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REVUE
DES
ÉTUDES JUIVES
PUBLICATION TRIMESTRIELLE
DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES JUIVES
V
No 7
JANVIER-MARS 1882.
PARIS
A LA LIBRAIRIE A. DURLAGHER
83***, RUE DE LAFAYETTE
LUS SOUSCRIPTIONS DOIVENT ÊTRE ADRESSEES AU SIEOE DE LA SOCIETK
17, RUE SAINT-GEORGES
La Société des Études juives, voulant assurer
aux Hédacleurs de la Revue une pleine liberté
scientifique^ déclare qu'elle n'accepte point la
responsabilité des articles publiés et qu'elle la laisse
tout entière aux auteurs.
REVUE
DES
ÉTUDES JUIVES
TEKSAILIJ'S
CK RF ET FILS, I M 1' l; I M K U R S
Kl-F, DUPLESSIP, S9
,$^ BEVUE
DES
ÉTUDES JUIVES
PUBLICATION- TRIMESTRIELLE
DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES JUIVES
TOME QUATRIEME
PARIS
\ i,,\ i,i!;i!.\iiîii-, \. nn^i.ACHEn
Kî**'', HTE I.AK.WK ITK
1882
APR26 '^79
loi
LE MEMORBUCII DE MAYENCE
ESSAI SUR LA LITTÉRATURE DES COMPLAINTES
Les chroniques proprement dites, écrites par des auteurs juifs
au moyen âge sont pauvres en renseignements sur Fliistoire des
persécutions des Juiis. Pour reconstituer cette histoire depuis
la destruction du second temple jusqu'à la première croisade, il
faut glaner dans des commentaires hihliques et le Talmud, dans
des réponses de casuistique, dans les ordonnances des rois et
des seigneurs et dans des recueils des conciles, quelques maigres
notes qui ne s'y trouvent qu'accidentellement.
Pour l'époque de la première croisade, R. Eliézer, fils de Nathan,
écrivit un petit récit historique, intitulé l'a'n'n mT^w, Persécu-
tions de Vannée 48-'i6 * (de la création du monde, correspondant
à l'année 1096 de l'ère vulgaire). Un auteur anonyme nous a
laissé un document semblable, publié récemment sous le titre de
ms^i:^!-! mn"'n , les anciennes persécutions-. Pour l'époque de
' Zur Gesc/iichte fier Krenzniige nacJihandschrift lichen hebraïschen Qucllen herausjj:.
von A.Jellinek. Leipz. 18.54. Le ms. hébreu n" 4.'3 de la bibliothèque de TUniversiLé
de Strasbourg renferme ce document (voir le catalogue de M. Landaucr, p. 66)
avec quelques variantes. Nous n'en mentionnerons ici qu'une seule, réservant les
autres pour un travail que nous publierons sur les documents hébreux relatifs aux
croisades. C'est le mot énigmalique -Cnni T^N. • la fête de ^-iTT' », que M. Graetz
explique bien par la fête de S' Jean, qui a lieu le 24 juin et qui tombait, en lO'.tG, lo
premier jour de Thammouz; M. Graetz corrige avec beaucoup de sagacité UJin"^ en
■ÛSrT'. [Oeschichte der Juden (1861), t. VI, p. 430). Le ms. de St. lit tl'WT^; ce
même mot désignant une fête chrétienne se trouve également, d'après les renseigne-
ments de M. Loeb, dans le registre de Dijon. Or \y^rv contient les premières deux
lettres de 'J'H"', Jean, et est en même temps une allusion au passage ClTîbNb HniT
Û-ltT^ (Exode xxii, 18). Nous possédons aussi le même traité de U. Eliézer, beaucoup
plus étendu que celui qui a été publié par M. Jellinek. Nous l'avons trouvé dans un
ms. du Beth hammidrascb de Londres. Ajoutons, dès maintenant, que le ms. est
d'une écriture française.
s Publié par M. Manuhcimer, d'après un manuscrit de la bibliothèque de Darm-
T. rv. 1
2 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
la seconde croisade, nous avons l'ouvrage d'Ephraïm de Bonn*.
Les persécutions sont encore relatées dans des pièces litur-
giques assez nombreuses, connues sous le nom de m^-'p, élégies,
dont une grande partie est imprimée dans les recueils de prières
du rite franco- allemand, appelés û-^nTm^o ; quelques-unes cepen-
dant se trouvent encore en manuscrits-. Les souffrances que les
Juifs ont eu à endurer dans la province ibérique sont également
racontées dans des liturgies du rite hispano-portugais ^ Il en est de
même pour les persécutions d'Afrique et de Pologne. Ce n'est qu'au
xv^ et au xvp siècle qu'Abraham Zakkout*, Judah ibn Verga^
Samuel Usque ^ et Joseph Cohen d'Avignon ' composèrent de vé-
ritables chroniques, dans lesquelles l'histoire des souffrances des
Juifs est parfois minutieusement racontée. Il est indubitable que
ces auteurs ont eu à leur disposition un grand nombre de docu-
stadt, dans le Mat/azin as M. Berliner, dans la 31onatsschnft de M. Graetz, et à part,
en 1880.
1 Imprimé sous le titre de Vp'n'n nTT'W, comme appendice à la traduction
allemande de VEiiiek hah-Bahha par M. Wiener (Leipz. 1858). Le ms n° 45 de
Strasbourg renferme aussi ce document; nous Favons coUationné et nous en don-
nerons les variantes une autre fois. Nous saisissons cette occasion de remercier l'admi-
nistration de cette bibliothèque qui a bien voulu envoyer ce ms. à la bibliothèque
Bodléienne d'Oxford.
* Voyez surtout l'admirable ouvrage de M. Zunz, le vétéran de la littérature rab-
binique, intitulé Die sijnadogale Poésie des Mittelalters^ Berlin 1853 ; Geschirhte der
Jiiden, de M. Graetz, t. YI, p. 219 et Yll, p. 461. Nous donnerons à la suite quelques
autres notices, tirées de notre catalogue des mss. hébreux de la bibliothèque Bod-
léienne à Oxford. Nous espérons que ce catalogue, dont nous corrigeons en ce mo-
ment l'index, paraîtra dans le courant de Tannée 1882.
N" 1025 (col. 223), comm. nb "17:3 py^H suscriplion C^iniaN ^"tl ^i^'' TNT
^"'■'riimD nT^T't hz' 'TTID '^"rî p. N» 103l le nblT, commencement M^DÎN
■^rrsa n"'ribN\ suscriplion i;"«:2-i72 ti7:p cinp ù^n'o:' nno û-^-i«ni< it nbiT
-,"^ '- '^--i-^-pzii niTt by no'^o Vniwi:; in -ip"' . N'^ nos (col. ai 4) rr^^abrû
rrnriN nbin, suscription ci'cr; ■ainip b:> "c-^-^ibn ■'T^Dnbjy • n» 1155 (coi. 349]
commencement TT b"£^^ par Ahron Cassel (Zunz, Litcratarçieschichle dcr syn. Poésie,
p. 380), suscriplion '•> 'n ST^a Nm ^Tipr! inb-^Hp n-i-iîs b:^ tid"^ it rij"^p
p-'^i "{-iroîn 'V-i'n : û-^CTip cn-^-'m t2n"v:;'7pnn-i '-onob p-i^a ii"n^ û-'»'^
N" 1171 (col. 376), commencement "jîiprN"! "jîINrNI suscription '^b"'NT "jN^D^T
112=) "irm;7o pDr; rt-v^w N:n-i p r-nM^-^ '1 n-no r;73T7?:ST . "jo-^n y'-^n
rîTS"^ . N» 1204 [foiirmeiUaii-e sur les prières de li. Elca^ar de Worms] on lit (fol. 259)
r-y-j b:n r.-bv ts-i'r'?:?»^^ i3\-nb3b T^-^hv u''112^•J -mi nn bDni::! NbN
ib-ibrrii i:iDb l-:">:p»-im n-'DbwS 't inrca t;n3 'N3 û-^iirTir! Y'z û-in-iM
-an i;b yav isbi ^;b"'2£!^ n"3p!n mnn ï-inN Dnisbon dn^ n?:ib -ù-^bv
...-icn "^isb û-^^^mb lib ins o^n -^3
' Voyez encore, Zunz, oj), cit., Graetz, op. cit., t. VII, p. 04; Zc/^e;ZiO(/e (périodi-
que publié par M. Rocst û Amsterdam), année Y'I, p. 32.
* Connu sous le titre de "j^Oni"^ "IDO. dernière éd. par Filipowski, Londres, 1857,
' ïmri"^ t2!3"0, traduit en allemand par M. Wiener.
* Consola fam as tribnlaçoès de Ysrael, Fcrrarc, 1553.
' ND2ln "pJ^y, dont M. Julica Séc vient de publier une bonne traduction fran-
çaise avec des notes.
LE MEMORBUCH DE MAYENCE ' 3
ments perdus aujourcriiui, ou qui se trouvent encore en manus-
crits dans des bibliothèques inconnues.
De tout temps le respect pour les morts a été grand, et il Test
encore, parm.i les Juifs. Le deuil est observé de nos jours ri-
goureusement, même par les libres-penseurs ; les enfants mâles
se rendent à la synagogue pour réciter le Qadcliseh ;■ aLuirefois
chacun s'empressait de faire des donations, soit pour la syna-
gogue, soit pour la caisse des pauvres, soit enfin pour l'entretien
des écoles ou des cimetières. Ces donations étaient consignées
dans des livres spéciaux qu'on conservait à la synagogue. Ces
livres sont connus en Allemagne sous le nom de Memorhucliy ou
Mémoriaux : c'est surtout dans les communautés allemandes que
cet usage s'est observé jusqu'au commencement de ce siècle ; en
Pologne et en Hongrie même il n'est pas éteint. Les noms des
bienfaiteurs étaient mentionnés dans une prière spéciale nommée
Hazharah (irtiDîn) dans le rite allemand, parce que la prière com-
mence parle mot 'mrsp, et HaschUcibali (rtaiD'û-) dans le rite por-
tugais. Ce dernier rite ne possédait pas de Memorducli, au moins
à notre connaissance. Les Mémoriaux renferment également les
noms des célébrités rabbiniques du temps, l'étude du Taîmud ayant
été tenue toujours en grand honneur parmi les Juifs ; ils contien-
nent aussi ceux des martyrs morts à différents époques ' . Ces noms
étaient aussi mentionnés dans la Hazkarah, et quelques-uns même
tous les Sabbath.
On comprendra par là l'importance historique de ces ouvrages.
Il est vrai qu'on n'y trouve que des noms de personnes et de lo-
calités, très rarement un fait historique proprement dit; mais ces
noms à eux seuls représentent toute rhis!:oire juive du moyen
âge ; ils appartiennent à ceux qui ont souffert pour le Dieu unique.
La connaissance géographique du moyen âge profitera également
de la connaissance de ces noms de lieux qui portent la dénomi-
nation du temps 2, de même les noms de personnes auront un
grand intérêt pour la lexicographie ^ Les Juifs en effet non seu-
lement adoptaient toujours la langue du pays où ils étaient ac-
cueillis, et cela même dans les écoles et dans les synagogue» '',
1 Dans les écrits des rabbins français du Nord on emploie presque frénéra-
lement l'épithète 'jiUTlpln, • le saint • pour un martyr ; c'est une espèce de canoni-
sation.
« L'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres a mis au concours en 1879 ce sujet
pour le prix ordinaire.
•■' Voyoz Topuscule de M. Zunz, avec le titre Namcn der Jiidcn, Leipz. 1837,
réimprimé avec des additions dans les Gesammeltc Schriften de cet auteur.
* Nous n'avons pas besoin de mentionner l'usage de la langue arabe en Orient et
en Espagne. Nous possédons des traductions en persan de la Bible, des écrits apo-
/, REVUE DES ETUDES JUIVES
mais même donnaient à leurs enfants des noms populaires ; outre
le nom saint ou hébreu, hommes et femmes portaient pour la plu-
part un nom indigène.
Dans ces dernières années on s'est occupé beaucoup de la litté-
rature des MemorJjiicli . L'honneur en revient à M. le D"" A. Jel-
linek, prédicateur à Vienne, qui le premier a publié une partie
d'un Memorhucli concernant les communautés de Worms et de
Vienne ', publication suivie d'additions tirées par nous d'un ma-
nuscrit de la bibliothèque Bodléienne à Oxford-. Le savant hébraï-
sant et théologien, M. W.-H. Lowe de Cambridge, un des meilleurs
connaisseurs de la littérature rabbinique parmi les chrétiens, a
publié une partie du Memorhuch de Nuremberg pour l'année
5109= 1349 ■■* ; il l'a fait précéder d'une courte et intéressante in-
troduction sur les dates des persécutions des Juifs en Allemagne
et dans la France du Nord, jusqu'à l'année 1349. Il l'a accom-
pagnée de notes très instructives sur les noms des personnes * et
des localités mentionnés dans ce document. M. Jcllinek ne s'est
pas arrêté à sa première publication ; il vient de nous donner un
traité qui renferme les noms des martyrs morts en 1349, en diffé-
rentes localités, ainsi que ceux de bienfaiteurs et des rabbins de
Cologne et de Deutz de 1581 à 1816, d'après les Memorhuch de
Deutz et de Coblence ^ M. le grand rabbin Charleville, de Ver-
sailles, a contribué à ce travail par une liste de lieux où des mas-
sacres eurent lieu en 1096, d'après un manuscrit qu'il possède*'.
Nous devons encore mentionner l'article de M. le D"" Perles sur
cryphes el des pièces midraschiques. D'autres traductions existent en grec et en es-
pagnol. Des mots et des phrases françaies sont cités dans les commentaire's de
Rasclii et de ses successeurs, et, comme on peut le voir par l'élégie de Troyes et par
la prière que nous donnons plus loin, le français fut employé dans les sj'nagogues.
Pour l'allemand, les Juifs de Pologne el de Hongrie le parlent encore et le consi-
dèrent avec un certain respect comme langue sacrée, parce que leurs ancêtres le
parlaient.
• Wonns und Wien, Vienne, 1880.
' Dans le Letterfjode, année, VI, p. 67, 130 et 141.
' The Mcmorhooh of NUrenhcrg, London 1881. M. Lowe a bien deviné que le ms.
de Cambridge contient tous les noms des martyrs de l'année 13''i9. Dans lo Memorhuch
de Mayence la liste des martyrs est précédée de la prière "i^lDÎ"^ à plusieurs reprises,
comme cela se trouvait sans doute autrefois dans le ms. de Cambridge. Ajoutons en-
core que Icms. de Mayence porte toujours (à l'exception de deux passages où on lit
Û'^T'W) Û"'"173 au lieu de D"^*T^72 du ms. de (".ambridge. Au lieu de TVQI^ '"I (n° 32), le
ms. de Mayence a i"nN '"1 ; au lieu de "ijUIDp (u° H.'i), le ms de Mayence lif^^LÛ^yp,
à lafin (n" 1î;1), ce ms. porle 1">b3"'73 '73 mina!^ ")nm.
" Le nom de Û"^!rn que M. Lowe croit d'origine arajie nous semble représenter le
nom d'Isaac. En cllet, H. Isserlcin dit expressément (juc 'j"'pn représente lo nom
d'Isaac.
' Miirtynr nnd Memorhuch, Vienne 1881.
" Voyez pour les corrections Jievue^ t. III, p. 280.
LE iMEMORBUCII DE MAYENCE 5
le Memorhuch de Pfersee ' et les extraits que M. le D'- Levin a
donnés de celui de Coblence-. La synagogue de AYorms en pos-
sède également un, qui. contient peu de nouveau après celui de
Maj^ence. Malheureusement l'ancien Memorbuch que feu M. Car-
moly avait vu ^ est perdu, et le nouveau a peu d'intérêt pour nous'*.
Le plus ancien et le plus complet de ces Mémoriaux est celui
qui se trouve maintenant à Mayence et qui appartient à la com-
munauté orthodoxe de cette ville. Grâce à M. le D'' Lehmann qui
s'est empressé avec la plus grande amabilité de nous envoyer cet
important manuscrit à la bibliothèque Bodléienne d'Oxford, nous
allons en donner une description complète, à laquelle nous join-
drons quelques extraits, et surtout une liste relative au massacre
de Nuremberg en 1298. Cette publication complétera le travail de
M. Lowe mentionné plus haut.
Ce manuscrit, qui se compose de trois volumes, provient de la
bibliothèque de feu M. Carmoly et est connu sous le nom de Me-
morbuch de Mayence, pour la seule raison que le manuscrit ap-
partenait jadis à la synagogue de Mayence; à la vérité, comme on
le verra plus loin on pourrait plutôt l'appeler le Memorbuch de
Nuremberg et "même de la Lorraine, à en juger d'après la prière
de "iiiDr qui s'y trouve en français. L'écriture n'est pas partout la
même. La plus ancienne partie est en caractères carrés, elle a
été écrite en 5057 = 1296 par Isaac fils de R. Samuel de Meinin-
gen, comme l'apprend le passage suivant qui se trouve dans le
2" volume de ce manuscrit, après la prière commençant par vd
D-'Oi !^o:?^ et û-^T^nif^ :3N; il se rapporte à la construction d'une
synagogue faite dans la même année.
!:»bDni-!b bH'pT, ib'irinr; rVo-n i"n 'il uv^ ^MH'Cir^ Clbxb unsb ■;"- nrvTn
Ht- liilsT noo %nnns it rr>n "^nrm rin^o'^ai iTO'^r-i ?^c•^nï^ nc^rr; rr^an
. pj-'^i'^^oTj bNi):o -i3 pr;:ii dn- ujnp^rt Tin^bi Nmian ^^-i^ib
Dans Tannée îjO'67 de la création du monde (129G de l'année vul-
gaire), le jeudi 18 kislew, la communauté commença à prier dans la
nouvelle synagogue avec joie et allégresse ; et dans cette même année,
j'ai écrit ce livre de mémoires en l'honneur du Créateur et à la gloire
du nouveau sanctuaire. Isaac, fils de Samuel de Meiningcn.
• Dans la Monatssrhnft do M. Graelz, , année 187;i, p. iJ08. Noire Maiiorbiu-h y
(p. 512) est cité comme s'il était le Memoibuc;h de Mayence.
2 Dans le LitcratiirUatt de la Israelitiscke WochcHSchvift, publié par M. Rahmer a
Magdebourg, année 1881, n»» 40 et 41.
' Voir ci-dessous, p. 28.
" Nous saisissons cette occasion pour remercier M. Higart, grand rabbin de Metz,
et les membres du Consistoire de Metz, pour nous avoir envoj'é le manuscrit à la bi-
ijliotbèque Bodléienne d'Oxlbrd.
6 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Ce passage est suivi d'un morceau en prose cadencée que voici :
. !:"'2"''^: r-Tr::"! . "itbirb Y-i^ . •ï:">''c ",r;Nbi m-i'r, ^7::;'7r .l'^iS"' nb-^nn»
.ts'^mrîN -îsc .bi' , û''mP5 r:?:- isbr; . ii-^nicnj ii'^rra- .s-'m:: n^'rrm
Je me réjouirai en lui (le temple), où le roi, assis à sa table {Can-
tique, I, 4 2), placera sa majesté. Sa bonté y sera abondante, jusqu'à
l'arrivée du Messie. En attendant, R. Samson bâtit (le temple); en
marchant a-vec humilité (avec son Dieu ; Michée, vu, 8) il poussa le
travail, dès le commencement de la fondation, jusqu'à l'achèvement
de sa splendeur. Après l'avoir fini, il alla dans son monde (il mou-
rut). Avec l'assistance des nobles et les dons des hommes généreux,
les constructions furent faites. Leurs noms sont écrits sur le livre des
bien-aimés, qui dorment avec ceux qui reposent dans la terre.
M. Carmol}", dans sa copie de ces deux morceaux sur la pre-
mière feuille moderne de ce volume, dit que cette s^^nagogue fut
construite à Maj^ence. Si cette assertion était prouvée, Isaac au-
rait en effet écrit ce passage de ce Memorbuch à Mayence.
La suite donne la prière commençant par 'jpn'iD ûip"^ et le -nsf'
dépourvu de noms, avec la traduction suivante en français :
(îT^:ri"r) '•:i''yh (-nas'a) in ■'p npi'-ii pniti û'-'isn'i (n'^"::5 -ist":; i^d) N3-j
: "1«N in:? pa û-'p^ni: d:> 'Tn^'«»b
.iTijCr; mnn^a bsn 'j'^T'Idt» mTC'ûsri ûmN
Cette transcription hébraïque est fort incorrecte ; il faut lire i^e-
memra (texte rememer) Dé spirteme... coiime spirteine ("texte
spiriene) . . . Ki ad layés (peut-être faut-il lire lassiés, c'est-à-
dire Zm55ié5). . . pour amor M fesis (faut-il lire W il fesist ?) cil
leruémeréd.
Vient ensuite le morceau suivant :
t!":5-i5 ira'i " :nTT^n ib:3ai mb"'!ip '^^^'2•J irnaiïî brrn ni^oi rt^^b"»:) '-:»
mbnp -.13^ n-'.-j':: bin^r; "îirwo li-^ni :'inmr:i nbns?^ -^rr -r^N^iia
' Les mots entre parenthèses représentent la traduction liébraïque des mots fran-
çais, et se trouvent au-dessus de ceux-ci.
* Corrigé par une main plus récente Ni:;:;'^^ mi^pil rT^^ 15pO ■ qui achetèrent
des terrains pour des cimetières à Ma3'ence » .
' Au-dessus par la môme main T^m3pn3 < par ses règlements pour la commu-
nauté >.
LE MEMORBUCH DE iMAYENCE 7
•in "T^N73 irm tyrbsipT: Di7o Vr:2T0 ■nb'^n ^,'^\)J^ 'pni:-' n?: :bi<-i"::-^3
R. Salomon et sa femme Rachel, qui se sont occupés des intérêts
des communautés pour faire cesser les persécutions; R. Gerson (de-
Metz), qui a éclairé les yeux de la captivité par ses commentaires
(sur le Talmud) ; R. Simon le Grand (de Mayence), qui a pris les inté-
rêts des communautés et a fait cesser les persécutions ; R. Salomon
(de Troyes, connu sous le nom de Raschi), qui a éclairé les yeux de
la captivité par ses commentaires (sur la Bible et le Talmud) ; R. Jacob
(Tarn de Rameru) et son frère, R. Samuel (connu sous le nom de
Raschbam), qui répandaient la loi en Israël, ainsi que tous les au-
tres rabbins qui ont vulgarisé la loi en Israël (par leurs commen-
taires) ; R. Isaac et sa femme, Relia, qui firent abolir les impôts à
Coblence ; R. Meir, fils de Baruch \ qui, lui aussi, répandit la loi en
Israël.
Comme l'élégie de Troyes - qui se récitait en hébreu et en fran-
çais, le msfi se disait dans les deux langues ; à moins de supposer
qu'à Ma3'ence les Juifs parlaient les deux langues, ou qu'il s'y
trouvait une forte colonie des Juifs français, on serait tenté d'at-
tribuer ce Memorincli à une communauté de la Lorraine, peut-
être de Metz. On aurait tort cependant de vouloir conclure de ce
que la majorité des rabbins qui sont nommés dans les n',5T"< sont
français, que ce Memortuch doit avoir été écrit en France. La
réputation de ces rabbins allait si loin, qu'on les trouve cités dans
les Mahazorim de toutes les provinces rhénanes.
Après les feuilles écrites en caractères anciens par Isaac, en
viennent d'antres en écriture carrée également d'une main plus
récente.
Elles nous donnent les noms des martyrs de l'année 5038 à 5059
= r2'78 à 1299, et même de dates plus modernes. Une petite partie
de ces trois volumes est en écriture germanico-rabbinique nommée
d'ordinaire écriture de Raschi, du xv° et du xvi^ siècle.
Parmi ces morceaux, nous signalerons dans le troisième volume
le passage suivant :
pnif^ bïn^2N n)2U53 'dv -^nbïi ^na -i"pln3 bNiwu) '-i n'^'aiî d-'rtVN miDr
1 Né à Kolhcnboiirf; et mort eu prison, à Ensishoim (Haut-Rhin) en 1203. Voyez
Histoire littéraire do la France, t. XXVII, p. 'lïrl et suiv.
* Voyez l'excellent article de M. Darmestcter dans la Jievve, t. II, p. 109 et suiv.
8 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
^a'ipnV '-c^b t'^w'^'^m n-naprî n^nb '-^b û-'nNW rr^^no "in^^'a npr-^n
. . . riî nDï:3 tj^'n^': m^oibb 'L:b û'^ur-'ttm ^^j^^'ci nibc3"i
Voici les noms qu'on mentionne ici, à Nuremberg :
Que Dieu se rappelle Fâme de R. Samuel, le fils du saint (martyr] ;
R. Nathan Lévi, avec les âmes d'Abraham, Isaac et Jacob, parce qu'il
a laissé 200 litlres pour l'entretien du cimetière, 50 littres pour l'hô-
pital, avec un Talith et un Sargenes (vêtement pour les morts), et
50 littres pour les écoles.
En remarquant que les noms des martyrs de Nuremberg de 1349
s'y trouvent trois fois, conjointement avec une autre liste des
martyrs de cette ville de l'année 1298, que nous donnons plus
loin, on serait tenté de prendre ce livre pour le Memorbuch de
Nuremberg. Mais ce qui est le plus probable, c'est que la plus an-
cienne partie de ce document a été écrite dans une ville rhénane
Ijroche de la Lorraine, et qu'on y a fait des additions au fur et à
mesure que les événements le commandaient. Disons encore que
ce ms. contient des feuilles qui n'appartiennent pas à un même ou-
vrage, et que c'est sans doute un de ceux qui l'ont possédé qui les
a fait relier arbitrairement ensemble. En effet, il y a des transpo-
sitions très gênantes et des suscriptions faites par une main plus
moderne, qui sont incorrectes'. Mais tel quel, ce manuscrit est
important pour l'histoire de la martyrologie juive, et à cause de
la liste des donations qui y sont énumérées. Espérons que M. Jel-
linek avec son ardeur bien connue pour la littérature rabbinique,
publiera prochainement in-extenso ce ms. curieux. Gela lui sera
d'autant plus facile que M. Graetz en possède une copie.
Il est temps d'analyser maintenant ce Memorbuch. Le premier
volume, en prenant l'ordre actuel du ms. contient les prières que
nous avons mentionnées plus haut et d-es noms de bienfaiteurs. La
première partie en est écrite par Isaac de Meiningen. Le deuxième
volume renferme les listes des martyrs de différentes époques
et de difï"érentes localités, comme on le verra par les extraits que
nous allons en donner. La première partie, ainsi que quelques
feuilles du milieu et de la fin, est également de la main du pre-
mier copiste. Enfin le troisième volume çst un amas de feuilles re-
' Aiuei nous lisons ù la l'cuille Si"p (la paj^inalion est arbitraire , écrite pur une
niaiu moderne (par M. Carmoly ?), la suscriptiou suivante .:
n": pr>r Ti^n n-i^b i""' '"7 oni p-nn;:2T-i nwTiN "i"';' idtt>:5i -^ro-ir!
tn?: mp:-' '- n: û^3ip;n a-^^rTip nr^u^s d^^^î73^ D-'C>:n -^-o^r^ qb^:»
Les noms qui suivent (en caractères antico-germauiqucs, très oblitérés) no sont autres
que ceux dos martyrs de Nurerabcrf^ de IS/jÔ, publiés par M. Lowe.
LE MEMORBUCH DE MAYE.NCE <}
liées en volume, d'une écriture plus ou mois moderne. Il renferme
des prières, quelques épitaphes, dont quelques-unes écrites par
M. Carmoly (celles de Elle de Loans et de Josselman de Rosheim
petit-fils du fameux Josselraann), des m^T"', Tliistoire de R. Amnon
et de l'institution de la prière Eipin i-;3n3T, également de la main
de M. Carmoly. Ajoutons encore qu'à la fin du deuxième 'volume-
se trouvent les copies faites par M. Carmoly des lieux où les mas-
sacres eurejit lieu\ avec leur dénomination actuelle, qui n'est
pas toujours exacte, ainsi qu'une autre liste d'endroits qu'il a
copiée du Mejiwrbuch de Metz-, perdu à présent. Dans cette
copie, plusieurs noms sont estropiés et par conséquent les iden-
tifications que M. Carmoly en donne n'ont pas de valeur.
Voici la table des matières du second volume de ce Memorbiich :
rricn ST'3 n''\xn 'n '~^zh Virn Nn^'rr ■'jii-n .T'\s-
^;sbu5 nncn '•'-.■«rî?: ::-.Lb V';nn r-,i;r- n-nt?: N-';i5ip ^^T-lr! . it^s
niNa n"3 'T'p'n'n p"nn2£-i''i i:i-nr! . mN
^[b"-,sb 'N's'p'n'n] 'jT'cn rî"s 'ncb tibN Lû-nnnr •':;i-ir! .iro
nnan [T''] tD-iDb 'l'ii'p'n'n Nibn "^riTir! . nna
"inïîn-iT^a ansb 'n'it'p'r'n ^sncrbn ■':n-in .';icn-i73
"12 N"'^i L^n'::! '^ n^nab 'ri'ii'p'n'n û-'-'n'wST::"'^ '^N^nb '':n^r! .isno
l'pcn :;"i -^ccr^ qb^b r-irr-Ni n:-:: t:-mpm -:i-nn . i^o
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' Voyez ci-dessous, p. 28.
* Voyez ci-dessous, p. 28.
' Les mots entre [ ] sont pris dans les listes des noms des martyrs.
' Ce nom est écrit ailleurs NT^lb.
'■ Dans la liste, ce nom est écrit N^j'^^'^p.
'' Dans la liste, ce nom est écrit N"1"j5^N et à la fin de notre table "j-li' '"îbj? .
Voyez Gcschichte der Juden, de ^L Graet/, t. \'I, p. iSl.
' Dans la liste, les mots tT^;"C ÏTT'TJ, • seconde persécution ^ , sont ajoutés.
10 REVUE DES ETUDES JUIVES
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[i;cr!] niN3 b'c:'?: b-j'^ijp",:?^ •':iTir! . -i'7N
Massacre de Sjnre, le jour du SabbaLli, 8 lyyar 4856= 1096.
PFonw^, lés dimanches, 23 lyyar et 1^'' Siwan = 1096
Cologne, le lendemain de Schebouoth 1096.
Maymcc, le mardi 3 Siwan 1096.
Wurtzboiirg, le 22 Adar 4907 = 1147.
Erfurt, le 25 Sivan 4981 =1221.
Fulda, le 17 Tebeth 4696= 1236.
Wolfshagen, le mois de Heschwan 4996= 1235.
Lauda et Bischofsheim, le 10 et le 11 Schebat 4995 = 1235.
Francfort, le 13 Siwan 5001 =1241.
Kitzingm, le 17 Ab 5003 = 1243.
Ortenbourg, Tbischri 5004 = 1243.
Pforzheim, le 20 Thammouz.
Coblence, le 15 Nissan 5025 =1265.
Sinzig, le vendredi 15 lyyar 5026 = 1266.
* Dans la liste, '7"3.
* Dans la liste, on donne ensuite ici les deux noms suivants de martyrs mis à mort
à Bambcrgen4975 = 121!J: p-l3::3n l'ÙM-t'Zi TlID ''"j'O "l5-in3 lDIdS !-î';''p'n'n3
LE MEMORBUCH DE MAYENCE 1 1
Cologne et Neiiss, le 13 et le 21 Thammouz.
Wiebelingen.
Biais, le 20 Siwan 4931 = 1171 *.
Xanien, Aldenahr, MeU, Trêves, Bopart, Dortmimd.
Arnstadt, le 11 et le jeudi 13 Ab 5024= 1264.
Mellrickstadt, le mercredi 2 Nissan 5043 = 1 283.
Kreimiach, le même jour et la même année R. Epbraim, fils de
R. Eliezer le Lévite mourut du supplice de roue.
Maijence, le 7^ jour de Pessah 1283.
Badiarach, 26 âmes périrent le même jour.
Ruckenhausen, 13 personnes furent massacrées, le vendredi
25 Nissan 1288.
Munich, le vendredi 12 Marheschwan 5046 = 1285.
Wissembourg '■ , le vendredi 13 Thammouz 5030 = 1270.
Cobern, le dimanche 29 Tammouz 5046= 1296.
Seberg, le jeudi 23 Eloul 1296.
Cochem, le 23 Nissan 5013 = 1253.
Milnster, le jeudi 4 Ab 5047 = 1287.
Trmmbach, 36 personnes périrent au mois de Thammouz 1287.
TJmringen, les années 1287 et 1288.
Langenstein, le 12 Thiscbri 5048 = 1287.
Hornberg, cinq personnes périrent.
Au.
Bottingen, 21 personnes moururent le 7 lyyar 5058 = 1298.
Neusladt et Windesheim, le lundi le 20 Thammouz de la même
année
Kempen, aux mois de Thammouz et de Siwan 5048= 1288.
Bonn, le vendredi 6 Thamj^ouz delà même année.
Berncatsel, le second Adar 5039 = 1279.
Aldenalir, six jeunes gens suivirent les eaux ^ 5046 = 1289.
Mais la liste des localités où les Juifs eurent à souffrir la torture
et la mort n'est nullement finie avec cette table. Celle-ci se rap-
porte seulement aux feuilles écrites par Isaac de Meiningen. Avant
d'énumérer les autres lieux mentionnés dans ce Memorhuch,
nous allons citer les noms des Juifs massacrés dans quelques villes
de France.
Martyrs de Blois^ (fol. ti:].-
1 On trouvera les noms des martyrs ci-dessous, p. 12.
2 Probablement en Alsace ; ou trouvera ces noms ci-dessous, p. 13.
3 Se sont fait baptiser? .
* Voyez Graetz. Gcschkhte der Jnden, t. VI, p. 219. Les mois entre [ ] ne se trouvent
pas dans la liste de la seconde main (fol. ?:"p). Celte liste est plus correcte que ce le
qui a été écrite par Isaac ; nous l'avons donnée telle quelle, en y ajoutant les vananles
de l'autre liste dans les notes qui suivent.
12 REVUE DES ETLDES JUIVES
'-i] .'iT3>"'>N 'in pn;i^ 'n .'bNir-c '-, i^n.si ûn:73 -12 [']n2 nn] 'ii-.n
pn::'^ 'n bo t^hn rnirt^ 'i • 1" in ne» '-^, . "j-i-n "^3 rt-iin"' 'n . [n-nrii
f-n72 . ûTOtt 'n bï; r-i:;in .limn] bNiwo '-1 ^-i:;it n:"i3 r-1-7: .n:ti"72
i-n» . bm m-î^ . 'm'i^:^ tn"i72 . r;^m;n \-t:;t ba^f:':: /-in r-:;-iî rtNb
û'^':?: rr-.X] . bNT?:"^ 'n mn n:n n-?: . 'inn '-, n^m ri-,o m-iT: . irns::
ï-irb?: r^-i?: . n:n r— ,",72 . -iirr '-, ?-.:nT Q-'-itt f^r.n-] . Nrb:;nN rn-i?:i
fir;:n r^mz -■"'■'bN 'n r-iD
R. Jehiel, fils de R. David le Cohen le pieux, R. Jekoutliiel, fils de
R. Judah le Cohen, R. Judah, fils de R. Samuel, R. Judah, fils de R".
Meïr, R. Raruch, fils de R. Menahem, et son frère, R. Samuel, R. Isaac,
fils de R. Eliézer, R. Judah, fils d'Aaron, R. Moïse, fils de isoun, R.
Judah, frère de Isaac de Trêves (ou de Troj^es), le jeune Pantin, les
femmes pieuses : Pulcelina et ses deux filles, Lea, Madrona, Rona,la
femme de R. Samuel le Hazan, la femme de R. Menahem, Lea, femme
de R. Samuel et ses deux filles, Zephora, Rachel, Zephora, Sarah et
son fils R. Baruch, Hanna, fille de R. Samuel, Miriam ; Eiguelina'^ ;
Miriam, femme de R. Judah ; Hanna : Malkah, fille de R. Eliézer
Hanna, avec une petite fille née dans l'auto-da-fé.
Martyrs de Metz (fol. n::),
irsiTT .pn::'^ -3 r;7jbc 'n .-■■^nt: •-: .^x^rin bNi^-e 'n y-^» ■^:;i-in
r>. Samuel le Gabbin Ctrésorier de la communauté). R. Meïr, R. Sa-
lomon, fils d'Isaac, avec sa femme, en tout 22 âmes.
Martyrs de Troi/es^ (fol. a"i:).
'-1 .ipb:i mrn '^v:^^ ipcni 'j-'b::":;!: pni:-' 'n .c-'-in:::» c-'ei-io
» Suivent les noms de bN'iT:"^ 't "'la niin"^ '"T ;:n;''j '"n.
* NrbxbiD n-)2 riT^onn û-^crr!.
•^ La liste plus rccenle a Tordre suivant: "inCN 'T:"! CHj'Ta 'l r31 "^Tia 'l n31
'721 nrn 'ri '^ns 'n !-i;3t rrnEi: '7:1 bm '7: Gn-riin tct ï-r^b '721
wwN3 mb^w "ir-^r;-! n-.n:;- r::n '7:t n-,-»:; '7: nn^i r;3b7: '7:t nrbr.-'-'N
' Ce nom représente peut-être un diminutif du mot allemand Atnje, a-il, Eifrelein ;
ou le diminuliC du nom Abigail, en ce cas il faut le prononcer Avigalina. Voyez
Zunz, Namen der Jiiden (dans le 20 vol. de ses (Jesawmelte Schriften, t. H, p. G,*) au
mot Âlif/ali, et Lowe, op. cit., p. 2.3 au mol N^'^^l'N, prononcé Avi<rai).
■* Voyez l'article de M. A. Darraesteler dans la Jieviie, t. II. p. l'JH et suiv.
LE MEMORBUCH DE MAYENCE 13
R. Isaac Chastelain (Châtelain), sa femme, ses deux fils et sa bru ;
R. Isaac le Cohen ; R. Salomon, fils de Vivas (Hayyim) Gabbai (tré-
sorier) de Brinay ; R. Hayyim, de Chaourse ; R. Simon Sofer (scribe);
R. Rendit, d'Aviré ; R. Jona et R. Simon, gendre de Kadmeneth.
Martyrs de Wissenibourg * parmi lesquels on trouve
plusieurs prosélytes (fol. X2":i).
'inr; . ';ii'):'û -in ^u:72 'n . r;n73 nn^7:m V'^p V"^^^"'^ ino-^^ns d-^p-'is:
pru:-^ '1 . ï-iDni£» thn iinm bN^-^"lp•l 1:3 do-i:* "i .rT?2bo 13 "jt:;?:'::
ï^srbin rrn^o in^in t^tn na pn^i '-1 . tj'Cîr! '«riT^p by Ei-iiDsr; nmnN p
lr:5m>3 '^ 121x2 rn:D3 cist' 'la mnnn pn^i '-1 • ûiarj iinii by loior::
. t]T::;i :\nr;3n ;rinpn lînrr bN-i:':-:^ na ansN '-, . a-nni^T'-i b!-rp n-i2::b
on72":j û-^an-i- bDb •ûtî-i rr^rro nsiiCTo iraN ûrr-inx -la ûrriax '-i
nrinawx 'n . d'ûri mn*^-^ b::' si^'':35i û-'Tobir -^ri •'DiD bi:a monb Nai ci-^T^b::
• û-'T^bi: ■^'CîNi yi:pi □r^s'rî -^rib^ dn»^ pm^ta-^iNT^ iraN ûrriaN p
•ON'na .ûcrs /5iri' by sinc;i yap imo'^a -iDi-^nST -ti-^rj^TJ -^na n-jan
is-^aN d!-î-iaN "ja pnii:'' 'n .'^0':5r! t]bî<b unsb r!"D 'i dt^ T^boa) 'cnn
. ûiiîrt mn^-^ b3? rj-i'^iis p-naitTi^
Voici les sept hommes pieux qui subirent la torture et moururent
d'une mort amère : R. Moïse, fils de R. Simon; R. Samson, fils- de R.
Salomon ; R. Gersom, fils de R. Jekuthiel, avec un jeune homme fran-
çais ; R. Isaac, fils d'Abraham (un prosélyte?), brûlé pour la sainteté
de Dieu; R. Isaac, fils de R. Ascher, avec sa femme, Dolça, brûlés
pour l'unité de Dieu; le jeune R. Isaac, fils de R. Joseph, mort du
supplice de la roue en expiation pour la communauté deWurtzbourg;
R. Ephraïm, fils de R. Samuel le Hazan, martyr par le feu; R. Abra-
ham, fils du patriarche Abraham* de France, supérieur des Déchaus-
sés, qui quitta sa religion pour venir s'abriter à l'ombre des ailes de
celui qui est éternel, brûlé pour l'unité de Dieu; R. Abraham, fils du
patriarche Abraham d'Augsbourg, qui quitta sa religion pour se con-
fier à celui qui vit éternellement, subit la torture et fut brûlé pour
l'unité de Dieu, le jour de la uéoménie de kislew, le vendredi, en
l'année de la création 5025 (=4264 de l'ère vulgaire); R. Isaac, fils
• Nous ne sommes pas sûrs que toutes ceo personnes aient été mises k mort à \\ is-
sembourg. Nous les donnons comme telles d'après l'indication du texte. Il est curieux
de voir que, malgré les persécutions continuelles, des chrétiens embrassaient la
foi juive. Voyez Perles, Monatsschrift, 187'.5, p. !)14.
* Au-dessus on trouve un 2 = p"na!3'0'^T.
3 Le père des prosélytes est toujours Abraham le patriarche, qui, d'après la tradi-
tion, a le premier renié les idoles et prêche l'unité de Dieu.
14 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
du patriarche Abraham de Wurtzbourg, qui fut brûlé pour l'unité
de Dieu.
Voici ensuite une liste de localités où eurent lieu des massacres
de Juifs à différentes époques :
Ratisbonne (Regensburg p-na'^Jii'i), le 28 lyyar,
Prague (N5"i3), le jour de Schebouoth.
Les martyrs du pays de Kanaan ('i3>22i, pays Slaves] *.
Les martyrs de la France (nD"ii:).
Halle (Nbn), le 26 Nissan.
Autodafé à Corbeil.
Les martyrs des îles de la trier (d"^n ■^\^ ; Angleterre).
Londres (i!5"n:ib), 4,500 personnes en l'année 5024 = 1264.
Nassau (? N-^^û3), en 5037 = 1277.
La femme Hannah brûlée à Salzbourg (p"nD2£bT).
Meiningen, en 5003 = 1243.
Presboîcrg (p'n3T"'"ic), R. Jonah et ses collègues.
Neustadt (en Autriche).
Vienne (Nj"^i).
Ziegenhageii (Ziegenhain N5ii3:*'^2£).
Jidicli (N^bi:.).
Kirchberg (p-ir^ST^p), en 5047=1287.
Lechenich ('^"^d^V), la même année.
Kira (N"i"'P), dix personnes y périrent le 1 1 Thischri 5048 = 1287.
Premisl (? Nbo-^^^iD).
Anjou (? nn'^?:^).
Ueimbach (^■>n?2-^iN).
Heilbronn (NSinnb-'-'n), le dimanche 12 Heschwan, 5059 = 1298.
Widdern CinTii), le 19 Ab 5048 = 1288.
Rlieinheim (? û-'"'Dr'^n), mardi 15 Kislew 5062 = 1301 -.
•«Tsu:-^! (Weissensee'i), le 2 Nissan 5064= 1304.
Nibip [CoUeda'i)
N-j-j;r5-Ji (Tennstaedfi]
Constance (Ni:3:3t:np). le mercredi 18 Siwan 5086= 1326.
Ham (nn) ».
Rolhenburg (imisain) \
Pour l'année 1298, les endroits suivants sont énumérés :
' Sur l'applicatioa de ce nom aux pays slaves, voyez llarkavvy, Die Judcn und die
Slavi.schen ^prac/ien, 1807, p. '20.
^ 11 osl douteux que ^Ti désigne la localité française de Ham (dép. de la Somme)
comme M. Graetz [Gescli. dcr Juden, t. VI. p. ^i^'.\] le veut.
* Parmi les martyrs on mentionne le nom de R. Misçé OD"lS!l, probablement
l'auteur de l'ouvrage de casuistique DSID "IDO (voir le catalogue de Turin 1881,
p. 10;)). La date du massacre niaii([uc.
LE MEMORBUCH DE MAYENCE 16
Berching [yA'y^'zn^ii), le dimanche 16 Ab.
IvThofen (';mr:2\s), le lundi 19 Thammouz.
Kitzingen^ le même jour.
Oclisenfurt (UTnj'^jniN), le dimanche soir, 18 Thammouz.
Wîcrfzbourg, le mercredi 1o Ab.
Sindringen (pr^n^T), le lundi 19 Ab.
Mergentheim {û"'i~:::;:i")}3), le même jour.
Mekkelsmuhle (? NbiTriûp-^TD), le 1 5 Ab.
Krautheim (Q-^-^naTip), le 16 Ab.
Moshaclh (^nn^a), le 18 Ab^
Biscîtofsheim (à Gamburg pm353>), le 14 Ab.
Garth (NHJ-iS), le dimanche 8 Elloul.
Weinheim (û'^'^r^j'^i), dans la synagogue, le 13 Thischri 3039 =
1298 (la mention de l'année est de l'écriture de M. Carmoly).
Enfin voici les noms de ceux qui furent massacrés et brûlés à
Nuremberg, le vendredi le 26 Ab 5058 = 1298, nous publions cette
liste in-extenso. Parmi eux se trouve l'auteur du ■^i'^n^a, R. Mar-
dochéeben Hillel.
'on bN-Ti-" ^3 HDD '-\ . i-i-^in 'm NanT nn» irm i-^biin niTo "in"::Ni 'an
• ^<a■^:^ nn» iîTwNt 'or; b.s-^rr^ -in e^cv 'n . -ii':i V^-"'"'^ ^"^ inuiNi
ri3m psrt ^1-13 riDST "inn- "jrîDn np^-^ ri32i !-!a» 'n nn n^t: t-n?jT
i-Timsa '^J•Q^ x^b-^'^Ti T^-m ij-tcni insr; 'n\x?2 nn pn^i"' 'n . 'in^ri i^js^j
. n:>3T in'Jiîi^-i iriDn priii-^ na riT^b-:: '-i . rnx r•^-\:>':^ n;i7::"'-'?: mn7D
l^in ûrri^N in -i">::.s -i"nr: . nn^'ari mm "jn^ri b^'n"» na û^i-ûn 'n
nmnN -13 ppb- . insr; dn-i3N nn bi<n?30 'n • n^'ST i-^bsn-in ma ipont
'^"na -i3 '2-p'j-' -1 . no^irîbnN J-i-^,73 incNi "[non npr-' nn ']Tn3 '■^ . inors
tmni "1 -nnnrî 1331 b^^::-^-' n-i» m-w^i por: 3pri n3 b.si^ro '-1 . pi^rt
':n inajîT inarr npri -a rrcTa '1 pon apr-» 13 bis-^n-^ 'n . id-cnt irirr;
In2 Ynn . n"';3 'm pb:-i3 n-i7: in^L'Ni 'iriz'n "jna -i3 oitt^rbp 'n . T133
. iriDn Di):'^:ibp -13 -^Din» 'n .' v:3 ':ii xnbia n-,?3 "idcnt "{nDr! or:3"'Sibp -i3
bî<"im -13 yrT^ '-1 . tij3 'rii Nrn ni» inCNT l-or: bN-^rr» -i3 pn::-^ '-i
. T'33 'ni n:-»» J-ntt in'CJNi inm bwX'^m n3 bxiT^o 'n . inCwST i-^n
rnTo ir-i^iîNi inorr Dm3.s 13 bxiao '1 . nn3rî inon nitj^ '1 i;3t
1 Parmi les noms des martyrs, on trouve les noms de 'i3 'jnpïM bNT^'»15 'l
y3'0 P3 'm irilTT ITJ'bN '1. Ce R. Samuel le Ponctuateur est sans doute le même
qui a copié une Bible en 12G0. Voyez dans le l'^DTTCin de M. Steinschucider, n» 109
et Wickes. Trcatisc of accentuation, Oxford, 1881, p. ix, noie ii.
* Cette feuille se trouve séparée des suivantes ; nous voyons cependant qu'elle ap-
partient au même documeut, à eu jufçer par le nombre 730 des martyrs qu'où donne
à la lin et qui s'accorde ù peu près avec notre liste.
1G REVUE DES ÉTUDES JUIVES
L^TîV-N 5— .-?o li-^'wNT \r,^T, i:r:-2N -:2 j-.rr^-^ '■? . £r;^:2 ':;n L2-^"'r:i'^-i
t:r:"'.2N -3 sidt" '-! . *rcN n-ti ir'rNT \i-,^Ti ci-innN nn bx'^'c-' 'n . -i;';i
d-i^n -^2 ûm2N '-1 • Nrr r^-i72 in-rNi 1-rr: rj-'^oTr;-' "i"nr; p 2p;"i
npr-^ '-) . 2-r; ^::b •ii?:b":; N-^îib-ip^: n-^rrirr; ûtiwN "^m ' n"p:m;'^ irrrr:
nr-i'wNT "irirr; rr^-^ in ûrt-nx 'i . Nb-^n J—- ?: irm v:m ';r:2T; "j-riN nn
i-i'Hti ir-wNi ipTn -^ibn rî'vT» nn -ni 'n . l^rr; ap:'i -a "j-^riN 'n . i^:n '^-i
•pr:^"^ '-I -.innr; i;m r::n r^-,": -,rCwXT vrr; pr:::'" -,n Vnt:'^ 'n . l-^b::-:.
-,3 Vn" wi '-1 . T^:3 '-■] l:— ':: M rr-.Ta nri:'Ni iibM tici-i nn pniti 'n . •»ibri
bN\n-,p-' -in VNn7:t:J 'n . ■'ibr; nr;r: i^'^-'X'Cj - v:n ':ii inv^NT "^nb!-! n-^-^o
•-3 '[li'K'::; n"nr; . -.j^*:! n?:-'^ m72 inm . T^:n '-n i-;;n Jn-iTo iriiîNi "«"ibr:
Dir-'Sibp 'n . N'wS nn?3 nnai T^niîn '-n 'j'^bi:-:"'r! i-i'i^o ir">:iNi -.ibr! r;u;72
ï-n» nncNi ■'irr: 'îirw:: n"nr; p r:?:r.:i 'n . V-^'i^ ïi"'''^ nr\rNi -iibrr
ï:r;-,2N nn mir;'' '"i . n;*^» m73 ipu^ni '•ibî-; c-'p-'bN "in "jns '-i . i-^biN
ï-iiw irTûîNT ^ibTi ï-!'wtt 12 û'^'T! '-1 . T^ra ':;t i-^bm f-i-i?: irr^rNi -^ib!-!
nrs -."n- . xibis r^-?: "ir">:îi;i "^ibr: ncD m "îpT!-: bNi7:'j 'i . nrm NLir-^
■^ibr^ bNn?20 13 fp-^bN '"! . T'in 'jt "j-^biin ïn".T2 ir'wNn -^ib!-; bNi7:'J 13
• !-i;n i-i-i'^ ir^'N^ ^'^r- bwS^-^c "3 3p;-i 'i . '-rrn N:::3'^n miT: iruiNi
'n . b2ib ?niy: ir^Ni -^ibrr ncD -,3 bNT;i 'i . "^-ibr; ncs -.3 bNi!^c 'n
. ■'ib^; bNi^ïO 13 cn-nwX 'i ■ s^^r^ia mi^ in":;Ni -^ibrî i-^nw 13 i'::n
• ■'-ibi; bN"i7:o 'i i:m -p;3 'm n:i-3 ni72 ipcnt "^ibi; ic^bN 13 t:;n 'i
rpyi 13 NPsbn 'i . ■.■^;3 'm Nib'T r-,i?3 ir-w'Nn bbn i3 "'mi'a 'i nii:
TwN 'i . l'^bis"':^ n-"^ iP'wNi i;'w73 '1 . 1^:3 ':n N'rbnj ni» ip-^riNT
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■'pno 13 ipTi-r bxr '1 . nn3ir ■'3';i72 '1 1531 ab"'3 ni): ipiiîni pni:->
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iTr-^bN 13 ^3ni» '1 . sn:» '1 p3 Nr^: m» . ir;T ybn::5 m» ip-cni
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LE xMEMORBUCH DE MAYENGE . 17
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'1 be imiT n:i3 '17: . rû'^ii: '172 id^tni pn^t"' 13 S]DT' '1 . iy:i! 1331
i":5N 13 bN-^n-' '1 . !i'^23 'm pnif '1 n3 i-!p3i '172 . rr^n "ii ■lû'^'73''3
. !-;-ij3 'n NiiD '172 . i">::n i:>5m !ie72 '1 n3 bni 'i7o . rt:n '172 linu^Ni
"inuîtîi u]'>:::i5 13 pn::^-' '1 . v:3 ':;i ybi^'j: 'i7o m'^NT pnif 13 ûair^ '1
cjoi"' 13 i;7:b\:: '1 . n"^53 'm yL^-^-^?: '17: nnuJNn bNi7:"*:i 13 itoVj '1 . li'jT
b^n?:'»:: '1 . 1:^:3 'n nitiit '172 ir^zj^i t\ov 13 ipTr; bxTT^ '1 . in":;NT
'm rr^Ti: '17: nn\:;Ni bNn730 13 tioT^ '1 . Mbiii '172 irr^i^NT n!r;i3N 13
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'1 n3 ybn^ inir;m . ■i"^33 'ni Nitanso 'i7j inujwNi ^c^^ 13 r;m!T^ '1
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.T^33 '3-1 'j-'bij'^i m72 in-^iJuSi ^113 13 iTi'-^bN i"nr; .i:':t V--12 ï"'"'''^
T. IV. 2
18 REVUE DES ETUDES JUIVES
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.r!^33 ';t û^-^n '1 nn n3^7: m?: .n02 '1 21^; n2 -j^-ptr^ h^.^Tj ni?: .r:bin2rî
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'1 n2 r;2n m?: icwx '1 »i2 Nb'TN ni^ inar: pnit"^ '1 n2 n5"^?: m?:
ni?: . nipTr: r;p2i ni?: . irrrr; bxi?:":: '1 nn r;;^pTr; Nb-'2 m?: bN-^im:?
n-?: rTnn2r; r;n2-i :::r2b-iwS' ni?: . pirr; ^^-\:l r;;2i !:r;i2N '1 n2 tîniT
•ir:r: ap^'^ r;:2i irirr: in: '1 n2 Nibi;, ni?: r!:ipT- bs""?: ni?: .N-^'^b"'::
. p-r; 2pr^ '1 n2 aib-^.: ni?: . --^in '21 pan 2p::>i '1 n2 l-'bbr ni?:
ni?: .vjî?: i"n- 12 i:?:r; pm:*^ r;:2T -^rni?: 'i na niinni; i-'b;in ni?:
l-'bby ni?: r;;n ni?: rr^in ';i i-^n?: '1 na £]ibnN ni?: . i;:ipTr: i-^b-jT^
• r;:2T i-^bitTi ni?: .ir;ri ï-j32i
'^■'•^àr ûi n7:p; i"'^:?:3 a-^'wTipn ieo?2T
Liste des martyrs tués et hrnlés à Nuremberg, le vendredi 22 al
:;(hï8A. M.^ - [juillet) 42i)8.
H. Yehiel fils de R. Menahem le Cohen avec sa femme Ilannah et
trois fils; R. Abraham le Cohen de Francfort avec son gendre le
jeune Samuel fils d'Abraham le Cohen ; R. Abraham le Cohen, chef
de la communauté, avec sa femme Bonneliue', sa fille Zussa et les
' DiiDiiiulir (1« Uonue.
. LE MEMORBUCH DE MAYENCE 19
deux fils de celle-ci ; R. Pessah lils de R. Yehiel le Cohen avec sa
femme Bruaeline ' et un garçon ; R. Joseph fils de Yehiel le Cohen
avec sa femme Gemma; la femme Mina fille de R. Moïse avec ses
fils, Jacob le Cohen, fiancé, Baruch et Meïr ; R. Isaac fils de R. Meïr
le Cohen avec sa femme Hitslin - et ses deux filles Moïraona et une
jeune fille; R. Salomon fils de R. Isaac le Cohen avec sa femme et un
jeune garçon ; R. Abraham fils de Yehiel le Cohen avec sa jeune fille ;
R. Ascher fils de R. Abraham le Cohen avec sa femme Bruneline
et un garçon; R. Samuel fils de R. Abraham le Cohen; Seligman
fils de R. Abraham le Cohen ; R. Baruch fils de R. Jacob le Cohen
avec sa femme Adelheid; R. Jacob fils de R. Baruch le Cohen; R.
Samuel fils de R. Jacob le Cohen avec sa femme Yentil ^ son fils, l'a-
dolescent R. Juda et sa femme ; R. Yehiel fils de R. Jacob le Cohen ;
R. Y'ehiel fils de R. Jacob le Cohen ; R. Moïse fils de R. Jacob le
Cohen avec sa femme et ses trois fils ; R. Calonymos fils de R. Na-
than le Cohen avec sa femme Bonneline et ses cinq fils ; R. Nathan
fils de R. Calonj-mos le Cohen avec sa femme Golda et ses trois fils,
Mardochce fils de R. Calonymos le Cohen ; R. Isaac fils de R. Yehiel
le Cohen avec sa femme Heuna -, et ses cinq fils ; R. Yoeç fils de R.
Y'ehiel le Cohen avec sa femme ; R. Samuel fils de R. Yehiel le Cohen
avÊC sa femme Mina et ses quatre fils ; son fils R. Ezra le Cohen l'ado-
lescent ; R. Samuel fils d'Abraham avec sa femme Reichheit et leurs
trois lils ; R. Isaac fils de R. Abraham le Cohen avec sa femme Adel-
heid et un garçon ; R. Israël fils de R. Abraham le Cohen avec sa
femme Eslher ; R. Joseph fils de R. Abraham le Cohen avec sa femme
Gemma ; le jeune Abraham fils de R. Yehiel le Cohen avec sa femme ;
R. Jacob fils deR. Yehosiphyah (Joseph; avec sa femme Ella ; R. Abra-
ham fils deR. Hakim^lc Cohen de Spire; deux frères de Cologne, Co-
hanim, qui fréquentèrent l'école; R. Jacob fils de R. Aaron le Cohen
avec ses fils et sa fille Bella ; R. Abraham fils de R. Moïse le Cohen
avec sa femme et ses trois fils ; R. Aaron fils de R. Jacob le Cohen. R.
David fils de R. Moïse le- lévite, le vieux, avec sa femme Gutline; R.
Y''ehiel fils de R. Isaac le lévite avec sa femme Hannah et son fils le
jeune R. Isaac le lévite ; R. Isaac fils de R. Joseph le lévite avec sa
femme Guteret et cinq fils; R. Israël fils de R. Schemarya le lévite
avec sa femme et trois fils ; le jeune Schemarya le lévite ; R. Samuel
fils de R. Yekuthiel le lévite avec sa femme Ilannah et quatre fils; sa
fille Gemma et un garçon ; R. Siméon fils de R. Moïse le lévite avec
sa femme Ilerzlin, ses quatre fils et sa fille Pessa^; R. Calonymos le
lévite avec sa femme Gutline ; R. Salomon lils dcR. Siméon le lévite
' Diminulir de Bnine,
- Voyez Lowe, op. ri/., ]>. 24.
' Probablement Gentille. Voyez cependant, Lo\ve, op. cit., p. 2"i.
* Hannah ?
5 Isaac? Voir ci-dessus, p. 'i, note /i.
'' Probablement le Bess, l'orme anglaise pour Elisubetb. Comparez Peslia ou Pessel.
Voyez, Lowe, op. cit., p. 20.
20 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
avec sa femme Adeline ; R. Nathan fils de R. Elyakim le lévite avec sa
femme Mina ; R. Juda fils de R. Abraham le lévite avec sa femme
Rachlin' et trois fils ; R. Hayyim fils de R. Moïse le lévite avec sa
femme Yenta* et sa fille; R. Samuel, le vieux, fils de R. Pessah le
lévite avec sa femme Golda ; R. Pessah fils de R. Samuel le lévite avec
sa femme Ronneline et trois fils; R. Elyakim fils de R. Samuel le lévite
avec sa femme Reichenza * et un garçon; R. Jacob fils de R. Samuel
le lévite avec sa femme Hannah ; R. Samuel fils de R. Pessah le lévite ;
R. Yehiel fils de R. Pessah le lévite avec sa femme Lûbel''; R. Ascher
fils de R. Meïr le lévite avec sa femme Gottlieb ^ ; R. Abraham fils de
R. Samuel le lévite ; R. Ascher fils de R. Eliézer le lévite avec sa
femme Brune, ses cinq fils et son fils R. Samuel le lévite. — Le grand
rabbin R. Mardochée fils de R. Hillel avec sa femme Zelda** et cinq fils ;
R. Halaftha fils de R. Jacob avec sa femme Golda et trois fils ; R. Moïse
avec sa femme Tsiperlin ; R. Ascher avec sa femme Senoria '^ et deux
fils;R. Siméon fils de R. Joseph avec sa femme Liebste**; R. Moïse avec
son fils le jeune Bera ; R. Samuel fils de R. Joseph avec sa femme
Esther et deux fils ; R. Abraham fils de R. Gersom avec sa femme
Yeruschahet quatre fils; la femme Mina fille de R. Nathan le Cohen
et cinq fils ; R. Moïse fils de R. Yoëç avec sa femme Youllin * et quatre
fils; la femme Rechila fille de R. Nathan le Cohen avec ses trois fils ;
R. Yoëç fils de Tobiyyah avec sa femme Reichlin; R. Salomou fils de
R. Yehiel le vieux ; Sara, femme de R. Baruch fils de R. Yehiel ; R. Sa-
muel, le vieux, fils de R. Samuel ; la femme Hannah fille de R. Isaac;
R. Jacob, le vieux, fils de R. Schabbathai avec sa femme Guta, son fils
le jeune Bernedet et sa fille Mina avec ses quatre fils; la femme Kai-
serin fille de R. Baruch avec ses cinq fils ; la femme Michal avec sa
fille Tserouyah ; R. Juda avec sa femme Zephorah et ses deux filles ;
la jeune fille Reichline ; R. Joseph fils de R. Isaac avec sa femme Bel-
let et son fils l'adolescent R. Mardochée ; R. Yoël, le vieux, fils de R.
Schabbathai avec sa femme ïserif, sa fille Esther et Yoël le jeune;
R. Isaac fils de R. Samuel avec sa femme Goldeline et cinq fils ; R.
Nathan fils de Orschraga" avec sa femme Susse et trois fils; R. Ju-
dah fils de R. Yoeç avec sa femme Relèvent et trois fils ; R. Isaac fils
de Calonymos avec sa femme Yechlin '* et un garçon ; R. Jacob fils de
R. Moïse avec sa femme Golda ; R. Ascher fils de R. Judah l'adoles-
' Diminutif de Rachel.
' Probablement Jeannette. \'oycz, Lowe, op. cit. 25.
' Diminutif de Iteich.
* Diminutif de Lieb ou Luba.
5 Uu Gutlin, Lowe, op. cit., p, 23.
^ Peut-être le nom slave Zlata, Or, correspondant à Golda.
' Voyez cependant Lowe, op. cit. p. 27 au mot N'^'^"l31î23-
" Peut-être Lihussa, Zunz, Namen der Judcn, p. 4G.
' Voyez Lowe, oj). cit., p. 2o.
"> Peut-être Zieralh, comparez le nom Tsirl.
" Correspond à t'civesch, Phœbus.
" Voyez Lowi^. np. cit., p. 2'.'», au mot L;;~"^. Peul-êlre faudrail-il lire 'J"'Vz"1.
LI-: iMK.MUHHUCll DE MAYENCK 21
cent avec sa femme Richautsa ; Joseph fils de saiut (martyr) R.
Isaac ; R. Ephraïm fils de R. Mardochée avec sa femme Mina et
trois fils ; R. Samuel fils de R. Ephraïm avec sa femme Gneudeline
et un garçon ; Mina fille de R. Menahem ; R. Mardochée, fils de
R. Eliézer avec sa femme Reichlin, un garçon, et une vierge la
fille de R. Vivelin'; R. Yehiel, le vieux, fils de R. Othniel avec
sa femme Ilannah et un jeune fils; R. Baruch fils de R. Moïse
avec sa femme Gutline et quatre fils; R. Abraham fils de R. Baruch
avec sa femme Reichlin ; R. Salomon fils de R. Isaac avec sa
femme Gutart^ et ses fils; R. Isaac avec sa femme Michal et ses
deux fils ; R. Salomon fils de R. Moïse, le vieux, avec sa femme
Schœnfrau^ et ses quatre fils; Lutsa'' fille de R. Simhah, femme
de R. Jérémie ; le jeune Ohadyah fils de Jérémie et la jeune fille
Goldeline fille de R. Jérémie; R. Isaac fils de R. Jérémie avec sa
femme Salveda et quatre fils ; R. Samuel fils de R. Jérémie avec
sa femme Minkelich et le jeune Meïr; R. Abraham fils de R. Jéré-
mie ; R. Pessah fils de R. Yerahmiel avec sa femme Belletta, qui
furent tués et brûlés du vivant de leur père ; R. Yehiel, l'adoles-
cent, fils du saint R. Eliézer avec sa femme Esther; la femme
Gutline fille de R. Menahem et ses quatre fils; R. Senior fils de R.
Yehiel avec sa femme Zephora et cinq fils ; R. Pessah fils de R.
Simhah avec sa femme et quatre fils ; la femme Goldeline fille de
R. Pessah ; R. David fils de R. Juda avec sa femme et un garçon ;
R. Juda fils de R. Moïse avec sa femme Bouline et quatre fils; R.
Jacob fils de R. Orscheraga avec sa femme Sarah et quatre fils ; R.
Juda fils de R. Moïse avec sa femme Reichlin et quatre fils; Rosa, un
garçon et sa sœur Hefzi-bah, enfants de R. Joseph ; Tilia (Mathilde)
fille de R. Juda ; R. Isaac fils de R. Samson avec sa femme Mineline
et cinq fils ; R. Yehiel fils de R. Isaac avec sa femme Mina ; R. Azarie
fils de R. Samuel ; R. Hananel fils de R. Samson avec sa femme
Tsorline^ et quatre fils ; R. Néhémie fils de R. Samson avec sa femme
Tsorline ; R. Hakim fils de R. Ascher avec sa femme Hanline et quatre
fils ; R. Gedaliah fils de R. Hakim ; R. Abraham fils de R. Baruch avec
sa femme Rebecca ; R. Ascher fils de R. Hakim avec quatre fils ; R.
Israël fils de R. Y'oëç avec sa femme Gutline et quatre fils ; R. Meïr
fils de R. Yoëç avec sa femme Schoenlin et un garçon ; R. Orschraga
fils de R. Salomon avec sa femme Brune et cinq enfants ; Ilanline
fille de R. Salomon et un garçon ; R. Liberman fils de R. Isaac avec
son fils ; R. Abraham fils de R. Joseph avec sa femme Mina et son
jeune fils Samuel ; R. Elle fils de R. Abraham avec sa femme Golda ;
Bona fille de U. Abraham ; R. Meïr fils de R. Saadyah avec sa femme
1 Viveliii csl sans doule lo diiniuulil' de Vive, traduction de Û"^TI, et non pas
Fcblin, diiniuutif de IMiœbiis, comme M. Lowe le propose, op. cit. p. 2.
* C.-à-d. Guthard ou Gutherz, bon C(Eur.
î Voyez ci-dessus p. 22, note 7, cl Lowi^ p. 27.
* Peut-être Lu ce, lumière.
5 Diminutif de Sara.
22 REVl'E DES ETIDES JUIVES
Diha' et trois fils ; R. Ascher fils de R. Ezécliias avec sa femme Mina
et quatre, fils ; R. Elie, le vieux, Hazan, fils de R. Joseph avec sa
femme Yechlin; R. Nathan fils de R. Zerah avec sa femme Tsorline et
quatre fils; R. Nathan fils de R. Isaac avec sa femme Relia et un
garçon ; Traute, fille de R. Yoëlavee cinq fils; R. Isaac fils deR. Moïse,
le vieux, avec sa femme Brune et cinq fils ; R. Gerson fils de R.
Pessah avec sa femme Schoenlef - et quatre fils; R. Obadiah fils deR.
Yehiel avec sa femme Avigai ^ et un garçon ; R. Eliézer fils de R. Juda
avec sa femme Esther et son jeune fils ; R. Joseph fils de R. Isaac
avec sa femme Tsaret ; Boua femme deR. Benedet avec ses quatre fils ;
Rebecca fille de R. Isaac avec cinq fils ; R. Yehiel fils de R. Ascher et
sa femme Hannah ; Rachel fille de R. Moïse et le garçon Ascher ;
Paura avec ses quatre fils; R. Gerson fils de R. Isaac avec sa femme
Tserline et trois fils ; R. Isaac fils de R. Gerson avec sa femme et un
garçon; R. Salomon fils de R. Samuel avec sa femme Maïten* et
quatre fils ; R. Salomon fils de R. Joseph avec sa femme; R. Yehiel.
le vieux, fils de R. Joseph avec sa femme Freude^ et quatre fils ; R.
Samuel fils de R. Abraham avec sa femme Golde; R. Joseph fils de
R. Samuel avec sa femme Zeruyah et cinq fils ; R. Jacob fils de R. Juda;
R. Joseph fils de R. Moïse avec sa femme Reichlin et quatre fils ; R.
Juda, fils de R. Joseph avec sa femme Sprinça et quatre fils; les jeunes
filles Tserlin filledeR. Salomon et Richantsa fille de la femme Sarah;
R. Galonj^mos tils de R. Joseph avec sa femme Gutline ; R. Simhah
fille de R. Moïse avec sa femme Reichengold et trois fils ; R. Juda fils
de R. Moïse l'adolescent avec sa femme Golde ; R. Jacob fils de R. Moïse
avec sa femme Gutline et quatre fils ; Yechlin fille de R.Jacob; R.
Moïse fils de R. Jacob avec sa femme Bonline et un garçon ; R. Eliézer
fils de R. Baruch avec sa femme Yechlin et deux fils ; R. Baruch fils
deR. Eliézer et son jeune frère; R. Abraham, le vieux, fils de R.
Yehiel ; R. Yehiel fils de R. Abraham avec sa femme Goldeline et un
garçon, le jeune Mullin fils de R. Abraham le lévite ; R. Isaac fils de
R. Moïse avec sa femme Michal et un garçon ; R. Joseph Ilazan fils de
R. Saadyah avec sa femme Richanlsa et leurs quatre fils; R. Abra-
ham, l'adolescent, fils de R. Moïse avec sa femme Miriam ; R. Isaac, le
vieux, fils de R. Abraham avec sa femme Boneline et son fils Mei'r l'a-
dolescent ; le très estimable Yehiel fils de R. Reuben ; R. Moïse fils de
R. Calonymos avec sa femme Mina et ses deux fils ; la femme Gutline
fille de R. Juda avec ses quatre fils ; les deux fils de R. Ellukini avec
sa femme Schoenlef; R. Moïse fils de Jérémie avec sa femme Guta et
cinq fils ; R. Samuel fils de R. Alexandre avec sa femme et sept fils ;
R. Yehiel fils de R. Ouri avec sa femme Bella et trois fils; R
' \'oycz sur co nom rcxplication peu ]irol)ul)le de M. Lnwo, op. cit., p. 23.
' Compose; (le Schoii et 2b cœu)\ anaiof^uo à Gulliani, ci-dessus p. 2|, note 2.
Voyez, pour une autre dérivation, Lowe, p. 20 au mol S'^bm^.
' Voy. ei-dcssus, p, 12, note 1.
'• Mathildc. l.owe, p. 2:i.
' Lowc, p. 2'i.
LK iMliMURBUCH DE MAYEXCK 23
Abraham fils de K. Salomon avec sa femme Salveda cl trois lils ; la
femme Tsarit fille de R. Joseph et un garçon ; Elazar fils de R. Isaac le
lévite; R. Abraham fils de R. Jacob avec sa femme Frida et deux fils ;
R. Jacob avec sa femme Miriam et un garçon ; R. Moïse, le vieux, avec
sa femme Rechila; R. Isaac fils de R. Peter avec sa fille Minklich; R.
Pessah fils de R. Lévi ; R. Moïse le Français et son ami R. Moïse avec
leurs femmes et leurs fils ; R. Salomon de Ilochstedt fils de R. Isaac
avec sa femme Guta et ses fils; la femme Ilannah fille de R. Abraham
le Hazan et deux fils; R. Isaac avec sa femme Léa; le prosélyte qui
se convertit pendant la colère de Dieu; la femme Rumeline avec son
jeune fils Judeline; la femme Hanneline fille de R. Eliakim le lévite ;
la femme Zirlef fille de R. Eliézer le lévite, qui fut tué, avec son fils;
Gutline et sa jeune sœur, filles de R. Eliézer le lévite; trois jeunes
filles, Adelheid, Pessline et Esther. — Les femmes: Minela' la vieille ;
Gemma la vieille; Goldeline avec son fils Yiveline; Zirlef et ses fils;
Mingut et son fils ; Mina la vieille avec sa lille l'utta, sa petite fille
Rachela et le garçon Abraham; Zirlef la vieille, la sage femme; Michal
la vieille; Yetta la jeune fille, fille de R. Yehiel le Cohen; Rachela
avec sa fille Zirlef la jeune; Mina la vieille, fille du rabbin R. Pessah';
Mina fille de R. Hayyim avec ses trois fils; Reichlin fille de R. David
le lévite; Richentsa qui prie pour les femmes; Miriam la sage femme
et sa petite fille Gutline; Gaila ^ et ses deux fils; Mina fille de
R. Isaac le Cohen ; Adela fille de R. Ascher ; Ilannah fille de
R. Othniel; Bella, la vieille, fille de R. Samuel le Cohen; Rebecca la
vieille ; Diha fille de R, Abraham avec son fils Baruch le Cohen ;
Adelkind avec sa jeune fille ïilia ; Michal la vieille ; Golde fils de
R. Nathan le Cohen, avec son jeune fils Jacob ; EUène fille de R. Jacob
et ses deux fils; Golde fille de R. Jacob le Cohen; la jeune Ilaven-
line * fille de R. Mardochée avec son jeune fils Isaac fils de R. Meïr;
Yatline la vieille; Adlef fille de R. Meïr et ses trois fils; Hannah ;
EUène avec son jeune fils; Hitsline et son fils.
Total des saints (mart,yrs) : 740.
Voici maintenant les noms des endroits où eurent lieu les mas;-
sacres, qui se trouvent (''num(''rés dans notre Memo)'huch. Ces
mots sont écrits par diflerentes mains.
I. En caractères carres d'une main jiostericure à Isaac (U^ Mei-
ningen (fol. ^-^''p).
• Lisez Nb5"'?j.
" AbrégR d'Abif:ail; voyez Lo\Ne, p. 23.
' La pelilu Eve.
•2', RKVIE DES ETUDES JUIVES
Np\s:-jr;^5 p;^Vr;rN ■^i:;mN inT^i mN;i^5 p'n:::;rbp !-;':?i7:-jp?: c-^^n-j-in
^2n?: ';:rb:i^p u^^'-p:":) Y^-^':i pnaanbri û^^rrjT'.p p^,2;o-^n nNibirsnp
p-iar-bni l^mii-^T prbror, p-ruiïnb N-j'?:i rz-'-^rin 'j^i-inb-'T:
NI? N-ii?::; pmnb-^5:r: p\H;n u-j":;b-ip p-urDiiT^n ipm yiN \''mn
Tibpb»"»a'ia^;'^''7:-j-o''«ur'''nby73 "j'j'wrD^bn^ N::-niTrî Nuiirr»:: isnnobTT^ri
(SIC) n::û^p pirrirt^ip n;^":;5ii3 Nnti'^^:: :;ûb'^r;^in pinn ijinVu
-rrb ::t:':::ip pn::"--;"': p":;-'; pi2;Di::2'v:j "wbnrjrr'b Nrnp L:bTibnr; :û:;û\n
tprj^a v^înna ^n;ip £^-m;:Dt:n ri^'^iî^n 'î7:i^i 'n 1."^^'^ û^n-jiïî pnarj
::::c^m innspi^ NpT'-'n r^u'C-^-'i' pnins;:;^! pinsm!-; riiiiN pi3:i:bn::o
'-1 r:m in-wNi lï^^n û'^sia 'n pTinîiû^-j pinb-^no d-^^rimrî moï-iN
'1 û-^-^riw^Ljnp-'m 'î:i2'^:Db'i'^3 apnw^'^iis N;?:bip N'^'^i;-n-j irr^n "^^m N-i^n
"^Tin NT'ubjjN vnnn q-^-^t; ■i\\ -^^Tir; nsni: \"o-ir! in":.\si Trc^i^ 1:3 ']n-:2
inmsm npy-' 'n n-in b-^nnip ■'Dn-ia "û-^^ibn -^sTr:) -.in y-,N ■'^inlri Nbn
p"nD"w-iL3\:5 ''rtT.r! lî-iID-.n \'."nr! n:i?2j-'"i \m-i!-!
iVom^ (?^5 ^i/^é5 rfe safiç.
Lauden, Grossfeld, Gamburg, ...heim,Dûren,Wartenberg, Freuden-
berg, Wertheim, Eckenmûhl, Klingenburg, Gernau, Wiedern, Oden-
gau, Ingelfingen, Lichteneck, Kunzelsau, Weissenburg, Krautheim,
Haldenberg, Stetten, Konigsbeim, Kreglingen, Mosbach, Heilbrun-
nen, Winbeim, Grath, Luuenburg, Gœggingen, Sindringen, Wal-
denberg.
Martyrs du pays de Franken; Wurzbourg, Carlstadl, Reineck,
llammelburg, Ginimd, Lahr, Arustein : la femme Tsira de Hei-
lingsfeld, Hocbfeld, Schœnberg, Wasserdorf, Geroldshofen, Schoén-
wart, Hasperde, Melrichsladé, Meiningen, Schmalkaldeu, Schleu-
singen, Wasungen, Rombild, Themar, Neustadt, Konigshofen, Kircb.
Martyrs des villes de Bamberg, Forchheim, Iloheastett, Gugel,
Erkolsheim, Ebermannstadt, Ilollleld, Kirn, Liclitenfels, Staufen-
berg , Keusladt, Gcrsburg, Kousladl, Licbtenberg, Ausbeim,
Falziugen, R. Frohman, brûlé à Tanndorf, Kœnigssee, , ,
Slolzenberg, Urach, Ilobenberg, Weisseuburg, Eiscbslatt, Ileideck,
Meckeiihausen, Freisladt, Erfurt, Ilornlieim, Spielberg, Tetlenborn :
R. Boncm le Colien avec sa femme et ses fils ; R. Bera avec toute sa
maison, Toniau, Gulmcnau, Neumarkt, Wcilchingen, Wickershcim :
R. Baruch Moïse avec sa femme.
Martyrs de la France, des îles de la mer, d'Angleterre, de Halle
et de Hongrie. Ceux qui furent brûlés à Blois et à Corbeil, R. Jacob
et ses amis. Martyrs de Rcmagen, Erfurt et Strasbourg.
II. En (■■(■l'itiini cursivo allemande ancienne (l'ol. "l'p et T"-p).
'b'Vx 3Na -^in nb^nnm DO linn^UJ û^)3i- -^^r mTouj ibN
LE MKMUHUL'CIi DE MAYENCE 2o
]1^b . û-^^i^yni . û-^-^ri^bip . û-^nsin . p-in3:E'>i'ii< . û^'-'Cisicn
pnn-iin-n -N^i^T • N'i^ïb-'T .p"iimr-nr: .pmnb^^ .Nr-'rj":: -iTinina
• Nzî'^iïN .n:::c3i)2 ."ipbN .ntdsi^ .N'^-'b . ^,n3
'b'-'iC ic^bN
. t^^b-^"i5^"i . f^-^-p-ii'a . Nib-^r^r-'ib-isTn . û^^icbnr: . N]:b',T -Ni^ni-i
• ïNiia . ciriîT . û-'rr^^TiwS . inribi:»: . û'^npS'^-Tin .bNr33Tû53i» . p-iD":;-',r^p
. pin^T^ibn .p-i3;o"^n , nj-nD^^-^a .L]"^ib::î:o . "^Hi^iiDi^cT^: .Nib-^pb^ .lit^d
. Nnn:: .p-.-'pnmN . û'^^-;::r .^s^ibiî .p-in^bri
b'n']i: ^^-i^'wiNT C'^ï-in
.y"'37::>'^ . p'n!j'-i\s . opn .b-jiix . ]^':r, . t3^'':T_. Ni:."^i._.. pmairoN -Npbno
. •o-iia . £]'Ti:û^3"^"'-,3yr! . ';i'^L]":;jpbn . p-i^'s-^ribr-n . y-^ni-.-j . 'j^j'^a^is
. ^•;^b . ntids . p"nn;ii3 . )brû . ri-nn^D-iTow . p-'i • '^abL:"»::^?^ . "j^biniiLDcn
.']b'^"i .q-nijTTnn . "inï^rxii .v^:d^^,d . 'jNbLî'^rNi: .Nb .•u;'^^ .pbiD
-nrjy .p-i^p-iD . i^iriTab-^iT .Nnsi-in . ';5;ib:i2'i'i .NTnsb .S|-ni;pi'-j
.';nr!jî53'n .';:;D"ini-iL;\:: . 'j:o'^"!-i::> .pb^-n .p-nnn73 .p-na-^n .'i:i5"iuJ3'*» ."jibn
.N^ttp .^■'■'rîbrp .ap^7:n3 ."jc-nn .p^-^ti^iN .pma"'">"ip .ain^'rsb
Voici les noms des villes de sang où les massacres commencèrent
le20 Ab, 5096 = 1336.
Roettingen, Au, Oppenlieim, Kilzingen, IiJhofeu, Wickersheim,
Mergentheim, Hohenburg,\Viedern, Lauterbach.
Le 10 Tammouz 3097= 1337 les massacres commencèrent à Bis-
chofsheim, Aschaffenburg, Buchheim, Klilsheim, Bretheim, Lauden,
Pfafîenhausen, Stein, Hammelburg, Holienburg, Villeneuf. Diez,
Friedburg, Bïidingen.
Sur le Rbin en 3097 == 1337.
Lorsh, Bacliarach, Vedl, Boppart, Kirchberg, Rbcinbellen, Coblence,
Montabaur, Lcun, Kochem, Alken, Munster, Andernacl).
En Alsace eu 3098 — -1338.
Rouffach , Soulz , Ilerlisheim , Rappoldsweiler (Ribcauvillè),
Berkheim, Richviller, Kaiscrsberg, Mûnslertal, Duriugheim, Mïil-
bausen (Mulbouse), Eiisislicim, Sennsbeim (Cernay), Tliann, Firt,
Altkirch, Munster , Benlort, Ritlenberg, Blumberg, ZcUenberg,
Soulzbach, Ettenheim, Oberkirchen, Saverne.
En Bohême et en Autriche en 5098 = 1338.
ofi REVUE DES ETUDES JUIVES
Pulkau, Eggenburg, Reisch, Znaïm, Ilora, Zwell, Rakonitz, Er-
burg, Jemnitz, Pratingen, Trebitscli, AVelschberg, Walkenstein,
Hebreichsdorf, Gortz, Raslenwalden, Mistelbach, Yiten, Emersciorl",
Tuln ', Naunberg, Passau, Linz, Politz, Budweiss, La, Zastelan,
Rechniz, Naunbausen, Drosendorf, Felk.
En Bavière.
Tegendorf, Landau, Dingelwangen, Brunau, Willshofen, Vierkir-
cben, Ettenteld, , Mosburg, Felden, Erding, Straubingen.
Pfaffenhausen, Landshut, Kraiburg, Oettingen, , Neumarkt,
Kellheirn, Kamm.
Une main plus récente a ajouté le passage suivant :
"5"-' p-rinr^nw vo-.r; . 'D':/p p^:n "-^-z'V: -^sinci \".i-.r: . t:7:'7 ûip:"» 'n
. b'T'p '- ST^ -^\\:2
Eu l'année 5133 = 1373, le sabbalh 2i Nissan, la communauté de
■NVacbenheim fut brûlée ; la même semaine la communauté de
Lambsbeim et celle de Neustadt près de Spire eurent le même sort.
Le sabbath, néoménie dlyyar 3133 = 1373 les malades étant à Ger-
mersbeim ainsi que les gens bien portants furent brûlés. Personnes
massacrées et brûlées à Mosbacb, en Nisan 5133 = 1373. Personnes
massacrées à Schweinbourg le mercredi, 14 Iyyar5l37 = 1377.
Le passage suivant, en caractères carrés, vient immédiatement
après et est suivi de la prière '^'^-^r:) -''a en caractères cursifs al-
lemands anciens.
NbT2 prb-^iN 'ir.:"'bu:\s N?:"'nN prb-;— : .t-;-'3T:;"'T p— ic-^ns vo^iH
t^irr:-^-,-'- N:bnp n-,-"— j Njirbmp isi:::.r7: Nt:;'?2-n'i n-^-^d'û' .pms'winui'i
Vi-.'iZ'^.y iT^in-j-.i: Nr::-^'^'?: LNbn pn-i^n^-^r?: p'^n2:n:-,2 'j^b'^rs NpT-.D5nN
pma\:;25"'-i pn'iasmD p-.-^nron-i p-nnir-i-'-n cû-nspno N-;biD inT-'ïibn?:
. N5-ID 'is-'-'N N-^-^p-ip Nb\ri-îa s-^-'rT NT72"^"ip ^b-'D p-ii^itbT t2'^'^ir:'>::T:b
Personnes tuées à Augsbourg et aux environs, à Nordlingen,
Ulm, Eislingen, Uberlingen, Bfde, Strasbourg, Spire, Worms,
Mayence, Coblence, Trêves, Cologne, Dortmund, Osnabrûck, Ber-
lin, Brandonburg, Magdeburg, Halle, Meissen, Nordliausen, Erfurt,
Muhlhausen, Fulda, Francfort, Wurzbourg, Rothenburg, Nurem-
berg, Ratisbonne, Landshut, Salzburg, Felk, Krems, Znaim, Bres-
lau, Cracovic, Eger, Prague.
' C'est sans doute dans celte ville (jue tut copié le Talmud dont une partie se
trouve a\i Vatican. Voyez N. Kabbinowicz, Vari/s Lectioiiet:, t. XI, p. 17.
LE MEMORBUCH DE MAYEXCE 27
A la fin du volume en caractères cursit's allemands anciens.
.■'UJUîr! E^rNb S-p »nr:in 'lyi ioj'D t^'n rrTnr.r; i-;bN
-■nniN imï-isin .p^DOjn-i .NiTii-'b .p-,>^p-ob:?iT nbi-rp .'^T.s'na ns-^TJ^
.■î^ribnsi:» .Nn:3">i ps^^oi'^a •■^TNiia D"r ';nns':5 .^rirjTDip .'j^^'^b
!>i5^-^y pi-jDD piDiD^ib Nn^^^2 pm3":JiN rbnp .)i^^'2 n5n^
LDiu^sni^ p3i>3 rûrû'^rsbn^'-^N pj^b'^i iD^^ii^'^b n;il:'i:'"i p-iia^iS"!" û-'^i-îb-'"!
-bp;^n i:j5"nbi' psirjnn ■jro-'bTiiD ';r.;'^::-,'^'^3 Np'^T^-'n ';::*5'^"i^-,:» ';^inb3>Ti
Nib'^i^uu'T'DTi l^3"'b;'î2 p'n3'^,wS "^mo 'j.'ij-'mi: nii-iwX qmii^mn brnT*5
p-nn-^-'m pm:25ii3 Nbn rb-p .inbyni-^Tjirr^nb-n pï"^p;»î?b2:3 T?"'^
-■ûbin "jTiribi» N^b-^i:':i NirbiT Nib-'irjiT di-'r^jT f^rrcîiîSN u'^.-'D n^::
Nnb-^'rûujbiD-n N-i>2bip n-^'^nprTTi n53T-i b"jTj^3i^ p-i2":i'^r^p û'^'^r:
û"i"^ri^bipn^ :2-j">ai:rbTi) ybir^y^'oyj) d-'-'^îp'-is^in Nabis pinsb^i: N-ib-^iD*!"!
ab3'i3:?D p-^iisyp "jsrni^x Nnb Nbrtn D-^-^nror Nnni^^î N'^::û03^:cc-n«
•N'ûbj'T pTinn-jib Ninsb Nn^sn ribripr: pniDûTJO
NiTiDb":^ t3-'-'^::jjn:i t:^-''-i:m3 Nb\:)T-i3 f^-^.-'D-iîi >>î-w73mi mbnp
t:'^'^ï-;a-i3*i piairob-^T^ Ni3^2 b-iiab^» Qi-^rrano NwbiN p-inb'r^^r; N;r;;'^i
innbi'D "jms-iwS r-ib!-;p . ';b"vrr;n7: ';n^;"i2b^r; pii-;":3:;;ip "j^s-^nbiD pbp
.Nrrji.n î<D:rN n^.iob-^i: n-j-j'^ts-iï^ v^'''^ inïTo-iiD
Voici les [lieux où eurent lieu des] persécutions en l'année 5109=:
1349.
Prormce de Boden-See : Les communautés de Weltkirclien, Lindau,
Rabensberg, Buchhorn, Ueberlingen, Constance, Schafihausen. [Autre
province] Memingen, Bibra, Giindelwangen. Bavière : les commu-
nautés d'Augsbourg, Burgau,Landsberg, Pfaffenhofen, Aichach, Fell-
heim, Wasserburg, Vorden, Lipheim, Dillingen, Ingolstadt, Munich,
Neustadt, Welldorf, Greding, Heidek, Berching, NOrdlingen, Feuch-
twang, EUv/angen, Dinkelspiel, Burgdorf, Arau, ZofiDgen, Sursce,
Arburg, Mellingen, Roupertsviler, Zurich, Bàle, Sekingen, Waldshut,
Rheinwalden. Les communautés de Bâle, Neuenbourg, Fribourg,
Thann, Fûrt, Ensisheim, Sennheim (Cernay), Watviller, Soulz, Gue-
viler, Mulhouse, Ilerlisheim, Kaiserberg, Munstertal, Roufl'ach, Du-
rinkheim, Colmar, Rapporldsviller, Richeviler, Zcllenberg, , Bcr-
kheim, Kestenholz, Schlettstadt, Markolsheim, Ockenheim, Erstheim,
Fiirth, Rosheim, Saverne, Neuviller, Bischviler, Oflenburg, Maur-
miinster (Marmouticrs), Rhinau, Ettenheim, Hasel, Lar, Eudingen,
Kenzingen, Benfeld, la communauté de Strasbourg, Haguenau, Lan-
dau, Lauterbourg, Selz.
Les communautés de Worms, Spire, Bruxelles, prorzhcim, Bret-
theim, Ileilbronn, Wimpien, Ileidelberg, Ulm, Sersheim, Eltvillc,
Bingen, Miltenberg, Wertheim, Duren, Erbach, Amorbach, Ilam-
melburg, Friedberg, Wurzburg, Schwcinfurtli, Ebern, Scbmalkaldou,
28 REVUE DES ÉTLDES JUIVES
Schleusingen, Konigsliofen, Herleshausen, Les communautés
de Erfurt, de Muhlhausen, de Nordhausen, de Meissen, Arustadt,
d'Eisenach, de Gotha.
Le passage suivant est écrit par la même main," mais il est
presque oblitéré ;
.''Z':ii-i T\biib b"'û'î> rr::n 'm •i":;^'; n"«rN m-r^nn nrN
inirsams "it^^"-^^ ::-,is"i:^* r^j'ibm N;bip a-mpm fc-^^rirsiN nisj^:?»
.p-nn;aT-, p-srnn p-2:--i: p-nn::-,-'! yc-^iû rm?: Nbcp 'j"^"''^ nmT:
Voici les lieux oîi eurent lieu des] persécutions un vendredi 5139
= 1379.
Augsbourg, Nordlingen, Ulm, Strasbourg, Bâle, Ueberlingen, Spire,
Worms, Maj-ence, Oppenbeim, Francfort, Cologne, Fulda, Erfurt,
Miihlhausen, Nordhausen, Iglau ? les provinces de Meissen, Cassel,
Wurzbourg, Nuremberg, Bamberg, Rothenbourg.
mbi-ip ^DT^/CT '"iinïi ■^rwS'i:'»: îqVp Vr a'z"-^ y^u 'p"-p^, nii:^': "ji-iiTa
^'7"i:2"^i: s-n^T"''?:' innuû-n; ir^i^^"''^ l:"ii2i:' N^bT^n imssi-mu; ri-nan-^ns
N:-^-i:i ■jr.rb-riN ir.rbcr :::ir!":;:-ib :.-,i3"vr:j;"^ N?:bnN ';."''bir; :i-n3"r:;iN bn
-Dnb-'r! y::":;2nN i-'bNs V^V ^^"'"'^- '"i7:bip inrb"''! nb-^ity-n roin-iw N"i:b
-bp"'» *]2iïi3 •'■'libN 'jiiib-'T rmaTT»?: p-iTi'iJsi-ia N-'inrb -n::n;:ûm ct
un . a-mn
nis-i-ittin m»a to iir 'S-p mn-^n
a5aN-i3 nibin laNnvi I'^.n^^s v^P" l^rT'T^ cim 'l'^piD p"^*itt
•jv^-^-^^o \riTbr rmsma pn?: ûtt^d i^nir-ip ';-in"'-'l:o ']'^n"L:">i'"iN rsni:
en . N"^T rr'i^j nnss rri^o "{"^bsa^yii
Persécutions de l'an 5109 — 1349 (copie de M. Carmoly).
Dans le Memoràuck de Metz, écrit sur parchemin, j'ai trouvé énumé-
rés les [noms de ceux qui ont été] tués et brûlés dans les communau-
tés de Spire, Worms, Mayence, Oppenheim, Coblence, Cologne, Ro-
thenbourg, Wurzbourg, Nuremberg, Strasbourg, Bàle, Erfurt, Muhl-
hausen, Nordhausen, Magdebourg, Ncubourg, Halle, Augsbourg,
Nordlingen, Ulm, Regensburg, Landshut, Eslingen, Ueberlingen,
Ziirich, Francfort, Eger, Krems, Dortmund, Munster, Minden, Bres-
lau, Cracovie, Trier, Prague, Vienne, Trente, Passau, Weissenburg,
Schweinfurt, Neustadt, Costniz, Kochenburg, Salzbourg, Schaflhau-
LE MEMORBUCH DE MAYEJSGE 29
sen, Haguenau, Friedburg, Bamberg, Oppel, Werlheini, Landau,
Marbourg, Wetzhar, Dillingen, Colmar, , Cobern, , Arn-
stadt Hildesheim, Wintertur, Lindau, Brunswick, Magdebourg, Se-
lingen, Alzei, Butzbach, Meklembourg.
Noms des provinces qui ont souffert pendant les persécutions de
5109 = 1349.
Mark, Franconie, Rbin, Thuringue, Saxe, Bavière, Souabe, Hol-
lande, Brabant, France, Autriche, Styrie, Garinthie, Bohême, Mark
Bernbourg, Meissen, Alsace, Westphalie, Espagne, See ?
Nous ajouterons une autre liste qui se trouve dans un Mahazôr
ms. d'Oxford qui porte le n" : Micli. 328, Olim. 537 ; (dans mon
catalogue n° 1108); le commencement de quelques villes est il-
lisible.
. Nb^7
rûTj^T ï:"'"'!-!D'^bi72 Nmn N'mibD'^'n . . . N"T^:bN ^:^'nr> ': . . . m::r
T^rûoai» Niis-^b-^np nss-ci^n l^srp NlJDT NOia N'^TD-^b Nri^^^iin n313 i^:;?:^-!
tiûnsin N^-inn-^p Npj^iba "m-isn:: ï^i"^np'N NbLîCp-^a XD-^br^'^n HJ^n N7:::ip
c-^-^r;:::!"! ûi-^ripmi NT^rc wS\::?:nTi Niis-^-^rT^ Nir-'n Niip îo-cn -i-^rbi Nbm
û-^-'^Din ']3bttN di-'i-îT-m Nriû'j p-naj-^rwiN] ^■'"'îT-îûb û-^-'-^aT^ns a:30n3
11» [—1 "j-nnn ']m2;T:3 '^n'^nma l'^-j-j'Ciin '^an a-j">::i3 û^'^'-tj'^i [\Xj 'p^i-2
zi'^'cb^a -ju'C^ [— ] -jTimwS -j-j'Jiinbp û-i-^rîj-'siis i."2'^ii"'p V^^^^""^"^ 'p^i'^^^'^'p
■^■\i-r:^':b 'j^'^Db'^:;^-''! N^niib prs ["ni] 'iittïï"'T rababin N3in:^ bpb7:"«:î ';^^■':72
Y'^'ci Lîtj'^'^m pn?3;^n3 pnas^^s ^xnit [-] p-nr-îs i^^^mn û^nbp
. pmnrujiT Npnn
Dans le ms. Micli. 14 [olim, 3542, non catalogué n° 1111) se
trouve à la fin, après la prière de -nDT\ la liste suivante, malheu-
reusement en partie oblitérée :
-•wi.s . NT^Ti ?"jb-^DD-ir. .i-^p;-!-! . "j-^rir-nn ?';-'L:Dirî .V«^>t ."j-'b^DUor-n
. ::jb-i"JOT"'nb . pmnai-inn . ns-i-iwid . LDib-TiiN . ■'lûibnû^'^nT *? a"in . tsDb'T'::
.o:y-ia . :25b:;D-^iN . ']-^np5-n . NiSm-iD . NTi:\r-ï . -JDnN-in . v>2NTbN . N'^Tr-'T
? . . . nn •/ N^^T^iTû . '^ma^X'Ta . ià:?lr, . (apj'-^ -i"-) vîi^'^"i"i2 • V'"»^
. ? Ni:;"^-i3 . Nirjjj'-^D . -jDîinî * èîTON-^np . (aroTj -i"r;) Nr^-ns . û•^^srT
. (pni:^ -1"-) '^mnrjin . p-nD">:;;^:>-^N^-i , pmD^rix . prb-îm3 . î<?:bnN
' Tous les iioin? de localitrs sont suivis du auoL ÎT*2Tw''1.
.30 REVUE DES ETUDES JUIVES
-i"rî) amnpD-ii . Cj-d nn- 'n ann] ']'-n3i:T'ii . C^^tiX] 'n mrr) '^naa-^-n:
-i"r;) i^s-^p-imN . p-nsoTJD . "^-inbT^-'j^n . [t\ov -i"r!) û-'-^nssiN . (û-^idn
JS'ous ne donnons pas la traduction de ces deux pièces parce que
!les2ioms de localités qu'elles renferment se trouvent déjà dans les
j[)assages cités plus haut et parce que certaines leçons ne donnent
pas de sens satisfaisant. Nous aurons même à revenir ailleurs
sur mi grand nombre de noms d'endroits que nous avons tra-
duits dans les pièces précédentes mais qui nous semblent encore
très douteux.
Ad. Neubauer.
NOTES ET DOCUMENTS
POUR SERVIR A L"HISTOIRE DES JUIFS DES BALÉARES
SOUS LA DOMINATION ARAGONAISE
DU XIIP AU XV« SIÈCLE
L'histoire des Juifs des Baléares sous la domination aragonaise
commence avec la conquête de Majorque par Jacme P'" d'Aragon
(1229) et se termine en 1435, date de la conversion forcée de tous
les Juifs de cette dernière lie. A partir de cette époque il n'y a
plus, à proprement parler, de Juifs aux Baléares ; toutefois les
nouveaux convertis, comme on les nomme, ne sont pas mis, par
le fait du baptême qu'ils ont dû subir, sur un pied de parfaite
égalité avec les habitants chrétiens des îles, ils continuent à tbr-
mer, surtout à Majorque, sinon une classe, tout au moins un
groupe à part, très surveillé par Tlnquisition, qui châtiait sévè-
rement le moindre retour aux pratiques du culte abolie et vu de
mauvais œil par les autres insulaires.
Les anciens annalistes du royaume de Majorque, D. Juan Da-
meto et D. Vicente Mut, n'ont touché que très incidemment à This-
toire des Juifs de leur pays ; le pillage de la juiverie de Palma et
le massacre d'un certain nombre de ses habitants en 1391, la con-
version générale de Tannée 1435, sont à peu près les seuls épi-
sodes auxquels ils aient cru devoir consacrer quelques pages.
Jusqu'à D. Jaime Villanueva, qui visita en 1814 les archives et
les bibliothèques de Majorifue et de Min()r(j[ue, il ne semble pas
qu'aucun érudit insulaire ou étranger ait cherché à combler les
lacunes des historiens du xvii* siècle. Le savant dominicain de
Valence prit le bon parti ; il fouilla consciencieusement tous les
dépôts de manuscrits qui lui furent ouverts et s'appliqua à réunir
une collection de constitutions, ordonnances, privilèges ou autres
32 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
documents relatifs aux Juifs des Baléares, à leurs droits poli-
tiques, à leur condition sociale et à leurs relations avec la popula-
tion chrétienne ; les résultats de ses recherches sont consignés
dans les tomes XXI et XXII du Viage lUerario à las Iglesias de
Espana, publiés en 1851 et 1852 seulement, sous les auspices de
l'Académie de l'Histoire de Madrid. Bien qu'il soit loin, sans doute,
d'avoir épuisé la matière*, Villanueva a fait plus qu'ouvrir la
voie : les nombreux documents qu'il a tirés des archives de Ma-
jorque et mis au jour seront toujours considérés comme la base la
plus solide des travaux à entreprendre sur le sujet qui nous oc-
cupe. L'érudition locale n'a jusqu'ici ajouté que peu de choses aux
recherches si bien conduites par Villanueva : VHistoria de Soller
en sus relaciones cou la gênerai de Mallorca -, par D. José
RuUan, me semble être le seul ouvrage imprimé depuis le Viage
literario où aient été réunis quelques renseignements nouveaux
sur les Juifs de la grande Baléare. Il serait inutile d'en chercher
dans la volumineuse Historia social, polilica y religiosa de los
Jiidios de Espana y Portugal, par D. José Amador de los Rios,
qui n'a même pas su tirer parti des recherches de Villanueva, et
n'a fait, dans les quelques pages de son livre ^ consacrées aux
Juifs de Majorque, que résumer un article d'un ancien répertoire
de jurisprudence*. Je n'ai rien trouvé non plus dans le premier
volume des Insliliiciones jnridicas del pmelilo de Israël en los
diferentes estados de la penin'^ula ibérica^, par D. Francisco
Fernandez y Gonzalez.
Pour préparer le terrain à de nouvelles investigations et faci-
liter la tâche de ceux qui voudraient entreprendre l'étude de la
question dans son ensemble, je crois utile, avant de faire connaître
les documents inédits que j'ai eu la bonne fortune de découvrir,
de donner ici un catalogue détaillé des pièces diplomatiques et
notices historiques que renferment les ouvrages qui viennent d'être
mentionnés.
N'o 1. — Ann. 1247 ^11 juin'. — Charte de Jacme I»'" d'Aragon, dou-
uée à Valence, le 11 juin 1247. Le roi accorde sa protection à quel-
• Il resterait, par eiemple, à achever la transcription d'un manuscrit très important
fie la bibliothèque des marquis de Campotranco à Palma, dont Villanueva n'a pu
copier qu'un « petit nombre de documents •. Voir le Yiatje literatio, t. XXII, p. 233
et 250.
« Palma, 1877-1878, 2 vol. in 4*.
' Tome II, p. 2'J3-29".. (Madrid 1876).
* Le Sumari dels prkileijis y franqueses del rtf/ne de Mallorca, d'Antonio Moll
(Los Hios écrit JUallol). Je ne connais pas cet ouvrapçe, mais, à en juger par les ex-
traits d'Amador de los Rios, l'article Jnheiis diidit répertoire doit être l'oivt incomplet.
5 Madrid. 1K81, in 8".
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES :«
ques Juifs du Maroc et en général à tous les Juifs, d'où qu'ils vien-
nent, qui voudront s'établir dans ses domaines de Majorque, Barcelone
ou Valence, et défend à ses sujets de les molester ou de leur faire tort
en quoi que ce soit, sous peine d'une amende de mille sous d'or.
(Publ. par Villanueva , Viage lilerario, t. XXII, p. 327; cf.
ibid., p. 250).
N" 2. — Ann. 4249 (6 juillet). — Article additionnel aux Franchises
de Majorque (Valence, 6 juillet 1249), qui fixe le taux de l'intérêt
qu'il est interdit aux Juifs de dépasser, c'est-à-dire « quatre deniers
par livre de deniers, au mois », et l'article ajoute : « ainsi que cela
est plus amplement déclaré dans la charte ou les chartes données
par nous sur les usures et contrats usuraires faits ou à faire entre
chrétiens et Juifs. »
(Publ. par Villanueva, Viage Hferario, t. XXIT, p. 301).
N«3. — Ann. 12.50 (10 mai). — Charte de Jacme l*'\ donnée à Mo-
rella, le 10 mai 1250. Le roi confirme un privilège d'habitation accordé
aux Juifs que nous ne connaissons pas; il leur reétitne la place qui
est devant le palais royal de Majorque \ îU haheatis eam de cetera xo§
et vestri, sicict in ij^so privilegio continetur. En matière civile et crimi-
nelle un chrétien ne sera admis à faire la preuve contre un Juif que
s'il se fait assister d'un Juif et d'un chrétien. Si quelqu'un prétend
que des gages détenus par un Juif lui ont été volés, et si, d'autre part,
le Juif jure qu'il en ignorait la provenance, ce dernier ne pourra être
tenu de les rendre au propriétaire que si on lui paie auparavant le
capital et les intérêts. If est permis aux Juifs de régler entre eux leurs
différends et leurs querelles; ils n'auront recours à l'autorité royale
que pour des délits graves. Les chrétiens qui auront obtenu des ater-
moiements pour le payement de leurs dettes seront tenus d'informer
le baile de Majorque qu'ils paieront à l'échéance le montant de leurs
dettes et les intérêts, etc.
(Publ. par Villanueva, Viage literario, t. XXII, p. 301).
N° 4. — Ann. 1251 (20 août). — Article additionnel aux Franchises
de Majorque (Lérida, 20 août 1251). Le taux de l'intérêt que pourront
prendre chrétiens, Juifs et Sarrasins ne devra pas dépasser quatre
deniers par livre de 20 sous, au mois. Les intérêts ne pourront plus
croître lorsqu'ils auront atteint la valeur du capital, et lorsque la
somme des intérêts payés sera équivalente au capital, le créancier
sera tenu de restituer le contrat du prêt et les gages.
(Publ. par Villanueva, iMd., t. XXII, p. 302^.
1 Le nom de Majorque, en catalan Mallorca, a été appliqué pendant longtemps à
la l'ois à l'île et à sa capitale. Ce n'est guère qu'à la lin du xvii<= siôcle que s'intro-
duisit l'usage de nommer la capitale Fainia, en souvenir de la Falma des Romains
que des antiquaires ont voulu idcn(i(ier avccla capitale des royaumes arabe et chré-
tien. La langue administrative n'a pas entièrement renoncé à l'ancien usage : on dit
ainsi Vévfjue de Majorque et non Vévêqua de Palma.
T. IV. i
34 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
N" 5. — Ann. 1252 (8 mai). — Charte de Jacme P'', donnée à Lérida,
le 8 mai 1232. Confirmation d'un privilège donné à Valence qui ne
nous est pas connu et de la charte de Morella (voir ci-dessus, n° 3).
Le roi accorde en outre aux Juifs le droit de se plaindre à lui directe-
ment des torts que pourraient leur causer ses agents. Tout Juif de Ma-
jorque a le droit de constituer à sa femme une dot en or ou en argent
par un acte rédigé en hébreu, lequel acte aura la même valeur que
s'il était rédigé en latin par un notaire chrétien. Les Sarrasins de reli-
gion juive* qui se feront baptiser en tout autre temps qu'à Pâques,
la Pentecôte et Noël, devront payer douze morabetiJis au baile du roi.
Il est défendu aux chrétiens et aux Sarrasins, sous peine d'une
amende de cent morabetùis, d'extraire des pierres ou de la terre du
cimetière juif.
(Publ. par Villanueva, ibid., t. XXII, p. 330).
N° 6. — Ann. 1254 (15 septembre). — Charte de Jacme I«'\ donnée à
Lérida, le 13 septembre* 1234. Le Juif qui ne se conformera pas aux
prescriptions de l'autorité royale touchant les prêts et le taux de l'in-
térêt sera seul responsable et puni, les autres Juifs de la commu-
nauté ne seront pas inquiétés. Il ne se fera plus d'inquisition chez les
Juifs pour connaître l'état de leur fortune et ils ne seront plus tenus
de déclarer leurs prêts. Les débiteurs devront payer leurs dettes aux
échéances ; on ne leur accordera plus de délais.
(Publ. par Villanueva, ibid., t. XXII, p. 331).
N" 7. — Ann. 1273 (18 août). — Article additionnel aux Franchises
de Majorque (Valence, 18 août 1273). Les chrétiens et les Juifs con-
damnés à la prison ne seront pas détenus ensemble, mais les chré-
tiens seront enfermés dans une maison et les Juifs dans une autre.
(Publ. par Villanueva, ibid., t. XXII, p. 312).
N" 8. — Ann. 1274 (12 mars). — Article additionnel aux Franchises
de Majorque (Lérida, 12 mars 1274). Défense aux Juifs de prêter sur
gages à des esclaves, sous peine de perdre le capital et d'avoir à l'es-
tituer les gages aux maîtres des esclaves.
(Publ. par Villanueva, ibid-, t. XXII, p. 314).
N» 9. — Ann. 1276 (12 septembre). — Article additionnel aux Fran-
chises de Majorque ^Majorque, 12 septembre 1276). En matière de
contrats le chrétien n'est pas tenu de prêter serment au Juif.
(Publ. par Villanueva, ibid., t. XXII, p. 317).
N" 10. — Ann. 1300 ( 18 mars). — Charte de Jacme II de Majorque,
' item statuimus qnod si aliyuis Sarracenus vel S<i>'''acena de Juden vel Judea se
ferent CAristianiimvcl C'/ftstianam, etc. Peut-être faiidiait-il Iradiuif : « Si quelque
sarrasin ou sarrasine, esclave d'un Juif ou d'une Juive >. etc.
» Il y a dans le texte septimo dccimo Kalendas ocfobris ; or, le 17» jour avant les
calendes d'octobre est le jour des ides de septembre ; on s'attendrait donc à trouver
dans la charte idus sentcmhiis. Le premier nombre est probabledieut erroné.
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALEARES 33
donnée à Majorque, le 18 mars 1299 (vieux style). Attendu que les
Juifs de Majorque qui Inbitaient dans l'enceinte de Valmiidayna * et
dans d'autres lieux de la ville de Majorque ont transféré leurs domi-
ciles dans certains quartiers (vicos), nommés pao'iies du Temple et de
Calalrata'- [partita Templi et Calatravae), où ils ont établi et cons-
truit leur juiverie [calliim sitmn). et que ce serait leur causer un grave
préjudice que de les contraindre à quitter ce lieu et à transporter
ailleurs leur juiverie, le roi leur concède à perpétuité ladite juiverie,
le lieu où elle se trouve et la synagogue qu'avec l'agrément de l'é-
vêque de Majorque ils ont commencé à y construire. Il veuten outre
qu'au cas où ladite juiverie devrait être agrandie, elle puisse s'é-
tendre dans les lieux contigus à celui qu'elle occupe actuellement, du
côté de la maison du Temple.
iPabl. par A'illanueva, iHd., t. XXII, p. 332).
N* 11. — Ann. 1301 (30 août). —Deux articles des Franchises de
Minorque, données à Majorque, le 30 août 1301. i" Taux de l'intérêt
(quatre deniers par livre de 20 sous, au mois); extinction de la dette
lorsque la somme des intérêts égale le capital, et restitution des ga-
ges. 2» Défense' aux Juifs de prêter sur gages à des esclaves, sous
peine de perdre le capital prêté.
(Publ. par Villanueva, iUd., t. XXI, p. 211 et 215).
N» 12.— Ann. 1303 (27 juin). — Charte du roi Jacme II (27 juin 1303).
Le roi ordonne de donner la sépulture ecclésiastique à certains Juifs
faux rnonnayeurs, qui, au moment d'être pendus, avaient demandé et
obtenu le baptême.
i^Citée par Villanueva, il/id., t. XXI, p. 160).
N» 13. —Ann. 130.'i (i avril). —Lettre de Jacme II, adressée, de
Perpignan, le 4 avril 130o, à son lieutenant royal à Majorque, Dalma-
cio de Garriga. Le "roi invite ce fonctionnaire à se concerter avec l'é-
vêque de Majorque " sur le cas des Juifs et la récente affaire qui a
causé du scandale », et à prendre avec lui une décision d'après la-
quelle aucun clerc ne pourra désormais pénétrer dgns la juiverie ni
dans les maisons des Juifs « pour exhiber les sacrements en temps de
nécessité » (pro sacramenlis talibus exîiibendis in tempore necessitatis) ,
s'il ne se fait accompagner par un agent du lieutenant ou du baile de
Majorque.
Publ. par Villanueva, ihid., l. XXI, p. 165).
IS'o U. — Ann. 1311 (22 juin). — Charte de Sancho P^ Le roi aj'ant
' Almudayna (arabe d-maUna) était la partie fortifiée, et entourée de murs de la
ville arabe ; les Juifs y avaient un château ou citadelle, du moins Desclot parle d'un
ca$tell (tels Jueus qui devait se trouver à grande proximité du castell dit de VAltmi-
dayna. Voir Quadrado, Histuria de la compiista de Mallorca, Palma, IS.W, p. 396.
« C'est-à-dire les parts concédées aux ordres du Temple et de Calatrava lors de la
répartition générale de l'île après la conquête.
36 REVUE DES ETUDES JUIVES
pris connaissance d'une lettre adressée à son père, le feu roi Jacme II,
par les Juifs de Majorque, dans laquelle ils lui font part des craintes
qu'ils ont ressenties à l'annonce de l'expulsion des Juifs de France, et
considérant que le roi son père a donné aux Juifs de son royaume
l'assurance qu'ils n'en seraient jamais chassés, déclare qu'il prend
sous sa protection et sa garde la communauté des Juifs de Majorque.
(Publ. par Villanueva, iMd., t. XXII, p. 333).
N° 15. — Ann. 1315. — "Vers l'année 13151e roi Sancho confisca les
biens des Juifs de Majorque pour des motifs qui ne nous sont pas
connus> Les Juifs se rachetèrent moyennant une somme de 95,000 li-
vres de Majorque. Villanueva dit qu'il a vu plusieurs documents sur
cette affaire.
(Villanueva, iHd., t. XXI, p. 300, note ; cf. Vicente Mut,
Historia gênerai del reino de Mallorca, éd. de 1841, t. III,
p. 384).
K» 16. — Ann. 1323 (7 juillet). — Charte de Sancho P'' (Majorque,
7 juillet 1323;. Les Juifs de Majorque considérant qu'après leur « con-
damnation générale » on leur a confisqué leur synagogue qui a été
transformée en une chapelle dédiée à la Sainte-Foi et que cette cha-
pelle est à très grande proximité de leur juiverie, supplient humble-
ment le roi de la faire transférer ailleurs. Le roi accédant à ce vœu
décide, après en avoir délibéré avec son conseil et Tévèque Gui de
Terrena, que ladite chapelle sera transférée dans un terrain de feu
En Cassa, près de la porte du Temple. En outre, les Juifs ayant versé
au fisc une somme de 2,000 livres de Majorque, et une autre somme
de 300 livres pour aider à la construction de la cathédrale de Major-
que, le roi leur accorde les faveurs suivantes : après que la chapelle
de Sainte-Foi aura été transférée dans le terrain de feu En Cassa, les
Juifs pourront ouvrir au bout du chemin qui conduit à l'ancienne
chapelle [in ca2nie carreriae dlclae capellae antiquae) une porte de la
grandeur qu'ils voudront donnant accès dans la juiverie. D'autre part,
le roi retient la propriété de l'édifice de l'ancienne chapelle, mais il
s'engage à ne jamais y laisser restaurer le culte chrétien et à inter-
dire à ceux qui plus tard pourraient acquérir des droits de propriété
sur ladite chapelle de pratiquer dans le mur de l'édifice des ouver-
tures donnant sur la juiverie.
(Publ. par Villanueva, Viage literario, t. XXI, p. 300).
N° 17. — Ann. 1324 (2 janvier). — Charte de Sancho P"" (Perpignan,
2 janvier 1323, vieux style). Sur la demande de l'évêque de Majorque,
Gui de Terrena, le roi Sancho décrète que l'ancienne chapelle de
Santa-Fé ni son emplacement ne pourront jamais être affectés au culte
juif ou payeu; qu'au contraire le « lieu de la dite chapelle » aban-
donnée restera toujours à la disposition, au pouvoir et au service des
chrétiens.
(Publ. par Villanueva, ibid., t. XXI, p. 302).
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES 37
N» 18. — Ann. 1328 (3 mars). — Lettre de Philippe de Majorque,
trésorier de Saiut-Marlin de Tours, oncle et tuteur du roi Jacme III,
à son lieutenant à Majorque, Arnau de Cardayllac (Perpignan,
5 mars 1327, vieux style). Défense de laisser baptiser à Majorque des
enfants juifs de moins de sept ans, en aucun cas, et des Juifs de plus
de sept ans, s'ils se refusent à recevoir le baptême.
(Publ. par Villanueva, ibld., t. XXI, p. 303).
N" 19. — Ann. 1347 (10 décembre). — Délai accordé aux habitants de
Soller (Majorque) pour le payement de leurs dettes aux Juifs, malgré
le privilège obtenu peu de temps auparavant par les Juifs de la com-
munauté de Majorque, aux termes duquel aucun délai ne serait ac-
cordé à leurs débiteurs pendant une période de cinq années (Barce-
lone, 10 décembre 1347).
(Publ. par Rullan, Historia de Soller, t. I, append. 15).
N« 20. — Ann. 1373 (i"juin). — Statut de l'évêque de Majorque,
Antoine de Galiana, par lequel il prescrit de ne conférer le baptême
aux Juifs que trois jours après qu'ils se seront présentés à l'église
pour le recevoir, afin de leur 'laisser le temps d'accomplir l'acte
de leur conversion en toute • connaissance de cause (Majorque,
l*"" juin 1373).
(Publ. par Villanueva, Viage literario, t. XXII, p. 233).
N° 21. — Ann. 1373 (13 novembre). — Annulation par le gouverneur
de Majorque, Olfo de Praxida, d'une décision du baile de Soller, sui-
vant laquelle aucun boucher ni autre personne ne pourra vendre de
la viande cacher {carns caxerns^) dans la boucherie publique, contrai-
rement aux privilèges des rois Jacme et Pierre a'Aragon, qui autori-
saient les Juifs à abattre des animaux et à vendre leurs viandes dans
les boucheries des chrétiens.
(Publ. par Rullan, Historia de Soller, t. I, p. 37, note 2).
N" 22. — Ann. 1381 (12 août). — « Lundi, 12 août de l'an de la Na-
tivité 1381, un Juif, nommé Saydo Davidis, fut brûlé pour avoir cou-
ché avec une religieuse de Sainte-Claire, qui, pour le même motif, fut
aussi mise à mort-. »
(Chronique du notaire Salcet, apud Villanueva, Viage lite-
rario, t. XXI, p. 219).
N« 23. — Ann. 1390 i28 novembre). — Ban du gouverneur de Major-
que interdisant aux Juifs de porter des armes prohibées dans Tinté-
1 Le texte porte taxeras, mais le c et le < se confondent souvent dans l'écriture du
xiv et du xv siècle.
* Une ordonnance du roi Jean I'^"', publiée à Valence, le 14 avr"!l 1394, prescrit que
• si alfjuu dels dits Juhcus sera atrobat ab fembra crestiana en loch sospitos per
haucr copia carnal ub ella, que sien abdos cremats sens Iota mercc ». Voir Saupere y
Miguel, Las costumbres catalanas en tiempo de Juan I, Barcelone, 1878. p'. 279.
38 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
rieur de la juiverie et de sortir sans lumière de leurs maisons quatre
heures après le coucher du soleil.
(Cité par Rullan, Historia de Soller, t. I, p. 419).
]S'° 24. — Ann. 1391 . — Liste de pi'êts faits par des Juifs aux habi-
tants de Soller pendant le premier semestre de l'année 1391. Les
noms de famille juifs qui reviennent le plus souvent dans cette liste
sont ceux de Mili, Xulelli, Sagrassa, Mandil, Ben Baracho, Maymo,
Faraig, Massaua, Sesportes, Natjar, Doscha.
(Publ. par Rullan, iUd., t. I, append. 43.
N" 25. — Ann. 1391 (juillet). — On apprend à Majorque le massacre
des Juifs de Castllle et de Valence et le pillage de beaucoup de juive-
ries du continent.
(Chronique de Salcet, apud Villanueva, Viage litcrario, t. XXI,
p. 223).
N° 26. — Ann. 1391 (12 juillet^ — Ban du gouverneur de Majorque
pour assurer la sécurité de la juiverie et faire cesser les disputes
et rixes entre Juifs et chrétiens dans Tintérieur ou aux alentours
du call.
(Cité par Rullan, Historia de Soller, t. I, p. 419, note 2).
N° 27. — Ann. 1391 (2 ou 4 août). — Pillage de la juiverie de Major-
que (Palma) et massacre d'environ 300 Juifs, hommes et femmes, par
les habitants de Isi partie for ai7ie de File venus à la capitale pour obte-
nir d'être déchargés de certains impôts et libérés des dettes contrac-
tées par eux envers des Juifs et des convertis'.
(Chronique de Salcet , apud Villanueva , Viage Uierario ,
t. XXI, p. 224).
N° 28. — Ann. 1391 (9 août). ~ Défense aux notaires, sous peine de
mort et de confiscation de leurs biens, de détruire les actes concer-
nant les transactions des Juifs, et défense d'en rédiger à nouveau ni
d'en recevoir.
(Chronique de Salcet , apud Villanueva , Viage literario ,
t. XXI, p. 224).
N" 29. — Ann. 1391 (30 septembre). — Article 3 des capitulations
conclues entre le gouverneur de Majorque et les paysans révoltés :
« Toutes les dettes de l'ile (contractées envers des Juifs ou des con-
vertis et les usures des chrétiens seront amorties en dix échéances,
à raison de 2 sous par livre et sans intérêts. Les délégués demandent
en outre que tous les actes notariés soient détruits. »
(Publ. par HuUan, Historia de Soller, t. I, p. 425).
' Salcel (laïc flu vcudntdt, 2 août, ce pillaf^c et ce massacre ; mais en 1391 le 2 août
était un mercredi. Il faut dune, dans le texte du chroniqueur, lire 4 août a.u lieu de
3 '/oû<, uu mercredi au lieu de vendredi.
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALEARES 39
N° 30. — Ann. 1394 (4 octobre). — Articles 33, 43, 45 et 48 de nou-
velles capitulations conclues entre le gouverneur de Majorque et les
paysans révoltés. Art. 35. « Le roi pardonnera les offenses, violences
et crimes commis jusqu'à cette date dans les diverses attaques diri-
gées contre le gouverneur, les Juifs et les juiveries, le tout ayant été
fait en l'honneur du roi et pour le bien public. » Art. 43. Obligation
pour les Juifs d'embrasser sans retard le christianisme. — Art. 45.
Révocation des ordres envoyés aux recteurs et aux vicaires à l'effet
d'obliger leurs paroissiens à rendre l'argent et les objets mobiliers
provenant du pillage des juiveries. — Art. 48. Annulation des dettes
contractées envers des Juifs dans les dix dernières années et des
usures des chrétiens.
(Publ. par Rullan, ibid., t. I, p. 430^.
N* 31 . — Ann. 1391 (24 octobre). — Ban du gouverneur de Majorque.
Les Juifs convertis doivent déclarer s'ils veulent continuer à vivre
dans la juiverie ou louer leurs maisons aux Juifs privés de domicile.
Les habitants de Majorque, qui ont en leur possession cj^s portes
enlevées à la juiverie, devront les faire remettre au cimetière de
Sainte-Eulalie, où on leur paiera le prix du transport.
(Cité par Rullan, iUd., t. I, p. 433).
]S<» 32. — Ann. 1391 [8 novembre). — Ban du gouverneur de Ma-
jorque touchant la réorganisation de la communauté des Juifs de
Majorque.
(Cité par Rullan, ibid., t. I, p. 433).
N° 33. — Ann. 1391. — Art. 1°'' d'un règlement pour le tissage de
la laine et la fabrication de draps et de couvertures, promulgué par
Francesch Çagarriga, gouverneur de Majorque. La fin de ce pre-
mier article est ainsi conçue : « Les convertis à la foi chrétienne du
lignage des Juifs sont admis à exercer le métier de tisserand, qui
pourra leur être enseign-é et montré, bien qu'ils soient du lignage
des infidèles. )>
(Publ. par Rullan, ibid., t. I, append. 251.
N' 34. — Ann. 1392 (25 mai). — Ordre du gouverneur de Majorque
aux Juifs et convertis émigrés d'avoir à se présenter dans l'ile, dans
le délai d'un mois, pour y établir à nouveau leur résidence.
(Cité par Rullan, ibid., t. I, p. 434).
îs'" 35. — Ann. 1392 (3 juin). — Ban du gouverneur de Majorque
offrant 100 florins à celui qui découvrira l'auteur de quittances falsi-
fiées au détriment des Juifs.
(Cité par Rullan, ibid., t. I, p. 434).
N» 36. — Ann. 1392 (16 juillet). —Pardon général accorde par le
roi Joan I«"" à tous ceux qui ont participé aux troubles de l'année 1391
et en particulier aux auteurs du pillage de la juiverie et du massacre
40 REVUE DES ETUDES JUIVES
des Juifs de Majorque. Les lettres de pardon, données à Pedralves
(Catalogne), le 16 juillet 1392, ne furent publiées à Majorque que le
vendredi 11 octobre de la même année.
(RuUan, ibid., 1. 1, p. 435. — Chronique de Salcet, apud Vi-
llanueva, Viage literario, t. XXI, p. 225).
N» 37. — Ann. 1393 (21 janvier). — Ban du gouverneur de Majorque
défendant aux habitants chrétiens de l'île de molester les Juifs, sous
peine, pour les chevaliers, d'être condamnés au supplice de l'estra-
pade, et, pour les autres, d'être pendus.
(Cité par Rullan, Historia de SoUer, t. I, p. 308, note 2).
N° 38. — Ann. 1413 (20 mars). — Ordonnance de Ferdinand P-",
donnée à Barcelone, le 20 mars 1413, qui détermine à quelles condi-
tions les Juifs de Majorque seront admis à habiter dans l'iie et quels
rapports ils pourront avoir avec les chrétiens. Cette ordonnance, très
importante, tranche, par la sévérité de ses prescriptions et l'accent
de haine qui y éclate, sur la législation antérieure, en général assez
favorable aux Juifs. Voici l'analyse détaillée de ce document.
Considérant que notre mère la sainte Église a décrété que les Juifs
infidèles vivraient séparés des chrétiens pour ne pas les souiller
de leur contact, que les inquisiteurs ont constaté qu'à Majorque
quelques Juifs cohabitent avec des convertis à la foi catholique et
excitent ces convertis à abandonner leur nouvelle religion, et que
des femmes du même lieu passent en Afrique, où elles abjurent le
christianisme et reviennent aux pratiques judaïques, le roi, pour
empêcher le retour de telles abominations, ordonne ce qui suit :
1. Les Juifs de l'île de Majorque et des îles adjacentes habiteront
dans chaque ville ou cité un lieu clos de toutes parts et ne commu-
niquant avec l'extérieur que par une seule porte ', lequel lieu sera
choisi par les jurais et le procureur royal ; et dans les villes où existe
une juiverie, ils seront tenus d'y habiter.
2. Les Juifs ne doivent ni manger ni boire avec les chrétiens hors
les cas de force majeure. Les Juifs ne doivent avoir dans leur mai-
son ni écuyers ni serviteurs chrétiens, ni nourrices chrétiennes pour
nourrir leurs enfants ; ils ne doivent pas non plus aller dans les mai-
sons des chrétiens pour leur faire honneur à l'occasion de noces ou
de funérailles. Il est permis toutefois aux Juifs de louer des chré-
tiens pour construire leurs maisons, cultiver leurs vignes et leurs
champs, mais ces ouvriers ne doivent ni manger ni boire dans les
maisons des Juifs*.
' Une ordonnance de l'2!jb applicable au Roussillou, qui faisait alors partie du
royaume de Majorque, prescrit également que la juiverie (il s'agit de la juiverie de
Perpignan) ne doit avoir qu'une seule entrée ; voir Alart, Documents sur la langue
catalane des nnriens romfés de RoussiUon et deCcrdaqne. Paris, Màisonncuvc, 1881,
p. 115.
* Les mêmes prescriptions à peu prés se trouvent daus les ordonnances du Rous-
NOTES ET DOCUJIENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES 'il
3. Défense aux Juifs de porter des armes telles qu'épées, dagues,
poignards, etc., mais ils pourront porter des couteaux et des canifs
pour couper le pain et la viande.
4. Gomme il est connu que le Talmud prescrit aux Juifs de réciter
chaque jour une prière contre les chrétiens, les églises et les fidèles
défunts, dorénavant il sera interdit aux Juifs de dire cette prière,
qu'ils devront en outre faire disparaître de leur Talmud ou de tout
autre livre où elle pourrait se trouver écrite.
5. Défense aux femmes chrétiennes, de quelque condition qu'elles
soient, mariées, non mariées ou femmes publiques, d'entrer de
jour ou de nuit dans les juiveries ou dans les quartiers réservés
aux Juifs.
.6. Les Juifs qui voudront se faire baptiser ne devront être de-
tournés de leur intention par qui que ce soit, chrétien ou Juif, mari
ou femme, père ou mère, frère ou sœur, etc.
7. Il est défendu aux Juifs de prendre le titre de Don.
8. Pour que les Juifs puissent être dorénavant facilement reconnus
et distingués des chrétiens, il leur est enjoint de porter à leur cha-
peron un capuchon long d'une palme, fait en forme d'entonnoir ou
de corne et cousu jusqu'à la poi.nte. Lesdits Juifs ne pourront pas
porter de manteaux, mais ils revêtiront par-dessus leurs habits de
longues robes {gramalles), où seront fixées à la partie extérieure les
insignes qu'ils ont coutume de porter*. Lorsqu'ils voyageront les
Juifs ne seront pas tenus de revêtir ce costume, afin d'éviter les en-
nuis que cet accoutrement spécial pourrait leur attirer.
9. Il est défendu aux Juifs de vendre aux chrétiens des objets
d'alimentation, excepté les produits de leurs jardins ou de leurs
champs, qu'ils pourront vendre aux Juifs et aux chrétiens dans leurs
quartiers ou leurs propriétés, dans les foires et les marchés où ils
seront autorisés à avoir des boutiques, à la condition qu'ils n'y cou-
chent point. Il est en outre permis aux Juifs de vendre toutes sortes
d'autres marchandises.
10. Les Juifs ne peuvent remplir les charges de percepteur d'im-
pôts, de vérificateur des poids et mesures, de procureur, etc.
11. Défense aux Juifs défaire de la propagande et d'attirer des
étrangers à leur secte.
12. Défense aux Juifs d'assister les chrétiens dans leurs maladies,
de leur apporter des remèdes, de se baigner dans le même bain
qu'eux, de leur envoyer des présents de pâtisseries, épices et autres
victuailles ou boissons.
13. Défense aux Juifs, hommes et femmes, de porter des étoffes
sillon de Tannée 1296 ; l'une porte qu'il est défendu de ■ faire la cour à la jeune Juive
ou à la Juive qui vient d'accoucher • Alart, Documents, etc., p. 116.
^ Ces insif^ues, d'après une ordonnance promulguée ù Valence le 14 avril 1393,
étaient une roue jaune ou rouge [roda 'Ji'oga o vermella), qui se portait sur la poitrine
(en los pits). Voir Sanpere y Miquel, Las costumbrts catatanas eu ticmj)0 de Juan I,
Barcelone, 1878, p. 280, notel.
42 REVUE DES ETUDES JUIVES
d'écaiiale et autres étoffes précieuses ainsi que des manteaux garnis
de soie ou de fourrures : défense aux Juives de porter des ornements
d'or dans leurs voiles et toques.
14. Défense aux Juifs d'exercer le métier de barbier ni de coudre
des vêtements de femmes chrétiennes.
15. Il est prescrit aux officiers royaux d'interdire aux Juives con-
verties de passer en Afrique pour y abjurer et de laisser revenir à
Majorque les enfants de ces femmes.
(Publ. par Villanueva, Viageliterario^V. XXI, p. 238).
N" 39. — Ann. 1435. — Conversion générale des Juifs de Majorque.
Sur les causes de cette conversion je ne connais que le récit de
rhistorien Mut, qui ne renvoie à aucun document contemporain de
l'événement.
(Voir Mut, Historm gênerai del reino dellallorca, éd. de 1841,
t. III, p. 384 et suiv.^
Incontestablement les documents qui viennent d'être analysés
jettent un grand jour sur certains côtés de l'histoire des Juifs aux
Baléares depuis la conquête aragonaise, en particulier sur les tra-
giques événements de l'année 1391, mais il manque encore bien
des anneaux à la chaîne. Un des points de cette histoire qu'il se-
rait le plus intéressant d'éclaircir est cette « condamnation géné-
rale » de l'an 1315, au sujet de laquelle ni les anciens historiens
de l'île ni la collection diplomatique de Villanueva ne nous ren-
seignent. J'ai trouvé dans le deuxième registre de la procuration
royale de Majorque , intitulé Liber literarimi regiarmn of-
ficii régie procurationis, maio, anni MCCCVIIII nsque ad
MCCCXXXVIIII et conservé dans les archives de l'ancienne
Bailla à Palma ', trois documents relatifs à un accord intervenu
entre le roi Sancho et les secrétaires de la communauté {aljatna)
des Juifs de Majorque : les Juifs pour payer leur amende avaient
besoin d'argent, ils demandent au roi la permission de se charger
momentanément de certains impôts. Je transcris ces pièces en ac-
compagnant d'une traduction les deux dernières.
I. Lettre du roi Sancho à ses procureurs royaux à Majorque.
Sancius, Dei gracia rex Maioricarum, cornes Rossilionis et Ceri-
tanie et dominus Montispesullani, fidclibus procuratoribus suis,
P. FJguera et Michaeli Rotlando, salutem et graciam. Mlttimus vobis
■ Le premier registre de ccUe collection n'existe plus aux archives de la Bailia.
J'ai donné sur ces archives et sur tous les dépôts de documents historiques de Palma
des renbeiguemeiits nombreux dans un rapport adressé à M. le Ministre de l'Instruc-
tion j)ubli'jue qui sera prochainement publn; dans les Archives des missions.
NOTES ET DOGUiMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES
43
interclusa presentibus capitula super statuta Judeorum Maioricarum
cum responsionibus factis ad ea, vobis presentibus et consencien-
tibus, secundum quas responsiones, que in fine cuiuslibet capituli
continentur, volumus fieri et procedi. Super aliis non ad negocium
Judeorum pertinentibus extra dicta capitula volumus quod permit-
tatis procedi per Judeos ipsos, prout consueverunt ante captionem
eorum. Ceterum super sinagoga Judeorum volumus quod eligatur
locus competens, ubi construatur arbitrio nostro et secretariorum,
prout satisper nos et nostros consiliarios jam fuit tractatum. Datum
in Sancto Felice Guixellense *, VP Kalendas octubris anno Domini
M" GCC° XV".
Ainsi le roi Sancho envoie à ses procureurs un projet de nou-
veaux statuts de la communauté juive de Majorque avec les ré-
ponses ou observations qu'il a jugé bon d'y faire. Pour tout ce
qui n'a pas trait à « l'affaire des Juifs » et n'est pas mentionné
dans les articles de ces statuts, le roi permet aux Juifs de pro-
céder comme autrefois, avant la saisie de leurs biens. Quant à la
synagogue, on la fera construire sur un emplacement choisi par
les secrétaires de Valja?na et les représentants du roi«
Voici ces statuts avec les annotations du roi :
II. Aquests son los ordonamens
e constitucions, les quais los se-
cretaris del Cayl Juych volen fer
e ordonar entre eils ab volentat e
ab consentiment del seuyor Rey.
1. Primalment, que tôt jueu
maior de .XV. anys ho juyha que
tenga alberch per si, que sia ten-
gut de pagar per testa cosa certa,
segous que aura, a coneguda dels
secretaris e dels .VIII. prohomens
ordonats en aiuda dels negocis de
la aljama, aqueils empero que au-
ran valent de .X. libres ensus. —
Plau al senyor Rey.
•2. Item, que tôt jueu ho juyha,
estrany ho priuat, sia tengut de
pagar cosa certa per libra de carn
de molto, de hou, de oueyla e de
totes altres carns escortxadisses,
IL Ce sont les règlements et
constitutions que les secrétaires
de la Juiverie veulent faire et éta-
blir entre eux, avec la permission
et le consentement du Seigneur
Roi.
1. Premièrement, tout Juif ou
Juive de plus de quinze ans qui a
un domicile payera, par tête, une
certaine somme, selon ce qu'il ou
elle aura, à la connaissance des
secrétaires et des huit prohomens
établis pour subvenir aux besoins
de la communauté, mais ne se-
ront tenus de payer que ceux qui
possèdent plus de dix livres. —
Le Roi consent.
2. Item, que tout Juif, homme
ou femme, étranger ou du pays,
soit tenu de payer une certaine
somme par livre de viande de
mouton, de bœuf et de brebis et de
' Son Feliu de Guixols en Catalogne.
44 REVUE DES ETUDES JUIVES
a coneguda dels damuntdits e toutes autres viandes de bouche-
aiii con eils ho aordonaran, en rie, à la connaissance des susdits
aytori dels negocis de la aljama. et comme ils le régleront, pour
— Plau al senyor Rej^ abque pa- subvenir aux besoins de la com-
guen en la aiuda comuna. munauté, — Le Soi cousent, à la
condition qu'ils payeront leur part
dans Taide commune.
3. Item, que tôt jueu bo juj'ha 3. Item, tout Juif ou Juive qui
que menucb pan de forment ho mange pain de froment ou de farine
de mescayl • sia tengut de pagar mêlée devra payer une certaine
cosacerta per quintar, a coneguda somme par quintal, à la connais-
dels damuntdits aixi con eils ho sance des susdits et ainsi qu'ils
aordonaran. — Fiat ut super de le régleront. — Accordé comme
carnibus. plus haut pour les viandes.
4. Item, que tôt jueu estrany bo 4. Item, que tout Juif, étranger
priuat que vena vin juesch en ou du pays, qui vend du vin juif
Maloroba, que sia tengut de pagar à Majorque, soit tenu de payer
cosa sabuda per quatrer ho per une certaine somme par mesure '
liura, aixi con mils ho pus pro- ou par livre, ainsi que cela pourra
fitos sera faedor, a coneguda dels se faire le mieux et le plus utile-
damuntdits, en aiuda dels dits ment, à la connaissance des sus-
negocis; e que nengu crestia es- dits, pour subvenir aux dits be-
trany ne priuat no puscha vender soins; et aucun chrétien étranger
en lo Gayl ne deffora vin jueuesch ou du pays ne pourra vendre dans
senes volentat dels secretaris. — la Juiverie ni au dehors du vin
Plau al senyor Rey quels secre- juif sans l'autorisation des secre-
taris pusquen stablir certas per- taires. — Le'Roi permet aux secré-
sonasde les quais losjueus pus- taires d'établir certaines person-
quen comprar vin e no daltres. nés qui seront seules autorisées
à vendre du vin aux Juifs.
5. Item, que tôt jueu ho juj-ha 5. Item, tout Juif ou Juive qui
quis fassa vestedures noues que se fait des vêtements neufs devra
deia pagar per liura cosa certa payer par livre une certaine som-
d'aytant con li costaran, a cône- me selon ce que ces vêtements
guda dels damuntdits, en aiuda lui coûteront, à la connaissance
dels dits negocis. — Placet domino des susdits, pour subvenir aux
Régi. dits besoins. — Le Roi consent.
6. Item, que lot jueu qui compra 6. Item, que tout Juif qui achète
ni vena negunes mercadories e ou vend des marchandises ou au-
allrcs coses en Mailorcha sia ten- très choses soit tenu de payer
' Mescayll, écrit aussi mastayll, se dit d'un mélange de froment et d'orge; voir
Du Gange, au mot mescalia. On trouve aussi dans les documents la forme mastall,
mastay {yz=ll), par exemple dans RuUan, Historia de Sollei; t. I, p. 350 et
352, note 3. C'est cette forme qui a été enregistrée dans le dictionnaire catalan de
Laberniu.
* Je traduis ainsi, ignorant la contenance du quatrer et ne lui trouvant, par consé-
quent, pas déquivalcut eu français.
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES
45
^ut de pagar cosa certa per liura,
a coneguda dels damuatdits, en
aiuda dels dits negocis. — Fiat,
exceptis judeis extraneis.
7. Item, que tôt jueu ho juhia
qui prest a uzura sien tenguts de
pagar cosa certa per liura del pres-
tech, a coneguda dels damunt-
(lits, en aiuda dels dits negocis.
— Placet domino Régi.
8. Item, que tôt jueu estrany,
manestral ho de qualque art que
sia, pusque aia .1. mes continua-
ment estât en Malorqua, deia pa-
gar cosa certa per setmana, a co-
neguda dels damuntdits, en aiuda
dels dits negocis. — Placet do-
mino Régi.
9. Item, que tôt jueu mercader
qui aia estât en Malorcha .1. ayn
complit deia pagar en los dits ne-
gocis cosa certa, a coneguda dels
damuntdits. — Placet domino
Régi, si enim factus fuerit civis
Majoricarum,
10. Item, que tôt jueu ho juhia
qui tenga cases a loger, so es que
les loch a altre, que deia pagar
cosa certa per liura del loger, a
coneguda dels dits negocis. —
Placet domino Régi.
11. Item, quels damuntdits pu-
xen fer e ordonar per eils mateixs
totes les damuutdites coses e sem-
blants d'aquelles, a profit e a uti-
litat de la aljama. — Vol le se-
nyor Rey que totes les coses da-
muutdites, ans ques publiqueU;
sien aordonades ab conceil e con-
sentiment dels procuradors.
12. Item, que nul patro de nau
ne de leyn ne de nengu altre ve-
xel no gos rebugar de reebre en
une certaine somme par livre, à
la connaissance des susdits, pour
subvenir aux dits besoins. —
Accordé, sauf pour les Juifs étran-
gers,
7. Item, que les Juifs ou Juives
qui prêtent à usure soient tenus
de payer une certaine somme par
livre du capital prêté, à la con-
naissance des susdits, pour sub-
venir aux dits besoins. — Le Roi
consent.
.8. Item, que tout Juif étranger,
ouvrier ou quel que soit son mé-
tier, un mois après avoir établi
son domicile à Majorque, soit tenu
de payer une certaine somme par
semaine, à la connaissance des
susdits, pour subvenir aux dits
besoins. — Le Roi consent,
9. Item, que tout Juif marchand,
après avoir résidé à Majorque une
année entière, soit tenu de payer
pour lesdites atïaires une certaine
somme, à la connaissance des sus-
dits. — Le Roi consent, si ledit
marchand est fait citoyen de Ma-
jorque.
10. Item, que tout Juif ou Juive
qui a des maisons à louer, c'est-
à-dire qui les loue à un autre, paye
une certaine somme, par livre du
prix du loyer, à la connaissance
des susdits et pour subvenir aux
dits besoins. — Le Roi consent.
11. Item, que les secrétaires
puissent eux-mêmes faire et régler
toutes les choses susdites et au-
tres analogues pour le bien et Tu-
lilité de la communauté. — Le Roi
veut que les choses susdites, avant
d'être publiées, soient réglées sui-
vant l'avis et avec rasseutimeut
des procureurs.
12. Item, qu'aucun patron de
bateau ou de navire ou de quel-
que vaisseau que ce soit, n'ose
46
REVUE DES ETUDES JUIVES
son vaxel coses e mercaderies de
jueus per porlar fora la terra con
per venir en Malorcha, ans tôt pa-
tro con ve quest no sia ' per lo
jueu ho deia reebre e fer carregar
en son vaxel, lo jueu empero pa-
garli son nolit. — Aordonen ne
los procuradors e fassen quels pa-
trons deien pendre e carregar ro-
bes e mercaderies dels jueus.
refuser de recevoir en son vais-
seau des choses et marchandises'
appartenant à des Juifs, pour les
porter hors du pays comme pour
les amener à Majorque, mais tout
patron devra recevoir ce qui ap-
partient aux Juifs et le faire char-
ger en son vaisseau, le Juif de son
côté doit lui en payer le nolis. —
Que les procureurs obligent les
patrons à recevoir et à charger
les bagages ot les marchandises
des Juifs.
En se chargeant ainsi d'impôts extraordinaires et en sollicitant
quelques facilités pour leur commerce, les Juifs comptaient pou-
voir se libérer promptement de la somme due au roi pour le ra-
chat de leurs biens confisqués ; mais ils entendaient ne pas rester
perpétuellement soumis aux articles de ce traité qui les grevaient
considérablement. Aussi adressèrent-ils au roi une pétition afin
d'obtenir quelques faveurs spéciales, puis une grâce d'un carac-
tère général, la restitution de tous leurs privilèges, et enfin le
droit 'de déclarer nul et de nul effet le traité en question, aussitôt
qu'ils auraient pa^é leur dette. Le texte de cette pétition est ainsi
conçu :
III. Aquestes son les gracies
quels jueus demanen al senyor
Rey.
h . Primerament, que nengu jueu
ho juhia no sia couengut ne oia
sentencia ne preua justicia en dia
feriat lur.
2. Item, si nengu jueu ho juhia
sera jutgat a sentencia corporal, e
algun prehicador ho frare menor
ho preuera lo uol fier tornar cres-
tia, qu(; los sacretaris que lauors
seran, puxen, lo dia que pendra
la justicia, dins en la preso a eil
trametre .II. jueus, qui re no li
diguen, mas li sien dauant e la-
uors, sis vol fer crestia, fassau,
cor christianisme per forsa no es
III. Ce sont les grâces que les
Juifs demandent au Roi.
1 . Premièrement, qu'aucun Juif
ou Juive, ne soit cité, ni jugé, ni
ne subisse une peine un jour de
fêle juive.
'l. Ilem, si un Juif est con-
damné à subir une peine corpo-
relle, et qu'un frère prêcheur, ou
un frère mineur, ou un prêtre
veut le convenir au christianisme,
les secrétaires de la communauté
qui seront alors en fonction pour-
ront, le jour du supplice, lui en-
voyer deux Juifs dans la prison,
qui ne lui diront rien, mais se
tiendront devant lui, et alors si le
' I^robablement (ju'es^t ne sia.
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES
/i7
bo. E si non vol fer, que puxa
ffer orde de jueu, e los dits jueus
puxen ab eil anar tro al loch
bon pendra la justicia e nols sia
vedat.
3. Item, que tôt jueu que sia
condempnat a peniar, que sia pe-
iiiat per lo coll, no per tal quels
n'entenen a auer semblant honor
ab crestia, mas con un hom es
peniat per los peus trigua a uio-
rir .II. ho .III. dies ; e con es pe-
niat per lo col, es mort tantost. E
axi solament domanen asso per la
pena a aleugar.
4. Item, que si algun patro de
nau ho de leyn ho d'altre vaxel
aportaua algun jueu ho juhia que
no aia de que pae lo nolit, quel
patro nol atur en son vaxel, ans
lo lex anar encontinent, e no li
deia nel pusque despular de sos
vestits.
5. Item, que si algun inqueri-
dor fara inquisicio contra alcun
Jueu ho juhia per fet de la fe, que
no puxa en re enantar contra eii
ne enquérir sens la cort rreyal,
ans tantost con lo aia fet pendre,
lo jueu ho la juhia sia mes en la
preso del senyoi Rey, e aqui se
fassa la inquisicio ; e tota hora
quel enqueridor voira parlar ab
eil ho ab eila que hi sia lo batle
ho son lochtinent. E fêta la in-
quisicio, sien dades défendons al
jueu ho a la juhia e auocat quils
defena a lur dret.
6. Item, que si alcun infant
jueu ho juhia menor de .XV. anys
se uol fier crestia, que li sien
Juif veut se faire chrétien, qu'il le
fasse, car christianisme par force
n'est pas bon ; et s'il ne le veut pas,
qu'il puisse faire profession de
judaïsme, et lesdits Juifs pourront
aller avec lui jusqu'au lieu où il
subira sa peine, et que cela ne
leur soit point interdit.
3. Item que le Juif condamné à
être pendu, soit pendu par le cou,
non pas parce que les Juifs pré-
tendent au même honneur que
les chrétiens, mais parce qu'un
homme, qui est pendu par les
pieds, tarde deux ou trois jours à
mourir, et quand il est pendu par
le cou, il meurt aussitôt. Et ainsi
ilsdemandent cela seulement pour
alléger la peine.
4. Item, s'il advient qu'un pa-
tron de bateau ou de navire ou de
tout autre vaisseau transporte un
Juif qui n'a pas de quoi payer le
nolis,le patron ne devra pas le dé-
tenir dans son navire, mais le lais-
ser aller aussitôt, et il ne devra ni
ne pourra non plus le dépouiller
de ses vêtements.
5. Item, si un inquisiteur fait
inquisition contre un Juif pour
affaire de la foi, qu'il ne puisse
en rien procéder contre lui ni en-
quérir à son sujet, sans l'assen-
timent de la cour royale, mais
aussitôt après qu'il l'aura fait
prendre, le Juif sera mis dans la
prison du roi ; et toutes les fois
que l'inquisiteur voudra lui par-
ler, le baVe ou son lieutenant de-
vra être présent. Et lorsque l'in-
quisition sera terminée, on don-
nera au Juif les moyens de se
défendre et un avocat pour ré-
clamer son droit.
6. Item, îi un Juif ou une Juive
de moins de quinze ans veut em-
brasser le christianisme , qu'on
48
REVUE DES ETUDES JUIVES
dats .III. dies d'acort, dins los
quais tôt hom, aixi crestia con
jueu, i^uxa ab el ho ab ela parlar.
E que nul hom, sots certa pena,
no gos aytals persoues bateiar tro
los dits .III. dies sien passais.
Encara que nul hom no gos ba-
teiar ne fer bateiar jueu ni juhia
menor de .X. anys, con non aien
sen, e asso sots pena la quai el
senyor Rey conega.
7. Item, que aj^tant con los dits
jueus sien en deute ab lo senyor
Rey no sien tenguts de pagar
questa ni siza ne moliuatge ne ne-
guna altre aiuda ucesaotiorrej-al
ne veyual.
8. Item, que dins lo dit temps
nul hom (neguna persona) no puxa
auer ne recaptar gracia ni alon-
gament de negunes deutes que
deie(n) a jueus, con en altre guisa
cils no porien pagar so que deuen
al sen^'or Rey.
9. Item, que totes les mercade-
ries qui sien de jueus fora la terra
e dins lo dit temps vendran a
Malorcha, que no sien embargades
ne emparades per lo senyor Rey
ne SOS ofecials per lo deute del
senj'or Rey, ans deien venir en
poder dels sacretaris, per tal que
los jueus de qui son pus volen-
terosament les aporten en esta
terra.
'10. Item, que tots los secretaris
que seran dins lo dit temps aien
pieu poder e licencia de pendre e
fer pendre tots seils qui seran dc-
sobediens e rebcls a eils e no vol-
ran pagar so en que seran tenguts
e uquoils absolrc e fer absolro
scDs licencia do balle ne de altre
hom 0 dostrenyer los eu beus e
lui donne un délai de trois jours,
pendant lequel tout homme, juif
ou chrétien, pourra lui parler. Et
que personne, au risque d'encou-
rir une certaine peine, ne s'avise
de baptiser de telles personnes
avant que lesdits trois jours soient
écoulés. En outre que personne,
au risque d'encourir une certaine
peine, qui sera fixée par le roi, ne
s'avise de baptiser ni faire bapti-
ser Juifs ni Juives de moins de
dix ans, car à cet âge on n'a pas
de raison.
7. Item, que lesdits Juifs, tant
qu'ils n'auront pas payé leur dette
au roi, ne soient pas tenus de
payer quête ni imposition, ni droit
de mouture, ni aucune autre aide,
ni exaction royale ou vicinale.
8. Item, que pendant ledit temps
personne ne puisse être tenu
quitte de dettes contractées en-
vers des Juifs, ni obtenir des ater-
moiements, car, autrement, ils ne
pourraient pa3'er ce qu'ils doivent
au roi.
9. Item, que les marchandises
qui au dehors de File appartien-
nent à des Juifs et qui pendant
ledit temps seront envoyées à Ma-
jorque, ne soient point saisies ni
retenues par le roi ou ses agents
à cause de la dette, mais qu'elles
soient remises aux mains des se-
crétaires, afin que les Juifs à qui
elles appartiennent soient encou-
ragés à les envoyer en ce pays.
10. Item, que tous les secrétai-
res qui seront en fonction pen-
dant ledit temps, aient plein pou-
voir et plein droit de prendre et
de faire prendre tous ceux qui
leur seront désobéissants et re-
belles et ne voudront pas payer
ce à quoi ils sont teuus, de les ab-
soudre ou faire absoudre sans per-
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES
en persona e penyorar e uendre
penyores e totes altres coses fer
perque eils puixen cumplir les
pagues al senyor Rey.
11. Item, que tôt jueu puixa
comprar bens aventats.
12. Item, que nengu jueu ne
juyha no puscha vendre son al-
berch dins le cail a crestia o cres-
tiana mas que puscha carregar
sobre son alberch morabetins, a
coneguda dels secretaris.
13. Item, quels jurats de Ma-
lorcha nels prohomens de la terra
nopusquen fer nengu ordonament
sobre ne contra jueus en especial,
si doncs eu gênerai no eraper tota
la terra, encara que sien enteses
e usen de totes franquesas e pri-
vilegis de la terra aixi con habi-
dators de Malorcha.
14. Item, con los jueus de Ma-
lorcha sien despulats de tots lurs
privilegis, franqueses, les quais
en spécial lurs eren dades e ator-
gades, sens les quais los jueus de
Malorcha en la terra profitosament
nels jueus estranys habitar en la
dita terra no vendrien menys de
priuilegis, con per los priuilegis
los quais hauien los jueus estran-
gers de diverses terras en Malor-
ches habitar venguessen : per so
vmilment els dits jueus habi-
tadors de Mailorcha a la Reyal
Magestat sopleguen que de bontat
sua acustumada los reta lurs pri-
viligis ab los quais pusquen habi-
tar en la terra e tirar los estran-
gers, axi con d'abans fcyen.
15. Item, con els dits jueus no
T. IV,
mission du baile ni d'aucun autre
homme, de les contraindre à payer
en se saisissant de leurs biens
ou de leurs personnes, de leur
prendre des gages, de vendre ces
gages et de faire toutes autres
choses, moyennant quoi ils puis-
sent effectuer leurs payements au
roi.
11. Item, que tout .Juif puisse
acheter des biens mis en vente.
12. Item, qu'aucun Juif ni Juive
ne puisse vendre sa maison de .la
juiverie à chrétien ou à chrétienne,
mais qu'il ou elle puisse l'hypothé-
quer, à la connaissance des secré-
taires.
13. Item, que les y^m^^ de Ma-
jorque ni les proJiomens du pays
ne puissent faire sur ou contre les
Juifs aucune ordonnance spéciale
qui ne s'applique en même temps
à tout le pays en général, auquel
cas ils doivent être entendus et
admis à user de toutes les fran-
chises et privilèges du pays comme
habitants de Majorque.
14. Item, comme les Juifs de
Majorque ont été dépouillés de
toutes les franchises et privilèges
qui leur avaient été spécialement
donnés et accordés, sans lesquels
les Juifs de Majorque ne peuvent
habiter avec profit le pays ni les
Juifs étrangers venir s'y établir,
comme, en vertu de ces privilè-
ges, ils y venaient autrefois de di-
vers pays, lesdits Juifs habitants
de Majorque supplient humble-
ment la Majesté Royale qu'avec
sa bonté accoutumée elle leur
rende leurs privilèges, grâce aux-
quels ils puissent habiter dans
le pays et y attirer les étrangers,
comme ils faisaient auparavant.
i;j. Item, comme lesdits Juifs
50
REVUE DES ETUDES JUIVES
agen sinagoga e als dissaptes e
als altres dies de lur oracio agen
a anar per alberchs e fer partides
dels matexs, es los gran trebayl :
per so sopleguen humilment que
placia al senyor Rey quels assi-
gure els don loch dlns lo caj^l en
lo quai pusquen fier lur sinagoga,
con tan gran caj^l senes sinagoga
estar no puscha.
\6. Item, que lot jueuestranger
qui uenga en Malorcha ab merca-
deries de les quais aia pagat dret
en Malorque, que parten de Malor-
cha, si pren en Manorcha, que no
sia tengut de pagar leuda ne al-
tre drel.
M. Item, que con els ditsjueus
agen demanats los damuntdits
capitols de seruitut entre ells, los
quais, con sien esmeses de diners
e de bens, no porien complir la
paga del senyor Rey, entenen los
dits jueus que los dits capitols
de seruitut sien obseruats entre
eils entro quel dit senyor Rey aia
ahuda conplida paga e fenit lo
terme, e conplida la paga del dit
senyor Rey, quels dits capitols de
la dita seruitut sien casses e vans
e que d'aquels no vssen ne pus-
quen vsar d'aqui auant.
n'ont pas de synagogue et que les
samedis et autres jours de fête ils
sont tenus d'aller dans les mai-
sons particulières et de se séparer
les uns des autres, ce qui est pour
eux un grand ennui, ils suppli-
ent humblement le Roi qu'il lui
plaise de leur assurer et donner
un lieu dans la juiverie, où ils
puissent faire leur synagogue,
car une si grande juiverie ne peut
subsister sans synagogue.
16. Item, tout Juif étranger qui
viendra à Majorque avec des mar-
chandises, et qui, après en avoir
payé le droit, les fera sortir de
Majorque et les transportera à Mi-
norque, ne devra pas être tenu de
payer le droit de douane ni au-
cun autre droit.
17. Item, parce que lesdits Juifs
ont demandé à établir entre eux
lesdits chapitres de servitude,
sans lesquels ils ne pourraient
pas, puisqu'ils sont sans argent
et sans biens, satisfaire à leurs
engagements envers le Roi, les-
dits Juifs entendent que lesdits
articles de servitude soient ob-
servés entre eux jusqu'à ce que
ledit Seigneur Roi ait reçu tout
ce qui lui est dû, et après avoir
atteint le dernier terme du paye-
ment et avoir versé la somme
entière, ils entendent que les-
dits articles de ladite servitude
soient cassés et annulés et qu'on
n'en use ni ne puisse en user à
l'avenir.
On ne sait pas exactement combien de temps mirent les Juifs de
Majorque à s'acquitter des 95,000 livres dues au roi Sanclio pour
leur rachat, en tout cas ils étaient entièrement libérés au mois de
mars de l'année 1327. C'est vers cette époque qu'ils envoyèrent à
Pliilippe do Majorque, tuteur du roi Jacme III, qui résidait alors
à l'erpignan, quatre notables de leur communauté, Abraham Ma-
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES ï>i
lequi, Isaac ben Aron, Ayon Choen et Joseph Barqui, pour le
supplier de replacer la communauté juive dans le droit commun,
puisqu'elle avait payé le montant de l'amende, et de n'exiger
d'elle à l'avenir que le tribut annuel de cent soixante-cinq livres
qu'elle était tenue de payer avant la condamnation générale du roi
Sancho. Philippe, comme on le voit par la lettre suivante qu'il fit
adresser par son trésorier, de Perpignan, le 8 mars 1327, aux
procureurs royaux de Majorque, acquiesça à ce vœu et déclara
que, voulant suivre l'exemple de ses prédécesseurs, il prenait sous
sa garde et protection les Juifs de Majorque et leurs biens.
Als houralz, sauis e discretz senyors en Michel Rotlan e en P. Roig,
prociwadors en lo règne de Maylorches per nostre senyor lo Rey, de
nos en Nicholau de Sent Just, maior, e en P. Berro, Ihesaureres del
dit senyor'Rey, salutz ab tota honor. Fem vos saber quels messages
de l'aljama de Maylorches, ço es Nabraffim Malequi, Nissach ben
Aron, Nayon Choen, En JucefT Barqui, suplicaren a Mossenyer en
Felip e al consseyll que pus la dita aljema auia pagades noranta
sinch mill libres en les quais fo condanpnada a pagar al senyor Rey
en Sanxo de bona memoria, que deges restituir e tenir la dita aljema,
quant a pagar lo trahut que deuen, en aquela forma e manera que
auien acostumat de donar ans de la dita condenpnacio. Perqueus fem
saber que délibérâtes estât per lo dit senyor mossenyer En Philip e per
son conseyllque la dita aliama no déjà pagar al senyor Rey altre tra-
hut sino aquell que per eylla era acostumat de paguar ans de la dita
condenpnacio, ço es cent saxanta sinch Ib., segous que auem trobat
per los libres de la thesauraria. E axi daym uos eus manam de part
del dit senyor mossenyer en Philip que la dita aljama no sia per uos
altres costreta eu altra manera de pagar lo dit trahut sino axi con dit
es Vol encara e mana lo dit senyor mossenyer en Philip e axi vos ho
diem de part sua que la dita aljama e tots lurs bens sien en guarda
e protectio del dit senyor Rey axi con cosa sua propria e axi con tots
temps han estât per sos predessessors. E registrada la présent letra
en lo libre de la nostra thesauraria, sia per vos altres rrestituida als
ditz messatges. Dada en Perpenyan, dimarts a VIII dies del mes de
mars on l'ayn MCCCXXVir.
Deux autres lettres de la même date qui suivent immédiate-
ment dans le registre II de la Procuration Iloyale ont trait encore
à des affaires juives, conséquences toujours de la condamnation
générale et des droits réservés par le roi Sancho sur l'édilice et
l'emplacement de la chapelle de Santa Fé. La première est une ré-
1 Archives de la Bailia. Registre II de la Procuracio Real, fol. 5t) v. La lettre
porte cette note d'enrcpislrcment : « Fuit preseutata prcseiis litera die lune XXVllI
marcii aunu Domiui MCCCXKVllI, pro aljama Judeoruui de Maiorica ••
b2 REVUE DES ETUDES JUIVES
ponse des trésoriers de Philippe de Majorque à une supplique des
quatre délégués que nous avons vu figurer dans la lettre précé-
dente. Ces personnages sollicitaient la permission de transporter
une fabrique monétaire « dans la cour {pati) ou dans le lieu où se
trouvait jadis la chapelle de Santa Fé ». Le tuteur du roi fait re-
pondre que, si la communauté juive s'engage à payer les mêmes
droits de cens et d'entrée qu'elle paye pour l'emplacement actuel
de ladite fabrique, et si le lieu où se trouvait la chapelle reste clos
de toutes parts, de telle sorte que personne ne puisse s'en servir,
il consent à céder aux Juifs la cour et les maisons avoisinantes au
prix qui sera fixé d'après l'estimation qui en a été faite du t^mps
du roi Sancho, à condition que la communauté paiera pour l'amor-
tissement de ladite cour une certaine somme de neuf en neuf ans.
En même temps Philippe donne ordre à ses procureurs de faire à
la communauté juive de Majorque « une charte publique de
dette à un an » pour une somme de 5,000 livres qu'elle avait prê-
tée au roi.
Remenbransa sia als honrats e discrets en Michel Rotlan e en P.
Roig, procuradors en Maylorches per nosire senj^orlo Rey, queusfem
nos en Nicholau de Sent Just,maioi\e en P. Berro, thesaureres del dit
senyor Rey. Fem vos saber que entre nos e Nabrafim Malequi, Nis-
sach ben Aaron, Nayon Choen, En Juceff Barqui, missatges assi
trameses per Taljama de Maylorches, son estais diverses tractamens
sobrel fet de la monedaria que entenien a ffer mudar en lo pati o en
lo loch on esser solia la capella de Sancta Fe. E fmalment lo Consseyl
ha fmat en aquesta manera : que si la dita aljama uol donar al
senyor Rey ay[t]ant de sens e d'intrada con hom trobara del loch on
ara es la monedaria, quel dit loch on solia esser la dita capella ro-
manga clos de totes partz enaxi que no sia a seruehy ni a us ni a
cmpriu de neguna persona d'aqui enant, e que la dita aljama per
amortizatio del dit pati pach alguna cosa per manera de foriscapi de
VIIII en YIIII ayns en aquela forma ques parra faedor, perque si la
dita aljama uol consentir a aço procehits ab ells sots la forma d'amont
dita. En allre manera, si fer no ho uol, fets nos ho assaber e nos
tremetrem uos en a dir la uolenlat de mossenyer En Phelip e del Gon-
seyll. Empero si la dita aljama uol consentir al dit tractameut, en
aquest cas consentissets que lots los alberchs que son denant lo
loch on esser solia la dita capella sien liurats a la dita aljama, per
aquela estimacio quel senyor Rey los ach, enaxi que d'aqui enant
los habitadors dels dits alberchs exida alcuna no agen en lo dit car-
rer. E con los dits missatges diguen quels alberchs qui son en la
partida denant lo loch on solia esser la dita capela no poden esser a
nengu seruehi del cayll eu la forma d'amuut dita sensgran danpuage,
veyats vos altres si es axi con eyls dicn. E d'asso e de tôt l'alls tra-
NOTES ET DOCUMENTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES 53
metets nos en a dir uostre vigayres ans que res procecescats al dit
negooi. Daim vos encara de part de mossenyer En Phelip que de les
cincli milles libres que la dita aljama ha prestades al senyor Rey lus
fassatz cartapublica de deutea .1. any. Dada enPerpenyan, dimartes
del mes de marts del ayn MCCCXXVII.
La seconde lettre concerne le seul Abrahim Malequi, qui sut ob-
tenir l'autorisation de racheter une maison voisine de l'ancienne
chapelle de Santa Fé qui lui avait appartenu avant la confiscation;
mais les trésoriers du roi ont la précaution d'informer les procu-
reurs de Majorque que la valeur de ladite maison étant jugée su-
périeure par le conseil à celle de l'ancienne estimation, ils devront
eux-mêmes fixer le prix du racliat.
Pro Abrahim Malequi, judeo.
Als hourats, sauis e discrets senyors En Michel Rotlan e En P.
Roig, procuradors del sen.yor Rey en Maylorches, de mi En Nicholau
de Sen Just, thesaurer major del senyor Rey, saluts ab tota honor.
No contrastant, senyors, oo que es contengut en vna letra queus
trametem per los messages de l'aljama de Maylorches dels alberchs
que son prop lo loch, on solia esser la capella de Sancta Fe, es aor-
donat que an Abrahim Malequi sia relut lo seu alberchper aquel preu
que fo estimai e mes en paga al senyor Rey. Empero con sia estât dit
per alcuns al Conseyll quel dit alberch val mes de la dita estimacio,
asso sia a arbitracio uostra, e si trobaretz que mes vayla, lo dit
Abrahim pach lo mes valent. Datum en Perpenyan, dimartes a VIII
de marts MCCCXXVII.
Il ne me reste plus qu'à faire connaître deux autres documents
de la même collection qui nous renseignent sur la condition du
Juif étranger qu'un motif quelconque amenait à élire domicile à
Majorque. Dans la première pièce, du 20 mars 1334, se trouve re-
produite la supplique d'un certain Joseph Faquin, Juif de Bar-
celone, qui, après avoir a couru le monde » était venu se fixer à
Majorque, où il avait pris femme. Or, un an et demi environ
après son établissement dans l'ile, les secrétaires de ValjcDua vou-
lurent lui faire payer sa part d'une imposition de dix-huit mille
livres dont la communauté avait été frappée huit ans auparavant.
Faquin proteste énergiquement contre cet excès de pouvoir « con-
traire à toute justice et raison » et obtient de Jacme III, dernier
roi de Majorque, une lettre pour les procureurs royaux qui seront
chargés d'examiner son affaire.
Jacobus Dei gratia rex Maioricarum, cornes Rossilioniset Ceritanie
oi REVUE DES ÉTUDES JUIVES
ac domiuus Montispesullani, fidelibus procuraloribus nostris in
Maiorica Bn. Jane et Bn. de Valleviridi, salutem et gratiam. Supli-
cationem nobis oblatam pro parte Jucceffi Faquin oriundi de Barchi-
nona uobis niiltimus presentibus interclusara, mandantes uobis qua-
tenusprouideatis dicto lucefî super petitis a nobis suplicando, vocatis
qui fuerunt euocandi, prout de jure vel consuetudine videritis proui-
dendum. Datum in Castro de Turri propre EInam \ tercio decimo
Kalendas aprilis anno Domini M° CCC° XXX^ quarto. Ténor supli-
cationis talis est :
Denant vos molt ait e poderos senyor en Jacme per la gracia de
Deu Rey de Maj^lorcbes, etc. Diu e mostra En Jucetf Faquin, jueu
naturalde Barcelona, que eyl es anat per lo mont nauegant e vsant
e per diuerses parts, e ara tro a vn ayn e mig prop passais, poch mes
bo menj^s, a pressa muler en la ciutat de Maylorcha e los secretaris
dels jueus de Maylorcba an taxât lo damunt dit Juceff Fequin que
déjà mètre e contribuir certa quantitat de moneda en aqueles
XYIII milia libres que per la dita aljama son degutz, passât ha
VIII aj'ns e mes ; lo quai, senyor, es a uos cert (on senyor) con sia
contra tota justicia e contra tota ralio quel dit Juceff Faquin déjà res
mètre o contribuir en los deutes, les quais per la dita aljema son de-
guts, ans- quel dit Juceff, humil seruidor jueu vostre, ab aquela hu-
militat que pot [prech] que lo dit tort no li sia fet. Enaxi, senyor,
que sia merce vostra que lo honrat conseyll vostre déjà asso deter-
menar et conoxer, enaxi que lo dit Juceff no aja a uenir a conoxensa
de altre jatge bo conoxedor de Maylorcha o d'altre loch. Placia a
Deu, senyor, que[u]s deu (?) longa vida ab honor e salut*.
L'autre pièce est un sauf-conduit {guiaige) délivré le 21 février
1448, parle lieutenant du procureur royal de Majorque à Mardufex
Racandel, Juif de Tenès, pour se rendre à Majorque et y résider.
Ce Juif n'était pas à proprement parler un étranger ; il avait autre-
fois [en temps pessai) habité Majorque et demandait à pouvoir y
élire de nouveau domicile. On voit parles considérants de ce sauf-
conduit que les rois d'Aragon, depuis Joan P'', furent amenés, par
intérêt, à permettre le retour dans leurs états des Juifs que l'into-
lérancp do la masse avait obligés de s'expatrier et de s'établir sur
la côte d'Afrique*.
' Probablement la Tour-Bas'-Elne.
' Il y a ici une lacune dans le texte. Le mot ans indique que Jucel' faisait valoir
que l'amende avait été imposée à la communauté avant son établissement dans l'île.
' Arcbives de \a Bailiade Majorque. Reffislrc II de la Procuration Royale, fol. 10b.
* Il est intéressant de savoir qu'au xiv siècle (peut-être aussi plus tôt et plus
tard), les rois de Majorque toléraient le séjour dans Pile de maures, libres (Sarra/tins
frani-hs) moyennant une certaine redevance. Les registres de complabilité de la Pro-
curation Royale [lihres de daJes e rchudes) mentionnent très souvent des sommes per-
çues pour Yestada (séjour) ou Vexida (fortiej de Sarra/iins.
NOTES ET DOCUiMEiNTS SUR LES JUIFS DES BALÉARES So
Guiatge d'En Mardufex Racaadell, judeu del loch de Tenes'.
Als molt honorables tots e sengles bâties, gênerais procuradors
Reyals e altres qualseuol officiais Reyals dins les terres del molt ait
senyor Rey constituits, e a tots altres patrons de qualseuol fustes
dels subdils del dit senyor Rey, als quais les présents preuendran o
presentades los seran o als loclitinents de aquells, de part d'En An-
thoni Sait, loclitinent del honorable mossenyor Johan Alberti, caua-
11er, conceller e maiordom del dit molt ait senyor Rey, e Regidor o
administrador del offici de la procuraci-o Reyal de Mallorcha salutz e
honor. Com En Mardutïex Racandell, judeu del loch de Tenes, en
temps pessat habitant en Mallorcha vulle e entena habitar e son do-
milici en la dita ciutat de Mallorcha mudar, on, com segons lo guiatge
e seguretat fet e atorgat per lo molt ait senyor Rey Eu Johan de ec-
cordable memoria, confirmât après per lo senyor Rey En Marti glo-
riosament rregnant a tots e sengles e uniuerses juheus, mascles e
fembres, axi naturals dels dits senyors com habitedors dels r règnes
e terres dels serrahins, e aquells encare qui ans e après o en temps
de les destruccions de les juheries e jueus de la senyoria dels dits
senyors a les dites terres de serrahins se son tresportats os trens-
porteran, contra voluntat e ordinecio dels dits senyors, e altres en-
care qualseuol 1 juheus de qualseuol condicio o estament, seran de
altres rregnes e terres de crastians e serrahins,, a qualseuol ciutats,
parts" e lochs de nostra senyoria vinents per causa de habitar, mer-
cadeiar o negocis altres fer, de tots e sengles excessos, crims, delictes
en qualseuol manera greus e forts no exceptant ne aigu, encare que
fos dels costumats per los dits senyors exceptar : en après guien los
dits senyors e asseguren los dits senyors los dits juheus en mar e
en terra ab tots lurs mercaderies e a ells comenades joyes, moneda,
aur, argent e altres qualseuol bons, per mar e per terra entrant en
los dits nostres rregnes, mercedeiant e estant e d'aquen saluament e
segura en les dites terres de sarrehins e en qualseuol parts retor-
nants ab totes les dites meixadcries sens algun empetxamcnt, preso,
violencia, detensio, arrest que a ells ne a lurs bens en naguna ma-
nera sia ifet per qualseuoll persones, segons que aquestas CQses o
altres en lo dit guiatge e seguretat molt pus largament son conten-
gudes. E lo quai guiatge e seguretat lo molt victorios senyor Rey
Nalfonso, ara beneuenturadament rregnant, actenent lo profit e
utilitat que per raho de les dites mercaderies reporten lo seu patri-
moni e regalia, per reho dels dits drets que paguen los juheus de les
dites mercaderies, ha confirmais ensemps ab tots altres guiatges per
los Reys pessats als dits juheus atorgats ab carte del dit senyor
dade en lo moncstir de Sent Cugat dez Valers, a XV de noembre
> Litterarum ve//ii procuratoris anni MCCCCXXXIIII usque ad MCCCCZVl, loi.
153 T".
* Peul-èlTc ports
se REVUE DES ETUDES JUIVES
any MCCGCXVIIII. Emperamordaço, de part del senyor Rey, requir
en subsidi de justicia a cascun de vosaltres e de la mia affectuo-
sament prech que al dit Mardufax Racandell seruets e façats se-
ruar lo dit guiatge e seguretat segons séria e ténor de aquelles. En
testimoni de les quais coses he fêta fer la présent signade de ma
man e ab lo segell del dit meu offici en lo dors segellade. Datum
en Mallorcba, a XXI de ffebrer any MCCCCXXXXVIII. Antboni
Sait, lochtinent.
Alfred Morel-Fatio.
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE
EN 1392
Nous avons déjà parlé (Voir Revue, III, 145) du document inté-
ressant publié par M. Andreu Balaguer y Merino, le savant membre
et archiviste-bibliothécaire de l'Académie roj-ale des Belles-
Lettres de Barcelone, dans deux numéros de La Veu ciel Montser-
rat, qui se publie à Vich (n°' du 23 juillet et du 30 juillet 1881,
p. 231 et 239). On connaît les massacres dont les Juifs d'Espagne
furent victimes en 1391. La communauté juive de Barcelone fut
attaquée par l'émeute le samedi 5 août, une partie des Juifs fu-
rent tués (250 dès le premier jour de l'émeute, à ce qu'il semble ;
voir la lettre de Hasdaï Crescas dans ScJievet Jehuda, édit. Wiener,
p. 129), beaucoup d'autres furent obligés de se baptiser. Le docu-
ment publié par M. Andreu Balaguer contient la liste nominative
de 129 Juifs de Barcelone ♦ qui se baptisèrent et, suivant un usage
général, adoptèrent des noms chrétiens à la place de leurs noms
juifs. La pièce est datée de Barcelone, 11 mars 1392. Elle contient
une procuration donnée par trois des Juifs baptisés, procurateurs
des 127 autres en vertu de plusieurs actes publics dont le premier
était daté du 7 décembre 1391, par laquelle procuration Franciscus
Cahanerius, de Saragosse, est chargé de poursuivre la restitution
de tous les objets volés pendant le sac de la juiverie de Barce-
lone et dont les détenteurs se trouveraient dans le royaume d'Ara-
gon. M. Balaguer en conclut avec raison que les pillards devaient
être en partie des étrangers venus de l' Aragon. Une pièce du
7 mars 1393, dont M. Balaguer a donné un extrait, indique du reste
que cette recherche des objets volés fut infructueuse : De ipsis
bonis yiullo modo aliquid potuit inveniri seu recuperari.
Le document publié par M. Balaguer est si utile pour l'étude
• Les numéros 1 et 19 sont idcnliques.
58 REVUE DES ETUDES JUIVES
des noms juifs que nous n'hésitons pas à le reproduire ici. (N° I.)
Nous le faisons suivre d'un autre document, encore inédit
(N° II), que nous devons à l'obligeance de M. Balaguer et qui con-
tient également une liste nominative de Juifs de Barcelone. Ce se-
cond document est de 1383 et est tiré des archives tlu notaire An-
tonio Bellver, de Barcelone '.
N° I.
« Noverint universi : Quod nos
1. Petrus daragay olÙ7i Bonanasch astruch,
2. Raymundus de rosanis olim Caravida çaporta,
3. Johannes ses escales olhn Vinant coffeu,
cives Barchinone, procuratores ad infrescripta et quamplura alia
légitime constituti à
4. Petro pujol, magistro in medicina olim Mestre noch,
5. Laurencio Sent climent olùn Maçot evangena,
6. Bernardo dezcarner olim Vidal,
1. Jaufredo se*s escales olim Abamari rossell,
8. Guillermo mulet olim Jafiel ferrer,
9. Nicholao conomina oli7n Astruch melsia,
10. Leonardo ferrer oliiïi Bonjuha argent,
11. Raymundo de gualbis olitn Suclam astruch,
12. Bernardo çaclosa olùn Astruch çatorra,
13. Petro de casa sagia olim Vidal de la torra,
14. Bartholomeo despont oli7n Mosse bonofeu,
15. Francisco pedralbes olim Mosse falco,
16. Ferrario gracia de gualbis olim Isaach bonsenyor,
n. Raymundo de villafrancha olim Mestre bendit deu lo
guart,
18. Lodovico buçot o^jm Vidal isaach,
19. Raymundo de rosanis olim Caravida çaporta,
20. Berengario dezcortey olim Jucefï"des falco,
21. Simon savall olim Samuel abraam,
22. Johanne ginero/im Bonjuha gracia,
23. Petro vives olim Astruch de ripoll,
24. Bartholomeo de casasagia olim Bonjuha isaach dalell,
25. Bernardo gualter olim Bonjuha mosse dalell,
20. Bartholomeo sait olim, Barzalayt michael,
' M. Balaguer a eu la bonté de rectifier pour nous quelques fautes d'impression de
La Yfu (tel Moniserral. — Les numéros d'ordre qui, dans nos deux dociinicuts, pré-
cèdent les noms, ont été ajoutés par nous.
LISTE NO^IINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 :;'.!
2T. Jacobo baro oUm Astruch talco,
28. Johanne bertran olîm Samuel benvenist,
29. Lodovico de prades olim Vidal de prades,
30. Guillermo vidai puiol ollm Isaacli de piera,
31. Bernardo casais olhn Juceff abraam,
32. Bertrando çabater oli7n Abraam maliir,
33. Berengario badorch o/im Bonjulia badorcli,
34. Micliael lobet olim Davi de bellcayre,
35. Johanne roure olim Samuel des forn,
36. Bernardo de muntalt olùn Juceflf jaflel,
37. Petro gibert de campredon olim Salamo de campredon,
38. Guillermo valles olwi Isaacli bonafos,
39. Dominico puiol olim Vidal maymo,
40. Petro ardit olim Isaacli abraam ardit,
41. Johanne ferrer oliin Astruch ravalla,
42. Francisco joannes oliin Bonjuha anatzanell,
43. Johanne dezval olim Juceff evangena,
44. Johanne massana olim Salamo maçaua,
45. Bernardo cisa olim Abraam juceff,
46. Marcho desprat niaior olbn Rovem bondia,
41. Guillermo oliverii olltn Astruch cap,
48. Bernardo arnau olim Lobell de manresa,
49. Gabriele de muntpaho olim Abraam vidai de muntso,
50. Francisco colomerii olim Samuel ananell,
51. Johanne ferrarii olim Abraam alfeu,
52. Petro bofiy oli7n Isaach maymo galipapa,
53. Anthonio buçot oli7n Asquio de milan,
54. Guillermo ferrer olim Astruch de milan,
55. Gabriele des sayol olim Bonsenj-or mercadell,
56. Bernardo dezpont olim Jafuda vinag,
57. Petro jovent olim Isaach de bron,
58. Poncio de tahust olim Jacobo coffeu sartoro,
59. Guillermo salelles olim Salamo morcat,
60. Petro martini olim Juceff burgales,
61. Bernardo de terra olim Jafuda navarro,
62. Rafaele desqiier olùn Bonafeu fabib,
03. Johanne de gualbis oli7n Lobell bonjuha gracia,
64. Sisto olim Hayem gomer,
65. Raymundo de parets olim Salomo botarell,
66. Bernardo costa olim Bonjuha maliir,
67. Johanne de cruilles oli>it Vives astruch,
68. Johanne isarch olim Issaach senton mahir,
69. Francisco Vilamari olim Issaach badorch,
60 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
TO. Berengario ferrarii oZ^m Juceff ferrer,
•71. Ludovico guixar olim Salamo adret,
'72. Raj-mundo boneti olim Mosse torarfF,
•73. Petro de muntros olim Isaach jasquell,
74. Guillermo çatorra olim Abraam salamo.
•75. Margarita figuera oliin Bonanada uxor Astruch biona,
76. Galcerando castello o^w Vidal sutlam,
Tl. Ferrario gracia alias de gualbis,
"78. Raymundo ballistarii olim Samuel alietzer,
79. Arnaldo soler olim Vidal mercadell,
80. Petro de cigiis olim Vidal senton xantxell,
81. Ludovico de gualbis oli7n Davi jaques,
82. Johanne de Valencia olim Salamo de Valencia,
83. Petro vidai olim Juceff çaporta,
84. Clara olim Astruga uxor den biona de pura,
85. Raymundo ballistarii olim Abraam des forn,
86. Jacobo de podio olim Salamo toraif,
87. Petro bartliolomei olim Abraam natzanell,
88. Jolianne de Vallesicca olim Ilaym bavent riscb,
89. Jacobo lonch olim Salamo lobell gracia,
90. Petro buçot olim Senton caro,
91. Petro merles olim JucefFdavi,
92. Petro ça rocha olim Abraam rugat,
93. Jacobo augusti oli^n Samuel abraam magister scola-
norum ' ,
94. Johanne corro olim Isaach çaragoça,
95. Salvatore de vallo olim Salamo salvat,
96. Petro ballester olim Davi burgales,
97. Bertrando lança olim JucefF de pontardia,
98. Bernardo coll olim Lobell baro,
99. Jacobo mediona olim Samuel bellshom,
100. Raymundo ballester olim Isaach mahir,
101. Francisco ripoU o^im Juceff alborga,
102. Francisco pujades olim Samuel sadoch,
103. Bernardo calaf olim Abraam nogueres,
104. Johanni gracia olim Mosse roven,
105. Francisco oliver olim Astruch sescola,
106. Guillermo mascaro olim Mahir bonjuha,
107. Francisco vilaplana olim Michel barzalay,
108. Francisco bertran olim Natan adret,
109. Phllipo de ferreres olim Astruch de Teraçona,
' Le mol n'est pas dans Ducango. Les écoliers s'appellent escolans en catalan.
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 Cl
110. Michael ariembau olim Isaac mosse,
111. Raymundo de querio olim Astruch fabib,
112. Francisco lodrigo olim Abraam alfamem,
113. Johanne bertrandi oZim Bonastruch alcaravi,
114. Guillermo çagarriga oU7n Salamo fabib,
115. Petro guardiola olim Mosse de ganges,
116. Petro bertrandi oli7n Bonjuha bennevist,
in. Gabriele de prades olim JucefF de prades,
118. Petro terraça olim Isaacli mavmo,
119. Gabriele boni olim Mosse cabrit,
120. Francisco de podio olim Davi cortés,
121. Raymundo saval o^mz Cresques affunant,
122. Arnaldo de rosanes olim Mestre abraam coffe,
123. Bernardo lunes oZim Abraam adret,
124. Ferra rio sayol pujades olim Yidal abravini,
125. Floynii bononati oli7n Isaach de ganges,
126. Francisco guicli olim Salamo asdrach;,
127. Berengario oliverii olim Juceff ferrer,
128. Johanne de fontcuberta oli7n Juceff ferrer,
129. Arnaldo ferrarîi oliin Senton del de bellcayre,
130. Simone pétri oli77i Mahir salamo,
omnibus olim judeis Barchinone nunc yero ad fidem orthodoxam
conversis, etc. . . »
N° IL
Ce document, daté du 6 juillet 1383, contient une vente et créa-
tion de cens annuel de 1,000 sous, autorisée par la Aljama (com-
munauté juive) de Barcelone en faveur de Vénérable Juan de
Vall, de la maison du roi d'Aragon, citoyen de Barcelone, flls de
défunt Juan de Vall, également citoyen de cette ville, en échange
de 14.200 sous, monnaie de Barcelone, prêtés à l'Aljama pour les
payer à « Petro Cabanyes, juponerio et sartorio civi. Barchinone, »
en vertu d'une autre écriture de vente de cens, datée du 17 janvier
1381 et faite par devant Antonio Saploma, notaire public de Barce-
lone. L'Aljama avait de grands besoins d'argent, car le 10 sep-
tembre 1383, le même Bonjuha assanell qui (igure dans l'acte du
6 juillet 1383, agissant au nom de la communauté, vendit encore,
par-devant le même notaire Bellver, au môme Juan de Vall, avec
l'autorisation de l'infant Don Juan, fils du Roi et gouverneur gé-
néral du royaume, un cens annuel de 400 sous, en échange d'une
somme de 15.600 sous, monnaie de Barcelone. Ces besoins d'argent
62 REVUE DES ETUDES JUIVES
sont expliqués par le passage suivant de cette pièce : « Attendentes
dictam aljama et eius judeos singulares ipsius aljame teneri et
obligatos fore tam Curie Inclite ac magnifici Domini Infantis Jo-
liannis serenissimi domini Régis primogeniti quam nonnullis per-
sonis christianis videlicet et judeis et diversis et magnis peccunie
sumrais diversis respectis atque causis. Attendentes etiam diverses
modos fuisse constitutos unde dictas quantitates exolvi possent
comodius creditoribus ipsius aljame et non invenissent tam utile
quam per viam seu modum venditionis censualis mortui infra-
scripto. Idcirco, etc. »
Voici maintenant la pièce du 6 juillet 1383 :
« In nomine Domini. Noverint universi : Quodego Bonjuhà assa-
nell, judeus Barcliinone, sindicus, actor et procurator ad infra-
scripta specialiter et legitimum constitutus ab Aljame judeorum
Civitatis Barchinone et a secretariis et a triginta de consilio ac
aliis judeis singularibus eiusdem aljame infrascriptis inter alios
nomine ipsius aljame et nomine etiam eorum proprio videlicet a :
131. Bonjuha gracia,
132. Roven bonafeu,
133. et Struch Abenefeia,
secr(
?tariis anno presenti aljame
jamdicte et etiam ;
a
134.
Massoto avengena
154.
Bissaltell gracia
135.
Salamono scaleta
155.
Samuele desforn
136.
Bonsenyor gracia
156.
Jafïuda lobell cresques
137.
Atzay cresques
157.
Salamone bione bondie
138.
Salamono cresques
158.
Salamone obrador
139.
Salamono gracia
159.
Astrugo mosse mayir
140.
Samuele bennevist
160.
Jacob de milan
141.
Issacbo bisbal
161.
Issach bonafos
142.
Abamari rossel
162.
Juceffo gabbai
143.
Lobell massana
163.
Abraham ardit
144.
Salamono azdra
164.
Astrugo çatorra
145.
Davin de bellcayre
165.
Juceffo bolaix
146.
Astruc bonafos fisico
166.
Bonjuho issach dalell
147.
Vitale scapat
167.
Perfetto rosselli
148.
Vitale ferrarii
168.
Samuele rosselli
149.
Abraham adret
169.
Juceffo domasch
150.
Vitale de ripoll
170.
Astrugo de ripoll
151.
Samuele bonafos
171.
Juceffo jaliell
152.
Salamono brunelli
172.
Juceffo mosse
153.
Samuele sai)orta
173.
Caravida raporta
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392
(13
174. Satell issach
175. Bonjuha badorcli
176. Salamone fabib
177. Bonsenyor mercader
178. Astrugo jucefFlevi
179. Astrugo vides
180. Senton desforn
181. JucefFo salamo falclio
182. Abraham tarros
183. Davi issach cap de pebre
184. Astrugo massana
185. Jacob argenter
186. Bonastruch samuel
187. Vitale sanon
188. Senton de bellcayre
189. Vitale de prades
190. Juceffo coray
191. Abraham massies
192. Juceffo abrahe ferrer
193. Bonjuha samuel bolaix
194. Janya xaham
195. et Senton abraham mayr
De quo quidem sindicatu, procuratione et actoria apparet per
publicum instrumentum inde factum per Anthonium Bellver auc-
ritate Regia notarium publicum Barchinone infrascriptum sexta
die Julii anno a nativitate Domini ultimo scripto millesimo trecen-
tesimo octuagesimo tertio in quo quidem procurationis, sindicatus
et actorie instrumento auctoritas et decretum venerabilis Galce-
randi sestrada, Bajuli Barchinone pro domino Rege intervene-
runt, etc. »
Nous allons essayer de donner quelques explications sur les
noms contenus dans ces deux pièces et d'en identifier un certain
nombre avec les noms juifs déjà connus. M. Ad. Neubauer, M. le
docteur Steinschneider et M. Adreu Balaguer nous ont fourni sur
ce sujet des informations pour lesquelles nous les prions d'agréer
tous nos remerclments.
Ce travail d'identification est rendu plus facile par cette circons-
tance qu'un certain nombre de noms se retrouvent dans les deux
pièces que nous publions. (Comparez n°^ 131 et 22 ; 134 et 5 ; 139
et 89 ; 140 et 28; 142 et 7 ; 144 et 126 ; 145 et 34 ; 149 et 123 ; 155
et 35 ; 161 et 38 ; 163 et 30 ; 164 et 12 ; 166 et 24 ; 170 et 23 ; 171 et
36; 173 et 2 et 19; 175 et 33 ; 176 et 114 ; 177 et 55; 181 et 20;
188 et 129 ; 189 et 29 ; 192 et 127, 128 ; 195 et 32.)
On verra que ce travail aura pour résultat de fixer définitivement
la prononciation du nom d'un certain nombre d'auteurs célèbres
dans la littérature juive et dont les noms n'ont pas été encore lus
exactement.
Cette étude a surtout un grand intérêt parce qu'elle s'applique
auxJuifs de Barcelone. C'est une des villes d'Espagne qui a pro-
duit, avec Gérone, sa voisine, le plus de savants et d'écrivains
juifs. Déjà dès la naissance de la science juive en Espagne, Barce-
64 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
lone compte un rabbin savant, Isaac b. Reuben, de la célèbre gé-
nération des cinq Isaac. La prospérité des écoles de cette ville est
attestée par cette parole d'Isaac b. Schéschet ' : r^aibitnn «n^nx
rT':3 !:">sriM « l'air qu'on respire à Barcelone rend intelligent )j.
Nous donnons ici une liste des savants ou autres hommes célèbres
de Barcelone, en avertissant que nous n'avons pas la prétention
de la faire complète - .
Abba Mari, fils de Joseph ibn Caspi (Catal. Leipzig,
p. 303 e).
Abraham Abulafia, fin xiii" s. {Ozar NeJvniad, II, 231).
Abraham et Barchilon, 1328 (Amador, Historia, II, 60).
Abraham Cohen, vers 1540 (Wolf, I, n° 100).
Abraham b. Hasdaï, 1235/40 [Catal. lodl. p. 673).
Abraham b. Juda, vers 1253 (Wolf, I, 81 ; comp. pour la
date, Ghirondi, p. 24 et p. 26).
Abraham b. Samuel Hallévi b. Hasdaï, 1232 [Kobeç Tes-
cJmbot ha-Rambam, édit. Leipzig, III, p. 6 et 7).
Abraham b. Iliyya Albargeloni, mort 1135 ou 1136?
Aron Halévi, mort 1293.
Rab 'jnb-'S'-in (?), xvi« siècle {Koré Mdd07'0t, f° 33 a).
Benjamin Schéschet, Naci, vers 1160 (Benj. Tud., init.).
Bonafos Vidal, 1305 [Rabb. fr., index).
Bonastruc de Barcelone (Consult. Isaac b. Sch., n° 7).
Bonirac (Bonisac?) Salomon (Wolf, III, 371 & et 460).
Ilasdaï Grescas, 1391.
Isaac, poëte, comm. xiii^ s. (Harizi, ch. 46).
Isaac 'jib'^itnn, xvi° siècle [ScMlsch., P 64 a; peut-être le
môme que R. Bargilon, plus haut).
Isaac b. Reuben, né 1043.
Isaac -b. Schéschet, 1391, a dû résider à Barcelone, où il
aura été élève de Nissim Gerondi. D'après M. Stein-
schneider, il y aurait eu un autre ':j"3"'n de Barcelone
{Ozar Nehni., II, 235).
Jacob et ses fils, comm. xiii° s. (Ilarizi, ch. 46).
Jacob b. Isaac Alcorsono, écrit à Barcelone en 1378 {Revue,
III, 139).
Jacob b. Josef Kabrut [Jeioish Literat., p. 184).
' Consultations, n" 369 ; comp. Baha Batra, 1158 h.
* Dans ce qui suit, nous appelons Catal. Leyde, catal. Munich, catal. Paris, etc.,
les catalogues des manuscrits hébreux de Leyde, de Munich, de Paris, etc. Catal.
hodl. désigne le catalogue des livres hébr. imprimés de la bibliothèque bodléiennc, par
M, SteinschneidcT.
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1302 ( ;;
Jacob b. Moïse ibn Acsaï, 1298 (Schalschélet, éd. Venise,
Johanan (Wolf, I, III, 724) ?
Jona b. Abraham Gerondi, a résidé à Barcelone; mort 12<j3.
Joseph de Barcelone (Castro, Bibliot., p. 623).
Josef b. Aknin b. Juda b. Josef Jacob le dayyan sefardi Bar-
celoni (Mebo haitalmud, Breslau, 1871).
Josef ibn Caspi (vers 1300; CataL Leipzig, p. 203 p; p. 324^.
Josef Ilayyat (Schalschélet, édit. Venise, p. 65«].
Joseph ibn Yahya, élève de Salomon b. Adret {Schalschélet ,
édit., Venise, f" 59 a).
Josef ibn Zabara nni<nT, vers fin xii° siècle (Ca^«^. bodl.,
p. 1521). M. Saige a un sceau appartenant, si je ne me
trompe, à un Josef b. Juda j-i-in^t. La lecture de Vrilcf
est difficile, cette lettre ayant une forme archaïque qui
ressemble à celles des Iscrizionl, de M. Ascoli, planche II.
On connaît aussi un Juda Zabara, du xiii'' siècle {Cat.
bodl. s. V. Jelmda Sahara), et qui pourrait être le fils de
notre Josef. Voir en outre, Salomon b. Adret, I, 415;
Rabh. fr., p. 715 ; H. B., VIII, 89.
Juda b. Astruc, sous Jayme 1°'' d'Aragon {Hebr. UibL
XII, 59).
Juda b. Barzillaï, vers 1130.
Juda h. Isaac, médecin, comm. xiii^ s. (Harizi, ch. 46).
Juda b. Salomon, fin xiii" s. (Catal. Paris, n'' 985 ; Ozar
Nehmacl, II, 121. 233/.
Makir, comm. xiii° s. (Harizi, ch. 46).
Moïse b. Nahman, de Gérone, a disputé à Barcelone contre
PaulusChristiani, en 1263.
Moïse de Narbonne, a écrit à Barcelone en 1349.
Mordekai, vers 1305 {Rabb. fr., index).
Mordekai Rossello (Catal. Munich, n° 49 et Ozar Nclua.,
II, 236).
Nissim b. Reuben Gerondi, a enseigné à Barc., mort après
1374.
Salomon b. Abraham b. Adret, et ses fils, 1.305.
Samuel Galil {Minh. Ken. : Rabb. fr., index).
Samuel Ilallévi, Naci, comm.xiii*' s. (Harizi, ch. 46).
Samuel ou Salomon b. Abraham b. Ilasdaï, vers 1160 (BiMij.
Tud., inil. ; Graetz, VI, 1'° éd., p. 230^.
Sealtiel, vers 1160 (Benj. Tud., inii.).
Sealtiel, comm. xiii*' s. (Harizi, ch. 46).
Schéschet, comm. xni« s. (Harizi, ch. 46).
T. IV. 5
G6 REVUK DES ÉTUDES JUIVES
Scliéscliet b. Beiiveniste, le Naci, mort vers 1203 [Hebr.
BiU. XII, p. 106).
Scliéscliet b. Isaac Gerondi, vers 1320 (Benj. Tiid., édit.
Asher, II, p. 5).
Senitob ibn Gaon, de Soria, élève de Salomon B. Adret
[Catal. I)odl.,T^. 2523).
Semtob b. Isaac, de Tortose, et son maître Isaac b. Meschul-
lam, à Barc. en 1284 {Catal. liodl., p. 2523).
Simon Duran, quitte Barcelone en 1391.
Zag (Azzachus, = Isaac), médecin du roi d'Aragon, 1220
(Graetz, VI, 2° édit , p. 375).
Zerabya b. Isaac b. Sealtiel Hên {Cat. hodl. p. 2585 : Oza)"
Nehmad, II, 229 ; He?r/\ Bibl., X, 42, XI, 42; Cf. ibid.,
II, 99; IV, 125).
Dans cette liste nous avons omis à dessein la plupart des noms
de Barcelone qui se trouvent 1° dans le Minhat Kenaot ; 2° dans
les consultations de Salomon b. Adret, n° 415 et ss. ; 3'» dans
Benjamin de Tudèle, édit. Asher, II, p. 4 à 6 ; 4° ceux de la fa-
mille des Gracia qu'on trouvera plus loin ; 5° ceux des consulta-
tions d'Isaac b. Scli., etc.
Voici maintenant nos notes sur les noms compris dans nos
deux documents ' :
Ahamari (n» ^j. Nom bien connu et rendu célèbre par Abba-
mari ben Moïse (Don Astruc), de Lunel, auteur du recueil de
lettres Minhat Kenaot, relatives à la querelle des maïmonistes
(Voir Rabbins français, p. G47 et index). On sait quel rôle impor-
tant la communauté juive de Barcelone et son rabbin en chef, Sa-
lomon b. Abraham b. Adret, jouèrent dans cette querelle, qui
se termina lors de l'expulsion des Juifs de France en 1306.
Abenefeia (n° 133). Ce nom est sans doute de la même famille
que celui d'Abulafia. Dans les Abné Ziccaron^ ce dernier nom est
souvent écrit ï-T'-^orbinN, avec deux yod, ce qui donnerait la pro-
nonciation Abulafiyya. Dans Hebr. Blbliogr., XIV, 96, Salomon b.
Isaac ^t>v. Comp. Wolf, III, n« 39, Abenephi, etn°220.
Ahravini (n" 124). Ce nom pourrait servir, s'il en était besoin, à
fixer la i)rononciation du nom de la célèbre famille des !5N33inN.
• l'our les noms géographiques, nous nous sommes servi du Diccionario de Pas-
cual Madoz.
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 67
Âffunant (n° 121]. Nous n'avons pas pu identifier ce nom.
Adret (n°^ 71, 108, 123). On a enfin la vraie prononciation du
nom du célèbre rabbin de Barcelone, Salomon b. Adret, miwS.
M. Steinschneider a été bien près de la vérité lorsque, dans ' son
Catalogue de la Bodléienne (p. 2269), il orthographiait ::'^l.nN, sui-
vant E^néh ha-dakha, édit. Letteris, p. 127. Le Salamo Adret de
notre liste (n" 71) ne peut pas être le Salomon b. A. dont nous ve-
nons déparier et qui est mort avant 1330. Ce dernier paraît avoir
eu au moins trois fils : Isaac, qui a signé la lettre qui se trouve
dans les consultations de son père, I, n° 415; Juda [Koré had~
dorof, éd. Casse), p. 22a); Nastruc Salomon, dans Jescliurwi ,
VIII, p. 157 et 159. Sur un Abrahaiii b. Salomon b. Adret, voir
Ca(al.bodL,i).2'iQ9.
AWorga (n° 101 >. Le Koï'é Ttaddorot (édit. Cassel, p. 28&) nomme
un Isaac J-T:i-na-'bN (Aliborga), correspondant de Josef Colon,
xv^ siècle.
Alcaravi{n°\V^]. Serait-ce le nom de ■'inpbN (Abraham Alca-
ravi) dans Simon Duran, I, 97?
Alfamem (n° 112). Peut-être "^T^nisbN, dans Simon Duran, IV, 1.
Alfeu{\\° 51). Probablement Ilall'en. Ce dernier nom peut pro-
venir de l'hébreu liai fan, ou de l'arabe "[isbn ou lisbri, Halfon,
Kalfon, nom déjà porté par un des plus anciens poètes juifs de
l'Espagne (Harizi, chap. 3 et 18). Un Abu Saïd Halfon Ilalévy, à
Damiette, du temps de Juda llalévi (v. 1141); Saadia ibn licb^,
dans Yahïiin uboaz de Sémali Duran, I, n°65 ; Béni Alton, dans
Amador, Hisloria, I, 399. Comp. Catal. hodl. p. 697 (Abraham
Kalfon) et p. 835, Chalfon ; Catal. mss, hébr. Berlin, Chalfon b.
David b. Abr. et Saadia b. Yahyia b. Halfon. V03'. aussi Ghirondi,
p. 41 .
Alietzer {\\° l'è).WL\ézQY] remarquez la prononciation /:r pour
l'hébreu t.
Anaizanell (n" 42), Natzanell [\V' 87). C'est le nom de Netanel ;
remarquez la transcription de n par tz.
Ardit (n« 40). Ce nom (Ardit, Arditi) est encore très répandu
aujourd'hui pai'mi les Juifs d'Orient. Voir, par exemple, Isaac
Ardit, auteur d'un livre imprimé à Salonique en 1823, Hebr. BibL,
VII, 24. Voyez Abraham Ardit et Efraïm Ardit, dans ScJtem hag-
■ yedolim de Benjacob, 2° partie, au mot û-'-idn ï-tu)":. Nous ne sa-
vons quels rapports il y a entre ce nom d'Ardit et celui d'Ardot
ai'TiN, qui est très répandu dans la littérature juive.
68 REVUE DES ETUDES JUIVES
Argent (n° 10). Comparez Revue, I, p. 65, Marc-Dargent ; Comp.
aussi le mot suivant.
Argenter (n° 185). Pourrait bien être la traduction du nom de
Caspi ■'E03 (p.éx. Josef ibn Caspi).
Asdrach (n° 126), Azclra (n« 144). Serait-ce le nom d'Ezra? Il
n"est pas impossible que ce nom soit parent de celui d'Astruc.
Voy. ff. B., IV, 124.
Asqiào (n° 53). Peut-être Hiskiyya (Steinschneider).
Astruch (n°' 1, 9, 11, etc.), Astriig (n° 159). Nom très répandu.
Voir, par exemple, l'index des Rabbins fr., celui de Ssiige,Les
Juifs du Languedoc. Le nom vient d'Aster, astre ; il est peut-
être la traduction de Gad; H. B., V, 47; Ghirondi, p. 66.
Ast^mga (n° 84). Nom de femme. Voir les mêmes index.
Atzai (\\° 137). Nous supposons que c'est le nom de Hasdaï.
Nous aurions ainsi le nom du célèbre rabbin Hasdaï Crescas, qui a
sûrement demeuré à Barcelone (Consultât. Isaac b. Schéschet,
n" 376) et qui s'y trouvait peut-être à l'époque du massacre de
1391, puisque son fils fut tué dans ce massacre. S'il était identique
avec le Atzai Cresques de notre n° 137, il faudrait en conclure qu'il
se trouva parmi ceux qui furent obligés de se faire baptiser. Après
l'émeute, il se serait enfui à Saragosse ; c'est de là qu'il adressa
aux Juifs d'Avignon sa lettre sur les persécutions de 1391 dont
nous avons parlé plus haut. Il faut pourtant remarquer que cette
lettre est datée de Saragosse le 19 octobre 1391, tandis que notre
document est daté de Barcelone 1 1 mars 1392. En cas d'identité,
il faudrait supposer que Hasdaï serait revenu de Saragosse à Bar-
celone ou que les Juifs dont les noms figurent sur notre pièce et
qui avaient donné procuration à trois d'entre eux pouvaient ne
plus demeurer tous à Barcelone à l'époque où cette pièce a été
dressée. Quelques-uns auront pu aller demeurer à Saragosse, et ce
sont peut-être eux qui ont noué les relations avec le Franciscus
Cahanerius de notre document. — Voir dans Girbal,Z/05 Judios en
Geromiy Azay Toros (= Theodoros ?), pp. 35 et 83.
Avengena (n° 134), Ecangena [n°^ 5, 43). C*est le nom d'Ibn
Gannah, porté par le célèbre grammairien Jona ibn Gannali. Comp.
Steinschneider, Gafihi, p. 356.
Azdra. Voir Asdrach.
Dadorch (n"' 33, 69). \]\\ Ilayyim ^mnn écrit, en 1470, le cod.
Rossi n° 312; Perreau, BoUet. degli studii orientait, I, p. 454;
Comp. Catal. llninbourg. p. 138.
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 69
Baro (n° 98). On connaît le poète Abu Ibrahim ben iTia, de
Lucène, contemporain de Jona ibn Gannali. Sur Abu Ibrahim b.
Baron b. rro (r":;u3 ?), voir Kerem Chemed, IV, 85 : Catal. bodl.,
pp. 1335, 1616, 1806; Ilebr. Bibl., XIII, 91 ; Isaac Ibrahim b.'
Baron, de Malaga et Abu Ammar b. Baron, contemporains de Juda
Ualé\i, Betulat bat Jehuda, pp. 19 et 20; "[ir; nn, Simon Duran,
II, 96, 97; Baron, dans Saige, index.
Barzalaij (n° 107), Barzalayi {n° 26). Les Barzillaï sont nom-
breux dans l'histoire de la littérature juive, par exemple, Juda b.
Barzillaï Albargeloni, du commencement du xii^ siècle; \q Koré
haddarot (voir l'index) nomme encore Baruch, Josua, Méir (comp.
Hebr. Bibl., XI, 39) ; divers Barselay figurent dans Kayserling,
Navarra (voir l'index). Un Reuben b. Barzillaï b. Sealtiel,de Bar-
celone, figure dans la Consultation de Salomon b. Adret, I, 415.
Enfin, dans Harizi, ch. 3, il y a un Josef b. Barzel. — Le mot hé-
breu barzel signifiant fer., il est permis de supposer, comme l'a
déjà fait M. Steinschneider {Hebr. Bibl., III, 87), que les noms
de Barzel, Barzillay, sont identiques avec ceux de Ferrer, Fer-
rarii, portés par divers Juifs espagnol?. Voir ces noms plus loin.
Bellcayre (n°^ 34, 129). Ville de Catalogne.
Bellshoni (n° 99). Pour ce nom encore nos documents sont pré-
cieux. On ne savait comment lire le nom de ûTcba ou ûT>rb"'2,
porté entre autres par Moïse de Narbonne, dit maître Vidal. On le
prononçait Blasoni (Catal. bodl., p. 1968) ou Blason (Kayserling,
Navarra, p. 168). Ce nom se trouve dans les Consultât. d'Is. b.
Sch. n° 220 ; de Simon Duran, I, 26, 163, dn^bnïN Efraïm Gerondi;
dans Kayserl., Navarra, Efraïm Vidal = Vidal Bellshom (p. 170);
Heb. Bibl. VIII, 88, Josef Bellshom ; dans Catal. des ms. hébr.
de Paris, n° 1200, Moïse Vidal Bellshom, en Sicile, en 1504 ; dans
Girbal, Los .Tudlos, etc., p. 20, Bellhom Scapat ; dans Saige,
Juifs du Languedoc (index), Belhom. Voy. aussi Josef Bellshom,
IL B., VIII, 88.
Bemievlst (n» 116), Benvenlst (n» 28). Le nom de Benveniste est
très répandu dans l'histoire et la littérature juives. A Barcelone,
on connaît spécialement le Naci Schéschet Benveniste ; un Josef
b. Benveniste a signé, à Barcelone, la lettre qui se trouve dans les
Consultations de Salom. b. Adret, 1, 415. Sur les Benveniste, voir
Graetz, Histoire, VIII, note 4; Hebr. Bibl., V, 68; VI, 14 ; VIII,
125 ; IX, 91 ; X, 82, 136 ; XI, 91 ; XIII, 106 ; XV, 54, 78. Un Sa-
muel Benv. est nommé dans Consult. d'Is. b. S., n° 214.
Biona (n°«M, 157). ^:3V25n dans Consult. d'Isaacb. Sch., \\^ 206,
70 liKVUE DES ETUDES JUIVES
377, 378 (Zunz, Gesamm. Schrlfl., II, p. 30). Le den Biona du
n° 84, probablement pour de EnU07ia.
• BisMl (n" 141). Ville de la Catalogne.
Bissallel (n° 154). C'est le nom hébreu Beç«llel .
Bolaixiw"^ 165, 193). C'est le nom a-'i'bi^iDïi. Comparez, sur les
noms de ce genre, H. B., XVI, 61 ; XIX, 93 ; Çag Abenayx, al-
mojarife de la reine dona Maria, dans Amador, II, 87.
Bonanada (n° 75). Nom de femme.
Bonanasch (n" 1). Prononcez Bonanasc, non Bonnasc (Zunz,
Ziir Gescli., 461). Le nom paraît composé de Bonan ("jn^i^) et
d'Isaac. Voir Consult. d'Is. b. S, pt533ia5N, En Bonanasc, n° 349, et
pO"i3;:N de Barcelone, n° 415;
Bondia (n° 46). En hébreu Yom ioh, bonjour, jour heureux,
(Saige, index). Comparez Kayserl., Navarra, p. 168, note 2.
Dans Consult. d'Is. b. Sch., Bondia Cohen, n° 60^; David Bondia
Cohen, n» 179; Vidal Bondia, n° 266. Dans Aoré liadd., Abraham
Botidie (n° 157). Autre forme du nom précédent?
Bonjuha (no' 10, 22, 24, etc.). C'est le nom de Bon-Iuj^f
[Revue, I, p. 65), plus ou moins identique avec Bon-Juda ou Juda
{car Jiiha vient sans doute, comme juif, du nom de Juda). Juda
Desfils s'appelle J-tni:--:: (Consult. Simon Duran, I, 134) ; Juda
Zeraliya s'appelle riNiMin Astruc [Hebr. Bibl., XIV, 98). Un Bon-
juha de Gérone assiste au colloque de Tortose [Schev. Jeh., éd.
Wiener, p. 168). Bonjuah, en Sicile, dans Is. b. Sch., n" 171 ;
Bonjua, dans Girbal, p. 20. On voit, par ce qui précède, qu'il ne
faut plus transcrire les noms de î-jMiriSiia et ©Nmasia par Bongua,
Bongodas ou Bongudas, car le 5 est tilde ; il faut donc écrire Bon-
jua, Bonjudas; Comp. dans Is. b. Sch., n» 265, CioV:., Jucef, et
n" 266, u5N'Ti':s3T3, Bonjudas.
Boiisciiyor (nos 16, 55, 136). En hébreu, rf^rj, Tobie. Kenésel
Itaijgcdola, Eben Ezer, chap. 129, n» 121.
Bolarell (n» 65). Nom connu [lar Moïse Botarel, qui, en 1409,
composa un commentaire du Livre de la Création. Il existe un
Moïse Botarel plus ^ewwQ. [Catal. bodl. p. 1780); Moïse Farissol
Botarel (Catal. Munich, n" 252); Salomon Botarel, Catal. Munich,
index des propriétaires de mss ; Botarel bN^^iiiiun, Catal. Mu-
nich, n" 252. — Ville dans la prov. de Tarragoiie.
Burgales (n'" CO, 96). Voir dans Koré haddO)'o(, index, Ahra-
LISTE NOML\ATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 71
liam b. Aziz (ou Azuz ?), Abraham b. b^rm^ ; dans le corps de
l'ouvrage, f'^ 43^, ce nom est écrit b-^a-nn (Bourgueil?). Gomn.
Caial. boclL p. 672. Le mot encore usité aujourd'hui, veut dire
« habitant ou originaire de Burgos ».
Cabrll (n" 119). Le nom se trouve dans Clirbal, Los JucUos, de,
p. 32 (Moïse Cabrit) ; Nastruc a-i-inp, dans Consult. de Nissim Ge-
rondi, n°55; Gabriel Souscabrito, AVolf,III, 447c.,Fïirst, Bibliotli.,
■S. 1?.; Jacob b. Juda b. Kabrut, Jewish Literaiure, p. 184; Ludovic
Cabrito, Catal. Paris, n° 753. — Cabrita, Cabrito, sont des noms
de villes espagnoles.
Cap (n°' 47, 183). C'est sans doute ainsi qu'il faut lire le nom
des qxp qui se trouve dans la Consultation de Salomon b. Adret,
I, 415, et dans Minliat Kenaot, p. 157. Nastruc s^Np, dans Is. b.
Sch., n° 104.
Çaporta (n°' 2, 19, 83), Saporta (n° 153). Nom très connu, dans
la littérature juive, sous les formes de Saporta, Saportas, Sas-
porta, Sasportas, Sasportès, et peut-être Sprot ef Saprout. Voir
Caial. hodl., p. 2551. — Le préfixe ça, sa, est un ancien article fé-
minin, encore en usage aujourd'hui à Majorque. Il y a un Porta
dans le département des Pyrénées-Orientales. Bonastruc à Porta,
Catal. bodl., p. 1956.
Caravkla (lY''' 2, 19). Le nom est fort connu sous cette forme ou
sous celle de Caravita. Isaac Caravida, Cat. bodl. ; Astruch Cara-
vita, Guirbal, p. 20; En Caravida, Consult. de Nissim Gerondi,
n° 30.
Caro (n^OO). En transcription hébraïque, i"iNp, traduit peut-être
par n"'in. Le nom est célèbre par Josef Caro, auteur du Sclmllian
«re<A7i. Voir dans Fïu^st, Bibl., Abraham Caro, Isaac, Menahem,
Salomon Caro, II, 171 et ss.
Coffe (n» 122), Coffen (n«^ 3, 58). C'est le mot Cohen, avec /"
pour h. Le nom serait-il identique avec celui de Cofflno? Voir
Korê hadd., index, Aron Coffino.
Coray (n° 190). Ce nom serait-il parent de Toraïf, Torarfi"(voir
ces mots) ?
Campredon (n° 37). Ville de la Catalogne, aujourd'hui Cam-
prodon.
Ct'esques (n" 137). Le nom serait en] liébr. rr^it (Zunz, Ges.
Sch., II, p. 54).
Dalell (n°« 24, 25). Un Elie bxbT dans Catal. Leyde, de Stein-
schneider, p. 285 ; Comp. Hebr. Bibl. VIII, 48.
72 REVUE DES ETUDES JUIVES
Ddvi {W^ 34, 81, 91, etc.). Pour David. Comp. En Crescas ■^nn,
dans Is. b. Scli., \\° 226 ; ■in'isnn Boiulavi, iUd., n° 171; Muel Bon-
(lavi Comprad, Catal. Mimicli, n'' 292.
Domasch (n° 169). Serait-ce quelque chose comme paT:*!,
Damasc ?
l)cu lo guart (n° VI). En français. Dieu le garde ; en hébreu, pro-
bablement rii-iTc'^y ou peut-être rr^z^i ; Saige, Juifs du Languedoc
(index), Diex lo gar.
Evangena {n^^o, ^"y). \o\v Avengena.
Fabib {n"" 62, 111, 114). C'est le nom très connu de n-^nn, Habib.
D'après Zunz [Gesamm. Sc/ir., II, p. 53), le nom aurait été tra-
duit en espagnol par Comprado (voir cependant plus haut, Caro) ;
peut-être aussi en latin par Amatus [Hebr. Bibl, IX, 80). Le plus
célèbre des Habib est Jacob, auteur du En Jacob. On trouvera
chez les bibliographes les noms de Hayyim (Conforte), Josef,
Lévi, Moïse, Samuel (Cat. bodl) ben ou ibn Habib, Amatus Lu-
sitanus = Habib Hassefardi ; R. Habib, à Xativa, dans Is. b.
Sch.,no326.
Falcho {n° 181), Falco (n°^ 15, 27), des Falco (n° 20). En trans-
cription hébraïque, "iip^D ou "iipb.XD ou 'jisbD. Abraliam, David,
Elle, Jacob, Juda, Moïse, Semtob, Senior b. Juda Falcon, dans
les bibliographes, A'ort' hadd., Scliem liagged. ,Z\\xiz, Liteimlg.,
p. 586; Abrabam b. Moïse F., Abné Ziccaron, n" 52 ; Bondua F.
et Semtob F., dans Simon Duran, 1,51; Hebr. Bibl., NUI, ^%\
Saloraon b. Moïse Falconi, Minhai Ken., p. 61 ; divers dans Kay-
serl., Kavarra. — Falco est une ville de l'île Majorque.
Ferrer (n"' 8, 70, 127, 128). Nom assez fréquent, porté aussi par
des chrétiens, comme le prouve le nom du célèbre Vincent Ferrer,
qui a tant contribué au malheur des Juifs en Espagne. Un Rabbi
Ferrer a assisté au colloque de Tortose, et il est probable que ce
rabbin est identique avec le 'j-'^îVc T^-.crN d'Is. b. Sch., n° 314, qui
?ii' sera autre que le rabbin Zerahy a Ilalévi, de Saragosse, nommé
par le Schevel Jehuda dans le récit du colloque de Tortose et qu'on
peut supposer identique avec Zerahya Ilalévi b. Isaac Saladin
{Oz.Neh., ibid.). Comp. Abraham Ferrar ou Farrar, Wolf, I, III,
IV, n" 137; David Farrar, IV, n" 516 ; Josef b. Abr. Ferrer, codex
De Rossi, n» 428; Nassim (= Nissim) Ferrer, dans Girbal, p. 34.
Lo nom parait avoir été traduit en hébreu par bn:: ou "^bna, Bar-
zillaï (voir ce mot plus haut).
Ferrarii (n"" 77, 148). Parait êti'o identique à Barzillaï. Voir ce
mot et le mot Ferrer.
LISTE NOMINATIVE DES JLIFS DE BARCELONE EN 1392 73
Forn (n''s 35, 85). Il y a diverses villes de Forna en Espagne.
Gahbay (n" 162). En bébr., in35, nom très répandu. Dans
Fûrst, Bibl., I, 312, Abraham, Isaac, Juda, Méir, Salomon, Gab-
baï, Jacob Algabbaï, I, 37; Mohamed Gabbaï, Wolf, III, n° 1407;
Moïse Gabbaï, \Volf, I, n° 1533; fréquent dans Isaac b. Sch.
(n°^ 28, 43, 53, etc.), et dans Simon Duran fl, 33, 58, etc.); En
Mose Gabbaï, Hebr. Bibl, XYI, 86. Dans Rabb. fr., p. 713,
\\n:.}:i doit peut-être se lire c des Gabbaï » .
Galipapa (n° 52). Nom connu. Il y a une ville de Gali dans la
province de Barcelone.
De Giialbis (n° 77). Peut-être la ville de Gualba, dans la prov.
de Barcelone.
Gomer ('n° 64). Serait-ce le nom de l'ile Gomer, dans les Ca-
naries ? ou bien Gomez ?
Gracia (n^^ 22, 63, 77, 89, 136, 157). Nom d'une famille célèbre
de Barcelone, portant en hébreu le nom de ^n, Hèn=^ grâce. Nous
ne nous rappelons pas qu'on ait déjà fait la remarque que ce nom
vient d'une petite ville, Gracia, située tout près de Barcelone.
Zunz, dans Benjamin, de Tudèle, édition Asher, II, pp. 4 à 6, énu-
mère un certain nombre de personnes de cette famille. Nous
croyons devoir reproduire ici ces noms en y insérant ceux que nous
avons trouvés ailleurs : Abraham Gracian {Ozar Nehni., II, 232),
Abraham b. Salomon llèn{Jeio. LU., 199; Ozar Nehm., II, 232) ;
Bonsenior Gracian {Hebr. Bibl., VIII, 89); Isaac Hên b. Juda b.
Immanuel ibn Sealtiel (H. Bibl., Y, 69); Josef b. Isaac Gracian,
vers 1412 (//. B., XI, 91) ; Juda Hên, de la maison Sealtiel, à Can-
die, vers 1528 (Zunz) ; Don Lobel Gracian b. Moïse b. Sealtiel b.
Isaac b. Zerahya Plên, mort à Barcelone en 1306/7 (Ugolini, The-
san7''us,\o\.XXXlll, p. 1457-58); Makhirb. Schéschet Hên (M^/^7^
Ken., p. 157. Adret, n° 415) ; Moïse b. Sealtiel Hên, xv« siècle
{Catal. boclL, p. 1872) ; Prophet Gracian (i?aô&. />-., index); Don
Salomon Gracian b. Moïse b. Sealtiel b. Zerahya Hên, mort à
Barcelone 1306/7 (Ugolini, ibid.), le même peut-être que Salomon
Gracian b. Sealt. b. Zer., dans Zunz, Zur GescJi., p. 408, et que
Salomon b. Moïse Hên dans Consult. de Salomon b. Adret, n« 415,
et que Salomon Gracian, dans Minliat Ken., p. 154, 157, 163; Sa-
lomon Hên, vers 1349 [Oz. Neh. H, 232) ; Salomon Gracian, à
Barcelone, 1391 {Revue, 111,465); Sealtiel Hên, près Barcelone,
vers 1380 (Zunz) ; Sealtiel b. Isaac b. Moïse Hên, à Barcelone,
1305 (Adret, Zunz); En Sealtiel Gracian, vers 1412 (//. B., XI,
91) ; Sealtiel Nastruc Vidal Gracian, à Barcelone, 1373 {Cat. boclL,
74 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
2585; Jeschunin, VIII, IbS; H. B., VIII, 89) ; Zaraliya b. Isaac b.
Sealtiel Hèn (vers 1284, Zunz; Catal. bocll. 2585; Oz. Neh., II,
229); Zeraliya b. Scheschet Hên (Adret, 415 ; Minli. lien., 157).
Un Moïse dlsaac Gratian, à Rhodes, 1426, H. B., IV, 124.
Bavent risch [n° 88). Le commenceiiient liaven est évidem-
ment pour Aben = ibn. Nous ne savons pas expliquer le reste
du nom.
Jaffuda (n» 156), Jafucla {i\°^ 56, 61). C'est le nom de Jehuda
avec changement du h en f. Voir, dans le Comtat, Jassuda pour
Jehuda {Annuaire de la Soc. des Et. J., I, p. 264, note).
Jaftel (n°* 8, 36), Jafiell (n° 171). C'est le nom de lehiel, avec
changement du h en f.
Janya (n° 194). Peut-être altération de Hananya (Stn.).
Jasqnell (n^ 73). Nous supposons que c'est une altération du nom
de Jéheskel, Ezéchiel. Dans le Comtat, ce même nom est devenu
Jaasque et Jasque (Corriger dans Annuaire, I, p. 264, note).
Lobell (n°^ 48, 63, 89, 98, 143, 1561 Transcrit en hébreu b^mb.
Voir, plus haut, au nom de Gracia ; voir aussi Consult. R. Nissim,
édit. Constpl., n° 36.
Maçana (n° 44), Massana {w 144). Peut-être la ville de Mas-
sanas dans la prov. de Gérone.
Magot [\Y> 5), Massot {w" 134). Probablement le nom arabe
11^*07:, Massoud (Stn.).
Maldr (n°' 32, 66, etc.); Maijir (n» 159), Mayr (n» 195). Nous
supposons que c'est le nom de Méir.
Manresa (n"* 48). Ville de la Catalogne, prov. do Barcelone.
Massies (n° 191). Un R. Josué Messie a assisté au colloque de
Tortose (Castro, Bibl. esp., p. 206). Comp. Moïse b. Isaac w^ffilo,
dans Simon Duran, IV, n'=s 16, 119, et dans !-7r!D":;r! n?::', f° 92,
3'^ col. ; Josef b. Moïse. n-'-'UJW, Catal. mss. hébr. de Vienne, p. 127;
Comp. Ileb. Bibl., XV, 111. *
Mayir. Yoyez Mahir.
Maymo (n»» 39,52, 118). C'est le nom rendu célèbre par Maïrao-
nide ou Moïse b. Maïmon. M. Ad. Neubauer suppose que le nom
signifie Petit, 1::^ mot signilie calme, lent, indolent.
Mercadell {n"" 55, 79), Mercader [w 177). La comparaison des
n"' 55 et 177 montre que les deux noms sont identiques. Comp.
Samuel b^np-r?: dans Is. b. Scli., n"* 263, 264; ib.. n" 413, Vidal
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 7o
Mercadel est peut-être identique avec notre n" 79 ; dans Gâtai.
Paris, n" 1284, 12", Bongoda Merquadil. — Une ville de Mercadal
se trouve dans l'ile de Minorque.
Morcat (n° 59). Morcate, ville près de Iluesca, dans l'Aragon.
Mimtso (n° 89). C'est Monzon, dans l'Aragon.
Natzanell (n° 87). C'est le nom hébreu Netanel ; remarquer la
transcription du n en tz.
Navm^ro (n" 61). Un Navarro est célèbre dans l'histoire des
Juifs du Portugal. Comp. HeW. BiU., XIX, 114, 115.
Noch (no 4). Serait-ce Enoch? Peut-être Ve du commencement
du nom s'est perdu dans Ve final du mot 7nestre qui précède.
Mestre désigne le médecin.
Nogueres (n° 103). Peut-être une des villes de Nogueira, No-
gueiras, Nogueras. Josué b. Moïse Nogaras, en 1484. Catal. Paris,
n" 948.
Ohraclor (n° 158). Nous supposons que c'est la traduction du
nom hébreu b^ns, Poêl. Voir dans Catal. Paris, David b. Yom
Tob Poêl, n° 1065; Jacob Poêl, n» 1090, et Catal. Munich (index),
Jacob Poêl.
Piera (n" 30). Ville du district de Barcelone. Le nom du poète
Salomon de Piera est célèbre. Voir sur lui principalement^. B.,
XVI, 86 etss. On connaît aussi Meschullam da Piera, poète, mêlé
à la première querelle des philosophes (Graetz, VII, 60).
Prades (n°'^ 29, 117). Ville dans la prov. de Tarragone, en Ca-
talogne.
Pura (n° 84). Peut-être la ville de Puras, prov. de Valladolid.
Ripoll (n°^ 23, 150). Ville de la prov. de Gérone. Josef de Ripoll,
biD"^'-]"!, dans Kennicott, Dmc^ri. gen., p. 381.
Rossell (n" 7), RosseMi (n"« 167, 168). Comp. Abraham Profiag
Bonjudas b"^aii, dans Is. b. Sch., w 266; Rossel, dans Amador,
Ristoria, II, 616; Mordekaï Rossello, Catal. Munich, n» 49. Le
nom désigne sans doute des personnes originaires du Roussillon /
Roveni (no46), Roven{\\°'' 104, 132). Probablement Ruben.
Riigat (n° 92). Ville dans le diocèse de Valence. Peut-être le
U3:\-i'i de Catal. Vienne, I, p. 124 ; Rahh. fr., p. 713, Rugino, peut-
être a-iiT-i, non la-'STn (communication de M. Ad. Neubauer). David
et Çémah, fils de Josei' ui'^:*n^, à Avignon, 1722, dans Catal. des
mss. de la Bodl. préparé par M. Ad. Neubauer.
76 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Sadoch (n° 102). = pnni:, Sadoc.
Salvat {n" 95). Comp. n^nbo dans Is. h. Sch., n° 266, et y-^iV:;,
dans Sim. Dur., I, n° 55. En Isaac Salvat Méir (vers 1305), Catal.
Paris, n° 1284.
Sanon (n° 187). Peut-être Samon, arabe ';ir?:5, =Siméon (Stn.).
Sartore (n° 58). C'est la famille des u-'-^n = tailleur. On trou-
vera Jacob, Joseph, Juda Hayj-at dans les bibliographes.
Scaleta (n^ l.'^S). Le don Salomon r:i!-'bpCD (Sescaleta") de Barce-
lone, dans Is. b. Sch., n° 415, peut être identique avec le nôtre.
En hébreu, Sullam (voir ce mot plus loin au mot Suclam) et dans
Saige, index, Scaleta. — Le nom, d'après M. Saige, indique la
localité française VEscaleite.
Scapat (n° 14*). On connaît le En Escapat Malit ftrad. hébr.
du mot Escapat) Halévi, qui joua un rôle dans la dispute des phi-
losophes des ans 1305/6 {EoM. fr., p. 726; Min. Ken., 154, 160) ;
Bellhome Scapaf, de Gérone, en 1337, dans Girbal, p. 20 ; Is. b.
Sch.. 11° 228. Des Escapa se trouvent dans Abrah. ibn Daud, p. 43 1)
de l'édit. d'Amst. (Néhémie rtcr^N) ; dans Koré hadd. (Josef
i-îDp'C-'N) ; voyez Catal. bodl., p. 1458.
Senton (n°^ 68, 79, 90). Probablement Semtob. Comp. le nom
du rabbin bien connu Santo de Carrion. Peut-être faut-il lire, dans
notre pièce, Sentou = Sentov.
Sescola (n° 105). Nous ne savons si ce nom est le même que
celui de rtbip'i'N qu'on trouve dans la littérature juive. Comp. Cre-
cas Vidal Dascolar, Castro, I, 202; H. B., XI, 134; Samuel Astruc
da Scola, ce qui est traduit en hébreu par ■'crs; Catal. Munich,
n° 343^ ; Catal. Paris, n" 1047'»; Catal. Turin, Peyron, p. 177. Cet
Astruc da Scola est peut-être notre Astruch Sescola. — Le mot
est composé de sa-escola, devenu s'escola, puis sescola. Voir, plus
haut Çaporta. La forme Sasporta est ainsi également expliqué.
Slruch (n° 133) = Astruc.
Suclam (n" 11), Sutilam (n" 76). Probablement Sullam (= échelle).
Les Sullam sont assez nombreux dans la littérature juive. Voir
surtout Samuel Suliami, dans Jiabb. fr., p. 700; ridentification
{ib., p. 701) de Sullam avec La Escala, près Gérone, nous parait la
meilleure de celles qui ont été proposées (voir cependant Saige,
Juifs de Languedoc).
Toraif (n" 86), Torarff (n» 72). Les deux noms sont probable-
ment identiques. Serait-ce l'hébreu Cj-ni:, Çorcf?
LISTE NOMINATIVE DES JUIFS DE BARCELONE EN 1392 77
Tarros (n° 182). Ville près de Lérida, en Catalogne.
Torra (n° 13). La Torra, dans l'île Majorque .
Vinag (n° 56). Peut-être pour Vivag, ce qui donnerait le nom
connu des Bibago.
Vinant (n° 3). Peut-être Vivant, û"'"»n.
Xaham (n°80). Peut-être dnb? Voy. Gat. Paris, n" 308.
Xanixell (n° 80). Nous ne pouvons identifier le nom avec cer-
titude. Le 00 sert le plus souvent à représenter le u) hébreu ; par
exemple, Xuxên, pour v^iîT^a. C'est ainsi qu'on identifiera facile-
ment le fleuve b^a^i dont il est question dans le divan de Samuel
Hannagid publié par. M. A. Harkavy [Stiidien. u. Mitthl., I, p. 56),
et qui n'est autre que le Xenil (cf. z&., p. 175). On aurait ici, d'a-
près cette règle, Xantxell = bN0"j50. Il ne nous parait pas impos-
sible que le mot représente quelque chose comme Saint Gilles,
V^:,bo dans Benjam Tud., éd. Asher, I, 5«. A défaut d'identifi-
cation sûre, nous rappelons encore le nom de ibnitjtu Sanzolo, dans
Schevet Jehuda, éd. Wiener, p. 114, qui a, comme notre Xant-
xell, le prénom Semtob; Comp. Calai. &odZ., p.2393/-l. Dans Catal.
Leyde, n<' 56, Abr. ibns'o"::.
Nous n'avons l'ait aucune observation sur les noms de Bron
(n° 51), Brunelli (n" 132), Çaragossa (n° 94), Çatorra (n° 12), Cer-
tes (n° 120), Melsia ()i° 9), Milan (n^^ 53, 54, 160), Pebre (n° 183),
Pontardia (n° 91), Ranvalla (n° 41), Terraçona (n^ 109), Valencia
(n» 82), et quelques autres plus ou moins connus, parce que,
pour quelques-uns d'entre eux, cela était superflu et que, pour
d'autres, nous n'avons. pu, à notre grand regret, présenter au-
cune explication.
Isidore Loeb.
PAUL DE BONAEFOY ET LE LIVRE DE LA FOI
(EXTRAIT DIXE LETTRE DU D^ M. STEINSCHNEIDER A M. ISIDORE LOEB;
Vous savez que j"ai besoin de concentrer mes études quelque
temps sur une thèse dont vous connaissez le sujet. Dans mes
recherches, j'ai été amené à m'occuper en passant d'une question
littéraire qui vous intéressera, car elle a quelque rapport avec
les études que vous avez publiées dernièrement sur les polémi-
ques entre Juifs et chrétiens. Je vous envoie ces quelques notices,
dans lesquelles je n"ai fait qu'effleurer la question, vous priant
d'excuser mon mauvais français.
Un court mais intéressant article de M. Charles Jourdain, inti-
tulé : « De la condition des maîtres dliéhreu dans C Université
de Paris, au commencement du's.\'' siècle^ », contient quelques
détails inconnus jusque-là et puisés dans un document que M. Au-
guste Castan, correspondant du Ministère de l'Instruction publique
pour les travaux historiques, avait trouvé dans les archives de la
ville de Besançon.
On y voit qu'en 1421, l'Université de Paris fit appel à la bien-
veillance des gouverneurs, bourgeois et habitants de cette ville, en
faveur de « maistre Paul de Bonnefoy, maistre en Ebrieu et en
Caldée ». Elle exposait que maître Paul avait composé un livre en
hébreu sur la foi catholique, que son intention était de le faire tra-
duire en latin ; qu'à cet effet il se rendait en pays étranger, sans
aucunes ressources, et qu'à tous ces titres il méritait d'obtenir
aide et secours. Comme il s'est converti, ajoute-t-elle, « à la con-
fusion des Juifs ennemis de Dieu et de la dite fo}', nous sommes
perforcez de lui administrer ses vies et estât jusqu'à icy, afin
qu'un si notable clerc qui de présont au pays de France est seul
' Revue (les So<:iûés savantes des difpartemenls, 3" série, lome I, aunéc 1863, 1" se-
mestre, p. 35Û-3ÎÎ8.
PAUL DE BONNEFOY ET LE LIVRE DE LA FOI 79
docteur en Ebrieu et Caldée au grand reproche de tous clirestiens
et au déshonneur de nostre dite foy, ne soit contraint de retourner
au premier et dampnable estât des tenesbres duquel Dieu l'a ap-
pelé à la lumière ».
Selon M. Jourdain, deux faits paraissent pleinement établis par
ce document :
!<* Que l'Université de Paris n'avait pas cessé de compter dans
ses rangs quelques maîtres d'hébreu ;
2° Que ces maîtres étaient en général des Juifs convertis, et que
leur nombre s'était réduit à un seul. M. Jourdain a en vain cher-
ché ce Paul dans Fabricius, Golomesius \ Wolf et De Rossi, mais
il l'a retrouvé dans un autre document qu'il a promis pour le pro-
chain cahier de son Index chronolog. chartarum ail hist. Uni-
versitatis Paris, spectantiwn -.
Lorsque Henri V, vers la fin de l'année 1420, retournant en An-
gleterre, passa à Rouen, l'Université de Paris lui envoya une dépu-
tation chargée de lui présenter diverses demandes,, entre autres la
suivante. D'après les anciennes ordonnances {ex antiqua ordina-
tîone), l'Université de Paris devait compter plusieurs docteurs en
hébreu ; or elle n'en avait alors qu'un seul, « qui, à cause de l'in-
jure du temps, pouvait à peine continuer à être nourri et vêtu hon-
nêtement » {qui p7^opter iniquitatem temporis vix potest victum
et uestUum lionéste coniimiare). La députation demandait au roi
de remédier à cet état- de choses et surtout de donner à maître Paul
de Bonnefoy, à qui il avait alloué cent francs, les cinquante francs
qui lui étaient dus. Or, tout porte à croire que ces cinquante francs
ne lui furent pas payés, et c'est pour cette raison, selon M. Jour-
dain, que Paul prit la résolution d'aller chercher fortune à l'étran-
ger, peut-être dans l'Italie, qui voyait déjà poindre l'aurore d'une
renaissance des lettres antiques.
En 1434, le concile de Bâle invita les évêques à envoyer dans les
localités de leur diocèse des missionnaires aux Juifs, et renouvela
le décret du concile de Vienne portant qu'il y aurait dans les
Universités deux maîtres chargés d'enseigner la langue, hébraïque,
l'arabe, le grec et le chaldéen.
En 1455, le maître chargé de l'enseignement de l'hébreu à Paris
réclama ses honoraires annuels, auxquels la France contribua
pour la somme de huit écus. C'est là le dernier indice sur l'histoire
de la chaire d'hébreu à Paris avant la Renaissance.
* Crallia Orientalis.
* Je ne sais pas si M. Jourdain a tenu sa promesse, je ne suis pas eu clat do le
Térilicr, Aussi bien, les dates louruies par ce premier document sullisent.
80 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Telle est la substance de l'article de M. Jourdain en ce qui nous
mtéresse spécialement.
M. Jourdain croit que Paul de Bonnefoy * alla probablement en
Italie. Cette circonstance nous fait penser à l'auteur anti-juif Paul
(auparavant Saûl) contre qui (un de ses parents ?) Jacob b. Elia
écrivit une épître qui a été publiée par M. Kobak -. On ne connaît
pas exactement l'époque où vécurent ces deux auteurs, mais il sem-
ble qu'ils appartiennent au xiii° sièle^ M. Halberstam croit que ce
Paul serait Paulus Christiani, l'adversaire de Nachmanide (1263).
Mais ces questions d'identification ne peuvent pas se décider par
les ressemblances de nom : combien n'y a-t-il pas eu de Juifs con-
vertis qui portèrent le nom de Paul ? Il faudrait à l'appui de l'hy-
pothèse de ]^. Halberstam que les citations de Jacob b. Elia se re-
trouvassent dans les discours où les écrits de Paul Christiani. La
controverse de Nachmanide, que j'ai publiée d'après un manuscrit,
est une rédaction où les arguments de Paul Christiani sont abrégés,
autant du moins que je peux en juger par une comparaison super-
ficielle, elle n'offre donc pas dfe renseignement sur la question qui
nous occupe*. Peut-être en apprendrait-on davantage par le
rîjTQN p"'Tntt, dans lequel Mordekhai b. Jehosifia fait mention de
Paul, adversaire de Nachmanide, et dont la bibliothèque de Turin
possède probablement un fragment encore inconnu ^. On pourrait
peut-être déterminer l'époque où vécut Jacob par celle « du Nasi
Samuel, de la maison de David », cité par lui {Jesch.,hélor.,Y], 29 ;
cf. VII, 86), si on avait quelque notice sur ce Samuel. Le passage
où il est cité, d'après un ms. de Munich, a du reste une lacune qui
est encore plus grande dans le ms. de cette pièce que possède
M. Halberstam. Est-ce par erreur que l'éditeur a fait de ce passage
un nouvel alinéa, ou bien faut-il rattacher ce passage à l'alinéa
précédent, d'où il résulterait que Samuel aurait vécu en Babylo-
nie? Nous connaissons trois Samuel ayant porté le titre de Nasi :
P Samuel b. Salomon Nasi, de Carcassonne, au xiii° siècle ; c'est
probablement l'auteur d'un commentaire sur le Guide de Maïmo-
' Nom arlopté certainement au moment de l'apostasie, comme un peu auparavant
le nom de Sancla Fide adopté, en Espagne, par Ilieronymus, qui s'appelait autrefois
Josua Lorki.
* Jeschurun, t. VI, partie hébraïque, p. 1-32. La femme de ce Paul revint au
judaïsme; voy, p. 22.
3 Voir mon Polem. tmd apolof/etischc LiteratHi\ p. 416, manuscrit Schœnblum,
'ÔO (}; Jesc/iurun, t. VIII, p. 40.
'• Le protocole latin do la Controverse, daté du mois d'août 1263, publié en 1867
par Cil. de Fourtoulon (Voy. Hebr. Bililiof/r., t. XXI, n<" 123), ne fouruit aucun ren-
seignement non plus pour notre élude.
■'= Jusqu'à présent on ne connaissait que le ms. du Vatican ; voy. IJcI/r. Bil>lio(/r,,
XXï,u"12:i.
PAUL DE BO.NNEFÛY ET LE LIVRE DE LA FOI 81
nide dont il y a un ms. à la bibliothèque des Néophytes à Rome' ;
2° Samuel Nasi, qui voulut faire revenir de Rome Calonymos b.
Calonymos (vers 1320), et qui, selon M. Gross-, vécut probable-
ment à Arles, domicile de Calonymos ;
3" Don Samuel Nasi, « de la famille de David » (du roi David,
comme celui de Jacob b. Elia), parent de Samuel ibn Verga, qui
alla demeurer à Tolède et qui semble avoir vécu au xv° siècle -K
Quoi qu'il en soit de ces Samuel Nasi, l'identité de Paul de Bon-
nefoy avec le parent de Jacob b. Elia est peu vraisemblable. Est-il
possible de retrouver le livre hébreu de Paul de Bonnefoy ?
On sait qu'un autre Paul, le chrétien Paul Fagius, édita, en
1642, un ^:7:n "idd*, Libe?' ficlei, avec traduction latine, d'après un
manuscrit assez mauvais et plein de lacunes (voy. p. 130). Lors-
que j'ai composé le catalogue des livres hébreux de la Bibliothèque
bodléienne, il m'a été impossible de faire de chaque livre un exa-
men minutieux. Le Livre de la foi chrétienne m'intéressait trop
peu pour y consacrer le temps qui était alors à ma disposition. Je
devais supposer d'ailleurs qu'aucun point intéressant de ce livre
n'avait échappé aux bibliographes chrétiens jusqu'à Jo. Clir. Wolf;
j'ai donc seulement cité le passage de ce dernier dans le Catal.
Bocll. (p. 521, n° 3406). Il est vrai que je demandai, à l'article Fa-
gius (p. 799), si Fagius ne serait pas l'auteur du texte hébreu
qu'il aurait peut-être composé avec l'aide d'un Juif. L'étude de
M. Jourdain sur Paul de Bonnefoy dirigea de nouveau mon atten-
tion sur le Liher fidei, je le feuilletai pour voir s'il pouvait être le
livre composé par Paul de Bonnefoy, et je trouvai, sans avoir be-
soin d'un examen approfondi, que l'ouvrage, tel qu'il a été publié
par Fagius, ne peut pas être de la plume d'un Juif du commence-
ment du xv*^ siècle.
Je n'ai pas l'intention d'épuiser la matière, mais je crois que les
notices suivantes sur ce livre qui n'a pas encore été étudié sérieu-
sement ne seront pas tout à fait superflues. Quel est l'état du texte
et quelles sont les ressources que nous avons pour l'établir ? Wolf
(t. II, p. 125^) parle, d'après Bartolocci, d'un manuscrit anonyme
» Wolf, Bihlioth. Hehr., I, p. 1123, n° 2148 ; conf. Catal. Bodl., p. 2475.
* Monaisschrift de Graetz, 1879, p. 544.
3 Ibn Verfra, Schevet Jchiula, ch. i" ; conf. Zunz, dans Benjamin de Tudèle,
tome II, p. 8, qui cite Depping, p. 365 (traduct. allemande, p. 286). Depping nomme
quelques personnes qui sont censées descendre de David, entre autres : Samuel Aben
Huacar ("iNpT), Samuel Benjaés (lys^i "jaN) et Samuel Lévi, fondateur de la syna-
gogue de Tolède. Sur les deux premiers, voy. Ibn Verga, ch. x. La persécution dont
parle Ibn Verga, ch. v, eut lieu au temps de Salomon ibn Schoschan, qui est proba-
blement mort en 1257, d'après Zunz, Zur Geschichte, p. 437. L'époque où Samuel,
parent d'Ibn Verga, alla demeurer à Tolède m'est inconnue.
♦ Il faut sans doute lire Emonna et non Amana, comme l'écrit Wolf, II, p. 1261.
T. IV. G
82 REVUE DES ETUDES JUIVES
du Vatican, appelé niT^rN n-:», où il est prouvé par la Bible et les
sentences des rabbins que le Christ est le Messie et qu'il reviendra
un jour. AVolf suppose que ce ms. est identique au livre publié par
Fagius *. Bartolocci (t. I, p. 310) dit qu'il possède un ms. du livre
édité par Fagius, et il en parle une seconde fois dans sa liste des
livres anonymes (t. IV, p. 301). Jean Buxtorf en possédait aussi un
exemplaire, écrit par un Juif, comme il le dit dans sa Biblioiheca
raWlnica (p. 38, éd. 1708). On serait tenté également de supposer
que dans le titre du livre intitulé û'^mr:"'^ T<3 r!-i?:N, Contre l'ai lente
vaine du Messie-, il y a une faute et qu'on doit lire r:D^:N. La
transcription Amara, expliquée par ty^actatus, n'est pas de l'hé-
breu. Si ce n'est pas une mauvaise leçon, ce sera un de ces titres
fabriqués, qui ne sont pas rares dans les mss. du Vatican. Tels
sont les mss. que nous connaissons du livre de Fagius, édité avec
une ponctuation peu correcte. Il serait désirable qu'on les com-
parât.
Le livre contient neuf chapitres, dont la table se trouve dans
Wolf (t. III, p. 1176), divisés en 87 paragraphes, dont l'index se
trouve à la page 170. Le texte de l'original n'est pas reproduit
dans toute sa pureté. Ainsi, à la p. 79, l'éditeur a inséré une note
qui nous est révélée par le mot ^"rr^T-t (correction); cette note est
omise dans le latin (p. 86). A la p. 100, les mots pTi*?:!^ "^rN sem-
blent indiquer une remarque du copiste (cf. l'épigraphe, p. 126).
Fagius traduit : « egointerpres ». (Serait-ce lui-même qui aurait
inséré ce passage ?) La confession de foi hébraïque à la fin du
livre (p. 127, non chiffrée) est ajoutée par Fagius, on s'en aper-
çoit au stjle. Nous relèverons encore le passage suivant (p. 23) :
\i"^^'rx t:^;::n 'jTwbn t-^Nipïi^ û'^-'n''t;?:lr; iN'm « Et venerunt ergo qui
vocantur Ismaelitœ, teutonice die hayden, et receperunt eum cum
amore. » Le mot )i"-'^n semble être le seul mot allemand qui se
rencontre dans tout le livre ; c'est peut-être la glose d'un copiste
allemand, à qui le mot Ismaélites était étranger, ou bien c'est la
traduction d'un mot qui se trouvait dans le texte primitifs.
Quant à la date de la rédaction du Liher fidei, il faut s'étonner
qu'une date bien précise qui s y trouve ait échappé aux savants
chrétiens, y compris Wolf. A la page 99, § 76 (dans la version la-
tine, p. 107), on raconte qu'en 262 (1502), les Juifs, jeunes gens et
vieillards, attendant le Messie, observèrent pendant une année en-
tière, dans tous les pays, une pénitence telle qu'il n'en avait pas
• p. 1263, à la fin du n» 58 sur le livre édité par Fagius.
* Ms. du Vatican, cité par Wolf, II, p. 1202, n» 60, d'après Bartolocci.
' Dans l'oncien Nizzulion édité par Wagensoil, p. 277, le mot Û'^Vj'T^lï'' paraît
sipnilier éfralcnient les poyens (conT. plus bus).
1
PAUL DE BONxNEFOY ET LE LIVRE DE LA FOI 8.1
été observé jusqu'alors, que pourtant nulle trace de Messie n'ap-
parut. C'est sans cloute une exagération de l'impression que pro-
duisit chez les Juifs le pseudo-prophète Ascher Lœmmlein, qui se
montra dans l'Italie du Nord '. Si ce paragraphe, qui commence
par les mots psb 2sn ri''::-2 T^- Tr:::?i2 mît, n'est pas une interpo-
lation qu'on aurait ajoutée plus tard pour montrer qu'il est vrai,
comme le dit le Liber /Idei, que les Juifs tirent souvent en vain
pénitence, ce livre aurait été publié entre 1502 et 154^. C'est là
encore une raison pour laquelle il serait utile de pouvoir examiner
un autre manuscrit.
A tout le moins, ce passage est suspect, car Fagius prétend, dans
le frontispice hébreu qu'il a composé, que le livre est écrit « depuis
nombre d'années » û-^r^ n?:!: ■'îîb (au frontispice latin : ante miil-
tos annos) ; ce ne sont pas des expressions qu'on emploie pour un
ouvrage publié seulement depuis quarante ans. Mais il y a plus :
Fagius publia la même année un opuscule qui semble très rare et
qui a pour titre : Precationes hehr. quïbus in solemnibus cUelnis
festis Judœi cwn raensœ occumUmt adhuc hodie uluntur.Pa7'vus
item iradatulus ex libella Jiebr. excerptiis. . . rii^^N ido Lib. ftdei
a dodo qv.odam Judœo., sed ad chrisiianismum converso anie
DucENTOs ANNOS pro fidc nostrci... conscripio... per Paulum
Fagium ; Isny, 1342, in-4°-. Ce livre ne renferme que des béné-
dictions en hébreu et en latin, mais rien du Tymctulus promis sur
le titre et qui devait donner sur les oraisons juives des extraits du
Liber fidei. Fagius s'était peut-être décidé à publier le Liber fidei
en entier pendant qu'il éditait les « bénédictions ». Quoi qu'il en
soit, il est intéressant de voir que Fagius croyait et déclarait que
le. Liber fidei avait été composé deux siècles avant l'an 1542. N'a-
t-il pas connu le passage relatif à l'année 1502 que nous avons cité
tout à l'heure ? Ces doutes nous autorisent et nous obligent à lais-
ser de côté cette date suspecte de 1502 et à examiner directement
le Liber fidei, pour essayer d'y trouver la date de sa composition.
Je répète que les remarques suivantes ne sont que le résultat
d'une lecture superficielle.
L'auteur nomme souvent Raschi (p. 18, 22, 2(3, etc.) et David
Kimhi (p. 44) ; il connaît les « soixante-douze noms des livres de la
1 Voir Polcmische u. apoloi/clische Litcratur, p. 380, n« Gti. Daus le Catalogue des
mss. hébreux de Turin, publié par B. Peyron, 1880, p. IGo, il est dit de Joseph iba
Scherapça : « Qui /^uadaiii objecit de eo r/uod {in nobis) insit vis (!) proplielica • ; ce
qu'il faut traduire ainsi : • Qui a fait des objections contre Ascher, qui prétendait
("tre prophète. «
2 Ce livre n'est pas indique dans le Catalogue Bodl., p. 401. J'ai découvert cet
exemplaire, le seul que je connaisse, en compilant le catalogue des livres hébreux de
la Bibliothèque Royale de Berlin, Il ne contient que seize feuillets non cldlTrés.
84 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Cabbale », les n-n-isDT m720 miTo, ce qui était presque impossible
avant le commencement du xiv« siècle. Sans appuyer son dire sur
aucun passage, Wolf remarque (II, p. 1262) que le livre dispute
contre le liniti veius ; mais plus loin (III, p. 661), il dit que le
Liber fidei répond aux caliimniœ qui se trouvent dans l'ouvrage
de LipmannMïihlliausen, intitulé également Nizzahon. La diffé-
rence de date de ces deux Nizzahon est de tout un siècle ; elle est
donc de quelque importance pour la solution du problème qui
nous occupe, comme on le verra *.
Si nous recherchons dans le Liber ficlei les passages du Nizza-
hon, nous nous trouvons en présence d'une abondance de rensei-
gnements. L'auteur déclare, à la fin du second chapitre (p. 40, ver-
sion latine, p. 44) -jiniis by mmïîn mnix '^b\xi l^^'o « Ab isto porro
loco jam describam responsiones contra Nizzachon. » A partir de là
il répond donc à des attaques du Nizzahon. A la page 88, S 62 (ver-
sion latine, p. 96), il revient à la réfutation du Nizzahon, en pre-
mier lieu sur les peines infernales d'Adam -. Le troisième chapitre
contient des objections faites par des Juifs contre les Evangiles. Or,
dans le livre de Lipmann, on ne trouve pas de partie consacrée
aux Evangiles; il y en a une au contraire dans le vieux Nizzahon,
édité par WagenseiL p. 166 et suiv. Il ne serait pas sans intérêt,
pour le texte hébreu, de rechercher dans le Liber ficlei, tous les
passages qu'il cite ; si ces passages ne se trouvent pas dans le
Nizzahon, on devra supposer que ce dernier ouvrage est incom-
plet ou que le Liber fidei parle d'un autre livre de controverse, car
le mot Nizzahon parait être devenu un appellatif commun aux
écrits de cette sorte, comme je l'ai déjà fait observera Je n'ai pas
l'intention de faire une collation complète des textes, il me suffii:a
de donner ici quelques exemples.
Ce qu'on lit au troisième chapitre, pages 42 et 43, §§ 22 et 23, se
trouve dans Wagenseil, page 217, en ordre inverse. Ce qu'on lit
page 44, g 24, sur la résurrection, se trouve en substance dans
Wagenseil, page 234, avec la formule de citation û-^^win nnon (Pen-
tateuque), ot un peu plus bas '::'12^r^ "is53, ce que Wagenseil traduit
par « in lege ipsorum ■>•>. Un Juif probablement n'aurait pas em-
ployé le mot « Pentateuque » pour désigner les Evangiles. Ce mot
désigne plutôt les Quinicrne, comme dans les Controverses (ara-
bes) de Vévi'qne*.
' Faf^ius voulait mômo composer une n'fulalion du vieux Nizzahon, mais la mort
l'en cmpûciia ; Vjoir Wolf, III, p. l'AVl.
" Voir le livre de Lipuiaun, eh. viii.
' Encyclopr'die d'Erseh el (trubcr, à l'arlielo Judiaclie Lilcratiir, ^ 1!j.
* Voir IJehr. Bibliogr., XX, p. 7ù.
PAUL DE BOXNEFOY ET LE LIVRE DE LA FOI 80
Pour ne pas laisser notre question sans aucune solution, j"ai
comparé le petit nombre de passages du Liber fidei où le Nizza-
hon est nommé formellement. Par malheur, le titre même du Niz-
zahon n'a pas joué de bonheur, aussi bien dans le texte hébreu
que dans la traduction latine. Déjà au premier chapitre, page 28,
S 16, on trouve deux fois la faute d'impression m^-^i au lieu de mj:3
qui se trouve plus correctement à l'index, page 131. Fagius traduit
ce mot par l'expression vague quidam, dans ce passage qui se rap-
porte à Isaie, Yiii, 4. Or ce paragraphe se trouve dans Wagenseil,
page 84 (cf. Lipmann, chap. 225). On comprend alors comment,
page 36, § 2, les mots mri2t:r! hv mns'5 n-r^n Nn">ar;T [sic], qui se
trouvent dans le LWer fidei, peuvent être traduits par Fagius :
« Nunc vero scribam etiam aliquid contra (inanes glorias Judaîo-
rum)... » Immédiatement après ce passage, on trouve le mot m^;m,
rendu en latin par : Author libri Nlzzachon et par: triumphato'r
ille. A la vérité, cette citation dit que l'idolâtrie est contraire au
Décaloguo, ce qui ne se trouve pas dans Wagenseil, page 37, sur
Exode, XX, 4 (cf., p. 134), mais, en tout cas, cela se lit dans Lip-
mann, chapitre 610.
A la page 54, § 31, il est dit que les chrétiens s'appellent Israël,
mais que le m^: [Kizuach, dans la version latine, p. 59) y oppose
le Décalogue [Exode, xxiii, 20). Ni Wagenseil (p. 40 ; conf. p. 103
et 122), ni Lipmann (chap. 610), n'ont ce détail.
A la page 57 (vers, lat., p. 59 : NizuacJi), il y a une discussion
sur Isaïe, vi, 14, et Deuiéronome, xiii, 7; elle se retrouve dans
Wagenseil, page 50.
A la page 58 (lat., p. 63), on discute sur Ps., cxi.vi, 3, comme
dans Wagenseil, page 141 '.
Voici un passage enfin qui est certainement emprunté au ISiz-
zuacJi de Lipmann, c'est celui (p. 4) où est cité Maïmonide réfu-
tant l'opinion que le monde ne serait pas créé, opinion d'Aristote,
appelé ici û"^r>:r; "wN-i et dans Lipmann (Introduction) PT^Nn ^n-i,
ce qu'il faut peut-être corriger en mr^i-î "c^ni.
Or, Lipmannn a composé le supplément de son œuvre en 1399 ;
on doit donc se demander, dans l'hypothèse que Paul de Bonnefoy
serait l'auteur du Liber fidei original, s'il est possible que le livre
d'un auteur de Miihlhausen ait pu arriver si vite après sa compo-
sition jusqu'en France, où Paul de Bonnefoy l'aurait connu, ou si
ce dernier était un Juif allemand.
Il nous reste à signaler quelques points intéressants du Liber
fidei. |Les expositions du IV" chapitre roulent sur les calculs du
* La vraie place de celte discussion, selon Tordre de la Bible, serait p. 185.
S(3 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
temps de l'arrivée du Messie, fondés sur les 1335 jours de Daniel
pris généralement pour des années. Le chapitre IIl (p 49) dit déjà :
« Plus de 1335 années se sont écoulées depuis la destruction de Jéru-
salem ' ». Or, 1335 plus 68, date de cet événement, d'après les chro-
nograplies juifs, donnent l'an 1403. L'ouvrage ne peut donc pas
avoir été composé avant 1403. Au chapitre IV (p. 61 et suiv.), il est
dit à plusieurs reprises que les 1335 jours (ans) de Daniel doivent
être comptés à partir de Toccupation de la Terre sainte par les
Hébreux jusqu'à la destruction de Jérusalem-. A la page 68 (lat.
p. "74), on trouve la remarque qu'aucun des calculs établis jus-
qu'alors sur l'avènement du Messie ne s'est vérifié. Si l'on compte,
dit l'auteur, comme Raschi, 1335 ans depuis Titus, on reconnaît
que ■plusieurs siècles se sont déjà écoulés depuis le temps pré-
dit % et que, selon Saadia et d'autres, le terme devait arriver
encore plus tôt. Or nous savons que Raschi (sur Daniel, viii) a
calculé l'époque du Messie pour Tannée 1352, et cependant notre
auteur inconnu prétend que depuis ce temps plusieurs siècles
étaient déjà passés ! N'aurait-il pas compris les calculs de Raschi?
Quoi qu'il en soit, on voit qu'on peut difficilement se servir de ces
données pour établir l'époque de l'auteur. Ainsi, page "79, on dit
encore que le jugement dernier doit arriver en 5379 (1619).
Enfin, pour en revenir à Jacob b. Elia, il faut remarquer que
dans le dernier chapitre, le malheur des Juifs est attribué à l'usure,
parce que dans les mots '^■^"wn i-i^:b ils voient les chrétiens. Or,
au contraire, Jacob b. Elia, dans sa lettre* en réponse à Paul, qui
avait dénoncé l'usure des Juifs, emploie la phrase 'z'r^ sr; ^ pour dé-
noncer la rapacité chrétienne. Il réplique à Paul que les Juifs de
l'Orient vivent de leur travail. « 11 est vrai, dit-il, que les régents
d'Ismaël (les Mahométans) sont méchants et pécheurs, mais ils sont
néanmoins assez raisonnables pour demander un impôt annuel fixe ;
' !2"'5w ElbN est une faute d'impression, comme le prouve la version latine (p. 53].
- De roccupation jusqu'à l'érection du \" temple 4'iO
Durée du premier temple /ilO
Exil 70
Epoque du second temple il'i
13:^0
L'auteur substitue à la • Gemalria » juive une Uematria chrétienne pour ariivor
au nombre désiré convenant au temps du Christ. Page 73, il retrouve le fiombre de
133;i dans ^"^PON "ITDÏI [sic], Deul., XXI, 18, comme dans Albiruni (voir Polem.
Uii'L apolog. LilcvaHir, p. 350), Joseph b. Bechor Schor (voir Deutsch. morfjenliitul .
(reselhckaft, XXXI, p. 394).
' Ces paroles sont répétées, p. 7'i.
* Jeuchurun, p. lîj.
• D'où quelques-uns font dériver le mol hep, heji.
PAUL DE BONNEFOY ET LE LIVRE DE LA FOY 87
nos princes, au contraire^ ne pensent qu'à nous piller, qu'à s'em-
parer de notre or et de notre argent. Que l'on considère comment
l'usure se pratique à la cour de Rome 1 La domination de la terre,
la guerre contre la Grèce et les Maliométans se fait avec de l'ar-
gent ; il faut que de hauts dignitaires du clergé en apportent à
Rome de toutes les contrées, et, s'il en manque, les habitants de la
Toscane sont prêts à en prêter à usure ; on donne cinq cents pour
mille, mille pour dix mille, pour « ne pas venir les mains vides "
devant le Seigneur ». De la sorte, les chrétiens font. l'usure avec
leurs propres coreligionnaires, et nous autres que sommes-nous ?
Berlin, janvier 1882.
M. Steinschneider.
DÉLIVRANCE DES JUIFS DE ROME
EN L'ANNÉE 1555
(MARCELLO II — PAUL IV — LES MARTYRS D'ANCONE — MORT DE CARAFFA)
Dans mon exemplaire du Schalschélet hakhabbcUâh (Venise,
1587), outre de nombreuses gloses d'une grande valeur, se trouve,
f" 117 a, ligne 26, une note marginale qui occupe les marges
droites et inférieures de trois pages. Elle est écrite de la main du
« pèlerin wbien connu, Abraham- Josepli-Salomon Graziano,hâ b''^k,
comme il se désignait lui-même, d'après les lettres initiales de son
nom, qui a fleuri dans la première moitié du xvii^ siècle. Ce con-
naisseur et collectionneur de manuscrits et d'imprimés, mort rab-
bin de Modène en 1684, nous a conservé, dans cette note, l'extrait
d'une relation historique, qui autrement se fût perdue, puisque
on n'en a trouvé de trace, jusqu'à ce jour du moins, ni à Rome
ni ailleurs. Il serait grandement à souhaiter qu'on pût découvrir
de nouveaux témoignages et de nouveaux renseignements sur
l'événement raconté dans cette note, car elle retrace une des dé-
livrances les plus merveilleuses arrivées aux Juifs de Rome, à une
des époques les plus critiques de leur histoire. Comme je puis l'af-
firmer d'après les recherches de mon ami M. le professeur
Ignazio Guidi, on n'a pu trouver jusqu'à présent aucune mention
de cet événement dans les archives et les histoires spéciales de
Rome. Voici la note de Graziano (texte plus loin) :
a Ce pape (Paul Carafï'a) a, comme je le pense, succédé à Marcello II,
■qui mourut après un règne de vingt et un jours, au mois de Nissan
5315 de la création (1555 de l'ère chrétienne). C'est ce que j'ai lu dans
une Megilla manuscrite, rédigée à Rome par les savants qui s'y trou-
vaient alors, à l'occasion d'un fait miraculeux arrive aux Juifs à cette
époque. Un avocat arabe, le docteur Sulini d'Espagne, avait tué un
DÉLIVRANCE DES JUIFS DE ROME EN L'ANNÉE 15oo 89
chrétien après l'avoir frappé de coups nombreux et l'avoir blessé en
plusieurs endroits. Il le plaça ensuite dans un sac et le porta dans
un lieu appelé Campo Santo, parce qu'on y avait placé de la terre
apportée de Palestine. Le lendemain matin, lorsque le surveillant se
leva et aperçut le sac plein et souillé de sang, il fut saisi de frayeur;
il ouvrit le sac et y vit le cadavre d'un enfant couvert d'affreuses
blessures. Il se rendit auprès des juges de la ville, pour faire sa dé-
claration aux autorités. A la nouvelle du meurtre de l'enfant, et des
violences inouïes qu'on avait exercées sur lui, le peuple afflua par
masses à Rome pour voir la victime. Tous se demandaient stupéfaits
qui avait pu avoir l'audace de commettre un tel crime et de porter
le cadavre au Campo Santo, alors que le pape, maître de la ville et
de cet endroit, avait statué que quiconque voudrait ensevelir un*
homme ou une femme dans ce cimetière aurait à remettre le mort
au gardien et à payer le prix de l'inlmmation. L'étonnement et la
consternation causée par la mort de cet enfant fut générale parmi les
cardinaux, les évèques, les conseillers municipaux et les notables de
la ville. Lorsque l'affaire arriva devant le pape Marcello, celui-ci fit
venir ses conseillers, ses agents secrets, et les gardiens de la ville.
Il leur recommanda de garder l'enfant et de ne pas l'ensevelir, avant
qu'on eût trouvé ses père et mère, ou un de ses parents. On devait
saisir ces derniers et les jeter dans la prison réservée aux criminels
passibles de mort. Dans la ville, on devait établir des guetteurs et
des espions, pour apprendre ainsi ce qui se disait de la victime.
Pendant ce temps parut aussi parmi ceux qui étaient venus voir
l'enfant un apostat d'origine juive, qui affirma hautement qu'un tel
crime ne pouvait avoir été commis que par les Juifs ; car, disait-il,
ils ont coutume chaque année entre Purim et Pâques^ de tuer un
enfant, non-juif : on peut s'en convaincre par leurs livres d'his-
toire et leurs chroniques. Les chrétiens l'approuvèrent naturelle-
ment et lui accordèrent d'autant plus de créance que ce calomnia-
teur des Juifs était le même qui, en l'année looS, le jour du Rosch
haschana, avait provoqué l'auto-da-fé du Talmud et d'autres livres.
Le calomniateur se rendit avec beaucoup de gens auprès des cardi-
naux, du préfet et des conservateurs, et demanda qu'on exterminât
les Juifs à cause de ce crime. Les conservateurs se virent forcés de
s'adresser au pape, pour qu'il donnât l'ordre de massacrer et d'exter-
miner toute la population juive et de piller leurs biens, le 3 lyar
[mercredi 24 avril]. Mais le pape Marcello leur recommanda d'agir
avec prudence dans cette aflaire : ils devaient d'abord se convaincre
que cette abomination avait véritablement été commise par les Juifs,
alors seulement il consentirait à porter contre eux un édit de mort
et d'extermination.
Sur ces entrefaites vint un médecin chrétien, pour voir, lui aussi,
l'enfant assassiné. Il affirma le reconnaître pour l'avoir soigné dans
la maison d'un chrétien, le docteur Sulim. L'enfant était orphelin,
mais sa mère, avant de mourir, l'avait remis avec toute sa fortune
90 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
entre les maius de ce docteur. Lorsque cette nouvelle parvint au
« bargello * », il se rendit dans la maison du docteur Sulim. Il y vit
le lit de Tenfant, souillé de sang ; mais il ne trouva pas le docteur
chez lui.
A la suite des instantes prières que lui avaient adressées les chefs
de la communauté juive de Rome et à la suite de la promesse d'une
somme d'argent considérable, il se donna toutes les peines possibles
pour découvrir le docteur. Lorsque, grâce à ses efforts, il l'eut enfin
trouvé, il le fit jeter en prison, lui fit mettre aux pieds des chaînes
de fer, jusqu'à ce qu'une décision formelle intervînt de la part du
pape. A la suite des interrogatoires auxquels les juges soumirent
le docteur Sulim, Taflaire fut tout à fait éelaircie. Il avoua sans
'honte que c'était lui qui avait martyrisé et mis à mort l'enfant, mais
que c'était dans la seule intention de faire périr tous les Juifs des
Etats du Pape et de toute la terre. On n'avait pas encore prononcé
sa sentence, lorsque mourut à un âge très avancé le pape Mar-
cello II. Alors parut le pape qui avait surnom Théatiuo, lequel
ébranla tous les empires et accabla de persécutions les Israélites, qui
furent profondément humiliés à cette époque. Le jour de son anni-
versaire, il fit un festin pour tout son entourage. A cette occasion, il
amnistia les criminels, mais donna en même temps Tordre de pen-
dre le docteur Sulim, ce qui fut fait. Par là fut apaisée la colère du
pape et du peuple. Béni soit l'Eternel, le Dieu d'Israël, qui lui a
conservé si merveilleusement sa protection à toutes les époques ;
car beaucoup se sont élevés contre Israël pour le détruire, mais
Dieu, par sa grande miséricorde et sa bonté infinie, l'a sauvé de
leurs mains. Puisse-t-il ainsi faire des miracles en notre faveur et
nous rassembler bientôt des quatre coins de la terre. Amen !
J'ai écrit ici l'extrait de la relation de ce miracle pour que le
lecteur de ce livre (le Schalschélet hakabbalah), qui y apprend que
Paul Garaffa, le Napolitain, décréta contre Israël, en Vô'ôb, des peines
sévères, et que déjà auparavant au Pvosch Haschana de Tannée 1353,
il avait fait brûler le Talmud, sache avec quelle précision tous ces
événements concordent avec l'histoire miraculeuse racontée par les
rabbins de Rome et que j'ai rapportée. Le pape surnommé Théatino,
qui fit le procès au docteur Sulim, auteur de l'assassinat et cause de
tant de maux pour les Juifs, est bien le pape Paul Garaffa de Naplcs,
que Guédalia b. Jahia, l'auteur de ce livre, a mentionné en cet en-
droit, puisque c'est précisément ce pape qui, en 13oo, décréta tant
de mesures contre les Israélites. Si Guédalia b. Jahia n'a pas ra-
conté cette histoire, c'est sans doute parce qu'il n'a pas connu la
relation du miracle ou qu'il a désiré la cacher pour quelque raison
inconnue.
Joseph Cohen était le seul jusqu'à pri'.seut, qui, dans son Emeli
' Chef de police, capo dei birri, d'après Tcxplieuliou que ino donne M. Guidi.
DÉLIVRANCE DES JUIFS DE ROME EN L'ANNEE i;i:>> '.U
habacha^, nous eût fait connaitre le grave danger qui menaça les
Juifs des Etats de l'Eglise en 1555. C'est d'après lui que Graetz a
raconté cet événement dans le IX^ volume de son Histoire des
Juifs ^ p. 359.
Nous apprenons par Graziano qu'en souvenir de cette merveil-
leuse délivrance, les Juifs romains firent écrire un rouleau dans
lequel fut exposée, dans le style de la Megilla d'Estlier, toute l'his-
toire de l'événement. A ce rouleau vint s'ajouter bientôt un poème,
dans lequel^ sans doute, le même sujet était traité une seconde
fois, sous forme poétique.
De ces deux pièces, nous n'avons décidément que l'extrait qu'en
a fait Graziano. Même sous cette forme, la relation inconnue jus-
qu'à ce jour nous offre une confirmation heureuse et un com-
plément du récit que nous fait Joseph Cohen. Comme il fallait s'y
attendre de la part de cet historien véridique des infortunes des
Juifs, son récit se trouve confirmé par celui de Graziano dans
tous ses points essentiels. Les divergences entre les deax relations
devront être jugées avec circonspection aussi longtemps que nous
n'aurons pas sous les yeux, dans sa teneur intégrale, le véritable
document historique, le rouleau écrit par les soins de la Commu-
nauté de Rome-. On peut avoir assez de confiance dans l'auteur
de VEmek licOmclia, car il fut contemporain des faits en question
et il a connu vraisemblablement les relations en quelque sorte of-
ficielles des chroniques romaines.
Ce qui peut paraître fort étrange, c'est qu'il n'est fait, à ce qu'il
semble, aucime mention, dans la relation romaine, du rôle que pa-
rait avoir joué Alexandre Farnèse dans cette circonstance. D'après
le récit de Joseph Cohen (p. 117), le cardinal Farnèse devint ulté-
rieurement le sauveur des' Israélites, mais il paraît résulter du
récit simple et naturel de notre Megilla que sous Marcello son
intervention n'avait pas été nécessaire.
Notre document rend pour ainsi dire justice devant l'histoire à
deux papes, en faisant apparaîti'e sous un jour favorable leur
attitude dans ces circonstances. Marcello II, auquel on n'éleva pas
même un monument après sa mort ^ paraît, autant qu'on en peut
juger par la durée de son règne, qui n'a été que de vingt et un
jours, avoir été animé de dispositions bienveillantes envers les
Juifs. En tous cas il mérite que nous gardions de lui un bon sou-
venir, pour avoir, par sa présence d'esprit et la fermeté qu'il dé-
' Ed. LeUeris, p. ll'i, trad. allein. do Wiener, p. 92.
^ Noiis ne connaissons aujourd'hui que le nom du f!;refiier de la Communauté Israé-
lite do Home en lîiîj'i : Jchuda b. Sabbati (Bcrliner, J)/rty(j»/«, I, 8'i).
3 Grégorovius, Pahstijrii.bcr,'!" édit., p. 1311.
92 REVUE DES ETUDES JUIVES
ploya contre les efforts des judéophobes, empêché dans la ville
éternelle des malheurs indicibles et des massacres sanglants.
Ce qui est surtout satisfaisant, c'est le fait que l'auteur de la
persécution a été mis à mort sur l'ordre de Paul IV, ce pape contre
lequel l'histoire juive a prononcé un jugement si sévère. Cette in-
formation est d'autant plus vraisemblable que, dans une affaire
aussi importante, c'est bien le pape qui a dû prononcer l'arrêt de
mort et non pas le cardinal Farnèse, comme nous le raconte la
chronique de Joseph Cohen.
Grâce à cette nouvelle relation, les faits s'enchaînent plus inti-
mement et avec plus de vraisemblance. C'est encore une de ces
histoires de Pâque qui ont fait si souvent répandre le sang des
Juifs. Il est à remarquer qu'il ne vint pas à l'idée du peuple que
les Juifs pussent être les auteurs du meurtre. Il fallut, pour faire
soupçonner les Juifs et les précipiter dans le malheur, l'invention
du misérable Chananel di Foligno, qui avait déjà pris une grande
part à l'auto-da-fé du Talmud en 1553. De même, deux ans aupa-
ravant, à Asti, dans un cas analogue, il avait fallu un Allemand
pour exciter la populace italienne à accuser les Juifs d'un meurtre ',
Chananel, qui, dans la relation de Joseph Cohen, ne paraît que
dans la dernière partie du drame, après que celui-ci a pris une
tournure heureuse, joue dès l'origine, d'après la nouvelle rela-
tion, le rôle d'un instigateur. La réserve de la Curie est d'autant
plus mémorable. Elle ne se laissa pas entraîner à des violences
précipitées par l'audacieux apostat qui, rappelant son origine juive
et de prétendues traditions de famille, pouvait donner plus de
créance à ce conte de l'usage du sang chez les Juifs.
On remarquera également qu'il a fallu de grosses promesses
pour décider les autorités à déployer plus d'activité dans la re-
cherche du meurtrier. Ce qui préserva de la mort la population
Israélite de Rome, c'est qu'on empêcha à temps la fuite du docteur
Sulim. Ce sont ces détails précis (comme par exemple cette cir-
constance que le meurtrier, qu'on n'avait pas trouvé dans sa mai-
son, ainsi que le raconte Joseph Cohen, a dû être d'abord tiré de
sa cachette), qui donnent à la nouvelle relation la valeur d'un té-
moignage oculaire. Elle doit être l'impression immédiate de l'évé-
nement, car elle nous a conservé le nom du misérable apostat et le
souvenir de toutes les circonstances accessoires. C'est seulement
sur la scène où s'est passé l'événement qu'on prend plaisir et in-
térêt aux petits détails.
Les deux autres glosf.'s luibraïques citées plus loin, et que j'em-
' 'Emch hahacha, p. H3 ; Wiener, p. 91.
DELIVRANCE DES JUIFS DE ROME EN L'ANNEE 1335 93
priinte également à mon exemplaire du Schalscliélet hahhabbâlâh
d'Ibn Jahia, f. 117 5, sont aussi de Graziano et concernent le plus
grand crime et le plus grand bienfait de Paul IV : Fauto-da-fé
d'Ancone et sa propre mort. Nous ne connaissions jusqu'à pré-
sent qu'une poésie de Jacob di Fano dans laquelle soit raconté
l'horrible événement d'Ancone (Graetz, IX, p. 362, n" 1), et le
poème de Salomon Chasan (Zunz, Lilg., 592), publié par M. Ad.
Neubauer dans le Lihanon, V, 344. Nous apprenons par notre
note que dans la synagogue portugaise de Pesaro, parmi les élé-
gies récitées le 9 d'Ab dans lesquelles avait déjà trouvé place
plus d'une histoire douloureuse de l'exil, on en disait régulièrement
une consacrée aux malheureux maranes d'Ancone, victimes du
parjure de Caraffa. La piété de notre « pèlerin « nous a conservé
aussi le nom du poète Mordechai b. Juda di Blanes ' qui paraît
être issu de la famille bien connue des Blanes.
On connaît la réputation que s'est faite le plus sombre des
papes, le napolitain Paul Caraffa, que les auteurs Juifs nomment
Théatino, parce qu'il a fondé l'ordre des Théatihs , et aussi
parce que la valeur numérique de ce mot le stigmatisait du nom
d'Aman (i3-':ûN"':û = 95 = ';^lr! ; Wiener, 1. c, p. 210, n° 288) et que
maudirent après sa mort Juifs et chrétiens. De môme qu'il ne
respecta pas les œuvres de ses prédécesseurs, de même que, par
exemple, il voulut faire détruire le Jugement dernier de Michel
Ange et ne renonça à son projet que sur les instances des cardi-
naux, de même il ne respectait pas sa propre parole, surtout quand
elle avait été donnée à des Juifs. Il a pu couvrir la nudité des saints
sur le tableau de Michel Ange-, mais aucune peinture ne sau-
rait couvrir sa réputation, et ses yeux n'étaient pas encore fer-
més que déjà ses contemporains prononçaient contre lui la sen-
tence d'éternelle damnation. On connaît les excès qui se produi-
sirent à Rome après sa mort, le 18 août 1559. On sait que sa statue
surmontée de la triple couronne fut traînée à travers les rues de
Rome et que, sur le Capitole, on prit la décision de détruire ce mo-
' Isaac b. Scheschet, dans ses Réponses, n" 127, nomme Meschullam di Blanes.
C'est de Blancs en Catalogne (Zunz, Zeitschrift, p. 143), que cette famille tire son
nom. Il n'est donc pas impossible que ses branches italiennes descendent do maranes
réfup;iés en Italie. Sur Juda di Blanes, voyez Graetz, IX, ;J0, n" 2; BrûU, Jahrluch^
I, 2?)G... Sur Juda b. Salomon di Blanes, cf. llehr. Bil/lioffrnphic, IV, p. 148, n"ll'i
Cat. Bodl., 30.'jO, n" 2901, et 3Iaf/a:iu de Bcrliner, II, 'M). Notre Mordochaï est
peut-être le fils de ce Juda Blanes qui, en lo24, à Rome, veilla David Réubeni pen-
dant son sinj^ulicr jeûne, comme il le raconta lui-même à Gedalja ibn Jachia (dans
Schalscliélet. éd. Venise, f" 4:1").
* On donnait à Daniello da Voltera le surnom de Brachettone, faiseur de cu-
lottes, parce qu'il s'oll'rit pour ce travail. — Cf. Sprinter, Ra/Tael iind MichelanijHo,
p. 423.
iii REVUE DES ETUDES JUIVES
iiument, « parce que le pape avait démérité de la ville ainsi que de
tout l'univers ». Mais dans d'autres villes d'Italie, comme à Pé-
rouse, avaient aussi éclaté des troubles semblables, à la nouvelle
de sa mort '. Cette nouvelle mit surtout en joie les Juifs. Le poids
qui les avait si lourdement oppressés était enfin enlevé de leur
âme : ils pouvaient de nouveau respirer. Et de même qu'à Rome,
signe saisissant des sentiments communs, la populace laissa tran-
quillement un Juif placer rinfàme chapeau jaune sur la tiare de
la statue papale, de même, dans les autres villes d'Italie, à la nou-
velle de la mort du pape, se produisirent sans doute hautement
chez les Juifs des éclats de joie et de bonheur. Comme nous le
savons par les Réponses d'Abraham Menahem Porto de Crémone
que nous a conservées également le zèle du collectionneur Gra-
ziano- un décret de Paul IV voulait que chaque Juif qu'on trou-
vait sans le ■'5:"iw-ii rniD « chapeau jaune », payât une amende
de 20 scudi, et maintenant c'était un Juif qui plaçait ce signe de
déshonneur sur la tète de l'auteur de l'édit ! « Paul IV, dit Grégo-
rovius (1. c, p. 138) ne construisit pas de loggia ni de galeries de
tableaux, mais une prison avec des murs et des portes, et c'est là
qu'il enferma l'objet de sa haine, les Juifs. Le ghetto est son mo-
nument architectural. » Depuis la destruction du temple, il n'y a
pas eu, paraît-il, de temps plus fécond en douleurs pour les Juifs.
C'est pourquoi nous comprenons le sentiment qui poussa la main
du scribe à insérer dans son livre de prières le jour et l'heure où
unhérault après l'autre apporta à Modène cette nouvelle joyeuse :
Paul IV a cessé d'édicter des peines. .
Budapest.
David Kaufmann .
APPENDICE.
Texte de la note de Graziauo, f"' 1 17.
c^-îTr:^!! i;: -,t.v>:: ^Vin 3"= , mc^sNri ^V'iDsn ND"N-ip ■^b"nNs mi^T:
' Kanke, Die rômischen Pâhste in dcn letztcn vier Jahrhundcrten, I, p. IS", n" 1.
» Voir ses collections, f. '120, dans le codex 228 de mon ami M. llalberstam, de
Bielitz.
DÉLIVRANCE DES JUIFS DE ROME EN L'ANNÉE loSo Oo
ntiwn r\'j'::^ , 10^3 '::iirio toit t5n':;:^'^ ^r\^ irnsb^n n'':rt:j i-iI-in r^o
J-itt -«Dri ,û3in^nb r:"Dpn t^^ n3'«:j N-^n .ûbii^n nx^^nb ^"xyc d-^obN
■'^ isim , 'J)2Tr^ "imN3 û^mnib 3>-i-'iS">:; n-^oa ï-t:;;'?: '?;• d"'?:"irr dm^n do
ï-irjrn , "inN nDî :\"in , ■i'tisd d'^"bio 'nV'-j-in r-i^n n?:":: , '^a-i:^ iriN ^"''^
ib"^:û:^i nnN pt:) "^in imN dai , nmTDNT mnn niD^^n m-nnm d^i'iiD la
•Tpnn .rj"DiSD id"î:np NnpDr: ,bNT>ai y-iN nD3>» nn ittiao iriN dip7:n
î-nnn i:ib nnn ,Q"7?d ^biDib^^i aàiz Niriî^ p-cn ni^ ï-7Nm -17:1"^^: dp'::^ -tin
, mir-i»3 mDî2 d^ rmrr -in^ irs d'>::J rr^n ■^id nt^t p"::^ nx nns-'i , i-ibi'ir»
■^M-i"! .driins^ia bx t-TTi-: rnn nmn pn '^\-T;b t^:?!-! iiiûsto bx "^b-^i
-i-^ra 13)3'?: r;;a;»:va riî< ^c^'::>^ t\iz''T\ n^nTiSkSi , ^5^r;r; ni':r! rrr^?: i'):^'r;D
^ bN i!5\^ ■irT):nii , Ninn .-innî^ -irrri nx mi^ib d^sn d-^)::» litapn^n , n?:!-!
iD"?:Npn nN'^nnbT , p rr:;yb inb nxb?: nt5N ^'7Wix^ Nin -^î: iTrN'i-i , t^hn
ï-T'r; Ninn dip):m 'r^vr, "jiidb'iJ -n3"'iDNr! ^^b^o -in-iiî nnis): , b":n rj";ï«D
-no)ob '■p':iMz V-r-> n3"):Np3 dnnpb rr^rix in* ;r\^ dO n-'S): nt--:; -^iz bd'^D
iN-iïïdi nm srjid , dr-iinp -irn Tb:^ baiîatJ nïo s'iisbi -i^ai^r: T^a dmN
, r\i2 Nit-ir; -i;'3rî nN -r^rn -^binr, niV^ii , d-'STT^^'m d"^3"i):r>r!rî d-ii^ccnr:
isni"i nbri .ib'^^Ta nrs'^DNrî bN -in'in r-^rinm ^ib^iris nîT?:n'p ini i-î):ri
. b":r; n:*:?: nis -n7:":;b n):Nb dmN nsi-^T , tt^:> iToitîT imo "^br^i T^?:dn nx
,Ti:iDn"iT , i^m-ip72 "HN nx , i):n nNi t^in pn nî<i£)3'^ ^"iN nr nm-inp^ Nbi
t!''n-i"i5< iTû-'^'^'ûn .d-^iidïî m^on "^-i^dn "ton dip): ,imon n-^na ûtd-itu-^t
•*:5'^N !sn "-p "j-^m , Ninn s-ni^fr hv d-^n^aiN r;?o in7ot:b n-'r'n d^bsim
Nirir: -i::»*!-! ud'û): pn pi^nb d-^Nnrr '^ip^ bN-i'^-ii rr:;?: pn b:> T^n:'!-!"»::
■^"::> NbN r^TS w^a nos»?: r!\D:?3 Nb "^NmaïD bTi:\ bnpn n7:NT ,irT>rr7:i
-i:î>3 iTiinb d-'Tisb nos "j-^n i-ir^i^n !-7;'>r! '^'7): ^d PT:;rb d^r^î^r*:; , d-^mrr^r;
'^msr: tni , drrbiiî Ip^îTipm pisnstr; -issn riN-iîd) dbim pr:\x i?: nn^
!-iT t3>b N^iiiriO ■c:\Hrt ntîNn T^nnnn i^-^^ûn-it .Iton i^nnx niv 'p '\s>)2'û^
T^iitn "i''-;o ïT^m pjtî r!"-i dT^n D"or; pd-^-i'C: N^^ns iriTi d"'mrT'r; br
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96 REVUE DES ETUDES JUIVES
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-irD-'^Nrr»:: z'jz-oz b";r; rrririnr; y: s:. "C "j^iNa , iisoir.N 's , ^'<:i':i'ri cib^nT:
-irc-^ENT: 1P1N T^n , b"3n ta-^oi rT:;:>7:2 iD^r; nb-^i.SD ira^-'a r;3i372r;
,b";3 û-'iT--'- 152 -m':) n): -it:o ribnpn pb'>rbo bi*3 anr: ins 3pso
.b-^rb ""papoo i7:dt
[Ib. f. 1l7i, 1. 6.]
bv ,13-1 -^5 i;\m3ir3 îinna -i'^n ^s-ï^'t î-ninr:! /iii-^a ^lay?: -iidd
t^ï-'P -la-'H -i2Dn , î-j-^n 'j7:t riT-'i^m , iiy i:;3 ûppiiîto nîipïn -^Dt-i'^a d-^iai-jpr;
■i:;-; t:;» , b"3:T c^rxbm mirr^ n"-i^îi7aa -^m-i': 'n ûsnn ,r;T bv r^s-' pHwX
DÉLIVRANCE DES JUIFS DE ROME EN L'ANNÉE loo-'. 97
ir3-nN72 o^^Z)^1 ns-ii^n ioïî -^-i 'wSOid -iva nsttn rjjO -«i» nm^ n^^ib
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[Ib. 1. 21.]
b"TT nbNrt û-'iniD inni?a b3>i , Tm-i-^u b:ri , riT its^dn- b3> sino \nN2:73
cibNiTittJ p"Db û3"-^u5 n3UJ rûor^i< "d .riTri Drn ûstra '^-'N ,-•^^^•' nrj -i^Tb
, y-iN T^inrt , y-iNn nbnbanD y^n^'2 n^N , ib-^iNS i7:o i^-'ldn-'lj -n-'S'^DNr;
na-in^b lû-iD3"i N-'bN::-'^ bsb mbin:* mni:i , m7:nb7a nnoi , mDbx373 u:i:?-ir;
biL^-'ai D-'-inN d-'imi û^^^miDri^j m3>-n mnn m-it:* -it:* , bisno-^ ■'32
ni<T3 bNius-'b nhn^ rr\i rr^n Nbi , m-itiN rrnitn (:*n3)25 nin-12) rTNibn-
iiDb- 1D3172» b^ "^3 , û-'mt-î irmDiyn , r,xr^ ûrr; li' , idw rr^n innn ût'M
rnnn û-ip"' i^Torn l^^ob 'n ,-ii: "lisb ina iDbn û-isiisr! û:;-i ^"nn-'Nb
,r;3-iU3Ni3D i3m2'a nx ni^^i ,bN-iU3i b3> ma nmi iu5N',inN nrD"^DN
'T û-'io nrnnwS ^b7: , n^TDr; -iTD-^DNr; . 172N , issi-ion nN Nb7:^i
N^bN -1"».-: -iNis7ûrt b"^ -nTn7:n ,b"Dr; i"d o-'-it^jjipa mnn ^-lNii7a s"::'
T^TN ini:p7o i''"i:2r:; "V'J oidt rrrio , Nbr-'rr: b"i:T tior 7a"3a iSNi-'i'^n
bwp D1D-Î7D -iNia'm — iDî<b'^7j oïDii nb'^iîTc^o pnn /ni<"'i-iN372nb rtj-^iTan
. ■»nr72
T. IV.
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGUENÂU
sous LA DOMINATIO?y^ ALLEMANDE '
En 1610 des troubles éclatèrent en Alsace, qui forcèrent encore
une fois les Juifs des environs de Haguenau à se réfugier dans la
Yille; ils durent acheter ce refuge au prix de 70 florins. Lorsque
la paix régna de nouveau, les Juifs durent quitter Haguenau.
Parmi eux se trouvait un homme instruit, médecin et rabbin : il
demanda aux magistrats l'autorisation de rester dans la ville. Le
conseil, pour toute réponse, lui signilla les conclusions suivantes :
« Nous défendons à Haym, juif, rabi, de s'établir chez nous-. » —
11 dut donc s'en aller aussi, pour retourner à Landau, ville d'où il
était venu.
Après quelques années de repos, commença la guerre de Trente
ans. En 1621 les troupes suédoises vinrent en Alsace. Aussitôt les
Juifs des environs de Haguenau accoururent de nouveau dans la
ville pour s'}- mettre à l'abri. Ils eurent à payer 12 reichsthalers
par ménage et par semestre, comme droits de résidence passagère.
Vers la fin de l'année, Mansfeld s'empara de Haguenau, où ses sol-
dats, avec l'assenthnent de leurs supérieurs et au mépris des con-
ventions, se mirent à piller la plus grande partie des établissements
de la ville, qui devaient leur être sacrés, mais où ils cherchaient
des trésors. Ils ne manquèrent naturellement pas de tout saccager
aussi dans le temple Israélite. Les livres. qu'ils trouvèrent et qui
ne pouvaient guère leur être utiles furent déchirés et jetés dans
les rues'.
' Voir tome II, p. 73, et tome III, p. ;J8,
» Arch. de Ilag., BB. lilj.
' Au milieu de ce tumulte, fut ramassé un machsor du matin de Yoni-Kippour, en
morceaux. Les feuilles en mesuraient 0'", 47 de hauteur, sur 0, 31 de largeur; elles
servirent ù relier, pendant plusieurs années, les registres des protocoles du conseil de
cette époque, et elles se trouvent encore en cet état aux archives. On voit bien i|ue
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGUENAU 99
Les Israélites pleuraient ces malheurs, quand, au commence-
ment de l'année 1622, rarcliiduc Léopold vint au secours de Ila-
guenau et y mit le siège pour la prendre d'assaut. Mansfeld avait
eu le temps de lever une contribution de guerre, pour laquelle les
Juifs versèrent 400 florins.
Sur ces entrefaites, au mois d'avril, mourut un des Israélites
réfugiés. La communauté ne put penser à le faire inhumer hors de
la ville, au cimetière actuel ; elle s'adressa en conséquence au
Stettmeister Capito *. Celui-ci leur céda une partie de son jardin,
pour y enterrer leurs morts, moyennant une redevance d'un
reichsthaler par mort, qui devait lui être payée, à lui personnelle-
ment. Toutefois, pour être à couvert contre toutes les éventuali-
tés, ils avaient dû, le jour du décès, et avant môme d'avoir pu s'en-
tendre avec Capito, soumettre l'affaire au magistrat. Le conseil
se réunit le 19 (dans l'intervalle était mort un 2''JuiO pour s'en-
tendre sur la question. Les Israélites, y fut-il dit, ne pouvant sor-
tir de la ville, pour aller au cimetière, y enterrer leurs deux morts, •
à cause des troupes qui les arrêteraient, demandent un emplace-
ment dans la ville, et cela le plus tôt possible. En effet, plus la chose
traîne en longueur, plus il y a danger (à cause de la contagion et
de la grande agglomération de troupes). Ils veulent bien donner à
la ville un florin, comme droit de sépulture -, comme par le passé.
Il fut alors décidé : « Qu'ils arrangent cette affaire au mieux, afin
V qu'il n'en résulte pas de danger pour la cité, et qu'en attendant
» la fin du siège, ils enterrent leurs morts dans le jardin commu-
M nal mis récemment à la disposition du commissionnaire du Con-
» seil. Qu'ils payent pour chaque inhumation un florin d'or. Seule-
» ment qu'ils prennent note que cette autorisation ne leur est
» concédée que pendant la durée des hostilités autour de Ilague-
» nau. Après cela, on verra à tomber d'accord avec eux-'. »
Les Juifs, appelés pour entendre ces conclusions, supplièrent les
honorables membres du conseil de vouloir bien modérer leurs
exigences. Ceux-ci consentirent à remettre ce tribut exceptionnel
à un reichsthaler. Quand tout fut terminé, le Stettmeister Capito
s'avança pour annoncer à ses collègues qu'il avait déjà accordé
aux Juifs un coin de son jardin, moyennant un reichsthaler par
l'écrivain n'était pas un savant. Ces pages pullulent de fautes d'orlliograplie et sont
pleines d'omissions. Une autre main s'est chargée de la correction. Le rite en est
moitié polonais, moitié allemand.
' Il demeurait dans la maison Antoine Guntz, rue du Sel, et avait un jardin der-
rière sa maison, comme on le voit encore aujourd'hui, donnant sur le marché aux
grains.
« Arch. de Ilag., BB. iiO.
' Liv. de proloc. du Conseil, aux arcli. de llag., BU. S9.
100 REVUE DES ETUDES JUIVES
mort (outre le reichsthaler qui était à verser dans la caisse mu-
nicipale), en ajoutant que personne ne pouvait rien prétendre
contre cet arrangement. Naturellement on lui donna raison : il
n'eût tenu qu'à lui de se faire verser deux reichsthalers, s'il avait
voulu.
Les Juifs des villages environnants, revenus dans leurs foyers
à la fin de l'année 1622, accoururent de nouveau, en janvier 1623,
supplier les autorités de Haguenau de vouloir bien leur permettre
de se réfugier encore une fois en ville. Ils en reçurent l'autorisa-
tion, à la condition que chaque famille donnerait pour droits de
séjour, la somme de 12 reichsthalers (à 5,80 = 69 fr. 60) et appor-
terait, avec ses biens, trois viertel (sacs) de seigle par tête.
Les Juifs prièrent le magistrat de diminuer cette somme, vu les
grands sacrifices qu'ils avaient faits depuis près de trois ans. L'im-
position fut alors réduite à huit reichsthalers.
Enfin, Haguenau recouvra sa liberté et surtout un peu de tran-
quillité : les Juifs étrangers retournèrent dans leurs villages.
Quand les esprits furent un peu apaisés, la communauté Israé-
lite songea à remettre son temple en état. A bout de ressources,
elle s'adressa à la banque, qui était sous le patronage de la ville,
pour faire un emprunt. Les fonds de cette banque venaient de dé-
pôts, et c'est par des prêts qu'on faisait valoir cet argent. Mayer,
au nom de tous les Juifs de Haguenau, emprunta donc en février
1623, du dépôt fait par les héritiers de Plnlippe Wïdwesheim, la
somme de cent livres neue ungarische ducats (1063 fr.). Pour tou-
cher cette somme, Mayer dut signer un billet et donner pour cau-
tion une chaîne en or du poids de 16 1/2 loths et un demi-quintel
(259 grammes '7/10'''), de plus, trois gobelets en vermeil pesant en-
semble 496 loths (soit 3 kilog. 62 1/2 gr.). Les Juifs purent rem-
bourser cette avance avec les intérêts, le 20 septembre de la
même année ' .
Grâce à la tranquillité qui avait commencé à régner dans la ville,
les autorités eurent de nouveau le temps de penser aux Juifs. Pen-
dant ces dernières années de guerre, un des six pères de famille
s'était trouvé retenu à Saverne, par le siège qu'en avait entrepris
Mansfeld. Il fut forcé de s'y créer une occupation pour se nourrir.
Il réussit dans ses affaires, il se i)laisait d'ailleurs dans cette ville.
Comme il s'était distingué pendant le siège, l'archiduc Léopold lui
avait permis, sur sa demande, de vendre sa maison de Haguenau
à un antre Juif et de venir demeurer ù Saverne. A son arrivée à
' Ils avaient fuil fioiir cilu uupri's d'un jiarlii'ulirr un ciiiprunl , dans de nicilknires
conditions (Ardi. d.; Hafi;. Cahier. CC lîj:}).
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGUENAU 101
Haguenau, il présenta son remplaçant à la magistrature. Celle-ci
lui défendit de vendre sa maison à ce coreligionnaire. Comme ce
Juif Jàckel ou Jacob se croyait dans son droit, il porta plainte à
l'archiduc Léopold, qui intercéda pour lui auprès du Landvogt',
Après des pourparlers, il put avoir l'autorisation de partir, lais-
sant à sa place le nommé Gerstel, appelé plus tard l'Allemand, pour
le distinguer d'un autre Gerstel, dénommé alors le Welch, parce
qu'il était arrivé à la suite des troupes françaises.
Ils étaient donc de nouveau au nombre de six familles, quand en-
fin, le 13 juillet 1626, Jouas, fils de Simon, reçut la permission de
s'établir à Haguenau comme Juif protégé. Cependant il ne put
acheter de maison de bourgeois ; mais il fallut qu'il allât demeurer
chez son père, qu'il versât 12 reichsthalers (69 fr. 60) pour sa ré-
ception, qu'il fournît un mousquet à l'arsenal, qu'il payât tous les
ans 24 schillings de capitation, et 4 thalers pour le vin qu'il pour-
rait boire (s'il n'en prend pas à table, tant pis pour lui). Il fut
obligé, bien entendu, de venir à la mairie, devant le Stettmeister,
prêter serment de fidélité aux lois de la ville, etc.-. C'était la pre-
mière fois, après quatre siècles et demi, que la communauté
comptait plus de six familles. Cette impulsion, une fois donnée, le
mouvement suivit. Au fur et à mesure que la ville eut besoin d'ar-
gent, situation qui se reproduisit souvent pendant ce siècle, elle
frappa monnaie en imposant les Juifs, selon le bon plaisir du
Stettmeister.
La guerre sévissant de nouveau, en 1627, les Juifs étrangers re-
vinrent. C'était après la fête de Pentecôte. Au mois de juin, Bild-
' « A uos amés el i'éaux les Unterlandvogt et conseillers de la Basse-Alsaeo à
Haguenau.
• Leopold, par la grâce de Dieu, archiduc d'Autriche, etc., etc.
» Vous verrez, par la copie ci-jointe, que la ville de Haguenau veut s'opposer aune
résolution que nous avons prise récemment à l'égard du nommé Jacob, Juil' à Ha-
guenau. Nous lui avions permis de vendre sa maison, située en ladite ville à un
autre Juif, et la ville a l'intention d'empêcher celte vente.
• Ledit Juif n'est pas le premier venu. Il nous a rendu des services et encore plus
à la ville de Saverne, lors du siège de cette localité par les troupes de Mansfeld .
Il a aidé avec une adresse particulière à éteindre les bombes qui y étaient lancées, et
a empêché ainsi plusieurs incendies. Nous avons profité de cette occasion pour lui
donner un témoignage public de notre reconnaissance, d'autant plus que nos con-
seillers intimes nous avaient envoyé sur lui des rensciginemcnts très favorables.
Nous devons, si nous "Voulons être justes, secourir ledit Juif et chercher autant que
possible à dissuader la ville de Haguenau de son opposition. Si, au contraire, elle
trouve des raisons assez plausibles qui méritent d'être débattues, on pourra s'en-
tendre à ce sujet pour les discuter. Vous donnerez votre avis sur les propositions
à faire à l'une ou à l'autre partie.
• Ayez-nous toujours comme jusqu'à présent, en afTection, elc.
. Kouffach, 1C avril 162!i. . (Arch. de Hag., BB. V6].
^ Protoc. du Conseil, aux Arch. de Hag., BB., 61. A'oir plus loin n" li.
102 REVUE DES ETUDES JUIVES
stein proposa de faire paj^er à ceux du Reicli, un reichsthaler par
semaine par chaque homme, et un schilling par chaque femme,
enfant, domestique et bétail même, d'imposer ceux de la Land-
Togtéi, à raison de deux florins par homme et les autres à raison
d'un schilling. La différence d'imposition était excessivement mi-
nime, comme on le voit : Bildstein profitait de chaque occasion.
Les Israélites du dehors firent donc une demande collective de
diminution de cet impôt extraordinaire, surtout pour les enfants,
les femmes, les domestiques et les bestiaux. Le 14 juin, le conseil
se réunit et après un assez long débat, où Bildstein tenait à sa pre-
mière proposition, ceux du Reich furent imposés à raison d'un
florin par semaine et par homme, ceux de la Landvogtéi d'un reichs-
thaler '. Les Juifs revinrent à la charge, en disant que ces dix an-
nées de guerres continuelles les avaient presque ruinés et qu'on
devait avoir pitié d'eux. Le magistrat leur répondit qu'il compre-
nait leur position, mais qu'il n'y pouvait rien changer, et que les
riches qui se trouvaient parmi eux n'avaient qu'à payer pour les
pauvres-. Enfin, poussés à bout, ils n'eurent plus d'autre res-
source que de s'adresser au commandant colonel Asçanius, gou-
verneur de la ville. Celui-ci eut compassion d'eux et les imposa de
la façon suivante : Ceux du Reich, ensemble, à cent florins par
trimestre, ceux de la Landvogtéi à six thalers par trimestre, et
par tète, ce qui faisait plus de cent pour cent de diminution.
Malgré tous ces sacrifices, ils n'eurent pas le droit d'aller à la
synagogue. Voici du reste une histoire intéressante à ce sujet ^ :
A la séance du 31 janvier 1628, le conseil prit la résolution sui-
vante : comme dans la synagogue on entend continuellement des
cris, aussi bien la nuit que le jour, elle sera fermée. Simon, le
président, vint alors annoncer que cette maison lui appartenait,
et qu'il devait être autorisé à y laisser faire des prières. On lui de-
manda de montrer ses privilèges. Il répartit qu'il n'y avait pas de
libertf' spéciale concernant la synagogue, mais qu'il se rapportait
aux promesses que le magistrat avait faites en 15'79 à la commu-
nauté. Bonus et Mayor vinrent au nom de leurs autres coreligion-
naires dire que, depuis un temps immémorial, ils avaient toujours
pu exercer librement leur culte partout oii les Juifs s'étaient
trouvés. Le secrétaire du conseil, après avoir compulsé les traités
faits avec les Juifs, rapporta qu'il n'y était pas explicitement dit
qu'ils étaient libres d'avoir une synagogue, et encore moins qu'ils
' Ardi. de Ilofr., BB. 02.
' Ihid.
' l'rotoc. du Conseil, Arch. de Ilag., BB. G2.
HISTOIRE DES JUIKS DE HAGUENAlJ 103
pouvaient se réunir en communauté ; que cette permission était,
et avait toujours été, une simple tolérance de la part du magistrat.
Le conseil maintint donc sa première décision : le temple devait
être fermé. Mais Simon en sa qualité de propriétaire, et parce
que les quittances de la rente foncière étaient en son nom, pou-
vait venir à la synagogue, y faire ses prières.
Le 28 février. Bonus et Mayer revinrent demander, au nom de
leurs coreligionnaires, l'autorisation de prier dans le temple. Ils
furent remis à quinzaine. Enfin le 10 mars le contrat suivant fut
élaboré et lu aux Israélites :
Comment à Vavenir les Juifs de Haguenmi doivent se comporter,
2)ar rajjjoort à leur synagogue.
Comme ils sont très souvent venus Importuner les membres du
conseil, qu'ils courent après eux, et qu'ils supplient incessamment
et très humblement, ils ont touché le cœur des magistrats. Ceux-ci
veulent donc bien par pure grâce, et sans aucune obligation, leur
permettre de retourner dans leur synagogue; seulement cette autori-
sation ne leur a été accordée qu'à la condition qu'aucun étranger n'y
entre. S'ils transgressent cet ordre, ils seront, à la première infrac-
tion, punis d'une amende de dix florins et même davantage, mais si,
contre leur devoir et leur serment, ils recommencent, nous nous ré-
servons de leur infliger une peine arbitraire.
Les Juifs protégés de Haguenau à qui nous donnons de nouveau,
par la présente, la permission de venir avec les leurs à la synagogue,
doivent, s'ils ne veulent pas qu'on leur défende le service, aussi bien
à l'intérieur qu'à l'extérieur du temple, être plus modestes, ne gêner
personne par leurs prières, surtout modérer leurs cris habituels,
quand ils s'adressent à leur Dieu, et au surplus, tâcher de se mon-
trer réservés, et d^evenir des gens honorables. De cette manière l'idée
ne viendra jamais au conseil de vouloir les gêner dans leurs offices ;
mais encore une fois, que par leurs manières ils n'offensent pas la
bourgeoisie de notre localité.
De même que les Juifs tiennent grandement pour sacré leur sabbat,
et ne veulent pas s'occuper d'affaires mondaines, de même, ils doi-
vent aussi trouver très rationnel que nous n'aimiôns pas les voir les
dimanches et jours de fête conduire leur bétail au pâturage, et, par
suite, gesticuler dans les rues de la ville. Nous tenons au contraire à
ce qu'ils s'en abstiennent totalement, comme nous le leur avons déjà
fait comprendre plus clairement. Faute de quoi, le magistrat sera
obligé de les punir arbitrairement.
Outre cela ils feront bien, s'ils ne veulent pas être inquiétés, de se
conformer continuellement, à tous les droits réguliers, à tous les pri-
vilèges, à tout ce qui est juste, de ne transgresser aucun de ces com-
mandements qui regardent spécialement les Juifs.
lOi REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Les Israélites naturellement répondirent qu'ils voulaient de
tout cœur, obéir ponctuellement à tous les articles qu'on venait de
leur lire ' .
Néanmoins, après être rentrés de nouveau en possession de
cette liberté qui leur était si chère, ils s'adressèrent de rechef
quelques jours après au Conseil, pour lui soumettre une grave
question.
« Nous ne sommes que sept pères de famille, - dirent-ils, dans
» leur pétition, et il faut que nous soyons à dix pour faire nos
» prières. Nous supplions donc encore une fois le plus humble-
)) ment possible, qu'on permette aux étrangers de venir au temple,
)) afin que nous soyons en nombre. »
Ils s'étaient bien gardés de parler de leurs domestiques juifs,
qu'ils avaient eus de tout temps, pour avoir minian, et parce
qu'ils ne pouvaient engager de serviteurs chrétiens. Ils eurent
beau implorer, rien n'y fit. Les étrangers ne reçurent jamais l'au-
torisation de se rendre à la synagogue -.
Au mois de septembre de l'année suivante (1629), Bonus maria
sa fille à un jeune homme des environs de Cologne nommé Isaac,
et obtint, pour son gendre, l'autorisation de venir demeurer à
Haguenau, aux conditions qui lui avaient été faites à lui-même en
1610, avec cette différence qu'on ne demanda au jeune marié
qu'un cheval dans son écurie à la disposition de la bourgeoisie. Un
mois après, en octobre, Mayer put aussi établir son fils Lôwel,
aux mêmes conditions ■''. Les voilà donc à neuf ménages pour
supporter toutes les charges dont la ville les imposait continuel-
lement. En 1630, en plus de leurs impôts ordinaires, ils furent
forcés de verser 400 florins de contributions de guerre. Ils durent
s'imposer des sacrifices pour s'acquitter, mais ils furent obli-
gés de s'exécuter *. En outre, ils eurent à supporter la plus grande
partie des impositions qui pesaient sur leurs compatriotes de
llaguenan.
La guerre continuait toujours. La ville avait une sorte de garde
civique pour maintenir l'ordre dans ses murs. Toutefois aucun
Juif n'était admis dans ses rangs, quoiqu'on eût vu par l'exem-
ple de Jacob, qu'alors déjà, un Juif savait être brave. Par contre,
il était obligé de se faire remplacer. Une autre anomalie, qu'on a
peine à comprendre, était qu'on ne leur confiait pas de garni-
saires ; et si l'idée en était venue à l'autorité civile, les comman-
' Arch. de Ilag., BB. 62. V. plus loin w 15.
' Ihid.
■* Arch. deHag., BB. 63.
* Ihid., EE. 8H,
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGUENAU lOo
dants militaires s y tussent refusés. Pour compenser toutes ces
exemptions de corvées, logements de gens de guerre et gardes à
monter, ils eurent à payer vingt florins (à 3 fr. 87 = 77 fr. 40) par
semaine, qu'ils devaient répartir entre eux. Pour éviter tout re-
tard, ils étaient obligés de faire les versements tous les mardis '
entre les mains du receveur-.
Les événements se précipitent. Nous sommes en 1631. On n'en-
tend plus parler que de guerre. On fait dans la ville de grands
préparatifs pour ne pas être pris au dépourvu. Dès le début, la
communauté juive est obligée de verser deux mille florins (à 3 fr.
87 = 7740 francs), elle doit fournir quatre chevaux pour le service
de la poste, tandis que le reste des habitants n'a à livrer que deux
chevaux ou 90 florins^. En septembre, les Juifs supplient le ma-
gistrat de les exonérer des vingt florins qu'ils payaient pour être
exempts des corvées et autres charges, et off'rent de se libérer en
nature. Ainsi ils proposent de livrer, à partir de ce mois jusqu'à
la Pàque suivante, cent voitures de bois et un quintal de chan-
delles. On accepte leur proposition ; seulement le terme est rap-
proché, et la quantité augmentée. Ainsi ils sont contraints d'ame-
ner de septembre 1631, au carnaval de 1632, cent cinquante
klofi'ter (600 stères] de bois, trois quintaux de chandelles et deux
sacs de sel. Quand ils voulurent se mettre à l'œuvre pour s'acquit-
ter envers la ville, ils ne trouvèrent pas d'ouvriers pour faire le
bois. Aussi le Conseil les punit pour leur retard, en leur imposant
l'obligation de fournir vingt kloffter de bois en plus, et demanda
que la commamauté en fournît dix par semaine, jusqu'à complète
livraison K
Cependant les Suédois étaient annoncés d'un côté, et les Lor-
rains d'un autre. Tous les Juifs non seulement des environs de la
Landvogtéi de Haguenau, mais encore du comté de Hanau, du
Landvogt de Strasbourg, vinrent se réfugier à Haguenau. Ils ar-
rivèrent ainsi au mois de janvier 1632. Ils étaient au nombre de
268, dont 124 vieillards, 137 enfants, et 7 célibataires. On fixa leur
imposition à 2 florins par tête , soit 536 florins (à 3 fr. 87 =
2074 fr. 32), plus 24 florins par famille pour contributions de
guerre^ moyennant quoi, ils eurent l'autorisation de rester jusqu'à
Pâques. Certains autres eurent à verser trente reichsthalers par
• Le mardi s'appelait alors Zinslag (jour des intérêts] , d'où probablement le
Dienslag et certainement la traduction patoise de mardi, chez les paysans d'Alsace,
par Zistig.
» Arch. de Hag., BB. f>:\.
3 Arch. de llag., EE. Si.
4 Ibid., BB. G*5.
106 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
mois (à 5 fr. 80= 174 fr.) ^ Le préposé de ceux qui étaient dénom-
més de la Landvogtéi, était Haym de Landau, a^ec qui nous avons
déjà fait connaissance en 1611. Il remit à la mairie une liste de
tous ceux qui l'a^^aient suivi, et qui s'élevaient au nombre de
43 personnes. Ils durent payer jusqu'à Pâques un reichstlialer par
tète, et, de plus, 15 reichsthalers par famille, pour contributions
de guerre. Ce même liaym, en sa qualité de savant, était obligé
de tenir un registre oii il inscrivait tous les Juifs qui entraient
dans la ville ou en sortaient. Ce livre devait être constamment à
jour, afin que, si l'autorité voulait le vérifier, il fût toujours pré-
sentable. Si l'on y trouvait une irrégularité quelconque, Haym
était prévenu qu'il serait cité en justice.
Les Juifs de Haguenau avaient aussi de lourdes impositions. A
côté de tout ce qu'ils versaient, ils eurent encore, à partir du mois
de janvier de cette année, trente reichsthalers à payer par mois,
pour l'entretien de leurs soldats 2.
Le temps passait très vite, l'on voyait arriver la fête de Pâques
et Haguenau était toujours dans la crainte de se voir prise par les
Suédois. Les Juifs demandèrent une prolongation de séjour, on
la leur accorda jusqu'à la Pentecôte, avec la même imposition que
celle qu'ils avaient déjà payée. Comme supplément, ils durent en-
core contribuer pour 500 florins à l'entretien des officiers de guerre
qui se trouvaient dans la ville. Ils se plaignirent de ces imposi-
tions trop élevées auprès du sous-bailli et du conseil de préfec-
ture ; ceux de la Landvogtéi adressèrent, en outre, la lettre sui-
vante aux autorités locales :
Haguenau, ce 28 juin 1632.
A Messieurs du magistrat, très nobles, etc.,
Nous, pauvres Juifs, nous venons vous ennuyer de nouveau par
notre pétition et vous en demander mille pardons. Pour la permis-
sion de notre séjour dans la ville, les louables magistrats de la cham-
bre impériale et de la ville de Haguenau nous ont demandé de rechel"
un nouveau Reichsthaler par tête. Il est vrai qu'on nous a accordé
trois termes pour le payement, prolongé jusqu'à la saint Jean. Mais
avec la meilleure volonté, nous ne pouvons payer un droit de protec-
tion si élevé. Si vous comptez. Messieurs, que de la Noël à Pâques,
nous avons été obligés de vous verser 4:J0 llorius, et si vous laisse/,
subsister le tlialer, cela nous ferait 207 thalcrs, qui, sur le pied de
16 florins, forment 330 florins. Nous aurions donc à payer 760 florins
pour six mois. Si vous calculez encore qu'à côté des Juifs d'ici nous
' Ardi. (le Hag,, BB. G7.
» Ihid.
HISTOIRE DES JUIFS DE IIAGUENAU 107
avons été obligés de contribuer pour BOO florins à l'entretien des offi-
ciers de guerre qui se trouvaient en nos murs (laquelle contribu-
tion ne nous a nullement protégés) vous arrivez à un chiflre beaucoup
trop élevé pour nos moyens.
Nous ne nous rappelons pas que jamais la Juiverie réunie de la
Landvogtéi, dont les plus ricbes se sont réfugiés cette fois-ci ailleurs,
ait jamais été pressurée de pareille sorte. Le maximum de ce qu'on
leur ait réclamé était de 200 florins, et même il y a quelques années,
en 1610, on s'est contenté de les imposer à 70 florins.
Eu égard à toutes ces contributions, nous vous prions très respec-
tueusement, par la présente, de vouloir bien nous accorder notre de-
mande, en nous déchargeant de cette dernière imposition, qui serait
notre ruine complète.
Vous nous feriez par là une grâce insigne que les soussignés n'ou-
blieront jamais.
Dans l'attente, Messieurs, que vous voudrez bien nous écouter dans
notre réclamation si juste, nous sommes vos très obéissants sujets
et très dévoués serviteurs.
Les Juifs de la Landvogtéi, réunis pour le moment à Haguenau'.
Le Landvogt intercéda pour eux. Le Sénat répondit :
Depuis quatre-vingts ans, on a graduellement élevé la contribution
frappée sur les Juifs étrangers qui venaient chercher un refuge au-
près de nous. La ville de Haguenau est pourvue de privilèges impé-
riaux qui ont de tout temps laissé au magistrat la liberté d'accepter
ou de refuser des Juifs, et même de chasser de son sein ceux qui y
demeurent, si tel est son bon plaisir. Par conséquent, chaque fois
qu'on annonce aux Juifs ce qu'ils auront à verser, pour droits de pro-
tection, ils ont le choix de quitter la ville et son rayon, ou de rester.
Cependant, pour faire plaisir au Landvogt, nous voulons modifier
notre demande pour cette deuxième contribution de Pâques à Pente-
côte, en leur faisant une diminution du tiers ^
Ce rabais était un réel bonlieur pour eux. ■ — Ces malheureux no
savaient pas que les Suédois n'entreraient dans la ville qu'en
décembre, et qu'ils étaient même encore assez éloignés. Outre cela,
les Lorrains qui étaient en garnison à Haguenau les harcelaient
de toutes laçons et leurs patrouilles volantes qu'on rencontrait
sur toutes les routes les molestaient où elles pouvaient.
La population juive do Haguenau étant ainsi devenue plus
dense, la mortalité augmenta et, vu l'état de siège, elle dut songer
à s'approprier un cimetière dans l'intérieur de la ville. Déjà,
' Arcl». de liât.,, B13. Vô.
» Ibid.
108 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
lors d'un siège, les Juifs avaient enterré leurs morts dans le
jardin du Stettmeister Capito. Ce cimetière finit bientôt par se
remi^lir, lorsque les hostilités recommencèrent. Les Juifs dési-
rant en avoir un comme les catholiques, près de leur maison de
prières, profitèrent de la situation pour demander l'autorisation
d'en établir un dans la ville. Cette autorisation leur fut accordée,
et ils achetèrent à ceteiïet un jardin situé près de la tour de l'hor-
loge (actuellement rue des Roses). En faisant cette demande, les
Juifs avaient allégué qu'il venait de mourir un des leurs et qu'ils ne
pouvaient transporter son corps hors de la ville, à cause du dan-
ger. Bientôt on apprit que les Juifs, outrepassant leurs droits,
avaient inhumé dans le nouveau cimetière plusieurs corps sans
nouvelle autorisation du Conseil. Aussitôt (28 avril 1632) le Stett-
meister Bildstein réunit le Conseil et demanda une punition
pour les délinquants. La décision suivante fut alors prise : « Comme
les Juifs ont commis ce délit à l'insu de l'honorable Conseil, ils
devront déterrer leurs morts, les transporter hors de la ville, à
leur lieu de repos habituel et payer en outre pour chaque inhuma-
tion ainsi faite dix reichstalers d'amende '. Les Juifs répondirent
par une supplique - dans laquelle ils exposaient qu'ils étaient vic-
times d'un malentendu, et demandaient la permission de laisser ces
corps dans leur lieu d'inhumation, qu'il n'y avait aucun péril à les
y conserver, qu'au contraire il serait dangereux de les exhumer.
Le Conseil ordonna une enquête et les Juifs durent obéir. Mais
le cimetière ordinaire n'avait plus de place, ils durent donc ache-
ter une propriété qui y attenait, que le Conseil leur permit de
convertir en lieu de sépulture à la condition qu'aucun Juif étran-
ger à la ville n'y fût enterré. Ils fondèrent alors une société char-
gée, sous le contrôle de l'administration de la communauté, de la
gestion du cimetière. Cette société qui était composée de presque
tous les Juifs de la ville et de ceux des environs, prit le nom de
Ilebrah de Gemilout Ilasadim.
Pendant ce temps les Suédois étaient partis et avaient été rem-
placés par les Impériaux sous le commandement de Metternich.
Des Juifs réfugiés, deux seuls purent continuer à y résider; ce
furent le médecin Haym et une veuve de Schweighausen, celle-ci
à la demande du gouverneur, parce qu'elle savait parler le fran-
çais ^ Ainsi la communauté Israélite comptait en 1633 onze
' Livre de proloc. du Consoil. Aux arcliivr=; de Ilaguenau, BB. V>>^.
» Ibid.
' Haym dut payer huit reichslhalers (iG fr. M), comiiip droits aiuuiols de protcc-
ti»n, fl un schillinfr (0 fr. 30), par jour, comme contribution de guerre. La veuve
pa3'a la moitié. La famille de ce lleym prit au siècle suivant le nom de Rehnst
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGL'ENAU 109
ménages. Les charges qui pesaient sur elle étaient très lourdes,
et on s'explique difficilement qu'ils aient pu les supporter. En plus
des impôts ordinaires, en 1634, ils durent, contrairement à la
jurisprudence établie, recevoir des garnisaires, lesquels avaient
droit au gîte, à un reichstlialer par semaine (5fr. 80) par cavalier,
à trois par porte-étendard, quatre par lieutenant et dix par capi-
taine. En outre, ils furent contraints de verser toutes les semaines
les cinquante reichsthalers que Metternich exigeait de la ville.
Ils réclamèrent et on leur accorda seulement que les bourgeois
logeraient chez eux les cavaliers*. Pour le coup les Juifs ne
purent se contenir. Le 25' décembre un sieur GreifF, membre
du Conseil, étant venu signifier à Bonus, l'un des préposés de la
communauté, l'arrêté qui leur imposait ces lourdes contributions,
Bonus, indigné, lui dit, en présence d'une foule de bourgeois et de
soldats : « Tu es un de ceux qui ont fait cette ordonnance, tu as
fait partie de la réunion qui est allée au devant de Metternich
jusqu'à Soufïlenheim. Vous aviez l'air heureux de vous voir suivre
d'un général et de ses soldats ; vous aviez tout fait pour les faire
venir dans la ville; maintenant qu'ils y sont, vous vous déchargez
sur les Juifs des impositions occasionnées par leur présence-. »
Les soldats approuvèrent les paroles de Bonus et le louèrent de
son courage, mais Greiff le cita devant le magistrat, le lendemain
26 décernbre, réclamant mille thalers de dommages-intérêts et la
peine de la prison contre lui. Bonus comparut; il ne nia rien, il
dit simplement que c'était l'indignation qui l'avait forcé à parler de
la sorte, que chaque jour il devait essuyer les larmes et les sup-
plications de ses coreligionnaires, qu'il ne nourrissait d'ailleurs
aucun mauvais sentiment à l'égard de Greiff et des membres du
Conseil.
Le magistrat renvoya le prononcé du jugement au 28 décembre
et le fit conduire préventivement dans la cage aux sorciers, pri-
son spéciale réservée aux sorciers condamnés à mort : on n'y pou-
vait tenir debout. Sa femme implora sa grâce auprès du colonel
de Hartenberg qui obtint un allégement de la peine ; on mit le
prévenu dans un autre cachot. Le 28, la sentence fut rendue, il
était condamné à mille francs d'amende, à six mois de prison dans
la tour appelée A?-/ubrusler Turin, pour avoir oiïensé non seule-
ment le sieui' Greill", mais tous les magistrats.
L'année 1634 vit encore deux nouveaux pères de famille admis à
s'établir à Ilaguonau, Lo [trcmicr, nommé Ilirtzol, avait demeuré
' Archives de llagacnuu, BL5. 70.
'■' Livre de protoc. ilu Conseil aux archives de IIuj{., BB. "U.
IKJ REVUE DES ETUDES JUIVES
jusqu'alors à Esclipacli, le second était le gendre de Majer ' . Peu
à peu la communauté s'accroissait, bientôt après Haguenau compta
une treizième famille israélite. Le docteur Ungar permit, en ef-
fet, à la veuve d'Isaac d'Ueberracli, de demeurer dans la ville pen-
dant un certain temps, parce qu'elle pouvait y rendre des ser-
vices par sa connaissance du français. Plus tard elle se maria et
demeura définitivement à Haguenau.
La ville semblait donc se départir de sa rigueur, mais aussi
augmentait les droits d'admission que devaient payer les Juifs. Jus-
qu'à la Révolution, ce fut cette méthode qui prévalut.
La guerre de Trente ans continuait à faire venir des troupes dans
la ville ; une garnison partie, une autre la remplaçait. Les Juifs
eurent de nouveau à loger des cavaliers, cette fois ils eurent le
courage de demander au magistrat, pour pouvoir supporter cette
nouvelle charge, la permission de vendre des chevaux les di-
manches et jours de fête. Cette autorisation leur fut accordée,
en tant que la relisrion n'en serait pas lésée -. Ils la conservèrent
pendant quatre-vingt ans, puis elle leur fut retirée.
Les hostilités continuant, les Juifs surchargés d^impôts décla-
rèrent qu'ils n'étaient plus en état de payer leurs droits de protec-
tion. La villo, étant elle-même devenue pauvre, ne put renoncer à
cette ressource et consentit à réduire ces droits de moitié. La ville
fut bientôt obligée même d'emprunter de l'argent à ses protégés ;
le médecin Haym reçut du Conseil des remerciements pour avoir
prêté vingt florins ^
En 1037^ nouveaux impôts, ils durent fournir le mobilier de la
Landvogtei.
Eu 1648, ayant oublié d'offrir aux autorités de la ville le cadeau
du jour de l'an qu'ils étaient accoutumés de faire, le Conseil les
rappela à leur devoir, leur déclarant que, faute de quoi, ils se-
raient déchus de leurs droits de protection. Ces cadeaux furent
plus tard convertis en un impôt si)écial.
Ici s'arrête l'histoire des Juifs de Plaguenau pendant la domina-
tion allemande ; il nous reste à faire connaître, pour cette période
la législation qui les régissait.
Elie Scheid.
{A suivre).
' Livre'dc'protoc.'du'Conseil aux archives de la ville. BB. "U.
» Archiv. do Hag., BB. 71.
* Livre de prol. des séances du Conseil. Archiv. de Ilag., BB. 71. 11 est même
ri marquablc que le Conseil appelle Haym l'honorable médecin Juif, dpithèle qui
u'avait pas peu de valeur.
HISTOIRE DES JUIFS DE HAGUENAU 1 1 1
PIÈGES JUSTIFICATIVES
N" 14. 1G26.
Jonas Jud, Simon Judens Solm hat ihme in Schùtz und Schirm
aùfzùnelimen imterthanig gebetten ; — Conc. — So ihm dargestell :
1 " Das er doch ]i:ein burgs haus kauffen ;
2'' Und bei Vater bleibe ;
3° 1 1 Reichsthaler Schirmgeld ;
4° Ein Mussquett in das Zeùghaùs liefern ;
5° Jahrs ^A Schilling Marzahl ;
6° Und fiir den jehrliche Umbgelt 4 Reichsthaler legen soll.
N° 15. 1628. 10 mars.
Wie es in der Kûnftig mit der allhiesigen Juden ihren Synagog
halber soll gehalten \vei"den. Nemblich und fur das erst, ist den Ju-
den so unter ersamenrathschutz und Schirm bestandig alhier wohnen
auf ihr viefeltig importuniren und nachlauffen, auch untherdenig,
innstendig und demutigs suppliciren und bitten, bis auf E. E. raths
andervertiger ordnùng und belieben allein aus gnaden und ganz dur-
chaus keiner Schuldigkeit, angeregte ihr allhier hahendte Synagog
zwor widerùmb jedoch solcher gestalt vergiïnstigt und zugelassen
worden, das sich derselben aile andre ausslandiche Juden bei pan
10 H. d. und doriber noch; weil si auf den Avidrigen fall, auch wider
ire Pflicht und aydt handeln werden, einer andern willkurliclien
StrafF, ganzlich und durchaus enthalten und bemiessigen sollen,
Fûrsander, so sollen sich die erstbemelten allhiesige juden, deren
jetzt verstandener masse die Synagog Aviderum zù besuchen erlaùbt,
sambt den ihrigen allen bei Vernichtung ihres vermeinten Gottes-
dienst sowohl in als ausserhalb der Synagog, auf uffentlicher Gassen,
mehrerer Bescheidenheit als bishero beschehen und im verelich vers-
lorl worden, beilassen, imsonderheit ihr gewonlicher Geschrey dar-
bei also moderiren auch im ûbrigen sich dermassen erbar erzeigen
und eingezogen vcrhalten, auf den Vorderrist e. e. rath zù anderwcr-
tigen Verordnùug oder gentziicher Abstelluug kein Anleitung nocli
weniger etwan der gemeine Burgerschaflt dardurcli ainiche Erge-
rens gegeben werden.
Drittens, gleich wie sie die Juden iren Sabath hoch heiligen, und
sich davon gern audercr wcltlichen geschefUcn und vorrichtungeu
bemiesigen; als sollen sic auch billich, au unscrn sonn und feierta-
gen, in das kunftig nit mer, wie bis her beschen, mit ihrem ergerli-
chen, ùnzùlessigen waithcû, sprengeu, und lumuhrcn aufgezogen
112 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
kommen sondern sich dasselben genzlich und durchaus enthalten
soUen, ailes wie ietzt verstanden, bel obig angesetzten und noch an-
deren e. e. raths erost : willkurlicher imausbleiblicher Straff sonders
geferde.
Und soll dies einera ersamen ralli intérims Venvilligung, so der-
selbe auf abverstandene Juden allhier innstendiges, demitiges anru-
fen und implorirea aus H. fir die liandt genommen, einem E. ralli
auch gemeiner Stat, weder jelzt, noch in das kunfiig, an allen und
jeden ihren habendle Régalien, privilegien, redite und gerechtigkeit,
insonderheit aber an dene freiheiten so sie in specie der juden halber,
schedlich oder nachtheilig sein.
Hierauf sich die juden des H. ertheilte Decreti untertenig, demutig,
bedwiligt mit dem anerbieten das sie sich auf aile und jede obige
puncte gehorsamlich bequemen wollen. — Allein belen Sie E. E. rath
nochmalen ganz undertenig ihne das puncte der fremdte halber die
fernere Gnad zu erzeigen, damit doch sie dieselbe auf begebendte ge-
legenheit auch in ir Synagog einlassen dorfeu. —
Ist ihnen Categorisch abgeschlagen und durcli H" D'" Kônig reg.
Stettem. erst noche in guten Ausswichenes derzù geben worden.
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZIANI
POÈTE HÉBREU DU XVIF SIÈCLE
Le rabbin Abraham Joseph Salomon Graziani n'a laissé aucune
œuvre imprimée, et cependant deux siècles après sa. mort son
souvenir est encore très vivant chez les Israélites de Modène. C'est
qu'il a été non seulement un rabbin distingué, versé dans la théo-
logie, mais aussi un poète aimé du peuple ; il a composé des
pièces de vers pour toutes les circonstances de la vie : l'êtes,
naissances, mariages, enterrements. Elles sont contenues dans
un manuscrit hébreu que nous avons eu la bonne fortune de dé-
couvrir ' .
Ce manuscrit d'ailleurs n'est pas seulement intéressant pour
l'histoire de Graziani et de la littérature juive, il est rempli de
renseignements sur les contemporains du rabbin italien.
Disons d'abord quelques mots de l'auteur. Graziani naquit à
Pésaro, ville soumise alors aux ducs d'Urbin. Son père-, nommé
Mardochée, s'était établi dans cette ville, mais était probablement
originaire de Gallico. La famille des Graziani parait avoir porté
primitivement le nom de cette ville. Ainsi dans les mémoires 'des
fossoyeurs juifs du temps, en parlant d'elle, on se sert de l'expres-
sion "'p-^bN^n nnD'i?a « famille originaire de Gallico ». Mon savant
ami, M. Marc Mortara, grand rabbin de Mantoue, a trouvé dans
les notes manuscrites de Graziani au Schoulhan Arouhh les mots
• Je ilois la découverte de ce ms. à M. le D' Laudadio Modéna, lils du savant
grand rabbin David Zécut Modéna, qui a la bonté do me communiquer tout ce
qui peut intéresser l'histoire des rabbins qui se sont succédé sur le si^ge de Mo-
dène. Je saisis cette occasion pour lui exprimer publiquement ma vive gratitude.
* Il est mort à Pésaro à l'àf^e de Ht) ans, le mardi, G Kislev 5'(04 (7 novembre 1643).
On lui lit des funérailles maf^niliques, ce qui semblerait indiquer qu'il fut un homme
considéré ou un savant. A ses obsèques, le rabbin Sabadai Uaphaél Mondolfo et le
rabbin Samuel Corkos prononcèrent des discours.
T. IV. 8
114 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
suivants : « Je nie souviens qu'il m'a été dit par le pieux et intel-
ligent Ouzriel Graziano, fils du savant cabbaliste, Johanan, fils de
Tobie Galllco, appelé communément Graziano en langue ita-
lienne ' ». Gallico était donc probablement le nom de famille et
Graziano un surnom donné à Tobie, qui passa ensuite à ses des-
cendants et supplanta même plus tard le nom de Gallico. En effet
dans les quelques mémoires de cette famille que nous possédons,
lorsqu'on parle d'une femme, on ne l'appelle pas Graziani ou
Graziano, mais Graziana, comme si c'était un adjectif ajouté
au nom. La mère de notre poète-. Patience, était fille du rabbin
Samuel Mondolfo.
Le jeune Graziani quitta de bonne heure sa ville natale, pour
venir à Modène chez le grand rabbin Nataniel Trabot^ La famille
Trabot, d'origine française, avait quitté la ville d'Ascoli, où ce Na-
taniel était né, et s'était établie à Pésaro. Elle avait une parenté
avec les Graziani ; ainsi s'explique peut-être pourquoi Abraham
vint à Modène auprès de Trabot. Peut-être aussi n'était-il attiré
dans cette ville que parla science du maître *.
C'est sans doute parce qu'il n'était qu'un étranger à Modène,
que Graziani avait adopté la signature suivante : id2N n:* ^■'N
yiNa. « Je suis un étranger dans le pays ». En même temps ces
mots rappelaient son nom : ^in renferme en effet les initiales de
M52bu3 tpr^ ûmI^m « Abraham Joseph Salomon », et les trois der-
niers mots son nom « Graziani ». Tous les livres qui lui ont ap-
partenu portent cette légende ; on la trouve encore à la première
page de quelques Bibles manuscrites des bibliothèques de Modène
et de Parme, ce qui prouve qu'elles lui ont appartenu. Encore
aujourd'hui les Juifs de Modène ne donnent à Graziani que le nom
de Isch Ger. Mais on ne comprend pas cette sorte d'ostentation à
^E3 î-!ji:27:r; b"i:T ip-^bN^ rr^m:: -i"7033 lanr n"rî-?:5 n-'\r)3>?3 i-ibnp hvz
'■' Après la mort de son époux, elle viut demeurer avec sou (ils Abraham et mourut
à Modène, le samedi 1" Adar II 3423.
' Ce Trabot, né à Ascoli en Îj329 (1Î3G9), mourut à Modène, âgé de 8!} ans, le pre-
mier jour do Hoscb-IIascbana îJ'il'i (22 décembre lOSil) au moment où les fidèles
réunis dans le temple chantaient la Kedouscha do Moussaf. Ces renseignements nous
sont fournis par Graziani dans les quelques pafjes de mémoires sur sa famille, qui
précèdent le recueil de ses poésies.
'' D'une pièce du recueil (u" 53], il semble que Graziani, avant de venir à Modène,
était allé à Home, où il perdit sa première femme. Nous ne savons rien d'autre de
celle-ci, sinon qu'elle s'appelait Intl^JU) et qu'elle était bonne, intolligculc et pieuse.
La femme qu'il épousa plus tard et dont il eut plusieurs enfants, était Saro Bella Pisa,
qui mourut peu de jours après lui, le 29 kislev ÎJi'iiJ (l()8i). Elle était fdle du rabbin
Samuel Pisa, établi dans le village de Vignole, qui mourut à Modène, le 'J Tischri
ll'ilUj ('i oclobre 16CÎ)(.
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZIAM II.",
s'intituler étranger dans un pays qui l'avait accueilli. En voici
peut-être les raisons. Nataniel Trabot, dans son testament que
possède M. Mortara, avait recommandé aux chefs de la commu-
nauté de Modène de choisir Graziani pour le remplacer, en qualité
de rabbin. Néanmoins, à la mort de Trabot, la communauté élit
Nahman Ben Nahman, rabbin de Ferrare ', parce qu'il était mo-
dénais. Peut-être Graziani, mécontent, se vengea-t-il en prenant
pour signature les mots « Je suis un étranger dans le pays »,
comme pour rappeler à ses concitoyens l'injure qu'ils lui avaient
faite.
Jusqu'à ce jour, on ne connaissait de Graziani que les œuvres
suivantes :
1° Une élégie pour la mort du rabbin Aaron Benoit Modéna
(•27 Tammouz 5399) ;
2° Une autre élégie plus étendue en l'honneur du même rabbin,
récitée le septième jour après son décès. Ces deux pièces ont été
imprimées en tête de l'ouvrage pin-^ nn:^'^ d'Aaron Benoit Mo-
déna, dans l'édition faite à Amsterdam par les frères Profess
en 1732;
3" Plusieurs décisions théologiques, insérées dans le Afar Ja-
hoh, de Nataniel Segré. Quelques-unes de ces décisions sont
mentionnées par Isaac Lampronti dans son Paliad Ishaii ;
4° Un commentaire sur tout le Soulliaa AroKJîh, cité par Is-
mael Coen, dans son Zera Emet. Cet ouvrage manuscrit est en
la possession de mon cher ami, le chevalier Mortara, grand
rabbin de Mantoue-.
Sur la vie de Graziani, nous ne connaissons presque rien, sauf
qu'il a rempli les fonctions de grand rabbin à Modène.
Il mourut le samedi 27 Ileswan 5444 (1664). Ses funérailles furent
faites en grande pompe, et, dans toutes les communautés voisines,
on célébra des offices funèbres en son honneur. On peut encore
voir ('ans le 'j-'»^:a bnin:; le discours prononcé par Benjamin Coen
dans un des temples de Reggio Emilia.
Il semble que Graziani aurait montré une certaine largeur de
vue dans la manière d'interpréter les usages religieux, car il excita
' Nous tenons pour certain que Nahman fut le successeur immédiat de Trabot. Eu
ciFet, dans la liste des rabbins qui prêchent ù la Société 'Q'^T^V "^i'^lp (l'ondée par
Trabot, le 6 Kislev Îi399 =^ 1G38) à l'anniversaire de sa fondation, figurent d'abord
Trabot, puis Nahman et à la suite Graziani. De plus, ce dernier a composé une éléf;ie
sur la mort de Nahman, ce qui indique qu'il le considérait comme son supérieur.
Enfin dans le préambule de cette poésie, il dit de lui Î1"1T>IÎ wN"',^ Dwl"' ' il sié-
geait le premier parmi les rabbins ».
î 11 a pour litre t]DT^ tiTran n-i"ni7a3 iiNsrT>: y'vi'n by coiT^m mn^^r:
116 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
le mécontentement des rabbins sévères de ce temps. Voici ce que
nous apprend Nataniel Halévi, fils du successeur de Graziani au
rabbinat de Modène :
« A Modène, ma ville natale, les portes du glietto étaient comme
celles du vôtre, sauf qu'au lieu d'être en bois le toit en était en
pierre. Pendant tout le temps que vécut Abraham Graziani, qui
était le chef religieux de cette ville, les rabbins murmurèrent,
mais les choses restèrent en l'état. Le jour de sa mort, qui eut
lieu le samedi de la péricope rrra ■^■Ti de l'an 1690, les Cohanim
vinrent consulter mon père (Meschoullam Halévi), qui leur défendit
de sortir du ghetto ' .
Il permettait également l'emploi de l'orgue dans les sj-nagogues,
hardiesse étonnante pour l'époque. C'est ce qui ressort du passage
suivant tiré de son ms. [Orah Haïm, 560 § 3].
Nn?::3 l-^s-i:?3 iw 'd i-^::-,;'^ "jro-.s '^'z^ -P'^ -^birn "[rirb Nb-:; -nTr, -j::-,
■^:î": ix-j'y^r^ Nbn-j ■'■'nN n-rj^ oib-n-ir: •^in.'n ":;ip7:3 oib-inr; r!3?3 n-'n Nb
N-.r;":: ';r:;N-,- Nbn-j l^-.v^ ']T^:?r! nn'r; '-^st i-iM-^i'^rr nx nm^MT :iy nbnpuî
'•^n-iTvrrrrro sinb iw"-^ ^":~ ^l^'^i '^cn ^'"z ^-^^;^^;3 y-'-^v T"rbm3NJ-nNir;
T^c '^-inni 'nb D"'-^"^^^î■«:; r-nn-im m-puîa i:N:i-nN -^bm 'u^T^i.ri D-'m'-"'
î-^b tir;\-np-ina-i piOD br -,i2rb iWvU "jnd T^ib ']-^-'\:j Nb p f'ûi:? ûni
r::;*;b '•^•2 a^mc?: in 'w^c -i^":; ■'brD in^n r;n'^ y^r^h p s: p^bi : iDbn
l-iwbm T"rb3 i:N:i-ns nrix V"''P^ nn^Tw?: mbip"^ mn û"'N'^n'^\:; û-'Spi^
'-\-npir;m Dr»:;:^ rsT b:? !r;ni!^p N-n?: ûr:: ^-l^s'-l Nb n315-i"'5 Nbn-j û-'Ksn
a^n-irt^n p Nbi a-^:r:;j<'^rT p ^b pciD aie \-iNi:-'2 Nb a:o ,nabn Nb
prb psu; a-^-":!.^ acsi r^i^ç^:-.:: arn "jt:- V- ^"'"^ ^^~ ^"^ laiNO
;'5"3r! ^ban
Analysons maintenant le manuscrit qui fait l'objet de ces notes.
C'est un volume de 190 pages, dont les 14 premières contiennent
des mémoires de famille et quelques notes tirés du livre des an-
ciens fossoyeurs de Modène. Le reste du ms. renferme cinquante-
quatre pièces de poésie de Graziani -.
Ce recueil fut commencé par l'auteur lui-même, car les vingt-
deux premières pages sont écrites de sa main. A certains endroits,
la marge est chargée de notes, de corrections et «le commentaires.
De temps en temps on rencontre des pages en blanc, ce qui sem-
blerait indiquer que le copiste savait qu'il existait d'autres pièces
qu'il n'avait pas, et dont la place chronologique était en cet endroit.
C'est ainsi qu'on comprend que ce recueil ne contienne pas d'élé-
gies pour la mort de Trabot, son maître et son oncle.
' Pahad Itzhak, 11, «. v. '^T^^ nNTûl^-
» La plupart de CCS pièces rcnlermenl les mots VINS "^DjN "*.' "ÙÎ"'N-
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZIANI 117
Plusieurs de ces pièces sont précédées d'une courte introduction
qui apprend les circonstances dans lesquelles elles furent com-
posées. Pour d'autres, on a laissé un blanc qui devait recevoir
cette notice.
Voici la liste des poésies contenues dans le manuscrit :
4 . Hymne à chanter dans la veillée du Hoschana Rabba (Tischri 5421
= 1660 de l'ère chrétienne).
2. Hymne chantée dans un des temples de Reggio Emilia, le lo Ab
5422 (1662), à propos d'un don, fait au temple par le rabbin
Israël Lenghi, d'un nouveau livre de la loi '.
3. Elégie pour la mort du rabbin Halléluia Ouzriel Modène (îDSrir;
n"725 nr.iz'r» in V'iitî iiî-i'iiT: bN-i-ivr i-î^ibbrr irt"m^:3 lia^i tbcr;
3>"D r-i-Cl2 Sbrr) 23 Sivan 5422 (12 juin 1662).
4. Fragment (3 strophes) d'une élégie en langue chaldaïque, pour lu
mort d'un savant et pieux rabbin. Le préambule ordinaire
manque, de sorte qu'on ne saurait dire avec certitude quel
était ce rabbin. Cependant on peut conjecturer que cette élégie
fut composée pour les funérailles du rabbin Méir Barzilaï de
Saffet [Terre Sainte), décédé à Modène le 23 Tébet5424^
Voici sur quoi se fonde cette conjecture : Le refrain de l'é-
légie, que l'on devait répéter à toutes les strophes, renferme le
nom de 3Iéir écrit en grands caractères :
« Chef dans l'office divin, chef de la Communauté religieuse,
» premier parmi son peuple et son guide, Méir, qui éclairait^
y> les intelligences par ses décisions; un des puissants de la
» terre et une de ses lumières ». Ensuite on voit que le rabbin
en honneur duquel cette élégie a été composée mourut dans le
mois de Tébet.
NpT:> ■'Ni-îb û-i-i:! i!-!\\ "ib N-isinb Nri'-i'' jniti ''
' Une note placée au bas de la page nous apprend que celte poésie fut imprimée à
Mantoue en 5427 (1GG7), aux frais d'Israël Lenghi. Ce rabbin était un homme très
considéré. L'auteur du bNITOlU ^13*7 lui adresse quelques consultations casuisti-
ques (V., § 270 et 270). Moïse Zéchut correspondait avec lui dans des termes qui
marquent l'estime et lallection qu'il avait pour l\ii (Y. T^O^ltl m"l5N, 14, lli, 16,
17). On voit par ces lettres qu'il s'occupait beaucoup do Kabbale, Lenghi a composé
lui-même deux volumes appelés "ib^Dil '^"il sur la première partie du "jnbw
'11TS'; ils se trouvent manuscrits à la bibliothèque Foa do Ueggio.
* Cité avec éloges par l'auteur du Û"^72bU5!l tl^T, ainsi que l'a signalé Azulaï dans
son Û'^bTl^ïl d\23. (Première partie, lot. mem, art. 8j.
' Le nom de Méir, qui vient de la racine ^"IN, sij^uiiic < qui éclaire •.
118 REVL'E DES ÉTL'DES JUIVES
« Tébet ' mois de fâcJieux souvenir, c'est lui qui nous cause au-
jourd'hui ce deuil. »
Or, Méir Barzilaï fut enseveli le 23 Tébet 5424, comme il ré-
sulte des mémoires des fossoyeurs.
• o. Elégie en honneur du grand rabbin Nabman-Nahman ^ 1' "jT^rij)
(V-Hï, qui mourut à Modène, le 12 Sclievat 3226.
6. Poésie pour le mariage de Hephtzia (iT^iisn) Lévi, et d'Esther
Fano, célébré le 14 de Tiscbri 5427 (13 octobre 1666).
7. Hymne chantée dans le temple Israélite des Espagnols, à Modène,
à l'occasion d'un don, fait au temple par Mordechaï fils de David
Fano, d'un nouveau livre de la loi (Ilesvan 5427).
8. Ode, à l'occasion du mariage de Pèlerin, fils d'Elie Formiggini
et de Juliette, fille de Léon Orsino, célébré le 7 Hesvan 5427.
!>. Ode pour le mariage d'Abadia, fils de Raphaël Rovigo et de Né-
hama, fille de Moïse Seppilli d'Ancône.
■10. Sonnet pour célébrer le mariage de Samson Finzi de Gorreggio
avec Sarah, fille d'Abraham Calabresi, 8 Adar 5427 (3 mars
1667).
1 1 . Poésie en l'honneur d'une nouvelle cabane sacrée (HSID), 1 i Tis-
chri5428 (Octobre 1667).
12. Elégie pour les funérailles du rabbin Joseph-Benoit-Zalmann de
Ferrare (23 Adar 5429).
[Ici une page Manche dans le ms).
13. Poésie pour le mariage d'Elie, fils du rabbin Isaac Benoit Modéna,
avec Sarah, fille de Moïse Fermo d'Ancône, célébré le 14 Tischri
5430 = (9 octobre 1669).
14. Poésie pour le mariage de Saiil, fils de Samuel Formiggini de Fi-
nale, avec AUégrine, fille du rabbin Samuel Piazza, de Florence,
célébré le 14 Tischri 5432.
15. Hymne pour un nouveau livre de la loi donné à un des temples
israélites de Modène (26 du premier Adar 5432) ^
16. Elégie pour la cérémonie funèbre, célébréodanslepremiertemple
de la communauté, eu l'honneur des rabbins, INIaorSarga Aske-
nasi (n-^ON Nroo -iiNW) ; Benjamin Ilalévi ('i'^tt'^22 "Ti"m)2D
\::^p!-! ^mp^n -^nbr: ) ; Abraham Guedilia (rr^b-'T^:* ûïrnnN) de
Jérusalem; Joseph Ravennc (NS-^iiN-i C]DT^), grand rabbin à
' Le mois (le 'l'ébcl est un mois néfaste dans l'histoiro des Juifs.
* Le ral)l)in Niiliman Naliman, pèro du rabbin Samson Naiiman, auteur des deux
œuvres "["i^Tj'ii; i'IT et "[TC^O nibin, succéda probablement aussitôt à Natanicl
Trabot sur le siège do Modl-ne. Il mourut soudainement.
' Une note placée au bas de cette bymnc dit sans auciino autre indication qu'elle
fut imprimée à Manloue, le deuxième mois d'Adar de la m^-me année.
ABRAHAM JUSEPH SALOMON GRAZIAM 110
Alexandrie de la Paille' et Salvador Fermo' (itt-i^D r>rir;-^),
grand rabbin à Ancône (21 lar 5432 =22 mai 1672).
17. Vers pour une circoncision linb-'^: rr^-i^). On devait les placer
sur le grand fauteuil (lir^bx ï^o:^). (Année 5432 = 28 septem-
bre 1672).
Ces vers, tous allégoriques, étaient bien difficiles à com-
prendre, et l'auteur même en a donné l'explication au bas de
la page.
18. Poésie pour le mariage de Joseph Eliézer, fils d'Elie Formig-
gini, et de Claire, fille de Michel Zemah de Vérone (8 Kislev
5435}.
19. H^-mne pour rinauguration d'un temple à Modène, fondé grâce
à la générosité d'Elie feu Pèlerin Formiggini ^ Cette inaugu-
ration eut lieu le 1^'" Nissan 5435.
20. Poésie pour le mariage du rabbin Samuel Sonino, et d'Eve, fille
d'Elie Formiggini, célébré le 1 1 Sivan 5437.
21. Poésie pour le mariage de Salomon Salvador Arezzo, et d'Esmé-
ralde Graziani. Elle était nièce du poète , étant fille de son
frère Emmanuel.
22. Hj^mne à l'occasion du don d'un livre de la loi à un des temples de
la Communauté.
Dans le manuscrit on a laissé en blanc un espace pour le
préambule ordinaire.
23. Poésie en l'honneur de la fête de Pourim.
24. Hymne à chanter dans la veillée du Iloschana Rabba par les con-
frères de la société religieuse, dite des ^p3b û"'"i?3"i^ de Mo-
dène. Cette hymne a été achevée le 4 Tischri 5423.
25. Vers en honneur du rabbin Benjamin Coen d'Alexandrie, grand
rabbin de Reggio Emilia, lorsqu'il fut appelé par le sort à
officier le samedi de rr^UîN-in. Ces vers furent écrits en Tis-
chri 5443 '\
' Savant casuiste et écrivain élégant. Nous avons de lui une prière pour les temps
de guerre, imprimée après sa mort à Mantoue en 1701 ; une dissertation sur le
morceau chaldéen "{^b"^^ mWTpN insérée dans le 3pi"^ "iSS' ; un avis sur les cas
de ?T73, inséré dans le même recueil, autre avis sur le rituel mentionné par le "^Isia
t|5"l"^, vol. Û'^'^n rmN j^ 538 1, 12. Ravenne est surtout connu par ses controverses
avec Néhémie Ilyun imprimées dans le "nb ïlWnbw.
* On connaît de lui un avis riluélique, inséré dans les TW"1m r\"'\'Ci (n" 27] et un
autre dans le 3p^'^ "l^î'. h semlde qu'il ait été aussi disciple de Trabot.
' Ce temple, qui a toujours porté le nom de son fondateur, est resté ouvert jusqu'à
l'inauguration du nouveau temple, en décembre 1873.
* C'est celui qui, deux ans après, a prononcé un magnifique discours aux funéraiHes
du rabbin Graziani, disciple du célèbre Moïse Zéchut. Benjamin Cocn était un des
rabbins les plus distingués de l'Italie en ce siècle, non seulement pour sa piété sin-
1-20 UEVI E DES ÉTUDES JUIVES
A partir d'ici se trouvent 35 pages laissées en blanc. Les
poésies qui viennent ensuite sont antérieures, de jîlusieurs an-
nées, à celles^gui ont été mentionnées aux n°s 23, 24 et 23. Aussi
on pourrait presque affirmer avec sûreté que les vers écrits en
honneur de Benjamin Coen furent les derniers que l'auteur
ait composés. Après ces vers on trouve dans le manuscrit
des lignes écrites et rayées, ensuite des mots qu'on lit avec
peine sous la rature. Il semble que l'auteur aurait été trou-
blé par des pensées mélancoliques. On y lit par exemple
« T^rob ^:û172 nnM'iJ "^tt » (« celui qui à son mort étendu devant
les yeux ») « ^rii^n mîj'^ "^a ûnx » (« Vhomme lorsqu'il meurt
sous la fatigue de ses études religieuses ») pensées qui nous
donnent l'idée qu'il eut presque le pressentiment de sa mort
prochaine.
26. Vers écrits pour engager ses concitoyens à avoir pitié d'un mal-
heureux, Jacob Polak, surnommé Cantarini, jadis officiant pu-
blic (mn^ rr'bï^j à Prague.
{Le i^réanihule ordinaire manque).
21. Autres vers sur le même sujet et pour la même personne.
[Le préamhile manque aussi).
28. Vers qu'on devait placarder dans la Soucca (ïilsno), écrits le jour
qui précédait la fête des Cabanes de l'an 3422.
cère, mais aussi pour sa vaste et profonde science. Né à Alexandrie de la Paille
d'une famille aisée, il fut élu, très jeune encore, comme rabbin de la ville de Casale,
et depuis, pour ses talents, appelé au siège rabbinique de Reggio Emilia, très im-
portant alors. Ses rapports affectueux avec le célèbre auteur du ^"n;* !nn2n na-
quirent de là. Moïse Zccbut, avant de se fixer délinitivement à Venise, avait de-
meuré quelque temps à Manloue. A cette époque, la ville de Casale était sous la
domination des Gonzague, ducs de Mantoue, de sorte qu'il y avait entre ces deux
villes des rapports continuels. Les Casalais devaient aller iréquemmeut pour leurs
intérêts à la capitale du ducbé. L'affection du tbéologien hollandais pour le jeune
et spirituel Benjamin Coen était comme celle d'un père pour son fils. Dans ses
lettres, eu elfel, il l'appelle toujours ib l'^p'' )'2 • ^'lon fils chéri > et il ne pouvait
rester longtemps sans le voir. Aussi Tappelait-il auprès de lui de temps en temps,
d'abord à Mantoue, puis à Venise oîi il s'était fixé. Avec le jeune Coen, le rabbin
Zéchut voyait chez lui un autre jeune homme, le rabbin Abraham Rovigo de Mo-
dène. Ces deux jeunes gens restaient auprès du savant hollandais des semaines,
et quelquefois des mois entiers, adonnés à l'étude. De Benjamin Coen nous con-
naissons les œuvres suivantes : L T^T^Til PS', poésies sacrées, d'une rare beauté,
pour chacun des jours de la semaine, pour les Néoménies {"CTn "CHl] et pour
toutes les autres fêtes des Israélites, — IL 'j"^73"*33 bl35, recueil de sermons. —
III. n~3 IiVNi commentaire sur les lamentations de Jérémie. — IV. û'ïli' P1DN.
commentaire sur le traité iVAhôt. — A'. Des notes sur le D'^T! imN^IP- — VI.
Des lettres scientiliques insérées dans les "^Jj^iT, ^\^\'^:^ii et des avis eu matière de
rituel, épars dans le pn^"^ ins et dans le 'Q'nb'r, '^r\'C. Enfin, outre ces travaux,
tous imprimés, on a de lui en manuscrits à la bibliullièquc Foa de Reggio Emilia,
le Ï~ID13 "^JOuiji et le f>"i;'TI3 "^nPD. Benjamin Coen a eu des disciples distin-
gués parmi lesquels: Isaïc Israël Bassano, qui épousa une de ses llUcs et lui succéda
après sa mort comme rabbin de Reggio ; Meuassé .lehossua Padova devenu lu
aussi son gendre et nommé grand rabbin de Modène et le célèbre rabbin Irgaz de
Livourne.
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZIAM 121
Le préambule porte ces mots : « Poésie pour mettre dans
la SoMca. Je Vai composée dans ma jeunesse en 3422. » Ces
mots sont faits pour nous surprendre. En effet nous avons
déià dit qu'on connaissait de Graziani deux elegies, une
écrite pour la mort, et l'autre pour les funérailles du Rab-
bin Aaron Benoit Modéna , insérées toutes deux dans les
premières pages du Mahavar Jahok avec la signature crr-.aN
nn-bT i:N^i:Nn: ^Dn^^2 n?3"D3 et non Y'^^'2 ■^sîn ^^ û^n. Or, com-
ment celui qui, en 5399, avait composé ces élégies, pouvait-il
dire que les vers dont nous parlons, écrits 23 ans après, étaient
un travail de sa jeunesse ? Doit-on dire que ces vers écrits
pour Soucca ne soient pas du rabbin Graziani, bien qu'ils se
trouvent dans un recueil commencé par lui-même ? Ou faut-il
supposer qu'on aurait attribué à Graziani les deux élégies du
Mahavar Jahok et qu'elles ne seraient pas de lui? De 1639,
année de la mort de R. Aaron Benoit Modéna, a l'an 1/32 ou
le Mahavar Jabok fut imprimé, presque un siècle s'était passe.
Aucun de ceux qui avaient assisté aux funérailles du célèbre
cabbaliste n'était encore vivant pour témoigner de la vente.
Il est vrai que les lettres initiales des strophes de la pre-
mière élégie donnent le nom de D^in^N et que la deuxième
porte "^3^ ir^ nrib iv?:> ûnnN, mais il faut remarquer, pre-
mièrement, que les deux compositions insérées dans le Ma-
havar Jaioh portent la simple signature de -i"WD p dnnnN
i;&î^:iNn.n -^^nn^, ce qui prouve que la signature n a pas ete
mise par Graziani lui-même, car lors même qu'il ne signai
pas avec sa légende ordinaire V^^n --N ns "Cî^N, il signait
avec ses trois nom^, AMaham, Joseph, Salomou ; deuxième-
ment, que dans le préambule qui se trouve dans le 3faharar
Jabok avant ces deux élégies, on dit que Graziani était alors
grand rabbin de la Communauté \ Or, ce fait est mexact, cai
îe grand rabbin de la Communauté était alors Nataniel Irabot,
décédé 15 ans après, ainsi que nous l'avons déjà dit ; troisiè-
mement, que dans la petite introduction qui précède ces deux
compositions, l'auteur après avoir parlé des hauts mentes du
défunt dit : -nsn7:72 "^rNi^ p br, expression qui senible dé-
noter un haut fonctionnaire qui pour la gravité du cas descend
de sa dignité et non un jeune homme obscur, ce que Graziani
était alors ; enfin, que, dans le recueil des poésies du rabbin
Graziani, on ne trouve ni l'une ni l'autre des deux elegies in-
sérées dans le Mahavar Jal/ok.
1 Voici les termes de ce préambule:
^^i2yr, nni^nrTb b"pi^T nr^n^ûrr nnrt 'yi2 ^n^^n ;=^^^^^;'^ JL^^^J.^^"^ .
122 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
29. Poésie pour le mariage de Joseph Miram de Vignole, avec
Ester Forli de Sermide. (Il n'y a pas d'autres indications}.
30. Sonnet pour un autre mariage. (Le préambule manque, nous
• ne connaissons donc pas les noms des époux ni le jour du ma-
riage).
31. Poésie pour le mariage de Mordecliaï Sanguinetti, et Bersabée,
fille d'Azaria Benoit Modéna (Sans autre indication).
32. Sonnet pour le mariage du rabbin Mordecliaï Rovigo, fils du
rabbin Isaac Rovigo, fils d'Abraham, avec Anne Grâce, fille
de Salomon Lévi de Florence. (Le jour de la célébration
manque).
33. Ode, pour le même mariage.
34. Poésie pour le mariage de Salvador (:'^Tr;"') fils d'Elie ïitio, orfè-
vre fils de Ménahem, orfèvre d'Ascoli de Pésaro*, avec Elisévah
(•♦lawVtî), fille du rabbin Isaac Benoit Modéna, célébré le ven-
dredi. .. (?)
33. Vers qu'on devait placarder dans l'école supérieure d'instruc-
tion religieuse ('û"i'773!-î n-^n), afin d'exciter les élèves à étudier
avec ardeur.
36. Vers qu'on devait chanter au temple avant le Kadisch qui précède
le ■i5"ia des prières du samedi.
Ces vers furent composés parce qu'un des amis du poète
fonctionnait comme prieur le samedi de n'''"«255<"ia.
37. Epigramme contre quelqu'un qui, devant signer au bas d'un
acte public devant le tribunal civil, avait signé, Monsieur tel
des tels.
38. Enigme à coller sur la tète du veau qu'on avait l'habitude alors
de placer tout entière sur la table, dans tous les grands
repas.
39. Vers à afficher dans une nouvelle cabane sacrée (Tisehri 5428).
40. Vers pour engager les riches à secourir les pauvres.
41. Ode, à propos des fiançailles de Moïse Crispino, fils de Léon
de Livourne , avec Rebecca , fille du médecin Silva de Ve-
nise.
' Celle indicalion est un peu o!)SCure. Après les noms de l'époux, de son i)ère el
de l'aïeul, se Irouve le mol C]"]"!^ qui signifie orfèvre, mais qui pourrait être aussi le
nom de famille, car il y a encore aujourd'hui à Florence, à Padoue cl ailleurs, des
familles qui portent le nom iVOréficc Cependant les noms des deux villes Ascoli et
Pesaro que nous trouvons mis l'un après l'aulrc, nous n décidé à traduire t]"ni£
comme un qualilicalif de leur profession, oL à leur donner le nom de famille Ascoli,
quoiqu'il se puisse qu'à l'origine ils aient eu le prénom d'Ascoli, et qu'ensuite on
les ait nommés Oréfià^ ù cause de leur état.
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZIANI 123
42. Ode pour un mariage.
Le préambule ordinaire manque el par conséquent les noms
des époux aussi. Cependant les jeux de mots qu'on trouve
dans cette pièce , comme dans presque toutes les poésies
joyeuses de notre auteur, paraissent montrer que le nom
de l'époux était Samuel Sanguinetti, et celui de l'épouse Ber-
sabée Zalmann.
43. Sonnet pour un mariage.
Même lacune et mêmes jeux de mots, dont on peut tirer les
noms Moïse Orsiuo, et Bonne Anne, fille d'Israël Cividali.
44. Ode, pour un mariage.
Mêmes observations. Les noms qu'on peut tirer des jeux de
mots, sont Samuel de Bondy Sanguinetti, et Marianne d'Azaria
Modéna.
4o. Autre version, très ditïérenle, des vers que nous avons cités au
numéro 27. Il est dit dans le préambule que ces vers furent
composés pour la fête de Pâque.
[Ici 50 pages laissées en blanc).
46. Elégie en langue clialdaïque.
Le préambule ordinaire manque. En conséquence, il n'y a pas
le nom de la personne en lionneur de qui elle a été composée.
Cependant par l'ensemble de cette poésie, on peut affirmer
avec toute sûreté qu'elle a été écrite pour la mort de l'aïeule
du poète nommée Fortunée {"yrù bf?:), veuve du rabbin Samuel
Mondolfo.
47. Autre élégie en vers bébreux.
Le préambule ordinaire manque. De l'ensemble de la poésie
il parait résulter qu'elle a été composée en l'honneur de Mor-
decliaï Abner Gallico, mort à l'âge de 86 ans et enseveli le
6 Kislev 5404.
Cette élégie a la forme d'un petit poème dramatique. Un
étranger arrive dans une ville où il voit avec étonnement par-
tout l'empreinte du deuil et de la douleur la plus profonde. Il
en demande la cause. On lui répond que le pays vient de per-
dre son guide spirituel, son père bien aimé. L'étranger s'as-
socie au deuil du pays. Pendant ce temps le convoi funèbre
arrive entouré et suivi de tout le peuple. Il remarque la fa-
mille du défunt plongée dans la plus grande consternation.
Des voix s'élèvent, qui célèbrent les vertus du mort, et tout le
peuple pleure.
48. Elégie pour son frère chéri, Aaron Graziani, mort à l'âge de
22 ans, dans le village de Cortcmaggiorc, le 20 Ab oiOS ' et cn-
' 8 août IC'iH*
124 ' REVUE DES ÉTUDES JUIVES
seveli à Busseto, dans le duché de Parme. Cette poésie, dictée
par raffection la plus tendre, est un des plus beaux morceaux
de l'auteur.
49. Elégie en honneur d'un rabbin appelé Léon (i-i"^"iN îTnr;"'), mort à
l'âge de 63 ans, le 11 Tébet S408.
Le préambule manque encore, et on doit chercher le nom du
personnage pour lequel cette poésie fut composée, ainsi que le
jour de sa mort dans la composition elle-même. J'ai supposé un
moment que ce Léon (ii'^'nN ïTii^T') pouvait être le célèbre
Léon de Modèue (N;"'m;2?2 -"'"iN !-Tnr;"i), décédé lui aussi dans
l'hiver de l'année 5408, sans que personne ait su jusqu'ici en
préciser le mois, ni le jour. Cependant après réflexion, j'ai dû
renoncer à cette hypothèse. Voici pourquoi : Dans un "mNW
£■':■';', manuscrit à la Bibliothèque de Parme, il y a une note
écrite de la main même de Léon de Modène * dans laquelle il dit
qu'alors (à la fin du mois de Schevat 5408), il se trouvait réduit
presque à la fin de sa vie par la maladie qui l'accablait. Or le
rabbin dont il est question dans cette élégie mourut le 1 1 Tébet.
En deuxième lieu, Léon de Modène mourut à l'âge de 77 ans,
tandis que le rabbin de l'élégie avait 63 ans à sa mort. Nous
croyons donc qu'ici il s'agit d'un autre rabbin du nom de
Léon (ï~ii"iN rrnïT'), le rabbin Léon Pogetti ouPhujetli (^ïtim"^
"ia"'"'nD in-^-iN) un de ceux qui siégeaient dans le Bet-Din du
grand rabbin Trabot, et que nous voyons figurer parmi les
juges, dans la grande discussion qui eut lieu entre le rabbin
Aaron Benoit Modèna et le rabbin Joseph Ididia Carmi, au sujet
des chants de la Synagogue ou des Pioutim -. Si cette élégie
avait été faite pour celui que nous venons de nommer, elle nous
rendrait deux services : -1° Elle nous montrerait que cet hom-
me n'était pas un rabbin vulgaire, mais un savant bien dis-
tingue ; 2" Elle nous donnerait le jour exact de sa mort que
nous ne trouvons pas dans les mémoires des fossoyeurs du
temps \
' De Wossi, Dictionnaire des auteurs Juifs. Vol. 2, :\x\..Lcone di Modena. — Rej^gio.
Introduction à son Examen 2'radilionis Duo inedita et poene incof/nita Leonts
Mutinensis. Page XVII.
* V. Introduction au Û"^;;") C]35, édit. de Vcise 1G26 et ce que j'ai écrit moi-
même sur celte question dans V Univers israélite (Année XXX", n"' 4 et 9), dans un
article intitulé : Une découverte importante.
' Dans ces mémoires on trouve enregistrée on ces termes la translation des os du
pieux rab!)in :
^":r7 ^iiTi y''-^ -^b^nbi n"rïbT -^"j-^^id rc-iN 'n1^T•i•' -i'i"m»s tobu^n DDnrj
■ ; p"Db "^''n ns^D niM ri"3 ûvn Ti-^Ti riTi
< Dans la rangée susdite, dans le XVI' tombeau, on ensevelit les os saints du
pieux rabbin, le savant Léon Phujctli, et aux pieds de ce rabbin on ensevelit aussi
ABRAHAM JOSEPH SALOMON GRAZFAXf 125
30. Elégie.
Mêmes lacunes. Grâce aux jeux de mots, elle paraît avoir été
composée en honneur d'Israël Usiglio, mort le 11 Sivan 3406, à
l'âge de 47 ans. Du vers suivant ^n^riN ibi Snti:i2 o;"id
il semble qu'il ait été un des chefs de la Communauté.
31. Autre élégie sans indication. Elle a été écrite afin de célébrer
les vertus d'une femme éminente par ses talents, sa charité
et la rare bonté de son âme, Gentille Modéna, fille de feu
Isaac Modéna de Vignola , veuve de David Modéna de No-
nantola, décédée, le 4 Tischri 3409 =2 septembre 16i8, à l'âge
de 77 ans.
32. Elégie qui semble avoir été écrite pour Michel Modéna, mort en
3416, à l'âge de 64 ans.
53. Elégie. Il m'a été impossible de découvrir en l'honneur de qui elle
a été écrite. Ce sont les plaintes amères d'un homme qui a
perdu sa jeune épouse, belle, sage et vertvieuse. Peut-être,
comme nous l'avons déjà dit, était-ce la femme de notre poète.
Cette hypothèse est corroborée par les vers suivants
'mn-^ri -'b "o -.-1—71 Nir: ma
dans lesquels Graziani dit que personne ne peut adoucir son
malheur, sauf celui dont le nom est contenu dans le deuxième
vers ■^ST,'^. C'était le nom de son père.
54. Elégie pour les funérailles du rabbin ledidia Rimini de Carpi,
mort le mercredi 22 Kislev 3442 K
33. Le manuscrit finit par une épitaphe, écrite par l'auteur, pour
mettre sur le cercueil du grand rabbin Léon Rabbeno, de Reg-
gio Emilia, mort en cette dernière ville à la fin du mois de
Sehevat 3441. Une note nous dit que cette épitaphe a été
faite par l'ordre du neveu du défunt, Raphaël Melli de S. Mar-
tin, par suite des prières de David Lenghi.
les os de l'honorable dame Espérance, femme de David Usiglio, ce qui fut accompli
le 28 Adar ;j420. • Il s'ugil donc ici du transport des os du rabbin dun cimetière à
l'autre et non de son enterrement. Pour comprendre la vraie signification de ce mé-
moire, il faut savoir qu'anc-ennement les Israélites de Modène enterraient leurs morts
dans la ville. En 1030, lorsque la peste y exerça ses ravages, comme dans presque
toute l'Italie, le gouvernement ordonna aux Israélites de se pourvoir d'un cimetière
hors de la ville.. La chose ne put se l'aire aussitôt, il se passa plusieurs années jus-
qu'à ce que les Israélites achetèrent le morceau de terrain qui sert encore aujourd'hui
pour le cimetière. Il semble que le grand rabbin Trabot ait été un des premiers qui
y lurent ensevelis. Ensuite on y transporta peu à peu les os des personnes respectables
qui étaient enterrées dans l'ancien champ. Le nom de ce Léon se retrouve dans le "121
bN1720 (S 10). Il était llls du rabbin Jacob Phujetti d'Asti en Piémont, auteur du
rt?2Dn rT'"::N'n -ni:^p.
' Il est Fauteur d'un recueil de r^"'\'0 ms., mentionné dans le p^i' "1N2.
126 RKVUE DES ETUDES JUIVES
Après avoir donné ce catalogue raisonné des poésies contenues
dans ce manuscrit, nous croyons devoir dire quelques mots sur le
mérite littéraire de ces compositions.
On se tromperait si on croyait que Graziani ait été un poète de
premier ordre. Il n'a pas l'élévation et la profondeur de Gabirol,
mais c'est un homme d'esprit. Il parle le langage de son temps,
il possédait bien l'hébreu, ce qui lui donnait une grande habileté à
faire de ces jeux de mots qui plaisaient tant à ses contemporains,
et qui lui acquirent une renommée surprenante. Ses vers sont
toujours faciles. Mais, à l'occasion, il savait s'élever au-dessus
de la foule, et faire entendre de hautes vérités.
Modène, août 1881.
S. JONA.
LES JOIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES
AU XVIII^ SIÈCLE
Nous avons dit dans une précédente étude ' qu'au dix-septième
siècle, les Français, en s'emparant des îles d'Amérique, y avaient
trouvé un assez grand nombre de Juifs, amenés ou attirés par les
premiers occupants, Hollandais pour la plupart. Nous devons
ajouter que ces Juifs avaient su prendre une telle situation dans
ces colonies, tant sous le rapport commercial que sous le rap-
port industriel ou agricole, qu'on fut obligé de compter avec eux
et de ne pas feindre d'ignorer leur présence. Ils ne se laissaient
d'ailleurs point oublier. Pour ne citer qu'un exemple, lorsque la
compagnie de Ouest-Indes qui occupait Tile de Cayenne fut forcée
de quitter cette ile et de traiter avec les Français, les directeurs de
cette compagnie durent introduire dans les conditions du traité,
qu'ils soumirent au commandant français, un article tout spécial
concernant les Juifs : c'est un fait qui mérite d'être signalé pour
l'époque. « La nation judaïque, y était-il dit, demande aussi/ le
» libre exercice de religion comme dans chapitre %»récédent'- »,
c'est-à-dire, exercice libre et public de leur culte, comme pour les
religionnaires dont il était question au chapitre cité.
M. de Tracy, à qui furent soumises, le 15 mai 1664, toutes les
demandes des directeurs de la compagnie Ouest-Indes, mit en
regard de ce passage : « Renvoyé à Monsieur de la Barre, seul
bon. Tracy. » Et nous trouvons ensuite dans le traité ou Pre-
1 Ab. Cahen, Les Juifs de la Martinique au xvii» siècle, liccuc ilcs Eludes juives,
t. II, p. y3.
« Archives du Minislcrc de la Mariuc. — CoUecliou Moreau de Sainl-Méry. —
Code de Cayenne, t, I, p. 82.
12.S REVUE DES ETUDES JUIVES
mières conditions qui furent accordées par M. de la Barre à
MM. les directeurs de la Compagnie de Ouest-Indes dans Vile
de Cayenne le paragraphe suivant, qui est la réponse faite à la
demande des Juifs dont nous venons de parler :
« Pour ce qui concerne les Juifs qui sont habitués de lile
» il leur sera donné toute protection et assistance j)our jouir de
» leurs Mens et possession et pour le libre exercice de leur reli-
« gion et un lieu dellle qui leur sera assigné par le sieur de la
» Barre et sous les conditions dont on conviendra après avoir
» veu celles accordées par la compagnie Ouest-Indes aux dits
» Juifs ' . »
Pour donner une idée de la situation des Juifs dans les pos-
sessions hollandaises ou anglaises, nous empruntons aux notes
manuscrites de Moreau Saint-Méry les renseignements suivants,
qui nous font connaître les libertés dont jouissaient les Juifs aux
colonies, notamment à la Jamaïque , pendant le dix-septième
siècle :
« Il y a beaucoup de Juifs à la Jamaïque. Ils y ont tous les
» droits des autres blancs, excepté celui de voter avec les chré-
» tiens, d'être membre de l'assemblée ni de i^emplir aucune
» pjlace de magistrature. Ils ont le libre exercice de leur reli-
» gion-. »
Ces premières libertés furent confirmées en même temps pour
toutes les colonies françaises par l'ordre rojal du 23 mai 1671,
que nous avons déjà publié \ La protection de M. de Baas s'étendit
également sur les Juifs de toutes les îles d'Amérique appartenant
aux Français. Mais, à la mort de ce gouverneur, les restrictions,
qui furent apportées aux libertés et franchises des Juifs de la
Martinique, atteignirent également celles des Juifs des autres
colonies françaises, et nous trouvons dans les Instructions que le
Roy ordonne être mises aux mains de M. Patoidet, intendant
de la justice, pjolice et finances des îles, la recommandation toute
si»éciale, où il est dit :
« Sa Majesté estant informée qu'il y a quelques Juifs establis
» aux dites îles, son intention est qu'il les laisse dans laposses-
y> sion paisible de leurs habitations sans souffrir qu'ils fassent
>' aucun exercice public de leur religioyi". »
> Archives du Minist. fie la Marine — Collcct. Moreau Saiat-Méry. — Code de
Cayenne, t. I, p. 82.
» Ihid., V. H., t. VII, p. 299.
^ Revue des Études juives, t. II, p. 99.
'• Arcli. du Minist. de la Marine. — Instructions aux administrateurs, t. I. 1G65-
1701, ad annum 1C79.
1
LES JUIFS DANS LES COLOiNIES FRANÇAISES AU XVIII« SIÈCLE 120
Le même paragraphe se retrouve textuellement dans les Ins-
tructions envoyées à M. Bégon au mois de mai 1G82'.
Malgré ces restrictions, les Juifs se croyaient assez fortement
établis aux colonies, et, loin de prévoir une persécution, ils
pensaient être en droit de refuser d'assister à une revue, parce
qu'elle avait lieu un samedi. L'intendant en signala le fait dans
un de ses rapports'^, et M. de Blénac dut sans doute tirer de
ce fait un argument très fort en faveur de l'expulsion des Juifs,
qu'il demandait alors avec beaucoup d'insistance, pour plaire aux
associations religieuses et particulièrement aux jésuites^. A ce
moment encore on profita de l'abjuration d'un Juif (19 avril 1683)
pour donner à la cérémonie du baptême un éclat extraordinaire :
l'événement avait une si grande importance aux yeux des admi-
nistrateurs qu'ils le signalèrent immédiatement au roi ^ (20 avril
1683), en faisant remarquer que c'était le premier exemple de con-
version donné aux îles et qu'il fallait en attribuer tout le mérite
au zèle des religieux. Les circonstances étaient bien favorables
pour montrer, d'un côté, les difficultés que créaient les prétentions
des Juifs, et, d'un autre côté, l'activité des religieux et les services
qu'ils rendaient au catholicisme dans les colonies. Tout concourait
au but que poursuivait M. de Blénac, en flattant les sentiments
religieux du roi et de son entourage ; et nous avons vu qu'avec la
mort de Colbert avait disparu le seul obstacle qui s'élevait contre
la proscription des Juifs des colonies d'Amérique.
L'ordonnance royale du 28 septembre 1683 et le paragraphe pre-
mier du Code noir furent édictés; et, pendant de longues années,
l'exécution de ces ordres fut l'objet d'une grande sollicitude de la
part de la Cour. A chaque changement de gouverneur et d'inten-
dant, les instructions du roi renouvelèrent la recommandation de
tenir la main à l'accomplissement de la volonté royale et d'empê-
cher tout retour des Juifs dans les colonies françaises. Aux
exemples que nous avons déjà cités pour la fin du xvii° siècle,
nous pourrions en ajouter un certain nombre d'autres pour le
commencement du xviii® siècle. Nous nous bornerons à rapporter
le paragraphe inséré dans les Insiructions royales adressées le
10 juin 1703 au sieur de Vaucresson, intendant des îles, para-
graphe qui se retrouve textuellement dans toutes les instruc-
tions suivantes :
« Sa Majesté ayant donné des ordres pour faire sortir (es
' Arcli. du Minist. de la Mar. — Inst, aux adniin., 1. 1, IGtjîi-lTUI ad anmiM 1682.
« Ihid. — CoUect. Morcau Saint-Méry. P. H., t. I, p. Î550.
' V, Revue des Études juives, t. II, p. 100-101).
'' Arch. du Minist, de la Mar. — CoUect. Morcau Saint-Mûry. P. II., t. I, p. 025.
T. IV.
130 REVUE DES ETUDES JUIVES
» Juifs qui étaient estaUis aux îles, Elle veut qu'il empesclie
w qu'il n'y en soit receu aucuns nouveaux à Vavenir et qu'il
» tienne la main à l'exécution ponctuelle de l'ordonnance du
» 26 septe^nhre 1683 *. »
Malgré ces recommandations particulières, les intendants firent
souvent observer dans leurs rajDports que les Juifs, qui avaient
quitté les colonies françaises, avaient été accueillis avec empres-
sement dans les colonies voisines, qu'ils y avaient transporté leur
fortune, leurs industries, leur activité commerciale, et qu'ils y
jouissaient d'une très grande liberté. Ils montraient aussi parfois
quelle utilité on pourrait retirer du retour des Juifs dans les îles
françaises, et envoyaient au ministre d'assez fréquentes demandes
de ce genre que leur adressaient des groupes de Juifs des colonies
voisines. Nous ne signalerons que la requête que transmit M. Dor-
villiers en 1725, requête par laquelle les Juifs de Surinam sollici-
taient l'autorisation de s'établir à Cayenne. M. de Pliélipeaux,
secrétaire d'Etat, répondit à cette communication par la lettre sui-
vante :
« J'ai rendu compte au Roy de la demande qui vous a été faite
de la part des Juifs de Surinam de leur permettre de s'établir à
Cayenne, Sa Majesté n'a pas jugé qu'il convienne de leur accorder.
Ainsi s'ils vous eu font parler encore, vous leur ferés sçavoir que
vous avez ordre de ne pas les recevoir ^ »
Il esta supposer que M. Dorvilliers, assez osé pour transmettre
une pareille demande, alors que les instructions royales étaient
nettes et explicites à ce sujet, avait sans doute fait valoir les
raisons qui militaient en faveur de cette requête. Il n'avait pas
dû oublier de faire remarquer que cette demande des Juifs n'a-
vait pas pour motif leur situation malheureuse à Surinam, où
ils étaient, au contraire, traités avec douceur, avec bienveillance
môme : ils y étaient en quelque sorte entièrement émancipés. Une
note manuscrite qui appartient à cette époque, note qui est peut-
être de M. Dorvilliers lui-même, donne sur eux les détails sui-
vants :
" Les Juifs de Surinam professent leur religion, possèdent
» des terres, des esclaves et des maisons. Ils ont voix aux
>' assemblées, me me pour élire les membres du conseil^ comme
' Arch. du Minist. de la Mar. — Instruct. aux administraleurSj l, II, 17(J2-1'/19,
ad annum 17fly.
» Idetn. — Collecliou Moreuu do Saint-Méry. — Colonies en général. T. XV,
art. Juif.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVII[<^ SIÈCLE 131
» les autres citoyens. De plus, des magistrats juifs : leur noml-
» nation est faite pour décider leurs affaires et leurs querelles,
M pourvu qu'elles n'intéressent ni Vordre puUic ni un citoyen
» dhme autre religion K »
Nous savons, d'autre part, par les événements historiques qui
concernent Surinam, que les Juifs de cette colonie étaient recon-
naissants de l'émancipation qui leur avait été accordée et qu'ils
donnaient au pays de grandes preuves de leur patriotisme. Nous
en citerons comme exemple le fait suivant :
Lorsque, en 1712, l'amiral français Cassard attaqua Surinam, une
défense énergique lui fut opposée. Les Juifs surtout, qui étaient en
très grand nombre, se signalèrent par leur courage et par leur
attitude martiale : ils étaient commandés par un des leurs, nommé
Isaac Pinto. La lutte fut héroïque de la part de ces derniers et
l'amiral Cassard ne passa pas ce détail sous silence. Paramaribo
n'en fut pas moins bombardé et la contribution de guerre n'en fut
point allégée.
II
Malgré la volonté royale nettement exprimée dans les Instruc-
tions aux administrateurs des colonies, un certain nombre de
Juifs continua à séjourner dans les îles françaises d'Amérique, soit
par tolérance, soit par faveur spéciale. La tolérance venait de la
part de l'administration locale qui fermait les yeux sur les infrac-
tions, tant qu'elles ne lui étaient pas formellement signalées ; et
même, quand elles lui étaient dénoncées, l'autorité agissait avec
une sage lenteur, de manière à laisser tomber dans l'oubli les
plaintes qui lui étaient adressées. Mais il arrivait aussi que ceux
qui faisaient ces dénonciations avaient un intérêt particulier, dont
ils poursuivaient la satisfaction avec ténacité : ils s'adressaient
alors à l'autorité suprême de la métropole et suscitaient des re-
montrances au gouverneur général et à l'intendant.
Beaucoup de Juifs de France obtenaient aussi des autorisations
de séjour aux colonies : l'embarquement se faisait à Bordeaux, et
les permissions devaient passer sous les yeux de l'intendant de la
province, quand il ne les délivrait pas lui-même. D'autres autori-
sations étaient délivrées à des Juifs habitant depuis longtemps les
' Archives du Minist. de la Marine, — Collecliou Moreau do Saiut-Méry. P. H.,
l. II, p. 080.
132 REVUE DES ETUDES JUIVES
colonies, sous forme de lettres de naiuralité, et sur la demande
formelle des autorités locales.
Lorsque les lettres patentes de juin 1123 parurent, lettres qui
confirmaient les Juifs de Guyenne et dWucli dans tous les privi-
lèges que leur avaient accordés celles du roi Henri II (août 1550),
ils pensèrent que ces lettres abrogeaient pour eux toutes les res-
trictions apportées par l'article premier du Code noir. D'après cette
interprétation, l'édit d'expulsion (1683) et cet article premier (1685)
ne pouvaient plus s'appliquer qu'aux Juifs étrangers et nullement
aux Juifs régnicoles. Nous verrons, par la suite, que ce fut aussi
l'opinion des différentes Cours établies aux colonies, qui, dans les
questions d'héritage, reconnurent toujours aux Juifs régnicoles le
droit de disposer de leurs biens, et déclarèrent que l'article premier
du Code noir ne leur était pas applicable.
Aux différentes causes qui poussaient les Juifs à rester dans les
colonies ou même à s'y rendre, nous devons en ajouter une der-
nière : c'est l'influence très grande qu'exerça une famille juive
de Bordeaux dans toutes les affaires coloniales, depuis le com-
mencement jusqu'à la fin du xviii*^ siècle. Nous voulons parler
de la famille Gradis, qui fut assez puissante pour intervenir fré-
quemment en faveur de ses coreligionnaires des colonies. Si elle
n'eut pas le pouvoir d'amener le gouvernement de la Métropole à
abroger la loi de proscription de 1685, son influence ne s'en fit
pas moins sentir dans toutes les îles françaises de l'Amérique, où
les autorités locales comprenaient fort bien qu'elles avaient à
compter avec cette maison, toute-puissante sur le commerce colo-
nial, et qu'elles avaient le plus grand intérêt à ne pas se l'aliéner.
David Gradis, fils de Diego, fut le fondateur de cette maison
importante, qui depuis bientôt deux siècles occupe un rang aussi
honorable dans le commerce de Bordeaux que dans celui des co-
lonies. Nous allons faire connaître rapidement les relations de
cette famille avec les possessions maritimes de la France d'après
une notice que M. Gradis, chef actuel de la maison de Bordeaux,
a bien voulu nous communiquer et dont il nous a autorisé à
extraire les détails qui touchent à notre sujet.
C'est en 1717 que David Gradis commença, pour la première fois,
à faire des armements, et qu'il ouvrit avec les colonies d'Amérique
des relations commerciales dont il augmenta plus tard considéra-
blement l'importance. A partir de 1722, il s'adonna entièrement
aux affaires maritimes et établit des comptoirs à Saint-Pierre-
Martinique et sur différents points de la côte de Saint-Domingue,
le Cap, Saint-Louis, le Fond-de-l'Ile à Vaches et surtout à Léogane,
où se trouvait déjà un de ses parents et amis, Lopez de Paz, mé-
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVJIl' SIÈCLE 133
decin du roi. Presque toujours il envoyait, comme ses représen-
tants, des coreligionnaires et, très souvent même, des membres de
sa famille. C'est ainsi qu'il fit partir pour le Fond-de-l'Ile à Vaches
deux de ses neveux, Mendès et Mirande, et pour la Martinique
deux autres neveux, Gradis et Mendès. Pour donner une idée de
l'importance de ses affaires, il nous suffira de dire qu'à partir de
1725 David Gradis expédia jusqu'à six navires par an à ses neveux
Mendès et Mirande. Ces navires, complètement frétés par lui,
étaient le plus souvent sa propriété. En 1731 il dut même envoyer
à la Martinique son propre fils Samuel, pour rétablir l'accord entre
les deux associés de ce comptoir, dont les caractères s'harmoni-
saient fort peu.
Samuel Gradis, qui partit de Bordeaux le 21 août sur un des
bateaux de son père, tomba malade peu de jours après son arrivée
à la Martinique et, atteint d'une fièvre maligne, il y mourut le
5 janvier 1732. A l'occasion du décès de ce jeune homme, si pré-
maturément enlevé à l'avenir brillant qui s'ouvrait devant lui,
nous devons ajouter un détail curieux et caractéristique : c'est
qu'il fut enterré dans le jardin des Frères de la Charité, qui lais-
sèrent faire les prières selon le rite juif dans l'enceinte de leur
couvent. Mais ils refusèrent, malgré l'offre de mille livres, qu'on
plaçât une pierre funéraire sur la tombe du malheureux Samuel
Gradis.
Il nous est bien permis de déduire de ce fait que les Juifs étaient
assez nombreux à la Martinique pour former la réunion {niinian)
nécessaire à l'accomplissement dos rites funéraires. Constatons
encore qu'à ce moment l'intendant de la colonie ne dissimula pas
à Gradis et à Mendès qu'ils étaient censés domiciliés en France et
que, si l'un d'eux venait à décéder aux colonies, tous les biens
du défunt seraient confisqués comme aubaine, au profit du Trésor.
Mais nous allons voir que cette théorie ne fut pas admise comme
règle de jurisprudence, ni par les autorités locales, ni par le Mi-
nistre. C'était à l'occasion de la mort d'un autre Gradis.
Abraham Gradis, chef de la maison Gradis et Mendès frères
de la Martinique, mourut en cette ile au mois de mars 1738,
léguant tout ce qu'il possédait à deux de ses sœurs non mariées :
il excluait par là ses deux autres sœurs mariées, dont l'une s'était
convertie au christianisme et était devenue la femme d'un procu-
reur au Parlement de Bordeaux. Cette dernière, à la nouvelle de
la mort de son frère et du testament qui la déshéritait, porta
plainte au Ministre et lui remit un mémoire qu'il s'empressa d'en-
voyer aux administrateurs de la Martinique avec la lettre sui-
vante :
13/i REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Lettre du Minisire ' à 31''' de Champigni/ et Lacroix,
du 9 février i7o9'-.
Je vous envoyé un mémoire qui a élé présenté par Suzanne Gra-
dis, femme du sieur Coustault, procureur au Parlement de Bordeaux,
concernant la succession d'Abraham Gradis, son frère, mort à la
Martinique au mois de mars de Tannée dernière. Il paroît par ce
mémoire qu'il y a un procès à la Martinique à l'occasion d'un testa-
ment par lequel Abraham Gradis a institué ses héritières Rebecca et
Judith ses sœurs qui sont, comme il était lui-même, de la rehgion
juive, à l'exclusion de Suzanne Gradis qui a eu le bonheur d'em-
brasser la religion catholique ; que Rébecca et Judith réclament la
succession de leur frère en vertu de ce testament qui est attaqué
par Suzanne Gradis, et que la succession en question est entre les
mains des sieurs David et Aaron Mendès, exécuteurs testamentaires
du deffunt, ses associés et de la même religion que lui.
Les représentations que Suzanne Gradis a faites par ce même mé-
moire ont paru mériter attention, non seulement par raport à l'af-
faire particulière qui en fait l'objet, mais encore par raport à la
question en général, et Sa Majesté à qui j'en ay rendu compte m'a
ordonné de vous dire qu'EUe veut être informée de l'état de l'ins-
tance pendante devant les juges de la Martinique.
Il est à croire que M. de Lacroix n'aura pas manqué d'y faire in-
tervenir le Domaine de Sa Majesté qui peut avoir des droits sur la
succession dont il s'agit, et j'attends même qu'il m'informera de ce
qui sera passé. En tout cas, s'il n'y avoit pas satisfait avant la ré-
ception de cette dépèche, vous aurès agréable de m'envoyer un détail
qui puisse me mettre en état de connoitre -toutes les circonstances
de cette affaire ainsy que la succession d'Abraham Gradis. Vous
ferès surseoir en même tems au jugement jusqu'à ce que sur le
compte que vous m'en aurès rendu, je vous aye envoyé de nou-
veaux ordres de S. M. et vous prendrès cependant les mesures
nécessaires pour mettre en sûreté tous les effets apartenant à cette
succession.
S. M. veut aussy être informée s'il est vraye que les S'* Mondes
soient Juifs comme on l'expose dans le mémoire que je vous envoyé,
que vous m'envoj'ès une liste de ceux qui peuvent se trouver dans
les Isles, que supposé qu'il y en ayt, vous expliquiès depuis quel
tems ils y sont, les establissemcnts qu'ils y ont, et le commerce
qu'ils y font.
J'attendray sur le tout une réponse prompte de votre part aiin
que S. M. puisse donner les ordres qu'EUe jugera à propos.
' M. Pliélipeaux, comte de Maurepas.
^ Arch. du Miiiist. de la Mar. — Collccl. Moreau Sainl-Méry. — Code delà Mar-
tinique, l, X, p. 701.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII" SIECLE 13:;
Voici la réponse de MM. de Cliampigny et de La Croix ' :
ILES DU VENT. La Martinique, le 12 aoust 1730.
Monseigneur,
Abraham Gradis et David Mendès Juifs sont venus avec votre
agrément dans cette Isle au mois de novembre 1729^ pour y régir
les affaires de Gradis leur oncle, autre Juif établi à Bourdeaux, qui
faisoit de gros armements pour les Isles. Ils n'avoient alors aucun
bien. L'oncle les defrayoit entièrement et ne leur donnoit aucuns
appointements. Lasses de ne rien gagner, ils firent leurs représen-
tations à leur oncle qui leur accorda quatre pour 0/0 de commission
sur les ventes et se chargea de tous les frais. Ils ont depuis retourné
à la charge, leur oncle a étendu les quatre pour 0/0 sur les achats,
mais aux conditions de supporter tous les frais de sa maison de
commerce en ces Isles. Enfin le s*' David Mendès ayant fait venir icy
Aaron Mendès, frère du dernier, lis l'ont fait entrer dans leur so-
ciété sans qu'il fut tenu d'y mettre aucun fond : les deux associés se
contentoient de son industrie.
Ces détails feront connaître, Monseigneur, qu'ils doivent toute
leur fortune à la commission dont leur oncle Gradis de Bourdeaux
les a chargés et à leur industrie. Abraham Gradis s'est cru dans ces
circonstances en droit de disposer de ses acquêts en faveur de deux
sœurs Rebecca et Judith Gradis qui ne sont point établies pour leur
faciliter les moyens d'y parvenir. Il s'est pareillement cru en droit
de deshériter Suzanne Gradis, femme du s"" Coustaud qui vous a
porté sa plainte et qui a embrassé la religion catholique, et une
autre sœur également établie, qui est restée juive. Elle se nomme
Sara et elle a épousé le nommé Acosca, juif : fondé à ce que nous ont
assuré les Mendès sur ce que ces deux dernières étant établies, elles
n'avoient pas besoin des mêmes secours que celles qui ne l'étoient
point. Si, comme il y a apparence, ce motif est vrai, la religion ca-
tholique que Suzanne Gradis a embrassée n'a point opéré son exhc-
rédation.
Il nous reste à examiner si Abraham Gradis a été en droit de
tester et si sa succession est ou non sous le cas d'être confisquée par
droit d'Aubaine.
Les Juifs de nation portugaise établis à Bourdeaux ont payé au
Roy en 172.3 une somme de tOO mil livres et les deux sols pour
' Arch. du Minist. de la Mar. — Corrcspoudauco générale. — Clolonio?. — Ad an-
niim 1730.
'■' D'après la Notice manuscrite de la famille Gradis, Abraham lils d'Anthoine et
neveu de David Gradis partit de Bordeaux pour la Martinique le 2V) juillet 1720,
sur le Patriarche Ahraliam, appartenant à la maison David Gradis; et le 17 mai
suivant (1727), David Mendès y l'ut envoyé et associé à Abraham par David Gradis,
dont il était éf^alement le neveu.
136 . REVUE DES ETUDES JUIVES
livre en sus pour le joyeux avènement de Sa majesté à la Couronne
et en considération de ce paiement ils ont obtenu au mois de juin
de la même année des Lettres-Patentes par lesquelles (vien-
nent quelques extraits)
Suivant l'esprit de ces Lettres-Patentes, Abraham Gradis étoit
très en droit de tester et de disposer de ses biens et sa succession
ne seroit point en France dans le cas d'être confisquée par droit
d'Aubaine.
Mais il n'en est pas de même des Isles et colonies françoises. Par
l'article premier du Code noir, Sa Majesté enjoint à tous ses officiers
de chasser hors de ces Isles tous les Juifs qui ont établi leur rési-
dence comme aux ennemis du nom chrétien et commande d'en sortir
à peine de confiscation de corps et de biens. Cette loy est très
rigoureuse. Mais il nous paroist qu'elle ne peut ni ne doit s'appli-
quer qu'aux Juifs qui viennent icy de leur chef et sans permission.
Tous ceux qui en obtiennent ne peuvent plus être confondus avec
ceux que S. M. déclare ennemis du nom chrétien. Elle ne leur ac-
corderoit point de permission particulière si Elle n'étoit point as-
surée de leurs sentiments personnels par les comptes qu'EUe s'en est
fait rendre. Les s''^ Gradis et Mendès sont dans ce dernier cas. Ils
sont venus icy, Monseigneur, autorisés de votre agrément, vous
avès même particulièrement recommandé leurs intérêts à M''^ le Mar-
quis de Champigny et d'Orge ville par votre dépêche du 2 septem-
bre 1736. Nous leur devons de plus la justice de vous rendre témoi-
gnage de leur droiture et de leur probité dans leur commerce el de
leur exactitude dans le paiement des sommes qu'ils doivent.
Ces différentes raisons nous persuadent, Monseigneur, qu'il y a une
distinction à faire entre les différents avantages qu'ils peuvent pré-
tendre dans ces Isles eu conséquence des Lettres-Patentes du mois
de juin 1723. Elles ne dérogent point nommément au Code noir du
mois de mars 1685. Abraham Gradis n'a pas pu tester et n'a point
deu le faire sans en avoir obtenu une permission expresse de Sa
Majesté; ainsi nous estimons que son testament doit être déclare
nul.
Les Mendez et luj' étant venus icy à la faveur de la permission
que vous leur avès accordée, nous pensons que leurs biens ne sont
pas dans le cas d'être confisquez au proffit du Roy par droit d'Au-
baine. Et conséquement que la succession d'Abraham Gradis doit
revenir ù ses héritiers.
Ces différentes réflexions ont déterminé M. de La Croix à sus-
pendre un jugement définitif sur l'instance que le Directeur Général
du Domaine a porté devant lui. A la réception de votre dépêche du
9 février dernier, M. de La Croix s'est fait présenter par ce Direc-
teur une requeste tendante à la confiscation de la succession d'A-
braham Gradis. Il a ordonné sur celle requeste aux s''* Mendez de
représenter l'inventaire du defi'unt et les autres actes dont nous
vous envoyons coppie. Ils y ont satisfait el il n'a pas cru devoir
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII'' SIÈCLE 137
pousser cette procédure plus loin jusqu'à ce que vous réussies ho-
noré de vos ordres.
Si vous accordés la succession aux héritiers il leur sera signiffiée
la requeste du Directeur du Domaine avec assignation pour compa-
roitre devant lui et en conséquence des permissions particulières
obtenues de S. M. par les s'^ Abraham Gradis, David et Aaron Mon-
dez pour venir commercer dans les Isles, il déboutera le Directeur
du Domaine des fins de conclusion de sa requeste, mais attendu
que par les dernières permissions Sa Majesté ne leur a pas ac-
cordé le pouvoir de tester dans ces Isles et que les Lettres-Pa-
tentes du mois de juin 1723 obtenues par les Juifs de nation portu-
gaise établis dans la généralité de Bourdeaux ne dérogent point
nomément à l'Edit du mois de mars 1683, il cassera et annullera le
testament d'Abraham Gradis comme étant contraire aux dispositions
de l'article premier dudit Edit et il renvoyera les héritiers à par-
tager la succession suivant les loix et coutumes.
Si au contraire vous jugés à propos d'accorder la succession à une
ou à plusieurs des sœurs du deffunt par préférence aux autres, Il
adjugera la confiscation de la succession au domaine de S. M.,
comme lui étant acquise par droit d'Aubaine et en conséquence de
l'article premier de l'Edit du mois de mars 1683 et au moyen de
cette confiscation vous serès, Monseigneur, en état de procurer ce
don à celles des sœurs du deffunt que vous voudrès en gratifier.
Si vous adjugés cette succession aux sœurs du deffunt, il sera
nécessaire qu'elles envoyent icy une procuration bien et duement
légalisée appuyée des titres sur lesquels elles fonderont leurs droits
d'hérédité.
Quant au montant de cette succession qui auroit été plus forte
qu'elle n'est sans les pertes que l'incendie a causées à la société de
Gradis avec les Mendez, nous ne pouvons vous rendre d'autre compte
de son état présent que celui qui résulte du compte cy-joint qui
nous a été fourni par les s" Mendez. Il paroist par ce compte qu'il y a
eu, comme nous l'avons exposé, une première société entre les sieurs
Abraham Gradis et David Mendez, depuis le 3 novembre 1729 jusqu'au
1<='" janvier 1736 et une autre entre eux et Aaron Mendez depuis le
1°'' janvier 1736 jusqu'au lor octobre 1738 et que déduction faite de
la solde du compte particulier d'Abraham Gradis, il restoit de net
pour sa succession 70,276 livres, 1G,G. Cette somme ne pourroit
valoir en argent de France qu'environ 52 à 53 mil livres suivant le
cours actuel du change. Mais elle ne paroist pas exigible aux termes
de la Société contractée entre les s" Abraham Gradis et Mendez.
Cette société devant durer jusqu'au l^"' janvier 1741 sans que dans
le cas de mort d'un des associez les survivants ayent aucun compte
à rendre aux héritiers du prédécédé qu'à la fin de cinq années de
leur société, à peine les contrevenants de payer aux acquiesçants la
somme de quinze mille livres par forme de dédomagement. Les
s""^ Mendez nous ont cependant témoigné qu'ils étoient prêts de
138 REVUE DES ETUDES JUIVES
compter par devant des négociants que les partis prendroient pour
arbitres et qu'ils le feroient d'autant plus volontiers qu'ils s'ac-
querroient par là tout le fruit de leur industrie pendant le reste du
tems pour lequel leur société devroit avoir lieu. Ce sera, Monsei-
gneur, aux parties auxquelles vous adjugerès cette succession à dé-
cider de la continuation ou de la cessation de la société, et à prendre
les mesures qu'elles estimeront les plus convenables pour faire
compter les s'"^ Meudès qui paroissent disposez à terminer le tout à
l'amiable.
Nous sommes avec un très profond respect, Monseigneur, vos très
humbles et très obéissans serviteurs.
La réponse du ministre fut conforme aux arguments avancés
par les administrateurs, comme on peut le voir par la lettre
suivante ' :
Lettre du Ministre à Messieurs de Champigny et de La Croix.
Du 18 janvier 1740.
J'ai examiné le détail dans lequel vous êtes entrez par votre lettre
du 12 aoust dernier, au sujet de l'affaire concernant la succession
d'Abraham Gradis, Juif, mort à la Martinique, au mois de mars 1738.
Des deux partis que vous proposés pour le jugement de cette affaire,
le premier est celuy qui paroist le plus en règle.
En effet, Abraham Gradis ayant obtenu la permission d'aller s'é-
tablir pour comercer aux Isles, il n'étoit pas dans le cas de l'article
premier du Code noir, mais on ne peut donner à cette permission
d'autres effets que celuy de mettre un Juif à l'abry de la prohibition
et des peines portées par le Code noir et autres effets civils suivant
les règles du droit commun qui s'observe à l'égard des Juifs. Ainsy,
M. de La Croix peut juger la contestation portée devant luy par le
Directeur des Domaines et sur le fondement de la permission ac-
cordée à Abraham Gradis, renvoyer le directeur de la demande par
luy formée, il restera à décider les contestations que les sœurs de
ce Juif pourront avoir entr'elles pour sa succession et avec les s'"^
Mondes pour raison de la société qu'il avoit contractée avec eux ; mais
M. de La Croix pourra les renvoyer devant les juges ordinaires.
Au reste, on prétend que cette succession doit être bea;ucoup plus
considérable qu'elle ne paroist par l'état que vous m'en avés remis,
mais c'est ce qui pourra être discuté devant les juges ordinaires. Il
convient cependant que M. de La Croix prenne toutes les mesures
possibles pour empescber qu'elle ne soit dissipée.
Par ma lettre du 9 février de l'année dernière, je vous avois de-
mandé une liste des autres Juifs qui peuvent se trouver aux Isles
avec un état de leurs établissements, je vous prie d'y satisfaire sans
plus de retardement.
' Ardiives du Ministère de la Marine. — Collect. Morcau Saiat-Méry. — Code do
la Martinique, t. X, ad annnm.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XYIII-^ SIÈCLE 139
A cette lettre, les administrateurs firent la réponse suivante ' :
A la Martinique, le 24 juin 17iO.
Monseigneur,
Nous avons reçu la lettre que vous nous avés fait l'honneur de
nous écrire le 4 8 janvier dernier, en réponse à la notre du 12 aoust
précédent, sur la succession d'Abraham Gradis, Juif, mort à la Mar-
tinique.
Aussitôt que les héritiers de ce Juif ou leur fondé de procuration
s'adressera à M. de La Croix, il prononcera son jugement pour dé-
bouter le Directeur du Domaine de la demande qu'il a formée en
confiscation de cette succession et s'il les voit trop animés les uns
contre les autres sur la validité du testament, il les renvoyera de-
vant les juges des lieux, il donnera cependant tous ses soins pour
empêcher que la succession d'Abraham Gradis ne soit dissipée.
Les s'^ Mendez, cousins du deffunt, étoient. Monseigneur, les seuls
Juifs que nous eussions icy ; ils ont embrassé la religion catholique
au commencement de cette année, suivant le compte que nous avons
eu l'honneur de vous en rendre et ils sont fort estimés des négo-
cians de S' Pierre. La permission en vertu de laquelle ils sont venus
commercer en cette Isle ne s'est point trouvée dans le peu de vos
lettres dont M. d'Orgeville a laissé copie à M. de La Croix ; la copie
que M. d'Orgeville leur avoit donnée de cette permission a été consu-
'mée dans l'incendie ; mais le s"" Roze pourra aisément retrouver l'o-
riginal parmy les papiers de M. d'Orgeville dont il a été chargé.
Nous sommes avec un très profond respect, Monseigneur, vos très
humbles et très obéissans serviteurs.
Champigny, De La Croix.
III
Outre la question de savoir si le droit (\' aubaine était applicable
ou non aux biens des Juifs décédés aux colonies, la correspon-
dance ministérielle nous montre encore que le roi désirait ap-
prendre comment des Juifs, malgré les ordres formels, avaient
pu s'établir aux colonies, et quel était le chiffre do cette popula-
tion. Dans toutes nos recherches, il nous a été impossible de trou-
ver une réponse catégorique à ces questions, à moins de regarder,
comme pouvant en tenir lieu, le passage de la dernière lettre de
MM. de Champigny et de la Croix, où il est dit que les frères
> Archives du Ministère de la Marine. — Corresp. générale. — Colonies. -- Mar-
linii|uc, ad aiinum.
140 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Mendez étaient les seuls Juifs établis aux colonies. La situation
des administrateurs était fort délicate. Ils ne pouvaient pas ré-
pondre d'une manière formelle à ces questions, parce qu'ils ne se
sentaient point à l'abri de tout reproche : ils n'avaient point fait
exécuter strictement les ordres du roi et il ne leur était pas pos-
sible de présenter leur ignorance comme une excuse valable.
Cependant le zèle des religieux était toujours en éveil ; et sou-
vent des colonies, quelquefois aussi de Bordeaux, partaient des
dénonciations contre le séjour ou les actes de quelque Juif habi-
tant les îles d'Amérique. La correspondance suivante échangée
entre le ministre et les administrateurs des colonies nous en four-
nit une preuve bien édifiante :
Lettre du Ministre à 31'^ de Champigny et de La Croix ' .
Du 16 avril 1741.
Il m'est revenu qu'un Juif établi à S' Domingue a envoyé il y a
quelque tems à Bordeaux deux filles mulâtres qu'il a eiies d'une
négresse libre catholique qu'on prétend être sa femme et qui n'avait
consenti à ce qu'elles passassent en France qu'à condition qu'elles
seroient élevées dans la religion catholique dans laquelle elles
avoient déjà été instruites : mais qu'ayant été adressées à d'autres
Juifs, ils ne leur avoient point permis de suivre l'intention de la
mère et se disposoient à les élever dans le Judaïsme, si M. l'arche-
vêque de Bordeaux, qui en fut informé, n'y avoit mis ordre.
Comme il ne faut pas douter que tous les Juifs qui peuvent être
aux Isles n'envoyent de même en France leurs enfants légitimes ou
naturels pour les faire élever dans leur religion, il m'a paru néces-
saire de vous recommander de faire veiller à leur conduite à cet
égard, s'il y eu a à la Martinique qui soyent dans ce cas.
Je dois aussy vous prévenir que sur l'avis que M. Rostan m'a
donné qu'il se présente journellement des Juifs à Bordeaux qui de-
mandoient à s'embarquer pour les Isles, je luy ay prescrit de les
refuser afin d'empescher qu'ils ne se multiplient trop dans les Isles
où ils pourroient causer du désordre ; je vous observeray de même
à ce sujet que quoique dans l'état que vous m'avez envoyé au mois
de novembre 1739 des étrangers qui éloient alors aux Isles du Vent,
il ne soit mention que de deux Juifs qui ont embrassé depuis la re-
ligion catholique, il y a cependant lieu de croire sur ce que M. Ros-
tan m'a mandé que le nombre pourroit en être augmenté depuis.
Dans ce cas vous aurez agréable de m'envoyer une liste en m'expli-
quant les établissements qu'ils y ont et le commerce qu'ils font, afin
que je vous fasse sçavoir les intentions du Roy sur leur compte.
' Arch. du Minist. de la Mar. — Coliect. Moreau St-Méry. — Colonies en général,
t. XV, art. Juif.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII« SIÈCLE 141
Lettre des administrateurs au Minisire sur les Juifs de S^ Domingue ' .
A Léogane, le 4 juillet 1743.
Monseigneur,
Nous avions remis au compte que nous avons à vous rendre de
l'état des missions et de la religion en ce pays à répondre à la lettre
que vous nous avez fait l'honneur de nous écrire le 16 avril 1741,
concernant les Juifs qui se trouvent à S' Domingue et par laquelle
vous nous recommandez de veiller à ce qu'ils n'envoyent leurs en-
fants naturels ou légitimes en France pour les faire élever dans leur
religion.
Comme votre dépêche, Monseigneur, nous ordonne aussi de vous
faire informer du nombre des Juifs qui sont à S* Domingue et de
vous envoyer une liste en vous expliquant en même tems les établis-
sements qu'ils y ont et le commerce qu'ils y font, nous envoyâmes
nos ordres en conséquence dans tous les quartiers pour pouvoir
être en état de vous rendre le compte précis que vous désirez là
dessus.
Mais après les recherches assez exactes faites partout à cet égard,
Monseigneur, il ne s'est trouvé en Juifs connus dans cette colonie
que les s""^ Mirande et Mendès, fameux négocians de Bordeaux qui
depuis plus de 15 à 20 ans sont établis au Fonds de l'Isle à Vaches
où ils font un commerce très considérable et très avantageux à ce
quartier auquel ils ont fait et font journellement de grands crédits.
Ce sont de très bonnettes gens et contre lesquels il n'y a jamais eu
la moindre plainte : ils ne sont point mariés.
Dans la ville du Cap on ne connoit qu'un autre négociant de cette
religion nommé Jacob Suarès, établi depuis de longues années dans
cette ville, point marié et d'une très bonne réputation.
Il y avoit bien ci-devant un autre négociant au Cap que les jésui-
tes avoient soupçonné d'être Juif, nommé Pereyre ; mais il est mort
depuis deux ans, et d'ailleurs il avoit purgé ce soupçon par la charge
de marguillier de la paroisse.
Par le compte que M. Bigoton nous a rendu là-dessus, il y en
avoit bien eu ci-devant un établi à la ville de S' Marc ; mais il a
quitté le pays pour retourner en Europe : on n'en connoit point d'au-
tres à S' Domingue.
Pour le nom, Monseigneur, du Juif établi à S' Louis dont votre
dépêche nous parle et qui est accusé d'avoir envoyé deux filles
mulâtresses qu'il a eues d'une négresse catholique qu'on prétend
être sa femme, dans le dessein de les faire élever au Judaïsme, si
M. l'archevêque de Bordeaux qui en fut informé n'y eut mis ordre,
on a voulu dépeindre M. de Paz, et il a été découvert que c'est un
trait de vengeance et de tracasserie du Père Rhédon, qui partit à
1 Arch, du Minist. de lu Mar. — Collecliou Moreuu St-Méry. Colonies ea généra!,
t. XV, art. Juif.
1V2 REVUE DES ETUDES JUIVES
peu près dans ce tems là de la ville de S' Louis pour Bordeaux.
M. de Paz s'est effectivement amusé à faire quelques enfants maies
et femèles à une négresse à lui pour laquelle il a des bontés ; il l'a
affranchie depuis longtemps, mais il n'en a point fait sa femme. La
tendresse qu'il a pour sa progéniture le porte effectivement à en-
voyer ses enfants à ses parents à Bordeaux pour les y faire élever ;
mais ils ne le sont seurement pas dans le Judaïsme, nous en avons
la preuve dans les aînés qui reparaissent icy très chrétiens. M. de
Paz est sans doute d'origine et de famille juive et son nom même
est ancien et illustre dans cette nation ; mais il n'est pas lui de cette
religion et professe icy très ouvertement et de bonne foi celle du
royaume non peut-être avec la pureté des mœurs et l'édification que
tout catholique devroit étaler, mais c'est la crainte du cocuage qui
en est la seule cause. Il n'a jamais pu se résoudre au sacrement du
mariage comme aU remède de la concupiscence. Nous n'avons rien
à nous reprocher là-dessus.
Nous sommes, etc. . .
Larnage, Maillart.
Si les administrateurs des colonies avaient mis plus de deux ans
pour répondre au ministre, celui-ci leur écrivit immédiatement la
lettre suivante :
Lettre du Ministre à Messieurs de larnage et Maillart *.
Du 3 septembre 1743.
Sur les éclaircissements que vous me donnés dans votre lettre du
4 juillet dernier au sujet des Juifs établis à S' Domingue, il paroist
qu'il n'y a aucun nouvel arrangement à prendre par rapport à eux.
Dès qu'il n'y en reste en effet que trois, qu'ils ne forment que deux
maisons, qu'ils ne sont point mariés et que leur conduite dans
le commerce qu'ils font est aussi convenable que vous le dites,
il n'y a aucun inconvénient à les tolérer dans la colonie et le Roy
trouvera bon qu'ils y restent tant qu'ils continueront à s'y compor-
ter comme ils ont fait jusqu'à présent. S. M. n'entend cependant
point que cette nation puisse se multiplier à S' Domingue ; et s'il
s'y présentoit d'autres Juifs que ceux qui y sont vous aurès soin de
ne les y souffrir qu'autant que S. M. aura permis leur passage. Vous
êtes déjà informez que sur ce que M. Rostan m'avoit marqué qu'il y
en avoit journellement à Bordeaux qui demandoient à s'embarquer
pour les Isles, ce commissaire a eu ordre de les en empêcher.
A l'égard du s'" de Paz, il y a toute apparence que c'est lui qu'on a
voulu, comme vous l'observés, désigner par l'avis qui me fut donné
au mois d'avril dernier. J'ai su en effet depuis que les deux jeunes
• Archiv. du Minisl, do la Mur. — Collect. Morcau St-Méry. — Colonies en général,
t. XV, an. Juil.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII" SIÈCLE i i3
mulâtresses qui furent mises vers ce tems là dans un couvent de
Bordeaux sont ses filles, et qu'il pourvoit exactement aux dépenses
nécessaires à leur entretien et à leur éducation. Mais il y a dans la
même ville une troisième mulâtresse plus âgée que les deux autres,
laquelle se dit aussi la fille du s*' de Paz. Depuis peu de tems elle
m'a fait demander un ordre pour pouvoir s'embarquer pour S' Do-
mingue, prétendant que les parents de son père sy opposoient pour
des raisons d'intérêt et même de religion. Mais je me suis contenté
de prescrire à M. Rostan den'emploïer l'autorité pour un embarque-
ment qu'autant qu'elle sera en état de faire voir que son retour à
S' Domingue doit se faire de l'aveu de sou père. Je ne suis point
encore informé de ce qui se sera passé à ce sujet ; mais en tout cas
il convient que le s'" de Paz prenne des arrangements pour que les
enfants qu'il a en France puissent profiter de l'éducation qu'il a
l'intention de leur donner sans que ceux à qui il les adresse puis-
sent y mettre obstacle : et c'est de quoi je vous prie de le prévenir.
Au reste les témoignages que vous me rendes de lui s'accordent avec
ce qui m'en est revenu de tous les tems.
Il résulte de cette correspondance que MM. de Larnage, gouver-
neur général, et Maillart, intendant, affirmèrent que cette dénon-
ciation était une vengeance qu'avait voulu exercer le Père Rliedon :
contre qui ? Peut-être contre M. de Paz ; mais, à coup sûr, contre
ces administrateurs qui, pour ne point s'exposer à un blâme du roi,
furent obligés de dissimuler la vérité et de déclarer qu'il n'y avait
aux Iles que trois Juifs formant seulement deux maisons, lorsqu'il
est certain qu'il s'en trouvait, au contraire, un bien plus grand
nombre, que les autorités connaissaient parfaitement et qu'elles se
gardaient bien de nommer. Il est certain également que plusieurs
Juifs se convertirent vers ce temps pour se mettre à l'abri des
persécutions populaires* soulevées contre eux, pensant éviter
ainsi la ruine de leur industrie ou de leur commerce ; car ils igno-
raient quelle serait la réponse qui serait faite au ministre par les
administrateurs. Ce mouvement fut loin cependant d'être général,
et pour quelques conversions auxquelles on donnait un apparat et
un retentissement qui s'alliaient fort peu à des convictions sincères
et profondes, la très grande majorité des Juifs resta fidèle à sa foi,
malgré sa perplexité et ses craintes. Les Juifs y furent d'ailleurs
' Les mauvais plaisants même y contribuèrent, Icmoin le fait suivant que nous
avons trouvé dans des notes sur les colonies : • Une négresse fanatique intcrro-
" gcait depuis longtemps le Christ du Petit-Goavc pour sçavoir qui l'avait crueilié.
» Un plaisant se cacha un jour derrière le pied d'aulel do maçonnerie et répondit :
• C'est Meudez ! La négresse prit des pierres et fondit dans la maison de ce juif
» qu'elle voulut lapider et qui lut obligé do fuir pour échapper à sa sainte fureur. »
(Arch. du Minist, de la Marine. — CoUect, M. S. — P. IL, t. II, p. 502.
144 REVUE DES ETUDES JUIVES
encouragés par l'exemple que leur donnèrent les deux sœurs Gra-
dis qui, à l'honneur de cette famille, refusèrent d'épouser les frères
Mendez, nouveaux convertis, bien que leur frère, Abraham Gradis,
dont elles étaient héritières, eût exprimé un tel désir, alors que
les frères Mendez, ses associés, appartenaient encore à la religion
juive.
C'est, sans doute, au dépit occasionné par ce refus et à l'influence
que les deux frères Mendez pouvaient exercer sur l'esprit de quel-
ques juges à la Martinique que les demoiselles Gradis durent de
voir le procès, commencé en 1739, se prolonger pendant douze
ans et ne prendre fin que le 16 juillet nsi. Encore fallut-il que
Judith, l'une des sœurs légataires, payât de sa personne et se
rendît à la Martinique. La famille de Rochechouart, qui était fort
liée avec David Gradis et qui fit ce long voyage avec Judith, mit à
la disposition de sa compagne de route sa grande influence et les
relations puissantes qu'elle avait aux colonies.
Disons un mot de ce procès. — De la correspondance que nous
venons de publier il résulte qu'Abraham Gradis, mort à la Marti-
nique, avait fait un testament par lequel il léguait toute sa fortune
à deux de ses sœurs non mariées, à l'exclusion de ses deux autres
sœurs mariées dont l'une était devenue catholique. Celle-ci de-
manda l'annulation du testament et fit parvenir au ministre un
mémoire à ce sujet. M. de Maurepas, qui transmit ce mémoire aux
administrateurs, songea un moment à faire saisir la succession au
profit du Trésor par dy^oit cCanljaine. Mais, sur les observations
judicieuses de MM. de Champigny et de la Croix, il abandonna cette
prétention et laissa à la justice le soin de trancher la contes-
tation soulevée. Les arguments de la sœur déshéritée consistaient
en ces deux points : 1° la qualité de Juif devait empêcher son frère
de disposer de ses biens aux colonies ; 2° sa qualité de Juive con-
vertie était le seul motif de son exhérédation. Le juge rendit une
sentence qui cassait le testament et ordonnait le partage égal
entre toutes les sœurs. Appel de ce jugement fut interjeté par les
deux parties : 1° par les deux sœurs légataires pour demander la
validité du testament ; 2° par Suzanne Gradis contre la décision du
juge qui n'avait pas adjugé à elle seule, catholique, l'héritage tout
entier. L'affaire, portée devant la cour de Port-au-Prince, fut étu-
diée à fond et rapportée par le conseiller Dessalles qui fit ressortir
avec beaucoup de clarté et de vigueur la contradiction qui se trou-
vait dans la sentence môme*. Sur ses conclusions, un arrêt fut
' Nous donnerons en supplément ce rapport plein de vues élevées, do raisonne-
ments judicieux et précis. V. Pièce supplémentaire.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII' SIECLE 1 iij
rendu le 6 juillet 1752, qui niit les appellations respectives avec
ce dont est appel à néant, émendant or^donne l'exécution du
Testament du feu sieur Abraham Gradis, les dépens pris sur la
masse de la succession ' .
Le jugement et l'arrêt dont nous venons de parler ne sont pas
les seuls d'ailleurs qui reconnaissent aux Juifs des colonies le droit
de disposer de leur fortune, bien que cette jurisprudence fût con-
traire aux prescriptions rigoureuses de l'article premier du Code
noir. Toutes les Cours des colonies jugeaient dans le même sens et
refusaient au directeur du domaine le droit de revendiquer comme
aî^&(2t>2e les successions des Juifs. Cependant les simples juges,
plus influencés par leur entourage, admettaient généralement les
prétentions du directeur du domaine. L'arrêt du conseil de Léo-
gane-, du 8 mars 1751, condamnait le receveur des aubaines à
remettre à Emmanuel Cardoze, Juif de la Généralité de Bordeaux,
les deniers, titres, papiers et renseignements de la succession de
David Cardoze, son frère ; l'arrêt du conseil du Port-au-Prince^ du
4 juillet 1759 et l'arrêt du conseil du Cap ^ du 6 octobre 1759, à
propos de la succession de Moïse Daguilard sont conçus dans le
même esprit et basés sur les mêmes considérants.
Ab. Cauen.
[A suivre.)
» Arch. du Minist. de la Mar. — CoUect. Moreau St-Méry. — Code de la Marti-
nique, ad animai.
">■ Moreau de Saint-Méry, Lois et constitutions des colonies françaises d'Am&if/ne
sons le Vent, etc. Paris, 1787, t. IV, p. 66.
3 Idem, t. IV. p. 260.
* Idem, t. IV, p. 293.-
T. IV. 10
NOTES ET MÉLANGES
JOSEPH LE ZÉLATEUR
I
Bans le second article de M. Zadoc Kahn sur Joseph le Zélateur ' ,
on a Yu avec quels artifices Joseph Officiai a mis sa signature
dans la poésie qui termine le Vihkiiah. Si on considère que, dans
cette poésie, il y a des mots à double sens ('^n^N, par exemple,
fait à la fois 'TinN et ^n2N = Joseph ; Vn -«osn fait aussi ^n-'çdn;) ;
si en outre on remarque que le nom de Joseph se trouve encore
une seconde fois en acrostiche, au commencement des lignes 3 à
6, on trouvera peut-être légitime Th^^pothèse suivante. Dans le
ms. de Hambourg de Joseph f<2p73r!, il y a quelques observations
de R. Ascher, frère de Joseph b. Natan l'Official. Ces passages
manquent dans le texte du ms. de Paris, et s'y trouvent ajoutés
en marge, sans nom d'auteur. M. Zadoc Kahn dit avec raison -
que « cette suppression du nom d'Ascher dans le ms. de Paris a
quelque chose de singulier. » Je crois avoir trouvé Texplication
de l'énigme. Le poème final dont je viens de parler laisse entre-
voir qu'Ascher a assisté son frère pour la rédaction du Vikhiiah,
mais que, par modestie, il ne voulut pas être nommé. C'est aussi
pour cela qu'il n'est pas mentionné dans le ms. plus ancien de
Paris, mais plus tard, la part qu'il eut à l'œuvre fut connue et son
nom trouva place dans le ms. plus jeune de Hambourg. En effet,
le second vers du petit i)oème dit :
mmï:nn a-^b^aiib ■'srjTT Trôna ■^s-its' ï-id ns' niiîN
ce qu'on peut traduire par : « [Dieu] qui m'a aidé, etc., "iiaN, »
' 'l'oiiie III, paj^f 1.
'■■ Tome I, jiugc lii'j.
NOTES ET MÉLANGES !'•"
mais aussi, en lisant TipN, par : « C'est Asclier qui m'a aidé jus-
qu'à ce point et m'a permis d'achever ces Réponses. » En outre,
le poème commence et finit par ces mots by Dp niax bN "i"i2t^
nin-^nD, où ily a à la ibis un hommage à Dieu, un souvenir au nom
de l'auteur (']n3N = JoseC) et enfin, comme nous le supposons,
cette pensée que le frère de l'auteur, Ascher, a renoncé à ses droits
de paternité sur l'œuvre commune et les a sacrifiés à Joseph ^iiîn
'ai dp. Ainsi le poème mentionne Ascher et rend en môme temps
témoignage de sa modestie.
D. SlMONSEN.
II
1. — Je possède un Mahzor du rite romain, sur parchemin, oii
le texte des prières est entouré d'un ancien commentaire anonyme,
écrit par un Provençal ou du moins par un Français. Il cite, entre
autres, R. Jacob Tam, R. Elia, Maïmonide, R. Ascher de Lunel,
R. David Kimhi, et dit, f'^ 31 : y-MH bsn nn^ n3pn n-'n7:vs nSN ^5i
ni^n û'^D'm:\ n-iDom ...nsni:. Au f-^ 8, il y a ce passage : T-i)2-^b'^r>
in 3^^nr<n 1.^ ^-o'û'^îûp i^-npo ù-^p^brir! SnN ^tJDiN^sNp V"^^P'^
4'j'ib'-^jir,n. Au f^ 7 se trouve un passage qui a été aussi communi-
qué par M. Zadoc Kahn, dans sa belle étude (III, p. 7), mais comme
il est plus complet dans mon ms., je le donne ici in-extenso :
'iÙ'^'Q -1313 1517272 b"03 iîb llMltnn ■ib-'Dï* '''2 1721î^ r!in3>1 1573» IITj, Nbl IfllN
iDb ']r\-ù NT- n-i:Di73 i2iii:-ia m "jnii'^a s"i'N ■'^ T^ir; î^-i'-i iiD\s m
innn li7073 npib rii'm -inr ^-^J^rii 1317:72 n^tn72 nitîi 157272 mibb "ç^i:'»::
Û1N "jw ^^ 13 b^^'^ CinN r^rn r;t)3'72'r;t5 ^Dbi i5iiti3 ni'-"»:? d"3>n V^^" n^'»^
y>b'J r:n^72nri '^i^sb i-;n'^5:;'n b:>i nb^T^r; bj' 172D ^72:3 D72n tVj Nmp
13 b-'ii-iTii nim72nri .dj> iniïî i3n5) b\s"'35ïii r!3n^ i3'r:-iT!Tm iriinri
r:-iinï-ii rinin -noNU) r!72 NbN in72N Nb b^pTn^i niii 1517272 v^t "^-''^^ ^"î^""
•i72i<2 Nbi "T^"::!-! -^nissb -i72N5;:5 17253 -ini72 ■^■iD5b b3N btîi'u-^b Nbis ï-iioi^ Nb
3i5:\b IN ibîr^b im ni5Tnb niON ■^-i:D5b ib-^sN -^d r:N5iN3i ns-^s:! rib"''î:^3
s-i-^n bNi"»::!"' ■^3) -ini72 in:>n3i i3i2:n3 157272 npib Ni'no "yû'T* b3N 1517272
TC13-I d'^uJ5N ii3'-i^! -^3) r!5n72r: 172 ni72ip?23 r;3i::2 inri ^i3rji non nioyb
' Capions, chaperons.
^ Clicmiscs.
3 (îarnic (garucmout, manteau).
* Gonellc (casaque d'homme).
148 REVUE DES ETUDES JUIVES
TN fNDio tDi-, m-i3 -ir) tïna iiit:» ib rmbnb-i non !?::> mt):5?b n-^in
bx-iw-^ n-i-T! bî<"iu;i t::? rim-Lii non "^i:;:: ï-i':;ir ûïî \s-m3 bnjî b^n'û-»
rt::rwn i3 N:i?:r">:; •^i'd !-!T3 ^b "innn-Tm , nb n^::r;bi icn i?::^ ^"> miu^'b
-noN n->3-i br) «bN "^isb bN-iï:-» ■j*':: ©"^-isni Nb mi "^s û-^-iwiNia û-^-iitiîb
iriN !-î:rîT b^n 1D":' rî":y 1221 riU)^ -i\n?T:5 !^72 ncN in -^^ pn-^ Nb riTi
. lîtttt ::>n:;n Nbi rb:? Sj-^oin isb ri-nna
2. — Les explications communiquées par M. Zadoc Kalm (III,
p. 27) sur les yersets ûT'D nn^To et ^pyib inm^a nx mrDXD'^T n'ap-
partiennent pas à un seul et même auteur. L'explication du pre-
mier verset se trouve bien, comme M. Zadoc Kalin l'indiqug (p, 28,
note 1) dans Daath Zékenim, mais ne peut pas être de Joseph
Beclior Sclior, puisque celui-ci, dans son commentaire (édit. Jel-
linek, Leipzig, 1856) explique tout autrement ce verset. Joseph
b. Nathan a donc fait ici une erreur de mémoire ou de copie.
L'explication du second verset se trouve dans le commentaire
de R. Samuel b. Méir, et est aussi mentionnée, mais sous le nom
de R. Mosché, dans Paeneach Eaza, mais R. Joseph Bechor
Schor la repousse formellement en disant : npr\ri;p s^s^a i:d 72"it
mNnn isirn t^i-^-ian ^i-npo n-T'Dwn mire Trr, br5^^î^î .'-in rrnisnr;
•'r^'n. Le mot français 'Ninna, que M. Jellinek a rendu par de-
veria, se trouve seulement chez Bechor Schor, mais non chez
Samuel b. Méir, et est remplacé dans Paeneach Eaza par un mot
allemand : - tj-^ipi-iV^ js"bn impffl.
S. J. Halberstam.
' De biberagium, beveragium, pourboire.
* Lehakauf, acquisition féodale.
BIBLIOGRAPHIE
HEYUE BIBLIO&UAPHIQUE
1"' TRIMESTRE 1882.
dïTnaN 5|&T^1 'D Dito libro esto ordinado en ladino para que todos coran
en su meldado, e es por las mbi'tt di Josef ha-çaddik n";> el affamado. . .
(Livre de morale eu l'honneur de Joseph, fils de Jacob, composé de deux
parties : 1° une apologie de Joseph en judéo-espagnol ; 2° une partie hé-
braïque contenant des homélies, extraits talmudiques et-midraschiques,
disposés par ordre alphabétique, sur le même sujetX par Joseph Palaggi
avec le concours de son frère Abraham Palaggi. Smyrne, imp. Hayyim
Abraham, 1881, m-i° de 43 + 106 ff.
Tilza ■'^2^lJ a treatise on the accentuation of thc three so-called poetical
Books of the old testament Psalms, Provcrbs and Job, witli an Appendix
containing the trcalise assigned to R. Jehuda ben Bil'am on the same
subject in thc original arable, by William Wickes. Oxford, Clarendon
Press, 1881, in-S» de x-119 p.
Un do nos collaborateurs rendra probablement compte de cet intéressant
ouvrage.
■1^33 TTabnb m^Nill û"'ï:5TT'D Scholien zum babylonischen Talmud, von
Abraham Krochmal. Lemberg, libr. Michael Wolf, 1881 ; ia-8° de 320 p.
L'ouvrage demanderait un examen détaillé que nous ne pouvons faire
ici. Il nous a paru très intéressant, et nous avons vu avec plaisir qu'il
s'occupe principalement des problèmes bistoriques et archéologiques du
Talmud.
Bauwerker (C). Das rituelle Schiichtou dcr Israeliten im LichLe dcr Wis-
senschaft. Kaiserslautern, libr. Gotlhold, in-8° de IG p.
Lecture publique faite le '.> décembre 1881. L'auteur se prononce en fa-
veur du maintien de la manière juive do tuer les bûtes, mais il voudrait
qu'elle fût améliorée dans certains détails.
Encyclopédie des sciences religieuses publiée sous la direction de V. Lich-
tcnbcrger. Paris, G. Fischbachcr, éditeur, 1881. Tomes X et XI.
Nous signalons, dans ces deux volumes, les articles suivants : Onias,
im RENTE DES ÉTUDES JUIVES
Oiikelos, Isaac Orobio, Osée, Olhoniel, Palestine, Paris (culte israélile,
p. 221), peines chez les Hébreux, Pentateuque (Maurice Vernes), Pente-
côte (Eug. Picard), Péripot Duran, Pharaon, Pharisiens (Edm. Stapfer),
Phénicie (Phil. Berger) , Philou (Jean Réville), phylactères, poids et
mesures chez les Hébreux, Pourim, prophétisme chez les Hébreux (Ch.
Bruston), propriété chez les Hébreux, Proverbes (Ch. Bruston), Psaumes
(Ch. Bruston), purifications chez les Hébreux, Rabbin, Rabbinisme, Ra-
chel, Rahab, Raimond de Pennaforte, Raphaim, Raphidim, Rébecca,
Réchabites, Adrien Reland, Respah, Livre des Rois, Ruben, Ruth
(AI. Vernes), Saba, Sabbat (Scherdlin), Sabbatbaires, Sabbathien, année
sabbatique, sacrifices (Scherdlin), Saducéens (Stapfer), Salomé, Salomou,
Samarie, Samson, Samuel, Livre de Samuel (M. Vernes), Sanaballat, San-
hédrin, Livre de la Sapience (M. Vernes), Sarepta, Saul, Schammaï
(Stapfer), Scribes (Stapfer), Sédécias,, Séir, Sennachérib, Sépulture chez
les Hébreux, Sésac, Seth, Livres Sibyllins (M. Vernes), Sidon, Siméon,
Richard Simon, Sinaï (A. Chauvet), Spinoza (E. Rabier), Sj'mmaque, la
grande Synagogue (A. Warnitz), synagogue.
Gellion-DanCtLar (Eug.). Les Sémites et le Sémitisme aux points de vue
ellinograpliique, religieux et politique. Paris, libr. Maisonneuve, in-18 de
s:i-199 p.
Ouvrage de polémique dirigé principalement contre la religion chré-
tienne à titre de religion sémitique.
Immanuel b. Salomo Romano. Comento sopra i Salmi, etc., publié par
M. le chevalier P. Perreau ; fascicules XXX et XXXI.
Kapff (L.-H.). Hebrâisches Vocabularium in alfabetischer Ordnung, mit
Zusammenstellung von Synonymen, gleich und âhnlicli lautenden Wôr-
tern und analogen Formen, nacb dem Ms. von D'' L. H. Kapff bearbei-
tet u. berausgg. von D'' L. Ableiter. Leipzig, libr. Halin, 1881 ; in-8° de
vi-178 p.
La Rochelle (Ernest). Jacob Rodrigues Percirc, premier instituteur des
sourds-muets eu France, 'sa vie et ses travaux. Paris, imp. Paul Dupont,
in-8° de 576 p.
Les chapitres x, xiii et xv contiennent des renseignements en partie
inédits sur l'établissement de la communauté juive à Paris, les services
rendus par Péreire à ses coreligionnaires, la création du premier cimetière
Israélite à Paris, en 1780.
Reuss (Eduard). Die Geschichtc der heiligen Schriften Alton Testaments;
zweite Iliilftc. Brunswick, libr. Scbwctscbke, 1881 ; in-8° allant de p.
401 b p. 743.
OuvERLEAUX (Emile). Notice sur une inscription hébraïque dccouvorte à
Béjar. Bruxelles, imp. Lhoest, in-8° de 19 p*. Extrait de l'Athcnivum
beige du 15 février 1882.
Cette inscription très curieuse, découverte eu 1X77, a été décrite par
M. Nicolas DJaz y Pcrcz dans l'Averiqiiador uuiversal do Madrid, n° du
li) novembre 1879, et dans une brochure de M. Augustin Blasco [Jipigrafia
hebraica, piedra sépulcral ; Madrid, imp. Aribau, lS8l) avec le concours
de notre savant ami M. Fidel Fita. L'inscription est composée de quatre
lignes disposées en carré. M. Ouvcrleaiix a fort bien lu les deux lignes
latérales et la ligne inférieure, qui forment ensemble la première partie
du verset 14 du psaume VJ : !l73"'3D ^12 P3 ïlliniD bS- La ligne supé-
rieure seule, qui renferme le nom do la jirrsonue enterrée, offre de la
ilinicullé. Autant qu'on en peut juger d'a|)rès la reproduction imparfaite qui
BIBLIOGRAPHIE ir.I
a été donnée de ce monument, cette ligne doit so lire ainsi : N"^:!!
N'^j"'N'nN3- Le premier mot n'oirre pas de difficulté, c'est le nom de doua
(donia, dame). Dans le second mot, il n'y a de douteux que les deux "n,
le premier pourrait être un 1 ou un "i. Le N qui suit le D est archaïque,
de la même forme que ceux dont nous parlons plus haut, dans l'article sur
les Juifs de Barcelone (p. 6a). La coexistence des N archaïques et des N
modernes ne doit pas étonner, on la rencontre également dans les inscrip-
tions publiées par M. Ascoli. M. Ouverleaux prend le second mot pour
Paldoinia (en supposant que le signe que nous prenons pour N archaïque
soit le signe ^Nj ou bien Padoinia, ce qui serait le nom Baldoina, féminin
de Baldcwin, Balduin (en fr. Baudouin). Si la troisième lettre du mot
pouvait être b, nous ne serions pas éloigné de penser que nous avons ici
le nom de Falvinia pour Flavinia (comme, par exemple Porvençal pour
Provençal, Revue-, III, p. 236 ; ces inversions sont fréquentes). îî"^:"^ïîl
pour i-inia (avec un N entre la l"' et la 3*^ lettre) s'expliquerait peut-être
par cette circonstance que le groupe iT semble avoir servi à représenter le
son au (Ascoli, p. lo).
Palestine et Syrie, Manuel du voyageur, par K. Baedeker, avec 18 cartes,
43 plans, un panorama de Jérusalem et 10 vues. Leipzig, libr. K, Bae-
deker, in-8° de xiv-631 p.
Quoique cet ouvrage soit apprécié plus loin dans un article, du savant
M. Duval, nous croyons devoir en parler ici à un point de vue différent.
Ce guide ne ressemble à aucun autre, il est supérieur à tout ce que
nous connaissons en ce genre. On n'en sera pas étonné quand ou saura
qu'il est principalement l'œuvre de M. Albert Socin, un des savants qui
connaissent le mieux le pays. Ce qui en fait l'originalité et le mérite ex-
ceptionnel, c'est que tout en fournissant au voyageur tous les renseigne-
ments pratiques les plus détaillés et les plus précis, il lui donne, sur l'his-
toire et la géographie anciennes du pays, l'archéologie, les monuments de
l'art, les grands ouvrages du génie civil et militaire, des informations pui-
sées aux meilleures sources et toujours dignes de confiance. L'auteur a
accompli uu immense travail de condensation en résumant, dans ces 600
pages, très compactes, il est vrai, une littérature des plus vastes. Son ou-
vrage ne sera pas seulement un guide sûr pour le pieux pèlerin qui va
surtout eu Palestine pour y chercher des souvenirs religieux et des émo-
tions pieuses, il peut aussi servir de manuel et de répertoire excelleut
à l'archéologue et au savant. Il fait l'identiUcalion des lieux bibhques,
indique l'âge des monuments, mentionne les hypothèses vraisemblables,
signale les problèmes encore pendants, le tout sans aucun pédantisme et
sans formules rébarbatives. Si l'on veut, par exemple, parcourir avec lui
Jérusalem, ou sera d'abord rais au courant de la question topographique
la plus grave qui concerne cette ville, celle de l'identification de l'an-
cien Sion et de l'emplacement de la Tille de David. Puis le voyageur
recevra dos notions justes sur l'histoire de la ville, de ses monuments,
de ses fortifications, sous Salomon et les rois, principalement sur les tra-
vaux que fit exécuter le roi Ezéchias. La Jérusalem du temps de Né-
hémie, avec toutes ses complications do noms bizarres, lui sera ensuite
décrite. Enfin viendra la Jérusalem d'IIérode, le temple, le Ilaram actuel,
la description des trois enceintes, le problème si controversé do l'empla-
cement du Golgotha. En parcourant, du dehors, l'enceinte du temple d'IIé-
rode, le voyageur apprendra en gros tout ce qu'on sait aujourd'hui sur
les portes (l'auteur a probablement tort d'appeler les portes du sud • por-
tes de la irrophétessc lloulda •) de cette enceinte, sur l'âge des assises du
mur gigantesque de l'enceinte, sur les parties de cette enceinte qui, soit
au Sud soit au N.-O., peuvent être du temps de Salomon, sur ce fait cu-
rieux qu'aux angles S.-E. et N.-O. les fondations enjambaient d'uu côté
la vallée de Tyropéon, de l'autre côté uu dérivé de cette vallée, etc. Eu
132 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
pénétrant dans l'intérieur du Haram et des maisons environnantes, on sera
mis au courant, par exemple, des récits historiques et des légerdes sur le
roc sacré, et Tauteur n'a même pas oublié que dans la salle du Tribunal il
y avait autrefois un beau sarcophage qu'on peut admirer maintenant au
Louvre. Les environs de Jérusalem, les tombeaux nombreux et les grottes
qui se trouvent au N. et à l'E. de la ville sont étudiés avec le même soin
et la même science. La Jérusalem souterraine et les galeries et canaux
qui la traversaient auraient peut-être demandé une description plus com-
plète ou du moins plus ramassée. Il nous semble aussi que Jérusalem au-
rait mérité d'avoir des cartes topographiques plus détaillées, l'ouvrage en
était digne.
Dans les autres parties du livre, nous avons lu particulièrement avec
intérêt les chapitres consacrés à Hébron, aux eaux d'Etam, à Masada,
Pétra, Arac-el-Emir, Jotapata, Bettir, aux synagogues de Kefr-Birim
(p. 398).
Il est clair qu'un travail si considérable ne peut pas être absolument
parfait. Les renseignements sur l'état actuel des Juifs sont très maigres
et quelquefois inexacts. La population de Jérusalem, au dire de tous ceux
qui connaissent la ville, est bien supérieure à 2^,000 âmes (l'auteur sait
fort bien que les recensements officiels sont des plus incomplets) et la po-
pulation juive de la ville n'est ni de 4,000 ni de 8,000 âmes (p. 1G9), mais
au moins de 13,000 âmes. Les écoles primaires juives ne sont pas mea-
tionnées (p. 169). A JafTa, à Beyrouth, l'auteur n'indique pas l'existence
de communautés juives; à la liste des écoles de Beyrouth, il aurait pu
ajouter deux écoles fondées par l'Alliance israélite (il mentionne celle de
Damas) et une institution privée. Sur le plan des environs de Jaffa, les
mots « Colonie agricole de l'Alliance israélite » doivent être remplacés
par ■ Ecole agricole do l'Alliance israélite >. Nous ne savons ce que c'est
que les ouarchi de la p. 94.
Renan (Ernest). L'Ecclésiaste, étude sur l'âge et le caractère du livre.
Dans Revue des Deux-Mondes, n° du 15 février.
Cette étude, sur laquelle la Revue reviendra plus tard avec plus de
détail, doit servir d'introduction à la traduction de l'Ecclésiaste que
M. R. veut publier bientôt. Elle contient des pages très aimables sur
« le charmant écrivain qui nous a laissé cette délicieuse fantaisie philo-
sophique ' homme du monde et de la bonne société, qui n'est à propre-
ment parler ni blasé ni fatigué, mais qui sait en toutes choses garder la
mesure, sans enthousiasme, sans indignation et sans exaltation d'aucune
espèce. M. R. considère le titre de Cohélet comme une énigme qui n'est
pas encore déchiffrée. Il pense que le livre est très moderne et rédigé vers
l'an 125 avant l'ère chrétienne. La doctrine de l'auteur ne lui semble pas
provenir du scepticisme grec, mais représenter un état spécial, et qui n'est
pas sans antécédents, de la pensée juive. Celte étude si intéressante et
pleine de charme se termine par une page qui nous paraît regrettable à
bien des égards et que M. Renan ferait bien de supprimer dans l'édition de
son livre.
RuLF (J.). Drci Tage in Ji'ulisch-Russland, ein Cullur- und Siltenbild.
Francforl-s-M., libr. Kauirmann, iu-8" de vii-131 p.
Intéressante relation de voyage dans la Pologne russe.
Stein (Ludwig). Bcrtliold Auorbach und dass Judcnihuni. Berlin, libr.
Drlcsner, ln-8" de 10 p.
M. Stein a eu raison de faire le portrait éloquent de Borthod Auerbach,
qui vient de mourir (né 28 février 1H12) et de vanter sou attachement au
judaïsme. La vie du grand écrivain allemand et ses œuvres mériteraient
d'être spécialement étudiées au point de vue juif.
BIBLIOGRAPHIE 153
Strack (H -L.) [et M. Steinschneider ?]. Geschichte der Juden : a. bis zur
Zerstôrung Jerusalems ; b. von der Zerst. Jerusal. bis zur Gegenwart.
Rapport ancuel sur les ouvrages historiques concernant le judaïsme,
extrait du Jahresbericht der Geschichtswissenschaft, 2e année, pour 1879 ;
Berlin, Mittler, in-8°, allant de p. I. 43 à p. I, 67.
Le Talmud de Jérusalem traduit pour la première fois par Moïse Schwab ;
tome V, traités Pesabim, Yoma, Sclicqalim. Paris, libr. Maisonneuve,
gr. in-8° de iv-332 p.
Lorsque M. Schwab a commencé celte œuvre importante, on pouvait
douter qu'il fût possible de la continuer, tant elle aemande de labeur et
d'application I\L Schwab a maintenant convaincu les plus incrédules,
puisqu'il en est au 5° volume de sa traduction. Les autres volumes ne
manqueront pas de suivre. A mesure que l'œuvre avance, on peut mieux
apprécier son incontestable utilité et les services queUe rend a ceux qui ne
peuvent pas lire le texte. Ce sera la première fois qu en dehors du monde
des talmudistes on pourra embrasser toutes les parties du Talmud. Il im-
porte peu, par un tel travail, que la critique ne soit pas encore arrivée a
tout comprendre ; les imperfections de détail inhérentes a une pareille tra-
duction disparaissent dans l'ensemble de l'œuvre et dans cette vue géné-
rale qu'elle donne du Talmud.
Weill (AlexandreX L'Isaïe du faubourg Saiut-Honoré. Paris, lib.Dentu;
in-18 de 236 p.
Cet ouvrage est un recueil de poésies ou de satires contre l'état social
moral et politique de la France depuis 1870. Il n'est pas seulement ju,
parle titre, mais il est tout imbu de l'esprit hébraïque, M. Al- Weil est
un prophète à sa manière, et quelquefois un prophète éloquent.
ZucKERMANN (B.). Materialeu zur Entwickelung der alljiidisclien Zeitre-
chnung im Talmud; dans le Jahresbericht du séminaire rabbmique de
Breslau. Breslau, imp. Schottlander, in-8° de 68-xi p.
M le D'" Zuck. a réuni et expliqué, avec son érudition ordinaire, les
passages talmudiques relatifs à l'histoire du calendrier juif (le tribunal qui
entendait les témoins de la néoménie, résidence de ce .tribunal, les temoms
et témoignages, l'annonce de la néoménie au dehors, longueur des mois,
de l'année, etc.). Ce recueil sera très utile pour étudier les origines encore
très obscures de notre calendrier actuel.
Revue des périodiques.
^^^^j^ P^^ Beth-Talinuil (Wien, mensuel). 2° année. = = N" 6. Weiss :
Biographie de Raschi (suite). — Friedmann : Esprit de la Ilaggada
(suite). — II. Oppenheim : Histoire de la Mischna. — Marco Mortara :
Explication d'énigmes d'Abr. ibn Ezra par maître Profiat Duran. —
L. Eisler : Sur divers passages du Commentaire d'Abr. il)n Ezra sur
Isaïe cl les douze prophètes. = = N» 7. Weiss (suite). - Friedmann
{^niie). — Eisler (suite). — J. Reifmann : Mots syriaques dans la Bible,
le Talmud, le Midrasch ; sur le Targum des Psaumes. = _ N° 8. Weiss
(suite). - Friedmann : Mœurs des patriarches. — Oppenheim (suite du
n° G). — Jacol) Brïill : Le sens du mot Nn^35. — Friedmann : Note sur le
calendrier. - Selig Cohen : Notes talmudiques. = = N" 9. Weiss
Ib'i REVl'E DES ETUDES JUIVES
(suite). — Fricdmann, Patriarches (suite). — Oppenhcim (suite). — Feiss
Rosenlhal : Date de la composition du Targum Onkelos. = = N° 10.
Weiss (suite). — Friedmnn (suite). — Oppenbeim (suite). — Néh.
Briill : Origine et histoi'-e de h. pratique concernant la purification des
mains.
"nriia^i Haschachar. .;îe Morgenrœthe (Wien, mensuel), 10^ année. = =
N° 8. Lilienblum : Sur Israël et la Palestine. — La terre de gloire (Pa-
lestine). — D'' Miller ; Mots syriaques dans la Bible. — Modlinger :
Recensioû de l'édition du Lékah toh, de S. Buber. — David Kabana :
Massoret Siag la-wi^va. = = N° 9. La terre de gloire, Palestine (suite).
— W. Scborr : Relation d'un voyage sur l'Eupbrate. — Salomon Buber :
Réponse i une critique de son édition du Lèkah-tob. — Lettre sur la
manière de ' ompter les mois chez les Hébreux. — Bibliographie (Meh-
ke/'é Kohéi,d, de David Kahana ; Delar Bsther, du même ; Samuel ha-
Nagid, de A. Harkavy, etc.). = = N" 10. W. Schorr : Relation d'un
voyage sur l'Euphrate (fin). — La terre de gloire. — Jos. BrùU : Midrasch
Soferim (polémique). — Moïse Orenstein : Histoire des peuples anciens
(suite).
Archives Israélites (Paris, hebdomadaire). 43° année. = ::= N" 1.
M. Schuhl : Superstitions et coutumes populaires du Judaïsme contem-
porain. IL Gamzou letobah. = r= N°® 2, 3, 5. Ernest David : Histoire
juive, les Texeira.
Dcr Israielit (Mayence, hebdomadaire). 23^ année. = = N° 5. Nochmals
ein Wort iiber die Lage des Gartens Eden.
Suite des articles intéressants qui ont paru dans les u°* 42,. 43, 44 de
l'année précédente eS que nous avions omis de signaler.
Journal asiatique (Paris). 7° série, tome XVIII, n° 2, octobre-décem-
bre 1881. = = René Basset : Etudes sur l'histoire de l'Ethiopie,
1'"'^ partie. Chronique éthiopienne. = = Barbier de Meynard : Le livre de
Sîbawaihi, traité de grammaire arabe, publié par Ilartwig Derenbourg.
Israclietisclie Letterbode (Arrsterdam, trimestiel). = = 7^ année,
1''' livr., p. 1 h 48. — M. Stcinschneider : Purim und Parodie, bibliogra-
Ijhisclic Nnliz (littérature du Purim). — Ad. Ncubauer : Pseudo-Biogra-
phie von Maimonides, ms. des Beth ham-Midrasch in London (texte
hébreu). — M. Roest : Onuitgegeven Stukken betreffeudc de Bibliotheek
en de nalalcnschap van David Oppenbeim. — Ad. Ncubauer : Liturgien
ans der Ilds. Casanata, II. V. 7, in Rom. — H. J. Malbews : Notes on
the Minor Prophets by 3"NT (Notes tirées de deux mss.). — Zur Bibel-
forschuug. — Die Gruppirungsgedanken einiger Pcntateuch-Parlieen.
Roest : Deux pièces, datées do ITy;!, dont Tune de Moïse Mendelssohn,
sur la valeur de la célèbre bibliothèque Oppenbeim. — Ncubauer, Litur-
gien : Poésies liturgiques de Menahem Méiri, de Simon b. Josef ou En
Duran (Durant) do Lunel, et de Juda bar Galonymos.
Das jiitlisclie Literaturblatt (Magdchourg, hebdomadaire). 10'' année. =:
= N" 48. Lewiii : J, Salvador. — Lôwy : Was ist fi-^Nb::, Sam., I, 15,
4 ? =: := N° 4'J. Lewin (suite). — Weshalb sind im Talniud u. Midrasch
die Ilasmon. — Siegcslliaten niu" schwasch erwiihnt. = = N° 50. Lewin
(suite). — Wcshallb sind. . . (suite). = = N" 51. Lewin (fin). — Schcflel :
Benieriiiingen zur Mas^ora auf Oukclos. = = IP année. N" 1. Ein
B]BLIOGru\PinE liio
Bciirag zur Gcschichtc dcr Frankislen. — M. Jastrow : Bemcrkuugcn zu
D"" Gebhavdls Beilragen -^ur Erklarung griecLisclier Wôiicr in den Mi-
drascliim u. Talmudeu. = = N° 3. Eiu Beitrag zur Gesch der Fran-
kisten. — Jastrow (suite). = = N° 3. Caro : David's Testament. —
Jastrow (suite). = = N° 5. Ad. Jellinek : Galdos (sur un roman "Gloria,
de Don Benito Pevez Galdos, Madrid, 1878). = = N° 6. J. Minor : His-
lorisches zur Bcrliner Judenfrage. = = N ■ 7. Minor (suite).
IVagazin fiip dio Wissenschaft des Juifeiithuîns (Berlin, trimestriel).
8'^ année. = = N° 3. Hoffmann : BemerkuniJcn zur Kritik der MiscJina.
— Lerner : Anlage des Bcreschit-Rabba und seino Qucll'jn. — ■ Ans
Briefen von David Rosin (Sur la date du Séfer ha-hiuni-.k ; sur le Com-
mentaire dé Samuel b. Méir sur Maccot, etc.). — Literar'r-boriclit. —
Recensionen (Gûdeman ; Glosses et Glossaires d'A. Darmesteter). = ::^-,
N° 4. Hoffmann (suite). — Lerner (suite). = = 0:ar toh, sup]jl''mru1
hébreu au Magazin, année 1881. Contient : 1'' \':^^ù^ îT'wp, livre d'Apolo-
gie du Judaïsme de Simon b. Çérçiar Duran, réédité par M. Steiusclmei-
der, d'ap'"ès des mss. — Jacob Reifmann : û"i7:b:'3 r;ï2M, Dix-sept lettres
adressées par A. Firkowitz à J. Reifm. et renfermant des renseigne-
ments sur des poètes et littérateurs Juifs.
Steinschneidec : Nous sommes très heureux de la réimpression de ce
célèbre ouvrage. — Reifmann : Documents. très importants pour l'histoire
de la littérature juive en Espagne et en Afrique : 1. Lettre de Jehosef le
Sefardi (Josef fils de Samuel ha-nagid ?) à R. Nissim, à Cairoan ; 2. Poésie
de Moïse b. Ezra à Hananel b. Josué ; 3. Lettre du même au même ;
k. Lettre du même à un inconnu ; 5 et 6. Lettre à Barukh b. Isaac (Al-
balia?) et réponse; 7. Lettre anonyme; 8. Poésie adressée par Samuel
ha-uagid à R. Hananel.
Monatsschrîft fikr Gesehickte und Wissenschaft des Judentliunis
(Krotoscliin, mensuel), 30" année. ::= = N° 11. Graetz : Agrippa II. —
J. Theodor : Zur Composition der agadisclien Homelicn. — Graetz : Die
urspriïngliclie Auspraclie des d Lautes im Hebraiscben. = = N° 12.
Graetz : Die jûd, Stcinsarkopbage in Palastina. — M. Brann : Zum
Ofener Judenmord 1686. — Gross : Méir b. Simon (fin). — Brann :
Nachtrag. = = 3P année, n° 1. Frankl : Karaische Studien. I. Jehuda
Hadassi und sein Eskol hakofer. — Graetz : Zur Topographie Palastina's ;
Koreaï , Sartaba , Alexandrion , Kônigsberg, Ilyrkanion, Ccndevia. —
Frankl : Erinnerungen und Denkmaler der jiid. Gemeindc in Berlin. I.
Mcudclssobn's Stellung in der Gemeindc. — J. Landsberger : Zur Ge-
schichte der Juden in der Mark Brandeburg, insbesonderc in der Stadt
Stcndal, um die Mitte des xv. Juhrhunderls. = = N" 2. Horowitz : Ucber
die Péripétie im Buchc Esther. — Frankl : Kariiische Studien (suite de
Juda Hadassi). — David Kaufmann: DasTodesjahrdcsR. Isakbar Schcs-
chct (d'après l'inscription française dans le mur de la ville d'Alger et
l'épitaphe hébr. imprimée pour la première fois). = = N" 3. W. Bâcher :
Die Agada der Tannaiten. — Graetz : Aus dor Gcdiichtuissrcde am Ster-
betage des Stifters des jûd.-thelog. Sominars, Jonas Frankel. — Grùii-
baum : Jïulisch deutschc Chrestomathie (recensioii de W. Perles). —
Hochmuth : Gotteserkcnntniss (rccension de M. Rosiu).
niosè, Ant<>Iogia israclitica (Corfou, mensuel). 5*' année =: = N° 1.
P. Perreau : La Caiilica di Salonione ed i Commenlatori isracliti del
medioevo. — S. D. Luzzatio : Autobiografia (suite). = =•■= N° 2. P. Per-
lo6 • REVUE DES ETUDES JUIVES
reau (suite). — Luzzatto (suite). — Quinto congressointernaz. degli Orien-
talisti tenuto in Berlino 12-17 sett. 1881 (suite\ — F. Parisini : I Cautici
di Salomone Rossi. = = N° 3. Perreau (suite).
Palestine Exploration Fund (Londres, trimestriel). = = Janvier 1882.
Notes and News. — Lieutenant Conder's report n° IX. — Clermont Gan-
neau : Notes n°^ II, III, IV. — Boscawen : A Pliœnician Funeral Tablet.
— Tomkins : Kadesh on Orontes. — Bircli : The rock Rimmon. — Birch :
The Valley of Hinnoni and Zion. — Birch : Variétés. — Sayce : The
Siloam inscription. — Henderson : Kirjath Jearim.
Conder : Notes sur l'identification de diverses localités bibliques (Sedé-
Çofim, Luhitj lazer, Sibœa Minnit), sur Hesbon. — Cl. Ganneau, note II :
Sur le chapiteau d'Amwas {Revue, III, p. 296).
ïiie Hebrew-Review' (Cincinnatti, trimestriel), 2" volume. = = N° 1.
Annual Address of D'" Max Lilien thaï. — Cyrus and the return of the
Exil (traduction de l'article de M. Jos. Halévy dans la Revue, n° 1). —
Felsenthal : The science of Judaïsm, ils nature and its divisions. — A.
Jellinek : Rédaction of the Mishna. — Jos. Derenbourg : In cxplanation
of somc Psalms (traduit du journal de Stade?). = =; N° 2. Retrospect of
the History of the Jewish People (traduction du Coup d'œil de M. James
Darmesteter). — Mielziner : The talmudic Analogy or the rules of Gesercc
sliawa and lieckesli. — E. Lucius : Essenism in the middle of the first
Century (traduction ?). — Isaac M. Wisc : The INIassorah and the masso-
rctic Tcxt.
Revue de l'histoire des religions (Paris, trimestriel). 2° année, tome IV,
n° 5, septembre-octobre 1881. = = H. Oort : Bulletin du Judaïsme
postbiblique (Z« doctrine du Logos dans le 4^ évangile et dans les œuvres de
PhiloH, par Jean Réville ; Sgstem der altsynagalen palastin. Théologie, par We-
ber) ; etc. = = N° 6, novembre-décembre 1881. Maurice Vernes : Bulle-
tin critique de la religion juive, Judaï.sme ancien ^Histoire critique de la
littéral, prophétiq. des Hébreux, par Ch. Bruston ; Histoire de la Bible,
par L. Wogue ; Coup d'œil, etc., par J. Darmesteter ; J. Salvador ; sur le
nom deYahvéh, par G. d'Eichthal ; Esdras, par J. Ilalévy).
L'Univers israélite (Paris, bi-mensuoP. 37° année. = = N° 9. Moïse
Weill : Les noms des mais hébreux. = = N'^ 11. M. Schuhl : Préven-
tions des Romains contre les Juifs.
Il Vcsslllo israclitico (Casale-Monferrat, mensuel). 30° année. =: =
N° 1. A. Pesaro : Cenui storici sulla Comunità isr. di Lugo (suite). — P.
Perreau : Nuovi studii (suite). — M. Lattes : Letteratura antigiudaica in
lingua italiana. = = N° 2. A. Pesaro : Cenni storici sulla comunità isr.
di Cento.
Zeitsclirift der deutsriien nior^^enliindischcn Gcscllscliaft (Leipzig,
trimestriel). = = 35" volume, 4° fascicule. — Mordtmann : Die him-
jarisch-alhiopischen Kricge noch einmal (Le roi juif Dhu Novas et les
chrétiens de Nadjran). — Perles : Bemerkungcu zu Bruns-Sachau sy-
risch-rumisches Rechtsbuch aus dcm 5. Jahrhimdert (Voir Revue, II,
]). 331 ; suite). — Ed. Sachau : Palmyreuischc Inschriflen.
ISIUORK LOEB.
BIBLIOGRAPHIE 137
Palestine et Syrie : nianuel du Voyageur, par K. B^edeker, avec 18 cartes,
43 plans, un panorama de Jérusalem et 10 vue?. Leipzig, Karl Bœdeker. 1882,
iiv et 631 p. in-16.
Grâce à la traduction française que M. Bœdeker vient de publier
du Manuel du Voyageur en Palestine et en Syrie, C3 livre est appelé
à trouver en France le succès qui Ta accueilli en Allemagne, où il en
est déjà à sa seconde édition. Un voyage dans ces contrées, comme
le fait observer l'auteur dès la première page, n'est pas une simple
distraction de touriste, en quête de beaux paysages. Le pays, gran-
diose par son passé, vit surtout de souvenirs ; pour le comprendre, il
faut apprendre à le connaître tel qu'il était aux époques de sa pros-
périté. C'est dans cette pensée que l'éditeur a confié la rédaction de
ce guide à M. Socin, professeur à l'Université de Tubingue, dont la
réputation de savant est faite depuis longtemps. M. Socin était bien
préparé pour cette œuvre, car, pendant de longs mois, il a visité et
fouillé en archéologue passionné le pays où il nous conduit. Si par
son titre le livre s'adresse au voyageur, par l'abondance de ses ren-
seignements, dont quelques-uns sont tout à fait neufs, il forme une
encyclopédie aussi utile à l'orientaliste qu'au grand publie qui aime
à s'instruire.
Nous passons les 132 premières pages spécialement destinées au
voyageur et relatives à la manière de voyager, à l'histoire et à la géo-
graphie, pour arriver aux cinq cents pages suivantes qui renferment
la description des lieux et qui intéressent davantage les lecteurs de
cette Revue.
Ce n'est pas sans émotion, qu'en parcourant ces feuillets, nous re-
trouvons nos impressions d'autrefois, alors qu'il nous était donné de
faire ce voyage, objet de tant de vœux! Nous retrouvons ces lieux
tels que nous les avons laissés il y a douze ans. On fait toujours sur
de mauvais chevaux mal harnachés la route de Jaffa à Jérusalem. La
tentative de relier la Ville Sainte à la mer par un chemin de fer a
échoué ; nous apprenons, par un procès en cours d'instance, que
toute espérance de voir se réaliser ce projet doit être abandonnée pour
le moment. C'est naturellement Jérusalem et ses alentours qui occu-
pent la place la plus importante dans ce guide, p. 150-253. Des plans
de la ville et de ses environs immédiats \ des gravures des princi-
paux monuments en facilitent l'étude, mais nous remarquons surtout
le panorama pris de la Montagne-des-Oliviers, qui donne une vue
d'ensemble très réussie, où chaque édifice ressort et se détache sur
le fond. Il semble cependant, si nos souvenirs sont précis, que le mur
* L'absence d'orientation dans les i>lans est parl'ois Inen fj-ênante.
lo8 REVUE DES ETUDES JUIYES
de face se prolonge, outre mesure, de la porte Saiut-Étienne vers le
nord ; au reste, le plan, p. 132, n'indique pas un développement aussi
considérable.
Nous aimerions à signaler tous les points qui nous ont frappé,
mais nous devons nous borner. Notons qu'à Naplouse se trouvent en-
core 130 Samaritains- c • . à vingt ans près, le nombre qu'avaient
constaté Robinson '■■ . Suivant M. Socin, p. 350, ils croiraient
à la résurrectic: J. ^ement dernier ; ils auraient donc changé
sur ce point la f~'i J iours ancêtres.
La description de Damas et de ses environs, ainsi que de la Syrie
du Nordî \v \\s parait traitée d'une manière entièrement neuve. Les
ruine? (V '^-cil'"at Sim^^an, entre Antioche et Alep, où Siméon fonda au
'\<' siècle l'ordre monastique des Stylites, sont très intéressantes. Au-
tiocLe et Alep terminent la partie descriptive.
Une table alphabétique très complète, mise à la fin du livre, sera
très appréciée de ceux qui voudront y puiser des renseignements.
Nous savons par expérience combien l'absence d'une telle table est
regrettable ; c'était un des principaux desiderata du Guide-Indica-
teur du frère Liévin de liamme, dont nous nous servions pour notre
voyage.
Les cartes ont été dressées par M. Kiepert ; ce nom nous dispense
de tout éloge.
Ce bon manuel sera désormais le guide indispensable de quiconque
voudra faire un voj'age instructif dans les paj'S qu'il décrit.
RUBENS DUVAL.
Le Livre de Sibawaihî, traité de grammaire arabe par Sîbouta, dit Sibawaihi.
Texte arabe publié d'après les manuscrits du Caire, do l'Escurial, d'Oxford, de
Paris, .de Saint -Pétersbourjr et de Vienne, par Hartwig Derenbourg, professeur
d'arabe littéral à UEcolc spéciale des Langues orientales. Tome ])remier, Paris,
imprimé par autorisation du Gouvernement à rimprimerie Nationale, 18S1, p. xliv
et iCO, gr. iu-8".
La brillante époque scientifique que parcoururent les Juifs d'Es-
pagne au moyen âge ne saurait être justement appréciée, si on ne
tenait compte de l'influence qu'exerça sur les esprits la civilisation
des Arabes. C'est surtout dans l'art de là grammaire que ceux-ci
excellaient, comme le font remarquer MM. Joseph Uercnbourg et
llartwig Derenbourg dans leur édition des Opuscules d'AbouU-
' Histoitc dts langues svniiiii/uea, 'i* édition, p. '2'i0.
BIBLIOGRAPHE 159
Walid : « Abou'l-Walid, disent-ils, prit les Arabes pour maîtres et
acquit une profonde connaissance de leur littérature et des grands
ouvrages dans lesquels avaient été exposés minutieusement les prin-
cipes de leur langue. Dans ses Opuscules comme dans son Livre des
Recherches, il cite souvent les procédés dt!a langue arabe pour expli-
quer ceux de la langue hébraïque, imitant en cela le Gaôn Saadia
qui, un siècle auparavant, avait déjà sui, i ia môme méthode
Dans la version hébraïque du Rikmâh, les nassat:e? des grammai-
riens arabes sont quelquefois supprimés ou r-s Nous en
donnons un exemple curieux, le seul où le ce > - îbawaihi soit
expressément nommé » '.
Si, envisagée de ce côté, la grammaire arabe adroit jj cii-. dans la
Revue des Etudes Juives, un rang honorable est dû assurément à
Sibawaihi dont la réputation comme grammairien a tru^ orsé les
siècles, sans perdre de son éclat. Son traité de grammaire, reproduit
par d'innombrables copies, n'a pas d'autre titre que « le Livre », car
c'est la grammaire par excellence qu'aucune autre ne doit faire ou-
blier. 11 n'est pas de maitre parmi ses successeurs qui ne s'appuie
de son autorité ou ne le discute. Aussi les commentaires sur son
œuvre abondent, et souvent, en passant dans le texte, ils l'altèrent et
lui enlèvent de son originalité. L'éditeur, dans ce cas, est constam-
ment tenu en éveil pour séparer le bon grain de l'ivraie ; la quantité
abondante des copies ne rend sa lâche que plus difficile. Heureuse-
ment, M. H. Derenbourg a rencontré à la Bibliothèque Nationale un
bon manuscrit ancien, qui fait le fond de son texte; il a, en outre,
consulté les manuscrits des diverses bibliothèques indiquées dans le
titre du livre. Pour arriver à donner une œuvre aussi parfaite que
possible, il n'a marchandé ni peines, ni démarches, ni voyages.
Le but du grammairien arabe est de faire comprendre la langue
littéraire qui est, par excellence, celle de la poésie; aussi, ce sont les
divans des poètes qui fournissent la plupart des exemples cités à
l'appui des règles et des .exceptions. Ce n'est pas un mince travail
que de chercher le sens de ces vers et de leur rendre leur vraie phy-
sionomie après les migrations qu'ils ont subies. Le livre de Siba-
waihi, par l'abondance de ses citations, fournit une ample moisson
à ses scoliastes ; on se rend compte de leur labeur, quand on songe
que le commentaire du plus autorisé d'entre eux, celui de Sirâfi,
remplit trois volumes in-folio de la bibliothèque Khédiviale au Caire.
M. H. Derenbourg s'en est procuré une copie pour son édition.
Si Sibawaihi n'est pas le premier grammairien arabe, c'est au
moins le plus ancien dont l'œuvre nous soit parvenue, car elle
remonte au ii« siècle de l'hégire. A son défaut de méthode, à sa
prolixité, on reconnaît une science à ses débuts, qui clierche sa voie,
au milieu des traditions des écoles. Quoique l'auteur n'y traite guère
' Opuscules et Traités d'Abou'l-Walid Merwaii ibii Djauali, par Jobcpli Dcieu-
Luurg ot llaiLwig Derenbourg. Paris, ISSO. inlroductiou, p, lxxvi.
160 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
que de la syntaxe, son traité comprend néanmoins deux gros volumes.
En raison des difficultés à surmonter, on ne saura pas mauvais gré
à M. H. Derenbourg d'avoir tant tardé à publier le premier volume.
L'introduction qui précède le texte est consacrée principalement
à rbistorique des manuscrits utilisés pour cette publication. Le se-
cond volume, qui attendra le jour moins longtemps que son aîné,
contiendra c une biographie sur Sibawaihi et un essai critique sur
le rang qu'il occupe dans l'histoire de la grammaire arabe ». Cet
examen critique que nous attendons avec impatience ajoutera à la
valeur et à l'importance de ce volume. A son apparition, nous lui
souhaiterons la bienvenue, et nous serons heureux de renouveler à
son auteur les félicitations que nous lui adressons pour les premiers
succès de cette belle œuvre, si digne des presses de l'Imprimerie
Nationale.
RUBENS Du VAL.
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES JUIVES :
Par l'auteur : Soave, Controversia di Tortosa. Venise, G. Antonelli,
1862, in-4'de 48 p.
Par l'auteur : Soave, Dei Soncino celeiri tipograpU Ualiani. Ve-
nise, G. Longo, 1878, in-S^ de 50 p.
Par M. le D"^ Adler : The Nineteenth Century, n^ 38, décembre 1881 .
Par M. le D'' Adler : PerseciUion of ihe Jews in Rîcssia 1881 reprin-
ted froom the Times with map and tabulated statement. 2° éd. 1882.
Par M. le D"" Adler : Russian airocities 1801. Supplementary state-
ment issued by the Russo-jewish Committee. Londres, 1882.
Par M. Nestor Dreyfus. Flavius Josèphe. Trad. franc. d'Arnaukl
d'Andilly. Amsterdam, Pierre Mortier, 1700.
Par l'auteur : Mose Lattes, Catalogo dei Codici ebraici délia M-
blioteca Marciana. Extrait des Cataloghi dei Codici orientali di alcune
bibUotechc d'Italia. Florence, Lemonnier, 1882, 11 p.
Par l'auteur : M. Lattes, Nîwvo saggio di giiuUe e correzioni al les-
sico lalmudico (Lévy-Fleischer). Uomc, Salviucci, 1881, in-i» de 81 p.
ADDITIONS ET RECTIFICATIONS
TOME TROISIÈME.
P. 26. — "»pO"'TC est le mot Schwetsken, bien connu en Alsace et aussi
en Allemagne. — D. Kaufmann et Jsid. Loeb.
P. 40, note 1. — Sur "jUpin bNIT^UÎ qu'on trouve dans àc^ mss. du Tal-
mud et d'anciens auteurs, p. ex. Alfassi, Schebuot, ch. i, comparez aussi
S. Taussig, i-i'^jti',:; n^Nb?:, Il, 39, note 3. — D. Kaufmann.
P. 111, en bas. — La tradition, conservée par R. Hananel et Raschi,
montre que le mot TmilîD ne veut pas dire « fîgurément », mais « dans son
sens littéral ». Plus tard, il est vrai, sous l'influence de l'arabe, influencé
sans doute à son tour par les idiomes occidentaux, le mot a eu le sens que
lui donne M. Perles. Cp. Bet Tabnud, II, 117, ma note 4. Mon ami M. S.-J.
Halberstam me dit que, d'après une hypothèse de M. P.-M. Heilperin, il
faudrait lire le passage eu question {Megilla, IV, fin) : inil^lD pTD2 Q^nn^ïn
■^Nnn nî -i-iri rhv £]"^D"i7:lm E]1:\72 ITîT "^"in « Quiconque traduit un verset
littéralement est un blasphémateur (à cause des anthropomorphismes),
quiconque y ajoute de son fonds est im menteur (puisqu'il altère le
texte). — T). Kaufmann.
P. 117. — Si on veut se convaincre du danger qu'il y a à faire des com-
binaisons sur les débris des noms de littératures perdues, on n'a qu'à lire
M. S.-A. Lindermann dans Magid, XXI, 166 et ss. Il fait de r!33>b \2.
Eusèbe [= 'jvmTN] et de rhyr\ \2. St. Jérôme [rîi>:;n p = 'jlttnn]. Cela
rappelle les calembours accadiens, tels que les explique M. Jos. Halévy.
Dans le Nllplû \^V de Messer Léon il y a un passage publié par M. Stein-
schneider (i?!?/*;-. Bibl., VIII, 65) et que M. Perles n'a pas signalé : "i^b^lT^D
ÛilU) Ûi-lDOrt ûmN ^-l■lN'^ -^aNI (sic) riD^i "i-IDD IISD \Sanli., 28 a\ laiDT:
.'iDT ûii^injTi û\sb72 t]-»-iDD Lirio rî3'»:;ttn '"^on n'in ":3"7:dt û-^bn^n min
Remarquez aussi le ■^NT'S'in'O nommé dans le Galuy de Saadia {Carmel,
noûv. série, I, 66) et qui, se trouvant mentionné à côté de N^i^O "jn, rappelle
particulièrement les ?^^3>b \2. "'"iDD du Talmud Jerusalmi. — D. Kaufmann.
P- 120. — Il fallait remarquer que ce n'est pas seulement le Talmud de
Babylone, mais aussi la Mischna (Tadaïm, IV), qui change le iD"in"'"'3 de
la Tosefta en "^pTilt- Le ms. de la Mischna de Cambridge, qui, d'après
MM. Schiller- Szinessy et Taylor, contiendrait la recension palestinienne de
la Mischna et dont Taylor, dans ses Sai/ings of the Jew. Fatlien, a justement
publié les dernières Mischnas de Yadaïm, paraît avoir quelquefois (d'après
les notes que j'ai prises autrefois à Breslau) le mot ">p"i1^ ; dans le dernier
passage, seulement "j-i!^. — Z>. Simonsen.
P. 139. L'identité des trois Jacob "iSlD'Hp que nous connaissons paraît
certaine (l'orthographe liUJmpbN dans Gractz, VIII, 1'° édil., 415, est fau-
tive, comme on peut le voir dans la copie exacte que j'ai doimée dans Beih
Talmud, II, 116); il en résulte que Ilayyim ibu Musa, parlant des miracles
accomplis par ses contemporains Jacob Alcorsono, Moïse Botarcl et d'au-
tres, a en vue des faits un peu antérieurs à l'année 1454, date de la rédaction
T. IV. 11
162 REVUE DES ETUDES JUIVES
de son livre. C'est du reste ce que prouve la formule ii"3> "'Tlb ûbs "iDT
dont il se sert et qui indique que tous ces rabbins étaient morts à l'époque
oii Hajyim écrivait. Si notre Jacob a collaboré, à titre d'astronome distin-
gué, aux tables faites sous Pierre IV, comme le prouve M. Steinsclineider ;
si, d'autre part, il a composé 3n 1376 son ouvrage sur l'astrolabe ^ms. Mu-
nich, n° 261, 11°) on r.c peut guère admettre qu'il ait vécu au-delà des
premières dix ou vingt ^ inées du xv'' siècle. C'est évidemment à tort que
M. Graetz a fait de lui un J.i'x messie (VIII, 107, 415), quoiqu'il ait pu
être, comuT^ tant d'autres Espagnols, cabbaliste en même temps qu'astro-
nome. JI irest pas, plus exact, et on peut le prouver, de faire de Hasdaï
Grescas un partisaL de ce faux messie. — D. Kaufmanii.
P. 273. ~ soamuel ibn Tibbon en traduisant <\ celui qui vous plaira » par
hen Tobef a suivi l'interprétation du Targoum, adoptée par quelques com-
mentateurs, d'après laquelle Tobel se compose de tob « bon », el « à ». Voy.
Aben Ezra, Sefaf Yétèr, éd. Lippmann, p. 13 «. — Israël Lém.
P. 278. — Dans les éditions du Talmud on a, il est vrai, supprimé très
souvent les alej)li qu'on rencontre dans les mss., mais lorsqu'ils sont des
maires ledionis, nullement lorsque cette lettre est radicale. « On était dans
l'usage de retrancher cette lettre du commencement des mots » uniquement
en certains dialectes araméens, et dans les écrits qui reproduisent servile-
ment la prononciation populaire ; mais jamais les mots hébreux ne sont dé-
figurés de la sorte dans la langue de la Mischna. — Israël Lévi.
LISTE DES immi MEMBRES DE U SOCIÉTÉ DES ÉTPES JUIVES
DEPUIS LE ic>' JANVIER 1882
Membres souscripteurs :
Alliance Israélite universelle, rue de Trévise, 35. — 150 fr.
Cattaui (Elie), rue de Riclielieu, 92.
Chanaleil (le comte de), rue do Chabanais, 6.
Franck (Adolphe), membre de l'Institut, rue de Boulogne, 32.
Landau, villa Landau, Florence.
Mahcus (Saniel), place Saint-Georges, 6, Bucliarest.
Popelin (Claudius), rue de Téhéran, 7.
Weill (Benjamin-Léopold), rue de Richer, 4L
PROCÈS-YERBAUX DES SEANCES DU CONSEIL
SÉANCE DU 29 DÉCEMBRE 1881.
Présidence de M. Arsène Darinesteter.
L'ordre du jour appelle l'élection des membres du Bureau. Le Bureau de l'année
précédente est réélu : M^L A. Darmesteter et Zadoc Kahn, vice-présidents ; Er-
langer, trésorier; Hartwig Derenbourg et Ephraïm, secrétaires.
M. le Pi'esident propose de fondre les deux Comités de publication et d'adminis-
tration en un seul comité de direction, attendu que la séparation de ces Comités pré-
sente des inconvénients.
M. Loeh est d'avis que les Comités devraient être ouverts à tous les membres du
Conseil qui voudraient y entrer et prendre part à leurs travaux.
M. Ah. Cahen dit que les Comités pourraient être supprimés et les questions por-
tées directement devant le Conseil.
M. Zadoc Kahn craint que dans ce cas les 'questions arrivent en séance sans avoir
été suffisamment étudiées.
M. Th. Reinach propose la création d'une section permanente renouvelée fréquem -
ment.
Le Conseil nomme une Commission chargée d'étudier ces questions et de rédiger
un projet de règlement intérieur.
SÉANCE DU 26 JANVIER 1882.
Présidence de M. le grand-rabbin Zadoc Kahn.
L'ordre du jour appelle la délibération sur le projet de règlement intérieur élaboré
par la Commission.
Le Conseil adopte les articles proposés par la Commission et qui peuvent être
ainsi résumés.
Il est formé dans le sein du Conseil : 1° un Comité de publication et d'adminis-
tration composés des six membres du Bureau et de cinq membres élus par le Con-
seil ; 2° un Comité de propagande élu par le Conseil.
164 REVUE DES ETUDES JUIVES
SÉANCE DU 31 JANVIER 1882.
Présidence de M. le grand-rabbin 'Zadoc Kalin.
L'ordre du jour appelle la suite de la délibération sur le projet de règlement.
Le Cfomité adopte les propositions suivantes :
Le Conseil de direction se réunit en séance ordinaire, au moins une fois par mois.
Les séances pourront être suspendues pendant les mois de juillet, août et septembre.
Les dates des séances du Conseil seront indiquées sur la couverture de la Revue, afin
que tous les sociétaires puissent y assister, conformément à l'article 22 des Statuts.
Les tv.ages au sort dont mention est faite aux procès-verbaux des séances du Con-
seil tenues le 28 avril 1881 et le 31 janvier 1882 règlent le roulement des élections
pour le Conseil. Les vacances résultant des démissions ou décès dans les séries
non-soumises au renouvellement seront chaque année comblées par un vote spécial
de l'Assemblée générale : les membres ainsi nommés entreront dans les séries aux-
quelles appartenaient les membres qu'ils remplacent.
Le tirage au sort pour le classement des trois nouveaux membres élus dans l'as-
semblée générale du 26 novembre 1881, dans l'une des trois séries annuelles est effec-
tué. M. Ternes est classé dans la première série, M. Oppert dans la deuxième,
M. James Darmesteter dans la troisième.
SÉANCE DU 28 FÉVRIER.
Présidence de M. le grand-rabbin Zadoc Kahn,
M. le Président propose au Conseil de délibérer sur l'opportunité d'introduire
dans les séances mensuelles du Conseil des communications et des discussions litté-
raires et scientifiques.
M. HaUvy appuie cette proposition et fait remarquer que tel est l'usage dans toutes
les sociétés savantes.
M. Schwab et M. Reinach présentent des observations dans le même sens.
Le principe de la proposition est adopté. Le Comité de publication et d'adminis-
tration est chargé d'en préparer l'application.
L'ordre du jour appelle l'élection des cinq membres qui composent avec le Bureau
le Comité de publication et d'administration. Sont élus : MM. Joseph Derenbourg,
James Darmesteter, Joseph Halévy, Isidore Loeb, Théodore Reinach.
Les Secrétaires,
IIart.wig Deuenbourg, a. Éphra'im.
Le ni'runt responsable,
Israël Lévi.
VEUHAILLliS, IMPRIMERIE CEnF ET l'ILS, HUE DUPLESSIS, 59.
UN VASE JUDÉO-CHALDÉEN
DE LA BIBLIOTHÈQDE NATIONALE
Le département des Médailles et Antiques de la Bibliothèque
nationale a lait récemment l'acquisition d'un vase contenant une
inscription magique d'origine juive, dont nous nous proposons de
donner ici le texte et la traduction, avec un court commentaire.
Ce monument se rattache par sa forme, son usage et les formules
qu'il renferme, à une série peu nombreuse et, jusqu'ici, fort impar-
faitement étudiée, de terres cuites inscrites, qui dévoilent un des
côtés les plus intéressants de l'histoire des colonies juives instal-
lées sur les ruines de Babylone après la conquête de Jérusalem
par les Romains. Ces vases hémisphériques, assez grossièrement
façonnés au tour, et dépourvus de tout intérêt artistique, ont été
tous, jusqu'ici, découverts dans les environs de Hillah, c'est-à-
dire, sur l'emplacement même de Babylone, ou non loin de ses
ruines. C'est à l'intérieur, sur la surface concave, que se trouve
écrite à l'encre, circulairement, l'inscription magique destinée à
mettre en fuite les démons et à préserver de certaines maladies
celui qui buvait le liquide versé dans la coupe.
La langue dans laquelle sont conçues ces formules d'incanta-
tion est généralement celle des Targums de Babylone ; l'écri-
ture est le plus souvent l'hébreu carré, affectant des formes plus
ou moins éloignées des formes de l'écriture actuelle, suivant
l'ancienneté du monument. Nous ne connaissons que deux vases
qui portent des inscriptions en caractères syriaques estranghelo,
et qui sont rédigés en un dialecte qui parait être le mendaïte ' .
' L'un de ces vases est au Brilish Muséum; l'autre, très fragmenté, se trouve dans
la coUeclion de M. Slewarl. Il est bon de se mctlre en garde eontrc les marcliands
orientaux qui apportent en Europe des f'alsiliea lions de ces vases inscrits. Nous avons
vu plusieurs de ces monuments dus à l'industrie de que'que potier de liaj^dad.
T. IV. 12
166 REVUE DES ETUDES JUIVES
Les premiers de ces bols magiques qui aient été publiés, à notre
connaissance, sont ceux que M. Layard a découverts au cours de
son exploration de la Chaldée, et auxquels M. Thomas Ellis a con-
sacré une notice accompagnée d'une transcription et d'une tra-
duction, l'une et l'autre fort défectueuses'. Ces petites patères, au
nombre de six, sont actuellement au British Muséum. M. A. Lévy
a repris la traduction du premier des textes donnés par M. Ellis, et
il a réussi à expliquer, d'une manière très satisfaisante au point
de vue linguistique, une formule de magie difficile à interpréter".
Depuis lors, M. Rodwell, assisté de M. Drach, a fait connaître une
nouvelle coupe dont il a donné un fac-similé très fidèle, avec une
transcription et une traduction aussi inexactes que possible 3.
M. Joseph Halévy a corrigé les nombreuses erreurs de MM. Rod-
well et Drach, dans une courte notice lue à l'Académie des Ins-
criptions et Belles-Lettres, et qui ne laisse guère de prises à la
critique*. Avec sa sagacité habituelle et sa connaissance profonde
des livres talmudiques, il a établi un texte et fourni une traduction
qui nous ont mis nous-mêmes sur la voie ; et nous devons dire ici
que sans la notice de M. Halévy, il nous eût été difficile de publier
l'inscription qui suit, car elle off"re une grande analogie avec celle
dont ce savant s'est occupé.
Le vase récemment entré au Cabinet des Antiques de la Biblio-
thèque afiecte la forme d'une calotte hémisphérique très évasée ;
il est uni sur toutes ses parties et n'offre aucune trace d'ornemen-
tation ; il n'a même pas au centre, à l'intérieur, cette saillie ou
([l'idloi qu'on remarque sur quelques bols du même genre, notam-
ment sur celui qu'a interprété M. Halévy. La pâte de l'argile est
rougeâtre, et les parois sont d'une épaisseur moyenne. Le pourtour
du bord mesure un diamètre de 15 centimètres environ. Rien dans
la fabrique et l'aspect de ce monument, grossier en lui-même, ne
peut révéler l'époque de la fabrication ; les caractères paléogra-
phiques et linguistiques seuls permettent, comme nous le verrons,
de placer cet objet vers le huitième ou le neuvièmes siècle de notre
ère, par assimilation au bol ^ décrit par M. Halévy : ceux qui ont
1 Layard, Nineveh and Babylon, p. !)09-526.
* A. Lévy, dans la Zeitschrift der dtutschen Morgenl. Gcsellschaft, t. IX, p. 4C5 et
suiv. ; puis, en abrégé, dans \c Jahriuch fiir die Geschichte der Juden, an. II, 1861,
p. 2GG-271 et 294-29^.
' Dans les Transactions of the Bihlical archaiological Society, vol. Il, part, i, p. 114
ol suiv.
♦ (Comptes-rendus de V Académie des Inscriptions et Belles-Lettres^ 1877, p. 288-293.
Quelques réserves seront faites plus loin, dans le commentaire.
■■• Ce dernier, à en jufrer d'afirès le caractère graphique, est peut-être d'un siècle
postérieur à celui qui nous occupe ici.
UN VASE JUDÉO-CHALDÉEN DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE 167
été publiés par M. Layard sont manifestement un peu plus an-
ciens.
L'intérieur de notre vase, c'est-à-dire la surface concave, est
occupé par deux inscriptions qui se déroulent en spirale, et qui,
^^«^.J^i.^^^
se faisant suite l'une à l'autre, sont néanmoins séparées par un
trait à l'encre qui court sur tout le circuit de la paroi. Contraire-
ment à ce qui s'observe sur la plupart des monuments du môme
genre, notamment celui qu'a déchiffré M. Lévy, la spirale inscrite
va de la circonférence au centre. La première formule, celle qui
est le i)lus rapprochée du bord, a un peu plus do cinq lignes ; celle
168 REVUE DES ETUDES JUIVES
qui est au centre en contient à peine quatre petites. Au milieu,
sans doute pour remplacer la saillie ou ombilic dont nous parlions
plus haut, on remarque, tracé à l'encre, un cercle irrégulier et
très allongé, traversé par deux diagonales qui se croisent en forme
d'X. Ce signe, qui devait avoir un sens magique, se trouve
de même sur plusieurs des coupes publiées dans l'ouvrage de
M. Laj^ard.
Voici en caractères hébraïques ordinaires la transcription de
nos deux textes, qui sont d'une conservation graphique suffi-
sante, sauf quelques parties frustes que nous essayerons de re-
constituer.
TEXTE EXTÉRIEUR.
>»db?bT s'j-'T n»!"' p ïT«b 81■'■T3y^^ t-t^b "^^ayT !-(ttN7:-^*n ï-i-^ib-^bn
TRADUCTION.
Salut du ciel, pour Hisda bar Ama. Toutes mauvaises sorcel-
leries, grand'
Œuvres, malédictions, vœux, engagements, de loin ou de près,
d'hommes ou de femmes,
La nuit ou le jour, qu'ils font contre lui, ou qu'elles font contre
lui, depuis ce jour jusqu'à jamais :
■ Le mot NmDN se traduirait exactement par le latin saîus, c'est-à-dire santé,
salut, remède, talisman, préservatif physique ou moral. C'est par ce mot que débute
aussi la formule magique de l'une des coupes du British Muséum (Layard, op. cit.,
p. 515, n" 2). On sait que NmON est le souhait de santé formulé, aujourd'hui
encore, par les Juifs à l'adresse de ceux qui éternuent : c'est, selon la tradition, un
préservatif contre une mort inopinée, et la légende rapporte qu'Abraham mourut en
éternuant.
* Nous ferons remarquer que le mot ÏT^73^ est écrit par un ï^ au lieu d'un N. Ce
n'est pas la seule parlicularilé du morceau, qui prouve que l'orthographe eu est très
négligée : nous en citerons d'autres exemples.
' La forme "'TD^n est pour NTD'^M, et rî73N pour N73N. Ces noms propres se ren-
contrent très fréquemment dans les livres rabbiuiques.
* Ce mol est très fruste et presque illisible ; mais le contexte et la formule analogue
publiée par M. Halévy en rendent certaine la restitution.
5 M. Halévy traduit "j^D'^pn 'J"'"73iy par • œuvres puissantes • ; l'expression nous
paraît correspondre à ce qu'on appelait au moyen âge le grand' œuvre (magique).
'^ Les trois premières lettres de ce mot ont presque disparu.
' Ce mot ■»\DD■'^^ est écrit plus emphatiquement ^TUNÎIT dans le texte de .
M. Halévy,
* Mol Iruste, en partie restitué. On remarquera la répéliliou du même verba au
féminin pluriel, ayant pour sujet les démons feininins.
' Ou : ^îT (par traiisposilion).
'0 La formule ûb^bl ^^l MTOT^ '\J2, est exprimée (avec une légère variante) dans
le texte de M. liulevy pur les mots □bj» "^T "J'^l N)DV 173, qui ne modilicnt en rien
le sens.
UN VASE JUDÉO-CHALDÉEN DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE 169
J-TiDia p 'j-'pBttT i"'-iip3'T 'i-^T^nm T^mîm i\-i7:'J7: v^""*^"! T^^^ l'^^îbs
m'^by^ rriasiD bri •}» ni:3 -î^^irri ï-r^nsis 'b c<'i::in '-^nw by i-ijjn
^niD'oa-iai '[û'caT 'i"'^"'-.-] Nrrannb iiunn nsbtt Nim -nsoN '^nm^-i
Que toutes ces choses, les unes et les autres, soient anathéma-
tisées, bannies, expulsées, arrachées et chassées de son corps
Et de sa demeure, hors des deux cent quarante-huit (membres)
ensorcelés, et hors de l'endroit où se tient Hisda bar
Ama, sur le chemin de Housia. A l'étoile qui domine sur toutes
les autres étoiles d'en haut,
Qui chevauche (dans le firmament), appartient le salut, car elle
enseigne la magie aux magiciens... par l'invocation (?) du jujubier.
Que le grand nom (de Dieu) soit prononcé. Amen, amen, iSélah.
* 'j'^"l'^Dn, fitot à mot : brisées, broyées.
* Dans le texte interprété par M. Halévy, le mot 'J'^nTlTO a heureusement une
sorte d'explication placée à l'interligne qui contient le mot IIÏT^mTOlp^J, • ses empla-
cements '. Peut-être faut-il lire ici : ln^"nTltt (avec intercalation superflue d'un
premier T), dont le sens certain est : sa demeure.
' « Les deux cent quarante-huit • (membres). Cette formule est tout-à-fait nou-
velle dans les inscriptions des vases magiques. Au moyen âge, les Juifs admettaient
que le corps humam se décompose en 248 membres, ou parties, qui étaient sujettes,
chacune individuellement, à subir les atteintes de la maladie ou du démon. Notre
formule d'incantation a pour but de les préserver toutes sans exception. — Faut-il,
au contraire, supposer qu'il s'agit de < 248 procédés de sorcellerie », contre lesquels
l'inscription a pour but de protéger ledit Hisda ?
* M. Halévy a lu ce mot rî"nïî ; mais la lecture "^T^N, sur notre vase, ne peut faire
l'objet d'une contestation. — Littéralement : main, par extension (?) voie.
^ La lecture de cette lettre est certaine; elle est assez distante du mot qui précède
et du mot qui suit ; le fac-similé de la coupe Rodwell, sur lequel a travaillé M. Halévy,
l'a induit en erreur ; il a vu dans le passage, semblable au nôtre, l'interjection i^N, ô,
comparable à l'hébreu '^N ; il lit : NDlDlD "^iN . "^ICin.. • au heu de NDIDIS b ^''liin.
Dans l'un et l'autre cas, il y a un point d'arrêt, une tinsie phrase, après le mol Hoîisia.
^ Au lieu de ;^31D"1 Ti''by~l !l^!2D"lS, M. Halévy a cru lire sur son texte défec-
tueux ^{3172^ ■^Tobi'T N'^DDID; mais la lecture de notre passage ne peut faire l'objet
d'aucun doute. Le mot ïiaiD'H appliqué à une étoile, à V^énus probablement, indique
une curieuse notion astrologique empruntée par les Juifs aux Chaldéens.
' Le mot ncDN est le même que NDIDN, le premier mot de notre inscription, avec
une orthographe un peu dillérente (par mutation du T en S). En rabbinique, il est
vrai, ce mot a hui par être regardé comme dérivé du grec (T7td9r), spata, d'où il a pris
le sens à'épée plate ; mais ce sens ne saurait convenir ici.
, s Passage fruste et difficile à rétablir. Le dernier mot ne paraît pas douteux, c'est
Ûiy^m. e' pO'')' le nom ; il en reste encore des traces graphiques. Mais ce qui précède
a complètement disparu, et nous proposons conjecturalement de restituer les lettres
suivantes : „32T''1D^Ï'TT'^) dont nous avouons ne pas comprendre le sens. Dans le
passage parallèle de l'inscription traduite par M. Halévy, également fruste, ce savant
a cru pouvoir restituer le mol 'J^^'^lûW- Ici, ce mot n'est pas admissible. Pour les trois
ou quatre dernières lettres de ce groupe, il y a peut-être lieu do lire par conjecture :
['jlD'^DT, « de ceux qui murmurent i (sous-enleudu : les formules), « de ceux qui
énoncent à voix basse >, selon le mode usité au temps des auteurs du Talmud, pour
guérir par l'incanlalioa : lî^tlb. — Enfin, serait-on en présence de lettres détournées
de leur vrai sens, à reconsiilucr par les procédés du CD DN ou û^bN comme les
coupes publiées par M. Layard en olfrenl des exemples ?
9 Au lieu du mot ln''D''D?3"1.'^T, M. Halévy propose de lire : n"'p"'D73 "133- Mais
170 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
TEXTE INTÉRIEUR.
bs i^T ntî-'a ^yiw 1^1 toinui-^a f^m*! )i2 ïr^ttu) ^-^wnin ir^in-is
IWN n-s» •jTT'a^a'i l'^b'^aa rrttN na ■^lo'^nb n-^ba-'pb Tn-^p'i "i^i^in 'rr^rw
.nbo ^ttN
TRADUCTION.
Délivrance par la grâce du ciel, des mauvais esprits et des
mauvaises maladies, et de toutes sortes
D'adversités qui se lèvent contre lui, contre Hisda bar Ama : Qu'ils
disparaissent et soient anéantis de devant lui. Amen, amen, Sélah.
Quelques expressions et tours de phrases se retrouvent dans la
formule du Kol Nidré, en tête de la liturgie de la veille du Kip-
pour.
Au point de vue tacliygraphique, nous noterons les particularités
suivantes. La forme particulière du d est celle d'un triangle. Le
•^ se confond avec le i et même parfois avec le a au commence-
ment ou au milieu des mots. Le 5 est presque identique aun. Les
trois lettres n, n et n se confondent absolument. Le » a, quand il
est fait négligemment, beaucoup d'analogie avec le it. Le 3> et le st
sont presque identiques. Le p peut se confondre avec le 12, car la
queue est souvent sacrifiée. Faisons enfin remarquer que le a a
une forme particulière dans le mot rr^Dis, et que nt sont joints de
façon à ressembler à un rj phénicien. Le 3 final est quelquefois à
angle droit et ressemble assez à une équerre ; il est orné d'une ou
de deux petites hastes à sa partie supérieure ; mais il ressemble
aussi parfois à un 1 ou un 1 prolongé.
Les particularités linguistiques et paléographiques que nous
avons signalées permettent de regarder notre inscription comme
un peu antérieure à celle qu'a étudiée M. Halévy et qui se place
il n'est pas possible de se ranger à l'opinion de ce savant, car la lecture matérielle
du mot est certaine. 11 faut donc y voir une forme dérivée de NUITOIID (ou NIZJTOD^S)
en syriaque U3ltt"l!3, N12)7D1"|D, le jujubier, ziziphus rhammns, jujuha, dit J. Lévy
dans son Neuhebr. Worterhuch [siih verho), en rapjjclant le passage suivant du Tal-
mud Babli, Pesahim, f. 111 i : • Pour tout arbre dont le branchage est dangereux,
l'ombre l'est aussi (parce que c'est ordinairement là que les démons opèrent leurs
malélices). Une exception est faite pour le jujubier : son ombre n'est pas nuisible,
bien qu'il ait un feuillage touffu (pouvant servir de repaire aux esprits). Puisqu'un
démon femelle dit un jour à son fds : tiens-toi à l'écart du jujubier, car c'est lui qui
a tué ton père et qui te tuera • . (Us s'éloignent donc d'un tel arbre.)
' Avec les points diacritiques : NH^S, repos, tranquillité, délivrance. NJT^S ou ^"'3 a
le môme sens en syriaque.
* Ce mot est très fruste, et il semble qu'il y ait entre NtT^3 et lui, place pour uue
ou deux lettres qui nous échappent.
' Ce mol est difficile à lire ; mais le coulexte laisse deviner le sens.
UN VASE JUDÉO-CHALDÉEN DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE 171
vers le neuvième siècle de notre ère. Elle est postérieure à la
plupart des coupes qui figurent dans l'ouvrage de M. Layard,
mais qui néanmoins ne remontent pas, comme le croit l'auteur,
Jusqu'au troisième siècle après J.-C.
Les Juifs avaient emprunté l'usage de ces coupes magiques aux
habitants de la Clialdée avec lesquels ils se trouvaient en contact.
On ne les trouve point en effet ailleurs qu'en Chaldée ; et dans ce
pays, on voit tous les habitants y recourir, aussi bien les Juifs que
les Arabes et les Mendaïtes ou Soubbas: Ces vases, rappelons-le,
servaient à préserver contre l'atteinte des démons ou des ma-
ladies celui qui buvait le liquide qu'ils contenaient. On ne peut
donc pas confondre ces objets avec les coupes dans lesquelles on
versait un liquide qui servait à scruter l'avenir et à faire des pré-
dictions. Ces derniers se rattachent à l'hydromancie : telle était la
coupe de Joseph dont il est question dans la Genèse, celle de
Djemschid dans le Schah-Nameh, et celle que des traditions
orientales donnent à Alexandre. On les trouve quelquefois men-
tionnées chez les Grecs et les Romains ; c'est au moyen d'une de
ces coupes que Numa faisait ses présages ; saint Augustin et divers
auteurs nous signalent ces usages singuliers *. Mais ces pratiques
avaient surtout leur siège en Orient, et on les trouve encore chez
les Arabes du moyen âge. « On obtenait l'effet désiré, dit Reinaud,
en remplissant la coupe d'eau et en examinant le mouvement du
liquide, ou en y jetant soit un anneau, soit des bagues. Les Mu-
sulmans accordent la principale attention aux figures ou aux
paroles marquées sur le vase. Ils remplissent la coupe d'eau, et
après que le liquide s'est pour ainsi dire pénétré de la vertu des
paroles et des figures, ils l'avalent ou le répandent sur eux-. »
Toute autre était la nature et la destination des vases à incan-
tations magiques du genre de celui que nous publions : on ne cher-
chait point à connaître avec eux les secrets de l'avenir, mais
seulement à éviter les maladies et les mauvais esprits. La formule
avait pour effet d'empêcher que le démon ne trempât ses lèvres à
la coupe avant celui qui devait boire : aujourd'hui encore, les
Juifs superstitieux répandent à terre, pour expulser l'atteinte des
démons, la première goutte de l'eau contenue dans un vase, avant
de la boire.
Parmi les notions talmudiques les plus caractéristiques que nous
pouvons signaler dans la formule qui nous occupe, notons celle des
248 membres ou parties du corps humain. C'est à l'ancienne astro-
* Varro, apud S. Auf.'ust. Civil. Dei, VII, 35; Jamblich, De Mysteriis Acgypt., 3,
14, p. 78; Creuzer, Dionysos, p. 302.
* Keiuaud, Descript. des monnmcntsimusulmans du duc de Blacas, p. 338.
172 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
logie chaldéenne que se rattache la mention de l'étoile Vénus,
l'antique Istar ou Belit, qui était particulièrement puissante pour
les exorcismes et les guérisons *, et qui a pris place, avec les
mêmes attributs, dans l'astrologie des Mendaïtes et des Arabes.
Les déplacements mêmes de la planète Vénus sont indiqués dans
notre texte : elle chevauche à travers le firmament, et, sans
doute, la place relative qu'elle occupait devait influer sur l'effica-
cité de l'invocation de son nom. L'invocation du jujubier doit
aussi être d'origine chaldéenne ; les Mendaïtes ont également un
arbre dont l'ombre est bienfaisante ; il est fréquemment mentionné
dans le Sidra rabba sous le nom de ni523nn, que Norberg traduit
par vitis cypria -. Il y aura certainement un jour des rapproche-
ments fort intéressants à établir entre ces antiques traditions chal-
déennes qui ont persisté presque jusqu'à nos jours et les textes
cunéiformes concernant les pratiques magiques et astrologiques
des anciens Babyloniens. De même, M. Fagnan a lu sur des mss.
persans une invocation au roi des Djinns, à celui qui règne sur les
vers rongeurs, pour qu'ils n'attaquent pas ces manuscrits. Le vase
que nous avons examiné était fait pour Hisda fils d'Ama, qui ha-
bitait non loin de Housia ; cette localité mentionnée aussi dans le
texte traduit par M. Halévy, est inconnue; elle devait se trouver
non loin de Hillah, peut-être sur les ruines mêmes de Babylone.
Ern. Babelon et M**"^ Schwab.
• Fr. Lenormant, Chaldean Magic, p. 17.
* Norberg, Onomast. ad lib. Adami. p. 144.
DOCUMENTS INÉDITS
I. UNE PSEUDO-BIOGMPHIE DE MOÏSE MAÏMOîlIDE
Nous avons publié dernièrement une biographie apocryphe * du
célèbre Rabbin, philosophe et médecin Moïse Maïmonide. Nous
donnons ici un document analogue qui a beaucoup plus d'intérêt à
cause du mouvement du pseudo-messie David Alroï qu'on y trou-
vera raconté avec de nombreux détails. En outre, il renferme une
notice sur les Juifs du Yémen, dont l'histoire n'est pas encore
faite, puis quelques noms et quelques dates qui peuvent être d'une
certaine utilité pour les historiens du peuple juif au moyen âge.
Nous ne croyons pas nécessaire de prouver que notre document
est apocryphe, surtout en ce qui concerne Maïmonide; on n'a qu'à
le comparer avec la lettre de cet auteur adressée aux Juifs du Yé-
men sur le mouvement messianique dans ce pays -, et on y trou-
vera sans difficulté des divergences avec notre pièce. Un mot seu-
lement sur le manuscrit d'où nous avons tiré ce document. Il se
trouve à la bibliothèque Bodléienne d'Oxford, marqué 0pp. add.
8°-36 (dans notre catalogue, n" 2425, 11). Notre pièce commence au
fol. 63 i/ et est écrite en caractères rabbiniques espagnols ^.
1|br^^^ U'^'n^ «■>•' Ninm ir-^Nïi ïr^m itûiu "iiTs-^» n-iDO y-iNn ^r^in v>»
D-'sn "«sw nu •m-'Nb n-^m nbibi ûtot^ ujn mn pDi:!>T û"^ttujn© T^nN "«iD-iia
nn rwDn b^a bTi^ ûsn bt<n nmna •po^y^ n^-'XJ b^^y m^ ûujb ir^ri ""D
■jiNan maDb vsm in-^a -^ujsn-i Ninn «j-'Nrj iiby 'nwn't tr^iann bsn bina
vn-^ bD -jiNsn ^ssb iiw^tj -i3 nuj» 'n -iTobi b"T 111:211 îmnn^ isn-i bTian
«a i73Tn nn"iî<m bN-ni:'»^ n-nn y^n-i» ir^rt -^d min vasb "j?aib ïr^m
> Voyez Letferbode, année, VU, p. Ui pass.
* Voyez Graetz, Gesehichte dtr Juden (3° édition), t. VI. 306 pass.
' Nous reproduisons fidèlement le texte d'après le ms. unique. Les mots et lettres
entre [ ] sont oblitérés dans le ms ; les mots entre ( ) sont superflus, « notre avis.
174 REVUE DES ETUDES JUIVES
cp3-i c^ap V"'^""' "''^'^ '^■'^^ "■^'^■^ ^^ bTirirr i-iNsri :i-i:ii y'^Jin » -nttTt;
'-1 nx-io iv-t bN-.wi n-'n bs irnï* b'^^t'^i lib-^i^i ïDipar: "]'»'n ïi5iïJ73
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ba3b !rj-nnD3 iiDbit û!tT pï:«n •^u:3N53 D"«bT7:» û"'nmD ûiT^u5y ûiujîn "^i^
irs c-^-iittib -Na "^ai nn^Ni '-«lî^rî^ N^a; nap aob crib tî^-j ina^a n;» labm
cnb TnTDN D"ib^ cnb -^r-iTnm ûibo ■'b irpjT -'bi^ tj^î a^ur ^-nN iniuî
awnb^aa Tha^ ^T^n la'w^ 'inaia Dar^» b-'''::^ "^^Di* "la^n liaaT^ "1:^33
"^a nt-iN c-'p-in-ir; Dvz-i'pr:^ r:m^<^ baa mb-p i;-^nN ûib'^i û^a-nn ûibuJT
T:;nan bNi iiiz'-'mrTi 'abNCJN î^n:>^ t:DDT ab baa -ly-n "^amN DnN tnb \n-i»N
' Lisez ^7^t^73 ou "1173113. Voir la Iraductioa p. 18(1.
» Ms. 1^723.
DOCUMENTS INEDITS 173
rt73 orib -^n-iWN baw nnN riTD br ^b t^sd nwNirT^s tun^s xb ■'b in»N -is^t}
£3-ibN:?»'air; tsnN ib Tnttî^ iNb dn N-'ii Da^n û5^b:?M Tj'ttiDU) rr^^iTo^ri
nrb:?M na^ttî n^' ts-^iana b-^-iab ^^ pnsnsn "nnsa n-in^r lî-^-^m □■'i^nr!
by 'd^'j'^ybn r!^ ûm û^pm û-^thid û-^i^b û-^uî^n n-iiu; imN Tcsm "^nir^
''^^!^■^!^ Q3> û-^srbri ûmN» o'^pm© ir^n iîtoni inix iis-inTûi -^mn^ri imx
IN û-^itbn ûmNb i-ittN n3Dt n3^ -^-imo» û-^nan o^ujîn "«suj iNii-^t) iy
1^1 ûiN •'sat: D'^W'-^nn» «bi tnpwrr p û-^j^t^ dids-^nï^ na^T i-ion ^n û-^pn
15-ip rT"Dn D'il?: in^ imN □"'Diawi ûiD-in^a ûniîiu ^min^n "imi< 1:3 DDb
rbî* mb3i nm^n nnp ^33 smbina mnsu:» -is^ tnaT m^i^r! biD vbx
nsn li-^nma v»Ntt ifs-'N un t)-'bN5'72'>a''ï^ ûpin "^b i-iton my-i i3 li-^WNm
t^SNm ^b ■n-^a-' nwm iNin-' ban n-^uia»» ûi-i"^\i5y û-'Iiït' d-^uiiN -^311)
Q-^ntiiN nrî nwNn û'^bNz'XD'o-^r: iw ywiu: -^sn^ ns'ittujn n» drtb in-i73Ni
bNiD i3bNa"^i I3^i3y3 riNn aipsn û^mïT^rt Dmïî insiN i3"^by û-'ai:?b72 in
■^s inttNT nmnDn iNati û'^nin-' iN-n bana T^n ïiwrr "^3 i^7:n .i3-'maN nx
b'tt) Nait niD -^5 nt:Ni ^niNT la T^rD-^aN i?2^n iNiisoNa ûin n:by nWN
l»! [û-^n] bin35 bN-iï:i73 bnp T^bN iib3T û-^sw 't tiVn Nit-'i Nin n-'^ti
C=ir,nt< br) TibN lirapns -^r: rr^nti^ -npT m-iasT isoti anb v^i mttiNi^
û'^mïT'r! "^b inwNT d-^sa 't itti£3> N-^anrn ypn v** V^^ '^'^'^ ^'^^ ninstîT^n
■ib TittNT inbnn iibN ii:apn3^ n»): imi T-bN ■nb3i iNSf ri3'ffir! ira
inT^Hs'a "^D T^b3>» iNn d-^in^x d-^mrr^ iNiin d'^'iirr^ dnb timn "^i d-^-nn^n
ï-iM'^nttîrî ^'■'a^a nuJNn by m^p 'J3:?rr m»::' in-i rrbDnb in nai b:^ biN\Db
135b^ 133T7N lb l-lttNT Tîpl DT^aS •^3pT721 d-^Tir!"» T^bN 103S3 p ^HN
13'^nNT iddt: i3b '[\m nasi an bîip -jp'^iîïia ri3r! d-^aoïi isnsx ■'"•^ n^^^^'n
is-'H^b NirsT i3"^by rniiïn isb riT rî-^^ri "^n?: 1:? ti-^aim-' inbiaa bNnuî"' ■'3a
■jTST y^^n Nb .-15 -^HN N3 bN tD^ib "i«N nvsbT^ 'najj'UJi r-iittiNr; i-^a nï3N
d-^pm^o ynN« -^i^y na np:?i: ri3>73U33 -^r; t<bN -^rnbiu: Nb "^sni ^''ly ypTi
mab n-^nûanb -^rnbiuîT -^sn ^^ï<i!:■l\D ^y d-^pni: pw Ndib tDnprsr j>-«ar:i
dST nT^iNn "j-^a dnb d'^'nNïi3r! ta-^suîri n-iro ibao-^n bN-i"û"i -133 di73na:?ri
\-iyti'iu;i: "irai f>^T2 ds-inN "snt . Nin ainpa bax ypr: nbab» ïn2£» i3n
'^D'i'ny ■'3'^3>}2 ■^n3':3 ïT7n3 nb-^brr riiD'î "^nn^iu-, -^^533 nro tN d-^iirr^rr "^st! ^la
rriT^T Nia-i ly t:b^y -^siNa th^ntu niibn n""^ TNiCWi N-iwaa 'j'^-'3>?3 ^-l■^1m
iNia-^uj d-'^iN-i d-i-ianai mîT-ina ■^ns'T mi3y ■'sai anai ^-i-inoT ^r\iJ2y p'ii:
ib n^Di'N'a: mnûjam lab by "^nnaii nnb in^b ■•ni^'npi ^u-^Nin imN ■^32b
■^nnauJi mbN^ln iny anom n'^'i::» 'ns-^i tzi-^nN» ib ■inn3i Tiaai nbna
"na:>iu5ai mnsïn "pio'n i-iw iriina3:-'U5 ans ib ■'nn3 dai 1Nr^DDi<b imN
*^t]H "^bN "nTm tj-^»"' Ti^^y iNnsoNa aD:fin3T inttddn n3> ib 'ib'^i in-'bT»
inN "^b T^anc n73 bai tsDb amD \n^in tD-^nana na-iN\D -^bibi ■'^m rT3"0
"•n '-i-iwiNi luiaa d"':'atU3n ^nx iTi im» riN-n ùab "^nanD np-'j'n iaN
n"-^:! 1» i"t3 ria -^b •>::)n'^D phn mnaN 'n -^hn nm ■'b «-^am "^"-^ n-^a» isDbT:
■^n'^'^ïn pb dinpa d^-^HN nu:» -^sn dai . -«b i-i»î« Nb -i7:n ^abwm mb^TU
176 REVUE DES ETUDES JUIVES
1N3U5 iT^a p-^b:? Tibs"» «b Q-iiN^sm ûnsepTD -^rittiBi mïsbri dmN2 ^'^^y'iz
ons» rT»r: un "^aba •^n'i^NT mw::"! pirir) mas tniN ;z5-iid ^u-^Nn T^b
to-'amn mn-^sn -^niDn -^d nwNn b:? iris -^d naix -riiin û-^-iNCirr 'sn -^b
Nnrr -^d ■'Nina ti-imn cumN dis Nbo iris pTi: rrnn ni^ïj t:? ûi»iroi
îTivi N3iiii 13' tsmN uînsb ^b "jin-i ^b t-i72N3 Nb Nin ntiN 1^1 r7:Nn b:»
ni3 î-T^nwrn by ^b -i-i^i'CjO CDnnDa inhcon bnp ^b nn^aNin 'jrDi pni:
■^n-ittNT innMu:T mpi min: 'd^i rrnnrt mnc'c:» ir^s? iibiT iit:» ^hn
Nim /laT ^inntti mi^î ibN "]b lirnpi -np "j.xi: bm n":? Nin^r: nwN "int
Nb 13 nnysn p ni:n Nb crû riobï: iis' id nn inN ûs» nnn^n nbo
• nrj ibT72 ni^iT ';T>rn'nttn T'-'n i^th 5iid i:!» nNxb i;ttT ^'ijn
13373 uns:» bo NWTT73 '^btt DU)b nin\a htd r:'::3>72 DDb "idon ii:»!
nii nnm ps» ini^' d^t ''>::nn NiDin mn "ji^nto Nim nsi lam ntinain
bTTJ ûTN Nim ûn:^ 'n itt'û nnN 'j-'i-! nnb ">::in bN-iiDix: !:]bN Ta:' di;a
intjnu:^ tnnb n)3iN"i Y-'^" t=;riinnN -i:aT tnitjw nii nm ûon bNnujia
rîrniu i^T n;b rtîn isiin ^b»b -imni ûn;72 '-i n23> imwi in bNnuji ^Nsno
CDiTor: i:Db niDin ntm br;prri;pT t=:r ctctd 'n lisbTD inscio ivo ni7:i
bNnu:^ m br aniam sidd i"i3D T'i nb nsn^n nnao n»y na^n mnom
cniNSva mnnuji in d^hn riOD i-iidd i"i ib i;n ûnb -i»n riNan nsab
n"b -N^a Nbn Dnb r;i- -iu:n b^ ms^n nb i;n3i nmwi in bNT^i bu)
nmm un» :\"im ani-inN nrj ni^iban -;ab b^Nb nim n^pb mba
ina nnm bN-i^i im» J=;mN Ni::nn ynNrî nbn toinN^'m nn-n an»
n-rt CNnb niDn»n pan nb^in cnreTo '-i nnnin ïmain» inm nvD3D
^brin imN ^t^ïj n"i in ûioin Y'a -inN mnpn bnN -ihn ^ba mnbwn
nni m -in «bn niaryn nbnnan ni3D nbcii m^-i inTnNi n^^n^an it
OjDjI ûiba n-in inianm nmN n^too iy E;n;73 'n nnN DinnD -i^iai '7i73yb
nN ynpn nbo nn:?i nas'tjn nniNn inN^n id iW2:rn i3N y"7ii nb -,7:Nn nibr
nniD ûi-iaa'n naT^n ^bwn nnibN -irnn nna-nwnn nniD3nn n:nnn ^inN bs
ra^ pn "jnb tnsnnpTo ninao nniDssn nn3nb nrin r]OD Di^b in^n nrjT
nrnT^an nr nji'wa Di-iNa3r! DrnN D^n aiN ûisbN m'n-iN n73D un» npoin
■jNnDONn '■^b3 apnwb n3b -t ni-i in73 i:> ûnsTo 'nb '»Nn bnpn i3pT nNm
Dinmn nnnpinnna "jniD y-pn i?:t r:'n Nb ini ihn bN Dna» 'n ûnb nttN
GN Y^^i bnpn 5nn:>» m2:p73 ib nsn ciiidtq::^ nbûûban bN tsnb n»N
ibmaa nyj3> !-ia»nn tDn373 'n "^bnn tJSinnN nam i3n Nnn n»N nmn
naba nrwn fcn373 'nn pw n''i iNncoNb n:'i:n tDiain n"L3 nriNb bnpn
bN nD3D3a "inis tzjiobnn tzin nnnmwnn Nin npnnn "ini id N7:i:n tan?:
Cnnb nwNn bnpn ninNab nn^n t^mm 'n Niiin aiNn i3Db nNnn n3i'7)3n
min nina i» bn'p'n'i n"3> n3nn na»n i3i3>n Nnnn njs'nwann nmn nwNn
. nnon nn^n nnbb nbnDi
inib Nnn T^y-i'D'^iir, nrb IWT nnNb nani ipnn in^iTa nn na73 i3Nn
nau:nn nnrn bnpcrn inTOTcn nin bj^ I72:>n ib n73N Y^'^nn Y^'^^ "i°i5
nsno ib nwNn ■jmbNriNbx Nnn '■jb^nn nTanbwn pDrn73 ^b»n nin id ib
t=3Db nTDNn niban by iJzy '^bTan toDb n73N id "^b^^n nnn Ninna ^b^on
nny^n nnT73 iDb73 nnsrnN ini:p» nNnniuj ûibns'n nbN id ûDb n3»n on bnpD
DOCUMENTS INÉDITS 177
by "^ibttb -^b "[-^n ■'în 'a^^ -imm ns'nnT "^n-inn im»*'^ n:' 'û'>3>^y mn nnn
t^"li:-lLNî^ np-^T n^-^ 'r:r\y [Dimrr^] ']btt "^^ "^în yr)-^ "^s ti-^nbN?i m^b»
ts-im^-^ri Y^'^ nmN npi ■^t'» -^s mun -^bren nby "^s bnx trai-'WT "^tito
. T^r3>3 "jn Ni£»N "^biN ïi»nb»3 Nbi upiunn
1iu:b73 a-'nnnn ibN inpny^m: NbN dnd brtpbn nn^^wb nauj nu:N nuî»
n73u:n n"i in^-^b 3iïn mnnb in-iso s-tTomb "inNnTrîDT ^nprt i^bb 3-13?
• ibN biD ib anSNW "^bj» m:£T into û!T»by
•^nriTo-m t2"'-ii£tt3 Niri^m -^n niïiuji rtu:^ '-i idiin ans ■^nj'To^u: t^wt
t-iN riNiNTD isf m3N Nbi ::ip"iUN Nb i:d 'ni tDUJn iny^wn i-tbn:* nn):^
nbinu:a mon ^nuipai û^nirTab inNau: i:? û^uJin 'a ^b^i» ^nsbriT ^sinN
ny :-in:5>tt3 iniN in-TUsm imNnb iniDbin qi^di n"i2 ï]id "I3> -"nNi:» Nbn
inNa 13N i3inN nsnip-iTDNT iura "'»3> T^J2'û^ iD-i^Dri n^-i^^ t^t^t rnNitwt)
t)Ti nbnu: t^ nriN ns^ iT^y inTn:^T ^ib3> bî<n dn^^u: n^' '^laybi ']mNib
N^piT in5^)3 mjs^ii ii^j» ntnj' f<si!n dimaa rsa:?! !Tia:\ ib'N î-tN-nu thn
baN initia naia la^N baN imN "nnsN ibix n^N"iT i72ibn ib nsii iia^b
tnbnn nb -iimni niTaibn -nnsb j'It» tD:Dn û'in ^paT 'T'is'a ']bnnri mp
-ims CDdn tzi^N •ajpa-ii laj^rt ùp^i riT^iN» ^d^to uj^n yi^ Nbi "^b^auja
^bN i^NT nnTD ny "jtDT ib "jn ib -iTaN^i i^ibn nb n:«iT imN NUiTo^i ?m»ibn
bN'^DT t3V nnxb ibi^N ^-^ '^'^'^ 1- "'"'^n^ to^aai^a ri^nNT !-JTn nb^ba
t^aren rrww p ^ai aibn^r '^wtd i-i^rî Nb ib -i^n taibnn imnD ^.d»»
nb i-TTf;:: biia ûip72 maa -jb^N ^d iï<72 Nir; aiu taibnn id j'm n-i:?7ja
f'-iTDiNr! Y^^n n^a i^tj^n bai ^a ûrî^b:? "iwii» nih^^d tid35>t Y^'^^ ^"'^^
baa imia^'i Dm iîto^d arj q^-i^in ni"-» nn in::?-i Qi^paT^m 3>*i i;w73
lamina ba bi' ûm)o Nin ^a a^^rib "jin-i ian?i Nai t3u:rt ito ^d ûna
dizain ba ib n:»"'! -raj^rr ^b-^^ . dn-^b:? bi;::):^ riujtt Nim n»iDa d^bniTor^
NifT ^b)2rî isa^irr»! nann nb:ji ^biN laba nwN ia nwn ^^tin Nb72->T nb^r:
yi^riu) ij' taiTunn Y'u qid.i:^ ù^ iTabi n-inn ;ab72-«T maii n-i3>ttn -j):
.r!"apn d^ab^orr ^ab?: '^b» iscb inbsm i3>iu;
bab nbin^T tap^n imn tnysnm caibna rîNm iaaM)7Da ']bnr: aau:in
ba VDD5 iNa^i i)Dibn "ji-inD ib T^:;r!bi c^ab ï-riT^am ta^ni:» 'Toiann
nttibn l-nns ib n^anb iba^ ê<bi d^suja d^i'iT' n^^^a 1x^733 ^'>l^n di;::3Nr;
T^bN Mb:;3^ ny n72nN?2 dibn imNa :j>tti d"iN n^^o Nbn ii:-iwS baa nbu;i-,
Ti:i-< Nin Nûjn Nba nab;i:nu3 mi)» iiin ib -i»iN"i) Dibna rtNii 'n^. bNr:
y-iNrj baa dnb^^in ca^inn bia':;a nb^D^T inDO): "^bttn -ii^'it ^}3ibn Y-
în^w ib n^nriO ui-^N ba diria73 rn^n y-ixa d-^iinn iNiEin 'n-^r: 112 3'*i-'V
n72N ia vbN lab auj Nbi ^nc» 'n n:» nann l'^iim -jai "ja '^bi^r, ib irr
ï-tN-iM5 '^y tzn^T tav "^bTon nana d^^^nn lab^i i:annb rtiiin '^b?Dn ^biK
yaiD ">a ïT-ir7a;n y: "^nN^iri iwt 3>"':iri nsn ib di-ittiN'»:: n;i!)3 '-i dibna
"jbwn n-iab '^b n^N^i na^b -is^t ab avji r\)2^ np507a -ni'^i ijb^-p pn i"->
•13b n>DNu: d^a^ '^n i^^r^n rrn:? ^a na'irî n?2N dN yîi<\u tj' d^ a;ui
178 REVUE DES ETUDES JUIVES
Y^ ^">:573 '-) ib -172N11 mDbwn rjji^Ni fn-^îiin Q-^'^iinsr; "^aa 'i»5'0 r:73
ribN rra^n -^b inn ï-!r;72 'n ^b "jn^' — ^ "'""T'^'* "i"' ti^ni '^bT::^ birx
nb-^nujn '^bïî ""^ni ^T2 "3» "jT^T "^b in ib -nWN p ntDNi c^ û-^nitT: vi;-'"î
n"«:îN bas tîy-^n ^b»r; rr^n 13> n^i-^i nn:?;^ p "^zj^^-^t '^'^bN irTN-^nN nnsn
'n T^bN N-^nrsb inN cisi û-^'^a-i^bai ^-is-^iri '^bairt nb ■jn-^n t^^t^n ir:iï
by asn-^i 'ù;inb7:!i ^a» '-".b ■^nb-'n J-rns'ar; n:? N3fi inyrr "^b-^n rr:)»
nj' Nn-iT rî-is'wn iDniN in'us»^ û'^noo riy^:: i»:;' rr^uw 'n np-^T oiori
ï-7i:nN û-^DN innia-^n T^briii t^t^ p;:5"^T "^bTob Nn'^T rT^M'^isr; ']b»rr nrj'o
ib T^■'^ ^^73 "172J' rîK)U5i in:\33 imN wQ-^'i "n-^a np-^T rssb "p^r: np-^n
ïiiitT rî"5>3 ^îoibn ^b t^^n -^dni nna n;' i^t -^b in 'ibîob n^it'^T -ii^ibn
■^b^arî ■'iDb Nn ût' iriNbi inn^b T'"j33> bib mi:n ibitN n^^n ib nnb ^bar;
y2^bn ii-ino rr^-in û-')2i 'n ^y ûT^n^o ^b72b -i52ï«i i^^ibn ii-ins ib T5ïn
rrnus îr^n n^^N'^J -^^tin ib nttïîu: n?: ^b'?:^ ?7i<-iw it^^i . rî-^n pi nu'^n nsn
Ss^T IjS brf imx û'^ii^i ii^ib v'^nr b^bi bMÀ Tiiy ib nnb T^'^^ in73
b^n iNi:"' vd bri nnrm nna^n mn br ib rnr.rî'jjb in^D-i;::-!! "niriN n-'n
ti'^:i"i:ûp7û d-iû^NW ûinni i-ib:' i-^atî-i js^b ^1531 bs'û i^-^nsn ib yn-ci•^^ n^n^ t^d
bD3 ni'>2U5 -^ri^n ts-^uJîis û:^' mui ■'"i ûy m:: ps'i ûsn i"-» 'in:' ï^tJTa ûp-'i
ib in-^1 '7NW r;":î?2 nN nnN '^b):m iTTi ■'53 b:^!!^ bTii nmi iscn-i riir;"! y-iNi-s
nb "ib-i-^i nniUN nN n:^^ r-i^CJ2^ , mn^T t:513> ib in-^T dnd m;ntt ïrttiN
n^p '^iiDb ^-lb^i■1 ■i5\n"i "^iT^'n rr^'n ûrt-inN -^ribi^ n):N -^5 ûr;n3N ittWT p
f^tîn^ri nN7D-i ^b^^r: nï«?a "«îinNb ri-^r!^ "nnsm n^i3>:^n nrjri bs^o nnx
•isnN C^mN) in-^i . pn-i» y-iN?3 ûxs^r^ m3n?:în n2ipT "^b^M -^ssb û-^n^iyr:
t-i-^n b:? iri^o'^uî'^T bins n^ir ib in-^n tz^'^'Z)^ m:n» rra^ ttin mi 'nb
. inT:::>b "i"'b:s' vi-^-û û-'nnn?! nî^bab biD-^ Nb Nir; ^^ initiN
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DOCUMENTS INÉDITS 179
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^uinbb n^m bisixb ûnb i52T^3 ût' -i3i ûnb i5nii p'isicri '5'^: i05-isn''\y
mnon ninbbT tiJiabbT biDxb d-si; d^sm dm:x]iN in'^srr d-^oiNn mm
b33T d-init» y-is^n d-'DbN rrnujr nitai n^ïs b^a pisnsb rr^riw pTj^rî
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n-iu5::>T in3"^m inttnn miT^T d"'a"'r7 bD ii-Qiy^ pi ond n:in!?:7D d-'jLûp
. d'^nsD r;7D3i ibis-^ Nb inpiiri
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b:DT ti-'"n!T^r! bri bn:^ ni33) nb T:::>-'n &"^-i2;»n imN iiap-^i d^w rntiîT
■^b yN nt)-'aw3 ^-orjiD mn^m iso^ir; mn^^T d'>a d'^Nit'^irî d"'bNi'WïU"'n
tin-i'' bNïn imb^3N •i»"' bD ']b»?i ib !ni2i3>o ni^Dn 3i-i)3T nsob nb-:^"^
.mbuJT d"iDU) .'j'QN b&<-iw brj bin is'^bj'
« Il y avait en Espagne un homme nommé Maïmon. Cet homme
était très pieux et marchait dans les voies de TEternel ; il s'occupait
de la loi divine jour et nuit. Il avait deux fils, dont Tun s'appelait
' Le nom de l'amille manque daus le ms.
180 REVUE DES ETUDES JUIVES
Moïse et l'autre David. Ayant appris que dans la ville de Fez
dans le Magreb, existait un homme savant s'occupant d'études
sacrées, versé dans toutes les sciences et qui était une sommité
dans la philosophie spéculative, il alla, avec toute sa famille, trou-
ver le grand Gaûn R, Yehoudah ha-Gohen*,de sainte mémoire.
R. Moïse fils de Maïmon étudia chez ce Gaôn, durant toute sa vie,
la loi divine qu'il répandait en Israël. A cette époque survint le
tyran Mahmud - qui tua le grand Gaôn au milieu de souffrances
atroces, parce qu'il avait refusé de se convertir. Voyant qu'il ne
voulait pas consentir à changer de religion, il le fit périr de mort
violente. (Que Dieu nous en préserve, nous et nos frères en Is-
raël ! ) Lorsque R. Maïmon apprit cette nouvelle fatale, il prit ses
deux fils, R. Moïse et R. David son frère, et s'enfuit nuitamment.
Ils marchèrent toute la nuit, se tenant cachés pendant le jour,
jusqu'à ce qu'ils arrivèrent dans la ville de Ceuta, où ils gagnè-
rent un vaisseau et se rendirent par Alexandrie à Jérusalem. Là
mourut R. Maïmon, et il fut enterré par ses fils. R. Moïse retourna
en Egypte et devint plus savant que tous ses contemporains. Sa
grande renommée parvint aux oreilles du roi d'Egypte, qui por-
tait le nom de Selah ed-Din. Moïse fut introduit chez le roi, qui le
reçut favorablement et l'éleva au-dessus des autres princes. Il ré-
pandit l'étude de la loi en Israël, ses ouvrages et ses lettres arri-
vèrent en tout temps dans le Magreb, et il s'informait de leur état
de paix.
» Moi, le traducteur de cette lettre, habitant de Tolède et natif
d'Espagne, j'ai fui aussi ce tyran à Tolède en l'an 4946 A. M. (=
1186 de l'ère vulgaire), le douze du mois de Tammouz et j'ai sé-
journé en Espagne, pour des affaires, environ quatorze mois. De là
je suis parti dans la ville de Fez pour le commerce, comme tant
d'autres. J'y demeurai dans un hôtel en compagnie de Juifs pen-
dant quatre mois. Le jour du Sabbath, les notables de la commu-
nauté me dirent : « Il y a ici un vieillard très savant, mais qui
est malade, nous allons lui rendre visite. » Je les accompagnai
chez ce malade qui était un homme savant et très pieux. Nous
nous entretînmes avec lui des exactions du gouvernement et de
notre état de servitude. Ce vieillard nous apprit que son nom
était R. Isaac, fils de Nathan et ajouta : « Mes frères, ne savez-
vous pas que j'ai reçu une lettre d'Egypte du Gaôn R. Moïse
• Ce Gaon est probablement le R. Jchoudah ha-Kohcn ibn Soussan que Saadyab
ibn Danàn mentionne comme ayant été martyr. Voy. Graetz, Qesck, der Juden, VI,
p. 172.
" C'est probablement Mohammed Almoumen. Peut-être faut-il même lire ■nn'^tî =
Toumart.
DOCUMENTS INÉDITS 181
ben Maïmon, de sainte mémoire ? » Il nous montra cette lettre.
» Voici le contenu de la lettre venue d'Egypte du grand Gaôn
R. Moïse ; elle est écrite en arabe et traduite en hébreu.
» A mes frères et amis, au peuple saint de la communauté sainte
de Fez. Moi, votre frère, l'humble Moïse fils de Maïmon, je vous
annonce la bonne nouvelle que Dieu va envoyer bientôt le Messie
et nous consoler avec la ville de Zion. Sachez, mes amis, que j'ai
appris ces bonnes nouvelles par des commerçants qui sont arrivés
de Bagdad en Egypte et à Jérusalem. Ils rapportent que le roi des
Juifs si longtemps attendu a enfin apparu à Ispahan. Le même
fait est rapporté par les commerçants qui viennent de St-Jean-
d'Acre, de Damas et d'autres villes. Mais moi, Moïse, je ne voulais
pas croire, me disant que ces commerçants se raillaient de nous ;
cependant il me semblait étrange d'entendre le même rapport fait
par tant de personnes venant de différents endroits, et le doute
surgit dans mon cœur. Enfin deux riches commerçants de Damas,
qui voyageaient pour leurs affaires à Bagdad et jusqu'à la Mecque
oîi le tombeau de Mahomet se trouve, arrivèrent au Caire et
vinrent me voir pour me saluer ; pendant mon entretien avec
eux sur l'état de nos frères en Babylonie et dans d'autres contrées
éloignées, je leur dis : « Vous êtes mes amis, répondez à une ques-
tion que je vous adresse, sans me cacher la vérité. » Ils me pro-
mirent de me dire toute la vérité. « Ce que j'ai appris par les com-
merçants arabes est-il vrai? » leur demandai-je. Ils répondirent:
«^Oui, en effet ; nous étions au caravansérail de Bagdad et cau-
sions de différentes choses, assis devant la porte, quand nous
vîmes passer un Juif. Celui-ci fut arrêté par deux vauriens qui
se moquèrent de lui, et nous-mêmes nous prîmes part à leurs rail-
leries, quand deux commerçants du Yémen ', s'adressant à ces vau-
riens : « Fous que vous êtes, dirent-ils, ne craignez-vous pas Dieu
et n'avez-vous pas honte devant les hommes? Sachez que ce Juif
que vous insultez. Dieu a levé sa corne et fait briller son étoile. »
En effet le Messie que les Juifs attendaient est en ce moment à
Ispahan. Beaucoup de tribus se sont jointes à lui, et parmi elles
deux grandes familles des Arabes, et tout le monde croit en lui.
Et si on ne veut pas nous croire, me dirent ces commerçants
arabes, voici deux commerçants riches de Bagdad qui te répéte-
ront la même chose ; tu croiras alors. J'attendis pendant quatre
jours l'arrivée de ces commerçants juifs, enfin ils vinrent, et, sur
' Littéralement « fie Schéba et de Séba » (Psaumes, lxxii, lO). Séba est plutôt
l'ElLiopie (voir le Leiicoadc Gescaias s. v). Dans uotre lettre, ou ne veut parler que
du Yémen.
T. IV. 13
182 REVUE DES ETUDES JUIVES
ma question si le rapport des commerçants était vrai, ils me
répondirent : « En effet Dieu a vu notre misère et il nous délivrera
comme il a fait pour nos ancêtres. » Ils ajoutèrent qu'à Bagdad ils
avaient vu des commerçants juifs qui disaient qu'à Ispahan un
homme du nom d'Abi-Saïd ben Daûdi * s'était levé, sept ans aupa-
ravant, se disant le chef de l'armée du Messie, et que beaucoup de
tribus s'étaient rangées autour de lui et parmi elles des Arabes.
Voyant cette multitude se joindre à lui, il leur avait dit : « Le
temps de la rédemption n'est pas encore venu >^, et il s'était tenu
caché dans une caverne pendant sept ans. Ces Juifs me dirent
encore que, cette année, une plus grande multitude se groupe au-
tour de lui. Ils rapportèrent avoir entendu d'autres Juifs qui pré-
tendent avoir vu un nuage se lever sur la tête de ce Abi-Said
pendant qu'il faisait la prière, nuage qui atteignit le ciel. Les
anciens des Juifs lui dirent : « Maître, notre roi et Messie de
Dieu, nous vivons en paix et nos communautés sont florissantes,
tandis que nos frères sont en captivité. Cela ne doit pas durer ,
sois notre commandant et nous irons les délivrer du joug des
nations. » Sur quoi Abi-Said répondit: « Non, mes frères, l'époque
de la rédemption n'est pas encore venue et je n'ai pour mission
que de rassurer les cœurs oppressés de nos frères lointains, afin
qu'ils supportent encore pendant quelque temps l'oppression. J'ai
l'ordre de ne pas révéler le moment de la rédemption, mais il est
proche. »
» Moi, votre frère Mo'ise, lorsque j'entendis ces mots de la bou-
che des Juifs, mon âme se tranquillisa et je fus rempli de joie. Et
dans la nuit, comme le sommeil ne voulait pas venir, j'étudiai le
Talmud et j'y trouvai dix-huit questions qui ne peuvent être réso-
lues que par le Messie-. Les ayant mises par écrit, j'appelai mon
frère David et lui demandai d'aller les soumettre à Abi-Saïd à Ispa-
han ; je le munis d'argent et de lettres de recommandation pour
les princes et les pachas. Il partit pour Ispahan où il l'psta dix jours,
puis il revint chez moi après une absence de dix-huit mois. Si je
voulais être prolixe, je vous écrirais ce qu'il m'a rapporté, mais je
ne vous enverrai que ce qui vous concerne principalement. C'est
que mou frère a vu Abi-Saïd par qui les Juifs jurent en disant :
« Vive notre roi, le Messie de Dieu. » Mon frère m'apporta deux
lettres de lui, dans lesquelles il répond à quinze de mes questions,
tandis que pour les trois autres, il dit que la solution ne lui en a
pas été donnée. Moi-même, votre frère Mo'ise, j'ai pu expliquer
' C'est le nom arabe de David Alroï. Cf Graelz. o;>. cit., p. 426.
' Celle iratlilion est inconnue au Taliuud et au Midrasuii.
nOCUMENTS INEDITS 183
quelques-unes de ces questions, indépendamment de la réponse
d'Abi-Saïd, tandis que celui-ci a fait davantage pour l'explica-
tion d'autres questions. Je fais le raisonnement suivant : Si cet
homme avait répondu aux trois autres questions, je n'aurais pas
cru en lui, car nos Rabbins en ont laissé la solution au Messie,
mais puisqu'il a dit lui-même qu'il faut attendre le Messie pour
les réponses, je vois qu'il est dans le vrai. Et comme les com-
munautés d'Ispahan m'ont répondu, dans la lettre que m'a remise
mon frère, que beaucoup de tribus se rangent autour de lui, et
parmi elles celles de Kédar (Arabes) et de Nébayoth (Nabatéens),
je me suis réjoui, en me disant : « Voilà ce que le prophète a
prédit : Toutes les brebis de Kédar seront assemblées vers toi ; les
moutons de Nébaj'oth seront employés à ton service » (Isaïe, lx, "7).
Abi-Saïd m'écrivit en outre, dans la lettre qu'il donna à mon frère,
que durant trois ans encore je ne sortirai pas de la caverne,
car le temps n'est pas encore arrivé que je la quitte; c'est le qua-
torze du mois de marheschwan que je sortirai et mon étoile sera
bonne alors.
w Je vous raconterai encore ce qui s'est passé dans ce pays. Il y
a un roi au sud de l'Egypte, descendant des flls de Togarma et
de Yaphet, qui est musulman. Sa capitale s'appelle Aden, et 12,000
Israélites demeurent dans son royaume. Leur rabbin s'appelle
Menahem, c'est un grand homme, savant et craignant Lieu. Un
jour le roi décréta que les Juifs devaient se convertir ou mourir.
Menahem demanda un délai de sept jours ; mais ils se rachetèrent
avec une somme de quatorze talents d'argent. L'année suivante, le
roi demanda la même somme en renouvelant la même menace, et
les Juifs se dépouillèrent entièrement pour satisfaire à l'.exigence
du roi. La troisième année, le roi tua un grand nombre d'Israé-
lites, d'autres purent s'enfuir, et les plus i)auvres se converti-
rent. Les synagogues ainsi que les écoles furent détruites. R. Me-
nahem s'enfuit, portant un sac sur les reins, au sommet d'une
montagne, dans un autre royaume. Après quinze ou dix-huit mois,
le roi apprit où R. Menahem se réfugiait, il en fut fort effrayé. Il
lui manda de revenir avec confiance, disant: « Je sais que j'ai mal
agi dans cette affaire, maintenant tâche de rassembler tes frères
et rebâtissez les synagogues et les écoles. » Il leur donna vingt-
cinq talents d'or pour la reconstruction qu'ils acconiphrent en
effet. Il en revint 4000; ayant appris ce qui se passait, les anciens
de la communauté se rendirent chez R. Menahem, et lui dirent :
« Jusqu'à quand cet homme sera-t-il pour nous une cause de ruine
(Exod., X, 7) ? Allons à Lspahau.» — Menahem leur réj)ondit : « Non
mes frères, le moment de la (h'iivrance n'est pas encore arrivt". o
184 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
» Comme ils se récriaient, Menahem leur dit : « Ne vous mettez
pas en mouvement, mais donnez-moi quelque argent, et J'irai voir ;
si la chose est vraie, je vous ferai venir. » Il partit donc avec
quinze des plus notables de la communauté ; ils n'étaient plus que
douze quand ils arrivèrent, après quinze mois de marche, à Ispahan,
les trois autres étaient morts de soif, car le chemin était long et il
fallait traverser des déserts. Ils virent cet homme (Abi-Saïd), et
R. Menahem écrivit à la communauté que le fait était vrai ; les
plus aisés quittèrent alors la communauté secrètement*.
» Et moi, Moïse, fils de Maïmon, je me tins tranquille après avoir
appris ce rapport. Le secrétaire du roi vint me trouver et me dit :
« Le roi mande ce qui suit : Tu seras le trésorier et tu m'enverras
l'argent » ; car le roi Selah ed-Din - se préparait pour une guerre.
Le secrétaire, qui m'apportait la lettre du roi, m'apprit que le roi,
se tenant debout, avait annoncé que parmi les chrétiens qui ve-
naient de tous côtés, du Sud et de l'Ouest, pour le combattre et
s'emparer de Jérusalem et du sanctuaire. Dieu avait fait entrer
l'esprit de vertige (Isaïe, xix, 14), aussi tous mourraient-ils, soit
par l'épée, soit par la famine, soit la peste. « Et moi, continua le
roi, je n'ai pas non plus le droit de régner sur le royaume de Dieu,
et je vois que le roi des Juifs viendra bientôt pour reprendre ces
provinces de ma main et de la leur ; mais ma destinée veut que le
roi des Juifs reprenne de ma main Jérusalem paisiblement et non
par la guerre, et ainsi peut-être truuverai-je grâce à ses yeux. »
» Moi qui écris cette lettre, j'ai vu l'original autographe de R.
Moïse, qui l'a envoyé à la communauté de Fez; et je l'ai traduit
de l'arabe en hébrea. En arrivant à Rome, j'ai raconté ce récit à
R. Léon, il s'en est réjoui et m'a prié de le mettre par écrit.
» Quand j'eus appris par la lettre de mon maître, R. Moïse, qu'il
était encore en vie au Caire, je me réjouis et me jurai que je n'au-
rais pas de repos avant de l'avoir vu. Je me mis en marche et
voyageai pendant neuf mois pour me rendre chez lui au Caire. Je
ne réussis à le trouver qu'après quinze jours d'informations, et je
le vis enfin dans une caverne. Il me reconnut et fut heureux de
me voir. Je lui dis : « Me voici à ton service, jusqu'à ce que Dieu
ait pitié de toi. » Je restai donc avec lui un an, quand il fit un
' Voir sur cette conversion forcée des communautés du Yémen, Graetz, GescK. der
Juden^ VI, p. 306. Selon notre document, la lettre de Maïmoiiide adressée aux Juils
du Yémen se rapporterait au mouvement messiani(jiic qui se ]iroduisit à Ispahan ot
non à celui d'un autre Messie (jui s'était montré dans le Yémeu, comme M. Graetz
le croit.
* C'est le roi Saladin, qui avait repris Jérusalem des mains des chrétiens, et qui
permit aux Juils de s'établir dans la ville sainte. Cf. Graetz, op. cit., p. 305.
DOCUMENTS INEDITS 185
rêve, dans lequel il se voyait près d'un grand arbre portant des
branches énormes. Il appela son domestique et lui dit de se
faire interpréter ce rêve, comme si c'était lui qui avait eu la
vision. Il alla trouver l'homme qui s'entendait à interpréter les
songes, mais celui-ci lui demanda un délai d'un jour, afin de pou-
voir consulter les étoiles. Le lendemain, il dit au domestique : « Ce
n'est pas toi qui as eu la vision, mais Moïse qui se tient caché dans
la caverne. Sache donc que le rêve prédit de bonnes choses.
L'arbre représente une grande place que le roi donnera à Moïse, et
les branches représentent les serviteurs du roi, qui, voulant lui
faire du mal, diront malgré eux du bien de lui et seront utiles à
Moïse de toutes leurs forces. C'est le Dieu miséricordieux qui le
veut, afin que Moïse règne sur eux. » Celui-ci, ayant appris de la
bouche du domestique ce qui s'était passé, se fâcha, car il se
dit : « Si le roi a connaissance de cette interprétation, il me
fera tuer. » Aussi Moïse sortit de la caverne, et s'enfuit dans la
montagne, où il resta pendant quinze mois, jusqu'à ce que ses
prières fussent accueillies de Dieu.
» Après un certain temps, le roi fit un rêve qui le rendit inquiet.
Il fit appeler tous les savants et tous les mages d'Egypte pour en
savoir l'interprétation, mais ce fut en vain, personne ne savait ce
que le rêve signifiait. Enfin, Dieu se révéla au roi dans un songe
et lui dit : « Ce Moïse que tu as rejeté sans raison saura inter-
préter ton rêve. » Le roi envoya des estafettes dans tout le royaume
pour chercher Moïse ; ceux-ci publièrent que le roi donnerait une
récompense à celui qui le trouverait. La nouvelle parvint jusqu'aux
oreilles de Moïse et il eut peur de se montrer, croyant que c'était
un piège qu'on lui tendait. Enfin Dieu lui apparut dans un songe
et lui dit : « 11 est temps que tu sortes de la caverne, car Dieu a
entendu ta voix. » Moïse se réveilla avec joie et dit à son domes-
tique : « Va au palais pour savoir si la chose est vraie, car les trois
ans annoncés par notre maître, le messager du Messie, touchent à
leur fin. »
» Le domestique revint et dit à R. Moïse ce qu'il avait appris des
officiers du palais. Moïse dit au domestique : « Va chez le roi et
propose-lui de m'amener, moyennant une r('Compense de 5000 de-
niers d'Egypte, et, s'il consent, demande un délai d'un jour. » Le
serviteur fit comme son maître le lui avait ordonné. Le roi lui
donna l'argent, ainsi que de beaux vêtements et un cheval afin d'a-
mener Moïse. Le domestique arriva à la caverne, revêtit Moïse de
l'habit que le roi lui avait donné et le fit monter sur le cheval.
R. Moïse se munit des sept livres qu'il avait composés pendant
son séjour dans la caverne, et se rendit au palais du roi. A son ar-
186 REVUE DES ETUDES JUIVES
rivée, il se prosterna devant le roi qui se leva, le prit par les mains,
le fit asseoir devant lui, en montrant sa grande joie, et le pria d'in-
terpréter son songe. Moïse demanda un délai d'un jour, ce qui lui
fut accordé. Le roi le fit loger dans son palais et ordonna à ses ser-
viteurs d'être à sa disposition. Le lendemain, Moïse donna au roi
l'interprétation de son rêve, en ajoutant : « Dans huit jours, tu ver-
ras l'eflFet de la vérité de mon interprétation. » Et il en fut ainsi.
Le roi, après avoir vu que tout ce que Moïse disait se réalisait, le
combla, dans sa joie, de grandes richesses et le rétablit à sa place
comme trésorier et comme second du palais; il lui jura parle pro-
phète Mahomet que jamais il n'écouterait plus les calomniateurs
qui diraient du mal de Moïse. Aussi la réputation de Moïse comme
savant et comme médecin s'accrut-elle journellement, le roi
l'aimait beaucoup et lui donna comme femme une fille de Fez.
Celle-ci mit au jour un fils qu'il nomma Abraham, car il dit : « Le
Dieu d'Abraham est venu à mon secours. » Il m'est impossible
de donner un aperçu des honneurs et des richesses que le roi ac-
^ corda à Moïse, de l'estime que toas les officiers lui montraient, et
des cadeaux qu'il reçut de l'étranger. Mon maître donna comme
femme à son frère David une habitante du Caire, il le combla de
richesses et le nomma son trésorier, car Moïse ne pouvait pas suf-
fire à toutes les affaires que le roi lui avait confiées.
w Je vais vous raconter maintenant comment R. Moïse menait
ses occupations. Tous les matins, il se rendait à la synagogue pour
faire la prière avec deux cents élèves qui demeuraient dans sa
maison, outre les étrangers de tous les pays qui venaient le voir
l)Our s'instruire. Il allait visiter ensuite les malades juifs et mu-
sulmans. A neuf heures, il se rendait chez le roi, pour rester avec
lui pendant trois heures. Puis, il prenait son repas et dormait jus-
qu'au soir, ensuite il s'occupait des comptes, en qualité de trésorier
de l'Etat, jusqu'à la tombée de la nuit. Pendant la huit il composait
ses livres, qui sont au nombre de vingt-cinq. Le lendemain, il
donnait aux scribes tout ce qu'il avait écrit pendant la nuit pour
le copier. Telles étaient régulièrement ses occupations. Un jour,
il arriva chez lui de Damiette un vieillard très estiiré, du nom de
Néhémie. R. Moïse le reçut d'une manière très affable et ordonna
de lui rendre tous les honneurs possibles. Ce vieillard demanda la
permission de lui adresser une question, ce que Moïse lui accorda
malgré ses nombreuses occupations. Ce vieillard resta cependant
avec R. Moïse pendant trois ans, pour suivre ses cours. Il mourut
au Caire et y fut enseveli avec grand honneur. Notre maître reçut
un autre fils qu'il appela David ; cet onlant prospéra et devint plus
savant que sou frère Abraham. R. Moïse aimait David, car il était
DOCUMENTS INEDITS 187
reniant de sa vieillesse, tandis que sa femme préférait Abraham,
car celui-ci était aimé de toute la maison royale. Tous les deux
se marièrent avec les filles de R. Joseph le prince, de la famille
[ ]. Leur père leur donna de grandes richesses. En
l'année 4939 A. M. (= 1179 de l'ère vulgaire), David, frère démon
maître, devint malade et il mourut le 11 du mois d'Ab. Il fut
enseveli au Caire ; mon maître ainsi que tous ses élèves pro-
noncèrent des oraisons funèbres et firent un deuil tel qu'on n'en
avait pas fait depuis cinq ans. Mon maître donna ses deux filles
en mariage aux deux fils de R. David et les dota amplement. Il
envoya ensuite des copies de ses livres en Espagne, en France, à
Alexandrie, en Allemagne, à Fez, à Ispahan, et en général dans
tous les pays où il y avait des rabbins. Aussi ses œuvres se répan-
dirent-elles partout, mais bientôt des rabbins les regardèrent d'un
mauvais œil, car ils ne connaissaient pas ses voies et ne compre-
naient pas ses œuvres, ayant peu d'intelligence, et en somme ils
le calomnièrent'. R. Moïse, à cette nouvelle, composa un ouvrage
nommé « La lumière des aveugles- », dans lequel il explique clai-
rement ses idées et donne la solution des questions douteuses,
en disant : « C'est pour ceux qui ont des yeux pour ne pas voir,
et des oreilles pour ne pas entendre. » Il écrivit aussi des lettres
qu'il expédia dans tous les pays.
» Je ne peux dire en partie même les bienfaits dont R. Moïse
a comblé tout le monde, Juifs et Musulmans; en effet de son vivant
aucun Juif au Caire ainsi que dans les villages de l'Egypte n'eut
à souffrir de persécution. Cet homme fut très savant, droit et
craignant Dieu. Il fit bâtir des synagogues et des écoles, et les
Juifs étrangers qui venaient voir R. Moïse étaient plus nombreux
que ceux qui habitaient l'Egypte avant son arrivée, lesquels
étaient au nombre de 2230. Il enseignait pour tout le monde et,
pour que les élèves de passage pussent travailler sans souci pour
leur vie matérielle, il fit construire un hôtel oîi ils recevaient tout
le nécessaire; il dota cet hôtel d'une annuité de 10,000 deniers
égyptiens. 11 distribuait toutes les semaines aux pauvres de la ville
et des villages, sans distinction de religion, deux cents petits de-
niers en monnaie courante de Fez. Telle lut la conduite d(i toute
sa vie; des volumes ne pourraient pas contenir les récits de sa
science, de son intelligence, de sa richesse et de sa droiture.
» En l'année 4962 A. M. (= 1202 ' de l'ère vulgaire), R. Moïse
' Voyez sur celle lultu contre MaïmoiiiJc, cl surtout pour hi Provence. Giactz, op.
cit., ]). 353 pass. et Hùtoire l'iU(fraire (Je la France, xxvii, p. (iiid.
- Cl est le « (j ail/ 1: des Ei/arif.i •. nnblié par M. Munk.
' La mort (le Maimonide a eu liciiiu l.'ll'i. \
188 REVUE DES ETUDES JUIVES
tomba gravement malade, il mourut et fut réuni à son peuple,
vieux et rassasié de jours. Il fut enterré au Caire, oii tout le
monde. Juifs et Musulmans, lui fit grand honneur. Je ne suis pas
en état de relater le deuil ainsi que les honneurs qui lui furent
rendus par le roi et toute la maison royale. Que Dieu ait pitié de
nous et de tout Israël 1 Amen ! »
n. DOCUMENT SUR DAYID ALROI
Ce document est tiré d'une chronique inédite ou plutôt d'une
histoire des Mahométans et des Juifs, composée par Joseph fils
d'Isaac rs-^-^a^p y'^T' ■^-lawD, en l'année 5433 A. M. (=16*73 de l'ère
vulgaire). Ce livre, qui forme la seconde partie de l'ouvrage, com-
mence à l'année 4302 A. M. (=542) et va jusqu'en 5432 A. M. (=
1672), il est intitulé S]ot^ ■^-i3"i "i2D, tandis que le premier volume,
qui est peut-être perdu, avait pour titre ûi7:sn "^nm et allait depuis
Adam jusqu'à l'époque des rabbins surnommés û-'is-nno '. L'au-
teur énumère dans la préface les ouvrages suivants qu'il avait
à sa disposition, quand il composa son livre :
nbapïn nV^btJ •miN'^ t:30 "i^ont-^ 'o û-^nn 'o !-i723n p-^^n-i nso
3"N-|2N '^"1^73 . -l5UJW-« lip^n . 1-'a"'33 'l myD73 t^^^U nWU52 Û"^73i!n '^nnT
.\aN"in i-nansn y'nontib in"u3 .maN p73 .i^biz^ T' .-nTaM m-ii:
by^ 'nnb ûbir m72'^ -^b.soDNp irr^bt^ 'nnb irr^bx ■'di t]"a73-)n rm-ir:
IN-npbN û-^iar: ■'733n73i i-'nn "| bNiTau) ma-ri -^TaN-i Ninuj û-^mrs n"3;a
. -^mibN ans iSNn i3wS ûN73NbN '^inNnnb.N ■'T"'-ipN7:bN
En comparant ce récit avec celui de Joseph ha-Kohen-, on
verra que les deux chroniqueurs avaient sous les yeux deux docu-
ments différents, surtout pour la lin.
■v':?» -^Ni^bN nnm»Tî3T inx ;a^N dp '^'s'p'n'm Q-^abN (!) nïîHn rî^aai
•'SDbi !-i3-'i25"'n ^N-i -iby -^lobi ''iaovt "133") Nmba "O^n "^^sb n»bi ' i^-^-^-in^
' Voyez notre catalofïue, p. 2410, 1. Le ms. est marqué 0pp. add. 8» 3'i.
* Voyez Emek Habbacka, traduction de M. Julien Sée, pp. 41 à 44.
' Lisez N'*"»iny.
DOCUMENTS INÉDITS 189
bsai TiTsbnm n^bïim n'Cii^ mina bnns n^m man nriwa ap:»-' iiNa?i
□■'D'cawm D->ttn:2-inrî i-iDom trînn'^nam b^yn^a-^ "ji^abni ï-i-^snir-^n riTasn
ia-'ian b^' cnbrjb cri-^Tiîî-'ïn yapbT o-id "j^^n n-* tn-^nrrb inz^na nbri
-ipïJ ï-nmN3 ti-'2)3-io tD-^niN-'b ima ït^^i abuJiT' nx ^lonb n^bbn
C^'^^^î<■^î^ t-ispa in ir7:Nm ûb^TT" t-iN laïaDb nnbia 'n "»5 dnb n»iNi
bina "j-inana ibïi< Nn-^ï5 n-^bia ib nboi nabn 0333 Tno ta-^Tay ynp»T rbêt
rinî<rs '^barr ib -iwnt n-iits xb^T nns Nbn T'bN «m ib rtn-^n 'nn •'d i^T'i
i2i"»i bx-iffl"' •'33 &y J-)N t-nnsb 'rt -^inbo ■'S ""sn "i53N"''i to-^mN-'n "^b?:
&y -13*772 *fb73!i nirï £3^73"' '3 siiobi imon rT'33 i^-^Tar^bi nïJsnb ^bîari
ittisy -i^nrto inîtnpb n3 tit rism nt^t tD-imN-in -i3'7 by T''733>i T^miJ
ib -i73tîi brt33 "^b73rn nn-iN nN-ic ny3T dix ûnn m\Z5n •'b3 û->-noKrr n-'3tt
p:^i: T'T: ^77373 nt' •'■■'N ■'3K ■'S ■'b m»:' TiWDn ib n73N dnbrr n? iN^3rr ^70
D\s^'n i;n i^n ib ti73Ni t'"t3?-i ni-iia ib i33> irti-ccn -i73NT bma bip3 ']b72n
■îb7;b -lUNi rt37i in733n by ^b-nTi !^73n t^to I3b3 bip n3>''73ir3 Nbît imN
nD':: by CNin n:? -i-^nriN T>n33>n vt^tt 'ibTom ^bnn n^m "iD-inb ^biin '^33r;
imN 1N-1 Ti^o imN3 vby 'n3?'i û^73!-! '^32 br ':;-i"'dt i-mo npb Nirtî nnsii
msap nr:"''73 vnnN lobrri i-i*71D b3> d-'733 131:' tr^rîT:: ']b73rt -^ns^» bs
Y5?^tt "^bi-i dvn -,mî<3i ht i7d3 Db-i3?3 qo^?: ^^ ""^ n-i7:NT ims-^'cjn î^bi
by abi nr!73n"'"i . imp i^tk n^ û'^TiN-'b i^^i ^n"iD73r: dr:3 d-'73'' r!-na:>
c^bNJ?73\:;"'rt 1"'''^ nna33 -it:» Ns-^b^ bx v^'^iTobN -1^73-^n nbo 3)"nNi inTorn
n"^n3n3) rr::3'b73 "iti n^ 3'i373b m3^'>:!^n ■'u:n'-i d^i nbiarr ujn-i d:' -i3nb
•^sb im^b» m3ii7o 533 C3\Ni:733n n-^mî^-'n bD nwx ai-irrî^ ixb dwNi nbï^rs
nbisr; ujn-i b» 3rD d^m^^n inb"::i d-id m3"'-i73 b33 triir ny ï^n-^m 3nn
d3 i3n3N d:> û3"'3"'yb p.n733 ritjb -,73X5 TI53 y-iN3;D ï-n3-''»Dirr ■'TliN-l bNI
n3n3 TN bj*-)^-^ 3ip3 -^pS dT ^10123"' Nb"l la-^Xn f-lN 13>373T d-'mN'^ï^ bs
"'D "ii-'N -135"! n33 Nb "^D !ibiN5ri 173T y^i'Ti nb 'l'^iy •^'D n73Nb 3n3 m-îb
dNT rtbNi-; a-'-i3'7D n"n!3:?b73 ^73i:j> y373n "'s Y- C"''^»"'î< ^5*<"i ti3>icnrr 'rsb
53 b3pi i-iimrtb d-'3n3 nb inbo rîbî<3"i bi<"T*3'^ b373 rTn373 ir^rin ii<b
3b3 dU5 dn-i73rt bNim dST^b» 3>7ou5 Nbn pmDi pnuST arbi nM-',pT d*'3n3^î
a-^m^iin 3niM ïr^m oid ^b73b ir^n ■J3ni'^73'i d"*733'mn!^ "^573 v^'^î< V'^t-î*
n-i2:3 t3in t^n '•]735> j-in riyr^ Ttini ^b n73NT mn bt; T'73n t-iN "t^stût
£3'3ir:T a-Dbx sn-iia:s>"i ^^73^ hn b-^itnb '^''by pb o-id ^b73 d:' 'n'n-\'zy
r73n î^np Kinr: rib-'bsi dujpsn ■''T'73'i ds-i^x ■'33ni cnix-'r^ '^b isn''
lïî-'i mû33 Nirti i-ib-'bri ■^jtnsT ■'iiî-i3 is-rp^ïri t-ina73n b» mnb
aipTum 'j-'nbN 'j-'t t^s «SNirj N-^srrT icn-i fiN ir-nsi T^b:' yop "ti3U5
. y-iNfr
f( En l'année [4]923 A. M. (1163 de l'ère vulgaire) se leva un
horannic nommé David Al-Hoï, de la ville d'Amadia. Il avait étudie
sous le chef de la captivi 'é Rabbénou Hasdaï, sous le chef de l'école
190 KEVUE DES ETUDES JUIVES
Éli* et SOUS le Gaôn Jacob-, à Bagdad. Ce David était très versé
dans la loi de Moïse, la Halakhah, et le Talmud dans toutes les
sciences externes (profanesj, dans la langue et la littérature arabes,
ainsi que dans les livres mystiques. Il lui vint à Tidée de se révolter
contre le roi de Perse et de réunir les Juifs, afin de combattre les na-
tions et de s'emparer de Jérusalem. Il donna aux Juifs des signes ■■
faux en leur disant que Dieu l'avait envoyé avec cette mission.
Une partie de Juifs crurent en lui et le proclamèrent le Messie.
Quand le roi de Perse apprit ce que David faisait et comment il
avait réussi à réunir des multitudes, il lui envoya un messager
pour le prier de venir en toute sécurité le voir, afin qu'il se con-
vainquît lui-même de la vérité de ses signes et de ses actions ; ainsi
il saurait que c'est Dieu qui le veut. David vint chez le roi sans
crainte et sans frayeur. Sur la question du roi : « Es-tu le roi des
Juifs ? » David répondit : « Je le suis, car Dieu m'a envoyé pour dé-
livrer les enfants d'Israël. » Le roi ordonna alors de le saisir et de
le mettre en prison. Trois jours après le roi s'entretenait avec ses
princes et serviteurs de l'affaire des Juifs, quand il vit venir à sa
rencontre David, qui était sorti de la prison sans l'aide de per-
sonne. En le voyant, le roi lui demanda tout effrayé : « Qui t'a
amené ici? » David répondit : « Ma sagesse est venue à mon aide,
et en effet je n'ai pas peur de toi. » Le roi commanda à haute voix
de saisir David, mais ses princes et serviteurs lui répondirent :
« Nous ne le voyons pas, ce n'est que sa voix que nous entendons. »
Le roi fut tout interdit devant la sagesse de David, lequel lui ré-
pondit : " Je m'en irai sur mon chemin. » Suivi du roi, de ses
princes et de ses serviteurs, il arriva au bord de la rivière, oîi il ôta
son turban, retendit sur la surface de l'eau, et traversa la rivière
en présence de tous les serviteurs du roi. Ceux-ci le poursuivirent
sur des nacelles, mais ils ne purent l'atteindre ; ils dirent : « Il n'y
a pas de plus fort sorcier au monde que ce David. » Le même jour,
ce David parcourut avec l'aide du Tétragramme un chemin de dix
jours de marche; il raconta aux Juifs ce qui lui était arrivé, et ils
s'étonnèrent de sa sagesse. Là-dessus [le roi envoya] auprès de
l'Emir des croyants, le Khalif de Bagdad, le maître des Musulmans,
pour lui demander de parler au prince de la captivité et aux chefs
des écoles, afin qu'on empochât David de continuer d'agir comme
' Il est probable que le poème dédié au chef de l'école, Eli {/le-Halouç, III, p. 151 ;
voir noire Catalogue, n" 242'i, 4) se rapporte à notre Eli. Voyez cependant Graetz,
Gesch. der Juden, VII [2* édition), p. 462.
' Ce Gaôn est peut-être identique avec le Jacob, sur la mort duquel on trouve
deux potiTies d'éloj^e, publiés par nous dans le LetterhoHe, III, p. 54 pass.
' Vcjy "z Deutéronome, xii, 2.
DOCUMENTS LNEDITS 191
il avait i'ait jusqu'alors, car en cas contraire le roi ferait tuer tous
les Juifs qui habitaient son royaume. Ce fut alors un temps de dé-
tresse dans toute la Perse. Les Juifs envoyèrent au chef de la cap-
tivité et aux chefs des écoles à Bagdad une lettre ainsi conçue :
(( Pourquoi mourrions- nous devant vos yeux, nous avec tous les
Juifs? Empêchez cet homme de verser un sang innocent en Israël. »
Là-dessus les chefs des écoles écrivirent à David en ces termes :
« En vérité, l'époque de la délivrance n'est pas encore venue et
l'homme ne réussit pas par la force, car c'est avec Dieu qu'est la
délivrance. Nous te demandons de cesser tes actions, sinon tu
seras excommunié par tout Israël. » On voulait ainsi le ramener à
la raison, mais David en recevant ces lettres, s'en moqua, il se tut
et ne voulut rien écouter. Mais Dieu, le miséricordieux, mit dans
le cœur du roi des Turcs, Zaïned-Dîn, un des tributaires du roi de
Perse, qui était ami des Juifs, et qui connaissait le beau-père de
David, de lui dire : « Tu sais que tes coreligionnaires sont en
grande détresse par [les menaces] du roi de Perse. C'est pourquoi
il est de ton devoir de les sauver. Les Juifs, en outre, te donneront
dix mille pièces d'or, dont je suis garant. » Le même soir, David
fut invité à dîner chez son beau-père, qui lui donna suffisamment
à boire. Au milieu de la nuit, comme David était ivre et dormait,
son beau-père tomba sur lui, lui coupa la tête, qu'il apporta à Zaïn
ed-Din. Et le pays devint tranquille.
Ad. Neubauer.
{La fin au prochain numéro.)
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL
Parmi les savants du midi de la France mêlés à la querelle re-
ligieuse qui éclata dans les premières années du xiv^ siècle, entre
les croyants orthodoxes et les partisans de la philosophie, Abba
Mari de Lunel occupe un des premiers rangs. C'est lui qui y joua
le rôle le plus important, on peut même le considérer comme le
véritable auteur de toute cette fatale querelle, qui eut pour ré-
sultat d'arrêter pendant un certain temps les progrès de la science
juive, d"aigrir les esprits et de jeter la discorde au sein de commu-
nautés jusqu'alors paisibles. Tels ont été de tous temps les fruits
funestes du fanatisme religieux. Nous connaissons tous les inci-
dents de cette querelle par la correspondance qui fut alors échan-
gée entre les rabbins, et qui nous a été conservée dans le recueil de
Minhat Kenaot. Elle a été racontée avec détails par M. Perles,
dans sa biographie de Salomon ben Adéreth et par M. Renan, dans
Les Rabbins français. Nous sommes moins bien renseignés sur
la vie d'Abba Mari ; nous nous proposons de coordonner ici tout ce
que nous savons sur ce rabbin.
I
LE NOM D'aBBA MARI.
Abba Mari signe ses lettres de son nom et de celui de son
père : Abba Mari ben Moïse (cf. Minhat Kenaot, n" 26, 62, etc.),
ou encore de celui de son grand-père : Abba Mari ben Moïse ben
Joseph (ibid. n»" 19, 34), ou plus simplement: Abba Mari ben Jo-
seph {ibid. n"» 1, 25, 50, 56, 78, 98). Comme cette dernière signa-
ture se retrouve fort souvent, il est difficile d'admettre ici une
erreur de copiste, comme le suppose M. Renan {Les Rabbins
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 193
français, p. 649), mais il faut plutôt songer à l'usage qu'on avait,
surtout chez les Juifs provençaux, de se servir du nom du grand-
père comme nom de famille, en omettant le nom du père. Ainsi,
pour ne citer ici que quelques exemples, le célèbre Calonymos ben
Galonymos ):)&:). Méir d'Arles est appelé aussi Calonymos ben
Méir*. — Menaliem Méiri, appelé aussi Don Vidal Salomon de
Perpignan, qui se nomme lui-même •^niN» n-^nb r:5:bw p ûn:73
(voy. sa préface au Bet ha-Behira), est également cité sous le
nom de Menaliem ben Méir-. — Abraham ben Ismaël, le maître du
savant provençal Jeruham, est aussi cité^ sous le nom d'Abraham
ben Moïse ben Ismaël, ce qui montre bien que la première déno-
mination n'est qu'une abréviation. — Joseph ben Jehuda ben Si-
mon, le disciple connu de Maïmonide, est appelé plus simplement
Joseph ben Simon dans la suscription d'une de ses lettres (Munk,
Notice sur Joseph ben Jehuda, p. 59).
Abba Mari portait aussi le nom d'Astruc, Don Astruc ou En As-
truc (pn::":;» 1') de Lunel [Minhat Kenaot n" 89; Leiterbode, V,
p. 73), mais il est inexact qu'il ait porté, comme l'affirment quel-
ques auteurs, le nom de Enduran de Lunel [Rabbins fr., p. 649).
Une des lettres du Minhat Kenaot (n° 87) est adressée à la fois à
Astruc et à Duran de Lunel. Ce dernier n'est autre que Simon ben
Joseph, originaire de Perpignan, qui s'établit à Lunel et vécut
pendant la querelle religieuse à Montpellier, avec Abba Mari, dont
il était un des partisans les plus zélés [Rabbins fr., p. 695).
Dans une relation écrite à Perpignan, le 17 novembre 1304, on
nomme un certain Moïse Astruc, qui emprunta des livres à son
tils Bénédic Astruc (Saige, Les Juifs du Languedoc, p. 114, 242j.
Il est impossible d'identifier, comme le veut M. Saige, cet Astruc
avec notre Abba Mari, qui à ce moment vivait à Montpellier et ne
se réfugia que deux ans plus tard à Perpignan; et dailleurs il"
n'est jamais appelé Abba Mari de Perpignan. Il importe peu de
rechercher quel était cet Astruc : ce n'est sûrement pas notre
Abba Mari.
i Cf. Zunz, Gesammelts Schriften, III, p. 150; Gross, Mnnatsschnft de Graetz,
1879. p. 470; mss. hcbr. de Berlin, n» 46; Cataiof/. Bodl., p. 24. Ces auteurs
écrivent n"^K» '"1 p D173"^3V3p "^"y- —Cf. Monatsschrift, 1879, p. ooS ; ms. de
Turin, U, foi. 213 (dans le Catalogue de Peyron. p. 14) ei Monaissrhri/'t. l. c. Cest
ainsi qu'il laul expliquer ces mois d Isaac de Lattes : "isn "T'NTO "l"3 D1W;"l?p '"1
("ITiS ■'"l^'O) '1D"1 m732n3 "linri- et il u'est pas nécessaire d'admettre une altéra-
tion du texte. [Ueùr. Bibitoij' aj/kic, VIII, p. 77.)
» Cf. Aaron ha-Cohen, Orhot Hai/yim, I, p. 80 b, qui renvoie au commentaire sur
Béçah du Mein, édition de Berlin, p. 13 fl. Il est vrai qu'à la même pa-c Aaron ha-
Cohen cite Monahem ben Salomon, qui n'csl auirc que Menahem Meiri.
' Jehudu hen Ascher, Réponses s. t. min"" "JinST. édil. de Berlin, n. 84. Cf. Mo-
natsichrifi. 1880, p. 400.
19/, REVUE DES ÉTUDES JUIVES
II
LIEU DE NAISSANCE ET DOMICILE d'ABBA MARI.
Abba Mari était originaire de Lunel ' (département de l'Hé-
rault), en latin Lunate ou Lunellum, en hébreu "irrr^ -, d'où le nom
qu'il se donnait lui-même Tn-^n •"*. Il quitta sa ville natale Lunel et
s'établit à Montpellier où il vécut pendant la querelle de 1303 à
1306. Peu de temps auparavant il avait été à Lunel, peut-être
seulement de passage, sans doute pour s'entendre avec plusieurs
de ses partisans [Minliat Kenaot, n° 18). Dans cette dernière
ville il rencontra une approbation générale. A Montpellier au con-
traire, quoiqu'il s'y fût créé un parti puissant, il se heurta à une
opposition qu'il n'avait pas prévue : celle des libéraux ayant à
leur tête des hommes comme Jacob ben Makhir, Jehuda ben Moïse
ibn Tibbon, Salomon de Lunel. La querelle fut très vive de part
et d'autre. L'expulsion des Juifs de France (1306) en marqua la
fin subite et tragique.
Abba Mari se réfugia à Arles (cf. iJnd., n° 100), où cependant il
ne trouva pas, à ce qu'il semble, un accueil bienveillant. Le séjour
dans cette ville lui devint insupportable, puisqu'il parle d'un se-
cond lieu d'exil où il dut se rendre en quittant Arles. Il se dirigea
sur Perpignan où il arriva six mois après l'expulsion de Provence,
c'est-à-dire vers la fin de décembre 1306. Quelques-uns de ses ad-
versaires essayèrent de l'expulser de cette ville, mais ses amis Sa-
muel ben Ascher, de Perpignan, et son fils Moïse ayant intercédé
pour lui auprès du maître du pays, le roi de Majorque, on lui
permit, comme aux autres exilés, de demeurer à Perpignan. Com-
bien de temps y resta-t-il? Nous ne le savons pas. Mais la suppo-
sition {Rabbins ft\, p. 496) que de là il se serait rendu à Barcelone
n'est nullement fondée. Son élégie sur la mort de Salomon ben
Adéreth (1310) n'a certainement pas été composée à Barcelone,
mais y a été envoyée sous forme de lettre.
' Sa naissance dans cette ville est encore ])rouvée de ce que Salomon ben Adéreth
l'appoUc une lois plus brièvement b'^'2^b nn ''1)2 N3N (Cf. Mrnhat Kenaot, n. 31).
■■' in"*"!"* b^S73 dans Zeraliia Gcrondi. préface à son Maor ; IJl"'")"' PJ'p^ dans
Samuel ibn Tihbon, préface à sa traduction hébraïque du More, par allusion à Dont.,
ixxiv, 3. Cf. Letterhode. IV, p. 166 ; Isaac de Lattes S'-haaré Zion.
s Cf. sa préface au Minhat Kenaot. Ainsi se nommaient entre autres : Abraham
ben Natan, auteur du Manhiçi ; un poète du nom de David, que célèbre Abraham Be-
dursi (Cf. son poème nDD^nW^T n^n) ; de même un Jehuda poète également nommé
par liedtrsi; voy. Zunz, Zur (icsrliichte und Lttcralur, p. 049.
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 190
III
LES DATES.
Nous ne connaissons ni la date de la naissance d'Abba Mari,
ni celle de sa mort. Nous ne pouvons fixer qu'approximativement
l'époque de sa vie. Lors de la querelle de 1303-1306 il devait être
un homme mûr, vu l'estime dont il jouissait et puisqu'il avait
déjà à ce moment un fils marié. Quoi qu'il en soit, il était beaucoup
plus jeune que Salomon ben Adéreth, auquel il a survécu et dont
il se dit le disciple, dans un sens figuré, il est vrai. Les expressions
({ui paraissent le représenter comme étant encore jeune à cette
<'poque [Minhat Kenaot, n° 6, t]"'T»bnr! "i"^:'^; iMd., préface, "^aït
•'^N n-^n^ T':?::ri) ne doivent pas être prises à la lettre : ce sont des
lorrnules de modestie. Elles nous empêchent cependant d'admettre
({u'il lut déjà alors d'un âge avancé. M. Neubauer {Monatsschrift,
1871, p. 514) tient pour vraisemblable que notre Abba Mari est
identique avec le vieux Bonastruc, mentionné par Isaac ben Sché-
schet (Réponses, n° 7) et qui, à Barcelone se serait prononcé sur
une question de rituel pn riirrj (1. b-^sib) b-^i-h pnrriînn iprn ^b n^;?m
-DibL^-inn. Cette hypotlièse n'est pas fondée. Abstraction faite de ce
(lue les noms Astruc et Bonastruc, quelle que soit leur parenté, ne
l)euvent cependant pas être confondus sans plus de façon, il y a
t'ucore deux points à considérer : 1° Isaac ben Schéschet ne donne,
dans ses Réponses, aucun titre honorifique à ce Bonastruc, mais
l'appelle simplement « ce vieillard »^ tandis qu'Abba Mari est tou-
jours mentionné par ses partisans de la façon la plus honorable ',
comme « savant éminent », « l'étoile qui nous guide » {ibid.,
n" 57), « notre maître, la lumière de l'exil ». {Leiterbode, 1. c).
2° Il faut aussi considérer l'époque où ben Schéschet écrivit cette
réponse. Elle est adressée à Benjamin Amar à Bougie en Algérie.
C'est à ce môme savant et un peu i)lus tard à un savant de Bar-
sach que Simon ben Zémah Duran adressa un écrit sur le même
sujet (Réponses, I, n"^ 125, 127] . La Réponse de ce dernier a donc
« Ben Adéreth l'appelle [Minhat Kenaot, n» 29), TaiSSri Î^b3'2!^ p-^mrs' ÛDMi^;
(ibid., n» 49), finp ■'723n '(■'n 'j'^DlM'^Sa "IPlDltt Û^H : Ascher beii Yehiel {ihid.,
n» 151), ThVjTi "TiI5ri TH^jH aDnrî. Les savants do Luncl lui écrivent [ibid.,
n» .'i4), b^^5^; "ion ïlbnnbT "a^db "bz'Sn ÛDnrt ; Abraliam ben Joseph d'Aix
[ibid., w" /i4) va jusqu'à (iirc -yQTi ^3^:^ ;L:\sr; pni: rîTiTD ïjnp n-^ribN cn
bilan.
196 REVUE DES ETUDES JUIVES
dû être écrite presque en même temps que celle d'Isaac ben Sché-
schet, et cela sans doute à Alger, où tous deux s'étaient réiugiés
en 1391. Il est même certain que la date de la Réponse de Duran
est un peu postérieure à cette année de 1391, puisque l'auteur
n'avait alors que trente ans et ne pouvait passer pour une au-
torité à cet âge. C'est donc dans les années 1395 à 1400 que
Bonastruc de Barcelone fit une réponse orale à la question de
Benjamin Amar ^ Il ne faut donc pas songer à identifier ce
Bonastruc avec Abba Mari de Lunel, qui fleurit environ un siècle
plus tôt.
IV
LA FAMILLE D ABBA MARI.
Le père d'Abba Mari, Moïse ben Joseph, qui atteignit un âge
avancé, et son grand-père Joseph, qui porte le titre de Nassi, et
qui ont sans doute demeuré tous deux à Lunel, étaient des hommes
très considérés et très estimés pour leur science-. Son fils Me-
schullam ^, qui était très savant, était le gendre de ce Moïse ben
Samuel ben Ascher* de Perpignan, dont nous avons déjà parlé
plus haut. Une amitié intime liait Moïse b. S. b. A. avec Abba
Mari, dont il embrassa le parti dans la querelle, s'efforçant néan-
moins, par esprit de conciliation, d'atténuer l'opposition des partis
et de les mettre d'accord.
Un Samuel ben Abba Mari de Lunel copia en 1409 le commen-
taire - d'Aaron ha-Lévi sur Allassi. L'hypothèse de M. Neubauer
> 11 y a r!3lb::"133 pn N1?1U3 ...'^b T^rm. Il n'était donc plus alors à Ali;-cr.
D'autres savants qui se trouvaient dans cette ville étaient aussi dits • de Lunel »,
entre autres Abraham Lunel, {rendre de Benjamin Amar (Cl. Salomon ben Zémab
Duran, Réponses, n» 607).
î Rab Joseph est appelé [Minhat Kenaot, n» 91), 3"l!n pnm?:n N"^ï:3r: CSnn
T\^Z^^^ '"1. R. Moïse {ibid., u» 2), par Ben Adéreth, NIH inrin D^nn bn^H mn
rrbrKrr mo"' ; (n» 3), i^rrm r:br:r: bin^n b^:J^^^ : (u» 32). 2in ^"^UJ-^n
rvcT:; 'n ; (n» 61), û-^sD N1C2T ipT r:br3n pNrn bn:ir: yrcin ■. (u» \S), p-^ns
nbrMn ms"'; (n» 49). 17:0 p-i?: bi'ia ; (n» o.i), trnn *t^53t n;an.
5 Ibid., n» :'iS. Son bcau-pere écrit u Abba Mari : ÛlbCT *janbï33 Nllp 'T'^nN
Lb^^c'a •'n-i "«-nm •'^^n "^sm "^ïn.
* Ibid., et n° 18. Abba Mari dit de lui, peut-être seulement parce qu'il lui était
apparcuté, «nn la^ibNlS». (Cl. u<" 36, 37 et 100).
'- Le iiis. de Munich, n" 237, publié eu 1874, porto l'épifïrapho suivante : "^JN
NOTICE SUR ABBA MARI DE LIONEL lf>T
que ce copiste serait le fils de notre Abba Mari ne peut se soute-
nir, d'après ce que nous avons dit sur l'époque où vécut ce dernier.
Il est de même peu vraisemblable que Salomon ben Abba Mari de
Lunel qui a publié une grammaire hébraïque sous le titre de La
Langue savante S soit le fils de notre Abba Mari. L'époque où vé-
cut cet auteur est inconnue, mais comme il se plaint du peu de
connaissance que ses contemporains avaient de l'hébreu, ce qui
l'a porté à écrire une grammaire, il est difficile d'admettre qu'il
ait vécu dans la première moitié ou au milieu du xiv*" siècle ; il a
dû vivre bien plus tard à une époque où la grammaire hébraïque
était en pleine décadence et où une telle plainte était plutôt justi-
llée, comme à l'époque de Yedaya Penini, de Calonymos ben Ca-
lonymos, d'Immanuel de Rome. Abstraction faite de cette remar-
(jue, il y a eu certainement à Lunel et ailleurs d'autres hommes
(lu nom d'Abba Mari. Ainsi il y avait à Lunel, à l'époque même
(le la querelle, un Abba Mari ben David, qui signa, de concert avec
d'autres rabbins, une lettre d'adhésion adressée à Salomon ben
Adéreth {Rabbins fr., p. 692).
En général le nom d'Abba Mari était très répandu en Provence^
ce qui a donné lieu à maintes confusions. Nous ne ferons remar-
(juer que la suivante. Le voyageur Benjamin de Tudèle nomme
dans son Itinéraire [liinerarium, éd. Ascher, I,p. 5) un Abba Mari
ben Isaac qu'il rencontra à Saint-Gilles où il était bailli du comte
Raymond (vers 1170). Zunz (Itinerariwn, II, p. 14) et après lui
d'autres savants, comme M. Graetz (Histoire, VI, p. 244) et M. Re-
nan [l. c, p. 250) tiennent pour vraisemblable que cet Abba Mari,
bailli de Saint-Gilles, était le père d'Isaac ben Abba Mari, l'auteur
de YIttour (composé de 1179 à 1189). C'est là au contraire une hy-
pothèse tout à fait invraisemblable. L'auteur de VIttour était de
Marseille et est sans doute le môme R. Isaac que Benjamin de Tu-
dèle rencontra dans cette yiWe [Itinerarimn,!, P-6); son père
était également de Marseille, comme le témoigne Isaac de Lattes.
r^nfzrt r.v:^ -j^'i; '>::nn2 ir73r:;r! i^rr^ïri ...itjdw» NCT-iïn N^'^a^b n-^îym
?TT^^"'b "'UJIUlrî ClbNn Î3"isb 3>ï3m D'^UÎ'iUl. Steinschneider met en doute l'exac-
titude de la date 109. Neubauer, Monalsscfirift, l. c, donne la date Û^i'Om !lt<ï3
> Ms. de Parme, n" '.W dans Hehr. Bibliofjr. do Steinschneider, VIII, p. 27,
■^TlT' ■'173 N2N p M^obW 'nb D"^11?2b "JTOb. Le nom de ce dernier rabbin est
accompagné de la note suivante « appelé aussi En Duran Astruc do Lunel », comme
si c'était notre Abba Mari. Le manuscrit est aussi à Paris, n" 1239^, et dans De
Rossi, n° 800 ; mais il n'a que la première partie. Il i'aut en dire autant de celui de la
Hodléicnne, précédemment Cod. Rupgio, 1S. Le ms. Schorr a le nom N^N p Tifzb'C:
t^iin^ 1-172, ce que Hcnjacoi), D'^-iDDM "1^1i<> considère comme une corruption de
T. IV. 1-i
198 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
En outre, l'auteur de Vlttotir » invoque souvent les écrits talmu-
diques de son père, qui avait été le chef d'une grande école. Cela
ne peut pas s'appliquer au bailli de Saint-Gilles, que Benjamin de
Tudèle compte à peine parmi les savants de l'endroit. Il est diffi-
cile d'admettre qu'il y ait eu à Saint-Gilles, où demeuraient cent
Juifs environ, une école considérable ; dans tous les cas, il n'est ja-
mais question nulle part d'une école pareille ; mais il a dû en
exister une dans la grande communauté de Marseille, qui est dé-
signée par Benjamin - comme une ville de talmudistes distingués,
et qui était un des grands centres de la science juive. C'est là sans
doute qu'il nous faudra cbercher cette école et à sa tête Abba Mari,
père de l'auteur de VIttour. On a aussi mis ce dernier en rapport
avec notre Abba Mari, et supposé que celui-ci descendait d'Isaac
Abba Mari de Marseille (Jost, Geschichte des Judenthums, III,
p. 41). Cette hypothèse n'est confirmée par aucune preuve.
Ce qui est certain, c'est que notre Abba Mari était parent du
Nassi Calonynos ben Todros de Narbonne. Quelle était cette
parenté? On ne le sait pas. Il n'est pas prouvé non plus qu'elle
s'étendît à Meschullam, cité dans la lettre adressée à Calo-
nymos ^. Meschullam était simplement leur ami commun et leur
partisan. C'est dans sa maison, sans doute à Narbonne, qu'Abba
Mari avait obtenu du Nassi la promesse d'un appui énergique dans
la querelle qui venait d'éclater. Abba Mari lui rappelle cette pro-
messe dans la lettre dont nous venons de parler et fait allusion en
même temps à leur parenté. Le Nassi, qui avait hésité jusque là,
s'attacha tout à fait à lui. 11 faut remarquer le respect extraordi-
naire * qu'il témoigne à Abba Mari dans sa réponse et ailleurs.
Abba Mari jouissait d'une haute considération à cause de sa
science et de sa noble extraction. Jacob ben Makhir, don Proflat
Tibbon, le chef du parti libéral à Montpellier et son plus grand ad-
versaire, se prononce sur cette extraction dans une lettre à Sa-
lomon ben Adéreth. Nous reproduisons le passage malheureuse-
' -TIlD^^Î nSD, (!dit. Lemberg, I, p. 7, 47 a, 52 a ; II, p. 17 J, 33 i ; I. p. IC h : nT
Û'^TOSn. Un peu plus tard Maïmonide écrit à. Marseille à 12"i5nT70") 15"^DlbN
V'TI rn ■'J'IV £]'^3in73lrî D"'ttSri!^- Cf. ses lettres, édit. Ariisterdam, p. 6.
' Minhat Kcnaot, n" SC Clbl"-i;73 'l I^-TIN "735jrî n^nn ■^S"'»'^ T^n "^înTriN
IH"^ ^53"il5^. De là M. Perles conclut (Biof/mphie des Salomon h. Âdcreth, p. 44) que
Meschullam lui était parent. Mais flN peut ici comme ailleurs avoir le sens d'ami.
Cl. i/iid., n" 19; Jlahbtna français, p. 713.
* Jhid., n" rj7, n-nnirr hr:^ nmnr; N3s: ^-û, irjn?: nsis is'T'aa •■ n* 64,
binai .ïnwisnn Nt^3 ,bT75ï-! lasnn ù^sd ntcs ,iro3?3 2Di5 ist^in ,*i«
I
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 199
ment corrompu qui en fait mention, à cause de la précision du
texte. Jacob ben Makhir reproche à Salomon ben Adéreth d'avoir
proclamé hérétiques les études scientifiques et surtout les études
philosophiques, sur la seule instigation d'Abba Mari, qui les lui a
montrées sous un faux jour, en disant qu'elles étaient dangereuses
pour la foi. Après lui' avoir représenté le propos blessant qu'Abba
Mari avait tenu sur le « vieux roi * », expression par laquelle il
désignait Samuel ibn Tibbon, il continue en ces termes : « Je me
» rappelle que dans ma jeunesse-, quand j'étais à Lunel pour y étu-
» dier, on y lisait, à des époques déterminées, ses écrits (de Sa-
» muel ibn Tibbon). Le savant (Abba Mari), qui t'a dicté ta conduite
•' à l'égard de la philosophie, aurait dû se rappeler que mes ancê-
< très et les siens, le grand savant Meschullam ^, honoré de l'es-
) time universelle, ainsi que ses fils et ses gendres, étaient au
)) nombre des plus considérés du pays, que mon grand-père^ (Sa-
» muel) et le pèreide mon grand-père (Jehuda) avaient les rapports
' les plus intimes avec eux (Meschullam et ses fils) et que' c'est
sur leur conseil qu'ils (mes ancêtres) ont traduit plusieurs écrits
> philosophiques, en tête desquels ils ont mis les noms de ces cour
« seillers. Ce qu'on permit alors, on ne peut pourtant pas le dé-
» fendre aujourd'hui. Maïmonide s'est prononcé d'une façon élo-
» gieuse et approbative sur ces traductions, dans les lettres qu'il
« lui a adressées (à Samuel ibn Tibbon). »
Jacob ben Makhir Tibbon , proche parent de Jehuda ben Moïse Tib-
' Minhat Kenaot, n" 39 ; «f. n° 9, mininb '^"^T' DNllia ipTir; '^^73^! by
'rb'iljf'^, allusion sans doute au passage de Kohélet IV, 13, b'^DS'l ^pT ^^772.
Cr. Rabhins //•., p. 673- Samuel ibn Tibbon n'est pas non plus nommé, mais c'est
lui sans doute qu''il désigne par ces mots ÛJ d'^W^D 1135 b"l Q3"72"l b'rtS?^ 2"|îl
ih ITibUJ m"l5N3 ©bU5. L'édition porte la leçon 'jn"ni : un manuscrit au contraire
D3"73"1, ce qui est plus juste. Voy. Lciterbode, IV, p. 131. Maïmonide correspondit
;ivec Samuel ibn Tibbon. Cf. Lettres de Maïmonide, édit. Amsterdam, p. 12.
« L'édition et deux manuscrits portent im:'33, d'autres manuscrits •^m"n5M3.
Cl'. Letterbode, l, c. La différence n'est pas essentielle, puisque Jacob ben Makhir
iHait sans doute à Lunel pendant sa jeunesse.
3 'nhyûl2 '-1 blisn n-lïl irSpTI irSTivX. M. Renan, l. c. et p. 713 traduit
'Ù"'"pT par « notre aïeul > ou « notre grand-père ». C'est la signification ordinaire de
■'-pT, mais "li'^îpT est uni<juement un titre bonorifique. Cf. Menabem Méiri, intro-
.luction au Bclh ha-Beliira pnif n"2 Ûl-nnN 'l "innSirî "iS'^'pT ; ibid., irspT
b"T '73"iS-|ïn b"n:in ; 'i^>i<l., ■a-'^U'^rj nsba IS-^lpT anrr. Ce Meschullam est Me-
schullam bon Jacob de Lunel, qui était très considéré et qui encouragea Jehuda ibn
'l'ibbon à faire des traductions d'ouvrages arabes. Cf. préface de Jeliuda ibn Tib-
bon à sa traduction du mnnbrt m3in. Cf. Monatsschrift, 1868, p. 292. Les fds de
Meschullam sont honorablement connus.
* L'édition porto seulement fjpT "'SIlN ; urt mauuBcrit uu contraire "^apî ^mN
T^aNI. Cf. Letterbode, l. c.
200 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
bon, un des adhérents les plus zélés du parti libéral à Montpellier et
certainement fils de Moïse ben Samuel ibn Tibbon [Minhat Ke-
naot, n°^ 21, 26) descendrait, d'après le passage cité, de Jehuda ibn
Tibbon '.Mais il est très douteux qu'il ait été en même temps,
comme M. Graetz le dit [GescMchte der Juclen, VII, p. 261), un des-
cendant de Mescliullam ben Jacob de Lunel ; du moins le passage
que nous avons cité ne le prouve pas. Si l'expression lî'^spT- se
rapportait aux seuls ancêtres de Jacob ben Makhir, il serait
très étonnant que celui-ci ne nommât et ne louât que ses aïeux et
non pas ceux d'Abba Mari, auquel il fait cependant allusion. Pour-
quoi s'abstiendrait-il de les mentionner ? De plus, dans cette hypo-
thèse, les Tibbon auraient été alliés à la famille des Mescliullam,
alliance dont on ne trouve de trace nulle part ailleurs . On ne com-
prendrait pas bien non plus l'emphase avec laquelle cette lettre
rappellerait à Abba Mari les rapports intimes qu'auraient eus
entre eux les aïeux paternels et maternels de Jacob ben Makhir. Il
n'y aurait dans cette intimité rien de remarquable, si les deux fa-
milles étaient apparentées. Il est plus vraisemblable que Meschul-
lam de Lunel (mort en 1110), qui avait aussi un fils savant, Rabbi
Joseph, a été le bisaïeul d'Abba Mari benMoïse ben Joseph de Lunel.
Chronologiquement, rien n'empêche d'adopter cette hypothèse,
d'autant plus que le Moïse dont nous venons de parler a atteint un
âge très avancé. II faudrait seulement que la naissance d'Abba
Mari remontât aux années 1245 à 1250, de sorte qu'il aurait eu
50 à 55 ans au moment de la querelle, ce qui s'accorderait bien
avec les témoignages de grande estime qu'on lui adresse de tous
côtés. Tout le passage recevrait dans cette hypothèse une bien
autre signification et un sens plus précis. Meschullam et ses fils
ont favorisé les études scientifiques en Provence et c'est à leur ins-
tigation que les Tibbonides, par de nombreuses traductions, ont
im[)rimé à ces études un mouvement progressif. C'est la coopéra-
tion amicale de ses aïeux et des aïeux d'Abba Mari que Jacob
ben Makhir rappelle à Abba Mari. Il l'exhorte en quelque façon à
ne pas agir contrairement à l'esprit de ses aïeux, mais à partager
leur amour de la science.
Dans la famille de Meschullam se manifestent des contrastes
étonnants. Il avait cinq fil^, tous savants (Benjamin de Tudèle, l. c,
\). 3) : l'un, Aaron, était un des partisans les plus exaltés de Maï-
' Est-ce Jehuda ou son fils unique Samuel qui a été le grand-père de Jacob beu
Makhir? je n'ose pas trancher la question, parce que les leçons portent, les unes ""^pT,
les autres 113^1 i3pT.
" Pourquoi aussi y aurait-il i;">DpT <îl no" las "^rpT "•'
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 201
monide (Voy. Gross, Motiatsschrift, 1873, p. 405) ; un autre, As-
cher, talmudiste éminent, menait une vie d'ascète, sans cependant
être un obscurantiste, comme M. Graetz [l. c, p. 240) le représente,
il était au contraire un ami de la science [Monatsschrift, 1874,
p. 174) ; le troisième, Jacob, est certainement le même que le cab-
baliste Jacob Nasir {ibid., p. 170, 173); le quatrième est Joseph
dont le petit-fils serait notre Abba Mari qui combattit avec tant de
fanatisme les études scientifiques cultivées avec tant d'ardeur par
ses ancêtres.
LES ECRITS D ABBA MARI.
1 . — Abba Mari n'était pas tout à fait étranger à la science dont
il désapprouvait l'étude. Il connaît divers ouvrages philosophiques
auxquels il renvoie dans ses écrits ou dont il emprunte certaines
expressions et propositions ; mais il n'avait pas pénétré l'esprit
de ces ouvrages : il s'en est tenu plutôt à la surface. Sans grande
profondeur et engagé dans une haggada demi-mystique, il n'a vu
la philosophie que dans un demi-jour. Il n'en a pas reconnu l'im-
portance et n'en a pas mesuré l'influence d'après les travaux des
grands philosophes juifs, mais d'après les exagérations de ces
philosophes exaltés et fanatiques qui croyaient retrouver la philo-
sophie jusque dans l'Ecriture sainte, et qui avaient appliqué à
celle-ci un système sans frein d'interprétations allégoriques, afin
d'établir un accord complet entre Moïse et Aristote. C'est là ce qui
effraya Abba Mari et lui fit voir dans les recherches scientifiques,
qui faisaient négliger l'étude du Talmud, un danger sérieux pour
la foi, dont les doctrines renferment des vérités éternelles qui
sont au-dessus des systèmes changeants de la philosophie. Il fit
donc tous ses efforts pour limiter l'étude de la science chez la jeu-
nesse, en ne lui permettant cette étude qu'à partir de trente ans,
âge où d'ordinaire les jeunes gens sont assez familiarisés avec le
Talmud. C'est pour cela qu'il se mit en relation avec les savants
les plus considérés de Provence, avec Salomon ben Adéreth de
Barcelone et plus tard avec Ascher ben Yehiel de Tolède; il ob-
tint leur approbation et fut cause de leur sévérité contre ses ad-
versaires. Cette conduite arbitraire et fanatique, qui était tout à
fait propre à troubler la vie intellectuelle des Juifs, se heurta dans
202 REVUE DES ETUDES JUIVES
les cercles libéraux à l'opposition la plus tranchée et appela la ré-
plique la lîlus acerbe. Lorsque de tristes événements matériels
coupèrent court à la querelle qui s'alluma à ce sujet, Abba Mari
recueillit dans le loisir de l'exil les lettres qu'il avait écrites pen-
dant la lutte ou qu'il avait reçues de ses partisans, surtout de Sa-
lomon ben Adéretli, les réponses approbatives et les répliques
adressées à celui-ci ; puis il donna à toute la correspondance le
nom de Minhat Kenaot « l'Offrande du zèle » (d'après Nomb., v,
18). En tête de l'ouvrage est une très longue introduction et vers
la fin est intercalé un petit ouvrage m-'r; "idd envoyé par Abba
Mari à Ben Adéretli, oi^i sont développés les principes religieux de
l'auteur. Cette collection a été publiée en 'l838 à Presbourg,
d'après un manuscrit incomplet. M. Renan {l. c.) a donné sur
l'ouvrage des renseignements additionnels très précis, d'après plu-
sieurs manuscrits plus complets et plus corrects, et M. Neubauer
a publié dans le Letterbode de M. Roest (iv-v) les passages qui
manquent dans l'édition de Presbourg. Les travaux profonds de
ces deux auteurs nous dispensent de parler du contenu des lettres
plus qu'il n'est nécessaire pour la suite de cette étude.
2. — Abba Mari était un talmudiste très considéré, mais on ne
sait pas s'il a écrit de vastes travaux talmudiques. Il est très invrai-
semblable qu'il soit identique, comme le suppose M. Renan [L c,
p. 649), avec cet Abba Mari ben Joseph dont Salomon ben Adéreth,
dans ses Novelles sur le traité talmudique Schabbat (p. 128 a)
cite le commentaire sur Alfasi. Ce nom n'est certes pas celui du
savant de Lunel, et si parfois il signe de cette façon, ilfaut remar-
quer que Ben Adéreth, dans les nombreuses lettres qu'il lui adresse,
ne le nomme jamais Abba Mari ben Joseph. On ne peut donc, sans
motifs plus graves, considérer ce nom comme celui de notre Abba
Mari. Ben Adéreth était, du reste, bien plus âgé qu'Abba Mari de
Lunel : on ne peut donc pas admettre qu'il l'ait invoqué comme
une autorité rabbinique. Les Novelles précitées de Ben Adéreth
ont sans doute été rédigées, comme la plupart de celles qu'il a
écrites, bien longtemps avant l'époque de la querelle, à peu près
dans les années 1270 à 1290 '.
On ne connaît d'Abba Mari que quelques lettres sur des ques-
tions de casuistique qu'il a échangées avec Salomon ben Adéreth -
• I/époquc de la rédaction de ces Novelles ue peut être déterminée avec précision.
Cf. Perles, L c.,p. 79. Dans les Novelles sur Schabbat le nom de Nahmaui est suivi
de la roniiule b"lïT.
* Minhat Kenaot, n" 6. Cl', u" 8, la réponse d' Adéreth. Cf. Répousas d'Adéreth,
éd., Berlin, u'^ /i24-/i27.
NOTICE SUH ABliA MARI DE LUNEL 203
OU avec celui-ci et Ascher ben Yeliiel à la fois •, plus une réponse
qui se trouve dans le manuscrit de M. Halberstam ^ (n° 136) et qui,
à cause des renseignements qu'elle nous donne sur les relations
d'Abba Mari avec quelques savants provençaux, réclame une plus
lono>ue description. Ce manuscrit, écrit sur papier petit in-4» par
plusieurs mains, contient 204 ff. ; il est très défectueux en certames
parties, renferme de nombreuses Réponses talmudiques de divers
savants éminents, la plupart de l'époque de Joseph Caro (1488-
1575), de Joseph Caro lui-même, Jacob Berab, Jacob Castro, Ehe
Mizra'hi, Moïse ben Joseph di Trani et autres 3; de plus quel-
ques Réponses moins nombreuses traduites de l'arabe en hébreu,
de Joseph ibn Migasch sans doute*, et enfin cinq lettres casuis-
tiques de savants provençaux, de l'époque de Salomon ben Adé-
reth '. Une de ces lettres est d'un docteur très estimé «, Mordechai
ben Isaac Kimhi, petit-fils sans doute du grammairien David
Kimhi; une autre est de son fils Isaac ^ lui aussi savant très es-
timé, auteur de nombreux écrits talmudiques et autres, et connu
aussi comme poète liturgique (il vivait encore en 1341). Ces deux
lettres, empruntées sans doute à la collection « plus vaste des Ré-
ponses de ces deux rabbins, ont été copiées par le petit-fils de
Mordechai Kimhi. Ce petit-fils pourrait bien être Joseph ben Salo-
mon ben Mordechai Kimhi, père d'Isaac ben Joseph Kimhi, qui
a vécu en 1394 à Arles, où il a copié plusieurs écrits de Schem
Tob ibn Falkera ^ Parmi les savants avec lesquels Isaac ben Mor-
1 Jilinkat Kmaot, n" 50 ; Question à Beu Adérelh et n» 51 ; Réponse de ce der-
nier Les Réponses que celui-ci envoya à Montpellier sur un sujet analogue (cf. edit.
[prabertr H n° 237), sont sans doute aussi adressées à Abba Mari.
Tu Halberstam, pour me permettre d'approfondir la question, a eu la complai-
sance de m'envoyer le manuscrit sur la couverture duquel il a écrit quelques rensci-
^"'LaTernièrriSponse, très -défectuense. du temps de Joseph Caro, renferme entre
autres une citation remarquable d'un écrit talmudique inconnu n . O ^■^Ni.t3
.nmnDi nnnn^ \\:n ^n:^ r)-\b:^i2r> û",:» nson nn^*:) 5Nnwia
* Halberstam, l. c. ._v»^.H-,
'■■ Une des lettres, 189, est intitulée TCJN -^^nb mnVûn ^mpn mni ^1Ni.W
N3"-:3n^ 1MT3 Vn. Uno collection de ce nom était connue au xvi» siècle, aussi
bien de' Joseph ibn Lêb, cf. b3"•^nr^)^ n"Y'U3. I, P- 24, que de Beçalel Askenasi.
cf ses Réponses, n-> 20. C'est de ce recueil aussi que sont tirées sans doute plusieurs
Réponses d'Isaac ben Immanuel de Lattes, éd. \ lenne, p. 34 il.
c Ibid., p. 51, -iDinTQ 'n IIN^rr. Cf. Conforte, Koré ha-Dorot, edit. Berlin, p. -
et les Réponses précitées de Joseph ibn Lêb et Beçalel. ^ ^ ^
7 Cf ihid ■ vovez Isaac de Lattes, Schaar^ Zion : -|"3 pHif^ 1 551D. . QDn. .1
°^3n^ ^^^3T ^^,:'5,-nr! mnn û-pOSI. Voye. sur lui Laudsbul, AmouM ha-
Alioda, I, p. 124 ; Zunz, Literalwff., p. 505.
s Joseph ibn Lêb {L c] avait sous les yeux une collection pareille.
Cf. Gross, Monatsschrifl, 1880, p. 174; Landsliut, /. c.
■-'Ji REVL'E DES ÉTUDES JUIVES
dechai était en correspondance il faut, outre Salomon ben Adé-
reth (Réponses I, n° 443), Isaac Kohen de Manosque (Isaac de
Lattes, Réponses, p. 51) et Lévi ben Gerson de Marseille [ihid.,
p. 93), remarquer Abba Mari de Lunel. Leur correspondance porte
sur un cas de jurisprudence matrimoniale, qui, à des époques dif-
férentes, fut l'objet de controverses entre de savants talmudistes :
à savoir, au bout de combien de temps, une femme divorcée, en-
ceinte de son mari ou allaitant l'enfant déjà né, peut se remarier '.
Deux savants de Marseille Msaac ben Merwan ben Jacob ba-
Scbeniri (de Montauban ?) et Moïse ha-Doeg ben Natan adres-
sèrent sur un cas analogue une question à Isaac ben Mordechai et
à un second savant, peut-être son frère Salomon, -cr^^^-^zK En
effet le premier s'appelait aussi Mestre Petit ':;7:^N;^n^ mot qui
signifie difficilement Nîmes (Renan, l. c, p. 650), mais plutôt
Nions, en latin Neomagus (ville du département de la Drôme,
au nord de Vaison). Isaac ben Mordechai y a sans doute vécu et a
émigré plus tard à Salon où Salomon ben Adéreth {l. c.) lui a
adressé des lettres. Isaac, qui, dans sa réponse aux savants de
' rr^p^-^^N rîp^r'»: ^-IJI^:;. Cf. Ketouhot. f<-60: lehamot, /d-42 • Tossa-
phot, thid.; Or Zaroua, I, p. 173 ; Salomon ben Adéreth, l. c, n» 723 ■ Isaac de
LaUes, Réponses, p. 42 ; Ascher ben Yehiel, Réponses. LUI, 1-3 ; Isaac ben Sché-
schet, Réponses, n» 13, et souvent dans les Réponses talmudiques. Cf Maïmonide
^■^;i"i-"'; T: chap. XI ; Ehen ha-Sze>\ chap. xiii. '
' Le manuscrit p. 191 porte au bas dune lettre la si-nature npr^ 'îNin'D pHit^
"'-I"'rwn et ^r; nn :,N-i-;- rrO^. Le surnom de ha-Scheuiri se rencontre chez d'au-
tres personnages provençaux. Un Ezra ben MeschuUam -^n^rrrr vivait en 1386 à
Marseille. Cf. Isaac de Lattes, Réponses, p. 08 ; uu autre de ce nom, de l'année
W.'lS^r^'^ïrT ™^;^^^-^l^ ^^^'i^^'^' "° 362 ; cf. Zunz, Zeitnn.j des Juden-
thnms, 1839, p. 681. Le poète ha-Scheniri est bien connu. Il est très douteux que ce
mot signihe . de Montauban .. Cf. Zunz. S,,nago!jale Poésie,- Ralbins fr., p. 71o
..r\ru 1 .'°"'!'^'"'' ^^°'''' ^'" ^'"^^^^"' °'^^' P'^^ identique, comme le sup-
pose M Halberstam, /. c, au poëte Moïse Nathan qui s'appelait de son vrai nom
Moïse ben Nathanel. Cf. Zunz, Zur Geschichte, p. 474 ; Hehr. Bibl., XI, p. 141 La
dénomination i^inri est incompréhensible. Il ne faut pas songer au nom biblique
iJoeg, isanmes, lu, 2. carie mot parait être un surnom. Je ne veux pas laisser sans
la mentionner cette circonstance qu'Abba Mari de Lunel signe ainsi sa lettre de con-
doléance sur la mort de Ben Adéreth (cf. plus loin] nm::^. n3.N:i ï.^13 .Nnn
ui est in ■■ 5 ■^^*"''*' 'ï"'' ^^^'^'^ '^^"^ ''^"'re passage signiherait aussi . celui
' Dans Isaac de Lattes, Réponses, p. 93, et Isaac de Lattes, Schaaré Zion, simple-
ment j jo n-i:o^N73 : dans la liturgie de Carpentras, dans ses Azharot, on a ajouté
a son nom X^IzTj^^. Cf. Zunz, Utcraturg., p. fiOo et Landshut, l. c. Le nom de la
»ï/ *''i,,7;'«'"^'"enl altéré dans le ms. de Parme, n» 37. Cf. Halberstam, Hebr.
^imcs est toujours transcrit 1^703. Cf. Temim Dcim, n»' 7, 19 ; Isaac ben Schéschet,
réponses, n» 220. Cf. Lettcrhode, p. 182, ^i::^:;^: ; Minhat Kenaot, n" 23; ms. de
,, *!L^"''^' ^"'''""^ /■'■•< P- t^6!i; ms. de Munich, n» 284 : Lattes, p. 112,
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 20b
Marseille, était disposé à la solution la plus indulgente dans la
question sur laquelle on le consultait, mais qui n'osait pas se pro-
noncer ouvertement, s'est sans doute, comme c'était l'habitude en
pareil cas, adressé de son côté à d'autres savants, pour délibérer
avec eux sur ce sujet. C'est donc certainement à lui qu'est adressée
la Réponse de son ami Abba Mari ben Moïse ben Joseph *, de Lu-
nel par conséquent, qui décide, avec beaucoup de sévérité, que
dans n'importe quelle circonstance, et sans différence aucune, le
délai légal de vingt-quatre mois, comptés à partir du divorce, de-
vra être maintenu.
3. — Abba Mari est aussi nommé parmi les poètes liturgiques.
Cependant on ne peut lui attribuer avec certitude qu'une élégie -
(le six strophes pour le 9 Ab, qui commence par les mots : >^3N
ni3n^ S]iONb, et qui probablement a été écrite après l'expulsion des
Juifs de France, laquelle commença dans le funeste mois d'Ab
de l'année 1306. Les deux autres élégies ' que nous connaissons
de lui sont écrites en prose, dans une langue très énergique, il est
vrai, mais parsemée d'expressions talmudiques. Une de ces élégies
roule sur la mort du célèbre Salomon ben Adéreth (Cf. plus haut).
Dans l'autre Abba Mari déplore la mort de son ami intime *, le
grand et fin talmudiste Menahem ben Salomon, nommé Don
Vidal Salomon de Perpignan ^, décédé à Perpignan , dans la
seconde moitié de l'année 1306 6, et d'un savant autrement in-
connu, Meschullam ben Makliir, nommé Don Bonet Crescas de
Lunel \ qui s'était réfugié sans doute à Perpignan. En outre, Abba
' Abba Mari lermine ainsi sa lettre, qui dans le manuscrit suit immédiatement celle
.lUsaac ben Mordechai ^mï^N ';>:ND ']r"i"l3 \:J"'N CS3D1 '^wîSriD ÛibO nrNT
* Elle n'est pas imprimée. Cf. à ce sujet Zunz, l. c, p. 498.
3 Minhat Kenaot, ms. n" 131-132; Letterhodc, V, p. 73-79.
* Minhat Kenaot, l. c, "b Ni!"! JlNl \1 û:; i^b br ûmniD 1\-1^U:.
5 Minhat Kenaot, n" 93. C(. Salomon ben Adéreth, Réponses, I, n" 1249 ; ibiJ.,
ûTN mibin, II, n" 11; Isaac de LaUes, (ScAaa/^^îOJï, où Perpignan est donné
comme la patrie de Méiri.
'• Cette date n'offre aucun doute. Cf. Bahhins fr,, p. î)29. Elle est confirmée par le
passage suivant du Srhalschélet ha-Kahhala, p. 46 a .• ("^T'NTD dH3'^ '"1 h'i^) T^^O'^^I
nu ^^j>'r\^y: ']5?a tn û:n . • . no-i^t ^ums ïr^m i"d Q-DbN '- nso ï-^rro
bNm::-^ bc p^M bri ujnpM nDO by.
" Il est appelé bbli^ DjH^^ et vanté à côté de Méiri comme savant très impor-
lanl. Peut-être est-il identique avec ce Sen Bonet de Lunel dont le supercommen-
taire sur Ibn Ezra est cité par Nathanel Caspi, dans son commentaire sur le Cozari.
Cf. Senior Sachs, dans Kerem Hemcd^ VIII, p. 197 ; Steinschneider, dans Jihl.
Zeitschr. de Geiger, VI, p. 124. Dans notre hypothèse un des noms, Crescas, serait
tombé, ce qui arrive souvent chez les Provençaux. Sachs identifie ce Bonet avec Yc-
206 REVUE DES ETUDES JUIVES
Mari déplore la situation pénible de ses coreligionnaires dans les
domaines du Roussillon, de la Cerdagne et de Majorque', qui ap-
partenaient alors à T Aragon, et dont le roi Jayme II fit saisir vers
cette époque la fortune des Juifs et brûler en public les livres hé-
breux. Abba Mari, à la suite de cet événement, institua un deuil
public.
En revanche, il n'est pas certain qu'il soit l'auteur d'une poésie
liturgique - commençant par les mots bi b:' ■^tiN et qui ne ren-
ferme que l'acrostiche Abba Mari. L'allusion au nom de Joseph,
son père, est incertaine ; et si même ce nom était indiqué claire-
ment, l'auteur resterait toujours difficile à déterminer, puisqu'il
y a eu encore d'autres poètes liturgiques du nom d' Abba Mari ben
Joseph, entre autres Abba Mari ben Joseph ibn Caspi, auteur de
la poésie liturgique qui commence par •^yr:û :>J2^^ ■':d3> '" (Zunz,
l. c). Ce dernier Abba Mari est peut-être le père de l'éloquent
Joseph ben Abba Mari ben Joseph ibn Caspi surnommé Bonafoux
de l'Argentière (né en 1280), ou peut-être est-il le talmudiste Abba
Mari ben Caspi ^ d'Alger, celui, sans doute, qui a écrit l'inscrip-
tion'* poétique, gravée sur le monument funèbre du célèbre Isaac
ben Schéschet (mort en 1408) ; mais on ne sait pas si son père s'ap-
pelait Joseph. Le simple nom d'Abba Mari se retrouve encore dans
deux autres poésies, l'une en hébreu commençant par Tnri"^ nnri''
(Zunz, L c, Nachtràge, p. 50) et l'autre en araméen commençant
par n-^Tz-û r:bi<b NniNi nn^nx (Luzzato, L c).
L'affirmation » qu'Abba Mari de Lunel ou un Abba Mari quel-
conque aurait commenté la liturgie araméenne d'Isaac ben
Gayyath pour la fête de Pourim repose sur un malentendu. L'au-
daya Pcnini, mais ce dernier, quoiqu'il portât le nom de Bonet, n'est jamais appelé
« de Lunel » .
1 Letterbode, L c, np^lliT^T r!"'''5"'1^i: 'îT''«bï:"n mb;np. Le second nom est
Cerdana, en latin Ceretania ou Geredania, en français Cerdagne, ancien comté situe
dans les Pyrénées, confinant au Roussillon, et qui appartient aujourd'hui partie à
l'Espagne, partie à la France, département des Pyrénées-Orientales.
=• Cette poésie est imprimée dans le Kf.reni Hemed , IV, p. 30. CL Zunz, l. c, p. 537,
La dernière strophe contient les lignes suivantes yj'ÏD t\OV lï^'O T^DDS 'JSN'Û '^ÏT'
tlDT^ 1-12 lrT"1D"^ 'J33''n. Dans ces derniers mots, Zunz prétend voir une allusion au
nom du père do l'auteur. Cf. Luzzatto's Nachlass dans le Magazin de Bcrliner, Vil,
partie hébraïque, p. 4, où cette poésie ainsi que celle dont nous avons parlé N2N
SlIDXb et une troisième qui commence par iS^^N^ JinON sont attribuées, semble-t-il,
à Ai)ba Mari de Lunel.
3 Cf. Salomon ben Simon Duran, Réponses, n" G12.
* Cr. Kaufmann, Monatsuchrift, '1882, p. 8(3.
'• Cf., à ce sujet, Steinschneidur, Cat. Bodl., p. 2307 et 27G1 ; Catal. mss, Michael,
p. 'l'M'). Cf. Jia///i. /?*., p. GOIi, où cependant la désignation qu'emploie Salomon Du-
ran t~\yz N3i<, qui ne laisse aucune incertitude sur l'auteur, n'est pas prise eu consi-
dération.
NOTICE SUR ABBA MARI DE LUNEL 207
ti'iir de ce commentaire est Zémaii Diiran d'Alger (xvi* siècle),
dont le fils Salomon Duran junior fit entrer l'écrit de son père
'c -1-173 N3N », dans son ouvrage b^Tvii"» mïîsn « Gloire d'Israël ».
4. — On dit aussi qu'Abba Mari de Lunel a composé un ou-
vrage astronomique*. Mais c'est là une hypothèse tout à fait in-
vraisemblable, si on considère l'attitude hostile de ce rabbin à
l'égard des études scientifiques. L'auteur en est peut-être le phi-
losophe Abba Mari, nommé encore Sen Astruc de Noyés-, chez
lequel Samuel ben Jehuda ben Meschullam de Marseille est allé
tHudier (vers 1324) l'astronomie à Salon, et sans doute aussi le
même que l'auteur de la traduction hébraïque d'Euclide^.
Henri Gross.
1 Voy. Gerondi, ni'îTn, p. 24 ; De Rossi, Dizionario sforico, p. 1 ; Calai, mss.
Codd. à l'index s. v. Le manuscrit n'est pas indiqué avec précision, je ne lai pas
trouvé.
* Voy. Gross, Monatsschrift, 1879, p. 471.
3 Ms, de Munich, 91 a, Mm» ïDriujrî EiiDip-^sin 'N nttNKjri Tîî nrT^nD n^-^n
"'"153 MDN p^^• La façon dont ce dernier est cité ici ne plaide pas en faveur de l'hy-
pothèse proposée dans le catalogue, p. 40, que i-itt NIN voudrait dire le père du
traducteur.
LISTE DE RABBll DRESSEE PAR AZRIEL TRAROTTO
UNE DES SOURCES DE &UEDiLYA IBN YÂHYA
Dans le manuscrit n° 227 de M. Halberstam, qui comprend les
notes recueillies par Abraham Joseph Salomon Graziano n:»" d-'K,
se trouve, f" 226(2 à 227 <2, une nomenclature de savants, semblable
à celle que nous donne Salomon Luria dans sa consultation n° 29,
et à celle du petit-fils de Samuel de Sélestat publiée par Een-
jacob dans le deuxième fascicule de ses D■'p^"^r ûnnn. Il était per-
mis de supposer à priori que Graziano, qui a été un grand collec-
tionneur, avait copié cette liste sur un manuscrit plus ancien,
quoiqu'il n'indique dans sa copie ni l'auteur de cette pièce, ni sa
provenance. Mais nous n'en sommes pas réduits sur ce point à des
conjectures : nous connaissons le manuscrit original, et, par suite,
l'auteur de la relation, et nous savons de plus que Graziano a pos-
sédé ultérieurement ce ms.
Comme nous l'apprend le catalogue des manuscrits hébreux de
Cambridge, par Schiller Szinessy, I, 97, le ms. 40 a été acheté par
Graziano dans la succession de Natanel Trabotto (forme italienne
de L2n:3-iL2). La pièce que nous allons publier se trouve égale-
ment dans ce volume, sous le n° 19, avec cette seule différence
que la suscription du ms. Halberstam y est mise à la fin. Ce ms.
de Cambridge nous apprend également que l'auteur de la pièce
est Azriel Trabotto, portant le titre de Çarfati que prenaient,
depuis Joseph Colon I, tous les membres de cette famille riche en
savants. Je puis aujourd'hui, grâce aux gloses manuscrites de
Graziano sur mon exemplaire du Schalschélet hahhabbalah, indi-
quer avec précision la parenté d'Azriel Trabotto avec Graziano.
Azriel ben Yehiel Trabotto fut chef de l'école d'Ascoli et mourut
à Pesaro lejeudi22 tammuz 5329, ce qui correspond, comme la
glose nous le dit explicitement, au 7 juillet [1.569]. Il était le bi-
saïeul de Graziano, car la dénomination de -^apT jointe au nom
LISTE DE RABBINS DRESSÉE PAR AZRIEL TRABOTTO 209
d'Azriel dans la glose du f* 64éï démon Schalschélet, édit. Venise,
est expliquée, f'' 65 &, par les mots b"ii:T tt"N :?"73 bïJ nspT, « grand-
père de mon père ». Si donc Azriel est l'auteur de notre pièce,
Graziano aura recueilli dans ses collections le travail de son
bisaïeul.
Dans une littérature aussi pauvre que la nôtre en sources his-
toriques et oii la biographie des savants se compose péniblement
à l'aide de notices dispersées , le plus petit travail d'ensem.ble un peu
ancien, le moindre essai de réunir dans une suite chronologique et
généalogique nos écrivains les plus éminents est pour nous d'un
intérêt considérable. Comme on le verra par les notes dont j'ai ac-
compagné le texte de notre liste, surtout si on la complète en
consultant les travaux spéciaux auxquels je renvoie, cette liste
nous fournit pour la chronologie des renseignements précieux à la
fois par leur clarté et leur exactitude. Les informations littéraires
qui s'y trouvent ne sont pas toutes puisées dans des livres ;
çà et là on y rencontre aussi quelques fragments de traditions
historiques qui suffiraient seuls à justifier notre publication.
Trabotto est si familier avec la littérature des Toçafistes, qu'on
peut se demander si sa famille, en même temps qu'elle portait le
nom de Çarfati (français), n'a pas gardé un souvenir de traditions
françaises. Dans tous les cas, l'intérêt véritablement scientifique
qu'Azriel éprouvait pour l'histoire de nos savants est un fait digne
d'attention et qu'on note avec plaisir.
La liste que nous publions est un document qui nous servira à jus-
tifier l'auteur si souvent méconnu du Schalschélet, Guedalya ben
Joseph ibn Yahya, dont Joseph del Medigo disait méchamment qu'il
fallait l'attacher à sa propre « chaîne ». Le pieux Azulaï lui-même
traite Guedalya avec malveillance (par exemple s. v. inNn) ; Zunz
le nomme tout simplement l'auteur « léger » de la Chaîne de la
tradition (ZeitscJirift, 280), et appelle ce livre un livre « souvent
mensonger » [ihid., I, 131). Contrairement à ces injustes accusa-
tions, on se convaincra facilement que Guedalya a déployé un zèle
touchant et digne de tout éloge en s'efforçant de réunir tout ce
qu'il pouvait trouver de renseignements sur l'histoire de nos sa-
vants, et s'il a mis sa confiance dans tous les vieux papiers et
dans tout ce qui est écrit, suivant l'épigramme d' Azulaï, on verra
qu'il a toujours suivi ses auteurs avec une fidélité scrupuleuse et
souvent omis ce qui lui paraissait peu croyable. Comme nous le
montrerons, Guedalya a connu notre pièce de Trabotto et l'a utilisée
dans son ouvrage, où il la cite souvent comme un vieux Conteros
Dnuîip ; il l'a même tirée directement des papiers de R. Azriel
Trabotto, comme nous essayerons de le prouver. Dans l'iiis-
210 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
toire merveilleuse qu'il raconte au f<'52a, il nous dit explici-
tement qu'il a trouvé cette histoire dans un recueil de l'école de
Rabbi Trabotto. Or, nous retrouvons cette même histoire dans le
recueil de notes de Graziano (ms. Halberstam), comme je le mon-
trerai prochainement dans cette Revue. De même, la notice mer-
veilleuse sur la pierre tumulaire de la mère de Nahmani (56 a du
ScJialschélet) se retrouve dans Graziano (voy. notre note 94).
Remarquons enfin qu'Azriel Trabotto considère déjà notre pièce
comme un vieux Conteros. Elle est donc sans doute le travail d'un
de ses ancêtres du même nom que lui. En tout cas, nous avons sous
les yeux l'œuvre d'un des ancêtres de Graziano.
,mi:nïî -inci tîsïînt ,'i-iDDi ,r3ni:T ,b3m bNi*::-' y-ixn .b^T^s-^n rrnn
-iDDT , m5NO mnr^ïm , niisbr; •'psD isnD Dni:p?:T û-^-idd ■'inn?: ûnitpn
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r^np3 "jT^ub ii< N-i!^ n2î 'jr:;b \>? ']"n ^n:; N-nwbn •'-1:31 b-^p'^iT (3) •{•'■tai-îpa
"i^an -i-iDittT ,&';:: rT:?npii-t i-inbnr; n7:\-in "iriN tnm «■^■^snsn b^D^
•ji^tt^D -1'"-!^ înp3 -iHN "îivNî rr^r: , riT iins nhhn ni ^7:'^3 , N"«rî •^xm^D
i-inx , nan -.cn n-^nr; n-nn nson D"'?::»^ -^v:: N"3'*rnr; itst^it , «"nN-^'^p
T773:? îj-'inx û-'iiNS nsi^T (■'•) nbin:i ni::br: brn "jins ■'NIiïT' n-i '7735' p
■i3n::2 (6j n"o riwsT (3) N-,p72ï^ br) n^n -i->:;n iin^ r^iro '-1 "5153 t^^hn
1531 Nl-^lïa 31 , (9) r!\-in72 21 , (8) "^IHûbD 21 ,(7) pIS: p5 21 , I73\a br
21 ,(11) tnb"»ai'«a 21 ,mDi»73 -i^^-j by (lO) t2^ir:3 lan irj< \yfn ai
13121 i;rrii , bi<"ri i:''2i , (U) -^nsii-js 21 , (13) -^«brr^s 21 , (12) ai^y
pns"» irai , (16) m:>ii:p7:ri isd lan bi<:2n ir2ii (15) -fii:?r: b^a in3
û"^i::>U5rî-, , (17) i;7373 bap ti"a72i:-;i , -^DobN Nip3ïi ico lan i^î< ""CND
^■'DDbisman':} pnjf^ irai riT ni:?u ainD -^rKit?: , cobN 21 ■'ir:: û"^Nip3?i
c\s oi72"'5ibp 13-^21 ,0E73 pHi:"' lï^^ai Nin û:* &<ip3i ^r:-^^ (is) ns3 bax
, (22) riN-'iNB?: rTCî73 i"ir; , (21) n^w ai , (20) ii^Nin û^ds is-^ai , (19) iwii
i"irr aa , niîiNib ^7:c3 fasiii trsv:: «"-^i , (23) t^siNS iNip3 ibx bs
an iïï!!< ,r;bi:ir; iintî iiœia i3-'ai ti-^nDi^îr; ^731 r'^^ P îNinTO
ninsDT: nsp iNa niîii ni3iN5b ^t^ds Nir; na / 137373 ibap rsix ''31N3
. (2;j) iiïta ^Nn ai mnx N\:i3 n'^îi baab ^brr^ i-^b? iitNi , [2.'.) ni73bna
,niaiï:ni nibN-:; n733i diNii73Ni ûiN3n iïjo lan (26) oby arj ciDi-" is-iai
ap^i 13^21 v'01 bc vniai ,p!iai73 iai n^n Nbi (27) a^Ta 137373 bap'^"«5ii
î=ip (3U) rriiïi^ i"a pHii^ is'^aii ,(2'j) ^ibïi pnî:^ 13^311 ,(28) ipi i"a
13-^ai inT v'c-i ^ ûMjy73 C)-'73r>D 'n73bna i''UJii''Da iï<"<2ni , nstp ■>"ûib
LISTE DE RABBINS DRESSÉE PAR AZRIEL TRABOTTO 211
(31) T'ttîTT'cn bis^'^a-^ bi) "^i-^y -i\^r; nrJN isDmDT^r; pni'' "i"3 T^i^b-a
D5 , 17:':^ by lan^:: -i^n rnsblr: ipDD nws labw û-^isD T's^t , niî^brn
, ï-T'^n i''^-! inittbnT^ (33) rr^nMO n"ir; , rsDb -ns3 (32) ■^"n-j'^n "riTrîT^r;
irnnb rnNas n-iminti nriN , (34) man szn -^^ û-';^ nb i^r; t^'b •^";i:^b
ï-iirp '•^D':3 V'nn î^iî^ , (36) ini ^"n ri'îTni i"-ir:b n^îiur;! , (35) ^-^nt:
:p::3 "iin:: Ij-^^-i , (38) û-^isk ^''-ni-ib n-^"»::-^?":::!-;"! , (37) r^n ■'"'>ï;-i "issb mnisa
K-inn Nnn n::D» aii -ixa n wîî L3"3'v:;n Nir; b^{^730 nrs-i , iD"'nwS* r!">ab\:)
,(39) ninN mn5D?3 nirpi -^i^ nsD na iN-^m ,-i3pT ''"•c-i b":j in-r^-jD ii-în
nriN n"-i m:y /-lO-^n nso nnn n"-n ^rr; •^''cn b^ inn ^sn ibN nob-i;
li-^nn ,(41) •a3"'i-^b-nN!': np:?i i^ian Nir:i ,û"i:::>i?a m72ip7:3 masinn -i5T3
bapn rr^n n"-i b^ imm in (42) j-nssinr; b:>n rnn^r; bNi^^r:: n"2 pnsi''
'■) / (44) v'-an i3pîtt bnp û "nam , (43) t^hn t=,"'2-c^i2 h'2'p n"-n , i;x:»
np:?-^ -i"-im (46) -^sTiTo n"3 priiT'i is^mi , (45) î]\s'Tir: b:?n y"-»'?:?: irr-^bN
û-^-^n "iD^nn , (48) ^^"■«■^bTiNT: rjOT^ n"nri û^i , T^r! n"-i iTii^^brD^ (47) bïî-TJ:"^
nïta "i^N (50) "nï3 Tii^a riDii i^-^nm , ■'iiip?: t:3"-i!i bin i52N "^nN (49) )to
Tîttbi n""! i7:"^n T^r. ûrr'jiy (5i) mcDinn iSTi t=i:;-i ,i-nin "'ïJ72in 'rr
nï-in-i ■i73'«2 (53) ■'UJ-^ns» N-'bN i3"^:n-i , (52) a-^n-^an û"i'T^7:bn nb i^rri nrin-'^'^n
i3^a-n , (54) 'i;25'^'-iD» n'iiir;-' 'n , ri-^^-^tt "ta-^^pi , rr^r: rnsDinn b3>3 prii^-^
-l'JiîN (56) v?"P^ ir^:î:^o ir^'^.i (55) r;?2Tnnr^ -!2D nan n-rx pnir-^ '-i"3 "ri-in
"i^-^n"-, ^T^r; t-nDSin:i b:?3 bNi7:uj n''^ pni:"' 'n -^T^T^bn ti-^j^-iT nno iNa
ù-iT , rr^r: ■^'iî-'-ict: tmiï-!"^ 'n T'T^bn , lirn ^b^ t^dn (57) ^œ-i-iî^^ bN-^n-^
(59) NïN-^TiT: priif' i"-i^n , bT7r,r; mi:): "iss nan nïïiN (58) ■'iipTs r;"i!72 i"nrt
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bN3n3 "i"-ir! iiinp^i /n iini br i^nN ^■^nn (64) ^npnii ti^-i'is j-i307:3
(66) ï-iiDDinn 1SÎ3T f-iiDOinrr byn pnifi i5^3-i m:3-'^^a n^^b (65) "iia-^s^j
n^Tî^î ■'T55'>::n!^ (67) pi"iDD:j"'^tt bm.'ir; fa-^^oN r.-^^i , û-^-jj^iîo t::-^737D
î-jTSibD -131 , n"n n3^'i:"^3 no-iiin "iTob ■«^nnTaai ^"ttDni (68) rnsoinn
la-^n-i lï^TT ,■^5117:3 smttip73 r^Tosa "iSTS!^ ïiiln ^nb^i (69) b^r li-'n-Tî
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ti-'-isN is-^nn Ni!-îi -^ijT-ittn -i^jt^ -ihn anaN li-^nn nm , '{■'rj: miDbrtn
■^^n-iTon -iibr: bt^T^ is-^n-n , p'niD"D:i'^'n73 d-^noN nî"'^'-, b:' pbnsi (7i) r!"3i3'a
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212 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
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n^rro -inn nnsn ^n^Nm ,niN72 bi^a T'-iin ynN3 v;eb i^^rî (89) nn» ■!3"Nnm
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nab -nî<7:r5 bra (9i) inbn nin-îT iram Nir;T , rr^n (90) T'n =x t=:mnN
ï-iir: i^^i-bT , r;^- «"^cnr: t:: inn (92) i-tr^ibTj:^ -zv -i"-i- , »nnN rin^'^ia
"i^ns -i"a r-!0?o l'inn nnr; î<im VaTann , mi<7a bii: (93) -lON nîT" -i"n!^
ic»in r:":;7:n 'd rr^T: lï-^n^ r:T~ uî^nï^i , rnin y^-ir; ûct (9'i) n3n-i[is]n
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(looj-ji-inxn ûiDs i;ia-i ,ïî"3ï:-ir7 n^na "jDDNrsT (99) n3i::iir-i3 "pi uy
: 1-^n î<"2-:5-ir; bo iT^^bn
Avant de passer à l'étude de cette pièce, nous en donnons ici,
pour les lecteurs qui ne sont pas initiés au style rabbinique, une
traduction à peu près littérale.
« Tableau d'une partie des savants qui ont vécu après la clôture
du Talmud, tels que Saboréens, Gueo?iim, casuistes modernes et
anciens, qui ont cultivé la Tora en Israël, dans la Terre Sainte, et
u Babel, en France, en Espagne, en Allemagne et autres pa^^s, et
dont les uns ont écrit des livres, les autres des décisions rituelles
ou des consultations, sans avoir fait un livre qui porte leur nom.
') Après Rabina et Uab Ascbi, les derniers talmudistes, est
LISTE DR RABBINS DRESSÉE PAR AZRIEL TUABOTTÛ 213
venu R. Ahaï Gaon, Saboréen, auteur des Scàeéltot, mentionné en un
petit nombre de passages du Talmud, entre autres au I" cbap. de
Kidduscliin dans un passage ajouté après la rédaction du Talmud.
R. Ahaï avait pour contemporain le Gaon R. Simon de Kiyyara.
Puis est venu Rab Yehudaï Gaou, auteur du Halakhot gedolot, et
après celui-ci, d'autres Gueonim tels que R. Saadia Gaon (qui a
commenté toute la Rible et à qui sont attribuées un grand nombre
de Consultations), R. Cohen Cédek, R. Paltoï, R. Mattatia, R. Scherira
et son fils R. Haï (auteur de Portes sur la législation civile), R.
Sar Schalom, R. Amram, R. Nihalaï, R. Natronaï, Rabbénu Hanna-
nel et son gendre R. Natan ;_auteur de VArukh), R. Hannanel qui a
écrit le livre des Maqçuot, R. Isaac de Fez ;auteur de VAlfasi ; Maï-
monide a suivi son enseignement ; c'est par erreur qu'on lui a attri-
bué les Portes de R. Alfas, qui ne sont pas de lui, mais de son neveu
Isaac de Fez), R. Calonymos de Rome, R. Nissim I, R. Moïse, R.
Moïse de Pavi'e. Tous ces docteurs sont appelés Gueonim; quelques-
uns disent que Maïmonide également et R. Samuel b. Hofni ont
reçu officiellement ce titre de Gaon, et parmi les Français, R. Guer-
schora, la « lumière de l'exil », le maitre de la plupart des rabbins
français. R. Guerschom a commenté un certain nombre de traités du
Talmud, et on dit qu'il avait été en Babylonie et qu'il avait épousé la
sœur de R. Haï Gaon. R. Joseph Tob Élem a composé le livre des
Tannaïm va-amoraim et nombre de Consultations. Raschi n'a appris
de lui que peu de chose et n'a pas été son vrai disciple. Les maîtres
de Raschi sont R. Jacob b. Yakar, R. Isaac Ilallévi, et R. Isaac b.
Yehuda qui a été un peu plus ancien que Raschi, lequel le cite
un certain nombre de fois dans son commentaire talmudique.
Raschi, c'est le célèbre R. Salomon bar Isaac, qui a éclairé les
yeux de tout Israël par son commentaire sur le Talmud et sur
les vingt-quatre livres de la Bible, sans compter les nombreuses
décisions qui lui sont attribuées. Le Mahzor Vitry a été rédigé
sous ses yeux. R. Schemarya a été un de ses élèves. Raschi n'a-
vait pas de fils, mais seulement des filles. L'une d'elles a épousé
R. Méir, l'autre R. Yehuda b. Natan appelé Riban, qui a commenté
quelques traités talmudiques sous les yeux de Raschi, son beau-
père ; la troisième a épousé R. Ephraïm. R. Méir a planté trois cèdres :
R. Samuel appelé Raschbam (qui a commenté la plus grande partie
du traité de Baba Batra après la mort de son grand-père Raschi, le
dernier chapitre du traité de PeraJtim et quel([ues autres traités), R.
Jacob, le rabbin bien connusous le uoni de Rabbénu Tam, R. Isaacb.
Méir dit Ribam. R. Tam a écrit le Séfer hayyaschar ; les toçafot men-
tionnent un autre R. Tam, qui est R. Jacob d'Orléans. R. Isaac b.
Samuel, l'auteur bien connu de toçafot, était le fils de la sœur de
R. Tam et l'élève de ce dernier, et R. Tam a été l'élève de son frère
Raschbam, qui a été l'élève de sou grand-père Raschi. R. Eliézer de
Metz, auteur du livre des Yeréini, R. Isaac b. Mordekhaï et R. Jacob
Israël ont été les élèves de R. Tam, comme aussi R.Joseph d'Orléans.
T. IV. i:;
214 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
R. Hayyim Cohen, père de la mère du Ram de Coucy, et R, Joseph
Bekhor Schor, qui a commenté les cinq livres de la Loi et qui est
mentionné dans les toçafot, ont vécu tous deux du temps de R. Tam,
ont étudié à son école et ont été ses élèves habérim. R. Elle de
Paris, a été un contemporain de R. Isaac le toçafiste, mais plus âgé
que lui. R. Yehuda de Paris, R. Barukh h. Isaac, auteur du Séfer
hatteruma, R. Simson de Sens, qui a commenté TOrdre de Zeraïm, ont
été élèves de R. Isaac le toçafiste. R. Yehiel de Paris, qui est allé à
Acco, a été élève de R. Yehuda de Paris, de même que R. Moïse de
Coucy, auteur du Grand livre des Préceptes, &l queR. Isaac devienne,
en Allemagne , auteur de VOr zarua. R. Yehiel de Paris a été
aussi l'élève de Riba (R. Isaac b. Abraham) ; Riba a aussi composé
des toçafot, mais ils n'ont pas obtenu la même vogue que ceux de
R. Isaac b. Samuel. R. Isaac de Vienne a aussi été élève de R.
Simson de Coucy, comme nous l'apprend le Mordekhaï. R. Simha
est le grand-père de Ri le toçafiste et le fils de Riba, c'est-à-dire R,
Elhanan, qui a écrit des toçafot sur Nedarim ; il est mort martyr
du vivant de son père. Le saint R. Netanel de Chinon a étudié à
l'école de R. Isaac le toçafiste et il est mentionné quelquefois dans
les toçafot. R. Ephraïm le Grand de Ratisbonne, l'Allemand, a étu-
dié en France à l'école de R. Tam, et il a souvent été en discussion
avec R. Joël Hallévi qui est mentionné souvent dans le Mordekhaï et
qui a adressé des questions scientifiques à Riba. Un autre R. Ephraïm
est nommé dans le Mordekhaï, c'est Ephraïm de Bonn ; il discute contre
Ephraïm de Ratisbonne et R. Joël Hallévi, ce qui est également men-
tionné dans le Mordekhaï. Rabiah, qui est souvent cité dans ce même
ouvrage, est R. Eliézer fils de ce Joël Hallévi que j'ai nommé ; il a été
un peu antérieur à R. Méir de Rothenbourg, ce rabbin célèbre dont
les consultations remplissent le Mordekhaï. Ses élèves ont fait un re-
cueil appelé Tasbaç. Raban, c'est-à-dire R. Eliézer b. Natan l'Allemand,
qui est mentionné dans le Mordekhaï, est le grand-père de Rabiah.
R. Méir de Rothenbourg, que je viens dénommer, a été l'élève de R.
Yehiel de Paris; son père s'appelait R. Barukh, et est nommé deux ou
trois fois dans le Mordekhaï. R. Ascher l'Allemand a été élève haber
de R. Méir de Rothenbourg et a écrit un livre appelé Ascheri. Son fils
R. Jacob a écrit les Arba Tiirim. R. Barukh de Mayence était alle-
mand, il a écrit le Livre de la Sagesse. L'auteur du Mordekhaï a été le
gendre de R. Yehiel de Paris, et le beau-frère de R. Isaac de Corbeil,
auteur du Litre des Préceptes abrégé appelé les Colonnes de VExil. Il
parait que R. Isaac de Corbeil a, lui aussi, été élève de R. Isaac b.
Abraham nommé plus haut. R. Péreç, qui a fuit des notes sur le
Livre des Préceptes abrégé, a été l'élève de R. Yehiel de Paris. En Es-
pagne, Catalogne et Languedoc 11 y a aussi eu de grands savants qui
ont cultivé la Loi en Israël et sont devenus célèbres avec d'autres
auteurs de Décisions. Le célèbre R. Moïse, fils de R. Maïmon, a fait
un(! œuvre remarquable, son grand ouvrage divisé en quatorze
livres; il a commenté toute la Mischna et écrit en outre d'innom-
LISTE DE RABBINS DRESSÉE PAR AZRIEL TRABOTTO 215
brables ouvrages. Il était de Cordoue, dans le pays dlsmaël, et Raschi
l'a précédé de peu. Rabad, c'est R. Abraham b. David de Narbonne,
contemporain de R. Tam ; on dit même qu'il alla étudier incognito à
l'école de R. Tam. lia écrit un livre sur ce qui est défendu et permis,
appelé leur Maschhu, et fait des critiques sur Maimonide. L'autre
Rabad, qui a vécu avant lui à Bagdad, est un homme très remar-
quable et j'ai vu dans une lettre que Maïmonide l'estimait beaucoup.
Le Rabad qui a été l'antagoniste de Maïmonide était le gendre de R.
Abraham Ab-bet-din; lui et R. Zerahya Hallévi ont étudié à la même
école. R. Jona de Tolède, a été le maître de Raschba, et avant lui a
vécu un autre R. Jona, homme très remarquable. Ramban veut dire
Moïse b. Nahman, il était de Girone, où 11 enseignait. Il a commenté
les cinq livres de la loi et écrit des toçafot sur tout le Talmud. Il
était savant, instruit dans la Cabbale, qu'il apprit de R. Eliézer de
Worms, l'Allemand, auteur du Rokéah. Raschba a été élève de Ram-
ban, mais son vrai maître a été R. Jona de Tolède, comme je l'ai dit.
Raschba, c'est R. Salomon b. Abraham b. Adret de Barcelone. Lui
aussi a poussé des branches et porté des fruits. II a composé le
grand Torat habbaït et le Tarât habbaït abrégé, et on a de lui des
Consultations sur tout le Talmud. Il a vécu du temps de R. Ascher
l'Allemand nommé plus haut, et lorsque R. Ascher alla ouvrir une
école à Tolède, il passa par Barcelone et fut l'hôte de Raschba. R.
îsissim II a été l'élève de Raschba. »
Voici maintenant nos notes et explications sur notre texte.
1. Baba M., 86a ; cf. Brûll, Jahrhûcher, II, 39, note 52.
•2. D'après Samuel ben Méir (voy. Toçafot de Ketubot, 2&, s. V.
-j"^U5d), l'auteur des Scheéttot serait le Rab Ahaï qui est
nommé ici et dans d'autres endroits du Talmud de Babylone.
Cf. Jiœhasin, édit. Filipowski, 109 b. : ^ïîn.x 3n '^^nc, voy.
Kidduschm, 13a, où les passages parallèles sont indiqués;
i^HN 31 a-^ïîD, voy. Ketubot, 2«. Cf., sur le maître de Rab
Ahaï et sur son époque, Brûll, l. c, 146 sqq.
3. 2b. Scherira déjà désigne ce passage comme une addition des
Saboréens : i^api ^^ii'id ^«nna ^Nmao "js^n. Voy. la Lettre de
Scherira, édit. Goldberg, Mayence", 1873, p. 28 sqq. ; cf.
Brùll, t. c, 46, note 64.
4. Ceci d'après l'école française qui reconnaît comme auteur des
mbns m:3bn Rab Yehuhaï Gaon, qui fleurit après Simon
de Kiyyara. Voy., sur cette question, Graetz dans la Monats-
schrift de Frankel, VII, 217 sqq. et Ilalberstara, ibid., VIII,
379 sqq. Sur Rab Yohudaï Gaon, cf. Ilamagid, V, 293 sqq.
5. Le mot n5<3 indique sans doute une traduction de la Bible, bien
que d'ordinaire on emploie le mot c-id (voy. Zunz, Gesamm.
21G REVUE DES ETUDES JUIVES
Schrîften, III, 63), et que le témoignage de Petahya de Ra-
tisbonne semblerait indiquer que Saadia a commenté toute
l'Ecriture Sainte (voy. Graetz, Geschichte, V, 536). La tra-
duction de Saadia avait une très grande réputation en Occi-
dent, comme on le voit, par exemple, dans le règlement
scolaire publié par Giidemann, Geschichte des E?-ziehungs-
loesens, 269.
6. Sur les Consultations de Saadia, voyez Frankel, Entwurf
einer Geschichte der Literatur der nachtalmudischen Res-
ponsen, 81 sqq.
7. Sur Cohen Cédek I, cf. Graetz, dans la Monatsschrift, Ylf,
223. Ici, d'après la place qu'il occupe dans cette relation, ce
parait être Cohen Cédek II ben Joseph, le célèbre contem-
porain de Saadia.
8. A partir d'ici, la science historique de notre auteur commence à
être moins sûre. Sur R. Paltoï Gaon, cf. Graetz, Geschichte,Y,
276; Frankel, Mojiatsschrift, YII, 224 ; Zunz, Ritus, 186,
9. Sur Mattatia Gaon, voy. Graetz, Geschichte, V, 2*77 et Zunz,
l. c. 187.
10. L'auteur entend certainement par là le nD7:?:i np?: ido, traduit
de l'arabe en hébreu en 1078 par Isaac ben Ruben Albargeloni,
ouvrage que Raschi [Baba M., 29a) appelle aussi nnn "^lyo
YiiH'j: "^Nr;, comme le remarque Rappoport, Biccuré fia-Ittim,
X, 91, note 22.
11. Sur Sar Schalom Gaon, contemporain de R. Paltoï, voy.
Graetz, Geschichte, V, 276 sqq. ; Zunz, l. c, 186 sqq.
12. Mar Amram est l'auteur du Siddur de Rab A^nram; voy.
Graetz, l. c, 278 ; Zunz, /. c, 88.
13. C'est sans doute un des "^Nb-^r;. Voy. Lettre de Scherira, édit.
Goldberg, 43 et Juchasin, édit.Filipowski, 206, où on a deux
fois imprimé "^Ni^-^riN ; cf. Schêm haggedolim au mot ii<'3-»ï^:.
14. C'est probablement le célèbre Rab Natronaï II ben Hilaï (859-
869). Voy. Graetz, /. c, 277: YY^x\\iQ\. Monatsschrift,W\,
225; Zunz, l. c, 187 sqq.
15. Il n'y a que Guedalya ibn Y i\h\ a, Schalschélet, édit. Venise,
41 Z>, qui nous dise : iln: ■^::-,' ai- r>vû ic 0"'"i::3ip3 ^■^^N^^
■jiNi bN::n ira-i bo nra r!CNb ib npb. Cette assertion a sans
doute pour fondement remi)loi extraordinaire que fait Fau-
teur de VAruhh des commentaires du célèbre rabbin de
Cairoan. C'est aussi pour cela qu'on a fait de Ilannanel un
Romain ; voy. Kohut, A7'uch Cotnpletîim, I, p. XII ; Hebr.
Bibliographie, V, 121. Lebrecht a fait deux liyjjothèses
différentes jiour expliquer cette désignation de « romain »
LISÏK 1)1-: HAHBINS DRESSEE FAR AZRIKL TI{AHOTTO 217
a[ti)liquée à Ilannanel [Wlssenschaftl. Blàlter, 33, note 3 et
96, note 2). Sur la parenté supposée de R. Xatan avec
le Gaon Haï, voy. Pinsker, Likknté Kadmoniyi/ot, 156,
note 3, et lettres de Rappoport, dans Haschachar, X (qcs*:
n'^m:, 16 sqqJ.
16. Cf. Rappoport, Blccuré ha-Jltlm, XII, 30, note 36 et Warn-
lieim, rr-'-c^n ri:i3p, 52-60, avec les rectifications dans le
JescJiurîoi de Kobak, IV, p. r;"o ; voy. aussi Senior Sachs
dans Haniagid, 1878, 321.
17. Guedaha ibn Yali^-a, l. c, 42b, donne aussi cette indication
sur l'autorité douteuse de Schem Tob ibn Gaon. Cf. Conforte,
Koré haddot'ot, Qb en bas.
18. Conforte réunit déjà. Le, la, les témoignages de Méir de
Rothenbourg sur ce prétendu neveu d'Alfasi. Cf. aussi
Rappoport, Biccuré ha-Itiim, X, 92, note 23 et l'addition
embrouillée d'un ms. des û-^nrc, Hebr. Bibliogr., YII, 22;
Cîbx m ■'ir:) est déjà le titre qu'on trouve chez le petit-fils
de Samuel Sélestat ; vovez c-'p-rr nnn-, édit. Bénjacob,
II, 1.
19. Calonymos ben Schabtaï de Rome; voy. Zunz, Synag. Poésie,
203; Lite7^aturgeschichte , 250 ; Ritus, 198.
20. Nissim ben Jacob de Cairoan; cf. Rappoport, Biccuré ha-
Ittim, XII, 69, note 19.
21. Certainement Moïse ben Calonymos; cf. Zunz, Liieraig.,
104 sqq.
22. Sur Moïse de Pavie, cf. Zunz, Zur Gesch., 57, et les notes de
Halberstam dans VAruch de Kohut, I, p. XXXVIII ; sur son
titre de Gaon, voy. Zunz, Ritus, 192.
23. Sur le titre de Gaon donné à des autorités non babyloniennes,
voyez la dissertation de Zunz, l. c, 192 sqq. et Halberstam
dans le Magazin de Berliner, I, 35. J'ajouterai encore à ces
û-^sis^ Joseph ibn Abitur (voy. Jescfmnm, IV, p. Nirp) et
Rabbi Gerschora Meor haggola (voy. Ozar Nehmad, II, n5V
24. Cf., sur R. Ger.schom, Zunz, Zeitschrift, 309 sqq.; Addil..
315; Lileratg., 238 sqq ; sur ses commentaires du Talmud,
Weiss, Bet Tabnud, II, 97 sqq.
25. Gerschom, dont Salomon Luria (Consult. n" 29) fait un dis-
ciple do Rab Haï, en devient ici le beau-frère; cf. Gross.
ùaiXi^Xe Magazin de Berliner, 1, 77 ; Carmoly, France isr.,
16 sqq.
26. Sur Joseph Bonfils, cf. Luzzatto, Biblioiheca, 466, sqq. ; Zunz.
Zur Gesch., 61; Synag. Poésie, 179; Lileratg., 129. L'er-
reur que fait ici Trabotto au f^ujet (]e l'auteur du Séder Tan-
218 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
naïm wa-amoraïm^ partagée par Zunz [Zeitscfirift, 312), a
déjà été relevée par Luzzato, l. c, 52a; cf. Azulaï, à la fin
de l'article û"'Nm7:Ni û^N:n mo et Kolm, Mardochaï hen
milel, 137.
27. Cf. Zunz, ZeitscJirift, 314.
28. Sur ce premier maître de Raschi, voy, Zunz, Ztschr., 315 et
Ziir Gesch., 63.
29. Sur ce second maître de Rasclii, voy. Zunz, Ztschr., 316;
Kolm, l. c, 122; cf. aussi Weiss, Bet Talmud, II, 36.
30. C'est à son sujet que Guedalya ibn Yahya dit : 13-1:: pnif irn-i
p-i-miipn '^n-'Nn p "^"u)-) b*:: is-i rr^n it5D"I3n rr-nr;-^. Cf. sur
lui Zunz, Ztschr., 317; Llteratg., 155 sqq. ; Gross, Magazin,
IV, 185. C'est dans le même ordre d'ailleurs que Luria nous
donne ces trois maîtres de Raschi, toutefois avec cette diffé-
rence que Luria appelle l'un Isaac ben Yakar au lieu de Ja-
cob ben Yakar.
31 . Nous rencontrons'aussi souvent la formule '^'l'^S' "i"'N!tû nin^a
T''ûiT'D2 nbisr;, par laquelle on veut éterniser le nom de
Raschi dans les Memorlmch ; voyez par exemple Jellinek,
Nr-'WT^Ti D"i::3ip, 7, et Conteros hammeconên, 8.
32. R. Isaac l'Ancien donne comme auteur du MaJizor Vitry son
aïeul R. Simha, élève de Raschi : id-'O ''"i:;û"'1 mTn^jn tin"!
i"o-i -^Ti^bn^a r^n»'»:) irai -«spT ; voy. Mordekhaï, Moed Katton,
838. Luzzatto a analysé cet ouvrage dans le Kerem Chemed,
III, 200 sqq. D'après Giinsbourg, Massorét hammasorét,
45, note, il en a été rendu compte également par Wright dans
le Journal ofsacred Literature, 1866, 356.
.33. Guedalya ibn Yahya, 49 &, dit de lui: "^n-^N*! i-rii'Totî '\T^'2r\
r"i^»bn '^b'TiS'TD ^ttîO \'û^ d ■>-!::: 3 Tp 3 ; Conforte, 18a, le dé-
signe déjà comme un collègue de R. Simha.
34. Guedalya ibn Yahya, qui ici s'accorde avec notre source pour
l'ordre des noms, nous dit,49 h : û"''n3t û'^33 ■'"oib T^n Nbo -^ n b n p t
l'^'^na tiH^^Ti niaN msa ':* nbir. Zunz, Literatg., 283, contrai-
rement à Ztschr., 282 et Conforte, 9&, n'indique, dans le ta-
bleau généalogique, que deux filles. Rosin, Samuel ben Méir,
3, et dans son édition du commentaire sur le Pentateuque
de Samuel ben Méir, p. VII, adopte cette opinion.
35. Méir, ou, d'après Carmoly, IJaleban07i, IV, 24, Méir ben Méir
bon Samuel, était le mari de Jokhébed, fille de Raschi (voy.
Magazin, I, 3; II, 45). Cf. sur lui Zunz, Zur Gesch., 2\\
Synag. Poésie, 183; Literatg., 254. Sur une décision de
Raschi adressée à Méir, voy. Magazin. VII, 183.
36. Yehuda ben Natan était marié à Miriam, fille de Raschi.
LISTE DK RABBINS DRESSÉE PAR AZRIEL TRAROTTO 219
Cf. sur lui Zunz, Zur Gesch., 31 et Garmoly, Halehanon,
IV, 25 sq.
37. Guedalya ibn Yahya, 49?>, dit : v?3n ''Scb nin3D?3 nitp '^cn, re-
produisant littéralement les mots de notre texte. Outre le.
commentaire de Méir sur Maccot à partir de 19 &, où s'arrête
le commentaire de Raschi, nous connaissons, grâce au té-
moignage de Moïse de Goucy {Semag, défense 79), le commen-
taire qu'il a fait sur Peçahim.
38. D'après Garmoly, HaleMnon, IV, 103, la troisième fille de
Raschi, du nom de Rachel, aurait été mariée à un certain
Eliézer. Sur Scliemaya, qu'on prétend être né de cette union
et que Kohn [Mardocfiaî ben Hillei, 152) maintient comme
petit-fils (le Raschi, parenté contestée par Zunz en 1838 dans
les Addit. ad. caial. Lips., ms. 1, cf. Berliner, Hebr.
Bibliogr., XI, 78. Zunz a réuni tous les Ephraïm du moyen
âge, Literatg., 618 et Nachirag, 65.
39. Ici encore nous retrouvons la trace de notre document dans
Guedalya ibn Yahya, puisque Rieti, qu'il cite, n'énumère pas
dans le détail les commentaires de Raschi qui furent com-
plétés par Samuel ben Méir (-j^Ta tjnptj, 100 a, note 2). nDDT
D-^nnsi ^3U5 de Guedalya est également calqué sur notre texte.
Gf. sur les traités commentés par R. Samuel ben Méir, Rosin,
Le, 10, et l'introduction au commentaire de Samuel ben
Méir sur le Pentateuque, XII sqq.
40. Sur Isaac ben Méir, cf. Zunz, Z. G., 32; Kohn, l. c, 123 et
Rosin, Z. c, 4, note 6. Sur les trois ûn"n, cf. Kerem Chemed,
VII, 67.
41. Sur ce Jacob d'Orléans, appelé aussi R. Tam, cf. Zunz, Z. G.,
75 sqq. ; Gross, Magazin, I, 78 sqq., 87 sqq. Pour les passages
des Toçafotoix il est cité, voy. Zunz, Le, 51; cf. Kohn,
l. c. 125.
42. Sur Isaac l'Ancien, un des principaux Toçafistes, voy. Zunz,
l. c. , 33 ; Gross, Magazin, IV, 176 et 192, note 43 ; Kohn, l. c. ,
124. Sur les Toçafistes du môme nom, voy. Zunz, Litg.,
169 sqq.
43. Cf. Consultations de Salomon Luria, n° 49, où l'on dit la même
chose.
44. Cf. Guedalya ibn Yahya, blb et Rosin, /. c, 6.
45. Sur Eliézer ben Samuel de Metz, cf. Zunz, Z. G., 34 et Kohn,
Le, 111.
46. Sur Isaac ben Mordekhai, cf. Zunz, Z. 6'., 33; Kohn, /. c,
122 sqq. ; Luria, L c, le cite, ainsi que Rabbi Eliézer de Metz,
parmi les disciples de R. Tam.
220 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
47. Cf. -sur JacoL Israël, Zunz, Z. G., 51 et Kolin, l. c, 125.
48. Sur Joseph d'Orléans, cf. Zunz, Z.G., 33; Gross et Berliner
{Magazin, I, 93 sqq.) Font Identilié avec Joseph Bekhor
Schor, hypothèse à laquelle se range également M. Zadoc
Kahn, Revue des E. J., III, 6 ; cf. aussi Monatsschrift,XX\l,
366 et Kohn, L c, 135, note 1, et 136.
49. Sur Hayyim ha-Cohen, voy. Zunz, Z. G., 48 et Gross, L c,
IV, 184.
50. Sur Joseph Bekhor Schor, cf. Zunz, Z. G., 74 sqq. ; Lit g.,
282 sqq. : Renan, Rabbins fr^mçais, 334. Pour l'éloge de son
commentaire sur le Pentateuque par Isaac de Latas, voy.
Berliner, Magazin, IV, 073 ; cf. Luzzatto, Bibliotheca, 666 ;
Kohn, L c, 135.
51. Maccot, 6«, d'après Zunz, Z. G., 52.
52. Sur l'amitié de Joseph Bekhor Schor avec R. Tam. voy. Gross,
L c, I, 94, note 50. Dans Luria également on le voit à côté
de Haj^im ha-Cohen. Guedalya ibn Yahya, dans son énumé-
ration des disciples qui paraissent être sortis des écoles des
trois fils de Méir ben Samuel, a certainement emprunté à
notre texte les cinq premiers noms, 52 &: -n-n pn::-' ira-;
l'Ti'D 'C'^Vi nrn-n ,^rc "iisn T\z^^ ira— i. R. Moïse, qu"on trouve
ici à côté des cinq autres rabbins, pourrait bien être R. Moïse
ha-Cohen de Mayence, que Luria nous donne comme dis-
ciple du Ri et dont a parlé Zunz, Z. G., 54; cf. Kohn,
L c, 143.
53. C'est Elle ben Yehuda le Pieux, de Paris, "^-^icn T'cnr: irr^rN,
comme il est nommé chez Luria (à compléter chez Gross,
L c.,IV, 190, note 21). La légende que rapporte Guedalya
ibn Yahya, 52 a, sur ce rabbin, nous montre quelle fut
sa renommée. Voy. sur lui Zunz, Z. G., 49, 356 «7 ; Litg.,
458; Carmoly. L c, 112; Gross, L c, 184 sqq.; Kohn,
L c, 112.
54. Sur Yehuda ben Isaac Sir Léon, cf. Zunz. Z. G., 35 sqq. ; Rltiis,
198; Litg., 328. Sa biographie a été retracée par Carmoly,
L c, 66 et Gross, l. c, IV, 173 sqq. Luria le nomme explici-
tement •c'^tiz priit"^ nn rrnrri '-.
55. Sur Barukh ben Isaac, voy. Zunz, Z. G., 36.
56. Sur Simson de Sens, beau-frère de Moïse de Coucy, voy. Zunz,
Z. G., 35; Lilg., 302; Kohn, ^.c*., 154. Pour son commentaire
sur Biccurim, voy. Jlaiebanon, IV, 5. Sur la question de sa»
voir s'il a été aussi disciple de Jacob ben Mt'ir, voy. Luzzatto,
Jlali/iltol Kédeni, 46.
LISTE DE RABBINS DRESSEE PAR AZRIEL TRABOTTO 221
57. Sur Yehiel ben Joseph, cf. Zunz, Z. G., 39; Cannoly, l. c,
69 sqq. ; Gross, l. c, IV, 178; Monatsschrift, XYllI, 539,
note 7: Zadoc Kahn, Revue, III, 4.
58. Sur R. Moïse ben Jacob de Coucy.voy. Znwz.Add., 315; Z. G.,
37, 85; LUg., 479: Garmoly, /. c, 100 sqq. ; Gross, L c, 179.
59. La biographie d'Isaac Or Zarua a été retracée par Gross, dans
Monatssclu'ift, 1871, 248 sqq.; cl". Zunz,^. G., 50; Gesamm.
Sclir., III, 128 et, sur les rabbins de ce nom, LUg., 468.
60. Sur Isaac ben Abraham, cl". Zunz, Z. G., 34, et sur les rabbins
de ce nom, LUg., 622, note 33; voy. aussi Kohn, l. c, 120
et Gross, Monatsschrift, XVIII, 539, note 4.
61. ce. Kohn, l. c, 123.
62. Simha de Vitry était, par son fils Samuel qui avait épousé une
fille de Méir ben Samuel, le grand-père de Ri l'Ancien. Cf.
Kohn, L c, 155.
63. C'est certainement ■>"-! qu'il faut lire à la place de &<2"-'-i, puis-
que nous savons, sur la foi même d'Isaac l'Ancien et par des
renseignements ultérieurs, comme par exemple les Consul-
tations de Siméon ben Céraah Duran, III, n" 246 et le frag-
ment de Luria, qu'Elhanan est le fils d'Isaac ben Samuel.
Cf. sur lui Zunz, Z. G., 34; Synag. Poésie, 249; Litg.,
288.
64. Jusqu à présent c'est de Luria seul qu'on tirait ce renseigne-
ment : n:3 irnbi* 'n jr^r^ n72pnr vvc'z^. Notre relation n'af-
firme pas seulement qu'Elhanan a été victime d'un meurtre,
comme on le voit, sans preuve à l'appui, chez Zunz, Litg.,
288, mais elle proclame avec une entière certitude qu'il est
mort martyr, ce que Gross, l. c, IV, 191, note 38, met com-
plètement en doute. Guedalya ibn Yahya, 53&, ne connaît
Elhanan que par Joseph Colon, Consult. n" 52. Sur la ques-
tion de savoir si Isaac ben Samuel a survécu de plusieurs
années à son fils, voy. Gross, L c, IV, 192, note 43. Dans les
Toçafot d'Ellianan sur Aboda Zaym, Luzzatto a trouvé la
date de 1182. Voy. Halikhol Kédem, 46.
65. Netanel, le martyr de Chinon, ne peut pas avoir été le disciple
d'Isaac ben Samuel, puisqu'il a été le maître d'Estori Parhi.
Cf. sur lui Zunz, Z. G., 54, 205 ; Litg., 363 et Gross, Monats-
sclunft, XVIII, 435, n. 1. C'est lui que Guedalya ibn Yahya,
526, nomme (lis. 1131:?:) insrTo rinpr^ bN:n3 imn.
66. Cf. Azulaï I, r^y s. r.. : Kohn, l. c, 146.
67. Cette épithète de bn;" ajoutée au nom d'Ephraïm ben Isaac
de Ratisbonne a été donnée par Moïse de Coucy. Cf. Zunz,
Syn. P0(?5ie, 254 sq(i. ; Z.i^£7.,274sqq. Luria l'appelle D"'"i5N ■'3-i
222 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
5ms'':î55"ii3 'T'na^i, ce que Graetz, Geschichte, VI, 365 (2* (^d.),
reproduit littéralement; mais Zunz, qui lit "nn^n, voudrait
remplacer cet adjectif par bni^n [l. c). Son identité avec
Rabbi Yakir est prouvée parKolm, l. c, 127.
68. Voyez les endroits où il est cité dans les Toçafot chez Zunz,
Z.G., 49.
69. Sur ses rapports avec Joël Hallévi, voy. Kohn, L c, 113 sqq.
70. Sur Joël ben Isaac Hallévi de Bonn, voy. Zunz, Syn. Poésie,
251 sqq.; Z. G., 51 ; Litg., 269; Kohn, l. c, 132 sqq.
71. Sur Ephraïm ben Jacob de Bonn, le chroniqueur des malheu-
reux événements qui se sont passés de 1146 à 1196, voy.
Zunz, Syn. Poésie, 262 sqq.; Litg., 288 sqq.; Kohn, l. c,
117 sqq. Les lettres !i3"ib"' qui accompagnent son nom sont
expliquées par Zunz, Z. G., 363; Litg., 619.
72. Eliézer est le fils de Joël de Bonn déjà mentionné. Cf. Zunz,
Z. G., 36, 162; Litg., 326 sqq. ; Kohn, /. c, 109 sqq. et Gross,
Monatsschrift, 1871, 256.
73. Ordinairement on attribue le y2"'0n à Simon ben Çadok, dis-
ciple de R. Méir de Rothenbourg. Cf. Conforte, 24<2, et Azulaï,
s. V. Sur les explications de l'abréviation y3"'an, voy. Ca-
talog. Bodl., s. V.; Rabbins français, p. 4bl, et sur T^^^bn,
Steinschneider, Z. D. M. G., XYIII, 173 sqq. Guedalya ibn
Yahya, 61 &, le confond avec Simon ben Céraah Duran.
L'épithète de nniu): rappelle celle de "^yiyû qu'on trouve chez
le petit-flls de Samuel Sélestat, d-'p'^ny û"'"i3'7, II, 8.
74. Eliézer ben Natan, le "j^''^"! bien connu, est le grand-père
d'Eliézer ben Joël flallévi rT'"3N"i, qui le nomme toujours
■^;pT ia"N-i ou "i^''^-! "^ipT. Cf. Buchholz, Monatsschrift, 1871,
425 sqq. ; Kohn, l. c, 21 sqq. Aussi faut-il corriger dans Gue-
dalya ibn Yahya les mots p"»-i bïïi nnn p en ^''^n b'O inn Xn.
Sur Eliézer ben Natan, voy. Zunz, Z. G., 49, 72 ; RitMS, 196;
Syn. Poésie, 246; Litg.,2b9 sqq.; Kohn, /. c, 110 sqq. et
Gross, Monatsschrift, XVIII, 538, note 5.
75. 'iï5'^-iD7a harrv '-iTo bnp aci'r^ dit Guedalya ibn Yahya, 58&. Cf.,
sur Méir de Rothenbourg, Zunz, Z. G., 40, 92; Syn. Poésie,
312; Litg., 357 sqq. ; Kohn, L c, 30 sqq. et surtout Rabbins
fr., 452 sqq.
76. Cf. Conforte, À'or^M-i)oro//i, 18 & et Kohn, /. c, 101.
77. Pour la généalogie d'Aschéri, voy. Zunz, Z. G., 422.
78. Sur l'inscription tumulaire de Jacob ben Ascher, voy. Abné
Ziccaron, édit. Luzzatto, n° 7.
79. Sur Harukh ben Samuel deMayence, cf. Zunz, Z.G., 55; Syn.
Poésie, 268 ^(\q. : Litg., 306 ; Kohn. l. c, 102. Le petit-fils de
LISTE DE RABBLNS DRESSÉE PAR AZRIEL TRABOTTO 223
Sélestat, l. c, attribue le r:?:3nî^ 'o à Bariikh de Ratisbonne,
sa^s doute par suite d'une confusion avec le rTm^nn 'a.
80. Voy. la réfutation de cette assertion tirée du passage du Mor-
dekliai même, Erubin, VU, 524, dans Kolin, /. c, 23.
81. ]>"'^:Dr^ byi b":) TO'^a rr^rt":: 0'^"iL:3ip2 ^-T'N-,^. dit Guedalya ibn
Yahya, 58 &, suivant en cela sans doute notre source. Con-
forte, l. c, 24«, croit pouvoir tirer ce renseignement des
paroles mêmes du Mordekliai, Î5eça, IV, 691, ce que réfute
Kohn, l. c, 24, note 1.
82. Cf. plus haut, n. 60. Nous ne connaissons comme maître de
R. Isaac ben Joseph de Corbeil que Yehiel de Paris. Voy.
Carmoly, l. c, 40; Gross, Z. c; IV, 178, et Monaisschrtft,
XVIII, 539, note 9. Dans le ms. V du Musée national de
Pestli se trouve, au milieu du Semak, un abrégé d'Isaac ben
Abraham que je suis porté à attribuer au commentateur
d'Alfasi, Isaac ben Abraham de Narbonne, contrairement
à Kohn, Magazin, IV, 87.
83. Sur Péreç ben Elle de Corbeil, cf. Zunz, Add., 316; Z. G.,
41 ; Kohn, L c, 33 sqq., et Rabbins fr., 449 sqq.
84. Imité de Kohélet XII, 12. Le petit-fils de Samuel Sélestat dit, lui
aussi, au sujet de Maïmonide yp y^^ . . . û-'-iDO r:2-;tn, l. c, 8.
85. Tandis qu'ici déjà nous trouvons une vue juste sur l'époque
de ces deux hommes, Guedalya ibn Yahya, 42a et48&, est
encore hésitant.
86. Au lieu de Narbonne il faut lire Posquières, puisqu'il est ici
question d'Abraham ben David et non d'Abraham ben Isaac,
chef bien connu du rabbinat de Narbonne. Azulaï, le pre-
mier, puis Zunz, Gesammelte Schriften, III, p. 145, ont jeté
quelque lumière sur les trois n3"Nn, qu'on confondait aupa-
ravant. Voy. la biographie d'Abraham ben David dans Car-
moly, l. c, 119 sqq; Reifmann, Hamagid, 1862, 382 sqq. ;
Gross, Monatsschrift, 1873, XXII, 337 sqq. et 1874, 274 sqq. ;
Rabbins fr., 518 sqq.
87. C'est cette assertion, donnée dans notre source seulement, qui
a fait dire à Guedalya ibn Yahia, 53 a : n"-i nï^n".
88. Cf. Carmoly, Z. c, 125, Xlll; Gross. Monatsschrift, XXI, 537,
n. 8. Dans mon Schalschélet halikabalaîi, qui est illustré de
gloses d'Abraham Joseph Salomon Graziano, se trouve,
53<2, un renvoi au commentaire de Nissim sur Hidlin, édit.
Riva, 22 &, où est cité également le ^r^^12 mD-^N 'o.
89. On peut comprendre ainsi le commencement si dilficile à ex-
pliquer de la lettre de Maïmonide à Samuel ibn Tibbon (voy.
Kobeç, édit. Lichtenberg, II, 27rt), qui a embarrassé égale-
224 REVUE DES ETUDES JUIVES
ment Guedalya ibn Yahya, 42^, On s'étonne de voir mention-
ner en cet endroit Abraham ibn Ezra. Aussi Senior Sachs,
Hamagid, 1868, 390, 397 sqq., suppose-t-il qu'il y a là une
faute. Abraham [b. Méir] ibn Ezra est mis pour Abraham
ben Méir, l'ami d'Abraham ben David. Le nom d'Abraham
ben Méir aurait mérité de trouver place dans les Rabbins
français, comme correspondant éminent d'Abraham ben
David.
90. Sur Abraham ben Isaac Ab-bet-din de Narbonne, voy. Zunz,
Ges. Schrifleii, III, 145 sqq. et Gross, Monatsschrifl, 1868,
241 sqq.
91. -,iSN iN-ipi -pr^i -ns-iNa 'w\ -2C -sn':; yc' s-'iiisips ■^r-^x-i"',
r"- r;N-,i nn-' iTT^b '^iN?:r! b?2i NincT nnct:. C'est par ces
mots que Guedalya ibn Yahya, 53(2, résume brièvement les
renseignements donnés ici par notre source. Nous savons
maintenant que Zerahya et Abraham ben David sont dé-
signés par Guedalya comme condisciples et non comme chefs
d'école contemporains. C'est dans ce dernier sens qu'Azulaï
(édit. Benjacob, 4&, qui a lu iT^b) a expliqué les termes de
Guedalya. Sur Zerahya ben Isaac Hallévi, cf. la biographie
de Reifmann n-rn- 'n m?in : Rabbins //\, 512 sqq.; Gross,
^. c.,247.
92. Sur Jona ben Abraham de Girone, cf. Steinschneider, Cat.
BodL, s. V. Son inscription tumulaire a été conservée dans le
Ab né Ziccar on, édit. LuzzSitto,!!'' II. Il est aussi cité sou-
vent sous le nom de Jona de Tolède dans le Mordekhaï, où son
père est appelé par erreur Samuel. Voy. Kohn, l. c, 134.
93. Ne serait-ce pas là Jona ben Joseph, cousin du précédent?
Cf. Conforte, I9b ; Catalog. BodL, L c.
94. C'est sans doute notre texte qui a donné lieu à cette faute de
Guedalya !n;i-i?2 T'J'» n-'r; p"7:-ir!. Cf. Perles, Monatsschriff,
VII, 115 sqq. et IX, 175. Le terme de mcDin désigne ici les
Novelles qu'a écrites Nahmani sur chaque traité talmudique.
L'aventure surnaturelle que raconte Guedalya ibti Yahya
56a, d'après un cn^jip, se trouve également dans les collec-
tions de Graziano, 560 &. J'en extrais le passage suivant, à
cause de sa bonne leçon ; b"i:T l'un na r;u:« imn 3-ir; by i-irN
i-zr"*: T.izri i^upm ,^313 i^T^rbn n^r; irDi^i rijLT, y-iK3 naprrin
T^b:? b2Nnr;b "ibirT»':; ly ,im-'as r7':i lyn^z pin cnb 'jp-'O prx
iNïttn "^riT^aD CT'n "^d ,\n-i-'aD ^:?^p pnt3 ■'in nnb -i«n ,"nDDb'^
^^r-^i:n723 y-p-^r^ pnth "T'rD ••?:« ^r—^ r^-)^:z•p by ion i','2:ir2n'.::
LISTE DE RABBINS DRESSEE PAR AZRIEL TRABOTTO 223
^-,1 b:^ -inp;*! ,!d"':*cj ':3b*:: -inx -i::2s:"i ,a-'b'>rTT'a Ln5':;2 ']br:"i
S^-^n^^brrr ipbn "imTo ^"ipi -wXTnb -^-^rb isini-:: n'^biïts n^N-'n
trzvrzi .N-^nn r:ai:t:r; npsb ,^^3 b:n ir;?: nriN "^b-^'C J-npV?r;?:r;
■;;:- i*: r-jbin-i ,-;nM nirr: rr^^pc nnir-^m .rrp^: rriNi:» im"^
.— i"i; TwS:^?: 2"r — .û'J nx-,^':: "^"^ br^ r;r-;î« nwSl-i .■'r^"-
95. N":5"''^"ii7: -it^vn 'i ^-ir;?: m?::? ib rr^rrc rtbnpr; n-^snc ^-lb3p^
dit Guedalya ibii Yahya 55 &. Cf. Conforte, 19 a. Peut-être
cette assertion provient-elle d'une confusion avec R. Azriel
dont l'anagramme fait R. Eliézer et qui a enseigné la Cabbale
à Nahmani. Cf. Graetz, Gesc?iichie,Yll, 448. Sur Elazar ben
Yehuda, cf. Zunz, Litg., 317 sqq. ; Rabbins fr., 464 sqq.
96. M. Perles a fait la biographie de Salomon ben Adret. Cf.
aussi mes Spurcn al-BatlajiisVs, 41.
97. Cf. note 92.
98. Sur les différentes façons d'écrire 'iibir-^n, voy. Zunz, Zeif-
schrift, I, 144 sq.
99. Guedalya ibn Yaliya dit, 58 &, Na"c-'.r;"w nmr; ■'ipr: "'nb::p-i
n^33 ic^Nns r7bi::^bTjb t:dcî<?3 -z^'-.r, n^bnc iy '^?:^ "inx-
N3""w-ir:. Et f" 60// il s'exprime ainsi: c-'^iiiîipn -^rT^N-n
nn-^ n7:b. Nous pouvons en inférer qu'il y a une lacune dans
la copie de Graziano et la combler par ces mots 'n £0 n?::?]
100. C'est par opposition à Nissim Gaon (cf. n. 20), que Nissim ben
Reuben est appelé « le postérieur ». Cf. Schorr dans le
Chahdz, YIIl, 126 sqq.
Budapest.
David Kaufmann.
ACTES DE VENTE HEBREUX
EN ESPAGNE
Notre savant ami, M. Fidel Fita, de Madrid, a découvert l'année
dernière, dans le trésor de la cathédrale de Léon, un manuscrit
contenant un certain nombre d'actes de vente en hébreu, datant
du xp et du xii^ siècles. Cette découverte avait déjà un grand
intérêt par cela seul que les manuscrits hébreux remontant à une
si haute antiquité sont rares. Ce qui la rend encore plus précieuse,
c'est que nous ne connaissons guère beaucoup d'actes de vente
originaux. Un des plus anciens qui aient été publiés est celui qui
se trouve dans le volume intitulé : Musée des Archives natio-
nales, Paris, 1872 (p. 118), et qui est un acte passé à Bray-sur-
Seine le 20 mai P206. VAnglia Judaica, de Tovey, contient éga-
lement une pièce de ce genre, très défigurée par l'éditeur, mais
n'ayant pas le volume sous la main, nous ne pouvons en indiquer
la date. On en trouvera d'intéressants datés des années 4873 et
4879 (1113 et 1119) dans les Consultations de Maïmonide, édit.
Leipzig, n°^ 237 et 240.
M. Fidel Fita a bien voulu nous envoyer des notes sur les pièces
qu'il a découvertes, au nombre de sept, et en outre il a eu l'obli-
geance de nous adresser des photographies de cinq d'entre elles,
mais le manuscrit n'étant pas dans un très bon état, là lecture de
deux de ces photographies est impossible. Nous avons réussi à dé-
chiffrer suffisamment bien les trois autres, et, vu la valeur de ces
documents, nous n'hésitons pas à les imprimer ici. La gravure
intercalée dans cet article reproduit la plus lisible de ces trois
photographies, qui est en même temps la plus curieuse au point
de vue paléographique.
N« I. — Vente faite par Josef bar Joab Escapat * à Dona Afro-
' Voir sur le nom de Scapal (Escapal), Revue, IV, p. 7(3.
ACTES DE VENTE HEBREUX EN ESPAGNE 227
nilde Elinfante, pour 50 deniers de bon a loi, d'une vigne qu'il pos-
sède à Montaurio, et bornée d'un côté par la vigne de Yita ben
Aldahi, d'un autre côté par la vigne des héritiers d'Elazar bar
Isaac, et des deux autres côtés, par la voie publique. Si des tiers
élèvent des prétentions sur cette vigne, le vendeur, si nous com-
prenons bien, devra payer à l'acquéreur le prix d'une vigne sem-
blable située dans le même clos, et, en cas de retard, d'une amende
de 100 deniers payables au roi. Fait à Léon, le jeudi 20 marbesvan
(4)814 [4 novembre 1053]. Ont signé comme témoins Hayya bar
Salomon et Josef bar Menabem.
Voici cet acte ^ :
•^Tb-^î-iDN n:inb i;m miDT b'û '\r::b ban i«nm nnn^T "îiipa n^n^ -^by ^^'n
V'isi'T D^ï:»n n37:73 -^nbapT Tibuirj n^n» m^ïb mi3 nrnb -^nîDSNbN
TmNn3itt3 ib ;aiU3 û-isrt nmx bs irrnrîb •^nn^wT '^r:i»aNp D'^d"' û-^nT bu;
13 -iT^'bN •i;a-ii"' û-is •'r:D ni:72T -^riNibN p :tj->3 ma inx ns:» -rs-iSHiz:
■71:13 r:T DIS bs r:b imsn D'i3-in muj-i '^m •'s'in-n -«^ib^n nitm pnsf
NT^-^-^pT NT'-na N-inns r,T^37a Nr-^p-i û-n ■jjs't n^'-in ûinnTo ib-^N ^^"12:»
Kbi nbrb r!3 -nnnb NbT niaibm rrsirn rrr'ST: N-^D^ncT V'^by m-^sTs
p-'Tnm ûb^'bT tirr:« TicsNbN it -^nb-^inonN nsiT^bn l'^Mbyb nr» riNsanb
Ejibnm p'^awm mr)Mm b-^nsm '\^^nT^^ la-^mm ^an-^n -nw:» pirn it rrr^rsas
■rns?: riD'i ';i:>3W •'Db nsis-n tistcn ï-i3 î-iu5:>m nsnn;a •'nb rTjn»3 inm
■^"inN ''^'ivb Nbi ■'msn "^^nb «bi •'?3^:?b ^-l-|■'1ïï jsbi it r-TT^a» !-ib
i»i£7 -^npbDi ûbiy3 n-i-iSNT NsruT m^TT û"^n3m i-^nn bip it r!T^3X]3
pinn 31-ip mnNHK nn p ûbn:? mmi rm^» "Nn ont Db:?b m»5 pib-^o
t2bi:>3 û-^3£3 Û103 rr^b:» ly^^y^-i ns b^' in 3n33 •^^3, in imni bmï lanr
uîtt» 13 VN^ n3U33r: u2-inb- v^r^am v^''^^ t''^^'' "'*"' ""^ îTT'a» n5ann
ûvp m^3 iT tnn-'sa û'^-'pNUJ i:' pian n-n:' bD n-^br?: n^nrtbi y^Dîib ■'b:'T
pvjT n-n:5> bD rr^b:'» n^iï^bi y^sï-îb ^-133-^:? uni niito:» rntt^^^in m»;
bb3 ^33:? Nbn d-^Dïn imN -723 Dipwri imN3 rîb ynDN'«3 it n-i'D» nnn?:
"ntt:i ûvp m-^s it nn-'sn N-n '}'^i3-^n nx» ^bîsb 3>-idn":: 'ir3D'^y dnt
•«babaTaT •^j'pnpTa ■'oa: ba by^ i-inx lanv b:?T ■^b^' nt rîT^s» "laa nvnnNi
* Dans les originaux, les abréviations sont indiquées par des points placés sur les
lettres ; nous avons remplacé ordinairement ces points par le signe ' placé à la suite
de la lettre munie d'un poiut.
* Casémijjah, roonauie d'Aboul Casem, probablement Aboul Casem Mobamnu'd, le
second calife faliinile d'Afrique, qui régna de 322 à 334 (iSauvairc, Journal asiat.,
t. XVIII, p. ;i09).
3 Illisible sur la photographie,
* Le mot est à la fin d'une ligne ; la ligne suivante commençait pcut-i?tre par le
mot N3'^, cependant il nous semble qu'il n'y a pas de lacune en tête de cette liguo.
228 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
1^ i*'':pT i-ia'>rT "^DsmT Nn3»3wS3 Nbn 'nb '2t 'zn 'nn ^spi '•'jiNa
DbïJ l-i^pn nb:?»? mnar: bis br ^";y2-,st< r;:T7 it •^nisî^bb riT tiûT'
en:?: na pDT' . ^'"3 rtnb':: -n N-^n .Nnw iTib i-'îîjb r:-;:;:? :?mNT niNTo
.♦'bs
Traduction.
Nous témoins soussignés [affirmons que] il est arrivé comme suit:
Que le sieur .Tosef, fils du sieur Joab Escapat, nous a dit : Soyez té-
moins pour moi dans la vente et écrivez et signez en due forme et
donnez a Doua Afronilde el-Enfanti en toute propriété, parce que
j'ai pris et reçu d'elle oO deniers casémiyah de bon aloi et lui ai vendu
pour cette somme toute la vigne que j'ai à Montaurio et bornée d'un
côté par la vigne de Vita ben Aldahi, du second côté, par la vigne
des héritiers d'Elazar fils d'Isaac, des S'' et 4*' côtés, par la voie pu-
blique. Je lui ai vendu cette vigne placée au milieu de ces voisins
depuis le fond de la terre jusqu'à la voûte du ciel, en vente complète,
régulière, constante, vente éternelle et publique, vente arrêtée et
décidée, vente sur laquelle il n'y a pas à revenir jamais et où il n'y
aura jamais rien à changer. Aille ladite Dona Afronilde el-Enfanti,
à partir de ce jour et pour toujours, et prenne possession de cette
vente en toute propriété; acquière, fasse acquérir, transmette, donne
en héritage, vende, donne en hj^pothèque, échange, fasse don à [et
avec] qui elle voudra et en fasse selon son désir et sa volonté, parce
que je lui ai fait cette vente de bon cœur et n'ai réservé pour moi ou
mes ayant cause ou mes héritiers après moi, en cette vente, ni pré-
tention, ni droit, ni contestation, ni propriété, ni allégation, ni pré-
texte d'aucune espèce, et je rae suis retiré moi-même et ai retiré
mes propriétés, possession et droit et le droit de mes ayant cause
et de mes héritiers après moi de cette vente, reirait complet et
éternel. Et vienne, d'un des quatre coins du monde, fils, fille, frère,
sœur, parent, étranger, successeur ou héritier, Juif ou non-Juif,
verbalement ou par écrit, et soulève au sujet de cette vente une con-
testation quelconque, ses paroles seront nulles et considérées comme
un tesson brisé qui n'a point de valeur, à charge pour moi de re-
pousser et rendre vaine toute contestation et réclamation de façon a
la (Dona Afronilde) maintenir dans son droit d'un maintien complet
et d'une conservation complète ; et si je suis empêché de repousser
et rendre vaine une contestation et réclamation quelconque concer-
• Voir Arukh, au mot "jN ; "^ÎTX -^ contrat d'acquisition ; le mot ^3p lui suit si-
gnitie sans doute '{"'Dp, acquisition.
' nr)-i2b niDT nrwDn iipna.
' Très peu lisible sur la pholoirrapliie ; peut-être b"3t.
* La dilléronco entre les deux formules 'i'3 et 'blS vient sans doute de ce que la
première s'applique à une personne morte, la seconde à une personne vivante.
Cf. Ozar toh, 18S1, ji. 'Id, 'b"T pour des vivants.
AGT£;S DE VENTE HÉBREUX EN ESPAGNE 229
nant cette vente, je payerai en cette ville la valeur de cette vigne
sans aucun retard, et s'il y avait retard, je payerai au roi cent de-
niers. Et soit cette vente en ses mains d'un maintien complet. Et la
garantie de cet acte de vente sera, à ma charge et à celle de mes héiù-
tiers après moi, hypothéquée sur toutes mes propriétés immeubles
et meubles, par acte et acquisition, selon la prescription de nos rab-
bins, leur mémoire soit bénie ! et non comme une promesse ou une
formule. Et nous avons fait la vente dudit Josef à ladite el-Enfanti
Dona Afronilde selon tout ce qui est écrit plus haut, comme vente
complète ; et tout est régulier et constant ; le 5° jour de la semaine
(jeudi), 20« jour du mois de marhesvan, l'an huit cent quatorze de
l'ère de Léon. [Signé ;j Hayya bar Salomon; Josef bar Menahem.
Dona Fronilde était la fille du duc Don Pelage, le restaurateur
de la puissance chrétienne dans le Nord de l'Espagne, après l'inva-
sion des Arabes.
M. Fidel Fita nous adresse sur cette infante les notes suivantes :
1° 14 juin 1045. Elle achète un jardin potager. « Et est in ter-
mine primo suo propio de illa infanta Donna Fronilde, alio in ter-
mino de Fédéral hebreo... » (Trésor de la cathédrale de Léon, ms.
du xii^ siècle, fol. 204, verso).
2" 22 mars 1049. Elle achète une vigne. « Et est ipsa vinea de
termine Sancto Tirso de Val de Castro et inde per termine de No-
men Bono ' hebreo -. » (Ibid., f" 265, v^).
Sur Vita qui figure dans notre acte et sur le témoin Hayya
bar Salomon, M. Fidel Fita nous écrit :
Dans un acte de donation que fit le prêtre Sampirus à l'église
Saint-Jacques de Léon, il dit : « Item alla villa quod sita est in ripa
amnis Vernesga, wistasta (?) Alisca, quod fuit de Vitas hebreo, et
presit eam rex domnus Vermudus pro eorum scelus. » L'acte est
de 1308 {Ilrid., i° 107, V) et est signé par Hayya bar Salomon.
Le Judicimn Régis Adep/ionsi, publié dans VEspagna sa-
grada, vol. XXXVI, append. x, daté du 13 février 1015, fait
mention de vignes appartenant aux Juifs à Montaurio. Sont
nommés dans cotte pièce : Xab Xaia , Jacob Traballio, Vita
Xabiz. Xaia est égal à Hayya.
îsfo II 3 _ Auro, iille de Josef, veuve d'Aziz ben cbita*, vend à
Pelage Guderriz '• le chrétien, ■'lïiîr; y^-ni5 ^NbD, au prix de 31 de-
' Scmtob? (Note (le M. F. F.).
* Voir aussi Espaijna safjmda, vol. XXXVI, append. \xv.
' D'après M. Fiilel Fita.
" La photofi;iaphic de cette pièce est lisiblo par endroits. Nous croyons que le nom
doit se lire '0'>b;!i"'3.
=1 Aiijourd'luii le nom s'écrit Ciulit^rrc/ ; au moyen à<sc, Gulerri/ et Chidcrri/. 11 y
T. IV. If'
230 REVUE DES ÉTUDES .IIIYES
niers, une vigne située dans le territoire de Léon. Fait à Léon, le
27 adar II de l'an (4)883 [lundi 26 mars 1123]. Témoins : Moïse bar
Isaac, Isaac bar Abraham.
N° III '. — Rébecca, fille de ■'^no, et son mari Jacob fils de Cid (?)
Isaac vendent à Domenico Ramoniz (D''2in72-i ■ip-'3N'?:n) et à sa femme
Marina Fernandez Gonzalez (o-'b^iis C"'-!;n*-id i-;2'^-i72), au prix de
20 deniers, une vigne située dans le territoire de Tiersi - (■'D"i&«\-i).
Fait à Léon, le 2 schevat (4)884 [dimanche 20 janvier I124J.
N° IV. — Auro Toda, fille de Cid Crescent, et son mari Isaac bar
Moïse vendent à Don Albertin, chanoine ^, au prix de 35 maravé-
dis d'or, une moitié de vigne qu'ils possèdent dans le territoire de
Castrillo appelé Serna, et bornée de deux côtés par les vignes des
héritiers de Jacob bar Moïse, du troisième côté par celle de Juan
Pelaiz, du quatrième côté par celle d'Olaliab Petriz. Fait à Léon
en élul (4)897 [allant du 20 août au 17 septembre II 37]. Ont signé
comme témoins : Isaac bar Salomon et Isaac bar Péreç.
Voici le fac-similé et la transcription de cette pièce :
avait, en 1133, à la cathédrale de Léon, un chantre appelé Petrus Guterriz {Esp.
sagr., XXXVI. app. lui), peut-être le frère de noire Pélaj.'e Guderriz, car les Juifs
du Caslrum Judeorum de Léon (aiij. Puente-Caslro) payaient à l'évêque de Léon une
redevance annuelle que celui-ci céda en 1122 a la cathédrale pour les besoins du culte
[Ei'p. saqr., ihid.. app. xlviii), ce qui expliquerait les relations des Juifs avec les
Guderriz (M. P. F.).
' Dapiès M. F. Fita.
' M. Fidel Fila n'a pas pu retrouver un Tiorsi dans le territoire de Léon. Il existe
un Tierz dans la province et le canton de Huesca (Aragon), un Tierzo dans la prov.
de Guadalajara, cant. de Molina. Notre Tiersi pourrait être le Tercia del Gamine,
cominune de la prov. et rant. de Léon (F. F.).
' C'est le sens du mot "'àï-.D, du latin ranonicns : ancien castillan : ralonge. ca-
ronge, dérivé de rnnonge.
ACTES DE VENTE HÉHHEUX EN ESF'AONE 231
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232 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
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iT tsns nîcnw ib i3-iDtJ D-^-iao 3;^bbiN did ■'jr^'^an i::7ûi oN-'bD pr ann
NbiNLjibm n^inn NTa'^-'pn Nino r!72^b-::T r;-n«a 'T'CD^'t^t '^-^nTjn 2vr;72
Dvr!72 n- "i^cûinbN in Y-"" V^brb r:r?2 nsrcnb Nbm nbi'b riia -n-wb
b-'nD'^T c-'nT'i OT» miToa rr'-'rDT rin n^n Titjs pirn it riT'ST^n p-irn-^i
nb isnD'n J-iTo'^bo nyti riD-^ 'j-'^'no -^Db laiicm ii^dh rna rrar-'i i^on-'T
'j-'m bip Nb n- rn-'D^n irmDt; ■'Nnb «bn ■'2-'Wi::?b i;n^^-û «b it ïTT'^Ta
bD» mo-n irn-n::m ir'ai:^ iDpb-'D n^Di ûbii'3 -3:;'C]t m^T dioi û-'-i3m
p ûbiy mmn :?mN73 Nin-' uni -n»:; pib-'O it r;-i-'37o b:?7D irmoTo "^Nn
-i:>nT"'i riD b:?2 in an^a -^15 in ■''nn'^ bm3 ïdit» pnn-i ai-ip mriN nx ns
12 ■jWsT n3">::;r! -cînnb ';-'2Tj:m ';-'b^3 mn'r T-rr' it j-t-t'^t: r-i^nw l'^br
f'-'p;-:; -;• p'vji n-ny bo n'^i-bi mircb i^-^bri 12 yen ^n ■'b^bi "wX:^
b^'T irnnN is-'-c'nT' b:?T nrbr rmnNa ûbii'b m^a ûT^p tt^3 it n-i-'::?:
"'-i:::o-i ■^D21l:i np^won^ Nbi ^'nb'oT 'rn'PD -^b::?;:»! ■'rp-ip73 irosîbD
'j-'spn rîbi'tib mprn bD bj' nr v^nnbwS iTib ibx pn::-^-! riiip p iripi
rt"ià NnpSn nptd "jT^ba Ti»-iri r-iî^ bnbN m-'n i;?:pn"i l'aPD .ûbc
pn^f /r: t-î72b'0 "13 pn::"' .û-i^ipTon '^pnTar: bri ^b rnsiriTàr; -^tj^n -^rs
. ':;': yno nn
M. Fidel Fita nous écrit sur cette pièce :
1. Le chanoine Albertin est peut-être l'évêque de Léon Jean
Albertin (1139-1181) dont il est question dansl'^^p. sagr., XXXV,
p. 192-231.
2. Il y a dans la province de Léon plusieurs Castrillo. Dans
notre pièce il s'agit probablement de Castrillo de la Ribera, près
de la ville de Léon et du fleuve Torio.
3. Sema est un mot très répandu ; il indique l'espace qu'on peut
semer dans une journée.
4. Jean Pelaiz est le nom d'un chanoine, diacre de la cathé-
' Lettres peu visibles sur la photographie.
* Pour D'^"^n?31, et de mon vivant: la lecture Q^'^HTO est assurée par la photogra-
phie de la pièce n° II, où les mots T^OD^Wl C'^'^nTjl sont très lisibles. La formule
est opposée à celle de nP"^73 "in^bl T'OD^T^ usitée pour les donations testamen-
taires. Voir Tur, Hoschen misr/ipat, chap. ccvi. V oir aussi plus loin, n" V.
' Le mot ;ti^3?2 semble manquer à celte place.
* Voir la pièce n" I.
' Ce '5 est exponclué et, par suite, ne compte pas.
^ Le passafre veut dire que les mots ^2"ltt5 N"lp3tl qui se trouvent plus haut
■ entre les lij^nes •, et le mot niïriT^rï qui se trouve plus haut sur un grattage, sont
bons. Comp. Itfnr, éd. Venise, ItiOX, ï" 17. ^' col.
^ ACTES DE VENTE HÉBREUX EN ESPAGNE 233
drale de Léon, cité dans une pièce du 19 avril 1133. [Esp. sagr.,
XXXVI, app. lui). Parmi les nobles qui signent cette pièce, après
le roi et avant les évêques, se trouve Albertinus, père de l'é-
vêque Jean.
5. Le 30 décembre 1167, un chanoine de la cathédrale, «Dominus
Albertinus, archidiaconus, » signe une pièce reproduite dans Esjj.
sagr., XXXVI, app. lvi.
N° V. — Don ' Auro, fille de Cid, et son mari Rabbi Abraham ben
Méir Mogusi (?) vendent à Petro Pelaiz et à sa femme Eznada Mu-
nioz, au prix de 15 1/2 maravédis d"or, une vigne située dans le
territoire de Valdesanialos (?), bornée par les vignes de Geraldo,
chanoine, de Salvador Basso Cuacho (?), des héritiers de Samuel
ben Aziz et par la voie publique. Fait à Léon le dimanche 4 iyyar
(4)911 [22 avril 1151]. Ont signé comme témoins : Josef bar
Barzillaï et Samuel bar Jacob.
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•jTi irDb-' ';-'wb:î>b rtrTo n^sanb Nbii ûb^^b rrn -ii"73b xbi NHûibni ri^inn
piT'^n "iT ni-'DTsa ip-Tn^'i ûbirbi ûT'n): û-'^ipri ibx ni;tn im iiao
lîD^a^iT n-n:DW^i iron''^ ib^^nn lïïj-^m-'i niJT'"' rt-n^s n-iDT nn iDn -n)::^
12--11U: -^TD bob -3nW3 narrai mpr^n ir::"»! ■niicn-'i ibittr^i isn-'i iQ-^bn'^i
riT ûiiD tis-b id-i:d» -TDb'w pj^'ii riD-' ^v^nu: ^ob aDii:-n ciisn cna nor^i
Nb iT m-'STon 131-inN ■ij'">::-n^b Nbi irmD72 û-^N^b j?bT ir72i:rb m^-'C xbi
iD-^XDi::? lîpb-'O -odi ûbi;'3 riDr^Ji n^T ûiï) Nbi û-'im xbi i^ wxbi bp
mnp mnN hn na p ûbnr mmi r 21x73 xia-'O -^73 bsi nbi:'b 11735 pi,>o
fiD û"iu:2 trribi» -ly-ir-^i no bs>i nnDn -iia in ■'nirr' bma o-it^ pinn
13 VNu: -i3u:3n u:-inb l'^a-icn "j-^bua mm t'h-^ rrT ûid nttn» ûbnra
-my b^ ar!''b:*73 n-«nnbT m::Db irbr'i nN^m m yen "j-^n ■'bDbT ^^737;
r-n"'nnN2 ûbi3>b -1173:^ ûi^p DT'a it m-^D73 □■'■'pî^D ir pn-j-i ymm l^i^i
'bî 'DH 'm:: ■^bL:ba73T •^yp"ip73 nroDD bD byi ■:D-^-inN iro-iT» bri irby
' Un remarquera l'emploi de don (non </o«fl) devant un nom de lomme.
234 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
ITib nbwS nnnsN 'm iiix in i» iripi ■^nrj'CT ■•001:31 Nn::?20ND n5t
B"'"'ip73T ivb Nn73 '{"'jTob N-'prin nrû -t^^n riT'b tz-^Xi-^ nrs-iN nsc:
iHNn i3»nm db-û V^P^ nbi'wb ninsn bo by ibiS îîidtn inbi i-iiid
. ' :jn3 'bi: np:>i ^2 b^i):^ . 'bic -ib-ina la rjcr
Note de M. Fidel Fita :
« nàNip pourrait être l'espagnol juez, provenant du latin ju-
dex, cependant j'incline plutôt à y voir un nom de famille, par
exemple Cuecho, de Cocho, primitif de Cochino (cochon). Cocho,
en ce sens, est encore usité à Léon et dans les Asturies. ^>
Le nom de localité que nous lisons Valdesanialos, est lu par
M. F. F. Valdesarielos. Ce serait alors le Valle de Sariegos, ha-
meau de la commune de Saint-i^drien de Rabanedo, près du
fleuve Bernerga, canton de Léon.
N" Vr-. — Auro, fille de David, et son mari Abraham bar
vendent à Don Petro Martinez, le chanoine (n>-''-i'i3pn), au prix de
trois maravédis d'or, une vigne située dans le territoire de
Léon. Fait à Léon, le jeudi 5 kaslev (4)936 [20 novembre 1175].
Ont signé comme témoins : Jacob bar nbT-in^^n 7\wb^ et Joseph bar
Elischa.
M. Fidel Fita fait les remarques suivantes :
L riLs-ibn, Vellito ou Vileto, est un nom de famille très usité à
Léon.
2. nbT-i2"«3n aurait-il quelque rapport avec le nom de Taza-
ferro^ qu'on trouve dans un acte de janvier 1206 [Esp. sagr.,
XXXVI, app. Lxi)?
N" Vil*. — Vente d'une vigne située à Tercios (oiio-in). Fait à
Léon en (4)990 = 1229/30.
Un des personnages nommés est Mar Josef Naci; un autre, Féli-
cia, fille d'Isaac b. Moïse ; le nom de la principale venderesse pour-
rait bi(m être lniU5-ia, Gracia (I. L.).
N" VIII. — Document fort intéressant [)Our l'étude de l'ancien
dialecte léonais.
« Sub era M^" CC" XC. VII, in mense aprilis. Consabido sea por
' Nous soiiimus assez embarrassé pour lire ces deux derniers mots, lis font peut-
être : Ûinm d'iTia ïlDinb inpiit. Au lieu deana, il t'aul peut-être lire 15n3.
que nous ne savons pas déchiil'rer.
' D'après M. Fidel Fita.
^ l'eut-être faut-il lire IlbinD^ir, et r;bT"'.3 (Haut la traduction de ferro. on aurait
exactement le nom di; Tazalerro (I. L.).
♦ i>'après M. Fidel Fita.
»:•;•''
ACTES DE VENTE HÉBREUX EN ESPAGNE 235
esle escripto que yo D. Pelayo, erno de ya Lonarda,, e yo Pela Pa)-
maz, ambos decïïia commo e cada uno por todo devemos a Vos Yuçe
et a vuestra muyer IIII sol. 3. mr., aquen ata dia dentruestro pri-
mero que vie, por nos e por nostras buenas mobles non mobles. Se
volos non pagarnos a este devandicho plazo : que graven sobre nos
como manda el Rey Casto que sin misiones quacusnas fecierdes
sobre este pleyto, todas sean sobre nos; e vos seades creidos. Ts.
don Marcos fld', Martin Parayso, Diago de Frexno, don Pedro fid',
don Martin Zapalero, Diago Perez Maria, Diago Liger Zapatero, don
Yuanes e don Pedro fijos de don Esidro de Quintamela, Pedro Ma-
zana, Yuanes Farto; — Abrafan judio, Masse judio. »
« Petrus notuit. »
Traduction. — Sous l'ère 1297 ', au mois d'avril. Quon sacbe par
cet écrit que moi Don Pelayo-, gendre de la Lonardo^ et moi Pela-*
Palmas, tous deux solidairement ^ et chacun pour le tout, devons à
vous Yuce^ et à votre femme 4 sous 3 maravédis, dece jour jusqu'au
prochain jour d'Enlruecho", pour nous et pour nos biens meubles
et immeubles. Si nous ne les payons pas à ce susdit terme, que
tombe sur nous, selon l'ordonnance du Roi Chaste*, [la peine] que
les frais quelconques que vous ferez au sujet de ce procès soient tous
à notre charge et que vous soyez crus [en justice]. Témoins : Don
Marcos fid[algo?], Martin Paraiso, Diego de Fresno. Don Pedro
fid[algo?], Don Martin Zapataro, Diego M[an?]aria[n?], Diego Liger
Zapatero, Don Juan et Don Pedro, fils de Don Isidoro de Quintanilla,
Pedro Mazana^ Juan Farto ; — Abrafan *", juif; Mossé ", juif.
Pedro, notaire.
Isidore Loeb.
' Correspondant à Tannée 1259 de l'ère chrétienne.
■■i Pelage ; sur le dos de la pièce, "N"'bD "JTT-
^ Léonarde.
* M. F. F. suppose que c'est le nom de Pelaya ; sur le dos, "^ÎD.
5 Decma, dans le texte, doit, suivant M. F. F., se lire de companna ou de coManda.
^ Josef.
^ C'est l'espagnol antruyo (carnaval), du latin introitus ; sur le dos de la pièce,
"là'^NlIU'^jbN. Le carnaval de l'an 1260, ou dimanche de Quinquagésime, tombait le
15 février (M. F. F.J.
>< Alphonse II (791-842). Des traces de cette ordonnance doivent se trouver dans la
Karta inter C/tristianos et Jtideos de foros illorum, faite par Alphonse VI (31 mars
1091) et publiée dans Esp. sagr., XXXV, app. i (M. F. F.).
' Voir ce nom dans Revue, IV. p. Ih.
=" Abraham, avec /"pour A,- voir Revue, IV, p. 71, Co/I'e; p. 72, Fahih ; p. 74, Jaffuda.
" C'est peut-être ainsi qu'il faut lire dans le texte.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES
AU XVIH'^ SIECLE
IV
La situation des Juifs aux colonies françaises était donc tolé-
rable, puisque l'autorité laissait tomber en désuétude les rigueurs
du Code noir et que la justice elle-même avait admis une juris-
prudence qui leur reconnaissait en quelque sorte une existence
légale, lorsque tout à coup la nomination du comte d'Estaing
comme gouverneur général (llôé) vint jeter le trouble dans les
esprits et inquiéter d'une manière bien vive les petits groupes de
population juive qui se trouvaient éparpillés dans les différentes
localités des Iles d'Amérique.
Le comte d'Estaing fut appelé le 27 décembre 1163 au gouverne-
ment général des colonies avec le titre de représentant la per-
sonne de Sa Majesté aux Iles sous le Vent de VAméHque, titre
tout spécial qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait porté jusqu'à
lui ; mais il ne fut reçu au Cap que le 23 avril 1764. Il arrivait
investi de toute la confiance du ministre et l'imagination pleine
d'idées de transformation et de grands travaux. Tous les rouages
de l'administration lui paraissaient défectueux ; l'allure, la con-
duite et les mœurs des individus lui déplaisaient et il voulait impo-
ser au pays une réforme complète. Aussi devait-il s'attendre à une
résistance qu'il aurait pu vaincre, grâce à Tappui tout-puissant que
lui donnait le ministre, s'il avait eu la connaissance pratique des
choses maritimes et coloniales, s'il avait su mettre delà diplomatie
et des ménagements dans sa conduite. Mais le comte d'Estaing
avait toutes les allures du grand seigneur dans ses actes, dans ses
• Voir plus haut, p. 127.
LKS JLKFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII= SIÈCLE 237
conversations et dans sa correspondance. M. de Choiseul, ministre
de la marine, qui lui avait donné toute sa confiance, le qualifie
assez durement dans le mémoire qu'il remit au roi en HôS *■ et le
traite de fou et de fou dangereux. Dès les premiers jours, il
ameuta contre lui toutes les classes de la société coloniale, et des
plaintes de la plus haute importance furent lancées contre lui. Il
eut presque immédiatement à se défendre contre des critiques
amères et violentes qui se formulèrent en des accusations très
graves. Le personnel de la justice même ne refusa pas de prêter
la main à ces dénonciations.
De toute cette lutte, nous ne voulons rechercher que les détails
concernant les Juifs , dont l'imposition arbitraire forma un des
sept points d'accusation dressés contre lui : nous laissons à
d'autres, plus experts et plus versés dans l'histoire des colonies,
le soin d'exhumer des archives du ministère de la marine tous les
détails piquants de cette affaire.
Le comte d'Estaing vint-il aux colonies précédé d'une réputa-
tion de libéralisme, d'homme acquis aux idées nouvelles qui étaient
alors à la mode ? C'est ce que nous ne pouvons affirmer. Mais il
est à peine arrivé au Cap, que les Juifs de la Martinique lui adres-
sent la requête suivante, dont nous n'avons pu retrouver le texte
original et que nous donnons d'après une copie (fidèle?/ conservée
aux archives du ministère de la marine'-'.
Coppie de la Requête présentée par ceux de la Religion Judaïque
qui haUtent Vlsle de la Martinique.
Du 4 juillet 1764.
Supplie humblement la Communauté des marchands de la nation
hébraïque demeurant tant en cette Isle que autres dépendantes et
étant sous la domination de Sa Majesté très Chrestienne.
Et vous remontrent que les commencements qu'elles ont été habi-
tués, il y seroit venu de divers lieux et contrée de la terre y ayant
été receus par les propriétaires et habitans avec toute sorte d'a-
mitié et bienveillance et permission d'y trafiquer en toute liberté
ainsy quil avoit toujours depuis fait y ayant fait venir une infinité
de diverses marchandises et vaisseaux de toutes parts très requis et
' • J'ai voulu établir en Amérique un système d'Europe; j'ai lait choix de sujets
• pour gouverner qui m'ont jeté dans des écarts épouvantables ; les uns étaient inlé-
» ressés, les autres despotiques, ignorants et déraisonnables. Un, tel que M. d'Es-
• taing, à qui je croyais un talent supérieur, n'est que l'ou et fou danpereux ; son
. intendant pour le moins un Fripon. . Voy. Giraud, Mémoire deM.de Choiseul remis
au Roi en ^765. {Journal des Savants, avril 18S1, p. 255.)
2 Arch. du Minist. de la Marine. — Collect. Moreau S t-Méry. — Colonies on gé-
néral, t. XV, art. Juif.
238 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
nécessaires pour la subvention et autîes nécessités desdits habitans,
et par ce moyen beaucoup contribué à les établissements et avène-
ments des Colonies qui y sont maintenant plantés, de quoy lesdits
habitants auroient néanmoins été si peu recognoissant qu'ils avoient
toujours dilayé et refusé le payement des marchandises qu'ils leur
avoient livrés en leur grandes nécessités, y en ayant un grand nombre
qui leur sont redevables de sommes assez considérables, de il y a
plus de dix à douze ans, et de presant ne tiennent encore compte de
les satisfaire, ce qui les empêche de se retirer des dites Isles à
moins que de perdre la meilleure partie de leurs biens pour quoy
ils se voyent dans la nécessité le reste de leur vie.
Et d'autant qu'il est très notoire et évident que par leur grand traf-
fique et négoce, ils aportent un bien et utile fort considérable en
toutes lesdites Isles, ce qu'ils feroient encore plus abondament de
toutes ces danrées qui y sont requises, s'il etoient permis sy habi-
tuer ainsy qu'à Gayenne et divers autres lieux de l'Amérique puis-
que par ce moyen quoy que fesant audit, ils ne pouroient rien
perdre et ce qu'il ne porteroit neul préjudice ains n'yroit qu'à l'a-
vencement desdites Colonies.
Ce considéré, Monseigneur, il vous plaisce permettre ausdits sup-
plians d'habituer dans toutes les Isles quy sont sous la domination
de Sa dite Majesté a ceste fin qu'ils puisent se pourvoir par devers
les propriétaires ou autres ayant pouvoir de donner des terres aux
fins qu'il leur soit accordé pour y continuer moulins a sucre et y
fere manufacture toute marchandise et danrée qui y croit, et leur
permettre d'user des mêmes facultés, droits, franchises et libertés
dont jouissent et usent les naturels françois qu'autres habitans, ce
qui ne portera qu'a l'augmentation et avantage desdites colonies et
bien public comme leur permettre le libre exercice de leur religion
et aussy seront obligés de prier Dieu pour la conservation de Sadite
Majesté et augmentation de la couronne et qu'il vous tienne en santé
et prospérité puisque vous leur ferés justice.
Le comte d'Estaing voulut profiter de cette demande pour com-
mencer les réformes et les améliorations qu'il projetait. Il fit venir
chez lui quelques Juifs, les plus notables de la colonie de Saint-
Louis et des Cayes, il leur offrit sa protection et sa puissante in-
tervention en leur faveur, mais à la condition qu'ils feraient des
sacrifices d'argent pour des fondations d'utilité publique, fon-
taines, batteries, bateaux, auberges avec relais de poste, etc., etc.
Dans la crainte de s'aliéner l'esprit du gouverneur, les Juifs
n'osèrent point refuser, sachant que leur situation illégale et
indéterminée deviendrait intolérable si, par suite de leur refus,
le gouverneur se mettait à les tracasser et à soulever contre
eux l'opinion de la Cour. Leur silence fut donc un acquies-
cement et le comte d'Estaing les imposa à des sommes fort im-
LES JUIFS DANS LES COLONIES i'RANÇAlSES AU XVIll" SIECLE 229
portantes, que les uns versèrent immédiatement et pour lesquelles
d'autres signèrent des engagements qui furent remis à Tintendant
des finances.
Mais s'ils n'osèrent résister en face, une fois hors de la présence
du gouverneur, ils ne se firent pas faute de murmurer, de crier à
l'injustice et de chercher un moyen de ne point payer un impôt
qu'ils trouvaient vexatoire et inique. Les mécontents qu'avait
déjà faits le comte d'Estaing profitèrent de cette circonstance et
s'empressèrent de conseiller les Juifs. Ils les excitèrent à faire in-
tervenir en leur faveur la maison Gradis de Bordeaux, qui, sans
doute, ne refuserait pas de porter leurs doléances devant le roi et
qui, grâce aux services éminents qu'elle ne cessait de rendre à la
Cour, pourrait contrebalancer l'influence du comte d'Estaing. Le
moment était assez bien choisi pour user du crédit de la maison
David Gradis et fils, car elle venait d'être chargée par le mi-
nistre de fournir les vivres destinés à l'approvisionnement des
troupes de Cayenne, Saint-Domingue, la Martinique et la Gua-
deloupe.
De vagues informations sur toute cette petite conspiration par-
vinrent au gouverneur : il s'empressa d'écrire au duc de Choiseul.
ministre des affaires étrangères et de la guerre, qui avait les co-
lonies dans ses attributions. Dans cette lettre, il voulut aller au-
devant de l'accusation qu'on semblait être prêt à porter contre
lui ; il ne dissimula pas son inquiétude et montra sa crainte d'être
accusé de malversation. La lettre originale que nous avons copiée
montre, par son écriture fiévreuse et tremblée, sous quelle impres-
sion il l'a écrite ; quant à l'orthographe, que nous respectons,
c'est celle d'un grand seigneur de la cour, dédaigneux du frein de
la grammaire :
Aux Cayes, partie du sud de Tisle de Saint-Domingue,
ce 8 septembre 1764 '.
Monsieur,
La crainte en lésant de son mieux est la pation des sots ; si c'est la
mienne aujourd'huy, c'est que je vous suis attaché ; quand au reste,
je me crois très brave ; j'ai donc l'honneur, Monsieur le Duc, de
vous écrire à la hatte, et de peur: la malignité et les interprétations
sont les denrées du climat ; mon journal pourroit arriver trop tard :
je me dépêche de vous rendre compte que j'ai fait contribuer pour le
bien publique et non pour moy les sinagogues de S' Louis et des
Cayes : des Juifs, propriétaires d'esclaves qu'ils rendent Israélites
' Archives du Minist. de la Mar. — Colonies. — Saiul-Domiugue. — Correspon-
dance générale, ad annum.
240
REVUE DES ETUDES JUIVES
comme eux ; qui achettent et qui possèdent des terres, dans un pays
chrétien, doivent pour y être tolérés, faire venir de l'eau dans les
villes, fournir des battaux au Roy et s'occuper d'autres petites uti-
lités qui leur feront honneur dans les siècles futures ; c'est ce que
je leur ai conseillé, cela n'est pas considérable ; mais M. Gradis
pourrat le desapprouver et cryer ; j'ai d'ailleurs mesuré ces petits
dons gratuits sur la bonne ou la mauvaise conduite de ces enfans
de Moyse.
Il joignit à cette lettre la note suivante, où il établit les contri-
butions qu'il avait imposées et donna certains détails sur la situa-
tion des individus compris dans ce premier rôle :
Nattes sur les Juifs de Saint-Louis et des Cayes qui ont offert par
requête, et pour être tolérés, de contribuer au bien public *.
OBJETS.
Une fontaine dans la place publique de
Saint-Louis, avec une conduite d'eau sur
le port pour en donner, bord à quay, aux
chaloupes des navires ; l'eau est éloignée
de Saint-Louis d'une lieue ; on deman-
dait 7,000 livres par an pour en fournir à
cinq compagnies.
Une batterie fermée susceptible de re-
cevoir quatre pièces de gros canon, qui
doit être placée dans la baye d'Aquin ;
une auberge dont la maison restera au Roy,
avec des chevaux de poste au même lieu.
Une auberge dont la maison restera au
Roy avec des chevaux de poste au Bourg
Saint-Michel.
Une soumission de 50,000 livres payable
en deux ans pour acheter pour le Roy des
batteaux nommées collombes.
NOMS ET MOTIFS.
Le sieur Depas père, chef de famille :
il a auprès de Saint-Louis une grande
habitation sur laquelle il y a environ 280
nègres ; ce Juif possède une autre habita-
tion dans le Bas d'Aquin et une autre à
l'Azile.
\
De Pas le jeune, honnête homme. Il
vient d'acheter une habitation de 100 nè-
gres près du Bourg d'Aquin ; il en a une
autre à l'Azile. Il possède deux maisons à
Saint-Louis et aux Cayes.
Jean Depas ; il possède une habitation
à la colonne à Mangon avec 30 nègres.
Michel Depas, mauvais sujet contre
lequel il y a une multitude de plaintes de
la part des habitans ; mulâtre libre et ba-
Idrd. Il possède une habitation très con-
sidérable à la Grande colline avec 120 nè-
gres. Il a de plus une autre habitation à
la colline à Mangon avec 30 nègres : il
s'est révolté plusieurs fois contre les or-
dres qui ont été donnés pour le bon ordre
public : cet homme a été autrefois cour-
tier de M. Gradis.
' Archives du Minist. de la Mar.
dance générale, ad annum.
Colonies. — Saint-Domingue. — Correspon-
LES JUIFS DANS LES COLOiNIES FRANÇAISES AU XVIII" SIÈCLE 241
OBJETS.
Une somme de 10,000 livres payée
comptant à M. l'intendant, pour acheter
pour le Roy un batteau nommée collombe.
NOMS ET MOTIFS.
Levis : il posfède deux maisons de
lO.OUO livres de loyers aux Cayes ; il a
ruiné plusieurs habitants par des procès
qu'il a achetés et dont il fait commerce ;
il prétend avoir été baptisé et avoir eu
Mgr le Duc d'Orléans père pour parrain ;
il a judaisé dans la Colonie.
Il existe encore d'autres Juifs qui n'ont point encore fait de don
gratuit.
Aux Cayes, le 8 septembre 1764.
ESTAING.
Mais le gouverneur sut dissimuler son inquiétude aux yeux du
public et n'en continua pas moins l'exécution de son plan. Dans
les premiers jours du mois d'octobre, il avait à peu près fini de
dresser la liste des personnes qui devaient payer cet impôt ex-
traordinaire, applicable aux travaux publics dont il avait fait
préparer les projets et les devis et pour lesquels il avait déjà
passé quelques marchés. Il fit notifier à chaque Juif la somme
pour laquelle il était imposé et lui demanda de se libérer le plus tôt
possible ou de signer des engagements que l'intendant des finances
se chargerait de faire exécuter au temps fixé.
De tous ces Juifs imposés par M. le comte d'Estaing, nous ne
voyons qu'un seul qui ait songé à résister à la volonté du tout-
puissant gouverneur général et qui lui ait écrit dans ce sens. La
réponse que lui fit ce haut personnage suffit sans doute pour
briser cette velléité de résistance. Nous n'avons pu retrouver
la lettre de ce Juif assez osé pour discuter les actes du gouver-
neur ; mais celle que le comte d'Estaing lui adressa nous fait com-
prendre que le Juif récalcitrant avait protesté contre cet acte
arbitraire et avait déclaré vouloir s'opposer à la perception (Je
cet impôt. Le nom de ce Juif n'est pas indiqué en tête de la
lettre ; mais les détails nous indiquent que c'était Alvarez de
Léogane. La lettre du comte d'Estaing nous le montre décidé à
briser tdute résistance et à ne reculer devant aucun moyen
pour se faire obéir. Comme il ne voulait point avoir à s'oc-
cuper du détail des rentrées, il nomma M. Daguilard syndic
des Juifs de la colonie et, par cela même, le rendit garant et
responsable des engagements de tous ses coreligionnaires. La
242 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
lettre de M. d'Estaing à ce Juif récalcitrant servit ù'exposé de
motifs à cette décision. Voici les deux pièces ' :
lettre de M. le comte d'Estaing à un Juif.
Port-au-Prince, le 10 octobre 1764.
J'ai reçu, Monsieur, la lettre que vous avés jugé à propos de m'é-
crire le 8 octobre. Les principes du Christianisme et les loix du
Royaume ne permettent pas que les Juifs possèdent des esclaves à
qui ils peuvent faire pratiquer une religion différente de la notre.
J'ai bien voulu leur ouvrir un moyen de prouver leur zèle pour le
bien général de la colonie. Cette légère marque de soumission et
d'attachement de leur part me forcera à obtenir de S. M. qu'ils soient
tolérés dans cette colonie, j'en pourrai d'autant plus répondre de
leur soumission sur d'autres objets plus Importans et sur lesquels
il faut nécessairement s'en rapporter à leur bonne foy, étant impos-
sible d'empêcher un maître dans l'intérieur de sa maison et dans
son habitation de persuader ses esclaves de sa croyance et de les
faire agir et penser comme il le veut. Le s»- Delpech s'est mal expli-
qué. Il est vrai qu'il a fait un marché avec M. l'Intendant pour des
baraques construites sur la place dont le loyer est destiné à procurer
une conduite d'eau salubre au Port-au-Prince. J'ai admis les Juifs
à en faire les fonds. M. d'Aguilard. que j'aime fort et avec lequel je
vis, a fourni un contingent de 50,000 livres. Il vous a écrit pour une
somme de 3,500 livres, monnayées de l'Isle. Loin de vous plaindre,
vous devriés remercier M. d'Aguilard Je vous conseille de prévenir
un moment qui seroit plus fâcheux à votre crédit que la signification
dont vous menace mal a propos le s'' Delpech. On ne signifie à per-
sonne de venir demander une grâce. Et si M. d'Aguilard ne me ré-
pond pas de vous dans trois jours, tems auquel je vais partir, co
sera puis que vous my forcés et que vous ne me voulés fournir de
bonne volonté aucun prétexte, le procureur des biens vacans à qui
j'enjoindrai d'exécuter les loix du Royaume et mes ordres. Ne doutés
pas plus de l'exécution exacte de cet article que de toute l'impartia-
lité et de la protection sur laquelle vous pouvés compter en qualité
de citoyen.
J'ay l'honneur d'être très parfaitement. Monsieur, votre très
humble.
ESTAING.
Et au-dessous est écrit : •
En conséquence de la lettre dont la copie est ci-dessus, j'autorise
' .\rcli. du Minist. de la Marine. — CoUect. Moreau St-Méry. — Colonies en </é~
nérjl. l. XV. iirl. .luif.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII^ SIECLE 243
M. d'Aguilard à faire les fonctions de syndic de tous les Juifs de
cette colonie, de percevoir les deniers qu'ils remettront pour les ou-
vrages publics. Je le charge d'en presser le recouvrement, suivant les
états acceptes par M. l'Intendant et par moi qui seront enregistrés
ainsi que leur emploi aux deux bureaux municipaux du Cap et du
Port-au-Prince. J'autorise M. d'Aguilard en cas que quelques parti-
culiers Juifs se refusassent à l'arrangement gênerai à les dénoncer
au procureur des biens vaccans et à demander main forte aux com-
raandans des lieux pour faire arrêter les delinquans. M. d'Aguilard
pourra d'ailleurs reverser les fonds entre les mains de tous entre-
preneurs dont les marchés auront été signés et approuvés par
M. l'Intendant et par moi, et sur leur quittance, il en demeurera
bien et valablement déchargé. Fait au Port-au-Prince, le 18 oc-
tobre 1764.
ESTAING.
(Et plus bas :)
Par ordre, Guerin (avec un cachet sur cire rouge).
Toutes les résistances vaincues, tous les projets préparés, les
sommes versées, ou tout au moins les engagements signés, le
comte d'Estaing s'aventura encore plus loin et voulut triompher
complètement de ses ennemis. Pour ne pas as.sumer sur lui settl
la responsabilité d'un impôt aussi irrégulier, il chargea M. Magon,
l'intendant, de soumettre au conseil supérieur la note ci-jointe,
avec l'état qui l'accompagne • :
Notes données par le Général.
Art. I"-". — La destination des secours demandés aux Juifs a varié
suivant les circonstances et selon les nouveaux motifs de dépense
qui se sont succédés.
Art. 2. — Le premier objet de ces soumissions a été d'avoir un
prétexte pour tolérer les Juifs comme propriétaires d'habitations et
comme marchands en les rendant utiles au public par des fonda-
tions nécessaires ou commodes.
Art. 3. — Le second objet a été d'acheter des batimens nécessaires
» Arrh. du Minist. <le la Marine. — Collecl. Moreaii Sl-Mt^ry. — Colonies en gé-
néral, t. X\'. art. Juif.
244 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
au service de la Colonie et par la d'en diminuer d'autant les dé-
penses.
Art. 4. — Le troisième objet a été de chercher un moyen de plus
pour faire face au fardeau occasionné par l'arrivée imprévue des Al-
lemands.
Art. 5. — Dans tous les cas on a toujours compté payer l'intérêt à
5 pour cent de l'argent avancé par les Juifs. Ce prêt outre l'aisence
actuelle que l'on a eu en vue a pour objet politique celui d'attacher
au gouvernement des gens qui ne songent ordinairement qu'à leur
intérêt : la perte de la Colonie occasionneroit vraisemblablement
celle du revenu dont ils auroient preste le capital : on est occupé à
fixer un projet de remboursement par lots afin d'acquérir la con-
fiance des Juifs pdur obtenir d'eux un prest plus considérable, lors-
que d'autres circonstances pourroient l'exiger.
Art. 6. — Les motifs énoncés dans l'article précédent ont engagé à
employer trente mille livres du prêt des Juifs et trenfe autres
mille livres du trésor de Sa Majesté pour parvenir à la construc-
tion des cases de la place du Port au Prince : ces boutiques suivant
l'évaluation la plus basse produiront chaque année un loyer de
24,000 livres qui seront affectées au payement de l'intérêt et à four-
nir une partie des fonds nécessaires pour le remboursement du
capital.
Art. 7. — Toutes les sommes payées ont été reçues par le tréso-
rier : toutes les soumissions ont été enregistrées, quant à la partie du
Sud ou de l'Ouest au bureau de police du Port au Prince ; toutes
celles du Cap seront enregistrées au bureau de police de ce ressort ;
leur perception et les titres ainsy que l'argent seront remis à
M. Gouvion, trésorier gênerai.
Art. 8. — Il doit résulter de ces précautions une comptabilité
exacte et il est difficile de supposer des motifs ou des arrangements
ocultes.
Art. 9. — Les Juifs de la partie du Nord demandent, suivant la re-
quête ci-jointe, de payer gratuitement et non a titre de prêt, les
sommes énoncées, pourvu que les Lettres-Patentes accordées par
Sa Majesté aux Juifs portugais servent de prétexte à ceux même
qui ne le sont pas et que leur enregistrement assure dans la colonie .
l'état des gens de cette religion : il est probable que ces Lettres-
Patentes enregistrées en attiroroient beaucoup.
Art. 10. — Le Conseil national aura pour agréable de donner un
avis sur cet objet et il sera fait ensuite les démarches qui paroîtront
nécessaires.
Au Cap, le 16 janvier 17()3.
KSTAING.
Pour copie, Estaing.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII^ SIÈCLE 2io
Elat des sonunes à payer jmr les Juifs, établis dans le ressort du
Conseil du Cap {46 janvier 17 6b).
SOMMES
;>. payer.
Pierre Fessard 30,000 \.
Jean Fessard 20,000
Rabba frères 12,000
D. Victoria , 15,000
D. Pereira et Totta 9,000
La Meyra l'aîné 3,000
La Meyra jeune 3,000
David Mendes et Victoria. . . 5,000
Lange père et fils 5,000
Francillon et Moline 3,0Ù0
Oliveira 4,000
Joseph Pessoa père et fils. . . . 500
Torres 300
Fereire 200
Garcie 200
SOMMES
à payer.
Salzedo 600 1.
Jean 200
Isaac et Roble 600
Monsanto et Totta 1,000
Barques 100
Lejan aîné 200
Petit Lyon 150
Daniel Monsanto 200
Mendes fils 150
Pechotte 100
Torres de Limarade 800
Jacob Toussaint 150
Lopes 100
David Castro OuO
Nota. Ces sommes sont payables en différents termes éloignés ;
il n'en a pas été reçu une seule au Trésor, et les différents titres de
créance que l'on propose sur les Espagnols et sur les François, ainsi
que les soumissions, sont simplement déposés.
SOMMES
PAYÉES.
A Saint-Marc :
Le sieur Aron Victoria 3,000 1.
Le sieur Mendes Fourtado 2,000
Au Port-au-Prince :
Le sieur Guimarin (i,nO()
Le sieur Mendes France "3,000
A Léogane :
Le sieur Alvares 3,.j00
Au Petit-Goave :
Le sieur Alvares Corrca 10,000
A Nippes :
Le sieur Alvares 2,o00
Ces sommes sont em-
pl03'ées à la construction
de trente-une baraques
dans la place publique
de Port-au-Prince, sui-
vant le marché passé
devant notaire le il oc-
tobre 17()4.
T. IV.
17
246
REVUE DES ÉTUDES JUIVES
AU PORT-AU-PRINCE.
Le sieur Daguilar
Despas père et clief de
famille
Depas le jeune.
Jean Depas.
Michel Depas,
M. S. J. Depas.
SOMMES A PAYER.
.50,000 livres.
Une soumission enre-
gistrée au greffe du bu-
reau de police de Port-
au-Prince le r.î octobre
1764 pour l'établissement
d'une fontaine à faire
dans la place publique
de Saint-Louis, avec une
conduite d'eau sur le port
pour ea donner bord à
quai aux chaloupes des
navires.
Une soumission enre-
gistrée au grefl"e du bu-
reau de police du Port-
au-Prince le 13 octobre
1764, pour la construction
d'une batterie fermée ,
susceptible de recevoir
quatre pièces de gros ca-
non, qui doit être placée
dans la Baye d'Aquin.
Une soumission enre-
gistrée au greffe du bu-
reau de police de Port-
au-Prince le 13 octobre
17G4, pour l'établissement
d'une auberge au Bourg
Saiut-Michel.
50,000 à payer en deux
termes de un an et deux
ans à compter du 10 sep-
tembre 1764.
Pour acheter pour le
Roy des batteaux nom-
més colombes.
10,000 à payer pour lui
et Antoine Depas sou
cousin.
MOTIFS,
Il a auprès de Saint-
Louis une grande habita-
tion sur laquelle il a en-
viron 280 nègres. Ce Juif
possède une autre habita-
tion dans le bas d'Aquin
et une autre à l'Azile.
Honnête homme : il
vient d'acheter une habi-
tation de 100 nègres près
du Bourg d'Aquin. Il en
a une autre à l'Azile. Il
possède deux maisons,
l'une à Saint-Louis, l'au-
tre aux Cayes.
Il possède une habita-
tion à la coline à Mangon
avec 30 nègres.
Mauvais sujet, contre
lequel il y a une multitude
de plaintes de la part des
habitans. Mulâtre libre et
bâtard ; il possède une
habitation considérable à
la grande Coline avec 120
nègres ; il a de plus une
autre habitation à la Co-
line à Mangon avec 30 nè-
gres. Il s'est révolté plu-
sieurs fois contre les or-
dres qui ont été donnés
pour le bon ordre public ;
cet homme a été autrefois
courtier de M. Gradis.
LES JUIFS DANS LES COLONIES FRANÇAISES AU XVIII' SIÈCLE 1M
AU PORT-AU-PRINCE.
SOMMES A PAYER.
MOTIFS.
Lewis
10,000 pour achelter
pour le Roy un batteau
Il possède deux mai-
soas de 10,000 1. de loyer
nommée colombe.
aux Cayes. Il a ruiné
plusieurs babitants par
des procès qu'il a achetés
et dont il fait commerce.
Il prétend avoir été bap-
tisé et avoir eu M. le Duc
d'Orléans père pour Par-
rain. Il a judaïsé dans la
Colonie.
Payés 40,000 livres.
A payer , 110,000 —
Ressort du Cap 133,190 —
Arrêté et certifié le 16 janvier 1763. Magon.
Cette note montre que M. cVEstaing avait changé de tactique et
qu'il tenait à faire passer ces contributions imposées aux Juifs
comme de simples prêts consentis par eux, prêts qui devaient
rapporter 5 0/0 d'intérêts annuels. Que s'était-il donc passé du
mois de septembre 1764 au mois de janvier 1765? Par suite de
quelles circonstances M. d'Estaing, qui, trois mois auparavant, ne
se gênait point pour employer le langage raide et menaçant que
nous avons rapporté un peu plus haut, arriva-t-il à ce moment à se
défendre de tout abus de pouvoir, à vouloir prouver que, loin de
persécuter les Juifs, il voulait les protéger et les soutenir, enfin
à déclarer que c'est par reconnaissance pour ses bienfaits que les
Juifs avaient consenti, avaient offert même des prêts, où, tout en
rendant service au gouvernement, ils trouvaient encore un hon-
nête revenu de leurs avances?
La crainte qu'il avait manifestée dans sa lettre du 8 septembre
était fondée. Ses allures autoritaires et ses dédains trop ouver-
tement manifestés lui avaient créé de grandes inimitiés, des haines
formidables aussi bien dans la population que dans l'adminis-
tration coloniale. On avait saisi l'occasion offerte par les fautes et
les abus d'autorité qu'il avait commis, pour dresser contre lui un
acte d'accusation en sept points, acte qui fut conseillé et même
rédigé, croyon.s-nous, par des magistrats et des membres du
conseil. M. d'Estaing avait eu connaissance des accusations qui
étaient lancées contre lui et qui sans doute avaient été expédiées
dans les derniers jours de l'année 1704; il sentait le besoin de
préparer sa défense poui' le moment où le roi lui ferait demander
24S REVUE DES ETUDES JUIVES
des explications. Il n'avait que quatre à cinq mois devant lui, et
ce n'était pas trop pour un pareil labeur, rendu beaucoup plus
pénible et difficile par l'opposition presque générale qu'il avait
soulevée contre lui.
Or, dans ces sept points d'accusation, on avait inséré le para-
graphe suivant, qui signalait l'illégalité de sa conduite adminis-
trative dans les contributions imposées aux Juifs :
« On a taxé à des sommes considérables les Juifs de la colonie,
» quoique les Juifs Portugais ayent le privilège de s'établir
» dans toutes les terres sous la domination de la France et en
» France même '. «
Et on faisait suivre ce paragraphe de la note suivante :
« Les Anglois ont un principe bien posé : Ils attirent chez eux
» ces peuples industrieux en leur donnant de grands prrivilèges:
M on peut dire aussi que ce sont les Juifs qui font fleurir le
» C07nmerce de la Jamaïque. »
Laissons de côté tous les autres points de Vaccusaiion lancée
contre le comte d'Estaing, et voyons les moyens qu'il va employer
pour se disculper du fait particulier concernant l'impôt mis sur les
Juifs. Il sent que, malgré l'appui tout-puissant qu'il trouvera à la
Cour, il lui faut tout au moins présenter pour sa justification cer-
taines apparences de vérité, et que, si le résultat est satisfaisant,
on ne s'enquerra pas trop des moyens employés pour y arriver.
C'est donc une habileté de sa part de soumettre la question au
conseil national dans les termes que nous venons de citer et de lui
faire accepter comme prêt l'argent versé ou à verser par les Juifs.
Mais cette démarche ne donna point le résultat qu'il en attendait.
Le conseil ne voulut pas suivre M. d'Estaing sur le terrain où il
désirait l'engager et il n'accepta ni le projet de travaux ni le pro-
jet d'emprunt : Note et Etat ne furent point admis.
Il fallut donc au gouverneur trouver un autre moyen de dissi-
muler l'irrégularité de sa conduite dans cette affaire des Juifs. Il
chercha alors par des intrigues souterraines et i>eu avouables à
amener les Juifs à se jeter dans ses bras et à reconnaître que
c'était de leur plein gré qu'ils avaient donné ces sommes d'argent
ou qu'ils s'étaient engagés à payer certains travaux d'utilité pu-
blique. Il déchaîna contre eux l'envie et la jalousie de leurs con-
currents, pour intervenir, comme un Deus ex machina, au mo-
ment oii le jK-ril iiniiiineut lui livrerait les Juifs à merci.
{A suivre.) Al!, ('aiikn.
' Arch. (lu Minisl. de la Mar. — Corrcsp. •générale. — Colonies. — Saiiil-Doniin-
{.■•ue, ad aimum.
1
NOTES ET MÉLANGES
SENS ET ORl&INE I)E LA PARABOLE ÉYAN&ÉLIQUE
DITE DU BON SAMARITAIN
Saint Luc est le seul des évangélistes qui rapporte la parabole
dite du bon Samaritain. Voici en quelle occasion elle aurait été
prononcée par Jésus. Un jour que ses disciples, au nombre de
soixante- dix, lui exprimaient leur joie de ce qu'ils avaient
réussi à chasser les démons parla vertu de son nom, le Maître leur
dit avoir vu en effet Satan tomber du ciel sur la terre en forme
d'éclair. Il ajouta qu'il leur avait transmis le pouvoir d'écraser les
serpents et les scorpions ainsi que de vaincre toute la puissance
du démon, qui ne pourrait plus leur nuire, mais que toutefois ils
devaient moins se réjouir de leurs victoires sur les démons que de
ce que leurs noms étaient inscrits dans les cieux parmi les justes. Il
termina en disant que, son Père lui ayant remis tous les pouvoirs
entre les mains, ils devaient s'estimer heureux d'être témoins de
choses que les prophètes et les rois anciens avaient en vain sou-
haité de voir et d'entendre.
« Alors un docteur de loi (voixixo? xi?) se leva et lui dit pour le
tenter : Que faut-il que je fasse pour posséder* la vie éternelle?
Jésus lui répondit : Qu'y a-t-il d'écrit dans la loi? Qu'y lisez-vous ?
Il lui répondit: Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre
cœur, de toute votre âme, de toutes vos forces et de toute votre
intelligence-, et votre prochain comme vous-mêmes. Jésus lui dit :
Vous avez fort bien répondu : faites cela et vous vivrez. Mais cet
homme, voulant faire paraître qu'il était juste, dit à Jésus : Et qui
est mon prochain ? Et Jésus prenant la parole lui dit : lin homme
• Mot à mot « hériter • K),ripovci|j.6(i).
- Les mots ' et de loulc votre intellif;;encc • Ibrini'iit une autre version îles mots
< et de fout votre cœur », car Thébreu Irf/ siirnilie ù la l'ois • cœur • et < inlolligeuce > .
2o0 REVUE DES ETUDES JUIVES
qui descendait de Jérusalem à Jéricho, tomlDa entre les mains des
voleurs, qui le dépouillèrent, lui firent des blessures et s'en allèrent,
le laissant à demi mort. Un prêtre qui descendait par hasard par
le même chemin, l'ayant aperçu, passa outre. Un lévite aussi,
se trouvant sur les lieux, y vint et Payant aperçu passa outre
encore. Mais un Samaritain qui voyageait, étant venu près de lui
et l'ayant vu, fut touché de compassion. Il s'approcha donc de lui,
versa de l'huile et du vin sur ses plaies et les banda ; et, l'ayant
mis sur sa bête de somme, il le transporta dans une hôtellerie et
prit soin de lui. Le lendemain au moment de partir, il tira deux
deniers qu'il donna à Thôte, et lui dit : Ayez bien soin de cet
homme, et tout ce que vous dépenserez de plus, je vous le rendrai
à mon retour. Lequel de ces trois vous semble avoir été le pro-
chain de celui qui tomba entre les mains des voleurs ? Le docteur
lui répondit : Celui qui a exercé la miséricorde envers lui. Allez
donc, lui dit Jésus, et faites de même (Luc, x, 11-31). ^
La première partie du récit qui précède se fait reconnaître tout
d'abord comme une légende postérieure à l'âge apostolique. En
premier lieu, la donnée relative à l'élection de soixante-dix disci-
ples, qui est contredite par les autres évangiles, lesquels ne
mentionnent jamais que douze disciples, a tout l'air d'être une
simple imitation des soixante-dix anciens sacrés prophètes
par Moïse en dehors des douze chefs de tribu. En second lieu,
malgré Mathieu, x, 1, et Marc, m, 13, vi, 7, il est avéré que du
vivant de Jésus les disciples n'ont jamais opéré des cures mira-
culeuses ou, comme on disait alors, chassé les démons ; le fait
rapporté par Mathieu, xvii, 16 (Cf. Marc, iv, 14; Luc, ix, 38)
atteste leur impuissance absolue à cet égard. En troisième lieu
enfin, le don de mettre les serpents hors d'état de nuire, dont il
est question dans ce récit, est selon toutes les vraisemblances
celui auquel font allusion les paroles de Jésus ressuscité, dans
Marc, XVI, 18, et se fait reconnaître par cela même comme
étant tout au plus d'origine apostolique. Il faut probablement y
voir un reflet de l'histoire racontée dans les Actes, xx, 16, d'après
laquelle saint Paul aurait secoué de sa main un serpent veni-
meux, sans souffrir des suites de sa morsure.
Toutes ces considérations se réunissent donc pour établir que
l'introduction doit historiquement être séparée du récit qui suit
et qui rapporte le dialogue de Jésus avec le docteur.
Mais ce dialogue lui-même a subi sous la plume de saint Luc
certaines modifications qui le distinguent de celui qui est rapporté
par les autres évangélistes. La version de saint Marc, qui semble
la plus originale, motive la question du docteur i)ar la satisfaction
NOTES ET MELANGES 251
que les Pharisiens avaient ressentie, en entendant Jésus défendre
contre les Saducéens le dogme de la résurrection des corps.
Comme à ce moment les sacrifices du temple étaient faits par des
prêtres saducéens, le docteur pharisien voulut savoir si Jésus était
d'accord avec ses coreligionnaires, qui déclaraient que l'amour de
Dieu et du prochain valait mieux que tous les sacrifices ; et quand
Jésus eut répondu dans ce sens, il s'établit entre eux un accord
parfait : le Pharisien fit entendre un affectueux « bravo, Maître,
vous avez dit la vérité », et Jésus de son côté se hâta de lui dire:
« Vous n'êtes pas loin du royaume des cieux » ; c'est-à-dire :
il ne vous manque qu'une chose, c'est de devenir mon disciple
(Cf. Mathieu, iv, 19). Dans Mathieu, xxii, 35, l'enthousiasme
des Pharisiens est non seulement supprimé, mais on les accuse
d'avoir provoqué contre Jésus un rassemblement, dont celui-ci
profite d'ailleurs pour leur adresser une question irritante, à sa-
voir si le Messie n'est pas plus qu'un fils de David. La version de
saint Luc sépare violemment la demande du docteur de la discus-
sion avec les Saducéens. C'est par esprit de chicane que le docteur
pharisien interrompt la confidence de Jésus à ses disciples, en
lui adressant cette question captieuse : « Que faut-il que je fasse
pour posséder la vie éternelle ? », question à laquelle il espérait
obtenir pour réponse le célèbre « suivez-moi » lancé jadis à saint
Pierre, pour pouvoir ainsi l'accuser devant le sanhédrin de séduire
le peuple. Jésus se garde bien de tomber dans le piège et invite
le docteur à citer le passage biblique relatif à l'amour de Dieu
et du prochain ; et quand celui-ci l'a cité, il se contente de
l'applaudir et de l'assurer que l'observance de ce commandement
suffit à procurer la vie éternelle. Le docteur, voyant sa ruse
déjouée, veut au moins satisfaire sa vanité de pharisien en faisant
paraître son zèle dans l'accomplissement exact des prescriptions
de la loi (= la justice), et demande quel est le sens du mot
« prochain». Jésus raconte alors l'action charitable d'un Sama-
ritain envers un malheureux blessé qu'un prêtre et un lévite
avaient cruellement abandonné à son sort, et dit au docteur
d'imiter ce bon exemple.
Saint Mathieu nous transporte, au contraire, à la dernière ('po-
que de l'activité de Jésus. L(> Maître désabusé et désespérant de
ses contemporains cherche à mourir, afin de s'attacher ses disciples
par la profonde commisération qu'on ressent pour un martyr,
surtout lorsque^ ce martyr est un maître vénéré et sympntlii(pie et
que ses bourreaux professent des principes qui sont diamé-
tralement opposés aux siens. L'exécution de ce dessein est facilitée
par la haine des Pharisiens, qu'eflarouche sa prétention d'être
2^)2 UliVUli DES ETUDES JUIVES
le Messie et d'être en même temps d'une nature supérieure à son
ancêtre David. Jésus attise le leu en cherchant à prouver, d'abord
par le psaume ex, que le Messie, loin d'être le fils de David,
est plutôt son seigneur, puis en prononçant publiquement un
véhément discours contre les Pharisiens, où ceux-ci sont traités
d'hypocrites et d'assassins, et où il les invite à combler la mesure
d'iniquité de leurs pères, « en ajoutant son exécution à celle de tant
de prophètes et d'envoyés, dont le sang ^j?<r a été versé par
eux (ibid., xxiii) ».
Il ne faut pas faire un grand effort de réflexion pour reconnaître
que la version de saint Marc est seule en situation. Nous avons là,
sans aucun doute, une tradition authentique qui, bien qu'émanant
de troisième main — car rien dans les évangiles ne vient immé-
diatement des apôtres, ni des judéo-chrétiens — a conservé une
image vive et claire de ce que Jésus a pu dire dans la première
période de sa mission, alors qu'il avait encore l'espoir de gagner
les Pharisiens à sa cause. Marchant d'accord avec ceux-ci, il
combattait comme eux les deux partis adverses, le parti sadu-
céen, qui niait le « royaume des cieux «, l'existence d'un monde
surnaturel, et le parti des zélotes qui niait le « royaume de
la terre -», la domination romaine et ses prétentions ; toute son
ambition se bornait alors au désir de former une école de repentis
expectants, à l'instar de l'école de Jean-Baptiste, à laquelle il s'était
affilié pendant quelque temps. Pour faciliter l'entrée des disciples,
il renonça môme à la cérémonie du baptême que l'école rivale
observait rigoureusement et qui lui donna une teinte essénienne.
Si quelqu'un lui avait demandé à cette époque ce que signifiait le
commandement de la loi : « Aimez votre prochain comme vous-
même «, il aurait certainement répondu comme l'avait fait Hillel
avant lui et comme devait le faire saint Paul après lui : « Ne faites
pas à votre prochain ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fit » ;
mais cette maxime courait les rues de Jérusalem et personne
n'avait besoin qu'on la lui l'appelàt.
Nous sommes donc obligés de séparer la parabole du long récit
qui lui sert d'introduction chez saint Luc, et cette circonstance est
de nature à soulever un grave doute sur l'authenticité de la para-
bole elle-même. En effet, sous la forme qu'elle revêt chez saint
Luc, cette; parabole ne ])eut point venir de Jésus : le rôle d'un
Iw'ro.s de charité qui y est attribué à un Samaritain réfléchit d'une
façon nette les idées de saint Paul. On sait que, d'après l'ordre
exprès de Jésus, l(;s disciphïs devaient éviter tout contact avec
les Samaritains et limiter leur prédication aux Israélites ortho-
doxes (Mathieu, x, 5, nv, 24; Actes, xiii, 40; Rom., xv, 8). Il est
NOTES Eï .MELANGES 2b3
avéré i[ne les Samaritains ont constamment refusé l'iiospitalité
à la secte naissante (Luc, ix, 52, 58), et que d'ailleurs le seul
Samaritain loué pour sa reconnaissance est traité d'étranger
{àXKo-^Bvr,i;), expression qui équivaut à c. ethnique » ou « païen )>
(Luc, XVII, 15-18). Il s'ensuit que, si Jésus avait voulu chercher
un exemple de charité ailleurs que chez ses compatriotes, il eût
choisi pour modèle un païen pur et simple (Cf. Mathieu, xi, 21). A
ces considérations il faut encere ajouter une remarque d'un ordre
difïérent : c'est que le mot Samaritain était hors d'usage chez
les Juifs à l'époque de Jésus ; ils employaient alors exclusive-
ment l'expression Chuthéens [Kûiim). Nous avons pour cela
le témoignage formel de Josèphe (Histoire, viii, 14), témoignage
confirmé par l'emploi constant de la même dénomination dans la
littérature talmudique. En im mot cette parabole telle qu'elle
figure dans saint Luc appartiendrait tout au plus aux derniers
développements du christianisme primitif, au cycle des traditions
pauliniennes ou pagano-chrétiennes. Faut-il pour cela adniettre le
caractère apocryphe de l'ensemble ? Je ne le pense pas ; je suis
convaincu au contraire que saint Luc nous a conservé un des
AoyCa les plus autlieutiques que le Maître ait produits à l'époque
où saint Marc place la question du docteur pharisien, c'est-à-dire
au début de la prédication de Jésus récemment séparé de l'école de
Jean-Baptiste . Il faut seulement éliminer la mention du Samari-
tain qui jette une note tardive dans ce vieux récit.
L'examen approfondi des actes du héros principal, en même
temps qu'il révélera de nouveau l'inexactitude de la version
actuelle, nous fournira un moyen très simple pour rétablir la
physionomie vraie de ce personnage, en sorte que les considé-
rations qui nous faisaient douter de l'authenticité de la parabole,
se transformeront en autant de preuves en sa faveur.
En effet, que nous raconte la parabole au sujet de l'homme
secourable que la présente version qualifie de Samaritain 1 Elle
nous dit : 1° que ce personnage, comme le prêtre et le lévite qui
l'ont précédé, s'est trouvé entre Jérusalem Pt Jéricho ; 2° qu'il a
soigné le blessé dans une hôtellerie, dont le maître le connaissait et
avait confiance en lui ; 3° qu'il avait l'intention de retourner à bref
délai à .Jérusalem. Toutes ces particularités cadrent, on ne peut
plus mal, avec ce que l'histoire et les Évangiles eux-mêmes nous
apprennent au sujet des relations entre les Juifs et les Samaritains
à l'époque dont il s'agit. La haine entre ces deux peuples était
telle qu'ils n'avaient au('un rapport entre eux. Un grave interdit
pesait sur toutes les dennies d'origine sanuiritnine, et coupa court
à toute transaction commerciale. Juifs et Samaritains ne m;in-
254 REVUE DES ETUDES JUIVES
geaient jamais ensemble et se refusaient mutuellement l'iiospita-
litf^. Dans ces conditions on ne conçoit guère comment un Sama-
ritain pouvait se trouver en Judée sur la route de Jéricho, être
en bons termes avec le maître d'hôtel, et surtout aller et venir
à Jérusalem quand il lui plaisait. Est-ce sérieux? Mais un Sama-
ritain isolé dans cette ville dévote, au milieu de cette multitude
chatouilleuse et méfiante, eût risqué à chaque instant d'être
chassé et maltraité comme un espion. On le voit, ici encore le rôle
du Samaritain est incompatible avec la situation et ne peut par
conséquent avoir appartenu à la rédaction primitive.
On comprendra sans peine qu'on ne peut songer un seul instant
à remplacer le Samaritain par un païen. D'abord une pareille
substitution est par trop violente; puis, il est bien constaté que
les relations entre les Juifs et les païens étaient au temps de Jésus
beaucoup moins amicales que ne le font supposer les rapports
du voyageur avec le maître d'hôtel. Aucune transaction commer-
ciale n'avait d'ailleurs son siège à Jérusalem, encore moins à
Jéricho, et les seuls païens qui résidaient dans la première de ces
villes étaient les soldats de la milice étrangère, qui ne voyageaient
guère. Enfin, si la première rédaction avait le mot « païen »
(è9vtxd;), ce mot Serait resté dans le récit de saint Luc qui, comme
nous le disions plus haut, vient d'un milieu paulinien, si bien
disposé en faveur des païens. Il ne reste qu'un seul moyen de
remédier à cet état de choses, celui de supposer que, dans la
version primitive, le bienfaiteur du blessé était ou bien un Juif de
Jérusalem que les affaires ou les relations de famille appelaient
souvent à Jéricho, ou bien un pieux galiléen ayant l'habitude de se
rendre à Jérusalem pendant lés grandes fêtes et de s'arrêter che-
min faisant dans l'hôtellerie où il a déposé le blessé. Le fait que
la parabole place le dénouement de ce drame sur le chemin de
Jéricho milite en faveur de la dernière hypothèse, car cette route
était surtout fréquentée par les pèlerins de la Galilée, lesquels
évitaient ordinairement la Samarie, aussi bien par la crainte
de l'hostilité de ses habitants que par celle d'y contracter des con-
taminations légales, qui les auraient rendus incapables de manger
l'agneau pascal et de visiter le temple. Quoi qu'il en soit du reste, le
voyageur charitable que Jésus donne comme modèle au pharisien
était un Israélite ('iîp!ïT,>k(TT,ç). On sait que dans la législation rabbi-
nique le titre d'Israélite désigne tout particulièrement un Juif qui
n'est ni prêtre ni lévite. La pointe de la parabole vient de cette
opposition : le prêtre et le lévite qui vivent des dons des pèlerins,
et qui devraient donner l'exemple de la chanté au commun
du peuple, abandonnent sans pitié un pauvre pèlerin blessé sur
NOTES ET MELAiNGES 2oo
une route déserte ; un simple Israélite, ne consultant que son cœur,
prend soin de lui et le sauve d'une mort certaine. Ce sens particu-
lier de la dénomination « Israélite » était naturellement incompré-
hensible pour le cercle pagano-clirétien, auquel saint Luc a em-
prunté la parabole. Pour les chrétiens recrutés parmi les païens, la
mention d'un Israélite, après celle d'un prêtre et d'un lévite qui
sont aussi Israélites, n'avait aucun sens et gâtait par sa présence
la belle ordonnance de la parabole. Pour remédier à cet incon-
vénient, on se crut autorisé à corriger 'iaaoLT}.iTf\<; en 2a[iapdTri?, et
cette correction fut accueillie d'autant plus favorablement qu'elle
donnait satisfaction à un besoin réel, celui de rattacher à Jésus
l'idée de la supériorité des chrétiens païens sur les Juifs non
convertis.
Nous n'avons plus qu'à récapituler les résultats de notre re-
chercha :
1° Le récit par lequel saint Luc introduit la question du docteur
pharisien appartient à la troisième phase du christianisme, ou
christianisme paulinien.
2° Le dialogue entre Jésus et le docteur pharisien au sujet
du principal commandement de la loi, que saint Luc sépare de la
discussion de Jésus avec les Saducéens sur la résurrection des
corps, doit y être relié et placé avec lui dans la première phase de
la prédication de Jésus, conformément à la version de saint Marc.
3° La parabole primitive du bon Israélite est authentique et
se rattache étroitement au dialogue avec le docteur pharisien.
4° La correction de la qualification d' « Israélite » en celle
de a Samaritain » a été faite par des chrétiens païens qui ne com-
prenaient pas le sens spécial de cette dénomination.
J. liALÉVY.
UN ALPHABET HÉBREU ANGLAIS AU XIY" SIÈCLE
I
Le sens des lettres de l'alphabet a souvent préoccupé les éru-
dits. Les savants du moyen âge, cette époque classique de l'allé-
gorie, se sont plu à attribuer à chacun des caractères de l'alphabet
un sens emblématique. M. Omont publiait, il y a quelques mois
dans la Bibliothèque de l école des Chartes (1881, p. 429) un
•2o6 UKVLE DES ETUDES JLiVES
poème latin du x^ siècle sur les lettres de l'alphabet grec. La pièce
suivante montrera que l'hébreu n'a pas été oublié.
Le ms. B. N. fr. 1, qui date du commencement du xiv^ siècle et
contient une traduction de la Bible en dialecte anglo-normand,
renferme aux i'"'' 258 v° et 259 r^ à la suite des Lamentations de
Jérémie, un alphabet dans lequel chaque lettre hébraïque est
expliquée par un mot latin et par le mot anglais correspondant.
Par une erreur du copiste, c'est le mot anglais qui se trouve placé
le premier. On verra que l'ordre alphabétique n'est pas observé et
que plusieurs lettres sont expliquées de deux et même de trois
façons différentes. Nous avons placé entre crochets le mot anglais
moderne correspondant.
F" 258^1 Ci finissent les lamenta-
tions de Jeremie' et comence
le alphabetli en grieu ^
God
Deus
{\) Aleph
teching [teaching]
doctriua
(2) Zai
sone [son]
filius
(3) Beth
telling
narracio
('*] Eetli
voiz [voice]
vox
(o) Gimel
gode (good)
bonus
(6) Tetli
drede [dread]
timor
(7) Deleph
biginning [beginning]
principium
(8) loth
waye [way]
via
(9) He
werching [workingj .
operacio
(10) Ca2)h
of helche [of lielp]
salutis
(11) Vaio
worde [word]
sermo
(!2) Lameth
oneliclie [onely]
unicus
(1 3) Mem
confort
consolacio
(f 4j Sade
Tecliing [teacliing]
doctrina
(lo) Alepk
lif [life]
vita
{\&)Beth
of hem [of theml
ex ipsis
(17) 0[?]
moulh of rithfulnessc [mouth
of righteousness]
osjusticie
' Cest-à-dirc les rjuatrc premiers chapitres dont les versets, comme on le sait, se
suivent dans l'ordre alphabétique.
' Faute évidente pour hehrieii.
NOTES ET MÉLANGES
257
(1 8) Sade
tokenes ftokens]
signa /
(19) Vait
wyt [wit]
sensus
(20) mm
cleping
vocacio
(21) Coph
hous [house]
domus
(22) Beth
biginning [beginning]
principium
(23) loth
F" 209''" everlastend [everlasling]
sempiternum
(24) Nun
helping
adjutorium
(25) Sameth
of heued [of head]
capitis
(26) Res
plentee [plenty]
plenitudo
(27) Gimel
hend [haud]
manus
(28) Caph
on [one]
unus
(29) Smi[eth]
rythfulnesse [righleousness]
justicia
(30) Sen
tabler
tabcUarius
(31) Deleth
lering [Cf. ail. lehren]
disciplinam
(32) Lamelh
cleping
vocacio
(33) Coph
moutb vel bon [mouth vel
bone]
os
(34) Phe
strenthe [strength]
fortitudo
(35) Tau
yis [this]
ista
(36) He
wytoutencord[without cords]
sine cordis
(37) Mem
stahvorlli
fortis
(38) Ain
of ye heued [oi' the head]
capitis
(39) Res
he
ipse
(40) Vau
lyf [lifci
vita
(41) Zai
withouten ezen [wilhout eyes]
sine oculis
(42) Phe
of ten [of teeth]
dentium
(43) Sen
Ci tînist le alphabeth
en grieu
Vient ensuite V Oraison de Jérémle qui forme le cinquième
chapitre des Lamentations dans le canon juif.
Le tal^leau suivant, dans l('(|U('l nous avons jtlacé à côtd de
cliacjuc ictii'c ranpV'c par oi'di-o alplialx'tiiinc les diUi'reiilcs sii:nili-
258
REVUE DES ÉTUDES JUIVES
cations qui lui sont attribuées, mettra un peu de clarté dans cet
ensemble si confus :
Aleph, Deus, God[\].
Beth, filius, sone (3).
GiMEL, tox,toiz (o).
Deleph, timor, drede (7).
He, via, maye (9).
Vau, salutis, ofhelche [W].
Zai, doctn7ia, teching (2).
ïiETR^narracio, telling[!^).
Teth, honus, gode (6).
lOTH, principiiim, Hgin-
ning (8).
Caph, operacio, werckvig
(10).
LAUKT!B.,sermo, '}vorde[\ 2).
MEM,?mic««, oneliche [13).
NuN, sensîis, wyl i20).
Sameth, adjutoriwm, hel-
ping (2o).
Ain, fortis, sialworth (381.
VKE,os,moutkvel bou(3i).
Sade, co7isolacio, confort
(14).
CopH, tocacio, cleping (21 )
Res, capitis, of heued (26).
Sen, jiisticia, rythful-
nesse (30).
Tau, fortitudo, sirenthe
(3o).
O (?) ea; ïjî^w, ofhem (17).
doctrina, teching (15).
vi^a, ii/" (16). <?omM^, Ao«5 (22).
pleniiudo, plentee (27).
tabellarius, tabler (31).
i^/a, ^ù (36).
5i^w«, tokenes (19). ^i^^e, ^6 (40).
mta, lyfi'iVi-
princiimmi, Ugining (i3).
matins, hend (28).
disciplinatn, lering (32).
si»e cordis, wytouien cord (37;
sempiternum, everlastend (24).
M^i2(5, (jw (29).
5mé oculis, witJwuten e^en
(42).
05 justicie, moutk of rith-
fulnesse (18).
vocacio, cleping i'i'i).
capitis ofye heued (39).
dentium, often (43).
Le fait même que certaines lettres ont reçu plusieurs interpré-
tations différentes montre que les explications données n'ont en
général pas d'autre source que la fantaisie de leur auteur.
Quelques lettres seulement sont traduites d'après leur sens réel :
BETii, domiis, hoiis; vue, os, rnouth; res, capitis, of heued;
sen, dentium, of tea : etc. En traduisant zai par vita, lyf,
l'auteur a sans doute songé au grec zaw. Il n'y a pas de rapport
entrfî le sens attribué à chaque caractère hébraïque et les versets
des Lamentations de Jérémie en tète desquels sont placées ces
lettres.
Une seule chose est certaine, c'est que l'Anglais qui a traduit les
1
NOTES ET MÉLANGES 239
gloses latines ne connaissait pas le sens attribué aux lettres
hébraïques. Le fait qu'il traduit phe, os, par moiitli vel bon. le
prouve suftisamment.
.1. BONNARD.
II
Le document que nous fait connaître M. Bonnard a son intérêt
et mérite attention : il suggère quelques observations que nous
prenons la liberté de soumettre au lecteur.
I. M. Bonnard fait remarquer avec raison que, par quelque
erreur de copiste, c'est le mot anglais qui se trouve placé le pre-
mier. On peut se demander, il est vrai, si le copiste n'a pas oublié
la première glose hébraïque, de telle sorte que l'ordre entier doive
être interverti, et chaque lettre hébraïque demander son expli-
cation, non aux deux mots qui la précèdent, mais aux deux mots
qui la suivent. Ne serait-il pas plus simple, par exemple, de rat-
tacher gimel non à vorv, parole, mais à bonus, bienfaisant?
Mais, à l'examen, cette thèse ne tient pas ; on reconnaît vite que,
pour le plus grand nombre des lettres, c'est la traduction anglaise
ou latine précédait l'hébreu qui leur convient. Malgré des inco-
hérences, malgré des bizarreries comme celles de Valef précédé
au n" 15, suivi au n" 1 d'une même traduction doctrina, il faut
admettre que le scribe a placé régulièrement l'anglais avant
l'hébreu, le commentaire. avant le texte à commenter.
Autre singularité plus frappante, et qui nous expliquera la pre-
mière: les lettres répétées deux et quelquefois môme trois fois se
suivent dans l'incohérence du désordre le plus arbitraire. Ce dé-
sordre toutefois n'est qu'apparent et est dû à une méprise.
Prenons d'abord les douze premières lettres et écrivons les à la
ligne en n'en mettant que deux à chaque ligne :
God,
(Icus,
alef{n° 1).
Tecbinp-.
doctrina,
zai (2).
Souc;,
filius,
beih (3).
Tcllinfr,
iiarracin,
/teih (4).
Voiz,
vox.
gimel (5).
Gode,
bonus,
/eik (6).
Dredc,
liinor,
delepk (7).
Bigiuniug,
principium,
îo(h (8).
Waye,
via,
ke (9).
Werching,
operacio,
capk (10).
Ofhclche,
salutis,
vau (111.
Worde.
sermo,
lamelh (12),
Lisons maintenant ces mots non plus ou lignes horizontales,
2G0
REVUE DES ÉTUDES JUIVES
mais en colonnes, et nous voyons aussitôt l'ordre alphabétique se
suivre à la première colonne de gauche, de alef à vau et reprendre
à la seconde colonne de zai {=■ zaïn] k lameth. KwivQwiQwi à\i,
le copiste reproduisait un manuscrit présentant sur deux colonnes
l'ordre alphabétique, du moins pour les douze premières lettres ;
mais il a fait sa copie en suivant la ligne, passant de alef à zai,
comme de vau à lameth. C'est ce qui explique également comment,
pour chaque lettre, il a commencé par l'anglais qu'il trouve
ou qu'il met à gauche des lettres et a fini par l'hébreu, qu'il ren-
contrait en allant à droite.
Pour les lettres suivantes, une erreur du même genre s'est pro-
duite, mais plus compliquée.
Ecrivons les lettres à la suite les unes des autres sur cinq lignes '
liorizoniales : (pour faciliter la lecture, je mets les caractères hé-
breux à la ]>lace de leurs noms en lettres latines) :
Col. 1.
Col. 2.
Col. 3.
;: (11° 13;
:i (14)
N (13:
3(20)
P (21)
2 (22)
0 (25)
1(26)
S (27)
V] (29 bis).
•C5 (30]
->m
S (34)
n (35j
r; (36)
Col. 4.
n (3) (16
^ (23)
^(28)
b (32)
?3 (37)
Col. 5.
Col. 6.
-.2 (0) (17)
^i (181
2 (2'i)
))
0 (29)
»
:> (p) (33)
))
3 [y] (38)
»
Col. 7.
T (no
et enfin hors rang n (39), ^ (40), t (41), d (42) et -J (43).
Dans ce tableau, nous avons remplacé n (n° 16) par n, le signe
inintelligible 0 (n° 17) par ::, et aux n°^ 33 et 38 p et :> par v et c.
Ces changements, amenés par les exigences de l'ordre alphabé-
tique, se justifient, comme nous le verrons plus loin, par la nature
des traductions.
Or, reportons-nous maintenant aux colonnes verticales, et nous
constaterons avec une régularité presque entière l'ordre même de
l'alphabet, deux fois répété. Nous n'avons dû, pour arriver à ce
résultat, qu'ajouter dans la première colonne un :f qui peut avoir
été oublié par le copiste, laisser quelques lettres à la suite en
dehors de nos classements et faire trois ou quatre légers change-
ments qui se justifient d'ailleurs.
Une régularité presque aussi complète ne peut être l'efièt du ha-
sard, et il faut en conclure que le scribe avait sous les yeux un
double ou triple alphabf t en colonnes multiples qu"il a lu par lignes
horizontales, comme le i)remior ali<liabet partiel.
L'original qu'il rei)roduit n'est lui-même qu'une coi)ie. En efiet,
si l'incohérence ajtparente d<' l'alpliabet est l'onivre du scribe
anglo-normand. Tordre alphabétique que l'on n?constitue den'ière
NOTES ET MELANGES .01
cette incoh(''rence, a, nous le voyons, ses lacunes, ses omissions et
ses erreurs. Si le y de la l""» colonne a été sûrement oublié par le
copiste du xiv» siècle, le i et le t de la colonne 3, le a de la
colonne 4, pour ne citer que les faits les plus frappants, n'ont pu
être omis que par le copiste antérieur qui arrangeait à sa ma-
nière un document plus ancien.
Par ce texte du commencement du xiV siècle, nous plongeons
donc à travers deux copies en plein moyen âge, peut-être, au
xii^ siècle, ce qui n'étonnera pas pour qui connaît quelque peu
l'histoire des transcriptions des manuscrits à cette époque. Peut-
on remonter plus haut ? Ici nous rencontrons de nouvelles
sources, et la critique de ces sources nous permet en même temps
de mieux comprendre la formation de notre alphabet, et d'en
corriger les nombreuses erreurs,
IL La Bible contient plusieurs poésies, enseignements moraux,
complaintes, psaumes, etc., rédigés de façon à présenter en
acrostiches l'ordre alphabétique. Tels les quatre premiers cha-
pitres des Lamentations de Jérémie et le fameux psaume cxviii,
qui présente, en vingt-deux chapitres de sept versets chacun, sept
fois chacune des vingt-deux lettres de l'alphabet. Les Pères de
l'Eglise, au lieu de voir dans cette répétition de simples procédés
mnémotechniques, n'ont pas manqué d'y chercher et d'y trouver
des significations édifiantes, mystiques. De là des travaux d'inter-
prétation dont sont en particulier l'objet les Lamentations et
notre psaume cxviii. A cela s'ajoutent les explications purement
(■'tymologiques d'interprètes non juifs qu'une curiosité de gram-
mairiens pousse naturellement à s'enquérir du sens des noms qui
désignent les lettres hébraïques.
Au IX* siècle Paschal Radbert, l'abbé de Corbie, a laissé un
commentaire en cinq livres sur les rinq chapitres des Lamen-
tations et naturellement chaque lettre y est l'objet d'interpréta-
tions spéciales (voir Migne, Pairologie Latine, tome CXX, co-
lonnes 1059-1256).
Ses contemporains, Raban Maur et saint Rémi, ont laissé éga-
lement, le premier un commentaire sur Jérémie dont le huitième
livre est consacré aux Lamentations (Migne, CXI, col. 1083 et
suiv.), l'autre un traité intitulé Enarrationes in Psalnws, où le
psaume cxviii est étudié (Migne, GXXXI, 145 et suiv.).
En remontant plus haut, nous rencontrons le célèbre évêque de
Séville, Isidore, qui touche aux questions d'étymologie hébraïque,
dans le livre VII de ses précieuses Etymologiœ (Migne, CXXXII,
col. 275 et suiv.).
T. IV. 18
262 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Plus haut encore, nous trouvons deux grands noms, saint Ara-
broise de Milan, qui commente le psaume cxviii (Migne, XV,
pars posterior, col. 1863) et le docteur illustre duquel découle,
dans sa plus grande partie, la science théologique du moyen âge :
j'ai nommé saint Jérôme.
Saint Jérôme a étudié à plusieurs reprises l'alphabet hébreu,
d'abord dans une lettre qu'il adresse à Paula, commentaire
grammatical, édifiant et mystique sur le psaume cxviii (Migne,
XXII, col. 441-445), puis dans son Liber de nominilms heljroicis
qui a tant défrayé les étymologistes du moyen âge (Migne, XXIIT,
827); enfin dans un commentaire sur les Lamentations de Jé-
rémie (Migne, XXV, col. 787-791). Il est vrai que ce dernier
commentaire est attribué par quelques-uns à Bède le Vénérable.
C'est la lettre à Paula que reproduisent textuellement Raban
Maur et Rémi, dont le témoignage devient dès lors inutile pour
-nous. Voyons si c'est à ces sources ecclésiastiques que remonte
notre alphabet anglo-normand.
Alef, n° 1 : Dens, God; n° 15 : doctrina, teching. — L'interpréta-
tion Deus est mystique : elle se retrouve fréquemment au
moyen âge; aleph ou alplia est un des 70 noms de la divi-
nité, et l'un des plus usités : c'est une allusion au mot de
l'Évangile « Dieu est V alplia et l'oméga ». — Doctrina; c'est
l'interprétation de P. Radbert, de saint Jérôme (cxxv), de
saint Ambroise.
Betli, n» 3 : filius; n" 16 : vita ; n'^ 22 : domiis. — L'explica-
tion si naturelle de domus se trouve chez tous nos commen-
tateurs. Pour filius, le premier auteur de l'alphabet, quel qu'il
soit, a confondu Ijeih avec hen. Pour vita (n° 16), cette
glose est inexplicable en elle même. Saint Jérôme et les autres
rendent par ce mot l'hébreu heth. Or, c'est justement
heih que réclame au n° 16 l'ordre alphabétique. Nous
sommes donc en droit de corriger le teih en Ueth, correc-
tion d'autant plus simple que dans l'écriture du moyen
âge Vh se confond facilement avec le &. L'erreur est, à n'en
pas douter, l'œuvre du dernier scribe.
Gimel, n» 5 : rox, voice ; n" 27: plenitiido, plentee. — Plenitudo,
Pasch. Radbert, saint Jérôme (xxir, xxiii, xxv) et ceux
qui le reproduisent. Quant à vooo, d'où vient-il ? Quelle
faute se cache derrière ce mot ?
Deleph ou Deleih, n° 7 : timor, drede ; n° 23: tabellariiis, tabler.
— " Daleih significat latine timorem, vel (ut alibi inveni-
mus) nativitatem », dit saint Ambroise. — Saint Jérôme et
NOTES ET MELANGES 263
ses imitateurs pour daleih donnent tabidatum ou tahidarum
dont se rapproche beaucoup notre tahellarius ; ce dernier en
est-il une altération? Quant à tabula7nim, ce génitif surprend
et on serait tenté d'y voir une corruption de tahulatum ;
mais lisez l'interprétation de Jérôme sur la C07ineooio, ou lien
mystique qui réunit cette lettre aux quatre premières : doc-
trina, doynus, plenUudo, tabuLarum : « quia videlicet doc-
trina Ecclesiae quse domus Dei est, in librorum reperiatur
plenitudine divinorura. « C'est bien des tabidœ, des tables de
la Loi qu'il s'agit ici.
Hé, n° 9 : via, waye ; n° 36 : ista yîs. — Jérôme: ista (xxii, xxiii,
xxv) ; saint Ambroise : est ou vivo. Via est une faute de
lecture du dernier copiste pour vivo : et celui-ci, en faisant
suivre l'alphabet hébreu ou latin de la traduction anglaise, a
confirmé son erreur en traduisant sa fausse lecture via par
wai/e.
Van, n" 11 : sahitis, of helche ; n° 19 : signa, tokenes ; n° 40 : ipse,
he. — Saint Jérôme, saint Ambroise, Radbert, Raban Maur,
Rémi, n'ont d'autre explication que ipse, ille, et, ou et ille.
D'où notre copiste a-t-il tiré son saluiis et son signa ?
Zai (zain), n° 2 : doctrina, teching; n° 41, vita, lyfe. — Nos sources
nous donnent tout autre chose : saint Jérôme, hœc, oliva ou
/■orw2ca^zo^ c'est-à-dire soit zoth, soil zaiih, soit zenouth; saint
Ambroise, duc te ou Tiuc. Sont-ce les sources qui sont en
défaut? Est-ce notre scribe? Remarquons d'abord que doc-
trina est l'explication la plus généralement admise pour
alef (voir à cette lettre) et que, dans l'original copié par le
scribe, zaïn et alef étaient sur la même ligne ; conclusion :
pour la glose 2, il a rapporté à zaïn l'explication qui devait
revenir à alef. Sans doute alef avait à sa gauche la glose
Deus et à sa droite la glose doctrina, et le copiste l'a détachée
d'un côté pour la relier à l'autre. — Au n° 41, le vita est
également extraordinaire; on soupçonne une méprise du
même genre ; la glose 41 se trouve hors rang dans notre ta-
bleau de la page 260, et il est impossible de voir la place
qu'elle occupait dans l'alphabet primitif; peut-être était-elle
voisine d'un heth, la lettre qui la suit immédiatement dans
l'alphabet, et que les Pères rendent i)ar vita ; ce serait de ce
vita que l'étourderie et 1 ignorance de notre copiste l'auraient
gratifiée.
Tletli, n» 4 : norracio, telling.— Ni le V)ita ou le viventes de saint
Jérôme, ni le pavor de saint Ambroise n'expliquent cette
étraiigo traduction. Quelle erreur suppose-t-elle?
264 REVUE DES ETUDES JUIVES
Teih, n° 6 : honns, gode. — Ici Radbert et Jérôme s'accordent à
traduire par bomim : ils changent simplement teth en lob{l).
Joih, n° 8 : principiimi biginning; n° 23, idem — Saint Jérôme
(xxiii) : f< Jod, principium vel scientia, vel Dominator « ;
Id. XXII et XXV : « principium ». Pasch. Radbert : « princi-
pium vel desolatio. »
CapJi, n° 10 : operacio, werching; n° 18 : manus, hend. — Manus
se trouve dans Radbert et dans saint Jérôme. D'où vient
operacio ?
LameiJi, n° 12 : sermo, worde; n° 32 : disciplinam, lering. — Pas-
chal Radbert : disciplina; saint Jérôme, une fois disciplina
cordis (xxv) ; une fois disciplina sive cordis (?) (xxii) ; une
fois doctrina sive disciplina (xxiii) ; saint Ambroise : « cor,
vel ut alia interpretatio habet, seryo; unde videtur admonere
vel prudenter haec intelligenda, vel sollicite servanda prae-
cepta. » — Corrigeons donc sermo en servo.
Mem, n° 13 : unicus, oneliche ; n'^ST : sine cordis, wytouten cord.
Ajoutons ici l'inintelligible 0, ex ipsis, of hem (n° 17), que
l'ordre alphabétique réclame à cette place. — Saint Jérôme :
ex ipsis (xxii, xxiii, xxv) ; ex quo et sive aqua (xxiii); saint
Ambroise : viscera ou ex ipsis. La source de « 0, ex ipsis »
est toute trouvée.
Mais d'oii vient imiciis? d'où sine cordis? Cette dernière
glose a le n" 37; or, la lettre n° 32, c'est-à-dire b, qui la
précède immédiatement dans la colonne 4 de notre tableau
est expliquée par saint Jérôme disciplina sive cordis. C'est
ce sive cordis qui a été attribué par le copiste antérieur
à la lettre 73 qui venait immédiatement au-dessous. Notre
scribe a lu suie pour sive. sans se laisser arrêter par ce
génitif cordis dépendant de sine, et a ensuite régulièrement
traduit son contre-sens par loyiouten (without).
Pour îoiicus, remarquons également que c'est la traduction
de la glose n» 13 (colonne 1), et que celle-ci ajustement au-
dessous d'elle la lettre 3 (n*' 20), que saint Ambroise traduit
par imicus Confusion de môme nature.
Nun, n" 20 : sensus, wyt ; n° 24 : sempiternum, everlastend. —
Saint Jérôme explique nun, par fasliis, piscis ou sempiter-
nuni; Pasch. Radbert par sempliernum, saint Ambroise par
una pars eorum et par unicus. (Voir la fin de l'article pré-
cédent.) D'où vient sensiis?
Sameih [Vire samedi, confusion du c et du /, fréquente dans les
textes du moyen âge), n° 25 : adjidorium, helpiiig; n° 29 :
tiniis, on. — Adjuioriiim est donné par Radbert, par saint
NOTES ET MELANGES '16o
Jérôme i^xxii, xxvj, qui, ailleurs (xxiii) dit : « firmamentum,
licet quidam erectionem vel adjutorium sive fulturam pu-
tent. » Saint Ambroise dit : firmamentum.
Quant à imus, ce doit être un doublet de iinicus, rapporté
à la lettre placée immédiatement au-dessus du nun, comme
unicus a été rapporté à la lettre placée immédiatement a u-
dessus.
Ain, n° 38 : fortis, stalworth. — Le manuscrit porte la lettre ,
quoique l'ordre alphabétique réclame s. Il y a là une erreur
qui remonte au premier rédacteur; sur cette erreur, le se-
cond copiste a enté la sienne : il a lu fortis au lieu de fon-
tis (souce) et a traduit par stalicor^th. Saint Jérôme, saint
Ambroise, etc., traduisent correctement aïn par oculus
ou fous [fons, sive oculus).
Phe, W 34 : os, moutli vel bon; n° 42 : sine oculis, withouten ezen.
Saint Jérôme (xxiii) : « os, ab ore, non ab osse, ne litterarum
ambiguitate fallaris ; » autrement dit : os, bouche, génitif
oris, et non os, ossement, génitif ossis. — Le plus ancien de
nos copistes avait traduit phe par os, sans spécifier s'il s'agis-
sait de os, oris ou de os, ossis; le second, qui ignore le sens
de plie et reconnaît à os deux significations, les indique con-
sciencieusement, ?/20?<^/« vd bon, c'est-à-dire bouche ou. os.
— Pour le sine oculis, nouvelle et double bourde de notre
copiste anglo-normand : il a lu si7ie oculis, et a traduit loi-
thouten eyen (sans yeux\ là où il devait lire sive oculus et
traduire or eij (ou œil). Et ce sive ocnlus appartient à une
ligne précédente et se rapporte à la lettre y que saint Jérôme
. interprète par fons sive oculus. (Voir la lettre et l'alinéa
précédents.) Qu'on se reporte à la colonne 1 de notre al-
phabet reconstitué (p. 260), on verra que notre reconstitu-
tion nous avait forcé à admettre un y entre le o (n" 25) et le
D (n° 34) ; c'est cet s> (n°29 bis) qui devait être interprété par
f07îs sive oculus, dont une trace nous est conservée, et à
une ligne au-dessous, dans la glose sine oculis de notre
manuscrit, nouvelle confirmation de la justesse de notre
hypothèse.
Sade, n"» 14 : consolatio, comfort ; A» 18 : os justicie, mouth of
rithfulnesse. — Saint Ambroise donne consolatio, saint Jé-
rôme juslitia (avec regio et venatio). Le os est obscur ; mais
il doit s'expliquer par une erreur du même genre que celle
que nous venons de signaler. Dans l'original, la glose 18 fait
suite à la glose 38, qui doit être un phé, latin os, et c'est à
cette lettre qu'il faut rendre cet os, indûment rapporté à sade.
266 REVUE DES ÉTUDES JUIVLS
Le scribe anglo-normand, lisant os jiisticie, traduit brave-
ment mouth of rUhfulnesse, « bouche de justice! »
Coph, n° 21 et n° 33 : vocacio, cleping. — C'est la traduction tra-
ditionnelle des Pères de l'Église.
Res, n° 26 et n° 39 : capitis, of heued. — Ici encore la traduction
traditionnelle est conservée.
Sen, n° 30 -.justicia, rythfulnesse; n° 43 : dentium, of ten. — Le
dentium s'explique de lui-même. (Voyez saint Jérôme, xxii,
XXIII, XXV, etc.) Mais d'où vient le justicia?
Tau, n° 35 : fortiiiido, stenthe. — Saint Jérôme et d'autres tra-
duisent par signwn, saint Ambroise par erravit, consum-
mavit. Nous ne voyons pas comment expliquer ce fortitudo.
III. De cette discussion ressortent plusieurs conséquences : 1° Le
copiste du manuscrit français 1, de la B. N., a reproduit un texte
contenant seulement le nom des lettres et la traduction latine de
l'alphabet hébreu; il ne comprenait pas son texte, l'a copié de tort
et de travers, lisant en ligne horizontale ce qui devait être lu en
ligne verticale, rapportant aux lignes supérieures ou inférieures
des gloses qui, sans doute, par suite du manque de place, avaient
été rejetées à la marge interlinéaire supérieure ou inférieure, se
trompant dans ses lectures, prenant tel mot pour tel autre, et
confirmant ses contre-sens par ses traductions anglaises. Il voyait
bien que l'alphabet qu'il copiait n'était pas l'alphabet latin, sa
science allait jusque là; mais il ne pouvait entrer dans son esprit
que ce fût de l'hébreu, et il le baptise bravement d'alphabet grec :
« Ci... comence le alphabet en grieu; ci finist le alphabet en
grieu. w On pourrait peut-être tirer de ces faits de nouvelles in-
ductions sur le reste du manuscrit; mais ce n'est ni le lieu ni
notre affaire de toucher à ce point.
2° Le texte qu'il copie, lui-même incorrect, avec ses omissions,
ne peut être l'original; nous l'avons montré plus haut, d'ailleurs.
Il reproduit un document antérieur qu'il ne serait pas difficile
maintenant de reconstituer. Ce document consiste dans deux
alphabets hébreux (et même plus), placés à la suite des quatre
chapitres alphabétiques des Lamentations, et expliquant, d'après
la tradition de l'Église, le sens des alphabets acrostiches de ces
chapitres. Peut-être l'alphabet expliqué était quadruple, comme
dans le texte de Jérémie.
3° Est-ce de saint Jérôme que sont tirées directement les traduc-
tions? Nous ne saurions le dire. Sur 43 gloses, 27 se retrouvent
dans saint Jérôme, 6 dans saint Ambroise, 1 appartient à tout le
moyeu âge théologien (deus-aleph), 1 est une explication para
NOTES ET MELANGES 267
peu près qui peut être le fait du premier rédacteur [beth-filius).
Reste 8 traductions dont des recherches nouvelles finiraient
peut-être par faire reconnaître les formes erronées ou les ori-
gines authentiques. Nous ne pouvons qu'indiquer ici ce point.
IV. En nous en tenant aux résultats généraux, et sans trop
presser les détails, cet alphabet nous fait donc remonter sûrement
à un système d'interprétation qui appartient à saint Jérôme ou à
ses contemporains. Il y aurait lieu d'examiner de plus près ce
système, d'en déterminer le degré d'exactitude et de science et de
discuter la valeur et l'origine de ces traductions, mais ce serait
toucher à une grave question depuis longtemps et longuement dé-
battue, du moins en ce qui regarde saint Jérôme, à savoir la con-
naissance que les Pères avaient de l'hébreu. Nous n'avons nul-
lement l'intention d'ouvrir incidemment ici le débat. Mais nous
devons remarquer que saint Jérôme a pu prendre aux Rabbins,
avec les notions d'hébreu qu'il a été leur demander, l'idée de
commentaires grammaticaux ou édifiants sur la signification des
lettres hébraïques. La littérature rabbinique nous a laissé quelques
traces de ce genre d'interprétation.
Au folio 104 a du traité Sadbath, on lit une page consacrée à la
signification des lettres de l'alphabet et de leurs connexions ; ainsi
gimel et dalet/i sont rapprochées de gomel (charitable, « qui re-
tribuit » ; cf. la retribuHo de saint Ambroise et de saint Jérôme)
et de dalim, les pauvres (cf. le daleih-pauper de saint Jérôme);
de là une conclusion fort édifiante sur la Gemilouth Hassadim
envers les Dalim. Une bonne partie des discussions de cette
page est mise en dialogue entre les Rahhanan et R. Josué ben
Lévi; elle se passe vers la fin du m'' siècle, aux temps mêmes de
S. Jérôme.
Dans la collection des petits Midraschini publiés par M. Adolf
Jellinek, sous le titre de Beth-Hammidrasch (t. III, p. 12-49
et p. 50-64), on trouve deux alphabets midraschiques ou allégo-
riques, attribués à R. Akiba. L'un semble dériver itrécisc'ment de
la page du traité Sabhath que nous venons de rappeler ; l'autre est
une œuvre plus originale, où les lettres, étudiées dans leurs noms,
leurs formes, leurs successions ou connexions, donnent lieu à une
longue suite de considérations morales, allégoi'iques, religieuses,
mystiques, cabalistiques. 11 n'est guère admissible que ces alpha-
bets, signalé's déjà au viii^ siècle et au ix'' siècle, remontent sous
leur forme actuelle au ii" siècle et sortent tels quels de la main
d'Akiba; mais il n'y a rien d'invraisemblable à ce que la première
idée de ces Midraschini appartienne en effet au célèbre docteur qui
268 REVUE DES ETUDES JUIVES
avait imaginé dans l'Ecole une méthode nouvelle d'exégèse, qui
consistait à expliquer toutes les lettres et tous les signes de l'Écri-
ture, et « tirait de chaque angle de lettre des boisseaux de règles ».
Le premier numéro de ce Midrasch nous montre dans Valef le
symbole de Dieic, dans le gimel le symbole de la bienfaisance de
Dieu à l'égard du monde, dans le daleth Dieu préoccupé du
pauvre, etc.
Nous n'avons point à étudier ici cette littérature toute spéciale,
et renvoyons le lecteur aux travaux dont elle a été l'objet *. Nous
nous contentons de rapprocher le système d'interprétation des
Pères de l'Église de celui des Rabbins, en nous demandant si le
premier ne dérive pas du second. Cette question n'est d'ailleurs
elle-même qu'un point spécial d'une autre beaucoup plus vaste, ce
que la littérature des Pères de l'Église a reçu ou conservé de la
littérature et des traditions rabbiniques.
Arsène Darmesteter.
OUIGINE ET FORMATION DE LA CONJONCTION TALMUDIQUE
ILMALÈ
La conjonction "«bnbN ou N^TabN, très fréquente dans le Talmud
de Babylone et très rare dans les targoums, ne s'emploie que pour
exprimer une hypothèse et se distingue nettement de la particule
de la condition simple ^N ou ■}« si. Elle est usitée aussi bien pour
l'affirmation que pour la négation et se traduit tantôt par « s'il était
que », tantôt par « si ce n'était que ». Elle répond donc aux con-
jonctions ^b et "'b^b ou Nbnb de l'hébreu biblique, ^bî< et "^b^bN ou
NbnbN des targoums. Ce rapprochement a conduit M. J. Lévy à
voir dans "hrh» ou xb'DbN la conjonction "ib^bN ou N.bnbN, dans la-
quelle aurait été insérée la particule ma « quelque chose»-. Cette
explication soulève cependant plusieurs objections. Pourquoi l'in-
sertion de cette particule aurait-elle fait tomber la voyelle ou, de
••b^bN, laquelle se trouve également dans les formes correspon-
dantes du syriaque, de l'hébreu biblique et de l'arabe'? Pourquoi
• Voir Jellinek, dans l'introduction de son Beth Hammidrasch, p. xiv-ivii ; dans
la Monatsschrift, II, /.20, et Zunz, G. F., 168.
* Chaldmisckes Waerterbuch , Leipzifç, 1867, et Neuhebraisrhes und CAaldieisehts
Warteiiuch, Leipzig, 1876, sous ce mot.
NOTES ET MELANGES 'I&J
aurait-elle altéré la valeur de ■'î^n'?», à tel point que cette conjonc-
tion pût servir pour les hypothèses affirmatives? Enfin ne s'atten-
drait-on pas à trouver ma rejeté à la fin du mot, au lieu d'être in-
tercalé au milieu 1 Ces objections paraissent assez sérieuses pour
qu'on n'accepte pas à p^Hori l'étymologie proposée, et il sera utile
de rechercher dans d'autres langues sémitiques des termes de
comparaison qui mettent sur la voie de l'origine et de la formation
de la conjonction "^bizha.
Le syriaque littéraire ne nous ofiFre rien d'analogue ; mais Bar-
hebraeus a conservé dans sa grande grammaire syriaque une locu-
tion vulgaire, où l'on ne peut s'empêcher de voir le dernier
membre de notre conjonction : c'est le mot mâle. Nous traduisons
ici le passage qui s'y rapporte * : « «btt avec a - après le mim et é
» après le lâmed est une particule arabe ayant le sens de « sinon ».
» On dit, par exemple, à celui qui, invité à dîner, s'excuse :
» a Sinon, envoie quelqu'un de tes parents », c'est-à-dire, «si tu ne
» viens pas toi-même, envoie un des tiens ». [Autre exemple] :
» « Sinon, aide en paroles », c'est-à-dire, « si tu n'aides pas par des
» actes, aide par des paroles ». Des personnes ignorant l'origine
» du mot, le prennent dans le sens de donc et disent : « Si le
» monde est composé, c'est donc qu'il est périssable. » D'autres
» croient qu'il signifie quoique et disent : « Quoiqu'il m'ait vu, il
» ne m'a pas cependant interrogé. » Quelques-uns, se trompant
» sur la prononciation du mot, articulent mêlô comme on dit
» mêhô avec ê après la première consonne et ô après la deuxième
» (primitivement redoublée). — Eclaircissement — oiNna (t^u;)
» avec é après le têt et o bref après Yaleph est une particule
» grecque ; il a le même sens que 7nàlê. De même que les Sy-
» riens orientaux se servent de Nb», les Syriens occidentaux font
» usage de DiNï^a. »
Ce passage est explicite : on doit prononcer mâle et donner à ce
mot le sens de « sinon ».- La prononciation mélô et le sens de
« donc » n'ont rien à faire ici, ils viennent du grec fiâT^a; Barhe-
braius a tort de chercher à l'expliquer par une composition de ■;«
et de nV, à l'instar de n^» formé de p et de ^5D. Quant au sens de
quoique, il montre que cette conjonction, comme le talmudique
■•bttbN, pouvait être prise pour l'affîrmatif si, à côté de l'acception
plus usuelle de si 7ion.
' Voy. Œuvres grammaticales d' Abou'l-Faradj , dit Barhebraus, éd. par M. labbé
Martin, I, p. 183, 1. 18 el suiv.
* Barhebraeus emploie le mol patah, c'cst-à-dirc a bref, quoique Va ici soit long,
parce qu'il s'aj^it d'un mot uestorien, comme nous le verrons plus loin ,- or les Nes-
toriens avaient conservé pur la long qui, chez les Jacobites, avait le sou o. \,'a
de malt ne pouvait donc être exprimé en signes jacobites que par le patah.
270 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Il est encore digne de remarque que, si ibttbN ne se rencontre
guère que dans le Talmud, mâle n'était usité que chez les Syriens
orientaux.
On sait que Barliebraeus était originaire de Mélitène, où avait
été transportée une colonie deNabatéens et où, de son temps même,
le peuple parlait encore un dialecte nabatéen^ Il est donc probable
que mâle est une locution nabatéenne et que les exemples dont se
sert Barhebrseus ont leur fondement dans des souvenirs de son
enfance. Cependant, quand il dit que cette particule est arabe et
qu'il la compare, pour le sens, au grec t^w; usité dans la Syrie oc-
cidentale, il en a vue les gloses arabes des lexicographes syriens.
Ceux-ci, en effet, sous le mot din:: ou ohn^Tl:, citent entre autres
mots : immâ, immâ là, onmmâla[î) ^ . Après le passage que nous
avons traduit plus haut, Barhebrseus montre par des exemples
empruntés à divers auteurs que la particule grecque técùî avait pris
en syriaque le sens de « au moins », « sinon ». Les mots arabes
immâ et immâ là indiqués par les lexicographes comme les équi-
valents de cette conjonction, prouvent qu'elle pouvait être prise
dans un sens aftirmatif ou négatif, comme le syriaque oriental
mâle et le talmudique ilmâlê. Quant au troisième mot oummâla(i),
écrit "h ^I2in, sa prononciation est donnée par Djawâlîqî^ qui le
considère comme altéré de l'arabe immâ là. Souvent Djawâlîqî
emprunte au dialecte nabatéen de l'Iraq des mots consignés comme
des prononciations vulgaires dans ses hâta et surtout dans son
autre traité intitulé Almou arrab. La comparaison de oummâla[i)
avec immâ là n'est nullement forcée; on sait qu'en Babylonie
une voyelle devant une labiale se changeait souvent en ou. Ce mot
a passé de la Babylonie en Egypte où il est encore usité dans le
dialecte arabe de ce pays avec les sens de « oui, sans doute »,
« pourquoi donc pas '? » On dit aussi par abréviation ummâl, soit
pour affirmer: « sans doute », « naturellement», soit pour solliciter
ou interroger : « cependant » * .
Les mots mâle et oummâlê semblent, d'après ce que nous ve-
' Voy. Noeldeke, Zeitschr. der D. M. 0., XXV, p. 125. Il n'est pas à notre con-
naissance que le mot màlâ se trouve constaté en syriaque avant Barhcbrœus, c csl-à-
dire avant le xiii' siècle.
* Vi)y. Bar 'Ali, éd. G. Hoffmann, n"' 4128 et /ilG.'i, et Payne Smith, Thésaurus
syr., col. 1419 et 1433.
' Voy. le traité des hâta publié par M. Ilartwij^ Dercnbourg dans les Alorffenlân-
dische Forschunfjeji, Leipzig, 1875, p. 132-
* Voy. 'S\n\.\.ii-]i(iy,G-rammattk des arabischen vulgaer Dialectes von j£l(ji/pCen, Leip-
zig, 1880, p. 171, n. 9. M. le D' Spilla-Bey prend le mol oummal comme la forme
première, par contraction de immâ là, el il écrit en deux mots oummal ê, considé-
rant c' comme une particule à part. La comparaison avec les autres dialectes nous
obligo à rejeter cette manière de voir.
NOTES ET MELAiN(;ES '211
nons de dire, être d'origine nabatéenne et babylonienne. L'analogie
qu'ils présentent avec le talmudique -^babN, autant pour la forme
que pour le sens, et la circonstance que cette dernière locution
se rencontre non seulement dans la Mischna, mais aussi dans
le Talmud de Babylone nous engagent à attribuer -^bwbN au dia-
lecte babylonien. C'est une locution que la langue vulgaire de
cette contrée forma parallèlement aux anciennes conjonctions
ibN et "'bibN.
Cet exposé préliminaire concernant l'origine de la conjonction
•'bTabN nous conduit à rechercher les éléments qui entrent dans sa
composition. Il serait assurément subtil de vouloir établir des dis-
tinctions de sens d'après les différentes écritures ib^bN et NbttbN ;
les mots analogues que nous avons mentionnés plus haut, mâle
en syriaque, oicmmâlê en arabe vulgaire, ne sont pas non plus
susceptibles de prononciations variant suivant les acceptions du
mot. On doit donc rejeter avec Buxtorf et M. J. Lévy la distinction
qu'on trouve dans Tosaphot sur Megilla, 21a, d'après laquelle
NbT^bN serait usité pour une hypothèse négative : « si ce n'était
que», et ''bwbs pour une hypothèse affirmative : « s'il était que ».
Il ne manque pas, en effet, d'exemples qui contredisent cette règle.
La voyelle finale ê est indiquée indifféremment dans les livres tal-
mudiques par aleph ou par yod; dans le cas présent, la double
écriture était d'autant moins surprenante qu'elle suivait la double
orthographe de l'hébreu biblique ■'bnb et Nbib. Nous ne pouvons,
cependant, nous empêcher de penser que cette règle devait se rat-
tacher à quelque tradition des écoles juives. L'arabe et le syriaque
n'admettent que la négation là, lu, dans la composition de ces con-
jonctions : lau là, ellou lô. L'hébreu xb ib et le targoumique
Nbibis n'ont-ils pas été prononcés autrefois loii lô, illou là ? Rien
ne défend de le supposer. Les formes -^l^ib et ■'bibN indiqueraient,
dans cette hypothèse, une modification de la négation : le serait
contracté de la négation et de l'interrogatif ai, "iN, que l'on trouve
joint à d'autres particules, comme le syriaque /i«i et l'arabe Kai-
mâ * . Nous serions tenté maintenant d'expliquer le syriaque
lewai « puisse. . . ! », targ. ^ib -^Nib « puisse ! », -^iib^ ■^Nibr: « oh 1
puisse ! » par l'hébreu nb, en ar. lau, allongé au moyen de la parti-
cule ai; ^b ne se rencontre plus sous sa forme simple en syriaque
et dans les targoums, mais il existe encore dans les particules com-
posées ellou, illou. Une autre locution analogue est l'hébreu bi-
> M. J. Lévy dans ses dictionnaires, sous le mot '^bttbN, voit dans "^b une abré-
viation de rc^b, mais cette explication n'est pas applicable à Thébreu biblique ou
n^b n'existe pas.
272 REVUE DES ETUDES JUIVES
blique -b^N "^bsj, nisi forte, fartasse. Nous voyons dans ce mot la
conjonction In qui se traduit quelquefois par wm /bWe', aug-
mentée du lâmed conjonctif dont nous parlons plus loin, et de la
particule interrogative ai dont il est actuellement question ; le
changement de iN en ^î< ne souffre aucune difficulté, car cet
■jK vient d'une diphtongue au, comme le montrent l'arabe et le
syriaque, comp. l'arabe lau avec l'hébrea lou « s'il était que » *.
Le targoumique 'jiDb^VN, à côté de 'jiD'^brbN, plaide aussi en faveur
d'une ancienne prononciation Nb^'?N, à côté de ■'b^bx. Il est donc
permis de supposer que la double écriture Nbib et '^b^h dans la
Bible, NbibN et ibibx dans les targoums, répondait à une double
prononciation et indiquait une légère nuance du sens, la termi-
naison <?■ renfermant une idée de vague et de doute étrangère à la
désinence â. Mais cette distinction n'est plus à faire pour le tal-
mudique NbabN et ibwbN, susceptible d'une seule prononciation.
comme nous l'avons dit plus haut.
Le second élément formatif, commun aux particules immâlê, '
mâle, oummâlè est n« ma, l'interrogatif indéfini qui donne à la
négation lé sa véritable portée : « n'est-il pas ? »
Ibnâlê et oummâlè sont, en outre, précédés de la conjonction
IN ou IN si qui se place facilement en tête des particules condi-
tionnelles ou hypothétiques, comme le montrent le targoumique et
le syriaque illou, ellou, comparés avec l'hébreu lou, l'arabe immâ
et immâ là, et le mandéen «by^-^n ou Nb-rr: comparé avec le syria-
que ellâ (v. Mand. Gramm.,% 314). Dans ilmâlê et oummâlè, cette
particule change l'interrogatif « n'est-il pas? » en une conjonction
conditionnelle « si ce n'est pas>3, « sinon ». Mais, dira-t-on, que
signifie le premier lâmed ûHbnâlê? C'est le lâmed conjonctif qui
indique l'hypothèse, car ibnâlê ne signifie pas simplement « si ce
n'est »,« sinon »,mais« si ce n'était que », «s'il était que ». Les exem-
ples de ce lâmed abondent dans les particules hypothétiques : héb.
lou, ar. lau, « s'il était que », contractés de la et de hou; comp. le
syriaque ellou, le targoumique illou et l'éthiopien la emma, à côté
de emma; héb. lâmmâ, jjltî ti, {itS Tcoxe, Ecclés., v, 5. vu, 19, ou
Zemâ, Ezra, IV, 22 ; syr. /em«, Matth., xxvi, 22, Marc, xiv, 19;
plus souvent avec le relatif en tête : syr. dalmâ, Ezra, vu, 23, et
• Voy. les exemples cités par Gesenius dans son Thésaurus. En mandéen, i:» si es
plus usité que "j^fl, V. Mand. Gramm., § 313.
* Ewald, Lehrh., p. 805, note 2, 8« éd., après avoir fait ressortir les fortes raisons
qui engafijent à considérer "^b^lN comme composé de IN et de "^b, rejette cette expli-
cation et suppose une forme primitive "^b'b analogue à ^blb, laquelle aurait perdu
son lÂmed initial. Mais une pareille perte n'est guère admissible.
iNOTES ET MÉLANGES 273
targ. dumâ, Cant., i, 7, r-siif-q. Dan., i, 10, irr^sb -iiiN. Cependant ce
lâmed peut aussi manquer dans les locutions de ce genre comme
dans le syr. et le targ. ût, mischnaï<729, comparés avec dalmâ et
n^V'à. Les passages bibliques que nous venons de citer montrent
suffisamment que dans les derniers livres de l'ancien Testament
la particule lemâ, qui entre dans la composition dllmâté, s'était
substituée, sous l'influence de l'araméen de la Babj'lonie, à la par-
ticule archaïque )p ne, ut non.
En résumé, la conjonction talmudique ilmâlê appartient au
dialecte babylonien, elle se compose des trois particules ■'N, N«b
et ^b.
RUBKNS DUVAL.
NOTES SUR ABOU'L WALID
I. Sur Isaïe,vu, 14. — M.Neubauer dans sa Notice sur la lexi-
cographie hébraïque (p. 171, n. 2) a déjà lait observer qu'Abou'l
Walid dans son Lexique cite deux fois la Bible chrétienne (Cf.
Kitah el Oussoul, col. 135, 1. 24; 155, 1. 15). Nous avons rencontré
un troisième passage plus intéressant, d'où il ressort qu'Abou'l
Walid avait quelquefois des controverses avec les chrétiens. Dans
l'article nib:i> (col. 530 et ss.) il dit : « Je me suis arrêté plus long-
temps au mot rjwbr, parce que les chrétiens interprètent mal le
verset d'Isaïe : mr, njzbyr* risn, en traduisant la vierge sera en-
ceinte. Dans tous les débats et discussions que j'ai eus avec eux,
je les ai réfutés avec les arguments que je viens de donner. » — 11
faut observer également que, dans le premier des passages cités
par M. Neubauer, Abou'l Walid parle du « traducteur chrétien des
Psaumes » et ajoute : « Non seulement dans la version du mot
biba iPs., Lxxxiii, 14), mais aussi en beaucoup d'autres endroits
on y rencontre des erreurs. » Ceci prouve de la part d'Abou'l
Walid une étude approfondie de la Vulgate.
II. Abou'l Walid et le Targoiun des Ilagiographes. — On peut
s'étonner à juste titre que, parmi les centaines de passages du Tar-
goum cités par Abou'l Walid, soit dans l'intérêt de l'exégèse, soit
pour la comparaison des racines araméennes et hébraïques, on
ne rencontre nulle part le Targoum des Hagiographes. Abou'l
Walid paraît donc ne pas l'avoir possédé.
274 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
III. Mar Jacob le Pèlerin. — Au cliap. xxx de sa Grammaire
{Rikmah, p. 197), Abou'l Walid parle d'un ouvrage apporté de Jé-
rusalem (u5np?3!-! n"«n») par '^^^^br^ a^inrî 3p::>"i n». Le dernier de ces
mots doit être changé en '^':vb'n « originaire de Léon », comme le
montre le passage suivant de Toriginal arabe, que j'ai pu consulter
grâce à l'obligeance de la Bibliothèque Bodléienne : n^ni^bN Nnm
n-^3 173 -^snibbN nsiD^N imrnn nps»"^ {=- n») 'm Nî-^bx T^nhi -ns-i^VN
T,!'' :û53 iNiDi DipîobN. « Ce livre nous a été apporté de Jérusalem
par Mar Jacob le Pèlerin, le scribe de Léon. Il était écrit de sa
main. » Mar Jacob était donc connu d' Abou'l Walid non seule-
ment comme originaire de Léon, mais aussi comme « le scribe de
Léon ». Ce passage nous prouve encore que le livre qu'il apporta
de Jérusalem était écrit de sa main. On voit par là quel cas il
faut faire de l'assertion de Dukes [Schiré Schlomo, p. 88) qui
affirme que R. Jacob le Pèlerin était « certainement Abou'l "Wa-
lid ». Le surnom de ^ainr; provient certainement de ce que Ja-
cob avait été à Jérusalem. Ce pèlerinage valait donc aux Juifs de
cette époque le nom honorifique qu'on donne encore aujourd'hui
aux Mahométans qui se sont rendus à la Mecque et à Médine.
IV. VAtionyme de Jérusalem. — Le livre apporté par Jacob
faisait peut-être partie des ouvrages cités par Ibn Ezra [Moznaïm,
init.) immédiatement après ceux de Saadia dans la notice biblio-
graphique placée en tète de cette grammaire. Abou'l Walid ajoute
que « le livre que Jacob lui a fait connaître était l'œuvre d'un
Hiérosolomytain dont il ne sait pas le nom », et il en tire l'expli-
cation de rî-i3>'' nn-i5 (Jér., xlvi, 23) et la vraie leçon de n^uî^
(Ezéch., xxxii, 20 j.
Budapest, novembre 1881.
W. Bâcher.
UN RUDIMENT DE GRAMMAIRE HÉBRAÏQUE EN ARABE
VENU DU YÉMEN
Les manuscrits du Pentatcuque qui nous viennent du Yémen ont
d'ordinaire, en tête, des traités de grammaire hébraïque plus ou
moins étendus. Peut-être le nom de grammaire est-il bien pré-
tentieux, car ces traités ne parlent guère que de la division des
lettres d'après les organes avec lesquels elles se prononcent, de
NOTES ET MÉLANGES 275
la distinction entre les lettres radicales et serviles, des points-
voyelles, des accents et de quelques règles masorétiques sur les
lettres fortes et douces * . Ils se distinguent peu de ceux que les
anciens lexicographes juifs, tels que Menahêm, Hayyoudj, Parliùn
et d'autres, ont mis comme introductions en tête de leurs lexi-
ques. Nous avons publié en 1871 un de ces opuscules, écrit en
hébreu, sous le titre de Manuel du lecteur-, nom tout à fait arbi-
traire que nous avons emprunté à un travail analogue, composé
par R. Yehouda ben Balaam^. Depuis, différentes bibhothèques
ont fait l'acquisition de Pentateuques manuscrits précédés de
quelques chapitres assez courts en arabe*, qui ne méritent certes
pas d'être publiés en entier, mais qui contiennent quelques pas-
sages pouvant jeter un peu de lumière sur deux termes obscurs
employés dans notre Manuel.
Le premier de ces termes est celui de ôgîrâh ïiVSiN ^ On
nomme ainsi l'ensemble des sept versets où, sans raison connue,
les masorètes ont pourvu d'un dâguesch l'une des six .lettres
muettes placées au commencement d'un mot, bien que le mot pré-
cédent se termine par une lettre douce et porte un accent con-
jonctif. Voici comment s'exprime l'auteur anonyme arabe à cet
égard : « Quant ■àuôgiràh, qui veut dire ce qui réunit, U. s'applique
à sept passages, sans qu'il y en ait d'autres dans toute la Bible,
savoir, à quatre versets dans le cantique de Moïse , à un
cinquième dans Isaïe, à un sixième dans Jérémie et à un septième
dans Daniel Contrairement à la règle, le dâpuesch s'y ré-
tablit, sans qu'on connaisse la raison qui a décidé les masorètes.
Il y a ensuite d'autres mots qui conservent le dâguesch contraire-
ment à la règle établie ; mais pour ceux-ci les grammairiens ne
sont pas d'accord et on n'a pas pu se réunir à leur égard comme
pour les sept qu'on vient décompter... Aussi le lecteur est-il
» Voici le titre du manuscrit de Cambridge : î^!TT'N1T"l ClTnntiN V^lb "^D 3N3
N-?::.-îbT û^^r^ubN "^m iNnbxbNT NnbNntti -jipsbN ■'m ^ib7:bNT ^D-ibNT
"iN2:nbN3 N!-!nxr)nm.
« Journal asiatique, 1870, Octob. Novemb. Décembre. Tirage à part, Paris, 1871.
■■ Voyez \V. Wickes, Treatis', of the accrntnation, Oxford. 1881, p. 102.
* Deux exemplaires de ce traité, détachés du Pentateuque dont ils faisaient partie, se
trouvent à la Bodléienne. et portent dans le Catalogue de M. Neubaucr les n"' 2;)20 et
2521 ; une troisièm'i copie, précédant le PeDtaleuque,*a été achetée par la bibliothèque
de Cambridge. Enfin, nous avons sous les yeux une quatrième copie, défectueuse au
commencement, et qui a un nombre considérable de chapitres qui ne se trouvent pas
dans les autres manuscrits. Elle appartient à M. David de Gùnzbourg, propriétaire à
Paris d'une riche collection de manuscrits hébreux. M. G., qui est un jeune orien-
taliste distingué, a l'avantage de pouvoir utiliser les trésors qu'il amasse.
s Manuel, i). 7X.
■J76 KFA'UE DES ÉTUDES JllVllS
libre de lire ces mots avec ou sans dâguesch, sans qu'on puisse
l'en Màmer, puisqu'il y a divergence dopinion • ». Le terme
agir au serait donc un dérivé du verbe nsN « réunir, recueillir ».
Un second terme grammatical insuffisamment expliqué par
Tauteur du Manuel est le darbân-. Le sens en est indiqué dans
le passage suivant. Après avoir parlé des accents, l'auteur continue
ainsi : « Il y a encore une figure nommée gdiali (^T':?^) qui res-
semble à un tipha et n'est ni conjonctive ni disjonctive... Elle n'est
employée que pour allonger légèrement certaines lettres et pour
y arrêter quelque peu le lecteur, afin que le débit devienne plus
beau et plus agréable. Les copistes la mettent ou la négligent et
' ■'D -T^s Nb :?2iN1tt 73S ■'D ■'!^3 !^:?MN5rN NM'T'DSn Ml-'SnNrN N?:î<53
iTST-^ "^Tpa tjn; r-;372D -k û-'i» cnV "irm -^s ■'•irN r;N5 nw -''2 rr^n
"j-^rï'rx r?:2n:: i-i'^wm b^-^n ■'d inrnNcbN"i briN ^<b^ '^'zb'z TNb;i
PÈi-i^d •;?: Nnîwxb ■'d-i lirn i^s n:-^ ino Nbir; iw r•r>n^i^ br; r:''^ pnrn"r!-f
Nb "cyi nri-,"i bjiNbiî nncro ûn-jd nn-'b:? -^ib^ û-irrcûbNi n-^'iisb '720731
"iri-n biiTNbN n-iOD ■'isbiN- T'S "iSn ûbD un ']b'i ■'d Nnn'?:? nî: Dbj>"'
rr^r: ^n:^ ûn-'b^ r?:;» o-^bi piipnbx 3wNn::N v^ tlbà tniob caT
. . • . PNTI'lS'WbN. Il ne peut pas y avoir de doute sur le sens que ce grammairien
attache au mot ôgîrâh. Mais, sans parler de ce que la forme du mot a d'étrange, la signi-
ficaliou ne nous paraît probable qu'autant qu'on supposerait un recueil masorétique,
où Ton aurait placé d'une part les irrégularités dans la ponctuation sur lesquelles tout
le monde aurait été d'accord, et d'autre part les irrégularités sur lesquelles les opinions
auraient été divergentes. La racine "|5N revient d'ailleurs dans le mot "jnSN (tfji'ôn,
qui désij.ne à l'époque de Sa'adiâ un lexique, ou thésaurus de la langue, et qui pré-
sente aussi une formation nouvelle. — En abandonnant l'explication proposée par
notre anonyme, on ne peut pas méconnaître que !^"T^iT!!< renferme les lettres tT^ÏN
dans l'ordre adopté par les grammairiens du "Yémen, mélangées avec le mot "ia. Le
terme désignerait-il, d'une manière énigmatique, un ôyûh étranger, c'esL-à-dire, qui
n'a pas l'intluence que ces lettres possèdent ordinairement? Enfin, on pourrait en-
core y voir un amalgame de ÎT^IN et de "15^.
L'ordre suivi par les grammairiens juifs pour les quatre lettres faibles, subit des
changements, qu'il est curieux d'observer. Nous venons de mentionner le mot mné-
motechnique (cf. Psaumes, CJ.^!i.^]^m les représente dans le Yémen. Menahêm choisit
NI^T^, en pensant à Ecclés., xi, 3, ou bien au roi lêhoii. Hayyoudj place les lettres
telles qu elles se succèdent dans l'alphabet.
Bien que l'auteur du Manuel et celui du petit traité déclarent tous les deux que
le dâguesch dans les sept passages n'a pas de raison d'être, ces passages cependant
présentent un cas spécial. Quatre fois le kaf pourvu d'un dâguesch n'est séparé
d'un second kaf que par une seule lettre; deux fois il y a trois mots fort courts qui
commencent par /;, g et y, et on a aspiré seulement la lettre muette du milieu; enfin
une fois le kaf n'est séparé que par une lettre d'une seconde leUre muette qui, dans'
ce verset, est un f/ct. — Nous croyons peu à l'arbitraire chez les masorètes, qui ont
<;u un sentiment très délicat de la prononciation hébraïque, et quand même on rencon-
trerait encore dans l'Ecriture d'autres mots où, en appliquant notre manière de voir,
le dâguesch aurait dû être maintenu également, cela prouverait ."seulement que ces
passages ont passé inaperçus.
' Manuel, p. 90.
NOTES ET MELAxXGES 277
disent : « Le ga'iah n'a pas de père », c'est-à-dire, il n'a aucune
racine dans la langue. Cependant on l'emploie dans certains pas-
sages pour distinguer entre deux sens différents et diriger ceux
qui manquent d'expérience... Puis, il y a une figure nommée
hmnzah ou darbân (pn'i), ce qui veut dire aiguillon. Le darbân
n'est également ni disjonctif ni conjonctif et s'emploie seule-
ment pour précipiter avec énergie la lettre qui en est pour-
vue. Il est donc le contraire du ga'iaJi, puisque celui-ci pro-
longe la lettre, «tandis que le darbân ou harazah l'entraîne. Ce
signe ne se trouve jamais ailleurs que devant le zahèf haton ; il
se place au-dessus de la lettre et ressemble à un azlah. Exemples
npnrii, irirrii* ». Yehouda ben Balaam qui connaît notre signe
l'appelle également hamzâh, ce que le traducteur a rendu par mê-
iigô.li {T->'j,^r\'i2) ; l'un et l'autre en indiquent fort mal le caractère
et l'emploie Du reste nous n'avons rencontré ni ôgîrâh ni darbân
chez aucun grammairien hors du Yémen.
' inb Nb 1^7 o-^bi rrHDtiûbN b2\y brro ■^'m 'tt'J'^ ■'?:d"' nS^ bso xpm
"•nbw\ r;72b:DbN rsNi "jN Nbx 'rsZ^'zhin. y':^^^ •'by nisn ya-^ Nbi ûi.nd Nbi
t|TinbN yy^ iw"^b NbN bi2y ^r^^ rinTCii NTai b:5i^-Nb b»n72 r^pT^n ntï^d ir;
Sr73 'y-\•J^\^ rtNipbN^ lonn -^^b nt^ûi n:35» ï-;3 ^op^'^t xb-^bp ^^iz
nN "j-^N "ibipi '^b'ibT rib^n-i û^ij'm i-hizy-^ n.snsbïî y-:?m rr-a'wi r::^^
'\:^'-n nb bNp^T ri'ïttr! ■'WO'^ ^isn b:DO 'a^^^ Nnb b^tN Nb -«n ïT^:?5b
q-inb.\ TiTT^b b):?-^ n?:;ni snx^ wsbi inb ^b Ni\x nr;i tîî^j^to ï-im:??oi
i-tTrrn rÏTwnbNT tinnbwX -^^n '--^y^^ v^b n-^r^r.b.s Ti ^-^ --^hy Tn -^ibN
ï^mi: Sn72 !q-,nbN pis V- 1^"^"^ 1"^P SipTr^j^^b^ n^^n ^•^^T\ t^bn
.Nrrnn'wN N7:i '-\f.■2T■^^ \r\•ZT^^ N-iori nbTNbN
Une partie de ce morceau est déjà citée par M. "Wickes, l. c, p. 1 12, note 1, avec
de légères variantes. Les cinq mots qui suivent TtlICiTi manquent dans le ni^:.
Gïmzbourg. — On voit par ce passage que les mots pntlb et ^ïTrlTin {Manuel,
p. 77 et 90) sont des néohébraïsmes formés de l'arabe "jTt. (Cf. i/iii/., p. 170, note ,3;
Geiger, Wissmschaftl. Zeitsch-ift, vol. X,p. 19-20).
* Voir Wickes, l, c, p. 70, note 10 et Wolf Heidcnheim, Misriipetc Hatte'-ûmhn,
fol. 113 i. On sait que cette partie de Touvrage est empruntée à Bcn-Balaam. —
R. Mosé de Londr.es appelle ce signe : bpTa " bâton • (Frensdorlf, Fragmente, etc., Ha-
novre, 1847, p. 27, 1. 1), ce qui ne diiïère guère de darhân. Ce nom se rencontre
aussi souvent chez Yehouda b. Yekoutiel dans son En Halikâré, voir surtout Exode,
ivi, 18, Ewald [Lchriuch d. luhr. Sjirache, 1870, p. 217) connaît bien notre signe,
mais il le confond avec la paschta : puis, il ne donne pas d'exemple pour le cas où il
y a plus d'une syllabe entre l'accent et la syllabe fermée, comme !T?:rî3:T'|?3T (Gen.,
VII, 8, où l'on peut voir l'observation de Heidenheim dans le Soum-Séchél) ; enfin, une
dernière condition de l'emploi du mahkêl ou darhân est que la syllabe fermée soit
précédée d'une lettre ayant schevâ mohilc. Comme celte condition n'est mentionnée
nulle part, j'ai trouvé prudent de consulter M. le D"^ S. Ba-r à Bibcrich, qui est cer-
tainement, en matière de masorah, la première autorité. M. Ba^. dans une commu-
nication épistolaire, se déclare d'accord avec moi. Il ajoute : dans des mots, comme
"irij^n^nT [Exode, xxx, 32), il faut sans doute accentuer lh35n?:m ; le mét^fj sous
le waio s'est confondu avec le davhûn du nn'm. Il eu est de même pour ûnbDbl (»'*.,
T. IV. !••>
278 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Nous noterons encore un petit chapitre qui traite des ifWiârât
« les besoins », qui sont au nombre de quatre. Premièrement, la
lettre a besoin d'autres lettres pour former son nom, ainsi on
ajoute lamecl et pé pour obtenir le nom de aleph ; deuxièmement,
la lettre a besoin d'une ou de plusieurs lettres pour former un
mot, puisqu'aucun mot hébreu n'a moins de deux lettres ; troisiè-
mement, ce composé de lettres a besoin pour se prononcer de
points-voyelles appelés y^ois (û"^Db52) ; quatrièmement, les mots ont
besoin d'accents qui marquent les coupes des phrases et distin-
guent souvent les temps et les genres.
J, Derenbourg.
TROIS SCEAUX JUIFS DU MOYEN AGE
On sait que les Juifs de l'ancien Empire possédaient, au mo3'en
âge, dans beaucoup de villes, les « droits de citoyens ». Nous trou-
vons assez souvent, dans les archives de ces villes, les brevets
par lesquels le Conseil leur donnait ou renouvelait ces droits . On
n'a pas encore pu établir si des restrictions étaient portées, et
lesquelles, aux droits de ces citoyens comparés à ceux de leurs
concitoyens chrétiens, mais il y a lieu de penser que l'intolérance
religieuse n'épargnait pas, même dans les villes libérales, ces Is-
raélites privilégiés. Nous croyons donc que les citoyens Israélites
qui dépendaient immédiatement de la juridiction impériale et qui
étaient les « serfs de la chambre impériale * », formaient un certain
corps de « citoyens étrangers », de sorte qu'ils ne pouvaient être
investis de fonctions publiques, que ces fonctions fussent simple-
ment honorifiques ou rémunérées. Dans la vie civile, les Juifs de
ces temps n'étaient pas, du reste, aussi rigoureusement séparés de
leurs concitoyens chrétiens qu'on pourrait le croire. Parmi les dé-
crets de la ville de Zurich du xiy° siècle, nous trouvons souvent des
ordonnances contre les repas somptueux où se rencontraient les
Juifs et les Chrétiens, et certains décrets du Conseil condamnent
des jeunes filles chrétiennes à porter le chapeau juif {Judenhid)
pour avoir mis au monde dos enfants do pères juifs.
XXXII, V2), oii le (larhâa a élé- avancé sur wâw qui doit avoir mûig au lieu d'Otre à sa
place sur le haf. Voir En Hahkôri', sur Jixode, xxx, 32, et Ileidciiheiiii, l. c, 38»,
• Kammerkncchie,
NOTES ET MELANGES
279
Ce qui est sur, c'est que les Israélites avaient, dans leur vie do-
mestique et même synagogale, des coutumes et des symboles em-
pruntés à leurs concitoyens chrétiens.
Des sceaux qui se trouvent dans les Archives de Zurich, et qui
sont apposés à des obligations signées par des Israélites de ce
temps, prouvent ce fait singulier que les Israélites non seulement
admettaient dans leurs sceaux des légendes avec caractères latins,
mais aussi des armes {Wappen], coutume qui venait seulement
d'entrer dans les mœurs des bourgeois et qui, jusqu'à la fin du
xiii^ siècle, avait été un des privilèges des nobles.
Nous croyons qu'il sera intéressant pour le lecteur de trouver
ci-après le fac-similé de trois de ces sceaux; nous les reproduisons
en y joignant quelques observations.
N" 1.
N" 2.
N" 3.
Le premier sceau porte l'inscription : « S' MOSE, ûn;?^ -i3 ïTw^d • ».
Au centre, on voit l'écu triangulaire renfermant trois chapeaux de
Juifs - affrontés par la pointe supérieure. L'intérieur des chapeaux
est tourné vers les coins de l'écu. Sur la pièce qui porte ce
sceau il y a encore deux autres sceaux qui ont les mêmes armes*.
L'un de ces sceaux appartient, il est vrai, au frère de notre Moïse
(« S' GUMPRECIIT, ûre73 -13 ^^Tiu », c.-à-d.MardochéebarMeua-
hem); mais un autre appartient à un Juif VISLI (« S' VISLI
lUDEI, r-rcjz -2 i-^b-ii »), et porte les mêmes armes, de sorte que
nous croyons pouvoir prendre ces tricornes pour les armes com-,
munes des Israélites de ces régions et de ce temps, d'autant plus
qu'il y a aussi dans les Archives do Carlsruhe (Bade) plusieurs
sceaux juifs de cette époque, originaires d'Ueberlingen, sur le lac
de Constance, qui portent, avec une légère variante, également
trois chapeaux de Juifs.
' « Sigillum Mosu », eu hébreu : < Mosché Lui" Menahem
* Judenhiitc,
280 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Je suis porté à croire que le triangle connu sous le nom de
Magen David * que nous trouvons si souvent comme enseigne
des temples Israélites en Allemagne, et dont l'interprétation et
l'origine ne sont pas encore suffisamment connues, malgré les
nombreux commentaires dont il a été l'objet, n'est autre chose que
ces trois chapeaux de Juifs sous une forme un peu altérée, il est
vrai. Je crois d'autant plus à cette explication que le Magen Da-
vid porte encore aujourd'hui dans plusieurs régions, comme en
Bohême par exemple, un bonnet placé au centre et que l'on veut à
tort prendre pour la « couronne de David » ou <(. le chapeau de
Suède- ». Sur le drapeau d'honneur que l'empereur Charles VI a
offert aux Israélites de Prague et qui est encore dans la Altneu-
schul ^ de cette ville, le Magen David a également au centre un
chapeau.
Le bonnet de Juif était le signe que les Israélites avaient
été d'abord forcés de porter, et qu'ils ont pris ensuite (ce fait n'est
point sans analogie) pour leur symbole national. Nous ne le trou-
vons pas seulement sur leurs sceaux, mais encore comme ensei-
gnes sur les portes de leurs maisons. Ainsi, il y a dans la Marht-
gasse'' de Zurich une maison qui, par erreur, porte aujourd'hui le
nom de Judenhûs (maison de Juif), mais qui se trouve encore dans
les registres des impôts du dernier siècle sous le nom de Juden-
Jiut (chapeau de Juif).
Nous savons aussi, par un règlement synagogal de ce temps,
qu'il était défendu d'aller à la synagogue sans porter le chapeau
de Juif (en corne, in cornu ^) sur la tête''.
Le Moïse du premier de nos trois sceaux, et dont le nom se
trouve assez souvent dans les actes d'achat et de prêt de cette
époque qui existent encore aux Archives d'Etat de Zurich, avait
été, comme son frère Vislin (dont nous avons aussi vu le sceau) et
sa mèreMinna, reçu citoyen de Zurich. Ils possédaient dans l'an-
cienne Judengasse (rue des Juifs) une maison qui, lors de l'expul-
sion des Juifs de la ville de Zurich, en 1348, fut acquise par le
bourguemestre Brun, dont le nom est encore aujourd'hui inscrit
• ' Bouclier de David.
'■' Les Juifs de Prague se sout distingués pendant le siège de cette ville par les
Suédois en IG'iS, et on prétend que Pcmpercur leur a permis, à cette occasion, de
placer un chapeau de Suède dans leurs armes.
■" Ancienne synagogue neuve.
'' Rue du Marché.
" Ce même nom de cornu^ en français conie, est donné au bonnet semblalilc des
doges de Venise. Voir Littré, Dict., s. v. corne.
" Ce passage est cité par Gùdemann, 0-esch. des ]îrz'iehun()swcscns, II, p. 201, mais
je crois que Tinterprélalion et la correction do M. G. sont erronées.
NOTES ET MELAxNGES 281
sur les coins de l'ancienne Judengasse (aujourd'hui Brunngasse).
La pièce sur laquelle se trouve ce sceau porte la date de 1329.
Le second de nos sceaux a la forme gothique en amande qui ai)-
partient en général aux prêtres catholiques. On peut donc supposer
que ce sceau appartenait à un Ahronide ou à un rabbin, ce que
la légende du sceau aurait cependant dû mentionner, et il est dans
tous les cas intéressant de voir les Juifs emprunter aux chrétiens
cette forme en amande des sceaux. La légende du sceau est : np;'-»
bïX: bi!:T i-;)2bo nn, « Jacob bar Salomon», avec une abréviation très
connue, et le mot bvz, bon augure. Ullrich ' a pris ce mot pour
biw « circonciseur », erreur qui a été suivie par M. Lœwenstein,
dans sa Gescliichte der Ji(de)i am Bodensee, C'est une eulogie
qu'on mettait après son nom et que nous trouvons aussi dans l'épi-
graphe d'un manuscrit mentionné par M. D. Kaufmann '-.
Ce Jacob, dont nous ne connaissons pas l'histoire, était « citoyen
de Schafhouse » , comme le nomme la pièce à laquelle nous em-
pruntons son sceau.
Le troisième de nos sceaux enfin ressemble beaucoup au pre-
mier, mais, au lieu de trois chapeaux de Juifs, nous y trouvons
trois petits brochets en spirale, la bouche au centre. La légende
est : « S' SUSLIN, b"T \>^M2':j -/'n '3 bwSTi;i » (Israël b. Samuel). Ce
Suslin porte, dans la pièce à laquelle le sceau est attaché, le nom
de Fislin (petit poisson), nom commun parmi les Juifs d'Alle-
magne, et c'est à cause de ce nom qu'il a certainement adopté ces
ai'mes.
Juiigbunzlau Bohème), avril 18S2.
D-- A. Kiscii.
' Stiiii»iliinrj jiii/. (leschirhtcii.
^ Spurcn Al Batlfjvsi'.';, p. 1 i.
BIBLIOGRAPHIE
REYUE BIBLIOCtPiAPHIQUE-
2^ TRIMESTRE 1882.
IIÏliN nTlblP llba Poésies hébraïques, par L. Rabbiuowicz. Varsovie, imp.
Alex. Ginsa, 1881, in-8° de 64 p.
"inSN (Estber), Tragedia en 3 actos del cele'u e escritor frances Racine,
tirada de la escritura santa, tresladada del frances per un anonimo. Cons-
tantinople, impr. du journal El Tiempo, in-8° de 56 p. En judéo-espagnol,
caractères rabbiniques.
Û'^'ISIO '^7>'n'p'') 'O Variée lectiones in Mischnam et in Talmud babyloni-
cum. . . auctore RapbaeloRabbinovicz. Pars XI, tract. Baba Bathra. Mu-
nicb, imp. Huber, 1881, in-8° de 468 col. -25 ff.
A la fin, commentaire de l'édition de Pesaro, à partir de f° 29 a, à la
place de celui du Raschbam, qui se trouve dans les éditions ordinaires (Cf.
Revue, III, p. 129).
^"'7:"'-3 T> 'D Jad Benjamin uud WScbem Mardechai, entbalt einc Abliand-
lung liber Philosophie, Cabbala, und die goschichllichen Momente bis
zur Offenbarung, sodann die Verzeichnung der 620 Gebote. nach den
620 Buchstaben der zehn Geboto, sammt genaucr Erklarung derselben ;
ferner in muglichsler -Kiirze die Geschichte der Philosophie oder die
geistige Seele als Grund des Pantheismus und Polytheismus, par J. L.
Rosncr, rabbin à Schaffa (Moravie). Vienne, imp. M. Knopflmacher, in-8"
de 31 PP.-64 ff.
Liste des 613 préceptes de la Loi et des 7 préceptes rabbiniques
(ensemble 620), avec les 620 lettres des dix commandements en acrosticbe,
avec commentaire et dissertation sur la philosophie, la cabbale, l'histoire
jusqu'à la révélation, l'histoire de la philosophie ou l'ûme intellectuelle
comme fondement du panthéisme et du polythéisme. Rien que cela !
npîn^; T^ Relation du voyage de Sir Moscs Montefiorc en Russie en 1872,
par Iloyyim Gucdalla, traduite en hébreu par un ami de la langue hé-
BIBLIOGRAPHIE 283
braïquc. Londres, imp. Valleuline, iu-8° de (4) 2-1 p. La préface (eu an-
glais) est datée du 14 mars 1882.
ÏD'^^^rîî'?:!-! '-\^10 Livre des Minhagim (usages religieux) d'Isaac Tyrnau, avec
deux commentaires, Zikhron Aschêr et Toledot EstJier, par Salomon Hirscli
Schûck, rabbin à Karczag. Munkacs, impr. Pinkas Blayer; li'e partie,
1880, in-40 de 87-(3) ff. ; 2« partie, 1881, in-4" de 86-(6) fi'.
Le commentaire ne nous paraît pas sans valeur, surtout pour rindication
des sources ou des auteurs qui se sont occupés de la matière. L'auteur
aurait pu nous épargner ses théories philosophiques, physiques, chimiques
et que sais-je encore.
t5"*w1PlD "^1:1 '01 Û'^SlblD tiV '0 Adam Mickiewicz. Le Livre de la Nation po-
lonaise et des Pèlerins polonais, traduit en bébreu par le D'" Moïse Asca-
relli, avec une préface d'Armand Lévy. Paris, libr. du Luxemboxu-g, 1881,
in-24 de xvi-82 p.
Ce joli petit livre, d'une parfaite exécution typographique, a été imprimé
par M. Cerf, l'imprimeur de la Revue. Il en a été tiré des exemplaires su
papier du Japon, de Chine, de Hollande, teinté, vélin. Il se vend au profit
de la souscription pour le monument qu'on élève à Adam Mickiewicz, à
Cracovie. M. Armand Lévj^ rappelle, dans la préface, ces belles paroles
écrites par M., le 29 mars 1848, dans le Symbole politique polonais qu'il
donna, en ce jour, à la légion polonaise créée par lui à Rome pour aider
l'Italie à reconquérir son indépendance : « A Israël, notre frère aîné, respect,
fraternité, égalité complète de tous les droits civils et politiques. • Ce même
jour, le roi Charles-Albert signait le décret qui émancipait tous les Israélites
de ses Etats. Adam Mickiewicz a prononcé d'autres paroles excellentes
pour les Israélites : au Collège de France, à Paris (p. vi), à Rome (p.viii).
C'est sur la proposition d'un Israélite, M. Samuel Alatri, que le conseil
municipal de Rome a placé une plaque commémorative sur la maison
habitée par A. M. et son buste au Capitule. A. M. est mort à Constanti-
nople en 1835. M. le rabbin Ascarelli, en traduisant, à l'occasion du 25° anni-
versaire de sa mort, un de ses poèmes, a rendu au poète polonais un
hommage auquel s'associent nos cœurs.
ûbïJil '^^'^3' 'O Aruch completum. . . auctore Nathane filio Jecbiclis. . . cdit
D"" Alexander Kobut. Tome III, Vienne, impr, G. Brôg, in-4° de 400 p.
allant de la lettre dalet à la lettre hêt.
ÏT^53TO1 N"1T;j> bv 'î25l^''D Anecdota Oxoniensia. Texts, Documonls, and Ex-
tracts, chiefly from manuscripts in thc Bodleian and olher Oxford Libra-
riers. Semitic séries, vol. I, part. I. Commentary on Ezra and Nehemian
by Rabbi Saadiab, cdiled by II. .1. Malhews. Oxford, imp. Clarendon,
iu-4° de xxviii-32 p.
Nous résumons ici la savante introduction de AI. Mathews. Le com-
mentaire sur Ezra et Néhémie dont il publie le texte se trouve, en partie
ou en totalité, dans 13 mss., sur lesquels 10 n'indiquent aucun auteur;
l'un (celui de Munich) indique à tort comme auteur Benjamin b. Juda
(M. M. prouve que cette indication est erronée), l'autre (celui de Milan)
indique comme auteur du commentaire sur Ezra Saadia Gaon, et dans trois
de.s mss. ce commentaire est précédé de celui de Daniel qui est imprimé
dans les Bibles rabbiniques et qui est attribué ù un Saadia qu'on a re-
connu depuis longtemps n'être pas Saadia Gaon (Catal. Bodl., p. 219;')).
Dans le ms. du British Mus. le comment, sur Ezra et le pscudo-Saadia
sur Daniel commencent également par ces mots : in^ "^Î'^TS'D, allusion au
nom do Saadia. Enfin, trois écrivains (Azula'i, s. v. R. Saadia Gaon; Sa-
lomon d'Urbiiio, dans Okcl Mord; Azaria de Rossi, d'après Zunz, Ker.
28/, REVL'E DES ÉTUDES JUIVES
Chem-, V, 152) connaissent le commentaire de Saadia (ou Saadia Gaon,
d'après l'un d'eux) sur Ezra. Il résulte de là que notre commentaire est
d'un Saadia, et il semble qu'il soit de Saadia Gaon. Mais d'un côté M. M.
prouve avec évidence que ce commentaire a les mêmes caractères, la
même méthode, la même langue que le pseudo-Saadia sur Daniel; on
trouve dans les deux ouvrages, sur les mêmes mots, des explications iden-
tiques dans le fond et dans la forme. Notre commentaire sur Ezra et Néhé-
• mie et le commentaire de Daniel ont donc un seul et môme auteur, un
Saadia qui n'est pas Saadia Gaon. On a tour à tour supposé que ce Saa-
dia est un Juif français du xm^ ou du xiv® s. (Dukes', Saadia b. Nah-
mani ^Michael, Saadia b. Jos. Bekhor Schor (Fuerst), un Saadia contem-
porain de ce Jakar qui était élève de Calonymos de Rome {Rappoport,
Bicc- haitt., IX, 33) et, par suite, vécut à peu près en même temps que
Raschi. C'est cette dernière opinion qui a été le plus généralement
admise. Elle s'appuie sur la prétendue analogie d'un passage du pseudo-
Saadia sur Daniel et d'un passage que Jakar dit avoir entendu de la bouche
de R. Saadia, mais le passage du pseudo-Daniel et celui de Jakar ne
disent pas du tout la même chose, de sorte que l'identité du Saadia de
Jakar et celle du pseudo-Saadia de Daniel ne s'appuie sur rien. On
admet généralement que le commentaire des Chroniques attribué à Ra-
schi a été écrit à Narbonne vers 1130-1140 par un élève ou des élèves d'un
R. Saadia, lequel aurait donc été rabbin à Narbonne ; mais cette hypo-
thèse repose sur des preuves que M. Math, a raison de ne pas regarder
comme concluantes, quoiqu'il soit certain qu'un R Saadia a écrit un com-
ment, sur les Chroniques, et que le commentaire du pseudo-Raschi sur ce
Livre a été fait à Narbonne. M. Math, conclut comme suit : Notre
commentaire sur Ezra et Néhémie est sans doute, à en juger d'après son
caractère et sa phraséologie, du xu° siècle et peut-être antérieur à Raschi.
Un R. Saadia a composé le pseudo-Daniel et le comment, sur Ezra-Néhé-
mie, dont les caractères sont si ressemblants, « ou au moins l'un d'eux >.
Cette dernière restriction montre l'extrême circonspection avec laquelle
M. Mat. étudie ces questions difficiles.
£!T>2t^ 'O A Grammar and Lexicon of the Hebrew languagc eulitled Sefcr
Ilassoham, by Ralibi Moseli ben Yitshak of England, edited from a Ms. iu
the Bodleian library of Oxford, and collated with a Ms. in the Impérial li-
brary of St-Peterïburg, with additions and corrections, by George Wol-
seley CoUins. Londres, libr. Trûbner., imp. Cerf, à Versailles, in-4° de
x-40 colonnes (ou v-20 p.).
M.Neubauera consacTé,àaLnsVHistoi>-eli(l(fi-. de la France^ lomc'S.X'S.Yll,
p. 484, uu article assez étendu à Moïse de Londres, ou Moïse b. Isaac, fils
de la r^N^^wri^ d'Angleterre. Cet auteur a vécu probablement vers le milieu
du xiii'' siècle. Il pourrait être originaire de France, ou avoir écrit eu
France, car on trouve chez lui des gloses françaises. Le nom de sa mère
était Comtesse (cf. Contesse, Revi'e, I, p. 68). L'ouvrage édité par M. Col-
lins a pour titre Cn",:^ = ^['w'v:. Il contient: 1° une introduction gramma-
ticale; 2° un lexique composé de trois parties : verbes, types des substantifs,
sujets divers (adverbes, nombres, règles de lecture, accents, ponctuation,
mots chaldéens de la Bible). M. CoUins nous donne aujourd'hui la pre-
mière partie de ce travail et nous espérons que le diligent éditeur en pu-
bliera bientôt la suite.
?N~,w"' ■^b"i"75 mibin 'O Biographien berïihnilcr jiïdischcr Gelehrlen des
Millclalters, von J. II. WeLss, Lcctor am Bcth-ha-Midrasch in Wieu.
Ersles Ilofl : Rabbi Moscs ben Maimon. Vienne, libr. Lowy, 1881 ; in-8"
de rw p. — Zweitcs llcfl : Rabbi Salomon bar Jizchok, gcnannt Raschi.
Vienne, libr. Lowy, 1882 ; in-S" de 72 ]>.
BIBLIOGRAPHIE 285
Extraits du journal Beth Talmud. Malgjré les nombreuses études faiies
sur Maïmonide et sur Raschi, on trouvera encore des indications nouvelles
et bonnes à noter dans ces biographies de M. Weiss.
Auuar pentru isracliti... pe anul 56-^3 (1882-1883); publié par M. Schwarz-
feld. Bucharest, imp. Binder et fils, libr. Steinberg; in-8° de xiv-114 p.
Cinquième année de cette publication. Cet annuaire mérite d'être signalé
à cause de ses suppléments historiques, littéraires ou scientifiques (p. 1
à 114). Parmi ces articles nous signalons les suivants : 1. Un Crésus juif
sur la chaire de Saint-Pierre. (Histoire de Petrus Léo, fils d'un Juil'
baptisé de Rome, devenant antipape sous le nom d'Anaclet II (mort lloS^,
raconté d'après Gregorovius, Gesch. der Stadt Rom im Mittelalter, Stutl-
gard, 1869, vol. IV, p. 392.) — 2. Légendes 'talmudiques et légendes rou-
maines, par le D"" M. Gaster. (Enfant reconnu, dans Baba batr., SS a;
esprit des habitants de Jérusalem ; légendes retrouvées par M. G. dans la
littérature roumaine et dans d'autres littératures.) — 3. La Calomnie du
sang, par Lazar Schein. (Elude historique sur cette calomnie, avec indica-
tions bibliographiques concernant la littérature roumaine, et un certain
nombre de faits, provenant de cette superstition, qui se sont passés eu
Roumanie depuis 1717 jusqu'en 1881.) — 4. Explication d'un certain nombre
de passages talmudiques, par le D'' C. Lippe. — Biographie de Cilibi Moïse
(écrivain roumain, né à Focsani en 1815, mort 1SG9}, par M. Schwarzfeld.
— ' Bibliographie.
Bibliothcca oricnlalis, oder eiue voUstandige Liste der im Jalire 1881 in
Dcutschland, Frankreich, England und den Golonien erscbienenen Bi'i-
cher, Broscbûron, Zeitscbriften, u. s. w. ûber die Spracben, Religioneu,
Antiquitateu, Literatureu und Gescbicbte des Ostens, par Karl Friederici.
6<^ année. Leipzig, libr. Otto Schulze, Londres, Paris, New- York, s. d.,
in-8° de 76 p.
Dans le chapitre consacré à la littérature hébraïque nous remarquons :
Mgr. David : Gramm. de la langue araméenne, Paris ; — Hutcheson : The
Syntax oî z^ra, dans Bibliotheca sacra, avril; — P. de Lagarde : Erkliirg.
hebr. Wôrter ; iiber den Hebr. Ephraïm von Edessa, Zu Genesis 1-38,
dans Abhdl. d. Golt. Gesell. d. Wiss., XXVI ; — Lederer : Lehrbuch zum
Selbstunterricht im Babjl. Talmud ; — Ncildeke : Ueber den Gottesnameu
El, dans Monatsb. d, Akad. d. Wiss., Berlin, sept.-oct. ; — Toy : The
Hebr. Verb. terminalion ««, dans Trans. Amer. Philolog. Assoc. , XI;
Wijnkoop : Darcho- hanuesiqah, sive leges de accentus hebr. linguoî ascen-
sione, Leyde, libr. Brill.
BiCKELL (Gustavus). Carmina Veleris Testamcnli metrice. Ocnipoutc, libr.
Wagner, in-S" de iv-236 p.
Les travaux de M. Bickell sur la grammaire hébraïque ont fait quelque
bruit. Sur la métrique, il a déjà publié un opuscule intitulé : Motrices
biblicœ reguhe exemplis illustrata; (1879). Dans l'ouvrage actuel, M. B.
expose, p. 219 et ss., les règles qui président, d'après lui, à la vcrsiûcatioa
hébraïque. Elles partent toutes de ce principe que le vers hébreu est com-
posé d'un certain nombre de syllabes de valeur égale, comme, par exemple,
le vers français, et que, dans un même poème, ou dislingue des strophes
oii alternent, dans un certain ordre, des vers do diirérenles longueurs.
Les règles povir compter les syllabes sont assez compliquées et semblent
d'abord si arbitraires qu'on se demande si, avec des procédés pareils, ou
ne pourrait pas voir dans la prosodie bibli(jue à peu près tout ce qu'on
voudrait. Ainsi, on pourrait à volonté compter ou no pas compter la
voyelle auxiliaire des mots comme st'/cr, kénn, la voyelle des particules
au commencement des substantifs ou des verbes. Va du futur avant les suf-
fixes (Ps.jXvui, 'i3), l'ù de piaiiiii, y^/»»/»?, etc., les voyelles qui commencent
286 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
les mots, sous certaines conditions (p. 293], etc. D'après ce système, M. B.
transcrit en vers, à l'aide de caractères latius, les Psaumes, les Cantiques,
les Lamentations, les Proverbes, Job, des poésies isolées des livres histo-
riques et prophétiques. Grâce à ces règles, et avec force additions, retran-
chements et corrections, M. B- arrive à trouver dans chaque morceau une
versification régulière. Prenons, par exemple, le Ps. i^'", qui commence le
recueil. Il serait composé de la. série suivante, où les chitlVes indiquent le
nombre de pieds de chaque vers : 12.8.8 | 8.C. Mais pour arriver à con-
former le Ps. à ce type, il faut : \° faire du mot dérekh tantôt un mot de
deux pieds, tantôt le mot dnrh, à un pied (v.l et 6); 2° lire le tétragramme
tantôt Jahvé [2 pieds), tantôt Jah (v. 2 et 6); 3° supprimer, sous prétexte
de platitude, le mot letorato du v. 2, au risque de faire un vers encore
beaucoup plus plat ; 4° intercaler arbitrairement le mot hehom (dans la cha-
leur? compté pour 1 pied) après le mot vealéhu du v. 3; ^^ corriger, d'après
les Septante, dans v. b, al-hêa en al penê érer et ajouter ces trois mots au
V. 4. Il y a pourtant quelque chose de séduisant dans le système de M. B.
et nous sommes loin de dire que tout en soit à rejeter. Si une partie seu-
lement de ses règles se confirme, elles seront un instrument nouveau et
remarquable pour l'étude de la phonétique hébra'ique. Dans tous les cas,
l'ouvrage de M. B. est rempli d'intéressantes notes exégétiques. Remar-
quez, p. 212, l'acrostiche curieux, découvert récemment, dans le chap. i^'"
de Nahum.
Brigidi (E. a.). Giacobini e Realisti o il Yiva Maria, storia del 1799 in
Toscana, con documenti inediti. Sienne, libr. Enrico Torrini ; in-8" de
(iv)-453p.
Episodes de l'invasion française en Italie, en 1799, et luttes des Jacobins
et des royalistes. Le mot de Viva Maria, dit l'auteur, malgré son air
séraphique et la douceur des sentiments qu'il éveille dans l'âme, ne fat
alors qu'un mot d'ordre donné en Italie, et principalement en Toscane, par
la noblesse et le clergé, et signifiant : Mort aux républicains ! mort aux
Jacobins ! mort aux Juifs !
Les passions politiques et religieuses étaient excitées au plus haq.t point
en Italie à la suite de la révolution et de l'invasion françaises. A Sienne
particulièrement, où le pape Pie VI, après son départ de Rome au commen-
cement de 1798, demeura quelque temps, l'agitation des esprits était grande
cl l'irritation des partis des plus vives. Elles s'accrurent lorsque les Français
y entrèrent, le 29 mars 1799. La direction des affaires civiles et politiques
fut confiée à Franceso Abrâm, citoyen commissaire pour la ville et l'état
de Sienne, délégué à cet effet par Charles Reinhard, commissaire de la
République française en Toscane. Fr. Abrâm n'était pas juif, mais en qualité
de libre-penseur et de philosophe humanitaire, qui veut braver le préjugé,
il se montra tout de suite très favorable aux Juifs, se laissa voir souvent
dans leur société, les invita, au grand scandale des Sieunois, à la fête
nationale célébrée le 7 (ou 0; cf. p. 237 et p. 257) avril sur la place du
Campo. A Sienne plus que partout ailleurs on se souvenait de toutes les
lois oppressives édictées contre les Juifs, principalement au xvi" siècle.
M. Brigidi reproduit deux de ces édits (p. 2V2 et 243) : l'un du 13 mai 15G7,
promulgué par le prince de Florence et de Sienne, se rapporte principale-
ment au signe que les Juifs étaient obligés de porter sur leurs vêtements ;
l'autre, du 9 décembre 1572, promulgué par le prince de Toscane, contenant
les dispositions suivantes : Tous les Juifs de la Toscane quitteront leur
domicile et viendront demeurer dans le ghetto de Sienne; des calendes de
novembre jusqu'aux calendes de mai, ils ne sortiront plus du ghetto à partir
de 3 heures de la nuit; le reste do l'année, à partir de 2 heures ; ils porte-
ront le signe ; tout Juif ûgé de quinze ans payera par an une taxe de 2 scudi
d'or ; la communauté payera le salaire de l'homme chargé d'ouvrir et de
fermer lo ghetto aux heures voulues et de veiller à la police du ghetto. Ces
15IBLlOGKAPillE 287
lois n-élaient plus en pleine vigueur eu 1799, mais on méprisait les Juifs,
oa chantait dans la rue la chanson baroque de Gnora Lmia qui trompe e r/oi
(chrétien) et la chanson à boire de Baruccahà {larukh habba, mois hébreux
empruntés au rituel et aux usages juifs). Il va sans dire qua 1 arrivée des
Français toutes les lois d'exception furent abolies. La reconnaissance des
Juif= fut si grande que tous les soirs ils se rendaient a la Lizza et sur la
place du Campî) pour arroser l'arbre de la liberté qu'on y avait plante.
Cependant les passions grondaient dans tous les cœurs, et surtout les
passions religieuses. Bientôt toutes les images miraculeuses la Madone de
Florence le Christ de Livourne, la Madone de Prato, celles de Certaldo, de
Sienne de Montalcino, firent des miracles. La Madone d'Arezzo surpassa
toutes les autres. Arezzo était le centre d'une vaste entreprise de reaction
fn 300) Là se trouvait une société cosmopohte composée de capitames et
d'émissaires allemands, de conspirateurs anglais, de nobles, de F^tres de
frères tous brûlant de faire une croisade contre la révolution. Le G mai 1799
la Madone d'Arezzo fit un grand miracle, ce fut le signal d un soulevemen
n-énéral, au cri de Viva Maria. En très peu de temps, toute la Toscane fut
en feu. Un mouvement parallèle était parti de Volterre, ou les habitants
s'étaient soulevés le 5 mai 1799. A Arezzo, il se forma une sorte de gouver-
nement provisoire, sous le nom de Députaliou suprême et une armée de
près de 6,000 hommes, que les conjurés appelaient • 1 illustre ^''^^ee de la
foi . Des bandes de paysans s'enrôlaient sous la bannière de Notre-Dan e-
de-Secours {Maria del Conforta, c'est ainsi qu'on appelait, depms le miracle.
la Madone d'Arezzo). Un détachement de cette armée entra a Florence
avant à sa tête une aventurière du nom d'Alessandra Man, qui devint un
d^s personnages importants de la conjuration. Ces troupes ne demandaient
qu'à^tuer et à piller ; le ghetto serait devenu leur proie sans 1 interven K.n de
rarchevêque Antonio Martini, qui, déjà en 1790, avait sauve les Jui s de
Florence^ttaqués par la foule (p. 37G). Le 28 juin 1799, le bruit se répandit
que les soldats de la foi arrivaient à Sienne. L'alarme fut grande dans la
ville, car ces soldats passaient pour des brigands et des assassins (p o8G)
Ils entrèrent le même jour dans la ville, massacrèrent les jacobins et les
JuifT t , 11 r nt7e gheUo (p. 391). Parmi les plus furieux on remarquait un
c t in Pettirossi, judéophobe distingué (p. ^^ et 391). Les Juifs furent
Ta^^ Chèrement maltraités. On leur reprochait ^e s être enro es dans a
Lrde nationale, d'avoir composé des chansons patriotiques, da^o,r a ose
Va brede la lib rlé (p. 390). Les Madoniens les firent mourir dans d hor-
ribles tourments. Ainsi furent tués, le 28 juin, et brûlés morts ou mourants
sur un bûcher élevé sur la place du Campo. 19 Juifs dont les noms ont ete
cons rvés (p. 412). Le ghetto fut livré au pillage, à la destruction, au
meurtre nIs ne donnerons pas ici la longue liste de ces actes de cruauté
b 3 à 0 ) dont furent victimes le rabbin RafTaele Castelnuovo, les fre
Moïse et Gi iseppe Gallichi, Levi fils de Daniel, Isacco Galhchi, deux fils
de San 1 Castelnuovo et leur mère Nissim, etc. Il va sans dire q- la syna
r.o'nie fut saccagée. C'est à tort qu'on a dit [Corrwre nraeUUco, numéro du
o oa 1872) que levêque Zondadari sortit dans la rue pour haranguer le
assassins et arrCter le ir fnreur, il se tint enfermé toute la journée dans son
paas (p ' 7 .D-antres habitants de Sienne, Luca Marcetto, S.lvio Lanz.
Tiberio'ser.ardi, etc. , donnèrent au contraire asile aux Juifs et en sauvèrent
un °rand nombre au péril de leur vie (p. 407-408). Un gardien de l'Univer-
silé'lt lo FueschU protégea dans sa fuite et cacha chez lu. un pau^■l^
h f blëi nonimé Levi (pr^OS). Un officier autrichien, Carlo Schne.d r
n mamL;. on chef d'une ^rtie de la troupe ^'Are.zo ar^va e soir men
dans la ville : il exigea des Juifs une somme de '..0.000 Inres, a%ec la
irice d'incendier le .^betto si la somme n'était pas wr e dans un d
de deux heures. Il réduisit cependant ses prétentions al, .,000 livres, mais
Udemand ensuite une nouvelle taxe do 10,000 livres à fournir dans une
heurrsous peine, pour les Juifs, d'être conduits enchain s a Arezzo. I
furent plus tard indemnisés par lo bon prince l'erd.nand III (p. 410). Les
288 REVUE DES ETUDES JUIVES
Juifs de Sienne ont établi le jeûne du 25 sivan (correspondant, eu Tannée
1799, au 28 juin) en souvenir de ces horribles événements.
Gennarelli (A.)- La persecuzione degli Ebrei specialemente iu Romauia ed
in Russia. (Nuova Àntologia, série II, vol. XXXI, fasc. 4, 15 février 1882.)
Contient quelques renseignements curieux empruntés à un travail de
Leone Carpi, de 18i7, sur les lois d'exception relatives aux Israélites et
sur la condition identique des Catholiques et des Juifs en Angleterre et en
Ecosse, où les uns et les autres étaient encore relégués dans des quartiers
spéciaux, également méprisés, réduits au petit commerce et à l'usure. Dans
le préambule, décret de la fin du xv° siècle, à Florence, pour la fonda-
tion d'un mont-de-piété ayant pour objet d'obvier à l'usure des Juifs. Dans
un autre passage, mention d'une lettre de Paul III eii réponse à une lettre
du sultan Soliman, qui avait recommandé au pape les Juifs d'Ancone,
trop durement persécutés en rJ6G. En parlant de l'apologie des Juifs pu-
bliée par Massimo d'Azeglio en 1817, l'auteur fait mention d'un mémoire
imprimé en 182G par l'avocat G. Vicini, de Bologne, qui fut plus tard pré-
sident du gouvernement provisoire des Romagnes, en faveur des droits des
Juifs dans les Etats pontificaux. En Toscane, les Juifs ont toujours trouvé
une hospitalité libérale, comme on peut le voir dans le beau livre de
l'avocat J. Rignano, de Livourne, et dans un travail que le même Gen-
narelli a publié à une époque où l'intolérance commençait à poindre à
Florence. — M. Lattes.
Graetz. Histoire des Juifs, traduit de l'allemand par M. Wogue. Tome P'' :
Delà sortie d'Egypte (1400) à l'Exode babylonien (534). Paris, libr. A.
Lévy ; in-S" de 297 p.
L'ouvrage doit avoir six volumes : 2. Exode babylonien et guerre de
Barcokebas ; 3. Dispersion, Talmud ; 4. Juifs d'Espagne, croisades; 5 et
6. Des croisades à 1848. Nous serions heureux de pouvoir nous féliciter
sans réserve de la publication française d'un ouvrage dû au célèbre his-
torien des Juifs et auquel a collaboré notre cher maître M. Wogue.
Hamburger (J.). Real-Encyclopadie fi'ir Bibel und Talmud. Abtb. II, lleft
VII, Rccht — Sprichwort. Strelitz, chez l'auteur, in-8*^ allant de p. 977 à
p. 113G.
IIOGHMUTH (Abrabam\ Rabbiner in Veszprim. Gotteserkentniss uud Goltes-
verehung, auf Grundlage der II. Schrifl vmd spaterer Quellen bearbeilcl...
Budapest, libr. Franklin-Verein ; in-8° de 207 p.
Cet ouvrage est une espèce de catéchisme accompagné d'explications
hisloriques et scientifiques. Il est divisé en 4 parties : connaissance et
amour de Dieu, articles de foi et de morale, morale pratique, culte.
IIORONViTZ (M.), Rabbiner. Frauklurter Rabbinen, eiu Beitrag zur Gc-
scbichte der isr. Gemeinde in Frankfurt. a. M. — I. Von R. Simon Ila-
darschan biss R. Jesaia Ilalcvi (1200-1014). Francfort s/M , libr. Jaegcr ;
in-8° de ix-60 p.
L'avant-propos contient une discussion sur la date de l'établissement des
Juifs à Francfort, question fort controversée (Voir D'' Grotefend, Mit-
theilungen des Vereins fiir Gesch. und AUerlhmsk. in Fr. a/M., vol. IV,
fasc. I; cf. Graetz, VII, 12ii\ L'auteur explique ensuite pourquoi Simon
Hadarschan, l'auteur du Yalkut, est compté par lui parmi les rabbins de
Francfort, quoiqu'un doute puisse encore être admis sur ce point. D'a-
près une notice manuscrite qui se lit sur un exemplaire imprimé du Yalkut,
l'auteur se serait appelé R. Simon an der P/ort (près de la porte, peut-
Olre à la porte de.s Pêcheurs-, p. VII, note). L'auteur indique, comme une
BIBLIOGRAPHIE 289
des sources de l'histoire des Juifs à Francfort/ les pierres tumulaires de
l'ancien cimetière juif; il serait bien à désirer que les inscriptions de ces
lierres fussent publiées. . '. i c;
Voici une espèce de table des matières de cette intéressante étude bi-
mon Hadarschan et le Yalkut ; massacre de 1241, où 159 personnes furent
tuées et 1^9 autres obligées de s'enfuir ; la communauté est deja reconsti-
tuée en 1288; nouvelle destruction de la communauté en 1349 pendantla
peste noire, et sa reconstitution vers 1363; les rabbins Nathan Epstein,
gmon ïlkohen, Israël Rheinbach, Isaac t" Eljakim, etc. ; Klieser
TrTves (un des rabbins les plus remarquables de cette ville) Abraham
Naft Herz Halevi, Samuel B. Elieser (synode et statuts faits a cette
éDoaue 1603 et signature des rabbins de la contrée qui ont assiste a ce
svnode p 4 ) ; Je^aia Hor.-itz. Un supplément hébreu contient les pièces
Vivantes 1. Liste nominative des martyrs de Tan 1241 ; 2. Statuts de en-
dant aix abbins d'un pays d'appeler devant leur juridiction des Israélites
d'im autre pays, faits dans un synode le 10 elul 1542; 3- Décision des
rabbins le Franc ort au sujet d'un procès curieux raconté p. 24 ; la décision
Î da é de la veille de Pâque 1564 ; 4. et 5. Pièces relatives a la même
question 6. Engagement de Jesaia Horwilz comme rabbin a Francfort,
vers 1606.
autographié à 60 espl.
Katalog der Kais. Universitats uncl Landesbibliolhek in Strasburg. Oricnta-
lische Handscbriften, Theil I. Strasbourg, hbr. Trubner, 1881, in-4
(2)-75p.
' ' Ce catalo-ue comprend les mss. hébreux, arabes, persans et turcs il
(.e catalo ue ""^^ ^ remarquons les ouvrages suivants :
a nour auteur M. o. J-.anQauei. inuud j ic -i .^ i i TVT^t^Jn- Ac Tîan-
^Ji étude sur le calendrier par Jaekel b. Isaac Saeke Mutzig de Uap
compose probablement en i/u-. u , , , , -navid h->':5"ir:2
Mœchingen (Morhange , demeurant dans 1 école de Da_ id ^ pn^U
nô S letl es d'Italie, avec renseignements historiques, quelques-uns
^té de 1553/ - n" 37, documents et projets relatifs à 1 histoire des Juifs
1 Tr«.^ le 720 à 1784 ' ^^l^n = Birié, nom qui existe encore a Metz ,
^^ tn? doute^'Tr'énî oli^Trenel ; Moise Blien^-oir .««»«;.. ■
. mI K»,r — 7nv? — 11° 45. Ne faut-il pas lire Û-^-^riSïl^w an neu uc
R^^^Tm'ÎÎsU. prl StrlsLourg, n»cie„ Lparte.„e„t du Bas-l«u..
Kosso^viTZ. Canlicum Canlteorum ex hobraco convo,-Ul '^'^f^^^
■ rru^rl^^rrattrie^^iientausto. SaLt-P.Cc-sbou.., )«.-. ; .»„.
deuxième, supplément.
Texte non vocalisé, avec traduction latine cl notes.
--- («ose,^Ça^o.„ aouo... -.a,. ... .j..o.«.^^;.^a^^^
rence, mip. Le Monuicr, m o uo xx i>. j--
oriculali di alcuuc bibliolhcce d'Ilalia.
Ce catalogue des mss. hébr. delà Bibliothèque Saml-Marc. de A eni.e,
290 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
renferme 19 numéros. Le numéro 13 contient la grammaire (rare) de Josef
Sarko ; le n° 14, le grand ouvrage philosophique de Lévi b. Gcrson, pro-
bablement sans la partie astronomique.
Lattes (M.). Nuovo Saggio di giuute e correzioni al Lessico talmudico
• (Levy-Fleisclierl Rome, imp. del Salviucci, 1881; in-4o de 81 p. Reale
Accademia del Liucei, anno CCLXXVIII (1880-81).
Le premier Essai d'additions et de corrections de M. Lattes au diction-
naire talmudique de Lévy est de 1879. Dans ce travail, M. L. ne s'occupe
pas seulement du lexique talmudique, mais outre les mots omis par Lévy
dans les sources consultées par lui, M. Lattes a enregistré les mots qui
se trouvent dans d'autres ouvrages (par. ex. le Pirké de R. Eliézer), les-
quels, quoique rédigés plus tard que le Talmud et les principaux Midra-
schim, contiennent des parties moins récentes et sont, par conséquent, des
restes de l'ancienne littérature talmudique. De même, M. Lattes a enregistré
les mots de l'hébreu biblique qui se trouvent dans les sources talmudi-
ques, pour indiquer qu'ils étaient usités à l'époque du Talmud. Enfin il a
donné des exemples tirés du Talmud pour les mots araméeus que M. Lévy
ne donne que dans des exemples tirés de la Bible. Cet essai va de la lettre
alef à la lettre lamed. Citons quelques exemples qui montreront l'utilité de
cet excellent travail: N3N ne signifiant pasjo^re, mais ayant simplement
un sens honorifique ; la correction de Gabtari en Nabtaié, au mot 5îp"|3tî ;
l'explication du nom Agustos pour Augustos ; celle du mot i3"'731pTiî, tiré
du grec, = le monde habité ; l'orthographe NijïDOïî pour l'Espagne ; etc.
Ledrain (E.). Une page de mythologie sémitique sur uu petit bijou du
Louvre. Paris, libr. Lemcrre, in-8° de 8 p. Extrait de la Philosophie x>o-
sitive, mars-avril 1882.
Le bijou en question est un de ces petits cônes en agate que les Sémites
portaient comme des amulettes qui devaient leur assurer une grande pos-
térité. La pomme de pin tenue par les génies placés à la porte des palais
assyriens rappelle également, par sa forme, ces collines sacrées. Ces
cônes seraient la réduction minuscule des collines adorées primitivement
par les Sémites (les bamot) et représentées aussi par les bétyles. Sur le
cône décrit par M. L. se trouve gravé uu dieu en costume persan de
l'époque des Achéménides ; à ses pieds, on voit un disque lunaire. Ce
sont, sans doute, le dieu-soleil et la déesse-lune, dont les noms se re-
trouvent encore dans le nom de bien des localités bibliques : Bêt-Sémes,
Gilgal (disque de la lune), Jéricho, Astarot-Karnaïm (croissant à deux
cornes). Enfin, sur ce cône se trouvent deux colonnes, dont l'une est atta-
chée à la barque solaire. L'une est VAsclu'ra ou pieu de Baal, l'autre celui
d'Astarté.
Maimonide. Sefer ha-Mitzwot. Das Buch der Gesetze von Moscli beu Mai-
muu in arabiscbeu Urlexte nebst dcr hcbr. Uebersetzung des Schclomoh
b, Joseph ibn Ajab und mit eiucr deuischeu Uebcrsetzuug und Au-
merkung versehen von W Moritz Peritz. Theil I. Broslau, imp. Grass, iu-
8° de vi-34 + 28 p.
Contient l'introduction et les trois premières règles.
MoRAis (Henry Samuel). The Daggatouus, a Iribe of Jewish origin in Ibc
désert of Sahara. Philadelphie, Edward Slern, iu-S-^ de 14 p.
D'après « Les Daggatoun, tribu d'origine juive... par le rabb. Mar-
dochée Aby Serour ; Paris, 1880. ■
MO.SGOVJTEU (S. J.). llct Nieuwe Testament en de Talmud. l'Mivraison.
llaarlem, libr. Graaf, in-8o de 80 p.
I
BIBLIOGRAPHIE 291
Apologie de la morale religieuse et civile du Talmud ; le Nouveau Testa-
ment serait en grande partie né du Talmud (p. ■42), dont les idées sont an-
ciennes, quoique écrites et rédigées plus tard. Passages parallèles des
Evangiles et du Talmud, p. 73 à 80. P. bo, citation d'un ouvrage (ou ar-
ticle ?) d'Oort, intitulé : Evaugelie en Talmud. L'auteur promet trois autres
livraisons.
Parisini [F.). I caulici di Salomone Rossi. (Gazzetta musicale di Milauo,
l*-'" janvier 1882}.
L'auteur, bibliothécaire du Lycée musical de Bologne, se référant à un
article relatif à l'œuvre de Salomon de Rossi publié dans le Boccherini,
journal musical de Florence (n° 10, 30 oct. 1S8l), éuumère les exemplaires
plus ou moins complets de la très rare édition priuceps des Cantiques de
Rossi (Venise, 1623), réimprimés en partie par S. Naumbourg, à Paris,
187C, sous le titre de Recueil de chants religieux. M. Parisini donne une
description détaillée de l'exemplaire presque complet que possède le Lycée
musical de Bologne. Il ignore qu'un autre exemplaire assez complet, et
contenant en particulier les feuillets qui manquent dans l'exemplaire de
Bologne, était autrefois dans la bibliothèque du grand-rabbin Marco Mor-
tara, de Mantoue* (voir Carrière isr-, I, p. 124, note l). L'article de M. Pa-
risini a paru aussi dans VArpe du 23 déc. 1881. — 31. Lattes.
Perreau (P.). La Cautica di Salomone ed i conimeutatori isracliti nel medio
evo. Corfou, imp. Nacamulli, m-8° de 25 p.
Nous avons analysé ce travail lors de sa publication dans le journal le
Mssè, dont il est extrait.
Perreau (Pietro). 1700 abbrevialure e sigle (m3"^n "^TUiS"!) ebraiche, cal-
daiche, rabbiniche, talmudichc, colle loro varie soluzioni. Parme, auto-
graphié à 60 exempl,, iv-SJ: p. papier écolier.
M. P. avait composé pour son usage personnel cette table des abrévia-
tions initiales, il la livre aujourd'hui au public, parce qu'il a la conviction,
très fondée, que, si elle n'est pas complète (et il est impossible d'en faire de
complètes, car la matière est inépuisable), elle est plus riche que toutes
celles qui ont été publiées jusqu'à ce jour. Il va sans dire que M. P. a
utilisé les travaux antérieurs sur ce sujet. Il en donne la liste dans son
Avertissement. Sa table ne contient pas seulement les abréviations de la
littérature talmudique et rabbinique, mais celles de la littérature cabbalis-
tique, des noms propres d'auteurs, des titres de livres, des noms géogra-
phiques, des inscriptions tumulaires (d'après Zunz), etc. C'est un travail très
utile et très méritoire.
ScHERDLix (E.). Le Judaïsme moderne. Paris, imp. Larousse [1882] ; iu-8°
de 30 p.
Extrait de l'Encyclopédie des sciences religieuses de Lichtenbcrger.
L'auteur prend l'histoire des Juifs en Europe à partir de Mendelssohn et de
la Révolution française ; il étudie Icuç situation politique et civile dans les
dilférents pays, les effe.ts de la Révolution et de la chute de l'Empire sur
leur situation en Allemagne, leur lutte pour l'émancipation à Francfort, à
Hambourg, les polémiques de 1810, la réaction et les excès de 1819, sur les
bords du Rhin, celle de 1822 en Prusse, l'antisémitisme de 18i2 en Prusse
encore, la lutte pour l'émancipation en Angleterre, pour l'abolition du ser-
ment more judaico en France, les détestables lois d'oppression qu'ils
subissent en Rtissic, l'aifairc de Damag, l'histoire de la réfofme religieuse.
• Nous croyons que quelques fascicules de cet exemplaire ayant été adressés à
M. Naumbourg, se sont perdus à la poste. — I. L.
292 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
dans le judaïsme, histoire agitée et tourmentée, qui a si longtemps et peut-
être si inutilement occupé les esprits. II était difficile de mieux raconter,
en si peu de pages, les événements qui ont marqué dans le développement
du judaïsme moderne. L'auteur les a retracés à grands traits, comme il
convenait, laissant de côté les détails, sans omettre rien d'important ni au-
cun épisode intéressant. L'article se termine par une appréciation très élevée
du mouvement autisémitique actuel. Ce mouvement procède à la fois d'i-
dées religieuses, sociales et politiques. Les Juifs sont poursuivis comme
secte religieuse, comme agents économiques importants, comme propaga-
teurs d'idées libérales. Ce n'est point par indifférence, comme le suppose
M. Sch., que les Juifs de France ne sont point venus au secours ue leurs
coreligionnaires allemands, c'est par crainte de leur nuire. Parmi les chrétiens
qui, en Allemagne, ont pris la défense des Juifs, M. Sch. cite avec raison
Vogt, le chanoine Doellinger, le D'" Cassel; il faudrait ajouter Franz De-
litzch. M. Sch. a des paroles touchantes pour protester contre cette guerre
odieuse, nourrie de passions inavouables : l'orgueil national et de race
poussé à la folie depuis 1870, le fanatisme religieux et politique, une
jalousie que rien ne justifie et qui repose sur de pures imaginations. Il est
consolant de voir un savant comme M. Sch., qui, si nous ne nous trompons,
a été à l'école de l'Allemagne, condamner avec une si grande énergie et
une sympathie si vive pour les persécutés cette expédition honteuse, qui est
une insulte à la civilisation.
ScHULTZE (MarUn\ Handbuch der ebraischen Mythologie. Sage und Glaiibe
der alten Ebraer in ibrem Zusammenbang mit den religiôsen Anscbau-
ungen anderer Semiten sowie der Indogermanen und Aegypter; 2" édi-
tion. Leipzig, libr. Karl Scboltze, in-8'' de x-294: p.
Nous ne sommes pas eu mesure d'apprécier la valeur scientifique de ce
livre, nous dirons seulement qu'on y trouve des étymologies très hardies.
Pour l'auteur, l'histoire ancienne des Hébreux telle qu'elle est racontée dans
la Bible, n'est le plus souvent que de la mythologie, de la légende, de la
poésie épique. Dans l'histoire de Moïse il voit une espèce d'odyssée,
comme l'Odyssée des Grecs ; l'histoire de Joseph, serait l'Iliade des Hé-
breux. Une belle personne (homme ou femme) est enlevée de son pays,
ses compatriotes la suivent pour la délivrer, et, après de longues difficultés,
la ramènent (morte ou vive) dans sa patrie. Cette fable représenterait le
mythe du Dieu de la lumière, exilé pendant l'hiver, et retournant au ciel
à l'arrivée du printemps, avec une suite nombreuse. — Autre exemple: Le
cantique de Déborah est un mythe dyonisiaque. Lorsque, au solstice d'hiver,
le soleil entre dans le signe du capricorne (Jael) et recommence à monter
(jaal), que le vin également fermente et monte dans les cruches, que les
nuées versent l'eau sur la terre, que les rues sont désertes et que les pas-
sants fout des zigzags (pour poser le pied aux endroits que la boue ne re-
couvre pas), les moissonneurs sont en fête (boivent le vin), jusqu'à ce que
vienne Déborah, la mère en Israël. Déborah, l'abeille, c'est l'Artémise des
Grecs (appelée mélissa), l'amazone guerrière (armée comme l'abeille),
sœur d'Apollon. Elle est représentée avec deux torches à la main, comme
Déborah est la femme àcs lappidot (torches). Cette même déesse, sous
d'autres formes, règne dans le signe dû Bélier, en mars, c'est-à-dire au
réveil du printemps. On entend la voix des moissonneurs qui chantent
dans les champs et qui vont faire la guerre aux plaines immobiles (searim)
de blé ! Puis vient la saison du reste (de la vendange), les tribus sont
louées ou blâmées selon qu'elles cultivent la vigne ou la négligent. Le rai-
sin toule dans le sang de son jus, comme des cadavres dans le Kison ; les
vendangeurs le foulent et piaffent comme des chevaux dans la bataille. Si-
sara (le lait de la bravoure, c'est-à-dire le vin) est placé dans la tente, où
il repose, jusqu'en hiver. Jael revient alors avec le marteau, elle enfonce un
piquet dans la tête du géant, et le sang (vin) coule par l'ouverture béante.
BIBLIOGRAPHIE 2^"^
11 est clair qu'on peut aller loia avec ce système d'interprétalion. Q^e de-
vient, dans tout cela, Thistoire de la guerre de Sisara racoutee par la Bible
eu dehors du chant prétendu dyonisiaque ? Les mythes auraient-ils servi a
faire de l'histoire ?
Stade (Bernhard). GeschicMe des Volkes Israël, mit Illusirationen uud
Karten. Berlin, libr. G. Grote, 1881, in-8».
Livraisons 3a et 40 de l'AUpemeine Geschichtë in Einzeldarstellungen
(Encyclopédie historique), publiée par Wilhelm Oflken. Ces deux livrais
allant de p 1 à p. 304, ne forment encore qu'une partie de 1 ouvrage. 11
faut se féliciter qu'un travail aussi important ait été conhé à un savant
si consciencieux et si érudit que M. Stade. Son introduction montre deja
avec quel soin il s'est proposé de procéder au travail et comment ,1 se rend
compte des difficultés extrêmes de cette œuvre.
T. FIE (G -P ) Histoire comparée des auciennes religions de l'Egypte et des
peuple^ sémitiques, traduite du hollandais par G. Collins, précédée d une
préface par A. RéviUe. Paris, libr. Fisclibacher, m-S» de xvi-olO p.
Nous ne pouvons pas faire ici l'analyse détaillée «if;^^ «^^'^^.S'V.^^.eî-
divisé en trois livres : 1. Histoire de la religion de 1 Egypte 2. La re
4on de Babylone et de l'Assyrie; 3. La religion des Phéniciens et cel e
des Israélites Dans ce dernier livre, nous signalons les chapitres suivants
(chap va à XVI) : Etat religieux des Hébreux dans le pays de Goschen
-le yahvisme primitif et Moïse ; - le yahvisme mosaïque de Samuel
jusqu'au schisme des dix tribus ;- la lutte du yahvisme mosaïque pour a
iuprématie, de la sécession des dix tribus à la ruine du royaume d Israé
-^^ 'iSalisme des nouveaux prophètes en lutte avec la tendance réaliste
de pu en plus prononcée d'AhaL à Amon ; - réalisation temporaire de
rîdéaî prophétique; réforme de Josias. le Deatéronome ; - la catastrophe
e son lugubre^r^phète; - caractère de la religion d'Israël. La conc u-
si'oi de r auteur est que la religion mosaïque se distingue de toutes les reli-
Aons des Egyptiens et des slmites de l'Asie par le caractère à^samteté
q' 'ele attribif à Dieu et au culte. On ne peut approcher D^eu - e voir
îi toucher l'arche, ni pénétrer dans le samt des saints. Ce dieu est
ds r'te ÎSl le fut' également (p. .06), les ^^^^^^^ff^^
nui le séparent des autres peuples lui mspirent un orgueil qui, dans le
Tamud ^dégénère en véritable folie ». Ces conclusions nous paraissen
asseTmèsquine^s pour un sujet aussi élevé, et --P^^f <!- ^^^^J^^ ^t
Hébreux s'étaieni faite de Dieu, lors du retour de 1 exi , était autrement
Sandc et^énéreuse. L'orgueil national des Juifs, si malmené par M. T.,
ïetatps^plu féroce nfmoins Justifié que celui des -très peuples qui
ks entouraient. C'était une maladie du temps, et il semble bien que les
nations modernes la connaissent également.
RENAN (Ernest). L'Ecclésiastc traduit de l'hébreu avec une étude sur l'âge et
le caractère du livre. Paris, libr. Calmann Levy; m-8° de 153 p.
Nous avons déjà annoncé VEtude qui forme l'introduction de cet ouvrage
Ptaui a été publiée dans la Rcvl des Deux-Mondes (voir plus haut.
;. ^S). Nous reviendrons prochainement sur cette Etude et sur lu traduction
de M. Renan.
[Spinoza]. Beuedicti Spinoza opéra quotquol reporta sunt ^■^^-o;'^^*:;';^^^
^ J Van Vloten et J. N. Land. Volumen prius. La Haye, unp. N.jholi, in-h
de XI-G30 p.
20
T. IV.
294 REVUE DES ETUDES JUIVES
PuMicaiions 'pouvant servi?' à l'histoire moderne des Juifs, du Judaïsme,
des commu?iautés, des institutions, etc.
Adler (Hermann). Récent Phases of Judseopliobia (Nineteenth Ccutury,
Londres, n" 58, décembre 1881, p. 813).
Réponse excellente à l'article de M. Smith (voir plus loin).
Debidour (m. a.)- L'abbé Grégoire. Nancy, imp. Sordoillet, 1881; in-8°
de 15 p.
Viox (Camille). L'abbé Grégoire, conférence historique. Lunéville, imp.
nouvelle, in-8° de 44 p.
Friedlaender (M.)- Fiiuf Wochen in Brodj unter jûdisch-russischen Emi-
granten. Vienne, libr. Waizner, in-8° de 50 p.
L'auteur a vécu cinq semaines parmi les émigrants juifs de Russie qui
se sont léfugiés à Brody : il a travaillé, avec beaucoup de cœur et de
dévouement, de concert avec ^L Charles INetter, à secourir ces malheureux
et à soulager leurs souffrances. Le récit de son séjour dans cette ville est
instructif et touchant.
Die russischen Judenverfolgungen, fûnfzehn Briefe aus Siid-Russland. Franc-
fort s/M., libr. Kautfmann, in-8° de 61 p.
Ces lettres sont d'un témoin oculaire ; elles ont une grande valeur histo-
rique et sont, en outre, très émouvantes.
Le Juif russe jugé par lui-même, par Arvède Barine (Revue politique et
littéraire, 10 juin 1882, p. 7051.
Le titre de cet article u"est point exact, l'auteur s'est servi, pour faire
son travail, de documents dont un grand nombre n'émanent pas le moins
du monde des Juifs. Certains passages de l'article, généralement équitable
et bienveillant pour les Juifs, prêtent cependant à la critique et indiquent la
persistance singulière des préjugés.
Leroy-Beaulieu (Anatole). Les troubles antisémitiques; la persécution des
Juifs en Russie (Revue politique et littéraire, n° 20, p. 609).
Détails sur la législation oppressive dont souffrent les Juifs de Russie,
sur les nombreuses professions manuelles qu'ils exercent; contradiction
entre les reproches qu'on leur adresse et les mesures qui sont prises à leur
égard et dont l'unique effet ne peut être que de perpétuer les défauts qui
leur sont attribués.
LuBOMiRSKi (le Prince). Jérusalem : Juifs, Chrétiens, Musulmans (Nouvelle
Revue, 13 avril 1882, p. 589).
L'article, conçu dans un esprit un peu singulier, et d'une observation qui
nous semble superficielle, est peu bienveillant pour les Juifs. Un épisode
curieux est celui d'un Juif, autrefois serf de l'auteur à Dubno (et nous
croyons volontiers que le prince traitait ses serfs avec la plus grande hu-
manité), et qui, à Jérusalem, lui témoigne une certaine mauvaise humeur :
• Que voulez-vous que je vous donne en échange do votre mépris? Mon
amitié peut-être? » (p. 597). Cet article, probablement augmenté, a paruiin
volume sous ce titre : Jilrusalem, un incrtduU en S^errc-kSainte.
BIBLIOGRAPHIE 295
Persécution of the Jews in Russia, 1881. Reprinted from the Times with Map
and Appendice. Londres, imp. Spottiswoode, in-S'^ de 30 p.
C'est le résumé le plus complet qui ait été fait des persécutions des
Juifs en Russie depuis leur origine jusqu'en décembre 1881.
Que faire? Réponse à l'auteur de la situation en Russie. (Nouvelle Revue,
15 mai 1882, p. 241.)
Réponse à un article paru dans la même Revue, numéro du 15 février
1S82. L'auteur de « Que faire? » pense que le mouvement contre les Juifs est
parti des nihilistes, qui voient dans cette agitation un instrument de dé-
sordre et d'anarchie, et que le comte Ignalieff a favorisé « cette indigne
persécution » dans l'espoir qu'elle servirait de dérivatif aux passions révo-
lutionnaires. De plus, cette agitation est dans les desseins du parti pansla-
viste, lequel persécute également les vieux croyants, qui sont au nombre
de la millions et qu'on accable de vexations. Le parti national russe, à la
tête duquel se trouve l'éminent directeur de la Gazette de Moscou, ne doit
pas être confondu avec le parti panslaviste, car il est beaucoup plus sage
et plus modéré. Cette assimilation serait pour lui une injure.
RuELF (J.). Drei Tage in Jiidisch-Russland. Francfort s/M., libr. Kauffmann,
in-80 de 131 p.
Relation de voyage intéressante et qui renferme de nombreux renseigne-
ments sur la situation morale et économique des Juifs de Pologne.
Smith (prof. Goldwin). The Jewish question (Niueteenth Century, Londres,
n° 56, oct. 1881, p. 494).
Voir, plus haut, H. Adler.
ScHWABAGHER (D'" Simou Leou von). Uenkschrift ûber Entsteliung und
Charakter der in den siidlichen Provinzen Russlands vorgefallenen Uu-
ruheu. Stuttgart, libr. Levy et Miiller, in-8° de 43 p.
L'auteur est rabbin à Odessa, il est donc bien placé pour apprécier les
causes des persécutions en Russie. Le mémoire qu'il a écrit à ce sujet lui
a été demandé par le sénateur, commissaire du gouvernement, comte Kutai-
soil. L'auteur proteste contre cette opinion que le peuple russe haït les
Juifs. Il n'en est rien, il a seulement contre eux des préjugés, et ces pré-
jugés ont été exploitéspar le parti révolutionnaire, surtout par la presse
populaire, à laquelle M. Sch. attribue un rôle prépondérant (et peut-être
exagéré) dans les derniers événements. Il y a des milliers de Juifs en
Russie qui sont cultivateurs ou qui exercent les métiers les plus durs. Il
est donc faux qu'ils repoussent le travail manuel. Ce qu'on peut reprocher
aux Juifs n'est que le résultat fartai de la mauvaise législation à laquelle
ils sont soumis. « Vestra culpa 1 »
Théâtre de Campéador. Le devoir du mari, la peur du bruit, David Rizzio.
Paris, libr. Calm.-Lévy, gr. in-S» de 327 p.
Notre excellent ami, M. Hippolyte Rodrigues, nous permettra de
mentionner ici cet ouvrage aimable, où respire une bonne grâce parfaite.
C'est ainsi que se délasse dignement, entre deux ouvrages plus graves,
l'auteur des Trois filles de la Bible, des Origines du Sermon sur la Mon-
tagne, des Midraschim et de tant d'autres œuvres honorables.
TissoT (V.). La Russie et les Russes. (Illustration, à partir du numéro du
15 avril).
Beaucoup de détails sur les Juifs, maig où lo romancier a peut-être plus
de part que l'observateur et l'historien.
296 lŒVUE DES ÉTUDES JUIVES
Remie des périodiques.
"n^rn nin Beth-Xalmud (Wien, mensuel). 2*^ année. = = N" 11. Fried-
mann : Civilisation du temps des patriarclies (suite). — N. Briill : Origine
et développement de la législation relative à la purification des mains.
— Feiss-Rosentlial : Époque de la rédaction primitive du Targum On-
kelos. — Une consultation de Rasclii. — H. S. Slonimski : Notes talmu-
diques. — H. Oppeuheim : Histoire de la Mischna. — Une lettre de
Rappoport. : N°12. Friedmann : Esprit de la haggada (suite), — BrùU :
Origine, etc. (suite). — David Kaufmann : Additions et corrections à son
article sur Hayyim ibn Musa. — J. Reifmann : Divers Tikkuné So-
ferim. — Traité des Bénédictions, par Samuel b. Hofni, édité par
Weiss. — J. JReifmann : Réplique à un article du Scaacliar sur ses articles
concernant les mots syriens de la Bible.
N° 11. — Rosenthal : Le Targum Onkelos aurait été rédigé en Palestine,
du temps de R. Akiba. — Consultation de Rasebi : Elle est très courte.
Un jeune homme et une jeune fille ont été mariés après qu'ils avaient été
obligés, pour sauver leur vie, de se baptiser. Le mariage est-il valable
comme tout mariage Israélite? Réponse : oui, car les baptisés involontaires
ont le cœur pur.
N° 12. — La publication du traité de Samuel b. Hofni mérite spéciale-
ment d'être signalée.
"1315-!^ Hamtlaber (Berlin, bimensuel). V année. = = N° 2 à 5. Elle
Capsali : Relation d'un miracle arrivé aux Israélites de Candie en 1537
et jour commémoratif institué à ce sujet. = = ]Si° 8. Origine historique
du nom d'Azulai. = =: N° 9. Lettre de Hayy. J. David Azula'i.
Nous n'avons pas vu les n°'" 0, 7, 10, 11. Le n° 12 est-il le dernier de
cette publication ?
in'il^;^ Haschachar, die Moi-genreethe (Wien, périodicité non-indiquée).
10'' année. = = N^ 11. Smolensky : Sur la situation actuelle des Juifs.
Ilillcl Noah Steinscbneider : Sur l'article de M. Modlinger (n" T) sur le
Midrasek Lekah Tob. — S. Rubin : Les Urim we-Tummim. — La terre
de gloire (suite). — Midrascb Soferim. — Histoire des peuples anciens
(suite).
Archives Israélites (Paris, hebdomadaire). 43^ année. = = N** 5.
Ernest David : Histoire juive, les Texeira. == No** 11, 12, 14, IG, 17,
II. Becker : Voltaire et les Juifs. = = N" 16. M. Schwab : Archéologie,
lettre adressée de Tours au directeur (sur un ms. hébreu du Pentateuque
conservé à Tours).
Académie des iuscriptioiis et l>clics«leltres, Coiiiptes-rciidus (Paris)-
=:= 4'' série, tome IX, octobre à décembre ISSl : Philippe Berger : Note
sur les inscriptions puniques qui figurent à l'exposition des fouilles d'U-
tique. — J. Menant : Remarques sur des portraits des rois assyro-chal-
déens. — A. de Longpérier : Monuments antiques de la Chaldée rapportés
par M. de Sarzac.
Menant : Ce travail cherche à prouver que, dans les représentations des
rois assyriens qu'on trouve sur les monuments, les artistes n'ont pas rc-
BIBLIOGRAPHIE 297
produit un type conventionnel, mais des figures ressemblantes, quoique
ennoblies, de telle sorte qu'il est facile de reconnaître par exemple Tiglat-
Pileser, Sargon, Sennacbérib, Assarbaddou, Assurbanipal. On distingue
aussi les types des peuples, Susiens, Hébreux, Arméniens. — Long-
périer : La Syrie des deux ileuves {Arani nehar'ahn) est représentée sur les
monuments par deux courants à lignes brisées ou ondulées, repré-
sentant l'un le Tigre, l'autre l'Eupbrate. Il y a un symbole de ce genre
sur les bas-reliefs rapportés par M. de Sarzac. M. de L. pense que les rois
de cette contrée, qui ont élevé des monuments comparables, pour leur
grandeur, à ceux de l'Egypte, devaient être très puissants et on comprend
qu'ils aient facilement remporté sur les Hébreux la victoire dont il est
question dans les Juges, chap. m.
Das jiidische Centralblatt (Belovar, bimensuel), l""" année. =: = N° 1.
Wesen und Urafang der Aggada. := == N° 2. Wesen (suite). — Zur Ge-
schichte der Juden in dem vereinigten Kônigreiclie Kroatien, Slavonien
und Dalmatien. — A, ^A'iinsclle : Ibn Esra als Râtliseldicliter. == = N° 3.
Wesen (suite). — Ueber die Juden in Bosnien und Herzegovina. — Zur
Geschichte, etc. (suite\ = = N° 4. Ueber den jiidiscb-spanisclien
Dialekt. = =: N° 9. Das altfranzôsiche bei Raschi. = = N-^ 10 et 11.
Ueber die spaniscb-portugiesiscben Juden der Gegenwart. — Das altfran-
zôsiche, etc. (suite}.
Les études sur l'histoire des Juifs en Croatie, Slavonie et Dalmatie, sur
le judéo-espagnol et sur les gloses françaises dans Raschi sont particu-
lièrement intéressantes. — Nous n'avons pas les n°* 5, 6 et 8.
Fraternitatea (Bucbarest, hebdomadaire). 4^ année. r= = N" 3 à 20. Do-
cumente istorice previtoare la Evreii din Remania.
Ces documents historiques sur l'histoire des Juifs en Roumanie sont
très précieux. Nous y remarquons tour à tour des pièces de 1790 i^du voivod
Michel Constantin), de 1834, de 1710, de 1823 (Jean Stourdza), etc.
Hebr^isohe Bibliographie niit72M (Berlin, bimestriel). 21* année. =:
= N" 123-124, mai à août 1882. Cataloge. — Bibliotheken. — Elia del
Medigo. — Grabschriften. — Kulturgeschichle. — Literaturgeschichte. —
Abraham b. Schemtob (Bibago?). — Averroes. — Berkamani. — Ibn
Efraim. — Fcindesliebc. — Figura Sector. — Heirathsgesellschaften. —
Inschrift. — Josef ha darschan. — Jus primne noctis. — Kanon des A. T.
— Mordechai b. Jehosifja.
Cataloge : Notes sur un catalogue de livres hébreux publié à Munich
par M. R. M. Rabbinovicz, 1881. — Elle del Medigo : Analyse d'un ou-
vrage de M. Dukas, de l'année 1870, avec notes, observations, additions,
et extraits de deux mss. latins du Vatican. — Grabschrifttn : Sur les
luchot abanim de M. Berliner, avec notes sur la transcription et l'in-
terprétation des noms propres. — Kulturgeschichte : Sur un ouvrage
d'Abraham Jagel. — Literaturgeschichte : Supplément à l'article sur Elie
del Medigo. — Jefct Berkamani. — Société pour marier les jeunes filles
pauvres, en Italie, 1G4i. — Jus : Dans un ouvrage sous ce litre, par
Schmidt(Fribourg enBrisgau, 1 881 ), il est traité, p. 103 à 175, du fait qui, d "a-
près le Talmud, aurait amené le soulèveiiaent des Macchabées. — Kanon:
Article de L. Strack sur le canon de l'Ancien Testament, dans la Real En-
cyklopaîdie fvir protest. Théologie, 2° édit. ; Leipzig, 1880, vol. VII, p. 412
à 4L)1 .
Dep Israelit (Maycncc, hebdomadaire). 23' année. = = N° 5. Nochmals
ciu Wort ûber die Lagu des Gardons Edou. = = N*^ 9. Aus dciî Verhand-
298 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
lungen des preuss. Abgeordnetenhauses vom 25. Febr. (Stocker, etc.).
= =z N° 13-14. Eine émeute Verdâchtigung gegen das Schachten.
Jonrnal asiatique (Paris). 7« série, tome XIX. = r- N^l. E.Renan:
Sur quelques noms arabes qui figurent dans des inscriptions grecques de
l'Auranitide. — H. Sauvaire : Matériaux pour servir à l'histoire de la nu-
mismatique et de la métrologie musulmane. = = N" 2. Sauvaire : Maté-
riaux (suite).
Renan : P. 19, quelques mots sur Tenvahissement de la Syrie par les
Arabes plusieurs siècles avant la naissance de l'islamisme. — Sauvaire :
Etude qui peut souvent être très utile pour les recherches archéologiques
concernant la littérature des Juifs qui ont vécu en pays musulman.
Das jiidische Lîteraturblatt (Magdebourg, hebdomadaire). 11^ année. =
= N° 1. Ein Beitrag zur Geschichte der Frankisten. — Jastrow : Be-
merkungen zu D'" Gebhard's Beitragen zur Erklarung griech. Wôrter in
dcu Midraschim und Talmuden. = = N° 2. Ein Beitrag (suite). — Jas-
trow (suite). = = N'^ 3. Caro : David's Testament. — Jastrow (fin). = =
N° 5. Ad. Jellinek : Galdos (auteur du roman Gloria, 1878, contre les
préjugés religieux). = = N° 6. J. Minor : Historisches zurBerliner Juden-
frage. — Recension der Gedenkebliitter an Ober-Cantor Salomon Sulzer.
= = N° 7. Minor (fin, activité intellectuelle des Juifs de Berlin au com-
mencement de ce siècle). = = N° 10. Eine neue jiid. Sekte in Russland.
= = N° 12. Berthold Auerbach's Stellung in der deutschen Literature.
— S . Friedmann : Ueber die Entstehungszeit der Septuaginta. = =
N° 13. Friedeberg: KantundMendelssohn. = =: N° 14-15. Das Edikt
vom 11. Marz 1812. Zur Emancipationsgeschichte der Juden in Preussen.
— S. Friedmann : Ueber unsere Pessach-Haggadah. = = N° 16. Friede-
berg (suite). — Das Edikt (suite). — Wolffsohn : Zur Geschichte des
Aberglauben im Talmud. ^= = N° 17. Wolffsohn (suite; si Abraham
était devin; le mauvais œil ; Aschmodai).
Slagazin fi'ir die Wissenschaft des Judeiithnms (Berlin, trimestriel).
9" année. = =: N° 1. Eduard Baneth : Ueber den Ursprung der Sadukiier
und Boëthosàer. — David Kaufmann : Berichtigungen imd Erklarungen.
— Aus Briefen.
Baneth : Nous reviendrons sur ce travail, qui paraît devoir devenir fort
intéressant, lorsqu'il sera plus avancé. — Kaufmann : Explications et cor-
rections pour la partie hébraïque de l'année précédente. — .Notes de
M. Halberstam sur le même sujet. — Aus Briefen : Lettre de M. Rosin
sur la correspondance dcRappoport publiée récemment par M. A. Harkavy
et annoncée dans notre Bibliographie.
Popiilar %visscnsch»f(Iiche Monatsblatter (Francfort-sur-Mein, men-
suel). 2» année. = = N^ 1. A. Slein : Aus dcm Lcben der Juden in Ara-
bien. — II. Friedlander : Geschichtsbilder aus der nachtalmudischcn
Zeit. — David : Semitisches und Antisemitisches in Oeslerreich-Ungarn.
— Eine neue jiidische Secte in Russland. — Personalien. = = N° 2.
Stein: Aus dem Leben (suite). — Friedlander : Geschichtsbilder (suite).
— D. Selver : Anti-Dûhring. — Literarische Mittheilungcn. = = N" 3.
A, Rosenberg : Das Judenthum und die Nationalidee. — Friedlander :
Geschichtsbilder (suite). — Refcrate, Personalien. = = N" 4. A. Rosen-
berg (suite). — Die Lcichenfeicr Berthold Auerbach's. — Referate, Per-
sonalien. = = N» 5. Griinebaum : Zur Geschichte der Juden in der Pfalz.
BIBLIOGRAPHIE 20'.i
— David : Scmitisches und Antisemitisches in Oesterreich (suite). —
Mittheilungen, Referate. = == N" 6. Grûnel^aum : GeschicliLe (suite). —
David: Semitisches (suileK — A. Rosenberg : Das Judenthum (suite). —
Duscliak : Ticriches Strafrecht. — Referate.
N" 1. — Stein : La vie juive en Arabie, principalement d'après Eben
Sappir. — Friedlànder : Mordechai Meisel, de Prague (né 1528); R.Lôwe
b. Bezalel, né 1^25 ; R. Jesaias Hurwitz, né 1570. — Personalien : 80* an-
niversaire de la naissance de M. le chevalier Josef de Wertheimer, à
Vienne, 24 octobre 1881.
N' 2. — Friedlànder : R. Joël Serkes, né à Lublin, vers IliôO ; R. Lip-
pmann Heller, né à Wallerstein en 1579.
N° 3. — Rosenberg : Sur l'idée de nationalité &\. l'importance qu'elle a,
surtout depuis les agitations antisémitiques. — Friedlànder : Menascbe h.
Israël. — Personalien : Mort de Simon Szanto, directeur de la Neuzeit, de
Vienne, le 17 janvier 1882; né le 13 août 1819 à Gross-Kanisza. Mort de
Berthold Auerbach à Cannes, le 8 février 1882; né à Nordstetten le 13 fé-
vrier 1882 (voirn" 4, p. 90).
N° 5. — Grûnebaum : Histoire des Juifs du Palatinat. Renseignements
sur Spire datant de 1010; sur Landau, datant de 1291 ; sur Kaiserslautern,
datant de 1315, etc. — Friedlànder : Uriel da Costa et Spinoza. — Recen-
sion de Laroche, drame en cinq actes de Ferdinand Ludwig Neuburger
(Frcf s/m, 1882), où est traitée la question du mariage d'un juif avec une
chrétienne.
N'-' 6. — Grûnebaum : Suite, épisodes de la peste noire à Mayence, à
Landau, Strasbourg, Spire. Un enfant chrétien disparu à Strasbourg, en
1539; etc. — Duschak : Sur la législation mosaïque relative au traitement
des animaux, à propos d'un article de M. Lacagne, professeur de droit pé-
nal à Lyon, dans la Revue scientifique.
IHonafsschrift fi'ir Gesrliichte und l¥issenscliaft des Judentliums
(Breslau, mensuel). 3P année. = =: N" 4. W. Bâcher : Die Agada der
Tannaiten. — A. Harkavy : Eine von Saadia Gaon bestatigte Décision
des Exilarchen David b. Sackai. — A. Harkavy : Karaische Deutung des
Wortes ïiiamzêr. — J. Landsberger : Geschichte der Juden in der Stadt
Stendal vom Endedes 13. Jahrli. bis zu ihrer Vertreibung im J. 1510. —
Jastrow : Notiz (I. Ein aller Copisteufehler ; II. Eine wandernde Corrup-
tion). = = N°5. Graetz : Das Deborah-Lied. — W. Bâcher: Die Agada
(suite). — J. L. : Miscellen.
N" 4. — Bâcher : Jochanan b. Zakkai, sa vaste érudition, son applica-
tion à l'intelligence des textes bibliques. — Harkavy : Texte d'une formule
pour la confirmation d'une décisiou de l'Exilarque de Babylonie, David,
par Saadia, chef de l'Académie de Sora. C'est un document très précieux,
tiré d'un ms. oîi se trouvent encore d'autres pièces de Saadia. — Har-
kavy : Passage d'un commentaire caraïte du Deutéronome où le nom de
mamzSf est appliqué aux Khozars. Les Caraïtes leur ont peut-être donné ce
nom à cause de l'attachement des Khozars aux rabbanites. — Jastrow :
I. Les mots ^153 iSÎTIEi dans Gittin^ 44a, doivent être lus "^"l^j^ilD ("^"n^S
venant de iTJ pour i"i5) ; c'est la corvée appelée parangaria. II. Corruption
de mots do la même racine, Bab. Mec, 83 h : N'I^rTlS pour NI2T.">;t1D,
paranijentes, celui qui est requis pour la corvée.
N'^ II. — Graetz : Explications ingénieuses de nombreux passages du
Cantique de Dcl)ora. — Hacher : Zadoc, Eléazar b. Zadoc, Ilanina, chefdcs
prêtres, Nchunja b. Haccana, Nahum do Gimzo, Bon Paturi [Si/'ra, Lév.
25, S6, et B. Mec, 02 a), Elié/.er b. Jacob, José Ilaccolien. — J. L. : Ex-
plication de divers mots talmudiques : 'jTnîû'^p = centurion, dans Sifr^,
Balac, 131, p. 47, édit. Friedm. ; etc.
300 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
niosè, Aiitologîa israelîtîca (Corfou, mensuel). 5'^ année = = N" 4.
P. Perreau : Iiitorno al comento inedito ebreorabbinico del R. Immanuel
b. Salomo sopra Giobbe. — S. Morais : Autobiografla di S. D. Luzzatto
(suite). — M.Mortara rNotizia di alcune raccolte di Consulti mss. di Rabbini
italiani possedute da Marco Mortara. = = N°^ 5 et 6. Perreau (suite).
Mortara (suite).
Les notices de M. Mortara sur les consultations rabbiniques qu'il possède
contiennent des renseignements historiques utiles.
Palestine Exploration Fund (Londres, trimestriel). = = Avril 1882.
Captain Conders Reports. — A. M. Manlelli : Jérusalem, newly discove-
red Cburch. — C. R. C: Note on prehistoric remains in Western Pales-
tine. — C. R. C: The Siloam Tunnel. — W.Wright: Kadesh on the
Orontes. — Assyrian discoveries near Bagdad. — E. A. Finn : Cromlechs
on the East of Jordan. — C. Pickering Clarke : The Mountain of the Scap
Goat.
Conder : Description de nombreux cromlechs, restes d'un ancien culte,
à l'est du Jourdain et de la mer Morte, aux environs de Hesban. M. C.
croit pouvoir identifier les principaux groupes de cromlechs avec Bamot-
Baal, et les sanctuaires de Baal Peor, de Baal Peor en face de Jesimon et
de Baal Peor dans la vallée du Jourdain, où est Sittim, localités et monu-
ments mentionnés dans le Pentateuque. Description de constructions à
Amman et à Arak el Emir. — Note... : Monuments de pierre près de
Jérusalem et à Gezer. — Siloam tunnel : Plan du tunnel maintenant cé-
lèbre par l'inscription de Siloé. Ce tunnel part de la fontaine de la Vierge,
se dirige à l'ouest, puis descend au sud, où il est encore obligé de faire un
coude pour se diriger, à l'ouest, sur la fontaine de Siloé. Ce tracé capri-
cieux est dû à l'inexpérience des mineurs ou à la dureté plus ou moins
grande de la roche. Ce qu'il y a de curieux et d'intéressant dans ce plan,
c'est que vers le milieu du tunnel, le tracé fait un certain nombre de zig-
zags très courts. C'est là probablement que se sont rejoints, après des tâ-
tonnements, les deux tronçons du tunnel qui a été commencé aux deux
bouts. En se rapprochant les unes des autres, les deux brigades de mi-
neurs qui avaient entamé le tunnel aux deux extrémités s'aperçurent
qu'elles ne se rejoindraient pas, et durent faire ce tracé en zigzag pour se
rencontrer. M. J. Derenbourg a déjà fait ces remarques dans la Iievue,lU,
p. lii:i.
Israelitischer Reichs-Bote (Francfort-s.-M., hebdomadaire). 7° année. =
= N° 35-36. Karl Pick : Die Juden in Bôhmen im 14. Jahrhundert
(d'après Israelitischer Lehrerbote ?). = =^ N°' 39 à 42. Samuel Oppen-
heimer (suite).
Revue de l'histoire des religions (Paris, bimestriel). 3° année, tome V.
=: = N° 1, janvier-février. M. Vernes : Les plus anciens sanctuaires des
Israélites. — La foi en la rédemption et au médiateur. — Périodiques et
sociétés savantes. = = N° 2, mars-avril. St. Guyard : Bulletin de la re-
ligion assyro-babylonieune. — Périodiques et sociétés savantes. — Biblio-
graphie.
N° 1. — Vernes : Le premier de ces sanctuaires est celui qui fut établi
par Mika [Juffes, XVII et XVIII), et dont la tribu de Dan enleva l'image
et le prêtre pour les installer à Laïsch. Les adhérents de ce culte prétendent
que leur dieu a été desservi par Jonathan, fils de Gersom, fils de Moïse,
mais ce nom de Moïse aurait été substitue par eux à celui de Manassé
(XVIII, 30; Beuss, ad. /oc). Un sanctuaire plus important a été celui de
Silo, renfermant une arche, probablement avec une pierre sacrée. Ces repré-
BIBLIOGRAPHIE 301
sentations élémentaires de Dieu étant partout plus anciennes que les idoles
ou images, le sanctuaire de Silo, avec son arche et sa pierre, a été ou pré-
tendait être un des plus anciens. Il a survécu à la prise de l'arche par les
Philistins, et peut-être existé jusqu'à la chute du royaume des dix tribus.
Sichem, ancienne ville sainte de la Palestine et qui n'a jamais oublié sa
gloire passée, avait un temple de Baal Berit, un chêne sacré, une stèle,
symbole de Dieu, consacrée de nouveau et rendue sainte par Abraham et
Jacob. A Ofra, près Sichem, était l'idole en or de Gédéon-Yerubbaal, un
autel, un pic sacré (aschéra). A Bétel se rattache le souvenir de la pierre
élevée par Jacob et du culte fondé par les dix tribus dissidentes. Guilgal,
où Josué, après le passage du Jourdain, fit ériger douze pierres, fut aussi
le centre fameux d'un culte. M. V. croit que le récit de Josué, xxii, con-
cernant l'autel construit avant (?) leur retour dans leur territoire par les tribus
transjordaniqucs, a pour objet de légitimer et de justifier, au point de vue
orthodoxe, l'érection d'un autel à Guilgal. Enfin Gabaon a eu, avant la
construction du temple par Salomon, un sanctuaire vénéré. Si l'on se rap-
pelle que les prêtres des sanctuaires locaux devaient, après la conquête du
pays par les Hébreux (cf. Ezéch., xliv, 10-14), servir comme coupeurs
de bois et porteurs d'eau au temple des Hébreux, on comprendra ce que
signifie le curieux épisode des Gabsonites raconté au livre de Josué. Il
constate que le clergé indigène de Gabaon est soumis au Dieu des conqué-
rants. Mais Gabaon garde encore une certaine importance, comme le
prouve le sacrifice que ses prêtres accomplissent sous David, lors de la fa-
mine, les sacrifices que Salomon fait dans cette ville, et l'attention excep-
tionnelle que la Bible accorde aux Gabaoniles.
N° 2. — Guyard : On a inventé, dans ces dernières années, une langue
dite sumérienme ou accadienne, qu'on a voulu retrouver dans les textes
cunéiformes, et cette langue n'étant pas sémitique, mais étant, d'après les
savants qui appuient celte théorie, antérieure à l'assyrien, on en a conclu
que récriture cunéiforme et la civilisation assyrienne devaient leur origine
à une race non sémitique. C'est M. Jos. Halévy qui a le premier, et avec
une grande énergie, combattu cette théorie. M. St. Guyard se rattache à
l'opinion de M. Halévy et montre que le prétendu suméro-accadiea
n'existe pas.
The Hebrew-Revicw (Cincinnati, trimestriel), 2" volume. = = N° 3.
M. Lilieutlial : The Jew a riddlc. - — Thomas d'Aquino in thc Jewish lile-
raturc (d'après Ad. Jellinek). — ' M. Lilienlhal : TTn.'nn Nb or the Blood
Covenant.
Lilienthal, The Jew : Apologie des Juifs, — Lilienthal, Blood Covenant :
Coutumes diverses chez les peuples, qui expliquent la défense de la Bible de
se percer les chairs (Deut., xiv, l).
L'Univers Israélite (Paris, bi-mensuel). 37° année. = ^^N" 11. Schuhl :
Préventions des Romains contre les Juifs. = = N" 16. La Chalitsa de-
vant la loi française, lettre de M. 'Wogue et de M. Ch. Lyon-Caen, pro-
fesseur h la Faculté de droit de Paris.
La Veu del Montserrat CVich). = = Numéro du 22 avril 1882, p. 123.
Andreu Balaguer y Mcriuo : Apuntacions de bibliografia Catalana. En
Dalmau Planes y son traclact d'Astrologia que li feu cscriure lo rey eu
Pcre m de Catalunya y IV d'Arago.
Nous avons analysé, dans lo tome III de la lievue, p. 138"130, un travail
de M. Stoinschneider sur des tables astronomiques rédigées par Pierre
Gilebcrt et son élève Dalmacius Planes, et remaniées, dans un certain
système, pour le même roi, par un Juif castillan appelé Jacob Carsium.
M. St. avait cherché à fixer la date doTouvragc original et du remaniement
302 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
par Jacob Carsium ; il en était venu à cette conclusion que l'ouvrage de
Jacob Carsium avait été composé vers 1360 ou un peu plus tard, et que le
roi pour lequel furent faits et cet ouvrage et celui de Gilebert et de D. Pla-
nes, n'était pas, comme le dit le prologue du ms. latin 10,263 de la Biblio-
thèque nat. de Paris, Pierre III, roi d'Aragon, mais Pierre IV. M. An-
dréa Balaguer y M. vient de faire une découverte qui confirme l'hypothèse
de M. St. et résout la question. Cette découverte consiste ea trois pièces
dont voici l'analyse : 1. Le roi Pierre, en récompense des services à lui
rendus par Dalmatius Planes, et en dédommagement des dépenses faites par
celui-ci. pour certains livres d'astrologie qu'il a traduits [tradidistis] pour
le roi, lui accorde 300 florins d'or d'Aragon. Donné à Barcelone, le 6 jan-
vier 13G7 (Arch. génér. de la couronne d'Aragon, registre 1344, 1" 22 v°) ;
2. Reçu de 300 florins, signé par Dalmacius Planes, à Barcelone, le di-
manche 24 janvier 1367 (Arch. des protocoles du district notarial de Barc,
manuel des écritures du notaire Guillem de Sant Hilari) ; 3. Le roi Pierre
mande à son trésorier à Barcelone que Dalmau Planes, à qui il a promis
12 livres pour une grande et solennelle œuvre qu'il a faite, se plaint qu'il
lui reste dû encore une grande partie de cette somme -, le roi ordonne qu'on
lui donne tout de suite un à compte et qu'on lui paie le reste dès qu'il sera
possible. Donné à Saragosse le 31 décembre 1381 (Arch. gén. de la cour.
d'Aragon, reg. 1270, f° 41 r°). Pierre III d'Aragon, qui est Pierre II de
Catalogne, a régné de 1276 à 1285 (à corriger. Revue, ibid., p. 139), ce n'est
donc pas lui qui est mentionné dans ces pièces. Pierre IV d'Aragon, qui
est Pierre III de Catalogne, a régné de 1335 à 1385 (la conquête de la Sar-
daigne avait eu lieu en 1324, non eu 1297; à corriger ibid.). C'est ce Pierre
qui a commandé des travaux astrologiques à Dalmatius Planes, c'est lui
aussi qui est mentionné dans le prologue du ms. de Paris sous le nom de
Pierre III (de Catalogne), roi d'Aragon, de Valence, etc.
Il 'Vessillo israelitico (Casale-Monferrat, mensuel). 30*^ année. = =
No 3. A. Pesaro ; Cenni storici sulla comunità isr. di Cento. — F. Servi :
Samuel Romanelli (né à Mantoue le 17 sept. 1757 ; sou épitaphe ; mort à
Casale, 17 oct. 1814"'.
Zeitschrift der dcutschen niorgenliindisclien Gesellseliaft (Leipzig,
trimestriel). 36" vol. r=: = N" l.Nôldeke : Article sur l'ouvrage: Wo lag
das Paradies? de Fried. Delitzscli (voir Revue, III, p. 290).
Allgcmeiiic Zeituug des Judcnthuins (Bonn, hebdomadaire). 45°année.
=: = N° 28. M. J. Schleiden (notice nécrologique; voir la Chronique).
= = N°* 30-31. Moses Mendelssohn und der Rector Damm. := = N° 34.
Teatru israelit (le théâtre Israélite à Bucharest, d'après la Gazette de Co-
logne). =z=zW 40. Heinrich Heine als deutscher Patriot. =; = N° 46.
Alexander von Ilumboldt und die Judcu (extrait d'une lettre du 12 sept.
1836). = rrN" 48. Auch ein Curiosum (si les Peaux-rouges descendent
des dix tribus, etc., dans Otto Reveutlow, Amcrik. Skizzcn). == W 50.
Ludwig Barnay und Uriel Acosla im Grand-Theatcr zu Amsterdam.
Isidore Loeb.
BIBLIOGRAPHIE 303
Le Blîstépe dn Vîel Testaînent, publié, avec introduction, notes et glossaire,
par le baron James de Rothschild. Tome III. Paris, libr. Firmin Didot, 1881.
Ia-8° de cxi-428 pages.
C'est avec une douloureuse émotion que 'nous annonçons cet ou-
vrage posthume de notre regretté président de la Société des Études
juives. La publication du Mistére du Viel Testament, qu'il avait
commencée pour la Société des Anciens Textes français, est une
œuvre de longue haleine à laquelle il consacrait, depuis quelques
années, sa vaste érudition et tous ses soins de savant consciencieux.
Quoique d'autres mains que les siennes soient appelées à l'achever,
elle laissera, dans la littérature française, un témoignage touchant
de son goût pour la science et un souvenir des plus honorables pour
le nom illustre qu'il a porté.
C'est lui-même qui avait imprimé, dès le printemps de 1881,1e
texte de ce troisième volume ; il a préparé en grande partie l'introduc-
tion de ce volume, qui a été complétée par ses amis.
L'introduction est précédée d'un extrait du discours prononcé par
M. Gaston Paris, président de la Société des Anciens Textes fran-
çais, le 21 décembre 1881, à la séance générale de cette assemblée.
Nous devons à la mémoire du président qui a fondé notre Société de
reproduire ici quelques-unes des paroles prononcées par M. Gaston
Paris.
Le baron Nathan-James-Edouard de Rothschild est né à Paris le
28 octobre 1844 ; il a été enlevé à sa famille et à ses amis le 23 oc-
tobre 1881. C'est lui qui, en 1874, à Vichy, eut l'idée de fonder la
Société des Anciens Textes français. Il en parla à M, Gaston Paris.
« Nous y avons pensé plus d'une fois, lui répondit M. Gaston Paris,
mais nous craignons un insuccès. Les afl'aircs de ce genre ont un côté
temporel qui nous est étranger et qui nous effraie. — Sa proposition
me fit cependant réfléchir, continue M. Paris, et le lendemain, je lui
dis en l'abordant : Eh bien ! la société dont vous me parliez hier, nous
la fonderons si nous pouvons la présenter comme ayant pour tré-
sorier le baron James de Kolhschild. — J'y consens de grand cœur,
dit-il aussitôt, et la Société existait l'année suivante. Vous savez
quel intérêt il a toujours porté à nos travaux et quel précieux con-
cours il nous a donné et valu. Qu'il fût un trésorier hors ligne, c'est
ce qu'on pouvait attendre ; qu'il fût en môme temps un donateur li-
béral, on n'en était pas non plus étonné; mais ce qui surprit fort
ceux qui ne le connaissaient que de nom, ce fut de trouver en lui
un excellent éditeur de textes. Je ne parlerai pas ici des ouvrages
qu'il a publiés ou commencés ailleurs et qui auraient justement
fondé la réputation d'un littérateur sérieux ; mais le Mistére du Viel
30 'i REVUE DES ÉTUDES JUIVES
Testament, dont il a pu nous donner deux volumes, — et dont la
suite, grâce à la générosité de M'"^ j^ baronne James de Rothschild et
à l'active amitié de M. Emile Picot, ne nous fera pas défaut, — est
une publication hors ligne. Pour les soins à donner au texte, le
baron James étonnait parfois les éditeurs les plus diligents par la ri-
gueur de sa méthode et la minutieuse exactitude de son travail ;
pour le commentaire, il a montré une information que peu de sa-
vants auraient possédée au même degré... «
Nous pouvons nous associer entièrement, dans les limites de notre
compétence, à cet éloge. Il est justifié de nouveau par la Notice qui
précède le troisième volume du Mistére. Ce volume, qui va du vers
17,567 au vers 27,113, contient l'histoire de Joseph, la mort de Jacob,
la captivité d'Egypte, la vie et la mort de Moïse. Nous remarquons,
dans la Notice, les comparaisons, encore plus nombreuses que dans
les volumes précédents, tirées de la littérature rabbinique : Gomment
la femme de Putiphar était seule à la maison avec Joseph (p.xiiilisez
rascha, non roscha); pourquoi Putiphar était stérile (p. xvii); pour-
quoi Pharaon fit tuer les enfants mâles des Hébreux (p. lxxxvii ; à
la note 1 , lire Zunz, non Zung) ; etc. Le Midrasch connaît parfai-
tement bien l'épreuve du charbon (pageLxxxviii). Aux pages xxvi à
Lxxxii, on trouvera une bibliographie extrêmement remarquable des
pièces dramatiques dont Joseph est le héros : pièces latines (29 pièces),
françaises (31 pièces), béarnaises (1 pièce), ladines (3 pièces), ita-
liennes (9 pièces), espagnoles (10 pièces), anglaises (3 pièces), néerlan-
daises (11 pièces), allemandes (28 pièces), danoises (1 pièce), suédoises
(3 pièces), russes (2 pièces), serbo-croates (1 pièce), polonaises (1 pièce),
celtiques (2 pièces), sans compter les difïerentes éditions, quelquefois
très nombreuses, d'une même pièce et les traductions en langue
étrangère, qui sont également énumérées. Les mêmes indications
sur l'histoire de Moïse, qui a beaucoup moins occupé les dra-
maturges, se trouvent p. lxxxix et p. xc ; puis p. xcvi à p. c,
p. civ à cvi, p. ex à CXI. On peut apprécier par ces seules indications
l'étendue des recherches et le vaste savoir de M. le baron James de
Rothschild. La lecture do son dernier ouvrage a réveillé dans nos
cœurs le regret et la douleur de l'avoir perdu.
Isidore Loeb.
Torqiicinada. drame, par Victor Hugo. Paris, libr. Calmanu Lévy, in-S» de 203 p.
L'Inquisition est loin de nous, mais le souvenir de ses épouvanta-
bles autodafé est encore si vif qu'on ne saurait prononcer son nom
sans éveiller dans les cœurs un sentiment de douleur et de réproba-:
BIBLIOGRAPHIE 305
tion. M. Hyacinthe Loyson s'est donné une peine superflue lorsqu'il
a récemment, dans une conférence publique, pris à parti sur ce sujet
un prédicateur de Notre-Dame. L'Inquisition d'Espagne, au moins,
avec sa procédure hypocrite, ses hideuses processions, ses cachots,
ses tortures et ses bûchers, restera à jamais exécrée comme une des
inventions les plus atroces du fanatisme religieux. Torquemada n'a-
point créé l'Inquisition, comme Victor Hugo parait le supposer, car
elle existait longtemps avant lui, sous un aspect moins barbare, il
est vrai, dans le midi de la France, mais il l'a introduite en Castille,
il en a été la vivante incarnation. Victor Hugo Fa fait, en un sens,
trop grand. Son Torquemada est un génie sanguinaire, il effraie, il
épouvante, il n'est pas, ce qu'il devrait être, haïssable et odieux.
Lorsque, repaissant ses yeux du quemadero où gémissent ses vic-
times, il lance au ciel son cantique sauvage (p. 173), on frissonne et
on tremble comme devant un monstre, mais l'impression est plutôt
physique que morale. Cet homme n'a pas la moindre conscience du
mal qu'il fait, ce n'est pas un homme, avec un cœur et des entrailles,
c'est une formule, un paradoxe, le massacre par amour, l'homicide
par charité. C'est le sophisme d'un frénétique ou d'un halluciné. Ces
théories féroces pouvaient hanter le cerveau de maint inquisiteur, et
plus d'un, en y mettant beaucoup de bonne volonté, pouvait s'ima-
giner qu'en brûlant les Juifs, l'Inquisition leur donnait une preuve de
charité angélique, mais tout le monde sait qu'à ces beaux senti-
ments s'en mêlaient d'autres beaucoup moins nobles. On n'était déjà
pas si fanatique à la fin du xv° siècle, la politique avait bien sa part,
une part très grande, dans les persécutions contre les Juifs. L'Inqui-
sition aussi bien que le roi d'Espagne ne pensaient pas seulement au
salut des âmes et aux intérêts du ciel lorsqu'ils dressaient les bû-
chers en permanence sur les places publiques, et Torquemada n'était
pas aussi inconscient, aussi irresponsable ni aussi séraphique qu'on
pourrait le croire. Lors môme qu'il eût été ce mystique sincère que
nous représente Victor Hugo, sa sincérité ne pourrait pas l'absoudre.
Son erreur est trop grave, son assurance trop grande, on n'a pas le
droit de se tromper ainsi et à ce point. Il est bon de réfuter ses théo-
ries, il faut aussi flétrir ses actes. Ils ne sont pas seulement condam-
nables parce qu'ils sont absurdes et insensés, mais parce qu'ils sont
cruels, inhumains, injustes, immoraux. Il n'y a pas de maladie men-
tale qui justifie de tels forfaits.
Victor Hugo ne les justifie pas, l'ùme de l'iuimauité est en lui, il est
le grand poète des misérables, le père miséricordieux des humbles et
des malheureux. Mais, dans ce drame, son cœur s'est tu, impuissant
peut-être à exprimer sa douleur. Ce qu'il a vu surtout c'est le côte
extérieur, dramatique et terrible de l'Inquisition, les san-benitos, les
cagoules, les bannières noires, les têtes de mort, les poteaux, les
flammes, les têtes hurlantes des suppliciés. L'action du drame est
peu de chose : Torquemada obtient du pape la permission d'intro-
duire l'Inquisition en Espagne, il fuit cliasser les Juifs, humilie le roi
306 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
et couronne son œuvre en sauvant à sa manière, toujours par
pur amour, un jeune prince qui l'avait tiré de Vin-pace où il
allait mourir. La plus belle partie de l'œuvre sont les trois ou
quatre tableaux qui la résument. Celui qui termine le prologue
(p. S7) et où Torquemada descend marcbe à marche dans Vin-pace,
serait, à la scène, d'un effet prodigieux. Tout aussi dramatique est
la rencontre de Torquemada avec François de Paule (p. 113), son
Irruption chez le roi au moment où celui-ci va céder à la prière des
Juifs et révoquer l'édit d'expulsion fp. 171), son grand monologue du
quatrième acte dont nous avons parlé plus haut. Mais cette figure
grandiose parle aux yeux. Les personnages du drame sont pitto-
resques, magnifiques, mais unis, nus et de bronze. L'âme humaine
est plus variée et compliquée que cela. Le pape signe en riant
l'édit que lui demande Torquemada (p. 128), on sait cependant qu'il
n'y a pas mis cette désinvolture et que la bulle n'a été accordée
qu'après d'assez longues négociations. Le pauvre Moïse b. Habib,
le grand rabbin (pourquoi Victor Hugo a choisi justement ce nom,
nous ne saurions le dire), se répand en lamentations éloquentes
(p. 163J\ mais sa plainte n"a qu'une note, le gémissement; le dis-
cours que la jeune juive de Montesquieu adresse à l'Inquisition est
bien plus fort, dans sa simplicité, et plus touchant. Le seul person-
nage qui s'exprime comme un homme, c'est François de Paule
(p. 123). Sa parole est douce, comme il convient au bon ermite, il n'y
manque qu'un peu plus de fermeté et d'accent. Cette protestation
énergique que nous aurions souhaitée, il aurait fallu la placer dans
la bouche d'un Juif ou dans celle d'un grand d'Espagne. 11 aurait
parlé au nom du christianisme, au nom de la morale et des intérêts
de l'État. A côté des effusions lyriques de Torquemada, il eût été bon
et consolant de faire entendre la voix de la raison, de la justice, de la
religion, de l'humanité. Quelque politique sage et modéré, quelque
évoque véritablement pieux s'en serait chargé. Et nous aurions été
tout à fait soulagés si un chevalier de tempérament moins calme ou
un Juif moins endurant nous avait donné ce spectacle d'une bonne
explosion de colère et d'indignation.
Isidore Loeb.
La tluivc, poésie par Henuy Gréville, dans la Revue politique et lill&aire,
du 7 janvier 1882, p. '23-26.
L'histoire ([ui se déroule en traits rapides daus « La Juive » n'est
empruntée ù aucune chronique. L'uclion se passe dans (^ une ville
BIBLIOGRAPHIE 307
d'Espagne », on ne sait laquelle. Ni la Juive ni son fils ne portent
un nom. De telles indications trop précises auraient pu diminuer la
portée morale de la pensée philosophique. Le plaidoyer daté de fé-
vrier 1876, est prononcé non point en faveur d'un individu, mais en
faveur d'une race. Ce que l'auteur se propose, c'est de flétrir non
point quelques hommes, mais de vieilles institutions et de nouvelles
tendances où l'on cherche à les faire revivre.
La Juive vivait ignorée dans une ville d'Espagne, se tenant à
l'écart «tout au bout du faubourg», habitant sa hutte et son tout
petit jardin avec son fils, sans qu'on s'occupât, dans l'humble voisi-
nage, de sa foi judaïque, lorsque la très sainte Hermandad, dont « le
feu vorace» lui avait jadis dévoré son mari, parvint à découvrir le
secret de son origine, et la fit saisir avec l'enfant.
Une Juive autheatique, ah ! la belle capture !
La mère, conduite devant «le juge triomphant», avoua tous ses
méfaits et refusa d'abjurer. Mais, par un mensonge pieux, elle vou-
lut sauver l'enfant. Ce n'était pas son fils, dit-elle; elle avait volé cet
enfant à Séville, ayant eu le malheur de voir mourir le sien. Le len-
demain matin, lorsque l'aube parut, les juges vinrent en pompeux
équipage chercher leur précieuse conquête. L'Inquisiteur ne voulut
même point permettre que, par un dernier baiser, la mère, « bête
immonde », souillât l'innocence nouvelle de ce jeune chrétien
ressuscité par le Saint-Office. Et la procession l'emporte de force au
milieu du tapage :
L'église triomphante acclamait sa victoire ;
La Juive succomba. . . Levant son œil hagard,
Elle appela son fils. L'enfant dans son regard
Connut la vérité! « Mère! • dit-il. La llammc
Montait. . . La femme juive à Dieu rendit son âme
Heureuse et consolée,. et ne regrettant rien.
Son fils n'oublia point, et ne fut pas chrétien.
Le lecteur me pu'donncra d'avoir reproduit, dans un recueil en-
tièrement consacré à la science, le sujet et quelques vers de ce petit
drame où la grandeur des idées est encore rehaussée par la simpli-
cité sans apprêt du style et la noble pureté de l'expression. Je sou-
haite d'avoir pu mettre, dans ma courte analyse, quelque chose de
l'admiratiou que m'a fait éprouver la lecture de cette poésie.
II. D.
CHRONIQUE
L'allé Grégoire. — Un comité s'est formé à Lunéville pour élever
une statue à Tabbé Grégoire. Aucun personnage de la Révolution
française ne mérite plus que ce modeste prêtre la reconnaissance
des Juifs pour la part qu'il a prise à leur émancipation. On sait que
c'est lui qui remporta le prix proposé par l'Académie de Metz sur la
question de la situation sociale des Juifs. Son mémoire a été im-
primé sous le titre de : Essai sur la régénération physique, morale
et politique des Juifs...., par M. Grégoire, curé du diocèse de Metz
(Metz, imp. Claude Lamort; Paris, libr. Belin, 1789). La même an-
née, il écrivit sa Motion en faveur des Juifs, précédée d'une notice his-
torique sur les persécutions qu'ils tiennent d'essuyer en divers lieux,
notamment en Alsace, et sur V admission de leîtrs députés à la Barre
de VAssemllé^ nationale (Paris, Belin, 1789). Son Histoire des sectes
religieuses esl de 1814. Dans la séance de l'Assemblée nationale du
3 avril 1789, il réclama lïntervenlion de l'Assembléepour faire cesser
les persécutions en Alsace. Il plaida la cause de l'émancipation des
Israélites dans les séances du 28 septembre 1789, du 28 janvier 1790,
et ce fut sous sa présidence, dans la séance du 18 janvier 1791,
qu'une motion fut faite pour régler définitivement cette question ;
elle ne le fut cependant que le 27 septembre suivant. Après le pre-
mier Empire, l'abbé Grégoire vécut pauvrement et nous nous rap-
pelons qu'Adolphe Crémieux fut son avocat dans un procès qu'il
soutint pour obtenir le règlement d'une pension que lui devait l'État.
M. A. de Longpérier . — M. Henri-Adrien Prévost de Longpérier,
membre de l'Institut, ne à Paris le 21 septembre 1816, est mort le
14 janvier 1882. C'était, parmi les savants français, une des person-
nalités les plus remarquables et les plus sympathiques. M. de L. s'est
aussi occupé des antiquités juives. Des communications de lui sur
des sceaux juifs et sur la ville d'IIysope se trouvent dans la col-
lection des Comptes-rendus de l'Académie des inscriptions, et une
étude sur les pierres tumulaires hébraïques du Musée de Cluny, à
Paris, dans le Journal des Savants.
M. Lilienihal et la Russie. — Le D"" Lilienthal, rabbin, né à Munich
en 1815, est mort à Cincinnati, le vendredi 31 mars 1882. Sa biogra-
phie forme un chapitre instructif de l'histoire des Juifs de Russie,
sur lesquels se portent en ce moment l'attention et les sympathies
de l'ELuope. 11 y u environ quarante ans, le nom de M. Lilienthal
CHRONIQUE 309
était dans tous les journaux. 11 a eu, à cette époque, son heure de
célébrité. Une généreuse illusion l'avait conduit en Russie, où il
devait, avec l'aide du gouvernement, régénérer les écoles Israélites.
De cruelles déceptions l'y attendaient. Après de louables efforts,
rendus stériles par la politique changeante et finalement persécu-
trice du gouvernement, il dut quitter ce pays le cœur plein d'amer-
tume et de douleur.
M. Lilienthal s'est d'abord fait connaître par un travail sur les
manuscrits hébreux de la bibliothèque de Munich, publié dans le
Beiblatt de \'Allge77i. Zeitung des JudentJmms^ en 1838'. Peu de temps
après, il fut nommé prédicateur et directeur général des écoles Israé-
lites de Riga. Voici dans quelles circonstances.
Riga était la seule ville de Livonie où, à cette époque, il fût permis
aux Israélites de demeurer. La communauté Israélite de cette ville
se félicitait d'avoir deux siècles d'existence, elle trouvait sa situation
tolérable, surtout depuis l'ukase du 13/25 avril 4 835, qui avait réglé
et jusqu'à un certain point amélioré la situation des Juifs en Russie*.
Elle avait le grand désir de fonder une bonne école et elle avait
publié un appel pour trouver un directeur*. Cet appel fut. renouvelé
en '1839, lorsqu'elle eut obtenu du ministère de l'instruction pu-
blique un décret, daté du 12 juin 1839, qui lui permit de lever un
impôt spécial de 50 copeks pour l'entretien de cette école^. Les Israé-
lites de Riga faisaient remarquer avec bonheur que cette école était
la première école juive de Russie placée sous l'autorité de l'Univer-
sité, comme toutes les autres écoles du pays ^ L'école fut ouverte le
4 5/27 janvier 4 840, sous la haute direction de M. Lilienthal^ qui
paraît avoir été désigné pour ces fonctions à la communauté par
M. le D'" Philippson, directeur deVAllgemeine Zeitung des Judenthums.
Les efforts pour la culture de la communauté étaient encouragés par
le comte Ouwaroff, ministre de l'instruction publique % qui, en
toutes circonstances, montra les meilleures dispositions en faveur
des Juifs. L'empereur Nicolas envoya même à l'intelligent prédica-
teur une bague en brillants, en témoignage de satisfaction*.
L'exemple de Riga porta ses fruits. Beaucoup d'autres commu-
nautés russes voulurent avoir des écoles nouvelles. C'était l'empe-
reur lui-même qui avait pris, dans le conseil d'Ktat, l'initiative de
mesures libérales pour le progrès de l'instruction parmi les Israélites.
Une enquête avait été ouverte pour cet objet, et, le 45 janvier 4841, le
> P. /i9 et ss.
* La traduction de cet ukase important se trouve dans VAllijenicinc Zeitung des Ju-
denthums, 1840, p. \M et ss. Nous avertissons ici <[u'à moins de mention contraire,
toutes les citations de cet article sont tirées de ce mOnio journal.
3 1837, p. /.ÎO et 414.
« 18:59, p. 81.
'' 1839, p. 390.
« 1840, p. 174; 221. 2f)9, 339.
7 1840, p. r)27.
8 1840, p. Cil.
T. IV. 21
310 REVUE DES ETUDES JUIVES
ministre de l'instruction publique avait appelé M. le D"" Lilienthal
à St-Pétersbourg '. M. L. fut chargé de chercher des professeurs
en Allemagne et de préparer les plans, programmes, projets néces-
saires pour une vaste œuvre de réorganisation des écoles juives. Le
6 mars, de retour à Riga, il pouvait déjà dresser une liste de plus de
200 candidats aux fonctions d'instituteur.
Cependant les papiers restaient au ministère et les candidats se
découragèrent. Au mois de décembre 1841, un Israélite de Wilna
s'entretint des écoles de sa ville avec le ministre et il fut convenu
entre eux que M. L. se rendrait dans cette ville pour étudier la
question. Il y alla en janvier 1842'^ La communauté avait déjà
réuni un fonds de 5,100 roubles pour la fondation de l'école et tout
semblait annoncer que le projet aboutirait promptement. Cependant
il y eut certaines résistances dans la communauté. Il ne manquait
pas de gens pour dire que l'instruction sans l'émancipation rendrait
les Juifs malheureux, parce qu'ils deviendraient beaucoup plus sen-
sibles à l'infériorité légale dont ils étaient frappés, et que les jeunes
gens élevés dans les écoles formeraient une classe de mécontents qui
se plaindraient des hommes et de Dieu. L'Etat et la religion avaient,
à leurs yeux, un égal intérêt à ne pas donner à la jeunesse Israélite
une éducation qui serait en désaccord avec la situation légale des
Juifs en Russie. Ce raisonnement était en partie fondé, si aucun rai-
sonnement pouvait prévaloir contre la nécessité de l'instruction,
mais une grande partie de la communauté juive de Wilna désirait
ardemment améliorer les écoles Israélites. On a, dans les lettres
d'un témoin oculaire, le tableau très animé des discussions, des
luttes, des espérances et des craintes qui partageaient la commu-
nauté et avaient enflammé les esprits ^
Avant que rien ne fût arrêté à Wilna, les Israélites de Minsk
avaient appelé M. L. pour les aider également à fonder une bonne
école. Cet appel parut immédiatement suspect à ceux qui connais-
saient cette communauté. Elle passait pour un des centres les plus
ardents de l'orthodoxie aveugle et de ce fanatisme particulier appelé
en Russie le hassidisme. Les amis de M. L. craignirent un piège et
le dissuadèrent, mais en vain, de se rendre dans cette ville. Leurs
appréhensions furent justifiées par l'événement. M. L. fut mal
accueilli, accablé d'insultes et de calomnies. Ce qu'il y eut de plus
l'ùcheux dans cette aventure, c'est que l'opposition qui avait éclaté à
Minsk enhardit l'opposition d'abord timide de certains Israélites de
Wilna. D'un autre côté, les amis de M. L. dans cette ville avaient
fini par le trouver trop tiède, trop enclin à respecter les scrupules
religieux des orthodoxes, ils ne lui prêtèrent plus un appui aussi
énergique. Le quatrième jour de Pâque, il y eut, à Wilna, une
• 18'i2, p. 603.
« 1842, p. S9 et 11)3.
' B. Maudclstmnm, CallUfhildir, Wicu, 1877, 2-^^ partie, p. IH cl ss.
CHRONIQUE 311
assemblée générale de la communauté où les adversaires de l'école
combattirent avec la dernière énergie. La lutte ne fut pas décisive,
mais les passions étaient excitées au plus baut point et M. L. lui-
même ne conserva pas, dans ces pénibles circonstances, toute l'éga-
lité d'âme qu'il aurait fallu '. Il était blessé, irrité, il ne voyait de
salut que dans l'intervention active du gouvernement. D'après lui,
le ministre de l'instruction publique avait à dessein laissé la crise se
produire et se développer, afin de connaître l'état des esprits dans
chaque communauté et d'abandonner les communautés où la majo-
rité était contraire aux écoles.
Le 13/25 avril, M. L. se rendit à Saint-Pétersbourg, pour rendre
compte de son voyage au ministre, et, sur la proposition de celui-ci,
l'empereur signa, le 22 juin/4 juillet, un ukase dont voici les princi-
pales dispositions : Par un rescrit impérial du 19/31 août 1827, toutes
les écoles existant dans l'empire, sauf les écoles militaires et ecclé-
siastiques, ayant été mises sous la direction du ministère de l'instruc-
tion publique, celui-ci était maintenant chargé d'appliquer cette
mesure à toutes les écoles des Juifs, écoles primaires, écoles rabbi-
niques, etc. Une commission provisoire, composée de quatre rabbins,
un pour chacun des gouvernements où demeurent des Juifs, sera
nommée pour contribuer à l'exécution de la mesure ; elle siégera à
Saint-Pétersbourg. En outre, sur la proposition du ministre de
l'instruction publique, M. L. fut chargé par l'empereur de parcourir
tous les gouvernements russes habités par les Juifs, afin de faire de
la propagande en faveur des écoles. Il dut se mettre en route le
30 juillet/11 août, et une somme- de 10,000 roubles fut mise à sa dis-
position pour frais de voyage. Une lettre-circulaire du comte Ou-
warofl', ministre de l'instruction publique, aux gouverneurs, datée
du 23 juillet/ 4 août, annonçait en excellents termes l'intention for-
melle de l'empereur de placer les écoles juives sous la direction du
ministère et d'améliorer ces établissements, en même temps qu'elle
leur recommandait de bien accueillir et de seconder le directeur des
écoles Israélites de Riga, le rabbin D"' Lilienthal. Enfin, une lettre du
même ministre, datée du 22 juillet/3 août, contenait des instructions
précises pour M. Lilienthal :
« Votre itinéraire passe par Riga, Mitau, Kowno, Wilna, Minsk,
Grodno, Bialistock, Zitomir, Berditschew, Kamenecz-Podolsk, Kischi-
new, Odessa, jusqu'à Cherson; de là, vous passerez, dans le gouver-
nement de Kiew et irez à Kiew par Uman ; puis vous continuerez
votre route par Tschernigow, Mohilew et Witebsk, pour revenir à
Saint-Pétersbourg. »
La lettre prescrivait ensuite à M. L. la conduite suivante : Visiter
partout les autorités civiles et scolaires, expliquer aux Juifs les
intentions de l'empereur, lâcher d'obtenir d'eux le vitle des ressources
nécessaires, visiter leurs écoles exisluuleSj recueillir sur elles des
> 1842, p. OOG.
312 REVUE DES ETUDES JUIVES
renseignements statistiques, s'enquérir des jeunes gens instruits et
de valeur, dont le concours pourrait être utile; enfin, tâcher d'être
de retour avant le 15 octobre. A cette époque, les séances de la com-
mission spéciale des quatre rabbins seront ouvertes, et M. L. avait
reçu du ministre la permission d'y inviter sir Moses Montefiore et
Crémieux. Après que la commission aurait délibéré, on se proposait
de demander l'appui et le concours financier des Israélites des autres
pays.
Avant d'entreprendre son voyage, M. L. rédigea en hébreu, sous le
titre de î^3>iia'^ ^ny/2, une espèce de manifeste où il s'etlbrçait de pré-
parer les esprits et de les convaincre de l'utilité de l'œuvre'.
Les communautés juives parurent heureuses de l'accueillir. Des
lettres de Mohilew, où M. L. se trouvait en octobre, de Varsovie et
de Berditschew, indiquaient, chez les populations Israélites, un véri-
table enthousiasme*. Il en fut de même à Odessa, lorsque M. L. y
vint à la fin du mois d'octobre', à Kischinew*. Le 14/26 janvier 1843
M. L. était de retour à Saint-Pétersbourg et comme il craignait que
sa mission ne durât encore longtemps, il donna sa démission de
directeur des écoles de Riga^ La convocation de la commission des
quatre était attendue pour fin février" et on espérait que sir Moses
Montefiore prendrait part aux séances.
La commission se trouva formée à la fin d'avriF. Elle était com-
posée des personnes suivantes : le conseiller d'État, chevalier de
Wrontchenko, président ; chevalier Dukstadukschinski, rapporteur ;
D^" Lilienthal, commissaire ; un secrétaire, le rabbin de Wolosni, le
rabbin de Lubawitz, le directeur de l'école Israélite d'Odessa, un
banquier Israélite de Berditschew. Elle siégea jusqu'au vendredi
27 aoùt/8 septembre*, mais il se passa du temps jusqu'à ce qu'on
entendit parler de ses délibérations et des résultats qu'elles avaient
eus. Ce n'est que le 13/23 novembre 1844 qu'on en put apprécier les
effets par un ukase de l'empereur Nicolas signé, à cette date, à
Gatschinio, et contenant les dispositions suivantes'' :
1*^ Pci-mission accordée de nouveau aux Juifs (en vertu d'un ukase
de 1804 et d'un autre de 1833) de fréquenter les écoles chrétiennes,
de fonder des écoles du l*^^'' ordre (écoles élémentaires) et du 2° ordre,
de former des écoles rabbiniques ayant rang de gymnase;
i° Les élèves juifs dans les écoles juives ou chrétiennes placées sous
la direction du gouvernement, les professeurs chrétiens ou juifs dans
> l.s'ri. ]j. Oiii ; <•!'., p. (;(i2.
■" 1842, p. 714. Tlo.
' 1842, p. 760, et 1S.',;i, p. a,
" 1843, p. 22.
• 1843, p. 131, M. L. lui remplacé jcn octobre 1843; p. G4'J.
•■■ 1843, p. 190.
" 1843, p. 310.
» 1843, p. 002.
« 184',, p. 737.
CHRONIQUE 313
les écoles juives, jouiront de tous les droits et privilèges accordés
aux autres élèves ou professeurs.
Bientôt après (13/25 décembre 1844), parut un règlement du comte
Ouwarotï sur l'organisation des écoles juives'. Ce règlement con-
tenait 60 articles et organisait, jusque dans le détail, les cinq
genres d'écoles suivantes : Ecoles (élémentaires) fondées avec la per-
mission du ministre, talmud-tora pour les pauvres entretenus par
des dons volontaires, écoles privées, ;g^c/ié^(9^ ou écoles talmudiques,
Mt-hammidrasch ou klauses. Vers la fin du mois de juin, le rapport
général du ministère de l'instruction publique pour l'année 1844 se
bornait encore à mentionner ces mesures, sans rien dire des effets
qu'elles avaient produits-. Dans tous les ukases précédents il avait
été question vaguement des ressources à créer plus tard pour l'en-
tretien des écoles juives. Ces ressources devaient être fournies par les
Juifs eux-mêmes et le gouvernement n'entendait y contribuer pour
rien. Un ukase d'octobre 184o institua, à cet effet, un impôt juif sur
les lumières que les Juifs ont l'habitude d'allumer pour célébrer le
samedi et les fêtes'. Un autre impôt, appelé Korl) ou Korbak, et qui
était autrefois un impôt volontaire consenti par les communautés,
plus le produit de la ferme des imprimeries hébraïques, étaient éga-
lement consacrés aux futures écoles"^. Cependant les anciennes écoles
étaient maintenues telles quelles et des commissions provisoires,
nommées par le ministère, au nombre de 97, leur accordaient la
permission de continuer à subsister comme par le passé -'. Plus de
10,000 anciens instituteurs avaient reçu des certificats de ce genre.
Le rapport général du ministre de l'instruction publique pour l'année
1845, publié fin 1846.. se bornait à constater cette situation qu'il
paraissait considérer comme un grand progrès. Il résumait l'état des
écoles juives en Russie par le tableau suivant'' : •
' 1845, p. 6 et p. 17.
2 184.'5, p. 523.
3 1845, p. 655 ; 184G, p. 2fi, et p. 232 ; p. 291, détails.
^ La Iiorobka ou kniplia est un impôt sur la viande de consommation tuée suivant
les rites juifs. En Pologne elle s'ap^pelle /;oscheni(f. Le produit de cet impôt devait
être exclusivement employé en faveur des communautés juives, de leurs écoles, de
leurs pauvres, des cultivateurs juifs. Mais tandis qu'en Polof^nc seule il rapporte
environ 400,000 roubles par an, le gouvernement n'accorde, sur cette somme, qu'un
faible subside de 9,000 roubles par an à l'hôpital juif de Varsovie ; le reste rentre
dans les caisses de l'Etat (Louis Lubliner, De la rondilion jiolitiqwe et civile des Juifs
dans le royaume de Pologne, IJruxellcs, l'"' janvier 1800, p. 40 et p. 72^
En Pologne, il existait (et existe peut-être encore) un impôt spécial payé jiar les
Juifs des provinces qui viennent séjourner à Varsovie. Cet impôt, appelé laçzctlel
(billet de séjour), devait être consacré à l'entretien des écoles primaires juives du
royaume, mais il n'a pas reçu cette destination ni aucune autre connue. Tout au plus
y a-t-on puisé ce qu'il fallait pour le séminaire rabbiniquc créé par décret organiipu;
du 15 novembre 182G, cl dont l'entretien aurait dû, en vertu de ce décret, être à la
charge de l'État (Lubliner, p. 44-45). Le ta^zettel rapportait environ 700,000 roubles
par an [Iliid., p. 68j.
• 1846, p. 490.
fi 1847, p. 80.
314 REVUE DES ETUDES JUIVES
Ecoles ayant rang de gymnase — 79 avec 20,436 élèves.
— du 2'' rang 447 1
— du 1 ^■'" rang 1 ,047 | avec 87,935 —
— privées 585 )
2,158 108,391 élèves.
En outre, cinq écoles réelles israélites (Odessa, Riga, Kischinew,
Wilna, Uman) comptaient ensemble 273 élèves.
Toute cette grande agitation, qui avait duré plus de trois ans,
n'avait donc abouti à rien. Faut-il attribuer cet échec à Timpuissancc
et à l'incurie de l'administration ou à la résistance des Juifs? Ni l'un
ni l'autre. Il eut pour cause principale un changement profond qui
s'était opéré dans l'esprit de l'empereur et qui eut, pour les Juifs, les
plus funestes effets.
L'empereur avait commencé par chercher sincèrement à améliorer
la situation des Juifs, en les laissant néanmoins sous un régime
d'exception. Son but était de les assimiler plus qu'ils ne l'avaient été
jusque là au reste de la population russe. Mais une fois engagé dans
cette voie, ses habitudes d'esprit et son caractère absolu devaient le
conduire plus loin qu'il n'avait pensé d'abord. Puisqu'on voulait
transformer les Juifs, pourquoi s'arrêter à des demi-mesures ? Les
Juifs ne seraient véritablement russifiés que le jour où ils
auraient embrassé la religion russe, et il y avait des moyens de les
y amener. Il paraît hors de doute que l'empereur poursuivit pendant
quelque temps ce projet tyrannique. Il se rattachait à un plan géné-
ral d'unification de la Russie par l'établissement de l'unité religieuse.
Une grande activité était déployée, pour cet objet, dans les minis-
tères pendant les années 1844 à 1846, Les Juifs n'étaient pas les
seuls qu'on voulut rattacher de force à l'Église dominante, les pro-
testants, les catholiques, les nombreuses sectes dissidentes de Russie
furent également en butte à des tentatives plus ou moins directes de
conversion, mais les Juifs furent plus que tous les autres harcelés
par l'administration et accablés de vexations. Quelques-unes des
mesures prises contre eux avaient le caractère d'une véritable per-
sécution. Il leur semblait évident que ces violences étaient calculées
et avaient pour objet leur conversion. Comment auraient-ils pu
accepter d'une main aussi cruelle le bienfait suspect des écoles?
Les mauvaises intentions ou dispositions du gouvernement parais-
saient se révéler dans tous ses actes. En 1844, il s'était proposé de
faire traduire en hébreu, à l'usage des Juifs, les prières de l'église
russe ♦. Un ukase du 1/13 février 1845 avait supprimé toutes les
administrations des communautés juives et avait remis la direction
de celles-ci aux autorités civiles - : c'était les désorganiser complè-
tement. Les livres hébreux étaient soumis à des impôts excep-
' 1844, p. 437.
' 1846. p. 1G5 cl 377-379.
CHRONIQUE 315
tionnels'. La loi militaire surtout semblait révéler la malveillance
du gouvernement et aussi son intention d'amener les Juifs de force
au christianisme.
Depuis l'ukase du i6 août 1827, les Juifs de la Lithuanie,delaPodo-
lie, de la Volhynie, de l'Ukraine et delà Nouvelle-Russie, etc., étaient
soumis au service militaire'. Il y avait, en 1843, environ 10,000 sol-
dats juifs dans l'armée russe, dont 4,000 matelots, et les officiers
étaient unanimes à vanter leur conduite et leurs bons services. Dans
d'autres pi'ovinces, et particulièrement en Pologne, les Juifs n'étaient
par astreints au service militaire. Au commencement de 1843, il fat
question de les y soumettre tous. Un ukase fut publié (ou préparé?)
à ce sujet, puis letiré. On prétendait que l'empereur avait fait
l'ukase pour tirer les Juifs de leur isolement, mais qu'ensuite il
avait pensé qu'ils n'étaient pas dignes de servir dans l'armée*. Ce-
pendant le 26 septembre / 8 octobre 1843 l'empereur signa, dans la
forteresse de Nowo-Georgiewsk, un ukase par lequel tous les
Juifs de Pologne étaient soumis à la loi du recrutement militaire à
partir du 1°'' janvier 1844, l'impôt de recrutement de 105,299 roubles
argent qu'ils payaient jusque là était aboli, et enfin il leur était
permis, comme aux chrétiens, de se faire remplacer, mais seulement
par des Juifs *. Bien entendu, cette mesure n'était pas accompagnée
de son corollaire naturel : l'égalité des droits civils. La loi militaire
excluait les Juifs des grades à partir de celui d'officier, un règle-
ment de février 1844 les excluait du service de la garde et ordonnait
que les nouvelles recruesjuives seraient toutes envoj'ées dans le Cau-
case, pour la guerre contre les montagnards, ou incorporées dans
les compagnies d'ouvriers militaires *. On faisait remarquer, en 1845,
que depuis longtemps aucun Juif n'avait été nommé même au grade
de sous-officier. Faites-vous chrétiens, et vous avancerez, tel était
le langage que la loi tenait aux soldats juifs. De nombreuses dispo-
sitions tendaient à, hâter leur conversion. Un Juif qui se faisait bap-
tiser était exempté du service militaire. En 1843, un ordre secret
enjoignit au procureur du Synode de faire faire un catéchisme pour
la conversion des enfants juifs élevés dans les écoles militaires, et,
en 1844, l'ordre formel fut donné d'élever ces enfants dans la religion
chrétienne **. Pour apprécier toute la portée de cette mesure, il faut
savoir qu'à cette époque le service militaire durait vingt-cinq ans,
que les communautés juives étaient forcées do fournir chaque année
un nombre d'hommes déterminé qui pouvaient avoir de douze à
» 18/iG, p. 282 et 749; 1847, p. C89.
» 1843, p. 205,
3 1843, p. 204-205.
* 1843, p. OiiG, 674.
!> 1844, p. 678.
fi II l'aut lire, sur tous ces faits et d'autres encore, VAUf/cmnne ZcUuntj des Jinlen-
tliums, 184ÎJ, p. 464, G81, 693 et suivantes. On racontait ([ue, dans une revue, l'em-
pereur ayant durement reproché à deux matelots ju ils do ne pas se convertir, ils se
jetèrent à la mer sous ses yeux (1845, p. 714).
316 REVUE DES ETUDES JUIVES
vingt-cinq ans. Les enfants ainsi fournis étaient élevés dans les
écoles militaires et on comprend le désespoir des mères juives à qui
on arrachait leurs enfants pour les conduire au catéchisme. Les
scènes de séparation étaient déchirantes '.
Une autre persécution vint atteindre les Juifs au moment même où
Ton prétendait les relever par la création de nouvelles écoles. Un
ukase du 20 avril /2mai 1843 ordonna que tous les Juifs demeurant
dans une étendue de 30 verstes à partir des frontières autrichienne
et prussienne seraient obligés de quitter cette région et d'aller s'é-
tablir dans un des 17 gouvernements habités par leurs coreligion-
naires -. Cette mesure cruelle décrétait la ruine de milliers de fa-
milles. Leurs inquiétudes furent d'abord vives, puis on s'imagina
que l'ukase ne serait exécuté qu'en partie et seulement contre quel-
ques misérables qui faisaient la contrebande sur la frontière ^ Bientôt
on crut savoir qu'une déclaration officielle restreignait l'ukase aux
habitants juifs des campagnes, beaucoup moins nombreux que ceux
des villes''. Vain espoir ! Au mois d'octobre, les Juifs de Radziwillow
furent avertis que la mesure allait être exécutées Ils protestaient en
vain contre l'accusation de faire la contrebande en disant que, par
exemple, sur la frontière autrichienne la plupart des contrebandiers
étaient des chrétiens de Galicie. Dans la Lithuanie, les Juifs avaient
prouvé que, sur environ 100 contrebandiers arrêtés, ily avait à peine
5 Juifs. Tout fut inutile, trente-trois communautés juives de la Lithua-
nie furent sommées de se retirer à l'intérieur et on ne leur laissa le
choix de s'établir que dans 7 gouvernements, tout en leur défendant
de s'expatriera On estimait à 30,000 (au moins 150,000 à 200,000 âmes)
le nombre de familles qui allaient être atteintes et ruinées par l'u-
kase'' : leurs maisons, leur mobilier ne pouvaient être vendus qu'à des
prix dérisoires, leurs moyens d'existence leur étaient enlevés. On com-
1 Un ukase du 4/16 septembre 1843 pour le ro_yaume de Pologne donnait à l'auto-
rité administrative le droit de prendre au recrutement jusqu'à làge de vingt-cinq ans
les Juifs inculpés de vagabondage ou de toute autre contravention aux lois, et ces
recrues n'étaient pas portées en décompte sur le contingent annuel à fournir par les
communautés juives. C'était l'arbitraire érigé en loi (Lubliner, p. 73).
Après la guerre de Crimée, le Comité hébraïque (chargé des alTaires juives) qui
siège au ministère de l'intérieur i'ut sollicité en faveur des soldats juifs. Le 13 mai 1858,
il prit une décision déclarant qu'il était impossible d'accorder aux soldats juifs le droit
d'avancement au grade de sous-oflicier et d'oflicier, et il s'en référa à la décision du
ministre de l'intérieur sur l'autorisation à donner aux soldats juifs congédiés de
s'établir librement dans n'importe quelle partie de l'empire comme les soldats chrétiens
congédiés. J^'empcreur Alexandre 11 écrivit de sa main, en marge : « Je ne partage
pas l'avis émis par le Comité hébraïque [sur les restrictions que ce Comité voulait
maintenir). . Cependant, il ne paraît pas que ces restrictions aient été levées
(Lubliner, p. 24).
» 1843, p. 397.
5 1843, p. S74.
* 1843, p. 610.
' 1843, p. C98.
« 1843, p. 748-7411.
' 1844, p. 7;; et p. 247.
CHRONIQUE 317
prend leur douleur et leur désolation. Mais la volonté de l'empereur
était inébranlable. Au mois de janvier 1844, il accorda seulement
quelques facilités nouvelles aux Juifs expulsés : le délai pour la vente
de leurs maisons était porté de deux ans à quatre ans; les Juifs ex-
pulsés étaient exempts de tout impôt pendant cinq ans ; la mesure
était provisoirement suspendue en faveur des Juifs possesseurs de
grandes fabriques ou à la tête d'industries importantes '. L'adminis-
tration fit même mine de vouloir dédommager les Juifs, et des com-
missions furent nommées pour faire l'estimation de leurs biens -,
Cette enquête et quelques autres sur le même sujet paraît avoir eu
pour résultat d'ajourner, au moins pour les Juifs habitant les villes,
l'exécution de la mesure ^ De tous côtés, du reste, des personnages
importants et même des gouverneurs s'employaient en faveur des
Juifs. Finalement, il ne semble pas que l'ukase ait été exécuté. Il fut
remplacé par d'autres lois d'exception, non moins graves, et toutes
empreintes d'un esprit de persécution, parmi lesquelles la défense
de vendre des spiritueux (ukase du 6/18 septembre 1845)*.
On parlait beaucoup aussi des encouragements donnés, par l'Em-
pereur aux Juifs qui voulaient devenir agriculteurs. Des colonies
d'agriculteurs juifs avaient été créées, sous les auspices du gouver-
nement, à Cherson, à Ekatherinoslaw et dans la Bessarabie, mais les
subventions mises à la disposition des agriculteurs juifs pour les
frais du voyage, l'achat du matériel d'exploitation, etc., avaient fondu
entre les mains des intermédiaires officiels et les Juifs ne les avaient
pas touchés*. Un rapport ministériel de 1859 constatait qu'il y avait
dans le royaume de Pologne, à cette époque, 8,000 cultivateurs
juifs *. On sera étonné de ce chiffre quand on saura quels étaient les
singuliers encouragements que le gouvernement voulait donner aux
Juifs agriculteurs. Un arrête du lieutenant royal du 9 avril .182:i
avait autorisé le gouvernement du royaume à concéder des terres
arables aux Juifs, mais la concession était soumise à des conditions
impossibles à remplir. Entre autres, il était interdit aux Juifs de se
servir de laboureurs chrétiens, mais ceux-ci leur étaient indispensa-
bles au moins pendant quelque temps, pour leur apprendre le mé-
tier. En outre, une circulaire ministérielle interprétative ordonnait
d'offrir aux Juifs des terres incultes ou des bruyères éloignées des
forêts ou des métairies abandonnées et dont personne ne voulait ^
On sait du reste que les Juifs, au moins jusqu'en 1860, ne pouvaient
pas posséder de terres ni en Pologne, ni en Russie, si ce n'est par
concession exceptionnelle. En 1843, cette concession fut soumise
» \u\, p. io;i-i07.
« 1844. p. 247 dp. 540.
^ 1845. p. 64.
* 1X4"), p. 752.
' H. Mandclslamm, CuUurbildcr, Wicn, 1877, .'!• partie, p. .37.
'' Lublincr, p. 67.
•" Lublincr, p. 8-'.'.
318 REVUE DES ÉTUDES JUIVES
aux conditions suivantes : Etablissement de 23 familles juives dans
les six premières années de la concession, versement préalable de
430 roubles à titre de cautionnement par famille, menace d'expro-
priation en cas de mort des concessionnaires, faveurs en cas de con-
version des Juifs colons au christianisme '. Une ordonnance de 1844
affranchit de la peine de la bastonnade, en cas de procès criminel,
les Juifs qui auraient obtenu une médaille d'honneur pour une bonne
administration agricole -.
Une autre mesure enfin, presque puérile en apparence, fut extrê-
mement pénible aux Juifs. L'empereur voulut les forcer de changer
leur vêtement traditionnel et de s'habiller à la russe. Un ukase parut
pour cet objet, en 1843. Il devenait obligatoire à partir de 1830, mais
jusque-là, les Juifs qui voulaient garder leur ancien costume pou-
vaient se donner cette satisfaction en payant un impôt. En Pologne
cependant, on voulut que la transformation du costume fût immé-
diate. Le 7/19 mai 1843, le gouverneur de Wilna fit savoir à la popu-
lation juive qu'en vertu d'un ordre impérial, les Juifs étaient obligés,
à partir du 13/27 mai, sous peine de fortes amendes,, de quitter les
vêtements qu'ils avaient l'habitude de porter et de s'habiller comme
les chrétiens ; de se couper aussi les cheveux qu'ils laissaient croître
le long des tempes \ L'intention pouvait être excellente, mais le pro-
cédé parut odieux. Ce n'eût été rien si on s'était borné à punir les
récalcitrants de l'amende ou de la prison, mais il était brutal de les
saisir dans la rue, comme on faisait, pour les livrer de force au bar-
bier. Sans doute, les Juifs éclairés ne demandaient pas mieux que
d'obéir à l'ukase*, à Varsovie beaucoup prirent la chose en riant".
D'autres souffrirent cruellement de se voir imposer un vêtement
nouveau, et versaient des larmes de rage pendant qu'on leur cou-
pait les cheveux et la barbe ^. La police renonça probablement bientôt
à exécuter l'ukase et le principal effet qu'il produisit, ce fut de
faire entrer dans les caisses du gouvernement l'impôt que payaient
les Juifs qui voulaient garder leur costume ^
On pense bien que ces vexations et ces persécutions, qui avaient
apporté aux Juifs tant de préoccupations et de souffrances, avaient
fait oublier les écoles. Cependant le mouvement inauguré par le
D"" Lilienthal avait fait quelque impression sur les esprits, on en aura
une preuve par ce seul fait que la communauté juive de Minsk, qui,
au début, avait montré la plus vive hostilité envers la réforme
scolaire, avait, dès 1845, réorganisé son Talnmd-Tora conformément
aux prescriptions ministérielles**, puis transformé cette école en
' Lubliner, p, .'i6-;jS.
* Lubliner, p. 06.
3 184;}, p. 304 et 300.
* 1846. p. 318.
5 1846, p. 641.
* 1846, p. ".•)4. Ces scènes nous ont été racontées par des témoins oculaires.
7 1846, p. 490; 1847, p. 136.
« 1847, p. 87.
CHHONIQUE 319
école du gouvernement à partir du mois d'octobre 1847*, et enfin
fondé deux bonnes écoles nouvelles vers la même époque-. Le
D"" Lilienthal n'était plus là pour jouir du fruit de ses efforts. Il avait
compris que sa place n'était pas à côté d'un gouvernement persécu-
teur. Découragé, désespéré, il avait quitté l'Europe et s'était rendu
en Amérique. Le 25 novembre 1845 il écrivait de New-York à VAUge-
meine Zeitung des Judenthums * : « Recevez mon salut fraternel et
joyeux qui vous vient du pays béni de la liberté, du beau pays de
l'égalité civile! La vieille Europe, avec ses lois d'exception, m'appa-
rait comme dans un rêve, l'borrible haine contre les Juifs en Russie
n'est plus pour moi qu'un souvenir nébuleux. Mon âme n'est plus
oppressée par l'image effrayante de la tyrannie et de la persécution;
ma poitrine respire en liberté, mon esprit se meut sans entraves sur
ses ailes et c'est avec allégresse que je voudrais offrir aux hommes,
qui vivent ici dans la concorde, le baiser fraternel ! »
Nous n'avons que peu de renseignements sur la vie du D'- Lilien-
thal en Amérique. Il remplit d'abord des fonctions de rabbin à New-
York, puis fonda dans cette ville une maison d'éducation. En 1855, il
fut nommé rabbin d'une des communautés Israélites de Cincinnati.
Il devint, peu de temps après, membre du Board of Education de
l'Etat et on dit qu'il contribua beaucoup à faire admettre dans les
écoles les leçons de choses, pour lesquelles il composa même un
manuel. En 1872, il fut nommé directeur du Board de l'Université de
Cincinnati. Il a fondé, en 1874, le journal Sabbat School Visitor'' et il
a pris une grande part, en 1879, à la fondation de la Rabbinical lite-
rary Association. Sa mort est une grande perte pour le judaïsme
américain. — /. L.
Isaac bar Schéschet. — Dans l'exposition artistique faite par l'Aca-
démie de Berlin, se trouve entre autres envois de Wilhelm Gentz,
un tableau dû au pinceau de ce célèbre artiste et qui intéressera les lec-
teurs de ce recueil. La Zeitschrift fur bildende Knnst, de von Liitzow
(178 vol., fascic. 2, n" 56), contient une gravure de ce tableau, sous le
titre de : GedJichtnissfeier des Rabbi Isak Barschischat in Algier
(Fête commémorative de R. Isaac Barschischat à Alger). Ce rabbin
est le fameux Isaac ber Schéschet que les persécutions d'Espagne en
1391 ont chassé au-delà de la mer, en Algérie, et en mémoire duquel.
les .luifs algériens ont institué un service commémoratif annuel '•
(voir Wavnhcim, Kebuçat ml/iktabim, p. ]\'\). Il résulte d'une commu-
nication qui m'a été faite par M. Gentz lui-même, qu'il se promenait
près de la tombe du rabbin, placée près de la mer dans une situation
des plus pittoresques, il ne savait rien de la fête commémorative,
> 1847, p. 037.
î 18'i7, ]). 090.
' 18 if), p. 18.
* Ces renscif^nemenls sont tirés du Jewish Messenger du 7 avril 1882.
5 Ceci ne paraît pas exact. On va sur la tombe de R. Isaac b. Scli. Icsmomcs jours
que sur les autres tombes.
320 REVUE DES ETUDES JUIVES
lorsque soudain ses yeux furent frappés par le tableau de celte fête,
qui, par sa signification profonde, lui rappela les scènes émouvantes
de la prière des Juifs au pied du mur de Salomon, à Jérusalem.
Enchaîné par ce surprenant spectacle, il resta jusqu'à la nuit pour
le dessiner. Sans doute, tous les Juifs d'Alger, indigènes et étrangers,
Français, Espagnols, Orientaux, riches et pauvres, s'étaient associés
à la cérémonie. Tous versaient des dons dans une caisse qui se rem-
plit jusqu'au bord. Le monument sépulcral était éclairé, à l'intérieur,
de centaines de lumières que les visiteurs y avaient apportées à l'envi.
Il y a encore des doutes sur la date de la mort d'Isaac (voir Abr.
Cahen, Les J l'A fs dans VAfriqne septentrionale, p. 57-58 ei ArcJi. isr.,
1863, p. 33). L'inscription commémorativede sa tombe porte ces mots':
a Ce monument a été restauré par la communauté Israélite d'Alger
en l'honneur du rabbin Isaac Barschischat, né en Espagne, décédé à
Alger en 1408, dans sa quatre-vingt-deuxième année. » Sa tombe
s'est conservée, son nom est resté célèbre, et il a maintenant la gloire
d'avoir été illustré par le pinceau d'un maître. — David Kaufmann.
Prix Brunet. — M. Moïse Schwab, notre excellent collègue du
Conseil, vient d'obtenir ce prix de l'Académie des inscriptions pour
un travail de bibliographie aristotélique. [Séance du 26 mai 1882.)
M. J. Schleiden. — Tsous tenons beaucoup à rappeler ici le sou-
venir de ce savant qui a écrit, en faveur des Juifs deux opuscules
excellents et pour lesquels il a droit à notre reconnaissance. M. Schlei-
den était un naturaliste distingué, et, si nous ne nous trompons, ses
idées libérales lui avaient fait perdre la place de professeur qu'il
avait en Russie. On se rappelle la sensation que fit son écrit intitulé :
Die Bedeutu7ig der Jiiden filr Erhallung und Wiederhelebung der Wisseri-
scliaft im Mittelaîter (1877). Il a été traduit en français [Les Juifs et la
science au moyen âge, Paris, 1877) et en italien (Milan, 1878). M. Schlei-
den a aussi écrit, en 1878, Die Roinantilt des Martyriums im Mittel-
aîter. (Les martyrs juifs au moyen âge.) Il est mort à Francfort-sur-
le-Mein le 23 juin 1881, à l'âge de soixante-dix-sept ans. (Monat-
sblatter, 1881, n" 7.)
M. Ernest Sahatier. — M. Sabatier est mort à Nîmes le 13 décembre
1881, à l'âge de cinquante-cinq ans. Il a réuni et transcrit un certain
nombre de chants liturgiques des Juifs comtadins sous le titre de
Chansons hébraïco-provençales, Nîmes, 1874. Nous prions sa fa-
mille de recevoir l'expression de nos sentiments de condoléance.
' Elle a été rédigée par M. le grand rabbin Michel A. Weill.
ADDITIONS ET RECTIFICATIONS
A notre liste des savants de Barcelone (Eevue, IV, 64), il faut sans doute
ajouter Péreç de Barcelone, cité dans le catalogue des ms. orientaux de la
Bibliothèque de l'Université de Strasbourg (voir plus haut p. 289), à la
page 66, n*^ 46. Ce Péreç, auteur d'un écrit de Cabbala, pourrait être le Péreç
b. Isaac Cohen Gerondi, qui a écrit un ouvrage cabbalislique bien connu.
(Voir Catal. Bodl., p. 2mi.)— Isidore Loeb.
Le passage de Josef Bechor Schor cité dans Revue, IV, p. ).48, se trouve
aussi dans le ms. d'Oxford du Paeneah Raza sous la forme suivante (d'après
une communication de notre ami, M. Ad. Neubauer) :
Llh^vr^ t:"Z^TC r::D ^m^ïb un "'D rr^n xb û-^'^n:? in;"! cnbi . rimDnr:
. t:3":.'n "jr-ba Nsiprb "j-^mpo
Pour l'étymologie de ce mot leinkauf, voyez Grimbaum, Jiïdisch-deutsche
Chrestoiiiathie, p. 473. M. Gr. ne trouve pas de source plus ancienne pour leit-
liauf ou laikauf qvLd Sârtels ; notre passage de Paeneah Raza montre que
ce mot était usité à la fin du xiii'^ siècle, c'est-à-dire trois cents ans avant
Siirtcls. — »S'. /. Halberstaiit.
Sur le mot d"ir"P [Revue, IV, p. 1, note 1) désignant la fête de Saint-Jean,
voir S. Kohn, Die hebr. Handschriften des ungar. Nationalnmseufds, p. 24, et
Hebr. Bibliographie, XVII, p. 81. — David Kaufhiann.
Tome IV, p. 11, 1. 25. Lire lundi 12 (non 20) Tammouz 5058. Cette date
correspond au 23 juin 1298. — P. 10, 1. 22 et p. 11, 1. 28. Le 6 Tam-
mouz 5045 n'est pas un vendredi, mais correspond au mardi 8 juin 1288.
Il y a donc une faute dans le texte. Il faut peut-être lire T17:n2 Y'i,
16 Tammouz, c'est-à-dire vendredi 18 juin 1288. — P. 10, 1. 23 et p. 11,
1. 29. L'année 5039 n'a pas d'Adar II ; le texte hébreu a du reste 5049
(1288, 9), qui est une année embolismique ayant un Adar II ; lire Bérn-
castel, non Berncatsel. —P. 11, 1. 30. Lire 5046 = 1286, ou 5047 = 1287.
— P. 25, 1. 7. Il faut sans doute lire 'b'î'^ et non 'b'T'72 ; cf. la traduction',
même page, 1. 32. — Ibid., I. 10 et 1. 35. Lire 'rf'Ji au lieu de 'n'iî. — P. 26,
lignes 17 à 23. Il faut remplacer les années 5133, 5137, 5139, par 5103, 5107,
5^09, et les nombres 1373, 1377, 1379, par 1343, 1347, 1349. Le 24 Nissan
etlel'=''Iyyar 5103 tombent un samedi (19 avril et 26 avril 1343), tandis que
dans l'année 5133 ils tombent un lundi. Le 14 lyyar 5107 correspond au
mercredi 25 avril 1347 (en 5137, le 14 lyyar tombe le vendredi 24 avril
1377). — P. 28, 1. 11 et 12. Evidemment 5109 = 1349, l'année de la peste
noire. — Presque toutes ces incorrections que nous avons rectifiées nous
ont été signalées par M. Emile Ouverleaux, sous-directeur de la Biblio-
thèque royale de Bruxelles. — Isid. Loeb.
Tome IV, p. 74, ligne 4 en bas. — Lisez comme suit : « Que le nom
signifie Petit, "jUp. Eu catalan, le mot maymo siguitie « calme, lent, indo-
lent ». — I. L.
Ibid., p. 114, note 3, lisez 22 septembre.
115, ligne 29, lisez : il mourut le samedi 27 Ilesvan 5445 (1684).
117, dernière ligue du texte, lisez nizlid.
119, note 4, lisez : Discijjle du célèbre Muïse Zéchul. Benjamin
.S'. Joua.
150, ligne 7 en bas. — M. l'idol l''ila n'a pas collaboré à la bro-
Auguslin Blasco. — /. L.
IIM.
P-
Ibid.
!'•
Ibid.
P-
Coen . .
Ibid.
p.]
chure de M
PROCÈS-VERBAUX DES SEANCES DU CONSEIL
SÉANCE DU 30 MAI 1882.
Présidence de M. Isidore Loeb.
Le Conseil, après discussion, adopte les articles suivants :
1° La Revue publie les tableaux des dates des séances du Conseil pour l'année
courante.
2" Les membres de la Société sont admis à faire aux séances du Conseil des
lectures ou communications qui rentrent dans le cadre des études de la Société. Il eu
est de même de toute personne présentée par un Sociétaire. Les Sociétaires et autres
personnes ne peuvent user de ce droit qu'à la condition de prévenir le Président du
Comité de publication et d'administration huit jours au moins avant la séance. Ils
devront en même temps indiquer le sujet de leur lecture ou communication.
3° Les communications et lectures sont rcises à l'ordre du jour de la séance. Elles
peuvent être suivies de discussions. Le président de la séance reste maître de la
direction des débats et peut lever la séance quaud il le juge nécessaire. Des analyses
des travaux communiqués sont insérées dans la Revue.
L'ordre du jour appelle l'élection des membres du Comité de propagande.
M. Erlanger propose que le Conseil s'enquière d'abord des membres qui voudraient
eu faire partie.
L'élection est ajournée à la séance suivanle.
SÉANCE DU 27 AVRIL
Présidence de M. Arsène Darmesteter.
Le Conseil décide qu'il sera envoyé une lettre aux membres du Conseil qui ne
font pas partie du Comité de publication et d'administration, pour leur demander s'ils
veulent entrer dans le Comité de propagande.
Sur la proposition de M. Loeb, le Conseil déclare que l'Annuaire pourra contenir
dorénavant une Revue générale des événements de l'année relatifs aux Israélites.
Plusieurs membres font remarquer que l'Annuaire paraissant au mois d'octobre ne
peut publier que les rapports de l'année précédente, qu'ainsi l'Annuaire qui paraîtra
en 1882 ne donnera que les rapports lus dans la séance de l'Assemblée générale de
l'année 1881. Ils estiment donc que cette publication devrait paraître au mois de
janvier.
M. le Président serait d'avis qu'au lieu de donner dans chaque numéro de la
Rtvxie une revue bibliographique, ou fît paraître à la lia de l'année un fascicule à
part pour cet objet.
M. Halévi/ combat cette opinion.
M. Schwab voudrait qu'on fît un rapport général sur tous les travaux de science
juive parus dans l'année.
L'examen de ces diverses questions est renvoyé au Comité de publication.
Les Secrétaires,
IIautwio Deuknbourg, A. Épura'im.
Li; 1,'cr^iH res|ioii>ublf,
Israël Lévi.
TABLE DES MATIÈRES
ARTICLES DE FOND .
Babelon (Ern.) et Schwab (Moïse). Un vase judéo-chaldéen — -165
Cahen (Ab.). Les Juifs dans les colonies françaises au xviii"
siècle 1 27, 236
Gross (Henri). Notice sur Abba Mari de Lunel 192
Jona (S.). Abraham Joseph Salonion Graziani 113
ELaufmann (David). L Délivrance des Juifs de Rome en looS. . . 88
IL Liste de rabbins dressée par Azriel Trabolto 208
LoEB (Isidore). I. Liste nominative des Juifs de Barcelone en
4 392 57
II. Actes de vente hébreux en Espagne 226
Morel-Fatio (Alfred). Notes et documents sur les Juifs des
Baléares 31
Neubauer (Ad.). I. Le Memorbuch de Mayence 1
II. Documents inédits sur Maïmonide et David Alroï.. 173
Sgheid (Élie). Histoire des Juifs de Haguenau [suite] 98
Steijn SCHNEIDER (M.). Paul de Bonnefoy et le Livre de la foi.. . 78
NOTES ET MÉLANGES.
Bâcher (W.). Notes sur Abou'l Walid 273
BONNARD (J.). Un alphabet hébreu anglais au xiv° siècle 255
Darmesïeter (Arsène). Sur le même sujet 259
Derenbourg (Joseph). Un rudiment de grammaire hébraïque
eu arabe 274
DuvAL (Rubens). Origine et formation de la couj onction talmu-
dique Umalé -*^^
Halberstam. Joseph le Zélateur ' * '
IIalévy (J.j. Sens et origine de la parabole évangéliquc dite du
bon Samaritain -*'-*
KiscH (A.). Trois sceaux juifs du moyen ûgc 278
SiMONSEN (D.). Joseph le Zélateur ' itj
324 REVUE DES ETUDES JUIVES
BIBLIOGRAPHIE.
DuvAL (Rubens). I. Palestine et Syrie : Manuel du vo^'ogeur,
par K. Baedeker 157
II. Le livre de Sibawailii, par Hartwig Derenbourg. . . 158
LoEB (Isidore). I. Revue bibliographique, '!'='• et 2'^ trimestres
1 882 U9 et 282
IL Le Mistére du Viel Testament, par le baron James
de Rothschild 303
III. Torquemada, par Victor Hugo 304
IL D. La Juive, par Henri Gréville 306
DIVERS.
Chronique 308
Additions et rectifications 161 et 321
Ouvrages offerts à la Société des Études juives 160
Liste des nouveaux membres de la Société des Études juives
depuis le 1 <"' janvier 1 882 1 62
Procès-verbaux des séances du Conseil 163 et 322
Table des matières 323
FIN.
VKHSAILLKS, IMPniAJErtlK CEUF HT FILS, mJE DUPI.KSSIS, ÎJO.
MM. les Membres de la Société des Etudes juives
pourront recevoir I'Histoire des Juifs du Languedoc
par G. Saige, au prix de 10 francs (11 francs rendue
franco), au lieu de 15 francs.
S'adresser à la Rédaction, 8, Allée Verte, Paris.
TABLE DES MATIERES
Babelox (Ern.) et Schwab (Moïse). Un vase judéo-chaldéen 165
Neubauer (Ad.). Documents inédits sur Maïmonide et David
Airoï 173
Gross (Henri). Notice sur Abba Mari de Lunel 4 92
Kaufmann (David). Liste de rabbins dressée par Azriei Trabotto 208
LoEB (Isidore). Actes de vente hébreux en Espagne 226
Gahen (Ab.). Les Juifs dans les colonies françaises au
xviii*' siècle 236
NOTES ET MÉLANGES.
Halévt (J.). Sens et origine de la parabole évangélique dite du
bon Samaritain 249
BoNNARD (J.). Un alphabet hébreu anglais au xiv" siècle 255
Darmesteter (Arsène). Même sujet 239
DuvAL (Rubens). Origine et formation de la conjonction talmu-
dique Ilmalé 268
Bâcher (W.). Notes sur Abou'l Walid 273
Derenbourg (Joseph). Un rudiment de grammaire hébraïque
en arabe 274
KiscH (A.). Trois sceaux juifs du moyen âge 278
BIBLIOGRAPHIE.
LoEB (Isidore). I. Revue bibliographique : 2° trimestre 1882 282
II. Le Mistére du Viel Testament, par le baron James
de Rothschild 303
III. Torquemada, par Victor HuGO 304
H. D. La Juive, par Henri Gréville 306
Chronique 308
Additions et rectifications 321
Procès-verbaux des séances du Conseil 322
Conformément au règlement inlcricur, les séances du Conseil sont suspen-
dues pendant les mois de juillet, août et septembre.
Le n" 9 contiendra le tableau des séances ultérieures. Tous les Sociétaires
peuvent assister à ces séances dans lesquelles pourront être failes des com-
munications scientifiques.
Toutes les communications concernant la Rédaction doivent être adressées
à la Société des Études juives , 8, Allée Verte, Paris.
Les envois d'argent doivent élrc adressés à M. Michel Erlanger, (résorisr,
y, place des Vosges.
PRIX D'ABONNEMENT A LA REVUE DES ETUDES JUIVES
Un an 25 fr.
Prix du numéro 7 —
VERSAILLES; IMl'RIMEUIE CERF ET FH.S, RUE UUI'LESSIS, U'J.
r
I
I
BÏNDING SECT. APR 2 6 1979
DS Revue des études juives;
101 historia judaica
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