχην χρυσοῦ πεποιημένα ἀναθέντος καθ' οὖς χρόνους
Ξέρξης ἐπεστοάτευε τῇ Ἑλλάδι, τοῦ δ᾽ Ἱέρωνος τὰ ὅμοια. Suivent les extraits de Théo-
pompe (= FHG 1, 314) et de Phainias (ib. 11, 297), mais dans le premier il n'est
question que de l'offrande d'Hiéron ct de la difficulté qu'il eut à se procurer l'or
nécessaire (Ἱέρων δ᾽ ὁ Συρακόσιος βουλόμενος ἀναθεῖναι τῷ θεῷ τὸν τρίποδα καὶ τὴν
πίχην ἐξ ἀπέφθου χρυσοῦ, etc.), dans le second il n'est question d'aucun des tyrans
siciliens. On ne sait donc pas auquel des deux historiens Athénée a emprunté le
renseignement sur l'offrande de Gélon.
20 THÉODORE REINACH
son offrande contemporaine de celle de Gélon et destinée à
célébrer le même événement, la victoire d'Himère ; mais l’addi-
tion d'une Niké me porte à croire qu'elle commémore en réalité
la victoire de Cymé remportée sur les Etrusques (474).
: D'après Bacchylide, Hiéron aurait consacré à Delphes non
pas un, mais plusieurs trépieds d'or :
λάμπει δ᾽ ὑπὸ μαρμαρυγαῖς ὁ χρυσὸς
ὑψιδαιδάλων τριπόδων σταθέντων
πάροιθε ναοῦ, τόθι μέγιστον ἄλσος
Φοίδου παρὰ Κασταλίας ῥεέθροις
Δελφοὶ διέπουσι... (1)
On peut se demander s'il n’y a pas là un peu de gasconnade
et si le poète n'a pas fait honneur à Hiéron des offrandes de ses
frères. Il est d’ailleurs possible que l’offrande de Gélon ne fût
pas terminée au moment de sa mort (478) qui suivit de près
sa victoire; si Hiéron l'avait fait achever et installer on pou-
vait, sans mensonge, parler de trépieds au pluriel mis en place
(σταθέντων) par lui.
Le trépied de Gélon est encore mentionné dans un texte très
important de Diodore, qui parait emprunté à Timée. « Avec le
produit du butin pris aux Carthaginois, dit-il, Gélon bâtit des
temples remarquables à Déméter et à Coré, et ayant fait fabri-
quer un trépied d'or du poids de 16 talents, il le consacra à
Apollon comme témoignage de reconnaissance, dans le sanc-
tuaire de Delphes (2) »
Il n’y a rien de surprenant à ce que la tradition historique
eût conservé le poids exact du trépied de Gélon : les renseigne-
ments de ce genre étaient notés sur les registres des temples;
peut-être mème une inscription, aujourd’hui perdue, donnait-
(1) Bacchylide, ΠῚ, 45 suiv.
(2) Diodore, XI, 26, 6 : ἐκ μὲν τῶν λαφύρων κατεσχεύασε ναοὺς ἀξιολόγους Δήμητρος
καὶ Κόρης, χρυσοῦν δὲ τρίποδα ποιήσας ἀπὸ ταλάντων ἐχκαίδεκα ἀνέθηχεν εἷς τὸ τέμενος
τὸ ἐν Δελφοῖς ᾿Απόλλωνι χαριστήριον.
LES TRÉPIEDS DE GÉLON ET DE SES FRÈRES 21
elle le détail transmis pur Diodore; nous avons vu que la
dédicace attribuée à Hiéron portait une indication analogue.
Mais ce qui a choqué tous les commentateurs c’est la contra-
diction qui paraît exister entre le texte de Diodore et celui de
l’'épigramme attribuée à Simonide : Diodore parle de 16 talents,
l’'épigramme, de 50 talents et une fraction. On a longtemps
cherché à concilier ces deux chiffres ; on n’y a pas réussi et
comme le texte de Diodore paraît puisé à bonne source, on en a
conclu que le renseignement de l’épigramme était erroné. Dès
lors, les uns ont vu dans l’épigramme entière l’œuvre d’un
grammairien mal informé; d'autres en ont supprimé simple-
ment les deux derniers vers; d'autres, enfin, y ont substitué,
malgré sa platitude et sa hâblerie, le distique qu'on lit à leur
place dans le scholiaste de Pindare :
βάρδαρα νικήσαντας ἔθνη, πολλὴν δὲ rapuryeiv
σύμμαχον Ἕλλησιν χεῖρ᾽ ἐς ἐλευθερίην.
ΠῚ semble pourtant, à la réflexion, que le distique de l’An-
thologie porte en lui-même la preuve de son authenticité; je
veux dire par là qu'il est l'œuvre, sinon de Simonide, du
moins d'un poète contemporain, vivant en Sicile. Comme l’a
déjà remarqué M. Hauvetle, la précision ingénieuse avec la-
quelle le poète a exprimé en vers une somme complexe rap-
pelle l’épigramme 157 de Simonide :
᾿Αρτέμιδος τόδ᾽ ἄγαλμα * διηκόσιαι δ᾽ ἄρ ὁ μισθὸς
δραχμαὶ ταὶ Παρίαι, τῶν ἐπίσημα τράγος.
ΤΙ aurait pu également rapprocher le n° 145, œuvre au moina
contemporaine de Simonide : |
Ἕξ ἐπὶ πεντήχοντα, Σιμωνίδη, ἤραο ταύρους
καὶ τρίποδας...
Ces tours de force arithmétiques sont comme une marque de
fabrique. : ᾿
22 __’ THÉODORE REINACH
.‘ En outre, je ne puis concevoir qu'un grammairien alexan-
drin, si savant fût-il, ait eu l’idée saugrenue d'exprimer le
poids du trépied en talents et litres de Sicile, au lieu d'unités
intelligibles pour le commun des lecteurs. Et par quel renché-
rissement d'érudition, ce grammairien « mal informé » aurait-
il su que dans des indications de ce genre les Siciliens énon-
gaisnt la petite unité avant la grande, les litres avant les
talents, particularité qui nous a été révélée par les tables de
Tauroménion (1)?
. Enfin, il n'est pas jusqu'au terme δαρεικοῦ χρυσοῦ, corrompu |
par le scribe .en δαρετιον (que lisait déjà Suidas), qui ne soit, à
mes yeux, un nouvel indice d'antiquité, L'or « darique » c’est,
dans la langue du ν᾽ siècle, l'or pur, l'or raffiné, ce que Théo-
pompe, dans le texte cité, appelle χρυσὸς ἄπεφθος par opposition
à l'or blanc ou électrum, alliage d'or et d'argent, le seul qui
circulât couramment en pays grec. C’est dans les monnaies
récemment frappées par Darius 1”, les famèux dariques, que
cet.or pur avait, pour la première fois, été employé en quan-
tités considérables, d'où son nom : οἱ Δαρεικοὶ ἀπὸ Δαρείου, dit
Pollux, d'après Hérodote, ὡς ὑπ᾽ ἐκείνου ἀχριδωθέντος εἰς χάθαρσιν
τοῦ χρυσίου (2). L'expression Δαρειχὸς χρυσός est donnée par le
même auteur commesynonyme de ἄπεφθος (3). Elle se rencontre
dans les comptes de la trésorerie athénienne, par exemple :
Κυ[ζικηνό χρυσίο ἕχτ[αι] II δαρεχδί χρυ]σίο στατίέρες) H II (4). De-
vant l’ensemble de ces témoignages, il me semble impossible
de douter que la leçon Gapetxou, déjà proposée par. Otfried
Müller (5), ne soit la bonne. Mais un « grammairien » n'aurait
pas eu l'idée de s’ exprimer ainsi, et la preuve en est que le
mot, incompris des copistes, a été altéré par eux.
(1) CISIt., 422-493.
(2) Pollux, ΠῚ, 87 (= Hérodote, IV, 166).
(3) VIL, 98: ἄπεφθος χρυσὸς, ἀχριδῆς, εἴλικρι 'νής, ᾿δκήρατος, ἀκραιφνής, Δ αρειχός,
Γυγάδας.
(4) CIA I, 199.
, () Les corrections Δαμαρετίου (Bentley) Δαμαρέτου (Bergk) Δαρετίου (Meineke)
me paraissent intolérables. Wesseling avait proposé Δαρείου, qui n est pas grec,
mais qui a mis 0. Müller sur la bonne voie.
LES TRÉPIEDS DE GÉLON ET DE SES FRÈRES 23.
. Il ne reste donc, en somme, qu'une objection contre notre
distique : c'est la contradiction avec Diodore. Mais cette con-
tradiction n'est qu'apparente. Diodore parle du seul trépied de.
Gélon, l'épigrammatiste parle des quatre trépieds consacrés par
les fils de Déinoménès ; en outre, Diodore (Timée) s'exprime cer-
tainement, selon l'usage, en talents attiques, l'épigrammatiste,
comme le prouve la mention des litres, suit la terminologie et,
le système pondéral des Grecs de Sicile. Admettons que les:
trépieds avaient ou étaient censés avoir le même poids (1), hypo-
thèse très plausible si l'on se souvient du rôle monétaire que le
trépied joue dans l'Iliade et dans les inscriptions crétoises ;
voyons si, dans cette hypothèse, en réduisant les talents de
Sicile en talents attiques, nous arriverons à un résultat con-
cordant. |
Nous savons, par les tables de Tauroménion, que le talent
sicilien se divisait en 420 λίτραι, La λίτρα sicilienne vaut 12 οὐγ-
χίαι (2), comme la Zbra italique 12 unctae : il est donc infini-
ment probable que la Alpe sicilienne n’est pas autre chose que
l'ancienne libra italique; elle pèse, en conséquence, à peu près
213 grammes, poids rée/ de celle-ci (3). Le talent sicilien, de
120 litres, pèse donc environ 32 kil. 75. Par conséquent, le
poids des 4 trépieds des Deinoménides égale
50 talents à 32 kil. 75 ouenviron 14,637 kilos;
plus 100 litres à 273 gr. ou environ 27 »
Total........ 1,664 kilos.
En admettant, comme je l’ai dit plus haut, que les trépieds
fussent de poids égal, on obtient ainsi, pour chacun d'eux,
le poids de 416 kilogrammes.
(1) Si les bases des offrandes de Gélon et d'Hiéron sont plus grandes que les
deux autres, c'est qu'il fallait trouver place, outre le trépied, pour la Niké.
(2) Aristote fr. 476 Rose.
(3) C'est le poids moyen des plus anciens as libraux, les 5/6 de la libra nouvelle
adoptée au me siècle. Cf. Nissen dans lwan von Müller, If, p. 886 suiv. On ne
saurait admettre avec Mommsen et Hultsch que ces as ne représentent que
10 onces; la formule de Varron as erat libra pondo est décisive.
24. THÉODORE REINACH -
Or, le talent attique, comme on sait, vaut 26 kilos. Les
146 talents du Diodore valent donc 26 >< 16 ou exactement
416 kilos. |
La concordance, on le voit, ne saurait être plus complète.
Elle confirme, du même coup, l’authenticité de l’épigramme et
celle du renseignement de Diodore. Un seul détail reste sus-
pect : c'est l'assertion que ces 1664 kilos d'or ne représentaient
que le centième du butin fait sur les barbares, τᾶς δεκάτας
δεχάταν! 1664 kilos d'or valent, en effet, aujourd'hui, poids pour
poids, ὅ 4/2 millions de notre monnaie d'or; le butin total
représenterait donc la valeur colossale de 550 millions. Malgré
la description rutilante de Diodore, il est difficile de croire que
le butin fait sur les Carthaginois s’élevât réellement à ce chif-.
fre, même en faisant entrer dans le compte l'indemnité de
guerre, 2,000 talents d'argent (12 millions), et la couronne de
100 talents d'or (8 4/2 millions) offerte par les Carthaginois à
Démarété. “
_ Théodore Reinacu.
LA GALATIE MARITIME DE PTOLÉMÉE
Dans sa description de l’Asie-Mineure, Ptolémée (V, 4) rat-
tache à la province de Galatie non seulement la Paphlagonie
intérieure, mais tout le rivage du Pont-Euxin depuis 61° Δ᾽ jus-
qu’à 65° θ᾽, avec les villes d'Abonotichos, Sinope et Amisos.
Cette indication impliquerait un changement considérable
effectué au n° siècle dans les divisions administratives de cette
région de l'empire. En effet, nous savons qu'auparavant la
Paphlagonie était bien, comme du temps de Ptolémée, sou-
mise au légat de Galatie, mais les villes grecques de la côte
faisaient partie du κοινόν du Pont, qui formait la moitié de la
province double de Bithynia Pontus (1). Il en était encore ainsi
à l’époque de Trajan, où l'on voit Pline intervenir en qualité
de légat de Bithynie (4114-1414 ap. J.-C.) dans les affaires des cités
de Sinope et d'Amisos (2). Il faudrait donc admettre, si les
renseignements de Ptolémée étaient exacts, que peu après la
mort de Pline, sous le règne d’Hadrien ou d’Antonin, la partie
orientale du Pont fut détachée de la Bithynie pour être
annexée à la Galatie (3).
Mais des raisons très sérieuses empêchent de croire à une
pareille dislocation. Tout d’abord, les inscriptions prouvent
qu'aux n° et im° siècles Amisos et Sinope n'avaient pas cessé de
(1) Cf. Rev. é£. gr., 1901, p. 139.
(2) Plin., Ep. ad Trai., 90, 92, 110.
(3) C'est ce que suppose Marquardt, Sfaatsverwaltung., 1, p. 351. M. Ramsar
mieux informé, réserve son jugement (Historical geogr., p. 195}
26 FRANZ CUMONT
faire partie du κοινὸν Πόντου, fédération de dix villes dont la
métropole parait avoir été Amastris (1). Or, si une province
peut comprendre plusieurs κοινά, on n'a pas d'exemple, je
pense, qu'un xotvoy soit partagé au point de vue administratif
entre deux gouvernements. Cette unité religieuse était aussi
indivisible au point de vue politique. On conclura de ceci que
16 Pont bithynien s’étendait encore au moment où écrivait
Ptolémée jusqu'à Amisos.
Mais on peut invoquer surtout contre Ptolémée le témoignage
décisif d'un de ses contemporains (2) vers l'an 167. Lucien de
Samosate fit une tournée à travers la Cappadoce jusqu’au Pont
Euxin, et il faillit y périr victime d'un assassinat à l'instigation
du pseudo-prophète Alexandre d'Abonotichos. Arrivé à Amas-
tris, le sophiste se hâta de porter plainte auprès du gouverneur
qui résidait dans cette métropole du Pont — c'était alors Lol-
lianus Avitus (3). Celui-ci, craignant de punir le devin d'Abo-
notichos, personnage influent, se refusa à intervenir, mais il ne
déclara pas que cette ville était en dehors de sa juridiction, il
ne se récusa pas comme incompétent : c'est une liaison person-
nelle qu’il invoqua pour excuse (4). Il s'ensuit qu'Abonotichos
dépendait toujours alors de la province de Bithynia Pontus, et
les expressions même dont se sert Lucien à plusieurs reprises.
ne laissent aucun doute à cet égard (5).
Abonotichos, Sinope, Amisos n’ont donc jamais fait partie
de la Galatie, et force nous est d'admettre une erreur ou plutôt
une inexactitude de Ptolémée.
(1) Pontarque à Amisos en 209 ap. J.-C. (/nscr. res Rom. pert., III, 97), à Sinope
(ibid., 95). Une dédicace d'Héraclée (ibid., 19), qui date au plus tôt de la seconde,
moitié du ne siècle, mentionne le χοινὸν τῶν ἐν Πόντῳ πόλεων τ, On ne voit pas
comment on pourrait arriver à ce chiffre en supprimant les villes paphlago-
ajiennes.
(2) J'ai déjà signalé ce texte dans une étude sur Alexandre d'Abonotichos (Mém.
Acad. Bruxelles, 1887, p. 11, note). °
(3) Prosopogr. Rom. IX, p. 293, n° 222, cf. Inscr. gr. r.R., 111, 84.
(4) Cf. Luc. Alez., 51, qui nomme le praeses : ὃ τότε ἡγούμενος τῆς Βιθυνίας καὶ
τοῦ Πόντον Αὐεῖτος.
. (8) Lucien, ibid., α. 10 : ἐς πᾶσαν τὴν Βιθυνίαν καὶ τὸ» Πόντον χαὶ πολὺ πρὸ τῶν
ἄλλων ἐς τὸ τοῦ ᾿Αδώνου τεῖχος, cf. ὁ. 1, c. 25.
LA GALATIE MARITIME DE PTOLÉMÉE 27
M. Ramsay (1) me paraît en avoir suffisamment expliqué
l'origine. L'écrivain du 11 siècle a, comme 1] le fait souvent,
combiné des renseignements de date différente. Il savait que la
Paphlagonie ressortissait au /egatus pro praetore de Galatie (2),
mais il a joint à tort à ce gouvernement tout le pays que ses
sources géographiques désignaient sous lenom de Paphlagonie,
bien que, au point de vue politique, des proportions considé-
rables en appartinssent à la Bithynie. IL est fort possible, d’ail-
leurs, qu'en certains endroits lu Paphlagonie se soit étendue
jusqu’à l'Euxin entre les territoires des cités grecques éche-
lonnées le long du rivage, comme l'étaient au moyen âge les
villes hanséatiques le long de nos mers du Nord. Certaine-
ment les géographes continuèrent toujours jusqu’à Constantin
Porphyrogénète à parler d’une côte de Paphlagonie (3). Les
anciens noms de pays ne persistent-ils pas de même aujour-
d’hui ἢ N’imprime-t-on pas encore que Lille et Dunkerque se
trouvent en Flandre bien que la langue administrative ne con-
naisse plus de Flandre qu'en Belgique ?
Franz Cumonr.
(1) Hist. geogr., p. 68.
(2) Lucien aussi (Alex., 44) sait que les Paphlagoniens de l’intérieur sont justi-
ciables du gouverneur de Galatie, à la différence des habitants d'Abonotichos.
Un habitant du pays (τὸν δεῖνα Παφλαγόνα) dénonce ἃ ce légat (τῷ ἡγουμένῳ τῆς
Fahatlas) ses propres esclaves qu'il rend responsables de la mort de son fils et
ils sont condamnés ad bestias. Le passage est intéressant au point du droit cri-
minel (cf. Mommsen, Sérafrecht, 630 s.).
(3) Arrien, Peripl. Pont. Eux. 20 avec les notes de Muller, Geogr. gr. min. 1,
p. 385. Cf. Marcien d'Héraclée, Epit., 9 (Ibid., p. 510).
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES
DU LIVRE DES CÉRÉMONIES
Le Livre des Cérémonies, que composa vers le milieu du
x° siècle l'empercur Constantin VII, a, on le sait, une triple
importance : d'abord, pour la connaissance du cérémonial
byzantin; en second lieu, pour l'étude de la topographie du
palais impérial; enfin et surtout, pour l’histoire des institutions
byzantines. De ce document fort considérable on s’est naturel-
lement beaucoup servi : de là viennent la plupart des descrip-
tions pittoresques que l'on nous a faites de la cour des basilers,
et c'est sur lui que se fonde presque entièrement la restitution
que Labarte a tentée du Palais Sacré. Mais si l’on a fait grand
emploi de ce livre, jamais on ne s’est préoccupé sérieusement
d'en essayer une étude critique : or, c'est là une grave et dan-
gereuse lacune. Le jour — qu'il faut espérer prochain — où
l'on se décidera enfin à aborder sérieusement l'histoire des ins-
titutions de Byzance, sans cesse il faudra revenir au Livre des
Cérémonies ; et sans cesse, alors, si l'on n’a, au préalable, pris la
peine de déterminer fort exactement la valeur critique de cette
source, on s'exposera aux plus fâcheuses erreurs. Il y a donc
quelque intérêt peut-être à montrer par quelques exemples pré-
cis comment cette étude critique est possible et pourquoi elle
est nécessaire.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 29
Quiconque a parcouru, même rapidement le Livre des Céré-
montes, ἃ été assurément frappé de ce fait, que cet ouvrage est
une compilation de fragments d'époques évidemment fort
différentes. L'auteur au reste ne s'en est point caché. Dans la
préface qui précède le premier livre, il explique qu’il a voulu
rassembler dans son traité « tout ce qu'il a trouvé dans les écri-
vains plus anciens, tout ce qui lui a été rapporté par des
témoins oculaires, tout ce qu'il a vu lui-même et qui a été
remis en honneur de son temps » (1). Pareillement, en tête du
second livre, résumant dans une nouvelle préface le contenu du
livre I, l’impérial écrivain expose qu'il a eu pour but de mettre
en ordre « les usages qui se trouvaient déjà consignés dans
quelque document écrit » (2), mais dont la plupart étaient
mal connus à cause du désordre des ouvrages qui les
relataient, ou étaient par l'effet du temps entièrement tombés
en oubli; et opposant à ces informations, puisées à des sour-
ces anciennes, le contenu du livre 11, Constantin VII déclare
qu'ici au contraire, il n'a voulu apporter que des renseigne-
ments inédits (3). Ce n’est point le lieu de discuter l'exactitude
assez contestable de cette déclaration (4). Un fait est certain : le
Livre des Cérémonies est plein de choses empruntées à des
auteurs ou à des documents plus anciens que le x° siècle. Parmi
elles, il en est d’ailleurs dont on sait fort précisément la pro-
venance, que l’auteur lui-même a pris soin de marquer. Voilà
longtemps que l’on a remarqué que les chapitres 84-95 du
livre I sont extraits du traité περὶ πολιτικῆς καταστάσεως que com-
posa, au temps de Justinien, le maître des offices et patrice
(4) Ed. Bonn, p. 4: ὅσα τε παρὰ τῶν παλαιοτέρων épeupéôn, καὶ παρὰ τῶν ἑωραχότων
διηγγέλθη, καὶ παρ᾽ ἡμῶν αὐτῶν ἐθεάθη καὶ ἐν ἡμῖν ἐνηργήθη.
(2) P. 516. ὅσα μὲν αὐτῶν συγγραφῆς παρά τισιν ἔτυχεν.
(3) ὅσα δὲ À παροῦσα βίδλος ἐμπεριέχε: ἔτυχεν μὲν συγγραφῆς ὑπό τινος οὐδαμῶς.
(4) Cf. sur ce point Rambaud, Constantin Porphyrogénèle, Ὁ. 132 sqq.
90 CHARLES DIEHL
Pierre (1); semblablement d’autres morceaux (II, 27-30) sont
empruntés à des sources du γι" siècle; d’autres (App. au livre I, .
p. 498-508, II, 31-34) proviennent du ΙΧ’ siècle, et enfin la
longue notice des dignités, qui forme le chapitre 52 du livre II,
est datée avec précision de l'an 900 et donnée comme l'œuvre
de l’artocline Philothée. Sans parler même des quelques addi-
tions faites à l'ouvrage postérieurement à l'époque de Constan-
tin VII (par exemple, I, 96), une conclusion donc s'impose,
c'est qu’il convient, dans le maniement d’un livre fait de choses
aussi disparates et diverses, d’user des plus attentives précau-
tions. .
* Ces remarques générales, 16 le sais, ont été pour une part
déjà faites dans le seul essai critique, d’ailleurs assez sommaire,
auquel ait donné lieu le Livre des Cérémonies, j'entends les
quelques pages que Rambaud, dans son Constantin Porphyro-
génète, a consacrées à ce traité (2). Mais on peut — et il faut —
les pousser plus profondément. Rambaud incline à croire que
les chapitres que n'accompagne aucune indication contraire
datent du x° siècle uniformément; il estime en particulier que
les 83 premiers chapitres du livre 1 présentent « une remar-
quable unité », unité de plan, unité d'époque (3). « Ils forment,
dit-il, un tout homogène et harmonieux (4). Ils sont tous posté-
rieurs à Basile le Macédonien » (5). On serait donc fondé, si
cette remarque était exacte, à attribuer en bloc au x° siècle tous
les renseignements que fournissent ces chapitres sur le céré-
monial; la topographie ou les institutions, et on l’a fait souvent.
Or, en Île faisant, on se tromperait, et on s’est trompé, grave-
ment. Dans cette portion même de l’ouvrage, qui semble de
tenue si homogène, on rencontre des morceaux d'époque assez
différente. Les deux préfaces précédemment citées permettaient
déjà de le conjecturer; mais on en peut apporter des preuves
(4) Krumbacher, Gesch. d. byz. Litt., p. 239.
(2) Rambaud, loc. οἷέ., 128-136.
(3) Jbid., 130-131,
(4) lbid., 135.
(5) Tbid., 130-134.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 31
tout à fait formelles, qui permettront d'éviter quelques confu-
sions regrettables.
Il
_ Si on lit avec quelque attention cette série de chapitres, on
observera sans peine que les formules rituelles qui les remplis-
sent ne datent point toutes du même temps. Ici (1, 19), la des-
cription du cérémonial prescrit pour la fête de Saint-Elie appar-
tient à une époque où trois empereurs au moins — ὁ μὲν μέγας
βασιλεύς, dit le texte, οἱ δὲ μιχροί (4) — étaient associés dans
l'exercice du pouvoir. Ailleurs (1, 9, I, 38, etc.) deux empe-
reurs seulement apparaissent comme exerçant l'autorité
suprême (2); ailleurs, le trône est occupé par un basileus seule-
ment. Il y a plus : il n’est point rare que, dans l'intérieur d’un
même chapitre, dans l'indication de l'étiquette prescrite pour
une même cérémonie, le rédacteur ait mis bout à bout des
morceaux d'époque différente. Au chapitre 43 du livre 1, la pre-
mière partie (3) du chapitre est empruntée à un document rela-
tant la nomination simultanée de deux Césars ; la seconde s’ap-
plique à des circonstances où un César seulement fut désigné (4).
Or, il se trouve précisément que dans ce chapitre 43 (ἐπὶ χειρο-
rovia καίσαρος) et dans le chapitre 44 (ἐπὶ χειροτονίᾳ νωῤελησίμου)
certuins détails particuliers peuvent être relevés, qui permettent
de dater ces passages avec une absolue exactitude.
Il s’agit, dans la première partie du chapitre 43 (p. 217-222)
d'une cérémonie solennelle, par laquelle, sur la terrasse du
palais des Dix-neuf lits, l’empereur revêt de ses insignes, préa-
lablement bénis par le patriarche, le César nouvellement élu,
après quoi il le présente au Sénat, à l’armée et au peuple. Or,
(4) De Cerim., p. 118.
(2) Ibid., p. 68, 194.
(3) P. 247-222.
(4) P, 222-295,
32 UT CHARLES DIEHL
dans la description de cette cérémonie figurent deux empereurs
associés, l’un que le texte appelle /e grand, l'autre qu'il nomme
le petit (1), et l'on constate également que l'investiture est don-
née simultanément à deux Césars (2). Enfin, le document four-
nit une précieuse indication de date : la cérémonie dont il est
question se passe le jour de Pâques, « le saint dimanche de la
sainte Anastasis » (3). De ces faits très particuliers, de cette date
très précise, 1] est possible, je crois, de tirer quelques conclu-
sions.
Le titre de César ne se rencontre pas très fréquemment dans
l’histoire byzantine. C’est un titre très élevé, que l'Empereur,
avant le x° siècle au moins, confère d'ordinaire à l'héritier pré-
somptif du trône ou à quelque personnage de la famille impé-
riale. L'événement est donc assez considérable et assez rare
pour que les chroniqueurs aient toujours pris soin d'en faire
mention, et nous possédons ainsi la liste complète des actes de
cette sorte. Y trouvons-nous un cas où, comme dans notre cha-
pitre 43, deux Césars aient été simultanément proclamés par
deux empereurs associés ?
J'ai rencontré, avant le milieu du x‘° siècle, trois exemples
seulement d'une nominalion simultanée de deux Césars. Le
premier se rapporte à la fin du vi° siècle (4). En 582 l'empereur
Tibère éleva en même temps à la dignité de César ses deux
gendres Maurice et Germanos. Mais, comme à ce moment il n’y
avait qu'un seul basileus, Le fait ne correspond point aux don-
nées du problème que nous essayons de résoudre.
Il en va de même pour le second exemple. Celui-ci date de
l'époque d’Héraclius, En l’année 638, David et Marinos, fils de
l'Empereur, furent simultanément proclamés Césars par leur
père (5). Or, on sait combien Constantin VII s'est intéressé à
(1) p. 221.
(2) P. 219, 221. Προσκυνοῦσιν ἕν yévatov τοῦ καίσαρος τόῦ ἐκ δεξιῶν καὶ ἕν τοῦ ἐξ
ἑἐυωνύμων.
(8) Ρ. 218.
(4) Théophane, éd. de Boor, p. 251-252.
(5) Nicéphore patr., éd. de Boor, p. 21.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 92
cette période de l’histoire byzantine. Au livre des Thèmes, dans
le traité de l'Administration de l'empire, sans cesse il cherche des
renseignements dans l’époque d’Héraclius, et dans /es Cérémo-
nies même, on l’a vu, plusieurs chapitres (11, 27-30) nous repor-
tent à ce temps. L'hypothèse est donc séduisante de chercher
dans notre chapitre 48 la description de l’acte de 638; elle n'est
point pourtant recevable. Quand David et Marinos furent pro-.
mus Césars, le trône était occupé, en effet, non point par deux,
mais par trois empereurs. Héraclius avait pour associés ses deux
fils, l'atné Constantin, depuis 612 (1), l’autre, Héraclonas, qui
avait commencé par être César, depuis 633 (2).
Le troisième et dernier exemple s’accorde-t-il mieux aux
données proposées ? Je le pense.
Le patriarche Nicéphore (3) et Théophane (4) rapportent que
le 2 avril 768, dans le tribunal des Dix-neuf lits, en présence
du patriarche Nicétas, qui dit les prières rituelles, l'empereur
Constantin V nomma Césars ses deux fils Christophore et Nicé-
phore en leur remettant τάς τε χλαίνας καὶ τὰ χαισαρίχια περιχε-
φάλαια. Or, à ce moment, Constantin V ne régnait pas seul;
depuis 750, il avait associé au pouvoir son fils aîné Léon (5).
Voilà donc bien deux basileis, un grand et un petit, et deux
Césars simultanément nommés. Ajoutez que l'endroit où se
passe la cérémonie — le tribunal des Dix-neuf lits —, certains
détails de l'étiquette — la présence du patriarche, l'indication
des insignes césariens —, sont identiques dans notre chapitre
et dans le récit que font les chroniqueurs de l'acte de 768.
(4) Théoph. p, 300.
(2) Id., p. 301, Niceph.., p. 23, 26. — 11 y a peut-être même une raison plus
décisive pour écarter cet exemple. Il semble bien, en effet, que le renseignement
de Nicéphore soit inexact. Au livre des Cérémonies, 11, 27, il est question de
l'acte de 638; or, d'après ce texte, Héraclius ne créa alors qu’un seul César,
David (p.628). Son autre fils, que Nicéphore appelle Marinos, et qui porte au livre
des Cérémonies le nom plus vraisemblable de Martinos, formé de celui de sa
mère Martine, n'était que nobilissime (p. 630). Il faudrait donc dans l'édition de
Boor (p. 21) corriger Mapivoy en Maprtivoy.
(3) Niceph., p. 71.
(4) Théoph., p. 443-444.
(3) Id., p, 426.
34 ! τ Ὁ Ὁ CHARLES DIEHE
“- “ὦ
ÆEnfin, la date est la même : Théophane et Nicéphore s'accordent
à nous apprendre que les deux Césars reçurent le jour de
-Pâques l'investiture des deux empereurs,
-. Ce sont là, semble-t-il, de fortes raisons d'attribuer au
vin* siècle le chapitre 43 du livre des Cérémonies. L'étude du
chapitre 44 complètera, je crois, la démonstration.
Le titre de nobilissime, dont ce passage nous apprend com-
ment il était conféré, datait du milieu du 1v° siècle. Zosime
rapporte que Constantin le Grand, à la veille de sa mort, le
donna à son frère Constance et à son neveu Hannibalien (4),
et on le rencontre ensuite à plusieurs reprises au cours du
même siècle. Plus tard, au vr° siècle, Justinien le reçut de son
oncle Justin (2); Martinos, au vu siècle, l’eut de son père
‘Héraclius (3); on en trouve enfin également la mention au
commencement du x° siècle (4). Pourtant, il apparaît assez rare-
ment en somme dans l’histoire byzantine; et comme il n'était
‘guère moins considérable que celui de César, il y a lieu de
“croire que nous pourrons non moins aisément découvrir dans
‘les chroniqueurs l’événement qui a fourni à l'auteur des Céré-
-monies la description du chapitre 44. Aussi bien, cette fois
-encore, peut-on relever dans le texte certains traits fort carac-
téristiques. | |
De même qu’au chapitre 43, il s’agit d'une cérémonie solen-
-nelle par laquelle, dans le tribunal des Dix-neuf lits, l'empe-
‘reur remet les insignes de sa dignité au nouveau nobilissime
“et le présente ensuite au Sénat et au peuple. Deux basileis
associés président à la cérémonie telle qu’elle nous est décrite (5),
et à côté d'eux, y figurent deux Césars (6), c’est-à-dire préci-
sément l'ensemble des personnages que nous avons tout à
(4) Éd. de Bonn, p. 105.
(2) Zonaras, éd. de Bonn, 11], p. 150.
(3) De Cerim., p. 630.
(4) 1bid., p. 111, 726.
(5) P. 226, 228.
(6) P. 228.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 35
l'heure rencontrés au chapitre 43. La cérémonie, d'autre part,
ne comporte la nomination que d'un seul nobilissime. Cette
fois encore, comme tout à l'heure, il est aisé de retrouver le
fait particulier qui remplit ces conditions réunies.
Reprenons les deux passages de Théophane et du patriarche
Nicéphore. On y lit que, le même jour où il proclamait Césars
son second et son troisième fils (l'aîné était basileus associé),
Constantin V éleva le quatrième de ses fils, Nicétas, à la dignité
de nobilissime. Après quoi, ajoutent les chroniqueurs, tous
ensemble, les deux empereurs, les deux Césars et le nobilissime
se rendirent « processionnellement, selon l'usage (1) » du
palais à la grande Église. |
La coïncidence des détails est trop exacte, ce semble, pour
laisser la moindre place au doute. Le chapitre ἀξ comme Île
chapitre 43 du livre des Cérémonies sont évidemment emprun-
tés à des documents du vur° siècle, οἱ remontent, pour préciser
davantage, à l’époque du grand empereur iconoclaste Constan-
tin V. Un détail complémentaire assez curieux achève de le
prouver. À la fin du chapitre 44 (2), le livre des Cérémonies
prévoit le cas où la promotion du nobilissime se fait le jour de
Pâques : or, c’est précisément à cette date, on le sait, que Cons-
tantin V éleva son fils Nicétas à cette dignité. Puis le texte
prévoit le cas où la cérémonie serait célébrée en quelque autre
Jour de fête : or, ceci encore nous reporte à la même époque.
Entre 768, en effet, et 775, Constantin V fit uu autre nobilissime,
son cinquième fils Anthime (3), eten 776, au lendemain de son
avènement, Léon IV conféra la même dignité au seul de ses
frères, Eudokimos, qui ne fût encore pourvu d'autre litre
officiel (4). C'est à la première de ces deux cérémonies que
se rapporte le passage final du chapitre 44. L'acte qui y est
décrit est présidé, en effet, par deux empereurs assistés de deux
(4) Nicéph., p. ΤΊ : Τῆς δὲ βασιλικῆς προόδου κατὰ τὸ εἰωθὸς... γενομένης.
(2} P. 298. -
(3) Théoph., p. 450.
(4) Id. p. 449,, 450.
46 CHARLES DIEHL
Césars ; or, ces détails ne conviennent point pour 776, où un
seul basileus occupait le trône. |
On fera à ces conclusions une objection peut-être. Il se peut
bien, dira-t-on, que les chapitres 43 et 44 du livre des Cérémo-
nies aient été empruntés à une source du vin siècle. Mais il est
certain aussi — les faits et la notice de Philothée l'attestent (4)
— qu'au x° siècle encore les titres de César et de nobilissime
“existaient à la cour de Byzance. Peu importe donc que, pour
régler le cérémonial de son temps, l’impérial écrivain ait pris
des informations dans des sources plus anciennes; les indica-
tions qu'il nous donne conservent pour le x° siècle toute leur
réalité historique, et alors rien ne prouve que nous soyons
fondés à y chercher aucun renseignement utile sur les usages
ou les institutions du vin* siècle. — Raisonner ainsi, c’est, Je
crois, méconnaître la façon dont procèdent Constantin VII et
plus généralement tous les écrivains du moyen âge. Dans les
recueils de formules occidentales que nous ont conservées le
Liber Diurnus ou les collections de l'époque mérovingienne et
carolingienne, le rédacteur s'est contenté d'ordinaire de repro-
duire textuellement tel ou tel document particulier, en se
bornant à effacer les noms propres qu'il rencontrait dans la
pièce originale; il ne s'est jamais préoccupé d'établir, par la
comparaison d'un certain nombre d'exemples, un type général
de formule. Constantin VII a agi de manière assez semblable.
Pour chaque description d'acte rituel il a cherché dans ses
sources un ou plusieurs précédents, un ou plusieurs procès-
verbaux de cérémonies ayant eu cet acte pour objet. Ila, sans
y changer un mot, inséré ces procès-verbaux dans son livre,
il ne s’est jamais préoccupé de les retoucher pour les mettre en
harmonie avec les usages et les institutions de son temps. Cela
est si vrai que d'une part on trouve dans son ouvrage nombre
de répétitions assez inutiles, provenant de ce qu'il a mis bout à
bout, sans se soucier de les fondre, des procès-verbaux qui se
(1) De Cerime, p. 111-712, 726.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 37
doublaient en grande partie (1) et que bien des fois, d'autre
part, après avoir textuellement transcrit telle antique formule,
l'auteur indique par une note additionnelle quels changements
a depuis lors subi ce vieux cérémonial (2). Il serait vain, en
conséquence, de chercher dans les fragments empruntés au
patrice Pierre rien qui corresponde aux institutions du x° siècle ;
ce qu’ils nous montrent, c'est l'état administratif de l’époque
de Justinien. Il en va de même pour les morceaux empruntés
à des sources du vur* siècle; dans ces formules scrupuleusement
copiées par le compilateur du x° siècle, revivent les institutions
et les mœurs de l’époque des empereurs iconoclastes, Et c'est
pour cela qu'ils nous sont si précieux.
ΠῚ
De la démonstration que j'ai essayé de faire, on peut tirer,
je crois, quelques conséquences d’une portée plus générale.
Îl est possible d'abord, en appliquant à d'autres passages la
méthode que j'ai employée, de retrouver dans le Livre des
Cérémonies d'autres documents de date plus ancienne. Il est
visible, quand on examine la composition de ce premier livre
du traité, que les chapitres 43 et 44 appartiennent à une por-
tion bien distincte de l'ouvrage. Après que, du chapitre 1 au
chapitre 37, l'auteur a énuméré la série des fêtes religieuses
auxquelles doit assister l'empereur, il aborde au chapitre 38 et
décrit jusqu'au chapitre 59 une tout autre suite de cérémonies.
(1) Pour les formules du mariage et du couronnement impérial, voici des
exemples de ces répétitions :
Cer. 200-201 — 198.
202-206 = 207-212 (plus détaillé).
196-200 — 212-213 (plus abrégé).
204 — 205
Dans la formule de nomination du patrice,
Cer. 239-240 — 251-252.
etc.
(2) De Cerim, 159, 201, etc.
38 CHARLES DIEHL
C’est le couronnement et le mariage du basileus, le couronne-
ment de l’Augusta, le couronnement et le mariage de l'Au-
gusta, ce sont les fêtes qui accompagnent la nomination d’un
César, d’un nobilissime, d’un curopalate, la promotion d'un
magistros, d'un patrice, d’autres dignitaires encore. Or, dans
_ plusieurs de ces chapitres, on constate un grand nombre de
répétitions partielles et de détails qui se doublent, Le cha-
pitre 40 décrit un couronnement d’impératrice ; or, au cha-
pitre ἀϊ!, un couronnement tout semblable est décrit, avec
cette seule différence qu'il est suivi d'un mariage. Le cha-
pitre 39 montre un mariage d'empereur, dont le rituel est
presque identiquement répété au chapitre 41. Il y a deux for-
mules assez semblables pour la promotion du magistros, deux
et même trois pour celle du patrice. Tout cela n'est compré-
hensible que si ces descriptions sont, comme nous l'avons
démontré pour les chapitres 43 et 44, empruntées à une série
de cas particuliers, qu’il serait tout à fait intéressant de déter-
miner.
On peut alors se demander si ces cas particuliers ne provien-
draient point peut-être de la même source qui a fourni à Cons-
tantin VII les chapitres 43 et 44. Quelle était cette source? Il
n'est point aisé de l'expliquer avec certitude. Était-ce une col-
Jection de documents, de pièces d'archives datant du vin siècle?
Était-ce, au contraire, un traité complet du cérémonial rédigé à
cette époque? Nous pouvons entrevoir, par les fragments du
patrice Pierre; ce qu'étaient les ouvrages de cette sorte, ces
ταχτιχὰ βιόλία καὶ βασιλικὰ, comme dit ua chroniqueur (4) qui
tenaient grande place dans la littérature byzantine. On y trouve
deux sortes de choses : des formules pour la promotion des
dignitaires et des descriptions d'avènements impériaux (ἀναγο-
ρεύσεις), c'est-à-dire les matières mêmes que renferment les
chapitres 38 à 59 du livre des Cérémonies; et c'est par une série
d'exemples particuliers — réception d’un ambassadeur perse
(1) Théopb. cont., p. 142.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 9389
par Justinien, élection de Justin, etc., — qu'est expliqué 16,
rituel à suivre pour ces différentes cérémonies, ce qui est pré-:
cisément la méthode qui semble avoir été employée dans la,
* source d’où provenaient les chapitres 38 à 59. Comme il est cor-
tain en tout cas que Constantin VII a eu sous les yeux des:
documents du vi siècle, il n'est point téméraire de supposer,
quelle que soit la nature exacte de la source consultée par lui,
que l’ensemble des chapitres en question a la même origine; et
sans affirmer rien trop précisément, il vaudrait en tout cas la
peine d'examiner si, dans les chapitres autres que ceux que’
nous avons étudiés, on ne relèverait point certains indices pour,
appuyer notre hypothèse. | |
- Le chapitre 41 du livre des Cérémonies (1), mériterait à cet
égard d'attirer l’attention, Il s'agit, dans ce passage, d’une impé-
ratrice qui est mariée à un empereur, associé au pouvoir d'un
autre basileus : la cérémonie commence par le couronnement, :
célébré dans l’Augoustcos, et où la nouvelle Augusta est revêtue,
par les mains des deux souverains, des insignes de sa dignité
suprême; puis vient le mariage, qui a lieu dans l’église de-
Saint-Étienne du palais. Or, si l'on consulte Théophane, on
trouve qu’en cette même année 768, où se passèrent les événe-
ments décrits aux chapitres 43 et 44, au mois de novembre,
Irène l'Athénienne, fiancée au basileus associé Léon, fut cou--
ronnée dans le triclinium de l’Augusteos par les mains de Cons--
tantin V, et que de là elle se rendit pour le mariage dans l'église.
de Suint-Étienne de Daphné (2). C’est l’ordre même des cérémo-
nies décrites dans notre chapitre 41 ; et si l'on ajoute que dans-
ce passage on constate l'existence de certaines institutions an-.
ciennes, telles que ce χόμης τῶν ἀδμησιόνων (3) (comes admis-
sionum), fréquemment mentionné dans lé haut moyen âge’
byzantin (4) et entièrement disparu au x° siècle, on peut se
(1) P. 207-214.
(2) Théoph., p. 444. Cf. Niceph. patr., p. ΤΊ.
(3) De Cerim., p. 209.
(4) Ibid., 386, 387, Cf. 394, 404.
40 .: CHARLES DIEHL
demander, avec toutes les réserves nécessaires, si le chapitre
&1 ne nous a point par hasard conservé le cérémonial qui accom-
pagna le mariage de la grande impératrice Irène.
Mais, en dehors même de cette hypothèse, voici quelques
conséquences, assez importantes pour l'histoire des institutions,
que peut suggérer l'examen des chapitres 43 et 44, dont la date
est certaine.
Dans la procédure suivie pour nommer le César et le nobi-
lissime, plusieurs faits sont dignes de remarque. C'est l'inter-
vention d'abord du Sénat et de l’armée, qui demandent à l’em-
pereur de créer un César (αἰτοῦνται διὰ τὸν καίσαρα) (4); c’est
ensuite la délibération des grands dignitaires sous la présidence
du basileus, et l’accord qui se fait pour la désignation du nou-
veau César (πάντων συναινούντων ἐπὶ τῇ χειροτονίᾳ τοῦ xaloapos) (2).
Ce n’est donc point par un simple acte de la volonté impériale
qu'est conférée cette haute dignité : il y a, en théorie du moins,
une véritable élection faite par les grands. Il ya plus. Le peuple
lui-même est appelé à participer à cet acte solennel : l'empereur
interroge ses sujets (ὁ βασιλεὺς προσομιλεῖ τῷ λαῷ et τι βούλεται,
καὶ εἴ τι ἔχουσιν ἀποχριθῆνα, ὁ λαὸς, ἀποχρίνονται) (3), et c’est en
leur présence que l'investiture est donnée au César. Il en va de
même pour le choix du nobilissime : ici aussi il y a délibération
Jes grands (χελεύουσιν οἱ δεσπόται λαλῆσαι αὐτοὺς τὰ περὶ τοῦ vw6e-
λησίμου, καὶ εἴ τι βούλονται ἀνταποχρίνονται) (4), et consultation du
peuple (δ). Ce sont là des usages très anciens, héritage des anti-
ques formes romaines, mais qui vont mul avec le droit impé-
rial tel qu'il s’était constitué au x° siècle. On les observait soi-
gneusemement dans la Byzance du ν᾽ et du vi siècle (6); il
est intéressant de les voir conservés encore et constamment
appliqués au vin‘. Et ici de nouveau le Livre des Cérémonies
(4) P. 218.
(2) P. 318.
(3) P. 219.
(4) P. 296.
(5) P. 297.
(6) P. 410, 424, 427, 432.
SUR LA DATE DE QUELQUES PASSAGES DES « CÉRÉMONIES » 44
s'accorde pleinement avec les renseignements que fournit Théo-
phane. Quand, en 776, l'empereur Léon IV associa à l'empire
son fils Constantin, ce fut sur la demande de l'armée et du peuple;
selon l'usage (ὡς ἔθος τοῖς βασιλεῦσιν) (1), l'empereur harangua
ses sujets, et l'acte fut accompli en présence du Sénat, de
l'armée, du peuple de la capitale et des corporations ouvrières,
qui tous jurèrent fidélité au nouveau souverain. De même,
quand on découvrit peu après la conspiration du César Nicé-
phore, le basileus réunit le peuple au palais de la Magnaure et
Jui exposa les faits (ἀνέθετο τῷ λαῷ τὰ περὶ αὐτοῦ ῥηθέντα) et le
peuple consulté prononça le jugement (οἱ δὲ ὁμοθυμαδὸν ἀνε-
66nsav) (2). Placez, comme on inclinerait à le faire si l’on accep-
tait sans critique le témoignage du Livre des Cérémonies, de
tels usages au x° siècle : on voit quelles graves méprises on
s’exposerait à commettre dans l’histoire des institutions
byzantines.
Assurément, pour l'histoire du cérémonial, qui ne varie
guère de siècle en siècle, l'étude critique dont j'ai tâché de mon-
trer la nécessité peut paraître d'assez médiocre importance ;
pour la topographie du palais au contraire et pour l’exacte con-
naissance des institutions, elle est absolument indispensable.
Faute de l'avoir faite, Labarte s'est donné un mal infini pour
placer dans sa restitution, ingénieuse sans doute, mais par tant
de points inexacte et manquée, des édifices qu'il a crus simul-
tanés, et qui sont plus d'une fois successifs. Faute de la faire, on
courrait, en entreprenant l'étude des institutions de Byzance, le
risque d'erreurs plus fâcheuses encore. C'est ce danger que j'ai
voulu signaler et prévenir dans les présentes recherches; ct
peut-être, dans la pénurie des documents que nous possédons
sur l'époque des empereurs iconoclastes, n'est-il pas sans
quelque intérêt aussi d’en augmenter le nombre par quelques
textes authentiques et de date entièrement certaine.
Charles Duc.
(4) Théoph., p. 449.
(2) Id., p. 450.
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΏΝΟΣ
La pierre gravée, ici reproduite, est conservée au Musée
Impérial, à Constantinople ; je remercie Son Excellence Hamdy-
Bey de m'avoir permis de l’étudier et de m'en avoir donné unc
empreinte. Elle porte en caractères assez mal tracés, qui
indiquent la basse époque impériale, l'inscription suivante :
Σολωμῶν (1}eïxs * φύ(λγαξε, avec omission du À de φύλαξε, ce qui
est une négligence du graveur et nullement la notation exacte
d'une prononciation populaire. Il est bon de signaler ce petit
texte, d'abord parce qu'il n’a été ni défini ni exactement trans-
crit par M. Joubin dans son catalogue (Musée Impérial Ottoman.
Bronzes et bijoux, p. 86, n° 246), ensuite parce qu'il est unique
eu son genre parmi les phylactères au nom de Salomon. |
_« Dieu, dit l'Écriture (III Rois, IV, 29 et suiv.), donna à Salo-
mon une‘science et une sagesse extraordinaires... La science
de Salomon dépassa celle de tous les Arabes et toute la science
(1) Σολωμῶν ou Σολομῶν est la forme grecque; cf. le nom romaïque Solomos.
La forme Salomon, que le français a préférée, s'explique par la dissimilation.
ΠῚ serait aussi fautif de dire en grec Zrhwuüv qu'en français Solomon; c'est la
faute que font les byzantinistes quand ils parlent (cf. Diehl, L' Afrique ἀπ ας
passim) du patrice « Solomon »,
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩ͂ΝΟΣ 43
de l'Égypte ». « Chaque âge, dit Renan (Hist. du peuple d'Israël,
II, p. 178), comprit cette science et cette philosophie selon la
mode qui dominait. Salomon fut tour à tour paraboliste, natu-
raliste, sceptique, magicien, astrologue, alchimiste, cabba-
liste. » Je parlerai ici, d'après les sources grecques, de Salo-
mon magicien, particulièrement de son pouvoir sur les démons,
et du sceau merveilleux qui lui conférait ce pouvoir (1).
Un historien byzantin de la fin du xn° siècle, Nicétas de
Chones, rapporte qu’une impératrice de Constantinople pos-
sédait une βίδλος Σολομώντειος qui lui servait à évoquer les
démons et à converser avec eux (2). Cette Bl6)os devait être un
grimoire du genre de nos Clavicules de Salomon, ou du Salo- ἡ
monis Schlüssel dont parle Gæthe (3). Nulle des βίδλοι Σολομών-
reot en usage à Byzance ne nous est parvenue, que je sache ; en
revanche, nous possédons de nombreux témoignages sur le
… (1) Hubert, dans son savant travail sur la magie dans l'antiquité (Dicé. des
antiq., art. Μαρία), n'a pu que signaler d'un mot (p. 1505, note 11) le rôle de Salo-
mon comme magicien. J'ai trouvé beaucoup dans Frôhner, Bull. des antiquaires
de Normandie, 1867, p. 2117, et Annuaire de la soc. fr. de numismatique, 1890,
p. 237; J. B. de Rossi, Bull. arch. crist., 1869, p. 62; 1891, p. 133; 1894, p. 105;
Dietrich, Proleg. ad pap. mag., p. 155 (N. Jahrb. f. Philol., suppl. n° XVI) et
Abrazas, p.141; Heim, Incantamenta magica, p. 480 (N. Jahrb. f. Philol., suppl:
n° XIX). Je ne connais le travail de Pelliccioni, Filalterio esorsistico in lingua
greca (Modène, 1880) que par les comptes rendus du Burs. Jahresb., 1883, p. 150
et de Wessely, Bericht über griech. Papyri in Paris und London (Wien. Slud.,
1886), p. 119. Je n'avais pas à traiter de Salomon dans la magie occidentale; on
trouvera là-dessus des renseignements dans le Bibliophile Jacob, Les sciences
occulles, p. 335, et surtout dans Le Blant, Rev. arch., 1892, I, p. 55, qui tous
deux ont mis à profit la collection de grimoires de la bibliothèque de l’Arsenal ;
cf. encore Brunet, Manuel5, 8. v. Hama; Maury, La magie et l'astrologie, Ὁ. 222.
Le légende de Salomon en général serait un sujet fort vaste ; cf. Weil, Biblische
Legenden der Musulmänner, 1845; G. Paris, La lilt. fr. du M. A., 20 éd., p. 84,
200, 219; Journal asialique, 1902, 1, p. 540; etc.
(2) Τοὺς συχοφάντας μέντοι μετῆλθε, χαὶ ἄλλῳ μὲν ἄλλην δίχην ἐπέθηχε, τῷ δ᾽ ᾿Ααρὼν
ἐπέδρισε χαλεπώτερον, ταῖς οἰχείχις ἀρπεδόσι περισχοινίσασα. Μετ’ οὐ πολὺν γάρ τινα
χρόνον ἁλίσχεται μαγείαις προσανέχων, xal προὔκειτο χελώνης ἔχφορον μίμημα, ἔνξον
στέγο» τῆς χέλυος ἀνθρωπόμορφον εἴχασμα, πεπεδημένον ἄμφω τὼ πόδε καὶ τὸ στέρνον
ἐληλαμένον ἔλῳ διαμπερές, ‘Exkw δὲ χαὶ βίθδλον Σολομώντειον ἀνελίττων, ἥτις ἀνχπ-
τυσσομένη τε καὶ διερχομένη χατὰ λεγεῶνας συλλέγει χαὶ παρίστησι τὰ δαιμόνια, συχνά-
κις ἀναπυνθανόμενα ἐφ᾽ ὅτῳ προσχέχληνται, καὶ τὸ ἐπιταττόμενον ἐπισπεύδοντα. περα-
τοῦν, χαὶ ποοθύμως δρῶντα τὸ χελευόμενον. Nicetas Chon., De Manuele Comneno,
lib. IV, p. 95 (Migne, Patr. Gr., CXXXIX, p. 489). ,
” (3) Faust, 1% partie, scène du barbet.
ἀὰ PAUL PERDRIZET
rôle de Salomon dans la magie grecque, non seulement à
l'époque byzantine, mais à l'époque romaine.
Un clou magique souvent étudié invoque Salomon, le grand
magicien des Juifs, en même temps que le Dieu des chrétiens,
et que l’Artémis des gentils (1). Une tablette magique du Louvre
invoque contre les démons de la fièvre, de l’épilepsie et de la
rage la protection de Salomon et de Mechlis (2). Un phylactère
chrétien porte l'image d'un hibou (symbole du démon) ‘ävec
cette inscription : Vicif te leo de tribu Tuda radix David dominus
Jesus Christus; higavit te brachius Dei et sigillus Salomonis. Avis
nocturna, non valeas ad animam puram et supra, quisvis sis (3).
Cette formule se retrouve en abrégé sur un autre phylactère (4).
Une pierre gravée invoque Salomon avec Iaô et Sabaoth (5).
Dans son commentaire sur saint Matthieu, Origène (vers 250)
blâme les chrétiens qui, à l'imitation des Juifs, invoquent
Salomon contre les démons (6). Plus ancien encore est le texte
de Josèphe, où il est dit que Salomou avait trouvé des exor-
(1) Ter dico, ler incanto in signo Dei et signo Solomonis el signo domna Arimix.
Pour la bibliographie de cette inscription, cf. Heim, op. laud., p. 541-542, où
l'on trouvera l'indication d'un autre clou magique avec le nom de Salomon.
(2) Ἐπὶ τοῦ μεγάλου καὶ ἁγίου ὀνόματος τοῦ ζῶντος xupiou θεοῦ Δαμναναίου καὶ
᾿Αδωναίου καὶ Ἰαὼ καὶ Σαδαώθ, ὀρκίζω... πᾶν πνεῦμα πυρεχτιχὸν uai πᾶν πτωματισμὸν
χαὶ πᾶν ὑδροφόθον χαὶ πᾶν βάσκανον ὀφθαλμὸν καὶ πᾶσαν ἐπαποστολὴν βιαίαν πνευμα-
τιχὴν καὶ πᾶσαν φαρμαχείαν [μή] μου ἅψασθαι. Τὸν δρχισμὸν τοῦτον συντύχῃ πᾶν
πνεῦμα πονηρὸν μντησθέντα τῆς διαθήχης ἧς ἕλοντο ἐπὶ δέει Σολομῶνος καὶ Μεχλέως τοῦ
ἀγγέλον, ὅτι ὥμοσαν τὸν μέγαν καὶ ἅγιον ὄρχον. Cf. Frühner, Bull. des antiq. de Nor-
mandie, 1861, p. 217; Bull. arch. crist., 1869, p. 62. Je n'ai pas vu Kraus, Ueber
ein angebl. basilianidisches Amulet. |
(3) Bull. arch. crist., 1869, p. 62.
(4) Jd., ibid. : Vincil leo de tribu radix Davit Solomoni Davit filius Jesse.
(5) Matter, Hist. du gnosticisme, TI, p. 95; Longpérier, Œuvres, 111, p. 378;
Chabouillet, Cat. des camées et intailles de la Bibl. Nat., n° 2028 ; Babelon, Guide
au Cab. des médailles, p. 58. Longpérier mentionne une calcédoine avec l'ins-
cription CHPATEIC COAGMAN KYPIOC NAIHT (Seigneur de Naioth, la ville où
David s'était réfugié pour échapper à Saül). Il signale aussi un cône de métal
avec l'inscription COAOMAQ.
(6) Quaeret aliquis si convenil vel daemones udjurare : el qui r'espicil ad multos
qui lalia facere ausi sunt, dicet non sine ratione fieri hoc. Qui autem aspicit
Jesum imperantem daemonibus, sed eliam polestatem dantem discipulis suis super
omnia daemonia, et ul infirmilates sanarent, dicet quoniam non est secundum
poteslalem datam a Salvatore adjurare daemonia : Judaïcum est enim. Hoc elsi
aliquando a nostlris tale aliquid fiat, simile fit ei quod a Salomone scriptis adju-
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΔΟΜΩΝῸΣ ἀδ
cismes contre les maladies : ἐπῳδὰς συνταξάμενος αἷς παοηγορεῖται
τὰ νοσήματα καὶ τρόπους ἐξορχώσεων κατέλιπεν... καὶ αὕτη μέχρι νῦν
παρ᾽ ἡμῖν ἡ θεραπεία πλεῖστον ἰσχύει (Ant. Jud., VIII, 2). Josèphe
raconte même qu’un Juif du nom d'Éléazar délivra, devant
Vespasien, plusieurs possédés par le moyen de l'une des
racines dont Salomon avait fait connaître les vertus magiques :
προσφέρων ταῖς ῥισὶ τοῦ δαιμονιζομένου τὸν δαχτύλιον ἔχοντα ὑπὸ τῇ
σφραγῖδι ῥίζαν(() ἐξ ὧν ὑπέδειξε Σολομῶν, ἔπειτα ἐξεΐλκεν ὀσφραινο-
μένῳ διὰ τῶν μυχτήρων τὸ δαιμόνιον... μηκέτ᾽ εἰς αὐτὸν ἐπανελθεῖν
ὥρχου Σολομῶνός τε μεμνημένος, καὶ τὰς ἐπῳδάς, ἃς συνέθηκεν ἐχεῖ-
γος, ἐπιλέγων... Γινομένου δὲ τούτου, σαφὴς ἡ Σολομῶνος καθίστατο
σύνεσις καὶ σοφία, δι᾿ ἣν ἵνα γνῶσιν ἅπαντες τὸ μεγαλεῖον αὐτοῦ τῆς
φύσεως χαὶ τὸ θεοφιλὲς. .. περὶ τούτων εἰπεῖν προήχθημεν.
Pour les non-civilisés, pour les gens superslitieux, la maladie
est l’œuvre d’un esprit malin ; elle cesse si l’on peut exorciser cet
ralionibus solent daemones adjurari. Sed ipsi qui utuntur adjurationibus illis,
aliquoties nec idoneis constilulis libris uluntur : quibusdam autem et de Hebraeo
acceptis adjurant daemonia. Trad. latine du comment. sur saint Matthieu (Migne,
Patr. gr., t. XIE, p. 1151). Sur cette trad., cf. Battifol, Anc. lit. chrét., 1, p.115.
(1) Quelle racine employait Eléazar ? Peut-être celle du polygonatum, vulgaire-
ment « sceau de Salomon », en allemand Salomonssiegel ; la racine du poly-
gonatum a encore aujourd'hui la réputation de guérir l'épilepsie (Dietrich,
Abraxas, p. 142). Dioscoride (IV, 6) appelle cette plante πολύγονον. Dans le Dios-
coride français de Martin Matthée (Lyon, 1559), p. 343, πολύγονον est traduit
α signet de Salomon ». Le polygonaltum doit son nom vulgaire de « sceau » ou
« signet de Salomon » non à sa fleur, comme on pourrait le croire d'après la
forme en hexagramme étoilé, mais aux « cicatrices » du rhizome. Cf. van Tie-
ghem, Traité de botanique, % Ed., p. 264, fig. 91. Mon collègue M. Gain, profes-
seur de botanique à l'Université de Nancy, m'informe que Cæsalpin a donné
les noms de sigillum Salomonis (cf. Bauhin, Pinax, p. 186) et de sigillum S.
Mariae à deux hellébores, à cause des cicatrices qu'elles portent sur le bas de
la tige. L'hellébore passait pour guérir la folie; peut-être la racine dont se
servait Eléazar n'était pas celle d'un polygonatum, mais une racine d'hellébore.
L'idée de faire de Salomon le fondateur légendaire de la botanique médicale
et particulièrement de la rhizo{omie, le grand naître de la science des vertus
magiques des plantes, a sa source dans la Bihle, IIL Rots, 1V, 33 : ἐλάλησεν Σολο-
μῶν περὶ τῶν ξύλων ἀπὸ τῆς χέδρου ἕως τῆς ὑσσώπου τῆς ἐν τῷ τοίχῳ. Salomon est
souvént cité comme autorité dans les différents Physiologus; cf. Homuwel, Die
dthiop. Uebersetzung des Physiologus, Leipzig, 18717, p. 101, et les travaux cités
par Strzygowski, Der Bilderkreis des griechischen Physiologus, p. 4 et 53. C'est
ἃ quoi Renan pensait quand il écrivait dans le passage cité plus haut : « Salo-
mon fut tour à tour paraboliste, naturaliste, etc. »
(2) Tylor, La civilisation primitive, ἃ. 11, p. 161.
ἀθ PAUL PERDRIZET
esprit (1). Or, Salomon, par sa science profonde de la magie,
avait tout pouvoir sur les démons. Le pèlerin bordelais, qui fit
vers 333 le voyage de Terre-Sainte, a vu à Bethsaida le caveau
où le roi-magicien mettait les diables à la gène (1). C'est un fait
connu que les démons sont naturellement couards (2) ; on avait
donc chance de les mettre en fuite, particulièrement les démons
qui.sont cause des maladies, rien qu’en les menaçant de Salo-
mon, comme on fait peur aux enfants qui ne sont pas sages en
les ménaçant du loup, ou de Croquemitaine. C'est, je crois, ce
que fait le phylactère de Constantinople : Σολωμῶν εἶπε * φύλαξε
(lisez φῴλαξαι, impératif moyen), Salomon a dit : « Prends garde
à toi », prends garde à toi, démon méchant qui me veut du
mal. De même, c'est de Salomon, d’ après le Pseudo-Pline (3),
qu'il faut menacer le démon de a fièvre quarte : Ad quartanas :
in charta virgine scribis, quod in dextro brachio ligatum portet
ille qui patitur : recede ab illo Gaio Seio (4), Solomon te sequi-
dur. « Sur un morceau de parchemin vierge (c'est-à-dire fait
avec la peau d'un animal vierge) qu’on liera au bras droit du
malade, écrire : Va t'en d'un tel, Salomon te poursuit. »
. Souvent le phylactère, au lieu de consister simplement en
. une phrase de menace adressée au démon, portail une image
qui lui montrait ce qu’il risquait en s’attaquant à qui s était
mis sous la protection de Salomon. On voyait Salomon ἃ cheval,
perçant de sa lance une diablesse qui représentait la maladie
contre laquelle le phylactère était censé prémunir. Depuis Mat-
ter, on a publié nombre de phylactères de ce genre, la plupart
monétiformes, avec ou sans inscriptions. Je décrirai seulement
les plus typiques et les plus curieux :
1. Médaille talismanique trouvée à Cyzique. Au droit (fig. 1),
l'ange Araaf, ailé, debout, et Salomon, nimbé, sur un cheval au
‘galop ; Salomon perce d’un coup de lance et renverse la dia-
(4) Est et ἰδὲ crypta ubi Salomon daemones torquebat (Tobler, Itin.Terrae Sanc-
ae, Genève, 1871, t. I, p. 14).
(2) Sittl, Die Gebärden der Griechen und Rümer, p. 116.
(3) ILL, 15, p. 85 Rose. Cf. Le Blant, 750 inscr. de pierres gravées, Ὁ. 85.
(4) Noms quelconques, comme dans les textes juridiques Lucius Tilius, etc.
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝΟΣ 47
blesse. Au-dessus du cheval, dans le champ, une étoile (y. a-t-il
quelque rapport entre cette étoile et le pentagramme ou l’hexa-
gramme dont nous parlerons plus loin ?). Un serpent rampe
vers la diablesse. Au pourtour : φεῦγε, μεμισιμένι, XZolouôv σε
διόκι (καὶ) ἄγγελος ᾿Αραάρ. — Au revers (fig. 2), les bustes affron-
tés du Soleil et de la Lune, devant lesquels brûle une torche.
Au dessous, un lion s’élance, la gueule ouverte, par dessus le
cadavre de la diablesse, sur un grand œil, le βάσκανος ὀφθαλμός
de la tablette du Louvre. Dans le champ, entre les deux bustes,
le trisagion (ἅγιος, ἅγιος, ἅγιος) et cette suite de lettres : RPSSS.
Au pourtour : Μιγαήλ, Γαδριήλ, Oüper À, Ῥαφαήλ, δισφύλαξον τὸν
φοροῦντα (4). ee
2. Médaille talismanique provenant de l’Asie-Mineure (2). Au
droit (fig. 3), Salomon à cheval, nimbé, perce d’une lunce cruci-
fère la diablesse renversée. Au pourtour : φεῦγε, μεμισιμένι,
Zohopñv σε διόχι, Σισίννιος Σισιννάριος (le nom du propriétaire du
talisman, ou peut-être le nom d’un saint, cf. Cptes-R. de l’Ac.
des Inscr., 1902, p. 541). Cette légende est précédée d’une croix,
et terminée par un astérisque à 6 branches (l'hexagramme ?). —
- Au revers (fig. 4), le mauvais œil, avec son nom : Φθόνος. Il est
percé de trois couteaux (à courte lame triangulaire, dits « cou-
(1) Sorlin-Dorligny, Rev. des Εἰ. grecques, 1891, p. 287; cf. 1892, p. 16 et ΤΊ.
(2) Rev. des Et, grecques, 1892, p. 14; Heim, p. 481 (qui lit l'inscription de
l'avers φεῦγέ με, μισουμένη); Bull. de corr. hell., 1900, p. 293.
48 PAUL PERDRIZET
teaux de sacrifice »; cf. Dict. des antig., 1, fig. 2118 ; on trouve
des couteaux de cette forme figurés sur quelques « mains pan-
thées »), et attaqué par une horde de bêtes, deux lions, une
cigogne, un serpent, un scorpion. Au dessous, le cadavre gisant
de la diablesse. Au pourtour : + Σφραγὶς ZoAouovos. ᾿Αποδίοξον
πᾶν χαχὸν ἀπὸ τοῦ φοροῦντο(ς). :
3. Médaille talismanique trouvée à Carthage (1). Au droit,
Salomon à cheval, transperçant la diablesse ; au dessus, de face,
le buste du Christ entre deux anges; au pourtour : + Σφραγὶς
Σολομοῦνος. Βοήθι Ἰωάννου. — Au revers un ange, reconnaissable
à ses ailes, frappe d'une lance crucifère un démon étrangement
dessiné; au pourtour : +-weUye, μεμισιμένι, διόχι σε ὁ ἄγγελος ᾿
᾿Αρ[αἀφ].
&. Médaille talismanique, trouvée en Lydie, la plus curieuse.
peut-être, de toute la série (2). Au droit, Araaf, nimbé, debout,
et Salomon à cheval, transperçant la diablesse, vers qui rampe
un serpent. Dans le champ, derrière Salomon, l'étoile ; derrière
l'ange, une croix monogrammatique avec À et Q. Au pourtour :
+ Φεῦγε, μισιμένη, ᾿Αραὰφ ὁ ἄνγελός σε διόχις«χι"» κὲ Σολομὸν
ἀπὸ τοῦ φοροῦντ(ος). — Au revers, en bas, le cadavre de Îa dia-
blesse, vers qui rampe un serpent et bondit un lion. Au-dessus,
(1) Bull. des antiqg., 1897, p. 190 et 395. Ce n’est pas le seul monument de ce
genre provenant d'Afrique : cf. Bull. arch. crist., 1891, p. 133.
(2) Bull. de corr. hell., 1893, p. 638 (Millet); Bull. arch. crist., 189$, p. 105.
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝῸΣ 49
3 bustes : au milieu, de face, celui du Christ, avec le nimbe
crucifère; à droite et à gauche, les bustes affrontés du Soleil et
de la Lune. Deux anges affrontés semblent se prosterner devant
la figure du Christ. Dans le champ : Σαδαὼθ πλίοις ὁ οὐρανὸς καὶ
ἡ γῖ τῖς δόξις (σου): c'est la suite du trisagion, les deux anges
en adoration devant le Christ le chantent ; ces anges sont donc
des séraphins ou des chérubins. Au pourtour : Σφραγὶς τοῦ ζὄντος
Θεοῦ. Φύλαξον τὸν φοροῦντα, “Δγιος, ἅγιος, ἅγιος Κύριος.
5. Amulettes en forme de plaque oblongue. D'un côté (fig. 5),
le groupe de Salomon et de la diablesse; au pourtour : Εἷς θεὸς ὁ
Fig. 6.
γικῶν τὰ xaxe. Au revers (fig. 6), le mauvais œil, et des inscrip-
tions comme ‘law Σαδαώθ, "Αὔραξας. M. Schlumberger a décrit
une demi-douzaine d’amulettes de cette variété (1).
6. Tous les phylactères décrits Jusqu'ici sont en métal. Une
catégorie spéciale est formée par des phylactères en hématite
rouge (2), en forme de plaque oblongue, qui portent d'un côté
(1) Rev. des él. grecques, 1892, p. 82. M. Jean De Mot me communique les
empreintes d'une amulette conservée au Cabinet des médailles de Bruxelles. Elle
est identique à celle que représentent nos fig. 5 et 6.
(2) Rev. des ét. grecques, 1892, p. 84. M. le professeur Gaston May a récemment
acheté à Smyrne, et donné au Cabinet des médailles, un phylactère de cette
catégorie. L'hématite rouge est ainsi nommée parce que, frottée sur un corps
dur, sur de la porcelaine par exemple, elle laisse une trace rouge.
4
50 PAUL PERDRIZET
(fig. 7) le groupe de Salomon et de la diablesse, parfois avec
l'inscription : Σολομῶν, de l'autre côté (fig. 8) l'inscription :
Σφραγὶς θεοῦ. Les phylactères de celte catégorie préservaient
probablement d’une certaine maladie bien déterminée, peut-
être des hémorroïdes ; ou peut-être elles régularisaient les épo-
ques.
Ces phylactères au nom de Salomon n'ont pas encore été,
Fig. 7. Fig. 8.
que je sache, l’objet d'une étude approfondie. A défaut d’un
travail complet, voici quelques indications.
Ce que ces phylactères ont évidemment de plus surprenant,
c’est de nous montrer Salomon à cheval, et transformé en saint
chrétien, monté comme un saint Georges, le nimbe en tête, en
main Ja lance crossée. Cette lance crossée, ce nimbe, comme
aussi le signe de la croix au début des légendes inscrites à l’exer-
gue sont l’apport, pour ainsi parler, du christianisme dans ce
syncrétisme. Mais pourquoi représenter Salomon à cheval? La
Bible ne parle pas de lui comme d’un cavalier; du temps de
Salomon, les rois, qu'ils fussent rois d'Israël, de Syrie, d'As-
syrie, d'Égypte ou de Grèce, ne montaient pas à cheval pour
combattre, mais en char. Je crois que l'idée de figurer Salomon
à cheval n'est ni juive, ni chrétienne, mais païenne. Peut-être
même doit-on préciser davantage. Ce sont les peuples thraco-
anatoliens qui ont particulièrement affectionné le type du cava-
lier pour la représentation de leurs divinités protectrices, Μάη,
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝΟΣ 54
le θεὸς σώζων, le θεὸς Ἥρως ou Ἥρων. En fin de compte, ce doit
être aux Anatoliens et aux Thraces que les Égyptiens, comme
les Syriens (cf. C. R. de l’Acad. des Inscr., 1902, p. 130), ont
pris l’idée de figurer à cheval leurs dieux et leurs saints natio-
naux (cf. pour l’Egypte, Horus à cheval, Rev. arch., 1876, II,
pl. 18; saint Georges, saint Phoebammon, saint Sisinnios, C. R.,
1902, p. 541, pl. IV, 2). Sur une fresque copte de Baouît, saint
Phoebammon paraît à cheval, avec la lance crossée, comme le
Salomon de nos phylactères ; saint Sisinnios offre avec la
représentation qui nous occupe une ressemblance encore plus
frappante : il est à cheval et perce de sa lance une diablesse
renversée à terre, A/abasdria, sans doute la diablesse d’Alabas-
tra, la ville de l’albâtre, dans la Moyenne Egypte. Cette influence
des religions thraco-anatoliennes en Egypte se conçoit mieux,
ce semble, depuis la découverte, dans le Fayoum, d'un
sanctuaire ptolémaïque du dieu thrace Héron (C. R., 1902,
p. 355).
Qui est cet ange Araaf, ou Arlaf, ou Archaf — car les trois
formes APAA, APAAdD, APXA se lisent sûrement sur nos
phylactères — qui assiste Salomon dans sa lutte contre la
diablesse? C’est une question que M. Schwab ne s’est pas posée
dans son Vocabulaire de l’angélologie (1). D'après les légendes
de nos phylactères et la façon dont il s’escrime contre la
diablesse sur le n° 3, Araaf est un bon ange. Cette observation
ruine la théorie de M. Sorlin-Dorligny, qui, lorsqu'il publia la
première médaille talismanique connue au type de Salomon et
d’Araaf, rapprocha du nom d'Araaf l’arabe rahafa — « sang
(1) Mém. présentés par divers savants à l'Acad. des Inscriplions, 1re série,
t. X, 2, p. 113. Puisque l'occasion s'en offre, je protesterai contre le mot angé-
lologie, qui est de la fabrication de M. Schwab (Littré, comme Hatzfeld-Darmes-
teter sont muets sur la question). La seule forme admissible est la forme syn-
copée, qui est conforme aux habitudes de la langue; il faut dire angélogie,
comme on dit minéralogie, et non « minéralologie », idolälrie et non « idololà-
trie ». Maximilien et non « Maximémilien », χαλχόπτης et non χαλκοχόπτης. Cf.
Eranos Vindob., p. 210. Quant à angéologie, que je trouve dans l'art. Anges de
l'Encyclopédie Lichtenberger, c'est un véritable monstre.
52 PAUL PERDRIZET
coulant du nez », d'où il concluait, en supposant qu'Araaf était
un démon méchant, que c'était à lui qu'on attribuait les saigne-
ments de nez.
Ici, que le lecteur me permette de risquer une conjecture
dont je sens tout le premier la fragilité. |
Chacun ἃ lu, dans les Mille et nuits (1), 1 « Histoire du ρᾶ-
cheur et de l'Efrit ». Un pauvre pêcheur retire de la mer
une jarre scellée; il l'ouvre; il en sort un démon, un E/rit,
qui explique au pêcheur comment il se trouvait dans la jarre;
« Je suis un de ces esprits rebelles qui se sont opposés à la
volonté de Dieu. Tous les autres Génies reconnurent le grand
Salomon prophète de Dieu, et se soumirent à lui. Nous fumes
les seuls, Sacar et moi, qui ne voulumes pas faire cette bassesse.
Pour s’en venger, ce puissant monarque chargea Assa/, fils de
Barakhia, son premier ministre, de me venir prendre. Cela
fut exécuté. Assaf vint se saisir de ma personne et me mena
malgré moi devant le trône du roi son maître. » « Assaf, fils
de Bérékhia ou Béloukia, dit Loiseleur-Deslongchamps dans
une note à ce passage, est, à ce que l'on croit, le même dont le
nom se trouve à la tête de quelques psaumes et qui paraît avoir
été un officier de la cour de David. Les Orientaux le considèrent
comme le modèle de leurs vizirs. » Je me demande si Assaf,
maître des chantres du roi David, n’est pas devenu l'ange Araaf
ou Arlaf ou Archaf de nos phylactères, comme il est devenu
grand vizir de Salomon dans les contes arabes. Salomon n'a
pas subi dans la magie et dans la légende orientale des trans-
formations moins surprenantes : les légendes persanes parlent,
dit-on, de 40 ou de 72 Salomons préadamites, qui, revètus de
formes monstrueuses, comme celles des dieux assyriens et égyp-
tiens, armés d’une épée flamboyante, luttaient de père en fils
contre les démons (2).
Le motif de la diablesse que Salomon transperce de sa lance
et que son cheval foule aux pieds rappelle 1 ὑδριστής foulé aux
(1) Mille et une nuits, δὰ. du Panthéon littéraire, p. 25.
(2) Rev, arch., 1816, IT, p. 398.
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝῸΣ 53
pieds par Némésis (1), et mieux encore, les Géants vaincus des
Gigantomachies, le motif d'Alexandre (2), ou d'un Empe-
reur (3), ou d’un Saint chrétien (4), vainqueurs d'un fauve ou
d'un monstre ; nous indiquions tantôt la ressemblance frappante
qu'offrait avec le motif de Salomon transperçant la diablesse
anonyme cette fresque de Baouît qui représente saint Sisin-
nios transperçant la diablesse Alabasdria. On peut rapprocher
encore un relief publié par Lajard (Monum. del l'Instituto, 1847,
pl. 38, 4) qui représente un dieu oriental {le dieu de Doliché ?)
foulant aux pieds de son cheval le cadavre gisant d’une
femme.
Plusieurs de nos phylactères montrent le mauvais œil,
l'oculus invidiosus (βάσκανος ὄφθαλμος, φθονερὸς ὀφθαλμός, ou sim-
plement, comme dit l'un de nos monuments, φθόνος) cerné,
attaqué par une horde de bêtes. La question du mauvais œil
dans l'antiquité a été étudiée par Otto Jahn, dans un mémoire
célèbre (5). Pour la question spéciale qui nous occupe en ce
moment, pour l'attaque du mauvais œil par la horde de bêtes,
on rapprochera de nos phylactères, outre les monuments étu-
diés par Jahn, reliefs, médailles, etc., les monuments suivants,
que Jahn n'a pas connus :
1° Un des phylactères publiés par M. Schlumberger (5). C'est
celui qui porte au droit la légende : Εἷς θεὸς ὁ νικῶν τὰ χκαχά
(1) Bull. de corr. hell., 1899, p. 600, pl. XV-XVI.
(2) Babelon, Traité, t. I, col. 682.
(3) Rev. arch., 1876, Il, p. 398. Cf. encore les groupes dits de l'Anguipède,
si nombreux dans la Gaule Belgique et dans les Germanies (Lehmann, Beifrdge,
ΤΠ, p. 201).
(4) Cf. l'étui de scribe d'Antinoé, antérieur à 642, date de la destruction d'An-
tinoé, publié par Omont, Bull. des antiquaires, 1898, p. 330, où l'on voit Phi-
Jothée, un Saint des Coptes, perçant de sa lance une diablesse à corps de serpent
et à tête de femme; sur le bas de l'étui, des Ἐφέσια γράμματα. Pour l'époque à
laquelle s'est formée Ja légende de saint Georges, cf. Amélineau, Les actes des
martyrs de l'Église Copte, p. 311.
(3) {δον die Aberglauben des bôsen Blicks bei den Allen !{Berichte de la Société
royale de Saxe, 1855). Cf. Stephani, Comptes rendus, passim; Tuchmann, La fas-
cinalion dans Mélusine, depuis 1885, et Bull. de corr. hell,, 1900, p. 291 sq. Je ne
connais pas l'ouvrage de Elworthy, The evil eye:
(5) Reg. él, pr; 1809, p. 80:
54 __ PAUL PERDRIZET
avec le groupe de Salomon et de la diablesse. Au revers, un
lion courent et rugissant, et uñe inscription qui énumère quel-
ques animaux considérés comme prophylactiques : ἵππος, μοῖλος
(sic), εἴδις, ospouoxépndos, le cheval, le mulet, l'ibis, la girafe.
2 Une médaille d’or (1), uniface, où l’on voit le mauvais œil
cerné par des bêtes et attaqué par des gladiateurs, dont l'un
est armé du trident des rétiaires (à comparer avec ceux de nos
phylactères (2) où le mauvais œil est cloué par un trident).
3° Une médaille de bronze (3), qui montre au droit la tête de
Maximien Hercule (286-305) avec la légende IMP C MAXIMIA-
NVS PF AVG, au revers, le mauvais œil cerné par les bêtes.
Ce qui fait l'importance de ce phylactère, c'est que de tous ceux
que nous passons en revue, il est le seul qui soit daté. M. Sor-
lin-Dorligny faisait remonter jusqu'au 111 siècle la date du pre-
mier phylactère connu au type de Salomon et de la diablesse.
On voit qu'il pouvait remonter aussi haut, et que J.-B. de
Rossi se trompait en voulant descendre jusqu’au vn° ou au
viu* siècle (4). |
4° La mosaïque trouvée en 1889 à Rome, sur le Célius (BulJ.
communale, 1889, pl. 1-11 ; Bienkowski, Malocchio, dans l’Era-
nos Vindobonensis; p. 285-303), à l’entrée d'une basilique du
n° siècle de notre ère, qui servait aux réunions d’une confrérie
de dendrophores, c'est-à-dire de dévots de Cybèle et d'Attis. On
y voit la chouette, symbole du Malin, et le mauvais œil, attaqué
par la horde des bêtes.
La formule de conjuration : Φεῦγε, μεμισημένη, ὁ δεῖνά σε
(1) Rev. belge de numismatique, 1898, p. 372. C'est le phylactère que M. Mi-
chaelis avait vu à Bruxelles dans la collection Robiano (Arch. Zeitung, 1814,
p. 69; Journ. of hell. stud., 1885, p. 313; Eranos Vindobonensis, p. 288); il a
été trouvé à Mayence, en 1862. Quant à la médaille talismanique, uniface, en or,
publiée dans le même volume de la Revue belge de numismatique, p. 459, par
M. le comte Albéric du Chastel, elle était connue depuis Caylus (Recueil, t. ΤΥ,
pl. 38), et Jahn avait reproduit le dessin de Caylus (Bôse Blick, pl. IN, 2).
(2) Supra, fig. 6.
(3) Frôhner, Annuaire de la Soc. fr. de numism., 1890, p. 237.
(4) « Jo li stimmo tutti o quasi tutti posteriori al secolo setto o settimo: » Bull.
ürch. crist., 1891, p. 138; |
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝῸΣ 55
διώχει, ἃ été illustrée par Frôhner (1), Le Blant (2), et J.-B.
de Rossi. Celui-ci, notamment, en a rapproché deux vers de
l'hymne grec que le peuple de Rome, au commencement du
moyen âge, chantait quand revenait le printemps :
φύγε, φύγε Debooudot
ὁ Μάρτις σε διώχι (3).
Le mot μεμισημένη mérite explication. Remarquez que la
formule de conjuration ne nomme pas de son nom le démon,
mâlé ou femelle, qu'il s'agit de conjurer; c'est sans doute que
nos phylactères devaient préserver le porteur contre n'importe
quel démon, et non seulement contre tel ou tel (cette remarque
est une nouvelle raison de ne pas admettre la théorie de
M. Sorlin-Dorligny). C'est aussi qu'on ne savait pas toujours le
nom du démon à conjurer: avis nocturna, quivis sis, dit un
phylactère dont nous parlions tantôt; c’est enfin qu'on ne nom-
mait pas volontiers le démon de son nom, pour ne pas pro-
noncer un nom abominable ; on remplaçait donc le nom du
diable par une périphrase qui avait le double avantage d’inju-
rier le diable et de l’écarter, de le conjurer. Les Grecs d'aujour-
d’hui le désignent ainsi : « Celui... hors d'ici soit-il! » (ὁ ἐξα-
ποδῶ) ; les Byzantins l’appelaient le Réprouvé, μεμισημένος (4).
Plusieurs des phylactères au type de Salomon et de la dia-
blesse portent au revers l'inscription : Zopayis Σολομῶνος. Que
signifie-t-elle ? |
Il importe ici de dissiper une confusion, qu'a faite, par
exemple, M. Babelon dans son dernier ouvrage. « Sous le nom
de sceaux de Salomon, qui désignait ces phylactères (les mé-
(1) Bull. des antiquaires de Normandie, 1867, p. 229-230.
(2) Rev. archéol., 1892, 1, p. 55 sq.
(3) Bull. arch. crist., 1891, p. 135, d'après Fabre, Le polyplyque du chanoine
Benoit, Ὁ. 30.
(4) Ainsi dit la colombe à Sainte Marine : καὶ ἀπέλυσε φωνὴν t, περιστερὰ λέγουσι.
χαῖρε, Maplva, ὅτι τὸν μεμισημένον κατήσχυνας. Cf. Usener, Acla S. Marinae et S.
Christophori, p. 30 (Festschrift für die fanfte Säcularfeier der Univ: su Heidelberg,
Bonn, 1866);
56 PAUL PERDRIZET
dailles talismaniques dont nous parlons), l'usage, écrit M. Babe-
lon, en a passé aux Arabes (1). » C’est une erreur; les Arabes
— et en général les Musulmans — n'ont pas de médailles talis-
maniques analogues à celles qui nous occupent. Celles-ci por-
tent des représentations figurées, et le Coran a interdit de
représenter les êtres vivants. Il est vrai que dans les légendes
et les superslitions musulmanes, il est souvent question du
sceau de Salomon (2), mais ce que les Musulmans entendent par
là, c'est, comme dans la magie blanche des Occidentaux, une
figure géométrique en forme d'étoile (3). Ce que nos phylac-
(4) Traité des monnaies grecques el romaines, t. I, col. 689.
(2) « Le sceau de S. était le plus précieux de tous ses trésors ; il joue un grand
rôle dans la fiction orientale. Il portait gravés les mots suivants : « Louange à
Dieu ! Dieu est très grand! » Il avait appartenu à Adam avant son péché ; Salo-
mon le reçut de l'ange Gabriel. Lorsqu'il le portait à son doigt, dit un auteur
arabe cité par Sacy dans ses notes sur le Pendnameh, les bêtes féroces, les
oiseaux, les poissons, les génies et les hommes obéissaient à sa voix et se ren-
daient auprès de lui pour exécuter ses ordres » (Loiseleur-Deslongchamps, dans
les Mille et une nuits du Panthéon littéraire, p. 25). Ce passage de l'auteur
arabe est à rapprocher de nos phylactères, où l'on voit toutes sortes de bâtes,
et des plus sauvages, à commencer par le lion, conjurées contre le mauvais œil
et contre la diablesse ; c'est Salomon, qui, par la vertu de son sceau, les a liguées
contre le démon. « Quelques auteurs, poursuit Loiseleur-Deslongchamps, assu-
rent que le sceau de Salomon ne portait pas de légende, mais représentait une
figure composée de deux triangles, encadrés l’un dans l’autre, de manière à for-
mer une sorte d'étoile ». « Cette figure, dit Reinaud (Monuments arabes, persans et
turcs, 11, p. 55), est appelée par les Musulmans hexagone, et on la trouve souvent
tant sur les pierres gravées que sur les monnaies [par exemple sur les monnaies
marocaines] et autres monuments musulmans. Elle est surtout recherchée par
les personnages du nom de Soliman. » Cf. au Cabinet de France un sceau juif
avec l'inscription suivante : « Salomon, fils de Guedalia; il repose dans l'Éden »
(Rev. numism., 1889, p. 426). Le peintre lyonnais Bernard Salomon (1540-1572)
dessinait un pentalpha après sa signature (Natalis Rondot, Les peintres de Lyon
du xve au ΧΥΠΠ 8. Paris, Plon, 1888, p. 97).
(3) Tantôt à 5 pointes, tantôt à 6, d'où les noms (qu'on s'étonne de ne pas
trouver dans nos Dictionnaires de la langue francaise, par exemple dans Littré
ou dans Hatzfeld-Darmesteter, de pen{alpha, pentacle, pentagramme; hexralpha,
hexacle, hexagramme. L'histoire du pentalpha et de l'hexalpha serait longue à
traiter; quelques indications suftiront pour le moment. L'hexalpha se trouve
déjà sur nombre de monnaies mérovingiennes (Prou, Cat. des monn. mérov. de
la Bibl. nat., p. cxin-cxrv), mais y figure-t-il comme figure talismanique, et ie
mettait-on à l'époque mérovingienne en rapport avec Salomon ? Il paraît comme
épisème du bouclier d'Athéna sur une aimnphore panathénaïque (Monum. dell'
Instiluto, 1, pl. XXII.) Un pentalpha est dessiné dans un ms. médical latin (Cod.
Sangall. 151, 441; cf, Heim, op, laud., p. 563-564) à la fin d'une recette ad mor:
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝῸΣ 57
tères appellent σφραγὶς Σολομῶνος doit être tout autre chose.
Mais quoi?
Remarquons d'abord que nos phylactères ne portent pas tous
au revers les mots : σφραγὶς Σολομῶνος. Sur notre n° 4, on lit
σφραγὶς τοῦ ζῶντος Θεοῦ, et sur les amulettes en hématile (n° 6) :
σφραγὶς Θεοῦ — ce qui permet de supposer qu'on croyait que
Salomon tenait, de Dieu mème son pouvoir sur les démons, et
que c'est au moyen d’un sceau reçu de Dieu même qu'il exer-
çait ce pouvoir.
Une autre explication de ces expressions évidemment équiva-
lentes σφραγὶς Σολομῶνος, σφραγὶς Θεοῦ, est possible. Rappelons-
nous l'intaille du Cabinet de France mentionnée au début de
cette dissertation, celle qui porte l'inscription IAW COAOMON
CABAG. Matter, en la publiant dans son Histoire du gnosticisme.
l'a trailée de « monument du genre le plus vulgaire ». En quoi
il avait tort, car cette inscription, jusqu'ici, est unique. « Il
élève, continue Matter, il élève Salomon, fameux dans la magie
des bas temps au rang d’Iao et de Sabaoth. » Si vraiment Salo-
mon est l'égal de [ao Sabaoth, c'est-à-dire de Dieu même, on
comprend que son sceau soit appelé indifféremment σφραγὶς
Σολομῶνος, ou σφραγὶς θεοῦ. A l'appui de cetle hypothèse, on
alléguera peut-être ceci :
bum porcorum; ce Ms. est du 1x° siècle, mais la recette est une addition posté-
rieure, dont j'ignore la date. Aux xvie et xvu° siècles, le sceau de Salomon sert
de talisman de bataille (Bull. des antig., 1899, p. 347). A la fin du xvre siècle, une
dame lorraine, Diane de Dommartin, se compose un monogramme de ses deux
initiales écrites à la grecque, deux deltas, et en fait un hexalpha (L. Germain,
Bull. de la soc. d’arch. lorr., 1902, p. 230); un peu plus tard, Callot prend l'hexal-
pha comme cadre du portrait gravé du médecin Delorme. Au xvmr siècle, Goe-
the, grand maître ès arts occultes, n'ignore pas l'importance du pentagramme
dans la magie blanche; cf. Faust, 1re partie, scène du barbet :
Mephistopheles
Verbietet mir ein kleines Hinderniss :
Der Drudenfuss auf eurer Schwelle…
Faust
Das Pentagramm macht dir Ῥείη ?
L'hexalpha est aujourd'hui le symbole de la brasserie (Ferdinand Reiber
Études gambrinales, Paris, 1882, p. 69); c'est, je suppose, que l'art du brasseur:
qui emprisonne dans les tonneaux et dans les bouteilles la force mousseuse de
la bière, ἃ semblé analogue à la science de Salomon, qui par la vertu de son
sceau mâgique, emprisonnait lies démons dans des jarres,
58 PAUL PERDRIZET
Le plus ancien lexte grec où il soit question du sceau de
Salomon est un exorcisme Πρὸς δαιμονιζομένους contenu dans le
grand papyrus magique de Paris, ligne 3038 et suivantes (1) :
ὋὉρχίζω σε πᾶν πνεῦμα δαιμόνιον, ... κατὰ τῆς σφραγῖδος ἧς ἔθετο
Σολομῶν ἐπὶ τὴν γλῶσσαν τοῦ Ἱερεμίου καὶ ἐλάλησεν. Ainsi le sceau
de Salomon, imposé sur la bouche d'un démoniaque, le déli-
vrait du démon. Mais le prophète Jérémie avait donc été pos-
sédé? Et Salomon était revenu sur la terre, qui l'avait délivré?
Si l'on admet, d’après la pierre gravée du Cabinet de France,
que Salomon avait été identifié, par je ne sais quels gnostiques,
à Jéhovah Sabaoth — et c'est l’idée de Matter, de Longpérier,
de M. Babelon (2), — on expliquera ce passage étrange du
papyrus magique de Paris en disant que les gnostiques qui
avaient identifié Salomon et Jéhovah pouvaient bien avoir
imaginé que Jéhovah-Salomon avait donné à Jérémie l'inspi-
ration prophétique après l'avoir au préalable délivré du démon.
Et l'on rapprochera de ce texte du papyrus magique un passage
de Jérémie même (1, 9): καὶ ἐξέτεινε Κύριος τὴν χεῖρα αὐτοῦ
πρός pe καὶ ἥψατο τοῦ στόματός μου καὶ εἶπε Κύριος πρὸς μέ" ᾿Ιδοὺ
δέδωκα τοὺς λόγους μου εἰς τὸ στόμα σου.
Je ne crois pas que cette combinaison d'hypothèses ait chance
de paraître satisfaisante. L'interprétation de la pierre gravée
qui porte l'inscription IAW COAOMON CABAUD est-elle exacte ἢ
On s’est généralement accordé à juger cette inscription gnos-
tique. Il est bien probable que c'est une erreur. Autant que j'ai
pu me renseigner sur cette épineuse question du gnosti-
cisme (3), il n'a dû se trouver parmi les gnostiques personne
(4) Publié par Wessely, Griech. Zauberpapyri von Paris und London (Denkschr.
d. ph.-hist. Klasse d. K. ΑΚ. ἃ. Wiss. zu Wien, XXXVI, p. 27 8q.).
(2) Je n'ai pas vu Münter, Odae gnosticae Salomoni tribulae, thebaice el latine,
Copenhague, 1812 (cf. Brunet, Manuel5, s. v. Salomon et Matter, Hist. du gnos-
ticisme, 11, Ὁ. 247), non plus que l'ode gnostique de Salomon (en copte) publiée
par Uhlemann, Linguae copticae grammatica, p. 104, et citée par Amélineau, Le
gnoslicisme égyplien, p. 100.
(3) Comme travaux français, cf. outre l'ouvrage de Matter, bien vieilli, antérieur
à la découverte des Philosophoumena, les Origines du christianisme de Renan
(t. VIl), l'Essai eur le gnosticisme égyptien d'Amélineau, et dans la Rev. de l'hist:
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝΟΣ 59
d'assez inepte pour identifier Jéhovah Sabaoth avec Salomon.
En général, il est permis de dire que certains archéologues ont
abusé du gnosticisme dans leurs essais d'explication des monu-
ments magiques; ils lui ont imputé bien des produits de la
superstition la plus basse, dont le gnosticisme n’est nulle-
ment responsable. Renan me semble, sur cette question,
avoir écrit une page bien juste, qu'il faut citer : « Le monde,
fatigué d’un polythéisme épuisé, demandait à l'Orient, et sur-
tout à la Judée, des noms divins moins usés que ceux de la
mythologie courante. Les noms d'Abraham, d'Isaac, de Jacob,
de Salomon passaient en Égypte pour des talismans de première
force. Des amulettes répondant à ce syncrétisme effréné cou-
vraient tout le monde. Ces mots IAU, AAGWNAI, CABAW®,
EAGWI et les formules hébraïques en caractères grecs s’y mêlaient
à des symboles égyptiens et au sacramentcl ABPACAZ... Tout
cela est bien plus judéo-païen que chrétien, et le gnosticisme
représentant dans le christianisme l’aversion contre Jéhovah
poussée jusqu’au blasphème, il est tout à fait inexact de rap-
porter au gnosticisme ces monuments d'ineptie... Basilide adop-
tait Abrasar comme tant d'autres noms sacramentels: mais
rien de plus faux que d’appeler basilidiennes toutes les pierres
où on Jit ABPACAS. {πο n'est pas non plus une invention de
Valentin. Pas un texte des Pères de l’Église ne mentionne chez
les gnostiques de pareils talismans (1). » Une preuve que Renan
a raison est donnée précisément par cette intaille qui porte
l'inscription IAG COAOMON CABAU). L'inscription est gravée
au revers de la pierre. Qu'y a-t-il de l’autre côté? Une Isis
debout. Personne ne dira que les Gnostiques adoraient Isis.
Renan a raison encore quand il désigne l'Égypte comme
l'officine où se fabriquuient la plupart de ces amulettes. C’est
en Égypte que s’est formé le syncrétisme grossier dont elles
témoignent. La croyance que Salomon avait été un grand magi-
des religions, mai-juin, juillet-août 1902, le travail en cours de publication de
M. Faye, Introduction à l’histoire du gnosticisme aux 11° et 111 siècles;
(1) Marc Aurèle, p, 141-143;
60 PAUL PERDRIZET
cien, et qu'il était bon de l'invoquer contre le diable, est d'ori-
gine juive; les Juifs de Judée l’avaient ; le texte de Josèphe le
prouve. Mais chez les Judéo-Grecs d'Égypte, cette croyance
était destinée à une fortune extraordinaire. L'intaille avec l'ins-
cription [AG COAOMON CABAG est égyptienne, puisqu'elle
porte l’image d’Isis. Parmi les bêtes prophylactiques nommées
ou figurées sur nos médailles talismaniques, on voit le lion, la
girafe, l'ibis ; le lion est un animal africain, qui abondait daus
le désert libyque, aux portes de l'Egypte ; la girafe, animal de
l'Afrique tropicale, n'a été connue du monde gréco-romain que
par l’intermédiaire de l'Egypte; l'ibis enfin est spécialement
égyptien. D'autre part le papyrus magique de Paris, qui met
en rapport d'une façon si inattendue Salomon et Jérémie, est
un document égyptien (4). Et 1] convient aussi de rappeler
le rapprochement indiqué plus haut entre le Salomon de
nos phylactères et le Saint copte Sisinnios de la fresque de
Baouît.
Pour en revenir à l'expression σφοαγὶς Σολομῶνος, qui, dans le
langage courant, désignait sans doute les talismans au type de
Salomon à cheval transperçant la diablesse, on voudrait con-
paître les légendes que les gens superstitieux qui portaient ces
talismans se racontaient sur le sceau de Salomon. Quel usage,
par exemple, Salomon, sa vie durant, avait-il fait de son sceau?
De qui le tenait-il? Un curieux texte, publié par M. Usener (2),
semble dire que le sceau qui rendait Salomon si puissant sur
les démons était le propre sceau de Satan, que Salomon lui
aurait ravi : un diable vaincu par Marine explique ainsi à la
Sainte l’histoire des démons : ἡ μεῖς δὲ οὐ γινώσχομεν πόθεν ἔχομεν
τὴν γένεσιν... And χρόνων (3) δὲ Σολομῶντος ἦμεν φυλαττόμενοι
εἰς πίθους ἐγχεχλεισμένοι τῇ σφραγῖδι τοῦ Σατανᾶ. Ὅτε δὲ ἦλθον οἱ
(1) La mémoire de Jérémie a été entourée d'une vénération particulière par
les Juifs d'Égypte. Jérémie s'était réfugié en Égypte après la prise de Jérusalem
et il y mourut. L'Égypte tient du reste beaucoup de place dans son livre.
(2) Op. laud.
(3) ᾿Απὸ χρόνων Usener, d'après une version latine où 18 phrase est ainsi rendue :
nam Salomon in vitu δια inclusii nos in uno vase, ἴλχρις MS,
ΣΦΡΑΓῚΣ ΣΟΛΟΜΩΝῸΟΣ 61
BabuAwvor (1), ἡμεῖς ἐποιήσαμεν φλόγα ἀπὸ τῶν ἀγγείων * οἱ δὲ
ἐνόμισαν ἰδόντες θησαυρὸν λάμποντα, καὶ ἐλθόντες ἤνοιξαν τοὺς “χαλ-
χοὺς πίθους νομίζοντες χρυσίον εὐρεῖν " ἡμεῖς δὲ ἀπολυθέντες ἐφύγομεν
εἰς τὴν ὑπ᾽ οὐρανόν (2).
Paul PERrDRizer.
(1) Les Chaldéens de Nabuchodonozor.
(2) Cette histoire, la même que celle racontée par l'Efrit des Mille el une nuits,
a passé dans Jacques de Voragine (Vie de sainte Marguerile, vierge el martyre;
cf. Wyszewa, La légende dorée, traduction française, p. 334); c'est dans Voragine
que Bonaventure des Périers a puisé l'idée de sa x nouvelle : « Du roy Salo-
mon qui fit la pierre philosophale, et la cause pourquoy les alquemistes ne
viennent au dessus de leurs intentions. » Salomon, dit le conteur, força les
démons à entrer dans une grande cuve de cuivre « bien plus grande que le bois
de Vincenne. » 11 les y força par la vertu de la pierre philosophale. Il n'est plus
question, dans Bonaventure, du fameux sceau.
LES PERSES DE TIMOTHÉE ‘
I
Le poète Timothée de Milet n'était guère pour nous
jusqu’à présent que l'ombre d'un grand nom. On savait par les
témoignages des anciens qu'il avait été le rénovateur, ou selon
d’autres le « corrupteur » de la musique grecque, le chef d’une
nouvelle école et le créateur du style « varié » (ποιχίλον) ; on
savait aussi la fécondité de sa longue carrière, presque sécu-
laire, environ 450-360 avant J.-C. Virtuose, poète, compo-
siteur de nomes citharodiques, d'hymnes et de dithyrambes,
violemment attaqué à ses débuts comme tous les novateurs,
mais encouragé et peut-être imité par Euripide, il avait fini
par triompher de toutes les résistances. Archélaüs, roi de Macé-
doine, l’appela à sa cour; Éphèse payait mille dariques son
hymne à Artémis. Mort, il passa classique à son tour. En Arca-
cadie, du temps de Polybe, les enfants apprenaient ses nomes
par cœur. Une inscription d'une ville de Crète, Cnosse, qui
date du n° siècle, remercie un virtuose de Téos d'avoir exécuté
en public, aux sons dela cithare, les œuvres de Timothée et de
Polyidos, ainsi que celles des vieux poètes crétois, « comme il
convient à un homme cultivé » (2). Cependant, sous l'influence
des critiques sévères de l’école d'Alexandrie, une réaction se
(1) Der Timotheos Papyrus, Lichtdruck Ausgabe. Leipzig, Hinrichs, 1903, in-£”.
— Timotheos. Die Perser... herausgegeben von U. von Wilamowitz Moetlendorff.
Ibid., in-80.
(2) CIG., 3053.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 63
produisit dens le goût des lettrés. Timothée et tous les poètes
du 1v° siècle, les dithyrambistes du nouveau style, furent exclus
du « canon » des lyriques. On ne daigna pas commenter leurs
œuvres, qui cependant auraient eu bien besoin de commen-
taire; bientôt même on cessa de les copier et de les lire; vint
l'empire romain, et le théâtre lui-même, envahi par d’autres
modes, leur fut désormais fermé. Les citations qui nous
restent de Timothée, au nombre d’une trentaine seulement,
sont toutes de deuxième ou de troisième main, elles sont en
outre fort courtes — la plus longue a six lignes — et si elles
suffisaient à faire entrevoir le caractère de son « écriture »,
elles étaient loin de donner une idée de ses procédés de compo-
sition et de l'allure générale de sa poésie.
Tout cela est désormais changé par une heureuse, une admi-
rable découverte. En explorant un cimetière de l’ancien empire
dans un faubourg de Memphis — Bousiris, aujourd’hui Abousir
— une mission, envoyée par la Société orientale allemande, a
mis la pioche par hasard sur un groupe de sépultures beau-
coup plus récentes, de la fin de l'époque perse ou du commen-
cement de l'époque macédonienne. Le 1° février 1902, dans
une de ces sépultures, à côté d'un sarcophage d'occasion, où
s'était fait inhumer un grec, le consul allemand L. Borchhardt
trouva un paquet d'objets semblant appartenir à un scribe (1),
et un rouleau de papyrus long de 4 m. 41. Il suffisait d’entr'ou-
vrir le rouleau pour en reconnaître l'importance : car l'écriture
est parfaitement lisible et le poète se nomme lui-même dans les
dernières lignes, Timothée le Milésien. On était en présence
d’une notable partie du plus célèbre nome de Timothée, les
Perses, celui-là même que chantait le citharède Pylade aux
Néméennes de 207, en soulevant, dit Plutarque, l'enthousiasme
de la Grèce assemblée, par l’éclat d'une voix appropriée à la
pompe de la poésie. Le précieux manuscrit fut transporté à
Berlin, déroulé, photographié, recollé, avec la diligence la plus
(1) Un petit sac en cuir, une éponge, un fer rouillé, un morceau de bois
tourné. Paquet et sarcophage ont été transportés à Berlin et y sont exposés. .
δά T. R.
minutieuse. Le déchiffrement ct la publication en furent confiés
à M. de Wilamowitz, assisté de M. Schubart : c’est assez dire
la compétence et le soin qui ont présidé à ce travail. Un an
après la découverte, nous avons aujourd’hui sous les yeux,
d'une part l'édition en fac-similé, sept planches en phototypie
d'une exécution parfaite, d'autre part, l’édition « littéraire »,
qui comprend une transcription en majuscule, puis une resti-
tution dans les caractères usuels, avec la division en χῶλα,
enfin, un commentaire très développé. Dans ce commentaire
M. de Wilamowitz a épuisé ou amorcé toutes les questions
relatives à son sujet ; on y retrouve la vaste érudition, le délicat
sentiment littéraire, l'esprit fécond en aperçus, combatif et
tranchant qui, doublé d’un style vivant et très moderne d'al-
lure, impriment à toutes les publications du savant professeur
de Berlin un cachet particulier, une σφραγίς originale. Il ne
manque à cette belle édition princeps qu'une traduction ; mais
M. de Wilamowitz déclare Timothée intraduisible en aucune
langue moderne, et, au lieu de s'épuiser dans une lutte inutile,
il a, par une fantaisie bien amusante d'érudit, préféré joinére
au texte une paraphrase en prose grecque de sa façon, dans le
genre des paraphrases antiques qui nous sont parvenues de
Lycophron et d'Oppien. On a pu constater à cette occasion que
M. de Wilamowitz manie aussi habilement la prose byzantine
que le vers « alexandrin », dont il nous a déjà donné plusieurs
jolis échantillons. Dans quelques siècles il arrivera à sa para-
phrase le même sort qu’à 1᾿ ᾿Ολυμπιάδων ἀναγραφή de Scaliger,
d'être prise pour un ouvrage antique.
J'ai peur cependant que cette manière d’éclaircir un texte grec
difficile ne soit pas du goût de tous les lecteurs, et notamment
des lecteurs français ; c’est à eux que j'ai pensé en joignant à la
rapide analyse qu'on va lire quelques essais de traduction dont
je ne me dissimule pas l’imperfection, mais qui rendront du
moins un peu de la couleur et du mouvement de l'original à
ceux pour qui le grec, et surtout le grec de Timothée, a des
secrets.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 6%
Il
M. de Wilamowitz dit avec raison que le papyrus de Timo-
thée est, à l'heure actuelle, le plus ancien livre grec que l'on
possède. À la vérité, la célèbre « imprécation d'Artémise », con-
servée à la Bibliothèque de Vienne, paraît être à peu près de la
même époque, fin du 1v° ou commencement du mu‘ siècle; mais
ce n'est là qu'un court document privé, en grec d'illettré. Le
papyrus de Timothée est, au contraire, l'œuvre considérable d'un
scribe de profession, encore qu'assez négligent (1). 1] se com-
pose de six colonnes, dont la première, il est vrai, n'est qu'une ᾿
poussière de fragments minuscules et informes; la seconde,
quoique très mutilée, peut être comprise et même restituée en
grande partie ; les colonnes 3 à 5 sont presque parfailes, la 6°
ne contient que quelques lignes — la fin du poème — et un
grand espace blanc : ce jour-là le scribe n'était pas en veine
d'économie. Les colonnes sont d'une largeur tout à fait insolite,
qui atteint jusqu'à 24 centimètres (sur 18 de haut) et dépasse
souvent 50 lettres; le nombre des lignes varie de 29 à 26.
Les formes des lettres sont celles des inscriptions, surtout des
inscriptions peintes, du 1v° siècle finissant. On remarquera
comme particulièrement caractéristiques le σόα à barre verti-
cale (τὴ), le Π à branche droite très courte, la petitesse de o et
de ὃ, le + à boucle triangulaire; seul l'oméga a la forme semi-
cursive du papyrus d'Artémise, mais le sigma est épigraphique
ct à branches divergentes, par une évidente affectation du
scribe, car, dans l'écriture cursive, la forme lunaire avait
certainement prévalu dès le rv° siècle.
Les lignes, de longueur très inégale, se terminent souvent au
milieu d’un mot, mais non d'une syllabe. Les mots ne sont pas
séparés, et il n'y a aucune trace d’accents, d'esprits ou de ponc-
(1) Le scribe s'est corrigé plusieurs fois en se relisant; dans les dernières
colonnes, il a laissé ce soin à ses futurs éditeurs.
ὅ
66 T. R. |
tuation ; toutefois, les grandes divisions du sens sont marquées
par l'alinéa et la paragraphos, et au début du finale — peut-
être la σφραγίς — on voil en marge un très curieux signe en
forme d'un oiseau à aigrette, perché sur une patte. Malheureu-
sement, les notes de musique, signes mélodiques aussi bien
que signes rythmiques, font également défaut : nous n'avons
que le livret de ce qui fut une des plus célèbres « partitions »
de l’antiquité. Que ne donnerions-nous pas pour avoir l'édi-
tion complète !
Complet, le papyrus ne l’est pas non plus pour le texte. Non
seulement, comme je l'ai dit, la première colonne est réduite
en miettes, mais, à ce qu'affirment les éditeurs, elle porte la
trace évidente d'une coupure à sa marge gauche : le rouleau
actuel a donc été détaché d’un rouleau plus considérable, et il
y a toute apparence que, même complétée, la première colonne
ne nous donnerait pas le commencement du poème. Ce qui
confirme cette hypothèse, c’est que des trois citations des Perses
qui nous ont été conservées par Plutarque, aucune ne se
retrouve dans le texte d'Abousir.
Ajoutons toutefois que l'identification ne saurait soulever
aucun doute : le poème est bien de Timothée, qui se nomme en
toutes lettres; il traite d'une bataille navale perdue par les
Perses sous les yeux du grand Roi, évidemment celle de Sala-
mine. Quelle vraisemblance que les Perses eussent un autre
sujet ou que Timothée eût traité deux fois un thème analogue ?
IT
Plutarque nous a conservé le premier vers des Perses (1) —
χλεινὸν ἐλευθερίας τεύχων μέγαν Ἑλλάδι κόσμον — et ce vers est
(1) Je ne saurais accorder à M. de Wilemowitz que le mot ἐνάρξασθαι (Plut.,
Philop., 11) ne désigne pas le début séfricto sensu et qu'il pût y avoir un proème
auparavant. Quant au sens de ce vers, ainsi détaché du contexte, il est malaisé à
déterminer. Le sujet peut être la bataille (ἀγών) ou Arès ou même (si le début
avait un caractère d'actualité) Lysandre.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 67
un hexamètre. C'était, nous dit-on (1), l'habitude de Timothée,
dans ses premiers nomes, de combiner l'hexamètre tradition-.
nel avec les rythmes libres (λελὺ μένοι), qui pour nous, il faut
bien l'avouer, ne se distinguent guère de la prose. Ce mélange
n'était pas d’ailleurs de son invention : déjà Phrynis en avait
donné l'exemple (2). Timothée ne s’en servit pas non plus
seulement « dans ses premiers nomes », car les Perses, où nous
le constatons, sont une œuvre de sa maturité. Lui-même nous
l'apprend (ν. 226 suiv.) :
ἐγὼ δ᾽ οὔτε νέον τινὰ
Ψ . ιν 6
οὔτε γεραὸν οὐτ᾽ ἰσήθαν
y “« 1.6 [14
εἴργω τῶνδ᾽ ἑχὰς ὕμνων.
De nombreux indices montrent, d’ailleurs, que les Perses ont
été composés entre la chute d'Athènes (404 av. J.-C.) et
l'expédition d'Agésilas (396 av. J.-C.), où on les citait déjà.
Timothée, à cette date, avait environ cinquante ans.
Les Perses sont un nome citharodique, c’est-à-dire un long
solo de chant exécuté avec accompagnement de cithare. L'hexa-
mètre initial fait deviner que le poète musicien annonçait au
début en vers pompeux — τοῦ περὶ τὴν ποίησιν ὄγχου, dit Plu-
tarque, — le sujet de sa ballade. Deux autres fragments
semblent indiquer que ce début avait un caractère très person-
nel. Le poète s’adressait aux Grecs en son propre nom (τοὺς
Ἕλληνας παρεχάλει, dit le même auteur), pour leur remémorer
les hauts faits et les vertus de leurs ancêtres et les exhorter à
les imiter ; il les mettait en garde contre la séduction de l'or
et leur rappelait que la supériorité militaire était la vraie
garantie de la puissance :
σέῤεσθ᾽ αἰδῶ συνεργὸν ἀρετᾶς δοριμάχου.....
"Ἄρης τύραννος " χρυσὸν δ᾽ ᾿Ελλὰς οὐ δέδοικεν.
Comment de ces réflexions morales et actuelles le poète pas-
(1) Plut., Mus., ὁ (8. 38 Weil Reinach).
(2) Proclus, p. 245 Westph.
68 ᾿ T. R.
sait-il au récit proprement dit qui formait le noyau, l'onpæioç de
son poème ? C'est ce que nous ignorons et ce que les misérables
débris de la première colonne du papyrus ne permettent même
pas d’entrevoir; tout au plus convient-il d'y signaler la pré-
sence du mot, ou tout au moins du groupe de lettres, ΜΟΥ͂ΣΑ
(1. 18), qui semble encore appartenir à une invocation ἐσίο
sensu; mais, dès La fin de cette colonne, d'autres débris (fr. 8)
AINOIO .... TYIA ... semblent se rapporter déjà à la bataille.
Elle est engagée certainement dès le début de la colonne II.
Le poète, sans aucun souci de la vérité historique, décrit celte
bataille comme s’il s'agissait d’un combat de son temps, avec
les engins perfectionnés et les manœuvres savantes qui s'étaient
introduits dans la tactique nautique pendant le siècle de Péri-
clès et la guerre du Péloponnèse, mais que les vainqueurs et les
vaincus de Salamine ignoraient également. Les Grecs ont dis-
posé, au-dessus de leurs navires, un parapet offensif (γεισόλογ-
{0Y), dont les créneaux servent à la fois au choc et à la pro-
tection des embrasures où sont chevillées les rames; ces
créneaux, le poète les appelle dents, ὀδόντες, sans doute parce
qu'ils étaient peints en blanc. C'est par une métaphore analogue
qu'il appelle plus loin « pieds montagneux » du navire (6pelous
πόδας ναός, vers 104) les avirons en bois de sapin qui font mou-
voir la galère (1). Ici, les avirons ne sotit pas les pieds, mais les
«mains de sapin » : des machines placées sur le parapet arrachent
les « mains » des navires ennemis à l’aide de têtes recourbées :
A nd \ ?
στο... χαι δὲ χυρτοῖσι χρασὶν [ἀμφεστεμ)]μένα!
χεῖρας παρέσυρον ἐλατίνας
(1) Dans ce passage, où le poète décrit les navires barbares brisés contre des
écueils, après avoir montré les rames tombant des mains des matelots, il ajoute :
στόματος δ᾽ ἐξήλλοντο papuapopsyyeis παῖδες συγχρουόμενοι : « les enfants de la
bouche, blancs comme marbre, sautaient en s'entrechoquant ». Ici encore M. de
Wilamowitz (guidé par Diels) croit qu’il s’agit des dents (créneaux) du navire.
Mais, outre que l'expression serait, même pour Timothée, par trop amphigou-
rique, il semble bien que ce dispositif n'existât que sur les vaisseaux grecs (v. 4-5).
Je crois donc plus simple de rapporter ce vers aux dents des rameurs que le
choc fait sauter de leurs alvéoles. C'était, d'ailleurs, la première pensée de M. de
Wilamowitz.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 69
: - Le mot mutilé doit peut-être se lire otovuyal pour στόνυχες,
à tenailles »; c'est ainsi qu’on a parallèlement διωρυχή et διῶρυξ,
La forme στονυχή, il est vrai, n'est pas attestée, mais on n'en
6st pas à compter les néologismes, ou tout au moins les ἅπαξ,
dans Timothée. |
La mêlée est donc engagée, furieuse, mais la supériorité des
-Grecs éclate immédiatement : hardis à l’abordage, habiles à se
dérober aux contre-attaques de l'ennemi. Déjà, de tous côtés,
flottent des navires désemparés, montrant à nu leur carcasse
retenue par des ceintures de toile. Le choc foudroyant de
l’éperon les achève, les coule à fond. Projectiles et brandons
pleuvent dru comme grêle :
« Pareil au feu, Arès meurtrier jaillit de la main, la courroie
(Zamentum) au flanc; il transperce les membres et son corps,
ébranlé par son passage dans l'air, vibre dans la plaie. De
lourdes masses de plomb portent la mort; l’étoupe enflammée
vole, enfermée dans l’aiguillon toucheur de bœufs (avelines
incendiaires). Les cadavres s'amoncellent sous le dard des dra-
gons (?) empennés à la tête de bronze, que décochent les cordes.
Et voici que la mer aux cheveux d'émeraude rougit dans ses
sillons sous la sueur sanglante des nefs; clameurs et hur-
lements retentissent. La flotte barbare reflue pêle-mèle en
arrière dans le golfe enguirlandé de poissons, frangé d'ailes de
marbre (/es falaises du golfe de Salamine) (1). »
À ce tableau de bataille, haut en couleur, succède un épisode
(1) 382 σμαραγδογαίτας δὲ πόντος ἀλοκαναίο:ς ἐφοί-
νίσσετο σταλαγ[μοῖς,
χρ]αυγᾶι βοὰ δὲ [συμ]μιγὴς κατεῖχεν.
ὁμοῦ δὲ νάιος στρατὸς βάρθαρος ur αὗτις] ἀντ-
ἐφέρετ’ ἐΐν ἰχ]θυ[σ]στέφεσ: μαρμαροπ[τέρ]οις
χόλποισιν [᾿Αμφιτρίτ]ας(ἢ
δ᾽ αἱ marqué 165 {enues probables que nécessite le rythme, mais on ne peut
guëre en cette matière dépasser la vraisemblance. Ainsi βαρὄαρος au pourrait être
un choriambe substitué au diiambe, et à la troisième ligne on obtiendrait plus
d'effet en scandant.
xpauyat ὅσα, etc.
J'écris, d'après une conjecture de M. Maurice Croiset, &\oxävzx/otç en un seul mot.
“0 T. R.
de genre qu’on peut intituler : « Un homme à la mer. » Le
commencement en est fort délabré. Autant qu'on peut deviner,
il s’agit d'un riche Asiatique, gros propriétaire de la plaine,
« maître d’un domaine qu'il faut un jour entier pour traver-
ser » (1). Il est tombé de son navire fracassé ; maintenant, jouet
des vents, il se débat avec les pieds et les mains, et le conti-
nental, ajoute non sans humour le poète, est devenu un insu-
Jaire ou pour mieux dire une 116 flottante (ἔπλει νησιώτας). La
tempête le secoue, l'écume amère, « pluie insociable à Bac-
chus » (2) pénètre dans son estomac, son « vase nourricier »,
τρόφιμον ἄγγος. À peine a-t-il réussi à la rejeter, nous le voyons
grincer des dents comme pour mordre l'élément déchaîné qui
le malmène et sa colère s'exhale en accents suraigus (3). Écou-
tons cette imprécation ou plutôt cette menace qui ne manque
pas de fierté : |
« Téméraire, déjà ton col rebelle a dû se ployer sous l’en-
- trave aux liens de chanvre (le pont jeté par Xerxès sur l'Hel-
lespont) ; maintenant mon roi, oui mon roi, enfoncera dans ton
sein les pins fils de la montagne, et ses regards errants empri-
sonneront tes champs navigables (4), ὁ vieille horreur piquée
du taon de la folie, embrasseuse perfide du vent qui galope et
bouillonne (5) ».
(1) Et non, comme l'interprète Wilamowitz (p. 59), « Herr eines Gebietes das
KAUX eine Tagereise durchmass ».
(2) ἀδαχχίωτος ὅμόρος. Cf. pour le sens le fr. 5 de Timothée : ἀναμίσγων. αἷμα
᾿ Βαχχίου νεορρύτοισι δαχρύοισι Νυμφᾶν.
(3) 74. ἐπεὶ δ᾽ ἀμδόλιμος ἄλμα στόματος ὑπερέθυιεν
16. ὀξυπαραυδήτω: φωνᾶι παραχόπωι τε δόξαι φρενῶν
χκαταχορὴς ἀπείλει
Ὑόμφοις ᾿Σμπρίων μιμούμενος
λυμεῶνι σώματος θαλάσσαι.
Remarquez les dochmiaques, 16 suiv., qui ont une saveur tragique.
(4) Le trône au pied de l'Aigaléos d'où Xerxés contempla la bataille (Hérod.,
VIT, 90).
᾿ς (δὴ) 90. οἱστρομανὲς παλεομίσημ᾽
ἄπιστόν τ᾽ ἀγχάλισμα
χλυσιδρομάδος αὔρας.
Je ne sais pas scander ces vers. L'orthographe constante παλεοὸ (cf. v. 120) ne
perinet pas de scander v — vu —,
LES PERSES DE TIMOTHÉE 74
Cependant la flotte barbare s’est décidée à la retraite, mais
cette retraite ou plutôt cette fuite apporte une nouvelle succes-
sion de désastres. Navire sur navire se brise contre les écueils
(σύρτις), les rames sautent des mains, les dents sautent des gen-
cives ; la mer s'éloile de cadavres flottants et les rivages en
sont alourdis. Le sort des vivants n'est pas plus enviable que
celui des morts. Une lamentable cohue de naufragés, nus et
grelottants de froid, s’entasse sur la plage, et les poitrines se
frappent et la plainte gémissante s'élève. Ce chœur des naufra-
gés, appel angoissé à la patrie absente, mérite d’être reproduit :
« Ὁ vallons de Mysie, à la chevelure d'arbres, sauvez-moi
d'ici où les vents m'ont jeté. Jamais la poussière ne recevra
plus ma dépouille, car voici, sous ma main, la grotte inacces-
sible, antique berceau des nymphes.. (1) borne profonde de la
mer. Enlève-moi, ramène-moi vers le toit solide que mon
maître a bâti sur le courant navigable d'Hella (7 Hellesponi).
Comment, sans cela, quittant le Tmole et Sardes, ville
lydienne, serais-je venu repousser l'Arès hellène? Maintenant
où me tourner ? Où trouver le doux refuge, où éviter la mort
inévitable? Qui pourra me ramener à Ilion, me délivrer de
mes maux? Toi seule, mère des montagnes (Cybèle), si je pou-
vais tomber à tes genoux souverains que drape le chiton
brodé de feuilles noires, et embrasser tes mains, tes beaux
bras. Déesse aux boucles d'or, ὁ Mère, je t'implore! Délivre ma
destinée sans issue. Encore un moment, et le fer habile à tran-
cher la gorge m’achèvera, ou ce seront les brises, fondeuses de
vagues, tueuses de nefs, qui m'anéantiront du souffle nocturne
et glaçant de Borée, car la tempête sauvage a dépouillé mes
membres de tous les tissus qui leur donnaient une forme. Ici
je serai couché, lamentable festin offert aux voraces tribus des
oiseaux. »
Cette plainte tragique ἃ sa grandeur, malgré l'abus des
figures et quelque obscurité. On y sent l'Asiatique rivé à son
(1) Παλεονυμφαιογονὸν corrigé avec vraisemblance par Wilamowitz en παλεονυμ-
payovov. On ne voit pas, en effet, ce que viendraient faire ici les nénuphars.
Ν . T..R.
dieu, on y sent passer aussi, pour emprunter le vers d'un de
nos poètes :
Un peu du grand zéphir qui souffle à Salamine,
Seulement le zéphir est devenu un borée glacial, et c’est contre
les Perses désarmés, nus et grelottants, qu'il souffle en tempête.
Per quel singulier goût des contrastes, immédiatement après
cette scène pathétique, le poète passe-t-il soudain au ton de la
comédie, pour ne pas dire de l’opérette? Tel est, en effet, le
caractère du troisième discours inséré dans cette trame épico-
lyrique. Un Grec armé de la « rame de fer » — l'épée — s’est
saisi d’un Phrygien déshabitué des combats (ὀρφανὸν μαχᾶν),
habitant de Célènes aux opulents troupeaux, et l’'emmène en
le traînant par les cheveux. Le malheureux se jette aux pieds
de son vainqueur et implore sa pitié. Dans son trouble, il
mélange les mots grecs à son parler barbare; c'est un vrai
petit-nègre, émaillé de barbarismes et de solécismes voulus,
qu’il faut rendre par un bégaiement équivalent :
« 6... moi... toi... quément? quelle chose? moi plus jamais
‘ revenir. Aujourd’hui maître à moi m’emmena ici; mais à
l'avenir, petit père, moi jamais revenir te combattre, moi rester
tranquille à la maison. Moi pas venir ici contre toi, moi demeu-
rer là-bas à Sardes, à Suse, à Ecbatane. Artimis, mon grand
dieu, à Éphèse, me gardera! (4) »
Cette grotesque cantilène, accentuée sans doute par une
mélopée phrygienne, ne rappelle pas seulement la chanson du
Phrygien dans l'Oreste; Timothée out-euripids Euripid. C'est
(4) 162. ἐγώ... μοί... σοί... κῶς... χαὶ τί πρᾶγμα ;
αὖτις οὐδάμ᾽ Ὥθω.,
καὶ νῦν ἐμὸς δεσπότης δεῦρό μ᾽ ἐνθάδ' ἤξε"
τὰ λοιπὰ δ᾽ οὐχέτι, πάτερ, οὐχέτι
μάχεσθ᾽ αὖτις ἐνθάδ᾽ ἔρχω,
ἀλλὰ κάθω.
ἐγώ σοι μὴ δεῦρ᾽, ἐγὼ ΕΝ
κεῖσε παρὰ Σάρδι͵ παρὰ Σοῦσα, ᾿Αγδάτανα ναίων.
ἤλρτιμις ἐμὸς μέγας θεὸς
παρ᾽ Ἔφεσον φυλάξει.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 73
au galimatias du faux ambassadeur perse dans les Acharniens
(v. 100 suiv.) qu'il faut plutôt songer ici, et nous comprenons
maintenant ce que c'était que cet « air de Datis » dont parle
Aristophane (Paix, 289) où se lisait le barbarisme χαίρομαι.
M. de Wilamowitz a parfaitement élucidé ce point et c’est avec
raison aussi qu'il a rappelé que d'après Aristote (Poet., c. 2) le
nome, aussi bien que l'épopée, pouvait « imiter » le laid et le
grotesque aussi bien que le beau et l'idéal (1).
Toutefois, il ne fallait pas laisser l'auditeur sous cette impres-
sion burlesque ; l'éthos soutenu du genre s'y opposait. C'est sur
un tableau saisissant — la débandade de l'armée perse après
celle de la flotte, la plainte éplorée de Xerxès, le chant triomphal
des Grecs vainqueurs — que s’achèvera le corps du poème.
Le désespoir s’est emparé de l'armée barbare, ce ne sont
plus que javelines jetées à terre, visages que les ongles ensan-
glantent, robes arrachées des épaules, un gémissement aigu
(σύντονος οἰμωγά) surgit de toutes les poitrines, et le cortège
royal lui-même (πᾶσα βασιλέως πανάγυρις) s’abandonne à la ter-
reur et aux hurlements devant le désastre imminent. Alors
enfin entre en scène le Roi — je ne dis pas Xerxès, car il
n’est pas plus nommé que la Reine dans les Perses d'Eschyle. Il
tombe à genoux et se déchire le corps. Et voici les paroles que
lui arrache cette « tempête de malheurs » :
« Hélas! écroulement de ma maison! (2) hélas! nefs incen-
diaires des Hellènes, qui avez ravagé la nombreuse floraison de
mes jeunes guerriers ! Ma flotte ne les ramènera pas en arrière;
le feu, rage ardente, le feu; corps sauvage, les consumera, et
des douleurs gémissantes accableront la terre persique. O lourde
fatalité qui m'a mené en Grèce!...…. Mais allons, point de
retard. Qu'on attelle mon char à quatre coursiers; et vous,
(1) 11 peut être même question des Perses dans ce texte malheureusement
altéré. La conjecture de Vettori ὡς Πέρσας (codd. ὥσπερ γᾶς) est bien séduisante.
(2) Ἰὼ κατασκαφαὶ δόμων (vers pris littéralement dans les Choéphores, 49). Com-
ment M. de Wilamowitz peut-il écrire qu’il n'a pas relevé dans tout le poëine
une seule réminiscence digne d'être signalée ? (p. 54). Je note rapidement Eschyle
Perses 69 suiv. (= Tim. 85), 397 (— Tim. 96), 421 (— Tim. 108), 104$ (— Tim. 201).
74 τ, R.
qu'on entasse sur les fourgons mes innombrables trésors; qu'on
brûle mes tentes. Que rien de notre richesse ne profite à ces
hommes ! »
Pendant ce temps les vainqueurs érigent à Zeus le temple
qu'il préfère, un trophée, et entonnent le péan, en soulevant
leurs pieds dans une haute danse cadencée (1).
IV
Il semble que le poème soit fini, et qu'après cette pathétique
antithèse du dénouement il suffise d’une coda de quelques vers
pour renvoyer les auditeurs satisfaits. Ainsi en usait Bacchylide
dans ses « dithyrambes ». Mais le nome n'est pas le dithyrambe
choral. La personnalité du poète-musicien sy accuse, encore
plus franchement que dans l’ëmivtxwv pindarique ; elle y inter-
vient d'autant plus directement, que c’est lui-même, en chair et
en os, qui prend la parole. De même qu’au début des Perses
Timothée, à ce qu’il semble, se faisait le conseiller politique et
moral de la Grèce, à la fin du poème il revient à des sujets
d'actualité, mais cette fois c’est de sa personne et de son art
qu'il nous entretient ; il plaide pro domo, justifiant ses innova-
tions contre les critiques violentes dont elles étaient l’objet de
la part des conservateurs spartiates (2). Ce morceau où Wila-
(1) 208 D ἀλλ᾽ ἴτε μηκέτι μέλλετε"
Ὦ ζεύγνυτε μὲν τετράορον ἵππων
G ὄχημ᾽, οἵ δ' ἀνάριθμον ὅλ-
G Gov φορεῖτ᾽ ἐπ᾽ ἀπήνας.
D πίμπρατε δὲ σκὴν ἧς
D μηδέ τις ἡμετέρου
I γένοιτ᾽ ὄνησις αὐτοῖσι πλούτου. »
D οἵ δὲ τρόπαια στησάμενοι Διὸς
D ἀγνότατον τέμενος Παιᾶνα
G ἐχελάδησαν, l'étov
Ι ἄνακτα, σύμμετροι δ'ἐπεχτύπεον ποδῶν
I ὑφψιχρότοις χορείαις.
Alternance de χῶλα dactyliques, iambiques et glyconiques.
(2) On connaît l'anecdote suspecte des cordes supplémentaires coupées par les
éphores, et le décret falsifié conservé par Boëce, d'après Nicomaque.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 75
mowitz voudrait voir la section du nome appelée σφραγίς, c'est-
à-dire le « cachet » personnel du compositeur, est du plus haut
intérêt :
« Mais à toi qui fais prospérer la Muse d'invention nouvelle,
la Muse à la cithare d'or, viens à la défense de mes chants, ὁ
Péan secourablel L’antique et noble peuple spartiate, grand
chef (de la Grèce), débordant d'une jeunesse florissante, me
déchire de traits de flamme et me poursuit d’une satire brû-
lante parce que je fais fi de la muse ancienne pour courir à des
chants nouveaux. |
« Mais non! je n’exclus de ces chants ni jeune, ni vieux, ni
homme de mon âge : ceux-là seuls je les repousse, qui estro-
pient les antiques muses, massacreurs de cantilènes, poussant
au ciel leurs cris de hérauts (1) glapissants et braillards.
« Le premier, le fils de Calliope (Orphée), à la muse variée,
inventa en Piéric le jeu des cordes sonores (2). Après lui Ter-
pandre plia la muse à un joug de dix notes (3) : Lesbos l’Éo-
lienne lui donna le jour, illustre enfant d’Antissa. Et mainte-
nant Timothée déploie ses mètres et ses rythmes dans le chant
d'une cithare à onze cordes (4) et découvre un trésor nouveau,
riche en mélodies, que les Muses tenaient caché. Sa patrie, c'est
(1) Peut-être faut-il interpréter par cogs plutôt que par hérauts : c'est une idée
que me suggère mon cher maître H. Weil.
(2) Il s'agit sûrement d'Orphée, mais on peut hésiter sur la correction des mys-
térieux caractères OPIYEYN ἐτέχνωσεν. M. de Wilamowitz propose ᾿Ορφεὺς yéhuv,
ce qui s'écarte terriblement du texte. J'ai pensé à xpouatv. Quant à ὀρχηστύν,
paléographiquement préférable, il ne donne pas un sens satisfaisant.
(3) D'après la tradition ordinaire la lyre de Terpandre n'avaît que sept cordes :
même en ajoutant la nète dorienne (octave de l'hypate), il retranche par compen-
sation une des sept autres pour conserver le chiffre traditionnel. Timothée
_ abuse de l'ignorance de ses auditeurs pour se donner un précurseur. Doit-on
en conclure qu'à cette époque le règlement du concours spartiate admettait la
_ Iyre à dix cordes ?
(4) C'est bien le chiffre que tous les textes lui attribuent, à l'exception de Phé-
récrate (Plut., Mus., 30) qui parle de 12. Comme Timothée paraît se déclarer ici
l'inventeur de la cithare a 11 cordes, il devient difficile d'attribuer à Ion de Chios
(mort en 422) l'épigramme célèbre qui la vante déjà. M. de Wilamowitz pense
maintenant à lon de Samos, contemporain de Lysandre, dont les fouilles de
Delphes nous ont livré une épigramme (BCH, 1900, 681). |
10 T. R.
Milet, ville du peuple à douze murailles, premier né des
Achéens (1).
« Mais, ὁ Pythien qui frappes au loin, w viens avec le bonheur
vers cette ville pieuse (2), envoie à ce peuple, pour son salut, la
paix florissante et le règne des sages lois. »
᾿Αλλ᾽ ἑκαταδόλε Πύθι᾽ ἁγνὰν
ἔλθοις τάνδε πόλιν σὺν ὄλδωι
πέμπων ἀπήμονι λα-
Gt τῶιδ᾽ εἰρήναν
θάλλουσαν εὐνομίαι.
Ce couplet final, l'épt/ogue du nome, rappelle de très près le
refrain du péan delphique à Dionysos (1v* siècle), publié par
M. H. Weil (3) :
ἼΣ Παιάν, ἴθι σωτὴρ
εὔφρων τάνδε πόλιν φύλασσ᾽
9 4 Ν'
εὐαίωνι σὺν ὄλθωι.
On doit aussi en rapprocher la conclusion du péan d'Aris-
tonoos et celle du deuxième hymne delphique à Apollon. Il y
‘avait là évidemment des clausules de style dont l'origine
remontait probablement très haut, et que Timothée lui-même
s’est contenté de varier.
V
J'ai placé sous les yeux du lecteur les parties principales de
la trouvaille d'Abousir. Elle fait revivre, on peut le dire, tout
(4) Les mots πρωτέος ἐξ ᾿Αχαιῶν sont trés obscurs. Wilamowitz voit dans +pu-
τέος le génitif de πρωτεύς, princeps, inconnu en ce sens. La tradition orüinaire fait
d'lon le frère d'Achéus, Timothée fait des loniens les colons des Achéens pour les
éloigner d'Athènes et les rapprocher de Sparte. C'est de l'opportunisme mytholo-
gique.
(2) Probablement Milet. En tous cas, les mots τάνδε πόλιν prouvent que la scène
est dans une ville ionienne, et non pas, comme le croit Wilamowitz, au temple de
Poseidon à Mycale, lieu de réunion des loniens.
(3) BCH., XIX, 393.
LES PERSES- DE TIMOTHÉE 11
un chapitre de la poésie grecque qu'on pouvait croire perdu à
jamais : c'est son principal mérite. Comme le dit fort justement
le premier éditeur, deux cents vers de Timothée ne valent pas
deux cents vers nouveaux de Sophocle, mais ils nous apprennent
davantage. Seulement, ce qu'ils nous apprennent n'est pas tout
à l'honneur du poète et du public qui l'acclamait.
Le lyrisme de Timothée — et ce qui est vrai de Timothée
l'est sans doute aussi de Philoxène et des autres dithyrambistes
— est déjà un art factice. Ce n’est pas le langage naturel de la
passion comme chez les vieux Lesbiens, ou l'expression imagée
d'un profond sentiment moral et religieux comme chez Pindare.
Je veux bien croire au patriotisme panhellénique de Timothée,
mais, pas plus que chez Isocrate, ce patriotisme ne trouve les
accents qui vont au cœur. Timothée a la défroque d’Eschyle, il
n’en a pas l’âme. Et comment en eût-il été autrement à l'heure
où « la Grèce de la Grèce », Athènes, gisait abattue d'une chute
profonde, où le poète, qui avait dû au public athénien ses pre-
miers triomphes, se voyait condamné par des considérations
d'opportunité, par les préventions de son auditoire à chanter la
victoire de Salamine sans prononcer le nom, je ne dis pas de
Thémistocle, mais d'Athènes elle-même? Malgré tout, pour
nous, lecteurs d'Eschyle et d'Hérodote, l'image de la grande
cité plane sur la pièce et la remplit de son absence ; mais les
Joniens assemblés au théâtre, frais échappés au joug pesant de
leur prétendue métropole, ne devinant pas encore la banque-
route nationale où les conduisait le protectorat spartiate, les
Joniens ont dû penser et sentir tout autrement.
La virtuosité prend donc ici nécessairement la place laissée
vide par l'émolion. Les Perses de Timothée ne sont qu'une.
succession habile de morceaux de bravoure, tableaux de ba-
taille, scènes de mœurs barbares, discours pathétiques ou
burlesques. Épopée, tragédie, comédie, tous les genres, tous
les tons sont également mis à contribution. Le nome ainsi
conçu est un véritable pot-pourri; l'on frémit à la pensée des
multiples talents qu'il exigeait du poète, du compositeur, du
18 | T. R.
virtuose réunis dans une seule et même personne. Rien dans
l'art moderne — M. de Wilamowitz en a fait justement l'obser-
vation — n'est comparable à un pareil effort; Wagner lui-même
ne chantait pas ses opéras.
Le vêtement de ce corps composite, la langue poétique, est
d'un bout à l’autre celle du lyrisme le plus échevelé. A cet
égard, Timothée est le -eontinuateur d'Eschyle et de Sophocle,
plutôt que d’Euripide, dont le lyrisme est souvent un peubour-
geois. Le métaphore à jet continu, la formation indéfinie de
nouveaux composés, l'accord de mots purement psychologique,
qui se moque des relations grammaticales, tels sont les traits
caractéristiques de ce langage auquel on ne s’habitue pas sans
peine.
Déjà Aristote (4) avait signalé les composés, τὰ διπλᾶ, comme
le propre du dithyrambe. Le nome de Timothée, s'il a peut-être
un peu plus de calme et de tenue que le dithyrambe contem-
porain, ne s’en distingue pas essenticilement par la diction.
Chemin faisant, le lecteur a pu remarquer quelques-uns de ces
composés à deux ou trois éléments forgés par Timothée. La
facilité illimitée qu'offre à cet égard la langue grecque ne va
pas sans inconvénient ; la tentation est dangereuse qui ne laisse
d'autre garde-fou que le goût individuel. Aussi les hardiesses
de Timothée ne sont-elles pas toujours heureuses. On peut
admirer la Cybèle μελαμπεταλοχίτων qui évoque une peinture
de vase grec, et la mer σμαραγδοχαίτας qui m'a fait ressouvenir
des Fées de la Mer d'Alphonse Karr (2). Je savoure, comme il
faut, les vallons de Mysie δενδροέθειραι et je consens à m’amuser
des poétastres μουσοπαλαιολῦμαι. Mais, après le golfe ἰχθυσστέφης,
je dis hélas ! et après la rame μαχραυχένοπλος, holà !
Les métaphores de Timothée sont proches parentes de ses com-
posés et appellent les mêmes réserves. Il en fait un abus fatigant
(1) Poet., 22.
(2) Wilamovwitz note que c'est en date la première image (à sa connaissance}
empruntée à une pierre précieuse. On sent l'influence naissante du commerce de
l'Orient.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 19
qui contraste avec l’exclusion presque complète de la lente com-
paraison. Quant au mot propre il le poursuit d'une véritable
horreur. 1] sait qu'une rame s'appelle χώπη, mais il se garde bien
d'appeler un aviron ainsi : l'aviron, pour lui, c’est le « pied » ou
la « main » du navire; χώπη n'est admis qu'en composition
et par métaphore pour désigner l'épée : σιδαρόχωπος ᾿Ἑλλάν (1).
De même, il sait que dent se dit ὀδούς, mais il n’emploie ce mot
qu’en parlant des créneaux blanchis du pont d’un navire ; les
dents proprement dites s'appelleront γόμφοι « chevilles », ou
encore les « enfants marmoréens de la bouche », στόματος μαρ-
μάροφεγγεῖς παῖδες ! Dans cette chasse aux images il ÿ a, certes,
des trouvailles grandioses ou charmantes, car, après tout,
Timothée est une nature de poète, mais il y a aussi des plati-
tudes ct surtout bien des obscurités prétentieuses. Les « enfants
mermoréens de la bouche » en sont un exemple, le « vase nour-
ricier » (τρόφιμον ἄγγος) en est un autre, et aussi le « cachet
perçant de la bouche » (διάτορον σφραγῖδά στόματος), pour désigner
(si nous en croyons Wilamowitz) un langage intelligible. Ces
laborieuses énigmes rappellent à la fois la « devinette primitive »
chère aux Gaulois et aux Indous et annoncent déjà l'ombre
menaçante de l'Alexandra : Eschyle, Timothée, Lycophron,
autant d'anneaux de la chaîne qui va des Védas à l'abbé Delille
en passant par l’Euphuisme et les Précieuses. Notre goût actuel
répugne à ce maniérisme. Nous voulons, sans doute, des images
éclatantes et neuves, sans lesquelles il n’y a point de poésie,
mais nous les voulons rares et qui nous laissent respirer.
Surtout il faut qu'elles semblent jaillir comme d’elles-mêmes
d’une sensibilité vibrante qui transforme spontanément, suivant
le mot de Taine, les idées en sensations, les sensations en
images; dès qu’on sent le travail, l'effort, la recherche de l'es-
_ prit, l'illusion est détruite et le plaisir s’évanouit; la splendide
draperic de la pensée n’est plus qu'un oripeau défraichi.
(4) Dans ce composé, κώπη n’a certainement pas le sens homérique de poignée,
car la poignée du glaive n'est pas en fer.
80 D Βχτι
. Le luxe d'images, la richesse du vocabulaire contrastent
d'une manière frappante chez Timothée avec la pauvreté des
tours, avec la monotonie de [a construction syntactique. Inver-
sions et épithètes à part, toutes ses phrases sont comme jetées
dans le même moule, celui de la simple proposition narrative,
d'où le présent historique est rigoureusement exclu. Et ces
phrases sont toutes soudées les unes aux autres par la sempi-
ternelle particule δέ, très rarement ao (1). Ajoutons que si le
style est encombré de trop d'images, la phrase est souvent
encombrée de trop de mots. Pour dire que des naufragés se
lamentent en se frappant la poitrine, Timothée écrira (v. 444):
auTg τε καὶ δαχρυσταγεῖ γόῳ
στερνοχτύποι γοηταὶ .
θρηνώδει κατείχοντ᾽ ὀδυρμῷ.
Je ne puis voir, dans cette accumulation oiseuse de termes
quasi synonymes, qu'une faute de goût, dût-on invoquer le pré-
cédent d'Eschyle. Quandoque bonus αογηιίαί... Æschylus.
Le peu de souci de la variété constructive, joint à une
recherche extrême de la variété décorative, a son pendant exact
dans la technique musicale de Timothée ; les deux phénomènes
partent du même principe; ce sont comme les deux faces de ce
que les anciens appeluient le style « varié » ou « bigarré »,
ποικίλον. À la pauvreté des tours correspond celle des rythmes,
à la richesse des images devait correspondre celle de la mélo-
pée. OÙ μὲν γὰρ γῦν φιλομελεῖς, dit un contemporain de Timothée
chez Plutarque, οἱ δὲ τότε — les vieux classiques — φιλὸρ-
ρυθμοι (2). Nous pouvons encore aujourd'hui contrôler la vérité Ὁ
de cette assertion. Les rythmes de Timothée, autant qu’on peut
les restituer sans le secours des notes, sont faciles et coulants,
(1) Une fois seulement, j'ai eu l'espoir de voir une phrase commencer par καὶ,
c'est au v. 186 où Wilamowitz imprime χαὶ παλινπόρευτον ὡς ἐσεΐδς... Mais, en se
reportant à la transcription en majuscules (col. IV, ligne 26), on voit que là
aussi le texte porte à δὲ παλινπόρευτον etc. Le fac-similé, quoique un peu brouillé,
confirme cette lecture.
(2) De Mus., c. 31.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 81
mais peu variés, rarement expressifs; l'iambe, entremélé d'un
petit nombre de dactyles, de crétiques, de trochées, en fait à peu
- près tous les frais ; c'est seulement dans les deux reprises finales
qu’il cède la place au glyconien. Cette technique nous est fami-
lière et n’a rien d'original; c’est celle des parties lyriques des
dernières pièces de. Sophocle et d’Euripide. Que nous voilà
loin des savantes architectures d’Eschyle, de Pindare et mème
de Bacchylide! Mais cette indigeñce de rythmes était sans
doute voilée pour l'auditeur par la variété de la rythmopée,
c'est-à-dire en première ligne par l'accumulation fréquente de
‘plusieurs notes sur une seule et même syllabe, procédé qu'Aris-
tophane raille chez Euripide qui lui-même l'avait sans doute
émprunté à Ha nouvelle école lyrique (1). Surtout elle disparais-
sait devant la richesse et la souplesse de la mélopée. ἡ |
De nombreux textes, entre autres celui de Denys d'Halicar-
nasse (2), nous apprennent que la mélopée du dithyrambe nou-
veau, du dithyrambe du 1v° siècle, était essentiellement expres-
sive et variée, c’est-à-dire modulante. Il faut donc entendre
‘cum grano salis la formule trop brève de Proclus qui assigne au
dithyrambe, comme modes traditionnels, les harmonies phry-
gienne ét hypophrygienne. Sans doute, c’étaient là, comme
noûs le confirment d’autres témoignages, les modes cäractéris-
tiques, principaux du dithyrambe, comme de la musique de
flûte en général; mais il ne s’y emprisonnait pas, il savait à
l’occasion, suivant l’éfhos ou le pathos de la situation, faire
des excursions dans d'autres modes. Nous avons là-dessus le
témoignage irrécusable d’Aristoxène (3), qui nous apprend que
dans les Mysiens, un des dithyrambes les plus célèbres de Phi-
loxène, le début — disons l'ouverture, — était en hypodorien,
le final en dorien et en mixolydien, l'ombilic seul en phry-
(1) Voyez un rapprochement analogue chez Estève, Innovations musicales... à
l’époque d'Euripide, p. 118.
(2) De comp. verb., 13. 11 y aurait quelques réserves à faire sur ce texte. Je ne
crois pas, pour ma part, que dans une même composition on ait jamais associé
.le chromatique et l'enharmonique.
(3) Chez Plutarque, Mus. 33. Confirmé par Aristote.
82 T.R.
gien et hypophrygien : cinq modes dans une seule composition.
Or, ce qui est vrai du dithyrambe l’est aussi mutatis mutandis
du nome contemporain, son frère jumeau. Ici encore le témoi-
gnage de Proclus, qui attribue au nome le mode lydien, ou,
selon la très vraisemblable correction de Westphal, éolien
(c'est-à-dire hypodorien) (4), ne doit être accepté que sous
d'expresses réserves. Sans doute le mode « citharodique par
excellence » dominait dans le nome nouveau; mais il n’y était
pas seul. Dans les Perses, par exemple, je crois infiniment
probable que la prière grotesque du « bourgeois de Célènes »
était harmonisée en phrygien, et la complainte funèbre des
naufragés asiatiques en lydien ou en mixolydien. Et ce qui est
vrai des modulations modales l’est aussi, à plus forte raison,
des modulations de ton et de genre.
Sur ce point, d’ailleurs, nous ne sommes pas absolument
réduits à des suppositions ; une lumière naît du rapprochement
avec les hymnes de Delphes. Ces hymnes, qu'on a pris d’abord
pour des compositions chorales, nous apparaissent clairement
aujourd'hui comme des nomes citharodiques, comme des
sortes de réductions des nomes à la Timothée. Une invocation
aux Muses en forme le début, une longue narration l'ombtlic,
un final lyrique appelle la bénédiction divine sur l'audi-
toire et la patrie. Ces trois éléments se retrouvent dans le
nome de Timothée, et la coda glyconique du deuxième hymne
delphique offre avec celle des Perses une surprenante analogie.
Eh bien, cette analogie, n'est-il pas naturel, légitime, de
l'étendre également à la mélopée? Si les Perses nous aident à
comprendre la destination et le mode d'exécution des hymnes
delphiques, à son tour ceux-ci nous ont conservé un écho, très
affaibli sans doute, de ce qu'a dû être la prestigieuse mélopée
(1) Nous savons, en effet, d'une part que l'hypodorien était le mode cithero-
dique par excellence (Prob. Arist., XIX, 48), d'autre part que l'hypodorien n'est
qu'un nom nouveau du mode éolien (Heracl. Pontic. ap. Athen., XIV, 625). Le
commentaire de Wilamovwitz sur cette question (p. 95) me paraît tout à fait :
manqué. Reste toutefois la possibilité que la source de Proclus ait confondu le
mode avec le ton : la citharodie affectionnait le trope lydien.
LES PERSES DE TIMOTHÉE 83
du « rousseau Milésien » : modulations savantes, passages
suraigus, notes hétérogènes hardiment empruntées à un autre
ton (ἐξαρμόνιοι), diatonique sévère et archaïsant allernant avec
le chromatisme le plus sensuel et le plus raffiné, bref tout ce
qu'on pouvait déjà lire dans les vers fameux de Phérécrate,
ou de l'auteur quel qu'il soit du Cztron :
ἅπαντας οὗς Λέγω
παρελήλυθ᾽ ἐσάγων ἐχτραπέλους μυρμηκιάς,
ἐξαρμονίους ὑπερθδολαίους τ᾽ ἀνοσίους
καὶ γιγλάρους, ὥσπερ τε τὰς ῥαφάνους ὅλην
χαμπῶν με κατεμέστωσε [ποιχιλωτάτων 7],
xäv ἐντύχῃ πού μοι βαδιζούσῃ μόνῃ
. ἀπέδυσε κἀνέλυσε χορδαῖς ἕνδεκα (4).
L'heureux et brillant génie se fit pardonner d’avoir violé la
Muse à force de lui faire de beaux enfants.
TR.
(4) J'écris maintenant avec Meziriac ἕνδεκα au lieu de δώδεκα des manuscrits,
puisque Timothée lui-même ne s'attribue qu'une cithare à onze cordes : νῦν δὲ
Τιμόθεος μέτροις ῥυθμοῖς θ᾽ ἐνδεκαχρουμάτοις κίθαριν ἐξανατέλλει, θησαυρὸν πολύυμνον
οἴξας μουσᾶν θαλαμευτόν (v. 241 suiv.).
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE
Bien que les travaux résumés ci-dessous aient à peu près tous paru en 4901,
‘je dois annoncer dès maintenant le fascicule du Corpus publié en 1902. C'est le
premier volume des Inscr. gr. du Péloponnèse : il contient les textes d'Égine,
de Pityonesos, de Cecryphalia et d’Argolide, et il a pour auteur Max Fränkel.,
L'Asclépieion d'Épidaure y occupe les numéros 913-1533, les nouvelles décou-
vertes d'Égine les numéros 1580-1595 et celles de Corinthe 1596-1606.
Les périodiques suivents ont été dépouillés pour le présent bulletin (le signe *
désigne ceux qui l’ont été par M. Th. Reinsach).
France. — Bulletin de corr. hellén. (BCH). Tomes XXIV (1900), p. 329-617 et
XXV (4901), p. 1-240.
Revue Archéologique (RA). Tomes XXX VIII (1901, 1) et XXXIX (1904,
ID).
Revue de Philologie (RPh) XXV (1901).
Revue des Études Grecques (REG) XIV (1904).
Revue des Études Anciennes. 11I (1904).
Mélanges d'arch. et d’hist. (École de Rome) XXI (1901).
* Revue biblique, X (1901).
Académie des Inscriptions, Comptes rendus, 1901.
* Bulletin de la Société nationale des Antiquaires, 1901.
* Clermont Ganneau, Recueil d'archéologie orientale, fin du tome IV.
Belgique. — * Musée Belge, V (1901).
Hollande. — Mnemosyne XXIX (1901).
Grèce. “-- Ἐφημερὶς ἀρχαιολογικχή, 1901.
* ᾿Αθηνᾶ, 1904.
Grande Bretagne. — Journal of hellenic Studies (JHS), XXI (1901).
Classical Review (CLR) XV (1901).
* Hermathena, XI (1901).
ὁ Palestine exploration fund. Quarterly statement (Pal. Quart.), 1901
et 1902.
Italie. — Monumenti antichi pubblicati dei Lincei, XI (1901),
Bullettino archeol. della commissione municipale di Roma, 1901.
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 85
* Nolizie degli scavi (Atti dei Lincei). Année 1904 jusqu’à juillet
(inanque le mois de mars). [Sorb. P. 119].
Allemagne. — Milteilungen des deutschen Instiluts. Athenische Ableilung (AM),
1901 (deux fasc. parus).
Mitteilungen.. Rômische Abteilung (RM), 1901.
Jahrbuch des deutschen archäol. Instituts, 1901.
Berliner Philologische Wochenschrift (BPhW), 1901.
Hermes, XXXVI (1901).
Philologus, 1901.
Rheinisches Museum (RhM) LVI (1901).
Neue Jahrbücher, IV (1901).
Byzantinische Zeitschrift, X (1901).
* Deutscher Palästina-Verein. 1° Mittheilungen und Nachrichten
1901 fasc. 1-2 seuls parus, 2 Zeitschrift tome XXTV (1901) [Sorb.
H Æ 0 63 a].
Académie de Berlin. — Abhandlungen, 1901.
- Silzungsberichte, 1901.
Académie de Saxe (Leipzig). — Berichle über die Verhandlungen,
1901.
Académie de Munich. — Sifzungsberichte, 1901.
Académie de Gôttingen. — Nachrichten, 1901.
Autriche. — Jahreshefle des Gsterreichischen archäol. Instituts IV (1901).
Académie de Vienne. — Sifsungsberichte, 1901.
États-Unis. — " Harvard Studies in classical philology. Vol. XII (1904) et XIII
(1902).
* American journal of philology, ΧΧΤῚ (1901),
* American journal of archaeology, V (1901).
Suède. — * Eranos Acta philologica suecana. Vol. IV (1900-1902!) fasc. 2-4.
[Sorb. P 53791.
Russie. — * Jzvestya (Bulletin de l'institut archéologique russe de Constanti-
nople). Sophia. V (1900) et VI (1901) [Sorb. P. 706].
J'ai essayé de grouper autant qu'il était possible d'après l'ordre géographique
les remarques, ohservations, restitutions nouvelles et corrections proposées à pro-
pos de textes déjä connus. Je dois signaler à part, comme intéressant l'histoire
de l'épigraphie, la plaidoirie décisive de Wilhelm (Anzeiger der phil. hist. CI.
der Wiener Akad., 1904, 20 juillet — p. 9 et suiv. du tirage à part; cf. ἈΠ. M.
511 etsuiv.), qui a vengé Fourmont des reproches de négligence qu'on lui adresse
trop souvent : les copies faites pour le Corpus ont été prises, non pas sur les
papiers originaux, mais sur des copies déjà préparées sans doute pour l'impres-
sion (1).
(1) Signalons encore l’article de G. ἢ, Chase, SAield devices of the Greeks (Harvard studies XIII, 61)
qui intéresse par divers côtés l'épigraphie ; Waltzing, Musée belge, V, 62 et 126 qur les inscriptions
corporalives romaines ; Drerup, ibid, V, 136 sur l’histoire des alphabets grocs locaux (insiste sur l'al-
phabet corinthien qui aurait servi de pont entre l’alphabet iouien et les alphabets locaux de la mère
pairie).
86 ÉMILE BOURGUET
ITALIE
Huelsen, RM, 193 : les inscriptions gravées sur les hermes représentant des
Grecs illustres d'après les collections iconographiques de la fin du xvr siècle, et
d’après les monuments. Additions aux IGS. et It : 34 Ὅμηρος, 42 Φιλημῶων et 68
textes faux ou suspects (28 Ἀριστοτέλης ὁ ἀριστος των φιλοσοφωνὴ..
Rome. — Jardin du palais Barberini. — Hartwig, RM. 366; sur un morceau
de marbre : Φιλόξενος ᾿Αθηναῖος ἔποηισεν (sic) : sculpteur néo-attique inconnu.
© Via salaria. Nolizie, 1901, 16. Epitaphe de Kledoneios ὃ χαὶ Helladios par sa
femme Ζουλιττα.
Forum. — Bull. comun., 1900, 295. Funéraire de Seilikès yepouoidpyns et de sa
famille.
Via Nazionale, — Bull. comun., 132. Fragm. base, un débris de titulature
impériale. Ze6aoth, θειο[τάτου] Αὐτοκράτο[ρος]....
Forum boarium. — Bull. comun., 284. Tessère d'os, πτερὰ l', et le même
nombre en chiffres romains, III. |
Pouzzoles. — Cagnat, Ac IBL, CR 192. Nouvelle copie du texte publié, Nofisie,
1891, 161 (la pierre est en Amérique). L'an 204 de Tyr, le dieu Soleil d'Arcpta
(Arefa) est venu par mer à Pouzzoles, apporté par Elim selon l’ordre du dieu.
Ph. Berger, ibid., 196 : la correction [Σ]αρεπτηνός dans ce texte est tentante,
mais surtout il est difficile de voir dans HAstu un nom d'homme.
Clermont-Ganneau lit, au lieu de θεὸς ἥλιος : Θεοσέδιος Σαρεπτηνός — ἤγαγεν
Ἡλεὶμ κατ᾽ ἐπιτολήν. | | | .
Naples. --- Soccavo près Naples, Gabrici, Notizie, 1901, 298. Πομπ. Αθηνωδωρος
τῷ Lôtw πάτρωνι.
᾿ Malte. — Héron de Villefosse, Ac IBL, CR 11, complète l'histoire de l'inscrip-
tion grecque et phénicienne, CI Semit.,.I, 122. :
SICILE
Gela. — Orsi, Nolizie, 1901, 310, Pied de vase :
ΜΠΊνησομαι Nixaotev (?) ὑπὸ γαι[ας]. D'autres inscriptious de cette provenance
sont fausses. ᾿
DALMATIE
Senj. — Funéraire de M. Κλαύδιος Mapustavés, Νεικομηδεύς : Messager de la Soc.
archéol. croate, 1898-1899, p. 173, d'après Cagnat-Besnier, RA, II, 471.
GRÈCE DU NORD
-
Thessalie. — Larissa. — ‘Ep. àpy., 1901, 193. — κι, Témoignage d'un habi-
tant d'Ascuria (ou Ascurion ?) et de trois habitants de Mopsion pour une limita-
tion de territoire intéressant les habitants de Kondaia (?). Le texte ne paraît pas
établi d'une manière définitive : on y relève des détails nouveaux sur la géo-
graphie du pays au confluent du Pénée et de l'Europos (Titarèse). À noter, à
Larissa, le sanctuaire d’Apollon Kerdoios. — 3. Fragment d'un grand texte
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 87
juridique où il paraît être question de terrains en culture près d'un théâtre ? —
8. Débris de proxénie (ἐπινομία καὶ πολέμοιο καὶ ipivac), avec les noms des
ταγεύοντες. — 14. Si la lecture de la 1. 11 est bonne, fragment de décret hono-
rant plusieurs personnes qui ont rendu des services aux Rhodiens (?). —
4,12, métriques. — 18. Dédicace à Déméter φυλάχα et à Dionysos Κάρπιος. —
19, à Milichios. — 20-31, funéraires.
Velestino (Phères). — AM. 237, dédicace de Δεινίας Γυρείτου Κρατιδαίας Τοφίνειος.
Démétrias. — Holleaux, R. ét. anc. 111. Corrections à SylL, 790.
GRÈCE MOYENNE
Locride. — Amphissa. — Vollgraff, BCH 1901, 221-240. — n° siècle. Fin d'un
décret de proxénie, daté du nom du boularque, président non pas du conseil
municipal, mais du conseil général du département de la Locride, τοῦ Aowpixoÿë
æéhs0<. — Décret pour un médecin Menophantos, Macédonien d'Hyrcanie (Lydie) :
une lettre aux magistrats οἱ à la ville de Scarphée transmet les honneurs accor-
dés.
Phocide. — Delphes. — L’E et les autres γράμματα δελφικά ont donné lieu aux
- ξδιδικ avivants : Roscher, Philologus, 1900, 21; Lagercrants, Hermes, 1901, 411 :
Roscher, Philologus, 1904, 81, et Hermes, 1901, 470 ; Robert, ibid., 490. Celui-ci
pense que l'E archaïque en bois massif n'a rien à faire avec les maximes, c'est.
une ancienne offrande qui n'était peut-être même pas une lettre et dont on a dû
ignorer d'assez bonne heure la signification. Roscher persiste à croire que tous
les γράμματα étaient gravés sur des tableaux de bois, au-dessus et des deux côtés
de l'entrée du temple, l'E sur l'épistyle, les autres sur les deux colonnes à droite
et à gauche du milieu.
A. Mommsen, Philologus, 25. Coup d'œil d'ensemble sur les résultats obtenus
jusqu'ici pour la chronologie delphique : on est étonné de trouver encore, p. 41,
dans la liste amphictionique de Charixenos-printemps, les quatre hiéromnémons
attribués ä Alexandre.
Homolle, BCH, 1900, 447. — Signature d'un « Apollon » archaïque : [Πολ)]υμέ-
δες ἐποίεε Hapyslioc] = 6 ’Apystos. vie siècle, écriture rétrograde.
Homolle, Ac IBL, CR 668. — Fragments, dont deux métriques, complétant la
publication des bases de l'ex-voto Lacédémonien après Ægos-potamoi, BCH, 1897,
286. Décrets de proxénie postérieurs, pour des parents des navarques ; mentions.
abrégées (xäpuE, Τροζάνιος) qui sont des repères pour le montage. Restitution du.
nom [(Αύσανδρος] ᾿λρι[στοχρίτου] sur une de ces bases.
Homolle, ibid., 681. — * Très belle épigramme de cinq vers, signée d'Ion de
Samos; Lysandre consacre sa statue, témoignage de sa victoire sur Athènes et
de la gloire qu'il a donnée 4 Lacédémone, Ἑλλάδος ἀκρόπολιν, καλλίχορομ πατρίδα.
Cette statue est distincte de celle qui le représentait au milieu des navarques,
et devait s'élever auprès du trésor des Acanthiens, non loin du grand autel.
Bourguet, BCH, 1900, 463. — * Comptes des trésoriers sous l'archontat de.
Caphis et celui de Theon.-— P. 464, 1. 6, B. Keil propose de lire Ὀλυμπιάδι, pour
Olympias. L. 13-15, taux du change de la monnaie attique. — Liste amphictio-
nique : Φυρράγιος, ethnique nouveau (Pyrrha?); indication d'un édifice que les
88 ᾿ς ÉMILE BOURGUET
amphictions faisaient construire aux Pyles pour leurs séances. — P. 472, texte
de Théon, mutilé. : les deux listes amphictioniques de l'archontat. — Discussion .
sur la chronologie des premières années d'Alexandre : Dion sûrement en 336-5,
Caphis en 331-0, Charixenos en 330-29 et Théon en 328-7 : la série Eribas-Maima-
los vient ensuite. Lykinos et Bathyllos doivent être insérés entre Dion et Caphis,
il reste dans cet intervalle deux places vides, 335-3, dont l'attribution à Etymon-
das et à Thebagoras est probable. — P. 504, fragments de la même comptabi-
lité, datés d'années trés voisines.
* Homolle, BCH., 1904, 105-449, republie d'après l'original CIG. 1690; de plus,
une plaque semblable, mais complète, et quatre fragments. L'archonte Theolytos
doit sans doute être inséré avant Caphis en 332-1, et dans la liste proposée ci-
dessus, il faudra exclure Thebagoras ou Etymondas (?). — Ces textes contiennent
l'énumération des versements opérés entre les mains des trésoriers par les loca-
taires de 31 immeubles, terrains de culture ou constructions : ces immeubles sont
répartis en trois séries, d’après la succession chronologique des contrats : baux
primitifs; baux postérieurs (série première), et baux postérieurs (série addition-
nelle). En capitalisant à 8 pour 100, H. obtient pour la valeur totale de ces pro-
priétés 30,250 dr., ce qui ne représente évidemment qu ‘une petite partie du
domaine sacré.
. Homolle, BCH., 1900, 541. Fin de décret de proxénie; archonte Euboulidas,
quinze dernières années du 1v° siècle.
.Id., ibid., 581. — Dédicace 1v° siècle ['A πόλις τῶν Δελφ]ῶν (ou un nom propre
en ων) καὶ τοὶ πρυτάνιες Πανί,
Homolle, BCH., 1901, 104. Dédicace à Athéna Pronaia et signature de Céphi-
sodote l'aîné (?). 1d., ibid. 136. Décret de Thèbes et, en réponse, décret de Del-
phes sur le droit d'hospitalité dont les Thébains veulent continuer à jouir dans
l'oixla τῶν 6. : le droit leur est maintenu (rr° 5.)
. Foucart, RPh., 91; base d'une statue d'Hérode Atticus qui porte les noms de
ses deux grands pères Vibullius et Hipparchos.
Il faut mentionner ici le livre de Nikitsky, Recherches d’épigraphie delphique
(en russe), Jurjew-Dorpat, 1901 : la partie la plus importante, sur la liste géo-
graphique des proxènes, a paru depuis résumée en allemand par l'auteur dans les
Travaux de l'Université de Jurjew-Dorpat (1902).
. Tithorée. — Wilhelm, Jahreshefte, Beibl. 20. Epitaphe métrique du médecin
Dorotheos d'Alexandrie, mort à Tithorée d'où la pierre a été transportée à
Athènes.
Béotie. — Acraephiae. — Dragoumis, BCH., 1900, 530, corrige quatre vers de
l'épigramme d'Eugnotos : ibid., 10.
: Danielsson, Eranos, IV, 187. Corrections à la même épigramme, V. 10 μάρν]ατο.
V. 16, αἰστεα — ἄστεα. |
. H. v. Gelder, Mnemosyne, 281. — Dans les catalogues qui commencent par le
nom de deux archontes, l'äpywv Βοιωτοῖς et l'archonte de la ville, les trois polé-
marques sont du χοινὸν τῶν Βοιωτῶν. — IGS., 1, 2716 est du commencement du
mue siècle. — Date des catalogues BCH., 1899, 92, 193 et suiv.; corrections à
quelques noms de ces listes, et de celles du CIGS. — La date de 180 (environ)
hour 16S., I, 4135 et suiv., est confirmée.
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 89
Tanagra. — Solmsen, RhM., 475 : sur le mot ἐπιπατρόφιον, dérivé de l'ablatif-
instrumental en φι(ν) dans le texte REG., 1899, 53.
Eubée. — Chalcis. --- Ἔφ. dpx., 89. — 4 : copie d'un décret d'Alabanda (νυ.
plus loin Asiw-Mixeure, Carie). — 15 funéraires, dont une du type ἐπὶ datif.
— 12 inscr. céramiques, noms propres, patronymiques, archontes et ethniques.
Attique. — Athènes. — Dragoumis, ‘Ep ἀρχ., 91, reprend après Kürte et Fou-
cart, CIA, II, 1649. Les deux fragments ὁ et ὁ ne se rajustent pas comme l'a cru
Kôhler, mais ils se font suite, c au-dessous de ὃ. Le graveur a répété par erreur
six lignes; chaque ligne avait dix-huit lettres. On a ainsi la restitution assurée
de !a suite des travaux accomplis, archontat après archontat, dans l’Asclépieion
d'Athènes de 420 à 412. Noter le début nouveau : ἀνελθὼν Ζεόθε μυστηρίοις τοῖς
μεγάλοις et la restitution ôté[xovov] au lieu de δράΐ κοντα].
Wilhelm, Anzeiger der phil. hist. cl. der Wiener Akad., 10 juillet 1904. —
Inscr. d'Athènes revues ἃ Paris, et dont W. donne de nouvelles copies : CIG,
add. 175 ὁ (ne figure pas au CIA). épitaphe de Μάνννς (Μάσνης, Μάνης), mort à la
guerre (du Péloponnèse). — CIA, 1, 32 : 1. 5, il n'est pas du tout question de Péri-
clès. — Deux exemples, CIA, III, 23 (l'ordre vrai des deux dernières lignes) 6
l'intitulé de CIA, Il, 435, âttestent l'intelligente fidélité des copies originales de
Fourmont.
En tête de CIA, I, 110, Wilhelm, Hermes, 449, restitue sûrement Θεοὶ [{ Aô]e[véa
τύχε, comme dans I, 298 : la restitution des Θεοὶ ἐπικούριοι doit disparaître.
Kolbe, AM. 223 ; deux fragments nouveaux de CIA, I, 324. Sur l'un ᾿Αθεναῖοι
ἀνέλοσαν ἐπὶ] E[ü]u{réposoc ἄρ. ἀρχ]ιτέκτίον ‘Apx]lhoyols ’Ayou]A@e(v] ; il y ἃ peu
à tirer de l'autre : δραχμαῖν, ἐμ Μελίτει [hotxôv], χαλκον, χρυσος, etc. Le premier
confirme l'opinion de Kirchhoff sur la date du texte, et aussi sur le rapproche-
ment des fragments : l'inscription était gravée en neuf colonnes, l'en-tête avec
le nom de l'architecte au-dessus de la 5mc colonne, celle qui correspond aux
dépenses de la septième prytanie. Le travail de l'Erechtheion, repris en 409 avec
Philocles, a été continué en 408-7 sous l'architecte Archilochos : on ἃ terminé le
mur N., travaillé aux colonnes du portique E., et au toit. 1] semble que, pen-
dant les dernières prytanies de cette année, on ait redoublé d'activité.
* Wilhelm, BCH, 1901, 93, rend au dême de Halai les deux textes CIA, 571 et
572, première moitié du 1v* siècle. 11 restitue avec une méthode très sûre le pre-
mier : inauguration d'un système de contrôle dans les finances du dême : on
mettra tous les mois dans le coffre officiel le bilan des recettes et des dépenses,
et pour les εὔθυναι ce sont ces bilans mensuels qui seuls vaudront.
Wilhelm, Ἐφ. ἀρχ., 49, reprend CIA, 1V, 2, 407 e en l'honneur d'Aristocreon,
neveu du philosophe Chrysippe, et publie un fragment d'un autre décret en l'hon--
neur du même Aristocréon, un peu plus ancien : l'archonte Chariclès est nou-
veau (sans doute 239-8). À noter l'expression περὶ ὧν ἀπομε)μαρτυρήχασιν αὐτῶι
κλε[ίους..., et la correction νέννος (oncle, frère de mère) naguère proposée par W.
pour l'épigramme de la statue de Chrysippe, élevée par Aristocréon : le mot se
retrouve dans une inscription gravée au-dessus d'un relief funéraire, probable-
ment de Théra.
Wilhelm, Philologus, 486 : funéraire (fin 1ve-début τ 8.), avec le nom de
Bpéuwv : étude des participes employés comme noms propres.
90 EMILE BOURGUET
AM, 4. — Sur une lampe en terre cuite, en forme de trois personnages
comiques : μιμολ(ό)γοι ἣ ὑπόθ(ε)σις Εἴκυρα (sic). ᾿
Foucart, RPh, 91, restitue CIA, III, 1333, grâce ἁ un texte de Delphes qui
prouve qu'Hérode Atticus a porté les deux noms de Vibuilius et d'Hipparchos.
Liopesi (Paeania). — Castriotis, Ἐφ. ἦρχ., 158. Stèle (fin du v*, début du rv° 5.) :
Διὸς φρατρίο, ᾿Αθηνάας ppat[plas] * οἵδε φράτερες. Suivent les noms des vingt mem-
bres : plusieurs sont connus, ou leur père. Une note imprimée sur la couverture
du fascicule prévient que le graveur ἃ répété l'A dans ’Aënvéac à cause d'un
défaut de la pierre (!).
Pirée. — AM., 235 : deux funéraires.
Phalère. — ibid., 235-236 ; quatre funéraires.
Munichie. — ‘Ro. ἀρχ., 81. Fragment d'un catalogue de navires (2° moitié
γ 5.) où chaque nom ἰΤαυροπόλη, Aavén, θέαμα) est accompagné de la mention
δόκιμος καὶ ἐντελής. Wilhelm signale l'existence d’un fragment semblable, prove-
nant d'une autre stèle, dans la collection Frôübner.
Éleusis. — Foucart, RPh., 89, rapporte la seconde inscription ‘E?. &px., 1894,
207, non pas à Hérode Atticus, mais à Tib. Claudius Hipparchos, son grand-père.
PÉLOPONNÈSE.
Egine. — ‘Furtwängler, Berl. Ph. W. 1002 et Berichte Munich, 372. Cf.
Anseiger, 199; CIR, 473, 471; Ac IBL, CR 5% (85. Reïinach) : IGP, 1, 1580.
..«Ἐλ]εοίτα ἱαρέος ἐόντος τἀφαίαι ὁ οἶκος [ὠικοδομ]ήθη, χὼ βωμὸς χὠλέφας ποτεποιήθη,
χὠ περίδολο]ς περι[εἸποιήθη. Lettres archaïques sur une plaque de calcaire. Cette
construction, la maison sacrée de la déesse, est antérieure au temple connu, qui
a été lui aussi consacré à Aphaia. C'est une divinité voisine d'Artemis, identifiée
avec Diktynna et Britomertis.
Meister, Berl. PhW. 1088. Dans d'autres dédicaces, tipar — vd ᾿Αφᾶι. ‘Apala
τς ’Apda == ᾿Αφᾶ, comme ᾿Αθηναία == ᾿Αθηνᾶ.
Furtwängler, Berl PhW. 1597. Inventaire des sanctuaires de Mnia (Damia) et
d’Auxesia : statue de Mnia en bois de cyprès, pas d'objet en métal précieux, c'est
le mobilier simple d'un sanctuaire de campagne.
Argolide. — Argos. — Fränkel, Rh. M. 233, défend sa restitution de IGP, I,
556, modifiée sur quelques points de détail, cf. add. p. 380, contre Wilhelm,
Jahreshefte 1900, 144.
Wilhelm, Rh. M. 571 confirme sa première restitution du même traité : les
lignes sont plus longues que ne l'admet Frâänkel, le texte a sans doute été gravé
στοιχηδόν, mais toutes les lignes n'avaient pas le même nombre de lettres.
L'attribution de ce document, par lequel les Grecs confédérés refusent de soutenir
les satrapes révoltés contre le grand roi, à l'année 362, est une découverte propre
à Wilhelm.
James Dennison Rogers, Amer. 7. of archaeology, V, 159. Inscription boustro-
phédon archaïque sur bronze découverte à l'Héraion d'Argos en 1895 nous repro-
duisons ce texte important, malheureusement mutilé :
...pañpara " ταδε» " Ὠαγνοι... |
xatavot?] he συνχεοι tac ἀρὰς * τὰς
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 94.
φευγετο ex] γας * τὰς ἀργειας " τὰ δε παμαίτα
χα[θ]ανατον * he αλλο τι χᾶσον " ἢ
5 ε] πι[τ]εχνοιτο “ s..1Fiobere * .0
ὃς * προγροίφ]ος " sExpua
αἹ ι δε με δαμιιοίρ]γοι τις " ἢοις
€ Apystac * wa hoc ἔοι εἰ.
τὸ * τοι ἢυλες * axoôou
10 γας ‘ Apysiac γα * καταχᾷ
tvov For soto * ποι τας H
Les suppléments très étendus de l'éditeur sont bien incertains. Il s'agit d'une
loi sacrée avec une sanction énergique.
Epidaure. — Cavvadias, Ἐφ ἀρχ. 51. Résumés, en 75 lignes d'un στοιχηδόν très
irrégulier, des décrets de proxénie — ou plus souvent de proxénie et de théaro-
doquie ensemble — donnés surtout à des. Péloponnésiens, à un Macédonien
(Bepwaïoc), un habitant de la Cyrénaïque (Ταυχόριος), un Acarnane (si la lecture
Δεριεύς est exacte), etc…., pendant dix-sept ans, peut-être avec des intervalles,
et toujours au mois Apellaios. Commentaire sur le rôle politique des théaro-
doques, le κατάλογος mensuel dont le nom sert ἃ dater, les quatre tribus subdi-
visées en trente-deux phratries, et la date des Asclepieia : Apellaios, dernier
mois de l'année épidaurienne.
Kayser, Musée belge, V, 65 et 235. Études sur les comptes de construction de
l'Asclépieion, commentaire des termes techniques.
Ligourio. — Fränkel, RhM. 493, lit après Kirchhoff et Kretschmer dans 1GS, I,
4249, (maintenant IGP, 1, 1611) ἔΑνφοξυν — et non pas "Avppoëuv comme il est
écrit dans le nouveau volume du Corpus —, nom de la divinité guerrière (—
Athéna ?, redoublement d'été) que devait représenter la statuette, et il voit dans
hsxpopos un nom propre pluriel (Ἕπροροι, Ἕπρωροι....), dème, phratrie ou thiase
qui l’a dédiée.
Trézène. — Haussoullier, RPh. 336. — Les 1. 5-13 du texte publié par Legrand
BCH 1900, 190 (maintenant IGP, 1, 752, cf. add.), s'expliquent par la transaction
qui intervient aprés la razzia faite par les Trézéniens sur le territoire de la ville
adverse : on règle les détails de la restitution.
R. Meister, Berichte Leipz., 21, voit dans ce texte un décret relatif au droit de
représailles : il faut expliquer dans ce sens ῥυτιάζειν et ἀνεπιδασία. Le λόγος du
trésorier Philocies est un inventaire, dressé par un magistrat Trézénien, des objets
saisis. Les polémarques (de l'autre cité) réclament trois de leurs compatriotes à
qui o2 paiera une indemnité pour leur liberté perdue.
Bechtel, Hermes, 610, admet avec Legrand, contre Meister, que les πεπεμμένοι
de ce texte sont les détenteurs des biens saisis, mais il faut lire πεπαμμένοι pour
πεκαμένοι.
Laconie. --- Gytheion. — Hoileaux, KR. ét. anc., 113. Corrections à Le Bas-
Foucart, 242 a.
Antikythera. — Berl Ph W. 1628. Sur un vase :
H IA ἡμιαμφόριον 11.
Χ Καὶ κχάόεας 20,
92 ÉMILE BOURGUET
Elide. — Olympie. — Foucart, RPh., 85, restitue à l'aide d'une inscr. de Mysie
(en dernier lieu JHS, 1897, 216), l’inscr. d'Olympie 327 : dans toutes deux, les
civitates d'Asie, les xoivé, ceux qui avaient reçu individuellement le titre d'amis
du peuple romain et ceux qui voulurent prendre part aux dépenses célèbrent
des fêtes en l'honneur de Q. Mucius Scaevola, στρατηγὸς ἀνθύπατος : statue éle-
vée à Olympie.
Arcadie. — Lousoi. — Wilhelm, Jahreshefte, 64. Inscriptions sur bronze, plu-
sieurs gravées en points. Proxénies pour deux Χαραδρεῖς, deux Κυπαρισσιεῖς, un
Φαραιεύς d'Achaïe, un ᾿Αμφισσεύς et un Athénien. — No 42. Liste de proxènes
(sans ethniques, quelques noms remarquables Méôpos, BAdoac, Ilavñs) sur un
disque de bronze. — No 13. Décret reconstitué avec quatre fragments. — 9, 45,
18. "Apreutx Ἡμέρα. Noter les remarques sur les cinq (?) démiurges, les hiérom-
némons; l'emploi des lettres à formes rondes; et l'appendice sur l'habitude d'in-
sérer des plaques de bronze inscrites dans les antes ou les montants des portes
(φλιά, παραστάς).
Tégée. — Herzog, Philologus, 440. Dans l'inscr. BCH XVII, 14; XXIV, 285, il
faut probablement lire col. IL, au lieu de Μηδείαι, ᾿Αλεξάνδρωι, Cet athlète n’a
donc rempli que des rôles tragiques où il pouvait faire montre de sa force. On
doit restituer à la fin le forme d'imparfait vulgaire Kyocav.
CYCLADES
Amorgos. — Arcésiné. — Holleaux, R. ét. anc., 116. — Corrections à Syll.
643—BCH, XV, 589.
*“ Delamarre, RPh., 166, donne une copie beauroup plus complète de l'impor-
tant contrat de location du domaine appartenant à Zeus Téménitès (R. Weil,
premier éditeur AM, 1876, 343). — 2° moitié du 1v° siècle. Une étude très détail-
lée du texte fait ressortir les détails nouveaux sur les cautions, le mode de cul-
ture (terres arables, vignes et figuiers), la garantie des amendes, la fumure,
l'enduit des toitures, l'époque de la plantation des vignes (au mois Εἰραφιών,
nouveau : D. rappelle le Dionysos Εἰραφιώτης de l'hymne homérique), l'interdic-
tion de faire pattre les bestiaux dans l'enceinte (ἐμδιθάσχεν, 1. 36), la délimitation
des jachères, le paiement des amendes et de l'impôt, et les contestations.
Astypalée. — Wilhelm, Hermes, 450, complète dans IG Ins. III, 212 le nom de
Kleombrotos fils de Pheres, connu par une honorifique d'Epidaure (Fouilles, 267).
Céos. — Holleaux, R. ét. anc., 115. — Corrections à Syil. 241.
Délos. — Ferguson, CI. R. 38 : observations sur le marbre Sandwich : les
amphictyons athéniens sont énumérés d'après l'ordre officiel des tribus aux-
quelles ils appartiennent. |
Wilhelm, Ac. Vienne, Anzeiger, 10 juillet 1901. — Nouvelle lecture des 1. 1-27
de CIG 2274 : 1. 11 μετὰ τῆς τῶν "θεῶν εὐνοίας (Holleaux); 1. 22 πεφιλανθρωπηκχώς, lu
aussi par Holleaux et que Wilhelm rapproche de Le Bas Wadd. 409, 10 :
φιλανθρωπῶν.
Rhénée. — Jahreshefte, Beibl., 17. — Wilhelm reprend et explique l'épigramme
Kaibel 214 : deux frères, Pharnace et Myron d'Amisos ont pu, dans une tempête,
gagner Sériphos, les habitants les ont massacrés. Protos élève une stèle sur Île
tombeau vide de ses amis.
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 93
Jahreshefte, Beibl., 9. — Wilhelm rend à Rhénée les deux inscriptions impré-
catoires, l’une contre les assassins de Marthine, l'autre contre ceux de Héracléa,
et qui se trouvent, la première au Musée d'Athènes (Le Bas, V, 185, 269), la
seconde au Musée de Bucarest (Le Bas, 2054; Sy1l., 816). — Date : fin du 11 siècle
ou début du 1er avant J.-C. Les expressions θεὸς ὄψιστος, χύριος τῶν πνευμάτων καὶ
πάσης σαρκός, τὸ ἀναίτιον αἷμα, χύριε ὃ πάντα ἐφορῶν καὶ οἱ ἄνγελοι θεοῦ, οἷο...
attestent, comme le nom de Marthine, l'origine juive des deux textes.
Mélos. — Hiller v. Gaertringen, Hermes, 305, identifie 1" ᾿Αλέξανδρος Μηνίδου,
᾿Αντιοχεὺς ἀπὸ Maiavôpou, sculpteur IGIns., III, 1241, avec le poète vainqueur à
Thespies, 1GS., I, 1761. |
Naxos. — Jahreshefte, 142. — Krestchmer lit 1GA., 411 (BCH., IX, 495) Δωροφέα
<Ka>Kapluv οἰφόλης, c'est-à-dire καταφερὴς πρὸς γυναῖκα (Hesych.), dérivé de
l'olow des inscriptions de Théra — et voit dans la charrue dessinée au dessous
une allusion ironique aux rapports amoureux des esclaves Karion et Dorophee.
Paros. — Hilier v.Gaertringen, Hermes 160, rapproche IGlns., Il, 1242 du texte
conservé par Cyriaque (Riemann, BCH., I, 134), sur le sculpteur Antiphanes.
Hauvette, Bull. Soc. Antiquaires, 1901, p. 139. À propos de la prétendue men-
tion d'Archiloque dans la Chronique de Paros.
Arthur R. Munro, CIR., 149 et 355. Sur le texte du marbre de Paros. Correc-
tions aux restitutions de Bœckh; à noter 1. 23, rplonpoola ἐἸ]πρ[άχθη πρ]ώτη; 1. 32,
αἱ χ[ρ]ε[ανομίαι) Auxdovos; 1. 56, Κροῖσος εἰς Δελφοὺς ἀπέπεμψε τὰ dvabñuata]; ]. 83,
xatexdn δὲ τότε wall ὃ ἐν Δελφοῖς ναός], c'est-à-dire en 373, comme M. Homolie l’a
pensé. Quelques iectures nouvelles d’après la pierre, par exemple 1. 60, Ἵππαρχον
Πεισιστοάτου [διά]δ[οχ]ον.
Rubensohn, AM., 160 : fragment d'une dédicace métrique à Φρυγίη, épithète
de la Mère des Dieux. — 171 : Néotoc, dieu fluvial: ibid., métrique. — 204 : pierre
funéraire de C. Julius Magnus, τραγῳδογράφος de Laodicée de Syrie. — 211 : fac-
simile de le dédicace d'Erasippe. — 212 : réédition de BCH., 1897, 16 et de Ran-
gabé, 896. — 217 : dédicace aux Nymphes ; 219, à Artémis d'Éphèse; 221, aux
grands dieux de Samothrace.
Ténos.— Jahreshefte, 166. P. Quinctilius Varus, quaestor (ταμίας) de la province
d'Asie vers 22 av. J.-C.
Hiller v. Gaertringen, BCH., 1900, 615, complète le fragment BCH., 1883, 2417,
L. 4. [τὸ ἱερὸν... τᾶς ᾿Αμ]φιτρίτας, ce qui laisse définitivement ce texte à Ténos.
Théra. — Hiller v. Gaertringen, Hermes, 113. Poids avec inscriptions : com-
mentaire métrologique de Lehmann.
Hiller v. Gaertringen, Hermes, 134. Inscription archaïque rupestre, en deux
trimètres iambiques, plus deux spondées :
᾿Αγλωτέλης πράτιστος ἀγορὰν hixdôt
Καρνῆια θεὸν δείπνιξεν μοὐνιπαντίδα
χαὶ Δαχαρτῶς.
« Agloteles, fils d'Enipantidas et de Lakarto (2), le premier dans les discours au
peuple, a offert le 20 (Karneios) au dieu un festin pour les Karneia. » C'est le plus
ancien témoignage de cette fête à Théra.
94 - ÉMILE BOURGUET
Hiller v. Gaertringen, Hermes, 444 : un Crétois (Ῥαύκιος) stratège des Ptolémées
(milieu me s.). ᾿
CRÈTE
G. de Sanctis, Mon. Ant., 473-550.
Provinces occidentales :
Polyrhenion. — 1. Dédicace de συνευνομιωταί à Pan. — 2. Jolie épitaphe métrique.
— 3, 4. Métriques. — 5. Encore le nom ὉὈρύας. — 7. et 14. Les noms ᾿Αὐδίας et
Σῶσος. — 18,19, 22... Listes de noms, le plus souvent gravés sans aucun soin,
qui doivent avoir été ‘écrits par les pèlerins et visiteurs d'un petit sanctuaire. —
1] faut ajouter, p. 333 : fac-simile du texte (avec la signature de Καλλίχριτος) pp.
Myres, JHS., 1896, 183; p. 489, fac-simile de la lettre des Thébains aux Polyrhé-
niens, Doublet, BCH., 1889, 68; p. 492, fac-simile de l'inscription de C. Cornelius
Scipio Hispanus (Myres, 181), et p. 493, celle d'Auguste (ibid.).
Dikiynnaeon : p. 493, restes misérables du traité entre Polyrhénion et Pha-
lasarna. *.
Kantanos : 28. Stèle funéraire : noms Μαάστοχλῆς et Δαμοκούδνς ᾿Αγησιφόω. —
32, funéraire métrique. — 33. Trajan : 1. 3, il faut lire sans doute ἐπιμε[λτιθέντος
ve... ]Jpou ἀνθυπάτου. |
Hyrlakina. — 35, K\fvovoa Tupéaiw. - 36, funéraire métrique de Pasimnasta
Dspyauia (de Pergamos entre Kydonia et Polgrhenion?). — 45, ᾿Αγησίφως ᾿Αδράστοι
τῶι πατρὶ καὶ Γεροίτοι tôt νέννοι.
Poekilassos. — 53, funéraire métrique. |
Anopolis. — 64, gén. en v pour ov : ᾿Επίτονος Μαργύλυ.
Ile de Kaudos (Gozzo). — 71. Dédicace à Zeus Καύδιος (Ὁ)
Aptera. — Fac-simile d'une partie du texte pp. Haussoullier, BCH.. 1889,
429 : identification ἀ᾽ ᾿Αρίσταινος Δαμοχκάδηος ᾿Αχαιός avec [6 stratège achéen de
198-186.
Du centre de l'Île :
Lappa. — 4, décret de proxénie pour ᾿Αγαθόδουλος Ἰάσιος (ἢ).
Soulia. — 82, dédicace à ᾿Αθανᾶ Σαμωνία (du cap Salmonion ou Samonion, auj.
c. Sidero).
Phaestos. — 90, funéraire, avec l'interdiction habituelle : ἔπειτα μηθεὶς dviot (=
ἀνοίγοι). — P. 541, fac-simile de l’importante inscription métrique (temple de la
Grande Mère) pp. Halbherr, Museo Ital. IIL, 735.
Lasaea. — 92, remerciement à Isis.
Azxos. — 94, fragment du traité avec Nicomède, probablement Nicomède IT. —
95, très jolie épitaphe métrique d'une jeune fille morte à quinze ans.
Gortyne. — De Sanctis, Am. 7. ‘for arch. V, 319. Le startos dans les inscriptions
crétoises désignerait l'ensemble des cosmes d'une année.
Critsa. — Hiller v. Gaertringen, Hermes 452, garde dans l’épigramme publiée
BCH 1900, 241, le nom du dédicant Τίμων, et rend à Hermes son épithète de Κυλ-
λάνιε. Reste Κυφαρισσιφᾶ, dont il fait une nouvelle épithète du même dieu —
Κυπαρισσιφάνης : le nom s'expliquerait par un ancien ξόανον en bois de cyprès qui
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 95
aurait remplacé les arbres eux-mêmes, primitive résidence du dieu, comme objet
de cuite.
Dragoumis, BCH 1900, 524, lit dans le même texte τιμῶν, retrouve aussi l'invo-
cation au Κυλλάνιε, découvre dans Κύφαρις Σίφα le nom du dédicant et celui de son
père, et restitue dans les derniers vers les offrandes que l'on consacrait au dieu
des voleurs : fnxiov (agneau), σταίς (pâte de farine), βρυτίς (tisane d'orge); il
semble que la restitution Bpuyis, indiquée en note, s'accorderait mieux avec les
restes conservés.
Hierapytna. — Deiters, Rh M. 587, complète, en établissant deux familles de
copies, la restitution des premières lignes de CIG 2555 : c'est un fragment de l'ac-
cord conclu entre les habitants de Hiérapytna envoyés comme colons à Praisos
après la prise de cette ville, et la mère-patrie (peu après 146). 11 faut lire dans le
serment Tfva Opétprov xal Tfva Διχταῖον.
Praisos. — Halbherr, Am. j. of arch. V, 311. Fragments divers.
Haghios Ilias etc., Helbherr, ib. 398. Fin d'une dédicace boustrophédon : ..Acover
104 καί Τιλον[.] ἀνεθεκαν δε [ε]πι χοσμίοντον Θαμυνδαίρι]ος τὸ Τηλεγνοτο καί Πανταν-
δριδα τὸ Νιχολαο. Οστις αποστεριδδοι τὸν τὸν ἐμᾶνιν μὲν αυὐτοι ταν) AGavztav.
Autres fragments archaïques.
PÉNINSULE BALKANIQUE
Macédoine. — Siatisia. — Papageorgiou, Berl. Ph. W. 699 : ᾿Αρτέμιδι M4 Ma
Μακεδόνος ἀπέδωχεν εὐχήν.
Id., ibid. 1666 : relief consacré à Apollon ἀπὸ προ[γραφῆς] ᾿Αλεξάνδρου ὑπὲρ υἱοῦ
Παρμενίωνος.
Thrace. — Traianopolis (Dedeagatch). — Seure, BCH 1900, 574 : la borne du
territoire continental des dieux de Samothrace, publiée par Pappageorgiou, Beri.
PW. 699, est la même qui avait été donnée BCH 1900, 447. — Elle ἃ été vue aussi
par G. F. Abbott, CLR. 84.
Pappageorgiu, ibid. — Base de M. Aurèle Antonin.
Selymbria. — Jahreshefte, 201. — F. v. Calice attribue Dumont-Homolle 62 c
10 à l’époque de Trajan.
Mossie. — Singidunum. — Jahreshefte, Beibl., 130. Fac-simile de CIL, III,
8. 13811.
Karadcha-Keui et Tchorlu (Dobrudja). — Schuchhardt, Jahrbuch, 114. Trois
textes du x° siècle : les murs de défense élevés par Anastase ont été restaurés
par Nicéphore Phocas, Basile II le Bulgaroctone et Constantin VIII.
Abob. — Ouspensky, Isviestiya, VI, 216, Époque bulgare : Κανὰς ὀδιγι Ὃμυο-
τὰγ ᾿Οχσουνὸς ὃ ζουπὰν cap χανὸς θρεπτὸς ἄνθρωπός μου τον κὲ ἀπέθανε ἰς τὸ φοσᾶτον,
ἦτον δὲ τὸ γένος αὐτού Κυριγήρ. |
Basch Bounar (près Bourgas).— Ibid. 444. Miliaire (?) bilingue d’Hadrien, 8%e
puissance tribunitienne, légat propréteur Otinfius Rufus. |
Nicopolis. Ib. 445. Dédicace de la ville (Ulpia Nicopolis) ἃ L. Ælius César.
᾿ Autre à Gordien sous le légat Ju... (martelé).
Mesembria. Ib. 446. Dédicace à Gordien. Inscr. byzantines de la métropole.
06 ÉMILE BOURGUET
RUSSIE
Scythie. — Olbia. — Jahreshefte, Beibl., 51. — Ἐς v. Stern et Karabacek
reprennent l'épigramme sur Anaxagoras (cf. Bullelin précédent, p. 85) et compa-
rent les résultats obtenus par les tireurs d’arc (colonnes de l'Okmeïdan à Constan-
tinople).
Pays des Sauromates. — Région du Kouban. — Anzeiger, 56. Coupe (v° 5.
trouvée dans un tumulus : ἀπολλωνος ἡγεμόνος εἰμι vou Φασι, 1] ne faut pas,
d'après Kieseritzky, voir ici le fleuve et la ville de Colchide ; mais le Kouban se
serait aussi appelé Phasis, cf. Esch., Prom. dél., fg. 185 Nauck.
ASIE-MINEURE
Troisième série des études d'I. Lévy sur la vie municipale en Asie-Mineure
(Antonins) : archives, finances, monnaies, édilité, gymnasiarchie. REG, 350-371.
Villefosse, Bull. soc. antiqg., 1901, 233. DE polyédrique portant sur chaque face
une lettre de l'alphabet (1).
R. A. I, 328. Cagnat et Besnier transcrivent trois textes publiés par Pridik,
Journal du Minist. Instr. publ. (russe), 1900, et un autre donné par Cumont (Rap-
port sur une mission en Asie-Mineure, Bruxelles, 1900).
Pont. — REG, 138-141. Cumont : distinction des trois Pontarques ; identifica-
tion avec ἀρχιερεὺς Πόντον.
Sinope. — Yerakis, R. él. anc., 352. — Cinq marques sur des anses de vases, avec
le nom de l'éstuvouüv. — Funéraire de C. Licinnius Frugi, προξενητής. — 8. Un
œpovtiothc? — 10. Liste de noms propres : il faut lire 1. 5 (Μ)ῆτρι[ς Κ] αλλ[ι]χρά-
tous et restituer sans doute [Καλλιχράτει)] Μήτριος Σινωπεῖ dans le décret de Del-
phes, BCH, 1882, 225, où le patronymique a été rétabli par Wilhelm, AEMO,
1897, 13.— 16. Honorifique pour un Claudius Ποτε.... qui avait organisé une chasse
(κυνηγέσιον).
Paphlagonie. — Vezir-Keupru. — Cumont, REG., 26-45.
“Serment de fidélité exigé par Auguste des habitants de la Paphlegonie, avec
les formules ordinaires d'imprécation contre ceux qui violeraient le serment. —
Identification définitive de Vezir-Keupru avec Phazimon-Neapolis-Neoclaudiopo-
lis -Andrapa; fixation des limites du territoire, carte p. 34; l'ère de la province
date bien de l'annexion, 6 avant J.-C. : 3 ans après, presque toutes les villes de
la Paphlagonie ont un Augusteum où l'on jure devant l'autel du nouveau dieu;
le serment lui-même paraît être un héritage des monarchies militaires hellénis-
tiques. |
Galatie. — Ancyre. — Mommsen, Sitzungsb. Berl. 24 : honorifique de la
VIle tribu, Παχαλινή, pour C. Julius Severus, déjà connu : CIG, 4033, 4034 où il
faut lire Γ. 1. — Dernières années de Trajan. Énumération des nobles parentés
de Severus (rois, tétrarques et consuls), de tous ses honneurs et de ses charges :
ποῶτος “Ελλήνων = ἐλλαδάρχης, ἀρχιερεὺς τοῦ χοινοῦ τῶν Γαλατῶν, σεθαστοφάντης.
ἢ fit accueil aux troupes allant combattre les Parthes. C'est le Severus qui entra
(1) J'ai vu un pelit monument analogue à Thèbes d'Égypte (T. R.).
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 97
au Sénat sous Hadrien et devint proconsul d'Asie : ce n'est pas lui dont parle
Ælius Aristide. Le consul de 155 (CIG, 4029) était sans doute son fils.
Cappadoce. — Ramsay, R. éf. anc., 219. Sidamaria (ville nouvelle). Dédicace
d'un bain, C. Bruttius Praesens étant gouverneur de Cappadoce.
Bithynie. — Nicomédie. — Syllogos de Constantinople, 1900, p. 288 (d'après
Cagnat-Besnier, RA, II, 144). — Remerciements de deux soldats oxreipre ἔχτυης
ἱππιχῆῇς à un ἐπιμελντὴς χτηνῶν Καίσαρος.
Mendel, ΒΟΗ͂, 1900, p. 361-426.
Brousse. — 2, remerciement des mystes à L. Julius Frugi, et à Sérapis et
Isis : les δεχατισταί sont ceux qui perçoivent les cotisations. — ὁ, un soldat de
la sixième cohorte équestre. — 7, 9, épitaphes métriques de deux enfants et d'un
guerrier nommé Myron.
Filadar. — 12, jurisprudens = νομιχός.
Kios. — 23, phylarque de la tribu Héraciéotis.
Bazar-keui. — 27, intéressante épitaphe métrique, en deux pièces de huit vers
chacune, de Ménas le Bithynien, mort à Coroupédion (fixe l'emplacement de cette
plaine célébre).
leni-keui. — 33, Zeus Astrapaios ; honneur à un Exôtxoc.
Keremed. — 41, 49 année de Dioclétien. Maximien (288), honneur au fils d'un
bithyniarque : ἃ remarquer ὡρολογιάζρχη,ς], βουδό[της}, οἰνοποσιάρχτς, le προθύτης
à côté du γραμματεὺς τοῦ δήμου. |
Nicée. — &4, ex-voto à Zeus Lidaios. — Parmi les funéraires 72, datée de 62.
Goel-bazar. — 18, honorifique, entre 102 et 114.
Atjilar. — 90-91, dédicace métrique d'un aigle à Zeus ἀρχάγαθος ravuréptatos ;
énumération des titres du dédicant, ἐνποριάρχτ,ς, οἰνοποσίαρχης, etc.
Bayat. — 96, dédicace à la Mère des Dieux.
Déré-keui. — 101, Apollon Κρελληνός (2). — 103, 106, 107, Zeus Bronton. —
Hammalar. — 112, un λογχονόμος ἢ celui qui répartit le produit des offrandes
(λόγχτν, " μερίς Hesych.). — 114, un πράγματιχός. — 117, dédicace métrique à Zeus.
Keur-oglou-devr'end. — 140, funéraire : don aux Δαδοχωμῆται pour le ῥοδισμός.
Tchoukour-keut. — 141, base de Septime-Sévère, 210-211.
Mendel, BCH 1901, 5-92.
Hadrianopolis. — 144, Dédicace des Katoapeïs Προσειλτμμενεῖται au Θεὸς Νερούας.
— 145, Septime Sévère. — 146, Constance. — 147, C. Julius Scapula, légat en
138.
148. — Antonin, par un irénarque. — 154, 157, 158, funéraires métriques.
Samaïl. — 160. Épitaphe en vers de la Romaine Thémis. — 161, Zeus Κιμισ-
τηνός, — 163, Θεὸς ὕψιστος, — 165, 166, funéraires métriques. — 167, Zeus ἐπή-
χοῦς.
Bartin (Παρθενία). ---- 171. milliaire de la route d'Amastris : Septime Sévère,
Caracalla et Géta : propréteur Q. Tineius Sacerdos. — 118, Ait μεγάλῳ Σδαλείτῃ.
— 184, 0 olxos ὃ τῶν ναυκληρῶν. — 189, milliaire latin avec chiffre des milles en
grec.
Héraclée du Pont. — 192, dédicace d'une exèdre sous Marc Aurèle. — 193, un
décaprote.
. Akiché-chéir (Dia). — 196, M. Aurelius Chrysenion Damatrios, pontarque et
7
98 ÉMILE BOURGUET
bithyniarque, ἐπιστάτης τῆς πόλεως (Dia), s'est occupé de l'éurôprov. — 197, épi-
taphe d’un habitant de Prusias ad Hÿpium. — 198, agonothète, archonte (ἄρξας
τὴν μεγίστην ἀρχήν), agoranome et τειμητήῆς.
208. — Remerciement à la θεὰ ἴλνγιστις (Cybèle) au nom d'une σύνοδος. --- 205,
legio I et II Parthica.
Prusias ad Hypium. — 206, Sévère Alexandre, — 207-213, Inscriptions en
l'honneur d'archontes par les phylarques. Quelques titres intéressants, σεδαστό-
Yruwatos, αἰτήσας τὴν πορφύραν χαὶ λαθών, ταμίας val λογιστὴς, τῶν σειτων: κῶν
χρημάτων. L'expression ἐχ τῆς ὁμονοίας, dans les textes de ce genre, signifie quil
Υ a eu entente, accord entre les deux collèges municipaux, archontes et phylar-
ques. — 214, cohors VI Lusitanorum. — 215, ala 1 Thracum Herculania; Παιονία
au lieu de Havwvovia; leg. XVI Flavia Firma. — 219, la femme d'un ἀργυροκόπος.
— 223, δουχινάριος. | |
Beiouk-Dervend. — 230, sarcophage d'un ancien fonctionnaire du palais,
πα]λατίνων.
Nicée et environs. — Koulakovsky, Zzvestiya, VI, 208. Inscriptions funéraires.
(Au n° 7, ne faut-il pas restituer X]MT? et de même au n° 9). Remarquer la
désignation répétée du tombeau par le nom de σχαφή (7, 12) comme dans CiG.
3151. No 14. Épitaphe métrique de Διλίπορις ᾿Άπφου (dans la transcription, le mot
ζῶν a été omis) : ἐννεὰ γράμματ᾽ ἔχω, τετρασύλλαδος εἰμὶ νοιεῖσθαι — αἵ τρεῖς αἱ
πρῶται δύο γράμματ᾽ ἔχουσιν ἐχάστη — ἢ λοίσθη τε τὰ τρεῖα, καὶ εἰσιν ἄφωνα τὰ πέντε.
- ἔστιν ἀριθμὸς πενθεχατοντάχις ἡδὲ δὶς ἑπτά (514). 15. Un γερουσιαστής.
Troade. — Skepsis. — Kôhler, Sitzungsb. Berl. 1057. La lettre d’Antigone à
la ville de Skepsis (Munro, JHS 1899, 330) est une note diplomatique, destinée à
faire croire aux Grecs qu'Antigone n'a agi que dans leur intérêt. Par les condi-
tions pénibles que Cassandre posait aux négociations de 341, il faut entendre
qu'il demandait à être reconnu comme maître de 18 Macédoine jusqu’à la majo-
rité de l'héritier du trône. Les vraies raisons pour lesquelles Ptolémée a été
admis à ces négociations ne sont pas celles qu'Antigone indique. On fait jurer
aux villes grecques le serment par lequel leur liberté a été garantie : c’est une
manière pour Antigone de se déclarer leur protecteur. Dans leur réponse, les
Scepsiens laissent éclater leur reconnaissance : c'est le plus ancien exemple d'un
diadoque recevant les honneurs divins dans une cité grecque.
Dittenberger, Hermes 450, propose de lire dans ce même texte, 1. 22 πρὸς (ἃ)
ἔπεμψαν (Cassandre et Lysimaque) Πρεπέλαον αὐτοκράτορα, ce qui rend la phrase
intelligible ct vraisemblable.
J. À. R. Munro, JHS 235, fin de décret : on doit verser à des époques mar-
quées certaines χαταδολαί, sinon ἀνχπωλήσει ὁ ταμίας..... — 236, ἱερεὺς τοῦ Διὸς
«τοῦ Ἰδαίου.
Mysie. — Deux textes; Contoléon REG, 295.
Hadrianeia. = Munro, JHS, 229 : l'identification avec la ville actuelle de Balat
est confirmée.
Pergame. — Foucart, RPh. 87, propose une restitution nouvelle pour l’inscr.
Perg. 268 et pour Le Bas Wadd. 1721 b; il voit dans la première une allusion à
la fondation des jeux en l’honneur de Q. Mucius Scévola (cf. Olympie).
Cyzique. — Wiegand, AM. 121; liste de prytanes, du type déjà connu : époque
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 99
d'Hadrien. L'identification proposée par Bœæckh de l'äpyuv et du καλλιάρχων
(ἄρχων τοῦ xaXAlov) est prouvée. Deux tribus encore ici exercent ensemble la
prytanie : ce sont les Σεδαστεῖς et les Ἰουλεῖς, qui contiennent sans doute les
Citoyens romains. |
Wachsmuth, RhM. 149, revient sur le décret de la province d'Asie, publié en
dernier lieu par Munro JHS, 1897, 216. 11 faut lire 1. 3-4 οἱ εἰρημένοι (= ἡρημένοι)
μεφέχειν... et le personnage honoré est sans doute le Hérostratos ami de Brutus.
Eolide. — Pitfané et Nouv. Phocée. — Quelques fragments: Contoléon REG,
295-6. |
Ionie. — Mugnésie du Méandre. — Holleaux, R. ét. anc., 119-130. — Corrections
ὁ ljpublicetion de Kern; je n'en peux signaler ici que quelques-unes : 15 b (τὰ
Fäpaxakoüpeva ἐπαχούσει); 61 (χρείας ... τῶν πρὸς δόξαν ἀνηκουσῶν) ; 62 (πιστεύομαι
περί....}; 80 (τὰ διατείνοντα πρός...); 83 (Apollonis, veuve d'Attale I); 103 (τὸ ψήφισμα
ἀναδόντες). |
Wilhelm, Jahreshefte, Beibl., 21-36. — Corrections à 18 publication de Kern :
il fut noter quelques restitutions. 14. W. découvre dans ces débris une loi sur
la haute trahison, sur les attaques à la majesté des personnes royales et de leur
entourage. — 50 ἢ παράστασις τῶν δη[μοσίων) sc. ἱερείων. — 90 διόρθωμα (κατὰ τὸ)
μετά[πεμπτος δι]καστίς, — 119 βαίτη, comme ἃ Mantinée. — 273 νε]ανισχάρχου. —
Quelques lectures « redressées » : ἈΞΙΟΥ͂ΣΙΝ au lieu de APMOTEIN, ΑΥ̓ΞΕΙΝ au
lieu de A:NEEAI, KAÏAAIA au lieu de KATANA.
Kern, Hermes 491-515, recueille dans les inscriptions publiées par lui les élé-
ments d'une étude sur la fête des Leukophryena.
Erythrées. — Weber, AM, 117. À, 3, 4, honorifiques. — 2, πομπαγωγήσας. —
6, 1, 8, funéraires.
Smyrne. — Route de Sardes : 8° mille. — Borne milliaire, Fontrier R. ét.
anc. 349.
Quelques textes d'Éphèse et de Smyrne; Contoléon, REG, 991,
Clazomènes. — Wilhelm, Ac. Vienne, Anzeiger 10 juillet 1904, pense que CIG,
3184 doit venir de Clazomènes : en tout cas, il n'est nullement question de
Smyrne. L'épyalx πόλις 1. 17 ne peut être que Colophon (cf, Inscr. Magné-
sie, 53). ᾿ ι
Milet. --- Wiegand, Sitzungsb. Berl. 905. Nouveau fragm. de la décision de
Strouses sur la querelle de frontières entre Milet et Myus. — “Base de marbre :
statue élevée par les Milésiens à Lichas, fils d'Hermophantos, vers 200 avant J.-C.
Belle épigramme de six distiques : cf. Anzeiger, 196. Le bâtiment en forme de
théâtre, à l'entrée duquel était la statue, y est indiqué comme bouleuterion. La
même base a servi (2° moitié du Ier s. avant J.-C.) pour la statue du consul
L. Domitids Cn. f. Ahenobarbus. — 908. Le proconsul L. Egnatius Victor Lol-
lianus. — 910. Restes d'une prescription potr des sacrifices, vie 5. βουστροφγηδόν !
OjéAne πλακχ[οῦντα....» βὅν φερε...... — 911 ‘Amendement à un décret sur les γέρεα
de la prêtresse d'Artemis : si quelqu'un ne les donne pas, ἐχγραφέξω αὐτὸν πρὸς
τοὺς πράκτορας ὃ κύριος τῆς ἱέρης ἐπαγγείλας ὀφείλοντα τὴν ζημίην τὴν γεγραμμένην
(commenc. du τνὸ s. avant J.-C.).
Haussoullier, RPh. 338, rapproche du texte en l'honneur de Lichas, Milésien
(Sitzungsb. Berl. 905), l'inser. Michel 480 ; et complète CIA IT, 442, 1: 20 : Λήχαντος,
100 ÉMILE BOURGLET
Didymes. — Holleaux, REG, 92 : restitutions et traduction nouvelles pour les
26 premières lignes du décret RPh 1900, 243.
Haussoullier, RPh., 6 : titres d'une hydrophore d'Artémis Pythienne, descen-
dante d'Hippomachos, le Milésien qui obtint l'intervention d’Antiochus II contre
le tyran Timarchos. — *“P. 9-10 : acte de vente (253 avant J.-C.), un lot du domaine
royal près de Zéleia (Troade) est vendu par Antiochus II à Laodice (la reine).
Ilion, Sardes, Samothrace, Milet et Éphèse appartiennent alors au royaume de
Syrie. Arrhidaeos (1. 20) ὃ οἰκονομῶν τὰ Λαοδίχης est retrouvé par H. dans un texte
d'Éphèse (Gr.inscr. Brit. M., 451). Les satrapes et les ὕπαρχοι; condition des
terres cédées et des λαοί qui y habitent; limites du territoire vendu à Laodice,
emplacement de Baris (cf. B. Καὶ], note sur Baris RPh, 123); importance du domaine
royal en Troade.
Haussoullier, RPh., 126, Lettre de Séleucus [1 à la ville de Milet, qui lui avait
envoyé en hommage, sans doute à son avènement, une couronne sacrée cueillic
dans l'adyton de Didymes. — Avec l'aide de deux inscriptions de Smyrne et de
Delphes, H. trace un nouvel exposé des premières années de Séleucus II, jusqu'à
la conquête de l’Ionie par Ptolémée III.
Tralles. — ΑΜ. 231-240. — 1. Honorifique. — 3. Julius Philippos agonothète,
CI. Méliton ἀλυταρχῶν. — 4. Prêtre de Zeug Λαράσιος. — Les textes publiés par
Contoléon REG., 303 étaient déjà connus.
Carie. — Alabanda. — ‘E?. &py.,147, Wilhelm rend à Alabanda le décret CIG.,
-2152 ὁ que Bœckh avait cru d'Alexandrie, et un autre, tout semblable, dont un
exemplaire assez incomplet a été retrouvé à Chalcis (Ἐφ. &px., 1901, 89). Noter
dans celui-ci l'ingénieuse restitution ἐπληρ[ώθη), c'est-à-dire ἐδόθη τὰ χρήματα ct
les exemples qui prouvent que le mot avait déjà ce sens à l'époque impériale.
Cousin, BCH., 1900, 329-347, achève la publication commencée dans ce recueil
en 1898.
P. 337. Tchaltillar, épitaphe d’un Οἰνοανδεύς qui paraît avoir fait partie de l'ad-
ministration des finances impériales χαθολ[ικῶν] κυριακῶν, a rationalibus. --- Ρ. 339.
Statue de bronze à Aurelia Polycleia (cf. p.344) pour ses largesses, lors des ἀγῶνες
(un θυμελικός et un γυμνικός), qu'elle a institués, mention des σεδαστοφόροι. —
Pp. 344 et 345, bases d'Aur. Onesiphoros et d'Aur. Onésimion, vainqueurs aux
jeux.
Peppmüller, Berl. Ph. W., 1149, dans l'inscription métrique de Stratonicée,
BCH. 1891, 430, défend xaudrov au v. 9. |
Iles Cariennes. — Cos. — Herzog, Anzeiger, 135 : ....wvos ... [δήμ]ητρι, base
d'offrande dans un sanctuaire {peut-être le Δαμάτριον ἐν Σιτέαι, Syll.3 618).
Halasarna. — Herzog, Sitzungsb. Berl., 413. Honorifique pour Diocles (Paton-
Hicks, 10 et 45) qui ἃ repoussé une attaque, peut-être des Crétois de Hiérapytna
en 201-200, et fait un emploi libéral de ses richesses (surtout envers le sanctuaire
d’Apollon). — 418, honorifique : le dème d'Halasarna notifie officiellement son
décret à la πόλις (προστάται, βουλά, ἐκκλησία). — 481. Liste chronologique des
offrandes données à Hecate Stratia par le prêtre d'Apollon et les six hiéropes
pendant leur année de charge. — 483. Liste de prêtres, de 30 av. J.-C. à 103 ap. ;
le décret qui ordonne la gravure de cette stèle est daté par le nom du monarque de
Cos Regillus (18 ap. J.-C.). Le δᾶμος est inscrit deux fois comme prêtre, et le dieu
-
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 101
6 ᾿Απόλλων trois fois. Le bâton aux serpents gravé à côté de certains noms de
prêtres indique que ces années-là eurent lieu les ’Acxharia. — 493. Base de Dru-
silla, sœur de Caligula. — 494. Philion, le même qui a élevé une statue à Hérode
Antipas (Paton-Hicks, 75). |
P. Stengel, Hermes, 328 (cf. 615) : sur le mot Evôopx --ἐ σπλάγχνα dans les ins-
criptions de Kos, et sur l'expression τῷ θεῷ διδόναι ou παρέχειν.
Rhodes. — Hiller v. Gaertringen, Hermes, 440. Base de statue, avec la signa-
ture de Phanias Rhodien (nouveau); sur la inême base, statue d'un phylarque qui
a été chorège et triéraque. — Un Ποντωρεύς prêtre d’Athéna Polias et de Zeus
Polieus.
Jahreshefte, 459. Hiller v. Gaertringen, Inscription honorifique, rer 5, av. J.-C. —
Le renouvellement du conseil tous les six mois est prouvé : semestre d'été et
semestre d'hiver. — Aux associations religieuses d'équipages de navires, il faut
ajouter les Παναθηναισταί de 1" Εὐανδοία. — 2. Funéraire : un γραματεὺς δάμοσιος, un
ou deux ὑπηρέται, et la femme de l’un d'eux, métèque de Cyzique. — 3. (D'après
les papiers du Suédois Hedenborg), partie de la base d'une statue pour Anaxibios
fils de Pheidianax, honoré à Délos, qui paraît l'avoir adopté, ὑοθετήσαν[τος
αὐτόν ?]. .
Clermont-Ganneau, Recueil, IV, 240. Anses d'amphores, rhodiennes recueillies en
Palestine.
Lydie. — Quelques textes d'Hypaepa, Koula, Magnésie du Sipyle et Thyatire;
Contoléon, REG, 300.
Thyatire. — Fontrier-Fournier, R. ét. anc., 265-268. Honorifique pour Julius
Nicomachos, énumération de toutes ses charges. — 3. Athenades vainqueur aux
“Ρωμαῖα d'Éphèse.
Phrygie. — Un texte; Contoléon REG, 305.
Ramsay, R. ét anc., 212-216. — Environs d’Akmonia : lecture plus complète de
l'inscr. juive {Cities and Bish., n. 559) : archontes et chefs de la synagogue. —
Testament de J. Praxias instituant un culte (roselia) en son honneur : le décret
vaudra aussi longtemps que durera l'empire romain; mention de Zeus Στοῦμη-
νός (ἢ). — Honorifiques de L. Egnatius Quartus, officier, et de L. Claudius Julia-
nus, agoranome. — P. 276, σπείρα — association religieuse.
Gordion. — Fragments d'une coupe avec la double signature d'Ergotimos et de
Klitias, Anzeiger 10.
Pisidie. — Pogla.— Rostowzew, Jahreshefte, Beibl. 31. Inscription honorifique
pour un personnage qui a été peut-être conducior du domaine impérial à Pogla.
Remarques sur la constitution : d'une simple cominunauté (ἔτη xotvuvlas), les
réunions de colons sont devenues des villes (ἔτη πολιτείας); distinction des
citoyens en éxxAnotastal et en simple πολεῖται.
CYPRE
CL. Ganneau, Recueil, IV, 224 commente l'épithète ᾿Απόλλων Maysiptos connue
par les inscriptions. Athénée XIV, 658 rapporte que Cadmus aurait servi comme
cuisinier chez un roi phénicien.
Michon, Bull: soc: ἀπίΐᾳ. 1901, p. 185. Inscription provenant de Lapethos,
102 ÉMILE BOURGUET
récemment offerte au Louvre : c'est le psaume XV (cf. Perdrizet, BCH, 1896,
p. 349). À ce propos, M. Michon étudie les inscriptions reproduisant des passages
de l'Ecriture.
SYRIE
Antioche. — Fœrster, Jahkrbuch 55. Rupestre, très basse époque : ὅροι (ὄρος ?)
᾿Αναστασίου Παλλαδίου.
Serdjilla. — W. K. Prentice, RA I, 69. — Six hexamètres incorrects au
milieu d'un pavé de mosaïque en l'honneur de Julianus, donateur. — Après le
v. 4 est insérée la date de l'achèvement du λουτρόν, 184 de l'ère des Séleucides,
473 ap. J.-C.
Liban. — Perdriset, Bull. Soc. Antiq., 1901, 110. — Dédicace d'un A. Γάϊος Σόλων»
πατὴρ χοινοῦ τῆς tptaxé6oç (== l'impôt du trentième ?). À rapprocher de CIL, II,
supp. n° 6671 (commune tricensimae).
Phénicie. — Qala αἱ Fagra. — P. Ronzevalle, Ac IBL, CR 481 : Διὶ Ἡλιοπολίτῃ
παρὰ Ἑρμοῦ.
Tyr. — Villefosse, Bull. soc. antig., 1901, p. 228 et 323. Τ, Φουριωι Ονυικτωρεινωι |
ἐπαάαρχωι Αἰγύπτου ἐπαρχωι πραιτωριου (tué en,167) Φορτουνατος Σεδαστίου)] απελ
αρχιταὄδλαριος Αἰγυπτου καὶ ἐπιτοῦπος προσόδων Αλεξα[νδρειας]. On ne savait pas que
Furius Victorinus eût été préfet de l'Égypte. Le titre d'architabularius Ægypti
paraît nouveau.
Héliopolis. — Dussaud-Macler, Voyage archéol. au Safd, p. 211. Dédicace de la
κώμη Χάμων à Mercure, Msprouoiw δωμίνῳ : 484 de l'ère des Séleucides. Mention du
prêtre, des ἱεροταμίαι, du secrétaire et de l'architecte. (D'après Perdrizet, R. ἐξ. anc.,
264). |
Puchstein, Jahrbuch. 152. Sur un fragm. de caisson du temple de Jupiter, une
figure ailée avec l'inscription : ...ovvæpoc ὃ καὶ Βριάρης. — 157, épigramme (expli-
quée par Diels) sur un δλχός (canal), Μουσῶν τείχισμα φυλάσσων, autour du temple
rond : 742 de Père des Séleucides, 430 ap. J.-C. Lupus, décaprote d'Hékopolis, en
fit les frais.
PALESTINE
Beersheba. Clermont-Ganneau; Pal. quart. 1901, 122. Epitaphe de Silvanus,
homonyme du fondateur du monastère de Gerar.
Macalister, ib. 4902, 236 et CI. Ganneau, ib. 270 et 385. Fragment d'un édit impé-
rial (?) donnant les chiffres de νομίσματα) imposés (?) à divers fonctionnaires et
diverses localités. C'est peut-être un édit relatif à la répartition de l'annona mili-
taire (cf. un rescrit de Théodore II au Code Théodosien).
Naplouse. Macalister, Pal. quart. 1902, 240. Épitaphe de Doxadia.
Gaza. Schumacher Millh. Pal. Vereins,1901, 12. Dans la mosquée el Kebir funé-
raire avec chandelier à 7 bras : (héb.) Η (8) (8) y(a)h b(a)ry(a)hq(o)b ANA-
NIA YIQ IAKQ(B).
Émèse etc. Lammens, Musée belge, V, 253. 65 petits textes presque tous funé-
raires (le n° 41 paraît juif). |
Eleuthéropolis. — Clermont-Ganneau, Ac. IBL, CR 109 (— Pal. quart., 1901,
116 ; Recueil, IV, 237), Σιμὴ καλὴ δοχεῖ ἔμοι ’Avxateiôn:, acclamation amoureuse
BULLETIN ÉPIGRAPHIQUE 103
qui remonte peut-être au μ19 8. av. J.-C. (cf. Macalister, Pal. quart., 1901, 14,
fac similé). |
Clermont-Ganneau, ibid., 410. Deux anses d'amphores rhodiennes trouvées en
Palestine — Pal. quart., 1901, 114, CI. Macalister, Pal. quart., 1901, 25 et 124 qui
en publie 307!
CI. Ganneau, Rev. biblique, X, 88 (— Pal. quart., 1901, 54; Recueil IV, 152).
Dédicace à la reine Arsinoé (cf. notre précédent Bullelin, p. 93).
Jérusalem. — Ciermont-Ganneau, Ac. IBL, CR, 225. Θεοδοσία et γεωργία sur
une mosaïque byzantine d'Orphée = biens de la terre dus à Dieu. Cf. aussi Revue
biblique, X, 439 et Strzygowski, Z. Pal. Vereins, 1901, p. 139.
Nécropole du Mont des Oliviers. — Vincent, Revue biblique,, X, 83. Graffites
divers, d'après CI. Ganneau, Archacological Researches, [, 349 suiv. Cf. Macalis-
ter, Pal. quart., 1901, 22.
Route de Jérusalem à Naplouse. — Rev. biblique, X, 96. Milliaire romain au
nom de Néron et de Trajan.
Beit Sourik (2 1/4 heures au N. O. de Jérusalem). — Rev. biblique, X, 445.
Mosaïque avec une inscr. chrétienne mutilée : + ext tou [...ext] pavous Ἰαχω[όου.
Macalister, Pal. quart., 1902, 243. Épitaphe d'Arontius (sic).
TRANSJORDANIE
Medaba. — Clermont-Ganneau. Pal. quart., 1904, 235. Notes sur la mosaïque
de Medaba (— Recueil, 1V, 272).
Haouran. — G. À. Smith, Pal. quart., 1901, 340. Qutre un curieux cartouche
de Séti 195, l’auteur a copié quelques inscriptions grecques fragmentaires notam-
ment, p. 354, une dédicace à Titus (?), une autre pour Antonin le Pieux, à la
κυρία Artémis (Cl.-Ganneau), un texte bizarre d'un soldat congédié (p. 361). Ces
textes ont été très heureusement amendés par Ci.-Ganneau, ib., 1902, p. 24 suiv.
Le même auteur, dans Recueil, IV, 159, commente les inscriptions recueillies par
Schumacher et Seltin ; ib., 1V, 364, il ratifie diverses lectures de Waddington.
Gerasa. — Cl.-Ganneau, Pal. quart., 1902, 15 et 135. Dédicace (déjà plusieurs
fois publiée) à Zeus ἅγιος Βεελχωσωρος (?) et à Hélios.
Schumacher et Rohrer, Mifth. Pal. Vereins, 1901, 17 suiv. N° ὅ (Gerasa). Tr.
métrique. N° 7 (au N. de Gerasa), ὑπὴρ τῆς τῶν σεδαστῶν σωτηρίας... ρετεννια ἔχατον-
τάρχης ἐπανελθ[ὼν) érméerionv ναὸν Διὸς ἐπιχαρπίου. [Μοι]ραγένης Μόλπωνος ὁ αὐτοῦ
πατὴρ 4p….
Janssen et Vincent, Revue biblique, X, ὅ10. Petits textes provenant du Hauran,
de Djolan, de l'Hermon, de la Damascène et de diverses villes du littoral. On
notera les nos 4 (édifice bäti par la femime d’un σχολαστιχός), 10 (noms nouveaux
Ourpsa et Zsnpac), 16 (βεερ..ς καὶ Αἰχνὴς uiot Avivou Σαλχμαίου TOUS κιονας εχ των
ἰδιων avsbnxav), 20 (métrique), 24 (épitaphes de Joppé).
L'épitaphe de Gaza a été étudiée par Cl.-Ganneau, Pal. quart., 1902, 131.
Arabie. — Chapot, BCH, 1900, 571.
Route de Philadelphia vers le N. — Neuvième milliaire, Ἰουλιανὸς ἐνίχτσεν
εὐτυχῶς τῷ χόσμῳ. M. 8,
Haouran. -- Funéraire Zuol6:a φιλόφιλε χαῖρε : datée de 321 (ère de Bostra) =
421 ap. J.-C.
104 ÉMILE BOURGUET
Naoua. — Dédicace de l'äbis τοῦ ἡἐμισφερίου, mur en demi-cercle qui délimitait
le chœur (?) : vies.
BABYLONE
BHaussoullier, RPh., 40, défend l'origine babylonienne du texte publié par Kôh-
ler, Sitzungsb. Berl., 1900, 4100; le date exactement de 166 av. J.-C., et propose
d'y voir la mention d'un concours ajouté par Philippos aux Χαριστήρια.
ÉGYPTE
S. de Ricci republie en fac-similé KR. AÀ., I, 304, le texte donné par Willrich
(Archiv Papyrusf., 1900, 48) et T. Reinach (R. Εἰ. juives, 1900, 50). — Ibid. , 301-
308, sur quelques textes donnés par Strack daus l'Archiv; le n° 26 «a daté du
re s. ap. J.-C. d'après une inscription publiée par Sayce.
Musée du Caire. — J. ἃ. Milne, JHS, 275. — 1. Statue de Πολιεὺς Σάρατις (épo-
que de Commode) élevée par un gymnasiarque de Xoïs. — 5. Dédicace à Hermes-
Heracles (80-69 av. J.-C.) : les deux dieux rapprochés de deux dieux lunaires
égyptiens et fondus ensemble. — 6. Tout une lignée d'agonothètes-gymnasiarques.
ἀπὸ τῆς ἱεοᾶς θυμελικῆς καὶ ξυστιχῆς συνόδου. — 7. Dédicace de deux médecins à
Héra. — 10. Quatre épigrammes sur les quatre faces d'un cippe orné de reliefs
qui représentent des dieux grecs et, au-dessous, des dieux égyptiens. Plusieurs
vers sont des citations des poèmes homériques. — 11. Dédicace à Apollon ‘V'Aétrs,
Artémis Φωσφόρος et ’Evoôia, Leto Edtexvoc et Heracles Kallinicos.
F. v. Bissing, Anzeiger, 199. Quelques textes gravés sur des stèles funéraires
ou des statues : n. 11, fac-similé de l'inscr. J. des Sav., 1819, 470; ἢ. 21, signature
d’’Appuwvioç ᾿Απολλοφάνου (= BCH, XX, 249).
Karnak. — H. Weil, Ac. IBL, CR 201. — Un certain Niger, marbrier (Ὁ), remercie
les dieux de l'avoir aidé dans son ouvrage. :
Kôm-Ouessim. — Grenfell-Hunt-Hogarth, Fayum towns, 1900, p. 33-34 :
3 textes : Néron, Vespasien, Commode (d'après Cagnat-Besnier, ΒΑ, II, 151).
Montpellier. Émile Bourouer.
BULLETIN PAPYROLOGIQUE"‘"
(Suite et fin)
PAPYRUS DE BERLIN.
W. Schubart, Neue Bruchstücke der Sappho und des Alkaios dans Silzungsber.
Akad. Berl. 1902, pp. 195-209 avec une planche en phototypie.
M. Schubart a eu la rare bonne fortune de découvrir, dans les collections du
musée de Berlin, un long fragment d'un ms. de Sappho. C'est un morceau de
parchemin (P. 1922) acheté en 1896 et contenant les restes de trois colonnes en
onciale penchée du vie ou du vu* siècle : en tout une soixantaine de lignes, bien
wnutilées, mais qui nous conservent deux jolis fragments de deux poëmes de Sap-
pho; l'identification est certaine, car trois vers cités par Athénée se retrouvent
sur le parchemin de Berlin.
Dans le même articlé M. Schubart publie un papyrus de Berlin (P. 9569) du rer
ou du n° siècle de notre ère, également très mutilé, mais dans lequel il ἃ reconnu
le fragm. 23 (Bergk) d'Alcée avec scholies marginales.
On peut consulter sur ces deux textes :
Wochenschr. klass. Philol., XIX (1902), col. 110-111. d'après le Reichsanzeiger
C... Bruchstücke des Liederbuches der Sappho dans Beilage zur allgemeinen Zei-
tung 1902, 1, p. 319 (cf. ibid. p. 14 un article anonyme Neue Lieder der Sappho).
H. Jurenka. Die neuen Bruchstücke der Sappho und des Alkaios dans Zeitschrift
für die üslerr. Gymnasien, LIII (1902), pp. 289-298.
G. Fraccaroli. 1 nuovi frammenti di Saffo nei papiri berlinesi dans Bollelino di
filol. class., VIII (1901-1902).
T. R(einach). Nouveaux fragments de Sappho, dans Rev. des él. gr. XV (1902),
pp. 60-10.
F. Solmsen, Die Berliner Bruchslücke der Sappho, dans Rh. Mus., LVII (1902),
pp. 328-336.
F.Blass. Die Berliner Fragmente der Sappho dans Hermes, XXXVII (1902), pp. 455-
419, collationné avec Schubart sur l'original.
S. Nicastro et L. Castiglioni. Nuovi frammenti di Sa/ffo, dans Atenee Roma
V (1902), col. 541-546.
- (1) Cf. Revue, XIV, 163-205; XV, 408-460;
406 8. DE RICCI
En 1900, M. Borchardt a acheté pour le musée de Berlin un fragment de papyrus
trouvé à Achmouneïn et que vient de publier M. Kroll avec une brillante restitu-
tion de M. Gercke.
G. Kroll. Analecta graeca : Wissenschaftliche Beilage zum Vorlesungsverzeich-
niss der Universiläl Greifswald. Ostern 1901 (Greifswald, 1901, 8°), pp. 3-6 et 15-16
C'est un fragment portant au recto les restes d'une quinzaine de lignes très
mutilées (1γ9 s. apr.) où MM. Kroll et Gercke ont reconnu le début d'une cosmo-
gonie en vers, rappelant l'exorde des Métamorphoses d'Ovide.
Au verso restes d'un contrat (9).
Tout le monde regrettera que M. Kroill ait enterré ce texte curieux dans un
programme qui, chose incroyable, n'est pas compris dans le service des échanges
universitaires (1).
C. Kalbfleisch, Papyri graecae musei Brilannici et musei Berolinensis dans le
programme de Rostock, été 1902. [Rostock, 1902, 4°], pp. 14 et II planches.
M. Kalbfleisch, qui paraît décidément tenir à publier ses travaux dans d'introu-
vables dissertations, publie et commente dans cette brochure deux importants
fragments littéraires du musée de Berlin.
Pp. 8-9 et pl. I. Copies de l'auteur, de M. Kroll et de M. Schubart. Restes de
18 lignes d’une jolie onciale du premier siècle de notre ère. Le texte est médical
(Asclépiade) ? et concerne l’excrétion. Une bonne phototypie accompagne Île texte
et nous rappelle que M. Kalbfleisch ne publie jamais un papyrus sans en donner
le fac-simile : louable principe trop rarement suivi jusqu'à ces dernières années
par ses compatriotes.
Pp. 9-14. photogravure (P. 1094), πὸ s. apr. Fragment intéressant pour la métro-
logie et savamment commenté par M. Fr. Hultsch (pp. 11-14). Die Masse und
Gewichle des Berliner Papyrus 7094. Ce fragment porte au verso les restes des
30, 49 et 5e lettres d'Hippocrate. Sera réédité plus exactement par M. Kaiïbfleisch.
M. Kalbfleisch nous apprend que le papyrus 6934 du mÂme musée contient la
fin de la 5° lettre et le commencement de la 11° et qu'il publiera sous peu ces
curieux restes de la médecine antique. Compte rendu par C. O. Zuretti Bolletino
di filol. class. IX (1901-1903), p. 30.
M. Wilcken publie dans l'Archiv (1, 1901, pp. 388-395 : Ein Polybiuslext auf
Papyrus) deux fragments de papyrus récemment achetés par le musée de Berlin
(P. 9570). I1s contiennent des parties du XI< livre de Polybe en onciales du 119 ou du
ne siècle de notre ère. Malgré leur mutilation et leur faible étendue ils sont fort
intéressants pour la constitution du texte. Quoiqu'en deux passages le papyrus
contienne déjà le texte corrompu des mss. médiévaux, en huit autres passages
il confirme des émendations conjecturales dues à Scaliger, Ursinus, Casaubon,
Arcerius (et non Arcesius), Reiske et Schweighäuser, C'est ce que montre M. Wil-
cken dans une discussion savante des variantes des mss. et des éditions.
M. Kenyon, Aristotle *A6. πολ, XIE, 2 dans Classical review, XIV (1900), p. 413,
ἃ collationné sur l'original le fragment de 1᾿Αθηναίων πολιτεία que possède le musée
de Berlin; on doit y lire [πέν]τε et non [τέτταρ]ας. Nous avons quelques rensei-
gaements sur les papyrus littéraires inédits du musée de Berlin :
(1) Compte rendu par O. Apelt. Berl. philol. Wochenschr., XXI (1901), col. 1348-1349,
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 107
Fragment des Actes des apôtres (Orientalislische Lileraturzeilung, 1, 1898,
col. 94).
Fragment de la I[° épltre aux Thessaloniens, I, 1-11 (1ve-ve s.). Kenyon, Introduc-
tion, p. 38; Gregory, Teztkrilik, 1, p. vi, qui le désigne par les lettres Τὰ PAUL.
Fragment de quatre cents vers de Timothée en dialecte Dorien (1v° 5. av.?)
découvert en 1902 par Borchardt dans un tombeau à Abousir. Cf. O0. Rubensohn.
Arch. Anzeiger, XVH (1902), p. 48 d'après + le 4° Bericht de la Deutsche Orient
Gesellschaft, p. 5. Sera publié par Wilemowitz. [Cf. supra pp. 62-83].
Fragments nombreux d'un papyrus Copte contenant un texte théologique inédit
apparemment dogmatique ; achetés par M. Reinhard. Cf. Beilage zur Allgemeinen
Zeilung, 1902, IT, p. 16.
Papyrus 9780 (119 4. apr.). Recto : 15 colonnes de scholies de Didymos sur les
Philippiques de Démosthène. Verso : Ἠθιχῆς στοιχείωσις d'Hiéroklès en 7 colonnes.
Décrit sommairement par H. Diels, Sifzungsber. Berl. Akad., 1902, p. 333.
W... Eos VII (1901), pp. 133-134, analyse les fragments d'Hésiode publiés par
Wilamowitz. Cf. aussi W. Cronert. Archiv. 1 (1901), pp. 507-508.
ὟΝ. Schubert, Jahresber. Bursian CXI B (1901), pp. 28-35, rend à la mémoire de
Fritz Krebs un hommage éloquent et sympathique en exposant avec simplicité
les nombreux travaux scientifiques du jeune papyrologue.
H. Weil, La Ninopédie dans Études de litléralure et de rythmique grecque
(Paris, 1902, 16°), pp. 90-106, republie avec une traduction le fragment du roman
de Ninos que possède ie musée de Berlin (Haeberlin, n. 121).
W. Crônert, Archiv 1 (1901), pp. 517-518, analyse l'étude de M. Diels sur une
élégie de Posidippe (planchette de bois du musée de Berlin).
IL a été publé des comptes rendus du petit catalogue des papyrus d'Erman et
Krebs par W. Schubart, Juhresber. Bursian, CXI B (1901), p. 34; par L. Reinisch,
Deutsche Lilleraturzeilung XXII (1901), col. 3167-3168 et par + A. von Premers-
tein, Œsterreichisches Lileraturblult, 1900, p. 695.
M. W. Schubart a envoyé à M. Spiegelberg quelques renseignements sur un
papyrus inédit du musée de Berlin (n. 8549), trouvé à Pathyris. C'est un contrat
de vente comme on en connaît beaucoup de même provenance et de même
époque (env. 100 av.). Cf. W. Spiegelberg, Die demotischen Papyrus der Strassbur-
ger Bibliothek, p. 31.
Je n'ai pas encore vu un important ouvrage de M. Spiegelberg dont on me dit
grand bien : Demotische Papyrus aus den Kôniglichen Museen zu Berlin (Leipzig,
1902, grand in-folio, Giesecke et Devrient), pp. 37 et xcix, planches en phototypie
(100 mark). J'ai obtenu des photographies des papyrus latins inédits du musée
de Berlin ; je les publierai sous peu dans mon petit Corpus papyrorum lutinarum.
Il a été publié au cours de l'année 1904, trois nouveaux fascicules (les 6e, 7e et
8e dut. IT) des B. G. U. (4egyptische Urkunden aus den Kôniglichen Museen zu
Berlin). On y trouvera les nes 842 à 923 de cette imposante collection de papyrus.
Disons tout de suite que les textes d'un intérêt capital brillent par leur absence
et qu'â part quelques nouveautés assez intéressantes, comme les papyrus de
Mendes, il y a là surtout du déjà vu.
Les nn. 842-852 et 854-873 sont l'œuvre de feu Krebs, les nn. 815-883 sont dus
à M. Viereck et les ms. 884-923 témoignent du zèle et de l'habileté de M. Schubart,
108 ‘8. DE RICCI
le nouvel attaché à la section des papyrus. M. Zereteli (n. 853) et M. Wilcken
(n. 874) ne publient chacun qu'un seul papyrus.
Un erratum important des fascicules 5-8 (nn. 814-923) des B. G. U. a été donné
par M. Wilcken, Archiv 1 (4901), pp. 554-557 et I1 (1902), pp. 136-139. Il y a inséré
beaucoup de corrections importantes et, chose plus utile, il a pu faire contrôler
ses corrections sur les originaux par M. Schubart.
Le fascicule 9 du tome III (nn. 924-968) a paru en 1902. Il contient outre les
papyrus d'Herakléopolis (cf. infra, p. 112), quelques documents (nn. 959-968),
publiés par M. Wilcken.
Voici la liste des documents publiés dans les quatre nouveaux fascicules.
N. 842 (187 apr.). Longue série de quittances administratives, provenant d'Her-
mopolis et mentionnant Pomponius Faustinianus (sic), préfet d'Égypte.
Nn. 843-848. (165 et 119 5. apr.). Lettres privées. ;
N. 847 (182-183 apr.). Epikrisis reslituée par M. P. Meyer (Bert. philol. Wochen-
schr., XXI, 1901, col. 244-245) et mentionnant un nouveau préfet d'Égypte, Vetu-
rius Macrinus.
N. 848 (119 5. apr.). Lettre officielle.
N. 849 {ive 5. apr.). Ordre d'effectuer un paiement en nature.
N. 850 (env. 76 apr.). Lettre privée.
N. 851 (161-169 apr.). Quittance délivrée par l'érempnrhe γενηματογραφουμένων
ὑπαρχόντων.
. 852 (443-144 apr.). Quatre chameaux sont déclarés par leur possesseur.
. 853 (119 8. apr.). Au recto un emprunt, au verso la vente d'une chamelle.
. 854 (44-45 apr.). Souscription en grec d'un contrat de vente écrit en démotique.
. 855 (147 apr.). Contrat par un tuteur.
. 856 (106 apr.). Contrat de dépôt d'une somme. Timbre rouge imprimé au verso.
.851 (113 apr.). Prêt de 300 drachmes d'argent, s'ajoutant à des prêts antérieurs.
. 858 (294 apr.). Repaiement d'une dette.
. 859 (μ᾽ s.). Vente d'un esclave.
. 860 (254-268 apr.). Offre de prendre un terrain en location. — À noter le
nom Saras et le toponymique χώμη Μαγδώλων Mipn.
N. 861 (re/-ur 5.). Extrait de la δημοσία βιδλιοθήχη.
. 862 (πὸ 8.). Offre de prendre des palmiers en location.
. 863 (re 5.). Fragment avec le nom du bourg de Karanis.
. 864 (44-45 apr.). Contrat de vente, mutilé.
. 865 (ue 5. apr.). Σύνθεσις. À noter la formule va ὡς χρηματίζει,
. 866 (n° 5. apr.). Extrait du registre des χαταλοχισμοὶ.
. 867 (re 5. apr.). Quittance délivrée par la πύλη ἐρημοφυλαχίας.
. 868 (ue 5. apr.). Pétition à l'idiologue, malheureusement très mutilée. On y
reconnaît un démotique d'Antinoë Ματίδειος ὃ wat Καλλι[τέχνιος que je restitue
d'après le papyrus 1164 de Londres.
N. 869 (155-156 apr.). Cinq chameaux sont déclarés par leur possesseur. Men-
tion d'Archias, stratège de la partie Héraclide du nome Arsinoite.
N. 810 (ne 5. apr.). Extrait de la βιδλιοθήχη δημοσίων λόγων.
N. 874 (πὸ 5. apr.). Pétition mutilée.
N. 812 (v°s,?). Fragment d'un contrat:
222ZL2ZL'2LZLZZ
2
2222 Ἃ Ἃ "ἃ
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 109
N. 813 (ve 5. ὃ). Prêt, mutilé.
N. 874 (ve 5. 3). Lettre privée.
Nn. 875-879 (146, 152, 158, 161, 164 apr.). Quittances pour prestations en tra-
vaux de terrassement à Karanis.
N. 880 (197 apr.). Quittance délivrée par les πρεσδύτεροι κώμης.
N. 881 (154 apr.). Long recu de contributions délivré par les rp#xtopes ἀργυριχῶν.
N. 882 (115 8. apr.). ᾿Αντισύμδολον analogue à ceux publiés dans Fayüm {owns,
an. 73 et 14. \
N. 883 (11° 5. apr.). Réédition du ἢ. 236 complété par un nouveau fragment.
Contrat de vente d’uu terrain. Intéressant pour les formules, mais très mutilé.
Nn. 884-886 (11" s. apr.). Trois lettres privées écrites par un certain Theoktistos.
N. 887 (151 apr. daté par les consuls). Long papyrus écrit à Sidè en Pamphylie
mais trouvé dans le Fayoum. Contrat de vente d'une esclave. Important à cause
de la nouveauté de certaines formules.
N. 888 (160 apr.}). Sentence (ὑπόμνημα) rendue par un archidikaste. Mention
d'un soldat de la σπεῖρα πρώτη ᾿Απαμηνῶν.
N. 889 et 890 {151 apr.). Listes relatives à la perception des impôts. Mention
d'un soulèvement juif en Égypte en 1436/1317, inconnu jusqu'ici.
N. 891 (144 apr.). Cautionnement et promesse d'aller comparaître à Alexan-
drie. Cf. Wenger, Rechtshistorische Papyrusstudien (Graz 1902, in-80), pp. 30 et 82.
N. 892 (111 8. apr.). Lettre privée.
N. 893 (u°/ure 5. apr ). Extrait très mutilé des procès-verbeux des décisions
rendues par un certain Moderatus.
N. 894 (109 apr.). Liste de maçons : on y trouve des jeunes filles (παρθένοι).
N. 895 (137-164 apr.). Testament, peut-être écrit en Syrie. À signaler la φυλὴ
᾿Αστάρτης, la φυλὴ Ἔρωτος, les noms Ἔμμανω et Μαροέμμα.
N. 896 (161-169 apr.). Fragment de testament. Peut-être mention d’Antinopolis.
Nn. 897-898 (n° 5. apr.). Comptes d'impôts.
N. 899 (1v°s. apr.). Reçu délivré par un soldat στρατιώτης λεγίονως (sic) πέμπτης
Μακαιδωνιχῆς τῶν ἐν Μέμφι διαχιμένων. ᾿
N. 900 (vr° 5. apr.). Contrat de location.
N. 901 (rre/inre apr.). Contrat de vente, mutilé.
Nn. 902-905 (161-173 apr.). Papyrus carbonisés de Mendes, les premiers qu'on
ait encore publiés. On y trouve mentionnés (903, 1. 16), Bassaeus Rufus, préfet
d'Égypte, dont la date est fixée à l’année 168/199 et (904, L. 45), un Sempronius.
dont M. Schubart aurait pu restituer le cognomen Liberalis, puisqu'un préfet de
ce nom est connu pour les années 154-158.
N. 906 (époque romaine). Vente d'un terrain. Papyrus intéressant à cause du
développement des formules.
N. 907 (fin du n° 5. apr.). Document relatif à une hypothéké.
N. 908 (env. 103 apr.). Pétition relative aux sifologoi. Mention de Minicius Ita-
lus, préfet d'Égypte.
N. 909 (359 apr.). Plainte contre un certain Arios, coupable de voies de fait et
d'incendie. Daté par les consuls.
N. 910 (69-70 apr.). Contrat de vente d'une maison, rédigé en démotique avec
des signatures en grec, suivi d’un prêt de 100 drachmes d'argent.
110 8. DE RicCI
N. 914 (18-19 apr.). Prêt de 84 drachmes d'argent.
N. 912 (33 apr.). Location d'une ânesse.
N. 943 (206 apr.). Deux papyrus, dont l'un très mutilé, écrits à Myra en Lycie.
Diffciles à restituer.
N. 914 (113 apr.). Reçu délivré par la banque de Ptolemais Euergetis.
N. 915 (n° s.). Long document relatif à des terrains.
N. 916 (10-80 apr.). Contrat de location.
N. 917 (348 apr.). Vente d'une aroura de terre arable.
N. 918 (111-112 apr.). Baïl de terrains.
N. 9149 (rr° 5. apr.). Déclaration d'héritage. Mention du démotique Alexandrin
[ΕἸὶρηνοφ᾽)λαχεί[ο]υ τοῦ χαὶ [Μ]αρωνέως.
N. 920 (180 8ρ1.). Bail de deux arpents de terre arable.
N. 921 (π’ 5. apr.). Comptes d'un chamelier.
N. 922 (286 apr.). Quittance d'impôt.
N. 923 (re° ou 115 8. apr.). Lettre privée.
N. 959 (448 apr.). Extrait officiel du cadastre de Soknopaiou nésos.
N. 960-n. 968 (v°-vre 5. apr.). Série de billets de Theon à Sambas ἐλαιουργός, l'invi-
tant à livrer de l'huile à différentes personnes.
Peu de chose à signaler cette année comme articles relatifs aux fascicules
antérieurs des BGU. |
d'attirerai pourtant l'attention sur un article très important de M. Wilcken,
Ein neuer Brief Hadrians dans Hermes, XXXVII (1902), pp. 84-90. Il s’agit du
papyrus BGU, 140, bien connu des romanistes parce qu'il contient un mandalum
impérial conférant aux enfants de soldats la bonorum possessio unde cognati. Il
est republié par exemple dans Bruns, Fonles iuris romani (6° éd., 1893), pp. 381-
382 et dans Girard, Textes de droit romain (2° éd., 1895), pp. 157-158 (1).
M. Wilcken montre qu'il est du règne d'Hadrien, non de Trajan et qu'il est
adressé non à Gaius Flavius Sulpicius Similis, préfet d'Égypte de 101 à 109, mais
à Q. Rammius Martialis, préfet de 118 à 120 (?). BGU 140 est donc du 4 août 119.
L. Lafoscade republie plusieurs papyrus de Berlin dans sa thèse De epistulis
imperatorum (Lille, 1902, in-8°), passim [BGU. 19, 74, 140, 261, 288, 372, 4173, 646,
141].
N. Hohlwein republie BGU, 288 dans le Musée belge, VI (1902), p. 25.
0. Gradenwitz analyse longuement les fascicules 3 à δ du tome Ili des BGU et
corrige un certain nombre de passages (Berl. philol. Wochenschr. XXII, 1902, col.
650-656). |
R. Cagnat, CR. Acad. Inscr., 1904, pp. 193-197, donne des traductions de BGU 22,
423 et 814.
Th. Mommsen vient enfin de publier avec la collaboration de MM. O. Hirschfeld
et A. von Domaszewski, le dernier supplément du t. III, du Corpus inscriptionum
(1) Cf. encore cic-rrr, p. 2011 ; P. Meyer, Zeilschr. der Savigny-Stiftung, XVII
(1897), p. 44, Jahrb. class. Philol. (1897), p. 511 et Heerwesen, p. 148; Mitteis,
Hermes, XXX (1895), p. 614; Trommsdorf, Quaest. duae ad hist. legg. rom. spect.
(1896), p. 15; Mommsen, Zeilschr. der Savigny-Stiftung, XXII (1901), p. 142;
Lafoscade, De epislulis imperatorum (1902), pp. 8-9, ἢ. 14.
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 414
lalinarum : Inscriptionum Orientis οἱ Illyrici latinarum supplementum Pars pos-
lerior (Berlin, 1902, très grand in-4°), pp. env. 1000. Il y reproduit p. 2214. BGU.
265 et 324.
H. Waltzing, Musée belge, VI (1902), pp. 82-87, reproduit BGU. 333.
W. Crônert, Denkschrift, etc. (Bonn, 1902, 80), pp. 13-14 et 17-21 traduit BGU.
13, 22,27, 252, 333, 380 et le fragment du roman de Ninos.
A. Deissmann, Bible Sludies (Edimbourg, 1901, 8°), cite des papyrus de Berlin.
P. Viereck, Die Ostraka des Berliner Museums dans Archiv, 1 (1901), pp. 450-467
avec une planche autographiée. — L'auteur a collationné tous les ostraka grecs
du musée de Berlin et publie sa collation. La partie la plus intéressante de son
article est celle où 1] traite de la publication des ostraka : il pose des règles pré-
cieuses par leur précision, nous ne manquerons pas d'en faire personnellement
notre profit. |
+ C. Dewischeit, Griechische Tachygraphie in dgyptischen Papyrusurkunden aus
den kgl. Museen zu Berlin dans Der Schriftwart, 1900, pp. 9-14 et 21-23. S'occupe
de BGU, 303, 394, 310, 364, 366, 367, 619, 683-689 et 691. Cf. du même un autre
article avec presque le même titre (Altgriechische Tachygraphie, etc.), dans
l'Archiv für Slenographie, LI (1901), pp. 22-23.
Th. Mommsen, Zeitschrift der Savigny-Sliftung XXII (1901), cite p. 142, BGU.
140 et p. 143, BGU. 261.
St. Brassloff, Aetas legitima, ibid., pp. 169-194, étudie le début de Βαϊ). 611.
R. Dareste, Les papyrus égyptiens de l'époque romaine dans Nouvelles éludes
d'histoire du droit (Paris, 1902, 8°), pp. 176-213, republie Βαϊ), 326 (pp. 184-190),
° BGU, 641, latin (pp. 207-211) et BGU, 628 latin (pp. 206-207 et 211-213). Ι
L. Wenger, Rechishisloriche Papyrusstudien (Graz, 1902, 80), passim, étudie
BGU, 255, 401 et 581.
HR. M., Revue critique, LII (1901), p. 461. Compte rendu trop court de BGU. II,
fasc. 1. |
5. Sudhaus, Von zwei kleinen Leulen (Papyrusschnitzel) dans Rh. Mus., LVI
(1901), pp. 307-309, republie BGU, 229.
L. Mitteis, Zur Geschichte der Erbpacht im Allerthum dens Abhand. Säch.
Gesellsch. Wissen, XV (1901), fasc. IV, p. 34, utilise BGU, 648.
B.-P. Grenfell et A.-S. Hunt, The Amherst papyri, t. 11, passim (cf. p. 243), étu-
dient BGU, 153, 337, 392, 426, 552, 553, 639.
O. Gradenwitz, Zwei Bankanweisungen aus den Berliner Papyri dans Archiv 1I
(1902), pp. 16-116, étudie minutieusement BGU, 813, 156 et 472.
FOUILLES DE M. WILCKEN
Conformément à la promesse qu'il avait faite l’an detnier, M. Wilckeh nous
a fait connaître dans l'Archiv quelques-uns des papyrus découverts par lui à
Herakleopolis (Ehnasie) et détruits, comme on se le rappelle, par un incendie en
rade d’Hambourg (Heidnisches und Christliches aus Ægyplen duns Archiv, I, 1901,
pp. 396-436). Ces τῇ êmes documents, M.Wilcken les a réédités dans les BGU avec
d'autres textes de la même collection dans un fascicule qui forme le neuvième du
tome III (1903) : ce sont les nos 924-958 (pp. 257-282).
112 8. DE RICCI
924 (ne 5. apr.). Lettre de la βουλή d'Herakleopolis. Mutilée.
925 (nr 5. apr.). Procès verbal d'une séance de la βουλή.
926 (romain). Court décret d'un ἐπίτοοπος.
927 (rrre 5. apr.). Lettre de deux χωμάοχ[α!ι].
928 (1115 5. apr.). Certificat d'un δημόσιος ἰατρός.
929 fire-rrre s.). Deux fragments; mention d'un basilicogrammate du nome Saïte.
930 (1ve 5. apr.). Recu de blé.
931 (ure-1v° 5. apr.). Reçu d'huile ἀπὸ ἀποθήχης τῆς μέσης, délivré à un πρινχιπάριος.
932, 933. Reçus de basse époque.
934 (1116 5. epr.). Début d'une lettre à un fonctionnaire.
935 (Π|15-1Υ 5. apr.). Fragment d'une pétition mentionnant les Μαστῖται et les
Γωνιῶται.
936 (= Archiv, I, 1901, p. 408; republié aussi par Wenger, Rechishistorische
Papyrusstudien, p. 41). Ἐγγύη de l'an 426, datée par les consuls et faite par ordre
du μεγαλοπρεπεστάτω (sic) ....vioc ἐπαρχίας ᾿Αρχαδίας. Le titre mutilé me paraît
être celui de [βαρῶ]ν[τ|ος comme dans BGU 836. Cet intéressant document nous
montre qu'Oxyrhynchus faisait partie de la province d'Arcadie et qu'il y avait
encore en 426 dans la Moyenne-Égypte des associations païennes (παγανιχαὶ
συντελεῖαι).
937 (250 apr.). Vente d'un esclave Pontique âgé de treize ans.
938 (1v° 5. apr.), 939 (363 apr.), 940 (398 apr.). Contrats de location.
941 (376 apr.), 942 (240 apr.};. Recus.
943 (389 apr.). Prèt.
844 (rv°/ve 5. apr.) ἀκυρωσία (annulation d’un contrat).
945 (256 apr.), 946 (271 apr.). Fragments de contrat. Le ἢ. 946 est daté de l'an 2
d'Aurélien et de l'an 5 de Vaballathus : L ε τοῦ x[uplou] ἡμῶν Σεπτιμίου Οὐαδαλάθου
᾿Αθηνοδώρο[υ] τοῦ λαμπρ[οτάτου] βασιλέως ὑπάτου αὐτοκράτορος στρατηγοῦ) Ρωμαίων.
941 Fragment.
948 (1v°-ve 5. apr.), 949 (env. 300 apr.), 950 (byzantin). Lettres privées.
951 (byzantin), 952 (115-115 δ. ap.). Comptes.
953 (1e 1v° 5. ap.). Recette magique.
954 (vis s. apr.). Amulette chrétienne, contenant une prière très curieuse
suivie d'un paler noster.
Déjà publié, Archiv, 1 (1901), p. 431.
955 (= Archiv, 1, 1901, p. 427). Début d'un document analogue.
956 (= Archiv, I, 19014, p. 420), τὸ 5. ap. Exorcisme paien.
957 (10 av.). Horoscope.
958 Six fragwents d'époque romaine ou byzantine.
On a peu publié sur le palimpseste de Chariton acheté à Thèbes par M. Wilcken
et également détruit dans l'incendie d'Hambourg :
F. G. Kenyon, Archaeol. report, 1900-1901, p. 58.
S. A. Naber, Ad Charitonem dans Mnemosyne, XXIX (1901), pp. 92-99.
W. Crônert, Archiv, 1 (1901), pp. 529-530.
N. Fiesta), Il roman:o di « Chione » dans Afene e Roma, II (1900), pp. 325-328.
‘BULLETIN PAPYROLOGIQUE 143
PAPYRUS DE GENÈVE
_ C'est avec grand plaisir que nous avons vu dans le dernier fascicule de l'Archiv
deux articles de J. Nicole sur les papyrus de Genève.
Il publie d'abord Un questionnaire de chirurgie (Archi Il, 1902, pp. 1-3) d’après
le papyrus 111 de Genève (1119 5. apr.?) : on y lit au verso d'un texte non littéraire
très effacé 22 lignes d'onciale, contenant une série de courtes questions chirur-
gicales suivies de réponses (Exemple : τί ἐστιν διαχέντησις; [ἔστι]ν À διὰ βελόνης τῶν
[σ᾽]ϊωμάτων vou). — Les mots ἀποδορά, διαρραφή et Üroérax{po:] paraissent
nouveaux.
Le deuxième article de M. Nicole (Archiv 11, 1902, pp. 63-69) est intitulé :
Compte d’un soldat romain No IV des Papyrus Latins de Genève : supplément aux
Archives Militaires du re siècle) (1). Ce n'est qu'un fragment de 27 lignes muti-
lées, mais il est écrit en latin et M. Nicole montre qu'on peut le restituer en
grande partie à l'aide du grand papyrus latin de Genève.
A propos de ce document, il peut être utile de faire savoir que M. A. von Pre-
merstein compte publier cet automne dans les Beifräge sur allen Geschichle un
article assez considérable sur ces Archives mililaires de Genève. Il est arrivé à
établir un certain nombre de faits nouveaux. Il n'y a presque rien à ajouter à la
bibliographie de ce papyrus telle que je l'ai donnée en 1901 [B. I, p. 196] :
_ Bull. de la Soc. des Antiquaires de France, 1901, p. 15 (analyse de l'article
d'Espérandieu).
O. Schulthess, Neue philologische Rundschau, 1902, pp. 346-350.
C. Wessely, Hesiodi fragmentorum Genauiensium specimen dans Studien zur
Paläographie 1 (1901), p. xx. Publie un fac-similé partiel, communiqué par
M. Nicole, du célèbre papyrus Naville contenant des fragments des Travaux et
des jours d’Hésiode (Haeberlin, ἢ. 38).
U. Wilcken, Archiv 1 (1901), pp. 553-554 publie une série de notes et correc-
tions, relatives aux deux fascicules parus des Papyrus de Genève de M. Nicole.
On sait que M. Wilcken a trouvé à Munich la moitié manquante du papyrus 21 de
Genève : il la publie Archiv I (1901) pp. 484-491.
T. Reinach, Revue des études grecques, XV (1902), pp. 105-106, rend compte du
T. Il du recueil de M. Nicole.
À. Olivieri, À proposilo dei due frainmenlti del Γεωργός ὁ della Περικειρομένη di
Menandro dans Rivisia di flologia XXVIII (1900), pp. 447-455.
PAPYRUS DE TURIN
Des papyrus grecs de Turin sont cités par A. Deissmann, Bible Studies (Edim-
bourg, 1901, 8). (Cf. supra).
Le papyrus n. I de Turin avait été traduit jadis en français par M. Dareste : Le
procès d'Hermias (117 av. J.-C.) dans Nouvelle revue hist. de droit VIL (1883),
pp. 191-203: il vient de rééditer ce travail dans ses Nouvelles études d'histoire
du droit {Paris, 1902, 8°), pp. 214-229.
(1) C'est par erreur que j'avais imprimé l'an dernier (Β. I, p. 196] Archives du
τὸς siècle : c'est Archives Mililaires du 1er siècle qu'il faut lire.
18 8. DE RICCI
PAPYRUS DE FLORENCE
M. Schisparelli a profité d'un récent voyage en Égypte pour acheter une collec-
tion de papyrus pour le compte de la Socie{à Italiana per la diffusione e l’incorrag-
giamento degli studi classici. La publication de cette collection ἃ été commencée
aussitôt par ὦ. Vitelli Da papiri greci dell’ Egitto dans Alene e Roma IV
(1904), coll. 73-81 (cf. col. 231 et V, 1902, col. 592). Le papyrus de Florence n. 1 est
un magnifique document parfaitement intact et qui coustitue un très bel exem-
plaire d'un prêt d'argent (200 drachmes) à formules très déveluppées (153 apr.).
M. Vitelli, qui traduit et commente ce document avec autant d'habileté que s'il
était un vétéran de la papyrologie, n'a pourtant pas reconnu un démotique dans
(1. 2) Σωσιχοσμίου τοῦ καὶ ᾿Αλθαιέως. — On consultera sur le papyrus ἢ. 1 de
Florence :
C. Wessely, Uber die lex commissoria pignorum im alexandrinischen Volksrecht
dans Anseiger Akad. Wien, 12 juin 1901.
U. Wilcken, Archiv I (1901), pp. 557-558.
E. Costa, Sul papiro forentino num. 1 dans Bulletino dell Istitulo di Diritto
Romano XIV (1901), pp. 47-50.
D. Comparetti, Frammento filosofico da un papiro greco-egisio avec deux
planches en photogravure dans Festschrift für Theodor Gomperz (Vienne, 1902, 4°),
pp. 80-89. Au recto restes de deux colonnes en jolie onciale (rr° 5. apr.). Frag-
ment philosophique relatif à la φιλανθρωπία. Au verso, lettre d’Alypios à Herônei-
nos (111 5. apr.) phrontistès de Theadclphia (aujourd'hui Harit). Comme le fait très
justement remarquer M. Wilcken (Archiv, II, 1902, p. 163) MM. Grenfell et Hunt
ont trouvé à Hartt une autre lettre du même Alypios au même Hérôneinos phron-
tislés de Thrasô (Fayäm towns, Ὁ. 288, ἢ. 133). M. Comparetti publie une
deuxième lettre (p. 87) du même au même; ajoutons que M. Théodore Reinach
possède plusieurs pièces de la même correspondance et que M. Comparetti n'a pas
publié toutes celles de la collection florentine. M. Wilcken (4. c.) améliore, sur
quelques points, d'après une photographie, la lecture de M. Comparetti.
M. Comparetti m'écrit qu'il a trouvé dans les papyrus inédits de Florence « un
protocole où sont enregistrées des circulaires adressées à divers stratèges pour
la réquisition des chameaux pour la πορεία annuelle ».
SOI-DISANT PAPYRUS DE VENISE.
Il n'est guère de bibliographe de la papyrologie qui n'ait reproduit une asser-
tion de Montfaucon (Diarium Italicum p. 55) attestant l'existence à Venise d'un
ms. de l'évangile de Saint-Marc sur papyrus. M. Haeberlin et il y a quelques
mois à peine M. Deissmann paraissent l'avoir accepté sans contrôle. Il ne sera
donc pas inutile de rappeler que ce fameux manuscrit n’est autre chose qu'un
fragment d'un manuscrit sur parchemin en onciales latines, manuscrit dont
d'autres parties sont conservées à Prague et à Cividale dans le Frioul. Ce fait a été
établi dès 1753 par Lorenzo da Torre et en 1878 M. Cesaro Paoli a insisté de
| nouveau sur ce point (Paoli, Del papiro, Florence, 1818, 85, p. 60, note 3).
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 115
PARCHEMIN DE ROME.
C. R. Gregory, Tertkritik des Neuen Testamentes, 1, p. 66 et 11 p. 549, n. 48,
décrit assez longuement un parchemin gréco-copte (v°s.) de l'ancienne collection
Borgia, conservé à Rome, au Vatican. Ce parchemin contient Luc XXII, 20-
XXII, 20; Jean VI, 28-67 et VIT, 6-VIIL, 31. Publié par ᾧ Aug. Ant. Georgius
(Giorgi), Fragmentum evangelit S. Ilohannis Graecum Copto-Thebaicum saeculi IV
te... (Rome, 1189); + H. Alford, Novum Teslamentum graece, ἀρ éd. 1859; Gre-
gory, Prolegomena, p. 391 (Ta); Scrivener-Miller, Inéroduction I, pp. 146-147. Une
autre série de fragments contenant Mathieu XVI, 13-20 ; Marc, f, 3-8 et XII, 35-
37; Jean, XIX, 23-27 et XX, 30-31, vue jadis par Tischendorf à la Propagande, est
décrite par Scrivener-Miiler, I, p. 148 ; Gregory, Prolegomena, Ὁ. 392 (Td.) et Text-
krilik, 1, p. 61. En 1886, M. Gregory ne retrouva pas ces fragments.
PAPYRUS D'HERCULANUM.
M. Crônert continue à publier petit à petit les résultats de sa fructueuse mis-
sion à Naples : ses articles, rédigés avec autant de soin que de compétence, comp-
teront parmi les meilleurs échantillons des éditions de Volumina Herculanensia.
‘C'est d'abord un travail intitulé Die λογιχὰ ζητήματα des Chrysippos und die
übrigen Papyri logischen Inhalls aus der herculanensischen Bibliothek (Hermes,
XXXVI, 1901, pp. 548-5179). On y trouve publiés en tout ou en partie les volumina
300-9, 307,671, 861, 1003 et 1389, sans parler des nn. 1038, 1065 et 1421 cités seule-
ment.
Herkulanensische Bruchstücke einer Geschichte des Sokrates und seiner Schule
dans Rheinisches Museum, LVII (1902), pp. 285-300. M. Crônert a reconnu que le
ἢ. 495 et 558, tous deux inédits, faisaient partie d'un même rouleau et que ce rou-
leau contenait les restes lamentablement mutilés d'une biographie de Socrate. 1]
publie tout ce qu'il a réussi à en déchiffrer.
Neues über Epikur und eintge Herkulanensischen Rollen dans Rheinisches Museum
LVI (1904), pp. 607-626. Article important où sont exposés les résultats de l'exa-
men d'un grand nombre de volumina dont voici 18 liste : 98, 1117, 163, 176, 200,
253, 310, 846, 415, 419, 421, 452, 454, 465, 495, 634, 862, 986, 989, 996, 998, 1005,
1012, 1036, 1084, 1090, 1116, 1188, 1196, 1199, 1232, 1289, 1398, 1418, 1457, 1471,
1485, 4489, 1643, 1634, 1639, 1645, 1675, 1181, 1803. ΠῚ y a là de précieux renseigne
ments sur les fragments d' Épicure et de Philodème.
Hans von Arnim, Bemerkungen sum Index Sloicorum Herculanensis dans Sit-
zungeber. Akad. Wien, CXLIII (1901), fasc. XIV, 80, pp. 13. On connait l'intéressant
texte d'histoire philosophique contenu dans le papyrus 4018 d'Herculanum et
désigné d'ordinaire sous le nom Index Sloicorum. Publié en 1875 par M. Compa-
retti, étudié ἃ cette époque par MM. Bücheler et Gomperz, ce document précieux
avait été depuis lors négligé (1). Il est heureux que l'attention de M. von Arnin ait
été attirée de ce côté, car son étude, quoique courte, contient plus d'une contri-
bution intéressante au texte et à l'interprétation de ces curieux fragments,
. (4).M. Crônert en prépare une nouvelle édition.
410 9, DÉ Ricci
Qu'on me permette de signaler ici deux autres travaux de M. von Arnim qui
paraissent avoir été trop peu connus dans notre pays : l'un et l'autre sont relatifs
aux remarquables travaux de M. Sudhaus sur les œuvres de Philodème : De res-
tituendo Philodemi de Rhetorica lib. ἢ] (Programme Rostock, hiver 1893, 49, pp. 14)
et De Aristonis Peripatetici apud Philodemum vestigiis (Programme Rostock, été
1900, 40, pp. 13). Ce deuxième mémoire est relatif au vol. 1004.
F. G. Kenyon, The palaeography of the Herculaneum papyri dans Festschrift
für Theodor Gompers (Vienne 1902, 49), pp. 373-380. Si l'on a peu étudié jusqu'ici
la paléographie des papyrus d'Herculanum, c'est que l’on manquait de termes de
comparaison. Les récentes découvertes de papyrus littéraires gréco-égyptiens
nous ont depuis peu singulièrement enrichis : personne plus que l'auteur de la
Palaeography of Greek papyri n'était désigné pour examiner sous le rapport des
formes scripturales les papyrus d'Herculanum, d'abord sur les fac-similé publiés,
ensuite sur les originaux : cette dernière partie du travail était d'autant plus
nécessaire que nous ignorions quel degré de confiance méritent les dessinateurs
napolitains. Les résultats des recherches de M. Kenyon sont des plus intéres-
sants : les fac-similé, nous dit-il, nous présentent une écriture trop fine et trop
élégante ; sur les originaux les traits sont plus lourds et plus épais, l'ensemble
est plus sobre et plus massif; c'est une écriture petite et ferme qui a un air de
famille avec l'Hérodas du British Museum. Les volumina Herculanensia parais-
sent presque tous du 1°* siècle avant notre ère : ils rentrent dans le groupe des
papyrus littéraires d'époque Ptolémaïque et les lettres Α et £, qui servent de cri-
terium à M. Kenyon, y ont bien la forme que ce savant pouvait s'attendre à leur
trouver : le £ notamment n'est pas écrit une seule fois sans lever la plume.
+ W. Crôünert, Abkürzungen in einigen griechischen litterarischen Papyri, mit
besonderer Berücksichtigung der herkulanensischen Rollen, dans Archiv. für Stenor
graphie LIV (1902) pp. 13-79.
Segofredus Mekler, Academicorum philosophorum index Herculanensis (Ber-
lin, 1902, in-8°, Weidmann), pp. xxxv1-135 (6 mark). Un des papyrus les plus
intéressants de la bibliothèque d'Herculanum est le volume 1021 qui contient un
texte d'une cinquantaine de colonnes connu sous le nom d'index academicorum.
M. Gompers avait réuni en vue d'une édition définitive une certaine quantité de
matériaux dont il a confié la mise en œuvre à un de ses élèves, M. Mekler, qui
s'est acquitté de cette tâche difficile avec un remarquable succès ; l'excellente
monographie qu'il consacre à ce texte fait espérer qu'il traitera de même d'autres
documents de l'inépuisable collection de Naples.
Douze colonnes de ce papyrus, conservées dans les dossiers Hayter à Oxford,
sont publiées, si je ne me trompe, pour la première fois dans le travail de
M. Mekler. Pour le reste du papyrus, existant encore à Naples, l'éditeur a pu
profiter non seulement des copies de Naples et d'Oxford, mais encore des colla-
tions de M. Gomperz, de sa propre copie et surtout de celle de M. Crônert qui a
découvert un deuxième exemplaire très mutilé du même texte dans le volumen
168.
Les restitutions de M. Mekler ont fait faire au texte un réel progrès. Il faudra
encore bien des années pour que tous les volumina Herculanensia soient édités
avec un appareil critique aussi développé et des commentaires aussi documentés.
ἘΣ BULLETIN PAPYROLOGIQUE 117
U. Von Wilamowitz-Môllendorff, Lesefrüchte, LXXV, dans Hermes, XXXVII (1902),
p. 305, corrige Philodème, de musica (édition Kemke), IV, 80,
C. von Jan, Jahresber. Bursian CIV (1900), pp. 25-26, rend compte de Philodème,
de musica, édition Kemke.
J. Bidez, Revue critique, LI (1901), pp. 324-326, rend compte de Crônert, Philo-
nides (quelques corrections) et Revue de l'instr. publ. en Belgique XLV (1902),
Chronique, pp. 58-59, analyse l'article du même sur l'état actuel des volumina
Herculanensia.
Cf. encore sur les Herculanensia, A. Deissmann, Bible studies (Edimbourg, 1901,
In-80), p. 38,
| PAPYRUS DE VIENNE
C. Wessely, Die griechischen Papyrusurkunden des Theresianums in Wien
dans Studien zur Paläographie, \ (1901), pp. 1-5.
Dans cet article sont publiés, traduits et commentés quatre papyrus grecs com-
pris dans une collection d'antiquités égyptiennes offerte par le Khédive à la
Theresianische Akademie de Vienne :
1 (1e s. av.). Fragment d'une pétition écrite par une femme.
à (1ve s. apr.). Pétition mutilée à un préfet d'Égypte (?) Flavius..…
3 (1v° 5. apr.). Hermopolis magna. Début d'une lettre à Flavius Epiphanius,
préfet d'Égypte (inconnu jusqu'ici). Mention d'un ταρσικάριος.
4 (1v° 5. apr.). Paiements faits à l'administration en or et en argent au poids.
Intéressant pour l'histoire de la réforme monétaire sous Dioclétien.
On trouvera quelques remarques utiles sur ces papyrus dans U. Wilcken,
Archiv IL (1902), pp. 140-141. Cf. aussi W. Crônert, Wochenschr. klass. Philol. X1X
(1902), col. 57-58.
C. Wessely, Hesiodi carminum fragmenta antiquissima dans Studien zur
Paläographie, X (1904), pp. m1-xxm et À. Rzach, Zu den neugefundenen Bruch-
‘stücken des Hesiod-Papyrus Erzherzog Rainer, ibid., pp. 11-16.
On connaissait, depuis 1887, l'existence à Vienne, dans la collection Rainer d'un
important codex d'Hésiode sur papyrus (Haeberlin, n. 39). M. Wessely en avait.
publié dès cette date quatorze fragments (Mifleilungen Raïner, 1, 1831, pp. 13-83)
et M. Rzach s'était occupé à plusieurs reprises de la critique textuelle des deux
cents vers qu'ils contenaient, plus ou moins mutilés. Depuis quinze ans,M. Wes-
sely a retrouvé de nouveaux fragments en nombre assez considérable ; il les a
joints avec les fragments déjà connus et les a donnés en fac-similé dans sa nou-
velle publication.
Environ soixante fragments d'un codex sur papyrus du 1v° 5. en onciale pen-
chée assez vilaine. Restes des vers suivants : Théogonie, 626-640, 658-673, 771-183,
811-817; Travaux et Jours, 179-185, 210-215, 243-248, 252-265, 214-296, 309-331, 344-
363, 491-494, 511-519, 527-528, 544-552, 686-828 fin ; Bouclier, 1-32, 350-354, 382-384,
426-440, 456-470. M. Rzach fait ressortir l'importance que présente ce papyrus
pour le texte d'Hésiode (notamment Theog. 630-631, Trav. 812 et 278, Bou-
clier 432 (4).
(4) Comptes rendus sommaires par C. H(ae)b(e)rl(iln, Literarisches Centralblatt
LIL (1904), col. 1722-1723 et W. Crônert, Wochenschr. für klassische Philol. XIX
(1902), col. 60-64.
418 8. DE RICCI
C. Wessely, συνῆρμαι, dans Sfudien zur Paldographie 1 (1901), p. 5. Note de cinq
lignes pour signaler cette forme du parfait dans le n. 23 du Corpus papyrorum
Raineri qui ne serait pas un contrat de mariage, mais un acte de séparation ; c'est
à la même conclusion qu'est arrivé M. Gregor Zereteli, qui a revu sur l'original,
republié et longuement étudié ce papyrus dans un article en russe sur La donatio
ante. nuplias dans un papyrus grec, paru dans le Journal du ministère russe de
l'instr. publ., mai 1901, t. 335, section de philologie classique, pp. 63-75. Cf. Wil-
cken, Archiv 1 (1901), pp. 556 et 551 ; II (1902), p. 154; Mitteis, ibid., I (1901),
pp. 347-348 ; Grenfell-Hunt, Oxyrhynchus papÿri, IL, p. 239.
J'ai signalé plus haut (p. 414), une note paléographique de M. Wessely (S£u-
dien, etc., 1, 1901, pp. 1-u), sur le papyrus latin, n. 23 de ses Schriftlafeln.
C. Wessely, Die Epikrisis und das Ἰουδαίων τέλεσμα unter Vespasian dans Sfu-
dien zur Paläographie 1 (1901), pp. 9-44, étudie, malheureusement sans en publier
le texte, un papyrus important de le collection Rainer, provenant du même dos-
sier que les papyrus 260 et 261 du British Museum. Ce document de l’époque de
Vespasien est le premier à nous faire connaître dans le Fayoum l'existence de
l'impôt de capitation frappant spécialement les Juifs; intéressant aussi pourl'ono-
mastique juive et l'histoire de l'epikrisis. Cf. U. Wilcken, Archiv 11 (1902), p. 164;
C. Wessely, Berl. philol. Wochenschr., XXI (1901), col, 475; W. Crônert, Wochenschr.
klass. Philol., XIX (1902), col 59.
L. Mitteis, Zur Geschichte der Erbpacht im Allerthum dans Abhandl. Sächs.
Gesellsch. Wissensch. XX (1901). fasc. IV, pp. 35-36, utilise le papyrus Rainer,
1, n. 19.
B. P. Grenfell et À. 8. Hunt, The Amherst papyri, Il, p. 109, corrigent le papy-
rus Rainer, I, n. 39, 1. 18.
C. Wessely, Uber die lex commissoria pignorum im alerandrinischen Volksrecht
dans Anzeiger Akad. Wien, 12 juin 1901, fasc. XV, publie un important papyrus
inédit (4) de la collection Rainer (RNN 28) de l'an 229 de notre ère : c’est un
prêt de 900 drachmes d'argent garanti par un terrain qui appartiendra au
créancier en cas de non repaiement de la somme. Ce papyrus vient d'Herekléopolis.
C. Wessely, Neues über Diogenes den Kyniker dans Festschrift für Theodor
Gomperz (Vienne, 1902, 40), pp. 67-74, publie un papyrus littéraire intéressant du
er siècle avant notre ère, qu'il a découvert dans la collection Rainer. Restes de
six colonnes d'environ 27 lignes. Série d'anecdotes relatives à Diogène le
Cynique (ce qu'il répondait quand on lui demandait qui et d'où il était, Diogène
et son bâton, Diogène chez le barbier, Diogène et Denys le tyran, Diogène au
bain, Diogène et Ménandre). On peut, avec M. Wessely, rapprocher ce texte
curieux de plusieurs passages de Diogène Laerte (2).
Le fragment célèbre du « Protévangile du Fayoum », dont on trouvera une
bibliographie utile dans Haeberlin (n. 163), est republié par E. Preuschen Anti-
(4) Cité cependant par + Gerhard Alexander Leist, Die Sicherheit von Forde-
rungen durch Ubereignung von Mobilien (Jena, 1889, 8°), pp. 66, n. 82.
(2) Comptes rendus déjà publiés :
X... Neues von Diogenes dans Beilage zur allgemeinen Zeitung, 1902, II, p. 440,
X.., Zu dem neuen Diogenes, ibid., p. 512.
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 119
legomena (Giessen, 1901, 16°), pp. 19-20 et 118-119. M. Deissmann nous apprend
(Encyclopaedia Biblica, t. III, col. 3560) qu'une réédition de ce texte avec un
ample commentaire est préparé par M. H. Müller de Paderborn. |
C. R. Gregory publie dans sa Textknilik des Neuen Teslamentes, t. 1 (Leipzig,
1900, 8°), plusieurs fragments inédits de la collection Rainer dont M. Wessely
lui a communiqué des copies; ce sont :
PP. 72-73, ΤΊ (Rainer 8024). Parchemin. Mathieu XVIII, 18-29.
PP. 73-14, T° (Rainer 8025). Papyrus. Marc XV, 29-38.
PP. 74-75, T' (Rainer 8020). Jean, 1, 29-32. ᾿
Ρ. 411, Evl. 848 (Rainer 8021), décrit seulement; évangéliaire sur papyrus
publié ailleurs par Wessely (Haeberlin, n. 168). |
P. 418, Evl. 349 fRaïner 8023). Parchemin. Mathieu XV, 12-16 en grec et en
copte (feuillet d'un évangéliaire).
Comptes rendus des Specimina Isagogica de M. Wessely :
K. Kaïbfleisch, Berl. philol. Woch., XXI (1901), col. 1331-1332 [quelques
corrections].
U. Wilcken, Archit, I (1901), pp. 558-559 [quelques corrections].
W. Schubart, Deutsche Lilteraturzeitung, XXII (1901), col. 1689-1694.
F. B{lass), Liferarisches Centralblatt, LII (1901), col. 768-769.
J. P. Waltzing, Bull. bibliogr. du Musée Belge, V (1904), p. 68.
F. G. Kenyon, Arch. report, 1900-1901, p. 61.
3. Kohm, Zeitschr. für die üsterr. Gymn., LII (1901), pp. 304-306.
W. Weinberger, Neue philol. Rundschau, 1902, p. 251.
G. Fraccaroli, Rivista di filologia, ΧΧΙ͂Χ (1901), p. 333.
Signalons deux comptes rendus attardés de Wessely, Bruchstücke einer ank-
ken Schrift über Welterzeichen, par À. Rehm, Berl. philol. Wochenschr., XXII
(1902), col. 513-516 et par W. Crônert, Archiv, I (1901\, pp. 536-538.
Feu Carl von Jan a analysé les différents articles écrits depuis dix ans sur le
fragment musical de la collection Raïiner, dans le Jahresbericht de Bursian (CIV
1900, pp. 5-8).
PAPYRUS DE GRAZ
Nous avons vu que Graz en Styrie était ornée d’un papyrologue émérite,
M. Leopold Wenger : il s'y trouve aussi un papyrus grec fort curieux acheté à
Echmouneïn par M. J. Strzygowski. On y lit neuf lignes de cursive grecque du
vue siècle. Le document est un modèle de bail rédigé par un certain Flavius loannes
σιγγουλάριος τῆς κατὰ Θηδαίδα ἡγεμονιχῆς τάξεως. Il ἃ remplacé le nom du fermier
par ὁ δεῖνα ou 666; on y lit par exemple (ἰ. 3) Αὐρηλίω τῷδε ὑἱῷ τοῦδε γεωργῷ.
Le papyrus est publié par M. Wilcken, Der Grazer Papyrus dans Archiv, Il
. (1902), pp. 183-184 (cf. aussi Wilcken, Archiv, 1, 1901, p. 468, note 2).
OSTRAKA DE SUÉDE
IL n'y a pas encore de papyrus grecs en Suède, du moins à ma connaissance
mais il y a beaucoup d'ostraka grecs à Upsala, les uns dans le musée Victoria
420 ο 8, DE RICCI
les autres dans la collection de M. Karl Piehl, l'égyptologue bien connu. Deux
d'entre eux sont déjà publiés :
O. Lagercrantz. Griechische Ostraka im Victoria-Museum zu Upsala dans
Sphinx, V (1901), planche, et VI (1902), pp. 36-38, publie un ostrakon analogue
au n. 1387 de M. Wilcken.
K. P{iehl), Ostracon Piehl n. 1 dans Sphinx, VI (1902), p. 60 et fac-simile en
photogravure. Amulette chrétienne (vis vie siècle) de quinze lignes sur un éclat
de calcaire trouvé à Thèbes, Très curieux.
PAPYRUS DU DANEMARK
Je disais l'année dernière [B. I, p. 201] qu'il n’y avait pas de papyrus au Dane-
mark la lacune: est aujourd'hui comblée :
Chr. Blinkenberg. Un contrat de vente de l'époque ptolémaïque dans Oversigt
over det Kgl. Danske videnskabernes selskabs forhandlinger, 1901, pp. 119-196,
avec une planche en phototypie. 11 s'agit d'un papyrus acheté par M. H.-0. Lange
eu 1900 pour le musée de Copenhague. C'est un contrat de vente en 12 lignes,
parfaitement intact, écrit à Pathyris le 9 Epeiph de l'an XV de Ptolémée
Alexandre et de sa sœur Bérénice (99 av.) : Sensouchis vend un champ à
Pakoibios.
M. Wilcken (Archiv, I, 1901, p. 559) a apporté à la copie très soignée publiée
par M. Blinkenberg quelques corrections de détail qui ont bien leur importance.
PAPYRUS DE RUSSIE
À la mort de l'évêque Porfiri Uspensky de Kiev, la Bibliothèque Impériale de
Saint-Pétersbourg est entrée en possession (par voie d'achat ou d’héritage ?) de
la riche collection de manuscrits formée en Orient par ce prélat il y a déjà un
demi-siècle. Les fragments intéressant la papyrologie sont :
5. Petersb., ἢ. ccLviur. Papyrus. Première épitre aux Corinthiens, 1, 47-20; VI,
13-18; VII, 3, 4, 10-14.
Cf. + Tischendorf, Verhandlungen der Philologenversammlung zu Halle, 1861
(1868), pp. 44-45; Gregory, Prolegomena, pp. 434-435 (0) et Textkritik, t. I, p. 149;
+ Tregelles, New Testament, add. p. 1021.
5. Petersb.,gr.n. ccLxxv. Deux ff. de parchemin pourpre, écrits en or. Étaient en
1850 au Caire dans la bibliothèque du patriarche d'Alexandrie. Marc, IX, 14-18,
20-22 et X, 23, 94, 29. Publiés par + Porfri Uspenski, Voyage en Égypte el aux
monastères du grand Saint Antoine el du bienheureux Paul de Thèbes, en 1850
(S. Petersb., 1856, en russe), p. 11 et Orient chrétien : Égypte et Sinaï (S. Petersb.,
1857, en russe), pl. XIII et XIV, fac-similés ; + Tregelles, New Testament, add.
p. 1019; Scrivener-Miller, Introduction, t. 1, p. 140, note 1; Gregory, Prolego-
mena, p.384 (N a) et Textkritik, t. I, p. 59.
S. Petersb.,n. ccuxxvr. Parchemin rapporté d'Égypte (2) par Porfiri Uspenski.
Matthieu, XIV, 19-34 et XV, 2-8. Cf. Gregory, Prolegomena, Ὁ. 392 (T c) et Tertkri-
tik, I, p.67; Scrivener-Miller, Introduction, t. I, ἢ. 148.
- La Bibliothèque Impériale possède encore six feuillets rapportés d'Égypte (?)
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 124
par Tischendorf (vi 8.), contenant Jean, 1, 25-42; IT, 9-1V, 14 et IV, 34-50. Cf.
Tischendorf, Nolitia edilionis codicis Sinailici (Leipzig, 1860, in-4°), p. 50, n. If;
Muralt, Catal. des mss. gr. de la Bibl. Imp., n. 1); Gregory, Prolegomena, Ὁ. 392
(T b) et Textkrilik, 1, p. 67; Scrivener-Miller, Infroduction, [, p. 148.
V. Iernstedt, Un papyrus prophélique (en russe) dans Journal du ministère
russe de l'instruction publique. Section de philologie classique. T. 337, octobre
1901, pp. 48-55. Je ne sais malheureusement pas le russe, mais j'ai pu comprendre
que M. lernstedt a réédité dans cet article d’après l'original, le très intéressant
Catalogue de livres sur papyrus (Haeberlin, n. 138) publié en fac-simile par
Muralt (1864) et déchiffré par Zündel (ΕΛ. Mus., 1866, p. 431). M. Iernstedt a réussi
à déchiffrer bien plus de titres de livres que Zündel qui n'a travaillé que sur le
fac-simile de Muralt. On sait que dans cette liste figure le titre [᾿Αρισ]τοτέλους
᾿Αθηναίων πολ[ι]τείας. Cf. les comptes rendus de + Εἰ. Kurtz, Byzantinische
Zeitschr., XI (1902), p. 219 et de U. Wilcken, Archiv, IL (1902), pp. 163-164.
B. Turaieff, article en russe dans le Bulletin de l'Académie Impériale des
sciences de S. Pétersbourg, 1900, VII, n. 3 (tirage à part, p. 8). Article que j'ai
encore moins compris que le précédent : tout ce que je vois, c'est que M. Turaieff
publie deux fragments liturgiques chrétiens fort curieux (viuc-xe s.?), l'un de la
collection Golénischeff, l'autre de la collection de feu W. de Bock.
C.R. Gregory, Textkrilik, I, p.68, décrit trois feuillets de parchemin (vre-vrre 8.),
trouvés en Égypte, appartenant à M. Papadopoulos-Kerameus, de Saint-Péters-
bourg (ancienne collection fkonomopoulos au Caire) et contenant Matthieu, XX,
3-32 et XXII, 4-16.
H. Weil, La légende d’Ésope dans Études de littérature et de rythmique grecque
(Paris, 1902, 16°), pp. 119-126, republie un article qu'il avait écrit jadis (Revue de
philologie, IX, 1885, pp. 19-24) sur un papyrus littéraire de la collection Golénis-
cheff (Haeberlin, n. 145).
PAPYRUS D'ALEXANDRIE
La + Vossische Zeitung a publié, sur les papyrus du musée d'Alexandrie, un
article reproduit par la Deutsche Lilleralurzeitung, XXII (1901;, col. 2071. Cet
article n'ajoute rien aux indications que j'ai données dans mon premier Bulletin
[B. I, p. 203], sinon la mention de deux nouveaux fragments littéraires, l'un sur
« l'histoire naturelle », l'autre «a un calendrier ancien ».
Le hasard d'un dépouillement au British Museum m'a permis d'exhumer fort à
propos deux articles intéressants de M. Botti :
Due frammenti inediti della Iliade nel Museo d’Alessandria dans Rivista Egi-
siana, VI (1894), pp. 126-128. Renseignements intéressants sur les papyrus
d'Alexandrie, au nombre de plus de deux mille (envoyés par M. de Morgan) et
publication de deux fragments homériques, Iliade, XI, 347-357 et 802-821, ainsi
que d'un fragment d’argument en prose d'un chant de l'iliade.
Del futuro Museo Greco-Romano di Alessandria (deuxième article) dans Rivista
Quindicinale, 111 (1891), pp. 245-247. M. Botti y publie six colonnes d'un parche-
min latin du musée d'Alexandrie, contenant les comptes d'un banquier. Cf. aussi
Botti, Notice des monuments exposés au Musée Gréco-Romain d'Alexandrie
(Alexandrie, 1893, 165), p. 50, ἡ. 2919.
422 5. DE RICCI
La collection des papyrus grecs du musée d'Alexandrie est assez longuement
décrite par M. Botti dans un autre ouvrage, Catalogue des monuments exposés au
Musée Gréco-Romain d'Alexandrie (Alexandrie, 1901, 16), pp. 323-340, nn. 392-
676. Les contrats d'époque romaine sont assez nombreux. :
PAPYRUS DU CAIRE
(Ancien musée de Gizeh).
Dans la bibliographie du ms. de l'Évangile de Pierre, de l'Apocalypse de
Pierre et du livre d'Énoch, telle que je l'ai donnée l'an dernier [B. I. p. 204} se
sont glissées deux fautes d'impression : 1. 28 lire Gymnasialschulwesen et |. 22
lire Badham The origin of the Gospel of Peter. De plus, il faut ajouter les ren-
vois suivants :
H. B. Swete, The apocryphal Gospel of Peter : the greek lext of the newly dis-
covered fragment (Londres, 1892, 8°), pp. 15, et Revised edition withsome corrections
from the MS (Londres, 1893, 80); H. B. Swete, Euxyyekov κατα Iletpov. The Akhraim
fragment of the apocryphal gospel of Saint-Peler, ediled with an introduction,
notes and indices (Londres, 1893, 8°), pp. xuvinr-34 et 2 planches; Anonyme, The
gospel according lo Peter by the author of « Supernalural religion » (Londres,
1894, 8°), pp. 139; H. von Schubert, Das Petrus evangelium : synoptische Tabelle
nebst Uebersetzung und krilischem Apparat (Berlin, 1893, 80), pp. 31 ; H. von Schu-
bert, Die Composition des Pseudopetrinischen Evangelienfragments(Berlin, 1893, 8°),
pp. xu-196; + E. Piccolomini, Sul éesto dei Frammenti dell’ Evangelio e dell
Apocalissi del Pseudo-Petro dans Rendiconti Accad. Lincei, VII- VIII (1899), pp. 388-
404 (Compte rendu par Harnack, Theol. Lileraturzeitung, XX V, 1900, col. 137-139).
E. Preuschen Antilegomena (Giessen. 1901, 16°), pp. 14-18, 48-51, 93-94, 114-118
et 140-142; H. B. Swete, The Psalms of Solomon wilh the greek fragments of the
book of Enoch (Cambridge 1889 16°), pp. vu-50 (cf. p. vin et pp. 24-50); J. Rendel
Harris, À popular account of the newly recovered gospel of St-Peter (Londres
1893 160), pp. vi-97. P. Lejay, Revue critique, XXXVII (1894), pp. 207-209.
S. Reinach, L'évangile de saint Pierre (Paris, 1893, in-32), pp. 24 (extrait de la
République Française, 5 janv. 1893); 8. Reïinach, L’apocalypse de Pierre (Paris
1893, in-32), pp. 18 (extrait de la République Française 15 janv. 1893); C. Wes-
sely, Das Petrus Evangelium und der mathematische Papyrus von Achmtm, dans
Studien zur Paldographie, 1 (1904), pp. xxxvn-xxxvirr; Stanton, The Gospel of
Peter, ils early history aud character considered in relation to the history of the
recognilion in lhe church of Lhe canonica: gospels dans Journal of theological
studies 11 (1900-1901), pp. 1-25; les Bollandistes, Un fragment des actes de
5. Julien d'Anazarbe dans Analecta Bollandiana, XV (1896), pp. 13-16; A. Har-
nack, Allchr. Liléeraturgeschichte, passim.
+ Je n'ai pas vérifié les renvois suivants : Baljon, Theol. Studien, 1894, p. 1 544:
(et Utrecht, 1896); Funck, Theol. Quartalschr. 1893, p. 218 seqq; A. Harnack,
Theol. Lileraturzeitung, 189$, col. 9 seqq.; Hilgenfeld Zeitschr. für wissensch.
Theol. 1893, pp. 220 seqq.; Koch, Kirchliche Monatschr. 1896, pp. 311 seqq. ;
J. Kunze, Das neu aufgefundene Bruchstück des sogenannten Petrusevangelium
(Leipzig, 1893, in-8°), p.48; Robinson, The new world, 1894, pp. 680 seqq.; von Sodeu,
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 123
Zeilschr. für Theol. und Kirche, 1893, pp. 32 sqq.; Zahn, Das Petrusevangelium,
1893; Zahn, Geschichle des Neulesiamentlichen Kanons, t. 11, pp. 768 seqq.; Die-
terich, Nekyia, Beiträge zur Erklärung der neuentdecklen Petrusapokalypse
(Leipzig, 1893, 8e), pp. vi-238 (cf. Drug, Liler. Centralblalt 1894 col. 386-387).
À. Loisy, Enseignement biblique, 1893, chronique, p. 113, etc. etc.
B. P. Grenfell et A. S. Hunt, Pfolemaic papyri in the Gizeh museum. dans Archiv
11 (1902), pp. 79-84. Deuxième article. En attendant la publication de leur cata-
logue des papyrus grecs du musée du Caire, MM. Grenfell et Hunt publient
quelques documents ptolémaïques du ic siècle retirés par eux de cartonnages
de momies. Ce sont respectivement :
N. 10250 (an 20 d'Evergète 1). Reçu de plus de mille artabes de blé, dressé par
un Πέρσης τῆς ἐπιγονῆς (cf. aussi Amherst papyri 11, Ὁ. 53).
N. 10271 (an 24 d'Evergète I ou d'Epiphane ?) Lettre à Euphranôr sur un ὑπόμ-
vnuz des cultivateurs de ricin (des βασιλικοὶ γεωργοί) du bourg de Philopator
dans le nome Arsinoîïte.
NN. 40277, 10323, 40274 (an 14 d'un Ptolémée du 11 8.). Déclarations (äxcypapai)
de maison et cour.
NN. 10295, 40307. Déclarations analogues décrites mais non publiées.
M. Hunt a fait savoir à M. E, von Dobschütz, par l'intermédiaire de M. ἢ. J.
White, qu'il y avait au musée du Caire un papyrus contenant la correspondance
apocryphe d'Abgar et du Christ. M. E. von Dobschütz espère pouvoir publier ce
texte dont il signale l'existence dans la Zeitschrift für wissenschaflliche Theologie
XLII, (4900), p. 427, note 1.
B. P. Grenfell et A. 8. Hunt, Thé Amherst papyri, t. II, pp. 169 et 180, citent des
papyrus inédits du musée du Caire (nn. 40267, 10416, 10485).
J'ai signalé par mégarde l’an dernier comme étant à Chicago un papyrus du
musée du Caire : c’est un fragment homérique portant au verso les restes très
mutilés d'un texte non littéraire, et publié per E. J. Goodspeed, À papyrus frag-
ment of Iliad E, 824-841 dans Amer. journ. philol. XXI (1900), pp. 310-314. Cf. Crô-
nert Archiv I, (1901), p. 507.
Par contre le papyrus bilingue grec et latin édité par MM. Collinet et Jouguet
dans l'Archiv n'appartient pas au Musée, mais à l’Institut Français d'Archéologie
Orientale au Caire.
E. J. Goodspeed, Amer. journal of theology, V (1904), pp. 358-359, corrige
d'après sa copie de l'original quelques détails du texte du papyrus 10263 du Caire
publié en 1900 par A. Jacoby.
DAMAS
À l'heure où tous les regards sont tournés vers l'Egypte, les philologues ne
veulent pas écouter ceux qui leur parlent de chercher ailleurs des manuscrits :
c'est tout juste si l'on ose encore songer au Sinaï où M. Gardthausen n'a vu et
catalogué, dit-on, qu'une moitié environ des manuscrits grecs. 11 y a.bien les jour-
nalistes qui parlent de Moukden et des bibliothèques Tartares, mais cela ne parait
pas sérieux (1). Plus intéressantes et moins connues sont les recherches de
(4) Cf. E. Bretschneider, Uber den Ursprung der Mukden’schen Bibliothek dans
Beilage zur Allgem. Zeitung, 1901, n. 89, pp. 1-4.
124 8. DE RICCI
M. Bruno Violet dans la geniza de la mosquée de Damas. Il y a découvert, en
quantités considérables, des fragments grecs, latins, syriaques, français, armé-
niens, hébraïques et arabes. De tout cela il n'a encore publié qu'un ms. bilingue
(grec et arabe) en lettres grecques du psaume LXXVIIT (var siècle) dans l'Or'ien-
lalislische Lilleraturzeilung, IV (1901), col. 384-403, 425-441 et 475-488 : Ein
zweisprachiges Psalmfragment aus Damascus (avec un fac-simile). Cf. des
comptes-rendus Deutsche Litleraturzeitung, XXII (1901), col. 2951-2952 et Beilage
zur Allgemeinen Zeitung, 1901, n. 275, p. 8, 1902, I, p. 120, et 1], p. 583, Ueber-
wichtige Funde aller Handschriften der heiligen Schriften (d'après le Standard).
Nous devons à M. von Soden un intéressant article sur ces manuscrits que le
Sultan vient de faire expédier à Berlin (cf. Orientalistische Literatur-Zeitung,
1901, col.) Ein Weihnachtsgeschenk des Sultans an die deutsche Wissenschaft dans
die Christliche Well, xv (1901), col. 1247-1249. IL y énumère les textes grecs
suivants :
a Fragments du Nouveau-Testament du rv°, du v* et peut-être du mr siècle.
b 25 feuillets d'un psautier en onciale.
c Long fragment patristique et fragments divers.
ÉTATS-UNIS
William C. Winslow, Distribution of papyri : a list of one hundred und
eighteen papyri, presented in 1901 to American colleges by the Egypt Exploration
Fund dans Biblia X1V (1901), pp. 45-53 avec un fac-simile d'Oxy. 211 sur la
couverture.
Liste extrêmement précieuse et que je résume ci-après :
Université de Pennsylvanie à Philadelphie : Oxy. 2, 16, 29, 35, 45, 65, 88, 108,
168, 181, 194, 223, 237, 239, 245, 269, 290, 293, 327, 344, 348, 349; Fay. 29, 71, 88,
174, 196, 310, 349, 359.
Harvard : Oxy. 8, 46, 92, 109, 170, 480, 200, 209, 284, 314, 328, 362. Fay. 92, 157,
168, 197, 350, 360, 362.
Yale : Oxy. 10, 24, 115, 206, 216, 249, 282, 329, 351, 393; Fay. 25, 180, 211, 351,
361, 366.
Columbia : Oxy. 13, 226, 262, 317, 330, 345, 352, 358, 399 ; Fay. 42, 135, 164, 214,
352, 357, 365.
John Hopkins (Baltimore) : Oxy. 17, 25, 57, 114, 230, 296, 319, 331, 334, 353;
Fay. 33, 75, 165, 353, 358, 363.
Princeton : Oxy. 19, 64, 244, 320, 332, 333, 357; Fay. 32, 16, 166, 216, 354, 364.
Hamilton college : Oxy. 14, 118, 369; Fay. 183, 355.
Vassar college : Oxy. 10, 169; Fay. 28, 176.
Rappelons qu'Oxy. 3 est au Haskell-Museum à Chicago depuis 1898.
M. Wilcken, Archiv. I (1901), pp. 551 étudie les reçus de Chicago publiés par
M. Goodspeed.
ERRATUM
J'ai relevé dans mon premier Bulletin (Revue, XIV, 163 suiv.) quelques fautes
d'impression et petites erreurs :
BULLETIN PAPYROLOGIQUE 128
p. 166, 1. 18 ajouter 8. Pétersbourg; 1. 25, lire, Greco-Egizi; p. 115, 1. 21, lire
et des symbolae; p. 181, 1. 20 lire la vulgate; p. 181, 1. 26, lire petit in-folio;
p. 188, 1. 14 lire ᾿Αρσινοείτῃ; 1. 4 avant la fin, lire le papyrologue; p. 195, 1. 6
lire pp. 76-11; 1. 13 lire, Sitzungsber. ; 1. 28, Lire 4900 ; p. 196, 1. 4 lire 1901: p. 200,
1.7 et 5 avant la fin, lire réunie ef importance; p. 201, note 2, 1.1 lire Dewischeit.
Et dans mon deuxième Bulletin, XV, p. 408, n. 2, lire Lilerarisches ; Ρ. 435, 1.
avant dern., lire : di filologia ; p. 436, 1.4, lire Fr. Mie; p. 441, 1. avant dern., lire
ἡγεμόνες ; p. 446, L. 8 avant la fin, lire Manchester; p. 451, 1. 34, Lire que; p. 452,
n. 1, lire Antinoou ; 1. 19, lire 1901; p. 453, n. 1, {fre Dewischeit; p. 458, n. 2, 1. 6,
lire Strassburgo.
Paris, 145 août 1902.
Seymour pe Ricct.
COURRIER DE GRÈCE
Athènes, 11-24 février 1908.
L'événement le plus important qui se soit passé en Grèce,
dans l'ordre politique, depuis trois mois, est assurément le
renouvellement de la Chambre et l'avènement au pouvoir du
Ministère Delyannis. Le chef du Cabinet ἃ promis de fonder la
politique du nouveau gouvernement sur un système d’'écono-
mies sévères et il vient de remettre à la Chambre un projet
de budget qui comporte, en effet, quelques millions d'économies
sur les chapitres des dépenses. Cette diminution ne peut être
réalisée qu'après l'adoption d’un nombre assez important de
projets modifiant certaines dispositions de la loi et réduisant
non seulement le traitement de tout un ordre de fonctionnaires,
mais encore le personnel des employés subalternes de l'admi-
nistration et même le nombre des députés. Cette dernière
mesure, quoique rationnelle, sera très certainement diflicile à
obtenir du Parlement. Le Ministère dispose-t-il d’une majorité
assez forte et assez compacte pour exécuter, au moins en par-
tie, son programme ? C'est la question qui se débat dans la
presse et dans le public depuis les élections. Manifestement
M. Delyannis est le chef du parti le plus important dans l'as-
semblée législative, mais ce parti seul ne peut lui donner une
majorité indiscutable et il a dû s’adjoindre deux autres groupes
secondaires et quelques députés indépendants. Cette majorité
composite n'a pas encore été éprouvée par les débats. La
Chambre n'a opéré jusqu’à présent que la vérification des pou-
voirs et les premières discussions n'auront sans doute lieu que
COURRIER DE GRÈCE 127
dans une quinzaine de jours après les fêtes du Carnaval. Il est à
souhaiter pour le bien de la Grèce que le nouveau Ministère
reste aux affaires un certain temps; le pays a surtout besoin de
stabilité pour refaire entièrement son crédit, dont le relèvement
est en bonne voie et dont le progrès s’accélèrerait encore sous
l'application d’un régime d'économies sérieuses. M. Delyannis
a la réputation d’un homme habile ; il s'est chargé du Minis-
tère des Finances ; souhaitons pour le pays et pour lui-même
qu’il se tire d'affaire à son honneur.
Bien que professeur et prytane de l’Université d'Athènes,
M. Cazazis peut être relié à la politique puisqu'il est en même
temps, et depuis nombre d'années, président de la société
« Hellenismos », porte-parole de la nation dans toutes les
questions qui intéressent l’'Hellénisme en dehors du royaume
libre. En cette dernière qualité, M. Cazazis a fait une suite de
conférences très suivies sur la Macédoine. C'est, du reste, la
question brûlante du jour, et les inquiétudes légitimes du
peuple grec, au moment où l'intervention de l’Europe et l'im-
patience des Bulgares peuvent amener des complications dans
une contrée que l'Hellénisme regarde comme sienne, ont fait
de cette série de conférences un événement important.
Dans ces conférences l'orateur a rappelé l’histoire de la
Macédoine depuis le roi Philippe, père d'Alexandre le Grand,
jusqu’à nos jours; il a ensuite exposé l’origine et les différentes
péripéties’ historiques des races qui se disputent la prédomi-
nance dans la presqu'île des Balkans et l’antagonisme qui s’est
élevé depuis quelques années entre les Hellènes et les Bul-
gares, antagonisme qui est, du reste, un héritage commun aux
deux nations depuis l'Empire de Byzance. C’est sur cette riva-
lité, cette hostilité plutôt, que M. Cazazis appelle l'attention de
ses concitoyens. Il leur montre la Bulgarie ne rêvant rien de
moins que de mettre la main sur la Macédoine d'abord, puis
sur la Thrace et enfin sur Constantinople. Pour les Grecs, la
Bulgarie est l'avant-garde du Panslavisme et le Panslavisme
c'est le flot qui engloutira tout l'Orient si les puissances euro-
128 3. GUILLEBERT
péennes ne se liguent pas entre elles pour soutenir l’Hellénisme
et l'opposer comme une digue aux progrès incessants de Ja
Russie.
Nous ne suivrons pas l'éminent professeur dans les dévelop-
pements de sa thèse dont le but est de rappeler aux citoyens du
royaume libre les droits historiques de la Grèce sur les pro-
vinces européennes de la Turquie et de leur inspirer la foi
patriotique qui soulève les montagnes. Nous nous contenterons
de signaler cet éloquent plaidoyer en faveur des revendications
helléniques sur la Macédoine comme un épisodé marquant dans
l'actualité athénienne.
De l’Université au Théâtre, la transition est facile ; nous pas-
serons donc de la tragédie vécue à la tragédie écrite. Nous
signalerons comme un progrès important dans les fastes encore
peu remplis du théâtre grec moderne le fonctionnement régu-
lier de la jolie petite salle, édifiée tout récemment, aux frais de
S. M. le roi de Grèce, et qui ἃ été inaugurée l'hiver dernier par les
représentations de Madame Réjane, en tournée dans nos para-
ges. Peu à peu, par les soins de la Commission d'administration
du Théâtre-Royal, c'est le nom du nouvel édifice, une troupe
convenable s’est formée, et aux traductions de pièces étrangères
commencent à se mêler quelques œuvres des littérateurs du
pays. Quand nous disons une troupe convenable, nous n'avons
pas l'intention de marchander nos éloges aux comédiens ordi-
naires de Κι, M. le roi de Grèce; nous reconnaissons tout 16
mérite d'acteurs qui se sont formés sans le secours d'aucune
école et qui ne peuvent, dans de telles conditions, arriver à la
perfection. Les professeurs sont assez difficiles à trouver, le
grec moderne n'étant pas une langue très répandue. On nous
annonce pour celte année une tentative de professorat que
M. Truffier, de la Comédie française, a bien voulu entre-
prendre, sans se dissimuler, du reste, les difficultés qui l'at-
tendent, en raison justement de l'ignorance où il est de la
langue actuelle de la Grèce.
Dans le domaine de l'Art nous avons encore à signaler le
COURRIER DE GRÈCE 429
goût des expositions de peinture qui semble se développer rapi-
dement dans la capitale; nous en avons eu jusqu’à trois à la
fois cét hiver. Peut-être les artistes auraient-ils gagné à épar-
piller moins leurs œuvres, et à nous montrer un ensemble de
travaux plus nourris ; cependant, l'élan semble donné et, l'expé-
rience aidant, nous espérons voir, à la saison prochaine, les
salles d'exposition mieux remplies encore de tableaux et de
visiteurs. Les peintres ne sont pas encore très nombreux en
Grèce et ce sont toujours à peu près les mêmes noms que nous
voyons figurer au bus des toiles, des aquarelles ou des pas-
tels; cependant nous devons signaler l’apparition -de la pein-
ture militaire au milieu des scènes de genre et des marines
habituelles. M. Roïilos, un artiste très jeune encore et qui a
étudié sous les premiers maîtres à Paris et à Munich, a exposé
au salon de la Mairie d'Athènes une toile de très grandes
dimensions sous la légende « Pharsala ». Le peintre nous a
montré au milieu d'une plaine le prince-héritier de Grèce com-
mandant en chef de l’armée de Thessalie, dans la dernière
guerre, passant devant le front de ses troupes et entouré de
tout son état-major. Îl y avait là, en outre de la disposition
très pittoresque des masses d'infanterie, tout une série de por-
traits très réussis etun groupe bien vivant d'officiers à cheval.
Le même artiste avait déjà exposé il y a deux ans au Palais du
Zappeion une grande toile rappelant un épisode de la bataille de
Mati, aux frontières thessaliennes. C'est décidément une voca-
lion et c'est la première de ce genre; il est regrettable que
M. Roïlos n'ait pas eu une victoire pour s'inspirer mieux encore
de la vie militaire de son pays.
Tous ceux qui tiennent une plume avec 5 quelque autorité dans
Athènes se sont unis pour célébrer le cinquantenaire de
M. Angelos Vlachos, c'est-à-dire le cinquantième anniversaire,
non pas de sa naissance, mais de son entrée dans la carrière
littéraire. M. Vlachos est, sans contredit, le plus actif des
hommes de lettres de la Grèce. Penché depuis cinquante ans
sur sa table, il a entassé, et il entasse encore manuscrits sur
130 δ. GUILLEBERT
manuscrits. Il a écrit des poèmes, des comédies, des articles
de critique, des chroniques, des nouvelles ; il a même fait des
dictionnaires. Ce n’est pas un créateur, mais un observateur
de premier ordre. Ses traductions du français, de l'anglais ou
de l'allemand en grec sont remarquables.
Les fêtes de ce cinquantenaire ont duré plusieurs jours : con-
férences à l’Université, à la salle du Parnasse, et enfin grand
dîner offert à l'écrivain par ses confrères dans la grande salle
de l’hôtel de la Grande-Bretagne, assaisonné de nombreux et
éloquents discours et couronné par l'offre d'un magnifique
bronze dont l'acquisition avait été faite avec le produit d’une
souscription publique, tel a été le programme de cette solen-
uité jusqu’à présent unique en Grèce.
Quelques jours après cette fête, la ville d'Athènes inaugurait
: éclairage de ses rues à la lumière électrique. La rue Hermès
a été la première illuminée par les flots blancs de ce soleil
artificiel et à la fin de mars toutes les rues principales de la ville
jouiront du même privilège. C'est un nouveau progrès pour la
capitale dont les quartiers se transforment tous les ans et s'em-
bellissent de jolies maisons qui s'élèvent du sol comme par
enchantement.
Je n'ai pas besoin d'apprendre à nos lecteurs l'existence du
syllogue fondé il y a trois ans pour la propagation des livres
utiles au prix unique de 0,40 lepta pour le public et 0,30 pour
les membres de la société. M. Bikélas, président du syllogue,
qui en a été le fondateur et l'âme, a pu annoncer avec une
légitime fierté à la réunion générale des membres qui a eu lieu
en janvier, sous la présidence d'honneur de son Altesse Royale
Ja princesse Sophie, que l’œuvre des Livres Utiles a dispersé en
trois ans plus de 400,000 petits volumes aux quatre coins du
royaume.
On peut encore signaler comme un progrès dans la librairie
la publication d’une revue illustrée, l'Orient, qui vient d'at-
teindre sa dixième livraison, sans défaillance, au contraire.
Les illustrations en phototypie sont parfaitement réussies et
COURRIER DE GRÈCE 131.
peuvent soutenir la comparaison avec celles des autres publi-
cations européennes.
. Pour compléter tous ces symptômes de progrès matériel et
moral, signalons une œuvre, entreprise depuis quelques mois
déjà, et qui marche à grands pas, sous l’active direction d'in-
génieurs français. Nous voulons parler de la construction du
chemin de fer de Pirée-Larissa-Frontières, confié à la Com-
pagnie française des Batignolles. Les travaux avancent littéra-
lement à vue d’œil et la Compagnie concessionnaire pense
livrer à l'exploitation, dans un an au plus tard, la section
Pirée-Athènes-Livadia, près de Thèbes. La construction de
cette ligne ne donnera pas seulement à la Grèce un moyen de
communication rapide entre la capitale et les provinces du
Nord; elle dotera encore Athènes de l'édifice qui est dans
toutes les villes modernes comme le palais du progrès, c'est-à-
dire d'une véritable gare de chemin de fer. De plus, quand la
ligne sera achevée et reliée aux lignes turques, elle permettra
aux étrangers qui craignent le voyage sur mer, de se rendre
commodément au pied du Parthénon sans s'exposer aux bour-
rasques de la mer ionienne ou au balancement un peu rude
des vagues du cap Matapan.
Pour se moderniser plus vite, la ville d'Athènes a décidé d'ou-
vrir une exposition internationale dans le palais du Zappeion
au mois de mars prochain. Malheureusement, une exposition
ne s improvise pas; il faut de l'expérience d'abord au comité
organisateur, puis à l'entrepreneur chargé d'aménager le
palais, toutes choses qui font généralement défaut ici où une
telle entreprise n’a jamais été sérieusement tentée. Enfin, il
faut un capital. L'argent est le nerf non seulement de la guerre,
mais encore des expositions, et nous voyons que de ce côté il
n’y a point pléthore. En tout état de cause, on pourra organiser
une exposition locale assez réussie, et c'est la solution à
laquelle on se décidera sans doute étant donné le peu de temps
qui reste avant l'ouverture. Il y aura certainement quelques
exposants étrangers qui seront heureux de voir figurer parmi
132 J. GUILLEBERT
les effigies de leur médaillier le profil de Minerve accompagné
du nom révéré d'ASHNA.
Nous ne pouvons terminer ce rapide exposé de la vie athé-
nienne sans signaler la présence de deux éminents artistes fran-
çais, hôtes en ce moment de la cité « couronnée de vio-
lettes ». M. A. Brouillet, peintre parisien, que nous avions
déjà eu le plaisir de voir l’année dernière à l'Acropole, où il
travaillait à son tableau « la Prière de Renan » destiné aux
murs de la Sorbonne, est revenu cette année pour peindre le
portrait de 5. M. la Reine de Grèce. Enfin, M. Coquelin est
depuis deux jours à Athènes; il a donné hier Tartufe au
Théâtre Royal devant une salle comble et donnera ce soir Le
Gendre de M. Poirier et La Joie fait peur.
J. GuiLLEBERT.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
La Revue rend compte, à cette place, de tous les ouvrages relatifs aux
études helléniques ou à la Grèce moderne, dont uN exemplaire sera
adressé au bureau de la Rédaction, chez M. Leroux, éditeur, 28, rue
Bonaparte.
Si les auteurs ou éditeurs désirent: faire hommage de leurs publica-
hons à PAssociation pour: l'encouragement des Études grecques, ils
sont priés de les adresser directement à celle-ci (12, rue de l'Abbaye);
mais, en ce cas, il n’en sera rendu compte dans cette bibliographie que
s'ils en envoient DEUx exemplaires, l’un devant rester à la Bibliothèque
de l'Association, et l'autre devant être remis à l'auteur du compte rendu.
1. ALTMANN (Waller). Architectur
und Ornamentik der antiken Sarco-
phage. Berlin, Weidmann, 41902.
In-8°, 112 p.
Ce petit livre est le développement
d'une thèse latine, qui avait été favo-
rablement accueillie. L'auteur est un
élève de Carl Robert ; c'est dire qu'il a
été à bonne école et que son opuscule,
né sous les auspices du maître, peut
être à certains égards considéré comme
une introduction ou un complément
au monumental Sarkophagenwerk de
celui-ci. Le mémoire se divise en deux
parties : 19 l'architecture des sarco-
phages; 29 leur ornementation. Dans
la pratique les deux sujets sont si
étroitement liés qu'il est difficile de
les envisager séparément, et, de fait,
chacune des deux parties empiète cons-
tamment sur l'autre. La même obser.
vation s'applique d'ailleurs aux chapi-
tres entre lesquels M. Α. divise ses
« livres ». Ainsi, dés le début, les sar-
cophages lyciens sont très malheureu-
sement rattachés (p. 10) au chapitre
des « anthropoïdes », alors qu'il con-
venait de les réserver pour le chapitre
suivant, celui des sarcophages en forme
d'habitation. Les autres chapitres du
premier livre traitent : 1° des fhécas
(parmi lesquelles M. A. range le sarco-
phage du Satrape, malgré son intérieur
anthropoïde, et le sarcophage d’Ale-
xandre qu'il attribue hardiment à
Abdalonyme, sans avoir pesé les nom-
breuses raisons qui infirment l'hypo-
thèse de Studniczka) ; 2° des sarcopha-
ges-lits; 3° de la forme d'autel; 4° des
sarcophages à stries (Anvol); 5° des
sarcophages à colonnes. Dans le se-
cond livre M. A. passe en revue Îles
sarcophages à guirlandes, étudie les -
caractères distinctifs des sarcophages
grecs et romains sous l'Empire et ter-
mine par un important chapitre sur les
critériums chronologiques, au premier
184
rang desquels il faut placer le mode de
coiffure. L'opuscule est assez abon-
damment illustré et quelques monu-
ments y sont publiés pour la première
fois : par exemple une κλίνη de Tosca-
nella (p. 34) et un très curieux sarco-
phage de Cnosse (p. 39 suiv.) où l'on
voit, au pied du lit, traité avec réalisme,
un joueur de flûte, une larve funéraire,
etc. La planche 11 (sarcophage d'Arles)
anticipe sur la deuxième moitié (sous
presse) du tome 11I des Sarkophagen-
reliefs, dont M. A. eut communication
en épreuves.
Le mémoire de M. À. est plein d'ob-
servations de détail qui prouvent que
l'auteur a beaucoup lu et beaucoup vu.
On ne peut s'empêcher de trouver ce-
pendant, que le sujet n'est pas suffi-
samment digéré : c'est plutôt un cha-
pelet de notes et de réflexions souvent
judicieuses qu’un exposé systématique
et complet de la matière.
X. Le Ba.
2. Annual of the British school at
Athens. VII (1900-1). Londres, Mac-
millan, in-8e, 190 p.
Le morceau de résistance est, cette
fois encore, un rapport de M. Evans
sur les résultats de ses fouilles au pa-
lais de Cnosse pendant la campagne de
1901. Ils sont aussi étonnants que ceux
de la précédente campagne et exposés
avec la même intéressante lucidité.
En dehors des données architecturales
qui, pour être comprises exigeraient
un dessin οὐ de longues explications,
nous devons signaler comme des pièces
de premier choix les restes de figures
en plâtre colorié, notamment l’homme
au collier de fleurs de lys (fig. 6), le
cachet qui montre, auprès d'un autel
cornu, un adorant devant une déesse,
perchée sur un tertre sacré que gardent
deux lions du type de la porte de My-
cènes (fig. 9), puis encore es stéatites
à l’archer (fig. 13) et au boxeur (fig. 31),
la fresque si curieuse de la jeune fille
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
à l’accroche-cœur, avec un « nœud
Watteau » derrière la nuque (fig. 17),
le couvercle en albâtre avec le car-
touche du roi Hycsos Khyan (fig. 21),
enfin la grande plaque en ivoire doré,
incrustée de rosaces, de barres en cris-
tal et de merguerites en lapis lazuli,
chef-d'œuvre de bijouterie que M. Evans
a baptisé un peu hardiment peut-être
« la table à jeu royale » (fig. 25). —
Les autres mémoires du volume sont :
1° un rapport de Hogarth sur des
fouilles de Zakro (péninsule étéocré-
toise), à l'extrémité E. de l'ile : elles
ont donné des fondations de maisons,
des vases, des cachets au « Minotaure »,
des crânes étudiés par M. Boyd Daw-
kins; 2° un article de Wilhelm sur
l'inscription CIA, Il, 410, récemment
entrée à l'École anglaise d'Athènes.
T.R.
3. DIETERICH (Karl). Geschichte der
byzantlinischen und neugriechischen
Litleralur. Leipzig, Amelang, 1902
(Die Lilleraturen des Oslens. IV, 1).
In-8°, x-242 Ὁ.
Le livre de M. D. est le premier essai
en Allemagne — et peut-être ailleurs
— d'une véritable his/oire de la littéra-
ture grecque moderne, conçue non pas
comme une stérile nomenclature de
noms d'auteurs et d'œuvres, mais
comme une analyse raisonnée des dif-
férents courants qui se partagent l'es-
prit grec, étudiés dans leurs représen-
tants coractéristiques.
Aprés un chapitre introductif où
l'auteur insiste sur les origines alexan-
drines de la littérature byzantine et
néo-grecque, la littérature byzantine
est résumée en un bref chapitre (pour
se conformer au programme de la col-
lection). Un second chapitre étudie
le passage du Byzantin au Néogrec et
tout particulièrement les influences
françaises, italiennes, orientales sur la
formation de la poésie populaire. Celle-
ci elle-même occupe le troisième cha-
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
pitre où ilest beaucoup plus question
des chansons d'amour et de mort
(Charoslieder) que des chansons de
klephtes. Le chapitre τν est consacré à
l'école classique, considérée comme
un dérivé du byzantinisme; À. Rhan-
gabé, AI. Soutzos en sont les dioscures.
Le dernier chapitre étudie avec une
sympathie marquée l'école populaire,
depuis Solomos et Valaoritis jusqu'aux
poètes les plus récents. M. D. est,
comme la plupart des linguistes, un
ennemi décidé de la καθαρεύουσα; peut-
être n'a-t-il pas assez approfondi les
causes historiques, religieuses et natio-
nales qui s'opposent jusqu'a présent au
triomphe des « impuristes ». On peut
aussi lui reprocher d'avoir limité trop
étroitement la notion de littérature aux
œuvres d'imagination : il nous semble
que des orateurs comme Koumoundou-
ros, des historiens comme Paparrigo-
poulos et Sp. Tricoupis, pour ne parler
que des morts, avaient leur place mar-
quée dans un tableau de la littérature
grecque contemporaine. Dans un au-
tre ordre d'idées, M. Bikélas n'ob-
tient qu’une sèche mention sous Île
nom de Vikélas, que M. D. croit à tort
(p. vu) d'origine romane ; cette ortho-
graphe n'est pas plus correcte que
celle de « Prudhom » (sic) pour dési-
gner l'auteur du Vase brisé (p. 211).
On pourrait chicaner M. D. sur d'au-
tres points, notamment sur l'abus fati-
gant qu'il fait du terme vague « orien-
tal » pour caractériser tout ce qui est
byzantin, alors que tant de: choses
« orientales » ne sont au contraire que
des emprunts à Byzance; ne va-t-il pas
(p. 54) jusqu'à supposer que les chan-
sons satiriques contre les empereurs
sont d'origine « orientale », oùbliant les
refrains que fredonnaient les soldats
de Jules César derrière le char du
triomphateur!
T. R.
135
4. GERCKE (Alfred). Abriss der grie-
chischen Lautlehre. Berlin, Weiïd-
mann, 1902, In-12, vi-86 p.
Cet abrégé s'adresse non aux lin-
guistes, mais aux philologues ; l'auteur
le présente lui-même comme une intro-
duction aux ouvrages de G. Meyer et
de Brugmann et ne prétend pas appot-
ter du nouveau ; on notera pourtant ce
qu'il dit($8) du remplacement spora-
dique de la moyenne aspirée par une
moyenne ordinaire, après une syllabe
aspirée : φιδάχνη (= πιθάκνν), θάμδος,
θρόμδος (ce dernier exemple peu sûr).
Est-ce que l'explication ingénieuse de
μοῦσα, mont-ja, par Bergfrau appar-
tient à l'auteur? Une innovation assez
hardie est le tableau chronologique de
la fin où sont résumés en quatre-vingt-
quinze paragraphes, groupés par épo-
ques, les changements successifs du
phonétisme grec : l'auteur ne se dissi-
mule nullement ce que cet essai a d'aven-
tureux et d'incomplet, mais il est inté-
ressant et pourra rendre service. Le
reste du livre est un résumé clair,
concis et bien ordonné des derniers
résultats de la science; il paraît bien
au courant {{) et mériterait peut-
être d'être traduit, à la condition d'éli-
miner quelques rapprochements par
trop hypothétiques et d'adopter un
style un peu moins télégraphique.
L'impression aurait dû être mieux sur-
veillée : dès la première page j'ai
compté trois coquilles, et il y en a
beaucoup d'autres.
H. GRÜBLER.
5. HANNIG (Franciscus). De Pegaso
(1) L'auteur emploie encore (p. 65 et passim)
l'absurde expression More pour « temps pre-
mier » qui ne trouve aucune justification dans
les textes. Je ne vois pas comment l'orthographe
Me Πιαμόρια peut se rattacher aux noms ca-
riens (p. 31). — P. 12. iourmenta de l'inscrip-
tion du Forum n'a peut-être rien à faire avec
| tugum:
136 COMPTES RENDUS
(Breslauer philol. Abhandlungen,
VIIT, 4). Breslau, Marcus, 1902. In-8°,
162 p.
L'ordre, la méthode, le bon sens,
telles sont les qualités maîtresses de ce
travail solide, mais un peu terne. L'au-
teur s'occupe d'abord, très en détail,
des mythes relatifs à la naissance de
Pégase, et il insiste avec raison sur l'am-
phore archaïque de Béotie ‘BCH, XXI,
455) qui nous a révélé la nature cheva-
line de Méduse dans la tradition primi-
tive. Poseidon Hippios lui-même a dû
être adoré sous la forme d'un cheval.
Quoi de plus naturel, dès lors, que la
généalogie de Pégase ? Le second cha-
pitre étudie l'association de Pégase
avec Bellérophon ; M. H. la croit très
ancienne, originaire de Grèce d'où elle
aurait été importée en Lycie. Au con-
traire, la combinaison de Pégase avec
des sources est relativement récente ;
primitivement le cheval qui d'un coup
de sabot produisit Hippocrène est ano-
nyme. Le nom de Pégase n’a d'ailleurs
rien à faire avec #ryh ; il se rattache à
πέγνυμι et signifie « solide ». Le cha-
pitre le plus bref et le plus insuffisant
est le dernier : de fabulae explicatione.
L'auteur passe consciencieusement en
revue les systèmes des mythologues
anciens et modernes, mais arrivé à sa
propre opinion il tourne court: nous
apprenons seulement que Pégase est,
comme Arion, un cheval divin, auxi-
liaire de son maître. On s'en doutait.
Un peu de folklore comparatif (M. H.
en use par ci par là) n’eût pas été de
trop à cette occasion.
A. Micuer.
6. IATZIDARKIS (George). ᾿Ακαδημειχὰ
᾿ ᾿γαγνώσματα, “Ελληνιχὴ, Λατινιχὴ καὶ
Ἰνδικὴ Γραμματιχή, ὑπὸ Γεωργίου N.
Χχττίξαχι. À. — Ἔν ᾿Αθήναις, Βιδλ, K.
λεέπέκ, 1902, Gr. in-8, κή-608 pp. (Bibl.
Murasly).
À tous les linguistes de mon âge ce
BIBLIOGRAPHIQUES
livre en rappellera un autre, dont ils
ont sûrement fait leurs délices autrefois,
où peut-être, comme moi, ils ont puisé
leur première initiation : les Leçons
sur la Science du Langage, de Max
Müller. Même exposition abondante et
variée; même agrément de forme, dont
nous ont déshabitués les manuels plus
concis et plus sévères de la nouvelle
école : c'est bien là le livre qu'il fallait
à un pays neuf encore à la science lin-
guistique, pour la lui enseigner en la
lui faisant aimer. ἃ vrai dire, malgré
le titre, c'est de grec qu'il est essentiel-
lement question dans ce volume : de
latin, fort peu, et de sanscrit, presque
pas; mais, par cela même que le livre
est écrit en grec, on ne s'étoune ni ne
se choque d'y voir la grammaire com-
parée envisagée exclusivement du point
de vue du grec; et d'ailleurs, puisque
le grec est à bien des égards le plus pur
des idiomes indo-européens, il est d’ex-
cellente méthode de le prendre pour
norme. Nulle part, par exemple, on ne
trouvera une accumulation de faits
d'analogie helléniques comparable à
celle que M. Hatzidakis a coiligée, du
début à l'état actuel de sa propre langue,
dans son chapitre VI (p. 197-233). Et
son nom me dispense d'ajouter que les
explications théoriques qu’il superpose
aux faits sont toujours frappées au coin
des plus saines doctrines.
Ce n'est pas à dire qu'il ne donne
jamais prise à la critique. La bibliogra-
phie, notamment, est bien incomplète.
Ma Grammaire comparée est de 1888, il
est vrai; mais la 5e édition est de 1894,
et l'édition italienne, de 1896; ces détails
ont leur importance dans une science
dont les progrès sont si rapides. C'est
avec raison quil cite trois excellents
périodiques allemands ; mais jusqu'en
Ablemagne on s'étonnera qu'il n'en ait
pas trouvé à citer un seul français, non
pas même les Mémoires de la Société
de Linguistique ; l'American Journal of
Philology partage cet ostracisme. Les
transcriptions du sanscrit laissent éga-
lement à désirer : passons sur des dis-
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
parates telles que devas et dhenu (p.27),
bien qu'il soit expédient de citer tous
les mots, suivant une méthode uni-
forme, soit sous la forme thématique,
soit sous celle du nominatif singulier;
mais comment un auteur qui choisit
pour la semi-voyelle palatale le sym-
bole y (p. 188) écrit-il avec récidive le
mot « Jajur-Veda » (p. 8%, etc.)? L'ac-
cent grave substitué à l’aigu, la dentale
à la cacuminale, l'omission du trait de
longueur se rencontrent aussi çà et là.
Mais au contraire, — et c'est le seul
point qui importe, — les inexactitudes
de théorie sont, dans ce volumineux
ouvrage, infiniment rares et relèvent
beaucoup plus de la forme que du fond.
— P. 66 : la 4° particularité assignée
au pamphylien n'est pas intelligible. —
P. 83 : le z = 8 intervocalique n'est
point un caractère des langues italiques
à opposer au latin; on sait que l'owm-
brien, lui aussi, rhotacise. — P. 204 :
je ne crois pas que le type épique φερό-
utoûa puisse s'expliquer uniquement
par l'analogie de φέρεσθε: cf. Mém. Soc.
Ling., VI, p. 3. — P. 228 : le sk.
yundjmi n'a absolument rien à voir à la
restitution théorique d'une forme grec-
que "ζύγνυμι, qui d'ailleurs en réalité
devrait être "ζυγνεύμι. — P. 246 : la
restitution d'une forme “néuolim, pour
expliquer lat. nôlim, est inutile,
puisque lat. eu devient ou, et tout à fait
invraisemblable en présence de la pau-
vreté de l'apophonie latine. — P. 509
et 513, les mots lituanjiens ne sont pas
tous exactement figurés. — P,. 570 n.,
1. 4, lire ἔστι. — Dans ce chapitre, l'ac-
centuation latine semble par trop sacri-
fée à la grecque.
Ce tome Ie" comporte douze divisions.
— I. Introduction. — II. Sources. —
III. Phonétique physiologique. — IV.
Phonétique figurative. — V. Les lois
phonétiques. — VI. L'analogie grem-
maticale. — VII Les éléments d'em-
prunt. — VIII. Les apophonies, — 1X-X,
La prononciation du grec ancien. —
XI. L'esprit doux οἱ l'esprit rude. —
Xjl. L'accentuation.
191
Parmi ces chapitres, tous excellents,
la longue étude, critique, puis dogma-
tique (p. 284-461), sur la prononciation,
mérite une mention toute spéciale. Elle
ne pouvait guère être écrite que par un
savant grec : non seulement parce quil
y apporte une double autorité; mais
encore et surtout, parce que chez nous
on se lasserait vite d'une aussi minu-
tieuse réfutation opposée à chacun des
arguments des antiérasmiens, pour la
plupart si puérils et si ruisselants
d'heureuse ignorance. Dans l'Occident,
le procès est gagné, et même les velléi-
tés reuchlinisantes d'un ministre ne le
remettent pas un instant sérieusement
en cause. Mais enfin, tant que les Grecs
instruits persisteront à croire que, dans
ce monde où tout change, seule leur
langue n'a pas changé depuis vingt-cinq
siècles, la prononciation qui ne tient
50} compte des données de l'histoire et
de la dialectologie et fausse les vers
d'Homère et de Sophocle gardera à
Athènes un support puissant et tenace.
C'est pourquoi l'on ne saurait trop
applaudir à l'œuvre de vaillance scien-
tifique de M. Hatzidakis et à la péro-
raison éloquente(p. 372), — le mot n'est
pas trop fort, — dans laquelle il adjure
ses compatriotes de ne point placer
l'amour-propre national où il n'a que
faire et d'ouvrir les yeux à l'évidence.
V. Henry.
1. H. LECHAT. Au Musée de l’Acropole
d'Athènes. Études sur la sculpture en
Attique avant la ruine de l’Acropole
lors de l'invasion de Xerxès. In-8e,
468 p., 47 fig. et 3 pl. A Lyon chez
Rey, et à Paris chez Fontemoing, 1903.
Tous les archéologues ont lu les fines
et pénétrantes études que M. Lechat a
consacrées aux statues archaïques de
l'Acropole dans le Bulletin de corres-
pondance hellénique et c'est ici même
qu'il a publié la notiocs sur le scul-
pteur KEndoaios que nous retrouvons
dans son volume. Tout le monde lui
138
sera reconnaissant de la bonne idée
qu'il a eue de réunir ses articles épars
et de les grouper dans un ensemble qui
en marque plus fortement l'enchaîne-
ment logique. C'est une véritable his-
toire de la sculpture attique depuis les
origines jusqu'aux guerres Médiques :
admirable matière, plus fertile qu'au-
cune autre en réflexions sur la forma-
tion du génie grec, sur la lente et
patiente évolution de l'art, même. quand
il se développe sur un 50] ineompa-
rable. Personne n'était mieux doué que
M. Lechat pour aborder ce beau et dif-
ficile sujet. Nous n'avons pas à rappeler
aux lecteurs de la Revue les nombreuses
chroniques où depuis 1895 ils ont pu
apprécier les qualités d'esprit et de
style de celui qui s'était chargé de les
tenir au courant des découvertes et des
publications récentes dans le domaine
archéologique. Pour ma part, ce que je
me plais à admirer le plus dans ces
bulletins de M. Lechat, c'est la sou-
plesse de sa science,” qui sait dans cha-
que sujet aller droit aux idées intéres-
santes, et la clarté toute française de
son jugement. Tels de ses résumés sont
des chefs-d'œuvre d'exposition lucide
où tout est mis en valeur, sans pédan-
tisme, dans une langue alerte et gaie,
et où les réflexions personnelles du cri-
tique montrent à quel point lui-même
est informé sur les questions traitées
dans les ouvrages qu'il analyse.
On connaîtra sous une autre face le
talent de l'auteur, quand on aura lu son
nouveau volume. C'est une science toute
technique et plus sévère. On y sent le
résultat de patientes méditations et de
longues journées passées en face des
chefs-d'œuvre que contient le Musée
de l’Acropole d'Athènes. Beaucoup de
gens les ont vues, ces précieuses
corés que les fouilles nous ont rendues
toutes pimpantes de couleurs poly-
chromes; beaucoup de touristes sont
venus saluer leur jeune et étrange
beauté; beaucoup d'archéologues ont
pris des notes sur leurs calepins en
contemplant leurs visages osseux, éclai-
COMETES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
rés d'un naïf sourire, leurs- vêtements
tout raidis de plis symétaiques,. Mais
je ne crois pas qne personne. les con-
naisse pour. les avoir étudiées. à foni
comme M. Lechat.
Le priucipe qu'il a appliqué à ces
sculptures est celui du catalogue, dont
on ne saurait trop recommander la pra-
tique aux étudiants qui veulent bâtir
leurs idées sur un fond solide. Avant
toute déduction historique, M. Lechat
s'est astreint à cataloguer pour lui-
même les détails de chaque seulpture,
pièce par pièce. Il a scruté chaque
boucle de cheveux, chaque ligne des
paupières, il a disséqué les ouriets et
les cartilages des oreilles, il a examiné
une à une les étoffes du vêtement, il
en ἃ sondé tous les replis, il a noté
tous les vestiges de couleurs. C'est après
cette énorme et minutieuse enquête
qu'il a pris la plume pour écrire ses
articles, comme un médecin qui n'écrit
sur un cas pathologique qu'après avoir
autopsié le plus de sujets possible. Il
en résulte que les très petits détails
abondent dans ses descriptions, mais
qu'ils concourent à une idée générale,
qu'ils soutiennent comme une ossature
solide les raisonnements esthétiques.
On voit comment se sont superposés,
lentement, logiquement, le travail du
bols, le travail de la pierre tendre, le
travail du marbre. On suit l'histoire
des gestes, l'élaboration prudente de
chaque mouvement, si naturel et si
facile qu'il semble, un bras porté en
avant, une main saisissant le pli de la
draperie, un pied avancé. On assiste
aux ingénieuses « tricheries » des an-
ciens sculpteurs pour dompter la ma-
tière rebelle et lui donner l'apparence
dela vie; on voit de combien de petits
morceaux rapportés et patiemment cise-
lés se compose une statue archaïque.
Sous nos yeux la plastique grecque
progresse sans bruit et sans secousse,
comme une fleur s'ouvre au soleil.
Enfin, quand l'évolution est terminée,
quand tout un peuple de statues se
presse autour du sanctuaire athénien:
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
J'archéologue revient de nouveau et les
- passe encore en revue. Il détermine
alors les ressemblances, il recherche
les œuvres sorties des mêmes ateliers.
C'est un nouveau classement et un
nouveau catalogue. Les airs de physio-
nomie, les sourires, les particularités
du costume trahissent les parentés.
C’est une psychologie subtile et raffinée
qui intervient pour découvrir la main
du même artiste, pour opposer Îles
écoles indigènes ou insulaires, pour
dater les œuvres. Ce n'est plus un ana-
tomiste qui regarde, c'est un artiste et
un historien.
Les illustrations nombreuses et en
général bien réussies, soit en héliogra-
vure soit en simili-gravure, permet-
tent de suivre tous les détours du
raisonnement. C'était une addition in-
dispensable dans des études aussi mi-
nutieuses. L'auteur a, de plus, modifié
en plusieurs points les articles autre-
fois publiés. 11] a repris, par exemple,
l'étude du chitonisque et conclu dans
un sens qui me paraît beaucoup plus
juste, corrigeant une opinion où il
s'était laissé entraîner par la disserta-
tion de M. Bœbhlau. Il a ajouté cer-
tains chapitres sur des monuments
publiés depuis ou mieux étudiés. Ce
n'est donc pas une simple réimpres-
sion de travaux anciens; c'est une
nouvelle édition, plus soignée et plus
abondante en documents.
Les observations que j'ai à faire
sont peu nombreuses et ne portent
guère que sur des détails. Je m'étonne
par exemple que M. Lechat, en parlant
des zoana (Ὁ. 9), n'ait rien dit des
terres cuites : c'est là que l’on trouve
les documents les plus sûrs et les plus
nombreux pour se faire une idée de
ces primitives idoles de bois. — Pour-
quoi ne pas rappeler, à propos du tra-
vail sur la pierre tendre au moyen
d'outils à couper le bois (p. 13 à 25),
que déjà les anciens prétaient au légen-
daire sculpteur Dédale la scie, la ha-
chette, le fl à plomb, la vrille et la
0116, c'est-à-dire tout l'appareil du
139
menuisier (Plin., Hist. Nat., VII, 498)?
Enfin, à côté du bois, les récentes dé-
couvertes de Mycènes et de Crète pla-
cent l'emploi d'une matière, le gypse,
dont il faut tenir grand compte pour
expliquer les progrès et la modification
de la technique. — L'auteur écrit à
dessein kydriophore au lieu du vocable
usité hydrophore (p. 19, 20, 22, 28). Mais
est-ce une correction légitime” Car on
ne porte pas de l'eau que dans les hy-
dries; on peut en mettre dans des
amphores ou tout autres récipients,
surtout à l'époque archaïque où l'hydrie
n'a pas conquis sa forme définitive
(Heuzey, Les figurines antiques du Lou-
vre, pl. 9, 2). L'hydrophore est la por-
teuse d'eau, non la porteuse d'hydrie.
— Je ne crois pas qu'il soit nécessaire
d'expliquer comme un rabat distinct
et cousu au bord supérieur de la tuni- ὁ
que, certains plis d'étoffe qui se voient
dans quelques rares statues (p. 162-163).
C'est, à mon avis, une variante de
l'apoptygma formé normalement, en
repliant l’étoffe horizontalement, mais
beaucoup plus court, et ce qui couvre
le reste du torse est le kolpos formé au
moyen de le ceinture qui reste invisible
par-dessous. 1] faut tenir compte des
conventions ou des maladresses de
l'exécution archaïque qui rend parfois
comme un bord de l'étoffle ce qui est
en réalité une partie repliée. — Dans
l'étude du costume, de la chevelure et
des ornements (p. 158-263), il me seun-
ble qu'une idée s'impose et je ne la
trouve pas exprimée ou du moins mise
en lumière suffisamment. C'est l'in-
fluence de la plastique de bronze. On
sait combien elle a été florissante dans
lesiles aux vus et vie siècles, avec Glau-
cos de Chios, Rhæcos et Théodoros de
Samos. La base d'une statue de Théo-
doros a été trouvée sur l'Acropole
d'Athènes. L'œuvre capitale d'Anténor
était le groupe en bronze des Tyran-
nicides. Je me demande si les corés de
l'Acropole ne représentent pas une
réaction de l’art attique contre la préé-
minence des bronziers. C'est une sorte
140 COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
de tour de force pour transporter
dans l'admirable matière qu'est le mar-
bre toutes les finesses et toutes les
délicatesses méticuleuses du métal :
elles en ont même gardé la sécheresse
et la rigidité. Il me semble que c'eût
été une comparaison à développer.
M. Lechat note (p. 236) un compromis
curieux : une statue de marbre qui
aurait eu des boucles de cheveux rap-
portées en métal. L'emploi du bronze
doré pour les bijoux (p. 209 et suiv.)
indique la même alliance des deux
techniques : elle s'est d'ailleurs conser-
vée pendant tout le ve siècle. — Dans
la figure 15 (p. 173), la brièveté de
l'himation et l'épaisseur des plis sur
la jambe gauche semblent prouver
qu'il s'agit là de la chlainè diplar,
c'est-à-dire que l'étoffe entière du man-
teau a été pliée en deux, avant d'être
drapée sur le personnage; toutes les
épaisseurs se trouvent doublées. —
Parmi les raisons qui expliquent l'em-
ploi de la polychromie (p. 241), ne faut-
il pas mettre au premier rang celle de
la tradition ? N'est-il pas certain que le
bois, plus encore que le calcaire, avait
eu besoin d'être recouvert d'un enduit
et que, quand commença la plastique
de pierre, on était déjà habitué à
peindre les sculptures ? Ici encore l'étude
des terres cuites fournit de très impor.
tantes preuves, car beaucoup sont con-
temporaines des xoana de bois. — Aux
arguments iovoqués contre le sens de
déesses, prêté parfois aux corés de l'A-
cropole {p. 267), on peut ajouter celui-
ci : dans une salle voisine du musée,
on a rassemblé tous les ex-voto de terre
cuite recueillis dans les fouilles et anté-
rieurs au pillage des guerres Médiques.
Il est très instructif de les étudier et de
voir avec quelle sûreté les modeleurs
ont su préciser le caractère des déesses
qu’ils voulaient représenter : Athéna,
Aphrodite, Artémis, soit par la coiffure
et le vétement, soit par l'atiribut tenu
en main. Pourquoi les statuaires au-
raient-ils été plus impuissants que les
industriels à exprimer leur intention?
Si elle est restée vague, c'est que l'of-
frande même de la coré, comme l'a.
soutenu le premier M. Lechat, et comme
l'ont confirmé les formules de dédicaces
elles-mêmes, devait conserver un carac-
tère impersonnel d'ex-voto religieux.
On pourrait rappeler encore l'imper-
sonnalité voulue des bas-reliefs funé-
raires du ve et du rv° siècles.
J'insisterai en terminant sur le carac-
tère pédagogique de l'ouvrage. Je ne
connais pas de meilleur modèle à re-
commander aux étudiants qui veulent
faire de l'archéologie, car il contient
une méthode de travail. Tout est subor-
donné à l'étude attentive et minutieuse
du monument. En lisant l'analyse des
frontons en tuf de l’Acropole et la
critique des restaurations proposées,
le chapitre sur « le travail du marbre »
dans les corés, toute la partie sur les
« essais de groupements », les jeunes
gens se rendront compte que l'idée naît
logiquement du petit détail, quand il
est étudié par un esprit vigoureux et
précis, et qu'il n'est pas nécessaire,
pour écrire sur l'histoire de l'art, d'a-
border de prime abord les sujets les
plus généraux et les plus difficiles. A
cet égard, ce n'est pas seulement un
livre excellent d’archéologie; c'est un
livre de doctrine et d'éducation.
E. Porrren.
8. Henri OMONT. Missions archéolo-
giques françaises en Orient, aux xvn°
et xvire siècles. 1902, Paris, Impri-
merie nationale, 2 vol: 1237 p.
M. Omont est un infatigable travail-
leur. ΠῚ y a peu d'années (1897), il nous
donnait un bel Album sur Athènes au
ΧΡ" siècle, avec des renseignements
nouveaux sur l’auteur des dessins exé-
cutés d'après les sculptures du Parthé-
non. En 1901, il publiait des Fac-simi-
lés de manuscrits grecs, latins et fran-
çais du v° au xiv° siècle, d'après les
originaux de la galerie Masarine.
L'année 1902 ἃ vu paraitre deux gros
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
volumes sur les Missions archéologi-
ques en Orient et nous savons que,
pour 1903, il a déjà préparé et imprimé
un ouvrage où il décrit et reproduit
les plus belles Peintures des Manuscrits
grecs, conservés à la Bibliothèque Na-
tionale. C'est, coup sur coup, une
série de grands travaux qui se succè-
dent avec une remarquable et peu com-
mune régularité.
Faire l'histoire des voyages et des
missions archéologiques dansle Levant,
pendant le xvu° et le xvir° siècle, c'est
raconter la formation de nos grandes
bibliothèques et en particulier du Dé-
partement des Manuscrits. On com-
prend ce qui a surtout guidé M. Omont
dans cette entreprise. Maïs elle n’in-
téresse pas seulement les bibliothécai-
res et les paléographes. Toutes les
branches de l'archéologie y trouvent
profit : outre les livres et les manus-
crits précieux, ce sont aussi les mon-
paies et médailies, les pierres gravées,
les inscriptions, les statues mêmes qui
prenaient la route de la France. L'his-
toire des musées et celle des grandes
collections profiteront donc des textes
publiés par M. Omont.
On admirera quelle impulsion intelli-
gente des hommes d'État comme Ma-
zarin, le chancelier Séguier, Colbert,
ont su donner à ces recherches scien-
tifiques. Les missionnaires religieux
étaient naturellement mis les premiers
à contribution. Le père Athanase au
mont Athos, le père Wansleben en
Égypte, le père Besnier à Constanti-
nople, plus tard les abbés Sevin et Four-
mont, dont l'ample récolte dans les
pays helléniques servit de base au pre-
mier Recueil d'épigraphie grecque, se
montrérent d'actifs et zélés agents de
la science française. À côté d'eux, des
voyageurs comme Vaillant, Galland,
Paul Lucas, des ambassadeurs tels que
le marquis de Nointel, de Girardin, le
marquis de Bonnac, le marquis de Vil-
leneuve, les consuls et agents consu-
Jaires de Maillet, Le Maire et Dussault,
secondèrentde leur mieux ces patrioti-
141
ques entreprises. Il y eut une rare en-
tente des services publics et des bonnes
volontés disponibles pour mettre au
premier rang les collections du roi de
France. À cet égard, le présent n'a
qu'à prendre leçon sur ce passé.
Mais la France, sur ce terrain, trou-
vait déjà la concurrence des autres
nations. Paul Lucas écrivait de Cons-
tantinople, le 31 mars 1724 : « Je trouve
ce pays-ci beaucoup changé de ce qu'il
était autrefois. Les choses précieuses y
sont fort rares; toutes les nations de
l'Europe sont ici, qui cherchent des
curiosités et des antiquités. » Le mé-
tier n'était donc pas facile et il faut y
joindre la difficulté des voyages, exé-
cutés alors sur de mauvais petits bâ-
timents, avec la crainte contiauelle
des corsaires et des tempêtes. Les nau-
frages ne sont pas rares dans les récits
de ces hardis pélerins, qui prennent
parti aisément de la perte de leur ba-
gage, quand leur vie est sauve. Les
maladies contagieuses, la peste, sans
compter la mauvaise volonté des Turcs,
ne sont pas des obstacles moins redou-
tables. Enfin, il arrivait qu'après tant
de fatigues et de dangers connus, l’ex-
plorateur revenu ἃ Paris trouvait quel-
que peine à tirer profit de ses trou-
vailles lointaines. Il est stipulé dans
les instructions remises à Paul Lucas
que tout ce qui n'est! pas digne d'en-
trer dans le cabinet du Roi lui sera
laissé pour compte et qu'il rembour-
scra lui-même l'argent employé à
l'achat de ces pièces. Lucas fut ainsi
réduit à ouvrir à Paris une sorte de
magasin d'antiquités, pour se défaire
des objets qui lui étaient restés. Four-
mont, après le voyage en Grèce d'où
il rapportait plus de deux mille ins-
criptions et les dessins de trois cents
reliefs, ne réussit pas à obtenir de
Maurepas les fonds nécessaires à la
publication du grand Recueil qu'il se
proposait d'exécuter en quatre volumes
in-folio, et dont Montfaucon avait dit
que ce serait incontestablement « le
plus ample, 18 plus beau, le plus exact
142 COMPTES RENDUS
et le mieux exécuté qu'on ait jamais
fait ». 11 mourut à la peine sans avoir
rien publié. L'Académie des Inscrip-
tions existait pourtant déjà; mais elle
h'avait pas encore trouvé son véritable
emploi. Nos missionnaires scientifiques
sont aujourd'huiassurés d’un sort meil-
leur : qu'ils n'oublient pas tout ce
qu'ils doivent à leurs courageux et
moins fortunés prédécesseurs. L'ou-
vrage si utile de M. Omont est là pour
le leur rappeler. “
E. Ῥοττιξα.
9. SOPHOCLE. Électre traduite en vers
par CA. CHABAULT, professeur agrégé
des Lettres. Delagrave éd.
L'estimable et suffisamment exacte
traduction en vers de M. Chabauit n'est
pas tout à fait 4 la hauteur des terribles
passions développées dans le drame de
Sophocle. À de telles passions il faut un
langage simple, mais nerveux dans ja
simplicité; et si ce langage est en
vers, il faut que la rime contribue par
son relief à cette force de l'expression.
M. Ch. a pris un parti que je ne blâme
pas absolument, de ne pas pratiquer
uniformément les « rimes plates » (AA.
BIBLIOGRAPHIQUES
BB..). Non seulement dans les parties
lyriques, mais même dans les récits ou
les dialogues, il rime les vers suivant
un ordre irrégulier, qui évidemment
procure une grande facilité au traduc-
teur, et donne de l'aisance à la tra-
duction. Ce parti est acceptable et a
des avantages, mais à condition que
l'irrégulerité des rimes soit compensée
par leur richesse, en quelque sorte natu-
relle. Ce n'est pas le cas ici. M. Ch.
fait rimer des syllabes qui ont vraiment
trop peu de rapports sonores, ou des
adjectifs et des temps de verbes iden-
tiques (infinitif avec infnitif, impar-
fait avec imparfait, etc.), qui sont des
rimes très faibles. Je relèverais des
centaines de rimes de ce genre dans la
traduction et c'est un grave défaut, que
ne rachète pas la structure souvent
molle et contournée de ses alexandrins.
Nous ne pouvons pas oublier, malgré
tout, que V. Hugo et Leconte de Lisle
ont fait des vers français.
Je ne sais pas trop ce que signifie en
tête du drame l'indication : « La scène
se passe à Mycènes, sur une place
publique, le Lycos (?) ».
E. d'EicatuaL.
Bon à tirer donné le 30 mai 4903.
Le rédacteur en chef-gérant, Tu. Reacs.
Le Puy-en-Velay. — Imp. R. Marchessou, boulevard Carnot, 33.
Ἷ
PUBLICATIONS ÉPIGRAPHIQUES
Ph. BERGER, de l'Institut.
Inscriptions céramiques de la nécropole
punique d'Adrumète. in-8...… 3 fr.
J. A. BLANCHET
Tessères antiques, théâtrales et autres.
In-8, fig.. ...... .s.... 2 fr. 50
E. BLOCHET
Les inscriptions de Samarkand. ἴω 8.
Les inscriptions turques de lOrkhon:
In8. .............. …... 2fr.
R. CAGNAÎT, de l'institut.
Lettre sur quelques inscriptions de
Chemtou. In-8. . fr.
Inscription des Thermes de Carthge.
1n-8, planche. . 11». 25
C. CARAPANOS |
Inscriptions de lOracle de Dodone et
pierre gravée. In-8, fig. . lfr. »
Dr. CARTON
Inscription du temple du Capitole À
Numiulis. In-8.. 1 fr.
Estampilles puniques sur |‘émphores
In. . .. 1 fr. 25
A. σ ASTAN
Deux épitaphes romaines de femmes, de
Pavenue sépulcrale de Vesontio. ἐμ ὃ,
r.
CLERMONT-GANNEAU, de l’Institut.
Notes d’épigraphie et d'histoire arabe.
In8.................... 1 fr. 50
Sur une inscription arabe de Bosra rela-
tive aux Croisades. In-8..... 1 fr. 25
La stèle phénicienne d'oumm el Aonë
mid. in-8, 2 planches.. . 1 50
F. CUMONT
Nole eur une inscription de Sébaste.
In8................... . lfr. »
J. DELAMARRE
Inscription d’Amorgos. In-8....
J. DERAMEY
Les inscriptions d'Adoulis et d’'Axoum.
In-8. . essence 2 fr.
E. DESJARDINS, de l'Institut.
L'inscription d’Hasparren et les Novem
Populi. In-8.............. 1'fr. »
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collection Tyzkiewicz. In-8, pl. 2fr. »
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Bains. In8. .............. 0 fr. 50
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Les inscriptions gauloises, nouvel essai
d'interprétation - 2 fascicules in-8.
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lementaires ας de l'alphabet | fre
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Inscription gravée sur un 1 vase tarentin.
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Inscriptions provenant du Maroc et de
la Tunisie. {n-8. . ..…..... 1 fr. 25
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Inscriptions grecques d'Égypte. In-8.
P grecq ΕΥΡ 1 fr. 25
L. JURGIEWITCH
Sur deux inscriptions grecques inédites
de la Russie méridionale.ln-8. 1 fr. 85
R. DE LA BLANCHÈRE
Les gnscriplions du Djebel Toumiat.
Inscription du Musée d'Oran. In- 8 Ofr. 50
LEBÈGUE
Inscriptions latines trouvées dans la Nar-
bonnaise. In-8 .- 1 ἤν. »
Α. LEVAL |
Inscription grecque de Constantinople.
n-8..................... »
Inscription de conitaninopie. T8
0 fr. 50
D. MALLET
Les inscriptions de Naucratis.In-8 2 fr. »
E. MILLER, de l’Institut.
Inscriptions grecques découvertes en
Egypte. 2 fasc. in-8. 2 fr.
R. MOWAT
Inscriptions de la cité des Lingons con-
servées à Dijon et à Langres. Ia-8,
2 planches. .............. 2 fr. »
NÉROUTSOS BEY
Inscriptions grecqueset latines d’Alexan-
drie. In8................. 1 fr. »
PERNOT
A propos de r inscription d'Henchir-Met-
ich. In8. .…................ 0 fr. 50
E. RENAN, de l'Institut
Inscription phénicienne et grecque dé-
couverte au Pirée. In 8, pl... 1 fr. 50
S. DE RICCI
Répertoire épigraphique des départe-
ments de ΠΡ et de l'Oise. fre
Inscriptions de l'Oise. Ager Belloracor
rum. — Sylvanectes. In-8.. 1 fr. 50
Note sur une inscription d'Amiens.
In-3. .... 0 fr. 50
Inscriptions déguirées. In8. . . 1. »
Inscriptions de Germanie dans la cor-
respondance d'Oberlin. In-8,fig. 1 fr. 25
F. SAUREL
Une nouvelle inscriplion gauloise. ἴῃ δ.
r.
L. VERNIER
Inscriptions métriques de l'Afrique ro-
maine. In8. .............°
WAILLE ET GAUCKLER
Inscripiions inédites de Cherchel. In-f°
r.
TABLE DES MATIÈRES
PARTIE LITTÉRAIRE
Pages.
J. W. GŒTHE. — L’Agamemnon d'Eschyle..............
Jules OPPERT. — L'année de Méton..................... 5
Théodore Reinacx. — Les trépieds de Gélon et de ses
frères...........,.......... Ξ Ξ ΞἭ͵ΓΚ({Γ(ΨᾳΓᾳ0.Ε 18
Franz ΟΜΟΝΤΥ. --- La Galatie maritime de Ptolémée...... 25
Charles DiexL. — Sur la date de quelques passages du
Livre des Cérémonties.........................., 28
Paul PERDRIZET. — ΣΦΡΑΓΙΣ SOAOMONOE ............... 42
T.R. — Los Perses de Timothéa...................... 62
CHRONIQUE
Emile BourGuEr. — Bulletin épigraphique ............. 84
S. De Ricci. — Bulletin papyrologique................. 105
J. GUILLEBERT, — Courrier de Grèce................... 126
BIBLIOGRAPHIE
Comptes rendus bibliographiques ..................... 133
Le Comité se réunil le premier jeudi non férié de chaque mois,
excepté en août, septembre et octobre. Tous les membres de l’As-
sociation peuvent assister aux séances avec voix consultative.
La Bibliothèque de l’Association, 12, rue de l’Abbaye, est ouverte
le jeudi de 3 ἢ. 1/2 à 4 ἢ. 1/2, et le samedi de 2 à 5 heures.
La Revue des Etudes grecques est publiée cinq fois par an.
Prix d'abonnement : Paris ...................,.... 10 »
Départements et étranger.................... 11 »
Un numéro séparé........................... 2 50
La Revue est envoyée gratuitement aux membres de l’Associa-
tion pour l’encouragement des études grecques.
Le Puy, typographie R. Marchessou, boulevard Carnot, 23.
REVUE
DES
ÉTUDES GRECQUES
PUBLIÉE PAR \
L'ASSOCIATION POUR L'ENCOURAGEMENT DES ÉTUDES GRECQUES
TOME XVI
N° 70
Mai-Juin 1903
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
28, RUE BONAPARTE, νι
Toutes les communications concernant la Redaction doivent être adressées
à M. Tuéonore ReiNAcH, rédacteur en chef-gérant, à la librairie Leroux.
its
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
RUE BONAPARTE, 28, PARIS (vie)
” À. DE BOISSIEU. — Inscriptions antiques de Lyon, reproduites d’après les
monuments ou recueillies dans les auteurs. În-4.. ............. 40 fr. υ
R. CAGNAT, membre de l'Institut. — L’Année épigraphique, Revue des pu-
᾿ blications “pigraphiques relatives à l’antiquité romaine. 1888-1902. 15 volumes
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A. CARRIÈRE. — Inscriptions d’un reliquaire arménien de la collection
Basilewski, publiées et traduites. In-8, 2 planches. ........... 5fr. »
CH. CLERMONT-GANNEAU, membre de l'Institut — Recueil d’archéoio-
gie orientale. Tomes I à IV. In-8, figures et planches. Chaque vol.. 25 fr. »
Η. et δ. DERENBOURG, de l'Institut. — Les inscriptions phéniciennes du
temple de Séti à Abydos, publiées et traduites. In-4, 4 planches. .... 5 fr. »
CAPITAINE ESPÉRANDIEU. — Recueil de cachets d'oculistes romains.
In-8.. ..... serve “ss... Ofr. »
R. DE LA BLANCHÈRE. . -- ‘Histoire de Pépigraphio romaine, depuis les
origines jusqu’à la publication du Corpus. In-8. ses... 3 fr. »
5. REINACH, membre de l'Institut. — Traité d'épigraphie grecque. Un fort
volume in-8, fig. et planches... .... .…... 20 fr. »
LÉON RENIER, de l'Institut. — Recueil des diplômes militaires romains.
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MAX VAN BERCHEM. -- ᾿ Corpus inscriptionum arabicerum. Le Caire. Fas-
cicules 1 à III, in-4, avec planches. Chaque... ........,...... 25fr, »
— Fasc. IV (Sous presse).
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la Syrie. Index sphabétique et analytique, rédigé par J.-B. Chabot.
In-4........ . css sus. ΝΕ 4 ἰτ »
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l’Institut, Haussoullier et Théodore Reinach. Première série, en 3 fascicules
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tutions de la Grèce ancienne jusqu'à la conquête romaine, par Ch. Michel, pro-
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SUR LA DATE
D'UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE
"A Εράτρα τοῖς αλείοις. Πατριὰν θαρρὲν καὶ γενεὰν καὶ ταὐτδ,
αἱ ζέ τις κατιαραύσειε Ἐάρρενορ Βαλείο. Aï ζὲ μέπιθεϊαν τὰ ζί-
χκαια ὃρ μέγιστον τέλος ἔχοι καὶ τοὶ βασιλᾶες, ζέχα μναῖς κα
ἀποτίνοι Ῥέχαστος τὸν μέπιποεόντον κα(τ)θυταὶς rot Ζὶ ᾽Ολυν-
B πίοι. ᾿Επένποι ζέ κ᾿ ἐλλανοζί κας, καὶ τἄλλα ζίκαια ἐπενπ-
ἔτο à ζαμιοργία. Αἱ ζὲ μἔνποι, ζίφυιον ἀποτινέτο ἐν μαστρά-
αι. Αἰ ζ|ε] τις τὸν αἰτιαθέντα ζικαίον ἱμάσχοι, ἐν τᾶι ζεκαμναίαι χ᾽ ἐ-
νέχο[ιτ]ο, αἰ Εειζὸς ἰμάσχοι. Καὶ πατριᾶς ὁ γροφεὺς ταὐ[τ]ά κα πάσχοι,
[αἴ τ]ιν᾽ [ἀζ]ικέο[ι]. ᾽Ο πίναξ tapèc ᾿Ολυνπίαι.
Cette inscription, trouvée ἃ Olympie sur une tablette de
bronze et publiée par Kirchhoff en 1880, a été, depuis, éditée
bien souvent (1) et bien souvent commentée (2), sans qu’on
(4) Kirchhoff, dans l'Archdologische Zeitung, XXXVIIL (1880), p. 66, n° 362
(cf. p. 68); Comparetti, dans les Ati dell Accad. dei Lincei, Mem. della classe di
sci. mor., Ser. LIT, t. VI (1880-1881), p. 70 ss., et dans ses Iscrizioni di Olympia,
1883, p. 3 ss.; Daniel, dans les Beifr. de Bezzenberger, VI (1881), p. 243, n° 3;
Rôhl, Inscr. gr. antiquissimae, p. 39, πο 112 (Imagines, 2° éd., p. 37); Cauer,
Delectus inscr. gr., 2 éd., n° 253 ; Blass, dans la Samml. der gr. Dialekt-Inschr.,
n° 1152; Roberts, Infrod. to gr. epigr., 1, Ὁ. 287-289, no 292 (cf. p. 364 ss.) ; Ditten-
berger-Purgold, Inschr. von Olympia, n° 2; Michel, Recueil d'inscr. gr., n° 195.
(2) Voir G. Curtius, dans l'Arch. Zeit., l. c., Ὁ. 69 ss.; Ahrens, dans le Rheïin.
Mus., XXXV (1880), p. 578-585, 631 (Kleine Schriften, I, Ὁ. 325 ss.); Bücheler, dans
le Rhein. Mus, ἱ. c., Ὁ. 632; Gilbert, Handb. d. gr. Staatsallt., 11, p. 100-101;
Th. Bergk, dans le Rhein. Mus., XXXVIIT (1883), p. 526-539; Th. Reïinach, dans la
Revue critique, 1896, t. Il, p. 81-88; Danielsson, dans l’Eranos, 11} (1898), p. 80-
105 ; Bruno Keil, Ueber zwei elischen Inschr., dans les Nachrichten von der Gesellsch.
der Wissensch. zu Güllingen, 1899, p. 154-164. -
10
144 GUSTAVE GLOTZ
soit arrivé à des conclusions certaines. Quel qu'en soit exacte-
ment le contenu, cette rhètra apparaît comme un document de
premier ordre sur les institutions judiciaires de l’ancienne
Grèce. Il importe au plus haut point d'en établir sûrement la
date au moins approximative.
Au premier abord, on distingue une indication précieuse.
Les lignes 5-7 portent ces mots : Ἑπένποι ζὲ χ᾽ ἐλλανοζίχας,
Αἱ GE pévnot, ζίφυιον ἀποτινέτο ἐν μαστράαι. La mention de
l'Hcllanodike au singulier fournit un renseignement précis.
D'après Pausanias (1), le fondateur des jeux olympiques, Iphi-
tos, fut seul à les présider, et le γένος des Oxylides, héritier de
ce monopole, le conserva jusqu’à la L° olympiade (580). A ce
moment, les Eléens nommèrent deux Hellanodikes. Ce nombre
ne fit plus qu'augmenter par la suite : il fut porté à neuf
dans la LXX V° olympiade (480), à dix dans la LXX VII° (472).
Ainsi, notre monument est antérieur à 580. Telle était l'opinion
du premier éditeur, opinion qui a été partagée par la plupart
des épigraphistes (2). Je vais essayer de la défendre contre les
commentateurs qui n'ont pas voulu accepter une date aussi
reculée.
Comparetti (3) a donné le signal de la protestation. Pour lui,
l'intervention d’un seul Hellanodike dans une affaire ne prouve
nullement qu'il n'ait pas de collègue. Il rappelle que Pindare,
à une époque où les Hellanodikes forment sûrement un col-
lège, représente « l’Hellanodike aux regards infaillibles qui,
de son estrade, pose sur la chevelure du vainqueur la glauque
(1) Paus., V, 9, 4-5. Nous citons ici ce passage, base de toute la discussion :
Ἴφιτος μὲν τὸν ἀγῶνα ἔθτχεν αὐτὸς μόνος * al μετὰ Ἴφιτον ἐτίθεσαν ὡσαύτως oi ἀπὸ
Ὀξύλου. Πεντηχοστῇ δὲ Ὀλυμπιάδι ἀνδράσι δύο ἐξ ἁπάντων λαχοῦσιν Ἠλείων ἐπετράπη
ποιΐσα: τὰ Ὀλύμπια... Πέμπτῃ δὲ ᾽Ολυμπιάδι καὶ εἰχοστῇ (ὕττερον) ἐννέα “Ἑλλανοδίκας
κατέστησαν. Δευτέρᾳ δὲ ἀπὸ ταύτης ᾿Ολυμπιάδι προσετέθη καὶ 6 δέκατος ἀθλοθέτης.
Pour les références qui confirment les assertions de Pausanias et pour le détail
des faits mentionnés plus loin, je renvoie à l'art. Hellanodikai que j'ai publié
dans le Dict. des antiquités.
(2) L'opinion de Kirchhoff (4. c.) est soutenue par Ahrens, Daniel, Rôh], Cauer,
Blass, Dittenberger-Purgold, Michel, etc.
(3) Atti, p. 71-178 et Iscriz. di OÙ., 1. ο..
SUR LA DATE D’UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE 145
parure de l'olivier (1) ». Aujourd'hui on pourrait encore citer
en faveur de cette thèse certains vers de Bacchylide (2). Bref,
selon Comparetti, non seulement on aurait le droit de ramener
l'inscription en decà de 580, mais il y aurait lieu de l’attribuer
au v° siècle.
Ce raisonnement porte à faux. (Comment comparer un
texte législatif à un poème lyrique ? Ils ne comportent pas
une égale liberté d'expression. Il y a plus : le poète ne pou-
vait pas nommer les Hellanodikes au pluriel. Sans doute, la
troisième Olympique a été composée à l'occasion de la
LXXVI° olympiade (476) (3), c'est-à-dire quatre ans après la
réforme qui fit passer le nombre des Hellanodikes de deux à
neuf. Mais le personnage dont parle Pindare n’est pas l’un
quelconque des Hellanodikes; c'est l'Hellanodike par excel-
lence, le président du collège (4), ce dignitaire éponyme qui
faisait fonction d'athlothète et, par conséquent, remettait de sa
propre main Îles couronnes aux vainqueurs, Si donc notre
inscription renfermait un singulier collectif, elle attesterait,
chez le législateur d'Elis une plus grande imprécision de
langage que chez le chantre des Olympioniques. Est-ce admis-
sible ?
Les érudits favorables à la conclusion de Comparetti ont
généralement senti la faiblesse de son argumentation. Ils ont
soutenu que l'inscription désignait un membre déterminé du
collège, investi d’attributions spéciales. D'après Théod. Bergk (5),
qui bien mieux que Comparetti aurait pu invoquer Pindare,
il s'agit de l’Hellanodike éponyme, à qui deit être assignée
l'hégémonie du tribunal constitué par les démiurges. D'après
(1) OL, Il, 21-22.
(2) XI, 26 ss.
(3) C'est la date donnée par Bôckh. Elle n'a pas été démentie par le papyrus
d’Oxyrhynchus (cf. C. Gaspar, Essai de chronol. pindarique, Bruxelles, 4900, p. 89).
(4) L'existence de ce président a été prouvée par Hugo Foerster, De Hellano-
dicis Olympicis, Lips. 1879, p. 31-34, pour la période des dix Hellanodikes. Mais
on peut, avec E. Curtius, Der Synôükismos von Elis, dans les Sifzungsber. der Berl.
Akad., 1895, p. 800, l'admettre déjà dans le collège des neuf Hellanodikes.
(5) L. c., p. 535, n. 2.
416 | GUSTAŸVE GLOTZ
Ed
Rich. Meister (1), il s'agit de l'Hellanodike, quel qu'il soit, qui
est compétent dans le cas prévu par la rhètra. Dans la dernière
hypothèse, la constitution d'Elis aurait défini les pouvoirs de
chaque Hellanodike, comme celle d'Athènes fixait les droits de
chaque archonte; les rhètrai orinaires n'auraient plus eu qu’à
mettre en mouvement l'autorité de l’Hellanodike, sans spéci-
fier lequel.
Ces interprétations jumelles soulèvent d’abord une objec-
tion grammaticale, celle que Comparetti fait à l'interprétation
contraire : pourquoi l'article manque-t-il devant ἐλλανοζίκας ?
Si jamais l’article est nécessaire, c’est dans le cas où l’on
désigne spécialement une personne dans un groupe. Indis-
pensable si un seul et même Hellanodike préside toujours la
démiurgie, l’article est indispensable et même insuffisant, si
chaque Hellanodike peut être appelé à cette présidence dans
les limites de sa juridiction. Et comment rapprocher les Hella-
nodikes des archontes athéniens? Nous avons précisément
conservé une loi athénienne qui enjoint aux archontes, ou
plutôt aux magistrats en général, d'introduire une action cha-
cun selon sa compétence (2). Il se trouve que cette loi a pour
_ objet, comme la rhètra éléenne, de réprimer les voies de fait
exercées par une partie sur son adversaire. Le législateur athé-
nien se borne-t-il à dire : εἰσφέρειν ἄρχοντα, ou même : τὸν
. ἄρχοντα ῦ Non, voici comme il s'exprime : εἰσφέρειν τοὺς ἄρχοντας,
ὧν ἕκαστοι δικασταί εἰσιν. Il faut donc qu'on renonce à un rap-
prochement qui crée plutôt un préjugé contre la thèse qu'il
devait confirmer.
Historiquement, cette thèse n’est pas soutenable. Les attri-
butions des Hellanodikes, à partir du ν᾽ siècle, ne nous sont pas
si inconnues, et nous ne voyons nulle part qu’à pareille époque
ils aient tenu la première place dans la justice ordinaire ou dans
la gestion financière de l’État éléen. Pausanias (3) énumère, à
(1) Die gr. Dial., Gôtting. 1889, II, p. 16, n° 3.
(2) Dém. C. Aristocr., 28, p. 629.
(3) Paus., V, 21, 3-18; VI, 6, 5-6.
SUR LA DATE D'UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE [47
propos des zanes élevés dans l’Altis avec le produit des amendes,
une foule de condamnations prononcées par les Hellanodikes.
Nous avons là le relevé des arrêts les plus remarquables rendus
par ces magistrats depuis la LXXV* olympiade (4), c’est-à-dire
depuis l’année même (480) où ils siégeaient pour la première fois
au nombre de neuf. Tous ces arrêts, sans exception, ont été
motivés par des infractions au règlement des jeux olympiques,
telles qu’entente frauduleuse entre concurrents et manœuvres
déloyales. Les Hellanodikes exercent une juridiction purement
disciplinaire et momentanée ; ils envoient les alytes réprimer les
contraventions à coups de fouet (2); s'ils infligent des peines
pécuniaires, c’est qu’en Grèce les atiributions de police ne vont
pas sans le droit de faire ce que les Athéniens appellent èm£ohas
ἐπιδάλλειν. Tous les quatre ans, les Hellanodikes sont les maîtres
techniques de l'Altis; pas le moindre fait ne permet de supposer
qu'ils aient à titre permanent 18 haute main sur la justice ou
sur le trésor de la république éléenne, qu'ils puissent ainsi infli-
ger des amendes aux juges locaux et soient appelés à rendre des
comptes ἐν μαστράαι.
Il est vrai que Pausanias décrit Olympie et n’est pas tenu de
nous donner, même en raccourci, une espèce de Πολιτεία ᾿Ηλείων.
Il nous parle des Hellanodikes en nous guidant dans l’Altis,
en nous montrant la rangée des statues sur la terrasse des tré-
sors, pourquoi aurait-il fait une digression sur le régime judi-
ciaire et fiscal des Éléens? Le silence des documents sur les
attributions ordinaires des Hellanodikes à Élis ne nous autorise
pas à les nier, sans doute; mais si ces attributions probléma-
matiques étaient incompatibles avec celles dont nous connais-
sons l'existence? Si des occupations certaines excluaient la pos-
sibilité d’occupations toutes différentes et hypothétiques? Depuis
480, les Hellanodikes furent toujours répartis, trois par trois,
dans trois commissions, chargées respectivement d'organiser et
de surveiller les courses de chevaux, le pentathle οἱ les autres
(4) 14., VE, 6, 5-6: 44, 4.
(2) Id., VI, 2, 2.
148 GUSTAVE GLOTZ
concours (1). Un pareil sectionnement serait-il concevable dans
un collège chargé de la justice ordinaire ou des finances publi-
ques ? Ces fonctions-là n’ont pu être par-dessus le marché. Admel-
tons-le pourtant. Où les Hellanodikes auraient-ils pris le temps
d’aller aux tribunaux ou de percevoir les deniers dûs à l'État?
Dès leur entrée en charge, ils passaient dix mois, dans l’Hella-
nodikéon, sous la direction des nomophylaques, à étudier le
règlement. Sur le décret d’Iphitos, le fonds primitif, avait poussé
une telle masse d'articles nouveaux, que de se débrouiller au
milieu de cette végétation louffue, c'était déjà une besogne pas-
sablement absorbante. Ce n’est pas tout. Avant le lever du soleil,
les Hellanodikes se rendaient au gymnase, pour surveiller les
courses, ils y retournaient à midi pour le pentathle. Quand ils
en sortaient, c'était pour courir à l’agora, où ils passaient la
plus grande partie de la journée à suivre les exercices de l'hip-
podrome. L’Hellanodikéon était situé en face du gymnase et
avait vue sur l’agora, parce que ces trois endroits était le centre
de leur activité (2). Là ils acquéraient les connaissances théo-
riques et l'expérience dont ils avaient besoin pour classer et
juger athlètes et chevaux. Durant les dix mois d'entraînement
et durant les fêtes, ils nous apparaissent comme les régisseurs
des jeux olympiques, les directeurs des concours, les juges du
camp, etils ne peuvent pas être autre chose. Personne ne pré-
tendra que, nommés pour la durée d'une olympiade, ils n'étaient
pas les trois dernières années ce qu'ils étaient la première.
D'abord, on ne saurait même pas dire si, les fêtes une fois ter-
minées, les Hellanodikes conservaient leur titre, à plus forte
raison, une fonction quelconque. Ensuite en quel pays la justice
ou la perception a-t-elle vaqué une année entière tous les quatre
ans? Ce n'est donc pas seulement dans l'état de nos documents
et dans l'ouvrage forcément incomplet de Pausanias que les
(4) Id., V, 9, 5. Nous voyons une de ces commissions fonctionner encore à
l’époque où les Hcllanodikes étaient au nombre de dix, dans la XCVI* olympiade
(Id., VIII, 45, 4).
(2) Paus., VI, 24 1-3.
SUR LA DATE D'UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE [419
Hellanodikes n'ont rien à faire depuis 480 avec l'ensemble des
citoyens éléens ; c’est encore dans la réalité des choses.
Que conclure de à? Que l'inscription est antérieure à l’époque
des neuf Hellanodikes? Il ne vaudrait pas la peine de le démon-
trer si longuement : Comparetti lui-même, touten se prononçant
pour le ν᾽ siècle, ne parle pas d’une date postérieure à 480. Ce
que j'ai voulu établir, c'est que la constitution qui régissait
Élis en 480 n’a jamais pu confier aux Ilellanodikes de pouvoirs
politiques ou administratifs.
Est-il possible de savoir à quel moment cette constitution fut
établie ?
C'était une constitution oligarchique : les neuf Hellanodikes
sont en relations évidentes par leur nombre avec les {rois tribus
des Héraclides (1) et avec ces quatre-vingt-dix gérontes qu'Aris-
tote mentionne en Élide comme les chefs de l’ancienne oligar-
chie (2). Mais l’année 480 n’a pas pu marquer l'avènement de
l’oligarchie en Élide. Huit ans après, dans la LXX VII° olym-
piade (472), une révolution démocratique remplagçait les tribus
patronymiques par dix tribus locales et fixait le nombre des
Hellanodikes à dix, un par tribu (3). Il est inadmissible que
(1) Cf. 3. Beloch, Sulla costiltuzione politica dell’ Elide, dans la Riv. di filol., IV
(1875), p. 225 ss., 230.
(2) Aristote, Pol., VIIL (V), 5 (6), 8, p. 1306 a : Καταλύονται δὲ xal ὅταν ἐν τῇ
ὀλιγαρχίφ ἑτέραν ὀλιγαρχίαν ἐμποιῶσιν " τοῦτο δ᾽ ἐστὶν ὅταν, τοῦ παντὸς πολιτεύματος
ὀλίγου ὄντος, τῶν μεγίστων ἀοχῶν μὴ μετέχωσιν οἱ ὀλίγοι πάντες. “Ὅπερ ἐν Ἤλιδι
συνέδη ποτέ’ τῆς πολιτείας γὰρ δι' ὀλίγων οὔσης, τῶν γερόντων ὀλίγοι πάμπαν ἐγίνοντο,
διὰ τὸ ἀϊδίους εἶναι ἐνενήχοντα ὄντας, τὴν δ᾽ αἵρεσιν δυναστευτιχὴν εἶναι καὶ ὁμοίαν τῇ
τῶν ἐν Λακεδαίμονι γερόντων.
(3) Pour prouver le caractère démocratique de cette révolution, il ne suffirait pas
d'invoquer le mot ποτέ, employé par Aristote ; il faut considérer les événeinents
de 412 et les placer dans l’histoire constitutionnelle de l'Élide au veet au 1ve siècles.
Vers 472, Thémistocle, banni d'Athènes par ostracisme, avait pris domicile à Argos,
d'où il faisait des excursions dans le reste du Péloponèse (Thuc., I, 135). Il pré-
para un soulèvement démocratique contre la domination de Sparte. Bientôt les
Argiens allaient se donner des institutions populaires, en abolissant les souverai-
netés locales et en créant des tribus toponymiques. Bientôt allait se faire, avec
l'appui des Argiens et sur une base démocratique, le synœcisme de Mantinée (voir
Busolt, Gr. Gesckh., IL, I, p. 113-116, 118-119 ; Fougères, Mantinée et l'Arc. Orient.,
p. 315-378). Les Éléens donnèrent l'exemple. Dés 480, après Platées, ils avaient
banni leurs généraux, comme les Mantinéens (Hér., IX, 71), et remplacé l'aristo-
150 | GUSTAVE GLOTZ
le régime oligarchique ait été d'aussi courte durée. Nous savons
qu'il subit de sérieuses transformations avant de succomber.
Aristote invoque l'exemple d’Elis pour prouver qu’une oligar-
chie est vouée aux rivalités intestines quand tous les grands n’ont
point part aux charges, et qu’elle est perdue dès l'instant où se
forme en elle une autre oligarchie. Cette lutte pour les hautes.
fonctions entre une caste restreinte et un groupe de familles
plus étendu, ces dissensions entre deux factions oligarchiques
ayant pour effet rapide la ruine de l’oligarchie : tout cela devient.
très clair si l'on admet que [6 remplacement de deux -Hella-
nodikes par neuf fit partie d’une mesure générale qui mettait
en pralique le système de l’oligarchie large, et que cette
réforme fut suivie dès 472 d'une révolution populaire. Mais
ce n’est pas faire crédit d'une existence trop longue à l'oli-
garchie éléenne, que de lui accorder un siècle entre la chute de
cratie étroite par une aristocratie plus large en nommant neuf Hellanodikes au
lieu de deux. En 472, un synœcisme concentra pour la première fois une forte
population dans la ville d'Élis (Diod., XI, 54, 4; Éphore, dans Strab., VIIL, 3, 2,
p. 336), et les citoyens furent répartis en dix tribus (Hellanicos, fragun. 90, dans
les Fragm, hist. gr., 1, p.51; Aristodèmos, dans Harp., 8. v. ᾿Ελλανοδίχαι). Ce synœ-
cisme est évidemment de ceux dont on a pu dire : ἐκ τῶ, τοιούτων συνόδων συστρέ-
φεται τὰ πλήθη καὶ διαλύει τὰς ὀλιγαρχίας (Anaximénès, Rhélorique à Alex., 2, Ὁ. 14
fin, éd. Spengel; voir Beloch, L. c., p. 227; Fœrster, Op. εἷξ., p. 25 ss.; Busoit, L. c.,
p. 116-118). Quant aux tribus, elles étaient toponymiques, puisque leur nombre
allait désormais être proportionnel à l'étendue du territoire (Paus., V, 9, 5-6), et
la substitution de dix tribus locales aux tribus patronymiques résulte clairement
d'une influence athénicenne. Effectivement, à partir de 472, Élis apparaît, par sa
politique extérieure comme une cité démocratique. Dans la guerre du Péloponèse,
si elle se déclare d'abord contre Athènes, c'est malgré elle, sous la contrainte de
Sparte (Paus., V, 4,1); dès qu'elle le peut, elle s'allie avec Athènes, précisément
par le même traité qu'Argos et Mantinée (Thuc., V, 47; Xén., Hell., 111, 2, 21;
Paus., L. c.). Quand Agis fait coup sur coup trois campagnes en Élide, de 402 à 400,
il favorise les complots tramés par les chefs de l'oligarchie qui, loin d'être les
maîtres, sont bannis depuis quelque temps (Xén., LL. c., 27ss.; Paus., ΠΙ, 8, 4 ss.;
V, 4, 8). Il est vrai que l'État éléen fut longtemps encore déchiré par les factions
rivales : on voit, par exemple, les démocrates bannis en 365 par l'oligarchie alliée
à Sparte (Xén., Hell., VIL, 4, 15 55.); on voit La βουλή oligarchique renversée" défi-
nitivement par Phormion, disciple de Platon (Plut., Préc. pour gouv. la rép., X,
15, p. 805 D; C. Cololès, XXXII, 8, p. 1126 D). Ces troubles, ces fluctuations rem-
plissent une bonne partie du 1v° siècle (voir encore Dém., Sur la fausse amb., 260,
p- 424; Paus., IV, 98, 4: Michel, n° 1334) : l'histoire d’Elis ressemble à celle de
presque toutes les cités grecques. Mais l'oligarchie primitive n'en a pas moins été
détruite en 472,
SUR LA DATE D’UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE | 154
la royauté et la réforme de 480. Il fallut bien du temps, dans
ce pays de campagnards conservateurs (1), pour qu'après la
victoire commune des γένη sur la royauté, quelques « dynas-
ties » pussent en accaparer les bénéfices, pour que les évincés
perdissent tout espoir d’entrer dans une gérousie où les places
étaient viagères, pour que le mécontentement grandit au point
d'opérer un nouveau classement des partis et de décider la
réussite finale de celui qui d’abord était le plus faible. En cher-
chant à quelle date approximative l'Élide se donna des institu-
tions oligarchiques, nous sommes donc obligés de rétrograder
de la LXXV° olympiade aux environs de la L°, vers cette année
580 où pour la première fois l'Élide choisit deux Hella-
nodikes.
Ici le même texte de Pausanias qui nous a fourni les maté-
riaux de notre démonstration semble nous présenter une objec-
tion capable de la renverser d’un coup. 11 dit qu'à partir de la
L° olympiade les deux Hellanodikes furent tirés au sort parmi
tous les Éléens. Si la charge de l'Hellanodike primitif a été
dédoublée par l'oligarchie victorieuse, les deux Hellanodikes
n'ont pas pu être ἐξ ἁπάντων λάχοντες ᾿Ηλείων, dans le sens usuel
que donne à ces mots la phraséologie politique des Grecs. Ce
n'est pas le tirage au sort qui a de quoi nous offusquer. Il se
concilie très bien, conformément aux idées émises par Fustel
de Coulanges (2), avec cette αἵρεσις δυναστευτική, ce « choix
dynastique » qu'Aristote donne comme le mode de nomination
pratiqué par l'oligarchie en Elide et à Sparte. Mais comment
expliquer que les noms proposés pour le tirage au sort puissent
être ceux de tous les Eléens? On a déjà présenté deux solu-
tions. Kuhn (3) voit dans le passage de Pausanias une allusion
(4) Polybe, 1V, 73, 8-10, prétend retrouver les vestiges du passé le plus lointain
dans la vie sociale et paerticuliérement dans la vie judiciaire des ruraux en
Élide.
(2) Rech. sur le tirage au sort appliqué à la nom. des arch. ath. dans Îles
Nouv. rech., p. 147-179, surtout p. 158 ss.
(3) Ὁ οὐ. die Enstehung der Städie der Alten, Ὁ. 86; cf. E. σαγίτα, Pelop., 11,
Ρ. 98, ἢ. 21.
152 GUSTAVE GLOTZ
à l’Hellanodike nommé précédemment par les Piséates : il
comprend « tous les Eléens » comme s'il y avait « les seuls
Eléens ». Mais ἁπάντων ne signifie pas μόνων. Foerster (4) sou-
tient que Pausanias, parlant successivement de l'Hellanodike
unique et des deux Hellanodikes, oppose le nouveau mode de
nomination au privilège des Oxylides : il comprend « tous les
Eléens » comme s'il y avait « les Eléens des autres familles ».
Cette opposition existe, en effet, dans l'esprit de Pausanias;
mais il a mis plus que cela dans sa phrase. Il a entendu les
mots ἐξ ἁπάντων ᾿Ηλείων comme tout le monde les entendait de
son temps, et l’on ne peut pas traduire ἁπάντων par καὶ ἑτέρων.
Il faut donc toujours en revenir à ceci : Pausanias fait succé-
der à un monopole héréditaire un tirage au sort qu'il croit
démocratique. Comment sortir d'embarras ? Il suffit d'observer
que Pausanias a écrit tout ce chapitre d’après des documents
originaux qu'il tenait de première ou de seconde main (2). Avec
son défaut ordinaire de sens critique, il a recopié les mots
qu'il avait sous les yeux. À nous de leur restituer leur signifi-
cation véritable. En 580, un Eléen, dans toute la force du
terme officiel, ce n'était pas un habitent quelconque de l'Élide,
mais un citoyen investi de tous les droits politiques, un
membre des grandes familles (3). ἽΛπαντες ᾿Ηλεῖοι, ce n'est pas
la masse de la population ; c’est la classe appelée par Aristote
οἱ ὀλίγοι πάντες (4). Depuis la révolution de 580, tout membre
(4) Op. cit., p. 18-19; cf. E. Curtius, Der Synôk. von Elis, 1. c., p. 199.
- (2) Ce qui prouve bien que la notice de Pausanias sur les Hellanodikes est
écrite d'après des documents éléens, c’est qu'elle ne mentionne pas l'Hellanodike
délégué par Pise à Olympie dès la XXVIIIe olympiade (Strab. VIII, 3, 30, p. 355;
Hér. VI, 127; cf. Foerster, Op. cit., p. 10-16). En réalité, il y a eu deux Ilellano-
dikes longtemps avant 580, dès 668, et l'on pourrait être tenté de placer notre
inscription dans le premier tiers du vu: siècle. Mais il est naturel que les docu-
ments éléens aient été muets sur ce point, d'abord par raison de patriotisme,
ensuite parce que les rhètrai, aux termes mêmes de leur intitulé, sont faites
τοῖς Εαλείοις et n'ont pas à tenir compte d'un magistrat nommé par une ville
étrangère. Pausanias n'ignore pas que, de la XXVIIIe olympiade à la L°, Pise
partageait avec l'Élide la direction des jeux (voir VI, 22, 2-4); mais il n'en dit
rien ici, parce que sa source n'en disait rien.
(3) Cf. E. Curtius, L. c., p. 197.
(4) Thuc. II, 25,
SUR LA DATE D'UNE INSCRIPTION TROUVÉE A OLYMPIE 153
de l'oligarchie pouvait devenir Hellanodike : voilà ce que
déclarait une loi que Pausanias transcrit sans la comprendre
et sans donner de référence. Mais, en même temps, le tirage
au sort laissait le champ libre à une αἵρεσις δυναστευτική : les
« dynasties » ne se firent pas faute d'en profiter et, en fait, elles
gardèrent pour elles cette charge, comme les autres, pendant
un siècle. L'année 580 marque donc bien le début de la période
oligarchique, le moment critique à partir duquel les Hellano-
dikes ont été relégués dans la préparation et la présidence des
jeux olympiques.
Dès lors, nous avons incontestablement une règle fixe pour
dater les actes éléens où il est parlé d'un ou de plusieurs Hella-
nodikes. S'il est question des fonctions gymniques exercées à
Olympie une année sur quatre, il peut y avoir doute; mais
non, s’il s’agit de fonctions judiciaires ou financières exercées
en permanence dans la république éléenne. Nous avons cons-
taté que depuis 480 les Hellanodikes n'ont plus de place dans
la vie publique de l'État éléen ; nous avons démontré que, s’il
en était ainsi en 480, il a dû en être ainsi cent ans plus tôt.
Tout Hellanodike investi d'attributions régulières et durables
en dehors des jeux olympiques est un magistrat unique de la
période antérieure à 580 (1). Donc notre inscription appartient
aux premières années du vi‘ siècle, à moins qu'elle ne remonte
au vu : elle est contemporaine de Solon, si elle ne l’est pas
de Dracon lui-même. |
Gustave GLorz.
(1) Dans la période comprise entre 668 et 580, les Éléens, affaiblis par les
luttes de la royauté contre les πατρίαι et les yeveal, menacés de se voir enlever
définitivement la présidence des jeux olympiques, ont eu intérêt à maintenir le
prestige de leur Ilellanodike, pour l'opposer à celui de Pise.
DÉCRETS RELIGIEUX D’ARKÉSINÉ
(AMORGOS)
I. — L'inscription suivante est bien connue de la plupart
des archéologues qui ont visité Amorgos. Baumeister (1),
ἢ. Weil (2), Radet (3) l'ont copiée successivement. Mais le
texte restait très obscur. M. Weil avait pensé qu’il s'agissait
d'un règlement relatif au foyer sacré du temple de Héra.
M. Homolle, qui a publié la copie de M. Radet (4), s’est borné
à transcrire les premiers mols : πῦρ μηδένα καίε[ι]ν ἐν τῶι
Ἡρα[ίωι}, déclarant la suite incompréhensible. Cette copie
marquait pourtant un progrès sensible sur les précédentes. La
lecture d’une ou deux lettres de plus à la fin de la troisième
ligne aurait suffi à donner la clé de l'inscription. J'en reprends
à mon tour l'étude d'après ma copie et mes estampages.
L'inscription est gravée en tête d’une stèle de marbre
bleuâtre (1. 0,53, ἢ. 0,96, ép. 0,14) brisée en deux dans le sens
de la hauteur. Les deux moitiés se raccordent exactement à
la partie postérieure; mais, par devant, des éclats ont sauté,
laissant une brèche de 0,06 à 0,17 de large. Le bord droit est
légèrement écorné. La surface du marbre est très usée, et la
(1) Philologus, IX, p. 389. La pierre avait déjà été vue par Ross qui n'a publié
que le décret gravé à la suite de celui-ci. Inscr. graec. ined., II, ἢ. 136.
(2) Athen. Mitth., 1 (1816), p. 352.
(3) Bull. de corr. hellén., XV (1891), p. 592 n. 12.
(4) Bull. de corr. hellén., ibid. (Les numéros 12-16 ont été intercalés par
M. Homolle dans l’article de MM. Radet et Paris. Cf. p. 581),
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ . 155
lecture présente de grandes difficultés. Il est à peine besoin de
dire que ma copie, reproduite ci-après en fac-simile, n’est
qu'un dessin schématique. J’ai voulu donner simplement une
idéc de la forme des lettres et indiquer l'étendue des lacunes.
| FAIT IAHMAIO POI
PYNPAMHAENARKAIÏIEN
ATORAINOOIKOTHETIA
OLSTOATKEICEANAE
AAPA MAS ‘
£ KAINIANOT:
ΠΡ.
"Edobe[v τῆι βολῆι χ]αὶ τῶι δήμωι " "Op[e]-
σίλεως [εἶπεν] πῦρ μηδένα καίεν [ἐ]-
[y] τῶι Ἡρ[αίωι rod] τῦ καινῦ οἴχο τῆς γω[ν]-
ἰας χαὶ τὸ [ν]ε[ὼ καὶ πρ]ὸς τό Auxelo . ἐὰν δέ [τ|]-
5 ç καί[η]ι, ἀποτιζνέτω δέχ]α δρα[χ]μὰς [ἱερὰς]
[τὴ]: [Ἤ]ρ[η]-.
L'écriture o ete pour ou et et (fausses diphtongues) montre
déjà que l'inscription est antérieure à la seconde moitié du
iv* siècle avant J.-C. Les lettres y paraissent, d'autre part,
plus anciennes que dans plusieurs inscriptions d'Arkésiné
présentant les mêmes particularités. Elles gardent encore l'as-
pect un peu archaïque et ne peuvent guère être postérieures
au v° siècle.
156 2. DELAMARRE
L. 1-2. — Pour l'intitulé, ma copie ne diffère en rien de
celle de M. Radet. Il n’est pas besoin de répéter que la restitu-
tion [ἐπὶ βα]σιλέως Ν[αυσσώλλου], proposée par M. Weil, est
tout à fait impossible (4). M. Homolle a déjà montré que nous
avons là les restes d’un nom propre en -λεως, Il s’est abstenu
de le restituer. Étant donnés les éléments qui en subsistent, on
ne peut rétablir que ᾽Ορβθ[ε] σίλεως. Ce nom, je crois, ne s'est
pas encore rencontré, mais il est régulier. 1] se trouve avec
᾿Ορθόλαος dans le même rapport que Πρωτεσίλαος avec Πρωτό-
λαος, et tous deux sont formés, par analogie purement exté-
rieure, sur le modèle des noms à premier composant aoris-
tique comme ᾿Αρχεσίλεως, Ὁρμησίλεως, etc. (2). M. Weil avait
cru distinguer ensuite le commencement du my qui lui ἃ
suggéré sa restitution. Je verrais plutôt le bas d’un trait ver-
tical. On peut hésiter sur le verbe qu’il convient de suppléer.
Parmi les autres intitulés de décrets d'Arkésiné qui nous ont
été conservés intégralement ou dont la restitution est certaine,
dix-huit sont complets et contiennent : 1° la formule de sanc-
tion : ἔδοξεν τῆι βουλῆι καὶ τῶι δήμωι; 2° le nom de l'orateur :
ὁ δεῖνα εἶπεν ; 3° le nom de l’épistate : ὁ δεῖνα ἐπεστάτει (3). Deux
seulement sont abrégés : dans l’un la formule de sanction est
omise, et le nom de l'orateur seul est mentionné (4); le second
se réduit au contraire à la formule de sanction (5). L'intitulé
de notre décret comprend la formule de sanction etun seul nom.
Comme c’est de beaucoup le plus ancien, il semble qu’il faille le
considérer, non comme une forme abrégée, mais comme une
(1) Cette restitution est encore admise par Swoboda, Die gr'iechischen Volks-
beschlüsse, p. 25.
(2) Cf. Brugmann, Griech. Grammalik, p. 169.
(3) 11 faut remarquer de plus que dans les décrets antérieurs au n° siècle, au
nombre de 11, le patronymique n'est jamais mentionné ; il figure toujours, au
contraire, dans les autres.
(4) Décret en l'honneur d'Androtion d'Athènes, vers 355 av. J.-C. (Dittenberger,
Syllogeï, 112).
(5) ᾿Αθήναιον, X (1881), p. 535. L'inscription est publiée en minuscules; mais
lc patronymique indique qu'elle est postérieure au mnt siècle av. J.-C. Cf. plus
haut, note 3.
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ 157
forme antérieure moins développée (1). Le nom qui nous est con-
servé est-il celui de l’orateur ou de l’épistate? L’intitulé d'un
décret de l'île d'Ios, datant de la première moitié du 1v° siè-
cle avant J.-C., ne contient que la formule de sanction .et le
nom de l’épistate. Mais je n'en connais pas d’autre exemple.
Peut-être a-t-on accueilli avec trop de confiance les leçons
et restitutions de Ross. Elles ne semblent rien moins que
certaines (2). Dans les autres intitulés qui nous sont parve-
aus, lorsqu'il n'y ἃ qu'un seul nom mentionné, c’est tou-
jours celui de l’auteur de la proposition. Il est donc très vrai-
semblable que tel est bien aussi le cas dans notre décret. La
restitution de εἶπεν, il est vrai, ne va pas sans quelque difi-
culté, et il faudrait deux ou trois lettres de plus pour remplir
Ja lacune. Mais l’hypothèse d’un vide après l'intitulé n'est nul-
Icment impossible, et j'ai préféré l'admettre plutôt que de réta-
blir un autre verbe moins usité. |
Le sigma qu'on lit après la lacune de la ligne 3, appartient
nécessairement à la préposition régissant les génitifs suivants,
et l’on ne peut guère restituer que [rp6j « du côté de », dont
l'emploi avec le génitif est bien connu (3). La restitution γω [ν]ίας,
d'autre part, est certaine (4). Remarquons, dès maintenant, —
(4) Sur 16 développement de l'intitulé des décrets, en dehors de l'Attique, voy.
Swoboda, ouvr. cité, p. 24 et suiv.
(2) Ross, /nscr. graec. ined., 11, 94 Ὁ. (= Ch. Michel, Recueil, 411) : Ἔδοξε, τῆι
βολῆι [καὶ τῶι] δήμωι * Τιμοχλῆῇς [Κλεο]δήμου [rie] στάτε * πρόξενον εἶναι Ἰητῶν
x. τ, À. (La leçon est également admise par Swoboda, ouvr. cilé, p. 25). Le texte
épigraphique porte TIMOIHS. . . . AHMOT. Tout d’abord le génitifen οὐ est très sus-
pect, en raison de l'écriture : o et ε — οὐ et et {fausses diphtongues) qui est cons-
tante dans le reste de l'inscription. Le décret étant antérieur à la seconde moi-
tié du 1v° siècle avant J.-C., comme ces formes l'indiquent, la mention du patro-
nymique dans l'intitulé ne laisse pas, d'autre part, d'être assez surprenante (cf.
plus haut, p. 156, n. 3). Enfin la pierre est brisée à droite, et l'inscription gravée
au-dessus, dont quelques restitutions sont certaines, montre que la lacune de la
fin des lignes est d’environ 8 lettres. Dans ces conditions, il semble qu'on peut
restituer avec quasi-certitude : Τιμο[κλ]ῆς [airs], Anuo[x..... ἐπ) ε]στάτε.
(3) Le sens primitif de cette préposition avec le génitif «en venant du côté de »
(cf. cependant Brugmann, Gr. Gr.s, p. 450, 4) s'est affaibli de bonne heure dans
‘les inscriptions. Par exemple, dans les comptes de l'Érechthéion, πρός marquant
la direction est employé indifféremment avec le génitif, le datif et l'accusatif.
(4) “EKAI Weil. £TOKAINOOKOTEZS" Radet. Le petit trait que M. Radet a pris
158 J. DELAMARRE
et il en est à peine besoin — qu'on ne saurait traduire ces mots
dans l’ordre donné. Le génitif [γωνίας] serait grammaticalement
inexplicable. Il faut donc construire : πρὸ]ς τῆς γωνίας τὸ καινὅ
οἴχο (1). Je lis ensuite, comme M. Weil, καὶ τ; mais, au lieu
d'un À avant E, je distingue une barre verticale et un trait
oblique, dessinant sur le marbre effrité la première partie d'un
ny. Nous sommes conduit à restituer ve[w], ce qui entraîne le
supplément : [καὶ πρ]ὸς τό Auxeio (2). Si l’on entend trois indi-
cations topographiques différentes, on se heurte à de sérieuses
difficultés. La plus grave est l'omission de la préposition devant
ve, étant donné surtout qu'elle est répétée devant Auxelo.
Il est de plus très étrange que l'angle où il est interdit d'allu-
mer du feu ne soit pas déterminé (3). Ne pourrait-on, dès
lors, supposant une de ces tournures brachylogiques si fré-
quentes en grec, faire porter γωνία à la fois sur τὸ χαινῦ οἴχο
et τὸ vw, et traduire « l'angle formé par le bâtiment neuf
et le temple » ou plus simplement — et le français offre ici
exactement l'équivalent du grec — « l'angle du bâtiment neuf
et du temple »? Les difficultés précédentes seraient écartées, et
l'inversion πρὸς τὸ οἴχο τῆς γωνίας, un peu inattendue en style
épigraphique (4), se trouverait motivée par la place de γωνία
entre les deux mots auxquels il se rapporte (5). Le sens ne
serait pas seulement très satisfaisant, mais nous comprendrions
en même temps la raison de l'interdiction. Le danger d’incen-
pour le second jambage d'un pi est un défaut de la pierre. Le pi, dans cette
inscription, est d’ailleurs un tiers plus large. L'ôméga, qui n'a pas été noté par
les précédents éditeurs, est très distinct, même sur l'estampage ; et la lettre est
trop caractéristique ici pour prêter à la moindre confusion. |
(1) Cf. Hérodote, I, 51 : ἐπὶ τοῦ rpovnlou τῆς γωνίης.
(2) ΟΣΙΟ Weil. OZTO ... KEIQ Radet.
(3) Dans l'exemple d'Hérodote cité plus haut (note 2), il est vrai, l'angle n'est
pas non plus déterminé; mais le cratère dont il est question suffisait à le faire
reconnaître. Ici le cas est différent.
(4) Voy. cependant, Dittenberger, Sylloge 3, 588 1. 6 : χύμα χρυσοῦν ἀπὸ τοῦ
᾿Απόλλωνος τοῦ ἀγάλματος (Délos).
(5) Les constructions de ce genre ne sont pas rares en grec. Voy. par exemple,
Xénophon, Cyr., VI, 3, 8 : συνεχάλεσε,.. καὶ τῶν μηχανῶν δὲ καὶ τῶν σκευοφόρων
τοὺς ἄρχοντας καὶ τῶν ἀρμαμαξῶν,
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ 159
die était beaucoup plus gränd aux abords d'un tel recoin ; et
précisément nul endroit de l’Héraion ne devait être plus pro-
pice pour allumer du feu, à cause de l'abri qu'il offrait contre
le vent. Il convenait, avant tout, de le protéger. D'autre part,
l'épithète καινός jointe à οἶκος, la place de ces mots en tête de
l'énumération, semblent indiquer que l'interdiction a été moti-
vée par la construction neuve. Or, celle-ci était évidemment
moins précieuse que le temple lui-même. Il y aurait donc sujet
de s'étonner que la mesure n'ait pas été prise plus tôt, si l’on
n’admettait pas que cette nouvelle construction y avait donné
lieu en raison du danger que sa situation créait. On peut se
demander enfin comment on aurait pu rendre autrement la
même idée. La préposition μεταξύ (μεταξὺ τὸ otxo καὶ τὸ vew), par
exemple, ne serait pas d’un emploi très exact, et, surtout, l'in-
terdiction ne s’appliquerait plus aux abords de l'angle. Il eût
donc fallu recourir à une longue périphrase peu en harmonie
avec le style ordinairement si concis de ces sortes de pres-
criptions. Mais ce n'est pas assez que tant de bonnes raisons
recommandent l'interprétation précédente ; il faut encore que la
grammaire l’autorise. Γωνία désigne proprement une partie
d’une surface ou d'un objet. Si on le construit avec deux noms,
le génitif ne saurait s'expliquer par un rapport d'appartenance,
ou tout autre rapport exprimé par ce cas. Il faut supposer,
comme 16 l’ai dit, une tournure brachylogique. Si elle ne s'est
pas encore rencontrée, il n’y a pas lieu de s’en étonner, tant
le mot est peu employé. Nous en avons, du moins, semble-t-il,
un exemple analogue dans les locutions comme χατὰ μέσον
τάφρου καὶ τείχεος (1). En effet, le mot μέσον --- et il importe peu
que ce soit un adjectif pris substantivement — signifie aussi,
essentiellement, une partie d’une surface ou d’un objet; mais,
par une transposition identique, il se trouve ici exactement
dans le même rapport que γωνία avec les génitifs qu'il régit.
| (4) Homère, I!., V, 8 (exactement xà5 δὲ μέσον τάφρου xai τείχεος). Cf. Platon,
Tim., 32 Ὁ : ἐν μέσῳ πυρός τε χαὶ γῆς, etc. Collitz-Baunack 2010, 1. 43 : ἀνὰ μέσον
τοῦ ναοῦ καὶ τοῦ βωμοῦ. Cf. 2049, 1. 48, etc.
41
160 J. DELAMARRE
Ce rapprochement suffit, je crois, à justifier notre interpréta-
tion. Je traduis donc : « Défense d'allumer du feu dans l’Hé-
raion du côté (1) de l'angle du bâtimeut neuf et du temple, et
du côté du Lykeion. » |
La nature de ce décret se trouve maintenant nettement déter-
minée. Nous voici bien loin du foyer sacré auquel on avait
songé. Il s’agit d'un simple règlement de police ; mais c'est
pour ainsi dire le premier de ce genre qui nous ait été con-
servé (2). À peine rencontre-t-on deux ou trois prescriptions
analogues dans les règlements généraux concernant les sanc-
tuaires de l’Acropole d'Athènes (3) et de Mantinée (4).
On a beaucoup discuté sur la destination des ἱεροὶ οἶκοι. On
avait donné du mot une définition trop étroite, en l’appliquant
exclusivement aux bâtiments où étaient conservés les objets
sacrés (3). Dans les inscriptions de Thisbé (6) et d'Égine (7), il
désigne aussi un édifice abritant une statue de culte (8). La
déesse poliade de Sparte, Athéna χαλκίοιχος, devait d’ailleurs
(1) On ne peut songer, à cause de l'exiguité de la lacune, à restituer 1. 3 [été]
au lieu de [προό]ς.
(2) Ce travail était terminé, lorsqu'a paru, dans le dernier fascicule des Afhen.
Mittheilungen, XXVII (1902), p. 223, une inscription qu'il faut placer maintenant
à côté de la nôtre. C'est un fragment d'un règlement analogue, mais plus déve-
loppé, datant du n° siècle av. J.-C., et trouvé par M. Rubensohn dans les fouilles
de l’Asklépieion de Peros. L'exposé des motifs (]. 5) surtout est à noter : μὴ τὸ
ἱε]ρ[ὸ]ν κινδυνεύει μηδὲ τὰ ἀναθήματα βλ[άπτηται]).
(3) Ch. Michel, Recueil, 810 — Jahn-Michaelis, Arr Athen., Ὁ. 99, 1. 5 : μεδὲ τὸ
πῦρ ἀν[άπτ]εν ; 1. 15 μεδὲ Ὠιπνε[ύεσθαι..1].
(4) Bull. de corr. hellén., XIII (4889), p. 284, 1. 21 : εἴ x’ ἐπὶ δόμα πῦρ ἑποίσε,
δυόδεκα δαρχμὰς ὄφλεν, τὸ μὲν ἔμισυ τᾶι θεδι͵ τὸ δ᾽ ἔμισυ τοῖς πιερομνάμονσι.
(5) Kôhler, Athen. Mitth., VII (1882), p. 374. Telle est bien, cependant, la desti-
nation de l'ofxos de l'Héraion de Samos : ibid., p. 311 = Ch. Michel, Recueil 832,
L 44 : ἐνελίμπανεν ἐν τῶι οἴκωι χ. τ. À. (inventaire du trésor de Héra). Cf. Ditten-
berger, Sylloge 3, 511, I. 14 (Chios); 588, 1. 155 (Délos), etc.
(6) C. I. G. Sept., 2233.
(T) Berl. philol. Wochenschrift, 1901, p. 1002 (Furtwaengler). Cf. Fraenkel.
Rhein. Museum, 1902, p. 153; Furtwaengler, ibid., p. 252; Fraenkel, ibid., p. 544,
(8) Je crois qu'il faut rapprocher des textes précédents une inscription
archaïque d'Arkésiné de la fin du vie siècle (Hoffmann griech. Dialekte, ΠῚ,
p. 29 n. 54) : Δήμητρος Ο(ὐ)ρέης à οἰκίη. (C'est par erreur que le premier éditeur,
M. Radet, a attribué ce texte à Minos. Bull. de corr. hellén., XII, 1888, p. 236,
D. 9). |
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ : 161
son épithète à l'oixos revêtu de plaques de bronze où se trou-
vait sa statue (1). Thucydide nous apprend qu'il était de petites
dimensions; et c'est seulement en cela, semble-t-il, que
l'oikos-sanctuaire se distinguait du temple proprement dit
(ναός) (2). Pour revenir à notre inscription, l’oixoçs dont il y est
question rentre vraisemblablement dans la première de ces
deux catégories. Sa situation par rapport au temple paraît bien
indiquer, en effet, que c'était une simple annexe.
La mention du Lykeion est nouvelle. Il est difficile de déci-
der si cet édifice était simplement contigu au sanctuaire de
Héra ou s’il en faisait partie. Dans cette dernière hypothèse, 1]
faut admettre qu’il se trouvait tout à fait sur le bord. La prépo-
sition πρός semble montrer, en effet, qu'il n'était accessible de
l’Héraion que dans une seule direction. C'est également la pre-
mière fois qu'il est question du culte d'Apollon Lykeios dans
les inscriptions d'Amorgos. Je n’en connais d'autre mention
pour les Cyclades que dans un texte de Paros tout récemment
découvert (3).
Les dernières lignes (4-6) contiennent la clause pénale, en
cas de contravention (4). Le taux de l'amende n'étant pas ordi-
nairement énoncé en chiffres dans les inscriptions de ce genre,
les traces de lettre qu'on distingue devant ὄρα[χ)]μάς ne peuvent
appartenir qu’à un alpha. Le nombre rond [ôéxj« est dès lors le
supplément le plus vraisemblable (5). La restitution ("Hjp[nt]
est certaine. Cette forme se retrouve encore à Arkésiné dans
un autre décret d'époque un peu plus récente (6).
(4) Thucydide, I, 434. Pausanias, IIT, 11, 2.
(2) Pausanias néanmoins se sert du mot ναός pour désigner Île sanctuaire
d'Athèna yahxloruoc.
(3) Athen. Mitth., XXVI (1901), p. 213.
(4) L. 4 ΣᾺΝ Radet. L. 5 SIAKI/ ΠΟΤῚ Weil. L. 6 ΠΡΙΙΗ Weil. La copie de
M. Radet s'arrête à la ligne 4.
(5) C'est également le chiffre porté dans un autre règlement relatif à l'Héraion,
cité plus loin p. 162, note 1. A vrai dire, le chiffre rond est loin d'être un principe
en pareil cas (cf. plus haut p. 160, note 4), mais c'est celui qui cadre le mieux
ici avec les dimensions de la lacune.
(6) Dittenberger, Sylloge 3, 511 1. 42. Ce même décret contient en outre la forme
rpobeauin 1.46, après [προθ]εσμίαν 1. 25.
162 J. DELAMARRE
Notre décret est le texte le plus ancien qui concerne l'Hé-
raion. C'était, on le sait, le principal sanctuaire de la cité,
celui où l’on exposait les actes publics. Je ne rappellerai pas
ici le décret bien connu, gravé précisément à la suite de celui-
ci, mais environ d’un siècle postérieur, interdisant aux étran-
gers d'y sacrifier et ordonnant de l'enclore (1). Un autre décret
publié dans 1 ᾿Αθήναιον, en minuscules et sans aucun commen-
taire, semble, au contraire, avoir passé à peu près inaperçu (2).
Je veux profiter de l'occasion qui s'offre à moi de revenir sur ce
texte intéressant. J'en reproduis la partie principale d'après
ma collation.
Ἐπειδὴ Θεόδοτος Nixéou Πάριος πολλὴν φιλοτιμίαν ἐνδέδεικτα[ι)
περὶ τὸ ἄγαλμα τῆς Ἥρας, ἐλθὼν ἐν τοῖς χρόνοις χαβὰ ᾧ μολόγη-
D σεν πρὸς ᾿Αρκεσινεῖς, καὶ ἐχόσμησεν καλῶς καὶ προθύμως, ἐπιτρέ-
ψας περὶ μισθοῦ τῆι πόλει * δεδόχθαι τῆι βουλῆι καὶ τῶι δήμωι, ἐπα:-
γέσαι μὲν αὐτὸν φιλοτιμίας ἕνεκα τῆς πρὸς τὴμ πόλιν καὶ στε-
φαγῶσαι θαλλοῦ στεφάνωι " ἀποδοῦναι δὲ αὐτῶι τό τε ἀνάλωμα
τὸ ἐψηφισμένον δραχμὰς P : καὶ μισθὸν καὶ ἐπίχειρα τοῦ ἔργου
10 δραχμὰς H : τοὺς ταμίας (3)............. prrnsrosoresse
« Attendu que Théodotos, fils de Nikéas, Parien, a fait
preuve de beaucoup d'empressement au sujet de la statue de
Héra, en venant à l’époque dont il était convenu avec les Arké-
siniens, et qu’il l’a mise en état avec zèle et avec succès, s'en
rapportant à la cité pour l'appréciation de son salaire : plaise au
Conseil et au peuple, on décernera un éloge à Théodotos pour
son dévouement envers la cité, et on le couronnera d’une cou-
ronne de feuillage. Les trésoriers lui remettront les cinquante
drachmes de la dépense votée, et 100 drachmes à titre de
salaire et de gratification. »
(1) R. Weil, Aéhen. Mitth., 1 (1876), p. 342, n. 10 ὁ (ΞΞ Ch. Michel, Recueil, 741 ;
Dittenberger, Syllogei, 565). La nouvelle lecon ᾿Αγήνω[ρ] (1. 1) due à la collation
de M. Radet (Bull. de corr. hellén., XV (1891), p. 592) a échappé aux deux der-
niers éditeurs.
(2) Koumanoudis, ᾿Αθήναιον, X (1881), p. 534, 1. 25 et suiv.
(3) L. 8 : ἀνήλωμα Koumanoudis.
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ 163
Ce décret est gravé sur la même pierre que trois décrets de
proxénie : l’un en faveur d’un habitant de Théra, les deux -
autres en faveur de Rhodiens. Les formes des lettres, à peu
près identiques, montrent qu'ils sont contemporains. M. Ho-
molle a placé tous ces textes à la fin du troisième siècle avant
J.-C., ou au commencement du second (1). Mais le style de la
gravure, qui est excellent, ne permet guère de descendre plus
bas que la fin du quatrième siècle. Des données historiques
nouvelles prouvent, d'autre part, que l'inscription sur laquelle
reposent la plupart des synchronismes établis par M. Homolle
date elle-même de cette époque (2). |
Le statue de Héra, dont il s’agit ici, est évidemment la
statue de culte de la déesse, celle qui occupait le centre de la
cella du temple. Le fait que l'ouvrier chargé de la mettre en
état vient de Paros laisse supposer qu'elle était de marbre, et
le prix relativement élevé du travail indique une œuvre impor-
tante. Les monnaies, malheureusement, ne nous en ont pas
gardé le type (3). Le verbe xosuet», 1. 5, semble pris dans un
sens assez large. La χόσμησις ou γάνωσις, il est vrai, est une
opération nettement définie, qui avait pour objet de rendre aux
statues leur poli et leur éclat primitif. Nous en connaissons
maintenant le détail précis grâce aux comptes de Délos (4).
Elle consistait dans un lavage à l’eau étendue de nitre, et dans
une friction à l'huile et à la cire parfumées. Le prix des four-
(1) Bull. de corr. hellén., XVI (1892), p. 269. Van Gelder a adopté également
cette date pour les décrets en faveur de Rhodiens, Gesch. der allen Rhodier,
P. 554, n. 86 et 87.
(2) Je réserve la démonstration pour une prochaine étude où j’aurai l’occasion
de revenir sur la plupart de ces textes.
(3) À Minoe seulement, on trouve sur les monnaies la tête de Héra (P. Lambros,
Ἔφημ, &py. 1810. p. 356, n. 23 et pl. 54). Les belles têtes de marbre provenant
d'Arkésiné montrent combien l’art y était florissant. (Max. Collignon, Bull. de
corr. hellén., X1II (1889), p. 40 et pl. Χ et XL.)
(4) Les textes ont été réunis et étudiés par M. Homolle, Bull, de corr. hellén.,
XIV (1890), p. 497 et suiv. Voir aussi Holleaux, ibid., p. 185, où l'on trouvera
cités les textes d'auteurs. Il faut distinguer de cette opération la χόσμησις ayant
pour objet la toilette et la parure de la déesse et dont le soin incombait aux
femmes. Cf. Bull. de corr. hellén., ibid., Ὁ. 500, note 6 : εἰς χόσμησιν τὸς Ἥρας
χαὶ ταῖς χοσμούσαις MI.
164 J. DELAMARRE
nitures varie entre 9 et 13 drachmes (1). À en juger par la
dépense, le travail de Théodotos n’a pu se borner là. Dans un
compte délien, pour la même statue, il est fait mention, à côté
de la χόσμησις, d'une peinture à l’encaustique (ἐγχαῦσαι καὶ
ἐπικοσμῆσαι) et d’une opération appelée κονίασις, consistant soit
dans un polissage au sable, soit dans l'application d’un enduit
destiné à recevoir la peinture (2). Pour l'éyxauors et la κόσμησις,
qui ont été exécutées par le même ouvrier, la dépense com-
prend 27 drachmes de fournitures et 96 drachmes de salaire.
La κονίασις revient à 416 drachmes. Il semble que ce soient les
opérations principales auxquelles pouvait donner lieu la mise
en état d’une statue de marbre. La dernière, toutefois, est beau-
coup plus rare. Les 150 drachmes de notre décret correspondent
à peu près au prix des deux premières. Les inscriptions de
Délos nous apprennent, d'autre part, que les ouvriers chargés
de ces travaux étaient des spécialistes (χοσμηταῦ étrangers à
l'île (3). Notre texte nous fait connaître le pays de l’un d’eux,
et le renseignement est d'autant plus intéressant qu'il s'agit de
Paros. |
Les cinquantes drachmes mentionnées à la ligne 9 : τὸ ἀνά-
λωμα τὸ ἐψηφισμένον représentent les fournitures et autres
déboursés de Théodotos. Nous voyons que le devis en a été
approuvé par l'assemblée du peuple. On trouve également
dans les comptes déliens la mention de devis et contrats pour
les entreprises de ce genre. 1] me suffira de citer ici le texte
auquel j'ai déjà emprunté quelques-uns des renseignements pré-
cédents : ᾽οφελίωνι ἐργολαόδήσαντι τῆς ᾿Αφροδίτης τὸ ἄγαλμα...
. (1) Bull. de corr. hellén., XIV, p. 498, pour la χόσμησις de la statue d'Artémis :
éponges 2 dr, nitre 4 ob. huile 3 dr. 3 ob. linge et cire 4 ob. parfum 5 dr.
(2) Bull. de corr. hellén., XIX, p. 499. La κονίασις était surtout usitée pour les
monuments et consistait alors dans un crépissage. Ici ilne peut guère s'agir que
d'un polissage antérieur à l'application de la peinture; la κόσμησις venait néces-
sairement en dernier lieu. La χονίασις correspondrait ainsi à la première opéra-
ration indiquée dans le texte de Plutarque οἱ λιθοξόοι τὰ πληγέντα καὶ περιχοπέντα
τῶν ἀγαλμάτων ἐπιλεχίνοντες χαὶ γανοῦντες. (Discr. adul. et amic. 31 p. 14 E.)
(3) Bull. de corr, hellén., XIV, p. 500, note 1 : μηνὸς Γαλαξιῶνος ὅτε ἧσαν oi
κοσμηταί,
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ 165
ἐγκαῦσαι καὶ ἐπικοσμῆσαι χατὰ συγίγραφήν... (4). Comme, dans
notre inscription, le salaire n'avait pas été fixé d'avance (2), il
n'y a pas eu adjudication, mais contrat de gré à gré. IL est pro-
bable que les délais dans lesquels le travail devait être achevé y
étaient stipulés, et que les mots χαθὰ ὡμολόγησεν πρὸς ᾿Αρχεσινεῖς
(L 4) font précisément allusion à cette clause du contrat. Le
travail a naturellement été exécuté sous le contrôle des νεωποῖαι
qui, dans le décret cité plus haut, étaient déjà chargés de sur-
veiller l'établissement de la clôture de l’Héraion (3).
Cent drachmes sont allouées à Théodotos, à titre de μισθός et
ἐπίχειρα, C’est la première fois, je crois, que le mot ἐπίχειρα se
rencontre dans les inscriptions. Dans les auteurs, il semble
_ avoir toujours le sens de récompense ou de châtiment (4), et
non celui de salaire, qu'indiquent également les dictionnaires.
Dans notre texte, à côté de μισθός, ce mot ne peut signifier
que « récompense ». Les deux termes ne sont donc pas syno-
nymes, et le sens du second se trouve maintenant fixé avec la
plus grande précision.
IT. — Le décret dont il nous reste à nous occuper n'est pas
non plus inédit. Il a été publié par M. Homolle, d’après une
copie de M. Radet, en même temps que le premier. Mais il était
également impossible d'en saisir le sens. Aussi bien l’inscrip-
tion est dans le plus misérable état. Les lettres sont rongées
par l'humidité, souvent très déformées et à demi effacées.
Comme les traits résultant des éraflures ou des défauts du
marbre ont naturellement subi les mêmés déformations, la
difficulté de la lecture en est accrue d'autant. Dans ces condi-
tions, je n'ai pas besoin de dire le très grand service que m'a
rendu la copie de M. Radet malgré ses lacunes et ses erreurs.
(1) Bull. de corr. hellén., XIV, p. 499.
(2) Cf. Ch. Michel, Recueil, 328, 1. 12 : τοὺς μισθοὺς Adu6avev οὖς à δῆμος ἠξίου
(décret d’Apollonia ? de Thrace en faveur de l'architecte Epikratès de Byzance).
(3) Voyez plus haut p. 162, n. 1. Sur les attributions des νεωποῖαι voir aussi
Revue de Philologie, XXV (1901) p. 166.
(4) Platon, Rep., 608 ὁ. Aristophane, Vesp., 581,
166 : J. DELAMARRE ΤᾺ
Je n'ai pas tenu compte, dans la copie reproduite ci-après, des
déformations des lettres. Ce n'est, comme la précédente, qu'un
dessin schématique très imparfait (1).
«
- «ον πποΠΡὲξῃ ——— σὰ
- — ee mate
meme ee
-
. O Ν .
AVEE NTHIROYAHIKAIT: | ma
KkY " CIPERATOANAASNIOZSEME!
LTAT FIEPSIAHHIEPEATHEANMAHTPO 1
TH£EA MOTE DO Y LEISATTEMEINNPO |
TOYETP TAN PEPITOIEPONTE <AH
AHTPOZOTIA Finn LIOYZ AI
A ENTAIIEPMIKAIOTI.
| -ENOITOENTAIIEPANI
7 N APKE £INEYÆIN \£EI
| OZTOYEOEOVE
— EOY »
[8 e] of].
Ἔδοξεν τῆι βουλῆι καὶ τῶι δή]μωι"
Κυ...... εἶπεν, ᾿Απολλώνιος ἐπε-
στάτίε]ι " ἐπειδὴ ἡ ἱερέα τῆς Δήμητρος]
5 τῆς δ[η]μοτε[ζλ]οῦς εἰσαγγέλλει πρὸς]
τοὺς πρ[υ]τάν[ει]ς περὶ τὸ ἱερὸν τῆς] Δή-
[μ]ητρος ὅτι α[ΐ γυ]ναῖκες εἰσιοῦσαι
ον νᾶννννννον ἐν τῶι ἱερῶι, καὶ ὅτι,
[εἰ ἔτι] το[ὕ]το [γ]ένοιτο ἐν τῶι ἱερῶι,
40 [δεινὰ ἄ]ν [εἴη] ᾿Αρκεσινεῦσιν [ἀ]σε[6οῦ]-
(1) Bull. de corr. hellén., XV (1891), p. 593 n. 44. Voir plus haut, p. 134 note 4.
DÉCRETS RELIGIEUX D’'ARKÉSINÉ 167
[ouv......nplôc τοὺς θεοὺς (4).....
Quelques lettres encore intactes montrent que l'inscription
était gravée avec le plus grand soin. Le sigma, le my, le pi sont
du meilleur style, et ce texte ne peut guère être postérieur au
iv° siècle (2).
* Les dix premières lignes seules nous ont été conservées.
Elles suffisent cependant à nous indiquer le sujet du décret, et
permettent d'en reconstituer le cadre. Nous apprenons d'abord
(1. 4-6) qu'il a été proposé à la suite d’un rapport fait aux pry-
tanes par la prêtresse de Déméter Démotélès, au sujet d'une
impiété commise dans le sanctuaire de la déesse (3). Cette cir-
constance déjà est d’un vif intérêt. Si les lois et règlements
religieux nous sont parvenus en assez grand nombre, les textes
relatifs à la procédure suivie en cas d'infraction sont extrème-
ment rares. Ils se réduisent à quelques passages d’Aristophane.
Dans les Θεσμοφοριάζουσαι, par exemple, lorsque Mnésilochos
est reconnu au milieu des femmes réunies pour célébrer les
mystères de Déméter, Kleisthénès se charge aussitôt d'aller
dénoncer le fait aux prytanes (v. 652) :
τουτονὶ φυλάττετε
-« 4 4 u (4
χαλῶς, ὅπως μὴ διαφυγὼν οἰχήσεται "
ἐγὼ δὲ ταῦτα τοῖς πρυτάνεσιν ἀγγελῶ.
Un peu plus loin l’une des femmes reprend à son tour (v. 762) :
(4) L. 3, pour le nom de l'orateur, la copie de M. Radet porte KY.. AMO. Je n'ai
pas reconnu l'alpha ; au lieu d'un my je verrais plutôt un ny. Mais tout cela est
très incertain. J'indiquerai au fur et à mesure du commentaire les autres leçons
de M. Radet. L. 4, il est à peine besoin de signaler la forme ἱερέα si fréquente dans
les inscriptions. Cf. Meisterhans-Schwyzer. Gr. der att. Inschr., p. 40 et suiv.
(2) C'est par erreur que M. Radet a noté sur sa copie le my à jambages verti-
caux, et le pi à hastes égales.
(3) L. 5 ΤΗΣΑΜΟΡΓΕΙΟΥ͂Σ (mais la plupart des lettres en pointillé), 1. 6-1 ΤΟΥΣ
HP. TON .,.EUITO ..ONTI... AI | ..TPQ Radet.
168 | J. : DELAMARRE
ἀλλ᾽ ἐπειδήπερ πάρει
φύλαξον αὐτόν, ἵνα, λαβοῦσα Κλεισβένη,
τοῖσιν πρυτάνεσιν ἃ πεποίηχ᾽ οὗτος φράσω.
Notre décret forme l'illustration précise de ces textes. La
plainte ayant été portée devant les prytanes, c’est-à-dire les
membres de la section permanente du Conseil (1), il en faut
conclure que le sanctuaire en question appartenait à l'État.
L'épithète Sr μοτελής ne s'était rencontrée jusqu'ici que dans un
passage contesté de Démosthène (2) et dans une inscription de
Karystos de très basse époque (3), où elle est appliquée à Diony-
s0s.On la considérait comme synonyme de δημόσιος et désignant
une divinité qui recevait un culte de l’État, par opposition aux di-
vinités de même nom des cultes privés (4). Nous avons ainsi une
nouvelle preuve de l'exactitude de cette interprétation (5).
Les lignes 7-8 contiennent l'exposé des faits qui ont motivé
la démarche de la prêtresse de Déméter : ὅτι αἱ γυναῖχες εἰσιοῦ-
σα! | ...u,..,.,.. ἐν τῶι ἱερῶι, La lacune porte malheureuse-
ment sur le verbe principal de la phrase. La pierre est brisée au
milieu de la seconde lettre dont les traces m'ont paru trop
incertaines pour être notées. M. Radet lit en outre MANTO....
Le my n'est guère possible. Ce serait le seul de l'inscription
ayant les jambages extérieurs verticaux. L’estampage ne laisse
voir qu’un croisillon peu distinct qui pourrait n'être qu'un
(1) Les prytanes, à Arkésiné, restaient en charge un mois (cf. Revue de Philo-
logie, XXVIL (1903), p. 118, 1. 3), de même qu'à Aegialé (Bull. de corr. hellén., XXIII
(1899), p. 395, 1. 37). Les inscriptions ne nous en font pas connaître le nombre. À
Minoa, un texte inédit nous apprend qu'ils étaient six.
_ (2) Démosthène, XXI, 53.
(3) Dittenberger, Hermes, XXVI (1891), p. 414.
(4) Dittenberger, ibid., p. 416.
(3) L'adjectif δημοτελής ἃ ici à peine la valeur d'une épithète, et il est possible
que le déese en ait porté une autre plus caractéristique. Cf. Dittenberger, Syl-
loget, 513, 1. 5 : Διονύσκ Dur Βαχχίωι τῶι δημοσίωι (M. Dittenberger, il est vrai,
préférerait supposer une omission du lapicide, et considérer τῶι ênuoslut comme
un substantif. L'hypothèse est bien peu vraisemblable). Le culte de Déméter à
Arkésiné nous est connu par d'autres inscriptions. Voy. plus haut, p. 460, note ὃ:
Déméter Ouréa. Athen. Mitth., 1 (1816), p. 334, ἢ. 4 : Déméter, Koré, Zeus
Eubouleus.
DÉCRETS RELIGIEUX D ARKÉSINÉ 169
défaut de la pierre. L’alpha est certain, mais le ny est bien peu
probable : le second jambage descendrait trop bas et se trou-
verait de plus engagé sous la barre du tau. Je π᾿ αἱ vu d’ailleurs
que des traces très flottantes, et peut être n'est-ce Ἰὰ aussi qu’un
défaut de la pierre. Le tau m'a paru, sur la pierre, d'apparence
plus consistante,; sur l'estampage cependant 16 crois distin-
guer en bas, à gauche de la haste, un petit trait horizontal qui
ferait prendre la lettre pour un zêta; mais à l'envers la haste
disparaît et on a l'illusion d’un epsilon. Ensuite je reconnais
bien le cercle que M. Radet a pris pour un oméga ; mais je ne
crois pas qu’il corresponde à une lettre. En résumé, ces lectures
sont beaucoup trop douteuses pour servir de point de départ à
une restitution, mais peut-être pourraient-elles permettre de
vérifier une conjecture. Le reste de la phrase nous donne
quelques indications qui ne laissent pas d’avoir leur prix. L’ar-
ticle précédant le mot yuvatxes montre qu'il s’agit sinon de l’en-
semble, tout au moins de la majorité des femmes de la cité.
L'emploi du participe présent εἰσιοῦσαι, d'autre part, ne s'ex-
plique que si l’action exprimée par le verbe principal a été
répétée et cst devenue habituelle. Les actes d’un caractère
individuel — et ce sont les plus nombreux de ceux auxquels se
rapportent les règlements religieux qui nous ont été conser-
vés — ne sauraient donc venir ici en considération (1). Le
nombre des hypothèses possibles se trouve dès lors très réduit.
Un décret du Pirée, relatif au sanctuaire de Déméter Thesmo-
phoros, semble fixer les limites dans lesquelles nous devons
nous renfermer, et nous fournit le commentaire le plus précis
de notre texte (2).
[ἐπιμελεῖσθαι.... τὸν δήμαρχον)
[μετὰ] τῆς ἱερείας [τ]ὸ[ν ἀεὶ δημαρχ]
[οὔ]ντα τοῦ Θεσμοφοοίου, [ὅπως ἄν μ]-
(4) Par exemple, le règlement de Lykosoura relatif au culte de Despoina, Ditten-
berger, Sylloge ?, 939, Cf. 560, 567, etc.
(2) Ch. Michel, Recueil, 144.
. 470 J. DELAMARRE
[ηδ]εὶς ἀφέτους ἀφιεῖ μηδὲ θιά[σο]-
ὅ [ue] συνάγει μηδὲ ἱερὰ ἐνιδρεύω[ν]-
[rule μηδὲ καθαρμοὺς ποιῶσιν μηδ-
[δ] πρὸς τοὺς βωμοὺς μηδὲ τὸ μέγαρ-
ον προσίωσιν ἄνευ τῆς ἱερέας, [ἀλ]-
λ᾽ ἢ ὅταν ἡ ἑορτὴ τῶν Θεσμοφορίων
10 καὶ Πληροσίαι καὶ Καλαμαίοις x-
αἱ τὰ Σχίρα καὶ εἴ τινα ἄλλην ἡ υἐ-
pay συνέρχωνται αἱ γυναῖκες κα-
τὰ τὰ MATRA. ...,......, ΝΠ
« Le démarque aura avec la prêtresse la surveillance du
Thesmophorion. Ils veilleront à ce que personne n’y lâche de
bestiaux, n'y réunisse de thiases, n’y établisse d'objets de
culte (1), n’y fasse de purifications, ne s'approche des autels et
du mégaron sans la prêtresse, en dehors de la fête des Thesmo-
phories, des Plérosiai, des Kalamaia, des Skira et de tout autre
jour où les femmes se réunissent conformément à la tradition
des ancêtres. »
La mention aveu τῆς ἱερείας (1. 8) permet déjà de saisir la por-
tée qu'a dans notre texte 16 participe εἰσιοῦσαι. Le fait d'entrer
dans le sanctuaire sans la prêtresse constituait vraisemblable-
ment une première impiété. Reste à déterminer l'action prin-
cipale. La lacune, d'une étendue de 10 à 12 lettres, peut être
remplie soit par un verbe actif très court avec son complément,
soit par un verbe neutre. Nous ne tiendrons compte, quant à pré-
sent, que de l'alpha, qui est certain, et qui occupe la quatrième
ou, à la rigueur, la cinquième place. Il ne peut donc être ques-
tion de la restitution θιάσους συνάγουσι (ou. tout autre verbe) à
laquelle on songerait tout d’abord. Le supplément [ἱεο]ὰ [ἱδρύον-
(4) Le verbe ἐνιδρδύωνται: (cette forme — si ce n’est pas là une erreur du lapi-
cide — au lieu de ἐνιδρύωνται, ne s'était pas, je crois, encore rencontrée) déter-
mine ici le sens du mot ἱερά. Le sens propre de ce dernier mot serait « emplace-
ments sacrés ». Ils pouvaient être très exigus, et un simple ὅρος sutlisait à les
faire reconnaître. Mais il semble que le mot soit pris dans une acception plus
générale, et désigne tous les objets ou signes extérieurs qui pouvaient manifester
l'existence d'un culte, tels que statues, images, autels, etc.
DÉCRETS RELIGIEUX D'ARKÉSINÉ 411
ται) est matériellement possible. Mais ce cas est bien particulier,
et je ne crois pas qu’il faille s’y arrêter. Avec [ὀργι]άζζουσιν] nous
nous rapprocherions de la première restitution. Seulement le
verbe est rare et s'emploie plutôt avec un régime. De plus
l'hypothèse ne laisse pas d'être assez compliquée. Je crois la
vérité beaucoup plus simple. L'importance que semble avoir ici
le participe εἰσιοῦσαι ferait penser qu'il s'agit de réunions sans
but déterminé, mais au cours desquelles la plupart des impiétés
énumérées dans le décret du Pirée pouvaient être commises.
Cette hypothèse n'est pas seulement la plus simple, c’est aussi
la plus générale. Elle est d'autant préférable ici que la lacune
est plus restreinte. On trouve dans un règlement de Knide :
μὴ ἐξῆμεν καταλύεν ἐν τῶι ἱαρῶι ... μηδένα (1). Le supplément
[κατ]α[λύουσι)] ne s’accorderait pas très bien, surtout à cause du
lambda, avec les traces de lettres signalées plus haut. [Συν]α[γεί-
povtai] s'en rapprocherait beaucoup plus, sans pourtant que la
concordance soit parfaite. Le moyen, d’ailleurs, ne se rencontre
guère que dans la langue homérique. Je n'indique donc cette
restitution qu'à titre d'exemple et pour mieux fixer l'hypothèse
à laquelle je m'arrête.
Avec χαὶ ὅτι commence une nouvelle période. L'optatif
γένοιτο, après le présent εἰσαγγέλλει, montre qu'il ne s'agit plus
des faits qui se sont passés dans le sanctuaire, mais d’une opi-
nion exprimée par la prêtresse. Ici encore le commencement
des lignes est très mutilé; mais, cette fois, les mots essentiels
nous ont été conservés, et La suite des idées nous apparaît très
claire. Des mots Yévouro ἐν τῶι ἱερῶι (1. 9), ᾿Αρκεσινεῦσιν, ἀσεῦ....
(L. 10), [πρ]ὸς τοὺς θεούς (1. 14), il faut conclure en effet que la
prêtresse déclarait qu'au cas où pareille chose se renouvelle-
rait, le peuple entier serait responsable de l’impiété envers les
(1) Dittenberger, Sylloge 3, 661. Au lieu du supplément proposé par Bechtel et
Dittenberger, 1. 12 : εἰ δέ [κα μὴ | &ys]ün[var τὸ ἱαρὸν.....], qui est bien peu satis-
faisant, je préférerais rétablir εἰ δέ [κα καϊταλ]ύη [τ τις À ποιμαίνηι, etc. La répéti-
tion, dans la clause pénale, du verbe exprimant la défense est presque de règle.
Notre premier décret nous en offre précisément un exemple : ἐὰν δέ τις καίηι
(p. 155, 1. 4).
179 1. DELAMARRE
dieux. M. Radet lit au commencement de la ligne 9 .3. TONT. .
EN x.t.À. Du sigma et du ny, je n'ai pu distinguer la moindre
trace. Le tau, l’omikron et le second tau paraissent au contraire
assez probables. La restitution =o[u]r{o] serait dès lors la seule
possible. Il ne resterait de place que pour [εἰ ἔτι]. Α la ligne
suivante, la copie de M. Radet porte . . ANIONI. Je n'ai reconnu
que le premier ny. Tout le reste est extrêmement incertain.
Peut-être pourrait-on songer à [δεινὰ ἄ]ν [ein] ᾿Αρκεσινεῦσιν
ἀσεῤ[οὔ]σιν.... πρ]ὸς τοὺς θεούς (1). Cet avertissement solennel
donné à la cité par la prêtresse est particulièrement digne de
remarque. |
Là se terminait sans doute l'exposé des motifs. Venaient
ensuite les mesures proposées par l’orateur pour prévenir le
retour des actes incriminés et les peines applicables en cas de
délit. Tel est précisément l'objet du fragment de décret du
Pirée, cité plus haut. Les deux textes se complètent ainsi très
heureusement. Le nôtre a surtout l'intérêt de définir avec pré-
cision les attributions respectives des prêtres et des pouvoirs
publics au sujet de la police des sanctuaires. 11 nous permet,
de plus, de nous rendre compte de la formation du droit reli-
gieux, et nous voyons que, s’il émanait, comme le reste de la
législation, de la souveraineté populaire, il était dû, le plus
souvent, à l'initiative des prêtres, représentants de la divinité.
Paris, avril 1903.
J. DELAMARRE.
(1) TOZTOYKONOYTEME Radet.
Υ A-T-IL UN NOMBRE GÉOMÉTRIQUE
DE PLATON ?
Ξύμπας δὲ οὗτος ἀριθμὸς γεωμετρικός, lit-on dans le célèbre pas-
sage de la République de Platon (VII, 546 c), et, par suite, on
a considéré l'énigme qu'offre ce passage comme consistant à
déterminer un nombre que Platon aurait appelé géométrique, et
en même temps indiqué comme étant le total d'autres nombres
précédemment désignés d'une façon plus ou moins obscure.
Or, si Platon avait écrit πᾶς δὲ οὗτος, cette idée ne serait cer-
tainement venue à personne; tout le monde aurait immédia-
tement compris que l’auteur de la République voulait parler de
tous ces nombres précédemment désignés, pour lesquels il avait
au reste indiqué une génération géométrique, et que c'était à
eux tous qu'il attribuait le pouvoir de régler l'heure des nais-
sances. Mais l'emploi du mot ξύμπας ne doit rien changer à cette
conception; car il n'implique nullement l'idée d'addition, que
Platon aurait formulée autrement; il signifie seulement que
pour l'effet supposé, il ne faut pas envisager isolément les divers
nombres en question, qu’il faut les considérer tous ensemble.
Je ne suis nullement le premier à faire cette remarque, car
on peut la trouver, brièvement exprimée, dans la longue note
de la quatrième édition de la Philosophie der Griechen d'Ed.
Zeller (ΠῚ, 4889, p. 857-860), sur le passage de Platon dont il
s'agit. Mais j'ai cru devoir insister sur ce point, parce qu’en
dehors de toute autre considération, il y a là, à mes yeux, un
474 PAUL TANNERY
motif suflisant pour ne pas me rallier à la seconde interprétation
proposée par notre regretté confrère M. Dupuis en 1882 et récem-
ment reproduite dans la Revue des Études grecques (XV, 1902,
p. 288-301). |
Si l’on compare cette interprétation à la dernière d'Ed. Zeller,
on ne peut cependant nier que, depuis une trentaine d'années,
un progrès décisif n'ait été accompli vers la solution de l'énigme.
S'il subsiste en effet, cntre ces deux interprétations, des diver-
gences irréductibles, il y a néanmoins, sur certains points essen-
tiels, un accord remarquable, et l’on peut désormais regarder
comme unanime et définitive l'entente au sujet de ces points.
C'est ce que je vais essayer de faire ressortir.
Platon parle tout d’abord de deux nombres : l’un relatif au
θεῖον γεννητόν et qualifié de parfait; l’autre relatif à 1᾿ἀνθρωπεῖον
γεννητόν. Vient ensuite une phrase (ἐν ᾧ πρώτῳ... ἀπέφηναν), qui
est restée parfaitement obscure, et dont on peut seulement
aflirmer qu'elle décrit l’un de ces deux nombres, le premier,
suivant Ed. Zeller, le second, au contraire, d'après M. Dupuis.
Tous les efforts (y compris, bien entendu, mon juvenile tenta-
men de 1876) pour expliquer cette phrase d'un nombre déter-
miné, n'ont, à mon avis du moins, abouti jusqu'à présent qu'à
des interprétations qui ne sont pas réellement plus claires que
le texte même.
Au contraire, sur la phrase qui suit (ὧν ἐπίτριτος πυθμὴν...
χὐόων τριάδος), la lumière est à peu près complète désormais. Et
cela est d'autant plus notable qu’à première vue cette phrase, à
cause des expressions techniques qu'elle renferme, paraissait
beaucoup plus incompréhensible que la précédente. Mais c’est
qu'on ignorait le sens précis des termes mathématiques
employés par Platon; peu à peu ce sens a pu être reconnu et
déterminé sûrement, sauf pour le mot ἁρμονία, exception qui ne
peut plus avoir d'influence sur l'interprétation.
Si, en effet, dans cette phrase, est indiquée l'existence de deux
harmonies, l'une est sûrement représentée par le nombre 10,000 ;
l’autre par l'ensemble de deux nombres non moins parfaitement
Y A-T-IL UN NOMBRE GÉOMÉTRIQUE DE PLATON 175
déterminés, à savoir 4,800 et 2,700, dont la somme forme
1,500.
Voilà ce qui, en tout cas, est acquis; quelles sont maintenant
les divergences sur cette partie de texte?
Ed. Zeller pense que les deux harmonies sont précisément les
deux nombres du θεῖον γεννητόν et de 1᾿ἀνθρωπεῖον γεννητόν, hypo-
thèse qui n'est pas susceptible de confirmation tant que la phrase
antérieure du texte n’est pas éclaircie, et tant que l'on ne pourra
pas affirmer avec une pleine certitude que, dans ὧν ἐπίτριτος πυῦ-
μήν, le relatif ὧν désigne bien les deux nombres en question.
Quant à la génération des deux harmonies (ἐπίτριτος πυθμὴν πεμ-
πάδι συζυγεὶς δύο ἁρμονίας παρέχεται τρὶς αὐξηθείς), il l'explique,
comme nous le verrons tout à l’heure, d’une façon satis-
faisante.
M. Dupuis estime que le nombre du θεῖον γεννητόν est un
nombre idéal, pour lequel Platon ne propose en fait aucune
valeur déterminée; pour le nombre de 1 ἀνθρωπεῖον γεννητόν, ce
serait simplement le nombre dix (1). Les harmonies n'auraient
donc rien à faire avec les deux nombres dont Platon a parlé
jusqu'alors; mais leur total constituerait un troisième nombre,
le nombre géométrique, opinion qui, ainsi que je l’ai dit en com-
mençant, a été pendant longtemps à peu près générale, mais
que je considère comme erronée. |
Maintenant, pour retrouver ainsi un nombre dans lequel entre
comme facteur celui de la période métonienne, 19, M. Dupuis
a recours à une combinaison particulière. Il multiplie par 400 la
seconde harmonie, soit 7,500, ce qu’il justifie en adoptant pour
le texte une variante suspecte; il a ainsi 10,000 + 100 >< 7,500
— 160,000. D'autre part, il explique la génération des harmo-
nies, en commençant par additionner un rapport et un nombre,
chose absolument contraire aux habitudes de la mathématique
(1) En 1882, il proposait 40, tout en rappelant -une remarque que je crois avoir
faite le premier, à savoir que la description restée obscure concorde, pour une
partie des termes, avec celle que le fr. 13 Mullach de Philolaos donne du nombre
dix. Bien entendu, j'admets aujourd'hui que le Ps.-Philolaos a emprunté ces termes
à Platon, mais il n’est nullement certain qu'il eût le mot de l'énigme.
43
1106 PAUL TANNERY
grecque, et en donnant ensuite à τρὶς αὐξηθείς une signification
tout à fait imprécise, alors que dans toute cette partie du texte,
Platon emploie des expressions qui ne laissent aucun jeu pour
des combinaisons arbitraires. Enfin, M. Dupuis se met en oppo-
sition, pour celte interprétation de τρὶς αὐξηθείς, avec la phrase
exégétique d’Aristote (Politique, V, 12, 1316 a), dont le sens est
désormais parfaitement éclairci pour nous, grâce à la partie du
Commentaire de Proclus sur la République, qui est connue seu-
Jement depuis 1882 et qui a été comprise, en dernier lieu, dans
l'édition de Kroll (Teubner, 1904).
D 36 À 64 C
-ς D. “ .
100
Prenons le triangle rectangle EDC dont les côtés soient dans
les rapports des nombres 3, 4, 5 (ἐπίτριτος πυθμὴν πεμπάδι
cubuyels).
Si du sommet D nous abaissons sur l’hypoténuse la perpen-
diculaire DB, nous divisons ce grand triangle en deux qui lui
sont semblables, dont les côtés se trouvent donc dans le même
rapport. Si du sommet B nous abaissons dans chacun de ces
triangles une perpendiculaire sur leur hypoténuse, nous le
diviserons à son tour en deux triangles semblables entre eux et
aux précédents. Si au contraire, dans la figure, nous partons de
l'un des triangles extrêmes, nous obtiendrons, par deux opé-
rations successives et pareilles entre elles, le triangle total.
Chacune des lignes de la figure s'exprime nécessairement
par un nombre rationnel; mais pour que tous les nombres soient
entiers, la première opération de construction, dans l'un ou
l'autre sens, nécessite la multiplication de l’un des nombres
Y A-T-IL UN NOMBRE GÉOMÉTRIQUE DE PLATON 471
linéaires 3, 4, 5 par l’un d'eux, et donne ainsi des nombres
plans (c'est-à-dire composés de deux facteurs), suivant le lan-
gage de l’arithmétique grecque. La seconde opération introduira
à son tour, pour chacun des nombres représentant les lignes de
la figure, un troisième facteur; les nombres seront donc solides.
C’est bien ce que dit Aristote : λέγων ὅταν ὁ τοῦ διαγράμματος ἀρι-
θμὸς τούτου γίνεται στερεός.
Les nombres ainsi obtenus par cette construction géométrique
sont inscrits sur la figure, et l’on y retrouve tous ceux de
Platon, avec cette différence toutefois que, pour une raison que
nous ignorons encore, il a tout multiplié par 400.
Nous voyons en même temps sur cette figure que si l’harmo-
nie 1500 est formée par la somme des deux nombres 2700 et
4800, l'harmonie 10000 est formée de la même façon par les
nombres carrés 3600 et 6400. Enfin‘ Proclus nous indique éga-
lement la génération arithmétique qui correspond à la géné-
ration géométrique de ces divers nombres.
Entre 2700 et 6400, c'est-à-dire entre les centuples des cubes
de 3 et de 4, intercalons deux moyennes proportionnelles.
Nous avons les quatre nombres
2100 : 3600 : 4800 : 6400
desquels deux consécutifs quelconques sont dans le rapport 4/3,
et si l'on prend deux termes séparés par un intermédiaire, on
a un couple (2700 et 4800 ou bien 3600 et 6400) qui représente
le rapport doublé 16/9 (1)
L'explication qui précède, pour la génération des nombres
de la seconde partie du texte platonicien, est celle qu'Ed. Zeller
a adoptée, sans faire d’ailleurs allusion au Commentaire de Pro-
(1) On sait que le rapport 4/3 est celui qui correspond à la quarte, et 16/9 celui
qui existe entre les cordes extrêmes de deux tétracordes conjoints. Un tel sys-
tème pouvait être qualifié d'harmonie au temps de Platon (p. ex. 1’ ἁρμονία ἰαστί
dans Aristide Quintilien, éd. Meib., p. 22) aussi bien que le système de deux tétra-
cordes disjoints ou l'octave. Est-ce bien [à l'explication du terme technique har-
monie dans notre passage ? On peut en douter, mais le rapprochement mérite en
tout cas d'être fait.
178 PAUL TANNERŸ-
clus, où pourtant elle se retrouve exactement. Mais ce Com-
mentaire paraît exclure l'hypothèse de Zeller, à savoir que
l'une des deux harmonies soit précisément le nombre parfait
du θεῖον γεννητόν. L’illustre historien de la philosophie grecque
n'a probablement pas voulu attacher une importance majeure
aux explications de Proclus, et il est certain que, pour la pre-
mière partie du texte, ces explications ne sont point de nature
à nous satisfaire. Il n'avait donc pas, par la tradition, une
interprétation complète: mais du fait que, dans le détail, il
nous fournit pour la seconde partie du passage platonicien des
explications exactes et assez difficiles à inventer pour lui-même
(notamment, pour le nombre 4800, celle que M. Dupuis a
retrouvée le premier), nous avons un indice assuré qu'il dis-
posait de sources anciennes dont la valeur n'est point négligea-
ble. Aussi je considère comme encore passablement douteuses
les conjectures de Zeller sur la première partie du passage, et
j'estime que la première tâche à accomplir désormais, pour qui
voudra poursuivre l'élucidation du problème, est de soumettre
à un examen approfondi toute la partie du Commentaire de
Proclus qui concerne ce sujet.
Quant aux conjectures de M. Dupuis sur l'interprétation de
la phrase restée obscure, je les regarde comme peut-être aussi
plausibles que celles de Zeller, mais comme n'étant pas assu-
rées. En ce qui concerne la seconde partie du passage, la ques-
ton me paraît désormais tranchée contre lui.
J'ajoute une dernière remarque tendant à écarter toute nou-
velle tentative dans la voie suivie par M. Dupuis, c’est-à-dire
ayant pour objet la détermination d'un nombre géométrique par
la combinaison des deux harmonies. Platon a indiqué, pour
celles-ci, une génération géométrique; mais on ne voit aucune
raison pour ajouter les deux côtés de son grand triangle et lais-
ser en dehors l'hypoténuse 12500 (ce qui donnerait 30000, un
nombre d'Empédocle). Il ne faut plus chercher une énigme là
où il n’y en a pas : c’est dans la description des nombres rela-
tifs à 1 ἀνθρωπεῖον ou au θεῖον γεννητόν.
Y A-T-IL UN NOMBRE GÉOMÉTRIQUE DE PLATON 119
L'hypothèse de Zeller repose au fond sur l'identification du
nombre parfait du θεῖον γεννητόν avec la période de 10000 ans
du Phèdre (248-249) ou avec celle du mythe ἀ Ἔν. Ce rappro-
chement me paraît illusoire ; car pourquoi Platon aurait-il pro-
posé une énigme sans but au sujet d’un nombre adopté par lui ?
11 est plus probable, à mon sens, qu'il aura seulement voulu
faire une allusion à un écrit connu, mais d'un autre que lui-
même. Si cette allusion est devenue inintelligible, c’est surtout
parce que nous ne savons pas à quoi elle se rapporte. Les Muses
qui sont supposées parler sont-elles de Sicile ou d’Ionie (1)?
leurs harmonies viennent-elles de quelqu’autre contrée ἢ Nous
lignorons. |
Naturellement, à cause de l'habillement mathématique du
passage, on songe aux pythagoriciens, et ils ont incontesta-
blement fourni certains éléments au moins. Muis une autre
possibilité n'est pas exclue par là même. L'incontestable affec-
tation d'obscurité dans le langage de Platon ramène la pensée
soit sur le ton des oracles, soit sur celui du ténébreux Éphésien.
Dans la première de ces directions, nous n’apercevons aucun
point de repère, mais nous savons qu'Héraclite avait parlé
d'une grande année en des termes que nous ne connaissons
pas bien, et le dernier fragment de lui que l’on ait retrouvé
nous indique qu’il n’était pas, lui non plus, étranger aux combi-
naisons mathématiques. Si peu probable que soit en réalité la
chance de trouver la solution de ce côté, elle ne doit peut-être
pas être absolument négligée.
Mais je π᾿ αἱ eu l'intention que d'exposer l’état actuel de la
question, et je dois dès lors m'arrêter ici.
Paul TAnnery.
(1) Ἰάδες δὲ καὶ Σιχελαί τινες ὕστερον Μοῦσαι, Platon, Sophisie, 242 ἃ.
ee m5
61.
INSCRIPTIONS GRECQUES
I
ÉPIGRAMMES DE THASOSs.
4. Copies de M. Christidis. Bons caractères (Σ, 0).
Ἱκέσιον νούσοισι καταφθίμενον (τ)όδε [σῆμα ?]
χέχρυφεν, Εὐθυχράτους υἷα τὸν εὐγενέτ(α)ν,
(Zjusiun ἐϊν] μούσαισι πανέ(ξογχον ὅν ποτ᾽ ἔτιχτε
μάτηρ, τρισσὰ τέχνων ἄνθεα γειναμένα᾽
5 δύσμορος, ἃ (δ)ισσοὺς μὲν ἐλ(ε)ίπετο παῖδας ἐν οἴχοις
εὐγενέτας, ἀγαθὴν ἄρσενα συνζυγίην |
καὶ χοῦραν φιλάδελφον, ἀποφθιμένη δὲ πρὸς "Atôav
πλουτίον (7) τέχνων λ(ε)ίπετο δωμάτιον :
ἄλλους μὲν ζώσας ἀπενόσφισε δύσμ[ορος “Αιδης ou "Atn?
10 — VU -- θνητοὺς μυρομένα στεναχάς,
τοὺς γλυχεροὺς ποθέουσ[α...........0ὐννννν νιν
Copie. v. 4 : ιοδε, 2. euVevernv. 3. Σωσίιμη. €. μουσαισι πανεγὸν
(8161). 5. λισσους. ᾿
V. 3. Joignez ἐν μούσαισι πανέξοχον, « excellent dans le culte
des Muses ».
V. 6. ἀγαθὴν ἄρσενα συνζυγίην « un beau couple de mâles ? ».
V. 8. Les Laconiens disaient πλούτιον pour πλούσιον (Et.
Mag.). Mais comment expliquer la quantité? Osera-t-on écrire
πλουτεῦον ?
V. 10. Pour στεναχάς, cf. Kaïbel, Epig., 707, 6.
INSCRIPTIONS GRECQUES 181
2. Copie de M. Christidis. Basse époque (C, G)).
᾿Αντίοχον Σωτήραν | ὁρᾶτε, ὃς ἐνθάδε χεῖμε, |
ὃς πολλῶν ἄνορῶν ἔγ|[νων * νόον ἢ ἄστεα δ᾽ εἶδον ?]
5 οὕνεκα καί νο(ύ)σων [στυγερῶν πολλοὺς ἐσάϊωσα :
ἄλλῃ, φαρμαχθεὶς, | Θασίων δ᾽ ἐμ’ ἐδέξατο γέ | α.
10 ᾿Αντίοχος καὶ ᾿Αντιγόνη [[᾿Αντιόχῳ υἱῷ καὶ
Πρωτόκίτητος υἱὸς καὶ ᾿Αρτεμιδώρα σύμόιος ᾿Αντιόχῳ
μνείας y[épev].
2. Faut-il corriger en ὁρᾶτέ (x)? ou avons-nous ici un
exemple de l’hexamètre asynartète de M. Usener ?
3-4. La copie porte ETINOI NOYNEKA, etc. Une ligne a élé
visiblement sautée soit par le graveur soit par le copiste, mais
je ne sais que faire des lettres NOIN.
7. φαρμαχθείς est-il pris au sens propre d'empoisonné ἢ
10. La copie porte KAIKAMITONH.
Il
ÉeIGRAMMES D'ÉGvPTE.
1. Musée d'Alexandrie (non encore cataloguée) (1). Bons
caractères du n° au 1° siècle avant J.-C. (Σ Τὴ).
οὐχέτι δὴ μάτηρ σε, Φιλόξενε, δέξατο χερσίν,
σὰν ἐρατὰν χρονίως ἀμφιδαλοῦσα δέρην,
οὐδὲ μετ᾽ ἀϊθέων ἀν᾽ ἀγαχλυτὸν ἤλυθες ἄστυ,
γυμνασίου συνετῶι γηθόσυνος δαπέδωι :
5 ἀλλά σου ὀστέα πηγὰ πατὴρ θέτο τεῖδε χομίσσας
Καῦνος ἐπεὶ μαλερῶι σάρχας ἔδευσε πυρί.
Épitaphe du jeune Philoxénos, mort loin de sa ville natale,
loin de sa mère, et dont son père a rapporté les os, après
(1) [L'inscription a depuis lors été publiée par Wilamowitz dans les Sifzungabe-
richle de l'Académie de Berlin, 4902, p. 1047, et par Botti, Bull. de la Soc,
d'Alexandrie, IV, 88.]
182 THÉODORE REINACH
avoir incinéré le cadavre. Quelle est la ville célèbre —
ἀγακλυτὸν ἄστυ --- dont il fréquentait le gymnase « intelligent » et
où il a été inhumé ? Je ne pense pas que ce soit Alexandrie, mais
plutôt Rhodes. Le dorisme affecté du dialecte s'explique mieux
ainsi. J'ai constaté au musée d'Alexandrie la présence de
plusieurs marbres d'origine rhodienne.
Si Καῦνος est un nom propre d'homme, j'avoue n'en avoir
pas d'exemple. S'il désigne la ville de Carie, la tournure du
vers 6 devient bien amphigourique.
2. Gizeh, chez un antiquaire.
Stèle de marbre blanc, couronnée par un fronton; hauteur
totale 0 m. 62. Caractères du m° ou u° siècle avant J.-C. (ZroNA).
Τὸ πρὶν ἐγὼ ναίων Λιδύης πέδον ἐνθάδε κεῖμαι,
Μάγνν,ς δ᾽ εἰμὶ γένος χοὔνομα Σωσίθιος,
Πλούτωνός τε δόμους xal Φερσεφόνης [κα]τ᾿ ἀναυ(γ)εῖς
Μίνῳ σύνθωχος δ’ εἰμὶ παρ᾽ εὐσεόδέσιν.
᾿Αλλά σύ μοι, παροδῖτα, προσαυδήσας μέγα « Χαίρειν »,
μηθὲν ταρδήσας ἀσφαλέως ἄπιθι.
Épitaphe du Magnète Sosibios, de son vivant habitant de la
« plaine de Libye », c'est-à-dire sans doute de la Cyrénaïque.
Un Sosibios bien connu dans l'histoire fut ministre de Ptolémée
Philopator; sa patrie est inconnue ; il est contemporain de
notre Magnète et pourrait bien avoir été son compatriote.
La lecture des derniers mots du troisième vers est un peu
incertaine en raison d’une cassure de la pierre. J'ai noté sur
mon carnet || TANAYTEIS. Quoique ἀναυγής soit un mot nou-
veau, je ne trouve pas de restitution plus convenable; il est
synonyme de ἀναύγητος qu'Eschyle (Prom. 1028) emploie préci-
sément en parlant de l'Hadès. Il aura été formé sur le modèle
de τηλαυγής οἱ de l'adjectif εὐαυγής que les manuscrits ont si
souvent altéré en εὐαγής (voir le Thesaurus 5. v.).
C'est le δὲ du vers 4 qui sert de copule avec le premier dis-
tique, malgré son éloignement; le τς du v. 3 doit se rattacher
INSCRIPTIONS GRECQUES 183
à xat et forme simplement copule entre Pluton et Perséphone.
Pour l’idée comparez l’épigramme 189 du recueil de Kaibel :
ἐσθλὰ δὲ ναίω | δώματα Φερσεφόνας γώρωι ἐν εὐσεδφέων,
L'adjectif σύνθωχος est rare et notre épigramme en offre sans
doute le plus ancien exemple. Faut-il vraiment l'entendre au
sens d'assesseur? Platon avait associé aux juges des enfers
ὅσοι τῶν ἡ μιθέων δίχαιοι ἐγένοντο ἐν τῷ ἑαυτῶν βίῳ (Apalog. {1 A),
il n’était pas descendu plus bas que les demi-dicux. Peut-être
notre Sosibios avait-il été de son vivant magistrat et ne pou-
vait-il se figurer la vie bienheureuse sans le plaisir de juger.
Perrin Dandin aux enfers !
3. Gizeh, dans le commerce.
Mauvaise écriture d'époque romaine
Τὸν δύο πληρώσαντα καὶ εἴχοσι | πρόσθ᾽ ἐνιαυτοὺς
Σαραπίωνα | νέον τε καὶ ἀρτιγένειον (4) ἐόντα ||
μοῖο᾽ ὀλοὴ θανάτοιο κατήγαγεν εἰς ᾿Αἰδαο
μειλείχιον (sic) | πάντ[εσσ]ι καὶ ἥπιον ἀνθρώποισι.
Épitaphe du jeune et suave Sarapion, enlevé à l’âge de
vingt-deux ans.
4. Nécropole de Thèbes (rive gauche), tombe de Rhamsès IX.
Entre beaucoup de graffiti de toutes les époques j'ai noté
celui-ci :
xal τόδ᾽ ἐγὼ (Κλεο)δουλιανὸς [μέ]γα θαῦμα νοήσας
ἡγασάμην γαίης Δελφίδος ὧν ναέτης.
Cette inscription avait été notée par Deville (Archives des
missions, II, 1865, p. 481, n° 220) à qui j'emprunte la leçon
Κλεοθουλ'ανὸς (mon carnet porte Νεοδουλιανὸς); si je la repro-
duis, c’est qu'il n'avait rien su tirer du deuxième vers où il
croyait apercevoir le mot ἀδελφιδῆς.
(4) Cf. Anth. Pal., IX, 219 (Diodore de Sardes): xoüooc ἔτ᾽ ἀρτιγένειον ἔχων χνόον.
181 THÉODORE REINACH
III
Inscriprions DE RHones.
M. Abraham Galante, professeur au lycée ottoman de Rhodes,
m'a communiqué la copie de quelques inscriptions récemment
découvertes dans cette île. Elles occupent les deux faces d'un
marbre qui ἃ été exhumé dans le voisinage d’un cimetière turc
et transféré dans la cour du Lycée. Le marbre mesure 0 m. 55
de haut sur 0 m. 93 de large et 0 m. 50 d'épaisseur. Les ins-
criptions sont gravées dans le sens de la longueur. Les lettres
de la face A mesurent de 3 1/2 à 4 1/2 centimètres de hauteur,
celles de la face B, 1 1/2 à 2 centimètres seulement. En l'ab-
sence d'un fac similé exact, il est difficile de savoir laquelle des
deux faces a été gravée la première; je croirais volontiers
cependant que c'est la face B. Elle paraît antérieure à l'em-
pire; la face À est sûrement d'époque romaine (1° siècle).
Face Α.
IOKAEIANTANKPA ABOYAAANTON
ΦΡΟΣΥΝΑΣ ENEKA | KAAYAIONTIEPT
MYOIAZTAZENITOAF TONKPATIZTON
NANAPIAYTAZ®DAABIN MYOZAZTAZEIZ
EITOKPATIZTOKAITO MATEPA
OTATANAIAIAYTONANT ΕΟΙΣ
ΓΕΝΕΙΤΩΚΡΑΤΙΣΤΩ SEO
OEOIZ
I
‘A GouAx Δ]ιόχλειαν τὰν χρα-
τίσταν σ]ωφροσύνας ἕνεχα
καὶ πᾳρα] μυθίας τᾶς ἐπὶ τῷ ἀρ-
DUREE lp ἀνδοὶ auras Φλαδίῳ
5 Ἑρμογέν]ει τῷ χρατίστῳ, καὶ τῷ
ὌΝ Ἰοτάτῳ παιδὶ αὐτῶν ᾿Αντ-
ὠνίῳ ...]γένει τῷ χρατίστῳ
Θεοῖς
INSCRIPTIONS GRECQUES 185
Il
‘A 6au}à ᾿Αντών[ιον......
Κλαύδιον Περγ[αμηνὸν
τὸν χράτιστον [ἕνεχα παρα-
μυθίας τᾶς εἰς [τὰν αὐτοῦ
D ματέρα
Θεοῖς
I, 5. On pourrait aussi restituer Μοιραγέν]ει, Un Φλαύιος
Morpayévns Τιμοδίχου est quatre fois mentionné dans le grand
calendrier des fournisseurs d'huile, Inscr. insul., 4.
L, 6-7. Peut-être ‘Avr. EppoJyévet.
IL, 1-2. Peut-être ᾿Αντών[ιον Φιλο]χλαύδιον ?
Face B.
Al... OIZAETIAAMIAAEAOTAI
Z.......... YTEPMHNOANPOY
OZ AIZ..-ETITPOTIEYZANTOZ AYTON
OEOIZ
ΤΗΝΩΝ AMIZHNOZ ΕΠΟΙΗΣΕ
ΝῊ [x?lur...... οἷς à ἐπιδαμία δέδοται
εὐ σι νονόνννν, ὑπὲρ Μηνοδώρου
στραταγήσαντ]ος (ἢ) δὶς [καὶ] ἐπιτροπεύσαντος αὐτῶν
Θεοῖς
Ζήνων ᾿Αμισηνὸς ἐποίησε.
Les deux inscriptions de la face À appartiennent à la classe
bien connue des décrets de condoléance (1); mais le décret est
réduit ici à une simple dédicace honorifique qui accompagnait
(4)S. Reinach, Trailé d'épigraphie, p. 432 ; Buresch, Die griechischen Tr'ostbesch-
lässe, Rheinisches Museum, XLIX, p. 424-461.
186 THÉODORE REINACH
peut-être la consécration d’une statue. Je ne vois pas, d’ailleurs,
quel lien existait entre les deux personnages honorés, l’un,
Diocleia, qui a perdu son mari et son fils, l’autre Antonius
Philoclaudius (?), qui a perdu sa mère.
Nous possédons déjà une dédicace rhodienne de ce genre
(/nser. ins. 91); elle émane du peuple et du conseil et accom-
pagne l'érection d'une statue signée par Euprépès de Laodicée.
L'inscription de la face B, quoique plus mutilée, est plus
intéressante. Elle donne d’abord la signature d’un artiste nou-
veau, Zénon d'Amisos. La statue était érigée à un certain
Ménodoros par des personnes qui avaient obtenu l'epidamia.
Les individus οἷς ἁ ἐπιδαμία δέδοται ou, comme nous pouvons les
appeler pour abréger, avec l'inscription rhodienne 157, les
ἐπιδαμιασταί, sont très souvent mentionnés. M. Foucart (1) et
M. Clerc (2) ont cherché à montrer que les épidamiastes sont
différents des simples métèques mentionnés dans quelques
textes (382, 383) et des étrangers que ces savants assimilent à
des métèques. Ils voient en eux l'équivalent des ἰσοτελεῖς athé-
niens, des métèques exemptés du paiement de la taxe des
étrangers. Je ne crois pas que dans l'état actuel des textes cette
question puisse être tranchée.
Les mots ἐπιτροπεύσαντος αὐτῶν sont embarrassants. Il n’est
pas probable que Ménodoros, qui a été magistrat (... ος δίς), ait
servi de tuteur à ces étrangers (sens que pouvait avoir ἐπίτροπος.
à Rhodes, Inscr. ins. 162, 1. 112). Il est plus vraisemblable. qu'il
faut reconnaître en lui leur prostate. Le mot ἐπίτροπος me paraît
avoir été employé dans ce sens à Athènes même, témoin le texte
d'Aristote (Rhet.III,8)(3) : « ὥσπερ οὖν τῶν xnpÜxwv roohkau6avouot
τὰ παιδία τὸ « τίνα αἱρεῖται ἐπίτροπον ὁ ἀπελευθερούμενος ; Κλέωνα. »
Il n'est pas exact, en effet, comme on l'enseigne souvent, que
l'affranchi athénien eût nécessairement pour patron son ancien
(1) BCH, X, 206.
(2) De la condition des étrangers domiciliés dans les différentes cités grecques.
Revue des Universilés du Midi, 1898. P. 47 suiv. du tirage à part.
(3) Cf. Revue, V, 463.
INSCRIPTIONS GRECQUES 187
maître ; seulement, s’il en choisissait un autre (ἐὰν ἕτερον ent-
γράφωνται προστάτην), il s’exposait à la δίχη ἀποστασίου ; s'il y suc-
combait il retombait en servitude; vainqueur, il devenait
absolument libre (τελέως ἐλευθέρους), c'est-à-dire délivré de
toutes obligations (o/ficia) envers son ancien maître : c'est à
l'occasion de procès de ce genre qu'ont été consacrées les φιαλαὶ
ἀπελευθερικαξ (4). Les inscriptions de Delphes où le manumissor
impose à l'affranchi l’obligation de le choisir pour prostate
(Collitz, n°* 2172, 2251) prouvent que dans cette ville également
ce choix n'était pas imposé par la loi. A Thespies un acte
d'affranchissement autorise formellement l'affranchi à choisir
librement son prostate : ἐλευθέραν εἶμεν ᾿Απολλοδώραν κὴ avérapoy
χὴ νεμέμεν [πο]οστάταν ᾿Απο[λλοδώραν δὴν κα [θέλε!}] (CIGS, I, 1778).
Le Ménodoros de notre inscription est peut-être identique
au magistrat monétaire de ce nom qui figure sur des drachmes
et hémidrachmes frappés entre 166 et 88 avant J.-C. (Br.
Museum, Carta, p. 255 et 258).
IV
Inscriptions d'Els.
1. Le bronze publié en 1898 par Szanto (2) et souvent repro-
duit depuis est ainsi conçu :
Θεὸς * τύχα. Ταὶρ δὲ γενεαὶρ μὰ œuyadelnu made x-
ur” ὁποῖον τρόπον, μάτε ἐρσεναιτέραν μάτε θηλυτ-
Épav, μάτε τὰ χρήματα δαμοσιῶμεν. A δέ tip φυγαδ-
είοι αἴ τε τὰ χρήματα δαμοσιοία, φευγέτω ποττῶ Δ-
ὃ ιὸρ τὠλυμπίω αἴματορ, καὶ χατιαραίων ὁ δηλομὴρ (sic)
(1) Voir en dernier lieu l'article de Marcus N. Tod dans Annual of the British
échool at Athens, VIII, 197 suiv.
(2) Œsterr. Jahreshefte, 1, 191. Cf. Wilhelm, ibid. Beiblatt, p. 195; Meister,
Berichle Sæchs. Ges., 1898, 218; B. Keil, Gô{{. Nachr., 1899, 136 ; Danielsson,
Eranos, 111, 1899, p. 129; Bréal, REG, XII, 116; J. Schmidt, Sifzungsb. Berl., 1899,
302; Michel, Recueil, n° 1334.
488 | THÉODORE REINACH :
ἀνάατορ ἥστω. Ἐξήστω δὲ xai χα φυγαδεύαντι tôt ὃ-
ἡλομένοι γοστίττην καὶ ἀττάμιον ἦμεν, ὄσσα χα ὑ-
? ? -Ὁ- 4 ? æ
στάρ'ν γένωνται τῶν περὶ Πύρρωνα δαμιοργῶν. To-
Lo δὲ ἐπ᾽ ἄσιστα μὰ ἀποδόσσαι (1) pate ἐχπέμψαι τὰ γχρ-
19 Ê ET AT τα M μ πε rs γί
-- ὃς 4. e« U A A G
10 Auata τοῖρ φυγάδεσσι " αἱ δέ τι ταύτων πὰρ τὸ γράμ-
μα ποιέοι, ἀποτινέτω διπλάσιον τῶ χα ἐκπέμπα χα-
ὶ τῶ xx ἀποδῶται. At δέ τιρ ἀδεαλτώμαιε ταστάλαν,
ὡς ἀγαλματοφῶραν ἐόντα πάσχην.
« Dieu. Fortune. Nul ne prononcera la sentence d'exil contre
les familles, quelque détour qu'il emploie, ni contre les mâles
ni contre les femmes, et nul ne confisquere leurs biens. Qui-
conque aura décrété ces familles d'exil ou de confiscation sera
mis en accusation, au nom (?) de Zeus Olympien, comme cou-
pable de sang, et tout venant pourra impunément jeter l'impré-
cation contre lui (2). Même si on les bannit, les familles pour-
ront, si elles veulent, revenir, sans être passibles d'aucune
amende pour tous faits postérieurs à l’année où Pyrrhon et ses
collègues furent démiurges. Défense aux plus proches parents
des bannis de vendre leurs biens pour eux ou de les leur envoyer;
celui qui, sur ce point, agira contre le présent écrit, payera le
double de ce qu'il aura envoyé ou vendu. Si quelqu'un efface
la présente stèle, il sera châtié comme un voleur d'images
sacrées (3). »
Cette traduction s'écarte de celles qui ont été données jusqu'à
présent notamment par le sens que j'attribue aux mots (|. 4)
φευγέτω ποττῶ Διὸρ τὠλυμπίω atuarop. Szänto et Keil inter-
prétent : « sera banni du sanctuaire d'Olympie comme coupable
de sang. » Mais φεύγειν suivi du génitif ne saurait avoir ce sens;
(1) = ἀποδόσθαι.
(2) C'est-à-dire, suivant l'interprétation que me communique M. Gustave Glots
et qui est aussi celle de M. Dareste, « se porter accusateur ». J’incline mainte-
nant à croire avec M. Glotz (et M. Dareste) que tel est aussi le sens de χατιάραυσις
dans la vieille rhétra.
(3) Cf. Brit. Mus., 440 (Iasos) : Av δέ τις [τὴν στήλην] ἀφαν[ίξηι...} πασχέτω ὡς
ἱεοόσυλος.
INSCRIPTIONS GRECQUES 189
il signifie « être traduit en justice en raison de», cf. par exem-
ple Démosthène, C. Nausinicos (XXXVIIT), 20 : τοσούτων
χρημάτων ἐπιτροπῆς φεύγων, ob éantam pecuniam petitus tutelae
nomine (1).
L’accusation est faite au nom de Zeus olympien, et, par con-
séquent, devant le tribunal qui siégeait dans ce sanctuaire.
Dans un décret de naturalisation de Chaladra, cité éléenne
(Inschrifien von Olympia, n° 11), il est dit : αἱ δέ τις œuhain,
Fépny αὐτὸν (le naturalisé) ποτὸν Δία, εἰ μὴ δάμοι δοχεῖ. Le
verbe Ἐέρ(ρ)ην signifie aller en justice comme demandeur,
de même que φεύγειν signifie aller en justice comme défen-
deur. |
La date exacte du texte ne peut être fixée; nous connaissons
trop mal le détail de l’histoire intérieure d’Elis au rv° siècle.
Les révolutions y ont été fréquentes (2). Dès l'an 400 les oli-
garques s’agitaient pour détruire la constitution — une démo-
cratie tempérée — alors en vigueur (Xén., Hell., III, 2, 27.
Paus., LIT, 8, 4). Ils y réussirent, nous ne savons quand, car en
365, les démocrates essaient à leur tour, avec le concours des
Arcadiens, un coup de main qui entraîne leur exil et leur mas-
sacre à Pylos (Xén., VII, 4, 15-16, 26). Un peu plus tard —
nous ignorons encore la date — un disciple de Platon, Phor-
mion, renverse le Séuat oligarchique (Plut., Mor., p. 983 et
1377 Didot). La démocratie règne en 343, époque où les bannis
(sûrement oligarques) soudoyent les débris des bandes de Pha-
læcos et tentent sans succès de rentrer dans leur patrie (Diod.,
XVI, 63; Démosth., Fals. leg., 260 et 294). Ensuite l'influence
de la Macédoine devient prépondérante, et, en 335, à la nou-
velle de la ruine de Thèbes, les Éléens s'empressent de rappeler
leurs bannis, amis d'Alexandre (Arrien, I, 10). On peut suppo-
+ (1) C'est d'après ce texte et autres analogues (v. Thesaurus 5. v.) que Dittenber-
ger a restitué dans le décret d'Olbia (Syllogeï, 546, 1. 12) psu]keïrat ὁ μὲν ἀποδό-
μενος το[ῦ πωλουμέν]ου ἀργυρίου, etc., mais la leçon στε]ρήσεται me parait pré-
férable.
(2) C'est bien à tort que Pausanias (IV, 28, 1) prétend que les discordes n'ont
commencé en Élide qu'avec l'ingérence de Philippe.
190 THÉODORE REINACH
ser — mais je ne donne cette hypothèse que sous toutes réserves
— que le bronze de Vienne a conservée la copie (l'original était
gravé sur pierre, Ï. 12 ταστάλαν) de la loi d'amnistic rendue à
cette dernière occasion.
Cette loi interdisait à l'avenir toute proscription de familles
entières, étendant ainsi aux délits politiques le principe de la
personnalilé des fautes proclamé par la vieille ῥήτρα du vu siècle
en matière civile, comme l’a bien vu M. Glotz. Mais l'amnistie
ne s'applique qu'aux faits postérieurs au démiurgat de
Pyrrhon, c’est-à-dire probablement à la tentative criminelle
de 343.
2. L'inscription fragmentaire qui porte le n° 4 des Inschrif-
ten von Olympia doit, à mon avis, se restituer ainsi :
τῶι ζέ κα θεοχόλωι θά[ρο)ς ἔα (x) ὑτῶι καὶ χρημάτοις ὅτι [av-
τ]ὦ γᾶ εἴη ποτ᾽ ἀλάθειαν. Αἰ δ᾽ ἀλότρια πωλοῖτο, πενταχ-
ατίας χα δαρχ μὰς ἀποτίνοι χατά Féxasrov θεθμὸν
ὅτι ἀδίχως ἔχοι καὶ πωλοῖτο ἀδίχως γα(γ) ᾿ γνώμα
δὲ χ᾽ εἴη τ(ῶ) ἰ-
.ὅ ἀρομάο * τὰ δὲ δίκαια δίφυια, τὸ δίκαιον τόδε κα θεοχό-
λος ἐπένποι «(αλοι» δαμιοργία τὸν δ᾽ ἀλότίρια πωλησάμενον 9]
ἀποξελέοι x’ ἀπὸ μαντείας * τῶι δὲ un) ἔα (τ)ό(κ)ωι (??),
θορας (pour θάρρος ?) χ᾽
εἴη τοῖς χρημάτοις τοῖς ἐν Tai) Εοικίαι καχεμένοις
χαὶ τοῖς ὑπαδυγίοις τοῖς αὐτῶ.
« (Celui qui vend un terrain au sanctuaire de Zeus) garan-
tira au ‘héocole, en s’engageant de sa personne et de ses biens,
que le terrain lui appartient en réalité. S'il a vendu la chose
d'autrui, il paiera, pour chaque contrat, cinq cents drachmes
d'amende, comme ayant possédé et vendu sans droit un ter-
rain; la sentence sera prononcée par l’hiéromaos. Il paiera, en
outre, les dommages-intérêts au double, dommages dont le
montant sera fixé par le théocole. Enfin, les démiurges interdi-
ront l’accès de l'oracle à celui qui aura vendu le bien d'autrui.
INSCRIPTIONS GRECQUES 194
S'il ne peut (payer en argent ?), on se dédommagera sur les
meubles qui garnissent sa maison et sur ses bêtes de joug. »
D'après cette interprétation la loi a pour but de protéger le
sanctuaire d'Olympie contre la fraude de particuliers qui lui
vendraient des terrains ne leur appartenant pas. Le #kéocole est
le plus élevé en grade des fonctionnaires du sanctuaire ; plus
tard il y a un collège de 3 théocoles ; mais dans notre inscrip-
tion, le théocole est unique comme l’hellanodique dans la rhétra
Πατριὰν θαρρῆν, qui est de la même époque. De même l'Atéro-
maos, encore unique ici, sera remplacé plus tard par un collège
(n° 10 : γνῶμαν τὼς ἰαρομάως τὠλυμπίαι). Quant aux démiurges,
dont il est également question dans la rhétra Πατριάν, il faut y
voir une sorte de Directoire siégeant à Olympie et dont la compé-
tence, restreinte d'ailleurs à des objets assez limités, embrassait
toute la région éléenne, divisée alors en un grand nombre de com-
munes (δῆμο:, πόλε!ς) autonomes. Ils subsistèrent, avec des pou-
voirs sans doute agrandis, après le synoecisme de 472 : dans le
traité de 420 (Thucydide, V, 47) ils figurent en tête des autorités
éléennes. Gilbert veut y reconnaître le collège de 90 gérontes
mentionné par Aristote (Polt., VIIT, 6). Mais ces gérontes sont
viagers; or, dans le bronze Szanto, le collège des démiurges est
annuel et il paraît l’avoir été dès l’époque (400 environ) du
fragment n° 17 où on lit : ἐνίχασαν ent... va δαμιοργῶν, c'est-à-
dire ἐπὶ [τῶν περὶ Πύρρω]να (ou autre nom semblable) δαμιοργῶν.
Il faudrait donc admettre — ce qui d’ailleurs n’a rien d’im-
possible — que les pouvoirs des gérontes-démiurges ont été
rendus annuels dès le v° siècle (4).
Au reste, à côté de la démiurgie centrale d'Olympie (plus
tard d'Elis) on trouve des directoires locaux désignés sous le
même nom. Nous n’invoquerons pas le décret de la ville de
Chaladra (no 41), qui date du νι siècle, où le naturalisé Deuca-
lion est déclaré FisonpoËevos, ΕἸἰσοδαμιωργός, car cela pourrait
(1) On ne doit pas, en revanche, considérer les démiurges comme annuels dans
la rhétra Πατριάν : la reddition de comptes (μαστοάα) ne paraît concerner que
l'hellanodique.
13
192 THÉODORE REINACH
signifier à la rigueur « éligible aux fonctions de damiurge à
Olympie » : les πρόξενοι sont, en effet, des magistrats d'Olympie
(n°* 10, 13). Mais dans le décret organique réglant la constitu-
tion de Scillonte (n° 16), décret qui date du milieu du v° siècle
et émane du pouvoir central, les deux commissaires chargés
de l'organisation de la ville soumise sont qualifiés de δαμιορνία.
Théodore Rernacu.
REMARQUES SUR LES PAPYRUS DE MAGDOLA
Les papyrus grecs publiés par M. Jouguet (Bull. de corr.
hell., XXVI, 99-127) et provenant de ses fouilles de Médinet-
en-Nahas, l'antique bourgade de Magdola au sud du Fayoum,
ont apporté beaucoup de nouveautés de tout genre. L’explora-
teur, voyant l'importance de la collection, n'a pas hésité à
communiquer aussitôt que possible, en édition provisoire,
une série de textes fort intéressants. Nous le félicitons de
cette promptitude, et c'est pour lui témoigner notre reconnais-
sance que nous allons proposer quelques remarques destinées
à’ servir à la publication définitive.
1, 9 καὶ ἀπενηνεγμένοι εἰσὶ παρὰ πάντα δίχαια, lisez πάντα (τὰ)
δίκαια, C’est une sorte d'haplographie assez commune dans les
manuscrits grecs.
48 περὶ δὲ τοῦ βεθιασμένους | [γεωρ]γοὺς κατεσπαρχέναι, ἐξ ὑστέ-
ρου λήψομαι τὸϊν σπόρον] παρ᾽ α[ὑ]τ[ὦ]ν. Les restitutions de M. Jou-
guet donnent un sens contraire à la pétition ; de plus ils con-
tiennent une faute grammaticale (βεδιασμένους γεωργούς pour
Bebtasuévous τοὺς γεωργούς). Il faut écrire πεοὶ δὲ τοῦ βεδιασμέ-
γους [αὐτοὺς κατεσπαρχέναι, ἐξ ὑστέρου λήψομάι τὸ [δίκαιον] παρ᾽
α[ὐγτ[ὧ]ν. Sur le sens actif de la forme BeGtasmévous, voir
Thes. Ling. Gr. Il 237 À, pour la phrase finale, cf. περὶ μὲν γὰρ τῆς
ὕδρεως καὶ πληγῶν καὶ ὧν συντετελεσμένοι εἰσὶν εἰς μέ, μετὰ ταῦτα
λήμψομα! παρ᾽ αὐτῶν Ov ἄλλης ἐντεύξεως τὸ δίκαιον ὡς χαθήχει,
P. Par. 1445: ὑπέχειν χαὶ λαμδάνειν τὸ δίκαιον, Ρ. Tebt. 1 Sas, etc.
Wilcken ἃ donné, dans l'Archiv für Papyrusforschung, I,
391, la même restitution.
104 __ WILHELM CRÔNERT
IT, 2 τοῦ γὰρ ἀνδρὸς Mayärou σταθμοδοθέντος ἐν xw[urt] Πηλου-
σίωι καὶ διελομένου αὐτοῦ πρὸς τὸν Ποῶριν : suppléer τὸν σταθμόν,
ou τὸν τόπον, Cf. ὁμολογοῦμεν... διειρῆσθαι πρὸς ἑαυτοὺς.. τὸ
ὑπάρχον ἑκατέρω τέταρτον μέρος, CPR I 115 (108 après J.-Chr.),
διειρῆσθαι [πρὸς ἑαυτοὺς τ]ὰ ὑπάρχοντα αὐτοῖς BGU 241: etc.
D'ailleurs, Asia n'est pas la femme de Machatos : Μαχάτου
appartient à un nominatif Ναχάτας, nom fréquent dans la
Grèce septentrionale. — Σταδμοδοθέντος au lieu de σταθμοδο-
τηθέντος (Wilcken, I. c. 391).
5 ἐπισυντελέσαι τὸν τοῖχον, ἵνα μὴ ὑπερδατὸν ἧι εἰς τὰ ἡ μέτερα,
οἵ. ἵνα μὴ εὐυπέρθατον ἧι τὸ ἐλαιούργιον, Fay. towns, 1109 (94 apr.
J.-Chr.). Selon toute apparence, il faut lire ἵνα μὴ ὑπερδατὸς ἦι,
car 1] n'est pas vraisemblable que ὑπερθατόν ait été écrit dans le
sens de ὑπέρθασις.
ΠῚ, 4 Θεόδοτος, Γαδδαῖος, [᾿ΟἸνίας : c'est une conjecture heu-
reuse de M. Jouguet de supposer que ces trois personnages sont
des Juifs. Les noms composés avec θεός sont assez fréquents
dans la nomenclature des Juifs hellénisés. Parmi les « soixante-
dix interprètes », par exemple, on voit trois Θεοδόσιοι, puis ὑπ
Θεόδοτος, un Θεόφιλος et un Δοσίθεος (Arist., Epist., 47-50; le
nom ‘Opvixs, cap. 47, doit être remplacé par ᾿Ονίας). Les papy-
rus de Tebtynis nous ont fourni la mention d'une chapelle
juive (προσευχὴ Ἰουδαίων) au faubourg d’Arsinoë (86 18, 19, 29). —
Voir aussi Wilcken, 1. c. 390.
5 πλὴν ἀδρόχου καὶ καταθρόχου : au lieu de κατάδροχ ος (terre
inondée), les papyrus de Tebtynis parlent d'une (γῆ) ἔμ. 6poyoc.
Sur la clause, cf. ἐὰν δέ τις ἄδροχος ἢ καθ᾿ ὕδατος γένηται,
παραδεχθήσεται ἡμεῖν τὸ ἐχφόριον P. Lond. II 193,2.
ΙΝ, 3 ἐγχλ]είσαντες εἰς τὰ μυρίκινα [σηχώματα,
V, 4 ἀργώμεθα : lisez : κατ]]εργώμεθα, ν. Χ, 3.
9 ἐν δὲ τῶι [μεταξύ..
12 ὃ καὶ εἰς τὸ γή]]διον κατῆγον. Ὁ δὲ αἰσίθόμενος ἤδη καταῦε-
δλῆσθαι τὸ] σπέρμα.
10 ἐπι]σκεψάμενον.
21 ἐπὶ τὸν λοι] πὸν χρόνον,
REMARQUES SUR LES PAPYRUS DE MAGDOLA 195
VI, 4 προσπηδ[ήσαντες] vois?
Ἴ ὃ καὶ ἐχομισάμην | [ὕστερον, Τούτου οὖν ἕνεκα ἀἸπέδωχα xt.
10... οὗτος δὲ «οὐχ» ὁμοίως χρησάμενος — Cette restitution
se recommande par le sens; on aimerait encore mieux : οὗτος
δὲ ἀλλοίως χρησάμενος.
12... (μησαι wpw ... ρήσασβαι : on serait tenté de restituer
παρὸν τιμωρήσασθαι où ἀμελήσαντα τοῦ τιμωρήσασθαι,
VIE, 8 τούτου γεν(ομένου).
VIII, 2 Θευδότης : ce n'est pas un nom exclusivement ionien.
Les Rhodiens de l’époque hellénistique contractaient aussi eo in
eu, Cf. Inscr. insul. 1. L'influence rhodienne sur la nomenclature
des Grecs de l'Orient sera étudiée dans mon ouvrage sur les
noms doubles grecs.
3 οἰκησάντων γὰρ ἡμῶν ἀμφοτέρων [ἐν τῆι σημαινομένηι χώμηι
χαὶ ἐχείνων μ]|εθ᾽ αὑτῶν (ΞΞ ἡμῶν αὐτῶν d’après l'usage de la
χοινὴ).
ὅ [τῆς γυναικός μου τὸν Bllov καταλυσάσης, ὑπαρχόντων δέ μοι
σχευ[ῶν τινων ἐν οἷς χ]αὶ δρέπανον.
8 [ἐν ht...
9 ἃς καὶ παρέδει[ξα ἐκείνοις ἐν παραθήκηι " ἐπὶ δὲ το]ύτοις χτλ.
10 ὅπως ἀπαγ[γέλλω τοῖς ἐκεῖσε τὴν κατ[άλυσιν
11 ἀναχάμ[πτοντός μου πάλιν οἴκαδε] χτλ.
12 τῶν σχευῶν ἐδούλετο ἀποσ]τερέσαι,
18 ὑπερ[ιδεῖν με ἀδιχούμενον, ἀλλὰ προστάξαι Διο]φάνει χτλ.
Il est clair que l’action incriminée fut occasionnée par la mort
de la femme du plaignant (cf. sur la phrase χαταλύειν τὸν βίον
un papyrus de Londres : ἐπὰν τὸν Slov.. χκαταλύσω P. Lond. I 233,4
de l’ép. byz.). Celui-ci va à Bacchias pour annoncer cette mort
à certaines personnes, mettant quelques objets précieux en
dépôt auprès de l'accusé, mais après son retour il réclame en
vain sa propriété.
X, 3 ἐφ᾽ ὧι xatwoyouelax : bien que M. Jouguet ait donné la
leçon χατωργώμεθα comme certaine, le papyrus offre sans doute
χατεργώμεθα (= χατεργασόμεθα, οἵ, la grammaire de Kühner-
Blass IT 109), comme le témoigne un papyrus de Tebtynis : ἐφ᾽
196 WILHELM ΟΑΟΝΕΚΤ
ὧι κατεργᾶται 1 10ς͵ De même plus haut V, ἀ il faut lire xa]|eo-
yo pee.
5 θ[ἐσθ]αι μοι ἀ[ντίγραφον αὐτῆς (Ὁ συμδέδηκεν αὐτὸν] ἐκχλεῖσαί
με τῆς μετοχ[ῆς, Cf. ἐξεκλήισαν τῆς μετοχῆς Herodot. I 144.
9 θέσθαι μοι τὴν συγγραφὴν τὴ[ν συμπεφωνη μένην ἢ ἀποτεῖσαι τὸ
βλάδος.
XI, 3 παρὰ τὸ ἐγγὺς εἶναι τὸν ᾿Αρσινοΐτην, ὅ παρὰ τὸ μὴ δύνασθαι
τοῖς ἱστίοις ἔτι χρῆσθαι, 13 παρὰ τὸ μέγα εἶναι τὸ πλοῖον : usage
assez remarquable de παρὰ τό au lieu de διὰ τό.
18 μηδὲ ἱστίοις [εἶναι] Ofuvardy τὸ]μ [πλοῦν εἰς] τὴν πόλιν) On
attendrait plutôt εἶναι δυνατὸν πλεῖν ἐπὶ τὴν πόλιν.
XII, 8 οὐδὲν α[ὑ]τὸν ἐποιήσατο, « ils ne l'ont pas du tout res-
pecté ».
XIIL, 1 To..sos, verso 2 Τρεγτος : nom macédonien dont la
lecture paraît incertaine. On peut choisir entre plusieurs
noms, cf. par exemple Τρῆτος, Τρέμιος, Tpônos, Τρόμιος, Τρώγιλος
(contrée macédonienne selon Steph. Byz. ; cf. le nom de famille
Τρωγιλίδης à Téos, CIG 306435).
XIV,5 συγγράψασθαι αὐτῆι δανείου (δραχμὰς) (μυρίας), cf.
συγγραψαμένων μοι.. δανείου [χαλ]κοῦ τἀλ(αντα)ς Ρ. Par. 8, (an 131
av. J.-Chr.).
9 ἐὰμ μὴ φαίνηται [χυρία] τοῦ ἀργυρίου γεγενημένη.
XV,1 βασιλεῖ Πτολεμαίωι χαίρειν. [Παρυώτης Αραν κουρεὺς
ἀδι]χοῦμαι πτλ,
2 τουτονὶ γὰρ] τεθεραπευχὼς ἀνεγκλζήτως ἔναγχος εἶδον ἀγεοχό]με-
γον πρὸς μὲ χλαίοντα μά[λ᾽ οἰκτρῶς. Malchos paraît avoir refusé
de payer la somme due à Paryotes.
XVI, 4 παρ᾽ ἐμοῦ οὐκ ἔφη ἀποδώσειν τὴν] ὄνον.
XVII, 1 ἀδιχζοῦμαι...εἰσδεδωκὼς] ἔντευξιν Διοφάνγει.
2 ἐνέφα[ινον ὅτι..
3 οὐκ [ἀπέδωχεν " ὃ δ᾽ ἐπεὶ συνέταξεν Πολυχρά]τει.
X VIII, 1 γάο : peut-être παρ[έλχει
XIX, 3 τζεναμουνι : lisez Τζεναμοῦνι. C’est un nom égyptien :
« fille d'Ammon ».
T τυχεῖν αὐτὸν τῆς προ[σηχούσης ἐπιπλήξεως, τῆς δὲ προσαγγελίας]
ὑπογραφὴν ποιήσασθαι ?
REMARQUES SUR LES PAPYRUS DE MAGDOLA 197
XXI, 1 sans doute Gupoxonnouyfes],
2 ᾽Οξόρυγχα : cette forme nous rappelle la graphie ὀξόβαφον —
ὀξύθαφον (οἵ. Thes. Ling. Gr. V 2051°), cf. 0Ë66apx BGU.
781, ὃς, etc., puis ὀξόγαρον — ὀξύγαρον (Thes. V 20532).
3 ὑπὸ τῶν [κυνῶν καὶ τ]ῶν χοράχω[ν διαδεθρωμένην, ὡς | καὶ] τοῖς
κτλ.
6 περὶ το[ῦ πράγματος, καὶ ἐὰν ἧι | τὰ] διά «TA.
Ἴ ἀποδο[ῦναί μοι χωρὶς ἀντιλογίας] τὴν χτλ.
XXII 6 ουπούουλον : Αὐτόδουλον La lecture des lettres ΥΠῸ
me paraît incertaine.
Bonn, le 18 mars 1903.
Wilhelm CRÔNERT.
TROIS STATUES ANTIQUES
PROVENANT DE SMYRNE
DANS L’ANCIENNE COLLECTION DU ROI
L'histoire des antiques de l'ancienne collection du Roi,
aujourd'hui en majeure partic réunis au Louvre, est, sauf quel-
ques rares exceptions, presque toute à faire (1). Des statues qui
en formèrent le premier fonds, nous ne pouvons guère désigner
que la Diane à la Biche : encore la tradition ne s'appuie-t-elle
que sur le témoignage très postérieur de Sauval qui indique
que la statue passa de Rome en France sous François [°* (2).
Jusqu'à une date voisine peut aussi, semble-t-il, être reporté
le don fait au Roi du Bacchus dit de Richelieu (3), qui, aliéné
pendant deux siècles et demi, est rentré sous la Révolution
dans nos collections nationales (4). Si des premiers antiques
nous passons à ceux réunis sous le règne de Louis XIV, qui
(1) Voy., sur quelques-unes des statues de la collection du Roi trouvées en
France, mon étude sur les Séalues antiques trouvées en France au Musée du
Louvre, extrait des Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France,
t. LX.
(2) Frôhner, Notice de la sculpture antique, Ὁ. 124. Il n'est pas vraisemblable
en tout cas que la Diane ait fait partie des marbres achetés en Italie par le
Primatice pour le compte du Roi.
(3) Catalogue sommaire des marbres antiques, ne 81.
(4) Envoyé sans doute en France en 1550 avec les Esclaves de Michel-Ange,
donnés au Roi par Robert Strozzi, le Bacchus Richelieu a partagé leur sort
depuis le xvre siècle jusqu'à la Révolution (Bulletin de la Société des Antiquaires,
1894, p. 168-174; 1901, p. 274-296),
TROIS STATUES ANTIQUES PROVENANT DE SMYRNE 199
fut comme le second créateur de la collection, nous ne sommes
pas, dans l'ensemble, beaucoup mieux renseignés. Rappeler le
don de la Vénus d'Arles et celui, plus que problématique, de la
Vénus Genitrix, prétendue trouvée à Fréjus (1), celui enfin du
Jupiter dit de Versailles, l'achat du Jason et du Germanicus,
c'est, peu s'en faut, dresser la liste des statues jusqu'ici recon-
nues au Louvre comme remontant à cette époque. Mais combien
d’autres acquisitions resteraient à étudier et des plus impor-
tantes, ne füt-ce par exemple que celle d’une partie des marbres
de la collection Mazarin (2). La fondation de l’Académie de
France à Rome, de son côté, eut comme conséquence l'envoi
de bien d'autres statues que le Jason et le Germanicus, no-
tamment un Bacchus envoyé par le sculpteur Théodon (3) et un
groupe d'un Centaure marin enlevant un Silène, don du prince
Alexandre Albani (4). Aux missions archéologiques entreprises
en Grèce et en Orient, enfin, missions qu'inaugure le minis-
tère de (Colbert, sont dûs de nouveaux enrichissements.
M. H. Omont, dans les deux savants volumes qu'il vient de
leur consacrer, a relevé avec soin, en même temps que tout
ce qui touche aux manuscrits, médailles et pierres gravées con-
servées à la Bibliothèque nationale et dont je ne veux point
m'occuper, les documents plus rares — car là ne fut jamais le
but principal assigné aux missionnaires — relatifs aux acquisi-
tions de sculptures (5). Ici, nous rentrons dans le domaine
(1) La provenance est en réalité très incertaine (Slatues antiques trouvées en
France au Musée du Louvre, p. 4-11) et de même le don fait à Louis XIV.
(2) 1] s'en faut de beaucoup que les indications portées au Catalogue sommaire
des marbres antiques correspondent au nombre des statues du Louvre ayant
réellement appartenu au Cardinal. Il ne faut pas oublier, en outre, que quatre
Caryatides provenant de la collection de Mazarin, cédées en 1815 en vertu d’un
échange au prince Albani, sont aujourd'hui conservées à la Glyptothèque de
Munich (Furtwängler, Beschreibung der Glyptothek, n° 305, 306, 371 et 372).
(3) Sans doute le n° 113 du Catalogue sommaire des marbres antiques.
(4) Placé d'abord daus le grand escalier des Ambassadeurs du Palais de Ver-
sailles, le groupe avait été plus tard transporté dans le jardin du Grand Tria-
non. Il a été récemment cédé au Louvre par le Musée de Versailles.
(5) H. Omont, Missions archéologiques françaises en Orient aux xvus et
xvine siècles, dans la Collection de documents inédits sur l'histoire de France
publiés par les soins du Ministère de l'Instlruclion publique, 2 vol., 1902.
200 ÉTIENNE MICHON
assigné aux études de la Société et je voudrais, en m'appuyant
sur une lettre de Galland à l’abbé de la Chambre, publiée par
M. Omont (1), signaler brièvement trois statues découvertes à
Smyrne dans les tout dernières années du xvr° siècle et trans-
portées à Versailles.
Trop souvent, hélas, les documents d'archives ne fournissent
à l’archéologue, en quête d'identifications, aucun secours. Ou
bien il est parlé seulement Δ᾽ « antiques », sans aucun rensei-
gnement précis : telle, par exemple, une lettre du P. Bracon-
nier au ministre, datée de Constantinople le 30 septembre 1710,
et: qui n’est, dit-il, « que pour accompagner les antiques dont
j'ai eu l'honneur de parler à votre Grandeur (2) ». Ou bien, tout
en contenant quelques indications moins vagues, d'autres let-
tres laissent dans le doute un point capital, qui est de savoir si
les monuments ont été réellement expédiés : il en est ainsi de
« deux statues d’un fort beau marbre blanc, d'environ six pieds
de haut... se ressemblant à croire qu'elles représentent le
même objet, le nez un peu mutilé et le couronnement endom-
magé » et d’une Vénus à demi nue découvertes par un drogman
d'Alexandrie en 1750 ou 1751 et dont furent longuement entre-
tenus non seulement le ministre, mais le directeur général des
bâtiments, M. de Tournehem (3). Ou bien encore l'envoi a été
fait, non pas au Roi, mais à un ministre personnellement ou
même à quelque grand personnage amateur, comme tel « bas-
relief de six figures, avec une inscription grecque, pesant plus de
60 livres », donné en 1715 par l'ambassadeur de Constantinople
au comte de Pontchartrain (4), ou tel marbre antique adressé
par un Français fixé à Smyrne, Jean Guérin, de Marseille,
pourvu d’un brevet d'antiquaire du Roi, au premier président
du Parlement de Provence, Le Bret (3). L'intérêt du document
n'en est pas, à coup sûr, diminué et l’on m'’excusera de citer
(1) Ibid, t. I, p. 209-240.
(2) Ibid. t. I, p. 278.
(3) Ibid. t. 11, p. 801-804.
(4) Ibid., t. I, p. 359-360.
(5) Jbid., t. IL, p. 124, n. 1.
TROIS STATUES ANTIQUES PROVENANT DE SMYRNE 201
encore, parce qu'elle peut sembler comme un premier écho de
l'ingénieuse théorie exposée ici-même par M. Pottier (4), la des-
cription faite par Charles de Peyssonnel, chancelier de l'am-
bassade de Constantinople, dans une lettre à M. de Caumont
en 1739, d'une espèce de patère acquise par lui dans l'île de
Ténédos : « il y a autour du disque une bande de deux tra-
vers de doigts, sur laquelle on voit des figures humaines qui
ont quelque chose de grotesque ; elles sont noires, l’articula-
tion des muscles est marquée par des linéaments blancs... ;
il semble qu’on a voulu peindre des ombres et des spec-
tres (2) ». Mais il est clair qu'il n’y a point à chercher d'iden-
tification au Louvre.
Ilest temps d'arriver à la lettre de Galland à l’abbé de la
Chambre dont j'ai parlé. Elle est datée de Smyrne le 1° no-
vembre 1680 et ainsi conçue : « Le lendemain de mon arrivée
(à Smyrne), je vis chez un marchand hollandois deux grandes
statues de marbre assés belles, l’une de Jupiter et l'autre d’une
femme, à qui la teste manquoit ; elle estoit vestue et la drape-
rie estoit admirable. Mais je ne pus voir que le dessein d’une
statue d'Apollon Phythien, qu'il avoit envoiée en France par
un vaisseau, parti depuis pour Marseille sous l’escorte du vais-
seau du Roi (3) ».
La description, on le voit, est bien sommaire et du seul
Apollon Galland dit qu’il a été ‘envoyé en France : les trois
statues, néanmoins, je voudrais le montrer, peuvent être recon-
nues avec certitude.
M. Omont a indiqué en note pour l’Apollon la référence sui-
vante : « aujourd’hui au Musée du Louvre, n° 73 du catalogue
Frôhner (4) ». Mais l’Apollon Pythien n° 73 de cette Notice est
(1) Le dessin par ombre portée chez les Grecs, Revue des Études grecques, 1898,
Ρ. 355-388.
(2) Missions archéologiques françaises en Orient aux xvu* el xvuie siècles, t. II,
Ῥ. 142-743.
(3) Ibid., t. I, p. 209-210.
(4) Ibid., t. I, p. 210, n. 1.
202 ÉTIENNE MICHON
une petite statuette dont la présence en France remonte peut-
être en effet à une date antérieure à la Révolution, mais qui n’a
jamais fait partie de la collection royale (1). Il se pourrait, au
surplus, que l'erreur ne fût due qu'à une faute d'impression et
que M. Omont ait voulu renvoyer, non au n° 73, mais au n° 75,
l’'Apollon dit Lycien, qui est venu au Louvre de Versailles (2).
Il ne resterait alors, car c'est bien de cette statue qu'il s'agit,
qu'à fournir la preuve : plusieurs étaient en effet certainement
les Apollons dans l'ancienne collection royale et il en reste
à Versailles qui en ont dû faire partie (3). La dénomination
de Lycien, remarquons-le tout d’abord, au lieu de Pythien,
employée dans la lettre de Galland, ne saurait faire obstacle.
Notre Apollon, que M. Collignon a fait reproduire dans son
Histoire de la sculpture grecque (4) et qu'il déclare avec raison
un excellent spécimen du type, est une de ces figures d’Apollon
au repos, ramenant languissamment le bras au-dessus de la
tête, dont il attribuerait volontiers la création à Praxitèle, tant
l'attitude semble habilement combinée pour donner à la figure
humaine tout ce qu'elle peut recevoir de morbidesse et d’élé-
gance (3): à la gauche du dieu un grand serpent s'enroule
autour d’un tronc d'arbre, et c'en est à coup sûr assez pour que
Galland ait pu qualifier le dieu de Pythien. L'essentiel pour
nous est que dans la marge de la lettre, conservée parmi les
manuscrits français de la Bibliothèque royale de Munich, est
(1) Il a été indiqué dans le Catalogue sommaire des marbres antiques comme
provenant du château d'Écouen, mais l'attribution, due à une confusion avec le
n° 533, ne repose sur aucun indice certain (voy. nes Noles sur quelques monu-
ments du Louvre, extrait des Mémoires de la Société des Antiquaires, t. LVII,
p. 41, n. 31).
(2) Catalogue sommaire des marbres antiques, n° 928.
(3) H en est un, notamment, dans le Bosquet de l'Étoile, qualifié d'Antique
(Soulié, Notice du Musée nalional de Versailles, éd. de 1881, 3° partie, p. 519),
mais qui n'est que la reproduction d'un Apollon du Musée du Capitole : la statue,
il est vrai, se présente aujourd'hui sous un aspect tout différent, mais la copie
de Versailles nous est un témoin de la manière dont il avait été primitivement
restauré (Clarac, Musée de sculpture, t. 11], pl. 490, 954 et 483, 928 A).
(4) T. 11, p. 303, fig. 154.
(5) Jbid., L c.
TROIS STATUES ANTIQUES PROVENANT DE SMYRNE 203
inscrite la mention : « ceste statuc est présentement dans la
galerie de Versailles (1) », mention qui va nous donner la clef
de l'identification.
Il y avait dans la grande galerie huit statues, deux à chaque
extrémité de part et d'autre de l'entrée des salons de la Guerre
et de la Paix, quatre se faisant vis-à-vis deux à deux dans les
niches placées vers le milieu de la longueur. Le nombre a tou-
jours été immuable. Ces huit statues, toujours les mêmes, les
différentes éditions de la Description de Versailles de Piganiol
de la Force, aussi bien que le Versailles immortalisé de J.-B. de
Monicart, nous les signalent ainsi qu'il suit : du côté du salon de
la Guerre, la Vénus d'Arles et le Bacchus (2); au centre, d'un
côté le Germanicus et la Vénus connue sous le nom d’Aphro-
dite de Troas (3), de l’autre la Faustine mère, dite Crispine, en
Pudicité, venant de Bengazi (4), et la Diane à la Biche; du côté
du salon de la Paix l’Uranie et la soi-disant Vestale restaurées
par Girardon (5). Il n’est pas, on le voit, question d'Apollon et
il pourrait sembler que la mention portée en marge de la lettre
de Galland dût être inexacte. D'ailleurs, dans le parc non plus,
aucun des Apollons qui y sont placés n'est l’objet d'une men-
tion particulière, et ce n’est que par M. Frihner que nous appre-
nons que l’Apollon Lycien, lorsqu'il fut apporté au Louvre à
l'époque de la Révolution, était placé dans les jardins près
du bosquet de la Colonnade (6). La solution du problème
n'est pourtant pas impossible à trouver. La première édition
du guide de Piganiol ne date que de 1701. Avant cette date,
les statues de la Galerie avaient pu n'être pas celles qu’il
indique. Piganiol lui-même parle d’une statue de « Sénateur »,
de son temps dans la demi-lune près du bassin d’Apollon,
(1) H. Omont, Missions archéologiques françaises en Orient aux xvue et
xvure siècles, t. 1, p. 210, n. 1.
(2) Catalogue sommaire des marbres antiques, n° 622.
(3) Jbid., n° 315.
(4) Ibid., no 1130.
(5) 1bid., nos 444 et 918.
(6) Notice de la sculpture antique, p. 99.
204 ÉTIENNE MICHON
comme ayant été autrefois dans la Galerie (1). Il y a plus. Il
est une des huit statues énumérées plus haut, la Faustine en
Pudicité, envoyée par le sieur du Sault, consul de la nation
française à Tripoli, dont, en 1701, l'arrivée était encore toute
récente : signalée à M. de Pontchartrain en 1693, embarquée dans
les derniers jours de 1694, débarquée à Toulon en janvier 4695,
elle n'était pas encore parvenue à destination au mois de juillet
de cette année (2). 1] fallait donc que, avant cette date, une autre
eût occupé dans la Galerie la place qui lui fut ensuite attribuée
comme à « l'antique la mieux conservée qui soit en Eu-
rope (3) ». Que cette figure füt précisément notre Apollon
Lycien, on peut l'établir, grâce au Recueil des statues, groupes,
fontaines, termes, vases et autres magnifiques ornemens du Cha-
teau et Parc de Versailles publié, en 1695, par un ancien pen-
sionnaire de l'Académie, Simon Thomassin, graveur du Roi,
d'après des dessins faits en l’année 1689 (4). Après une pre-
mière planche consacrée, aux armes du Roi, on y trouve, dans
les huit planches suivantes, n°" 2 à 9, le Bacchus, la Vénus
d'Arles, le Germanicus, la Diane, un « Bacchus nu, figure
antique de marbre, qui est accotée sur un tronc d'arbre » (5),
la seconde Vénus, l’Uranie et la Vestale. Il est facile de cons-
tater que, au second Bacchus près, qui tient la place de la Faus-
tine non encore à Versailles, la liste en concorde avec les indi-
cations de Piganiol. Le catalogue qui précède les planches a
soin d’ailleurs, à la suite de la Vestale, de nous avertir que
« ces huit figures antiques cy-dessus nommées sont dans [ἃ
(1) Nouvelle description des châleaux et parcs de Versailles et de Marly, éd. de
1704, p. 212.
(2) H. Omont, Missions archéologiques françaises en Orient aux xvii® el
xviue siècles, t. 1, p. 310-312. Puget lui-même fut invité à venir de Marseille à
Toulon pour la faire encaisser « avec le soin qu'elle mérite », de même qu'en
1821 Révoil, peintre de Madame, était officiellement chargé de se transporter à
Toulon pour présider au débarquement et à l'expédition de la Vénus de Milo.
(3) Nouvelle description de Versailles et de Trianon, p. 96.
(4) Il en ἃ été fait une réédition à La Haye en 1123, d'après laquelle sont
faites les citations suivantes.
(5) P. 42.
TROIS STATUES ANTIQUES PROVENANT DE SMYRNE 205
grande Galerie (1) ». Mais, d'autre part, l'examen dela planche,
tout infidèle qu'elle soit et retournée comme toutes les gra-
vures de Thomassin (2), permet de reconnaître dans ce pré-
tendu Bacchus, appuyé sur un tronc d'arbre autour duquel
s'enroule un serpent, notre Apollon.
Il faudra donc désormais rendre la provenance de Smyrne
à l’Apollon Lycien du Louvre; mais, de plus, il est non moins
certain, quoique Galland ne le dise pas, que le Jupiter et la
femme drapée dont sa lettre fait aussi mention sont également
venus à Versailles. Un premier indice résulte de ce que, dans ce
même recueil de Thomassin où nous avons trouvé l'Apollon,
figurent précisément un « Jupiter tonnant, antique (3) » et une
« Junon reine, antique (4) », visiblement restaurée pour lui
faire pendant avec un diadème et une grenade dans la main
droite, mais dont la gravure elle-même suffit à attester que la
tête est moderne. Dès la première édition de 1701, en outre,
la Description de Versailles de Piganiol de la Force indique
un Jupiter et une Junon trouvés à Smyrne (5). Il est vrai que
sur ces questions de provenance, Piganiol est sujet à caution.
Il n'hésite pas, par exemple, à donner comme découverts à
Besançon (6) le torse de Jupiter dit de Versailles et le buste de
Junon du palais Granvelle, offerts l’un et l’autre à Louis XIV
après son séjour en Franche-Comté (7), alors que nous savons
pertinemment que le Jupiter, au moins, conservé à Rome à la
villa Madama et envoyé au cardinal de Granvelle par Margue-
rite d'Autriche, vient par suite des fouilles faites à Rome ou
aux environs (8). Il est clair, toutefois, que désormais la
(1) Zbid., 1. c.
(2) PL 6.
(3) PI. 43.
(4) PL 20.
(5) P. 204 et 225.
(6} P. 341.
(1) Catalogue sommaire des marbres antiques, n°* 10 et 460.
(3) Voy. Statues antiques trouvées en France au Musée du Louvre, p. 11-14. Il est
permis de croire:que c'est à ce Jupiter que fait allusion Félibien, dont l'assertion
206 ÉTIENNE MICHON
lettre de Galland donne au renseignement l'autorité qui lui
manquait.
De ces deux statues, la Junon est encore aujourd’hui à Ver-
sailles sur le côté nord du Tapis vert. M. Soulié, dans son cata-
logue, la décrit ainsi : « Junon; statue antique en marbre.
Piganiol dit que cette statue a élé trouvée à Smyrne. La tête et
les bras sont de Mazière, — indication, remarquons-le, qui se
trouve d'accord avec le renseignement donné par Galland que
la tête manquait. — Elle tient un sceptre de la main gauche et
une grenade de la droite (1). » Le Jupiter, au contraire, y serait
cherché vainement, mais il n’est autre que la statue colossale
de Jupiter de la salle des Caryatides au Louvre (2). Ni M. Früh-
ner (3), ni Clarac, tant dans son catalogue (4) que dans le Musée
de sculpture (5), ni Bouillon dans son Musée des antiques (6),
ne fournissent, il est vrai, sur ce Jupiter aucun renseignement
de collection ou d'origine. Les procès-verbaux du conserva-
toire du Museum central des arts m’avaient en revanche déjà
permis d'y reconnaître un Jupiter qui fut pris pour le Louvre
à Versailles, sur le Tapis vert, à droite, en descendant, à
l’époque de la Révolution. La mention « Jardins de Versailles »
a été, en conséquence, inscrite dans le Catalogue sommaire des
marbres antiques. Sur ce point, la comparaison avec la plan-
che 13 du recueil de Thomassin ne laisse aucun doute. Il était
bien indiqué aussi, dans les procès-verbaux, que ce Jupiter
par suite devrait être corrigée, lorsque, à propos de la « vigne Madame », il écrit
que « ce palais était rempli de très belles statues antiques, entre lesquelles il y
avait un Jupiter qui fut envoyé à François ler. » Entretiens sur les plus excel.
lents peintres anciens et modernes, éd. de 1685, t. I, p. 389.
(4) Notice du Musée national de Versailles, 3° partie, p. 510.
(2) Catalogue sommaire des marbres antiques, n° 13.
(3) Notice de La sculpture antique, n° 188.
(4) Description du Musée royal des Antiques, n° 32.
(5) T. III, p. 42, n° 683.
(6) T. 111, statues, pl. 1, p. 1. Le texte de J.-B. de Saint-Victor, qui indique
inexactement que la tête, le torse et le bras gauche sont seuls antiques, recon-
naît, d'autre part, à la différence de Clarac qui déclare la statue très médiocre
de pose, de dessin et d'exécution, que ce Jupiter, placé dans une niche près de
la porte extérieure du Musée, mériterait plus que beaucoup d'autres monuments
une place honorable dans l'intérieur.
TROIS STATUES ANTIQUES PRÔVENANT DE SMYRNE 207
avait été trouvé à Smyrne, évidemment d’après le témoignage
de Piganiol de la Force, mais le fait, aujourd'hui certain,
n'avait pas paru assez établi pour être inscrit au Catalogue.
Debout, la jambe gauche légèrement fléchie et reportée en
arrière, enveloppé à la manière d'Esculape d’un manteau qui
couvre les jambes et dont l'extrémité, ramenée sur l'épaule et
le bras gauche, laisse toute la poitrine à découvert, le dieu a
reçu du restaurateur seul un bras droit levé armé du foudre (1).
Il n'est donc pas même certain que la statue ait été celle d'un
Jupiter tonnant. Mais la tête, avec sa longue chevelure tom-
bante en boucles ondulées, témoigne d'un bon modèle et se rat-
tache, à coup-sûr, à un type de l'époque proprement grecque.
La statue, de toute manière, est loin d'être indifférente et, en
la marquant pour le Louvre le 14 frimaire an VIII, les délé-
gués du Museum n'ont pas seulement grossi d’un numéro, ils
ont vraiment enrichi sa collection d’antiques. La Junon restée
à Versailles, entièrement drapée, vêtue d'une longue tunique et
d'un ample manteau, par cela seul que la tête est refaite, est évi-
demment de valeur beaucoup moindre ; mais, trouvée à Smyrne
en même lemps, ayant fait partie du même envoi, marquée
de même pour le Museum le 14 frimaire, an ὙΠ], il est permis
de regretter qu'elle n'ait pas suivi jusqu'au bout le sort du
Jupiter et d'émettre le vœu que, remplacée dans le parc de
Versailles, elle trouve elle aussi un jour asile au Louvre.
Etienne Micuon.
(1) Piganioi de la Force (p. 204) indique que la statue a été restaurée par
Granier.
14
DEUX PLAIDOYERS
SUR LA QUESTION DE LA LANGUE LITTÉRAIRE EN GRÈCE
La question de la langue littéraire en Grèce intéresse trop le
présent ct l'avenir d’un peuple qui nous est cher à tant de titres
pour laisser indifférente notre Association.
À plusieurs reprises déjà cette question ἃ été traitée dans nos
publications; il suffira de rappeler l’article de M. Psichari sous
forme de commentaire d'un poème de Solomos (Revue, I, 192)
et celui de M. A. Dozon à propos de l'émotion produite par le
Ταξίδι de M. Psichari lui-même (/bid., 11, 66).
Depuis celte époque, la controverse ne s'est pas apaisée, bien
au contraire. En novembre 1901, par un malheureux concours
de circonstances, la querelle de la langue, compliquée d’une
question religieuse et de délicates susceptibilités nationales, a
même provoqué une émeute sanglante dans les rues d Athènes.
Nous nous sommes abstenus à ce moment d'intervenir, fût-ce
comme narrateurs, dans un conflit trop violent pour que la
voix de la raison pût s’y faire entendre. Aujourd'hui que de
part et d'autre 168 passions soulevées par cet incident semblent
s'être un peu calmées, sans que les convictions respectives
aient rien perdu de leur ardeur, l'heure nous paraît venue de
mettre les lecteurs de la Revue au courant de la phase actuelle
du débat linguistique.
Il va sans dire que nous n'avons pas, en tant que rédaction
ou organe collectif, à prendre parti dans la controverse ; notre
DEUX PLAIDOYERS SUR LA LANGUE LITTÉRAIRE EN GRÈCE 209
tâche se borne à en exposer complètement et sincèrement les
éléments. Pour cela, à défaut d’un arbitre incontesté, planant
au-dessus des luttes des écoles et dont le verdict, ou tout au
moins le résumé, püt s'imposer comme celui de la postérité,
nous croyons bien faire en donnant successivement la parole à
deux champions autorisés des opinions en présence.
Pour représenter les partisans de la langue « épurée », notre
choix ne pouvait se porter sur un avocat plus habile et plus
savant que M. Hatzidakis. À ses éminentes qualités de linguiste,
le professeur d'Athènes joint le singulier mérite d’avoir le
premier en Grèce créé l'étude scientifique de la langue popu-
laire et de lui avoir par là témoigné et valu d’utiles sympathies,
qui n'auraient pas fait prévoir en lui l'adversaire passionné de
son emploi dans la prose littéraire. M. Hatzidakis, malgré ses
multiples occupations, s'est prêté volontiers à notre désir ; l'ar-
ticle qu'on va lire résume et condense les arguments qu’il a,
depuis plusieurs années, semés sur ce sujet dans de nombreuses
publications.
Quant à la thèse contraire, au moment où nous étions en
quête pour elle d'un porte-parole non suspect de plaider pro
domo sua, l’infatigable et brillant organisateur des études
byzantines M. Karl Krumbacher entrait en lice avec un
mémoire retentissant qui, sous sa forme première, a été lu
dans une séance publique de l’Académie de Bavière. Ce dis-
cours, qui a fait sensation (1), coordonne avec tant de clarté,
fortifie de raisons si ingénieuses les arguments des vulgaristes
que nous n'avons pas cru devoir chercher plus loin. L'autorité
de l’auteur en cette matière n’a pas besoin d’être démontrée :
dès le début de sa carrière d'érudit, ses Beiträge zu einer Ge-
schichte der griechischen Sprache l'ont classé parmi les historiens
de la langue, et depuis lors 1] n'est pas un seul de ses travaux
qui n'ait attesté son souci constant du côté linguistique dans
(1) Das Problem der neugriechischen Schriflsprache. Festrede gehallen... am
15. November 1902. Munich, Académie, 1903. Un extrait sommaire avait paru
dans l'Allgemeine Zeitung des 15 et 17 novembre 1902,
210 te ΞΕ GEORGES HATZIDAKIS
l'histoire littéraire de la Grèce médiévale et moderne. Comme le
mémoire était trop long pour être communiqué intégralement à
nos lecteurs, nous avons demandé à l’auteur d'en extraire lui-
même, à leur usage, les parties qui lui paraissaient les plus
topiques et vraiment essentielles. Ce sont ces pages, fidèlement
traduites, reliées par de brefs sommaires des morceaux inter-
médiaires, que nous plaçons sous leurs yeux à la suite de l'ar-
ticle de M. Hatzidakis. Il va sans dire que ceux qui désireront
se faire une idée vraiment exacte de l’ensemble, si fortement
coordonné, de l'argumentation de M. Krumbacher, devront re-
courir au document original.
. Nous n'avons pas à préjuger les conclusions que nos lecteurs
adopteront sur le fond du débat, après avoir pris connaissance
de ces deux plaidoyers. Il en est une pourtant que nous croyons
pouvoir énoncer dès à présent en leur nom; c’est celle que le
chœur antique exprimait en ces termes : εὖ γὰρ εἴρηται διπλῇ.
La RÉDacTIoN.
LA QUESTION DE LA LANGUE EN CRÈCE
À M. le Rédacteur en chef de la Revue des Études grecques.
Monsieur et honorable confrère,
- Désireux de renseigner les lecteurs de la Revue sur ce que
nous appelons la « question de la langue », vous m'avez
demandé de vous faire connaître, et par vous au public fran-
çais, quelle est mon opinion sur ce sujet. Je me conforme
volontiers à votre désir. Convaincu que de parcils problèmes
ne peuvent se résoudre qu’à la condition d’en éclaircir l'origine
ét l'évolution, je me propose d’écarter tout d'abord certaines
LA QUESTION D£ LA LANGLE EN GRÈCE 211
erreurs scientifiques qui encombrent le terrain, puis d'exposer
les faits dans l'ordre historique, | |
Ι, —- Points à éliminer.
La question de la langue, quoique discutée chez nous depuis
des siècles, l’a rarement été sous son vrai point de vue. Tantôt
on la rattache à des considérations qui lui sont étrangères,
tantôt on la sépare à tort de problèmes étroitement connexes.
Autre chose, en effet, est la question pratique de l'emploi de
lu langue écrite, autre chose l'examen historique et scientifique
du grec moderne étudié sous le rapport de la régularité et de la
“purcté plus ou moins grandes de ses formes. La science des
langues est bien postérieure à leur emploi littéraire. Ce dernier
‘intéresse tout le monde et dépend d'un grand nombre de volon-
tés; au contraire l'examen scientifique intéresse peu de per-
sonnes et relève de la pure théorie. Les problèmes qu’il soulève
peuvent être résolus par un petit nombre de savants, quel-
quefois par un seul. Aussi les solutions théoriques peuvent-elles
varier facilement ct rapidement: il n’en est pas de même des
solutions pratiques, qui dépendent de tant de monde.
Tel mot, telle forme, d’une étymologie claire, d'une forma-
tion régulière, seront pourtant rejetés du langage écrit, et
inversement un terme d’origine inconnue, de formation irré-
gulière y sera adopté (exemple : θά, ἀκόμη etc.). On peut appro-
fondir la phonétique, la morphologie, la syntaxe, le lexique
d'un dialecte sans pour cela en faire, ou chercher à en faire, la
Jangue écrite d’un peuple ; exemples : le dialecte homérique,
le lithuanien, le celtique. Au contraire, la plupart des langues
des nations civilisées se sont formées comme langues écrites
avant d’avoir été examinées scientifiquement.
La régularité, la simplicité, la facilité de l'étude sont assu-
rément des qualités précieuses qu'on désirerait trouver dans
toute langue parléc ou écrite. Mais notre rôle, à nous Grecs
du xx° siècle, n'est pas de choisir une langue et de la construire
212 | GEORGES HATZIDAKIS
selon les règles de l'art. Nous avons hérité une langue de nos
pères ; nous n'avons jamais cessé de nous servir de cet héri-
tage ; notre vie intellectuelle y est si intimement liée que nous
ne pouvons plus l'échanger contre une autre pour donner satis-
faction à des desiderata de régularité dans les formes et dans les
sons. Par conséquent, alors même qu’il serait vrai, comme je
le crois (1), que notre langue parlée est plus régulière dans sa
phonétique, dans sa morphologie, dans sa syntaxe que notre
langue écrite, ilne s’en suivrait point que nous dussions substi-
tuer celle-là à celle-ci. Aucune nation n’a jamais procédé ainsi ;
tout: au plus a-t-on cherché à régulariser, ou plutôt à épurer la
langue écrite en expulsant les éléments étrangers. Le mélange
et l’irrégularité des formes ne sont point des défauts qui sutt-
sent à faire rejeter une langue; c'est un fait qu'atteste suffisam-
ment toute l'histoire de la littérature grecque. Homère, Pin-
dare, les tragiques, Xénophon, Théocrite, Polybe emploient
tous des langues diversement mélangées d'éléments anciens et
modernes. On rencontre chez eux des formes mixtes ou analo-
giques qu'aucun dialecte n’a jamais connues : σύρισδες (00
éolien, ε dorique), ἰδοῖσα, λαδοῖσα etc. Ce caractère hétéroclite
est encore bien plus accentué dans les langues modernes;
l'uniformité des lois phonéliques y est violée à chaque instant
par la juxtaposition de mots d'origine populaire et d'origine
savante. Voyez en français altérer à côté de autre; extérieur à
côté de setier; penser et peser ; respecter et lait, lutte ; accepter et
route ; scolaire et école ; testament et téte, etc.
Assurément, au point de vue glossologique ce mélange de
formes incompatibles est un défaut, mais les linguistes ne sont
pas chargés de créer ou de régenter les langues; leur rôle se
borne à les comprendre et à les expliquer. C’est en sortir que
de nous écrier par exemple que telle langue est « un étrange
jargon bâtard, capable de faire grincer les dents d’un linguiste »,
de l'appeler « l'incroyable jargon des pédants », « un monstre.
(1) Voir ce que j'ai dit dans 1᾽ ᾿Αθήναιον,͵ X (1881), p. 14 suiv.
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 213
qui n'est ni chair, ni poisson, ni volaille, ni même un hareng
rouge » (1). En présence de ces métaphores virulentes il est bon
de rappeler cette sage remarque d’un savant allemand : « En
matière d'usage ce n'est pas la voix du linguiste, c’est celle de
l'artiste, celle de la nation qui est souveraine »: et 16 même
savant ajoute : « Le mélange de termes étrangers qui altèrent
la langue maternelle est presque la règle chez les nations civi-
lisées » (2). Ce mélange de termes étrangers est très sensible dans
notre langue populaire; il est rempli d'inconvénients. Les mots
italiens, turcs, etc. dont elle fourmille sont comme des corps
étrangers enfoncés dans un organisme qui rappellent les jours
malheureux de notre pays (3). A la vérité, ces mots étrangers,
une fois qu'ils ont reçu droit de cité dans notre langue, une fois
déclinés conformément aux nôtres, ont acquis extérieurement
une forme grecque; ils n’en restent pas moins obscurs, faciles
à confondre, et se prêtent difficilement à la formation des déri-
vés; on ne peut pas d'un de ces radicaux étrangers tirer, comme
d'un radical purement grec, une famille complète : nom, adjec-
tif, verbe, adverbe, etc.
Enfin, un dernier point, qui a été introduit à tort dans Île
débat, c’est la richesse comparée des deux idiomes. On a lon-
guement soutenu la thèse que la langue populaire est très
riche, et cela à cause du grand nombre de ses mots, supérieur
dit-on, à celui de la langue française. Mais la richesse d’une
langue ne consiste pas seulement dans l'étendue de son voca-
bulaire ; il faut encore tenir compte de la facilité qu'offrent les
mots à un emploi figuré, de leur souplesse syntactique, de leur
aptitude à former des phrases toutes faites. D'ailleurs, richesse
pour richesse, notre langue écrite l'emporte infiniment sur la
langue parlée.
Dans un autre ordre d'idées, on a fait fausse route en com-
parant l'histoire du grec à celle d’autres langues qui se sont
(1) Psichari, Revue des Revues, 1902, p. 21.
(2) Gabelentz, Sprachwissenschaft, p. 62.
(3) Voyez mes Études glossologiques, p. 340 et 359.
914 GEORGES HATZIDAKIS
développées dans des conditions toutes différentes, et l’on ἃ
| tiré de cette comparaison des conclusions qui pèchent par la
base. Le grec moderne, a-t-on dit, est dans le même rapport
avec l’attique et la κοινή que l'italien avec le latin; de même
donc que les Italiens ont abandonné le latin pour créer une
langue écrite nouvelle qui s'en distingue sous tous les rap-
ports, ainsi, dit-on, les Grecs modernes devraient suivre cet
exemple au lieu de tâcher de rapprocher leur langue moderne
de l’ancienne, de s’attrister des différences qui les séparent,
d'espérer que peu à peu elles disparaîtront, de s'épuiser enfin à
ramener la phonétique, les formes, la syntaxe, le lexique, ἰὰ
phraséologie du grec moderne au type de Xénophon et d'Iso-
crate, procédé aussi absurde que si les Italiens d'aujourd'hui
voulaient ramener leur langue au latin de Cicéron. La compa-
raison ainsi exprimée semble irréfutable ; à l'examiner de près,
on verra combien elle renferme d’inexactitudes et d'exagéra-
tions.
C'en est une d’abord que de prétendre que les Grecs d'au-
jourd'hui s'efforcent de ramener le phonétisme de leur langue
au type de Xénophon et d'Isocrate. Dans la langue écrite
comme dans la langue parlée nous prononçons tous les sons à
la moderne. Les diphtongues ne sont plus des diphtongues ; nous
ne connaissons plus ni l'u — « ni ἡ, ὦ longs distincts de ε οἱ ὁ
brefs. De même que les français prononcent sireté et sécurité
avec z et non avec l’ou lalin, ainsi nous prononçons αἰ comme
ὁ aussi bien dans αἰτία, ἀπαιτῶ que dans (ἐ)παινῶ, ἐπαίτης. A la
vérité nous avons rétabli dans la langue écrite le ν final et quel-
ques combinaisons de consonnes perdues dans la langue parlée
telles que χθ, of, xt, xs, of, sy, v0, y, γλ, γξ, ud. Certains lin-
guistes s’en indignent. Ils oublient que tous ces groupes, pro-
noncés et entendus pendant des siècles à l'église et à l'école,
étaient parfaitement connus de tous les lettrés ; ils oublient
aussi que le français a pareillement emprunté au latin certains
mots dont il a conservé les sons intacts, quoique dans la
langue populaire ces mêmes groupes eussent subi des trans-
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 215
formations. — Un autre phénomène qui allriste les linguistes
intransigeants c'est la réintroduction dans la langue de formes
anciennes prononcées à la moderne, d'où sont résullés des
phonèmes inconnus aussi bien à la langue ancienne classique
qu’à la langue populaire ; exemple : βασιλεύς, βασιλεῦ, εὔμορφος,
πεπαιδευμένος, ἕνδεχα, ἄνδρες. Cette indignation ne prouve que
l'ignorance de l’histoire. Ces prononciations, on ne saurait en
douter, ont, en effet, toujours été en usago parmi les lettrés
depuis la période post-classique jusqu'à nos jours, et il en est
de même de πτέρνα, χθές, φθάνω, χτίστης, σχολεῖον, ἀσθενής, Αἰσ-
""ὖλος, τὸν ἄνθρωπον, ξανθός, ἔπεμψεν, τὸ καλόν, τὸ καχόν, etc. Une
tradition aussi longue confère à des formes pareilles des droits
historiques si sérieux qu’à celles de la langue purement popu-
laire car, comme le dit Gabelentz, « chez un peuple sachant
lire, la langue écrite est vraiment une seconde langue popu-
laire ». Aussi, l'emploi actuel de ces formes ne blesse ni notre
oreille ni nos organes phoniques, et il n'y a pas plus de néces-
sité de changer Αἰσχύλος en Αἰσχύλος que de prononcer en fran-
0815 auterer (pour altérer), tétament, estraordinaire.
Voilà pour la phonétique. Quant à la morphologie, il n'est
pas non plus exact de prétendre que nous calquons les formes
anciennes aussi servilement que les lettrés italiens du moyen
âge continuaient à employer celles du latin. Nous ne nous ser-
vons plus ni du parfait, ni du plus-que-parfait, ni de l'infinitif,
si ce n’est parfois avec l'article. Le futur monolectique ne sur-
vit que dans ἔσται, l’optatif dans μὴ γένοιτο, la troisième per-
sonne de l’impératif dans ἔστω et θεωγηθήτω. L'aoriste moyen
en -&unvest d’un emploi très rare ; de même le datif pluriel de
la troisième déclinaison (πατράσι, θυνατοάτ!) est ordinairement
remplacé par une périphrase formée d'une préposition avec
l'accusatif. La plupart des verbes en ut (οημί, εἶμι, ovivnut),
ctc., sont hors d'usage; quelques-uns seulement sont em-
ployés et cela sous une forme nouvelle (eux: εἶσαι, pour etui et;
ἀφίνω, ἀοίνεις pour faut, ets) ou ne subsistent qu'à la voix
moyenne (ἐχτίθευαι, ἐπιτίθεμαι, προτίθεμαι, srauat, ἐπίσταμαι, xoë-
216 GEORGES HATZIDAKIS
μαμαι, δύναμαι). Les Italiens du moyen âge, quand ils écrivaient
en latin, ne connaissaient pas de pareilles limitations; ils ne
connaissaient pas non plus des formes modernes comme celles
que nous avons substituées aux anciennes, quand nous écri-
vons θέλω ou ἔχω γράψει (ou γραφῇ), elle νὰ ἔλθῃ, etc.
Arrivons enfin au vocabulaire et ἃ la phraséologie. Ici encore,
il est évident que le rapport entre notre langue écrite et l'an-
cienne χοινή est bien différent de celui du latin savant du moyen
âge avec la langue de Cicéron. D'une part, nous créons con-
tinuellement des mots nouveaux (16 dictionnaire de Kouma-
noudis en renferme plus de 60,000) et nous employons quan-
tité de mots anciens dans une acception nouvelle. D'autre part,
nous avons entièrement rejeté les figures de grammaire de
l'ancienne langue, telles que l'attraction, la prolepse, la syn-
taxe attique, etc... En général, nous construisons notre phrase
plutôt sur le modèle des autres langues modernes qu'à l’imi-
tation de la langue ancienne. L'usage actuel, le sentiment
glossique nous guide au moins autant que le souvenir de
celle-ci.
Pour achever d'écarter cette comparaison, rappelons qu’au
moyen âge le latin n'était connu et compris que d’une mino-
rité; chez nous, au contraire, tout ce qui est écrit dans la
langue moderne — et Dieu sait combien nous avons de jour-
naux — est lu de tous ceux qui savent lire, tandis que les
publications écrites dans la langue dite populaire ne trouvent
point de lecteurs. Les journaux et périodiques rédigés dans cette
langue (Ἑστία, Πατριώτης, ἡ Τέχνη, etc.) n’ont eu qu'une exis-
tence éphémère. Qu'est-ce à dire sinon que la langue écrite est
à la fois plus claire et plus chère à la majorité de la nation que
cette langue vulgaire nouvellement fabriquée ?
Avec la comparaison que nous venons de réfuter doit tomber
la conclusion qu’on en tire d'ordinaire. Cette conclusion, on le
sait, c’est que notre langue écrite doit se détacher complète-
ment du grec ancien et se constituer avec autant d'indépen-
dance que l'italien, 16 français et les autres langues romanes.
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 217
Formuler cette prétention au nom de la linguistique, c’est
oublier la sage maxime « comparaison n’est pas raison ». De
même que la propagation d’une langue parlée dans un pays
peut être due à des faits historiques (conquêtes, émigrations,
etc...) tout à fait indépendants du mérite de cette langue,
ainsi de la formation et de la prédominance d'une langue écrite.
Si l'attique est devenu la langue commune du monde hellé-
nique, si le latin s’est répandu sur l'Italie, la péninsule ibé-
rique, la Gaule etc..., si le français du nord a conquis toute la
France, ces résultats sont dus non pas à quelque supériorité
proprement glossique, mais à des causes politiques et litté-
raires. L’historien d'une langue ne doit donc jamais perdre de
vue l'histoire générale du pays où elle s’est développée ; cette
histoire offre une physionomie très variée et conditionne dif-
féremment l’évolution de la langue. Négliger l’ensemble de ces
faits pour s’en tenir à une analogie superficielle, c'est commettre
une profonde erreur.
IT. — Développement historique de notre langue écrite.
Chez les nations romanes la langue latine n'était pas aussi
profondément enracinée ni aussi intimement liée avec tout
leur passé que le fut la langue grecque chez les Iellènes. Ces
peuples, conquis par des étrangers barbares, divisés en divers
états, ne tardèrent pas à tomber dans une profonde ignorance.
Longtemps les conquérants montrèrent le plus grand mépris
pour la littérature et la civilisation de leurs sujets romains.
La tradition de la civilisation ancienne fut interrompue, et
par voie de conséquence celle de la langue, qui en esl insé-
parable. Ajoutons que la languc latine est de sa nature extrè-
mement variable: elle ἃ subi depuis les temps anciens de nom-
breuses modifications; 6116 en subit de plus profondes encore
quand elle se propagea chez des peuples étrangers. La résul-
tante de toutes ces causes fut que l’ancienne déclinaison latine
218 GEORGES HATZIDAKIS
disparut en grande partie, que les mots et la syntaxe se trans.
formèrent et s’écartèrent de plus en plus du type classique,
Quand plus tard conquérants et sujets se fondirent ensemble et
recommencèrent à cultiver les lettres, le latin classique n'était
plus compris des peuples; aussi les savants, après avoir
essayé à plusieurs reprises de faire revivre cette langue éva-
nouie, se virent-ils enfin obligés d'adopter eux-mêmes le nou-
veau type de langue parlée en usage dans chaque pays. Chaque
nation développa d'ailleurs une variété nettement caractérisée
de ce nouveau latin. On y composa bientôt des œuvres litté-
raires remarquables et ainsi la nouvelle langue, soutenue par
la grande masse du peuple et par des chefs-d'œuvre de plus
en plus nombreux, prévalut définitivement sur le type ancien.
Les choses se sont passées tout autrement chez les Grecs. La
langue hellénique était vraiment nationale, profondément gra-
vée dans les âmes de ceux qui la parlaient depuis un temps
immémorial, inséparable de tout leur -passé. Les barbares
d'Égypte, de Syrie et de la Haute-Asie, qui depuis Alexandre
avaient plus ou moins appris le grec, le désapprirent depuis
la conquête musulmane; le grec ne fut plus parlé que par des
Grecs d'origine ou par des peuples depuis longtemps helléni-
sés, si l’on excepte l'intérieur de l'Asic-Mineure (Cappadoce,
etc.) où, précisément parce qu'il était parlé par des hellénisés
de fraîche date, le grec s'est beaucoup altéré.
1] est vrai que les Grecs ont été subjugués par les Romains,
mais la conquête ne les a ni divisés ni rendus barbares ; tout au
contraire, la nation, autrefois morcelée en un grand nombre de
royaumes et de républiques, se trouva réunie en un seul corps,
les conquérants peu à peu s'hellénisèrent, et de bonne heure le
grec devint la languc officielle dans la moitié orientale de l'em-
pire. Aussi l'étude de l'ancienne langue et de l’ancienne civili-
sation ne fut-elle jamais interrompue ; [ἃ tradition se mainlint
et ne cessa de rejeter comme un idiome vulgaire toute nouvelle
forme de la languc. |
Ce n’est pas tout. En raison même de leur décadence poli-
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 219
tique, les Grecs tournèrent avec admiration leur regard vers
leur passé glorieux. Impuissants à le faire revivre dans leurs
institutions, ils cherchèrent du moins à le ressusciter dans
l’art, et surtout dans l’art du discours. De là naquit l’atticisme ;
depuis Denys d'Halicarnasse, pendant une longue série de siè-
cles, on ne cessa d'admirer et d’imiter cette langue du passé
immortalisée par tant d'admirables monuments. La conserva-
tion de cette langue fut considérée comme un devoir national ;
l'antiquité devint la règle : toute innovation fut condamnée
comme erronée et vulgaire. Toutes les fois qu'un écrivain
semble violer cette règle devenue sacrée, il le fait soit par igno-
rance, soit parce que certaines choses ne lui paraissent pas sus-
ceptibles d’être exprimées en langage attique; de là tant de
termes nouveaux chez Malala, Théophane, Porphyrogénète,
Kékauménos, etc... Plusieurs d’entre eux s'en excusent (4);
d'autres, tels que Théodore et Hilarion Prodrome multiplient
les emprunts à la langue contemporaine dans le but de provo-
quer le rire.
N'oublions pas non plus que dans la littérature, comme dans
les sciences et dans les beaux arts, la Grèce romaine et byzan-
tine n’a pas produit un seul génie digne d’être comparé aux
anciens. Îl ne pouvait donc pas être question de mettre les
œuvres modernes en balance avec celles du passé, à plus forte
raison de leur accorder la préférence. L'ancienne langue con-
tinua dès lors à régner en souveraine, avec son orthographe,
‘sa syntaxe, sa morphologie et son lexique.
Α ces raisons historiques vient s'ajouter une raison pure-
ment glossique : c'est que la langue grecque a de tous temps
été naturellement conservatrice; aucune n’a gardé aussi fidè-
lement le système des voyelles, des diphtongues, des déclinai-
(1) Καλὸν yho ἐπὶ τούτοις κοινολεχτεῖν (Porphyrogénète). Ἐπιτιμήσει δὲ ἡμῖν οὐδὲ
εἷς τῶν καὶ μιχρὰ λογίζεσθαι δυναμένων ἐν τῷ παρόντι πονήματι ὀνόμασί τε καὶ ῥήμασι
τῶν ἐξ ἀγορᾶς καὶ τριόδου διειλτμμένων χεχρημένοις δρῶν ᾿ οὐ γὰρ ἄγνοια τῶν... βαρ-
βάροις ὄνομασι καὶ διεφθαρμένοις ἔστιν ὅπῃ κεχρήμεθα (Théophane Nomios, I, De la
Dièle). Cf. mon Einleilung, p. 112 et 283 ; ᾿Αθηνᾶ, VIII, 361.
920 | GEORGES HATZIDARIS
sons indo-européennes. Ce caractère conservateur s'est aflirmé.:
dans la langue grecque jusqu'à l'heure présente. La cause en
est dans 16 remarquable développement qu'ont pris chez nous
toutes les conditions propres à retarder l'évolution glossique :
grande et riche civilisation, séjour constant sur le même sol,
persistance des façons de vivre, liaison de la langue avec les
formes du culte, perfection inaccessible de la littérature clas-
sique. |
De tout cela il est résulté que la langue communément par-
lée aujourd'hui dans les villes diffère moins de la langue com-
mune de Polybe que cette dernière ne diffère de la langue
d'Homère. Notre grec a conservé quatre cas sur cinq du grec
alexandrin, les formes essentielles du verbe actif et passif,
presque tous les sons et les mots. Même les éléments linguis-
tiques, qui peu à peu tombaient en désuétude dans la langue
des ignorants, continuaient à leur rester compréhensibles,
parce qu'ils ne cessaient de les entendre employés à l'église,
à l'école et en général dans toute société lettrée. Il n'y avait
donc là qu'une désuétude relative, distinction trop souvent
méconnue.
Après la prise de Constantinople, d'abord par les Lalins,
ensuite par les Turcs, quand la plupart des savants grecs se
furent réfugiés en Italie, le peuple grec tomba dans la plus
profonde ignorance. L'empire absolu de l'ancienne χοινή com-
mença alors à s'ébranler, et, tandis que la langue parlée sc
développait tous les jours ct divergeait davantage de la langue
écrite, celle-ci devenait de moins en moins compréhensible au
grand nombre. Pourtant, mème dans ces circonstances, on
n'est pas arrivé à créer une nouvelle langue écrite. Les tenta-
tions n’ont pas manqué (par exemple de la part des despotes
ilaliens et français en Crète et à Chypre), mais elles ont
échoué : d’abord parce que les œuvres de ces novateurs (qui
d'ailleurs respectaient l'orthographe traditionnelle) étaient
écrites dans les idiomes crétois οἱ chypriote, nécessairement
obscurs aux lecteurs originaires des autres parties de la Grèce;
LA QUÉSTION ὉΒΊ LA LANGUE EN GRÈCE 291
ensuite et surtout parce que ces œuvres ne sc distinguaient ni
par le nombre, ni par la valeur, ni par le caractère national.
Par surcroît ces îles furent occupées et dévastées par les Turcs,
qui mirent en fuite les Muses timides. Ainsi, même après la
prise de Constantinople, la nation grecque resta sans autre
langue nationale reconnue que l'ancienne χοινή; d'où une
grande anarchie, les uns employant et préconisant la langue
ancienne, les autres quelque dialecte local, d'autres enfin un
mélange des deux systèmes.
Cependant l’asservissement général de la nation grecque par
les Turcs fortifiait le sentiment de son unité. De plus en
plus on éprouvait le besoin d’une langue commune à toute la
nation, à la fois compréhensible aux ignorants ct tolérable aux
lettrés. Comment réaliser cette unité linguistique ? Aucun dia-
lecte local n'avait produit de chef-d'œuvre qui s'imposât et
l'imposât, comme ce fut le cas du toscan en Italie; d'autre part,
il n'existait pas de langue vulgaire comprise et parlée partout.
Le fait a été nié; Solomos, par exemple, prétend avoir eu des
domestiques provenant de Mani, de l’Élide, du mont Olympe,
de Chio et de Philippopoli avec lesquels il s’entendait facile-
ment; de même, il comprenait sans peine tout ce que lui
disait des gens originaires de Missolonghi et de Constantinople.
L'argument ne vaut rien, car, parmi ses interloculeurs, les
uns avaient voyagé en pays divers, les autres avaient reçu une
certaine instruclion, et, par conséquent, plus ou moins renoncé
aux expressions de terroir. J'ai moi-même plus d’une fois
remarqué le fait contraire, et chacun peut faire la même obser-
vation (1). C'est donc par nécessité que l'on a suivi la voie
imposée par l'histoire de la nation et par celle de la langue.
Dès le commencement du moyen âge, à côté de la langue
écrite atticisante, on faisait souvent usage d'une langue plus
simple, débarrassée autant que possible des termes trop
anciens, et se rapprochant du langage des masses; c'est la
(1) Cf. mes Éludes glossologiques, p. 282.
299 GEORGES HATZIDAKIS
langue que parlent les papyrus, les lettres de l'empereur Héra-
clius, la Chronique Pascale, Malala, Théophane, le Porphyro-
génète, Kékauménos, divers recueils de Vies de Saints, Pacôme
de Ronsano, elc. IL y avait donc là une tradition déjà ancienne
que l'on s'est contenté de suivre. On a pris pour base de la langue
commune celle qui, de tout temps, avait été en usage à l'église et
à l'école, avec son orthographe, ses formes grammaticales, sa
richesse lexicographique ; d'autre part, cédant aux exigences des
temps, on a éliminé de ce langage certains éléments devenus
étrangers aux masses ignorantes, et on les a remplacés par des
formes de la langue parlée communes à tous les dialectes, ou du
moins au plus grand nombre. Ainsi s'introduisirent dans la
langue écrite les νά, θά, εἶναι, etc, et se constitua un langage
mixte dans lequel furent composés jusqu'au milieu du xvui° siè-
cle plusieurs livres intelligibles à tout le monde tels que Damas-
chinos, ᾿Αμαρτωλῶν Σωτηρία, et d'autres. C'est cette langue
qu'écrivait Righas, de Phères, ce martyr national que personne
n'osera qualifier de pédant.
Les choses en étaient là lorsque, d’une part, apparut Coraiïs,
et que, d'autre part, éclata la révolution grecque. Coraïs était
un vrai savant, nullement pédant, qui a beaucoup écrit contre
le mauvais enseignement de la grammaire. Voulant s'adresser
à tout le monde, il ne pouvait employer ni la langue ancienne,
incompréhensible au plus grand nombre, ni un dialecte quel-
conque, puisque aucun n'était capable d'exprimer ce qu'il vou-
lait dire à la nation; il garda un juste milieu et écrivit une
langue claire pour tous et qui fut généralement acceptée. Les
chefs de la nation, guerriers aussi bien que savants, suivirent
son exemple. C’est dans cette nouvelle langue littéraire, dite
aussi épurée (χαθαρεύουσα) parce qu’elle évite les mots étrangers
et les idiomes, que furent rédigés à cette époque les journaux,
les lettres, les chartes, les lois, tous les actes officiels de la révo-
lution.
Dès ce jour, il fut déclaré que ce serait un malheur national
si l'on voulait ressusciter chez nous la langue ancienne; dès ce
LA QUESTION ὈΒ LA LANGUE EN GRÈCE 223
jour les Grecs montrèrent par des faits que la langue de Xéno-
phon et de Platon était étrangère à leurs besoins et à leurs habi-
tudes d'esprit. C’est donc à tort qu'on a prétendu dernièrement
que « la Grèce moderne s'éveille cruellement au fait que, pour
elle aussi, comme pour le reste du monde, la langue grecque
ancienne est une langue morte », et il n'est pas moins inexact
de prétendre que, « il y a une vingtaine d'années, l’atticisme
régnait en maître à Athènes : on ne se servait que de l’attique
le plus pur » (1). D'une part, il est faux que la langue grecque
ancienne soit aussi complètement morte pour les Grecs d'au-
jourd'hui que pour les autres hommes. L'identité fondamentale,
qui existe sur tant de points entre la langue classique et la
nôtre, nous met à même d'apprendre, de sentir et de com-
prendre la langue ancienne plus facilement qu'aucun autre
peuple ; d'autre part, cette prétendue domination du pur attique
dans notre langue écrite est une fable : pas un journal, presque
aucun livre n’a fait usage de cette langue. Je ne me rappelle
guère en ce moment que les Φιλολογικὰ Πάρεργα de Philippos
Ioannou, les commentaires de Vassiadis sur Démosthène, ma
lettre à Théodore Reinach, certaines dissertations de Pantazi,
et quelques autres livres d’érudition, qui correspondent à ceux
que les savants français ou allemands écrivent en latin.
La preuve que cette nouvelle langue écrite n’est pas, comme
on l'a prétendu, la création de quelques maîtres d'école pédants,
mais au contraire la résultante d'une longue tradition histo-
rique, c'est qu’elle n’admet, comme la langue simplifiée du
moyen âge, que des éléments de l’ancienne χοινὴ à l'exclusion
de tous éléments épiques ou dielectaux, éléments qui abondent
au contraire dans une languc fabriquée, comme celle d'Hermo-
niaque. Ajoutons que c’est en pleine connaissance de cause que
Coraïs et ses amis ont constitué cetle langue moyenne, à un
moment où la langue ancienne οἱ les idiomes populaires
avaient, les uns et les autres, leurs partisans chaleureux. C'est
la force de l’histoire qui a guidé et soutenu leur choix.
(1j Psichari, Revue des Revues, janvicr 1902, p. 22.
224 GEORGES HATZIDARIS
Comme la langue littéraire traditionnelle forma le noyau de
la nouvelle langue écrite, on fut naturellement amené à ortho-
graphier et à décliner, suivant les règles de cette langue, les
éléments empruntés à la langue parlée; on écrivit donc et l'on
prononça θεωρῶ, χλέπτω, ὁμιλῶ, πταίω, ἡ νύξ, etc. À plus forte
raison a-t-on conservé la forme antique des mots que l'on em-
pruntait au grec classique ; agir autrement serait les rendre
méconnaissables. Tel n'est pas l'avis de quelques-uns qui, par
exemple, écrivent περικεφαλιὰ au lieu de περικεφαλαία, et qui
nous rappellent doctement que, lorsque des français ou des ila-
liens empruntent des mots au lalin, ils laissent de côté les
formes de la déclinaison. Parler ainsi, c'est méconnaïtre les
différences profondes, rappelées plus haut, qui existent entre
l'histoire de notre langue et de notre civilisation et celles des
nations romanes. Transformer de quelque façon que ce soit les
mots cmpruntés à la langue ancienne, ce serait élever, à notre
grand détriment, une muraille de Chine centre la littérature
ancienne et nous: ce serait aussi créer mille difficultés aux
jeunes gens qui, dans nos écoles, étudient la langue ancienne.
On peut s'en rendre compte par ce fait que souvent des
élèves, en écrivant le grec ancien, remplacent l'infinitif εἶναι
par la forme εἶνε, orthographe fautive du moderne εἶναι (— ἐστί).
ΤΙ fallait donc ou renoncer à puiser dans le trésor de la langue
ancienne, ou conserver intacle la forme de ces emprunts.
Ajoutons qu’en conservant à ces mots anciens leur orthographe
historique, il devient facile de les reconnaître el de les cher-
cher dans les dictionnaires du grec ancien; il en serait tout
autrement s'ils revêtaient la forme vulgaire. On trouve ἡ πόλις,
ἡ δρῦς, τὸ δάχρυον, etc., on ne trouve pas à πόλη, ὁ δρῆς, τὸ δάχρι,
ἀδγή, ἀφτός, etc. |
Avec ce dernier système, il aurait fallu composer tout
d’abord des dictionnaires ad hoc où seraient inscrits sous leur
habit nouveau tous les mots de la langue ancienne introduits
dans Ju nouvelle; et comme il est impossible de connaître
d'avance tous les emprunts qu'exigeront les besoins de tous les
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 225
moments, c'est le trésor entier de la langue ancienne qu'il
serait nécessaire de transcrire et de déformer. Bien entendu,
ceux qui ne reçoivent que l'instruction primaire se contente-
raient d'apprendre une seule déclinaison et une seule ortho-
graphe — la moderne ; tandis qne les élèves des écoles secon-
daires auraient à en apprendre deux; voit-on d'ici la confusion
et les difficultés de tout ordre qui résulteraient de ce système ?
Au surplus, la tradition séculaire de l'Église ct des milliers
de lettrés ne se serait jamais résignée à un changement aussi
radical. Ne voit-on pas qu’en Angleterre même, où les nova-
teurs n'ont à lutter ni contre une tradition aussi longue, ni
contre une supériorité aussi écrasante du passé, toutes les ten-
tatives, si nécessaires, dit-on, de réformer l'orthographe ont
misérablement échoué? On peut augurer par là du sort qui
attend toule tentative similaire chez nous. C'est le culte d’un
immense passé qui nous a fait sortir de la tombe; c’est lui qui
continue à régler notre vie ; s'il arrivait qu'un jour nous aban-
donnions notre langue écrite actuelle pour adopter je ne sais
quel dialecte populaire, la force même des choses, j'en suis
persuadé, ne tarderait pas à nous ramener à une forme de
langue plus ou moins pareille à celle d'aujourd'hui.
Cette langue, en effet, constituée d’une manière uniforme (4),
s’est entrelacée à toute notre vie intellectuelle : elle est devenue
l'organe du gouvernement, de la juslice, de l’armée, des écoles,
des livres, des journaux, bref l’agent de la civilisation et de
l'éducation nationales. Elle est le lien de cohésion entre tous
les Grecs qui savent lire, depuis Chypre et Trébizonde jusqu'à
Philippopoli et Corfou. Sa prépondérunce a rabaissé les dia-
lectes locaux au rôle d'un langage de paysans et d’ignorants ;
quiconque s’en écarte démesurément en reçoit un brevet de
vulgarité. C’est ainsi déjà que les Atticistes (Phrynichus, Pol-
lux, etc.) et même Théocrite dans ses Adoniazusae jugeaient
les vulgaristes de leur temps.
ον (4) « Les mots pris un à un ont une couleur ancienne, c'est-à-dire qu'ils ont
conservé l’ancienne orthographe ». Psichari, Revue des Revues, 1902, p. 23.
220) GEORGES HATZIDAKIS
À la tendance des vulgaristes s’est opposée de honne heure
celle des archaïsants. Elle cest née de l'enthousiasme que la
guerre de l'Indépendance et le réveil des études classiques ont
suscité pour notre passé; elle est née aussi du sentiment
durable de la beauté et de la justesse de la langue ancienne
comparée avec l'insuffisance de la langue moderne, qui n'avait
pas encore fait ses preuves. Les archaïsants, si imprégnés d'at-
ticisme qu'ils fussent, n'ont d’ailleurs jamais prétendu nous
ramener au pur idiome de Xénophon et d’Isocrate ; mais ils se
sont efforcés d'enrichir ou, comme on disait, d'épurer la
langue moderne par l'introduction de plus en plus abondante
de mots, de formes, de tournures syntactiques empruntés à la
langue ancienne.
M. Contos lui-même, qui est considéré comme le chef de cette
école, n’a jamais écrit en attique ni même dans l’ancienne
χοινή: il a continué à faire usage des vx, a, εἶναι, etc., et à
exclure les infinitifs, les futurs monolectiques, les optatifs, les
parfaits. Il en est de même des autres lettrés : ŒEconomos,
Doucas, Soutzos, Aospios, Chrysoverghis, D. Bernardakis,
Livadas, Therianos. Em. Rhoïdis, etc... Les contestations
entre eux portent sur le plus ou moins d'éléments anciens quil
convient d'incorporer à la langue moderne ; aucun d'eux n'a
réclamé le rétablissement pur et simple de l'ancien grec, ou
inversement l'adoption comme langue écrite de quelque dia-
lecte. Rhoïdis lui-même, qui a composé en langue épurée tout
un livre contre les puristes, n'a jamais demandé en somme que
l« épuration », ou si l’on veut la modération, de la langue
épurée.
Il faut reconnaître que dans tout ce travail régnaient pas-
sablement d'idées bizarres; on jugeait de la justesse de notre
langue moderne d’après celle de la langue ancienne : le passé
servait d'étalon au présent ; tantôt on faisait appel aux monu-
ments écrits, tantôt à l'usage parlé. Pour comprendre et excu-
ser ces incohérences, il faut se rappeler qu'il n'existait aucune
langue populaire parlée partout et différente de la langue écrite
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 227
traditionnelle. Nos savants n'avaient aucun sentiment de la
langue vulgaire : toute leur éducation s'était faite dans la langue
mixte ; en fait de grammaire, ils ne connaissaient que celle de
la langue ancienne; la langue vulgaire ne leur paraissait pas
même susceptible d’un examen grammalical et d'une régle-
mentation. Ainsi s'explique la prépondérance qu'ils ont accor-
dée forcément aux règles anciennes dans la constitution de
notre langue écrite. S'ils n'avaient pas procédé ainsi, on n’au-
rait jamais obtenu l'unification de la langue; nous aurions
été condamnés au flottement perpétuel de l’'hérésie. Ajoutons
que les excès d’archaïsme commis par quelques-uns des parti-
sans de Coraïs n'ont été qu'un phénomène passager. Les géné-
rations formées depuis quelques dizaines d'années possèdent
actuellement le sentiment vivant de la langue écrite, devenue
leur langue naturelle et pour ainsi dire maternelle; en re-
vanche, la langue populaire leur est devenue complètement
étrangère. Je puis apprécier ce changement dans ma propre
famille. Dans mon enfance, j'ai appris d'abord les mots popu-
laires où étrangers, et c’est par ceux-ci qu'on m'expliquait les
mots de la langue écrite. Aujourd'hui, au contraire, les enfants
de mon frère Jean me demandent constamment la signification
de mots étrangers ou populaires prononcés par des ignorants
et je dois les leur expliquer par les mots correspondants de la
langue écrite. En d'autres termes, la langue épurée, à force
d'être écrite et enrichie, a pris une forme déterminée, des habi-
tudes régulières et stables, appuyées sur des monuments écrits,
qui excluent le trouble et la confusion des débuts. IL s'est formé
un bon usage et un sentiment glossique.
C'est faute d'ignorer ce changement que les personnes qui
vivent depuis longtemps loin de la Grèce adressent à la « langue
de la société » des reproches imaginaires. Nous l'apprenons,
prétendent-elles, des livres et des maîtres d'école; personne ne
l'entend parler par sa mère ou par sa nourrice, personne ne
s'en sert ni dans ses discussions, ni dans ses achats et ventes,
ti lorsqu'il exprime soù aïhour; ni enfin lorsqu'il pense, Si le
228 _ GEORGES HATZIDAKIS
but de toute langue est d'exprimer :ou de susciter des senti-
ments, notre langue littéraire, dit-on, est presque aussi inutile
que les hiéroglyphes. — Ce: réquisitoire pèche par la base :
sans doute, les jeunes gens qui arrivent de leur village, ou
du fond d’une province, ont besoin d'apprendre cette langue
de société soit à l’école, soit par la conversation; mais les
enfants nés dans les villes l'apprennent tout naturellement
de leur mère ou de leur nourrice; c’est dans cette langue qu'ils
expriment leur colère, leur: joie, leur amour ; c'est dans cette
langue qu'ils pensent et qu’ils rêvent, et non dans un jargon
expédié de France ou d'Angleterre. À qui fera-t-on croire qu’une
langue employée à La Chambre par les orateurs, aux tribunaux
par les avocats, aux écoles par les maîtres, et, d'une façon un
peu plus relâchée, par tous les gèns du monde dans les salons,
à qui fera-t-on croire que cette langue est privée de toute force
et de toute vertu, qu’elle ne peut ni exprimer, ni soulever des
passions, qu'elle est incapable de familiarités ou de plaisante-
ries, — bref, qu’elle cest aussi morte que des hiéroglyphes? Si
nous parlions une pareille langue, nous serions donc un peuple
de trappistes! |
« On est venu, nous dit-on, à l’adoption d'une langue mixte
où 1l y a de tout; du classique, du moderne, du byzantin, des
gallicismes, des anglicismes, et où domine un certain grec
macaronique qui date du moyen âge. Cela est proprement
hideux (4). »)
Voyons quelle est la portée véritable de ces reproches. On
nous fait un crime d'emprunter des mots à la langue attique,
à la κοινή, au byzantin, au dialecte moderne. Mais si nous nous
én tenions au vocabulaire classique, comme faisaient quelques
ultras d'autrefois, c'est pour le coup qu’on nous traiterait de
pédants ! Si, au contraire, nous voulions nous borner au grec
populaire, comme son lexique est notoirement insuffisant, nous
serions obligés de prendre tout ce qui lui manque à des langues
(1) Psichari, Revue des Revues, loc. cil., p. 22-23,
" "1
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 229
modernes étrangères; alors, notre langue perdrait toute homo-
généité. Pour ma part, je ne vois que des avantages à prendre
notre bien où nous le trouvons, dans le grec de toutes les
périodes, à l'exclusion toutefois des mots poétiques ou dialec-
taux. C’est ainsi que le grec vulgaire nous donne ἐγγίζω, διαιω-
νίζω, ἀσμενίζω, φορτικότης, le byzantin δικηγόρος (bien préférable
au stérile ἀδοχᾶτος), d'où nous formons δικηγορῶ, δικηγοοικός,
δικηγορεία; etc. L'abondance d'éléments verbaux que nous trou-
vons dans toutes les périodes de l’histoire de notre langue
nous a permis de constituer en très peu de temps, sans recourir
à des langues élrangères, un vocabulaire à la fois très riche et
très flexible, suffisant à tous nos besoins, et qui trouve dans une
homogénéité relative l'élégance et la clarté. Les composés
nouveaux eux-mêmes, que nous avons été amenés à former,
puisent leurs éléments aux mêmes sources et ne déparent pas
l'unité de l'ensemble.
D'autre part, de quel droit nous reproche-t-on d’avoir façonné
notre discours sur le modèle du français, de l'allemand et de
l'italien? ou encore d’avoir, dans beaucoup de mots anciens,
substitué à la signification primitive un sens nouveau que ces
mots avaient pris dans une autre langue européenne? Ce sont
là des faits qui ne sont pas propres au grec seul, mais com-
muns à presque toutes les langues modernes ; il faut y voir un
résul{at nécessaire de l’histoire et des communications interna-
tionales. Les Romains ont imité les Grecs, les Allemands [68
Français, et ainsi de suite, aussi bien dans la construction du
discours que dans la sémantique. Nous aurions adopté pour
langue littéraire la pure langue populaire, que des phénomènes
analogues se seraient produits.
On reproche encore à notre langue écrite d'avoir été cause
de notre stérilité littéraire pendant les siècles: passés, et l'on
s'imagine que son remplacement par la langue vulgaire serait
le signal d’une floraison nouvelle décrits classiques. Je crains
qu’il n'y ait là de grandes illusions : ce sont les malheurs poli-
tiques de la Grèce, et non pas la forme de sa langué écrite, qui
230 GEORGES HATZIDAKIS
expliquent que pendant tant de siècles nous n'ayons pas pro-
duit de chef-d'œuvre, non seulement en littérature, mais dans
tous les arts en général. L’idiome populaire a été écrit à Chypre
et en Crète pendant des siècles : en est-il résulté une seule
œuvre vraiment nationale ? Les vulgaristes depuis le xvin° siè-
cle, et ceux de ces dernières années, en ont-ils davantage à
leur actif?
On nous accuse enfin de confondre la question de la langue
écrite avec celle de notre descendance des Grecs anciens, ct
aussi avec celle de la prononciation véritable du grec classique.
Sur ces questions, dit-on, nous nous laissons hypnotiser par
notre vanité nationale. Je répudie complètement, au moins en
ce qui me concerne, cette double accusation. Il y a vingt-deux
ans déjà, j'ai séparé publiquement la question de la langue et
la question d'origine (4). De même j'ai soutenu énergiquement
contre M. Papadimitracopoulos et ses partisans que la pronon-
ciation de la langue grecque a subi de profondes transfor-
mations (2). Je ne sache pas d’ailleurs, en fait, que personne
chez nous ait Jamais solidarisé cette question avec celle de la
langue.
Tout ce que je viens de dire ne s'applique guère qu'à l'his-
toire de la prose ; quant à la poésie, il faut distinguer. La poésie
Iyrique ἃ trouvé, de bonne heure, dans le trésor des chansons
populaires un modèle excellent, véritablement national, qui a
cruellement manqué à la prose; aussi voyons-nous Athanase
Christopoulos recommander l'emploi de la langue populaire
dans la poésie lyrique, et après quelqués vains efforts pour
introduire dans ce genre la langue épurée, nous voyons, à par-
tir du milieu du xix° siècle, dominer dans notre lyrisme, soit le
pur langage des chansons populaires, soit un mélange très
libre de celui-ci avec la langue écrite (Terzétis, Zalocosta, Valuo-
ritis, les frères Paraschos, ctc....) Malheureusement la poésie
populaire nc fournissait de modèle ni pour le drame, ni pour
(1) ᾿Αθήναιον, tome X, p. 1 suiv.
(8) ᾿Αναδὴμεικὰ ’Avayvuouata, ἴ, 284 suivi;
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 231
l'épopée, ni pour l’épigramme (1). Ceux donc qui ont cultivé
ces genres ont presque tous cu recours à la langue écrite.
Quant aux contes et aux romans, ceux qui s'y sont essayés
avec le plus de succès se sont scrvis d’une variélé relâchée de
la langue écrite, fortement imprégnée d'éléments populaires
(Skylitzis, Vikélas, Drosinis, Kampouroglou, Damvergis, οἷο....),
et c’est cette langue des nouvellistes, moins épurée que celle
des historiens, qui est devenue peu à peu la vraie langue de la
société, l'organe de la conversation, l'idiome national que tous
les Grecs parlent ou comprennent.
ΠΙ. — Une tentative de révolution dans la langue écrite.
Nous avons vu que par la force des choses, et malgré les
exagérations des puristes, la langue écrite, depuis cinquante ans,
s’achemine graduellement vers une observance plus lâche des
règles anciennes et un emploi plus large des mots de la langue
parlée; le conflit violent des premières années du xix° siècle
s'apaisait peu à peu et aboutissait à une transaction ration-
nelle. C'est alors qu’il nous est venu de Paris un cri de guerre,
une sommation faite au nom de la linguistique, de reprendre
la lutte, ou pour mieux dire de jeter à la mer notre langue
nationale, celle où, depuis bientôt un siècle, nous rédigcons
nos lois, nos contrats, nos journaux, nos livres, nos actes pri-
vés et publics, celle que parlent les députés à la Chambre, les
avocats au tribunal, les instituteurs à l’école. Α sa place on
nous. convie à adopter une autre langue, soi-disant parlée,
constituée, dit-on, selon les règles de l’art. On fait litière de
l'histoire et de la tradition, on nous intime l'ordre de créer un
langage écrit, comme si nous étions des barbares frais éclos
sur la scène du monde, et qui n'en avaient jamais eu.
A la vérité cette langue nouvelle qu'on veut nous imposer,
(1) On voit ce qu'il y a d’erroné dans la formule de M. Leaf : Most people think
that if a language is good enough for poetry, il is good enough for anything, even
fer hislory, science or scholarship, etc:
232 GEORGES HATZIDAKIS
ses créateurs la présentent non comme une innovation, mais
simplement comme la reconnaissance officielle de la véritable
languc nationale : « Le dialecte psicharien, l’hérésie psicha-
rienne, a-t-on écrit, consiste tout bonnement à dire et à écrire
ψωμί, κρασί, νερό comme tout le monde (1) ». Cette prétention
a été vivement contredite par l'immense majorité des criti-
ques : « La langue de Psichari, écrit l'Éphéméris de Coro-
mila (2), n'est point la langue populaire des Grecs modernes,
et s’il l'enseigne comme telle à ses élèves français, il égare des
hommes qui n'ont aucune connarssance des faits ». Et de
même (3) : « M. Psichari, dans son petit livre, a mêlé le patois
de Constantinople avec celui de Chio ». Pareillement le
Ronmiios (n° 205) :
δὲν μπορῶ, παρὸλ vrovéo, τὴν γλῶσσά σας νὰ νοιώσω,
χι᾿ αὐτὰ θὰ πάθωμεν κι᾽ ἐμεῖς οἱ Ἕλληνες ἀπτοί,
ἂν ἕνας λογιώτατος purowvn χάθε τόσο
μὲ ἰδικό του λεξικὸ καὶ γλῶσσα Ὑωριστή
μὲ ἰδ' . χωριστή...
-ν CA 4 ?
καὶ va πετᾷ ᾽ς τὴ μέση σας ὁ χύριος Ψυχάρης
μιὰ γλῶσσα ποῦ τὴν ἐννοοῦν μονάχα᾽ στὸ Παρίσι
καὶ ἂν δὲν θέλετε καὶ σεῖς va ξεχασθῆτε,
va μάθετε τὴν γλῶσσά σας εἰς ἕνα παπαγάλο
καὶ ἴσως κατορθώσετε νὰ συνεννοηθῆτε.
Et dans son n° 216, s'adressant au prince héritier de Grèce :
xal μάθε τὴν ὀγρήγορα μαζί σου va μιλῇ...
τὴν γλῶσσα τὴν Ἑλληνική, καὶ ὄχι τοῦ Ψυχάρη.,
Rappelons encore M. Gennadios écrivant dans le Times du
10 janvier 1902 que cette langue est « a jumble of every and
any local idiom, leavened mainly with the Perote Greek in use
(4) Manchester Guardian, 4 février 1902.
(2) N°252 de 1888.
(3) N° 61 de 1889.
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 233
among Levantine Franks, and moulded into an amorphous and
congruous whole ἐν some new glosso-logo-mathematical pro-
(6585. » ,
. Le journal Astrapi du 1° janvier 1902 qualifie cetle langue
de ἀλαμπουρνέζικη (eharabia). Le saint synode de Constanti-
nople la proclame un idiome « abortif et monstrueux :», et
déclare que « de l’aveu de tout chrélien sensé c’est un crime
impardonnable, une action abominable et horrible que de tra-
duire la Sainte Écriture dans cet idiome ». A la Chambre des
Députés d'Athènes, les représentants les plus éminents Étienne
Dragoumis, Lconidas Deligeorgis, Constantin Papamichalo-
poulos, Théodore Delyannis, Théodore Philaétis, dont pas un
n'est un philologue de profession, ont tenu un langage ana-
logue. M. Papamichalopoulos en particulier, dans la séance
du 29 janvier 4902, a insisté sur l'intensité du soulèvement
national qui s'était produit en noverabre 4901 contre la tenta-
tive de vulgariser la langue de l'Évangile. Ce mouvement d’in-
dignation et d'appréhension, a-t-il dit en substance, a retenti
jusqu'au fond de l'Asie Mineure partout où l'on parle et où l'on
aime l'immortelle langue grecque, et l'orateur flétrit, aux
applaudissements de ses collègues, la tentative de « deux ou
trois douzaines d’hérétiques, qui veulent imposer comme
langue nationale à sept millions d'Hellènes un jargon, dans
lcquel ils n'arrivent même pas à se faire comprendre les uns
les autres ». Enfin, dans la séance du 11 février 1902, le
ministre de l'instruction publique, M. Momferratos, a formel-
lement déclaré, à propos du texte d’un projet de loi, que la
langue hellénique était une, et que par là il fallait entendre la
langue épurée, et non la langue vulgaire.
À côté de ces démonstrations en quelque sorte officielles il
ne manque pas d'arguments de fait pour établir que cette
prétendue langue nationale n’est qu’une fabrication person-
nelle de quelques individualités. Si peu nombreux qu'ils soient,
les adeptes de la secte ne s'accordent pas entre eux; chacun
prétend que lui seul a le secret de la vraie langue populaire, ce
234 GEORGES HATZIDAKIS
qui ne l'empêche pas d'en changer la forme tous les ans. Le
chef de l'école n’a pas craint de déclarer que nos femmes ne
parlent pas bien la langue, mais emploient un idiome incon-
grûment mêlé d'éléments anciens et modernes. Il s'est mis
ainsi en opposition avec le sentiment unanime des peuples, qui
a toujours vu dans la langue parlée dans les salons par les
dames le type par excellence de la langue nationale.
Les criliques dirigées par les nouveaux vulgaristes contre la
Jangue écrite actuelle ne sont pas autre chose que la répétition
pure et simple des arguments formulés avant la révolution par
Katardji, Philippidis, Vilaras, Solomos et autres ; mais, tandis
que ces polémistes combattaient non sans raison l'usage intran-
sigeant de la languc ancienne, on applique mal à propos leurs
critiques à l'emploi de la langue mirte, qui est devenue notre
idiome national. Solomos, grand poète, mais médiocre connais-
seur de l'histoire de Ia langue grecque, s'exprimait avec une
singulière violence, méconnaissant les services des hommes
éminents que l’histoire a proclamés les maîtres de notre nation;
il écrit : « Si quelques pédants croassent, ou si quelques Turcs
aboient — car pour moi les deux se valent » ; et encore : « Je
combats les savantissines qui se sont donné pour tâche d'aveu-
gler la nation ». Nos sophistes d'aujourd'hui ne font que répé-
ter ces vieilles injures quand ils écrivent; « ποιοὺς πολεμοῦμε ;
τοὺς Toupxous καὶ τοὺς δασχάλους... ἡ διγλωσσία φθείρει τὸν ἐθνιχὸν
χαραχτῆρα...»
Les arguments n'ont pas manqué contre cette révolte soule-
vée au nom de la linguistique; nous allons en rappeler
quelques-uns :
1° La vieille prévention, en faveur de la beauté, de la jus-
tesse et de la noblesse des formes anciennes, 16 sentiment d'in-
suffisance et de vulgarité qui s'attache aux formes modernes
ou étrangères, sont toujours fortement enracinés dans l'âme de
la nation entière ; l'usage des mots purement grecs caracté-
rise l'homme bien élevé, celui des formes vulgaires provoque
le dégoût et la répugnance. Nos réformateurs n'ont tenu aucun
LA QUESTION ὈΒ LA LANGUE EN GRÈCE 235
compte de ces sentiments. Dans leurs écrits, ils admettent sans
hésitation comme sans nécessité une foule de mots turcs, ita-
liens, français, slaves, etc. ; et les mots grecs eux-mêmes, ils
les déforment, en vertu de lois morphologiques et phonétiques,
qu'ils ont souvent imaginées.
De là, une impression esthétique désastreuse dont ils sont
seuls à ne pas s’apercevoir, sans doute parce que, vivant à
l'étranger, ils n’ont pas suivi l’évolution glossique qui s’est
élaborée chez nous depuis trente ans. Seuls, les gamins des
rues et des gens de la dernière grossièreté pourraient employer,
même en parlant, des mots et des phrases comme ceux-ei : κατα-
λαδίγκος, ἐπῆρεν ὁ διάδολος τὸν Χριστόν (formé sur le juron νά πάρῃ
ὁ διάδολος), etc. On a loué M. Pallis d’avoir, dans sa traduction
de l'Évangile, pour rendre le terme d’énesse, créé une forme
nouvelle sur le modèle des formes populaires. Mais cette forme
nouvelle, ὄνισσα, est aussi mal imaginée que possible. Dans la
langue populaire, le féminin des noms d'animaux, se forme,
en ajoutant au radical, soit la terminaison α (σχύλλα, xouve).ha,
γαϊδάοα) soit ἵνα (Baplaxiva, λαφῖνα, vepaxive, xxboupiva, crétois
xaboïva, λαγῖνα, crétois λαγουδῖνα, πουλλῖνα, προδατῖνα) ; jamais
on n’emploie le suffixe ἰσσὰ qui ne sert à former que des termes
de gentillesse, de nationalité ou de dignité (6asiktoou, πριγχί-
πίσσα, μαστόρισσα, γειτόνισσα, Μοραΐτισσα, etc.). Le terme ὄνισσα
témoigne donc, aussi bien chez celui qui l’a forgé que chez
ceux qui le prônent, de l’absence d’unc véritable connaissance
scientifique du grec.
2° M. Psichari assure n'avoir pas écrit un mot ni une seule
forme grammaticale qu'il n’ait examinés préalablement pen-
dant des heures, ou même des années. N'est-ce pas là condam-
ner lui-même l’idiome qu’il a fabriqué? Une langue écrite, des-
tinée réellement à servir aux besoins de la nation, ne doit pas,
au moment du travail, exiger beaucoup d’études et de médita-
tions ; elle doit couler de source et, pour ainsi dire, inconscie m-
ment : là-dessus l'avis des véritables linguistes est unanime (1).
(1) Gabelenz, Sprachwissenschaft, p. 63; Principien, p. 382.
236 ᾿ GEORGES HATZIDAKIS
8 C’est notre long et brillant passé qui nous a réveillés du
sommeil de l'esclavage; nous fixons les yeux sur lui comme
sur notre étoile polaire; c'est dans sa langue que nous trou-
vons notre unité nationale. Nous avons fait ainsi de tout temps;
pourquoi donc donner aujourd’hui à notre langue écrite une
direction et une forme qui nous éloigneraient plus qu'il n'est
strictement nécessaire de la littérature ancienne, source de {ant
d'instruction pour nous? L'histoire nous apprend que l'oubli de
notre unité nationale, ethnique ou religieuse, a toujours coîïn-
cidé chez nous avec l'emploi des idiomes vulgaires. Pendant la
dominalion franque, chaque district employait son dialecte
particulier; les Grecs qui avaient embrassé le catholicisme fai-
saient de même, abusaient des termes étrangers, et impri-
maient souvent leurs livres en caractères latins; de même ceux
qui passaient à l’islamisme s’efforçaient de rejeter ou de déna-
turer la langue grecque. |
ἀο Comme l'a fait observer Denys d'Halicarnasse, dans l'ex-
pression vulgaire « il n’y a ni clarté ni distinction ». Les mots
de notre langue écrite, d'un usage commun depuis longtemps,
sont comme des monnaies d'un cours très répandu, connues οἱ
acceptées de tous; au contraire, les termes forgés ou cxhumés
“par nos novateurs sont souvent obscurs et incompréhensibles
pour l'immense majorité des lecteurs : il faut, pour en deviner
le sens, en chercher l'étymologie et les traduire par leur équi-
valent dans la langue épurée. C'est ainsi qu'il m’a fallu du
temps pour comprendre que τὸ περασμένο signifiait le passé
(παρελθόν) et que ἀπέθαντος signifiait immortel, alors que le mot
classique ἀθάνατος est connu du peuple de tout temps (cf. là
locution ἀθάνατο νεοό). M. Psichari a déclaré lui-même que l'in-
telligence des œuvres de la secte n'est pas à la portée du pre-
mier venu; il aurait dû se souvenir de l’adage d'Euripide, qu'il
faut appeler savant ce qui est clair et non ce qui est obscur.
5° Si la langue populaire n’a pas réussi à triompher de la tra-
dition du passé, même pendant une époque de servitude,
d'ignorance, de ténèbres et d'affaiblissement du sentiment
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 237
national, comment peut-on espérer qu’elle puisse prévaloir
aujourd'hui, après la fondation de tant d'écoles dans tous les
pays habités pas des Grecs; après l'usage incessant de la languc
mixte dans les journaux, dans les actes, dans les livres; après
sa propagation, sous une forme plus simple, dans tous les
recoins du monde grec, où elle est devenue l'organe commun
de la conversation, et a rabaissé les dialectes locaux au rang
de patois vulgaires ?
6° Jamais un peuple n’a quilté sa langue écrite pour adopter
un idiome simplement par des raisons glossologiques, c'est-à-
dire pour la régularité de sa morphologie et de sa phonétique;
ce ne sont pas là des considérations décisives dans le choix
d’une langue écrite, à plus forte raison chez un peuple aussi
solidement attaché aux traditions de ses ancêtres que le nôtre.
7° Quand les novateurs prétendent qu'ils écrivent la langue
populaire parlée et comprise de tous, ils ne disent point la
vérité. Il n’en faut pas d’autres preuves, outre celles que j'ai
déjà données, que la réaction singulière dont leur tentative'a
été l’origine. Leur fanatisme contre la tradition a provoqué un
fanatisme pour la tradition. Plusieurs, qui naguère considé-
raient comme inoffensive la violation d'un certain nombre de
« règles », ont maintenant changé d'avis. L'introduction dans
le discours écrit d'éléments populaires est considérée comme
suspecte; le nom de μαλλιαροί (les « chevelus »), adopté par les
novateurs, est devenu une raillerie; celui de ψυχαριστής une
injure. Au mois de novembre 1901, le second jour des troubles,
lorsque j'essayai de calmer les étudiants surexcités en leur repré-
sentant que nos pères avaient versé des flots de sang pour la
liberté et la franchise, et qu'eux, serviteurs de la vérité et de la
science, ne devaient empêcher personne de dire et d'écrire ce
qu’il lui plaît, parce que la science vit de la discussion et meurt
de l’inertie, — un jeune étudiant m'interrompit pour me jeter,
comme une injure qu’il croyait sanglante, ces mots : εἶστε κύριε
buyaousris! Comment ose-t-on, après cela, prétendre que les
professeurs de l'Université ont élé les instigateurs de ces trou-
238 GEORGES HATZIDARIS
bles, et, cela, dit-on, faute d'argument meilleur pour com-
battre les progrès de la langue nouvelle : « They abandoned
argument and appealed to prejudice ; riot was called in to crush
reason. » Ainsi s exprime M. Leaf (Times du 11 décembre 1904).
Comme si les professeurs de l’Université avaient jamais accueilli
autrement que par le silence et le dédain les nombreux écrits
de la secte, antérieurs à 1901! Comme si, dans le cas où ils
auraient réellement voulu ameuter l'opinion, ils ne l’auraient
pas plutôt fait à l'occasion de la traduction populaire des épo-
pées d'Homère ! Ce qui a mis le feu aux poudres, ς᾽ été la ten-
tative audacieuse faite sur l'Évangile : cette version malencon-
treuse qui en corrompait de plus d'une manière l'esprit et le
texte, qui mettait dans la bouche du Sauveur des mots et des
expressions que nul Grec qui se respecte ne profère aujour-
d'hui. C'est alors que la presse de Constantinople s'est soulevée
la première et ἃ dénoncé le sacrilège ; le Saint Synode s’est
associé à son -indignation, et c’est par les étudiants originaires
de Turquie, notamment par les étudiants en médecine, que le
mouvement s'est propagé à l’Université, à la ville d'Athènes et
au royaume tout entier.
8° En dénonçant la langue épurée comme un mélange
informe et sans grâce, les novateurs me rappellent le médecin
du proverbe : ἄλλων ἰατοὸς αὐτὸς ἕλχεσιν βρύων. Leur connais-
sance très insuffisante de la langue grecque leur a fait à la fois
blämer des formes parfaitement correctes et en introduire bon
nombre qui ne le sont pas (1). Quant au charme littéraire de
leurs écrits, l'opinion, juge souverain en pareille matière, en a
fait justice en refusant de les lire jusqu'au bout, et là-dessus,
comme le dit Aristote, χρίνουσιν ἄριστα οἱ πολλοί.
9° Il est parfaitement vrai que certaines formes de la langue
écrite ne s'emploient pas dans le langage parlé de tous les jours,
et réciproquement. Mais c’est là un phénomène qui n'est ni
(1) Cf. mes Études glossologiques, p. 211 et suiv. sur le rejet de la forme excel-
lente ἐγγίζω prise à tort pour une traduction du français « approcher », sur les
gallicisnes impropres σήχων φόρους, νὰ μᾶς γελάσῃ μὲ γύρους etc.
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 239
particulier à la langue grecque, ni nouveau dans cette langue :
on en trouve déjà la description bien nette chez Sextus Empi-
ricus, Adversus mathematicos, I, p. 651, Bekker. « Il y a, dit-il
en substance, des habitudes de langage qui diffèrent suivant les
pays et les milieux. Quand un mème objet peut s'exprimer par
plusieurs noms, nous devons nous efforcer de choisir celui qui
ne fera pas rire l'assistance. C’est ainsi que ἀρτοφόριον a [6 même
sens que πανάριον, σταμνίον que ἀμίδιον, ἴγδις que θυΐα. Néan-
moins, dans la vie courante, pour ne pas faire rire les domes-
tiques qui nous servent, nous disons raväptoy, quoique ce soit
une forme harbare, et non ἀρτοφόριον, σταμνίον et non &u{ôuov,
θυΐα et non ἴγδις. Inversement, dans la discussion soutenue, en
considération de l'assistance, nous éviterons des termes vul-
gaires pour nous en tenir à l'usage lettré et de bon ton : ὡς
γὰρ ἢ φιλολόγος (συνήθεια) γελᾶται παρὰ τοῖς ἰδιώταις, οὕτως ἡ ἰδιω-
τιχὴ παρὰ τοῖς φιλολόγοις ». On trouve des observations toutes
semblables chez Diogène Laërce, VIIE, 58; chez Démétrius,
De Interpretatione, δὰ 717, 173, 234; chez Denys d'Halicarnasse,
Sur Démosthène, ©. 1, V, Vi, XV, XVIII, XXIX, xxxv; enfin chez
Pollux, πὶ, 18, qui rejette la forme παππεπίπαππος (aïeul de
l’aïeul) comme δεινῶς ἰδιωτικόν, Combien de formes populaires
de ce genre sont condamnées par les atticistes Phrynichus,
Mæris, etc. ! Ce dualisme existait dès l’époque attique. Euri-
pide écrit une langue archaïsante qui a pour base le dialecte
attique du temps où la tragédie fit sa première apparition.
Aristophane écrit dans le Plutus : τοῖσιν ἀνθρώποιδιν, τοῖσι λόγοις,
ποίοις ὅπλοισι alors que le datif pluriel en οἷσι avait disparu des
inscriptions, par conséquent de:la languc usuelle, dès 444 envi-
ron. Thucydide emploie θάλασσα, πράσσω, “χέρσον, θάρσος, ἐφθάρα-
ται, ἐτετάχατο, toutes formes inconnues à l’attique parlé de son
temps (1). Déjà dans les poèmes homériques, il est question de
certains mots usités chez les dieux, tandis que d'autres termes
synonymes l’étaient chez les hommes (A 403, B 813, Ξ 290
(1) Cf. ᾿Αϑηνᾶ, VIII, 272-214.
16
210 GEORGES HATZIDARIS
Y 74). Les formes μελισσάων, ἀδινάων, ᾿Ατρείδαο, θεά, Ναυσιχάα
n'ont pas pu coexisler dans le langage parlé avec πυλέων, νυμ-
φέων, ᾿Ατροείδεω, γενεή, Δανάη, ni λόγοιο, θεοῖο avec λόγου, θεοῦ.
On voit donc que de tout temps chez les Grecs, même depuis
Homère, la langue littéraire différait plus ou moins de la
languc parlée. Les anciens se plaisaient à cette différence et
savaient en tirer un parti esthétique. Le même phénomène sub-
siste aujourd'hui, et le public, loin de s’en choquer, prend
plaisir aux ouvrages littéraires où la langue mixte est employée
. avec convenance. Ceux-là seuls s’insurgent contre cette diglos-
sie qui, esclaves aveugles du principe d’analogie, exigent qu'en
grec, à l'exemple de ce qui se passe en France, en Angleterre,
en Allemagne, il n'y ait qu’une forme unique de grammaire et
de lexique pour la prose, la poésie, la conversation.
On nous traite de sots et de pédants parce que nous résis-
tons à leurs sommations ; alors, il faut appliquer les mêmes
noms aux anciens, qui dans leur poésie lyrique et dramatique
employaient un langage si différent de celui de la conversation.
C'est là une tradition qui n’a rien de plus choquant que la cou-
tume de s'habiller autrement à la maison ou pour sortir, ou
encore les jours de semaine οἱ les jours de fête. Nous avons
une sorte de luxe linguistique et nous nous y plaisons. On nc
voit pas de quel droit les étrangers nous en blâment : ils pour-
raient tout aussi bien nous reprocher d’avoir trois genres et
deux futurs alors que les Français n'ont que deux genres et un
futur; ou encore d'avoir deux passés contre un seul en alle-
mand, trois articles contre un en anglais. Et que dire alors des
Javanais avec leurs trois langues graduées suivant le degré de
respect qu'on porte à l'interlocuteur, des Japonais qui évitent
le mode actif en parlant à des personnes de qualité, des Anglais
eux-mêmes, qui emploient de préférence les mots d'origine
française dans le langage administratif etles mots saxons dans
la vie privée ? Toute critique de ce genre serait absurde, car,
ainsi que l’a enseigné Humboldt, toute langue forme une espèce
de microcosme, qui veut ètre étudié et jugé en lui-même sans
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 241
que l’on doive chercher à modeler les langues les unes sur 165
autres.
Il y a sans doute du vrai dans l'observation que notre langue
est difficile à apprendre, parce que pour tant de notions elle
offre deux formes ou deux mots différents; mais ce mélange
d'éléments hétérogènes se rencontre plus ou moins dans tous
les idiomes de l'Europe : tous requièrent étude et exercice
pour être maniés correctement. Le nôtre ne présente pas de
difficulté si exceptionnelle puisque des Journalistes, qui ne
sont pas des philologues de profession, arrivent sans trop de
peine à s'en servir correctement. On pourrait plutôt soupçon-
ner de paresse nos révolutionnaires qui se sacrent réciproque-
ment « Tourguenief » et « poètes nationaux de la Grèce » et
qui, pour s'éviter la peine d'apprendre et de respecter les lois,
en ont forgé de nouvelles à leur usage.
Le legs du passé, l'élément conservateur dans la langue, dont
d'éminents linguistes ont si souvent signalé l'importance et l'uti-
lité (1), on voudrait en faire litière, et cela précisément pour
une langue qui doit tant à son grand cet glorieux passé. On
oublie que, grâce à la couleur tant soit peu archaïque de notre
langue écrite, notre littérature actuelle est accessible à tous
ceux qui ont appris le grec ancien dans les collèges de l'occi-
dent, avantage immense qui a fait entrer de plain pied notre
production savante dans le grand courant de la civilisation euro-
péenne. On oublie encore que, grâce à cela, nos jeunes gens qui
ont appris la langue écrite à l’école peuvent sans peine arriver
à comprendre les auteurs classiques les plus simples, surtout
ceux de l’âge d'argent ; de là ce sentiment puissant de la con-
tinuité et de l'unité historique de la langue grecque prise dans
son ensemble, sentiment qui a trouvé son expression dans la
séance du parlement du 14 février 1902, lorsque la tentative de
séparer les langues en Grèce a été flétrie officiellement comme
une impiété. Et cette affirmation de l’unité fondamentale de la
(1) Gabelenz, Loc. cil., p. 141; Whitney, Forlesungen, Ὁ. 230.
912 GEORGES HATZIDAKIS
langue grecque n'est pas seulement une vérité oflicielle; en
fait, le répertoire de l’ancienne κοινή et celui de la langue vul-
gaire se sont intimement mélés. Tous les jours nous entendons
dans les rues des personnes tout à fait ignorantes employer des
expressions telles que τῆς πόλεως, τῆς κυδερνήσεως, δὲν δύναμαι.
Il y ἃ ἰγοὶβ ans il m'est tombé entre les mains le manuscrit d'un
condamné interné dans le pénitencier dit Averoffion ; il y avait
inscrit tout ce que lui avait enseigné l’aumônier de l'établisse-
ment ; le manuscrit était plein de fautes contre l'orthographe et
la syntaxe, mais Iles formes grammaticales étaient presque
toutes anciennes. Or ce jeune homme était entré au péniten-
cier absolument illettré : on lui avait enseigné seulement à lire
et à écrire : c'est lui-même qui s'était formé spontanément une
morphologie mixte, semblable à celle de la langue épurée sous
sa forme simple. Et c'est là un phénomène de tous les jours,
qui tend à faire de cet amalgame 18 langue usuelle de [8 nation.
Si l'étude de la morphologie classique n'offre à nos ‘élèves
que peu de difficultés, il n’en est pas de même de celle de
l'orthographe historique, avec son luxe de diphtongues, de
voyelles longues et brèves, d'accents et d'esprit variés, de con-
sonnes simples et composées. Toutes ces distinctions, ne cor-
respondant à aucune différence réelle dans le langage actuel,
constituent un outillage singulièrement encombrant et que les
écoliers doivent s'approprier machinalement. On peut s'étonner
du silence que nos novateurs gardent sur cette plaie. Depuis
longtemps, des essais ont été faits pour y porter remède. Les
Crétois, sous la domination vénitienne, employaient souvent
l'alphabet latin; Vilaras avait composé une grammaire ‘Pouén-
χης γλόσσας où il employait uniformément n pour tous les sons
ent, o pour oetw, e pour ε et αι; d'autres réformateurs ont
supprimé les esprits ou les accents; quelques-uns le iota sous-
crit; d'autres ont proposé d'écrire, selon le cas, αὖ, εὖ ou ay, €
pour αὖ εὖ (1). Il n’est pas douteux que si ces réformes avaient
(1) Voir sur tous ces projets ᾿Αθηνά, XI, 157 suiv.
LA QUESTION DE LA LANGUE ΕΝ GRÈCE 243
prévalu, l'enseignement de la langue serait devenu beaucoup
plus facile ; pourtant elles ont misérablement échoué, parce que
le saut par lequel l'orthographe arrivait ainsi à s’accorder avec
la véritable prononciation était trop vaste; or, comme le dit
Gabelenz (4), « l'histoire tolère difficilement les sauts, et là où
on lui arrache de force des changements brusques, elle sait se
venger ». Mais, je le répète, est-il raisonnable de laisser sub-
sister le plus grand obstacle à l'étude de notre langue, celui de
l'orthographe, et de faire tant de bruit pour une difficulté beau-
coup plus petite — celle des formes?
40° Il ne sied point à des écrivains aussi pou familiers avec
les éléments de notre languc de vouloir régenter leurs con-
frères. Quant on écrit des mots tels que καμπήσιος (pour ἀγρο-
71x06), ψώφια, συχαίνομαι, θὰ σείρω, τούπα, λύπες, στηλώσῃη, γλυσ-
προῦσαν, etc.) (2), on est mal venu à se poser en législateur du
langage.
*
CE
Tous ces arguments — et bien d'autres — ont été déjà oppo-
sés à nos novateurs ; mais, quoique prétendant parler au nom
de la science, ils n'yont jamais répondu, ou du moins n'y ont ré-
pondu que par des affirmations triviales ou inexactes. Par exem-
ple, ils nous enseignent doctoralement, ce que nous savons depuis
longtemps (3), que la langue vulgaire n’est que le développement
naturel de l’ancienne κοινή; ils nous accusent de mépriser notre
langue pariée comme barbare et corrompue, alors que, en ce qui
me concerne, Je n'ai Jamais employé de pareils termes et crois
avoir autant fait pour l'étude scientifique de cette langue que ses
panégyristes actuels. Et puis, brochant sur tout cela, on nous
chante la régularité de sons et de formes que présente la langue
nouvellement fabriquée, et on accable de reproches, généra-
lement immérités, notre langue écrite nationale. Enfin, on
(1) Op. cit., p. 142.
12; Voir mes Études glossologiques, Ὁ. 258 et 218;
43) Cf, ᾿Αθήνχιον, tome X:
244 __ GEORGES HATZIDAKIS
écrit sans rire (Manchester Guardian, 27 février 1902) que per-
sonne n'a réfuté les arguments de la secte, oubliant aïnsi que
les thèses des Essais (1, p. 235-288) ont été réfutées dans
l'Ephéméris de Coromila, la Berliner Philologische Wochen-
schrift, et l'Etnleitung in die Neugriechische Grammatik. Εἰ de
même 1] n'est pas resté grand’chose des Εἴδωλα de Rhoïdis
après la critique publiée dans ᾿᾿Αθηνὰ (VIE, 185 suiv.), à tel
point que M. Pernot a dû convenir que les « Idoles » étaient,
non un livre de science, mais une œuvre d'art! .
IV. — Que faire?
Notre histoire d'un côté, les circonstances actuelles de l’autre,
nous prescrivent, ce semble, clairement notre voie. Nous
sommes fortement attirés par la civilisation et la langue an-
cienne, par notre passé glorieux, par la conscience de notre
solidarité nationale avec nos aïeux. Mais nous le sommes éga-
lement par la civilisation actuelle avec ses multiples besoins.
Il y a là une sorte de Kulturkampf analogue à celui que les
sciences physiques et les langues modernes livrent en Occident
aux études classiques. Mais, si les peuples latins et germaniques
eux-mêmes ne peuvent pas sacrifier celles-ci à celles-là, à bien
plus forte raison cela nous est-il impossible, à nous qui n’avons
ni une langue tout à fait indépendante, ni une littérature vrai-
ment digne d'attention en dehors de celle d'autrefois. Les
occidentaux cherchent à résoudre ce conflit d’un côté en
restreignant l'étude des langues classiques, tout en tirant des
civilisations antiques tout le profit possible; d'autre part, en
développant l'étude des sciences physiques et des langues
modernes pour satisfaire aux exigences du temps présent. C'est
un compromis; nous aussi, nous devons nous acheminer vers
un compromis semblable, dussions-nous encourir une fois de
plus les longues railleries dont M. Psichari a rempli un cha-
pitre de son livre. Ce compromis consistera à réduire à de sages
limites l'observation des règles anciennes, et à fortifier de plus
LA QUESTION DE LA LANGUE EN GRÈCE 245
en plus le nouvel usage jusqu'à ce que les deux éléments
deviennent si intimement amalgamés qu'ils soicnt réellement
inséparables, ou, pour mieux dire, que les parties conservées
de la règle ancienne ne soient plus qu'un élément intégrant
de la langue moderne. Combien de temps prendra cette évolu-
lion pour s'accomplir? Je ne veux pas imiter la suffisance de
nos μαλλιαροί, qui, prophètes après Jésus-Christ, nous prédisent
qu'il ne se passera pas cinquante ans avant que leur langue ne
règne sur toute la surface de la Grèce. Pour moi, je me con-
tente de dire que la consolidation plus ou moins rapide de
notre langue écrite dépendra du mérite des écrivains qui vont
paraître, des progrès de l'instruction, et en général des desti-
nées de notre nation.
Le lecteur, qui m'a suivi dans les développements qui précè-
dent, reconnaîtra, je l'espère, qu'aucune erreur scientifique n'a
été commise dans l’évolution de notre langue littéraire. C'est
par une inéluctable nécessité historique qu’elle s'est formée
telle qu’elle est aujourd'hui, et si même nous acceptions comme
point de départ la langue de nos « chevelus », nous ne tarde-
rions pas à en revenir au même état. Cette campagne tapageuse
n'a donc pour raison d'être que l'ignorance du public étranger,
et le désir immodéré de gloire et de controverse chez quelques
personnes qui semblent avoir pris pour devise : « θέλω δόξα καὶ
γροθὶες ».
Je souhaite — plutôt que je n'espère — qu'elles finiront par
reconnaître l'erreur, l’absurdité et l'injustice de la tâche à
laquelle elles 86 sont vouées.
Georges N. Hartzinaxis.
246 KARL KRUMBACHER
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE ‘
I
L'uttitude hostile de l'énorme majorité des lettrés à l'égard
de l’idiome populaire a des raisons diverses et très discutées.
J'ai déjà indiqué qu'il s'y mêlait aussi des motifs de derrière la
tète qu’on ne se décide pas à avouer officiellement — ou du
(4) Dans la première partie, purement historique, de son mémoire, M. Kruin-
bacher, après avoir esquissé l'état actuel de la philologie du grec moyen et nou-
veau, pose le problème de la langue littéraire moderne et en caractérise l'im-
portance scientifique et psychologique. Il définit la diglossie grecque actuelle ct
montre comment elle diffère, à la fois en degré et en nature, des phénomènes
analogues signalés dans d'autres langues. A cet effet il cite de nombreux exem-
ples tirés soit du vocabulaire, soit de la phonétique, de la morphologie et de la
syntaxe. La langue quasi-classique, où sont rédigés les quatre-vingt-dix-neuf
centièmes de la production littéraire hellénique, lui paraît une « mystification »,
mais cette mystification s'explique historiquement. Et à ce propos il étudie les
origines lointaines de cette langue, la formation de la κοινή littéraire antique, les
trois mouveinents de « réaction linguistique » qu'on peut distinguer dans son
histoire (au rer siècle avec les Atticistes, au x1° avec les humanistes du temps
des Comnènes et des Paléologues, au xix° avec les créateurs de la langue litté-
raire actuelle). ἃ l'histoire de la langue artificielle s'oppose celle de la langue
« naturelle », sortie elle aussi de la χοινή par la disparition des dialectes anciens
et d'importantes modifications intimes, dont M. Krumbacher relève le caractère
spontané. 11] passe en revue les documents Jittéraires trop rares qui nous rensei-
gnent sur son évolution, tant ceux où elle est employée pure que les échantillons
du style « macaronique ». Il arrive ainsi à la renaissance de l'hellénisme, renais-
sance intellectuelle à la fin du xvur siècle, politique et nationale au xixe οἱ il
montre quelles raisons historiques expliquent le triomphe de la langue artifi-
cielle à l'époque de Coraïs et de ses successeurs. Mais si la χαθαρεύουσα a des rai-
sons d'être historiques dans le passé matériel et intellectuel du peuple grec, il ne
s'ensuit pas qu'elle représente une solution définitive de la question de la langue.
M. Krumbacher rappelle les tentatives de réaction populaire qui se sont pro-
duites contre elle dès le commencement du xix° siècle ; il étudie les productions
poétiques et les théories grammaticales de l'école ionienne (Solomos, Valaoritis,
Vilaras, Konemenos), puis il arrive tout de suite au mouvement inauguré depuis
quinze ans par Psichari, dont il qualifie l'action de « vraiment libératrice »
(wahrhaft erlôsend). Il raconte brièvement la querelle soulevée par la traduction
d'une partie de l'Évangile de Pallis et publie à ce sujet en appendice de très
euricux documents. Ici sc termine (p. 63) l'exposé historique:
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 247
moins pas devant l'étranger. Ce que l’on reproche à la langue
populaire, c'est son caractère barbare et grossier, son incor-
rection, son manque de règles, sa pauvreté, ses mots étrangers,
et surtout sa prétendue absence d'unité. Tous ces reproches
dénotent une familiarité insuffisante avec la vie de la langue
naturelle, une connaissance défectueuse des lois du développe-
ment des langues écrites, une mauvaise information au sujet
de l’histoire des autres littératures et des autres langues. Cela
nous mènerait trop loin d'entrer dans le détail de tous ces
reproches et de les réfuter à fond à l’aide de l'appareil considé-
rable que nous fournissent la philologie et la linguistique. Je
veux seulement mettre en lumière quelques points essentiels.
Presque tous les arguments contre la langue populaire ont
un point de départ commun : c'est l'idée erronée que la langue
grecque ancienne est l'idéal absolu pour tous les temps. Parce
que la littérature ancienne, ou, pour mieux dire, une partie de
cette littérature, a atteint la plus haute perfection artistique, et,
autant que nous en pouvons juger, une valeur impérissable,
on en conclut qu'il doit en être de même de la forme linguis-
tique de cette littérature. On oublie qu’une langue ne peut
convenir à la littérature que d'un certain peuple et pour un
certain temps, et qu'elle perd ses facultés littéraires dès que sa
corrélation intime avec l’époque et ke peuple se trouve relâchée
à l'excès. On oublie que les beaux monuments littéraires sont
des œuvres d'art indestructibles et inaltérables, mais qu'au
contraire la langue des hommes est un organisme incessam-
ment modifié sous l'influence de mille facteurs. Une forme lin-
guistique peut avoir fait ses preuves à merveille dans une cer-
taine littérature, elle n'en garde pas pour cela la même force
dans tous les âges futurs, lorsque la langue parlée aura changé,
lorsque des révolutions profondes se seront produites dans la
civilisation, les conditions politiques et religieuses, les moyens
intellectuels et matériels, la science, l’industrie, le commerce,
etc... On peut appliquer à la langue la phrase de Taine : « Il
faut faire autrement que nos ancêtres ct louer ce que nos
918 KARL KRUMBACHER
ancêtres ont fait. » Ce préjugé étroit de la valeur « absolue » de
la langue grecque jusqu'à un certain moment de son existence,
et de son caractère barbare à partir de ce moment, était
répandu également en Occident; il l'est même encore en partie.
Le grec moyen et nouveau étaient souvent qualifiés de
lingua graecobarbara, et encore tout récemment un philologue
appliquait au grec moderne cette sévère critique : « idiome
comprimé par d'obscurs barbarismes de tous genres. » C’est ce
que pensait aussi ce philologue de Bonn, arrivé à une gloire
imméritée, qui repoussait avec indignation l’étude du néo-grec
par ces mots : « comment s'occuper d'une langue où ἀπό régit
l'accusatif? « Ce n’est que dans les dernières années que l’on
semble peu à peu se rendre compte que la langue naturelle
qu'ont parlée les Grecs à chaque époque a la même raison
d'être, et que le grec qui se parlait du temps de Périclès dans
les rues de la ville couronnée de violettes n'était pas d'un che-
veu plus distingué que la prétendue linqgua graecobarbara où
s'entretenait sous les Commènes la foule avide de spectacles qui
encombrait l'hippodrome de Constantinople.
Le reproche d'incorrection et d'irrégularité part du même
principe. Il faut insister sur ce point : en formulant ce reproche
on n'a pas en vue l'idée scientifique de la correction linguis-
tique dans les limites d'une certaine période de le langue ou
d'une certaine espèce de style; on considère les formes nou-
velles comme incorrectes parce qu’elles sont en contradiction
avec le schéma attique ou hellénistique, et l'on écrit des dis-
sertations lourdement érudites pour prouver qu'il faut bannir
. telle ou telle forme introduite dans la nouvelle langue écrite.
On parle d'absence de règles parce que certaines formes pré-
sentent des fluctuations dialectales, et parce que le système
grammalical et l'orthographe ne sont pas encore catalogués
aussi commodément, paragraphe par paragraphe, que dans la
langue ancienne; sans compter que les jolis paragraphes de la
grammaire scolaire du grec ancien renferment souvent bien
des trésors imaginaires ou arbitrairement choisis. En réalité,
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 249
il n'existe pas dans une langue vivante de formes incorrectes
dans le sens où ce mot est employé par les puristes grecs. Ici
s'applique cum grano salis la phrase de Hegel dont on a si
souvent abusé : « Tout ce qui est réel est rationnel ». Sitôt
qu'une forme est adoptée par la majorité, elle acquiert droit
de cité. Au sens des puristes grecs, chaque échelon d'une
langue serait incorrect comparé à l'échelon qui le précède,
par conséquent l’attique ne le serait pas moins que le grec
moderne.
Ce que les pédants nomment « incorrection » est insépa-
rable de la vie même d'une langue; c’est le sel nécessaire au
renouvellement de son essence, à l'élimination de substances
devenues incommodes ou inutiles, au développement de forces
nouvelles, en un mot à la création de nouvelles langues.
C'est à ce phénomène que nous devons toutes les langues
modernes. L'Italien, le Français, l'Espagnol, ne sont que la
somme d’une accumulation énorme, sans cesse croissante, de
fautes contre la grammaire latine et le lexique latin, devant
lesquelles un grammairien de la Rome antique se serait arraché
tous les cheveux de son crâne pensif. Personne pourtant ne
considère aujourd’hui ces langues comme des idiomes barbares;
personne ne voudrait les échanger, elles et leurs littératures,
contre un latin poli, stéréotypé, correct, même pas pour le plus
pur latin de Cicéron.
Si l'on fait comme A. Rh. Rangabé, dans sa prétendue gram-
maire néo-grecque, l'indémontrable hypothèse que le grec
antique, le grec pur, n'a jamais disparu de la bouche des let-
trés et que, scule, la langue de la populace a « dégénéré », ce
sera nier toute l’histoire de la Grèce dans les derniers millé-
naires, si fertiles en cffroyables fatalités et en péripéties mer-
veilleuses, en succès brillants et en mortelles défaites. Exiger
des Grecs d'aujourd'hui qu'ils écrivent, mieux encore, qu'ils
parlent comme Xénophon, c'est nier qu'ils descendent des mal-
heureux raïas de l'époque turque, par eux des Byzantins, par
ceux-ci des Grecs des siècles romains et alexandrins, οἱ par
250 | KARL, KRUMBACHER
ceux-là seulement des glorieux Dix mille de Xénophon —
sans compter tout ce qui s’y est glissé de sang étranger. C'est
faire d'eux une race momifiée qui n’a jamais été capable de
tirer de son cerveau desséché de nouvelles formes et de nou-
velles idées. C’est remplacer la vie par la fixité immobile de la
mort. C’est croire que depuis Platon οἱ Aristote le peuple grec
n'a plus ni vécu, ni travaillé, ni surtout pensé. C’est croire enfin
que la langue grecque a dormi pendant deux mille ans le som-
meil de la Belle au bois dormant et que maintenant, réveilléce
tout à coup, elle se frotte les veux avec étonnement.
Raisonner ainsi, c’est commettre dans le domaine de la
langue ct de la littérature la même erreur qui a si longtemps
obscurci les idées des Grecs, et hélas! aussi de nous autres
« Sages de l'Occident», dans le domaine de l'histoire, erreur qui
consistait à faire un sa/to mortale depuis Marathon, Périclès οἱ
Alexandre jusqu'à l'époque de Kolokotronis et du roi Othon,
et de condamner, par le mépris, tout ce qui remplissait l'in-
tervalle.
Les griefs que je viens d'examiner concernent principale-
ment la phonétique et la morphologie. D'autres s'adressent
de préférence au lexique. On déplore la pauvreté du néo-grec,
la grossièreté de bien des termes, l’immixtion de mots étran-
gers. En fait, on ne saurait contester que la langue naturelle
d'aujourd'hui ne soit insuffisante pour l'exposé de questions
scientifiques et techniques, ct surtout qu’elle nous laisse sou-
vent en plan quand il s’agit d'exprimer des idées abstraites et
les nuauces un peu fines des processus psychiques. Mais c est
là une indigence commune à toutes les langues populaires tant
qu'elles ne servent que pour les besoins de la vie populaire et
tout au plus pour la poésie. Chaque fois qu'une langue na-
turelle est appliquée sans une élaboration préalable à des
sujets scientifiques, de grandes difficultés se produisent. Il
n'y ἃ pas d'idiome populaire qui puisse, du premier coup,
se mouvoir d'un picd assuré sur le parquet glissant de la
seicnce ct de l'abstraction. Quiconque est familier avec l'his-
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 251
toire des langues romanes ou du nouvel haut-allemand, sait
que là aussi il a fallu créer à nouveau ou transférer d'un
sens concret primitif au sens abstrait une foule de termes
nécessaires à l'expression des idées scientifiques, et que d'in-
nombrables mots au son d'abord grossier ont été ennoblis en
passant au creuset de l’usage. Les mêmes scrupules qu ex-
priment aujourd'hui, en Grèce, des esprits timorés contre l'in-
troduction de la langue naturelle dans la littérature scientifique
se sont produits aussi, à l’époque de la domination du latin, contre
l'italien, l'allemand, etc... Mais si l'on veut savoir avec quelle
vitesse une langue naturelle, pourvu qu'elle ne soit pas cn-
travée dans son expansion par des préjugés pédantesques ou
des routines grammaticales, peut arriver à satisfaire aux exi-
gences les plus variées et les plus élevées de la littérature, on
peut s'en assurer en étudiant le chemin parcouru dans les
deux derniers siècles par les langues slaves, d'abord le russe
et le tchèque, en dernier lieu le serbe et le bulgare. A la vérité,
l'appropriation d'une langue à de pareils emplois exige un
labeur assidu, la conscience du but poursuivi, une Joie créa-
trice, hardie et jeune. Il est plus commode d'aller chercher
des mots dans le vieil arsenal et d'en nettoyer un peu la
rouille des âges, que de tailler dans la matière brute de la
Jangue nouvelle et vivante les instruments qu'il faut aux idées
et aux raisonnements étrangers à la vie journalière. Si l'on
tient compte des conditions historiques singulières où s'est
constituée la langue écrite des Grecs, on ne leur fera pas un
crime d'avoir pris cette tâche un peu à la légère, bien que dès
à présent ils disposent d'un bon nombre de jolis néologismes.
Mais on doit espérer, .qu'à l’avenir, ils dépenseront plus de
travail et plus d'originalité pour accommoder la langue de Ja
science à l'esprit et au sentiment glossiques modernes.
Ce ne sont pas les moyens qui leur manqueront. Quelque
indigente en effet que soit la langue naturelle pour l'expression
scientifique, aussi grande est sa richesse pour la traduction des
idées concrètes et des relations de la vie journalière. 1] suffit de
252 KARL KRUMBACHER
lire l'excellente dissertation d'Hatzidakis Zur Wortbildungs-
lehre des Mittel-und Neurigechischen (1) pour se rendre compte
de Ja fertilité de la langue populaire actuclle en termes
concrets, de sa richesse en suffixes significatifs. C’est une langue
qui suffirait aux tableaux de genre, si hauts en couleur, d'un
Zola; quelle pitié si cette matière façonnable ne trouvait pas
un emploi littéraire ! Il finirait par arriver au peuple grec tout
entier ce qu'on observe souvent sur des Grecs individuels : ils
perdent le contact intime et vivant avec leur .peuple, ignorent
presque Îa richesse de ses proverbes, de ses locutions expres-
sives, de son vocabulaire original et ne trouvent point de com-
pensation pour cette perte dans la langue littéraire, lourde et
ossifiée, qu'ils lisent dans les livres et les journaux; finalement
tout leur être intellectuel et verbal tombe dans la maigreur et
dans l’anémie.
Outre sa pauvreté, on reproche à l'idiome populaire la masse
de mots non helléniques qu'il renferme ainsi qu'un certain
nombre de suflixes étrangers. Dans la langue « épurée » la
crainte des mots étrangers joue un grand rôle ; déjà la prin-
cesse Anne Commène les évitait à tout prix; même en
énumérant des noms propres exotiques, elle s'excuse de désho-
norer son histoire par des termes barbares! De mêm et
beaucoup d’autres Byzantins aiment mieux devenir obscurs et
même incompréhensibles que d'employer des mots non hellé-
niques. C'est un classicisme aussi exclusif qui est la source
principale de la terreur aveugle qu’'inspirent aujourd’hui aux
puristes les mots étrangers. Les mots italiens, turcs, etc., leur
paraissent incompatibles avec la noblesse et la pureté de leur
langue (2)
Une autre question est de savoir si les Grecs d'aujourd'hui
(1) Bysantinische Zeitschrift, 11 (1893), p. 235 suiv.
(2) M. Krumbacher signale des tendances analogues chez les puristes germa-
nomanes de l'Allemagne actuelle. Il montre que les termes étrangers introduits
dans la langue grecque sont le résultat nécessaire de l’histoire et des échanges
de civilisation et ne peuvent presque jamais être remplacés par des termes pure-
ment helléniques équivalents ; exemple touvéx:, πόρτα.
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 253
doivent, pour exprimer des idées de création nouvelle emprun-
ter le mot étranger ou le traduire par un néologisme hellénique.
En pareille matière il faut Je crois se réserver une certaine la-
titude de mouvement (1)... |
Quelques partisans de la langue naturelle sont allés beau-
coup trop loin dans l’ardeur de la lutte contre les mots momi-
fiés et sont devenus plus vulgaires que le vulqus. Pourquoi les
Grecs, par exemple, se laisseraient-ils imposer le vilain mot
italien σταμπαρία, puisqu'ils possèdent le mot τυπογραφεῖον,
formé d'éléments grecs et répondant à la terminologie de la
plupart des nations civilisées ? Pourquoi l'italien μπάγχα au lieu
du mot τράπεζα qui, universellement connu et déjà populaire,
est l'appellation stéréotypée de toute banque (p. 6. τράπεζα τῶν
᾿Αθηνῶν) et n’est nullement en contradiction avec la morpho-
logie moderne? De mème on a heureusement remplacé « posta »
par le joli composé =xyuôpouetov. D'ailleurs le néo-grec ne
pourra pas non plus sans violence nuisible se soustraire à la
loi formulée par Victor Ilehn : « Où il y a commerce de civili-
sation, il y ἃ beaucoup de mots étrangers ; ils ne manquent
que là où règnent l’exclusivisme et la stagnation à la chinoise. »
IT
Un grief beaucoup plus sérieux que les arguments discutés
jusqu’à présent est celui qui consiste à dire que l’idiome popu-
laire ne se prête pas à la littérature parce qu'il est composé
d’une quantité de dialectes différents et ne forme pas une langue
commune. G. N. Hatzidakis en personne a amplement prouvé, à
la lumière de son incomparable connaissance des dialectes néo-
grecs, que beaucoup de notions sont exprimées dans les dialectes
par des mots différents, et que les mêmes mots ont une certaine
signification dans tel dialecte, une autre dans tel autre ; il en
(1) M.Krumbacher signale ici la difficulté de rendre en grec les suffixes abstraits
des langues romanes -aéio, -ilas, etc.
------....-.ὕὌῸ Ῥ.. .-...
.
A — - τον ---- —
τσ τον ------ -ιτν--- το ,----- --ν»---- α-
254 KARL KRUMBACHER
conclut que la langue populaire ne saurait être la base conve-
nable d’une littérature intelligible à tous. Il ne faut donc pas
s'étonner que cet argument tienne une large place dans la
discussion.
À cela je réponds : 1° qu'une langue naturelle commune
existe chez les Grecs d'aujourd'hui aussi bien que chez les
Allemands, les Français, les Italiens et les Russes ; 2° que les
différences dialectales réunies par Hatzidakis et d’autres ne
changent rien à ce fait, et sont parfaitement indifférentes pour
l'emploi littéraire de la langue populaire. Pour peu qu’on ait
voyagé en Grèce et en Turquie et qu’on sache vraiment le grec,
on me concèdera que dans toutes les grandes villes telles que
Constantinople, Smyrne, Athènes, Patras, Syra, etc., on parle
un idiome à peu près similaire et que tout Grec, ou tout étran-
ger possédant le grec moderne, se fait comprendre sans la
moindre difficulté, même s’il ne tient pas compte des particula-
rités locales. Même dans de petites localités isolées, la popula-
tion comprend cette langue commune sans difficulté et sait s'y
exprimer. J'ai pu m'en assurer bien souvent dans un voyage de
huit mois que j'ai fait il y a 18 ans et qui s'étendit notamment
sur l'Asie Mineure, les îles orientales et Constantinople, et dans
un petit voyage tout récent au Péloponèse et dans les Cyclades.
ΠῚ est absolument certain que la compréhension réciproque est
beaucoup moins troublée en Grèce par des dilférences dialec-
tales, notamment sur le terrain de la phonétique, que par
exemple en Allemagne ou en Italie.
Les différences que Hatzidakis et d'autres ont alléguées sont
surtout d'ordre lexicographique et je n'ai jamais compris
qu'un savant aussi éminent ait pu leur attribuer aucune impor-
tance dans le débat. C’est un fait pourtant bien connu que de
pareilles variations existent même chez les nations qui ont
depuis longtemps une langue écrite sortie de l'idiomc popu-
laire (1).
(1) M. Krumbacher cite l'exemple de l'Allemagne où le lexique offre, selon les
dialectes, des différences considérables, qui, loin de nuire à la formation d'une
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 255
Rien n'est plus inexact que la critique à courte vue, inspirée
d'un esprit de magister, qui condamne un style enrichi de
néologismes individuels et d'expressions dialectales, dédai-
gneux de la tradition classique. Le besoin de créer, en litté-
rature comme en art, de nouvelles formes d’expression, est
si profondément enraciné dans l’âme humaine, qu'il s'impose
même dans les circonstances les plus difficiles. Dans la langue
littéraire française et italienne règne moins de liberté qu'en
allemand, et cela pour des raisons que je ne veux pas exposer
ici, mais ici aussi on est souvent remonté avec le plus
grand succès à la source du langage populaire, et ici aussi le
purisme soigneusement entretenu par la serre chaude acadé-
mique ἃ rendu très pressant le danger de platitude et de mono-
tonie. Lorsque Manzoni fit paraître pour la première fois ses
Promessi sposi, ses nombreux « lombardismes » choquèrent les
sévères critiques toscans ; Manzoni se laissa intimider, émigra
à Florence « pour rincer ses loques dans l’Arno », et la seconde
édition du livre parut, netloyée de ses taches lombardes, mais
diminuée en fraîcheur et en force vitale. Et combien, depuis
cette époque, la Toscane a-t-elle perdu de place dans la litté-
ralure, et combien la langue littéraire a-t-elle été enrichie par
les grands écrivains non toscans d'éléments empruntés à
d’autres dialectes ! Il en est des néologismes comme des expres-
sions dialectalés. Tant qu'il ne s’agit pas d'expressions tech-
niques ou imposées de force par une autorité, on peut dire
que les néologismes sont bons lorsqu'ils subsistent et mauvais
lorsqu'ils sombrent d'eux-mêmes; la languc aussi exerce une
espèce de sélection naturelle.
En France comme en Italie, beaucoup ont rejeté le joug aca-
démique, bien que la centralisation de toute vie intellectuelle
à Paris paralyse la libre concurrence des éléments dialectaux
et que tout doive s accorder plus que de raison sur le diapason
langue littéraire, lui ont fourni de précieuses ressources; témoin le récent roman
Slesvigois de G. Frenssen « Jôrn Uhl » dont l'immense succés est dû en partie
l'emploi artistique et judicieux de termes de terroir.
17
256 KRARL KRUMBACHER
de la capitale. Il en résulte un danger de stagnation et de
marasme qui n’a pas échappé à la clairvoyance de certains
Français, danger qui n’est atténué que par le courant vivifiant
de forces intellectuelles nouvelles ct originales qui, des pro-
vinces et des pays voisins de langue française, affluc conti-
nuellement vers Paris. Si enfin on prend comme point de com-
paraison l'ultra-conservatrice Angleterre, on n’a qu'à rappeler
le contingent puissant dont George Eliot dans Adam Bede,
R. D. Blackmore dans Lorna Doone, Rudyard Kipling dans
Plain tales from the Hills, etc, ont enrichi la littérature
anglaise en puisant sans crainte dans le trésor des dialectes
provinciaux.
L'exemple de la littérature allemande devrait servir de leçon
aux Grecs et dissiper leurs scrupules mesquins. Comme on
pourrait m'objecter que les choses se présentent autrement en
Allemagne qu'en Grèce, je veux encore exposer les raisons
générales, indépendantes de toute question de lieu et de temps,
qui font que la différence des dialectes ne constitue pas un obs-
tacle sérieux à l'emploi littéraire de la languc naturelle.
La différence la plus forte, et qui frappe le plus dans la pra-
tique entre les dialectes, ne réside pas dans la flexion ou dans
le vocabulaire, mais dans la phonélique, ou, pour parler vul-
gairement, dans la prononciation. Qu'on me permette un
exemple. Que l'on réunisse cinq paysans provenant respecti-
vement de la Prusse orientale, du Mecklenbourg, de la Haute-
Bavière, de la Suisse et du pays Rhénan, ct supposons que par
un miracle on puisse obtenir qu'ils s’accordent complètement
dans l'emploi des mots et des formes grammaticales, tout en
conservant leur prononciation particulière : je mets en fait
qu'ils n'arriveront qu'avec la plus grande peine à se com-
prendre. Au contraire, que par un autre miracle nos cinq pay-
sans acquièrent tout à coup la même prononciation ef ne con-
servent leur individualité dialectale que dans la flexion et le
lexique : il leur arrivera sans doute de dresser l'oreille en
cntendant tel mot, telle forme insolites, mais dans l’en-
LE PROBLÈME DE LA LANGTE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 257
semble 115 ne tarderônt pas à se comprendre à merveille et
deviendront vite amis. Les différences colossales que présente
la phonétique des dialectes et mème des individus restent géné-
ralement peu connues au profane, parce qu'il ne peut pas
débarrasser sa conception de l’image visuelle du mot écrit avec
des lettres, si nous pouvions construire un appareil phoné-
tique mille fois plus sensible que ceux d'aujourd'hui, et si
nous pouvions obtenir que nos cinq paysans de tout à l'heure y
enregistrent un mot quelconque, tel qu'ils le prononcent dans
le commerce journalier, sans aucune préoccupation psycholo-
gique, il en résulterait des courbes qui n'auraient pas un point
commun hormis l’origine, et le non initié ne pourrait pas croire
qu'elles traduisent le mème mot.
Cependant, si fortes que soient les différences phonétiques,
dans l'écriture ordinaire, et par conséquent dans la littérature,
elles ne trouvent aucune expression ou une expression tout à
fait inadéquate. Voilà pourquoi l'individu s’assimile bien plus
vite une orthographe déterminée qn'une prononciation déter-
minée. Par là se trouve évidemment et heureusement éliminé
le principal obstacle que la variété dialectale oppose en appa-
rence à la formation d’une langue littéraire uniforme. Pour le
néo-grec, cette proposition s'applique encore plus sûrement que
pour l'allemand, par exemple, car les différences phonéliques
des dialectes y sont beaucoup moins fortes. Les particularités
lexicologiques et morphologiques sur lesquelles insistent les
adversaires de la langue populaire, n’occasionnent, comme je
l'ai montré, aucun trouble sensible. Elles aussi, d’ailleurs, sont,
comme les divergences phonétiques, moins nombreuses ct
moins compliquées en néo-grec qu’en allemand, en italien ou
en français, et le néo-grec a sur ces langues encore un autre
avantage : tandis qu'en Allemagne, en France et en Italie la
langue littéraire est née de la prépondérance d’un dialecte
unique, les Grecs, eux, n’ont pas besoin de se raltacher à une
forme dialectale déterminée en faveur de laquelle 115 écarte-
raient les autres. Dès à présent, en eflet, ils possèdent une
258 KARL KRUMBACHER
langue naturelle commune dont le type le plus parfait est la
langue de la conversation athénienne, et qui leur fournit une
base solide pour une langue littéraire capable de vie.
C'est donc une véritable politique d'autruche que de fermer
obstinément les yeux à ces faits comme le font les pédants, et
de s’acharner à nous démontrer que le morcellement dialec-
tal ne permet pas à la langue littéraire de se modeler à
l'idiome du peuple (1).
ΠῚ
Quand même on arriverait à rendre la langue artificielle d'un
accès encore beaucoup plus facile et à élever l'instruction popu-
laire à un tel degré qu'elle devint intelligible même aux
couches profondes de la nation, on n’y aurait pas encore gagné
grand'chose. La simple transmission mécanique d'un certain
contenu n'épuise pas la tâche d'une langue écrite; sans cela
l'idéal rèvé par tant de gens d’une langue universelle pourrait
peut-être se réaliser, qu'il s'agisse du latin, de l'anglais ou du
volapuk. Une langue littéraire capable de vie doit être apte à
des tâches plus élevées; elle doit être si vivante qu'elle soit
non seulement comprise mais sentie ; si vivante, qu'elle jaïllisse
de l'âme et « prenne d'assaut les cœurs de tous les auditeurs »;
si vivante, qu'elle sache façonner artistement la matière. Elle
doit s'entrelacer si étroitement avec les fibres de l'âme natio-
nale, qu'elle puisse exprimer sans déformation les sentiments
les plus grands et les plus profonds qui émeuvent le cœur
de l'homme dans la tourmente de la passion. Avant tout, elle
doit être quelque chose de si plastique et de si souple que
la. personnalité de l'écrivain y trouve une expression claire
et sincère, qu'elle puisse servir à la création d’un style origi-
(1) L'auteur passe ensuite à l’examen des vertus et des vices de la langue arti-
ficielle. 11 rend justice aux services qu’elle a rendus pour la propagation des idées
et des institutions modernes, mais là s'arrête sa capacité.
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 259
nal, et qu’un grand esprit puisse s’en servir de manière à
entraîner avec fui tout un peuple vers un idéal plus élevé.
Devant de pareils problèmes la langue « épurée » défaille, et
elle doit défaillir, parce qu'elle est en grande partie le produit
d'une élaboration artificielle à coups de grammaire, de dic-
tionnaire et d'exercices d'école; parce qu'elle dépend dans une
trop large mesure de la mémoire mécanique et du raisonne-
ment logique; parce qu'elle n'a pas été sucée avec le lait
maternel, apprise dans les jeux de l'enfance, développée dans
le feu de la jeunesse, associée avec l'éducation intérieure de
l’homme, avec les multiples expériences de sa vie, avec ses
vœux, ses aspirations, ses espérances. La καθαρεύουσα est une
« langue en papier » dans le pire sens du mot ; elle réglemente
les fuyants sentiers de la pensée et les subtils tressaillements
de la sensibilité au lieu de s'y plier elle-même. La spontanéité
absolue, la sincérité ressentie de l'expression — idéal de tous
les grands écrivains — se heurtent à la roideur de ses formes
pétrifiées. La « sainte folie » de l'inspiration artistique se perd
et s épuise dans le maquis des règles et des exceptions.
La tentative d'insufler à cette langue artificiellement galva-
nisée un vrai souffle de vie est un labeur de Sisyphe. Pour don-
ner à l'expression un vêtement classique, tantôt on remplace
des mots populaires par des synonymes tirés de l'ancien grec,
tantôt on se borne à les archaïser par diverses opérations chi-
rurgicales : on recolle des syllabes initiales tombées, on com-
plète des terminaisons mutilées, on « rétablit », on « corrige »
des voyelles ou des consonnes disparues ou altérées. Dans tout
ce travail de laboratoire se fait jour non seulement la tendance
au classicisme, mais l'obscure espérance qu'avec le temps,
grâce aux soins assidus de la clinique livresque, on réussira à
ressusciler les mots el les formes depuis longtemps endormis,
et à rapprocher d'autant la langue naturelle du vieux grec.
Pour qui ne connaît pas le néo-grec, on peut rendre intelli-
gibles les procédés employés à « l'épuration » de la langue par
un exemple tiré des langucs romanes. Essayons, par quelques
260 KARL KRUMBACHER
tours de vis, de ramener le début de la Marseillaise au latin, en
substituant à chaque mot français la forme latine qui lui corres-
pond étymologiquement : A{/ons enfants de la patrie — Ambu-
lemus infantes de 1lla patria, Le jour de gloire est arrivé — Ulud
_ diurnum de gloria est adripatum. Voilà qui n'est ni du vieux
français ni du latin, mais du français nouveau refondu d’une
manière toute mécanique dans le moule latin. Une pareille
‘langue, sous cet aspect, n'a jamais été vivante à aucune époque ;
ce n'est qu’une expérience linguistique, qui peut illustrer gros-
sièrement l’origine des mots individuels, mais qui néglige tous
les éléments intermédiaires et le développement si varié dès
formes. Même l'académicien le plus conservateur ne considé-
rerait pas un pareil jargon comme du français amélioré, ramené
in pristinum splendorem. Il était réservé aux grecs de prendre
au sérieux ces rétrogressions artificielles ; c'est en principe de
cette façon qu'ils procèdent (bien entendu moins radicalement)
quand ils « corrigent » les formes modernes d'après le modèle
antique.
Toutes ces améliorations sont de la peine perdue. C'est un
des résultats les plus certains de la science linguistique, que
J'on n’a jamais réussi, qu'on ne réussira jamais, par des pres-
criptions grammaticales, et par l'emploi obstiné en littérature,
à réintroduire dans la langue naturelle une syllabe initiale tom-
‘béc, une terminaison raccourcie ou toute autre forme altérée.
On aura beau imprimer des millions de fois dans des livres ou
dans des journaux ὀμμάτιον (ou même ὀφθαλμός) au lieu de
μάτι, ψωμίον (ou même ἄρτος) au lieu de ψωμί, ὁ πατήρ pour ὁ
πατέρας, ἐλθέ pour ἔλα, οὕτως pour ἔτσι οἷα...., le peuple, οἱ
même le lettré, le savant, quand 1] parlera spontanément,
reviendra toujours aux formes naturelles, proscrites par la
langue écrite. Un élément morphologique disparu, s'agit-il
même d'une seule lettre, est aussi impossible à ressusciter qu’il
est impossible à la médecine de nous recoudre un doigt coupé
qui est resté pendant un an dans l'alcool. Tout ce qu'on peut
‘obtenir, c'est la réintroduction artificielle d’un mot ancien dans
LE. PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 9264
quelque terminologie officielle ou technique ; mais cela même
ne peut réussir que si la forme du mot n'est pas en conflit avec
la morphologie nouvelle (1).
IV
Un des procédés les plus instructifs pour l'appréciation du
problème du néo-grec est l'examen comparé de l'histoire d'au-
tres langues littéraires ou littératures. Malheureusement ce
moyen a été peu employé jusquà présent en Grèce; c'est ce
que montre par exemple un article récemment publié par Hat-
zidakis (2). Après avoir insisté avec raison sur l'importance du
point de vue historique, dans toutes les sciences et dans les
arts, il continue en ces termes : « Et maintenant, je le demande
à tout homme raisonnable, a-t-on jamais vu dans l'histoire un
seul exemple d'un peuple qui, possédant une langue appro-
priée à sa législation, à la rédaction de ses traités, aux besoins
de son parlement, de son administration, de ses écoles, à ses
jourhaux, à ses livres, à la correspondance ct aux relations de
toute espèce, l'ait abandonnée pour s'en façonner une autre à
son usage ? Pour ma part, je n’ai jamais rencontré de pareil
exemple, quoique j'aie blanchi dans l'étude de l'histoire des
langues. » En présence de ces affirmations, signalons tout
d'abord le grand exemple des nations romanes. Ces nations, et
principalement les Italiens, dont l'évolution offre le parallèle lo
plus exact, ont soutenu des luttes semblables à celle des Grecs
d'aujourd'hui pour la conquête d'une langue littéraire viable.
En Italie aussi, il existait jusqu’au xne siècle une langue «appro-
priée » aux besoins de la justice, de l'administration, de l’école,
des livres, de la correspondance, etc... Cette langue paraissait
(1) M. Krumbacher met ensuite en parallèle l'attachement passionné des Grecs
lettrés à la langue artificielle avec leur préjugé également enraciné en faveur de
la prononciation nto-grecque du grec ancien. Il félicite Hatzidakis d’avoir rompu
avec une superstition d'école devenue en Grèce une sorte de dogme intangible.
(2) Τὰ Πάτρια, 42 octobre 1902.
262 KARL KRUMBACHER
alors aux lettrés aussi bien « appropriée à leurs besoins », aussi
« distinguée » que la langue « épurée » le semble à ses parti-
sans grecs d'aujourd'hui ; et pourtant, les Italiens ont aban-
donné cette langue et ont organisé à sa place unc langue nou-
velle.
Il importe peu pour la portée instructive de ce parallèle qu il
faille en éliminer les notions de la presse ct du Parlement, et
que le processus se soit accompli en Italie sept siècles plus tôt.
En revanche, il est intéressant de constater que le moment où
les Italiens et les autres nations romancs ont secoué avec l'ar-
deur d'une force juvénile le lourd carcan d’un latin pétrifié, où
elles ont tiré du langage populaire un nouvel idiome littéraire,
est précisément l'époque où ces peuples, après de longs siècles
obscurs, s’élevaient à une nouvelle et haute civilisation: car la
véritable Renaissance de l'Italie et, dans un certain sens, celle
du monde roman tout entier, commence au xm° siècle avec
l'affermissement et le développement complet des idiomes
nationaux. Cette Renaissance-là a été bien plus grandiose
comme phénomène historique, plus saine dans son essence,
plus durable dans ses fruits que la Renaissance au sens étroit,
qui a consisté principalement dans le retour au classicisme et
au puganisme. Les Grecs sont aujourd'hui mutatis mutandis au
point où se trouvaient les Romans au xn° siècle ; puissent-ils
saisir dans toute sa portée le grand enseignement historique de
l'occident! puissent-ils se représenter dans toute sa réalité
concrète quel eût été le sort des nations et des littératures ita-
lienne, française, espagnole, si l'on n'avait pas, à cette époque,
jeté sans scrupule le bon Donat au débarras et si l’on s'élait
contenté d'un compromis analogue à celui de la langue « épu-
rée » des néo-Grecs, consistant à écrire par exemple : Nessu-
nus maior dolor quam recordari se de illo tempore felice in illa
maiseria (1).
(1) Hatzidakis conteste (Παναθήναια, 1902, XXXV, p. 217 ss.) la justesse du
parallèle entre la χαθαρεύουσα et le latin médiéval, « διότι ἡμεῖς δὲν ἀκολουθοῦμεν
δουλιχῶς τοῖς ἀογαίοις ποοτύποις, ὅπως οἱ τοῦ μέσου αἰῶνος Αατινισταὶ ἐποίουν, ἀλλ᾽
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 263
Si l'on voulait contester la force probante de ce parallèle
parce qu'il date d'une époque où l'imprimerie, si importante
pour la constitution d’une littérature, n'était pas encore inven-
tée, et où régnaicnt, sous bien des rapports, des conditions dif-
férentes des nôtres, il est facile de citer d’autres exemples lirés
de temps plus modernes. Nous les trouvons chez les Slaves, si
souvent, mais si injustement méprisés par les Grecs, qui
pourraient apprendre d'eux tant de choses. La Russie n'a
renoncé qu’au commencement du xvin° siècle à sa vieille
langue littéraire, pétrifiée dans les formes du slavon ecclésias-
tique, et c'est seulement depuis cette époque que sa littérature
nationale a pris ce puissant essor avec lequel, au courant du
xix° siècle, elle a fait une entrée si grandiose dans la littérature
universelle. Ni la langue fine et clarifiée d'un Pouchkine ou
d’un Tourguenieff, ni les puissantes peintures psychologiques
d’un Dostoïewsky, ni le style lapidaire d'un Tolstoï, ni la dic-
ὅτι καὶ νέα πλάττομεν χαὶ ταῖς ἀρχαίαις λέξεσι νεωτέραν στιμασίαν δίδομεν καὶ χαθόλου
ἢ χρῆσις τοῦ παρόντος μετὰ τῶν ἀρχαίων προτύπων χαταρτίζουσι τὸν χανόνα τοῦ
λόγου ἡμῶν. On sait pourtant que les Latins du moyen âge ne suivaient pas ser-
vilement leurs modèles, inais que, tout comme les Grecs d'aujourd'hui, ils intro-
duisaient des mots nouveaux, employaient des mots anciens dans un sens modi-
fié, et de toutes façons développaient la langue en l’adaptant aux besoins nou-
veaux. S'ils n'avaient pas procédé ainsi, Du Cange n'aurait pas eu besoin d'écrire
son énorme Glossarium ad scriplores mediae el infimae Latinilatis, qui daus le
remaniement de Henschel forme sept formidables volumes. Donc, au moyen
âge, le latin demeura vivant jusqu'à un certain point; ce n'est que lorsque les
humanistes voulurent se rattacher directement à Cicéron, que le latin devint une
langue complètement morte et incapable de servir désorwais aux besoins uni-
versels des rapports scientifiques et commerciaux, ainsi que l'a justement observé
H. Paul (Prinzipien der Sprachgeschichte, 3° éd., 1898, p. 383). Même de nos
jours dans un pays où il fut longtemps l'organe des publications otlicielles, et
parfois même privées, en Hongrie, le latin a bénéficié de beaucoup d'enrichisse-
ments et d'un développement ultérieur. On peut s'en assurer en feuilletant le
Glossarium mediae et infimae latinitatis regni Hungariae (Leipzig, Teubner, 1901)
récemment publié. Je ne soutiens pas, bien entendu, que le latin médiéval se
soit développé par des néologismes etaccommodé à son époque au même degré
que la langue littéraire néo-grecque; mais la différence provient moins d'une
dissemblance intime des deux moyens d'expression que du fait qu'au moyen
âge, pour mille causes extérieures, un développement aussi rapide et aussi mul-
tiple que celui de la καθαοεύουσα n'aurait pas été possible. En principe il n'en
subsiste pas moins une grande analogie entre le latin médiéval et la langue
savante néo-grecque.
264 KARL KRUMBACHER
tion populaire, dans le meilleur sens du mot, d’un Tchekhov
et d'un Gorki ne seraient imaginables si la littérature russe
n'avait secoué en temps opportun les étroites entraves de la
langue d'église.
C'est plus tard encore que les Serbes ont réussi à procurer à
leur langue naturelle droit de cité dans la littérature. Jusqu'au
commencement du xix° siècle régnait dans la Serbie orthodoxe
une langue archaïque, peu intelligible au peuple, mélange de
slavon d'église et de serbe; l’idiome populaire était méprisé
et déclaré indigne d’un emploi littéraire, mais bien entendu les
ouvrages rédigés dans la langue archaïque ne pouvaient péné-
trer dans les couches profondes de la nation. Ainsi s’explique
le peu d'influence de l'ouvrage historique en quatre volumes
de Jean Raïc (mort en 1804), dont le centenaire a été récem-
ment célébré. Il en fut de même des odes de l'évêque Mous-
chicki (mort en 1837), finement ciselées, mais dans une langue
sans. vie. C'est aux grandes collections de chansons populaires
de Vouk Karadjik que la littérature serbe a dù se ressaisir ; le
pseudo-classicisme fut vaincu par l'épopée populaire. Ici encore
la poésie a précédé la prose et lui a frayé la voie, comme chez
les Romains et les Néo-grecs, et sans doute aussi dans la cons-
titution de toutes les langues littéraires:
Ce que les Serbes ont conquis, les Bulgares ont encore à le
conquérir. Leur littérature en est encore aujourd’hui au même
point que la littérature serbe avant Vouk : « D'un côté, disent
Pypin et Spasovitch (4), la tradition littéraire, un riche bagage
de formes et de mots d'origine russe ou paléo-slave, auxquels
malheureusement le peuple ne comprend pas grand chose, de
l'autre la langue vivante qui a besoin d'être façonnée et comme
recréée. Dernière difliculté enfin : « dans la langue vulgaire
même, il règne une extrême incertitude à cause de différences
de prononciation et de dialecte, les règles de l’orthographe
même sont loin d’être fixées. »
(1) Histoire des liltéralures slaves (traduite en francais par Ernest Denis,
Ῥ. 115).
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 265
Il ne sera pas inutile de jeter également un coup d’æil sur
une nation qui, aujourd'hui, n'appartient pas au cercle de la
civilisation européenne, mais qui autrefois a eu avec elle les
rapports les plus étroits, et qui habite aux portes de l'Eu-
rope, et en particulier du monde grec : je veux parler des
Arabes. Ils se contentent aujourd’hui d'une langue littéraire
emprisonnée dans de vieilles formes mortes toutes semblables
à celles du néo-grec « épuré », et jusqu'à présent il y-a peu
d'espoir qu'ils réussissent à organiser une langue littéraire.
vraiment moderne. L’obstacle principal provient de ce que les
dialectes arabes, qui sont parlés sur une immense étendue,
depuis Mossoul jusqu'à Maroc, ont divergé peu à peu les uns
des autres dans des proportions bien plus considérables que
les dialectes néo-grecs. Peut-être cependant cet obstacle pour-
rait-il être surmonté si l’on adoptait comme base de la nouvelle
langue littéraire un dialecte qui occupe géographiquement une
situation centrale et intermédiaire, dans un pays relativement
civilisé; j'ai nommé l'arabe d'Égypte. En fait on a proposé
d'ériger le dialecte du Caire à la dignité de langue littéraire, et
un Égyptien a traduit en langue populaire quelques comédies
de Molière; toutefois ces projets de réforme sont restés fort
isolés et n'ont point prévalu. 1185 rencontrent sans doute un
grand obstacle dans l'infériorité de la civilisation actuelle
des Arabes et dans Ie remarquable affaissement de leur res-
sort intellectuel. Je n’ai pas à rechercher les causes de cette
décadence, mais certainement les Arabes ne réussiront pas à
entrer réellement dans la sphère de la civilisation moderne
tant qu'ils ne se seront pas formé une nouvelle langue litté-
raire viable. Ajoutons toutefois que chez les Arabes le mal est
quelque peu atténué par les particularités de la notation écrite.
« Le système d'écriture, m'écrit Nældekc, qui ne note pas les
voyelles brèves masque de nombreuses différences et permet
par exemple de lire correctement des phrases entières à volonté
dans la langue ancienne ou dans un dialecte moderne. Aussi
le besoin d’une création nouvelle n'est-il pas aussi pressant ici
266 KARL KRUMBACHER
que chez les Grecs. Il faudra pourtant, dans le cours des siècles,
se décider à le satisfaire. »
L'immixtion artificielle d'éléments anciens se fait sentir
d’une manière non moins préjudiciable dans la langue litté-
raire néo-arménienne. Dans l'introduction de sa grammaire de
cette langue, N. Fink s'exprime ainsi : « Ce qu'enseigne le
présent livre, c'est la langue de l'Arménic orientale, fondée
sur le dialecte d'Érivan, mais fortement influencée par des
éléments, artificiellement maintenus, de l’arménien ancien.
Cette langue mixte, qui a eu pour initiateur Abowéan, a reçu
sa forme actuelle principalement de Stéphan Nasaréan, Michel
Nalbandéan et Raphaël Patkunéan. Elle n'est sans doute pas
librement maniée par tous les Arméniens orientaux, mais elle
est généralement regardée comme exemplaire, et elle est ainsi
devenue l'organe d’une littérature digne d’attention. Elle per-
met, même dans les cercles de gens qui ne parlent que les dia-
lectes, une conversation commune, qui répond aux besoins de
la vie journalière. » De curieuses tendances archaïsantes se
rencontrent également chez les Turcs, les Syriens et, comme
me l’apprend mon collègue Kuhn, dans les littératures néo-
indiennes, par exemple chez les Cinghalais.
Une conclusion bien nette ressort des faits énumérés qu'une
connaissance plus approfondie des langues orientales permet-
trait sans doute de multiplier et de préciser. Parmi les nations
européennes et leurs voisins immédiats d'Asie et d'Afrique, les
Grecs, les Arabes, les Arméniens orientaux, les Turcs, les
Syriens, et quelques tribus hindoues, forment, au point de vue
de leur langue écrite, un groupe archaïsant; leur trait carac-
téristique est une prédilection excessive pour des éléments lin-
guistiques morts et disparus depuis longtemps, un dédain de
grand seigneur pour les ressources de la langues naturelle —
ou l'incapacité de les approprier à l'expression littéraire. Si les
puristes grecs, si fiers de la patine antique de leur langue,
n'ont pas peur de rester mèlés à cette compagnie orientale, il
n'y a plus rien à faire pour eux. Faut-il croire que l'infiltration
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 207
de l'Orient dans le caractère byzantin et néo-grec est devenue
si prépondérante que, même en matière de langue et de litté-
rature, les Grecs aiment mieux imiter le formalisme pétrifié
des Orientaux que de répondre à l’appel alerte au progrès que
leur adresse l’Europe occidentale ? (4)... |
V
Une question étroitement liée à celle de la relation psycholo-
gique des Grecs avec leur langue « épurée » est celle-ci : doit-
on, et jusqu'à quel point, considérer la langue « épurée »
comme une langue vivante, et inversement quelle languc,
opposée à celle-là, doit être considérée comme naturelle? Au
fond, ce ne devrait pas être là des questions; mais l'assertion
que la langue « épurée » constitue la langue néo-grecque véri-
table et vivante est répétée tous les jours dans la discussion, et
tout récemment un auteur grec éminent m'écrivait que le
nœud du problème résidait dans la définition du concept
« Jangue naturelle »; je dois donc examiner aussi ce côté du
problème. A cet effet, le meilleur moyen consistera à placer en
regard l’une de l’autre deux séries de phrases rédigées l’une
dans la langue naturelle (groupe A), l’autre dans la καθαρεύουσα
(groupe B). Sur la rédaction des exemples A, il ne saurait s'éle-
ver aucun doute : elle représente la langue vulgaire naturelle
telle qu'elle est parlée dans le commerce journalier à Athènes,
par 999 habitants sur 1,000, à moins qu'ils n°’ « archaïsent »
dans une intention particulière, par exemple par une bienveil-
lante considération pour un philologue étranger en voyage. À
Smyrne, à Constantinople, etc. quelques formes se présente-
raient sous un autre aspect; mais là aussi, tout homme du
(1} M. Krumbacher examine ensuite la question délicate du « rapport psycholo-
gique » des Grecs avec leur langue littéraire; il voit, dans l'emploi continu de
cette langue, la source d’un dualisme psychique, la cause d'une déformation du
goût, qui s'attache aux beautés conventionnelles et aux élégances factices.
268
RARL KRUMBACHER
peuple comprendrait immédiatement nos phrases sous la forme
indiquée. Dans le groupe B un critique grincheux pourrait
trouver fort à redire, car la langue « épurée » est, comme l’on
sait, une formalion assez flottante et qui dépend largement du
caprice individuel. Je fais donc observer, pour couper court à
d’inutiles chicanes, que les grandes phrases ne sont pas de
ma façon, mais ont été empruntées à des publications de ces
dernières années.
A
Langue populaire :
1. Ὃ πατέρας μας πέθανε.
2. Τὸ σπίτι τοῦ πατέρα ou
χάηχε.
3. Ἐχαρίσαμε ᾿ς τὸν πατέρα (ou
bien τοῦ πατέρα) μου ἕνα
σπίτι.
4, “Eva σκαλοπάτι ἔσπασε.
5. Ῥῖξε φαῖ᾿᾿΄ς τὶς κόττες.
6. Κανεὶς ὁὲ βρίσκει τὸ δίκιο του
σὲ τοῦτο τὸν χόσμο.
t “ “- y
7. Ἢ γυναῖκα, ποῦ παντρεύτηχε.
8. Τότε συνέταξαν διαβθήχην, ἢ
ὁποία ἄνοιξε αὐτὸν τὸν
ἀγῶνα.
9. Εἰς τὴν Κέρχυραν ἐχάθισα μο-
y ρ 2". PA 4
vaya μίαν ἑῤδομάδα χαὶ
μ᾿ ᾿ 3 » 6 Α
ἔτσι δὲν μ᾽ ἔφτασε ὁ χαιρὸς,
va ἐξετάσω τὴν τοπογρα-
? 4 Α ? 4
φίαν καὶ νὰ γνωρίσω τὸν
χοινωγιχὸν βίον τῶν χατοί-
KXOY.
B
Langue savante.
Ὃ πατὴρ ἡμῶν ἀπέθαι
ν τὴ nl ÿ ie AVE.
€ 3 -. ᾿ 9 7?
Η οἰκία τοῦ πατρός pou éxar,.
Ἐδωρήσαμεν τῷ πατρί μου οἰκίαν.
Μία βαθμὶς τῆς κλίμαχος ἐθραύσθη.
'Ρίψον τροφὴν εἰς τὰς ὄρνιθας.
Οὐδεὶς εὑρίσχει τὸ δίκαιόν του εἰς
αὐτὸν τὸν κόσιλον (ἐν αὐτῷ
τῷ χόσμῳ).
Ἢ γυνή, ἥτις ἐνυμφεύθη (dans
la langue scientifique
aussi : ἔγημε).
Τότε συνετάχθη διαθήκη n τὸν πα-
ρόντα ἀγῶνα καταστήσασα.
Ἐν Κερκύρᾳ διέμεινα ἐπὶ ἑόδομάδα
μόνον, ἥτις εἴνε χρονικὸν
διάστημα βραχὺ πρὸς τοπο-
γραφιχὴν ἔρευναν χαὶ γνῶ-
σιν τοῦ χοινωνικοῦ τῶν χα-
τοίχων βίου.
=
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 269
10 "Hoÿe τηλεγράφημα ἀπὸ τὸ
Αἰτωλικό, πῶς προχτὲς τὴ
νύχτα ᾿ς τὴ θέση Κόντου-
4 0 4 L
pos ἐσχοθώθηχε μὲ τουφέχι
(ὅπλο) ὁ A. Παπαφώτης,
φύλαχας 'ς τὰ χτήματα τοῦ
Καρδέλη. Où φονιάδες εἶναι
ζωοχλέφτες χαὶ πῆγαν ἐκεῖ
γὰ χάμουν τὴ συνειθισμένη
τους δουλειὰ (ou bien τὸ
ἐπάγγελμά τους) καὶ ἅ
πάγγελμά Tous } qua
L = 4 [An e β =
TOUS EUTOOLTE 0 ἢ απαφωώτης,
Τηλεγραφικῶς ἠγγέλθη ἐξ Αἰτωλι-
΄“«, a 4 A
χοῦ, ὅτι τὴν προχθεσινὴν
’ , “- [4
γύχτα ἐν τῇ θέσει Κόντουρος
ἐφονεύθη δι᾽ ὅπλου ὁ φύλαξ
τῶν χτημάτων KapbéAn, À.
? € - Ὑ
Παραφώτης. Οἱ φονεῖς εἶναι
΄ς
ζωοχλέπται, μετέδησαν δ᾽
4 -- \ 9 --
ἐκεῖ πρὸς ἐξάσχησιν τοῦ
ἐπαγγέλματός των καὶ ἐμπο-
δισθέντες ὑπὸ τοῦ Παπαφώτη.
4 U 4 4 9 -
ἐπυροδόλησαν καὶ τὸν ἀ»ῇ,-
χαν ἄπνουν.
ἐπυροδόλησαν καὶ τὸν ἀρῇ-
χαν τοῦ τόπου.
41. Ὡς τόσο δὲν ἠμπόρεσα νὰ Ἔν τούτοις δὲν ἡδυγήθην νὰ συγ-
χρατήσω τὴν ἀνατριχίλα, χοατήσω φρικίασιν ἀναλογισ-
ὅταν ἐσυλλογίστηχα, σὲ θεὶς τὸν κίνδυνον, ὃν διετρέ-
ποῖον χίνδυνο εὑρισκόμαστε. χουεν.
12. « Παποῦτσι ἀπ᾽ τὸν τόπο sou Προτίμησον ὑπόδημα Ex τῆς πα-
χι ἂς εἶν χαὶ μπαλω μένο » τρίδος σου ἔστω καὶ ἐμδαλω-
(proverbe). μένον.
Quiconque possède une connaissance même superficielle de
l'histoire du grec et des principes de la linguistique reconnaîtra
sans peine que la forme « épurée » de ces phrases correspond à
un slage morphologique et lexicographique essentiellement
différent de leur forme populaire, et qu'il est impossible que
deux formes de langage comme celles que j'ai mises en paral-
lèles soient réellement vivantes en mème temps. Or, laquelle
des deux est vraiment vivante? C'est un point qu'on ne peut
discuter, car dans les classes les plus hautes comme les plus
basses de la population, c'est seulement le premier groupe de
formes qu'on entend employer. Malgré cela beaucoup de Grecs
prétendent que les deux formes sont réellement vivantes; toute
la différence, disent-ils, c'est que le groupe A appartient au
La
270 KARL KRUMBACHER
langage de la canaille, tandis que le groupe B serait le langage
des gens cullivés. Cette coexistence de deux formes de langage
l'une inférieure, l'autre supérieure, serait quelque chose d'ana-
logue à la coexistence du patois de Berlin ou de Munich avec
la langue commune usitée dans toute l’Alllemagne. En somme,
les formes anciennes seraient simplement un peu « mutilées »
en passant par la bouche du peuple ou « défigurées » par une pro-
nonciation rapide ; au fond, elles seraient restées vivantes οἱ
inchangées.
Lo raison de cette conception erronée doit être cherchée dans
l'organisation de l’enseignement scolaire, et dans son prolon-
gement pratique par la presse, la littérature, etc. A l'école on
enseigne exclusivement la grammaire de l’ancien grec; les mor-
ceaux choisis, les exercices sont presque entièrement conformes
au modèle ancien, tant pour la flexion que pour le lexique;
c'est encore cette forme de langage découpée à l'antique que
les adultes retrouvent dans les journaux, dans les livres, etc...
Ajoutons que jusqu’à présent beaucoup de notions et d'idées
abstraites ne peuvent s'exprimer commodément et sans équi-
voque qu'au moyen de la langue artificielle. Par le long pro-
cessus de l'instruction scolaire, composé d'une infinité de phé-
nomènes psychiques, par l’habitude que donnent la lecture et
la production écrite, il s’est formé peu à peu chez les lettrés et
les demi-letirés l’idée obscure que la langue « épurée », dont on
leur a inculqué les formes et les mots depuis l'enfance, n'est pas
seulement la langue normale de la littérature, mais encore une
langue vivante et naturelle. Inversement, la langue vraiment
vivante et naturelle leur paraît constituer un mode d'expression
inférieur, pauvre et incorrect sinon pour l'usage oral, du moins
pour l'usage écrit — bref une forme de langage de second
ordre. À force de n'avoir en vue que les formes de la langue
artificielle, on perd la faculté de distinguer les formes, les
moyens, les limites de la langue naturelle; et ainsi s'explique
la question de mon ami grec. « Qu'est-ce que la langue natu-
relle? » J'ai indiqué la manière d'y répondre par le parallèle
s
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 274
donné plus haut. Il est impossible à toute personne scientifique-
ment documentée, sachant s'affranchir de la puissante influence
de l’école et des habitudes littéraires, d'y répondre autrement.
Il est impossible de considérer comme la langue naturelle des
Grecs actuels un type de langue que caractérisent πατρός, σὺν
τῇ διαπλάσει, τῶν ὁμοφρονούντων αὐτῷ, μετατραπέν, ἐξελεύσονται,
a μεταδώσουσαι (exemples pris au hasard dans un article que j'ai
sous les yeux). Croire que cette langue soit vivante ou qu'elle
puisse jamais le devenir est une erreur, une erreur néfaste, car,
séduite par cette chimère, la jeune nation poursuit des fan-
tômes inaccessibles et perd de vue en attendant le but qu'elle
pourrait atteindre.
Étant donné l'expérience que nous fournit l'histoire des
langues et des littératures humaines, on peut affirmer aujour-
d'hui avec une absolue certitude que la χαθαρεύουσα, en tant
qu’elle se compose de formes et de mots inutiles de l’ancien
grec, ne s'identifiera jamais à l'âme du peuple au point de
compter comme langue naturelle, ni au sens le plus large du
mot, ni en une manière quelconque encore inconnue et non
définie par la science (1)...
VI
Quel sera l'aspect de la langue littéraire grecque dans cent
ou deux cents ans, nul mortel ne saurait le dire aujourd'hui. Je
(4) Dans les pages suivantes l'auteur montre le caractère incurable de la
diglossie et énumère ses effets funestes : dans l'enseignement devenu purement
formel et passif, dans le droit, l'armée, l'église, la vie nationale en général, la lit-
térature, etc. Il esquisse ensuite un tableau du nouveau mouvement de réforme
et des fruits qu'il a déjà portés dans les livres comme dans les journaux; il ana-
lyse l'état des théories grammaticales et du dictionnaire néo-grec et passe enfin à
l'examen de la question du « compromis ». Sur ce point il condamne le radica-
lisme de Psicheri et son dogmatisme intransigeant fondé exclusiveinent sur des
considérations linguistiques; un compromis est nécessaire, mais il y a compromis
et compromis. Le seul, selon M. Krumbacher, qui soit viable, est celui qui aura
pour base la langue naturelle (vulgaire), tout en acceptant des formes et des mots
de la langue savante consacrés par l'usage ou la nécessité ; l'orthographe histori-
que devrait être maintenue.
18
"272 | ᾿ς KARL KRUMBACHER
n’ose pas croire à une victoire complète de la langue populaire
sur tous les domaines littéraires. S'il n'intervient pas d'une
manière imprévue quelque puissant facteur, comme, par
exemple, un écrivain de génie, l'évolution se fera peut-être
ainsi : dans l’ensemble de la poésie et de la prose d'imagination
régnera une langue littéraire fondée sur la langue naturelle,
mais sensiblement éloignée du radicalisme vulgariste de l’école
de Psichari; ce qui n'empêchera sans doute pas, même dans
un avenir reculé, des auteurs isolés de composer en langue
distinguée un poème ou un conte pour leur plaisir personnel,
tout comme aujourd’hui quelques têtes désœuvrées forgent des
vers grecs ou latins.
De cette façon se formera une littérature vraiment néo-
grecque, constituée d'éléments glossiques néo-grecs authen-
tiques, et reflétant les particularités de la vie et du caractère du
peuple grec moderne; littérature qu'ont heureusement déjà
commencée il y a quelque temps, dans le domaine de la poésie,
Solomos, Christopoulos, Valaoritis et d'autres, et que tout
récemment, dans le domaine de la prose, Psichari et ses amis
immédiats d’une part, les hommes groupés autour de certains
journaux d'autre part, ont efficacement préparée. Par contre il
est à supposer que la science, l’État et l'Église, conserveront
encore longtemps 18 χαθαρεύουσα, bien que sous une forme
tempérée. Malgré ce rapprochement de la langue savante vers
le peuple et de la langue populaire vers les savants, les deux
formes glossiques n’arriveront pas à se rejoindre, comme on
l'a pensé, pour se fondre en une seule. La diglossie se main-
tiendra, non pas toutefois dans l'ancienne äâpreté, οἱ les
domaines des deux langues délimiteront leurs frontières avec
une précision toujours croissante. Dans cette évolution,
quelque désavantageuse qu’elle soit pour la langue naturelle,
le champ le plus important pour la civilisation nationale sera
sauvé : celui des belles-lettres.
La grande tâche serait singulièrement facilitée si le Dante ou
le Luther néo-grec depuis longtemps attendu venait à surgir
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 9212
pour doter la nation d'une langue littéraire moderne, grâce au
poids irrésistible d’une grande création littéraire. Beaucoup
prétendent même que sans l'apparition d'un ou de plusieurs
écrivains de génie le retour à la nature n’est plus aujourd'hui
possible, parce que la langue « épurée » ἃ. déjà pris trop solide-
ment racine (1). Peut-être ces pessimistes auront-ils raison ;
mais ce serait un manque de conscience si les Grecs, dans
l'attente confiante de ce Messie problématique, se croisaient
tranquillement les bras. D'abord, il n’est pas absolument cer-
tain que la création d'une langue littéraire praticable soit
impossible sans l'intervention d'un auteur génial : il existe des
langues littéraires que n'ont fondées ni un Dante ni un Luther;
la langue littéraire néo-russe, par exemple, a été formée non
par un grand mais par beaucoup de petits auteurs, et lors-
qu'enfin, dans la deuxième moitié du xix° siècle, parurent les
puissants écrivains russes qui remuèrent le monde, l'instru-
ment littéraire était en somme déjà achevé. Ensuite, il faut
considérer que cette idée courante de la création d'une langue
littéraire nouvelle par Dante ou Luther doit être entendue
cum grano salis : eux non plus n’ont pas tiré leur création dun
néant. L'œuvre de Dante avait été préparée depuis le début du
ΧΙ" siècle, soit depuis environ cent ans, par les troubadours
(1) Malgré tout on doit se réjouir qu'un adversaire aussi décidé et aussi con-
sidérable que G. N. Hatzidakis considère comme indubitable l'introduction de
la langue naturelle dans la littérature, sous la condition indiquée du « génie ».
I dit dans le Λεξιχὸν ἐγχυχλοπαιδιχόν 5. v. "EXAnvxh γλῶσσα, (Athènes, 1893), III,
p. 806 ss. : « Voilà pourquoi la langue des chansons populaires nous paraît plus
mâle et plus mélodieuse (que la xaôzxpetouoa). Et il n’est pas douteux que si
aujourd'hui des hommes de la valeur des anciens Athéniens composaient dans
cette forme de la langue nouvelle des œuvres d'art équivalentes aux leurs, c'est
cette forme qui deviendrait la langue littéraire de tout le peuple. » (Τούτου δ᾽ ἕνεχα
φαίνεται ἡμῖν ὃ τῶν γνησίων δημοτιχῶν ἀσμάτων λόγος ἀνδροποεπέστερος καὶ εὐφωνό-
τερος. Οὐδεμία δ᾽ ἀμριδολία ὅτι ἂν σήμερον ἄνδρες ἔχοντες τὰς ἀρετὰς τῶν ἀρχαίων
᾿Αθηναίων συνέτασσον ἐν τῇ νεωτάτῃ γλωσσικῇ φάσει ταύτῃ φιλολογικὰ καλλιτεχνήματα
ἀντάξια τῶν ἀρχαίων, αὕτη θὰ χαθίστατο f, γραπτὴ γλῶσσα τοῦ ἔθνους ὅλου.)
Il ressort de ses observations ultérieures que Hatzidakis ne croit d'ailleurs pas
à la’ possibilité de l'apparition de pareils Athéniens néo-grecs. Je considère ce
pessimisme national comme mal fondé : ce qui n'existe pas aujourd'hui peut
naître demain.
274 KARL KRUMBACHRER
italiens et autres amateurs doués du dolce stil nuovo; de même
Luther a eu de nombreux devanciers qui ont commencé l'édifice
achevé par son énergie géniale. Il ne faut pas s'attendre à ce que
le Luther néo-grec jaillisse comme Minerve du cerveau de Jupi-
ter. Si les éléments propres à la formation d'un tel homme dor-
ment au sein de la matière humaine de l’hellénisme actuel, ils
fleuriront et mûriront d'autant plus facilement que le sol aura été
ameublé auparavant par le labeur et l'abnégation de pauvres
tâcherons. Il serait donc bon que tous ceux qui sont théorique-
ment convaincus de la nécessité d'une réforme y travaillassent
aussi pratiquement dans la mesure de leurs forces en écrivant
des essais, en favorisant les organes de la langue populaire, en
faisant de la propagande verbale, etc. Chaque obole par
laquelle on y contribue peut rapporter plus tard de riches inté-
rêts au bien-être national.
L'avenir seul pourra trancher certains détails d'orthographe
et de lexicologie ainsi que beaucoup de questions de morpholo-
gie. Là n'est pas l'intérêt ; il importe peu de savoir s’il faut
écrire αὐτὸς ou ἀφτός, si un mot savant peut risquer ou non un
génitif en -ews, si tel ou tel mot sera reçu dans les salons ou
non, etc. Ce qui importe, c'est la décision de principe, seule
féconde. Doit-on enfin rompre une fois pour toutes avec la
tradition archaïque et byzantine, ou doit-elle aujourd'hui
encore, que le peuple grec, délivré d’une longue servitude, peut
se développer sans obstacles, être maintenue et traînée comme
un boulet jusqu'à la fin des siècles? Est-ce que la langue
naturelle d'aujourd'hui, telle que l'a élaborée un progrès de
2,000 ans, continuera à être traitée comme un méprisable
idiome de paysans ou doit-elle enfin être installée dans la posi-
tion qu’elle a bien conquise? Est-ce que les écoles, les tribunaux,
l'administration, l'armée, l'Église renonceront pour jamais à
l'elixir de vie qui s'appelle une langue vivante, ou doit-on
enfin accorder au peuple grec le plus sacré de ses droits — celui
de la langue maternelle? Est-ce que la nation, émancipée et
LE PROBLÈME DE LA LANGUE LITTÉRAIRE NÉO-GRECQUE 210
fortifiée, doit rester indéfiniment enfermée dans les lisières
d’un système de formes vieillies, ou doit-elle apprendre à mar-
cher avec ses propres forces?
Karl KRuMBACHER.
COURRIER DE GRÈCE
Athènes, 6/19 juin 1903.
Il n'est guère possible de tracer une esquisse, même vague,
de la situation en Grèce sans aborder la question politique.
J'aurais cependant voulu l'éviter; il n’y a rien de satisfaisant à
en dire. C’est un sujet d’étonnement et en même temps d’espoir
pour tous ceux qui aiment la Grèce, que de constater le progrès
matériel de ce pays malgré les fautes des partis appelés succes-
sivement à le gouverner.
Depuis plus de quatre mois le Gouvernement est à l’état de
crise chronique. M. Delyannis, le chef du Cabinet actuel avait
promis de réformer de fond en comble le système financier du
royaume; de plus, il devait réorganiser l’armée qui est encore
dans la situation fâcheuse où l'avait trouvée la guerre de 14897.
Comme premier point de cette rénovation, il s'était fait fort
d'enlever à S. À. R. le Prince-Héritier le commandement géné-
ral de l’armée qu'une loi proposée par le Ministère Théotokis
lui avait conféré. Le Princc-Héritier n’a sans doute pas la voca-
tion du martyre; il ne s'est pas laissé exécuter sans protester
et pour sauver le Cabinet le Ministre de la guerre, qui avait
présenté le projet, a dû se retirer. Quant aux réformes finan-
cières, l'échec est aussi complet. Le Gouvernement, mal sou-
tenu par une majorité très faible et encore plus indécise, n'a
pu, en une session de cinq mois, faire voter une seule des lois
sur lesquelles il avait appuyé les bases de son budget. Natu-
rellement ce budget lui-même.est resté perdu dans les profon-
deurs de l’ordre du jour et nous en sommes au sixième dou
COURRIER DE GBÈCE 271.
zième provisoire. L'âge d'or financier est donc encore loin de.
s'ouvrir. Le Ministère s’est vu dans l'obligation de recourir à
une session extraordinaire qui s'annonce mal; la crise chro-
nique menace de passer à l'état aigu, et l'on entrevoit déjà la
constitution d'un nouveau cabinet (1).
Pour nous consoler des déceptions de la politique, nous nous
tournerons vers les triomphes de la science. L'inauguration du.
musée de Delphes et la remise du terrain des fouilles par l'École
française d'Athènes au Gouvernement hellénique ont été, pour
l'archéologie, pour la Grèce et pour la France, une fête sans
amertume et une victoire sans vaincus. Le matin du 2 mai, le
golfe de Corinthe retentissait des salves d’une véritable flotte ;
bâtiments de guerre, yachts et paquebots, mêlant aux trois
couleurs françaises le pavillon bleu et blanc de la Grèce, débar-
quèrent sur la plage ensoleillée d'Itéa le Ministre de l’Instruc-
tion publique de France (M. Chaumié), deux ministres de Grèce,
l'ambassadeur de France à Constantinople, le Ministre de
France à Athènes, des députés français, de hauts fonction-
naires de l’Instruction publique de France et de Grèce, tous les
directeurs des Hautes Écoles et des Instituts archéologiques et
une foule d'invités de l'École française, choisis dans tout ce que
la Société d'Athènes compte de notabilités.
Pour gravir les pentes assez escarpées du Parnasse et
atteindre le plateau à la fois gracieux et sauvage où s'élevait
jadis le temple d’Apollon, tous les moyens de locomotion
avaient été requis : landaus vénérables, carrioles rustiques,
chevaux de bât et mulets s’échelonnaient sur la route en lacet
et après plus de trois heures de montée sous un soleil ardent,
les Ministres ét leur cortège mettaient pied à terre devant le
Musée de Delphes. Les paysans des villages voisins, la plupart
vêtus de la blanche fustanelle et de cnémides de flanelle, les
(1) Depuis que ces lignes ont été écrites, la catastrophe prévue par notre cor-
respondant est réalisée. Le ministère Delyannis, mis en minorité, a cédé la place
à un nouveau ministère Théotokis, qui, à son tour, æ êté remplacé presque
aussitôt par un ministère Rhallys; (La πόα.) ᾿
218 J. GUILLEBERT
femmes en costume national, saluaient les visiteurs de vigou-
reux : ζήτω ! accompagnés de la grosse caisse οἱ de la flûte
traditionnelles.
Dans une des salles du Musée, les discours se succédèrent,
puis M. Th. Homolle, directeur de l'École française, pour qui
ce jour fut une véritable apothéose, fit les honneurs du Musée
et ensuite des ruines rendues à la lumière sous sa direction par
les soins de l’École française.
Après cette visite les invités reprirent des forces dans le
théâtre de Delphes où un déjeuner copieux avait été servi ; au
champagne, les villageois de Castri dansèrent le συρμό auquel
se joignirent la plupart des visiteurs, M. Chaumié, Ministre de
l'Instruction publique, en tête. La fête se termina par une joute
de vitesse dans le stade, et le prix, une coupe de Sèvres, offerte
par M. le Président de la République, fut reçue aux cris mille
fois répétés de : ζήτω n Γαλλία ! ζήτω ἡ Ἑλλάς !
N'oublions pas avant de quitter Delphes de rappeler que
c'est à la générosité de M. Syngros, un riche hellène décédé
depuis quelques années, qu'est dû le Musée qui offre un abri
convenable aux débris archéologiques retrouvés dans les
fouilles de Delphes. Un buste du donateur, œuvre d’un artiste
parisien et placé dans la salle centrale du Musée, a été inau-
guré en même temps que l'édifice.
Après maintes péripéties et plusieurs ajournements, l'Expo-
sition d'Athènes, dont je vous parlais dans mon précédent
courrier, ἃ enfin ouvert ses portes au public le 1° juin, ou plus
exactement le 31 mai (anc. st.) L'inauguration a eu licu en
présence du Roi accompagné de toute la famille royale, des
membres du Gouvernement, des autorités municipales ct du
corps diplomatique. Cette Exposition se compose d'une section
hellénique et de plusieurs sections étrangères. Comme je vous
l'avais fait pressentir, tout l'intérêt se concentre sur les pro-
duits du pays; de l'étranger 1] n’est venu rien de bien remar-
quable et, du reste, cette partie est bien en retard. Les remises
successives de la date d'ouverture ont déconcerté quelque peu
COURRIER DE GRÈCE 279
les exposants étrangers et un ou deux mois se passeront encore
avant que tout soit agencé de ce côté.
L'Exposition d'Athènes n'a rien de l'aspect des grandes foires
internationales ; la saison serait, en tous cas, mal choisie pour
attirer un grand nombre de visiteurs. Elle n’en est pas moins
extrêmement remarquable en ce sens qu’au premier coup
d'œil, le touriste qui a déjà visité la Grèce constate un progrès
immense dans plusieurs branches de l'industrie locale. L’arran-
gement des vitrines indique à lui seul un goût plus épuré; le
pin des premières exhibitions a été remplacé par le métal
nickelé, le verre commun par les glaces. A côté des industries
depuis quelque temps déjà florissantes, telles que la prépara-
tion des vins, la fabrication des eaux-de-vie, la cordonnerie,
le tissage de certaines étoffes indigènes, nous voyons appa-
raître la fubrication des fleurs artificielles, des plumes, des
chapeaux de feutre et de paille; il y a même une exposition
de carrosserie et une bicyclette fabriquée à Athènes. Pour
qui connaît cette partie de l'Orient et qui sait combien lente-
ment l’industrie y a pris naissance, il se dégage de ces salles
une impression de surprise réconfortante.
La lithographie en couleurs qui n'avait fait ici jusqu’à ce
jour que de timides essais, ἃ saisi l'occasion pour risquer un
pas décisif. Nous avons vu avec surprise sur 168 murs de la
ville une affiche de l'Exposition, de grandes dimensions, tirée
en plusieurs couleurs, qui ne prêtait point trop à la critique.
Au moment de l'ouverture une seconde affiche a été placardée
qui constituait un progrès sur la première. Depuis quelque
temps déjà on constatait une certaine recherche dans la con-
fection et dans l'illustration des boîtes à cigarettes, débouché
le plus important pour la chromo-lithographie. Le développe-
ment de la fabrication des eaux-de-vie ἃ beaucoup favorisé cet
essor'et vraiment les étalages des marchands de tabac et des
négociants en vins ct alcools ont un aspect tout à fait européen,
comme on dit en Grèce. Le Gouvernement, en renonçant au
monopole des cartes postales, vient encorc d'encourager le
280. ες J, GUILLEBERT
développement de l'initiative locale dans cette industrie qui
touche l’art de si près. A côté des reproductions de monuments
antiques, qui constituaient à elles seules toute la ressource du
hthographe sur ces petits carrés de papier devenus d'un usage
universel, commencent à apparaître des scènes de mœurs, des
groupes de costumes, des paysages ensoleillés; ces mille petits
tableaux de genre iront porter jusqu'aux confins du monde
une image vivante de la Grèce actuelle. encore si peu connue.
Les attractions, selon l'expression consacrée, sont peu nom-
breuses autour de l'Exposition. Un petit théâtre français
d'opérette, une tarentelle italienne, un cinématographe, c’est
tout et c'est assez. Rien ne peut rivaliser dans ce coin privi-
légié avec le spectacle du soleil se couchant derrière le Par-
thénon, avec la magie des tons changeants, du rose pâle au
violet foncé, que prennent au crépuscule les pentes de l'Hymette
et avec la clarté laiteuse de la lune qui inonde à certains soirs
les bosquets et les jardins du Zappeion.
Une Exposition industrielle au pied de l'Acropole, voilà qui
jure un peu avec nos impressions littéraires; mais que dirait
un élève de cinquième classique si on lui apprenait que la
société Victor Popp établit un poste de télégraphie sans fil
sur les collines qui bordent la baie de Munÿchie? Ce poste sera
en communication avec d’autres postes établis sur les cuirassés
de la flotte.
Les touristes attirés cette année par l'Exposition d'Athènes
pourront enfin contempler dans toute sa majesté le portique
ouest du Parthénon; les travaux de consolidation du fronton
sont enfin terminés et les affreux échafaudages, qui nous voi-
laient depuis plusieurs années cette partie de l'édifice, ont
enfin disparu. Ils ont émigré en face, au-dessus du temple
d'Erechthée et de la tribune des cariatides. La ville d'Athènes a
voté les fonds nécessaires à la restauration de ce gracieux
monument que nous verrons surgir des ruines, comme autre-
fois le temple de la Victoire Aptère. Le mème conseil muni-.
cipal a en outre décidé de reconstituer à Delphes le Frésor.
COURRIER DE GRÈCE 281
des Athéniens, dont les parties principales ont été retrouvées
dans les fouilles.
Dans le domaine du théâtre, je vous signalais dernièrement
une tentative faite par M. Truffier, de la Comédie Française,
pour jeter à Athènes les bases d’une sorte de Conservatoire ou
tout au moins d'école de déclamation. Cette tentative a plei-
nement réussi. Après trois mois d'éfforts de toutes sortes, le
sympathique artiste a pu reprendre le chemin de la France en
laissant derrière lui un noyau de professeurs imbus de bons
principes d'enseignement et qui continueront l’œuvre dont il
n'a pu qu'esquisser les premières lignes. Nous espérons le
revoir bientôt dans la capitale de la Grèce pour jouir du résul-
tat de sa peine-et pour fortifier par quelques conseils les adeptes
de la bonne diction qu'il ἃ formés. La présence de M. Truffier
à Athènes a eu un autre résultat heureux : il a pu indiquer
les pièces du répertoire français dont la traduction en grec.
scrait le plus profitable au théâtre encore si jeune de la capitale.
J. Guizceserr.
Post-scriptum.
Un « Congrès hellénique d'éducation » se tiendra à Athènes au
mois d'avril 4904. Il sera complété par une exposition scolaire. Les
travaux du Congrès porteront sur les sujets suivants :
a) Questions spéciales {à discuter en sections).
4° Enseignement élémentaire. — Expansion de cet enseignement,
diminution du nombre des illettrés.
20 Enseignement moyen. — Formation pédagogique du personnel
enseignant.
3° Enseignement des jeunes filles. — Modification des programmes
dans un sens conforme à la tradition et aux exigences de la civili-
sation moderne.
4° Enseignement technique et professionnel. — À organiser.
b) Question générale (à discuter en assemblée générale) :
Amélioration des ouvrages d'enseignement au point de vue de la
composition et de la forme extérieure.
Le président du Comité d'organisation est notre ami D. Bikélas,
le secrétaire, M: G, Drosinis,
ΟΘΟΝΡΤΕΝ RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
La Revue rend compte, à cette place, de tous les ouvrages relatifs aux
études helléniques ou à la Grèce moderne, dont UN exemplaire sera
adressé au bureau de la Rédaction, chez M. Leroux, éditeur, 28, rue
Bonaparte.
Si les auteurs ou éditeurs désirent faire hommage de leurs publica-
lions à Association pour l’encouragement des Études grecques, ils
sont priés de les adresser directement à celle-ci (12, rue de l'Abbaye) ;
maïs, en ce cas, il n’en sera rendu compte dans cette bibliographie que
s’ils en envoient DEUx exemplaires, l’un devant rester à la Bibliothèque
de l'Association, et l'autre devant être remis à l'auteur du compte rendu.
10. BEVAN (Edwyn-Robert) The house
of Seleucus. London, Arnold, 1902.
8°, 2 vol. de 330 et 333 p.
L'histoire des Séleucides n'avait pas
fait l'objet d'une monographie depuis
Frôlich (1744); le livre de M. Bevan
comble donc une véritable lacune et il
la comble avec savoir et avec agré-
ment. Assurément l'auteur n'a ni
méconnu ni cherché à dissimuler les
énormes trous de la tradition. Depuis
l'heure où nous quitte Diodore (à la
veille d'Ipsus) jusqu'à celle où nous
retrouvons Polybe (vers 220), c'est-à-
dire pendant 80 ans, le naufrage des
documents est complet, et les rari
nantes ne suffisent pas à un récit
suivi. Aussi M. Bevan, après avoir
raconté tant bien que mal ce qu'on
sait de la politique « anatolienne »
des premiers Séleucides, a-t-il groupé
ensuite dans une série de chapitres,
disposés suivant l'ordre non plus chro-
nologique mais géographique, nos mai-
gres renseignements sur les autres
provinces de leur vaste empire. La
narration reprend ensuite avec Antio-
chus III, Antiochus 1V ct leurs succes-
seurs ; les derniers règnes m'ont paru
un peu écourtés. Un chapitre final
rassemble le peu que nous savons sur
le gouvernement, la cour et l'armée.
L'auteur a renoncé, faute de docu-
ments, à exposer le système financier ;
peut-être n'a-t-il pas assez insisté sur
le développement de l'autonomie
urbaine, favorisée par les Séleucides
qui, sur ce point, ont été imités par
les Romains.
M. Bevan ἃ cherché naturellement à
compléter l'information littéraire par
celle que fournissent les inscriptions et
les monnaies. Il m'a semblé qu'il n'a
pas tiré de ces dernières tout ce qu'elles
peuvent donner, même au point de vue
économique : on cherche en vain un
chapitre sur le système monétaire des
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
Séleucides, le développement si curieux
de la frappe du bronze sous Epiphane,
la concession du droit de monnayage
aux cités émancipées, etc. Les sicles
juifs ne sont même pas mentionnés!
En épigraphie, l'auteur possède bien
son « Michel », mais il est loin d'avoir
dépouillé avec un soin suffisant tous
les recueils périodiques. Sans doute le
volume de M. Haussoullier sur Milet a
paru trop tard pour qu'il pût encore
l'utiliser, mais la plupart des inscrip-
tions avaient été déjà publiées dans la
Revue de Philologie et M. Bevan ne les
a pas toutes utilisées (par exemple
le texte si curieux sur la δίοα de Milet).
En parlant de Philoclès roi de Sidon
(p. 235) ignore les textes décisifs qui
ont perinis de fixer l'époque de ce per-
sonnage, et il n'a certainewent pas lu
mon mémoire sur la dynastie de Com-
magène, ni mon article et celui de M. Isi-
dore Lévy sur Antiochus Cyzicène, ni
l'article de M. Holleaux sur Josèphe,
Ant. XII, 455, ni les dernières découver-
tes sur la dynastie pontique. J'ajoute
que l’auteur montre peu de disposition
à approfondir les questions controver-
sées et à se former une opinion per-
sonnelle, par exemple sur un point
aussi essentiel que l'autorité respective
des deux livres des Macchabées. A tous
ces indices on reconnaît un travail u
peu hâtif (1).
T.R.
1. Tome Ier p. 25 au milieu. σου pour Ara!
est une regrettable coquille, P. 29 « the son
still unborn of Roxane, if if proved to be ἃ
son » n'est anglais en aucune langue. P. 76. Le
plateau de l'Asie est « un Iran en miniature ».
M. Bevan ne se souvient-il pas d'avoir lu cette
phrase quelque part? P. 80. Ne pas contester
que les drachmes d’Ariarathe aient été frappés à
Sinope. P. 90 et 96. Mithridate n'a régné à
Cios qu'après la chute de la monarchie perse.
P. 154. Ne pas écrire Ariamnès pOur Arariam-
nès. P. 186, l'interprétalion géographique du
papyrus Petrie Il, 45 est très contestable. Plu-
sieurs savants placent toule l'action en Cilicie.
(cf. Koehler, Sitzunysb. de Berlin, 1894, 445)
P. 225, parmi les illustrations littéraires d’An-
283
11. Abbé À. BOXLER. Précis des insti-
tulions publiques de la Grèce et de la
Rome ancienne. Paris, Lecoffre, 1903.
In-12°, 422 p. illustrées.
La partie de ce petit manuel consa-
crée aux institutions grecques nous a
paru à peu près exacte, mais bicn séche,
bien bourrée, et surtout bien dénuée
de sentiment historique; par exemple,
la constitution de Dracon, à laquelle
personne ne croit plus, est résumée
sans un mot de réserve (p. 61). Que
dire aussi d'une phrase comme celle-ci
(p. 1): « Chaque cité (grecque) suivait
son système propre dans la supputa-
tion des années, prenant pour point de
départ certains événements qui avaient
fait époque dans son histoire ? » Ces
« ères locales » (avant l'époque ma-
cédonienne avancée) sont un simple
mythe. P. 165, παραχχαταλογή est tra-
duit par « récitatif », ce qui est faux,
si M. B. prend le mot récitatif au sens
propre. Notre récitatif est une mélopée
sans mesure ; 18 zx. est exactement le
contraire, c'est un rythme sans mélo-
die. M. B. rapporte la fameuse anecdote
de l'acteur Hégélochos qui se trompe
sur l'accentuation de γαλέν(η) dans un
vers d'Euripide ; il aurait dû s'en sou-
venir en corrigeant les épreuves de
son volume où les fautes d'accentuation
grecque sont nombreuses, D'autres
coquilles ou négligences déparent la
Bibliographie placée en tête de l’ou-
vrage. Des indications comme « Unger,
Chronologie. München (sic !), Nissen,
Metrologie. München » sont inutiles;
Lubker ne s'appelait pas Lübkers, ni
Eckhel Eckel, ni Daremberg Darenberg
(N. B. 16 dictionnaire est en cours de
publication depuis 1877 et non 1881);
« Inscriptiones Siciliac depuis 1892 » est
tioche l'auteur oublie Archias. P. 325. À propos
dos Ayparchies ciler l'article de Cumont sur le
serment de Vezir-Keupru.
IL. P. 155. Le mot Wicéphore n'est pas grec
au sens matériel.
‘284
inintelligible ; Dareste et Haussoullier
ont eu un collaborateur pour les Ins-
criplions juridiques, etc.
H. G.
12. BREWER (Heinrich). Die Unler-
scheidung der Klagen nach attischem
Rechte etc. Vienne, C. Gerold, 1904,
8°, 111 p.
L'objet direct de ce travail est d'éta-
blir l'authenticité de deux lois citées
dans la Midienne : la loi sur la violence
($ 47) et celle sur la corruption des
juges ($ 113), mais pour arriver à ce
résultat l'auteur a exposé et défendu
un système nouveau de classification
des actions en droit athénien, système
qui se résume ainsi : les actions (δίκαι
lato sensu) sont civiles (ôtxn s{riclo
sensu) ou criminelles (γραφή). A la diffé-
rence du droit moderne, chacune de
ces catégories comporte une subdivi-
sion en actions privées ou publiques,
selon le caractère du poursuivant. En
particulier, il faut distinguer les γραφαὶ
ἴδιαι (privées), qui sont le cas général,
et les γραφαὶ δημόσιαι qui sont au nom-
bre de deux seulement : l’sicayyehix où
une autorité constituée se porte plai-
gnante elle-même (le nom s'applique
aussi à la proposition qui lui est faite
de se porter plaignante) et la προδολή
où un citoyen demande au peuple à être
investi de la mission de porter plainte
en son nom (contre les perturbateurs
des fêtes et les sycophantes). Cette clas-
sification, dont plusieurs détails soulè-
vent des objections sérieuses (1), per-
mettrait, si elle était acceptée, d'écarter
les doutes dont le 8 47 de la Midienne
a de tout temps été l'objet. Quant au
8 118 M. Brewer cherche à montrer
qu'il s'accorde à merveille avec les cir-
(1) M. Glotz me fait observer que les actions
pour meurtre, assurément criminelles, sont tou-
jours restées des δίχαι, ouvertes aux seuls pa-
-rents de la victime. Lo Recueil des inscriptions
Juridiques (11, p. 21) est à rectifier sur ce point.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
constances où a été prononcée l'éro-
λογία δωροδοκίας de Lysias; il ne se pro-
nonce pas sur l'authenticité de la loi
différente sur le même sujet qu'on
lit dans le deuxième plaidoyer contre
Stéphanos, p. 1131.
T.R.
143. BRITISH MUSEUM. Catalogue of
the greek coins of Lydia by Barclay
V. HEAD. 1901, Longmans etc.,
in-8°, cz-440 p. 1 carte et xiv plan-
ches (autotype).
Ilest bien tard pour parler de ce
beau volume dont on peut résumer l'é-
loge en disant qu'il est digne de ses
aînés. L'introduction qui ne compte
pas moins de 150 pages est une histoire
très complète du monnayage lydien,
depuis les premières émissions en
électrum des rois Mermnades — les
plus anciennes : monnaies du monde
— jusqu'aux derniers bronzes si nom-
breux et si variés de l’époque. ro-
maine, soit pendant une durée de prés
de mille ans. M. Head n'attribue expres-
sément aux rois Lydiens, en fait de
monnaies d'électrum, que les pièces
aux types de la protome ou de la tête
de lion; il propose très ingéuieusc-
ment de reconnaître dans certaines
pièces, où le type se borne à un con-
tour très rudimentaire, des imitations
cimmériennes. Il considère enfin
comme des « estampilles de chan-
geurs » les petits poincons appo-
sés sur certains spécimens ; mais
il faudrait prouver qu'il y a quelque
relation entre ces poinçons et le titre
des pièces ainsi marquées. Sous ces
réserves on peut admettre les raisons
données par M. H. pour la substitution
(au temps de Crésus) du monnayage en
or et argent purs à celui d'électrum.
Le monnayage lydien s'éclipse pen-
dant la domination perse, pour repa-
raître à l'époque héllénistique avec les
ateliers de cistophores (au nombre de
six) et les bronzes locaux (quatorze ate-
COMPTES ΠΒΕΝΌΓΒ BIRBLIOGRAPHIQUES
liers avant l'empire). C'est à partir de
Trajan qu'on assiste à un grand dévelop-
pement du monnayage municipal dans
la Lydie du Nord (autour de Thyatire) ;
le magistrat responsable y est réguliè-
rement 16 premier archonte (ou stra-
tège) tandis que dans la Lydie méri-
dionale c'est le secrétaire.
Le monnayage de chaque cité est
étudié à part et M. Head a dressé des
listes très utiles, très instructives des
noms de magistrats qu'il considère
comme certains. On notera qu'il se
range maintenant à l'opinion d'Imhoof
sur la provenance lydienne de toutes
les monnaies de Germé (p. 11]. Parmi
les textes relatifs à Masgvrc-Maxcons on
pourrait citer Plut. De Mus. c. 1.
M. Head a naturellement tiré grand parti
des travaux de Ramsay, Radet, Imhoof,
Clerc, Buresch sur diverses parties de
son sujet, mais il sait les contrôler et
les corriger au besoin par les données
des monnaies ; c’est ainsi qu'il montre
très bien que ἱππικός sur les monnaies
de Thyatire ne désigne pas un magis-
trat, mais un titre romain (eques) porté
par certains stratèges. À chaque ins-
-tant, en parcourant soit l'introduction,
soit le catalogue, on saisit sur le vif
l'alliance de plus en plus intime et
féconde des différentes branches de
l'archéologie.
T.R.
14 Archaeological instilule of America.
Investigations at Assos... by Joseph
T. CLARKE, Francis H. BACON,
Robert KOLDEWEY... Cambridge
(Massachusetts). Archaeol. Institute,
1902. Part I. in-f°, album de 74 p.
Ce n'est pas sans quelque surprise
que l'on voit paraître en 1902 seulement
la preruière livraison d’un ouvrage por-
tant sur des fouilles exécutées de 1881 à
1883, c'est-à-dire il y a vingt ans. Les
explications données à ce sujet dans la
Préface sont un peu vagues; elles
semblent mettre en cause M. Clarke qui
285
avait été chargé primitivement de l'en-
treprise et auquel on doit le rapport
préliminaire publié dès 1882 et Île
mémoire sur le Temple d'Assos
imprimé dans la Classical series de
l'Institut archéologique américain
(1898). La publication actuelle est dirigée
par M. Francis Bacon; elle compren-
dra cinq fascicules qui ne se vendront
pas séparément : le prix de souscription
est fixé à 25 dollars, ce qui est relative-
ment raisonnable. Ce premier fascicule
comporte un résumé de l'histoire
d'Assos et un historique de t'expédi-
tion, dus à la plume de M. Clarke; puis
la description (par M. Bacon) de l'agora,
de la stoa et du bouleutérion, ainsi que
des inscriptions et bases trouvées sur
l'agora. L'illustration comprend un
grand nombre de vues en phototypie
très bien exécutées, une réduction pho-
tographique (illisible) de la carte de
Kiepert, un plan général et plusieurs
plans de détail dus en partie à l'archi-
tecteallemand Koldewey, un géométral
de l'agora « restaurée », d'une fantaisie
assez amusante, enfin d'excellents fac-
similés des inscriptions les plus impor-
tantes. La traduction et le commentaire
des inscriptions sont la reproduction
pure et simple du mémoire de Sterrett,
publié il y a vingt ans (Papers, tome Icr),
procédé qu'on ne saurait approuver. Un
texte aussi important, par exemple, que
le serment des Assiens à Caligula
(Dittenberger, 2° éd. 364) aurait dû être
transcrit en minuscules et commenté ;
en tout cas il fallait indiquer la biblio-
graphie postérieure à 1882. Au n° 19
le patronymique Prodicos a été omis par
le traducteur. Le commentaire du n° 20
ignore les livres de Sonne et de Bérard;
celui du n° 22 l'article de Perdrizet etc.,
Au n°95 le fac-similé a ΠΑΞΙΑΙ, la trans-
cription en minuscule Νάξιαι,
T.R.
15. ACTA APOSTOLORUM APOCRY-
PHA,N.2. Λεία Philippi et Acta Tho-
mae; accedunt Acta Barnabae ; edidil
‘286
M. Bonnet. Lipsiae, H. Mendelssohn
19083.
M. Bonnet peut être fier de l'œuvre
qu'il vient de mener à bonne fin. Le
nouveau volume de l'édition générale
des Actes apocryphes entreprise par lui
avec Lipsius est de tous points admi-
rable par la conscience et la préci-
sion des recherches qui l'ont préparé,
et par la méthode avec laquelle les
matériaux y sont mis on œuvre. Il
comprend les Actes de Philippe, 168
Actes de Thomas etles Actes de Barnabé.
— Les premiers avait été édités partiel-
lement d'abord par Tischendorf, puis
plus complètement par M. Batiffol
dans les Analecta Bollandiana. Ils se
lisaient d'ordinaire par récits séparés,
et le Vaticanus 824, découvert par
M. Bonnet, utilisé pour la première fois
par M. Batiffol, est le seul qui nousles
ait conservés à peu près en leur ensem-
ble (il nous manque cinq numéros, de
10 à 14.) Le texte de la nouvelle édition
provient pour les récits 1 et 3-9 de
cette source unique; pour la 2° de trois
manuscrits; pour la fin, à partir du
n° 15 (la partie la plus lue, parce
qu'elle comprend le martyre), M. Bon-
net n'a pas consulté moins de quinze
manuscrits, et il nous donne concur-
remment le texte du Vaticanus 824 et
celui du Parisianus 881. — Les Actes
de Thomas sont la pièce capitale du vo-
lume; on sait que de tous les actes
apocryphes, qui ne nous sont parve-
nus que dans des rédactions expur-
gées, ce sont ceux qui, en l'état où
nous les avons, ont conservé le plus de
traces d'un original gnostique. M. Bon-
net les avait déjà publiés en 1383. Ici
encore, les divers récits étaient le plus
souvent transcrits isolément, et, pour
sc débrouiller dans le chaos de la tra-
dition que représentent les vingt-un
manuscrits utilisés, il fallait autant de
pénétration que de patience. Ajoutez
que le texte grec doit être confronté
avec la rédaction syriaque éditée et
traduite par Wright en 1871, et que l'on
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
a beaucoup discuté sur le rapport de
l'un et de l'autre. M. Bonnet, qui pen-
sait autrefois, comme beaucoup d'au-
tres, que le grec était l'original, se rend
aujourd'hui (page xxt) à l'argumenta-
tion de M. Burkitt, et admet qu'il pro-
vient d'un original syriaque, plus com-
plet du reste que celui qui nous est par-
venu et surtout où la tendance gnos-
tique était mieux respectée; il se de-
mande toutefois encore (p. xx11) si, en
dernière analyse, le syriaque ne remon-
terait pas lui-même à une rédaction
grecque primitive. Parmi les mor-
ceaux gnostiques que ces Actes nous
ont conservés, le plus long et le plus
curieux est celui qui est connu sous le
nom d'Hymne de l'âme (on l’a attribué
notamment à Bardesane), et qui est
d’ailleurs extrêmement obscur ; il n'é-
tait connu qu'en syriaque, jusqu'a ce
que M. Bonnet l’eût retrouvé en grec
dansun Vallicelanus du xr° siècle. —
Les Actes de Barnabé sont beaucoup
moins intéressants, mais ne sont pas
publiés avec moins de soin.
M. Bonnet a joint à son édition des
index très précieux, qui seront aussi
utiles aux philologues et aux grammai-
riens qu'aux théologiens, et qui de-
vraient bien servir de modèles.
A. Puscs.
16. GILDERSLEË VE (Basil L.}. Problems
ingreek syntax. Tirage à part de l’Ame-
rican journal of philology, t. XXHI.
Baltimore, Johns Hopkins press, 1903.
in-8°, à pagination intermittente.
Les problèines qu'effleure cette char-
mante plaquette se rapportent à la
structure de la phrase, à l'emploi des
cas, de l'article, des modes, des temps
et des prépositions. Rien de moins
aride que ces recherches sous la plume
du savant philologue américain. On y
retrouve partout cette profonde et
fine connaissance de la langue grecque
qui met M. Gildersleeve au tout pre-
mier rang des grammairiens contem-
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
porains. Une idée mattresse relie d'ail-
leurs ces pages détachées; c'est qu'il
n'y ἃ pas une syntaxe grecque, mais
des syntaxes grecques ; chaque époque,
chaque genre littéraire, chaque grand
écrivain ἃ la sienne ; par là l'étude de la
syntaxe se rattache à celle du style ou
plutôt n'en est plus qu'une face ; de la
pure philologie nous passons à la psy-
chologie. Il y a, en effet, dans M. G.
un psychologue délicat, attentif aux
moindres nuances et habile à tirer le
bilan des plus abstruses statistiques;
il y a aussi «un poète mort jeune » à qui
le grammairien survit. Ce poëte n'est
pas tout à fait mort; il se révèle à
chaque instant par un style prégnant
et pittoresque, auquel l'austère muse de
la grammaire nous ἃ peu habitués .
parfois même, comme le Calchas de
l'opérette, on se surprend à penser
qu'il y a vraiment un peu « trop de
fleurs .»
Η. G.
17. G.-N. HATZIDAKIS. Rapport sur
le concours de la Société de linguis-
tique d'Athènes (en grec). Athènes,
1903, 32 p., in-8°.
Pour la première fois cette année, la
Société de linguistique récemment fon-
dée à Athènes avait à distribuer des
prix. Le concours institué par elle a
donné de brillants résultats. Vingt-trois
concurrents y ont pris part, avec des
mémoires manuscrits parfois très éten-
dus. Dix d'entre eux ont été jugés
dignes d'être couronnés et la Société a
décerné les récompenses suivantes : au
nom du Syllogue pour la propagation
des lettres grecques, deux prix de
250 drachmes à des études sur la langue
de la Thesprotie (Epire) et d'Oenoé
(Pont); au nom de Μπι de Riancowrt,
un prix de 300 drachmes à une étude
sur le dialecte de Kastoria. La Société
disposait elle-même de 1,600 drachmes,
qu'elle a ainsi réparties : premier prix
(800 drachmes) par moitié à des travaux
287
sur les parlers de Lesbos et de Leu-
cade ; second prix (500 drachmes) à trois
mémoires de linguistique ou de folk-
lore; troisième prix (300 drachmes) par
moitié à un recueil de noms propres
et de chansons populaires de Phigaleia
et à une collection de mirologues du
Magne. On voit que l'initiative privée
continue à travailler pour le bien de la
Grèce et de la science. Il serait dési-
rable que le gouvernement hellénique
la suivit dans cette voie et créât enfin
à l'Université d'Athènes la chaire de
langue et de littérature néo-grecques
que réclame, une fois de plus, le
rapporteur et, avec lui, le monde
savant.
H. P.
48. W. HELBIG. Les ἱππεῖς athéniens.
Extrait des Mém. de l'Acad. des Ins-
criptions, XXXVII. Paris, Imp. nat.,
1902, in-4°, 112 p.,2 pl., nombreuses
zincogravures.
M. Helbig a eu l'idée excellente
d'étudier les vases archaïques au point
de vue des renseignements qu'ils four-
nissent sur la cavalerie athénienne. Le
résultat le plus net de cette enquête —
d'accord, d'ailleurs, avec le texte classi-
que d’Andocide — c'est que jusqu'au
milieu du v° siècle la cavalerie athé-
nienne n’est pas une véritable cavale-
rie : ce sont des fantassins montés qui
se transportent à cheval jusqu'au ter-
rain du combat, puis en descendent pour
combattre, comme jadis les héros ἀ Ἦο-
mère descendaient de leur char. L'ho-
plite très riche a deux chevaux, l'un
pour lui, l’autre pour son valet; celui
de moyenne fortune n'en a qu'un seul ;
le valet suit à pied ou monte en croupe.
Pendant la bataille 1 ὑπηρέτης devient
garde-cheval ; mais il prend part à la
poursuite, exceptionnellement même à
la lutte. Ces résultats paraissent aussi
bien assurés qu'ingénieusement établis
et copieusement illustrés. P. 54 l'in-
terprétation du nom des ζευγῖται est au-
19
288
jourd'hui contestée, avec raison, ce me
semble.
T. R.
19. (TATIEN). Aimé PUECH. Recherches
sur le Discours aux grecs de Tatien
suivies d'une traduction. Paris, Alcan,
1903 (Bibl. de la Faculté des lettres,
XIII). In-8°, vur-160 p.
IL est difficile d'analyser un livre dont
la plus grande partie se compose de
discussions critiques très serrées, très
sagaces, mais aussi très minutieuses.
M. Puech possède à fond son Tatien,
ille possède si bien que sur certains
points il ne craint pas de contredire
l'opinion d'un maître aussi autorisé que
Harnack et, ce semble, avec succès :
c'est ainsi qu'il établit que l'Oratio ad
Graecos n'est pas, comme on l’a cru, de
très peu postérieure à la conversion de
Tatien ; elle daterait environ de 170, peu
d'années avant sa rupture avec l'Église.
M. Puech montre ensuite à quel point
l'influence de la sophistique contempo-
raine se fait sentir dans le style très
artificiel et jusque dans les rythmes de
l'auteur, il analyse ses sources, ap-
précie sa méthode saccadée de discus-
sion, enfin il nous conduit dans les
arcanes de la théologie et de l'anthro-
pologie si bizarres du futur hérétique.
Deux très intéressants chapitres étu-
dient les rapports de Tatien avec Justin
d’une part, avec Josèphe de l'autre; la
chronologie de Tatien dériverait uni-
quement d'Apion et de Ptolémée de
Mendès : « on peut considérer comme
certain qu'il ne dépend pas de Josèphe ».
Dans toute cette étude, il est inutile de
dire que M. Puech cite et met à profit les
savants allemands qui, presque seuls,
se sont occupés sérieusement de Tatien
dans ces derniers temps (1), mais il est
(1) À propos des εὑρήματα il aurait fallu
mentionner et surtout utiliser l'excellente disser-
tation de Kremmer. À propos du ch. 19 la
Citation du vase d'Herstal s'imposait.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPBIQUES
loin de se laisser absorber par eux, il
conserve toute son indépendance cri-
tique et en fait souvent un judicieux
usage. Les mêmes qualités distinguent
la traduction complète de l’Oratio dont
M. Puech a fait suivre son étude; le
texte de Schwartz est pris pour base,
mais dans bien des passages M. Puech
se tient plus près de la lecon des manus-
crits et il hasarde même quelques con-
jectures originales (ch. 11, πενέστεροι, ὁ
δὲ μετριώτατος; ch. 14).
TR.
20. HICKS (E.-L.) and HILL (G.-F.).
A manual of greek historical inscrip-
tions. New and revised edition.
Oxford, Clarendon press, 1901. In-8°,
xxx1V-341 p.
Le recueil de M. Hicks, dont la pre-
mière édition a paru en 1882, s'estrecom-
mandé aussitôt à tous les épigraphistes
et à tous les historiens par le choix ju-
dicieux des textes et les excellents com-
mentaires qui les accompagnent. La
présente édition ne sera pas moins bien
accueillie, On regrettera sans doute que
l'accroissement de matière, dû aux dé-
couvertes d'Athènes, de Délos et de
Delphes, ait obligé l’auteur à retrancher
toute la partie postérieure à la mort
d'Alexandre; mais ce qui reste a fait
l'objet non seulement de nombreux
enrichissements mais encore du rema-
niement le plus attentif. Outre la col-
laboration précieuse de M. Hill, le dis-
tingué numismate du British Museum,
M. Hicks a pu profiter du concours
obligeant de M. Wilhelm qui ἃ fourni
de nouvelles lectures pour plusieurs
marbres athéniens et entr'ouvert les tré-
sors de son érudition bibliographique.
Une innovation d'un intérêt un peu dis-
cutable est la liste des archontes athé-
niens de 500 à 34, avec références
nombreuses mais incomplètes. J'au-
rais préféré une table de concordance
avec les principaux recueils. Voici
encore quelques desiderata. Les auteurs
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES 289
répètent je ne sais pourquoi que la dé- | épuisé le problème et l'on aimerait au
dicace du casque d'Hiéron (Michel | moins savoir quelle valeur M. Hill as-
1084) est métrique et ils ne laissent | signe à la liéra de bronze sicilienne.
pas percer le plus léger doute sur l’au- | Nulle part, il n'indique même combien
thenticité de la lettre de Darius à Gada- | d'onces il y avait dans une litra, ni
tas (Michel 32). Parmi les inscriptions | l'exact rapport de valeur entre 18 litra
-qu'on regrette de ne pas trouver, je | d'argent et l'obole. Je regrette aussi
nommerai le décret d'Olbia sur le | que l'auteur ait cité ou reproduit si peu
change des monnaies et surtout le pré- | de spécimens du médaillier de France.
cieux document CIG.15441, l'un des plus | Des pièces comme l’hémilitron de Sy-
importants que l'on possède. racuse au saccos (Luynes), le penton-
TR. kion archaïque (Paris, n° 1049), etc.
méritaient une mention.
T.R.
81. HILL(G. F.). Coins of ancient Si-
cily. London (Westminster), Consta-
ble, 41903, in-8° illustré, 256 p. | 22. JERUSALEM (Wilhelm). Der Bil-
XVI planches. dungswert des altsprachlichen Unter-
richts und die Forderungen der
Ce beau volume tient le milieu entre Gegenwart (Conférence). Vienne,
la science pure et la vulgarisation. 11 Hœlder, 1903, in-8°, 35 p.
donne, sans aucun appareil d'érudition,
une histoire très suffisamment com- Éloquente et ingénieuse défense de
plète du monnayage antique de la Si- | l'étude des langues antiques et particu-
cile, divisée en cinq périodes, précédée | lièrement du grec dans les écoles. On
d'une introduction sur l'histoire de | sent que l'auteur est un psychologue
l'île et suivie d'une bibliographie et d'un | de profession. Par une analyse très
appendice sur les monnaies de Malte et | fine et des exemples heureusement
de Pantellaria. M. Hill ἃ fait ses | choisis, il montre tout ce que cette
preuves comme savant; il se montre | étude apporte de profit à l'éduca-
ici écrivain non moins agréable que | tion historique, « formelle », esthéti-
bien informé des choses d'art. L'illus- | que, morale des jeunes esprits. Il cite
tration — seize admirables planches | souvent Wilamowitz ; quand il le com-
« collotypiques » et quatre-vingt vi- | bat, il nous paraît avoir généralement
gnettes dans le texte — ajoute infini- | raison, du moins au point de vue pra-
ment, est-il besoin de le dire? à l'intérêt | tique. On apprendra non sans surprise
de l'ouvrage et le recommande aux lec- | en lisant ces pages que ni le Phédon,
teurs même étrangers à l'archéologie; | ni aucune tragédie d'Eschyle n'ont en-
s'il est un livre capable de répandre | core pénétré dans l’enseignement des
dans le public lettré le goût des mon- | lycées autrichiens. On est aussi un
naics antiques et des études qui s'y | peu étonné de constater le peu de place,
rattachent, c'est donc assurément ce- | ou pour mieux dire la place nulle, que
lui-là. semble occuper dans cet enseignement
Malgré le caractère quasi-populaire | l'exercice doublement utile de la ver-
de ce volume, je regrette que l’auteur | sion; il n'est guère question que de la
ne se soit pas un peu plus étendu sur | lecture et de l'erplication orale des
les questions économiques et notam- | auteurs, que M. J. désire d'ailleurs la
ment sur la veratissima quaestio du | plus approfondie possible. IL semble
rapport de valeur des trois (ou plutôt | que les lectures « cursives », ἢ « abat-"
qualre) métaux monétaires usités en | tage » des textes, si prônés, il ἃ
Sicile. Je suis loin de croire que j'aie | quelques années par nos germano-
290
manes, commencent à tomber en dis-
crédit même au bord de la Sprée et du
Danube.
H. G.
23. D. JORDELL. Répertoire bibliogra-
phique des principales Revues fran-
çaises. Année 1898 (paru en 1900),
272 p. in-8e. Année 1899 (paru en
1901), 359 p. Per Lamm (Nilsson).
Répertoire bibliographique de la li-
brairie française, 1902. Per Lamm,
1903, 164 + 96 Ὁ.
Le travailleur infatigable, à qui l'on
doit la continuation du Répertoire de
Lorenz, nous donne ici deux précieux
instruments de recherche, surtout le
premier — le Répertoire des Revues —
— que nous nous reprochons de ne
pas avoir signalé plus régulièrement à
nos lecteurs. Le nombre des Revues
analysées est constamment en progrès
(257 pour 1898, 346 pour 1899) et il n'y a
pas un périodique vraiment important
qui n'y figure. Ce répertoire est divisé
en deux parties, l'une par ordre alpha-
bétique de sections, l'autre par noms
d'auteurs; c'est à la seconde qu'iront
plus volontiers les auteurs pour en
contrôler l'exactitude, mais c'est la pre-
mière qui leur rendra le plus de ser-
vices. Le classement des sujets y est
excellent ; l'impression, quoique fine,
est d'une parfaite netteté. Je conseille-
rai à l'auteur, pour augmenter encore
l'utilité de cet inventaire, de subdiviser
un certain nombre d'articles trop éten-
dus. Ainsi sous la rubrique Archéologie
on trouve énumérés, en 1 colonnes, en-
viron 300 articles portant sur toutes les
branches, toutes les époques de l'ar-
chéologie ; il y aurait avantage à sous-
distinguer au moins quatre grandes sec-
tions : archéologie en général, archéo-
logie classique, archéologie médiévale,
archéologie orientale. — Je souhaite
vivement que le Répertoire des Revues
trouve assez d'abonnés pour vivre et se
développer encore; il fait honneur à la
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
librairie francaise en même temps qu'il
apporte une image intéressante de la
fécondité intellectuelle de notre temps.
T.R.
24. (ARISTOXÈNE). MACRAN (Henry).
’Aotatoëévou ἁρμονιχὰ στοιχεῖα. Texte
grec avec introduction, appareil cri-
tique, traduction anglaise et com-
mentaire. Oxford, Clarendon Press,
1902. In-8°, 303 pp.
M. Macran prend pour point de dé-
part le texte de Marquard et le classe-
ment des manuscrits établi par le
même savant: il ajoute dans l'appareil
critique les lecons des manuscrits H
(manuscrit du Séminaire protestant de
Strasbourg, détruit en 1870) données
par Westphal d'après M. Ruelle, et
quelques lecons de S (Seldenianus),
dont il a fait une nouvelle collation :
comme on pouvait s'y attendre, cette
collation ne nous apprend rien de nou-
veau sur ce manuscrit que M. Jones
(Classical Review), VII, 10) rattache
avec raison au Vaticanus (V). La divi-
sion en trois livres, donnée par les
manuscrits, a été conservée; on sait
que Marquard la considère comme er-
ronée, et voit dans l'ouvrage une ag-
glomération confuse d'extraits aristoxé-
niens; Westphal y reconnaît au con-
traire les restes de quatre ouvrages
différents qu'il essaye de reconstituer.
M. Macran trouve cette tentative trop
hardie, sans toutefois en condamner le
principe; mais, en attendant, il ne
tente rien pour sa part. Le texte a été
amélioré en quelques endroits : P. 22
Meib. 1. 32 : οὐγ est supprimé avec rai-
son. P. 27, 1. 11, βαρυτάτης pour παου-
πάτης est une bonne conjecture. En
revanche, la dernière phrase du pre-
mier livre reste inintelligible et bar-
bare, même et surtout avec le dépla-
cement de ὦν.
Le commentaire se recommande par
des qualités de clarté et de bon sens :
les profanes, auxquels s'adresse spécia-
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
‘lement M. Macran, trouveront à s'y ins-
truire. Par contre, il y aurait degraves
réserves à faire sur la théorie des
modes exposée dans l'introduction.
L. L.
25. MÉLANGES PERROT. Recueil, etc.,
dédié à Georges Perrot à l'occasion
du 50° anniversaire de son entrée à
l'École Normale. Paris, Fontemoing,
1903. In-80 jésus, 343 p. οἱ 5 plan-
ches.
Personne ne méritait mieux que le vir
bonus scribendi perilus qu'est M.Georges
Perrot l'honneur d’une couronne de
« mélanges », et par la variété comme
par l'intérêt des feuilles qui la compo-
sent, l'offrande est digne de l'honoré.
Nous ne nous occuperons que des arti-
ticles — les plus nombreux d’ailleurs —
consacrés à l'antiquité grecque, bien
qu'il nous en coûte de ne pas mention-
ner des mémoires signés de MM. Heu-
zey, Helbig, Boissier, Bérard, Martha,
Gsell, Michon, de la comtesse Lovatelli,
etc. L'article de M. Bréal, malgré sa
généralité, touche, en revanche, assez
aux études grecques pour être signalé
ici : il s'occupe du curieux phénomène
linguistique pour lequel l'auteurinvente
le terme d'aulomimèse. L'exemple le
plus saillant qu'il en cite est l'emploi
homérique des verbes en σχὼ : quand
une de ces formes, favorisées par le
mètre, fait son apparition, on peut être
sûr que d'autres ne sont pas loin. Che-
min faisant, M. Bréal explique le mot
ἀνδράποδον pour ἀνδράπεδον par l’analo-
gie de δάπεδον, οἰχόπεδον.
Dans le peloton archéologique, l'er-
ticle de M. Treu se détache du lot. Étu-
diant une statuette récemment acquise
par le musée de Dresde, il y reconnaît
avec raison une copie de la célèbre Mé-
nade de Scopas. La statuette est mutilée
(M. Treu restitue un chevreau sur
l'épaule gauche et un glaive dans la
main droite) et le travail sommaire,
mais dans le mouvement hardi du
291
buste renversé, dans la draperie ou-
verte et défaillante, on retrouve le
style des têtes de Tégée et de l'ama-
zone du Mausolée, ce style vibrant
et passionné, sans déclamation, qui
fait de Scopas le plus tragique des
sculpteurs.
La période archaïque de l'art est re-
présentée par plusieurs articles. M. de
Ridder publie deux fragments d'ampho-
res béotiennes de la Bibliothèque, dont
l'un donne une des plus anciennes re-
présentations connues du mythe d'Eu-
rope. Ua fin aryballe, à tête de femme,
du Louvre, fournit à M. Pottier l'occa-
sion de remarques utiles sur la péné-
tration réciproque des styles locaux
même avant les guerres médiques : M.
Joubin, on le voit, fait école. L'alabas-
tos du Musée britannique comments
par M. Murray,avec ses scènes de dres-
sage de chevaux, annonce déjà la frise
du Parthénon. M. Perdrizet étudie un
groupe de monuments se rapportant au
culte d'Athéna Ergané. Le relief archaï-
que d'Athènes (Wolters, n° 417) serait
du nombre : Athéna rend visite à un
artisan qui lui tend l'ouvrage qu'il vient
d'achever. Le joli petit bronze du type
des Apollons nus, publié par M. Ho-
molle, est un travail original et qui me
paraît un peu plus ancien que la date
(410) proposée par le savant éditeur.
M. ΠΥ, à propus de la 4° face du
monument des Harpyes, où des femmes
héroïsées recoivent l'hommage, rappelle
le texte d'Hérodote (1, 173) sur la haute
situation sociale des femmes en Lycie.
M. Percy Gardner publie un bas-relief
en terre cuite de Géla, conservé au Mu-
sée d'Oxford, Aphrodite tenant un petit
bouc : charmant spécimen de l'art ar-
chaïque, où M. Gardner trouve un reflet
cypriote et M. Lechat une saveur flo-
rentine.
Nous arrivons à la période classique
avec M. Furtwängler. Je l'approuve de
défendre contre Wernicke la date tra-
ditionnelle du Zeus d'Olympie, mais je
ne puis le suivre dans sa tentative de
rattacher à ce type placide, peu copié
292.
des anciens (1), le type consacré du
Christ. On n'aperçoit pas le lien, et, de
plus, je crois que les premiers sculp-
teurs qui ont représenté 16 Christ ont
vu en lui un sage plutôt qu'un Dieu et
se sont inspirés des types traditionnels
des philosophes et des penseurs.Jamais
non plus on ne me fera croire que Cé-
cilius ait désigné le chef-d'œuvre de
Phidias par le nom de « colosse man-
qué ». — On lira avec intérêt les obser-
vations de M. Studniczka sur l'admi-
rable relief du Pirée (les acteurs chez
Dionysos) qu'il assigne à la fin du
ve siècle, et celles de M. Lechat à propos
du front « athlétique » de l'Hermès de
Praxitèle : c'est un trait particulière-
ment attique, et le développement de
de ces protubérances s'explique par le
combat front contre front des lutteurs.
C'est à l’âge d'argent qu'appartiennent
les monuments publiés par MM. Colli-
gnon (tête funéraire de Tralles au Lou-
vre, cousine éloignée — oh combien! —
de la Déméter de Cnide), Joubin (sta-
tuette de femme drapée de 18 collection
Arndt), Jamot (ex-voto thespien à Dé-
méter et Héraclès). La stèle lycienne de
M. Benndorf est un souvenir de la Ty-
ché d’Eutychidès. M. Salomon Reinach
démonte pièce à pièce la Vénus de
Médicis et ne lui laisse guère que le torse
et l'amorce des bras; c’est peut-être un
peu excessif et je ne saurais admettre,
pour ma part, l'interprétation donnée
p. 287 du témoignage d'Aldroandi.
M. Graillot communique un médaillon
de Cybèle avec des attributs inusités
qui accuseraient le caractère funéraire
de cette déesse. L'étude intéressante de
M. Michaelis sur les basiliques de l'épo-
que hellénistique aurait gegné à pou-
voir utiliser la précieuse inscription de
Didymes publiée par Haussoullier (Étu-
des sur Milet, p.34) : c'est actuellement
COMPTES RENDUS
(1) M. Furtwängler exagère cependant ce point.
Chose curieuse, il oublie (comme Overbeck) la
célèbre copie du colosse, en grandeur naturelle,
qu'avait fait faire Antiochus Épiphane (Amm.
Marce!l. XXIL, 13).
BIBLIOGRAPHIQUES
le plusancien exemple connu d'une στοά
offerte par un roi (Antiochus Ie”). L'ori-
ginalité des Pergaméniens s’en trouve
un peu compromise.
M. Carl Robert se tient, comme tou-
jours, à cheval sur la littérature et l'ar-
chéologie : ses remarques sur un vers
d'Euripide (Electre, 416) qui lui rappelle
un poignard damasquiné genre Mycè-
nes, sur le vase de Cratès (Arch. Z.,
1861, p. 184), qui prouverait l'authen-
ticité de 6 185, sont encore plus ingé-
nieuses que convaincantes.
Passons à la géographie. M. Doerp-
feld donne d'assez bonnes raisons pour
contester que l'Ithaque d'Homèéère cor-
responde à l’Ithaque actuelle; mais il
explique moins bien la prétendue trans-
position de noms qu'il suppose (l’Itha-
que homérique serait Leucade). Le texte
Od., IX, 21 conduirait plutôt à identi-
fier l’Ithaque d'Homère avec Céphallé-
nie. M. Bourguet s'occupe du faubourg
de Delphes qui s’est appelé successive-
ment Θνῖαι, Güotiov, Pylaea; M. Radet .
cherche à identifier le château des Mar-
mariens forcé par Alexandre en 334
(Saradjik ?)
La diffusion graduelle du nom des
Hellènes ἃ fourni à M. Bloch la ma-
tière d’un article qui ne m'a pas con-
vaincu, ni son interprétation de Thuc.,
I, 3, ni son identification des Ἕλληνες et
des Σελλοί ne me paraissent admissi-
bles, et il ignore ou méprise à tort l'ar-
ticle de Bury dans le J. H. S. de 1901.
Je ne puis en revanche qu'applaudir à
l’article de M. Guiraud et au nouvel ar-
gument qu’il a trouvé contre l'authen-
ticité de la prétendue constitution du
Dracon : l’allusion à l’hypothèque est,
en effet, un anacbronisme manifeste.
M. Decharme a très heureusement com-
menté la « loi de Diopeithès »; elle vi-
sait surtout les théories des météorolo-
gues sur la constitution physique des
luminaires célestes, détrônés de leur
rang de dieux. Très intéressant aussi
l'article de M. Foucart sur la déesse
thrace Bendis introduite à Athènes vers
420 et les deux thiases thraces auxquels
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
(par une exception unique) étaient con-
flés son culte et l’organisation de sa pro-
cession annuelle. M. Ph. Legrand défend
ingénieusement contre Joël l'authenti-
cité de l'oracle de la Pythie sur Socrate,
sans prétendre toutefois que le texte ori-
ginal s'en soit conservé; dans la version
iambique qui nous en est parvenue il
corrige avec trop d'esprit Σοφοχλῆς en
Περικλῆς. M. Holleaux a raison de s'ins-
-crire en faux contre le texte de Polybe
-qui semble faire remonter à l'an 306
l'alliance de Rome et des Rhodiens;
mais il n'a pas réussi à expliquer
la genèse de l'erreur. Enfin, M. Bou-
ché-Leclercq discute la question des
κάτοχοι du Sérapéum, où il voit à
bon droit des reclus, non des possédés.
Si plusieurs des travaux précédents
utilisent déjà les inscriptions, en voici
d'autres qui appartiennent plus spécia-
lement à l'épigraphie. M. Cavvadias pré-
sente une nouvelle « stèle des guérisons »
de l’Asclépieion d'Epidaure. M. Haus-
soullier explique par une inscription de
Suse la « Séleucie de l’Eulaios » d'une
inscription de Magnésie : c'est le nom
hellénistique de Suse elle-même. M.Fou-
gères brûle ce qu’il a adoré : converti
par Mommsen, il identifie désormais le
lyciarque et l'archiprêtre des Augustes
en Lycie; il aurait pu se rappeler que
cette opinion a été soutenue ici même
contre les arguments qu'il y avait oppo-
sés (XII, 408). M. Wolters énumère les
mentions, dans les copies épigraphiques
d'actes légaux, des cachets apposés sur
les originaux ; il a sans doute raison de
rattacher à ce groupe les emblèmes
individuels mentionnés dans les tables
d'Héraclée, mais les sigles restent
inexpliqués.
La numismatique, Cendrillon de l’ar-
chéologie, brille par son absence dans
ce Recueil. L'histoire littéraire, en re-
vanche, y est bien représentée. M. Hau-
vette cherche à expliquer par une série
de réminiscences d’Archiloque les sin-
gularités de la 11" Pythique. M. Paul
Girard corrige deux passages d’Aristo-
phane ; dans le vers 605 des Chevaliers
293
il lit βρώματα, pour στρώματα : dans
Plutus, 535-541, il essaie de déméler
l'enchevêtrement de deux rédactions
consécutives. Le Ménéxrène, selon M. Al-
fred Croiset, est un cousin du Phèdre :
Platon y a voulu donner aux rhéteurs
une leçon d’éloquence philosophique
et Isocrate s’en est souvenu dans le
Panégyrique. M. Maurice Croiset res-
serre en quelques semaines de juillet
349 les trois Olynthiennes. M. H. Weil
remet sur pied des distiques mytholo-
giques tracés par un écolier égyptien
sur une tablette de cire du Louvre.
Enfin M. Th. Reinach publie ce qu'il
appelle «16 roi des ostraka » : un frag-
ment de mime érotobacchique écrit sur
un tesson de Thèbes; ce texte est à
rapprocher de la Plainte de l'amante
abandonnée découverte par Grenfell.
R. T.
26. PHILON DE BYZANCE. Le livre des
appareils pneumatiques et des machi-
nes hydrauliques, édité d’après les
versions arabes d'Oxford et de Cons-
tantinople et traduit par le baron
CARRA DE VAUX. Tiré des Notices
et extraits des MSS. Paris, Klinck-
sieck, 211 pages gr. in-4°.
L'orientaliste qui, il y a dix ans,
nous donnait la première édition et la
premiére traduction des Mécaniques de
Héron d'Alexandrie, vient de tirer des
manuscrits arabes un autre monument
de la science grecque. On connaissait
déjà, par une version latine et médié-
vale faite sur l'arabe, à peu près un
cinquième des Pneumaliques de Phi-
lon. V. Rose avait édité en 1870 cette
version dans ses Anecdola (II, p. 299-
313), et elle a été mise en français par
M. de Rochas (Revue archéologique,
1881 ; cf. de Rochas, La science des phi-
losophes εἰ l'art des thaumaturges, 1882).
M. Carra de Vaux a trouvé dans les
mss. 3113 et 2755 de Sainte-Sophie de
Constantinople un texte arabe com-
prenant 65 chapitres, à savoir: les 16
9.
de la version latine; 26 autres dont
l'ensemble constitue, dans le manuscrit
arabe n° 954 de la Bodléienne d'Oxford,
le Livre des Pneumatiques de Philon ;
les 8 derniers chapitres d'un Recueil
anonyme qui en renferme 15 et se
trouve dans le même manuscrit d'Ox-
ford ; enfin 17 chapitres intercalés dans
les trois séries précédentes et qui,
jusqu'à présent, ne sont connus que
par les manuscrits de Sainte-Sophie,
dont le second est une copie du pre-
mier.
M. Carra de Vaux a publié ce texte
arabe, en l'accompagnant d'une tra-
duction francaise; il a ajouté en
Appendices : 1, deux descriptions de
pompes qui se trouvent en tête du
inanuscrit d'Oxford; II, les sept pre-
miers chapitres du Recueil anonyme de
ce même manuscrit.
L'authenticité générale de l'ouvrage
attribué à Philon par les Orientaux est
hors de conteste; il est clair qu'en
revanche on ne peut être assuré de
l'exactitude de la version arabe, et que
dans un recueil technique analogue
aux Pneumatiques bien connus de Hé-
ron d'Alexandrie, tel ou tel chapitre
peut avoir été interpolé. La tradition
manuscrite, dont les dates ne peuvent
étre précisées, est malheureusement
trop incertaine pour porter à cet égard
un jugement d'ensemble. Je me con-
tenterai donc de faire remarquer que
l'ancienne version latine paraît avoir
été faite sur un texte assez différent de
celui du manuscrit de Sainte-Sophie et,
semble-til, moins fidèle en général ;
que des 17 chapitres spéciaux au dit
manuscrit, et dont l'authenticité parait
à priori moins garantie que celle des
autres, plusieurs sont certainement
tirés de bonnes sources grecques ; je
citerai notamment le n° 59 (le dragon
buveur et le Paniscos) et le n° 63 (roue
pour les ablutions ; cf. Héron, Pneum.
I, 32). Ce dernier appareil est une com-
binaison d'un περιρραντήοιον avec les
roues mobiles de bronze que les Egyp-
tiens placaient à l'entrée de leurs tem-
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
ples (cf. Aristote, Mechan. 1) διὰ τὸ
δοχεῖν τὸν χαλκὸν ἀγνίζειν. Mais la roue
de Héron duit être mise en mouvement
avec la main pour que l'eau coule ;
celle de Philon est au contraire action-
née par un écoulement d'eau continu.
Cet exemple peut indiquer la façon
dont Héron modifie le plus souvent les
appareils de Philon pour donner à son
propre recueil un caractère relative-
ment original. Le début du chapitre,
dans la traduction faite sur l'arabe,
montre en même temps comment les
Orientaux prenaient avec le texte grec
certaines libertés, tout en en rendant
l'esprit assez fidèlement.
L'importance de 18 nouvelle publica-
tion de M. Carra de Vaux ne saurait être
estimée trop haut pour l'histoire de la
science grecque ; souhaitons que les
travailleurs en tirent le plus tôt possi-
ble tout le parti qu'on en doit espérer.
Paul ΤΑΝΚΕΆΥ.
27. POSSENTI (G. D.). Il re Lisimaco di
Tracia. Turin, Paravia, 1901. In-89,
184 p.
L'Italie a emprunté à l'Allemagne la
coutume de ces consciencieuses mono-
graphies qui, même lorsqu'elles n'ap-
portent pas grand'chose de nouveau
(comme c'est ici le cas), ont l'avantage
de fixer l’état de nos connaissances, sur
unc question. Le premier chapitre sur
ies sources de l'histoire de Lysimaque
m'a paru le plus intéressant sinon le
plus concluant. Parmi les auteurs con-
temporains de Lysimaque, il faut nom-
mer en première ligne Hiéronyme de
Cardia et Duris de Samos : le premier,
dont Lysimaque ἃ détruit la ville na-
tale, lui eat hostile, le second favorable:
les récits de seconde main (Diodore,
Justin, Pausanias) sont un composé des
deux traditions, dont M. P. essaie de
doser le mélange. Les chapitres sui-
vants racontent avec sobriété et pri-
cision la carrière de Lysimaque,comme
satrape, puis comme roi, avant et après
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
Ipsus. Il est difficile de rester clair en
détachant ainsi un lambeau d'une his-
toire qui veut être étudiée dans son en-
semble et, par la force des choses, M. P.
a souvent débordé son cadre. Mais ne
nous en plaignons pas, car dans ces di-
gressions il y a parfois des remarques
intéressantes, par exemple à propos de
l'itinéraire de Démétrius Poliorcète
dans sa fameuse campagne de 286. Nous
croyons très plausible l'identification
proposée du Lycus avec l'afluent de
l'Iris. P. 89 il faut lire ἱερὸν τῶν Καλ-
χτδονίων et non Καλχηδόνων. P. 150,
Comana n'a jamais été la « capitale »
du Pont. Parmi les rois qui ont imité
la monnaie de Lysimaque il ne fallait
pas oublier "Axa ou "Axns dont ie Bi-
bliothèque nationale possède un sta-
tère d’or (publié à part par Chabouillet
en 1886). C'est ἃ tort, selon moi, que
Imhoof et Head attribuent cette pièce
au 119 siècle : je la crois du 15,
T.R.
28, Francesco RIBEZZO, Nuovi studi
sulla origine e la propagasione delle
favole indo-elleniche, communemente
dette esopiche. Napoli, Giannini, 1901,
1-243 p., in-8°.
Cette intéressante étude appellerait la
discussion sur la plupart des points
examinés par l'auteur, qui est presque
partout un fidèle disciple de Max Mül-
ler, en un temps où l'école anthropolo-
gique attaque si vivement tout ce sys-
tème. M. Ribezo rattache Ja fable
grecque aux légendes indiennes où pa-
raissent tant d'animaux symboliques :
le dragon, image de la foudre, le cha-
cal, l'aigle et le hibou, qui représentent
respectivement Indra, le ciel brillant
et le démon des ténèbres. En un mot, la
fable n’a pas d'autre origine que le thé-
riomorphisme primitif; elle remonte à
une époque où les hommes, divinisant
les forces de la nature, concevaient
leurs dieux sous une double forme,
animale et humaine. La rencontre d'une
‘295
bête fut représentative d'une interven-
tion divine; puis vint un temps où les
apologues furent des sortes d'énigmes
dont le « devineur » tirait quelque prin-
cipe religieux, métaphysique. Tel est le
fond de la théorie de M. Ribezzo. Ses
rapprochements paraissent, en plus
d'un endroit, bien forcés. 1] retrouve
dans la légende d'Elien, relative à
l'alouette huppée (Hist. anim., XVI, 5),
celle de Yayäti, rapportée par le Mah4.
bhârata; la huppe fait de sa tête, qu'elle
se coupe elle-même, la sépulture de ses
parents, et le fils de Yayäâti donne sa
vie pour allonger les jours de son père.
Or, dans la mythologie aryenne primi-
tive, le soleil est souvent conçu sous
l'aspect d'une tête, et c'est ce que l'on
retrouve, vaguement indiqué, dans le
mythe de Kephalos. La fable de la
huppe et l'histoire de Yayâti figurent
donc, pour M. Ribezzo la permanence
du vieux soleil dans le soleil qui renaît
au matin suivant. — Nous voilà, semble-
t-il, bien loin des fables et de la morale
toute pratique et railleuse que prêchent
la plupart d’entre elles. 11 est bien dou-
teux que l'apologue sorte entièrement
de la religion, surtout de celle des
Brahmanes ou du Bouddha. L'homme
et l'animal n'y sont pas comparés dans
Jeur essence, mais dans quelques-unes
de leurs attitudes ou de leurs tendances
intellectuelles. Ne faudrait-il pas cher-
cher l'origine de 18 fable dans les mé-
tamorphoses ou dans les contes d’ani-
maux que l'on rencontre partout et qui
ont fait les délices de tous les peuples,
de toutes Îles générations? Nous nous
permettrons de signaler à M. Ribezzo
deux livres qui ne traitent pas de la
Grèce, ni de l'Inde, mais dont la lecture
eût pu modifier plusieurs de ses idées :
la thèse de M. Bédier sur les Fableaux
(Paris 1895; et le petit manuel de la Lit-
ltérature française du moyen dge, par.
Gaston Paris. — Nous reprocherons
encore à l’auteur de n'avoir pas déter-
miné avec précision la date à laquelle
remontent les divers épisodes des épo-
pées ou des « prières » de l'Inde. D'ail-
290
leurs le quatrième chapitre où il com-
pare entre elles les diverses rédactions
grecques ou indiennes de sujets sem-
blables ou analogues, en y ajoutant les
opinions de Halm, Wagener, Weber,
Benfey et Keller, sera d'une grande
utilité pour ceux qui reprendront après
lui l'étude de cette difficile question.
R. Hanmano.
29. Mikhaïl STEPHANIDIS. Πεοὶ τῶν
ποτίμων ὑδάτων παρὰ τοῖς
ἀοχαίοις ὑπὸ φυσιχὴν vai
χημιχὴν ἔποψιν. Athènes, Sakel-
larios, 1901 (Extrait du tome XIII de
- l'Athena, 90 pp. in-8.)
L'auteur, professeur de sciences na-
turelles à Mitylène, s'est proposé de
réunir tous les passages de la littéra-
ture ancienne où il est parlé des eaux
potables dans un sens qui intéresse
tant soit peu la science. Pline est mis
à contribution et paraphrasé, aussi bien
qu'Aristote ou Plutarque, dans cette
nouvelle xotvñ, dont le caractère le plus
saillant n’est pas, à mes yeux, l'emploi
d'eivat pour ἔστι, ni l’abréviation de
quelques mots très usuels, mais bien
l'introduction, encore trop peu régu-
gulière, de l'alphabet latin pour repro-
duire les noms propres, par exemple.
M. 5. cite même dans son texte toute
une phrase en francais, et, bizarrerie
du sort, c’est une phrase de Coray ! Au
reste, et on doit l'en féliciter, il a évité
de donner à sa compilation une allure
pédantesque, et on peut la lire avec
beaucoup plus d'intérêt qu’on ne serait,
tout d’abord, tenté de le supposer.
Quelques sobres explications techni-
ques, empruntées aux connaissances
modernes, éclaircissent divers textes
dont le sens précis est obscur à pre-
mière vue. Les deux derniers chapitres
(épreuve des eaux, moyens de corriger
celles qui sont trop dures) sont ceux
qui m'ont paru fournir le plus de ren-
seignements utiles.
T.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
30. WEICKER (Georg). Der Seelenvo-
gel in der alten Litteratur und Kunst.
Leipzig, Teubner, 1902. In-8°, 218 p.
et fig.
C'est un très bon livre et d'autant
plus méritoire que l’auteur vit loin des
musées, loin des grandes bibliothèques,
dans la très petite ville d'« Annaberg
im Erzgebirge » où il est professeur au
gymnase. Qu'on me cite beaucoup de
nos régents de collège qui entrepren-
draient dans de telles conditions un
travail d'érudition philologique et ar-
chéologique de pareille importance ! On
aurait mauvaise grâce à reprocher à
M. W. quelques erreurs d’interpréta-
tion à peu près inévitables pour un
archéologue autodidacte et quelque peu
novice ; il reste vrai qu'il a non seu-
lement réuni tous les témoignages
littéraires sur les sirènes, mais décrit
et publié une longue série de mo-
numents figurés, dont quelques-uns
inédits et très intéressants : pierre
gravée dont l’empreinte seule est cuon-
servée à Bonn (fig. 2), mastos corin-
thien du musée d'Athènes (fig. 8), ary-
balle de Carlsruhe (fig. 15, vase rho-
dien de Londres (fig. 38-39), etc.; sur
103 figures que comprend l'ouvrage, la
moitié environ sont inédites. La théorie
mythologique de l'auteur, déjà esquissée
dans sa thèse latine de 1895, voit dans
la sirène et les figures congénères une
conception purement hellénique : l’oi-
seau-âme, représentant primitivement
l'âme humaine, ou plutôt le « double »
humain, dégagé par la mort. Mais cette
idée primitive a subi dans la suite des
temps de nombreuses transformations;
de curieux contre-sens, dont l’auteur
suit la trace d'abord dans la littérature
antique, ensuite dans l'art. Assurément
M. W.n'’a pas résolu tous les problèmes
et, dès les premières pages, il passe trop
vite surcelui de la pluralitédesErinyes,
je ne suis pas non plus très convaincu
de l'étymologie grecque du nom des
Sirènes, pour laquelle il se prononce
COMPTES RENDUS
(p. 84); mais dans l'ensemble, comme
dans les détails, on doit rendre pleine
justice à sa méthode et à son jugement.
T. R.
31. Francesco RIBEZZO. Saggio de Mi-
tologia comparata. La discesa di Or-
feo all inferno e la liberazione di Eu-
ridice. Napoli, Giannini, 4901, 4-103 p.
in-8e.
La première partie de cet opuscule
est un excellent essai de littérature
comparée; on y trouve une étude ap-
profondie du célèbre épisode de Virgile,
de celui d'Ovide (Métamorphoses, X, 1-
85), des fragments de Philétas et d'Her-
mésianax, des analyses d'Apollodore,
1,3, 5 et de Pausanias, IX, 30, 1-9, des
allusions d'Euripide (Alceste, 357; avec
la scholie de Lucien, X, 23, 3, et de
Plutarque, Moral. 931, 7 Didot). Enfin
le beau récit des amours de Ruru et
de Pramadvarä est traduit et commenté
avec soin. Les sanscritistes connaissent
le dévouement de Ruru; celui-ci, pour
obtenir d’Yama le retour de sa fiancée,
que la morsure d'un serpent a fait des-
cendre aux enfers le jour même de ses
noces, ne craint pas de donner en
échange au dieu sombre Ja moitié de
sa vie. — Le reste de la dissertation,
dont les spécialistes pourraient discu-
ter la méthode et les conclusions, tend
à découvrir sous cette légende un mythe
solaire. Qu'il s'agisse de Ruru et de
Pramadvära, de Satyävat et de βάν),
d'Admète et d'Alceste, de Céphale et de
BIBLIOGRAPHIQUES 297
l’'Aurore, ou encore des Dioscures, c'est
toujours la lutte d'Indra contre Ahi ou
Vrtra qui est ainsi représentée; par-
tout, dans la mythologie aryenne, les
dieux solaires combattent le monstre
de l'obscurité, qui tient emprisonnées
les eaux et l'Aurore. Orphée symbolise
donc le dieu du soleil et de l'aurore; il
est très analogue à ceBhraspati du culte
brahmanique qui, « cherchant la lu-
mière dans l'obscurité, a fait apparaître
l'aurore»; le texte du Pseudo-Eratosthène
et les arguments qui nous restent de la
trilogie d'Eschyle, intitulée « Orphée »,
nous montrent en lui un grand-prêtre
d'une religion apollinienne, pure, lumi-
neuse, sereine, opposée aux mysté-
rieuses angoisses du culte Dionysien.
Son nom même ἀ᾽ Ὀρφεύς, qu'il faut sans
doute rattacher à ὄρφνη, fait allusion à
ses prières, à ses incantations magi-
ques, auxquelles il se livre pendant la
nuit pour ramener la lumière.
R. HaARMAND.
— Simple note en réponse à la ques-
tion posée dans le n°68-69 de la Revue,
p- 135, col. 2.
L’explication, non seulement ingé-
nieuse, mais presque sûre, de μοῦσα,
par mont-ia « Oréade », — qu'on songe
à l’'Hélicon et au Parnasse, — appar-
tient, comme nombre d’autres étymo-
logies aussi sûres qu'ingénieuses, à
M. Wackernagel, K. Z., XXIII, p. 571.
V. Hexay.
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MÉMOIRES DE LA DÉLÉGATION EN PERSE
Publiés sous la direction de M. J: de Morgan, délégué général.
Ι. — FOUILLES A SUSE en 1897-98 et 1898-99, par J. de Morgan, G. Lampre
et G. Jéquier. In-4, planches en héliogravure et en chromotypogra-
ΕἸ sus ses 50 fr.
11. — TEXTES ELAMITES-SÉMITIQUES, par V. Scheil. Première série.
In-4, 24 planches en héliogravure.............................. 50 fr.
III — TEXTES ELAMITES-ANZANITES, par V. Scheil. Première série.
In-4, 33 planches hors texté..................,.,..........,..... 50 fr.
IV. — TEXTES ELAMITES-SÉMITIQUES, par V. Scheil. Deuxième
série. 1n-4, 20 planches hors texte................ ΝΆ ΆΨΨ0. 50 ὦ».
MISSION SCIENTIFIQUE AU CAUCASE
Etudes archéologiques et historiques.
Ι. Les premiers âges des métaux dans l’Arménie russe. — II. Recherches
sur les origines des peuples du Caucase.
2 volumes gr. in-8, nombreuses cartes, planches et dessins....... 20 fr.
TABLE DES MATIÈRES
PARTIE ADMINISTRATIVE
Pages.
Statuts de l'Agsociation.....................,.,.....,.. ï
La Médaille de l'Assoctiation............ ............. IV
Souscription permanente pour l'illustration de la Revue. V
Assemblée générale du 7 mai 1903............... por. VI
Discours de M. Salomon REïINACH, président........ VI
Rapport de M. Au. HAUVETTE, secrétaire............ ΧΙ
Rapport de la Commission administrative........... XXVII
PARTIE LITTÉRAIRE
Gustave GLoTz. — Sur la date d’une inscription trouvée à
Olympie .................,..................... 143
J. DELAMARRE. — Décrets religieux d'Arkésiné (Amorgos). 154
Paul TANNERY. — Ὑ a-t-il un nombre géométrique de
Platon?......................,...,,............ 173
Théodore RernaAcx. — Inscriptions grecques............ 180
Wilhelm CRüNERT. — Remarques sur les papyrus de
Magdola ....................................... 193
Etienne MichoN. — Trois slatues antiques au Louvre.... 198
Deux plaidoyers sur la question de la langue littéraire en
Grèce. ....... ses εν νεν νειν νον ο νον ον 208
George HaTzinakis. — La question de la langue en
Grèce............... ses secs esse 210
Karl KRUMBACHER, — Le problème de la langue litté-
raire néO-SreCu8 ............ ses 246
CHRONIQUE
J. GuiLLEBERT, — Courrier de Grèce................... 276
Post-scriptum. Congrès pédagogique d'Athènes......... 281
BIBLIOGRAPHIE
Comptes rendus bibliographiques ..................... 282
Le Comité se réunit le premier jeudi non férié de chaque mois,
excepté en août, septembre et octobre. Tousles membres de l’'As-
sociation peuvent assister aux séances avec voix consultative.
La Bibliothèque de l’Association, 12, rue de l’Abbaye, est ouverte
le jeudi de ὃ ἢ. 1/2 à 4 ἢ. 1/2, et le samedi de 2 à 5 heures.
La Revue des Etudes grecques est publiée cinq fois par an.
Prix d'abonnement : Paris ........................ 10 »
Départements el étranger..............,...... 11 »
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La Revue est envoyée gratuitement aux membres de l’Associa-
tion pour l’encouragement des études grecques.
Le Puy, typographie R. Marchessou, boulevard Carnot, 23.
REVUE
ÉTUDES GRECQUES -
L'ASSOCIATION POUR L'ENCOURAGEMENT DRS ÉTUDES GRECQUES ce,
TOME XVI
N° 71
Juillet-Octobre. 1903
| PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
. 28, RUE BONAPARTE, VI°
Toutes les communications concernant la Redaction doivent être adressées
à M. Taéonorg REINACH, rédacteur en chef-gérant, à la librairie Leroux.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
28 RUE BONAPARTE, PARIS
Mission dans les régions désertiques de la Syrie
moyenne, par René Dussaup, avec la collaboration de
Frédéric Maczer. Un volume in-8, avec itinéraire, 30 plan-
ches et 5 figures..................,.................
Notes de mythologie syrienne, par R. Dussau», In-8, fig...
Nouvelles archives des Missions scientifiques et litté-
raires. Tome X. Un fort volume in-8, nombreuses figures,
planches et cartes....................................
Recuell de tablettes chaldéennes, publié par M. F. Tau-
REAU-DANGIN. Un volume in-4............... ...........
Mémoires de la Délégation en Perse, publiés sous la direc-
tion de M. J. de Morcaw, délégué général.
Tome I, Fouilles à Suse en 1897-98 et 1898-99 par J. de MorGaw,
G. LAmPRE et JÉQUIER. In-4°, planches en héliogravure et
en chromotypographie.............,.......,......,....
Tome 11. Textes élamites-sémitiques, par V. Scueiz, O. P. Première
série. In-4°, 2 planches en héliogravure. ..............
Tome III. Textes élamites-anzanites, par V. Scueix, O. P. Première
série. In-4°, 33 planches, hors texte....................
Tome IV. Textes élamites-sémitiques, par V. Scueir, O. P. Deu-
xième série. In-4°, 20 planches hors texte....,..........,
Tome V. Textes élamites-anzanites, par V. Scueiz,, O. P. Deuxième
série. In-4, 20 planches hors texte (sous presse).
Tome VI. Études archéologiques. In-4°, planches hors texte (En
préparation).
12 fr.
3 fr.
48 fr.
12 fr.
50 fr.
50 fr.
50 fr.
DE L'ORIGINE .…
e
-ὄ«ς- -ν --
παρα eve τα
DU TYPE DES PLEUREUSES
DANS L'ART GREC (1)
On sait que les tombes grecques de l'époque classique ont
livré des figurines de terre cuite dont le caractère funéraire
n’est pas douteux, et auxquelles paraît bien convenir le nom de
pleureuses. Certains types, comme celui de la femme assise au
pied de la stèle dans une attitude de deuil (2), procèdent de la
même conception d'art que les pleureuses de marbre destinées
à décorer le tombeau, et dont les statues de Ménidi nous offrent
des exemples bien connus (3). Ces figurines ne sauraient être
interprétées comme l'image de la morte. Ce sont des femmes
en deuil, et leur présence dans le tombeau prolonge pour ainsi
dire, auprès du mort, l'écho de la lamentation funèbre qui a
retenti à l’heure des derniers adieux. Il y a quelque intérêt, .
oroyons-nous, à rechercher, dans les monuments les plus
anciens, l'origine de ce type figuré, et à essayer de déterminer
les conditions dans lesquelles il a pu prendre naissance.
(1) Ce mémoire a été lu au Congrès international des Sciences historiques de
Rome, séance du 3 avril 1903.
(2) Musée de Berlin, Furtwaengler, Coll. Sabouro/ff, vignette à la fin de la notice
de la pl. XV-XVI-XVII. Musée d'Athènes, n° 4720. Cf. Hamdi-bey et Th. Reinach,
Une nécropole royale à Sidon, Ὁ. 244, fig. 65.
(3) Furtwaengler, Coll. Sabouroff, ibid., Arndt-Bruckmann, Denkmaeler gr. und
” roem. Sculptur, pl. 534.
20
900 MAX. COLLIGNON
Voici une série de terres cuites appartenant au Musée natio-
nal d'Athènes et au Musée du Louvre, et qui, classées dans
l'ordre chronologique, nous mettent sous les yeux le développe-
ment du type de la pleureuse debout. Avant d'examiner les
questions que soulève l’étude
des monuments, j'en donnerai
d'abord la description.
1. Louvre, Salle L, vitrine C
(MN B, 535). H. 0 m. 24.
La provenance indiquée est
la Béotie, et probablement
Tanagre (fig. 1). La figurine
représente une femme, la tête
relevée, la main gauche posée
sur la tête, la droite ramenée
sur la poitrine avec un geste
de douleur. Le modelé du
visage, des bras et du buste
est tout à fait rudimentaire.
Le buste se soude à une partie
inférieure évasée en forme de
cloche, façonnée au tour, et
fermée à la base. Le vêtement,
évidemment un chiton à cein-
ture, est peint au brun rouge
avec des traces de couleur
jaune (1).
2. Louvre, Salle L, vitrine C
(C À, 295). H. 0 m. 175.
Tanagre (fig. 2). Une femme, les deux mains ramenées sur la
tête, fait les gestes de la lamentation. Les cheveux sont coupés
courts. Le costume est le même que dans la figurine précé-
Fig. 1. — Terre cuitc du Louvre
(1) J'ai vu un type analogue dans la collection archéologique de l’Université
de Wurzbourg. -
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 9301
dente; mais le modeleur a indiqué plastiquement les courtes
manches du chiton qui est peint au bistre. Bien que le style
soit aussi archaïque que dans le n° 1, 16 visage est exécuté
moins sommairement.
Fig. 2. — Terre cuite du Louvre. Fig. 3. — Terre cuite du Musée national d'Athènes.
3. Musée national d'Athènes, n° 4157. H. 0 m. 25. Largeur de
la base, 0 m. 08. Provenance inconnue, l’objet ayant été con-
fisqué (fig. 3). Pleureuse faisant les mêmes gestes que la précé-
_ dente. Même technique et même indication des courtes manches
du chiton, peint au bistre. Mais il faut noter l'exécution très
réaliste du visage, qui a une expression étrange avec ses grands
302 MAX. COLLIGNON
yeux farouches, son nez saillant et pincé, et sa bouche en coup
de sabre. Les cheveux sont coupés courts. Le type est certaine-
ment celui d'une vieille femme, et le coroplaste a souligné ce
caraclère en donnant au visage une coloration brun rouge. Le
Fig. 4. — Terre cuite du Musée national d'Athènes.
même détail se retrouve
dans une terre cuite primi-
tive de Dresde représentant
un vieillard dont la barbe
et la chevelure sont blan-
ches, tandis que le visage
et les mains sont peints au
brun rouge foncé (Jahrbuch
des arch. Inst., 1891, Arch.
Anseiger, p. 163, fig. 6.
&. Musée national d’Athè-
nes, n° 4563. H. 0 m. 20.
H. de la base, 0 τι. 046.
Provenance, Tanagre (fig. 4).
Femme debout, vêtue d'un
chiton avec diploidion à
peine indiqué. La jambe
gauche, un peu fléchie, est
portée en avant. La main
gauche est ramenée au-
dessus de la tête; le bras
droit est tendu, mais il est
modelé avec une telle né-
gligence qu’il a l'aspect d'un
moignon informe. Le visage
a déjà le type régulier propre au style sévère de la fin de
l'archaïsme. ἢ est peint d'un ton brun rouge, sur lequel tranche
le ton clair des yeux et de la chevelure. L’exécution est négligée,
mais la figure appartient sans doute au premier quart du
γ᾽ siècle.
5. Musée national d'Athènes, n° 3953. H. 0 m. 20. H. de la
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 303
base, 0 m. 016. Provenance, Tanagre (fig. 5). Pleureuse, les
bras relevés et ployés, les mains réunies et posées à plat sur la
tête. Elle est vêtue d’un chiton avec un long diploïdion. La
tête a les caractères de l'archaïsme avancé, le nez droit, le
menton fort, la chevelure ondulée, et elle trahit un certain
Fig. 5. — Terre cuite du Musée national d'Athènes. Fig. 6. — ie se du Musée nalional
iènes.
désaccord avec la rudesse d'exécution du reste de la figure. Les
proportions du corps sont ridiculement écrasées, et les bras,
modelés sommairement, articulés à angle droit, sont d'unc lon-
gucur démesurée. Mais ces fautes grossières d'exécution n'im-
304 MAX. COLLIGNON
pliquent pas nécessairement que la figurine soit d'une date
très ancienne. C'est la forme du costume et le type qui doivent
surtout être considérés. La base fait corps avec la figurine.
6. Musée d'Athènes, n° 3957. H. 0 m. 335. H. de la base,
0 m. 045. Provenance, Tanagre (fig. 6). Une femme vêtue du
chiton à diploidion. Les bras élevés et ployés, elle tient les
deux mains posées à plat sur la tête. C’est le type de la figure.
n° 5, mais avec des progrès de style évidents. Le visage, avec
ses traits réguliers, la chevelure divisée en bandeaux, offre tous
les caractères du style postérieur à 450. En faisant porter le
poids du corps sur une jambe, tandis que l’autre est légèrement
fléchie, le modeleur a donné à la figurine un rythme qui est
courant dans la grande sculpture. Mais, ici encore, l'exécution
n’est pas d'accord avec le style, et le modelé des bras, des
mains et du cou laisse fort à désirer. |
Répartie sur un assez long espace de temps, cette série de
monuments nous permet de suivre le développement d’un type
unique, celui de la pleureuse exécutant les gestes consacrés de
la mimique funèbre. Les terres cuites dont la partie inférieure
est modelée en forme de cloche paraissent succéder immédia-
tement aux plus anciennes productions des ateliers béotiens,
aux idoles en forme de cloche à décor géométrique étudiées par
M. Holleaux (1), et aux pappädes qui représentent déjà une
ornementation « orientalisante » (2). Elles se placent donc vers
le νι" siècle, environ. Les plus récentes nous conduisent jus-
qu'au v* siècle. Il faut ajouter qu’elles proviennent toutes de
fabriques béotiennes. Il y a par suite quelque intérêt à recher-
cher : 1° comment le type s’est formé, et quelles en sont les
origines ; 2° dans quel rapport il se trouve avec le rituel funé-
raire béotien.
(1) Monuments Piot, 1, Figurines béotiennes en terre cuile, pp. 21-42.
(2) Boehlau, Jahrbuch des arch. Inst., III, pp. 342-344. Cf. la bibliographie citée
par M. Holleaux, art. cilé, p. 28, note 2.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 305
S'il faut en croire certaines théories, il conviendrait de
remonter fort loin, jusqu'à la civilisation mycénienne, pour
retrouver, dans des essais de plastique tout à fait rudimen-
taires, comme l’ébauche du type de la pleureuse. On connaît
les figurines trouvées à Mycènes, à Tirynthe, à Chypre, et qui
offrent souvent [ἢ image sommairement
modelée d'une femme vêtue élevant les
deux bras (1). Elles ont été le plus
souvent interprétées comme des divi-
nilés. M. Maximilian Meyer est le pre-
mier à ma connaissance, qui ait pro-
posé une autre explication (2). Pour
lui, l’époque mycénienne aurait ignoré
le culte des dieux, et le culte des morts
serait seul en cause. Ces prétendues
idoles, dont plusieurs semblent se
livrer à une mimique expressive, se-
raient des pleureuses ; déposées avec
le mort dans sa sépulture, elles perpé-
tucraient le souvenir des lamentations
qui l’avaient escorté pendant l'éxvopa.
M. Reichel a soumis à un examen Fig. 7. — Idole de Chypre
. . (Musée du Louvre).
critique la théorie de M. Maximilian
Meyer, et il en a restreint la portée (3). Si quelques-unes de
ces figurines, caractérisées par les gestes des bras relevés, lui
paraissent avoir des droits au nom de pleureuses, les autres
(4) Voir, par exemple, Schliemann, Mycènes, p. 131, fig. 94, 96; p. 140, fig. 111.
Les mêmes types se sont rencontrés sur l'Acropole d'Athènes (Arch. Anzeiger,
1893, p. 140, fg. 1). Cf. pour les figurines de provenance chypriote, Heuzey, Fig.
antiques de terre cuile, p. 148; Cesnola, Cyprus, pl. VI. Nous reproduisons ci-joint
une des figurines chypriotes du Musée du Louvre (fig. 1).
(2) Max. Meyer, Mykenische Beitraege, 11, Jahrbuch, 1892, p. 189. Cf. 8. Reïnach,
Chroniques d'Orient, Il, p. 234.
(3) Reïichel, Ueber vorhellenische Goelterculte, 1897, p. 68 et suivantes,
906 MAX. COLLIGNON
seraient, non pas des imitations de statues de culte, mais des
simulacres d’idoles religieuses, spécialement destinés au culte
des morts.
Ainsi limitée à une série de figurines, l'interprétation de
M. Reichel nous paraît encore douteuse. Le geste des bras
levés n'est pas nécessairement l'expression d’un sentiment
pathétique et il reste permis de l’interpréter soit comme un
geste d’adoration (4), soit simplement comme une attitude
indiquant le caractère divin de
ὦ :
FR Îh l'idole (2). Cette dernière hypothèse
(æ\®) .| 8 pris beaucoup de force depuis que
TZ ] des découvertes récentes ont ap-
|
| | porté de nouveaux termes de com-
AI ΕἾ paraison. M. Sam Wide a publié
᾿ς ὁ des idoles mycéniennes trouvées
par M. Halbherr à Prinias, au sud
de l'Héraion d'Argos (3). L'une
d'elles, caractérisée par la forme
cylindrique de la partie inférieure
du corps, à laquelle se joint un
buste féminin, est certainement une
divinité: or, si l’un des bras est
brisé, l’autre, relevé vers la tête, ne
laisse pas de doute sur l'attitude
qu'il convient de lui restituer : c’est
celle des prétendues pleureuses de Mycènes et de Tirynthe. Il
faut ajouter que des types de divinités aux bras relevés ont été
découverts en Crète, d'abord à Gournia, dans un hiéron de
l'époque mycénienne (4), ensuite à Cnossos, dans une chapelle
d ÿ: 2 ΕἾ
τ:
.Ὁ
πρὶ
LS
ER |
Fig. 8. — Idole de Cnossos.
(1) Cf. une terre cuite de Chypre (Louvre, vitrine E. Heuzey, Catalogue des
figurines antiques, n° 20, p. 149).
(2) Cf. Tsountas et Manatt, The mycenaean Age, p. 291; Perrot et Chipiez, Hist.
de l'art, VII, p. 148. Schmidt pense que ces figures peuvent représenter des
orantes; Jahrbuch, 1898, Arch. Anzeiger, p. 125-1926.
(3) Sam Wide, Mykenische Goetlerbilder und Idole, Ath. Mittheil., XXVI, 1904,
p. 247-257, pl. XIL
(4) Sam Wide, ibid., p. 249,
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 907
consacrée au culte de la double hache. L'une de ces dernières,
publiée récemment par M. Evans, est remarquable par la forme
cylindrique de la base, et par la pose des bras relevés, une
main vue de face, l'autre de profil (1) (fig. 8). Voilà donc tout
un groupe de monuments de même style, découverts dans des
conditions qui ne laissent aucun
doute sur leur caractère d'idoles, et
sur la valeur du geste qui nous oc-
cupe.
Enfin je rappcllerai que cette sorte
de formule plastique à survécu à
l'époque mycénienne. On la re-
trouve dans des terres cuites de
Chypre appartenant à la période
archaïque, témoin la figurine du εὐ μὴ
Louvre que nous reproduisons et ET
- . ὍΝ
qui ἃ la forme d'un cylindre aplati, : 34
muni d’une tête, et de deux mains TR
“2,2 }
ouvertes « sortant brusquement du 47
Lo
corps de la colonne (2) » (fig. 9). LT
L’attitude, ajoute M. Heuzey « rap- 5
pelle, par la position des mains, une τ.
ς ᾽ . ἔν
classe de simulucres dont l’Artémis “ZA
4 μ, , . ΄ Α
d'Éphèse est l'exemple le plus cé- 7
lèbre; cependant il ne serait pas “TA
ΓῚ Γ . 4° A
impossible d'y reconnaître aussi un ‘. D
Sd
geste d’invocation ou de prière ».
ΕΞ ᾿ : Fig. 9. — Figurine de Chypre
Qu'elle ait également le sens d'un (Musée du Louvre).
geste divin, c'est ce que tendrait à
prouver une autre terre cuite du Louvre, d’origine tana-
gréenne, montrant une divinité coiffée du polos, et vêtue
d'un ample himation qui recouvre deux bras, ou plutôt
(4) A.-J. Evans, The palace of Knossos (extrait de l'Annual of {he British School
at Athens, VIII, 1901-1902), p. 99, fig. 36.
(2) Heuzey, Fig. ant. de lerre cuile du Musée du Louvre, p. 49.
308 MAX. COLLIGNON
deux moignons, relevés exactement comme dans les idoles
mycéniennes (4).
En réalité, il semble bien que le geste des bras relevés n'ait
pas le sens précis qu'on serait tenté d'y chercher. Je partage
tout à fait les idées exposées par M. Salomon Reinach sur le
peu de valeur expressive qu'il convient d'attribuer à la mimique
dans les figures primilives. « Nous pensons, écrit-il, que dans
tous les arts primitifs, le geste est chose indifférente, c’est-à-
dire qu’il se produit une certaine quantité de types, indépen-
dants de toute conception psychologique, où l'attitude des bras
et des jambes n'est qu'un effet de l’inexpérience de l'artiste, de
son désir d'être compris de tous, et de sa tendance naïve à la
symétrie (2) ». M. Cecil Smith arrive à des conclusions iden-
tiques en analysant les phases par lesquelles passe la plastique
primitive, pour aboutir au geste des bras ramenés sur la poi-
trine, tel qu'on l'observe dans une statuctte de bronze trouvée
à Melos (3). En ce qui concerne le geste de la main ramenée
vers la tête, on se tromperait fort si l’on voulait y reconnaître à
tout prix, dès les origines de l’art, l'attitude caractéristique de
la lamentation. On le trouve reproduit dans de petits bronzes
découverts en Crète, dans la grotte du Dicté (4). Or le lieu de
la trouvaille indique qu'il s’agit ici de simples figures votives.
Il faut donc renoncer à l'explication proposée par M. Maxi-
milian Meyer. Les idoles de Mycènes et de Tirynthe ne sont
point des pleureuses. Est-ce à dire cependant que l'art mycé-
nien ait ignoré le type de la pleureuse et qu’à cette époque on
ne trouve aucune trace du rite funéraire que nous font con-
naître nos terres cuites béotiennes ? La question s’est posée au
sujet d'un monument très familier aux archéologues. Nous
voulons parler de la figurine de bronze du Musée de Berlin
(1) Elle a fait partie de la collection d'Olivier Rayet. Salle L.
(2) S. Reinach, La sculpture en Europe (extrait de l'Anthropologie, 1894-1896),
p. 74-15.
(3) C. Smith, Excavations at Melos (extrait de l'Annual of the British School at
Alhens, 1896-1897), p. 28 et pl. II.
(4) Hogarth, Annual ofthe British School, VI, 1899-1900, p. 497, pl. X, fig. 5 et 8.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 309
représentant une femme en costume mÿcénien, une main
ramenée sur la poitrine, l'autre étendue à la hauteur des
yeux (1) (fig. 10). Pour certains
savants, c'est là un geste rituel
d'orante ou de prêtresse ; pour d’au-
tres c’est bien l'attitude de la la-
mentation (2). Cette seconde hypo-
thèse nous paraît la plus juste.
M. Furtwaengler l’a confirmée par
le témoignage d'autres monuments
qu’on peut rapprocher de la figure de
Berlin, une terre cuite de Crète (3),
et un fragment d'un bronze mycé-
nien trouvé dans les environs de
Smyrne, où la main gauche est
ramenée vers le front par un geste
très caractérisé (4). Si le nom de
pleureuse convient réellement,
comme nous le croyons, à ces
figures, on remarquera qu'elles se EM ἃς τ
distinguent bien nettement des, NES
idoles. Ce ne sont plus, comme pig. 10. — Statuelte de bronze
| (Musée de Berlin).
celles-ci, des images convention-
nelles; ce sont des représentations d'être réels. Ces femmes
portent le costume d'apparat qui nous est connu par les intailles
et les ivoires; leurs longues chevelures flottantes sont traitées
(1) Jahrbuch des arch. Inst., IV, 1889; Arch. Anzeiger, p. 94, fig. 1. Cf. Perrot et
Chipiez, Hist. de l’art, VI, fig. 349, 350. Helbig, La question mycénienne (extrait
des Mémoires de l’Acad. des Inscr., t. XXXV, 1896), p. 315, fig. 17° 11°. Furtwaen-
gler, Berl. phil. Wochenschrift, 1896, pp. 1519-1520.
(2) M. Perrot, ouv. cilé, p.751, y voit « un geste rituel dont la signification nous
échappe faute d’un texte qui l'explique ». Le monument a été interprété comme
une figure de pleureuse par Furtwaengler, Jahrb., 1899, loc. cit., p. 94; Max. Meyer,
Jahrb., 1892, p. 121. Cf. Hamdi-bey et Théodore Reinach, Une nécropole royale à
Sidon, p. 244, note 3.
(3) Monumenti antichi dell Accad. dei Lincei, VI, p. 171, 173, fig. 3,4.
(4) Furtwaengler, Neue Deukmaeler antiker Kunst, Sitzungsber. der bayer. Akad.,
4900, p. 580, fig. 1.
910 MAX. COLLIGNON
avec un curieux réalisme. Comparées aux idoles mycéniennes,
elles accusent la même recherche de vérité que trahissent nos
terres cuites béotiennes les plus anciennes, si on les rapproche
des pappâdes dont le style s'est si lentement transformé. Il
y a, d'une part, un type traditionnel, qui n'échappe pas, il
est vrai, à l’évolution de l’art, car il est difhicile de méconnaître
dans l'idole de Cnossos limitation sommaire du costume
mycénien, mais dont les étapes se reconstituent aisément ; de
l'autre, un type observé pour ainsi dire sur nature, et créé en
dehors de loute convention. C'est donc dans la civilisation
mycénienne que nous trouvons, sous sa première forme, le
type plastique de la pleureuse. On admettra facilement que
ces figures étaient déposées dans les tombeaux.
IT
Pour l’époque qui suit les invasions doriennes, les poèmes
homériques nous renseignent suffisamment sur le rôle dévolu
aux pleureuses dans les cérémonies des funérailles. Il est à
peine besoin de rappeler les textes qui mentionnent le thrène
funèbre οἱ la lamentation des femmes (γόος) (1). On sait d'autre
part que, pour la période qui s'étend du 1x° au vu® siècle, les
grands vases du Dipylon nous mettent sous les yeux tout le
cérémonial funéraire des Attiques, et que la lamentation des
femmes y tient une large place (2). Nous ne reviendrons pas
sur des questions souvent traitées, et nous n'avons pas à décrire
ici le type bien connu des pleureuses, représentées nues, les
bras ramenés au-dessus de la tête, par un gesle mécanique et
uniforme, et alignées en file auprès du lit servant à la mooûéo,
ou derrière le char funèbre. Nous ne rouvrirons pas non plus
(4) Iliade, XXIV, vers 721 suiv. Sur le rituel funéraire à l'époque homérique,
voir Helbig, Zu den homerischen Bestaltungsgebräuchen, Silzungsber. der bayer.
Akademie, 1900, pp. 199 et suivantes.
(2) Voir Hirschfeld, Annali, 1812; Kroker, Die Dipylonvasen, Jahrbuch. des
arch. Inst., 1, 1886, p. 125.
mc mm = »"ν
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 944
le débat auquel a donné lieu l'explication de la nudité des
pleureuses. Pour M. Helbig, elle pourrait avoir été suggérée
aux peintres attiques par l'imitation de motifs étrangers, tels
que les figurines nues désignées sous le nom d'Astarté, décou-
vertes dans les tombes mycéniennes (1). Pour M. {Kroker,
Fig. 11. — Statuettes chypriotes en pierre calcaire (Musée du Louvre.)
on retrouverait là l'influence des modèles égyptiens où les
contours du corps féminin se dessinent sous une étoffe trans-
parente (2). Ces théories ont été combattues (3), et l’on est
(1) Helbig, L'épopée homérique, trad. Trawinski, p. 41.
(2) Kroker, Jahrbuch des arch. Inst., 1, 1886, p. 105-106.
(3) 8. Reinach, Rev. arch., 1895, I, p. 367-394; Pottier, Catal. des vases ant. du
Louvre, p. 226; Perrot, Hist. de l’art, VIL, pp. 174-175. Cf. Furtwaengler, Arch.
Zeilung, 1884, p. 136.
312 MAX. COLLIGNON
aujourd’hui d'accord pour reconnaître dans cette prétendue
nudité une pure convention de style.
Je dois cependant signaler des monuments qui, au premier
abord, sembleraient apporter des arguments en faveur de
l'hypothèse de M. Helbig. Le Louvre possède une série de trois
figures en calcaire, provenant de Chypre et dont l’une est sim-
plement ébauchée (1) (fig. 11). Ce sont des femmes nues, aux
larges hanches, tenant les mains posées à plat sur la tête dans
l'attitude des pleureuses du Dipylon. Le corps est coupé à la
hauteur des genoux par une section nette, comme si les figu-
rines étaient destinées à être posées sur le sol. Faut-il voir ici
les prototypes de ces pleureuses nues dont se seraient inspirés
les peintres du Dipylon? Je ne le pense pas. Tout d’abord la
date des figurines de Chypre paraît être relativement basse,
et, en outre, cette conception s'explique par une évolution de
style qui semble avoir été localisée dans la plastique chypriote.
Il est facile de reconnaître le motif d’où dérivent les pleureuses
de Chypre; c’est celui de la déesse nue appuyant les deux
mains sur ses seins pour les presser, et qui a été souvent
qualifiée du nom d’Aphrodite orientale. On sait combien ce
type est fréquent dans les figurines de terre cuite (2) ; le Louvre
en possède un exemplaire en pierre calcaire qui peut être
rapproché des statuettes de pleureuses (3). Si l'on songe au rôle
de protection funéraire que les Chypriotes attribuaient à ces
images (4), on ne s’étonnera pas de voir ce même type de
divinité passer dans la décoration des sarcophages; nous re-
trouvons, en effet, quatre figures analogues sur un des petits
côtés du sarcophage d'Amathonte (5). Je croirais volontiers que,
sous l'influence des idées grecques, ce type a perdu graduel-
lement son sens primitif, et que le caractère de divinité pro-
(4) Acquises en 1889, AM, 171-119.
(2) Heuzey, Fig. ant. du Musée du Louvre, pl. IX, 4, 5. Cf. Perrot, Hist. de l’art,
ΠῚ, p. 450, fig. 321, p. 555, fig. 319.
(3) Perrot, ouv. cité, p. 555, fig. 380.
(4) Heuzey, Catal. des fig. ant., p. 151.
(5) Perrot, Hist. de l’art, 111, p. 610, fig. 417
’ART GREC 913
4
DE L ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L
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314 MAX. COLLIGNON
tectrice a pour ainsi dire passé au second plan, pour ne laisser
en évidence que le rôle de pleureuses attribué à ces figures.
Cette évolution, sans doute postérieure à la date où se placent
les vases du Dipylon (1), n’intéresse en rien la formation du
type des pleureuses attiques. Elle ne saurait être invoquée
comme un argument pour expliquer la nudité des figures qui
prennent part au cérémonial funéraire. Nous le répétons,
cette nudité est une convention de style. Il faut ajouter qu'elle
est particulière aux ateliers attiques, car sur un vase béotien
représentant une scène funéraire, évidemment imitée d’un
modèle attique de style dipylien, les pleureuses sont vètues, et
l'on reconnaît sans peine la forme du costume qui est la même
que dans les plus anciennes de nos terres cuites (2). Les monu-
ments que nous publions nous permettent d'apporter un nouvel
argument en faveur de l'origine purement grecque du type des
pleureuses figuré sur les vases du Dipylon. Il est, en effet,
remarquable que le geste caractéristique des bras relevés et
des mains posées à plat sur le haut de la tête se retrouve dans
deux terres cuites béotiennes (n°* 4 et 6) (3); ainsi les peintres
attiques du vim° siècle ont déjà reproduit exactement une mi-
mique funéraire qui reste en usage à l’époque classique. On
peut même dire sans paradoxe qu'ils ont introduit dans le type
de la pleureuse plus de variété que ne l'ont fait les coroplastes,
car les femmes qui se lamentent sont tantôt debout (4), tantôt
assises (5), tantôt agenouillées auprès du lit funèbre (6). Sur le
(4) M. Perrot fait justement remarquer que la figure de Chypre en pierre cal-
caire représentant une divinité se pressant les seins est postérieure aux terres
cuites du même type. Hist. de l’art, 111, p. 355.
(2) Pottier, Vases antiques du Louvre, pl. 6, À, 11, et p. 5. Cf. Perrot, Hist. de
l'art, VI, p. 215, fig. 95.
(3) Οἱ. le geste de la femme qui assiste au départ des guerriers dans la peinture
du vase de Mycènes, Furtwaengler et Loeschcke, Myk. Vasen, pl. XLII.
(4) Mon. inediti, IX, pl. 39-40.
(5) Rayet et Collignon, Céramique grecque, p. 21, fig. 19.
(6) Sam Wide, Jahrbuch, 1899, p. 281, fig. 69. Collignon-Couve, Catal. des
vases du Musée national d'Athènes, n° 200. Nous donnons ci-joint un fragment
conservé au Musée d'Athènes. Perrot, Hist. de l’art, VII, p. 51, fig. 5.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 345
fragment que nous reproduisons, deux pleureuses sont accrou-
pies devant la couche du mort, tandis que les autres se tiennent
debout pour faire les gestes
commandés par le rituel
(fig. 12).
Il est à remarquer que les
tombes attiques de la période
du Dipylon n'ont pas livré
de figurines de terre cuite
représentant des pleureu-
ses (1). La raison en est sans
doute que les tombes les
plus riches, celles autour
desquelles le deuil avait été
mené avec le plus d’apparat,
étaient ornées de ces grands
vases qui formaient le σῆμα
ἐπιτύμδιον, et sur la panse
desquels se déroulait la re-
présentation de la πρόθεσις
et du cortège funèbre. Les
pleuréuses peintes sur les
flancs du vase suffisaient à
assurer la durée de la com-
mémoration du deuil.
Chose curieuse, on ne
trouve guère, à ma connais-
Fig. 13. — Loutrophore attique (Musée de Berlin).
sance, le type de la pleureuse figuré plastiquement que sur une
loutrophore de Berlin, postérieure à la fabrication du Dipylon,
et rappelant par la forme et le caractère oriental du décor le
(1) On connaît bien aujourd'hui le mobilier funéraire des tombes du Dipylon
(cf. Brückner et Pernice, Athen. Mittheil., xvin, 1893, p. 144 et suivantes). Or les
figurines ne s'y rencontrent que par exception. Les statuettes d'ivoire publiées
par M. Perrot (BCH., 1895 p. 273-295, Hisé. de l’art, vu, Ὁ. 142-145, et pl. III)
nous paraissent être des œuvres d'importation orientale plutôt que des produits
indigènes.
21
316 MAX. COLLIGNON
style des vases de Vourva (1) (fig. 13). L'anse, modelée en relief,
représente une femme tenant les bras levés, avec un geste de
désolation. Les peintures n'ayant aucun caractère funéraire,
on comprend que l'image de la pleureuse se soit insinuée
dans l'ornementation, sous la forme d’une figure modelée. En
réalité, le céramiste a eu recours à un procédé connu, et dont
nous trouvons de nombreux exemples dans la céramique de
Chypre.
L'idée de compléter le décor du vase par l'addition d'un
buste ou d'une figurine ajustés sur le col du récipient apparaît en
effet de bonne heure, et dès les origines, dans la fabrication chy-
priote. 1] est même possible que les potiers de Chypre aient
parfois attribué à ces figurines un caractère funéraire, témoin
celle dont nous donnons le dessin ci-joint, et qui appartient au
Louvre (fig. 14). C’est, pour emprunter les termes de la descrip-
tion de M. Heuzey, « une petite figure en forme de double
cylindre, munie de deux bras qu’elle porte à la tête en signe de
deuil (2) ». On pourrait être aussi tenté de retrouver comme la
première et lointaine ébauche d'un geste familier aux pleu-
reuses de l’époque classique dans la figure qui orne un vase
chypriote du Louvre, certainement antérieur au xu° siècle (3)
(fig. 15). Une femme, dont le buste seul émerge du vase, sou-
tient de la main droite le bras gauche qui semble ramené vers
le menton. N'est-ce pas là l'attitude si souvent prêtée à la
femme en deuil par les sculpteurs des stèles attiques du ν" et
duiv° siècle? Pourtant, si séduisante que soit cette conjecture,
il serait imprudent de s'y arrêter. Les vases de Chypre nous
offrent souvent de ces figures modelées dont les gestes sont
dépourvus de signification. Tel est le cas pour un autre vase du
Louvre décoré d'un buste de femme (fig. 16). Il n’y a aucune
(4) Jahrbuch des arch. Inst., 1892, Arch. Anzeiger, p. 100.
(2) Heuzey, Catal. des figurines en terre cuite, p. 141.
(3) Pottier, Vases antiques du Louvre, pl. 6, À, 71, et p. 6. Notre dessin et les
figures suivantes reproduisent des photographies obligeamment communiquées
par M. Pottier.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 317
intention à chercher dans l'attitude; elle relève simplement de
ces conventions primitives dont nous avons déjà indiqué le
caractère spontané et dénué de toute recherche d'expres-
sion.
L'examen de la loutrophore attique de Berlin nous conduit
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Fig. 14. — Figurine de Chypre
(Musée du Louvre).
Fig. 15. — Vase de Chypre (Musée du Louvre).
encore à considérer une autre classe de vases chypriotes où
les figurines modelées sont des femmes tenant à deux mains
une cruche appuyée contre leur corps. Ce sont les œnochoés au
318 MAX. Ÿ COLLIGNON
type de la « verseuse » (4). Notre figure 17 reproduit un frag-
ment qui se trouve au Louvre. La figure a-t-elle un sens funé-
raire? Faut-il y voir, suivant l'ingénieuse hypothèse de
M. Heuzey, un personnage divin, et songer à « la déesse égyp-
tienne Hathor, versant aux défunts l’eau céleste ? » Ou bien,
en restant dans le do-
maine de la vie fami-
lière, faut-il y recon-
naître une proche pa-
rente des pleureuses,
c’est-à-dire une femme
jouant son rôle dans
le rituel funéraire, et
versant l'eau du bain
du mort? Je crois,
pour ma part, qu'il n’y
a guère là qu'une
transformation d’un
décor plastique dont
l'idée est fort an-
ciennc. Nous la trou-
vons déjà réalisée dans
un curieux vase de la
Troade, conservé au
musée d'Athènes: le
vase lui-même a la
forme d'un personnage
qui soutient à deux mains une coupe posée contre sa poitrine (2).
Il est donc fort probable qu’en ajoutant aux vases ces figures
de « verseuses », les potiers chypriotes n’obéissaient qu'à une
préoccupation d'ordre artistique. M. Pottier a déjà fait observer
=
ἘΠ
---
—
Ch 1
LT +
LL.
Fig. 16. — Vase de Chypre (Musée du Louvre).
(1) Pottier, Catalogue, Ὁ. 113. Cf. Heuzey, Gas. arch., 1889, p.1-6. Herrmann,
Das Graeberfeld von Marion auf Cypern, p. 53-58.
(2) Collignon-Couve, Catal. des vases peints du Musée national d'Athènes,
n° 14.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 349
que la destination funéraire de ces vases n’est pas nettement
établie (1).
Il reste acquis néanmoins que les Attiques ont utilisé, pour
la décoration des loutrophores, cette sorte de formule plastique.
Mais ils ne l'ont guère fait qu'à titre d'exception. Les loutro-
phores à décoration orientale, comme celles de Berlin, appar-
tiennent en effet à une époque de transition. Bientôt la peinture
céramique à figures noires va revendiquer le privilège qu'elle
Fig. 17. — Fragment d'un vase de Chypre au type de la « verseuse » (Musée du Louvre).
avait possédé à l’époque du Dipylon, celui de retracer les
épisodes du cérémonial funèbre. Les pleureuses vont retrouver
leur place, soit sur les plaques de terre cuite peintes offertes au
mort, soit sur les loutrophores, véritables monuments funé-
raires destinés à être placés sur le tombeau (2).
(4) Pottier, Catalogue, p. 113.
(2) Voir notre article Loutrophoros, Dict. des Antiquités gr. et romaines.
320 : MAX. COLLIGNON
III
Aux vim* et γι" siècles, le rituel funéraire des Béotiens
semble offrir des caractères un peu différents de ceux qu'on
peut observer en Attique. Les ateliers béotiens ne fabriquent
que par exception, en copiant d’ailleurs des modèles du style
dipylien, ces grands vases reproduisant des scènes de funé-
railles qui sont si fréquents à Athènes (4). Par contre, les
tombes de l'époque dorienne livrent en grand nombre des
terres cuites représentant des sujets familiers, et offrant
d'étroites analogies avec celles qui se rencontrent dans les
plus anciennes nécropoles de Chypre, antérieures à la période
mycénienne. Boulangères pétrissant le pain, femmes faisant
cuire des aliments, coiffeurs accommodant leurs clients, scribes
écrivant, laboureurs, tels sont quelques-uns de ces sujets dont
M. Pottier a publié plusieurs spécimens appartenant au Musée
du Louvre (2). Dans ce mémoire, l'auteur a finement analysé
la signification de ces scènes de genre, en les rapprochant des
scènes familières qui décorent les parois des hypogées égyp-
tiens. Qu'on admette ou non des influences égyptiennes, per-
sonne ne contestera les conclusions exposées par M. Pottier. La
présence de ces figurines s'explique sans aucun doute par la
croyance à la vie matérielle qui subsiste dans le tombeau, ct
tout ce monde d'artisans, de serviteurs, ἃ pour mission de sub-
venir aux besoins du mort. N'est-ce pas, sinon la même idée,
au moins une préoccupation très voisine de celle-là, qui porte
les survivants à déposer dans la tombe des figures de pleu-
reuses? Elles ont, celles aussi, uu office à remplir auprès du
défunt: elles l'entourent dans sa sépulture, comme elles l'ont
entouré pendant la cérémonie des funérailles ; elles témoignent
qu'il n’a pas été enseveli ἄχλαυστος, et elles perpétuent le sou-
(1) Ainsi le vase déjà cité, Pottier, Vases antiques du Louvre, pl. 21, À. 575.
(2) Pottier, BCE, XXIV, 1900, p. 510-523, pl. IX, X, ΧΙ. Cf. un type analogue
publié par miss Hutton, Greek lerracotta Slaluettes, fig. 3.
DE L'ORIGINE DU TYPE DES PLEUREUSES DANS L'ART GREC 921
venir du deuil des survivants. Le mort a son cortège de
pleureuses, comme 1] a près de lui tout un petit monde de
serviteurs.
M. Pottier a justement remarqué que ce fonds d'idées est
commun à la Béotie et à l’île de Chypre. Pour cette dernière
région, on en trouve déjà l'expression à une date très lointaine,
antérieure aux influences mycéniennes. Nous ne remontons
pas aussi haut en ce qui concerne la Béotie; mais je croirais
volontiers que, Îà aussi, la tradition est fort ancienne. M. Sam
Wide a fait observer que, dans ce pays, on constate, au point de
vue des choses religieuses, plus d'une survivance de la civili-
sation mycénienne (1). Il est fort possible que nos figurines de
pleureuses, si nettement caractérisées par l’évasement en forme
de cloche de la partie inférieure du corps, gardent ainsi le
souvenir des idoles à base cylindrique qu'on trouve à Prinias,
à Gournia et à Cnossos, à moins qu'on ne préfère les rattacher
aux pleureuses mycéniennes de bronze dont il a été question
plus haut.
Suivre dans l’art grec, à des dates plus récentes, l’histoire
de ce type plastique dont nos terres cuites nous montrent
l'origine, ce serait là une tâche qui excéderait les limites de ce
travail. Je me propose de le faire dans une étude d'ensemble.
Remarquons seulement que, sans quitter la Béotie, nous
voyons le type se développer d’une manière ininterrompue
jusqu'au v° siècle. La série que nous avons formée permet de
saisir toutes les phases de l’évolution. Tandis que le progrès
des idées morales, en épurant les conceptions relatives à la
vie future, conduit à l'abandon des sujets familiers faisant
allusion à la vie matérielle du mort, les pleureuses gardent
leur place dans la tombe. Elles la conservent longtemps, au
moins en Béotie, témoin les terres cuites tanagréennes du
iv* et du m° siècle représentant une femme assise au pied de la
stèle dans l'attitude du deuil (2). Mais, avec les progrès de l'art,
(4) Sam Wide, Afhen. Miltheil., 1904, p. 250.
(2) Hawdi-bey et Th. Reinach, La nécropole royale de Sidon, p. 244, fig. 63,
322 MAX. COLLIGNON
cette conception est adoptée par la sculpture funéraire et elle
y fait une rapide fortune. Les pleureuses sortent de l'obscurité
de la tombe, pour paraître au grand jour; elles font partie de
la décoration extérieure de la sépulture. Devenues tantôt des
statues de marbre, comme les pleureuses de Ménidi, tantôt des
figures de bas-relief, comme dans le célèbre sarcophage de
Sidon, elles jouent le rôle de gardiennes du tombeau, ou for-
ment le chœur douloureux et charmant qui nous offre Ia plus
pure image du deuil silencieux et recueilli.
Max. CoLLiGNon.
OBSERVATIONS SUR LES PERSES
DE TIMOTHÉE DE MILET
Le long fragment des Perses de Timothée de Milet, récem-
ment publié par M. de Wilamowitz-Moellendorff, d'après un
papyrus égyptien (1), est un morceau littéraire dont il ne faut
pas exagérer la valeur, mais qui, assurément, mérite l’atten-
tion. Le premier éditeur a fait une œuvre digne de sa haute
réputation d’helléniste en le déchiffrant, en lui rendant sa
structure métrique, enfin, en l’expliquant et en le commentant
avec une intelligence pénétrante et une grande sûreté d'érudi-
tion. Le meilleur hommage qu'on puisse rendre à son travail
est d'essayer de le compléter, ou peut-être de le corriger et de
l'améliorer sur quelques points. Cette tentative, déjà commen-
cée avec succès, est destinée à se poursuivre peu à peu (2). Je
voudrais y apporter, comme contribution, quelques observa-
tions, qui ont surtout pour objet d'étudier Timothée en tant
que poète.
(1) Timotheos, Die Perser, Leipzig, 1903 ; et Der Timotheos-Papyrus, Facsimile-
ausgabe, Leipzig, 1903.
(2) En France, M. Théodore Reinach a publié, dans la Revue des Études
grecques, t. XVI, p. 62, une étude pleine d'aperçus, où le texte est en partie
analysé, en partie traduit; il en avait déjà donné communication à l'Acad. des
Inscriptions (séance du 27 mars 1903). Si j'avais pu la lire plus tôt, j'aurais abrégé
ma propre étude. Je la donne telle qu'elle a été écrite, pour éviter un remanie-
ment. J'ai profité aussi de la traduction très étudiée et fort bien annotée qu'a
donnée M, Paul Mazon dans la Revue de Philologie, t. XXVII, p. 209.
324 MAURICE CROISET
Commençons par rappeler dans quelles circonstances semble
avoir été composé le nome des Perses, bien qu’à vrai dire
presque tout l'essentiel ait été déjà dit sur ce sujet.
Ce nome est le seul, de nous connu, qui traite un sujet em-
prunté à l'histoire nationale. Cette observation, fût-elle isolée,
nous induiraità penser qu'il a dû être composéen un temps où une
certaine exaltation du sentiment patriotique devait suggérer au
poète cette dérogation à l’usage. Or, Plutarque, danssa Vie d'Agé-
silas (c. 14) rapporte, probablement d'après Éphore, qu'Agé-
silas, étant à Éphèse (en 396-393), prêt à entreprendre l'attaque
décisive contre le roi de Perse, c'était un agréable spectacle
pour les Grecs d’Asie que de voir les satrapes alliés, autrefois
arrogants et fastueux, trembler devant ce soldat au manteau
uni et à la parole brève, et qu'ils répétaient un vers de Timo-
thée : « C'est Arès qui est le maître; quant à l'or, la Grèce ne
le craint pas. »
4 Sn" L ,
"Apns τύραννος * χρυσὸν δ᾽ Ἑλλὰς où δέδοιχε.
Ce vers, nous savons, par un autre témoignage (Miller,
Mélanges, 363), qu'il provenait des Perses. Pour qu'il s’offrit
de lui-même aux esprits, en cette circonstance, il fallait que le
poème fût récent. Nous voici donc amenés à conclure qu'il a
dù être composé durant cette courte période, où Sparte, en
possession de l'hégémonie, se voyait obligée, un peu malgré
elle, de revendiquer la liberté des Grecs d'Asie, c’est-à-dire
entre 400 et 396. Timothée devait avoir alors une cinquantaine
d'années; et cela concorde avec le passage du papyrus où il se
classe parmi ceux qui nc sont ni jeunes, ni vieux (v. 226,
tor6av, un rival de mon âge, opposé à νέον et à γεραόν). Évidem-
ment, le chant pourrait, à la rigucur, être plus ancien. Mais
il semble qu’il aurait eu peu d'à propos, s’il eût été composé
pendant que la Grèce était déchirée par la guerre du Pélopon-
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 395
nèse. D'ailleurs, le vers 220, où le peuple de Sparte est appelé
μέγας ἁγεμών, fait clairement allusion à la situation créée par
les événements de 404. Bergk, en un temps où l'on ne connais-
sait que trois vers des Perses, avait cru pouvoir préciser davan-
tage (P. L. Gr., 4° éd., t. IIT, p. 622, fr. 10, note). Il rappelait
que vers l’année 395, Tithraustès, satrape dévoué au grand
roi, envoya en Grèce le Rhodien Timocrate pour exciter les
villes à se liguer contre Sparte, et que celui-ci y répandit l'or à
pleines mains. Le vers de Timothée sur l'or serait unc allusion à
cette tentative. Ce que nous connaissons aujourd'hui du poème
se prête mal à cette combinaison trop ingénieuse. Le ton n'est
pas celui d'un homme qui aurait cherché à se mêler aux choses
du jour, ni à dire du mal de personne. Mieux vaut donc nous
en tenir à une approximation qui, après tout, peut être regar-
dée comme suffisante.
Quant à la ville pour laquelle le nome des Perses fut com-
posé, M. de Wilamowitz pense qu'elle est indiquée par le poète
lui-même. Mais, sur ce point, il m'est impossible d'accepter
son opinion. Les vers sur lesquels il s'appuie sont les derniers,
et peuvent être traduits ainsi : « Mais, ὁ dieu pythien, qui
« lances tes iraits au loin, viens dans cette cité sainte, appor-
« tant avec toi la prospérité, et donne à ce peuple, en le pré-
« servant de toute souffrance, la paix, qui fleurit sous l’auto-
« rité des lois. »
249 "AV ἑκαταδόλε Πύθι᾽, ἁγνὰν
ἔλθοις τάνδε πόλιν σὺν ὅλ-
όῳ, πέμπων ἀπήμονι λα-
ᾧ τῷδ᾽ εἰοήναν
θάλλουσαν εὐνομίᾳ "
Selon M. de Wilamowitz, les mots « cette ville » (τάνδε
πόλιν) et « ce peuple » (λαῷ τῷδε) désigneraient Milet et le
peuple de Ja dodécapole ionienne, dont il est question dans
d’autres vers qui précèdent immédiatement : il en conclut que
le poème a dù être chanté pour la première fois à la fête panio-
326 MAURICE CROISET
nienne de Poseidon à Mycale (p. 63). Rien ne me paraît moins
probable. Α cette date, quand toute la Grèce d'Asie rêvait
d’affranchissement et se préparait à la guerre, comment ald-
mettre que le poète eût terminé ce chant, qui était, par son
sujet même, un appel au sentiment national, en souhaitant à
l'Ionie, non la liberté, mais la paix ? Ajoutons que les mots τάνδε
πόλιν se traduisent bien plus naturellement par « la ville où je
suis » que par « la ville dont il vient d'être question ».
Malheureusement, à cette conjecture, qui parait devoir être
écartée, il est bien difficile d'en substituer une autre, qui ait
quelque solidité. |
On peut, il est vrai, éliminer, avec peu de chances d'erreur,
quelques-unes des grandes villes du continent grec. Le poème
n'est certainement pas fait pour. Athènes : car il raconte la
victoire de Salamine sans prononcer le nom des Athéniens ;
dans une fête athénienne, cela eût été plus qu'une maladresse,
presque une impertinence. D'ailleurs, nul poète alors n'eût
songé à faire résonner à des oreilles athéniennes cette quali-
fication de μέγας ayeuwv, décernée par lui au peuple spartiate.
— Sparte est également hors de question. Si Timothée, vers la
fin, fait à cette cité de grands compliments, il parle cepen-
dant, avec liberté, du blâme dont elle poursuit'ses innovations.
Cela ne pouvait être dit dans Sparte même, devant les magis-
trats qui étaient les auteurs de ce blâme : le poète aurait paru
les censurer. — 1] me semble qu’il faut exclure aussi Thèbes.
Argos et Corinthe; les deux premières, à cause de leur rôle
dans la seconde guerre médique, qui ne pouvait leur rendre le
souvenir de Salamine fort agréable; la troisième, parce que
l'éloge retentissant de Sparte et l'affirmation de sa supériorité
n'étaient pas pour lui plaire à ce moment.
Mais ces quelques villes éliminées, il en reste beaucoup
d'autres, entre lesquelles le choix serait trop hasardeux. Tout
au plus pourrait-on dire que l’invocation finale au dieu pythien
et la qualification de sainte (ἁγνάν), attribuée à la ville en
question, permettent de songer à Delphes. Si l'on admettait que
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 921
le poème y a été chanté à une des fêtes du printemps, à l'épo-
que du retour annuel d'Apollon, on ne s'étonnerait pas de
l'expression ἔλθοις τάνδε πόλιν : et, d’autre part, bien que le nome
ne fût pas spécial aux fêtes delphiques, on ne peut oublier qu'il
yaété en grand honneur. J'ajoute que l'on pouvait souhaiter aux
Delphiens une paix profonde, sous la garantie de leurs lois,
tout en les associant, par le choix du sujet, à l’idée d'une entre-
prise dont Sparte était la tête. Mais il faut reconnaître qu’au-
cune de ces raisons n'est décisive, et que même la mention
assez surprenante des Achéens et de la dodécapole, au vers
247, se comprendrait mieux si Timothée avait composé son
nome pour une ville d’Achaïe, telle que Patras ou Pellène, ou
pour une colonie achéenne, telle que Metaponte (1). Rési-
gnons-nous donc à rester dans l'ignorance sur ce point.
Il
L'ensemble de la composition, sa structure générale, a été
bien déterminée par M. de Wilamowitz-Moellendorff (p. 16 et
suiv.). D’après un témoignage bien connu de Pollux (IV, 66), le
nome citharédique de Terpandre se divisait en sept parties,
ἀρχά, petaoyé, κατατροπά, μεταχατατροπά, ὀμφαλός, σφραγίς, ἐπί-
. (4) Le texte du papyrus porte :
Μίλητος δὲ πόλις νιν &
θρέψασ᾽, & δυωδεκατει-
χέος λαοῦ πρωτέος ἐξ ᾿Αχαιῶν.
M. de Wilamowitz paraphrase ainsi : Μίλητος... À τῆς δωχεχαπόλεως τῆς πρω-
τευούσης τῶν ἐξ ᾿Αχαΐας ἀποίκων. Pour arriver à ce sens, il faut créer un adjectif
πρωτεύς, inconnu jusqu'ici, dont πρωτέος serait le génitif. Il serait vraiment bien
surprenant que, pour exprimer une idée aussi courante, aussi simple, Timothée
se fût permis de créer un mot. En outre, la phrase est mal faite, tratnante et
tombante; et l'idée est peu satisfaisante, car, au lieu de glorifier Milet, le poëte
glorifie ses rivales, les villes de la dodécapole. Il me semble que le véritable
texte doit exprimer par un mot connu la primauté de Milet. Je corrigerais
donc le papyrus, et, au lieu de πρωτέος, je voudrais lire πρώτευσεν, qui aurait
pour sujet 4. Le sens est alors : « C'est Milet qui lui a donné le jour, Milet qui,
parmi le peuple des douze cités, tient des Achéens la primauté ». Le vers est un
iambique trimètre.
9328 MAURICE CROISET
λογος. Il n'est pas douteux que le texte retrouvé ne représente
la plus grande partie de 1᾿ὀμφαλός ou morceau central, la σφρα-
γίς ou finale, et l'éxihoyos. Ces trois parties s’y distinguent net-
tement; la première est un récit descriptif; la seconde, une
sorte de déclaration toute personnelle; la troisième, une
prière. Nous apprenons ainsi qu’il n'y avait aucune égalité
entre les parties du nome; car l'épilogue n’a que 4 vers; la
σφραγίς en ἃ 33; l'oupahôs, aujourd'hui incomplet, devait en
compter plus de deux cents. Il est permis de conclure de là
que les quatre autres parties, constituant ensemble l'introduc-
tion, n'avaient qu'une étendue médiocre.
C'est à cette introduction qu’appartenaient les trois vers anté-
rieurement connus des Perses.
Plutarque nous a conservé le premier vers de l'acyé, qui,
naturellement était aussi le premier du poème entier (4). ἢ
raconte, d'après Polybe, qu'aux Néméennes de l’année 207-206,
Philopæmen, alors stratège de la ligue achéenne, entra dans
le théâtre, entouré de soldats et d'officiers. « Comme ils
« venaient d'entrer, ajoute-t-il, par hasard le citharède Pylade,
« qui chantait les Perses de Timothée, entonna le prélude
(ἐνάρξασθαι) :
Κλεινὸν ἐλευθερίας τεύχων μέγαν ᾿Ελλάδι κόσμον. »
Et il nous dit qu’aussitôt tous les regards se tournèrent vers
Philopæmen. On pouvait jusqu'ici supposer avec vraisem-
blance que ce vers s’appliquait à Thémistocle. Cette hypothèse
se soutiendrait mal aujourd’hui. Car il est clair que la glorifica-
tion d’un homme, et surtout d’un Athénien, est inconciliable
avec la tendance générale du poème. 1] semble donc que le
sujet de la phrase ainsi commencée devait être un dieu, probsa-
blement Zeus libérateur ou Apollon, et la pensée dès lors se
restitue à peu près ainsi : « Fondant pour la Grèce la liberté
glorieuse, qui est sa grandeur et sa parure, déjà, du temps de
(1) Plutarque, Philop., 11. Cf. Pausanias, VIIL, 50, 3.
LE
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 329
nos pères, à dieu sauveur, tu as chassé l’ennemi de notre
patrie. Sois-nous propice, quand nous rappelons ces souvenirs,
prêts à combattre encore pour la liberté. » En tout cas, le
poème débutait certainement par un prélude en hexamètres,
dont la forme même rappelait le nome primitif, et qui se dis-
tinguait du reste par un caractère de majesté religieuse. Cela
nous donne quelque idée de ce qu'était, au début du 1v° siècle,
le prélude d’un nome citharédique.
Nous ne pouvons rien dire des parties suivantes, μεταρχά,
χατατροπά, μετακατατροοπά. 1] n'est même pas sûr qu'il y ait lieu
d'y rapporter les deux autres vers qui sont actuellement sans
domicile, à savoir :
, 9 Ἰὼ + ’ 4 …
σέδεσθ᾽ αἰδῶ, σύνεργον ἀρετᾶς δοριμάχου
οἱ "Apnç τύραννος * χρυσὸν δ᾽ “Ελλὰς οὐ δέδοικε
Tous deux semblent provenir d'un discours, probablement
d'une exhortation (1). On peut donc admettre qu’au commence-
ment de son récit, Timothée mettait en scène des chefs grecs,
peut-être sans les nommer, et qu'il les représentait exhortant
leurs concitoyens. Ces vers ont une fermeté de ton et une cer-
taine beauté de sentiment, que nous ne retrouverons pas dans
le reste du poème, et qui font regretter vivement que la pre-
mière moitié nous manque encore.
Passons maintenant au texte qui vient de nous être rendu.
(1) M. Théodore Reïinach (art. cité, Ὁ. 61), interprétant littéralement les expres-
sions dont se sert Plutarque (Τιμόθεος... τοὺς Ἕλληνας παρεχάλει) dans le passage
où il cite le premier de ces vers (De aud. poet., 16, p. 82 d), pense que Timothée
s'adressait aux Grecs « en son propre nom » pour leur recommander le culte de
l'honneur. Je ne crois pas que le texte de Plutarque autorise cette conclusion :
car, dans le même passage, il attribue à Homère une exhortation que celui-ci met
dans la bouche de Sarpédon, et à Eschyle un jugement qui appartient au messa-
ger d'Étéocle. Nous sommes donc libres d'interpréter Plutarque moins stricte-
ment; or, j'admettrais difficilement qu'un ehanteur, tel que Timothée, ait eu assez
d'autorité personnelle pour donner en son nom un tel conseil aux Grecs réunis.
Ne confondous pas Timothée avec Pindare ou Simonide.
:390 MAURICE CROISET
III
Pour apprécier littérairement le poème de Timothée, 1] serait
bon tout d'abord d'en déterminer l'originalité. Par malheur,
nous ne pouvons le faire qu'imparfaitement, faute des éléments
les plus indispensables. Essayons cependant de présenter au
moins quelques remarques à ce sujet.
Les Perses d'Eschyle étaient un modéle dont l'influence
devait nécessairement s'imposer à un poète traitant le même
sujet. Or, il ne paraît pas douteux qu'en effet Timothée ne se
soit inspiré, ou souvenu, de l’œuvre du grand tragique, dans
plusieurs passages de sa composition.
Naturellement, nous ne pouvons rien dire de la première
partie du combat, puisqu'elle n'existe plus dans le papyrus. La
mêlée des vaisseaux est aussi trop mutilée pour que les rappro-
chements précis y soient possibles. Tout au plus pourrait-on
suggérer que Timothée a mis à profit l'indication générale don-
née par Eschyle :
99
278 οὐδὲν γὰρ ἤρχει τόξα, πᾶς δ᾽ ἀπώλλυτο
στρατὸς δαμασθεὶς γαΐοισιν ἐμθολαῖς
et 336 μάχην συνάψαι ναΐοισιν ἐμθολαῖς
Le poète tragique avait aussi mentionné le choc des éperons
d'airain et leur rupture :
408 εὐθὺς δὲ ναῦς ἐν νηΐ χαλκάρη στόλον
ἔπαισεν...
Et il semble bien qu'il soit question de quelque chose de ce
genre dans les débris de vers par où commence ce qui nous
reste du récit de Timothée.
Un peu plus loin, notons chez Timothée un trait descriptif
frappant,
v. 35 xpauyg βοὰ δὲ συμμιγὴς χατεῖχε
OBSERVATIONS SUR «[Ε8 PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 334
Cela rappelle de fort près le v. 426 d'Eschyle,
.. οἰμωγὴ δ᾽ ὁμοῦ
- 6.
χωχύμασιν χατεῖγε πελαγίαν ἅλα.
Toute la description du naufragé, ballotté sur une épave, et
ses invectives contre la mer, sont, bien entendu, absolument
étrangères dans leur ensemble à Eschyle. Cela est purement
dans le goût nouveau, dont Timothée se fait honneur. Pour-
tant, la mention du pont de bateaux jeté sur l'Hellespont
éveille quelques réminiscences. Eschyle avait dit admirable-
ment: v. 12 ζυγὸν ἀμφιδαλὼν αὐχένι πόντου. Timothée dit à son
tour, avec moins de force d'ailleurs :
v. 83. ἤδη θρασεῖα xal πάρος
λαδρὸν αὐχένα ἔσχες Eu
πέδᾳ καταζευχθεῖσα λινοδέτῳ τέον
passage dans lequel se mêle au souvenir indiqué celui du
v. 68 des Perses, λινοδέσμῳ σχεδίᾳ πορθμὸν ἀμείψας. Aussitôt
après, la métaphore πεδία πλόιμα, appliquée à la mer, n’est pas
sans analogie avec l'expression δελφινοφόρον πόντου πεδίον, que
nous relevons dans lc fragment 150 d'Eschyle. Notons encore,
à la fin de cet épisode, v. 96, les mots βρύχιον ἅλμαν, d'autant
plus remarquables qu'ils n'ont guère de sens; car βρύχιος
signifie « profond »; comment ce naufragé peut-il rejeter de
sa bouche « l’eau profonde », ἐπανερευγόμενος στόματι βρύχιον
ἅλμαν 2 N'est-ce pas simplement parce qu'Eschyle avait écrit au
v. 397 ἔπαισαν ἅλμην βρύχιον « ils frappèrent de leurs rames
l'eau profonde »? L’adjectif βρύχιος est extrèmement rare. Il
sera resté dans la mémoire de Timothée, ainsi attaché au mot
ἅλμη, qui l'a ramené au jour avec lui.
Les ressemblances deviennent un peu plus précises dans la
description de la fuite. Nous lisons dans Timothée :
v. 97 φυγᾷ δὲ πάλιν ἱέτο Πέρσης στρατός βάρόαρος ἐπισπέρχων.
22
339 | MAURICE CROISET
Eschyle avait écrit :
v. 422 φυγῇ δ᾽ ἀχόσμως πᾶσα ναῦς ἠρέσσετο
ὅσαιπερ ἦσαν βαρδάρου στρατεύματος.
Timothée nous montre les vaisseaux qui, en se pressant
dans le détroit, se heurtent et brisent mutuellement leurs
rames : « Le mouvement d'un vaisseau, dans la longueur
« étroite du passage, brisait un autre vaisseau, et des mains
« des matelots s’échappaient les rames, taillées dans les arbres
« des montagnes. » |
v. 99 ἄλλα δ᾽ ἄλλαν θραῦεν σύρτις
μαχραυχενόπλους,
χειρῶν δ᾽ ἔγόαλλον ὀρείους
πόδὰς ναός (1).
Cela rappelle de près la description d'Eschyle :
« Comme la multitude des navires s’était entassée dans un
« défilé resserré, ils ne pouvaient se prêter un mutuel secours,
« mais ils se frappaient les uns les autres de leurs éperons
« d’airains et brisaient tout l’assemblage de leurs rames. »
V. 3 ᾿ οὡς δὲ πλῆθος ἐν στενῷ νεῶν
ἤθροιστ᾽, ἀρωγή γ᾽ οὔτις ἀλλήλοις παρῆν,
αὐτοὶ δ᾽ ὑφ᾽ αὐτῶν ἐμδολαῖς χαλχοστόμοις
παίοντ᾽, ἔθραυον πάντα χωπήρη στόλον.
(1) Le texte de Wilamowitz porte une virgule après σύρτις. L'adjectif μαχραυχε-
νόπλους se rapporte alors à πόδας ναός, c'est-à-dire aux rames; il est composé
dans ce cas de ὅπλον. Mais la construction est pénible et le sens du composé
n'est rien moins que satisfaisant. Je ponctue après μαχραυχενόπλους, et je fais de
ce mot un adjectif qui se rapporte à σύρτις, et dont le dernier élément est le
substantif πλόος. Je traduis σύρτις μαχραυχενόπλους par ναῦς διὰ μακχροῦ αὐχένος
συρομένη, « le vaisseau entraîné à travers le long col du détroit ». Pour αὐχὴν,
pris dans le sens de défilé, cf. Hérodote, VII, 233 (Therinopyles) : ..ëç τὸ εὐρύτερον
τοῦ αὐχένος.
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 333
Timothée ajoute :
v. 102. esse. TTOHATOG
δ᾽ ἐξήλλοντο μαρμαροφεγ-
γεῖς παῖδες συγχρουόμενοι
Vers fort obscurs, mais qui, rapprochés des précédents, ne
me paraissent pouvoir désigner qu'une nouvelle mutilation de
quelque autre partie des navires. Je traduis donc : « De l'avant
se détachaient en s’entrechoquant les figures qui y étaient
sculptées, décoration éclatante ». Et je me souviens du vaisseau
grec, qui, au vers 410 d'Eschyle, « brise et fait sauter d'un
coup d’éperon tous les ornements de la proue d'un vaisseau
phénicien ».
ο.χἀποθοαύει πάντα Φοινίσσης νεὼς
χόρυμθα (1).
La flotte a fui. Timothée nous découvre l'aspect de la mer
parsemée de cadavres et des rivages qui en sont chargés :
v. 405 κατάστερος δὲ πόντος
ἐχ λιποπνόης ψυχοστερέσιν
ἐγάργαιρε σώμασιν,
ἐύρίθοντο δὲ ἀιόνες.
Eschyle, avant lui, avait évoqué le même spectacle :
v. 419 ....θάλασσα δ᾽ οὐκέτ᾽ ἦν ἰδεῖν
γαυαγίων πλήθουσα καὶ φόνου βροτῶν.
ἀχταὶ δὲ νεχοῶν “χοιράδες τ᾽ ἐπλήθυον.
Ceux qui ont échappé à la mort, réfugiés sur le rivage,
(1) Les κόρυμδα, selon Hésychius (s. v.), étaient aussi bien les ornements de la
proue que ceux de la poupe, ἅ ἐστι χατὰ τὶν πρύμνην καὶ κατὰ τὴν πρῷραν. —
Quant au mot στόμα, il est appliqué à la pointe des lances (Iliade, 15, 589 ξυστὰ
κατὰ στόμα εἰμένα χαλχῷ); il me semble qu'il peut convenir aussi bien, sinon
mieux, à l'avant du vaisseau qu'au bordage latéral. — Cf. pour xôpuu6a, 1l., IX,
241, στεῦται (Ἔχτωρ) νηῶν ἀποχόψειν ἄχρα χόρυμδα, et Schol. ABD.. ἐπειδὴ ἐπὶ
τῶν ἀκροστολίων ἦσαν ἀγάλματα καὶ εἰχόνες θεῶν.
334 MAURICE CROISET
gémissent et prient. Toute cette longue lamentation est étran-
gère à Eschyle. Il en est de mème, bien évidemment, des sup-
plications effarées de l’homme de Célènes. Nous devons donc
arriver jusqu’à la plainte du roi pour retrouver certains sou-
venirs du poète tragique. Le premier cri qui lui échappe (Ἰὼ
χατασχαφαὶ δόμων) ne provient pas des Perses, mais il est textuel-
lement emprunté aux Choéphores (v. 49). Seulement Eschyle
le met dans la bouche du chœur qui gémit de voir la maison
des Atrides renversée; il convient moins à Xerxès, dont la
puissance sans doute est fort ébranlée, mais dont la maison en
tout cas n'est pas renversée. Suit une malédiction sur les vais-
seaux grecs :
ν. 192 σείριαί τε νᾶες λλανίδες
αἵ χατὰ μὲν nAux’ ὀλέσαθ᾽ ἣ-
Gay νέων πολύανδρον.
Il semble que deux passages des Perses d’'Eschyle aient ins-
piré ces vers. D'une part, les vers célèbres du premier stasimon :
V. D61 νᾶες δ᾽ ἀπώλεσαν, τότοι,
γᾶες πανωλέθροισιν € μθολαῖς.
D'autre part, ceux du dernier kommos :
v. 922 γᾶ δ' αἰάζει τὰν ἐγγαίαν
« μη
Nav Ξέρξᾳ χταμέναν..
πολλοὶ φῶτες, χώρας ἄνθος, .
τοξοδάμαντες, πάνυ ταρφύς τις
μυριάς ἀνδρῶν, ἐξέφθινται.
Ou encore v. 670 :
γεολαία γὰρ ἤδη͵ κατὰ πᾶσ᾽ ὄλωλεν.
Enfin le cri de désespoir que Timothée prète au roi, ν. 204,
ὦ βαρεῖα συμφορά, se trouve être la répétition d’un cri des vieil-
lards perses d'Eschyle, v. 1043, ὀτοτοτοτοῖ, βαρεῖά γ᾽ ἅδε συμφορά.
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE ΡῈ MILET 335
Ces rapprochements, comme on le voit, ne paraissent pas
résulter d'une imitation réfléchie. Ce sont des réminiscences
fort naturelles, le sujet traité étant le même. Elles montrent
simplement combien Timothée avait la tête pleine de fragments
de .vers, d'expressions, d'images, qui venaient à l'occasion
s’insérer dans sa poésie, et qu'il acceptait parfois sans beaucoup
de critique.
Outre les Perses d'Eschyle, d’autres œuvres poétiques auraient
pu lui fournir des occasions d'emprunts plus ou moins volon-
taires; par exemple, le poème épique de Chærilos (Περσικά), ou
la tragédie de Moschion intitulé Thémistocle. Chærilos, en parti-
culier, avec son goût pour les expressions étranges et son style
tourmenté, avait peut-être de quoi lui plaire. Il est très regret-
table assurément qu'il ne nous reste aucun fragment des Per-
siques qui permette de comparer les deux poètes.
Il semble qu'Euripide ne pouvait exercer aucune influence
directe sur Timothée, traitant un sujet auquel lui-même n'avait
pas touché. Pourtant, un passage du poème retrouvé éveille si
naturellement le souvenir d’un morceau célèbre de l’Oreste,
qu'il est difficile de n’en rien dire. À la fin de cette tragédie,
Euripide, comme on le sait, a mis en scène un eunuque phry-
gien, qui ἃ fui du palais, au moment où Oreste et Pylade
levaient le fer sur Hélène et se saisissaient d'Hermione. Épou-
vanté, il se précipite sur la scène, et là, dans une monodie
étrange, il raconte ce qui s’est passé. Tandis qu'il chante, Oreste
apparaît brusquement et fait mine de vouloir l'égorger. Le
Phrygien se jette à ses pieds, demande grâce, déclare tout ce
qu'on veut pour être épargné, et enfin obtient la vie. Euripide,
évidemment, a cherché à plaire à son public, en lui donnant
le spectacle presque comique de la lâcheté du barbare. Or, à
la fin des Perses de Timothée, nous trouvons une scène qui
ressemble à celle-là. Un Phrygien aussi, un non combattant
(ὀρφανὸς μαχᾶν), probablement quelque valet d’armée, y est
représenté comme saisi par un Grec, qui le traine par les che-
veux, et qui se prépare à le tuer. Le barbare pleure, supplie,
336 MAURICE CROISET
s'excuse, atteste qu’il n’est pas venu là volontairement, et jure
qu'il n’y reviendra jamais ; tout cela dans un langage composite
et baroque, car il essaye de parler grec et n'y réussit qu'à
moitié. À coup sûr, le Phrygien de Timothée diffère de celui
d'Euripide, Outre que son rôle est beaucoup plus court, il est
plus franchement comique. Le Phrygien de la tragédie a de
l'esprit, tout épouvanté qu’il est. Celui du nome ne sait que
crier et se débattre; il est encore plus près de la nature que
son prédécesseur. Malgré cela, il serait surprenant qu'il n'y
eut pas là un souvenir. Nous savons que l'Oreste, joué en 408,
eut un succès durable. Il est possible que le Phrygien y ait con-
tribué. Timothée, une dizaine d'années plus tard, a pu se croire
autorisé par un si glorieux exemple à mettre en scène, lui aussi,
devant l'imagination de ses auditeurs, son Phrygien peureux
et ridicule.
Ce Phrygien eut-il du succès? Peut-être est-il permis de le
croire en restituant un témoignage mutilé d'Aristote. Au cha-
pitre u de la Poétique, ce philosophe distingue, parmi les diverses
formes d'imitation poétique, celle qui représente les hommes
meilleurs qu'ils ne sont et celle qui les représente pires.' De
cette seconde sorte d'imitation, 1] cite comme exemples les
parodies d'Hégémon de Thasos et la Déliade de Nicocharès; puis
il ajoute : « Il en est de même dans les dithyrambes et les nomes,
« où cela s'applique aux (à un nom mutilé)..., aux Cyclopes
« de Timothée et de Philoxène ». “Ὁμοίως δὲ καὶ περὶ τοὺς διθυράμ.-
6ouç καὶ περὶ τοὺς “νόμους, ὥσπερ ...γας, Κύκλωπας Τιμόθεος καὶ
Φιλόξενος. On voit que le mot dont il ne reste que la syllabe
finale γας doit être un nom propre et désigner une création de
Timothée. Il est fort tentant aujourd'hui de restituer Φρύγας. La
phrase signifierait alors : c'est dans cet esprit que Timothée et
Philoxène ont créé leurs Phrygiens, leurs Cyclopes. Après tout,
il n'y aurait rien d'étonnant à ce qu'une invention aussi peu
conforme à la tradition du nome que celle de cet épisode
comique n'eût point passée inaperçue.
M. de Wilamowitz, appréciant l'originalité de Timothée quant
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 397
au style, écrit : « Incontestablement, Timothée n'est pas un
« grand artiste original en matière de style. Mais s’il fait usage
« des ressources qu'une langue poétique pratiquée pendant des
« siècles mettait à sa disposition, il est cependant original en ce
« sens qu'il n’est pas imitateur ; je n'ai trouvé aucun écho d'un
« passage déterminé, qui mérite d'être signalé. » (Timotheos,
p. 54). Bien que les observations qui précèdent n'aient pas porté
précisément sur le style, elles confirment, je crois, cette appré-
ciation dans son ensemble, tout en corrigeant ce qu'elle a d'un
peu exagéré. Il y a plus de réminiscences chez Timothée que le
jugement de M. de Wilamowitz ne le donne à entendre ; mais il
reste vrai que Timothée n’est pas un imitateur de profession.
Même lorsqu'il se souvient, il conserve sa manière propre, bonne
ou mauvaise, et, par suite, il y a quelque intérêt à essayer de
la définir.
IV
Toute mutilée qu'est la description du combat, il me semble
qu'elle laisse apercevoir, sous la recherche et la bizarrerie des
expressions, un tour d'esprit naturellement prosaïque. On y est
frappé, en effet, de la multiplicité des détails techniques, et
aussi du procédé analytique, qui décompose les mouvements.
M. de Wilamowitz a vu surtout dans cette description une sorte
de lieu commun, la reproduction d'un type de combat naval,
qui, justement vers ce temps, tendait à devenir classique ; et il
l'a rapprochée, fort à propos, d’une narration qui se lit dans
Diodore (XIII, 45), et qui paraît provenir d'Éphore; c'est celle
de la bataille de Cynossema, livrée en 411. La ressemblance
générale est assez sensible en effet. Mais elle me paraît tenir
justement à cette tendance analytique que je signale.
Eschyle, en nous racontant le même événement, avait une
toute autre manière de faire. En grand poète qu'il est, il procède
par larges touches. Il dégage de la confusion des choses quel-
ques faits saillants, par exemple l'apparition de la flotte grecque
338 MAURICE CROISET
s'avançant au lever du jour et le chant du péan entonné à
l'unisson sur tous les vaisseaux à la fois. Cela est saisissant. La
mêlée elle-même, bien qu’elle ait duré tout le jour d'après son
propre témoignage, est décrite en douze vers. La seule explica-
tion de la déroute des Perses, c’est que l'étroitesse du bras de
mer ne leur permet pas de manœuvrer; elle est donnée en deux
vers. Du reste, le poète se contente de nous montrer les Grecs
enveloppant leurs ennemis; à peine, deux ou trois détails des-
tinés à suggérer à l'imagination quelques indications précises,
le choc des éperons, les rames brisées; mais, en dehors de cela,
nulle curiosité technique; et, en revanche, des images simples
et fortes, des impressions ou des visions soudaines, qui de-
meurent dans l'esprit : « Les coques des navires se renversaient;
on ne voyait plus la surface de la mer, remplie d'épaves flot-
tantes, et regorgeant de carnage (v. 418-420) ». Ce que je veux
remarquer ici, ce n'est pas la puissance originale du génie, c’est
la disposition innée qui fait le poète, le don de synthétiser sous
des formes concrètes.
La prose procède tout autrement ; et elle y est tenue par sa
nature même, car elle vise d’abord à faire comprendre, par
conséquent à expliquer. Les narrations de Thucydide sont les
modèles en ce genre. Or, elles attestent des manières de penser
nouvelles, qui tendaient à déposséder la poésie de quelques-
uns de ses domaines, en particulier de la description historique.
Manifestement, à la fin du v° siècle, on voulait qu'un récit ne
visât pas seulement à donner des impressions, mais qu'il éclairât
les faits. Et quand le narrateur ne les comprenait pas lui-même,
il devait du moins se donner l'air de les comprendre, en les
expliquant. Ce fut là, si je ne me trompe, le cas d'Éphore,
quelques années plus tard, et c’est aussi celui de Timothée.
Il est fort probable que ce chanteur de Milet ne s’est fait
aucune idée nette de la bataille de Salamine, ni d'aucune autre
bataille navale. S'il eût été simplement et vraiment poète, ce
n'eût été là qu'un très petit malheur, à moins que ce ne fût
un bonheur. Car il aurait peint alors à grands traits, avec
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 339
son imagination, naïvement ; et, à défaut de renseignements,
qu'on ne fui eût pas demandés, il nous aurait donné des
émotions. Mais quoi! de son temps, 1] fallait avoir l'air de
savoir les choses dont on parlait. Aussi, paraît-il avoir pris
son rôle de stratège très au sérieux. C’est même un stratège
doublé d'un ingénieur. Et voilà comment, si sa description
nous eût été conservée en bon état, nous y verrions sans
doute divers appareils d'attaque et de défense, des mouve-
ments compliqués, de front et de flanc, en avant et en arrière,
beaucoup d’espèces de projectiles, enflammés ou non, des
aiguillons garnis d'étoupes et des serpents aux têtes d’airain.
En réalité, cela ne nous apprendrait rien du tout; mais cela
aurait l'air d’être très instructif et très documenté. Or, cette
préoccupation du document, ou de l'apparence du document,
n'est-ce pas l’essence même de la prose historique?
Et il me semble bien que l’étrangeté du style de Timothée,
son horreur du mot propre, son goût pour les périphrases qui
ressemblent à des énigmes, tiennent justement à ce prosaïsme
fondamental. C'est quand la pensée est prosaïque qu'on éprouve
le besoin des expressions compliquées, qui la dissimulent. Le
poète comique Anaxandridas s’est fort joliment moqué de ce
travers de notre auteur, dans un passage que nous a conservé
Athénée. Il y mettait en scène un personnage qui racontait les
apprêts d’un repas et qui disait : « Le cuisinier dépeça la viande
« très proprement, puis 1] domptait lu résistance des filets en
« les plongeant dans un récipient façonné au feu. C'est ainsi,
« ὃ Athéniens, que s’exprimait Timothée; je suppose qu'il
« voulait parler d’une marmite. » (Anaxandr., chez Athénée, X,
455 F.).Je le suppose aussi, sans en être autrement sûr, et je me
l'explique par la raison qui vient d'être donnée. Lorsque les
choses dont on parle sont poétiques par elles-mêmes, lorsqu'on
peint comme Homère la vie naïve avec naïveté, on peut nom-
mer les instruments de cuisine par leur nom; mais lorsqu'on
fait figurer les marmites dans des descriptions laborieuses, il
faut bien les appeler des « récipients façonnés au feu ».
340 MAURICE CROISET
Cette tendance froide à l'explication analytique ne se montre
pas seulement chez Timothée dans la composition ; elle appa-
raît aussi çà et là dans certains traits vraiment amusants. Ins-
piré par Eschyle, comme je l’ai noté tout à l'heure, il écrit, en
affaiblissant d'ailleurs son modèle : « la mer pullulait de corps
flottants » ἐγάργαιρε σώμασιν. Simple poète, cela lui aurait suffi;
mais le prosateur était là, qui voulait glisser son explication, et
il ajoute : « .. pullulait de corps, qui avaient perdu la vie par
- défaut de respiration » ἐκ λιποπνόης ψυχοστερέσιν. Le substantif
λιποπνόη est nouveau pour nous. Mais s’il l’a pris quelque part,
c'est probablement chez un des médecins de son pays. En tout
cas, l'explication dénote une préoccupation plus médicale que
poétique.
Un autre trait me frappe dans le style de Timothée : c’est
la verbosité. Il y a, dans le fragment qui vient de nous être
rendu, des exemples tout à fait étonnants de l'art de dire peu de
chose en beaucoup de mots. Je n’en citerai qu'un seul, à titre
d'échantillon : celui qui commence au vers 109 : « Les autres,
sur le rivage marin, assis nus et raidis, avec des cris, avec un
gémissement mêlé de larmes, se frappant la poitrine, pleureurs
lamentables, s’abandonnaient à la plainte. » Non seulement, dans
une série de dix mots qui se suivent, l’auteur a épuisé tous les
substantifs et tous les adjectifs qui marquent l'expression de la
douleur, ἀυτά, δαχρυοσταγής, γόος, στερνοχτύπος, θρηνώδης, ὀδυρμός,
mais encore il en a répété un par deux fois, sous deux formes
différentes (γόος, yontal). Cette verbosité vient de la pauvreté du
génie créateur. Il y aurait donc lieu peut-être d'y rattacher
d’autres défauts de même provenance. On pourrait noter les
expressions impropres ; j'entends par là celles qui affaiblissent
ou dénaturent l'idée à exprimer (70, ἐπεισέπιπτεν; 74, ἐχεῖτο;
84, αὐχένα ἔσχες ἐμ πέδᾳ; 118, ἀήταις φερόμεθα; 129, Ἕλλαν᾽
ἀπέρξων "Aon; 442, ἀποίσεται; 145, διαραίσονται; 177, ἔριπτον,
etc.); ou encore les mots répétés à satiété, comme les quatre
composés παλίμπορον v. 174, ταχύπορον v. 175, παλινπόρευτον
v. 186, ὀπισσόρευτον v. 196, accumulés en une vingtaine de vers.
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 944
Mais il faut ici prendre garde. Tout à l'heure, en signalant le
prosaïsme de Timothée, nous notions un état d'esprit qui inté-
ressait l’histoire littéraire, parce qu'il caractérisait une époque.
Si nous nous laissions aller au contraire à étudier les faiblesses
de langue qui lui sont personnelles, nous serions responsables
du ridicule des futurs philologues qui, dans quelques siècles
d'ici, pourraient être tentés d'étudier sérieusement le style de
Scribe dans le Prophète ou dans les Huguenots.
Mieux vaut donc, avant de quitter ce sujet, appeler l'attention
sur les qualités de la langue de Timothée. Car il importe de
dire, après ce qui précède, qu'il a des qualités de langue, et
même de remarquables qualités; et, pour le dédommager d'un
rapprochement injurieux, je dois déclarer qu'à mon avis ce
sont justement celles qui manquent le plus à Scribe; elles
peuvent se résumer en un mot : la langue de Timothée est
musicale.
Je n’entends pas par là qu'elle était spécialement adaptée à
une certaine mélodie. Évidemment, nous avons toute raison de
le croire, puisque le chanteur, écrivant lui-même ses vers, ne
pouvait pas ne pas les composer en vue des effets de chant et de
cithare qu'il avait en vue : mais enfin, si nous le croyons, nous
n'avons plus aucun moyen d'en juger. Mais ce que nous sentons
très bien, c'est que ses mots et ses phrases ont des qualités par-
ticulières de sonorité, de couleur et d'éclat. Le vers hexamètre
du début, cité plus haut, fera bien comprendre ce que veux
dire
Κλεινὸν ἐλευθερίας τεύχων μέγαν ᾿Ελλάδι χόσμον.
Si l'on s'attache au sens, cela est plutôt faible οἱ banal; les
deux adjectifs accumulés sont usés et de médiocre valeur; mais,
comme effet musical, le vers .est superbe; il met les grands
mots en belle place, ἐλευθερίας au commencement, Ἑλλάδι et
xoouoy à la fin ; il se développe sur un rythme de dactyles, ample
et calme, avec une sorte de majesté. Et Plutarque ou Polybe en
a très bien senti l'effet, lorsqu'il a écrit : « Ému par la voix
342 MAURICE CROISET
« claire du chanteur et par la noblesse de la poésie dont l'éclat
« s'associait à celui du chant, le théâtre tout entier porta ses
« regards vers Philopæmen. » Or, ces qualités, nous les retrou-
vons d’un bout à l’autre du morceau; et, chose remarquable,
elles sont peut-être particulièrement sensibles dans les passages
que nous critiquerions le plus chez un écrivain proprement dit.
Je rappelle un de ceux que j'ai traduits tout à l'heure sur le choc
confus des vaisseaux perses, qui se heurtent les uns les autres
dans le détroit, et qui se détruisent mutuellement. Personne à
coup sûr ne sait vraiment ce que cela veut dire, et j'estime que
personne ne Île saura jamais. Mais on soupçonne que cela veut
dire quelque chose de terrible, et il n’en faut pas davantage pour
être ému : car, une fois averti, l'auditeur n'attend plus du chan-
teur que des impressions poétiques et musicales ; or, ici, elles
se pressent en images frappantes, en mots nouveaux et mer-
veilleux, en coupes à effet, en une phrase habile qui jette çà et
là des lueurs éclatantes et vient s'achever sur un mot dun
grand effet :
ἄλλα δ᾽ ἄλλαν θραῦεν σύρτις
μαχραυχενόπλους,
χερῶν δ᾽ ἔγδαλλον ὀρείους
πόδας ναός" στόματος
δ᾽ ἐξήλλοντο μαρμαροφεγ-
γεῖς παῖδες συγχρουόμενοι.
Et, s'il faut aller jusqu’au bout dans cette réparation offerte
à Timothée, reconnaissons qu'un autre passage, signalé tout à
l'heure comme le type d’un prosaïsme scandaleux, a bien pu
être un de ceux, qui, au son de la cithare et au frémissement
d'une voix puissante, ont arraché des pleurs ou des applaudis-
sements. Je fais allusion à ces trois vers :
105 χατάστερος δὲ πόντος
ἐχ λιποπνόης Ψυχοστερέσιν
ἐγάργαιρε σώμασιν.
OBSERVATIONS SUR « LES ΡΕΆΒΕΒ » DE TIMOTHÉE DE MILET 343
A serrer de près les mots, cela est détestable ; mais qui ne
sent à quel point ce composé λιποπνόης se prête à l'expression
vocale de la souffrance et de l'angoisse, el combien ces ter-
minaisons fines et pénétrantes des deux datifs rapprochés
jettent sur cette brève apparition de la mort quelque chose de
sinistre ?
Je dirai donc, pour conclure sur ce point, que Timothée me
paraît avoir écrit deux fois en musique. Les paroles étaient pour
lui une première mélodie, qui appelait la seconde, ou qui naïis-
sait avec elle. Je suis convaincu qu'il s’est chanté à lui-même
les Perses, à mesure qu'il les écrivait, et dès lors j'ai conscience
que nous n'avons réellement pas le droit de le traiter comme
s'il eût parlé ses vers et s'il les eût faits pour être lus. S'il
irrite en nous un goût formé par la lecture, passons notre
colère sur ce scribe d'Égypte, qui, copiant l’œuvre d'un musi-
cien, ἃ cru pouvoir se dispenser de copier la musique.
Mais, après la manière de penser, il nous reste à étudier
rapidement le sentiment ; et, ici, nous aurons moins à craindre
de faire fausse route, puisque le sentiment est l'âme même qui
devait donner à la musique ses qualités propres.
y
L'esprit qui anime le poème peut être caractérisé par une
seule remarque : le rôle attribué aux Grecs, dans l'action
racontée, est à peu près nul.
Il est vrai que nous ne possédons que la dernière partie du
récit, le tableau de la déroute des Perses et de l’anéantisse-
ment de leur flotte. Mais enfin, dans une déroute, il y a des
vainqueurs et des vaincus. Ici, nous ne voyons que les vain-
cus, les vainqueurs sont absents. Un seul combattant grec nous
est montré. C'est celui qui a saisi par les cheveux le Phrygien
de Célènes et s'apprête à l’égorger (v. 155). Encore est-il qu'il
n'agit pas : il est là uniquement pour justifier la terreur du
344 MAURICE CROISET
Phrygien. L'armée victorieuse n’apparaît qu'un instant, tout à
la fin, pour célébrer son triomphe. Or ce thème si brillant, si
fécond, si riche en émotions puissantes, le poète le traite en
cinq vers, fort sèchement : « Les autres (ot δέ), ayant dressé des
trophées, sanctuaire très saint de Zeus, firent retentir le nom
de Péan, seigneur secourable, et, en mesure, ils frappaient la
terre de leurs pieds en forment des danses ‘bruyantes. » Voilà
tout. Il était impossible vraiment de faire moindre part à l'or-
gueil national.
Quelle est l'explication de ce fait étrange ?
S'il ne s'agissait que d'Athènes, elle serait très simple. On
comprend aisément qu'après la guerre de Péloponnèse, lorsque
la domination athénienne venait d’être abattue, lorsque Sparte
victorieuse dominait la Grèce, le grand rôle d'Athènes à Sala-
mine ait été passé sous silence, volontairement, par un poète
soucieux de ne pas déplaire aux puissants du jour. Mais qui
l'empéchait de mettre en scène les Spartiates, les Éginètes, les
Corinthiens, ou, si l’on veut, les Grecs en général, sans nom-
mer particulièrement aucune cité ?
Ge qui l'en a empêché, ce n'est pas une raison politique,
mais c’est tout simplement, je crois, l'inintelligence de la
grandeur morale, jointe à un goût prédominant pour le pathé-
tique facile. Les sentiments héroïques, l'exaltation du patrio-
tisme, tout ce qui remplissait l’âme d’Eschyle quand il compo-
sait ses Perses, tout cela était étranger au virtuose de Milet.
Il n'éprouvait plus lui-même ces grandes émotions, el son
art aurait été impuissant à les traduire.
Ce qu'il savait faire, c'était d'exprimer par le chant et la
musique, le trouble profond de l’être humain, dont la vie est
en jeu : la plainte éperdue, la menace furieuse, la colère vaine,
l'angoisse de la peur, la prière haletante et désespérée. Sa
poésie, comme sans doute sa musique, avait besoin, pour
produire les effets dont elle était capable, de se renfermer dans
ce domaine un peu étroit, où la sensation se mêle au sentiment,
à moins qu'elle n'y supplée. Une sorte de sensibilité plus musi-
-
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 945
cale que poétique, passablement artificielle, assez vulgaire au
fond, voilà ce qui dominait en lui. Tous ses personnages ont
été créés à sa ressemblance.
Le premier, autant qu'on peut le deviner à travers un texte
très mutilé, paraît être un riche seigneur perse, autrefois
propriétaire de grands domaines. Le poète nous le montre, dans
le naufrage des vaisseaux, jeté à la mer, et là, réfugié sur une
épave quelconque et ballotté au gré des. vents et des flots. Le
voilà, dit-il par une antithèse d'un goût médiocre, le voilà
devenu « insulaire ». La description même de sa lutte contre
les flots est à peu près perdue. Mais, entre deux vagues, nous
l’entendons pousser des cris de colère, et, dans une sorte de
délire, injurier la mer. « Lorsque l’eau salée, rejetée par lui,
s’élançait de sa bouche, alors, d'une clameur suraiguë, dans
l'égarement de son esprit, il ne se lassait pas, en grinçant des:
dents, de menacer la mer détestée (1), qui allait le détruire :
« Tout insolente que tu es, s'écriait-il, tu as dû déjà soumet-
« tre ton cou indompté au joug du pont que serraient des liens
« de chanvre. Et maintenant encore, mon roi, oui, le mien, te
« bouleversera avec ses vaisseaux, faits des pins de nos monta-
« gnes ; il fermera l'accès de tes plaines navigables par les
« courses errantes de ses marins (2). Elément furieux, je te hais
« de tout temps, mer trompeuse, qu'embrasse le vent, quand il
« accourt en soulevant les flots. » Cette colère d'enfant, mêlée
d’emphase et d’afféterie, est, il faut l’avouer, moins émouvante
que ridicule. |
Puis, c’est le tour de ceux qui se sont réfugiés sur les rochers
de la côte. Nus et à moitié glacés, ils poussent des cris,
pleurent, se frappent la poitrine, gémissent ; le poète n'a pas
assez de mots pour répéter cette unique idée autant qu'il le
voudrait. Ceux-là invoquent les vallons de la Mysie, ils se
(1) Le texte μιμούμενος me paraît certainement gâté ; je propose de rétablir
μισουμένῳ que je rapporte à λυμεῶνι (cf. v. 90 παλεομίσημα).
(2) Νομάσιν αὐγαῖς n'offre aucun sens, quoi qu'en dise M. de Wilamowitz. Je
suppose que le texte original devait être νομάσι ναύταις.
346 MAURICE CROISET
voient d'avance privés de sépulture, 115 s’écrient : « Emmène-
« moi au loin, là où, sur les eaux navigables d’Hellé, mon
« maître ἃ bâti un pont solide, passage qui conduit sûrement
« au loin. Sans cela, jamais 16 n’aurais quitté le Tmolos ni la
«cité lydienne de Sardes, jamais je ne serais venu pour
« repousser la force guerrière du Grec. Et maintenant, où fuir
« la mort qui m'étreint, où trouver l'asile désiré? Une seule
« puissance pourrait me conduire vers Ilios et mettre fin à mes
« maux, celle de la déesse Mère, habitante des montagnes,
« dont la tunique est brodée de feuilles noires, si je pouvais
«me jeter à ses genoux augustes, et embrasser ses belles
« mains. Délivre-moi, déesse aux boucles d’or, mère, je t'en
« supplie, sauve ma vie du danger inévitable! car un vain-
« queur, à l'instant, va me couper la gorge de son fer habile
. «au meurtre, ou bien encore les vents, destructeurs de vais-
« seaux, les vents qui épuisent les flots, me feront périr, la
« nuit, au soufile glacial de Borée. Le flot sauvage a déjà
« détruit la forme et le tissu de mon corps. C’est ici que je
« resterai abandonné, pâture misérable, au peuple des oiseaux
« qui dévorent les chairs crues. » Si la recherche n'est pas
moindre, le sentiment est peut-être plus sincère ; il y a dans
ces vers de la détresse et de l’angoisse; mais ni cette détresse
ni cette angoisse n'ont rien qui leur prète quelque beauté
morale.
Suit une troisième lamentation, la plus misérable de toutes :
celle du Phrygien de Célènes, qui balbutie sous l'épée levée au
dessus de sa tête. Éperdu de terreur, il essaye de parler la
langue du vainqueur pour le fléchir. « Un Grec, tenant son
« glaive à la poignée de fer, le traînait par les cheveux ; et lui,
« s’enlaçant à ses genoux, il suppliait, mêlant la langue de
« l'Asie à celle de la Grèce, d'une voix perçante, essayant de
« rompre la gêne qui scellait sa bouche et d'attraper le lan-
« gage ionien (41). » Sa prière est un bégaiement confus, où
(1) Je ponctue après διάτορον, auquel je laisse son sens naturel, « d'une voix
perçcante ». Le sens proposé par M. de Wilamowitz pour le vers suivant ne me
OBSERVATIONS SUR « LES PERSES » DE TIMOTHÉE DE MILET 347
se mêlent et s’entassent sans règle des mots estropiés, joints en
dépit de la syntaxe et de l'usage. Ici, par la volonté du poète,
le pathétique dégénère en comique. Ce qu’il nous présente,
c'est l’image visible de la peur, dégradant l'être humain, au
point qu'il n’excite même plus la pitié.
Reste un dernier groupe, le roi et son entourage. Quatrième
lamentation. Celle-ci a nécessairement plus de dignité. Elle
traduit brièvement, mais avec une certaine force, laccable-
ment douloureux et la prostration morale du chef, écrasé par
son désastre : « Ο renversement de ma maison, ὁ vaisseaux des-
« tructeurs des Grecs, vous avez anéanti cette jeunesse floris-
« sante, la multitude de mes compagnons ! mes vaisseaux ne la
« ramèneront pas sur la route du retour, mais la flamme
« ardente, dans sa force sauvage, les consumera, et il n’y aura
« pour la Perse que douleur et gémissements. O lourde infor-
« tune, qui m'as conduit en Hellade! Allez, ne tardez pas,
« attelez mon char à quatre chevaux, portez sur les chariots
« les trésors innombrables, et mettez le feu aux tentes, pour
« que du moins nos richesses ne profitent pas à nos ennemis. »
En somme, dans toute cette partie conservée du poème,
nous n'avons entendu que des lamentations et des pleurs. Sans
les quelques mots de conclusion cités plus haut, nous pour-
rions oublier qu'il s’agit d'une victoire des Grecs. Ce chant qui
veut être un appel au sentiment hellénique est une longue
plainte, à laquelle ne répond mème pas, dans le lointain tout
au moins, un chant de triomphe. Et ainsi, Timothée est arrivé
— involontairement, il est vrai — à réaliser cette chose vrai-
ment étrange, un poème national, dans lequel il n’y a pas
trace, non seulement d’un sentiment patriotique, mais même
d’un sentiment énergique et viril.
Une dernière observation, pour conclure. A cette sorte
d’affaiblissement moral de la poésie correspond l'effacement de
semble pas acceptable; σφραγίς implique l'idée de scellement; σφραγῖδα... στό-
ματος, C’est ce qui ferme sa bouche, ce qui l'empêche de parler, à savoir
l’inexpérience de la langue ionienne.
348 MAURICE CROISET
la personnalité du poète. Lorsque les lyriques de l’âge anté-
rieur, Simonide, Pindare, Bacchylide même, se faisaient nar-
rateurs, ils intervenaient dans les choses racontées, pour les
interpréter, pour les juger, pour en tirer des leçons. Ils se
considéraient eux-mêmes comme investis d’une autorité morale,
qu'ils devaient à leur génie, et au nom de laquelle ils avertis-
saient ou exhortaient leurs auditeurs. Rien de tel chez Timo-
thée. Si ‘celui-ci parle en son propre nom, c’est en qualité
d'artiste ; il se défend contre les critiques, mais seulement
comme musicien. Quant à philosopher sur les grands événe-
ments qu'il rapporte, il n’y songe même pas. Et s’il s’en abstient,
c'est incontestablement par un sentiment juste de sa situation.
Si un citharède de ce temps s'était avisé de faire de la morale,
il est très probable que le public l'aurait chassé en se moquant
de lui. |
Maurice Crorser.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE ‘”?
3. — LA COMPOSITION ET LA DATE DE [1 Ἑαυτὸν τιμωρούμενος
DE MÉNANDRE.
On s’est souvent demandé si l’Heautontimoroumenos de
Térence reproduit, dans sa composition générale, la comédie
homonyme de Ménandre, ou si c’est une pièce « contaminée ».
J’estime qu’en reprenant les conclusions d’un récent article, et
en en rapprochant une donnée connue depuis peu, nous pou-
vons augmenter les vraisemblances en faveur de la première
opinion.
Mais d’abord quelles raisons ont fait croire que l'Heautonti-
moroumenos de Térence était « contaminé » ?
Les unes sont tirées du prologue. M. Skutsch les a présentées
avec chaleur dans quelques pages du Philologus, tome XIII
(1900), p. 1 et suivantes. Térence, aux vers 16-21, s'excuse d'avoir
emprunté à plusieurs originaux la matière de telle ou telle de
ses pièces; 1] s'excuse en rappelant que de bons auteurs lui
ont donné l'exemple de pareille liberté. Si la comédie qu'il va
faire jouer était imitée d'un original unique, se contenterait-il,
dit M. Skutsch, d'alléguer cette circonstance atténuante? ne
signalerait-il pas, pour fermer la bouche à ses ennemis, que
cette fois il n’a suivi qu'un modèle ? A lui seul, le fait qu'il ne
dit rien de semblable prouverait la contamination ; mais il y ἃ
plus ; le vers 6 (duplex quae ex argumento facta est simplici), si
(1) Cf. Revue, 1902, p. 357 suiv.
350 PH.-E. LEGRAND
on le comprend bien, contient un aveu explicite ; car le sens
doit en être celui-ci : « d’une pièce simple j'en ai fait une
« double », c’est-à-dire une pièce « contaminée ». Tels sont les
arguments de M. Skutsch. Ils ont été combattus à l'avance par
tous ceux qui, comme M. Leo (4), attribuent au vers 6 une
signification précisément contraire, et croient y lire la déclara-
tion même que M. Skutsch réclamait du poète : « cette pièce
« a été faite ce qu’elle est, une pièce à double intrigue, avec ce
« qu'a fourni un seul original ». Le problème se ramène donc
à ceci : lequel des deux systèmes de traduction convient le
mieux au vers 6 (2)? Pour ma part, je préfère le second. L’expres-
sion « fabula duplex » serait, me semble-t-il, peu exacte pour
désigner une pièce contaminée au sens le plus large du mot,
telle que l'Eunugue ou les Adelphes, dans quoi l’adjonction de
quelques scènes tirées d’un original secondaire ne menace point
l'unité de l'intrigue. Une « fabula duplex » doit être bien plutôt
une pièce dans laquelle l'intrigue est double, où deux ques-
tions se posent, où l'intérêt se partage entre deux entreprises ;
de ce genre est l’Heautontimoroumenos, puisqu'il s’y agit à la
fois de savoir si Clinia sera réuni à Antiphile et 91 Clitiphon
possédera Bacchis; de ce genre avait été aussi la première
œuvre de Térenee, l'Andrienne, où, auprès des amours de Pam-
phile, les amours de Charin sont en question ; et c’est en son-
geant à l'Andrienne que le poète écrivit le vers 6 (3). Une note
très précise de Donat nous apprend que Charin et Byrrhia ne
figuraient pas dans l’’Avôoia de Ménandre; probablement
Térence les a tirés de quelque autre pièce grecque, et les a
associés par contamination à l’action de sa comédie. Fut-il bien
(4) Analecta Plautina II (Gôttingen, 1898), p. 22.
(2) Dernièrement, M. Schôll a proposé une troisième traduction, dont, à la
rigueur, nous pouvons nous accommoder : duplex ferait allusion, d’une façon
générale, au talent de combinaison dont Ménandre aurait donné le preuve dans
son Ἑαυτὸν τιμωρούμενος (Rh. Mus., 1902, p. 48-49). Nous croyons préférable
d'attribuer à duplex une valeur plus déterminée.
(3) On admet assez communément (cf. Schanz, Geschichte der rômischen Litte-
γαίων, 13, p. T1) qu'entre l'Andrienne et l'Heautontimoroumenos Térence ne pro-
duisit qu'une comédie, l'Hécyre, laquelle ne put être représentée.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 351
inspiré en agissant ainsi ? cela n'est point certain ; en tout cas,
on comprend que des détracteurs aient pu soutenir qu'il avait
commis une faute, et prétendre que l'introduction d'un second
amoureux ruinait l'unité du modèle. Le vers 6 leur répond.
Pour quiconque était au courant des critiques formulées par
Luscius et consorts, le vrai sens de la phrase, — malgré l'am-
biguité de la tournure « facta est er argumento » —, pouvait et
devait être immédiatement saisi: sous couleur d'annoncer sa
nouvelle comédie (quae esset), Térence, en réalité, commençait
l'apologie de l’ancienne; avant d'excuser la contamination,
telle qu'il l'avait pratiquée dans son premier ouvrage, par des
arguments de tradition et par l'exemple des comiques anté-
rieurs, il insinuait qu'au point de vue esthétique elle ne
méritait pas qu'on la blâmäât si fort; car ce à quoi elle avait
abouti, une « fabula duplex », était admis déjà chez les Attiques.
Certes, le rapprochement n'était pas sans réplique : on pouvait
objecter que, dans la pièce grecque prise comme exemple, —
1 'Εαυτὸν τιμωρούμενος, ---- les deux intrigues étaient mieux amal-
gamées qu'elles ne le sont dans l’Andrienne, et les deux amou-
reux plus également intéressants; mais qui s’étonnera si
Térence, plaidant sa propre cause, a fermé les yeux de parti
pris sur ce qui lui était défavorable ? En somme, l'interpréta-
tion de M. Skutsch, tout à fait convaincante pour ce qui est du
vers 5, l’est beaucoup moins sur le point principal; du prologue
de la comédie latine elle ne fait pas ressortir, à l'appui de
l'hypothèse d’une contamination, un témoignage formel et
péremptoire.
Il y a donc lieu d'examiner ce que vaut une raison d'une
seconde espèce, invoquée elle aussi pour prouver la contami-
nation, raison qui est fournie par la composition de la pièce.
Cette composition est loin d'être parfaite. Peut-être, après
l'avoir longtemps trop admirée, l'a-t-on trop dénigrée ces temps
derniers, par réaction (1); il n’en reste pas moins que, sans
(1) Il n’y a pas de contradiction entre les vers 596 suiv., où Syrus expose à
Chrémès le plan qu'il a formé pour duper Ménédème, et les vers 190 suiv., où
352 PH.-E. LEGRAND
pousser la rigueur à l'excès, on y peut relever un grand
nombre de fautes. Ainsi, il n'est pas vraisemblable que Méné-
dème et Chrémès soient des étrangers l’un pour l'autre si leurs
deux fils sont des amis d'enfance ; il ne l'est pas non plus que
Clitiphon accueille dans la maison de son père l’amoureux
Clinia et y mande la maîtresse de celui-ci, le tout sans l’aveu
de Chrémès ; ni que Syrus, renchérissant sur l’impertinence de
son jeune maître, se permette d'amener chez le bonhomme, en
plus de la discrète Antiphile, la bruyante Bacchis; ni qu'il
entame une mystification aussi audacieuse sans savoir com-
ment il s’en tirera (v. 512-513); ni qu'après la reconnaissance
d'Antiphile il escompte la mansuétude de Ménédème, lequel est
à ses yeux un homme sévère (v. 402, 526-528), en transportant
chez lui Bacchis et toute sa suite; ni qu'il se risque alors à
jouer un double jeu, quand il serait aisé de gagner la partie
plus simplement, Clinia feignant d'abandonner Bacchis, et
Chrémès lui donne sans protester les mille drachmes soi-disant dues ἃ Bacchis
(sic Herrmanowsky, Quaestiones Terentianae, Diss. Halle 1892, p. 26, note) : ce
que, dansjle premier passage, Syrus présentait comme une « fallacia » (v. 596),
ce n'est pas l'histoire tout entière d’Antiphile, c'est seulement l’idée de faire pas-
ser celle-ci pour une captive carienne, riche et de grande maison (v. 608 suiv.);
ce qui précède, bien que tout aussi mensonger, est donné pour vrai à Chrémès.
— Il ne faut pas non plus reprocher à Chrémès d'être hors de son rôle lorsque,
aux vers 610 et suiv., il fait des objections au projet de Syrus (Herrmanowsky,
0. L., p. 27) : il n'a pas avoué à Syrus que Ménédème est prêt à se laisser tromper,
de quelque manière que ce soit; il est donc naturel que, pour écarter tout soup-
çon de collusion, il raisonne d'abord comme si le voisin était ce que pense Syrus
(v. 526), un vieil avare sans entrailles ; si l'arrivée de Sostrata n'interrompait pas
l'entretien, Chrémès feindrait sans doute de se laisser convaincre par Syrus, et
finalement lui promettrait son concours. — On a relevé comme inexacte une
expression des vers 842-844, où Ménédème se félicite de voir son fils Clinia venu à
résipiscence (te intellego resipisse); et en effet Clinia n'a point renoncé ἃ son
ancien amour (Rôtter, De Heautontimorumeno Terentiana, progr. Bayreuth 1892,
p. 12); mais ce dont Ménédème lui sait bon gré, n'est-ce pas uniquement d'être
rentré au pays ? D'ailleurs, l'expression serait-elle sans excuse, je ne saurais y
voir la preuve d'une contamination maladroite ; dans une pièce où l'intrigue est
aussi compliquée que celle de l'Heaulontimoroumenos, l'auteur — ou, si l'on veut,
l'imitateur latin — a bien pu avoir un moment de distraction, et faire parler
Ménédème comme si on lui avait conté réellement ce que Syrus dit lui avoir
conté (v. 112-714). — Quant à conclure des vers 666 suiv., 835 suiv., que, dans le
modèle grec, Chrémès n'avait pas de fils (Rôtter, o. L., p. 11-12), c'est, je crois,
forcer le sens des mots.
POUR 1, ἨΙΒΤΟΙΒΕ DE LA COMÉDIE NOUVELLE 353
celle-ci, moyennant les dix mines que Chrémès paye sans diff-
culté, faisant le bonheur de Clitiphon; ni que Clinia, qui se
trouve chez Chrémès lorsqu'on y reconnaît Antiphile, ait assez
d'empire sur lui-même pour cacher ses vrais sentiments, et
qu’il attende d’être hors de la maison pour se laisser aller à
une joie délirante (v. 690 suiv.). Α ces invraisemblances d'ordre
psychologique, ajoutons plusieurs incohérences ou maladresses
de mise en scène : le théâtre laissé vide entre les vers 170 et
471; l'isolement dans la pièce des vers 171-172, auxquels rien
ne fait suite, si même certains autres détails (ainsi le vers 211)
ne les contredisent pas ; l’équivalence de durée admise, contre
toute vérité, entre des monologues de quatre ou de cinq vers
(v. 502-507, 949-952, 996-999) et des actions forcément assez
longues, visites à des voisins ou explications de famille ; des
entrées en scène injustifiées, comme celles de Chrémès et de
Clitiphon au vers 562, de Sostrata et de la nourrice au vers 614,
de Chrémès et de Sostrata au vers 1003, etc. Sans doute, presque
aucune de ces imperfections n’est spéciale à l’Heautontimoroume-
nos; on en peut relever d'autres exemples dans le répertoire de
Plaute et de Térence, et même dans la partie de ce répertoire qui
est ou qui semble être imitée de Ménandre; l'accumulation de
tant de fautes dans une pièce demeure toutefois une chose assez
frappante ; certains en ont été frappés si vivement, qu'ils n’ont
pas pu se résigner à croire que Ménandre fût responsable: ils
ont déclaré la comédie latine « contaminée » pour sauver l'hon-
neur du poète grec. Un pareil raisonnement, s'il ne constitue
pas une pétition de principe, manque à tout le moins de
rigueur. Peut-être nous faisons-nous de Ménandre considéré
comme dramaturge une idée trop avantageuse; et d’ailleurs,
tout en lui attribuant une comédie mal construite, il y a
moyen de le faire dans de telles conditions qu'on n’insulte pas
sa mémoire.
M. Bethe a montré le chemin (1). Du vers 117 de l’Heauton-
(4) Die Zeit des Heauton timorumenos und des Kolax Menanders, dans l'Her-
mes, 1902, p. 278-283.
354 PH.-E. LEGRAND
timoroumenos (in Asiam ad regem militatum abiit, Chremes),
où aucun nom propre n'accompagne regem, et du vers 194, où
Athènes est dite « incolumis », il a conclu que le modèle suivi
dans ces passages avait été composé avant la mort d'Alexandre
(printemps 323) et les malheurs de la guerre Lamiaque (323-
322). Ménandre était alors un tout jeune homme, presque un
adolescent ; à quelque degré de perfection qu'il dût s'élever par
la suite, on peut croire que ses débuts ne furent pas exempts
de faiblesses ; un ancien atteste expressément qu’au point de
vue du style la différence était grande entre ses premières
œuvres et celles de son âge mûr (1) ; selon toute probabilité, le
progrès se fit sentir aussi dans le domaine de la composition ;
si M. Bethe a bien interprété les vers 117 et 194, les plus fer-
vents dévots du grand comique ne sauraient plus refuser d'ad-
mettre que la même pièce où Térence a puisé ces deux vers lui
servit de modèle pour l’ensemble de son ouvrage (2), quelque
défectueuse que soit la conduite de celui-ci ; le scrupule qui les
retenait d'imaginer l’‘Eaurov τιμωρούμενος original d'après la pièce
latine doit céder aux leçons de la chronologie. Il importe donc
de rechercher si, dès avant la mort d'Alexandre, Ménandre
écrivait déjà pour le théâtre. À première vue, cette hypothèse
semble nettement contredite par ce que nous savons de ἴδ bio-
graphie du poète. Ménandre, dit un anonyme (3), fit représenter
sa première comédie, étant éphèbe, sous l'archontat de Dioclès :
ἐδίδαξε πρῶτος (L. πρῶτον) ἔφηδος ὧν ἐπὶ Διοχλέους ἄοσχοντος. AuCUN
Dioclès n'ayant été archonte dans la seconde moitié du 1v° siè-
cle, le mot Διοχλέους ne peut être gardé; on lui a substitué
Φιλοχλέους ; les débuts de Ménandre se trouvent ainsi placés
dans la 3° année de la 114° olympiade (322/1); d'après une
phrase d'Eusèbe (4), qui est peu claire, quelques savants les
(1) Plut., Compar. Aristophanis et Menandri, 1], 2-5.
(2) Je dis pour l'ensemble, et non pas pour tous les détails. En particulier, il
est difficile d'accorder avec le plan de la pièce latine le fragment de la pièce
grecque (146 Kock) où il est question d’un déjeuner (ἄριστον).
(3) CF. Kaibel, Fragm. Comic., I, p. 9, 3 11.
(4) OI. 414, 4: Μένανδρος ὃ χωμιχὸς πρῶτον δρᾶμα διδάξας Ὀργὴν ἐνίχησεν. Πρῶ-
τον peut être rattaché soit à δρᾶμα διδάξας soit à ἐνίκησεν.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 355
retardent même jusqu’à l’année suivante, OI. 114, 4 ( — 321/0).
Pour accorder avec ces données ce qu'il déduit des vers 417 et
194, M. Bethe suppose que Ménandre a travaillé pendant deux
ou trois ans à son ‘Eaurov τιμωρούμενος ; représentée seulement
en 321, sinon en 320, la pièce aurait été rédigée en partie au
plus tard en 323 ; et, lorsqu'enfin elle fut mise sur la scène,
l’auteur, par négligence ou par indifférence, y aurait laissé
subsister des allusions devenues inexactes. Je doute fort que
cette conjecture réunisse beaucoup de suffrages ; mais la conci-
liation peut être essayée, il me semble, d'une autre manière
avec plus de succès.
L'action de l'Heautontimoroumenos se passe à la campagne.
Térence ne dit pas où ; Ménandre était plus explicite. Un frag-
ment que M. Reitzenstein a publié en 1890 (4) nous apprend
que chez lui le lieu de la scène était Halai, c'est-à-dire sans
nul doute Halai Aixonides, dème voisin d’Aixoné, entre les
caps Colias et Zoster ; à la place des vers 63-64 de la pièce
latine (agrum his regionibus meliorem neque preti majoris
nemo habet), on lisait dans l'original :
soso. καὶ τῶν ἐν ᾿Αλῆισι χωρίων
χεχτημένος χάλλιστον εἶ νὴ τὸν Δία
ἐν τοῖς τρισίν γε, καὶ τὸ μαχαριώτατον
ἄστικτον.
Ces détails ne sont pas indifférents. Que Ménandre ait situé
son drame à la campagne, cela peut ètre motivé comme le
Dyskolos, par les dispositions d’un des principaux person-
nages : en ville, Ménédème ne pourrait pas mener la dure
vie de labeur qu’il s’inflige pour faire pénitence. L’intrigue
exigeait d'autre part que cette campagne où il peine et
gémit ne fût pas trop éloignée d'Athènes ; car, dans le cas
contraire, Bacchis, la délicate et dédaigneuse Bacchis, refuse-
rait de s’y transporter ; Halai Aixonides, à moins de deux
(1) Inedita poelarum graecorum fragmenta, ind. lect. Rostock 1890/1, p. 8.
‘350 PH.-E. LEGRAND
heures de la ville, dans une région jadis très habitée (1), était
une des localités rustiques qu'une personne aussi élégante
pouvait condescendre à visiter ; localité, d’ailleurs, connue
probablement de tous les Athéniens, et dont le nom à lui seul
évoquait pour eux, autour de Ménédème, un décor suffisam-
ment précis. Jusqu'ici tout s'explique, dans la phrase de Ménan-
dre, par des raisons de convenance dramatique ou par des
intentions pittoresques. Il n'en est plus de même, à mon avis,
pour les mots ἐν τοῖς τρισίν γε. Ces mots font allusion, je pense,
à quelque chose de réel, à trois domaines réputés dans Halai
comme les meilleurs du pays (2). Mais ces trois domaines
excellents étaient-ils célèbres jusqu’en ville? Cela est peu
vraisemblable ; pour les citadins d'Athènes, le trait ἐν voi
τρισίν γε, dès le τν siècle, n'était sans doute pas plus intelli-
-gible qu'il ne l’est aujourd'hui pour nous. Aussi bien croirais-je
volontiers qu’il ne fut pas destiné aux oreilles des citadins.
Aixoné, le dème voisin d’Halai, possédait un théâtre (3); dans
.ce théâtre, à l'époque de Ménandre, avaient lieu des concours
de comédie (4); pourquoi ne serait-ce pas là, non loin d’Athè-
nes et non loin du Pirée (5), dans un dème où les solennités
locales pouvaient attirer une nombreuse assistance, que le
jeune poète, avant d'affronter les concours dela ville, produisit
ses premiers essais ? Il est digne de remarque que l’action de
l'Heautontimoroumenos se déroule au moment des Dionysies (6);
les Dionysies dont il s'agit ne sont, bien entendu, ni les grandes
(1) Voir le texte explicatif joint aux Karéen von Allika de Curtius et Kaupert
(Milchhôfer), 1125 Heft, p. 29.
(2) C'est le sens que paraît préférer M. de Wilamowitz, Neue Jahrbücher f.
Philologie, 1899, p. 526. En publiant le fragment, M. Reitzenstein songeait à une
locution proverbiale τὰ τρία ἀγαθά, d'ailleurs sans exemple, qui se fût opposée à
l'expression courante τὰ τρία xaxä,
(3) CIA IT 579, 585 ; IV? 584 D. .
(4) CIA II 585 (décret du dème d'Aixoné, daté par l’archontat de Théophrastos,
313/2), lignes 14 suiv. : ᾿Ανειπεῖν δὲ χαὶ Atovuaiw/ τοῖς κωμωιδοῖς τοῖς AlEuvr:otv ἐν tui
θεάτρωι ὅτι χτλ.
(5) On sait que Ménandre, et peut-être son père avant lui, possédait une villa
au Pirée, où il séjournait volontiers (Alciphron, II, 3, 4; 4, 16-11).
(6) V. 162, 733.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 357
Dionysies ni les Lénéennes; ce sont les Dionysies rurales,
celles mêmes qui donnaient lieu, àAixoné, aux représentations
dramatiques ; si l’on se rappelle avec quelle complaisance les
poètes de la comédie nouvelle placèrent l’action fictive de leurs
drames à l’époque réelle des représentations (1), on reconnaîtra
que ce détail, inutile au point de vue de l'intrigue (2), pourrait
bien n'être pas sans valeur au point de vue de la chronologie.
Les Dionysies κατ᾽ ἀγρούς se fêtaient en Posidéon (décembre-
janvier). En Posidéon 323/2 Alexandre était mort depuis plus
de six mois et la guerre Lamiaque battait son plein ; consé-
quemment, c’est au plus tard en Posidéon 324/3 que fut repré-
senté, à Aixoné, l'Heautontimoroumenos. On ne doit pas s’éton-
ner si les biographes du poète ne parlent point de ce premier
essai : ils travaillaient en effet sur des documents didascaliques,
où les concours de la ville étaient seuls enregistrés ; ce qu'ils
disent de la carrière du poète laisse donc le champ libre à notre
hypothèse. Je ne crois pas, d'autre part, que la date à laquelle
on rapporte parfois la naissance de Ménandre, date au demeu-
rant conjecturale (3), permette d'élever contre cette hypothèse
(1) Pseudolus, v. 59-60. Cf. Dziatzko, Rh. Mus., 1899, p. 505, note.
(2) On ἃ même prétendu, ce qui est sans doute excessif (cf. Nencini, De Terentio
ejusque fontibus, Ὁ. 14), que cette indication d'un jour férié ne se concilie pas
avec un autre passage de la pièce, celui où Chrémès dit être convoqué pour une
opération d’arbitrage (v. 498 suiv.).
(3) L'inscription I. G. Sic. 1184 est le seul document qui date la naissance de
Ménandre: ἐγεννήθη ἐπὶ doyovros Σωσιγένους (— 342/1). Mais, aussitôt après, elle
dément elle-même cette assertion. Elle dit effectivement — d'accord avec Apol-
lodore et le biographe anonyme — que le poète vécut 52 ans (ἐτελεύτησεν ἐτῶν
ν᾿ καὶ βΊ, et qu'il mourut sous l'archontat de Philippos, dans la 32° année de la
βασιλϑία de Ptolémée Soter (ἐπὶ ἄρχοντος Φιλίππου, χατὰ τὸ β΄ χαὶ À’ ἔτος τῆς τοῦ
Πτολεμαίου τοῦ Σωτῆρος βασιλείας). Ces deux dernières indications déterminent
une époque très précise. Pour des raisons tout à fait indépendantes de la biogra-
phie de Ménandre, l'archontat de Philippos a été fixé en 293/2 (voyez, en dernier
lieu, les calculs de M. Kirchner, Hermes, 1902, p. 438-440) ; quant à la prise de
possession de l'Égypte par Ptolémée, elle eut lieu l'année même où mourut
Alexandre (chronique de Paros, dans les Afh. Mittheil., 1891, p. 187, lignes 8-9 :
ἀπὸ τῆς ᾿Αλεξάνδρου μεταλλαγῆς. καὶ Πτολεμαίου Αἰγύπτου κυριεύσεως ἔτη MA, ἄρχοντος
᾿Αθήνησιν “Hynaiou - 324/3), nécessairement vers la fin de l’année, puisque
Alexandre est mort en mai ou juin (Niese, 1, p. 186) ; la 32° année dela domination
de Ptolémée Soter ne coïncide donc avec l'archontat de Philippos que pendant
358 PH.-E. LEGRAND
une objection bien solide. Si Ménandre naquit sous l’archontat
de Sosigénès, c'est-à-dire en 342/1, il avait, dans l'hiver 324/3,
environ dix-huit ans ; à coup sûr, c'était débuter jeune ; mais
l'histoire des lettres grecques, et celle même de la comédie
attique, nous offrent d’autres exemples d’une aussi surprenante
précocité : Aristophane, lorsqu'il écrivit ses Tagénistes, était
encore près de l'adolescence : σχεδὸν μειραχίσχος ὦν, dit le
scholiaste, au vers 502 des Grenouilles.
A. — L'ORIGINAL Du Poenulus DE PLAUTE.
Voici un autre cas où des considérations de date et d’origine
me paraissent pouvoir être alléguées contre l'hypothèse d'une
contamination. Je veux parler du Poenulus de Plaute.
On admet aujourd'hui communément que cette pièce est
formée de scènes ou de portions de scènes prises dans deux
originaux (1). L'un et l'autre auraient eu ceci de commun :
un court espace de temps, quelques semaines d'été ; et cette précision même dans
l'établissement du synchronisme me paraft garantir qu'il est sûr et sincère. Ainsi,
ce doit étre en juin 292 que Ménandre se noya, au cours d'une baignade estivale.
Mafs alors, s'il avait 52 ans révolus avant la fin de l’année 293/2, c'est qu'il était
né en 345/4 ; auquel cas il eût été âgé, en Posidéon 324/3, de 21 ans environ. Si
la phrase ἐτελεύτησεν ἐτῶν v’ χαὶ β' veut dire qu’il mourut dans sa 52° année, il
aurait eu encore, en Posidéon 324/3, à peu près 20 ans. Il est vrai qu'en ce cas
il ne méritait plus, sous l'archontat de Philoklès (322/1), d'être appelé un éphèbe.
Mais peut-être le biographe anonyme a-t-il associé fautivement, à la date de la
première pièce jouée à Athènes et mentionnée dans les didascalies, une indication
d'âge fournie par un autre document et concernant les débuts d'Aixoné. Ou bien,
au lieu de corriger chez lui ἐπὶ Atoxhéous en ἐπὶ Φιλοχλέους, faut-il lire ἐπὶ
᾿Αντιχλέους ἢ Antiklès fut archonte en 325/4.
(1) Voyez principalement : Langen, Berliner Sludien, V (1886), p. 181 suiv. ; Leo,
Plautinische Forschungen (1895), p. 153 suiv.; von Wilamowitz, Neue Jahrbächer,
1899, p. 519 et note 2; Karsten, Mnemosyne, 1901, p. 364 suiv. ; Calonghi, Rivisia
di storia antica, VI (1901-1902), ἢ. 4317.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 359
que l'action s’y passait un jour de fête, le jour des Aphrodisies:
qu'on y voyait deux sœurs, esclaves d'un même prostitueur, et ᾿
de caractères différents; que l’aînée des deux sœurs était re-
cherchée par un jeune homme bien pourvu d'argent et libre de
ses actes, mais que le prostitueur écartait par des prétentions
excessives ; enfin, que l’amoureux, assisté d'un esclave malin,
jouait le prostitueur et conquérait sa belle sans bourse délier.
Dans l'un des deux originaux, intitulé Καρχηδόνιος, l'esclave du
jeune homme apprenait d'un esclave du prostitueur que les
deux sœurs étaient des enfants volés, de naissance libre, et,
comme son maître lui-même, d’origine carthaginoise ; il déci-
dait de les faire revendiquer εἰς ἐλευθερίαν, au besoin en provo-
quant de faux témoignages; l’arrivée opportune d’un vieux
Carthaginois, père des jeunes filles et oncle du jeune homme,
assurait d'emblée le succès de la combinaison. Dans lautre
original, on introduisait chez le prostitueur un esclave de
l'amoureux, travesti en soldat mercenaire et porteur d’une
forte somme d'argent; le prostitueur se trouvait ainsi compro-
mis, bon gré mal gré, dans une affaire de recel et de vol, et
devait composer avec son ennemi. Le premier de ces deux
complots est le seul qui soit annoncé par le prologue du Poenu-
lus. Mais, comme l’a remarqué un des partisans mêmes de la
contamination (1), cela ne prouve point que ce complot ait
jamais fourni à lui seul la matière d'une comédie entière;
l'objet d’un prologue, en effet, n'est pas de résumer d'avance
tous les événements de la pièce; c’est de faire connaître aux
spectateurs les événements antérieurs à l’action, et principa-
lement ceux dont aucun personnage n’est informé ; de ce genre
sont, dans le Poenulus, les relations de famille entre le jeune
homme et les jeunes filles; mais ces relations n'ont d'intérêt
que pour la réussite d’un des complots; il est donc naturel que
le prologue reste muet sur l’autre; et de son silence on ne
saurait conclure que l'épisode de l'esclave travesti soit étranger
(4) Leo, o. L., p. 191.
360 PH.-E. LEGRAND
au Καρχηδόνιος, Ce qui, aux yeux des modernes, a paru déceler
‘ la contamination, ce sont, d’une part, des inconséquences dans
la description des personnages ; et, d'autre part, dans la fable,
des contradictions et des vices de structure. Tous ces défauts
ne suggèrent pas avec la même force l'hypothèse d'une pièce
contaminée : quelques-uns seulement peuvent sembler l'im-
poser, et méritent qu'avant d'aller plus loin nous nous expli-
quions sur leur compte.
De ce genre est d'abord la différence de condition et d'état
civil qu'on a cru discerner entre les jeunes filles du premier
acte et les jeunes filles du cinquième; si cette diversité était
flagrante, il n’y aurait pas lieu de discuter davantage : présenter
les mêmes personnes ici comme des personnes de naissance
libre et là comme des personnes d'origine incertaine, les don-
ner ici pour des courtisanes expertes et ἰὰ pour des élèves-
courtisanes qui n'ont pas encore débuté, c’est en effet une con-
tradiction comme il en peut subsister, à la rigueur, dans une
pièce issue d’un mélange, mais telle que le plus médiocre dra-
maturge, inventant son œuvre dé toutes pièces, ne l'aurait cer-
tainement pas admise. Arrêtons-nous donc sur ce point. Il est
incontestable que les filles d'Hannon, lorsque leur père les
retrouve, ne sont pas encore des courtisanes. Mais les jeunes
personnes qui traversent la scène au premier acte sont-elles
plus avancées dans la carrière ? On allègue le mépris qu'elles
professent pour les prostituées de bas étage (v. 265 suiv.), —
jalousie de métier apparemment —, la science qu'elles font
paraître de ce qui plaît aux hommes (v. 240 suiv., 304 suiv.),
le discernement avec lequel elles savent choisir l’heure la plus
favorable pour se montrer au temple (v. 264 suiv., 319 suiv.).
Sont-ce donc là des sentiments, des connaissances, qu'Adelpha-
sium et Antérastilis n'aient pu acquérir qu'au prix de leur
vertu? Élevées chez un prostitueur, destinées dès l'enfance à
être des courtisanes, rien d'étonnant à ce qu’elles possèdent,
avant même le jour des débuts, quelques notions théoriques sur
leur future existence. Mais, dit-on, à l'acte premier Antéras-
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 361
ülis s'exprime en courtisane qui a de la pratique lorsqu'elle se
plaint de trouver tout au plus quelques chétifs amoureux
(v. 236 : vix aegreque amatorculos invenimus) ; et Adelpha-
sium parle de la pureté comme d'un état qui ne lui est plus
habituel (v. 350 : pura sum, comperce amabo me attrectare,
Agorastocles). J'avoue que ces propos, dont on s’alarme, ne me
donnent pas trop d'inquiétude. Les chétifs amoureux que
dédaigne Antérastilis n’ont pas nécessairement fait brèche à sa
pudeur; ce peuvent être des soupirants à qui le prostitueur
essaie de vendre ses esclaves encore vierges, et par qui celles-ci
espèrent être ‘affranchies avant de se voir livrées au caprice
d'amants passagers (1). Quant à la pureté qu'Adelphasium tient
à conserver en se rendant au temple, il semble bien, d’après le
vers 405, que pour la lui faire perdre il suffirait d'un baiser;
elle a donc pu la perdre plus d’une fois sans être devenue une
vraie meretrir (2). Ses agaceries à l'adresse d’Agorastoclès
(v. 335 suiv., 349 suiv., 359 suiv.), le ton gaillard sur lequel
elle lui parle (v. 344, 346), l'intérêt qu’elle affecte en sa présence
pour la fête des Aphrodisies (v. 337, 339-340), ne prouvent point
qu'elle ait dès lors l'âme d’une coquette professionnelle ; ces
traits attestent simplement sa résignation, qui apparaît bien
mieux à l'acte V (v. 1174 suiv.), dans une scène imitée du Καρ-
χηδόνιος. Enfin, on s’est étonné de ce que, au début de la pièce,
Adelphasium, morigénant sa sœur, ne dise mot de leur nais-
sance libre. Mais fallait-il qu’elle eût toujours à la bouche sa
(4) Agorastoclès n'a jamais possédé Adelphasium (v. 281, 292, 343-344); et celle-
ci, attendant l'effet de ses promesses, n'a pas cherché ailleurs quelqu'un qui la
délivre (v. 362). — Vis-à-vis d'Antérastilis, l'attitude d'Antamoenidès, à l'acte V
(v. 1288 suiv.), peut paraître un peu bien familière ; mais, dans le cas même d'une
contamination, il serait peu probable que le passage compromettant provint de
la pièce anonyme; dans la première partie du Poenulus (v. 491-498), Antamoeni-
dès semble en être, vis-à-vis de la sœur cadette, au même point qu'Agorastoclès
vis-à-vis de l'atnée.
(2) Est-il besoin de rappeler qu'en soutenant, à cause du vers 1139 (hodie earum
mutarentur nomina), que, dans le Καρχηδόνιος, les jeunes filles devaient porter
encore des noms carthaginois, Langen a commis un contre-sens ? Le vrai sens
de la phrase est donné par Ussing : « pro virginibus meretrices fierent ».
362 PH.-E. LEGRAND
famille, ses malheurs, sa liberté perdue? De cela, les deux
sœurs font mention à l'acte V parce que la prédiction de l'ha-
ruspice a réveillé dans leurs cœurs une espérance assoupie (1);
aussi, et surtout, parce que leur père est là qui les entend, et
que l’auteur croit bon de préparer la scène de l'anagnorisis ;
ni l’une ni l’autre de ces raisons n'existait au moment du pre-
mier entretien; dans ces conditions, pour que les jeunes femmes
. de l'acte 1 soient différentes de celles de l'acte V, il ne suffit
pas qu'elles ne disent point les mêmes choses; elles devraient
dire des choses nettement contraires, et parler d'elles-mêmes
comme de personnes nées dans la servitude; ce qu’elles ne
font pas.
Une seconde faute qui, d’après les modernes, prouverait
péremptoirement la contamination, se remarque à l'acte IV.
Aux vers 817 et suivants, Milphion ignoré, contre toute vrai-
semblance, le succès d’une ruse qu'il a tramée ; aux vers 923 et
suivants, il parle comme de choses à venir d'événements qui
sont accomplis. D'après Langen et ceux qui l'ont suivi, nous
aurions là des raccords mal faits entre les intrigues de deux
pièces différentes. Mais cette explication me semble insufii-
sante : pas plus qu'un auteur original, le plus négligent des
« contaminateurs », le réviseur le plus sot, ne peut avoir écrit
les vers 923-929 pour la place où nous les lisons aujourd’hui.
Sur ce point, je me rallie à l'opinion de Gôtz, dont les critiques
de Langen et autres laissent subsister, à mon avis, l'essentiel (2).
Dans la rédaction primitive du Poenulus, l'acte IV, sans les
vers 947-922, devait suivre le vers 503 ; la transposition est pro-
bablement l'œuvre d’un correcteur maladroit, qui, pour plus de
clarté, isola l’une de l'autre les deux entreprises dirigées contre
(1) L'haruspice leur a annoncé qu'elles seraient bientôt libres en dépit de leur
mailre (v. 1201 : invito domino); cette prophétie excluait l'hypothèse d'une ces-
sion amiable, consentie par Lycus aux soupirants des jeunes filles.
(2) Gôtz, De composilione Poenuli Plautinae, ind. schol. lena 1883/4 ; cf. Langen,
o. L., p. 187-190. Le tort de Gôtz ἃ été de soutenir que l'acte IV venait primiti-
vement avant l'acte II, plutôt qu'après ; en le plaçant à la suite du vers 503, on
évite une des critiques de Langen.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 363
le prostitueur ; prononcés par Milphion pendant qu'Agorastoclès
est à la recherche de témoins, les vers 817 suiv., 923-929, —
ceux-ci remplacés, lors du remaniement, par le couplet 917-
922 (4) —, n'avaient rien du tout de choquant.
Ces deux griefs principaux écartés, la composition du
Poenulus prète encore à mainte remarque défavorable. D’après
M. Karsten, presque tous les acteurs, de la première à la
deuxième partie, changeraient de caractère : Adelphasium
deviendrait plus honnête et plus digne, Antérastilis plus mali-
cieuse, Agorastoclès plus rassis, Milphion moins spirituel ; autant
de métamorphoses que, pour ma part, je n’aperçois pas bien.
Plus sûrement, dans la pièce considérée d'ensemble, l'unité d’ac-
tion fait défaut ; la correction de Gôtz a pour unique effet d'en-
trelacer, si je puis ainsi dire, les deux entreprises de Milphion ;
en dépit d'elle, et malgré l’unité de victime, qui s'affirme surtout
à l'acte V (v. 1342-1353), chacune de ces deux entreprises
demeure indépendante (2). Les imperfections de détail sont
nombreuses. Lycus est représenté tantôt comme ayant seule-
ment dans sa maison Adelphasium et Antérastilis, tantôt
comme possédant, en outre, d'autres esclaves : son attitude vis-
à-vis d'Agorastoclès n'est pas clairement expliquée, non plus
que les raisons qui empêchent celui-ci de libérer sa maîtresse ;
(1) À la place qu'il occupe dans la pièce remaniée, le vers 919 {satine prius
quan unumst injectum telum jam instat alterum?) n’est pas intolérable : l'action
judiciaire contre Lycus a été préparée, elle ne sera engagée que le lendemain
(v. 807); on peut donc dire que le coup n’est pas encore « injectum ».
(2) Le même défaut existe dans le Miles, où la contamination est discutable
(Hasper, Festschrift der 4éten Versammlung deutscher Philologen, Dresde, 1897,
p. 335 suiv.; Trautwein, WocA. für kl. Philol., 1903, p. 519-520). Observons que,
dans le Poenulus, ja succession de deux entreprises indépendantes est une faute
contre l'art dramatique, mais non pas, ainsi qu'on le répète, contre la vérité
psychologique. Qu'après avoir recu les confidences de Syncérastus, Milphion
n'abandonne pas une ruse dont l'effet paraît sûr (v. 183 suiv.) pour engager son
maître dans une affaire douteuse (v. 971-974), rien de plus naturel. Qu'il conseille
néanmoins à Agorastoclès de tenter, en faveur des deux sœurs, une ἀφαίρεσις εἷς
ἐλευθερίαν, cela aussi se comprend, pour peu qu'il veuille du bien aux victimes de
Lycus : car, pour celles-ci, c'était tout autre chose d’être simplement arrachées
à leur maître, ou d'être reconnues pour ce qu'elles sont réellement : des filles
de naissance libre.
364 PH.-E. LEGRAND
au premier acte, Milphion improvise un complot avec une
célérité qui étonne; il reste en scène, après le vers 197, sans
que l’on sache pourquoi; plus loin, il n’est pas vraisemblable
qu'Antamoenidès, enfermé chez Lycus, n’entende rien de ce qui
s’y passe ; il ne l'est pas non plus qu'on le laisse tout seul, et
que, sans s'occuper de lui, les gens du prostitueur fassent lu
sieste (v. 803-804); l'apparition de Lycus, au vers 746, n’est
aucunement motivée; rien n’explique comment les exta, que
Collibiscus au vers 804 dit avoir avoir trouvés et dévorés, ont
été rapportés du temple; etc. L'origine de presque toutes ces
fautes, contradictions, oublis, invraisemblances, a été cherchée
d'un seul côté : presque partout on a voulu reconnaître les
méfaits de la contamination. Avec quel succès, et par quelles
voies différentes, nous n'’entreprendrons pas de l’examiner en
détail. Il nous suffira de constater ici qu'aucune des dites fautes
n’est tellement grossière, tellement singulière, qu'elle n'ait pu
trouver place dans une œuvre composée d'un seul jet ou imitée
d'un seul original. Voyons maintenant si ce qui est possible
n'aurait pas quelque chance d’être vrai.
Le faux soldat est présenté avec insistance (v. 663-665, 719,
110, 780) comme un mercenaire venant de Sparte, où quelque
chose de grave s'est passé ; 1] était là-bas au service d’un roi que
l'écrivain latin appelle le roi Attale (nam hic latro in Sparta
fuit... apud regem Attalum); il s’est enfui au moment où la
ville était prise (inde huc aufugit, quoniam capitur oppidum),
non pas sans doute par l’armée de son roi, — car, à ce compte,
sa fuite n'aurait pas de raison —, mais évidemment par l'armée
ennemie, après une défaite du « roi Attale » et la ruine de ses
affaires. Que veut dire tout cela? D'après M. Hüffner (1), la men-
tion d'Attale et aussi celle de Sparte auraient été introduites
par Plaute; le poète, croit-il, songeait à une guerre contem-
poraine, la guerre de 195, entreprise par Eumène, de concert
(1) De Plauli comoediarum exemplis alticis quaestiones maxime chronologicae,
Diss. Gôttingen 1894, p. 34-35 et notes.
‘ POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 36%
avec Flamininus, contre Nabis: Attale, mort en 197, serait
nommé par inadvertance à la place d'Eumène son successeur.
Cette exégèse ne me satisfait point. Elle implique, contraire-
ment au sens le plus plausible du texte, que le mercenaire
servait non pas parmi les défenseurs de Sparte, mais parmi ses
vainqueurs ; elle admet que les mots oppidum capitur sont dits
par à peu près, car en 195 Sparte n’a pas été prise ; elle attribue
à un contemporain une confusion, surprenante de sa part, entre
Attale mort et Eumène vivant ; elle suppose le public romain
plus attentif que de juste à de menues hostilités lointaines,
sans gloire et sans grande importance. Répétée comme elle l’est
à plusieurs reprises, la mention de Sparte et des choses de
Sparte doit provenir de l'original; mais, comme jamais Attale
n a fait la guerre dans la région de Sparte, il faut croire que le
nom d’Attale fut ajouté par l’imitateur, ou substitué à un autre;
cherchons donc comment peut s'expliquer cette adjonction ou
cette substitution. Si je ne me trompe, le problème est aisé à
résoudre, pour peu que l’on identifie avec exactitude les événe-
ments visés par l’auteur grec. Quand eut lieu la prise de Sparte
qui a mis Collibiscus en déroute? Avec raison, M. Hüffner
renonce à la placer lors de l'expédition du Poliorcète dans le
Péloponnèse en 294, ou lors de à campagne de Gonatas en 285.
Α la date, plus ancienne, à laquelle songe M. Dietze (1), en 331,
après la défaite du roi Agis sous Mégalopolis, Sparte ne fut pas
prise, ni même, autant que nous pouvons savoir, en danger
d’être prise. Mais descendons plus bas, beaucoup plus bas, dans
la suite des temps. Après la bataille de Sellasie, Antigone Doson
occupa la ville de Lycurgue ; la chute de Sparte dut alors faire
grand bruit dans le monde hellénique ; et, même chez un pros-
titueur, le récit annoncé par Collibiscus (v. 719 : narrabo tibi
res Spartiaticas) pouvait être accueilli avec avidité. Le vaincu
de Sellasie, auprès de qui servaient des soldats mercenaires,
était le roi Cléomène. Supposons que, dans son modèle grec,
(4) De Philemone comico, diss. Gôttingen 1901, p. 81.
.“-----»---.
300 PH.-E. LEGRAND
Plaute ait lu le nom Κλεομένης, ou même — nous justifierons
cette forme dialectale — Κλευμένης. N'a-t-il pas pu confondre
ce nom, qui ne lui disait rien, avec un autre nom plus familier
aux oreilles romaines, celui d'Eumène — Εὐμένης — que portait
le frère d’Attale I‘, qu'avait porté son père et prédécesseur ?
et, s'il écrivait le Poenulus, comme je le crois, avant 197,
au nom d'un roi inconnu, qu'il prenait pour un Pergaménien,
n'a-t-il pu substituer, par une fantaisie d'actualité et sans
souci de la vérité historique, le nom du roi régnant, Attale,
l'allié de Rome (1)? Ainsi s’expliquerait l'étrange combinaison
que présentent les vers 663-665.
Après les conditions de temps, examinons les conditions de
lieu. Le Poenulus se passe en Étolie, à Calydon. Cette localisa-
tion est affirmée non seulement dans les scènes provenant à
coup sûr du Καρχηδόνιος, mais aussi dans celles que les
modernes croient tirées d'un autre original (v. 621). Une seule
phrase, dans la pièce entière, inviterait à situer l'action ailleurs :
le vers 372, où Milphion dit à Adelphasium, en parlant d'Ago-
rastoclès : « te faciet ut sis civis Attica atque libera ». Mais
cette phrase ne saurait être traduite du grec : car à Athènes les
esclaves affranchis ne devenaient pas d'emblée des citoyens (2).
En prêtant à Milphion les paroles qui viennent d'être trans-
crites, l’imitateur ajoute au texte qu'il imite, comme il y ajouta
aux vers 474-475 du Persa (3); dès lors, il y a tout lieu de
croire que la mention d'Athènes est de son crû. Cette constata-
(1) Quelque chose d'analogue s'observe au vers 339 du Persa (mirum quin regis
Philippi causa aut Attali | te potius vendam quam mea, quae sis mea). Je ne crois
pas d'ailleurs, avec M. Dietze (0. L., p. 81), que le nom d'’Attale ait remplacé là
un autre nom, celui de Darius : le parasite n'avait pas de raisons, comme en a
l'avare dans l'Aululaire (v. 85), pour nommer côte à côte les deux rois de l'argent;
il nommait le roi Philippe parce que Philippe, père d'Alexandre, régnait de son
temps en Macédoine et préoccupait fort les Athéniens (nous dirions de même en
français : pour le roi de Prusse); Plaute, profitant d'une homonymie, a entendu
le nom de son contemporain Philippe V, et il y a joint le nom d'un autre roi
avec qui les Romains d'alors avaient affaire.
(2) Cf. G. Foucart, De libertinorum conditione apud Athenienses, p. 49-50.
(3) Cf. Wilamowitz, De tribus carminibus lalinis, ind. schol. Gôttingen 1893-
1894, p. 30.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 307
tion n'est pas sans intérêt. Pour une fois que Plaute nomme le
lieu de l’action là où probablement son modèle ne le nommait
point, il nomme, au mépris du contexte, la ville où les
intrigues comiques se déroulaient d'ordinaire : Athènes. Com-
ment donc le même homme, si étourdi ou si indifférent au
vers 372, eût-il songé, au vers 621, à introduire le mot Aetoli,
sinon à remplacer par lui un autre ethnique, au cas où, dans
l'original, l'aventure du faux mercenaire ne se fût pas passée
en Étolie? Le plus vraisemblable est que, chez l'auteur grec,
cette aventure, comme celle du vieillard Carthaginoïs, était
localisée en pays étolien, à Calydon; et une aussi frappante
similitude m'est déjà une raison pour croire que les deux épi-
sodes ont toujours fait partie de la même pièce. Mais ce dont
je voudrais surtout tirer parti n’est pas tant cette unité de
lieu; c’est le nom même de Calydon.
On s’est demandé plusieurs fois pourquoi les intrigues de cer-
taines comédies, faisant exception à la règle habituelle de la
véa, se développaient hors d'Athènes. L'opinion de M. Hüff-
ner (4), approuvée par M. Leo (2), est qu'on les exila de la
sorte pour ménager l’amour-propre de spectateurs athéniens :
la plupart en effet comportent la présence d’un enfant volé;
or les citoyens d'Athènes, ville εὐνομωτάτη, ne voulaient pas
que leur patrie fût présentée sur le théâtre comme une cité
recéleuse. Certes, de la part d'un public athénien, de pareilles
susceptibilités n’ont rien d'invraisemblable; on ne doit pas,
néanmoins, les croire plus intransigeantes qu’elles n'étaient. A
l’acte IV du Persa, nous voyons fort bien un marchand,
‘patronné par un citoyen d'Athènes, vendre à Athènes une jeune
fille volée (3); il est vrai que, dans l'espèce, le marchand est
un pseudo-marchand, et que l'acheteur est aussitôt puni ; mais
ces circonstances particulières, fruits de la malice d'un esclave,
n'infirment pas la possibilité du marché, laquelle seule inté-
(1) O. L., p. 23-24, note.
(2) Plaut..F., p.199, ἢ. 3.
(3) V. 149-150 ; 380 ; 522; 545; 715,
368 | PH.-E. LEGRAND
resse le bon renom de la ville. Inversement, si un prostitueur,
comme c’est le cas pour Lycus (1), après avoir acheté à l’étran-
ger, d'un étranger, des enfants volés à leur famille, vient
s'établir avec eux dans une cité quelconque, je ne vois pas
pourquoi l’honneur de cette cité serait en péril ; et le patrio-
tisme le plus chatouilleux ne saurait, 1] me semble, s’offusquer
d'une telle hypothèse. En vérité, le cas d’Antidamas est plus
compromettant : Étolien, il a acheté en Étolie, d'un pirate
peut-être étolien, un jeune Carthaginois de naissance libre (2);
mais on doit observer que sa conduite, comme celle d’un autre
Étolien du répertoire qui achète des prisonniers de guerre,
l'Hégion des Captifs, ou mieux encore comme celle du ravis-
seur de Ménechme, est jusqu’à un certain point excusable et
excusée : Hégion poursuit la délivrance de son fils, prisonnier
lui-même des ennemis (3); Antidamas et le ravisseur de
Ménechme, qui n'ont ni l’un ni l’autre d’héritiers de leur sang,
pratiquent vis-à-vis des enfants d'autrui une espèce d'adoption
forcée (4). Ajoutons qu'Agorastoclès n'a jamais éprouvé à
Calydon aucun mauvais traitement; son père adoptif l'a fait
riche; si l’auteur l'eût voulu, l’action d’Antidamas pouvait être
présentée comme un trait de « philanthropie ». Nous ne sau-
rions donc nous en tenir à l'explication de M. Hüffner. Elle
peut être la bonne pour certaines pièces; d’autres fois, l’in-
trigue fut plus probablement localisée hors d'Athènes pour des
motifs où le patriotisme athénien n'avait rien à voir. Rappe-
lons-en un, signalé jadis par Dziatzko (5), et dont, à notre avis,
on tient trop peu de compte. Il tombe sous le sens que toutes
les productions de Ia νέα ne furent pas destinées aux seuls
(4) V. 896-897 : illas emit in Anactorio parvolas | de praedone Siculo ; v. 81
suiv. : eas qui surripuit, in Anactorium devehit, | vendit 685... homini... cui Lyco
nomen siet. | 15 ex Anactorio, ubi prius habitaverat, | huc commigravit in Caly-
donem hau diu. ΄
(2) V. 72 suiv.
(3) Captivi, v. 98-101.
(4) Men., v. 59 suiv.; Poen., v. 15, 904, 1058-1059.
(5) Rhein. Mus., XXIV, p. 574, n. 8.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 369
théâtres d’Attique ; les grands comiques eux-mêmes, qui habi-
tèrent Athènes, durent travailler parfois pour le dehors; si
Ménandre, qui en moins de trente-cinq ans composa près de
cent dix comédies, les avait toutes fait jouer dans son pays, il
aurait, quel que fût son talent, fatigué ses concitoyens; j'aime à
croire que, plutôt que d’en courir le risque, il donna quelques- :
unes de ses œuvres à l'étranger ; à plus forte raison, des poètes
de deuxième ou de troisième ordre, — comme nous savons,
par le prologue de l’Asinaire, que Plaute n'a pas craint d'en
imiter —, écrivirent pour des scènes secondaires. Mais alors,
dans des drames destinés au théâtre de telle ou telle ville,
pourquoi les écrivains auraient-ils considéré l’Attique comme
le lieu obligé de l'action? J'admets que quelquefois la tradition
les y ait décidés; le plus souvent sans doute ils situèrent tout
bonnement l'intrigue de leur comédie dans la ville même où
allait avoir lieu la représentation (1). Ainsi s'explique au mieux
que l’action de la Cistellaire, où il n’est pas question d'en-
fant volé, se passe cependant loin d'Athènes, à Sicyone (2); et
peut-être, pour l’une ou l'autre des pièces que M. Hüfiner
(1) Pour la plupart des comédies de Plaute dont l’action se passe hors d'Athènes,
et pour celles-là seulement, le lieu de la scène est indiqué dès le prologue. Admet-
tons que, chaque fois, cette indication provienne du modèle grec. Il y a une
grande différence entre les prologues où elle est présentée à part comme une
chose qui ne va pas de soi — tels sont les prologues du Rudens (v. 32-33), du
Miles (v. 88), des Ménechmes (v. 12 suiv.) — et ceux où elle est donnée en pas-
sant, au cours d'une narration — tels sont les prologues du Poenulus (v. 12, 94),
des Captifs (v. 24; la phrase du vers 94 « nam Aetolia haec est », superflue après
le prologue et comprise dans un passage embarrassé, est de provenance incer-
taine), de la Cistellaire (v. 156, 190) — : les pièces du premier groupe ne furent
probablement pas jouées dans la ville où elles sont censées se passer ; les autres
ont pu l'être. Alors même que le lieu de l'action et le lieu de la représentation
coïncidaient, il n'était pas sans opportunité, dens une petite ville négligée d'ordi-
paire par les poètes, de signaler cette coïncidence aux spectateurs, qu'elle pou-
vait bien disposer; n'oublions pas d'ailleurs qu'une des pièces où la scène est hors
d'Athènes, le Curculio, nous a été conservée sans prologue, et que peut-être elle
n'en a jamais eu.
(2) M. Hüffner propose — non sans réserves — une autre explication, qui
n'explique pas grand chose (0. L., p. 24, note) : « an docta est (Cistellaria)
« dum Athenae obsidebantur, ut Menander ejus argumentum alia in urbe agi
« maluerit? »
370 | PH.-E. LEGRAND
avait en vue, est-il inutile de chercher une explication plus
subtile.
Revenons au Poenulus. Calydon, où l'intrigue se déroule, n’a
jamais été célèbre, que je sache, comme un lieu de plaisir ; ses
_ fêtes d'Aphrodite ne sont connues que par Plaute (1); on voit
donc assez mal pourquoi un poète comique aurait songé à cette
localité, s’il n'avait pas dû y faire jouer sa pièce (2). On ne voit
pas non plus, du moins je ne vois pas, pourquoi la pièce n’y
aurait pas été jouée. Calydon, vers la fin du 11 siècle, était
encore une cité prospère (3); nous ne savons pas positivement
1 6116 ait possédé un théâtre; mais, ne connaissant rien ou
presque rien de la topographie intérieure de la ville, nous res-
tons libres de le supposer (4). A vrai dire, le peuple étolien ne
semble pas s'être beaucoup soucié des divertissements litté-
raires; toutefois, quelque belliqueux et rudes qu'ils aient été,
les Étoliens de l’âge hellénistique n'étaient plus les demi-sau-
vages dont a parlé Thucydide, et tout porte à croire qu'ils
valaient mieux que ne le dit Polybe, leur ennemi. C’est chez
eux que naquit, dès la fin du 1v° siècle, un des premiers poètes
alexandrins, Alexandros de Pleuron ; durant le siècle suivant,
leur ingérence constante dans les affaires de Delphes ne leur
permit pas d'ignorer plus longtemps les lettres et les arts de
leur époque (5); on sait, par Polybe même, qu’en 218 leur
sanctuaire fédéral regorgeait de statues; un peu plus tôt,
(1) Cf. Pauly-Wissowa, s. v. Aphrodite, p. 2745.
(2) Lycus, l’infâme Lycus (v. 89-92), vient d'Anactorion, c'est-à-dire d'Acarna-
nie. On sait qu'Étoliens et Acarnaniens se détestaient cordialement. Peut-être
l'auteur du Καρχηδόνιος a-t-il nommé Anactorion — comme les poètes attiques,
en pareille occurrence, aimaient à nommer Mégare (cf. Persa, v. 137) — pour
flatter chez son auditoire les passions de mauvais voisinage.
(3) Woodhouse, Aetolia, p. 100-102.
(4) Sur les ruines de Calydon, cf. Woodhouse, o. L., p. 95-100. Au me siècle, la
ville n'avait pas de port à proprement parler (0. L., p. 102-106, ; on pouvait cepen-
dant débarquer à proximité (ibid.); les vers 650 suiv. du Poenulus ne contiennent
donc pas d'erreur topographique.
(Ὁ) Des artistes étoliens sont nommés plusieurs fois dans 165 listes des Soteria :
Coilitz, 2563, 1. 43; 2564, L. 46, I. 66 ; 2565, 1. 17,1. 68 ; 2566, 1. 35. Aux Soteria de
226 ou 225, un citharède étolien est vainqueur : Collitz, 2568, 1. 9.
POUR L HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 371
Nicandre était venu séjourner parmi eux clavait recueilli leurs
anciennes légendes, ce dont ils le récompensèrent en lui fai-
sant avoir la proxénie delphique (1). Nous ne croyons donc
pas flatter les Étoliens du πὶ" siècle en supposant qu'ils pou-
vaient trouver quelque plaisir à voir représenter des comédies.
Ils le pouvaient surtout, nous semble-t-il, à l’époque que
paraissent indiquer les vers 663-665, c'est-à-dire au lendemain
de Sellasie, vers 221 : l’Étolie, en effet, venait de traverser alors
— chose rare dans ses annales — plusieurs années consécu-
tives de paix (2); après la mort de Démétrius l'Étolique, les
hostilités contre la Macédoine s'étaient terminées heureuse-
ment; depuis, et durant toutes les guerres de Cléomène, la
ligue était demeurée neutre entre les combattants, non sans
profiter des circonstances pour accroître son territoire (3); cette
exceptionnelle quiétude, à quoi font peut-être allusion, dans la
bouche des advocati, les vers 524-525 (praesertim in re populi
placida atque interfectis hostibus | non licet tumultuari),
devait favoriser le goût des distractions (4). Aussi bien le
Poenulus n'est-il pas la seule œuvre de Plaute qui fasse naître
la pensée d’une production comique en Étolie. L'action d’une
autre pièce, des Captifs, se passe dans une ville étolienne.
Elle suppose un état d’hostilité entre les Étoliens et les Éléens ;
étant donné la forme des mots AZis, Alei, que les Romains
n'écrivaient pas ainsi, il ne saurait être douteux que ce détail
provient du modèle grec ; il doit donc contenir une allusion à
quelque événement historique. Or, des guerres entre l’Étolie et
l'Élide ne nous sont attestées qu'à une époque relativement
(1) Collitz, 2653. .
(2) Niese, Gesch. der griech. und maked. Staaten, Il, p. 301, 331, 408.
(3) Niese, o. L., p. 324-395.
(4) Une allusion au faste d'Antiochus III comme celle que contiennent les vers
693-694 (ubi ego curer mollius | quam regi Antiocho oculi curari solent) n'a rien
d'invraisemblable en Étolie dès 221. Antiochus était monté sur le trône vers 223
(Niese, o. L., p. 112 note 4 et p. 366); les Étoliens, d'autre part, étaient, surtout
par l'entremise de Delphes, en relations avec les Séleucides (Niese, o. ἰ.. p. 408 et
note 2).
312 PH.-E. LEGRAND
ancienne (fin du rv° siècle et début du m°) (1), trop ancienne,
semble-t-il, pour que la pièce, pourvue du prologue que l'on
sait, puisse y être rapportée avec vraisemblance (2). Aussi,
plutôt qu'à aucune d'elles, songerais-je volontiers à quelque
guerre oubliée, guerre éphémère, guerre d'intérêt local, comme
le m° siècle, imparfaitement connu, en vit sans doute naître et
cesser beaucoup. Mais une telle guerre ne dut pas avoir de reten
tissement en dehors des pays intéressés et de leur entourage
immédiat (3) ; et, parmi ces pays, celui où les Captifs pouvaient
plaire le plus est à coup sur l'Étolie. Récemment, étudiant
l'onomastique de Plaute, M. Schmidt insistait à bon droit sur
les formes As et Ales Ce sont, disait-il, d’incontestables
dorismes; qu'on en rapproche les noms Colaphus, Tyndarus,
dont le premier se trouve chez Épicharme, dont le second a des
similaires (Τυνδαρίων, Τυνδαρίδας) en Sicile et en Italie ; et l'on
sera en droit de soupçonner que l'original des Captfs fut com-
posé quelque part en Grande-Grèce (4). Mais l'argument tiré de
deux noms propres, dont l’un est un sobriquet, dont l'autre
n'appartient pas aux légendes siciliennes ou italiotes, a évi-
demment peu de force (5). Quant aux formes ἴΑλις et ᾿Αλεῖοι,
elles furent d'usage courant, au m° siècle, en Étolie aussi bien
qu'en Grande-Grèce. Tout en approuvant M. Schmidt d'avoir
tiré parti des traces de dialecte conservées par l'onomastique
pour déterminer l’origine de la pièce, nous pouvons donc con-
clure autrement qu'il n'a fait. C'est ici le lieu de revenir sur
une forme dialectale que nous avons supposée, sans justification,
dans le modèle grec du Poenulus : la forme Κλευμένης. Les
(1) Hüffner, o. L., p. 41-42 ; Dietze, De Philemone comico, Ὁ. 18.
(2) Wilamowitz, De tribus carminibus latinis, p. 13-14 ; Neue Jahrb.,1899, p. 520;
cf. Leo, Plaut. F., p. 126. | "
(3) Non plus d’ailleurs, il me semble, qu'aucune de celles dont les auteurs nous
parlent.
(4) Hermes, 1902, p. 618-619.
(5) M. Schmidt lui-même (0. !., p. 196) nous en fournit un autre, de nature
identique, qui peut lui être opposé : le nom de Ménarchus, le médecin éléen
chez qui Philopolémus est prisonnier, est un nom porté en Étolie.
POUR L'HISTOIRE DE LA COMÉDIE NOUVELLE 3173
textes étoliens ne fournissent aucun équivalent : on n'y lit pas
de nom qui commence par Κλεο- ou par Κλευ-; et, dans un cas
analogue, plusieurs présentent des formes non contractes :
Θεόδοτος, Θεόδωρος, Θεόλυτος. Mais les contractions initiales Θευ-
Κλευ- se rencontrent dans des régions voisines de l'Étolie et
parlant à peu près la même langue (1) : en Épire (2), en Acar- .
nanie (3) — où le nom Κλευμένης figure sur une funéraire — ,
en Phocide (4); on les relève très fréquemment à Delphes,
quelquefois dans les noms de personnages étoliens; à côté
d’un Κλεώνυμος, les inscriptions delphiques connaissent des
Étoliens qu’elles appellent Θεύδοτος. Θεύδωρος, Θεύφραστος. Il ne
me semble donc pas que, dans une comédie jouée à Calydon en
221, Κλευμένης soit inacceptable.
Après une période de splendeur, la comédie nouvelle a lon-
guement végété ; en dehors des grands centres littéraires, elle
dut pousser des rejetons médiocres. C’est là ce qu'on oublie, je
crois, trop aisément, lorsqu'à travers telles ou telles pièces de
Plaute on cherche à entrevoir les originaux grecs, et qu'on
exige pour ceux-ci, sans savoir de qui ils sont les œuvres ni
quel temps les vit naître, un certain minimum de perfection
dramatique. Une pièce comique, dont le Poenulus — restauré
comme l'a conseillé Gôtz — serait la copie, je ne dis pas exacte
de tout point, mais cependant voisine et fidèle dans l’ensemble,
aurait été une pièce mal construite, je n'en disconviens pas ;
c'eût été une pièce indigne du théâtre athénien, indigne de
l'époque de Ménandre, je l'accorde; mais rien ne nous oblige à
tenir les yeux attachés sur Athènes, sur l’Athènes de Ménandre,
d’Alexis, de Philémon (5); et c'est en d’autres termes, à notre
(1) Cf. Boisacq, Les dialectes doriens, p. 8.
(2) Collitz, 1352, 1. 4.
(3) Collitz, 13179, 1. 2; 1397, |. 4.
(4) Collitz, 1352 B, 1. 5. |
(5) On a proposé d'identifier le Καρχηδόνιος que Plaute a imité soit avec la pièce
homonyme de Ménandre (Leo, Plaut. Ε΄, p. 143, 190 ; Geffcken, Siudien zu Menan-
der, progr. Hambourg 1898, p. 5, note 1; von Wilamowitz, Neue Jahrbücher, 1899,
p. 517, note) soit avec celle d'Alexis (Dietze, De Philemone comico, p. 82); et l'ori-
314 PH.-E. LEGRAND
avis, que la question se pose : en 221, sur la scène de Calydon,
une pièce telle que nous la concevons était-elle quelque chose
d’impossible?
Lyon, juillet 1903.
Ph. E. Lecranr.
ginal des Captifs a été attribué à Philémon (Dietze, o. L., p. 49); le tout, sans rai-
sons convaincantes.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS
ACCUSATION DU PATRIARCHE MICHEL CÉRULAIRE
DEVANT LE SYNODE
(1039).
Au commencement de novembre 1059, le patriarche de Cons-
tantinople Michel Cérulaire s'était retiré dans le monastère des
Neuf Ordres, situé hors de l'enceinte de la ville, afin de s'y pré-
parer, suivant l’usage, à célébrer la fête des Saints Archanges.
Depuis quelques mois ses rapports avec l'empereur Isaac Com-
nène devenaient de plus en plus difficiles. Le patriarche ne
cessait de critiquer les actes de l’empereur, voulait qu'il fit
droit à toutes ses demandes, proférait des menaces contre lui
et se montrait en public, les pieds chaussés des sandales de
pourpre, insigne de la dignité impériale. Résolu d’en finir,
Isaac Comnène profita de l’imprudence que Michel Cérulaire
avait commise en sortant de Constantinople. Par son ordre,
des Varangiens de la garde impériale cernèrent le monastère,
arrétèrent le patriarche, le conduisirent aux Blachernes et l’em-
barquèrent sur un navire (1), qui le conduisit dans l'ile d’Im-
bros (2). Là, 11 fut en butte aux sollicitations et aux menaces
(1) Michel d'Attalie (éd. de Bonn., p. 63). .
(2) Psellos, Mecatuv. βιό, IV, p. 362.
316 LOUIS BRÉHIER
de l’empereur, qui mit tous les moyens en œuvre pour le faire
abdiquer (1). Α la suite de son refus obstiné, Isaac Comnène
résolut de le traduire devant un synode, qui fut convoqué par
prudence dans une ville de Thrace. Psellos fut chargé de com-
poser le discours d'accusation, et le patriarche se rendait par
mer devant ses juges quand les courants entraînèrent son
navire dans l’Hellespont ; l’exilé fut débarqué à Madyte et y
mourut de fatigue et d'émotion (2).
Le réquisitoire qui devait être prononcé devant le synode est
contenu dans l’un des manuscrits de Psellos conservé à la
Bibliothèque Nationale (Gr. 1189, f°, xm° 5. Bombyc. f° 132
recto à f° 149 recto) (3). Ce manuscrit, acheté par Mazarin, fut
examiné au xvu° siècle par le père Combefis : il prépara même
une édition de Psellos que la mort l’empécha de publier (4). La
copie qu'il avait faite de l’Accusation du Patriarche nous a été
conservée (Bb. Nat. Supp. gr. 593, xvn° s. pap. pages 1-49).
Ce texte est resté inédit et M. Sathas n’a pas cru devoir le
publier avant l'Oraison funèbre de Michel Cérulaire dont il
forme la contre-partie (5); cet érudit en a seulement tiré un
texte fort intéressant de Proclus (6) et les éléments de l'étude
biographique qui précède son édition de Psellos (7). Le discours
de Psellos contre le patriarche n’est connu jusqu'ici que par
une traduction abrégée en langue russe, publiée avec une étude
critique par Bezobrazov (8).
(1) Michel d'Attalie, p. 64-65, Psellos, p. 370.
(2) Zonaras, XVIII, 5. Anon. Synopsis Chron., Μεσαιων. f16., VII, p. 164. Psel-
los, 1b., IV, p. 313-4. Mich. d'Att., p. 65. Je me permets de renvoyer le lecteur à
mon étude sur « le Schisme Oriental du x1e siècle ». Paris, 1899, in-80.
(3) Sur ce manuscrit et ses origines, voir Sathas, Μεσαιων. f16., t. V, p. νη΄.
(4) Pagi. In Ann. Baronii 1058, p. 209. — Ceillier, Hist. des Auteurs Sacrés (édit.
de 1151], 1. XX, p. 586. — Niceron, Mémoires... t. ΧΙ, p. 194.
(5) Μεσαιων 816., IV.
(6) Bull. de Correspond. Hell., 1811, p. 316-18.
(7) Μεσαιων B16., IV (Introduction). Ce morceau a servi aussi à Bezobrazov
(Psellos, homine d'état et historien. Moscou, 1890). J'ai eu moi-même l'oc-
casion d'en faire souvent usage dans mon étude sur Le Schisme Oriental du
ΧΙ" siècle.
(8) Journal du Ministère de l’Instruction publique de Russie. Saint-Pétersbourg
PE ne .
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 377
Ce morceau, qu'un mauvais sort semble avoir poursuivi
jusqu'ici, nous a paru digne d'être offert au public à cause du
jour curieux qu’il jette, et sur la société byzantine du xr° siècle,
et sur les préoccupations intellectuelles de Psellos. Notre édi-
tion a été faite d’après l'unique manuscrit connu, auquel nous
avons comparé la copie du père Combefis.-Cette copie n’est pas
une reproduction rigoureuse du texte; elle vise à donner plus
d'élégance au style de Psellos par la suppression d'articles ou
de mots jugés inutiles. Nous avons noté celles de ces inexacti-
tudes qui semblent voulues, ainsi que les corrections, peu nom-
breuses d’ailleurs, que Combefis propose d'apporter au texte.
L'Oraison Funèbre et l'Accusation du Patriarche diffèrent
autant l’une de l'autre qué les Anecdota des autres ouvrages
de Procope. À quatre ans de distance (4059-63) Psellos a tenu
un langage si opposé et s'est infligé à lui-même un si formel
démenti, que, dès le xvur° siècle, des doutes ont été jetés sur
l'authenticité de l’Accusation (1). Il a paru impossible que le
même homme ait pu composer, à si court intervalle, un pam-
phlet aussi haineux et un éloge aussi éclatant. D'après l’un, il faut
mettre Michel Cérulaire au rang des pires criminels : d’après
l'autre, il est un saint, presque un martyr. Malheureusement
pour la mémoire de Psellos, il est impossible de considérer [6
premier de ces ouvrages comme moins authentique que l’autre.
Les chroniqueurs du x1° siècle, Michel d’Attalie, Skylitzès,
Psellos lui-même, dans leurs réeits de la chute de Cérulaire, ne
mentionnent pas le discours d'accusation. Mais comment s’en
étonner quand les mêmes chroniqueurs ne donnent nul détail
sur un événement aussi important que le schisme de 1054 et
Année 1889, troisième trimestre. Matériaux pour servir à l’histoire de l'empire
byzantin, IV, p. 32-15 (en russe), la traduction est suivie d'une étude critique
(p. 76-84).
(1) L'ouvrage ne figure pas dans le Catalogue des ouvrages de Psellos qu'a
dressé Allatius (Fabricius. Biblioth. Gr. éd. 1807, t. V). Montfaucon, dans sa
Bibl. Bibl. l’attribue à Psellos, mais l'auteur du Catal. des mss. gr. de la Bibl. du
Roi, dressé au xvue 5., t. Il, p. 239, le regarde comme apocryphe. (Fabric. Id.,
t. X, p. 76.)
918 LOUIS BRÉHIER
montrent, d'ailleurs, à l'endroit de Cérulaire une réserve vou-
lue? D’autres chroniques, en revanche, sont plus explicites.
Zonaras raconte, qu'avant de juger le patriarche l’empereur
« fit rassembler, par Psellos, des griefs aussi nombreux
« qu'étranges, qui sont contenus et groupés dans le discours
« qu'il composa contre lui, τῷ Ψελλῷ αἰτιαμάτων πολλῶν καὶ
« ἀλλοχότων συναγωγεῖ, & ἐν τῷ κατ᾽ Exelvou λόγῳ συνήθροισε τε καὶ
« συνεγράψατο » (1). La chronique anonyme de Sathas, qui date
du x‘ siècle, signale aussi « l'éloge et la satire, ἐγχώμιον καὶ
ψόγον » que Psellos composa sur le patriarche (2). Nul doute que
le discours du manuscrit de Mazarin ne soit celui dont parlent
ces deux chroniques.
À défaut de ces preuves, il suffirait de parcourir ce morceau
pour y reconnaître, à chaque instant, les procédés littéraires
et la marque de Psellos. C'est le même goût pour la rhétorique,
la même recherche du trait, la même affectation d'enjouement,
la même emphase que dans les Lettres ou les Oraisons Fu-
nèbres. C'est le même désir naïf d’étaler sa connaissance de
l'antiquité profane, qui en fait un précurseur des savants du
xvi* siècle; c'est surtout la préoccupation de traiter toutes
les questions, même les plus minces, d’une manière philo-
sophique. Si l’on passe de l’Accusation à l’Oraison Funèbre,
on reconnaît la même langue et les mêmes habitudes d’es-
prit. Bien plus, si l'on considère les faits qui sont avancés
dans les deux discours, on ne voit pas qu'il y ait entre eux de
contradiction fondamentale. Dans l'Oraison Funèbre, Psellos
insiste sur les origines de Michel Cérulaire, sur son éducation,
sur son arrivée au patriarcat ; dans l'Accusation il n'avait fait
à toutes ces circonstances que des allusions brèves et pleines
de réticence pour ne mettre en lumière que quelques points,
et en particulier le rôle joué par le patriarche dans la révolte
de 1057. Les deux discours se complètent donc l’un par l'autre
(4) Zon., XVIIL, 5.
(2) Μεσαιων. βιό., t. VIT, p. 164.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 319
et, s'ils diffèrent, c'est par leur forme, par leur inspiration,
beaucoup plus que par les faits positifs qu’ils avancent (1).
Enfin, une autre preuve nous paraît encore plus décisive :
si en laissant de côté le fond même du discours, on étudie les
motifs de développement qui y reviennent sans cesse, on voit
qu'ils se rapportent tous aux études et aux recherches de Psel-
los ; il a saisi avec empressement l'occasion d’étaler devant les.
membres du synode sa connaissance des doctrines les plus
abstruses. La première moitié du discours est en réalité un
exposé de la philosophie néoplatonicienne, dont Psellos arrive,
par des prodiges de subtilité, à faire de Cérulaire un adepte.
En lisant ces longs développements, on se demande ce qui
domine chez lui, de la préoccupation de perdre l’accusé aux
yeux des juges ou du plaisir d'exposer devant un auditoire
d'élite les doctrines qu’il avait résumées dans ses traités sur
les Chaldéens (2). De même, il s'étend avec abondance sur la
recherche de la pierre philosophale entreprise par le patriarche,
mais il oublie de dire qu'il s'est fait le principal complice de
l'accusé en réunissant pour lui la collection des anciens alchi-
mistes et en lui adressant une lettre sur la fabrication de
l'or (3). Psellos seul était capable de développer avec ce goût
des matières si étrangères en apparence à son sujet.
Les circonstances expliquent d'ailleurs, sans la justifier, la
_palinodie de Psellos. En faisant arrêter le patriarche, l'empe-
reur s'exposait aux vengeances du peuple qui voyait en Cérulaire
(1) L'Oraison funèbre, comme l’Accusation, prouve que Michel Cérulaire a pris,
malgré lui, l'habit monastique et regretté plus tard cette contrainte (Msoxtwv. f16.,
IV, p. 319-20 et Accusation LVIIT). Ce n'est là qu’un exemple choisi entre
plusieurs.
(2) Ἐξήγησις εἰς τὰ Χαλδαϊχὰ λόγια. — "Exec... τῶν παρὰ Χαλδαίοις δογμάτων.
Édit. Migne, Ρ. G. CXXII. |
(3) V. Ruelle, Revue des Études grecques, 1889, p. 260. — Berthelot, Les Ori-
gines de l’Alchimie, Ὁ. 110 et suiv. Le développement de l’alchimie (Accusation
LXV) vient confirmer l'hypothèse de Ruelle sur la dédicace de la Chrysopée à
Michel Cérulaire. De même (Accusat. LXIV), Psellos étale sa science des pierres
précieuses dont il a donné un exposé (περὶ λίθων δυνάμεων. Migne, Pat. Gr.
CXXII).
25
380 LOUIS BRÉHIER
le représentant de l'indépendance religieuse vis-à-vis de Rome ;
les hauts fonctionnaires comme Psellos, auxquels le patriarche
avait fait souvent sentir le poids de son autorité, étaient dans
des dispositions tout autres (1). Psellos lui-même malgré les
bons rapports qu'il a pu avoir avec le patriarche était au nom-
bre de ces ennemis secrets. Il y avait trop d'opposition entre
ces deux esprits pour qu'ils pussent s'entendre, et dans une
des lettres qu'il lui adresse (2), Psellos raille l’aversion qu'il
témoigne pour la philosophie, dans des termes presque analo-
gues à ceux qu'il emploiera plus tard dans son discours d'accu-
sation. Il est donc vraisemblable qu'il accepta sans résistance
la mission de rassembler, comme il le dit lui-même (3), les
griefs qui s'amassaient depuis de longues années chez les hauts
fonctionnaires contre le patriarche. Il est à peu près certain
que s’il fut une fois sincère, ce fut plutôt dans l’Accusation que
dans l'Oraison Funèbre. Puis ce discours dont les termes sem-
blent si révoltants ne fut probablement jamais prononcé,
puisque Michel Cérulaire mourut avant de comparaître devant
le Synode (4). Resta-t-il inconnu des contemporains de Psellos ?
Il nous est impossible de le savoir, mais du moins cette cir-
constance nous explique que quatre ans plus tard Psellos ait
pu sans exciter trop de scandale prononcer l’Oraison funèbre
du patriarche en présence de l’empereur Constantin Ducas et
de l'impératrice Eudokia, la propre nièce du patriarche.
Tel qu’il nous est parvenu, et qu'il ait été connu ou non du
public de Constantinople, le discours de Psellos est un exem-
ple curieux de ces pamphlets qui tenaient dans la vie politique
(1) Voy. ses démêlés avec le lombard Argyros qui essaya de s'opposer au
schisme, et plus tard avec les conseillers de Théodora et de Michel VI.
(2) Lettres, éd. Sathas, Μεσ. βιό. V, p. 506. Ce mépris de la philosophie paratt
avoir blessé profondément Psellos, car il est affirmé à la fois par la lettre citée,
par l'Accusation (LXIV) et même par l'Oraison Funèbre (Mes. βιό. IV, p. 312).
Sur ce désaccord entre le patriarche et les philosophes voir les détails donnés
par M. Dräseke (Johannes Mauropus von Euchaïta. Byzant. Zeit., 11, 485 et
suiv.).
(3) Accusat. LXVIII : ἐγὼ δὲ τὰς ἁπάντων συνειληχὼς φωνάς...
(4) Voy. plus haut.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 381
des Byzantins une place analogue à celle du journalisme dans
nos sociétés modernes, et dont nous avons conservé de trop
rares spécimens. Il suffit, en effet, d’être un peu familier avec
l’histoire byzantine pour reconnaître quelle importance avait à :
. Constantinople l'opinion publique ; les empereurs les plus auto-
ritaires devaient compter avec elle. Cérulaire l'avait eue comme
auxiliaire dans sa lutte contre l'Église romaine et cette force
insaisissable avait suffi et devait suffire dans la suite à empè-
cher toute tentative de rapprochement avec le pape. C’est à elle
que s'adresse le discours de Psellos, bien plus qu’au synode lui-
même ; il constitue un véritable manifeste par lequel Isaac
Comnène essaye de justifier la déposition de ce patriarche si
populaire et cherche habilement à répudier le concours qu'il a
reçu de lui en 1057 pour renverser Michel VI. Psellos y établit
que Michel Cérulaire était à la fois l'ennemi de Michel VI et
de Comnène ; il l’accuse d’avoir déchaîné la populace de Cons-
tantinople et rejette sur lui tout l'odieux de la révolte. Il se
garde bien, par contre, comme il le fera dans l'Oraison funè-
bre (1), de parler des démélés du patriarche avec Rome : c’eût
été lui donner un titre à l'admiration de ses juges. L’'Accusation
n'a donc d'autre valeur historique que celle d'un pamphlet,
mais Bezobrazov est allé trop loin en essayant de réfuter toutes
les allégations de Psellos pour faire une apologie à outrance du
patriarche (2). L'habileté du pamphlétaire consiste justement à
laisser surnager quelques faits exacts au milieu des mensonges,
et certains des traits qu'il attribue au caractère de Cérulaire
sont confirmés par d’autres sources. L'intérêt de ce morceau
vient surtout de ce qu'il nous fait pénétrer intimement dans
cette société byzantine du x1° siècle, dont la complexité est un
sujet d'étonnement lorsqu'on la compare à la rudesse des Occi-
dentaux de la même époque. L'histoire de la voyante Dosithée
et des moines de Chio, ses acolytes, le récit de leur réception
(4) Νεσ, βιδ, IV, p. 348.
(2) Op. citat. p. 76-84.
nn,
382 | LOUIS BRÉHIER
par le patriarche, celui de l’émeute de Constantinople où l’on
voyait des moines en armes mêlés à la foule, la description de
la vie menée par Cérulaire dans son palais, ses rapports avec
les aventuriers et les marchands d’orviétan, ses. études d’alchi-
mie, constituent comme des tableaux de genre dont quelques-uns
semblent pris sur le vif. Le style est alerte et plus digne d'un
pamphlet que d'un réquisitoire devant le Synode ; les apostro-
phes, les exclamations, les prosopopées, tous les procédés d'une
rhétorique savante sont employés et prodigués. Malgré la lon-
gueur de ses développements, malgré le.pédantisme et l'em-
phase qui le déparent, ce discours est un rare spécimen d'un
genre littéraire qui fut très vivant à Byzance, mais dont les
monuments nous sont parvenus en moins grand nombre que
les traités théologiques ou les lourdes encyclopédies.
Louis BRÉRIER,
Professeur à l'Université de Clermont-Ferrand.
SOMMAIRE (1).
Exorde, divisions et précautions oratoires (I-III).
1°" grief : L'impiété. Réception des moines de Chio et de Dosithée
(IV-VIT). — Leurs doctrines : l’hellénisme (VIII) ; le chaldaïsme (IX).
— Leur condamnation sous Théodora (X). — Leur réhabilitation sous
Isaac Comnène (XI). — Développement des doctrines de Proclus et
des néoplatoniciens (XII-XIV). — Opinions hérétiques de Dosithée
sur la Vierge (XV). — Protection accordée par le patriarche aux
hérétiques (XVI-XIX). — Du mélange de vérités et d'erreurs con-
tenu dans les hérésies (XX). — Retour sur les doctrines de Dosithée
(XXI) et sur le peu de zèle du patriarche à les combattre contraire-
ment aux lois civiles et religieuses. (XXII-XX VIII). — Résumé de
la première partie (XX VIII-XXX).
(1) Nous avons adopté avec plusieurs modifications la division en paragraphes
qui se trouve dans la copie du P. Combeñs.
ven
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 383
2e grief : La tyrannie. (XXXI). Récit de l'avènement d'Isaac
Comnène (XXXII-XXXIII). — Dictature du patriarche à Constanti-
nople (XXXIV-XXX VIII). — Abdication de Michel VI (XXXIX). —
Jugement sur la conduite du patriarche (XL-XLIV).
3° grief : Le meurtre (XLV-L).
4° grief : Le sacrilège. Destruction de l’église Saint-André (LI).
Violation des sépultures (LIT-L VII).
be grief: L'indignité. Les antécédents et le caractère du patriar-
che (LVIII-LXII). Sa dureté envers ses serviteurs (LXIIT). — Son
ignorance de la théologie et son amour pour les charlatans (LXIV).
Ses études d’alchimie. (LXV-LX VI.)
Péroraison adressée à l'empereur, aux juges et au patriarche
(LXVII-LX VIT).
Πρὸς τὴν Σύνοδον κατηγορία τοῦ ἀρχιερέως.
(Bib. nat. Mss. gr. 1182. f χιπ’ 5. Bombyc.)
I. ‘O μὲν τοῦ λόγου σχοπὸς, ὦ θεία καὶ ἱερὰ σύνοδος, ἀληθείας po 432 re,
ἐστὶν βάσανος καὶ ἐξέτασις - ἢ μᾶλλον, εἰ δεῖ τἀληθὲς ἀναχεχαλυμ.-
μένως ἐρεῖν, ἔχθεσις καὶ ἀπόδειξις ἐξωμολογημένων καὶ χοινῶν
ἐννοιῶν. Οὐ γὰρ ἑτέροις ὧν ἐπιχεχείρηχα, ἀλλ᾽ ὑμῖν χρήσομαι
μάρτυσι * καὶ οὐχ ἀφαιροῦμαι ὑμᾶς τὸ τοῦ διχάζειν ἀξίωμα, ἀλλὰ
τοσοῦτο(!) ποιοῦμαι σεμνότερον, ὅτι μὴ φωναῖς ἀλλοτρίαις, ἀλλ᾽ οἰκείαις
γνώσεσί τε xal χρίσεσι πρὸς τὴν ψῆφον ἐλεύσεσθε. Ὁ μὲν οὖν σχοπὸς
τοῦ λόγου τοιοῦτος * τὸ δὲ τέλος χαὶ πρὸς ὃ πάντα συννένευχε, χαθαί-
ρεσις μὲν ἀσεδείας͵ ἐπίδειξις δὲ εὐσεδείας, καὶ χαινῶν μὲν δογμάτων
καὶ ὧν οὐχ ἴσμεν στηλίτευσις, τῶν δὲ συνηθῶν καὶ ἀληθῶν ἑδραίωσις
καὶ βεδαίωσις. Εἰ δ᾽ ἐπὶ τούτοις ἀρχιερέως χαταψηφίζεσθε, θαυμάζειν
οὐ χρή. Ὃ γὰρ βασκαίνων τῷ τοῦ δόγματος λόγῳ, ὥσπερ ἐξ ἀχροπό-
λεων τῶν προχαθη μένων, κατατρέχει τῶν ἡμετέρων ψυχῶν. Καὶ
ὥσπερ εἴ τις τὰ τῶν ποταμῶν ἐπίσγχειν ἐθελήσειε ῥεύματα, αὐτὸν
ἀποφράττει τὸν ὀφθαλμὸν τῆς πηγῆς, τὸν αὐτὸν λόγον εἴ γε καὶ ἡ μᾶς
χρεὼν ἐπέχειν τὰς ἐπιῤῥοὰς τῶν αἱρέσεων; τὴν γένναν αὐτὴν ἄνα-
(Ὁ) An τοσούτῳ ? (T. R.).
AA
Fe 132 ve,
384 | LOUIS BRÉBIER
xontéov, ἀφ᾽ ἧς τὸ θολερὸν καὶ ἄποτον ῥεῦμα τοῦ πονηροῦ δόγματος
προελήλυθεν. Εἰ γὰρ καὶ ἀνεῖλε τὸ μεσότοινχον τοῦ φραγμοῦ ὁ
πρῶτος καὶ θεῖος λόγος, καὶ συνῆψε τὰ διεστῶτα, ἑαυτὸν λίθον ἀχρό-
γωνον ἐχθαλὼν, ἀλλὰ καὶ πῦρ ἦλθε βαλεῖν ἐπὶ τὴν γῆν, καὶ ἐπισπεύδε:
τὴν ἄναψιν͵ καὶ διαιρεῖ τὰ γένη ὑπὲρ πᾶσαν δίστομον μάγαιραν, καὶ
τὴν τομὴν ἐμδαθύνει ἄχρις ἐννοιῶν χαρδίας καὶ μυελῶν ψυχῆς. Ti
τοῦ λόγου δηλοῦντος ἐν ἑκατέροις; ᾿Ἐχεῖϊ μὲν τὴν τῶν ψυχῶν περὶ τὴν
πρώτην ἕνωσιν σύμπνοιαν καὶ τὴν τῶν πρώτων καὶ δευτέρων συνα-
φήν - ἐνταῦθα δὲ τὴν τῶν ἀλλοτρίων μελῶν ἐκχοπὴν καὶ διαίρεσιν
καὶ τὴν ἀνάλωσιν τῶν πονηρῶν ἕξεων * ἀλλότρια δὲ μέλη εἰκότως ἄν
ὑμῖν νοοῖντο, ὅσα μὴ συγχεχάλλυνται πρὸς τὴν τῶν παραδεῦο-
μένων δογμάτων παραδοχήν. Κἂν εἰ χειρῶν οὖν ἐπέχοιεν λόγον, ἀπο-
χοπτέσθωσαν * χἄἂν ὀφθαλμῶν, ἀποδεύλήσθωσαν - χἄν εἰ χεφαλῆς
ἀξίωμά τις πρὸς ἢ ἡμᾶς ἔχοι, διεστραμμένως δὲ dpôn, ἢ χολοῦὰ
. καὶ ἄναρθρα φθέγγοιτο, ἐχτεμνέσθω. Κατ᾽ ὀλίγον ῥητέον δὲ ἡμῖν
καὶ πατέρων, χαὶ τῶν ἔτι ποῤῥωτέρω γενῶν, ἔνθα Θεὸς τὸ
χινδυνευόμενον.
IT. Ἐγὼ γοῦν οὐ τῷ πατριά ἀπεγθανόμενος τὸν παρόντα λόγο
. ΥΩΎ D πατριάρχῃ ἀπεχϑαγνόιλενος τὸν παρόντα λογον
ξυγγέγραφα, οὐδὲ οἰκείων ἕνεκα ὑποθέσεων τὴν γραφὴν εἱλόμην ποιή-
σασθαι " ἀλλὰ πάλαι τοῦτον ἑωραχὼς οὐ πάνυ τι τῇ εὐσεδείᾳ προσχεί-
μενον, καὶ μήτ᾽ ἐξαχριδοῦντα τοὺς τῶν πατέρων κανόνας, καὶ ὁμιλοῦντα
μὲν οἷς ὁ ἱερὸς νόμος μὴ δίδωσι (1), κοινωνοῦντα δὲ ὧν ἀπείργει.
ἀναμιγνῦντά τε ἀδεῶς τῷ καθαρῷ καὶ διαυγεῖ χαὶ καρδίαν εὐφραίνοντι
τῶν θείων δογμάτων πόματι τὸ ἐξίτηλον καὶ ὑδαρὲς καὶ εὔωνον τῶν
αἱρέσεων, καὶ τὴν ἄχραντον ἡ μῶν πίστιν ἐπιθολοῦντα καὶ καπηλεύοντα,
3 9 « 3 “- Ν ’ 4 , ε
ἀσεδείας αὐτὸν ἐγραψάμην * καὶ προῆγμαι, εἴ γε βούλεσθε, σὺν ὑμῖν
τούτου κατηγορεῖν. Μέλλων δὲ αὐτῶν τῶν ἀγώνων ἐφάπτεσθαι, τοτοῦ-
τον ὑμῖν προλέγω καὶ διορίζομαι, ὅτι πολλῶν ἐγχλη μάτων τὸν ἀρ1::-
ρέα τέως γραφόμενος, ἀσεδείας, τυραννίδος, φόνου, ἱεροσυλίας, πρὸς
δὲ χαὶ ἀδιαφορίας καὶ λόγων καὶ πράξεων χαραχτῆρας αὐτοῦ ποιού-
3 3 | σ ? 2 ν᾽, γὼ ? ἣν
μενος, οὐχ ἀναμὶξ ἅπαντα τίθεμαι, ἀλλ’ ἰδίᾳ xaf' ἕχαστον τῶν
χεφαλαίων ἐπέξειμι " xal ἵνα γε κατὰ λόγον ἡμῖν ἡ Ὑραφὴ προχωροΐῃ,.
τὸ περὶ τῆς αἱρέσεως πρῶτον ἐξεταζέσθω χεφάλαιον.
(1) Δίδωσι μή ms.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 385
ἯΙ. ᾿Αξιῶ δὲ ὑμᾶς μὴ μετὰ τῶν ἰδίων προλήψεων ἐπὲ τὴν χρίσιν
τοῦ λόγου ἐλθεῖν, μηδ᾽, εἴ τι παρ᾽ ἐκείνου ἕκαστος εὐηργέτησθε,
τοῦτο ἐνταυθοῖ προθέντας εὐνοίᾳ τῇ πρὸς ἐχεῖνον δεχάσαι τὰς ψήφους,
χαὶ ἀνθρώπῳ χαριζομένους κατολιγορῆσαι Θεοῦ - νῦν γὰρ ὑμῶν ἡ
poun ὥσπερ ἐν ῥοπαῖς πλαστίγγων ἐξετασθήσεται. Οὐδὲ γὰρ οὐδ᾽
αὐτὸς ἐπὶ τὴν χατηγορίαν ταύτην ἐλήλυθα, εἰ μὴ πρότερον τοὺς
οἰκείους ἐξακριδωσάμενος λογισμοὺς, ἀδεκάστους πρὸς τὸν λόγον
χεχίνηχα, Ὁρᾶτε τοίνυν ὡς ἐπιστημονιχὴν καὶ ἀχριδεστάτην τὴν εἰσα-
γωγὴν τοῦ πρώτου κεφαλαίου ποιήσομαι * προθήσομαι γὰρ, ὥσπερ
οἱ γεωμέτραι, κοινὰς ἐννοίας τῆς εὐσεθείας χαὶ ἀξιώματα, ἵνα πρὸς
ἐχεῖνα τοὺς τῶν αἱρέσεων λόγους ἀντεξετάζητε.
IV. Εὐσέθεια τοίνυν ἐστίν, ὡς ἐν ὑπογραφῆς λόγῳ, ὁμολογία τῆς
ἁγίας καὶ μαχαρίας Τριάδος καὶ πίστις τοῦ εὐαγγελικοῦ καὶ θείου
χηρύγματος " καὶ πιστὸς ἐχεῖνος ἐστὶν, οὐχ ὃς τὰ (4) μὲν παρεδέξατο
τῶν δογμάτων, ὧν οἱ πατέρες παρέδοσαν, τὰ δὲ (2) ἀπώσατο, περὶ δὲ
ὧν ἦν ἀμφισδήτησις (3), ἀλλ᾽ ὃς τοῖς ἄνωθεν ἡμῖν παραδεδομένοις ἀπό
τε τῶν εὐαγγελικῶν κηρυγμάτων, ἀπό τε συνόδων ἱερῶν xx χανόνων,
ἀχρειθῶς καὶ ἀνενδοιάστως ἐστοίχησε. Πρὸς δὲ τούτοις, xal τοῦτο
χοινῇ διομολογησόμεθα, ὅτι δεῖ τὸν εὐσεθεῖν ἀληθῶς ἐπαγγελλόμενον
οὐ περὶ τὰ πρῶτα μόνον καὶ τελευταῖα τῆς θεολογίας ἀδιάστροφα
δόγματα ἠχριδωμένην ἔχειν τὴν ἔννοιαν, ἀλλὰ καὶ πάντων ἁπλῶς τῶν
πατρικῶν ἐθῶν καὶ νομίμων ἔχεσθαι. Εὐσεδείας δὲ ὑποληπτέον, οὐ
τοὺς μὴ σαδελλίζοντας μέν, ἑλληνίζοντας δὲ - οὐδὲ τοὺς μὴ ἀρεια-
γίζοντας μέν, τὰ δὲ Χαλδαίων πρεσόεύοντας. Καθαρεύει γὰρ ὁ τῆς
ἐχχλησίας περίδολος, οὐ τῶν ἐν αὐτῇ μόνον διαφθαρέντων, ᾿Απολινα-
ρίων φημὶ καὶ Νεστορίων καὶ Εὐτυχῶν καὶ τῆς λοιπῆς σειρᾶς τῶν
αἱρέσεων, ἀλλὰ καὶ ἰουδαϊκῆς σχιαγραφίας καὶ ἑλληνικῶν λόγων καὶ
ὅσα ἡ τῶν Χαλδαίων φιλοσοφία περί τε χρησμῶν καὶ πνευμάτων
διαφορᾶς καὶ χατόχων καὶ θεῶν διαιρέσεως ἐμυθολόγησεν ἀναπλά-
σασα. Τούτων οὖν οὕτως ἡμῖν ἐχχειμένων καθαπερεὶ αὐτοπίστων
ἀξιωμάτων, εἰ μὲν ἐπιδείξω τὸν νῦν εὐθυνόμενον τῷ λόγῳ ἀρχιερέα
(1) τάδε μὲν cod. Correx. Combeñis.
(2) τάδε cod.
(3) Non intelligo; aut ἐν ἀμφισόττήσει scribendum, aut (quod malim) verba περὶ
δὲ — ἀἠμφισδήτησις ante τὰ δὲ ἀπώσατο reponenda, (T. R.) ,
Fe 133 το.
386 LOUIS BRÉHIER
μέρη τινὰ τούτων παραδεξάμενον καὶ τιμήσαντα, xal προσδιαφθαρέντα
τοῖς τῶν τοιούτων ἀσεδημάτων εἰσηγηταῖς καὶ γεννήτορσιν, οἰχειω-
σἀάμενόν τε τούτους οἷα δὴ προστάτας τῆς ἑαυτοῦ ψυχῆς καὶ τῆς mo
τὴν πίστιν χαινοτομίας χαγόνας χαὶ διδασκάλους, εὐθὺς ἀναστήσαντες
χαταψηφίσασθε - εἰ δ᾽ οὖν ἀλλά μοι τὴν ἀμφισδήτησιν ἐν γράμματι
δότε, ἵν᾽ ἢ παύσωμαι μηδὲν ἀχκριδῶς τῶν θειοτέρων εἰδὼς, ἢ διαλύσω-
μαι τὸ ἀμφίδολον, ἀρχομένῳ δέ μοι τῆς ἐξετάσεως τῷ λόγῳ
συμμαρτυρήσατε, ἵν᾽ εὐθὺς ἔχω τὸ ἀνεπίληπτον.
V. Οὐχ ἅπαντες ὑμεῖς σύνιστε, ἢ οἱ πλείους ὑμῶν, ὡς oùdeuts
μερὶς πρὸς Θεὸν τοῖς Χιώταις ἐστὶ μοναχοῖς, τῷ τε Νιχήτῃ χαὶ τῷ
Ἰωάννῃ, nept ὧν τὰ ὦτα ὑμῶν πολλάχις διατεθρύλληται (1); ὅτι
τοὺς μὲν τῶν πατέρων κανόνας παραδεδήχασι, καινὰ δὲ ἔθη xai νόμιμα
περί τε ἐνεργείας πνευμάτων καὶ ἐχχλησιαστικῆς τάξεως πρῶτα μὲν
τοῖς οἰκείοις μυστηρίοις ἐχαινοτόμησαν, ἔπειτα δὲ καί τισιν ἄλλοις"
τελευταῖον δὲ καὶ τῷ μεγάλῳ ἡμῶν καὶ θείῳ ἀοχιερεῖ τῆς τῶν ἀσεῦη-
μάτων λύμης μεταδεδώχασιν (2). Οὗτοι γάρ, ἵν᾽ εἰδότας ὑμᾶς ὑτο-
μβνήσω, διεφθορότα τῇ φυχῇ συλλεξάμενοι δόγματα, καὶ τὸ μὲν θεῖον
παρωσάμεγοι πνεῦμα, πονηρὸν δέ τι καὶ γυναιχεῖον ἀναπλασσόμενοι
καὶ πρεσδεύσαντες, θεαγωγίας τέ τινας καὶ ἀῤῥήτους ἀνακινήσεις χαὶ
ἀναθαχχεύσεις θαυμάσαντες χαὶ τιμήσαντες, μέ ἢ χρι τῆς ζώνης
ἴσως καὶ τοῦ ἐνδύματος, ἵν’ ᾧ αὐτοῖς ἀπὸ ῥοπάλου μόνου ii
δέρματος Ἡραχλῆς, εἶτα δή τινα θεσπιῴδη (3) καὶ προφῆτιν Ex τῶν
(4) Les moines Nicétas et Johannès avaient vécu longtemps en ermites sur une
montagne de 1116 de Chio avec un troisième compagnon nommé Joseph. Is
furent en relation avec Constantin Monomaque exilé à Lesbos, et celui-ci, devenu
empereur en 1042, fit élever pour eux Je monastère de Nea Moni dans l'île de Chio.
L'église existe encore et a été étudiée par Strzygowski (Byzantin. Zeit. V). Ces
détails sont connus par la chronique de Nea Moni rédigée en 1804 par 16 moine-
diacre Nicéphore (Venise, 1804, et 2° édition à Chio, 1864). Voir les extraits de
cette chronique dans Miklosich et Müller (Acta et diplom. gr., V, p. 445). Voir aussi
dans cette collection les chrysobulles de Constantin IX et de ses successeurs en
faveur du monastère de Néa Moni (p. 1 et suiv.).
(2) Il est important de noter que Psellos n'avait pas toujours eu si mauvaist
opinion des moines de Chio. 1l leur a adressé une lettre conservée dans w
manuscrit de Florence où il leur demande leurs prières et les considère comme
des saints : ἀλλ᾽ ὄμνυμι τὴν ἱερὰν ὑμῶν εὐχὴν καὶ ἀγάπην τὰ πλείω χαὶ ἐπκιλέλησμσ
ἐμαυτοῦ χαὶ μάλιστα ἐμδαθύνων τοῖς τῶν ἐμῶν χαχῶν ὑπομνή μασι..... Ὑμῖν..... τὴν
στενὴν τῆς ἀρετῆς ὀδεύσασι τρίδον... ἵν’ ἐν τῷ μέλλοντι αἰῶνι πᾶσα ὑμῖν τῆς apetis
ἀποταμιευθείη ἀντίδοσις (Bezobrazov, Op. cit.).
(3) Vox ignota.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 387
τριποδιχῶν, ὡς ἄν εἴποι τις, λεδήτων εἰσποιησάμενοι xal Ex τοῦ
θεάτρου θεοποιήσαντες, ἔπειτα δὴ καὶ πρὸς τὸ ἀνδρικώτερον σχημα-
τίσαντες, καὶ θεοφοοίαν καὶ ἐπίπνοιαν σχεδιάσαντες, τὰς χώμας περιΐε-
σαν καὶ τὰς πόλεις συναγυρτεύοντες ταύτῃ, καὶ τῆς μαντείας προχα-
ταρχόμενοι, ἵν᾽ αὐτοὶ μὲν εἶεν ᾿Απόλλωνες, ἡ δὲ ὑποφῆτις καὶ
θεοπρόπος μονονοὺ τῷ στομίῳ περιχαθίσασα, καὶ πρὸς τὸ ἐνθεάζειν
ἑαυτὴν ἀνερεθίσασα καὶ ἀναδαχχεύσασα.
VI. Τὸ μὲν οὖν τοὺς πολλοὺς ἐντεῦθεν ἐξαπατᾶσθαι, οὐ πάνυ
θαυμάζω * τὸ γὰρ τῆς ἐπιπνοίας καινὸν καὶ ἀσύνηθες ἐχπλήττει τὸν
ἰδιώτην, καὶ θαυμάζειν ἢ καὶ πρεσόδεύειν ποιεῖ τὸ δεικνύμενον * ἀρχιε-
pet δὲ τοῦτο πῶς δώσομεν γεγυμνασμένῳ τὰ αἰσθητήρια (1) καὶ
διάχρισιν εἰληφότι χείρονος καὶ βελτίονος, ὅς γε ἕν οἷδε μόνον πνεῦμα
θεῖον. προφητικαῖς καρδίαις ἐγχαινιζόμενον, χκατάρχον, οὐ καταρχό-
μενον, δεσπόζον, οὐ δεσποζόμενον, οὐ συνθήμασί τισι καὶ κινήσεσιν
εἰσπνεόμενον, ἀλλὰ νοῦ μετρούμενον καθαρότητι καὶ ψυχῆς ἐμφαινόμε-
γον τελειότητι; ᾿Αλλ᾽ ὁ μέγας τῆς ἀληβ[είας] (2) φωστὴρ καὶ τὸ τῆς
διαχρίσεως εἰληφὼς χάρισμα, τὴν καινοτομίαν ταύτην τῆς πλάνης
μεμαθηχὼς, οὐκ ἀνεῖλεν εὐθύς, οὐχ ἐθριάμόευσεν, οὐ τοὺς περιδε-
δεγμένους ἀπώσατο, οὐ τοὺς λυμανθέντας ἰάσατο, οὐ τὸν καινὸν
τοῦτον ἑλληνισμὸν καθεῖλεν ὡς ἀθεΐας ἀρχήν * πολλοῦ γε καὶ δεῖ, ἀλλ᾽
ὥς τι μέγα καὶ λαμπρὸν ἕρμαιον εὑρηκὼς, ὅλην εἰσποιεῖται τὴν πλάνην
καὶ ταῖς ἑλληνιχαῖς εὐθὺς θεαγωγίαις ἁλίσχεται. Καὶ ἵνα δὴ πρῶτον
ἐντρυφήσῃ τοῖς ὀφθαλμοῖς, τὴν χρησμῴδη (3) εἰσκαλεῖ * καὶ τοῖς περὶ
αὐτὴν τὸ ἑαυτοῦ ὑπανοίγνυσιν ἄδυτον " καὶ τὸ μὲν ἀσελγὲς ἐκεῖνο καὶ
μανιῶδες εἴσεισι γύναιον τοῖς τελετάρχαις χειραγωγούμενον, παρ᾽
ὧν καὶ ὁ μέγας ἐπαιδοτριόεῖτο πατὴρ ἐπὶ τὰ Μίθρου μυστήρια * καὶ ὁ
τοῦ μεγάλου ἐπόπτης καὶ θεατὴς πνεύματος, ὁ μετὰ τῶν ἀρχαγγέλων
ἱστάμενος καὶ μετὰ τῶν σεραφὶμ τὸν τρισάγιον ὕμνον ἀναφέρων Θεῷ,
ὁ θεωρὸς τοῦ μεγάλου καὶ ἀρχιερέως καὶ θύματος. ... ᾿Αλλὰ πῶς ἄν
ὑμῖν τὰ ἄῤῥητα διηγήσομαι ; Πῶς δὲ μὴ χρανθήσομαι τοιαυτὴν éEr-
γούμενος τελετήν ; ᾿Αλλὰ γὰρ ἀνάγχη λέγειν, ἐπειδήπερ εἰς τοιούτους
(1) Comparez à ces expressions celles que Psellos emploie dans une lettre à
Michel Cérulaire pour caractériser l'autorité patriarcale (Lettre 207. Sathas, Meo.
Βιβ. V, 5, p. 505).
(2) Cod. ἀληθ...
(3) Deb. χρησμῳδόν (T. R.).
388 LOUIS BRÉHIER
λόγους ἐμπέπτωχα. Ὁ τοίνυν τῶν θείων λαμπτὴρ καὶ τῶν τελουμένων
φωστὴρ, ὥσπερ ἐν Δελφοῖς ἑστηχὼς, ὑποφρίσσων εἱστήχει τὴν μαντώδη
ἀναμένων φωνὴν καὶ σεδόμενος τὴν προφήτιδα * οἱ δὲ μυσταγωγοὶ
ἑχατέρωθεν πρὸς τὴν θεαγωγίαν αὐτὴν παρεσχεύαζόν τε καὶ ἄνε-
θάχχευον, ἄνω τὰς βλεφαρίδας ἐγείρειν προτρέποντες, δευρὶ τὴν χεῖρα
κινεῖν ἀλλὰ μὴ δευρὶ, οὕτω συμόιδάζειν τὼ πόδε. Ἢ δὲ τέως μὲν
ἐμαλθαχίζετο, λεπτοτέραν ἀφιεῖσα φωνὴν, καὶ ἐδυσχέραινε τὴν ἐπίπ-
votav * ἐπεὶ δὲ ἡ πᾶσα ἐτελέσθη παρασχευὴ, ὑπεσείσθη τε ἀθρόον,
ἴσως οὐχ ἐνεγχοῦσα τοῦ πνεύματος τὴν παχύτητα, καὶ ἄφωνος εὐθὺς
ἦν, ὡς δέ φασιν οἱ τὰ ἐχείνων σεμνύνοντες, καὶ μετέωρος. Εἶτα δὴ τὴν
γλῶτταν κινήσασα, Babar τῶν πλάνων λόγων καὶ ληρημάτων!! χίνησιν
“γὰρ τοῦ παντὸς κατεψεύδετο, καὶ μελλόντων πρόῤῥησιν, καὶ οὐρανίων
κατάλογον τάξεων : προφῆται δέ τινες παρήεσαν ἐπὶ τούτοις καὶ μάρ-
τυρες, καὶ γυναικῶν ὁσίων χορὸς, καὶ πρὸ πάντων ὁ ᾿Αχερσεχόμης, οὕτω
τὸν Πρόδρομον λέγουσα μετὰ τῆς ὀρείον δασύτητος χαὶ τῆς τοῦ
προσώπου τραχύτητος ᾿ καὶ ἐπὶ πᾶσιν ἡ τοῦ Λόγου μήτηρ, ἣν ὥσπερ
ἀποιχτιζομένη « πολύπονον » ἀπεχάλει, ὠδῖνας αὐτῇ καὶ ὀδύνας ἡ
βλάσφημος γλῶσσα περὶ τὴν τοῦ Λόγου γέννησιν καταψευδομένη
καὶ λέγουσα. Καὶ ταῦτα οὐ λόγος, ἀλλ᾽ ἅπαντα μὲν οἶδε τὸ περὶ αὐτὴν
δορυφοριχὸν xat οἰκίδιον, οἶμαι δὲ xal ὑμῶν τοὺς πλείους μὴ ἀγνοεῖν,
ἀλλὰ καὶ τὸ τοῦ πατριάρχου συγγενὲς, ὅσον τε εἰς τὴν γυναυεωνῖτιν
ἀνήχει χαὶ ὅσον εἰς τὸν ἀνδρῶνα, πάντες χοινῇ συνομολογήσαιεν (1) καὶ
συμφωνήσαιεν.
VIL. Καὶ τὰ πλείω δὲ παρῆχεν ὁ λόγος, τό τε μῆχος τῆς γραφῆς
ὑφορώμενος καὶ τῇ αἰσχύνῃ τῶν πραγμάτων ἐπαισχυνόμενος. Ets
μὲν οὖν οὕτω ταῦτα, καὶ πάλιν ἡ Κασταλία ἀνεχινήθη πηγή, καὶ τὸ
λαλοῦν ὕδωρ μαντικῶς ὑπερήχησε, καὶ ὁ δελφιχὸς τρίπους τὴν
ἀρχαίαν ἀνεκαλέσατο δύναμιν, καὶ ὁ τῶν θειοτέρων μυσταγωγὸὺς
ἀτεχνῶς ἑλληνίζων καὶ τοῖς Χαλδαίων λόγοις ἑπόμενος. Ὑμεῖς μὲν οὖν
οἰήσεσθέ με πλείω τῶν πεφυχότων εἰπεῖν * ἐμοὶ δὲ ἔλαττον τῆς ἀλη-
θείας εἰρῆσθαι δοχεῖ " οὔτε γὰρ τοὺς σχηματισμοὺς τῆς βακχείας etonxa,
οὔτε τοὺς ὕθλους τῆς μελαγχολώσης γλώσσης ἐκχείνης, οὔτ᾽ ἄλλο τι
τῶν ἀπειρημένων ἐμοί, ἐχεΐνοις δὲ διαδεόοη μένων καὶ τιμωμένων. Τῶν
(1) ἄν omissum (Τ. Ἐ.).
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 389
μὲν γὰρ πρώτων ἀτοπημάτων ταχ᾽ ἄν τις αὐτὸν παραιρήσηται, ὅτι
μήπω δημοσίᾳ τὸ ἐχείνων δόγμα κατέγνωστο * ὑπὲρ δὲ τῶν δευτέρων,
τίς ἂν ἐκείνου ὑπεραπολογήσασθαι ἐπιχειρήσας, οὐχ ἄν πάσαις ψήφοις
ἁλοίη ; Εἴτα καὶ (4) τοσοῦτον αὐτὸν πρᾶγμα διέλαβεν, ὡς οἴεσθαι πάντας
ἀγνοεῖν, ἐκείνους μὲν ὅτι ἠσεδήχασι͵ τοῦτον δ᾽ ὅτι ταῖς αὐτῶν ἀσεθείαις
συνέθετο. ᾿Αλλ᾽ ἡ τῶν προῤῥήσεων τοῦτον ἀπάτη θηράσασα καὶ n τῶν
μελλόντων ἐλπὶς οὐ περὶ τὰ φιλούμενα μόνον ἐτύφλωσεν, ἀλλὰ καὶ
πρὸς τὴν τοῦ συμφέροντος σκέψιν τε καὶ διάγνωσιν " καὶ τοσοῦτον αὐτὸν
ὁ τῆς ἀσεδείας ἔρως κατέσχεν, ὡς μὴ ἐκ διαστημάτων τὴν ὁμιλίαν τού-
τοις ἀφοσιοῦν, ἀλλ᾽ εἴχετο τούτων ἀπρὶξ ἐν ταῖς προόδοις, ἐν ταῖς
εἰσόδοις, ὅπου δ᾽ ἄν φοιτῴη, ὅθεν ἐξέλθοι, ἐν τοῖς ἱεροῖς, ἐν ταῖς
θυσίαις, ἁπανταχοῦ. ἢ ᾿Εγὼ μὲν οὖν οὐδένα τῶν πάντων οἴομαι Fe 488 ve.
τούτοις ἀντερεῖν, ἢ μὴ προφανῶς ἀσεθεῖν τὸν ἀρχιερέα, ἢ ἀντιλογίαν
τινὰ πρὸς τὴν προφανεστάτην ταύτην πλάττειν ἀλήθειαν * εἰ οὖν
ἔστι, φανήτω, ῥηξαίτω δημοσίᾳ φωνήν, ὑπεραπολογησάσθω τῆς
ἀπάτης, καὶ πρὸς τοῦτον αὖθις ἀντιστησόμεθα. Πρὸς δὲ τοὺς ἀμφι-
ὀάλλοντᾳς ὡς ἄν φανερῶς ἠσεθήχασιν, ἀλλ᾽ ἐξηπάτηνται, ἐπεὶ μηδὲ
εἰς ἰδικὴν ἡ πλάνη ἀνήνεχται αἴοεσιν, μήτε μὴν τῇ πάσῃ συνόδῳ
καθήρηται, πρὸς ταῦτα διηρημένως ἢ καθ᾽ ἑξῆς ἀπολογοῦμαι ταυτὶ,
ὅτι καὶ ἑλληνισμὸς ἄντιχρυς καὶ χαλδαισμὸς ἡ ἐκείνης δόξα
χαθέστηχε ᾿ κἄν νεστοριάζειν αὐτούς τις φαίη, οὐχ ἂν ἅμαρτοι.
ΥΠ|. Ὅτι μὲν οὖν τὸ ἐνθεάζειν ἑλληνικῆς δόξης, εἰρήκαμεν φθάσαν-
τε[ς] * ὁ δέ γε ἑλληνισμὸς (2) ἀρχαία τις καὶ τρίτη καθέστηχεν αἷρε-
σις, καὶ τὰ ἐχείνοις δόξαντα τῇ ἐχχλησίᾳ ἀπείρηται - καὶ νῦν δὲ
αὖθις σμικρὰ ἄττα τῶν παρ᾽ ἐκείνοις παρεξετάσωμεν ὅπως ἄν γνοίητε"
ὅτι τὸν ἕνα καὶ μόνον ἐκεῖνοι Θεὸν ἀτιμάσαντες, τὸν ἐν τρισὶν ἀχτῖσιν
ἀειφανῆ ἥλιον, θεῶν δὲ χαὶ δαιμόνων πλῆθος ὑποστησάμενοι, νεώς τε
αὐτοῖς ἀφιδρύσαντο, καὶ μαντείας κατεσχευάχασι, τελετάς τε περιέργους
γενομίχασι, καὶ παρασχευὰς ἐφευρήκασιν " ἱεοείας τέ τινας καὶ τῆς ἑστίας
προπόλους συνηγηόχασι ᾿ καὶ μαντωδοὺς (3) καὶ κατόχους ἐπέστησαν,
θηλείαις ψυχαῖς καὶ ἁπαλοῖς σώμασι τὴν ἐπίπνοιαν πιστεύσαντες (4)
(4) Verba corrupta (Τ. R.).
(2) Sur l'accusation d'hellénisme ou de paganisme comparez le dialogue de
Philopatris.
(3) Vox alioquin ignota (T. R.).
(4) Scripsi; πιστεύσαντος cod. (T. R.).
990 LOUIS BRÉHIER
τοῦ μάντεως αὐτοῖς καὶ θεοῦ. Καὶ ἵνα δὴ τοὺς ἄλλους παρῶμεν συλλήπ-
τορας ἡμῖν τοῦ λόγου καὶ μάρτυρας, αὐτὸν δὴ τὸν πρῶτον ἐχείνοις
δεσμὸν, καὶ οὗ πάντες ἐξήρτηνται, Πλάτωνα φημὶ τὸν σοφόν, τῷ λόγῳ
παραληψόμεθα, ᾿Εχεῖνος γοῦν καὶ πανταχοῦ μὲν τῶν ἑαυτοῦ διαλόγων
τὸν περὶ τῶν θεῶν χαὶ τῆς αὐτῶν διαχατοχῆς ἐχθειάζει λόγον " ἐν δὲ
τῷ Φαίδρῳ καὶ μάλιστα ἐπιδείκνυσι " τὰ γὰρ τοῦ Λυσίου παραξέων τοῦ
ῥήτορος, ὁπόσα ἐχεῖνος τὸν καλὸν Φαῖδρον ἐσχη ματίσαιτο, — μεμηνότα
μὲν τὸν ἐρῶντα δεικνὺς, σωφρονοῦντα δὲ τὸν μὴ ἐρῶντα --- ἐπειδὴ μὴ
διέστειλε τὴν τῆς μανίας ὁμωνυμίαν (4) " καὶ οὕτω που ἐν τῷ διαλόγῳ
φησίν * « Εἰ μὲν γὰρ ἦν ἁπλοῦν τὸ μανίαν χαχὸν εἶναι, καλῶς ἄν
« ἐλέγετο * νῦν δὲ τὰ μέγιστα τῶν ἀγαθῶν ἡμῖν γίγνεται διὰ μανίας͵
« θείᾳ μέντοι δόσει διδομένης. Ἥ τε γὰρ δὴ ἐν Δελφοῖς προφῆτις, αἵ τ᾽
« ἐν Δωδώνγ, ἱέρειαι μανεῖσαι μὲν πολλὰ δὴ καὶ καλὰ ἰδίᾳ τε καὶ δημο-
« σίᾳ τὴν Ἑλλάδα εἰργάσαντο, σωφρονοῦσαι δὲ βραχέα ἢ οὐδέν. Κἄν
« δὴ λέγωμεν Σίδυλλάν τε καὶ ἄλλους, ὅσοι μαντικῇ χρώμενοι ἐνθέῳ
« πολλὰ δὴ πολλοῖς προλέγοντες [εἰς] τὸ μέλλον ὥρθωσαν, μηκύνοιμεν
« ἄν δῆλα παντὶ λέγοντες. » (2) Εἶτα δὴ βραχέα περὶ οἰωνιστικῆς εἰοη-
κὼς, ἐπιφέρει ταυτί * «᾿Αλλὰ μὴν νόσων γε καὶ πόνων τῶν μεγίστων,
« ἃ δὴ παλαιῶν ἐκ μηνιμάτων ποθὲν ἔν τισι τῶν γενῶν, à μανξα ἐγγε-
« vouévn χαὶ προφητεύσασα οἷς ἔδει ἀπαλλαγὴν εὕρετο, χαταφυγοῦσα
« πρὸς θεῶν εὐχάς τε καὶ λατρείας, ὅθεν δὴ καθαρμῶν τε καὶ τελετῶν
« τυχοῦσα ἐξάντη ἐποίησε τὸν ἑαυτῆς ταῦτα ἔχοντα (3) λύσιν τῷ ὀρθῶς
« μανέντι καὶ κατασχομένῳ τῶν παρόντων xaxüy εὑρομένη. » Ta
μὲν οὖν τοῦ Πλάτωνος ταῦτα " τί γὰρ δεῖ τὰς τελειοτέρας μανίας ἀπαοιῦ-
μεῖσθαι; ᾿Αρχεῖ γὰρ τέως ἡ μαντυκή “ἐγὼ δ᾽ ὡς οἶμαι, εἴ γε προεγε-
γόνει τοῦτο, καὶ ταῦτ᾽ ἄν γενναίως ἀπεμνημόνευσε, χαὶ μετὰ τῶν ἐν
Δελφοῖς ἀπηρίθμησε μανεισῶν γυναικῶν, Σίδυλλαν ᾿Ερυθραίαν τιθεὶς
μόνον οὐχ ἑξατόνῳ μέτρῳ τοὺς λόγους ἐντείνουσαν. Ὑποπτεύω δὲ
καὶ τὸ « δόσει θείᾳ » παρὰ Πλάτωνι χείμενον, μὴ ἐντεῦθεν n Δοσιθέα
τὸ ὄνομα εὕρατο. "Ap” οὖν ἔχει τις εἰπεῖν διαφορὰν τῶν ἑλληνιχῶν
ὕθλων πρὸς τὰ παρ᾽ ἐχείγοις τελούμενα; Ἥ τε γὰρ παρ᾽ ἐχείνους ἐμε-
(1) Hiat oratio. (T. R.)
(2) Platon, Phèdre, XXIL 244.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 394
μήνει προφῆτις, καὶ αὐτὴ παρήλλαχτο * ἡ τελετὴ ἴση “ἡ βαχχεία
ὁμοία * ἀπαράλλαχτος À παραφορά, ἡ κατοχὴ, ἡ ἐπίπνοια " ἰσόσταθμα
πάντα καὶ ἰσομέτρητα, πλὴν ὅσον ἣ μὲν ἐν Δελφοῖς καὶ ἐν Δωδώνῃ
ὠργίαζε παρὰ Κροίσῳ τῷ Λυδῷ, παρὰ τῷ τοῦ Λαύδάκου Λαΐῳ, παρὰ
Σόλωνι, À δὲ ἐν τοῖς ἱεροῖς ἡμῶν ἐμεμήνει, ἐν τοῖς δεσποτιχοῖς ἀδύτοις,
παρὰ τῷ μεγάλῳ ἀρχιερεῖ. Πόσῳ ταῦτ᾽ ἐχείνων μανιωδέστερά τε καὶ
βαχχικώτερα !
ΙΧ. ᾿Αλλὰ μὴ πλείω τὰ τῶν ᾿Ἑλλήνων ᾿ ὡς γὰρ εἰδότων ὑμῶν,
τἄλλα σιγῶ - μετρῶ δὲ καὶ τὸν λόγον πρὸς τὴν ἀχρόασιν ἵνα μὴ φορ-
τιχὸς ὑμῖν δόξω καὶ πλημμελής * τῆς δέ γε Χαλδαίων ἱερατικῆς τέχ-
γης, οἶδα μὲν ὡς οἱ πλείους ὑμῶν ἀνήχοοι καθεστήχατε. ᾿Αρχαία γὰρ
αὐτὴ καὶ πρεσδυτέρα φιλοσοφία καὶ τοῖς πλείοσιν ἄγνωστος * τὸ γὰρ
σέδας τούτων μυστηριῶδές τε καὶ ἀπόῤῥητον. Ἰουλιανὸς δέ τις ἀνὴρ
ἐπὶ Τραϊανοῦ καλῶς ἐν ἔπεσι (1) τὰ τούτων ἐξέθετο δόγματα, ἃ δὴ καὶ
λόγια φασὶν οἱ τὰ ἐχείνων σεμνύνοντες * τούτοις [ οὖν ὁ φιλόσοφος F 134».
ἐντυχὼν Πρόχλος, ἀνὴρ κρείττονος μὲν τετυχηχὼς φύσεως, πᾶσαν
δὲ φιλοσοφίαν ἠχριδωκὼς, Ἕλλην δ᾽ ἄντικρυς, χαλδαΐσας ἀθρόον
τὰ ἐχείνων ἐπρέσδευσε, καὶ τὰς ἑλληνιχὰς ἀποδείξεις « Δόγων καται-
γέδας D ὠνομαχὼς, ὡς ὁ Γαζαῖος Προχόπιος ἱστορεῖ (2), ἐπὶ τὴν ἱερα-
τικὴν ἐχείνην τέχνην ὅλοις ἱστίοις ἀπένευσεν (3). Εἰ μὲν οὖν ἀπιστεῖτε
τοῖς λεγομένοις, ἀλλὰ πῶς τοῦτ᾽ ἄν εἴποιτε, ἢ σχηματίσεσθε οἷ συνει-
δότες τῷ πράγματι; εἰ δ᾽ ὅλως ἀποχριθείητε, ἀλλὰ τὸ περὶ ἐκεῖνον οἰκί-
διον πάντες συνίστορες, οἱ κατευναστῆρες, οἱ δορυφόροι, οἱ τὰ ἄῤῥητα
πεπιστευμένοι. "Ent τούτοις ἡδέως ἄν πυθοίμην ὑμῶν ποτερὸν ἔξεσ-
τιν ἱερεῖ τοιούτοις μυστηρίοις τελεῖσθαι καὶ τοιούτων ἀξιοῦσθαι τῶν
τελετῶν, ἢ καὶ τὸ λέγειν ἄντικρυς βλασφημία καὶ ἀσεδείας ἀρχή ; Τίς
ὃέ ποτε τῶν ἀρχιερωσύνῃ τετιμημένων γυναικί τινι βδελυρᾷ, τῶν χθὲς
καὶ πρώην ἑταιρούσων, τὸν ἑαυτοῦ κοιτωνίσχον ἠνέῳφξε, καὶ μυστηρίων
ἀῤῥήτων ἄδυτον τὸ ἴδιον πεποίηχεν οἰκητήριον; Κἄν γὰρ Σωσάννα τις
(1) Sur Julien et les Oracles Chaldéens, v. Sathas, Bull. de corr. hellén., 1871,
p. 310, et le Commentaire de Psellos sur ces Oracles (Migne, P. G., CXXII,
p- 1123-54).
(2) Le titre de « Adyuv καταιγίδες » avait été pris déjà par Porphyre et Jamblique
(Sathas, op. cit., p. 319). V. Stiglmayr, Die Streitschrifl des Prokopios von Gaza
gegen den Neuplatoniker Proklos (Byzant. Zeit., VIII, 265).
(3) Videntur deesse aliqua (Note de Combefis).
392 LOUIS BRÉHIER
nv τὰ θεῖα ἐπαγγελλομένη μυστήρια, χἄν ἡ τοῦ Σαμουὴλ μήτηρ, κἂν
ἣ τοῦ Ζαχαρίου ᾿Ελισάδετ, ἔδει μὴ οὕτως τὴν προφήτιδα εἰσδέξασθι.
μηδὲ συγγενέσθαι, μηδὲ ἐν ἀποῤῥήτῳ τελεσθῆναι, μηδὲ ἐντὸς τοῦ θείου
γαοῦ βδελυρὸν εἰσαγαγεῖν γύναιον * ἀπομεμέρισται γὰρ ἑκατέρῳ γένει
χλῆρος ἴδιος. Ὃ δὲ θεῖος ἀρχιερεὺς, ὥσπερ ἐπιλελησμένος τῆς εὐαγγε-
λικῆς πολιτείας ἢ μηδ᾽ εἰδὼς ὅτι φωνοίη τὰ εὐαγγέλια, κατὰ πολλὴν
ἀλογίαν τῆς τῶν χρειττόνων συνέσεως, φύρειν (1) τὰ θεῖα τετόλμηχε καὶ
τὰ ἄμικτα μιγνύειν ἐπιχεχείρηχεν. Εἰ δέ τις ταῦτα μὲν εἰδοίη, τὰ μὲν
εἰδώς, τὰ δὲ τῶν ἐλέγχων ἀχούων, περὶ δὲ τῆς πλάνης ἀμφισδητοίη,
ὥστε μὴ ἡγεῖσθαι ταύτην τῆς περὶ τὰ θεῖα δόξης διαφθοράν, οὔ μοι
δοχεῖ (2) φιλοσόφως προσομιλῆσαι ἑλληνικαῖς τε δόξαις καὶ ἔθεσι τὰς
ἀχριθείας τῆς καθ᾽ ἡμᾶς πίστεως. ᾿Εχεῖνοι γὰρ τοῖς ἀπατηλοῖς δαίμοσι
τὸ τοῦ Θεοῦ ἐπιφημίζοντες ὄνομα, ἐκεῖθεν ἐμυοῦντο τὰς ἀῤῥήτους ἐχείνας
ἃς ἴσασιν ἅπαντες τελετάς * καὶ οἵ μὲν ἐς ἼΛμμωνος, οἵ δὲ ἐς ᾿Αμφια-
ρέω, οἵ δὲ ἐς Δελφοὺς ἐφοίτων * τοῖς δὲ Βάχις χαὶ Σιθύλλα φωνὰς
ἠφίεσαν μαντιχάς (3). ᾿Ἐρωτῶ οὖν ὑμᾶς, πότερον χρεὼν ταύτην τὴν
τελετὴν παραδέχεσθαι, καὶ ἀχριδῶς ἑλληνίζειν καὶ προσαγέχειν τοῖς
πνεύμασι ἢ τοῦτο, οὐδ᾽ ἄν μαινοίμην, φήσαιεν "πῶς οὖν ἃ παρὰ πάντων
καὶ πᾶσιν ὑμῖν ἀπείρηται, ταῦτα πρὸ πάντων καὶ ἀντὶ πάντων ἐπρέσ-
θευσεν ὁ μέγας ποιμήν ; ᾿Αλλ᾽ ὁ μέν τέως ἐν ἀποῤῥήτῳ εἶχε τὴν τελε-
τὴν, χαὶ τῶν πνευμάτων διὰ τῆς κοινωνίας μετεῖχε * νῦν μὲν τῷ Δερ-
γαίῳ, νῦν δὲ τῷ Ἰάχχῳ, νῦν δὲ τῷ Σαράπιδι, νῦν δὲ τῷ ᾿Απόλλωνι διὰ
τῆς Δοσιθέας τελούμενος γυναιχός.
X. Οἱ δὲ χρησμοὶ διεδίδοντο καὶ αἱ προῤῥήσεις τὴν πόλιν πᾶσαν
ἐπεπορεύοντο. Καὶ ἦν διαδόσιμον τὸ καχὸν, καὶ οἱ πλείους τῆς λύμης
ἀπέλαυον " καὶ ὁ πατριάρχης ἀλόγιστος τὴν ἀσέδειαν πρόφασις (4). ᾿Αλλ’
ἔμειναν ἔτι τοῦ δεινοῦ πόῤῥω, ὅσοι μήτε τῷ Βεελφεγὼρ ἐτελέσθησαν,
pnte τῇ εἰκόνι προσεχύνησαν τῇ χρυσῇ, μήτε τῇ Βάαλ ἀπατηθέντες
τεθύχασιν * οἱ δὴ καὶ τὴν τηνικαῦτα τὰ σχῆπτρα Ρωμαίων ἰθύνουσαν,
Θεοδώραν αὐτὴν, τὸ τελευταῖον τοῦ Βασιλείου γένους λείψανόν τε xai
(1) φύρειν Combefis ; φέρειν Codex.
(2) Combefñs : οὐχ οἶδ᾽ ἐκεῖνος.
(3) Combefis : Σαρματικάς (sic).
(4) Locus corruptus (T. R.) An καὶ ὃ πατριάρχης ἀλόγιστος τῆς ἀσεδείας
πρόφασις ἢ (L. B.)
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 393
ζώπυρον (4), χινδυνεύοντι τῷ ἁληθείας λόγῳ πεπείκασι βοηθεῖν, καὶ τὴν
ἀπάτην ἐλέγχειν καὶ τοὺς προστάτας τῆς ἀσεῤείας εὐθύνειν, καὶ κατα-
στρέψαι μὲν τὸ χρηστήριον, ἀνελεῖν δὲ τοὺς χρησμοὺς, καὶ τῶν πονη-
ρῶν πνευμάτων καταλῦσαι τὴν δυναστείαν. Ἔδει μὲν γὰρ τὸν τοῦ ὀρθοῦ
προϊστάμεγον δόγματος, χαὶ τῶν λογικῶν θρεμμάτων φροντίζοντα, καὶ
τῶν ψυχῶν πεπιστευμένον τὴν προστασίαν, τοὺς τοιούτους ἐλαύνειν
θῆρας ὡς ἀθρόον ἐπιπηδῶντας καὶ τὴν λογικὴν ποίμνην ταράττοντας.
Ἐπεὶ δὲ ὁ ποιμὴν τοῖς θηρίοις προσέθετο, τὸ εὐσεδὲς καὶ θεῖον βασί-
λειον ἀντὶ τοῦ θηρὸς ἢ ποιμένος μᾶλλον τοῖς θρέμμασι γέγονε " « καὶ
« χριτήριον ἐχάθισε φοδερόν, τὸ τοῦ Δανιὴλ φάναι, καὶ βίόλοι ἀνεῴχ--
« θησαν * ὁ μὲν οὖν παλαιὸς τῶν ἡμερῶν ἄνω δικάζων ἐχάθητο " οὐχ
« ἐλάττους δὲ τῶν ἄνω μυριάδων καὶ κάτω χιλιάδες παρειστήχει-
« σαν, » (2) ὅσοι τε τῆς ἐχκρίτου βουλῆς, ἣν δὴ γερουσίαν ἡ Ῥωμαίων
φωνὴ χαλεῖν εἴωθε, καὶ ὅσοι τῆς δευτέρας μετ᾽ ἐχείνους εἰλήχασι, καὶ
οἱ μετὰ τούτους καὶ ἄχρι τῶν ἐσχάτων ὁ κατάλογος τοῦ χοροῦ * ἐπὶ
τούτοις καὶ ὅσον οἰκεῖον Θεῷ, οἱ τῶν τῇδε ἀπάραντες πρὸ τῆς φυσικῆς
μεταθέσεως μονασταὶ καὶ οἱ τούτων καθηγεμόνες * οὐχ ὀλίγοι δὲ καὶ
τῶν ἀρχιερέων, ὅσοις μὴ διεφθάρη παρὰ τοῦ ἀπατήσαντος δαίμονος τὰ
χινήματα. Οὗτοι μὲν οὖν χατὰ τὰς οἰκείας τάξεις περ'εἰστήχησαν "
ἀνεγινώσκοντο δὲ τὰ μαντεύματα, καὶ n ἐπίμικτος ἐκείνη θεολογία,
Ι Εὐθὺς οὖν ἅπαντες ἠρυθρίασαν, μᾶλλον μὲν οὖν ἠλάλαξαν ταῖς Po 134 ve,
φωναῖς, καὶ τῶν ἐξάρχων τῆς ἀσεδείας κατεψηφίσαντο, καὶ τὰς συγγρα-
φὰς βλασφημίας κατωνομάχασι,͵ καὶ πίστεως ἀλλοτρίωσιν τὴν ἐχείνων
δόξαν ἐνόμισαν, καὶ συνοδικῇ ἀποφάσει τὴν κρίσιν ἀνέθεσαν. Γράμμα-
σιν οὖν εὐθὺς ἡ τούτων ἐνεσημάνθη κατηγορία “καὶ ὁ ὑπαγορεύσας τὰ
πρῶτα τῆς λογιότητος, καὶ n γραφὴ ἐννομωτάτη καὶ ἀσφαλεστάτη,
καὶ χλεὶς ἐπετέθη τῇ ἀσεδείᾳ, καὶ ὡς λαΐλαψ ἢ τυφῶν ἀθρόον ἡ καινὴ
δόξα ῥοιζηδὸν διακχινηθεῖσα διεπνεύσθη καὶ διεσχεδάσθη. Ἔδει μὲν
οὖν τότε μὴ τοὺς ἀρξαμένους μόνον τοῦ ἀσεδήματος, ἀλλὰ καὶ τὸν χοι-
γωνήσαντα τούτοις τοῦ δόγματος τὴν αὐτὴν ὑποστῆναι κατάχρισιν, ᾿Αλλ᾽
OÙ μὲν διαιρεθέντες ὑπερόριοι ἀπηνέχθησαν * ὁ δὲ μέγας ἀρχιερεὺς εἰς
(1) Théodora, fille de Constantin VIII, associée à l'empire en 1043, ἃ régné seule
après 18 mort de Constantin Monomaque (1055). Son règne a duré dix-huit mois
(janvier 1055-août 1056).
(2) Daniel, VII, 9-10.
394 LOUIS BRÉHIER
ἐγχόλπιον ἐφύλαττε τὴν ἀσέδειαν, οὐ παρρησιαζόμενος μὲν τὸ πονηρὸν
δόγμα, τρέφων δὲ ὅμως ἐν τῇ ψυχῇ καὶ ἐπιθυμῶν ἀναῤῥῆξαι ποτὲ τὸν
ἐγχεχρυμμένον αὐτῷ βασιλίσκον κατὰ τοῦ θείου τῆς ἐχκλησίας πλη-
ρώματος (4).
XI. Καὶ ἵνα τὰ ἐν μέσῳ ἐάσω, ὁμοῦ τε ὁ μέγας ἡμῶν αὐτοχράτωρ (2)
τῶν βασιλικῶν σχήπτρων ἐπείληπτο καὶ ὁ ἀρχιερεὺς πρώτην ὑπὲρ
ἐχείνων ἀφῆχε φωνὴν, τὸν χαιρὸν τῶν φροντίδων ἁρπάσας, καὶ πείσας
ἐξ ἐφόδου τὸν αὐτοχράτορα -" οὔπω γὰρ εἰδὼς ἦν οὔθ᾽ ὅτι δοξάζειν
χαχῶς εἵλοντο, οὐθ᾽ ὅτι ἐντεῦθεν τῆς πόλεως ἀπελήλαντο. Πάλιν οὖν
ὁ διαιρεθεὶς ποταμὸς εἰς μίαν ἀμάραν τῆς ἀσεθείας συνέδραμε, καὶ
πρὸς τὴν πηγὴν ἀνεχύθησαν ὅθεν καὶ ἀπεῤῥύησαν. ᾿Εγὼ δὲ οὐχ οἷδα
τίνος πρώτου χατηγορήσω, τῆς τοῦ ἀρχιερέως τόλμης ἢ τῆς τοσαύτης
ἀναισθησίας * ἄμφω γὰρ ἴσα τὸ μέγεθος καὶ τὴν τάξιν. Μὴ γάρ μοι τὸ
μέτρον τοῦ ῥήματος παρατρέχοιτε * ἀλλ᾽ οὖν νοεῖτε τὴν δύναμιν χαὶ
οὐχ ἄν εὑρήσετε διαφοράν. "Atomov οὖν εἰ μὲν ἴΑρειος, ὅτι διύρει
καχῶς, ἠθέτηται - καὶ Σαδέλλιος, ὅτι οὕτω συνήρει “ καὶ Νεστόριος͵
ὅτι τὸ θεῖον ἐφάνταζε " χαὶ ὁ Εὐτυχὴς, ὅτι τὸν ἄνθρωπον ἐσχημάτιζε "
καὶ ὁ Ἕλλην ὅτι ἀγέννητον τίθεται τὴν ψυχὴν καὶ τὸν χρόνον συναΐ-
διον τῷ Θεῷ * καὶ ὁ Χαλδαῖος ὅτι πνευμάτων ἐπενοεῖτο χάθοδον “ ὁ δὲ
μέγας χαὶ θεῖος ποιμὴν ταῦτα πάντα συνειληχὼς ἐν μιᾷ τῇ ἑαυτοῦ
ψυχῷ οὐκ ἀπελαθήσεται τοῦ καταλόγου τῶν ἱερῶν ! Καὶ ὁ μὲν τοῦ Βεη-
pelu Ὥσηέ (3) ἐγχκατάλειψιν τῷ Ἰσραὴλ ἀπειλεῖ τοῦ Θεοῦ, οὐχ ὅτι
σεσυλήχασιν ἤ ἄλλο τι πεπαρῳνήχασιν, ἀλλὰ τὴν αἰτίαν τιθείς, ἐν
συμθόλοις, φησὶν, ἐπηρώτων καὶ ἐν ῥάδδοις αὐτοῦ ἀπήγγελλον αὐτῷ"
χαὶ ἵνα μή τις τὴν τοιαύτην ἐπίπνοιαν ἐχ πνεύματος θειοτέρου ἡγήσε-
ται, πνεύματι, φησὶν, πορνείας ἐπλανήθησαν - ὡς δ᾽ ἄν τις γνοίη ὅτι
διάστασίς ἐστι τοῦτο ἄντικρυς τοῦ Θεοῦ, ἐξεπόρνευσαν, φησὶν, ἀπὸ τοῦ
Θεοῦ αὐτῶν * οὐ γὰρ ἁπλῶς μετάστασιν ἀπὸ τοῦ χρείττονος τὴν τοιαύ-
(4) D'après la Chronique de Nea Moni citée par Bezobrazov (Op. ciéat., p. 18),
les moines furent calomniés auprès de Théodora par un habitant de Chio. Un des
ministres de cette princesse les envoya en exil et dépouilla le monastère de ses
privilèges. Plus tard, Isaac Comnène, mieux informé, les rappela et promuigua le
chrysobulle dont Psellos parie plus loin (Acta et diplom. gr. med. ævi, V,
p. 445).
(2) Isaac Comnène, empereur depuis 1057.
(3) ‘Qoné Combefis (’Ashp codex). Cf. Osée, IV, 12.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS "395
τὴν οἴεται τελετήν, ἀλλὰ μεμηνυῖαν, καὶ πορνικήν * ὁ μὲν οὖν προφή-
τῆς, ὡς κορυφὴν τῆς καχίας ἀνάγων τὸ πρᾶγμα, ἀλλοτρίωσιν ἀπὸ τοῦ
Θεοῦ, τὴν πρὸς τὰ ὑλιχὰ πνεύματα προχώρησιν (4), ὑμεῖς δὲ οὐκ
οἶδ᾽ ὅτι σοφίζεσθε περιττὰ πάντως καὶ ὑπὲρ τὸν λόγον.
ΧΙ. Ὁ μὲν οὖν ἐπὶ τοῦ εἴδους τῆς αἱρέσεως λόγος οὕτως ὑμῖν
διηχρίδωται, καὶ οὐκ ἄν ἔχοι τις περὶ τούτου τὴν γλῶτταν κινεῖν. Τὸ
δ᾽ ἐπεὶ οὐ συνοδικῶς οἱ ἄνδρες καθήρηνται, διὰ τοῦτο ἐξῆν τῷ μεγάλῳ
ἀρχιερεῖ καὶ πατρὶ ἀδεῶς τε τούτοις συνεῖναι, καὶ χρῆσθαι ὅσα θείοις
πνεύμασι καὶ αὐτόπταις τοῦ Δόγου καὶ κήρυξι, χαὶ τὴν ἡμιφανῶς
τέως ἀποδεδειγμένην αὐτῶν αἵρεσιν, θεῖαν ἡγεῖσθαι διδασκαλίαν, --- καὶ
τοῦτό σοι ῥᾶστα διαλυσόμεθα. Πρῶτον μὲν γὰρ ἐκεῖνο ἐροῦμεν, ὅτι τὸ
κατ᾽ αὐτῶν συγχροτηθὲν δικαστήριον οὐδὲ τῆς συνοδικῆς μερίδος ἐστέ-
ρῆτο ᾿ ἀλλ᾽ ἦσαν τινὲς xal τῶν ἀρχιερέων ἐπιμεμφόμενοι τε τοῖς
λόγοις ἐκείνοις, καὶ ὡς παρέγγραπτα καὶ νόθα τὰ γεγραμμένα διαπτύονγ-
τες δόγματα. Ὁ δὲ: μέγας ἀπεδεδημήχει πατήρ; εἰκότως ᾿ καθ᾽ ἑαυ-
τοῦ γὰρ ἄν ἐτίθει ψῆφον, ὅ τι τῶν καινῶν δογμάτων ἡθέτει * ὁ γὰρ τὴν
τούτων μέθην προπεπωχὼς, πῶς ἄν ὡς ἐμέσαντας τούτους τὸν ὕθλον
διέγνωκεν; Εἰ δὲ καὶ μὴ τὸ τῆς συνόδου μέρος τῇ συγχλήτῳ βουλῇ
συντετέλεχε, μηδὲ τοῖς ἐχχρίτοις τῶν Ναζιραίων, καὶ γὰρ οὐδ᾽ n μερὶς
αὐτὴ τῆς χοινῆς ἀχροάσεως καὶ χρίσεως ἀπελέλειπτο * ἀλλ᾽ οὗτοι γε
διέσεισάν τε τοῖς Χιώταις τοὺς σαθροὺς θεμελίους τῶν λόγων, καὶ πᾶν
ἀσεθείας καταλελύχκασιν ὕψωμα * ἄνδρες τούς τε γνησίους ἡμῶν λόγους
ἀνεγνωχότες καὶ τὰ τῆς ἀληθείας ἠχριδωχότες δόγματα καὶ πολλοῖς
περὶ τούτων βιθλίοις προσομιλήσαντες, τά τε παρέγγραπτα καὶ νόθα,
ὥσπερ οἱ ᾿Ασχληπιάδαι τὰ δηλητήρια καὶ οἷ φιλόσοφοι τὰς σοφιστείας,
ὁμοῦ πε γνόντες ὥστε μὴ ἀπατᾶσθαι καὶ τῶν εὐγενῶν καὶ οἰχείων ἀπο--
διελόμενοι λόγων - ὑμεῖς δέ μοι καὶ διασπᾶν δοχεῖτε τὸ μέγα σῶμα
τῆς ᾿Εχχλησίας͵ ὅπερ ὁ Χριστὸς τὸ μεσότοιχον ἀφελόμενος συνεόδίόασε
καὶ συνήρμοσεν. Εἰ γὰρ καὶ τἄλλα οἱ τῆς συγχλήτου διῴρηνται πρὸς
τὴν σύνοδον, ἀλλ᾽ οὐχὶ καὶ τῷ λόγῳ τῆς εὐσεόείας * οὐδὲ νόμος ἃ μὲν
οὗτοι γνοῖεν, ἀθετεῖν ἐχείνους, ὧν δὲ ἐκεῖνοι καταφηφίσαιεν, τούτους
δοξάζειν τε ταῦτα χαὶ προιστᾶν τῷ λόγῳ. ᾿Ερήσομαι δὲ ὑμᾶς βραχύ τι
ἐρώτημα. Οὗτος τὴν ἐξηγητικὴν εἰς ἄκρον ἀχριδωσάμενος δύναμιν,
(1) Deest verbum. An φησὶν ἢ (T. R ).
Fe 135 ro,
396 LOUIS BRÉHIER
τὴν τῶν ἐπῶν διαλύει συνθήχην καὶ λόγῳ πεζῷ τὰ ἐχείνων ἐχτίθησι
δόγματα. Τούτων οὖν ὀλίγ᾽ ἅττα τοῖς κατηγορουμένοις γυνὶ παραθήσο-
μαι, ὅπως ἄν γνοίητε ὅτι παλαιὰν καὶ πολλοῖς χρόνοις χατασιγασθεῖσαν
ἀσέδειαν ὁ μέγας τῆς ᾿Εχχλησίας φωστὴρ ἢ καὶ νέος δογματιστὴς τοῖς
Εὐαγγελίοις συνήνεγκεν.
XIIL. Εἰρηχὼς γὰρ οὗτος περὶ διαφορᾶς τῶν καλουμένων θείων δυνά-
μεων, ὡς a μὲν ὑλικότεραι, al δὲ ἀυλότεραι, καὶ αἵ μὲν ἵλαραί, αἵ δὲ
ἐμδριθεῖς, καὶ αἵ μὲν μετὰ δαιμόνων, al ὃὲ χαθαρῶς περιγίνονται,
εὐθὺς ἐπιφέρει περὶ καιρῶν καθ᾽ οὗς καλοῦνται, καὶ περὶ τόπων ἐν οἷς,
καὶ περὶ τῶν ὁρώντων τὸ θεῖον φῶς ἀνδρῶν ἢ γυναιχῶν, σχημάτων τε
τούτων καὶ θείων συνθημάτων, καὶ μέτεισιν οὕτως ἐπὶ τὰς ἐνθεαστιχὰς
θεαγωγίας, « ὧν, φησίν, al μὲν ἐπὶ ἀψύχων εἰσὶν, al δὲ ἐπὶ ἐμψύχων"
« καὶ τούτων af μὲν ἐπὶ λογιχῶν, at δὲ ἐπὶ ἀλόγων " καὶ γὰρ ἄψυχα,
« φησί, πολλάκις πληροῦνται θείου φωτὸς, ὥσπερ τὰ χρησμῳδοῦντα
« τῶν ἀγαλμάτων ἐξ ἐπιπνοίας θεῶν τινὸς ἢ δαιμόνων ἀγαθῶν ᾿ χαὶ
« ἄνθρωποι δὲ χάτοχοι γίνονται χαὶ δέχονται πνεῦμα θεῖον, οἵ μὲν êx
« ταὐτομάτου, καθάπερ οἱ λεγόμενοι θεόληπτοι, χατά τινας περιόδους
« τοῦτο πάσχοντες, καὶ ἀορίστως ὁπότε τύχοιεν, οἱ δὲ ἀνακινήσαντες
« ἑαυτοὺς πρὸς τὸν ἐνθεασμὸν ἔχ τινος προαιρετικῆς ἐνεργείας, ὥσπερ
« ἐν Δελφοῖς ἡ προφῆτις περικαθίσασα τῷ στομίῳ, καὶ ἄλλοι μαντν-
« χοῦ πιόντες ὕδατος. » Εἶτα εἰπὼν ἃ δεῖ ποιεῖν αὐτούς͵ ἐπάγει * « Καὶ
« τούτων προσγινομένων ἐνεργῆσαι δεῖ τὴν θεαγωγίαν καὶ ἐπέπνοιαν
« γενέσθαι καὶ παράλλαξιν τῆς διανοίας - ἀλλὰ καὶ τούτων τῶν ἐνθεασ-
« μῶν OÙ μὲν γίνονται παντελῶς ἐξισταμένων τῶν χατόχων καὶ οὐδα-
« μῶς ἑαυτοῖς παραχαλουθούντων, οἵ δὲ θαυμαστόν τινα τρόπον μετὰ
« παραχολουθήσεως * ὅπου γε δὴ καὶ εἰς ἑαυτὸν δύναται τῇ θεαγωγίᾳ
« χρῆσθαι, καὶ αὐτὸς εἰσδεξάμενος τὴν ἐπίπνοιαν εἰδέναι τίνα τε ἐνερ-
« γεῖ καὶ τί φθέγγεται καὶ πόθεν δεῖ ἀπολύειν τὸ κινοῦν ᾿ παντελοῦς
« γὰρ τῆς ἐκστάσεως γινομένης, ἄλλου πάντως χρεία τοῦ ἐφεστῶτος
« τοῖς κατόχοις καὶ γήφοντος, » Εἶτα δὴ πολλὰ εἰρηχὼς περὶ διαφορᾶς
θεαγωγιῶν, ἐπὶ τῷ τέλει ἐπάγει " « Προχαταστέλλειν δὲ πάντα τὰ ἐμπό-
« δια χρὴ τῆς θεῶν ἐπιφοιτήσεως καὶ ἠρεμίαν ἐπιτιθέναι τῶν περὶ
« ἡμᾶς πᾶσαν, ἵν᾿ ἀτάραχος καὶ μετὰ γαλήνης ἡ παρουσία γένηται
« τῶν καλουμένων ὑφ᾽ ἡμῶν πνευμάτων. » Ἐπὶ τούτοις xal ταῦτα
τίθησιν, ὅτι « ταῖς παρουσίαις τῶν θεῶν πολλάχις συγχινεῖται καὶ
. “-
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 397
« ὑλικὰ πνεύματα, ὧν τὴν ἐπιφοίτησιν καὶ τὴν χίνησιν μετά τινος
« βίας γινομένην οὐ φέρουσιν οἱ ἀσθενέστεροι δοχ εἷς » (1).
XIV. Τὰ μὲν οὖν τῶν Χαλδαίων καὶ τοῦ Πρόχλου, ὡς ἐκ πολλῶν
ὀλίγα ἐρεῖν, ταῦτα * καὶ οἶμαι ὡς ἀδιάφορός ἐστιν ἣν ἐξετάζομεν νῦν
θεαγωγίαν τε καὶ ἐπίπνοιαν πρὸς τὴν ἰδικὴν ταύτην καὶ ἀπηγορευμένην
τῶν Χαλδαίων αἵρεσιν. Οὐ γὰρ θεαγωγία τὸ γινόμενόν ἐστιν, ὡς δηλοῖ
τοὔνομα, ἀλλὰ πνευμάτων ὑλικῶν ἐπιφοίτησις, οἷς ἐκεῖνοι τὸ τοῦ Θεοῦ
ἐπιτιθέασιν ὄνομα. Ὃ τοίνυν τοιούτων ἑαυτὸν ἐξαρτήσας πνευμάτων,
χαὶ τοιαύτην πρεσδεύσας ἐπίπνοιαν, καὶ θαυμάσας μὲν τὴν τῆς γυναι-
χὸς χατοχὴν, καὶ ὥς τινα τῶν χρειττόνων αὐτὴν ἐχπλαγείς, τιμήσας δὲ
καὶ τοὺς ἐξαρχοὺς καὶ μυσταγωγοὺς τῆς αἱρέσεως, πότερον τῆς ἡμετέ-
pas αὐλῆς ὧν τυγχάνει ἢ τῆς ἑλληνικῆς καὶ χαλδαϊκῆς συμμορίας; Καὶ
πότερον χρεὼν τὸν οὕτως κατὰ τοῦ θείου ἀπεουθριάσαντα δόγματος τὰ
πρῶτα τῶν ἀρχιερέων εἶναι καὶ δογματίζειν, οὐχ οἶδ᾽ ὅθεν τὰς ἀρχὰς
τῶν δογμάτων ἀνΞίληφεν (2), ἢ καθαιρεῖν τοῦ θρόνου καὶ τῆς ἐχτλησίας
ἀπελαύνειν μαχράν ; Εἰ μὲν γὰρ χοινὰ ἡμῖν πρὸς τοὺς Ἕλληνας καὶ ἢ
τῶν ἐκείνων ἀρχῶν ἡμεῖς ἐξηρτήμεθα ἢ τῶν ἡμετέρων ἐκεῖνοι, πρεσ-
δεύσομεν χαὶ τὴν ὕλην ἀγέννητον καὶ τὰς παρ᾽ ἐχείνοις ἰδέας καὶ τὸν
δημιουργὸν μετὰ ταύτας καὶ τοὺς ἐλευθέρους θεοὺς καὶ τοὺς ἐν ζώναις "
εἰ δὲ τοσοῦτον ἡμῖν πρὸς αὐτοὺς τὸ διάφορον, ὅσον ἡ ἀλήθεια πρὸς τὸ
ψεῦδός ἐστιν, τί μῖξιν τοῖς ἀμίχτοις ἐπινοοῦμεν; τί δεχόμεθα τὴν τοῦ
δράχοντος χεφαλήν ; δέος γὰρ μὴ καὶ ὁ λοιπὸς αὐτῇ. συνολισθήσῃ ὁλκός.
XV. Εἰ δέ τις ἀχριδοῦν ἐθέλοι, ἔχεται καὶ τῶν γνωρίμων “ἡ δόξα
τῶν αἱρέσεων. Τὸ γὰρ πολύπονον ἀεὶ τῆς τοῦ Κυρίου μητρὸς παρ᾽
αὐτοῖς γεγραμμένον, ἐν χεφαλαίῳ τὴν τοῦ Νεστορίου συνείληφεν αἶρε-
σιν * ἐχεῖνος γὰρ σχετικὴν τὴν ἕνωσιν δογματίσας τῶν φύσεων, οὐ
Θεὸν σαρκοφόρον ἀλλ᾽ ἄνθρωπον θεοφόρον τὴν Παρθένον τεκεῖν ἀποφαί-
γεται, ἵν᾿ ἐντεῦθεν αὐτῷ καὶ ἡ χωρὶς ἀνδρὸς κύησις καὶ ἡ ἄνευ ὠδί--
γων λοχεία καταλυθῇ. Εἰ γὰρ φυσικοῖς πόνοις ἡ Παρθένος ἀπέτεχε,
χεγὸν μὲν ἡμῶν τὸ μυστήριον, κενὸν δὲ τὸ θεῖον καὶ ἱερὸν εὐαγγέλιον,
κατέστραπται δὲ ἡ μῖν πάντα * χαὶ χεχράτηχε παρὰ μὲν τῷ Νεστορίῳ
ἡ σχετικὴ ἕνωσις, παρὰ δὲ τοῖς Χιώταις ἡ πολύπονος τῆς Παρθένου
(1) Ce passage de Proclus nous est connu uniquement par Psellos. V. Sathas,
Bull. de Correspond. Hellén., 1871, p. 316-318.
/ ‘alim ἀναλαδόντα (T. R.).
398 LOUIS BRÉHIER
Fo 135 ve,
ὠδίς. Εἰ γὰρ καὶ βραχὺ τὸ τῆς ὀδύνης περὶ τῆς μητρὸς τοῦ Κυρίου
λεγομένης ὄνομα, ἀλλὰ πάσας διασείει τὰς τῆς ἐχκλήσιας χρηπῖδας, εἰ
γε παραδεξόμεθα " καὶ εἰ περιώδυνος ἡ Μαρία, οὕπω τὸ τῆς οἰγονομίας
ἐτελέσθη μυστήριον, ἀλλ᾽ ἱλήχοι τῷ Λόγῳ Θεός * οὐ γὰρ οὕτω Θεὸς
τὸ τεχθὲν, ἀλλὰ ψιλὸς ἄνθρωπος ὀδυνήσει τὴν ἀποφορτίσασαν τὴν
μήτραν τοῖς ὀλισθήμασι. Τὸ δ᾽ ἐφεξῆς τοῦ λόγου ὑμεῖς καὶ συλλο-
γίίσασθε] καὶ συλλέξατε * οὐ γὰρ ἄν αὐτὸς οὐδὲν κατηγορίας λόγῳ
χατὰ τῶν οὕτως ὑπειληφότων τὰς τῆς παρθενίας σφραγῖδας τῇ Θεοτόχῳ
διασαλεύσαιμι. Πολύπονος ἡ τοῦ Λόγου μητήρ; ὦ τοῦ καινοῦ λόγου
γχαὶ τῶν τῆς ἀσεδείας δογματιστῶν, καὶ τῆς θεσμοθέτιδος ζαχόρου xx
ἱερείας, καὶ πρὸ τούτων τοῦ πονηροῦ πνεύματος! Πολύπονος ᾧ ἄντ᾽
ἄλλου τινὸς προοιμίου ὁ ἄγγελος τοῦ Λόγου τὸ « χαῖρε » προστέθειχε;
Περιώδυνος ἡ τὰς τῆς προμήτορος Εὔας ὠδῖνας συνδιαλύσασα καὶ
ἀντεισενεγχοῦσα τῆς μὲν παραχοῆς τὴν ὑπαχοὴν, τῆς δὲ κατακρίσεως
τὴν ἀνάῤῥησιν, τῶν δὲ ὠδίνων τὴν ἄπονον καὶ μαχαρίαν ζωήν ! Ag’ οὖν
εἴ τις ὑμῖν ὑποληφθείη μὴ καλῶς δοξάζων περὶ Θεοῦ, ἀπὸ σχη μάτων
φημί τινων καὶ ἐθῶν, μὴ μέντοι δοίη λόγους ἐν συνεδρίῳ, μηδὲ EAey-
Mein πρεσδεύων παρὰ τὸν λόγον, μηδὲ χαθαιρεθείη συνοδικῶς, —
ἀδεῶς τούτῳ συνομιλήσετε, ἢ τὴν ψυχὴν ὑποθήσεσθε, ἢ μαθητιᾶν αὐτῷ
ἕλοισθε ; Οὐχοῦν ἄτοπον εἰ ἅπερ ὑμεῖς ἀχριδοῦν ἐθέλοιτε, ταῦτα τῷ
πατριάρχῃ κατ᾽ ἐξουσίαν παραχωρήσετε ; Πῶς δὲ ἃ ἐχείνῳ διδοίητε ὡς
ἔννομα καὶ εὐσεδῆ, παρεγράψασθε τότε καὶ διεσύρατε; Πῶς χαὶ rive
τρόπον μὴ συνομιλοῦντες τοῖς Χιώταις μετὰ τὸν χοινὸν χατ᾽ αὐτῶν
ἔλεγχον, ὅτι μὴ πάσῃ ἀνάγχῃ ἀδουλήτως αὐτοῖς ἐντυγγάνοντες, μήτε
ταῖς οἰκίαις παραδεχόμενοι, ἀλλὰ καὶ τὸν ἀρχιερέα χαταμεμφόμενο:
ὅτι μετὰ τηλικαύτην χρίσιν καὶ γνῶσιν οὐδ᾽ οὕτως ἀπωθεῖν ἐκεένους
ἔγνω καὶ ἀποστρέφεσθαι, διὰ τί δὲ μὴ καὶ σύνοδον τηνικαῦτα κατ᾽ αὐτῶν
συγχεχρότηχεν, οὕτω διαδληθέντος αὐτοῖς τοῦ λόγου, καὶ τῶν δογμά-
τῶν διασεισθέντων; Ἔστω γὰρ ἔτι μὴ καθέρηχε τούτους ἐννόμως 5
σύγχλητος. ᾿Αλλὰ πῶς ἀφῆχε τὸ ἐλλελειμένον ἡ σύνοδος ; Εἰ μὲν va
αὐτοτελῆ τὴν συγχλητικὴν κρίσιν ὁ μέγας δεσπότης ἡγήσατο, πῶς
αὖθις συνῆλθε τούτοις καὶ συνωμίλησεν, καὶ τοῖς μεγάλοις συνηρέθμει
πατράσι, καὶ τὸν ἑαυτοῦ ἀμφορέα ἐκ τῆς ὠχεανίτιδος ἐχείνων ἐπλήρουν
πηγῆς ; Εἰ δ᾽ οὐ συνεχώρει τούτοις διχάζειν περὶ δογμάτων ποιουμέ-
vous τὸν λόγον, διὰ τί μὴ δευτέραν αὐτὸς ἔθετο χρίσιν καὶ τοῖς ἀν αι...
UN DISCOURS INÉDIT DE -PSELLOS 399 :
τὰ καινὰ ἐξιχνίασε δόγματα χαὶ χαγονιχὴν ἀπεφήνατο τὴν διάχρισιν ;
TH γὰρ ἑαυτὸν μόνον ὀρθὸν οἰόμενος δογματιστὴν τὸ λοιπὸν μέρος τῆς
καθ᾽ ἡμᾶς πόλεως, μᾶλλον δὲ ἁπάσης τῆς οἰχουμένης, διεστραμμένον
περὶ τὸν τοῦ δόγματος λόγον ὑπείληφεν; Ἢ μᾶλλον, ὅπερ καὶ ἀληθές
ἐστιν, ἡμεῖς μὲν ἑδραῖοι ἐφ᾽ ὧν παρειλήφαμεν δογμάτων βεόδήχαμεν,
οὗτος δὲ παραλλάξας τοὺς πόδας πρὸς τὴν κοημνὸν τῆς ἀπωλείας κατώ-
λισθε " καὶ ὅτι μὴ τέχνη λόγων ἡ περὶ τούτων ἀπόδειξις, αὐτὰ βοᾷ τὰ
ἐχείνων συγγράμματα, οἷς ὥσπερ λογίοις προσεῖχε καὶ ὡς θείους ἐτίμα
χρησμούς.
XVI. ᾿Αλλὰ τὰ πλείω τούτων κατὰ συγχώρησιν ἡμῖν δέδοται, ἐπεὶ,
εἴ γε τἀληθῆ σχοπεῖν ἐθέλοιμεν, οὐδὲ πάντα τῶν δογμάτων ὅσα διαδέ-.
ὄληται νῦν συνοδιχῶς ἀπηλέγχθη καὶ ἐν συνεδρίοις πατέρων ἀπεχρίθη
τῆς εὐσεδείας, ἀλλὰ τά γε πλείω τῷ τοῦ Εὐαγγελίου λόγῳ παραβάλ-
λοντες καὶ συγχρίνοντες ὡς διεστραμμένα, τῆς ἑαυτῶν ψυχῆς ἀπωσά-
μεθα. Αὐτίκα, τὰς πλατωγνιχὰς ἀναμνήσεις καὶ τὴν ἑλληνικὴν μετεμψύ-
χωσιν καὶ τοὺς τελετάρχας θεοὺς καὶ τὴν μεσότητα τῶν ψυχῶν καὶ
τὴν Ἑ χατυκὴν δύναμιν καὶ τοὺς χοσμαγωγοὺς δαίμονας καὶ τὰς ἀγγε-
λικὰς Κῆρας, ποῖοι τῶν πατέρων, ἢ πότε ἐν χοινῷ συνεδρίῳ διέσεισάν
τε καὶ χαθῃρήχασι ; τὰ δὲ αἰθέρια στερεώματα καὶ τὸν ἐχπύρινον νοῦν
καὶ τὸν ἅπαξ ἐπέχεινα καὶ τὸν δυαδικὸν Θεὸν, καὶ ἀγνοῆσαι οἴομαι τοὺς
ἄνωθεν τῆς εὐσεθείας μυσταγωγούς. Τὴν ὃὲ ᾿Αοιστοτέλους θεολογίαν
καὶ τὴν ψυχογονίαν τοῦ Πλάτωνος καὶ τοὺς καινοὺς ἀριθμούς καὶ τὰς
ἀναπλάσεις τῶν δογμάτων καὶ τὴν δαπάνην τοῦ μεριστοῦ, τίς ποτε τῶν
πάντων διέχρινε ταῦτα χαὶ συνοδικαῖς γνώμαις καθήρηχεν ; ἾΑρ᾽ οὖν
ὅτι μὴ συνοδικῶς τὰ δόγματα διεδλήθησαν, ἀθασανίστως ἐχδεξόμεθα
τῇ ψυχῇ, καὶ ἀπολονίαν ἕξομεν τοῦτο τῆς ἡμετέρας κακοδοξίας ; Πολ-
λοῦ γε καὶ δεῖ. Καὶ γὰρ οὕτως, ὦ βέλτιστοι, ὁ ἀληθὴς λόγος διαιτῴη
τοῖς πράγμασιν - ἀλλ᾽ ὅσα μὲν τῶν δογμάτων πατρικαῖς ἄνωθεν καὶ
συνοδικαῖς διαγνώσεσιν ἐξελήλεγχται, αὐτόθεν ἡμῖν ἀποχέχριται, τὰ
δὲ ἄλλα πρὸς τὸν τοῦ εὐαγγελίου κανόνα παραμετροῦντες ἡμεῖς ἀποχρί-
γοιμέν τε αὖθις καὶ ἀποχρινοῦμεν, ἔστ᾽ ἄν ὁ τῆς παραδλαστήσεως λόγος
ἀποφύῃ τὴν ἄκανθαν, Οὐ τοίνυν ἀπὸ τῶν λαιῶν τῆς ἑχάστης μερῶν
ἀπογεννήσομεν τὴν ψυχὴν, ὅτι ἐμφύσημα Θεοῦ ταύτην ἀπὸ τῆς γρα-
ons μεμαθήχαμεν, οὐδ᾽ ἀπὸ τῶν δεξιῶν αὐτῆς λαγόνων τὰς ἀρετὰς
ἐρεῖν οἰησόμεθα, ἀλλ᾽ ἄνωθεγ ἀπὸ τῆς πρώτης πηγῆς; εἰπεῖν δὲ καὶ τῆς
Fo 136 ro,
400 LOUIS BRÉHIER
ἡμετέρας Ὑνώμης καὶ τῆς ἐπαμφοτέρου αὐτεξουσίου ῥοπῆς * οὐδὲ τὸν
Θεὸν ἀμεθεχτὸν ni, δοξάσομεν, κἄν πολλὰ ὁ Ἕλλην περὶ τούτου
διισχυρίζοιτο, ὅτι ἐγοικεῖν ἡ μῖν καὶ ἐμπεριπατεῖν παρὰ τῶν τοῦ Λόγου
φωνῶν ἀχηχόαμεν * οὐδὲ τὴν ἐκ τῆς διοπτείας ἀφετηρίαν πύλην ζωῆς
ὀνομάσομεν, ὅτι μὴ τὸν Χριστὸν μόνον παρ᾽ οὗ καὶ τὴν πρὸς τὸν Πατέρα
προαγωγὴν κατὰ τὸν ἀπόστολον ἐσχήχαμεν. [[ Οὐ τοίνυν οὐδὲ τὸ παρὰ
τοῖς Χιώταις πνεῦμα παραδεξόμεθα, ὅτι ἕτερον τοῦτο παρὰ τοῦ Εὐαγγελίου
δεδέγμεθα, Πατρὶ συναριθμούμενον καὶ Υἱῷ καὶ ὁμοτιμίᾳ τιμώμενον :
οὐδὲ τὴν ἐγγαστρίμυθον ἐχδεξόμεθα, οὐδ᾽ εἰ ἀναθιθάζει τὸν Σαμουὴλ
χάτωθεν, εἰ καὶ ὁ μέγας πατὴρ καὶ εἰσῳκίσατο καὶ τεθαύμαχε xat πολ-
λοῖς ἡλίοις συνδιημέρευσε * δέδοικα δὲ μήπου καὶ συνωργίακε συγχο-
ρυθαντιῶν αὐτῇ, καὶ τοῦ καινοῦ συμπληρούμενος πνεύματος.
XVII. Πάλαι μὲν γὰρ, οὕπω τοῦ τῆς εὐσεδείας φωτὸς καθαρῶς ἀνα-
λάμψαντος, οὐδὲ τοῦ εὐαγγελικοῦ χηρύγματος πάντα διειληφότος τὰ
πέρατα, οὐδὲ τῆς τῶν δογμάτων ἡμέρας ἀμιγῶς ἀπὸ τῶν τῆς νυχτὸς
διαχοιθείσης, ἀλλ᾽ ἔτι ἀναμὶξ τῶν διαφόρων οὐσῶν νοήσεων ὑπὸ τοῖς
ἐπιστήμοσι χαὶ, ἵν᾽ οὕτως εἴπω, λογογνώμοσι, τά τε διαυγῆ τῶν
δοξασμάτων καὶ τὰ κίόδηλα καὶ ὑπόχαλχα διεχρίνετο. Διὰ ταῦτα πατέ-
puy ἁπανταχῆ ἐπὶ τῇ διαχρίσει τοῦ λόγου συνέδρια συγχεχρότητο,
χαὶ παρὰ τούτοις μὲν Αρειος, παρ᾽ ἐχείνοις δὲ Μακεδόγνιος, καὶ παρ᾽
ἀλλοῖς Λίδυς Σαδέλλιος τῆς ἐχχλησίας ἐξωστραχίζοντο, χαὶ ἀρχιερεῖς
μόνο! τὸν λόγον τῆς χοίσεως ἐπιστεύοντο. Νῦν δὲ τῶν γνησίων χαὶ
γόθων σπερμάτων διακριθέντων καὶ τοῦ φωτὸς χαθαρῶς τὴν γύχτα σχε-
δάσαντος χαὶ πάντων ὑπὸ μεγάλῳ φωστῆρι τῷ ὀρθοτόμῳ λόγῳ τίς
ἐχχλησίας πολιτευομένων, τίς ὁ λόγος μὴ ἄλλως τοὺς τῆς ἀσεῦείας
μυσταγωγοὺς τοῦ τῶν εὐσεδῶν χαταλόγου ἀποχηρύττεσθαι, εἰ ur
πατριάρχαι τούτους ἀποχρίνοιέν τε καὶ ἀθετήσαιεν ; Γλρ᾽ οὖν εἴ τις ἴδοι
τινὰ χατὰ νότου τὴν τοῦ ἡλίου πεποιημένον ἀνατολὴν καὶ πρὸς τὴν
ἑσπέραν ποιούμενον τὴν εὐχήν, χοινωνήσει τἀνδρὶ τοῦ σχοποῦ μέχρι
τῆς πατριαρχικῆς χρίσεως καὶ ἀδιάφορον ἡγήσαιτο τὸ εἶδος τῆς προ-
σευχῆς ; ἢ εὐθὺς ἐχκλίνοι καὶ γνώμονι ἑαυτῷ πρὸς τὴν διάχρισιν χρή-
σαιτο; ἴΛτοπον τοίνυν εἰ ἃ μηδὲ πολλὴν ἐπισύρεται τὴν διαβολὴν ae
ἑαυτῶν διαπτύοντες, πεοὶ τῶν πάντη XATEYVUOUÉVOY καὶ αὐτόθεν
ἀπελέγχτων καὶ ἀποθλήτων, συνοδικῆς γνώμης δεησόμεθα. Εἰ τοίνυν
σαδελλίζοντά τινα vvoinuev τήμερον, χαὶ τὰς ὑποστάσεις ἐν ποοσώπῳ
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 401
ἀναλύοντα, αὐτόθεν ἀποπεμψόμεθα, ἢ συνδοξάσομεν μέχρι ἄν ἡ σύνο-
δος χρίνοι τὸν ἄνδρα καὶ χαταχρίνοι ; ᾿Αλλ᾽ οὐκ ἄν εἴποιτε, εἰ μὴ προ-
δήλως ἀσεύεῖν βούλοισθε. Πῶς οὖν τοῦτο διδόντες, πικρῶς ἡμᾶς ἐξε-
πάζετε ὅτι τὰς τῶν Χιωτῶν δόξας διαπεφεύγαμεν μὴ παρ᾽ ἡμῶν (1)
εἰληφότες τῆς διαστάσεως τὸ ἐνδόσιμον; ᾿Αλλ’ οὐχ οἶδα τίς ἡμῖν περὶ
τούτου ὑπολέλειπται λόγος ἢ ὅπως τούτοις οὖσί γε τηλικούτοις διαμφισ-
δητεῖτε πρὸς ἀλλήλους καὶ ὑπερήμερον τίθεσθε τὴν ἀπόφασιν. Δεῖ μὲν
γὰρ εὐλαθεῖσθαι καὶ μὴ ῥᾷστα τῶν ἀρχιερέων κατηγορεῖν, ἀλλ᾽ ἔνθα
μὴ Θεὸς τὸ ἀτιμαζόμεγον. ᾿Εγὼ δ᾽ εἰ μὲν ἁπλῶς ἑώρων τὸν ἄνδρα τὴν
πλάνην παραδεξάμενον, ἀλλὰ μὴ εἰς τὸ βάθος τῆς ἑαυτοῦ ψυχῆς ταύ-
τὴν χαταχολπίσαντα καὶ βαφέντα, ὡς εἴπειν, δευσοποιά τε καὶ ἀγαπό-
γιπτα, οὐκ ἄν οὕτω θερμότερον κατηγορήσας, ἀλλὰ λόγοις ἑτέροις διορ-
θωσάμενος, μετεδίδαξα - ἐπεὶ δὲ οὐχ ἀπὸ τῶν ἡμετέρων μᾶλλον ἢ τῶν
λήρων ἐχείνων τὴν ψυχὴν ἐποιώθη, χαὶ τῶν καινῶν δογμάτων ἀντε-
ποιήσατο ὡς μιχροῦ δεῖν καὶ νομοθετεῖν περὶ τούτων, διὰ ταῦτα τὴν
παροῦσαν ἐνεστησάμην γραφήν. ᾿Αξιῶ δέ μοι ἐνταῦθα προσέξειν τὸν
γοῦν * χἄν μὲν ἀληθῆ καὶ δίχαια λέγω καὶ μετὰ πάσης, ὡς εἰπεῖν, ἀπο-
δείξεως, αὐτόθεν ἐπενέγκατέ μοι τὴν τομήν * εἰ δὲ περινοοῦμαι τι τῷ
λόγῳ σοφιστιχαῖς πιθανολογίαις πρὸς τὸν ἔλεγχον χρώμενος, μηδὲ
φωγῆς ἀνάσχοισθ᾽ ἐμοῦ.
XVIIT. Ἐπειδὴ γὰρ n τῶν Χιωτῶν ἀπάτη ἐλήλεγχται χαὶ τὰ
τῆς ἀσεδείας αὐτῶν κατεγνώσθη συγγράμματα, ὁ μέγας ἡμῶν πατριάρ-
χης δεινὸν ἄλλως ἡγεῖται, εἰ μὴ καὶ αὖθις τὰ ἐχείνων ἰσχύσειε καὶ τὴν
ἧτταν τούτοις ἀναχκαλέσαιτο. Καὶ σχοπεῖτε ὅπερ ὑπούλως ἐνταῦθα καὶ
δολερῶς τὴν ἀρχὴν πεποίηται τοῦ βουλήματος * ἑτέραν γὰρ τρεπόμε-
γος, ἑτέραν αὖθις ἐτράπετο. Τῷ γὰρ μεγάλῳ προσιὼν ἡμῶν αὐτοχρά-
τορι, οὐδὲν οὔπω μεμαθηχότι περὶ ὧν ἐκεῖνος κατελιπάρει τε καὶ
ἐδεῖτο, ὑπὲρ εὐσεδοῦς δῆθ[εν ἴστ]ατο (2) πράγματος, ἵν᾿ ἐκεῖθεν ἁρπάσῃ
ὥσπερ ὠρυόμενος λέων ἢ ἐν σχοτομήνῃ κατατοξεύσῃ τοὺς εὐθεῖς τῷ
καοδίᾳ, καὶ ὀλιγωρίαν μὲν τοῖς προδεδασιλευχόσι τοῖς ἱεροῖς ἐγχαλεῖ,
κοινώνησιν δὲ τῶν καθηγιασμένων Θεῷ, καὶ ἀσέῤειαν ἄντιχρυς ἐν σχή-
ματι εὐσεδείας “ οὕτω κύχλῳ τὸν λόγον περιδαλλόμενος, εὐθὺς ἐφο-
δεύει τὸν λόγον, καὶ πολιορχεῖν πειρᾶται τὴν ἀχατάτειστον τοῦ βασι-
(4) ἡιαῶν Cod. ὁμῶν Combefis,
(2) Combeñs,
Fe 136 γο͵
402 7 © LOUIS BRÉHIER ‘
λέως ψυχὴν. "Ent τούτοις γὰρ οἱ Χιῶται χαὶ ἡ κατ᾽ αὐτῶν πεῖρα, χαὶ
ὁ βάσκανος δαίμων, καὶ ἐφ᾽ ἑχάστῳ δαχρύων, καὶ τελευτῶν ὅτι τοι
ὅπερ ἐδείμαντο μοναστήριον (4) χαὶ Θεῷ μόνῳ δεσπότῃ ἀνέθεσαν
καὶ γράμμασιν ἰδίοις τε καὶ βασιλικοῖς τὴν γνώμην αὐτῶν ἐμπεφανί-
χασι καὶ ἐχύρωσαν, ἢ καταψηφισαμένη αὐτῶν βασιλὶς ἀφείλετο μὲν
Θεοῦ, ἑαυτῆς δὲ ἐποιήσατο, μήτε χρυσοδούλλου γραφῆς φεισαμένη,
μήτε τῆς τῶν μοναχῶν ἐπιστραφεῖσα βουλήσεως " « ἀλλ᾽ αὐτός, φησὶν,
ἀντὶ πάντων τοῖς ἀνδράσι γενοῦ, xal τῷ Θεῷ φέρων ἀπόδος τὸ μονατ-
τήριον, ᾧ δὴ καὶ παρὰ τῶν δειμαμένων καθαρῶς χαθωσίωτο. » Εἰ μὲν
οὖν οὐδὲν ἕτερον ὑπὸ τοῖς λόγοις τούτοις ἐκρύπτετο (2), ἀλλ᾽ ἁπλότητος
ἦν γνώμης ἡ δέησις, οὐδὲν ἄν αὐτῷ ἐν τούτοις προσετρίδετο ἔγχλημα.
Ἐπεὶ δὲ, ὥσπερ οἱ τυραννοῦντες, [| ὥσπερ ἐξ ἀχροπόλεως ἐπειρᾶτο
κατατρέχειν ἡμῶν, τοῦτό ἐστι τὸ παρ᾽ ἡμῶν αὐτῷ ἐγκαλούμενον.
Σχοπεῖτε γάρ - πείθεται τοῖς λόγοις τούτοις ὁ βασιλεὺς, καὶ πῶς
γὰρ οὐχί ; Ζηλοτυπεῖ περὶ τοῦ Θεοῦ, καὶ οἷα δικαστὴς χρείττων τὴν
λαχοῦσαν αὐτῷ κληρονομίαν ἀποκαθίστησιν ἐπὶ τούτοις τὰ εἰωθότα "
βασιλικῶν γραμμάτων ἔχθεσις καὶ αὐτόχειρ ὑπογραφή, καὶ ἣ ἐπίση-
μος καὶ συνήθης σφραγὶς τὸ κῦρος διδοῦσα τῷ πράγματι. Ἐντεῦθεν τὸ
προσωπεῖον ἀνακαλύπτει ὁ πατριάρχης ᾿ καὶ ἐπεγγελᾷ ἡδέως τῷ χατορ-
θώματι * xal δεδίττεται τοὺς πολλοὺς τῇ γραφῇ ᾿ xat ἣν ἐλελέξατο
πλάνην ἢ πέπωχεν, ἀχρατῶς ὅλην ἐν ὑπομνήμασιν ἐξεμεῖ - καὶ παῤῥη-
σιάζεται τὴν ἀσέδειαν οὕπω τολμήσας πρότερον " καὶ ἡ προφῆτις δεξιά,
ἡ χρυσόθδουλλος γραφή, καὶ ἡ βασιλέως ὑπογραφή.
XIX. ᾿Αλλ᾽ οὐ περὶ τῆς ἀσεδείας, ὦ βέλτιστε σύ, ἵνα τι καὶ διχανι-
χότερόν σοι προσενεχθήσομαι, ἀλλὰ περὶ τῆς τοῦ μοναστηρίου χαθιε-
ρώσεως ! Σὺ δ᾽ ἐξ ἑτέρας ἀρχῆς εἰς ἑτέραν μεταδαίνεις ὑπόθεσιν - χαὶ
χρυσῇ κεφαλῇ χεῖρας καὶ πόδας καὶ τὸ λοιπὸν σῶμα προπλάττεις (3)
πάντα χαλχᾶ " ὡς δέ σου ἡδέως ἄγαμαι καὶ τὸ ἐν ὑπομνήματι τοῦ χαλοῦ
ἐγχώμιον * οὗ μὲν γὰρ τὸ ὅλον ἀντέχεται χαὶ τὰς κοινὰς φροντίδας
ἀχθοφορεῖ, κατολιγωρεῖς χαὶ σχώπτεις ἄντικρυς * οὗ δέ σοι δοκεῖ συμ-
δεδλῆσθαι πρὸς τὸ βούλημα τῆς ψυχῆς, ἄγασαί τε καὶ τέθηπας - καὶ
ὥσπερ οἱ σοφισταὶ τὸν νόμον ἀναγινώσχων, ἔπειτα ἐπαινεῖς χαὶ θαυμά-
4). Le Monastère de Nea Moni à Chio. V. l'introduction.
(2) ἐκρύπτιστο cod. Corr. Combefis.
(3) Malim προσπλάττεις (T. R.)
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 403
ζεις χαὶ τοῦ νομοθέτου τὴν γνώμην ἀνακαλύπτεις, Τί δέ σοι τὰ πολλὰ
ταυτὶ πρὸς τὴν τοῦ βασιλέως γραφὴν γέγραπται; Ἐχρῆν γὰρ, εἴ γε καὶ
ἀσεδεῖν βεθούλησαι, εἴ γε καὶ ἐχρῆν τὴν περὶ τοῦ μοναστηρίου θεῖναι
ὑπόθεσιν, ὡς πρὸς Θεὸν τὸν λόγον ποιούμενον καὶ μηδενὸς ἑτέρου πρὸς
μνήμην ἐλθεῖν. Σὺ δέ , ὥσπερ ἐξεπίτηδες ἐγχωμιᾶσαι τοὺς Χιώτας βου-
λόμενος, γενιχῷ προσέχεις τῷ λόγῳ, γενεαλογῶν αὐτοὺς ὥσπερ οἷ᾽
ῥήτορες, καὶ μονονοὺ μαιεύων καὶ ἐξ ἐπαγγελίας προσάγων τῷ βίῳ.
Εἶτα δὴ ἀνάγων ἐν παιδείᾳ καὶ νουθεσίᾳ Κυρίου, καὶ τὰ λοιπὰ προστι-
θεὶς, ἃ κἂν ἀπώχνησέ τις Γρηγορίῳ καὶ Βασιλείῳ προσμαρτυρῶν, τοῖς
γνησίοις τοῦ Λόγου κήρυξι χαὶ μεγάλοις τῆς ἀληθείας ἀγωνισταῖς *
εἶτα τὰ πολλὰ ἐχεῖνα, xal ἐπὶ πᾶσιν ἀναχηρύττει ὡς στεφανίτας, Ὦ τῆς
ἀτοπίας τοῦ λόγου ! Εἴ γε διῶκται μὲν ἡμεῖς, οἱ τῆς εὐσεδείας προστά-
ται, οἱ δὲ προφανῶς ἀσεδήσαντες μάρτυρες καὶ ἀναῤῥήσεως ἄξιοι!
Στεφανῖται οἱ τὸν τῆς πίστεως ἡμῶν ὅσον τὸ ἐφ᾽ ἑαυτοῖς ἀφελόμενο!:
στέφανον καὶ καταδαλόντες ἡμῶν τὸ ἀξίωμα καὶ τὸ ἁπλοῦν τῆς πίσ-
τεως τυρανγήσαντες [ Στεφανῖται οἱ τοῦ θείου καταφρυαξάμενοι πνεύμα-
τος καὶ πνευμάτων ἑτέρων ἑαυτοὺς ἐξαρτήσαντες καὶ τοῖς ἀῤῥητοτάτοις
πιστεύσαντες! Εἶτα οὐχ ζσχύνθης τοῦ ῥήματος τὴν ἀσέδειαν ; ᾿Αλλὰ
βασκάνους μὲν ἀποχαλεῖς τοὺς δημοσιεύσαντας τὴν ἐκείνων ἀσέθειαν ᾿
στεφανοῖς δὲ τούτους τῷ λόγῳ καὶ ἐν μέσῳ θεάτρῳ ἀναχηρύττεις, καὶ
ἀναγορεύεις τῷ διαδήματι, xaxetvor μὲν, ὁπηνίκα τὴν δίκην ὑπεῖχον
τοῦ ἀσεδήματος, ἀσεδεῖν οὐδὲν ἧττον τῶν ἄλλων ὡμολογήκχασι * σὺ δὲ
κήρυκας θεολογίας ποιεῖς καὶ προμάχους ἀληθείας καὶ μάρτυρας ! ᾿Αλλὰ
τί μοι πρὸς τοῦτον ὁ λόγος; Ἐγὼ δὲ ἡδέως ἄν καὶ πάλιν πυθοίμην
ὑμῶν, εἴ γε εὐσεδῆ ταῦτα͵ χαὶ πρὸς μηδεμίαν τῶν ἡ μετέρων φωνῶν.
᾿Αλλ᾽ οὐδεὶς ἄν εἴποι “ εἰ μὴ μελαγχολᾶν ἄντιχρυς ἢ σχιαμαγεῖν βού-
λοιτο. Εἰ τοίνυν τις ὑμῶν γνοίη τῶν ἄλλων τινὰ Νεστορίῳ ἐχείνῳ ξυν-
τιθέντα ἐγχώμιον ἢ ᾿Απολιναρίῳ προσθέμενον, ἄρ᾽ οὐχ ἄν εἰκότως ἀγα-
ναχτήσειε, καὶ ἀσέδειαν ἐγχαλήσας τῷ γράψαντι ἢ προσχειμένῳ ἄλλως,
πόῤῥω τῆς ἐχκλησίας ἐλάσειεν ; Οὐχοῦν ἄτοπον εἰ κατὰ μὲν τῶν τοιού--
των εὐλόγως ἄν ὀργιεῖσθε, κατὰ δὲ τῶν νέα καινοτομησάντων δόγματα
καὶ τῶν ταῦτα παραδεξαμένων ἐλάττονα τὴν ὀργὴν ἕξετε;
XX. Εἰ δὲ τοῖς τούτου συγγράμμασι καί τινα εὐσεδείας ἀναμέμιχται
ῥήματα καὶ θεολογικαὶ ὑποτυπώσεις, θαυμάζειν οὐ χρή * πᾶσαι γὰρ
ai διεφθαρμέναι δόξαι αἷς ἐπαρώμεθα νῦν, ἀπὸ μέρους τῶν χαθολικῶν
Fe 137 το,
404 LOUIS BRÉHIER
δογμάτων ἀσεδεῖν εἵλοντο * καὶ ὡς εἰδότων ὑμῶν où πλέον τι προσεξ-
ἐργάζομαι, εἰ μὴ ὅσον εἰκός. Αὐτίκα γοῦν Ὠριγένης ἐκεῖνος, ὁ œuvax-
μάσας Πορφυρίῳ τῷ φιλοσόφῳ, καὶ τῇ καθ᾽ ἡμᾶς θεολογίᾳ προδέθδηχε,
χαὶ τὴν οἰκονομίαν ἐδέξατο, ἀλλὰ ταῖς αἱρέσεσι πάσαις τὰς ἀργὰς
ἐχεῖνος ἐνδέδωχε * κατὰ δὲ Κέλσου πολύστιχον ποιησάμενος σύγγραμμα,
σεμνύνει μὲν τὰ ἡμέτερα, ἐνιαχοῦ δὲ τῶν μερῶν καὶ θεολογεῖ xaûa-
ρῶς. Καὶ ᾿Απολινάριος δὲ Πορφυρίου χαταδραμὼν, ἐστὶν ὅπου ταὐτὰ
τοῖς ἀχριδῶς θεολογήσασι φθέγγεται * καὶ Εὐνόμιος, τὸ σύγγραμμα τῆς
ἀσεόείας ὑφαίνων, ἐχ τῆς ἀνωτάτω xat πρώτης οὐσίας τὴν ἀρχὴν τοῦ
λόγου πεποίηται * Νεστόριος δὲ χαὶ λανθάνει πολλοὺς ὅτι ἀχριδῶς ἀσε-
Get, ταῖς ὁμωνυμίαις τοὺς ἁπλουστέοους παραχρουόμενος. Οὐ τοίνυν εἰ
Πατὴρ καὶ Υἱὸς καὶ Πνεῦμα, κένωσίς τε καὶ σάρχωσις, xal τἄλλα τοῖς
τῶν νέων δογματιστῶν ἐμφαίνεται γράμμασιν, ἀποδέχεσθαι χρή, ἀλλ'
εἰ περὶ ἕν τι διημαρτήχασι, τὸ πᾶν ἀπολώλασι. Κἄν βραχύ τι ἁμαρτα-
γόμενον ἧ, καινοτομία τὸ διαφέρον καθέστηχε δόγμα. Οὐ γὰρ πάντες,
πρὸς οὗς διαφερόμεθα, τὰς συγχύσεις ἢ τὰς διαιρέσεις ἐπρέσδευσαν. Ti
γὰρ χοινὸν ὕλῃ καὶ ἰδέαις πρὸς τὰ ἡμέτερα δόγματα ; ᾿Αλλ᾽ ἐπειδὴ
ταύτας [ μὲν Πλάτων εἰσήνεγχε, τὴν δὲ ὕλην ᾿Αριστοτέλης ἄναρχον
ἀπεφήνατο, τῆς ἐχχλησίας εἰκότως ἀλλοτριοῦμεν. Καὶ τὴν μὲν Στοὰν
διασείομεν ὅτι μηδὲν ἀσώματον παρεδέξατο * καὶ τὴν ᾿Εμπεδοκλέους
ἀνάγχην, χαὶ τὴν ἩΗραχλείτου εἰμαρμένην, καὶ τὸ ἄτομον (1) ᾽'Ἔπι-
χούρου, καὶ Πυθαγόρου τὴν μετεμψύχωσιν καὶ τὴν ἄλλην ἑλληνικὴν
περθρείαν ἀποδαλλόμεθα ᾿ καὶ οὐχέτι πολυπραγμονοῦμεν εἰ ἔννους ὁ
χόσμος, καὶ ὁ οὐρανὸς ἔμψυχος * ἀλλὰ χἄν ἀποδειχνύειν δοχῶσι,
χἄν αὐτὰ τὰ πραγμάτα φέροντες δειχνύωσι, τοὺς ὀφθαλμοὺς ἐπιμύομεν.
Εἰ τοίνυν αἱρέσεις τὰ τοιαῦτα ὀνομάζομεν δόγματα καὶ αἱοεσιάρχας
τοὺς τούτων εἰσηγητάς, τοὺς τὸ ἀξίωμα τοῦ Πνεύματος ἀθετήσαντας,
οὐδὲν ἧττον ἢ Μακχεδόνιος, τίνος ἄν ἀξιώσαιμεν τῆς προσηγοοίας: ἢ
τὸν τούτοις χεχοινωνηχότα δεσπότην ποίας θήσομεν τάξεως, ἢ ποΐαις
τοῦτον εὐφημίαις ἀναδησόμεθα ; οὐ δῆλον αἷς οἱ μυσταγωγοὶ τούτων
χεχόσμηνται;
XXI. ᾿Αλλ᾽ 6 με μικροῦ διέλαθε, τοῦτο προσθήσω τοῖς εἰρημένοις,
ὁμολογουμένην ἀρχὴν εἰληφὼς ὅτι πᾶς δαίμων καὶ σκότος ἐστὶν, καὶ φῶς
(1) Combeñs ; τὸ αὐτόματον.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 405
ὑποχρίνεται, καὶ εἰς ἑαυτὸν περιπέσσων (1) τὸ τοῦ σεθάσματος χοάτος
οὐ παῤῥησιάζεται τὴν βλασφημίαν, ἀλλ᾽ οἷα δὴ τε νίτης καὶ σοφιστὴς
ἄντιχρυς μεθοδεύει τὴν ἐπιχείρησιν καὶ ἐπικαλύπτει τὴν χκακεντρέ-
χειαν, ἵν᾽ ἔχοι τὴν πρώτην τῶν ἀπατωμένων, εἶτα δὴ, ὡς εὐχαθαίρετον
τειχίον πολιορκήσῃ καὶ παραστήσηται, Θεοῦ γοῦν τὰ πρῶτα ὁμολογεὶ,
καὶ ἄναρχον ἀρχὴν τίθεται, τὰς οἰκείας καὶ συνήθεις τοῖς προσαγωγοῖς
φωνὰς ἀφιεὶς, ἵν᾿ ὡς γνησίῳ τῷ ἀλλοτρίῳ προσδράμωσι, καὶ τῆς ἐχεί-
vou διδασκαλίας ἑαυτοὺς ἀναρτήσωσι * τῇ δὲ μητρὶ τοῦ Λόγου χαὶ μάλα
μαχόμενος, καὶ τῷ σταυρῷ πολεμῶν δι᾽ οὗ καταλέλυται, ἐχείνην τε
σεμνύνει τῷ λόγῳ καὶ τούτῳ ἑαυτὸν καταγράφει, Οἶδα γὰρ ὡς οὐχ ἄν
ἄλλως παραδεχθείη τῶν ἀπατωμένων ταῖς ἀχοαὶς, εἰ μὴ τοιαῦτα πρῶτον
σοφίσηται. Εἰ μὲν οὖν ἔχοι τις τὸ τῆς διαχρίσεως χάρισμα, καὶ γεγύμ-
νασται τὰ τῆς ψυχῆς αἰσθητήρια πρὸς τὴν χατανόησιν τοῦ χείρονος καὶ
βελτίονος, ἔγνωχέ τε τοῦτον εὐθὺς χαραχτηρίσας χαὶ τοῖς εἴδεσι καὶ
τοῖς σχήμασιν * εἰ ἐμμένοι τούτοις, εἰ παραλλάττοι, εἰ τίθησιν ἱλαρὰν
τὴν τοῦ προσομιλοῦντος ψυχήν, καὶ ᾿ἀπελέγξας αὐτῷ τὴν ὑπόχρισιν
πόῤῥω τε γίνεται καὶ τὴν ἀπάτην ἀποδιδράσκει ᾿ εἰ δ᾽ οὖν τὸ τοῦ δόλου
χκαταπιὼν ἄγχιστρον ἑάλωχεν ἔσωθεν, καὶ ἀπὸ τῆς ψυχῆς ἤρτηται ἀσπα-
λιέως ἀγχυροθολίοις ἐχκρεμασθεὶς, τοῦτο γοῦν οἱ Χιῶται καὶ ἡ Δοσι-
θέα καὶ ὁ μέγας δεσπότης καταπεπώχασι καὶ ἀπηωρη μένοι χάτωβεν
ἡγνοήχασιν. ᾿Ἡπατήχασι γὰρ αὐτοὺς οἱ μάρτυρες παραγόμενοι, καὶ τὰ
χλαυθμυρίζοντα γήπια, καὶ ὁ εὐαγγελιστὴς Ἰωάννης χειραγωγῶν τὴν
μητέρα, καὶ τοιοῦτον μὲν τῆς ἀπάτης τὸ δέλεαρ, τὸ δὲ χῦρτος, τὸ δὲ
ἕρκος, ἢ πολύθλιόος μήτηρ, καὶ n ἁγία Τριάς, ἡ πᾶσαν φυσὶν Ônutoup-
γήσασα τόπῳ περιγραφομένη, καὶ τοῖς θεαταῖς ἐγγύς που προσδαίνουσα,
χαὶ n τοῦ Λόγου μήτηρ, τὰ μὲν τὸν υἱὸν λιτανεύουσα, τὰ δὲ ἐπαγγελ-
λομένν,, τὰ δὲ τῷ μύστῃ διδοῦσα καὶ πατριάρχῃ. ᾿Αλλ᾽ οὐ τοιαῦτα, ὦ
βέλτιστε σύ, τὰ τῆς θεοφανείας μυστήρια, οὐδὲ οὕτως ἀνθρωπιχά τε
καὶ φλύαρα, μᾶλλον δὲ χοινά τε καὶ χαμερπῆ * οὐδὲ τοιαύτας ἡ Παρ-
θένος καὶ Μήτηρ ἀφίησι τὰς φωνάς - ἑταιρίδων γὰρ μᾶλλον ἢ παρθένου
τὰ τοιαῦτα ῥήματα ταῖς ἐν γειτόνων προσφθεγγομένων « εὖ ὑμῖν τὸ
περίορθρον - ἀῤδάσκαντά σοι * διημερεύσοις χαλῶς " ἐμφύσησον δὶς τῷ
κυπέλλῳ * ἀγαθόν μοι ὅτι τὴν σεληγὴν ἰδοῦσα μηνοειδῆ εὐθύς σε τεθέα-
(4) πεοιπέσων (sic) cod. Correximnus.
Fo 437 ve,
406 * LOUIS BRÉHIER
pas. » Τοιούτων ἀποζεῖ λήρων τὸ τῆς Δοσιθέας μυστήριον, χαὶ μή γέ
τις ἐπιγελῴη μόνον τοῖς ῥήμασιν ὡς γραώδεσι " ταῦτα γὰρ ὑποτρέ-
χὼν ὁ πονηρὸς κατὰ τῶν ὑποδεξαμένων ψυχῶν τὰ τῆς πλάνης ἵστησι
τρόπαια.᾽
XXII. Βούλει τὴν καθαρὰν γνῶναι καὶ ἀκχίόδηλον Beopévetav;
“Axoucov τοῦ ᾿Ησαΐου φωνοῦντος περὶ τοῦ θρόνου τοῦ ὑψηλοῦ τε χαὶ
ἐπηρμένου, καὶ τοῦ ἐν αὐτῷ καθημένου (4) " γνῶθι τὰς χερουθιχὰς χαὶ
σεραφιχὰς πτέρυγας, τὴν τοῦ ἀοιθμοῦ τελειότητα, τὴν συμθολιχὴν
τοῦ προσώπου συγχάλυψιν, τὴν ἐντεῦθεν περιστολὴν τῶν ποδῶν, τὴν
μέσην καὶ ἐλευθέραν πτῆσιν. Κλῦθι τῶν θείων φωνῶν " τρὶς γὰρ εἰρη-
χότα τὴν τοῦ ἁγίου φωνὴν, εἰς μίαν τὰ διῃρημένα συνηρμόχασι
χυριότητα, ἵν᾿ ἐχεῖσε μὲν τὰς ὑποστάσεις δηλώσωσιν, ἐνταῦθα δὲ τὴν
θεότητα. Βούλει καὶ ἑτέραν ὀπτασίαν ἰδεῖν; ἰδέ μοι τὸν Παῦλον
αἰρόμενον καὶ ἄχρι τρίτου ὑψούμενον οὐρανοῦ, εἶτ᾽ ἐχεῖθεν εἰς τὸν
παράδεισον μεταγόμενον, χαὶ θείων μὲν ῥημάτων ἀχούσαντα χαὶ
θεαμάτων παραδόξων καταπολαύσαντα, ἄῤῥητα δὲ πάντα φυλάξαντα
καὶ ἀνέχφορα. ᾿Αλλ᾽ οὗτος μὲν ἴσως βάσκανος ἦν καὶ ἐφθόνησέ σοι
τῶν οὐρανίων φωνῶν * ἡ δὲ Δοσιθέα, ἀφειδὴς καὶ φιλότιμος. Διὰ ταῦτά
σοι χαὶ τοὺς μάρτυρας ἐχχαλύπτει, ἠχρωτηριασμένους ἢ ἴσως ἰδοῦσα
καὶ στιγματίας, καὶ τοὺς ὁσίους παραδειχνύει σοι ἐχτετουχω μένους
τοῖς ῥάχεσι, καὶ τὸν Πρόδοομον ὑπεμφαίνει σοι λάσιον ταῖς θριξὶ χαὶ
ἐχχεχαυμένον τὸ χρῶμα, Οὐκ οἶδα πότερον σοι ἀναισθησίαν, ἢ ἀσέδειαν
ἐγκαλέσαιμι! Εἰ δὲ πᾶσαν ὅρασιν ἀδιαφόρως δέχῃ, τί μὴ καὶ τοῦ
Τρισμεγίστου Ἑρμοῦ, ἣν ὁ Ποιμάνδρου (2) δαίμων δὲ οὗτος τούτῳ
παρέδειξε; καχεῖνα γὰρ φοδερὰ χαὶ παράδοξα τὰ ὁράματα, ἀχλὺς καὶ
ζόφος βαθύς, καὶ φῶς ἐχφαινόμενον, καὶ Πατὴρ καὶ Υἱὸς δεικνύμενοι
χαὶ θεολογούμενοι. Τί μὴ καὶ τὸν ᾿Εμπεδοτίμου μετεωριτμὸν, ὃν ἕτερος
δαίμων τούτῳ πεφιλοτίμηται δι᾿ οὗ τὴν τῶν ψυγῶν μυεῖται ἀθανασίαν;
Δέδοικα μὴ καὶ τὴν σὴν Δοσιθέαν ᾿Ερωτύχην ἢ Κασόθαν ἢ "Ἕπταχις ἢ
εἴ τις ἄλλος δαίμων ἀπατηλὸς παραχρουσάμενος ἢ δελεάσας ἐπὶ τὰς
(1) Esaïe, ch. vi.
(2) Ποιμάνδρτς (Pasteur d'homme). Nom sous lequel on avait placé l'un des
livres hermétiques (Ménard, Hermès Trismégiste. Étude sur l'origine des livres her-
métiques, p. xLv et suiv.). Psellos était au courant de ces écrits et avait composé
un traité Εἷς τοῦ Ἕρμοῦ τοῦ Τρισμεγίστου Ποιμάνδρην. (Migne, P. G,, ΟΥΧΗ,
p. 1153-56.)
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 407
, ἀτόπους ταύτας ὁράσεις μετήγαγεν ᾿ ὃς δὴ καὶ τῇ σῇ βασκαίνων ψυχῇ;
ἵνα μὴ λέγω ἐμπαράσχευον αὐτὴν εὑρηχὼς, τὰς τῆς ἀσεύδείας παρα-
φυάδας ἀναδενδράδας ἐν ταύτῃ πεποίηχε, πρῶτόν γε ταύτας τοῖς σοῖς
διδασχάλοις νοθεύσας τε χαὶ παρραῤῥιζώσας, χαὶ συνεγχεντρίσας αὐτοῖς
ὡς τοῦ λόγου ὃ δογματισταῖς.
ΧΧΠΙ, ᾿Αλλ᾽ ἀπωμόσαντο, φησὶν, τὰς δόξας αἷς συνεφθάρησαν. —
Πηνίχα, ὦ βέλτιστε, καὶ πῶς τοῦτο πεποιημένοι; ΓΑρά γε πρὸ τῶν
εὐθυνῶν; πρὸ τῆς εἰσαγωγῆς; πρὸ τῆς πανδήμου καὶ χοινῆς ἐξετάσεως;
ἐπὶ τῆς τῶν λόγων χρίσεως τὸ ὑλικὸν πνεῦμα φωράσαντες καὶ τὸ εἶδος
,διαπτύσαντες τῆς ἐμπνεύσεως ; Εἰ μὲν γὰρ τὰ ἐχείνων παραθαλόντες
τοῖς ἡμετέροις γνώμοσι, τὴν βδελυρὰν τελετὴν τῷ μυστηρίῳ τοῦ λόγου,
τὴν βάκχην τοῖς αὐτόπταις τῶν ἀῤῥήτων καὶ κήρυξι, τὴγ ἐκείνης ἀσχή-
μονα χίνησιν τοῖς σώφροσιν ἡμῶν σχήμασι καὶ κινήμασι, τὴν τοῦ δαί-
μονος εἰσφθορὰν τῇ καθόδῳ τοῦ ἡγεμονικοῦ πνεύματος, τοὺς λόγους τοῖς
λόγοις, τοῖς καθεστηχόσι τοὺς μεμηγνότας, --- εἰ οὕτω ταῦτα πρὸς ἄλληλα
τ᾽ ἐπιστη μογικῆς παρα μετρήσαντες χρίσεως, ἔπειτα τὸ παράλλακτον,
πρὸς τοὺς γενομισμένους κανόνας ἐφευρηχότες, τῶν πραττομένων ὡς
ἀτόπων καταψηφίσαντο, καὶ τοῖς τῶν δογμάτων μυσταγωγοῖς δημο-
σιεύσαντες, τὴν ὑπόνοιαν τὴν πρὸς τὸν λόγον διχόνοιαν ἡτιμάχασι, τότ᾽
ἄν ἐδεξάμην αὐτῶν τὴν τῶν ἐγνωσμένων ἀποψήφισιν, καὶ μετὰ τῶν
κατηχουμένων ἠρίθμησα, ἔπειτα δὲ καὶ τῇ τελειότητι τῶν μυστηρίων
προσήνεγχα. Εἰ δὲ ἐπ᾽ αὐτοῖς τοῖς δεινοῖς τῶν λογιστῶν ἐφεστηχότων,
τῶν δικαστῶν πιχρῶς τὰς ὑπολήψεις ἐξεταζόντων, τοῦ γραμματέως τὰς
ἐγγράφους δόξας χηούττοντος, τῶν τὰς φωνὰς ἀποσημαινομένων τῆς
θέμιδος πικρῶς καταψηφιζομένων τῆς θεσμοθέτιδος, μονονοὺ τῶν χολα-
. στῶν τὰ ξίφη θηγόντων, καὶ παντὸς εἴδους ὑποση μαινομένου κινδύνων,
περὶ ὧν ἐδόξαζον ἡμφισδήτησαν, — πότερον ἀχοιδῆ κρίσιν τὸ πράγμα
ἡγήσομαι ἢ, ὅπερ ἐστίν, ὑπονενοημένην ὑπόχρισιν, καὶ γνώμης ἀχρίόειαν
ἢ ἀνάγκης ἐπίδειξιν; Οἱ γὰρ θεοφόροις ἀνδράσι διαπιστήσαντες ἐν περιό-
ὃοις ἡλίου πολλαῖς καὶ ἐπὶ τοῦ πατριαρχικοῦ θεμελίου τὰ ἑαυτῶν ἐμπε-
δώσαντες, οὕτως ἐν βραχεῖ πρὸς ὀλίγους τοὺς συνεξηταχότας τὰς οἰχοδο--
μὰς τῶν δογμάτων διέσεισαν " εἰ μὲν γὰρ ἀμύητοι τῶν καθ᾽ ἡμᾶς λόγων
ἐτύγχανον ὄντες, καὶ παντάπασιν ἀχατήχητοι τῶν μυστηρίων τοῦ πνεύ-
ματος, τάχ᾽ ἄν τῷ φωτὶ προσελθόντες, τῆς ἀχλύος τὸν ζόφον ἐγνώχα-
σιν ᾿ ἐπεὶ δὲ μετὰ τῶν τοῦ λόγου ὕρεμμάτων συναριθμούμενοι, εἰς
Fo 138 ro.
408 LOUIS BRÉHIER
θηρίων μορφὰς ἑαυτοὺς μετεποίησαν (4), καὶ πᾶν εἶδος ἐπαγγελλόμενοι
γνώσεως καὶ διαφορὰν πνευμάτων εἰδέναι οἰόμενοι, τοῖς χείροσιν ἕαυ-
τοὺς εἰσεποίησαν, πῶς ἄν εὐθὺς εἰς τὴν xpeltrova μερίδα μετέθεντο,
ὁπότε καὶ τηνικαῦτα ἐξεταζομένου τοῦ δόγματος συνηγόρους τοὺς ἢμε-
τέρους ταῖς διεφθαρμέναις αὐτῶν δόξαις ἐπήγοντο ; Ἢν δὲ βούλει γνῶναι
ὅτι μηδέν τι τῶν δεδογμένων ἀπηλείφασι τῆς ψυχῆς, ἐπελθέ μοι πολ-
λάχις τὸ μέγα τοῦ δεσπότου περ' τούτων ὑπόμνημα, ἵν᾿ ὁμοῦ καὶ ἐνχω-
κίων γνοίης ὑπερδολὰς καὶ ἀγώνων ἀναῤῥήσεις μαρτυρικῶν “ στεφανοῖ
γὰρ αὐτοὺς ἐκεῖσε πολλάκις ὥσπερ διηγωνισμένους τὸν πένταθλον, καὶ
ἀναμιμνήσχει τῶν παλαισμάτων καὶ τῶν κατὰ νόμους ἀθλήσεων. ᾿Αμφο-
τέρωθεν οὖν ἡ τῆς δόξας ἄρνησις ὕποπτος, καὶ ὁ δεσπότης καὶ τοῦ
δόγματος καὶ τοῦ χηρύγματος μέτοχος, τότε μὲν ἀλείφων πρὸς τοὺς ἀγῶ-
γας τοὺς ἀθλητάς, νῦν δὲ βραδεύων τὰ γέρα καὶ τὴν κεφαλὴν ταινιῶν
καὶ ἀποσεμνύνων αὐτοῖς τὴν μάντιδα καὶ τὸ καινὸν πνεῦμα τιμῶν,
ὑπὲρ ὧν oÙ μὲν ἠθλήχασιν, ὃ δὲ ἐστεφάνωσεν.
XXIV. Οὕτω ποτὲ καὶ ὁ τῆς μανίας ἐπώνυμος Αρειος, τὴν οἰχείαν
δόξαν ἐν ὑποχρίσει ἀπομοσάμενος καὶ τῇ ἐχχλησίᾳ παρεισφθαρείς,
τῇ καθαρᾷ τοῦ Κυρίου αὔλακι καὶ τὸν σῖτον χαρποφορούσῃ τῆς
πίστεως σπορεὺς τῶν ζιζανίων ἐγένετο. Καὶ εἰ μὴ θᾶττον τῆς φθορᾶς
ἀπολελαύχει τοῦ καινοῦ δόγματος, ῥῆξιν ἀθρόαν ὑποστὰς καὶ ὁιαί-
θεσιν, ἐφ᾽ οἷς ἀνεῤῥήγνυ τὴν μίαν τῶν τριῶν φύσιν, καὶ διέρει
καχῶς τὴν |] θεότητα, διέφθειρεν ἄν με (2) πάντη καὶ ἐλυμήνατο. ᾿Αλλ᾽
ἐκεῖνον μὲν ὁ ᾿Αλεξανδρείας ᾿Αλέξανδρος (3) ὑπώπτευέ τε καὶ θαμὰ
τῆς ἐχχλήσιας ἀπήλαυνεν " καὶ τελευτῶν, ἐπεὶ μὴ ἀντισχεῖν πρὸς τὴν
ἐκείνου βίαν οἷός τε ἦν, ἱκετηρίαν θέμενος πρὸς Θεὸν, διασεέει τε
αὐτῷ ἀθρόως τὰ σπλάγχνα καὶ τῶν ἔνδον χκενοῖ. Τοὺς δὲ νῦν θῆρας
αὐτὸς ὁ μέγας ποιμὴν καὶ ἡ μέτερος ἀσμένως εἰσδέχεται καὶ τοῖς θρέῳ-
μᾶσιν ἐπαφίησι, μᾶλλον δὲ σὺν αὐτοῖς ἐπιχειρεῖ θοινᾶσθαι τὸ
ποίμνιον! Ἐγὼ δὲ θαυμάζω ὅτι πάλαι μὲν, οὔπω τῆς τοῦ Χριστοῦ
ἐκχλησίας ἐκκαθαρθείσης, εἴ πή τις ἀκανθώδης παραφυὰς ἐδλάστανεν,
εὐθὺς ἀπετέμνετο, καὶ ἀπηλαύνοντο οἱ τῶν ἱερῶν θρόνων πρόεδροι, οἱ
περιθόητοι καὶ τοῖς ὀνόμασι καὶ τοῖς πράγμασιν, εὐσεδῶν αὐτοχρατόρων
(1) μετεπεποίησαν cod. Corr. Combeñs.
(2) us corruptum. An ys? (T. KR.)
(3) Il faut probablement lire ᾿Αθανάσιος.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 409
χαὶ τότε τὰ σχῆπτρα εὐθυνόντων, Κωνσταντίνου τοῦ πάνυ, Θεοδοσίου,
τῶν ἄλλων, ἵνα μὴ καθ᾽ ἕκαστον λέγω, οὐχ ἐπὶ καινοῖς δόγμασιν, οὐδ᾽
ἐπ᾽ ἀσεδείαις τισὶν, ἀλλ᾽ εἰ παρὰ τὸν λόγον τινὰ τῶν ἐπὶ τῆς ἐχχλησίας
ἀφώρισαν, εἰ κακῶς εἶπον, ἢ πληγὰς βαρυτέρας ἐπήνεγχον, --- νῦν δὲ
τοῦ λόγου τῆς ἀληθείας διασπαρέντος ἁπανταχῆ, δυσανασχετοῦμεν εἴ
τις πατριάρχης ἀσεδήσας καθαιρεθήσεται.
XXV. Εἶτα δὲ καί τινες ὑπὲρ τούτου συνηγορήσοντες πάρεισιν,
ὑπὲρ ὧν αἰδοῦμαι * μᾶλλον δὲ δέδοικα μὴ. ἄλλων ἐξελεῖν ἀναιμωτὶ
τὸ βέλος προῃρημένοι, ἐκείνους τε μᾶλλον διασπαράξωσιν εἰσδεδυχυιῶν
τῶν ἀχίδων, καὶ ἀτέχνως ἐφελχυσάμενοι, ἐφ᾽ ἑαυτοὺς ἐμδαθύνωσι καὶ
οὐδαμῆ τοὺς ὑπερμαχήσοντας ἕξουσι, πάντων σωφρονισθέντων τῷ παρα-
δείγματι * οὐ γὰρ ὑμεῖς μὲν συμπεπόνθατε τῷ ἀρχιερεῖ xal περιπαθῶς
συνηλγήκχατε, ἡμεῖς δὲ οὕτως ἐσμὲν ἰταμοὶ καὶ θρασύσπλαγχνοι, ἀλλ᾽
οὐδὲν ἔλαττον τὸν ἄνδρα καὶ αὐτοὶ ἀσπαζόμεθα (1), πρὸ πάντων καὶ ὁ
μέγιστος ἡμῶν αὐτοχράτωρ, ὅς τε καὶ οἷα θείῳ πατρὶ προσεῖχε τούτῳ
τὸν νοῦν, καὶ πολλάχις αὐτῷ καὶ τὴν κεφαλὴν ὑπέχλινε, καὶ τὴν ψυγὴν
θεραπεύειν ἐδίδου, καὶ τῶν μεγάλων ἐκείνων, ὧν ἴστε πάντες, ἠξίου.
᾿Αλλὰ τῶν μὲν ἄλλων τοῦτον προίστη, τούτου δὲ μᾶλλον οἷδε τιμᾶν
τὸν Θεὸν + φούεῖται δὲ καὶ τὴν περὶ τούτου τοῦ λόγου ἐξέτασιν ἵνα μὴ
τῆς τῶν ἄλλων ἀσεδείας αὐτὸς εὐθύνας ὑφέξοι. Εἰ γὰρ ὁ δεχόμενος
ποοφήτην μισθὸν προφήτου λήψεται, ἐχ τοῦ ἐναντίου καὶ μείζονος
ὁ δεχόμενος ἀσεθῆ ποινὴν λήψεται ἀσεδοῦς, καὶ μάλιστα πατριάρχης
καὶ τὸ μέγιστον βασιλεύς. Ὃ μὲν γὰρ πᾶσι μεταδώσει τῆς λύμης
χαὶ ὅλον διαφθερεῖ τὸ ποίμνιον * οὗτος δὲ, ἀπείργειν δεχόμενος, τίνα
ἄν τὴν ἀπολογίαν πρὸς τὸν ἀδέχαστον πλάσαιτο δικαστὴν, τί δ᾽ ἄν
εἴποι προφασισάμενος ; εἰ μὲν οὖν τὰ ἐληλειγμένα, ἢ μᾶλλον ἐχτε-
θειμένα, μὴ κοινῇ δ'ωμολογημένα ἐτύγχανον ὄντα, ἀλλ᾽ εἶχέ τινα
ἀμφισδήτησιν, πᾶσαν ἄν ἡμῖν τὴν πολιτικὴν καὶ ἱερατικὴν νομοθεσίαν
συγχινήσας συνήγαγον * ἐπεὶ δὲ γυμνὰ τὰ πράγματα ἔχκχειται χαὶ ὁ
τῶν κατηγορη μάτων ἀχούσας εὐθύς τε ταῦτα τῷ χατηγορηθέντι ἐπιμαρ-
τύρεται, καὶ οὐχ ἔχει τισὶν ἄλλοις τὸ τούτων ἐξισώσειε μέγεθος, τάς
τε τιμωρίας οὐχ ἀγνοεῖ ἃς ἑκάστοις τούτων οἱ νομοθέται προσήρομοσαν,
διὰ ταῦτα καὶ αὐτὸς τὰ πλείω τῶν νόμων καὶ τῶν κανόνων παρείς,
(1) ἡσπκαζόμεθα coni. T. R.
__- 4 2
a α .... σδ κα... ὦ .᾿- -. -οο-ΟΟῬΟΚ.-.--.-----ος-ς------ς-
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Fe 138 vo.
410 LOUIS BRÉHIER
ὀλίγα ἅττα ἐξ ἀμφοτέρων ὑμῖν ἀπομνημονεύσας τῶν δέλτων, ἐκεῖνο
σαφὲς ὑμῖν παραστήσω, ὅτι τοσούτων νόμων ἀποτρεπόντων καὶ ὁντινα-
οὖν τοῖς τοιούτοις συναναφύρεσθαι δόγμασι χαὶ τοσούτων ἐφεστηκότων
χινδύγων τοῖς ἐπιδαίνουσιν, ἀμφοῖν ὁ δεσπότης καταπεφρόνηχε χατὰ
πολλὴν ὑπεροψίαν ἑκατέρων τῶν νόμων τοῖς ἐπιρρήτοις τελούμενος.
XXVI. Αὐτίκα τοίνυν ὁ πολιτικὸς νόμος πᾶσαν παῤῥησίας θύραν
ἐπιζυγοῖ τοῖς ὅσοι τὰς ἐναντίας ἡμῖν δόξας πρεσδεύουσιν * ἀλλ᾽ 5 +
δέσπότης καὶ ὑπεζευγμένας τὰς θύρας διέστησεν, καὶ ὥσπερ τι ἔρυμα
καρτερὸν ἀφελὼν, ὁδὸν τῷ πονηοῷ ῥεύματι δέδωχε. Καὶ ξύμπασα
μικροῦ δεῖν ἡ τῆς ἐχχλησίας χατεχλύσθη περιοχή, ἔξωθέν τε ἀχα-
τασχέτως ἐπιῤῥεόντων τῶν ποταμῶν, καὶ πατριαρχικῆς πηγῆς ἔσωθεν
τῶν διεφθαρμένων δοξῶν ἀναδλυζούσης τὰ νάματα. Ὃ τοίνυν νόμος
τῷ μὲν ἀρχιερεῖ περὶ τῶν οὕτως ὑπειλημμένων ταῦτα ἐπιχελεύεται"
ἡμῖν δὲ περὶ ἐχείνου προτρέπεται ἀπείργειν αὐτῷ τὰς εἰς τὰς θεία:
αὐλὰς ἐπιδη μίαν καὶ παῤῥησίαν. Ὃ δ᾽ αὐτὸς καὶ τὰ Πορφυρίου καξεσθαι
προστάττει συγγράμματα (1) * ἀλλ᾽ ὁ μέγας δεσπότης εἴ τί που τῶν
ἐκείνου ἡμίφλεχτον εἶδε, καὶ παρὰ τῇ αἰθάλῃ χρυπτόμενον, ἐπιμε-
λέστερον ἀναγινώσχει, καὶ ὅσα τὸ πῦρ ἐλυμήνατο, ταῦτα οὗτος ἐζω-
πύρησε χαὶ τὴν πᾶσαν ἐχείνου βίόλον ἐχαινοποίησε * καὶ ἐπανήγαγεν
αὖθις ἡμῖν τὰς βαχχείας, τὰς ἁγιστείας, τὰ ὄργια, τὰ μυστήρια, τὰς
κατοχὰς,͵ τὰς τελετὰς, τὴν πᾶσαν τῶν δαιμόνων διαπλοχήν, ὥστε πάλιν
δευτέρας ἡμῖν δεηθῆναι πυρκαϊᾶς, ἵν᾽ αὖθις ἀναλωθῇ τὰ τοῦ véou
Πορφυρίου πονήματα " καὶ τὰ μὲν κέκαυται, τὰ δ᾽ ἔτι λείπεται, ζώπυρα
τῶν ἐχείνου χαχῶν χαὶ τῆς τοῦ ἀρχιερέως ψυχῆς ὑπομνήματα.
Καὶ ὁ μὲν νόμος τοὺς τὰ Νεστορίου φρονεῖν βουλομένους, ἐπισχόπους
μὲν ὄντας, τῶν ἐχχλησιῶν ἐξωθεῖ * τοῖς δὲ τοῦ ἑτέρου λεὼ καὶ
ἐπαρᾶσθαι πᾶσι παραχελεύεται, Ὃ δὲ θεῖος οὗτος ποιμὴν τὴν δόξαν
σδεσθεῖσαν ἀνῆψε λαμπρῶς [| καὶ τὴν τοῦ Κυρίου μητέρα ἐν εὐθύναις
αὖθις πεποίηχεν * καὶ τοῦ πονηροῦ πνεύματος διὰ τῆς χατόχου τὴν
φωνὴν εἰσδεξάμενος, ὀδύνας αὐτῇ καὶ πόνους ἐπιμαρτύρεται. Καὶ αὖθι:
τοῖς μὲν τὰ Ἑλλήνων τολμῶσιν ἔγχλημα προστρίδει δημόσιον, χαὶ
τοῖς ἐλευθερίαν τούτοις διδοῦσιν ἔχπτωσιν τῆς ἀξίας ἐπανατείνεται. Ὁ
(4) On ne sait à quelle loi Psellos fait allusion ; peut-être la lecture des livres
de Porphyre a-t-elle été interdite par le synode qui condamna les moines de Chio
sous Théodora (V. Sathas, Bull. de corr. hellén., 18717, Ὁ. 320, ἢ. 1)?
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS ai
δὲ τῆς ἱερωσύνης φωστὴρ τὴν ἑλληνικὴν τερθρείαν διαλυθεῖσαν συλλέ-
γεῖν αὖθις ἐπικεχείρηχε, καὶ πρῶτος αὐτὸς τελεσθεὶς καὶ τοῖς ἄλλοις
τῳρανοίγνυσι τὰ αυστήρια. Κἄν γὰρ μὴ Πυθῶδε βεύάδιχκε, μηδ᾽ εἰς
Δωδώνην δεδράμηχε, μηδὲ προσέδαλεν τῷ ἠχείῳ τὴν ἀχοὴν, ἀλλ᾽
αὐτὸ τὸ μαντεῖον εἰς τὸν θεῖον νεὼν μετεχόμισε * τὴν ζάχορον αὐτὴν
καὶ δαδοῦχον ἐκ τῶν Δελφῶν ἀφελόμενος, ἐντὸς τῶν ἀδύτων πεποίηχεν *
αὐτὸν τὸν τρίποδα ἐπὶ τὴν ἐχχλησίαν μετήνεγχεν * αὐτὸ τὸ πνεῦμα, τὸ
τὴν ἐπίπνοιαν χορηγοῦν (4) ἐπὶ τὸν θεῖον νεὼν ἐφειλκύσατο ἀπὸ τοῦ ἐν
Δελφοῖς στομίου, ἀπὸ τῆς ἐκεῖθεν πλάνης, ἀπὸ τῶν τριόδων καὶ τῶν
βαράθρων - τὰς νυχτερινὰς φαντασίας ἡ μερινὰς αὐτοψίας πεποίηχεν *
ὑπερεῖδε πάντων νόμων, χανόνων, ἐθῶν - πάντων ὁμοίως χαταπεφρό-
γηχεν. Καίτοι ὥσπερ τοῖς ὠσὶν αὐτοῦ ἐφεστηχὼς ὁ νόμος ἐδόα͵ « μηδεὶς
τὰ βέδηλα διδασκέτω ἢ μανθανέτω », καὶ πάλιν ἑτέραν ἠφίει φωνήν *
« αἱρετικὸς δὲ πᾶς ὃς καὶ υιχρῷ ὑποδείγματι παρὰ τὸ τῆς καθολικῆς
ἐχχλησίας δόγμα ἢ τῆς εὐθείας ἐφάνη παρατραπείς, » ᾿Αλλ᾽ ὃ μὲν
ὑπερηχεῖ τούτῳ τὴν οἰκείαν φωνήν “ τῷ δὲ ἐξέδυστο τὰ ὦτα ὥσπερ
ὑπὸ χυψέλῃ παχείᾳ, καὶ οὐδεὶς τῶν λόγων εἰσέῤῥει παρὰ τὴν
μήνιγγα " ἀλλ᾽ αὐτοῦ που ἐθυραυλεῖ ἐνειλούμενος τῇ τοῦ αἰσθητηρίου
χοιλότητι, ὅθεν τὰ βέδηλα μανθάνων ἐδίδασχε. Καὶ ὁρῶν ἀπεθαύμαζε -
καὶ τὴν τῶν πνευμάτων ἐνέργειαν, μᾶλλον δὲ πλάνην καὶ τερατείαν,
θείαν ἡγεῖτο ὀμφήν * καὶ τὴν μαντικὴν πομπείαν, λατρείαν ἡγεῖτο
πνευματικὴν * καὶ τὴν βέδηλον τελετὴν ἔντιμον ἑορτῆς. Καὶ οὐ
βραχεῖ τῷ ὑποδείγματι δόγματος τινὸς τῇ ἐχχλησίᾳ ἀποπεπλάνητο,
ἀλλὰ τὸ τῆς εὐσεόείας ἅπαν σχῆμα μετήμειφεν * οὐ τῆς εὐχῆς τὸ
εἶδος ἀλλάξας, οὐδὲ τὴν περιδολὴν μεταθεὶς, ἀλλ᾽ ἑλληνικοῖς νομίμοις
προσθέμενος, καὶ ἀπὸ τῆς ἐχχλησίας ἐπὶ τὴν σχηνὴν μεταθέμενος. Καὶ
ὁ μὲν νόμος καὶ πᾶσι μὲν αἱρετικοῖς τόπον προσευχῆς ἀποχλείει, τοῖς
δέ γε μανιχαίοις καὶ μάλιστα, οὗς δὴ καὶ ἐξελᾷ πόλεως * ὃ δὲ τὴν
ἀρχὴν αὐτοῖς τῆς πλάνης ἀνανεοῖ τὸ γυναικεῖον τὸ Μοντανοῦ πνεῦμα
ἀναπλασάμενος, χαὶ ὥσπερ ὁ Πεισίστρατος τοῖς τυραννουμένοις τὸ
προσωπεῖον ἐπιφέρων τῆς ᾿Αθηνᾶς (2).
ΧΧΥΙ͂Ι. Καὶ τί δεῖ με πάντας μετατίθεναι τοὺς νόμους, ἐν τῷ μεμε-
τρημένῳ τούτῳ ξυγγράμματι, οὗς δὲ καὶ πολλοὺς καὶ πολλαχοῦ τῶν
(4) χορηγοῦ cod. Correximus.
(2) Herod., I, 60.
27
412 LOUIS BRÉHIER
βιδλίων οἱ νομοθετήσαντες ἔθεσαν; ᾿Εγὼ γοῦν ὑμῖν ἐχ χοινῆς διομο-
λογίας διεφθαρμένον αὐτὸν ἐν τοῖς χατὰ Χριστὸν λόγοις παρέστησα :
ὑμεῖς δὲ τὰς στήλας θεᾶσθε, ἵν᾿ εἴδητε οἷα δὴ ἐνσεσήμανται ταύταις
χατὰ τῶν οὕτως ὑπειλημμένων ἐς πόδας ἐκ χορυφῆς γράμματα.
Μήποτ᾽ οὖν ὁ μὲν πολιτικὸς νόμος πικοός ἐστιν καὶ αὐθέχαστος, ὁ δέ τε
ἱερατικὸς, οἷον ἐλαίου ῥεῦμα ῥέων ἀφοφητί ; ᾿Αλλ᾽ οὗτός γε καὶ μάλιστα
βαρύτερος ἐχείνου πολὺ, καὶ περὶ μὲν τὴν ἀχρίδειαν τῶν ἐθῶν λεπτότε-
pos, περὶ δὲ τὴν ἐπαγωγὴν τῆς τιμωρίας ἀποτομώτερος. Τῷ γοῦν
ἐπισχόπῳ μητέρα ἢ ἀδελφὴν μόλις που συγχωρεῖ, οὕτως ἐξαχριδοῖ
ταῦτα * ἀλλ᾽ ὁ ἡμέτερος καὶ μέγας ποιμὴν, ἧττον τοῦ κανόνος πεφρον-
τιχὼς, τῇ καινῇ Ἐριφύλῃ, καὶ νέᾳ Σαπφοῖ͵ ἢ Διοτιμᾷ, ἢ ᾿Ασπασίᾳ, ἢ
πυθαγοριχῇ Θεανοῖ ἀναίδην προσύει * μᾶλλον δ᾽ ἐχείνην ἐντὸς τῶν
ἑαυτοῦ ἀδύτων [ἐἸπεποίητο, βιαζόμενος ὥσπερ τὴν ἐγγαστρίμυθον ὁ
Σαοὺλ, οὐ τὸν Σαμουὴλ ἀνενεγκεῖν κάτωθεν (4) ---- ἧττον γὰρ ἄν τοῦτο
τὸ δεινόν —, ἀλλὰ πνεῦμα ὑλαῖον ἐχ τοῦ ἀφανοῦς ἐπιδείξασθα καὶ παρα-
γυμνῶσαί τι τούτων τῶν ἀποῤῥήτων, ἵν᾽ εἴη Παῦλός τις ἄλλος ἐπιχθό-
γιος, οὐ μετέωρος (2), ἔγγειος ἀλλ᾽ οὐχ ἐπουράνιος, τῶν ἀθεάτων
αὐτόπτης xal τῶν ἀῤῥήτων αὐτήχοος. Νάτην ἄρα τούτῳ χαὶ ὁ πολύα-
θλος ᾿Αθανάσιος ἐν μιᾷ τῶν συνοδικῶν αὐτοῦ ἐπάγει ἐπιστολῇ “ μετὰ
βουλῆς πάντων πράττειν κατὰ τὰ θεόπνευστα λόγια χαὶ μετὰ πάσης
ἀχριδείας τὴν ἐφ᾽ ἅπασι τοῖς πραχτέοις ποιεῖσθαι διάσχεψιν. Πολλοῦ
γὰρ ἐδέησε τούτῳ τῶν σοφωτέρων ἐνίοις συνδιασχέψασθαι περὶ τῆς
καινῆς ταύτης πομπείας τῶν μυστηρίων + ὅς γε πυθαγόρειον βίον ἐξη-
λωκὼς, ἑαυτῷ γνώμονι πρὸς τὴν μετάληψιν ἐχρήσατο τοῦ χαχοῦ, καὶ
σὺν τοῖς δυσὶ τελετάρχαις τῇ καινῇ ταύτῃ ἐδᾳδούχησε τελετῇ, τολμή-
σας ἀναίδην ἃ τῶν Ἑλλήνων τοῖς πλείοσιν ὑπὸ σχότῳ τεθρήσχευτο. Καὶ
τῶν μὲν πάλαι χρησμῶν οἱ πλείους διέλαθον, τὰ δὲ τῆς καινῆς μαντώ-
δους͵ ὥσπερ ἡ τῶν Αἰγυπτίων ἀστρολογία τὸ πρότερον, ἐν χαλκαῖς καβα-
περεὶ στήλαις ἐνεσημάνθησαν. Καὶ τὰ μὲν εὐσεδείας ἐχόμενα λόγια
χαὶ συγγράμματα, ἀμφισδητήσιμα δὲ πατράσι χαθεστηχότα, À τοῦ
Ἠλίου βίδλος ἀπόῤῥητος, ἡ Λεπτὴ γένεσις, ὁ Ποιμήν, ὁ τοῦ ᾿Αδὰμ
βίος, τοῦ καταλόγου τῶν διωμολογημένων ἀθετεῖται καὶ ἀποχρίνεται "
ὁ δὲ μέγας πατὴρ, εἴ τι φλύαρος καὶ ἀσελγὲς γυναιχὸς ὑλικῷ πνεύματι
(4) L'Rois, ΧΧΎΠΙ, 7-20.
(2) 11 Corinth., XII, 25.
UM DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 443
᾿
em
ἐλαυνόμενον ἁπλῶς οὕτως συνεῖρέ te καὶ ἀπήμεσεν, εἰχοστότριτον
τοῦτο σύγγραμμα οἴεται, ἢ μᾶλλον τῶν τότε πάντη ἡ μεδαπῶν καὶ τῶν
τοῦ νόμου καὶ τῆς σχιᾶς μέσον τίθησιν, ὥσπερ τινὰ λίθον ἀκρογωνιαῖον
τὰ δοχοῦντα διιστῆναι συνδέοντα. ἢ ᾿Εχεῖνος δὲ πῶς ἠγνόηχεν ὃ pe 139 re,
παρὰ τῶν ἐν Γάγγρᾳ συνελθομένων ἁγίων πατέρων νενομοθέτηται;
«Εἴ τις γὰρ, φησὶ, γυνὴ διὰ νομιζομένην ἄσχησιν μεταδάλλοιτο
« ἀμφίασμα, καὶ ἀνδρεῖον ἀναλάδοι, ἀνάθεμα ἔστω » (4). ᾿Εξαίρω
μέντοι τοῦ λόγου, εἴ τινες δύο ἢ τρεῖς τῶν ἁγίων (2) γυναικῶν τοῦτο
καὶ τετολμήχασι, καὶ ἀνάλωτοι τῇ ἀρᾷ μεμηνήχασι δι’ ὑπερδολὴν ἀρε-
τῆς καὶ ἀσχήσεως. δὲ περιώνυμός σοι προφῆτις Δοσιθέα οὐχ οὕτως
σοι πεπλησίαχε τὴν στολὴν μεταμείψασα, καὶ τῇ ἀναδολῇ καταπλή-
ξασα * χἀχείνη μὲν ἀγυρτεύουσα πάλαι καὶ μηδὲν τὸ νενομισμένον
εἰδυῖα τῇ μεγάλῃ ταύτῃ χατεδικάσθη ἀρᾷ * ὁ δὲ μέγας ἀρχιερεὺς ἔλατ-
τόν τι ταύτης ἀποίσεται, τόν τε νόμον εἰδὼς καὶ μὴ ἐλέγξας εὐθύς --- πολ-
λοῦ γε καὶ δεῖ — ἀλλὰ τιμήσας καὶ σεδασάμενος, ὥσπερ ὁ τοῦ Ναυῆ τὸ
πάλαι Ἰησοῦς τὸν τοῦ Κυρίου ἄγγελον, ἐπὶ στρατιωτικοῦ θεασάμενος
σχημάτος; Ὁ μὲν οὖν μέγας ἀπόστολος καὶ περιφανῶς δογματίζει
περὶ τοῦ τῆς κεφαλῆς ἀμφοῖν τοῖν γενοῖν σχήματος * καὶ τὸ μὲν χκατα-
λύψας εἰσάγει, τοῦ δὲ ἀφαιρεῖται τὸ κάλυμμα, δειχνὺς μέντοι καὶ ἄλλο
τῶν βαθυτέρων, ἀλλ᾽ οὐδὲ τὸ φαινόμενον τοῦ λόγου ἀπόδλητον ᾿ εἰ
γοῦν ὀλίγα φροντίζων τῶν τῆς Δοσιθέας χρησμῶν, τὰ πολλὰ ταῖς τοῦ
ἀποστόλου προσομιλεῖς ἐπιστολαῖς καὶ τῶν ἐξετασμένων περὶ τὴν τού-
των σύνεσιν ἢ θαμὰ ἐπύνθανες ἢ τὰς βίδλους ἐπανεγίνωσχες, οὐκ ἄν
πάσῃ οὐδὲ παντὶ προσωμιλήσεις, οὐδ᾽ ἄν τοιούτοις λόγοις ἔνοχος
χαθεστήχεις. ᾿Αλλὰ ταῦτα μὲν ἐν παραδύστῳ ἴσως που κείμενα καὶ ἐν
ὀλίγοις τοῖς ὑπομνήμασιν ἀγνοεῖν σκήψαιο ὁ ἀχοιδὴς τῶν κανόνων ἐξε-
ταστῆς * τοὺς δὲ περὶ τοῦ μὴ συνεῖναι αἱρετιχοῖς ἢ συγχοινωνεῖν παρὰ
πάντων πατέρων ἐχδεδομένους κανόνας, πῶς ἀγνοεῖν φήσεις; οὐ γὰρ οὗ
μέν, οἵ δὲ où, οὐδ᾽ ἅπαξ εἰπόντες ἀπεσιώπησαν, ἀλλ᾽ ἅπαξ ἅπαντες
χαὶ πάντων τῶν χανόνων, οὕς τί δεῖ κατὰ μέρος ἐπιφορεῖν καὶ τὰ ὦτα
ὑμῖν ἀποχναίειν, εἰδότων ἀχριθῶς, καὶ οὐ δεομένων τοῦ ὑπομνήσοντος;
Οὐ τοίνυν ἐξ ἀγνοίας τὰ πονηρὰ εἰσδέδεξαι δόγματα, ὥσπερ οὐδ᾽ εἴ τις
(1) Canon du Concile de Gangres (Canon 13 et Lettre synodale). Mansi, II,
p. 1097 et 1102.
(2) ἀκλῶν coni. Combeñs.
414 LOUIS BRÉHIER
ἀφεὶς ἐν μεσημόρίᾳ τὸν ἥλιον, τραπεξη πρὸς τὴν σχιὰν, ἀγνοεῖν εἴποι
τὸ φῶς. Ἐρεϊ γάρ τις αὐτῷ * « ὦ βέλτιστε, ἀλλ᾽ οὐχ ὑπὸ τῷ Παρνασῷ
ἢ τῷ Παγγαίῳ ὄρει ἐκέχρυπτο " ἀλλ᾽ ἤρχει βραχύ τι στραφῆναι xai
τῶν αὐτοῦ ἀπολαύσαι. »
XXVIIT. ‘Ab’ οὖν ἐπὶ τούτοις ἐγὼ μὲν εἰσῆλθον χατηγορήσων,
ὑμεῖς δὲ πρὸς τὸν λόγον ἀγωνιούμενοι, τίνα σοφίαν nyvooupévry
ἐσχηκότες ἡμῖν wat’ ἐκείνην ἀντεμδάλλειν τοῖς παρ᾽ ἡμῶν εἰρη-
μένοις καὶ λύσιν τοῖς ἀλύτοις ἐπινοήσασθαι: ᾿Εγὼ γοῦν πολλάχις Ex
ἐξουσίας εἰς ἀντιῤῥήσεις γυμνάζων τὸν ἐμὸν λογισμόν, πρὸς οὐδὲν
τῶν κατηγορουμένων οἷός τε γέγονα ἀντισχεῖν, πολλοὺς τῶν ἡττόνων
λόγων ἐχμελετήσας, καὶ τοῖς χρείττοσιν ἴσους πεποιηχώς. Οὐ γὰρ
μέσην xal ἀμφιῤῥεπὴ ὑπόθεσιν ὑμῖν προδεόλήχαμεν, ἵνα πρὸς τὴν τοῦ
γράφοντος δύναμιν μεταδάλλῃ αὕτη τὰς πλάστιγγας, ἀλλὰ κοινὴν x
ἀληθεστάτην, καὶ οἷα τὰ τῶν ἐπισήμων πέφυχεν ἀξιώματα. Καὶ τουτὶ
μὲν τὸ δικαστήριον καινότερόν μοι τῶν ἐκ τοῦ πάντος αἰῶνος δοχεῖ.
Ἔγώ τε γὰρ ὁ λέγων, ὑμεῖς τε οἱ ἀχούοντες, τάξιν κατηγόρων ἔχομεν,
γχαὶ τὸ ἀγτιπίπτον οὐδὲν, εἰ μή τις ἐριστικῶς ἐθέλοι φωνεῖν. ᾿Ενταῦθα
δὲ τοῦ λόγου γενόμενος, ἀριθμήσασθαι βούλομαι τὰ διηγορευμένα, ἵν᾽
ἔχοιτε ἀθρόα καὶ ὥσπερ εἰ χεφαλαιώδεις ἐπιτομάς,
XXIX. ᾿Απήλεγξα τοῖς Χιώταις τὴν ἀπὸ τοῦ θείου λόγου διάστα-
σιν, χοινὰς καὶ παρ᾽ ὑμῶν ἐννοίας λαθών " τὸ εἶδος τῆς διεφθαρμένης
αὐτῶν δόξης παρέστησα. Εἰς ἰδικὰς τοῦτο αἱρέσεις τῶν τε πάνυ γνωρί-
μὼν ἡμῖν καὶ τῶν ἀγνώστων τισὶ συγχρίνας ἀνήνεγχα ἑλληνικὴν
αὐτῶν τὴν ἀπάτην ἀπέδειξα, χαλδαίζουσαν, ἀτεχνῶς ἀπατηλὴν προσ-
χειμένην χαὶ πονηροῖς πνεύμασι, τοῖς Πορφυρίου λόγοις ἀχριδῶς éot-
χυῖαν, τῆς τοῦ Νεστορίου λύττης τὴν μανίαν ἀπειχονίζουσαν - ὑμῖν
ἀφῆκα συγχρίνειν αὐτὴν τοῖς τῶν Μασσαλιωτῶν (1) δόγμασι - τὴν
θήλειαν αὐτοῖς θεὸν ἢ ὑπηρέτιν θεοῦ ἐκ τῶν ἀδύτων ἐξήνεγχα ᾿ παρή-
γεγχα δὲ καὶ τὸν μέγαν ἡμῶν δεσπότην καὶ λαδαῖς πάσαις ἀνάλωτον,
ἑαλωχότα καὶ τῶν δογμάτων αὐτοῖς, καὶ τῶν νομίμων, καὶ τῶν ἐθῶν,
καὶ τῆς ἡμιθέου καὶ μάντιδος - καὶ τοὺς μὲν ἐν μέσοις καταχολπίσαντα
(1) Les Massaliotes ou Massaliens (terme syriaque synonyme d'Euchites, ceux
qui prient), hérétiques du 1ive siècle qui chassaient par des prières continuelles
le démon qu'ils croyaient cohabiter avec tout homme et arrivés à (ἀπάθεια,
croyaient voir la Trinité face à face.
UN DISCOURS INÉDIT DE PSELLOS 415
στήθεσι καὶ ἐγχολπίους πανταχοῦ φέροντα, τὴν δὲ ἔνδον τε τοῦ θείου
πεποιηχότα νεὼ μετὰ τὴν γνῶσιν τῆς ἀσεύείας, καὶ εἷς τὸ Σίναιον ὄρος
ἀναδιθάσαντα, καὶ τῆς νεφέλης ἔνδον εἰσαγαγόντα, καὶ μετειληφότα τῶν
μυστηρίων, καὶ τῶν ὀργίων αὐτῇ κοινωνήσαντα * ἐξέφρασα ὑμῖν τὸ
εἶδος τῆς μαντώδους, τὴν ἐχ τοῦ θήλεως εἰς τὸ ἀῤῥένωπον μεταποίησιν,
τὴν ἀναδολὴν, τὴν χουρὰν τῶν τριχῶν * ἐξεικόνισα ὑμῖν μονονοὺ xal
τὴν χατοχὴν, καὶ τὴν τοῦ πνεύματος αὐτοῦ μετοχήν, τὴν κίνησιν τῶν
μελῶν, τὴν ἔχστασιν τῶν φρενῶν, τὴν ὑπόχρισιν τῶν ἐθῶν, τὴν τῆς
διανοίας παράλλαξιν * εἶπον ὑμῖν καὶ τοῦ δεσπότου τὸ θάμθος, τὴν
μετὰ δέους παράστασιν, τὴν τῶν ποδῶν συστολήν, τὴν τῶν χειρῶν
συμπλοχήν, ὡς ἐξεθείασε τὰ ἐχείνης, ὡς ἐτελέσθη, ὡς ἐμυήθη,
ὡς μετέσχε τῶν νέων ᾿Ελευσινίων, ὡς ἅπαντα ἐγεγόνει τὰ τέως pe (20 vo,
θρυλλούμενα, Δελφιχὸς, Δωδωναῖος, ᾿Απολλωνιαχὸς, Διογυσιαχός.
Πρὸς τούτοις καὶ τὴν τῆς ἀπάτης ὑμῖν ἀνεχάλυψα δημοσίευσιν * τὸ
θεῖον χριτήοιον, τὴν ἐπαγωγὴν, τὸν τῆς ἀληθείας βάσανον, τὴν
τῆς εὐσεδείας εὕρεσιν, τὴν εὐθῆ (4) χρίσιν, τὴν συνεγνωσμένην
χατάχρισιν, τὴν ἀπαγωγὴν, τὴν δικαίαν ὑπερορίαν, τὴν ἐπὶ τοῖς
διδασκάλοις τοῦ μαθητοῦ καὶ δεσπότου φροντίδα καὶ συντριδὴν, τὴν
μετὰ ταῦτα ἐπίνοιαν, τὴν ἐμπερίθολον πρὸς τὸν μέγιστον ἡμῶν αὐτο-
χράτορα ἱχετηρίαν καὶ ἐχλιπάρησιν — ὡς ἐπολιόρχησεν, ὡς βέδληχε
χάραχα, ἵνα κατασείσῃ τὴν ἐχείνου ψυχήν, ὡς ἄλλο προθέμενος ἕτε-
ρον εἴληφεν. Ἐπὶ τούτοις ἐπήγαγον τὴν τῶν διδασκάλων ἀνάκλησιν,
τὴν εὐγνωμοσύνην τοῦ μαθητοῦ, τὴν ἀπολογίαν τῆς ὑπερθέσεως, τὴν
παρρησίαν τῆς ἀσεύείας, ὡς οὐχέτι ὑπὸ τὸν μόδιον ὁ πυρσὸς αὐτῷ τῆς
αἱοέσεως ἐκέχρυπτο.
XXX. ᾿Αλλὰ μετὰ τῆς γλώττης καὶ ἡ χεὶρ τὸ ἀσεδὲς ὑπεσήμαινεν "
εἶπον τὴν χαινὴν ὑπὲρ ἐχείνων γραφὴν ἅμα καὶ εὐφημίαν, ἣν χἄν τις
τῶν ἠλιθιωτέρων ἀπώχνησεν * ἀλλ᾽ ὁ συνετώτατος δεσπότης χαὶ περὶ τὰ
πραχτέα λεπτότατός τε καὶ ἀχριδέστατος πᾶσαν ὑπὲρ αὐτῶν ἐβθάῤῥησε
συγγραφήν. Ταῦτα δὲ κατὰ μέρος ὑμῖν διελόμενος, ἐφ᾽ ἑκάστῳ τοὺς τῶν
θεοφόρων πατέρων κανόνας προσήρμοσα ᾿ πέτραν δ φασι ποὸς στάθμῃ
τιθείς, ὅπερ ἐστὶν ἀπευθύνων τοὺς λόγους πρὸς τοὺς ἐκείνων ὡσανεὶ
γνώμονας " βίαιον δὲ ἢ τεχνικὸν νόημα, ἢ ῥητορείαν ἀγχύλην, ἢ ποι-
(1) Scilicet ab εὐθής, forma alexandrina,
416 LOUIS BRÉHIER
χίλην καὶ συνεστραμμένην κατασχευὴν οὔτε αὐτὸς οἶδα, οὔτε ᾿ἴσως
εἰδὼς τοῖς τοιούτοις ἐνταῦθα ἐχρησάμην ἐπιχειρήμασιν. ᾿Αλλ᾽ οὐδὲ
δεινὸν καὶ φορτικὸν τὸν λόγον πεποίηχα, ἢ τὰ νοήματα ouveoxlasa,
ἀλλὰ καὶ τὴν φράσιν διέλυσα χαὶ τὴν ἔννοιαν ὑμῖν (4) ἀπελάμπουνα, ἵνα
μηδεὶς ὑμῶν ἐχοίη λέγειν ὡς τοῦτο μὲν δεινῶς χκατεσχεύασται, ἐκεῖνο
δὲ ποικιλώτερον διηρμήνευται " οὐδὲ τὸν λόγον εἰς ὕψος ἐπῆρα, μετεω-
ρίσας οἷς οἶδε μετεωρίζεσθαι, ὥστε μηδένα τῇ δυνάμει τῆς τέχνης,
ἀλλὰ τῇ τῶν πραγμάτων ἰσχύει τὴν ἀπόδειξιν οἰηθῆναι προδήσεσβαι.
Καὶ τέθεικα οὐχ ὑπὸ τῷ νέφει τὸν ἥλιον, ἀλλὰ διαυγῆ χαὶ ἀνέφελον,
ἵν᾽ εἴ τις λέγοι μὴ βλέπειν τὸν δισχὸν, ἢ βλέπειν μὲν, μὴ καθαρὸν δὲ,
λογίζοιτο αὐτὸς εὐθὺς ἐγχεχυμένος τὰ ὄμματο. Σχοπεῖτε γοῦν τὰ
ἡμέτερα καὶ πρὸς ἔπος τῶν εἰρημένων τὴν ἀντιλογίαν, ὅπερ οὐχ οἶμαι,
ποιήσατε, ἵν᾿ εἴδω εἰ τοσοῦτον τῆς ἀληθείας καὶ ἀχριδείας φροντίσας,
ἢγνόησα τὴν ὑμετέραν ἀντίῤῥησιν. ᾿Αλλ᾽ ὑμεῖς μὲν ὅπερ ἄν ἐθέλοιτε
διασχέψασθε - ἐγὼ δὲ τὰ πολλὰ ταῦτα διαλέγομαι πρὸς ὑμᾶς, οὐχ
ἐπίδειξιν σοφίας ποιούμενος, οὐδ᾽ ἐμαυτὸν κχατασχευάζων κχαὶ
χαλλύνων χαβθαπερεὶ ἄγαλμα, ἀλλ᾽ ἀποδεικνὺς ἀποχρώντως ὅτι
προδήλως καὶ ἀναχεχαλυμμένως ὁ πατριάρχης Ὥσέδηχε " καὶ οὔτε
βουλομένοις τισὶν ὑμῶν, οὔτε περὶ ἐκείνου σπουδάζουσιν, ἔξεστιν ὑπε;-
ἀπολογεῖσθαι ἐχείνου καὶ πρὸς τοιούτων ἐλέγχων ἐπιμύειν μαρμαρυ-
γήν - βραχὺ δέ τι τῷ λόγῳ προσθεὶς, ἐπὶ τὸ δεύτερον τραποῦμαι, τὸ
περὶ τῆς τυραννίδος χεφάλαιον.
(1) ἡμῖν cod. Corr. Combefis.
(Α suivre).
LE PREMIER PROFESSEUR DE LANGUE GRECQUE
AU COLEÈGE DE FRANCE
JACQUES TOUSSAINT
(1829).
On sait que c’est en 1530 que François [* nomma les deux
premiers professeurs de grec au Collège de France, Pierre
Danès et Jacques Toussaint (1). Toussaint, venu jeune de Cham-
pagne à Paris, avait reçu les premières leçons de grec de
Guillaume Budé : « Ex eruditis Jacobum Tusanum eximie
dilexit, dit son biographe Louis Le Roy, suæ disciplinæ alum-
num... Hunc græce docere non est gravatus, propterea quod
ei linguæ propagandæ aptissimum esse cernébat » (2). Lié
d'une amitié étroite avec son maître, qui, dès 1520, l’entre-
tenait du projet d'établissement du Collège de France (3), il
était devenu, quelques années après, le familier d’un prélat
protecteur des lettres, l’évêque de Bayeux, Lodovico Canossa (4).
(1) Voir Goujet, Mémoire historique et littéraire sur le Collège royal de France
(1758), t. 1, p. 14 et 405-419; Lefranc, Hisfoire du Collège de France (1893),
p. 117, etc.
(2) G. Budaeï vita (1540), p. 40.
(3) Goujet, op. cit., p. 407-408.
(4) NE à Vérone, légat en France, auprès de Louis XII, des papes Jules II et
Léon X, évêque de Bayeux en 1516 : « Doctos viros impense fovit, disent les
auteurs de la Gallia chrisliana, sibique addicere curavit, qualis est Erasmus,
418 H. OMONT
Il était auprès de celui-ci, lorsque François I‘, à l’instigation
de Guillaume Budé, le choisit pour professer la langue grecque
au Collège de France et écrivit à son sujet, le 29 novem-
bre 1529, la lettre suivante à l’évêque de Bayeux (4).
H. Omonr.
Lettres du Roy à Mons’ de Baieux pour recouvrer de luy ung
homme qu’il a en son service, sçavant en langue grecque, pour
faire les leçons grecques publiques que ledict s' entend fere fere
en son. nom à Parts.
Monsieur de Bahyeulx, deux ans ou environ que ayant esté
adverty par M° Guillaume Budé, maistre de mes Requestes,
que M° Jacques Tusan estoit tout tel et de la sorte qu'il le me
failloit pour me servir au Colliege, que je veuil faire et entendz
fonder en ceste ville de Paris, je luy feiz dire par ledict Budé
que je le retenois pour ung des lecteurs et precepteurs de lan-
gue grecque, et pour ce que je veuil donner ordre au comman-
cement dudict Colliege, j'ay ordonné estat et sallaire tant
audict Tusan que aucuns aultres doctes et sçavans person-
naiges (2). Et comme, depuis quelque peu de temps en çà, vous
avez retiré en vostre maison ledict Tusan, pour vous servir de
luy en l'exercice de lettres, à ceste cause je vous prye, en pre-
ferant le bien publicq au particulier, comme je suis seur que
vous vouldrez bien faire, vous soiez contant me laisser ledict
cui annuum censum 200 ducatorum vix factus episcopus Bajocensis obtulit
idibus novembris 1516. » Il se démit de son évêché en 1531 et mourut peu après
à Vérone. Voir Gallia christiana, t. XI, col. 385-386; et Maffei, Verona illustrata,
p. 11, col. 165-166.
(4) La lettre de François Ier à Lodovico Canossa a été conservée en copie dans
un formulaire de lettres à l'usage d'un secrétaire du roi, du temps de Charles IX,
récemment acquis pour la Bibliothèque nationale; ms. français nouv. acq. 20256,
fol. 69 vo-70.
(2) Dans un extrait de comptes, du 27 mars 1530 (1531), publié par M. Lefranc,
op. cit., p. 394, on lit : « A Me Pierre Danès et Jacques Toussac, lecteurs en
grec, cc escuz d'or soleil, »
LE PREMIER PROFESSEUR DE LANGUE GRECQUE 419
Tusan pour mondict College, vous advisant bien que, pour
l'amour de vous, je le feray traitter de sorte qu'il aura occasion
de s’en contenter. Si vous prie le vouloir ainsi le faire, et vous
me ferez bien service en ce faisant. Et à Dieu, mons' de Bayeux,
qui vous ayt en sa garde. Escript à Paris, le xxix° jour de
novembre 1529.
. NOTES ET. ADDITIONS
M. Hiller von Gaertringen veut bien me communiquer une note
au sujet des inscriptions rhodiennes publiées p. 184 suiv. de la
Revue. D'une copie qu’il possède de ces textes, il résulte qu'à la
ligne If, 2 on doit lire Κλαύδιον Περι[γένην]. Ce même nom doit donc
être rétabli dans I, 6-7 : παιδὶ αὐτῶν ᾿Αντ[[ὠνίῳ Περι]γένει etc. Bien pro-
bablement le père s'appelle aussi Φλάδιος Ilepryévnc. J'ajoute que
je crois avoir mal interprété le texte n° II. La statue est érigée au
fils (Ant. Claudius Périgénès) pour consoler sa mère survivante,
[ἕνεκα παρα]μυθίας τᾶς εἰς [τὰν αὐτοῦ] ματέρα.
T.R.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
La Revue rend compte, à cette place, de tous les ouvrages relatifs aux
études helléniques ou à la Grèce moderne, dont uN exemplaire sera
adressé au bureau de la Rédaction, chez M. Leroux, éditeur, 28, rue
Bonaparte.
Si les auteurs ou éditeurs désirent faire hommage de leurs publica-
hons à lAssociation pour l'encouragement des Études grecques, ils
sont priés de les adresser directement à celle-ci (12, rue de PAbbaye);
mais, en ce cas, il n’en sera rendu compte dans cette bibliographie que
s'ils en envoient DEUx exemplaires, l’un devant rester à la Bibliothèque
de l'Association, et l'autre devant être remis à l'auteur du compte rendu.
39. COLARDEAU (Th). Étude sur
Épictète. Paris, Fontemoing, 1903,
in-8°, 354-x11 p.
La partie la plus importante et la
plus nouvelle de l'ouvrage de M. Colar-
deau est consacrée à l'étude d'Épictète
éducateur. On y voit que, comme
Socrate, Épictète voulait la philosophie
militante, ne se contentant pas de
spéculer sans fin marquée, mais cons-
ciente de son devoir de faire des
hommes. Et comment remplir cette
tâche ? Considérer comme vaine toute
connaissance ou soi-disant telle anté-
rieurement acquise, faire table rase
dans l'esprit de l'élève, et sur ce ter-
rain débarrassé de tout obstacle, édifier
la construction nouvelle, la seule so-
lide, car seule elle reposera sur la
base des vérités, qu'Épictète, comme
plus tard Descartes, considère comme
évidentes et permanentes en chacun
de nous; puis « n'avancer rien qu'on
n'ait soigneusement mesuré », définir
et relier aux précédentes toute notion .
nouvelle. De là l'importance de la
logique dans son enseignement, non
pas une logique purement formelle —
il l’abandonne aux sophistes — non
pas la logique de Gorgias mais celle
de Socrate; elle empêchera toute faute
de conduite, celle-ci pouvant le plus
souvent se ramener à une erreur de
jugement « on ne désire que ce qu'on a
jugé être un bien, et on ne fait que
ce qu'on a jugé convenable de faire »;
il faut donc savoir juger pour savoir
vivre et si Épictète encourage ses
disciples à l'étude de la logique, ce
n'est pas comme tant de faux philo-
sophes, dans une fin littéraire ou mon-
daine, mais dans une fin essentielle-
ment morale, essentiellement pratique;
la logique, pour lui, ne doit être qu'une
préface à l'éthique et celle-ci est toute
la philosophie : « La philosophie est
avant tout d'ordre moral, la morale
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
est avant tout d'ordre pratique ».
Voilà les deux idées autour desquelles
gravite son enseignement ; de là son
mépris pour tout ce qui est théorique
et dialectique ; il voudrait avoir formé
l'esprit de ses élèves de telle sorte,
que sans qu'aucune démonstration soit
nécessaire, la vérité apparût à leur
intelligence « comme à l'intelligence
divine, avec une évidence immédiate,
afin que la morale fut réduite à la
pratique ». Aussi est-ce à la pratique
qu'il demande la sanction de son ensei-
gnement ; il ne parlera pas mais agira;
c'est par l'exemple et non par le dis-
cours qu’il convaincra ; il se bornera
ἃ ces sentences qui se gravent si pro-
fondément dans l'esprit — telle la
fameuse trinité qui résume pour lui
toute la vie morale ἀπέχεσθαι, ἀνέχεσθαι,
συνεργεῖν — et ces sentences, ce n'est
pas en en discutent savamment la
portée qu'il en montrera l'excellence à
ses élèves, mais en y adaptant sa vie,
en leur demandant d'y adapter la leur.
Sitôt que, grâce à « l'exercice moral »,
cette hygiène excellente de l'esprit, il
lear aura appris à juger toute chose
d'aprés les quelques principes qu'il
leur aura communiqués à l'école (tout
ce qui ne dépend pas de la volonté
n'est pas un mal; on ne peut consi-
dérer comune mal que ce que le juge-
ment et la volonté bien employés
eussent pu éviter; tout le reste doit
être indifférent, etc.), il se gardera bien
de les retenir, inutiles, à ses côtés, mais
les lächera aussitôt dans le monde
« qui deviendra pour eux comme un
prolongement de l’école, une véritable
école d'application, où ce n'est plus le
maître, c’est la vie elle-même qui pose
les questions ». Quelle sera leur tenue
dans le monde? Comment le Stoiïcien
se comportera -t-il dans la Répu-
blique (1)? 1] ΒῪ mélera activement,
(1) Cette question est longuement examinée par
M. C. dans son chapitre la « Rentrée dans le
Monde » (p. 170-203) et dans des passages du
chapitre intitulé ; « l'Exercice Moral », il semble
421
ne dédaignant rien, mais fermement
résolu à tenir toujours la tête haute,
fixée invariablement sur ses prin-
cipes; rien ne le fera plier ni s’humi-
lier, et toujours, à la fausseté des biens
de ce monde, il préfèrera la dignité de
sa conscience et l'intégrité de ses prin-
cipes. Tout le monde, d'ailleurs, n’est
pas capable de se soumettre à la rigueur
d'une éducation qui fera un stoïcien
digne de ce nom; il faut renoncer à
tout désir, abdiquer toute passion,
dépouiller entièrement le vieil homme.
et revêtir un personnage tout nouveau
fait à l'image du maître, d'Épictète, de
Socrate, de Diogène. Épictète se rend
compte que tous ne peuvent pas venir
à son école; il ne tient pas à la quan-
tité mais à la qualité; il se contente
d'un petit nombre, mais ces quelques
disciples seront dignes de l'enseigne-
ment du maître ; Marc-Aurèle a prouvé
qu'il ne se trompait pas. On ne saurait
demander quelque chose de plus cons-
ciencieux et de plus détaillé que toute
cette étude sur Épictète éducateur, qui
n'avait été qu'esquissée par Martha et
Thamin (1). Il était utile d'avoir sur
ce point une étude circonstanciée qui
manquait; pourtant bien des passages
en eusssent pu être supprimés sans
grand dommage ou remplacés par
quelques vues synthétiques qui ne
laissent pas de se faire parfois désirer.
On en peut dire autant des 10 pages
de la 119 partie et des 130 pages de la
3° qui encadrent et complètent la
partie capitale. La première expose
sans grande originalité, d'après les
travaux de Schenkl, ce qu'on sait de
la vie d’Épictète et quel degré de fidé-
que ce dernier chapitre eût dû précéder immé-
diatement celui de la « Rentrée » et que celui
qui le précède, « L'Étude de la Logique », eût
dû être placé avant « l’Kxercice moral ».
(1) Nous ne laissons pas d'être étonné que
M. C. n'ait même pas cité les aperçus, si remar-
quables pourtant, que Guyau a donnés des
doctrines d'Épictète, dans les préfaces et com-
mentaires de son édition et de sa traduction
chez Delagrave.
4922 COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
‘lité on doit attribuer aux κα Entretiens »
et au « Manuel ». Ce dernier, composé,
‘par Arrien de pièces et de morceaux,
‘pour la vulgarisation de la doctrine, .
nous donne une image fort médiocre.
de l’enseignement d'Épictète ; au con-
traire, les « Entretiens » sont des
notes très peu travaillées prises par
Arrien au cours des lecons de son
maître; « rarement les lecteurs ont été
aussi près de ressembler à des audi-
teurs. » Dans le chapitre sur la « Doc-
trine d'Épictète », prise dans son en-
semble, se fait sentir plus qu'ailleurs
le défaut de toute vue synthétique :
Épictète n'y est aucunement mis à sa
place dans l'évolution philosophique
qui mène de Socrate aux Pères de
l'Église et son rôle, si important
pourtant, dans cette longue histoire
est singulièrement négligé. Remar-
quons cependant une tentative origi-
nale et qui se poursuit durant tout le
cours de l'ouvrage : chaque fois qu'est
citée une opinion d'Épictète, elle est
comparée (si possible) avec celle de son
« maître Musonius » sur le même sujet;
ces rapprochements continuels ten-
draient à transformer considérable-
ment la conception qu'on se faisait
généralement d'Épictète comme d'une
individualité puissante et ayant tiré
presque toute sa doctrine de ses propres
réflexions. Une transformation aussi
complète eut mérité d’être étudiée de
plus près. Quelle est exactement l'ori-
ginalité d'Épictète ? Qu'y a-t-il dans la
doctrine de son propre fonds et qu'y
a-t-il d'hérité de quelqu'autre Ὁ L'im-
portance exceptionnelle qu’on attache
encore ἃ son œuvre provient-elle sim-
plement de ce que nous ne connais-
sons pas celle de ses maîtres et pré-
décesseurs? On voit quelle mine de
questions nouvelles M. C. a indiquée;
elles sautent tellement aux yeux les
moins prévenus qu’on s’attendrait à ce
que la 39 partie (au lieu d'être consa-
crée à un examen sans grande origi-
nalité de l'humilité, l'indulgence et le
dévouement, du sentiment religieux et
de la forme, chez Épictète) fût remplie
par leur étude, Sachons gré à M. Co-
lardeau d’avoir indiqué la possibilité
de cet intéressant travail, tout en
regrettant, qu’il n'ait pas su l'entre-
prendre lui-même à côté et comme
complément de sa bonne étude sur
Épictète éducateur, qui restera la par-
tie la plus intéressante de son ouvrage.
| À. 3. ReINACH.
33. F, A.GEVAERTetJ.C.VOLLGRAFF.
Les problèmes musicaux d'Aristote.
Gand, Lhoste,1903, grand in-8, XXIII-
423 p.
Nous félicitons cordialement M. Ge-
vaert et son collaborateur de l'achève-
ment du grand ouvrage dont ici même
(XII, 18) nous avons apprécié le pre-
mier fascicule. Ce n'est pas seulement
une édition remarquable d'un des textes
les plus importants que nous possédions
sur la musique grecque; c'est encore,
grâce aux commentaires de M. Gevaert,
un exposé systématique et, à bien des
égards, nouveau de cette musique elle-
même, comme on peut s'en assurer par
un coup d'œil jeté soit sur l'index, si
clair et si instructif, soit sur la table
des matières. Dans huit chapitres, grou-
pés autour des problèmes principaux,
M. Gevaert étudie la théorie musicale et
l'acoustique avant Aristoxène, les ac-
cords consonants, l'échelle type, l'exé-
cution vocale, l'accompagnement des
mélodies, la structure des sept modes,
le développement historique de la mu-
sique vocale, enfin, l’esthétique musi-
cale d'Aristote; un chapitre final qui
constitue l'appendice, reprenant une
idée ingénieuse de Fortlage, essaie de
restituer le système préaristoxénien
des genres, tons et modes d’après l'ana-
lyse de l'écriture musicale des Grecs.
M. Gevaert est un musicologue trop
original et trop hardi pour qu'il puisse
espérer rallier tout 16 monde à ses opi-
nions souvent versatiles. Nous aurions
des réserves graves à faire sur plusieurs
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
doctrines exposées dans cet ouvrage, no-
tamment en ce qui concerne lastructure
des octaves modales, le sens et la fonc-
tion dela mèse, etc. Mais ce sont là des
questions trop délicates pour être étran-
glées dans un bref compte rendu. Nous
. 8&vons seulement voulu dire ici à nos
lecteurs le profit qu'ils trouveront à
étudier ce beau volume, le plaisir que
nous y avons trouvé nous-même (1).
T.R.
(1) [οἱ quelques notes portant exclusivement sur
le dernier chapitre de l'ouvrage. Je ne crois pas
(p. 359 noto) que les tons d’Aristoxène compris-
sent le proslambanomène (M. G. écrit ἴα proslam-
banomène). Son disgramme de 13 tons n'aurait
pas, dans ce cas, pu avoir l'étendue attestée
(Théon, 64) de 2 octaves et quart, il allait depuis
l'hypate des hypates de l’hypodorien (Sol 1) jus-
qu'à la nète des disjointes de l'hypermixolydten
(Ut 3). — P. 363, il est inadmissible que dans le
système primitif de la notation on ait déjà noté
le tétracorde suraigu (hyperbolées), soit hypodo-
rien, soit dorien. L’appellation de ton « fonda-
mental » pour désigner l° « hypodorien » (hypo-
lydien d'Alypius) ne se justifie pas davantage.
De plus, dans aucun des deux systèmes décrits
par Âristoxène (37 M), le ton hypodorien n'était
d’un demi-ton au-dessous du dorien (M. G. mo-
difie arbitrairement, et sans prévenir, le texte),
et ce n'est sûrement pas cette position qui lui
aurait valu son nom, le mot ὑπό n'ayant pas, à
celte époque, le sens de « au grave de ». —
P. 367. Ptolémée, Harm., Il, 6, en parlant des
3 τόνοι primitifs (lydien, phrygien, dorien) a en
vue non les « échelles transposées » mais plutôt
les modes de ce nom, quoiqu'il amalgame les
deux notions. — P. 369. Je ne vois pas où M. G.
a trouvé que le phrygien et le lydien enharmoni-
ques ne subdivisaient le demi-ton que dans un seul
tétracorde. De même tout ce qui estdit (p. 372 6.)
sur l'exclusion de telle ou telle chroa des harmo-
nies lydienne ou pbrygienne est singuliérement
affirmatif. — P. 372. Je ne puis admettre que
les distances indiquées par Aristoxène (37 M)
entre les sons initiaux des auloi hypophrygien,
hypodorien, etc., fussent motivées par « un
respecl aveugle pour le signe écrit ». L'explication
de M. G. confond ici encore les tons et les
modes. — P. 375. Aristoxène (Plut., Mus., 11)
ne dit nullement que les mélodies d'Olympos
présentaient la succession d’un tétracorde dia-
tonique et d'un enharmonique. 'Au contraire,
cette gamme primitive avait deux tétracordes
423
34. H. A. HAMILTON. The Negative Com-
pounds in Greek, Baltimore, 1899, in-8,
62 p.
Dans cette dissertation, l'auteur étu-
die les mots grecs pourvus de l'à pri-
vatif, et subsidiairement ceux en νη-.-
Il a relevé, dit-il, 4,029 composés en ἀ-,
ἀν- (971 dérivés), dont 10 seulement lui
paraissent d'origine indo-européenne.
Les autres se sont formés au long des
siècles, pendant toute la durée de la
littérature grecque, depuis Homère, qui
en présente 226, jusqu'aux écrivains
byzantins, qui en fournissent 1,522 nou-
veaux. Après Homère et avant la pé-
riode alexandrine, les auteurs qui sem-
blent en avoir introduit le plus grand
nombre dans la langue sont : les poètes
tragiques (Eschyle, 143; Sophocle, 123:
Euripide, 100), les philosophes (Platon,
137; Aristote, 167) et Hippocrate (150),
tandis qu'Aristophane ne figure dens
cette liste que pour 39, Hérodote pour
53, Thucydide pour 48, Antiphon pour
23, Démosthène pour 20, etc. Ces ren-
seignements nous sont donnés dans
des tableaux d’où il ressort encore, entre
autres choses, qu'à toutes les époques
et chez tous les auteurs, les types pré-
férés sont : 19 &-, &v- + adjectif verbal
en-vos (1631); 2 adjectifs formés de d-
ou ἀν- + racine verbale (ex., ἄτριψ) ou
+ substantif (ex. ἄθυμος, ἀναίμων — 883);
3° parmi les dérivés, les noms abstraits
(561).
On voit par ces chiffres à quels ré-
sultats sûrs et précis aboutit l'enquête
similaires, τὸ ἐχ τῆς ἀναλογίας συνεστηκὸς
σύστημα. — P. 383. M. G. ne tient aucun
compte du renseignement d'Alypius sur le trait
diacrilique qui distinguait la lichanos chro-
matique de l'enharmonique, et il ἃ tort d'affirmer
« qu'il est superflu de démontrer à des personnes
tant soit peu compétentes » que Île fragment
d'Oreste doit être interprété chromatiquement. —
P. 391. M. G. n'a pas aperçu que la gamme mixte
du premier hymne delphique n'est pas autre chose
que le véritable mixolydien, avant Lamproclès.
J'ai exposé cela dans le Congrès d'histoire de
la musique de 1900.
424
de M. H. Si elle ne nous apprend pas
beaucoup de nouveau, elle donne aux
notions connues des fondements plus
solides et parfois une valeur scientifi-
que. On peut regretter seulement que
M. H. n'ait pas publié leslistes des mots
sur lesquelsila travaillé. Il aurait faci-
lité ainsi le contrôle de ses conclusions,
et surtout il aurait dispensé d’un lourd
labeur les travailleurs qui auraient be-
soin, après lui, de dresser un inventaire
semblable.
J'ai insisté sur cette statistique, parce
qu'elle m'a paru prouver de la facon la
plus frappante l'utilité des monogra-
phies de ce genre. Mais ce n'est qu'une
toute petite partie de l'ouvrage de M. H.
Il étudie l'origine, la forme, la signifi-
cation, l'emploi, la « stylistique », et
jusqu'aux substituts possibles des com-
posés négatifs. La diversité de ces points
de vue et le grand nombre des obser-
vations ne permettent pas un compte-
rendu détaillé et suivi. D'autre part, il
serait parfois aussi difficile d'admettre
que de combattre les assertions de
M. H., parce qu'il lui arrive de les avan-
cer sans les appuyer d'une façon suff-
sante. Ainsi, nous lui concédons volon-
tiers que la dénomination tradition-
nelle d’à privatif (au lieu αὐ ἀν négatif)
n'est pas heureuse ; que les com-
posés pourvus du préfixe &-, dv-, s'op-
posent souvent à la fois au simple dont
ils dérivent (xaxéc) et à son contraire
(4γαθός), bien qu'il ne nous en donne
que cet unique exemple d'äxaxos. Nous
admettous encore que l'introduction de
composés négatifs nouveaux est due le
plus souvent au besoin de précision,
— puisqu'on en pourrait dire autant de
presque toute création de mot nouveau.
Mais quand il ajoute que beaucoup
(many) de mots négatifs ont été primi-
tivement des euphémismes ou des lito-
tes, en se contentant d'affirmer, sans
renvoi à aucun texte, que la litote se
sent encore dans dxaxoç, ἀμειλίχιος,
ἄἀλαμπίς, ἀδόκιμος, nous reconnaissons
que cela est possible, probable même,
mais indubitable (doubtless), non pas.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES
M. H. a-t-il cédé ici, comme pour les
chiffres signalés plus haut, à un désir
exagéré de faire court ? Est-ce indiffé-
rence fâcheuse à la pleine rigueur scien-
tifique ? On pourrait le craindre, malgré
les précautions oratoires dont il s'en-
toure, quand on le voit (p. 6 sq.) expli-
quer l'origine du préfixe négatif par le
son nasal que ferait entendre un enfant
fermant la bouche et se refusant à pren-
dre un aliment. Que M. H. nous par-
donne de lui chercher ces querelles. Sa
brochure n'en est pas moins fort inté-
ressante et d'une incontestable utilité
pour l'histoire de la composition nomi-
nale en grec.
Léon Jos.
35. KRAUSE (Ernestus). De Apollodoris
Comicis. Diss. inaug. Berlin, Ebering,
1903, in-8°, 38 p.
M. Krause démontre, contre Kaibel,
qu'il y a bien eu deux poètes comiques
du nom d'Apollodore, l'un natif de Géla,
contemporain de Ménandre, l’autre na-
tif de Caryste et plus célèbre, qui a
fleuri au temps de Posidippe, vers 280.
Outre les textes littéraires, qui sont
déjà assez concluants, M. K. a tiré un
heureux parti du nouveau fragment du
Catalogue ΟἿΑ, 1, 977, publié par
Wilhelm (Œsé. Jahreshefte, I, Beiblatt,
Ὁ. 46). Il en conclut notamment que
Apollodore II a triomphé deux fois aux
grandes Dionysies et trois fois aux Lé-
néennes. La dissertation de M. K.,
détachée d'un travail plus considérable,
ne traite pas un sujet bien important,
mais la méthode en est excellente,
elle annonce un philologue de bonne
école et qui continuera l'œuvre de ses
maîtres (1) H. G.
* (1) P. 9, L 2, βιδλίοι est une faute déplaisante
pour βιδλία.
COMPTES RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES 425
36. RADFORD (Robert Somerville). Per-
sonnificalion and the use of abstract
subjects in the atlic oralors and
Thukydides. Part. I. (Diss. John
Hopkins). Baltimore, 1904, in-8°, 52 p.
On reconnait dans ce consciencieux
travail la méthode vivifiante de Gil-
dersleeve, dont Radford s'honore d'être
l'élève. La statistique montrant la pro-
portion chez les différents auteurs de
sujets abstraits employés avec les
verbes d'action est par elle-même déjà
fort instructive; elle nous enseigne
que ce procédé de style, environ deux
fois plus fréquent dans les discours
de Thucydide que dans Eschine ou
Démosthène, est encore trois fois plus
rare chez les maîtres de l'orafio lenuis,
Isée et Lysias ; mais M. R. ne s'est pas
contenté de ce résultat général : il dis-
distingue et sous-distingue suivant
qu'il s'agit de forces naturelles person-
nifiées (ici lamythologie donne la main
à la grammaire), ou d'expressions
légales, ou de métaphores oratoires,
ou de périphrases; il note quels sont
les verbes et les noms qui se prêtent
le mieux à cet usage et partout il fait
ressortir, en s'appuyant sur la tradition
des rhéteurs antiques, l'effet varié et très
conscient qu'ont poursuivi les auteurs.
Parmi les synonymes de λόγος, peut-être
fallait-il mentionner μῦθος et rechercher
l'origine de la phrase stéréotypée des
fables ésopiques : ὁ μῦθος δηλοῖ ὅτι. Il
me semble que dans ce cas (comme dans
les exemples cités p. 20, b) le récit est
réellement personnifié. H. G.
31. REUTHER (Paulus). De Catonis De
agri cullura libri uestigiis apud
Graecos ; dissertatio inauguralis. Lip-
siae, 1903, typis F. Mitzlaffii. 53 pp.
in-80.
Le premier chapitre ἃ pour sujet :
De Catonis uestigiis in Geoponicorum
corpore. Une partie des enseignements
de Caton sont parvenus à ces compila-
teurs grecs probablement par l’inter-
médiaire de Celse. Outre Celse, M. Reu-
ther étudie les points de contact que
peuvent avoir eus avec Caton, Colu-
melle, Palladius et Apulée. Le deuxième
chapitre de la dissertation traite un
point particulier : De brassicae Catonis
commendatione (cf. Caton, De Agric.,
156 et 157). Une grande partie des
opinions de Caton sur le chou se
retrouvent dans Oribase. M. Reuther
rejette l'hypothèse d'une influence di-
recte ou indirecte de Caton sur Oribase.
Pour lui, Oribase et Caton ont pour
source commune un auteur grec. Cette
conclusion amène M. Reuther à for-
muler quelques hypothèses sur Mné-
sithée, qu'Oribase désigne comme au-
torité. Paul Lejay.
38. ROEMER (Adolph). Studienzu Aris-
lophanes und den alten Erklärern
desselben. 1 Theil. Das Verhältnis der
Scholien des Cod. Ravennas und
Venetus nebst Beiträgen zur Erklä-
rung der Komôdien des Aristophanes,
auf Grund unserer antiken Quellen.
Leipzig, Teubner, x1v-196 p. in-8°.
Cet ouvrage considérable, et qui est
appelé à modifier sur bien des points
les opinions généralement admises,
établit la supériorité des scholies du
Venetus sur celles du Ravennas ; elles
sont plus étendues, plus claires, moins
mêlées de gloses et d'interpolations
maladroites; elles remontent, en un
mot, à une tradition plus pure, à une
école de commentateurs alexandrins
qui avaient étudié avec finesse l'œuvre
d'Aristophane. M. KR. ne se contente
pas d'aflirmer; on ne peut lui repro-
cher aucune allégation qui ne s'appuie
sur une étude minutieuse des faits et
des textes. Certains chapitres (sur les
gloses du Ravennas ; sur la valeur du
Venelus au point de vue de l'explica-
tion même des comédies d'Aristophane,
ne sont guère que des analyses, con-
duites avec beaucoup de critique et de
426 COMPTES RENDUS
science Nous adresserons cependant
un double reproche à l'auteur : le ton,
très personnel, très vivant, pourrait
être plus sérieux; certaines railleries,
certaines allusions nous paraissent lé-
gérement déplacées. Ce défaut même
se rattache à un autre : l’auteur laisse
percer quelque dédain pour les « phi-
lologues du bon vieux temps » et les
travaux de ses devanciers ; Rutherford
et son estimable édition des scholies du
Ravennas trouvent rarement grâce à
ses yeux. Un pareil mépris n'est pas
digne d'un vrai savant, comme M. Rô-
mer : la science est en progrès conti-
nuel, ce n'est pas une raison pour
railler ou ignorer les efforts de ceux
qui nous précèdent. Signalons aussi
l'omission d'une étude importante, an-
térieure de quatorze ans aux travaux
de Rutherford : nous voulons parler
de la publication que M. Albert Martin
a fait en 1882 des Scolies du manuscrit
d'Arislophane à Ravenne (Paris, Tho-
rin, 1882) ; elle aurait dû être citée au
moins en note.
R. Hannmanr.
39. WEIGL (Ludwig). Studien zu dem
unedierten astrologischen Lehrgedicht
des Johannes Kamaterds. Würzburg,
Stürts, 1902, in-8°, 58 p.
Jean Kamateros est un grammairien
du temps des Comnène, auteur de deux
poèmes astrologiques, l'un en vers
iambiques et en langue savante qui a
été publiée par Miller (1872); l'autre
en méchants vers politiques et en
BIBLIOGRAPHIQUES
langue « mixte » qui est encore inédit
et dont M. Weigl prépare la publica-
tion, d'après les manuscrits qui n'en
renferment chacun que des fragments.
Dans la présente dissertation, M. W.
tâche d'abord de déterminer les sources
de ce poème : cesont tantôt des ouvrages
conservés (Héphestion, Lydus, Ptolé-
mée, Pseudo-Eratosthène, Maximus),
tantôt des auteurs perdus que Kama-
téros cite nommément (Teucros Rheto-
rios, etc.) K. est un compilateur
ignorant et sans critique, mais ses
paraphrases, souvent littérales, ne sont
pas sans utilité pour l'établissement
du texte des auteurs qu'il copie. Toute-
fois le principal intérêt de son poème
est dans la langue ; elle offre un très
curieux mélange de formes classiques et
vulgaires dont M. W. donne d'abon-
dants spécimens bien classés. Les
accusatifs du type πατέραν conduisant
à des nominatifs comme ἣ νύκτα, des
formes comme τώρα, μας, ἐσένα, Îles
formes apocopées de αὐτός, les noms
de nombre comme τριάντα, σαράντα, la
conjonction va, de nombreux diminutifs
en outt:xoc, ττζης, etc., les pluriels de
la 3e personne en ouv, la rareté du datif,
l'emploi de ἀπὸ avec l'accusatif, les
mots d'emprunt albanais, slaves, etc.
et de nombreux néologismes caracté-
risent la diction de Kamateros et jus-
tifient le labeur que M. Weigl, un
élève de Krumbacher, a consacré à cet
auteur oublié.
T.R.
Bon à tirer donné le 7 novembre 1908.
Le rédacteur en chef-gérani, ΤᾺ. Renacn.
Le Puy-en-Velay. — Imp. R. Marchessou, boulevard Carnot, 23.
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TABLE DES MATIÈRES
PARTIE LITTÉRAIRE
. Pages.
Max. CozLiGNon. — De l’origine du type des pleureuses
dans l'artgrec..:................... perverse 299
Maurice CRrorseT. — Observations sur « les. Perses » de
Timothée de Milet esse. 323
Ph.-E. LEGRAND. — Pour l'histoire de la comédie nou-
velle..................... eee 349
Louis BRÉHIER. — Un discours inédit de Pgellos.......... 375
H. Omonrt. — Le premièr professeur de langue grecque
au Collège de France............................ 416
Notes et additions ................: ..... ἰφε νον ννννννοςν 418
BIBLIOGRAPHIE
Comptes rendus bibliographiques ................. ΕΝ 419
Le Comité se réunit le premier jeudi non férié de chaque inois,
excepté en août, septembre et octobre. Tous les membres de l’As-
__ sociation peuvent assister aux séances avec voix consultative.
La Bibliothèque de l'Association, 12, rue de l'Abbaye, est ouverte
le jeudi de 3 ἢ. 1/2 à 4 h. 1/2, et le samedi de 2? à 5 heures.
La Revue des Etudes grecques est publiée cinq fois par an.
Prix d'abonnement : Paris ......... ΠΝ 10 »
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Un numéro séparé................ nervous 2 50
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Le Puy, typographie R. Marchessou, boulevard Carnot, 23.
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ÉTUDES GRECQUES
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pe 2 1004
L'ASSOCIATION POUR L'ENCOURAGEMENT DES ÉTUDES GCRECQU Abiñipes Ars:
TOME XVI
N° 72
Novembre-Décembrc 1903
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR ;
28, RUE BONAPARTE, VI°
Toutes les communications concernant la Redaction doivent être adressées
ἃ M. Tuéonore ReINAcH, rédacteur en chef-gérant, à la librairie Leroux.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
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ceux qui ne portent pas de date ont été publiés en 1901.
ABRÉVIATIONS
B. C. H. Bulletin de correspondance hellénique. R. Revue.
Byz. Ζ, Byzantinische Zeitschrift. R. Arch. Revue Archéologique.
CL R. The classical Review. R. E. G. Revue des études grecques.
f. für. R. Ph. Revue de Philologie.
H. Hermes. Rh. M. Rheinisches Museum. Neue Folge.
J. Journal. S. Ac. 1. Séances de l’Acad. des Inser. et B.-L.
J. Ἡ. 8. Journal of Hellenic studies. S. M. Ak. Sitrungsberichte der philos.-philol.
M. I. A. Mitteilungen des deutschen arcbæol. und histor. Classe der Bayrischen Akademie
Institutes. Athenische Abteilung. der Wissenschaften, χὰ München.
Mn. Mnemosyne. N. S. S. Pr. AK. Sitzungsb. d. K. Preuss. Ak. der W.
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Πρῶται βοήθειαι. 32 : ὃ υἱιχρὸς Πλούταργος, Γ΄. 33 : ᾿Ανέκδοτα ζῴων. 34 : τὰ Ir.
35 : Βενιαμὶν Dpayxhivas. 36 : ὁ βίος τοῦ Ἰησοῦ Χρίστοῦ.
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VLASTO, Et. A., Φιλοσοφιχαὶ μελέται. Alexandrie, Lagoudaki, 1902, p. ins.
χαι, 467 p.
CORRESPONDANCE
Liverpool, 9 novembre 1903.
MonsIEUR LE RÉDACTEUR,
Dans sa lettre qui ἃ paru dans le n° 10 de votre Revue sur la question de la
langue en Grèce, M. Hatzidakis me met personnellement en cause, et je fais
appel à votre sentiment de justice pour permettre que ma réponse y paraisse
aussi.
« On a loué M. Pallis, écrit M. Ilatzidakis, d’avoir, dans sa traduction de
« l'Évangile, pour rendre le terme d'ânesse, créé une forme nouvelle sur le
« modèle des formes populaires. Mais cette forme nouvelle, ὄνισσα, est aussi mal
« imaginée que possible. Dans la langue populaire, le féminin des noms d'ani-
« maux se forme en ajoutant au radical soit la terminaison a (σχύλλα, χουνέλλα,
« γαϊδάρα), soit ἵνα (Βαρθαχῖνα, Aupiva, γεραχῖνα, καδουοῖνχ, crétois xa6piva, λαγῖνα,
a crétois λαγουδῖνα, πουλλῖνα, προδατῖνχ) ; jamais on n’emploie le suflixe 1o5a quine
* « sert à former que des termes de gentillesse, de nationalité, ou de dignité
« (βασίλισσα, πριγκίπισσα, μαστόρισσα, γειτόνισσα, Mupzitiosa, etc.) Le terme
« ὄνισσα témoigne donc, aussi bien chez celui qui l'a forgé que chez ceux qui le
« prônent, de l'absence d'une véritable connaissance scientifique du grec ».
Dans ce paragraphe M. Hatzidakis affirme que le suffixe :o52 ne sert à former
que des termes de gentillesse, de nationalité vu de dignité. Mais voilà que nous
avons les mots ἀκαμάτισσα (— paresseuse) et χολαχεύτρισσα (= flagorneuse) qui,
au contraire, sont des termes injurieux. Je puise ces mots dans un livre dont
M. Uatzidakis ne peut pas contester l'autorité, dans l'Einleilung in die Grie-
chische Grammatik, écrite par lui-même (p. 26 et 27). Je citerai aussi un autre
terme d'injure de la dernière force, φόνισσα ! — « assassine! » (voir Vlachoyian-
nis, Προπύλαια I, p. 25 « δὲ μιλᾶς, μωρὴ φόνισσα »).
Ensuite, M. Hatzidakis dit qu'on n'emploie jamais la terininaison en question
pour former le féminin des animaux. Mais voilà encore que nous avons le mot
γάλισσα, féminin du γάλλος (italien gallo) — « dinde » qu'on peut voir dans le
Dictionnaire de M. Vlachos. C'est un terme, du reste, tout à fait courant, et
quiconque a visité Athènes doit avoir souvent remarqué des vendeurs de dindes
qui, une perche à la nain, chassent devant eux leurs troupeaux en criant « γάλ-
λισσες ! yiAkages! ».
C'est ainsi que M. Hatzidakis blâme aussi le mot χαμπήσιος (p. 243), mot qui,
pourtant, se trouve enregistré dans le même Dictionnaire de M. Vlachos.
484 ALEX. PALLIS
Plus loin (p. 238) M. Hatzidakis écrit : « Comme si les professeurs de l'Univer-
« sité avaient jamais accueilli autrement que par le silence et le dédain les nom-
« breux écrits de la secte antérieurs à 1901 ! ». Ici encore M. Hatzidakis se trouve
dans l'erreur. Dans une conférence qu'il a donnée, en 1897, au Syllogue
« Parnassos », sur « les femmes chez Homère », M. le professeur Lambros a lu,
devant l'élite de la Société athénienne, le fameux dialogue entre Hector et Andro-
maque, et c'est d'après ma traduction qu'il l'a récité. De même, les premiers écrits
de M. Eftaliotis, qui datent de l'an 1889, ont paru dans la « Hestia » du temps
que M. le professeur Politis, Le savant auteur des « Proverbes », en était l'édi-
teur, et je crois pouvoir dire que M. Politis se félicite d'avoir été le premier à
discerner la grande valeur de ce romancier charmant. Et il faut noter que tout
aussi bien M. Lambros que M. Politis ne sont pas de simples grammairiens,
mais des littérateurs très distingués qui, de plus, écrivent en langue puriste.
Agréez, M. le Rédacteur, l'expression de ma considération la plus distinguée.
Alex. PaLLis.
COURRIER DE GRÈCE
PREMIÈRE LETTRE
Athènes, 15:-14 septembre 1903.
La crise ministérielle que mon dernier courrier laissait pressentir n’a pas tardé
à éclater. A peine ma correspondance était-elle en route qu'à la Chambre hellé-
nique dix députés se séparaient avec éclat du parti Delyannis. A la suite de cette
défection, un orateur de l'opposition mit en demeure le Gouvernement de poser
la question de confiance ; 114 voix contre 95 se déclarèrent contre le Ministère.
I} ne restait plus à M. Delyannis qu'à prendre son chapeau, comme il en avait
tant de fois menacé la Chambre, ce qu'il fit aussitôt.
M. Théotokis fut chargé par le roi de former un nouveau Cabinet. Il prit
pour lui-même le portefeuille des Affaires étrangères avec la Présidence du
conseil, donna les Finances à M. Simapoulos, l’Intérieur à M. Lévidis, la Justice
à M. Caloyéropoulos, l'Instruction Publique à M. Lombardos, la Guerre ὰ
M. Grivas et la Marine à M. Stéphanopoulos.
Ce Ministère ne devait pas vivre longtemps ; il était né sous une mauvaise
étoile. Depuis quelques semaines les populations viticoles du Péloponèse étaient
en effervescence. La production du raisin, dit de Corinthe, qui constitue la
principale ressource du sol hellénique, souffre depuis quelques années d'une
crise assez grave. Le commerce de ce produit avait connu des jours très prospères,
lorsque la France, ravagée par le phylloxéra, était réduite à recourir aux raisins
secs pour la fabrication de ses vins. A cette époque on élargit imprudemment
la zone de culture ; toutes les terres, propices ou non, des éparchies viticoles se
couvrirent de ceps. La demande était tellement importante que les prix se main-
tinrent quelque temps à un cours élevé, malgré l’augmentation considérable de
la récolte offerte. Mais quand les vignes françaises furent reconstituées, le Gou-
vernement de la République frappa d'un droit élevé l'importation du raisin de
Corinthe pour encourager la production des vins naturels et les cours du raisin
sec, en Grèce, en furent profondément affectés. Depuis, ils ne peuvent se relever,
d'abord par suite de l'énorme disproportion entre l'offre et la demande, puis
en raison de la qualité inférieure d'une grande partie de la récolte, la viticul-
ture, étendue aux régions moins favorables, n'ayant pas été restreinte. La gêne
486 J. GUILLEBERT
d'abord, et la misère ensuite, succédèrent à l'aisance dans ces contrées ; de là,
les plaintes continuelles des habitants auprès du Gouvernement auquel on
demandait des lois protectrices ou des exemptions d'impôts.
M. Delyannis crut habile de satisfaire d'abord ces populations qui forment le
principal point d'appui de sa politique. Dès son avènement au pouvoir,
il signa avec une Société constituée à Londres une convention relative à l'éta-
blissement d'un monopole sur la vente des raisins de Corinthe. La Société s'en-
gageait ἃ acheter toute la récolte de chaque année à des prix fixés par qualités
et par régions. Naturellement cette convention fut accueillie avec enthousiasme
par les producteurs et combattue avec non moins d'énergie par les exportateurs
et les intermédiaires. L'animosité qui s'était déclarée entre les deux camps à
l'annonce des négociations se reproduisit à la Chambre, les députés étant pour
. ou contre la convention, selon qu'ils représentaient une circonscription de pro-
duction ou un centre de négoce. En outre, le texte de la convention présentait
des obscurités et même des difficultés d'application qui paraissaient, à première
vue, insurmontables. Enfin la constitution de la Société concessionnaire n'offrait
pas toutes les garanties de crédit et de solidité indispensables à une entreprise
aussi vaste. Aussi M. Delyannis n'osa-t-il pas la défendre à la Chambre et la
ratification en avait été renvoyée aux calendes locales, quelques jours avant la
chute du Ministère.
En prenant possession du gouvernement, M. Théotokis, interpellé sur f'ave-
nir de la convention du monopole, déclara à la tribune avec sa franchise ordi-
naire que la convention n'existait plus, puisque le projet des statuts et les enga-.
gements de garantie, que la Société s'était engagée à soumettre au Gouvernement
dans un délai fixé par ladite convention, n'avaient pas été fournis. A cette décla-
ration, les habitants des régions de production, qui avaient cru voir le salut dans
l'institution du monopole, se soulevèrent; il y eut à Pyrgos et dans quelques
villages voisins des manifestations armées, que les autorités ne surent ou ne
purent contenir. Pris entre la nécessité de se maintenir par la force ou de 86
retirer, M. Théotokis opta pour le moyen le plus facile et présenta sa démission
au roi qui l'accepta. M. Rhallis fut aussitôt chargé de former un Ministère.
M. Rhallis, député de l'Attique, avait déjà présidé le Gouvernement en 1891,
après la chute de M. Delyannis. Il s'était toutefois rallié au parti de ce dernier
lors des élections législatives, à la fin de l'année dernière. C'était donc en réalité
le retour de ce parti aux affaires, mais avec l'appui des groupes Théotokis et
Zaïmis, ses adversaires habituels. Nous avons eu ainsi pendant quelques jours
le spectacle, rare en tous les pays, d'une Chambre sans opposition. Il était à pré-
voir que, dans de telles conditions, le Gouvernement ne pouvait mettre en dis-
cussion que le budget et des projets de lois tout à fait secondaires; toute délibé-
ration sur une loi de politique générale eût amené un vote défavorable des
alliés conditionnels et la chute immédiate du Ministère.
Dans ce Cabinet, M. Rhallis, président du Conseil, détenait le portefeuille des
Finances et celui des Affaires Étrangères; M. Mavromichalis est Ministre de l'In-
térieur, M. Merlopoulos cumule la Justice et l'instruction Publique, et M. Cons-
tantinidis la Guerre ct la Marine. Depuis, l'Instruction Publique a été confiée à
M. Pharwacopoulos. Quelques jours après sa formation le Gouvernement fut
COURRIER DE GRÈCE 487
contraint de demander un décret royal ordonnant la prolongation de l'assemblée
législative en session extraordinaire, les six mois de la session ordinaire s'étant
écoulés sans qu'aucun travail parlementaire sortit des délibérations. Cette ses-
sion fut close, sinon offciellement, du moins de fait, huit jours après son ouver-
ture. Quelques amendements à la loi sur le Commandement Général de l’armée
et le budget de 1903 y furent votés avec quelques projets de lois secondaires ; Ic
pays vivait depuis sept mois sous le régime des douzièmes provisoires.
Les députés avaient à peine quitté Athènes qu'une campagne s'ouvrit dans ja
presse pour la dissolution de la Chambre. M. Delyannis déclarait que M. Rhallis
n'avait consenti à prendre le pouvoir qu'à la condition d'exiger du roi un décret
de dissolution avec la date en blanc. Ceux qui suivent de près les événements
politiques du royaume sont persuadés que M. Delyannis se fait de grandes illu-
sions à cet égard. Le roi de Grèce ne se serait pas décidé à faire son voyage d'été
habituel s'il avait dû laisser derrière lui la porte grande ouverte à une crise
parlementaire.
En dehors de la politique intérieure, la préoccupation principale de l'opinion
publique se concentre sur les événements de Macédoine. La rivalité entre les
Hellènes et les Bulgares, qui remonte aux temps de l'Empire de Byzance, est
entrée dans une phase aiguë depuis que la Bulgarie, érigée en principauté, a
recouvré sa liberté et surtout depuis qu'elle a tenté avec succès son coup de main
sur la Roumélie orientale. Cette réussite a mis en goût les patriotes bulgares qui
ne révent plus que la conquête de la Macédoine. Pour arriver à la réalisation de
ce rêve, ils ont à vaincre d'abord la Turquie et ensuite à combattre, à éliminer
même, si cela est possible, l'élément grec indubitablement prédominant dans la
partie méridionale de cette province. Contre la Turquie, les Bulgares ont entre-
pris de révolutionner la Macédoine dans l'espoir que la répression du mouve-
ment serait opérée par les autorités turques de facon à soulever l'indignation de
l'Europe et à amener une intervention arméc des Puissances. L'attitude paci-
fique de l'élément grec ἃ déjoué en partie ce plan et, malgré les efforts des comi-
tés et des bandes bulgares, l'agitation s’est bornée aux violences souvent crimi-
nelles accomplies par les conjurés de nationalité bulgare.
La défense des Hellènes contre les prétentions de la Bulgarie a surtout porté
sur la réfutation des statistiques fantaisistes pübliées par les comités révolu-
tionnaires touchant le dénombrement des populations macédoniennes. Je vous ai
déjà signalé dans ma correspondance de février la série de conférences faites à
Athènes par M. Cazazis, alors prytane de l'Université, sur la situation respective
de l'élément hellène et de l'élément bulgare en Macédoine et en Thrace. M. Ca-
zazis, qui est aussi président de la Société « Hellénigmos », a continué l'étude de
la question dans le bulletin mensuel de cette Société d'une façon très complète ;
il a cité à l'appui de ses arguments les statistiques établies par différents auteurs
étrangers sur la population de la Macédoine propre et qui prouvent clairement
la prédominance de l'élément hellène. Cette étude est trop complète et elle
embrasse un ensemble de questions trop large pour trouver place, même en
résumé, dans ce courrier. D'ailleurs, les revendications formulées par l' « Hellé-
nisnos » comprennent presque toute la Turquie d'Europe, sans en excepter natu-
rellement Constantinople; c'est un projet idéal qui ne saurait encore être exa-
488 J. GUILLEBERT
miné au point de vue d’une réalisation prochaine. Je préfère donc vous signaler
ici le mémoire rédigé à ce sujet par le Syllogue Macédonien d'Athènes, œuvre
plus politique que littéraire et par conséquent d'un plus grand poids auprès de
ceux qui s'intéressent au développement du royaume hellénique.
Le Syllogue Macédonien, en ce qui concerne les réformes à appliquer aux pro-
vinces européennes de la Turquie, déclare s'intéresser exclusivement à la Macé-
doine; et, pour lui, la Macédoine proprement dite ne doit se composer que des
vilayets de Monastir et de Salonique, défalcation faite d'un tiers du Sandjak d'Ei-
bassan et de la province de Kossovo (Uskub) où dominent, d'un côté l'élément
musulman, et de l’autre l'élément slave. On ne saurait appliquer dans ces contrées
la même réorganisation administrative que chez les populations hellènes. Cette
division a encore un autre avantage; elle laisse aux Bulgares et aux Serbes toute la
partie septentrionale et orientale de la Macédoine où la population est en majeure
partie slave d'origine, de religion et de conviction ; elle donne aux Hellènes le centre
et le midi où les populations,élevées pendant des siècles sous l'influence des ins-
titutions et des mœurs grecques et sous le patronage de l'Église grecque, offrent
en général une homogénéité assez grande pour rester soumise à une organisation
uniforme sous la souveraineté du sultan. La politique bulgare tend au contraire
à soumettre l'administration macédonienne à des fonctionnaires bulgares, et
pour obtenir dans ce but la majorité dans le pays, elle a demandé la première
avec insistance la transformation des trois vilayets macédoniens en une province
autonome. Cette réunion des trois vilayets en une grande circonscription sous un
inspecteur général fait l'objet des réformes contenues dans le projet austro-russe.
L'union de ces trois vilayets est indispensable à la réalisation du but que se pro-
pose la politique bulgare, car, si l'un d'eux en est retranché, c'est-à-dire le
vilayet de Kossovo, l'élément bulgare, loin d'avoir la majorité, sera réduit à la
minorité d'un tiers par rapport à l'élément grec dominant dans les deux autres
vilayets.
A l'appui de ce desideratum le mémoire du Syllogue Macédonien donne les
chiffres suivants puisés aux statistiques officielles de l'Administration ottomane :
Population des deux vilayets complets de Salonique et de Monastir, en chiffres
ronds :
Grecs Bulgares Musulmans Divers . Totaux
Salonique 350,000 200,000 433,000 50,000 1,033,000
Monastir 309,000 174,000 344,000 23,000 850,000
| 659,000 374,000 771,000 73,000 1,883,000
Population des mêmes vilayets en retranchant les parties septentrionales et
orientales slaves.
Grecs Bulgares Musulmans Divers Totaux
Salonique 350,000 130,000 397,000 50.000 927,000
Monastir 289,000 107,000 230,000 11,000 637,000
639,000 237,000 ‘627,000 61,000 1,564,000
À côté de ces moyens pratiques et raisonnables de revendication nationale, un
autre Comité a voulu organiser une grande réunion publique sur l'emplacement
du femple de Jupiter Olywpien, pour protester contre les atrocités bulgares.
Cette réunion ne pouvait avoir d'autre résultat que de soulever une effervescence
COURRIER DE GRÈCE 489
inutile et dangereuse parmi la population de la capitale. Heureusement les habi-
tants d'Athènes s'abstinrent de répondre à la convocation faite par la Presse, et
les membres du comité en question ne se virent entourés sur l'immense place
que par un millier de personnes presque exclusivement prises dans les derniers
rangs du peuple. |
En résumé, les événements de Macédoine n'ont soulevé aucun tumulte dans le
public. Les classes laborieuses du royaume commencent à marquer une indiffé-
rence de bon augure à l'égard des agitateurs politiques. On déplore générale-
ment la mauvaise posture qu'a créée à la Grèce, au point de vue de la politique
internationale, la malheureuse guerre de 1897, mais l'ère des coups de tête ne
paraît pas prête à se rouvrir. Au plus fort de l'émotion produite par ces événe-
ments, un groupe de 150 étudiants russes est arrivé en Grèce pour visiter les
antiquités. Certains journaux, toujours prêts à exciter les passions populaires,
avaient conseillé de huer ces jeunes slaves à leur passage. Ces conseils n'ont pas
été suivis ct les étudiants russes ont parcouru les rues de la capitale sans être
plus inquiétés que Les touristes ordinaires ; le Gouvernement a même mis à leur
disposition les éphores des antiquités pour leur faciliter la visite des stations
archéologiques du royaume.
DEUXIÈME LETTRE
Athènes, 24 novembre/7 décembre 1903.
Depuis trois mois toutes les discussions politiques roulent sur ce thème
unique : la Chambre sera-t-elle dissoute ? La réponse se fait attendre aujourd'hui
encore. Les organes du parti Delyannis tiennent toujours pour la mort sans
phrases, c'est-à-dire pour la dissolution immédiate, sans tenter même une
entente entre les divers groupes pour soutenir le Ministère. Les théotokistes,
leurs adversaires, prétendent que le Cabinet Rhallis peut trouver une majorité
sous certaines conditions. Quant à M. Rhallis, il semble pencher vers ce dernier
moyen; mais sera-t-il suivi par ses collègues? C'est un second point d'interro-
gation qui est venu depuis peu s'ajouter au premier.
Pour attendre le retour du roi et aussi pour se donner le temps de sonder les
dispositions des députés influents, le premier Ministre a obtenu un Décret Royal
qui proroge de quarante jours l'ouverture de la session parlementaire que la
Constitution fixe au 1°" novembre. Sa Majesté est rentrée depuis une dizaine de
jours et la situation n’est pas encore éclaircie, au contraire. 1] faut toujours
s'attendre à une crise ministérielle, tout au moins partielle, car deux Ministres
sur cinq sont manifestement hostiles à- la convocation de la Chambre actuelle.
Donc, convocation, dissolution, crise ministérielle 1 ou remaniement du Ministère,
1. C'est cette troisième hypothèse qui s'est réalisée à la mi-décembre; le
cabinet Rhallis a été remplacé de nouveau par un cabinet Théotokis (N. de la Réd.)
490 J. GUILLEBERT
telles sont en ce moment les quatre hypothèses entre lesquelles s'agitent les
amateurs de pronostics politiques.
Dans les preiniers jours de septembre la Grèce a renouvelé ses conseils muni-
cipaux et les maires ct adjoints de ses dèmes. Pour la première fois peut-être
l'élection du maire d'Athènes s’est faite en dehors de toute pression politique.
M. Mercouris, le maire sortant, avait réellement fait pour la ville, dans ses quatre
années d'exercice, tout ce que permettaient les ressources du budget municipal.
La quantité d'eau mise à la disposition des habitants ἃ été augmentée, l'arro-
sage des voies publiques est plus fréquent et plus régulier ; de jolis squares ont
remplacé sur les places publiques les fondrières et les dunes de poussière d'an-
tan , le marché en gros des légumes qui se faisait en plein vent avec un éclai-
rage rudimentaire, s'abrite maintenant sous une halle toute moderne. Enfin la
capitale du royaume prend rapidement l'aspect d'une grande ville. Ces résultats
n'ont pas empêché le parti Delyannis de susciter un concurrent à M. Mercouris.
M. Delyannis, lui-même, ἃ prononcé un discours du haut de son balcon légen-
daire pour recommander aux électeurs d'Athènes la candidature d’un de ses
partisans, député de l'Attique ; malgré l'éloquence du doyen des orateurs hel-
lènes, M. Mercouris a été réélu à l'écrasante majorité de 5,000 voix sur
16,000 votants.
Puisque nous parlons des embellissements d'Athènes, n'oublions pas de signa-
ler l'érection prochaine d'une statue équestre en bronze de Colocotroni, le fameux
chef des armées du Péloponèse pendant la guerre de l'Indépendance. Cette sta-
tue représente le héros revêtu de la fustanelle nationale et coiffé du casque quil
avait l'habitude de porter en campagne. Elle s'élèvera sur le côté de la Chambre
des Députés, en haut de la rue du Stade. Les ouvriers sont actuellement occupés
à élever le piédestal qui doit recevoir le bronze. Une statue du même modéle,
wais en marbre, a déjà été érigée à Nauplie, il y a trois ans. L'inauguratiou aura
lieu très probablement dans le courant du mois de janvier prochain.
Cette inauguration suivra de très près celle de la section Pirée-Athènes-Thébes-
Chalcis sur la ligne de Pirée-Larissa que construit en ce moment la Société
française des Batignolles. Les travaux d'art et de terrassement sur cette section
sont complètement terminés et on n'attend plus que la matériel roulant pour
livrer cette partie du chemin de fer à l'exploitation. 5. A. R. le Prince héritier ἃ
déjà fait usage de cette voie pour se rendre à Chalcis et de là en Thessalie, lors
de l'inspection de cette division militaire.
Une autre inauguration : le Syllogue si florissant du « Parnasse » a prété cette
année encore sa grande salle des fêtes à l'exposition des Beaux-Arts dont l'ou-
verture a eu lieu à la fin d'octobre en présence de toute la haute société athé-
nienne. Certainement les chefs-d'œuvre n'y abondent pas encore, mais il ya là
de belles marines, de jolies natures mortes et quelques tableaux de genre assez
réussis. Les grands peintres grecs exposent plutôt leurs œuvres au Salon de
Paris et dans les expositions d'Allemagne. Toutefois ces fêtes artistiques, de
plus en plus fréquentes à Athènes, sont un encouragement pour les peintres et
les sculpteurs fixés dans la capitale et un enseignement pour le public.
La question de langue passionne cependant plus les Athéniens que la peinture.
Nous avons eu, ces jours derniers, un soulèvement de l'opinion publique contre
COURRIER DE GRÈCE 494
la représentation de tragédies antiques traduites en néo-grec, dans la langue
dite populaire. La « Nouvelle Scène », théâtre nouvellement fondé sur la place
Homonia, a donné « Antigone » de Sophocle. Malgré la belle diction des acteurs,
la langue qui se parle à l'Agora n'a pas paru convenable dans la bouche des rois
et des grands de l'antiquité; là, cependant, le public s'est contenté de rire ironi-
quement et de battre le plancher du pied en signe de désapprobation. Mais au
Théâtre Royal les choses ont failli tourner au tragique. Cette scène est considé-
rée comme le théâtre officiel de la Grèce et toute attaque à la langue officielle y
prend une apparence d'encouragement par les autorités du pays elles-mêmes. Le
Directeur de ce théâtre s'est obstiné à faire représenter plusieurs fois de suite,
malgré les protestations de la presse et des étudiants, « Orestia », traduction éga-
lement en langue populaire de la trilogie d'Eschyle. Α l’Université, M. Mistriotis
professeur de philologie, a prononcé une violente philippique contre ceux qu'il
appelle profanateurs de la langue nationale et traîtres à la patrie, et les étudiants
se sont, à la suite de cette conférence, livrés à des manifestations tumultueuses
telles qu'il a fallu faire disparaître « Orestia » de l'affiche. L'émotion, produite par
cette affaire, dure encore; quelques étudiants ont été maintenus en état d'arres-
tation à la suite d'une bagarre entre les manifestants et la police appuyée par
la force armée. Des poursuites vont être intentées contre certains journaux qui
ont jeté de l'huile sur le feu.
Pendant cette saison d'automne, la famille royale de Grèce a célébré le
mariage du prince André, quatrième fils de S. M. le Roi, avec la princesse
Alice de Battenberg. C'est un événement heureux pour la dynastie du roi Georges
qui voit ainsi son prestige s'aflirmer d'année en année par d’heureuses alliances.
Malheureusement cette fête de famille a été suivie d'une grande inquiétude. A son
retour à Saint-Pétersbourg, S. M. Ja Reine Olga a été prise d'un mal subit qui a
nécessité une opération immédiate dont le succès a été complet. Le 93 octobre
(anc. st.) dans l'Église métropolitaine d'Athènes a été célébré un service d'actions
de grâces pour le rétablissement de la reine et en même temps pour le quaran-
tième anniversaire de l'élévation du roi Georges au trône de Grèce.
ὅδ. GUILLEBERT.
ACTES DE L'ASSOCIATION
8 janvier 1903. — Présidence de M. S. Reinach.
Membre décédé : M. le docteur Panas.
M. Oppert donne lecture d'un travail où il cherche à déterminer la date de
l'établissement à Athènes du calendrier de Méton.
M. Am. Hauvette communique une étude sur le proverbe grec πάλαι ποτ᾽ ἦσαν
ἄλχιμοι Μιλήσιοι, et se demande notamment dans quelle circonstance historique
ce vieux dicton populaire a pu être appliqué aux Milésiens; il tend à accepter le
témoignage de Didyme, suivant lequel ce vers se trouvait déjà sous cette forme
dans Anacréon, c'est-à-dire antérieurement à l'époque de la révolte ionienne et
de la destruction de Milet.
ὃ février 1908. — Présidence de M. 8. Reinach.
Membres décédés : MM. Charles Baron, Grégoire C. Soutzo et Vucina.
Membres nouveaux : MM. René Pichon, Polyphroni Polyphroniou, Spando-
“nidis, et Ghekis.
M. Edm. Pottier expose les résultats d'une étude qu'il a consacrée à deux vases
du Louvre, inédits, en forme de têtes de femme. Ces deux vases plastiques, du
genre improprement appelé rhyton, datent de la fin du vr* siècle avant notre ère,
ou du début du ve, et ils offrent cette particularité, que, sortis du même atelier,
ils portent une signature : Ἐπίλυχος ἔγραψεν καλός. Or, ce nom d” ᾿Επίλυχος, ou
Ἐπίλυκος καλός, se rencontre sur d’autres vases grecs, que M. Wernicke ἃ
signalés au nombre de 6 en 1890. M. Pottier a pu en étudier 13, et, de l’examen
approfondi qu'il en a fait, il résulte que le nom ἀ' Ἐπίλυχος, sauf sur les deux
pièces inédites du Louvre, ne saurait être une signature d'artiste : tous les vases
qui portent ce nom propre sans le verbe ἔγραψεν trahissent un style sensible-
ment distinct de celui qui caractérise les vases plastiques du Louvre.
M. Tannery donne lecture d’une note sur l'histoire des mots analyse et synthèse
dans la langue des philosophes et des mathématiciens grecs.
M. Th. Reinach présente les photographies d'un sarcophage trouvé en Asie-
Mineure, dans la ville ancienne de Sidamaria, et transporté aujourd'hui à
Constantinople.
ὅ mars 1903. — Présidence de M. S. Reinach.
Membre décédé : M. Mavrocordato.
ACTES DE L'ASSOCIATION 493
Membres nouveaux : M. le ἢ" Matarangas; l’Universily Library de Toronto,
Canada.
M. Michon donne lecture d'une communication sur trois statues antiques
provenant de Smyrne, dans l'ancienne collection du Roi.
M. Vasnier présente quelques observations sur les marques inscrites sur les
murailles de Thasos.
M. Vasnier donne lecture d’une autre communication sur l'importance rela-
tive et l'attribution des peintures de vases grecs. M. de Ridder a résumé, dans
le dernier bullctin archéologique de la Revue, l'étude de M. Furtwängler qui
retire à Euphronios la paternité des peintures de vases signées érofnoz, et non
ἔγραψεν. M. Vasnier conteste que des variations de style, qu'il ne nie pas
d'ailleurs, suffisent à légitimer les conclusions de M. Furtwängler : il signale
dans certains vases comme la coupe de Thésée, la différence de facture entre la
décoration intérieure et la décoration extérieure ; il estime que les céramistes
attachaient plus d'importance à la forme même des vases qu'à leur décoration
picturale, laissant peut-être exécuter celle-ci par des artistes de valeur secondaire.
M. de Ridder maintient que les observations de M. Furtwängler gardent leur
valeur.
M. Th. Reinach fait observer que les potiers ne considéraient pas les peintures
comme sans importance, puisqu'ils les signaient ; il ne croit pas non plus qu’ils
se soient directement inspirés des grandes œuvres de la peinture contemporaine.
M. Pottier admet, avec M. Furtwängler, qu'il faut distinguer les vases qui
portent la mention ἐποίησεν de ceux qui portent la mention ἔγραψεν; mais il
conteste que l'expression ἐποίησεν ne soit qu'une marque de fabrique générale,
n'indiquant pas que le signataire ait mis lui-même la main à l'œuvre. Il fait
remarquer aussi que, même après l'étude de M. Furtwängier, il reste à Euphro-
nios, auteur incontesté de trois coupes très intéressantes, une assez belle part.
M. Maurice Croiset se demande si la formule ὁ δεῖνα ἔγραψεν ne désignerait
pas l'auteur du dessin, du modèle, sans que l'artiste lui-même eût exécuté la
peinture.
2 avril 1903. — Présidence de M. S. Reinach.
Membres décédés : M. Jean Dupuis, M. G. Edet.
Membres nouveaux : MM. Cavaignac (Eugène) et Hypéridis.
M. Edm. Pottier donne lecture d'une étude sur le sens du mot sinis{er en latin
et sur la différence qui se marque à ce sujet entre les Grecs et les Romains. On
saisit dans la langue latine une contradiction flagrante entre le sens favorable et
le sens défavorable de sinister. Le premier est rituel et traditionnel ; l’autre est
usuel et littéraire, né sous l'influence des Grecs. En effet, pour les Grecs, c’est
la droite qui est favorable. Le Grec qui prie se tourne vers le Nord et invoque
les dieux ayant à sa droite le Levant, la région des heureux présages. Au con-
traire, le Romain, se conformant aux traditions étrusques, regarde le Midi, etil
a par conséquent le Levant à gauche. De là sont nés deux rituels différents, et
en apparence contradictoires. En remontant à la source grecque, on trouve peut-
être l'idée, naturelle à tous les peuples primitifs, que la droite est le côté agis-
sant et fort; la guerre rend naturellement les hommes droitiers. En remontant à
la source étrusque, on trouve plutôt l'adoration du soleil par les peuples orien-
494 ACTES DE L'ASSOCIATION
taux. Toutes les statues égyptiennes, dans l'attitude de la marche, portent le
pied gauche en avant: il paraît en être de même pour les œuvres chaldéennes
et phéniciennes. Chez les Latins comme chez les modernes, c'est le sens grec qui
a fini par triompher.
Μ. Th. Reinach entretient le Comité de la découverte du nome fameux de
Timothée, intitulé les Perses : il expose, et discute sur quelques points, le travail
récemment publié de M. von Wilamovwitz sur ce sujet.
Séance générale du 7 mai 1908. — Présidence de M. S. Reïinach.
M. 8. Reinach exprime ἃ ses confrères les sentiments qu'il éprouve en quittant
le fauteuil de la présidence, et rend hommage à la mémoire des membres
décédés dans le courant de l'année.
Le secrétaire présente, au nom de la Commission des prix, le rapport sur les
travaux et les concours de l’année. Le prix Zographos a été partagé entre
MM. Hatzidakis et Paul Mazon, auteurs, l'un, d'une grammaire comparée du
grec, du latin et du sanscrit, parue sous le titre ᾿Αχκαδημειχὰ ἀναγνώσματα, l'autre,
d'une traduction de l'Orestie d'Eschyle. Le prix Zappas a été attribué à M. le
général de Beylié, pour son ouvrage sur l'Habitation Byzantine.
Le secrétaire-adjoint donne lecture du rapport sur le concours de typographie
grecque, qui ἃ eu lieu cette année, comme il y ἃ deux ans, à Paris et dans les
départements.
M. Egger donne lecture, au nom de la Commission administrative, du rapport
sur l'état des finances de l'Association.
Le scrutin est ouvert par le renouvellement du bureau et du tiers sortant des
membres du Comité. Sont élus : 1 Vice-Président, M. Paul Tannery ; 2° Vice-
Président, M. Paul Guiraud; secrétaire, M. Am. Hauvette; secrétaire-adjoint,
M. Puech ; trésorier, M. Egger. — Sont nommés membres du Comité pour trois
ans : MM. Maurice Croiset, S. Reinach, Schlumberger, Monceaux, Legrand
(Émile), Glachant (Victor) et Bodin.
4 juin 1903. — Présidence de M. Edm. Pottier.
Le Président remercie M. 8. Reinach, président sortant, et annonce au Comité
que M. le duc de Loubat a mis à sa disposition une somme de mille francs, afin
de devenir membre donateur de la Société et membre fondateur pour l'illustra-
tion de la Revue. Des remerctments unanimes sont adressés à M. le duc de Loubat.
Membres nouveaux : MM. Carathéodory (Alex.) et Pelletier (François).
M. Tannery, rendant compte des travaux du congrès international des sciences
historiques, tenu à Rome en 1903, signale un vœu formulé par ce congrès, pour
la publication d'un recueil général des écrivains byzantins (philosophes et
savants) de la Renaissance. M. Tannery a déjà lui-même appuyé ce vœu dans le
Congrès. L'Association donne volontiers son adhésion ἃ un projet qui intéresse
au plus haut point la science.
M. Delamarre donne lecture d'un mémoire sur plusieurs décrets religieux
d'Arkésiné (Amorgos).
2 juillet 1908. — Présidence de M. Edm. Pottier.
Membre décédé : M. Patrocinio da Costa.
ACTES DE L'ASSOCIATION 495
Membres nouveaux : MM. Brizemur, Demargne, Engel, Fossey, Marguerite de
la Charlonie, Messinési (Léonce), Picard (Georges) et Vendryès.
M. Maurice Croiset donne lecture d'une étude, critique et littéraire, sur les
Perses de Timothée. |
M. Ch. Huit détache d’un travail plus général sur Ballanche quelques pages
relatives aux idées de cet écrivain sur l'Alexandrinisme.
M. Oment a eu la bonne fortune de découvrir récemment, dans un formulaire
d'un secrétaire du roi François Ier, une lettre royale, datée de 1529, et relative à
l'organisation du premier cours de grec au Collège de France, cours confié
au savant helléniste Toussaint. M. Omont donne lecture de cette lettre, adressée
à l'évêque de Bayeux.
5 novembre 1903. — Présidence de M. Edm. Pottier.
Membres décédés : MM. Botti et G. Larroumet.
Membres nouveaux : MM. Carra de Vaux, Droz (Alfred), Fournier (Paul)
Rheinart et V. de Swarte.
M. Bréal fait part à l'Association d'une interprétation nouvelle qu’il propose de
donner au mot διάδολος. On explique généralement ce mot, d'après l'étymologie,
par « le calomniateur », ou « l'accusateur, » ou « le trompeur ». Aucun de ces
sens n'est tout à fait satisfaisant. Hérodote présente un emploi du mot διαδάλλειν
qui permet, ce semble, une interprétation meilleure. 11 s'agit de la longue scène
que décrit l'historien entre Aristagoras de Milet et le roi de Sparte Cléomène. Le
tyran de Milet a déployé tout son talent, toute la puissance de son éloquence
persuasive, pour entraîner le Spartiate à la conquête de l'Asie, lui promettant
monts et merveilles. Α la fin, cependant, malgré toute son habileté, il échoue
lorsqu'il a l'imprudence d'avouer que la ville de Suse est à trois mois de la côte :
τἄλλα ἐὼν σοφὸς καὶ διαδάλλων ἐχεῖνον εὖ, ἐν τούτῳ ἐσφάλη (V, 50). Aristagoras, dit
M. Bréal, ne « trompe » pas Cléomène, il l'enjôle, le tente, le séduit. Διάδολος,
c'est le séducteur.
M. S. Reinach n'admet pas que Satan, dans les parties anciennes de la Bible,
soit le « tentateur ». Il est « celui qui s'oppose », ou bien « l'adversaire en
« justice », « l'accusateur ». Le sens de « tentateur » date du temps de saint Paul.
M. Alfred Croiset estime que le sens. de « tromper » convient bien à διαδάλλειν
dans le passage d'Hérodote, et il incline à se contenter de ce sefs, puisque dans
aucun autre texte ne se rencontre le sens de « tenter ».
M. Th. Reinach rappelle que le sens de « tromper » donné à διαθάλλειν est
signalé par Hésychius comme un ionisme.
M. Bréal n'est pas ébranié dans son opinion par ce fait, que le sens proposé
est unique dans la littérature : bien d'autres emplois de la langue populaire
peuvent nous échapper. D'autre part, il considère que, sans aucun doute, dans le
récit de la Genèse, le serpent joue le rôle de « tentateur ».
M. Th. Reinach étudie deux actes d’affranchissement gravés sur un autel, à
Orchomène (Arcadie).
3 décembre 1908. — Présidence de M. Edm. Pottier.
Membre décédé : M. Émile Legrand.
Membres nouveaux : MM. d’Anthonay, Deschemæcher, Grégoire, Macris,
Martin (Fernand), May, Migeon, Roujon et Weil,
<-
496 ACTES DE L'ASSOCIATION
M. Omont lit une note sur deux miniatures du manuscrit grec 2832 de la
Bibliothèque nationale. Ces deux miniatures, qui semblent inspirées des tradi-
tions de l’art antique, se trouvent à la suite d'un recueil des Jdylles de Théocrite,
copié à la fin du xrv° siècle, et qui a appartenu au célèbre Jean Lascaris ; elles
représentent, l'une, Dosiadès, offrant à Apollon le petit poème intitulé l'autel
(βωμός), l’autre, Théocrite, offrant à Pan le poème dont la forme rappelle celle
de la flûte (σύριγξ).
M. S. Reinach pense que la représentation de l’Apollon debout sur un trépied
est d'un grand intérêt, et que l'original dont ces miniatures procèdent peut
remonter au 1er ou au ne siècle de notre ère. M. Diehl se prononce également
dans ce sens. M. Th. Reinach est d'un avis opposé.
M. le capitaine Weil présente un moulage du vase de Phæstos, trouvé en Crète
dans les fouilles dirigées par M. Halbherr et discute l'interprétation donnée par
MM. Halbberr et Savignoni de la scène représentée sur le pourtour de ce vase.
On y voit se dérouler, derrière le personnage principal, une procession où ces
deux savants ont cru reconnaître une armée en marche. M. le capitaine Weil
propose une interprétation toute différente : l'instrument que portent ces pré-
tendus soldats n'est pas une arme, mais un instrument agricole, une sorte de
fourche ou de faux ; nous sommes en présence de moissonneurs, et le défilé est
un défilé rituel, dont le chef est probablement un prêtre. Cette scène rappelle de
très près certaines œuvres égyptiennes, en particulier un bas-relief de Médinet-
Habou (Maspero, Histoire de l'Orient, ἃ. 11, p. 463). M. Weil croit que ce vase
établit un trait d'union entre le monde carien et le monde égéen, et peut servir
d'argument à l'appui de l'opinion, qu'il s'est développé, à l'époque dite mycé-
nienne, dans les îles de la mer Égée et en Asie-Mineure, une civilisation parti-
. Culière, qui n'était ni égyptienne, ni indo-germanique.
M. S. Reinach applaudit à la découverte de M. Weil, et y voit une con8&rma-
tion que l'art de la Crète n’est ni un reflet de l'Égypte, ni l'œuvre de mystérieux
Phéniciens.
M. Pottier fait quelques réserves sur le costume du chef des prétendus mois-
sonneurs : il se demande s'il ne faut pas y reconnaître une cuirasse.
MM. Vasnier, Th. Reinach, Tannery et Michon présentent diverses observations
sur le même sujet.
M. Diehl commence la lecture d'un mémoire sur les origines asiatiques de
l'art byzantin, d'après l'ouvrage de M. Strzygowski, Kleinasien, ein Neuland in
der Kunslgeschichte. Cette lecture sera continuée.
Le Secrétaire,
Am. Hauverre.
OUVRAGES OFFERTS
A LA BIBLIOTHÈQUE DE L'ASSOCIATION
dans les séances de janvier-décembre 1903.
Général de BEYLIÉ, Supplément à L’habitation byzantine, Paris, 1903.
LANGLOIS et SEIGNOBOS, Introduction aux Études historiques, trad. en
grec par M. Sp. Lambros (Bibliothèque Marasiy).
MACAULAY, Histoire d'Angleterre, trad. en grec par Rhoïdis (Bibl. Marasiy).
HERTZBERG, Histoire de la Grèce sous la domination romaine, trad. en
grec par Karolidis (Bibl. Marasly).
MARCHETI, Πλουτολογία, Athènes, 1901.
MILIARAKIS (A.), Ofxoyévsta Mauwv& Athènes, 1902.
MILANI (Luigi AÀ.), I vaso François (estratto dail' Afene e Roma, ottobre 1902).
Ἢ ravnyupic τῆς ἐν!ΠΠανόρμῳ Σύμης ἱερᾶς μονῆς τοῦ ταξιάρχου
Μιχαὴλ τῆς ἐπιλεγομένης τοῦ Πανορμίτου, Samos, 1901.
ΒΙΟΕΆΘΕΟΕΝ (R.), De sonis dialecti Rhodiacae, Upsal, 1902.
MELTEN (G.), De Jus fabula, Upsal, 1901.
HJERTEN (1.), De loco Poeticae Aristoteliae, 1449b 13-16 cum tragædiis
coilato, Upsal, 1904.
BEASLEY (W.), Le cautionnement dans l’ancien droit grec (143. fascicule
de la Bibliothèque de l'École des Hautes-Études).
OMONT, Missions archéologiques françaises aux XVIII: et XVIIe siècles,
2 vol.
PUECH (A.), Recherches sur le discours aux Grecs de Tatien (XVIIT- fasci-
cule de la Bibliothèque de la Faculté des Lettres de l'Université de Paris,
Paris, Alcan, 1903.
LOMBARD, Études d’histoire byzantine, Constantin V, empereur des
Romains (XVI° fascicule de la même Bibliothèque), 1902.
DOSSIOS, Ελληνιχαὶ ἐπιγραφαὶ χαὶ ἐλληνιχὰ χειρογαφὰ ἐν ἸἸασίῳ
Jassy, 1903.
PERNOT (Hubert), 1.110 de Chio, Paris, Maisonneuve, 1903.
RINONAPOLI, La discesa d’Ischtar all’ Inferno, 2° éd. Cagliari, 1903.
Investigations at Assos (Expedition of the archæological Institute of America),
Part. 1, 1902, gr. in-folio.
498 | OUVRAGES OFFERTS
PSICHARI, Γιὰ τὸ ῥωμάιχο θέατρο, Athènes, 1904.
-- Ῥόδα χαὶ μῆλα, {.1, 1902.
-- -- ἀπόσπασμα, 1902.
ΒΟΙΑΤΖΙ, Πίναξ τῶν χαταλήξεων τῶν ῥημάτων τῆς λατινιχῆς
γλώσσης, Athènes, 1901.
BEIS, Χρονογραφικὰ σημειώματα ἐκ τῶν κωδίχων τῆς ἐθνιχῆς
Βιδόλιοθήκης τῆς Ελλάδος (extrait de 1" ᾿Αθηνᾶ).
ARVANITOPOULOS, Ὁ ἔφηδος τῶν ᾿Αντιχυθήρων, Athènes, 1903.
TROPEA, Studi sugli Scriptores historiae Augustae :
IV. Ælio Cardo, vita ὁ frammenti, Messine, 1900.
VI. Intorno alla patria di Adriano Imperatore Padova, 1903.
De RIDDER, Catalogue des vases peints de la Bibliothèque Nationale, t. Il.
KRUMBACHER, Das Problem der neugriechischen Schriftsprache, Mün-
chen, 1903.
CARRA de VAUX, Le livre des appareils pneumatiques et des machines
hydrauliques, par Philon de Byzance, édité d'après les versions arabes
d'Oxford et de Constantinople, et traduit en français, Paris, 1902.
POLITIS, Παροιμίαι, t. IV, 1902.
ELEUTHERIADIS (N.P.), à ἀκίνητος ἰδιοχτησία ἐν Τουρκίᾳ, Athènes, 1903.
CHAVANON, Étude sur les sources principales des Mémorables de
Xénophon (Biblioth. de l'École des Hautes-Études, fase. 140).
BLINKENBERG et K.-F. KINCH, Exploration archéologique de Rhodes
(fondation Ny Carlsberg) (Académie royale des Sciences et des Lettres de
Danemark, extrait du Bulletin, n° 2, 1903).
PHARMAKO WSKY (Β.), Monuments de culture antique, trouvés en Russie.
I. Pierre gravée de l'époque romaine. IJ. Main votive en bronze (extrait du
Bulletin de la Commission impériale archéologique de Saint-Pélersbourg,
3° livr. 1902 (en russe).
— Fragment d'une coupe en terre cuite d'Olbia (en russe).
— Hypogée d’Heurésibios et d'Arété à Olbia (en russe).
EURIPIDE, Iphigenia auf Tauris, éd. par Reiter, Wien, Tempsky, 1903.
APOSTOLIDES (Dr), Origine asiatique des inscriptions préhelléniques de
Lomnos, Le Caire, 1903.
PALLIS (Alex.}, À few notes on the gospels according to St. Mark and
St. Matthew, based chiefly on modern Greek, Liverpool, 1903.
MEUNIER (abbé), Prononciation du latin classique (extrait de la Revue du
Nivernais).
TSAKALOTOS, trad. en grec moderne des Commentaires de César, Athènes, 1903.
GEVAERT et VOLLGRAFF, Les problèmes musicaux d’Aristote, 1903.
KRUMBACHER, Das Mittelgriechisch.
PAPADIMITRACOPOULO, La tradition ancienne et les partisans d’Érasme.
OMONT, Notice du manuscrit nouvellement acquis Lat, 763 de la Biblio-
thèque nationale.
COLARDEAU, Étude sur Épictète, Paris, 1903.
POLITIS, Τὰ Πραξιτέλεια ἀνάγλυφα τῆς Μαντινείας (tirage à part).
HESSELING, ‘EhAnvixai καὶ ὁλλανδικαὶ παροιμίαι (tirage à part).
A LA BIBLIOTHÈQUE DE L'ASSOCIATION 499
BEIS, "Exppaotc κχώδιχος τῆς μητροπόλεως Νοδεμθδασίας xal
Καλαμάτας.
STEPHANOPOLI (Jeanne), Grecs et Bulgares en Macédoine (extrait).
Βουλόδημος, Δοχέμιον περὶ τοῦ ἰδιωτιχοῦ βίου τῶν ἀρχαίων
Ἑλλήνων, t. II.
ZANOS (Panayoti), 8éarpoy ξἑλληνικόν, 3 vol. Athènes, 1903.
STICKNEY, De Hermolai vita, thèse latine, 1903.
KASASIS, L’hellénisme et la Macédoine, 1903.
Comptes rendus de la Φιλεχπαιδευτιχὴ ‘Etatpæsiæ, Athènes, 1900-1,
1902-1.
SERVI, Per l’ubicazione del forum Allieni, Padoue, 1903.
— I dominio mamertino nella Sicilia, Messine. 1903.
REINACH (Th.), Le sarcophage de Sidamara, deux fascicules tirés à part des
Monuments Piot, Paris, 1903.
Périodiques divers.
TABLE DES MATIÈRES
PARTIE ADMINISTRATIVE
Statuts de l'Association ................,.................. pnsssossose Ε
La médaiïlle de l'Association ......................, sus. ἈΝΕ
Souscription permanente pour l'illustration de la Revue....... css
Assemblée générale du 1 mai 1903............. ΝῊ sommes .
Discours de M. Salomon Reinach, président.............,........ .
Rapport de M. Am. Hauvette, secrétaire ........,.,......,....,,..,
Rapport de la Commission administrative..........................
Concours de typographie.......................,....... cnsoseosve
Membres fondateurs de l’Association......... ΝΥ
Membres fondateurs pour les Monuments grecs et l'illustration de la
Bureau, Comité, Commissions........................ ΝΆ EEE .
Membres donateurs................... sonores νον ον ον σον οοοοο σον “90
Liste générale des membres au 1°" décembre 1903
Sociétés correspondantes, périodiques échangés....................,..
Prix décernés dans les concours de l'Association ................ ve...
Prix décernés par l'Association dans les lycées et collèges .....
0006020909 %.. 0505.
PARTIE LITTÉRAIRE
Louis Bréhier...... Un discours inédit de Psellos
Max. Collignon .... De l'origine du type des Pleureuses dans l'art grec.
Maurice Croiset. ... Observations sur les'Perses de Timothée de Milet..
Wilhelm Crônert... Remarques sur les papyrus de Magdola
Franz Cumont..... La Galatie maritime de Ptolémée.....,.............
J. Delamarre. ..... Décrets religieux d'Arkésiné (Amorgos)............
Charles Diehl...... Sur la date de quelques passages du Livre des
Cérémonies...... .......,......,.........s... .
Gustave Glotz...…. Sur la date d'une inscription trouvée à Oiyrpie- ..
ὁ. W. Gœthe...... L'Agamemnon d'Eschyle.........
502 TABLE DES MATIÈRES
George Hatzidakis.. La question de la langue en Grèce...............,. 210
Karl Krumbacher.. Le problème de la langue littéraire néo-grecque..…. 246
Ph. E. Legrand .... Pour l'histoire de la comédie nouvelle............. 349
Étienne Michon.... Trois statues antiques au Louvre.................. 198
H. Omont......... Le premier professeur de langue grecque au Col-
lège de France.................,.....,........... 416
Jules Oppert....... L'année de Méton ..........................,.,,... 5
Paul Perdrizet...,. ΣΦΡΑΓῚΣ ZOAOMQNOS....,........................ 42
Théodore Reinach. Les trépieds de Gélon et de ses frères............. 18
— Les Perses de Timothée............................ 62
-- Inscriptions grecques.........................., 180, 419
Paul Tannery...... Υ e-t-il un nombre géométrique de Platon ?........ 173
CHRONIQUE
Bulletin épigraphique (Émile Bourguet)................................. 84
Bulletin papyrologique (S. de Ricci)..................................,.. 105
Actes de l'Association ...................,......... ue cesse 492
Courrier de Grèce (J. Guillebert)...................... soso 126, 276, 485
Congrès pédagogique d'Athènes .................................s...s 281
BIBLIOGRAPHIE
Bibliographie annuelle des études grecques (C. E. Ruelle) .......... vos. 421
Comptes rendus bibliographiques ...........,..,................. 133, 282, 420
CORRESPONDANCE
Lettre de M. Al. Pallis.................,,........,...,.......... soon 483
Bon à tirer donné le 20 janvier 1904.
Le rédacteur en chef-gérant, Théodore Rermacu.
Le Puy-en-Velay. — Πρ. R, Marchessou, boulevard Carnot, 33.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
28, RUE BONAPARTE, PARIS
HISTOIRE DES LAGIDES
Par A. BOUCHÉ-LECLERCQ
Membre de l’Institut.
Tome I. Les cinq premiers Ptolémées (323-181 av. J.-C.).
Un volume in-8.................................... 8 fr.
IUSTINKXE NN
ET LA CIVILISATION BYZANTINE AU VI: SIÈCLE
Par Ch. DIEHL, correspondant de l’Institut.
Un beau votume gr. in-8, illustré de 200 dessins et 9 planches
hors texte......................................... 25 fr.
Couronné par l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (Prix Saintour).
HISTOIRE LITTÉRAIRE DE L’AFRIQUE CHRÉTIENNE
DEPUIS LES ORIGINES JUSQU'A L’'INVASION ARABE
Par P. MONCEAUX
Deux volumes in-8............................,....... 15 fr.
I. — Tertullien et les origines.
II. — Saint Cyprien et son temps.
LA LOI DE HAMMOURALES
(VERS 2000 AVANT J.-C.)
Par V. SCHEIL
Un volume in-18, avec planche........................ 2 fr.
CODEX BORBONICUS
MANUSCRIT MEXICAIN DE LA BIBLIOTHÈQUE DU PALAIS-BOURBON
(Livre divinatoire et Rituel figuré)
PUBLIÉ EN FAC-SIMILE, AVEC UN COMMENTAIRE EXPLICATIF
Par E.-T. HAMY, membre de l'Institut
Un volume grand in-4° oblong, en un carlon.......... 200 fr.
L'ART COPTE
ÉCOLE D'ALEXANDRIE — ARCHITECTURE MONASTIQUE — SCLLPTURE — PEINTURE — ART SOMPTUAIRE-
Par A. GAYET
Un beau volume grand in-8, richement illustré......... 20 fr.
TERTULLIEN
ÉTUDE SUR SRS SENTIMENTS A L'ÉCARD DE L'EMPIRE ET DE LA SOCIÉTÉ CIVILE
Par Ch. GUIGNEBERT, docteur ès-lettres.
Un volume in-8 de xx1v-616 pages..................... 12 fr.
TABLE DES “MATIÈRES
PARTIE ADMINISTRATIVE
Pages
Membres fondateurs de l'Assoctiation .................. XXXHI
Anciens présidents de l'Association ................... XXXVI
Bureau, comité, commissions......................... XXXVII
Membres donateurs................................... XXXVIIT
Liste générale des membres au 195 décembre 1903 ...... XLVI
Sociétés correspondantes, périodiques échangés........ LXV
Prix décernés par l'Assoctalion................,....... LXVII
PARTIE LITTÉRAIRE
Bibliographie annuelle des Études grecques, par C.-Ë.
RUELLE .................4 44444 esse sos 427
Courrier de Grèce, — J. GUILLEBERT................... 486
Lettre de M. Alex. Pallis.......................,.,.... 483
Actes de l'Association. Ouvrages offerts..... eosssessses 492
Table des matières du tome A V1...................... 501
Le Comité se réunil le premier jeudi non férié de chaque mois,
excepté en août, septembre et octobre. Tousles membres de l’As-
sociation peuvent assister aux séances avec voix consultative.
La Bibliothèque de l'Association, 12, rue de l’Abbaye, est ouverte
le jeudi de 3 ἢ. 1/2 à 4 ἢ. 1/2, et le samedi de 2 à 5 heures.
La Revue des Eludes grecques est publiée cinq fois par an.
Prix d'abonnement : Paris ........................ 10 »
Départements et étranger.................... 11 »
Un numéro séparé........................... 2 50
La Revue est envoyée gratuitement aux membres de l’Associa-
tion pour l’encouragement des études grecques.
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Le Puy, typographie R. Marchessou, boulevard Carnot, 93.
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Cambridge, MAO2138 (617) 495-2413
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