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Full text of "Revue des études juives"

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University  of  Ottawa 


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REVUE 


DES 


ÉTUDES  JUIVES 


PUBLICATION  TRIMESTRIELLE 
DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES 


V 


No  7 


JANVIER-MARS    1882. 


PARIS 

A   LA  LIBRAIRIE   A.    DURLAGHER 

83***,    RUE  DE  LAFAYETTE 


LUS   SOUSCRIPTIONS   DOIVENT   ÊTRE  ADRESSEES  AU  SIEOE   DE   LA  SOCIETK 
17,   RUE  SAINT-GEORGES 


La  Société  des  Études  juives,  voulant  assurer 
aux  Hédacleurs  de  la  Revue  une  pleine  liberté 
scientifique^  déclare  qu'elle  n'accepte  point  la 
responsabilité  des  articles  publiés  et  qu'elle  la  laisse 
tout  entière  aux  auteurs. 


REVUE 


DES 


ÉTUDES    JUIVES 


TEKSAILIJ'S 

CK  RF     ET     FILS,     I  M  1' l;  I  M  K  U  R  S 

Kl-F,    DUPLESSIP,    S9 


,$^         BEVUE 


DES 


ÉTUDES  JUIVES 


PUBLICATION-  TRIMESTRIELLE 
DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES 


TOME  QUATRIEME 


PARIS 

\   i,,\   i,i!;i!.\iiîii-,    \.    nn^i.ACHEn 

Kî**'',   HTE     I.AK.WK  ITK 

1882 


APR26 '^79 


loi 


LE  MEMORBUCII  DE  MAYENCE 


ESSAI  SUR  LA  LITTÉRATURE  DES  COMPLAINTES 


Les  chroniques  proprement  dites,  écrites  par  des  auteurs  juifs 
au  moyen  âge  sont  pauvres  en  renseignements  sur  Fliistoire  des 
persécutions  des  Juiis.  Pour  reconstituer  cette  histoire  depuis 
la  destruction  du  second  temple  jusqu'à  la  première  croisade,  il 
faut  glaner  dans  des  commentaires  hihliques  et  le  Talmud,  dans 
des  réponses  de  casuistique,  dans  les  ordonnances  des  rois  et 
des  seigneurs  et  dans  des  recueils  des  conciles,  quelques  maigres 
notes  qui  ne  s'y  trouvent  qu'accidentellement. 

Pour  l'époque  de  la  première  croisade,  R.  Eliézer,  fils  de  Nathan, 
écrivit  un  petit  récit  historique,  intitulé  l'a'n'n  mT^w,  Persécu- 
tions de  Vannée  48-'i6  *  (de  la  création  du  monde,  correspondant 
à  l'année  1096  de  l'ère  vulgaire).  Un  auteur  anonyme  nous  a 
laissé  un  document  semblable,  publié  récemment  sous  le  titre  de 
ms^i:^!-!  mn"'n ,  les  anciennes  persécutions-.  Pour  l'époque  de 

'  Zur  Gesc/iichte  fier  Krenzniige  nacJihandschrift lichen  hebraïschen  Qucllen  herausjj:. 
von  A.Jellinek.  Leipz.  18.54.  Le  ms.  hébreu  n"  4.'3  de  la  bibliothèque  de  TUniversiLé 
de  Strasbourg  renferme  ce  document  (voir  le  catalogue  de  M.  Landaucr,  p.  66) 
avec  quelques  variantes.  Nous  n'en  mentionnerons  ici  qu'une  seule,  réservant  les 
autres  pour  un  travail  que  nous  publierons  sur  les  documents  hébreux  relatifs  aux 
croisades.  C'est  le  mot énigmalique  -Cnni  T^N.  •  la  fête  de  ^-iTT'  »,  que  M.  Graetz 
explique  bien  par  la  fête  de  S'  Jean,  qui  a  lieu  le  24  juin  et  qui  tombait,  en  lO'.tG,  lo 
premier  jour  de  Thammouz;  M.  Graetz  corrige  avec  beaucoup  de  sagacité  UJin"^  en 
■ÛSrT'.  [Oeschichte  der  Juden  (1861),  t.  VI,  p.  430).  Le  ms.  de  St.  lit  tl'WT^;  ce 
même  mot  désignant  une  fête  chrétienne  se  trouve  également,  d'après  les  renseigne- 
ments de  M.  Loeb,  dans  le  registre  de  Dijon.  Or  \y^rv  contient  les  premières  deux 
lettres  de  'J'H"',  Jean,  et  est  en  même  temps  une  allusion  au  passage  ClTîbNb  HniT 
Û-ltT^  (Exode  xxii,  18).  Nous  possédons  aussi  le  même  traité  de  U.  Eliézer,  beaucoup 
plus  étendu  que  celui  qui  a  été  publié  par  M.  Jellinek.  Nous  l'avons  trouvé  dans  un 
ms.  du  Beth  hammidrascb  de  Londres.  Ajoutons,  dès  maintenant,  que  le  ms.  est 
d'une  écriture  française. 

s  Publié  par  M.  Manuhcimer,  d'après  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  de  Darm- 

T.  rv.  1 


2  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

la  seconde  croisade,  nous  avons  l'ouvrage  d'Ephraïm  de  Bonn*. 
Les  persécutions  sont  encore  relatées  dans  des  pièces  litur- 
giques assez  nombreuses,  connues  sous  le  nom  de  m^-'p,  élégies, 
dont  une  grande  partie  est  imprimée  dans  les  recueils  de  prières 
du  rite  franco- allemand,  appelés  û-^nTm^o  ;  quelques-unes  cepen- 
dant se  trouvent  encore  en  manuscrits-.  Les  souffrances  que  les 
Juifs  ont  eu  à  endurer  dans  la  province  ibérique  sont  également 
racontées  dans  des  liturgies  du  rite  hispano-portugais  ^  Il  en  est  de 
même  pour  les  persécutions  d'Afrique  et  de  Pologne.  Ce  n'est  qu'au 
xv^  et  au  xvp  siècle  qu'Abraham  Zakkout*,  Judah  ibn  Verga^ 
Samuel  Usque  ^  et  Joseph  Cohen  d'Avignon  '  composèrent  de  vé- 
ritables chroniques,  dans  lesquelles  l'histoire  des  souffrances  des 
Juifs  est  parfois  minutieusement  racontée.  Il  est  indubitable  que 
ces  auteurs  ont  eu  à  leur  disposition  un  grand  nombre  de  docu- 

stadt,  dans  le  Mat/azin  as  M.  Berliner,  dans  la  31onatsschnft  de  M.  Graetz,  et  à  part, 
en  1880. 

1  Imprimé  sous  le  titre  de  Vp'n'n  nTT'W,  comme  appendice  à  la  traduction 
allemande  de  VEiiiek  hah-Bahha  par  M.  Wiener  (Leipz.  1858).  Le  ms  n°  45  de 
Strasbourg  renferme  aussi  ce  document;  nous  Favons  coUationné  et  nous  en  don- 
nerons les  variantes  une  autre  fois.  Nous  saisissons  cette  occasion  de  remercier  l'admi- 
nistration de  cette  bibliothèque  qui  a  bien  voulu  envoyer  ce  ms.  à  la  bibliothèque 
Bodléienne  d'Oxford. 

*  Voyez  surtout  l'admirable  ouvrage  de  M.  Zunz,  le  vétéran  de  la  littérature  rab- 
binique,  intitulé  Die  sijnadogale  Poésie  des  Mittelalters^  Berlin  1853  ;  Geschirhte  der 
Jiiden,  de  M.  Graetz,  t.  YI,  p.  219  et  Yll,  p.  461.  Nous  donnerons  à  la  suite  quelques 
autres  notices,  tirées  de  notre  catalogue  des  mss.  hébreux  de  la  bibliothèque  Bod- 
léienne  à  Oxford.  Nous  espérons  que  ce  catalogue,  dont  nous  corrigeons  en  ce  mo- 
ment l'index,  paraîtra  dans  le  courant  de  Tannée  1882. 

N"  1025  (col.  223),  comm.  nb  "17:3    py^H   suscriplion   C^iniaN  ^"tl  ^i^''   TNT 
^"'■'riimD    nT^T't    hz'  'TTID  '^"rî  p.     N»    103l   le  nblT,  commencement  M^DÎN 

■^rrsa  n"'ribN\  suscriplion  i;"«:2-i72  ti7:p  cinp  ù^n'o:'  nno  û-^-i«ni<  it  nbiT 
-,"^  '-  '^--i-^-pzii  niTt  by  no'^o  Vniwi:;  in  -ip"' .    N'^  nos  (col.  ai 4)  rr^^abrû 
rrnriN  nbin,  suscription  ci'cr;  ■ainip  b:>  "c-^-^ibn  ■'T^Dnbjy  •   n»  1155  (coi.  349] 

commencement  TT  b"£^^  par  Ahron  Cassel  (Zunz,  Litcratarçieschichle  dcr  syn.  Poésie, 

p.  380),  suscriplion  '•>  'n  ST^a  Nm  ^Tipr!  inb-^Hp  n-i-iîs  b:^  tid"^  it  rij"^p 
p-'^i  "{-iroîn  'V-i'n  :  û-^CTip  cn-^-'m  t2n"v:;'7pnn-i  '-onob  p-i^a  ii"n^  û-'»'^ 

N"   1171    (col.  376),    commencement  "jîiprN"!    "jîINrNI    suscription  '^b"'NT   "jN^D^T 

112=)  "irm;7o  pDr;  rt-v^w  N:n-i  p  r-nM^-^  '1  n-no  r;73T7?:ST  .  "jo-^n  y'-^n 

rîTS"^ .     N»  1204   [foiirmeiUaii-e  sur  les  prières  de  li.  Elca^ar  de  Worms]  on  lit  (fol.  259) 

r-y-j  b:n  r.-bv  ts-i'r'?:?»^^  i3\-nb3b  T^-^hv  u''112^•J  -mi  nn  bDni::!  NbN 

ib-ibrrii  i:iDb  l-:">:p»-im  n-'DbwS  't  inrca  t;n3  'N3  û-^iirTir!  Y'z  û-in-iM 
-an  i;b  yav  isbi  ^;b"'2£!^  n"3p!n  mnn  ï-inN  Dnisbon  dn^  n?:ib  -ù-^bv 

...-icn  "^isb  û-^^^mb  lib  ins  o^n  -^3 

'  Voyez  encore,  Zunz,  oj),  cit.,  Graetz,  op.  cit.,  t.  VII,  p.  04;  Zc/^e;ZiO(/e  (périodi- 
que publié  par  M.  Rocst  û  Amsterdam),  année  Y'I,  p.  32. 

*  Connu  sous  le  titre  de  "j^Oni"^  "IDO.  dernière  éd.  par  Filipowski,  Londres,  1857, 
'  ïmri"^  t2!3"0,  traduit  en  allemand  par  M.  Wiener. 

*  Consola fam  as  tribnlaçoès  de  Ysrael,  Fcrrarc,  1553. 

'  ND2ln  "pJ^y,  dont  M.  Julica  Séc  vient  de  publier  une  bonne  traduction  fran- 
çaise avec  des  notes. 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYENCE  '  3 

ments  perdus  aujourcriiui,  ou  qui  se  trouvent  encore  en  manus- 
crits dans  des  bibliothèques  inconnues. 

De  tout  temps  le  respect  pour  les  morts  a  été  grand,  et  il  Test 
encore,  parm.i  les  Juifs.  Le  deuil  est  observé  de  nos  jours  ri- 
goureusement, même  par  les  libres-penseurs  ;  les  enfants  mâles 
se  rendent  à  la  synagogue  pour  réciter  le  Qadcliseh  ;■  aLuirefois 
chacun  s'empressait  de  faire  des  donations,  soit  pour  la  syna- 
gogue, soit  pour  la  caisse  des  pauvres,  soit  enfin  pour  l'entretien 
des  écoles  ou  des  cimetières.  Ces  donations  étaient  consignées 
dans  des  livres  spéciaux  qu'on  conservait  à  la  synagogue.  Ces 
livres  sont  connus  en  Allemagne  sous  le  nom  de  Memorhucliy  ou 
Mémoriaux  :  c'est  surtout  dans  les  communautés  allemandes  que 
cet  usage  s'est  observé  jusqu'au  commencement  de  ce  siècle  ;  en 
Pologne  et  en  Hongrie  même  il  n'est  pas  éteint.  Les  noms  des 
bienfaiteurs  étaient  mentionnés  dans  une  prière  spéciale  nommée 
Hazharah  (irtiDîn)  dans  le  rite  allemand,  parce  que  la  prière  com- 
mence parle  mot  'mrsp,  et  HaschUcibali  (rtaiD'û-)  dans  le  rite  por- 
tugais. Ce  dernier  rite  ne  possédait  pas  de  Memorducli,  au  moins 
à  notre  connaissance.  Les  Mémoriaux  renferment  également  les 
noms  des  célébrités  rabbiniques  du  temps,  l'étude  du  Taîmud  ayant 
été  tenue  toujours  en  grand  honneur  parmi  les  Juifs  ;  ils  contien- 
nent aussi  ceux  des  martyrs  morts  à  différents  époques  ' .  Ces  noms 
étaient  aussi  mentionnés  dans  la  Hazkarah,  et  quelques-uns  même 
tous  les  Sabbath. 

On  comprendra  par  là  l'importance  historique  de  ces  ouvrages. 
Il  est  vrai  qu'on  n'y  trouve  que  des  noms  de  personnes  et  de  lo- 
calités, très  rarement  un  fait  historique  proprement  dit;  mais  ces 
noms  à  eux  seuls  représentent  toute  rhis!:oire  juive  du  moyen 
âge  ;  ils  appartiennent  à  ceux  qui  ont  souffert  pour  le  Dieu  unique. 
La  connaissance  géographique  du  moyen  âge  profitera  également 
de  la  connaissance  de  ces  noms  de  lieux  qui  portent  la  dénomi- 
nation du  temps  2,  de  même  les  noms  de  personnes  auront  un 
grand  intérêt  pour  la  lexicographie  ^  Les  Juifs  en  effet  non  seu- 
lement adoptaient  toujours  la  langue  du  pays  où  ils  étaient  ac- 
cueillis, et  cela  même  dans  les  écoles  et  dans  les  synagogue» '', 


1  Dans  les  écrits  des  rabbins  français  du  Nord  on  emploie  presque  frénéra- 
lement  l'épithète  'jiUTlpln,  •  le  saint  •  pour  un  martyr  ;  c'est  une  espèce  de  canoni- 
sation. 

«  L'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres  a  mis  au  concours  en  1879  ce  sujet 
pour  le  prix  ordinaire. 

•■'  Voyoz  Topuscule  de  M.  Zunz,  avec  le  titre  Namcn  der  Jiidcn,  Leipz.  1837, 
réimprimé  avec  des  additions  dans  les  Gesammeltc  Schriften  de  cet  auteur. 

*  Nous  n'avons  pas  besoin  de  mentionner  l'usage  de  la  langue  arabe  en  Orient  et 
en  Espagne.  Nous  possédons  des  traductions  en  persan  de  la  Bible,  des  écrits  apo- 


/,  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mais  même  donnaient  à  leurs  enfants  des  noms  populaires  ;  outre 
le  nom  saint  ou  hébreu,  hommes  et  femmes  portaient  pour  la  plu- 
part un  nom  indigène. 

Dans  ces  dernières  années  on  s'est  occupé  beaucoup  de  la  litté- 
rature des  MemorJjiicli .  L'honneur  en  revient  à  M.  le  D""  A.  Jel- 
linek,  prédicateur  à  Vienne,  qui  le  premier  a  publié  une  partie 
d'un  Memorhucli  concernant  les  communautés  de  Worms  et  de 
Vienne  ',  publication  suivie  d'additions  tirées  par  nous  d'un  ma- 
nuscrit de  la  bibliothèque  Bodléienne  à  Oxford-.  Le  savant  hébraï- 
sant  et  théologien, M.  W.-H.  Lowe  de  Cambridge,  un  des  meilleurs 
connaisseurs  de  la  littérature  rabbinique  parmi  les  chrétiens,  a 
publié  une  partie  du  Memorhuch  de  Nuremberg  pour  l'année 
5109=  1349  ■■*  ;  il  l'a  fait  précéder  d'une  courte  et  intéressante  in- 
troduction sur  les  dates  des  persécutions  des  Juifs  en  Allemagne 
et  dans  la  France  du  Nord,  jusqu'à  l'année  1349.  Il  l'a  accom- 
pagnée de  notes  très  instructives  sur  les  noms  des  personnes  *  et 
des  localités  mentionnés  dans  ce  document.  M.  Jcllinek  ne  s'est 
pas  arrêté  à  sa  première  publication  ;  il  vient  de  nous  donner  un 
traité  qui  renferme  les  noms  des  martyrs  morts  en  1349,  en  diffé- 
rentes localités,  ainsi  que  ceux  de  bienfaiteurs  et  des  rabbins  de 
Cologne  et  de  Deutz  de  1581  à  1816,  d'après  les  Memorhuch  de 
Deutz  et  de  Coblence  ^  M.  le  grand  rabbin  Charleville,  de  Ver- 
sailles, a  contribué  à  ce  travail  par  une  liste  de  lieux  où  des  mas- 
sacres eurent  lieu  en  1096,  d'après  un  manuscrit  qu'il  possède*'. 
Nous  devons  encore  mentionner  l'article  de  M.  le  D""  Perles  sur 


cryphes  el  des  pièces  midraschiques.  D'autres  traductions  existent  en  grec  et  en  es- 
pagnol. Des  mots  et  des  phrases  françaies  sont  cités  dans  les  commentaire's  de 
Rasclii  et  de  ses  successeurs,  et,  comme  on  peut  le  voir  par  l'élégie  de  Troyes  et  par 
la  prière  que  nous  donnons  plus  loin,  le  français  fut  employé  dans  les  sj'nagogues. 
Pour  l'allemand,  les  Juifs  de  Pologne  el  de  Hongrie  le  parlent  encore  et  le  consi- 
dèrent avec  un  certain  respect  comme  langue  sacrée,  parce  que  leurs  ancêtres  le 
parlaient. 

•   Wonns  und  Wien,  Vienne,  1880. 

'  Dans  le  Letterfjode,  année,  VI,  p.  67,  130  et  141. 

'  The  Mcmorhooh  of  NUrenhcrg,  London  1881.  M.  Lowe  a  bien  deviné  que  le  ms. 
de  Cambridge  contient  tous  les  noms  des  martyrs  de  l'année  13''i9.  Dans  lo  Memorhuch 
de  Mayence  la  liste  des  martyrs  est  précédée  de  la  prière  "i^lDÎ"^  à  plusieurs  reprises, 
comme  cela  se  trouvait  sans  doute  autrefois  dans  le  ms.  de  Cambridge.  Ajoutons  en- 
core que  Icms.  de  Mayence  porte  toujours  (à  l'exception  de  deux  passages  où  on  lit 
Û'^T'W)  Û"'"173  au  lieu  de  D"^*T^72  du  ms.  de  (".ambridge.  Au  lieu  de  TVQI^  '"I  (n°  32),  le 
ms.  de  Mayence  a  i"nN  '"1  ;  au  lieu  de  "ijUIDp  (u°  H.'i),  le  ms  de  Mayence  lif^^LÛ^yp, 
à  lafin  (n"  1î;1),  ce  ms.  porle  1">b3"'73  '73  mina!^  ")nm. 

"  Le  nom  de  Û"^!rn  que  M.  Lowe  croit  d'origine  arajie  nous  semble  représenter  le 
nom  d'Isaac.  En  cllet,  H.  Isserlcin  dit  expressément  (juc  'j"'pn  représente  lo  nom 
d'Isaac. 

'  Miirtynr  nnd  Memorhuch,  Vienne  1881. 

"  Voyez  pour  les  corrections  Jievue^  t.  III,  p.  280. 


LE  iMEMORBUCII  DE  MAYENCE  5 

le  Memorhuch  de  Pfersee  '  et  les  extraits  que  M.  le  D'-  Levin  a 
donnés  de  celui  de  Coblence-.  La  synagogue  de  AYorms  en  pos- 
sède également  un,  qui.  contient  peu  de  nouveau  après  celui  de 
Maj^ence.  Malheureusement  l'ancien  Memorbuch  que  feu  M.  Car- 
moly  avait  vu  ^  est  perdu,  et  le  nouveau  a  peu  d'intérêt  pour  nous'*. 

Le  plus  ancien  et  le  plus  complet  de  ces  Mémoriaux  est  celui 
qui  se  trouve  maintenant  à  Mayence  et  qui  appartient  à  la  com- 
munauté orthodoxe  de  cette  ville.  Grâce  à  M.  le  D''  Lehmann  qui 
s'est  empressé  avec  la  plus  grande  amabilité  de  nous  envoyer  cet 
important  manuscrit  à  la  bibliothèque  Bodléienne  d'Oxford,  nous 
allons  en  donner  une  description  complète,  à  laquelle  nous  join- 
drons quelques  extraits,  et  surtout  une  liste  relative  au  massacre 
de  Nuremberg  en  1298.  Cette  publication  complétera  le  travail  de 
M.  Lowe  mentionné  plus  haut. 

Ce  manuscrit,  qui  se  compose  de  trois  volumes,  provient  de  la 
bibliothèque  de  feu  M.  Carmoly  et  est  connu  sous  le  nom  de  Me- 
morbuch  de  Mayence,  pour  la  seule  raison  que  le  manuscrit  ap- 
partenait jadis  à  la  synagogue  de  Mayence;  à  la  vérité,  comme  on 
le  verra  plus  loin  on  pourrait  plutôt  l'appeler  le  Memorbuch  de 
Nuremberg  et  "même  de  la  Lorraine,  à  en  juger  d'après  la  prière 
de  "iiiDr  qui  s'y  trouve  en  français.  L'écriture  n'est  pas  partout  la 
même.  La  plus  ancienne  partie  est  en  caractères  carrés,  elle  a 
été  écrite  en  5057  =  1296  par  Isaac  fils  de  R.  Samuel  de  Meinin- 
gen,  comme  l'apprend  le  passage  suivant  qui  se  trouve  dans  le 
2"  volume  de  ce  manuscrit,  après  la  prière  commençant  par  vd 
D-'Oi  !^o:?^  et  û-^T^nif^  :3N;  il  se  rapporte  à  la  construction  d'une 
synagogue  faite  dans  la  même  année. 

!:»bDni-!b  bH'pT,  ib'irinr;  rVo-n  i"n  'il  uv^  ^MH'Cir^  Clbxb  unsb  ■;"-  nrvTn 
Ht-  liilsT  noo  %nnns  it  rr>n  "^nrm  rin^o'^ai  iTO'^r-i  ?^c•^nï^  nc^rr;  rr^an 
.  pj-'^i'^^oTj  bNi):o  -i3  pr;:ii  dn-  ujnp^rt  Tin^bi  Nmian  ^^-i^ib 

Dans  Tannée  îjO'67  de  la  création  du  monde  (129G  de  l'année  vul- 
gaire), le  jeudi  18  kislew,  la  communauté  commença  à  prier  dans  la 
nouvelle  synagogue  avec  joie  et  allégresse  ;  et  dans  cette  même  année, 
j'ai  écrit  ce  livre  de  mémoires  en  l'honneur  du  Créateur  et  à  la  gloire 
du  nouveau  sanctuaire.  Isaac,  fils  de  Samuel  de  Meiningcn. 

•  Dans  la  Monatssrhnft  do  M.  Graelz, ,  année  187;i,  p.  iJ08.  Noire  Maiiorbiu-h  y 
(p.  512)  est  cité  comme  s'il  était  le  Memoibuc;h  de  Mayence. 

2  Dans  le  LitcratiirUatt  de  la  Israelitiscke  WochcHSchvift,  publié  par  M.  Rahmer  a 
Magdebourg,  année  1881,  n»»  40  et  41. 

'  Voir  ci-dessous,  p.  28. 

"  Nous  saisissons  cette  occasion  pour  remercier  M.  Higart,  grand  rabbin  de  Metz, 
et  les  membres  du  Consistoire  de  Metz,  pour  nous  avoir  envoj'é  le  manuscrit  à  la  bi- 
ijliotbèque  Bodléienne  d'Oxlbrd. 


6  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Ce  passage  est  suivi  d'un  morceau  en  prose  cadencée  que  voici  : 

.  !:"'2"''^:  r-Tr::"!  .  "itbirb  Y-i^  .  •ï:">''c  ",r;Nbi  m-i'r,  ^7::;'7r  .l'^iS"'  nb-^nn» 
.ts'^mrîN -îsc  .bi'  ,  û''mP5  r:?:-  isbr;  .  ii-^nicnj  ii'^rra-  .s-'m::  n^'rrm 

Je  me  réjouirai  en  lui  (le  temple),  où  le  roi,  assis  à  sa  table  {Can- 
tique, I,  4  2),  placera  sa  majesté.  Sa  bonté  y  sera  abondante,  jusqu'à 
l'arrivée  du  Messie.  En  attendant,  R.  Samson  bâtit  (le  temple);  en 
marchant  a-vec  humilité  (avec  son  Dieu  ;  Michée,  vu,  8)  il  poussa  le 
travail,  dès  le  commencement  de  la  fondation,  jusqu'à  l'achèvement 
de  sa  splendeur.  Après  l'avoir  fini,  il  alla  dans  son  monde  (il  mou- 
rut). Avec  l'assistance  des  nobles  et  les  dons  des  hommes  généreux, 
les  constructions  furent  faites.  Leurs  noms  sont  écrits  sur  le  livre  des 
bien-aimés,  qui  dorment  avec  ceux  qui  reposent  dans  la  terre. 

M.  Carmol}",  dans  sa  copie  de  ces  deux  morceaux  sur  la  pre- 
mière feuille  moderne  de  ce  volume,  dit  que  cette  s^^nagogue  fut 
construite  à  Maj^ence.  Si  cette  assertion  était  prouvée,  Isaac  au- 
rait en  effet  écrit  ce  passage  de  ce  Memorbuch  à  Mayence. 

La  suite  donne  la  prière  commençant  par  'jpn'iD  ûip"^  et  le  -nsf' 
dépourvu  de  noms,  avec  la  traduction  suivante  en  français  : 

(îT^:ri"r)  '•:i''yh  (-nas'a)  in  ■'p  npi'-ii  pniti  û'-'isn'i  (n'^"::5  -ist":;  i^d)  N3-j 

:  "1«N  in:?  pa  û-'p^ni:  d:> 'Tn^'«»b 
.iTijCr;  mnn^a  bsn  'j'^T'Idt»  mTC'ûsri  ûmN 

Cette  transcription  hébraïque  est  fort  incorrecte  ;  il  faut  lire  i^e- 
memra  (texte  rememer)  Dé  spirteme...  coiime  spirteine  ("texte 
spiriene) . . .  Ki  ad  layés  (peut-être  faut-il  lire  lassiés,  c'est-à- 
dire  Zm55ié5). . .  pour  amor  M  fesis  (faut-il  lire  W il  fesist  ?)  cil 
leruémeréd. 

Vient  ensuite  le  morceau  suivant  : 

t!":5-i5  ira'i  "  :nTT^n  ib:3ai  mb"'!ip  '^^^'2•J  irnaiïî  brrn  ni^oi  rt^^b"»:)  '-:» 
mbnp  -.13^  n-'.-j'::  bin^r;  "îirwo  li-^ni  :'inmr:i  nbns?^  -^rr  -r^N^iia 

'  Les  mots  entre  parenthèses  représentent  la  traduction  liébraïque  des  mots  fran- 
çais, et  se  trouvent  au-dessus  de  ceux-ci. 

*  Corrigé  par  une  main  plus  récente  Ni:;:;'^^  mi^pil  rT^^  15pO  ■  qui  achetèrent 
des  terrains  pour  des  cimetières  à  Ma3'ence  » . 

'  Au-dessus  par  la  môme  main  T^m3pn3  <  par  ses  règlements  pour  la  commu- 
nauté >. 


LE  MEMORBUCH  DE  iMAYENCE  7 

•in  "T^N73  irm  tyrbsipT:  Di7o  Vr:2T0  ■nb'^n  ^,'^\)J^  'pni:-'  n?:  :bi<-i"::-^3 

R.  Salomon  et  sa  femme  Rachel,  qui  se  sont  occupés  des  intérêts 
des  communautés  pour  faire  cesser  les  persécutions;  R.  Gerson  (de- 
Metz),  qui  a  éclairé  les  yeux  de  la  captivité  par  ses  commentaires 
(sur  le  Talmud)  ;  R.  Simon  le  Grand  (de  Mayence),  qui  a  pris  les  inté- 
rêts des  communautés  et  a  fait  cesser  les  persécutions  ;  R.  Salomon 
(de  Troyes,  connu  sous  le  nom  de  Raschi),  qui  a  éclairé  les  yeux  de 
la  captivité  par  ses  commentaires  (sur  la  Bible  et  le  Talmud)  ;  R.  Jacob 
(Tarn  de  Rameru)  et  son  frère,  R.  Samuel  (connu  sous  le  nom  de 
Raschbam),  qui  répandaient  la  loi  en  Israël,  ainsi  que  tous  les  au- 
tres rabbins  qui  ont  vulgarisé  la  loi  en  Israël  (par  leurs  commen- 
taires) ;  R.  Isaac  et  sa  femme,  Relia,  qui  firent  abolir  les  impôts  à 
Coblence  ;  R.  Meir,  fils  de  Baruch  \  qui,  lui  aussi,  répandit  la  loi  en 
Israël. 

Comme  l'élégie  de  Troyes  -  qui  se  récitait  en  hébreu  et  en  fran- 
çais, le  msfi  se  disait  dans  les  deux  langues  ;  à  moins  de  supposer 
qu'à  Ma3'ence  les  Juifs  parlaient  les  deux  langues,  ou  qu'il  s'y 
trouvait  une  forte  colonie  des  Juifs  français,  on  serait  tenté  d'at- 
tribuer ce  Memorincli  à  une  communauté  de  la  Lorraine,  peut- 
être  de  Metz.  On  aurait  tort  cependant  de  vouloir  conclure  de  ce 
que  la  majorité  des  rabbins  qui  sont  nommés  dans  les  n',5T"<  sont 
français,  que  ce  Memortuch  doit  avoir  été  écrit  en  France.  La 
réputation  de  ces  rabbins  allait  si  loin,  qu'on  les  trouve  cités  dans 
les  Mahazorim  de  toutes  les  provinces  rhénanes. 

Après  les  feuilles  écrites  en  caractères  anciens  par  Isaac,  en 
viennent  d'antres  en  écriture  carrée  également  d'une  main  plus 
récente. 

Elles  nous  donnent  les  noms  des  martyrs  de  l'année  5038  à  5059 
=  r2'78  à  1299,  et  même  de  dates  plus  modernes.  Une  petite  partie 
de  ces  trois  volumes  est  en  écriture  germanico-rabbinique  nommée 
d'ordinaire  écriture  de  Raschi,  du  xv°  et  du  xvi^  siècle. 

Parmi  ces  morceaux,  nous  signalerons  dans  le  troisième  volume 
le  passage  suivant  : 

pnif^  bïn^2N  n)2U53  'dv  -^nbïi  ^na  -i"pln3  bNiwu)  '-i  n'^'aiî  d-'rtVN  miDr 

1  Né  à  Kolhcnboiirf;  et  mort  eu  prison,  à  Ensishoim  (Haut-Rhin)  en  1203.  Voyez 
Histoire  littéraire  do  la  France,  t.  XXVII,  p.  'lïrl  et  suiv. 

*  Voyez  l'excellent  article  de  M.  Darmestcter  dans  la  Jievve,  t.  II,  p.  109  et  suiv. 


8  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

^a'ipnV  '-c^b  t'^w'^'^m  n-naprî  n^nb  '-^b  û-'nNW   rr^^no  "in^^'a   npr-^n 
.  .  .  riî  nDï:3  tj^'n^':  m^oibb  'L:b  û'^ur-'ttm  ^^j^^'ci  nibc3"i 

Voici  les  noms  qu'on  mentionne  ici,  à  Nuremberg  : 
Que  Dieu  se  rappelle  Fâme  de  R.  Samuel,  le  fils  du  saint  (martyr]  ; 
R.  Nathan  Lévi,  avec  les  âmes  d'Abraham,  Isaac  et  Jacob,  parce  qu'il 
a  laissé  200  litlres  pour  l'entretien  du  cimetière,  50  littres  pour  l'hô- 
pital, avec  un  Talith  et  un  Sargenes  (vêtement  pour  les  morts),  et 
50  littres  pour  les  écoles. 

En  remarquant  que  les  noms  des  martyrs  de  Nuremberg  de  1349 
s'y  trouvent  trois  fois,  conjointement  avec  une  autre  liste  des 
martyrs  de  cette  ville  de  l'année  1298,  que  nous  donnons  plus 
loin,  on  serait  tenté  de  prendre  ce  livre  pour  le  Memorbuch  de 
Nuremberg.  Mais  ce  qui  est  le  plus  probable,  c'est  que  la  plus  an- 
cienne partie  de  ce  document  a  été  écrite  dans  une  ville  rhénane 
Ijroche  de  la  Lorraine,  et  qu'on  y  a  fait  des  additions  au  fur  et  à 
mesure  que  les  événements  le  commandaient.  Disons  encore  que 
ce  ms.  contient  des  feuilles  qui  n'appartiennent  pas  à  un  même  ou- 
vrage, et  que  c'est  sans  doute  un  de  ceux  qui  l'ont  possédé  qui  les 
a  fait  relier  arbitrairement  ensemble.  En  effet,  il  y  a  des  transpo- 
sitions très  gênantes  et  des  suscriptions  faites  par  une  main  plus 
moderne,  qui  sont  incorrectes'.  Mais  tel  quel,  ce  manuscrit  est 
important  pour  l'histoire  de  la  martyrologie  juive,  et  à  cause  de 
la  liste  des  donations  qui  y  sont  énumérées.  Espérons  que  M.  Jel- 
linek  avec  son  ardeur  bien  connue  pour  la  littérature  rabbinique, 
publiera  prochainement  in-extenso  ce  ms.  curieux.  Gela  lui  sera 
d'autant  plus  facile  que  M.  Graetz  en  possède  une  copie. 

Il  est  temps  d'analyser  maintenant  ce  Memorbuch.  Le  premier 
volume,  en  prenant  l'ordre  actuel  du  ms.  contient  les  prières  que 
nous  avons  mentionnées  plus  haut  et  d-es  noms  de  bienfaiteurs.  La 
première  partie  en  est  écrite  par  Isaac  de  Meiningen.  Le  deuxième 
volume  renferme  les  listes  des  martyrs  de  différentes  époques 
et  de  difï"érentes  localités,  comme  on  le  verra  par  les  extraits  que 
nous  allons  en  donner.  La  première  partie,  ainsi  que  quelques 
feuilles  du  milieu  et  de  la  fin,  est  également  de  la  main  du  pre- 
mier copiste.  Enfin  le  troisième  volume  çst  un  amas  de  feuilles  re- 


'  Aiuei   nous   lisons  ù  la  l'cuille  Si"p   (la  paj^inalion  est  arbitraire  ,  écrite  pur  une 
niaiu  moderne  (par  M.  Carmoly  ?),  la  suscriptiou  suivante  .: 

n":  pr>r  Ti^n  n-i^b  i""'  '"7  oni  p-nn;:2T-i  nwTiN  "i"';'  idtt>:5i  -^ro-ir! 
tn?:  mp:-'  '-  n:  û^3ip;n  a-^^rTip  nr^u^s  d^^^î73^  D-'C>:n  -^-o^r^  qb^:» 

Les  noms  qui  suivent  (en  caractères  antico-germauiqucs,  très  oblitérés)  no  sont  autres 
que  ceux  dos  martyrs  de  Nurerabcrf^  de  IS/jÔ,  publiés  par  M.  Lowe. 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYE.NCE  <} 

liées  en  volume,  d'une  écriture  plus  ou  mois  moderne.  Il  renferme 
des  prières,  quelques  épitaphes,  dont  quelques-unes  écrites  par 
M.  Carmoly  (celles  de  Elle  de  Loans  et  de  Josselman  de  Rosheim 
petit-fils  du  fameux  Josselraann),  des  m^T"',  Tliistoire  de  R.  Amnon 
et  de  l'institution  de  la  prière  Eipin  i-;3n3T,  également  de  la  main 
de  M.  Carmoly.  Ajoutons  encore  qu'à  la  fin  du  deuxième 'volume- 
se  trouvent  les  copies  faites  par  M.  Carmoly  des  lieux  où  les  mas- 
sacres eurejit  lieu\  avec  leur  dénomination  actuelle,  qui  n'est 
pas  toujours  exacte,  ainsi  qu'une  autre  liste  d'endroits  qu'il  a 
copiée  du  Mejiwrbuch  de  Metz-,  perdu  à  présent.  Dans  cette 
copie,  plusieurs  noms  sont  estropiés  et  par  conséquent  les  iden- 
tifications que  M.  Carmoly  en  donne  n'ont  pas  de  valeur. 
Voici  la  table  des  matières  du  second  volume  de  ce  Memorbiich  : 

rricn  ST'3  n''\xn  'n  '~^zh  Virn  Nn^'rr  ■'jii-n      .T'\s- 

^;sbu5  nncn  '•'-.■«rî?:  ::-.Lb  V';nn  r-,i;r-  n-nt?:  N-';i5ip  ^^T-lr!       .  it^s 

niNa  n"3  'T'p'n'n  p"nn2£-i''i  i:i-nr!  .  mN 

^[b"-,sb  'N's'p'n'n]    'jT'cn  rî"s  'ncb  tibN  Lû-nnnr  •':;i-ir!  .iro 

nnan  [T'']  tD-iDb  'l'ii'p'n'n  Nibn  "^riTir!  .  nna 

"inïîn-iT^a  ansb  'n'it'p'r'n  ^sncrbn  ■':n-in  .';icn-i73 

"12  N"'^i  L^n'::!  '^  n^nab  'ri'ii'p'n'n  û-'-'n'wST::"'^  '^N^nb  '':n^r!  .isno 

l'pcn  :;"i  -^ccr^  qb^b  r-irr-Ni  n:-::  t:-mpm  -:i-nn  .  i^o 

2X2  T'"'  X2-\^^  '.■  5'j:ir::-»p  -^j^n--  2N 

■^-111:1-12  ancb  '-  p'-',i2:::jmN  ■':n-r;  .  i-."::n 

n7:n2  '21  Li"'T;i:'nD  ■':;"nr;  .TT?:n 

';o-'j2  i'-û  ■^":îcrî  qb^b  r;"2  y:b2"ip  -«riT^r;  .  ic: 

12  N"2T  n7:n2  "i"^  Ncn:  \".n-im  N">:ibip  'Jinr;       .Ti7:n 

•w'':<:b2-'T  ■':«inri 
1T^02  '2  -Li-iDb  'ws'b'p'm  ^■'•'V52  ■'31-10        .  iro 


'  Voyez  ci-dessous,  p.  28. 
*  Voyez  ci-dessous,  p.  28. 

'  Les  mots  entre  [  ]  sont  pris  dans  les  listes  des  noms  des  martyrs. 
'  Ce  nom  est  écrit  ailleurs  NT^lb. 
'■  Dans  la  liste,  ce  nom  est  écrit  N^j'^^'^p. 

''  Dans  la  liste,    ce  nom  est    écrit  N"1"j5^N  et  à    la  fin  de  notre   table   "j-li' '"îbj? . 
Voyez  Gcschichte  der  Juden,  de  ^L  Graet/,  t.  \'I,  p.  iSl. 

'  Dans  la  liste,  les  mots  tT^;"C  ÏTT'TJ,  •  seconde  persécution  ^ ,  sont  ajoutés. 


10  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

:2n3b  ('n"3  'fi  û^''  Sï^n  :^"''i  n^^  n"^  "j"j'>:;;"-iN  -"i-rnï^         .  :3N 

'-  CT^  bib.sn  :,"3  "onsb  i"7o  p'-.:':3-'T      .bibN 

mcsi  i"b  'sb  y»  nii^nn  '^nji-i::  ■^:iT"i!i      .  îTan 
a"iDb  n"»-)  unttb  T"»  iss-^-nT  "«^Tn^! 

NnN  -^run?!  pt^td:  'n  pnnmris 

[■b'n'3  DT'  îi»nn  3"-^]  tm  iD 

'b'n'72  1T^D3  nwnn  Nssp  -^roi^  ;  TT^^n 

'b'n'»  't  û"!""  n^nn  'i  Nns  "i:;nr;  .  tt^p 

[i;cr!]  niN3  b'c:'?:  b-j'^ijp",:?^  •':iTir!  .  -i'7N 

Massacre  de  Sjnre,  le  jour  du  SabbaLli,  8  lyyar  4856=  1096. 

PFonw^,  lés  dimanches,  23  lyyar  et  1^''  Siwan  =  1096 

Cologne,  le  lendemain  de  Schebouoth  1096. 

Maymcc,  le  mardi  3  Siwan  1096. 

Wurtzboiirg,  le  22  Adar  4907  =  1147. 

Erfurt,  le  25  Sivan  4981  =1221. 

Fulda,  le  17  Tebeth  4696=  1236. 

Wolfshagen,  le  mois  de  Heschwan  4996=  1235. 

Lauda  et  Bischofsheim,  le  10  et  le  11  Schebat  4995  =  1235. 

Francfort,  le  13  Siwan  5001  =1241. 

Kitzingm,  le  17  Ab  5003  =  1243. 

Ortenbourg,  Tbischri  5004  =  1243. 

Pforzheim,  le  20  Thammouz. 

Coblence,  le  15  Nissan  5025  =1265. 

Sinzig,  le  vendredi  15  lyyar  5026  =  1266. 


*  Dans  la  liste,  '7"3. 

*  Dans  la  liste,  on  donne  ensuite  ici  les  deux  noms  suivants  de  martyrs  mis  à  mort 
à  Bambcrgen4975  =  121!J:  p-l3::3n  l'ÙM-t'Zi  TlID  ''"j'O  "l5-in3  lDIdS  !-î';''p'n'n3 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYENCE  1 1 

Cologne  et  Neiiss,  le  13  et  le  21  Thammouz. 
Wiebelingen. 

Biais,  le  20  Siwan  4931  =  1171  *. 
Xanien,  Aldenahr,  MeU,   Trêves,  Bopart,  Dortmimd. 
Arnstadt,  le  11  et  le  jeudi  13  Ab  5024=  1264. 
Mellrickstadt,  le  mercredi  2  Nissan  5043  =  1 283. 
Kreimiach,  le  même  jour  et  la  même  année  R.  Epbraim,  fils  de 

R.  Eliezer  le  Lévite  mourut  du  supplice  de  roue. 
Maijence,  le  7^  jour  de  Pessah  1283. 
Badiarach,  26  âmes  périrent  le  même  jour. 
Ruckenhausen,   13  personnes   furent  massacrées,  le   vendredi 

25  Nissan  1288. 
Munich,  le  vendredi  12  Marheschwan  5046  =  1285. 

Wissembourg '■ ,  le  vendredi  13  Thammouz  5030  =  1270. 

Cobern,  le  dimanche  29  Tammouz  5046=  1296. 
Seberg,  le  jeudi  23  Eloul  1296. 

Cochem,  le  23  Nissan  5013  =  1253. 

Milnster,  le  jeudi  4  Ab  5047  =  1287. 

Trmmbach,  36  personnes  périrent  au  mois  de  Thammouz  1287. 

TJmringen,  les  années  1287  et  1288. 

Langenstein,  le  12  Thiscbri  5048  =  1287. 

Hornberg,  cinq  personnes  périrent. 

Au. 

Bottingen,  21  personnes  moururent  le  7  lyyar  5058  =  1298. 

Neusladt  et  Windesheim,  le  lundi  le  20  Thammouz  de  la  même 

année 
Kempen,  aux  mois  de  Thammouz  et  de  Siwan  5048=  1288. 
Bonn,  le  vendredi  6  Thamj^ouz  delà  même  année. 
Berncatsel,  le  second  Adar  5039  =  1279. 
Aldenalir,  six  jeunes  gens  suivirent  les  eaux  ^  5046  =  1289. 

Mais  la  liste  des  localités  où  les  Juifs  eurent  à  souffrir  la  torture 
et  la  mort  n'est  nullement  finie  avec  cette  table.  Celle-ci  se  rap- 
porte seulement  aux  feuilles  écrites  par  Isaac  de  Meiningen.  Avant 
d'énumérer  les  autres  lieux  mentionnés  dans  ce  Memorhuch, 
nous  allons  citer  les  noms  des  Juifs  massacrés  dans  quelques  villes 
de  France. 

Martyrs  de  Blois^  (fol.  ti:].- 

1  On  trouvera  les  noms  des  martyrs  ci-dessous,  p.  12. 

2  Probablement  en  Alsace  ;  ou  trouvera  ces  noms  ci-dessous,  p.  13. 

3  Se  sont  fait  baptiser?  . 

*  Voyez  Graetz.  Gcschkhte  der  Jnden,  t.  VI,  p.  219.  Les  mois  entre  [  ]  ne  se  trouvent 
pas  dans  la  liste  de  la  seconde  main  (fol.  ?:"p).  Celte  liste  est  plus  correcte  que  ce  le 
qui  a  été  écrite  par  Isaac  ;  nous  l'avons  donnée  telle  quelle,  en  y  ajoutant  les  vananles 
de  l'autre  liste  dans  les  notes  qui  suivent. 


12  REVUE  DES  ETLDES  JUIVES 

'-i]  .'iT3>"'>N  'in  pn;i^  'n  .'bNir-c  '-,  i^n.si  ûn:73  -12  [']n2  nn]  'ii-.n 
pn::'^  'n  bo  t^hn  rnirt^  'i  •  1"  in  ne»  '-^,  .  "j-i-n  "^3  rt-iin"'  'n  .  [n-nrii 

f-n72  .  ûTOtt  'n  bï;  r-i:;in  .limn]  bNiwo  '-1  ^-i:;it  n:"i3  r-1-7:  .n:ti"72 
i-n»  .  bm  m-î^  .  'm'i^:^  tn"i72  .  r;^m;n  \-t:;t  ba^f:'::  /-in  r-:;-iî  rtNb 
û'^':?:  rr-.X]  .  bNT?:"^  'n  mn  n:n  n-?:  .  'inn  '-,  n^m  ri-,o  m-iT:  .  irns:: 
ï-irb?:  r^-i?:  .  n:n  r— ,",72  .  -iirr  '-,  ?-.:nT  Q-'-itt  f^r.n-]  .  Nrb:;nN  rn-i?:i 

fir;:n  r^mz  -■"'■'bN  'n  r-iD 

R.  Jehiel,  fils  de  R.  David  le  Cohen  le  pieux,  R.  Jekoutliiel,  fils  de 
R.  Judah  le  Cohen,  R.  Judah,  fils  de  R.  Samuel,  R.  Judah,  fils  de  R". 
Meïr,  R.  Raruch,  fils  de  R.  Menahem,  et  son  frère,  R.  Samuel,  R.  Isaac, 
fils  de  R.  Eliézer,  R.  Judah,  fils  d'Aaron,  R.  Moïse,  fils  de  isoun,  R. 
Judah,  frère  de  Isaac  de  Trêves  (ou  de  Troj^es),  le  jeune  Pantin,  les 
femmes  pieuses  :  Pulcelina  et  ses  deux  filles,  Lea,  Madrona,  Rona,la 
femme  de  R.  Samuel  le  Hazan,  la  femme  de  R.  Menahem,  Lea,  femme 
de  R.  Samuel  et  ses  deux  filles,  Zephora,  Rachel,  Zephora,  Sarah  et 
son  fils  R.  Baruch,  Hanna,  fille  de  R.  Samuel,  Miriam  ;  Eiguelina'^  ; 
Miriam,  femme  de  R.  Judah  ;  Hanna  :  Malkah,  fille  de  R.  Eliézer 
Hanna,  avec  une  petite  fille  née  dans  l'auto-da-fé. 

Martyrs  de  Metz  (fol.  n::), 

irsiTT      .pn::'^  -3  r;7jbc  'n  .-■■^nt:  •-:  .^x^rin  bNi^-e  'n  y-^»  ■^:;i-in 

r>.  Samuel  le  Gabbin  Ctrésorier  de  la  communauté).  R.  Meïr,  R.  Sa- 
lomon,  fils  d'Isaac,  avec  sa  femme,  en  tout  22  âmes. 

Martyrs  de  Troi/es^  (fol.  a"i:). 
'-1   .ipb:i   mrn  '^v:^^   ipcni  'j-'b::":;!:   pni:-'  'n    .c-'-in:::»   c-'ei-io 

»  Suivent  les  noms  de  bN'iT:"^  't  "'la  niin"^  '"T  ;:n;''j  '"n. 
*  NrbxbiD  n-)2  riT^onn  û-^crr!. 

•^  La  liste  plus  rccenle  a  Tordre  suivant:  "inCN  'T:"!  CHj'Ta  'l  r31  "^Tia  'l  n31 

'721  nrn  'ri  '^ns  'n  !-i;3t  rrnEi:  '7:1  bm  '7:  Gn-riin  tct  ï-r^b  '721 
wwN3  mb^w  "ir-^r;-!  n-.n:;-  r::n  '7:t  n-,-»:;  '7:  nn^i   r;3b7:   '7:t  nrbr.-'-'N 

'  Ce  nom  représente  peut-être  un  diminutif  du  mot  allemand  Atnje,  a-il,  Eifrelein  ; 
ou  le  diminuliC  du  nom  Abigail,  en  ce  cas  il  faut  le  prononcer  Avigalina.  Voyez 
Zunz,  Namen  der  Jiiden  (dans  le  20  vol.  de  ses  (Jesawmelte  Schriften,  t.  H,  p.  G,*)  au 
mot  Âlif/ali,  et  Lowe,  op.  cit.,  p.  2.3  au  mol  N^'^^l'N,  prononcé  Avi<rai). 

■*  Voyez  l'article  de  M.  A.  Darraesteler  dans  la  Jieviie,  t.  II.  p.  l'JH  et  suiv. 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYENCE  13 

R.  Isaac  Chastelain  (Châtelain),  sa  femme,  ses  deux  fils  et  sa  bru  ; 
R.  Isaac  le  Cohen  ;  R.  Salomon,  fils  de  Vivas  (Hayyim)  Gabbai  (tré- 
sorier) de  Brinay  ;  R.  Hayyim,  de  Chaourse  ;  R.  Simon  Sofer  (scribe); 
R.  Rendit,  d'Aviré  ;  R.  Jona  et  R.  Simon,  gendre  de  Kadmeneth. 

Martyrs  de  Wissenibourg  *  parmi  lesquels  on  trouve 

plusieurs  prosélytes  (fol.  X2":i). 

'inr;  .  ';ii'):'û  -in  ^u:72  'n  .  r;n73  nn^7:m  V'^p  V"^^^"'^  ino-^^ns  d-^p-'is: 
pru:-^  '1 .  ï-iDni£»  thn  iinm  bN^-^"lp•l  1:3  do-i:*  "i  .rT?2bo  13  "jt:;?:':: 
ï^srbin  rrn^o  in^in  t^tn  na  pn^i  '-1  .  tj'Cîr!  '«riT^p  by  Ei-iiDsr;  nmnN  p 
lr:5m>3  '^  121x2  rn:D3  cist'  'la  mnnn  pn^i  '-1  •  ûiarj  iinii  by  loior:: 
.  t]T::;i  :\nr;3n  ;rinpn  lînrr  bN-i:':-:^  na  ansN  '-,  .  a-nni^T'-i  b!-rp  n-i2::b 
on72":j  û-^an-i-  bDb  •ûtî-i  rr^rro  nsiiCTo  iraN  ûrr-inx  -la  ûrriax  '-i 
nrinawx  'n  .  d'ûri  mn*^-^  b::'  si^'':35i  û-'Tobir  -^ri  •'DiD  bi:a  monb  Nai  ci-^T^b:: 
•  û-'T^bi:  ■^'CîNi  yi:pi  □r^s'rî  -^rib^  dn»^  pm^ta-^iNT^  iraN  ûrriaN  p 
•ON'na  .ûcrs /5iri'  by  sinc;i  yap  imo'^a -iDi-^nST  -ti-^rj^TJ  -^na  n-jan 
is-^aN  d!-î-iaN  "ja  pnii:''  'n   .'^0':5r!  t]bî<b  unsb  r!"D  'i  dt^  T^boa)  'cnn 

.  ûiiîrt  mn^-^  b3?  rj-i'^iis  p-naitTi^ 

Voici  les  sept  hommes  pieux  qui  subirent  la  torture  et  moururent 
d'une  mort  amère  :  R.  Moïse,  fils  de  R.  Simon;  R.  Samson,  fils- de  R. 
Salomon  ;  R.  Gersom,  fils  de  R.  Jekuthiel,  avec  un  jeune  homme  fran- 
çais ;  R.  Isaac,  fils  d'Abraham  (un  prosélyte?),  brûlé  pour  la  sainteté 
de  Dieu;  R.  Isaac,  fils  de  R.  Ascher,  avec  sa  femme,  Dolça,  brûlés 
pour  l'unité  de  Dieu;  le  jeune  R.  Isaac,  fils  de  R.  Joseph,  mort  du 
supplice  de  la  roue  en  expiation  pour  la  communauté  deWurtzbourg; 
R.  Ephraïm,  fils  de  R.  Samuel  le  Hazan,  martyr  par  le  feu;  R.  Abra- 
ham, fils  du  patriarche  Abraham*  de  France,  supérieur  des  Déchaus- 
sés, qui  quitta  sa  religion  pour  venir  s'abriter  à  l'ombre  des  ailes  de 
celui  qui  est  éternel,  brûlé  pour  l'unité  de  Dieu;  R.  Abraham,  fils  du 
patriarche  Abraham  d'Augsbourg,  qui  quitta  sa  religion  pour  se  con- 
fier à  celui  qui  vit  éternellement,  subit  la  torture  et  fut  brûlé  pour 
l'unité  de  Dieu,  le  jour  de  la  uéoménie  de  kislew,  le  vendredi,  en 
l'année  de  la  création  5025  (=4264  de  l'ère  vulgaire);    R.  Isaac,  fils 


•  Nous  ne  sommes  pas  sûrs  que  toutes  ceo  personnes  aient  été  mises  k  mort  à  \\  is- 
sembourg.  Nous  les  donnons  comme  telles  d'après  l'indication  du  texte.  Il  est  curieux 
de  voir  que,  malgré  les  persécutions  continuelles,  des  chrétiens  embrassaient  la 
foi  juive.  Voyez  Perles,  Monatsschrift,  187'.5,  p.  !)14. 

*  Au-dessus  on  trouve  un  2  =  p"na!3'0'^T. 

3  Le  père  des  prosélytes  est  toujours  Abraham  le  patriarche,  qui,  d'après  la  tradi- 
tion, a  le  premier  renié  les  idoles  et  prêche  l'unité  de  Dieu. 


14  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

du  patriarche  Abraham  de  Wurtzbourg,  qui  fut  brûlé  pour  l'unité 
de  Dieu. 

Voici  ensuite  une  liste  de  localités  où  eurent  lieu  des  massacres 
de  Juifs  à  différentes  époques  : 

Ratisbonne  (Regensburg  p-na'^Jii'i),  le  28  lyyar, 

Prague  (N5"i3),  le  jour  de  Schebouoth. 

Les  martyrs  du  pays  de  Kanaan  ('i3>22i,  pays  Slaves]  *. 

Les  martyrs  de  la  France  (nD"ii:). 

Halle  (Nbn),  le  26  Nissan. 

Autodafé  à  Corbeil. 

Les  martyrs  des  îles  de  la  trier  (d"^n  ■^\^  ;  Angleterre). 

Londres  (i!5"n:ib),  4,500  personnes  en  l'année  5024  =  1264. 

Nassau  (?  N-^^û3),  en  5037  =  1277. 

La  femme  Hannah  brûlée  à  Salzbourg  (p"nD2£bT). 

Meiningen,  en  5003  =  1243. 

Presboîcrg  (p'n3T"'"ic),  R.  Jonah  et  ses  collègues. 

Neustadt  (en  Autriche). 

Vienne  (Nj"^i). 

Ziegenhageii  (Ziegenhain  N5ii3:*'^2£). 

Jidicli  (N^bi:.). 

Kirchberg  (p-ir^ST^p),  en  5047=1287. 

Lechenich  ('^"^d^V),  la  même  année. 

Kira  (N"i"'P),  dix  personnes  y  périrent  le  1 1  Thischri  5048  =  1287. 

Premisl  (?  Nbo-^^^iD). 

Anjou  (?  nn'^?:^). 

Ueimbach  (^■>n?2-^iN). 

Heilbronn  (NSinnb-'-'n),  le  dimanche  12  Heschwan,  5059  =  1298. 

Widdern  CinTii),  le  19  Ab  5048  =  1288. 

Rlieinheim  (?  û-'"'Dr'^n),  mardi  15  Kislew  5062  =  1301  -. 

•«Tsu:-^!  (Weissensee'i),  le  2  Nissan  5064=  1304. 

Nibip  [CoUeda'i) 

N-j-j;r5-Ji  (Tennstaedfi] 

Constance  (Ni:3:3t:np).  le  mercredi  18  Siwan  5086=  1326. 

Ham  (nn)  ». 

Rolhenburg  (imisain)  \ 

Pour  l'année  1298,  les  endroits  suivants  sont  énumérés  : 

'  Sur  l'applicatioa  de  ce  nom  aux  pays  slaves,  voyez  llarkavvy,  Die  Judcn  und  die 
Slavi.schen  ^prac/ien,  1807,  p.  '20. 

^  11  osl  douteux  que  ^Ti  désigne  la  localité  française  de  Ham  (dép.  de  la  Somme) 
comme  M.  Graetz  [Gescli.  dcr  Juden,  t.  VI.  p.  ^i^'.\]  le  veut. 

*  Parmi  les  martyrs  on  mentionne  le  nom  de  R.  Misçé  OD"lS!l,  probablement 
l'auteur  de  l'ouvrage  de  casuistique  DSID  "IDO  (voir  le  catalogue  de  Turin  1881, 
p.  10;)).  La  date  du  massacre  niaii([uc. 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYENCE  16 

Berching  [yA'y^'zn^ii),  le  dimanche  16  Ab. 

IvThofen  (';mr:2\s),  le  lundi  19  Thammouz. 
Kitzingen^  le  même  jour. 

Oclisenfurt  (UTnj'^jniN),  le  dimanche  soir,  18  Thammouz. 
Wîcrfzbourg,  le  mercredi  1o  Ab. 
Sindringen  (pr^n^T),  le  lundi  19  Ab. 
Mergentheim  {û"'i~:::;:i")}3),  le  même  jour. 
Mekkelsmuhle  (?  NbiTriûp-^TD),  le  1 5  Ab. 
Krautheim  (Q-^-^naTip),  le  16  Ab. 
Moshaclh  (^nn^a),  le  18  Ab^ 
Biscîtofsheim  (à  Gamburg  pm353>),  le  14  Ab. 
Garth  (NHJ-iS),  le  dimanche  8  Elloul. 

Weinheim  (û'^'^r^j'^i),  dans  la  synagogue,  le  13  Thischri  3039  = 
1298  (la  mention  de  l'année  est  de  l'écriture  de  M.  Carmoly). 

Enfin  voici  les  noms  de  ceux  qui  furent  massacrés  et  brûlés  à 
Nuremberg,  le  vendredi  le  26  Ab  5058  =  1298,  nous  publions  cette 
liste  in-extenso.  Parmi  eux  se  trouve  l'auteur  du  ■^i'^n^a,  R.  Mar- 
dochéeben  Hillel. 

'on  bN-Ti-"  ^3  HDD  '-\  .  i-i-^in  'm  NanT  nn»  irm  i-^biin  niTo  "in"::Ni  'an 
•  ^<a■^:^  nn»  iîTwNt  'or;  b.s-^rr^  -in  e^cv  'n  .  -ii':i  V^-"'"'^  ^"^  inuiNi 
ri3m  psrt  ^1-13  riDST  "inn-  "jrîDn  np^-^  ri32i  !-!a»  'n  nn  n^t:  t-n?jT 
i-Timsa  '^J•Q^  x^b-^'^Ti  T^-m  ij-tcni  insr;  'n\x?2  nn  pn^i"'  'n  .  'in^ri  i^js^j 
.  n:>3T  in'Jiîi^-i  iriDn  priii-^  na  riT^b-::  '-i  .  rnx  r•^-\:>':^  n;i7::"'-'?:  mn7D 
l^in  ûrri^N  in  -i">::.s  -i"nr:  .  nn^'ari  mm  "jn^ri  b^'n"»  na  û^i-ûn  'n 
nmnN  -13  ppb-  .  insr;  dn-i3N  nn  bi<n?30  'n  •  n^'ST  i-^bsn-in  ma  ipont 
'^"na  -i3  '2-p'j-'  -1  .  no^irîbnN  J-i-^,73  incNi  "[non  npr-'  nn  ']Tn3  '■^  .  inors 
tmni  "1  -nnnrî  1331  b^^::-^-'  n-i»  m-w^i  por:  3pri  n3  b.si^ro  '-1  .  pi^rt 
':n  inajîT  inarr  npri  -a  rrcTa  '1  pon  apr-»  13  bis-^n-^  'n  .  id-cnt  irirr; 
In2  Ynn  .  n"';3  'm  pb:-i3  n-i7:  in^L'Ni  'iriz'n  "jna  -i3  oitt^rbp  'n  .  T133 
.  iriDn  Di):'^:ibp  -13  -^Din»  'n  .'  v:3  ':ii  xnbia  n-,?3  "idcnt  "{nDr!  or:3"'Sibp  -i3 
bî<"im  -13  yrT^  '-1  .  tij3  'rii  Nrn  ni»  inCNT  l-or:  bN-^rr»  -i3  pn::-^  '-i 
.  T'33  'ni  n:-»»  J-ntt  in'CJNi  inm  bwX'^m  n3  bxiT^o  'n  .  inCwST  i-^n 
rnTo  ir-i^iîNi  inorr  Dm3.s  13  bxiao  '1  .  nn3rî  inon  nitj^  '1  i;3t 

1  Parmi  les  noms  des  martyrs,  on  trouve  les  noms  de  'i3  'jnpïM  bNT^'»15  'l 
y3'0  P3  'm  irilTT  ITJ'bN  '1.  Ce  R.  Samuel  le  Ponctuateur  est  sans  doute  le  même 
qui  a  copié  une  Bible  en  12G0.  Voyez  dans  le  l'^DTTCin  de  M.  Steinschucider,  n»  109 
et  Wickes.  Trcatisc  of  accentuation,  Oxford,  1881,  p.  ix,  noie  ii. 

*  Cette  feuille  se  trouve  séparée  des  suivantes  ;  nous  voyons  cependant  qu'elle  ap- 
partient au  même  documeut,  à  eu  jufçer  par  le  nombre  730  des  martyrs  qu'où  donne 
à  la  lin  et  qui  s'accorde  ù  peu  près  avec  notre  liste. 


1G  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

L^TîV-N  5— .-?o  li-^'wNT  \r,^T,  i:r:-2N  -:2  j-.rr^-^  '■?  .  £r;^:2  ':;n  L2-^"'r:i'^-i 
t:r:"'.2N  -3  sidt"  '-!  .  *rcN  n-ti  ir'rNT  \i-,^Ti  ci-innN  nn  bx'^'c-'  'n  .  -i;';i 

d-i^n  -^2  ûm2N  '-1  •  Nrr  r^-i72  in-rNi  1-rr:  rj-'^oTr;-'  "i"nr;  p  2p;"i 
npr-^  '-)  .  2-r;  ^::b  •ii?:b":;  N-^îib-ip^:  n-^rrirr;  ûtiwN  "^m  '  n"p:m;'^  irrrr: 
nr-i'wNT  "irirr;  rr^-^  in  ûrt-nx  'i  .  Nb-^n  J—- ?:  irm  v:m  ';r:2T;  "j-riN  nn 
i-i'Hti  ir-wNi  ipTn  -^ibn  rî'vT»  nn  -ni  'n  .  l^rr;  ap:'i  -a  "j-^riN  'n  .  i^:n  '^-i 
•pr:^"^  '-I  -.innr;  i;m  r::n  r^-,":  -,rCwXT  vrr;  pr:::'"  -,n  Vnt:'^  'n  .  l-^b::-:. 
-,3  Vn"  wi  '-1  .  T^:3  '-■]  l:— '::  M  rr-.Ta  nri:'Ni  iibM  tici-i  nn  pniti  'n  .  •»ibri 
bN\n-,p-'  -in  VNn7:t:J  'n  .  ■'ibr;  nr;r:  i^'^-'X'Cj  -  v:n  ':ii  inv^NT  "^nb!-!  n-^-^o 
•-3  '[li'K'::;  n"nr;  .  -.j^*:!  n?:-'^  m72  inm  .  T^:n  '-n  i-;;n  Jn-iTo  iriiîNi  "«"ibr: 
Dir-'Sibp  'n  .  N'wS  nn?3  nnai  T^niîn  '-n  'j'^bi:-:"'r!  i-i'i^o  ir">:iNi  -.ibr!  r;u;72 
ï-n»  nncNi  ■'irr:  'îirw::  n"nr;  p  r:?:r.:i  'n  .  V-^'i^  ïi"'''^  nr\rNi  -iibrr 
ï:r;-,2N  nn  mir;''  '"i  .  n;*^»  m73  ipu^ni  '•ibî-;  c-'p-'bN  "in  "jns  '-i  .  i-^biN 
ï-iiw  irTûîNT  ^ibTi  ï-!'wtt  12  û'^'T!  '-1  .  T^ra  ':;t  i-^bm  f-i-i?:  irr^rNi  -^ib!-! 
nrs  -."n-  .  xibis  r^-?:  "ir">:îi;i  "^ibr:  ncD  m  "îpT!-:  bNi7:'j  'i  .  nrm  NLir-^ 
■^ibr^  bNn?20  13  fp-^bN  '"!  .  T'in  'jt  "j-^biin  ïn".T2  ir'wNn  -^ib!-;  bNi7:'J  13 

•  !-i;n  i-i-i'^  ir^'N^  ^'^r-  bwS^-^c  "3  3p;-i  'i  .  '-rrn  N:::3'^n  miT:  iruiNi 
'n  .  b2ib  ?niy:  ir^Ni  -^ibrr  ncD  -,3  bNT;i  'i  .  "^-ibr;  ncs  -.3  bNi!^c  'n 
.  ■'ib^;  bNi^ïO  13  cn-nwX  'i  ■  s^^r^ia  mi^  in":;Ni  -^ibrî  i-^nw  13  i'::n 

•  ■'-ibi;  bN"i7:o  'i  i:m  -p;3  'm  n:i-3  ni72  ipcnt  "^ibi;  ic^bN  13  t:;n  'i 
rpyi  13  NPsbn  'i  .  ■.■^;3  'm  Nib'T  r-,i?3  ir-w'Nn  bbn  i3  "'mi'a  'i  nii: 
TwN  'i  .  l'^bis"':^  n-"^  iP'wNi  i;'w73  '1  .  1^:3  ':n  N'rbnj  ni»  ip-^riNT 
ni'^  iPwNi  qsT^  13  "iiî-t:-,::  i"nr:  .r:3  'm  N-'-^nirui  i-ii?3  ip'^tnt 
ïn-5a  nPCNT  t\:dv  13  bwV,?:":)  'i  .  i^'îi;  ^-^3  lim  ii-w":  i"nrî  .N::":j3"'b 
ï~ii7o .  Tin  'm  rrrii"'  ^-.i:^  ip\i'ni  î:;::-^  m  ï:!-!13N  'i  •  t^:3  '3t  ipon 
'\•^'b'û^'>  i-ii73  np'^TNT  y^n-i  -a  iic:  'i  .  t^:3  'm  )i-,'2r,  IP^  '"i  ^^  ^r» 
inoNi  rT^3i::  i3  yrT^  'i .  r;-':3  'si  irr-  "jp;  'i  p3  Nb-^si  »^iw  .  t':3  '-n 
13  '^iia  '1  bo  np:iiT  r;i">:)  M",?:  -ipTr:  bx-r;"'  i3  ïi^-V»::  'i  .ybsi  s-iitt 
3pri  '1  .  pni:-'  'i  n3  rtrn  ni?û  .bNi7:o  13  ipTr;  bNT»:"j:  'i  .bN-^r;-^ 
'^2^  î<r73  ni73  •1P31  i:^:r!  u-iis-^n  isst  isaia  ni»  ip^'nt  m30  13  "ipTr: 
.  rr^nii:  m»  r:P3T  b^-»»  ni»  .rr^sn  'm  ']ii3  'i  nn  iiir">D  niTo  .  r;'':3 
13  C]DV  'i  .ybai  niriiTj  .M-^pirs  '3i  mis-^ï  r-,172  ip'^nt  rrnr;-^  '1 
■'pno  13  ipTi-r  bxr  '1  .  nn3ir  ■'3';i72  '1  1531  ab"'3  ni):  ipiiîni  pni:-> 
bN-ittc  13  priif»  '1  .  bNT»  iy;rin  ipdn  ï-)173  inm  a"^i:£  ï-ii»  ipcnt 
':n  Nu;nT  niT:  ipu^nt  i:;i':;nN  13  "jp:  '1  .  "i-i:3"'m  V-*-^^  ^"i'^  ipcnt 
13  pHi:-»  '1  .1^:3  ':t  rûï-^sbi  ïni73  ip^aNi  yin-»  m  rmir^  ■'31   .t':3 

^  .Nnbns  i-ii72  ip'jîni  ne»  i3  3p::'-^  '1  .1y':^  yb^"^  tni»  iP'^tn  Ditt-^aibp 
'1  'pn  13  ir'in  C]Dr  .  NitîDn  m»  ipitni  nnsi:  mii;"^  13  tcn  '1 
û-^iEwN  13  bNi^'j  '1  .  1^53  ':n  n;-^»  m»  ip"wî<t  ■^sii»  i3  û-^-^wX  '1 .  pni:"« 
iTr-^bN  13  ^3ni»  '1  .  sn:»  '1  p3  Nr^:  m»  .  ir;T  ybn::5  m»  ip-cni 
13  ipTi!  bN^rr^  '1  .  ybT'i  '1  bu;  nP3  r;biP3i  i:':i  ybD-^i  ï-,i7:  ip"j:nt 
m»  ip':;ni  ne»  13  '^t-'3  '1  .  ir^n  1231  n;n  m»  ipe^i  bx-^spiJ' 


LE  xMEMORBUCH  DE  MAYENGE  .  17 

.  "1153  'm  bD^72  nn72  in^Nn  prii:'^  'n  •  T^sm  l:^^!:;  mi»  inirNi  prii:-» 
sni  Niiib  m^n  .  v:3  'tt  niitij-'u:  m»  inMiNi  iptri  inïï)»  13  rt^^bui  '-i 
'[■'bTbnj  T^nt'J-^  n"^?:^"^  12  N^^n::»  -iy;m  n^7û"i"«  'n  b;y  in:iiT  inn»'»:;  n"nr: 
bNi7j'^  'n  .  -î-^sn  '11  N'T^ib"»::  ïni^:  inuîNi  n^x;-:^  in  pn^ii  'n  .  n-^ht^  'n  ma 

'-I  .  N'i»-T^    -13  DiT-l3J<    'n    .  n\S73    -1>'3T     ']'^bp5-^72  ï-ll»    -in'^l'NI    ï«-'»T'  -13 

i"'ri3  iDT*r;T  n:;nr;ro  n^7:-,-'  '-,  tni  aS-^^n  m-iT:  irrc.si  bN-^TjHT'  13  nos 
ï-i-iM  .-inDN  r-ii7:  lïntîNT  iTr-ibN  '-1  'pi-;  13  mrisr;  bN'^rr' 'n  •ûh'^sn 
t-r-iiD"^!:  ï-T-i7û  irT>:;Nn  bn^n^  13  mi^-^D"»::  '-1  .  rr^^n  'm  are^a  'n  n3  ')'^bL:iA 
'n  Sn3  'j-^bYr'i:.  n-i>:  .  -i-in  'm  nn^ï^i  nn^o  n"n-  13  noD  '-1  .  t':3  'm 
r-,i?3  inCwST  r;-tt  13  rnirr'  '-1  .  -ir;i  in">:;Ni  r;-nT;-^  13  -il  'n  .  nos 
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nniriwS-,  ny:i  nti-i  Jn-172  •  t^d3  'm  'j-'bD^-i  ïn-173  nn-^i^Ni  net:  13  i-î-nn-i 
13  prijii  '1  .  r:'7Tn^  '1  ms.  N-'b'^i:  niTo  •  rjOT^  '1  b">y  im;3  r73  litsn 
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13ii-î"ibï<  '1  .  ir;r;  bNiT:":;  i^ai  isr?:  ni72  in-^iiwXT  qsii  13  Lir!i3N  i"nr;  .■i:3-! 
.  t]r!i3N  i"nri  buî  1^3  r;i"iri3r;  NjU  ni72  .w^'ibis  Sni73  int;i<i  ûr;i3N  i"n^; 
nnuJNi  rr^pin  in  i">l'n  '1  .  T'j3  ':iT  nh-^t  ri72  iîtjiîni  rr'nyD  i"3  i'i<72  '1 
'1  .ybi'^"'  ni7a  inciNi  ciût^  'i3  iTirn  ipTr:  n-^b^  '1  .i"'23  'ni  n^t:  îiit: 
Nb"'3  ni73  in'iiîkST  pnif^  13  "jn;  '1  .  1^:3  'm  i-^bni:  ni7:  li-rcNi  niT  13  )r\i 
niT:  in'v:JNT  ipir;  r;'C7: 13  pni:'^  '1  •  T";3  'm  bxT'  '1  n3  n:21i:::  rr'.To  .  i:^*n 
N"'n3:>  '1  .  v;3  'ni  r^-^bsTû  ni?3  in">rNi  noD  13  D":;i:<  '1  •  t'33  'm  Nj113 

in&N  '173  liT^ÎNl  mi:-!-!  13  1T3>ibN  '1  .  1^31  N-^SIN  ni7:  iniIÎNI  bN-^n-i  13 

'1  be  imiT  n:i3  '17:  .  rû'^ii:  '172  id^tni  pn^t"'  13  S]DT'  '1  .  iy:i!  1331 
i":5N  13  bN-^n-'  '1  .  !i'^23  'm  pnif  '1  n3  i-!p3i  '172  .  rr^n  "ii  ■lû'^'73''3 
.  !-;-ij3  'n  NiiD  '172  .  i">::n  i:>5m  !ie72  '1  n3  bni  'i7o  .  rt:n  '172  linu^Ni 
"inuîtîi  u]'>:::i5 13  pn::^-'  '1  .  v:3  ':;i  ybi^'j:  'i7o  m'^NT  pnif  13  ûair^  '1 
cjoi"'  13  i;7:b\::  '1  .  n"^53  'm  yL^-^-^?:  '17:  nnuJNn  bNi7:"*:i  13  itoVj  '1  .  li'jT 
b^n?:'»::  '1  . 1:^:3  'n  nitiit  '172  ir^zj^i  t\ov  13  ipTr;  bxTT^  '1  .  in":;NT 
'm  rr^Ti:  '17:  nn\:;Ni  bNn730  13  tioT^  '1  .  Mbiii  '172  irr^i^NT  n!r;i3N  13 
.  v:3  'ni  ybrD^i  '173  incNT  i;c72 13  riOTi  '1  •rTnii"'  -.3  3pr-'  '1  .t^:3 
'1  n3  ybn^  inir;m  .  ■i"^33  'ni  Nitanso  'i7j  inujwNi  ^c^^  13  r;m!T^  '1 
tiDT'  13  Di72-^:ibp  i"ni:  •  nio  ïni7:  bo  11*^3  ni:;d-^i  !-;ir:tnT  riTob'j 
. -1^23 '51  LibiroDi  m7j  iPCNT  T-:::i2  13  !-;n7:ir!  '1  .  ybL:i:i  ni73  irT:.\sT 
irriN-i  !i\:)X3  13  3p3>"^  '1  .Nnbir.  t-ii72  inni<i  nnar:  .rT>:î72  13  rrrirr'  '1 
irT:;NT  .  3p:5''^  13  rrc?:  '1  3p;*"'  1  'ns  ybD-^  t-1172  .  v:3  "n  yb-ji:;  m» 
.T^33  '3-1  'j-'bij'^i  m72  in-^iJuSi  ^113  13  iTi'-^bN  i"nr;  .i:':t  V--12  ï"'"'''^ 

T.    IV.  2 


18  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

nn  bN^n^  '^  .V.s-'n^  na  prn  DmnN  'n  .n^-sn  i^hnt  nT:-'^bN  -in  ^inn  '-i 
pn^:-'  '-1  .^^br,  Dmnx  in  'j^bbn^:  ^y:-\  .  -r:i  "jV^ibn:;  niT:  mcNi  crr^.SwS 
ï-in»  int:\xi  rr^'irc -,"n- 12  lîn  riCT' '-1  .-rsi  b^-^):    ■in'>L\Ni  rr^r?:   -a 

bN-^n-i  n-icnrr  .--nnri  t^n?:  ri:ai  )<•:'J^n  i-^nij  in-:;iST  Dr;n2N  nn  p-- 
'21  NT?:  r^-':  nrcNn  cri-^inVp  n"n-  12  r;-w?:  '-  .piN-,  '-,  -/'m  p 
bc  v:2  -^r:;  .J-i-':2  '-1  r-nir:"'  — "n-  r-2  '[■^b:::i.-  ïnn?:  .  !-!^:2 
ni::-!:;  n-,?:  inuiNi  n-^t:-,-^  -2  -n?:  '-i  •Ci-'bîr:;  î-.-i?:  ■in'iîNi  rz-^p-^bx  '- 
■^mN  -!2  bx-^n-'  '-1  .T'ïn  'n  ip'wNi  n-:ssbN  "12  b.siwo  '1  .t^:2  'm 
NT^ib"-  rn?:  incNn  nizb':^  12  û?ti2N  'n  .t:.i  ':ii  rib-'2  n-.?:  inu-'Ni 
"12  ûr;n2N  '-.  .-^ib-  "prrjL^  -2  -iTrbN  .-.rïT  qsr  'n  r2  cj-^ninn?:  .t^;2  ';i 
'i  .-i:?;i  c-^-î?:  n-':  -pcnt  2pr'i  '1  .1132  '21  ni-^-;!  ni?:  "irrr.si  2p?"' 
'-I  .']-«bp:i7:  n-i":  -r2i  — jd  -;2  pn^i"»  'i  •Nb-'^-i  n-,w  irrcîNT  pT-  r;c?2 
T,J2b'C  '-,  .ûrr^ini  £-^":;;i  ne?:  '",  TT^nm  ■iPD-i:irî  rr^rr  '-i  .-^ib  nn  nsD 
cr;-2N-''nr;  -2  i-irn  r-?:  .r:2i  n::v.  rr,?:  in-wXi  pni:"^  12  ^aj:::cmr:?: 
•  Dwr;  crr  nr>:;2  -,v.rrc  nr,r;  .n^b  ni'':  in'>:;NT  pn^:-'  '1  .r!-i:2  '21  ith- 
r-)-i73  ."'ibrî  fc-'p-'bN  '-,  n2  "jibrr;  n-?:  .-,r;r;  ^biv  r;j2i  ';^b?:Tn  m?: 
M"iy;n  rrmnNT  it::!.-  m?:  .ï-;;2i  :;i-:r;  ^ibn  -iï^'ibN  -i"n-  n2  E^-'b-iii: 
ï-rbsiT:  m?:  incN-,  •;'^b">rrvT  ::-'->r;b-;N  mn;':  ':o  -^ib-  nî;"^bN  -/'nr;  n-!:2 
.!-ii:m  rj-'b-ii:  n-?:  .';-'b',ii  ri:2i  "i-^bibir.  ni?:  rti-'pTr:  n?:\-»  ni-^  .r;;"'pTr; 
m»  r!n2  r2T  îîlîT'  r,i?3  !^r2"i  rirp-r;  Nr7:  niT:  .Tr.^i  ::n:.r7:  n-iw 
bs-^tt  ni?:  .nnbi7:r;  ?irprrî  ti-'bii:  ni":  .!:-12N  i:':t  r!nn2rî  Nb-'ai 
ïT^biie  rtn2T  Nb^^i  ni?:  .\r>^n  bN-^rr^  '1  n2  rinnnrT  n::^"i  ni^  .n^^pn 
.r!^33  ';t  û^-^n  '1  nn  n3^7:  m?:  .n02  '1  21^;  n2  -j^-ptr^  h^.^Tj  ni?:  .r:bin2rî 
?bsn7:r;;  &■••:;;  b-:;  nbDDn?:?^  nj::2"^i  m?:  .  ■'it'H  -iT  '1  n2  i^b^n  ni?: 
.rr^sn  '21  xb-i-';  m?:  "jiba-,;;  ^p^  p^^  nib-»?:?!  û-^i?:  ni?:  (m  û"'03!^  •7:>n 
'1  n2  r;2n  m?:  icwx  '1  »i2  Nb'TN  ni^  inar:  pnit"^  '1  n2  n5"^?:  m?: 
ni?:  .  nipTr:  r;p2i  ni?:  .  irrrr;  bxi?:"::  '1  nn  r;;^pTr;  Nb-'2  m?:  bN-^im:? 
n-?:  rTnn2r;  r;n2-i  :::r2b-iwS'  ni?:  .  pirr;  ^^-\:l  r;;2i  !:r;i2N  '1  n2  tîniT 
•ir:r:  ap^'^  r;:2i  irirr:  in:  '1  n2  Nibi;,  ni?:  r!:ipT-  bs""?:  ni?:  .N-^'^b"':: 
.  p-r;  2pr^  '1  n2  aib-^.:  ni?:  .  --^in  '21  pan  2p::>i  '1  n2  l-'bbr  ni?: 
ni?:  .vjî?:  i"n-  12  i:?:r;  pm:*^  r;:2T  -^rni?:  'i  na  niinni;  i-'b;in  ni?: 
l-'bby  ni?:  r;;n  ni?:  rr^in  ';i  i-^n?:  '1  na  £]ibnN  ni?:  .  i;:ipTr:  i-^b-jT^ 

•  r;:2T  i-^bitTi  ni?:  .ir;ri  ï-j32i 
'^■'•^àr  ûi  n7:p;  i"'^:?:3  a-^'wTipn  ieo?2T 

Liste  des  martyrs  tués  et  hrnlés  à  Nuremberg,  le  vendredi  22  al 
:;(hï8A.  M.^  -  [juillet)  42i)8. 

H.  Yehiel  fils  de  R.  Menahem  le  Cohen  avec  sa  femme  Ilannah  et 
trois  fils;  R.  Abraham  le  Cohen  de  Francfort  avec  son  gendre  le 
jeune  Samuel  fils  d'Abraham  le  Cohen  ;  R.  Abraham  le  Cohen,  chef 
de  la  communauté,  avec  sa  femme  Bonneliue',  sa  fille  Zussa  et  les 

'  DiiDiiiulir  (1«  Uonue. 


.    LE  MEMORBUCH  DE  MAYENCE  19 

deux  fils  de  celle-ci  ;  R.  Pessah  lils  de  R.  Yehiel  le  Cohen  avec  sa 
femme  Bruaeline  '  et  un  garçon  ;  R.  Joseph  fils  de  Yehiel  le  Cohen 
avec  sa  femme  Gemma;  la  femme  Mina  fille  de  R.  Moïse  avec  ses 
fils,  Jacob  le  Cohen,  fiancé,  Baruch  et  Meïr  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Meïr 
le  Cohen  avec  sa  femme  Hitslin  -  et  ses  deux  filles  Moïraona  et  une 
jeune  fille;  R.  Salomon  fils  de  R.  Isaac  le  Cohen  avec  sa  femme  et  un 
jeune  garçon  ;  R.  Abraham  fils  de  Yehiel  le  Cohen  avec  sa  jeune  fille  ; 
R.  Ascher  fils  de  R.  Abraham  le  Cohen  avec  sa  femme  Bruneline 
et  un  garçon;  R.  Samuel  fils  de  R.  Abraham  le  Cohen;  Seligman 
fils  de  R.  Abraham  le  Cohen  ;  R.  Baruch  fils  de  R.  Jacob  le  Cohen 
avec  sa  femme  Adelheid;  R.  Jacob  fils  de  R.  Baruch  le  Cohen;  R. 
Samuel  fils  de  R.  Jacob  le  Cohen  avec  sa  femme  Yentil  ^  son  fils,  l'a- 
dolescent R.  Juda  et  sa  femme  ;  R.  Yehiel  fils  de  R.  Jacob  le  Cohen  ; 
R.  Y'ehiel  fils  de  R.  Jacob  le  Cohen  ;  R.  Moïse  fils  de  R.  Jacob  le 
Cohen  avec  sa  femme  et  ses  trois  fils  ;  R.  Calonymos  fils  de  R.  Na- 
than le  Cohen  avec  sa  femme  Bonneline  et  ses  cinq  fils  ;  R.  Nathan 
fils  de  R.  Calonj-mos  le  Cohen  avec  sa  femme  Golda  et  ses  trois  fils, 
Mardochce  fils  de  R.  Calonymos  le  Cohen  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Yehiel 
le  Cohen  avec  sa  femme  Heuna  -,  et  ses  cinq  fils  ;  R.  Yoeç  fils  de  R. 
Y'ehiel  le  Cohen  avec  sa  femme  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Yehiel  le  Cohen 
avÊC  sa  femme  Mina  et  ses  quatre  fils  ;  son  fils  R.  Ezra  le  Cohen  l'ado- 
lescent ;  R.  Samuel  fils  d'Abraham  avec  sa  femme  Reichheit  et  leurs 
trois  lils  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Abraham  le  Cohen  avec  sa  femme  Adel- 
heid et  un  garçon  ;  R.  Israël  fils  de  R.  Abraham  le  Cohen  avec  sa 
femme  Eslher  ;  R.  Joseph  fils  de  R.  Abraham  le  Cohen  avec  sa  femme 
Gemma  ;  le  jeune  Abraham  fils  de  R.  Yehiel  le  Cohen  avec  sa  femme  ; 
R.  Jacob  fils  deR.  Yehosiphyah  (Joseph;  avec  sa  femme  Ella  ;  R.  Abra- 
ham fils  deR.  Hakim^lc  Cohen  de  Spire;  deux  frères  de  Cologne,  Co- 
hanim,  qui  fréquentèrent  l'école;  R.  Jacob  fils  de  R.  Aaron  le  Cohen 
avec  ses  fils  et  sa  fille  Bella  ;  R.  Abraham  fils  de  R.  Moïse  le  Cohen 
avec  sa  femme  et  ses  trois  fils  ;  R.  Aaron  fils  de  R.  Jacob  le  Cohen.  R. 
David  fils  de  R.  Moïse  le- lévite,  le  vieux,  avec  sa  femme  Gutline;  R. 
Y''ehiel  fils  de  R.  Isaac  le  lévite  avec  sa  femme  Hannah  et  son  fils  le 
jeune  R.  Isaac  le  lévite  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Joseph  le  lévite  avec  sa 
femme  Guteret  et  cinq  fils;  R.  Israël  fils  de  R.  Schemarya  le  lévite 
avec  sa  femme  et  trois  fils  ;  le  jeune  Schemarya  le  lévite  ;  R.  Samuel 
fils  de  R.  Yekuthiel  le  lévite  avec  sa  femme  Ilannah  et  quatre  fils;  sa 
fille  Gemma  et  un  garçon  ;  R.  Siméon  fils  de  R.  Moïse  le  lévite  avec 
sa  femme  Ilerzlin,  ses  quatre  fils  et  sa  fille  Pessa^;  R.  Calonymos  le 
lévite  avec  sa  femme  Gutline  ;  R.  Salomon  lils  dcR.  Siméon  le  lévite 


'  Diminulir  de  Bnine, 
-  Voyez  Lowe,  op.  ri/.,  ]>.  24. 

'  Probablement  Gentille.  Voyez  cependant,  Lo\ve,  op.  cit.,  p.  2"i. 
*  Hannah  ? 

5  Isaac?  Voir  ci-dessus,  p.  'i,  note  /i. 

''  Probablement  le  Bess,  l'orme  anglaise  pour  Elisubetb.  Comparez  Peslia  ou  Pessel. 
Voyez,  Lowe,  op.  cit.,  p.  20. 


20  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

avec  sa  femme  Adeline  ;  R.  Nathan  fils  de  R.  Elyakim  le  lévite  avec  sa 
femme  Mina  ;  R.  Juda  fils  de  R.  Abraham  le  lévite  avec  sa  femme 
Rachlin'  et  trois  fils  ;  R.  Hayyim  fils  de  R.  Moïse  le  lévite  avec  sa 
femme  Yenta*  et  sa  fille;  R.  Samuel,  le  vieux,  fils  de  R.  Pessah  le 
lévite  avec  sa  femme  Golda  ;  R.  Pessah  fils  de  R.  Samuel  le  lévite  avec 
sa  femme  Ronneline  et  trois  fils;  R.  Elyakim  fils  de  R.  Samuel  le  lévite 
avec  sa  femme  Reichenza  *  et  un  garçon;  R.  Jacob  fils  de  R.  Samuel 
le  lévite  avec  sa  femme  Hannah  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Pessah  le  lévite  ; 
R.  Yehiel  fils  de  R.  Pessah  le  lévite  avec  sa  femme  Lûbel'';  R.  Ascher 
fils  de  R.  Meïr  le  lévite  avec  sa  femme  Gottlieb  ^  ;  R.  Abraham  fils  de 
R.  Samuel  le  lévite  ;  R.  Ascher  fils  de  R.  Eliézer  le  lévite  avec  sa 
femme  Brune,  ses  cinq  fils  et  son  fils  R.  Samuel  le  lévite.  —  Le  grand 
rabbin  R.  Mardochée  fils  de  R.  Hillel  avec  sa  femme  Zelda**  et  cinq  fils  ; 
R.  Halaftha  fils  de  R.  Jacob  avec  sa  femme  Golda  et  trois  fils  ;  R.  Moïse 
avec  sa  femme  Tsiperlin  ;  R.  Ascher  avec  sa  femme  Senoria  '^  et  deux 
fils;R.  Siméon  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme  Liebste**;  R.  Moïse  avec 
son  fils  le  jeune  Bera  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme 
Esther  et  deux  fils  ;  R.  Abraham  fils  de  R.  Gersom  avec  sa  femme 
Yeruschahet  quatre  fils;  la  femme  Mina  fille  de  R.  Nathan  le  Cohen 
et  cinq  fils  ;  R.  Moïse  fils  de  R.  Yoëç  avec  sa  femme  Youllin  *  et  quatre 
fils;  la  femme  Rechila  fille  de  R.  Nathan  le  Cohen  avec  ses  trois  fils  ; 
R.  Yoëç  fils  de  Tobiyyah  avec  sa  femme  Reichlin;  R.  Salomou  fils  de 
R.  Yehiel  le  vieux  ;  Sara,  femme  de  R.  Baruch  fils  de  R.  Yehiel  ;  R.  Sa- 
muel, le  vieux,  fils  de  R.  Samuel  ;  la  femme  Hannah  fille  de  R.  Isaac; 
R.  Jacob,  le  vieux,  fils  de  R.  Schabbathai  avec  sa  femme  Guta,  son  fils 
le  jeune  Bernedet  et  sa  fille  Mina  avec  ses  quatre  fils;  la  femme  Kai- 
serin  fille  de  R.  Baruch  avec  ses  cinq  fils  ;  la  femme  Michal  avec  sa 
fille  Tserouyah  ;  R.  Juda  avec  sa  femme  Zephorah  et  ses  deux  filles  ; 
la  jeune  fille  Reichline  ;  R.  Joseph  fils  de  R.  Isaac  avec  sa  femme  Bel- 
let  et  son  fils  l'adolescent  R.  Mardochée  ;  R.  Yoël,  le  vieux,  fils  de  R. 
Schabbathai  avec  sa  femme  ïserif,  sa  fille  Esther  et  Yoël  le  jeune; 
R.  Isaac  fils  de  R.  Samuel  avec  sa  femme  Goldeline  et  cinq  fils  ;  R. 
Nathan  fils  de  Orschraga"  avec  sa  femme  Susse  et  trois  fils;  R.  Ju- 
dah  fils  de  R.  Yoeç  avec  sa  femme  Relèvent  et  trois  fils  ;  R.  Isaac  fils 
de  Calonymos  avec  sa  femme  Yechlin  '*  et  un  garçon  ;  R.  Jacob  fils  de 
R.  Moïse  avec  sa  femme  Golda  ;  R.  Ascher  fils  de  R.  Judah  l'adoles- 


'  Diminutif  de  Rachel. 

'  Probablement  Jeannette.  \'oycz,  Lowe,  op.  cit.  25. 

'  Diminutif  de  Iteich. 

*  Diminutif  de  Lieb  ou  Luba. 

5  Uu  Gutlin,  Lowe,  op.  cit.,  p,  23. 

^  Peut-être  le  nom  slave  Zlata,  Or,  correspondant  à  Golda. 

'  Voyez  cependant  Lowe,  op.  cit.  p.  27  au  mot  N'^'^"l31î23- 

"  Peut-être  Lihussa,  Zunz,  Namen  der  Judcn,  p.  4G. 

'  Voyez  Lowe,  oj).  cit.,  p.  2o. 

">  Peut-être  Zieralh,  comparez  le  nom  Tsirl. 

"  Correspond  à  t'civesch,  Phœbus. 

"  Voyez   Lowi^.  np.  cit.,  p.  2'.'»,  au  mot  L;;~"^.  Peul-êlre  faudrail-il  lire  'J"'Vz"1. 


LI-:  iMK.MUHHUCll  DE  MAYENCK  21 

cent  avec  sa  femme  Richautsa  ;  Joseph  fils  de  saiut  (martyr)  R. 
Isaac  ;  R.  Ephraïm  fils  de  R.  Mardochée  avec  sa  femme  Mina  et 
trois  fils  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Ephraïm  avec  sa  femme  Gneudeline 
et  un  garçon  ;  Mina  fille  de  R.  Menahem  ;  R.  Mardochée,  fils  de 
R.  Eliézer  avec  sa  femme  Reichlin,  un  garçon,  et  une  vierge  la 
fille  de  R.  Vivelin';  R.  Yehiel,  le  vieux,  fils  de  R.  Othniel  avec 
sa  femme  Ilannah  et  un  jeune  fils;  R.  Baruch  fils  de  R.  Moïse 
avec  sa  femme  Gutline  et  quatre  fils;  R.  Abraham  fils  de  R.  Baruch 
avec  sa  femme  Reichlin  ;  R.  Salomon  fils  de  R.  Isaac  avec  sa 
femme  Gutart^  et  ses  fils;  R.  Isaac  avec  sa  femme  Michal  et  ses 
deux  fils  ;  R.  Salomon  fils  de  R.  Moïse,  le  vieux,  avec  sa  femme 
Schœnfrau^  et  ses  quatre  fils;  Lutsa'' fille  de  R.  Simhah,  femme 
de  R.  Jérémie  ;  le  jeune  Ohadyah  fils  de  Jérémie  et  la  jeune  fille 
Goldeline  fille  de  R.  Jérémie;  R.  Isaac  fils  de  R.  Jérémie  avec  sa 
femme  Salveda  et  quatre  fils  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Jérémie  avec 
sa  femme  Minkelich  et  le  jeune  Meïr;  R.  Abraham  fils  de  R.  Jéré- 
mie ;  R.  Pessah  fils  de  R.  Yerahmiel  avec  sa  femme  Belletta,  qui 
furent  tués  et  brûlés  du  vivant  de  leur  père  ;  R.  Yehiel,  l'adoles- 
cent, fils  du  saint  R.  Eliézer  avec  sa  femme  Esther;  la  femme 
Gutline  fille  de  R.  Menahem  et  ses  quatre  fils;  R.  Senior  fils  de  R. 
Yehiel  avec  sa  femme  Zephora  et  cinq  fils  ;  R.  Pessah  fils  de  R. 
Simhah  avec  sa  femme  et  quatre  fils  ;  la  femme  Goldeline  fille  de 
R.  Pessah  ;  R.  David  fils  de  R.  Juda  avec  sa  femme  et  un  garçon  ; 
R.  Juda  fils  de  R.  Moïse  avec  sa  femme  Bouline  et  quatre  fils;  R. 
Jacob  fils  de  R.  Orscheraga  avec  sa  femme  Sarah  et  quatre  fils  ;  R. 
Juda  fils  de  R.  Moïse  avec  sa  femme  Reichlin  et  quatre  fils;  Rosa,  un 
garçon  et  sa  sœur  Hefzi-bah,  enfants  de  R.  Joseph  ;  Tilia  (Mathilde) 
fille  de  R.  Juda  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Samson  avec  sa  femme  Mineline 
et  cinq  fils  ;  R.  Yehiel  fils  de  R.  Isaac  avec  sa  femme  Mina  ;  R.  Azarie 
fils  de  R.  Samuel  ;  R.  Hananel  fils  de  R.  Samson  avec  sa  femme 
Tsorline^  et  quatre  fils  ;  R.  Néhémie  fils  de  R.  Samson  avec  sa  femme 
Tsorline  ;  R.  Hakim  fils  de  R.  Ascher  avec  sa  femme  Hanline  et  quatre 
fils  ;  R.  Gedaliah  fils  de  R.  Hakim  ;  R.  Abraham  fils  de  R.  Baruch  avec 
sa  femme  Rebecca  ;  R.  Ascher  fils  de  R.  Hakim  avec  quatre  fils  ;  R. 
Israël  fils  de  R.  Y'oëç  avec  sa  femme  Gutline  et  quatre  fils  ;  R.  Meïr 
fils  de  R.  Yoëç  avec  sa  femme  Schoenlin  et  un  garçon  ;  R.  Orschraga 
fils  de  R.  Salomon  avec  sa  femme  Brune  et  cinq  enfants  ;  Ilanline 
fille  de  R.  Salomon  et  un  garçon  ;  R.  Liberman  fils  de  R.  Isaac  avec 
son  fils  ;  R.  Abraham  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme  Mina  et  son 
jeune  fils  Samuel  ;  R.  Elle  fils  de  R.  Abraham  avec  sa  femme  Golda  ; 
Bona  fille  de  U.  Abraham  ;  R.  Meïr  fils  de  R.  Saadyah  avec  sa  femme 

1  Viveliii  csl    sans  doule    lo  diiniuulil'  de    Vive,  traduction    de  Û"^TI,   et   non  pas 
Fcblin,  diiniuutif  de  IMiœbiis,  comme  M.  Lowe  le  propose,  op.  cit.  p.  2. 

*  C.-à-d.  Guthard  ou  Gutherz,  bon  C(Eur. 

î  Voyez  ci-dessus  p.  22,  note  7,  cl  Lowi^  p.  27. 

*  Peut-être  Lu  ce,  lumière. 
5  Diminutif  de  Sara. 


22  REVl'E  DES  ETIDES  JUIVES 

Diha'  et  trois  fils  ;  R.  Ascher  fils  de  R.  Ezécliias  avec  sa  femme  Mina 
et  quatre,  fils  ;  R.  Elie,  le  vieux,  Hazan,  fils  de  R.  Joseph  avec  sa 
femme  Yechlin;  R.  Nathan  fils  de  R.  Zerah  avec  sa  femme  Tsorline  et 
quatre  fils;  R.  Nathan  fils  de  R.  Isaac  avec  sa  femme  Relia  et  un 
garçon  ;  Traute,  fille  de  R.  Yoëlavee  cinq  fils;  R.  Isaac  fils  deR.  Moïse, 
le  vieux,  avec  sa  femme  Brune  et  cinq  fils  ;  R.  Gerson  fils  de  R. 
Pessah  avec  sa  femme  Schoenlef  -  et  quatre  fils;  R.  Obadiah  fils  deR. 
Yehiel  avec  sa  femme  Avigai  ^  et  un  garçon  ;  R.  Eliézer  fils  de  R.  Juda 
avec  sa  femme  Esther  et  son  jeune  fils  ;  R.  Joseph  fils  de  R.  Isaac 
avec  sa  femme  Tsaret  ;  Boua  femme  deR.  Benedet  avec  ses  quatre  fils  ; 
Rebecca  fille  de  R.  Isaac  avec  cinq  fils  ;  R.  Yehiel  fils  de  R.  Ascher  et 
sa  femme  Hannah  ;  Rachel  fille  de  R.  Moïse  et  le  garçon  Ascher  ; 
Paura  avec  ses  quatre  fils;  R.  Gerson  fils  de  R.  Isaac  avec  sa  femme 
Tserline  et  trois  fils  ;  R.  Isaac  fils  de  R.  Gerson  avec  sa  femme  et  un 
garçon;  R.  Salomon  fils  de  R.  Samuel  avec  sa  femme  Maïten*  et 
quatre  fils  ;  R.  Salomon  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme;  R.  Yehiel. 
le  vieux,  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme  Freude^  et  quatre  fils  ;  R. 
Samuel  fils  de  R.  Abraham  avec  sa  femme  Golde;  R.  Joseph  fils  de 
R.  Samuel  avec  sa  femme  Zeruyah  et  cinq  fils  ;  R.  Jacob  fils  de  R.  Juda; 
R.  Joseph  fils  de  R.  Moïse  avec  sa  femme  Reichlin  et  quatre  fils  ;  R. 
Juda,  fils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme  Sprinça  et  quatre  fils;  les  jeunes 
filles  Tserlin  filledeR.  Salomon  et  Richantsa  fille  de  la  femme  Sarah; 
R.  Galonj^mos  tils  de  R.  Joseph  avec  sa  femme  Gutline  ;  R.  Simhah 
fille  de  R.  Moïse  avec  sa  femme  Reichengold  et  trois  fils  ;  R.  Juda  fils 
de  R.  Moïse  l'adolescent  avec  sa  femme  Golde  ;  R.  Jacob  fils  de  R.  Moïse 
avec  sa  femme  Gutline  et  quatre  fils  ;  Yechlin  fille  de  R.Jacob;  R. 
Moïse  fils  de  R.  Jacob  avec  sa  femme  Bonline  et  un  garçon  ;  R.  Eliézer 
fils  de  R.  Baruch  avec  sa  femme  Yechlin  et  deux  fils  ;  R.  Baruch  fils 
deR.  Eliézer  et  son  jeune  frère;  R.  Abraham,  le  vieux,  fils  de  R. 
Yehiel  ;  R.  Yehiel  fils  de  R.  Abraham  avec  sa  femme  Goldeline  et  un 
garçon,  le  jeune  Mullin  fils  de  R.  Abraham  le  lévite  ;  R.  Isaac  fils  de 
R.  Moïse  avec  sa  femme  Michal  et  un  garçon  ;  R.  Joseph  Ilazan  fils  de 
R.  Saadyah  avec  sa  femme  Richanlsa  et  leurs  quatre  fils;  R.  Abra- 
ham, l'adolescent,  fils  de  R.  Moïse  avec  sa  femme  Miriam  ;  R.  Isaac,  le 
vieux,  fils  de  R.  Abraham  avec  sa  femme  Boneline  et  son  fils  Mei'r  l'a- 
dolescent ;  le  très  estimable  Yehiel  fils  de  R.  Reuben  ;  R.  Moïse  fils  de 
R.  Calonymos  avec  sa  femme  Mina  et  ses  deux  fils  ;  la  femme  Gutline 
fille  de  R.  Juda  avec  ses  quatre  fils  ;  les  deux  fils  de  R.  Ellukini  avec 
sa  femme  Schoenlef;  R.  Moïse  fils  de  Jérémie  avec  sa  femme  Guta  et 
cinq  fils  ;  R.  Samuel  fils  de  R.  Alexandre  avec  sa  femme  et  sept  fils  ; 
R.   Yehiel    fils  de  R.  Ouri   avec  sa   femme  Bella  et   trois   fils;   R 

'  \'oycz  sur  co  nom  rcxplication  peu  ]irol)ul)le  de  M.  Lnwo,  op.  cit.,  p.  23. 
'  Compose;   (le   Schoii   et    2b  cœu)\   anaiof^uo  à   Gulliani,    ci-dessus  p.  2|,  note  2. 
Voyez,  pour  une  autre  dérivation,  Lowe,  p.  20  au  mol  S'^bm^. 
'  Voy.  ei-dcssus,  p,  12,  note  1. 
'•  Mathildc.  l.owe,  p.  2:i. 
'  Lowc,  p.  2'i. 


LK  iMliMURBUCH  DE  MAYEXCK  23 

Abraham  fils  de  K.  Salomon  avec  sa  femme  Salveda  cl  trois  lils  ;  la 
femme  Tsarit  fille  de  R.  Joseph  et  un  garçon  ;  Elazar  fils  de  R.  Isaac  le 
lévite;  R.  Abraham  fils  de  R.  Jacob  avec  sa  femme  Frida  et  deux  fils  ; 
R.  Jacob  avec  sa  femme  Miriam  et  un  garçon  ;  R.  Moïse,  le  vieux,  avec 
sa  femme  Rechila;  R.  Isaac  fils  de  R.  Peter  avec  sa  fille  Minklich;  R. 
Pessah  fils  de  R.  Lévi  ;  R.  Moïse  le  Français  et  son  ami  R.  Moïse  avec 
leurs  femmes  et  leurs  fils  ;  R.  Salomon  de  Ilochstedt  fils  de  R.  Isaac 
avec  sa  femme  Guta  et  ses  fils;  la  femme  Ilannah  fille  de  R.  Abraham 
le  Hazan  et  deux  fils;  R.  Isaac  avec  sa  femme  Léa;  le  prosélyte  qui 
se  convertit  pendant  la  colère  de  Dieu;  la  femme  Rumeline  avec  son 
jeune  fils  Judeline;  la  femme  Hanneline  fille  de  R.  Eliakim  le  lévite  ; 
la  femme  Zirlef  fille  de  R.  Eliézer  le  lévite,  qui  fut  tué,  avec  son  fils; 
Gutline  et  sa  jeune  sœur,  filles  de  R.  Eliézer  le  lévite;  trois  jeunes 
filles,  Adelheid,  Pessline  et  Esther.  —  Les  femmes:  Minela'  la  vieille  ; 
Gemma  la  vieille;  Goldeline  avec  son  fils  Yiveline;  Zirlef  et  ses  fils; 
Mingut  et  son  fils  ;  Mina  la  vieille  avec  sa  lille  l'utta,  sa  petite  fille 
Rachela  et  le  garçon  Abraham;  Zirlef  la  vieille,  la  sage  femme;  Michal 
la  vieille;  Yetta  la  jeune  fille,  fille  de  R.  Yehiel  le  Cohen;  Rachela 
avec  sa  fille  Zirlef  la  jeune;  Mina  la  vieille,  fille  du  rabbin  R.  Pessah'; 
Mina  fille  de  R.  Hayyim  avec  ses  trois  fils;  Reichlin  fille  de  R.  David 
le  lévite;  Richentsa  qui  prie  pour  les  femmes;  Miriam  la  sage  femme 
et  sa  petite  fille  Gutline;  Gaila  ^  et  ses  deux  fils;  Mina  fille  de 
R.  Isaac  le  Cohen  ;  Adela  fille  de  R.  Ascher  ;  Ilannah  fille  de 
R.  Othniel;  Bella,  la  vieille,  fille  de  R.  Samuel  le  Cohen;  Rebecca  la 
vieille  ;  Diha  fille  de  R,  Abraham  avec  son  fils  Baruch  le  Cohen  ; 
Adelkind  avec  sa  jeune  fille  ïilia  ;  Michal  la  vieille  ;  Golde  fils  de 
R.  Nathan  le  Cohen,  avec  son  jeune  fils  Jacob  ;  EUène  fille  de  R.  Jacob 
et  ses  deux  fils;  Golde  fille  de  R.  Jacob  le  Cohen;  la  jeune  Ilaven- 
line  *  fille  de  R.  Mardochée  avec  son  jeune  fils  Isaac  fils  de  R.  Meïr; 
Yatline  la  vieille;  Adlef  fille  de  R.  Meïr  et  ses  trois  fils;  Hannah  ; 
EUène  avec  son  jeune  fils;  Hitsline  et  son  fils. 
Total  des  saints  (mart,yrs)  :  740. 

Voici  maintenant  les  noms  des  endroits  où  eurent  lieu  les  mas;- 
sacres,  qui  se  trouvent  (''num(''rés  dans  notre  Memo)'huch.  Ces 
mots  sont  écrits  par  diflerentes  mains. 

I.  En  caractères  carres  d'une  main  jiostericure  à  Isaac  (U^  Mei- 
ningen  (fol.  ^-^''p). 

•  Lisez  Nb5"'?j. 

"  AbrégR  d'Abif:ail;  voyez  Lo\Ne,  p.  23. 

'  La  pelilu  Eve. 


•2',  RKVIE  DES  ETUDES  JUIVES 

Np\s:-jr;^5  p;^Vr;rN  ■^i:;mN  inT^i  mN;i^5  p'n:::;rbp  !-;':?i7:-jp?:  c-^^n-j-in 
^2n?:  ';:rb:i^p  u^^'-p:":)  Y^-^':i  pnaanbri  û^^rrjT'.p  p^,2;o-^n  nNibirsnp 
p-iar-bni  l^mii-^T  prbror,  p-ruiïnb  N-j'?:i  rz-'-^rin  'j^i-inb-'T: 
NI?  N-ii?::;  pmnb-^5:r:  p\H;n  u-j":;b-ip  p-urDiiT^n  ipm  yiN  \''mn 

Tibpb»"»a'ia^;'^''7:-j-o''«ur'''nby73  "j'j'wrD^bn^  N::-niTrî  Nuiirr»::  isnnobTT^ri 
(SIC)  n::û^p  pirrirt^ip  n;^":;5ii3  Nnti'^^::  :;ûb'^r;^in  pinn  ijinVu 

-rrb  ::t:':::ip  pn::"--;"':  p":;-';  pi2;Di::2'v:j  "wbnrjrr'b  Nrnp  L:bTibnr;  :û:;û\n 
tprj^a  v^înna  ^n;ip  £^-m;:Dt:n  ri^'^iî^n  'î7:i^i  'n  1."^^'^  û^n-jiïî  pnarj 
::::c^m  innspi^  NpT'-'n  r^u'C-^-'i'  pnins;:;^!  pinsm!-;  riiiiN  pi3:i:bn::o 
'-1  r:m  in-wNi  lï^^n  û'^sia  'n  pTinîiû^-j  pinb-^no  d-^^rimrî  moï-iN 
'1  û-^-^riw^Ljnp-'m  'î:i2'^:Db'i'^3  apnw^'^iis  N;?:bip  N'^'^i;-n-j  irr^n  "^^m  N-i^n 
"^Tin  NT'ubjjN  vnnn  q-^-^t;  ■i\\  -^^Tir;  nsni:  \"o-ir!  in":.\si  Trc^i^  1:3  ']n-:2 
inmsm  npy-'  'n  n-in  b-^nnip  ■'Dn-ia  "û-^^ibn  -^sTr:)  -.in  y-,N  ■'^inlri  Nbn 
p"nD"w-iL3\:5  ''rtT.r!  lî-iID-.n  \'."nr!  n:i?2j-'"i  \m-i!-! 

iVom^  (?^5  ^i/^é5  rfe  safiç. 

Lauden,  Grossfeld,  Gamburg,  ...heim,Dûren,Wartenberg,  Freuden- 
berg,  Wertheim,  Eckenmûhl,  Klingenburg,  Gernau,  Wiedern,  Oden- 
gau,  Ingelfingen,  Lichteneck,  Kunzelsau,  Weissenburg,  Krautheim, 
Haldenberg,  Stetten,  Konigsbeim,  Kreglingen,  Mosbach,  Heilbrun- 
nen,  Winbeim,  Grath,  Luuenburg,  Gœggingen,  Sindringen,  Wal- 
denberg. 

Martyrs  du  pays  de  Franken;  Wurzbourg,  Carlstadl,  Reineck, 
llammelburg,  Ginimd,  Lahr,  Arustein  :  la  femme  Tsira  de  Hei- 
lingsfeld,  Hocbfeld,  Schœnberg,  Wasserdorf,  Geroldshofen,  Schoén- 
wart,  Hasperde,  Melrichsladé,  Meiningen,  Schmalkaldeu,  Schleu- 
singen,  Wasungen,  Rombild,  Themar,  Neustadt,  Konigshofen,  Kircb. 

Martyrs  des  villes  de  Bamberg,  Forchheim,  Iloheastett,  Gugel, 
Erkolsheim,  Ebermannstadt,  Ilollleld,  Kirn,  Liclitenfels,  Staufen- 
berg ,    Keusladt,     Gcrsburg,     Kousladl,     Licbtenberg,    Ausbeim, 

Falziugen,  R.  Frohman,  brûlé  à  Tanndorf,  Kœnigssee,   ,    , 

Slolzenberg,  Urach,  Ilobenberg,  Weisseuburg,  Eiscbslatt,  Ileideck, 
Meckeiihausen,  Freisladt,  Erfurt,  Ilornlieim,  Spielberg,  Tetlenborn  : 
R.  Boncm  le  Colien  avec  sa  femme  et  ses  fils  ;  R.  Bera  avec  toute  sa 
maison,  Toniau,  Gulmcnau,  Neumarkt,  Wcilchingen,  Wickershcim  : 
R.  Baruch  Moïse  avec  sa  femme. 

Martyrs  de  la  France,  des  îles  de  la  mer,  d'Angleterre,  de  Halle 
et  de  Hongrie.  Ceux  qui  furent  brûlés  à  Blois  et  à  Corbeil,  R.  Jacob 
et  ses  amis.  Martyrs  de  Rcmagen,  Erfurt  et  Strasbourg. 

II.  En  (■■(■l'itiini  cursivo  allemande  ancienne  (l'ol.  "l'p  et  T"-p). 
'b'Vx  3Na  -^in  nb^nnm  DO  linn^UJ  û^)3i-  -^^r  mTouj  ibN 


LE  MKMUHUL'CIi  DE  MAYENCE  2o 

]1^b    .  û-^^i^yni    .  û-^-^ri^bip    .  û-^nsin    .  p-in3:E'>i'ii<    .  û^'-'Cisicn 
pnn-iin-n    -N^i^T   •  N'i^ïb-'T    .p"iimr-nr:   .pmnb^^    .Nr-'rj"::    -iTinina 

•  Nzî'^iïN  .n:::c3i)2  ."ipbN  .ntdsi^  .N'^-'b  .  ^,n3 

'b'-'iC  ic^bN 

.  t^^b-^"i5^"i   .  f^-^-p-ii'a   .  Nib-^r^r-'ib-isTn  .  û^^icbnr:  .  N]:b',T  -Ni^ni-i 
•  ïNiia  .  ciriîT  .  û-'rr^^TiwS  .  inribi:»:  .  û'^npS'^-Tin  .bNr33Tû53i»   .  p-iD":;-',r^p 
.  pin^T^ibn  .p-i3;o"^n  ,  nj-nD^^-^a  .L]"^ib::î:o  .  "^Hi^iiDi^cT^:  .Nib-^pb^  .lit^d 
.  Nnn::  .p-.-'pnmN  .  û'^^-;::r   .^s^ibiî  .p-in^bri 

b'n']i:  ^^-i^'wiNT  C'^ï-in 
.y"'37::>'^ .  p'n!j'-i\s  .  opn  .b-jiix .  ]^':r,  .  t3^'':T_.  Ni:."^i._..  pmairoN  -Npbno 
.  •o-iia  .  £]'Ti:û^3"^"'-,3yr!  . ';i'^L]":;jpbn  .  p-i^'s-^ribr-n  .  y-^ni-.-j    . 'j^j'^a^is 
.  ^•;^b  .  ntids  .  p"nn;ii3 .  )brû  .  ri-nn^D-iTow  .  p-'i  •  '^abL:"»::^?^  .  "j^biniiLDcn 
.']b'^"i  .q-nijTTnn  .  "inï^rxii  .v^:d^^,d  . 'jNbLî'^rNi:  .Nb  .•u;'^^  .pbiD 

-nrjy  .p-i^p-iD  .  i^iriTab-^iT  .Nnsi-in  . ';5;ib:i2'i'i  .NTnsb  .S|-ni;pi'-j 
.';nr!jî53'n  .';:;D"ini-iL;\:: . 'j:o'^"!-i::>  .pb^-n  .p-nnn73  .p-na-^n  .'i:i5"iuJ3'*»  ."jibn 
.N^ttp  .^■'■'rîbrp  .ap^7:n3  ."jc-nn  .p^-^ti^iN  .pma"'">"ip  .ain^'rsb 

Voici  les  noms  des  villes  de  sang  où  les  massacres  commencèrent 
le20  Ab,  5096  =  1336. 

Roettingen,  Au,  Oppenlieim,  Kilzingen,  IiJhofeu,  Wickersheim, 
Mergentheim,  Hohenburg,\Viedern,  Lauterbach. 

Le  10  Tammouz  3097=  1337  les  massacres  commencèrent  à  Bis- 
chofsheim,  Aschaffenburg,  Buchheim,  Klilsheim,  Bretheim,  Lauden, 
Pfafîenhausen,  Stein,  Hammelburg,  Holienburg,  Villeneuf.  Diez, 
Friedburg,  Bïidingen. 

Sur  le  Rbin  en  3097  ==  1337. 

Lorsh,  Bacliarach,  Vedl,  Boppart,  Kirchberg,  Rbcinbellen, Coblence, 
Montabaur,  Lcun,  Kochem,  Alken,  Munster,  Andernacl). 

En  Alsace  eu  3098  —  -1338. 

Rouffach ,  Soulz ,  Ilerlisheim ,  Rappoldsweiler  (Ribcauvillè), 
Berkheim,  Richviller,  Kaiscrsberg,  Mûnslertal,  Duriugheim,  Mïil- 
bausen  (Mulbouse),    Eiisislicim,    Sennsbeim  (Cernay),   Tliann,   Firt, 

Altkirch,  Munster ,  Benlort,  Ritlenberg,  Blumberg,  ZcUenberg, 

Soulzbach,  Ettenheim,  Oberkirchen,  Saverne. 

En  Bohême  et  en  Autriche  en  5098  =  1338. 


ofi  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Pulkau,  Eggenburg,  Reisch,  Znaïm,  Ilora,  Zwell,  Rakonitz,  Er- 
burg,  Jemnitz,  Pratingen,  Trebitscli,  AVelschberg,  Walkenstein, 
Hebreichsdorf,  Gortz,  Raslenwalden,  Mistelbach,  Yiten,  Emersciorl", 
Tuln ',  Naunberg,  Passau,  Linz,  Politz,  Budweiss,  La,  Zastelan, 
Rechniz,  Naunbausen,  Drosendorf,  Felk. 

En  Bavière. 

Tegendorf,  Landau,  Dingelwangen,  Brunau,  Willshofen,  Vierkir- 

cben,  Ettenteld,  , Mosburg,  Felden,  Erding,  Straubingen. 

Pfaffenhausen,    Landshut,   Kraiburg,   Oettingen,    ,   Neumarkt, 

Kellheirn,  Kamm. 

Une  main  plus  récente  a  ajouté  le  passage  suivant  : 

"5"-'  p-rinr^nw  vo-.r;  .  'D':/p  p^:n  "-^-z'V:  -^sinci  \".i-.r:  .  t:7:'7  ûip:"»  'n 

.  b'T'p  '-  ST^  -^\\:2 

Eu  l'année  5133  =  1373,  le  sabbalh  2i  Nissan,  la  communauté  de 
■NVacbenheim  fut  brûlée  ;  la  même  semaine  la  communauté  de 
Lambsbeim  et  celle  de  Neustadt  près  de  Spire  eurent  le  même  sort. 
Le  sabbath,  néoménie  dlyyar  3133  =  1373  les  malades  étant  à  Ger- 
mersbeim  ainsi  que  les  gens  bien  portants  furent  brûlés.  Personnes 
massacrées  et  brûlées  à  Mosbacb,  en  Nisan  5133  =  1373.  Personnes 
massacrées  à  Schweinbourg  le  mercredi,  14  Iyyar5l37  =  1377. 

Le  passage  suivant,  en  caractères  carrés,  vient  immédiatement 
après  et  est  suivi  de  la  prière  '^'^-^r:)  -''a  en  caractères  cursifs  al- 
lemands anciens. 

NbT2  prb-^iN  'ir.:"'bu:\s  N?:"'nN  prb-;— :   .t-;-'3T:;"'T    p— ic-^ns  vo^iH 
t^irr:-^-,-'-  N:bnp  n-,-"— j  Njirbmp  isi:::.r7:  Nt:;'?2-n'i  n-^-^d'û'  .pms'winui'i 
Vi-.'iZ'^.y  iT^in-j-.i:  Nr::-^'^'?:  LNbn  pn-i^n^-^r?:  p'^n2:n:-,2  'j^b'^rs  NpT-.D5nN 
pma\:;25"'-i   pn'iasmD  p-.-^nron-i  p-nnir-i-'-n    cû-nspno   N-;biD   inT-'ïibn?: 
.  N5-ID  'is-'-'N  N-^-^p-ip  Nb\ri-îa  s-^-'rT  NT72"^"ip  ^b-'D  p-ii^itbT  t2'^'^ir:'>::T:b 

Personnes  tuées  à  Augsbourg  et  aux  environs,  à  Nordlingen, 
Ulm,  Eislingen,  Uberlingen,  Bfde,  Strasbourg,  Spire,  Worms, 
Mayence,  Coblence,  Trêves,  Cologne,  Dortmund,  Osnabrûck,  Ber- 
lin, Brandonburg,  Magdeburg,  Halle,  Meissen,  Nordliausen,  Erfurt, 
Muhlhausen,  Fulda,  Francfort,  Wurzbourg,  Rothenburg,  Nurem- 
berg, Ratisbonne,  Landshut,  Salzburg,  Felk,  Krems,  Znaim,  Bres- 
lau,  Cracovic,  Eger,  Prague. 

'  C'est  sans  doute  dans  celte  ville  (jue  tut  copié  le  Talmud  dont  une  partie  se 
trouve  a\i  Vatican.  Voyez  N.  Kabbinowicz,  Vari/s  Lectioiiet:,  t.  XI,  p.  17. 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYEXCE  27 

A  la  fin  du  volume  en  caractères  cursit's  allemands  anciens. 

.■'UJUîr!  E^rNb  S-p  »nr:in  'lyi  ioj'D  t^'n  rrTnr.r;  i-;bN 
-■nniN  imï-isin  .p^DOjn-i  .NiTii-'b  .p-,>^p-ob:?iT  nbi-rp  .'^T.s'na  ns-^TJ^ 

.■î^ribnsi:»  .Nn:3">i  ps^^oi'^a  •■^TNiia  D"r  ';nns':5  .^rirjTDip  .'j^^'^b 

!>i5^-^y  pi-jDD  piDiD^ib  Nn^^^2  pm3":JiN  rbnp  .)i^^'2  n5n^ 
LDiu^sni^  p3i>3  rûrû'^rsbn^'-^N  pj^b'^i  iD^^ii^'^b  n;il:'i:'"i  p-iia^iS"!"  û-'^i-îb-'"! 
-bp;^n  i:j5"nbi'  psirjnn  ■jro-'bTiiD  ';r.;'^::-,'^'^3  Np'^T^-'n  ';::*5'^"i^-,:»  ';^inb3>Ti 
Nib'^i^uu'T'DTi  l^3"'b;'î2  p'n3'^,wS  "^mo  'j.'ij-'mi:  nii-iwX  qmii^mn  brnT*5 
p-nn-^-'m  pm:25ii3  Nbn  rb-p  .inbyni-^Tjirr^nb-n  pï"^p;»î?b2:3  T?"'^ 
-■ûbin  "jTiribi»  N^b-^i:':i  NirbiT  Nib-'irjiT  di-'r^jT  f^rrcîiîSN  u'^.-'D  n^:: 
Nnb-^'rûujbiD-n  N-i>2bip  n-^'^nprTTi  n53T-i  b"jTj^3i^  p-i2":i'^r^p  û'^'^r: 
û"i"^ri^bipn^  :2-j">ai:rbTi)  ybir^y^'oyj)  d-'-'^îp'-is^in  Nabis  pinsb^i:  N-ib-^iD*!"! 

ab3'i3:?D    p-^iisyp   "jsrni^x   Nnb  Nbrtn  D-^-^nror  Nnni^^î  N'^::û03^:cc-n« 
•N'ûbj'T  pTinn-jib  Ninsb  Nn^sn  ribripr:  pniDûTJO 

NiTiDb":^  t3-'-'^::jjn:i  t:^-''-i:m3  Nb\:)T-i3  f^-^.-'D-iîi  >>î-w73mi  mbnp 
t:'^'^ï-;a-i3*i  piairob-^T^  Ni3^2  b-iiab^»  Qi-^rrano  NwbiN  p-inb'r^^r;  N;r;;'^i 

innbi'D  "jms-iwS  r-ib!-;p  .  ';b"vrr;n7:  ';n^;"i2b^r;  pii-;":3:;;ip  "j^s-^nbiD  pbp 
.Nrrji.n  î<D:rN  n^.iob-^i:  n-j-j'^ts-iï^  v^'''^  inïTo-iiD 

Voici  les  [lieux  où  eurent  lieu  des]  persécutions  en  l'année  5109=: 
1349. 

Prormce  de  Boden-See  :  Les  communautés  de  Weltkirclien,  Lindau, 
Rabensberg,  Buchhorn,  Ueberlingen,  Constance,  Schafihausen.  [Autre 
province]  Memingen,  Bibra,  Giindelwangen.  Bavière  :  les  commu- 
nautés d'Augsbourg,  Burgau,Landsberg,  Pfaffenhofen,  Aichach,  Fell- 
heim,  Wasserburg,  Vorden,  Lipheim,  Dillingen,  Ingolstadt,  Munich, 
Neustadt,  Welldorf,  Greding,  Heidek,  Berching,  NOrdlingen,  Feuch- 
twang,  EUv/angen,  Dinkelspiel,  Burgdorf,  Arau,  ZofiDgen,  Sursce, 
Arburg,  Mellingen,  Roupertsviler,  Zurich,  Bàle,  Sekingen,  Waldshut, 
Rheinwalden.  Les  communautés  de  Bâle,  Neuenbourg,  Fribourg, 
Thann,  Fûrt,  Ensisheim,  Sennheim  (Cernay),  Watviller,  Soulz,  Gue- 
viler,  Mulhouse,  Ilerlisheim,  Kaiserberg,  Munstertal,  Roufl'ach,  Du- 

rinkheim,  Colmar,  Rapporldsviller,  Richeviler,  Zcllenberg, ,  Bcr- 

kheim,  Kestenholz,  Schlettstadt,  Markolsheim,  Ockenheim,  Erstheim, 
Fiirth,  Rosheim,  Saverne,  Neuviller,  Bischviler,  Oflenburg,  Maur- 
miinster  (Marmouticrs),  Rhinau,  Ettenheim,  Hasel,  Lar,  Eudingen, 
Kenzingen,  Benfeld,  la  communauté  de  Strasbourg,  Haguenau,  Lan- 
dau, Lauterbourg,  Selz. 

Les  communautés  de  Worms,  Spire,  Bruxelles,  prorzhcim,  Bret- 
theim,  Ileilbronn,  Wimpien,  Ileidelberg,  Ulm,  Sersheim,  Eltvillc, 
Bingen,  Miltenberg,  Wertheim,  Duren,  Erbach,  Amorbach,  Ilam- 
melburg,  Friedberg,  Wurzburg,  Schwcinfurtli,  Ebern,  Scbmalkaldou, 


28  REVUE  DES  ÉTLDES  JUIVES 

Schleusingen,  Konigsliofen,  Herleshausen, Les  communautés 

de  Erfurt,  de  Muhlhausen,  de  Nordhausen,  de  Meissen,  Arustadt, 
d'Eisenach,  de  Gotha. 

Le  passage  suivant  est  écrit  par  la  même  main,"  mais  il  est 
presque  oblitéré  ; 

.''Z':ii-i  T\biib  b"'û'î>  rr::n  'm  •i":;^';  n"«rN  m-r^nn  nrN 
inirsams  "it^^"-^^  ::-,is"i:^*  r^j'ibm  N;bip  a-mpm  fc-^^rirsiN  nisj^:?» 

.p-nn;aT-,  p-srnn  p-2:--i:  p-nn::-,-'!  yc-^iû  rm?:  Nbcp  'j"^"''^  nmT: 

Voici  les  lieux  oîi  eurent  lieu  des]  persécutions  un  vendredi  5139 
=  1379. 

Augsbourg,  Nordlingen,  Ulm,  Strasbourg,  Bâle,  Ueberlingen,  Spire, 
Worms,  Maj-ence,  Oppenbeim,  Francfort,  Cologne,  Fulda,  Erfurt, 
Miihlhausen,  Nordhausen,  Iglau  ?  les  provinces  de  Meissen,  Cassel, 
Wurzbourg,  Nuremberg,  Bamberg,  Rothenbourg. 

mbi-ip  ^DT^/CT  '"iinïi  ■^rwS'i:'»:  îqVp  Vr  a'z"-^  y^u  'p"-p^,  nii:^':  "ji-iiTa 

^'7"i:2"^i:  s-n^T"''?:'  innuû-n;  ir^i^^"''^  l:"ii2i:'  N^bT^n  imssi-mu;  ri-nan-^ns 
N:-^-i:i  ■jr.rb-riN  ir.rbcr  :::ir!":;:-ib  :.-,i3"vr:j;"^  N?:bnN  ';."''bir;  :i-n3"r:;iN  bn 

-Dnb-'r!  y::":;2nN  i-'bNs  V^V  ^^"'"'^-  '"i7:bip  inrb"''!  nb-^ity-n  roin-iw  N"i:b 
-bp"'»  *]2iïi3  •'■'libN  'jiiib-'T  rmaTT»?:  p-iTi'iJsi-ia  N-'inrb  -n::n;:ûm   ct 

un  .  a-mn 

nis-i-ittin  m»a  to  iir  'S-p  mn-^n 
a5aN-i3  nibin   laNnvi   I'^.n^^s  v^P"   l^rT'T^  cim  'l'^piD  p"^*itt 
•jv^-^-^^o  \riTbr  rmsma  pn?:  ûtt^d  i^nir-ip  ';-in"'-'l:o  ']'^n"L:">i'"iN  rsni: 
en  .  N"^T  rr'i^j  nnss  rri^o  "{"^bsa^yii 

Persécutions  de  l'an  5109  —  1349  (copie  de  M.  Carmoly). 

Dans  le  Memoràuck  de  Metz,  écrit  sur  parchemin,  j'ai  trouvé  énumé- 
rés  les  [noms  de  ceux  qui  ont  été]  tués  et  brûlés  dans  les  communau- 
tés de  Spire,  Worms,  Mayence,  Oppenheim,  Coblence,  Cologne,  Ro- 
thenbourg, Wurzbourg,  Nuremberg,  Strasbourg,  Bàle,  Erfurt,  Muhl- 
hausen,  Nordhausen,  Magdebourg,  Ncubourg,  Halle,  Augsbourg, 
Nordlingen,  Ulm,  Regensburg,  Landshut,  Eslingen,  Ueberlingen, 
Ziirich,  Francfort,  Eger,  Krems,  Dortmund,  Munster,  Minden,  Bres- 
lau,  Cracovie,  Trier,  Prague,  Vienne,  Trente,  Passau,  Weissenburg, 
Schweinfurt,  Neustadt,  Costniz,  Kochenburg,  Salzbourg,   Schaflhau- 


LE  MEMORBUCH  DE  MAYEJSGE  29 

sen,    Haguenau,  Friedburg,   Bamberg,  Oppel,  Werlheini,  Landau, 

Marbourg,  Wetzhar,  Dillingen,  Colmar, ,  Cobern,    ,  Arn- 

stadt  Hildesheim,  Wintertur,  Lindau,  Brunswick,  Magdebourg,  Se- 
lingen,  Alzei,  Butzbach,  Meklembourg. 

Noms  des  provinces  qui  ont  souffert  pendant  les  persécutions  de 
5109  =  1349. 

Mark,  Franconie,  Rbin,  Thuringue,  Saxe,  Bavière,  Souabe,  Hol- 
lande, Brabant,  France,  Autriche,  Styrie,  Garinthie,  Bohême,  Mark 
Bernbourg,  Meissen,  Alsace,  Westphalie,  Espagne,  See  ? 

Nous  ajouterons  une  autre  liste  qui  se  trouve  dans  un  Mahazôr 
ms.  d'Oxford  qui  porte  le  n"  :  Micli.  328,  Olim.  537  ;  (dans  mon 
catalogue  n°  1108);  le  commencement  de  quelques  villes  est  il- 
lisible. 

.  Nb^7 
rûTj^T  ï:"'"'!-!D'^bi72  Nmn  N'mibD'^'n  .  .  .  N"T^:bN  ^:^'nr>  ':  .  .  .  m::r 
T^rûoai»  Niis-^b-^np  nss-ci^n  l^srp  NlJDT  NOia  N'^TD-^b  Nri^^^iin  n313  i^:;?:^-! 
tiûnsin  N^-inn-^p  Npj^iba  "m-isn::  ï^i"^np'N  NbLîCp-^a  XD-^br^'^n  HJ^n  N7:::ip 
c-^-^r;:::!"!  ûi-^ripmi  NT^rc  wS\::?:nTi  Niis-^-^rT^  Nir-'n  Niip  îo-cn  -i-^rbi  Nbm 
û-^-'^Din  ']3bttN  di-'i-îT-m  Nriû'j  p-naj-^rwiN]  ^■'"'îT-îûb  û-^-'-^aT^ns  a:30n3 

11»  [—1  "j-nnn  ']m2;T:3  '^n'^nma  l'^-j-j'Ciin  '^an  a-j">::i3  û^'^'-tj'^i  [\Xj  'p^i-2 
zi'^'cb^a  -ju'C^  [— ]  -jTimwS  -j-j'Jiinbp  û-i-^rîj-'siis  i."2'^ii"'p  V^^^^""^"^  'p^i'^^^'^'p 
■^■\i-r:^':b  'j^'^Db'^:;^-''!  N^niib  prs  ["ni]  'iittïï"'T  rababin  N3in:^  bpb7:"«:î  ';^^■':72 
Y'^'ci  Lîtj'^'^m  pn?3;^n3  pnas^^s   ^xnit  [-]  p-nr-îs   i^^^mn  û^nbp 

.  pmnrujiT  Npnn 

Dans  le  ms.  Micli.  14  [olim,  3542,  non  catalogué  n°  1111)  se 
trouve  à  la  fin,  après  la  prière  de  -nDT\  la  liste  suivante,  malheu- 
reusement en  partie  oblitérée  : 

-•wi.s  .  NT^Ti  ?"jb-^DD-ir.  .i-^p;-!-! .  "j-^rir-nn  ?';-'L:Dirî  .V«^>t  ."j-'b^DUor-n 
.  ::jb-i"JOT"'nb  .  pmnai-inn  .  ns-i-iwid  .  LDib-TiiN  .  ■'lûibnû^'^nT  *?  a"in  .  tsDb'T':: 

.o:y-ia  .  :25b:;D-^iN  .  ']-^np5-n  .  NiSm-iD  .  NTi:\r-ï  .  -JDnN-in  .  v>2NTbN  .  N'^Tr-'T 

?  .  .  .  nn  •/  N^^T^iTû  .  '^ma^X'Ta  .  ià:?lr,  .  (apj'-^  -i"-)  vîi^'^"i"i2  •  V'"»^ 
.  ?  Ni:;"^-i3  .  Nirjjj'-^D  .  -jDîinî  *  èîTON-^np  .  (aroTj  -i"r;)  Nr^-ns  .  û•^^srT 
.  (pni:^  -1"-)  '^mnrjin  .  p-nD">:;;^:>-^N^-i      ,  pmD^rix   .  prb-îm3   .  î<?:bnN 

'  Tous  les  iioin?  de  localitrs  sont  suivis  du  auoL  ÎT*2Tw''1. 


.30  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

-i"rî)  amnpD-ii  .  Cj-d  nn-  'n  ann]  ']'-n3i:T'ii  .  C^^tiX]  'n  mrr)  '^naa-^-n: 
-i"r;)  i^s-^p-imN  .  p-nsoTJD  .  "^-inbT^-'j^n  .  [t\ov  -i"r!)  û-'-^nssiN  .  (û-^idn 

JS'ous  ne  donnons  pas  la  traduction  de  ces  deux  pièces  parce  que 
!les2ioms  de  localités  qu'elles  renferment  se  trouvent  déjà  dans  les 
j[)assages  cités  plus  haut  et  parce  que  certaines  leçons  ne  donnent 
pas  de  sens  satisfaisant.  Nous  aurons  même  à  revenir  ailleurs 
sur  mi  grand  nombre  de  noms  d'endroits  que  nous  avons  tra- 
duits dans  les  pièces  précédentes  mais  qui  nous  semblent  encore 
très  douteux. 

Ad.  Neubauer. 


NOTES  ET  DOCUMENTS 

POUR  SERVIR  A  L"HISTOIRE  DES  JUIFS  DES  BALÉARES 
SOUS  LA  DOMINATION  ARAGONAISE 

DU  XIIP  AU  XV«  SIÈCLE 


L'histoire  des  Juifs  des  Baléares  sous  la  domination  aragonaise 
commence  avec  la  conquête  de  Majorque  par  Jacme  P'"  d'Aragon 
(1229)  et  se  termine  en  1435,  date  de  la  conversion  forcée  de  tous 
les  Juifs  de  cette  dernière  lie.  A  partir  de  cette  époque  il  n'y  a 
plus,  à  proprement  parler,  de  Juifs  aux  Baléares  ;  toutefois  les 
nouveaux  convertis,  comme  on  les  nomme,  ne  sont  pas  mis,  par 
le  fait  du  baptême  qu'ils  ont  dû  subir,  sur  un  pied  de  parfaite 
égalité  avec  les  habitants  chrétiens  des  îles,  ils  continuent  à  tbr- 
mer,  surtout  à  Majorque,  sinon  une  classe,  tout  au  moins  un 
groupe  à  part,  très  surveillé  par  Tlnquisition,  qui  châtiait  sévè- 
rement le  moindre  retour  aux  pratiques  du  culte  abolie  et  vu  de 
mauvais  œil  par  les  autres  insulaires. 

Les  anciens  annalistes  du  royaume  de  Majorque,  D.  Juan  Da- 
meto  et  D.  Vicente  Mut,  n'ont  touché  que  très  incidemment  à  This- 
toire  des  Juifs  de  leur  pays  ;  le  pillage  de  la  juiverie  de  Palma  et 
le  massacre  d'un  certain  nombre  de  ses  habitants  en  1391,  la  con- 
version générale  de  Tannée  1435,  sont  à  peu  près  les  seuls  épi- 
sodes auxquels  ils  aient  cru  devoir  consacrer  quelques  pages. 
Jusqu'à  D.  Jaime  Villanueva,  qui  visita  en  1814  les  archives  et 
les  bibliothèques  de  Majorifue  et  de  Min()r(j[ue,  il  ne  semble  pas 
qu'aucun  érudit  insulaire  ou  étranger  ait  cherché  à  combler  les 
lacunes  des  historiens  du  xvii*  siècle.  Le  savant  dominicain  de 
Valence  prit  le  bon  parti  ;  il  fouilla  consciencieusement  tous  les 
dépôts  de  manuscrits  qui  lui  furent  ouverts  et  s'appliqua  à  réunir 
une  collection  de  constitutions,  ordonnances,  privilèges  ou  autres 


32  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

documents  relatifs  aux  Juifs  des  Baléares,  à  leurs  droits  poli- 
tiques, à  leur  condition  sociale  et  à  leurs  relations  avec  la  popula- 
tion chrétienne  ;  les  résultats  de  ses  recherches  sont  consignés 
dans  les  tomes  XXI  et  XXII  du  Viage  lUerario  à  las  Iglesias  de 
Espana,  publiés  en  1851  et  1852  seulement,  sous  les  auspices  de 
l'Académie  de  l'Histoire  de  Madrid.  Bien  qu'il  soit  loin,  sans  doute, 
d'avoir  épuisé  la  matière*,  Villanueva  a  fait  plus  qu'ouvrir  la 
voie  :  les  nombreux  documents  qu'il  a  tirés  des  archives  de  Ma- 
jorque et  mis  au  jour  seront  toujours  considérés  comme  la  base  la 
plus  solide  des  travaux  à  entreprendre  sur  le  sujet  qui  nous  oc- 
cupe. L'érudition  locale  n'a  jusqu'ici  ajouté  que  peu  de  choses  aux 
recherches  si  bien  conduites  par  Villanueva  :  VHistoria  de  Soller 
en  sus  relaciones  cou  la  gênerai  de  Mallorca  -,  par  D.  José 
RuUan,  me  semble  être  le  seul  ouvrage  imprimé  depuis  le  Viage 
literario  où  aient  été  réunis  quelques  renseignements  nouveaux 
sur  les  Juifs  de  la  grande  Baléare.  Il  serait  inutile  d'en  chercher 
dans  la  volumineuse  Historia  social,  polilica  y  religiosa  de  los 
Jiidios  de  Espana  y  Portugal,  par  D.  José  Amador  de  los  Rios, 
qui  n'a  même  pas  su  tirer  parti  des  recherches  de  Villanueva,  et 
n'a  fait,  dans  les  quelques  pages  de  son  livre  ^  consacrées  aux 
Juifs  de  Majorque,  que  résumer  un  article  d'un  ancien  répertoire 
de  jurisprudence*.  Je  n'ai  rien  trouvé  non  plus  dans  le  premier 
volume  des  Insliliiciones  jnridicas  del  pmelilo  de  Israël  en  los 
diferentes  estados  de  la  penin'^ula  ibérica^,  par  D.  Francisco 
Fernandez  y  Gonzalez. 

Pour  préparer  le  terrain  à  de  nouvelles  investigations  et  faci- 
liter la  tâche  de  ceux  qui  voudraient  entreprendre  l'étude  de  la 
question  dans  son  ensemble,  je  crois  utile,  avant  de  faire  connaître 
les  documents  inédits  que  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  découvrir, 
de  donner  ici  un  catalogue  détaillé  des  pièces  diplomatiques  et 
notices  historiques  que  renferment  les  ouvrages  qui  viennent  d'être 
mentionnés. 

N'o  1.  —  Ann.  1247  ^11  juin'.  —  Charte  de  Jacme  I»'"  d'Aragon,  dou- 
uée  à  Valence,  le  11  juin  1247.  Le  roi  accorde  sa  protection  à  quel- 

•  Il  resterait,  par  eiemple,  à  achever  la  transcription  d'un  manuscrit  très  important 
fie  la  bibliothèque  des  marquis  de  Campotranco  à  Palma,  dont  Villanueva  n'a  pu 
copier  qu'un  «  petit  nombre  de  documents  •.  Voir  le  Yiatje  literatio,  t.  XXII,  p.  233 
et  250. 

«  Palma,  1877-1878,  2  vol.  in  4*. 

'  Tome  II,  p.  2'J3-29"..  (Madrid  1876). 

*  Le  Sumari  dels  prkileijis  y  franqueses  del  rtf/ne  de  Mallorca,  d'Antonio  Moll 
(Los  Hios  écrit  JUallol).  Je  ne  connais  pas  cet  ouvrapçe,  mais,  à  en  juger  par  les  ex- 
traits d'Amador  de  los  Rios,  l'article  Jnheiis  diidit  répertoire  doit  être  l'oivt  incomplet. 

5  Madrid.  1K81,  in  8". 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  :« 

ques  Juifs  du  Maroc  et  en  général  à  tous  les  Juifs,  d'où  qu'ils  vien- 
nent, qui  voudront  s'établir  dans  ses  domaines  de  Majorque,  Barcelone 
ou  Valence,  et  défend  à  ses  sujets  de  les  molester  ou  de  leur  faire  tort 
en  quoi  que  ce  soit,  sous  peine  d'une  amende  de  mille  sous  d'or. 

(Publ.  par  Villanueva ,  Viage  lilerario,  t.  XXII,  p.  327;  cf. 
ibid.,  p.  250). 

N"  2.  —  Ann.  4249  (6  juillet).  —  Article  additionnel  aux  Franchises 
de  Majorque  (Valence,  6  juillet  1249),  qui  fixe  le  taux  de  l'intérêt 
qu'il  est  interdit  aux  Juifs  de  dépasser,  c'est-à-dire  «  quatre  deniers 
par  livre  de  deniers,  au  mois  »,  et  l'article  ajoute  :  «  ainsi  que  cela 
est  plus  amplement  déclaré  dans  la  charte  ou  les  chartes  données 
par  nous  sur  les  usures  et  contrats  usuraires  faits  ou  à  faire  entre 
chrétiens  et  Juifs.  » 

(Publ.  par  Villanueva,  Viage  Hferario,  t.  XXIT,  p.  301). 

N«3.  —  Ann.  12.50  (10  mai).  —  Charte  de  Jacme  l*'\  donnée  à  Mo- 
rella,  le  10  mai  1250.  Le  roi  confirme  un  privilège  d'habitation  accordé 
aux  Juifs  que  nous  ne  connaissons  pas;  il  leur  reétitne  la  place  qui 
est  devant  le  palais  royal  de  Majorque  \  îU  haheatis  eam  de  cetera  xo§ 
et  vestri,  sicict  in  ij^so privilegio  continetur.  En  matière  civile  et  crimi- 
nelle un  chrétien  ne  sera  admis  à  faire  la  preuve  contre  un  Juif  que 
s'il  se  fait  assister  d'un  Juif  et  d'un  chrétien.  Si  quelqu'un  prétend 
que  des  gages  détenus  par  un  Juif  lui  ont  été  volés,  et  si,  d'autre  part, 
le  Juif  jure  qu'il  en  ignorait  la  provenance,  ce  dernier  ne  pourra  être 
tenu  de  les  rendre  au  propriétaire  que  si  on  lui  paie  auparavant  le 
capital  et  les  intérêts.  If  est  permis  aux  Juifs  de  régler  entre  eux  leurs 
différends  et  leurs  querelles;  ils  n'auront  recours  à  l'autorité  royale 
que  pour  des  délits  graves.  Les  chrétiens  qui  auront  obtenu  des  ater- 
moiements pour  le  payement  de  leurs  dettes  seront  tenus  d'informer 
le  baile  de  Majorque  qu'ils  paieront  à  l'échéance  le  montant  de  leurs 
dettes  et  les  intérêts,  etc. 

(Publ.  par  Villanueva,  Viage  literario,  t.  XXII,  p.  301). 

N°  4.  —  Ann.  1251  (20  août).  —  Article  additionnel  aux  Franchises 
de  Majorque  (Lérida,  20  août  1251).  Le  taux  de  l'intérêt  que  pourront 
prendre  chrétiens,  Juifs  et  Sarrasins  ne  devra  pas  dépasser  quatre 
deniers  par  livre  de  20  sous,  au  mois.  Les  intérêts  ne  pourront  plus 
croître  lorsqu'ils  auront  atteint  la  valeur  du  capital,  et  lorsque  la 
somme  des  intérêts  payés  sera  équivalente  au  capital,  le  créancier 
sera  tenu  de  restituer  le  contrat  du  prêt  et  les  gages. 
(Publ.  par  Villanueva,  iMd.,  t.  XXII,  p.  302^. 

1  Le  nom  de  Majorque,  en  catalan  Mallorca,  a  été  appliqué  pendant  longtemps  à 
la  l'ois  à  l'île  et  à  sa  capitale.  Ce  n'est  guère  qu'à  la  lin  du  xvii<=  siôcle  que  s'intro- 
duisit l'usage  de  nommer  la  capitale  Fainia,  en  souvenir  de  la  Falma  des  Romains 
que  des  antiquaires  ont  voulu  idcn(i(ier  avccla  capitale  des  royaumes  arabe  et  chré- 
tien. La  langue  administrative  n'a  pas  entièrement  renoncé  à  l'ancien  usage  :  on  dit 
ainsi  Vévfjue  de  Majorque  et  non  Vévêqua  de  Palma. 

T.   IV.  i 


34  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

N"  5.  —  Ann.  1252  (8  mai).  —  Charte  de  Jacme  P'',  donnée  à  Lérida, 
le  8  mai  1232.  Confirmation  d'un  privilège  donné  à  Valence  qui  ne 
nous  est  pas  connu  et  de  la  charte  de  Morella  (voir  ci-dessus,  n°  3). 
Le  roi  accorde  en  outre  aux  Juifs  le  droit  de  se  plaindre  à  lui  directe- 
ment des  torts  que  pourraient  leur  causer  ses  agents. Tout  Juif  de  Ma- 
jorque a  le  droit  de  constituer  à  sa  femme  une  dot  en  or  ou  en  argent 
par  un  acte  rédigé  en  hébreu,  lequel  acte  aura  la  même  valeur  que 
s'il  était  rédigé  en  latin  par  un  notaire  chrétien.  Les  Sarrasins  de  reli- 
gion juive*  qui  se  feront  baptiser  en  tout  autre  temps  qu'à  Pâques, 
la  Pentecôte  et  Noël,  devront  payer  douze  morabetiJis  au  baile  du  roi. 
Il  est  défendu  aux  chrétiens  et  aux  Sarrasins,  sous  peine  d'une 
amende  de  cent  morabetùis,  d'extraire  des  pierres  ou  de  la  terre  du 
cimetière  juif. 

(Publ.  par  Villanueva,  ibid.,  t.  XXII,  p.  330). 

N°  6.  —  Ann.  1254  (15  septembre).  —  Charte  de  Jacme  I«'\  donnée  à 
Lérida,  le  13  septembre*  1234.  Le  Juif  qui  ne  se  conformera  pas  aux 
prescriptions  de  l'autorité  royale  touchant  les  prêts  et  le  taux  de  l'in- 
térêt sera  seul  responsable  et  puni,  les  autres  Juifs  de  la  commu- 
nauté ne  seront  pas  inquiétés.  Il  ne  se  fera  plus  d'inquisition  chez  les 
Juifs  pour  connaître  l'état  de  leur  fortune  et  ils  ne  seront  plus  tenus 
de  déclarer  leurs  prêts.  Les  débiteurs  devront  payer  leurs  dettes  aux 
échéances  ;  on  ne  leur  accordera  plus  de  délais. 

(Publ.  par  Villanueva,  ibid.,  t.  XXII,  p.  331). 

N"  7.  —  Ann.  1273  (18  août).  —  Article  additionnel  aux  Franchises 
de  Majorque  (Valence,  18  août  1273).  Les  chrétiens  et  les  Juifs  con- 
damnés à  la  prison  ne  seront  pas  détenus  ensemble,  mais  les  chré- 
tiens seront  enfermés  dans  une  maison  et  les  Juifs  dans  une  autre. 
(Publ.  par  Villanueva,  ibid.,  t.  XXII,  p.  312). 

N"  8.  — Ann.  1274  (12  mars).  —  Article  additionnel  aux  Franchises 
de  Majorque  (Lérida,  12  mars  1274).  Défense  aux  Juifs  de  prêter  sur 
gages  à  des  esclaves,  sous  peine  de  perdre  le  capital  et  d'avoir  à  l'es- 
tituer  les  gages  aux  maîtres  des  esclaves. 

(Publ.  par  Villanueva,  ibid-,  t.  XXII,  p.  314). 

N»  9.  —  Ann.  1276  (12  septembre). —  Article  additionnel  aux  Fran- 
chises de  Majorque  ^Majorque,  12  septembre  1276).  En  matière  de 
contrats  le  chrétien  n'est  pas  tenu  de  prêter  serment  au  Juif. 
(Publ.  par  Villanueva,  ibid.,  t.  XXII,  p.  317). 

N"  10.  —  Ann.  1300  (  18  mars).  —  Charte  de  Jacme  II  de  Majorque, 

'  item  statuimus  qnod  si  aliyuis  Sarracenus  vel  S<i>'''acena  de  Juden  vel  Judea  se 
ferent  CAristianiimvcl  C'/ftstianam,  etc.  Peut-être  faiidiait-il  Iradiuif  :  «  Si  quelque 
sarrasin  ou  sarrasine,  esclave  d'un  Juif  ou  d'une  Juive  >.  etc. 

»  Il  y  a  dans  le  texte  septimo  dccimo  Kalendas  ocfobris  ;  or,  le  17»  jour  avant  les 
calendes  d'octobre  est  le  jour  des  ides  de  septembre  ;  on  s'attendrait  donc  à  trouver 
dans  la  charte  idus  sentcmhiis.  Le  premier  nombre  est  probabledieut  erroné. 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALEARES  33 

donnée  à  Majorque,  le  18  mars  1299  (vieux  style).  Attendu  que  les 
Juifs  de  Majorque  qui  Inbitaient  dans  l'enceinte  de  Valmiidayna  *  et 
dans  d'autres  lieux  de  la  ville  de  Majorque  ont  transféré  leurs  domi- 
ciles dans  certains  quartiers  (vicos),  nommés pao'iies  du  Temple  et  de 
Calalrata'-  [partita  Templi  et  Calatravae),  où  ils  ont  établi  et  cons- 
truit leur  juiverie  [calliim  sitmn).  et  que  ce  serait  leur  causer  un  grave 
préjudice  que  de  les  contraindre  à  quitter  ce  lieu  et  à  transporter 
ailleurs  leur  juiverie,  le  roi  leur  concède  à  perpétuité  ladite  juiverie, 
le  lieu  où  elle  se  trouve  et  la  synagogue  qu'avec  l'agrément  de  l'é- 
vêque  de  Majorque  ils  ont  commencé  à  y  construire.  Il  veuten  outre 
qu'au  cas  où  ladite  juiverie  devrait  être  agrandie,  elle  puisse  s'é- 
tendre dans  les  lieux  contigus  à  celui  qu'elle  occupe  actuellement,  du 
côté  de  la  maison  du  Temple. 

iPabl.  par  A'illanueva,  iHd.,  t.  XXII,  p.  332). 

N*  11.  —  Ann.  1301  (30  août).  —Deux  articles  des  Franchises  de 
Minorque,  données  à  Majorque,  le  30  août  1301.  i"  Taux  de  l'intérêt 
(quatre  deniers  par  livre  de  20  sous,  au  mois);  extinction  de  la  dette 
lorsque  la  somme  des  intérêts  égale  le  capital,  et  restitution  des  ga- 
ges. 2»  Défense' aux  Juifs  de  prêter  sur  gages  à  des  esclaves,  sous 
peine  de  perdre  le  capital  prêté. 

(Publ.  par  Villanueva,  iUd.,  t.  XXI,  p.  211  et  215). 

N»  12.— Ann.  1303  (27  juin).  —  Charte  du  roi  Jacme  II  (27  juin  1303). 
Le  roi  ordonne  de  donner  la  sépulture  ecclésiastique  à  certains  Juifs 
faux  rnonnayeurs,  qui,  au  moment  d'être  pendus,  avaient  demandé  et 
obtenu  le  baptême. 

i^Citée  par  Villanueva,  il/id.,  t.  XXI,  p.  160). 

N»  13.  —Ann.  130.'i  (i  avril).  —Lettre  de  Jacme  II,  adressée,  de 
Perpignan,  le  4  avril  130o,  à  son  lieutenant  royal  à  Majorque,  Dalma- 
cio  de  Garriga.  Le  "roi  invite  ce  fonctionnaire  à  se  concerter  avec  l'é- 
vêque  de  Majorque  "  sur  le  cas  des  Juifs  et  la  récente  affaire  qui  a 
causé  du  scandale  »,  et  à  prendre  avec  lui  une  décision  d'après  la- 
quelle aucun  clerc  ne  pourra  désormais  pénétrer  dgns  la  juiverie  ni 
dans  les  maisons  des  Juifs  «  pour  exhiber  les  sacrements  en  temps  de 
nécessité  »  (pro  sacramenlis  talibus  exîiibendis  in  tempore  necessitatis) , 
s'il  ne  se  fait  accompagner  par  un  agent  du  lieutenant  ou  du  baile  de 
Majorque. 

Publ.  par  Villanueva,  ihid.,  l.  XXI,  p.  165). 

IS'o  U.  —  Ann.  1311  (22  juin).  —  Charte  de  Sancho  P^  Le  roi  aj'ant 

'  Almudayna  (arabe  d-maUna)  était  la  partie  fortifiée,  et  entourée  de  murs  de  la 
ville  arabe  ;  les  Juifs  y  avaient  un  château  ou  citadelle,  du  moins  Desclot  parle  d'un 
ca$tell  (tels  Jueus  qui  devait  se  trouver  à  grande  proximité  du  castell  dit  de  VAltmi- 
dayna.  Voir  Quadrado,  Histuria  de  la  compiista  de  Mallorca,  Palma,  IS.W,  p.  396. 

«  C'est-à-dire  les  parts  concédées  aux  ordres  du  Temple  et  de  Calatrava  lors  de  la 
répartition  générale  de  l'île  après  la  conquête. 


36  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

pris  connaissance  d'une  lettre  adressée  à  son  père,  le  feu  roi  Jacme  II, 
par  les  Juifs  de  Majorque,  dans  laquelle  ils  lui  font  part  des  craintes 
qu'ils  ont  ressenties  à  l'annonce  de  l'expulsion  des  Juifs  de  France,  et 
considérant  que  le  roi  son  père  a  donné  aux  Juifs  de  son  royaume 
l'assurance  qu'ils  n'en  seraient  jamais  chassés,  déclare  qu'il  prend 
sous  sa  protection  et  sa  garde  la  communauté  des  Juifs  de  Majorque. 
(Publ.  par  Villanueva,  iMd.,  t.  XXII,  p.  333). 

N°  15.  —  Ann.  1315.  —  "Vers  l'année  13151e  roi  Sancho  confisca  les 
biens  des  Juifs  de  Majorque  pour  des  motifs  qui  ne  nous  sont  pas 
connus>  Les  Juifs  se  rachetèrent  moyennant  une  somme  de  95,000  li- 
vres de  Majorque.  Villanueva  dit  qu'il  a  vu  plusieurs  documents  sur 
cette  affaire. 

(Villanueva,  iHd.,  t.  XXI,  p.  300,  note  ;  cf.  Vicente  Mut, 
Historia  gênerai  del  reino  de  Mallorca,  éd.  de  1841,  t.  III, 
p.  384). 

K»  16.  —  Ann.  1323  (7  juillet).  —  Charte  de  Sancho  P''  (Majorque, 
7  juillet  1323;.  Les  Juifs  de  Majorque  considérant  qu'après  leur  «  con- 
damnation générale  »  on  leur  a  confisqué  leur  synagogue  qui  a  été 
transformée  en  une  chapelle  dédiée  à  la  Sainte-Foi  et  que  cette  cha- 
pelle est  à  très  grande  proximité  de  leur  juiverie,  supplient  humble- 
ment le  roi  de  la  faire  transférer  ailleurs.  Le  roi  accédant  à  ce  vœu 
décide,  après  en  avoir  délibéré  avec  son  conseil  et  Tévèque  Gui  de 
Terrena,  que  ladite  chapelle  sera  transférée  dans  un  terrain  de  feu 
En  Cassa,  près  de  la  porte  du  Temple.  En  outre,  les  Juifs  ayant  versé 
au  fisc  une  somme  de  2,000  livres  de  Majorque,  et  une  autre  somme 
de  300  livres  pour  aider  à  la  construction  de  la  cathédrale  de  Major- 
que, le  roi  leur  accorde  les  faveurs  suivantes  :  après  que  la  chapelle 
de  Sainte-Foi  aura  été  transférée  dans  le  terrain  de  feu  En  Cassa,  les 
Juifs  pourront  ouvrir  au  bout  du  chemin  qui  conduit  à  l'ancienne 
chapelle  [in  ca2nie  carreriae  dlclae  capellae  antiquae)  une  porte  de  la 
grandeur  qu'ils  voudront  donnant  accès  dans  la  juiverie.  D'autre  part, 
le  roi  retient  la  propriété  de  l'édifice  de  l'ancienne  chapelle,  mais  il 
s'engage  à  ne  jamais  y  laisser  restaurer  le  culte  chrétien  et  à  inter- 
dire à  ceux  qui  plus  tard  pourraient  acquérir  des  droits  de  propriété 
sur  ladite  chapelle  de  pratiquer  dans  le  mur  de  l'édifice  des  ouver- 
tures donnant  sur  la  juiverie. 

(Publ.  par  Villanueva,  Viage  literario,  t.  XXI,  p.  300). 

N°  17.  —  Ann.  1324  (2  janvier).  —  Charte  de  Sancho  P""  (Perpignan, 
2  janvier  1323,  vieux  style).  Sur  la  demande  de  l'évêque  de  Majorque, 
Gui  de  Terrena,  le  roi  Sancho  décrète  que  l'ancienne  chapelle  de 
Santa-Fé  ni  son  emplacement  ne  pourront  jamais  être  affectés  au  culte 
juif  ou  payeu;  qu'au  contraire  le  «  lieu  de  la  dite  chapelle  »  aban- 
donnée restera  toujours  à  la  disposition,  au  pouvoir  et  au  service  des 
chrétiens. 

(Publ.  par  Villanueva,  ibid.,  t.  XXI,  p.  302). 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  37 

N»  18.  —  Ann.  1328  (3  mars).  —  Lettre  de  Philippe  de  Majorque, 
trésorier  de  Saiut-Marlin  de  Tours,  oncle  et  tuteur  du  roi  Jacme  III, 
à  son  lieutenant  à  Majorque,  Arnau  de  Cardayllac  (Perpignan, 
5  mars  1327,  vieux  style).  Défense  de  laisser  baptiser  à  Majorque  des 
enfants  juifs  de  moins  de  sept  ans,  en  aucun  cas,  et  des  Juifs  de  plus 
de  sept  ans,  s'ils  se  refusent  à  recevoir  le  baptême. 
(Publ.  par  Villanueva,  ibld.,  t.  XXI,  p.  303). 

N"  19.  —  Ann.  1347  (10  décembre).  —  Délai  accordé  aux  habitants  de 
Soller  (Majorque)  pour  le  payement  de  leurs  dettes  aux  Juifs,  malgré 
le  privilège  obtenu  peu  de  temps  auparavant  par  les  Juifs  de  la  com- 
munauté de  Majorque,  aux  termes  duquel  aucun  délai  ne  serait  ac- 
cordé à  leurs  débiteurs  pendant  une  période  de  cinq  années  (Barce- 
lone, 10  décembre  1347). 

(Publ.  par  Rullan,  Historia  de  Soller,  t.  I,  append.  15). 

N«  20.  —  Ann.  1373  (i"juin).  —  Statut  de  l'évêque  de  Majorque, 
Antoine  de  Galiana,  par  lequel  il  prescrit  de  ne  conférer  le  baptême 
aux  Juifs  que  trois  jours  après  qu'ils  se  seront  présentés  à  l'église 
pour  le  recevoir,  afin  de  leur  'laisser  le  temps  d'accomplir  l'acte 
de  leur  conversion  en  toute  •  connaissance  de  cause  (Majorque, 
l*""  juin  1373). 

(Publ.  par  Villanueva,  Viage  literario,  t.  XXII,  p.  233). 

N°  21. —  Ann.  1373  (13  novembre). —  Annulation  par  le  gouverneur 
de  Majorque,  Olfo  de  Praxida,  d'une  décision  du  baile  de  Soller,  sui- 
vant laquelle  aucun  boucher  ni  autre  personne  ne  pourra  vendre  de 
la  viande  cacher  {carns  caxerns^)  dans  la  boucherie  publique,  contrai- 
rement aux  privilèges  des  rois  Jacme  et  Pierre  a'Aragon,  qui  autori- 
saient les  Juifs  à  abattre  des  animaux  et  à  vendre  leurs  viandes  dans 
les  boucheries  des  chrétiens. 

(Publ.  par  Rullan,  Historia  de  Soller,  t.  I,  p.  37,  note  2). 

N"  22.  —  Ann.  1381  (12  août).  —  «  Lundi,  12  août  de  l'an  de  la  Na- 
tivité 1381,  un  Juif,  nommé  Saydo  Davidis,  fut  brûlé  pour  avoir  cou- 
ché avec  une  religieuse  de  Sainte-Claire,  qui,  pour  le  même  motif,  fut 
aussi  mise  à  mort-.  » 

(Chronique  du  notaire  Salcet,  apud  Villanueva,  Viage  lite- 
rario, t.  XXI,  p.  219). 

N«  23.  —  Ann.  1390  i28  novembre).  —  Ban  du  gouverneur  de  Major- 
que interdisant  aux  Juifs  de  porter  des  armes  prohibées  dans  Tinté- 

1  Le  texte  porte  taxeras,  mais  le  c  et  le  <  se  confondent  souvent  dans  l'écriture  du 
xiv  et  du  xv  siècle. 

*  Une  ordonnance  du  roi  Jean  I'^"',  publiée  à  Valence,  le  14  avr"!l  1394,  prescrit  que 
•  si  alfjuu  dels  dits  Juhcus  sera  atrobat  ab  fembra  crestiana  en  loch  sospitos  per 
haucr  copia  carnal  ub  ella,  que  sien  abdos  cremats  sens  Iota  mercc  ».  Voir  Saupere  y 
Miguel,  Las  costumbres  catalanas  en  tiempo  de  Juan  I,  Barcelone,  1878.  p'.  279. 


38  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

rieur  de  la  juiverie  et  de  sortir  sans  lumière  de  leurs  maisons  quatre 
heures  après  le  coucher  du  soleil. 

(Cité  par  Rullan,  Historia  de  Soller,  t.  I,  p.  419). 

]S'°  24.  —  Ann.  1391 .  —  Liste  de  pi'êts  faits  par  des  Juifs  aux  habi- 
tants de  Soller  pendant  le  premier  semestre  de  l'année  1391.  Les 
noms  de  famille  juifs  qui  reviennent  le  plus  souvent  dans  cette  liste 
sont  ceux  de  Mili,  Xulelli,  Sagrassa,  Mandil,  Ben  Baracho,  Maymo, 
Faraig,  Massaua,  Sesportes,  Natjar,  Doscha. 

(Publ.  par  Rullan,  iUd.,  t.  I,  append.  43. 

N"  25.  —  Ann.  1391  (juillet).  —  On  apprend  à  Majorque  le  massacre 
des  Juifs  de  Castllle  et  de  Valence  et  le  pillage  de  beaucoup  de  juive- 
ries  du  continent. 

(Chronique  de  Salcet,  apud  Villanueva,  Viage  litcrario,  t.  XXI, 
p.  223). 

N°  26.  —  Ann.  1391  (12  juillet^  —  Ban  du  gouverneur  de  Majorque 
pour  assurer  la  sécurité  de  la  juiverie  et  faire  cesser  les  disputes 
et  rixes  entre  Juifs  et  chrétiens  dans  Tintérieur  ou  aux  alentours 
du  call. 

(Cité  par  Rullan,  Historia  de  Soller,  t.  I,  p.  419,  note  2). 

N°  27.  — Ann.  1391  (2  ou  4  août).  —  Pillage  de  la  juiverie  de  Major- 
que (Palma)  et  massacre  d'environ  300  Juifs,  hommes  et  femmes,  par 
les  habitants  de  Isi  partie  for ai7ie  de  File  venus  à  la  capitale  pour  obte- 
nir d'être  déchargés  de  certains  impôts  et  libérés  des  dettes  contrac- 
tées par  eux  envers  des  Juifs  et  des  convertis'. 

(Chronique  de   Salcet ,    apud   Villanueva ,   Viage  Uierario , 
t.  XXI,  p.  224). 

N°  28.  —  Ann.  1391  (9  août).  ~  Défense  aux  notaires,  sous  peine  de 
mort  et  de  confiscation  de  leurs  biens,  de  détruire  les  actes  concer- 
nant les  transactions  des  Juifs,  et  défense  d'en  rédiger  à  nouveau  ni 
d'en  recevoir. 

(Chronique  de  Salcet ,    apud  Villanueva ,    Viage   literario , 
t.  XXI,  p.  224). 

N"  29.  —  Ann.  1391  (30  septembre).  —  Article  3  des  capitulations 
conclues  entre  le  gouverneur  de  Majorque  et  les  paysans  révoltés  : 
«  Toutes  les  dettes  de  l'ile  (contractées  envers  des  Juifs  ou  des  con- 
vertis et  les  usures  des  chrétiens  seront  amorties  en  dix  échéances, 
à  raison  de  2  sous  par  livre  et  sans  intérêts.  Les  délégués  demandent 
en  outre  que  tous  les  actes  notariés  soient  détruits.  » 

(Publ.  par  HuUan,  Historia  de  Soller,  t.  I,  p.  425). 

'  Salcel  (laïc  flu  vcudntdt,  2  août,  ce  pillaf^c  et  ce  massacre  ;  mais  en  1391  le  2  août 
était  un  mercredi.  Il  faut  dune,  dans  le  texte  du  chroniqueur,  lire  4  août  a.u  lieu  de 
3 '/oû<,  uu  mercredi  au  lieu  de  vendredi. 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALEARES  39 

N°  30.  —  Ann.  1394  (4  octobre).  —  Articles  33,  43,  45  et  48  de  nou- 
velles capitulations  conclues  entre  le  gouverneur  de  Majorque  et  les 
paysans  révoltés.  Art.  35.  «  Le  roi  pardonnera  les  offenses,  violences 
et  crimes  commis  jusqu'à  cette  date  dans  les  diverses  attaques  diri- 
gées contre  le  gouverneur,  les  Juifs  et  les  juiveries,  le  tout  ayant  été 
fait  en  l'honneur  du  roi  et  pour  le  bien  public.  »  Art.  43.  Obligation 
pour  les  Juifs  d'embrasser  sans  retard  le  christianisme.  —  Art.  45. 
Révocation  des  ordres  envoyés  aux  recteurs  et  aux  vicaires  à  l'effet 
d'obliger  leurs  paroissiens  à  rendre  l'argent  et  les  objets  mobiliers 
provenant  du  pillage  des  juiveries.  —  Art.  48.  Annulation  des  dettes 
contractées  envers  des  Juifs  dans  les  dix  dernières  années  et  des 
usures  des  chrétiens. 

(Publ.  par  Rullan,  ibid.,  t.  I,  p.  430^. 

N*  31 .  —  Ann.  1391  (24  octobre).  —  Ban  du  gouverneur  de  Majorque. 
Les  Juifs  convertis  doivent  déclarer  s'ils  veulent  continuer  à  vivre 
dans  la  juiverie  ou  louer  leurs  maisons  aux  Juifs  privés  de  domicile. 
Les  habitants  de  Majorque,  qui  ont  en  leur  possession  cj^s  portes 
enlevées  à  la  juiverie,  devront  les  faire  remettre  au  cimetière  de 
Sainte-Eulalie,  où  on  leur  paiera  le  prix  du  transport. 
(Cité  par  Rullan,  iUd.,  t.  I,  p.  433). 

]S<»  32.  —  Ann.  1391  [8  novembre).  —  Ban  du  gouverneur  de  Ma- 
jorque touchant  la  réorganisation  de  la  communauté  des  Juifs  de 
Majorque. 

(Cité  par  Rullan,  ibid.,  t.  I,  p.  433). 

N°  33.  — Ann.  1391.  —  Art.  1°''  d'un  règlement  pour  le  tissage  de 
la  laine  et  la  fabrication  de  draps  et  de  couvertures,  promulgué  par 
Francesch  Çagarriga,  gouverneur  de  Majorque.  La  fin  de  ce  pre- 
mier article  est  ainsi  conçue  :  «  Les  convertis  à  la  foi  chrétienne  du 
lignage  des  Juifs  sont  admis  à  exercer  le  métier  de  tisserand,  qui 
pourra  leur  être  enseign-é  et  montré,  bien  qu'ils  soient  du  lignage 
des  infidèles.  )> 

(Publ.  par  Rullan,  ibid.,  t.  I,  append.  251. 

N'  34.  —  Ann.  1392  (25  mai).  —  Ordre  du  gouverneur  de  Majorque 
aux  Juifs  et  convertis  émigrés  d'avoir  à  se  présenter  dans  l'ile,  dans 
le  délai  d'un  mois,  pour  y  établir  à  nouveau  leur  résidence. 
(Cité  par  Rullan,  ibid.,  t.  I,  p.  434). 

îs'"  35.  —  Ann.  1392  (3  juin).  —  Ban  du  gouverneur  de  Majorque 
offrant  100  florins  à  celui  qui  découvrira  l'auteur  de  quittances  falsi- 
fiées au  détriment  des  Juifs. 

(Cité  par  Rullan,  ibid.,  t.  I,  p.  434). 

N»  36.  —  Ann.  1392  (16  juillet).  —Pardon  général  accorde  par  le 
roi  Joan  I«""  à  tous  ceux  qui  ont  participé  aux  troubles  de  l'année  1391 
et  en  particulier  aux  auteurs  du  pillage  de  la  juiverie  et  du  massacre 


40  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

des  Juifs  de  Majorque.  Les  lettres  de  pardon,  données  à  Pedralves 
(Catalogne),  le  16  juillet  1392,  ne  furent  publiées  à  Majorque  que  le 
vendredi  11  octobre  de  la  même  année. 

(RuUan,  ibid.,  1. 1,  p.  435.  —  Chronique  de  Salcet,  apud  Vi- 
llanueva,  Viage  literario,  t.  XXI,  p.  225). 

N»  37.  —  Ann.  1393  (21  janvier).  —  Ban  du  gouverneur  de  Majorque 
défendant  aux  habitants  chrétiens  de  l'île  de  molester  les  Juifs,  sous 
peine,  pour  les  chevaliers,  d'être  condamnés  au  supplice  de  l'estra- 
pade, et,  pour  les  autres,  d'être  pendus. 

(Cité  par  Rullan,  Historia  de  SoUer,  t.  I,  p.  308,  note  2). 

N°  38.  —  Ann.  1413  (20  mars).  —  Ordonnance  de  Ferdinand  P-", 
donnée  à  Barcelone,  le  20  mars  1413,  qui  détermine  à  quelles  condi- 
tions les  Juifs  de  Majorque  seront  admis  à  habiter  dans  l'iie  et  quels 
rapports  ils  pourront  avoir  avec  les  chrétiens.  Cette  ordonnance,  très 
importante,  tranche,  par  la  sévérité  de  ses  prescriptions  et  l'accent 
de  haine  qui  y  éclate,  sur  la  législation  antérieure,  en  général  assez 
favorable  aux  Juifs.  Voici  l'analyse  détaillée  de  ce  document. 

Considérant  que  notre  mère  la  sainte  Église  a  décrété  que  les  Juifs 
infidèles  vivraient  séparés  des  chrétiens  pour  ne  pas  les  souiller 
de  leur  contact,  que  les  inquisiteurs  ont  constaté  qu'à  Majorque 
quelques  Juifs  cohabitent  avec  des  convertis  à  la  foi  catholique  et 
excitent  ces  convertis  à  abandonner  leur  nouvelle  religion,  et  que 
des  femmes  du  même  lieu  passent  en  Afrique,  où  elles  abjurent  le 
christianisme  et  reviennent  aux  pratiques  judaïques,  le  roi,  pour 
empêcher  le  retour  de  telles  abominations,  ordonne  ce  qui  suit  : 

1.  Les  Juifs  de  l'île  de  Majorque  et  des  îles  adjacentes  habiteront 
dans  chaque  ville  ou  cité  un  lieu  clos  de  toutes  parts  et  ne  commu- 
niquant avec  l'extérieur  que  par  une  seule  porte  ',  lequel  lieu  sera 
choisi  par  les  jurais  et  le  procureur  royal  ;  et  dans  les  villes  où  existe 
une  juiverie,  ils  seront  tenus  d'y  habiter. 

2.  Les  Juifs  ne  doivent  ni  manger  ni  boire  avec  les  chrétiens  hors 
les  cas  de  force  majeure.  Les  Juifs  ne  doivent  avoir  dans  leur  mai- 
son ni  écuyers  ni  serviteurs  chrétiens,  ni  nourrices  chrétiennes  pour 
nourrir  leurs  enfants  ;  ils  ne  doivent  pas  non  plus  aller  dans  les  mai- 
sons des  chrétiens  pour  leur  faire  honneur  à  l'occasion  de  noces  ou 
de  funérailles.  Il  est  permis  toutefois  aux  Juifs  de  louer  des  chré- 
tiens pour  construire  leurs  maisons,  cultiver  leurs  vignes  et  leurs 
champs,  mais  ces  ouvriers  ne  doivent  ni  manger  ni  boire  dans  les 
maisons  des  Juifs*. 


'  Une  ordonnance  de  l'2!jb  applicable  au  Roussillou,  qui  faisait  alors  partie  du 
royaume  de  Majorque,  prescrit  également  que  la  juiverie  (il  s'agit  de  la  juiverie  de 
Perpignan)  ne  doit  avoir  qu'une  seule  entrée  ;  voir  Alart,  Documents  sur  la  langue 
catalane  des  nnriens  romfés  de  RoussiUon  et  deCcrdaqne.  Paris,  Màisonncuvc,  1881, 
p.  115. 

*  Les  mêmes  prescriptions  à  peu  prés  se  trouvent  daus  les  ordonnances  du  Rous- 


NOTES  ET  DOCUJIENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  'il 

3.  Défense  aux  Juifs  de  porter  des  armes  telles  qu'épées,  dagues, 
poignards,  etc.,  mais  ils  pourront  porter  des  couteaux  et  des  canifs 
pour  couper  le  pain  et  la  viande. 

4.  Gomme  il  est  connu  que  le  Talmud  prescrit  aux  Juifs  de  réciter 
chaque  jour  une  prière  contre  les  chrétiens,  les  églises  et  les  fidèles 
défunts,  dorénavant  il  sera  interdit  aux  Juifs  de  dire  cette  prière, 
qu'ils  devront  en  outre  faire  disparaître  de  leur  Talmud  ou  de  tout 
autre  livre  où  elle  pourrait  se  trouver  écrite. 

5.  Défense  aux  femmes  chrétiennes,  de  quelque  condition  qu'elles 
soient,  mariées,  non  mariées  ou  femmes  publiques,  d'entrer  de 
jour  ou  de  nuit  dans  les  juiveries  ou  dans  les  quartiers  réservés 
aux  Juifs. 

.6.  Les  Juifs  qui  voudront  se  faire  baptiser  ne  devront  être  de- 
tournés  de  leur  intention  par  qui  que  ce  soit,  chrétien  ou  Juif,  mari 
ou  femme,  père  ou  mère,  frère  ou  sœur,  etc. 

7.  Il  est  défendu  aux  Juifs  de  prendre  le  titre  de  Don. 

8.  Pour  que  les  Juifs  puissent  être  dorénavant  facilement  reconnus 
et  distingués  des  chrétiens,  il  leur  est  enjoint  de  porter  à  leur  cha- 
peron un  capuchon  long  d'une  palme,  fait  en  forme  d'entonnoir  ou 
de  corne  et  cousu  jusqu'à  la  poi.nte.  Lesdits  Juifs  ne  pourront  pas 
porter  de  manteaux,  mais  ils  revêtiront  par-dessus  leurs  habits  de 
longues  robes  {gramalles),  où  seront  fixées  à  la  partie  extérieure  les 
insignes  qu'ils  ont  coutume  de  porter*.  Lorsqu'ils  voyageront  les 
Juifs  ne  seront  pas  tenus  de  revêtir  ce  costume,  afin  d'éviter  les  en- 
nuis que  cet  accoutrement  spécial  pourrait  leur  attirer. 

9.  Il  est  défendu  aux  Juifs  de  vendre  aux  chrétiens  des  objets 
d'alimentation,  excepté  les  produits  de  leurs  jardins  ou  de  leurs 
champs,  qu'ils  pourront  vendre  aux  Juifs  et  aux  chrétiens  dans  leurs 
quartiers  ou  leurs  propriétés,  dans  les  foires  et  les  marchés  où  ils 
seront  autorisés  à  avoir  des  boutiques,  à  la  condition  qu'ils  n'y  cou- 
chent point.  Il  est  en  outre  permis  aux  Juifs  de  vendre  toutes  sortes 
d'autres  marchandises. 

10.  Les  Juifs  ne  peuvent  remplir  les  charges  de  percepteur  d'im- 
pôts, de  vérificateur  des  poids  et  mesures,  de  procureur,  etc. 

11.  Défense  aux  Juifs  défaire  de  la  propagande  et  d'attirer  des 
étrangers  à  leur  secte. 

12.  Défense  aux  Juifs  d'assister  les  chrétiens  dans  leurs  maladies, 
de  leur  apporter  des  remèdes,  de  se  baigner  dans  le  même  bain 
qu'eux,  de  leur  envoyer  des  présents  de  pâtisseries,  épices  et  autres 
victuailles  ou  boissons. 

13.  Défense   aux  Juifs,  hommes  et  femmes,  de  porter  des  étoffes 

sillon  de  Tannée  1296  ;  l'une  porte  qu'il  est  défendu  de  ■  faire  la  cour  à  la  jeune  Juive 
ou  à  la  Juive  qui  vient  d'accoucher  •  Alart,  Documents,  etc.,  p.  116. 

^  Ces  insif^ues,  d'après  une  ordonnance  promulguée  ù  Valence  le  14  avril  1393, 
étaient  une  roue  jaune  ou  rouge  [roda  'Ji'oga  o  vermella),  qui  se  portait  sur  la  poitrine 
(en  los  pits).  Voir  Sanpere  y  Miquel,  Las  costumbrts  catatanas  eu  ticmj)0  de  Juan  I, 
Barcelone,  1878,  p.  280,  notel. 


42  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

d'écaiiale  et  autres  étoffes  précieuses  ainsi  que  des  manteaux  garnis 
de  soie  ou  de  fourrures  :  défense  aux  Juives  de  porter  des  ornements 
d'or  dans  leurs  voiles  et  toques. 

14.  Défense  aux  Juifs  d'exercer  le  métier  de  barbier  ni  de  coudre 
des  vêtements  de  femmes  chrétiennes. 

15.  Il  est  prescrit  aux  officiers  royaux  d'interdire  aux  Juives  con- 
verties de  passer  en  Afrique  pour  y  abjurer  et  de  laisser  revenir  à 
Majorque  les  enfants  de  ces  femmes. 

(Publ.  par  Villanueva,  Viageliterario^V.  XXI,  p.  238). 

N"  39.  —  Ann.  1435.  —  Conversion  générale  des  Juifs  de  Majorque. 
Sur  les  causes  de  cette  conversion  je  ne  connais  que  le  récit  de 
rhistorien  Mut,  qui  ne  renvoie  à  aucun  document  contemporain  de 
l'événement. 

(Voir  Mut,  Historm  gênerai  del  reino  dellallorca,  éd.  de  1841, 
t.  III,  p.  384  et  suiv.^ 

Incontestablement  les  documents  qui  viennent  d'être  analysés 
jettent  un  grand  jour  sur  certains  côtés  de  l'histoire  des  Juifs  aux 
Baléares  depuis  la  conquête  aragonaise,  en  particulier  sur  les  tra- 
giques événements  de  l'année  1391,  mais  il  manque  encore  bien 
des  anneaux  à  la  chaîne.  Un  des  points  de  cette  histoire  qu'il  se- 
rait le  plus  intéressant  d'éclaircir  est  cette  «  condamnation  géné- 
rale »  de  l'an  1315,  au  sujet  de  laquelle  ni  les  anciens  historiens 
de  l'île  ni  la  collection  diplomatique  de  Villanueva  ne  nous  ren- 
seignent. J'ai  trouvé  dans  le  deuxième  registre  de  la  procuration 
royale  de  Majorque  ,  intitulé  Liber  literarimi  regiarmn  of- 
ficii  régie  procurationis,  maio,  anni  MCCCVIIII  nsque  ad 
MCCCXXXVIIII  et  conservé  dans  les  archives  de  l'ancienne 
Bailla  à  Palma  ',  trois  documents  relatifs  à  un  accord  intervenu 
entre  le  roi  Sancho  et  les  secrétaires  de  la  communauté  {aljatna) 
des  Juifs  de  Majorque  :  les  Juifs  pour  payer  leur  amende  avaient 
besoin  d'argent,  ils  demandent  au  roi  la  permission  de  se  charger 
momentanément  de  certains  impôts.  Je  transcris  ces  pièces  en  ac- 
compagnant d'une  traduction  les  deux  dernières. 

I.  Lettre  du  roi  Sancho  à  ses  procureurs  royaux  à  Majorque. 

Sancius,  Dei  gracia  rex  Maioricarum,  cornes  Rossilionis  et  Ceri- 
tanie  et  dominus  Montispesullani,  fidclibus  procuratoribus  suis, 
P.  FJguera  et  Michaeli  Rotlando,  salutem  et  graciam.  Mlttimus  vobis 

■  Le  premier  registre  de  ccUe  collection  n'existe  plus  aux  archives  de  la  Bailia. 
J'ai  donné  sur  ces  archives  et  sur  tous  les  dépôts  de  documents  historiques  de  Palma 
des  renbeiguemeiits  nombreux  dans  un  rapport  adressé  à  M.  le  Ministre  de  l'Instruc- 
tion j)ubli'jue  qui  sera  prochainement  publn;  dans  les  Archives  des  missions. 


NOTES  ET  DOGUiMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES 


43 


interclusa  presentibus  capitula  super  statuta  Judeorum  Maioricarum 
cum  responsionibus  factis  ad  ea,  vobis  presentibus  et  consencien- 
tibus,  secundum  quas  responsiones,  que  in  fine  cuiuslibet  capituli 
continentur,  volumus  fieri  et  procedi.  Super  aliis  non  ad  negocium 
Judeorum  pertinentibus  extra  dicta  capitula  volumus  quod  permit- 
tatis  procedi  per  Judeos  ipsos,  prout  consueverunt  ante  captionem 
eorum.  Ceterum  super  sinagoga  Judeorum  volumus  quod  eligatur 
locus  competens,  ubi  construatur  arbitrio  nostro  et  secretariorum, 
prout  satisper  nos  et  nostros  consiliarios  jam  fuit  tractatum.  Datum 
in  Sancto  Felice  Guixellense  *,  VP  Kalendas  octubris  anno  Domini 
M"  GCC°  XV". 

Ainsi  le  roi  Sancho  envoie  à  ses  procureurs  un  projet  de  nou- 
veaux statuts  de  la  communauté  juive  de  Majorque  avec  les  ré- 
ponses ou  observations  qu'il  a  jugé  bon  d'y  faire.  Pour  tout  ce 
qui  n'a  pas  trait  à  «  l'affaire  des  Juifs  »  et  n'est  pas  mentionné 
dans  les  articles  de  ces  statuts,  le  roi  permet  aux  Juifs  de  pro- 
céder comme  autrefois,  avant  la  saisie  de  leurs  biens.  Quant  à  la 
synagogue,  on  la  fera  construire  sur  un  emplacement  choisi  par 
les  secrétaires  de  Valja?na  et  les  représentants  du  roi« 

Voici  ces  statuts  avec  les  annotations  du  roi  : 


II.  Aquests  son  los  ordonamens 
e  constitucions,  les  quais  los  se- 
cretaris  del  Cayl  Juych  volen  fer 
e  ordonar  entre  eils  ab  volentat  e 
ab  consentiment  del  seuyor  Rey. 

1.  Primalment,  que  tôt  jueu 
maior  de  .XV.  anys  ho  juyha  que 
tenga  alberch  per  si,  que  sia  ten- 
gut  de  pagar  per  testa  cosa  certa, 
segous  que  aura,  a  coneguda  dels 
secretaris  e  dels  .VIII.  prohomens 
ordonats  en  aiuda  dels  negocis  de 
la  aljama,  aqueils  empero  que  au- 
ran  valent  de  .X.  libres  ensus.  — 
Plau  al  senyor  Rey. 

•2.  Item,  que  tôt  jueu  ho  juyha, 
estrany  ho  priuat,  sia  tengut  de 
pagar  cosa  certa  per  libra  de  carn 
de  molto,  de  hou,  de  oueyla  e  de 
totes  altres  carns  escortxadisses, 


IL  Ce  sont  les  règlements  et 
constitutions  que  les  secrétaires 
de  la  Juiverie  veulent  faire  et  éta- 
blir entre  eux,  avec  la  permission 
et  le  consentement  du  Seigneur 
Roi. 

1.  Premièrement,  tout  Juif  ou 
Juive  de  plus  de  quinze  ans  qui  a 
un  domicile  payera,  par  tête,  une 
certaine  somme,  selon  ce  qu'il  ou 
elle  aura,  à  la  connaissance  des 
secrétaires  et  des  huit  prohomens 
établis  pour  subvenir  aux  besoins 
de  la  communauté,  mais  ne  se- 
ront tenus  de  payer  que  ceux  qui 
possèdent  plus  de  dix  livres.  — 
Le  Roi  consent. 

2.  Item,  que  tout  Juif,  homme 
ou  femme,  étranger  ou  du  pays, 
soit  tenu  de  payer  une  certaine 
somme  par  livre  de  viande  de 
mouton,  de  bœuf  et  de  brebis  et  de 


'  Son  Feliu  de  Guixols  en  Catalogne. 


44  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

a  coneguda  dels  damuntdits  e  toutes  autres  viandes  de  bouche- 
aiii  con  eils  ho  aordonaran,  en  rie,  à  la  connaissance  des  susdits 
aytori  dels  negocis  de  la  aljama.  et  comme  ils  le  régleront,  pour 
—  Plau  al  senyor  Rej^  abque  pa-  subvenir  aux  besoins  de  la  com- 
guen  en  la  aiuda  comuna.  munauté,  —  Le  Soi  cousent,  à  la 

condition  qu'ils  payeront  leur  part 
dans  Taide  commune. 

3.  Item,  que  tôt  jueu  bo  juj'ha  3.  Item,  tout  Juif  ou  Juive  qui 
que  menucb  pan  de  forment  ho  mange  pain  de  froment  ou  de  farine 
de  mescayl  •  sia  tengut  de  pagar  mêlée  devra  payer  une  certaine 
cosacerta  per  quintar,  a  coneguda  somme  par  quintal,  à  la  connais- 
dels  damuntdits  aixi  con  eils  ho  sance  des  susdits  et  ainsi  qu'ils 
aordonaran.  —  Fiat  ut  super  de  le  régleront.  —  Accordé  comme 
carnibus.  plus  haut  pour  les  viandes. 

4.  Item,  que  tôt  jueu  estrany  bo  4.  Item,  que  tout  Juif,  étranger 
priuat  que  vena  vin  juesch  en  ou  du  pays,  qui  vend  du  vin  juif 
Maloroba,  que  sia  tengut  de  pagar  à  Majorque,  soit  tenu  de  payer 
cosa  sabuda  per  quatrer  ho  per  une  certaine  somme  par  mesure  ' 
liura,  aixi  con  mils  ho  pus  pro-  ou  par  livre,  ainsi  que  cela  pourra 
fitos  sera  faedor,  a  coneguda  dels  se  faire  le  mieux  et  le  plus  utile- 
damuntdits,  en  aiuda  dels  dits  ment,  à  la  connaissance  des  sus- 
negocis;  e  que  nengu  crestia  es-  dits,  pour  subvenir  aux  dits  be- 
trany  ne  priuat  no  puscha  vender  soins;  et  aucun  chrétien  étranger 
en  lo  Gayl  ne  deffora  vin  jueuesch  ou  du  pays  ne  pourra  vendre  dans 
senes  volentat  dels  secretaris.  —  la  Juiverie  ni  au  dehors  du  vin 
Plau  al  senyor  Rey  quels  secre-  juif  sans  l'autorisation  des  secre- 
taris pusquen  stablir  certas  per-  taires.  —  Le'Roi  permet  aux  secré- 
sonasde  les  quais  losjueus  pus-  taires  d'établir  certaines  person- 
quen  comprar vin  e  no  daltres.       nés  qui  seront  seules  autorisées 

à  vendre  du  vin  aux  Juifs. 

5.  Item,  que  tôt  jueu  ho  juj-ha  5.  Item,  tout  Juif  ou  Juive  qui 
quis  fassa  vestedures  noues  que  se  fait  des  vêtements  neufs  devra 
deia  pagar  per  liura  cosa  certa  payer  par  livre  une  certaine  som- 
d'aytant  con  li  costaran,  a  cône-  me  selon  ce  que  ces  vêtements 
guda  dels  damuntdits,  en  aiuda  lui  coûteront,  à  la  connaissance 
dels  dits  negocis.  —  Placet  domino  des  susdits,  pour  subvenir  aux 
Régi.  dits  besoins.  —  Le  Roi  consent. 

6.  Item,  que  lot  jueu  qui  compra  6.  Item,  que  tout  Juif  qui  achète 
ni  vena  negunes  mercadories  e  ou  vend  des  marchandises  ou  au- 
allrcs  coses  en  Mailorcha  sia  ten-  très  choses   soit  tenu   de  payer 


'  Mescayll,  écrit  aussi  mastayll,  se  dit  d'un  mélange  de  froment  et  d'orge;  voir 
Du  Gange,  au  mot  mescalia.  On  trouve  aussi  dans  les  documents  la  forme  mastall, 
mastay  {yz=ll),  par  exemple  dans  RuUan,  Historia  de  Sollei;  t.  I,  p.  350  et 
352,  note  3.  C'est  cette  forme  qui  a  été  enregistrée  dans  le  dictionnaire  catalan  de 
Laberniu. 

*  Je  traduis  ainsi,  ignorant  la  contenance  du  quatrer  et  ne  lui  trouvant,  par  consé- 
quent, pas  déquivalcut  eu  français. 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES 


45 


^ut  de  pagar  cosa  certa  per  liura, 
a  coneguda  dels  damuatdits,  en 
aiuda  dels  dits  negocis.  —  Fiat, 
exceptis  judeis  extraneis. 

7.  Item,  que  tôt  jueu  ho  juhia 
qui  prest  a  uzura  sien  tenguts  de 
pagar  cosa  certa  per  liura  del  pres- 
tech,  a  coneguda  dels  damunt- 
(lits,  en  aiuda  dels  dits  negocis. 
—  Placet  domino  Régi. 

8.  Item,  que  tôt  jueu  estrany, 
manestral  ho  de  qualque  art  que 
sia,  pusque  aia  .1.  mes  continua- 
ment  estât  en  Malorqua,  deia  pa- 
gar cosa  certa  per  setmana,  a  co- 
neguda dels  damuntdits,  en  aiuda 
dels  dits  negocis.  —  Placet  do- 
mino Régi. 

9.  Item,  que  tôt  jueu  mercader 
qui  aia  estât  en  Malorcha  .1.  ayn 
complit  deia  pagar  en  los  dits  ne- 
gocis cosa  certa,  a  coneguda  dels 
damuntdits.  —  Placet  domino 
Régi,  si  enim  factus  fuerit  civis 
Majoricarum, 

10.  Item,  que  tôt  jueu  ho  juhia 
qui  tenga  cases  a  loger,  so  es  que 
les  loch  a  altre,  que  deia  pagar 
cosa  certa  per  liura  del  loger,  a 
coneguda  dels  dits  negocis.  — 
Placet  domino  Régi. 

11.  Item,  quels  damuntdits  pu- 
xen  fer  e  ordonar  per  eils  mateixs 
totes  les  damuutdites  coses  e  sem- 
blants d'aquelles,  a  profit  e  a  uti- 
litat  de  la  aljama.  —  Vol  le  se- 
nyor  Rey  que  totes  les  coses  da- 
muutdites, ans  ques  publiqueU; 
sien  aordonades  ab  conceil  e  con- 
sentiment  dels  procuradors. 

12.  Item,  que  nul  patro  de  nau 
ne  de  leyn  ne  de  nengu  altre  ve- 
xel  no  gos  rebugar  de  reebre  en 


une  certaine  somme  par  livre,  à 
la  connaissance  des  susdits,  pour 
subvenir  aux  dits  besoins.  — 
Accordé,  sauf  pour  les  Juifs  étran- 
gers, 

7.  Item,  que  les  Juifs  ou  Juives 
qui  prêtent  à  usure  soient  tenus 
de  payer  une  certaine  somme  par 
livre  du  capital  prêté,  à  la  con- 
naissance des  susdits,  pour  sub- 
venir aux  dits  besoins.  —  Le  Roi 
consent. 

.8.  Item,  que  tout  Juif  étranger, 
ouvrier  ou  quel  que  soit  son  mé- 
tier, un  mois  après  avoir  établi 
son  domicile  à  Majorque,  soit  tenu 
de  payer  une  certaine  somme  par 
semaine,  à  la  connaissance  des 
susdits,  pour  subvenir  aux  dits 
besoins.  —  Le  Roi  consent, 

9.  Item,  que  tout  Juif  marchand, 
après  avoir  résidé  à  Majorque  une 
année  entière,  soit  tenu  de  payer 
pour  lesdites  atïaires  une  certaine 
somme,  à  la  connaissance  des  sus- 
dits. —  Le  Roi  consent,  si  ledit 
marchand  est  fait  citoyen  de  Ma- 
jorque. 

10.  Item,  que  tout  Juif  ou  Juive 
qui  a  des  maisons  à  louer,  c'est- 
à-dire  qui  les  loue  à  un  autre,  paye 
une  certaine  somme,  par  livre  du 
prix  du  loyer,  à  la  connaissance 
des  susdits  et  pour  subvenir  aux 
dits  besoins.  —  Le  Roi  consent. 

11.  Item,  que  les  secrétaires 
puissent  eux-mêmes  faire  et  régler 
toutes  les  choses  susdites  et  au- 
tres analogues  pour  le  bien  et  Tu- 
lilité  de  la  communauté.  —  Le  Roi 
veut  que  les  choses  susdites, avant 
d'être  publiées,  soient  réglées  sui- 
vant l'avis  et  avec  rasseutimeut 
des  procureurs. 

12.  Item,  qu'aucun  patron  de 
bateau  ou  de  navire  ou  de  quel- 
que vaisseau  que  ce  soit,  n'ose 


46 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


son  vaxel  coses  e  mercaderies  de 
jueus  per  porlar  fora  la  terra  con 
per  venir  en  Malorcha,  ans  tôt  pa- 
tro  con  ve  quest  no  sia  '  per  lo 
jueu  ho  deia  reebre  e  fer  carregar 
en  son  vaxel,  lo  jueu  empero  pa- 
garli  son  nolit.  —  Aordonen  ne 
los  procuradors  e  fassen  quels  pa- 
trons deien  pendre  e  carregar  ro- 
bes e  mercaderies  dels  jueus. 


refuser  de  recevoir  en  son  vais- 
seau des  choses  et  marchandises' 
appartenant  à  des  Juifs,  pour  les 
porter  hors  du  pays  comme  pour 
les  amener  à  Majorque,  mais  tout 
patron  devra  recevoir  ce  qui  ap- 
partient aux  Juifs  et  le  faire  char- 
ger en  son  vaisseau, le  Juif  de  son 
côté  doit  lui  en  payer  le  nolis.  — 
Que  les  procureurs  obligent  les 
patrons  à  recevoir  et  à  charger 
les  bagages  ot  les  marchandises 
des  Juifs. 


En  se  chargeant  ainsi  d'impôts  extraordinaires  et  en  sollicitant 
quelques  facilités  pour  leur  commerce,  les  Juifs  comptaient  pou- 
voir se  libérer  promptement  de  la  somme  due  au  roi  pour  le  ra- 
chat de  leurs  biens  confisqués  ;  mais  ils  entendaient  ne  pas  rester 
perpétuellement  soumis  aux  articles  de  ce  traité  qui  les  grevaient 
considérablement.  Aussi  adressèrent-ils  au  roi  une  pétition  afin 
d'obtenir  quelques  faveurs  spéciales,  puis  une  grâce  d'un  carac- 
tère général,  la  restitution  de  tous  leurs  privilèges,  et  enfin  le 
droit  'de  déclarer  nul  et  de  nul  effet  le  traité  en  question,  aussitôt 
qu'ils  auraient  pa^é  leur  dette.  Le  texte  de  cette  pétition  est  ainsi 
conçu  : 


III.  Aquestes  son  les  gracies 
quels  jueus  demanen  al  senyor 
Rey. 

h .  Primerament,  que  nengu jueu 
ho  juhia  no  sia  couengut  ne  oia 
sentencia  ne  preua  justicia  en  dia 
feriat  lur. 

2.  Item,  si  nengu  jueu  ho  juhia 
sera  jutgat  a  sentencia  corporal,  e 
algun  prehicador  ho  frare  menor 
ho  preuera  lo  uol  fier  tornar  cres- 
tia,  qu(;  los  sacretaris  que  lauors 
seran,  puxen,  lo  dia  que  pendra 
la  justicia,  dins  en  la  preso  a  eil 
trametre  .II.  jueus,  qui  re  no  li 
diguen,  mas  li  sien  dauant  e  la- 
uors, sis  vol  fer  crestia,  fassau, 
cor  christianisme  per  forsa  no  es 


III.  Ce  sont  les  grâces  que  les 
Juifs  demandent  au  Roi. 

1 .  Premièrement,  qu'aucun  Juif 
ou  Juive,  ne  soit  cité,  ni  jugé,  ni 
ne  subisse  une  peine  un  jour  de 
fêle  juive. 

'l.  Ilem,  si  un  Juif  est  con- 
damné à  subir  une  peine  corpo- 
relle, et  qu'un  frère  prêcheur,  ou 
un  frère  mineur,  ou  un  prêtre 
veut  le  convenir  au  christianisme, 
les  secrétaires  de  la  communauté 
qui  seront  alors  en  fonction  pour- 
ront, le  jour  du  supplice,  lui  en- 
voyer deux  Juifs  dans  la  prison, 
qui  ne  lui  diront  rien,  mais  se 
tiendront  devant  lui,  et  alors  si  le 


'   I^robablement  (ju'es^t  ne  sia. 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES 


/i7 


bo.  E  si  non  vol  fer,  que  puxa 
ffer  orde  de  jueu,  e  los  dits  jueus 
puxen  ab  eil  anar  tro  al  loch 
bon  pendra  la  justicia  e  nols  sia 
vedat. 


3.  Item,  que  tôt  jueu  que  sia 
condempnat  a  peniar,  que  sia  pe- 
iiiat  per  lo  coll,  no  per  tal  quels 
n'entenen  a  auer  semblant  honor 
ab  crestia,  mas  con  un  hom  es 
peniat  per  los  peus  trigua  a  uio- 
rir  .II.  ho  .III.  dies  ;  e  con  es  pe- 
niat per  lo  col,  es  mort  tantost.  E 
axi  solament  domanen  asso  per  la 
pena  a  aleugar. 

4.  Item,  que  si  algun  patro  de 
nau  ho  de  leyn  ho  d'altre  vaxel 
aportaua  algun  jueu  ho  juhia  que 
no  aia  de  que  pae  lo  nolit,  quel 
patro  nol  atur  en  son  vaxel,  ans 
lo  lex  anar  encontinent,  e  no  li 
deia  nel  pusque  despular  de  sos 
vestits. 

5.  Item,  que  si  algun  inqueri- 
dor  fara  inquisicio  contra  alcun 
Jueu  ho  juhia  per  fet  de  la  fe,  que 
no  puxa  en  re  enantar  contra  eii 
ne  enquérir  sens  la  cort  rreyal, 
ans  tantost  con  lo  aia  fet  pendre, 
lo  jueu  ho  la  juhia  sia  mes  en  la 
preso  del  senyoi  Rey,  e  aqui  se 
fassa  la  inquisicio  ;  e  tota  hora 
quel  enqueridor  voira  parlar  ab 
eil  ho  ab  eila  que  hi  sia  lo  batle 
ho  son  lochtinent.  E  fêta  la  in- 
quisicio, sien  dades  défendons  al 
jueu  ho  a  la  juhia  e  auocat  quils 
defena  a  lur  dret. 

6.  Item,  que  si  alcun  infant 
jueu  ho  juhia  menor  de  .XV.  anys 
se  uol    fier  crestia,  que   li   sien 


Juif  veut  se  faire  chrétien,  qu'il  le 
fasse,  car  christianisme  par  force 
n'est  pas  bon  ;  et  s'il  ne  le  veut  pas, 
qu'il  puisse  faire  profession  de 
judaïsme,  et  lesdits  Juifs  pourront 
aller  avec  lui  jusqu'au  lieu  où  il 
subira  sa  peine,  et  que  cela  ne 
leur  soit  point  interdit. 

3.  Item  que  le  Juif  condamné  à 
être  pendu,  soit  pendu  par  le  cou, 
non  pas  parce  que  les  Juifs  pré- 
tendent au  même  honneur  que 
les  chrétiens,  mais  parce  qu'un 
homme,  qui  est  pendu  par  les 
pieds,  tarde  deux  ou  trois  jours  à 
mourir,  et  quand  il  est  pendu  par 
le  cou,  il  meurt  aussitôt.  Et  ainsi 
ilsdemandent  cela  seulement  pour 
alléger  la  peine. 

4.  Item,  s'il  advient  qu'un  pa- 
tron de  bateau  ou  de  navire  ou  de 
tout  autre  vaisseau  transporte  un 
Juif  qui  n'a  pas  de  quoi  payer  le 
nolis,le  patron  ne  devra  pas  le  dé- 
tenir dans  son  navire,  mais  le  lais- 
ser aller  aussitôt,  et  il  ne  devra  ni 
ne  pourra  non  plus  le  dépouiller 
de  ses  vêtements. 

5.  Item,  si  un  inquisiteur  fait 
inquisition  contre  un  Juif  pour 
affaire  de  la  foi,  qu'il  ne  puisse 
en  rien  procéder  contre  lui  ni  en- 
quérir à  son  sujet,  sans  l'assen- 
timent de  la  cour  royale,  mais 
aussitôt  après  qu'il  l'aura  fait 
prendre,  le  Juif  sera  mis  dans  la 
prison  du  roi  ;  et  toutes  les  fois 
que  l'inquisiteur  voudra  lui  par- 
ler, le  baVe  ou  son  lieutenant  de- 
vra être  présent.  Et  lorsque  l'in- 
quisition sera  terminée,  on  don- 
nera au  Juif  les  moyens  de  se 
défendre  et  un  avocat  pour  ré- 
clamer son  droit. 

6.  Item,  îi  un  Juif  ou  une  Juive 
de  moins  de  quinze  ans  veut  em- 
brasser le  christianisme ,    qu'on 


48 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


dats  .III.  dies  d'acort,  dins  los 
quais  tôt  hom,  aixi  crestia  con 
jueu,  i^uxa  ab  el  ho  ab  ela  parlar. 
E  que  nul  hom,  sots  certa  pena, 
no  gos  aytals  persoues  bateiar  tro 
los  dits  .III.  dies  sien  passais. 
Encara  que  nul  hom  no  gos  ba- 
teiar ne  fer  bateiar  jueu  ni  juhia 
menor  de  .X.  anys,  con  non  aien 
sen,  e  asso  sots  pena  la  quai  el 
senyor  Rey  conega. 


7.  Item,  que  aj^tant  con  los  dits 
jueus  sien  en  deute  ab  lo  senyor 
Rey  no  sien  tenguts  de  pagar 
questa  ni  siza  ne  moliuatge  ne  ne- 
guna  altre  aiuda  ucesaotiorrej-al 
ne  veyual. 

8.  Item,  que  dins  lo  dit  temps 
nul  hom  (neguna  persona)  no  puxa 
auer  ne  recaptar  gracia  ni  alon- 
gament  de  negunes  deutes  que 
deie(n)  a  jueus,  con  en  altre  guisa 
cils  no  porien  pagar  so  que  deuen 
al  sen^'or  Rey. 

9.  Item,  que  totes  les  mercade- 
ries  qui  sien  de  jueus  fora  la  terra 
e  dins  lo  dit  temps  vendran  a 
Malorcha,  que  no  sien  embargades 
ne  emparades  per  lo  senyor  Rey 
ne  SOS  ofecials  per  lo  deute  del 
senj'or  Rey,  ans  deien  venir  en 
poder  dels  sacretaris,  per  tal  que 
los  jueus  de  qui  son  pus  volen- 
terosament  les  aporten  en  esta 
terra. 

'10.  Item,  que  tots  los  secretaris 
que  seran  dins  lo  dit  temps  aien 
pieu  poder  e  licencia  de  pendre  e 
fer  pendre  tots  seils  qui  seran  dc- 
sobediens  e  rebcls  a  eils  e  no  vol- 
ran  pagar  so  en  que  seran  tenguts 
e  uquoils  absolrc  e  fer  absolro 
scDs  licencia  do  balle  ne  de  altre 
hom  0  dostrenyer  los  eu  beus  e 


lui  donne  un  délai  de  trois  jours, 
pendant  lequel  tout  homme,  juif 
ou  chrétien,  pourra  lui  parler.  Et 
que  personne,  au  risque  d'encou- 
rir une  certaine  peine,  ne  s'avise 
de  baptiser  de  telles  personnes 
avant  que  lesdits  trois  jours  soient 
écoulés.  En  outre  que  personne, 
au  risque  d'encourir  une  certaine 
peine,  qui  sera  fixée  par  le  roi,  ne 
s'avise  de  baptiser  ni  faire  bapti- 
ser Juifs  ni  Juives  de  moins  de 
dix  ans,  car  à  cet  âge  on  n'a  pas 
de  raison. 

7.  Item,  que  lesdits  Juifs,  tant 
qu'ils  n'auront  pas  payé  leur  dette 
au  roi,  ne  soient  pas  tenus  de 
payer  quête  ni  imposition,  ni  droit 
de  mouture,  ni  aucune  autre  aide, 
ni  exaction  royale  ou  vicinale. 

8.  Item,  que  pendant  ledit  temps 
personne  ne  puisse  être  tenu 
quitte  de  dettes  contractées  en- 
vers des  Juifs,  ni  obtenir  des  ater- 
moiements, car,  autrement,  ils  ne 
pourraient  pa3'er  ce  qu'ils  doivent 
au  roi. 

9.  Item,  que  les  marchandises 
qui  au  dehors  de  File  appartien- 
nent à  des  Juifs  et  qui  pendant 
ledit  temps  seront  envoyées  à  Ma- 
jorque, ne  soient  point  saisies  ni 
retenues  par  le  roi  ou  ses  agents 
à  cause  de  la  dette,  mais  qu'elles 
soient  remises  aux  mains  des  se- 
crétaires, afin  que  les  Juifs  à  qui 
elles  appartiennent  soient  encou- 
ragés à  les  envoyer  en  ce  pays. 

10.  Item,  que  tous  les  secrétai- 
res qui  seront  en  fonction  pen- 
dant ledit  temps,  aient  plein  pou- 
voir et  plein  droit  de  prendre  et 
de  faire  prendre  tous  ceux  qui 
leur  seront  désobéissants  et  re- 
belles et  ne  voudront  pas  payer 
ce  à  quoi  ils  sont  teuus,  de  les  ab- 
soudre ou  faire  absoudre  sans  per- 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES 


en  persona  e  penyorar  e  uendre 
penyores  e  totes  altres  coses  fer 
perque  eils  puixen  cumplir  les 
pagues  al  senyor  Rey. 


11.  Item,  que  tôt  jueu  puixa 
comprar  bens  aventats. 

12.  Item,  que  nengu  jueu  ne 
juyha  no  puscha  vendre  son  al- 
berch  dins  le  cail  a  crestia  o  cres- 
tiana  mas  que  puscha  carregar 
sobre  son  alberch  morabetins,  a 
coneguda  dels  secretaris. 

13.  Item,  quels  jurats  de  Ma- 
lorcha  nels  prohomens  de  la  terra 
nopusquen  fer  nengu  ordonament 
sobre  ne  contra  jueus  en  especial, 
si  doncs  eu  gênerai  no  eraper  tota 
la  terra,  encara  que  sien  enteses 
e  usen  de  totes  franquesas  e  pri- 
vilegis  de  la  terra  aixi  con  habi- 
dators  de  Malorcha. 

14.  Item,  con  los  jueus  de  Ma- 
lorcha sien  despulats  de  tots  lurs 
privilegis,  franqueses,  les  quais 
en  spécial  lurs  eren  dades  e  ator- 
gades,  sens  les  quais  los  jueus  de 
Malorcha  en  la  terra  profitosament 
nels  jueus  estranys  habitar  en  la 
dita  terra  no  vendrien  menys  de 
priuilegis,  con  per  los  priuilegis 
los  quais  hauien  los  jueus  estran- 
gers  de  diverses  terras  en  Malor- 
ches  habitar  venguessen  :  per  so 
vmilment  els  dits  jueus  habi- 
tadors  de  Mailorcha  a  la  Reyal 
Magestat  sopleguen  que  de  bontat 
sua  acustumada  los  reta  lurs  pri- 
viligis  ab  los  quais  pusquen  habi- 
tar en  la  terra  e  tirar  los  estran- 
gers,  axi  con  d'abans  fcyen. 

15.  Item,  con  els  dits  jueus  no 
T.  IV, 


mission  du  baile  ni  d'aucun  autre 
homme,  de  les  contraindre  à  payer 
en  se  saisissant  de  leurs  biens 
ou  de  leurs  personnes,  de  leur 
prendre  des  gages,  de  vendre  ces 
gages  et  de  faire  toutes  autres 
choses,  moyennant  quoi  ils  puis- 
sent effectuer  leurs  payements  au 
roi. 

11.  Item,  que  tout  .Juif  puisse 
acheter  des  biens  mis  en  vente. 

12.  Item,  qu'aucun  Juif  ni  Juive 
ne  puisse  vendre  sa  maison  de  .la 
juiverie  à  chrétien  ou  à  chrétienne, 
mais  qu'il  ou  elle  puisse  l'hypothé- 
quer, à  la  connaissance  des  secré- 
taires. 

13.  Item,  que  les  y^m^^  de  Ma- 
jorque ni  les  proJiomens  du  pays 
ne  puissent  faire  sur  ou  contre  les 
Juifs  aucune  ordonnance  spéciale 
qui  ne  s'applique  en  même  temps 
à  tout  le  pays  en  général,  auquel 
cas  ils  doivent  être  entendus  et 
admis  à  user  de  toutes  les  fran- 
chises et  privilèges  du  pays  comme 
habitants  de  Majorque. 

14.  Item,  comme  les  Juifs  de 
Majorque  ont  été  dépouillés  de 
toutes  les  franchises  et  privilèges 
qui  leur  avaient  été  spécialement 
donnés  et  accordés,  sans  lesquels 
les  Juifs  de  Majorque  ne  peuvent 
habiter  avec  profit  le  pays  ni  les 
Juifs  étrangers  venir  s'y  établir, 
comme,  en  vertu  de  ces  privilè- 
ges, ils  y  venaient  autrefois  de  di- 
vers pays,  lesdits  Juifs  habitants 
de  Majorque  supplient  humble- 
ment la  Majesté  Royale  qu'avec 
sa  bonté  accoutumée  elle  leur 
rende  leurs  privilèges,  grâce  aux- 
quels ils  puissent  habiter  dans 
le  pays  et  y  attirer  les  étrangers, 
comme  ils  faisaient  auparavant. 

i;j.   Item,  comme  lesdits  Juifs 


50 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


agen  sinagoga  e  als  dissaptes  e 
als  altres  dies  de  lur  oracio  agen 
a  anar  per  alberchs  e  fer  partides 
dels  matexs,  es  los  gran  trebayl  : 
per  so  sopleguen  humilment  que 
placia  al  senyor  Rey  quels  assi- 
gure  els  don  loch  dlns  lo  caj^l  en 
lo  quai  pusquen  fier  lur  sinagoga, 
con  tan  gran  caj^l  senes  sinagoga 
estar  no  puscha. 


\6.  Item,  que  lot  jueuestranger 
qui  uenga  en  Malorcha  ab  merca- 
deries  de  les  quais  aia  pagat  dret 
en  Malorque,  que  parten  de  Malor- 
cha, si  pren  en  Manorcha,  que  no 
sia  tengut  de  pagar  leuda  ne  al- 
tre  drel. 

M.  Item,  que  con  els  ditsjueus 
agen  demanats  los  damuntdits 
capitols  de  seruitut  entre  ells,  los 
quais,  con  sien  esmeses  de  diners 
e  de  bens,  no  porien  complir  la 
paga  del  senyor  Rey,  entenen  los 
dits  jueus  que  los  dits  capitols 
de  seruitut  sien  obseruats  entre 
eils  entro  quel  dit  senyor  Rey  aia 
ahuda  conplida  paga  e  fenit  lo 
terme,  e  conplida  la  paga  del  dit 
senyor  Rey,  quels  dits  capitols  de 
la  dita  seruitut  sien  casses  e  vans 
e  que  d'aquels  no  vssen  ne  pus- 
quen vsar  d'aqui  auant. 


n'ont  pas  de  synagogue  et  que  les 
samedis  et  autres  jours  de  fête  ils 
sont  tenus  d'aller  dans  les  mai- 
sons particulières  et  de  se  séparer 
les  uns  des  autres,  ce  qui  est  pour 
eux  un  grand  ennui,  ils  suppli- 
ent humblement  le  Roi  qu'il  lui 
plaise  de  leur  assurer  et  donner 
un  lieu  dans  la  juiverie,  où  ils 
puissent  faire  leur  synagogue, 
car  une  si  grande  juiverie  ne  peut 
subsister  sans  synagogue. 

16.  Item,  tout  Juif  étranger  qui 
viendra  à  Majorque  avec  des  mar- 
chandises, et  qui,  après  en  avoir 
payé  le  droit,  les  fera  sortir  de 
Majorque  et  les  transportera  à  Mi- 
norque,  ne  devra  pas  être  tenu  de 
payer  le  droit  de  douane  ni  au- 
cun autre  droit. 

17.  Item,  parce  que  lesdits  Juifs 
ont  demandé  à  établir  entre  eux 
lesdits  chapitres  de  servitude, 
sans  lesquels  ils  ne  pourraient 
pas,  puisqu'ils  sont  sans  argent 
et  sans  biens,  satisfaire  à  leurs 
engagements  envers  le  Roi,  les- 
dits Juifs  entendent  que  lesdits 
articles  de  servitude  soient  ob- 
servés entre  eux  jusqu'à  ce  que 
ledit  Seigneur  Roi  ait  reçu  tout 
ce  qui  lui  est  dû,  et  après  avoir 
atteint  le  dernier  terme  du  paye- 
ment et  avoir  versé  la  somme 
entière,  ils  entendent  que  les- 
dits articles  de  ladite  servitude 
soient  cassés  et  annulés  et  qu'on 
n'en  use  ni  ne  puisse  en  user  à 
l'avenir. 


On  ne  sait  pas  exactement  combien  de  temps  mirent  les  Juifs  de 
Majorque  à  s'acquitter  des  95,000  livres  dues  au  roi  Sanclio  pour 
leur  rachat,  en  tout  cas  ils  étaient  entièrement  libérés  au  mois  de 
mars  de  l'année  1327.  C'est  vers  cette  époque  qu'ils  envoyèrent  à 
Pliilippe  do  Majorque,  tuteur  du  roi  Jacme  III,  qui  résidait  alors 
à  l'erpignan,  quatre  notables  de  leur  communauté,  Abraham  Ma- 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  ï>i 

lequi,  Isaac  ben  Aron,  Ayon  Choen  et  Joseph  Barqui,  pour  le 
supplier  de  replacer  la  communauté  juive  dans  le  droit  commun, 
puisqu'elle  avait  payé  le  montant  de  l'amende,  et  de  n'exiger 
d'elle  à  l'avenir  que  le  tribut  annuel  de  cent  soixante-cinq  livres 
qu'elle  était  tenue  de  payer  avant  la  condamnation  générale  du  roi 
Sancho.  Philippe,  comme  on  le  voit  par  la  lettre  suivante  qu'il  fit 
adresser  par  son  trésorier,  de  Perpignan,  le  8  mars  1327,  aux 
procureurs  royaux  de  Majorque,  acquiesça  à  ce  vœu  et  déclara 
que,  voulant  suivre  l'exemple  de  ses  prédécesseurs,  il  prenait  sous 
sa  garde  et  protection  les  Juifs  de  Majorque  et  leurs  biens. 

Als  houralz,  sauis  e  discretz  senyors  en  Michel  Rotlan  e  en  P.  Roig, 
prociwadors  en  lo  règne  de  Maylorches  per  nostre  senyor  lo  Rey,  de 
nos  en  Nicholau  de  Sent  Just,  maior,  e  en  P.  Berro,  Ihesaureres  del 
dit  senyor'Rey,  salutz  ab  tota  honor.  Fem  vos  saber  quels  messages 
de  l'aljama  de  Maylorches,  ço  es  Nabraffim  Malequi,  Nissach  ben 
Aron,  Nayon  Choen,  En  JucefT  Barqui,  suplicaren  a  Mossenyer  en 
Felip  e  al  consseyll  que  pus  la  dita  aljema  auia  pagades  noranta 
sinch  mill  libres  en  les  quais  fo  condanpnada  a  pagar  al  senyor  Rey 
en  Sanxo  de  bona  memoria,  que  deges  restituir  e  tenir  la  dita  aljema, 
quant  a  pagar  lo  trahut  que  deuen,  en  aquela  forma  e  manera  que 
auien  acostumat  de  donar  ans  de  la  dita  condenpnacio.  Perqueus  fem 
saber  que  délibérâtes  estât  per  lo  dit  senyor  mossenyer  En  Philip  e  per 
son  conseyllque  la  dita  aliama  no  déjà  pagar  al  senyor  Rey  altre  tra- 
hut sino  aquell  que  per  eylla  era  acostumat  de  paguar  ans  de  la  dita 
condenpnacio,  ço  es  cent  saxanta  sinch  Ib.,  segous  que  auem  trobat 
per  los  libres  de  la  thesauraria.  E  axi  daym  uos  eus  manam  de  part 
del  dit  senyor  mossenyer  en  Philip  que  la  dita  aljama  no  sia  per  uos 
altres  costreta  eu  altra  manera  de  pagar  lo  dit  trahut  sino  axi  con  dit 
es  Vol  encara  e  mana  lo  dit  senyor  mossenyer  en  Philip  e  axi  vos  ho 
diem  de  part  sua  que  la  dita  aljama  e  tots  lurs  bens  sien  en  guarda 
e  protectio  del  dit  senyor  Rey  axi  con  cosa  sua  propria  e  axi  con  tots 
temps  han  estât  per  sos  predessessors.  E  registrada  la  présent  letra 
en  lo  libre  de  la  nostra  thesauraria,  sia  per  vos  altres  rrestituida  als 
ditz  messatges.  Dada  en  Perpenyan,  dimarts  a  VIII  dies  del  mes  de 
mars  on  l'ayn  MCCCXXVir. 

Deux  autres  lettres  de  la  même  date  qui  suivent  immédiate- 
ment dans  le  registre  II  de  la  Procuration  Iloyale  ont  trait  encore 
à  des  affaires  juives,  conséquences  toujours  de  la  condamnation 
générale  et  des  droits  réservés  par  le  roi  Sancho  sur  l'édilice  et 
l'emplacement  de  la  chapelle  de  Santa  Fé.  La  première  est  une  ré- 

1  Archives  de  la  Bailia.  Registre  II  de  la  Procuracio  Real,  fol.  5t)  v.  La  lettre 
porte  cette  note  d'enrcpislrcment  :  «  Fuit  preseutata  prcseiis  litera  die  lune  XXVllI 
marcii  aunu  Domiui  MCCCXKVllI,  pro  aljama  Judeoruui  de  Maiorica  •• 


b2  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ponse  des  trésoriers  de  Philippe  de  Majorque  à  une  supplique  des 
quatre  délégués  que  nous  avons  vu  figurer  dans  la  lettre  précé- 
dente. Ces  personnages  sollicitaient  la  permission  de  transporter 
une  fabrique  monétaire  «  dans  la  cour  {pati)  ou  dans  le  lieu  où  se 
trouvait  jadis  la  chapelle  de  Santa  Fé  ».  Le  tuteur  du  roi  fait  re- 
pondre que,  si  la  communauté  juive  s'engage  à  payer  les  mêmes 
droits  de  cens  et  d'entrée  qu'elle  paye  pour  l'emplacement  actuel 
de  ladite  fabrique,  et  si  le  lieu  où  se  trouvait  la  chapelle  reste  clos 
de  toutes  parts,  de  telle  sorte  que  personne  ne  puisse  s'en  servir, 
il  consent  à  céder  aux  Juifs  la  cour  et  les  maisons  avoisinantes  au 
prix  qui  sera  fixé  d'après  l'estimation  qui  en  a  été  faite  du  t^mps 
du  roi  Sancho,  à  condition  que  la  communauté  paiera  pour  l'amor- 
tissement de  ladite  cour  une  certaine  somme  de  neuf  en  neuf  ans. 
En  même  temps  Philippe  donne  ordre  à  ses  procureurs  de  faire  à 
la  communauté  juive  de  Majorque  «  une  charte  publique  de 
dette  à  un  an  »  pour  une  somme  de  5,000  livres  qu'elle  avait  prê- 
tée au  roi. 

Remenbransa  sia  als  honrats  e  discrets  en  Michel  Rotlan  e  en  P. 
Roig,  procuradors  en  Maylorches  per  nosire  senj^orlo  Rey,  queusfem 
nos  en  Nicholau  de  Sent  Just,maioi\e  en  P.  Berro,  thesaureres  del  dit 
senyor  Rey.  Fem  vos  saber  que  entre  nos  e  Nabrafim  Malequi,  Nis- 
sach  ben  Aaron,  Nayon  Choen,  En  Juceff  Barqui,  missatges  assi 
trameses  per  Taljama  de  Maylorches,  son  estais  diverses  tractamens 
sobrel  fet  de  la  monedaria  que  entenien  a  ffer  mudar  en  lo  pati  o  en 
lo  loch  on  esser  solia  la  capella  de  Sancta  Fe.  E  fmalment  lo  Consseyl 
ha  fmat  en  aquesta  manera  :  que  si  la  dita  aljama  uol  donar  al 
senyor  Rey  ay[t]ant  de  sens  e  d'intrada  con  hom  trobara  del  loch  on 
ara  es  la  monedaria,  quel  dit  loch  on  solia  esser  la  dita  capella  ro- 
manga  clos  de  totes  partz  enaxi  que  no  sia  a  seruehy  ni  a  us  ni  a 
cmpriu  de  neguna  persona  d'aqui  enant,  e  que  la  dita  aljama  per 
amortizatio  del  dit  pati  pach  alguna  cosa  per  manera  de  foriscapi  de 
VIIII  en  YIIII  ayns  en  aquela  forma  ques  parra  faedor,  perque  si  la 
dita  aljama  uol  consentir  a  aço  procehits  ab  ells  sots  la  forma  d'amont 
dita.  En  allre  manera,  si  fer  no  ho  uol,  fets  nos  ho  assaber  e  nos 
tremetrem  uos  en  a  dir  la  uolenlat  de  mossenyer  En  Phelip  e  del  Gon- 
seyll.  Empero  si  la  dita  aljama  uol  consentir  al  dit  tractameut,  en 
aquest  cas  consentissets  que  lots  los  alberchs  que  son  denant  lo 
loch  on  esser  solia  la  dita  capella  sien  liurats  a  la  dita  aljama,  per 
aquela  estimacio  quel  senyor  Rey  los  ach,  enaxi  que  d'aqui  enant 
los  habitadors  dels  dits  alberchs  exida  alcuna  no  agen  en  lo  dit  car- 
rer. E  con  los  dits  missatges  diguen  quels  alberchs  qui  son  en  la 
partida  denant  lo  loch  on  solia  esser  la  dita  capela  no  poden  esser  a 
nengu  seruehi  del  cayll  eu  la  forma  d'amuut  dita  sensgran  danpuage, 
veyats  vos  altres  si  es  axi  con  eyls  dicn.  E  d'asso  e  de  tôt  l'alls  tra- 


NOTES  ET  DOCUMENTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  53 

metets  nos  en  a  dir  uostre  vigayres  ans  que  res  procecescats  al  dit 
negooi.  Daim  vos  encara  de  part  de  mossenyer  En  Phelip  que  de  les 
cincli  milles  libres  que  la  dita  aljama  ha  prestades  al  senyor  Rey  lus 
fassatz  cartapublica  de  deutea  .1.  any.  Dada  enPerpenyan,  dimartes 
del  mes  de  marts  del  ayn  MCCCXXVII. 

La  seconde  lettre  concerne  le  seul  Abrahim  Malequi,  qui  sut  ob- 
tenir l'autorisation  de  racheter  une  maison  voisine  de  l'ancienne 
chapelle  de  Santa  Fé  qui  lui  avait  appartenu  avant  la  confiscation; 
mais  les  trésoriers  du  roi  ont  la  précaution  d'informer  les  procu- 
reurs de  Majorque  que  la  valeur  de  ladite  maison  étant  jugée  su- 
périeure par  le  conseil  à  celle  de  l'ancienne  estimation,  ils  devront 
eux-mêmes  fixer  le  prix  du  racliat. 

Pro  Abrahim  Malequi,  judeo. 

Als  hourats,  sauis  e  discrets  senyors  En  Michel  Rotlan  e  En  P. 
Roig,  procuradors  del  sen.yor  Rey  en  Maylorches,  de  mi  En  Nicholau 
de  Sen  Just,  thesaurer  major  del  senyor  Rey,  saluts  ab  tota  honor. 
No  contrastant,  senyors,  oo  que  es  contengut  en  vna  letra  queus 
trametem  per  los  messages  de  l'aljama  de  Maylorches  dels  alberchs 
que  son  prop  lo  loch,  on  solia  esser  la  capella  de  Sancta  Fe,  es  aor- 
donat  que  an  Abrahim  Malequi  sia  relut  lo  seu  alberchper  aquel  preu 
que  fo  estimai  e  mes  en  paga  al  senyor  Rey.  Empero  con  sia  estât  dit 
per  alcuns  al  Conseyll  quel  dit  alberch  val  mes  de  la  dita  estimacio, 
asso  sia  a  arbitracio  uostra,  e  si  trobaretz  que  mes  vayla,  lo  dit 
Abrahim  pach  lo  mes  valent.  Datum  en  Perpenyan,  dimartes  a  VIII 
de  marts  MCCCXXVII. 

Il  ne  me  reste  plus  qu'à  faire  connaître  deux  autres  documents 
de  la  même  collection  qui  nous  renseignent  sur  la  condition  du 
Juif  étranger  qu'un  motif  quelconque  amenait  à  élire  domicile  à 
Majorque.  Dans  la  première  pièce,  du  20  mars  1334,  se  trouve  re- 
produite la  supplique  d'un  certain  Joseph  Faquin,  Juif  de  Bar- 
celone, qui,  après  avoir  a  couru  le  monde  »  était  venu  se  fixer  à 
Majorque,  où  il  avait  pris  femme.  Or,  un  an  et  demi  environ 
après  son  établissement  dans  l'ile,  les  secrétaires  de  ValjcDua  vou- 
lurent lui  faire  payer  sa  part  d'une  imposition  de  dix-huit  mille 
livres  dont  la  communauté  avait  été  frappée  huit  ans  auparavant. 
Faquin  proteste  énergiquement  contre  cet  excès  de  pouvoir  «  con- 
traire à  toute  justice  et  raison  »  et  obtient  de  Jacme  III,  dernier 
roi  de  Majorque,  une  lettre  pour  les  procureurs  royaux  qui  seront 
chargés  d'examiner  son  affaire. 

Jacobus  Dei  gratia  rex  Maioricarum,  cornes  Rossilioniset  Ceritanie 


oi  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

ac  domiuus  Montispesullani,  fidelibus  procuraloribus  nostris  in 
Maiorica  Bn.  Jane  et  Bn.  de  Valleviridi,  salutem  et  gratiam.  Supli- 
cationem  nobis  oblatam  pro  parte  Jucceffi  Faquin  oriundi  de  Barchi- 
nona  uobis  niiltimus  presentibus  interclusara,  mandantes  uobis  qua- 
tenusprouideatis  dicto  lucefî  super  petitis  a  nobis  suplicando,  vocatis 
qui  fuerunt  euocandi,  prout  de  jure  vel  consuetudine  videritis  proui- 
dendum.  Datum  in  Castro  de  Turri  propre  EInam  \  tercio  decimo 
Kalendas  aprilis  anno  Domini  M°  CCC°  XXX^  quarto.  Ténor  supli- 
cationis  talis  est  : 

Denant  vos  molt  ait  e  poderos  senyor  en  Jacme  per  la  gracia  de 
Deu  Rey  de  Maj^lorcbes,  etc.  Diu  e  mostra  En  Jucetf  Faquin,  jueu 
naturalde  Barcelona,  que  eyl  es  anat  per  lo  mont  nauegant  e  vsant 
e  per  diuerses  parts,  e  ara  tro  a  vn  ayn  e  mig  prop  passais,  poch  mes 
bo  menj^s,  a  pressa  muler  en  la  ciutat  de  Maylorcha  e  los  secretaris 
dels  jueus  de  Maylorcba  an  taxât  lo  damunt  dit  Juceff  Fequin  que 
déjà  mètre  e  contribuir  certa  quantitat  de  moneda  en  aqueles 
XYIII  milia  libres  que  per  la  dita  aljama  son  degutz,  passât  ha 
VIII  aj'ns  e  mes  ;  lo  quai,  senyor,  es  a  uos  cert  (on  senyor)  con  sia 
contra  tota  justicia  e  contra  tota  ralio  quel  dit  Juceff  Faquin  déjà  res 
mètre  o  contribuir  en  los  deutes,  les  quais  per  la  dita  aljema  son  de- 
guts,  ans-  quel  dit  Juceff,  humil  seruidor  jueu  vostre,  ab  aquela  hu- 
militat  que  pot  [prech]  que  lo  dit  tort  no  li  sia  fet.  Enaxi,  senyor, 
que  sia  merce  vostra  que  lo  honrat  conseyll  vostre  déjà  asso  deter- 
menar  et  conoxer,  enaxi  que  lo  dit  Juceff  no  aja  a  uenir  a  conoxensa 
de  altre  jatge  bo  conoxedor  de  Maylorcha  o  d'altre  loch.  Placia  a 
Deu,  senyor,  que[u]s  deu  (?)  longa  vida  ab  honor  e  salut*. 

L'autre  pièce  est  un  sauf-conduit  {guiaige)  délivré  le  21  février 
1448,  parle  lieutenant  du  procureur  royal  de  Majorque  à  Mardufex 
Racandel,  Juif  de  Tenès,  pour  se  rendre  à  Majorque  et  y  résider. 
Ce  Juif  n'était  pas  à  proprement  parler  un  étranger  ;  il  avait  autre- 
fois [en  temps  pessai)  habité  Majorque  et  demandait  à  pouvoir  y 
élire  de  nouveau  domicile.  On  voit  parles  considérants  de  ce  sauf- 
conduit  que  les  rois  d'Aragon,  depuis  Joan  P'',  furent  amenés,  par 
intérêt,  à  permettre  le  retour  dans  leurs  états  des  Juifs  que  l'into- 
lérancp  do  la  masse  avait  obligés  de  s'expatrier  et  de  s'établir  sur 
la  côte  d'Afrique*. 

'  Probablement  la  Tour-Bas'-Elne. 

'  Il  y  a  ici  une  lacune  dans  le  texte.  Le  mot  ans  indique  que  Jucel'  faisait  valoir 
que  l'amende  avait  été  imposée  à  la  communauté  avant  son  établissement  dans  l'île. 

'  Arcbives  de  \a  Bailiade  Majorque.  Reffislrc  II  de  la  Procuration  Royale,  fol.  10b. 

*  Il  est  intéressant  de  savoir  qu'au  xiv  siècle  (peut-être  aussi  plus  tôt  et  plus 
tard),  les  rois  de  Majorque  toléraient  le  séjour  dans  Pile  de  maures,  libres  (Sarra/tins 
frani-hs)  moyennant  une  certaine  redevance.  Les  registres  de  complabilité  de  la  Pro- 
curation Royale  [lihres  de  daJes  e  rchudes)  mentionnent  très  souvent  des  sommes  per- 
çues pour  Yestada  (séjour)  ou  Vexida  (fortiej  de  Sarra/iins. 


NOTES  ET  DOCUiMEiNTS  SUR  LES  JUIFS  DES  BALÉARES  So 

Guiatge  d'En  Mardufex  Racaadell,  judeu  del  loch  de  Tenes'. 

Als  molt  honorables  tots  e  sengles  bâties,  gênerais  procuradors 
Reyals  e  altres  qualseuol  officiais  Reyals  dins  les  terres  del  molt  ait 
senyor  Rey  constituits,  e  a  tots  altres  patrons  de  qualseuol  fustes 
dels  subdils  del  dit  senyor  Rey,  als  quais  les  présents  preuendran  o 
presentades  los  seran  o  als  loclitinents  de  aquells,  de  part  d'En  An- 
thoni  Sait,  loclitinent  del  honorable  mossenyor  Johan  Alberti,  caua- 
11er,  conceller  e  maiordom  del  dit  molt  ait  senyor  Rey,  e  Regidor  o 
administrador  del  offici  de  la  procuraci-o  Reyal  de  Mallorcha  salutz  e 
honor.  Com  En  Mardutïex  Racandell,  judeu  del  loch  de  Tenes,  en 
temps  pessat  habitant  en  Mallorcha  vulle  e  entena  habitar  e  son  do- 
milici  en  la  dita  ciutat  de  Mallorcha  mudar,  on,  com  segons  lo  guiatge 
e  seguretat  fet  e  atorgat  per  lo  molt  ait  senyor  Rey  Eu  Johan  de  ec- 
cordable  memoria,  confirmât  après  per  lo  senyor  Rey  En  Marti  glo- 
riosament  rregnant  a  tots  e  sengles  e  uniuerses  juheus,  mascles  e 
fembres,  axi  naturals  dels  dits  senyors  com  habitedors  dels  r règnes 
e  terres  dels  serrahins,  e  aquells  encare  qui  ans  e  après  o  en  temps 
de  les  destruccions  de  les  juheries  e  jueus  de  la  senyoria  dels  dits 
senyors  a  les  dites  terres  de  serrahins  se  son  tresportats  os  trens- 
porteran,  contra  voluntat  e  ordinecio  dels  dits  senyors,  e  altres  en- 
care qualseuol  1  juheus  de  qualseuol  condicio  o  estament,  seran  de 
altres  rregnes  e  terres  de  crastians  e  serrahins,,  a  qualseuol  ciutats, 
parts"  e  lochs  de  nostra  senyoria  vinents  per  causa  de  habitar,  mer- 
cadeiar  o  negocis  altres  fer,  de  tots  e  sengles  excessos,  crims,  delictes 
en  qualseuol  manera  greus  e  forts  no  exceptant  ne  aigu,  encare  que 
fos  dels  costumats  per  los  dits  senyors  exceptar  :  en  après  guien  los 
dits  senyors  e  asseguren  los  dits  senyors  los  dits  juheus  en  mar  e 
en  terra  ab  tots  lurs  mercaderies  e  a  ells  comenades  joyes,  moneda, 
aur,  argent  e  altres  qualseuol  bons,  per  mar  e  per  terra  entrant  en 
los  dits  nostres  rregnes,  mercedeiant  e  estant  e  d'aquen  saluament  e 
segura  en  les  dites  terres  de  sarrehins  e  en  qualseuol  parts  retor- 
nants  ab  totes  les  dites  meixadcries  sens  algun  empetxamcnt,  preso, 
violencia,  detensio,  arrest  que  a  ells  ne  a  lurs  bens  en  naguna  ma- 
nera sia  ifet  per  qualseuoll  persones,  segons  que  aquestas  CQses  o 
altres  en  lo  dit  guiatge  e  seguretat  molt  pus  largament  son  conten- 
gudes.  E  lo  quai  guiatge  e  seguretat  lo  molt  victorios  senyor  Rey 
Nalfonso,  ara  beneuenturadament  rregnant,  actenent  lo  profit  e 
utilitat  que  per  raho  de  les  dites  mercaderies  reporten  lo  seu  patri- 
moni  e  regalia,  per  reho  dels  dits  drets  que  paguen  los  juheus  de  les 
dites  mercaderies,  ha  confirmais  ensemps  ab  tots  altres  guiatges  per 
los  Reys  pessats  als  dits  juheus  atorgats  ab  carte  del  dit  senyor 
dade  en  lo  moncstir  de  Sent  Cugat  dez  Valers,  a  XV  de  noembre 


>  Litterarum  ve//ii  procuratoris  anni  MCCCCXXXIIII  usque  ad  MCCCCZVl,  loi. 
153  T". 

*  Peul-èlTc  ports 


se  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

any  MCCGCXVIIII.  Emperamordaço,  de  part  del  senyor  Rey,  requir 
en  subsidi  de  justicia  a  cascun  de  vosaltres  e  de  la  mia  affectuo- 
sament  prech  que  al  dit  Mardufax  Racandell  seruets  e  façats  se- 
ruar  lo  dit  guiatge  e  seguretat  segons  séria  e  ténor  de  aquelles.  En 
testimoni  de  les  quais  coses  he  fêta  fer  la  présent  signade  de  ma 
man  e  ab  lo  segell  del  dit  meu  offici  en  lo  dors  segellade.  Datum 
en  Mallorcba,  a  XXI  de  ffebrer  any  MCCCCXXXXVIII.  Antboni 
Sait,  lochtinent. 

Alfred  Morel-Fatio. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE 

EN  1392 


Nous  avons  déjà  parlé  (Voir  Revue,  III,  145)  du  document  inté- 
ressant publié  par  M.  Andreu  Balaguer  y  Merino,  le  savant  membre 
et  archiviste-bibliothécaire  de  l'Académie  roj-ale  des  Belles- 
Lettres  de  Barcelone,  dans  deux  numéros  de  La  Veu  ciel  Montser- 
rat,  qui  se  publie  à  Vich  (n°'  du  23  juillet  et  du  30  juillet  1881, 
p.  231  et  239).  On  connaît  les  massacres  dont  les  Juifs  d'Espagne 
furent  victimes  en  1391.  La  communauté  juive  de  Barcelone  fut 
attaquée  par  l'émeute  le  samedi  5  août,  une  partie  des  Juifs  fu- 
rent tués  (250  dès  le  premier  jour  de  l'émeute,  à  ce  qu'il  semble  ; 
voir  la  lettre  de  Hasdaï  Crescas  dans  ScJievet  Jehuda,  édit.  Wiener, 
p.  129),  beaucoup  d'autres  furent  obligés  de  se  baptiser.  Le  docu- 
ment publié  par  M.  Andreu  Balaguer  contient  la  liste  nominative 
de  129  Juifs  de  Barcelone  ♦  qui  se  baptisèrent  et,  suivant  un  usage 
général,  adoptèrent  des  noms  chrétiens  à  la  place  de  leurs  noms 
juifs.  La  pièce  est  datée  de  Barcelone,  11  mars  1392.  Elle  contient 
une  procuration  donnée  par  trois  des  Juifs  baptisés,  procurateurs 
des  127  autres  en  vertu  de  plusieurs  actes  publics  dont  le  premier 
était  daté  du  7  décembre  1391,  par  laquelle  procuration  Franciscus 
Cahanerius,  de  Saragosse,  est  chargé  de  poursuivre  la  restitution 
de  tous  les  objets  volés  pendant  le  sac  de  la  juiverie  de  Barce- 
lone et  dont  les  détenteurs  se  trouveraient  dans  le  royaume  d'Ara- 
gon. M.  Balaguer  en  conclut  avec  raison  que  les  pillards  devaient 
être  en  partie  des  étrangers  venus  de  l' Aragon.  Une  pièce  du 
7  mars  1393,  dont  M.  Balaguer  a  donné  un  extrait,  indique  du  reste 
que  cette  recherche  des  objets  volés  fut  infructueuse  :  De  ipsis 
bonis  yiullo  modo  aliquid  potuit  inveniri  seu  recuperari. 

Le  document  publié  par  M.  Balaguer  est  si  utile  pour  l'étude 

•  Les  numéros  1  et  19  sont  idcnliques. 


58  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

des  noms  juifs  que  nous  n'hésitons  pas  à  le  reproduire  ici.  (N°  I.) 
Nous  le  faisons  suivre  d'un  autre  document,  encore  inédit 
(N°  II),  que  nous  devons  à  l'obligeance  de  M.  Balaguer  et  qui  con- 
tient également  une  liste  nominative  de  Juifs  de  Barcelone.  Ce  se- 
cond document  est  de  1383  et  est  tiré  des  archives  tlu  notaire  An- 
tonio Bellver,  de  Barcelone  '. 

N°  I. 

«  Noverint  universi  :  Quod  nos 

1.  Petrus  daragay  olÙ7i  Bonanasch  astruch, 

2.  Raymundus  de  rosanis  olim  Caravida  çaporta, 

3.  Johannes  ses  escales  olhn  Vinant  coffeu, 

cives  Barchinone,  procuratores  ad  infrescripta  et  quamplura  alia 
légitime  constituti  à 

4.  Petro  pujol,  magistro  in  medicina  olim  Mestre  noch, 

5.  Laurencio  Sent  climent  olùn  Maçot  evangena, 

6.  Bernardo  dezcarner  olim  Vidal, 

1.  Jaufredo  se*s  escales  olim  Abamari  rossell, 

8.  Guillermo  mulet  olim  Jafiel  ferrer, 

9.  Nicholao  conomina  oli7n  Astruch  melsia, 

10.  Leonardo  ferrer  oliiïi  Bonjuha  argent, 

11.  Raymundo  de  gualbis  olitn  Suclam  astruch, 

12.  Bernardo  çaclosa  olùn  Astruch  çatorra, 

13.  Petro  de  casa  sagia  olim  Vidal  de  la  torra, 

14.  Bartholomeo  despont  oli7n  Mosse  bonofeu, 

15.  Francisco  pedralbes  olim  Mosse  falco, 

16.  Ferrario  gracia  de  gualbis  olim  Isaach  bonsenyor, 

n.  Raymundo  de  villafrancha  olim  Mestre  bendit  deu  lo 
guart, 

18.  Lodovico  buçot  o^jm  Vidal  isaach, 

19.  Raymundo  de  rosanis  olim  Caravida  çaporta, 

20.  Berengario  dezcortey  olim  Jucefï"des  falco, 

21.  Simon  savall  olim  Samuel  abraam, 

22.  Johanne  ginero/im  Bonjuha  gracia, 

23.  Petro  vives  olim  Astruch  de  ripoll, 

24.  Bartholomeo  de  casasagia  olim  Bonjuha  isaach  dalell, 

25.  Bernardo  gualter  olim  Bonjuha  mosse  dalell, 
20.  Bartholomeo  sait  olim,  Barzalayt  michael, 

'  M.  Balaguer  a  eu  la  bonté  de  rectifier  pour  nous  quelques  fautes  d'impression  de 
La  Yfu  (tel  Moniserral.  —  Les  numéros  d'ordre  qui,  dans  nos  deux  dociinicuts,  pré- 
cèdent les  noms,  ont  été  ajoutés  par  nous. 


LISTE  NO^IINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  :;'.! 

2T.  Jacobo  baro  oUm  Astruch  talco, 

28.  Johanne  bertran  olîm  Samuel  benvenist, 

29.  Lodovico  de  prades  olim  Vidal  de  prades, 

30.  Guillermo  vidai  puiol  ollm  Isaacli  de  piera, 

31.  Bernardo  casais  olhn  Juceff  abraam, 

32.  Bertrando  çabater  oli7n  Abraam  maliir, 

33.  Berengario  badorch  o/im  Bonjulia  badorcli, 

34.  Micliael  lobet  olim  Davi  de  bellcayre, 

35.  Johanne  roure  olim  Samuel  des  forn, 

36.  Bernardo  de  muntalt  olùn  Juceflf  jaflel, 

37.  Petro  gibert  de  campredon  olim  Salamo  de  campredon, 

38.  Guillermo  valles  olwi  Isaacli  bonafos, 

39.  Dominico  puiol  olim  Vidal  maymo, 

40.  Petro  ardit  olim  Isaacli  abraam  ardit, 

41.  Johanne  ferrer  oliin  Astruch  ravalla, 

42.  Francisco  joannes  oliin  Bonjuha  anatzanell, 

43.  Johanne  dezval  olim  Juceff  evangena, 

44.  Johanne  massana  olim  Salamo  maçaua, 

45.  Bernardo  cisa  olim  Abraam  juceff, 

46.  Marcho  desprat  niaior  olbn  Rovem  bondia, 
41.  Guillermo  oliverii  olltn  Astruch  cap, 

48.  Bernardo  arnau  olim  Lobell  de  manresa, 

49.  Gabriele  de  muntpaho  olim  Abraam  vidai  de  muntso, 

50.  Francisco  colomerii  olim  Samuel  ananell, 

51.  Johanne  ferrarii  olim  Abraam  alfeu, 

52.  Petro  bofiy  oli7n  Isaach  maymo  galipapa, 

53.  Anthonio  buçot  oli7n  Asquio  de  milan, 

54.  Guillermo  ferrer  olim  Astruch  de  milan, 

55.  Gabriele  des  sayol  olim  Bonsenj-or  mercadell, 

56.  Bernardo  dezpont  olim  Jafuda  vinag, 

57.  Petro  jovent  olim  Isaach  de  bron, 

58.  Poncio  de  tahust  olim  Jacobo  coffeu  sartoro, 

59.  Guillermo  salelles  olim  Salamo  morcat, 

60.  Petro  martini  olim  Juceff  burgales, 

61.  Bernardo  de  terra  olim  Jafuda  navarro, 

62.  Rafaele  desqiier  olùn  Bonafeu  fabib, 

03.  Johanne  de  gualbis  oli7n  Lobell  bonjuha  gracia, 

64.  Sisto  olim  Hayem  gomer, 

65.  Raymundo  de  parets  olim  Salomo  botarell, 

66.  Bernardo  costa  olim  Bonjuha  maliir, 

67.  Johanne  de  cruilles  oli>it  Vives  astruch, 

68.  Johanne  isarch  olim  Issaach  senton  mahir, 

69.  Francisco  Vilamari  olim  Issaach  badorch, 


60  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

TO.  Berengario  ferrarii  oZ^m  Juceff  ferrer, 

•71.  Ludovico  guixar  olim  Salamo  adret, 

'72.  Raj-mundo  boneti  olim  Mosse  torarfF, 

•73.  Petro  de  muntros  olim  Isaach  jasquell, 

74.  Guillermo  çatorra  olim  Abraam  salamo. 

•75.  Margarita  figuera  oliin  Bonanada  uxor  Astruch  biona, 

76.  Galcerando  castello  o^w  Vidal  sutlam, 

Tl.  Ferrario  gracia  alias  de  gualbis, 

"78.  Raymundo  ballistarii  olim  Samuel  alietzer, 

79.  Arnaldo  soler  olim  Vidal  mercadell, 

80.  Petro  de  cigiis  olim  Vidal  senton  xantxell, 

81.  Ludovico  de  gualbis  oli7n  Davi  jaques, 

82.  Johanne  de  Valencia  olim  Salamo  de  Valencia, 

83.  Petro  vidai  olim  Juceff  çaporta, 

84.  Clara  olim  Astruga  uxor  den  biona  de  pura, 

85.  Raymundo  ballistarii  olim  Abraam  des  forn, 

86.  Jacobo  de  podio  olim  Salamo  toraif, 

87.  Petro  bartliolomei  olim  Abraam  natzanell, 

88.  Jolianne  de  Vallesicca  olim  Ilaym  bavent  riscb, 

89.  Jacobo  lonch  olim  Salamo  lobell  gracia, 

90.  Petro  buçot  olim  Senton  caro, 

91.  Petro  merles  olim  JucefFdavi, 

92.  Petro  ça  rocha  olim  Abraam  rugat, 

93.  Jacobo  augusti  oli^n  Samuel  abraam  magister  scola- 

norum  ' , 

94.  Johanne  corro  olim  Isaach  çaragoça, 

95.  Salvatore  de  vallo  olim  Salamo  salvat, 

96.  Petro  ballester  olim  Davi  burgales, 

97.  Bertrando  lança  olim  JucefF  de  pontardia, 

98.  Bernardo  coll  olim  Lobell  baro, 

99.  Jacobo  mediona  olim  Samuel  bellshom, 

100.  Raymundo  ballester  olim  Isaach  mahir, 

101.  Francisco  ripoU  o^im  Juceff  alborga, 

102.  Francisco  pujades  olim  Samuel  sadoch, 

103.  Bernardo  calaf  olim  Abraam  nogueres, 

104.  Johanni  gracia  olim  Mosse  roven, 

105.  Francisco  oliver  olim  Astruch  sescola, 

106.  Guillermo  mascaro  olim  Mahir  bonjuha, 

107.  Francisco  vilaplana  olim  Michel  barzalay, 

108.  Francisco  bertran  olim  Natan  adret, 

109.  Phllipo  de  ferreres  olim  Astruch  de  Teraçona, 

'  Le  mol  n'est  pas  dans  Ducango.  Les  écoliers  s'appellent  escolans  en  catalan. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  Cl 

110.  Michael  ariembau  olim  Isaac  mosse, 

111.  Raymundo  de  querio  olim  Astruch  fabib, 

112.  Francisco  lodrigo  olim  Abraam  alfamem, 

113.  Johanne  bertrandi  oZim  Bonastruch  alcaravi, 

114.  Guillermo  çagarriga  oU7n  Salamo  fabib, 

115.  Petro  guardiola  olim  Mosse  de  ganges, 

116.  Petro  bertrandi  oli7n  Bonjuha  bennevist, 
in.  Gabriele  de  prades  olim  JucefF  de  prades, 

118.  Petro  terraça  olim  Isaacli  mavmo, 

119.  Gabriele  boni  olim  Mosse  cabrit, 

120.  Francisco  de  podio  olim  Davi  cortés, 

121.  Raymundo  saval  o^mz  Cresques  affunant, 

122.  Arnaldo  de  rosanes  olim  Mestre  abraam  coffe, 

123.  Bernardo  lunes  oZim  Abraam  adret, 

124.  Ferra rio  sayol  pujades  olim  Yidal  abravini, 

125.  Floynii  bononati  oli7n  Isaach  de  ganges, 

126.  Francisco  guicli  olim  Salamo  asdrach;, 

127.  Berengario  oliverii  olim  Juceff  ferrer, 

128.  Johanne  de  fontcuberta  oli7n  Juceff  ferrer, 

129.  Arnaldo  ferrarîi  oliin  Senton  del  de  bellcayre, 

130.  Simone  pétri  oli77i  Mahir  salamo, 

omnibus  olim  judeis  Barchinone  nunc  yero  ad  fidem  orthodoxam 
conversis,  etc. . .  » 


N°  IL 

Ce  document,  daté  du  6  juillet  1383,  contient  une  vente  et  créa- 
tion de  cens  annuel  de  1,000  sous,  autorisée  par  la  Aljama  (com- 
munauté juive)  de  Barcelone  en  faveur  de  Vénérable  Juan  de 
Vall,  de  la  maison  du  roi  d'Aragon,  citoyen  de  Barcelone,  flls  de 
défunt  Juan  de  Vall,  également  citoyen  de  cette  ville,  en  échange 
de  14.200  sous,  monnaie  de  Barcelone,  prêtés  à  l'Aljama  pour  les 
payer  à  «  Petro  Cabanyes,  juponerio  et  sartorio  civi.  Barchinone,  » 
en  vertu  d'une  autre  écriture  de  vente  de  cens,  datée  du  17  janvier 
1381  et  faite  par  devant  Antonio  Saploma,  notaire  public  de  Barce- 
lone. L'Aljama  avait  de  grands  besoins  d'argent,  car  le  10  sep- 
tembre 1383,  le  même  Bonjuha  assanell  qui  (igure  dans  l'acte  du 
6  juillet  1383,  agissant  au  nom  de  la  communauté,  vendit  encore, 
par-devant  le  même  notaire  Bellver,  au  môme  Juan  de  Vall,  avec 
l'autorisation  de  l'infant  Don  Juan,  fils  du  Roi  et  gouverneur  gé- 
néral du  royaume,  un  cens  annuel  de  400  sous,  en  échange  d'une 
somme  de  15.600  sous,  monnaie  de  Barcelone.  Ces  besoins  d'argent 


62  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

sont  expliqués  par  le  passage  suivant  de  cette  pièce  :  «  Attendentes 
dictam  aljama  et  eius  judeos  singulares  ipsius  aljame  teneri  et 
obligatos  fore  tam  Curie  Inclite  ac  magnifici  Domini  Infantis  Jo- 
liannis  serenissimi  domini  Régis  primogeniti  quam  nonnullis  per- 
sonis  christianis  videlicet  et  judeis  et  diversis  et  magnis  peccunie 
sumrais  diversis  respectis  atque  causis.  Attendentes  etiam  diverses 
modos  fuisse  constitutos  unde  dictas  quantitates  exolvi  possent 
comodius  creditoribus  ipsius  aljame  et  non  invenissent  tam  utile 
quam  per  viam  seu  modum  venditionis  censualis  mortui  infra- 
scripto.  Idcirco,  etc.  » 
Voici  maintenant  la  pièce  du  6  juillet  1383  : 

«  In  nomine  Domini.  Noverint  universi  :  Quodego  Bonjuhà  assa- 
nell,  judeus  Barcliinone,  sindicus,  actor  et  procurator  ad  infra- 
scripta  specialiter  et  legitimum  constitutus  ab  Aljame  judeorum 
Civitatis  Barchinone  et  a  secretariis  et  a  triginta  de  consilio  ac 
aliis  judeis  singularibus  eiusdem  aljame  infrascriptis  inter  alios 
nomine  ipsius  aljame  et  nomine  etiam  eorum  proprio  videlicet  a  : 


131.  Bonjuha  gracia, 

132.  Roven  bonafeu, 

133.  et  Struch  Abenefeia, 

secr( 

?tariis  anno  presenti  aljame 

jamdicte  et  etiam  ; 

a 

134. 

Massoto  avengena 

154. 

Bissaltell  gracia 

135. 

Salamono  scaleta 

155. 

Samuele  desforn 

136. 

Bonsenyor  gracia 

156. 

Jafïuda  lobell  cresques 

137. 

Atzay  cresques 

157. 

Salamone  bione  bondie 

138. 

Salamono  cresques 

158. 

Salamone  obrador 

139. 

Salamono  gracia 

159. 

Astrugo  mosse  mayir 

140. 

Samuele  bennevist 

160. 

Jacob  de  milan 

141. 

Issacbo  bisbal 

161. 

Issach  bonafos 

142. 

Abamari  rossel 

162. 

Juceffo  gabbai 

143. 

Lobell  massana 

163. 

Abraham  ardit 

144. 

Salamono  azdra 

164. 

Astrugo  çatorra 

145. 

Davin  de  bellcayre 

165. 

Juceffo  bolaix 

146. 

Astruc  bonafos  fisico 

166. 

Bonjuho  issach  dalell 

147. 

Vitale  scapat 

167. 

Perfetto  rosselli 

148. 

Vitale  ferrarii 

168. 

Samuele  rosselli 

149. 

Abraham  adret 

169. 

Juceffo  domasch 

150. 

Vitale  de  ripoll 

170. 

Astrugo  de  ripoll 

151. 

Samuele  bonafos 

171. 

Juceffo  jaliell 

152. 

Salamono  brunelli 

172. 

Juceffo  mosse 

153. 

Samuele  sai)orta 

173. 

Caravida  raporta 

LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392 


(13 


174.  Satell  issach 

175.  Bonjuha  badorcli 

176.  Salamone  fabib 

177.  Bonsenyor  mercader 

178.  Astrugo  jucefFlevi 

179.  Astrugo  vides 

180.  Senton  desforn 

181.  JucefFo  salamo  falclio 

182.  Abraham  tarros 

183.  Davi  issach  cap  de  pebre 

184.  Astrugo  massana 


185.  Jacob  argenter 

186.  Bonastruch  samuel 

187.  Vitale  sanon 

188.  Senton  de  bellcayre 

189.  Vitale  de  prades 

190.  Juceffo  coray 

191.  Abraham  massies 

192.  Juceffo  abrahe  ferrer 

193.  Bonjuha  samuel  bolaix 

194.  Janya  xaham 

195.  et  Senton  abraham  mayr 


De  quo  quidem  sindicatu,  procuratione  et  actoria  apparet  per 
publicum  instrumentum  inde  factum  per  Anthonium  Bellver  auc- 
ritate  Regia  notarium  publicum  Barchinone  infrascriptum  sexta 
die  Julii  anno  a  nativitate  Domini  ultimo  scripto  millesimo  trecen- 
tesimo  octuagesimo  tertio  in  quo  quidem  procurationis,  sindicatus 
et  actorie  instrumento  auctoritas  et  decretum  venerabilis  Galce- 
randi  sestrada,  Bajuli  Barchinone  pro  domino  Rege  intervene- 
runt,  etc.  » 


Nous  allons  essayer  de  donner  quelques  explications  sur  les 
noms  contenus  dans  ces  deux  pièces  et  d'en  identifier  un  certain 
nombre  avec  les  noms  juifs  déjà  connus.  M.  Ad.  Neubauer,  M.  le 
docteur  Steinschneider  et  M.  Adreu  Balaguer  nous  ont  fourni  sur 
ce  sujet  des  informations  pour  lesquelles  nous  les  prions  d'agréer 
tous  nos  remerclments. 

Ce  travail  d'identification  est  rendu  plus  facile  par  cette  circons- 
tance qu'un  certain  nombre  de  noms  se  retrouvent  dans  les  deux 
pièces  que  nous  publions.  (Comparez  n°^  131  et  22  ;  134  et  5  ;  139 
et  89  ;  140  et  28;  142  et  7  ;  144  et  126  ;  145  et  34  ;  149  et  123  ;  155 
et  35  ;  161  et  38  ;  163  et  30  ;  164  et  12  ;  166  et  24  ;  170  et  23  ;  171  et 
36;  173  et  2  et  19;  175  et  33  ;  176  et  114  ;  177  et  55;  181  et  20; 
188  et  129  ;  189  et  29  ;  192  et  127,  128  ;  195  et  32.) 

On  verra  que  ce  travail  aura  pour  résultat  de  fixer  définitivement 
la  prononciation  du  nom  d'un  certain  nombre  d'auteurs  célèbres 
dans  la  littérature  juive  et  dont  les  noms  n'ont  pas  été  encore  lus 
exactement. 

Cette  étude  a  surtout  un  grand  intérêt  parce  qu'elle  s'applique 
auxJuifs  de  Barcelone.  C'est  une  des  villes  d'Espagne  qui  a  pro- 
duit, avec  Gérone,  sa  voisine,  le  plus  de  savants  et  d'écrivains 
juifs.  Déjà  dès  la  naissance  de  la  science  juive  en  Espagne,  Barce- 


64  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

lone  compte  un  rabbin  savant,  Isaac  b.  Reuben,  de  la  célèbre  gé- 
nération des  cinq  Isaac.  La  prospérité  des  écoles  de  cette  ville  est 
attestée  par  cette  parole  d'Isaac  b.  Schéschet  '  :  r^aibitnn  «n^nx 
rT':3  !:">sriM  «  l'air  qu'on  respire  à  Barcelone  rend  intelligent  )j. 
Nous  donnons  ici  une  liste  des  savants  ou  autres  hommes  célèbres 
de  Barcelone,  en  avertissant  que  nous  n'avons  pas  la  prétention 
de  la  faire  complète  - . 

Abba    Mari,    fils   de   Joseph  ibn    Caspi   (Catal.    Leipzig, 

p.  303  e). 
Abraham  Abulafia,  fin  xiii"  s.  {Ozar  NeJvniad,  II,  231). 
Abraham  et  Barchilon,  1328  (Amador,  Historia,  II,  60). 
Abraham  Cohen,  vers  1540  (Wolf,  I,  n°  100). 
Abraham  b.  Hasdaï,  1235/40  [Catal.  lodl.  p.  673). 
Abraham  b.  Juda,  vers  1253  (Wolf,  I,  81  ;   comp.  pour  la 

date,  Ghirondi,  p.  24  et  p.  26). 
Abraham  b.  Samuel  Hallévi  b.  Hasdaï,  1232  [Kobeç  Tes- 

cJmbot  ha-Rambam,  édit.  Leipzig,  III,  p.  6  et  7). 
Abraham  b.  Iliyya  Albargeloni,  mort  1135  ou  1136? 
Aron  Halévi,  mort  1293. 

Rab  'jnb-'S'-in  (?),  xvi«  siècle  {Koré  Mdd07'0t,  f°  33  a). 
Benjamin  Schéschet,  Naci,  vers  1160  (Benj.  Tud.,  init.). 
Bonafos  Vidal,  1305  [Rabb.  fr.,  index). 
Bonastruc  de  Barcelone  (Consult.  Isaac  b.  Sch.,  n°  7). 
Bonirac  (Bonisac?)  Salomon  (Wolf,  III,  371  &  et  460). 
Ilasdaï  Grescas,  1391. 

Isaac,  poëte,  comm.  xiii^  s.  (Harizi,  ch.  46). 
Isaac  'jib'^itnn,  xvi°  siècle  [ScMlsch.,  P  64  a;  peut-être  le 

môme  que  R.  Bargilon,  plus  haut). 
Isaac  b.  Reuben,  né  1043. 
Isaac -b.  Schéschet,  1391,  a  dû  résider  à  Barcelone,  où  il 

aura  été    élève   de  Nissim  Gerondi.  D'après  M.  Stein- 

schneider,  il  y  aurait  eu  un  autre  ':j"3"'n  de  Barcelone 

{Ozar  Nehni.,  II,  235). 
Jacob  et  ses  fils,  comm.  xiii°  s.  (Ilarizi,  ch.  46). 
Jacob  b.  Isaac  Alcorsono,  écrit  à  Barcelone  en  1378  {Revue, 

III,  139). 
Jacob  b.  Josef  Kabrut  [Jeioish  Literat.,  p.  184). 


'  Consultations,  n"  369  ;  comp.  Baha  Batra,  1158  h. 

*  Dans  ce  qui  suit,  nous  appelons  Catal.  Leyde,  catal.  Munich,  catal.  Paris,  etc., 
les  catalogues  des  manuscrits  hébreux  de  Leyde,  de  Munich,  de  Paris,  etc.  Catal. 
hodl.  désigne  le  catalogue  des  livres  hébr.  imprimés  de  la  bibliothèque  bodléiennc,  par 
M,  SteinschneidcT. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1302  (  ;; 

Jacob  b.  Moïse  ibn  Acsaï,  1298  (Schalschélet,  éd.  Venise, 

Johanan  (Wolf,  I,  III,  724)  ? 

Jona  b.  Abraham  Gerondi,  a  résidé  à  Barcelone;  mort  12<j3. 

Joseph  de  Barcelone  (Castro,  Bibliot.,  p.  623). 

Josef  b.  Aknin  b.  Juda  b.  Josef  Jacob  le  dayyan  sefardi  Bar- 

celoni  (Mebo  haitalmud,  Breslau,  1871). 
Josef  ibn  Caspi  (vers  1300;  CataL  Leipzig,  p.  203  p;  p.  324^. 
Josef  Ilayyat  (Schalschélet,  édit.  Venise,  p.  65«]. 
Joseph  ibn  Yahya,  élève  de  Salomon  b.  Adret  {Schalschélet , 

édit.,  Venise,  f"  59  a). 
Josef  ibn  Zabara  nni<nT,  vers  fin  xii°  siècle  (Ca^«^.  bodl., 

p.  1521).  M.  Saige  a  un  sceau  appartenant,  si  je  ne  me 

trompe,  à  un  Josef  b.  Juda  j-i-in^t.  La  lecture  de  Vrilcf 

est  difficile,  cette  lettre   ayant  une  forme  archaïque  qui 

ressemble  à  celles  des  Iscrizionl,  de  M.  Ascoli,  planche  II. 

On  connaît  aussi  un  Juda  Zabara,   du  xiii''  siècle  {Cat. 

bodl.  s.  V.  Jelmda  Sahara),  et  qui  pourrait  être  le  fils  de 

notre  Josef.  Voir  en  outre,  Salomon  b.   Adret,  I,  415; 

Rabh.  fr.,  p.  715  ;  H.  B.,  VIII,  89. 
Juda  b.  Astruc,    sous   Jayme   1°''  d'Aragon    {Hebr.  UibL 

XII,  59). 
Juda  b.  Barzillaï,  vers  1130. 

Juda  h.  Isaac,  médecin,  comm.  xiii^  s.  (Harizi,  ch.  46). 
Juda  b.  Salomon,  fin  xiii"  s.  (Catal.  Paris,  n''  985  ;  Ozar 

Nehmacl,  II,  121.  233/. 
Makir,  comm.  xiii°  s.  (Harizi,  ch.  46). 
Moïse  b.  Nahman,  de  Gérone,  a  disputé  à  Barcelone  contre 

PaulusChristiani,  en  1263. 
Moïse  de  Narbonne,  a  écrit  à  Barcelone  en  1349. 
Mordekai,  vers  1305  {Rabb.  fr.,  index). 
Mordekai  Rossello  (Catal.  Munich,  n°  49  et  Ozar  Nclua., 

II,  236). 
Nissim  b.  Reuben  Gerondi,  a  enseigné  à  Barc.,  mort  après 

1374. 
Salomon  b.  Abraham  b.  Adret,  et  ses  fils,  1.305. 
Samuel  Galil  {Minh.  Ken.  :  Rabb.  fr.,  index). 
Samuel  Ilallévi,  Naci,  comm.xiii*'  s.  (Harizi,  ch.  46). 
Samuel  ou  Salomon  b.  Abraham  b.  Ilasdaï,  vers  1160  (BiMij. 

Tud.,  inil.  ;  Graetz,  VI,  1'°  éd.,  p.  230^. 
Sealtiel,  vers  1160  (Benj.  Tud.,  inii.). 
Sealtiel,  comm.  xiii*'  s.  (Harizi,  ch.  46). 
Schéschet,  comm.  xni«  s.  (Harizi,  ch.  46). 

T.  IV.  5 


G6  REVUK  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Scliéscliet  b.  Beiiveniste,  le  Naci,  mort  vers  1203  [Hebr. 

BiU.  XII,  p.  106). 
Scliéscliet  b.  Isaac  Gerondi,  vers  1320  (Benj.  Tiid.,  édit. 

Asher,  II,  p.  5). 
Senitob  ibn  Gaon,  de  Soria,  élève  de  Salomon  B.  Adret 

[Catal.  I)odl.,T^.  2523). 
Semtob  b.  Isaac,  de  Tortose,  et  son  maître  Isaac  b.  Meschul- 

lam,  à  Barc.  en  1284  {Catal.  liodl.,  p.  2523). 
Simon  Duran,  quitte  Barcelone  en  1391. 
Zag  (Azzachus,  =  Isaac),  médecin  du  roi  d'Aragon,  1220 

(Graetz,  VI,  2°  édit  ,  p.  375). 
Zerabya  b.  Isaac  b.  Sealtiel  Hên  {Cat.  hodl.  p.  2585  :   Oza)" 

Nehmad,  II,  229  ;  He?r/\  Bibl.,  X,  42,  XI,  42;  Cf.  ibid., 

II,  99;  IV,  125). 

Dans  cette  liste  nous  avons  omis  à  dessein  la  plupart  des  noms 
de  Barcelone  qui  se  trouvent  1°  dans  le  Minhat  Kenaot  ;  2°  dans 
les  consultations  de  Salomon  b.  Adret,  n°  415  et  ss.  ;  3'»  dans 
Benjamin  de  Tudèle,  édit.  Asher,  II,  p.  4  à  6  ;  4°  ceux  de  la  fa- 
mille des  Gracia  qu'on  trouvera  plus  loin  ;  5°  ceux  des  consulta- 
tions d'Isaac  b.  Scli.,  etc. 

Voici  maintenant  nos  notes  sur  les  noms  compris  dans  nos 
deux  documents  '  : 

Ahamari  (n»  ^j.  Nom  bien  connu  et  rendu  célèbre  par  Abba- 
mari  ben  Moïse  (Don  Astruc),  de  Lunel,  auteur  du  recueil  de 
lettres  Minhat  Kenaot,  relatives  à  la  querelle  des  maïmonistes 
(Voir  Rabbins  français,  p.  G47  et  index).  On  sait  quel  rôle  impor- 
tant la  communauté  juive  de  Barcelone  et  son  rabbin  en  chef,  Sa- 
lomon b.  Abraham  b.  Adret,  jouèrent  dans  cette  querelle,  qui 
se  termina  lors  de  l'expulsion  des  Juifs  de  France  en  1306. 

Abenefeia  (n°  133).  Ce  nom  est  sans  doute  de  la  même  famille 
que  celui  d'Abulafia.  Dans  les  Abné  Ziccaron^  ce  dernier  nom  est 
souvent  écrit  ï-T'-^orbinN,  avec  deux  yod,  ce  qui  donnerait  la  pro- 
nonciation Abulafiyya.  Dans  Hebr.  Blbliogr.,  XIV, 96,  Salomon  b. 
Isaac  ^t>v.  Comp.  Wolf,  III,  n«  39,  Abenephi,  etn°220. 

Ahravini  (n"  124).  Ce  nom  pourrait  servir,  s'il  en  était  besoin,  à 
fixer  la  i)rononciation  du  nom  de  la  célèbre  famille  des  !5N33inN. 


•  l'our  les  noms  géographiques,  nous  nous  sommes  servi  du  Diccionario  de  Pas- 
cual  Madoz. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  67 

Âffunant  (n°  121].  Nous  n'avons  pas  pu  identifier  ce  nom. 

Adret  (n°^  71,  108,  123).  On  a  enfin  la  vraie  prononciation  du 
nom  du  célèbre  rabbin  de  Barcelone,  Salomon  b.  Adret,  miwS. 
M.  Steinschneider  a  été  bien  près  de  la  vérité  lorsque,  dans  '  son 
Catalogue  de  la  Bodléienne  (p.  2269),  il  orthographiait  ::'^l.nN,  sui- 
vant E^néh  ha-dakha,  édit.  Letteris,  p.  127.  Le  Salamo  Adret  de 
notre  liste  (n"  71)  ne  peut  pas  être  le  Salomon  b.  A.  dont  nous  ve- 
nons déparier  et  qui  est  mort  avant  1330.  Ce  dernier  paraît  avoir 
eu  au  moins  trois  fils  :  Isaac,  qui  a  signé  la  lettre  qui  se  trouve 
dans  les  consultations  de  son  père,  I,  n°  415;  Juda  [Koré  had~ 
dorof,  éd.  Casse),  p.  22a);  Nastruc  Salomon,  dans  Jescliurwi , 
VIII,  p.  157  et  159.  Sur  un  Abrahaiii  b.  Salomon  b.  Adret,  voir 
Ca(al.bodL,i).2'iQ9. 

AWorga  (n°  101  >.  Le  Koï'é  Ttaddorot  (édit.  Cassel,  p.  28&)  nomme 
un  Isaac  J-T:i-na-'bN  (Aliborga),  correspondant  de  Josef  Colon, 
xv^  siècle. 

Alcaravi{n°\V^].  Serait-ce  le  nom  de  ■'inpbN  (Abraham  Alca- 
ravi)  dans  Simon  Duran,  I,  97? 

Alfamem  (n°  112).  Peut-être  "^T^nisbN,  dans  Simon  Duran,  IV,  1. 

Alfeu{\\°  51).  Probablement  Ilall'en.  Ce  dernier  nom  peut  pro- 
venir de  l'hébreu  liai  fan,  ou  de  l'arabe  "[isbn  ou  lisbri,  Halfon, 
Kalfon,  nom  déjà  porté  par  un  des  plus  anciens  poètes  juifs  de 
l'Espagne  (Harizi,  chap.  3  et  18).  Un  Abu  Saïd  Halfon  Ilalévy,  à 
Damiette,  du  temps  de  Juda  llalévi  (v.  1141);  Saadia  ibn  licb^, 
dans  Yahïiin  uboaz  de  Sémali  Duran,  I,  n°65  ;  Béni  Alton,  dans 
Amador,  Hisloria,  I,  399.  Comp.  Catal.  hodl.  p.  697  (Abraham 
Kalfon)  et  p.  835,  Chalfon ;  Catal.  mss,  hébr.  Berlin,  Chalfon  b. 
David  b.  Abr.  et  Saadia  b.  Yahyia  b.  Halfon.  V03'.  aussi  Ghirondi, 
p.  41 . 

Alietzer  {\\°  l'è).WL\ézQY]  remarquez  la  prononciation  /:r  pour 
l'hébreu  t. 

Anaizanell  (n"  42),  Natzanell  [\V'  87).  C'est  le  nom  de  Netanel  ; 
remarquez  la  transcription  de  n  par  tz. 

Ardit  (n«  40).  Ce  nom  (Ardit,  Arditi)  est  encore  très  répandu 
aujourd'hui  pai'mi  les  Juifs  d'Orient.  Voir,  par  exemple,  Isaac 
Ardit,  auteur  d'un  livre  imprimé  à  Salonique  en  1823,  Hebr.  BibL, 
VII,  24.  Voyez  Abraham  Ardit  et  Efraïm  Ardit,  dans  ScJtem  hag- 
■  yedolim  de  Benjacob,  2°  partie,  au  mot  û-'-idn  ï-tu)":.  Nous  ne  sa- 
vons quels  rapports  il  y  a  entre  ce  nom  d'Ardit  et  celui  d'Ardot 
ai'TiN,  qui  est  très  répandu  dans  la  littérature  juive. 


68  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Argent  (n°  10).  Comparez  Revue,  I,  p.  65,  Marc-Dargent  ;  Comp. 
aussi  le  mot  suivant. 

Argenter  (n°  185).  Pourrait  bien  être  la  traduction  du  nom  de 
Caspi  ■'E03  (p.éx.  Josef  ibn  Caspi). 

Asdrach  (n°  126),  Azclra  (n«  144).  Serait-ce  le  nom  d'Ezra?  Il 
n"est  pas  impossible  que  ce  nom  soit  parent  de  celui  d'Astruc. 
Voy.  ff.  B.,  IV,  124. 

Asqiào  (n°  53).  Peut-être  Hiskiyya  (Steinschneider). 

Astruch  (n°'  1,  9,  11,  etc.),  Astriig  (n°  159).  Nom  très  répandu. 
Voir,  par  exemple,  l'index  des  Rabbins  fr.,  celui  de  Ssiige,Les 
Juifs  du  Languedoc.  Le  nom  vient  d'Aster,  astre  ;  il  est  peut- 
être  la  traduction  de  Gad;  H.  B.,  V,  47;  Ghirondi,  p.  66. 

Ast^mga  (n°  84).  Nom  de  femme.  Voir  les  mêmes  index. 

Atzai  (\\°  137).  Nous  supposons  que  c'est  le  nom  de  Hasdaï. 
Nous  aurions  ainsi  le  nom  du  célèbre  rabbin  Hasdaï  Crescas,  qui  a 
sûrement  demeuré  à  Barcelone  (Consultât.  Isaac  b.  Schéschet, 
n"  376)  et  qui  s'y  trouvait  peut-être  à  l'époque  du  massacre  de 
1391,  puisque  son  fils  fut  tué  dans  ce  massacre.  S'il  était  identique 
avec  le  Atzai  Cresques  de  notre  n°  137,  il  faudrait  en  conclure  qu'il 
se  trouva  parmi  ceux  qui  furent  obligés  de  se  faire  baptiser.  Après 
l'émeute,  il  se  serait  enfui  à  Saragosse  ;  c'est  de  là  qu'il  adressa 
aux  Juifs  d'Avignon  sa  lettre  sur  les  persécutions  de  1391  dont 
nous  avons  parlé  plus  haut.  Il  faut  pourtant  remarquer  que  cette 
lettre  est  datée  de  Saragosse  le  19  octobre  1391,  tandis  que  notre 
document  est  daté  de  Barcelone  1 1  mars  1392.  En  cas  d'identité, 
il  faudrait  supposer  que  Hasdaï  serait  revenu  de  Saragosse  à  Bar- 
celone ou  que  les  Juifs  dont  les  noms  figurent  sur  notre  pièce  et 
qui  avaient  donné  procuration  à  trois  d'entre  eux  pouvaient  ne 
plus  demeurer  tous  à  Barcelone  à  l'époque  où  cette  pièce  a  été 
dressée.  Quelques-uns  auront  pu  aller  demeurer  à  Saragosse,  et  ce 
sont  peut-être  eux  qui  ont  noué  les  relations  avec  le  Franciscus 
Cahanerius  de  notre  document.  —  Voir  dans  Girbal,Z/05  Judios  en 
Geromiy  Azay  Toros  (=  Theodoros  ?),  pp.  35  et  83. 

Avengena  (n°  134),  Ecangena  [n°^  5,  43).  C*est  le  nom  d'Ibn 
Gannah,  porté  par  le  célèbre  grammairien  Jona  ibn  Gannali.  Comp. 
Steinschneider,  Gafihi,  p.  356. 

Azdra.  Voir  Asdrach. 

Dadorch  (n"'  33,  69).  \]\\  Ilayyim  ^mnn  écrit,  en  1470,  le  cod. 
Rossi  n°  312;  Perreau,  BoUet.  degli  studii  orientait,  I,  p.  454; 
Comp.  Catal.  llninbourg.  p.  138. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  69 

Baro  (n°  98).  On  connaît  le  poète  Abu  Ibrahim  ben  iTia,  de 
Lucène,  contemporain  de  Jona  ibn  Gannali.  Sur  Abu  Ibrahim  b. 
Baron  b.  rro  (r":;u3  ?),  voir  Kerem  Chemed,  IV,  85  :  Catal.  bodl., 
pp.  1335,  1616,  1806;  Ilebr.  Bibl.,  XIII,  91  ;  Isaac  Ibrahim  b.' 
Baron,  de  Malaga  et  Abu  Ammar  b.  Baron,  contemporains  de  Juda 
Ualé\i,  Betulat  bat  Jehuda,  pp.  19  et  20;  "[ir;  nn,  Simon  Duran, 
II,  96,  97;  Baron,  dans  Saige,  index. 

Barzalaij  (n°  107),  Barzalayi  {n°  26).  Les  Barzillaï  sont  nom- 
breux dans  l'histoire  de  la  littérature  juive,  par  exemple,  Juda  b. 
Barzillaï  Albargeloni,  du  commencement  du  xii^  siècle;  \q  Koré 
haddarot  (voir  l'index)  nomme  encore  Baruch,  Josua,  Méir  (comp. 
Hebr.  Bibl.,  XI,  39)  ;  divers  Barselay  figurent  dans  Kayserling, 
Navarra  (voir  l'index).  Un  Reuben  b.  Barzillaï  b.  Sealtiel,de  Bar- 
celone, figure  dans  la  Consultation  de  Salomon  b.  Adret,  I,  415. 
Enfin,  dans  Harizi,  ch.  3,  il  y  a  un  Josef  b.  Barzel.  —  Le  mot  hé- 
breu barzel  signifiant  fer.,  il  est  permis  de  supposer,  comme  l'a 
déjà  fait  M.  Steinschneider  {Hebr.  Bibl.,  III,  87),  que  les  noms 
de  Barzel,  Barzillay,  sont  identiques  avec  ceux  de  Ferrer,  Fer- 
rarii,  portés  par  divers  Juifs  espagnol?.  Voir  ces  noms  plus  loin. 

Bellcayre  (n°^  34,  129).  Ville  de  Catalogne. 

Bellshoni  (n°  99).  Pour  ce  nom  encore  nos  documents  sont  pré- 
cieux. On  ne  savait  comment  lire  le  nom  de  ûTcba  ou  ûT>rb"'2, 
porté  entre  autres  par  Moïse  de  Narbonne,  dit  maître  Vidal.  On  le 
prononçait  Blasoni  (Catal.  bodl.,  p.  1968)  ou  Blason  (Kayserling, 
Navarra,  p.  168).  Ce  nom  se  trouve  dans  les  Consultât.  d'Is.  b. 
Sch.  n°  220  ;  de  Simon  Duran,  I,  26,  163,  dn^bnïN  Efraïm  Gerondi; 
dans  Kayserl.,  Navarra,  Efraïm  Vidal  =  Vidal  Bellshom  (p.  170); 
Heb.  Bibl.  VIII,  88,  Josef  Bellshom  ;  dans  Catal.  des  ms.  hébr. 
de  Paris,  n°  1200,  Moïse  Vidal  Bellshom,  en  Sicile,  en  1504  ;  dans 
Girbal,  Los  .Tudlos,  etc.,  p.  20,  Bellhom  Scapat  ;  dans  Saige, 
Juifs  du  Languedoc  (index),  Belhom.  Voy.  aussi  Josef  Bellshom, 
IL  B.,  VIII,  88. 

Bemievlst  (n»  116),  Benvenlst  (n»  28).  Le  nom  de  Benveniste  est 
très  répandu  dans  l'histoire  et  la  littérature  juives.  A  Barcelone, 
on  connaît  spécialement  le  Naci  Schéschet  Benveniste  ;  un  Josef 
b.  Benveniste  a  signé,  à  Barcelone,  la  lettre  qui  se  trouve  dans  les 
Consultations  de  Salom.  b.  Adret,  1,  415.  Sur  les  Benveniste,  voir 
Graetz,  Histoire,  VIII,  note  4;  Hebr.  Bibl.,  V,  68;  VI,  14  ;  VIII, 
125  ;  IX,  91  ;  X,  82,  136  ;  XI,  91  ;  XIII,  106  ;  XV,  54,  78.  Un  Sa- 
muel Benv.  est  nommé  dans  Consult.  d'Is.  b.  S.,  n°  214. 

Biona  (n°«M,  157).  ^:3V25n  dans  Consult.  d'Isaacb.  Sch.,  \\^  206, 


70  liKVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

377,  378  (Zunz,  Gesamm.  Schrlfl.,  II,  p.  30).  Le  den  Biona  du 
n°  84,  probablement  pour  de  EnU07ia. 
•     BisMl  (n"  141).  Ville  de  la  Catalogne. 

Bissallel  (n°  154).  C'est  le  nom  hébreu  Beç«llel . 

Bolaixiw"^  165,  193).  C'est  le  nom  a-'i'bi^iDïi.  Comparez,  sur  les 
noms  de  ce  genre,  H.  B.,  XVI,  61  ;  XIX,  93  ;  Çag  Abenayx,  al- 
mojarife  de  la  reine  dona  Maria,  dans  Amador,  II,  87. 

Bonanada  (n°  75).  Nom  de  femme. 

Bonanasch  (n"  1).  Prononcez  Bonanasc,  non  Bonnasc  (Zunz, 
Ziir  Gescli.,  461).  Le  nom  paraît  composé  de  Bonan  ("jn^i^)  et 
d'Isaac.  Voir  Consult.  d'Is.  b.  S,  pt533ia5N,  En  Bonanasc,  n°  349,  et 
pO"i3;:N  de  Barcelone,  n°  415; 

Bondia  (n°  46).  En  hébreu  Yom  ioh,  bonjour,  jour  heureux, 
(Saige,  index).  Comparez  Kayserl.,  Navarra,  p.  168,  note  2. 
Dans  Consult.  d'Is.  b.  Sch.,  Bondia  Cohen,  n°  60^;  David  Bondia 
Cohen,  n»  179;  Vidal  Bondia,  n°  266.  Dans  Aoré  liadd.,  Abraham 

Botidie  (n°  157).  Autre  forme  du  nom  précédent? 

Bonjuha  (no'  10,  22,  24,  etc.).  C'est  le  nom  de  Bon-Iuj^f 
[Revue,  I,  p.  65),  plus  ou  moins  identique  avec  Bon-Juda  ou  Juda 
{car  Jiiha  vient  sans  doute,  comme  juif,  du  nom  de  Juda).  Juda 
Desfils  s'appelle  J-tni:--::  (Consult.  Simon  Duran,  I,  134)  ;  Juda 
Zeraliya  s'appelle  riNiMin  Astruc  [Hebr.  Bibl.,  XIV,  98).  Un  Bon- 
juha de  Gérone  assiste  au  colloque  de  Tortose  [Schev.  Jeh.,  éd. 
Wiener,  p.  168).  Bonjuah,  en  Sicile,  dans  Is.  b.  Sch.,  n"  171  ; 
Bonjua,  dans  Girbal,  p.  20.  On  voit,  par  ce  qui  précède,  qu'il  ne 
faut  plus  transcrire  les  noms  de  î-jMiriSiia  et  ©Nmasia  par  Bongua, 
Bongodas  ou  Bongudas,  car  le  5  est  tilde  ;  il  faut  donc  écrire  Bon- 
jua, Bonjudas;  Comp.  dans  Is.  b.  Sch.,  n»  265,  CioV:.,  Jucef,  et 
n"  266,  u5N'Ti':s3T3,  Bonjudas. 

Boiisciiyor  (nos  16,  55,  136).  En  hébreu,  rf^rj,  Tobie.  Kenésel 
Itaijgcdola,  Eben  Ezer,  chap.  129,  n»  121. 

Bolarell  (n»  65).  Nom  connu  [lar  Moïse  Botarel,  qui,  en  1409, 
composa  un  commentaire  du  Livre  de  la  Création.  Il  existe  un 
Moïse  Botarel  plus  ^ewwQ.  [Catal.  bodl.  p.  1780);  Moïse  Farissol 
Botarel  (Catal.  Munich,  n"  252);  Salomon  Botarel,  Catal.  Munich, 
index  des  propriétaires  de  mss  ;  Botarel  bN^^iiiiun,  Catal.  Mu- 
nich, n"  252.  —  Ville  dans  la  prov.  de  Tarragoiie. 

Burgales  (n'"  CO,  96).  Voir  dans  Koré  haddO)'o(,  index,  Ahra- 


LISTE  NOML\ATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  71 

liam  b.  Aziz  (ou  Azuz  ?),  Abraham  b.  b^rm^  ;  dans  le  corps  de 
l'ouvrage,  f'^  43^,  ce  nom  est  écrit  b-^a-nn  (Bourgueil?).  Gomn. 
Caial.  boclL  p.  672.  Le  mot  encore  usité  aujourd'hui,  veut  dire 
«  habitant  ou  originaire  de  Burgos  ». 

Cabrll  (n"  119).  Le  nom  se  trouve  dans  Clirbal,  Los  JucUos,  de, 
p.  32  (Moïse  Cabrit)  ;  Nastruc  a-i-inp,  dans  Consult.  de  Nissim  Ge- 
rondi,  n°55;  Gabriel  Souscabrito,  AVolf,III,  447c.,Fïirst,  Bibliotli., 
■S.  1?.;  Jacob  b.  Juda  b.  Kabrut,  Jewish  Literaiure,  p.  184;  Ludovic 
Cabrito,  Catal.  Paris,  n°  753.  —  Cabrita,  Cabrito,  sont  des  noms 
de  villes  espagnoles. 

Cap  (n°'  47,  183).  C'est  sans  doute  ainsi  qu'il  faut  lire  le  nom 
des  qxp  qui  se  trouve  dans  la  Consultation  de  Salomon  b.  Adret, 
I,  415,  et  dans  Minliat  Kenaot,  p.  157.  Nastruc  s^Np,  dans  Is.  b. 
Sch.,  n°  104. 

Çaporta  (n°'  2,  19,  83),  Saporta  (n°  153).  Nom  très  connu,  dans 
la  littérature  juive,  sous  les  formes  de  Saporta,  Saportas,  Sas- 
porta,  Sasportas,  Sasportès,  et  peut-être  Sprot  ef  Saprout.  Voir 
Caial.  hodl.,  p.  2551.  —  Le  préfixe  ça,  sa,  est  un  ancien  article  fé- 
minin, encore  en  usage  aujourd'hui  à  Majorque.  Il  y  a  un  Porta 
dans  le  département  des  Pyrénées-Orientales.  Bonastruc  à  Porta, 
Catal.  bodl.,  p.  1956. 

Caravkla  (lY'''  2,  19).  Le  nom  est  fort  connu  sous  cette  forme  ou 
sous  celle  de  Caravita.  Isaac  Caravida,  Cat.  bodl.  ;  Astruch  Cara- 
vita,  Guirbal,  p.  20;  En  Caravida,  Consult.  de  Nissim  Gerondi, 
n°  30. 

Caro  (n^OO).  En  transcription  hébraïque,  i"iNp,  traduit  peut-être 
par  n"'in.  Le  nom  est  célèbre  par  Josef  Caro,  auteur  du  Sclmllian 
«re<A7i.  Voir  dans  Fïu^st,  Bibl.,  Abraham  Caro,  Isaac,  Menahem, 
Salomon  Caro,  II,  171  et  ss. 

Coffe  (n»  122),  Coffen  (n«^  3,  58).  C'est  le  mot  Cohen,  avec  /" 
pour  h.  Le  nom  serait-il  identique  avec  celui  de  Cofflno?  Voir 
Korê  hadd.,  index,  Aron  Coffino. 

Coray  (n°  190).  Ce  nom  serait-il  parent  de  Toraïf,  Torarfi"(voir 
ces  mots)  ? 

Campredon  (n°  37).  Ville  de  la  Catalogne,  aujourd'hui  Cam- 
prodon. 

Ct'esques  (n"  137).  Le  nom  serait  en]  liébr.  rr^it  (Zunz,  Ges. 
Sch.,  II,  p.  54). 

Dalell  (n°«  24,  25).  Un  Elie  bxbT  dans  Catal.  Leyde,  de  Stein- 
schneider,  p.  285  ;  Comp.  Hebr.  Bibl.  VIII,  48. 


72  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Ddvi  {W^  34,  81,  91,  etc.).  Pour  David.  Comp.  En  Crescas  ■^nn, 
dans  Is.  b.  Scli.,  \\°  226  ;  ■in'isnn  Boiulavi,  iUd.,  n°  171;  Muel  Bon- 
(lavi  Comprad,  Catal.  Mimicli,  n''  292. 

Domasch  (n°  169).  Serait-ce  quelque  chose  comme  paT:*!, 
Damasc  ? 

l)cu  lo  guart  (n°  VI).  En  français.  Dieu  le  garde  ;  en  hébreu,  pro- 
bablement rii-iTc'^y  ou  peut-être  rr^z^i  ;  Saige,  Juifs  du  Languedoc 
(index),  Diex  lo  gar. 

Evangena  {n^^o,  ^"y).  \o\v  Avengena. 

Fabib  {n""  62,  111,  114).  C'est  le  nom  très  connu  de  n-^nn,  Habib. 
D'après  Zunz  [Gesamm.  Sc/ir.,  II,  p.  53),  le  nom  aurait  été  tra- 
duit en  espagnol  par  Comprado  (voir  cependant  plus  haut,  Caro)  ; 
peut-être  aussi  en  latin  par  Amatus  [Hebr.  Bibl,  IX,  80).  Le  plus 
célèbre  des  Habib  est  Jacob,  auteur  du  En  Jacob.  On  trouvera 
chez  les  bibliographes  les  noms  de  Hayyim  (Conforte),  Josef, 
Lévi,  Moïse,  Samuel  (Cat.  bodl)  ben  ou  ibn  Habib,  Amatus  Lu- 
sitanus  =  Habib  Hassefardi  ;  R.  Habib,  à  Xativa,  dans  Is.  b. 
Sch.,no326. 

Falcho  {n°  181),  Falco  (n°^  15,  27),  des  Falco  (n°  20).  En  trans- 
cription hébraïque,  "iip^D  ou  "iipb.XD  ou  'jisbD.  Abraliam,  David, 
Elle,  Jacob,  Juda,  Moïse,  Semtob,  Senior  b.  Juda  Falcon,  dans 
les  bibliographes,  A'ort'  hadd.,  Scliem  liagged. ,Z\\xiz,  Liteimlg., 
p.  586;  Abrabam  b.  Moïse  F.,  Abné  Ziccaron,  n"  52  ;  Bondua  F. 
et  Semtob  F.,  dans  Simon  Duran,  1,51;  Hebr.  Bibl.,  NUI,  ^%\ 
Saloraon  b.  Moïse  Falconi,  Minhai  Ken.,  p.  61  ;  divers  dans  Kay- 
serl.,  Kavarra.  —  Falco  est  une  ville  de  l'île  Majorque. 

Ferrer  (n"'  8,  70,  127, 128).  Nom  assez  fréquent,  porté  aussi  par 
des  chrétiens,  comme  le  prouve  le  nom  du  célèbre  Vincent  Ferrer, 
qui  a  tant  contribué  au  malheur  des  Juifs  en  Espagne.  Un  Rabbi 
Ferrer  a  assisté  au  colloque  de  Tortose,  et  il  est  probable  que  ce 
rabbin  est  identique  avec  le  'j-'^îVc  T^-.crN  d'Is.  b.  Sch.,  n°  314,  qui 
?ii'  sera  autre  que  le  rabbin  Zerahy a  Ilalévi,  de  Saragosse,  nommé 
par  le  Schevel  Jehuda  dans  le  récit  du  colloque  de  Tortose  et  qu'on 
peut  supposer  identique  avec  Zerahya  Ilalévi  b.  Isaac  Saladin 
{Oz.Neh.,  ibid.).  Comp.  Abraham  Ferrar  ou  Farrar,  Wolf,  I,  III, 
IV,  n"  137;  David  Farrar,  IV,  n"  516  ;  Josef  b.  Abr.  Ferrer,  codex 
De  Rossi,  n»  428;  Nassim  (=  Nissim)  Ferrer,  dans  Girbal,  p.  34. 
Lo  nom  parait  avoir  été  traduit  en  hébreu  par  bn::  ou  "^bna,  Bar- 
zillaï  (voir  ce  mot  plus  haut). 

Ferrarii  (n""  77,  148).  Parait  êti'o  identique  à  Barzillaï.  Voir  ce 
mot  et  le  mot  Ferrer. 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JLIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  73 

Forn  (n''s  35,  85).  Il  y  a  diverses  villes  de  Forna  en  Espagne. 

Gahbay  (n"  162).  En  bébr.,  in35,  nom  très  répandu.  Dans 
Fûrst,  Bibl.,  I,  312,  Abraham,  Isaac,  Juda,  Méir,  Salomon,  Gab- 
baï,  Jacob  Algabbaï,  I,  37;  Mohamed  Gabbaï,  Wolf,  III,  n°  1407; 
Moïse  Gabbaï,  \Volf,  I,  n°  1533;  fréquent  dans  Isaac  b.  Sch. 
(n°^  28,  43,  53,  etc.),  et  dans  Simon  Duran  fl,  33,  58,  etc.);  En 
Mose  Gabbaï,  Hebr.  Bibl,  XYI,  86.  Dans  Rabb.  fr.,  p.  713, 
\\n:.}:i  doit  peut-être  se  lire  c  des  Gabbaï  » . 

Galipapa  (n°  52).  Nom  connu.  Il  y  a  une  ville  de  Gali  dans  la 
province  de  Barcelone. 

De  Giialbis  (n°  77).  Peut-être  la  ville  de  Gualba,  dans  la  prov. 
de  Barcelone. 

Gomer  ('n°  64).  Serait-ce  le  nom  de  l'ile  Gomer,  dans  les  Ca- 
naries ?  ou  bien  Gomez  ? 

Gracia  (n^^  22,  63,  77,  89,  136,  157).  Nom  d'une  famille  célèbre 
de  Barcelone,  portant  en  hébreu  le  nom  de  ^n,  Hèn=^  grâce.  Nous 
ne  nous  rappelons  pas  qu'on  ait  déjà  fait  la  remarque  que  ce  nom 
vient  d'une  petite  ville,  Gracia,  située  tout  près  de  Barcelone. 
Zunz,  dans  Benjamin,  de  Tudèle,  édition  Asher,  II,  pp.  4  à  6,  énu- 
mère  un  certain  nombre  de  personnes  de  cette  famille.  Nous 
croyons  devoir  reproduire  ici  ces  noms  en  y  insérant  ceux  que  nous 
avons  trouvés  ailleurs  :  Abraham  Gracian  {Ozar  Nehni.,  II,  232), 
Abraham  b.  Salomon  llèn{Jeio.  LU.,  199;  Ozar  Nehm.,  II,  232)  ; 
Bonsenior  Gracian  {Hebr.  Bibl.,  VIII,  89);  Isaac  Hên  b.  Juda  b. 
Immanuel  ibn  Sealtiel  (H.  Bibl.,  Y,  69);  Josef  b.  Isaac  Gracian, 
vers  1412  (//.  B.,  XI,  91)  ;  Juda  Hên,  de  la  maison  Sealtiel,  à  Can- 
die, vers  1528  (Zunz)  ;  Don  Lobel  Gracian  b.  Moïse  b.  Sealtiel  b. 
Isaac  b.  Zerahya  Plên,  mort  à  Barcelone  en  1306/7  (Ugolini,  The- 
san7''us,\o\.XXXlll,  p.  1457-58);  Makhirb.  Schéschet  Hên  (M^/^7^ 
Ken.,  p.  157.  Adret,  n°  415)  ;  Moïse  b.  Sealtiel  Hên,  xv«  siècle 
{Catal.  boclL,  p.  1872) ;  Prophet  Gracian  (i?aô&. />-.,  index);  Don 
Salomon  Gracian  b.  Moïse  b.  Sealtiel  b.  Zerahya  Hên,  mort  à 
Barcelone  1306/7  (Ugolini,  ibid.),  le  même  peut-être  que  Salomon 
Gracian  b.  Sealt.  b.  Zer.,  dans  Zunz,  Zur  GescJi.,  p.  408,  et  que 
Salomon  b.  Moïse  Hên  dans  Consult.  de  Salomon  b.  Adret,  n«  415, 
et  que  Salomon  Gracian,  dans  Minliat  Ken.,  p.  154,  157,  163;  Sa- 
lomon Hên,  vers  1349  [Oz.  Neh.  H,  232)  ;  Salomon  Gracian,  à 
Barcelone,  1391  {Revue,  111,465);  Sealtiel  Hên,  près  Barcelone, 
vers  1380  (Zunz)  ;  Sealtiel  b.  Isaac  b.  Moïse  Hên,  à  Barcelone, 
1305  (Adret,  Zunz);  En  Sealtiel  Gracian,  vers  1412  (//.  B.,  XI, 
91)  ;  Sealtiel  Nastruc  Vidal  Gracian,  à  Barcelone,  1373  {Cat.  boclL, 


74  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

2585;  Jeschunin,  VIII,  IbS;  H.  B.,  VIII,  89)  ;  Zaraliya  b.  Isaac  b. 
Sealtiel  Hèn  (vers  1284,  Zunz;  Catal.  bocll.  2585;  Oz.  Neh.,  II, 
229);  Zeraliya  b.  Scheschet  Hên  (Adret,  415  ;  Minli.  lien.,  157). 
Un  Moïse  dlsaac  Gratian,  à  Rhodes,  1426,  H.  B.,  IV,  124. 

Bavent  risch  [n°  88).  Le  commenceiiient  liaven  est  évidem- 
ment pour  Aben  =  ibn.  Nous  ne  savons  pas  expliquer  le  reste 
du  nom. 

Jaffuda  (n»  156),  Jafucla  {i\°^  56,  61).  C'est  le  nom  de  Jehuda 
avec  changement  du  h  en  f.  Voir,  dans  le  Comtat,  Jassuda  pour 
Jehuda  {Annuaire  de  la  Soc.  des  Et.  J.,  I,  p.  264,  note). 

Jaftel  (n°*  8,  36),  Jafiell  (n°  171).  C'est  le  nom  de  lehiel,  avec 
changement  du  h  en  f. 

Janya  (n°  194).  Peut-être  altération  de  Hananya  (Stn.). 

Jasqnell  (n^  73).  Nous  supposons  que  c'est  une  altération  du  nom 
de  Jéheskel,  Ezéchiel.  Dans  le  Comtat,  ce  même  nom  est  devenu 
Jaasque  et  Jasque  (Corriger  dans  Annuaire,  I,  p.  264,  note). 

Lobell  (n°^  48,  63,  89,  98,  143,  1561  Transcrit  en  hébreu  b^mb. 
Voir,  plus  haut,  au  nom  de  Gracia  ;  voir  aussi  Consult.  R.  Nissim, 
édit.  Constpl.,  n°  36. 

Maçana  (n°  44),  Massana  {w  144).  Peut-être  la  ville  de  Mas- 
sanas  dans  la  prov.  de  Gérone. 

Magot  [\Y>  5),  Massot  {w"  134).  Probablement  le  nom  arabe 
11^*07:,  Massoud  (Stn.). 

Maldr  (n°'  32,  66,  etc.);  Maijir  (n»  159),  Mayr  (n»  195).  Nous 
supposons  que  c'est  le  nom  de  Méir. 

Manresa  (n"*  48).  Ville  de  la  Catalogne,  prov.  do  Barcelone. 

Massies  (n°  191).  Un  R.  Josué  Messie  a  assisté  au  colloque  de 
Tortose  (Castro,  Bibl.  esp.,  p.  206).  Comp.  Moïse  b.  Isaac  w^ffilo, 
dans  Simon  Duran,  IV,  n'=s  16,  119,  et  dans  !-7r!D":;r!  n?::',  f°  92, 
3'^  col.  ;  Josef  b.  Moïse.  n-'-'UJW,  Catal.  mss.  hébr.  de  Vienne,  p.  127; 
Comp.  Ileb.  Bibl.,  XV,  111.  * 

Mayir.  Yoyez  Mahir. 

Maymo  (n»»  39,52,  118).  C'est  le  nom  rendu  célèbre  par  Maïrao- 
nide  ou  Moïse  b.  Maïmon.  M.  Ad.  Neubauer  suppose  que  le  nom 
signifie  Petit,  1::^  mot  signilie  calme,  lent,  indolent. 

Mercadell  {n""  55,  79),  Mercader  [w  177).  La  comparaison  des 
n"'  55  et  177  montre  que  les  deux  noms  sont  identiques.  Comp. 
Samuel  b^np-r?:  dans  Is.  b.  Scli.,  n"*  263,  264;  ib..  n"  413,  Vidal 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  7o 

Mercadel  est  peut-être  identique  avec  notre  n"  79  ;  dans  Gâtai. 
Paris,  n"  1284,  12",  Bongoda  Merquadil.  —  Une  ville  de  Mercadal 
se  trouve  dans  l'ile  de  Minorque. 

Morcat  (n°  59).  Morcate,  ville  près  de  Iluesca,  dans  l'Aragon. 

Mimtso  (n°  89).  C'est  Monzon,  dans  l'Aragon. 

Natzanell  (n°  87).  C'est  le  nom  hébreu  Netanel  ;  remarquer  la 
transcription  du  n  en  tz. 

Navm^ro  (n"  61).  Un  Navarro  est  célèbre  dans  l'histoire  des 
Juifs  du  Portugal.  Comp.  HeW.  BiU.,  XIX,  114,  115. 

Noch  (no  4).  Serait-ce  Enoch?  Peut-être  Ve  du  commencement 
du  nom  s'est  perdu  dans  Ve  final  du  mot  7nestre  qui  précède. 
Mestre  désigne  le  médecin. 

Nogueres  (n°  103).  Peut-être  une  des  villes  de  Nogueira,  No- 
gueiras,  Nogueras.  Josué  b.  Moïse  Nogaras,  en  1484.  Catal.  Paris, 
n"  948. 

Ohraclor  (n°  158).  Nous  supposons  que  c'est  la  traduction  du 
nom  hébreu  b^ns,  Poêl.  Voir  dans  Catal.  Paris,  David  b.  Yom 
Tob  Poêl,  n°  1065;  Jacob  Poêl,  n»  1090,  et  Catal.  Munich  (index), 
Jacob  Poêl. 

Piera  (n"  30).  Ville  du  district  de  Barcelone.  Le  nom  du  poète 
Salomon  de  Piera  est  célèbre.  Voir  sur  lui  principalement^.  B., 
XVI,  86  etss.  On  connaît  aussi  Meschullam  da  Piera,  poète,  mêlé 
à  la  première  querelle  des  philosophes  (Graetz,  VII,  60). 

Prades  (n°'^  29,  117).  Ville  dans  la  prov.  de  Tarragone,  en  Ca- 
talogne. 

Pura  (n°  84).  Peut-être  la  ville  de  Puras,  prov.  de  Valladolid. 

Ripoll  (n°^  23,  150).  Ville  de  la  prov.  de  Gérone.  Josef  de  Ripoll, 
biD"^'-]"!,  dans  Kennicott,  Dmc^ri.  gen.,  p.  381. 

Rossell  (n"  7),  RosseMi  (n"«  167,  168).  Comp.  Abraham  Profiag 
Bonjudas  b"^aii,  dans  Is.  b.  Sch.,  w  266;  Rossel,  dans  Amador, 
Ristoria,  II,  616;  Mordekaï  Rossello,  Catal.  Munich,  n»  49.  Le 
nom  désigne  sans  doute  des  personnes  originaires  du  Roussillon  / 

Roveni  (no46),  Roven{\\°''  104,  132).  Probablement  Ruben. 

Riigat  (n°  92).  Ville  dans  le  diocèse  de  Valence.  Peut-être  le 
U3:\-i'i  de  Catal.  Vienne,  I,  p.  124  ;  Rahh.  fr.,  p.  713,  Rugino,  peut- 
être  a-iiT-i,  non  la-'STn  (communication  de  M.  Ad.  Neubauer).  David 
et  Çémah,  fils  de  Josei' ui'^:*n^,  à  Avignon,  1722,  dans  Catal.  des 
mss.  de  la  Bodl.  préparé  par  M.  Ad.  Neubauer. 


76  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Sadoch  (n°  102).  =  pnni:,  Sadoc. 

Salvat  {n"  95).  Comp.  n^nbo  dans  Is.  h.  Sch.,  n°  266,  et  y-^iV:;, 
dans  Sim.  Dur.,  I,  n°  55.  En  Isaac  Salvat  Méir  (vers  1305),  Catal. 
Paris,  n°  1284. 

Sanon  (n°  187).  Peut-être  Samon,  arabe  ';ir?:5,  =Siméon  (Stn.). 

Sartore  (n°  58).  C'est  la  famille  des  u-'-^n  =  tailleur.  On  trou- 
vera Jacob,  Joseph,  Juda  Hayj-at  dans  les  bibliographes. 

Scaleta  (n^  l.'^S).  Le  don  Salomon  r:i!-'bpCD  (Sescaleta")  de  Barce- 
lone, dans  Is.  b.  Sch.,  n°  415,  peut  être  identique  avec  le  nôtre. 
En  hébreu,  Sullam  (voir  ce  mot  plus  loin  au  mot  Suclam)  et  dans 
Saige,  index,  Scaleta.  —  Le  nom,  d'après  M.  Saige,  indique  la 
localité  française  VEscaleite. 

Scapat  (n°  14*).  On  connaît  le  En  Escapat  Malit  ftrad.  hébr. 
du  mot  Escapat)  Halévi,  qui  joua  un  rôle  dans  la  dispute  des  phi- 
losophes des  ans  1305/6  {EoM.  fr.,  p.  726;  Min.  Ken.,  154,  160)  ; 
Bellhome  Scapaf,  de  Gérone,  en  1337,  dans  Girbal,  p.  20  ;  Is.  b. 
Sch..  11°  228.  Des  Escapa  se  trouvent  dans  Abrah.  ibn  Daud,  p.  43 1) 
de  l'édit.  d'Amst.  (Néhémie  rtcr^N)  ;  dans  Koré  hadd.  (Josef 
i-îDp'C-'N)  ;  voyez  Catal.  bodl.,  p.  1458. 

Senton  (n°^  68,  79,  90).  Probablement  Semtob.  Comp.  le  nom 
du  rabbin  bien  connu  Santo  de  Carrion.  Peut-être  faut-il  lire,  dans 
notre  pièce,  Sentou  =  Sentov. 

Sescola  (n°  105).  Nous  ne  savons  si  ce  nom  est  le  même  que 
celui  de  rtbip'i'N  qu'on  trouve  dans  la  littérature  juive.  Comp.  Cre- 
cas  Vidal  Dascolar,  Castro,  I,  202;  H.  B.,  XI,  134;  Samuel  Astruc 
da  Scola,  ce  qui  est  traduit  en  hébreu  par  ■'crs;  Catal.  Munich, 
n°  343^  ;  Catal.  Paris,  n"  1047'»;  Catal.  Turin,  Peyron,  p.  177.  Cet 
Astruc  da  Scola  est  peut-être  notre  Astruch  Sescola.  —  Le  mot 
est  composé  de  sa-escola,  devenu  s'escola,  puis  sescola.  Voir,  plus 
haut  Çaporta.  La  forme  Sasporta  est  ainsi  également  expliqué. 

Slruch  (n°  133)  =  Astruc. 

Suclam  (n"  11), Sutilam  (n"  76).  Probablement  Sullam  (=  échelle). 
Les  Sullam  sont  assez  nombreux  dans  la  littérature  juive.  Voir 
surtout  Samuel  Suliami,  dans  Jiabb.  fr.,  p.  700;  ridentification 
{ib.,  p.  701)  de  Sullam  avec  La  Escala,  près  Gérone,  nous  parait  la 
meilleure  de  celles  qui  ont  été  proposées  (voir  cependant  Saige, 
Juifs  de  Languedoc). 

Toraif  (n"  86),  Torarff  (n»  72).  Les  deux  noms  sont  probable- 
ment identiques.  Serait-ce  l'hébreu  Cj-ni:,  Çorcf? 


LISTE  NOMINATIVE  DES  JUIFS  DE  BARCELONE  EN  1392  77 

Tarros  (n°  182).  Ville  près  de  Lérida,  en  Catalogne. 

Torra  (n°  13).  La  Torra,  dans  l'île  Majorque . 

Vinag  (n°  56).  Peut-être  pour  Vivag,  ce  qui  donnerait  le  nom 
connu  des  Bibago. 

Vinant  (n°  3).  Peut-être  Vivant,  û"'"»n. 

Xaham  (n°80).  Peut-être  dnb?  Voy.  Gat.  Paris,  n"  308. 

Xanixell  (n°  80).  Nous  ne  pouvons  identifier  le  nom  avec  cer- 
titude. Le  00  sert  le  plus  souvent  à  représenter  le  u)  hébreu  ;  par 
exemple,  Xuxên,  pour  v^iîT^a.  C'est  ainsi  qu'on  identifiera  facile- 
ment le  fleuve  b^a^i  dont  il  est  question  dans  le  divan  de  Samuel 
Hannagid  publié  par. M.  A.  Harkavy  [Stiidien.  u.  Mitthl.,  I,  p.  56), 
et  qui  n'est  autre  que  le  Xenil  (cf.  z&.,  p.  175).  On  aurait  ici,  d'a- 
près cette  règle,  Xantxell  =  bN0"j50.  Il  ne  nous  parait  pas  impos- 
sible que  le  mot  représente  quelque  chose  comme  Saint  Gilles, 
V^:,bo  dans  Benjam  Tud.,  éd.  Asher,  I,  5«.  A  défaut  d'identifi- 
cation sûre,  nous  rappelons  encore  le  nom  de  ibnitjtu  Sanzolo,  dans 
Schevet  Jehuda,  éd.  Wiener,  p.  114,  qui  a,  comme  notre  Xant- 
xell, le  prénom  Semtob;  Comp.  Calai.  &odZ.,  p.2393/-l.  Dans  Catal. 
Leyde,  n<'  56,  Abr.  ibns'o"::. 

Nous  n'avons  l'ait  aucune  observation  sur  les  noms  de  Bron 
(n°  51),  Brunelli  (n"  132),  Çaragossa  (n°  94),  Çatorra  (n°  12),  Cer- 
tes (n°  120),  Melsia  ()i°  9),  Milan  (n^^  53,  54,  160),  Pebre  (n°  183), 
Pontardia  (n°  91),  Ranvalla  (n°  41),  Terraçona  (n^  109),  Valencia 
(n»  82),  et  quelques  autres  plus  ou  moins  connus,  parce  que, 
pour  quelques-uns  d'entre  eux,  cela  était  superflu  et  que,  pour 
d'autres,  nous  n'avons. pu,  à  notre  grand  regret,  présenter  au- 
cune explication. 

Isidore  Loeb. 


PAUL  DE  BONAEFOY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOI 


(EXTRAIT  DIXE  LETTRE  DU  D^  M.  STEINSCHNEIDER  A  M.  ISIDORE  LOEB; 


Vous  savez  que  j"ai  besoin  de  concentrer  mes  études  quelque 
temps  sur  une  thèse  dont  vous  connaissez  le  sujet.  Dans  mes 
recherches,  j'ai  été  amené  à  m'occuper  en  passant  d'une  question 
littéraire  qui  vous  intéressera,  car  elle  a  quelque  rapport  avec 
les  études  que  vous  avez  publiées  dernièrement  sur  les  polémi- 
ques entre  Juifs  et  chrétiens.  Je  vous  envoie  ces  quelques  notices, 
dans  lesquelles  je  n"ai  fait  qu'effleurer  la  question,  vous  priant 
d'excuser  mon  mauvais  français. 

Un  court  mais  intéressant  article  de  M.  Charles  Jourdain,  inti- 
tulé :  «  De  la  condition  des  maîtres  dliéhreu  dans  C  Université 
de  Paris,  au  commencement  du's.\''  siècle^  »,  contient  quelques 
détails  inconnus  jusque-là  et  puisés  dans  un  document  que  M.  Au- 
guste Castan,  correspondant  du  Ministère  de  l'Instruction  publique 
pour  les  travaux  historiques,  avait  trouvé  dans  les  archives  de  la 
ville  de  Besançon. 

On  y  voit  qu'en  1421,  l'Université  de  Paris  fit  appel  à  la  bien- 
veillance des  gouverneurs,  bourgeois  et  habitants  de  cette  ville,  en 
faveur  de  «  maistre  Paul  de  Bonnefoy,  maistre  en  Ebrieu  et  en 
Caldée  ».  Elle  exposait  que  maître  Paul  avait  composé  un  livre  en 
hébreu  sur  la  foi  catholique,  que  son  intention  était  de  le  faire  tra- 
duire en  latin  ;  qu'à  cet  effet  il  se  rendait  en  pays  étranger,  sans 
aucunes  ressources,  et  qu'à  tous  ces  titres  il  méritait  d'obtenir 
aide  et  secours.  Comme  il  s'est  converti,  ajoute-t-elle,  «  à  la  con- 
fusion des  Juifs  ennemis  de  Dieu  et  de  la  dite  fo}',  nous  sommes 
perforcez  de  lui  administrer  ses  vies  et  estât  jusqu'à  icy,  afin 
qu'un  si  notable  clerc  qui  de  présont  au  pays  de  France  est  seul 

'  Revue  (les  So<:iûés  savantes  des  difpartemenls,  3"  série,  lome  I,  aunéc  1863,  1"  se- 
mestre, p.  35Û-3ÎÎ8. 


PAUL  DE  BONNEFOY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOI  79 

docteur  en  Ebrieu  et  Caldée  au  grand  reproche  de  tous  clirestiens 
et  au  déshonneur  de  nostre  dite  foy,  ne  soit  contraint  de  retourner 
au  premier  et  dampnable  estât  des  tenesbres  duquel  Dieu  l'a  ap- 
pelé à  la  lumière  ». 

Selon  M.  Jourdain,  deux  faits  paraissent  pleinement  établis  par 
ce  document  : 

!<*  Que  l'Université  de  Paris  n'avait  pas  cessé  de  compter  dans 
ses  rangs  quelques  maîtres  d'hébreu  ; 

2°  Que  ces  maîtres  étaient  en  général  des  Juifs  convertis,  et  que 
leur  nombre  s'était  réduit  à  un  seul.  M.  Jourdain  a  en  vain  cher- 
ché ce  Paul  dans  Fabricius,  Golomesius  \  Wolf  et  De  Rossi,  mais 
il  l'a  retrouvé  dans  un  autre  document  qu'il  a  promis  pour  le  pro- 
chain cahier  de  son  Index  chronolog.  chartarum  ail  hist.  Uni- 
versitatis  Paris,  spectantiwn  -. 

Lorsque  Henri  V,  vers  la  fin  de  l'année  1420,  retournant  en  An- 
gleterre, passa  à  Rouen,  l'Université  de  Paris  lui  envoya  une  dépu- 
tation  chargée  de  lui  présenter  diverses  demandes,,  entre  autres  la 
suivante.  D'après  les  anciennes  ordonnances  {ex  antiqua  ordina- 
tîone),  l'Université  de  Paris  devait  compter  plusieurs  docteurs  en 
hébreu  ;  or  elle  n'en  avait  alors  qu'un  seul,  «  qui,  à  cause  de  l'in- 
jure du  temps,  pouvait  à  peine  continuer  à  être  nourri  et  vêtu  hon- 
nêtement »  {qui  p7^opter  iniquitatem  temporis  vix  potest  victum 
et  uestUum  lionéste  coniimiare).  La  députation  demandait  au  roi 
de  remédier  à  cet  état- de  choses  et  surtout  de  donner  à  maître  Paul 
de  Bonnefoy,  à  qui  il  avait  alloué  cent  francs,  les  cinquante  francs 
qui  lui  étaient  dus.  Or,  tout  porte  à  croire  que  ces  cinquante  francs 
ne  lui  furent  pas  payés,  et  c'est  pour  cette  raison,  selon  M.  Jour- 
dain, que  Paul  prit  la  résolution  d'aller  chercher  fortune  à  l'étran- 
ger, peut-être  dans  l'Italie,  qui  voyait  déjà  poindre  l'aurore  d'une 
renaissance  des  lettres  antiques. 

En  1434,  le  concile  de  Bâle  invita  les  évêques  à  envoyer  dans  les 
localités  de  leur  diocèse  des  missionnaires  aux  Juifs,  et  renouvela 
le  décret  du  concile  de  Vienne  portant  qu'il  y  aurait  dans  les 
Universités  deux  maîtres  chargés  d'enseigner  la  langue,  hébraïque, 
l'arabe,  le  grec  et  le  chaldéen. 

En  1455,  le  maître  chargé  de  l'enseignement  de  l'hébreu  à  Paris 
réclama  ses  honoraires  annuels,  auxquels  la  France  contribua 
pour  la  somme  de  huit  écus.  C'est  là  le  dernier  indice  sur  l'histoire 
de  la  chaire  d'hébreu  à  Paris  avant  la  Renaissance. 


*  Crallia  Orientalis. 

*  Je  ne  sais  pas  si  M.  Jourdain  a  tenu  sa  promesse,  je  ne  suis  pas   eu  clat  do  le 
Térilicr,  Aussi  bien,  les  dates  louruies  par  ce  premier  document  sullisent. 


80  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Telle  est  la  substance  de  l'article  de  M.  Jourdain  en  ce  qui  nous 
mtéresse  spécialement. 

M.  Jourdain  croit  que  Paul  de  Bonnefoy  *  alla  probablement  en 
Italie.  Cette  circonstance  nous  fait  penser  à  l'auteur  anti-juif  Paul 
(auparavant  Saûl)  contre  qui  (un  de  ses  parents  ?)  Jacob  b.  Elia 
écrivit  une  épître  qui  a  été  publiée  par  M.  Kobak  -.  On  ne  connaît 
pas  exactement  l'époque  où  vécurent  ces  deux  auteurs,  mais  il  sem- 
ble qu'ils  appartiennent  au  xiii°  sièle^  M.  Halberstam  croit  que  ce 
Paul  serait  Paulus  Christiani,  l'adversaire  de  Nachmanide  (1263). 
Mais  ces  questions  d'identification  ne  peuvent  pas  se  décider  par 
les  ressemblances  de  nom  :  combien  n'y  a-t-il  pas  eu  de  Juifs  con- 
vertis qui  portèrent  le  nom  de  Paul  ?  Il  faudrait  à  l'appui  de  l'hy- 
pothèse de  ]^.  Halberstam  que  les  citations  de  Jacob  b.  Elia  se  re- 
trouvassent dans  les  discours  où  les  écrits  de  Paul  Christiani.  La 
controverse  de  Nachmanide,  que  j'ai  publiée  d'après  un  manuscrit, 
est  une  rédaction  où  les  arguments  de  Paul  Christiani  sont  abrégés, 
autant  du  moins  que  je  peux  en  juger  par  une  comparaison  super- 
ficielle, elle  n'offre  donc  pas  dfe  renseignement  sur  la  question  qui 
nous  occupe*.  Peut-être  en  apprendrait-on  davantage  par  le 
rîjTQN  p"'Tntt,  dans  lequel  Mordekhai  b.  Jehosifia  fait  mention  de 
Paul,  adversaire  de  Nachmanide,  et  dont  la  bibliothèque  de  Turin 
possède  probablement  un  fragment  encore  inconnu  ^.  On  pourrait 
peut-être  déterminer  l'époque  où  vécut  Jacob  par  celle  «  du  Nasi 
Samuel,  de  la  maison  de  David  »,  cité  par  lui  {Jesch.,hélor.,Y],  29  ; 
cf.  VII,  86),  si  on  avait  quelque  notice  sur  ce  Samuel.  Le  passage 
où  il  est  cité,  d'après  un  ms.  de  Munich,  a  du  reste  une  lacune  qui 
est  encore  plus  grande  dans  le  ms.  de  cette  pièce  que  possède 
M.  Halberstam.  Est-ce  par  erreur  que  l'éditeur  a  fait  de  ce  passage 
un  nouvel  alinéa,  ou  bien  faut-il  rattacher  ce  passage  à  l'alinéa 
précédent,  d'où  il  résulterait  que  Samuel  aurait  vécu  en  Babylo- 
nie?  Nous  connaissons  trois  Samuel  ayant  porté  le  titre  de  Nasi  : 

P  Samuel  b.  Salomon  Nasi,  de  Carcassonne,  au  xiii°  siècle  ;  c'est 
probablement  l'auteur  d'un  commentaire  sur  le  Guide  de  Maïmo- 

'  Nom  arlopté  certainement  au  moment  de  l'apostasie,  comme  un  peu  auparavant 
le  nom  de  Sancla  Fide  adopté,  en  Espagne,  par  Ilieronymus,  qui  s'appelait  autrefois 
Josua  Lorki. 

*  Jeschurun,  t.  VI,  partie  hébraïque,  p.  1-32.  La  femme  de  ce  Paul  revint  au 
judaïsme;  voy,  p.  22. 

3  Voir  mon  Polem.  tmd  apolof/etischc  LiteratHi\  p.  416,  manuscrit  Schœnblum, 
'ÔO  (};  Jesc/iurun,  t.  VIII,  p.  40. 

'•  Le  protocole  latin  do  la  Controverse,  daté  du  mois  d'août  1263,  publié  en  1867 
par  Cil.  de  Fourtoulon  (Voy.  Hebr.  Bililiof/r.,  t.  XXI,  n<"  123),  ne  fouruit  aucun  ren- 
seignement non  plus  pour  notre  élude. 

■'=  Jusqu'à  présent  on  ne  connaissait  que  le  ms.  du  Vatican  ;  voy.  IJcI/r.  Bil>lio(/r,, 
XXï,u"12:i. 


PAUL  DE  BO.NNEFÛY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOI  81 

nide  dont  il  y  a  un  ms.  à  la  bibliothèque  des  Néophytes  à  Rome'  ; 

2°  Samuel  Nasi,  qui  voulut  faire  revenir  de  Rome  Calonymos  b. 
Calonymos  (vers  1320),  et  qui,  selon  M.  Gross-,  vécut  probable- 
ment à  Arles,  domicile  de  Calonymos  ; 

3"  Don  Samuel  Nasi,  «  de  la  famille  de  David  »  (du  roi  David, 
comme  celui  de  Jacob  b.  Elia),  parent  de  Samuel  ibn  Verga,  qui 
alla  demeurer  à  Tolède  et  qui  semble  avoir  vécu  au  xv°  siècle  -K 

Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  Samuel  Nasi,  l'identité  de  Paul  de  Bon- 
nefoy  avec  le  parent  de  Jacob  b.  Elia  est  peu  vraisemblable.  Est-il 
possible  de  retrouver  le  livre  hébreu  de  Paul  de  Bonnefoy  ? 

On  sait  qu'un  autre  Paul,  le  chrétien  Paul  Fagius,  édita,  en 
1642,  un  ^:7:n  "idd*,  Libe?'  ficlei,  avec  traduction  latine,  d'après  un 
manuscrit  assez  mauvais  et  plein  de  lacunes  (voy.  p.  130).  Lors- 
que j'ai  composé  le  catalogue  des  livres  hébreux  de  la  Bibliothèque 
bodléienne,  il  m'a  été  impossible  de  faire  de  chaque  livre  un  exa- 
men minutieux.  Le  Livre  de  la  foi  chrétienne  m'intéressait  trop 
peu  pour  y  consacrer  le  temps  qui  était  alors  à  ma  disposition.  Je 
devais  supposer  d'ailleurs  qu'aucun  point  intéressant  de  ce  livre 
n'avait  échappé  aux  bibliographes  chrétiens  jusqu'à  Jo.  Clir.  Wolf; 
j'ai  donc  seulement  cité  le  passage  de  ce  dernier  dans  le  Catal. 
Bocll.  (p.  521,  n°  3406).  Il  est  vrai  que  je  demandai,  à  l'article  Fa- 
gius (p.  799),  si  Fagius  ne  serait  pas  l'auteur  du  texte  hébreu 
qu'il  aurait  peut-être  composé  avec  l'aide  d'un  Juif.  L'étude  de 
M.  Jourdain  sur  Paul  de  Bonnefoy  dirigea  de  nouveau  mon  atten- 
tion sur  le  Liher  fidei,  je  le  feuilletai  pour  voir  s'il  pouvait  être  le 
livre  composé  par  Paul  de  Bonnefoy,  et  je  trouvai,  sans  avoir  be- 
soin d'un  examen  approfondi,  que  l'ouvrage,  tel  qu'il  a  été  publié 
par  Fagius,  ne  peut  pas  être  de  la  plume  d'un  Juif  du  commence- 
ment du  xv*^  siècle. 

Je  n'ai  pas  l'intention  d'épuiser  la  matière,  mais  je  crois  que  les 
notices  suivantes  sur  ce  livre  qui  n'a  pas  encore  été  étudié  sérieu- 
sement ne  seront  pas  tout  à  fait  superflues.  Quel  est  l'état  du  texte 
et  quelles  sont  les  ressources  que  nous  avons  pour  l'établir  ?  Wolf 
(t.  II,  p.  125^)  parle,  d'après  Bartolocci,  d'un  manuscrit  anonyme 

»  Wolf,  Bihlioth.  Hehr.,  I,  p.  1123,  n°  2148  ;  conf.  Catal.  Bodl.,  p.  2475. 

*  Monaisschrift  de  Graetz,  1879,  p.  544. 

3  Ibn  Verfra,  Schevet  Jchiula,  ch.  i"  ;  conf.  Zunz,  dans  Benjamin  de  Tudèle, 
tome  II,  p.  8,  qui  cite  Depping,  p.  365  (traduct.  allemande,  p.  286).  Depping  nomme 
quelques  personnes  qui  sont  censées  descendre  de  David,  entre  autres  :  Samuel  Aben 
Huacar  ("iNpT),  Samuel  Benjaés  (lys^i  "jaN)  et  Samuel  Lévi,  fondateur  de  la  syna- 
gogue de  Tolède.  Sur  les  deux  premiers,  voy.  Ibn  Verga,  ch.  x.  La  persécution  dont 
parle  Ibn  Verga,  ch.  v,  eut  lieu  au  temps  de  Salomon  ibn  Schoschan,  qui  est  proba- 
blement mort  en  1257,  d'après  Zunz,  Zur  Geschichte,  p.  437.  L'époque  où  Samuel, 
parent  d'Ibn  Verga,  alla  demeurer  à  Tolède  m'est  inconnue. 

♦  Il  faut  sans  doute  lire  Emonna  et  non  Amana,  comme  l'écrit  Wolf,  II,  p.  1261. 

T.  IV.  G 


82  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

du  Vatican,  appelé  niT^rN  n-:»,  où  il  est  prouvé  par  la  Bible  et  les 
sentences  des  rabbins  que  le  Christ  est  le  Messie  et  qu'il  reviendra 
un  jour.  AVolf  suppose  que  ce  ms.  est  identique  au  livre  publié  par 
Fagius  *.  Bartolocci  (t.  I,  p.  310)  dit  qu'il  possède  un  ms.  du  livre 
édité  par  Fagius,  et  il  en  parle  une  seconde  fois  dans  sa  liste  des 
livres  anonymes  (t.  IV,  p.  301).  Jean  Buxtorf  en  possédait  aussi  un 
exemplaire,  écrit  par  un  Juif,  comme  il  le  dit  dans  sa  Biblioiheca 
raWlnica  (p.  38,  éd.  1708).  On  serait  tenté  également  de  supposer 
que  dans  le  titre  du  livre  intitulé  û'^mr:"'^  T<3  r!-i?:N,  Contre  l'ai  lente 
vaine  du  Messie-,  il  y  a  une  faute  et  qu'on  doit  lire  r:D^:N.  La 
transcription  Amara,  expliquée  par  ty^actatus,  n'est  pas  de  l'hé- 
breu. Si  ce  n'est  pas  une  mauvaise  leçon,  ce  sera  un  de  ces  titres 
fabriqués,  qui  ne  sont  pas  rares  dans  les  mss.  du  Vatican.  Tels 
sont  les  mss.  que  nous  connaissons  du  livre  de  Fagius,  édité  avec 
une  ponctuation  peu  correcte.  Il  serait  désirable  qu'on  les  com- 
parât. 

Le  livre  contient  neuf  chapitres,  dont  la  table  se  trouve  dans 
Wolf  (t.  III,  p.  1176),  divisés  en  87  paragraphes,  dont  l'index  se 
trouve  à  la  page  170.  Le  texte  de  l'original  n'est  pas  reproduit 
dans  toute  sa  pureté.  Ainsi,  à  la  p.  79,  l'éditeur  a  inséré  une  note 
qui  nous  est  révélée  par  le  mot  ^"rr^T-t  (correction);  cette  note  est 
omise  dans  le  latin  (p.  86).  A  la  p.  100,  les  mots  pTi*?:!^  "^rN  sem- 
blent indiquer  une  remarque  du  copiste  (cf.  l'épigraphe,  p.  126). 
Fagius  traduit  :  «  egointerpres  ».  (Serait-ce  lui-même  qui  aurait 
inséré  ce  passage  ?)  La  confession  de  foi  hébraïque  à  la  fin  du 
livre  (p.  127,  non  chiffrée)  est  ajoutée  par  Fagius,  on  s'en  aper- 
çoit au  stjle.  Nous  relèverons  encore  le  passage  suivant  (p.  23)  : 
\i"^^'rx  t:^;::n  'jTwbn  t-^Nipïi^  û'^-'n''t;?:lr;  iN'm  «  Et  venerunt  ergo  qui 
vocantur  Ismaelitœ,  teutonice  die  hayden,  et  receperunt  eum  cum 
amore.  »  Le  mot  )i"-'^n  semble  être  le  seul  mot  allemand  qui  se 
rencontre  dans  tout  le  livre  ;  c'est  peut-être  la  glose  d'un  copiste 
allemand,  à  qui  le  mot  Ismaélites  était  étranger,  ou  bien  c'est  la 
traduction  d'un  mot  qui  se  trouvait  dans  le  texte  primitifs. 

Quant  à  la  date  de  la  rédaction  du  Liher  fidei,  il  faut  s'étonner 
qu'une  date  bien  précise  qui  s  y  trouve  ait  échappé  aux  savants 
chrétiens,  y  compris  Wolf.  A  la  page  99,  §  76  (dans  la  version  la- 
tine, p.  107),  on  raconte  qu'en  262  (1502),  les  Juifs,  jeunes  gens  et 
vieillards,  attendant  le  Messie,  observèrent  pendant  une  année  en- 
tière, dans  tous  les  pays,  une  pénitence  telle  qu'il   n'en  avait  pas 

•  p.  1263,  à  la  fin  du  n»  58  sur  le  livre  édité  par  Fagius. 

*  Ms.  du  Vatican,  cité  par  Wolf,  II,  p.  1202,  n»  60,  d'après  Bartolocci. 

'  Dans  l'oncien  Nizzulion  édité  par  Wagensoil,  p.  277,  le  mot  Û'^Vj'T^lï''  paraît 
sipnilier  éfralcnient  les  poyens  (conT.  plus  bus). 


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PAUL  DE  BONxNEFOY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOI  8.1 

été  observé  jusqu'alors,  que  pourtant  nulle  trace  de  Messie  n'ap- 
parut. C'est  sans  cloute  une  exagération  de  l'impression  que  pro- 
duisit chez  les  Juifs  le  pseudo-prophète  Ascher  Lœmmlein,  qui  se 
montra  dans  l'Italie  du  Nord  '.  Si  ce  paragraphe,  qui  commence 
par  les  mots  psb  2sn  ri''::-2  T^-  Tr:::?i2  mît,  n'est  pas  une  interpo- 
lation qu'on  aurait  ajoutée  plus  tard  pour  montrer  qu'il  est  vrai, 
comme  le  dit  le  Liber  /Idei,  que  les  Juifs  tirent  souvent  en  vain 
pénitence,  ce  livre  aurait  été  publié  entre  1502  et  154^.  C'est  là 
encore  une  raison  pour  laquelle  il  serait  utile  de  pouvoir  examiner 
un  autre  manuscrit. 

A  tout  le  moins,  ce  passage  est  suspect,  car  Fagius  prétend,  dans 
le  frontispice  hébreu  qu'il  a  composé,  que  le  livre  est  écrit  «  depuis 
nombre  d'années  »  û-^r^  n?:!:  ■'îîb  (au  frontispice  latin  :  ante  miil- 
tos  annos)  ;  ce  ne  sont  pas  des  expressions  qu'on  emploie  pour  un 
ouvrage  publié  seulement  depuis  quarante  ans.  Mais  il  y  a  plus  : 
Fagius  publia  la  même  année  un  opuscule  qui  semble  très  rare  et 
qui  a  pour  titre  :  Precationes  hehr.  quïbus  in  solemnibus  cUelnis 
festis  Judœi  cwn  raensœ  occumUmt  adhuc  hodie  uluntur.Pa7'vus 
item  iradatulus  ex  libella  Jiebr.  excerptiis. . .  rii^^N  ido  Lib.  ftdei 
a  dodo  qv.odam  Judœo.,  sed  ad  chrisiianismum  converso  anie 
DucENTOs  ANNOS  pro  fidc  nostrci...  conscripio...  per  Paulum 
Fagium  ;  Isny,  1342,  in-4°-.  Ce  livre  ne  renferme  que  des  béné- 
dictions en  hébreu  et  en  latin,  mais  rien  du  Tymctulus  promis  sur 
le  titre  et  qui  devait  donner  sur  les  oraisons  juives  des  extraits  du 
Liber  fidei.  Fagius  s'était  peut-être  décidé  à  publier  le  Liber  fidei 
en  entier  pendant  qu'il  éditait  les  «  bénédictions  ».  Quoi  qu'il  en 
soit,  il  est  intéressant  de  voir  que  Fagius  croyait  et  déclarait  que 
le.  Liber  fidei  avait  été  composé  deux  siècles  avant  l'an  1542.  N'a- 
t-il  pas  connu  le  passage  relatif  à  l'année  1502  que  nous  avons  cité 
tout  à  l'heure  ?  Ces  doutes  nous  autorisent  et  nous  obligent  à  lais- 
ser de  côté  cette  date  suspecte  de  1502  et  à  examiner  directement 
le  Liber  fidei,  pour  essayer  d'y  trouver  la  date  de  sa  composition. 
Je  répète  que  les  remarques  suivantes  ne  sont  que  le  résultat 
d'une  lecture  superficielle. 

L'auteur  nomme  souvent  Raschi  (p.  18,  22,  2(3,  etc.)  et  David 
Kimhi  (p.  44)  ;  il  connaît  les  «  soixante-douze  noms  des  livres  de  la 

1  Voir  Polcmische  u.  apoloi/clische  Litcratur,  p.  380,  n«  Gti.  Daus  le  Catalogue  des 
mss.  hébreux  de  Turin,  publié  par  B.  Peyron,  1880,  p.  IGo,  il  est  dit  de  Joseph  iba 
Scherapça  :  «  Qui  /^uadaiii  objecit  de  eo  r/uod  {in  nobis)  insit  vis  (!)  proplielica  •  ;  ce 
qu'il  faut  traduire  ainsi  :  •  Qui  a  fait  des  objections  contre  Ascher,  qui  prétendait 
("tre  prophète.  « 

2  Ce  livre  n'est  pas  indique  dans  le  Catalogue  Bodl.,  p.  401.  J'ai  découvert  cet 
exemplaire,  le  seul  que  je  connaisse,  en  compilant  le  catalogue  des  livres  hébreux  de 
la  Bibliothèque  Royale  de  Berlin,  Il  ne  contient  que  seize  feuillets  non  cldlTrés. 


84  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Cabbale  »,  les  n-n-isDT  m720  miTo,  ce  qui  était  presque  impossible 
avant  le  commencement  du  xiv«  siècle.  Sans  appuyer  son  dire  sur 
aucun  passage,  Wolf  remarque  (II,  p.  1262)  que  le  livre  dispute 
contre  le  liniti  veius  ;  mais  plus  loin  (III,  p.  661),  il  dit  que  le 
Liber  fidei  répond  aux  caliimniœ  qui  se  trouvent  dans  l'ouvrage 
de  LipmannMïihlliausen,  intitulé  également  Nizzahon.  La  diffé- 
rence de  date  de  ces  deux  Nizzahon  est  de  tout  un  siècle  ;  elle  est 
donc  de  quelque  importance  pour  la  solution  du  problème  qui 
nous  occupe,  comme  on  le  verra  *. 

Si  nous  recherchons  dans  le  Liber  ficlei  les  passages  du  Nizza- 
hon, nous  nous  trouvons  en  présence  d'une  abondance  de  rensei- 
gnements. L'auteur  déclare,  à  la  fin  du  second  chapitre  (p.  40,  ver- 
sion latine,  p.  44)  -jiniis  by  mmïîn  mnix  '^b\xi  l^^'o  «  Ab  isto  porro 
loco  jam  describam  responsiones  contra  Nizzachon.  »  A  partir  de  là 
il  répond  donc  à  des  attaques  du  Nizzahon.  A  la  page  88,  S  62  (ver- 
sion latine,  p.  96),  il  revient  à  la  réfutation  du  Nizzahon,  en  pre- 
mier lieu  sur  les  peines  infernales  d'Adam  -.  Le  troisième  chapitre 
contient  des  objections  faites  par  des  Juifs  contre  les  Evangiles.  Or, 
dans  le  livre  de  Lipmann,  on  ne  trouve  pas  de  partie  consacrée 
aux  Evangiles;  il  y  en  a  une  au  contraire  dans  le  vieux  Nizzahon, 
édité  par  WagenseiL  p.  166  et  suiv.  Il  ne  serait  pas  sans  intérêt, 
pour  le  texte  hébreu,  de  rechercher  dans  le  Liber  ficlei,  tous  les 
passages  qu'il  cite  ;  si  ces  passages  ne  se  trouvent  pas  dans  le 
Nizzahon,  on  devra  supposer  que  ce  dernier  ouvrage  est  incom- 
plet ou  que  le  Liber  fidei  parle  d'un  autre  livre  de  controverse,  car 
le  mot  Nizzahon  parait  être  devenu  un  appellatif  commun  aux 
écrits  de  cette  sorte,  comme  je  l'ai  déjà  fait  observera  Je  n'ai  pas 
l'intention  de  faire  une  collation  complète  des  textes,  il  me  suffii:a 
de  donner  ici  quelques  exemples. 

Ce  qu'on  lit  au  troisième  chapitre,  pages  42  et  43,  §§  22  et  23,  se 
trouve  dans  Wagenseil,  page  217,  en  ordre  inverse.  Ce  qu'on  lit 
page  44,  g  24,  sur  la  résurrection,  se  trouve  en  substance  dans 
Wagenseil,  page  234,  avec  la  formule  de  citation  û-^^win  nnon  (Pen- 
tateuque),  ot  un  peu  plus  bas  '::'12^r^  "is53,  ce  que  Wagenseil  traduit 
par  «  in  lege  ipsorum  ■>•>.  Un  Juif  probablement  n'aurait  pas  em- 
ployé le  mot  «  Pentateuque  »  pour  désigner  les  Evangiles.  Ce  mot 
désigne  plutôt  les  Quinicrne,  comme  dans  les  Controverses  (ara- 
bes) de  Vévi'qne*. 

'  Faf^ius  voulait  mômo  composer  une  n'fulalion  du  vieux  Nizzahon,  mais  la  mort 
l'en  cmpûciia  ;  Vjoir  Wolf,  III,  p.  l'AVl. 
"  Voir  le  livre  de  Lipuiaun,  eh.  viii. 

'  Encyclopr'die  d'Erseh  el  (trubcr,  à  l'arlielo  Judiaclie  Lilcratiir,  ^  1!j. 
*  Voir  IJehr.  Bibliogr.,  XX,  p.  7ù. 


PAUL  DE  BOXNEFOY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOI  80 

Pour  ne  pas  laisser  notre  question  sans  aucune  solution,  j"ai 
comparé  le  petit  nombre  de  passages  du  Liber  fidei  où  le  Nizza- 
hon  est  nommé  formellement.  Par  malheur,  le  titre  même  du  Niz- 
zahon  n'a  pas  joué  de  bonheur,  aussi  bien  dans  le  texte  hébreu 
que  dans  la  traduction  latine.  Déjà  au  premier  chapitre,  page  28, 
S  16,  on  trouve  deux  fois  la  faute  d'impression  m^-^i  au  lieu  de  mj:3 
qui  se  trouve  plus  correctement  à  l'index,  page  131.  Fagius  traduit 
ce  mot  par  l'expression  vague  quidam,  dans  ce  passage  qui  se  rap- 
porte à  Isaie,  Yiii,  4.  Or  ce  paragraphe  se  trouve  dans  Wagenseil, 
page  84  (cf.  Lipmann,  chap.  225).  On  comprend  alors  comment, 
page  36,  §  2,  les  mots  mri2t:r!  hv  mns'5  n-r^n  Nn">ar;T  [sic],  qui  se 
trouvent  dans  le  LWer  fidei,  peuvent  être  traduits  par  Fagius  : 
«  Nunc  vero  scribam  etiam  aliquid  contra  (inanes  glorias  Judaîo- 
rum)...  »  Immédiatement  après  ce  passage,  on  trouve  le  mot  m^;m, 
rendu  en  latin  par  :  Author  libri  Nlzzachon  et  par:  triumphato'r 
ille.  A  la  vérité,  cette  citation  dit  que  l'idolâtrie  est  contraire  au 
Décaloguo,  ce  qui  ne  se  trouve  pas  dans  Wagenseil,  page  37,  sur 
Exode,  XX,  4  (cf.,  p.  134),  mais,  en  tout  cas,  cela  se  lit  dans  Lip- 
mann, chapitre  610. 

A  la  page  54,  §  31,  il  est  dit  que  les  chrétiens  s'appellent  Israël, 
mais  que  le  m^:  [Kizuach,  dans  la  version  latine,  p.  59)  y  oppose 
le  Décalogue  [Exode,  xxiii,  20).  Ni  Wagenseil  (p.  40  ;  conf.  p.  103 
et  122),  ni  Lipmann  (chap.  610),  n'ont  ce  détail. 

A  la  page  57  (vers,  lat.,  p.  59  :  NizuacJi),  il  y  a  une  discussion 
sur  Isaïe,  vi,  14,  et  Deuiéronome,  xiii,  7;  elle  se  retrouve  dans 
Wagenseil,  page  50. 

A  la  page  58  (lat.,  p.  63),  on  discute  sur  Ps.,  cxi.vi,  3,  comme 
dans  Wagenseil,  page  141  '. 

Voici  un  passage  enfin  qui  est  certainement  emprunté  au  ISiz- 
zuacJi  de  Lipmann,  c'est  celui  (p.  4)  où  est  cité  Maïmonide  réfu- 
tant l'opinion  que  le  monde  ne  serait  pas  créé,  opinion  d'Aristote, 
appelé  ici  û"^r>:r;  "wN-i  et  dans  Lipmann  (Introduction)  PT^Nn  ^n-i, 
ce  qu'il  faut  peut-être  corriger  en  mr^i-î  "c^ni. 

Or,  Lipmannn  a  composé  le  supplément  de  son  œuvre  en  1399  ; 
on  doit  donc  se  demander,  dans  l'hypothèse  que  Paul  de  Bonnefoy 
serait  l'auteur  du  Liber  fidei  original,  s'il  est  possible  que  le  livre 
d'un  auteur  de  Miihlhausen  ait  pu  arriver  si  vite  après  sa  compo- 
sition jusqu'en  France,  où  Paul  de  Bonnefoy  l'aurait  connu,  ou  si 
ce  dernier  était  un  Juif  allemand. 

Il  nous  reste  à  signaler  quelques  points  intéressants  du  Liber 
fidei.  |Les  expositions  du  IV"  chapitre  roulent  sur  les  calculs  du 

*  La  vraie  place  de  celte  discussion,  selon  Tordre  de  la  Bible,  serait  p.  185. 


S(3  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

temps  de  l'arrivée  du  Messie,  fondés  sur  les  1335  jours  de  Daniel 
pris  généralement  pour  des  années.  Le  chapitre  IIl  (p  49)  dit  déjà  : 
«  Plus  de  1335  années  se  sont  écoulées  depuis  la  destruction  de  Jéru- 
salem '  ».  Or,  1335  plus  68,  date  de  cet  événement,  d'après  les  chro- 
nograplies  juifs,  donnent  l'an  1403.  L'ouvrage  ne  peut  donc  pas 
avoir  été  composé  avant  1403.  Au  chapitre  IV  (p.  61  et  suiv.),  il  est 
dit  à  plusieurs  reprises  que  les  1335  jours  (ans)  de  Daniel  doivent 
être  comptés  à  partir  de  Toccupation  de  la  Terre  sainte  par  les 
Hébreux  jusqu'à  la  destruction  de  Jérusalem-.  A  la  page  68  (lat. 
p.  "74),  on  trouve  la  remarque  qu'aucun  des  calculs  établis  jus- 
qu'alors sur  l'avènement  du  Messie  ne  s'est  vérifié.  Si  l'on  compte, 
dit  l'auteur,  comme  Raschi,  1335  ans  depuis  Titus,  on  reconnaît 
que  ■plusieurs  siècles  se  sont  déjà  écoulés  depuis  le  temps  pré- 
dit %  et  que,  selon  Saadia  et  d'autres,  le  terme  devait  arriver 
encore  plus  tôt.  Or  nous  savons  que  Raschi  (sur  Daniel,  viii)  a 
calculé  l'époque  du  Messie  pour  Tannée  1352,  et  cependant  notre 
auteur  inconnu  prétend  que  depuis  ce  temps  plusieurs  siècles 
étaient  déjà  passés  !  N'aurait-il  pas  compris  les  calculs  de  Raschi? 
Quoi  qu'il  en  soit,  on  voit  qu'on  peut  difficilement  se  servir  de  ces 
données  pour  établir  l'époque  de  l'auteur.  Ainsi,  page  "79,  on  dit 
encore  que  le  jugement  dernier  doit  arriver  en  5379  (1619). 

Enfin,  pour  en  revenir  à  Jacob  b.  Elia,  il  faut  remarquer  que 
dans  le  dernier  chapitre,  le  malheur  des  Juifs  est  attribué  à  l'usure, 
parce  que  dans  les  mots  '^■^"wn  i-i^:b  ils  voient  les  chrétiens.  Or, 
au  contraire,  Jacob  b.  Elia,  dans  sa  lettre*  en  réponse  à  Paul,  qui 
avait  dénoncé  l'usure  des  Juifs,  emploie  la  phrase  'z'r^  sr;  ^  pour  dé- 
noncer la  rapacité  chrétienne.  Il  réplique  à  Paul  que  les  Juifs  de 
l'Orient  vivent  de  leur  travail.  «  11  est  vrai,  dit-il,  que  les  régents 
d'Ismaël  (les  Mahométans)  sont  méchants  et  pécheurs,  mais  ils  sont 
néanmoins  assez  raisonnables  pour  demander  un  impôt  annuel  fixe  ; 


'  !2"'5w  ElbN  est  une  faute  d'impression,  comme  le  prouve  la  version  latine  (p.  53]. 

-  De  roccupation  jusqu'à  l'érection  du  \"  temple 4'iO 

Durée  du  premier  temple /ilO 

Exil 70 

Epoque  du  second  temple il'i 

13:^0 

L'auteur  substitue  à  la  •  Gemalria  »  juive  une  Uematria  chrétienne  pour  ariivor 
au  nombre  désiré  convenant  au  temps  du  Christ.  Page  73,  il  retrouve  le  fiombre  de 
133;i  dans  ^"^PON  "ITDÏI  [sic],  Deul.,  XXI,  18,  comme  dans  Albiruni  (voir  Polem. 
Uii'L  apolog.  LilcvaHir,  p.  350),  Joseph  b.  Bechor  Schor  (voir  Deutsch.  morfjenliitul . 
(reselhckaft,  XXXI,  p.  394). 

'  Ces  paroles  sont  répétées,  p.  7'i. 

*  Jeuchurun,  p.  lîj. 

•  D'où  quelques-uns  font  dériver  le  mol  hep,  heji. 


PAUL  DE  BONNEFOY  ET  LE  LIVRE  DE  LA  FOY  87 

nos  princes,  au  contraire^  ne  pensent  qu'à  nous  piller,  qu'à  s'em- 
parer de  notre  or  et  de  notre  argent.  Que  l'on  considère  comment 
l'usure  se  pratique  à  la  cour  de  Rome  1  La  domination  de  la  terre, 
la  guerre  contre  la  Grèce  et  les  Maliométans  se  fait  avec  de  l'ar- 
gent ;  il  faut  que  de  hauts  dignitaires  du  clergé  en  apportent  à 
Rome  de  toutes  les  contrées,  et,  s'il  en  manque,  les  habitants  de  la 
Toscane  sont  prêts  à  en  prêter  à  usure  ;  on  donne  cinq  cents  pour 
mille,  mille  pour  dix  mille,  pour  «  ne  pas  venir  les  mains  vides  " 
devant  le  Seigneur  ».  De  la  sorte,  les  chrétiens  font. l'usure  avec 
leurs  propres  coreligionnaires,  et  nous  autres  que  sommes-nous  ? 

Berlin,  janvier  1882. 

M.  Steinschneider. 


DÉLIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME 

EN  L'ANNÉE  1555 

(MARCELLO  II  —  PAUL  IV  —  LES  MARTYRS  D'ANCONE  —  MORT  DE  CARAFFA) 


Dans  mon  exemplaire  du  Schalschélet  hakhabbcUâh  (Venise, 
1587),  outre  de  nombreuses  gloses  d'une  grande  valeur,  se  trouve, 
f"  117  a,  ligne  26,  une  note  marginale  qui  occupe  les  marges 
droites  et  inférieures  de  trois  pages.  Elle  est  écrite  de  la  main  du 
«  pèlerin  wbien  connu,  Abraham- Josepli-Salomon  Graziano,hâ  b''^k, 
comme  il  se  désignait  lui-même,  d'après  les  lettres  initiales  de  son 
nom,  qui  a  fleuri  dans  la  première  moitié  du  xvii^  siècle.  Ce  con- 
naisseur et  collectionneur  de  manuscrits  et  d'imprimés,  mort  rab- 
bin de  Modène  en  1684,  nous  a  conservé,  dans  cette  note,  l'extrait 
d'une  relation  historique,  qui  autrement  se  fût  perdue,  puisque 
on  n'en  a  trouvé  de  trace,  jusqu'à  ce  jour  du  moins,  ni  à  Rome 
ni  ailleurs.  Il  serait  grandement  à  souhaiter  qu'on  pût  découvrir 
de  nouveaux  témoignages  et  de  nouveaux  renseignements  sur 
l'événement  raconté  dans  cette  note,  car  elle  retrace  une  des  dé- 
livrances les  plus  merveilleuses  arrivées  aux  Juifs  de  Rome,  à  une 
des  époques  les  plus  critiques  de  leur  histoire.  Comme  je  puis  l'af- 
firmer d'après  les  recherches  de  mon  ami  M.  le  professeur 
Ignazio  Guidi,  on  n'a  pu  trouver  jusqu'à  présent  aucune  mention 
de  cet  événement  dans  les  archives  et  les  histoires  spéciales  de 
Rome.  Voici  la  note  de  Graziano  (texte  plus  loin)  : 

a  Ce  pape  (Paul  Carafï'a)  a,  comme  je  le  pense,  succédé  à  Marcello  II, 
■qui  mourut  après  un  règne  de  vingt  et  un  jours,  au  mois  de  Nissan 
5315  de  la  création  (1555  de  l'ère  chrétienne).  C'est  ce  que  j'ai  lu  dans 
une  Megilla  manuscrite,  rédigée  à  Rome  par  les  savants  qui  s'y  trou- 
vaient alors,  à  l'occasion  d'un  fait  miraculeux  arrive  aux  Juifs  à  cette 
époque.  Un  avocat  arabe,  le  docteur  Sulini  d'Espagne,  avait  tué  un 


DÉLIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME  EN  L'ANNÉE  15oo  89 

chrétien  après  l'avoir  frappé  de  coups  nombreux  et  l'avoir  blessé  en 
plusieurs  endroits.  Il  le  plaça  ensuite  dans  un  sac  et  le  porta  dans 
un  lieu  appelé  Campo  Santo,  parce  qu'on  y  avait  placé  de  la  terre 
apportée  de  Palestine.  Le  lendemain  matin,  lorsque  le  surveillant  se 
leva  et  aperçut  le  sac  plein  et  souillé  de  sang,  il  fut  saisi  de  frayeur; 
il  ouvrit  le  sac  et  y  vit  le  cadavre  d'un  enfant  couvert  d'affreuses 
blessures.  Il  se  rendit  auprès  des  juges  de  la  ville,  pour  faire  sa  dé- 
claration aux  autorités.  A  la  nouvelle  du  meurtre  de  l'enfant,  et  des 
violences  inouïes  qu'on  avait  exercées  sur  lui,  le  peuple  afflua  par 
masses  à  Rome  pour  voir  la  victime.  Tous  se  demandaient  stupéfaits 
qui  avait  pu  avoir  l'audace  de  commettre  un  tel  crime  et  de  porter 
le  cadavre  au  Campo  Santo,  alors  que  le  pape,  maître  de  la  ville  et 
de  cet  endroit,  avait  statué  que  quiconque  voudrait  ensevelir  un* 
homme  ou  une  femme  dans  ce  cimetière  aurait  à  remettre  le  mort 
au  gardien  et  à  payer  le  prix  de  l'inlmmation.  L'étonnement  et  la 
consternation  causée  par  la  mort  de  cet  enfant  fut  générale  parmi  les 
cardinaux,  les  évèques,  les  conseillers  municipaux  et  les  notables  de 
la  ville.  Lorsque  l'affaire  arriva  devant  le  pape  Marcello,  celui-ci  fit 
venir  ses  conseillers,  ses  agents  secrets,  et  les  gardiens  de  la  ville. 
Il  leur  recommanda  de  garder  l'enfant  et  de  ne  pas  l'ensevelir,  avant 
qu'on  eût  trouvé  ses  père  et  mère,  ou  un  de  ses  parents.  On  devait 
saisir  ces  derniers  et  les  jeter  dans  la  prison  réservée  aux  criminels 
passibles  de  mort.  Dans  la  ville,  on  devait  établir  des  guetteurs  et 
des  espions,  pour  apprendre  ainsi  ce  qui  se  disait  de  la  victime. 

Pendant  ce  temps  parut  aussi  parmi  ceux  qui  étaient  venus  voir 
l'enfant  un  apostat  d'origine  juive,  qui  affirma  hautement  qu'un  tel 
crime  ne  pouvait  avoir  été  commis  que  par  les  Juifs  ;  car,  disait-il, 
ils  ont  coutume  chaque  année  entre  Purim  et  Pâques^  de  tuer  un 
enfant,  non-juif  :  on  peut  s'en  convaincre  par  leurs  livres  d'his- 
toire et  leurs  chroniques.  Les  chrétiens  l'approuvèrent  naturelle- 
ment et  lui  accordèrent  d'autant  plus  de  créance  que  ce  calomnia- 
teur des  Juifs  était  le  même  qui,  en  l'année  looS,  le  jour  du  Rosch 
haschana,  avait  provoqué  l'auto-da-fé  du  Talmud  et  d'autres  livres. 
Le  calomniateur  se  rendit  avec  beaucoup  de  gens  auprès  des  cardi- 
naux, du  préfet  et  des  conservateurs,  et  demanda  qu'on  exterminât 
les  Juifs  à  cause  de  ce  crime.  Les  conservateurs  se  virent  forcés  de 
s'adresser  au  pape,  pour  qu'il  donnât  l'ordre  de  massacrer  et  d'exter- 
miner toute  la  population  juive  et  de  piller  leurs  biens,  le  3  lyar 
[mercredi  24  avril].  Mais  le  pape  Marcello  leur  recommanda  d'agir 
avec  prudence  dans  cette  aflaire  :  ils  devaient  d'abord  se  convaincre 
que  cette  abomination  avait  véritablement  été  commise  par  les  Juifs, 
alors  seulement  il  consentirait  à  porter  contre  eux  un  édit  de  mort 
et  d'extermination. 

Sur  ces  entrefaites  vint  un  médecin  chrétien,  pour  voir,  lui  aussi, 
l'enfant  assassiné.  Il  affirma  le  reconnaître  pour  l'avoir  soigné  dans 
la  maison  d'un  chrétien,  le  docteur  Sulim.  L'enfant  était  orphelin, 
mais  sa  mère,  avant  de  mourir,  l'avait  remis  avec  toute  sa  fortune 


90  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

entre  les  maius  de  ce  docteur.  Lorsque  cette  nouvelle  parvint  au 
«  bargello  *  »,  il  se  rendit  dans  la  maison  du  docteur  Sulim.  Il  y  vit 
le  lit  de  Tenfant,  souillé  de  sang  ;  mais  il  ne  trouva  pas  le  docteur 
chez  lui. 

A  la  suite  des  instantes  prières  que  lui  avaient  adressées  les  chefs 
de  la  communauté  juive  de  Rome  et  à  la  suite  de  la  promesse  d'une 
somme  d'argent  considérable,  il  se  donna  toutes  les  peines  possibles 
pour  découvrir  le  docteur.  Lorsque,  grâce  à  ses  efforts,  il  l'eut  enfin 
trouvé,  il  le  fit  jeter  en  prison,  lui  fit  mettre  aux  pieds  des  chaînes 
de  fer,  jusqu'à  ce  qu'une  décision  formelle  intervînt  de  la  part  du 
pape.  A  la  suite  des  interrogatoires  auxquels  les  juges  soumirent 
le  docteur  Sulim,  Taflaire  fut  tout  à  fait  éelaircie.  Il  avoua  sans 
'honte  que  c'était  lui  qui  avait  martyrisé  et  mis  à  mort  l'enfant,  mais 
que  c'était  dans  la  seule  intention  de  faire  périr  tous  les  Juifs  des 
Etats  du  Pape  et  de  toute  la  terre.  On  n'avait  pas  encore  prononcé 
sa  sentence,  lorsque  mourut  à  un  âge  très  avancé  le  pape  Mar- 
cello II.  Alors  parut  le  pape  qui  avait  surnom  Théatiuo,  lequel 
ébranla  tous  les  empires  et  accabla  de  persécutions  les  Israélites,  qui 
furent  profondément  humiliés  à  cette  époque.  Le  jour  de  son  anni- 
versaire, il  fit  un  festin  pour  tout  son  entourage.  A  cette  occasion,  il 
amnistia  les  criminels,  mais  donna  en  même  temps  Tordre  de  pen- 
dre le  docteur  Sulim,  ce  qui  fut  fait.  Par  là  fut  apaisée  la  colère  du 
pape  et  du  peuple.  Béni  soit  l'Eternel,  le  Dieu  d'Israël,  qui  lui  a 
conservé  si  merveilleusement  sa  protection  à  toutes  les  époques  ; 
car  beaucoup  se  sont  élevés  contre  Israël  pour  le  détruire,  mais 
Dieu,  par  sa  grande  miséricorde  et  sa  bonté  infinie,  l'a  sauvé  de 
leurs  mains.  Puisse-t-il  ainsi  faire  des  miracles  en  notre  faveur  et 
nous  rassembler  bientôt  des  quatre  coins  de  la  terre.  Amen  ! 

J'ai  écrit  ici  l'extrait  de  la  relation  de  ce  miracle  pour  que  le 
lecteur  de  ce  livre  (le  Schalschélet  hakabbalah),  qui  y  apprend  que 
Paul  Garaffa,  le  Napolitain,  décréta  contre  Israël,  en  Vô'ôb,  des  peines 
sévères,  et  que  déjà  auparavant  au  Pvosch  Haschana  de  Tannée  1353, 
il  avait  fait  brûler  le  Talmud,  sache  avec  quelle  précision  tous  ces 
événements  concordent  avec  l'histoire  miraculeuse  racontée  par  les 
rabbins  de  Rome  et  que  j'ai  rapportée.  Le  pape  surnommé  Théatino, 
qui  fit  le  procès  au  docteur  Sulim,  auteur  de  l'assassinat  et  cause  de 
tant  de  maux  pour  les  Juifs,  est  bien  le  pape  Paul  Garaffa  de  Naplcs, 
que  Guédalia  b.  Jahia,  l'auteur  de  ce  livre,  a  mentionné  en  cet  en- 
droit, puisque  c'est  précisément  ce  pape  qui,  en  13oo,  décréta  tant 
de  mesures  contre  les  Israélites.  Si  Guédalia  b.  Jahia  n'a  pas  ra- 
conté cette  histoire,  c'est  sans  doute  parce  qu'il  n'a  pas  connu  la 
relation  du  miracle  ou  qu'il  a  désiré  la  cacher  pour  quelque  raison 
inconnue. 

Joseph  Cohen  était  le  seul  jusqu'à  pri'.seut,  qui,  dans  son  Emeli 

'  Chef  de  police,  capo  dei  birri,  d'après  Tcxplieuliou  que  ino  donne  M.  Guidi. 


DÉLIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME  EN  L'ANNEE  i;i:>>  '.U 

habacha^,  nous  eût  fait  connaitre  le  grave  danger  qui  menaça  les 
Juifs  des  Etats  de  l'Eglise  en  1555.  C'est  d'après  lui  que  Graetz  a 
raconté  cet  événement  dans  le  IX^  volume  de  son  Histoire  des 
Juifs ^  p.  359. 

Nous  apprenons  par  Graziano  qu'en  souvenir  de  cette  merveil- 
leuse délivrance,  les  Juifs  romains  firent  écrire  un  rouleau  dans 
lequel  fut  exposée,  dans  le  style  de  la  Megilla  d'Estlier,  toute  l'his- 
toire de  l'événement.  A  ce  rouleau  vint  s'ajouter  bientôt  un  poème, 
dans  lequel^  sans  doute,  le  même  sujet  était  traité  une  seconde 
fois,  sous  forme  poétique. 

De  ces  deux  pièces,  nous  n'avons  décidément  que  l'extrait  qu'en 
a  fait  Graziano.  Même  sous  cette  forme,  la  relation  inconnue  jus- 
qu'à ce  jour  nous  offre  une  confirmation  heureuse  et  un  com- 
plément du  récit  que  nous  fait  Joseph  Cohen.  Comme  il  fallait  s'y 
attendre  de  la  part  de  cet  historien  véridique  des  infortunes  des 
Juifs,  son  récit  se  trouve  confirmé  par  celui  de  Graziano  dans 
tous  ses  points  essentiels.  Les  divergences  entre  les  deax  relations 
devront  être  jugées  avec  circonspection  aussi  longtemps  que  nous 
n'aurons  pas  sous  les  yeux,  dans  sa  teneur  intégrale,  le  véritable 
document  historique,  le  rouleau  écrit  par  les  soins  de  la  Commu- 
nauté de  Rome-.  On  peut  avoir  assez  de  confiance  dans  l'auteur 
de  VEmek  licOmclia,  car  il  fut  contemporain  des  faits  en  question 
et  il  a  connu  vraisemblablement  les  relations  en  quelque  sorte  of- 
ficielles des  chroniques  romaines. 

Ce  qui  peut  paraître  fort  étrange,  c'est  qu'il  n'est  fait,  à  ce  qu'il 
semble,  aucime  mention,  dans  la  relation  romaine,  du  rôle  que  pa- 
rait avoir  joué  Alexandre  Farnèse  dans  cette  circonstance.  D'après 
le  récit  de  Joseph  Cohen  (p.  117),  le  cardinal  Farnèse  devint  ulté- 
rieurement le  sauveur  des'  Israélites,  mais  il  paraît  résulter  du 
récit  simple  et  naturel  de  notre  Megilla  que  sous  Marcello  son 
intervention  n'avait  pas  été  nécessaire. 

Notre  document  rend  pour  ainsi  dire  justice  devant  l'histoire  à 
deux  papes,  en  faisant  apparaîti'e  sous  un  jour  favorable  leur 
attitude  dans  ces  circonstances.  Marcello  II,  auquel  on  n'éleva  pas 
même  un  monument  après  sa  mort  ^  paraît,  autant  qu'on  en  peut 
juger  par  la  durée  de  son  règne,  qui  n'a  été  que  de  vingt  et  un 
jours,  avoir  été  animé  de  dispositions  bienveillantes  envers  les 
Juifs.  En  tous  cas  il  mérite  que  nous  gardions  de  lui  un  bon  sou- 
venir, pour  avoir,  par  sa  présence  d'esprit  et  la  fermeté  qu'il  dé- 

'  Ed.  LeUeris,  p.  ll'i,  trad.  allein.  do  Wiener,  p.  92. 

^  Noiis  ne  connaissons  aujourd'hui  que  le  nom  du  f!;refiier  de  la  Communauté  Israé- 
lite do  Home  en  lîiîj'i  :  Jchuda  b.  Sabbati  (Bcrliner,  J)/rty(j»/«,  I,  8'i). 
3  Grégorovius,  Pahstijrii.bcr,'!"  édit.,  p.  1311. 


92  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ploya  contre  les  efforts  des  judéophobes,  empêché  dans  la  ville 
éternelle  des  malheurs  indicibles  et  des  massacres  sanglants. 

Ce  qui  est  surtout  satisfaisant,  c'est  le  fait  que  l'auteur  de  la 
persécution  a  été  mis  à  mort  sur  l'ordre  de  Paul  IV,  ce  pape  contre 
lequel  l'histoire  juive  a  prononcé  un  jugement  si  sévère.  Cette  in- 
formation est  d'autant  plus  vraisemblable  que,  dans  une  affaire 
aussi  importante,  c'est  bien  le  pape  qui  a  dû  prononcer  l'arrêt  de 
mort  et  non  pas  le  cardinal  Farnèse,  comme  nous  le  raconte  la 
chronique  de  Joseph  Cohen. 

Grâce  à  cette  nouvelle  relation,  les  faits  s'enchaînent  plus  inti- 
mement et  avec  plus  de  vraisemblance.  C'est  encore  une  de  ces 
histoires  de  Pâque  qui  ont  fait  si  souvent  répandre  le  sang  des 
Juifs.  Il  est  à  remarquer  qu'il  ne  vint  pas  à  l'idée  du  peuple  que 
les  Juifs  pussent  être  les  auteurs  du  meurtre.  Il  fallut,  pour  faire 
soupçonner  les  Juifs  et  les  précipiter  dans  le  malheur,  l'invention 
du  misérable  Chananel  di  Foligno,  qui  avait  déjà  pris  une  grande 
part  à  l'auto-da-fé  du  Talmud  en  1553.  De  même,  deux  ans  aupa- 
ravant, à  Asti,  dans  un  cas  analogue,  il  avait  fallu  un  Allemand 
pour  exciter  la  populace  italienne  à  accuser  les  Juifs  d'un  meurtre  ', 
Chananel,  qui,  dans  la  relation  de  Joseph  Cohen,  ne  paraît  que 
dans  la  dernière  partie  du  drame,  après  que  celui-ci  a  pris  une 
tournure  heureuse,  joue  dès  l'origine,  d'après  la  nouvelle  rela- 
tion, le  rôle  d'un  instigateur.  La  réserve  de  la  Curie  est  d'autant 
plus  mémorable.  Elle  ne  se  laissa  pas  entraîner  à  des  violences 
précipitées  par  l'audacieux  apostat  qui,  rappelant  son  origine  juive 
et  de  prétendues  traditions  de  famille,  pouvait  donner  plus  de 
créance  à  ce  conte  de  l'usage  du  sang  chez  les  Juifs. 

On  remarquera  également  qu'il  a  fallu  de  grosses  promesses 
pour  décider  les  autorités  à  déployer  plus  d'activité  dans  la  re- 
cherche du  meurtrier.  Ce  qui  préserva  de  la  mort  la  population 
Israélite  de  Rome,  c'est  qu'on  empêcha  à  temps  la  fuite  du  docteur 
Sulim.  Ce  sont  ces  détails  précis  (comme  par  exemple  cette  cir- 
constance que  le  meurtrier,  qu'on  n'avait  pas  trouvé  dans  sa  mai- 
son, ainsi  que  le  raconte  Joseph  Cohen,  a  dû  être  d'abord  tiré  de 
sa  cachette),  qui  donnent  à  la  nouvelle  relation  la  valeur  d'un  té- 
moignage oculaire.  Elle  doit  être  l'impression  immédiate  de  l'évé- 
nement, car  elle  nous  a  conservé  le  nom  du  misérable  apostat  et  le 
souvenir  de  toutes  les  circonstances  accessoires.  C'est  seulement 
sur  la  scène  où  s'est  passé  l'événement  qu'on  prend  plaisir  et  in- 
térêt aux  petits  détails. 

Les  deux  autres  glosf.'s  luibraïques  citées  plus  loin,  et  que  j'em- 

'    'Emch  hahacha,  p.  H3  ;  Wiener,  p.  91. 


DELIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME  EN  L'ANNEE  1335  93 

priinte  également  à  mon  exemplaire  du  Schalscliélet  hahhabbâlâh 
d'Ibn  Jahia,  f.  117  5,  sont  aussi  de  Graziano  et  concernent  le  plus 
grand  crime  et  le  plus  grand  bienfait  de  Paul  IV  :  Fauto-da-fé 
d'Ancone  et  sa  propre  mort.  Nous  ne  connaissions  jusqu'à  pré- 
sent qu'une  poésie  de  Jacob  di  Fano  dans  laquelle  soit  raconté 
l'horrible  événement  d'Ancone  (Graetz,  IX,  p.  362,  n"  1),  et  le 
poème  de  Salomon  Chasan  (Zunz,  Lilg.,  592),  publié  par  M.  Ad. 
Neubauer  dans  le  Lihanon,  V,  344.  Nous  apprenons  par  notre 
note  que  dans  la  synagogue  portugaise  de  Pesaro,  parmi  les  élé- 
gies récitées  le  9  d'Ab  dans  lesquelles  avait  déjà  trouvé  place 
plus  d'une  histoire  douloureuse  de  l'exil,  on  en  disait  régulièrement 
une  consacrée  aux  malheureux  maranes  d'Ancone,  victimes  du 
parjure  de  Caraffa.  La  piété  de  notre  «  pèlerin  «  nous  a  conservé 
aussi  le  nom  du  poète  Mordechai  b.  Juda  di  Blanes  '  qui  paraît 
être  issu  de  la  famille  bien  connue  des  Blanes. 

On  connaît  la  réputation  que  s'est  faite  le  plus  sombre  des 
papes,  le  napolitain  Paul  Caraffa,  que  les  auteurs  Juifs  nomment 
Théatino,  parce  qu'il  a  fondé  l'ordre  des  Théatihs ,  et  aussi 
parce  que  la  valeur  numérique  de  ce  mot  le  stigmatisait  du  nom 
d'Aman  (i3-':ûN"':û  =  95  =  ';^lr!  ;  Wiener,  1.  c,  p.  210,  n°  288)  et  que 
maudirent  après  sa  mort  Juifs  et  chrétiens.  De  môme  qu'il  ne 
respecta  pas  les  œuvres  de  ses  prédécesseurs,  de  même  que,  par 
exemple,  il  voulut  faire  détruire  le  Jugement  dernier  de  Michel 
Ange  et  ne  renonça  à  son  projet  que  sur  les  instances  des  cardi- 
naux, de  même  il  ne  respectait  pas  sa  propre  parole,  surtout  quand 
elle  avait  été  donnée  à  des  Juifs.  Il  a  pu  couvrir  la  nudité  des  saints 
sur  le  tableau  de  Michel  Ange-,  mais  aucune  peinture  ne  sau- 
rait couvrir  sa  réputation,  et  ses  yeux  n'étaient  pas  encore  fer- 
més que  déjà  ses  contemporains  prononçaient  contre  lui  la  sen- 
tence d'éternelle  damnation.  On  connaît  les  excès  qui  se  produi- 
sirent à  Rome  après  sa  mort,  le  18  août  1559.  On  sait  que  sa  statue 
surmontée  de  la  triple  couronne  fut  traînée  à  travers  les  rues  de 
Rome  et  que,  sur  le  Capitole,  on  prit  la  décision  de  détruire  ce  mo- 

'  Isaac  b.  Scheschet,  dans  ses  Réponses,  n"  127,  nomme  Meschullam  di  Blanes. 
C'est  de  Blancs  en  Catalogne  (Zunz,  Zeitschrift,  p.  143),  que  cette  famille  tire  son 
nom.  Il  n'est  donc  pas  impossible  que  ses  branches  italiennes  descendent  do  maranes 
réfup;iés  en  Italie.  Sur  Juda  di  Blanes,  voyez  Graetz,  IX,  ;J0,  n"  2;  BrûU,  Jahrluch^ 
I,  2?)G...  Sur  Juda  b.  Salomon  di  Blanes,  cf.  llehr.  Bil/lioffrnphic,  IV,  p.  148,  n"ll'i 
Cat.  Bodl.,  30.'jO,  n"  2901,  et  3Iaf/a:iu  de  Bcrliner,  II,  'M).  Notre  Mordochaï  est 
peut-être  le  fils  de  ce  Juda  Blanes  qui,  en  lo24,  à  Rome,  veilla  David  Réubeni  pen- 
dant son  sinj^ulicr  jeûne,  comme  il  le  raconta  lui-même  à  Gedalja  ibn  Jachia  (dans 
Schalscliélet.  éd.  Venise,  f"  4:1"). 

*  On  donnait  à  Daniello  da  Voltera  le  surnom  de  Brachettone,  faiseur  de  cu- 
lottes, parce  qu'il  s'oll'rit  pour  ce  travail.  —  Cf.  Sprinter,  Ra/Tael  iind  MichelanijHo, 
p.  423. 


iii  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

iiument,  «  parce  que  le  pape  avait  démérité  de  la  ville  ainsi  que  de 
tout  l'univers  ».  Mais  dans  d'autres  villes  d'Italie,  comme  à  Pé- 
rouse,  avaient  aussi  éclaté  des  troubles  semblables,  à  la  nouvelle 
de  sa  mort  '.  Cette  nouvelle  mit  surtout  en  joie  les  Juifs.  Le  poids 
qui  les  avait  si  lourdement  oppressés  était  enfin  enlevé  de  leur 
âme  :  ils  pouvaient  de  nouveau  respirer.  Et  de  même  qu'à  Rome, 
signe  saisissant  des  sentiments  communs,  la  populace  laissa  tran- 
quillement un  Juif  placer  rinfàme  chapeau  jaune  sur  la  tiare  de 
la  statue  papale,  de  même,  dans  les  autres  villes  d'Italie,  à  la  nou- 
velle de  la  mort  du  pape,  se  produisirent  sans  doute  hautement 
chez  les  Juifs  des  éclats  de  joie  et  de  bonheur.  Comme  nous  le 
savons  par  les  Réponses  d'Abraham  Menahem  Porto  de  Crémone 
que  nous  a  conservées  également  le  zèle  du  collectionneur  Gra- 
ziano-  un  décret  de  Paul  IV  voulait  que  chaque  Juif  qu'on  trou- 
vait sans  le  ■'5:"iw-ii  rniD  «  chapeau  jaune  »,  payât  une  amende 
de  20  scudi,  et  maintenant  c'était  un  Juif  qui  plaçait  ce  signe  de 
déshonneur  sur  la  tète  de  l'auteur  de  l'édit  !  «  Paul  IV,  dit  Grégo- 
rovius  (1.  c,  p.  138)  ne  construisit  pas  de  loggia  ni  de  galeries  de 
tableaux,  mais  une  prison  avec  des  murs  et  des  portes,  et  c'est  là 
qu'il  enferma  l'objet  de  sa  haine,  les  Juifs.  Le  ghetto  est  son  mo- 
nument architectural.  »  Depuis  la  destruction  du  temple,  il  n'y  a 
pas  eu,  paraît-il,  de  temps  plus  fécond  en  douleurs  pour  les  Juifs. 
C'est  pourquoi  nous  comprenons  le  sentiment  qui  poussa  la  main 
du  scribe  à  insérer  dans  son  livre  de  prières  le  jour  et  l'heure  où 
unhérault  après  l'autre  apporta  à  Modène  cette  nouvelle  joyeuse  : 
Paul  IV  a  cessé  d'édicter  des  peines.    . 

Budapest. 

David  Kaufmann . 


APPENDICE. 

Texte  de  la  note  de  Graziauo,  f"'  1 17. 

c^-îTr:^!!  i;:  -,t.v>::  ^Vin  3"=  ,  mc^sNri  ^V'iDsn  ND"N-ip  ■^b"nNs  mi^T: 

'  Kanke,  Die  rômischen  Pâhste  in  dcn  letztcn  vier  Jahrhundcrten,  I,  p.  IS",  n"  1. 
»  Voir  ses  collections,  f.   '120,  dans  le  codex  228  de  mon  ami  M.  llalberstam,  de 
Bielitz. 


DÉLIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME  EN  L'ANNÉE  loSo  Oo 

ntiwn  r\'j'::^  ,  10^3  '::iirio  toit  t5n':;:^'^  ^r\^  irnsb^n  n'':rt:j  i-iI-in  r^o 
J-itt  -«Dri  ,û3in^nb  r:"Dpn  t^^  n3'«:j  N-^n  .ûbii^n  nx^^nb  ^"xyc  d-^obN 

■'^  isim  ,  'J)2Tr^  "imN3  û^mnib  3>-i-'iS">:;  n-^oa  ï-t:;;'?:  '?;•  d"'?:"irr  dm^n  do 
ï-irjrn  ,  "inN  nDî  :\"in  ,  ■i'tisd  d'^"bio  'nV'-j-in  r-i^n  n?:"::  ,  '^a-i:^  iriN  ^"''^ 
ib"^:û:^i  nnN  pt:)  "^in  imN  dai  ,  nmTDNT  mnn  niD^^n  m-nnm  d^i'iiD  la 
•Tpnn  .rj"DiSD  id"î:np  NnpDr:  ,bNT>ai  y-iN  nD3>»  nn  ittiao  iriN  dip7:n 
î-nnn  i:ib  nnn  ,Q"7?d  ^biDib^^i  aàiz  Niriî^  p-cn  ni^  ï-7Nm  -17:1"^^:  dp'::^  -tin 
,  mir-i»3  mDî2  d^  rmrr  -in^  irs  d'>::J  rr^n  ■^id  nt^t  p"::^  nx  nns-'i ,  i-ibi'ir» 
■^M-i"!  .driins^ia  bx  t-TTi-:  rnn  nmn  pn  '^\-T;b  t^:?!-!  iiiûsto  bx  "^b-^i 
-i-^ra  13)3'?:  r;;a;»:va  riî<  ^c^'::>^  t\iz''T\  n^nTiSkSi  ,  ^5^r;r;  ni':r!  rrr^?:  i'):^'r;D 
^  bN  i!5\^  ■irT):nii ,  Ninn  .-innî^  -irrri  nx  mi^ib  d^sn  d-^)::»  litapn^n  ,  n?:!-! 
iD"?:Npn  nN'^nnbT  ,  p  rr:;yb  inb  nxb?:  nt5N  ^'7Wix^  Nin  -^î:  iTrN'i-i ,  t^hn 
ï-T'r;  Ninn  dip):m  'r^vr,  "jiidb'iJ  -n3"'iDNr!  ^^b^o  -in-iiî  nnis):  ,  b":n  rj";ï«D 
-no)ob  '■p':iMz  V-r->  n3"):Np3  dnnpb  rr^rix  in*  ;r\^  dO  n-'S):  nt--:;  -^iz  bd'^D 
iN-iïïdi  nm  srjid  ,  dr-iinp  -irn  Tb:^  baiîatJ  nïo  s'iisbi  -i^ai^r:  T^a  dmN 
,  r\i2  Nit-ir;  -i;'3rî  nN  -r^rn  -^binr,  niV^ii  ,  d-'STT^^'m  d"^3"i):r>r!rî  d-ii^ccnr: 
isni"i  nbri  .ib'^^Ta  nrs'^DNrî  bN  -in'in  r-^rinm  ^ib^iris  nîT?:n'p  ini  i-î):ri 
.  b":r;  n:*:?:  nis  -n7:":;b  n):Nb  dmN  nsi-^T ,  tt^:>  iToitîT  imo  "^br^i  T^?:dn  nx 
,Ti:iDn"iT ,  i^m-ip72  "HN  nx  ,  i):n  nNi  t^in  pn  nî<i£)3'^  ^"iN  nr  nm-inp^  Nbi 
t!''n-i"i5<  iTû-'^'^'ûn  .d-^iidïî  m^on  "^-i^dn  "ton  dip):  ,imon  n-^na  ûtd-itu-^t 
•*:5'^N  !sn  "-p  "j-^m  ,  Ninn  s-ni^fr  hv  d-^n^aiN  r;?o  in7ot:b  n-'r'n  d^bsim 
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.^i-^b^  ï-rb-^bn  drr?:  t-jc;>-i  TNtii  ,  b^ntî-'n  pnt:^  inbni  inpirrî  ^^  ,  !-5T!-i 
PN  piN-ib  Nii-T  d:*  "^pnD  "inx  ndi-i  N2  !nbNï-i  dnanrt  'nnN  ^r^^•^^  ,  N-i-^tt^T 
nriN  -ipiis  p^an  lï-rD-^niai  ,  ipiwx  t^d?:  Nino  i^nt  ,  b"3rT  :ii-ir!rî  -li'as-i 
iPT^pcJ-i  ï-ip):.':;  d"np  i7:n  ^n  ,  d^i  n^  nb  'jxn'::"!  ,  d-^"biD  '^^"^û^1  N-ip5W 
?d>  PN  ibv'tî-^'nNnn  bi:N  :>tt'ïïirtD  -^ït^t  ,  !-ib  -iirN  b^  d:»  Nni-irt  -irj"nr;  T^a 
STinn  ir^sn  p:û7:  pn  nt^i  ,b"3rt  tii'^b"iD  -irj"-i-it-r  p^na  ^btn  pnt 
pii-^npïi  p'joriT:-)  ,  p-^nn  Ninr;  irj"T]ïi  pn  Ni):  Nbn  ,  dn?:  i-ibbi:;'':  b"Dïi 
Ï-I3):  "ib  ppb  li-ntT^unm  ,N):in  p"p  ^onsn  "^;T':):  "i5  lor^iî  PTipnr:i 
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96  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

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'^•2'iT,  "wpiniT  ,  -ir3"'îN^  rhyjn  nN73  iinn  Nia  nj^  t:?  ,  t:;22  ï-tNn  bna 
,Nnî-!r!  ïj-ibio  ma"T7rî  "[To  û-iCûD-iirr;  nb^ci  Twim  -npn  t^tnd  Ni£7:-^T 
nDii'rr  !-T^-  ni-">:j  cia  Nbi  i-rrin  t.xi  ^ï-fn  '7\x  !-ii-o  ni  ï—t'C^yin 
?D  rx  ^2Nb  -^-3  iri^r;  rrcru;  i-i?:  bD  bsN  ,NT-n  -i^-r;  nx  :;-nrTr;n 
Ti'<::y-^  i-r?:  ^iid  Nbi  ,  ûtin  nnn  ,  ni-'s^sNi-;  m^b^'j  bi^n  TwN  û-«n"ii-iiï^ 
"iT'D'^sN'f-i  ::p  b2N  ,  b":M  nb"-^::n7o  TP-:-2î<r!  i-im;::  J-7n-''>r3  ttû  -^5  ,  nb- 
b:?  n-iT'n  "mT  ,n:3b?:"2  'vT^i'-.i-î  -r>:;i<  ,  1j"-'l:n-':j  r-fï-r  i?:"::  iir^*:: 
■i-'-;::  brib  i-irT::?^  în-:'  ,-r'7bi72  ins-  ûrm  ,-ii<M  Ti?:-^n  bi-'i  bïî-.'vTi 
PN  yrt-7  b:?  mbrb  ^":;  iif^T  ^Q-^mONi-i  bri  'C.s-i  r.s  no-^t  ,v^,nz'-\ 
,!-frr'w  sr"r:i  TPî^-rNr;  Y-'-ï^  î^'-'"'^  Vw^  Twn::  ,b":!-i  û-ibnc  "n"L2"nt-i 
tz-imc  ,-.mnT7  brn  îzr;?:::'  Tien  >^-'b2!-;  -^is  ,b^î'^\a•>  ■'pbN  'n '^i-in 
tb-^jt?:  i:"^bT7J'-  ii^Tcm  £■'2-1:7  T'^cnna  NTm  ^cmb^b  arrib:^  f'i^:-!:? 
r-£;D  rniN?:  rTi::?2  i;mN  ynp-»!  m^bs^-i  ïd'^dd  1:70:^  rr:::^'-!  p  ^ûir: 
■'-D  /"jN^D  riTr:  c^ca  n^r^:  ni:ip  nx  \-inr:2i  —  ,)i2^  -iteNii  ,ynïîT; 
n;n-np  ibni^s  -iT's-'îNr;  T'j'  ï^n-.s  iDin7:o  îbr:  nsca  N-npb  r"'-nr:b 
Vl:*::  fsbx  r^-c^izu  r-«3  ,bN'-i"--'3  ni'-i  nn-^î;  intD  -it:;  -i\:;n  ibiDx:- 
■^D  ,i"w^7:rir!  sqbNb  n"-'':5  p3ï:  r/'^n  c"'::-  tp':^  TjIzi^  n-npai  ,  ïiT'ifb 
b":r!£^c3  rTi':'7:  ']nr2  an:;r>:j  r;":  by  ,pT!p")2  û^:nD7:  ûr;  ibbri  û"i-imr; 
inN"*:;  Tw^^<•::  ,\n-i::TC  r;"-r*7:  ims  b^'  n?2Ti  i^y  ^i^^ni^  -laino 
tz-^biD  -,i:û"'nr:  nniN":  !-;?:p:  i-;"-rr"w  ,  ir::^-'::  t':-»::  1"';s73  T'i-io  nrD-^ai^r; 
-irs-^stî-  ii^r;  Nin  ,  û-'mr;-'-  by  ^r>^2^^'r>  m-pTs  -it:t  ,  b":ï-;  -^niDS  ny;?^  ^-^1-::^ 
-lîD  lan'':-  N^-^n-^  ";  -'bn'j,  '-1  n-i-  "jï*^  "i-'STn'ca  ."^biD^n  ndn-inp  "ibni«3 
:ibN-?2  p"cb  i"a"::  rr^n  b.s-i'w-'3  m-i-'T^  r;7:D  ni:;  -ns-^^tî-  nî  c^-:;  ,  tbn 
N-'TP  "j  «■'bi:;  '-I  n-ir;  rTwr7:n  ri"  -i::t  xb  ûnt  ,  b"3r;  b^iDT  ,  rTT^i:''b  "l'^'^n 
Nbo  1M  ,  b"3r!  û-iDS  ir!\:î:>73'-  mns  îtîn-î  Nbo  ■':37:  nth  ûrcir;  ■'bnN  ,  b";r!  b"T 
■irars"::  i-!7:":j  im  — .  "ibi:^  di7::d'-  tr::  r;T\^  "^r:':  125  b:'  imbrnb  nii-i 
^■^-.r-  n-^r:  isi--  -ir;-  ri-ino  b":r;  -^-nsD  D^bo  -irj"T!r!':5  b"'2Ti  T,':iyj2n 
-13-ini:;  "t^--  nmi<a  anSD  r!"DN  .bb^  b":-  '^c;  -•:;;'7:2  n^îa  Nb  i-ir::  ^"i\x 
naip^n  i"D  \-)r;;ri3  y-ii'-i  —  rnriiS  ap2:ri  —  ,b";r;  û^oa  rTwi'72  bD  b:> 
ib-iiND  i7:o  'p3  i-;^-  ,  b";r;  -n^D^sx-  "i;^-js^-j  -^3  c"w  3ipr>:i  ,  îbr;  q-îb  n^:'3 
'■•rmDïiw  .biST^r-^  -^ra  nmN  b:>  ^^-ly"\^  pnnn  pm^r:;  -it:;  Ninu;!  ,in5  mPSiD 
p"Db  :::"''::  p3'w3  p7:i  ,  Pinn^  p-ni:i  ,  o-^iirT^b  rtNibni^  bi::a"i  ,  û-'pi-i"' 
-irD-'^Nrr»::  z'jz-oz  b";r;  rrririnr;  y:  s:. "C  "j^iNa  ,  iisoir.N  's  ,  ^'<:i':i'ri  cib^nT: 
-irc-^ENT:  1P1N  T^n  ,  b"3n  ta-^oi  rT:;:>7:2  iD^r;  nb-^i.SD  ira^-'a  r;3i372r; 
,b";3  û-'iT--'-  152  -m':)  n):  -it:o  ribnpn  pb'>rbo  bi*3  anr:  ins  3pso 

.b-^rb  ""papoo  i7:dt 

[Ib.  f.  1l7i,  1.  6.] 

bv  ,13-1  -^5  i;\m3ir3  îinna  -i'^n  ^s-ï^'t  î-ninr:!  /iii-^a  ^lay?:  -iidd 
t^ï-'P  -la-'H  -i2Dn ,  î-j-^n  'j7:t  riT-'i^m  ,  iiy  i:;3  ûppiiîto  nîipïn  -^Dt-i'^a  d-^iai-jpr; 
■i:;-;  t:;»  ,  b"3:T  c^rxbm  mirr^  n"-i^îi7aa  -^m-i':  'n  ûsnn  ,r;T  bv  r^s-'  pHwX 


DÉLIVRANCE  DES  JUIFS  DE  ROME  EN  L'ANNÉE  loo-'.  97 

ir3-nN72  o^^Z)^1  ns-ii^n  ioïî -^-i 'wSOid  -iva  nsttn  rjjO  -«i»  nm^  n^^ib 

.b"l^T 
[Ib.  1.  21.] 

b"TT  nbNrt  û-'iniD  inni?a  b3>i ,  Tm-i-^u  b:ri ,  riT  its^dn-  b3>  sino  \nN2:73 
cibNiTittJ  p"Db  û3"-^u5  n3UJ  rûor^i<  "d  .riTri  Drn  ûstra  '^-'N  ,-•^^^•'  nrj  -i^Tb 

,  y-iN  T^inrt ,  y-iNn  nbnbanD  y^n^'2  n^N  ,  ib-^iNS  i7:o  i^-'ldn-'lj  -n-'S'^DNr; 
na-in^b  lû-iD3"i  N-'bN::-'^  bsb  mbin:*  mni:i  ,  m7:nb7a  nnoi ,  mDbx373  u:i:?-ir; 
biL^-'ai  D-'-inN  d-'imi  û^^^miDri^j  m3>-n  mnn  m-it:*  -it:*  ,  bisno-^  ■'32 
ni<T3  bNius-'b  nhn^  rr\i  rr^n  Nbi ,  m-itiN  rrnitn  (:*n3)25  nin-12)  rTNibn- 
iiDb-  1D3172»  b^  "^3  ,  û-'mt-î  irmDiyn  ,  r,xr^  ûrr;  li'  ,  idw  rr^n  innn  ût'M 
rnnn  û-ip"'  i^Torn  l^^ob  'n  ,-ii:  "lisb  ina  iDbn  û-isiisr!  û:;-i  ^"nn-'Nb 
,r;3-iU3Ni3D  i3m2'a  nx  ni^^i  ,bN-iU3i  b3>  ma  nmi  iu5N',inN  nrD"^DN 
'T  û-'io  nrnnwS  ^b7:  ,  n^TDr;  -iTD-^DNr; .  172N  ,  issi-ion  nN  Nb7:^i 

N^bN  -1"».-:  -iNis7ûrt  b"^  -nTn7:n  ,b"Dr;  i"d  o-'-it^jjipa  mnn  ^-lNii7a  s"::' 
T^TN  ini:p7o  i''"i:2r:;  "V'J  oidt  rrrio  ,  Nbr-'rr:  b"i:T  tior  7a"3a  iSNi-'i'^n 
bwp  D1D-Î7D -iNia'm  —  iDî<b'^7j  oïDii  nb'^iîTc^o  pnn  /ni<"'i-iN372nb  rtj-^iTan 

.  ■»nr72 


T.  IV. 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGUENÂU 

sous  LA  DOMINATIO?y^  ALLEMANDE  ' 


En  1610  des  troubles  éclatèrent  en  Alsace,  qui  forcèrent  encore 
une  fois  les  Juifs  des  environs  de  Haguenau  à  se  réfugier  dans  la 
Yille;  ils  durent  acheter  ce  refuge  au  prix  de  70  florins.  Lorsque 
la  paix  régna  de  nouveau,  les  Juifs  durent  quitter  Haguenau. 
Parmi  eux  se  trouvait  un  homme  instruit,  médecin  et  rabbin  :  il 
demanda  aux  magistrats  l'autorisation  de  rester  dans  la  ville.  Le 
conseil,  pour  toute  réponse,  lui  signilla  les  conclusions  suivantes  : 
«  Nous  défendons  à  Haym,  juif,  rabi,  de  s'établir  chez  nous-.  »  — 
11  dut  donc  s'en  aller  aussi,  pour  retourner  à  Landau,  ville  d'où  il 
était  venu. 

Après  quelques  années  de  repos,  commença  la  guerre  de  Trente 
ans.  En  1621  les  troupes  suédoises  vinrent  en  Alsace.  Aussitôt  les 
Juifs  des  environs  de  Haguenau  accoururent  de  nouveau  dans  la 
ville  pour  s'}-  mettre  à  l'abri.  Ils  eurent  à  payer  12  reichsthalers 
par  ménage  et  par  semestre,  comme  droits  de  résidence  passagère. 
Vers  la  fin  de  l'année,  Mansfeld  s'empara  de  Haguenau,  où  ses  sol- 
dats, avec  l'assenthnent  de  leurs  supérieurs  et  au  mépris  des  con- 
ventions, se  mirent  à  piller  la  plus  grande  partie  des  établissements 
de  la  ville,  qui  devaient  leur  être  sacrés,  mais  où  ils  cherchaient 
des  trésors.  Ils  ne  manquèrent  naturellement  pas  de  tout  saccager 
aussi  dans  le  temple  Israélite.  Les  livres. qu'ils  trouvèrent  et  qui 
ne  pouvaient  guère  leur  être  utiles  furent  déchirés  et  jetés  dans 
les  rues'. 

'  Voir  tome  II,  p.  73,  et  tome  III,  p.  ;J8, 

»  Arch.  de  Ilag.,  BB.  lilj. 

'  Au  milieu  de  ce  tumulte,  fut  ramassé  un  machsor  du  matin  de  Yoni-Kippour,  en 
morceaux.  Les  feuilles  en  mesuraient  0'",  47  de  hauteur,  sur  0,  31  de  largeur;  elles 
servirent  ù  relier,  pendant  plusieurs  années,  les  registres  des  protocoles  du  conseil  de 
cette  époque,  et  elles  se  trouvent  encore  en  cet  état  aux  archives.  On  voit  bien  i|ue 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGUENAU  99 

Les  Israélites  pleuraient  ces  malheurs,  quand,  au  commence- 
ment de  l'année  1622,  rarcliiduc  Léopold  vint  au  secours  de  Ila- 
guenau  et  y  mit  le  siège  pour  la  prendre  d'assaut.  Mansfeld  avait 
eu  le  temps  de  lever  une  contribution  de  guerre,  pour  laquelle  les 
Juifs  versèrent  400  florins. 

Sur  ces  entrefaites,  au  mois  d'avril,  mourut  un  des  Israélites 
réfugiés.  La  communauté  ne  put  penser  à  le  faire  inhumer  hors  de 
la  ville,  au  cimetière  actuel  ;  elle  s'adressa  en  conséquence  au 
Stettmeister  Capito  *.  Celui-ci  leur  céda  une  partie  de  son  jardin, 
pour  y  enterrer  leurs  morts,  moyennant  une  redevance  d'un 
reichsthaler  par  mort,  qui  devait  lui  être  payée,  à  lui  personnelle- 
ment. Toutefois,  pour  être  à  couvert  contre  toutes  les  éventuali- 
tés, ils  avaient  dû,  le  jour  du  décès,  et  avant  môme  d'avoir  pu  s'en- 
tendre avec  Capito,  soumettre  l'affaire  au  magistrat.  Le  conseil 
se  réunit  le  19  (dans  l'intervalle  était  mort  un  2''JuiO  pour  s'en- 
tendre sur  la  question.  Les  Israélites,  y  fut-il  dit,  ne  pouvant  sor- 
tir de  la  ville,  pour  aller  au  cimetière,  y  enterrer  leurs  deux  morts,  • 
à  cause  des  troupes  qui  les  arrêteraient,  demandent  un  emplace- 
ment dans  la  ville,  et  cela  le  plus  tôt  possible.  En  effet,  plus  la  chose 
traîne  en  longueur,  plus  il  y  a  danger  (à  cause  de  la  contagion  et 
de  la  grande  agglomération  de  troupes).  Ils  veulent  bien  donner  à 
la  ville  un  florin,  comme  droit  de  sépulture  -,  comme  par  le  passé. 
Il  fut  alors  décidé  :  «  Qu'ils  arrangent  cette  affaire  au  mieux,  afin 
V  qu'il  n'en  résulte  pas  de  danger  pour  la  cité,  et  qu'en  attendant 
»  la  fin  du  siège,  ils  enterrent  leurs  morts  dans  le  jardin  commu- 
M  nal  mis  récemment  à  la  disposition  du  commissionnaire  du  Con- 
»  seil.  Qu'ils  payent  pour  chaque  inhumation  un  florin  d'or.  Seule- 
»  ment  qu'ils  prennent  note  que  cette  autorisation  ne  leur  est 
»  concédée  que  pendant  la  durée  des  hostilités  autour  de  Ilague- 
»  nau.  Après  cela,  on  verra  à  tomber  d'accord  avec  eux-'.  » 

Les  Juifs,  appelés  pour  entendre  ces  conclusions,  supplièrent  les 
honorables  membres  du  conseil  de  vouloir  bien  modérer  leurs 
exigences.  Ceux-ci  consentirent  à  remettre  ce  tribut  exceptionnel 
à  un  reichsthaler.  Quand  tout  fut  terminé,  le  Stettmeister  Capito 
s'avança  pour  annoncer  à  ses  collègues  qu'il  avait  déjà  accordé 
aux  Juifs  un  coin  de  son  jardin,  moyennant  un  reichsthaler  par 

l'écrivain  n'était  pas  un  savant.  Ces  pages  pullulent  de  fautes  d'orlliograplie  et  sont 
pleines  d'omissions.  Une  autre  main  s'est  chargée  de  la  correction.  Le  rite  en  est 
moitié  polonais,  moitié  allemand. 

'  Il  demeurait  dans  la  maison  Antoine  Guntz,  rue  du  Sel,  et  avait  un  jardin  der- 
rière sa  maison,  comme  on  le  voit  encore  aujourd'hui,  donnant  sur  le  marché  aux 
grains. 

«  Arch.  de  Ilag.,  BB.  iiO. 

'  Liv.  de  proloc.  du  Conseil,  aux  arcli.  de  llag.,  BU.  S9. 


100  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mort  (outre  le  reichsthaler  qui  était  à  verser  dans  la  caisse  mu- 
nicipale), en  ajoutant  que  personne  ne  pouvait  rien  prétendre 
contre  cet  arrangement.  Naturellement  on  lui  donna  raison  :  il 
n'eût  tenu  qu'à  lui  de  se  faire  verser  deux  reichsthalers,  s'il  avait 
voulu. 

Les  Juifs  des  villages  environnants,  revenus  dans  leurs  foyers 
à  la  fin  de  l'année  1622,  accoururent  de  nouveau,  en  janvier  1623, 
supplier  les  autorités  de  Haguenau  de  vouloir  bien  leur  permettre 
de  se  réfugier  encore  une  fois  en  ville.  Ils  en  reçurent  l'autorisa- 
tion, à  la  condition  que  chaque  famille  donnerait  pour  droits  de 
séjour,  la  somme  de  12  reichsthalers  (à  5,80  =  69  fr.  60)  et  appor- 
terait, avec  ses  biens,  trois  viertel  (sacs)  de  seigle  par  tête. 

Les  Juifs  prièrent  le  magistrat  de  diminuer  cette  somme,  vu  les 
grands  sacrifices  qu'ils  avaient  faits  depuis  près  de  trois  ans.  L'im- 
position fut  alors  réduite  à  huit  reichsthalers. 

Enfin,  Haguenau  recouvra  sa  liberté  et  surtout  un  peu  de  tran- 
quillité :  les  Juifs  étrangers  retournèrent  dans  leurs  villages. 

Quand  les  esprits  furent  un  peu  apaisés,  la  communauté  Israé- 
lite songea  à  remettre  son  temple  en  état.  A  bout  de  ressources, 
elle  s'adressa  à  la  banque,  qui  était  sous  le  patronage  de  la  ville, 
pour  faire  un  emprunt.  Les  fonds  de  cette  banque  venaient  de  dé- 
pôts, et  c'est  par  des  prêts  qu'on  faisait  valoir  cet  argent.  Mayer, 
au  nom  de  tous  les  Juifs  de  Haguenau,  emprunta  donc  en  février 
1623,  du  dépôt  fait  par  les  héritiers  de  Plnlippe  Wïdwesheim,  la 
somme  de  cent  livres  neue  ungarische  ducats  (1063  fr.).  Pour  tou- 
cher cette  somme,  Mayer  dut  signer  un  billet  et  donner  pour  cau- 
tion une  chaîne  en  or  du  poids  de  16  1/2  loths  et  un  demi-quintel 
(259  grammes  '7/10'''),  de  plus,  trois  gobelets  en  vermeil  pesant  en- 
semble 496  loths  (soit  3  kilog.  62  1/2  gr.).  Les  Juifs  purent  rem- 
bourser cette  avance  avec  les  intérêts,  le  20  septembre  de  la 
même  année  ' . 

Grâce  à  la  tranquillité  qui  avait  commencé  à  régner  dans  la  ville, 
les  autorités  eurent  de  nouveau  le  temps  de  penser  aux  Juifs.  Pen- 
dant ces  dernières  années  de  guerre,  un  des  six  pères  de  famille 
s'était  trouvé  retenu  à  Saverne,  par  le  siège  qu'en  avait  entrepris 
Mansfeld.  Il  fut  forcé  de  s'y  créer  une  occupation  pour  se  nourrir. 
Il  réussit  dans  ses  affaires,  il  se  i)laisait  d'ailleurs  dans  cette  ville. 
Comme  il  s'était  distingué  pendant  le  siège,  l'archiduc  Léopold  lui 
avait  permis,  sur  sa  demande,  de  vendre  sa  maison  de  Haguenau 
à  un  antre  Juif  et  de  venir  demeurer  ù  Saverne.  A  son  arrivée  à 


'  Ils  avaient  fuil  fioiir  cilu  uupri's   d'un  jiarlii'ulirr  un  ciiiprunl ,  dans  de  nicilknires 
conditions   (Ardi.  d.;  Hafi;.   Cahier.  CC  lîj:}). 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGUENAU  101 

Haguenau,  il  présenta  son  remplaçant  à  la  magistrature.  Celle-ci 
lui  défendit  de  vendre  sa  maison  à  ce  coreligionnaire.  Comme  ce 
Juif  Jàckel  ou  Jacob  se  croyait  dans  son  droit,  il  porta  plainte  à 
l'archiduc  Léopold,  qui  intercéda  pour  lui  auprès  du  Landvogt', 
Après  des  pourparlers,  il  put  avoir  l'autorisation  de  partir,  lais- 
sant à  sa  place  le  nommé  Gerstel,  appelé  plus  tard  l'Allemand,  pour 
le  distinguer  d'un  autre  Gerstel,  dénommé  alors  le  Welch,  parce 
qu'il  était  arrivé  à  la  suite  des  troupes  françaises. 

Ils  étaient  donc  de  nouveau  au  nombre  de  six  familles,  quand  en- 
fin, le  13  juillet  1626,  Jouas,  fils  de  Simon,  reçut  la  permission  de 
s'établir  à  Haguenau  comme  Juif  protégé.  Cependant  il  ne  put 
acheter  de  maison  de  bourgeois  ;  mais  il  fallut  qu'il  allât  demeurer 
chez  son  père,  qu'il  versât  12  reichsthalers  (69  fr.  60)  pour  sa  ré- 
ception, qu'il  fournît  un  mousquet  à  l'arsenal,  qu'il  payât  tous  les 
ans  24  schillings  de  capitation,  et  4  thalers  pour  le  vin  qu'il  pour- 
rait boire  (s'il  n'en  prend  pas  à  table,  tant  pis  pour  lui).  Il  fut 
obligé,  bien  entendu,  de  venir  à  la  mairie,  devant  le  Stettmeister, 
prêter  serment  de  fidélité  aux  lois  de  la  ville,  etc.-.  C'était  la  pre- 
mière fois,  après  quatre  siècles  et  demi,  que  la  communauté 
comptait  plus  de  six  familles.  Cette  impulsion,  une  fois  donnée,  le 
mouvement  suivit.  Au  fur  et  à  mesure  que  la  ville  eut  besoin  d'ar- 
gent, situation  qui  se  reproduisit  souvent  pendant  ce  siècle,  elle 
frappa  monnaie  en  imposant  les  Juifs,  selon  le  bon  plaisir  du 
Stettmeister. 

La  guerre  sévissant  de  nouveau,  en  1627,  les  Juifs  étrangers  re- 
vinrent. C'était  après  la  fête  de  Pentecôte.  Au  mois  de  juin,  Bild- 


'  «  A  uos  amés  el  i'éaux  les  Unterlandvogt  et  conseillers  de  la  Basse-Alsaeo  à 
Haguenau. 

•  Leopold,  par  la  grâce  de  Dieu,  archiduc  d'Autriche,  etc.,  etc. 

»  Vous  verrez,  par  la  copie  ci-jointe,  que  la  ville  de  Haguenau  veut  s'opposer  aune 
résolution  que  nous  avons  prise  récemment  à  l'égard  du  nommé  Jacob,  Juil' à  Ha- 
guenau. Nous  lui  avions  permis  de  vendre  sa  maison,  située  en  ladite  ville  à  un 
autre  Juif,  et  la  ville  a  l'intention  d'empêcher  celte  vente. 

•  Ledit  Juif  n'est  pas  le  premier  venu.  Il  nous  a  rendu  des  services  et  encore  plus 
à  la  ville  de  Saverne,  lors  du  siège  de  cette  localité  par  les  troupes  de  Mansfeld . 
Il  a  aidé  avec  une  adresse  particulière  à  éteindre  les  bombes  qui  y  étaient  lancées,  et 
a  empêché  ainsi  plusieurs  incendies.  Nous  avons  profité  de  cette  occasion  pour  lui 
donner  un  témoignage  public  de  notre  reconnaissance,  d'autant  plus  que  nos  con- 
seillers intimes  nous  avaient  envoyé  sur  lui  des  rensciginemcnts  très  favorables. 
Nous  devons,  si  nous  "Voulons  être  justes,  secourir  ledit  Juif  et  chercher  autant  que 
possible  à  dissuader  la  ville  de  Haguenau  de  son  opposition.  Si,  au  contraire,  elle 
trouve  des  raisons  assez  plausibles  qui  méritent  d'être  débattues,  on  pourra  s'en- 
tendre à  ce  sujet  pour  les  discuter.  Vous  donnerez  votre  avis  sur  les  propositions 
à  faire  à  l'une  ou  à  l'autre  partie. 

•  Ayez-nous  toujours  comme  jusqu'à  présent,  en  afTection,  elc. 
.   Kouffach,  1C  avril  162!i.  .  (Arch.  de  Hag.,  BB.  V6]. 

^  Protoc.  du  Conseil,  aux  Arch.  de  Hag.,  BB.,  61.  A'oir  plus  loin  n"  li. 


102  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

stein  proposa  de  faire  paj^er  à  ceux  du  Reicli,  un  reichsthaler  par 
semaine  par  chaque  homme,  et  un  schilling  par  chaque  femme, 
enfant,  domestique  et  bétail  même,  d'imposer  ceux  de  la  Land- 
Togtéi,  à  raison  de  deux  florins  par  homme  et  les  autres  à  raison 
d'un  schilling.  La  différence  d'imposition  était  excessivement  mi- 
nime, comme  on  le  voit  :  Bildstein  profitait  de  chaque  occasion. 
Les  Israélites  du  dehors  firent  donc  une  demande  collective  de 
diminution  de  cet  impôt  extraordinaire,  surtout  pour  les  enfants, 
les  femmes,  les  domestiques  et  les  bestiaux.  Le  14  juin,  le  conseil 
se  réunit  et  après  un  assez  long  débat,  où  Bildstein  tenait  à  sa  pre- 
mière proposition,  ceux  du  Reich  furent  imposés  à  raison  d'un 
florin  par  semaine  et  par  homme,  ceux  de  la  Landvogtéi  d'un  reichs- 
thaler '.  Les  Juifs  revinrent  à  la  charge,  en  disant  que  ces  dix  an- 
nées de  guerres  continuelles  les  avaient  presque  ruinés  et  qu'on 
devait  avoir  pitié  d'eux.  Le  magistrat  leur  répondit  qu'il  compre- 
nait leur  position,  mais  qu'il  n'y  pouvait  rien  changer,  et  que  les 
riches  qui  se  trouvaient  parmi  eux  n'avaient  qu'à  payer  pour  les 
pauvres-.  Enfin,  poussés  à  bout,  ils  n'eurent  plus  d'autre  res- 
source que  de  s'adresser  au  commandant  colonel  Asçanius,  gou- 
verneur de  la  ville.  Celui-ci  eut  compassion  d'eux  et  les  imposa  de 
la  façon  suivante  :  Ceux  du  Reich,  ensemble,  à  cent  florins  par 
trimestre,  ceux  de  la  Landvogtéi  à  six  thalers  par  trimestre,  et 
par  tète,  ce  qui  faisait  plus  de  cent  pour  cent  de  diminution. 
Malgré  tous  ces  sacrifices,  ils  n'eurent  pas  le  droit  d'aller  à  la 
synagogue.  Voici  du  reste  une  histoire  intéressante  à  ce  sujet  ^  : 
A  la  séance  du  31  janvier  1628,  le  conseil  prit  la  résolution  sui- 
vante :  comme  dans  la  synagogue  on  entend  continuellement  des 
cris,  aussi  bien  la  nuit  que  le  jour,  elle  sera  fermée.  Simon,  le 
président,  vint  alors  annoncer  que  cette  maison  lui  appartenait, 
et  qu'il  devait  être  autorisé  à  y  laisser  faire  des  prières.  On  lui  de- 
manda de  montrer  ses  privilèges.  Il  répartit  qu'il  n'y  avait  pas  de 
libertf'  spéciale  concernant  la  synagogue,  mais  qu'il  se  rapportait 
aux  promesses  que  le  magistrat  avait  faites  en  15'79  à  la  commu- 
nauté. Bonus  et  Mayor  vinrent  au  nom  de  leurs  autres  coreligion- 
naires dire  que,  depuis  un  temps  immémorial,  ils  avaient  toujours 
pu  exercer  librement  leur  culte  partout  oii  les  Juifs  s'étaient 
trouvés.  Le  secrétaire  du  conseil,  après  avoir  compulsé  les  traités 
faits  avec  les  Juifs,  rapporta  qu'il  n'y  était  pas  explicitement  dit 
qu'ils  étaient  libres  d'avoir  une  synagogue,  et  encore  moins  qu'ils 

'  Ardi.  de  Ilofr.,  BB.  02. 

'  Ihid. 

'  l'rotoc.  du  Conseil,  Arch.  de  Ilag.,  BB.  G2. 


HISTOIRE  DES  JUIKS  DE  HAGUENAlJ  103 

pouvaient  se  réunir  en  communauté  ;  que  cette  permission  était, 
et  avait  toujours  été,  une  simple  tolérance  de  la  part  du  magistrat. 
Le  conseil  maintint  donc  sa  première  décision  :  le  temple  devait 
être  fermé.  Mais  Simon  en  sa  qualité  de  propriétaire,  et  parce 
que  les  quittances  de  la  rente  foncière  étaient  en  son  nom,  pou- 
vait venir  à  la  synagogue,  y  faire  ses  prières. 

Le  28  février.  Bonus  et  Mayer  revinrent  demander,  au  nom  de 
leurs  coreligionnaires,  l'autorisation  de  prier  dans  le  temple.  Ils 
furent  remis  à  quinzaine.  Enfin  le  10  mars  le  contrat  suivant  fut 
élaboré  et  lu  aux  Israélites  : 

Comment  à  Vavenir  les  Juifs  de  Haguenmi  doivent  se  comporter, 
2)ar  rajjjoort  à  leur  synagogue. 

Comme  ils  sont  très  souvent  venus  Importuner  les  membres  du 
conseil,  qu'ils  courent  après  eux,  et  qu'ils  supplient  incessamment 
et  très  humblement,  ils  ont  touché  le  cœur  des  magistrats.  Ceux-ci 
veulent  donc  bien  par  pure  grâce,  et  sans  aucune  obligation,  leur 
permettre  de  retourner  dans  leur  synagogue;  seulement  cette  autori- 
sation ne  leur  a  été  accordée  qu'à  la  condition  qu'aucun  étranger  n'y 
entre.  S'ils  transgressent  cet  ordre,  ils  seront,  à  la  première  infrac- 
tion, punis  d'une  amende  de  dix  florins  et  même  davantage,  mais  si, 
contre  leur  devoir  et  leur  serment,  ils  recommencent,  nous  nous  ré- 
servons de  leur  infliger  une  peine  arbitraire. 

Les  Juifs  protégés  de  Haguenau  à  qui  nous  donnons  de  nouveau, 
par  la  présente,  la  permission  de  venir  avec  les  leurs  à  la  synagogue, 
doivent,  s'ils  ne  veulent  pas  qu'on  leur  défende  le  service,  aussi  bien 
à  l'intérieur  qu'à  l'extérieur  du  temple,  être  plus  modestes,  ne  gêner 
personne  par  leurs  prières,  surtout  modérer  leurs  cris  habituels, 
quand  ils  s'adressent  à  leur  Dieu,  et  au  surplus,  tâcher  de  se  mon- 
trer réservés,  et  d^evenir  des  gens  honorables.  De  cette  manière  l'idée 
ne  viendra  jamais  au  conseil  de  vouloir  les  gêner  dans  leurs  offices  ; 
mais  encore  une  fois,  que  par  leurs  manières  ils  n'offensent  pas  la 
bourgeoisie  de  notre  localité. 

De  même  que  les  Juifs  tiennent  grandement  pour  sacré  leur  sabbat, 
et  ne  veulent  pas  s'occuper  d'affaires  mondaines,  de  même,  ils  doi- 
vent aussi  trouver  très  rationnel  que  nous  n'aimiôns  pas  les  voir  les 
dimanches  et  jours  de  fête  conduire  leur  bétail  au  pâturage,  et,  par 
suite,  gesticuler  dans  les  rues  de  la  ville.  Nous  tenons  au  contraire  à 
ce  qu'ils  s'en  abstiennent  totalement,  comme  nous  le  leur  avons  déjà 
fait  comprendre  plus  clairement.  Faute  de  quoi,  le  magistrat  sera 
obligé  de  les  punir  arbitrairement. 

Outre  cela  ils  feront  bien,  s'ils  ne  veulent  pas  être  inquiétés,  de  se 
conformer  continuellement,  à  tous  les  droits  réguliers,  à  tous  les  pri- 
vilèges, à  tout  ce  qui  est  juste,  de  ne  transgresser  aucun  de  ces  com- 
mandements qui  regardent  spécialement  les  Juifs. 


lOi  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Les  Israélites  naturellement  répondirent  qu'ils  voulaient  de 
tout  cœur,  obéir  ponctuellement  à  tous  les  articles  qu'on  venait  de 
leur  lire  ' . 

Néanmoins,  après  être  rentrés  de  nouveau  en  possession  de 
cette  liberté  qui  leur  était  si  chère,  ils  s'adressèrent  de  rechef 
quelques  jours  après  au  Conseil,  pour  lui  soumettre  une  grave 
question. 

«  Nous  ne  sommes  que  sept  pères  de  famille,  -  dirent-ils,  dans 
»  leur  pétition,  et  il  faut  que  nous  soyons  à  dix  pour  faire  nos 
»  prières.  Nous  supplions  donc  encore  une  fois  le  plus  humble- 
))  ment  possible,  qu'on  permette  aux  étrangers  de  venir  au  temple, 
))  afin  que  nous  soyons  en  nombre.  » 

Ils  s'étaient  bien  gardés  de  parler  de  leurs  domestiques  juifs, 
qu'ils  avaient  eus  de  tout  temps,  pour  avoir  minian,  et  parce 
qu'ils  ne  pouvaient  engager  de  serviteurs  chrétiens.  Ils  eurent 
beau  implorer,  rien  n'y  fit.  Les  étrangers  ne  reçurent  jamais  l'au- 
torisation de  se  rendre  à  la  synagogue  -. 

Au  mois  de  septembre  de  l'année  suivante  (1629),  Bonus  maria 
sa  fille  à  un  jeune  homme  des  environs  de  Cologne  nommé  Isaac, 
et  obtint,  pour  son  gendre,  l'autorisation  de  venir  demeurer  à 
Haguenau,  aux  conditions  qui  lui  avaient  été  faites  à  lui-même  en 
1610,  avec  cette  différence  qu'on  ne  demanda  au  jeune  marié 
qu'un  cheval  dans  son  écurie  à  la  disposition  de  la  bourgeoisie.  Un 
mois  après,  en  octobre,  Mayer  put  aussi  établir  son  fils  Lôwel, 
aux  mêmes  conditions  ■''.  Les  voilà  donc  à  neuf  ménages  pour 
supporter  toutes  les  charges  dont  la  ville  les  imposait  continuel- 
lement. En  1630,  en  plus  de  leurs  impôts  ordinaires,  ils  furent 
forcés  de  verser  400  florins  de  contributions  de  guerre.  Ils  durent 
s'imposer  des  sacrifices  pour  s'acquitter,  mais  ils  furent  obli- 
gés de  s'exécuter  *.  En  outre,  ils  eurent  à  supporter  la  plus  grande 
partie  des  impositions  qui  pesaient  sur  leurs  compatriotes  de 
llaguenan. 

La  guerre  continuait  toujours.  La  ville  avait  une  sorte  de  garde 
civique  pour  maintenir  l'ordre  dans  ses  murs.  Toutefois  aucun 
Juif  n'était  admis  dans  ses  rangs,  quoiqu'on  eût  vu  par  l'exem- 
ple de  Jacob,  qu'alors  déjà,  un  Juif  savait  être  brave.  Par  contre, 
il  était  obligé  de  se  faire  remplacer.  Une  autre  anomalie,  qu'on  a 
peine  à  comprendre,  était  qu'on  ne  leur  confiait  pas  de  garni- 
saires  ;  et  si  l'idée  en  était  venue  à  l'autorité  civile,  les  comman- 

'  Arch.  de  Ilag.,  BB.  62.  V.  plus  loin  w  15. 

'  Ihid. 

■*  Arch.  deHag.,  BB.  63. 

*  Ihid.,  EE.  8H, 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGUENAU  lOo 

dants  militaires  s  y  tussent  refusés.  Pour  compenser  toutes  ces 
exemptions  de  corvées,  logements  de  gens  de  guerre  et  gardes  à 
monter,  ils  eurent  à  payer  vingt  florins  (à  3  fr.  87  =  77  fr.  40)  par 
semaine,  qu'ils  devaient  répartir  entre  eux.  Pour  éviter  tout  re- 
tard, ils  étaient  obligés  de  faire  les  versements  tous  les  mardis  ' 
entre  les  mains  du  receveur-. 

Les  événements  se  précipitent.  Nous  sommes  en  1631.  On  n'en- 
tend plus  parler  que  de  guerre.  On  fait  dans  la  ville  de  grands 
préparatifs  pour  ne  pas  être  pris  au  dépourvu.  Dès  le  début,  la 
communauté  juive  est  obligée  de  verser  deux  mille  florins  (à  3  fr. 
87  =  7740  francs),  elle  doit  fournir  quatre  chevaux  pour  le  service 
de  la  poste,  tandis  que  le  reste  des  habitants  n'a  à  livrer  que  deux 
chevaux  ou  90  florins^.  En  septembre,  les  Juifs  supplient  le  ma- 
gistrat de  les  exonérer  des  vingt  florins  qu'ils  payaient  pour  être 
exempts  des  corvées  et  autres  charges,  et  off'rent  de  se  libérer  en 
nature.  Ainsi  ils  proposent  de  livrer,  à  partir  de  ce  mois  jusqu'à 
la  Pàque  suivante,  cent  voitures  de  bois  et  un  quintal  de  chan- 
delles. On  accepte  leur  proposition  ;  seulement  le  terme  est  rap- 
proché, et  la  quantité  augmentée.  Ainsi  ils  sont  contraints  d'ame- 
ner de  septembre  1631,  au  carnaval  de  1632,  cent  cinquante 
klofi'ter  (600  stères]  de  bois,  trois  quintaux  de  chandelles  et  deux 
sacs  de  sel.  Quand  ils  voulurent  se  mettre  à  l'œuvre  pour  s'acquit- 
ter envers  la  ville,  ils  ne  trouvèrent  pas  d'ouvriers  pour  faire  le 
bois.  Aussi  le  Conseil  les  punit  pour  leur  retard,  en  leur  imposant 
l'obligation  de  fournir  vingt  kloffter  de  bois  en  plus,  et  demanda 
que  la  commamauté  en  fournît  dix  par  semaine,  jusqu'à  complète 
livraison  K 

Cependant  les  Suédois  étaient  annoncés  d'un  côté,  et  les  Lor- 
rains d'un  autre.  Tous  les  Juifs  non  seulement  des  environs  de  la 
Landvogtéi  de  Haguenau,  mais  encore  du  comté  de  Hanau,  du 
Landvogt  de  Strasbourg,  vinrent  se  réfugier  à  Haguenau.  Ils  ar- 
rivèrent ainsi  au  mois  de  janvier  1632.  Ils  étaient  au  nombre  de 
268,  dont  124  vieillards,  137  enfants,  et  7  célibataires.  On  fixa  leur 
imposition  à  2  florins  par  tête  ,  soit  536  florins  (à  3  fr.  87  = 
2074  fr.  32),  plus  24  florins  par  famille  pour  contributions  de 
guerre^  moyennant  quoi,  ils  eurent  l'autorisation  de  rester  jusqu'à 
Pâques.  Certains  autres  eurent  à  verser  trente  reichsthalers  par 


•  Le  mardi  s'appelait  alors  Zinslag  (jour  des  intérêts] ,  d'où  probablement  le 
Dienslag  et  certainement  la  traduction  patoise  de  mardi,  chez  les  paysans  d'Alsace, 
par  Zistig. 

»  Arch.  de  Hag.,  BB.  f>:\. 

3  Arch.  de  llag.,  EE.  Si. 

4  Ibid.,  BB.  G*5. 


106  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

mois  (à  5  fr.  80=  174  fr.)  ^  Le  préposé  de  ceux  qui  étaient  dénom- 
més de  la  Landvogtéi,  était  Haym  de  Landau,  a^ec  qui  nous  avons 
déjà  fait  connaissance  en  1611.  Il  remit  à  la  mairie  une  liste  de 
tous  ceux  qui  l'a^^aient  suivi,  et  qui  s'élevaient  au  nombre  de 
43  personnes.  Ils  durent  payer  jusqu'à  Pâques  un  reichstlialer  par 
tète,  et,  de  plus,  15  reichsthalers  par  famille,  pour  contributions 
de  guerre.  Ce  même  liaym,  en  sa  qualité  de  savant,  était  obligé 
de  tenir  un  registre  oii  il  inscrivait  tous  les  Juifs  qui  entraient 
dans  la  ville  ou  en  sortaient.  Ce  livre  devait  être  constamment  à 
jour,  afin  que,  si  l'autorité  voulait  le  vérifier,  il  fût  toujours  pré- 
sentable. Si  l'on  y  trouvait  une  irrégularité  quelconque,  Haym 
était  prévenu  qu'il  serait  cité  en  justice. 

Les  Juifs  de  Haguenau  avaient  aussi  de  lourdes  impositions.  A 
côté  de  tout  ce  qu'ils  versaient,  ils  eurent  encore,  à  partir  du  mois 
de  janvier  de  cette  année,  trente  reichsthalers  à  payer  par  mois, 
pour  l'entretien  de  leurs  soldats  2. 

Le  temps  passait  très  vite,  l'on  voyait  arriver  la  fête  de  Pâques 
et  Haguenau  était  toujours  dans  la  crainte  de  se  voir  prise  par  les 
Suédois.  Les  Juifs  demandèrent  une  prolongation  de  séjour,  on 
la  leur  accorda  jusqu'à  la  Pentecôte,  avec  la  même  imposition  que 
celle  qu'ils  avaient  déjà  payée.  Comme  supplément,  ils  durent  en- 
core contribuer  pour  500  florins  à  l'entretien  des  officiers  de  guerre 
qui  se  trouvaient  dans  la  ville.  Ils  se  plaignirent  de  ces  imposi- 
tions trop  élevées  auprès  du  sous-bailli  et  du  conseil  de  préfec- 
ture ;  ceux  de  la  Landvogtéi  adressèrent,  en  outre,  la  lettre  sui- 
vante aux  autorités  locales  : 

Haguenau,  ce  28  juin  1632. 

A  Messieurs  du  magistrat,  très  nobles,  etc., 

Nous,  pauvres  Juifs,  nous  venons  vous  ennuyer  de  nouveau  par 
notre  pétition  et  vous  en  demander  mille  pardons.  Pour  la  permis- 
sion de  notre  séjour  dans  la  ville,  les  louables  magistrats  de  la  cham- 
bre impériale  et  de  la  ville  de  Haguenau  nous  ont  demandé  de  rechel" 
un  nouveau  Reichsthaler  par  tête.  Il  est  vrai  qu'on  nous  a  accordé 
trois  termes  pour  le  payement,  prolongé  jusqu'à  la  saint  Jean.  Mais 
avec  la  meilleure  volonté,  nous  ne  pouvons  payer  un  droit  de  protec- 
tion si  élevé.  Si  vous  comptez.  Messieurs,  que  de  la  Noël  à  Pâques, 
nous  avons  été  obligés  de  vous  verser  4:J0  llorius,  et  si  vous  laisse/, 
subsister  le  tlialer,  cela  nous  ferait  207  thalcrs,  qui,  sur  le  pied  de 
16  florins,  forment  330  florins.  Nous  aurions  donc  à  payer  760  florins 
pour  six  mois.  Si  vous  calculez  encore  qu'à  côté  des  Juifs  d'ici  nous 

'  Ardi.  (le  Hag,,  BB.  G7. 
»  Ihid. 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  IIAGUENAU  107 

avons  été  obligés  de  contribuer  pour  BOO  florins  à  l'entretien  des  offi- 
ciers de  guerre  qui  se  trouvaient  en  nos  murs  (laquelle  contribu- 
tion ne  nous  a  nullement  protégés)  vous  arrivez  à  un  chiflre  beaucoup 
trop  élevé  pour  nos  moyens. 

Nous  ne  nous  rappelons  pas  que  jamais  la  Juiverie  réunie  de  la 
Landvogtéi,  dont  les  plus  ricbes  se  sont  réfugiés  cette  fois-ci  ailleurs, 
ait  jamais  été  pressurée  de  pareille  sorte.  Le  maximum  de  ce  qu'on 
leur  ait  réclamé  était  de  200  florins,  et  même  il  y  a  quelques  années, 
en  1610,  on  s'est  contenté  de  les  imposer  à  70  florins. 

Eu  égard  à  toutes  ces  contributions,  nous  vous  prions  très  respec- 
tueusement, par  la  présente,  de  vouloir  bien  nous  accorder  notre  de- 
mande, en  nous  déchargeant  de  cette  dernière  imposition,  qui  serait 
notre  ruine  complète. 

Vous  nous  feriez  par  là  une  grâce  insigne  que  les  soussignés  n'ou- 
blieront jamais. 

Dans  l'attente,  Messieurs,  que  vous  voudrez  bien  nous  écouter  dans 
notre  réclamation  si  juste,  nous  sommes  vos  très  obéissants  sujets 
et  très  dévoués  serviteurs. 

Les  Juifs  de  la  Landvogtéi,  réunis  pour  le  moment  à  Haguenau'. 

Le  Landvogt  intercéda  pour  eux.  Le  Sénat  répondit  : 

Depuis  quatre-vingts  ans,  on  a  graduellement  élevé  la  contribution 
frappée  sur  les  Juifs  étrangers  qui  venaient  chercher  un  refuge  au- 
près de  nous.  La  ville  de  Haguenau  est  pourvue  de  privilèges  impé- 
riaux qui  ont  de  tout  temps  laissé  au  magistrat  la  liberté  d'accepter 
ou  de  refuser  des  Juifs,  et  même  de  chasser  de  son  sein  ceux  qui  y 
demeurent,  si  tel  est  son  bon  plaisir.  Par  conséquent,  chaque  fois 
qu'on  annonce  aux  Juifs  ce  qu'ils  auront  à  verser,  pour  droits  de  pro- 
tection, ils  ont  le  choix  de  quitter  la  ville  et  son  rayon,  ou  de  rester. 
Cependant,  pour  faire  plaisir  au  Landvogt,  nous  voulons  modifier 
notre  demande  pour  cette  deuxième  contribution  de  Pâques  à  Pente- 
côte, en  leur  faisant  une  diminution  du  tiers  ^ 

Ce  rabais  était  un  réel  bonlieur  pour  eux.  ■ —  Ces  malheureux  no 
savaient  pas  que  les  Suédois  n'entreraient  dans  la  ville  qu'en 
décembre,  et  qu'ils  étaient  même  encore  assez  éloignés.  Outre  cela, 
les  Lorrains  qui  étaient  en  garnison  à  Haguenau  les  harcelaient 
de  toutes  laçons  et  leurs  patrouilles  volantes  qu'on  rencontrait 
sur  toutes  les  routes  les  molestaient  où  elles  pouvaient. 

La  population  juive  do  Haguenau  étant  ainsi  devenue  plus 
dense,  la  mortalité  augmenta  et,  vu  l'état  de  siège,  elle  dut  songer 
à  s'approprier  un  cimetière  dans  l'intérieur  de  la  ville.  Déjà, 

'  Arcl».  de  liât.,,  B13.  Vô. 
»  Ibid. 


108  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

lors  d'un  siège,  les  Juifs  avaient  enterré  leurs  morts  dans  le 
jardin  du  Stettmeister  Capito.  Ce  cimetière  finit  bientôt  par  se 
remi^lir,  lorsque  les  hostilités  recommencèrent.  Les  Juifs  dési- 
rant en  avoir  un  comme  les  catholiques,  près  de  leur  maison  de 
prières,  profitèrent  de  la  situation  pour  demander  l'autorisation 
d'en  établir  un  dans  la  ville.  Cette  autorisation  leur  fut  accordée, 
et  ils  achetèrent  à  ceteiïet  un  jardin  situé  près  de  la  tour  de  l'hor- 
loge (actuellement  rue  des  Roses).  En  faisant  cette  demande,  les 
Juifs  avaient  allégué  qu'il  venait  de  mourir  un  des  leurs  et  qu'ils  ne 
pouvaient  transporter  son  corps  hors  de  la  ville,  à  cause  du  dan- 
ger. Bientôt  on  apprit  que  les  Juifs,  outrepassant  leurs  droits, 
avaient  inhumé  dans  le  nouveau  cimetière  plusieurs  corps  sans 
nouvelle  autorisation  du  Conseil.  Aussitôt  (28  avril  1632)  le  Stett- 
meister Bildstein  réunit  le  Conseil  et  demanda  une  punition 
pour  les  délinquants.  La  décision  suivante  fut  alors  prise  :  «  Comme 
les  Juifs  ont  commis  ce  délit  à  l'insu  de  l'honorable  Conseil,  ils 
devront  déterrer  leurs  morts,  les  transporter  hors  de  la  ville,  à 
leur  lieu  de  repos  habituel  et  payer  en  outre  pour  chaque  inhuma- 
tion ainsi  faite  dix  reichstalers  d'amende  '.  Les  Juifs  répondirent 
par  une  supplique  -  dans  laquelle  ils  exposaient  qu'ils  étaient  vic- 
times d'un  malentendu,  et  demandaient  la  permission  de  laisser  ces 
corps  dans  leur  lieu  d'inhumation,  qu'il  n'y  avait  aucun  péril  à  les 
y  conserver,  qu'au  contraire  il  serait  dangereux  de  les  exhumer. 

Le  Conseil  ordonna  une  enquête  et  les  Juifs  durent  obéir.  Mais 
le  cimetière  ordinaire  n'avait  plus  de  place,  ils  durent  donc  ache- 
ter une  propriété  qui  y  attenait,  que  le  Conseil  leur  permit  de 
convertir  en  lieu  de  sépulture  à  la  condition  qu'aucun  Juif  étran- 
ger à  la  ville  n'y  fût  enterré.  Ils  fondèrent  alors  une  société  char- 
gée, sous  le  contrôle  de  l'administration  de  la  communauté,  de  la 
gestion  du  cimetière.  Cette  société  qui  était  composée  de  presque 
tous  les  Juifs  de  la  ville  et  de  ceux  des  environs,  prit  le  nom  de 
Ilebrah  de  Gemilout  Ilasadim. 

Pendant  ce  temps  les  Suédois  étaient  partis  et  avaient  été  rem- 
placés par  les  Impériaux  sous  le  commandement  de  Metternich. 
Des  Juifs  réfugiés,  deux  seuls  purent  continuer  à  y  résider;  ce 
furent  le  médecin  Haym  et  une  veuve  de  Schweighausen,  celle-ci 
à  la  demande  du  gouverneur,  parce  qu'elle  savait  parler  le  fran- 
çais ^    Ainsi    la    communauté  Israélite    comptait  en   1633  onze 

'  Livre  de  proloc.  du  Consoil.  Aux  arcliivr=;  de  Ilaguenau,  BB.  V>>^. 

»  Ibid. 

'  Haym  dut  payer  huit  reichslhalers  (iG  fr.  M),  comiiip  droits  aiuuiols  de  protcc- 
ti»n,  fl  un  schillinfr  (0  fr.  30),  par  jour,  comme  contribution  de  guerre.  La  veuve 
pa3'a  la  moitié.  La  famille  de  ce  lleym  prit  au  siècle  suivant  le  nom  de  Rehnst 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGL'ENAU  109 

ménages.  Les  charges  qui  pesaient  sur  elle  étaient  très  lourdes, 
et  on  s'explique  difficilement  qu'ils  aient  pu  les  supporter.  En  plus 
des  impôts  ordinaires,  en  1634,  ils  durent,  contrairement  à  la 
jurisprudence  établie,  recevoir  des  garnisaires,  lesquels  avaient 
droit  au  gîte,  à  un  reichstlialer  par  semaine  (5fr.  80)  par  cavalier, 
à  trois  par  porte-étendard,  quatre  par  lieutenant  et  dix  par  capi- 
taine. En  outre,  ils  furent  contraints  de  verser  toutes  les  semaines 
les  cinquante  reichsthalers  que  Metternich  exigeait  de  la  ville. 
Ils  réclamèrent  et  on  leur  accorda  seulement  que  les  bourgeois 
logeraient  chez  eux  les  cavaliers*.  Pour  le  coup  les  Juifs  ne 
purent  se  contenir.  Le  25'  décembre  un  sieur  GreifF,  membre 
du  Conseil,  étant  venu  signifier  à  Bonus,  l'un  des  préposés  de  la 
communauté,  l'arrêté  qui  leur  imposait  ces  lourdes  contributions, 
Bonus,  indigné,  lui  dit,  en  présence  d'une  foule  de  bourgeois  et  de 
soldats  :  «  Tu  es  un  de  ceux  qui  ont  fait  cette  ordonnance,  tu  as 
fait  partie  de  la  réunion  qui  est  allée  au  devant  de  Metternich 
jusqu'à  Soufïlenheim.  Vous  aviez  l'air  heureux  de  vous  voir  suivre 
d'un  général  et  de  ses  soldats  ;  vous  aviez  tout  fait  pour  les  faire 
venir  dans  la  ville;  maintenant  qu'ils  y  sont,  vous  vous  déchargez 
sur  les  Juifs  des  impositions  occasionnées  par  leur  présence-.  » 

Les  soldats  approuvèrent  les  paroles  de  Bonus  et  le  louèrent  de 
son  courage,  mais  Greiff  le  cita  devant  le  magistrat,  le  lendemain 
26  décernbre,  réclamant  mille  thalers  de  dommages-intérêts  et  la 
peine  de  la  prison  contre  lui.  Bonus  comparut;  il  ne  nia  rien,  il 
dit  simplement  que  c'était  l'indignation  qui  l'avait  forcé  à  parler  de 
la  sorte,  que  chaque  jour  il  devait  essuyer  les  larmes  et  les  sup- 
plications de  ses  coreligionnaires,  qu'il  ne  nourrissait  d'ailleurs 
aucun  mauvais  sentiment  à  l'égard  de  Greiff  et  des  membres  du 
Conseil. 

Le  magistrat  renvoya  le  prononcé  du  jugement  au  28  décembre 
et  le  fit  conduire  préventivement  dans  la  cage  aux  sorciers,  pri- 
son spéciale  réservée  aux  sorciers  condamnés  à  mort  :  on  n'y  pou- 
vait tenir  debout.  Sa  femme  implora  sa  grâce  auprès  du  colonel 
de  Hartenberg  qui  obtint  un  allégement  de  la  peine  ;  on  mit  le 
prévenu  dans  un  autre  cachot.  Le  28,  la  sentence  fut  rendue,  il 
était  condamné  à  mille  francs  d'amende,  à  six  mois  de  prison  dans 
la  tour  appelée  A?-/ubrusler  Turin,  pour  avoir  oiïensé  non  seule- 
ment le  sieui'  Greill",  mais  tous  les  magistrats. 

L'année  1634  vit  encore  deux  nouveaux  pères  de  famille  admis  à 
s'établir  à  Ilaguonau,  Lo  [trcmicr,  nommé  Ilirtzol,  avait  demeuré 


'  Archives  de  llagacnuu,  BL5.  70. 

'■'  Livre  de  protoc.  ilu  Conseil  aux  archives  de  IIuj{.,  BB.  "U. 


IKJ  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

jusqu'alors  à  Esclipacli,  le  second  était  le  gendre  de  Majer  ' .  Peu 
à  peu  la  communauté  s'accroissait,  bientôt  après  Haguenau  compta 
une  treizième  famille  israélite.  Le  docteur  Ungar  permit,  en  ef- 
fet, à  la  veuve  d'Isaac  d'Ueberracli,  de  demeurer  dans  la  ville  pen- 
dant un  certain  temps,  parce  qu'elle  pouvait  y  rendre  des  ser- 
vices par  sa  connaissance  du  français.  Plus  tard  elle  se  maria  et 
demeura  définitivement  à  Haguenau. 

La  ville  semblait  donc  se  départir  de  sa  rigueur,  mais  aussi 
augmentait  les  droits  d'admission  que  devaient  payer  les  Juifs.  Jus- 
qu'à la  Révolution,  ce  fut  cette  méthode  qui  prévalut. 

La  guerre  de  Trente  ans  continuait  à  faire  venir  des  troupes  dans 
la  ville  ;  une  garnison  partie,  une  autre  la  remplaçait.  Les  Juifs 
eurent  de  nouveau  à  loger  des  cavaliers,  cette  fois  ils  eurent  le 
courage  de  demander  au  magistrat,  pour  pouvoir  supporter  cette 
nouvelle  charge,  la  permission  de  vendre  des  chevaux  les  di- 
manches et  jours  de  fête.  Cette  autorisation  leur  fut  accordée, 
en  tant  que  la  relisrion  n'en  serait  pas  lésée  -.  Ils  la  conservèrent 
pendant  quatre-vingt  ans,  puis  elle  leur  fut  retirée. 

Les  hostilités  continuant,  les  Juifs  surchargés  d^impôts  décla- 
rèrent qu'ils  n'étaient  plus  en  état  de  payer  leurs  droits  de  protec- 
tion. La  villo,  étant  elle-même  devenue  pauvre,  ne  put  renoncer  à 
cette  ressource  et  consentit  à  réduire  ces  droits  de  moitié.  La  ville 
fut  bientôt  obligée  même  d'emprunter  de  l'argent  à  ses  protégés  ; 
le  médecin  Haym  reçut  du  Conseil  des  remerciements  pour  avoir 
prêté  vingt  florins  ^ 

En  1037^  nouveaux  impôts,  ils  durent  fournir  le  mobilier  de  la 
Landvogtei. 

Eu  1648,  ayant  oublié  d'offrir  aux  autorités  de  la  ville  le  cadeau 
du  jour  de  l'an  qu'ils  étaient  accoutumés  de  faire,  le  Conseil  les 
rappela  à  leur  devoir,  leur  déclarant  que,  faute  de  quoi,  ils  se- 
raient déchus  de  leurs  droits  de  protection.  Ces  cadeaux  furent 
plus  tard  convertis  en  un  impôt  si)écial. 

Ici  s'arrête  l'histoire  des  Juifs  de  Plaguenau  pendant  la  domina- 
tion allemande  ;  il  nous  reste  à  faire  connaître,  pour  cette  période 
la  législation  qui  les  régissait. 

Elie  Scheid. 

{A  suivre). 


'  Livre'dc'protoc.'du'Conseil  aux  archives  de  la  ville.  BB.  "U. 

»  Archiv.  do  Hag.,  BB.  71. 

*  Livre  de  prol.  des  séances  du  Conseil.  Archiv.  de  Ilag.,  BB.  71.  11  est  même 
ri  marquablc  que  le  Conseil  appelle  Haym  l'honorable  médecin  Juif,  dpithèle  qui 
u'avait  pas  peu  de  valeur. 


HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  HAGUENAU  1 1 1 


PIÈGES  JUSTIFICATIVES 


N"  14.  1G26. 

Jonas  Jud,  Simon  Judens  Solm  hat   ihme  in  Schùtz  und  Schirm 
aùfzùnelimen  imterthanig  gebetten  ;  —  Conc.  —  So  ihm  dargestell  : 
1  "  Das  er  doch  ]i:ein  burgs  haus  kauffen  ; 
2''  Und  bei  Vater  bleibe  ; 
3°  1 1  Reichsthaler  Schirmgeld  ; 
4°  Ein  Mussquett  in  das  Zeùghaùs  liefern  ; 
5°  Jahrs  ^A  Schilling  Marzahl  ; 
6°  Und  fiir  den  jehrliche  Umbgelt  4  Reichsthaler  legen  soll. 

N°  15.  1628.  10  mars. 

Wie  es  in  der  Kûnftig  mit  der  allhiesigen  Juden  ihren  Synagog 
halber  soll  gehalten  \vei"den.  Nemblich  und  fur  das  erst,  ist  den  Ju- 
den so  unter  ersamenrathschutz  und  Schirm  bestandig  alhier  wohnen 
auf  ihr  viefeltig  importuniren  und  nachlauffen,  auch  untherdenig, 
innstendig  und  demutigs  suppliciren  und  bitten,  bis  auf  E.  E.  raths 
andervertiger  ordnùng  und  belieben  allein  aus  gnaden  und  ganz  dur- 
chaus  keiner  Schuldigkeit,  angeregte  ihr  allhier  hahendte  Synagog 
zwor  widerùmb  jedoch  solcher  gestalt  vergiïnstigt  und  zugelassen 
worden,  das  sich  derselben  aile  andre  ausslandiche  Juden  bei  pan 
10  H.  d.  und  doriber  noch;  weil  si  auf  den  Avidrigen  fall,  auch  wider 
ire  Pflicht  und  aydt  handeln  werden,  einer  andern  willkurliclien 
StrafF,  ganzlich  und  durchaus  enthalten  und  bemiessigen  sollen, 

Fûrsander,  so  sollen  sich  die  erstbemelten  allhiesige  juden,  deren 
jetzt  verstandener  masse  die  Synagog  Aviderum  zù  besuchen  erlaùbt, 
sambt  den  ihrigen  allen  bei  Vernichtung  ihres  vermeinten  Gottes- 
dienst  sowohl  in  als  ausserhalb  der  Synagog,  auf  uffentlicher  Gassen, 
mehrerer  Bescheidenheit  als  bishero  beschehen  und  im  verelich  vers- 
lorl  worden,  beilassen,  imsonderheit  ihr  gewonlicher  Geschrey  dar- 
bei  also  moderiren  auch  im  ûbrigen  sich  dermassen  erbar  erzeigen 
und  eingezogen  vcrhalten,  auf  den  Vorderrist  e.  e.  rath  zù  anderwcr- 
tigen  Verordnùug  oder  gentziicher  Abstelluug  kein  Anleitung  nocli 
weniger  etwan  der  gemeine  Burgerschaflt  dardurcli  ainiche  Erge- 
rens  gegeben  werden. 

Drittens,  gleich  wie  sie  die  Juden  iren  Sabath  hoch  heiligen,  und 
sich  davon  gern  audercr  wcltlichen  geschefUcn  und  vorrichtungeu 
bemiesigen;  als  sollen  sic  auch  billich,  au  unscrn  sonn  und  feierta- 
gen,  in  das  kunftig  nit  mer,  wie  bis  her  beschen,  mit  ihrem  ergerli- 
chen,  ùnzùlessigen  waithcû,  sprengeu,  und  lumuhrcn  aufgezogen 


112  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

kommen  sondern  sich  dasselben  genzlich  und  durchaus  enthalten 
soUen,  ailes  wie  ietzt  verstanden,  bel  obig  angesetzten  und  noch  an- 
deren  e.  e.  raths  erost  :  willkurlicher  imausbleiblicher  Straff  sonders 
geferde. 

Und  soll  dies  einera  ersamen  ralli  intérims  Venvilligung,  so  der- 
selbe  auf  abverstandene  Juden  allhier  innstendiges,  demitiges  anru- 
fen  und  implorirea  aus  H.  fir  die  liandt  genommen,  einem  E.  ralli 
auch  gemeiner  Stat,  weder  jelzt,  noch  in  das  kunfiig,  an  allen  und 
jeden  ihren  habendle  Régalien,  privilegien,  redite  und  gerechtigkeit, 
insonderheit  aber  an  dene  freiheiten  so  sie  in  specie  der  juden  halber, 
schedlich  oder  nachtheilig  sein. 

Hierauf  sich  die  juden  des  H.  ertheilte  Decreti  untertenig,  demutig, 
bedwiligt  mit  dem  anerbieten  das  sie  sich  auf  aile  und  jede  obige 
puncte  gehorsamlich  bequemen  wollen.  —  Allein  belen  Sie  E.  E.  rath 
nochmalen  ganz  undertenig  ihne  das  puncte  der  fremdte  halber  die 
fernere  Gnad  zu  erzeigen,  damit  doch  sie  dieselbe  auf  begebendte  ge- 
legenheit  auch  in  ir  Synagog  einlassen  dorfeu.  — 

Ist  ihnen  Categorisch  abgeschlagen  und  durcli  H"  D'"  Kônig  reg. 
Stettem.  erst  noche  in  guten  Ausswichenes  derzù  geben  worden. 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZIANI 

POÈTE  HÉBREU  DU  XVIF  SIÈCLE 


Le  rabbin  Abraham  Joseph  Salomon  Graziani  n'a  laissé  aucune 
œuvre  imprimée,  et  cependant  deux  siècles  après  sa.  mort  son 
souvenir  est  encore  très  vivant  chez  les  Israélites  de  Modène.  C'est 
qu'il  a  été  non  seulement  un  rabbin  distingué,  versé  dans  la  théo- 
logie, mais  aussi  un  poète  aimé  du  peuple  ;  il  a  composé  des 
pièces  de  vers  pour  toutes  les  circonstances  de  la  vie  :  l'êtes, 
naissances,  mariages,  enterrements.  Elles  sont  contenues  dans 
un  manuscrit  hébreu  que  nous  avons  eu  la  bonne  fortune  de  dé- 
couvrir ' . 

Ce  manuscrit  d'ailleurs  n'est  pas  seulement  intéressant  pour 
l'histoire  de  Graziani  et  de  la  littérature  juive,  il  est  rempli  de 
renseignements  sur  les  contemporains  du  rabbin  italien. 

Disons  d'abord  quelques  mots  de  l'auteur.  Graziani  naquit  à 
Pésaro,  ville  soumise  alors  aux  ducs  d'Urbin.  Son  père-,  nommé 
Mardochée,  s'était  établi  dans  cette  ville,  mais  était  probablement 
originaire  de  Gallico.  La  famille  des  Graziani  parait  avoir  porté 
primitivement  le  nom  de  cette  ville.  Ainsi  dans  les  mémoires  'des 
fossoyeurs  juifs  du  temps,  en  parlant  d'elle,  on  se  sert  de  l'expres- 
sion "'p-^bN^n  nnD'i?a  «  famille  originaire  de  Gallico  ».  Mon  savant 
ami,  M.  Marc  Mortara,  grand  rabbin  de  Mantoue,  a  trouvé  dans 
les  notes  manuscrites  de  Graziani  au  Schoulhan  Arouhh  les  mots 


•  Je  ilois  la  découverte  de  ce  ms.  à  M.  le  D'  Laudadio  Modéna,  lils  du  savant 
grand  rabbin  David  Zécut  Modéna,  qui  a  la  bonté  do  me  communiquer  tout  ce 
qui  peut  intéresser  l'histoire  des  rabbins  qui  se  sont  succédé  sur  le  si^ge  de  Mo- 
dène. Je  saisis  cette  occasion  pour  lui  exprimer  publiquement  ma  vive  gratitude. 

*  Il  est  mort  à  Pésaro  à  l'àf^e  de  Ht)  ans,  le  mardi,  G  Kislev  5'(04  (7  novembre  1643). 
On  lui  lit  des  funérailles  maf^niliques,  ce  qui  semblerait  indiquer  qu'il  fut  un  homme 
considéré  ou  un  savant.  A  ses  obsèques,  le  rabbin  Sabadai  Uaphaél  Mondolfo  et  le 
rabbin  Samuel  Corkos  prononcèrent  des  discours. 

T.  IV.  8 


114  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

suivants  :  «  Je  nie  souviens  qu'il  m'a  été  dit  par  le  pieux  et  intel- 
ligent Ouzriel  Graziano,  fils  du  savant  cabbaliste,  Johanan,  fils  de 
Tobie  Galllco,  appelé  communément  Graziano  en  langue  ita- 
lienne '  ».  Gallico  était  donc  probablement  le  nom  de  famille  et 
Graziano  un  surnom  donné  à  Tobie,  qui  passa  ensuite  à  ses  des- 
cendants et  supplanta  même  plus  tard  le  nom  de  Gallico.  En  effet 
dans  les  quelques  mémoires  de  cette  famille  que  nous  possédons, 
lorsqu'on  parle  d'une  femme,  on  ne  l'appelle  pas  Graziani  ou 
Graziano,  mais  Graziana,  comme  si  c'était  un  adjectif  ajouté 
au  nom.  La  mère  de  notre  poète-.  Patience,  était  fille  du  rabbin 
Samuel  Mondolfo. 

Le  jeune  Graziani  quitta  de  bonne  heure  sa  ville  natale,  pour 
venir  à  Modène  chez  le  grand  rabbin  Nataniel  Trabot^  La  famille 
Trabot,  d'origine  française,  avait  quitté  la  ville  d'Ascoli,  où  ce  Na- 
taniel était  né,  et  s'était  établie  à  Pésaro.  Elle  avait  une  parenté 
avec  les  Graziani  ;  ainsi  s'explique  peut-être  pourquoi  Abraham 
vint  à  Modène  auprès  de  Trabot.  Peut-être  aussi  n'était-il  attiré 
dans  cette  ville  que  parla  science  du  maître  *. 

C'est  sans  doute  parce  qu'il  n'était  qu'un  étranger  à  Modène, 
que  Graziani  avait  adopté  la  signature  suivante  :  id2N  n:*  ^■'N 
yiNa.  «  Je  suis  un  étranger  dans  le  pays  ».  En  même  temps  ces 
mots  rappelaient  son  nom  :  ^in  renferme  en  effet  les  initiales  de 
M52bu3  tpr^  ûmI^m  «  Abraham  Joseph  Salomon  »,  et  les  trois  der- 
niers mots  son  nom  «  Graziani  ».  Tous  les  livres  qui  lui  ont  ap- 
partenu portent  cette  légende  ;  on  la  trouve  encore  à  la  première 
page  de  quelques  Bibles  manuscrites  des  bibliothèques  de  Modène 
et  de  Parme,  ce  qui  prouve  qu'elles  lui  ont  appartenu.  Encore 
aujourd'hui  les  Juifs  de  Modène  ne  donnent  à  Graziani  que  le  nom 
de  Isch  Ger.  Mais  on  ne  comprend  pas  cette  sorte  d'ostentation  à 

^E3  î-!ji:27:r;  b"i:T  ip-^bN^  rr^m::  -i"7033  lanr  n"rî-?:5  n-'\r)3>?3  i-ibnp  hvz 

'■'  Après  la  mort  de  son  époux,  elle  viut  demeurer  avec  sou  (ils  Abraham  et  mourut 
à  Modène,  le  samedi  1"  Adar  II  3423. 

'  Ce  Trabot,  né  à  Ascoli  en  Îj329  (1Î3G9),  mourut  à  Modène,  âgé  de  8!}  ans,  le  pre- 
mier jour  do  Hoscb-IIascbana  îJ'il'i  (22  décembre  lOSil)  au  moment  où  les  fidèles 
réunis  dans  le  temple  chantaient  la  Kedouscha  do  Moussaf.  Ces  renseignements  nous 
sont  fournis  par  Graziani  dans  les  quelques  pafjes  de  mémoires  sur  sa  famille,  qui 
précèdent  le  recueil  de  ses  poésies. 

''  D'une  pièce  du  recueil  (u"  53],  il  semble  que  Graziani,  avant  de  venir  à  Modène, 
était  allé  à  Home,  où  il  perdit  sa  première  femme.  Nous  ne  savons  rien  d'autre  de 
celle-ci,  sinon  qu'elle  s'appelait  Intl^JU)  et  qu'elle  était  bonne,  intolligculc  et  pieuse. 
La  femme  qu'il  épousa  plus  tard  et  dont  il  eut  plusieurs  enfants,  était  Saro  Bella  Pisa, 
qui  mourut  peu  de  jours  après  lui,  le  29  kislev  ÎJi'iiJ  (l()8i).  Elle  était  fdle  du  rabbin 
Samuel  Pisa,  établi  dans  le  village  de  Vignole,  qui  mourut  à  Modène,  le  'J  Tischri 
ll'ilUj  ('i  oclobre  16CÎ)(. 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZIAM  II.", 

s'intituler  étranger  dans  un  pays  qui  l'avait  accueilli.  En  voici 
peut-être  les  raisons.  Nataniel  Trabot,  dans  son  testament  que 
possède  M.  Mortara,  avait  recommandé  aux  chefs  de  la  commu- 
nauté de  Modène  de  choisir  Graziani  pour  le  remplacer,  en  qualité 
de  rabbin.  Néanmoins,  à  la  mort  de  Trabot,  la  communauté  élit 
Nahman  Ben  Nahman,  rabbin  de  Ferrare  ',  parce  qu'il  était  mo- 
dénais.  Peut-être  Graziani,  mécontent,  se  vengea-t-il  en  prenant 
pour  signature  les  mots  «  Je  suis  un  étranger  dans  le  pays  », 
comme  pour  rappeler  à  ses  concitoyens  l'injure  qu'ils  lui  avaient 
faite. 

Jusqu'à  ce  jour,  on  ne  connaissait  de  Graziani  que  les  œuvres 
suivantes  : 

1°  Une  élégie  pour  la  mort  du  rabbin  Aaron  Benoit  Modéna 
(•27  Tammouz  5399)  ; 

2°  Une  autre  élégie  plus  étendue  en  l'honneur  du  même  rabbin, 
récitée  le  septième  jour  après  son  décès.  Ces  deux  pièces  ont  été 
imprimées  en  tête  de  l'ouvrage  pin-^  nn:^'^  d'Aaron  Benoit  Mo- 
déna, dans  l'édition  faite  à  Amsterdam  par  les  frères  Profess 
en  1732; 

3"  Plusieurs  décisions  théologiques,  insérées  dans  le  Afar  Ja- 
hoh,  de  Nataniel  Segré.  Quelques-unes  de  ces  décisions  sont 
mentionnées  par  Isaac  Lampronti  dans  son  Paliad  Ishaii  ; 

4°  Un  commentaire  sur  tout  le  Soulliaa  AroKJîh,  cité  par  Is- 
mael  Coen,  dans  son  Zera  Emet.  Cet  ouvrage  manuscrit  est  en 
la  possession  de  mon  cher  ami,  le  chevalier  Mortara,  grand 
rabbin  de  Mantoue-. 

Sur  la  vie  de  Graziani,  nous  ne  connaissons  presque  rien,  sauf 
qu'il  a  rempli  les  fonctions  de  grand  rabbin  à  Modène. 

Il  mourut  le  samedi  27  Ileswan  5444  (1664).  Ses  funérailles  furent 
faites  en  grande  pompe,  et,  dans  toutes  les  communautés  voisines, 
on  célébra  des  offices  funèbres  en  son  honneur.  On  peut  encore 
voir  ('ans  le  'j-'»^:a  bnin:;  le  discours  prononcé  par  Benjamin  Coen 
dans  un  des  temples  de  Reggio  Emilia. 

Il  semble  que  Graziani  aurait  montré  une  certaine  largeur  de 
vue  dans  la  manière  d'interpréter  les  usages  religieux,  car  il  excita 

'  Nous  tenons  pour  certain  que  Nahman  fut  le  successeur  immédiat  de  Trabot.  Eu 
ciFet,  dans  la  liste  des  rabbins  qui  prêchent  ù  la  Société  'Q'^T^V  "^i'^lp  (l'ondée  par 
Trabot,  le  6  Kislev  Îi399  =^  1G38)  à  l'anniversaire  de  sa  fondation,  figurent  d'abord 
Trabot,  puis  Nahman  et  à  la  suite  Graziani.  De  plus,  ce  dernier  a  composé  une  éléf;ie 
sur  la  mort  de  Nahman,  ce  qui  indique  qu'il  le  considérait  comme  son  supérieur. 
Enfin  dans  le  préambule  de  cette  poésie,  il  dit  de  lui  Î1"1T>IÎ  wN"',^  Dwl"'  '  il  sié- 
geait le  premier  parmi  les  rabbins  ». 

î  11  a  pour  litre  t]DT^  tiTran  n-i"ni7a3  iiNsrT>:  y'vi'n  by  coiT^m  mn^^r: 


116  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

le  mécontentement  des  rabbins  sévères  de  ce  temps.  Voici  ce  que 
nous  apprend  Nataniel  Halévi,  fils  du  successeur  de  Graziani  au 
rabbinat  de  Modène  : 

«  A  Modène,  ma  ville  natale,  les  portes  du  glietto  étaient  comme 
celles  du  vôtre,  sauf  qu'au  lieu  d'être  en  bois  le  toit  en  était  en 
pierre.  Pendant  tout  le  temps  que  vécut  Abraham  Graziani,  qui 
était  le  chef  religieux  de  cette  ville,  les  rabbins  murmurèrent, 
mais  les  choses  restèrent  en  l'état.  Le  jour  de  sa  mort,  qui  eut 
lieu  le  samedi  de  la  péricope  rrra  ■^■Ti  de  l'an  1690,  les  Cohanim 
vinrent  consulter  mon  père  (Meschoullam  Halévi),  qui  leur  défendit 
de  sortir  du  ghetto  ' . 

Il  permettait  également  l'emploi  de  l'orgue  dans  les  sj-nagogues, 
hardiesse  étonnante  pour  l'époque.  C'est  ce  qui  ressort  du  passage 
suivant  tiré  de  son  ms.  [Orah  Haïm,  560  §  3]. 

Nn?::3  l-^s-i:?3  iw  'd  i-^::-,;'^  "jro-.s  '^'z^  -P'^  -^birn  "[rirb  Nb-:;  -nTr,  -j::-, 
■^:î":  ix-j'y^r^  Nbn-j  ■'■'nN  n-rj^  oib-n-ir:  •^in.'n  ":;ip7:3  oib-inr;  r!3?3  n-'n  Nb 
N-.r;"::  ';r:;N-,-  Nbn-j  l^-.v^  ']T^:?r!  nn'r;  '-^st  i-iM-^i'^rr  nx  nm^MT  :iy  nbnpuî 
'•^n-iTvrrrrro  sinb  iw"-^  ^":~  ^l^'^i  '^cn  ^'"z  ^-^^;^^;3  y-'-^v  T"rbm3NJ-nNir; 
T^c  '^-inni  'nb  D"'-^"^^^î■«:;  r-nn-im  m-puîa  i:N:i-nN  -^bm  'u^T^i.ri  D-'m'-"' 
î-^b  tir;\-np-ina-i  piOD  br  -,i2rb  iWvU  "jnd  T^ib  ']-^-'\:j  Nb  p  f'ûi:?  ûni 
r::;*;b  '•^•2  a^mc?:  in  'w^c  -i^":;  ■'brD  in^n  r;n'^  y^r^h  p  s:  p^bi  :  iDbn 
l-iwbm  T"rb3  i:N:i-ns  nrix  V"''P^  nn^Tw?:  mbip"^  mn  û"'N'^n'^\:;  û-'Spi^ 
'-\-npir;m  Dr»:;:^  rsT  b:?  !r;ni!^p  N-n?:  ûr::  ^-l^s'-l  Nb  n315-i"'5  Nbn-j  û-'Ksn 
a^n-irt^n  p  Nbi  a-^:r:;j<'^rT  p  ^b  pciD  aie  \-iNi:-'2  Nb  a:o  ,nabn  Nb 
prb  psu;  a-^-":!.^  acsi  r^i^ç^:-.::  arn  "jt:-  V-  ^"'"^  ^^~  ^"^  laiNO 

;'5"3r!  ^ban 

Analysons  maintenant  le  manuscrit  qui  fait  l'objet  de  ces  notes. 
C'est  un  volume  de  190  pages,  dont  les  14  premières  contiennent 
des  mémoires  de  famille  et  quelques  notes  tirés  du  livre  des  an- 
ciens fossoyeurs  de  Modène.  Le  reste  du  ms.  renferme  cinquante- 
quatre  pièces  de  poésie  de  Graziani  -. 

Ce  recueil  fut  commencé  par  l'auteur  lui-même,  car  les  vingt- 
deux  premières  pages  sont  écrites  de  sa  main.  A  certains  endroits, 
la  marge  est  chargée  de  notes,  de  corrections  et  «le  commentaires. 
De  temps  en  temps  on  rencontre  des  pages  en  blanc,  ce  qui  sem- 
blerait indiquer  que  le  copiste  savait  qu'il  existait  d'autres  pièces 
qu'il  n'avait  pas,  et  dont  la  place  chronologique  était  en  cet  endroit. 
C'est  ainsi  qu'on  comprend  que  ce  recueil  ne  contienne  pas  d'élé- 
gies pour  la  mort  de  Trabot,  son  maître  et  son  oncle. 

'  Pahad  Itzhak,  11,  «.  v.  '^T^^  nNTûl^- 

»  La  plupart  de  CCS  pièces  rcnlermenl  les  mots  VINS  "^DjN  "*.'  "ÙÎ"'N- 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZIANI  117 

Plusieurs  de  ces  pièces  sont  précédées  d'une  courte  introduction 
qui  apprend  les  circonstances  dans  lesquelles  elles  furent  com- 
posées. Pour  d'autres,  on  a  laissé  un  blanc  qui  devait  recevoir 
cette  notice. 

Voici  la  liste  des  poésies  contenues  dans  le  manuscrit  : 

4 .  Hymne  à  chanter  dans  la  veillée  du  Hoschana  Rabba  (Tischri  5421 
=  1660  de  l'ère  chrétienne). 

2.  Hymne  chantée  dans  un  des  temples  de  Reggio  Emilia,  le  lo  Ab 

5422  (1662),  à  propos  d'un  don,  fait  au  temple  par  le  rabbin 
Israël  Lenghi,  d'un  nouveau  livre  de  la  loi  '. 

3.  Elégie  pour  la  mort  du  rabbin  Halléluia  Ouzriel  Modène  (îDSrir; 

n"725  nr.iz'r»  in  V'iitî  iiî-i'iiT:  bN-i-ivr  i-î^ibbrr  irt"m^:3  lia^i  tbcr; 
3>"D  r-i-Cl2  Sbrr)  23  Sivan  5422  (12  juin  1662). 

4.  Fragment  (3  strophes)  d'une  élégie  en  langue  chaldaïque,  pour  lu 

mort  d'un  savant  et  pieux  rabbin.  Le  préambule  ordinaire 
manque,  de  sorte  qu'on  ne  saurait  dire  avec  certitude  quel 
était  ce  rabbin.  Cependant  on  peut  conjecturer  que  cette  élégie 
fut  composée  pour  les  funérailles  du  rabbin  Méir  Barzilaï  de 
Saffet  [Terre  Sainte),  décédé  à  Modène  le  23  Tébet5424^ 

Voici  sur  quoi  se  fonde  cette  conjecture  :  Le  refrain  de  l'é- 
légie, que  l'on  devait  répéter  à  toutes  les  strophes,  renferme  le 
nom  de  3Iéir  écrit  en  grands  caractères  : 

«  Chef  dans  l'office  divin,  chef  de  la  Communauté  religieuse, 
»  premier  parmi  son  peuple  et  son  guide,  Méir,  qui  éclairait^ 
y>  les  intelligences  par  ses  décisions;  un  des  puissants  de  la 
»  terre  et  une  de  ses  lumières  ».  Ensuite  on  voit  que  le  rabbin 
en  honneur  duquel  cette  élégie  a  été  composée  mourut  dans  le 
mois  de  Tébet. 

NpT:>  ■'Ni-îb  û-i-i:!  i!-!\\  "ib  N-isinb  Nri'-i''  jniti  '' 


'  Une  note  placée  au  bas  de  la  page  nous  apprend  que  celte  poésie  fut  imprimée  à 
Mantoue  en  5427  (1GG7),  aux  frais  d'Israël  Lenghi.  Ce  rabbin  était  un  homme  très 
considéré.  L'auteur  du  bNITOlU  ^13*7  lui  adresse  quelques  consultations  casuisti- 
ques (V.,  §  270  et  270).  Moïse  Zéchut  correspondait  avec  lui  dans  des  termes  qui 
marquent  l'estime  et  lallection  qu'il  avait  pour  l\ii  (Y.  T^O^ltl  m"l5N,  14,  lli,  16, 
17).  On  voit  par  ces  lettres  qu'il  s'occupait  beaucoup  do  Kabbale,  Lenghi  a  composé 
lui-même  deux  volumes  appelés  "ib^Dil  '^"il  sur  la  première  partie  du  "jnbw 
'11TS';  ils  se  trouvent  manuscrits  à  la  bibliothèque  Foa  do  Ueggio. 

*  Cité  avec  éloges  par  l'auteur  du  Û"^72bU5!l  tl^T,  ainsi  que  l'a  signalé  Azulaï  dans 
son  Û'^bTl^ïl  d\23.  (Première  partie,  lot.  mem,  art.  8j. 

'  Le  nom  de  Méir,  qui  vient  de  la  racine  ^"IN,  sij^uiiic  <  qui  éclaire  •. 


118  REVL'E  DES  ÉTL'DES  JUIVES 

«  Tébet  '  mois  de  fâcJieux  souvenir,  c'est  lui  qui  nous  cause  au- 
jourd'hui ce  deuil.  » 

Or,  Méir  Barzilaï  fut  enseveli  le  23  Tébet  5424,  comme  il  ré- 
sulte des  mémoires  des  fossoyeurs. 

•  o.  Elégie  en  honneur  du  grand  rabbin  Nabman-Nahman  ^  1'  "jT^rij) 
(V-Hï,  qui  mourut  à  Modène,  le  12  Sclievat  3226. 

6.  Poésie  pour  le  mariage  de  Hephtzia  (iT^iisn)  Lévi,  et  d'Esther 

Fano,  célébré  le  14  de  Tiscbri  5427  (13  octobre  1666). 

7.  Hymne  chantée  dans  le  temple  Israélite  des  Espagnols,  à  Modène, 

à  l'occasion  d'un  don,  fait  au  temple  par  Mordechaï  fils  de  David 
Fano,  d'un  nouveau  livre  de  la  loi  (Ilesvan  5427). 

8.  Ode,  à  l'occasion  du  mariage  de  Pèlerin,  fils  d'Elie   Formiggini 

et  de  Juliette,  fille  de  Léon  Orsino,  célébré  le  7  Hesvan  5427. 

!>.  Ode  pour  le  mariage  d'Abadia,  fils  de  Raphaël  Rovigo  et  de  Né- 
hama,  fille  de  Moïse  Seppilli  d'Ancône. 

■10.  Sonnet  pour  célébrer  le  mariage  de  Samson  Finzi  de  Gorreggio 
avec  Sarah,  fille  d'Abraham  Calabresi,  8  Adar  5427  (3  mars 
1667). 

1 1 .  Poésie  en  l'honneur  d'une  nouvelle  cabane  sacrée  (HSID),  1  i  Tis- 

chri5428    (Octobre  1667). 

12.  Elégie  pour  les  funérailles  du  rabbin  Joseph-Benoit-Zalmann  de 

Ferrare  (23  Adar  5429). 

[Ici  une  page  Manche  dans  le  ms). 

13.  Poésie  pour  le  mariage  d'Elie,  fils  du  rabbin  Isaac  Benoit  Modéna, 

avec  Sarah,  fille  de  Moïse  Fermo  d'Ancône,  célébré  le  14  Tischri 
5430  =  (9  octobre  1669). 

14.  Poésie  pour  le  mariage  de  Saiil,  fils  de  Samuel  Formiggini  de  Fi- 

nale, avec  AUégrine,  fille  du  rabbin  Samuel  Piazza,  de  Florence, 
célébré  le  14  Tischri  5432. 

15.  Hymne  pour  un  nouveau  livre  de  la  loi  donné  à  un  des  temples 

israélites  de  Modène  (26  du  premier  Adar  5432)  ^ 

16.  Elégie  pour  la  cérémonie  funèbre,  célébréodanslepremiertemple 

de  la  communauté,  eu  l'honneur  des  rabbins,  INIaorSarga  Aske- 
nasi  (n-^ON  Nroo  -iiNW)  ;  Benjamin  Ilalévi  ('i'^tt'^22  "Ti"m)2D 
\::^p!-!  ^mp^n  -^nbr:  )  ;  Abraham  Guedilia  (rr^b-'T^:*  ûïrnnN)  de 
Jérusalem;  Joseph  Ravennc   (NS-^iiN-i  C]DT^),    grand  rabbin    à 

'  Le  mois  (le  'l'ébcl  est  un  mois  néfaste  dans  l'histoiro  des  Juifs. 

*  Le  ral)l)in  Niiliman  Naliman,  pèro  du  rabbin  Samson  Naiiman,  auteur  des  deux 
œuvres  "["i^Tj'ii;  i'IT  et  "[TC^O  nibin,  succéda  probablement  aussitôt  à  Natanicl 
Trabot  sur  le  siège  do  Modl-ne.  Il  mourut  soudainement. 

'  Une  note  placée  au  bas  de  cette  bymnc  dit  sans  auciino  autre  indication  qu'elle 
fut  imprimée  à  Manloue,  le  deuxième  mois  d'Adar  de  la  m^-me  année. 


ABRAHAM  JUSEPH  SALOMON  GRAZIAM  110 

Alexandrie  de  la  Paille'  et  Salvador  Fermo'  (itt-i^D  r>rir;-^), 
grand  rabbin  à  Ancône   (21  lar  5432  =22  mai  1672). 

17.  Vers  pour  une  circoncision  linb-'^:  rr^-i^).  On  devait  les  placer 

sur  le  grand  fauteuil  (lir^bx  ï^o:^).  (Année  5432  =  28  septem- 
bre 1672). 

Ces  vers,  tous  allégoriques,  étaient  bien  difficiles  à  com- 
prendre, et  l'auteur  même  en  a  donné  l'explication  au  bas  de 
la  page. 

18.  Poésie  pour  le  mariage  de  Joseph  Eliézer,  fils  d'Elie   Formig- 

gini,  et  de  Claire,  fille  de  Michel  Zemah  de  Vérone  (8  Kislev 
5435}. 

19.  H^-mne  pour  rinauguration  d'un  temple  à  Modène,  fondé  grâce 

à  la  générosité  d'Elie  feu  Pèlerin  Formiggini  ^  Cette  inaugu- 
ration eut  lieu  le  1^'"  Nissan  5435. 

20.  Poésie  pour  le  mariage  du  rabbin  Samuel  Sonino,  et  d'Eve,  fille 

d'Elie  Formiggini,  célébré  le  1 1  Sivan  5437. 

21.  Poésie  pour  le  mariage  de  Salomon  Salvador  Arezzo,  et  d'Esmé- 

ralde  Graziani.  Elle  était  nièce  du  poète ,  étant  fille  de  son 
frère  Emmanuel. 

22.  Hj^mne  à  l'occasion  du  don  d'un  livre  de  la  loi  à  un  des  temples  de 

la  Communauté. 

Dans  le  manuscrit  on  a  laissé  en  blanc  un  espace  pour  le 
préambule  ordinaire. 

23.  Poésie  en  l'honneur  de  la  fête  de  Pourim. 

24.  Hymne  à  chanter  dans  la  veillée  du  Iloschana  Rabba  par  les  con- 

frères de  la  société  religieuse,  dite  des  ^p3b  û"'"i?3"i^  de  Mo- 
dène. Cette  hymne  a  été  achevée  le  4  Tischri  5423. 

25.  Vers  en  honneur  du  rabbin  Benjamin  Coen  d'Alexandrie,  grand 

rabbin  de  Reggio  Emilia,  lorsqu'il  fut  appelé  par  le  sort  à 
officier  le  samedi  de  rr^UîN-in.  Ces  vers  furent  écrits  en  Tis- 
chri 5443  '\ 


'  Savant  casuiste  et  écrivain  élégant.  Nous  avons  de  lui  une  prière  pour  les  temps 
de  guerre,  imprimée  après  sa  mort  à  Mantoue  en  1701  ;  une  dissertation  sur  le 
morceau  chaldéen  "{^b"^^  mWTpN  insérée  dans  le  3pi"^  "iSS'  ;  un  avis  sur  les  cas 
de  ?T73,  inséré  dans  le  même  recueil,  autre  avis  sur  le  rituel  mentionné  par  le  "^Isia 
t|5"l"^,  vol.  Û'^'^n  rmN  j^  538 1,  12.  Ravenne  est  surtout  connu  par  ses  controverses 
avec  Néhémie  Ilyun  imprimées  dans  le  "nb  ïlWnbw. 

*  On  connaît  de  lui  un  avis  riluélique,  inséré  dans  les  TW"1m  r\"'\'Ci  (n"  27]  et  un 
autre  dans  le  3p^'^  "l^î'.  h  semlde  qu'il  ait  été  aussi  disciple  de  Trabot. 

'  Ce  temple,  qui  a  toujours  porté  le  nom  de  son  fondateur,  est  resté  ouvert  jusqu'à 
l'inauguration  du  nouveau  temple,  en  décembre  1873. 

*  C'est  celui  qui,  deux  ans  après,  a  prononcé  un  magnifique  discours  aux  funéraiHes 
du  rabbin  Graziani,  disciple  du  célèbre  Moïse  Zéchut.  Benjamin  Cocn  était  un  des 
rabbins  les  plus  distingués  de  l'Italie  en  ce  siècle,  non  seulement  pour  sa  piété  sin- 


1-20  UEVI  E  DES  ÉTUDES  JUIVES 

A  partir  d'ici  se  trouvent  35  pages  laissées  en  blanc.  Les 
poésies  qui  viennent  ensuite  sont  antérieures,  de  jîlusieurs  an- 
nées, à  celles^gui  ont  été  mentionnées  aux  n°s  23, 24  et  23.  Aussi 
on  pourrait  presque  affirmer  avec  sûreté  que  les  vers  écrits  en 
honneur  de  Benjamin  Coen  furent  les  derniers  que  l'auteur 
ait  composés.  Après  ces  vers  on  trouve  dans  le  manuscrit 
des  lignes  écrites  et  rayées,  ensuite  des  mots  qu'on  lit  avec 
peine  sous  la  rature.  Il  semble  que  l'auteur  aurait  été  trou- 
blé par  des  pensées  mélancoliques.  On  y  lit  par  exemple 
«  T^rob  ^:û172  nnM'iJ  "^tt  »  («  celui  qui  à  son  mort  étendu  devant 
les  yeux  »)  «  ^rii^n  mîj'^  "^a  ûnx  »  («  Vhomme  lorsqu'il  meurt 
sous  la  fatigue  de  ses  études  religieuses  »)  pensées  qui  nous 
donnent  l'idée  qu'il  eut  presque  le  pressentiment  de  sa  mort 
prochaine. 

26.  Vers  écrits  pour  engager  ses  concitoyens  à  avoir  pitié  d'un  mal- 
heureux, Jacob  Polak,  surnommé  Cantarini,  jadis  officiant  pu- 
blic (mn^  rr'bï^j  à  Prague. 

{Le  i^réanihule  ordinaire  manque). 

21.  Autres  vers  sur  le  même  sujet  et  pour  la  même  personne. 
[Le préamhile  manque  aussi). 

28.  Vers  qu'on  devait  placarder  dans  la  Soucca  (ïilsno),  écrits  le  jour 
qui  précédait  la  fête  des  Cabanes  de  l'an  3422. 

cère,  mais  aussi  pour  sa  vaste  et  profonde  science.  Né  à  Alexandrie  de  la  Paille 
d'une  famille  aisée,  il  fut  élu,  très  jeune  encore,  comme  rabbin  de  la  ville  de  Casale, 
et  depuis,  pour  ses  talents,  appelé  au  siège  rabbinique  de  Reggio  Emilia,  très  im- 
portant alors.  Ses  rapports  affectueux  avec  le  célèbre  auteur  du  ^"n;*  !nn2n  na- 
quirent de  là.  Moïse  Zccbut,  avant  de  se  fixer  délinitivement  à  Venise,  avait  de- 
meuré quelque  temps  à  Manloue.  A  cette  époque,  la  ville  de  Casale  était  sous  la 
domination  des  Gonzague,  ducs  de  Mantoue,  de  sorte  qu'il  y  avait  entre  ces  deux 
villes  des  rapports  continuels.  Les  Casalais  devaient  aller  iréquemmeut  pour  leurs 
intérêts  à  la  capitale  du  ducbé.  L'affection  du  tbéologien  hollandais  pour  le  jeune 
et  spirituel  Benjamin  Coen  était  comme  celle  d'un  père  pour  son  fils.  Dans  ses 
lettres,  eu  elfel,  il  l'appelle  toujours  ib  l'^p''  )'2  •  ^'lon  fils  chéri  >  et  il  ne  pouvait 
rester  longtemps  sans  le  voir.  Aussi  Tappelait-il  auprès  de  lui  de  temps  en  temps, 
d'abord  à  Mantoue,  puis  à  Venise  oîi  il  s'était  fixé.  Avec  le  jeune  Coen,  le  rabbin 
Zéchut  voyait  chez  lui  un  autre  jeune  homme,  le  rabbin  Abraham  Rovigo  de  Mo- 
dène.  Ces  deux  jeunes  gens  restaient  auprès  du  savant  hollandais  des  semaines, 
et  quelquefois  des  mois  entiers,  adonnés  à  l'étude.  De  Benjamin  Coen  nous  con- 
naissons les  œuvres  suivantes  :  L  T^T^Til  PS',  poésies  sacrées,  d'une  rare  beauté, 
pour  chacun  des  jours  de  la  semaine,  pour  les  Néoménies  {"CTn  "CHl]  et  pour 
toutes  les  autres  fêtes  des  Israélites,  —  IL  'j"^73"*33  bl35,  recueil  de  sermons.  — 
III.  n~3  IiVNi  commentaire  sur  les  lamentations  de  Jérémie.  —  IV.  û'ïli'  P1DN. 
commentaire  sur  le  traité  iVAhôt.  —  A'.  Des  notes  sur  le  D'^T!  imN^IP-  —  VI. 
Des  lettres  scientiliques  insérées  dans  les  "^Jj^iT,  ^\^\'^:^ii  et  des  avis  eu  matière  de 
rituel,  épars  dans  le  pn^"^  ins  et  dans  le  'Q'nb'r,  '^r\'C.  Enfin,  outre  ces  travaux, 
tous  imprimés,  on  a  de  lui  en  manuscrits  à  la  bibliullièquc  Foa  de  Reggio  Emilia, 
le  Ï~ID13  "^JOuiji  et  le  f>"i;'TI3  "^nPD.  Benjamin  Coen  a  eu  des  disciples  distin- 
gués parmi  lesquels:  Isaïc  Israël  Bassano,  qui  épousa  une  de  ses  llUcs  et  lui  succéda 
après  sa  mort  comme  rabbin  de  Reggio  ;  Meuassé  .lehossua  Padova  devenu  lu 
aussi  son  gendre  et  nommé  grand  rabbin  de  Modène  et  le  célèbre  rabbin  Irgaz  de 
Livourne. 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZIAM  121 

Le  préambule  porte  ces  mots  :  «  Poésie  pour  mettre  dans 
la  SoMca.  Je  Vai  composée  dans  ma  jeunesse  en  3422.  »  Ces 
mots  sont  faits  pour  nous  surprendre.  En  effet  nous  avons 
déià  dit    qu'on  connaissait  de  Graziani   deux  elegies,    une 
écrite  pour  la  mort,  et  l'autre  pour  les  funérailles  du  Rab- 
bin  Aaron  Benoit  Modéna ,  insérées   toutes   deux  dans   les 
premières  pages  du  Mahavar  Jahok  avec  la  signature  crr-.aN 
nn-bT  i:N^i:Nn:  ^Dn^^2  n?3"D3  et  non  Y'^^'2  ■^sîn  ^^  û^n.  Or,  com- 
ment celui  qui,  en  5399,  avait  composé  ces  élégies,  pouvait-il 
dire  que  les  vers  dont  nous  parlons,  écrits  23  ans  après,  étaient 
un  travail  de  sa  jeunesse  ?  Doit-on  dire  que  ces  vers  écrits 
pour  Soucca  ne  soient  pas  du  rabbin  Graziani,  bien  qu'ils  se 
trouvent  dans  un  recueil  commencé  par  lui-même  ?  Ou  faut-il 
supposer  qu'on  aurait  attribué  à  Graziani  les  deux  élégies  du 
Mahavar  Jahok  et  qu'elles  ne  seraient  pas  de  lui?  De  1639, 
année  de  la  mort  de  R.  Aaron  Benoit  Modéna,  a  l'an  1/32  ou 
le  Mahavar  Jabok  fut  imprimé,  presque  un  siècle  s'était  passe. 
Aucun  de  ceux  qui  avaient  assisté  aux  funérailles  du  célèbre 
cabbaliste  n'était  encore  vivant  pour  témoigner  de  la  vente. 
Il  est  vrai  que  les  lettres  initiales  des  strophes  de  la  pre- 
mière élégie  donnent  le  nom  de  D^in^N  et  que  la  deuxième 
porte  "^3^   ir^  nrib  iv?:>  ûnnN,  mais  il  faut  remarquer,  pre- 
mièrement, que  les  deux  compositions  insérées  dans  le  Ma- 
havar Jaioh  portent  la  simple    signature  de  -i"WD  p  dnnnN 
i;&î^:iNn.n  -^^nn^,  ce  qui  prouve  que  la  signature  n  a  pas  ete 
mise  par  Graziani  lui-même,  car  lors  même  qu'il  ne  signai 
pas  avec  sa  légende  ordinaire  V^^n  --N  ns  "Cî^N,  il  signait 
avec  ses  trois  nom^,  AMaham,  Joseph,  Salomou  ;  deuxième- 
ment, que  dans  le  préambule  qui  se  trouve  dans  le  3faharar 
Jabok  avant  ces  deux  élégies,  on  dit  que  Graziani  était  alors 
grand  rabbin  de  la  Communauté  \  Or,  ce  fait  est  mexact,  cai 
îe  grand  rabbin  de  la  Communauté  était  alors  Nataniel  Irabot, 
décédé  15  ans  après,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit  ;  troisiè- 
mement, que  dans  la  petite  introduction  qui  précède  ces  deux 
compositions,  l'auteur  après  avoir  parlé  des  hauts  mentes  du 
défunt    dit  :  -nsn7:72  "^rNi^  p  br,  expression  qui  senible  dé- 
noter un  haut  fonctionnaire  qui  pour  la  gravité  du  cas  descend 
de  sa  dignité  et  non  un  jeune  homme  obscur,  ce  que  Graziani 
était  alors  ;  enfin,  que,  dans  le  recueil  des  poésies  du  rabbin 
Graziani,  on  ne  trouve  ni  l'une  ni  l'autre  des  deux  elegies  in- 
sérées dans  le  Mahavar  Jal/ok. 

1  Voici  les  termes  de  ce  préambule: 

^^i2yr,  nni^nrTb  b"pi^T  nr^n^ûrr  nnrt  'yi2  ^n^^n  ;=^^^^^;'^ JL^^^J.^^"^    . 


122  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

29.  Poésie    pour    le  mariage    de   Joseph   Miram   de  Vignole,  avec 

Ester  Forli  de  Sermide.  (Il  n'y  a  pas  d'autres  indications}. 

30.  Sonnet  pour  un  autre  mariage.  (Le  préambule  manque,  nous 
•    ne  connaissons  donc  pas  les  noms  des  époux  ni  le  jour  du  ma- 
riage). 

31.  Poésie  pour  le  mariage  de  Mordecliaï  Sanguinetti,  et  Bersabée, 

fille  d'Azaria  Benoit  Modéna   (Sans  autre  indication). 

32.  Sonnet  pour  le  mariage  du  rabbin  Mordecliaï  Rovigo,  fils  du 

rabbin  Isaac  Rovigo,  fils  d'Abraham,  avec  Anne  Grâce,  fille 
de  Salomon  Lévi  de  Florence.  (Le  jour  de  la  célébration 
manque). 

33.  Ode,  pour  le  même  mariage. 

34.  Poésie  pour  le  mariage  de  Salvador  (:'^Tr;"')  fils  d'Elie  ïitio,  orfè- 

vre fils  de  Ménahem,  orfèvre  d'Ascoli  de  Pésaro*,  avec  Elisévah 
(•♦lawVtî),  fille  du  rabbin  Isaac  Benoit  Modéna,  célébré  le  ven- 
dredi. ..  (?) 

33.  Vers  qu'on  devait  placarder  dans  l'école  supérieure  d'instruc- 
tion religieuse  ('û"i'773!-î  n-^n),  afin  d'exciter  les  élèves  à  étudier 
avec  ardeur. 

36.  Vers  qu'on  devait  chanter  au  temple  avant  le  Kadisch  qui  précède 

le  ■i5"ia  des  prières  du  samedi. 

Ces  vers  furent  composés  parce  qu'un  des  amis  du  poète 
fonctionnait  comme  prieur  le  samedi  de  n'''"«255<"ia. 

37.  Epigramme  contre  quelqu'un   qui,  devant   signer  au  bas  d'un 

acte  public  devant  le  tribunal  civil,  avait  signé,  Monsieur  tel 
des  tels. 

38.  Enigme  à  coller  sur  la  tète  du  veau  qu'on  avait  l'habitude  alors 

de  placer  tout  entière  sur  la  table,  dans  tous  les  grands 
repas. 

39.  Vers  à  afficher  dans  une  nouvelle  cabane  sacrée  (Tisehri  5428). 

40.  Vers  pour  engager  les  riches  à  secourir  les  pauvres. 

41.  Ode,  à  propos  des  fiançailles  de  Moïse  Crispino,  fils  de  Léon 

de  Livourne ,  avec  Rebecca ,  fille  du  médecin  Silva  de  Ve- 
nise. 


'  Celle  indicalion  est  un  peu  o!)SCure.  Après  les  noms  de  l'époux,  de  son  i)ère  el 
de  l'aïeul,  se  Irouve  le  mol  C]"]"!^  qui  signifie  orfèvre,  mais  qui  pourrait  être  aussi  le 
nom  de  famille,  car  il  y  a  encore  aujourd'hui  à  Florence,  à  Padoue  cl  ailleurs,  des 
familles  qui  portent  le  nom  iVOréficc  Cependant  les  noms  des  deux  villes  Ascoli  et 
Pesaro  que  nous  trouvons  mis  l'un  après  l'aulrc,  nous  n  décidé  à  traduire  t]"ni£ 
comme  un  qualilicalif  de  leur  profession,  oL  à  leur  donner  le  nom  de  famille  Ascoli, 
quoiqu'il  se  puisse  qu'à  l'origine  ils  aient  eu  le  prénom  d'Ascoli,  et  qu'ensuite  on 
les  ait  nommés  Oréfià^  ù  cause  de  leur  état. 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZIANI  123 

42.  Ode  pour  un  mariage. 

Le  préambule  ordinaire  manque  el  par  conséquent  les  noms 
des  époux  aussi.  Cependant  les  jeux  de  mots  qu'on  trouve 
dans  cette  pièce ,  comme  dans  presque  toutes  les  poésies 
joyeuses  de  notre  auteur,  paraissent  montrer  que  le  nom 
de  l'époux  était  Samuel  Sanguinetti,  et  celui  de  l'épouse  Ber- 
sabée  Zalmann. 

43.  Sonnet  pour  un  mariage. 

Même  lacune  et  mêmes  jeux  de  mots,  dont  on  peut  tirer  les 
noms  Moïse  Orsiuo,  et  Bonne  Anne,  fille  d'Israël  Cividali. 

44.  Ode,  pour  un  mariage. 

Mêmes  observations.  Les  noms  qu'on  peut  tirer  des  jeux  de 
mots,  sont  Samuel  de  Bondy  Sanguinetti,  et  Marianne  d'Azaria 
Modéna. 

4o.  Autre  version,  très  ditïérenle,  des  vers  que  nous  avons  cités  au 
numéro  27.  Il  est  dit  dans  le  préambule  que  ces  vers  furent 
composés  pour  la  fête  de  Pâque. 

[Ici  50  pages  laissées  en  blanc). 

46.  Elégie  en  langue  clialdaïque. 

Le  préambule  ordinaire  manque.  En  conséquence,  il  n'y  a  pas 
le  nom  de  la  personne  en  lionneur  de  qui  elle  a  été  composée. 
Cependant  par  l'ensemble  de  cette  poésie,  on  peut  affirmer 
avec  toute  sûreté  qu'elle  a  été  écrite  pour  la  mort  de  l'aïeule 
du  poète  nommée  Fortunée  {"yrù  bf?:),  veuve  du  rabbin  Samuel 
Mondolfo. 

47.  Autre  élégie  en  vers  bébreux. 

Le  préambule  ordinaire  manque.  De  l'ensemble  de  la  poésie 
il  parait  résulter  qu'elle  a  été  composée  en  l'honneur  de  Mor- 
decliaï  Abner  Gallico,  mort  à  l'âge  de  86  ans  et  enseveli  le 
6  Kislev  5404. 

Cette  élégie  a  la  forme  d'un  petit  poème  dramatique.  Un 
étranger  arrive  dans  une  ville  où  il  voit  avec  étonnement  par- 
tout l'empreinte  du  deuil  et  de  la  douleur  la  plus  profonde.  Il 
en  demande  la  cause.  On  lui  répond  que  le  pays  vient  de  per- 
dre son  guide  spirituel,  son  père  bien  aimé.  L'étranger  s'as- 
socie au  deuil  du  pays.  Pendant  ce  temps  le  convoi  funèbre 
arrive  entouré  et  suivi  de  tout  le  peuple.  Il  remarque  la  fa- 
mille du  défunt  plongée  dans  la  plus  grande  consternation. 
Des  voix  s'élèvent,  qui  célèbrent  les  vertus  du  mort,  et  tout  le 
peuple  pleure. 

48.  Elégie  pour  son    frère  chéri,   Aaron  Graziani,  mort  à   l'âge  de 

22  ans,  dans  le  village  de  Cortcmaggiorc,  le  20  Ab  oiOS  '  et  cn- 

'  8  août  IC'iH* 


124    '  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

seveli  à  Busseto,  dans  le  duché  de  Parme.  Cette  poésie,  dictée 
par  raffection  la  plus  tendre,  est  un  des  plus  beaux  morceaux 
de  l'auteur. 

49.  Elégie  en  honneur  d'un  rabbin  appelé  Léon  (i-i"^"iN  îTnr;"'),  mort  à 
l'âge  de  63  ans,  le  11  Tébet  S408. 

Le  préambule  manque  encore,  et  on  doit  chercher  le  nom  du 
personnage  pour  lequel  cette  poésie  fut  composée,  ainsi  que  le 
jour  de  sa  mort  dans  la  composition  elle-même.  J'ai  supposé  un 
moment  que  ce  Léon  (ii'^'nN  ïTii^T')  pouvait  être  le  célèbre 
Léon  de  Modèue  (N;"'m;2?2  -"'"iN  !-Tnr;"i),  décédé  lui  aussi  dans 
l'hiver  de  l'année  5408,  sans  que  personne  ait  su  jusqu'ici  en 
préciser  le  mois,  ni  le  jour.  Cependant  après  réflexion,  j'ai  dû 
renoncer  à  cette  hypothèse.  Voici  pourquoi  :  Dans  un  "mNW 
£■':■';',  manuscrit  à  la  Bibliothèque  de  Parme,  il  y  a  une  note 
écrite  de  la  main  même  de  Léon  de  Modène  *  dans  laquelle  il  dit 
qu'alors  (à  la  fin  du  mois  de  Schevat  5408),  il  se  trouvait  réduit 
presque  à  la  fin  de  sa  vie  par  la  maladie  qui  l'accablait.  Or  le 
rabbin  dont  il  est  question  dans  cette  élégie  mourut  le  1 1  Tébet. 
En  deuxième  lieu,  Léon  de  Modène  mourut  à  l'âge  de  77  ans, 
tandis  que  le  rabbin  de  l'élégie  avait  63  ans  à  sa  mort.  Nous 
croyons  donc  qu'ici  il  s'agit  d'un  autre  rabbin  du  nom  de 
Léon  (ï~ii"iN  rrnïT'),  le  rabbin  Léon  Pogetti  ouPhujetli  (^ïtim"^ 
"ia"'"'nD  in-^-iN)  un  de  ceux  qui  siégeaient  dans  le  Bet-Din  du 
grand  rabbin  Trabot,  et  que  nous  voyons  figurer  parmi  les 
juges,  dans  la  grande  discussion  qui  eut  lieu  entre  le  rabbin 
Aaron  Benoit  Modèna  et  le  rabbin  Joseph  Ididia  Carmi,  au  sujet 
des  chants  de  la  Synagogue  ou  des  Pioutim  -.  Si  cette  élégie 
avait  été  faite  pour  celui  que  nous  venons  de  nommer,  elle  nous 
rendrait  deux  services  :  -1°  Elle  nous  montrerait  que  cet  hom- 
me n'était  pas  un  rabbin  vulgaire,  mais  un  savant  bien  dis- 
tingue ;  2"  Elle  nous  donnerait  le  jour  exact  de  sa  mort  que 
nous  ne  trouvons  pas  dans  les  mémoires  des  fossoyeurs  du 
temps  \ 

'  De  Wossi,  Dictionnaire  des  auteurs  Juifs.  Vol.  2,  :\x\..Lcone  di  Modena.  —  Rej^gio. 
Introduction  à  son  Examen  2'radilionis  Duo  inedita  et  poene  incof/nita  Leonts 
Mutinensis.  Page  XVII. 

*  V.  Introduction  au  Û"^;;")  C]35,  édit.  de  Vcise  1G26  et  ce  que  j'ai  écrit  moi- 
même  sur  celte  question  dans  V  Univers  israélite  (Année  XXX",  n"'  4  et  9),  dans  un 
article  intitulé  :  Une  découverte  importante. 

'  Dans  ces  mémoires  on  trouve  enregistrée  on  ces  termes  la  translation  des  os  du 
pieux  rab!)in  : 

^":r7  ^iiTi  y''-^  -^b^nbi  n"rïbT  -^"j-^^id  rc-iN  'n1^T•i•'  -i'i"m»s  tobu^n  DDnrj 

■  ;  p"Db  "^''n  ns^D  niM  ri"3  ûvn  Ti-^Ti  riTi 

<  Dans  la  rangée  susdite,  dans  le  XVI'  tombeau,  on  ensevelit  les  os  saints  du 
pieux  rabbin,  le  savant  Léon  Phujctli,  et  aux  pieds  de  ce  rabbin  on  ensevelit  aussi 


ABRAHAM  JOSEPH  SALOMON  GRAZFAXf  125 

30.  Elégie. 

Mêmes  lacunes.  Grâce  aux  jeux  de  mots,  elle  paraît  avoir  été 
composée  en  honneur  d'Israël  Usiglio,  mort  le  11  Sivan  3406,  à 
l'âge  de  47  ans.  Du  vers  suivant  ^n^riN  ibi  Snti:i2  o;"id 
il  semble  qu'il  ait  été  un  des  chefs  de  la  Communauté. 

31.  Autre  élégie  sans  indication.  Elle  a  été  écrite  afin  de  célébrer 

les  vertus  d'une  femme  éminente  par  ses  talents,  sa  charité 
et  la  rare  bonté  de  son  âme,  Gentille  Modéna,  fille  de  feu 
Isaac  Modéna  de  Vignola ,  veuve  de  David  Modéna  de  No- 
nantola,  décédée,  le  4  Tischri  3409  =2  septembre  16i8,  à  l'âge 
de  77  ans. 

32.  Elégie  qui  semble  avoir  été  écrite  pour  Michel  Modéna,  mort  en 

3416,  à  l'âge  de  64  ans. 

53.  Elégie.  Il  m'a  été  impossible  de  découvrir  en  l'honneur  de  qui  elle 

a  été  écrite.  Ce  sont  les  plaintes  amères  d'un  homme  qui  a 
perdu  sa  jeune  épouse,  belle,  sage  et  vertvieuse.  Peut-être, 
comme  nous  l'avons  déjà  dit,  était-ce  la  femme  de  notre  poète. 
Cette  hypothèse  est  corroborée  par  les  vers  suivants 

'mn-^ri  -'b  "o  -.-1—71  Nir:  ma 

dans  lesquels  Graziani  dit  que  personne  ne  peut  adoucir  son 
malheur,  sauf  celui  dont  le  nom  est  contenu  dans  le  deuxième 
vers  ■^ST,'^.  C'était  le  nom  de  son  père. 

54.  Elégie  pour  les  funérailles  du  rabbin  ledidia  Rimini  de  Carpi, 

mort  le  mercredi  22  Kislev  3442  K 

33.  Le  manuscrit  finit  par  une  épitaphe,  écrite  par  l'auteur,   pour 

mettre  sur  le  cercueil  du  grand  rabbin  Léon  Rabbeno,  de  Reg- 
gio  Emilia,  mort  en  cette  dernière  ville  à  la  fin  du  mois  de 
Sehevat  3441.  Une  note  nous  dit  que  cette  épitaphe  a  été 
faite  par  l'ordre  du  neveu  du  défunt,  Raphaël  Melli  de  S.  Mar- 
tin, par  suite  des  prières  de  David  Lenghi. 

les  os  de  l'honorable  dame  Espérance,  femme  de  David  Usiglio,  ce  qui  fut  accompli 
le  28  Adar  ;j420.  •  Il  s'ugil  donc  ici  du  transport  des  os  du  rabbin  dun  cimetière  à 
l'autre  et  non  de  son  enterrement.  Pour  comprendre  la  vraie  signification  de  ce  mé- 
moire, il  faut  savoir  qu'anc-ennement  les  Israélites  de  Modène  enterraient  leurs  morts 
dans  la  ville.  En  1030,  lorsque  la  peste  y  exerça  ses  ravages,  comme  dans  presque 
toute  l'Italie,  le  gouvernement  ordonna  aux  Israélites  de  se  pourvoir  d'un  cimetière 
hors  de  la  ville..  La  chose  ne  put  se  l'aire  aussitôt,  il  se  passa  plusieurs  années  jus- 
qu'à ce  que  les  Israélites  achetèrent  le  morceau  de  terrain  qui  sert  encore  aujourd'hui 
pour  le  cimetière.  Il  semble  que  le  grand  rabbin  Trabot  ait  été  un  des  premiers  qui 
y  lurent  ensevelis.  Ensuite  on  y  transporta  peu  à  peu  les  os  des  personnes  respectables 
qui  étaient  enterrées  dans  l'ancien  champ.  Le  nom  de  ce  Léon  se  retrouve  dans  le  "121 
bN1720  (S  10).  Il   était   llls  du  rabbin  Jacob   Phujetti  d'Asti  en  Piémont,  auteur  du 

rt?2Dn  rT'"::N'n  -ni:^p. 

'  Il  est  Fauteur  d'un  recueil  de  r^"'\'0  ms.,  mentionné  dans  le  p^i'  "1N2. 


126  RKVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Après  avoir  donné  ce  catalogue  raisonné  des  poésies  contenues 
dans  ce  manuscrit,  nous  croyons  devoir  dire  quelques  mots  sur  le 
mérite  littéraire  de  ces  compositions. 

On  se  tromperait  si  on  croyait  que  Graziani  ait  été  un  poète  de 
premier  ordre.  Il  n'a  pas  l'élévation  et  la  profondeur  de  Gabirol, 
mais  c'est  un  homme  d'esprit.  Il  parle  le  langage  de  son  temps, 
il  possédait  bien  l'hébreu,  ce  qui  lui  donnait  une  grande  habileté  à 
faire  de  ces  jeux  de  mots  qui  plaisaient  tant  à  ses  contemporains, 
et  qui  lui  acquirent  une  renommée  surprenante.  Ses  vers  sont 
toujours  faciles.  Mais,  à  l'occasion,  il  savait  s'élever  au-dessus 
de  la  foule,  et  faire  entendre  de  hautes  vérités. 

Modène,  août  1881. 

S.   JONA. 


LES  JOIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES 


AU  XVIII^  SIÈCLE 


Nous  avons  dit  dans  une  précédente  étude  '  qu'au  dix-septième 
siècle,  les  Français,  en  s'emparant  des  îles  d'Amérique,  y  avaient 
trouvé  un  assez  grand  nombre  de  Juifs,  amenés  ou  attirés  par  les 
premiers  occupants,  Hollandais  pour  la  plupart.  Nous  devons 
ajouter  que  ces  Juifs  avaient  su  prendre  une  telle  situation  dans 
ces  colonies,  tant  sous  le  rapport  commercial  que  sous  le  rap- 
port industriel  ou  agricole,  qu'on  fut  obligé  de  compter  avec  eux 
et  de  ne  pas  feindre  d'ignorer  leur  présence.  Ils  ne  se  laissaient 
d'ailleurs  point  oublier.  Pour  ne  citer  qu'un  exemple,  lorsque  la 
compagnie  de  Ouest-Indes  qui  occupait  Tile  de  Cayenne  fut  forcée 
de  quitter  cette  ile  et  de  traiter  avec  les  Français,  les  directeurs  de 
cette  compagnie  durent  introduire  dans  les  conditions  du  traité, 
qu'ils  soumirent  au  commandant  français,  un  article  tout  spécial 
concernant  les  Juifs  :  c'est  un  fait  qui  mérite  d'être  signalé  pour 
l'époque.  «  La  nation  judaïque,  y  était-il  dit,  demande  aussi/  le 
»  libre  exercice  de  religion  comme  dans  chapitre %»récédent'-  », 
c'est-à-dire,  exercice  libre  et  public  de  leur  culte,  comme  pour  les 
religionnaires  dont  il  était  question  au  chapitre  cité. 

M.  de  Tracy,  à  qui  furent  soumises,  le  15  mai  1664,  toutes  les 
demandes  des  directeurs  de  la  compagnie  Ouest-Indes,  mit  en 
regard  de  ce  passage  :  «  Renvoyé  à  Monsieur  de  la  Barre,  seul 
bon.  Tracy.  »  Et  nous  trouvons  ensuite  dans  le   traité  ou  Pre- 


1  Ab.  Cahen,  Les  Juifs  de  la  Martinique  au  xvii»  siècle,  liccuc  ilcs  Eludes  juives, 
t.  II,  p.  y3. 

«  Archives  du  Minislcrc  de  la  Mariuc.  —  CoUecliou  Moreau  de  Sainl-Méry.  — 
Code  de  Cayenne,  t,  I,  p.  82. 


12.S  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mières  conditions  qui  furent  accordées  par  M.  de  la  Barre  à 
MM.  les  directeurs  de  la  Compagnie  de  Ouest-Indes  dans  Vile 
de  Cayenne  le  paragraphe  suivant,  qui  est  la  réponse  faite  à  la 
demande  des  Juifs  dont  nous  venons  de  parler  : 

«  Pour  ce  qui  concerne  les  Juifs  qui  sont  habitués  de  lile 
»  il  leur  sera  donné  toute  protection  et  assistance  j)our  jouir  de 
»  leurs  Mens  et  possession  et  pour  le  libre  exercice  de  leur  reli- 
«  gion  et  un  lieu  dellle  qui  leur  sera  assigné  par  le  sieur  de  la 
»  Barre  et  sous  les  conditions  dont  on  conviendra  après  avoir 
»  veu  celles  accordées  par  la  compagnie  Ouest-Indes  aux  dits 
»  Juifs  ' .  » 

Pour  donner  une  idée  de  la  situation  des  Juifs  dans  les  pos- 
sessions hollandaises  ou  anglaises,  nous  empruntons  aux  notes 
manuscrites  de  Moreau  Saint-Méry  les  renseignements  suivants, 
qui  nous  font  connaître  les  libertés  dont  jouissaient  les  Juifs  aux 
colonies,  notamment  à  la  Jamaïque ,  pendant  le  dix-septième 
siècle  : 

«  Il  y  a  beaucoup  de  Juifs  à  la  Jamaïque.  Ils  y  ont  tous  les 
»  droits  des  autres  blancs,  excepté  celui  de  voter  avec  les  chré- 
»  tiens,  d'être  membre  de  l'assemblée  ni  de  i^emplir  aucune 
»  pjlace  de  magistrature.  Ils  ont  le  libre  exercice  de  leur  reli- 
»  gion-.  » 

Ces  premières  libertés  furent  confirmées  en  même  temps  pour 
toutes  les  colonies  françaises  par  l'ordre  rojal  du  23  mai  1671, 
que  nous  avons  déjà  publié  \  La  protection  de  M.  de  Baas  s'étendit 
également  sur  les  Juifs  de  toutes  les  îles  d'Amérique  appartenant 
aux  Français.  Mais,  à  la  mort  de  ce  gouverneur,  les  restrictions, 
qui  furent  apportées  aux  libertés  et  franchises  des  Juifs  de  la 
Martinique,  atteignirent  également  celles  des  Juifs  des  autres 
colonies  françaises,  et  nous  trouvons  dans  les  Instructions  que  le 
Roy  ordonne  être  mises  aux  mains  de  M.  Patoidet,  intendant 
de  la  justice,  pjolice  et  finances  des  îles,  la  recommandation  toute 
si»éciale,  où  il  est  dit  : 

«  Sa  Majesté  estant  informée  qu'il  y  a  quelques  Juifs  establis 
»  aux  dites  îles,  son  intention  est  qu'il  les  laisse  dans  laposses- 
y>  sion  paisible  de  leurs  habitations  sans  souffrir  qu'ils  fassent 
>'  aucun  exercice  public  de  leur  religioyi".  » 


>  Archives  du  Minist.  fie  la  Marine  —  Collcct.  Moreau  Saiat-Méry.  —  Code  de 
Cayenne,  t.  I,  p.  82. 

»  Ihid.,  V.  H.,  t.  VII,  p.  299. 

^  Revue  des  Études  juives,  t.  II,  p.  99. 

'•  Arcli.  du  Minist.  de  la  Marine.  —  Instructions  aux  administrateurs,  t.  I.  1G65- 
1701,  ad  annum  1C79. 


1 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLOiNIES  FRANÇAISES  AU  XVIII«  SIÈCLE       120 

Le  même  paragraphe  se  retrouve  textuellement  dans  les  Ins- 
tructions  envoyées  à  M.  Bégon  au  mois  de  mai  1G82'. 

Malgré  ces  restrictions,  les  Juifs  se  croyaient  assez  fortement 
établis  aux  colonies,  et,  loin  de  prévoir  une  persécution,  ils 
pensaient  être  en  droit  de  refuser  d'assister  à  une  revue,  parce 
qu'elle  avait  lieu  un  samedi.  L'intendant  en  signala  le  fait  dans 
un  de  ses  rapports'^,  et  M.  de  Blénac  dut  sans  doute  tirer  de 
ce  fait  un  argument  très  fort  en  faveur  de  l'expulsion  des  Juifs, 
qu'il  demandait  alors  avec  beaucoup  d'insistance,  pour  plaire  aux 
associations  religieuses  et  particulièrement  aux  jésuites^.  A  ce 
moment  encore  on  profita  de  l'abjuration  d'un  Juif  (19  avril  1683) 
pour  donner  à  la  cérémonie  du  baptême  un  éclat  extraordinaire  : 
l'événement  avait  une  si  grande  importance  aux  yeux  des  admi- 
nistrateurs qu'ils  le  signalèrent  immédiatement  au  roi  ^  (20  avril 
1683),  en  faisant  remarquer  que  c'était  le  premier  exemple  de  con- 
version donné  aux  îles  et  qu'il  fallait  en  attribuer  tout  le  mérite 
au  zèle  des  religieux.  Les  circonstances  étaient  bien  favorables 
pour  montrer,  d'un  côté,  les  difficultés  que  créaient  les  prétentions 
des  Juifs,  et,  d'un  autre  côté,  l'activité  des  religieux  et  les  services 
qu'ils  rendaient  au  catholicisme  dans  les  colonies.  Tout  concourait 
au  but  que  poursuivait  M.  de  Blénac,  en  flattant  les  sentiments 
religieux  du  roi  et  de  son  entourage  ;  et  nous  avons  vu  qu'avec  la 
mort  de  Colbert  avait  disparu  le  seul  obstacle  qui  s'élevait  contre 
la  proscription  des  Juifs  des  colonies  d'Amérique. 

L'ordonnance  royale  du  28  septembre  1683  et  le  paragraphe  pre- 
mier du  Code  noir  furent  édictés;  et,  pendant  de  longues  années, 
l'exécution  de  ces  ordres  fut  l'objet  d'une  grande  sollicitude  de  la 
part  de  la  Cour.  A  chaque  changement  de  gouverneur  et  d'inten- 
dant, les  instructions  du  roi  renouvelèrent  la  recommandation  de 
tenir  la  main  à  l'accomplissement  de  la  volonté  royale  et  d'empê- 
cher tout  retour  des  Juifs  dans  les  colonies  françaises.  Aux 
exemples  que  nous  avons  déjà  cités  pour  la  fin  du  xvii°  siècle, 
nous  pourrions  en  ajouter  un  certain  nombre  d'autres  pour  le 
commencement  du  xviii®  siècle.  Nous  nous  bornerons  à  rapporter 
le  paragraphe  inséré  dans  les  Insiructions  royales  adressées  le 
10  juin  1703  au  sieur  de  Vaucresson,  intendant  des  îles,  para- 
graphe qui  se  retrouve  textuellement  dans  toutes  les  instruc- 
tions suivantes  : 

«  Sa  Majesté  ayant  donné  des  ordres  pour  faire  sortir  (es 

'  Arcli.  du  Minist.  de  la  Mar.  —  Inst,  aux  adniin.,  1. 1,  IGtjîi-lTUI  ad  anmiM  1682. 
«  Ihid.  —  CoUect.  Morcau  Saint-Méry.  P.  H.,  t.  I,  p.  Î550. 
'  V,  Revue  des  Études  juives,  t.  II,  p.  100-101). 

''  Arch.  du  Minist,  de  la  Mar.  —  CoUect.  Morcau  Saint-Mûry.  P.  II.,  t.  I,  p.  025. 
T.  IV. 


130  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

»  Juifs  qui  étaient  estaUis  aux  îles,  Elle  veut  qu'il  empesclie 
w  qu'il  n'y  en  soit  receu  aucuns  nouveaux  à  Vavenir  et  qu'il 
»  tienne  la  main  à  l'exécution  ponctuelle  de  l'ordonnance  du 
»  26  septe^nhre  1683  *.  » 

Malgré  ces  recommandations  particulières,  les  intendants  firent 
souvent  observer  dans  leurs  rajDports  que  les  Juifs,  qui  avaient 
quitté  les  colonies  françaises,  avaient  été  accueillis  avec  empres- 
sement dans  les  colonies  voisines,  qu'ils  y  avaient  transporté  leur 
fortune,  leurs  industries,  leur  activité  commerciale,  et  qu'ils  y 
jouissaient  d'une  très  grande  liberté.  Ils  montraient  aussi  parfois 
quelle  utilité  on  pourrait  retirer  du  retour  des  Juifs  dans  les  îles 
françaises,  et  envoyaient  au  ministre  d'assez  fréquentes  demandes 
de  ce  genre  que  leur  adressaient  des  groupes  de  Juifs  des  colonies 
voisines.  Nous  ne  signalerons  que  la  requête  que  transmit  M.  Dor- 
villiers  en  1725,  requête  par  laquelle  les  Juifs  de  Surinam  sollici- 
taient l'autorisation  de  s'établir  à  Cayenne.  M.  de  Pliélipeaux, 
secrétaire  d'Etat,  répondit  à  cette  communication  par  la  lettre  sui- 
vante : 

«  J'ai  rendu  compte  au  Roy  de  la  demande  qui  vous  a  été  faite 
de  la  part  des  Juifs  de  Surinam  de  leur  permettre  de  s'établir  à 
Cayenne,  Sa  Majesté  n'a  pas  jugé  qu'il  convienne  de  leur  accorder. 
Ainsi  s'ils  vous  eu  font  parler  encore,  vous  leur  ferés  sçavoir  que 
vous  avez  ordre  de  ne  pas  les  recevoir  ^  » 

Il  esta  supposer  que  M.  Dorvilliers,  assez  osé  pour  transmettre 
une  pareille  demande,  alors  que  les  instructions  royales  étaient 
nettes  et  explicites  à  ce  sujet,  avait  sans  doute  fait  valoir  les 
raisons  qui  militaient  en  faveur  de  cette  requête.  Il  n'avait  pas 
dû  oublier  de  faire  remarquer  que  cette  demande  des  Juifs  n'a- 
vait pas  pour  motif  leur  situation  malheureuse  à  Surinam,  où 
ils  étaient,  au  contraire,  traités  avec  douceur,  avec  bienveillance 
môme  :  ils  y  étaient  en  quelque  sorte  entièrement  émancipés.  Une 
note  manuscrite  qui  appartient  à  cette  époque,  note  qui  est  peut- 
être  de  M.  Dorvilliers  lui-même,  donne  sur  eux  les  détails  sui- 
vants : 

"  Les  Juifs  de  Surinam  professent  leur  religion,  possèdent 
»  des  terres,  des  esclaves  et  des  maisons.  Ils  ont  voix  aux 
>'  assemblées,  me  me  pour  élire  les  membres  du  conseil^  comme 


'  Arch.  du  Minist.  de  la  Mar.  —  Instruct.  aux  administraleurSj  l,  II,  17(J2-1'/19, 
ad  annum  17fly. 

»  Idetn.    —  Collecliou  Moreuu  do  Saint-Méry.  —  Colonies  en   général.  T.  XV, 
art.  Juif. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVII[<^  SIÈCLE        131 

»  les  autres  citoyens.  De  plus,  des  magistrats  juifs  :  leur  noml- 
»  nation  est  faite  pour  décider  leurs  affaires  et  leurs  querelles, 
M  pourvu  qu'elles  n'intéressent  ni  Vordre  puUic  ni  un  citoyen 
»  dhme  autre  religion  K  » 

Nous  savons,  d'autre  part,  par  les  événements  historiques  qui 
concernent  Surinam,  que  les  Juifs  de  cette  colonie  étaient  recon- 
naissants de  l'émancipation  qui  leur  avait  été  accordée  et  qu'ils 
donnaient  au  pays  de  grandes  preuves  de  leur  patriotisme.  Nous 
en  citerons  comme  exemple  le  fait  suivant  : 

Lorsque,  en  1712,  l'amiral  français  Cassard  attaqua  Surinam,  une 
défense  énergique  lui  fut  opposée.  Les  Juifs  surtout,  qui  étaient  en 
très  grand  nombre,  se  signalèrent  par  leur  courage  et  par  leur 
attitude  martiale  :  ils  étaient  commandés  par  un  des  leurs,  nommé 
Isaac  Pinto.  La  lutte  fut  héroïque  de  la  part  de  ces  derniers  et 
l'amiral  Cassard  ne  passa  pas  ce  détail  sous  silence.  Paramaribo 
n'en  fut  pas  moins  bombardé  et  la  contribution  de  guerre  n'en  fut 
point  allégée. 


II 


Malgré  la  volonté  royale  nettement  exprimée  dans  les  Instruc- 
tions aux  administrateurs  des  colonies,  un  certain  nombre  de 
Juifs  continua  à  séjourner  dans  les  îles  françaises  d'Amérique,  soit 
par  tolérance,  soit  par  faveur  spéciale.  La  tolérance  venait  de  la 
part  de  l'administration  locale  qui  fermait  les  yeux  sur  les  infrac- 
tions, tant  qu'elles  ne  lui  étaient  pas  formellement  signalées  ;  et 
même,  quand  elles  lui  étaient  dénoncées,  l'autorité  agissait  avec 
une  sage  lenteur,  de  manière  à  laisser  tomber  dans  l'oubli  les 
plaintes  qui  lui  étaient  adressées.  Mais  il  arrivait  aussi  que  ceux 
qui  faisaient  ces  dénonciations  avaient  un  intérêt  particulier,  dont 
ils  poursuivaient  la  satisfaction  avec  ténacité  :  ils  s'adressaient 
alors  à  l'autorité  suprême  de  la  métropole  et  suscitaient  des  re- 
montrances au  gouverneur  général  et  à  l'intendant. 

Beaucoup  de  Juifs  de  France  obtenaient  aussi  des  autorisations 
de  séjour  aux  colonies  :  l'embarquement  se  faisait  à  Bordeaux,  et 
les  permissions  devaient  passer  sous  les  yeux  de  l'intendant  de  la 
province,  quand  il  ne  les  délivrait  pas  lui-même.  D'autres  autori- 
sations étaient  délivrées  à  des  Juifs  habitant  depuis  longtemps  les 

'  Archives  du  Minist.  de  la  Marine,  —  Collecliou  Moreau  do  Saiut-Méry.  P.  H., 
l.  II,  p.  080. 


132  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

colonies,  sous  forme  de  lettres  de  naiuralité,  et  sur  la  demande 
formelle  des  autorités  locales. 

Lorsque  les  lettres  patentes  de  juin  1123  parurent,  lettres  qui 
confirmaient  les  Juifs  de  Guyenne  et  dWucli  dans  tous  les  privi- 
lèges que  leur  avaient  accordés  celles  du  roi  Henri  II  (août  1550), 
ils  pensèrent  que  ces  lettres  abrogeaient  pour  eux  toutes  les  res- 
trictions apportées  par  l'article  premier  du  Code  noir.  D'après  cette 
interprétation,  l'édit  d'expulsion  (1683)  et  cet  article  premier  (1685) 
ne  pouvaient  plus  s'appliquer  qu'aux  Juifs  étrangers  et  nullement 
aux  Juifs  régnicoles.  Nous  verrons,  par  la  suite,  que  ce  fut  aussi 
l'opinion  des  différentes  Cours  établies  aux  colonies,  qui,  dans  les 
questions  d'héritage,  reconnurent  toujours  aux  Juifs  régnicoles  le 
droit  de  disposer  de  leurs  biens,  et  déclarèrent  que  l'article  premier 
du  Code  noir  ne  leur  était  pas  applicable. 

Aux  différentes  causes  qui  poussaient  les  Juifs  à  rester  dans  les 
colonies  ou  même  à  s'y  rendre,  nous  devons  en  ajouter  une  der- 
nière :  c'est  l'influence  très  grande  qu'exerça  une  famille  juive 
de  Bordeaux  dans  toutes  les  affaires  coloniales,  depuis  le  com- 
mencement jusqu'à  la  fin  du  xviii*^  siècle.  Nous  voulons  parler 
de  la  famille  Gradis,  qui  fut  assez  puissante  pour  intervenir  fré- 
quemment en  faveur  de  ses  coreligionnaires  des  colonies.  Si  elle 
n'eut  pas  le  pouvoir  d'amener  le  gouvernement  de  la  Métropole  à 
abroger  la  loi  de  proscription  de  1685,  son  influence  ne  s'en  fit 
pas  moins  sentir  dans  toutes  les  îles  françaises  de  l'Amérique,  où 
les  autorités  locales  comprenaient  fort  bien  qu'elles  avaient  à 
compter  avec  cette  maison,  toute-puissante  sur  le  commerce  colo- 
nial, et  qu'elles  avaient  le  plus  grand  intérêt  à  ne  pas  se  l'aliéner. 

David  Gradis,  fils  de  Diego,  fut  le  fondateur  de  cette  maison 
importante,  qui  depuis  bientôt  deux  siècles  occupe  un  rang  aussi 
honorable  dans  le  commerce  de  Bordeaux  que  dans  celui  des  co- 
lonies. Nous  allons  faire  connaître  rapidement  les  relations  de 
cette  famille  avec  les  possessions  maritimes  de  la  France  d'après 
une  notice  que  M.  Gradis,  chef  actuel  de  la  maison  de  Bordeaux, 
a  bien  voulu  nous  communiquer  et  dont  il  nous  a  autorisé  à 
extraire  les  détails  qui  touchent  à  notre  sujet. 

C'est  en  1717  que  David  Gradis  commença,  pour  la  première  fois, 
à  faire  des  armements,  et  qu'il  ouvrit  avec  les  colonies  d'Amérique 
des  relations  commerciales  dont  il  augmenta  plus  tard  considéra- 
blement l'importance.  A  partir  de  1722,  il  s'adonna  entièrement 
aux  affaires  maritimes  et  établit  des  comptoirs  à  Saint-Pierre- 
Martinique  et  sur  différents  points  de  la  côte  de  Saint-Domingue, 
le  Cap,  Saint-Louis, le  Fond-de-l'Ile  à  Vaches  et  surtout  à  Léogane, 
où  se  trouvait  déjà  un  de  ses  parents  et  amis,  Lopez  de  Paz,  mé- 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVJIl'  SIÈCLE       133 

decin  du  roi.  Presque  toujours  il  envoyait,  comme  ses  représen- 
tants, des  coreligionnaires  et,  très  souvent  même,  des  membres  de 
sa  famille.  C'est  ainsi  qu'il  fit  partir  pour  le  Fond-de-l'Ile  à  Vaches 
deux  de  ses  neveux,  Mendès  et  Mirande,  et  pour  la  Martinique 
deux  autres  neveux,  Gradis  et  Mendès.  Pour  donner  une  idée  de 
l'importance  de  ses  affaires,  il  nous  suffira  de  dire  qu'à  partir  de 
1725  David  Gradis  expédia  jusqu'à  six  navires  par  an  à  ses  neveux 
Mendès  et  Mirande.  Ces  navires,  complètement  frétés  par  lui, 
étaient  le  plus  souvent  sa  propriété.  En  1731  il  dut  même  envoyer 
à  la  Martinique  son  propre  fils  Samuel,  pour  rétablir  l'accord  entre 
les  deux  associés  de  ce  comptoir,  dont  les  caractères  s'harmoni- 
saient fort  peu. 

Samuel  Gradis,  qui  partit  de  Bordeaux  le  21  août  sur  un  des 
bateaux  de  son  père,  tomba  malade  peu  de  jours  après  son  arrivée 
à  la  Martinique  et,  atteint  d'une  fièvre  maligne,  il  y  mourut  le 
5  janvier  1732.  A  l'occasion  du  décès  de  ce  jeune  homme,  si  pré- 
maturément enlevé  à  l'avenir  brillant  qui  s'ouvrait  devant  lui, 
nous  devons  ajouter  un  détail  curieux  et  caractéristique  :  c'est 
qu'il  fut  enterré  dans  le  jardin  des  Frères  de  la  Charité,  qui  lais- 
sèrent faire  les  prières  selon  le  rite  juif  dans  l'enceinte  de  leur 
couvent.  Mais  ils  refusèrent,  malgré  l'offre  de  mille  livres,  qu'on 
plaçât  une  pierre  funéraire  sur  la  tombe  du  malheureux  Samuel 
Gradis. 

Il  nous  est  bien  permis  de  déduire  de  ce  fait  que  les  Juifs  étaient 
assez  nombreux  à  la  Martinique  pour  former  la  réunion  {niinian) 
nécessaire  à  l'accomplissement  dos  rites  funéraires.  Constatons 
encore  qu'à  ce  moment  l'intendant  de  la  colonie  ne  dissimula  pas 
à  Gradis  et  à  Mendès  qu'ils  étaient  censés  domiciliés  en  France  et 
que,  si  l'un  d'eux  venait  à  décéder  aux  colonies,  tous  les  biens 
du  défunt  seraient  confisqués  comme  aubaine,  au  profit  du  Trésor. 
Mais  nous  allons  voir  que  cette  théorie  ne  fut  pas  admise  comme 
règle  de  jurisprudence,  ni  par  les  autorités  locales,  ni  par  le  Mi- 
nistre. C'était  à  l'occasion  de  la  mort  d'un  autre  Gradis. 

Abraham  Gradis,  chef  de  la  maison  Gradis  et  Mendès  frères 
de  la  Martinique,  mourut  en  cette  ile  au  mois  de  mars  1738, 
léguant  tout  ce  qu'il  possédait  à  deux  de  ses  sœurs  non  mariées  : 
il  excluait  par  là  ses  deux  autres  sœurs  mariées,  dont  l'une  s'était 
convertie  au  christianisme  et  était  devenue  la  femme  d'un  procu- 
reur au  Parlement  de  Bordeaux.  Cette  dernière,  à  la  nouvelle  de 
la  mort  de  son  frère  et  du  testament  qui  la  déshéritait,  porta 
plainte  au  Ministre  et  lui  remit  un  mémoire  qu'il  s'empressa  d'en- 
voyer aux  administrateurs  de  la  Martinique  avec  la  lettre  sui- 
vante : 


13/i  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Lettre  du  Minisire  '  à  31'''  de  Champigni/  et  Lacroix, 
du  9  février  i7o9'-. 

Je  vous  envoyé  un  mémoire  qui  a  élé  présenté  par  Suzanne  Gra- 
dis,  femme  du  sieur  Coustault,  procureur  au  Parlement  de  Bordeaux, 
concernant  la  succession  d'Abraham  Gradis,  son  frère,  mort  à  la 
Martinique  au  mois  de  mars  de  Tannée  dernière.  Il  paroît  par  ce 
mémoire  qu'il  y  a  un  procès  à  la  Martinique  à  l'occasion  d'un  testa- 
ment par  lequel  Abraham  Gradis  a  institué  ses  héritières  Rebecca  et 
Judith  ses  sœurs  qui  sont,  comme  il  était  lui-même,  de  la  rehgion 
juive,  à  l'exclusion  de  Suzanne  Gradis  qui  a  eu  le  bonheur  d'em- 
brasser la  religion  catholique  ;  que  Rébecca  et  Judith  réclament  la 
succession  de  leur  frère  en  vertu  de  ce  testament  qui  est  attaqué 
par  Suzanne  Gradis,  et  que  la  succession  en  question  est  entre  les 
mains  des  sieurs  David  et  Aaron  Mendès,  exécuteurs  testamentaires 
du  deffunt,  ses  associés  et  de  la  même  religion  que  lui. 

Les  représentations  que  Suzanne  Gradis  a  faites  par  ce  même  mé- 
moire ont  paru  mériter  attention,  non  seulement  par  raport  à  l'af- 
faire particulière  qui  en  fait  l'objet,  mais  encore  par  raport  à  la 
question  en  général,  et  Sa  Majesté  à  qui  j'en  ay  rendu  compte  m'a 
ordonné  de  vous  dire  qu'EUe  veut  être  informée  de  l'état  de  l'ins- 
tance pendante  devant  les  juges  de  la  Martinique. 

Il  est  à  croire  que  M.  de  Lacroix  n'aura  pas  manqué  d'y  faire  in- 
tervenir le  Domaine  de  Sa  Majesté  qui  peut  avoir  des  droits  sur  la 
succession  dont  il  s'agit,  et  j'attends  même  qu'il  m'informera  de  ce 
qui  sera  passé.  En  tout  cas,  s'il  n'y  avoit  pas  satisfait  avant  la  ré- 
ception de  cette  dépèche,  vous  aurès  agréable  de  m'envoyer  un  détail 
qui  puisse  me  mettre  en  état  de  connoitre -toutes  les  circonstances 
de  cette  affaire  ainsy  que  la  succession  d'Abraham  Gradis.  Vous 
ferès  surseoir  en  même  tems  au  jugement  jusqu'à  ce  que  sur  le 
compte  que  vous  m'en  aurès  rendu,  je  vous  aye  envoyé  de  nou- 
veaux ordres  de  S.  M.  et  vous  prendrès  cependant  les  mesures 
nécessaires  pour  mettre  en  sûreté  tous  les  effets  apartenant  à  cette 
succession. 

S.  M.  veut  aussy  être  informée  s'il  est  vraye  que  les  S'*  Mondes 
soient  Juifs  comme  on  l'expose  dans  le  mémoire  que  je  vous  envoyé, 
que  vous  m'envoj'ès  une  liste  de  ceux  qui  peuvent  se  trouver  dans 
les  Isles,  que  supposé  qu'il  y  en  ayt,  vous  expliquiès  depuis  quel 
tems  ils  y  sont,  les  establissemcnts  qu'ils  y  ont,  et  le  commerce 
qu'ils  y  font. 

J'attendray  sur  le  tout  une  réponse  prompte  de  votre  part  aiin 
que  S.  M.  puisse  donner  les  ordres  qu'EUe  jugera  à  propos. 


'  M.  Pliélipeaux,  comte  de  Maurepas. 

^  Arch.  du  Miiiist.  de  la  Mar.  —  Collccl.  Moreau  Sainl-Méry.  —  Code  delà  Mar- 
tinique, l,  X,  p.  701. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII"  SIECLE       13:; 

Voici  la  réponse  de  MM.  de  Cliampigny  et  de  La  Croix  '  : 

ILES  DU  VENT.  La  Martinique,  le  12  aoust  1730. 

Monseigneur, 


Abraham  Gradis  et  David  Mendès  Juifs  sont  venus  avec  votre 
agrément  dans  cette  Isle  au  mois  de  novembre  1729^  pour  y  régir 
les  affaires  de  Gradis  leur  oncle,  autre  Juif  établi  à  Bourdeaux,  qui 
faisoit  de  gros  armements  pour  les  Isles.  Ils  n'avoient  alors  aucun 
bien.  L'oncle  les  defrayoit  entièrement  et  ne  leur  donnoit  aucuns 
appointements.  Lasses  de  ne  rien  gagner,  ils  firent  leurs  représen- 
tations à  leur  oncle  qui  leur  accorda  quatre  pour  0/0  de  commission 
sur  les  ventes  et  se  chargea  de  tous  les  frais.  Ils  ont  depuis  retourné 
à  la  charge,  leur  oncle  a  étendu  les  quatre  pour  0/0  sur  les  achats, 
mais  aux  conditions  de  supporter  tous  les  frais  de  sa  maison  de 
commerce  en  ces  Isles.  Enfin  le  s*'  David  Mendès  ayant  fait  venir  icy 
Aaron  Mendès,  frère  du  dernier,  lis  l'ont  fait  entrer  dans  leur  so- 
ciété sans  qu'il  fut  tenu  d'y  mettre  aucun  fond  :  les  deux  associés  se 
contentoient  de  son  industrie. 

Ces  détails  feront  connaître,  Monseigneur,  qu'ils  doivent  toute 
leur  fortune  à  la  commission  dont  leur  oncle  Gradis  de  Bourdeaux 
les  a  chargés  et  à  leur  industrie.  Abraham  Gradis  s'est  cru  dans  ces 
circonstances  en  droit  de  disposer  de  ses  acquêts  en  faveur  de  deux 
sœurs  Rebecca  et  Judith  Gradis  qui  ne  sont  point  établies  pour  leur 
faciliter  les  moyens  d'y  parvenir.  Il  s'est  pareillement  cru  en  droit 
de  deshériter  Suzanne  Gradis,  femme  du  s""  Coustaud  qui  vous  a 
porté  sa  plainte  et  qui  a  embrassé  la  religion  catholique,  et  une 
autre  sœur  également  établie,  qui  est  restée  juive.  Elle  se  nomme 
Sara  et  elle  a  épousé  le  nommé  Acosca,  juif  :  fondé  à  ce  que  nous  ont 
assuré  les  Mendès  sur  ce  que  ces  deux  dernières  étant  établies,  elles 
n'avoient  pas  besoin  des  mêmes  secours  que  celles  qui  ne  l'étoient 
point.  Si,  comme  il  y  a  apparence,  ce  motif  est  vrai,  la  religion  ca- 
tholique que  Suzanne  Gradis  a  embrassée  n'a  point  opéré  son  exhc- 
rédation. 

Il  nous  reste  à  examiner  si  Abraham  Gradis  a  été  en  droit  de 
tester  et  si  sa  succession  est  ou  non  sous  le  cas  d'être  confisquée  par 
droit  d'Aubaine. 

Les  Juifs  de  nation  portugaise  établis  à  Bourdeaux  ont  payé  au 
Roy  en  172.3  une  somme  de  tOO  mil  livres  et  les  deux  sols  pour 

'  Arch.  du  Minist.  de  la  Mar.  —  Corrcspoudauco  générale.  —  Clolonio?.  —  Ad  an- 
niim  1730. 

'■'  D'après  la  Notice  manuscrite  de  la  famille  Gradis,  Abraham  lils  d'Anthoine  et 
neveu  de  David  Gradis  partit  de  Bordeaux  pour  la  Martinique  le  2V)  juillet  1720, 
sur  le  Patriarche  Ahraliam,  appartenant  à  la  maison  David  Gradis;  et  le  17  mai 
suivant  (1727),  David  Mendès  y  l'ut  envoyé  et  associé  à  Abraham  par  David  Gradis, 
dont  il  était  éf^alement  le  neveu. 


136  .     REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

livre  en  sus  pour  le  joyeux  avènement  de  Sa  majesté  à  la  Couronne 
et  en  considération  de  ce  paiement  ils  ont  obtenu  au  mois  de  juin 
de  la  même  année  des  Lettres-Patentes  par  lesquelles (vien- 
nent quelques  extraits) 

Suivant  l'esprit  de  ces  Lettres-Patentes,  Abraham  Gradis  étoit 
très  en  droit  de  tester  et  de  disposer  de  ses  biens  et  sa  succession 
ne  seroit  point  en  France  dans  le  cas  d'être  confisquée  par  droit 
d'Aubaine. 

Mais  il  n'en  est  pas  de  même  des  Isles  et  colonies  françoises.  Par 
l'article  premier  du  Code  noir,  Sa  Majesté  enjoint  à  tous  ses  officiers 
de  chasser  hors  de  ces  Isles  tous  les  Juifs  qui  ont  établi  leur  rési- 
dence comme  aux  ennemis  du  nom  chrétien  et  commande  d'en  sortir 
à  peine  de  confiscation  de  corps  et  de  biens.  Cette  loy  est  très 
rigoureuse.  Mais  il  nous  paroist  qu'elle  ne  peut  ni  ne  doit  s'appli- 
quer qu'aux  Juifs  qui  viennent  icy  de  leur  chef  et  sans  permission. 
Tous  ceux  qui  en  obtiennent  ne  peuvent  plus  être  confondus  avec 
ceux  que  S.  M.  déclare  ennemis  du  nom  chrétien.  Elle  ne  leur  ac- 
corderoit  point  de  permission  particulière  si  Elle  n'étoit  point  as- 
surée de  leurs  sentiments  personnels  par  les  comptes  qu'EUe  s'en  est 
fait  rendre.  Les  s''^  Gradis  et  Mendès  sont  dans  ce  dernier  cas.  Ils 
sont  venus  icy,  Monseigneur,  autorisés  de  votre  agrément,  vous 
avès  même  particulièrement  recommandé  leurs  intérêts  à  M''^  le  Mar- 
quis de  Champigny  et  d'Orge  ville  par  votre  dépêche  du  2  septem- 
bre 1736.  Nous  leur  devons  de  plus  la  justice  de  vous  rendre  témoi- 
gnage de  leur  droiture  et  de  leur  probité  dans  leur  commerce  el  de 
leur  exactitude  dans  le  paiement  des  sommes  qu'ils  doivent. 

Ces  différentes  raisons  nous  persuadent,  Monseigneur,  qu'il  y  a  une 
distinction  à  faire  entre  les  différents  avantages  qu'ils  peuvent  pré- 
tendre dans  ces  Isles  eu  conséquence  des  Lettres-Patentes  du  mois 
de  juin  1723.  Elles  ne  dérogent  point  nommément  au  Code  noir  du 
mois  de  mars  1685.  Abraham  Gradis  n'a  pas  pu  tester  et  n'a  point 
deu  le  faire  sans  en  avoir  obtenu  une  permission  expresse  de  Sa 
Majesté;  ainsi  nous  estimons  que  son  testament  doit  être  déclare 
nul. 

Les  Mendez  et  luj'  étant  venus  icy  à  la  faveur  de  la  permission 
que  vous  leur  avès  accordée,  nous  pensons  que  leurs  biens  ne  sont 
pas  dans  le  cas  d'être  confisquez  au  proffit  du  Roy  par  droit  d'Au- 
baine. Et  conséquement  que  la  succession  d'Abraham  Gradis  doit 
revenir  ù  ses  héritiers. 

Ces  différentes  réflexions  ont  déterminé  M.  de  La  Croix  à  sus- 
pendre un  jugement  définitif  sur  l'instance  que  le  Directeur  Général 
du  Domaine  a  porté  devant  lui.  A  la  réception  de  votre  dépêche  du 
9  février  dernier,  M.  de  La  Croix  s'est  fait  présenter  par  ce  Direc- 
teur une  requeste  tendante  à  la  confiscation  de  la  succession  d'A- 
braham Gradis.  Il  a  ordonné  sur  celle  requeste  aux  s''*  Mendez  de 
représenter  l'inventaire  du  defi'unt  et  les  autres  actes  dont  nous 
vous  envoyons  coppie.  Ils  y  ont  satisfait  el  il  n'a  pas  cru  devoir 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII''  SIÈCLE       137 

pousser  cette  procédure  plus  loin  jusqu'à  ce  que  vous  réussies  ho- 
noré de  vos  ordres. 

Si  vous  accordés  la  succession  aux  héritiers  il  leur  sera  signiffiée 
la  requeste  du  Directeur  du  Domaine  avec  assignation  pour  compa- 
roitre  devant  lui  et  en  conséquence  des  permissions  particulières 
obtenues  de  S.  M.  par  les  s'^  Abraham  Gradis,  David  et  Aaron  Mon- 
dez pour  venir  commercer  dans  les  Isles,  il  déboutera  le  Directeur 
du  Domaine  des  fins  de  conclusion  de  sa  requeste,  mais  attendu 
que  par  les  dernières  permissions  Sa  Majesté  ne  leur  a  pas  ac- 
cordé le  pouvoir  de  tester  dans  ces  Isles  et  que  les  Lettres-Pa- 
tentes du  mois  de  juin  1723  obtenues  par  les  Juifs  de  nation  portu- 
gaise établis  dans  la  généralité  de  Bourdeaux  ne  dérogent  point 
nomément  à  l'Edit  du  mois  de  mars  1683,  il  cassera  et  annullera  le 
testament  d'Abraham  Gradis  comme  étant  contraire  aux  dispositions 
de  l'article  premier  dudit  Edit  et  il  renvoyera  les  héritiers  à  par- 
tager la  succession  suivant  les  loix  et  coutumes. 

Si  au  contraire  vous  jugés  à  propos  d'accorder  la  succession  à  une 
ou  à  plusieurs  des  sœurs  du  deffunt  par  préférence  aux  autres,  Il 
adjugera  la  confiscation  de  la  succession  au  domaine  de  S.  M., 
comme  lui  étant  acquise  par  droit  d'Aubaine  et  en  conséquence  de 
l'article  premier  de  l'Edit  du  mois  de  mars  1683  et  au  moyen  de 
cette  confiscation  vous  serès,  Monseigneur,  en  état  de  procurer  ce 
don  à  celles  des  sœurs  du  deffunt  que  vous  voudrès  en  gratifier. 

Si  vous  adjugés  cette  succession  aux  sœurs  du  deffunt,  il  sera 
nécessaire  qu'elles  envoyent  icy  une  procuration  bien  et  duement 
légalisée  appuyée  des  titres  sur  lesquels  elles  fonderont  leurs  droits 
d'hérédité. 

Quant  au  montant  de  cette  succession  qui  auroit  été  plus  forte 
qu'elle  n'est  sans  les  pertes  que  l'incendie  a  causées  à  la  société  de 
Gradis  avec  les  Mendez,  nous  ne  pouvons  vous  rendre  d'autre  compte 
de  son  état  présent  que  celui  qui  résulte  du  compte  cy-joint  qui 
nous  a  été  fourni  par  les  s"  Mendez.  Il  paroist  par  ce  compte  qu'il  y  a 
eu,  comme  nous  l'avons  exposé,  une  première  société  entre  les  sieurs 
Abraham  Gradis  et  David  Mendez,  depuis  le  3  novembre  1729  jusqu'au 
1<='"  janvier  1736  et  une  autre  entre  eux  et  Aaron  Mendez  depuis  le 
1°'' janvier  1736  jusqu'au  lor  octobre  1738  et  que  déduction  faite  de 
la  solde  du  compte  particulier  d'Abraham  Gradis,  il  restoit  de  net 
pour  sa  succession  70,276  livres,  1G,G.  Cette  somme  ne  pourroit 
valoir  en  argent  de  France  qu'environ  52  à  53  mil  livres  suivant  le 
cours  actuel  du  change.  Mais  elle  ne  paroist  pas  exigible  aux  termes 
de  la  Société  contractée  entre  les  s"  Abraham  Gradis  et  Mendez. 
Cette  société  devant  durer  jusqu'au  l^"'  janvier  1741  sans  que  dans 
le  cas  de  mort  d'un  des  associez  les  survivants  ayent  aucun  compte 
à  rendre  aux  héritiers  du  prédécédé  qu'à  la  fin  de  cinq  années  de 
leur  société,  à  peine  les  contrevenants  de  payer  aux  acquiesçants  la 
somme  de  quinze  mille  livres  par  forme  de  dédomagement.  Les 
s""^  Mendez  nous  ont  cependant  témoigné  qu'ils  étoient  prêts  de 


138  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

compter  par  devant  des  négociants  que  les  partis  prendroient  pour 
arbitres  et  qu'ils  le  feroient  d'autant  plus  volontiers  qu'ils  s'ac- 
querroient  par  là  tout  le  fruit  de  leur  industrie  pendant  le  reste  du 
tems  pour  lequel  leur  société  devroit  avoir  lieu.  Ce  sera,  Monsei- 
gneur, aux  parties  auxquelles  vous  adjugerès  cette  succession  à  dé- 
cider de  la  continuation  ou  de  la  cessation  de  la  société,  et  à  prendre 
les  mesures  qu'elles  estimeront  les  plus  convenables  pour  faire 
compter  les  s'"^  Meudès  qui  paroissent  disposez  à  terminer  le  tout  à 
l'amiable. 

Nous  sommes  avec  un  très  profond  respect,  Monseigneur,  vos  très 
humbles  et  très  obéissans  serviteurs. 

La  réponse  du  ministre  fut  conforme  aux  arguments  avancés 
par  les  administrateurs,  comme  on  peut  le  voir  par  la  lettre 
suivante  '  : 

Lettre  du  Ministre  à  Messieurs  de  Champigny  et  de  La  Croix. 

Du  18  janvier  1740. 

J'ai  examiné  le  détail  dans  lequel  vous  êtes  entrez  par  votre  lettre 
du  12  aoust  dernier,  au  sujet  de  l'affaire  concernant  la  succession 
d'Abraham  Gradis,  Juif,  mort  à  la  Martinique,  au  mois  de  mars  1738. 
Des  deux  partis  que  vous  proposés  pour  le  jugement  de  cette  affaire, 
le  premier  est  celuy  qui  paroist  le  plus  en  règle. 

En  effet,  Abraham  Gradis  ayant  obtenu  la  permission  d'aller  s'é- 
tablir pour  comercer  aux  Isles,  il  n'étoit  pas  dans  le  cas  de  l'article 
premier  du  Code  noir,  mais  on  ne  peut  donner  à  cette  permission 
d'autres  effets  que  celuy  de  mettre  un  Juif  à  l'abry  de  la  prohibition 
et  des  peines  portées  par  le  Code  noir  et  autres  effets  civils  suivant 
les  règles  du  droit  commun  qui  s'observe  à  l'égard  des  Juifs.  Ainsy, 
M.  de  La  Croix  peut  juger  la  contestation  portée  devant  luy  par  le 
Directeur  des  Domaines  et  sur  le  fondement  de  la  permission  ac- 
cordée à  Abraham  Gradis,  renvoyer  le  directeur  de  la  demande  par 
luy  formée,  il  restera  à  décider  les  contestations  que  les  sœurs  de 
ce  Juif  pourront  avoir  entr'elles  pour  sa  succession  et  avec  les  s'"^ 
Mondes  pour  raison  de  la  société  qu'il  avoit  contractée  avec  eux  ;  mais 
M.  de  La  Croix  pourra  les  renvoyer  devant  les  juges  ordinaires. 

Au  reste,  on  prétend  que  cette  succession  doit  être  bea;ucoup  plus 
considérable  qu'elle  ne  paroist  par  l'état  que  vous  m'en  avés  remis, 
mais  c'est  ce  qui  pourra  être  discuté  devant  les  juges  ordinaires.  Il 
convient  cependant  que  M.  de  La  Croix  prenne  toutes  les  mesures 
possibles  pour  empescber  qu'elle  ne  soit  dissipée. 

Par  ma  lettre  du  9  février  de  l'année  dernière,  je  vous  avois  de- 
mandé une  liste  des  autres  Juifs  qui  peuvent  se  trouver  aux  Isles 
avec  un  état  de  leurs  établissements,  je  vous  prie  d'y  satisfaire  sans 
plus  de  retardement. 

'  Ardiives  du  Ministère  de  la  Marine.  —  Collect.  Morcau  Saiat-Méry.  —  Code  do 
la  Martinique,  t.  X,  ad  annnm. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XYIII-^  SIÈCLE        139 

A  cette  lettre,  les  administrateurs  firent  la  réponse  suivante  '  : 

A  la  Martinique,  le  24  juin  17iO. 

Monseigneur, 

Nous  avons  reçu  la  lettre  que  vous  nous  avés  fait  l'honneur  de 
nous  écrire  le  4  8  janvier  dernier,  en  réponse  à  la  notre  du  12  aoust 
précédent,  sur  la  succession  d'Abraham  Gradis,  Juif,  mort  à  la  Mar- 
tinique. 

Aussitôt  que  les  héritiers  de  ce  Juif  ou  leur  fondé  de  procuration 
s'adressera  à  M.  de  La  Croix,  il  prononcera  son  jugement  pour  dé- 
bouter le  Directeur  du  Domaine  de  la  demande  qu'il  a  formée  en 
confiscation  de  cette  succession  et  s'il  les  voit  trop  animés  les  uns 
contre  les  autres  sur  la  validité  du  testament,  il  les  renvoyera  de- 
vant les  juges  des  lieux,  il  donnera  cependant  tous  ses  soins  pour 
empêcher  que  la  succession  d'Abraham  Gradis  ne  soit  dissipée. 

Les  s'^  Mendez,  cousins  du  deffunt,  étoient.  Monseigneur,  les  seuls 
Juifs  que  nous  eussions  icy  ;  ils  ont  embrassé  la  religion  catholique 
au  commencement  de  cette  année,  suivant  le  compte  que  nous  avons 
eu  l'honneur  de  vous  en  rendre  et  ils  sont  fort  estimés  des  négo- 
cians  de  S'  Pierre.  La  permission  en  vertu  de  laquelle  ils  sont  venus 
commercer  en  cette  Isle  ne  s'est  point  trouvée  dans  le  peu  de  vos 
lettres  dont  M.  d'Orgeville  a  laissé  copie  à  M.  de  La  Croix  ;  la  copie 
que  M.  d'Orgeville  leur  avoit  donnée  de  cette  permission  a  été  consu- 
'mée  dans  l'incendie  ;  mais  le  s""  Roze  pourra  aisément  retrouver  l'o- 
riginal parmy  les  papiers  de  M.  d'Orgeville  dont  il  a  été  chargé. 

Nous  sommes  avec  un  très  profond  respect,  Monseigneur,  vos  très 
humbles  et  très  obéissans  serviteurs. 

Champigny,  De  La  Croix. 


III 


Outre  la  question  de  savoir  si  le  droit  (\' aubaine  était  applicable 
ou  non  aux  biens  des  Juifs  décédés  aux  colonies,  la  correspon- 
dance ministérielle  nous  montre  encore  que  le  roi  désirait  ap- 
prendre comment  des  Juifs,  malgré  les  ordres  formels,  avaient 
pu  s'établir  aux  colonies,  et  quel  était  le  chiffre  do  cette  popula- 
tion. Dans  toutes  nos  recherches,  il  nous  a  été  impossible  de  trou- 
ver une  réponse  catégorique  à  ces  questions,  à  moins  de  regarder, 
comme  pouvant  en  tenir  lieu,  le  passage  de  la  dernière  lettre  de 
MM.  de  Champigny  et  de  la  Croix,  où  il  est  dit  que  les  frères 

>  Archives  du  Ministère  de  la  Marine.  —  Corresp.  générale.  —  Colonies.  --  Mar- 
linii|uc,  ad  aiinum. 


140  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Mendez  étaient  les  seuls  Juifs  établis  aux  colonies.  La  situation 
des  administrateurs  était  fort  délicate.  Ils  ne  pouvaient  pas  ré- 
pondre d'une  manière  formelle  à  ces  questions,  parce  qu'ils  ne  se 
sentaient  point  à  l'abri  de  tout  reproche  :  ils  n'avaient  point  fait 
exécuter  strictement  les  ordres  du  roi  et  il  ne  leur  était  pas  pos- 
sible de  présenter  leur  ignorance  comme  une  excuse  valable. 

Cependant  le  zèle  des  religieux  était  toujours  en  éveil  ;  et  sou- 
vent des  colonies,  quelquefois  aussi  de  Bordeaux,  partaient  des 
dénonciations  contre  le  séjour  ou  les  actes  de  quelque  Juif  habi- 
tant les  îles  d'Amérique.  La  correspondance  suivante  échangée 
entre  le  ministre  et  les  administrateurs  des  colonies  nous  en  four- 
nit une  preuve  bien  édifiante  : 

Lettre  du  Ministre  à  31'^  de  Champigny  et  de  La  Croix  ' . 

Du  16  avril  1741. 

Il  m'est  revenu  qu'un  Juif  établi  à  S'  Domingue  a  envoyé  il  y  a 
quelque  tems  à  Bordeaux  deux  filles  mulâtres  qu'il  a  eiies  d'une 
négresse  libre  catholique  qu'on  prétend  être  sa  femme  et  qui  n'avait 
consenti  à  ce  qu'elles  passassent  en  France  qu'à  condition  qu'elles 
seroient  élevées  dans  la  religion  catholique  dans  laquelle  elles 
avoient  déjà  été  instruites  :  mais  qu'ayant  été  adressées  à  d'autres 
Juifs,  ils  ne  leur  avoient  point  permis  de  suivre  l'intention  de  la 
mère  et  se  disposoient  à  les  élever  dans  le  Judaïsme,  si  M.  l'arche- 
vêque de  Bordeaux,  qui  en  fut  informé,  n'y  avoit  mis  ordre. 

Comme  il  ne  faut  pas  douter  que  tous  les  Juifs  qui  peuvent  être 
aux  Isles  n'envoyent  de  même  en  France  leurs  enfants  légitimes  ou 
naturels  pour  les  faire  élever  dans  leur  religion,  il  m'a  paru  néces- 
saire de  vous  recommander  de  faire  veiller  à  leur  conduite  à  cet 
égard,  s'il  y  eu  a  à  la  Martinique  qui  soyent  dans  ce  cas. 

Je  dois  aussy  vous  prévenir  que  sur  l'avis  que  M.  Rostan  m'a 
donné  qu'il  se  présente  journellement  des  Juifs  à  Bordeaux  qui  de- 
mandoient  à  s'embarquer  pour  les  Isles,  je  luy  ay  prescrit  de  les 
refuser  afin  d'empescher  qu'ils  ne  se  multiplient  trop  dans  les  Isles 
où  ils  pourroient  causer  du  désordre  ;  je  vous  observeray  de  même 
à  ce  sujet  que  quoique  dans  l'état  que  vous  m'avez  envoyé  au  mois 
de  novembre  1739  des  étrangers  qui  éloient  alors  aux  Isles  du  Vent, 
il  ne  soit  mention  que  de  deux  Juifs  qui  ont  embrassé  depuis  la  re- 
ligion catholique,  il  y  a  cependant  lieu  de  croire  sur  ce  que  M.  Ros- 
tan m'a  mandé  que  le  nombre  pourroit  en  être  augmenté  depuis. 
Dans  ce  cas  vous  aurez  agréable  de  m'envoyer  une  liste  en  m'expli- 
quant  les  établissements  qu'ils  y  ont  et  le  commerce  qu'ils  font,  afin 
que  je  vous  fasse  sçavoir  les  intentions  du  Roy  sur  leur  compte. 

'  Arch.  du  Minist.  de  la  Mar.  —  Coliect.  Moreau  St-Méry.  —  Colonies  en  général, 
t.  XV,  art.  Juif. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII«  SIÈCLE       141 

Lettre  des  administrateurs  au  Minisire  sur  les  Juifs  de  S^  Domingue  ' . 

A  Léogane,  le  4  juillet  1743. 
Monseigneur, 

Nous  avions  remis  au  compte  que  nous  avons  à  vous  rendre  de 
l'état  des  missions  et  de  la  religion  en  ce  pays  à  répondre  à  la  lettre 
que  vous  nous  avez  fait  l'honneur  de  nous  écrire  le  16  avril  1741, 
concernant  les  Juifs  qui  se  trouvent  à  S'  Domingue  et  par  laquelle 
vous  nous  recommandez  de  veiller  à  ce  qu'ils  n'envoyent  leurs  en- 
fants naturels  ou  légitimes  en  France  pour  les  faire  élever  dans  leur 
religion. 

Comme  votre  dépêche,  Monseigneur,  nous  ordonne  aussi  de  vous 
faire  informer  du  nombre  des  Juifs  qui  sont  à  S*  Domingue  et  de 
vous  envoyer  une  liste  en  vous  expliquant  en  même  tems  les  établis- 
sements qu'ils  y  ont  et  le  commerce  qu'ils  y  font,  nous  envoyâmes 
nos  ordres  en  conséquence  dans  tous  les  quartiers  pour  pouvoir 
être  en  état  de  vous  rendre  le  compte  précis  que  vous  désirez  là 
dessus. 

Mais  après  les  recherches  assez  exactes  faites  partout  à  cet  égard, 
Monseigneur,  il  ne  s'est  trouvé  en  Juifs  connus  dans  cette  colonie 
que  les  s""^  Mirande  et  Mendès,  fameux  négocians  de  Bordeaux  qui 
depuis  plus  de  15  à  20  ans  sont  établis  au  Fonds  de  l'Isle  à  Vaches 
où  ils  font  un  commerce  très  considérable  et  très  avantageux  à  ce 
quartier  auquel  ils  ont  fait  et  font  journellement  de  grands  crédits. 
Ce  sont  de  très  bonnettes  gens  et  contre  lesquels  il  n'y  a  jamais  eu 
la  moindre  plainte  :  ils  ne  sont  point  mariés. 

Dans  la  ville  du  Cap  on  ne  connoit  qu'un  autre  négociant  de  cette 
religion  nommé  Jacob  Suarès,  établi  depuis  de  longues  années  dans 
cette  ville,  point  marié  et  d'une  très  bonne  réputation. 

Il  y  avoit  bien  ci-devant  un  autre  négociant  au  Cap  que  les  jésui- 
tes avoient  soupçonné  d'être  Juif,  nommé  Pereyre  ;  mais  il  est  mort 
depuis  deux  ans,  et  d'ailleurs  il  avoit  purgé  ce  soupçon  par  la  charge 
de  marguillier  de  la  paroisse. 

Par  le  compte  que  M.  Bigoton  nous  a  rendu  là-dessus,  il  y  en 
avoit  bien  eu  ci-devant  un  établi  à  la  ville  de  S'  Marc  ;  mais  il  a 
quitté  le  pays  pour  retourner  en  Europe  :  on  n'en  connoit  point  d'au- 
tres à  S'  Domingue. 

Pour  le  nom,  Monseigneur,  du  Juif  établi  à  S'  Louis  dont  votre 
dépêche  nous  parle  et  qui  est  accusé  d'avoir  envoyé  deux  filles 
mulâtresses  qu'il  a  eues  d'une  négresse  catholique  qu'on  prétend 
être  sa  femme,  dans  le  dessein  de  les  faire  élever  au  Judaïsme,  si 
M.  l'archevêque  de  Bordeaux  qui  en  fut  informé  n'y  eut  mis  ordre, 
on  a  voulu  dépeindre  M.  de  Paz,  et  il  a  été  découvert  que  c'est  un 
trait  de  vengeance  et  de  tracasserie  du  Père  Rhédon,  qui  partit  à 

1  Arch,  du  Minist.  de  lu  Mar.  —  Collecliou  Moreuu  St-Méry.  Colonies  ea  généra!, 
t.  XV,  art.  Juif. 


1V2  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

peu  près  dans  ce  tems  là  de  la  ville  de   S'  Louis  pour  Bordeaux. 

M.  de  Paz  s'est  effectivement  amusé  à  faire  quelques  enfants  maies 
et  femèles  à  une  négresse  à  lui  pour  laquelle  il  a  des  bontés  ;  il  l'a 
affranchie  depuis  longtemps,  mais  il  n'en  a  point  fait  sa  femme.  La 
tendresse  qu'il  a  pour  sa  progéniture  le  porte  effectivement  à  en- 
voyer ses  enfants  à  ses  parents  à  Bordeaux  pour  les  y  faire  élever  ; 
mais  ils  ne  le  sont  seurement  pas  dans  le  Judaïsme,  nous  en  avons 
la  preuve  dans  les  aînés  qui  reparaissent  icy  très  chrétiens.  M.  de 
Paz  est  sans  doute  d'origine  et  de  famille  juive  et  son  nom  même 
est  ancien  et  illustre  dans  cette  nation  ;  mais  il  n'est  pas  lui  de  cette 
religion  et  professe  icy  très  ouvertement  et  de  bonne  foi  celle  du 
royaume  non  peut-être  avec  la  pureté  des  mœurs  et  l'édification  que 
tout  catholique  devroit  étaler,  mais  c'est  la  crainte  du  cocuage  qui 
en  est  la  seule  cause.  Il  n'a  jamais  pu  se  résoudre  au  sacrement  du 
mariage  comme  aU  remède  de  la  concupiscence.  Nous  n'avons  rien 
à  nous  reprocher  là-dessus. 

Nous  sommes,  etc. . . 

Larnage,  Maillart. 

Si  les  administrateurs  des  colonies  avaient  mis  plus  de  deux  ans 
pour  répondre  au  ministre,  celui-ci  leur  écrivit  immédiatement  la 
lettre  suivante  : 

Lettre  du  Ministre  à  Messieurs  de  larnage  et  Maillart  *. 

Du  3  septembre  1743. 

Sur  les  éclaircissements  que  vous  me  donnés  dans  votre  lettre  du 
4  juillet  dernier  au  sujet  des  Juifs  établis  à  S'  Domingue,  il  paroist 
qu'il  n'y  a  aucun  nouvel  arrangement  à  prendre  par  rapport  à  eux. 
Dès  qu'il  n'y  en  reste  en  effet  que  trois,  qu'ils  ne  forment  que  deux 
maisons,  qu'ils  ne  sont  point  mariés  et  que  leur  conduite  dans 
le  commerce  qu'ils  font  est  aussi  convenable  que  vous  le  dites, 
il  n'y  a  aucun  inconvénient  à  les  tolérer  dans  la  colonie  et  le  Roy 
trouvera  bon  qu'ils  y  restent  tant  qu'ils  continueront  à  s'y  compor- 
ter comme  ils  ont  fait  jusqu'à  présent.  S.  M.  n'entend  cependant 
point  que  cette  nation  puisse  se  multiplier  à  S'  Domingue  ;  et  s'il 
s'y  présentoit  d'autres  Juifs  que  ceux  qui  y  sont  vous  aurès  soin  de 
ne  les  y  souffrir  qu'autant  que  S.  M.  aura  permis  leur  passage.  Vous 
êtes  déjà  informez  que  sur  ce  que  M.  Rostan  m'avoit  marqué  qu'il  y 
en  avoit  journellement  à  Bordeaux  qui  demandoient  à  s'embarquer 
pour  les  Isles,  ce  commissaire  a  eu  ordre  de  les  en  empêcher. 

A  l'égard  du  s'"  de  Paz,  il  y  a  toute  apparence  que  c'est  lui  qu'on  a 
voulu,  comme  vous  l'observés,  désigner  par  l'avis  qui  me  fut  donné 
au  mois  d'avril  dernier.  J'ai  su  en  effet  depuis  que  les  deux  jeunes 

•  Archiv.  du  Minisl,  do  la  Mur.  —  Collect.  Morcau  St-Méry.  —  Colonies  en  général, 
t.  XV,  an.  Juil. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII"  SIÈCLE       i  i3 

mulâtresses  qui  furent  mises  vers  ce  tems  là  dans  un  couvent  de 
Bordeaux  sont  ses  filles,  et  qu'il  pourvoit  exactement  aux  dépenses 
nécessaires  à  leur  entretien  et  à  leur  éducation.  Mais  il  y  a  dans  la 
même  ville  une  troisième  mulâtresse  plus  âgée  que  les  deux  autres, 
laquelle  se  dit  aussi  la  fille  du  s*'  de  Paz.  Depuis  peu  de  tems  elle 
m'a  fait  demander  un  ordre  pour  pouvoir  s'embarquer  pour  S'  Do- 
mingue,  prétendant  que  les  parents  de  son  père  sy  opposoient  pour 
des  raisons  d'intérêt  et  même  de  religion.  Mais  je  me  suis  contenté 
de  prescrire  à  M.  Rostan  den'emploïer  l'autorité  pour  un  embarque- 
ment qu'autant  qu'elle  sera  en  état  de  faire  voir  que  son  retour  à 
S'  Domingue  doit  se  faire  de  l'aveu  de  sou  père.  Je  ne  suis  point 
encore  informé  de  ce  qui  se  sera  passé  à  ce  sujet  ;  mais  en  tout  cas 
il  convient  que  le  s'"  de  Paz  prenne  des  arrangements  pour  que  les 
enfants  qu'il  a  en  France  puissent  profiter  de  l'éducation  qu'il  a 
l'intention  de  leur  donner  sans  que  ceux  à  qui  il  les  adresse  puis- 
sent y  mettre  obstacle  :  et  c'est  de  quoi  je  vous  prie  de  le  prévenir. 
Au  reste  les  témoignages  que  vous  me  rendes  de  lui  s'accordent  avec 
ce  qui  m'en  est  revenu  de  tous  les  tems. 

Il  résulte  de  cette  correspondance  que  MM.  de  Larnage,  gouver- 
neur général,  et  Maillart,  intendant,  affirmèrent  que  cette  dénon- 
ciation était  une  vengeance  qu'avait  voulu  exercer  le  Père  Rliedon  : 
contre  qui  ?  Peut-être  contre  M.  de  Paz  ;  mais,  à  coup  sûr,  contre 
ces  administrateurs  qui,  pour  ne  point  s'exposer  à  un  blâme  du  roi, 
furent  obligés  de  dissimuler  la  vérité  et  de  déclarer  qu'il  n'y  avait 
aux  Iles  que  trois  Juifs  formant  seulement  deux  maisons,  lorsqu'il 
est  certain  qu'il  s'en  trouvait,  au  contraire,  un  bien  plus  grand 
nombre,  que  les  autorités  connaissaient  parfaitement  et  qu'elles  se 
gardaient  bien  de  nommer.  Il  est  certain  également  que  plusieurs 
Juifs  se  convertirent  vers  ce  temps  pour  se  mettre  à  l'abri  des 
persécutions  populaires*  soulevées  contre  eux,  pensant  éviter 
ainsi  la  ruine  de  leur  industrie  ou  de  leur  commerce  ;  car  ils  igno- 
raient quelle  serait  la  réponse  qui  serait  faite  au  ministre  par  les 
administrateurs.  Ce  mouvement  fut  loin  cependant  d'être  général, 
et  pour  quelques  conversions  auxquelles  on  donnait  un  apparat  et 
un  retentissement  qui  s'alliaient  fort  peu  à  des  convictions  sincères 
et  profondes,  la  très  grande  majorité  des  Juifs  resta  fidèle  à  sa  foi, 
malgré  sa  perplexité  et  ses  craintes.  Les  Juifs  y  furent  d'ailleurs 


'  Les  mauvais  plaisants  même  y  contribuèrent,  Icmoin  le  fait  suivant  que  nous 
avons  trouvé  dans  des  notes  sur  les  colonies  :  •  Une  négresse  fanatique  intcrro- 
"  gcait  depuis  longtemps  le  Christ  du  Petit-Goavc  pour  sçavoir  qui  l'avait  crueilié. 
»  Un  plaisant  se  cacha  un  jour  derrière  le  pied  d'aulel  do  maçonnerie  et  répondit  : 
•  C'est  Meudez  !  La  négresse  prit  des  pierres  et  fondit  dans  la  maison  de  ce  juif 
»  qu'elle  voulut  lapider  et  qui  lut  obligé  do  fuir  pour  échapper  à  sa  sainte  fureur.  » 
(Arch.  du  Minist,  de  la  Marine.  —  CoUect,  M.  S.  —  P.  IL,  t.  II,  p.  502. 


144  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

encouragés  par  l'exemple  que  leur  donnèrent  les  deux  sœurs  Gra- 
dis  qui,  à  l'honneur  de  cette  famille,  refusèrent  d'épouser  les  frères 
Mendez,  nouveaux  convertis,  bien  que  leur  frère,  Abraham  Gradis, 
dont  elles  étaient  héritières,  eût  exprimé  un  tel  désir,  alors  que 
les  frères  Mendez,  ses  associés,  appartenaient  encore  à  la  religion 
juive. 

C'est,  sans  doute,  au  dépit  occasionné  par  ce  refus  et  à  l'influence 
que  les  deux  frères  Mendez  pouvaient  exercer  sur  l'esprit  de  quel- 
ques juges  à  la  Martinique  que  les  demoiselles  Gradis  durent  de 
voir  le  procès,  commencé  en  1739,  se  prolonger  pendant  douze 
ans  et  ne  prendre  fin  que  le  16  juillet  nsi.  Encore  fallut-il  que 
Judith,  l'une  des  sœurs  légataires,  payât  de  sa  personne  et  se 
rendît  à  la  Martinique.  La  famille  de  Rochechouart,  qui  était  fort 
liée  avec  David  Gradis  et  qui  fit  ce  long  voyage  avec  Judith,  mit  à 
la  disposition  de  sa  compagne  de  route  sa  grande  influence  et  les 
relations  puissantes  qu'elle  avait  aux  colonies. 

Disons  un  mot  de  ce  procès.  —  De  la  correspondance  que  nous 
venons  de  publier  il  résulte  qu'Abraham  Gradis,  mort  à  la  Marti- 
nique, avait  fait  un  testament  par  lequel  il  léguait  toute  sa  fortune 
à  deux  de  ses  sœurs  non  mariées,  à  l'exclusion  de  ses  deux  autres 
sœurs  mariées  dont  l'une  était  devenue  catholique.  Celle-ci  de- 
manda l'annulation  du  testament  et  fit  parvenir  au  ministre  un 
mémoire  à  ce  sujet.  M.  de  Maurepas,  qui  transmit  ce  mémoire  aux 
administrateurs,  songea  un  moment  à  faire  saisir  la  succession  au 
profit  du  Trésor  par  dy^oit  cCanljaine.  Mais,  sur  les  observations 
judicieuses  de  MM.  de  Champigny  et  de  la  Croix,  il  abandonna  cette 
prétention  et  laissa  à  la  justice  le  soin  de  trancher  la  contes- 
tation soulevée.  Les  arguments  de  la  sœur  déshéritée  consistaient 
en  ces  deux  points  :  1°  la  qualité  de  Juif  devait  empêcher  son  frère 
de  disposer  de  ses  biens  aux  colonies  ;  2°  sa  qualité  de  Juive  con- 
vertie était  le  seul  motif  de  son  exhérédation.  Le  juge  rendit  une 
sentence  qui  cassait  le  testament  et  ordonnait  le  partage  égal 
entre  toutes  les  sœurs.  Appel  de  ce  jugement  fut  interjeté  par  les 
deux  parties  :  1°  par  les  deux  sœurs  légataires  pour  demander  la 
validité  du  testament  ;  2°  par  Suzanne  Gradis  contre  la  décision  du 
juge  qui  n'avait  pas  adjugé  à  elle  seule,  catholique,  l'héritage  tout 
entier.  L'affaire,  portée  devant  la  cour  de  Port-au-Prince,  fut  étu- 
diée à  fond  et  rapportée  par  le  conseiller  Dessalles  qui  fit  ressortir 
avec  beaucoup  de  clarté  et  de  vigueur  la  contradiction  qui  se  trou- 
vait dans  la  sentence  môme*.  Sur  ses  conclusions,  un  arrêt  fut 


'  Nous  donnerons   en  supplément  ce  rapport  plein  de  vues  élevées,  do  raisonne- 
ments judicieux  et  précis.  V.  Pièce  supplémentaire. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII'  SIECLE       1  iij 

rendu  le  6  juillet  1752,  qui  niit  les  appellations  respectives  avec 
ce  dont  est  appel  à  néant,  émendant  or^donne  l'exécution  du 
Testament  du  feu  sieur  Abraham  Gradis,  les  dépens  pris  sur  la 
masse  de  la  succession  ' . 

Le  jugement  et  l'arrêt  dont  nous  venons  de  parler  ne  sont  pas 
les  seuls  d'ailleurs  qui  reconnaissent  aux  Juifs  des  colonies  le  droit 
de  disposer  de  leur  fortune,  bien  que  cette  jurisprudence  fût  con- 
traire aux  prescriptions  rigoureuses  de  l'article  premier  du  Code 
noir.  Toutes  les  Cours  des  colonies  jugeaient  dans  le  même  sens  et 
refusaient  au  directeur  du  domaine  le  droit  de  revendiquer  comme 
aî^&(2t>2e  les  successions  des  Juifs.  Cependant  les  simples  juges, 
plus  influencés  par  leur  entourage,  admettaient  généralement  les 
prétentions  du  directeur  du  domaine.  L'arrêt  du  conseil  de  Léo- 
gane-,  du  8  mars  1751,  condamnait  le  receveur  des  aubaines  à 
remettre  à  Emmanuel  Cardoze,  Juif  de  la  Généralité  de  Bordeaux, 
les  deniers,  titres,  papiers  et  renseignements  de  la  succession  de 
David  Cardoze, son  frère  ;  l'arrêt  du  conseil  du  Port-au-Prince^  du 
4  juillet  1759  et  l'arrêt  du  conseil  du  Cap  ^  du  6  octobre  1759,  à 
propos  de  la  succession  de  Moïse  Daguilard  sont  conçus  dans  le 
même  esprit  et  basés  sur  les  mêmes  considérants. 


Ab.  Cauen. 


[A  suivre.) 


»  Arch.  du  Minist.  de  la  Mar.  —  CoUect.  Moreau  St-Méry.  —  Code  de  la  Marti- 
nique, ad  animai. 

">■  Moreau  de  Saint-Méry,  Lois  et  constitutions  des  colonies  françaises  d'Am&if/ne 
sons  le  Vent,  etc.  Paris,  1787,  t.  IV,  p.  66. 

3  Idem,  t.  IV.  p.  260. 

*  Idem,  t.  IV,  p.  293.- 


T.  IV.  10 


NOTES  ET  MÉLANGES 


JOSEPH  LE  ZÉLATEUR 


I 

Bans  le  second  article  de  M.  Zadoc  Kahn  sur  Joseph  le  Zélateur  ' , 
on  a  Yu  avec  quels  artifices  Joseph  Officiai  a  mis  sa  signature 
dans  la  poésie  qui  termine  le  Vihkiiah.  Si  on  considère  que,  dans 
cette  poésie,  il  y  a  des  mots  à  double  sens  ('^n^N,  par  exemple, 
fait  à  la  fois  'TinN  et  ^n2N  =  Joseph  ;  Vn  -«osn  fait  aussi  ^n-'çdn;)  ; 
si  en  outre  on  remarque  que  le  nom  de  Joseph  se  trouve  encore 
une  seconde  fois  en  acrostiche,  au  commencement  des  lignes  3  à 
6,  on  trouvera  peut-être  légitime  Th^^pothèse  suivante.  Dans  le 
ms.  de  Hambourg  de  Joseph  f<2p73r!,  il  y  a  quelques  observations 
de  R.  Ascher,  frère  de  Joseph  b.  Natan  l'Official.  Ces  passages 
manquent  dans  le  texte  du  ms.  de  Paris,  et  s'y  trouvent  ajoutés 
en  marge,  sans  nom  d'auteur.  M.  Zadoc  Kahn  dit  avec  raison  - 
que  «  cette  suppression  du  nom  d'Ascher  dans  le  ms.  de  Paris  a 
quelque  chose  de  singulier.  »  Je  crois  avoir  trouvé  Texplication 
de  l'énigme.  Le  poème  final  dont  je  viens  de  parler  laisse  entre- 
voir qu'Ascher  a  assisté  son  frère  pour  la  rédaction  du  Vikhiiah, 
mais  que,  par  modestie,  il  ne  voulut  pas  être  nommé.  C'est  aussi 
pour  cela  qu'il  n'est  pas  mentionné  dans  le  ms.  plus  ancien  de 
Paris,  mais  plus  tard,  la  part  qu'il  eut  à  l'œuvre  fut  connue  et  son 
nom  trouva  place  dans  le  ms.  plus  jeune  de  Hambourg.  En  effet, 
le  second  vers  du  petit  i)oème  dit  : 

mmï:nn  a-^b^aiib  ■'srjTT  Trôna  ■^s-its'  ï-id  ns'  niiîN 

ce  qu'on  peut  traduire  par  :  «  [Dieu]  qui  m'a  aidé,  etc.,  "iiaN,  » 

'  'l'oiiie  III,  paj^f  1. 
'■■  Tome  I,  jiugc  lii'j. 


NOTES  ET  MÉLANGES  !'•" 

mais  aussi,  en  lisant  TipN,  par  :  «  C'est  Asclier  qui  m'a  aidé  jus- 
qu'à ce  point  et  m'a  permis  d'achever  ces  Réponses.  »  En  outre, 
le  poème  commence  et  finit  par  ces  mots  by  Dp  niax  bN  "i"i2t^ 
nin-^nD,  où  ily  a  à  la  ibis  un  hommage  à  Dieu,  un  souvenir  au  nom 
de  l'auteur  (']n3N  =  JoseC)  et  enfin,  comme  nous  le  supposons, 
cette  pensée  que  le  frère  de  l'auteur,  Ascher,  a  renoncé  à  ses  droits 
de  paternité  sur  l'œuvre  commune  et  les  a  sacrifiés  à  Joseph  ^iiîn 
'ai  dp.  Ainsi  le  poème  mentionne  Ascher  et  rend  en  môme  temps 
témoignage  de  sa  modestie. 

D.    SlMONSEN. 


II 


1.  —  Je  possède  un  Mahzor  du  rite  romain,  sur  parchemin,  oii 
le  texte  des  prières  est  entouré  d'un  ancien  commentaire  anonyme, 
écrit  par  un  Provençal  ou  du  moins  par  un  Français.  Il  cite,  entre 
autres,  R.  Jacob  Tam,  R.  Elia,  Maïmonide,  R.  Ascher  de  Lunel, 
R.  David  Kimhi,  et  dit,  f'^  31  :  y-MH  bsn  nn^  n3pn  n-'n7:vs  nSN  ^5i 
ni^n  û'^D'm:\  n-iDom  ...nsni:.  Au  f-^  8,  il  y  a  ce  passage  :  T-i)2-^b'^r> 
in  3^^nr<n  1.^  ^-o'û'^îûp  i^-npo  ù-^p^brir!  SnN  ^tJDiN^sNp  V"^^P'^ 
4'j'ib'-^jir,n.  Au  f^  7  se  trouve  un  passage  qui  a  été  aussi  communi- 
qué par  M.  Zadoc  Kahn,  dans  sa  belle  étude  (III,  p.  7),  mais  comme 
il  est  plus  complet  dans  mon  ms.,  je  le  donne  ici  in-extenso  : 

'iÙ'^'Q  -1313   1517272  b"03  iîb    llMltnn  ■ib-'Dï*  '''2  1721î^  r!in3>1  1573»  IITj,  Nbl  IfllN 

iDb  ']r\-ù  NT-  n-i:Di73  i2iii:-ia  m  "jnii'^a  s"i'N  ■'^  T^ir;  î^-i'-i  iiD\s  m 
innn  li7073  npib  rii'm  -inr  ^-^J^rii  1317:72  n^tn72  nitîi  157272  mibb  "ç^i:'»:: 
Û1N  "jw  ^^  13  b^^'^  CinN  r^rn  r;t)3'72'r;t5  ^Dbi  i5iiti3  ni'-"»:?  d"3>n  V^^"  n^'»^ 
y>b'J  r:n^72nri  '^i^sb  i-;n'^5:;'n  b:>i  nb^T^r;  bj'  172D  ^72:3  D72n  tVj  Nmp 
13  b-'ii-iTii  nim72nri  .dj>  iniïî  i3n5)  b\s"'35ïii  r!3n^  i3'r:-iT!Tm  iriinri 
r:-iinï-ii  rinin  -noNU)  r!72  NbN  in72N  Nb  b^pTn^i  niii  1517272  v^t  "^-''^^  ^"î^"" 
•i72i<2  Nbi  "T^"::!-!  -^nissb  -i72N5;:5  17253  -ini72  ■^■iD5b  b3N  btîi'u-^b  Nbis  ï-iioi^  Nb 
3i5:\b  IN  ibîr^b  im  ni5Tnb  niON  ■^-i:D5b  ib-^sN  -^d  r:N5iN3i  ns-^s:!  rib"''î:^3 
s-i-^n  bNi"»::!"'  ■^3)  -ini72  in:>n3i  i3i2:n3  157272  npib  Ni'no  "yû'T*  b3N  1517272 
TC13-I  d'^uJ5N  ii3'-i^!  -^3)  r!5n72r:  172  ni72ip?23  r;3i::2  inri  ^i3rji  non  nioyb 

'  Capions,  chaperons. 

^  Clicmiscs. 

3  (îarnic  (garucmout,  manteau). 

*  Gonellc  (casaque  d'homme). 


148  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

TN  fNDio  tDi-,  m-i3  -ir)  tïna  iiit:»  ib  rmbnb-i  non  !?::>  mt):5?b  n-^in 
bx-iw-^  n-i-T!  bî<"iu;i  t::?  rim-Lii  non  "^i:;::  ï-i':;ir  ûïî  \s-m3  bnjî  b^n'û-» 
rt::rwn  i3  N:i?:r">:;  •^i'd  !-!T3  ^b  "innn-Tm  ,  nb  n^::r;bi  icn  i?::^  ^">  miu^'b 
-noN  n->3-i  br)  «bN  "^isb  bN-iï:-»  ■j*'::  ©"^-isni  Nb  mi  "^s  û-^-iwiNia  û-^-iitiîb 
iriN  !-î:rîT  b^n  1D":'  rî":y  1221  riU)^  -i\n?T:5  !^72  ncN  in  -^^  pn-^  Nb  riTi 

.  lîtttt  ::>n:;n  Nbi  rb:?  Sj-^oin  isb  ri-nna 

2.  —  Les  explications  communiquées  par  M.  Zadoc  Kalm  (III, 
p.  27)  sur  les  yersets  ûT'D  nn^To  et  ^pyib  inm^a  nx  mrDXD'^T  n'ap- 
partiennent pas  à  un  seul  et  même  auteur.  L'explication  du  pre- 
mier verset  se  trouve  bien,  comme  M.  Zadoc  Kalin  l'indiqug  (p,  28, 
note  1)  dans  Daath  Zékenim,  mais  ne  peut  pas  être  de  Joseph 
Beclior  Sclior,  puisque  celui-ci,  dans  son  commentaire  (édit.  Jel- 
linek,  Leipzig,  1856)  explique  tout  autrement  ce  verset.  Joseph 
b.  Nathan  a  donc  fait  ici  une  erreur  de  mémoire  ou  de  copie. 

L'explication  du  second  verset  se  trouve  dans  le  commentaire 
de  R.  Samuel  b.  Méir,  et  est  aussi  mentionnée,  mais  sous  le  nom 
de  R.  Mosché,  dans  Paeneach  Eaza,  mais  R.  Joseph  Bechor 
Schor  la  repousse  formellement  en  disant  :  npr\ri;p  s^s^a  i:d  72"it 
mNnn  isirn  t^i-^-ian  ^i-npo  n-T'Dwn  mire  Trr,  br5^^î^î  .'-in  rrnisnr; 
•'r^'n.  Le  mot  français  'Ninna,  que  M.  Jellinek  a  rendu  par  de- 
veria,  se  trouve  seulement  chez  Bechor  Schor,  mais  non  chez 
Samuel  b.  Méir,  et  est  remplacé  dans  Paeneach  Eaza  par  un  mot 
allemand  :  -  tj-^ipi-iV^  js"bn  impffl. 

S.  J.  Halberstam. 


'  De  biberagium,  beveragium,  pourboire. 
*  Lehakauf,  acquisition  féodale. 


BIBLIOGRAPHIE 


HEYUE    BIBLIO&UAPHIQUE 

1"'    TRIMESTRE    1882. 


dïTnaN  5|&T^1  'D  Dito  libro  esto  ordinado  en  ladino  para  que  todos  coran 
en  su  meldado,  e  es  por  las  mbi'tt  di  Josef  ha-çaddik  n";>  el  affamado. . . 
(Livre  de  morale  eu  l'honneur  de  Joseph,  fils  de  Jacob,  composé  de  deux 
parties  :  1°  une  apologie  de  Joseph  en  judéo-espagnol  ;  2°  une  partie  hé- 
braïque contenant  des  homélies,  extraits  talmudiques  et-midraschiques, 
disposés  par  ordre  alphabétique,  sur  le  même  sujetX  par  Joseph  Palaggi 
avec  le  concours  de  son  frère  Abraham  Palaggi.  Smyrne,  imp.  Hayyim 
Abraham,  1881,  m-i°  de  43  +  106  ff. 

Tilza  ■'^2^lJ  a  treatise  on  the  accentuation  of  thc  three  so-called  poetical 
Books  of  the  old  testament  Psalms,  Provcrbs  and  Job,  witli  an  Appendix 
containing  the  trcalise  assigned  to  R.  Jehuda  ben  Bil'am  on  the  same 
subject  in  thc  original  arable,  by  William  Wickes.  Oxford,  Clarendon 
Press,  1881,  in-S»  de  x-119  p. 

Un  do  nos  collaborateurs  rendra  probablement  compte  de  cet  intéressant 
ouvrage. 

■1^33  TTabnb  m^Nill  û"'ï:5TT'D  Scholien  zum  babylonischen  Talmud,  von 
Abraham  Krochmal.  Lemberg,  libr.  Michael  Wolf,  1881  ;  ia-8°  de  320  p. 

L'ouvrage  demanderait  un  examen  détaillé  que  nous  ne  pouvons  faire 
ici.  Il  nous  a  paru  très  intéressant,  et  nous  avons  vu  avec  plaisir  qu'il 
s'occupe  principalement  des  problèmes  bistoriques  et  archéologiques  du 
Talmud. 

Bauwerker  (C).  Das  rituelle  Schiichtou  dcr  Israeliten  im  LichLe  dcr  Wis- 
senschaft.  Kaiserslautern,  libr.  Gotlhold,  in-8°  de  IG  p. 

Lecture  publique  faite  le  '.>  décembre  1881.  L'auteur  se  prononce  en  fa- 
veur du  maintien  de  la  manière  juive  do  tuer  les  bûtes,  mais  il  voudrait 
qu'elle  fût  améliorée  dans  certains  détails. 

Encyclopédie  des  sciences  religieuses  publiée  sous  la  direction  de  V.  Lich- 
tcnbcrger.  Paris,  G.  Fischbachcr,  éditeur,  1881.  Tomes  X  et  XI. 

Nous  signalons,  dans  ces   deux   volumes,  les  articles  suivants  :  Onias, 


im  RENTE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Oiikelos,  Isaac  Orobio,  Osée,  Olhoniel,  Palestine,  Paris  (culte  israélile, 
p.  221),  peines  chez  les  Hébreux,  Pentateuque  (Maurice  Vernes),  Pente- 
côte (Eug.  Picard),  Péripot  Duran,  Pharaon,  Pharisiens  (Edm.  Stapfer), 
Phénicie  (Phil.  Berger) ,  Philou  (Jean  Réville),  phylactères,  poids  et 
mesures  chez  les  Hébreux,  Pourim,  prophétisme  chez  les  Hébreux  (Ch. 
Bruston),  propriété  chez  les  Hébreux,  Proverbes  (Ch.  Bruston),  Psaumes 
(Ch.  Bruston),  purifications  chez  les  Hébreux,  Rabbin,  Rabbinisme,  Ra- 
chel,  Rahab,  Raimond  de  Pennaforte,  Raphaim,  Raphidim,  Rébecca, 
Réchabites,  Adrien  Reland,  Respah,  Livre  des  Rois,  Ruben,  Ruth 
(AI.  Vernes),  Saba,  Sabbat  (Scherdlin),  Sabbatbaires,  Sabbathien,  année 
sabbatique,  sacrifices  (Scherdlin),  Saducéens  (Stapfer),  Salomé,  Salomou, 
Samarie,  Samson,  Samuel,  Livre  de  Samuel  (M.  Vernes),  Sanaballat,  San- 
hédrin, Livre  de  la  Sapience  (M.  Vernes),  Sarepta,  Saul,  Schammaï 
(Stapfer),  Scribes  (Stapfer),  Sédécias,,  Séir,  Sennachérib,  Sépulture  chez 
les  Hébreux,  Sésac,  Seth,  Livres  Sibyllins  (M.  Vernes),  Sidon,  Siméon, 
Richard  Simon,  Sinaï  (A.  Chauvet),  Spinoza  (E.  Rabier),  Sj'mmaque,  la 
grande  Synagogue  (A.  Warnitz),  synagogue. 

Gellion-DanCtLar  (Eug.).  Les  Sémites  et  le  Sémitisme  aux  points  de  vue 
ellinograpliique,  religieux  et  politique.  Paris,  libr.  Maisonneuve,  in-18  de 
s:i-199  p. 

Ouvrage  de  polémique  dirigé  principalement  contre  la  religion  chré- 
tienne à  titre  de  religion  sémitique. 

Immanuel  b.  Salomo  Romano.  Comento  sopra  i  Salmi,  etc.,  publié  par 
M.  le  chevalier  P.  Perreau  ;  fascicules  XXX  et  XXXI. 

Kapff  (L.-H.).  Hebrâisches  Vocabularium  in  alfabetischer  Ordnung,  mit 
Zusammenstellung  von  Synonymen,  gleich  und  âhnlicli  lautenden  Wôr- 
tern  und  analogen  Formen,  nacb  dem  Ms.  von  D''  L.  H.  Kapff  bearbei- 
tet  u.  berausgg.  von  D''  L.  Ableiter.  Leipzig,  libr.  Halin,  1881  ;  in-8°  de 
vi-178  p. 

La  Rochelle  (Ernest).  Jacob  Rodrigues  Percirc,  premier  instituteur  des 
sourds-muets  eu  France, 'sa  vie  et  ses  travaux.  Paris,  imp.  Paul  Dupont, 
in-8°  de  576  p. 

Les  chapitres  x,  xiii  et  xv  contiennent  des  renseignements  en  partie 
inédits  sur  l'établissement  de  la  communauté  juive  à  Paris,  les  services 
rendus  par  Péreire  à  ses  coreligionnaires,  la  création  du  premier  cimetière 
Israélite  à  Paris,  en  1780. 

Reuss  (Eduard).  Die  Geschichtc  der  heiligen  Schriften  Alton  Testaments; 
zweite  Iliilftc.  Brunswick,  libr.  Scbwctscbke,  1881  ;  in-8°  allant  de  p. 
401  b  p.  743. 

OuvERLEAUX  (Emile).  Notice  sur  une  inscription  hébraïque  dccouvorte  à 
Béjar.  Bruxelles,  imp.  Lhoest,  in-8°  de  19  p*.  Extrait  de  l'Athcnivum 
beige  du  15  février  1882. 

Cette  inscription  très  curieuse,  découverte  eu  1X77,  a  été  décrite  par 
M.  Nicolas  DJaz  y  Pcrcz  dans  l'Averiqiiador  uuiversal  do  Madrid,  n°  du 
li)  novembre  1879,  et  dans  une  brochure  de  M.  Augustin  Blasco  [Jipigrafia 
hebraica,  piedra  sépulcral  ;  Madrid,  imp.  Aribau,  lS8l)  avec  le  concours 
de  notre  savant  ami  M.  Fidel  Fita.  L'inscription  est  composée  de  quatre 
lignes  disposées  en  carré.  M.  Ouvcrleaiix  a  fort  bien  lu  les  deux  lignes 
latérales  et  la  ligne  inférieure,  qui  forment  ensemble  la  première  partie 
du  verset  14  du  psaume  VJ  :  !l73"'3D  ^12  P3  ïlliniD  bS-  La  ligne  supé- 
rieure seule,  qui  renferme  le  nom  do  la  jirrsonue  enterrée,  offre  de  la 
ilinicullé.  Autant  qu'on  en  peut  juger  d'a|)rès  la  reproduction  imparfaite  qui 


BIBLIOGRAPHIE  ir.I 

a  été  donnée  de  ce  monument,  cette  ligne  doit  so  lire  ainsi  :  N"^:!! 
N'^j"'N'nN3-  Le  premier  mot  n'oirre  pas  de  difficulté,  c'est  le  nom  de  doua 
(donia,  dame).  Dans  le  second  mot,  il  n'y  a  de  douteux  que  les  deux  "n, 
le  premier  pourrait  être  un  1  ou  un  "i.  Le  N  qui  suit  le  D  est  archaïque, 
de  la  même  forme  que  ceux  dont  nous  parlons  plus  haut,  dans  l'article  sur 
les  Juifs  de  Barcelone  (p.  6a).  La  coexistence  des  N  archaïques  et  des  N 
modernes  ne  doit  pas  étonner,  on  la  rencontre  également  dans  les  inscrip- 
tions publiées  par  M.  Ascoli.  M.  Ouverleaux  prend  le  second  mot  pour 
Paldoinia  (en  supposant  que  le  signe  que  nous  prenons  pour  N  archaïque 
soit  le  signe  ^Nj  ou  bien  Padoinia,  ce  qui  serait  le  nom  Baldoina,  féminin 
de  Baldcwin,  Balduin  (en  fr.  Baudouin).  Si  la  troisième  lettre  du  mot 
pouvait  être  b,  nous  ne  serions  pas  éloigné  de  penser  que  nous  avons  ici 
le  nom  de  Falvinia  pour  Flavinia  (comme,  par  exemple  Porvençal  pour 
Provençal,  Revue-,  III,  p.  236  ;  ces  inversions  sont  fréquentes).  îî"^:"^ïîl 
pour  i-inia  (avec  un  N  entre  la  l"'  et  la  3*^  lettre)  s'expliquerait  peut-être 
par  cette  circonstance  que  le  groupe  iT  semble  avoir  servi  à  représenter  le 
son  au  (Ascoli,  p.  lo). 

Palestine  et  Syrie,  Manuel  du  voyageur,  par  K.  Baedeker,  avec  18  cartes, 
43  plans,  un  panorama  de  Jérusalem  et  10  vues.  Leipzig,  libr.  K,  Bae- 
deker, in-8°  de  xiv-631  p. 

Quoique  cet  ouvrage  soit   apprécié  plus   loin  dans  un  article, du  savant 
M.  Duval,  nous  croyons    devoir  en  parler  ici  à  un  point  de  vue  différent. 

Ce  guide  ne  ressemble  à  aucun  autre,  il  est  supérieur  à  tout  ce  que 
nous  connaissons  en  ce  genre.  On  n'en  sera  pas  étonné  quand  ou  saura 
qu'il  est  principalement  l'œuvre  de  M.  Albert  Socin,  un  des  savants  qui 
connaissent  le  mieux  le  pays.  Ce  qui  en  fait  l'originalité  et  le  mérite  ex- 
ceptionnel, c'est  que  tout  en  fournissant  au  voyageur  tous  les  renseigne- 
ments pratiques  les  plus  détaillés  et  les  plus  précis,  il  lui  donne,  sur  l'his- 
toire et  la  géographie  anciennes  du  pays,  l'archéologie,  les  monuments  de 
l'art,  les  grands  ouvrages  du  génie  civil  et  militaire,  des  informations  pui- 
sées aux  meilleures  sources  et  toujours  dignes  de  confiance.  L'auteur  a 
accompli  uu  immense  travail  de  condensation  en  résumant,  dans  ces  600 
pages,  très  compactes,  il  est  vrai,  une  littérature  des  plus  vastes.  Son  ou- 
vrage ne  sera  pas  seulement  un  guide  sûr  pour  le  pieux  pèlerin  qui  va 
surtout  eu  Palestine  pour  y  chercher  des  souvenirs  religieux  et  des  émo- 
tions pieuses,  il  peut  aussi  servir  de  manuel  et  de  répertoire  excelleut 
à  l'archéologue  et  au  savant.  Il  fait  l'identiUcalion  des  lieux  bibhques, 
indique  l'âge  des  monuments,  mentionne  les  hypothèses  vraisemblables, 
signale  les  problèmes  encore  pendants,  le  tout  sans  aucun  pédantisme  et 
sans  formules  rébarbatives.  Si  l'on  veut,  par  exemple,  parcourir  avec  lui 
Jérusalem,  ou  sera  d'abord  rais  au  courant  de  la  question  topographique 
la  plus  grave  qui  concerne  cette  ville,  celle  de  l'identification  de  l'an- 
cien Sion  et  de  l'emplacement  de  la  Tille  de  David.  Puis  le  voyageur 
recevra  dos  notions  justes  sur  l'histoire  de  la  ville,  de  ses  monuments, 
de  ses  fortifications,  sous  Salomon  et  les  rois,  principalement  sur  les  tra- 
vaux que  fit  exécuter  le  roi  Ezéchias.  La  Jérusalem  du  temps  de  Né- 
hémie,  avec  toutes  ses  complications  do  noms  bizarres,  lui  sera  ensuite 
décrite.  Enfin  viendra  la  Jérusalem  d'IIérode,  le  temple,  le  Ilaram  actuel, 
la  description  des  trois  enceintes,  le  problème  si  controversé  do  l'empla- 
cement du  Golgotha.  En  parcourant,  du  dehors,  l'enceinte  du  temple  d'IIé- 
rode, le  voyageur  apprendra  en  gros  tout  ce  qu'on  sait  aujourd'hui  sur 
les  portes  (l'auteur  a  probablement  tort  d'appeler  les  portes  du  sud  •  por- 
tes de  la  irrophétessc  lloulda  •)  de  cette  enceinte,  sur  l'âge  des  assises  du 
mur  gigantesque  de  l'enceinte,  sur  les  parties  de  cette  enceinte  qui,  soit 
au  Sud  soit  au  N.-O.,  peuvent  être  du  temps  de  Salomon,  sur  ce  fait  cu- 
rieux qu'aux  angles  S.-E.  et  N.-O.  les  fondations  enjambaient  d'uu  côté 
la  vallée  de  Tyropéon,  de  l'autre  côté  uu  dérivé  de  cette  vallée,   etc.  Eu 


132  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

pénétrant  dans  l'intérieur  du  Haram  et  des  maisons  environnantes,  on  sera 
mis  au  courant,  par  exemple,  des  récits  historiques  et  des  légerdes  sur  le 
roc  sacré,  et  Tauteur  n'a  même  pas  oublié  que  dans  la  salle  du  Tribunal  il 
y  avait  autrefois  un  beau  sarcophage  qu'on  peut  admirer  maintenant  au 
Louvre.  Les  environs  de  Jérusalem,  les  tombeaux  nombreux  et  les  grottes 
qui  se  trouvent  au  N.  et  à  l'E.  de  la  ville  sont  étudiés  avec  le  même  soin 
et  la  même  science.  La  Jérusalem  souterraine  et  les  galeries  et  canaux 
qui  la  traversaient  auraient  peut-être  demandé  une  description  plus  com- 
plète ou  du  moins  plus  ramassée.  Il  nous  semble  aussi  que  Jérusalem  au- 
rait mérité  d'avoir  des  cartes  topographiques  plus  détaillées,  l'ouvrage  en 
était  digne. 

Dans  les  autres  parties  du  livre,  nous  avons  lu  particulièrement  avec 
intérêt  les  chapitres  consacrés  à  Hébron,  aux  eaux  d'Etam,  à  Masada, 
Pétra,  Arac-el-Emir,  Jotapata,  Bettir,  aux  synagogues  de  Kefr-Birim 
(p.  398). 

Il  est  clair  qu'un  travail  si  considérable  ne  peut  pas  être  absolument 
parfait.  Les  renseignements  sur  l'état  actuel  des  Juifs  sont  très  maigres 
et  quelquefois  inexacts.  La  population  de  Jérusalem,  au  dire  de  tous  ceux 
qui  connaissent  la  ville,  est  bien  supérieure  à  2^,000  âmes  (l'auteur  sait 
fort  bien  que  les  recensements  officiels  sont  des  plus  incomplets)  et  la  po- 
pulation juive  de  la  ville  n'est  ni  de  4,000  ni  de  8,000  âmes  (p.  1G9),  mais 
au  moins  de  13,000  âmes.  Les  écoles  primaires  juives  ne  sont  pas  mea- 
tionnées  (p.  169).  A  JafTa,  à  Beyrouth,  l'auteur  n'indique  pas  l'existence 
de  communautés  juives;  à  la  liste  des  écoles  de  Beyrouth,  il  aurait  pu 
ajouter  deux  écoles  fondées  par  l'Alliance  israélite  (il  mentionne  celle  de 
Damas)  et  une  institution  privée.  Sur  le  plan  des  environs  de  Jaffa,  les 
mots  «  Colonie  agricole  de  l'Alliance  israélite  »  doivent  être  remplacés 
par  ■  Ecole  agricole  do  l'Alliance  israélite  >.  Nous  ne  savons  ce  que  c'est 
que  les  ouarchi  de  la  p.  94. 

Renan  (Ernest).    L'Ecclésiaste,    étude  sur  l'âge  et  le  caractère    du  livre. 
Dans  Revue  des  Deux-Mondes,  n°  du  15  février. 

Cette  étude,  sur  laquelle  la  Revue  reviendra  plus  tard  avec  plus  de 
détail,  doit  servir  d'introduction  à  la  traduction  de  l'Ecclésiaste  que 
M.  R.  veut  publier  bientôt.  Elle  contient  des  pages  très  aimables  sur 
«  le  charmant  écrivain  qui  nous  a  laissé  cette  délicieuse  fantaisie  philo- 
sophique '  homme  du  monde  et  de  la  bonne  société,  qui  n'est  à  propre- 
ment parler  ni  blasé  ni  fatigué,  mais  qui  sait  en  toutes  choses  garder  la 
mesure,  sans  enthousiasme,  sans  indignation  et  sans  exaltation  d'aucune 
espèce.  M.  R.  considère  le  titre  de  Cohélet  comme  une  énigme  qui  n'est 
pas  encore  déchiffrée.  Il  pense  que  le  livre  est  très  moderne  et  rédigé  vers 
l'an  125  avant  l'ère  chrétienne.  La  doctrine  de  l'auteur  ne  lui  semble  pas 
provenir  du  scepticisme  grec,  mais  représenter  un  état  spécial,  et  qui  n'est 
pas  sans  antécédents,  de  la  pensée  juive.  Celte  étude  si  intéressante  et 
pleine  de  charme  se  termine  par  une  page  qui  nous  paraît  regrettable  à 
bien  des  égards  et  que  M.  Renan  ferait  bien  de  supprimer  dans  l'édition  de 
son  livre. 

RuLF  (J.).  Drci    Tage    in    Ji'ulisch-Russland,   ein  Cullur-  und   Siltenbild. 
Francforl-s-M.,  libr.  Kauirmann,  iu-8"  de  vii-131  p. 

Intéressante  relation  de  voyage  dans  la  Pologne  russe. 

Stein    (Ludwig).    Bcrtliold    Auorbach  und    dass   Judcnihuni.    Berlin,   libr. 
Drlcsner,  ln-8"  de  10  p. 

M.  Stein  a  eu  raison  de  faire  le  portrait  éloquent  de  Borthod  Auerbach, 
qui  vient  de  mourir  (né  28  février  1H12)  et  de  vanter  sou  attachement  au 
judaïsme.  La  vie  du  grand  écrivain  allemand  et  ses  œuvres  mériteraient 
d'être  spécialement  étudiées  au  point  de  vue  juif. 


BIBLIOGRAPHIE  153 

Strack  (H  -L.)  [et  M.  Steinschneider  ?].  Geschichte  der  Juden  :  a.  bis  zur 
Zerstôrung  Jerusalems  ;  b.  von  der  Zerst.  Jerusal.  bis  zur  Gegenwart. 

Rapport  ancuel  sur  les  ouvrages  historiques  concernant  le  judaïsme, 
extrait  du  Jahresbericht  der  Geschichtswissenschaft,  2e  année,  pour  1879  ; 
Berlin,  Mittler,  in-8°,  allant  de  p.  I.  43  à  p.  I,  67. 

Le  Talmud  de  Jérusalem  traduit  pour  la  première  fois  par  Moïse  Schwab  ; 

tome  V,  traités  Pesabim,  Yoma,    Sclicqalim.   Paris,   libr.  Maisonneuve, 

gr.  in-8°  de  iv-332  p. 

Lorsque  M.  Schwab  a  commencé  celte  œuvre  importante,  on  pouvait 
douter  qu'il  fût  possible  de  la  continuer,  tant  elle  aemande  de  labeur  et 
d'application  I\L  Schwab  a  maintenant  convaincu  les  plus  incrédules, 
puisqu'il  en  est  au  5°  volume  de  sa  traduction.  Les  autres  volumes  ne 
manqueront  pas  de  suivre.  A  mesure  que  l'œuvre  avance,  on  peut  mieux 
apprécier  son  incontestable  utilité  et  les  services  queUe  rend  a  ceux  qui  ne 
peuvent  pas  lire  le  texte.  Ce  sera  la  première  fois  qu  en  dehors  du  monde 
des  talmudistes  on  pourra  embrasser  toutes  les  parties  du  Talmud.  Il  im- 
porte peu,  par  un  tel  travail,  que  la  critique  ne  soit  pas  encore  arrivée  a 
tout  comprendre  ;  les  imperfections  de  détail  inhérentes  a  une  pareille  tra- 
duction disparaissent  dans  l'ensemble  de  l'œuvre  et  dans  cette  vue  géné- 
rale qu'elle  donne  du  Talmud. 
Weill  (AlexandreX  L'Isaïe  du  faubourg  Saiut-Honoré.  Paris,   lib.Dentu; 

in-18  de  236  p. 

Cet  ouvrage  est  un  recueil  de  poésies  ou  de  satires  contre  l'état  social 
moral  et  politique    de   la   France  depuis  1870.  Il  n'est  pas  seulement  ju, 
parle  titre,  mais  il  est  tout  imbu  de   l'esprit  hébraïque,  M.  Al-   Weil  est 
un  prophète  à  sa  manière,  et  quelquefois  un  prophète  éloquent. 

ZucKERMANN  (B.).  Materialeu  zur  Entwickelung  der  alljiidisclien  Zeitre- 
chnung  im  Talmud;  dans  le  Jahresbericht  du  séminaire  rabbmique  de 
Breslau.  Breslau,  imp.  Schottlander,  in-8°  de  68-xi  p. 

M  le  D'"  Zuck.  a  réuni  et  expliqué,  avec  son  érudition  ordinaire,  les 
passages  talmudiques  relatifs  à  l'histoire  du  calendrier  juif  (le  tribunal  qui 
entendait  les  témoins  de  la  néoménie,  résidence  de  ce  .tribunal,  les  temoms 
et  témoignages,  l'annonce  de  la  néoménie  au  dehors,  longueur  des  mois, 
de  l'année,  etc.).  Ce  recueil  sera  très  utile  pour  étudier  les  origines  encore 
très  obscures  de  notre  calendrier  actuel. 


Revue  des  périodiques. 

^^^^j^  P^^  Beth-Talinuil  (Wien,  mensuel).  2°  année.  =  =  N"  6.  Weiss  : 
Biographie  de  Raschi  (suite).  —  Friedmann  :  Esprit  de  la  Ilaggada 
(suite).  —  II.  Oppenheim  :  Histoire  de  la  Mischna.  —  Marco  Mortara  : 
Explication  d'énigmes  d'Abr.  ibn  Ezra  par  maître  Profiat  Duran.  — 
L.  Eisler  :  Sur  divers  passages  du  Commentaire  d'Abr.  il)n  Ezra  sur 
Isaïe  cl  les  douze  prophètes.  =  =  N»  7.  Weiss  (suite).  -  Friedmann 
{^niie).  —  Eisler  (suite).  —  J.  Reifmann  :  Mots  syriaques  dans  la  Bible, 
le  Talmud,  le  Midrasch  ;  sur  le  Targum  des  Psaumes.  =  _  N°  8.  Weiss 
(suite).  -  Friedmann  :  Mœurs  des  patriarches.  —  Oppenheim  (suite  du 
n°  G).  —  Jacol)  Brïill  :  Le  sens  du  mot  Nn^35.  —  Friedmann  :  Note  sur  le 
calendrier.    -    Selig   Cohen   :    Notes  talmudiques.  =   =   N"  9.   Weiss 


Ib'i  REVl'E  DES  ETUDES  JUIVES 

(suite).  —  Fricdmann,  Patriarches  (suite). —  Oppenhcim  (suite).  —  Feiss 
Rosenlhal  :  Date  de  la  composition  du  Targum  Onkelos.  =  =  N°  10. 
Weiss  (suite).  —  Friedmnn  (suite).  —  Oppenbeim  (suite).  —  Néh. 
Briill  :  Origine  et  histoi'-e  de  h.  pratique  concernant  la  purification  des 
mains. 

"nriia^i  Haschachar.  .;îe  Morgenrœthe  (Wien,  mensuel),  10^  année.  =  = 
N°  8.  Lilienblum  :  Sur  Israël  et  la  Palestine.  —  La  terre  de  gloire  (Pa- 
lestine). —  D''  Miller  ;  Mots  syriaques  dans  la  Bible.  —  Modlinger  : 
Recensioû  de  l'édition  du  Lékah  toh,  de  S.  Buber.  —  David  Kabana  : 
Massoret  Siag  la-wi^va.  =  =  N°  9.  La  terre  de  gloire,  Palestine  (suite). 
—  W.  Scborr  :  Relation  d'un  voyage  sur  l'Eupbrate.  —  Salomon  Buber  : 
Réponse  i  une  critique  de  son  édition  du  Lèkah-tob.  —  Lettre  sur  la 
manière  de  '  ompter  les  mois  chez  les  Hébreux.  —  Bibliographie  (Meh- 
ke/'é  Kohéi,d,  de  David  Kahana  ;  Delar  Bsther,  du  même  ;  Samuel  ha- 
Nagid,  de  A.  Harkavy,  etc.).  =  =  N"  10.  W.  Schorr  :  Relation  d'un 
voyage  sur  l'Euphrate  (fin).  —  La  terre  de  gloire.  —  Jos.  BrùU  :  Midrasch 
Soferim  (polémique).  —  Moïse  Orenstein  :  Histoire  des  peuples  anciens 
(suite). 

Archives  Israélites  (Paris,  hebdomadaire).  43°  année.  =  ::=  N"  1. 
M.  Schuhl  :  Superstitions  et  coutumes  populaires  du  Judaïsme  contem- 
porain. IL  Gamzou  letobah.  =  r=  N°®  2,  3,  5.  Ernest  David  :  Histoire 
juive,  les  Texeira. 

Dcr  Israielit  (Mayence,  hebdomadaire).  23^  année.  =  =  N°  5.  Nochmals 
ein  Wort  iiber  die  Lage  des  Gartens  Eden. 

Suite  des  articles  intéressants  qui  ont  paru  dans  les  u°*  42,.  43,  44  de 
l'année  précédente  eS  que  nous  avions  omis  de  signaler. 

Journal  asiatique  (Paris).  7°  série,  tome  XVIII,  n°  2,  octobre-décem- 
bre 1881.  =  =  René  Basset  :  Etudes  sur  l'histoire  de  l'Ethiopie, 
1'"'^  partie.  Chronique  éthiopienne.  =  =  Barbier  de  Meynard  :  Le  livre  de 
Sîbawaihi,  traité  de  grammaire  arabe,  publié  par  Ilartwig  Derenbourg. 

Israclietisclie  Letterbode  (Arrsterdam,  trimestiel).  =  =  7^  année, 
1'''  livr.,  p.  1  h  48.  —  M.  Stcinschneider  :  Purim  und  Parodie,  bibliogra- 
Ijhisclic  Nnliz  (littérature  du  Purim).  —  Ad.  Ncubauer  :  Pseudo-Biogra- 
phie von  Maimonides,  ms.  des  Beth  ham-Midrasch  in  London  (texte 
hébreu).  —  M.  Roest  :  Onuitgegeven  Stukken  betreffeudc  de  Bibliotheek 
en  de  nalalcnschap  van  David  Oppenbeim.  —  Ad.  Ncubauer  :  Liturgien 
ans  der  Ilds.  Casanata,  II.  V.  7,  in  Rom.  —  H.  J.  Malbews  :  Notes  on 
the  Minor  Prophets  by  3"NT  (Notes  tirées  de  deux  mss.).  —  Zur  Bibel- 
forschuug.  —  Die  Gruppirungsgedanken  einiger  Pcntateuch-Parlieen. 

Roest  :  Deux  pièces,  datées  do  ITy;!,  dont  Tune  de  Moïse  Mendelssohn, 
sur  la  valeur  de  la  célèbre  bibliothèque  Oppenbeim.  —  Ncubauer,  Litur- 
gien :  Poésies  liturgiques  de  Menahem  Méiri,  de  Simon  b.  Josef  ou  En 
Duran  (Durant)  do  Lunel,  et  de  Juda  bar  Galonymos. 

Das  jiitlisclie  Literaturblatt  (Magdchourg,  hebdomadaire).  10''  année.  =: 
=  N"  48.  Lewiii  :  J,  Salvador.  —  Lôwy  :  Was  ist  fi-^Nb::,  Sam.,  I,  15, 
4  ?  =:  :=  N°  4'J.  Lewin  (suite).  —  Weshalb  sind  im  Talniud  u.  Midrasch 
die  Ilasmon.  —  Siegcslliaten  niu"  schwasch  erwiihnt.  =  =  N°  50.  Lewin 
(suite).  —  Wcshallb  sind.  . .  (suite).  =  =  N"  51.  Lewin  (fin).  —  Schcflel  : 
Benieriiiingen   zur  Mas^ora  auf  Oukclos.    =   =   IP   année.  N"    1.    Ein 


B]BLIOGru\PinE  liio 

Bciirag  zur  Gcschichtc  dcr  Frankislen.  —  M.  Jastrow  :  Bemcrkuugcn  zu 
D""  Gebhavdls  Beilragen  -^ur  Erklarung  griecLisclier  Wôiicr  in  den  Mi- 
drascliim  u.  Talmudeu.  =  =  N°  3.  Eiu  Beitrag  zur  Gesch  der  Fran- 
kisten.  —  Jastrow  (suite).  =  =  N°  3.  Caro  :  David's  Testament.  — 
Jastrow  (suite).  =  =  N°  5.  Ad.  Jellinek  :  Galdos  (sur  un  roman  "Gloria, 
de  Don  Benito  Pevez  Galdos,  Madrid,  1878).  =  =  N°  6.  J.  Minor  :  His- 
lorisches  zur  Bcrliner  Judenfrage.  =  =  N  ■  7.  Minor  (suite). 

IVagazin  fiip  dio  Wissenschaft  des  Juifeiithuîns  (Berlin,  trimestriel). 
8'^  année.  =  =  N°  3.  Hoffmann  :  BemerkuniJcn  zur  Kritik  der  MiscJina. 
—  Lerner  :  Anlage  des  Bcreschit-Rabba  und  seino  Qucll'jn.  — ■  Ans 
Briefen  von  David  Rosin  (Sur  la  date  du  Séfer  ha-hiuni-.k  ;  sur  le  Com- 
mentaire dé  Samuel  b.  Méir  sur  Maccot,  etc.).  —  Literar'r-boriclit.  — 
Recensionen  (Gûdeman  ;  Glosses  et  Glossaires  d'A.  Darmesteter).  =  ::^-, 
N°  4.  Hoffmann  (suite).  —  Lerner  (suite).  =  =  0:ar  toh,  sup]jl''mru1 
hébreu  au  Magazin,  année  1881.  Contient  :  1''  \':^^ù^  îT'wp,  livre  d'Apolo- 
gie du  Judaïsme  de  Simon  b.  Çérçiar  Duran,  réédité  par  M.  Steiusclmei- 
der,  d'ap'"ès  des  mss.  — Jacob  Reifmann  :  û"i7:b:'3  r;ï2M,  Dix-sept  lettres 
adressées  par  A.  Firkowitz  à  J.  Reifm.  et  renfermant  des  renseigne- 
ments sur  des  poètes  et  littérateurs  Juifs. 

Steinschneidec  :  Nous  sommes  très  heureux  de  la  réimpression  de  ce 
célèbre  ouvrage.  —  Reifmann  :  Documents. très  importants  pour  l'histoire 
de  la  littérature  juive  en  Espagne  et  en  Afrique  :  1.  Lettre  de  Jehosef  le 
Sefardi  (Josef  fils  de  Samuel  ha-nagid  ?)  à  R.  Nissim,  à  Cairoan  ;  2.  Poésie 
de  Moïse  b.  Ezra  à  Hananel  b.  Josué  ;  3.  Lettre  du  même  au  même  ; 
k.  Lettre  du  même  à  un  inconnu  ;  5  et  6.  Lettre  à  Barukh  b.  Isaac  (Al- 
balia?)  et  réponse;  7.  Lettre  anonyme;  8.  Poésie  adressée  par  Samuel 
ha-uagid  à  R.  Hananel. 

Monatsschrîft  fikr  Gesehickte  und  Wissenschaft  des    Judentliunis 

(Krotoscliin,  mensuel),  30"  année.  ::=  =  N°  11.  Graetz  :  Agrippa  II.  — 
J.  Theodor  :  Zur  Composition  der  agadisclien  Homelicn.  —  Graetz  :  Die 
urspriïngliclie  Auspraclie  des  d  Lautes  im  Hebraiscben.  =  =  N°  12. 
Graetz  :  Die  jûd,  Stcinsarkopbage  in  Palastina.  —  M.  Brann  :  Zum 
Ofener  Judenmord  1686.  —  Gross  :  Méir  b.  Simon  (fin).  —  Brann  : 
Nachtrag.  =  =  3P  année,  n°  1.  Frankl  :  Karaische  Studien.  I.  Jehuda 
Hadassi  und  sein  Eskol  hakofer.  —  Graetz  :  Zur  Topographie  Palastina's  ; 
Koreaï ,  Sartaba ,  Alexandrion  ,  Kônigsberg,  Ilyrkanion,  Ccndevia.  — 
Frankl  :  Erinnerungen  und  Denkmaler  der  jiid.  Gemeindc  in  Berlin.  I. 
Mcudclssobn's  Stellung  in  der  Gemeindc.  —  J.  Landsberger  :  Zur  Ge- 
schichte  der  Juden  in  der  Mark  Brandeburg,  insbesonderc  in  der  Stadt 
Stcndal,  um  die  Mitte  des  xv.  Juhrhunderls.  =  =  N"  2.  Horowitz  :  Ucber 
die  Péripétie  im  Buchc  Esther.  —  Frankl  :  Kariiische  Studien  (suite  de 
Juda  Hadassi).  —  David  Kaufmann:  DasTodesjahrdcsR.  Isakbar  Schcs- 
chct  (d'après  l'inscription  française  dans  le  mur  de  la  ville  d'Alger  et 
l'épitaphe  hébr.  imprimée  pour  la  première  fois).  =  =  N"  3.  W.  Bâcher  : 
Die  Agada  der  Tannaiten.  —  Graetz  :  Aus  dor  Gcdiichtuissrcde  am  Ster- 
betage  des  Stifters  des  jûd.-thelog.  Sominars,  Jonas  Frankel.  —  Grùii- 
baum  :  Jïulisch  deutschc  Chrestomathie  (recensioii  de  W.  Perles).  — 
Hochmuth  :  Gotteserkcnntniss  (rccension  de  M.  Rosiu). 

niosè,  Ant<>Iogia  israclitica  (Corfou,  mensuel).  5*'  année  =:  =  N°  1. 
P.  Perreau  :  La  Caiilica  di  Salonione  ed  i  Commenlatori  isracliti  del 
medioevo.  —  S.  D.   Luzzatio  :  Autobiografia  (suite).  =  =•■=  N°  2.  P.  Per- 


lo6  •  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

reau  (suite).  —  Luzzatto  (suite).  —  Quinto  congressointernaz.  degli  Orien- 
talisti  tenuto  in  Berlino  12-17  sett.  1881  (suite\  —  F.  Parisini  :  I  Cautici 
di  Salomone  Rossi.  =  =  N°  3.  Perreau  (suite). 

Palestine  Exploration  Fund  (Londres,  trimestriel).  =  =  Janvier  1882. 
Notes  and  News.  —  Lieutenant  Conder's  report  n°  IX.  —  Clermont  Gan- 
neau  :  Notes  n°^  II,  III,  IV.  —  Boscawen  :  A  Pliœnician  Funeral  Tablet. 
—  Tomkins  :  Kadesh  on  Orontes.  —  Bircli  :  The  rock  Rimmon.  —  Birch  : 
The  Valley  of  Hinnoni  and  Zion.  —  Birch  :  Variétés.  —  Sayce  :  The 
Siloam  inscription.  —  Henderson  :  Kirjath  Jearim. 

Conder  :  Notes  sur  l'identification  de  diverses  localités  bibliques  (Sedé- 
Çofim,  Luhitj  lazer,  Sibœa  Minnit),  sur  Hesbon. —  Cl.  Ganneau,  note  II  : 
Sur  le  chapiteau  d'Amwas  {Revue,  III,  p.  296). 

ïiie  Hebrew-Review'  (Cincinnatti,  trimestriel),  2"  volume.  =  =  N°  1. 
Annual  Address  of  D'"  Max  Lilien thaï.  —  Cyrus  and  the  return  of  the 
Exil  (traduction  de  l'article  de  M.  Jos.  Halévy  dans  la  Revue,  n°  1).  — 
Felsenthal  :  The  science  of  Judaïsm,  ils  nature  and  its  divisions.  —  A. 
Jellinek  :  Rédaction  of  the  Mishna.  —  Jos.  Derenbourg  :  In  cxplanation 
of  somc  Psalms  (traduit  du  journal  de  Stade?).  =  =;  N°  2.  Retrospect  of 
the  History  of  the  Jewish  People  (traduction  du  Coup  d'œil  de  M.  James 
Darmesteter).  —  Mielziner  :  The  talmudic  Analogy  or  the  rules  of  Gesercc 
sliawa  and  lieckesli.  —  E.  Lucius  :  Essenism  in  the  middle  of  the  first 
Century  (traduction  ?).  —  Isaac  M.  Wisc  :  The  INIassorah  and  the  masso- 
rctic  Tcxt. 

Revue  de  l'histoire  des  religions  (Paris,  trimestriel).  2°  année,  tome  IV, 
n°  5,  septembre-octobre  1881.  =  =  H.  Oort  :  Bulletin  du  Judaïsme 
postbiblique  (Z«  doctrine  du  Logos  dans  le  4^  évangile  et  dans  les  œuvres  de 
PhiloH,  par  Jean  Réville  ;  Sgstem  der  altsynagalen  palastin.  Théologie,  par  We- 
ber)  ;  etc.  =  =  N°  6,  novembre-décembre  1881.  Maurice  Vernes  :  Bulle- 
tin critique  de  la  religion  juive,  Judaï.sme  ancien  ^Histoire  critique  de  la 
littéral,  prophétiq.  des  Hébreux,  par  Ch.  Bruston  ;  Histoire  de  la  Bible, 
par  L.  Wogue  ;  Coup  d'œil,  etc.,  par  J.  Darmesteter  ;  J.  Salvador  ;  sur  le 
nom  deYahvéh,  par  G.  d'Eichthal  ;  Esdras,  par  J.  Ilalévy). 

L'Univers  israélite  (Paris,  bi-mensuoP.  37°  année.  =  =  N°  9.  Moïse 
Weill  :  Les  noms  des  mais  hébreux.  =  =  N'^  11.  M.  Schuhl  :  Préven- 
tions des  Romains  contre  les  Juifs. 

Il  Vcsslllo  israclitico  (Casale-Monferrat,  mensuel).  30°  année.  =:  = 
N°  1.  A.  Pesaro  :  Cenui  storici  sulla  Comunità  isr.  di  Lugo  (suite).  —  P. 
Perreau  :  Nuovi  studii  (suite).  —  M.  Lattes  :  Letteratura  antigiudaica  in 
lingua  italiana.  =  =  N°  2.  A.  Pesaro  :  Cenni  storici  sulla  comunità  isr. 
di  Cento. 

Zeitsclirift  der  deutsriien  nior^^enliindischcn  Gcscllscliaft  (Leipzig, 
trimestriel).  =  =  35"  volume,  4°  fascicule.  —  Mordtmann  :  Die  him- 
jarisch-alhiopischen  Kricge  noch  einmal  (Le  roi  juif  Dhu  Novas  et  les 
chrétiens  de  Nadjran).  —  Perles  :  Bemerkungcu  zu  Bruns-Sachau  sy- 
risch-rumisches  Rechtsbuch  aus  dcm  5.  Jahrhimdert  (Voir  Revue,  II, 
]).  331  ;  suite).  —  Ed.  Sachau  :  Palmyreuischc  Inschriflen. 

ISIUORK  LOEB. 


BIBLIOGRAPHIE  137 


Palestine  et  Syrie  :  nianuel  du  Voyageur,  par  K.  B^edeker,  avec  18  cartes, 
43  plans,  un  panorama  de  Jérusalem  et  10  vue?.  Leipzig,  Karl  Bœdeker.  1882, 
iiv  et  631  p.  in-16. 


Grâce  à  la  traduction  française  que  M.  Bœdeker  vient  de  publier 
du  Manuel  du  Voyageur  en  Palestine  et  en  Syrie,  C3  livre  est  appelé 
à  trouver  en  France  le  succès  qui  Ta  accueilli  en  Allemagne,  où  il  en 
est  déjà  à  sa  seconde  édition.  Un  voyage  dans  ces  contrées,  comme 
le  fait  observer  l'auteur  dès  la  première  page,  n'est  pas  une  simple 
distraction  de  touriste,  en  quête  de  beaux  paysages.  Le  pays,  gran- 
diose par  son  passé,  vit  surtout  de  souvenirs  ;  pour  le  comprendre,  il 
faut  apprendre  à  le  connaître  tel  qu'il  était  aux  époques  de  sa  pros- 
périté. C'est  dans  cette  pensée  que  l'éditeur  a  confié  la  rédaction  de 
ce  guide  à  M.  Socin,  professeur  à  l'Université  de  Tubingue,  dont  la 
réputation  de  savant  est  faite  depuis  longtemps.  M.  Socin  était  bien 
préparé  pour  cette  œuvre,  car,  pendant  de  longs  mois,  il  a  visité  et 
fouillé  en  archéologue  passionné  le  pays  où  il  nous  conduit.  Si  par 
son  titre  le  livre  s'adresse  au  voyageur,  par  l'abondance  de  ses  ren- 
seignements, dont  quelques-uns  sont  tout  à  fait  neufs,  il  forme  une 
encyclopédie  aussi  utile  à  l'orientaliste  qu'au  grand  publie  qui  aime 
à  s'instruire. 

Nous  passons  les  132  premières  pages  spécialement  destinées  au 
voyageur  et  relatives  à  la  manière  de  voyager,  à  l'histoire  et  à  la  géo- 
graphie, pour  arriver  aux  cinq  cents  pages  suivantes  qui  renferment 
la  description  des  lieux  et  qui  intéressent  davantage  les  lecteurs  de 
cette  Revue. 

Ce  n'est  pas  sans  émotion,  qu'en  parcourant  ces  feuillets,  nous  re- 
trouvons nos  impressions  d'autrefois,  alors  qu'il  nous  était  donné  de 
faire  ce  voyage,  objet  de  tant  de  vœux!  Nous  retrouvons  ces  lieux 
tels  que  nous  les  avons  laissés  il  y  a  douze  ans.  On  fait  toujours  sur 
de  mauvais  chevaux  mal  harnachés  la  route  de  Jaffa  à  Jérusalem.  La 
tentative  de  relier  la  Ville  Sainte  à  la  mer  par  un  chemin  de  fer  a 
échoué  ;  nous  apprenons,  par  un  procès  en  cours  d'instance,  que 
toute  espérance  de  voir  se  réaliser  ce  projet  doit  être  abandonnée  pour 
le  moment.  C'est  naturellement  Jérusalem  et  ses  alentours  qui  occu- 
pent la  place  la  plus  importante  dans  ce  guide,  p.  150-253.  Des  plans 
de  la  ville  et  de  ses  environs  immédiats  \  des  gravures  des  princi- 
paux monuments  en  facilitent  l'étude,  mais  nous  remarquons  surtout 
le  panorama  pris  de  la  Montagne-des-Oliviers,  qui  donne  une  vue 
d'ensemble  très  réussie,  où  chaque  édifice  ressort  et  se  détache  sur 
le  fond.  Il  semble  cependant,  si  nos  souvenirs  sont  précis,  que  le  mur 

*  L'absence  d'orientation  dans  les  i>lans  est  parl'ois  Inen  fj-ênante. 


lo8  REVUE  DES  ETUDES  JUIYES 

de  face  se  prolonge,  outre  mesure,  de  la  porte  Saiut-Étienne  vers  le 
nord  ;  au  reste,  le  plan,  p.  132,  n'indique  pas  un  développement  aussi 
considérable. 

Nous  aimerions  à  signaler  tous  les  points  qui  nous  ont  frappé, 
mais  nous  devons  nous  borner.  Notons  qu'à  Naplouse  se  trouvent  en- 
core 130  Samaritains-  c  •  .  à  vingt  ans  près,  le  nombre  qu'avaient 
constaté  Robinson  '■■  .  Suivant  M.  Socin,  p.  350,  ils  croiraient 

à  la  résurrectic:    J.  ^ement  dernier  ;  ils  auraient  donc  changé 

sur  ce  point  la  f~'i  J    iours  ancêtres. 

La  description  de  Damas  et  de  ses  environs,  ainsi  que  de  la  Syrie 

du  Nordî  \v  \\s  parait  traitée  d'une  manière  entièrement  neuve.  Les 

ruine?  (V  '^-cil'"at  Sim^^an,  entre  Antioche  et  Alep,  où  Siméon  fonda  au 

'\<'  siècle  l'ordre  monastique  des  Stylites,  sont  très  intéressantes.  Au- 

tiocLe  et  Alep  terminent  la  partie  descriptive. 

Une  table  alphabétique  très  complète,  mise  à  la  fin  du  livre,  sera 
très  appréciée  de  ceux  qui  voudront  y  puiser  des  renseignements. 
Nous  savons  par  expérience  combien  l'absence  d'une  telle  table  est 
regrettable  ;  c'était  un  des  principaux  desiderata  du  Guide-Indica- 
teur du  frère  Liévin  de  liamme,  dont  nous  nous  servions  pour  notre 
voyage. 

Les  cartes  ont  été  dressées  par  M.  Kiepert  ;  ce  nom  nous  dispense 
de  tout  éloge. 

Ce  bon  manuel  sera  désormais  le  guide  indispensable  de  quiconque 
voudra  faire  un  voj'age  instructif  dans  les  paj'S  qu'il  décrit. 

RUBENS    DUVAL. 


Le  Livre  de  Sibawaihî,  traité  de  grammaire  arabe  par  Sîbouta,  dit  Sibawaihi. 
Texte  arabe  publié  d'après  les  manuscrits  du  Caire,  do  l'Escurial,  d'Oxford,  de 
Paris,  .de  Saint -Pétersbourjr  et  de  Vienne,  par  Hartwig  Derenbourg,  professeur 
d'arabe  littéral  à  UEcolc  spéciale  des  Langues  orientales.  Tome  ])remier,  Paris, 
imprimé  par  autorisation  du  Gouvernement  à  rimprimerie  Nationale,  18S1,  p.  xliv 
et  iCO,  gr.  iu-8". 


La  brillante  époque  scientifique  que  parcoururent  les  Juifs  d'Es- 
pagne au  moyen  âge  ne  saurait  être  justement  appréciée,  si  on  ne 
tenait  compte  de  l'influence  qu'exerça  sur  les  esprits  la  civilisation 
des  Arabes.  C'est  surtout  dans  l'art  de  là  grammaire  que  ceux-ci 
excellaient,  comme  le  font  remarquer  MM.  Joseph  Uercnbourg  et 
llartwig   Derenbourg  dans   leur  édition  des   Opuscules   d'AbouU- 

'  Histoitc  dts  langues  svniiiii/uea,  'i*  édition,  p.  '2'i0. 


BIBLIOGRAPHE  159 

Walid  :  «  Abou'l-Walid,  disent-ils,  prit  les  Arabes  pour  maîtres  et 
acquit  une  profonde  connaissance  de  leur  littérature  et  des  grands 
ouvrages  dans  lesquels  avaient  été  exposés  minutieusement  les  prin- 
cipes de  leur  langue.  Dans  ses  Opuscules  comme  dans  son  Livre  des 
Recherches,  il  cite  souvent  les  procédés  dt!a  langue  arabe  pour  expli- 
quer ceux  de  la  langue  hébraïque,  imitant  en  cela  le  Gaôn  Saadia 

qui,  un  siècle  auparavant,  avait  déjà  sui,  i  ia  môme  méthode 

Dans  la  version  hébraïque  du  Rikmâh,  les  nassat:e?  des  grammai- 
riens arabes  sont  quelquefois  supprimés  ou  r-s Nous  en 

donnons  un  exemple  curieux,  le  seul  où  le  ce  >  -  îbawaihi  soit 
expressément  nommé »  '. 

Si,  envisagée  de  ce  côté,  la  grammaire  arabe  adroit  jj  cii-.  dans  la 
Revue  des  Etudes  Juives,  un  rang  honorable  est  dû  assurément  à 
Sibawaihi  dont  la  réputation  comme  grammairien  a  tru^  orsé  les 
siècles,  sans  perdre  de  son  éclat.  Son  traité  de  grammaire,  reproduit 
par  d'innombrables  copies,  n'a  pas  d'autre  titre  que  «  le  Livre  »,  car 
c'est  la  grammaire  par  excellence  qu'aucune  autre  ne  doit  faire  ou- 
blier. 11  n'est  pas  de  maitre  parmi  ses  successeurs  qui  ne  s'appuie 
de  son  autorité  ou  ne  le  discute.  Aussi  les  commentaires  sur  son 
œuvre  abondent,  et  souvent,  en  passant  dans  le  texte,  ils  l'altèrent  et 
lui  enlèvent  de  son  originalité.  L'éditeur,  dans  ce  cas,  est  constam- 
ment tenu  en  éveil  pour  séparer  le  bon  grain  de  l'ivraie  ;  la  quantité 
abondante  des  copies  ne  rend  sa  lâche  que  plus  difficile.  Heureuse- 
ment, M.  H.  Derenbourg  a  rencontré  à  la  Bibliothèque  Nationale  un 
bon  manuscrit  ancien,  qui  fait  le  fond  de  son  texte;  il  a,  en  outre, 
consulté  les  manuscrits  des  diverses  bibliothèques  indiquées  dans  le 
titre  du  livre.  Pour  arriver  à  donner  une  œuvre  aussi  parfaite  que 
possible,  il  n'a  marchandé  ni  peines,  ni  démarches,  ni  voyages. 

Le  but  du  grammairien  arabe  est  de  faire  comprendre  la  langue 
littéraire  qui  est,  par  excellence,  celle  de  la  poésie;  aussi,  ce  sont  les 
divans  des  poètes  qui  fournissent  la  plupart  des  exemples  cités  à 
l'appui  des  règles  et  des  .exceptions.  Ce  n'est  pas  un  mince  travail 
que  de  chercher  le  sens  de  ces  vers  et  de  leur  rendre  leur  vraie  phy- 
sionomie après  les  migrations  qu'ils  ont  subies.  Le  livre  de  Siba- 
waihi, par  l'abondance  de  ses  citations,  fournit  une  ample  moisson 
à  ses  scoliastes  ;  on  se  rend  compte  de  leur  labeur,  quand  on  songe 
que  le  commentaire  du  plus  autorisé  d'entre  eux,  celui  de  Sirâfi, 
remplit  trois  volumes  in-folio  de  la  bibliothèque  Khédiviale  au  Caire. 
M.  H.  Derenbourg  s'en  est  procuré  une  copie  pour  son  édition. 

Si  Sibawaihi  n'est  pas  le  premier  grammairien  arabe,  c'est  au 
moins  le  plus  ancien  dont  l'œuvre  nous  soit  parvenue,  car  elle 
remonte  au  ii«  siècle  de  l'hégire.  A  son  défaut  de  méthode,  à  sa 
prolixité,  on  reconnaît  une  science  à  ses  débuts,  qui  clierche  sa  voie, 
au  milieu  des  traditions  des  écoles.  Quoique  l'auteur  n'y  traite  guère 


'  Opuscules  et   Traités  d'Abou'l-Walid  Merwaii   ibii  Djauali,  par  Jobcpli  Dcieu- 
Luurg  ot  llaiLwig  Derenbourg.  Paris,  ISSO.  inlroductiou,  p,  lxxvi. 


160  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

que  de  la  syntaxe,  son  traité  comprend  néanmoins  deux  gros  volumes. 
En  raison  des  difficultés  à  surmonter,  on  ne  saura  pas  mauvais  gré 
à  M.  H.  Derenbourg  d'avoir  tant  tardé  à  publier  le  premier  volume. 
L'introduction  qui  précède  le  texte  est  consacrée  principalement 
à  rbistorique  des  manuscrits  utilisés  pour  cette  publication.  Le  se- 
cond volume,  qui  attendra  le  jour  moins  longtemps  que  son  aîné, 
contiendra  c  une  biographie  sur  Sibawaihi  et  un  essai  critique  sur 
le  rang  qu'il  occupe  dans  l'histoire  de  la  grammaire  arabe  ».  Cet 
examen  critique  que  nous  attendons  avec  impatience  ajoutera  à  la 
valeur  et  à  l'importance  de  ce  volume.  A  son  apparition,  nous  lui 
souhaiterons  la  bienvenue,  et  nous  serons  heureux  de  renouveler  à 
son  auteur  les  félicitations  que  nous  lui  adressons  pour  les  premiers 
succès  de  cette  belle  œuvre,  si  digne  des  presses  de  l'Imprimerie 
Nationale. 

RUBENS  Du  VAL. 


OUVRAGES  OFFERTS  A  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES  : 

Par  l'auteur  :  Soave,  Controversia  di  Tortosa.  Venise,  G.  Antonelli, 
1862,  in-4'de  48  p. 

Par  l'auteur  :  Soave,  Dei  Soncino  celeiri  tipograpU  Ualiani.  Ve- 
nise, G.  Longo,  1878,  in-S^  de  50  p. 

Par  M.  le  D"^  Adler  :  The  Nineteenth  Century,  n^  38,  décembre  1881 . 

Par  M.  le  D''  Adler  :  PerseciUion  of  ihe  Jews  in  Rîcssia  1881  reprin- 
ted  froom  the  Times  with  map  and  tabulated  statement.  2°  éd.  1882. 

Par  M.  le  D""  Adler  :  Russian  airocities  1801.  Supplementary  state- 
ment issued  by  the  Russo-jewish  Committee.  Londres,  1882. 

Par  M.  Nestor  Dreyfus.  Flavius  Josèphe.  Trad.  franc.  d'Arnaukl 
d'Andilly.  Amsterdam,  Pierre  Mortier,  1700. 

Par  l'auteur  :  Mose  Lattes,  Catalogo  dei  Codici  ebraici  délia  M- 
blioteca  Marciana.  Extrait  des  Cataloghi  dei  Codici  orientali  di  alcune 
bibUotechc  d'Italia.  Florence,  Lemonnier,  1882,  11  p. 

Par  l'auteur  :  M.  Lattes,  Nîwvo  saggio  di  giiuUe  e  correzioni  al  les- 
sico  lalmudico  (Lévy-Fleischer).  Uomc,  Salviucci,  1881,  in-i»  de  81  p. 


ADDITIONS  ET  RECTIFICATIONS 


TOME  TROISIÈME. 

P.  26.  —  "»pO"'TC  est  le  mot  Schwetsken,  bien  connu  en  Alsace  et  aussi 
en  Allemagne.  —  D.  Kaufmann  et  Jsid.  Loeb. 

P.  40,  note  1.  —  Sur  "jUpin  bNIT^UÎ  qu'on  trouve  dans  àc^  mss.  du  Tal- 
mud  et  d'anciens  auteurs,  p.  ex.  Alfassi,  Schebuot,  ch.  i,  comparez  aussi 
S.  Taussig,  i-i'^jti',:;  n^Nb?:,  Il,  39,  note  3.  —  D.  Kaufmann. 

P.  111,  en  bas.  —  La  tradition,  conservée  par  R.  Hananel  et  Raschi, 
montre  que  le  mot  TmilîD  ne  veut  pas  dire  «  fîgurément  »,  mais  «  dans  son 
sens  littéral  ».  Plus  tard,  il  est  vrai,  sous  l'influence  de  l'arabe,  influencé 
sans  doute  à  son  tour  par  les  idiomes  occidentaux,  le  mot  a  eu  le  sens  que 
lui  donne  M.  Perles.  Cp.  Bet  Tabnud,  II,  117,  ma  note  4.  Mon  ami  M.  S.-J. 
Halberstam  me  dit  que,  d'après  une  hypothèse  de  M.  P.-M.  Heilperin,  il 
faudrait  lire  le  passage  eu  question  {Megilla,  IV,  fin)  :  inil^lD  pTD2  Q^nn^ïn 
■^Nnn  nî  -i-iri  rhv  £]"^D"i7:lm  E]1:\72  ITîT  "^"in  «  Quiconque  traduit  un  verset 
littéralement  est  un  blasphémateur  (à  cause  des  anthropomorphismes), 
quiconque  y  ajoute  de  son  fonds  est  im  menteur  (puisqu'il  altère  le 
texte).  —  T).  Kaufmann. 

P.  117.  —  Si  on  veut  se  convaincre  du  danger  qu'il  y  a  à  faire  des  com- 
binaisons sur  les  débris  des  noms  de  littératures  perdues,  on  n'a  qu'à  lire 
M.  S.-A.  Lindermann  dans  Magid,  XXI,  166  et  ss.  Il  fait  de  r!33>b  \2. 
Eusèbe  [=  'jvmTN]  et  de  rhyr\  \2.  St.  Jérôme  [rîi>:;n  p  =  'jlttnn].  Cela 
rappelle  les  calembours  accadiens,  tels  que  les  explique  M.  Jos.  Halévy. 
Dans  le  Nllplû  \^V  de  Messer  Léon  il  y  a  un  passage  publié  par  M.  Stein- 
schneider  (i?!?/*;-.  Bibl.,  VIII,  65)  et  que  M.  Perles  n'a  pas  signalé  :  "i^b^lT^D 
ÛilU)   Ûi-lDOrt  ûmN  ^-l■lN'^  -^aNI  (sic)  riD^i  "i-IDD  IISD   \Sanli.,   28  a\    laiDT: 

.'iDT  ûii^injTi  û\sb72  t]-»-iDD  Lirio  rî3'»:;ttn  '"^on  n'in  ":3"7:dt  û-^bn^n  min 

Remarquez  aussi  le  ■^NT'S'in'O  nommé  dans  le  Galuy  de  Saadia  {Carmel, 
noûv.  série,  I,  66)  et  qui,  se  trouvant  mentionné  à  côté  de  N^i^O  "jn,  rappelle 
particulièrement  les  ?^^3>b  \2.  "'"iDD  du  Talmud  Jerusalmi.  —  D.  Kaufmann. 

P-  120.  —  Il  fallait  remarquer  que  ce  n'est  pas  seulement  le  Talmud  de 
Babylone,  mais  aussi  la  Mischna  (Tadaïm,  IV),  qui  change  le  iD"in"'"'3  de 
la  Tosefta  en  "^pTilt-  Le  ms.  de  la  Mischna  de  Cambridge,  qui,  d'après 
MM.  Schiller- Szinessy  et  Taylor,  contiendrait  la  recension  palestinienne  de 
la  Mischna  et  dont  Taylor,  dans  ses  Sai/ings  of  the  Jew.  Fatlien,  a  justement 
publié  les  dernières  Mischnas  de  Yadaïm,  paraît  avoir  quelquefois  (d'après 
les  notes  que  j'ai  prises  autrefois  à  Breslau)  le  mot  ">p"i1^  ;  dans  le  dernier 
passage,  seulement  "j-i!^.  — Z>.  Simonsen. 

P.  139.  L'identité  des  trois  Jacob  "iSlD'Hp  que  nous  connaissons  paraît 
certaine  (l'orthographe  liUJmpbN  dans  Gractz,  VIII,  1'°  édil.,  415,  est  fau- 
tive, comme  on  peut  le  voir  dans  la  copie  exacte  que  j'ai  doimée  dans  Beih 
Talmud,  II,  116);  il  en  résulte  que  Ilayyim  ibu  Musa,  parlant  des  miracles 
accomplis  par  ses  contemporains  Jacob  Alcorsono,  Moïse  Botarcl  et  d'au- 
tres, a  en  vue  des  faits  un  peu  antérieurs  à  l'année  1454,  date  de  la  rédaction 
T.  IV.  11 


162  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

de  son  livre.  C'est  du  reste  ce  que  prouve  la  formule  ii"3>  "'Tlb  ûbs  "iDT 
dont  il  se  sert  et  qui  indique  que  tous  ces  rabbins  étaient  morts  à  l'époque 
oii  Hajyim  écrivait.  Si  notre  Jacob  a  collaboré,  à  titre  d'astronome  distin- 
gué, aux  tables  faites  sous  Pierre  IV,  comme  le  prouve  M.  Steinsclineider  ; 
si,  d'autre  part,  il  a  composé  3n  1376  son  ouvrage  sur  l'astrolabe  ^ms.  Mu- 
nich, n°  261,  11°)  on  r.c  peut  guère  admettre  qu'il  ait  vécu  au-delà  des 
premières  dix  ou  vingt  ^  inées  du  xv''  siècle.  C'est  évidemment  à  tort  que 
M.  Graetz  a  fait  de  lui  un  J.i'x  messie  (VIII,  107,  415),  quoiqu'il  ait  pu 
être,  comuT^  tant  d'autres  Espagnols,  cabbaliste  en  même  temps  qu'astro- 
nome. JI  irest  pas,  plus  exact,  et  on  peut  le  prouver,  de  faire  de  Hasdaï 
Grescas  un  partisaL  de  ce  faux  messie.  —  D.  Kaufmanii. 

P.  273.  ~  soamuel  ibn  Tibbon  en  traduisant  <\  celui  qui  vous  plaira  »  par 
hen  Tobef  a  suivi  l'interprétation  du  Targoum,  adoptée  par  quelques  com- 
mentateurs, d'après  laquelle  Tobel  se  compose  de  tob  «  bon  »,  el  «  à  ».  Voy. 
Aben  Ezra,  Sefaf  Yétèr,  éd.  Lippmann,  p.  13  «.  —  Israël  Lém. 

P.  278.  —  Dans  les  éditions  du  Talmud  on  a,  il  est  vrai,  supprimé  très 
souvent  les  alej)li  qu'on  rencontre  dans  les  mss.,  mais  lorsqu'ils  sont  des 
maires  ledionis,  nullement  lorsque  cette  lettre  est  radicale.  «  On  était  dans 
l'usage  de  retrancher  cette  lettre  du  commencement  des  mots  »  uniquement 
en  certains  dialectes  araméens,  et  dans  les  écrits  qui  reproduisent  servile- 
ment la  prononciation  populaire  ;  mais  jamais  les  mots  hébreux  ne  sont  dé- 
figurés de  la  sorte  dans  la  langue  de  la  Mischna.  —  Israël  Lévi. 


LISTE  DES  immi  MEMBRES  DE  U  SOCIÉTÉ  DES  ÉTPES  JUIVES 

DEPUIS  LE  ic>'  JANVIER  1882 


Membres  souscripteurs  : 

Alliance  Israélite  universelle,  rue  de  Trévise,  35.  — 150  fr. 

Cattaui  (Elie),  rue  de  Riclielieu,  92. 

Chanaleil  (le  comte  de),  rue  do  Chabanais,  6. 

Franck  (Adolphe),  membre  de  l'Institut,  rue  de  Boulogne,  32. 

Landau,  villa  Landau,  Florence. 

Mahcus  (Saniel),  place  Saint-Georges,  6,  Bucliarest. 

Popelin  (Claudius),  rue  de  Téhéran,  7. 

Weill  (Benjamin-Léopold),  rue  de  Richer,  4L 


PROCÈS-YERBAUX   DES  SEANCES  DU  CONSEIL 


SÉANCE  DU  29  DÉCEMBRE  1881. 

Présidence  de  M.  Arsène  Darinesteter. 

L'ordre  du  jour  appelle  l'élection  des  membres  du  Bureau.  Le  Bureau  de  l'année 
précédente  est  réélu  :  M^L  A.  Darmesteter  et  Zadoc  Kahn,  vice-présidents  ;  Er- 
langer, trésorier;  Hartwig  Derenbourg  et  Ephraïm,  secrétaires. 

M.  le  Pi'esident  propose  de  fondre  les  deux  Comités  de  publication  et  d'adminis- 
tration en  un  seul  comité  de  direction,  attendu  que  la  séparation  de  ces  Comités  pré- 
sente des  inconvénients. 

M.  Loeh  est  d'avis  que  les  Comités  devraient  être  ouverts  à  tous  les  membres  du 
Conseil  qui  voudraient  y  entrer  et  prendre  part  à  leurs  travaux. 

M.  Ah.  Cahen  dit  que  les  Comités  pourraient  être  supprimés  et  les  questions  por- 
tées directement  devant  le  Conseil. 

M.  Zadoc  Kahn  craint  que  dans  ce  cas  les  'questions  arrivent  en  séance  sans  avoir 
été  suffisamment  étudiées. 

M.  Th.  Reinach  propose  la  création  d'une  section  permanente  renouvelée  fréquem  - 
ment. 

Le  Conseil  nomme  une  Commission  chargée  d'étudier  ces  questions  et  de  rédiger 
un  projet  de  règlement  intérieur. 


SÉANCE  DU  26  JANVIER  1882. 

Présidence  de  M.  le   grand-rabbin  Zadoc  Kahn. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  délibération  sur  le  projet  de  règlement  intérieur  élaboré 
par  la  Commission. 

Le  Conseil  adopte  les  articles  proposés  par  la  Commission  et  qui  peuvent  être 
ainsi  résumés. 

Il  est  formé  dans  le  sein  du  Conseil  :  1°  un  Comité  de  publication  et  d'adminis- 
tration composés  des  six  membres  du  Bureau  et  de  cinq  membres  élus  par  le  Con- 
seil ;  2°  un  Comité  de  propagande  élu  par  le  Conseil. 


164  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

SÉANCE  DU  31  JANVIER  1882. 

Présidence  de  M.  le  grand-rabbin  'Zadoc  Kalin. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  suite  de  la  délibération  sur  le  projet  de  règlement. 

Le  Cfomité  adopte  les  propositions  suivantes  : 

Le  Conseil  de  direction  se  réunit  en  séance  ordinaire,  au  moins  une  fois  par  mois. 
Les  séances  pourront  être  suspendues  pendant  les  mois  de  juillet,  août  et  septembre. 
Les  dates  des  séances  du  Conseil  seront  indiquées  sur  la  couverture  de  la  Revue,  afin 
que  tous  les  sociétaires  puissent  y  assister,  conformément  à  l'article  22  des  Statuts. 

Les  tv.ages  au  sort  dont  mention  est  faite  aux  procès-verbaux  des  séances  du  Con- 
seil tenues  le  28  avril  1881  et  le  31  janvier  1882  règlent  le  roulement  des  élections 
pour  le  Conseil.  Les  vacances  résultant  des  démissions  ou  décès  dans  les  séries 
non-soumises  au  renouvellement  seront  chaque  année  comblées  par  un  vote  spécial 
de  l'Assemblée  générale  :  les  membres  ainsi  nommés  entreront  dans  les  séries  aux- 
quelles appartenaient  les  membres  qu'ils  remplacent. 

Le  tirage  au  sort  pour  le  classement  des  trois  nouveaux  membres  élus  dans  l'as- 
semblée générale  du  26  novembre  1881,  dans  l'une  des  trois  séries  annuelles  est  effec- 
tué. M.  Ternes  est  classé  dans  la  première  série,  M.  Oppert  dans  la  deuxième, 
M.  James  Darmesteter  dans  la  troisième. 


SÉANCE  DU  28  FÉVRIER. 

Présidence  de  M.  le  grand-rabbin  Zadoc  Kahn, 

M.  le  Président  propose  au  Conseil  de  délibérer  sur  l'opportunité  d'introduire 
dans  les  séances  mensuelles  du  Conseil  des  communications  et  des  discussions  litté- 
raires et  scientifiques. 

M.  HaUvy  appuie  cette  proposition  et  fait  remarquer  que  tel  est  l'usage  dans  toutes 
les  sociétés  savantes. 

M.  Schwab  et  M.  Reinach  présentent  des  observations  dans  le  même  sens. 

Le  principe  de  la  proposition  est  adopté.  Le  Comité  de  publication  et  d'adminis- 
tration est  chargé  d'en  préparer  l'application. 

L'ordre  du  jour  appelle  l'élection  des  cinq  membres  qui  composent  avec  le  Bureau 
le  Comité  de  publication  et  d'administration.  Sont  élus  :  MM.  Joseph  Derenbourg, 
James  Darmesteter,  Joseph  Halévy,  Isidore  Loeb,  Théodore  Reinach. 

Les  Secrétaires, 
IIart.wig  Deuenbourg,  a.  Éphra'im. 


Le  ni'runt  responsable, 

Israël  Lévi. 


VEUHAILLliS,    IMPRIMERIE    CEnF    ET    l'ILS,    HUE    DUPLESSIS,    59. 


UN  VASE  JUDÉO-CHALDÉEN 

DE  LA  BIBLIOTHÈQDE  NATIONALE 


Le  département  des  Médailles  et  Antiques  de  la  Bibliothèque 
nationale  a  lait  récemment  l'acquisition  d'un  vase  contenant  une 
inscription  magique  d'origine  juive,  dont  nous  nous  proposons  de 
donner  ici  le  texte  et  la  traduction,  avec  un  court  commentaire. 
Ce  monument  se  rattache  par  sa  forme,  son  usage  et  les  formules 
qu'il  renferme,  à  une  série  peu  nombreuse  et,  jusqu'ici,  fort  impar- 
faitement étudiée,  de  terres  cuites  inscrites,  qui  dévoilent  un  des 
côtés  les  plus  intéressants  de  l'histoire  des  colonies  juives  instal- 
lées sur  les  ruines  de  Babylone  après  la  conquête  de  Jérusalem 
par  les  Romains.  Ces  vases  hémisphériques,  assez  grossièrement 
façonnés  au  tour,  et  dépourvus  de  tout  intérêt  artistique,  ont  été 
tous,  jusqu'ici,  découverts  dans  les  environs  de  Hillah,  c'est-à- 
dire,  sur  l'emplacement  même  de  Babylone,  ou  non  loin  de  ses 
ruines.  C'est  à  l'intérieur,  sur  la  surface  concave,  que  se  trouve 
écrite  à  l'encre,  circulairement,  l'inscription  magique  destinée  à 
mettre  en  fuite  les  démons  et  à  préserver  de  certaines  maladies 
celui  qui  buvait  le  liquide  versé  dans  la  coupe. 

La  langue  dans  laquelle  sont  conçues  ces  formules  d'incanta- 
tion est  généralement  celle  des  Targums  de  Babylone  ;  l'écri- 
ture est  le  plus  souvent  l'hébreu  carré,  affectant  des  formes  plus 
ou  moins  éloignées  des  formes  de  l'écriture  actuelle,  suivant 
l'ancienneté  du  monument.  Nous  ne  connaissons  que  deux  vases 
qui  portent  des  inscriptions  en  caractères  syriaques  estranghelo, 
et  qui  sont  rédigés  en  un  dialecte  qui  parait  être  le  mendaïte  ' . 


'  L'un  de  ces  vases  est  au  Brilish  Muséum;  l'autre,  très  fragmenté,  se  trouve  dans 

la  coUeclion  de  M.  Slewarl.  Il  est  bon  de  se  mctlre  en  garde  eontrc   les  marcliands 
orientaux  qui  apportent  en  Europe  des  f'alsiliea lions  de  ces  vases  inscrits.  Nous  avons 
vu  plusieurs  de  ces  monuments  dus  à  l'industrie  de  que'que  potier  de  liaj^dad. 
T.    IV.  12 


166  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Les  premiers  de  ces  bols  magiques  qui  aient  été  publiés,  à  notre 
connaissance,  sont  ceux  que  M.  Layard  a  découverts  au  cours  de 
son  exploration  de  la  Chaldée,  et  auxquels  M.  Thomas  Ellis  a  con- 
sacré une  notice  accompagnée  d'une  transcription  et  d'une  tra- 
duction, l'une  et  l'autre  fort  défectueuses'.  Ces  petites  patères,  au 
nombre  de  six,  sont  actuellement  au  British  Muséum.  M.  A.  Lévy 
a  repris  la  traduction  du  premier  des  textes  donnés  par  M.  Ellis,  et 
il  a  réussi  à  expliquer,  d'une  manière  très  satisfaisante  au  point 
de  vue  linguistique,  une  formule  de  magie  difficile  à  interpréter". 
Depuis  lors,  M.  Rodwell,  assisté  de  M.  Drach,  a  fait  connaître  une 
nouvelle  coupe  dont  il  a  donné  un  fac-similé  très  fidèle,  avec  une 
transcription  et  une  traduction  aussi  inexactes  que  possible  3. 
M.  Joseph  Halévy  a  corrigé  les  nombreuses  erreurs  de  MM.  Rod- 
well et  Drach,  dans  une  courte  notice  lue  à  l'Académie  des  Ins- 
criptions et  Belles-Lettres,  et  qui  ne  laisse  guère  de  prises  à  la 
critique*.  Avec  sa  sagacité  habituelle  et  sa  connaissance  profonde 
des  livres  talmudiques,  il  a  établi  un  texte  et  fourni  une  traduction 
qui  nous  ont  mis  nous-mêmes  sur  la  voie  ;  et  nous  devons  dire  ici 
que  sans  la  notice  de  M.  Halévy,  il  nous  eût  été  difficile  de  publier 
l'inscription  qui  suit,  car  elle  off"re  une  grande  analogie  avec  celle 
dont  ce  savant  s'est  occupé. 

Le  vase  récemment  entré  au  Cabinet  des  Antiques  de  la  Biblio- 
thèque afiecte  la  forme  d'une  calotte  hémisphérique  très  évasée  ; 
il  est  uni  sur  toutes  ses  parties  et  n'offre  aucune  trace  d'ornemen- 
tation ;  il  n'a  même  pas  au  centre,  à  l'intérieur,  cette  saillie  ou 
([l'idloi  qu'on  remarque  sur  quelques  bols  du  même  genre,  notam- 
ment sur  celui  qu'a  interprété  M.  Halévy.  La  pâte  de  l'argile  est 
rougeâtre,  et  les  parois  sont  d'une  épaisseur  moyenne.  Le  pourtour 
du  bord  mesure  un  diamètre  de  15  centimètres  environ.  Rien  dans 
la  fabrique  et  l'aspect  de  ce  monument,  grossier  en  lui-même,  ne 
peut  révéler  l'époque  de  la  fabrication  ;  les  caractères  paléogra- 
phiques et  linguistiques  seuls  permettent,  comme  nous  le  verrons, 
de  placer  cet  objet  vers  le  huitième  ou  le  neuvièmes  siècle  de  notre 
ère,  par  assimilation  au  bol  ^  décrit  par  M.  Halévy  :  ceux  qui  ont 


1  Layard,  Nineveh  and  Babylon,  p.  !)09-526. 

*  A.  Lévy,  dans  la  Zeitschrift  der  dtutschen  Morgenl.  Gcsellschaft,  t.  IX,  p.  4C5  et 
suiv.  ;  puis,  en  abrégé,  dans  \c  Jahriuch  fiir  die  Geschichte  der  Juden,  an.  II,  1861, 
p.  2GG-271  et  294-29^. 

'  Dans  les  Transactions  of  the  Bihlical  archaiological  Society,  vol.  Il,  part,  i,  p.  114 
ol  suiv. 

♦  (Comptes-rendus  de  V Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres^  1877,  p.  288-293. 
Quelques  réserves  seront  faites  plus  loin,  dans  le  commentaire. 

■■•  Ce  dernier,  à  en  jufrer  d'afirès  le  caractère  graphique,  est  peut-être  d'un  siècle 
postérieur  à  celui  qui  nous  occupe  ici. 


UN  VASE  JUDÉO-CHALDÉEN  DE  LA  BIBLIOTHÈQUE  NATIONALE       167 

été  publiés  par  M.  Layard  sont  manifestement  un  peu  plus  an- 


ciens. 


L'intérieur  de  notre  vase,  c'est-à-dire  la  surface  concave,  est 
occupé  par  deux  inscriptions  qui  se  déroulent  en  spirale,  et  qui, 


^^«^.J^i.^^^ 


se  faisant  suite  l'une  à  l'autre,  sont  néanmoins  séparées  par  un 
trait  à  l'encre  qui  court  sur  tout  le  circuit  de  la  paroi.  Contraire- 
ment à  ce  qui  s'observe  sur  la  plupart  des  monuments  du  môme 
genre,  notamment  celui  qu'a  déchiffré  M.  Lévy,  la  spirale  inscrite 
va  de  la  circonférence  au  centre.  La  première  formule,  celle  qui 
est  le  i)lus  rapprochée  du  bord,  a  un  peu  plus  do  cinq  lignes  ;  celle 


168  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

qui  est  au  centre  en  contient  à  peine  quatre  petites.  Au  milieu, 
sans  doute  pour  remplacer  la  saillie  ou  ombilic  dont  nous  parlions 
plus  haut,  on  remarque,  tracé  à  l'encre,  un  cercle  irrégulier  et 
très  allongé,  traversé  par  deux  diagonales  qui  se  croisent  en  forme 
d'X.  Ce  signe,  qui  devait  avoir  un  sens  magique,  se  trouve 
de  même  sur  plusieurs  des  coupes  publiées  dans  l'ouvrage  de 
M.  Laj^ard. 

Voici  en  caractères  hébraïques  ordinaires  la  transcription  de 
nos  deux  textes,  qui  sont  d'une  conservation  graphique  suffi- 
sante, sauf  quelques  parties  frustes  que  nous  essayerons  de  re- 
constituer. 

TEXTE  EXTÉRIEUR. 

>»db?bT  s'j-'T  n»!"'  p   ïT«b  81■'■T3y^^  t-t^b  "^^ayT  !-(ttN7:-^*n   ï-i-^ib-^bn 

TRADUCTION. 

Salut  du  ciel,  pour  Hisda  bar  Ama.  Toutes  mauvaises  sorcel- 
leries, grand' 

Œuvres,  malédictions,  vœux,  engagements,  de  loin  ou  de  près, 
d'hommes  ou  de  femmes, 

La  nuit  ou  le  jour,  qu'ils  font  contre  lui,  ou  qu'elles  font  contre 
lui,  depuis  ce  jour  jusqu'à  jamais  : 

■  Le  mot  NmDN  se  traduirait  exactement  par  le  latin  saîus,  c'est-à-dire  santé, 
salut,  remède,  talisman,  préservatif  physique  ou  moral.  C'est  par  ce  mot  que  débute 
aussi  la  formule  magique  de  l'une  des  coupes  du  British  Muséum  (Layard,  op.  cit., 
p.  515,  n"  2).  On  sait  que  NmON  est  le  souhait  de  santé  formulé,  aujourd'hui 
encore,  par  les  Juifs  à  l'adresse  de  ceux  qui  éternuent  :  c'est,  selon  la  tradition,  un 
préservatif  contre  une  mort  inopinée,  et  la  légende  rapporte  qu'Abraham  mourut  en 
éternuant. 

*  Nous  ferons  remarquer  que  le  mot  ÏT^73^  est  écrit  par  un  ï^  au  lieu  d'un  N.  Ce 
n'est  pas  la  seule  parlicularilé  du  morceau,  qui  prouve  que  l'orthographe  eu  est  très 
négligée  :  nous  en  citerons  d'autres  exemples. 

'  La  forme  "'TD^n  est  pour  NTD'^M,  et  rî73N  pour  N73N.  Ces  noms  propres  se  ren- 
contrent très  fréquemment  dans  les  livres  rabbiuiques. 

*  Ce  mol  est  très  fruste  et  presque  illisible  ;  mais  le  contexte  et  la  formule  analogue 
publiée  par  M.  Halévy  en  rendent  certaine  la  restitution. 

5  M.  Halévy  traduit  "j^D'^pn  'J"'"73iy  par  •  œuvres  puissantes  •  ;  l'expression  nous 
paraît  correspondre  à  ce  qu'on  appelait  au  moyen  âge  le  grand'  œuvre  (magique). 

'^  Les  trois  premières  lettres  de  ce  mot  ont  presque  disparu. 

'  Ce    mot    ■»\DD■'^^    est    écrit    plus    emphatiquement    ^TUNÎIT    dans    le    texte   de    . 
M.  Halévy, 

*  Mol  Iruste,  en  partie  restitué.  On  remarquera  la  répéliliou  du  même  verba  au 
féminin  pluriel,  ayant  pour  sujet  les  démons  feininins. 

'  Ou  :  ^îT  (par  traiisposilion). 

'0  La  formule  ûb^bl  ^^l  MTOT^  '\J2,  est  exprimée  (avec  une  légère  variante)  dans 
le  texte  de  M.  liulevy  pur  les  mots  □bj»  "^T  "J'^l  N)DV  173,  qui  ne  modilicnt  en  rien 
le  sens. 


UN  VASE  JUDÉO-CHALDÉEN  DE  LA  BIBLIOTHÈQUE  NATIONALE       169 

J-TiDia  p  'j-'pBttT  i"'-iip3'T  'i-^T^nm  T^mîm  i\-i7:'J7:  v^""*^"!  T^^^  l'^^îbs 

m'^by^  rriasiD  bri  •}»  ni:3  -î^^irri  ï-r^nsis  'b  c<'i::in  '-^nw  by  i-ijjn 
^niD'oa-iai  '[û'caT  'i"'^"'-.-]  Nrrannb  iiunn  nsbtt  Nim  -nsoN  '^nm^-i 

Que  toutes  ces  choses,  les  unes  et  les  autres,  soient  anathéma- 
tisées,  bannies,  expulsées,  arrachées  et  chassées  de  son  corps 

Et  de  sa  demeure,  hors  des  deux  cent  quarante-huit  (membres) 
ensorcelés,  et  hors  de  l'endroit  où  se  tient  Hisda  bar 

Ama,  sur  le  chemin  de  Housia.  A  l'étoile  qui  domine  sur  toutes 
les  autres  étoiles  d'en  haut, 

Qui  chevauche  (dans  le  firmament),  appartient  le  salut,  car  elle 
enseigne  la  magie  aux  magiciens...  par  l'invocation  (?)  du  jujubier. 

Que  le  grand  nom  (de  Dieu)  soit  prononcé.  Amen,  amen,  iSélah. 

*  'j'^"l'^Dn,  fitot  à  mot  :  brisées,  broyées. 

*  Dans  le  texte  interprété  par  M.  Halévy,  le  mot  'J'^nTlTO  a  heureusement  une 
sorte  d'explication  placée  à  l'interligne  qui  contient  le  mot  IIÏT^mTOlp^J,  •  ses  empla- 
cements '.  Peut-être  faut-il  lire  ici  :  ln^"nTltt  (avec  intercalation  superflue  d'un 
premier  T),  dont  le  sens  certain  est  :  sa  demeure. 

'  «  Les  deux  cent  quarante-huit  •  (membres).  Cette  formule  est  tout-à-fait  nou- 
velle dans  les  inscriptions  des  vases  magiques.  Au  moyen  âge,  les  Juifs  admettaient 
que  le  corps  humam  se  décompose  en  248  membres,  ou  parties,  qui  étaient  sujettes, 
chacune  individuellement,  à  subir  les  atteintes  de  la  maladie  ou  du  démon.  Notre 
formule  d'incantation  a  pour  but  de  les  préserver  toutes  sans  exception.  —  Faut-il, 
au  contraire,  supposer  qu'il  s'agit  de  <  248  procédés  de  sorcellerie  »,  contre  lesquels 
l'inscription  a  pour  but  de  protéger  ledit  Hisda  ? 

*  M.  Halévy  a  lu  ce  mot  rî"nïî  ;  mais  la  lecture  "^T^N,  sur  notre  vase,  ne  peut  faire 
l'objet  d'une  contestation.  —  Littéralement  :  main,  par  extension  (?)  voie. 

^  La  lecture  de  cette  lettre  est  certaine;  elle  est  assez  distante  du  mot  qui  précède 
et  du  mot  qui  suit  ;  le  fac-similé  de  la  coupe  Rodwell,  sur  lequel  a  travaillé  M.  Halévy, 
l'a  induit  en  erreur  ;  il  a  vu  dans  le  passage,  semblable  au  nôtre,  l'interjection  i^N,  ô, 
comparable  à  l'hébreu  '^N  ;  il  lit  :  NDlDlD  "^iN  .  "^ICin..  •  au  heu  de  NDIDIS  b  ^''liin. 
Dans  l'un  et  l'autre  cas,  il  y  a  un  point  d'arrêt,  une  tinsie  phrase,  après  le  mol  Hoîisia. 

^  Au  lieu  de  ;^31D"1  Ti''by~l  !l^!2D"lS,  M.  Halévy  a  cru  lire  sur  son  texte  défec- 
tueux ^{3172^  ■^Tobi'T  N'^DDID;  mais  la  lecture  de  notre  passage  ne  peut  faire  l'objet 
d'aucun  doute.  Le  mot  ïiaiD'H  appliqué  à  une  étoile,  à  V^énus  probablement,  indique 
une  curieuse  notion  astrologique  empruntée  par  les  Juifs  aux  Chaldéens. 

'  Le  mot  ncDN  est  le  même  que  NDIDN,  le  premier  mot  de  notre  inscription,  avec 
une  orthographe  un  peu  dillérente  (par  mutation  du  T  en  S).  En  rabbinique,  il  est 
vrai,  ce  mot  a  hui  par  être  regardé  comme  dérivé  du  grec  (T7td9r),  spata,  d'où  il  a  pris 
le  sens  à'épée  plate  ;  mais  ce  sens  ne  saurait  convenir  ici. 
,  s  Passage  fruste  et  difficile  à  rétablir.  Le  dernier  mot  ne  paraît  pas  douteux,  c'est 
Ûiy^m.  e'  pO'')'  le  nom  ;  il  en  reste  encore  des  traces  graphiques.  Mais  ce  qui  précède 
a  complètement  disparu,  et  nous  proposons  conjecturalement  de  restituer  les  lettres 
suivantes  :  „32T''1D^Ï'TT'^)  dont  nous  avouons  ne  pas  comprendre  le  sens.  Dans  le 
passage  parallèle  de  l'inscription  traduite  par  M.  Halévy,  également  fruste,  ce  savant 
a  cru  pouvoir  restituer  le  mol  'J^^'^lûW-  Ici,  ce  mot  n'est  pas  admissible.  Pour  les  trois 
ou  quatre  dernières  lettres  de  ce  groupe,  il  y  a  peut-être  lieu  do  lire  par  conjecture  : 
['jlD'^DT,  «  de  ceux  qui  murmurent  i  (sous-enleudu  :  les  formules),  «  de  ceux  qui 
énoncent  à  voix  basse  >,  selon  le  mode  usité  au  temps  des  auteurs  du  Talmud,  pour 
guérir  par  l'incanlalioa  :  lî^tlb.  — Enfin,  serait-on  en  présence  de  lettres  détournées 
de  leur  vrai  sens,  à  reconsiilucr  par  les  procédés  du  CD  DN  ou  û^bN  comme  les 
coupes  publiées  par  M.  Layard  en  olfrenl  des  exemples  ? 

9  Au  lieu  du  mot  ln''D''D?3"1.'^T,  M.  Halévy  propose  de  lire  :  n"'p"'D73  "133-  Mais 


170  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


TEXTE  INTÉRIEUR. 


bs  i^T  ntî-'a  ^yiw  1^1  toinui-^a  f^m*!  )i2  ïr^ttu)  ^-^wnin  ir^in-is 
IWN  n-s»  •jTT'a^a'i  l'^b'^aa  rrttN  na  ■^lo'^nb  n-^ba-'pb  Tn-^p'i  "i^i^in  'rr^rw 

.nbo  ^ttN 

TRADUCTION. 

Délivrance par  la  grâce  du  ciel,  des  mauvais  esprits  et  des 

mauvaises  maladies,  et  de  toutes  sortes 

D'adversités  qui  se  lèvent  contre  lui,  contre  Hisda  bar  Ama  :  Qu'ils 
disparaissent  et  soient  anéantis  de  devant  lui.  Amen,  amen,  Sélah. 

Quelques  expressions  et  tours  de  phrases  se  retrouvent  dans  la 
formule  du  Kol  Nidré,  en  tête  de  la  liturgie  de  la  veille  du  Kip- 
pour. 

Au  point  de  vue  tacliygraphique,  nous  noterons  les  particularités 
suivantes.  La  forme  particulière  du  d  est  celle  d'un  triangle.  Le 
•^  se  confond  avec  le  i  et  même  parfois  avec  le  a  au  commence- 
ment ou  au  milieu  des  mots.  Le  5  est  presque  identique  aun.  Les 
trois  lettres  n,  n  et  n  se  confondent  absolument.  Le  »  a,  quand  il 
est  fait  négligemment,  beaucoup  d'analogie  avec  le  it.  Le  3>  et  le  st 
sont  presque  identiques.  Le  p  peut  se  confondre  avec  le  12,  car  la 
queue  est  souvent  sacrifiée.  Faisons  enfin  remarquer  que  le  a  a 
une  forme  particulière  dans  le  mot  rr^Dis,  et  que  nt  sont  joints  de 
façon  à  ressembler  à  un  rj  phénicien.  Le  3  final  est  quelquefois  à 
angle  droit  et  ressemble  assez  à  une  équerre  ;  il  est  orné  d'une  ou 
de  deux  petites  hastes  à  sa  partie  supérieure  ;  mais  il  ressemble 
aussi  parfois  à  un  1  ou  un  1  prolongé. 

Les  particularités  linguistiques  et  paléographiques  que  nous 
avons  signalées  permettent  de  regarder  notre  inscription  comme 
un  peu  antérieure  à  celle  qu'a  étudiée  M.  Halévy  et  qui  se  place 

il  n'est  pas  possible  de  se  ranger  à  l'opinion  de  ce  savant,  car  la  lecture  matérielle 
du  mot  est  certaine.  11  faut  donc  y  voir  une  forme  dérivée  de  NUITOIID  (ou  NIZJTOD^S) 
en  syriaque  U3ltt"l!3,  N12)7D1"|D,  le  jujubier,  ziziphus  rhammns,  jujuha,  dit  J.  Lévy 
dans  son  Neuhebr.  Worterhuch  [siih  verho),  en  rapjjclant  le  passage  suivant  du  Tal- 
mud  Babli,  Pesahim,  f.  111  i  :  •  Pour  tout  arbre  dont  le  branchage  est  dangereux, 
l'ombre  l'est  aussi  (parce  que  c'est  ordinairement  là  que  les  démons  opèrent  leurs 
malélices).  Une  exception  est  faite  pour  le  jujubier  :  son  ombre  n'est  pas  nuisible, 
bien  qu'il  ait  un  feuillage  touffu  (pouvant  servir  de  repaire  aux  esprits).  Puisqu'un 
démon  femelle  dit  un  jour  à  son  fds  :  tiens-toi  à  l'écart  du  jujubier,  car  c'est  lui  qui 
a  tué  ton  père  et  qui  te  tuera  • .  (Us  s'éloignent  donc  d'un  tel  arbre.) 

'  Avec  les  points  diacritiques  :  NH^S,  repos,  tranquillité,  délivrance.  NJT^S  ou  ^"'3  a 
le  môme  sens  en  syriaque. 

*  Ce  mot  est  très  fruste,  et  il  semble  qu'il  y  ait  entre  NtT^3  et  lui,  place  pour  uue 
ou  deux  lettres  qui  nous  échappent. 

'  Ce  mol  est  difficile  à  lire  ;  mais  le  coulexte  laisse  deviner  le  sens. 


UN  VASE  JUDÉO-CHALDÉEN  DE  LA  BIBLIOTHÈQUE  NATIONALE       171 

vers  le  neuvième  siècle  de  notre  ère.  Elle  est  postérieure  à  la 
plupart  des  coupes  qui  figurent  dans  l'ouvrage  de  M.  Layard, 
mais  qui  néanmoins  ne  remontent  pas,  comme  le  croit  l'auteur, 
Jusqu'au  troisième  siècle  après  J.-C. 

Les  Juifs  avaient  emprunté  l'usage  de  ces  coupes  magiques  aux 
habitants  de  la  Clialdée  avec  lesquels  ils  se  trouvaient  en  contact. 
On  ne  les  trouve  point  en  effet  ailleurs  qu'en  Chaldée  ;  et  dans  ce 
pays,  on  voit  tous  les  habitants  y  recourir,  aussi  bien  les  Juifs  que 
les  Arabes  et  les  Mendaïtes  ou  Soubbas:  Ces  vases,  rappelons-le, 
servaient  à  préserver  contre  l'atteinte  des  démons  ou  des  ma- 
ladies celui  qui  buvait  le  liquide  qu'ils  contenaient.  On  ne  peut 
donc  pas  confondre  ces  objets  avec  les  coupes  dans  lesquelles  on 
versait  un  liquide  qui  servait  à  scruter  l'avenir  et  à  faire  des  pré- 
dictions. Ces  derniers  se  rattachent  à  l'hydromancie  :  telle  était  la 
coupe  de  Joseph  dont  il  est  question  dans  la  Genèse,  celle  de 
Djemschid  dans  le  Schah-Nameh,  et  celle  que  des  traditions 
orientales  donnent  à  Alexandre.  On  les  trouve  quelquefois  men- 
tionnées chez  les  Grecs  et  les  Romains  ;  c'est  au  moyen  d'une  de 
ces  coupes  que  Numa  faisait  ses  présages  ;  saint  Augustin  et  divers 
auteurs  nous  signalent  ces  usages  singuliers  *.  Mais  ces  pratiques 
avaient  surtout  leur  siège  en  Orient,  et  on  les  trouve  encore  chez 
les  Arabes  du  moyen  âge.  «  On  obtenait  l'effet  désiré,  dit  Reinaud, 
en  remplissant  la  coupe  d'eau  et  en  examinant  le  mouvement  du 
liquide,  ou  en  y  jetant  soit  un  anneau,  soit  des  bagues.  Les  Mu- 
sulmans accordent  la  principale  attention  aux  figures  ou  aux 
paroles  marquées  sur  le  vase.  Ils  remplissent  la  coupe  d'eau,  et 
après  que  le  liquide  s'est  pour  ainsi  dire  pénétré  de  la  vertu  des 
paroles  et  des  figures,  ils  l'avalent  ou  le  répandent  sur  eux-.  » 

Toute  autre  était  la  nature  et  la  destination  des  vases  à  incan- 
tations magiques  du  genre  de  celui  que  nous  publions  :  on  ne  cher- 
chait point  à  connaître  avec  eux  les  secrets  de  l'avenir,  mais 
seulement  à  éviter  les  maladies  et  les  mauvais  esprits.  La  formule 
avait  pour  effet  d'empêcher  que  le  démon  ne  trempât  ses  lèvres  à 
la  coupe  avant  celui  qui  devait  boire  :  aujourd'hui  encore,  les 
Juifs  superstitieux  répandent  à  terre,  pour  expulser  l'atteinte  des 
démons,  la  première  goutte  de  l'eau  contenue  dans  un  vase,  avant 
de  la  boire. 

Parmi  les  notions  talmudiques  les  plus  caractéristiques  que  nous 
pouvons  signaler  dans  la  formule  qui  nous  occupe,  notons  celle  des 
248  membres  ou  parties  du  corps  humain.  C'est  à  l'ancienne  astro- 

*  Varro,  apud  S.  Auf.'ust.  Civil.  Dei,  VII,  35;  Jamblich,  De  Mysteriis  Acgypt.,  3, 
14,  p.  78;  Creuzer,  Dionysos,  p.  302. 

*  Keiuaud,  Descript.  des  monnmcntsimusulmans  du  duc  de  Blacas,  p.  338. 


172  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

logie  chaldéenne  que  se  rattache  la  mention  de  l'étoile  Vénus, 
l'antique  Istar  ou  Belit,  qui  était  particulièrement  puissante  pour 
les  exorcismes  et  les  guérisons  *,  et  qui  a  pris  place,  avec  les 
mêmes  attributs,  dans  l'astrologie  des  Mendaïtes  et  des  Arabes. 
Les  déplacements  mêmes  de  la  planète  Vénus  sont  indiqués  dans 
notre  texte  :  elle  chevauche  à  travers  le  firmament,  et,  sans 
doute,  la  place  relative  qu'elle  occupait  devait  influer  sur  l'effica- 
cité de  l'invocation  de  son  nom.  L'invocation  du  jujubier  doit 
aussi  être  d'origine  chaldéenne  ;  les  Mendaïtes  ont  également  un 
arbre  dont  l'ombre  est  bienfaisante  ;  il  est  fréquemment  mentionné 
dans  le  Sidra  rabba  sous  le  nom  de  ni523nn,  que  Norberg  traduit 
par  vitis  cypria  -.  Il  y  aura  certainement  un  jour  des  rapproche- 
ments fort  intéressants  à  établir  entre  ces  antiques  traditions  chal- 
déennes  qui  ont  persisté  presque  jusqu'à  nos  jours  et  les  textes 
cunéiformes  concernant  les  pratiques  magiques  et  astrologiques 
des  anciens  Babyloniens.  De  même,  M.  Fagnan  a  lu  sur  des  mss. 
persans  une  invocation  au  roi  des  Djinns,  à  celui  qui  règne  sur  les 
vers  rongeurs,  pour  qu'ils  n'attaquent  pas  ces  manuscrits.  Le  vase 
que  nous  avons  examiné  était  fait  pour  Hisda  fils  d'Ama,  qui  ha- 
bitait non  loin  de  Housia  ;  cette  localité  mentionnée  aussi  dans  le 
texte  traduit  par  M.  Halévy,  est  inconnue;  elle  devait  se  trouver 
non  loin  de  Hillah,  peut-être  sur  les  ruines  mêmes  de  Babylone. 

Ern.  Babelon  et  M**"^  Schwab. 


•  Fr.  Lenormant,  Chaldean  Magic,  p.  17. 

*  Norberg,  Onomast.  ad  lib.  Adami.  p.  144. 


DOCUMENTS  INÉDITS 


I.  UNE  PSEUDO-BIOGMPHIE  DE  MOÏSE  MAÏMOîlIDE 


Nous  avons  publié  dernièrement  une  biographie  apocryphe  *  du 
célèbre  Rabbin,  philosophe  et  médecin  Moïse  Maïmonide.  Nous 
donnons  ici  un  document  analogue  qui  a  beaucoup  plus  d'intérêt  à 
cause  du  mouvement  du  pseudo-messie  David  Alroï  qu'on  y  trou- 
vera raconté  avec  de  nombreux  détails.  En  outre,  il  renferme  une 
notice  sur  les  Juifs  du  Yémen,  dont  l'histoire  n'est  pas  encore 
faite,  puis  quelques  noms  et  quelques  dates  qui  peuvent  être  d'une 
certaine  utilité  pour  les  historiens  du  peuple  juif  au  moyen  âge. 
Nous  ne  croyons  pas  nécessaire  de  prouver  que  notre  document 
est  apocryphe,  surtout  en  ce  qui  concerne  Maïmonide;  on  n'a  qu'à 
le  comparer  avec  la  lettre  de  cet  auteur  adressée  aux  Juifs  du  Yé- 
men sur  le  mouvement  messianique  dans  ce  pays  -,  et  on  y  trou- 
vera sans  difficulté  des  divergences  avec  notre  pièce.  Un  mot  seu- 
lement sur  le  manuscrit  d'où  nous  avons  tiré  ce  document.  Il  se 
trouve  à  la  bibliothèque  Bodléienne  d'Oxford,  marqué  0pp.  add. 
8°-36  (dans  notre  catalogue,  n"  2425,  11).  Notre  pièce  commence  au 
fol.  63  i/  et  est  écrite  en  caractères  rabbiniques  espagnols  ^. 

1|br^^^  U'^'n^  «■>•'  Ninm  ir-^Nïi  ïr^m  itûiu  "iiTs-^»  n-iDO  y-iNn  ^r^in  v>» 
D-'sn  "«sw  nu  •m-'Nb  n-^m  nbibi  ûtot^  ujn  mn  pDi:!>T  û"^ttujn©  T^nN  "«iD-iia 

nn  rwDn  b^a  bTi^  ûsn  bt<n  nmna  •po^y^  n^-'XJ  b^^y  m^  ûujb  ir^ri  ""D 
■jiNan  maDb  vsm  in-^a  -^ujsn-i  Ninn  «j-'Nrj  iiby  'nwn't  tr^iann  bsn  bina 
vn-^  bD  -jiNsn  ^ssb  iiw^tj  -i3  nuj»  'n  -iTobi  b"T  111:211  îmnn^  isn-i  bTian 
«a  i73Tn  nn"iî<m  bN-ni:'»^  n-nn  y^n-i»  ir^rt  -^d  min  vasb  "j?aib  ïr^m 

>  Voyez  Letferbode,  année,  VU,  p.   Ui  pass. 

*  Voyez  Graetz,  Gesehichte  dtr  Juden  (3°  édition),  t.  VI.  306  pass. 
'  Nous  reproduisons  fidèlement  le  texte  d'après  le  ms.  unique.  Les  mots  et  lettres 
entre  [  ]  sont  oblitérés  dans  le  ms  ;  les  mots  entre  (  )  sont  superflus,  «  notre  avis. 


174  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

cp3-i  c^ap  V"'^""'  "''^'^  '^■'^^  "■^'^■^  ^^  bTirirr  i-iNsri  :i-i:ii  y'^Jin  »  -nttTt; 

'-1  nx-io  iv-t  bN-.wi  n-'n  bs  irnï*  b'^^t'^i  lib-^i^i  ïDipar:  "]'»'n  ïi5iïJ73 
i=:-^3b-ir7  rrn  nb^ba  imm  t^hn  mi  'm  riot:  'n  T^3n  •^;o  npb  ^n  ';i»-'» 
iNm  rr'ïNb  tn'cb'»:)  ib;n  innnD  r;i-5Mb  iN3'i!  13>  tm  i.san-'i  inb^b:: 
'-5  nïm  r:3  i^mnnpn  b"T  "îiti"^»  'n  -iîumt  û?bTaTTib  ib:n  N-^-i'75D3bNb 
bins  i2::n  Nir;  ^o  i-m  b^  "^rn  hyi'n^ri'-  r:7:5n3  Nn?^  1:3  riby^T  n-'-iit'nb  r^^tt 
•;bttrt  -^ssb  mra  '*i  D25D1  i»o  "î-^ibN  nï^bi:  £D-»-iit73  "^b^b  in:?nM'û  r:î<2i 
bK-iia-ia  rsmn  yn-i»  «nim  inN  -i^n  û-^n^ï^  b:D  b:*»  in55  nx  ^b»r!  ûtJiT 

'  ï-.jO  s^bTj-^brjtt  ^•^Ni:'^  Nbi;::-ibiï:b  3>'C*in  imis  bw  it^  mnn'n  ^-^m3 
nnNi  û-'ïDnn  T'*»  i-ison  "jttTi^  pD^a  '^nn5::?n5i  TiT^n  U5inb  -i''-^^  'l'To'p'n'n 
'{■'3  PN131E3  Ti  "TT^im  yiNr!  b^D  '^"ii^  ;-!mnD2  DND  rr'iwb  \-T^b:>  "^r) 
pT  1^33  lab  t)"^  bnpn  '''j'^yn  ris:ptt  ■'b  n-i:cN  n3U5  ûi-^m  û-'ïîin  "i  f'TT-"'rî 
nbinn  -«mrtirT  inN  in-^m  ûr;)::^  "^nsbrn  nipnb  '^bs  ribin  Nii-n  ûsn  î<im 
nT3btt!i  irbs'  ^-ino  pD^  b:'  D-'H'^'»::»  T^^sb  ûinuiT"  ir-^rtn  !:->72W  nt»!  ûsn 
'■^  iM\:5"o  Tip2b  1j0333  t^iîn  nbiim  "ipT-  Ta  my^  m?:nNn  Tûi^uJi  nb^n 
ï-iN»  tzi-^ij:»»  nn:iN  •^n-'b  rixa  -^r)  lym  Nbn  "^nx  i:b  -iwnt  ln5  -la  pniS'' 
.ir:Db  nmN  cai  nnm  «•'itiïn  b"T  Irr7j  p  n^UT:  N:a-n  fi<3-iti  lixairr 
nnars  imN  ba^  nu)»  'n  "jiNiri  tn»  û-^-ii:?:»  N3  niTN  ■zr^'DTi  0012  -tt 

'nnart  un  izi-^N  "^sis  'jn-'N  ■^■ib"'  ^ipn  d::'  cipin  mbrîp  m'^p-'i  irnN  ma^b 
•^rnni  b"T  ^nti^^  -13  t^jù  T^i'iin  û^^nx  ^;n  dnd  bnp  "^r-n  -^nNi  3-ir73  nbr^p 
ni<^33  i^HTOwii  mnn:»  pro  i:sb)3  mnrj  nimoa  "^^  inu;2nr\::  ûDnnaiDb 
m-arj  mritj;:)  t3>7:td  i;»  "^nï^-i  ■^mai  t=i5:>'^'nN  .  irit  n^rea  lîwro"^  iir 
risïT'D  ïi-'-ittiN  rinci^n  û-'b"OTT^bT  û->-ii:?2b  bnn»  n^n  Ti\x  û-i-imori  nx^a 
■<»  bm  i^nsoNn  nitî.  insrn  hn-ist  ni:-'  ni!^  rrîn  o^ipTo  ttî^d  ^^^^î1n  *^b73 

û">-iaib  iTwS  ■'n'^L:rr  Nbn  yi2r:i  rr^aw  -^ï^î  \-T>^r:'i  û'^n!^^  vit  ûr:  cr.  ma-^iTan 
TT^'^im  nimN  û-^D-inwT  133  û-^pn^iTai  iD-^bi»  û^î  û'^:i'^::'ba  Ntir:  ■'aba  -^n-iT:}*  -^d 
8^13-'^  ■<»  bD  ■'H'^N'-i'a  ']T'D  ûQn^T  ûsTiH  b3>  ';■^D:!'^^  riT  br  -^ttiri'a  nyai:» 
T:;n  -^aba  03D3  rt^n^"»::  nriN  n:?rrj:  m^iT^ori  in3t  "jr^rN-in  n3-ia  -i7:n-< 
•^byjz  i-iaru:  i:f  c^r^rr;  ■ibwX3  •^3b3  T:im2  ^•T^"'^i^  nanr;  i^iza  Nîao  t-ismi 
ba3b  !rj-nnD3  iiDbit  û!tT  pï:«n  •^u:3N53  D"«bT7:»  û"'nmD  ûiT^u5y  ûiujîn  "^i^ 
irs  c-^-iittib  -Na  "^ai  nn^Ni  '-«lî^rî^  N^a;  nap  aob  crib  tî^-j  ina^a  n;»  labm 
cnb  TnTDN  D"ib^  cnb  -^r-iTnm  ûibo  ■'b  irpjT  -'bi^  tj^î  a^ur  ^-nN  iniuî 
awnb^aa  Tha^  ^T^n  la'w^  'inaia  Dar^»  b-'''::^  "^^Di*  "la^n  liaaT^  "1:^33 
"^a  nt-iN  c-'p-in-ir;  Dvz-i'pr:^  r:m^<^  baa  mb-p  i;-^nN  ûib'^i  û^a-nn  ûibuJT 
T:;nan  bNi  iiiz'-'mrTi  'abNCJN  î^n:>^  t:DDT  ab  baa  -ly-n  "^amN  DnN  tnb  \n-i»N 


'  Lisez  ^7^t^73  ou  "1173113.  Voir  la  Iraductioa  p.  18(1. 
»  Ms.  1^723. 


DOCUMENTS  INEDITS  173 

rt73  orib  -^n-iWN  baw  nnN  riTD  br  ^b  t^sd  nwNirT^s  tun^s  xb  ■'b  in»N  -is^t} 
£3-ibN:?»'air;  tsnN  ib  Tnttî^  iNb  dn  N-'ii  Da^n  û5^b:?M  Tj'ttiDU)  rr^^iTo^ri 

nrb:?M  na^ttî  n^'  ts-^iana  b-^-iab  ^^  pnsnsn  "nnsa  n-in^r  lî-^-^m  □■'i^nr! 
by  'd^'j'^ybn  r!^  ûm  û^pm  û-^thid  û-^i^b  û-^uî^n  n-iiu;  imN  Tcsm  "^nir^ 
''^^!^■^!^  Q3>  û-^srbri  ûmN»  o'^pm©  ir^n  iîtoni  inix  iis-inTûi  -^mn^ri  imx 
IN  û-^itbn  ûmNb  i-ittN  n3Dt  n3^  -^-imo»  û-^nan  o^ujîn  "«suj  iNii-^t)  iy 
1^1  ûiN  •'sat:  D'^W'-^nn»  «bi  tnpwrr  p  û-^j^t^  dids-^nï^  na^T  i-ion  ^n  û-^pn 
15-ip  rT"Dn  D'il?:  in^  imN  □"'Diawi  ûiD-in^a  ûniîiu  ^min^n  "imi<  1:3  DDb 

rbî*  mb3i  nm^n  nnp  ^33  smbina  mnsu:»  -is^  tnaT  m^i^r!  biD  vbx 
nsn  li-^nma  v»Ntt  ifs-'N  un  t)-'bN5'72'>a''ï^  ûpin  "^b  i-iton  my-i  i3  li-^WNm 
t^SNm  ^b  ■n-^a-'  nwm  iNin-'  ban  n-^uia»»  ûi-i"^\i5y  û-'Iiït'  d-^uiiN  -^311) 

Q-^ntiiN  nrî  nwNn  û'^bNz'XD'o-^r:  iw  ywiu:  -^sn^  ns'ittujn  n»  drtb  in-i73Ni 
bNiD  i3bNa"^i  I3^i3y3  riNn  aipsn  û^mïT^rt  Dmïî  insiN  i3"^by  û-'ai:?b72  in 
■^s  inttNT  nmnDn  iNati  û'^nin-'  iN-n  bana  T^n  ïiwrr  "^3  i^7:n  .i3-'maN  nx 
b'tt)  Nait  niD  -^5  nt:Ni  ^niNT  la  T^rD-^aN  i?2^n  iNiisoNa  ûin  n:by  nWN 
l»!  [û-^n]  bin35  bN-iï:i73  bnp  T^bN  iib3T  û-^sw  't  tiVn  Nit-'i  Nin  n-'^ti 
C=ir,nt<  br)  TibN  lirapns  -^r:  rr^nti^  -npT  m-iasT  isoti  anb  v^i  mttiNi^ 
û'^mïT'r!  "^b  inwNT  d-^sa  't  itti£3>  N-^anrn  ypn  v**  V^^  '^'^'^  ^'^^  ninstîT^n 
■ib  TittNT  inbnn  iibN  ii:apn3^  n»):  imi  T-bN  ■nb3i  iNSf  ri3'ffir!  ira 
inT^Hs'a  "^D  T^b3>»  iNn  d-^in^x  d-^mrr^  iNiin  d'^'iirr^  dnb  timn  "^i  d-^-nn^n 
ï-iM'^nttîrî  ^'■'a^a  nuJNn  by  m^p  'J3:?rr  m»::'  in-i  rrbDnb  in  nai  b:^  biN\Db 

135b^    133T7N  lb  l-lttNT  Tîpl   DT^aS  •^3pT721    d-^Tir!"»   T^bN  103S3   p   ^HN 

13'^nNT  iddt:  i3b  '[\m  nasi  an  bîip  -jp'^iîïia  ri3r!  d-^aoïi  isnsx  ■'"•^  n^^^^'n 
is-'H^b  NirsT  i3"^by  rniiïn  isb  riT  rî-^^ri  "^n?:  1:?  ti-^aim-'  inbiaa  bNnuî"'  ■'3a 
■jTST  y^^n  Nb  .-15  -^HN  N3  bN  tD^ib  "i«N  nvsbT^  'najj'UJi  r-iittiNr;  i-^a  nï3N 
d-^pm^o  ynN«  -^i^y  na  np:?i:  ri3>73U33  -^r;  t<bN  -^rnbiu:  Nb  "^sni  ^''ly  ypTi 
mab  n-^nûanb  -^rnbiuîT  -^sn  ^^ï<i!:■l\D  ^y  d-^pni:  pw  Ndib  tDnprsr  j>-«ar:i 
dST  nT^iNn  "j-^a  dnb  d'^'nNïi3r!  ta-^suîri  n-iro  ibao-^n  bN-i"û"i  -133  di73na:?ri 
\-iyti'iu;i:  "irai  f>^T2  ds-inN  "snt  .  Nin  ainpa  bax  ypr:  nbab»  ïn2£»  i3n 
'^D'i'ny  ■'3'^3>}2  ■^n3':3  ïT7n3  nb-^brr  riiD'î  "^nn^iu-,  -^^533  nro  tN  d-^iirr^rr  "^st!  ^la 
rriT^T  Nia-i  ly  t:b^y  -^siNa  th^ntu  niibn  n""^  TNiCWi  N-iwaa  'j'^-'3>?3  ^-l■^1m 
iNia-^uj  d-'^iN-i  d-i-ianai  mîT-ina  ■^ns'T  mi3y  ■'sai  anai  ^-i-inoT  ^r\iJ2y  p'ii: 
ib  n^Di'N'a:  mnûjam  lab  by  "^nnaii  nnb  in^b  ■•ni^'npi  ^u-^Nin  imN  ■^32b 
■^nnauJi  mbN^ln  iny  anom  n'^'i::»  'ns-^i  tzi-^nN»  ib  ■inn3i  Tiaai  nbna 
"na:>iu5ai  mnsïn  "pio'n  i-iw  iriina3:-'U5  ans  ib  ■'nn3  dai  1Nr^DDi<b  imN 
*^t]H  "^bN  "nTm  tj-^»"'  Ti^^y  iNnsoNa  aD:fin3T  inttddn  n3>  ib  'ib'^i  in-'bT» 
inN  "^b  T^anc  n73  bai  tsDb  amD  \n^in  tD-^nana  na-iN\D  -^bibi  ■'^m  rT3"0 
"•n  '-i-iwiNi  luiaa  d"':'atU3n  ^nx  iTi  im»  riN-n  ùab  "^nanD  np-'j'n  iaN 
n"-^:!  1»  i"t3  ria  -^b  •>::)n'^D  phn  mnaN  'n  -^hn  nm  ■'b  «-^am  "^"-^  n-^a»  isDbT: 
■^n'^'^ïn  pb  dinpa  d^-^HN  nu:»  -^sn  dai  .  -«b  i-i»î«  Nb  -i7:n  ^abwm  mb^TU 


176  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

1N3U5  iT^a  p-^b:?  Tibs"»  «b  Q-iiN^sm  ûnsepTD  -^rittiBi  mïsbri  dmN2  ^'^^y'iz 
ons»  rT»r:  un  "^aba  •^n'i^NT  mw::"!  pirir)  mas  tniN  ;z5-iid  ^u-^Nn  T^b 
to-'amn  mn-^sn  -^niDn  -^d  nwNn  b:?  iris  -^d  naix  -riiin  û-^-iNCirr  'sn  -^b 
Nnrr  -^d  ■'Nina  ti-imn  cumN  dis  Nbo  iris  pTi:  rrnn  ni^ïj  t:?  ûi»iroi 
îTivi  N3iiii  13'  tsmN  uînsb  ^b  "jin-i  ^b  t-i72N3  Nb  Nin  ntiN  1^1  r7:Nn  b:» 
ni3  î-T^nwrn  by  ^b  -i-i^i'CjO  CDnnDa  inhcon  bnp  ^b  nn^aNin  'jrDi  pni: 
■^n-ittNT  innMu:T  mpi  min:  'd^i  rrnnrt  mnc'c:»  ir^s?  iibiT  iit:»  ^hn 
Nim  /laT  ^inntti  mi^î  ibN  "]b  lirnpi  -np  "j.xi:  bm  n":?  Nin^r:  nwN  "int 
Nb  13  nnysn  p  ni:n  Nb  crû  riobï:  iis'  id  nn  inN  ûs»  nnn^n  nbo 
•  nrj  ibT72  ni^iT  ';T>rn'nttn  T'-'n  i^th  5iid  i:!»  nNxb  i;ttT  ^'ijn 
13373  uns:»  bo  NWTT73  '^btt  DU)b  nin\a  htd  r:'::3>72  DDb  "idon  ii:»! 
nii  nnm  ps»  ini^'  d^t  ''>::nn  NiDin  mn  "ji^nto  Nim  nsi  lam  ntinain 
bTTJ  ûTN  Nim  ûn:^  'n  itt'û  nnN  'j-'i-!  nnb  ">::in  bN-iiDix:  !:]bN  Ta:'  di;a 
intjnu:^  tnnb  n)3iN"i  Y-'^"  t=;riinnN  -i:aT  tnitjw  nii  nm  ûon  bNnujia 
rîrniu  i^T  n;b  rtîn  isiin  ^b»b  -imni  ûn;72  '-i  n23>  imwi  in  bNnuji  ^Nsno 
CDiTor:  i:Db  niDin  ntm  br;prri;pT  t=:r  ctctd  'n  lisbTD  inscio  ivo  ni7:i 
bNnu:^  m  br  aniam  sidd  i"i3D  T'i  nb  nsn^n  nnao  n»y  na^n  mnom 
cniNSva  mnnuji  in  d^hn  riOD  i-iidd  i"i  ib  i;n  ûnb  -i»n  riNan  nsab 
n"b  -N^a  Nbn  Dnb  r;i-  -iu:n  b^  ms^n  nb  i;n3i  nmwi  in  bNT^i  bu) 
nmm  un»  :\"im  ani-inN  nrj  ni^iban  -;ab  b^Nb  nim  n^pb  mba 
ina  nnm  bN-i^i  im»  J=;mN  Ni::nn  ynNrî  nbn  toinN^'m  nn-n  an» 
n-rt  CNnb  niDn»n  pan  nb^in  cnreTo  '-i  nnnin  ïmain»  inm  nvD3D 
^brin  imN  ^t^ïj  n"i  in  ûioin  Y'a  -inN  mnpn  bnN  -ihn  ^ba  mnbwn 
nni  m  -in  «bn  niaryn  nbnnan  ni3D  nbcii  m^-i  inTnNi  n^^n^an  it 
OjDjI  ûiba  n-in  inianm  nmN  n^too  iy  E;n;73  'n  nnN  DinnD  -i^iai  '7i73yb 
nN  ynpn  nbo  nn:?i  nas'tjn  nniNn  inN^n  id  iW2:rn  i3N  y"7ii  nb  -,7:Nn  nibr 
nniD  ûi-iaa'n  naT^n  ^bwn  nnibN  -irnn  nna-nwnn  nniD3nn  n:nnn  ^inN  bs 
ra^  pn  "jnb  tnsnnpTo  ninao  nniDssn  nn3nb  nrin  r]OD  Di^b  in^n  nrjT 
nrnT^an  nr  nji'wa  Di-iNa3r!  DrnN  D^n  aiN  ûisbN  m'n-iN  n73D  un»  npoin 
■jNnDONn  '■^b3  apnwb  n3b  -t  ni-i  in73  i:>  ûnsTo  'nb  '»Nn  bnpn  i3pT  nNm 
Dinmn  nnnpinnna  "jniD  y-pn  i?:t  r:'n  Nb  ini  ihn  bN  Dna»  'n  ûnb  nttN 
GN  Y^^i  bnpn  5nn:>»  m2:p73  ib  nsn  ciiidtq::^  nbûûban  bN  tsnb  n»N 
ibmaa  nyj3>  !-ia»nn  tDn373  'n  "^bnn  tJSinnN  nam  i3n  Nnn  n»N  nmn 
naba  nrwn  fcn373  'nn  pw  n''i  iNncoNb  n:'i:n  tDiain  n"L3  nriNb  bnpn 
bN  nD3D3a  "inis  tzjiobnn  tzin  nnnmwnn  Nin  npnnn  "ini  id  N7:i:n  tan?: 
Cnnb  nwNn  bnpn  ninNab  nn^n  t^mm  'n  Niiin  aiNn  i3Db  nNnn  n3i'7)3n 
min  nina  i»  bn'p'n'i  n"3>  n3nn  na»n  i3i3>n  Nnnn  njs'nwann  nmn  nwNn 

.  nnon  nn^n  nnbb  nbnDi 
inib  Nnn  T^y-i'D'^iir,  nrb  IWT  nnNb  nani  ipnn  in^iTa  nn  na73  i3Nn 
nau:nn  nnrn  bnpcrn  inTOTcn  nin  bj^  I72:>n  ib  n73N  Y^'^nn  Y^'^^  "i°i5 
nsno  ib  nwNn  ■jmbNriNbx  Nnn  '■jb^nn  nTanbwn  pDrn73  ^b»n  nin  id  ib 
t=3Db  nTDNn  niban  by  iJzy  '^bTan  toDb  n73N  id  "^b^^n  nnn  Ninna  ^b^on 
nny^n  nnT73  iDb73  nnsrnN  ini:p»  nNnniuj  ûibns'n  nbN  id  ûDb  n3»n  on  bnpD 


DOCUMENTS  INÉDITS  177 

by  "^ibttb  -^b  "[-^n  ■'în  'a^^  -imm  ns'nnT  "^n-inn  im»*'^  n:'  'û'>3>^y  mn  nnn 
t^"li:-lLNî^  np-^T  n^-^  'r:r\y  [Dimrr^]  ']btt  "^^  "^în  yr)-^  "^s  ti-^nbN?i  m^b» 
ts-im^-^ri  Y^'^  nmN  npi  ■^t'»  -^s  mun  -^bren  nby  "^s  bnx  trai-'WT  "^tito 

.  T^r3>3  "jn  Ni£»N  "^biN  ïi»nb»3  Nbi  upiunn 

1iu:b73  a-'nnnn  ibN  inpny^m:  NbN  dnd  brtpbn  nn^^wb  nauj  nu:N  nuî» 
n73u:n  n"i  in^-^b  3iïn  mnnb  in-iso  s-tTomb  "inNnTrîDT  ^nprt  i^bb  3-13? 

•  ibN  biD  ib  anSNW  "^bj»  m:£T  into  û!T»by 
•^nriTo-m  t2"'-ii£tt3  Niri^m  -^n  niïiuji  rtu:^  '-i  idiin  ans  ■^nj'To^u:  t^wt 
t-iN  riNiNTD  isf  m3N  Nbi  ::ip"iUN  Nb  i:d  'ni  tDUJn  iny^wn  i-tbn:*  nn):^ 
nbinu:a  mon  ^nuipai  û^nirTab  inNau:  i:?  û^uJin  'a  ^b^i»  ^nsbriT  ^sinN 
ny  :-in:5>tt3  iniN  in-TUsm  imNnb  iniDbin  qi^di  n"i2  ï]id  "I3>  -"nNi:»  Nbn 
inNa  13N  i3inN  nsnip-iTDNT  iura  "'»3>  T^J2'û^  iD-i^Dri  n^-i^^  t^t^t  rnNitwt) 
t)Ti  nbnu:  t^  nriN  ns^  iT^y  inTn:^T  ^ib3>  bî<n  dn^^u:  n^'  '^laybi  ']mNib 
N^piT  in5^)3  mjs^ii  ii^j»  ntnj'  f<si!n  dimaa  rsa:?!  !Tia:\  ib'N  î-tN-nu  thn 
baN  initia  naia  la^N  baN  imN  "nnsN  ibix  n^N"iT  i72ibn  ib  nsii  iia^b 
tnbnn  nb  -iimni  niTaibn  -nnsb  j'It»  tD:Dn  û'in  ^paT  'T'is'a  ']bnnri  mp 
-ims  CDdn  tzi^N  •ajpa-ii  laj^rt  ùp^i  riT^iN»  ^d^to  uj^n  yi^  Nbi  "^b^auja 
^bN  i^NT  nnTD  ny  "jtDT  ib  "jn  ib  -iTaN^i  i^ibn  nb  n:«iT  imN  NUiTo^i  ?m»ibn 
bN'^DT  t3V  nnxb  ibi^N  ^-^  '^'^'^  1-  "'"'^n^  to^aai^a  ri^nNT  !-JTn  nb^ba 
t^aren  rrww  p  ^ai  aibn^r  '^wtd  i-i^rî  Nb  ib  -i^n  taibnn  imnD  ^.d»» 
nb  i-TTf;::  biia  ûip72  maa  -jb^N  ^d  iï<72  Nir;  aiu  taibnn  id  j'm  n-i:?7ja 
f'-iTDiNr!  Y^^n  n^a  i^tj^n  bai  ^a  ûrî^b:?  "iwii»  nih^^d  tid35>t  Y^'^^  ^"'^^ 
baa  imia^'i  Dm  iîto^d  arj  q^-i^in  ni"-»  nn  in::?-i  Qi^paT^m  3>*i  i;w73 
lamina  ba  bi'  ûm)o  Nin  ^a  a^^rib  "jin-i  ian?i  Nai  t3u:rt  ito  ^d  ûna 
dizain  ba  ib  n:»"'!  -raj^rr  ^b-^^  .  dn-^b:?  bi;::):^  riujtt  Nim  n»iDa  d^bniTor^ 
NifT  ^b)2rî  isa^irr»!  nann  nb:ji  ^biN  laba  nwN  ia  nwn  ^^tin  Nb72->T  nb^r: 
yi^riu)  ij'  taiTunn  Y'u  qid.i:^  ù^  iTabi  n-inn  ;ab72-«T  maii  n-i3>ttn  -j): 
.r!"apn  d^ab^orr  ^ab?:  '^b»  iscb  inbsm  i3>iu; 
bab  nbin^T  tap^n  imn  tnysnm  caibna  rîNm  iaaM)7Da  ']bnr:  aau:in 
ba  VDD5  iNa^i  i)Dibn  "ji-inD  ib  T^:;r!bi  c^ab  ï-riT^am  ta^ni:»  'Toiann 
nttibn  l-nns  ib  n^anb  iba^  ê<bi  d^suja  d^i'iT'  n^^^a  1x^733  ^'>l^n  di;::3Nr; 
T^bN  Mb:;3^  ny  n72nN?2  dibn  imNa  :j>tti  d"iN  n^^o  Nbn  ii:-iwS  baa  nbu;i-, 
Ti:i-<  Nin  Nûjn  Nba  nab;i:nu3  mi)»  iiin  ib  -i»iN"i)  Dibna  rtNii  'n^.  bNr: 
y-iNrj  baa  dnb^^in  ca^inn  bia':;a  nb^D^T  inDO):  "^bttn  -ii^'it  ^}3ibn  Y- 
în^w  ib  n^nriO  ui-^N  ba  diria73  rn^n  y-ixa  d-^iinn  iNiEin  'n-^r:  112  3'*i-'V 
n72N  ia  vbN  lab  auj  Nbi  ^nc»  'n  n:»  nann  l'^iim  -jai  "ja  '^bi^r,  ib  irr 
ï-tN-iM5  '^y  tzn^T  tav  "^bTon  nana  d^^^nn  lab^i  i:annb  rtiiin  '^b?Dn  ^biK 
yaiD  ">a  ïT-ir7a;n  y:  "^nN^iri  iwt  3>"':iri  nsn  ib  di-ittiN'»::  n;i!)3  '-i  dibna 
"jbwn  n-iab  '^b  n^N^i  na^b  -is^t  ab  avji  r\)2^  np507a  -ni'^i  ijb^-p  pn  i"-> 
•13b  n>DNu:  d^a^  '^n  i^^r^n  rrn:?  ^a  na'irî  n?2N  dN  yîi<\u  tj'  d^  a;ui 


178  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Y^  ^">:573  '-)  ib  -172N11  mDbwn  rjji^Ni  fn-^îiin  Q-^'^iinsr;  "^aa  'i»5'0  r:73 
ribN  rra^n  -^b  inn  ï-!r;72  'n  ^b  "jn^'  — ^  "'""T'^'*  "i"'  ti^ni  '^bT::^  birx 
nb-^nujn  '^bïî  ""^ni  ^T2  "3»  "jT^T  "^b  in  ib  -nWN  p  ntDNi  c^  û-^nitT:  vi;-'"î 
n"«:îN  bas  tîy-^n  ^b»r;  rr^n  13>  n^i-^i  nn:?;^  p  "^zj^^-^t  '^'^bN  irTN-^nN  nnsn 
'n  T^bN  N-^nrsb  inN  cisi  û-^'^a-i^bai  ^-is-^iri  '^bairt  nb  ■jn-^n  t^^t^n  ir:iï 
by  asn-^i  'ù;inb7:!i  ^a»  '-".b  ■^nb-'n  J-rns'ar;  n:?  N3fi  inyrr  "^b-^n  rr:)» 
nj'  Nn-iT  rî-is'wn  iDniN  in'us»^  û'^noo  riy^::  i»:;'  rr^uw  'n  np-^T  oiori 
ï-7i:nN  û-^DN  innia-^n  T^briii  t^t^  p;:5"^T  "^bTob  Nn'^T  rT^M'^isr;  ']b»rr  nrj'o 
ib  T^■'^  ^^73  "172J'  rîK)U5i  in:\33  imN  wQ-^'i  "n-^a  np-^T  rssb  "p^r:  np-^n 
ïiiitT  rî"5>3  ^îoibn  ^b  t^^n  -^dni  nna  n;'  i^t  -^b  in  'ibîob  n^it'^T  -ii^ibn 
■^b^arî  ■'iDb  Nn  ût'  iriNbi  inn^b  T'"j33>  bib  mi:n  ibitN  n^^n  ib  nnb  ^bar; 
y2^bn  ii-ino  rr^-in  û-')2i  'n  ^y  ûT^n^o  ^b72b  -i52ï«i  i^^ibn  ii-ins  ib  T5ïn 
rrnus  îr^n  n^^N'^J  -^^tin  ib  nttïîu:  n?:  ^b'?:^  ?7i<-iw  it^^i  .  rî-^n  pi  nu'^n  nsn 
Ss^T  IjS  brf  imx  û'^ii^i  ii^ib  v'^nr  b^bi  bMÀ  Tiiy  ib  nnb  T^'^^  in73 
b^n  iNi:"'  vd  bri  nnrm  nna^n  mn  br  ib  rnr.rî'jjb  in^D-i;::-!!  "niriN  n-'n 
ti'^:i"i:ûp7û  d-iû^NW  ûinni  i-ib:'  i-^atî-i  js^b  ^1531  bs'û  i^-^nsn  ib  yn-ci•^^  n^n^  t^d 
bD3  ni'>2U5  -^ri^n  ts-^uJîis  û:^'  mui  ■'"i  ûy  m::  ps'i  ûsn  i"-»  'in:'  ï^tJTa  ûp-'i 
ib  in-^1  '7NW  r;":î?2  nN  nnN  '^b):m  iTTi  ■'53  b:^!!^  bTii  nmi  iscn-i  riir;"!  y-iNi-s 
nb  "ib-i-^i  nniUN  nN  n:^^  r-i^CJ2^  ,  mn^T  t:513>  ib  in-^T  dnd  m;ntt  ïrttiN 
n^p  '^iiDb  ^-lb^i■1  ■i5\n"i  "^iT^'n  rr^'n  ûrt-inN  -^ribi^  n):N  -^5  ûr;n3N  ittWT  p 
f^tîn^ri  nN7D-i  ^b^^r:  nï«?a  "«îinNb  ri-^r!^  "nnsm  n^i3>:^n  nrjri  bs^o  nnx 
•isnN  C^mN)  in-^i  .  pn-i»  y-iN?3  ûxs^r^  m3n?:în  n2ipT  "^b^M  -^ssb  û-^n^iyr: 
t-i-^n  b:?  iri^o'^uî'^T  bins  n^ir  ib  in-^n  tz^'^'Z)^  m:n»  rra^  ttin  mi  'nb 
.  inT:::>b  "i"'b:s'  vi-^-û  û-'nnn?!  nî^bab  biD-^  Nb  Nir;  ^^  initiN 
n-inb  ^bi^T)  n-^nm:;:!  ûp  n-'r;  û-^To-^n  biD  ritaij'  rs-^r:  ï^tt  crjb  n-^ax  •'sni 
û-^-iî-in:!  1?:  yin  i-ibsn  muî3>b  "in-^n  "iT^b-"  T>T72bn  û^hns  û:^  ibo  nsssr; 
■^b-^  ^D  nriN"!  tnibNUJ  T^bt*  biNobn  mabbi  imN"ib  pm»  y-iN?3  izs'^is'nr! 
':»  :yi:;:i\a  ir»  tn-^bNJ'WUi"^  1"in  û'^nir^  l'^^  n-'s^n  rii^ii^u  ûibinïn  bn  m^nb 
ï-nnnN  m:?o  '5  n:?  173^  liToybn  "^btin  niNib  ^b-'  nn^T  ûT^ïn»  niy;a 
t-nt^ifinn  172  m;"i3UJn  rîu:^»"'  nriNi  3i:>n  isj  iui-i-«i  bsN-'T  in-^nb  3^  nriNT 
r:b"'bn7D  nriN  nsïp  n:'  ^bTûM  "^T^pD  -^n-i  bi'  n-ibN  Nn-^;:)  117373^1  172t  0^72^  I72i 
tnm  t3-^-iDD  t3^n">D:yn  Ti-ûj^n  rj^ritj  i-r^yt)  tn-^-iDon  b^  mniD-^  p  nn^T 
rtwy^  riTST  û-^-inN  n-'-ison  ûp-inyi-i  û-^-iciob  omN  p-^  dT^m  ïib-^ba  mnD^ 

•l:l\"^7;T  V-.N72  N3  tS-^SD  N1t351  pT  T^ssb  THN  ùTN  N3;::j  iy  '02^l2-''n  bD 
bnp-'T  T'jDb  Nn-'i  ■i73np7D73  3>D-^T  in3i3i  inTasm  ii>72TD  3>73U)  "^is  ■'îm^b  niN-ib 
1730  ïT'Tonî  '-1  pTlrt  ïî-^Nm  innj'bi  Ti3Db  ïTiiri  niD^  d-isri  nnon  i3T7N  imN 
*17:73  biNwb  riitn-i  "^aN  nriN  nb^t)  -^snN  ib  n72Ni  ib7aj'T  i^iin  I'^'^ds'  riNi 
■^sî^  pTïi  nb  -i72N  ï-Ti:-inu)  ï-i7q  bn  bNïï»  pT^r  im^b  ■'3T7N  nb  n73N 
Mb  131-11:733  •'nNs^  nT^!-!7ai  ^-^isb  nTobbn  ^m^nb  "^nssi  pn-i73  ynNTo  %-iN3 
■^3-nN  -ib  n73ï<i  "j-'bN  \-T'Nnt:  b733'3n  pmin  31-172  '7in''3  '■|733'  -i3-!b  ^-lb^:3"' 
o:D73ri  •^n3'7  -n3i*N'w)  iy  in73n  b3N  D"i73'^rî  5:2  ipnn  p  n73N3  nu372  'i 
imi:  -.-CN  bDiD  p  lar-^"!  ■l3^-nbN^::7^  bis^î  Nb73i  p  nriNn  û-'T'pcn  isb-'i 


DOCUMENTS  INÉDITS  179 

pT^  "imN  n»b"i:?b  Tjss'tt)  *73>  û-^-o  ■ab-i)  rscb  nT^bn  ûû  nnyï  ■'STîn 
p  nn^T  .£d'^-i^733  imx  inapii  b-ns  ni33  -^^tin  itt^utî  'n  ib  \:;7">i 
b'7:n  ']ibî-;  ^^b^r:  "^b-^T  i-^nN  in  '-i  b:^  mn  ly^'^u  tn  a-:;-!  p  ib  'rbis 
>ii!-;  û-'jipT  p  ■'D  in  nx  anïî  rr»:;»  'm  ttin»  nmi  rrî-in"!  r:»::n  t\CiV\ 
rr^^n  iu;i<  û-i\r-ii:r;  b:3^  m!-;N  niîi  -«^  nn-inN  '-i  rN  3^7N  inr^Ni  ib 
.  .  'nnDTn'^^3  N^tisr:  rjSTi  'n  m;3  T^inb  û-^'^ï  "^n'::  'sinx  npbi  "^bT^r; 
bins  "^bin  nbn  'a'b'p'n'n  n;ian  mnii  -lO^r  riîinN  crt-^nx  û^ib  ipii 
iDor:  -^siiN  'n':iy^  ^•^'l'zizn  imN  ■nnp'^T  ixn  n"i3  n7:i  i3tin  -^nwX  nn  'i 
rbj'  iw:;>i  r-îU3»  123-1  -^sTa  ï-imn  n»bir>  Q-^T'nbnrt  bD  tj^s'  pT  b-nr. 
•^auj  nN  "^iinN  npb  ^5  nn^i  .  a-'j^n  ^lîsn  tsT^ri^  ^a-'x  bi'  r:iy  ab  t^îjn 
rtnnN  û!ib  irr^-i  innn-^n  mi  b^^  n%-n53  \-iu:  ûiib  p2T  T^niî  TîT  'n  "^la 
■ncD  y-iNb  tsmwx  nb"::i  ï-T>a:^'\a  tzinsor;  npb  '^i  ninNi  .bn^  '-,'ûii'i 
bsbi  IN'-DSN  y-iNbi  ûNDbT  N^iT^-^bNi  r^N-iTîDSobN  ynxbi  TDii:  yn^bi 
•yn^n  T^nsD  iLDiaD-^i  û-^jin^T  izs^^Dn  û-^ud^n  -too  uii-vU  5'M':;-::  mirn^rr 
nîtipTo  T^bb3>»  irar;  Nb':  T^am  i^t^  Nb  ^ir  r;:5>n  1^3  ûrr^bN  iiû-^nriT 
ïT»:::^!  T::ii2  'n  lîwsb  -in'rr:  j>-':ir!a  13»  "irinns  Nb^  rb:>  tiniT  iN'^itVT  ûmn 
-1N3  d'^-in'îr:  bi  ûrra  ■ûist  Q-^myr:  T'.n  iwa  nN  ûu:t  nni*  nso  ûi^b 
^^"j-^y  -l'^in  ûv^îsxb  -^i!-;  ûib-inon  i^iîi  tbiiN  i-^nt!  npDDri  bm  au'^r: 
.  y-iï«r:  b32  n:!^'::  n-i5N  ans  in^T  i3''a"Lj-'  Nbi  ûrib  û'^iTwS  iNn^  Nbi  nrrb 
JT^na  iimaii  n3"^nm  nm::ri  m5-^5:5>»  mx  'iU-isb  iT^a  ^-^b^5■'  Nb  "^sni 
l-r-  Nb  r:ttnNi-r  b3>  ^n  ^"1573  i:nno  -^^^^  b^  -^^  i^::>  û'''nr!'«bT  û-^bN^'^o-^b 
bns  ûsn  ^\Nrn  ai-isism  û-'-iit'an  D'unir;  bN-iïi"^  133  bi»  mb:«  owb 
ri^ttn  û-^nitT^n  mui-iitti  dt^ws  !-:"ii:'  niïii  û-^ribN  nt^t  "iw^  u)"^n  imsi 
ini  !-i^)2  "i53-ib  mitiNt-:  bri'D  ixa^  bN-iiDi  l'iD'N^o  ûnitttn  t-^-i'i  T^r:i 
b^b  n-nn  nttb?3  Nim  û-^\i5bu3T  p"pi  û-iQbN  '3  ûiip  û^u  ûmrr  Q-^uj^Nrit) 
nmn  n"i7:bb  bi2£i-i^;  d^  tn-^iînïi  bsb  bins  pi3iD  !t>u:^t  3u:n  nm^? 
^uinbb  n^m  bisixb  ûnb  i52T^3  ût'  -i3i  ûnb  i5nii  p'isicri  '5'^:  i05-isn''\y 
mnon  ninbbT  tiJiabbT  biDxb  d-si;  d^sm  dm:x]iN  in'^srr  d-^oiNn  mm 
b33T  d-init»  y-is^n  d-'DbN  rrnujr  nitai  n^ïs  b^a  pisnsb  rr^riw  pTj^rî 
inn  tiTiïî'a  d"^bN;'X3\i:"'  yai  ti'^-ir;'^  yn  ymî^T  m^^n  "jn"^  innu^n  ;n30 
n-iu5::>T  in3"^m  inttnn  miT^T  d"'a"'r7  bD  ii-Qiy^  pi  ond  n:in!?:7D  d-'jLûp 

.  d'^nsD  r;7D3i  ibis-^  Nb  inpiiri 
pT  vny  d:»  ?:]Dt<"ii  n^^-^n  bn:  "'bn  n^»  isn-:  nbn  '3'0'p'n'n  nr^^T 
b:DT  ti-'"n!T^r!  bri  bn:^  ni33)  nb  T:::>-'n  &"^-i2;»n  imN  iiap-^i  d^w  rntiîT 
■^b  yN  nt)-'aw3  ^-orjiD  mn^m  iso^ir;  mn^^T  d'>a  d'^Nit'^irî  d"'bNi'WïU"'n 
tin-i''  bNïn  imb^3N  •i»"'  bD  ']b»?i  ib  !ni2i3>o  ni^Dn  3i-i)3T  nsob  nb-:^"^ 

.mbuJT  d"iDU)    .'j'QN  b&<-iw  brj  bin  is'^bj' 

«  Il  y  avait  en  Espagne  un  homme  nommé  Maïmon.  Cet  homme 
était  très  pieux  et  marchait  dans  les  voies  de  TEternel  ;  il  s'occupait 
de  la  loi  divine  jour  et  nuit.  Il  avait  deux  fils,  dont  Tun  s'appelait 

'  Le  nom  de  l'amille  manque  daus  le  ms. 


180  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Moïse  et  l'autre  David.  Ayant  appris  que  dans  la  ville  de  Fez 
dans  le  Magreb,  existait  un  homme  savant  s'occupant  d'études 
sacrées,  versé  dans  toutes  les  sciences  et  qui  était  une  sommité 
dans  la  philosophie  spéculative,  il  alla,  avec  toute  sa  famille,  trou- 
ver le  grand  Gaûn  R,  Yehoudah  ha-Gohen*,de  sainte  mémoire. 
R.  Moïse  fils  de  Maïmon  étudia  chez  ce  Gaôn,  durant  toute  sa  vie, 
la  loi  divine  qu'il  répandait  en  Israël.  A  cette  époque  survint  le 
tyran  Mahmud  -  qui  tua  le  grand  Gaôn  au  milieu  de  souffrances 
atroces,  parce  qu'il  avait  refusé  de  se  convertir.  Voyant  qu'il  ne 
voulait  pas  consentir  à  changer  de  religion,  il  le  fit  périr  de  mort 
violente.  (Que  Dieu  nous  en  préserve,  nous  et  nos  frères  en  Is- 
raël !  )  Lorsque  R.  Maïmon  apprit  cette  nouvelle  fatale,  il  prit  ses 
deux  fils,  R.  Moïse  et  R.  David  son  frère,  et  s'enfuit  nuitamment. 
Ils  marchèrent  toute  la  nuit,  se  tenant  cachés  pendant  le  jour, 
jusqu'à  ce  qu'ils  arrivèrent  dans  la  ville  de  Ceuta,  où  ils  gagnè- 
rent un  vaisseau  et  se  rendirent  par  Alexandrie  à  Jérusalem.  Là 
mourut  R.  Maïmon,  et  il  fut  enterré  par  ses  fils.  R.  Moïse  retourna 
en  Egypte  et  devint  plus  savant  que  tous  ses  contemporains.  Sa 
grande  renommée  parvint  aux  oreilles  du  roi  d'Egypte,  qui  por- 
tait le  nom  de  Selah  ed-Din.  Moïse  fut  introduit  chez  le  roi,  qui  le 
reçut  favorablement  et  l'éleva  au-dessus  des  autres  princes.  Il  ré- 
pandit l'étude  de  la  loi  en  Israël,  ses  ouvrages  et  ses  lettres  arri- 
vèrent en  tout  temps  dans  le  Magreb,  et  il  s'informait  de  leur  état 
de  paix. 

»  Moi,  le  traducteur  de  cette  lettre,  habitant  de  Tolède  et  natif 
d'Espagne,  j'ai  fui  aussi  ce  tyran  à  Tolède  en  l'an  4946  A.  M.  (= 
1186  de  l'ère  vulgaire),  le  douze  du  mois  de  Tammouz  et  j'ai  sé- 
journé en  Espagne,  pour  des  affaires,  environ  quatorze  mois.  De  là 
je  suis  parti  dans  la  ville  de  Fez  pour  le  commerce,  comme  tant 
d'autres.  J'y  demeurai  dans  un  hôtel  en  compagnie  de  Juifs  pen- 
dant quatre  mois.  Le  jour  du  Sabbath,  les  notables  de  la  commu- 
nauté me  dirent  :  «  Il  y  a  ici  un  vieillard  très  savant,  mais  qui 
est  malade,  nous  allons  lui  rendre  visite.  »  Je  les  accompagnai 
chez  ce  malade  qui  était  un  homme  savant  et  très  pieux.  Nous 
nous  entretînmes  avec  lui  des  exactions  du  gouvernement  et  de 
notre  état  de  servitude.  Ce  vieillard  nous  apprit  que  son  nom 
était  R.  Isaac,  fils  de  Nathan  et  ajouta  :  «  Mes  frères,  ne  savez- 
vous  pas  que  j'ai  reçu  une  lettre  d'Egypte  du  Gaôn  R.   Moïse 

•  Ce  Gaon  est  probablement  le  R.  Jchoudah  ha-Kohcn  ibn  Soussan  que  Saadyab 
ibn  Danàn  mentionne  comme  ayant  été  martyr.  Voy.  Graetz,  Qesck,  der  Juden,  VI, 
p.  172. 

"  C'est  probablement  Mohammed  Almoumen.  Peut-être  faut-il  même  lire  ■nn'^tî  = 
Toumart. 


DOCUMENTS  INÉDITS  181 

ben  Maïmon,  de  sainte  mémoire  ?  »  Il  nous  montra  cette  lettre. 

»  Voici  le  contenu  de  la  lettre  venue  d'Egypte  du  grand  Gaôn 
R.  Moïse  ;  elle  est  écrite  en  arabe  et  traduite  en  hébreu. 

»  A  mes  frères  et  amis,  au  peuple  saint  de  la  communauté  sainte 
de  Fez.  Moi,  votre  frère,  l'humble  Moïse  fils  de  Maïmon,  je  vous 
annonce  la  bonne  nouvelle  que  Dieu  va  envoyer  bientôt  le  Messie 
et  nous  consoler  avec  la  ville  de  Zion.  Sachez,  mes  amis,  que  j'ai 
appris  ces  bonnes  nouvelles  par  des  commerçants  qui  sont  arrivés 
de  Bagdad  en  Egypte  et  à  Jérusalem.  Ils  rapportent  que  le  roi  des 
Juifs  si  longtemps  attendu  a  enfin  apparu  à  Ispahan.  Le  même 
fait  est  rapporté  par  les  commerçants  qui  viennent  de  St-Jean- 
d'Acre,  de  Damas  et  d'autres  villes.  Mais  moi,  Moïse,  je  ne  voulais 
pas  croire,  me  disant  que  ces  commerçants  se  raillaient  de  nous  ; 
cependant  il  me  semblait  étrange  d'entendre  le  même  rapport  fait 
par  tant  de  personnes  venant  de  différents  endroits,  et  le  doute 
surgit  dans  mon  cœur.  Enfin  deux  riches  commerçants  de  Damas, 
qui  voyageaient  pour  leurs  affaires  à  Bagdad  et  jusqu'à  la  Mecque 
oîi  le  tombeau  de  Mahomet  se  trouve,  arrivèrent  au  Caire  et 
vinrent  me  voir  pour  me  saluer  ;  pendant  mon  entretien  avec 
eux  sur  l'état  de  nos  frères  en  Babylonie  et  dans  d'autres  contrées 
éloignées,  je  leur  dis  :  «  Vous  êtes  mes  amis,  répondez  à  une  ques- 
tion que  je  vous  adresse,  sans  me  cacher  la  vérité.  »  Ils  me  pro- 
mirent de  me  dire  toute  la  vérité.  «  Ce  que  j'ai  appris  par  les  com- 
merçants arabes  est-il  vrai?  »  leur  demandai-je.  Ils  répondirent: 
«^Oui,  en  effet  ;  nous  étions  au  caravansérail  de  Bagdad  et  cau- 
sions de  différentes  choses,  assis  devant  la  porte,  quand  nous 
vîmes  passer  un  Juif.  Celui-ci  fut  arrêté  par  deux  vauriens  qui 
se  moquèrent  de  lui,  et  nous-mêmes  nous  prîmes  part  à  leurs  rail- 
leries, quand  deux  commerçants  du  Yémen  ',  s'adressant  à  ces  vau- 
riens :  «  Fous  que  vous  êtes,  dirent-ils,  ne  craignez-vous  pas  Dieu 
et  n'avez-vous  pas  honte  devant  les  hommes?  Sachez  que  ce  Juif 
que  vous  insultez.  Dieu  a  levé  sa  corne  et  fait  briller  son  étoile.  » 
En  effet  le  Messie  que  les  Juifs  attendaient  est  en  ce  moment  à 
Ispahan.  Beaucoup  de  tribus  se  sont  jointes  à  lui,  et  parmi  elles 
deux  grandes  familles  des  Arabes,  et  tout  le  monde  croit  en  lui. 
Et  si  on  ne  veut  pas  nous  croire,  me  dirent  ces  commerçants 
arabes,  voici  deux  commerçants  riches  de  Bagdad  qui  te  répéte- 
ront la  même  chose  ;  tu  croiras  alors.  J'attendis  pendant  quatre 
jours  l'arrivée  de  ces  commerçants  juifs,  enfin  ils  vinrent,  et,  sur 


'  Littéralement  «  fie  Schéba  et  de  Séba  »  (Psaumes,  lxxii,  lO).  Séba  est  plutôt 
l'ElLiopie  (voir  le  Leiicoadc  Gescaias  s.  v).  Dans  uotre  lettre,  ou  ne  veut  parler  que 
du  Yémen. 

T.  IV.  13 


182  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ma  question  si  le  rapport  des  commerçants  était  vrai,  ils  me 
répondirent  :  «  En  effet  Dieu  a  vu  notre  misère  et  il  nous  délivrera 
comme  il  a  fait  pour  nos  ancêtres.  »  Ils  ajoutèrent  qu'à  Bagdad  ils 
avaient  vu  des  commerçants  juifs  qui  disaient  qu'à  Ispahan  un 
homme  du  nom  d'Abi-Saïd  ben  Daûdi  *  s'était  levé,  sept  ans  aupa- 
ravant, se  disant  le  chef  de  l'armée  du  Messie,  et  que  beaucoup  de 
tribus  s'étaient  rangées  autour  de  lui  et  parmi  elles  des  Arabes. 
Voyant  cette  multitude  se  joindre  à  lui,  il  leur  avait  dit  :  «  Le 
temps  de  la  rédemption  n'est  pas  encore  venu  >^,  et  il  s'était  tenu 
caché  dans  une  caverne  pendant  sept  ans.  Ces  Juifs  me  dirent 
encore  que,  cette  année,  une  plus  grande  multitude  se  groupe  au- 
tour de  lui.  Ils  rapportèrent  avoir  entendu  d'autres  Juifs  qui  pré- 
tendent avoir  vu  un  nuage  se  lever  sur  la  tête  de  ce  Abi-Said 
pendant  qu'il  faisait  la  prière,  nuage  qui  atteignit  le  ciel.  Les 
anciens  des  Juifs  lui  dirent  :  «  Maître,  notre  roi  et  Messie  de 
Dieu,  nous  vivons  en  paix  et  nos  communautés  sont  florissantes, 
tandis  que  nos  frères  sont  en  captivité.  Cela  ne  doit  pas  durer  , 
sois  notre  commandant  et  nous  irons  les  délivrer  du  joug  des 
nations.  »  Sur  quoi  Abi-Said  répondit:  «  Non,  mes  frères,  l'époque 
de  la  rédemption  n'est  pas  encore  venue  et  je  n'ai  pour  mission 
que  de  rassurer  les  cœurs  oppressés  de  nos  frères  lointains,  afin 
qu'ils  supportent  encore  pendant  quelque  temps  l'oppression.  J'ai 
l'ordre  de  ne  pas  révéler  le  moment  de  la  rédemption,  mais  il  est 
proche.  » 

»  Moi,  votre  frère  Mo'ise,  lorsque  j'entendis  ces  mots  de  la  bou- 
che des  Juifs,  mon  âme  se  tranquillisa  et  je  fus  rempli  de  joie.  Et 
dans  la  nuit,  comme  le  sommeil  ne  voulait  pas  venir,  j'étudiai  le 
Talmud  et  j'y  trouvai  dix-huit  questions  qui  ne  peuvent  être  réso- 
lues que  par  le  Messie-.  Les  ayant  mises  par  écrit,  j'appelai  mon 
frère  David  et  lui  demandai  d'aller  les  soumettre  à  Abi-Saïd  à  Ispa- 
han  ;  je  le  munis  d'argent  et  de  lettres  de  recommandation  pour 
les  princes  et  les  pachas.  Il  partit  pour  Ispahan  où  il  l'psta  dix  jours, 
puis  il  revint  chez  moi  après  une  absence  de  dix-huit  mois.  Si  je 
voulais  être  prolixe,  je  vous  écrirais  ce  qu'il  m'a  rapporté,  mais  je 
ne  vous  enverrai  que  ce  qui  vous  concerne  principalement.  C'est 
que  mou  frère  a  vu  Abi-Saïd  par  qui  les  Juifs  jurent  en  disant  : 
«  Vive  notre  roi,  le  Messie  de  Dieu.  »  Mon  frère  m'apporta  deux 
lettres  de  lui,  dans  lesquelles  il  répond  à  quinze  de  mes  questions, 
tandis  que  pour  les  trois  autres,  il  dit  que  la  solution  ne  lui  en  a 
pas  été  donnée.  Moi-même,  votre  frère  Mo'ise,  j'ai   pu  expliquer 

'  C'est  le  nom  arabe  de  David  Alroï.  Cf    Graelz.  o;>.  cit.,  p.  426. 
'  Celle  iratlilion  est  inconnue  au  Taliuud  et  au  Midrasuii. 


nOCUMENTS  INEDITS  183 

quelques-unes  de  ces  questions,  indépendamment  de  la  réponse 
d'Abi-Saïd,  tandis  que  celui-ci  a  fait  davantage  pour  l'explica- 
tion d'autres  questions.  Je  fais  le  raisonnement  suivant  :  Si  cet 
homme  avait  répondu  aux  trois  autres  questions,  je  n'aurais  pas 
cru  en  lui,  car  nos  Rabbins  en  ont  laissé  la  solution  au  Messie, 
mais  puisqu'il  a  dit  lui-même  qu'il  faut  attendre  le  Messie  pour 
les  réponses,  je  vois  qu'il  est  dans  le  vrai.  Et  comme  les  com- 
munautés d'Ispahan  m'ont  répondu,  dans  la  lettre  que  m'a  remise 
mon  frère,  que  beaucoup  de  tribus  se  rangent  autour  de  lui,  et 
parmi  elles  celles  de  Kédar  (Arabes)  et  de  Nébayoth  (Nabatéens), 
je  me  suis  réjoui,  en  me  disant  :  «  Voilà  ce  que  le  prophète  a 
prédit  :  Toutes  les  brebis  de  Kédar  seront  assemblées  vers  toi  ;  les 
moutons  de  Nébaj'oth  seront  employés  à  ton  service  »  (Isaïe,  lx,  "7). 
Abi-Saïd  m'écrivit  en  outre,  dans  la  lettre  qu'il  donna  à  mon  frère, 
que  durant  trois  ans  encore  je  ne  sortirai  pas  de  la  caverne, 
car  le  temps  n'est  pas  encore  arrivé  que  je  la  quitte;  c'est  le  qua- 
torze du  mois  de  marheschwan  que  je  sortirai  et  mon  étoile  sera 
bonne  alors. 

w  Je  vous  raconterai  encore  ce  qui  s'est  passé  dans  ce  pays.  Il  y 
a  un  roi  au  sud  de  l'Egypte,  descendant  des  flls  de  Togarma  et 
de  Yaphet,  qui  est  musulman.  Sa  capitale  s'appelle  Aden,  et  12,000 
Israélites  demeurent  dans  son  royaume.  Leur  rabbin  s'appelle 
Menahem,  c'est  un  grand  homme,  savant  et  craignant  Lieu.  Un 
jour  le  roi  décréta  que  les  Juifs  devaient  se  convertir  ou  mourir. 
Menahem  demanda  un  délai  de  sept  jours  ;  mais  ils  se  rachetèrent 
avec  une  somme  de  quatorze  talents  d'argent.  L'année  suivante,  le 
roi  demanda  la  même  somme  en  renouvelant  la  même  menace,  et 
les  Juifs  se  dépouillèrent  entièrement  pour  satisfaire  à  l'.exigence 
du  roi.  La  troisième  année,  le  roi  tua  un  grand  nombre  d'Israé- 
lites, d'autres  purent  s'enfuir,  et  les  plus  i)auvres  se  converti- 
rent. Les  synagogues  ainsi  que  les  écoles  furent  détruites.  R.  Me- 
nahem s'enfuit,  portant  un  sac  sur  les  reins,  au  sommet  d'une 
montagne,  dans  un  autre  royaume.  Après  quinze  ou  dix-huit  mois, 
le  roi  apprit  où  R.  Menahem  se  réfugiait,  il  en  fut  fort  effrayé.  Il 
lui  manda  de  revenir  avec  confiance,  disant:  «  Je  sais  que  j'ai  mal 
agi  dans  cette  affaire,  maintenant  tâche  de  rassembler  tes  frères 
et  rebâtissez  les  synagogues  et  les  écoles.  »  Il  leur  donna  vingt- 
cinq  talents  d'or  pour  la  reconstruction  qu'ils  acconiphrent  en 
effet.  Il  en  revint  4000;  ayant  appris  ce  qui  se  passait,  les  anciens 
de  la  communauté  se  rendirent  chez  R.  Menahem,  et  lui  dirent  : 
«  Jusqu'à  quand  cet  homme  sera-t-il  pour  nous  une  cause  de  ruine 
(Exod.,  X,  7)  ?  Allons  à  Lspahau.»  —  Menahem  leur  réj)ondit  :  «  Non 
mes  frères,  le  moment  de  la  (h'iivrance  n'est  pas  encore  arrivt".  o 


184  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

»  Comme  ils  se  récriaient,  Menahem  leur  dit  :  «  Ne  vous  mettez 
pas  en  mouvement,  mais  donnez-moi  quelque  argent,  et  J'irai  voir  ; 
si  la  chose  est  vraie,  je  vous  ferai  venir.  »  Il  partit  donc  avec 
quinze  des  plus  notables  de  la  communauté  ;  ils  n'étaient  plus  que 
douze  quand  ils  arrivèrent,  après  quinze  mois  de  marche,  à  Ispahan, 
les  trois  autres  étaient  morts  de  soif,  car  le  chemin  était  long  et  il 
fallait  traverser  des  déserts.  Ils  virent  cet  homme  (Abi-Saïd),  et 
R.  Menahem  écrivit  à  la  communauté  que  le  fait  était  vrai  ;  les 
plus  aisés  quittèrent  alors  la  communauté  secrètement*. 

»  Et  moi,  Moïse,  fils  de  Maïmon,  je  me  tins  tranquille  après  avoir 
appris  ce  rapport.  Le  secrétaire  du  roi  vint  me  trouver  et  me  dit  : 
«  Le  roi  mande  ce  qui  suit  :  Tu  seras  le  trésorier  et  tu  m'enverras 
l'argent  »  ;  car  le  roi  Selah  ed-Din  -  se  préparait  pour  une  guerre. 
Le  secrétaire,  qui  m'apportait  la  lettre  du  roi,  m'apprit  que  le  roi, 
se  tenant  debout,  avait  annoncé  que  parmi  les  chrétiens  qui  ve- 
naient de  tous  côtés,  du  Sud  et  de  l'Ouest,  pour  le  combattre  et 
s'emparer  de  Jérusalem  et  du  sanctuaire.  Dieu  avait  fait  entrer 
l'esprit  de  vertige  (Isaïe,  xix,  14),  aussi  tous  mourraient-ils,  soit 
par  l'épée,  soit  par  la  famine,  soit  la  peste.  «  Et  moi,  continua  le 
roi,  je  n'ai  pas  non  plus  le  droit  de  régner  sur  le  royaume  de  Dieu, 
et  je  vois  que  le  roi  des  Juifs  viendra  bientôt  pour  reprendre  ces 
provinces  de  ma  main  et  de  la  leur  ;  mais  ma  destinée  veut  que  le 
roi  des  Juifs  reprenne  de  ma  main  Jérusalem  paisiblement  et  non 
par  la  guerre,  et  ainsi  peut-être  truuverai-je  grâce  à  ses  yeux.  » 

»  Moi  qui  écris  cette  lettre,  j'ai  vu  l'original  autographe  de  R. 
Moïse,  qui  l'a  envoyé  à  la  communauté  de  Fez;  et  je  l'ai  traduit 
de  l'arabe  en  hébrea.  En  arrivant  à  Rome,  j'ai  raconté  ce  récit  à 
R.  Léon,  il  s'en  est  réjoui  et  m'a  prié  de  le  mettre  par  écrit. 

»  Quand  j'eus  appris  par  la  lettre  de  mon  maître,  R.  Moïse,  qu'il 
était  encore  en  vie  au  Caire,  je  me  réjouis  et  me  jurai  que  je  n'au- 
rais pas  de  repos  avant  de  l'avoir  vu.  Je  me  mis  en  marche  et 
voyageai  pendant  neuf  mois  pour  me  rendre  chez  lui  au  Caire.  Je 
ne  réussis  à  le  trouver  qu'après  quinze  jours  d'informations,  et  je 
le  vis  enfin  dans  une  caverne.  Il  me  reconnut  et  fut  heureux  de 
me  voir.  Je  lui  dis  :  «  Me  voici  à  ton  service,  jusqu'à  ce  que  Dieu 
ait  pitié  de  toi.  »  Je  restai  donc  avec  lui  un  an,  quand  il  fit  un 


'  Voir  sur  cette  conversion  forcée  des  communautés  du  Yémen,  Graetz,  GescK.  der 
Juden^  VI,  p.  306.  Selon  notre  document,  la  lettre  de  Maïmoiiide  adressée  aux  Juils 
du  Yémen  se  rapporterait  au  mouvement  messiani(jiic  qui  se  ]iroduisit  à  Ispahan  ot 
non  à  celui  d'un  autre  Messie  (jui  s'était  montré  dans  le  Yémeu,  comme  M.  Graetz 
le  croit. 

*  C'est  le  roi  Saladin,  qui  avait  repris  Jérusalem  des  mains  des  chrétiens,  et  qui 
permit  aux  Juils  de  s'établir  dans  la  ville  sainte.  Cf.  Graetz,  op.  cit.,  p.  305. 


DOCUMENTS  INEDITS  185 

rêve,  dans  lequel  il  se  voyait  près  d'un  grand  arbre  portant  des 
branches  énormes.  Il  appela  son  domestique  et  lui  dit  de  se 
faire  interpréter  ce  rêve,  comme  si  c'était  lui  qui  avait  eu  la 
vision.  Il  alla  trouver  l'homme  qui  s'entendait  à  interpréter  les 
songes,  mais  celui-ci  lui  demanda  un  délai  d'un  jour,  afin  de  pou- 
voir consulter  les  étoiles.  Le  lendemain,  il  dit  au  domestique  :  «  Ce 
n'est  pas  toi  qui  as  eu  la  vision,  mais  Moïse  qui  se  tient  caché  dans 
la  caverne.  Sache  donc  que  le  rêve  prédit  de  bonnes  choses. 
L'arbre  représente  une  grande  place  que  le  roi  donnera  à  Moïse,  et 
les  branches  représentent  les  serviteurs  du  roi,  qui,  voulant  lui 
faire  du  mal,  diront  malgré  eux  du  bien  de  lui  et  seront  utiles  à 
Moïse  de  toutes  leurs  forces.  C'est  le  Dieu  miséricordieux  qui  le 
veut,  afin  que  Moïse  règne  sur  eux.  »  Celui-ci,  ayant  appris  de  la 
bouche  du  domestique  ce  qui  s'était  passé,  se  fâcha,  car  il  se 
dit  :  «  Si  le  roi  a  connaissance  de  cette  interprétation,  il  me 
fera  tuer.  »  Aussi  Moïse  sortit  de  la  caverne,  et  s'enfuit  dans  la 
montagne,  où  il  resta  pendant  quinze  mois,  jusqu'à  ce  que  ses 
prières  fussent  accueillies  de  Dieu. 

»  Après  un  certain  temps,  le  roi  fit  un  rêve  qui  le  rendit  inquiet. 
Il  fit  appeler  tous  les  savants  et  tous  les  mages  d'Egypte  pour  en 
savoir  l'interprétation,  mais  ce  fut  en  vain,  personne  ne  savait  ce 
que  le  rêve  signifiait.  Enfin,  Dieu  se  révéla  au  roi  dans  un  songe 
et  lui  dit  :  «  Ce  Moïse  que  tu  as  rejeté  sans  raison  saura  inter- 
préter ton  rêve.  »  Le  roi  envoya  des  estafettes  dans  tout  le  royaume 
pour  chercher  Moïse  ;  ceux-ci  publièrent  que  le  roi  donnerait  une 
récompense  à  celui  qui  le  trouverait.  La  nouvelle  parvint  jusqu'aux 
oreilles  de  Moïse  et  il  eut  peur  de  se  montrer,  croyant  que  c'était 
un  piège  qu'on  lui  tendait.  Enfin  Dieu  lui  apparut  dans  un  songe 
et  lui  dit  :  «  11  est  temps  que  tu  sortes  de  la  caverne,  car  Dieu  a 
entendu  ta  voix.  »  Moïse  se  réveilla  avec  joie  et  dit  à  son  domes- 
tique :  «  Va  au  palais  pour  savoir  si  la  chose  est  vraie,  car  les  trois 
ans  annoncés  par  notre  maître,  le  messager  du  Messie,  touchent  à 
leur  fin.  » 

»  Le  domestique  revint  et  dit  à  R.  Moïse  ce  qu'il  avait  appris  des 
officiers  du  palais.  Moïse  dit  au  domestique  :  «  Va  chez  le  roi  et 
propose-lui  de  m'amener,  moyennant  une  r('Compense  de  5000  de- 
niers d'Egypte,  et,  s'il  consent,  demande  un  délai  d'un  jour.  »  Le 
serviteur  fit  comme  son  maître  le  lui  avait  ordonné.  Le  roi  lui 
donna  l'argent,  ainsi  que  de  beaux  vêtements  et  un  cheval  afin  d'a- 
mener Moïse.  Le  domestique  arriva  à  la  caverne,  revêtit  Moïse  de 
l'habit  que  le  roi  lui  avait  donné  et  le  fit  monter  sur  le  cheval. 
R.  Moïse  se  munit  des  sept  livres  qu'il  avait  composés  pendant 
son  séjour  dans  la  caverne,  et  se  rendit  au  palais  du  roi.  A  son  ar- 


186  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

rivée,  il  se  prosterna  devant  le  roi  qui  se  leva,  le  prit  par  les  mains, 
le  fit  asseoir  devant  lui,  en  montrant  sa  grande  joie,  et  le  pria  d'in- 
terpréter son  songe.  Moïse  demanda  un  délai  d'un  jour,  ce  qui  lui 
fut  accordé.  Le  roi  le  fit  loger  dans  son  palais  et  ordonna  à  ses  ser- 
viteurs d'être  à  sa  disposition.  Le  lendemain,  Moïse  donna  au  roi 
l'interprétation  de  son  rêve,  en  ajoutant  :  «  Dans  huit  jours,  tu  ver- 
ras l'eflFet  de  la  vérité  de  mon  interprétation.  »  Et  il  en  fut  ainsi. 
Le  roi,  après  avoir  vu  que  tout  ce  que  Moïse  disait  se  réalisait,  le 
combla,  dans  sa  joie,  de  grandes  richesses  et  le  rétablit  à  sa  place 
comme  trésorier  et  comme  second  du  palais;  il  lui  jura  parle  pro- 
phète Mahomet  que  jamais  il  n'écouterait  plus  les  calomniateurs 
qui  diraient  du  mal  de  Moïse.  Aussi  la  réputation  de  Moïse  comme 
savant  et  comme  médecin  s'accrut-elle  journellement,  le  roi 
l'aimait  beaucoup  et  lui  donna  comme  femme  une  fille  de  Fez. 
Celle-ci  mit  au  jour  un  fils  qu'il  nomma  Abraham,  car  il  dit  :  «  Le 
Dieu  d'Abraham  est  venu  à  mon  secours.  »  Il  m'est  impossible 
de  donner  un  aperçu  des  honneurs  et  des  richesses  que  le  roi  ac- 
^ corda  à  Moïse,  de  l'estime  que  toas  les  officiers  lui  montraient,  et 
des  cadeaux  qu'il  reçut  de  l'étranger.  Mon  maître  donna  comme 
femme  à  son  frère  David  une  habitante  du  Caire,  il  le  combla  de 
richesses  et  le  nomma  son  trésorier,  car  Moïse  ne  pouvait  pas  suf- 
fire à  toutes  les  affaires  que  le  roi  lui  avait  confiées. 

w  Je  vais  vous  raconter  maintenant  comment  R.  Moïse  menait 
ses  occupations.  Tous  les  matins,  il  se  rendait  à  la  synagogue  pour 
faire  la  prière  avec  deux  cents  élèves  qui  demeuraient  dans  sa 
maison,  outre  les  étrangers  de  tous  les  pays  qui  venaient  le  voir 
l)Our  s'instruire.  Il  allait  visiter  ensuite  les  malades  juifs  et  mu- 
sulmans. A  neuf  heures,  il  se  rendait  chez  le  roi,  pour  rester  avec 
lui  pendant  trois  heures.  Puis,  il  prenait  son  repas  et  dormait  jus- 
qu'au soir,  ensuite  il  s'occupait  des  comptes,  en  qualité  de  trésorier 
de  l'Etat,  jusqu'à  la  tombée  de  la  nuit.  Pendant  la  huit  il  composait 
ses  livres,  qui  sont  au  nombre  de  vingt-cinq.  Le  lendemain,  il 
donnait  aux  scribes  tout  ce  qu'il  avait  écrit  pendant  la  nuit  pour 
le  copier.  Telles  étaient  régulièrement  ses  occupations.  Un  jour, 
il  arriva  chez  lui  de  Damiette  un  vieillard  très  estiiré,  du  nom  de 
Néhémie.  R.  Moïse  le  reçut  d'une  manière  très  affable  et  ordonna 
de  lui  rendre  tous  les  honneurs  possibles.  Ce  vieillard  demanda  la 
permission  de  lui  adresser  une  question,  ce  que  Moïse  lui  accorda 
malgré  ses  nombreuses  occupations.  Ce  vieillard  resta  cependant 
avec  R.  Moïse  pendant  trois  ans,  pour  suivre  ses  cours.  Il  mourut 
au  Caire  et  y  fut  enseveli  avec  grand  honneur.  Notre  maître  reçut 
un  autre  fils  qu'il  appela  David  ;  cet  onlant  prospéra  et  devint  plus 
savant  que  sou  frère  Abraham.  R.  Moïse  aimait  David,  car  il  était 


DOCUMENTS  INEDITS  187 

reniant  de  sa  vieillesse,  tandis  que  sa  femme  préférait  Abraham, 
car  celui-ci  était  aimé  de  toute  la  maison  royale.  Tous  les  deux 
se  marièrent  avec  les  filles  de  R.  Joseph  le  prince,  de  la  famille 
[  ].  Leur  père  leur  donna  de  grandes  richesses.  En 

l'année  4939  A.  M.  (=  1179  de  l'ère  vulgaire),  David,  frère  démon 
maître,  devint  malade  et  il  mourut  le  11  du  mois  d'Ab.  Il  fut 
enseveli  au  Caire  ;  mon  maître  ainsi  que  tous  ses  élèves  pro- 
noncèrent des  oraisons  funèbres  et  firent  un  deuil  tel  qu'on  n'en 
avait  pas  fait  depuis  cinq  ans.  Mon  maître  donna  ses  deux  filles 
en  mariage  aux  deux  fils  de  R.  David  et  les  dota  amplement.  Il 
envoya  ensuite  des  copies  de  ses  livres  en  Espagne,  en  France,  à 
Alexandrie,  en  Allemagne,  à  Fez,  à  Ispahan,  et  en  général  dans 
tous  les  pays  où  il  y  avait  des  rabbins.  Aussi  ses  œuvres  se  répan- 
dirent-elles partout,  mais  bientôt  des  rabbins  les  regardèrent  d'un 
mauvais  œil,  car  ils  ne  connaissaient  pas  ses  voies  et  ne  compre- 
naient pas  ses  œuvres,  ayant  peu  d'intelligence,  et  en  somme  ils 
le  calomnièrent'.  R.  Moïse,  à  cette  nouvelle,  composa  un  ouvrage 
nommé  «  La  lumière  des  aveugles-  »,  dans  lequel  il  explique  clai- 
rement ses  idées  et  donne  la  solution  des  questions  douteuses, 
en  disant  :  «  C'est  pour  ceux  qui  ont  des  yeux  pour  ne  pas  voir, 
et  des  oreilles  pour  ne  pas  entendre.  »  Il  écrivit  aussi  des  lettres 
qu'il  expédia  dans  tous  les  pays. 

»  Je  ne  peux  dire  en  partie  même  les  bienfaits  dont  R.  Moïse 
a  comblé  tout  le  monde,  Juifs  et  Musulmans;  en  effet  de  son  vivant 
aucun  Juif  au  Caire  ainsi  que  dans  les  villages  de  l'Egypte  n'eut 
à  souffrir  de  persécution.  Cet  homme  fut  très  savant,  droit  et 
craignant  Dieu.  Il  fit  bâtir  des  synagogues  et  des  écoles,  et  les 
Juifs  étrangers  qui  venaient  voir  R.  Moïse  étaient  plus  nombreux 
que  ceux  qui  habitaient  l'Egypte  avant  son  arrivée,  lesquels 
étaient  au  nombre  de  2230.  Il  enseignait  pour  tout  le  monde  et, 
pour  que  les  élèves  de  passage  pussent  travailler  sans  souci  pour 
leur  vie  matérielle,  il  fit  construire  un  hôtel  oîi  ils  recevaient  tout 
le  nécessaire;  il  dota  cet  hôtel  d'une  annuité  de  10,000  deniers 
égyptiens.  11  distribuait  toutes  les  semaines  aux  pauvres  de  la  ville 
et  des  villages,  sans  distinction  de  religion,  deux  cents  petits  de- 
niers en  monnaie  courante  de  Fez.  Telle  lut  la  conduite  d(i  toute 
sa  vie;  des  volumes  ne  pourraient  pas  contenir  les  récits  de  sa 
science,  de  son  intelligence,  de  sa  richesse  et  de  sa  droiture. 

»  En  l'année  4962  A.  M.  (=  1202  '  de  l'ère  vulgaire),  R.  Moïse 

'  Voyez  sur  celle  lultu  contre  MaïmoiiiJc,  cl  surtout  pour  hi  Provence.  Giactz,  op. 
cit.,  ]).  353  pass.  et  Hùtoire  l'iU(fraire  (Je  la  France,  xxvii,  p.  (iiid. 
-  Cl  est  le   «  (j ail/ 1:  des  Ei/arif.i  •.  nnblié  par  M.  Munk. 
'   La  mort  (le  Maimonide  a  eu  liciiiu  l.'ll'i.  \ 


188  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

tomba  gravement  malade,  il  mourut  et  fut  réuni  à  son  peuple, 
vieux  et  rassasié  de  jours.  Il  fut  enterré  au  Caire,  oii  tout  le 
monde.  Juifs  et  Musulmans,  lui  fit  grand  honneur.  Je  ne  suis  pas 
en  état  de  relater  le  deuil  ainsi  que  les  honneurs  qui  lui  furent 
rendus  par  le  roi  et  toute  la  maison  royale.  Que  Dieu  ait  pitié  de 
nous  et  de  tout  Israël  1  Amen  !  » 


n.  DOCUMENT  SUR  DAYID  ALROI 


Ce  document  est  tiré  d'une  chronique  inédite  ou  plutôt  d'une 
histoire  des  Mahométans  et  des  Juifs,  composée  par  Joseph  fils 
d'Isaac  rs-^-^a^p  y'^T'  ■^-lawD,  en  l'année  5433  A.  M.  (=16*73  de  l'ère 
vulgaire).  Ce  livre,  qui  forme  la  seconde  partie  de  l'ouvrage,  com- 
mence à  l'année  4302  A.  M.  (=542)  et  va  jusqu'en  5432  A.  M.  (= 
1672),  il  est  intitulé  S]ot^  ■^-i3"i  "i2D,  tandis  que  le  premier  volume, 
qui  est  peut-être  perdu,  avait  pour  titre  ûi7:sn  "^nm  et  allait  depuis 
Adam  jusqu'à  l'époque  des  rabbins  surnommés  û-'is-nno '.  L'au- 
teur énumère  dans  la  préface  les  ouvrages  suivants  qu'il  avait 
à  sa  disposition,  quand  il  composa  son  livre  : 

nbapïn  nV^btJ  •miN'^  t:30  "i^ont-^  'o  û-^nn  'o  !-i723n  p-^^n-i  nso 

3"N-|2N  '^"1^73    .  -l5UJW-«    lip^n  .  1-'a"'33  'l    myD73   t^^^U  nWU52  Û"^73i!n  '^nnT 

.\aN"in  i-nansn  y'nontib  in"u3  .maN  p73   .i^biz^  T'  .-nTaM  m-ii: 

by^  'nnb  ûbir  m72'^  -^b.soDNp  irr^bt^  'nnb  irr^bx  ■'di  t]"a73-)n  rm-ir: 

IN-npbN  û-^iar:  ■'733n73i  i-'nn  "|  bNiTau)  ma-ri  -^TaN-i  Ninuj  û-^mrs  n"3;a 

.  -^mibN  ans  iSNn  i3wS  ûN73NbN  '^inNnnb.N  ■'T"'-ipN7:bN 

En  comparant  ce  récit  avec  celui  de  Joseph  ha-Kohen-,  on 
verra  que  les  deux  chroniqueurs  avaient  sous  les  yeux  deux  docu- 
ments différents,  surtout  pour  la  lin. 

■v':?»  -^Ni^bN  nnm»Tî3T  inx  ;a^N  dp '^'s'p'n'm  Q-^abN  (!)  nïîHn  rî^aai 
•'SDbi  !-i3-'i25"'n  ^N-i  -iby  -^lobi  ''iaovt  "133")  Nmba  "O^n  "^^sb  n»bi  '  i^-^-^-in^ 


'  Voyez  notre  catalofïue,  p.  2410,  1.  Le  ms.  est  marqué  0pp.  add.  8»  3'i. 
*  Voyez  Emek  Habbacka,  traduction  de  M.  Julien  Sée,  pp.  41  à  44. 
'  Lisez  N'*"»iny. 


DOCUMENTS  INÉDITS  189 

bsai  TiTsbnm  n^bïim  n'Cii^  mina  bnns  n^m  man  nriwa  ap:»-'  iiNa?i 
□■'D'cawm  D->ttn:2-inrî  i-iDom  trînn'^nam  b^yn^a-^  "ji^abni  ï-i-^snir-^n  riTasn 
ia-'ian  b^'  cnbrjb  cri-^Tiîî-'ïn  yapbT  o-id  "j^^n  n-*  tn-^nrrb  inz^na  nbri 
-ipïJ  ï-nmN3  ti-'2)3-io  tD-^niN-'b  ima  ït^^i  abuJiT'  nx  ^lonb  n^bbn 
C^'^^^î<■^î^  t-ispa  in  ir7:Nm  ûb^TT"  t-iN  laïaDb  nnbia  'n  "»5  dnb  n»iNi 

bina  "j-inana  ibïi<  Nn-^ï5  n-^bia  ib  nboi  nabn  0333  Tno  ta-^Tay  ynp»T  rbêt 

rinî<rs  '^barr  ib  -iwnt  n-iits  xb^T  nns  Nbn  T'bN  «m  ib  rtn-^n  'nn  •'d  i^T'i 
i2i"»i  bx-iffl"'  •'33  &y  J-)N  t-nnsb  'rt  -^inbo  ■'S  ""sn  "i53N"''i  to-^mN-'n  "^b?: 
&y  -13*772  *fb73!i  nirï  £3^73"'  '3  siiobi  imon  rT'33  i^-^Tar^bi  nïJsnb  ^bîari 
ittisy  -i^nrto  inîtnpb  n3  tit  rism  nt^t  tD-imN-in  -i3'7  by  T''733>i  T^miJ 
ib  -i73tîi  brt33  "^b73rn  nn-iN  nN-ic  ny3T  dix  ûnn  m\Z5n  •'b3  û->-noKrr  n-'3tt 
p:^i:  T'T:  ^77373  nt'  •'■■'N  ■'3K  ■'S  ■'b  m»:'  TiWDn  ib  n73N  dnbrr  n?  iN^3rr  ^70 
D\s^'n  i;n  i^n  ib  ti73Ni  t'"t3?-i  ni-iia  ib  i33>  irti-ccn  -i73NT  bma  bip3  ']b72n 
■îb7;b  -lUNi  rt37i  in733n  by  ^b-nTi  !^73n  t^to  I3b3  bip  n3>''73ir3  Nbît  imN 
nD'::  by  CNin  n:?  -i-^nriN  T>n33>n  vt^tt  'ibTom  ^bnn  n^m  "iD-inb  ^biin  '^33r; 
imN  1N-1  Ti^o  imN3  vby  'n3?'i  û^73!-!  '^32  br  ':;-i"'dt  i-mo  npb  Nirtî  nnsii 
msap  nr:"''73  vnnN  lobrri  i-i*71D  b3>  d-'733  131:'  tr^rîT::  ']b73rt  -^ns^»  bs 
Y5?^tt  "^bi-i  dvn  -,mî<3i  ht  i7d3  Db-i3?3  qo^?:  ^^  ""^  n-i7:NT  ims-^'cjn  î^bi 
by  abi  nr!73n"'"i  .  imp  i^tk  n^  û'^TiN-'b  i^^i  ^n"iD73r:  dr:3  d-'73''  r!-na:> 
c^bNJ?73\:;"'rt  1"'''^  nna33  -it:»  Ns-^b^  bx  v^'^iTobN  -1^73-^n  nbo  3)"nNi  inTorn 
n"^n3n3)  rr::3'b73  "iti  n^  3'i373b  m3^'>:!^n  ■'u:n'-i  d^i  nbiarr  ujn-i  d:'  -i3nb 
•^sb  im^b»  m3ii7o  533  C3\Ni:733n  n-^mî^-'n  bD  nwx  ai-irrî^  ixb  dwNi  nbï^rs 
nbisr;  ujn-i  b»  3rD  d^m^^n  inb"::i  d-id  m3"'-i73  b33  triir  ny  ï^n-^m  3nn 
d3  i3n3N  d:>  û3"'3"'yb  p.n733  ritjb  -,73X5  TI53  y-iN3;D  ï-n3-''»Dirr  ■'TliN-l  bNI 

n3n3  TN  bj*-)^-^  3ip3   -^pS  dT  ^10123"'    Nb"l   la-^Xn    f-lN    13>373T    d-'mN'^ï^    bs 

"'D  "ii-'N  -135"!  n33  Nb  "^D  !ibiN5ri  173T  y^i'Ti  nb  'l'^iy  •^'D  n73Nb  3n3  m-îb 
dNT  rtbNi-;  a-'-i3'7D  n"n!3:?b73  ^73i:j>  y373n  "'s  Y-  C"''^»"'î<  ^5*<"i  ti3>icnrr  'rsb 
53  b3pi  i-iimrtb  d-'3n3  nb  inbo  rîbî<3"i  bi<"T*3'^  b373  rTn373  ir^rin  ii<b 
3b3  dU5  dn-i73rt  bNim  dST^b»  3>7ou5  Nbn  pmDi  pnuST  arbi  nM-',pT  d*'3n3^î 
a-^m^iin  3niM  ïr^m  oid  ^b73b  ir^n  ■J3ni'^73'i  d"*733'mn!^  "^573  v^'^î<  V'^t-î* 
n-i2:3  t3in  t^n  '•]735>  j-in  riyr^  Ttini  ^b  n73NT  mn  bt;  T'73n  t-iN  "t^stût 
£3'3ir:T  a-Dbx  sn-iia:s>"i  ^^73^  hn  b-^itnb  '^''by  pb  o-id  ^b73  d:'  'n'n-\'zy 
r73n  î^np  Kinr:  rib-'bsi  dujpsn  ■''T'73'i  ds-i^x  ■'33ni  cnix-'r^  '^b  isn'' 
lïî-'i  mû33  Nirti  i-ib-'bri  ■^jtnsT  ■'iiî-i3  is-rp^ïri  t-ina73n  b»  mnb 
aipTum  'j-'nbN  'j-'t  t^s  «SNirj  N-^srrT  icn-i  fiN  ir-nsi  T^b:'  yop  "ti3U5 

.  y-iNfr 

f(  En  l'année  [4]923  A.  M.  (1163  de  l'ère  vulgaire)  se  leva  un 
horannic  nommé  David  Al-Hoï,  de  la  ville  d'Amadia.  Il  avait  étudie 
sous  le  chef  de  la  captivi  'é  Rabbénou  Hasdaï,  sous  le  chef  de  l'école 


190  KEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Éli*  et  SOUS  le  Gaôn  Jacob-,  à  Bagdad.  Ce  David  était  très  versé 
dans  la  loi  de  Moïse,  la  Halakhah,  et  le  Talmud  dans  toutes  les 
sciences  externes  (profanesj,  dans  la  langue  et  la  littérature  arabes, 
ainsi  que  dans  les  livres  mystiques.  Il  lui  vint  à  Tidée  de  se  révolter 
contre  le  roi  de  Perse  et  de  réunir  les  Juifs,  afin  de  combattre  les  na- 
tions et  de  s'emparer  de  Jérusalem.  Il  donna  aux  Juifs  des  signes  ■■ 
faux  en  leur  disant  que  Dieu  l'avait  envoyé  avec  cette  mission. 
Une  partie  de  Juifs  crurent  en  lui  et  le  proclamèrent  le  Messie. 
Quand  le  roi  de  Perse  apprit  ce  que  David  faisait  et  comment  il 
avait  réussi  à  réunir  des  multitudes,  il  lui  envoya  un  messager 
pour  le  prier  de  venir  en  toute  sécurité  le  voir,  afin  qu'il  se  con- 
vainquît lui-même  de  la  vérité  de  ses  signes  et  de  ses  actions  ;  ainsi 
il  saurait  que  c'est  Dieu  qui  le  veut.  David  vint  chez  le  roi  sans 
crainte  et  sans  frayeur.  Sur  la  question  du  roi  :  «  Es-tu  le  roi  des 
Juifs  ?  »  David  répondit  :  «  Je  le  suis,  car  Dieu  m'a  envoyé  pour  dé- 
livrer les  enfants  d'Israël.  »  Le  roi  ordonna  alors  de  le  saisir  et  de 
le  mettre  en  prison.  Trois  jours  après  le  roi  s'entretenait  avec  ses 
princes  et  serviteurs  de  l'affaire  des  Juifs,  quand  il  vit  venir  à  sa 
rencontre  David,   qui  était  sorti  de  la  prison  sans  l'aide  de  per- 
sonne. En  le  voyant,  le  roi  lui  demanda  tout  effrayé  :  «  Qui  t'a 
amené  ici?  »  David  répondit  :  «  Ma  sagesse  est  venue  à  mon  aide, 
et  en  effet  je  n'ai  pas  peur  de  toi.  »  Le  roi  commanda  à  haute  voix 
de  saisir  David,  mais  ses  princes  et  serviteurs  lui  répondirent  : 
«  Nous  ne  le  voyons  pas,  ce  n'est  que  sa  voix  que  nous  entendons.  » 
Le  roi  fut  tout  interdit  devant  la  sagesse  de  David,  lequel  lui  ré- 
pondit :  "   Je  m'en  irai  sur  mon  chemin.  »  Suivi  du  roi,  de  ses 
princes  et  de  ses  serviteurs,  il  arriva  au  bord  de  la  rivière,  oîi  il  ôta 
son  turban,  retendit  sur  la  surface  de  l'eau,  et  traversa  la  rivière 
en  présence  de  tous  les  serviteurs  du  roi.  Ceux-ci  le  poursuivirent 
sur  des  nacelles,  mais  ils  ne  purent  l'atteindre  ;  ils  dirent  :  «  Il  n'y 
a  pas  de  plus  fort  sorcier  au  monde  que  ce  David.  »  Le  même  jour, 
ce  David  parcourut  avec  l'aide  du  Tétragramme  un  chemin  de  dix 
jours  de  marche;  il  raconta  aux  Juifs  ce  qui  lui  était  arrivé,  et  ils 
s'étonnèrent  de  sa  sagesse.   Là-dessus  [le  roi  envoya]  auprès  de 
l'Emir  des  croyants,  le  Khalif  de  Bagdad,  le  maître  des  Musulmans, 
pour  lui  demander  de  parler  au  prince  de  la  captivité  et  aux  chefs 
des  écoles,  afin  qu'on  empochât  David  de  continuer  d'agir  comme 

'  Il  est  probable  que  le  poème  dédié  au  chef  de  l'école,  Eli  {/le-Halouç,  III,  p.  151  ; 
voir  noire  Catalogue,  n"  242'i,  4)  se  rapporte  à  notre  Eli.  Voyez  cependant  Graetz, 
Gesch.  der  Juden,  VII  [2*  édition),  p.  462. 

'  Ce  Gaôn  est  peut-être  identique  avec  le  Jacob,  sur  la  mort  duquel  on  trouve 
deux  potiTies  d'éloj^e,  publiés  par  nous  dans  le  LetterhoHe,    III,  p.  54  pass. 

'  Vcjy  "z  Deutéronome,  xii,  2. 


DOCUMENTS  LNEDITS  191 

il  avait  i'ait  jusqu'alors,  car  en  cas  contraire  le  roi  ferait  tuer  tous 
les  Juifs  qui  habitaient  son  royaume.  Ce  fut  alors  un  temps  de  dé- 
tresse dans  toute  la  Perse.  Les  Juifs  envoyèrent  au  chef  de  la  cap- 
tivité et  aux  chefs  des  écoles  à  Bagdad  une  lettre  ainsi  conçue  : 
((  Pourquoi  mourrions- nous  devant  vos  yeux,  nous  avec  tous  les 
Juifs?  Empêchez  cet  homme  de  verser  un  sang  innocent  en  Israël.  » 
Là-dessus  les  chefs  des  écoles  écrivirent  à  David  en  ces  termes  : 
«  En  vérité,  l'époque  de  la  délivrance  n'est  pas  encore  venue  et 
l'homme  ne  réussit  pas  par  la  force,  car  c'est  avec  Dieu  qu'est  la 
délivrance.  Nous  te  demandons  de  cesser  tes  actions,  sinon  tu 
seras  excommunié  par  tout  Israël.  »  On  voulait  ainsi  le  ramener  à 
la  raison,  mais  David  en  recevant  ces  lettres,  s'en  moqua,  il  se  tut 
et  ne  voulut  rien  écouter.  Mais  Dieu,  le  miséricordieux,  mit  dans 
le  cœur  du  roi  des  Turcs,  Zaïned-Dîn,  un  des  tributaires  du  roi  de 
Perse,  qui  était  ami  des  Juifs,  et  qui  connaissait  le  beau-père  de 
David,  de  lui  dire  :  «  Tu  sais  que  tes  coreligionnaires  sont  en 
grande  détresse  par  [les  menaces]  du  roi  de  Perse.  C'est  pourquoi 
il  est  de  ton  devoir  de  les  sauver.  Les  Juifs,  en  outre,  te  donneront 
dix  mille  pièces  d'or,  dont  je  suis  garant.  »  Le  même  soir,  David 
fut  invité  à  dîner  chez  son  beau-père,  qui  lui  donna  suffisamment 
à  boire.  Au  milieu  de  la  nuit,  comme  David  était  ivre  et  dormait, 
son  beau-père  tomba  sur  lui,  lui  coupa  la  tête,  qu'il  apporta  à  Zaïn 
ed-Din.  Et  le  pays  devint  tranquille. 

Ad.  Neubauer. 
{La  fin  au  prochain  numéro.) 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL 


Parmi  les  savants  du  midi  de  la  France  mêlés  à  la  querelle  re- 
ligieuse qui  éclata  dans  les  premières  années  du  xiv^  siècle,  entre 
les  croyants  orthodoxes  et  les  partisans  de  la  philosophie,  Abba 
Mari  de  Lunel  occupe  un  des  premiers  rangs.  C'est  lui  qui  y  joua 
le  rôle  le  plus  important,  on  peut  même  le  considérer  comme  le 
véritable  auteur  de  toute  cette  fatale  querelle,  qui  eut  pour  ré- 
sultat d'arrêter  pendant  un  certain  temps  les  progrès  de  la  science 
juive,  d"aigrir  les  esprits  et  de  jeter  la  discorde  au  sein  de  commu- 
nautés jusqu'alors  paisibles.  Tels  ont  été  de  tous  temps  les  fruits 
funestes  du  fanatisme  religieux.  Nous  connaissons  tous  les  inci- 
dents de  cette  querelle  par  la  correspondance  qui  fut  alors  échan- 
gée entre  les  rabbins,  et  qui  nous  a  été  conservée  dans  le  recueil  de 
Minhat  Kenaot.  Elle  a  été  racontée  avec  détails  par  M.  Perles, 
dans  sa  biographie  de  Salomon  ben  Adéreth  et  par  M.  Renan,  dans 
Les  Rabbins  français.  Nous  sommes  moins  bien  renseignés  sur 
la  vie  d'Abba  Mari  ;  nous  nous  proposons  de  coordonner  ici  tout  ce 
que  nous  savons  sur  ce  rabbin. 


I 

LE   NOM   D'aBBA   MARI. 


Abba  Mari  signe  ses  lettres  de  son  nom  et  de  celui  de  son 
père  :  Abba  Mari  ben  Moïse  (cf.  Minhat  Kenaot,  n"  26,  62,  etc.), 
ou  encore  de  celui  de  son  grand-père  :  Abba  Mari  ben  Moïse  ben 
Joseph  (ibid.  n»"  19,  34),  ou  plus  simplement:  Abba  Mari  ben  Jo- 
seph {ibid.  n"»  1,  25,  50,  56,  78,  98).  Comme  cette  dernière  signa- 
ture se  retrouve  fort  souvent,  il  est  difficile  d'admettre  ici  une 
erreur  de   copiste,  comme  le   suppose  M.  Renan  {Les  Rabbins 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  193 

français,  p.  649),  mais  il  faut  plutôt  songer  à  l'usage  qu'on  avait, 
surtout  chez  les  Juifs  provençaux,  de  se  servir  du  nom  du  grand- 
père  comme  nom  de  famille,  en  omettant  le  nom  du  père.  Ainsi, 
pour  ne  citer  ici  que  quelques  exemples,  le  célèbre  Calonymos  ben 
Galonymos  ):)&:).  Méir  d'Arles  est  appelé  aussi  Calonymos  ben 
Méir*. —  Menaliem  Méiri,  appelé  aussi  Don  Vidal  Salomon  de 
Perpignan,  qui  se  nomme  lui-même  •^niN»  n-^nb  r:5:bw  p  ûn:73 
(voy.  sa  préface  au  Bet  ha-Behira),  est  également  cité  sous  le 
nom  de  Menaliem  ben  Méir-.  —  Abraham  ben  Ismaël,  le  maître  du 
savant  provençal  Jeruham,  est  aussi  cité^  sous  le  nom  d'Abraham 
ben  Moïse  ben  Ismaël,  ce  qui  montre  bien  que  la  première  déno- 
mination n'est  qu'une  abréviation.  —  Joseph  ben  Jehuda  ben  Si- 
mon, le  disciple  connu  de  Maïmonide,  est  appelé  plus  simplement 
Joseph  ben  Simon  dans  la  suscription  d'une  de  ses  lettres  (Munk, 
Notice  sur  Joseph  ben  Jehuda,  p.  59). 

Abba  Mari  portait  aussi  le  nom  d'Astruc,  Don  Astruc  ou  En  As- 
truc  (pn::":;»  1')  de  Lunel  [Minhat  Kenaot  n"  89;  Leiterbode,  V, 
p.  73),  mais  il  est  inexact  qu'il  ait  porté,  comme  l'affirment  quel- 
ques auteurs,  le  nom  de  Enduran  de  Lunel  [Rabbins  fr.,  p.  649). 
Une  des  lettres  du  Minhat  Kenaot  (n°  87)  est  adressée  à  la  fois  à 
Astruc  et  à  Duran  de  Lunel.  Ce  dernier  n'est  autre  que  Simon  ben 
Joseph,  originaire  de  Perpignan,  qui  s'établit  à  Lunel  et  vécut 
pendant  la  querelle  religieuse  à  Montpellier,  avec  Abba  Mari,  dont 
il  était  un  des  partisans  les  plus  zélés  [Rabbins  fr.,  p.  695). 

Dans  une  relation  écrite  à  Perpignan,  le  17  novembre  1304,  on 
nomme  un  certain  Moïse  Astruc,  qui  emprunta  des  livres  à  son 
tils  Bénédic  Astruc  (Saige,  Les  Juifs  du  Languedoc,  p.  114,  242j. 
Il  est  impossible  d'identifier,  comme  le  veut  M.  Saige,  cet  Astruc 
avec  notre  Abba  Mari,  qui  à  ce  moment  vivait  à  Montpellier  et  ne 
se  réfugia  que  deux  ans  plus  tard  à  Perpignan;  et  dailleurs  il" 
n'est  jamais  appelé  Abba  Mari  de  Perpignan.  Il  importe  peu  de 
rechercher  quel  était  cet  Astruc  :  ce  n'est  sûrement  pas  notre 
Abba  Mari. 

i  Cf.  Zunz,  Gesammelts  Schriften,  III,  p.  150;  Gross,  Mnnatsschnft  de  Graetz, 
1879.  p.  470;  mss.  hcbr.  de  Berlin,  n»  46;  Cataiof/.  Bodl.,  p.  24.  Ces  auteurs 
écrivent  n"^K»  '"1  p  D173"^3V3p  "^"y-  —Cf.  Monatsschrift,  1879,  p.  ooS  ;  ms.  de 
Turin,  U,  foi.  213  (dans  le  Catalogue  de  Peyron.  p.  14)  ei  Monaissrhri/'t.  l.  c.  Cest 
ainsi  qu'il  laul  expliquer  ces  mois  d  Isaac  de  Lattes  :  "isn  "T'NTO  "l"3  D1W;"l?p  '"1 
("ITiS  ■'"l^'O)  '1D"1  m732n3  "linri-  et  il  u'est  pas  nécessaire  d'admettre  une  altéra- 
tion du  texte.  [Ueùr.  Bibitoij'  aj/kic,  VIII,  p.  77.) 

»  Cf.  Aaron  ha-Cohen,  Orhot  Hai/yim,  I,  p.  80  b,  qui  renvoie  au  commentaire  sur 
Béçah  du  Mein,  édition  de  Berlin,  p.  13  fl.  Il  est  vrai  qu'à  la  même  pa-c  Aaron  ha- 
Cohen  cite  Monahem  ben  Salomon,  qui  n'csl  auirc  que  Menahem  Meiri. 

'  Jehudu  hen  Ascher,  Réponses  s.  t.  min""  "JinST.  édil.  de  Berlin,  n.  84. Cf.  Mo- 
natsichrifi.  1880,  p.  400. 


19/,  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

II 

LIEU    DE   NAISSANCE   ET   DOMICILE    d'ABBA   MARI. 

Abba  Mari  était  originaire  de  Lunel  '  (département  de  l'Hé- 
rault), en  latin  Lunate  ou  Lunellum,  en  hébreu  "irrr^  -,  d'où  le  nom 
qu'il  se  donnait  lui-même  Tn-^n  •"*.  Il  quitta  sa  ville  natale  Lunel  et 
s'établit  à  Montpellier  où  il  vécut  pendant  la  querelle  de  1303  à 
1306.  Peu  de  temps  auparavant  il  avait  été  à  Lunel,  peut-être 
seulement  de  passage,  sans  doute  pour  s'entendre  avec  plusieurs 
de  ses  partisans  [Minliat  Kenaot,  n°  18).  Dans  cette  dernière 
ville  il  rencontra  une  approbation  générale.  A  Montpellier  au  con- 
traire, quoiqu'il  s'y  fût  créé  un  parti  puissant,  il  se  heurta  à  une 
opposition  qu'il  n'avait  pas  prévue  :  celle  des  libéraux  ayant  à 
leur  tête  des  hommes  comme  Jacob  ben  Makhir,  Jehuda  ben  Moïse 
ibn  Tibbon,  Salomon  de  Lunel.  La  querelle  fut  très  vive  de  part 
et  d'autre.  L'expulsion  des  Juifs  de  France  (1306)  en  marqua  la 
fin  subite  et  tragique. 

Abba  Mari  se  réfugia  à  Arles  (cf.  iJnd.,  n°  100),  où  cependant  il 
ne  trouva  pas,  à  ce  qu'il  semble,  un  accueil  bienveillant.  Le  séjour 
dans  cette  ville  lui  devint  insupportable,  puisqu'il  parle  d'un  se- 
cond lieu  d'exil  où  il  dut  se  rendre  en  quittant  Arles.  Il  se  dirigea 
sur  Perpignan  où  il  arriva  six  mois  après  l'expulsion  de  Provence, 
c'est-à-dire  vers  la  fin  de  décembre  1306.  Quelques-uns  de  ses  ad- 
versaires essayèrent  de  l'expulser  de  cette  ville,  mais  ses  amis  Sa- 
muel ben  Ascher,  de  Perpignan,  et  son  fils  Moïse  ayant  intercédé 
pour  lui  auprès  du  maître  du  pays,  le  roi  de  Majorque,  on  lui 
permit,  comme  aux  autres  exilés,  de  demeurer  à  Perpignan.  Com- 
bien de  temps  y  resta-t-il?  Nous  ne  le  savons  pas.  Mais  la  suppo- 
sition {Rabbins  ft\,  p.  496)  que  de  là  il  se  serait  rendu  à  Barcelone 
n'est  nullement  fondée.  Son  élégie  sur  la  mort  de  Salomon  ben 
Adéreth  (1310)  n'a  certainement  pas  été  composée  à  Barcelone, 
mais  y  a  été  envoyée  sous  forme  de  lettre. 

'  Sa  naissance  dans  cette  ville  est  encore  ])rouvée  de  ce  que  Salomon  ben  Adéreth 
l'appoUc  une  lois  plus  brièvement  b'^'2^b  nn  ''1)2  N3N  (Cf.    Mrnhat  Kenaot,  n.  31). 

■■'  in"*"!"*  b^S73  dans  Zeraliia  Gcrondi.  préface  à  son  Maor ;  IJl"'")"'  PJ'p^  dans 
Samuel  ibn  Tihbon,  préface  à  sa  traduction  hébraïque  du  More,  par  allusion  à  Dont., 
ixxiv,  3.  Cf.  Letterhode.  IV,  p.  166  ;  Isaac  de  Lattes  S'-haaré  Zion. 

s  Cf.  sa  préface  au  Minhat  Kenaot.  Ainsi  se  nommaient  entre  autres  :  Abraham 
ben  Natan,  auteur  du  Manhiçi  ;  un  poète  du  nom  de  David,  que  célèbre  Abraham  Be- 
dursi  (Cf.  son  poème  nDD^nW^T  n^n)  ;  de  même  un  Jehuda  poète  également  nommé 
par  liedtrsi;  voy.  Zunz,  Zur  (icsrliichte  und  Lttcralur,  p.  049. 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  190 


III 


LES    DATES. 

Nous  ne  connaissons  ni  la  date  de  la  naissance  d'Abba  Mari, 
ni  celle  de  sa  mort.  Nous  ne  pouvons  fixer  qu'approximativement 
l'époque  de  sa  vie.  Lors  de  la  querelle  de  1303-1306  il  devait  être 
un  homme  mûr,  vu  l'estime  dont  il  jouissait  et  puisqu'il  avait 
déjà  à  ce  moment  un  fils  marié.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  était  beaucoup 
plus  jeune  que  Salomon  ben  Adéreth,  auquel  il  a  survécu  et  dont 
il  se  dit  le  disciple,  dans  un  sens  figuré,  il  est  vrai.  Les  expressions 
({ui  paraissent  le  représenter  comme  étant  encore  jeune  à  cette 
<'poque  [Minhat  Kenaot,  n°  6,  t]"'T»bnr!  "i"^:'^;  iMd.,  préface,  "^aït 
•'^N  n-^n^  T':?::ri)  ne  doivent  pas  être  prises  à  la  lettre  :  ce  sont  des 
lorrnules  de  modestie.  Elles  nous  empêchent  cependant  d'admettre 
({u'il  lut  déjà  alors  d'un  âge  avancé.  M.  Neubauer  {Monatsschrift, 
1871,  p.  514)  tient  pour  vraisemblable  que  notre  Abba  Mari  est 
identique  avec  le  vieux  Bonastruc,  mentionné  par  Isaac  ben  Sché- 
schet  (Réponses,  n°  7)  et  qui,  à  Barcelone  se  serait  prononcé  sur 
une  question  de  rituel  pn  riirrj  (1.  b-^sib)  b-^i-h  pnrriînn  iprn  ^b  n^;?m 
-DibL^-inn.  Cette  hypotlièse  n'est  pas  fondée.  Abstraction  faite  de  ce 
(lue  les  noms  Astruc  et  Bonastruc,  quelle  que  soit  leur  parenté,  ne 
l)euvent  cependant  pas  être  confondus  sans  plus  de  façon,  il  y  a 
t'ucore  deux  points  à  considérer  :  1°  Isaac  ben  Schéschet  ne  donne, 
dans  ses  Réponses,  aucun  titre  honorifique  à  ce  Bonastruc,  mais 
l'appelle  simplement  «  ce  vieillard  »^  tandis  qu'Abba  Mari  est  tou- 
jours mentionné  par  ses  partisans  de  la  façon  la  plus  honorable  ', 
comme  «  savant  éminent  »,  «  l'étoile  qui  nous  guide  »  {ibid., 
n"  57),  «  notre  maître,  la  lumière  de  l'exil  ».  {Leiterbode,  1.  c). 
2°  Il  faut  aussi  considérer  l'époque  où  ben  Schéschet  écrivit  cette 
réponse.  Elle  est  adressée  à  Benjamin  Amar  à  Bougie  en  Algérie. 
C'est  à  ce  môme  savant  et  un  peu  i)lus  tard  à  un  savant  de  Bar- 
sach  que  Simon  ben  Zémah  Duran  adressa  un  écrit  sur  le  même 
sujet  (Réponses,  I,  n"^  125,  127] .  La  Réponse  de  ce  dernier  a  donc 

«  Ben  Adéreth  l'appelle  [Minhat  Kenaot,  n»  29),  TaiSSri  Î^b3'2!^  p-^mrs'  ÛDMi^; 
(ibid.,  n»  49),  finp  ■'723n  '(■'n  'j'^DlM'^Sa  "IPlDltt  Û^H  :  Ascher  beii  Yehiel  {ihid., 
n»  151),  ThVjTi  "TiI5ri  TH^jH  aDnrî.  Les  savants  do  Luncl  lui  écrivent  [ibid., 
n»  .'i4),  b^^5^;  "ion    ïlbnnbT    "a^db  "bz'Sn  ÛDnrt  ;  Abraliam   ben   Joseph    d'Aix 

[ibid.,  w"  /i4)  va  jusqu'à  (iirc  -yQTi  ^3^:^  ;L:\sr;  pni:  rîTiTD  ïjnp  n-^ribN  cn 
bilan. 


196  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

dû  être  écrite  presque  en  même  temps  que  celle  d'Isaac  ben  Sché- 
schet,  et  cela  sans  doute  à  Alger,  où  tous  deux  s'étaient  réiugiés 
en  1391.  Il  est  même  certain  que  la  date  de  la  Réponse  de  Duran 
est  un  peu  postérieure  à  cette  année  de  1391,  puisque  l'auteur 
n'avait  alors  que  trente  ans  et  ne  pouvait  passer  pour  une  au- 
torité à  cet  âge.  C'est  donc  dans  les  années  1395  à  1400  que 
Bonastruc  de  Barcelone  fit  une  réponse  orale  à  la  question  de 
Benjamin  Amar  ^  Il  ne  faut  donc  pas  songer  à  identifier  ce 
Bonastruc  avec  Abba  Mari  de  Lunel,  qui  fleurit  environ  un  siècle 
plus  tôt. 


IV 


LA  FAMILLE  D  ABBA  MARI. 


Le  père  d'Abba  Mari,  Moïse  ben  Joseph,  qui  atteignit  un  âge 
avancé,  et  son  grand-père  Joseph,  qui  porte  le  titre  de  Nassi,  et 
qui  ont  sans  doute  demeuré  tous  deux  à  Lunel,  étaient  des  hommes 
très  considérés  et  très  estimés  pour  leur  science-.  Son  fils  Me- 
schullam  ^,  qui  était  très  savant,  était  le  gendre  de  ce  Moïse  ben 
Samuel  ben  Ascher*  de  Perpignan,  dont  nous  avons  déjà  parlé 
plus  haut.  Une  amitié  intime  liait  Moïse  b.  S.  b.  A.  avec  Abba 
Mari,  dont  il  embrassa  le  parti  dans  la  querelle,  s'efforçant  néan- 
moins, par  esprit  de  conciliation,  d'atténuer  l'opposition  des  partis 
et  de  les  mettre  d'accord. 

Un  Samuel  ben  Abba  Mari  de  Lunel  copia  en  1409  le  commen- 
taire -  d'Aaron  ha-Lévi  sur  Allassi.  L'hypothèse  de  M.  Neubauer 

>  11  y  a  r!3lb::"133  pn  N1?1U3  ...'^b  T^rm.  Il  n'était  donc  plus  alors  à  Ali;-cr. 
D'autres  savants  qui  se  trouvaient  dans  cette  ville  étaient  aussi  dits  •  de  Lunel  », 
entre  autres  Abraham  Lunel,  {rendre  de  Benjamin  Amar  (Cl.  Salomon  ben  Zémab 
Duran,  Réponses,  n»  607). 

î  Rab  Joseph  est  appelé  [Minhat  Kenaot,  n»  91),  3"l!n  pnm?:n  N"^ï:3r:  CSnn 
T\^Z^^^  '"1.  R.  Moïse  {ibid.,  u»  2),  par  Ben  Adéreth,  NIH  inrin  D^nn  bn^H  mn 

rrbrKrr  mo"'  ;  (n»  3),  i^rrm  r:br:r:  bin^n  b^:J^^^  :  (u»  32).  2in  ^"^UJ-^n 
rvcT:;  'n  ;  (n»  61),  û-^sD  N1C2T  ipT  r:br3n  pNrn  bn:ir:  yrcin  ■.  (u»  \S),  p-^ns 
nbrMn  ms"';  (n»  49).  17:0  p-i?:  bi'ia  ;  (n»  o.i),  trnn  *t^53t  n;an. 

5  Ibid.,  n»  :'iS.  Son  bcau-pere  écrit  u  Abba  Mari  :  ÛlbCT   *janbï33  Nllp  'T'^nN 

Lb^^c'a  •'n-i  "«-nm  •'^^n  "^sm  "^ïn. 

*  Ibid.,  et  n°  18.  Abba  Mari  dit  de  lui,  peut-être  seulement  parce  qu'il  lui  était 
apparcuté,  «nn  la^ibNlS».  (Cl.  u<"  36,  37  et  100). 

'-  Le  iiis.  de    Munich,    n"  237,    publié  eu   1874,  porto   l'épifïrapho  suivante  :  "^JN 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LIONEL  lf>T 

que  ce  copiste  serait  le  fils  de  notre  Abba  Mari  ne  peut  se  soute- 
nir, d'après  ce  que  nous  avons  dit  sur  l'époque  où  vécut  ce  dernier. 
Il  est  de  même  peu  vraisemblable  que  Salomon  ben  Abba  Mari  de 
Lunel  qui  a  publié  une  grammaire  hébraïque  sous  le  titre  de  La 
Langue  savante  S  soit  le  fils  de  notre  Abba  Mari.  L'époque  où  vé- 
cut cet  auteur  est  inconnue,  mais  comme  il  se  plaint  du  peu  de 
connaissance  que  ses  contemporains  avaient  de  l'hébreu,  ce  qui 
l'a  porté  à  écrire  une  grammaire,  il  est  difficile  d'admettre  qu'il 
ait  vécu  dans  la  première  moitié  ou  au  milieu  du  xiv*"  siècle  ;  il  a 
dû  vivre  bien  plus  tard  à  une  époque  où  la  grammaire  hébraïque 
était  en  pleine  décadence  et  où  une  telle  plainte  était  plutôt  justi- 
llée,  comme  à  l'époque  de  Yedaya  Penini,  de  Calonymos  ben  Ca- 
lonymos,  d'Immanuel  de  Rome.  Abstraction  faite  de  cette  remar- 
(jue,  il  y  a  eu  certainement  à  Lunel  et  ailleurs  d'autres  hommes 
(lu  nom  d'Abba  Mari.  Ainsi  il  y  avait  à  Lunel,  à  l'époque  même 
(le  la  querelle,  un  Abba  Mari  ben  David,  qui  signa,  de  concert  avec 
d'autres  rabbins,  une  lettre  d'adhésion  adressée  à  Salomon  ben 
Adéreth  {Rabbins  fr.,  p.  692). 

En  général  le  nom  d'Abba  Mari  était  très  répandu  en  Provence^ 
ce  qui  a  donné  lieu  à  maintes  confusions.  Nous  ne  ferons  remar- 
(juer  que  la  suivante.  Le  voyageur  Benjamin  de  Tudèle  nomme 
dans  son  Itinéraire  [liinerarium,  éd.  Ascher,  I,p.  5)  un  Abba  Mari 
ben  Isaac  qu'il  rencontra  à  Saint-Gilles  où  il  était  bailli  du  comte 
Raymond  (vers  1170).  Zunz  (Itinerariwn,  II,  p.  14)  et  après  lui 
d'autres  savants,  comme  M.  Graetz  (Histoire,  VI,  p.  244)  et  M.  Re- 
nan [l.  c,  p.  250)  tiennent  pour  vraisemblable  que  cet  Abba  Mari, 
bailli  de  Saint-Gilles,  était  le  père  d'Isaac  ben  Abba  Mari,  l'auteur 
de  YIttour  (composé  de  1179  à  1189).  C'est  là  au  contraire  une  hy- 
pothèse tout  à  fait  invraisemblable.  L'auteur  de  VIttour  était  de 
Marseille  et  est  sans  doute  le  môme  R.  Isaac  que  Benjamin  de  Tu- 
dèle rencontra  dans  cette  yiWe  [Itinerarimn,!,  P-6);  son  père 
était  également  de  Marseille,  comme  le  témoigne  Isaac  de  Lattes. 

r^nfzrt  r.v:^  -j^'i;  '>::nn2  ir73r:;r!  i^rr^ïri  ...itjdw»  NCT-iïn  N^'^a^b  n-^îym 

?TT^^"'b  "'UJIUlrî  ClbNn  Î3"isb  3>ï3m  D'^UÎ'iUl.  Steinschneider   met  en  doute  l'exac- 
titude de  la  date  109.  Neubauer,  Monalsscfirift,  l.  c,  donne  la  date  Û^i'Om   !lt<ï3 

>  Ms.  de  Parme,  n"  '.W  dans  Hehr.  Bibliofjr.  do  Steinschneider,  VIII,  p.  27, 
■^TlT'  ■'173  N2N  p  M^obW  'nb  D"^11?2b  "JTOb.  Le  nom  de  ce  dernier  rabbin  est 
accompagné  de  la  note  suivante  «  appelé  aussi  En  Duran  Astruc  do  Lunel  »,  comme 
si  c'était  notre  Abba  Mari.  Le  manuscrit  est  aussi  à  Paris,  n"  1239^,  et  dans  De 
Rossi,  n°  800  ;  mais  il  n'a  que  la  première  partie.  Il  i'aut  en  dire  autant  de  celui  de  la 
Hodléicnne,  précédemment  Cod.  Rupgio,  1S.  Le  ms.  Schorr  a  le  nom  N^N  p  Tifzb'C: 
t^iin^  1-172,  ce  que  Hcnjacoi),  D'^-iDDM  "1^1i<>  considère  comme    une  corruption  de 

T.  IV.  1-i 


198  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

En  outre,  l'auteur  de  Vlttotir  »  invoque  souvent  les  écrits  talmu- 
diques  de  son  père,  qui  avait  été  le  chef  d'une  grande  école.  Cela 
ne  peut  pas  s'appliquer  au  bailli  de  Saint-Gilles,  que  Benjamin  de 
Tudèle  compte  à  peine  parmi  les  savants  de  l'endroit.  Il  est  diffi- 
cile d'admettre  qu'il  y  ait  eu  à  Saint-Gilles,  où  demeuraient  cent 
Juifs  environ,  une  école  considérable  ;  dans  tous  les  cas,  il  n'est  ja- 
mais question  nulle  part  d'une  école  pareille  ;  mais  il  a  dû  en 
exister  une  dans  la  grande  communauté  de  Marseille,  qui  est  dé- 
signée par  Benjamin  -  comme  une  ville  de  talmudistes  distingués, 
et  qui  était  un  des  grands  centres  de  la  science  juive.  C'est  là  sans 
doute  qu'il  nous  faudra  cbercher  cette  école  et  à  sa  tête  Abba  Mari, 
père  de  l'auteur  de  VIttour.  On  a  aussi  mis  ce  dernier  en  rapport 
avec  notre  Abba  Mari,  et  supposé  que  celui-ci  descendait  d'Isaac 
Abba  Mari  de  Marseille  (Jost,  Geschichte  des  Judenthums,  III, 
p.  41).  Cette  hypothèse  n'est  confirmée  par  aucune  preuve. 

Ce  qui  est  certain,  c'est  que  notre  Abba  Mari  était  parent  du 
Nassi  Calonynos  ben  Todros  de  Narbonne.  Quelle  était  cette 
parenté?  On  ne  le  sait  pas.  Il  n'est  pas  prouvé  non  plus  qu'elle 
s'étendît  à  Meschullam,  cité  dans  la  lettre  adressée  à  Calo- 
nymos  ^.  Meschullam  était  simplement  leur  ami  commun  et  leur 
partisan.  C'est  dans  sa  maison,  sans  doute  à  Narbonne,  qu'Abba 
Mari  avait  obtenu  du  Nassi  la  promesse  d'un  appui  énergique  dans 
la  querelle  qui  venait  d'éclater.  Abba  Mari  lui  rappelle  cette  pro- 
messe dans  la  lettre  dont  nous  venons  de  parler  et  fait  allusion  en 
même  temps  à  leur  parenté.  Le  Nassi,  qui  avait  hésité  jusque  là, 
s'attacha  tout  à  fait  à  lui.  11  faut  remarquer  le  respect  extraordi- 
naire *  qu'il  témoigne  à  Abba  Mari  dans  sa  réponse  et  ailleurs. 

Abba  Mari  jouissait  d'une  haute  considération  à  cause  de  sa 
science  et  de  sa  noble  extraction.  Jacob  ben  Makhir,  don  Proflat 
Tibbon,  le  chef  du  parti  libéral  à  Montpellier  et  son  plus  grand  ad- 
versaire, se  prononce  sur  cette  extraction  dans  une  lettre  à  Sa- 
lomon  ben  Adéreth.  Nous  reproduisons  le  passage  malheureuse- 

'  -TIlD^^Î  nSD,  (!dit.  Lemberg,  I,  p.  7,  47  a,  52  a  ;  II,  p.  17  J,  33  i  ;  I.  p.  IC  h  :  nT 

Û'^TOSn.  Un  peu  plus  tard  Maïmonide  écrit  à.  Marseille  à  12"i5nT70")  15"^DlbN 
V'TI  rn  ■'J'IV  £]'^3in73lrî  D"'ttSri!^-  Cf.  ses  lettres,  édit.  Ariisterdam,  p.  6. 

'  Minhat  Kcnaot,  n"  SC  Clbl"-i;73  'l  I^-TIN  "735jrî  n^nn  ■^S"'»'^  T^n  "^înTriN 
IH"^  ^53"il5^.  De  là  M.  Perles  conclut  (Biof/mphie  des  Salomon  h.  Âdcreth,  p.  44)  que 
Meschullam  lui  était  parent.  Mais  flN  peut  ici  comme  ailleurs  avoir  le  sens  d'ami. 
Cl.  i/iid.,  n"  19;  Jlahbtna  français,  p.  713. 

*  Jhid.,  n"  rj7,  n-nnirr  hr:^  nmnr;  N3s:  ^-û,  irjn?:  nsis  is'T'aa  •■  n*  64, 
binai  .ïnwisnn  Nt^3  ,bT75ï-!  lasnn  ù^sd  ntcs  ,iro3?3  2Di5  ist^in  ,*i« 


I 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  199 

ment  corrompu  qui  en  fait  mention,  à  cause  de  la  précision  du 
texte.  Jacob  ben  Makhir  reproche  à  Salomon  ben  Adéreth  d'avoir 
proclamé  hérétiques  les  études  scientifiques  et  surtout  les  études 
philosophiques,  sur  la  seule  instigation  d'Abba  Mari,  qui  les  lui  a 
montrées  sous  un  faux  jour,  en  disant  qu'elles  étaient  dangereuses 
pour  la  foi.  Après  lui' avoir  représenté  le  propos  blessant  qu'Abba 
Mari  avait  tenu  sur  le  «  vieux  roi  *  »,  expression  par  laquelle  il 
désignait  Samuel  ibn  Tibbon,  il  continue  en  ces  termes  :  «  Je  me 
»  rappelle  que  dans  ma  jeunesse-,  quand  j'étais  à  Lunel  pour  y  étu- 
»  dier,  on  y  lisait,  à  des  époques  déterminées,  ses  écrits  (de  Sa- 
»  muel  ibn  Tibbon).  Le  savant  (Abba  Mari),  qui  t'a  dicté  ta  conduite 
•'  à  l'égard  de  la  philosophie,  aurait  dû  se  rappeler  que  mes  ancê- 
<  très  et  les  siens,  le  grand  savant  Meschullam  ^,  honoré  de  l'es- 
)  time  universelle,  ainsi  que  ses  fils  et  ses  gendres,  étaient  au 
))  nombre  des  plus  considérés  du  pays,  que  mon  grand-père^  (Sa- 
»  muel)  et  le  pèreide  mon  grand-père  (Jehuda)  avaient  les  rapports 
'  les  plus  intimes  avec  eux  (Meschullam  et  ses  fils)  et  que'  c'est 

sur  leur  conseil  qu'ils  (mes  ancêtres)  ont  traduit  plusieurs  écrits 
>  philosophiques,  en  tête  desquels  ils  ont  mis  les  noms  de  ces  cour 
«  seillers.  Ce  qu'on  permit  alors,  on  ne  peut  pourtant  pas  le  dé- 
»  fendre  aujourd'hui.  Maïmonide  s'est  prononcé  d'une  façon  élo- 
»  gieuse  et  approbative  sur  ces  traductions,  dans  les  lettres  qu'il 
«  lui  a  adressées  (à  Samuel  ibn  Tibbon).  » 

Jacob  ben  Makhir  Tibbon ,  proche  parent  de  Jehuda  ben  Moïse  Tib- 


'  Minhat  Kenaot,  n"  39  ;  «f.  n°  9,  mininb  '^"^T'  DNllia  ipTir;  '^^73^!  by 
'rb'iljf'^,  allusion  sans  doute  au  passage  de  Kohélet  IV,  13,  b'^DS'l  ^pT  ^^772. 
Cr.  Rabhins  //•.,  p.  673-  Samuel  ibn  Tibbon  n'est  pas  non  plus  nommé,  mais  c'est 
lui  sans  doute  qu''il  désigne  par  ces  mots  ÛJ  d'^W^D  1135  b"l  Q3"72"l  b'rtS?^  2"|îl 
ih  ITibUJ  m"l5N3  ©bU5.  L'édition  porte  la  leçon  'jn"ni  :  un  manuscrit  au  contraire 
D3"73"1,  ce  qui  est  plus  juste.  Voy.  Lciterbode,  IV,  p.  131.  Maïmonide  correspondit 
;ivec  Samuel  ibn  Tibbon.  Cf.  Lettres  de  Maïmonide,  édit.  Amsterdam,  p.  12. 

«  L'édition  et  deux  manuscrits  portent  im:'33,  d'autres  manuscrits  •^m"n5M3. 
Cl'.  Letterbode,  l,  c.  La  différence  n'est  pas  essentielle,  puisque  Jacob  ben  Makhir 
iHait  sans  doute  à  Lunel  pendant  sa  jeunesse. 

3  'nhyûl2  '-1  blisn  n-lïl  irSpTI  irSTivX.  M.  Renan,  l.  c.  et  p.  713  traduit 
'Ù"'"pT  par  «  notre  aïeul  >  ou  «  notre  grand-père  ».  C'est  la  signification  ordinaire  de 
■'-pT,  mais  "li'^îpT  est  uni<juement  un  titre  bonorifique.  Cf.  Menabem  Méiri,  intro- 
.luction  au  Bclh  ha-Beliira  pnif  n"2  Ûl-nnN  'l  "innSirî  "iS'^'pT  ;  ibid.,  irspT 
b"T  '73"iS-|ïn  b"n:in  ;  'i^>i<l.,  ■a-'^U'^rj  nsba  IS-^lpT  anrr.  Ce  Meschullam  est  Me- 
schullam bon  Jacob  de  Lunel,  qui  était  très  considéré  et  qui  encouragea  Jehuda  ibn 
'l'ibbon  à  faire  des  traductions  d'ouvrages  arabes.  Cf.  préface  de  Jeliuda  ibn  Tib- 
bon à  sa  traduction  du  mnnbrt  m3in.  Cf.  Monatsschrift,  1868,  p.  292.  Les  fds  de 
Meschullam  sont  honorablement  connus. 

*  L'édition  porto  seulement  fjpT  "'SIlN  ;  urt  mauuBcrit  uu  contraire  "^apî  ^mN 
T^aNI.  Cf.  Letterbode,  l.  c. 


200  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

bon,  un  des  adhérents  les  plus  zélés  du  parti  libéral  à  Montpellier  et 
certainement  fils  de  Moïse  ben  Samuel  ibn  Tibbon  [Minhat  Ke- 
naot,  n°^  21,  26)  descendrait,  d'après  le  passage  cité,  de  Jehuda  ibn 
Tibbon '.Mais  il  est  très  douteux  qu'il  ait  été  en  même  temps, 
comme  M.  Graetz  le  dit  [GescMchte  der  Juclen,  VII,  p.  261),  un  des- 
cendant de  Mescliullam  ben  Jacob  de  Lunel  ;  du  moins  le  passage 
que  nous  avons  cité  ne  le  prouve  pas.  Si  l'expression  lî'^spT-  se 
rapportait  aux  seuls  ancêtres  de  Jacob  ben  Makhir,  il  serait 
très  étonnant  que  celui-ci  ne  nommât  et  ne  louât  que  ses  aïeux  et 
non  pas  ceux  d'Abba  Mari,  auquel  il  fait  cependant  allusion.  Pour- 
quoi s'abstiendrait-il  de  les  mentionner  ?  De  plus,  dans  cette  hypo- 
thèse, les  Tibbon  auraient  été  alliés  à  la  famille  des  Mescliullam, 
alliance  dont  on  ne  trouve  de  trace  nulle  part  ailleurs .  On  ne  com- 
prendrait pas  bien  non  plus  l'emphase  avec  laquelle  cette  lettre 
rappellerait  à  Abba  Mari  les  rapports  intimes  qu'auraient  eus 
entre  eux  les  aïeux  paternels  et  maternels  de  Jacob  ben  Makhir.  Il 
n'y  aurait  dans  cette  intimité  rien  de  remarquable,  si  les  deux  fa- 
milles étaient  apparentées.  Il  est  plus  vraisemblable  que  Meschul- 
lam  de  Lunel  (mort  en  1110),  qui  avait  aussi  un  fils  savant,  Rabbi 
Joseph,  a  été  le  bisaïeul  d'Abba  Mari  benMoïse  ben  Joseph  de  Lunel. 
Chronologiquement,  rien  n'empêche  d'adopter  cette  hypothèse, 
d'autant  plus  que  le  Moïse  dont  nous  venons  de  parler  a  atteint  un 
âge  très  avancé.  II  faudrait  seulement  que  la  naissance  d'Abba 
Mari  remontât  aux  années  1245  à  1250,  de  sorte  qu'il  aurait  eu 
50  à  55  ans  au  moment  de  la  querelle,  ce  qui  s'accorderait  bien 
avec  les  témoignages  de  grande  estime  qu'on  lui  adresse  de  tous 
côtés.  Tout  le  passage  recevrait  dans  cette  hypothèse  une  bien 
autre  signification  et  un  sens  plus  précis.  Meschullam  et  ses  fils 
ont  favorisé  les  études  scientifiques  en  Provence  et  c'est  à  leur  ins- 
tigation que  les  Tibbonides,  par  de  nombreuses  traductions,  ont 
im[)rimé  à  ces  études  un  mouvement  progressif.  C'est  la  coopéra- 
tion amicale  de  ses  aïeux  et  des  aïeux  d'Abba  Mari  que  Jacob 
ben  Makhir  rappelle  à  Abba  Mari.  Il  l'exhorte  en  quelque  façon  à 
ne  pas  agir  contrairement  à  l'esprit  de  ses  aïeux,  mais  à  partager 
leur  amour  de  la  science. 

Dans  la  famille  de  Meschullam  se  manifestent  des  contrastes 
étonnants.  Il  avait  cinq  fil^,  tous  savants  (Benjamin  de  Tudèle,  l.  c, 
\).  3)  :  l'un,  Aaron,  était  un  des  partisans  les  plus  exaltés  de  Maï- 


'  Est-ce  Jehuda  ou  son  fils  unique  Samuel  qui  a  été  le  grand-père  de  Jacob  beu 
Makhir?  je  n'ose  pas  trancher  la  question,  parce  que  les  leçons  portent,  les  unes  ""^pT, 
les  autres  113^1  i3pT. 

"  Pourquoi  aussi  y  aurait-il  i;">DpT  <îl  no"  las  "^rpT  "•' 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  201 

monide  (Voy.  Gross,  Motiatsschrift,  1873,  p.  405)  ;  un  autre,  As- 
cher,  talmudiste  éminent,  menait  une  vie  d'ascète,  sans  cependant 
être  un  obscurantiste,  comme  M.  Graetz  [l.  c,  p.  240)  le  représente, 
il  était  au  contraire  un  ami  de  la  science  [Monatsschrift,  1874, 
p.  174)  ;  le  troisième,  Jacob,  est  certainement  le  même  que  le  cab- 
baliste  Jacob  Nasir  {ibid.,  p.  170,  173);  le  quatrième  est  Joseph 
dont  le  petit-fils  serait  notre  Abba  Mari  qui  combattit  avec  tant  de 
fanatisme  les  études  scientifiques  cultivées  avec  tant  d'ardeur  par 
ses  ancêtres. 


LES   ECRITS  D  ABBA   MARI. 


1 .  —  Abba  Mari  n'était  pas  tout  à  fait  étranger  à  la  science  dont 
il  désapprouvait  l'étude.  Il  connaît  divers  ouvrages  philosophiques 
auxquels  il  renvoie  dans  ses  écrits  ou  dont  il  emprunte  certaines 
expressions  et  propositions  ;  mais  il  n'avait  pas  pénétré  l'esprit 
de  ces  ouvrages  :  il  s'en  est  tenu  plutôt  à  la  surface.  Sans  grande 
profondeur  et  engagé  dans  une  haggada  demi-mystique,  il  n'a  vu 
la  philosophie  que  dans  un  demi-jour.  Il  n'en  a  pas  reconnu  l'im- 
portance et  n'en  a  pas  mesuré  l'influence  d'après  les  travaux  des 
grands  philosophes  juifs,  mais  d'après  les  exagérations  de  ces 
philosophes  exaltés  et  fanatiques  qui  croyaient  retrouver  la  philo- 
sophie jusque  dans  l'Ecriture  sainte,  et  qui  avaient  appliqué  à 
celle-ci  un  système  sans  frein  d'interprétations  allégoriques,  afin 
d'établir  un  accord  complet  entre  Moïse  et  Aristote.  C'est  là  ce  qui 
effraya  Abba  Mari  et  lui  fit  voir  dans  les  recherches  scientifiques, 
qui  faisaient  négliger  l'étude  du  Talmud,  un  danger  sérieux  pour 
la  foi,  dont  les  doctrines  renferment  des  vérités  éternelles  qui 
sont  au-dessus  des  systèmes  changeants  de  la  philosophie.  Il  fit 
donc  tous  ses  efforts  pour  limiter  l'étude  de  la  science  chez  la  jeu- 
nesse, en  ne  lui  permettant  cette  étude  qu'à  partir  de  trente  ans, 
âge  où  d'ordinaire  les  jeunes  gens  sont  assez  familiarisés  avec  le 
Talmud.  C'est  pour  cela  qu'il  se  mit  en  relation  avec  les  savants 
les  plus  considérés  de  Provence,  avec  Salomon  ben  Adéreth  de 
Barcelone  et  plus  tard  avec  Ascher  ben  Yehiel  de  Tolède;  il  ob- 
tint leur  approbation  et  fut  cause  de  leur  sévérité  contre  ses  ad- 
versaires. Cette  conduite  arbitraire  et  fanatique,  qui  était  tout  à 
fait  propre  à  troubler  la  vie  intellectuelle  des  Juifs,  se  heurta  dans 


202  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

les  cercles  libéraux  à  l'opposition  la  plus  tranchée  et  appela  la  ré- 
plique la  lîlus  acerbe.  Lorsque  de  tristes  événements  matériels 
coupèrent  court  à  la  querelle  qui  s'alluma  à  ce  sujet,  Abba  Mari 
recueillit  dans  le  loisir  de  l'exil  les  lettres  qu'il  avait  écrites  pen- 
dant la  lutte  ou  qu'il  avait  reçues  de  ses  partisans,  surtout  de  Sa- 
lomon  ben  Adéretli,  les  réponses  approbatives  et  les  répliques 
adressées  à  celui-ci  ;  puis  il  donna  à  toute  la  correspondance  le 
nom  de  Minhat  Kenaot  «  l'Offrande  du  zèle  »  (d'après  Nomb.,  v, 
18).  En  tête  de  l'ouvrage  est  une  très  longue  introduction  et  vers 
la  fin  est  intercalé  un  petit  ouvrage  m-'r;  "idd  envoyé  par  Abba 
Mari  à  Ben  Adéretli,  oi^i  sont  développés  les  principes  religieux  de 
l'auteur.  Cette  collection  a  été  publiée  en  'l838  à  Presbourg, 
d'après  un  manuscrit  incomplet.  M.  Renan  {l.  c.)  a  donné  sur 
l'ouvrage  des  renseignements  additionnels  très  précis,  d'après  plu- 
sieurs manuscrits  plus  complets  et  plus  corrects,  et  M.  Neubauer 
a  publié  dans  le  Letterbode  de  M.  Roest  (iv-v)  les  passages  qui 
manquent  dans  l'édition  de  Presbourg.  Les  travaux  profonds  de 
ces  deux  auteurs  nous  dispensent  de  parler  du  contenu  des  lettres 
plus  qu'il  n'est  nécessaire  pour  la  suite  de  cette  étude. 

2.  —  Abba  Mari  était  un  talmudiste  très  considéré,  mais  on  ne 
sait  pas  s'il  a  écrit  de  vastes  travaux  talmudiques.  Il  est  très  invrai- 
semblable qu'il  soit  identique,  comme  le  suppose  M.  Renan  [L  c, 
p.  649),  avec  cet  Abba  Mari  ben  Joseph  dont  Salomon  ben  Adéreth, 
dans  ses  Novelles  sur  le  traité  talmudique  Schabbat  (p.  128  a) 
cite  le  commentaire  sur  Alfasi.  Ce  nom  n'est  certes  pas  celui  du 
savant  de  Lunel,  et  si  parfois  il  signe  de  cette  façon,  ilfaut  remar- 
quer que  Ben  Adéreth,  dans  les  nombreuses  lettres  qu'il  lui  adresse, 
ne  le  nomme  jamais  Abba  Mari  ben  Joseph.  On  ne  peut  donc,  sans 
motifs  plus  graves,  considérer  ce  nom  comme  celui  de  notre  Abba 
Mari.  Ben  Adéreth  était,  du  reste,  bien  plus  âgé  qu'Abba  Mari  de 
Lunel  :  on  ne  peut  donc  pas  admettre  qu'il  l'ait  invoqué  comme 
une  autorité  rabbinique.  Les  Novelles  précitées  de  Ben  Adéreth 
ont  sans  doute  été  rédigées,  comme  la  plupart  de  celles  qu'il  a 
écrites,  bien  longtemps  avant  l'époque  de  la  querelle,  à  peu  près 
dans  les  années  1270  à  1290  '. 

On  ne  connaît  d'Abba  Mari  que  quelques  lettres  sur  des  ques- 
tions de  casuistique  qu'il  a  échangées  avec  Salomon  ben  Adéreth  - 

•  I/époquc  de  la  rédaction  de  ces  Novelles  ue  peut  être  déterminée  avec  précision. 
Cf.  Perles,  L  c.,p.  79.  Dans  les  Novelles  sur  Schabbat  le  nom  de  Nahmaui  est  suivi 
de  la  roniiule  b"lïT. 

*  Minhat  Kenaot,  n"  6.  Cl',  u"  8,  la  réponse  d' Adéreth.  Cf.  Répousas  d'Adéreth, 
éd.,  Berlin,  u'^  /i24-/i27. 


NOTICE  SUH  ABliA  MARI  DE  LUNEL  203 

OU  avec  celui-ci  et  Ascher  ben  Yeliiel  à  la  fois  •,  plus  une  réponse 
qui  se  trouve  dans  le  manuscrit  de  M.  Halberstam  ^  (n°  136)  et  qui, 
à  cause  des  renseignements  qu'elle  nous  donne  sur  les  relations 
d'Abba  Mari  avec  quelques  savants  provençaux,  réclame  une  plus 
lono>ue  description.  Ce  manuscrit,  écrit  sur  papier  petit  in-4»  par 
plusieurs  mains,  contient  204  ff.  ;  il  est  très  défectueux  en  certames 
parties,  renferme  de  nombreuses  Réponses  talmudiques  de  divers 
savants  éminents,  la  plupart  de  l'époque  de  Joseph  Caro  (1488- 
1575),  de  Joseph  Caro  lui-même,  Jacob  Berab,  Jacob  Castro,  Ehe 
Mizra'hi,  Moïse  ben  Joseph  di  Trani  et  autres  3;  de  plus  quel- 
ques Réponses  moins  nombreuses  traduites  de  l'arabe  en  hébreu, 
de  Joseph  ibn  Migasch  sans  doute*,  et  enfin  cinq  lettres  casuis- 
tiques de  savants  provençaux,  de  l'époque  de  Salomon  ben  Adé- 
reth  '.  Une  de  ces  lettres  est  d'un  docteur  très  estimé  «,  Mordechai 
ben  Isaac  Kimhi,  petit-fils  sans  doute  du  grammairien  David 
Kimhi;  une  autre  est  de  son  fils  Isaac  ^  lui  aussi  savant  très  es- 
timé, auteur  de  nombreux  écrits  talmudiques  et  autres,  et  connu 
aussi  comme  poète  liturgique  (il  vivait  encore  en  1341).  Ces  deux 
lettres,  empruntées  sans  doute  à  la  collection  «  plus  vaste  des  Ré- 
ponses de  ces  deux  rabbins,  ont  été  copiées  par  le  petit-fils  de 
Mordechai  Kimhi.  Ce  petit-fils  pourrait  bien  être  Joseph  ben  Salo- 
mon ben  Mordechai  Kimhi,  père  d'Isaac  ben  Joseph  Kimhi,  qui 
a  vécu  en  1394  à  Arles,  où  il  a  copié  plusieurs  écrits  de  Schem 
Tob  ibn  Falkera  ^  Parmi  les  savants  avec  lesquels  Isaac  ben  Mor- 

1  Jilinkat  Kmaot,  n"  50  ;  Question  à  Beu  Adérelh  et  n»  51  ;  Réponse  de  ce  der- 
nier Les  Réponses  que  celui-ci  envoya  à  Montpellier  sur  un  sujet  analogue  (cf.  edit. 
[prabertr   H    n°  237),  sont  sans  doute  aussi  adressées  à  Abba  Mari. 

Tu  Halberstam,  pour  me  permettre  d'approfondir  la  question,  a  eu  la  complai- 
sance de  m'envoyer  le  manuscrit  sur  la  couverture  duquel  il  a  écrit  quelques  rensci- 

^"'LaTernièrriSponse,  très -défectuense.  du  temps  de  Joseph  Caro,  renferme  entre 
autres  une   citation    remarquable   d'un    écrit  talmudique    inconnu    n  .  O    ^■^Ni.t3 

.nmnDi  nnnn^  \\:n  ^n:^  r)-\b:^i2r>  û",:»  nson  nn^*:)  5Nnwia 

*  Halberstam,  l.  c.  ._v»^.H-, 

'■■  Une  des  lettres,  189,  est  intitulée  TCJN  -^^nb  mnVûn  ^mpn  mni  ^1Ni.W 
N3"-:3n^  1MT3  Vn.  Uno  collection  de  ce  nom  était  connue  au  xvi»  siècle,  aussi 
bien  de' Joseph  ibn  Lêb,  cf.  b3"•^nr^)^  n"Y'U3.  I,  P-  24,  que  de  Beçalel  Askenasi. 
cf  ses  Réponses,  n->  20.  C'est  de  ce  recueil  aussi  que  sont  tirées  sans  doute  plusieurs 
Réponses  d'Isaac  ben  Immanuel  de  Lattes,  éd.  \  lenne,  p.  34  il. 

c  Ibid.,  p.  51,  -iDinTQ  'n  IIN^rr.  Cf.  Conforte,  Koré  ha-Dorot,  edit.  Berlin,  p.  - 
et  les  Réponses  précitées  de  Joseph  ibn  Lêb  et  Beçalel.  ^  ^  ^ 

7  Cf  ihid  ■  vovez  Isaac  de  Lattes,  Schaar^  Zion  :  -|"3  pHif^    1  551D.  .  QDn.  .1 

°^3n^  ^^^3T  ^^,:'5,-nr!  mnn  û-pOSI.  Voye.  sur  lui  Laudsbul,   AmouM  ha- 
Alioda,  I,  p.  124  ;  Zunz,  Literalwff.,  p.  505. 

s  Joseph  ibn  Lêb  {L  c]  avait  sous  les  yeux  une  collection  pareille. 
Cf.  Gross,  Monatsschrifl,  1880,  p.  174;  Landsliut,  /.  c. 


■-'Ji  REVL'E  DES  ÉTUDES  JUIVES 

dechai  était  en  correspondance  il  faut,  outre  Salomon  ben  Adé- 
reth  (Réponses  I,  n°  443),  Isaac  Kohen  de  Manosque  (Isaac  de 
Lattes,  Réponses,  p.  51)  et  Lévi  ben  Gerson  de  Marseille  [ihid., 
p.  93),  remarquer  Abba  Mari  de  Lunel.  Leur  correspondance  porte 
sur  un  cas  de  jurisprudence  matrimoniale,  qui,  à  des  époques  dif- 
férentes, fut  l'objet  de  controverses  entre  de  savants  talmudistes  : 
à  savoir,  au  bout  de  combien  de  temps,  une  femme  divorcée,  en- 
ceinte de  son  mari  ou  allaitant  l'enfant  déjà  né,  peut  se  remarier  '. 
Deux  savants  de  Marseille  Msaac  ben  Merwan  ben  Jacob  ba- 
Scbeniri  (de  Montauban  ?)  et  Moïse  ha-Doeg  ben  Natan  adres- 
sèrent sur  un  cas  analogue  une  question  à  Isaac  ben  Mordechai  et 
à  un  second  savant,  peut-être  son  frère  Salomon,  -cr^^^-^zK  En 
effet  le  premier  s'appelait  aussi  Mestre  Petit  ':;7:^N;^n^  mot  qui 
signifie  difficilement  Nîmes  (Renan,  l.  c,  p.  650),  mais  plutôt 
Nions,  en  latin  Neomagus  (ville  du  département  de  la  Drôme, 
au  nord  de  Vaison).  Isaac  ben  Mordechai  y  a  sans  doute  vécu  et  a 
émigré  plus  tard  à  Salon  où  Salomon  ben  Adéreth  {l.  c.)  lui  a 
adressé  des  lettres.  Isaac,  qui,  dans  sa  réponse  aux  savants  de 

'  rr^p^-^^N  rîp^r'»:  ^-IJI^:;.  Cf.  Ketouhot.  f<-60:  lehamot,  /d-42  •  Tossa- 
phot,  thid.;  Or  Zaroua,  I,  p.  173  ;  Salomon  ben  Adéreth,  l.  c,  n»  723  ■  Isaac  de 
LaUes,  Réponses,  p.  42  ;  Ascher  ben  Yehiel,  Réponses.  LUI,  1-3  ;  Isaac  ben  Sché- 
schet,  Réponses,  n»  13,  et  souvent  dans  les  Réponses  talmudiques.  Cf  Maïmonide 
^■^;i"i-"';    T:  chap.  XI  ;  Ehen  ha-Sze>\  chap.  xiii.  ' 

'  Le  manuscrit  p.  191  porte  au  bas  dune  lettre  la  si-nature  npr^  'îNin'D  pHit^ 
"'-I"'rwn  et  ^r;  nn  :,N-i-;-  rrO^.  Le  surnom  de  ha-Scheuiri  se  rencontre  chez  d'au- 
tres personnages  provençaux.  Un  Ezra  ben  MeschuUam  -^n^rrrr  vivait  en  1386  à 
Marseille.  Cf.  Isaac   de  Lattes,  Réponses,  p.  08  ;  uu  autre  de  ce  nom,   de  l'année 

W.'lS^r^'^ïrT  ™^;^^^-^l^  ^^^'i^^'^'  "°  362  ;  cf.  Zunz,  Zeitnn.j  des  Juden- 
thnms,  1839,  p.  681.  Le  poète  ha-Scheniri  est  bien  connu.  Il  est  très  douteux  que  ce 
mot  signihe  .  de  Montauban  ..  Cf.  Zunz.  S,,nago!jale  Poésie,-  Ralbins  fr.,  p.  71o 

..r\ru  1  .'°"'!'^'"''  ^^°''''  ^'"  ^'"^^^^"'  °'^^'  P'^^  identique,  comme  le  sup- 
pose M  Halberstam,  /.  c,  au  poëte  Moïse  Nathan  qui  s'appelait  de  son  vrai  nom 
Moïse  ben  Nathanel.  Cf.  Zunz,  Zur  Geschichte,  p.  474  ;  Hehr.  Bibl.,  XI,  p.  141  La 
dénomination  i^inri  est  incompréhensible.  Il  ne  faut  pas  songer  au  nom  biblique 
iJoeg,  isanmes,  lu,  2.  carie  mot  parait  être  un  surnom.  Je  ne  veux  pas  laisser  sans 
la  mentionner  cette  circonstance  qu'Abba  Mari  de  Lunel  signe  ainsi  sa  lettre  de  con- 
doléance sur  la  mort  de  Ben  Adéreth  (cf.  plus  loin]  nm::^.  n3.N:i  ï.^13  .Nnn 
ui  est  in    ■■     5        ■^^*"''*'  'ï"''  ^^^'^'^   '^^"^  ''^"'re  passage  signiherait  aussi  .  celui 

'  Dans  Isaac  de  Lattes,  Réponses,  p.  93,  et  Isaac  de  Lattes,  Schaaré  Zion,  simple- 
ment j  jo  n-i:o^N73  :  dans  la  liturgie  de  Carpentras,  dans  ses  Azharot,  on  a  ajouté 
a  son  nom  X^IzTj^^.  Cf.  Zunz,  Utcraturg.,  p.  fiOo  et  Landshut,  l.  c.  Le  nom  de  la 
»ï/  *''i,,7;'«'"^'"enl  altéré   dans  le    ms.  de   Parme,   n»  37.  Cf.  Halberstam,  Hebr. 

^imcs  est  toujours  transcrit  1^703.  Cf.  Temim  Dcim,  n»'  7,  19  ;  Isaac  ben  Schéschet, 
réponses,  n»  220.  Cf.  Lettcrhode,  p.  182,  ^i::^:;^:  ;  Minhat  Kenaot,  n"  23;  ms.  de 
,,  *!L^"''^'    ^"'''""^    /■'■•<    P-   t^6!i;    ms.    de    Munich,    n»    284  :  Lattes,    p.  112, 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  20b 

Marseille,  était  disposé  à  la  solution  la  plus  indulgente  dans  la 
question  sur  laquelle  on  le  consultait,  mais  qui  n'osait  pas  se  pro- 
noncer ouvertement,  s'est  sans  doute,  comme  c'était  l'habitude  en 
pareil  cas,  adressé  de  son  côté  à  d'autres  savants,  pour  délibérer 
avec  eux  sur  ce  sujet.  C'est  donc  certainement  à  lui  qu'est  adressée 
la  Réponse  de  son  ami  Abba  Mari  ben  Moïse  ben  Joseph  *,  de  Lu- 
nel  par  conséquent,  qui  décide,  avec  beaucoup  de  sévérité,  que 
dans  n'importe  quelle  circonstance,  et  sans  différence  aucune,  le 
délai  légal  de  vingt-quatre  mois,  comptés  à  partir  du  divorce,  de- 
vra être  maintenu. 

3.  —  Abba  Mari  est  aussi  nommé  parmi  les  poètes  liturgiques. 
Cependant  on  ne  peut  lui  attribuer  avec  certitude  qu'une  élégie  - 
(le  six  strophes  pour  le  9  Ab,  qui  commence  par  les  mots  :  >^3N 
ni3n^  S]iONb,  et  qui  probablement  a  été  écrite  après  l'expulsion  des 
Juifs  de  France,  laquelle  commença  dans  le  funeste  mois  d'Ab 
de  l'année  1306.  Les  deux  autres  élégies  '  que  nous  connaissons 
de  lui  sont  écrites  en  prose,  dans  une  langue  très  énergique,  il  est 
vrai,  mais  parsemée  d'expressions  talmudiques.  Une  de  ces  élégies 
roule  sur  la  mort  du  célèbre  Salomon  ben  Adéreth  (Cf.  plus  haut). 
Dans  l'autre  Abba  Mari  déplore  la  mort  de  son  ami  intime  *,  le 
grand  et  fin  talmudiste  Menahem  ben  Salomon,  nommé  Don 
Vidal  Salomon  de  Perpignan  ^,  décédé  à  Perpignan ,  dans  la 
seconde  moitié  de  l'année  1306  6,  et  d'un  savant  autrement  in- 
connu, Meschullam  ben  Makliir,  nommé  Don  Bonet  Crescas  de 
Lunel  \  qui  s'était  réfugié  sans  doute  à  Perpignan.  En  outre,  Abba 

'  Abba  Mari  lermine  ainsi  sa  lettre,  qui  dans  le  manuscrit  suit  immédiatement  celle 
.lUsaac  ben  Mordechai  ^mï^N   ';>:ND    ']r"i"l3   \:J"'N  CS3D1   '^wîSriD  ÛibO  nrNT 

*  Elle  n'est  pas  imprimée.  Cf.  à  ce  sujet  Zunz,  l.  c,  p.  498. 
3  Minhat  Kenaot,  ms.  n"  131-132;  Letterhodc,  V,  p.  73-79. 

*  Minhat  Kenaot,  l.  c,  "b  Ni!"!  JlNl  \1  û:;  i^b  br  ûmniD  1\-1^U:. 

5  Minhat  Kenaot,  n"  93.  C(.  Salomon  ben  Adéreth,  Réponses,  I,  n"  1249  ;  ibiJ., 
ûTN  mibin,  II,  n"  11;  Isaac  de  LaUes,  (ScAaa/^^îOJï,  où  Perpignan  est  donné 
comme  la  patrie  de  Méiri. 

'•  Cette  date  n'offre  aucun  doute.  Cf.  Bahhins  fr,,  p.  î)29.  Elle  est  confirmée  par  le 
passage  suivant  du  Srhalschélet    ha-Kahhala,  p.  46  a  .•  ("^T'NTD  dH3'^  '"1  h'i^)  T^^O'^^I 

nu  ^^j>'r\^y:  ']5?a  tn  û:n  .  • .  no-i^t  ^ums  ïr^m  i"d  Q-DbN  '-  nso  ï-^rro 
bNm::-^  bc  p^M  bri  ujnpM  nDO  by. 

"  Il  est  appelé  bbli^  DjH^^  et  vanté  à  côté  de  Méiri  comme  savant  très  impor- 
lanl.  Peut-être  est-il  identique  avec  ce  Sen  Bonet  de  Lunel  dont  le  supercommen- 
taire sur  Ibn  Ezra  est  cité  par  Nathanel  Caspi,  dans  son  commentaire  sur  le  Cozari. 
Cf.  Senior  Sachs,  dans  Kerem  Hemcd^  VIII,  p.  197  ;  Steinschneider,  dans  Jihl. 
Zeitschr.  de  Geiger,  VI,  p.  124.  Dans  notre  hypothèse  un  des  noms,  Crescas,  serait 
tombé,  ce  qui  arrive  souvent  chez  les  Provençaux.  Sachs  identifie  ce  Bonet  avec  Yc- 


206  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Mari  déplore  la  situation  pénible  de  ses  coreligionnaires  dans  les 
domaines  du  Roussillon,  de  la  Cerdagne  et  de  Majorque',  qui  ap- 
partenaient alors  à  T Aragon,  et  dont  le  roi  Jayme  II  fit  saisir  vers 
cette  époque  la  fortune  des  Juifs  et  brûler  en  public  les  livres  hé- 
breux. Abba  Mari,  à  la  suite  de  cet  événement,  institua  un  deuil 
public. 

En  revanche,  il  n'est  pas  certain  qu'il  soit  l'auteur  d'une  poésie 
liturgique  -  commençant  par  les  mots  bi  b:'  ■^tiN  et  qui  ne  ren- 
ferme que  l'acrostiche  Abba  Mari.  L'allusion  au  nom  de  Joseph, 
son  père,  est  incertaine  ;  et  si  même  ce  nom  était  indiqué  claire- 
ment, l'auteur  resterait  toujours  difficile  à  déterminer,  puisqu'il 
y  a  eu  encore  d'autres  poètes  liturgiques  du  nom  d' Abba  Mari  ben 
Joseph,  entre  autres  Abba  Mari  ben  Joseph  ibn  Caspi,  auteur  de 
la  poésie  liturgique  qui  commence  par  •^yr:û  :>J2^^  ■':d3>  '"  (Zunz, 
l.  c).  Ce  dernier  Abba  Mari  est  peut-être  le  père  de  l'éloquent 
Joseph  ben  Abba  Mari  ben  Joseph  ibn  Caspi  surnommé  Bonafoux 
de  l'Argentière  (né  en  1280),  ou  peut-être  est-il  le  talmudiste  Abba 
Mari  ben  Caspi  ^  d'Alger,  celui,  sans  doute,  qui  a  écrit  l'inscrip- 
tion'* poétique,  gravée  sur  le  monument  funèbre  du  célèbre  Isaac 
ben  Schéschet  (mort  en  1408)  ;  mais  on  ne  sait  pas  si  son  père  s'ap- 
pelait Joseph.  Le  simple  nom  d'Abba  Mari  se  retrouve  encore  dans 
deux  autres  poésies,  l'une  en  hébreu  commençant  par  Tnri"^  nnri'' 
(Zunz,  L  c,  Nachtràge,  p.  50)  et  l'autre  en  araméen  commençant 
par  n-^Tz-û  r:bi<b  NniNi  nn^nx  (Luzzato,  L  c). 

L'affirmation  »  qu'Abba  Mari  de  Lunel  ou  un  Abba  Mari  quel- 
conque aurait  commenté  la  liturgie  araméenne  d'Isaac  ben 
Gayyath  pour  la  fête  de  Pourim   repose  sur  un  malentendu.  L'au- 

daya  Pcnini,  mais  ce  dernier,  quoiqu'il  portât  le  nom  de  Bonet,  n'est  jamais  appelé 
«  de  Lunel  » . 

1  Letterbode,  L  c,  np^lliT^T  r!"'''5"'1^i:  'îT''«bï:"n  mb;np.  Le  second  nom  est 
Cerdana,  en  latin  Ceretania  ou  Geredania,  en  français  Cerdagne,  ancien  comté  situe 
dans  les  Pyrénées,  confinant  au  Roussillon,  et  qui  appartient  aujourd'hui  partie  à 
l'Espagne,  partie  à  la  France,  département  des  Pyrénées-Orientales. 

=•  Cette  poésie  est  imprimée  dans  le  Kf.reni Hemed ,  IV,  p.  30.  CL  Zunz,  l.  c,  p.  537, 
La  dernière  strophe  contient  les  lignes  suivantes  yj'ÏD  t\OV  lï^'O  T^DDS  'JSN'Û  '^ÏT' 
tlDT^  1-12  lrT"1D"^  'J33''n.  Dans  ces  derniers  mots,  Zunz  prétend  voir  une  allusion  au 
nom  du  père  do  l'auteur.  Cf.  Luzzatto's  Nachlass  dans  le  Magazin  de  Bcrliner,  Vil, 
partie  hébraïque,  p.  4,  où  cette  poésie  ainsi  que  celle  dont  nous  avons  parlé  N2N 
SlIDXb  et  une  troisième  qui  commence  par  iS^^N^  JinON  sont  attribuées,  semble-t-il, 
à  Ai)ba  Mari  de  Lunel. 

3  Cf.  Salomon  ben  Simon  Duran,  Réponses,  n"  G12. 

*  Cr.  Kaufmann,  Monatsuchrift,  '1882,  p.   8(3. 

'•  Cf.,  à  ce  sujet,  Steinschneidur,  Cat.  Bodl.,  p.  2307  et  27G1  ;  Catal.  mss,  Michael, 
p.  'l'M').  Cf.  Jia///i.  /?*.,  p.  GOIi,  où  cependant  la  désignation  qu'emploie  Salomon  Du- 
ran t~\yz  N3i<,  qui  ne  laisse  aucune  incertitude  sur  l'auteur,  n'est  pas  prise  eu  consi- 
dération. 


NOTICE  SUR  ABBA  MARI  DE  LUNEL  207 

ti'iir  de  ce  commentaire  est  Zémaii  Diiran  d'Alger  (xvi*  siècle), 
dont  le  fils  Salomon  Duran  junior  fit  entrer  l'écrit  de  son  père 
'c  -1-173  N3N  »,  dans  son  ouvrage  b^Tvii"»  mïîsn  «  Gloire  d'Israël  ». 

4.  —  On  dit  aussi  qu'Abba  Mari  de  Lunel  a  composé  un  ou- 
vrage astronomique*.  Mais  c'est  là  une  hypothèse  tout  à  fait  in- 
vraisemblable, si  on  considère  l'attitude  hostile  de  ce  rabbin  à 
l'égard  des  études  scientifiques.  L'auteur  en  est  peut-être  le  phi- 
losophe Abba  Mari,  nommé  encore  Sen  Astruc  de  Noyés-,  chez 
lequel  Samuel  ben  Jehuda  ben  Meschullam  de  Marseille  est  allé 
tHudier  (vers  1324)  l'astronomie  à  Salon,  et  sans  doute  aussi  le 
même  que  l'auteur  de  la  traduction  hébraïque  d'Euclide^. 

Henri  Gross. 


1  Voy.  Gerondi,  ni'îTn,  p.  24  ;  De  Rossi,  Dizionario  sforico,  p.  1  ;  Calai,  mss. 
Codd.  à  l'index  s.  v.  Le  manuscrit  n'est  pas  indiqué  avec  précision,  je  ne  lai  pas 
trouvé. 

*  Voy.  Gross,  Monatsschrift,  1879,  p.  471. 

3  Ms,  de  Munich,  91  a,  Mm»  ïDriujrî  EiiDip-^sin  'N  nttNKjri  Tîî  nrT^nD  n^-^n 

"'"153  MDN  p^^•  La  façon  dont  ce  dernier  est  cité  ici  ne  plaide  pas  en  faveur  de  l'hy- 
pothèse proposée  dans  le  catalogue,  p.  40,  que  i-itt  NIN  voudrait  dire  le  père  du 
traducteur. 


LISTE  DE  RABBll  DRESSEE  PAR  AZRIEL  TRAROTTO 

UNE  DES  SOURCES  DE  &UEDiLYA  IBN  YÂHYA 


Dans  le  manuscrit  n°  227  de  M.  Halberstam,  qui  comprend  les 
notes  recueillies  par  Abraham  Joseph  Salomon  Graziano  n:»"  d-'K, 
se  trouve,  f"  226(2  à  227 <2,  une  nomenclature  de  savants,  semblable 
à  celle  que  nous  donne  Salomon  Luria  dans  sa  consultation  n°  29, 
et  à  celle  du  petit-fils  de  Samuel  de  Sélestat  publiée  par  Een- 
jacob  dans  le  deuxième  fascicule  de  ses  D■'p^"^r  ûnnn.  Il  était  per- 
mis de  supposer  à  priori  que  Graziano,  qui  a  été  un  grand  collec- 
tionneur, avait  copié  cette  liste  sur  un  manuscrit  plus  ancien, 
quoiqu'il  n'indique  dans  sa  copie  ni  l'auteur  de  cette  pièce,  ni  sa 
provenance.  Mais  nous  n'en  sommes  pas  réduits  sur  ce  point  à  des 
conjectures  :  nous  connaissons  le  manuscrit  original,  et,  par  suite, 
l'auteur  de  la  relation,  et  nous  savons  de  plus  que  Graziano  a  pos- 
sédé ultérieurement  ce  ms. 

Comme  nous  l'apprend  le  catalogue  des  manuscrits  hébreux  de 
Cambridge,  par  Schiller  Szinessy,  I,  97,  le  ms.  40  a  été  acheté  par 
Graziano  dans  la  succession  de  Natanel  Trabotto  (forme  italienne 
de  L2n:3-iL2).  La  pièce  que  nous  allons  publier  se  trouve  égale- 
ment dans  ce  volume,  sous  le  n°  19,  avec  cette  seule  différence 
que  la  suscription  du  ms.  Halberstam  y  est  mise  à  la  fin.  Ce  ms. 
de  Cambridge  nous  apprend  également  que  l'auteur  de  la  pièce 
est  Azriel  Trabotto,  portant  le  titre  de  Çarfati  que  prenaient, 
depuis  Joseph  Colon  I,  tous  les  membres  de  cette  famille  riche  en 
savants.  Je  puis  aujourd'hui,  grâce  aux  gloses  manuscrites  de 
Graziano  sur  mon  exemplaire  du  Schalschélet  hahhabbalah,  indi- 
quer avec  précision  la  parenté  d'Azriel  Trabotto  avec  Graziano. 
Azriel  ben  Yehiel  Trabotto  fut  chef  de  l'école  d'Ascoli  et  mourut 
à  Pesaro  lejeudi22  tammuz  5329,  ce  qui  correspond,  comme  la 
glose  nous  le  dit  explicitement,  au  7  juillet  [1.569].  Il  était  le  bi- 
saïeul  de  Graziano,  car  la  dénomination  de  -^apT  jointe  au  nom 


LISTE  DE  RABBINS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  209 

d'Azriel  dans  la  glose  du  f*  64éï  démon  Schalschélet,  édit.  Venise, 
est  expliquée,  f''  65  &,  par  les  mots  b"ii:T  tt"N  :?"73  bïJ  nspT,  «  grand- 
père  de  mon  père  ».  Si  donc  Azriel  est  l'auteur  de  notre  pièce, 
Graziano  aura  recueilli  dans  ses  collections  le  travail  de  son 
bisaïeul. 

Dans  une  littérature  aussi  pauvre  que  la  nôtre  en  sources  his- 
toriques et  oii  la  biographie  des  savants  se  compose  péniblement 
à  l'aide  de  notices  dispersées ,  le  plus  petit  travail  d'ensem.ble  un  peu 
ancien,  le  moindre  essai  de  réunir  dans  une  suite  chronologique  et 
généalogique  nos  écrivains  les  plus  éminents  est  pour  nous  d'un 
intérêt  considérable.  Comme  on  le  verra  par  les  notes  dont  j'ai  ac- 
compagné le  texte  de  notre  liste,  surtout  si  on  la  complète  en 
consultant  les  travaux  spéciaux  auxquels  je  renvoie,  cette  liste 
nous  fournit  pour  la  chronologie  des  renseignements  précieux  à  la 
fois  par  leur  clarté  et  leur  exactitude.  Les  informations  littéraires 
qui  s'y  trouvent  ne  sont  pas  toutes  puisées  dans  des  livres  ; 
çà  et  là  on  y  rencontre  aussi  quelques  fragments  de  traditions 
historiques  qui  suffiraient  seuls  à  justifier  notre  publication. 
Trabotto  est  si  familier  avec  la  littérature  des  Toçafistes,  qu'on 
peut  se  demander  si  sa  famille,  en  même  temps  qu'elle  portait  le 
nom  de  Çarfati  (français),  n'a  pas  gardé  un  souvenir  de  traditions 
françaises.  Dans  tous  les  cas,  l'intérêt  véritablement  scientifique 
qu'Azriel  éprouvait  pour  l'histoire  de  nos  savants  est  un  fait  digne 
d'attention  et  qu'on  note  avec  plaisir. 

La  liste  que  nous  publions  est  un  document  qui  nous  servira  à  jus- 
tifier l'auteur  si  souvent  méconnu  du  Schalschélet,  Guedalya  ben 
Joseph  ibn  Yahya,  dont  Joseph  del  Medigo  disait  méchamment  qu'il 
fallait  l'attacher  à  sa  propre  «  chaîne  ».  Le  pieux  Azulaï  lui-même 
traite  Guedalya  avec  malveillance  (par  exemple  s.  v.  inNn)  ;  Zunz 
le  nomme  tout  simplement  l'auteur  «  léger  »  de  la  Chaîne  de  la 
tradition  (ZeitscJirift,  280),  et  appelle  ce  livre  un  livre  «  souvent 
mensonger  »  [ihid.,  I,  131).  Contrairement  à  ces  injustes  accusa- 
tions, on  se  convaincra  facilement  que  Guedalya  a  déployé  un  zèle 
touchant  et  digne  de  tout  éloge  en  s'efforçant  de  réunir  tout  ce 
qu'il  pouvait  trouver  de  renseignements  sur  l'histoire  de  nos  sa- 
vants, et  s'il  a  mis  sa  confiance  dans  tous  les  vieux  papiers  et 
dans  tout  ce  qui  est  écrit,  suivant  l'épigramme  d' Azulaï,  on  verra 
qu'il  a  toujours  suivi  ses  auteurs  avec  une  fidélité  scrupuleuse  et 
souvent  omis  ce  qui  lui  paraissait  peu  croyable.  Comme  nous  le 
montrerons,  Guedalya  a  connu  notre  pièce  de  Trabotto  et  l'a  utilisée 
dans  son  ouvrage,  où  il  la  cite  souvent  comme  un  vieux  Conteros 
Dnuîip  ;  il  l'a  même  tirée  directement  des  papiers  de  R.  Azriel 
Trabotto,  comme    nous  essayerons  de  le  prouver.   Dans   l'iiis- 


210  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

toire  merveilleuse  qu'il  raconte  au  f<'52a,  il  nous  dit  explici- 
tement qu'il  a  trouvé  cette  histoire  dans  un  recueil  de  l'école  de 
Rabbi  Trabotto.  Or,  nous  retrouvons  cette  même  histoire  dans  le 
recueil  de  notes  de  Graziano  (ms.  Halberstam),  comme  je  le  mon- 
trerai prochainement  dans  cette  Revue.  De  même,  la  notice  mer- 
veilleuse sur  la  pierre  tumulaire  de  la  mère  de  Nahmani  (56  a  du 
ScJialschélet)  se  retrouve  dans  Graziano  (voy.  notre  note  94). 

Remarquons  enfin  qu'Azriel  Trabotto  considère  déjà  notre  pièce 
comme  un  vieux  Conteros.  Elle  est  donc  sans  doute  le  travail  d'un 
de  ses  ancêtres  du  même  nom  que  lui.  En  tout  cas,  nous  avons  sous 
les  yeux  l'œuvre  d'un  des  ancêtres  de  Graziano. 

,mi:nïî  -inci  tîsïînt  ,'i-iDDi  ,r3ni:T  ,b3m  bNi*::-'  y-ixn  .b^T^s-^n  rrnn 
-iDDT ,  m5NO  mnr^ïm  ,  niisbr;  •'psD  isnD  Dni:p?:T  û-^-idd  ■'inn?:  ûnitpn 

:  t:7:">:J  by  niïtdï  «b  Tor» 
(2)  •^xn»  3-1 17:7  ,  (1)  ï-ttsmïi  ï^io  T^rto  -^'iix  nm  ï^rm  -inx  î-:;i\:;isin 
)Vj>^  ^û-'-jritt  mttnp723  -nwbnn  -i3t;"i  ■'i<-n3o  "iin-iw  mnbN'wf:  bjrn  iisa 

r^np3  "jT^ub  ii<  N-i!^  n2î  'jr:;b  \>?  ']"n  ^n:;  N-nwbn  •'-1:31  b-^p'^iT  (3)  •{•'■tai-îpa 
"i^an  -i-iDittT  ,&';::  rT:?npii-t  i-inbnr;  n7:\-in  "iriN  tnm  «■^■^snsn  b^D^ 
•ji^tt^D  -1'"-!^  înp3  -iHN  "îivNî  rr^r:  ,  riT  iins  nhhn  ni  ^7:'^3  ,  N"«rî  •^xm^D 
i-inx  ,  nan  -.cn  n-^nr;  n-nn  nson  D"'?::»^  -^v::  N"3'*rnr;  itst^it  ,  «"nN-^'^p 
T773:?  îj-'inx  û-'iiNS  nsi^T  (■'•)  nbin:i  ni::br:  brn  "jins  ■'NIiïT'  n-i  '7735'  p 
■i3n::2  (6j  n"o  riwsT  (3)  N-,p72ï^  br)  n^n  -i->:;n  iin^  r^iro  '-1  "5153  t^^hn 

1531    Nl-^lïa   31    ,  (9)  r!\-in72   21    ,  (8)  "^IHûbD  21   ,(7)  pIS:  p5  21   ,  I73\a  br 

21  ,(11)  tnb"»ai'«a  21  ,mDi»73  -i^^-j  by  (lO)  t2^ir:3  lan  irj<  \yfn  ai 
13121  i;rrii  ,  bi<"ri  i:''2i  ,  (U)  -^nsii-js  21  ,  (13)  -^«brr^s  21  ,  (12)  ai^y 
pns"»  irai ,  (16)  m:>ii:p7:ri  isd  lan  bi<:2n  ir2ii  (15)  -fii:?r:  b^a  in3 
û"^i::>U5rî-,  ,  (17)  i;7373  bap  ti"a72i:-;i  ,  -^DobN  Nip3ïi  ico  lan  i^î<  ""CND 
^■'DDbisman':}  pnjf^  irai  riT  ni:?u  ainD  -^rKit?:  ,  cobN  21  ■'ir::  û"^Nip3?i 
c\s  oi72"'5ibp  13-^21  ,0E73  pHi:"'  lï^^ai  Nin  û:*  &<ip3i  ^r:-^^  (is)  ns3  bax 
,  (22)  riN-'iNB?:  rTCî73  i"ir; ,  (21)  n^w  ai ,  (20)  ii^Nin  û^ds  is-^ai ,  (19)  iwii 
i"irr  aa  ,  niîiNib  ^7:c3  fasiii  trsv::  «"-^i  ,  (23)  t^siNS  iNip3  ibx  bs 
an  iïï!!<  ,r;bi:ir;  iintî  iiœia  i3-'ai  ti-^nDi^îr;  ^731  r'^^  P  îNinTO 
ninsDT:  nsp  iNa  niîii  ni3iN5b  ^t^ds  Nir;  na  / 137373  ibap  rsix  ''31N3 
.  (2;j)  iiïta  ^Nn  ai  mnx  N\:i3  n'^îi  baab  ^brr^  i-^b?  iitNi  ,  [2.'.)  ni73bna 
,niaiï:ni  nibN-:;  n733i  diNii73Ni  ûiN3n  iïjo  lan  (26)  oby  arj  ciDi-"  is-iai 
ap^i  13^21  v'01  bc  vniai  ,p!iai73  iai  n^n  Nbi  (27)  a^Ta  137373  bap'^"«5ii 
î=ip  (3U)  rriiïi^  i"a  pHii^  is'^aii  ,(2'j)  ^ibïi  pnî:^  13^311  ,(28)  ipi  i"a 
13-^ai  inT  v'c-i  ^  ûMjy73  C)-'73r>D  'n73bna  i''UJii''Da  iï<"<2ni  ,  nstp  ■>"ûib 


LISTE  DE  RABBINS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  211 

(31)  T'ttîTT'cn  bis^'^a-^  bi)  "^i-^y  -i\^r;  nrJN  isDmDT^r;  pni''  "i"3  T^i^b-a 
D5 ,  17:':^  by  lan^::  -i^n  rnsblr:  ipDD  nws  labw  û-^isD  T's^t  ,  niî^brn 
,  ï-T'^n  i''^-!  inittbnT^  (33)  rr^nMO  n"ir;  ,  rsDb  -ns3  (32)  ■^"n-j'^n  "riTrîT^r; 
irnnb  rnNas  n-iminti  nriN  ,  (34)  man  szn  -^^  û-';^  nb  i^r;  t^'b  •^";i:^b 
ï-iirp  '•^D':3  V'nn  î^iî^  ,  (36)  ini  ^"n  ri'îTni  i"-ir:b  n^îiur;!  ,  (35)  ^-^nt: 
:p::3  "iin::  Ij-^^-i  ,  (38)  û-^isk  ^''-ni-ib  n-^"»::-^?":::!-;"! ,  (37)  r^n  ■'"'>ï;-i  "issb  mnisa 
K-inn  Nnn  n::D»  aii  -ixa  n wîî  L3"3'v:;n  Nir;  b^{^730  nrs-i  ,  iD"'nwS*  r!">ab\:) 
,(39)  ninN  mn5D?3  nirpi  -^i^  nsD  na  iN-^m  ,-i3pT  ''"•c-i  b":j  in-r^-jD  ii-în 

nriN  n"-i  m:y  /-lO-^n  nso  nnn  n"-n  ^rr;  •^''cn  b^  inn  ^sn  ibN  nob-i; 
li-^nn  ,(41)  •a3"'i-^b-nN!':  np:?i  i^ian  Nir:i  ,û"i:::>i?a  m72ip7:3  masinn  -i5T3 
bapn  rr^n  n"-i  b^  imm  in  (42)  j-nssinr;  b:>n  rnn^r;  bNi^^r::  n"2  pnsi'' 
'■)  /  (44)  v'-an  i3pîtt  bnp  û  "nam  ,  (43)  t^hn  t=,"'2-c^i2  h'2'p  n"-n  ,  i;x:» 
np:?-^  -i"-im  (46)  -^sTiTo  n"3  priiT'i  is^mi  ,  (45)  î]\s'Tir:  b:?n  y"-»'?:?:  irr-^bN 
û-^-^n  "iD^nn  ,  (48)  ^^"■«■^bTiNT:  rjOT^  n"nri  û^i  ,  T^r!  n"-i  iTii^^brD^  (47)  bïî-TJ:"^ 
nïta  "i^N  (50)  "nï3  Tii^a  riDii  i^-^nm  ,  ■'iiip?:  t:3"-i!i  bin  i52N  "^nN  (49)  )to 
Tîttbi  n""!  i7:"^n  T^r.  ûrr'jiy  (5i)  mcDinn  iSTi  t=i:;-i  ,i-nin  "'ïJ72in  'rr 
nï-in-i  ■i73'«2  (53)  ■'UJ-^ns»  N-'bN  i3"^:n-i  ,  (52)  a-^n-^an  û"i'T^7:bn  nb  i^rri  nrin-'^'^n 
i3^a-n  ,  (54)  'i;25'^'-iD»  n'iiir;-'  'n  ,  ri-^^-^tt  "ta-^^pi  ,  rr^r:  rnsDinn  b3>3  prii^-^ 
-l'JiîN  (56)  v?"P^  ir^:î:^o  ir^'^.i  (55)  r;?2Tnnr^  -!2D  nan  n-rx  pnir-^  '-i"3  "ri-in 
"i^-^n"-,  ^T^r;  t-nDSin:i  b:?3  bNi7:uj  n''^  pni:"'  'n  -^T^T^bn  ti-^j^-iT  nno  iNa 
ù-iT  ,  rr^r:  ■^'iî-'-ict:  tmiï-!"^  'n  T'T^bn  ,  lirn  ^b^  t^dn  (57)  ^œ-i-iî^^  bN-^n-^ 
(59)  NïN-^TiT:  priif'  i"-i^n  ,  bT7r,r;  mi:):  "iss  nan  nïïiN  (58)  ■'iipTs  r;"i!72  i"nrt 
i3"i::i  iiM->  N"n-^-i5o  t::  bnp  -iiaiis»  bi<"^n-'  i2""n'",i  ,:?i-it  -iin  brn  iT33t:îN 
iTDonQnî  Nb  bnN  ,niDOin  ni^7  d5  nnn  riT  «"nm  ,(60)  ûrrisN  "i"3  prrif^ 
fa:  bap  !-i55<-^n7:  pn^-^  n"nm  ^bNi^iD  n"3  pni:i  iD-^n-i  -inn"»::  imN^ 
bs  -1^3  T'pDttii  's  N:?'^iw  (61)  "•D'intin  Ni:'?:;^:)  -172:3  ■'"iripT:  ^^-cjn^  "i;-'an» 
"i"-!  biD  lîpT  (62)  ï^nwuJ  •i3-'3-i  /T^pDT^  Ni^T  T^s^i  iniUN  n^'T  b:?  T'psTsn 
niEDnn  inn  nu:î<  (63)  pn^^Nî  -li^ni  iî^t  N"n"^i  b'^D  i33i  r;^!-;  riDOinr:  b3>3 
bN3n3  "i"-ir!  iiinp^i  /n  iini  br  i^nN  ^■^nn  (64)  ^npnii  ti^-i'is  j-i307:3 
(66)  ï-iiDDinn  1SÎ3T  f-iiDOinrr  byn  pnifi  i5^3-i  m:3-'^^a  n^^b  (65)  "iia-^s^j 
n^Tî^î  ■'T55'>::n!^  (67)  pi"iDD:j"'^tt  bm.'ir;  fa-^^oN  r.-^^i  ,  û-^-jj^iîo  t::-^737D 
î-jTSibD  -131  ,  n"n  n3^'i:"^3  no-iiin  "iTob  ■«^nnTaai  ^"ttDni  (68)  rnsoinn 
la-^n-i  lï^TT  ,■^5117:3  smttip73  r^Tosa  "iSTS!^  ïiiln  ^nb^i  (69)  b^r  li-'n-Tî 
:*"73D3  Ni:?:n  'T':;n3i  nnu3N  pn  ^i:;b  biD"^  ûoipir;  ûN  ^''^-'n»  bNïï^  (70)  b^r 
ti-'-isN  is-^nn  Ni!-îi  -^ijT-ittn  -i^jt^  -ihn  anaN  li-^nn  nm  ,  '{■'rj:  miDbrtn 
■^^n-iTon  -iibr:  bt^T^  is-^n-n  ,  p'niD"D:i'^'n73  d-^noN  nî"'^'-,  b:'  pbnsi  (7i)  r!"3i3'a 
,?-i3;z53  ^57373  nïîirb  "im73  X'TJ  MrwS2  ns^can  t:ît'  -^aa  v^^"!^  nac?:^ 
bNT»  n"3  nTr'^b^i  isinn  t^iii  -^Dn-iTon  i-n73ip73  !-i7:53  ':r:  ^''''nN-i 
3>iT^n  p-n"33:3i-i73  "i-^n::  is-^anb  ■jî'7:  ûTp  ^ît  r!"'^3N-n  ,"^nnDT  n^^N  (72)  -^nbr: 
ûw-ipan  û-^Lîipb  "iDD  iinn  ■i"'T7:bm  ,vm3r:5n72  aàiz  ■'annT:!!  bD  i^un 
■'i'Tn733  iSTsri  ■^TïiuJN  (74)  ';n5  n"3  nT^'-'bN  'n  i^-^^ni  i''=iNn  /  (73)  y'nïjn 
bM'^n-'  '172  bap  nsnn  ('5)  p-i"i33'ji-i73  "tiist:  'n  ,  rr^rr  J-t""'aNn  br:  i5pT 


212  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

r-i'wbca  IN  û-^r^rn  -^sn-iwa  ^^','D'z^  ,  (76)  "^iin  n"-irT  ï<npD  t^^nt  ■^•::nDtt 
pn"nnrjn-i72  -i\s73  nrnnb  nnn  T^wbn  -^tî^'^n  (77)  -itUN  r.^ii  ,  m7:iT?T3 
!-7:>n-iK  -,3ri  (78)  npr"^  n"n^  ism  ,  ■^-■■«i^îxî  !>i-ip3  -ido  nam  rr^r: 
'D  N-p:-  "HN  -lîD  nnm  rr^n  ■'"s-iN  (79)  N2:":57:tt  ']i-ia  li-^n-ii  ,û-^-n:j 
rj  lo-'s  ï-T^n  -^c-^-is»  bN-^m  'n  b\::  i;nn  (80)  -^sTirr^  b:>3' ,  s-iT^^nr: 
■'nwy  î>!ip3ï^  -i^rpr:  s-ns:»  -ido  nnn  ncN  (si)  b"^"n-np7:  pni:"'  i^-^n-i 
n"n  pni:-^  irnn::  >iir:  cr,  bnp  b-^nmpT:  pni:-'  "irnn  "^d  !-jNn3i  rsbns 
[p]  y'ttsr!  b?  r!V.r7  -,*::n  i«3)  yno  lï-'n-n  ,r;b3>7ûb  i;-i~-t  t£n  ,(82)  ûfi-iax 
a-^^rn  TTî  pn"i3bT  ,N-^":ibL3pT  n-icDn  tsi  :i":;"'^-ie»  bx'^r;"'  la-^anTo  bsp 
,D'^poiEr^  -îN'J  n7  mi?:\:;3  i2p3  biîTr"^n  m-nn  i:i:"'nnr:  t^n  fbni 
biiin  i-nnna  m'::rb  î<ibcn  ■jin-^"'?:  ir^-i  a-ir;  in  riT'r:  ncn  irn-i 
nn-ir^  t2"^"ico  ncs'  n?:::?:  -u-tt^t  m-'rcnri  bs  iN-^m  ,  û-i-ido  n"-'b  pbnsrs 
ib  cznp  "^''uî-.T  ,bî<:y7:"w"'  y-ixa  -;rN  nmump?^  'n^T,  NirsT  ,(84)  yp  •;■»« 
-7:7T ,  n^rr  [86)  n^in-i:»  -^^^^  -,"3  cri-nN  nra^  3-r;  -ht  n"nN-in  ,  (8o)  a^n 
-inn  Kim  "irn^cî-^n  iTjynttbb  -iDinss  n"-ibNNn'i:  n"•^^  ,(87)  ïD"n  1:13-1  in^n 
,n"a»-;r;  ^nm  b^»  ^^cm  (88)  ir:::j2  -nD\s  'np:r:  nni::^i  -nD^î<  yrrn  nnx  'd 
n^rro  -inn  nnsn  ^n^Nm  ,niN72  bi^a  T'-iin  ynN3  v;eb  i^^rî  (89)  nn»  ■!3"Nnm 
-i"nrîb«  n;nn  t=i"37:nr7  b^  :->or;':;  !-tt  -"^N-im  ,-^mi3  ti"nn-!r7  ncbp» 
nab  -nî<7:r5  bra  (9i)  inbn  nin-îT  iram  Nir;T  ,  rr^n  (90)  T'n  =x  t=:mnN 
ï-iir:  i^^i-bT  ,  r;^-  «"^cnr:  t::  inn  (92)  i-tr^ibTj:^  -zv  -i"-i-  ,  »nnN  rin^'^ia 
"i^ns  -i"a  r-!0?o  l'inn  nnr;  î<im  VaTann  ,  mi<7a  bii:  (93)  -lON  nîT"  -i"n!^ 
ic»in  r:":;7:n  'd  rr^T:  lï-^n^  r:T~  uî^nï^i  ,  rnin  y^-ir;  ûct  (9'i)  n3n-i[is]n 
nwbn  rr^r:  ribnpm  nrsnn  rôcim  ,  mT^bnr;  bo  tr  noDin  nam  ,  n-nn 
N-ipjn  inx  -icD  -inn  -iviîn  it:^':;^^  (95)  NO"iitt-i3!o  "lî^ibN  imn»  inbap 
r!:2"ibrj73  iizv -i"nïiNi!r; pr^m»  i3-iû:72Nt  ,';''3'2"i!^'2bnp  (96)N"3"::-im  npin 
■'rib^tnnrî  n^nx  -jn  ûn-nx  n"3  riT^b^r  i:"'3-i  :^t  N"T:;nii  (97)  iinns  -i">aîo 
r-^:jrî  rnin  ncD  -inm  "^-^s  nt^ri  :]:r  n'C2  "n?  Nir;  Dsi  [(98)  ^iibn^r:  n":] 
■".TTN  im-i  iK^m  irc  b5>  (u:"n)  n"'j  ixjsrs  ■nTsbnn  bsm  ,  nspm  ']T-iî<r; 
n-nn  û^  yn-inb  n:2"ib-i:23  -i'wN  im-i  nrbm  ,  ht^  i3idt  n"::^  iTsriï;»?^ 
(looj-ji-inxn  ûiDs  i;ia-i  ,ïî"3ï:-ir7  n^na  "jDDNrsT  (99)  n3i::iir-i3  "pi  uy 

:  1-^n  î<"2-:5-ir;  bo  iT^^bn 

Avant  de  passer  à  l'étude  de  cette  pièce,  nous  en  donnons  ici, 
pour  les  lecteurs  qui  ne  sont  pas  initiés  au  style  rabbinique,  une 
traduction  à  peu  près  littérale. 

«  Tableau  d'une  partie  des  savants  qui  ont  vécu  après  la  clôture 
du  Talmud,  tels  que  Saboréens,  Gueo?iim,  casuistes  modernes  et 
anciens,  qui  ont  cultivé  la  Tora  en  Israël,  dans  la  Terre  Sainte,  et 
u  Babel,  en  France,  en  Espagne,  en  Allemagne  et  autres  pa^^s,  et 
dont  les  uns  ont  écrit  des  livres,  les  autres  des  décisions  rituelles 
ou  des  consultations,  sans  avoir  fait  un  livre  qui  porte  leur  nom. 

')  Après  Rabina  et  Uab    Ascbi,    les   derniers    talmudistes,   est 


LISTE  DR  RABBINS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TUABOTTÛ  213 

venu  R.  Ahaï  Gaon,  Saboréen,  auteur  des  Scàeéltot,  mentionné  en  un 
petit  nombre  de  passages  du  Talmud,  entre  autres  au  I"  cbap.  de 
Kidduscliin  dans  un  passage  ajouté  après  la  rédaction  du  Talmud. 
R.    Ahaï  avait  pour  contemporain  le  Gaon  R.  Simon  de  Kiyyara. 
Puis  est  venu   Rab  Yehudaï  Gaou,  auteur  du  Halakhot  gedolot,  et 
après  celui-ci,  d'autres  Gueonim  tels  que  R.   Saadia  Gaon  (qui  a 
commenté  toute  la  Rible  et  à  qui  sont  attribuées  un  grand  nombre 
de  Consultations),  R.  Cohen  Cédek,  R.  Paltoï,  R.  Mattatia,  R.  Scherira 
et  son  fils  R.    Haï  (auteur  de  Portes  sur  la  législation  civile),   R. 
Sar  Schalom,  R.  Amram,  R.  Nihalaï,  R.  Natronaï,  Rabbénu  Hanna- 
nel  et  son  gendre  R.  Natan  ;_auteur  de  VArukh),  R.  Hannanel  qui  a 
écrit  le  livre  des  Maqçuot,  R.  Isaac  de  Fez  ;auteur  de  VAlfasi  ;  Maï- 
monide  a  suivi  son  enseignement  ;  c'est  par  erreur  qu'on  lui  a  attri- 
bué les  Portes  de  R.  Alfas,  qui  ne  sont  pas  de  lui,  mais  de  son  neveu 
Isaac  de  Fez),  R.  Calonymos  de  Rome,  R.  Nissim  I,  R.  Moïse,  R. 
Moïse  de  Pavi'e.  Tous  ces  docteurs  sont  appelés  Gueonim;  quelques- 
uns  disent  que    Maïmonide  également  et  R.  Samuel  b.  Hofni  ont 
reçu  officiellement  ce  titre  de  Gaon,  et  parmi  les  Français,  R.  Guer- 
schora,  la  «  lumière  de  l'exil  »,  le  maitre  de  la  plupart  des  rabbins 
français.  R.  Guerschom  a  commenté  un  certain  nombre  de  traités  du 
Talmud,  et  on  dit  qu'il  avait  été  en  Babylonie  et  qu'il  avait  épousé  la 
sœur  de  R.  Haï  Gaon.  R.  Joseph  Tob  Élem  a  composé  le  livre  des 
Tannaïm  va-amoraim  et  nombre  de  Consultations.  Raschi  n'a  appris 
de  lui  que  peu  de  chose  et  n'a  pas  été  son  vrai  disciple.  Les  maîtres 
de  Raschi  sont  R.  Jacob  b.  Yakar,  R.   Isaac  Ilallévi,  et  R.  Isaac  b. 
Yehuda  qui  a  été  un  peu  plus  ancien  que  Raschi,  lequel  le  cite 
un   certain    nombre    de   fois    dans  son    commentaire   talmudique. 
Raschi,  c'est   le   célèbre  R.   Salomon  bar   Isaac,  qui  a   éclairé   les 
yeux  de  tout  Israël  par  son  commentaire  sur  le  Talmud  et  sur 
les  vingt-quatre  livres  de  la  Bible,   sans  compter  les  nombreuses 
décisions  qui  lui  sont   attribuées.  Le  Mahzor   Vitry   a  été   rédigé 
sous  ses  yeux.  R.  Schemarya  a  été  un  de  ses  élèves.  Raschi  n'a- 
vait pas  de  fils,  mais  seulement  des   filles.   L'une  d'elles  a  épousé 
R.  Méir,  l'autre  R.  Yehuda  b.  Natan  appelé  Riban,  qui  a  commenté 
quelques  traités  talmudiques  sous  les  yeux  de  Raschi,  son  beau- 
père  ;  la  troisième  a  épousé  R.  Ephraïm.  R.  Méir  a  planté  trois  cèdres  : 
R.  Samuel  appelé  Raschbam  (qui  a  commenté  la  plus  grande  partie 
du  traité  de  Baba  Batra  après  la  mort  de   son  grand-père  Raschi,  le 
dernier  chapitre  du  traité  de  PeraJtim  et  quel([ues  autres  traités),  R. 
Jacob,  le  rabbin  bien  connusous  le  uoni  de  Rabbénu  Tam,  R.  Isaacb. 
Méir  dit  Ribam.  R.  Tam  a  écrit  le  Séfer  hayyaschar  ;  les  toçafot  men- 
tionnent un  autre  R.  Tam,  qui  est  R.  Jacob  d'Orléans.   R.    Isaac  b. 
Samuel,  l'auteur  bien  connu  de  toçafot,  était  le  fils  de   la  sœur  de 
R.  Tam  et  l'élève  de  ce  dernier,  et  R.  Tam  a  été  l'élève  de   son   frère 
Raschbam,  qui  a  été  l'élève  de  sou  grand-père  Raschi.  R.   Eliézer  de 
Metz,  auteur  du  livre  des  Yeréini,  R.  Isaac  b.  Mordekhaï  et  R.  Jacob 
Israël  ont  été  les  élèves  de  R.  Tam,  comme  aussi  R.Joseph  d'Orléans. 
T.  IV.  i:; 


214  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

R.  Hayyim  Cohen,  père  de  la  mère  du  Ram  de  Coucy,  et  R,  Joseph 
Bekhor  Schor,  qui  a  commenté  les  cinq  livres  de  la  Loi  et  qui  est 
mentionné  dans  les  toçafot,  ont  vécu  tous  deux  du  temps  de  R.  Tam, 
ont  étudié  à  son  école  et  ont  été  ses  élèves  habérim.  R.  Elle  de 
Paris,  a  été  un  contemporain  de  R.  Isaac  le  toçafiste,  mais  plus  âgé 
que  lui.  R.  Yehuda  de  Paris,  R.  Barukh  h.  Isaac,  auteur  du  Séfer 
hatteruma,  R.  Simson  de  Sens,  qui  a  commenté  TOrdre  de  Zeraïm,  ont 
été  élèves  de  R.  Isaac  le  toçafiste.  R.  Yehiel  de  Paris,  qui  est  allé  à 
Acco,  a  été  élève  de  R.  Yehuda  de  Paris,  de  même  que  R.  Moïse  de 
Coucy,  auteur  du  Grand  livre  des  Préceptes, &l  queR.  Isaac  devienne, 
en  Allemagne ,  auteur  de  VOr  zarua.  R.  Yehiel  de  Paris  a  été 
aussi  l'élève  de  Riba  (R.  Isaac  b.  Abraham)  ;  Riba  a  aussi  composé 
des  toçafot,  mais  ils  n'ont  pas  obtenu  la  même  vogue  que  ceux  de 
R.  Isaac  b.  Samuel.  R.  Isaac  de  Vienne  a  aussi  été  élève  de  R. 
Simson  de  Coucy,  comme  nous  l'apprend  le  Mordekhaï.  R.  Simha 
est  le  grand-père  de  Ri  le  toçafiste  et  le  fils  de  Riba,  c'est-à-dire  R, 
Elhanan,  qui  a  écrit  des  toçafot  sur  Nedarim  ;  il  est  mort  martyr 
du  vivant  de  son  père.  Le  saint  R.  Netanel  de  Chinon  a  étudié  à 
l'école  de  R.  Isaac  le  toçafiste  et  il  est  mentionné  quelquefois  dans 
les  toçafot.  R.  Ephraïm  le  Grand  de  Ratisbonne,  l'Allemand,  a  étu- 
dié en  France  à  l'école  de  R.  Tam,  et  il  a  souvent  été  en  discussion 
avec  R.  Joël  Hallévi  qui  est  mentionné  souvent  dans  le  Mordekhaï  et 
qui  a  adressé  des  questions  scientifiques  à  Riba.  Un  autre  R.  Ephraïm 
est  nommé  dans  le  Mordekhaï,  c'est  Ephraïm  de  Bonn  ;  il  discute  contre 
Ephraïm  de  Ratisbonne  et  R.  Joël  Hallévi,  ce  qui  est  également  men- 
tionné dans  le  Mordekhaï.  Rabiah,  qui  est  souvent  cité  dans  ce  même 
ouvrage,  est  R.  Eliézer  fils  de  ce  Joël  Hallévi  que  j'ai  nommé  ;  il  a  été 
un  peu  antérieur  à  R.  Méir  de  Rothenbourg,  ce  rabbin  célèbre  dont 
les  consultations  remplissent  le  Mordekhaï.  Ses  élèves  ont  fait  un  re- 
cueil appelé  Tasbaç.  Raban,  c'est-à-dire  R.  Eliézer  b.  Natan  l'Allemand, 
qui  est  mentionné  dans  le  Mordekhaï,  est  le  grand-père  de  Rabiah. 
R.  Méir  de  Rothenbourg, que  je  viens  dénommer,  a  été  l'élève  de  R. 
Yehiel  de  Paris;  son  père  s'appelait  R.  Barukh,  et  est  nommé  deux  ou 
trois  fois  dans  le  Mordekhaï.  R.  Ascher  l'Allemand  a  été  élève  haber 
de  R.  Méir  de  Rothenbourg  et  a  écrit  un  livre  appelé  Ascheri.  Son  fils 
R.  Jacob  a  écrit  les  Arba  Tiirim.  R.  Barukh  de  Mayence  était  alle- 
mand, il  a  écrit  le  Livre  de  la  Sagesse.  L'auteur  du  Mordekhaï  a  été  le 
gendre  de  R.  Yehiel  de  Paris,  et  le  beau-frère  de  R.  Isaac  de  Corbeil, 
auteur  du  Litre  des  Préceptes  abrégé  appelé  les  Colonnes  de  VExil.  Il 
parait  que  R.  Isaac  de  Corbeil  a,  lui  aussi,  été  élève  de  R.  Isaac  b. 
Abraham  nommé  plus  haut.  R.  Péreç,  qui  a  fuit  des  notes  sur  le 
Livre  des  Préceptes  abrégé,  a  été  l'élève  de  R.  Yehiel  de  Paris.  En  Es- 
pagne, Catalogne  et  Languedoc  11  y  a  aussi  eu  de  grands  savants  qui 
ont  cultivé  la  Loi  en  Israël  et  sont  devenus  célèbres  avec  d'autres 
auteurs  de  Décisions.  Le  célèbre  R.  Moïse,  fils  de  R.  Maïmon,  a  fait 
un(!  œuvre  remarquable,  son  grand  ouvrage  divisé  en  quatorze 
livres;  il  a  commenté  toute  la  Mischna  et  écrit  en  outre  d'innom- 


LISTE  DE  RABBINS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  215 

brables  ouvrages.  Il  était  de  Cordoue,  dans  le  pays  dlsmaël,  et  Raschi 
l'a  précédé  de  peu.  Rabad,  c'est  R.  Abraham  b.  David  de  Narbonne, 
contemporain  de  R.  Tam  ;  on  dit  même  qu'il  alla  étudier  incognito  à 
l'école  de  R.  Tam.  lia  écrit  un  livre  sur  ce  qui  est  défendu  et  permis, 
appelé  leur  Maschhu,  et  fait  des  critiques  sur  Maimonide.  L'autre 
Rabad,  qui  a  vécu  avant  lui  à  Bagdad,  est  un  homme  très  remar- 
quable et  j'ai  vu  dans  une  lettre  que  Maïmonide  l'estimait  beaucoup. 
Le  Rabad  qui  a  été  l'antagoniste  de  Maïmonide  était  le  gendre  de  R. 
Abraham  Ab-bet-din;  lui  et  R.  Zerahya  Hallévi  ont  étudié  à  la  même 
école.  R.  Jona  de  Tolède,  a  été  le  maître  de  Raschba,  et  avant  lui  a 
vécu  un  autre  R.  Jona,  homme  très  remarquable.  Ramban  veut  dire 
Moïse  b.  Nahman,  il  était  de  Girone,  où  11  enseignait.  Il  a  commenté 
les  cinq  livres  de  la  loi  et  écrit  des  toçafot  sur  tout  le  Talmud.  Il 
était  savant,  instruit  dans  la  Cabbale,  qu'il  apprit  de  R.  Eliézer  de 
Worms,  l'Allemand,  auteur  du  Rokéah.  Raschba  a  été  élève  de  Ram- 
ban, mais  son  vrai  maître  a  été  R.  Jona  de  Tolède,  comme  je  l'ai  dit. 
Raschba,  c'est  R.  Salomon  b.  Abraham  b.  Adret  de  Barcelone.  Lui 
aussi  a  poussé  des  branches  et  porté  des  fruits.  II  a  composé  le 
grand  Torat  habbaït  et  le  Tarât  habbaït  abrégé,  et  on  a  de  lui  des 
Consultations  sur  tout  le  Talmud.  Il  a  vécu  du  temps  de  R.  Ascher 
l'Allemand  nommé  plus  haut,  et  lorsque  R.  Ascher  alla  ouvrir  une 
école  à  Tolède,  il  passa  par  Barcelone  et  fut  l'hôte  de  Raschba.  R. 
îsissim  II  a  été  l'élève  de  Raschba.  » 

Voici  maintenant  nos  notes  et  explications  sur  notre  texte. 

1.  Baba  M.,  86a  ;  cf.  Brûll,  Jahrhûcher,  II,  39,  note 52. 

•2.  D'après  Samuel  ben  Méir  (voy.  Toçafot  de  Ketubot,  2&,  s.  V. 
-j"^U5d),  l'auteur  des  Scheéttot  serait  le  Rab  Ahaï  qui  est 
nommé  ici  et  dans  d'autres  endroits  du  Talmud  de  Babylone. 
Cf.  Jiœhasin,  édit.  Filipowski,  109  b.  :  ^ïîn.x  3n  '^^nc,  voy. 
Kidduschm,  13a,  où  les  passages  parallèles  sont  indiqués; 
i^HN  31  a-^ïîD,  voy.  Ketubot,  2«.  Cf.,  sur  le  maître  de  Rab 
Ahaï  et  sur  son  époque,  Brûll,  l.  c,  146  sqq. 

3.  2b.  Scherira  déjà  désigne  ce  passage  comme  une  addition  des 

Saboréens  :  i^api  ^^ii'id  ^«nna  ^Nmao  "js^n.  Voy.  la  Lettre  de 
Scherira,  édit.  Goldberg,  Mayence",  1873,  p.  28  sqq.  ;  cf. 
Brùll,  t.  c,  46,  note  64. 

4.  Ceci  d'après  l'école  française  qui  reconnaît  comme  auteur  des 

mbns  m:3bn  Rab  Yehuhaï  Gaon,  qui  fleurit  après  Simon 
de  Kiyyara.  Voy.,  sur  cette  question,  Graetz  dans  la  Monats- 
schrift  de  Frankel,  VII,  217  sqq.  et  Ilalberstara,  ibid.,  VIII, 
379  sqq.  Sur  Rab  Yohudaï  Gaon,  cf.  Ilamagid,  V,  293  sqq. 

5.  Le  mot  n5<3  indique  sans  doute  une  traduction  de  la  Bible,  bien 

que  d'ordinaire  on  emploie  le  mot  c-id  (voy.  Zunz,  Gesamm. 


21G  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Schrîften,  III,  63),  et  que  le  témoignage  de  Petahya  de  Ra- 
tisbonne  semblerait  indiquer  que  Saadia  a  commenté  toute 
l'Ecriture  Sainte  (voy.  Graetz,  Geschichte,  V,  536).  La  tra- 
duction de  Saadia  avait  une  très  grande  réputation  en  Occi- 
dent, comme  on  le  voit,  par  exemple,  dans  le  règlement 
scolaire  publié  par  Giidemann,  Geschichte  des  E?-ziehungs- 
loesens,  269. 

6.  Sur  les  Consultations  de  Saadia,   voyez    Frankel,    Entwurf 

einer  Geschichte  der  Literatur  der  nachtalmudischen  Res- 
ponsen,  81  sqq. 

7.  Sur  Cohen  Cédek  I,  cf.  Graetz,  dans  la  Monatsschrift,  Ylf, 

223.  Ici,  d'après  la  place  qu'il  occupe  dans  cette  relation,  ce 
parait  être  Cohen  Cédek  II  ben  Joseph,  le  célèbre  contem- 
porain de  Saadia. 

8.  A  partir  d'ici,  la  science  historique  de  notre  auteur  commence  à 

être  moins  sûre.  Sur  R.  Paltoï  Gaon,  cf.  Graetz,  Geschichte,Y, 
276;  Frankel,  Mojiatsschrift,  YII,  224  ;  Zunz,  Ritus,  186, 

9.  Sur  Mattatia  Gaon,  voy.  Graetz,  Geschichte,  V,  2*77  et  Zunz, 

l.  c.  187. 

10.  L'auteur  entend  certainement  par  là  le  nD7:?:i  np?:  ido,  traduit 

de  l'arabe  en  hébreu  en  1078  par  Isaac  ben  Ruben  Albargeloni, 
ouvrage  que  Raschi  [Baba  M.,  29a)  appelle  aussi  nnn  "^lyo 
YiiH'j:  "^Nr;,  comme  le  remarque  Rappoport,  Biccuré  fia-Ittim, 
X,  91,  note  22. 

11.  Sur  Sar  Schalom    Gaon,  contemporain  de  R.  Paltoï,  voy. 

Graetz,  Geschichte,  V,  276  sqq.  ;  Zunz,  l.  c,  186  sqq. 

12.  Mar  Amram  est  l'auteur  du  Siddur  de  Rab  A^nram;  voy. 

Graetz,  l.  c,  278  ;  Zunz,  /.  c,  88. 

13.  C'est  sans  doute  un  des   "^Nb-^r;.  Voy.  Lettre  de  Scherira,  édit. 

Goldberg,  43 et  Juchasin,  édit.Filipowski,  206,  où  on  a  deux 
fois  imprimé  "^Ni^-^riN  ;  cf.  Schêm  haggedolim  au   mot  ii<'3-»ï^:. 

14.  C'est  probablement  le  célèbre  Rab  Natronaï  II  ben  Hilaï  (859- 

869).  Voy.  Graetz, /.  c,  277:  YY^x\\iQ\.  Monatsschrift,W\, 
225;  Zunz,  l.  c,  187  sqq. 

15.  Il  n'y  a  que  Guedalya  ibn  Y i\h\ a,  Schalschélet,  édit.  Venise, 

41  Z>,  qui  nous  dise  :  iln:  ■^::-,'  ai-  r>vû  ic  0"'"i::3ip3  ^■^^N^^ 
■jiNi  bN::n  ira-i  bo  nra  r!CNb  ib  npb.  Cette  assertion  a  sans 
doute  pour  fondement  remi)loi  extraordinaire  que  fait  Fau- 
teur de  VAruhh  des  commentaires  du  célèbre  rabbin  de 
Cairoan.  C'est  aussi  pour  cela  qu'on  a  fait  de  Ilannanel  un 
Romain  ;  voy.  Kohut,  A7'uch  Cotnpletîim,  I,  p.  XII  ;  Hebr. 
Bibliographie,  V,  121.  Lebrecht  a  fait  deux  liyjjothèses 
différentes  jiour  expliquer  cette  désignation  de  «  romain  » 


LISÏK  1)1-:  HAHBINS  DRESSEE  FAR  AZRIKL  TI{AHOTTO  217 

a[ti)liquée  à  Ilannanel  [Wlssenschaftl.  Blàlter,  33,  note  3  et 
96,  note  2).  Sur  la  parenté  supposée  de  R.  Xatan  avec 
le  Gaon  Haï,  voy.  Pinsker,  Likknté  Kadmoniyi/ot,  156, 
note  3,  et  lettres  de  Rappoport,  dans  Haschachar,  X  (qcs*: 
n'^m:,  16  sqqJ. 

16.  Cf.  Rappoport,  Blccuré  ha-Jltlm,  XII,  30,  note  36  et  Warn- 

lieim,  rr-'-c^n  ri:i3p,  52-60,  avec  les  rectifications  dans  le 
JescJiurîoi  de  Kobak,  IV,  p.  r;"o  ;  voy.  aussi  Senior  Sachs 
dans  Haniagid,  1878,  321. 

17.  Guedaha  ibn  Yali^-a,  l.  c,  42b,  donne  aussi  cette  indication 

sur  l'autorité  douteuse  de  Schem  Tob  ibn  Gaon.  Cf.  Conforte, 
Koré  haddot'ot,  Qb  en  bas. 

18.  Conforte  réunit  déjà.   Le,  la,  les  témoignages  de  Méir  de 

Rothenbourg  sur  ce  prétendu  neveu  d'Alfasi.  Cf.  aussi 
Rappoport,  Biccuré  ha-Itiim,  X,  92,  note  23  et  l'addition 
embrouillée  d'un  ms.  des  û-^nrc,  Hebr.  Bibliogr.,  YII,  22; 
Cîbx  m  ■'ir:)  est  déjà  le  titre  qu'on  trouve  chez  le  petit-fils 
de  Samuel  Sélestat  ;  vovez  c-'p-rr  nnn-,  édit.  Bénjacob, 
II,  1. 

19.  Calonymos  ben  Schabtaï  de  Rome;  voy.  Zunz,  Synag.  Poésie, 

203;  Lite7^aturgeschichte ,  250  ;  Ritus,  198. 

20.  Nissim  ben  Jacob  de  Cairoan;  cf.  Rappoport,  Biccuré  ha- 

Ittim,  XII,  69,  note  19. 

21.  Certainement   Moïse  ben  Calonymos;    cf.  Zunz,    Liieraig., 

104  sqq. 

22.  Sur  Moïse  de  Pavie,  cf.  Zunz,  Zur  Gesch.,  57,  et  les  notes  de 

Halberstam  dans  VAruch  de  Kohut,  I,  p.  XXXVIII  ;  sur  son 
titre  de  Gaon,  voy.  Zunz,  Ritus,  192. 

23.  Sur  le  titre  de  Gaon  donné  à  des  autorités  non  babyloniennes, 

voyez  la  dissertation  de  Zunz,  l.  c,  192  sqq.  et  Halberstam 
dans  le  Magazin  de  Berliner,  I,  35.  J'ajouterai  encore  à  ces 
û-^sis^  Joseph  ibn  Abitur  (voy.  Jescfmnm,  IV,  p.  Nirp)  et 
Rabbi  Gerschora  Meor  haggola  (voy.  Ozar  Nehmad,  II,  n5V 

24.  Cf.,  sur  R.  Ger.schom,    Zunz,  Zeitschrift,   309  sqq.;  Addil.. 

315;  Lileratg.,  238  sqq  ;  sur  ses  commentaires  du  Talmud, 
Weiss,  Bet  Tabnud,  II,  97  sqq. 

25.  Gerschom,  dont  Salomon  Luria  (Consult.  n"  29)  fait  un  dis- 

ciple do  Rab  Haï,  en  devient  ici  le  beau-frère;  cf.  Gross. 
ùaiXi^Xe  Magazin  de  Berliner,  1,  77  ;  Carmoly,  France  isr., 
16  sqq. 

26.  Sur  Joseph  Bonfils,  cf.  Luzzatto,  Biblioiheca,  466,  sqq.  ;  Zunz. 

Zur  Gesch.,  61;  Synag.  Poésie,  179;  Lileratg.,  129.  L'er- 
reur que  fait  ici  Trabotto  au  f^ujet  (]e  l'auteur  du  Séder  Tan- 


218  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

naïm  wa-amoraïm^  partagée  par  Zunz  [Zeitscfirift,  312),  a 
déjà  été  relevée  par  Luzzato,  l.  c,  52a;  cf.  Azulaï,  à  la  fin 
de  l'article  û"'Nm7:Ni  û^N:n  mo  et  Kolm,  Mardochaï  hen 
milel,  137. 

27.  Cf.  Zunz,  ZeitscJirift,  314. 

28.  Sur  ce  premier  maître  de  Raschi,  voy,  Zunz,  Ztschr.,  315  et 

Ziir  Gesch.,  63. 

29.  Sur  ce  second  maître  de  Rasclii,  voy.  Zunz,  Ztschr.,  316; 

Kolm,  l.  c,  122;  cf.  aussi  Weiss,  Bet  Talmud,  II,  36. 

30.  C'est  à  son  sujet  que  Guedalya  ibn  Yahya  dit  :  13-1::  pnif  irn-i 

p-i-miipn  '^n-'Nn  p  "^"u)-)  b*::  is-i  rr^n  it5D"I3n  rr-nr;-^.  Cf.  sur 
lui  Zunz,  Ztschr.,  317;  Llteratg.,  155  sqq.  ;  Gross,  Magazin, 
IV,  185.  C'est  dans  le  même  ordre  d'ailleurs  que  Luria  nous 
donne  ces  trois  maîtres  de  Raschi,  toutefois  avec  cette  diffé- 
rence que  Luria  appelle  l'un  Isaac  ben  Yakar  au  lieu  de  Ja- 
cob ben  Yakar. 

31 .  Nous  rencontrons'aussi  souvent  la  formule  '^'l'^S'  "i"'N!tû  nin^a 

T''ûiT'D2  nbisr;,  par  laquelle  on  veut  éterniser  le  nom  de 
Raschi  dans  les  Memorlmch  ;  voyez  par  exemple  Jellinek, 
Nr-'WT^Ti  D"i::3ip,  7,  et  Conteros  hammeconên,  8. 

32.  R.  Isaac  l'Ancien  donne  comme  auteur  du  MaJizor  Vitry  son 

aïeul  R.  Simha,  élève  de  Raschi  :  id-'O  ''"i:;û"'1  mTn^jn  tin"! 
i"o-i  -^Ti^bn^a  r^n»'»:)  irai  -«spT  ;  voy.  Mordekhaï,  Moed  Katton, 
838.  Luzzatto  a  analysé  cet  ouvrage  dans  le  Kerem  Chemed, 
III,  200  sqq.  D'après  Giinsbourg,  Massorét  hammasorét, 
45,  note,  il  en  a  été  rendu  compte  également  par  Wright  dans 
le  Journal  ofsacred  Literature,  1866,  356. 
.33.  Guedalya  ibn  Yahya,  49 &,  dit  de  lui:  "^n-^N*!  i-rii'Totî  '\T^'2r\ 
r"i^»bn '^b'TiS'TD  ^ttîO  \'û^  d ■>-!::: 3 Tp 3  ;  Conforte,  18a,  le  dé- 
signe déjà  comme  un  collègue  de  R.  Simha. 

34.  Guedalya  ibn  Yahya,  qui  ici  s'accorde  avec  notre  source  pour 

l'ordre  des  noms,  nous  dit,49  h  :  û"''n3t  û'^33  ■'"oib  T^n  Nbo  -^  n  b  n  p  t 
l'^'^na  tiH^^Ti  niaN  msa  ':*  nbir.  Zunz,  Literatg.,  283,  contrai- 
rement à  Ztschr.,  282  et  Conforte,  9&,  n'indique,  dans  le  ta- 
bleau généalogique,  que  deux  filles.  Rosin,  Samuel  ben  Méir, 
3,  et  dans  son  édition  du  commentaire  sur  le  Pentateuque 
de  Samuel  ben  Méir,  p.  VII,  adopte  cette  opinion. 

35.  Méir,  ou,  d'après  Carmoly,  IJaleban07i,  IV,  24,  Méir  ben  Méir 

bon  Samuel,  était  le  mari  de  Jokhébed,  fille  de  Raschi  (voy. 
Magazin,  I,  3;  II,  45).  Cf.  sur  lui  Zunz,  Zur  Gesch.,  2\\ 
Synag.  Poésie,  183;  Literatg.,  254.  Sur  une  décision  de 
Raschi  adressée  à  Méir,  voy.  Magazin.  VII,  183. 

36.  Yehuda  ben  Natan  était  marié  à  Miriam,    fille   de  Raschi. 


LISTE  DK  RABBINS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TRAROTTO  219 

Cf.  sur  lui  Zunz,  Zur  Gesch.,  31  et  Garmoly,  Halehanon, 
IV,  25  sq. 

37.  Guedalya  ibn  Yahya,  49?>,  dit  :  v?3n  ''Scb  nin3D?3  nitp  '^cn,  re- 

produisant littéralement  les  mots  de  notre  texte.  Outre  le. 
commentaire  de  Méir  sur  Maccot  à  partir  de  19  &,  où  s'arrête 
le  commentaire  de  Raschi,  nous  connaissons,  grâce  au  té- 
moignage de  Moïse  de  Goucy  {Semag,  défense  79),  le  commen- 
taire qu'il  a  fait  sur  Peçahim. 

38.  D'après  Garmoly,  HaleMnon,  IV,   103,  la  troisième  fille  de 

Raschi,  du  nom  de  Rachel,  aurait  été  mariée  à  un  certain 
Eliézer.  Sur  Scliemaya,  qu'on  prétend  être  né  de  cette  union 
et  que  Kohn  [Mardocfiaî  ben  Hillei,  152)  maintient  comme 
petit-fils  (le  Raschi,  parenté  contestée  par  Zunz  en  1838  dans 
les  Addit.  ad.  caial.  Lips.,  ms.  1,  cf.  Berliner,  Hebr. 
Bibliogr.,  XI,  78.  Zunz  a  réuni  tous  les  Ephraïm  du  moyen 
âge,  Literatg.,  618  et  Nachirag,  65. 

39.  Ici  encore  nous  retrouvons  la  trace  de  notre  document  dans 

Guedalya  ibn  Yahya,  puisque  Rieti,  qu'il  cite,  n'énumère  pas 
dans  le  détail  les  commentaires  de  Raschi  qui  furent  com- 
plétés par  Samuel  ben  Méir  (-j^Ta  tjnptj,  100  a,  note  2).  nDDT 
D-^nnsi  ^3U5  de  Guedalya  est  également  calqué  sur  notre  texte. 
Gf.  sur  les  traités  commentés  par  R.  Samuel  ben  Méir,  Rosin, 
Le,  10,  et  l'introduction  au  commentaire  de  Samuel  ben 
Méir  sur  le  Pentateuque,  XII  sqq. 

40.  Sur  Isaac  ben  Méir,  cf.  Zunz,  Z.  G.,  32;  Kohn,  l.  c,  123  et 

Rosin,  Z.  c,  4,  note  6.  Sur  les  trois  ûn"n,  cf.  Kerem  Chemed, 
VII,  67. 

41.  Sur  ce  Jacob  d'Orléans,  appelé  aussi  R.  Tam,  cf.  Zunz,  Z.  G., 

75 sqq.  ;  Gross,  Magazin,  I,  78  sqq.,  87  sqq.  Pour  les  passages 
des  Toçafotoix  il  est  cité,  voy.  Zunz,  Le,  51;  cf.  Kohn, 
l.  c.  125. 

42.  Sur  Isaac  l'Ancien,  un  des  principaux  Toçafistes,  voy.  Zunz, 

l.  c. ,  33  ;  Gross,  Magazin,  IV,  176  et  192,  note  43  ;  Kohn,  l.  c. , 
124.  Sur  les  Toçafistes  du  môme  nom,  voy.  Zunz,  Litg., 
169  sqq. 

43.  Cf.  Consultations  de  Salomon  Luria,  n°  49,  où  l'on  dit  la  même 

chose. 

44.  Cf.  Guedalya  ibn  Yahya,  blb  et  Rosin,  /.  c,  6. 

45.  Sur  Eliézer  ben  Samuel  de  Metz,  cf.  Zunz,  Z.  G.,  34  et  Kohn, 

Le,  111. 

46.  Sur  Isaac  ben  Mordekhai,  cf.  Zunz,  Z.  6'.,  33;  Kohn,  /.  c, 

122  sqq.  ;  Luria,  L  c,  le  cite,  ainsi  que  Rabbi  Eliézer  de  Metz, 
parmi  les  disciples  de  R.  Tam. 


220  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

47.  Cf.  -sur  JacoL  Israël,  Zunz,  Z.  G.,  51  et  Kolin,  l.  c,  125. 

48.  Sur  Joseph  d'Orléans,  cf.  Zunz,  Z.G.,  33;  Gross  et  Berliner 

{Magazin,  I,  93  sqq.)  Font  Identilié  avec  Joseph  Bekhor 
Schor,  hypothèse  à  laquelle  se  range  également  M.  Zadoc 
Kahn,  Revue  des  E.  J.,  III,  6  ;  cf.  aussi  Monatsschrift,XX\l, 
366  et  Kohn,  L  c,  135,  note  1,  et  136. 

49.  Sur  Hayyim  ha-Cohen,  voy.  Zunz,  Z.  G.,  48  et  Gross,  L  c, 

IV,  184. 

50.  Sur  Joseph  Bekhor  Schor,    cf.  Zunz,  Z.  G.,  74  sqq.  ;  Lit  g., 

282  sqq.  :  Renan,  Rabbins  fr^mçais,  334.  Pour  l'éloge  de  son 
commentaire  sur  le  Pentateuque  par  Isaac  de  Latas,  voy. 
Berliner,  Magazin,  IV,  073  ;  cf.  Luzzatto,  Bibliotheca,  666  ; 
Kohn,  L  c,  135. 

51.  Maccot,  6«,  d'après  Zunz,  Z.  G.,  52. 

52.  Sur  l'amitié  de  Joseph  Bekhor  Schor  avec  R.  Tam.  voy.  Gross, 

L  c,  I,  94,  note  50.  Dans  Luria  également  on  le  voit  à  côté 
de  Haj^im  ha-Cohen.  Guedalya  ibn  Yahya,  dans  son  énumé- 
ration  des  disciples  qui  paraissent  être  sortis  des  écoles  des 
trois  fils  de  Méir  ben  Samuel,  a  certainement  emprunté  à 
notre  texte  les  cinq  premiers  noms,  52  &:  -n-n  pn::-'  ira-; 

l'Ti'D  'C'^Vi  nrn-n  ,^rc  "iisn  T\z^^  ira— i.  R.  Moïse,  qu"on  trouve 
ici  à  côté  des  cinq  autres  rabbins,  pourrait  bien  être  R.  Moïse 
ha-Cohen  de  Mayence,  que  Luria  nous  donne  comme  dis- 
ciple du  Ri  et  dont  a  parlé  Zunz,  Z.  G.,  54;  cf.  Kohn, 
L  c,  143. 

53.  C'est  Elle  ben  Yehuda  le  Pieux,  de  Paris,  "^-^icn  T'cnr:  irr^rN, 

comme  il  est  nommé  chez  Luria  (à  compléter  chez  Gross, 
L  c.,IV,  190,  note  21).  La  légende  que  rapporte  Guedalya 
ibn  Yahya,  52  a,  sur  ce  rabbin,  nous  montre  quelle  fut 
sa  renommée.  Voy.  sur  lui  Zunz,  Z.  G.,  49,  356 «7  ;  Litg., 
458;  Carmoly.  L  c,  112;  Gross,  L  c,  184  sqq.;  Kohn, 
L  c,  112. 

54.  Sur  Yehuda  ben  Isaac  Sir  Léon,  cf.  Zunz.  Z.  G.,  35  sqq.  ;  Rltiis, 

198;  Litg.,  328.  Sa  biographie  a  été  retracée  par  Carmoly, 
L  c,  66  et  Gross,  l.  c,  IV,  173  sqq.  Luria  le  nomme  explici- 
tement •c'^tiz  priit"^  nn  rrnrri  '-. 

55.  Sur  Barukh  ben  Isaac,  voy.  Zunz,  Z.  G.,  36. 

56.  Sur  Simson  de  Sens,  beau-frère  de  Moïse  de  Coucy,  voy.  Zunz, 

Z.  G.,  35;  Lilg.,  302;  Kohn,  ^.c*.,  154.  Pour  son  commentaire 
sur  Biccurim,  voy.  Jlaiebanon,  IV,  5.  Sur  la  question  de  sa» 
voir  s'il  a  été  aussi  disciple  de  Jacob  ben  Mt'ir,  voy.  Luzzatto, 
Jlali/iltol  Kédeni,  46. 


LISTE  DE  RABBINS  DRESSEE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  221 

57.  Sur  Yehiel  ben  Joseph,  cf.  Zunz,  Z.  G.,  39;  Cannoly,  l.  c, 

69  sqq.  ;  Gross,  l.  c,  IV,  178;  Monatsschrift,  XYllI,  539, 
note  7:  Zadoc  Kahn,  Revue,  III,  4. 

58.  Sur  R. Moïse  ben  Jacob  de  Coucy.voy.  Znwz.Add.,  315;  Z.  G., 

37,  85;  LUg.,  479:  Garmoly,  /.  c,  100 sqq.  ;  Gross,  L  c,  179. 

59.  La  biographie  d'Isaac  Or  Zarua  a  été  retracée  par  Gross,  dans 

Monatssclu'ift,  1871,  248  sqq.;  cl".  Zunz,^.  G.,  50;  Gesamm. 
Sclir.,  III,  128  et,  sur  les  rabbins  de  ce  nom,  LUg.,  468. 

60.  Sur  Isaac  ben  Abraham,  cl".  Zunz,  Z.  G.,  34,  et  sur  les  rabbins 

de  ce  nom,  LUg.,  622,  note  33;  voy.  aussi  Kohn,  l.  c,  120 
et  Gross,  Monatsschrift,  XVIII,  539,  note  4. 

61.  ce.  Kohn,  l.  c,  123. 

62.  Simha  de  Vitry  était,  par  son  fils  Samuel  qui  avait  épousé  une 

fille  de  Méir  ben  Samuel,  le  grand-père  de  Ri  l'Ancien.  Cf. 
Kohn,  L  c,  155. 

63.  C'est  certainement  ■>"-!  qu'il  faut  lire  à  la  place  de  &<2"-'-i,  puis- 

que nous  savons,  sur  la  foi  même  d'Isaac  l'Ancien  et  par  des 
renseignements  ultérieurs,  comme  par  exemple  les  Consul- 
tations de  Siméon  ben  Céraah  Duran,  III,  n"  246  et  le  frag- 
ment de  Luria,  qu'Elhanan  est  le  fils  d'Isaac  ben  Samuel. 
Cf.  sur  lui  Zunz,  Z.  G.,  34;  Synag.  Poésie,  249;  Litg., 
288. 

64.  Jusqu  à  présent  c'est  de  Luria  seul  qu'on  tirait  ce  renseigne- 

ment :  n:3  irnbi*  'n  jr^r^  n72pnr  vvc'z^.  Notre  relation  n'af- 
firme pas  seulement  qu'Elhanan  a  été  victime  d'un  meurtre, 
comme  on  le  voit,  sans  preuve  à  l'appui,  chez  Zunz,  Litg., 
288,  mais  elle  proclame  avec  une  entière  certitude  qu'il  est 
mort  martyr,  ce  que  Gross,  l.  c,  IV,  191,  note  38,  met  com- 
plètement en  doute.  Guedalya  ibn  Yahya,  53&,  ne  connaît 
Elhanan  que  par  Joseph  Colon,  Consult.  n"  52.  Sur  la  ques- 
tion de  savoir  si  Isaac  ben  Samuel  a  survécu  de  plusieurs 
années  à  son  fils,  voy.  Gross,  L  c,  IV,  192,  note  43.  Dans  les 
Toçafot  d'Ellianan  sur  Aboda  Zaym,  Luzzatto  a  trouvé  la 
date  de  1182.  Voy.  Halikhol  Kédem,  46. 

65.  Netanel,  le  martyr  de  Chinon,  ne  peut  pas  avoir  été  le  disciple 

d'Isaac  ben  Samuel,  puisqu'il  a  été  le  maître  d'Estori  Parhi. 
Cf.  sur  lui  Zunz,  Z.  G.,  54,  205  ;  Litg.,  363  et  Gross,  Monats- 
sclunft,  XVIII,  435,  n.  1.  C'est  lui  que  Guedalya  ibn  Yahya, 
526,  nomme  (lis.  1131:?:)  insrTo  rinpr^  bN:n3  imn. 

66.  Cf.  Azulaï  I,  r^y  s.  r..  :  Kohn,  l.  c,  146. 

67.  Cette  épithète  de  bn;"  ajoutée  au  nom  d'Ephraïm  ben  Isaac 

de  Ratisbonne  a  été  donnée  par  Moïse  de  Coucy.  Cf.  Zunz, 
Syn.  P0(?5ie,  254  sq(i.  ;  Z.i^£7.,274sqq.  Luria  l'appelle  D"'"i5N  ■'3-i 


222  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

5ms'':î55"ii3  'T'na^i,  ce  que  Graetz,  Geschichte,  VI,  365  (2*  (^d.), 
reproduit  littéralement;  mais  Zunz,  qui  lit  "nn^n,  voudrait 
remplacer  cet  adjectif  par  bni^n  [l.  c).  Son  identité  avec 
Rabbi  Yakir  est  prouvée  parKolm,  l.  c,  127. 

68.  Voyez  les  endroits  où  il  est  cité  dans  les  Toçafot  chez  Zunz, 

Z.G.,  49. 

69.  Sur  ses  rapports  avec  Joël  Hallévi,  voy.  Kohn,  L  c,  113  sqq. 

70.  Sur  Joël  ben  Isaac  Hallévi  de  Bonn,  voy.  Zunz,  Syn.  Poésie, 

251  sqq.;  Z.  G.,  51  ;  Litg.,  269;  Kohn,  l.  c,  132  sqq. 

71.  Sur  Ephraïm  ben  Jacob  de  Bonn,  le  chroniqueur  des  malheu- 

reux événements  qui  se  sont  passés  de  1146  à  1196,  voy. 
Zunz,  Syn.  Poésie,  262  sqq.;  Litg.,  288  sqq.;  Kohn,  l.  c, 
117  sqq.  Les  lettres  !i3"ib"'  qui  accompagnent  son  nom  sont 
expliquées  par  Zunz,  Z.  G.,  363;  Litg.,  619. 

72.  Eliézer  est  le  fils  de  Joël  de  Bonn  déjà  mentionné.  Cf.  Zunz, 

Z.  G.,  36,  162;  Litg.,  326  sqq.  ;  Kohn,  /.  c,  109  sqq.  et  Gross, 
Monatsschrift,  1871,  256. 

73.  Ordinairement  on  attribue  le  y2"'0n  à  Simon  ben  Çadok,  dis- 

ciple de  R.  Méir  de  Rothenbourg.  Cf.  Conforte,  24<2,  et  Azulaï, 
s.  V.  Sur  les  explications  de  l'abréviation  y3"'an,  voy.  Ca- 
talog.  Bodl.,  s.  V.;  Rabbins  français,  p.  4bl,  et  sur  T^^^bn, 
Steinschneider,  Z.  D.  M.  G.,  XYIII,  173  sqq.  Guedalya  ibn 
Yahya,  61  &,  le  confond  avec  Simon  ben  Céraah  Duran. 
L'épithète  de  nniu):  rappelle  celle  de  "^yiyû  qu'on  trouve  chez 
le  petit-flls  de  Samuel  Sélestat,  d-'p'^ny  û"'"i3'7,  II,  8. 

74.  Eliézer  ben  Natan,  le  "j^''^"!  bien  connu,    est  le  grand-père 

d'Eliézer  ben  Joël  flallévi  rT'"3N"i,  qui  le  nomme  toujours 
■^;pT  ia"N-i  ou  "i^''^-!  "^ipT.  Cf.  Buchholz,  Monatsschrift,  1871, 
425  sqq.  ;  Kohn,  l.  c,  21  sqq.  Aussi  faut-il  corriger  dans  Gue- 
dalya ibn  Yahya  les  mots  p"»-i  bïïi  nnn  p  en  ^''^n  b'O  inn  Xn. 
Sur  Eliézer  ben  Natan,  voy.  Zunz,  Z.  G.,  49,  72  ;  RitMS,  196; 
Syn.  Poésie,  246;  Litg.,2b9  sqq.;  Kohn,  /.  c,  110  sqq.  et 
Gross,  Monatsschrift,  XVIII,  538,  note  5. 

75.  'iï5'^-iD7a  harrv  '-iTo  bnp  aci'r^  dit  Guedalya  ibn  Yahya,  58&.  Cf., 

sur  Méir  de  Rothenbourg,  Zunz,  Z.  G.,  40,  92;  Syn.  Poésie, 
312;  Litg.,  357  sqq.  ;  Kohn,  L  c,  30 sqq.  et  surtout  Rabbins 
fr.,  452  sqq. 

76.  Cf.  Conforte,  À'or^M-i)oro//i,  18  &  et  Kohn,  /.  c,  101. 

77.  Pour  la  généalogie  d'Aschéri,  voy.  Zunz,  Z.  G.,  422. 

78.  Sur  l'inscription  tumulaire  de  Jacob  ben  Ascher,  voy.  Abné 

Ziccaron,  édit.  Luzzatto,  n°  7. 

79.  Sur  Harukh  ben  Samuel  deMayence,  cf.  Zunz,  Z.G.,  55;  Syn. 

Poésie,  268  ^(\q.  :  Litg.,  306  ;  Kohn.  l.  c,  102.  Le  petit-fils  de 


LISTE  DE  RABBLNS  DRESSÉE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  223 

Sélestat,  l.  c,  attribue  le  r:?:3nî^  'o  à  Bariikh  de  Ratisbonne, 
sa^s  doute  par  suite  d'une  confusion  avec  le  rTm^nn  'a. 

80.  Voy.  la  réfutation  de  cette  assertion  tirée  du  passage  du  Mor- 

dekliai  même,  Erubin,  VU,  524,  dans  Kolin,  /.  c,  23. 

81.  ]>"'^:Dr^  byi  b":)  TO'^a  rr^rt"::  0'^"iL:3ip2 ^-T'N-,^.  dit  Guedalya ibn 

Yahya,  58  &,  suivant  en  cela  sans  doute  notre  source.  Con- 
forte, l.  c,  24«,  croit  pouvoir  tirer  ce  renseignement  des 
paroles  mêmes  du  Mordekliai,  Î5eça,  IV,  691,  ce  que  réfute 
Kohn,  l.  c,  24,  note  1. 

82.  Cf.  plus  haut,  n.  60.  Nous  ne  connaissons  comme  maître  de 

R.  Isaac  ben  Joseph  de  Corbeil  que  Yehiel  de  Paris.  Voy. 
Carmoly,  l.  c,  40;  Gross,  Z.  c;  IV,  178,  et  Monaisschrtft, 
XVIII,  539,  note  9.  Dans  le  ms.  V  du  Musée  national  de 
Pestli  se  trouve,  au  milieu  du  Semak,  un  abrégé  d'Isaac  ben 
Abraham  que  je  suis  porté  à  attribuer  au  commentateur 
d'Alfasi,  Isaac  ben  Abraham  de  Narbonne,  contrairement 
à  Kohn,  Magazin,  IV,  87. 

83.  Sur  Péreç  ben  Elle  de  Corbeil,  cf.  Zunz,  Add.,  316;  Z.  G., 

41  ;  Kohn,  L  c,  33  sqq.,  et  Rabbins  fr.,  449  sqq. 

84.  Imité  de  Kohélet  XII,  12.  Le  petit-fils  de  Samuel  Sélestat  dit,  lui 

aussi,  au  sujet  de  Maïmonide  yp  y^^  . .  .  û-'-iDO  r:2-;tn,  l.  c,  8. 

85.  Tandis  qu'ici  déjà  nous  trouvons  une  vue  juste  sur  l'époque 

de  ces  deux  hommes,  Guedalya  ibn  Yahya,  42a  et48&,  est 
encore  hésitant. 

86.  Au  lieu  de  Narbonne  il  faut  lire  Posquières,  puisqu'il  est  ici 

question  d'Abraham  ben  David  et  non  d'Abraham  ben  Isaac, 
chef  bien  connu  du  rabbinat  de  Narbonne.  Azulaï,  le  pre- 
mier, puis  Zunz,  Gesammelte  Schriften,  III,  p.  145,  ont  jeté 
quelque  lumière  sur  les  trois  n3"Nn,  qu'on  confondait  aupa- 
ravant. Voy.  la  biographie  d'Abraham  ben  David  dans  Car- 
moly, l.  c,  119  sqq;  Reifmann,  Hamagid,  1862,  382  sqq.  ; 
Gross,  Monatsschrift,  1873,  XXII,  337  sqq.  et  1874,  274  sqq.  ; 
Rabbins  fr.,  518  sqq. 

87.  C'est  cette  assertion,  donnée  dans  notre  source  seulement,  qui 
a  fait  dire  à  Guedalya  ibn  Yahia,  53  a  :  n"-i  nï^n". 

88.  Cf.  Carmoly,  Z.  c,  125,  Xlll;  Gross.  Monatsschrift,  XXI,  537, 

n.  8.  Dans  mon  Schalschélet  halikabalaîi,  qui  est  illustré  de 
gloses  d'Abraham  Joseph  Salomon  Graziano,  se  trouve, 
53<2,  un  renvoi  au  commentaire  de  Nissim  sur  Hidlin,  édit. 
Riva,  22 &,  où  est  cité  également  le  ^r^^12  mD-^N  'o. 

89.  On  peut  comprendre  ainsi  le  commencement  si  dilficile  à  ex- 

pliquer de  la  lettre  de  Maïmonide  à  Samuel  ibn  Tibbon  (voy. 
Kobeç,  édit.  Lichtenberg,  II,  27rt),  qui  a  embarrassé  égale- 


224  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ment  Guedalya  ibn  Yahya,  42^,  On  s'étonne  de  voir  mention- 
ner en  cet  endroit  Abraham  ibn  Ezra.  Aussi  Senior  Sachs, 
Hamagid,  1868,  390,  397  sqq.,  suppose-t-il  qu'il  y  a  là  une 
faute.  Abraham  [b.  Méir]  ibn  Ezra  est  mis  pour  Abraham 
ben  Méir,  l'ami  d'Abraham  ben  David.  Le  nom  d'Abraham 
ben  Méir  aurait  mérité  de  trouver  place  dans  les  Rabbins 
français,  comme  correspondant  éminent  d'Abraham  ben 
David. 

90.  Sur  Abraham  ben  Isaac  Ab-bet-din  de  Narbonne,  voy.  Zunz, 

Ges.  Schrifleii,  III,  145  sqq.  et  Gross,  Monatsschrifl,  1868, 
241  sqq. 

91.  -,iSN  iN-ipi  -pr^i  -ns-iNa  'w\  -2C   -sn':;  yc'  s-'iiisips  ■^r-^x-i"', 

r"-  r;N-,i  nn-'  iTT^b  '^iN?:r!  b?2i  NincT  nnct:.  C'est  par  ces 
mots  que  Guedalya  ibn  Yahya,  53(2,  résume  brièvement  les 
renseignements  donnés  ici  par  notre  source.  Nous  savons 
maintenant  que  Zerahya  et  Abraham  ben  David  sont  dé- 
signés par  Guedalya  comme  condisciples  et  non  comme  chefs 
d'école  contemporains.  C'est  dans  ce  dernier  sens  qu'Azulaï 
(édit.  Benjacob,  4&,  qui  a  lu  iT^b)  a  expliqué  les  termes  de 
Guedalya.  Sur  Zerahya  ben  Isaac  Hallévi,  cf.  la  biographie 
de  Reifmann  n-rn-  'n  m?in  :  Rabbins  //\,  512  sqq.;  Gross, 
^.  c.,247. 

92.  Sur  Jona  ben  Abraham  de  Girone,  cf.  Steinschneider,  Cat. 

BodL,  s.  V.  Son  inscription  tumulaire  a  été  conservée  dans  le 
Ab né  Ziccar on,  édit.  LuzzSitto,!!'' II.  Il  est  aussi  cité  sou- 
vent sous  le  nom  de  Jona  de  Tolède  dans  le  Mordekhaï,  où  son 
père  est  appelé  par  erreur  Samuel.  Voy.  Kohn,  l.  c,  134. 

93.  Ne  serait-ce  pas  là  Jona  ben  Joseph,  cousin  du  précédent? 

Cf.  Conforte,  I9b  ;  Catalog.  BodL,  L  c. 

94.  C'est  sans  doute  notre  texte  qui  a  donné  lieu  à  cette  faute  de 

Guedalya  !n;i-i?2  T'J'»  n-'r;  p"7:-ir!.  Cf.  Perles,  Monatsschriff, 
VII,  115  sqq.  et  IX,  175.  Le  terme  de  mcDin  désigne  ici  les 
Novelles  qu'a  écrites  Nahmani  sur  chaque  traité  talmudique. 
L'aventure  surnaturelle  que  raconte  Guedalya  ibti  Yahya 
56a,  d'après  un  cn^jip,  se  trouve  également  dans  les  collec- 
tions de  Graziano,  560 &.  J'en  extrais  le  passage  suivant,  à 
cause  de  sa  bonne  leçon  ;  b"i:T  l'un  na  r;u:«  imn  3-ir;  by  i-irN 

i-zr"*:  T.izri  i^upm  ,^313  i^T^rbn  n^r;  irDi^i  rijLT,  y-iK3  naprrin 
T^b:?  b2Nnr;b  "ibirT»':;  ly  ,im-'as  r7':i  lyn^z  pin  cnb  'jp-'O  prx 
iNïttn  "^riT^aD  CT'n  "^d  ,\n-i-'aD  ^:?^p  pnt3  ■'in  nnb  -i«n  ,"nDDb'^ 
^^r-^i:n723  y-p-^r^  pnth  "T'rD  ••?:«  ^r—^  r^-)^:z•p  by  ion  i','2:ir2n'.:: 


LISTE  DE  RABBINS  DRESSEE  PAR  AZRIEL  TRABOTTO  223 

^-,1  b:^  -inp;*!  ,!d"':*cj  ':3b*::  -inx  -i::2s:"i  ,a-'b'>rTT'a  Ln5':;2  ']br:"i 
S^-^n^^brrr  ipbn  "imTo  ^"ipi  -wXTnb  -^-^rb  isini-::  n'^biïts  n^N-'n 
trzvrzi  .N-^nn  r:ai:t:r;  npsb  ,^^3  b:n  ir;?:  nriN  "^b-^'C  J-npV?r;?:r; 
■;;:-  i*:  r-jbin-i  ,-;nM  nirr:  rr^^pc  nnir-^m  .rrp^:  rriNi:»  im"^ 
.— i"i;  TwS:^?:  2"r  —  .û'J  nx-,^'::  "^"^  br^  r;r-;î«  nwSl-i  .■'r^"- 

95.  N":5"''^"ii7:  -it^vn  'i  ^-ir;?:  m?::?  ib  rr^rrc  rtbnpr;  n-^snc  ^-lb3p^ 

dit  Guedalya  ibii  Yahya  55  &.  Cf.  Conforte,  19  a.  Peut-être 
cette  assertion  provient-elle  d'une  confusion  avec  R.  Azriel 
dont  l'anagramme  fait  R.  Eliézer  et  qui  a  enseigné  la  Cabbale 
à  Nahmani.  Cf.  Graetz,  Gesc?iichie,Yll,  448.  Sur  Elazar  ben 
Yehuda,  cf.  Zunz,  Litg.,  317  sqq.  ;  Rabbins  fr.,  464  sqq. 

96.  M.   Perles  a  fait  la  biographie  de   Salomon  ben  Adret.   Cf. 

aussi  mes  Spurcn  al-BatlajiisVs,  41. 

97.  Cf.  note  92. 

98.  Sur  les  différentes  façons  d'écrire  'iibir-^n,  voy.  Zunz,  Zeif- 

schrift,  I,  144  sq. 

99.  Guedalya  ibn  Yaliya  dit,   58 &,   Na"c-'.r;"w   nmr;  ■'ipr:  "'nb::p-i 

n^33  ic^Nns  r7bi::^bTjb  t:dcî<?3  -z^'-.r,  n^bnc  iy  '^?:^  "inx- 
N3""w-ir:.   Et  f"  60//   il   s'exprime  ainsi:    c-'^iiiîipn    -^rT^N-n 

nn-^  n7:b.  Nous  pouvons  en  inférer  qu'il  y  a  une  lacune  dans 
la  copie  de  Graziano  et  la  combler  par  ces  mots  'n  £0  n?::?] 

100.  C'est  par  opposition  à  Nissim  Gaon  (cf.  n.  20),  que  Nissim  ben 
Reuben  est  appelé  «  le  postérieur  ».  Cf.  Schorr  dans  le 
Chahdz,  YIIl,  126  sqq. 

Budapest. 

David  Kaufmann. 


ACTES  DE  VENTE  HEBREUX 

EN  ESPAGNE 


Notre  savant  ami,  M.  Fidel  Fita,  de  Madrid,  a  découvert  l'année 
dernière,  dans  le  trésor  de  la  cathédrale  de  Léon,  un  manuscrit 
contenant  un  certain  nombre  d'actes  de  vente  en  hébreu,  datant 
du  xp  et  du  xii^  siècles.  Cette  découverte  avait  déjà  un  grand 
intérêt  par  cela  seul  que  les  manuscrits  hébreux  remontant  à  une 
si  haute  antiquité  sont  rares.  Ce  qui  la  rend  encore  plus  précieuse, 
c'est  que  nous  ne  connaissons  guère  beaucoup  d'actes  de  vente 
originaux.  Un  des  plus  anciens  qui  aient  été  publiés  est  celui  qui 
se  trouve  dans  le  volume  intitulé  :  Musée  des  Archives  natio- 
nales, Paris,  1872  (p.  118),  et  qui  est  un  acte  passé  à  Bray-sur- 
Seine  le  20  mai  P206.  VAnglia  Judaica,  de  Tovey,  contient  éga- 
lement une  pièce  de  ce  genre,  très  défigurée  par  l'éditeur,  mais 
n'ayant  pas  le  volume  sous  la  main,  nous  ne  pouvons  en  indiquer 
la  date.  On  en  trouvera  d'intéressants  datés  des  années  4873  et 
4879  (1113  et  1119)  dans  les  Consultations  de  Maïmonide,  édit. 
Leipzig,  n°^  237  et  240. 

M.  Fidel  Fita  a  bien  voulu  nous  envoyer  des  notes  sur  les  pièces 
qu'il  a  découvertes,  au  nombre  de  sept,  et  en  outre  il  a  eu  l'obli- 
geance de  nous  adresser  des  photographies  de  cinq  d'entre  elles, 
mais  le  manuscrit  n'étant  pas  dans  un  très  bon  état,  là  lecture  de 
deux  de  ces  photographies  est  impossible.  Nous  avons  réussi  à  dé- 
chiffrer suffisamment  bien  les  trois  autres,  et,  vu  la  valeur  de  ces 
documents,  nous  n'hésitons  pas  à  les  imprimer  ici.  La  gravure 
intercalée  dans  cet  article  reproduit  la  plus  lisible  de  ces  trois 
photographies,  qui  est  en  même  temps  la  plus  curieuse  au  point 
de  vue  paléographique. 

N«  I.  —  Vente  faite  par  Josef  bar  Joab  Escapat  *  à  Dona  Afro- 

'  Voir  sur  le  nom  de  Scapal  (Escapal),  Revue,  IV,  p.  7(3. 


ACTES  DE  VENTE  HEBREUX  EN  ESPAGNE  227 

nilde  Elinfante,  pour  50  deniers  de  bon  a  loi,  d'une  vigne  qu'il  pos- 
sède à  Montaurio,  et  bornée  d'un  côté  par  la  vigne  de  Yita  ben 
Aldahi,  d'un  autre  côté  par  la  vigne  des  héritiers  d'Elazar  bar 
Isaac,  et  des  deux  autres  côtés,  par  la  voie  publique.  Si  des  tiers 
élèvent  des  prétentions  sur  cette  vigne,  le  vendeur,  si  nous  com- 
prenons bien,  devra  payer  à  l'acquéreur  le  prix  d'une  vigne  sem- 
blable située  dans  le  même  clos,  et,  en  cas  de  retard,  d'une  amende 
de  100  deniers  payables  au  roi.  Fait  à  Léon,  le  jeudi  20  marbesvan 
(4)814  [4  novembre  1053].  Ont  signé  comme  témoins  Hayya  bar 
Salomon  et  Josef  bar  Menabem. 

Voici  cet  acte  ^  : 

•^Tb-^î-iDN  n:inb  i;m  miDT  b'û  '\r::b  ban  i«nm  nnn^T  "îiipa  n^n^  -^by  ^^'n 
V'isi'T  D^ï:»n  n37:73  -^nbapT  Tibuirj  n^n»  m^ïb  mi3  nrnb  -^nîDSNbN 
TmNn3itt3  ib  ;aiU3  û-isrt  nmx  bs  irrnrîb  •^nn^wT  '^r:i»aNp  D'^d"'  û-^nT  bu; 
13  -iT^'bN  •i;a-ii"'  û-is  •'r:D  ni:72T  -^riNibN  p  :tj->3  ma  inx  ns:»  -rs-iSHiz: 
■71:13  r:T  DIS  bs  r:b  imsn  D'i3-in  muj-i  '^m  •'s'in-n  -«^ib^n  nitm  pnsf 
NT^-^-^pT  NT'-na  N-inns  r,T^37a  Nr-^p-i  û-n  ■jjs't  n^'-in  ûinnTo  ib-^N  ^^"12:» 
Kbi  nbrb  r!3  -nnnb  NbT  niaibm  rrsirn  rrr'ST:  N-^D^ncT  V'^by  m-^sTs 
p-'Tnm  ûb^'bT  tirr:«  TicsNbN  it  -^nb-^inonN  nsiT^bn  l'^Mbyb  nr»  riNsanb 
Ejibnm  p'^awm  mr)Mm  b-^nsm  '\^^nT^^  la-^mm  ^an-^n  -nw:»  pirn  it  rrr^rsas 
■rns?:  riD'i  ';i:>3W  •'Db  nsis-n  tistcn  ï-i3  î-iu5:>m  nsnn;a  •'nb  rTjn»3  inm 
■^"inN  ''^'ivb  Nbi  ■'msn  "^^nb  «bi  •'?3^:?b  ^-l-|■'1ïï  jsbi  it  r-TT^a»  !-ib 
i»i£7  -^npbDi  ûbiy3  n-i-iSNT  NsruT  m^TT  û"^n3m  i-^nn  bip  it  r!T^3X]3 

pinn  31-ip  mnNHK  nn  p  ûbn:?  mmi  rm^»  "Nn  ont  Db:?b  m»5  pib-^o 
t2bi:>3  û-^3£3  Û103  rr^b:»  ly^^y^-i  ns  b^'  in  3n33  •^^3,  in  imni  bmï  lanr 
uîtt»  13  VN^  n3U33r:  u2-inb-  v^r^am  v^''^^  t''^^''  "'*"'  ""^  îTT'a»  n5ann 
ûvp  m^3  iT  tnn-'sa  û'^-'pNUJ  i:'  pian  n-n:'  bD  n-^br?:  n^nrtbi  y^Dîib  ■'b:'T 
pvjT  n-n:5>  bD  rr^b:'»  n^iï^bi  y^sï-îb  ^-133-^:?  uni  niito:»  rntt^^^in  m»; 
bb3  ^33:?  Nbn  d-^Dïn  imN  -723  Dipwri  imN3  rîb  ynDN'«3  it  n-i'D»  nnn?: 
"ntt:i  ûvp  m-^s  it  nn-'sn  N-n  '}'^i3-^n  nx»  ^bîsb  3>-idn"::  'ir3D'^y  dnt 
•«babaTaT  •^j'pnpTa  ■'oa:  ba  by^  i-inx  lanv  b:?T  ■^b^'  nt  rîT^s»  "laa  nvnnNi 


*  Dans  les  originaux,  les  abréviations  sont  indiquées  par  des  points  placés  sur  les 
lettres  ;  nous  avons  remplacé  ordinairement  ces  points  par  le  signe  '  placé  à  la  suite 
de  la  lettre  munie  d'un  poiut. 

*  Casémijjah,  roonauie  d'Aboul  Casem,  probablement  Aboul  Casem  Mobamnu'd,  le 
second  calife  faliinile  d'Afrique,  qui  régna  de  322  à  334  (iSauvairc,  Journal  asiat., 
t.  XVIII,  p.  ;i09). 

3  Illisible  sur  la  photographie, 

*  Le  mot  est  à  la  fin  d'une  ligne  ;  la  ligne  suivante  commençait  pcut-i?tre  par  le 
mot  N3'^,  cependant  il  nous  semble  qu'il  n'y  a  pas  de  lacune  en  tête  de  cette  liguo. 


228  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

1^  i*'':pT  i-ia'>rT  "^DsmT  Nn3»3wS3  Nbn  'nb  '2t  'zn  'nn  ^spi  '•'jiNa 
DbïJ  l-i^pn  nb:?»?  mnar:  bis  br  ^";y2-,st<  r;:T7  it  •^nisî^bb  riT  tiûT' 

en:?:  na  pDT'  .  ^'"3  rtnb'::  -n  N-^n  .Nnw  iTib  i-'îîjb  r:-;:;:?  :?mNT  niNTo 

.♦'bs 

Traduction. 

Nous  témoins  soussignés  [affirmons  que]  il  est  arrivé  comme  suit: 
Que  le  sieur  .Tosef,  fils  du  sieur  Joab  Escapat,  nous  a  dit  :  Soyez  té- 
moins pour  moi  dans  la  vente  et  écrivez  et  signez  en  due  forme  et 
donnez  a  Doua  Afronilde  el-Enfanti  en  toute  propriété,  parce  que 
j'ai  pris  et  reçu  d'elle  oO  deniers  casémiyah  de  bon  aloi  et  lui  ai  vendu 
pour  cette  somme  toute  la  vigne  que  j'ai  à  Montaurio  et  bornée  d'un 
côté  par  la  vigne  de  Vita  ben  Aldahi,  du  second  côté,  par  la  vigne 
des  héritiers  d'Elazar  fils  d'Isaac,  des  S''  et  4*'  côtés,  par  la  voie  pu- 
blique. Je  lui  ai  vendu  cette  vigne  placée  au  milieu  de  ces  voisins 
depuis  le  fond  de  la  terre  jusqu'à  la  voûte  du  ciel,  en  vente  complète, 
régulière,  constante,  vente  éternelle  et  publique,  vente  arrêtée  et 
décidée,  vente  sur  laquelle  il  n'y  a  pas  à  revenir  jamais  et  où  il  n'y 
aura  jamais  rien  à  changer.  Aille  ladite  Dona  Afronilde  el-Enfanti, 
à  partir  de  ce  jour  et  pour  toujours,  et  prenne  possession  de  cette 
vente  en  toute  propriété;  acquière,  fasse  acquérir,  transmette,  donne 
en  héritage,  vende,  donne  en  hj^pothèque,  échange,  fasse  don  à  [et 
avec]  qui  elle  voudra  et  en  fasse  selon  son  désir  et  sa  volonté,  parce 
que  je  lui  ai  fait  cette  vente  de  bon  cœur  et  n'ai  réservé  pour  moi  ou 
mes  ayant  cause  ou  mes  héritiers  après  moi,  en  cette  vente,  ni  pré- 
tention, ni  droit,  ni  contestation,  ni  propriété,  ni  allégation,  ni  pré- 
texte d'aucune  espèce,  et  je  rae  suis  retiré  moi-même  et  ai  retiré 
mes  propriétés,  possession  et  droit  et  le  droit  de  mes  ayant  cause 
et  de  mes  héritiers  après  moi  de  cette  vente,  reirait  complet  et 
éternel.  Et  vienne,  d'un  des  quatre  coins  du  monde,  fils,  fille,  frère, 
sœur,  parent,  étranger,  successeur  ou  héritier,  Juif  ou  non-Juif, 
verbalement  ou  par  écrit,  et  soulève  au  sujet  de  cette  vente  une  con- 
testation quelconque,  ses  paroles  seront  nulles  et  considérées  comme 
un  tesson  brisé  qui  n'a  point  de  valeur,  à  charge  pour  moi  de  re- 
pousser et  rendre  vaine  toute  contestation  et  réclamation  de  façon  a 
la  (Dona  Afronilde)  maintenir  dans  son  droit  d'un  maintien  complet 
et  d'une  conservation  complète  ;  et  si  je  suis  empêché  de  repousser 
et  rendre  vaine  une  contestation  et  réclamation  quelconque  concer- 


•  Voir  Arukh,  au  mot  "jN  ;  "^ÎTX  -^  contrat  d'acquisition  ;  le  mot  ^3p  lui  suit  si- 
gnitie  sans  doute  '{"'Dp,  acquisition. 

'  nr)-i2b  niDT  nrwDn  iipna. 

'  Très  peu  lisible  sur  la  pholoirrapliie  ;  peut-être  b"3t. 

*  La  dilléronco  entre  les  deux  formules  'i'3  et  'blS  vient  sans  doute  de  ce  que  la 
première  s'applique  à  une  personne  morte,  la  seconde  à  une  personne  vivante. 
Cf.  Ozar  toh,  18S1,  ji.  'Id,  'b"T  pour  des  vivants. 


AGT£;S  DE  VENTE  HÉBREUX  EN  ESPAGNE  229 

nant  cette  vente,  je  payerai  en  cette  ville  la  valeur  de  cette  vigne 
sans  aucun  retard,  et  s'il  y  avait  retard,  je  payerai  au  roi  cent  de- 
niers. Et  soit  cette  vente  en  ses  mains  d'un  maintien  complet.  Et  la 
garantie  de  cet  acte  de  vente  sera,  à  ma  charge  et  à  celle  de  mes  héiù- 
tiers  après  moi,  hypothéquée  sur  toutes  mes  propriétés  immeubles 
et  meubles,  par  acte  et  acquisition,  selon  la  prescription  de  nos  rab- 
bins, leur  mémoire  soit  bénie  !  et  non  comme  une  promesse  ou  une 
formule.  Et  nous  avons  fait  la  vente  dudit  Josef  à  ladite  el-Enfanti 
Dona  Afronilde  selon  tout  ce  qui  est  écrit  plus  haut,  comme  vente 
complète  ;  et  tout  est  régulier  et  constant  ;  le  5°  jour  de  la  semaine 
(jeudi),  20«  jour  du  mois  de  marhesvan,  l'an  huit  cent  quatorze  de 
l'ère  de  Léon.  [Signé  ;j  Hayya  bar  Salomon;  Josef  bar  Menahem. 

Dona  Fronilde  était  la  fille  du  duc  Don  Pelage,  le  restaurateur 
de  la  puissance  chrétienne  dans  le  Nord  de  l'Espagne,  après  l'inva- 
sion des  Arabes. 

M.  Fidel  Fita  nous  adresse  sur  cette  infante  les  notes  suivantes  : 

1°  14  juin  1045.  Elle  achète  un  jardin  potager.  «  Et  est  in  ter- 
mine primo  suo  propio  de  illa  infanta  Donna  Fronilde,  alio  in  ter- 
mino  de  Fédéral  hebreo...  »  (Trésor  de  la  cathédrale  de  Léon,  ms. 
du  xii^  siècle,  fol.  204,  verso). 

2"  22  mars  1049.  Elle  achète  une  vigne.  «  Et  est  ipsa  vinea  de 
termine  Sancto  Tirso  de  Val  de  Castro  et  inde  per  termine  de  No- 
men  Bono  '  hebreo  -.  »  (Ibid.,  f"  265,  v^). 

Sur  Vita  qui  figure  dans  notre  acte  et  sur  le  témoin  Hayya 
bar  Salomon,  M.  Fidel  Fita  nous  écrit  : 

Dans  un  acte  de  donation  que  fit  le  prêtre  Sampirus  à  l'église 
Saint-Jacques  de  Léon,  il  dit  :  «  Item  alla  villa  quod  sita  est  in  ripa 
amnis  Vernesga,  wistasta  (?)  Alisca,  quod  fuit  de  Vitas  hebreo,  et 
presit  eam  rex  domnus  Vermudus  pro  eorum  scelus.  »  L'acte  est 
de  1308  {Ilrid.,  i°  107,  V)  et  est  signé  par  Hayya  bar  Salomon. 

Le  Judicimn  Régis  Adep/ionsi,  publié  dans  VEspagna  sa- 
grada,  vol.  XXXVI,  append.  x,  daté  du  13  février  1015,  fait 
mention  de  vignes  appartenant  aux  Juifs  à  Montaurio.  Sont 
nommés  dans  cotte  pièce  :  Xab  Xaia ,  Jacob  Traballio,  Vita 
Xabiz.  Xaia  est  égal  à  Hayya. 

îsfo  II 3  _  Auro,  iille  de  Josef,  veuve  d'Aziz  ben  cbita*,  vend  à 
Pelage  Guderriz  '•  le  chrétien,  ■'lïiîr;  y^-ni5  ^NbD,  au  prix  de  31  de- 

'  Scmtob?  (Note  (le  M.  F.  F.). 

*  Voir  aussi  Espaijna  safjmda,  vol.  XXXVI,  append.  \xv. 

'  D'après  M.  Fiilel  Fita. 

"  La  photofi;iaphic  de  cette  pièce  est  lisiblo  par  endroits.  Nous  croyons  que  le  nom 

doit  se  lire  '0'>b;!i"'3. 

=1  Aiijourd'luii  le  nom  s'écrit  Ciulit^rrc/  ;   au    moyen  à<sc,  Gulerri/  et  Chidcrri/.  11  y 

T.    IV.  If' 


230  REVUE  DES  ÉTUDES  .IIIYES 

niers,  une  vigne  située  dans  le  territoire  de  Léon.  Fait  à  Léon,  le 
27  adar  II  de  l'an  (4)883  [lundi  26  mars  1123].  Témoins  :  Moïse  bar 
Isaac,  Isaac  bar  Abraham. 

N°  III  '.  —  Rébecca,  fille  de  ■'^no,  et  son  mari  Jacob  fils  de  Cid  (?) 
Isaac  vendent  à  Domenico  Ramoniz  (D''2in72-i  ■ip-'3N'?:n)  et  à  sa  femme 
Marina  Fernandez  Gonzalez  (o-'b^iis  C"'-!;n*-id  i-;2'^-i72),  au  prix  de 
20  deniers,  une  vigne  située  dans  le  territoire  de  Tiersi  -  (■'D"i&«\-i). 
Fait  à  Léon,  le  2  schevat  (4)884  [dimanche  20  janvier  I124J. 

N°  IV.  —  Auro  Toda,  fille  de  Cid  Crescent,  et  son  mari  Isaac  bar 
Moïse  vendent  à  Don  Albertin,  chanoine  ^,  au  prix  de  35  maravé- 
dis  d'or,  une  moitié  de  vigne  qu'ils  possèdent  dans  le  territoire  de 
Castrillo  appelé  Serna,  et  bornée  de  deux  côtés  par  les  vignes  des 
héritiers  de  Jacob  bar  Moïse,  du  troisième  côté  par  celle  de  Juan 
Pelaiz,  du  quatrième  côté  par  celle  d'Olaliab  Petriz.  Fait  à  Léon 
en  élul  (4)897  [allant  du  20  août  au  17  septembre  II 37].  Ont  signé 
comme  témoins  :  Isaac  bar  Salomon  et  Isaac  bar  Péreç. 

Voici  le  fac-similé  et  la  transcription  de  cette  pièce  : 

avait,  en  1133,  à  la  cathédrale  de  Léon,  un  chantre  appelé  Petrus  Guterriz  {Esp. 
sagr.,  XXXVI.  app.  lui),  peut-être  le  frère  de  noire  Pélaj.'e  Guderriz,  car  les  Juifs 
du  Caslrum  Judeorum  de  Léon  (aiij.  Puente-Caslro)  payaient  à  l'évêque  de  Léon  une 
redevance  annuelle  que  celui-ci  céda  en  1122  a  la  cathédrale  pour  les  besoins  du  culte 
[Ei'p.  saqr.,  ihid..  app.  xlviii),  ce  qui  expliquerait  les  relations  des  Juifs  avec  les 
Guderriz  (M.  P.  F.). 

'  Dapiès  M.  F.  Fita. 

'  M.  Fidel  Fila  n'a  pas  pu  retrouver  un  Tiorsi  dans  le  territoire  de  Léon.  Il  existe 
un  Tierz  dans  la  province  et  le  canton  de  Huesca  (Aragon),  un  Tierzo  dans  la  prov. 
de  Guadalajara,  cant.  de  Molina.  Notre  Tiersi  pourrait  être  le  Tercia  del  Gamine, 
cominune  de  la  prov.  et  rant.  de  Léon  (F.  F.). 

'  C'est  le  sens  du  mot  "'àï-.D,  du  latin  ranonicns  :  ancien  castillan  :  ralonge.  ca- 
ronge,  dérivé  de  rnnonge. 


ACTES  DE  VENTE  HÉHHEUX  EN  ESF'AONE  231 

^  •^>^/  ^i^->  r>-^j^H  -;^p/  o  ;i:^^  o  ^  -y^p 
'"^^^Sji^j^jC^)  rf^)}:^)  f'^y--^  T7^'^ 

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^0/F-.^J>  J;^;,^;  i^*>j%^  ^OJ!^  J->^> 


232  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

n^D  rn  min  imN  "i:b  nToNO  r-rr>  p  nawb  n-'Toinnri  ri-^iy  -iîn 

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■);-'pbn  "w-'i  r:;-ip  Nip;n  ib-'-in^p  bnnsn  "i:b  co  ûid  nniN  bsw  irpbn 

iT  tsns  nîcnw  ib  i3-iDtJ  D-^-iao  3;^bbiN  did  ■'jr^'^an  i::7ûi  oN-'bD  pr  ann 
NbiNLjibm  n^inn  NTa'^-'pn  Nino  r!72^b-::T  r;-n«a  'T'CD^'t^t  '^-^nTjn  2vr;72 
Dvr!72  n-  "i^cûinbN  in  Y-""  V^brb  r:r?2  nsrcnb  Nbm  nbi'b  riia  -n-wb 
b-'nD'^T  c-'nT'i  OT»  miToa  rr'-'rDT  rin  n^n  Titjs  pirn  it  riT'ST^n  p-irn-^i 
nb  isnD'n  J-iTo'^bo  nyti  riD-^  'j-'^'no  -^Db  laiicm  ii^dh  rna  rrar-'i  i^on-'T 
'j-'m  bip  Nb  n-  rn-'D^n  irmDt;  ■'Nnb  «bn  ■'2-'Wi::?b  i;n^^-û  «b  it  ïTT'^Ta 
bD»  mo-n  irn-n::m  ir'ai:^  iDpb-'D  n^Di  ûbii'3  -3:;'C]t  m^T  dioi  û-'-i3m 
p  ûbiy  mmn  :?mN73  Nin-'  uni  -n»:;  pib-'O  it  r;-i-'37o  b:?7D  irmoTo  "^Nn 
-i:>nT"'i  riD  b:?2  in  an^a  -^15  in  ■''nn'^  bm3  ïdit»  pnn-i  ai-ip  mriN  nx  ns 
12  ■jWsT  n3">::;r!  -cînnb  ';-'2Tj:m  ';-'b^3  mn'r  T-rr'  it  j-t-t'^t:  r-i^nw  l'^br 
f'-'p;-:;  -;•  p'vji  n-ny  bo  n'^i-bi  mircb  i^-^bri  12  yen  ^n  ■'b^bi  "wX:^ 
b^'T  irnnN  is-'-c'nT'  b:?T  nrbr  rmnNa  ûbii'b  m^a  ûT^p  tt^3  it  n-i-'::?: 
"'-i:::o-i  ■^D21l:i  np^won^  Nbi  ^'nb'oT  'rn'PD  -^b::?;:»!  ■'rp-ip73  irosîbD 
'j-'spn  rîbi'tib  mprn  bD  bj'  nr  v^nnbwS  iTib  ibx  pn::-^-!  riiip  p  iripi 
rt"ià  NnpSn  nptd  "jT^ba  Ti»-iri  r-iî^  bnbN  m-'n  i;?:pn"i  l'aPD  .ûbc 
pn^f   /r:  t-î72b'0  "13  pn::"'   .û-i^ipTon  '^pnTar:  bri  ^b  rnsiriTàr;  -^tj^n  -^rs 

.  ':;':  yno  nn 

M.  Fidel  Fita  nous  écrit  sur  cette  pièce  : 

1.  Le  chanoine  Albertin  est  peut-être  l'évêque  de  Léon  Jean 
Albertin  (1139-1181)  dont  il  est  question  dansl'^^p.  sagr.,  XXXV, 
p.  192-231. 

2.  Il  y  a  dans  la  province  de  Léon  plusieurs  Castrillo.  Dans 
notre  pièce  il  s'agit  probablement  de  Castrillo  de  la  Ribera,  près 
de  la  ville  de  Léon  et  du  fleuve  Torio. 

3.  Sema  est  un  mot  très  répandu  ;  il  indique  l'espace  qu'on  peut 
semer  dans  une  journée. 

4.  Jean  Pelaiz  est  le  nom  d'un  chanoine,  diacre  de  la  cathé- 


'  Lettres  peu  visibles  sur  la  photographie. 

*  Pour  D'^"^n?31,  et  de  mon  vivant:  la  lecture  Q^'^HTO  est  assurée  par  la  photogra- 
phie de  la  pièce  n°  II,  où  les  mots  T^OD^Wl  C'^'^nTjl  sont  très  lisibles.  La  formule 
est  opposée  à  celle  de  nP"^73  "in^bl  T'OD^T^  usitée  pour  les  donations  testamen- 
taires. Voir  Tur,  Hoschen  misr/ipat,  chap.  ccvi.  V  oir  aussi  plus  loin,  n"  V. 

'  Le  mot  ;ti^3?2  semble  manquer  à  celte  place. 

*  Voir  la  pièce  n"  I. 

'  Ce  '5  est  exponclué  et,  par  suite,  ne  compte  pas. 

^  Le  passafre  veut  dire  que  les  mots  ^2"ltt5  N"lp3tl  qui  se  trouvent  plus  haut 
■  entre  les  lij^nes  •,  et  le  mot  niïriT^rï  qui  se  trouve  plus  haut  sur  un  grattage,  sont 
bons.  Comp.  Itfnr,  éd.  Venise,  ItiOX,  ï"  17.  ^'  col. 


^ ACTES  DE  VENTE  HÉBREUX  EN  ESPAGNE  233 

drale  de  Léon,  cité  dans  une  pièce  du  19  avril  1133.  [Esp.  sagr., 
XXXVI,  app.  lui).  Parmi  les  nobles  qui  signent  cette  pièce,  après 
le  roi  et  avant  les  évêques,  se  trouve  Albertinus,  père  de  l'é- 
vêque  Jean. 

5.  Le  30  décembre  1167,  un  chanoine  de  la  cathédrale,  «Dominus 
Albertinus,  archidiaconus,  »  signe  une  pièce  reproduite  dans  Esjj. 
sagr.,  XXXVI,  app.  lvi. 

N°  V.  —  Don  '  Auro,  fille  de  Cid,  et  son  mari  Rabbi  Abraham  ben 
Méir  Mogusi  (?)  vendent  à  Petro  Pelaiz  et  à  sa  femme  Eznada  Mu- 
nioz,  au  prix  de  15  1/2  maravédis  d"or,  une  vigne  située  dans  le 
territoire  de  Valdesanialos  (?),  bornée  par  les  vignes  de  Geraldo, 
chanoine,  de  Salvador  Basso  Cuacho  (?),  des  héritiers  de  Samuel 
ben  Aziz  et  par  la  voie  publique.  Fait  à  Léon  le  dimanche  4  iyyar 
(4)911  [22  avril  1151].  Ont  signé  comme  témoins  :  Josef  bar 
Barzillaï  et  Samuel  bar  Jacob. 

i72nm  nnnDT  ror^ivr]  ûbiD  I"^:p2  ûnr  irb2>  nn  -^01:11^  t^nw  p  cmnN  '1 
i-ivrib  DV3i^  n-i;tn  ini::NbT  DNbo  inaob  nam  niDî  bo  "jiob  bsn  is-^b:? 
tL-^D"^  ^■zn-]  c-^m-T  noy  Ti'Cji^n  ûrt^o  isbnpi  isbasu:  ri7:n7:  m^rb  di-^a 
c^u;  t=-iD  imN  bD  cnin  tznb  ididwi  -imob  nmo  i"^2  fnmy  N^::3N-n^ 
■nbnj  "jT:  tznD  inx  n^?a  t2-i3  nniN  brs  "'S-iictdi  ^ibN^3i::i  bN3  bT3:;n  i:b 
'-I  •^fflnT'  tDiD  -^uj-^b'vi:  1SWT  làNip  iD.sn  ■'.i-inbo  fi^  ■'rj:  iictdi  i^^id 
^•\r\'2  riT  îzi-is  cjnb  i3i^»  d'unir;  r-.van  'im  ■'y^m  12:»t  viy  p  b^Tat: 
£3-i^n»i  ciibij'bi  d^nT:  i-in^^To  imrDTi  nnpTm  inNir:  b^i  ibN  v^ii:» 
î^To-^-ipi  rrr'-io  !-i^bOT  rtmw:*  rrr^i»  N'^omci  •j-'wby  t-rr^DW  T«t:5r?2T 
•jTi  irDb-'  ';-'wb:î>b  rtrTo  n^sanb  Nbii  ûb^^b  rrn  -ii"73b  xbi  NHûibni  ri^inn 
piT'^n  "iT  ni-'DTsa  ip-Tn^'i  ûbirbi  ûT'n):  û-'^ipri  ibx  ni;tn  im  iiao 
lîD^a^iT  n-n:DW^i  iron''^  ib^^nn  lïïj-^m-'i  niJT'"'  rt-n^s  n-iDT  nn  iDn  -n)::^ 
12--11U:  -^TD  bob  -3nW3  narrai  mpr^n  ir::"»!  ■niicn-'i  ibittr^i  isn-'i  iQ-^bn'^i 
riT  ûiiD  tis-b  id-i:d»  -TDb'w  pj^'ii  riD-'  ^v^nu:  ^ob  aDii:-n  ciisn  cna  nor^i 
Nb  iT  m-'STon  131-inN  ■ij'">::-n^b  Nbi  irmD72  û-^N^b  j?bT  ir72i:rb  m^-'C  xbi 
iD-^XDi::?  lîpb-'O  -odi  ûbi;'3  riDr^Ji  n^T  ûiï)  Nbi  û-'im  xbi  i^  wxbi  bp 

mnp  mnN  hn  na  p  ûbnr  mmi  r 21x73  xia-'O  -^73  bsi  nbi:'b  11735  pi,>o 
fiD  û"iu:2  trribi»  -ly-ir-^i  no  bs>i  nnDn  -iia  in  ■'nirr'  bma  o-it^  pinn 
13  VNu:  -i3u:3n  u:-inb  l'^a-icn  "j-^bua  mm  t'h-^  rrT  ûid  nttn»  ûbnra 
-my  b^  ar!''b:*73  n-«nnbT  m::Db  irbr'i  nN^m  m  yen  "j-^n  ■'bDbT  ^^737; 
r-n"'nnN2  ûbi3>b  -1173:^  ûi^p  DT'a  it  m-^D73  □■'■'pî^D  ir  pn-j-i  ymm  l^i^i 
'bî  'DH  'm::  ■^bL:ba73T  •^yp"ip73  nroDD  bD  byi  ■:D-^-inN  iro-iT»  bri  irby 

'   Un  remarquera  l'emploi  de  don  (non  </o«fl)  devant  un  nom  de  lomme. 


234  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

ITib  nbwS  nnnsN  'm  iiix  in  i»  iripi  ■^nrj'CT  ■•001:31  Nn::?20ND  n5t 

B"'"'ip73T  ivb   Nn73  '{"'jTob  N-'prin  nrû  -t^^n  riT'b  tz-^Xi-^  nrs-iN  nsc: 

iHNn  i3»nm  db-û  V^P^  nbi'wb  ninsn  bo  by  ibiS  îîidtn  inbi  i-iiid 

.  '  :jn3  'bi:  np:>i  ^2  b^i):^    .  'bic  -ib-ina  la  rjcr 

Note  de  M.  Fidel  Fita  : 

«  nàNip  pourrait  être  l'espagnol  juez,  provenant  du  latin  ju- 
dex,  cependant  j'incline  plutôt  à  y  voir  un  nom  de  famille,  par 
exemple  Cuecho,  de  Cocho,  primitif  de  Cochino  (cochon).  Cocho, 
en  ce  sens,  est  encore  usité  à  Léon  et  dans  les  Asturies.  ^> 

Le  nom  de  localité  que  nous  lisons  Valdesanialos,  est  lu  par 
M.  F.  F.  Valdesarielos.  Ce  serait  alors  le  Valle  de  Sariegos,  ha- 
meau de  la  commune  de  Saint-i^drien  de  Rabanedo,  près  du 
fleuve  Bernerga,  canton  de  Léon. 

N"  Vr-.  —  Auro,  fille  de  David,  et  son  mari  Abraham  bar 

vendent  à  Don  Petro  Martinez,  le  chanoine  (n>-''-i'i3pn),  au  prix  de 

trois  maravédis  d'or,  une  vigne située  dans  le  territoire  de 

Léon.  Fait  à  Léon,  le  jeudi  5  kaslev  (4)936  [20  novembre  1175]. 
Ont  signé  comme  témoins  :  Jacob  bar  nbT-in^^n  7\wb^  et  Joseph  bar 
Elischa. 

M.  Fidel  Fita  fait  les  remarques  suivantes  : 

L  riLs-ibn,  Vellito  ou  Vileto,  est  un  nom  de  famille  très  usité  à 
Léon. 

2.  nbT-i2"«3n  aurait-il  quelque  rapport  avec  le  nom  de  Taza- 
ferro^  qu'on  trouve  dans  un  acte  de  janvier  1206  [Esp.  sagr., 
XXXVI,  app.  Lxi)? 

N"  Vil*.  — Vente  d'une  vigne  située  à  Tercios  (oiio-in).  Fait  à 
Léon  en  (4)990  =  1229/30. 

Un  des  personnages  nommés  est  Mar  Josef  Naci;  un  autre,  Féli- 
cia,  fille  d'Isaac  b.  Moïse  ;  le  nom  de  la  principale  venderesse  pour- 
rait bi(m  être  lniU5-ia,  Gracia  (I.  L.). 

N"  VIII.  —  Document  fort  intéressant  [)Our  l'étude  de  l'ancien 
dialecte  léonais. 

«  Sub  era  M^"  CC"  XC.  VII,  in  mense  aprilis.  Consabido  sea  por 

'  Nous  soiiimus  assez  embarrassé  pour  lire  ces  deux  derniers  mots,  lis  font  peut- 
être  :  Ûinm  d'iTia  ïlDinb  inpiit.  Au  lieu  deana,  il  t'aul  peut-être  lire  15n3. 
que  nous  ne  savons  pas  déchiil'rer. 

'  D'après  M.  Fidel  Fita. 

^  l'eut-être  faut-il  lire  IlbinD^ir,  et  r;bT"'.3  (Haut  la  traduction  de  ferro.  on  aurait 
exactement  le  nom  di;  Tazalerro  (I.  L.). 

♦  i>'après  M.  Fidel  Fita. 


»:•;•'' 


ACTES  DE  VENTE  HÉBREUX  EN  ESPAGNE  235 

esle  escripto  que  yo  D.  Pelayo,  erno  de  ya  Lonarda,,  e  yo  Pela  Pa)- 
maz,  ambos  decïïia  commo  e  cada  uno  por  todo  devemos  a  Vos  Yuçe 
et  a  vuestra  muyer  IIII  sol.  3.  mr.,  aquen  ata  dia  dentruestro  pri- 
mero  que  vie,  por  nos  e  por  nostras  buenas  mobles  non  mobles.  Se 
volos  non  pagarnos  a  este  devandicho  plazo  :  que  graven  sobre  nos 
como  manda  el  Rey  Casto  que  sin  misiones  quacusnas  fecierdes 
sobre  este  pleyto,  todas  sean  sobre  nos;  e  vos  seades  creidos.  Ts. 
don  Marcos  fld',  Martin  Parayso,  Diago  de  Frexno,  don  Pedro  fid', 
don  Martin  Zapalero,  Diago  Perez  Maria,  Diago  Liger  Zapatero,  don 
Yuanes  e  don  Pedro  fijos  de  don  Esidro  de  Quintamela,  Pedro  Ma- 
zana,  Yuanes  Farto;  —  Abrafan  judio,  Masse  judio.  » 
«  Petrus  notuit.  » 

Traduction.  —  Sous  l'ère  1297  ',  au  mois  d'avril.  Quon  sacbe  par 
cet  écrit  que  moi  Don  Pelayo-,  gendre  de  la  Lonardo^  et  moi  Pela-* 
Palmas,  tous  deux  solidairement  ^  et  chacun  pour  le  tout,  devons  à 
vous  Yuce^  et  à  votre  femme  4  sous  3  maravédis,  dece  jour  jusqu'au 
prochain  jour  d'Enlruecho",  pour  nous  et  pour  nos  biens  meubles 
et  immeubles.  Si  nous  ne  les  payons  pas  à  ce  susdit  terme,  que 
tombe  sur  nous,  selon  l'ordonnance  du  Roi  Chaste*,  [la  peine]  que 
les  frais  quelconques  que  vous  ferez  au  sujet  de  ce  procès  soient  tous 
à  notre  charge  et  que  vous  soyez  crus  [en  justice].  Témoins  :  Don 
Marcos  fid[algo?],  Martin  Paraiso,  Diego  de  Fresno.  Don  Pedro 
fid[algo?],  Don  Martin  Zapataro,  Diego  M[an?]aria[n?],  Diego  Liger 
Zapatero,  Don  Juan  et  Don  Pedro,  fils  de  Don  Isidoro  de  Quintanilla, 
Pedro  Mazana^  Juan  Farto  ;  —  Abrafan  *",  juif;  Mossé  ",  juif. 

Pedro,  notaire. 

Isidore  Loeb. 


'  Correspondant  à  Tannée  1259  de  l'ère  chrétienne. 

■■i  Pelage  ;  sur  le  dos  de  la  pièce,  "N"'bD  "JTT- 

^  Léonarde. 

*  M.  F.  F.  suppose  que  c'est  le  nom  de  Pelaya  ;  sur  le  dos,  "^ÎD. 

5  Decma,  dans  le  texte,  doit,  suivant  M.  F.  F.,  se  lire  de  companna  ou  de  coManda. 

^  Josef. 

^  C'est  l'espagnol  antruyo  (carnaval),  du  latin  introitus  ;  sur  le  dos  de  la  pièce, 
"là'^NlIU'^jbN.  Le  carnaval  de  l'an  1260,  ou  dimanche  de  Quinquagésime,  tombait  le 
15  février  (M.  F.  F.J. 

><  Alphonse  II  (791-842).  Des  traces  de  cette  ordonnance  doivent  se  trouver  dans  la 
Karta  inter  C/tristianos  et  Jtideos  de  foros  illorum,  faite  par  Alphonse  VI  (31  mars 
1091)  et  publiée  dans  Esp.  sagr.,  XXXV,  app.  i  (M.  F.  F.). 

'  Voir  ce  nom  dans  Revue,  IV.  p.  Ih. 

="  Abraham,  avec  /"pour  A,-  voir  Revue,  IV,  p. 71,  Co/I'e;  p.  72,  Fahih ;  p.  74,  Jaffuda. 

"  C'est  peut-être  ainsi  qu'il  faut  lire  dans  le  texte. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES 


AU  XVIH'^  SIECLE 


IV 


La  situation  des  Juifs  aux  colonies  françaises  était  donc  tolé- 
rable,  puisque  l'autorité  laissait  tomber  en  désuétude  les  rigueurs 
du  Code  noir  et  que  la  justice  elle-même  avait  admis  une  juris- 
prudence qui  leur  reconnaissait  en  quelque  sorte  une  existence 
légale,  lorsque  tout  à  coup  la  nomination  du  comte  d'Estaing 
comme  gouverneur  général  (llôé)  vint  jeter  le  trouble  dans  les 
esprits  et  inquiéter  d'une  manière  bien  vive  les  petits  groupes  de 
population  juive  qui  se  trouvaient  éparpillés  dans  les  différentes 
localités  des  Iles  d'Amérique. 

Le  comte  d'Estaing  fut  appelé  le  27  décembre  1163  au  gouverne- 
ment général  des  colonies  avec  le  titre  de  représentant  la  per- 
sonne de  Sa  Majesté  aux  Iles  sous  le  Vent  de  VAméHque,  titre 
tout  spécial  qu'aucun  de  ses  prédécesseurs  n'avait  porté  jusqu'à 
lui  ;  mais  il  ne  fut  reçu  au  Cap  que  le  23  avril  1764.  Il  arrivait 
investi  de  toute  la  confiance  du  ministre  et  l'imagination  pleine 
d'idées  de  transformation  et  de  grands  travaux.  Tous  les  rouages 
de  l'administration  lui  paraissaient  défectueux  ;  l'allure,  la  con- 
duite et  les  mœurs  des  individus  lui  déplaisaient  et  il  voulait  impo- 
ser au  pays  une  réforme  complète.  Aussi  devait-il  s'attendre  à  une 
résistance  qu'il  aurait  pu  vaincre,  grâce  à  Tappui  tout-puissant  que 
lui  donnait  le  ministre,  s'il  avait  eu  la  connaissance  pratique  des 
choses  maritimes  et  coloniales,  s'il  avait  su  mettre  delà  diplomatie 
et  des  ménagements  dans  sa  conduite.  Mais  le  comte  d'Estaing 
avait  toutes  les  allures  du  grand  seigneur  dans  ses  actes,  dans  ses 

•  Voir  plus  haut,  p.  127. 


LKS  JLKFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII=  SIÈCLE       237 

conversations  et  dans  sa  correspondance.  M.  de  Choiseul,  ministre 
de  la  marine,  qui  lui  avait  donné  toute  sa  confiance,  le  qualifie 
assez  durement  dans  le  mémoire  qu'il  remit  au  roi  en  HôS  *■  et  le 
traite  de  fou  et  de  fou  dangereux.  Dès  les  premiers  jours,  il 
ameuta  contre  lui  toutes  les  classes  de  la  société  coloniale,  et  des 
plaintes  de  la  plus  haute  importance  furent  lancées  contre  lui.  Il 
eut  presque  immédiatement  à  se  défendre  contre  des  critiques 
amères  et  violentes  qui  se  formulèrent  en  des  accusations  très 
graves.  Le  personnel  de  la  justice  même  ne  refusa  pas  de  prêter 
la  main  à  ces  dénonciations. 

De  toute  cette  lutte,  nous  ne  voulons  rechercher  que  les  détails 
concernant  les  Juifs  ,  dont  l'imposition  arbitraire  forma  un  des 
sept  points  d'accusation  dressés  contre  lui  :  nous  laissons  à 
d'autres,  plus  experts  et  plus  versés  dans  l'histoire  des  colonies, 
le  soin  d'exhumer  des  archives  du  ministère  de  la  marine  tous  les 
détails  piquants  de  cette  affaire. 

Le  comte  d'Estaing  vint-il  aux  colonies  précédé  d'une  réputa- 
tion de  libéralisme,  d'homme  acquis  aux  idées  nouvelles  qui  étaient 
alors  à  la  mode  ?  C'est  ce  que  nous  ne  pouvons  affirmer.  Mais  il 
est  à  peine  arrivé  au  Cap,  que  les  Juifs  de  la  Martinique  lui  adres- 
sent la  requête  suivante,  dont  nous  n'avons  pu  retrouver  le  texte 
original  et  que  nous  donnons  d'après  une  copie  (fidèle?/  conservée 
aux  archives  du  ministère  de  la  marine'-'. 

Coppie  de  la  Requête  présentée  par  ceux  de  la  Religion  Judaïque 
qui  haUtent  Vlsle  de  la  Martinique. 

Du  4  juillet  1764. 

Supplie  humblement  la  Communauté  des  marchands  de  la  nation 
hébraïque  demeurant  tant  en  cette  Isle  que  autres  dépendantes  et 
étant  sous  la  domination  de  Sa  Majesté  très  Chrestienne. 

Et  vous  remontrent  que  les  commencements  qu'elles  ont  été  habi- 
tués, il  y  seroit  venu  de  divers  lieux  et  contrée  de  la  terre  y  ayant 
été  receus  par  les  propriétaires  et  habitans  avec  toute  sorte  d'a- 
mitié et  bienveillance  et  permission  d'y  trafiquer  en  toute  liberté 
ainsy  quil  avoit  toujours  depuis  fait  y  ayant  fait  venir  une  infinité 
de  diverses  marchandises  et  vaisseaux  de  toutes  parts  très  requis  et 

'  •  J'ai  voulu  établir  en  Amérique  un  système  d'Europe;  j'ai  lait  choix  de  sujets 

•  pour  gouverner  qui  m'ont  jeté  dans  des  écarts  épouvantables  ;  les  uns  étaient  inlé- 
»  ressés,  les  autres  despotiques,    ignorants   et  déraisonnables.  Un,  tel  que  M.  d'Es- 

•  taing,  à  qui  je  croyais  un  talent  supérieur,  n'est  que  l'ou  et  fou  danpereux  ;  son 
.  intendant  pour  le  moins  un  Fripon.  .  Voy.  Giraud,  Mémoire  deM.de  Choiseul  remis 
au  Roi  en  ^765.  {Journal  des  Savants,  avril  18S1,  p.  255.) 

2  Arch.  du  Minist.  de  la  Marine.  —  Collect.  Moreau  S t-Méry.  —  Colonies  on  gé- 
néral, t.  XV,  art.  Juif. 


238  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

nécessaires  pour  la  subvention  et  autîes  nécessités  desdits  habitans, 
et  par  ce  moyen  beaucoup  contribué  à  les  établissements  et  avène- 
ments des  Colonies  qui  y  sont  maintenant  plantés,  de  quoy  lesdits 
habitants  auroient  néanmoins  été  si  peu  recognoissant  qu'ils  avoient 
toujours  dilayé  et  refusé  le  payement  des  marchandises  qu'ils  leur 
avoient  livrés  en  leur  grandes  nécessités,  y  en  ayant  un  grand  nombre 
qui  leur  sont  redevables  de  sommes  assez  considérables,  de  il  y  a 
plus  de  dix  à  douze  ans,  et  de  presant  ne  tiennent  encore  compte  de 
les  satisfaire,  ce  qui  les  empêche  de  se  retirer  des  dites  Isles  à 
moins  que  de  perdre  la  meilleure  partie  de  leurs  biens  pour  quoy 
ils  se  voyent  dans  la  nécessité  le  reste  de  leur  vie. 

Et  d'autant  qu'il  est  très  notoire  et  évident  que  par  leur  grand  traf- 
fique  et  négoce,  ils  aportent  un  bien  et  utile  fort  considérable  en 
toutes  lesdites  Isles,  ce  qu'ils  feroient  encore  plus  abondament  de 
toutes  ces  danrées  qui  y  sont  requises,  s'il  etoient  permis  sy  habi- 
tuer ainsy  qu'à  Gayenne  et  divers  autres  lieux  de  l'Amérique  puis- 
que par  ce  moyen  quoy  que  fesant  audit,  ils  ne  pouroient  rien 
perdre  et  ce  qu'il  ne  porteroit  neul  préjudice  ains  n'yroit  qu'à  l'a- 
vencement  desdites  Colonies. 

Ce  considéré,  Monseigneur,  il  vous  plaisce  permettre  ausdits  sup- 
plians  d'habituer  dans  toutes  les  Isles  quy  sont  sous  la  domination 
de  Sa  dite  Majesté  a  ceste  fin  qu'ils  puisent  se  pourvoir  par  devers 
les  propriétaires  ou  autres  ayant  pouvoir  de  donner  des  terres  aux 
fins  qu'il  leur  soit  accordé  pour  y  continuer  moulins  a  sucre  et  y 
fere  manufacture  toute  marchandise  et  danrée  qui  y  croit,  et  leur 
permettre  d'user  des  mêmes  facultés,  droits,  franchises  et  libertés 
dont  jouissent  et  usent  les  naturels  françois  qu'autres  habitans,  ce 
qui  ne  portera  qu'a  l'augmentation  et  avantage  desdites  colonies  et 
bien  public  comme  leur  permettre  le  libre  exercice  de  leur  religion 
et  aussy  seront  obligés  de  prier  Dieu  pour  la  conservation  de  Sadite 
Majesté  et  augmentation  de  la  couronne  et  qu'il  vous  tienne  en  santé 
et  prospérité  puisque  vous  leur  ferés  justice. 

Le  comte  d'Estaing  voulut  profiter  de  cette  demande  pour  com- 
mencer les  réformes  et  les  améliorations  qu'il  projetait.  Il  fit  venir 
chez  lui  quelques  Juifs,  les  plus  notables  de  la  colonie  de  Saint- 
Louis  et  des  Cayes,  il  leur  offrit  sa  protection  et  sa  puissante  in- 
tervention en  leur  faveur,  mais  à  la  condition  qu'ils  feraient  des 
sacrifices  d'argent  pour  des  fondations  d'utilité  publique,  fon- 
taines, batteries,  bateaux,  auberges  avec  relais  de  poste,  etc.,  etc. 
Dans  la  crainte  de  s'aliéner  l'esprit  du  gouverneur,  les  Juifs 
n'osèrent  point  refuser,  sachant  que  leur  situation  illégale  et 
indéterminée  deviendrait  intolérable  si,  par  suite  de  leur  refus, 
le  gouverneur  se  mettait  à  les  tracasser  et  à  soulever  contre 
eux  l'opinion  de  la  Cour.  Leur  silence  fut  donc  un  acquies- 
cement et  le  comte  d'Estaing  les  imposa  à  des  sommes  fort  im- 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  i'RANÇAlSES  AU  XVIll"  SIECLE        229 

portantes,  que  les  uns  versèrent  immédiatement  et  pour  lesquelles 
d'autres  signèrent  des  engagements  qui  furent  remis  à  Tintendant 
des  finances. 

Mais  s'ils  n'osèrent  résister  en  face,  une  fois  hors  de  la  présence 
du  gouverneur,  ils  ne  se  firent  pas  faute  de  murmurer,  de  crier  à 
l'injustice  et  de  chercher  un  moyen  de  ne  point  payer  un  impôt 
qu'ils  trouvaient  vexatoire  et  inique.  Les  mécontents  qu'avait 
déjà  faits  le  comte  d'Estaing  profitèrent  de  cette  circonstance  et 
s'empressèrent  de  conseiller  les  Juifs.  Ils  les  excitèrent  à  faire  in- 
tervenir en  leur  faveur  la  maison  Gradis  de  Bordeaux,  qui,  sans 
doute,  ne  refuserait  pas  de  porter  leurs  doléances  devant  le  roi  et 
qui,  grâce  aux  services  éminents  qu'elle  ne  cessait  de  rendre  à  la 
Cour,  pourrait  contrebalancer  l'influence  du  comte  d'Estaing.  Le 
moment  était  assez  bien  choisi  pour  user  du  crédit  de  la  maison 
David  Gradis  et  fils,  car  elle  venait  d'être  chargée  par  le  mi- 
nistre de  fournir  les  vivres  destinés  à  l'approvisionnement  des 
troupes  de  Cayenne,  Saint-Domingue,  la  Martinique  et  la  Gua- 
deloupe. 

De  vagues  informations  sur  toute  cette  petite  conspiration  par- 
vinrent au  gouverneur  :  il  s'empressa  d'écrire  au  duc  de  Choiseul. 
ministre  des  affaires  étrangères  et  de  la  guerre,  qui  avait  les  co- 
lonies dans  ses  attributions.  Dans  cette  lettre,  il  voulut  aller  au- 
devant  de  l'accusation  qu'on  semblait  être  prêt  à  porter  contre 
lui  ;  il  ne  dissimula  pas  son  inquiétude  et  montra  sa  crainte  d'être 
accusé  de  malversation.  La  lettre  originale  que  nous  avons  copiée 
montre,  par  son  écriture  fiévreuse  et  tremblée,  sous  quelle  impres- 
sion il  l'a  écrite  ;  quant  à  l'orthographe,  que  nous  respectons, 
c'est  celle  d'un  grand  seigneur  de  la  cour,  dédaigneux  du  frein  de 
la  grammaire  : 

Aux  Cayes,  partie  du  sud  de  Tisle  de  Saint-Domingue, 
ce  8  septembre  1764  '. 

Monsieur, 

La  crainte  en  lésant  de  son  mieux  est  la  pation  des  sots  ;  si  c'est  la 
mienne  aujourd'huy,  c'est  que  je  vous  suis  attaché  ;  quand  au  reste, 
je  me  crois  très  brave  ;  j'ai  donc  l'honneur,  Monsieur  le  Duc,  de 
vous  écrire  à  la  hatte,  et  de  peur:  la  malignité  et  les  interprétations 
sont  les  denrées  du  climat  ;  mon  journal  pourroit  arriver  trop  tard  : 
je  me  dépêche  de  vous  rendre  compte  que  j'ai  fait  contribuer  pour  le 
bien  publique  et  non  pour  moy  les  sinagogues  de  S'  Louis  et  des 
Cayes  :  des  Juifs,  propriétaires  d'esclaves  qu'ils  rendent  Israélites 

'  Archives  du  Minist.  de  la  Mar.  —  Colonies.  —  Saiul-Domiugue.  —  Correspon- 
dance générale,  ad  annum. 


240 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


comme  eux  ;  qui  achettent  et  qui  possèdent  des  terres,  dans  un  pays 
chrétien,  doivent  pour  y  être  tolérés,  faire  venir  de  l'eau  dans  les 
villes,  fournir  des  battaux  au  Roy  et  s'occuper  d'autres  petites  uti- 
lités qui  leur  feront  honneur  dans  les  siècles  futures  ;  c'est  ce  que 
je  leur  ai  conseillé,  cela  n'est  pas  considérable  ;  mais  M.  Gradis 
pourrat  le  desapprouver  et  cryer  ;  j'ai  d'ailleurs  mesuré  ces  petits 
dons  gratuits  sur  la  bonne  ou  la  mauvaise  conduite  de  ces  enfans 
de  Moyse. 

Il  joignit  à  cette  lettre  la  note  suivante,  où  il  établit  les  contri- 
butions qu'il  avait  imposées  et  donna  certains  détails  sur  la  situa- 
tion des  individus  compris  dans  ce  premier  rôle  : 

Nattes  sur  les  Juifs  de  Saint-Louis  et  des  Cayes  qui  ont  offert  par 
requête,  et  pour  être  tolérés,  de  contribuer  au  bien  public  *. 


OBJETS. 

Une  fontaine  dans  la  place  publique  de 
Saint-Louis,  avec  une  conduite  d'eau  sur 
le  port  pour  en  donner,  bord  à  quay,  aux 
chaloupes  des  navires  ;  l'eau  est  éloignée 
de  Saint-Louis  d'une  lieue  ;  on  deman- 
dait 7,000  livres  par  an  pour  en  fournir  à 
cinq  compagnies. 

Une  batterie  fermée  susceptible  de  re- 
cevoir quatre  pièces  de  gros  canon,  qui 
doit  être  placée  dans  la  baye  d'Aquin  ; 
une  auberge  dont  la  maison  restera  au  Roy, 
avec  des  chevaux  de  poste  au  même  lieu. 

Une  auberge  dont  la  maison  restera  au 
Roy  avec  des  chevaux  de  poste  au  Bourg 
Saint-Michel. 

Une  soumission  de  50,000  livres  payable 
en  deux  ans  pour  acheter  pour  le  Roy  des 
batteaux  nommées  collombes. 


NOMS  ET  MOTIFS. 


Le  sieur  Depas  père,  chef  de  famille  : 
il  a  auprès  de  Saint-Louis  une  grande 
habitation  sur  laquelle  il  y  a  environ  280 
nègres  ;  ce  Juif  possède  une  autre  habita- 
tion dans  le  Bas  d'Aquin  et  une  autre  à 
l'Azile. 


\ 
De    Pas  le  jeune,  honnête  homme.  Il 

vient  d'acheter  une  habitation  de  100  nè- 
gres près  du  Bourg  d'Aquin  ;  il  en  a  une 
autre  à  l'Azile.  Il  possède  deux  maisons  à 
Saint-Louis  et  aux  Cayes. 

Jean  Depas  ;  il  possède  une  habitation 
à  la  colonne  à  Mangon  avec  30  nègres. 


Michel  Depas,  mauvais  sujet  contre 
lequel  il  y  a  une  multitude  de  plaintes  de 
la  part  des  habitans  ;  mulâtre  libre  et  ba- 
Idrd.  Il  possède  une  habitation  très  con- 
sidérable à  la  Grande  colline  avec  120  nè- 
gres. Il  a  de  plus  une  autre  habitation  à 
la  colline  à  Mangon  avec  30  nègres  :  il 
s'est  révolté  plusieurs  fois  contre  les  or- 
dres qui  ont  été  donnés  pour  le  bon  ordre 
public  :  cet  homme  a  été  autrefois  cour- 
tier de  M.  Gradis. 


'  Archives  du  Minist.  de  la  Mar. 
dance  générale,  ad  annum. 


Colonies.  —  Saint-Domingue.  —  Correspon- 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLOiNIES  FRANÇAISES  AU  XVIII"  SIÈCLE       241 


OBJETS. 


Une  somme  de  10,000  livres  payée 
comptant  à  M.  l'intendant,  pour  acheter 
pour  le  Roy  un  batteau  nommée  collombe. 


NOMS  ET  MOTIFS. 


Levis  :  il  posfède  deux  maisons  de 
lO.OUO  livres  de  loyers  aux  Cayes  ;  il  a 
ruiné  plusieurs  habitants  par  des  procès 
qu'il  a  achetés  et  dont  il  fait  commerce  ; 
il  prétend  avoir  été  baptisé  et  avoir  eu 
Mgr  le  Duc  d'Orléans  père  pour  parrain  ; 
il  a  judaisé  dans  la  Colonie. 


Il  existe  encore  d'autres  Juifs  qui  n'ont  point  encore  fait  de  don 
gratuit. 

Aux  Cayes,  le  8  septembre  1764. 

ESTAING. 


Mais  le  gouverneur  sut  dissimuler  son  inquiétude  aux  yeux  du 
public  et  n'en  continua  pas  moins  l'exécution  de  son  plan.  Dans 
les  premiers  jours  du  mois  d'octobre,  il  avait  à  peu  près  fini  de 
dresser  la  liste  des  personnes  qui  devaient  payer  cet  impôt  ex- 
traordinaire, applicable  aux  travaux  publics  dont  il  avait  fait 
préparer  les  projets  et  les  devis  et  pour  lesquels  il  avait  déjà 
passé  quelques  marchés.  Il  fit  notifier  à  chaque  Juif  la  somme 
pour  laquelle  il  était  imposé  et  lui  demanda  de  se  libérer  le  plus  tôt 
possible  ou  de  signer  des  engagements  que  l'intendant  des  finances 
se  chargerait  de  faire  exécuter  au  temps  fixé. 

De  tous  ces  Juifs  imposés  par  M.  le  comte  d'Estaing,  nous  ne 
voyons  qu'un  seul  qui  ait  songé  à  résister  à  la  volonté  du  tout- 
puissant  gouverneur  général  et  qui  lui  ait  écrit  dans  ce  sens.  La 
réponse  que  lui  fit  ce  haut  personnage  suffit  sans  doute  pour 
briser  cette  velléité  de  résistance.  Nous  n'avons  pu  retrouver 
la  lettre  de  ce  Juif  assez  osé  pour  discuter  les  actes  du  gouver- 
neur ;  mais  celle  que  le  comte  d'Estaing  lui  adressa  nous  fait  com- 
prendre que  le  Juif  récalcitrant  avait  protesté  contre  cet  acte 
arbitraire  et  avait  déclaré  vouloir  s'opposer  à  la  perception  (Je 
cet  impôt.  Le  nom  de  ce  Juif  n'est  pas  indiqué  en  tête  de  la 
lettre  ;  mais  les  détails  nous  indiquent  que  c'était  Alvarez  de 
Léogane.  La  lettre  du  comte  d'Estaing  nous  le  montre  décidé  à 
briser  tdute  résistance  et  à  ne  reculer  devant  aucun  moyen 
pour  se  faire  obéir.  Comme  il  ne  voulait  point  avoir  à  s'oc- 
cuper du  détail  des  rentrées,  il  nomma  M.  Daguilard  syndic 
des  Juifs  de  la  colonie  et,  par  cela  même,  le  rendit  garant  et 
responsable  des   engagements  de  tous  ses  coreligionnaires.  La 


242  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

lettre  de  M.  d'Estaing  à  ce  Juif  récalcitrant  servit  ù'exposé  de 
motifs  à  cette  décision.  Voici  les  deux  pièces  '  : 

lettre  de  M.  le  comte  d'Estaing  à  un  Juif. 

Port-au-Prince,  le  10  octobre  1764. 

J'ai  reçu,  Monsieur,  la  lettre  que  vous  avés  jugé  à  propos  de  m'é- 
crire  le  8  octobre.  Les  principes  du  Christianisme  et  les  loix  du 
Royaume  ne  permettent  pas  que  les  Juifs  possèdent  des  esclaves  à 
qui  ils  peuvent  faire  pratiquer  une  religion  différente  de  la  notre. 
J'ai  bien  voulu  leur  ouvrir  un  moyen  de  prouver  leur  zèle  pour  le 
bien  général  de  la  colonie.  Cette  légère  marque  de  soumission  et 
d'attachement  de  leur  part  me  forcera  à  obtenir  de  S.  M.  qu'ils  soient 
tolérés  dans  cette  colonie,  j'en  pourrai  d'autant  plus  répondre  de 
leur  soumission  sur  d'autres  objets  plus  Importans  et  sur  lesquels 
il  faut  nécessairement  s'en  rapporter  à  leur  bonne  foy,  étant  impos- 
sible d'empêcher  un  maître  dans  l'intérieur  de  sa  maison  et  dans 
son  habitation  de  persuader  ses  esclaves  de  sa  croyance  et  de  les 
faire  agir  et  penser  comme  il  le  veut.  Le  s»-  Delpech  s'est  mal  expli- 
qué. Il  est  vrai  qu'il  a  fait  un  marché  avec  M.  l'Intendant  pour  des 
baraques  construites  sur  la  place  dont  le  loyer  est  destiné  à  procurer 
une  conduite  d'eau  salubre  au  Port-au-Prince.  J'ai  admis  les  Juifs 
à  en  faire  les  fonds.  M.  d'Aguilard.  que  j'aime  fort  et  avec  lequel  je 
vis,  a  fourni  un  contingent  de  50,000  livres.  Il  vous  a  écrit  pour  une 
somme  de  3,500  livres,  monnayées  de  l'Isle.  Loin  de  vous  plaindre, 
vous  devriés  remercier  M.  d'Aguilard  Je  vous  conseille  de  prévenir 
un  moment  qui  seroit  plus  fâcheux  à  votre  crédit  que  la  signification 
dont  vous  menace  mal  a  propos  le  s''  Delpech.  On  ne  signifie  à  per- 
sonne de  venir  demander  une  grâce.  Et  si  M.  d'Aguilard  ne  me  ré- 
pond pas  de  vous  dans  trois  jours,  tems  auquel  je  vais  partir,  co 
sera  puis  que  vous  my  forcés  et  que  vous  ne  me  voulés  fournir  de 
bonne  volonté  aucun  prétexte,  le  procureur  des  biens  vacans  à  qui 
j'enjoindrai  d'exécuter  les  loix  du  Royaume  et  mes  ordres.  Ne  doutés 
pas  plus  de  l'exécution  exacte  de  cet  article  que  de  toute  l'impartia- 
lité et  de  la  protection  sur  laquelle  vous  pouvés  compter  en  qualité 
de  citoyen. 

J'ay  l'honneur  d'être  très  parfaitement.  Monsieur,  votre  très 
humble. 

ESTAING. 

Et  au-dessous  est  écrit  :  • 

En  conséquence  de  la  lettre  dont  la  copie  est  ci-dessus,  j'autorise 

'  .\rcli.  du  Minist.  de  la  Marine.  —  CoUect.  Moreau  St-Méry.  —  Colonies  en  </é~ 
nérjl.  l.  XV.  iirl.  .luif. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII^  SIECLE       243 

M.  d'Aguilard  à  faire  les  fonctions  de  syndic  de  tous  les  Juifs  de 
cette  colonie,  de  percevoir  les  deniers  qu'ils  remettront  pour  les  ou- 
vrages publics.  Je  le  charge  d'en  presser  le  recouvrement,  suivant  les 
états  acceptes  par  M.  l'Intendant  et  par  moi  qui  seront  enregistrés 
ainsi  que  leur  emploi  aux  deux  bureaux  municipaux  du  Cap  et  du 
Port-au-Prince.  J'autorise  M.  d'Aguilard  en  cas  que  quelques  parti- 
culiers Juifs  se  refusassent  à  l'arrangement  gênerai  à  les  dénoncer 
au  procureur  des  biens  vaccans  et  à  demander  main  forte  aux  com- 
raandans  des  lieux  pour  faire  arrêter  les  delinquans.  M.  d'Aguilard 
pourra  d'ailleurs  reverser  les  fonds  entre  les  mains  de  tous  entre- 
preneurs dont  les  marchés  auront  été  signés  et  approuvés  par 
M.  l'Intendant  et  par  moi,  et  sur  leur  quittance,  il  en  demeurera 
bien  et  valablement  déchargé.  Fait  au  Port-au-Prince,  le  18  oc- 
tobre 1764. 

ESTAING. 

(Et  plus  bas  :) 
Par  ordre,  Guerin  (avec  un  cachet  sur  cire  rouge). 


Toutes  les  résistances  vaincues,  tous  les  projets  préparés,  les 
sommes  versées,  ou  tout  au  moins  les  engagements  signés,  le 
comte  d'Estaing  s'aventura  encore  plus  loin  et  voulut  triompher 
complètement  de  ses  ennemis.  Pour  ne  pas  as.sumer  sur  lui  settl 
la  responsabilité  d'un  impôt  aussi  irrégulier,  il  chargea  M.  Magon, 
l'intendant,  de  soumettre  au  conseil  supérieur  la  note  ci-jointe, 
avec  l'état  qui  l'accompagne  •  : 

Notes  données  par  le  Général. 

Art.  I"-".  —  La  destination  des  secours  demandés  aux  Juifs  a  varié 
suivant  les  circonstances  et  selon  les  nouveaux  motifs  de  dépense 
qui  se  sont  succédés. 

Art.  2.  —  Le  premier  objet  de  ces  soumissions  a  été  d'avoir  un 
prétexte  pour  tolérer  les  Juifs  comme  propriétaires  d'habitations  et 
comme  marchands  en  les  rendant  utiles  au  public  par  des  fonda- 
tions nécessaires  ou  commodes. 

Art.  3.  —  Le  second  objet  a  été  d'acheter  des  batimens  nécessaires 

»  Arrh.  du  Minist.  <le  la  Marine.  —  Collecl.  Moreaii  Sl-Mt^ry.  —  Colonies  en  gé- 
néral, t.  X\'.  art.  Juif. 


244  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

au  service  de  la  Colonie  et  par  la  d'en  diminuer  d'autant  les  dé- 
penses. 

Art.  4.  —  Le  troisième  objet  a  été  de  chercher  un  moyen  de  plus 
pour  faire  face  au  fardeau  occasionné  par  l'arrivée  imprévue  des  Al- 
lemands. 

Art.  5.  —  Dans  tous  les  cas  on  a  toujours  compté  payer  l'intérêt  à 
5  pour  cent  de  l'argent  avancé  par  les  Juifs.  Ce  prêt  outre  l'aisence 
actuelle  que  l'on  a  eu  en  vue  a  pour  objet  politique  celui  d'attacher 
au  gouvernement  des  gens  qui  ne  songent  ordinairement  qu'à  leur 
intérêt  :  la  perte  de  la  Colonie  occasionneroit  vraisemblablement 
celle  du  revenu  dont  ils  auroient  preste  le  capital  :  on  est  occupé  à 
fixer  un  projet  de  remboursement  par  lots  afin  d'acquérir  la  con- 
fiance des  Juifs  pdur  obtenir  d'eux  un  prest  plus  considérable,  lors- 
que d'autres  circonstances  pourroient  l'exiger. 

Art.  6.  —  Les  motifs  énoncés  dans  l'article  précédent  ont  engagé  à 
employer  trente  mille  livres  du  prêt  des  Juifs  et  trenfe  autres 
mille  livres  du  trésor  de  Sa  Majesté  pour  parvenir  à  la  construc- 
tion des  cases  de  la  place  du  Port  au  Prince  :  ces  boutiques  suivant 
l'évaluation  la  plus  basse  produiront  chaque  année  un  loyer  de 
24,000  livres  qui  seront  affectées  au  payement  de  l'intérêt  et  à  four- 
nir une  partie  des  fonds  nécessaires  pour  le  remboursement  du 
capital. 

Art.  7.  —  Toutes  les  sommes  payées  ont  été  reçues  par  le  tréso- 
rier :  toutes  les  soumissions  ont  été  enregistrées,  quant  à  la  partie  du 
Sud  ou  de  l'Ouest  au  bureau  de  police  du  Port  au  Prince  ;  toutes 
celles  du  Cap  seront  enregistrées  au  bureau  de  police  de  ce  ressort  ; 
leur  perception  et  les  titres  ainsy  que  l'argent  seront  remis  à 
M.  Gouvion,  trésorier  gênerai. 

Art.  8.  —  Il  doit  résulter  de  ces  précautions  une  comptabilité 
exacte  et  il  est  difficile  de  supposer  des  motifs  ou  des  arrangements 
ocultes. 

Art.  9.  —  Les  Juifs  de  la  partie  du  Nord  demandent,  suivant  la  re- 
quête ci-jointe,  de  payer  gratuitement  et  non  a  titre  de  prêt,  les 
sommes  énoncées,  pourvu  que  les  Lettres-Patentes  accordées  par 
Sa  Majesté  aux  Juifs  portugais  servent  de  prétexte  à  ceux  même 
qui  ne  le  sont  pas  et  que  leur  enregistrement  assure  dans  la  colonie  . 
l'état  des  gens  de  cette  religion  :  il  est  probable  que  ces  Lettres- 
Patentes  enregistrées  en  attiroroient  beaucoup. 

Art.  10.  —  Le  Conseil  national  aura  pour  agréable  de  donner  un 
avis  sur  cet  objet  et  il  sera  fait  ensuite  les  démarches  qui  paroîtront 
nécessaires. 

Au  Cap,  le  16  janvier  17()3. 

KSTAING. 

Pour  copie,  Estaing. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII^  SIÈCLE        2io 


Elat  des  sonunes  à  payer  jmr   les  Juifs,  établis  dans  le  ressort  du 
Conseil  du  Cap  {46  janvier  17 6b). 


SOMMES 

;>.  payer. 

Pierre  Fessard 30,000  \. 

Jean  Fessard 20,000 

Rabba  frères 12,000 

D.  Victoria , 15,000 

D.  Pereira  et  Totta 9,000 

La  Meyra  l'aîné 3,000 

La  Meyra  jeune 3,000 

David  Mendes  et  Victoria. .  .  5,000 

Lange  père  et  fils 5,000 

Francillon  et  Moline 3,0Ù0 

Oliveira 4,000 

Joseph  Pessoa  père  et  fils. .  .  .  500 

Torres 300 

Fereire 200 

Garcie 200 


SOMMES 
à  payer. 

Salzedo 600  1. 

Jean 200 

Isaac  et  Roble 600 

Monsanto  et  Totta 1,000 

Barques 100 

Lejan  aîné 200 

Petit  Lyon 150 

Daniel  Monsanto 200 

Mendes  fils 150 

Pechotte 100 

Torres  de  Limarade 800 

Jacob  Toussaint 150 

Lopes 100 

David  Castro OuO 


Nota.  Ces  sommes  sont  payables  en  différents  termes  éloignés  ; 
il  n'en  a  pas  été  reçu  une  seule  au  Trésor,  et  les  différents  titres  de 
créance  que  l'on  propose  sur  les  Espagnols  et  sur  les  François,  ainsi 
que  les  soumissions,  sont  simplement  déposés. 


SOMMES 

PAYÉES. 

A  Saint-Marc  : 

Le  sieur  Aron  Victoria 3,000  1. 

Le  sieur  Mendes  Fourtado 2,000 

Au  Port-au-Prince  : 

Le  sieur  Guimarin (i,nO() 

Le  sieur  Mendes  France "3,000 

A  Léogane : 
Le  sieur  Alvares 3,.j00 

Au  Petit-Goave  : 
Le  sieur  Alvares  Corrca 10,000 

A  Nippes  : 
Le  sieur  Alvares 2,o00 


Ces  sommes  sont  em- 
pl03'ées  à  la  construction 
de  trente-une  baraques 
dans  la  place  publique 
de  Port-au-Prince,  sui- 
vant le  marché  passé 
devant  notaire  le  il  oc- 
tobre 17()4. 


T.  IV. 


17 


246 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


AU   PORT-AU-PRINCE. 


Le  sieur  Daguilar 


Despas  père  et  clief  de 
famille 


Depas  le  jeune. 


Jean  Depas. 


Michel  Depas, 


M.  S.  J.  Depas. 


SOMMES  A  PAYER. 

.50,000  livres. 

Une  soumission  enre- 
gistrée au  greffe  du  bu- 
reau de  police  de  Port- 
au-Prince  le  r.î  octobre 
1764  pour  l'établissement 
d'une  fontaine  à  faire 
dans  la  place  publique 
de  Saint-Louis,  avec  une 
conduite  d'eau  sur  le  port 
pour  ea  donner  bord  à 
quai  aux  chaloupes  des 
navires. 

Une  soumission  enre- 
gistrée au  grefl"e  du  bu- 
reau de  police  du  Port- 
au-Prince  le  13  octobre 
1764,  pour  la  construction 
d'une  batterie  fermée  , 
susceptible  de  recevoir 
quatre  pièces  de  gros  ca- 
non, qui  doit  être  placée 
dans  la  Baye  d'Aquin. 

Une  soumission  enre- 
gistrée au  greffe  du  bu- 
reau de  police  de  Port- 
au-Prince  le  13  octobre 
17G4,  pour  l'établissement 
d'une  auberge  au  Bourg 
Saiut-Michel. 

50,000  à  payer  en  deux 
termes  de  un  an  et  deux 
ans  à  compter  du  10  sep- 
tembre 1764. 

Pour  acheter  pour  le 
Roy  des  batteaux  nom- 
més colombes. 


10,000  à  payer  pour  lui 
et  Antoine  Depas  sou 
cousin. 


MOTIFS, 


Il  a  auprès  de  Saint- 
Louis  une  grande  habita- 
tion sur  laquelle  il  a  en- 
viron 280  nègres.  Ce  Juif 
possède  une  autre  habita- 
tion dans  le  bas  d'Aquin 
et  une  autre  à  l'Azile. 


Honnête  homme  :  il 
vient  d'acheter  une  habi- 
tation de  100  nègres  près 
du  Bourg  d'Aquin.  Il  en 
a  une  autre  à  l'Azile.  Il 
possède  deux  maisons, 
l'une  à  Saint-Louis,  l'au- 
tre aux  Cayes. 


Il  possède  une  habita- 
tion à  la  coline  à  Mangon 
avec  30  nègres. 


Mauvais  sujet,  contre 
lequel  il  y  a  une  multitude 
de  plaintes  de  la  part  des 
habitans.  Mulâtre  libre  et 
bâtard  ;  il  possède  une 
habitation  considérable  à 
la  grande  Coline  avec  120 
nègres  ;  il  a  de  plus  une 
autre  habitation  à  la  Co- 
line à  Mangon  avec  30  nè- 
gres. Il  s'est  révolté  plu- 
sieurs fois  contre  les  or- 
dres qui  ont  été  donnés 
pour  le  bon  ordre  public  ; 
cet  homme  a  été  autrefois 
courtier  de  M.  Gradis. 


LES  JUIFS  DANS  LES  COLONIES  FRANÇAISES  AU  XVIII'  SIÈCLE       1M 


AU   PORT-AU-PRINCE. 

SOMMES  A  PAYER. 

MOTIFS. 

Lewis 

10,000    pour    achelter 
pour  le  Roy  un  batteau 

Il  possède  deux  mai- 
soas  de  10,000  1.  de  loyer 

nommée  colombe. 

aux  Cayes.  Il  a  ruiné 
plusieurs  babitants  par 
des  procès  qu'il  a  achetés 
et  dont  il  fait  commerce. 
Il  prétend  avoir  été  bap- 
tisé et  avoir  eu  M.  le  Duc 
d'Orléans  père  pour  Par- 
rain. Il  a  judaïsé  dans  la 
Colonie. 

Payés 40,000  livres. 

A  payer , 110,000      — 

Ressort  du  Cap 133,190      — 

Arrêté  et  certifié  le  16  janvier  1763.  Magon. 

Cette  note  montre  que  M.  cVEstaing  avait  changé  de  tactique  et 
qu'il  tenait  à  faire  passer  ces  contributions  imposées  aux  Juifs 
comme  de  simples  prêts  consentis  par  eux,  prêts  qui  devaient 
rapporter  5  0/0  d'intérêts  annuels.  Que  s'était-il  donc  passé  du 
mois  de  septembre  1764  au  mois  de  janvier  1765?  Par  suite  de 
quelles  circonstances  M.  d'Estaing,  qui,  trois  mois  auparavant,  ne 
se  gênait  point  pour  employer  le  langage  raide  et  menaçant  que 
nous  avons  rapporté  un  peu  plus  haut,  arriva-t-il  à  ce  moment  à  se 
défendre  de  tout  abus  de  pouvoir,  à  vouloir  prouver  que,  loin  de 
persécuter  les  Juifs,  il  voulait  les  protéger  et  les  soutenir,  enfin 
à  déclarer  que  c'est  par  reconnaissance  pour  ses  bienfaits  que  les 
Juifs  avaient  consenti,  avaient  offert  même  des  prêts,  où,  tout  en 
rendant  service  au  gouvernement,  ils  trouvaient  encore  un  hon- 
nête revenu  de  leurs  avances? 

La  crainte  qu'il  avait  manifestée  dans  sa  lettre  du  8  septembre 
était  fondée.  Ses  allures  autoritaires  et  ses  dédains  trop  ouver- 
tement manifestés  lui  avaient  créé  de  grandes  inimitiés,  des  haines 
formidables  aussi  bien  dans  la  population  que  dans  l'adminis- 
tration coloniale.  On  avait  saisi  l'occasion  offerte  par  les  fautes  et 
les  abus  d'autorité  qu'il  avait  commis,  pour  dresser  contre  lui  un 
acte  d'accusation  en  sept  points,  acte  qui  fut  conseillé  et  même 
rédigé,  croyon.s-nous,  par  des  magistrats  et  des  membres  du 
conseil.  M.  d'Estaing  avait  eu  connaissance  des  accusations  qui 
étaient  lancées  contre  lui  et  qui  sans  doute  avaient  été  expédiées 
dans  les  derniers  jours  de  l'année  1704;  il  sentait  le  besoin  de 
préparer  sa  défense  poui'  le  moment  où  le  roi  lui  ferait  demander 


24S  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

des  explications.  Il  n'avait  que  quatre  à  cinq  mois  devant  lui,  et 
ce  n'était  pas  trop  pour  un  pareil  labeur,  rendu  beaucoup  plus 
pénible  et  difficile  par  l'opposition  presque  générale  qu'il  avait 
soulevée  contre  lui. 

Or,  dans  ces  sept  points  d'accusation,  on  avait  inséré  le  para- 
graphe suivant,  qui  signalait  l'illégalité  de  sa  conduite  adminis- 
trative dans  les  contributions  imposées  aux  Juifs  : 

«  On  a  taxé  à  des  sommes  considérables  les  Juifs  de  la  colonie, 
»  quoique  les  Juifs  Portugais  ayent  le  privilège  de  s'établir 
»  dans  toutes  les  terres  sous  la  domination  de  la  France  et  en 
»  France  même  '.  « 
Et  on  faisait  suivre  ce  paragraphe  de  la  note  suivante  : 
«  Les  Anglois  ont  un  principe  bien  posé  :  Ils  attirent  chez  eux 
»  ces  peuples  industrieux  en  leur  donnant  de  grands  prrivilèges: 
M  on  peut  dire  aussi  que  ce  sont  les  Juifs  qui  font  fleurir  le 
»  C07nmerce  de  la  Jamaïque.  » 

Laissons  de  côté  tous  les  autres  points  de  Vaccusaiion  lancée 
contre  le  comte  d'Estaing,  et  voyons  les  moyens  qu'il  va  employer 
pour  se  disculper  du  fait  particulier  concernant  l'impôt  mis  sur  les 
Juifs.  Il  sent  que,  malgré  l'appui  tout-puissant  qu'il  trouvera  à  la 
Cour,  il  lui  faut  tout  au  moins  présenter  pour  sa  justification  cer- 
taines apparences  de  vérité,  et  que,  si  le  résultat  est  satisfaisant, 
on  ne  s'enquerra  pas  trop  des  moyens  employés  pour  y  arriver. 
C'est  donc  une  habileté  de  sa  part  de  soumettre  la  question  au 
conseil  national  dans  les  termes  que  nous  venons  de  citer  et  de  lui 
faire  accepter  comme  prêt  l'argent  versé  ou  à  verser  par  les  Juifs. 
Mais  cette  démarche  ne  donna  point  le  résultat  qu'il  en  attendait. 
Le  conseil  ne  voulut  pas  suivre  M.  d'Estaing  sur  le  terrain  où  il 
désirait  l'engager  et  il  n'accepta  ni  le  projet  de  travaux  ni  le  pro- 
jet d'emprunt  :  Note  et  Etat  ne  furent  point  admis. 

Il  fallut  donc  au  gouverneur  trouver  un  autre  moyen  de  dissi- 
muler l'irrégularité  de  sa  conduite  dans  cette  affaire  des  Juifs.  Il 
chercha  alors  par  des  intrigues  souterraines  et  i>eu  avouables  à 
amener  les  Juifs  à  se  jeter  dans  ses  bras  et  à  reconnaître  que 
c'était  de  leur  plein  gré  qu'ils  avaient  donné  ces  sommes  d'argent 
ou  qu'ils  s'étaient  engagés  à  payer  certains  travaux  d'utilité  pu- 
blique. Il  déchaîna  contre  eux  l'envie  et  la  jalousie  de  leurs  con- 
currents, pour  intervenir,  comme  un  Deus  ex  machina,  au  mo- 
ment oii  le  jK-ril  iiniiiineut  lui  livrerait  les  Juifs  à  merci. 

{A  suivre.)  Al!,  ('aiikn. 

'  Arch.  (lu  Minisl.  de  la  Mar.  —  Corrcsp.  •générale.  —  Colonies.  —  Saiiil-Doniin- 
{.■•ue,  ad  aimum. 


1 


NOTES   ET  MÉLANGES 


SENS  ET  ORl&INE  I)E  LA  PARABOLE  ÉYAN&ÉLIQUE 
DITE  DU  BON  SAMARITAIN 

Saint  Luc  est  le  seul  des  évangélistes  qui  rapporte  la  parabole 
dite  du  bon  Samaritain.  Voici  en  quelle  occasion  elle  aurait  été 
prononcée  par  Jésus.  Un  jour  que  ses  disciples,  au  nombre  de 
soixante- dix,  lui  exprimaient  leur  joie  de  ce  qu'ils  avaient 
réussi  à  chasser  les  démons  parla  vertu  de  son  nom,  le  Maître  leur 
dit  avoir  vu  en  effet  Satan  tomber  du  ciel  sur  la  terre  en  forme 
d'éclair.  Il  ajouta  qu'il  leur  avait  transmis  le  pouvoir  d'écraser  les 
serpents  et  les  scorpions  ainsi  que  de  vaincre  toute  la  puissance 
du  démon,  qui  ne  pourrait  plus  leur  nuire,  mais  que  toutefois  ils 
devaient  moins  se  réjouir  de  leurs  victoires  sur  les  démons  que  de 
ce  que  leurs  noms  étaient  inscrits  dans  les  cieux  parmi  les  justes.  Il 
termina  en  disant  que,  son  Père  lui  ayant  remis  tous  les  pouvoirs 
entre  les  mains,  ils  devaient  s'estimer  heureux  d'être  témoins  de 
choses  que  les  prophètes  et  les  rois  anciens  avaient  en  vain  sou- 
haité de  voir  et  d'entendre. 

«  Alors  un  docteur  de  loi  (voixixo?  xi?)  se  leva  et  lui  dit  pour  le 
tenter  :  Que  faut-il  que  je  fasse  pour  posséder*  la  vie  éternelle? 
Jésus  lui  répondit  :  Qu'y  a-t-il  d'écrit  dans  la  loi?  Qu'y  lisez-vous  ? 
Il  lui  répondit:  Vous  aimerez  le  Seigneur  votre  Dieu  de  tout  votre 
cœur,  de  toute  votre  âme,  de  toutes  vos  forces  et  de  toute  votre 
intelligence-,  et  votre  prochain  comme  vous-mêmes.  Jésus  lui  dit  : 
Vous  avez  fort  bien  répondu  :  faites  cela  et  vous  vivrez.  Mais  cet 
homme,  voulant  faire  paraître  qu'il  était  juste,  dit  à  Jésus  :  Et  qui 
est  mon  prochain  ?  Et  Jésus  prenant  la  parole  lui  dit  :  lin  homme 

•  Mot  à  mot  «  hériter  •  K),ripovci|j.6(i). 

-  Les  mots  '  et  de  loulc  votre  intellif;;encc  •  Ibrini'iit  une  autre  version  îles  mots 
<  et  de  fout  votre  cœur  »,  car  Thébreu  Irf/  siirnilie  ù  la  l'ois  •  cœur  •  et  <  inlolligeuce  > . 


2o0  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

qui  descendait  de  Jérusalem  à  Jéricho,  tomlDa  entre  les  mains  des 
voleurs,  qui  le  dépouillèrent,  lui  firent  des  blessures  et  s'en  allèrent, 
le  laissant  à  demi  mort.  Un  prêtre  qui  descendait  par  hasard  par 
le  même  chemin,  l'ayant  aperçu,  passa  outre.  Un  lévite  aussi, 
se  trouvant  sur  les  lieux,  y  vint  et  Payant  aperçu  passa  outre 
encore.  Mais  un  Samaritain  qui  voyageait,  étant  venu  près  de  lui 
et  l'ayant  vu,  fut  touché  de  compassion.  Il  s'approcha  donc  de  lui, 
versa  de  l'huile  et  du  vin  sur  ses  plaies  et  les  banda  ;  et,  l'ayant 
mis  sur  sa  bête  de  somme,  il  le  transporta  dans  une  hôtellerie  et 
prit  soin  de  lui.  Le  lendemain  au  moment  de  partir,  il  tira  deux 
deniers  qu'il  donna  à  Thôte,  et  lui  dit  :  Ayez  bien  soin  de  cet 
homme,  et  tout  ce  que  vous  dépenserez  de  plus,  je  vous  le  rendrai 
à  mon  retour.  Lequel  de  ces  trois  vous  semble  avoir  été  le  pro- 
chain de  celui  qui  tomba  entre  les  mains  des  voleurs  ?  Le  docteur 
lui  répondit  :  Celui  qui  a  exercé  la  miséricorde  envers  lui.  Allez 
donc,  lui  dit  Jésus,  et  faites  de  même  (Luc,  x,  11-31).  ^ 

La  première  partie  du  récit  qui  précède  se  fait  reconnaître  tout 
d'abord  comme  une  légende  postérieure  à  l'âge  apostolique.  En 
premier  lieu,  la  donnée  relative  à  l'élection  de  soixante-dix  disci- 
ples, qui  est  contredite  par  les  autres  évangiles,  lesquels  ne 
mentionnent  jamais  que  douze  disciples,  a  tout  l'air  d'être  une 
simple  imitation  des  soixante-dix  anciens  sacrés  prophètes 
par  Moïse  en  dehors  des  douze  chefs  de  tribu.  En  second  lieu, 
malgré  Mathieu,  x,  1,  et  Marc,  m,  13,  vi,  7,  il  est  avéré  que  du 
vivant  de  Jésus  les  disciples  n'ont  jamais  opéré  des  cures  mira- 
culeuses ou,  comme  on  disait  alors,  chassé  les  démons  ;  le  fait 
rapporté  par  Mathieu,  xvii,  16  (Cf.  Marc,  iv,  14;  Luc,  ix,  38) 
atteste  leur  impuissance  absolue  à  cet  égard.  En  troisième  lieu 
enfin,  le  don  de  mettre  les  serpents  hors  d'état  de  nuire,  dont  il 
est  question  dans  ce  récit,  est  selon  toutes  les  vraisemblances 
celui  auquel  font  allusion  les  paroles  de  Jésus  ressuscité,  dans 
Marc,  XVI,  18,  et  se  fait  reconnaître  par  cela  même  comme 
étant  tout  au  plus  d'origine  apostolique.  Il  faut  probablement  y 
voir  un  reflet  de  l'histoire  racontée  dans  les  Actes,  xx,  16,  d'après 
laquelle  saint  Paul  aurait  secoué  de  sa  main  un  serpent  veni- 
meux, sans  souffrir  des  suites  de  sa  morsure. 

Toutes  ces  considérations  se  réunissent  donc  pour  établir  que 
l'introduction  doit  historiquement  être  séparée  du  récit  qui  suit 
et  qui  rapporte  le  dialogue  de  Jésus  avec  le  docteur. 

Mais  ce  dialogue  lui-même  a  subi  sous  la  plume  de  saint  Luc 
certaines  modifications  qui  le  distinguent  de  celui  qui  est  rapporté 
par  les  autres  évangélistes.  La  version  de  saint  Marc,  qui  semble 
la  plus  originale,  motive  la  question  du  docteur  i)ar  la  satisfaction 


NOTES  ET  MELANGES  251 

que  les  Pharisiens  avaient  ressentie,  en  entendant  Jésus  défendre 
contre  les  Saducéens  le  dogme  de  la  résurrection  des  corps. 
Comme  à  ce  moment  les  sacrifices  du  temple  étaient  faits  par  des 
prêtres  saducéens,  le  docteur  pharisien  voulut  savoir  si  Jésus  était 
d'accord  avec  ses  coreligionnaires,  qui  déclaraient  que  l'amour  de 
Dieu  et  du  prochain  valait  mieux  que  tous  les  sacrifices  ;  et  quand 
Jésus  eut  répondu  dans  ce  sens,  il  s'établit  entre  eux  un  accord 
parfait  :  le  Pharisien  fit  entendre  un  affectueux  «  bravo,  Maître, 
vous  avez  dit  la  vérité  »,  et  Jésus  de  son  côté  se  hâta  de  lui  dire: 
«  Vous  n'êtes  pas  loin  du  royaume  des  cieux  »  ;  c'est-à-dire  : 
il  ne  vous  manque  qu'une  chose,  c'est  de  devenir  mon  disciple 
(Cf.  Mathieu,  iv,  19).  Dans  Mathieu,  xxii,  35,  l'enthousiasme 
des  Pharisiens  est  non  seulement  supprimé,  mais  on  les  accuse 
d'avoir  provoqué  contre  Jésus  un  rassemblement,  dont  celui-ci 
profite  d'ailleurs  pour  leur  adresser  une  question  irritante,  à  sa- 
voir si  le  Messie  n'est  pas  plus  qu'un  fils  de  David.  La  version  de 
saint  Luc  sépare  violemment  la  demande  du  docteur  de  la  discus- 
sion avec  les  Saducéens.  C'est  par  esprit  de  chicane  que  le  docteur 
pharisien  interrompt  la  confidence  de  Jésus  à  ses  disciples,  en 
lui  adressant  cette  question  captieuse  :  «  Que  faut-il  que  je  fasse 
pour  posséder  la  vie  éternelle  ?  »,  question  à  laquelle  il  espérait 
obtenir  pour  réponse  le  célèbre  «  suivez-moi  »  lancé  jadis  à  saint 
Pierre,  pour  pouvoir  ainsi  l'accuser  devant  le  sanhédrin  de  séduire 
le  peuple.  Jésus  se  garde  bien  de  tomber  dans  le  piège  et  invite 
le  docteur  à  citer  le  passage  biblique  relatif  à  l'amour  de  Dieu 
et  du  prochain  ;  et  quand  celui-ci  l'a  cité,  il  se  contente  de 
l'applaudir  et  de  l'assurer  que  l'observance  de  ce  commandement 
suffit  à  procurer  la  vie  éternelle.  Le  docteur,  voyant  sa  ruse 
déjouée,  veut  au  moins  satisfaire  sa  vanité  de  pharisien  en  faisant 
paraître  son  zèle  dans  l'accomplissement  exact  des  prescriptions 
de  la  loi  (=  la  justice),  et  demande  quel  est  le  sens  du  mot 
«  prochain».  Jésus  raconte  alors  l'action  charitable  d'un  Sama- 
ritain envers  un  malheureux  blessé  qu'un  prêtre  et  un  lévite 
avaient  cruellement  abandonné  à  son  sort,  et  dit  au  docteur 
d'imiter  ce  bon  exemple. 

Saint  Mathieu  nous  transporte,  au  contraire,  à  la  dernière  ('po- 
que  de  l'activité  de  Jésus.  L(>  Maître  désabusé  et  désespérant  de 
ses  contemporains  cherche  à  mourir,  afin  de  s'attacher  ses  disciples 
par  la  profonde  commisération  qu'on  ressent  pour  un  martyr, 
surtout  lorsque^  ce  martyr  est  un  maître  vénéré  et  sympntlii(pie  et 
que  ses  bourreaux  professent  des  principes  qui  sont  diamé- 
tralement opposés  aux  siens.  L'exécution  de  ce  dessein  est  facilitée 
par  la   haine  des  Pharisiens,  qu'eflarouche  sa  prétention  d'être 


2^)2  UliVUli  DES  ETUDES  JUIVES 

le  Messie  et  d'être  en  même  temps  d'une  nature  supérieure  à  son 
ancêtre  David.  Jésus  attise  le  leu  en  cherchant  à  prouver,  d'abord 
par  le  psaume  ex,  que  le  Messie,  loin  d'être  le  fils  de  David, 
est  plutôt  son  seigneur,  puis  en  prononçant  publiquement  un 
véhément  discours  contre  les  Pharisiens,  où  ceux-ci  sont  traités 
d'hypocrites  et  d'assassins,  et  où  il  les  invite  à  combler  la  mesure 
d'iniquité  de  leurs  pères,  «  en  ajoutant  son  exécution  à  celle  de  tant 
de  prophètes  et  d'envoyés,  dont  le  sang  ^j?<r  a  été  versé  par 
eux  (ibid.,  xxiii)  ». 

Il  ne  faut  pas  faire  un  grand  effort  de  réflexion  pour  reconnaître 
que  la  version  de  saint  Marc  est  seule  en  situation.  Nous  avons  là, 
sans  aucun  doute,  une  tradition  authentique  qui,  bien  qu'émanant 
de  troisième  main  —  car  rien  dans  les  évangiles  ne  vient  immé- 
diatement des  apôtres,  ni  des  judéo-chrétiens  —  a  conservé  une 
image  vive  et  claire  de  ce  que  Jésus  a  pu  dire  dans  la  première 
période  de  sa  mission,  alors  qu'il  avait  encore  l'espoir  de  gagner 
les  Pharisiens  à  sa  cause.  Marchant  d'accord  avec  ceux-ci,  il 
combattait  comme  eux  les  deux  partis  adverses,  le  parti  sadu- 
céen,  qui  niait  le  «  royaume  des  cieux  «,  l'existence  d'un  monde 
surnaturel,  et  le  parti  des  zélotes  qui  niait  le  «  royaume  de 
la  terre  -»,  la  domination  romaine  et  ses  prétentions  ;  toute  son 
ambition  se  bornait  alors  au  désir  de  former  une  école  de  repentis 
expectants,  à  l'instar  de  l'école  de  Jean-Baptiste,  à  laquelle  il  s'était 
affilié  pendant  quelque  temps.  Pour  faciliter  l'entrée  des  disciples, 
il  renonça  môme  à  la  cérémonie  du  baptême  que  l'école  rivale 
observait  rigoureusement  et  qui  lui  donna  une  teinte  essénienne. 
Si  quelqu'un  lui  avait  demandé  à  cette  époque  ce  que  signifiait  le 
commandement  de  la  loi  :  «  Aimez  votre  prochain  comme  vous- 
même  «,  il  aurait  certainement  répondu  comme  l'avait  fait  Hillel 
avant  lui  et  comme  devait  le  faire  saint  Paul  après  lui  :  «  Ne  faites 
pas  à  votre  prochain  ce  que  vous  ne  voudriez  pas  qu'on  vous  fit  »  ; 
mais  cette  maxime  courait  les  rues  de  Jérusalem  et  personne 
n'avait  besoin  qu'on  la  lui  l'appelàt. 

Nous  sommes  donc  obligés  de  séparer  la  parabole  du  long  récit 
qui  lui  sert  d'introduction  chez  saint  Luc,  et  cette  circonstance  est 
de  nature  à  soulever  un  grave  doute  sur  l'authenticité  de  la  para- 
bole elle-même.  En  effet,  sous  la  forme  qu'elle  revêt  chez  saint 
Luc,  cette;  parabole  ne  ])eut  point  venir  de  Jésus  :  le  rôle  d'un 
Iw'ro.s  de  charité  qui  y  est  attribué  à  un  Samaritain  réfléchit  d'une 
façon  nette  les  idées  de  saint  Paul.  On  sait  que,  d'après  l'ordre 
exprès  de  Jésus,  l(;s  disciphïs  devaient  éviter  tout  contact  avec 
les  Samaritains  et  limiter  leur  prédication  aux  Israélites  ortho- 
doxes (Mathieu,  x,  5,  nv,  24;  Actes,  xiii,  40;  Rom.,  xv,  8).  Il  est 


NOTES  Eï  .MELANGES  2b3 

avéré  i[ne  les  Samaritains  ont  constamment  refusé  l'iiospitalité 
à  la  secte  naissante  (Luc,  ix,  52,  58),  et  que  d'ailleurs  le  seul 
Samaritain  loué  pour  sa  reconnaissance  est  traité  d'étranger 
{àXKo-^Bvr,i;),  expression  qui  équivaut  à  c.  ethnique  »  ou  «  païen  )> 
(Luc,  XVII,  15-18).  Il  s'ensuit  que,  si  Jésus  avait  voulu  chercher 
un  exemple  de  charité  ailleurs  que  chez  ses  compatriotes,  il  eût 
choisi  pour  modèle  un  païen  pur  et  simple  (Cf.  Mathieu,  xi,  21).  A 
ces  considérations  il  faut  encere  ajouter  une  remarque  d'un  ordre 
difïérent  :  c'est  que  le  mot  Samaritain  était  hors  d'usage  chez 
les  Juifs  à  l'époque  de  Jésus  ;  ils  employaient  alors  exclusive- 
ment l'expression  Chuthéens  [Kûiim).  Nous  avons  pour  cela 
le  témoignage  formel  de  Josèphe  (Histoire,  viii,  14),  témoignage 
confirmé  par  l'emploi  constant  de  la  même  dénomination  dans  la 
littérature  talmudique.  En  im  mot  cette  parabole  telle  qu'elle 
figure  dans  saint  Luc  appartiendrait  tout  au  plus  aux  derniers 
développements  du  christianisme  primitif,  au  cycle  des  traditions 
pauliniennes  ou  pagano-chrétiennes.  Faut-il  pour  cela  adniettre  le 
caractère  apocryphe  de  l'ensemble  ?  Je  ne  le  pense  pas  ;  je  suis 
convaincu  au  contraire  que  saint  Luc  nous  a  conservé  un  des 
AoyCa  les  plus  autlieutiques  que  le  Maître  ait  produits  à  l'époque 
où  saint  Marc  place  la  question  du  docteur  pharisien,  c'est-à-dire 
au  début  de  la  prédication  de  Jésus  récemment  séparé  de  l'école  de 
Jean-Baptiste .  Il  faut  seulement  éliminer  la  mention  du  Samari- 
tain qui  jette  une  note  tardive  dans  ce  vieux  récit. 

L'examen  approfondi  des  actes  du  héros  principal,  en  même 
temps  qu'il  révélera  de  nouveau  l'inexactitude  de  la  version 
actuelle,  nous  fournira  un  moyen  très  simple  pour  rétablir  la 
physionomie  vraie  de  ce  personnage,  en  sorte  que  les  considé- 
rations qui  nous  faisaient  douter  de  l'authenticité  de  la  parabole, 
se  transformeront  en  autant  de  preuves  en  sa  faveur. 

En  effet,  que  nous  raconte  la  parabole  au  sujet  de  l'homme 
secourable  que  la  présente  version  qualifie  de  Samaritain  1  Elle 
nous  dit  :  1°  que  ce  personnage,  comme  le  prêtre  et  le  lévite  qui 
l'ont  précédé,  s'est  trouvé  entre  Jérusalem  Pt  Jéricho  ;  2°  qu'il  a 
soigné  le  blessé  dans  une  hôtellerie,  dont  le  maître  le  connaissait  et 
avait  confiance  en  lui  ;  3°  qu'il  avait  l'intention  de  retourner  à  bref 
délai  à  .Jérusalem.  Toutes  ces  particularités  cadrent,  on  ne  peut 
plus  mal,  avec  ce  que  l'histoire  et  les  Évangiles  eux-mêmes  nous 
apprennent  au  sujet  des  relations  entre  les  Juifs  et  les  Samaritains 
à  l'époque  dont  il  s'agit.  La  haine  entre  ces  deux  peuples  était 
telle  qu'ils  n'avaient  au('un  rapport  entre  eux.  Un  grave  interdit 
pesait  sur  toutes  les  dennies  d'origine  sanuiritnine,  et  coupa  court 
à  toute  transaction  commerciale.  Juifs  et  Samaritains  ne  m;in- 


254  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

geaient  jamais  ensemble  et  se  refusaient  mutuellement  l'iiospita- 
litf^.  Dans  ces  conditions  on  ne  conçoit  guère  comment  un  Sama- 
ritain pouvait  se  trouver  en  Judée  sur  la  route  de  Jéricho,  être 
en  bons  termes  avec  le  maître  d'hôtel,  et  surtout  aller  et  venir 
à  Jérusalem  quand  il  lui  plaisait.  Est-ce  sérieux?  Mais  un  Sama- 
ritain isolé  dans  cette  ville  dévote,  au  milieu  de  cette  multitude 
chatouilleuse  et  méfiante,  eût  risqué  à  chaque  instant  d'être 
chassé  et  maltraité  comme  un  espion.  On  le  voit,  ici  encore  le  rôle 
du  Samaritain  est  incompatible  avec  la  situation  et  ne  peut  par 
conséquent  avoir  appartenu  à  la  rédaction  primitive. 

On  comprendra  sans  peine  qu'on  ne  peut  songer  un  seul  instant 
à  remplacer  le  Samaritain  par  un  païen.  D'abord  une  pareille 
substitution  est  par  trop  violente;  puis,  il  est  bien  constaté  que 
les  relations  entre  les  Juifs  et  les  païens  étaient  au  temps  de  Jésus 
beaucoup  moins  amicales  que  ne  le  font  supposer  les  rapports 
du  voyageur  avec  le  maître  d'hôtel.  Aucune  transaction  commer- 
ciale n'avait  d'ailleurs  son  siège  à  Jérusalem,  encore  moins  à 
Jéricho,  et  les  seuls  païens  qui  résidaient  dans  la  première  de  ces 
villes  étaient  les  soldats  de  la  milice  étrangère,  qui  ne  voyageaient 
guère.  Enfin,  si  la  première  rédaction  avait  le  mot  «  païen  » 
(è9vtxd;),  ce  mot  Serait  resté  dans  le  récit  de  saint  Luc  qui,  comme 
nous  le  disions  plus  haut,  vient  d'un  milieu  paulinien,  si  bien 
disposé  en  faveur  des  païens.  Il  ne  reste  qu'un  seul  moyen  de 
remédier  à  cet  état  de  choses,  celui  de  supposer  que,  dans  la 
version  primitive,  le  bienfaiteur  du  blessé  était  ou  bien  un  Juif  de 
Jérusalem  que  les  affaires  ou  les  relations  de  famille  appelaient 
souvent  à  Jéricho,  ou  bien  un  pieux  galiléen  ayant  l'habitude  de  se 
rendre  à  Jérusalem  pendant  lés  grandes  fêtes  et  de  s'arrêter  che- 
min faisant  dans  l'hôtellerie  où  il  a  déposé  le  blessé.  Le  fait  que 
la  parabole  place  le  dénouement  de  ce  drame  sur  le  chemin  de 
Jéricho  milite  en  faveur  de  la  dernière  hypothèse,  car  cette  route 
était  surtout  fréquentée  par  les  pèlerins  de  la  Galilée,  lesquels 
évitaient  ordinairement  la  Samarie,  aussi  bien  par  la  crainte 
de  l'hostilité  de  ses  habitants  que  par  celle  d'y  contracter  des  con- 
taminations légales,  qui  les  auraient  rendus  incapables  de  manger 
l'agneau  pascal  et  de  visiter  le  temple.  Quoi  qu'il  en  soit  du  reste,  le 
voyageur  charitable  que  Jésus  donne  comme  modèle  au  pharisien 
était  un  Israélite  ('iîp!ïT,>k(TT,ç).  On  sait  que  dans  la  législation  rabbi- 
nique  le  titre  d'Israélite  désigne  tout  particulièrement  un  Juif  qui 
n'est  ni  prêtre  ni  lévite.  La  pointe  de  la  parabole  vient  de  cette 
opposition  :  le  prêtre  et  le  lévite  qui  vivent  des  dons  des  pèlerins, 
et  qui  devraient  donner  l'exemple  de  la  chanté  au  commun 
du  peuple,  abandonnent  sans  pitié   un  pauvre  pèlerin  blessé  sur 


NOTES  ET  MELAiNGES  2oo 

une  route  déserte  ;  un  simple  Israélite,  ne  consultant  que  son  cœur, 
prend  soin  de  lui  et  le  sauve  d'une  mort  certaine.  Ce  sens  particu- 
lier de  la  dénomination  «  Israélite  »  était  naturellement  incompré- 
hensible pour  le  cercle  pagano-clirétien,  auquel  saint  Luc  a  em- 
prunté la  parabole.  Pour  les  chrétiens  recrutés  parmi  les  païens,  la 
mention  d'un  Israélite,  après  celle  d'un  prêtre  et  d'un  lévite  qui 
sont  aussi  Israélites,  n'avait  aucun  sens  et  gâtait  par  sa  présence 
la  belle  ordonnance  de  la  parabole.  Pour  remédier  à  cet  incon- 
vénient, on  se  crut  autorisé  à  corriger  'iaaoLT}.iTf\<;  en  2a[iapdTri?,  et 
cette  correction  fut  accueillie  d'autant  plus  favorablement  qu'elle 
donnait  satisfaction  à  un  besoin  réel,  celui  de  rattacher  à  Jésus 
l'idée  de  la  supériorité  des  chrétiens  païens  sur  les  Juifs  non 
convertis. 

Nous  n'avons  plus  qu'à  récapituler  les  résultats  de  notre  re- 
chercha : 

1°  Le  récit  par  lequel  saint  Luc  introduit  la  question  du  docteur 
pharisien  appartient  à  la  troisième  phase  du  christianisme,  ou 
christianisme  paulinien. 

2°  Le  dialogue  entre  Jésus  et  le  docteur  pharisien  au  sujet 
du  principal  commandement  de  la  loi,  que  saint  Luc  sépare  de  la 
discussion  de  Jésus  avec  les  Saducéens  sur  la  résurrection  des 
corps,  doit  y  être  relié  et  placé  avec  lui  dans  la  première  phase  de 
la  prédication  de  Jésus,  conformément  à  la  version  de  saint  Marc. 

3°  La  parabole  primitive  du  bon  Israélite  est  authentique  et 
se  rattache  étroitement  au  dialogue  avec  le  docteur  pharisien. 

4°  La  correction  de  la  qualification  d'  «  Israélite  »  en  celle 
de  a  Samaritain  »  a  été  faite  par  des  chrétiens  païens  qui  ne  com- 
prenaient pas  le  sens  spécial  de  cette  dénomination. 

J.   liALÉVY. 


UN  ALPHABET  HÉBREU  ANGLAIS  AU  XIY"  SIÈCLE 


I 

Le  sens  des  lettres  de  l'alphabet  a  souvent  préoccupé  les  éru- 
dits.  Les  savants  du  moyen  âge,  cette  époque  classique  de  l'allé- 
gorie, se  sont  plu  à  attribuer  à  chacun  des  caractères  de  l'alphabet 
un  sens  emblématique.  M.  Omont  publiait,  il  y  a  quelques  mois 
dans  la  Bibliothèque    de   l  école  des  Chartes  (1881,  p.  429)  un 


•2o6  UKVLE  DES  ETUDES  JLiVES 

poème  latin  du  x^  siècle  sur  les  lettres  de  l'alphabet  grec.  La  pièce 
suivante  montrera  que  l'hébreu  n'a  pas  été  oublié. 

Le  ms.  B.  N.  fr.  1,  qui  date  du  commencement  du  xiv^  siècle  et 
contient  une  traduction  de  la  Bible  en  dialecte  anglo-normand, 
renferme  aux  i'"''  258  v°  et  259  r^  à  la  suite  des  Lamentations  de 
Jérémie,  un  alphabet  dans  lequel  chaque  lettre  hébraïque  est 
expliquée  par  un  mot  latin  et  par  le  mot  anglais  correspondant. 
Par  une  erreur  du  copiste,  c'est  le  mot  anglais  qui  se  trouve  placé 
le  premier.  On  verra  que  l'ordre  alphabétique  n'est  pas  observé  et 
que  plusieurs  lettres  sont  expliquées  de  deux  et  même  de  trois 
façons  différentes.  Nous  avons  placé  entre  crochets  le  mot  anglais 
moderne  correspondant. 


F"  258^1  Ci  finissent  les  lamenta- 
tions de  Jeremie'  et  comence 
le  alphabetli  en  grieu  ^ 
God 
Deus 
{\)  Aleph 

teching  [teaching] 
doctriua 

(2)  Zai 

sone  [son] 
filius 

(3)  Beth 
telling 
narracio 

('*]  Eetli 

voiz  [voice] 

vox 
(o)  Gimel 

gode  (good) 

bonus 

(6)  Tetli 

drede  [dread] 
timor 

(7)  Deleph 

biginning  [beginning] 
principium 

(8)  loth 
waye  [way] 
via 


(9)  He 

werching  [workingj    . 
operacio 

(10)  Ca2)h 

of  helche  [of  lielp] 
salutis 

(11)  Vaio 

worde  [word] 

sermo 
(!2)  Lameth 

oneliclie  [onely] 

unicus 
(1 3)  Mem 

confort 

consolacio 
(f  4j  Sade 

Tecliing  [teacliing] 

doctrina 
(lo)  Alepk 

lif  [life] 

vita 
{\&)Beth 

of  hem  [of  theml 

ex  ipsis 
(17)  0[?] 

moulh  of  rithfulnessc  [mouth 
of  righteousness] 

osjusticie 


'  Cest-à-dirc  les  rjuatrc  premiers  chapitres  dont  les  versets,  comme  on  le  sait,  se 
suivent  dans  l'ordre  alphabétique. 
'  Faute  évidente  pour  hehrieii. 


NOTES  ET  MÉLANGES 


257 


(1 8)  Sade 

tokenes  ftokens] 
signa    / 

(19)  Vait 
wyt  [wit] 
sensus 

(20)  mm 
cleping 
vocacio 

(21)  Coph 

hous  [house] 
domus 

(22)  Beth 

biginning  [beginning] 
principium 

(23)  loth 

F"  209''"  everlastend  [everlasling] 
sempiternum 

(24)  Nun 
helping 
adjutorium 

(25)  Sameth 

of  heued  [of  head] 
capitis 

(26)  Res 

plentee  [plenty] 
plenitudo 

(27)  Gimel 
hend  [haud] 
manus 

(28)  Caph 
on  [one] 
unus 

(29)  Smi[eth] 

rythfulnesse  [righleousness] 
justicia 

(30)  Sen 
tabler 
tabcUarius 


(31)  Deleth 

lering  [Cf.  ail.  lehren] 
disciplinam 

(32)  Lamelh 
cleping 
vocacio 

(33)  Coph 

moutb    vel  bon    [mouth  vel 

bone] 

os 

(34)  Phe 

strenthe  [strength] 
fortitudo 

(35)  Tau 

yis  [this] 
ista 

(36)  He 
wytoutencord[without  cords] 
sine  cordis 

(37)  Mem 
stahvorlli 
fortis 

(38)  Ain 

of  ye  heued  [oi'  the  head] 
capitis 

(39)  Res 
he 
ipse 

(40)  Vau 
lyf  [lifci 
vita 

(41)  Zai 

withouten  ezen  [wilhout  eyes] 
sine  oculis 

(42)  Phe 

of  ten  [of  teeth] 
dentium 

(43)  Sen 

Ci  tînist  le  alphabeth 
en  grieu 


Vient  ensuite  V Oraison  de  Jérémle  qui  forme  le  cinquième 
chapitre  des  Lamentations  dans  le  canon  juif. 

Le  tal^leau  suivant,  dans  l('(|U('l  nous  avons  jtlacé  à   côtd   de 
cliacjuc  ictii'c  ranpV'c  par  oi'di-o  alplialx'tiiinc  les  diUi'reiilcs  sii:nili- 


258 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


cations  qui  lui  sont  attribuées,  mettra  un  peu  de  clarté  dans  cet 
ensemble  si  confus  : 


Aleph,  Deus,  God[\]. 
Beth,  filius,  sone  (3). 
GiMEL,  tox,toiz  (o). 
Deleph,  timor,  drede  (7). 
He,  via,  maye  (9). 
Vau,  salutis,  ofhelche  [W]. 
Zai,  doctn7ia,  teching  (2). 
ïiETR^narracio,  telling[!^). 
Teth,  honus,  gode  (6). 
lOTH,  principiiim,  Hgin- 

ning  (8). 
Caph,  operacio,  werckvig 

(10). 
LAUKT!B.,sermo,  '}vorde[\  2). 
MEM,?mic««,  oneliche  [13). 
NuN,  sensîis,  wyl  i20). 
Sameth,  adjutoriwm,  hel- 

ping  (2o). 
Ain,  fortis,  sialworth  (381. 
VKE,os,moutkvel  bou(3i). 

Sade,  co7isolacio,  confort 

(14). 
CopH,  tocacio,  cleping  (21  ) 
Res,  capitis,  of  heued  (26). 
Sen,   jiisticia,    rythful- 

nesse  (30). 
Tau,  fortitudo,    sirenthe 

(3o). 

O  (?)  ea;  ïjî^w,  ofhem  (17). 


doctrina,  teching  (15). 

vi^a,  ii/"  (16).  <?omM^,  Ao«5  (22). 

pleniiudo,  plentee  (27). 

tabellarius,  tabler  (31). 

i^/a,  ^ù  (36). 

5i^w«,  tokenes  (19).  ^i^^e,  ^6  (40). 

mta,  lyfi'iVi- 


princiimmi,  Ugining  (i3). 

matins,  hend  (28). 

disciplinatn,  lering  (32). 
si»e  cordis,  wytouien  cord  (37; 
sempiternum,  everlastend  (24). 
M^i2(5,  (jw  (29). 


5mé  oculis,  witJwuten  e^en 

(42). 
05  justicie,  moutk  of  rith- 

fulnesse  (18). 
vocacio,  cleping  i'i'i). 
capitis  ofye  heued  (39). 
dentium,  often  (43). 


Le  fait  même  que  certaines  lettres  ont  reçu  plusieurs  interpré- 
tations différentes  montre  que  les  explications  données  n'ont  en 
général  pas  d'autre  source  que  la  fantaisie  de  leur  auteur. 
Quelques  lettres  seulement  sont  traduites  d'après  leur  sens  réel  : 
BETii,  domiis,  hoiis;  vue,  os,  rnouth;  res,  capitis,  of  heued; 
sen,  dentium,  of  tea  :  etc.  En  traduisant  zai  par  vita,  lyf, 
l'auteur  a  sans  doute  songé  au  grec  zaw.  Il  n'y  a  pas  de  rapport 
entrfî  le  sens  attribué  à  chaque  caractère  hébraïque  et  les  versets 
des  Lamentations  de  Jérémie  en  tète  desquels  sont  placées  ces 
lettres. 
Une  seule  chose  est  certaine,  c'est  que  l'Anglais  qui  a  traduit  les 


1 


NOTES  ET  MÉLANGES  239 

gloses  latines  ne  connaissait  pas  le  sens  attribué  aux  lettres 
hébraïques.  Le  fait  qu'il  traduit  phe,  os,  par  moiitli  vel  bon.  le 
prouve  suftisamment. 

.1.    BONNARD. 


II 


Le  document  que  nous  fait  connaître  M.  Bonnard  a  son  intérêt 
et  mérite  attention  :  il  suggère  quelques  observations  que  nous 
prenons  la  liberté  de  soumettre  au  lecteur. 

I.  M.  Bonnard  fait  remarquer  avec  raison  que,  par  quelque 
erreur  de  copiste,  c'est  le  mot  anglais  qui  se  trouve  placé  le  pre- 
mier. On  peut  se  demander,  il  est  vrai,  si  le  copiste  n'a  pas  oublié 
la  première  glose  hébraïque,  de  telle  sorte  que  l'ordre  entier  doive 
être  interverti,  et  chaque  lettre  hébraïque  demander  son  expli- 
cation, non  aux  deux  mots  qui  la  précèdent,  mais  aux  deux  mots 
qui  la  suivent.  Ne  serait-il  pas  plus  simple,  par  exemple,  de  rat- 
tacher gimel  non  à  vorv,  parole,  mais  à  bonus,  bienfaisant? 
Mais,  à  l'examen,  cette  thèse  ne  tient  pas  ;  on  reconnaît  vite  que, 
pour  le  plus  grand  nombre  des  lettres,  c'est  la  traduction  anglaise 
ou  latine  précédait  l'hébreu  qui  leur  convient.  Malgré  des  inco- 
hérences, malgré  des  bizarreries  comme  celles  de  Valef  précédé 
au  n"  15,  suivi  au  n"  1  d'une  même  traduction  doctrina,  il  faut 
admettre  que  le  scribe  a  placé  régulièrement  l'anglais  avant 
l'hébreu,  le  commentaire. avant  le  texte  à  commenter. 

Autre  singularité  plus  frappante,  et  qui  nous  expliquera  la  pre- 
mière: les  lettres  répétées  deux  et  quelquefois  môme  trois  fois  se 
suivent  dans  l'incohérence  du  désordre  le  plus  arbitraire.  Ce  dé- 
sordre toutefois  n'est  qu'apparent  et  est  dû  à  une  méprise. 

Prenons  d'abord  les  douze  premières  lettres  et  écrivons  les  à  la 
ligne  en  n'en  mettant  que  deux  à  chaque  ligne  : 


God, 

(Icus, 

alef{n°  1). 

Tecbinp-. 

doctrina, 

zai  (2). 

Souc;, 

filius, 

beih  (3). 

Tcllinfr, 

iiarracin, 

/teih  (4). 

Voiz, 

vox. 

gimel  (5). 

Gode, 

bonus, 

/eik  (6). 

Dredc, 

liinor, 

delepk  (7). 

Bigiuniug, 

principium, 

îo(h  (8). 

Waye, 

via, 

ke  (9). 

Werching, 

operacio, 

capk  (10). 

Ofhclche, 

salutis, 

vau  (111. 

Worde. 

sermo, 

lamelh  (12), 

Lisons  maintenant  ces  mots  non  plus  ou  lignes  horizontales, 


2G0 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


mais  en  colonnes,  et  nous  voyons  aussitôt  l'ordre  alphabétique  se 
suivre  à  la  première  colonne  de  gauche,  de  alef  à  vau  et  reprendre 
à  la  seconde  colonne  de  zai  {=■  zaïn]  k  lameth.  KwivQwiQwi  à\i, 
le  copiste  reproduisait  un  manuscrit  présentant  sur  deux  colonnes 
l'ordre  alphabétique,  du  moins  pour  les  douze  premières  lettres  ; 
mais  il  a  fait  sa  copie  en  suivant  la  ligne,  passant  de  alef  à  zai, 
comme  de  vau  à  lameth.  C'est  ce  qui  explique  également  comment, 
pour  chaque  lettre,  il  a  commencé  par  l'anglais  qu'il  trouve 
ou  qu'il  met  à  gauche  des  lettres  et  a  fini  par  l'hébreu,  qu'il  ren- 
contrait en  allant  à  droite. 

Pour  les  lettres  suivantes,  une  erreur  du  même  genre  s'est  pro- 
duite, mais  plus  compliquée. 

Ecrivons  les  lettres  à  la  suite  les  unes  des  autres  sur  cinq  lignes  ' 
liorizoniales  :  (pour  faciliter  la  lecture,  je  mets  les  caractères  hé- 
breux à  la  ]>lace  de  leurs  noms  en  lettres  latines)  : 


Col.  1. 

Col.  2. 

Col.  3. 

;:  (11°  13; 

:i  (14) 

N  (13: 

3(20) 

P  (21) 

2  (22) 

0  (25) 

1(26) 

S  (27) 

V]  (29  bis). 

•C5  (30] 

->m 

S  (34) 

n  (35j 

r;  (36) 

Col.  4. 

n  (3)  (16 

^  (23) 
^(28) 
b  (32) 
?3  (37) 


Col.  5. 

Col.  6. 

-.2  (0)   (17) 

^i  (181 

2  (2'i) 

)) 

0  (29) 

» 

:>  (p)  (33) 

)) 

3  [y]  (38) 

» 

Col.  7. 

T  (no 


et  enfin  hors  rang  n  (39),  ^  (40),  t  (41),  d  (42)  et  -J  (43). 

Dans  ce  tableau,  nous  avons  remplacé  n  (n°  16)  par  n,  le  signe 
inintelligible  0  (n°  17)  par  ::,  et  aux  n°^  33  et  38  p  et  :>  par  v  et  c. 
Ces  changements,  amenés  par  les  exigences  de  l'ordre  alphabé- 
tique, se  justifient,  comme  nous  le  verrons  plus  loin,  par  la  nature 
des  traductions. 

Or,  reportons-nous  maintenant  aux  colonnes  verticales,  et  nous 
constaterons  avec  une  régularité  presque  entière  l'ordre  même  de 
l'alphabet,  deux  fois  répété.  Nous  n'avons  dû,  pour  arriver  à  ce 
résultat,  qu'ajouter  dans  la  première  colonne  un  :f  qui  peut  avoir 
été  oublié  par  le  copiste,  laisser  quelques  lettres  à  la  suite  en 
dehors  de  nos  classements  et  faire  trois  ou  quatre  légers  change- 
ments qui  se  justifient  d'ailleurs. 

Une  régularité  presque  aussi  complète  ne  peut  être  l'efièt  du  ha- 
sard, et  il  faut  en  conclure  que  le  scribe  avait  sous  les  yeux  un 
double  ou  triple  alphabf  t  en  colonnes  multiples  qu"il  a  lu  par  lignes 
horizontales,  comme  le  i)remior  ali<liabet  partiel. 

L'original  qu'il  rei)roduit  n'est  lui-même  qu'une  coi)ie.  En  efiet, 
si  l'incohérence  ajtparente  d<'  l'alpliabet  est  l'onivre  du  scribe 
anglo-normand.  Tordre  alphabétique  que  l'on  n?constitue  den'ière 


NOTES  ET  MELANGES  .01 

cette  incoh(''rence,  a,  nous  le  voyons,  ses  lacunes,  ses  omissions  et 
ses  erreurs.  Si  le  y  de  la  l""»  colonne  a  été  sûrement  oublié  par  le 
copiste  du  xiv»  siècle,  le  i  et  le  t  de  la  colonne  3,  le  a  de  la 
colonne  4,  pour  ne  citer  que  les  faits  les  plus  frappants,  n'ont  pu 
être  omis  que  par  le  copiste  antérieur  qui  arrangeait  à  sa  ma- 
nière un  document  plus  ancien. 

Par  ce  texte  du  commencement  du  xiV  siècle,  nous  plongeons 
donc  à  travers  deux  copies  en  plein  moyen  âge,  peut-être,  au 
xii^  siècle,  ce  qui  n'étonnera  pas  pour  qui  connaît  quelque  peu 
l'histoire  des  transcriptions  des  manuscrits  à  cette  époque.  Peut- 
on  remonter  plus  haut  ?  Ici  nous  rencontrons  de  nouvelles 
sources,  et  la  critique  de  ces  sources  nous  permet  en  même  temps 
de  mieux  comprendre  la  formation  de  notre  alphabet,  et  d'en 
corriger  les  nombreuses  erreurs, 

IL  La  Bible  contient  plusieurs  poésies,  enseignements  moraux, 
complaintes,  psaumes,  etc.,  rédigés  de  façon  à  présenter  en 
acrostiches  l'ordre  alphabétique.  Tels  les  quatre  premiers  cha- 
pitres des  Lamentations  de  Jérémie  et  le  fameux  psaume  cxviii, 
qui  présente,  en  vingt-deux  chapitres  de  sept  versets  chacun,  sept 
fois  chacune  des  vingt-deux  lettres  de  l'alphabet.  Les  Pères  de 
l'Eglise,  au  lieu  de  voir  dans  cette  répétition  de  simples  procédés 
mnémotechniques,  n'ont  pas  manqué  d'y  chercher  et  d'y  trouver 
des  significations  édifiantes,  mystiques.  De  là  des  travaux  d'inter- 
prétation dont  sont  en  particulier  l'objet  les  Lamentations  et 
notre  psaume  cxviii.  A  cela  s'ajoutent  les  explications  purement 
(■'tymologiques  d'interprètes  non  juifs  qu'une  curiosité  de  gram- 
mairiens pousse  naturellement  à  s'enquérir  du  sens  des  noms  qui 
désignent  les  lettres  hébraïques. 

Au  IX*  siècle  Paschal  Radbert,  l'abbé  de  Corbie,  a  laissé  un 
commentaire  en  cinq  livres  sur  les  rinq  chapitres  des  Lamen- 
tations et  naturellement  chaque  lettre  y  est  l'objet  d'interpréta- 
tions spéciales  (voir  Migne,  Pairologie  Latine,  tome  CXX,  co- 
lonnes 1059-1256). 

Ses  contemporains,  Raban  Maur  et  saint  Rémi,  ont  laissé  éga- 
lement, le  premier  un  commentaire  sur  Jérémie  dont  le  huitième 
livre  est  consacré  aux  Lamentations  (Migne,  CXI,  col.  1083  et 
suiv.),  l'autre  un  traité  intitulé  Enarrationes  in  Psalnws,  où  le 
psaume  cxviii  est  étudié  (Migne,  GXXXI,  145  et  suiv.). 

En  remontant  plus  haut,  nous  rencontrons  le  célèbre  évêque  de 
Séville,  Isidore,  qui  touche  aux  questions  d'étymologie  hébraïque, 
dans  le  livre  VII  de  ses  précieuses  Etymologiœ  (Migne,  CXXXII, 
col.  275  et  suiv.). 

T.   IV.  18 


262  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Plus  haut  encore,  nous  trouvons  deux  grands  noms,  saint  Ara- 
broise  de  Milan,  qui  commente  le  psaume  cxviii  (Migne,  XV, 
pars  posterior,  col.  1863)  et  le  docteur  illustre  duquel  découle, 
dans  sa  plus  grande  partie,  la  science  théologique  du  moyen  âge  : 
j'ai  nommé  saint  Jérôme. 

Saint  Jérôme  a  étudié  à  plusieurs  reprises  l'alphabet  hébreu, 
d'abord  dans  une  lettre  qu'il  adresse  à  Paula,  commentaire 
grammatical,  édifiant  et  mystique  sur  le  psaume  cxviii  (Migne, 
XXII,  col.  441-445),  puis  dans  son  Liber  de  nominilms  heljroicis 
qui  a  tant  défrayé  les  étymologistes  du  moyen  âge  (Migne,  XXIIT, 
827);  enfin  dans  un  commentaire  sur  les  Lamentations  de  Jé- 
rémie  (Migne,  XXV,  col.  787-791).  Il  est  vrai  que  ce  dernier 
commentaire  est  attribué  par  quelques-uns  à  Bède  le  Vénérable. 

C'est  la  lettre  à  Paula  que  reproduisent  textuellement  Raban 
Maur  et  Rémi,  dont  le  témoignage  devient  dès  lors  inutile  pour 
-nous.  Voyons  si  c'est  à  ces  sources  ecclésiastiques  que  remonte 
notre  alphabet  anglo-normand. 

Alef,  n°  1  :  Dens,  God;  n°  15  :  doctrina,  teching.  —  L'interpréta- 
tion Deus  est  mystique  :  elle  se  retrouve  fréquemment  au 
moyen  âge;  aleph  ou  alplia  est  un  des  70  noms  de  la  divi- 
nité, et  l'un  des  plus  usités  :  c'est  une  allusion  au  mot  de 
l'Évangile  «  Dieu  est  V alplia  et  l'oméga  ».  —  Doctrina;  c'est 
l'interprétation  de  P.  Radbert,  de  saint  Jérôme  (cxxv),  de 
saint  Ambroise. 

Betli,  n»  3  :  filius;  n"  16  :  vita  ;  n'^  22  :  domiis.  —  L'explica- 
tion si  naturelle  de  domus  se  trouve  chez  tous  nos  commen- 
tateurs. Pour  filius,  le  premier  auteur  de  l'alphabet,  quel  qu'il 
soit,  a  confondu  Ijeih  avec  hen.  Pour  vita  (n°  16),  cette 
glose  est  inexplicable  en  elle  même.  Saint  Jérôme  et  les  autres 
rendent  par  ce  mot  l'hébreu  heth.  Or,  c'est  justement 
heih  que  réclame  au  n°  16  l'ordre  alphabétique.  Nous 
sommes  donc  en  droit  de  corriger  le  teih  en  Ueth,  correc- 
tion d'autant  plus  simple  que  dans  l'écriture  du  moyen 
âge  Vh  se  confond  facilement  avec  le  &.  L'erreur  est,  à  n'en 
pas  douter,  l'œuvre  du  dernier  scribe. 

Gimel,  n»  5  :  rox,  voice  ;  n"  27:  plenitiido,  plentee.  —  Plenitudo, 
Pasch.  Radbert,  saint  Jérôme  (xxir,  xxiii,  xxv)  et  ceux 
qui  le  reproduisent.  Quant  à  vooo,  d'où  vient-il  ?  Quelle 
faute  se   cache  derrière  ce  mot  ? 

Deleph  ou  Deleih,  n°  7  :  timor,  drede  ;  n°  23:  tabellariiis,  tabler. 
—  "  Daleih  significat  latine  timorem,  vel  (ut  alibi  inveni- 
mus)  nativitatem  »,  dit  saint  Ambroise.  —  Saint  Jérôme  et 


NOTES  ET  MELANGES  263 

ses  imitateurs  pour  daleih  donnent  tabidatum  ou  tahidarum 
dont  se  rapproche  beaucoup  notre  tahellarius ;  ce  dernier  en 
est-il  une  altération?  Quant  à  tabula7nim,  ce  génitif  surprend 
et  on  serait  tenté  d'y  voir  une  corruption  de  tahulatum  ; 
mais  lisez  l'interprétation  de  Jérôme  sur  la  C07ineooio,  ou  lien 
mystique  qui  réunit  cette  lettre  aux  quatre  premières  :  doc- 
trina,  doynus,  plenUudo,  tabuLarum  :  «  quia  videlicet  doc- 
trina  Ecclesiae  quse  domus  Dei  est,  in  librorum  reperiatur 
plenitudine  divinorura.  «  C'est  bien  des  tabidœ,  des  tables  de 
la  Loi  qu'il  s'agit  ici. 

Hé,  n°  9  :  via,  waye  ;  n°  36  :  ista  yîs.  —  Jérôme:  ista  (xxii,  xxiii, 
xxv)  ;  saint  Ambroise  :  est  ou  vivo.  Via  est  une  faute  de 
lecture  du  dernier  copiste  pour  vivo  :  et  celui-ci,  en  faisant 
suivre  l'alphabet  hébreu  ou  latin  de  la  traduction  anglaise,  a 
confirmé  son  erreur  en  traduisant  sa  fausse  lecture  via  par 
wai/e. 

Van,  n"  11  :  sahitis,  of  helche  ;  n°  19  :  signa,  tokenes  ;  n°  40  :  ipse, 
he.  —  Saint  Jérôme,  saint  Ambroise,  Radbert,  Raban  Maur, 
Rémi,  n'ont  d'autre  explication  que  ipse,  ille,  et,  ou  et  ille. 
D'où  notre  copiste  a-t-il  tiré  son  saluiis  et  son  signa  ? 

Zai  (zain),  n°  2  :  doctrina,  teching;  n°  41,  vita,  lyfe. — Nos  sources 
nous  donnent  tout  autre  chose  :  saint  Jérôme,  hœc,  oliva  ou 
/■orw2ca^zo^  c'est-à-dire  soit  zoth,  soil zaiih,  soit  zenouth;  saint 
Ambroise,  duc  te  ou  Tiuc.  Sont-ce  les  sources  qui  sont  en 
défaut?  Est-ce  notre  scribe?  Remarquons  d'abord  que  doc- 
trina  est  l'explication  la  plus  généralement  admise  pour 
alef  (voir  à  cette  lettre)  et  que,  dans  l'original  copié  par  le 
scribe,  zaïn  et  alef  étaient  sur  la  même  ligne  ;  conclusion  : 
pour  la  glose  2,  il  a  rapporté  à  zaïn  l'explication  qui  devait 
revenir  à  alef.  Sans  doute  alef  avait  à  sa  gauche  la  glose 
Deus  et  à  sa  droite  la  glose  doctrina,  et  le  copiste  l'a  détachée 
d'un  côté  pour  la  relier  à  l'autre.  —  Au  n°  41,  le  vita  est 
également  extraordinaire;  on  soupçonne  une  méprise  du 
même  genre  ;  la  glose  41  se  trouve  hors  rang  dans  notre  ta- 
bleau de  la  page  260,  et  il  est  impossible  de  voir  la  place 
qu'elle  occupait  dans  l'alphabet  primitif;  peut-être  était-elle 
voisine  d'un  heth,  la  lettre  qui  la  suit  immédiatement  dans 
l'alphabet,  et  que  les  Pères  rendent  i)ar  vita  ;  ce  serait  de  ce 
vita  que  l'étourderie  et  1  ignorance  de  notre  copiste  l'auraient 
gratifiée. 

Tletli,  n»  4  :  norracio,  telling.—  Ni  le  V)ita  ou  le  viventes  de  saint 
Jérôme,  ni  le  pavor  de  saint  Ambroise  n'expliquent  cette 
étraiigo  traduction.  Quelle  erreur  suppose-t-elle? 


264  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Teih,  n°  6  :  honns,  gode.  —  Ici  Radbert  et  Jérôme  s'accordent  à 
traduire  par  bomim  :  ils  changent  simplement  teth  en  lob{l). 

Joih,  n°  8  :  principiimi  biginning;  n°  23,  idem  —  Saint  Jérôme 
(xxiii)  :  f<  Jod,  principium  vel  scientia,  vel  Dominator  «  ; 
Id.  XXII  et  XXV  :  «  principium  ».  Pasch.  Radbert  :  «  princi- 
pium vel  desolatio.  » 

CapJi,  n°  10  :  operacio,  werching;  n°  18  :  manus,  hend.  —  Manus 
se  trouve  dans  Radbert  et  dans  saint  Jérôme.  D'où  vient 
operacio  ? 

LameiJi,  n°  12  :  sermo,  worde;  n°  32  :  disciplinam,  lering.  —  Pas- 
chal  Radbert  :  disciplina;  saint  Jérôme,  une  fois  disciplina 
cordis  (xxv)  ;  une  fois  disciplina  sive  cordis  (?)  (xxii)  ;  une 
fois  doctrina  sive  disciplina  (xxiii)  ;  saint  Ambroise  :  «  cor, 
vel  ut  alia  interpretatio  habet,  seryo;  unde  videtur  admonere 
vel  prudenter  haec  intelligenda,  vel  sollicite  servanda  prae- 
cepta.  »  —  Corrigeons  donc  sermo  en  servo. 

Mem,  n°  13  :  unicus,  oneliche  ;  n'^ST  :  sine  cordis,  wytouten  cord. 
Ajoutons  ici  l'inintelligible  0,  ex  ipsis,  of  hem  (n°  17),  que 
l'ordre  alphabétique  réclame  à  cette  place.  —  Saint  Jérôme  : 
ex  ipsis  (xxii,  xxiii,  xxv)  ;  ex  quo  et  sive  aqua  (xxiii);  saint 
Ambroise  :  viscera  ou  ex  ipsis.  La  source  de  «  0,  ex  ipsis  » 
est  toute  trouvée. 

Mais  d'oii  vient  imiciis?  d'où  sine  cordis?  Cette  dernière 
glose  a  le  n"  37;  or,  la  lettre  n°  32,  c'est-à-dire  b,  qui  la 
précède  immédiatement  dans  la  colonne  4  de  notre  tableau 
est  expliquée  par  saint  Jérôme  disciplina  sive  cordis.  C'est 
ce  sive  cordis  qui  a  été  attribué  par  le  copiste  antérieur 
à  la  lettre  73  qui  venait  immédiatement  au-dessous.  Notre 
scribe  a  lu  suie  pour  sive.  sans  se  laisser  arrêter  par  ce 
génitif  cordis  dépendant  de  sine,  et  a  ensuite  régulièrement 
traduit  son  contre-sens  par  loyiouten  (without). 

Pour  îoiicus,  remarquons  également  que  c'est  la  traduction 
de  la  glose  n»  13  (colonne  1),  et  que  celle-ci  ajustement  au- 
dessous  d'elle  la  lettre  3  (n*'  20),  que  saint  Ambroise  traduit 
par  imicus  Confusion  de  môme  nature. 

Nun,  n"  20  :  sensus,  wyt  ;  n°  24  :  sempiternum,  everlastend.  — 
Saint  Jérôme  explique  nun,  par  fasliis,  piscis  ou  sempiter- 
nuni;  Pasch.  Radbert  par  sempliernum,  saint  Ambroise  par 
una  pars  eorum  et  par  unicus.  (Voir  la  fin  de  l'article  pré- 
cédent.) D'où  vient  sensiis? 

Sameih  [Vire  samedi,  confusion  du  c  et  du  /,  fréquente  dans  les 
textes  du  moyen  âge),  n°  25  :  adjidorium,  helpiiig;  n°  29  : 
tiniis,  on.  —  Adjuioriiim  est  donné  par  Radbert,  par  saint 


NOTES  ET  MELANGES  '16o 

Jérôme  i^xxii,  xxvj,  qui,  ailleurs  (xxiii)  dit  :  «  firmamentum, 
licet  quidam  erectionem  vel  adjutorium  sive  fulturam  pu- 
tent.  »  Saint  Ambroise  dit  :  firmamentum. 

Quant  à  imus,  ce  doit  être  un  doublet  de  iinicus,  rapporté 
à  la  lettre  placée  immédiatement  au-dessus  du  nun,  comme 
unicus  a  été  rapporté  à  la  lettre  placée  immédiatement  a  u- 
dessus. 

Ain,  n°  38  :  fortis,  stalworth.  —  Le  manuscrit  porte  la  lettre  , 
quoique  l'ordre  alphabétique  réclame  s.  Il  y  a  là  une  erreur 
qui  remonte  au  premier  rédacteur;  sur  cette  erreur,  le  se- 
cond copiste  a  enté  la  sienne  :  il  a  lu  fortis  au  lieu  de  fon- 
tis  (souce)  et  a  traduit  par  stalicor^th.  Saint  Jérôme,  saint 
Ambroise,  etc.,  traduisent  correctement  aïn  par  oculus 
ou  fous  [fons,  sive  oculus). 

Phe,  W  34  :  os,  moutli  vel  bon;  n°  42  :  sine  oculis,  withouten  ezen. 
Saint  Jérôme  (xxiii)  :  «  os,  ab  ore,  non  ab  osse,  ne  litterarum 
ambiguitate  fallaris  ;  »  autrement  dit  :  os,  bouche,  génitif 
oris,  et  non  os,  ossement,  génitif  ossis.  —  Le  plus  ancien  de 
nos  copistes  avait  traduit  phe  par  os,  sans  spécifier  s'il  s'agis- 
sait de  os,  oris  ou  de  os,  ossis;  le  second,  qui  ignore  le  sens 
de  plie  et  reconnaît  à  os  deux  significations,  les  indique  con- 
sciencieusement,  ?/20?<^/«  vd  bon,  c'est-à-dire  bouche  ou.  os. 
—  Pour  le  sine  oculis,  nouvelle  et  double  bourde  de  notre 
copiste  anglo-normand  :  il  a  lu  si7ie  oculis,  et  a  traduit  loi- 
thouten  eyen  (sans  yeux\  là  où  il  devait  lire  sive  oculus  et 
traduire  or  eij  (ou  œil).  Et  ce  sive  ocnlus  appartient  à  une 
ligne  précédente  et  se  rapporte  à  la  lettre  y  que  saint  Jérôme 
.  interprète  par  fons  sive  oculus.  (Voir  la  lettre  et  l'alinéa 
précédents.)  Qu'on  se  reporte  à  la  colonne  1  de  notre  al- 
phabet reconstitué  (p.  260),  on  verra  que  notre  reconstitu- 
tion nous  avait  forcé  à  admettre  un  y  entre  le  o  (n"  25)  et  le 
D  (n°  34)  ;  c'est  cet  s>  (n°29  bis)  qui  devait  être  interprété  par 
f07îs  sive  oculus,  dont  une  trace  nous  est  conservée,  et  à 
une  ligne  au-dessous,  dans  la  glose  sine  oculis  de  notre 
manuscrit,  nouvelle  confirmation  de  la  justesse  de  notre 
hypothèse. 

Sade,  n"»  14  :  consolatio,  comfort  ;  A»  18  :  os  justicie,  mouth  of 
rithfulnesse.  —  Saint  Ambroise  donne  consolatio,  saint  Jé- 
rôme juslitia  (avec  regio  et  venatio).  Le  os  est  obscur  ;  mais 
il  doit  s'expliquer  par  une  erreur  du  même  genre  que  celle 
que  nous  venons  de  signaler.  Dans  l'original,  la  glose  18  fait 
suite  à  la  glose  38,  qui  doit  être  un  phé,  latin  os,  et  c'est  à 
cette  lettre  qu'il  faut  rendre  cet  os,  indûment  rapporté  à  sade. 


266  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVLS 

Le  scribe  anglo-normand,  lisant  os  jiisticie,  traduit  brave- 
ment mouth  of  rUhfulnesse,  «  bouche  de  justice!  » 

Coph,  n°  21  et  n°  33  :  vocacio,  cleping.  —  C'est  la  traduction  tra- 
ditionnelle des  Pères  de  l'Église. 

Res,  n°  26  et  n°  39  :  capitis,  of  heued.  —  Ici  encore  la  traduction 
traditionnelle  est  conservée. 

Sen,  n°  30  -.justicia,  rythfulnesse;  n°  43  :  dentium,  of  ten.  —  Le 
dentium  s'explique  de  lui-même.  (Voyez  saint  Jérôme,  xxii, 
XXIII,  XXV,  etc.)  Mais  d'où  vient  le  justicia? 

Tau,  n°  35  :  fortiiiido,  stenthe.  —  Saint  Jérôme  et  d'autres  tra- 
duisent par  signwn,  saint  Ambroise  par  erravit,  consum- 
mavit.  Nous  ne  voyons  pas  comment  expliquer  ce  fortitudo. 

III.  De  cette  discussion  ressortent  plusieurs  conséquences  :  1°  Le 
copiste  du  manuscrit  français  1,  de  la  B.  N.,  a  reproduit  un  texte 
contenant  seulement  le  nom  des  lettres  et  la  traduction  latine  de 
l'alphabet  hébreu;  il  ne  comprenait  pas  son  texte,  l'a  copié  de  tort 
et  de  travers,  lisant  en  ligne  horizontale  ce  qui  devait  être  lu  en 
ligne  verticale,  rapportant  aux  lignes  supérieures  ou  inférieures 
des  gloses  qui,  sans  doute,  par  suite  du  manque  de  place,  avaient 
été  rejetées  à  la  marge  interlinéaire  supérieure  ou  inférieure,  se 
trompant  dans  ses  lectures,  prenant  tel  mot  pour  tel  autre,  et 
confirmant  ses  contre-sens  par  ses  traductions  anglaises.  Il  voyait 
bien  que  l'alphabet  qu'il  copiait  n'était  pas  l'alphabet  latin,  sa 
science  allait  jusque  là;  mais  il  ne  pouvait  entrer  dans  son  esprit 
que  ce  fût  de  l'hébreu,  et  il  le  baptise  bravement  d'alphabet  grec  : 
«  Ci...  comence  le  alphabet  en  grieu;  ci  finist  le  alphabet  en 
grieu.  w  On  pourrait  peut-être  tirer  de  ces  faits  de  nouvelles  in- 
ductions sur  le  reste  du  manuscrit;  mais  ce  n'est  ni  le  lieu  ni 
notre  affaire  de  toucher  à  ce  point. 

2°  Le  texte  qu'il  copie,  lui-même  incorrect,  avec  ses  omissions, 
ne  peut  être  l'original;  nous  l'avons  montré  plus  haut,  d'ailleurs. 
Il  reproduit  un  document  antérieur  qu'il  ne  serait  pas  difficile 
maintenant  de  reconstituer.  Ce  document  consiste  dans  deux 
alphabets  hébreux  (et  même  plus),  placés  à  la  suite  des  quatre 
chapitres  alphabétiques  des  Lamentations,  et  expliquant,  d'après 
la  tradition  de  l'Église,  le  sens  des  alphabets  acrostiches  de  ces 
chapitres.  Peut-être  l'alphabet  expliqué  était  quadruple,  comme 
dans  le  texte  de  Jérémie. 

3°  Est-ce  de  saint  Jérôme  que  sont  tirées  directement  les  traduc- 
tions? Nous  ne  saurions  le  dire.  Sur  43  gloses,  27  se  retrouvent 
dans  saint  Jérôme,  6  dans  saint  Ambroise,  1  appartient  à  tout  le 
moyeu  âge  théologien  (deus-aleph),  1  est  une  explication  para 


NOTES  ET  MELANGES  267 

peu  près  qui  peut  être  le  fait  du  premier  rédacteur  [beth-filius). 
Reste   8  traductions  dont  des  recherches  nouvelles  finiraient 
peut-être  par  faire  reconnaître  les  formes  erronées  ou  les  ori- 
gines authentiques.  Nous  ne  pouvons  qu'indiquer  ici  ce  point. 

IV.  En  nous  en  tenant  aux  résultats  généraux,  et  sans  trop 
presser  les  détails,  cet  alphabet  nous  fait  donc  remonter  sûrement 
à  un  système  d'interprétation  qui  appartient  à  saint  Jérôme  ou  à 
ses  contemporains.  Il  y  aurait  lieu  d'examiner  de  plus  près  ce 
système,  d'en  déterminer  le  degré  d'exactitude  et  de  science  et  de 
discuter  la  valeur  et  l'origine  de  ces  traductions,  mais  ce  serait 
toucher  à  une  grave  question  depuis  longtemps  et  longuement  dé- 
battue, du  moins  en  ce  qui  regarde  saint  Jérôme,  à  savoir  la  con- 
naissance que  les  Pères  avaient  de  l'hébreu.  Nous  n'avons  nul- 
lement l'intention  d'ouvrir  incidemment  ici  le  débat.  Mais  nous 
devons  remarquer  que  saint  Jérôme  a  pu  prendre  aux  Rabbins, 
avec  les  notions  d'hébreu  qu'il  a  été  leur  demander,  l'idée  de 
commentaires  grammaticaux  ou  édifiants  sur  la  signification  des 
lettres  hébraïques.  La  littérature  rabbinique  nous  a  laissé  quelques 
traces  de  ce  genre  d'interprétation. 

Au  folio  104  a  du  traité  Sadbath,  on  lit  une  page  consacrée  à  la 
signification  des  lettres  de  l'alphabet  et  de  leurs  connexions  ;  ainsi 
gimel  et  dalet/i  sont  rapprochées  de  gomel  (charitable,  «  qui  re- 
tribuit  »  ;  cf.  la  retribuHo  de  saint  Ambroise  et  de  saint  Jérôme) 
et  de  dalim,  les  pauvres  (cf.  le  daleih-pauper  de  saint  Jérôme); 
de  là  une  conclusion  fort  édifiante  sur  la  Gemilouth  Hassadim 
envers  les  Dalim.  Une  bonne  partie  des  discussions  de  cette 
page  est  mise  en  dialogue  entre  les  Rahhanan  et  R.  Josué  ben 
Lévi;  elle  se  passe  vers  la  fin  du  m''  siècle,  aux  temps  mêmes  de 
S.  Jérôme. 

Dans  la  collection  des  petits  Midraschini  publiés  par  M.  Adolf 
Jellinek,  sous  le  titre  de  Beth-Hammidrasch  (t.  III,  p.  12-49 
et  p.  50-64),  on  trouve  deux  alphabets  midraschiques  ou  allégo- 
riques, attribués  à  R.  Akiba.  L'un  semble  dériver  itrécisc'ment  de 
la  page  du  traité  Sabhath  que  nous  venons  de  rappeler  ;  l'autre  est 
une  œuvre  plus  originale,  où  les  lettres,  étudiées  dans  leurs  noms, 
leurs  formes,  leurs  successions  ou  connexions,  donnent  lieu  à  une 
longue  suite  de  considérations  morales,  allégoi'iques,  religieuses, 
mystiques,  cabalistiques.  11  n'est  guère  admissible  que  ces  alpha- 
bets, signalé's  déjà  au  viii^  siècle  et  au  ix''  siècle,  remontent  sous 
leur  forme  actuelle  au  ii"  siècle  et  sortent  tels  quels  de  la  main 
d'Akiba;  mais  il  n'y  a  rien  d'invraisemblable  à  ce  que  la  première 
idée  de  ces  Midraschini  appartienne  en  effet  au  célèbre  docteur  qui 


268  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

avait  imaginé  dans  l'Ecole  une  méthode  nouvelle  d'exégèse,  qui 
consistait  à  expliquer  toutes  les  lettres  et  tous  les  signes  de  l'Écri- 
ture, et  «  tirait  de  chaque  angle  de  lettre  des  boisseaux  de  règles  ». 
Le  premier  numéro  de  ce  Midrasch  nous  montre  dans  Valef  le 
symbole  de  Dieic,  dans  le  gimel  le  symbole  de  la  bienfaisance  de 
Dieu  à  l'égard  du  monde,  dans  le  daleth  Dieu  préoccupé  du 
pauvre,  etc. 

Nous  n'avons  point  à  étudier  ici  cette  littérature  toute  spéciale, 
et  renvoyons  le  lecteur  aux  travaux  dont  elle  a  été  l'objet  *.  Nous 
nous  contentons  de  rapprocher  le  système  d'interprétation  des 
Pères  de  l'Église  de  celui  des  Rabbins,  en  nous  demandant  si  le 
premier  ne  dérive  pas  du  second.  Cette  question  n'est  d'ailleurs 
elle-même  qu'un  point  spécial  d'une  autre  beaucoup  plus  vaste,  ce 
que  la  littérature  des  Pères  de  l'Église  a  reçu  ou  conservé  de  la 
littérature  et  des  traditions  rabbiniques. 

Arsène  Darmesteter. 


OUIGINE  ET  FORMATION  DE  LA  CONJONCTION  TALMUDIQUE 

ILMALÈ 

La  conjonction  "«bnbN  ou  N^TabN,  très  fréquente  dans  le  Talmud 
de  Babylone  et  très  rare  dans  les  targoums,  ne  s'emploie  que  pour 
exprimer  une  hypothèse  et  se  distingue  nettement  de  la  particule 
de  la  condition  simple  ^N  ou  ■}«  si.  Elle  est  usitée  aussi  bien  pour 
l'affirmation  que  pour  la  négation  et  se  traduit  tantôt  par  «  s'il  était 
que  »,  tantôt  par  «  si  ce  n'était  que  ».  Elle  répond  donc  aux  con- 
jonctions ^b  et  "'b^b  ou  Nbnb  de  l'hébreu  biblique,  ^bî<  et  "^b^bN  ou 
NbnbN  des  targoums.  Ce  rapprochement  a  conduit  M.  J.  Lévy  à 
voir  dans  "hrh»  ou  xb'DbN  la  conjonction  "ib^bN  ou  N.bnbN,  dans  la- 
quelle aurait  été  insérée  la  particule  ma  «  quelque  chose»-.  Cette 
explication  soulève  cependant  plusieurs  objections.  Pourquoi  l'in- 
sertion de  cette  particule  aurait-elle  fait  tomber  la  voyelle  ou,  de 
••b^bN,  laquelle  se  trouve  également  dans  les  formes  correspon- 
dantes du  syriaque,  de  l'hébreu  biblique  et  de  l'arabe'?  Pourquoi 

•  Voir  Jellinek,  dans  l'introduction  de  son  Beth  Hammidrasch,  p.  xiv-ivii  ;  dans 
la  Monatsschrift,  II,  /.20,  et  Zunz,  G.  F.,  168. 

*  Chaldmisckes  Waerterbuch ,  Leipzifç,  1867,  et  Neuhebraisrhes  und  CAaldieisehts 
Warteiiuch,  Leipzig,  1876,  sous  ce  mot. 


NOTES  ET  MELANGES  'I&J 

aurait-elle  altéré  la  valeur  de  ■'î^n'?»,  à  tel  point  que  cette  conjonc- 
tion pût  servir  pour  les  hypothèses  affirmatives?  Enfin  ne  s'atten- 
drait-on pas  à  trouver  ma  rejeté  à  la  fin  du  mot,  au  lieu  d'être  in- 
tercalé au  milieu  1  Ces  objections  paraissent  assez  sérieuses  pour 
qu'on  n'accepte  pas  à  p^Hori  l'étymologie  proposée,  et  il  sera  utile 
de  rechercher  dans  d'autres  langues  sémitiques  des  termes  de 
comparaison  qui  mettent  sur  la  voie  de  l'origine  et  de  la  formation 
de  la  conjonction  "^bizha. 

Le  syriaque  littéraire  ne  nous  ofiFre  rien  d'analogue  ;  mais  Bar- 
hebraeus  a  conservé  dans  sa  grande  grammaire  syriaque  une  locu- 
tion vulgaire,  où  l'on  ne  peut  s'empêcher  de  voir  le  dernier 
membre  de  notre  conjonction  :  c'est  le  mot  mâle.  Nous  traduisons 
ici  le  passage  qui  s'y  rapporte  *  :  «  «btt  avec  a  -  après  le  mim  et  é 
»  après  le  lâmed  est  une  particule  arabe  ayant  le  sens  de  «  sinon  ». 
»  On  dit,  par  exemple,  à  celui  qui,  invité  à  dîner,  s'excuse  : 
»  a  Sinon,  envoie  quelqu'un  de  tes  parents  »,  c'est-à-dire,  «si  tu  ne 
»  viens  pas  toi-même,  envoie  un  des  tiens  ».  [Autre  exemple]  : 
»  «  Sinon,  aide  en  paroles  »,  c'est-à-dire,  «  si  tu  n'aides  pas  par  des 
»  actes,  aide  par  des  paroles  ».  Des  personnes  ignorant  l'origine 
»  du  mot,  le  prennent  dans  le  sens  de  donc  et  disent  :  «  Si  le 
»  monde  est  composé,  c'est  donc  qu'il  est  périssable.  »  D'autres 
»  croient  qu'il  signifie  quoique  et  disent  :  «  Quoiqu'il  m'ait  vu,  il 
»  ne  m'a  pas  cependant  interrogé.  »  Quelques-uns,  se  trompant 
»  sur  la  prononciation  du  mot,  articulent  mêlô  comme  on  dit 
»  mêhô  avec  ê  après  la  première  consonne  et  ô  après  la  deuxième 
»  (primitivement  redoublée).  —  Eclaircissement  —  oiNna  (t^u;) 
»  avec  é  après  le  têt  et  o  bref  après  Yaleph  est  une  particule 
»  grecque  ;  il  a  le  même  sens  que  7nàlê.  De  même  que  les  Sy- 
»  riens  orientaux  se  servent  de  Nb»,  les  Syriens  occidentaux  font 
»  usage  de  DiNï^a.  » 

Ce  passage  est  explicite  :  on  doit  prononcer  mâle  et  donner  à  ce 
mot  le  sens  de  «  sinon  ».-  La  prononciation  mélô  et  le  sens  de 
«  donc  »  n'ont  rien  à  faire  ici,  ils  viennent  du  grec  fiâT^a;  Barhe- 
braius  a  tort  de  chercher  à  l'expliquer  par  une  composition  de  ■;« 
et  de  nV,  à  l'instar  de  n^»  formé  de  p  et  de  ^5D.  Quant  au  sens  de 
quoique,  il  montre  que  cette  conjonction,  comme  le  talmudique 
■•bttbN,  pouvait  être  prise  pour  l'affîrmatif  si,  à  côté  de  l'acception 
plus  usuelle  de  si  7ion. 

'  Voy.  Œuvres  grammaticales  d' Abou'l-Faradj ,  dit  Barhebraus,  éd.  par  M.  labbé 
Martin,  I,  p.  183,  1.  18  el  suiv. 

*  Barhebraeus  emploie  le  mol  patah,  c'cst-à-dirc  a  bref,  quoique  Va  ici  soit  long, 
parce  qu'il  s'aj^it  d'un  mot  uestorien,  comme  nous  le  verrons  plus  loin  ,-  or  les  Nes- 
toriens  avaient  conservé  pur  la  long  qui,  chez  les  Jacobites,  avait  le  sou  o.  \,'a 
de  malt  ne  pouvait  donc  être  exprimé  en  signes  jacobites  que  par  le  patah. 


270  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Il  est  encore  digne  de  remarque  que,  si  ibttbN  ne  se  rencontre 
guère  que  dans  le  Talmud,  mâle  n'était  usité  que  chez  les  Syriens 
orientaux. 

On  sait  que  Barliebraeus  était  originaire  de  Mélitène,  où  avait 
été  transportée  une  colonie  deNabatéens  et  où,  de  son  temps  même, 
le  peuple  parlait  encore  un  dialecte  nabatéen^  Il  est  donc  probable 
que  mâle  est  une  locution  nabatéenne  et  que  les  exemples  dont  se 
sert  Barhebrseus  ont  leur  fondement  dans  des  souvenirs  de  son 
enfance.  Cependant,  quand  il  dit  que  cette  particule  est  arabe  et 
qu'il  la  compare,  pour  le  sens,  au  grec  t^w;  usité  dans  la  Syrie  oc- 
cidentale, il  en  a  vue  les  gloses  arabes  des  lexicographes  syriens. 
Ceux-ci,  en  effet,  sous  le  mot  din::  ou  ohn^Tl:,  citent  entre  autres 
mots  :  immâ,  immâ  là,  onmmâla[î)  ^ .  Après  le  passage  que  nous 
avons  traduit  plus  haut,  Barhebrseus  montre  par  des  exemples 
empruntés  à  divers  auteurs  que  la  particule  grecque  técùî  avait  pris 
en  syriaque  le  sens  de  «  au  moins  »,  «  sinon  ».  Les  mots  arabes 
immâ  et  immâ  là  indiqués  par  les  lexicographes  comme  les  équi- 
valents de  cette  conjonction,  prouvent  qu'elle  pouvait  être  prise 
dans  un  sens  aftirmatif  ou  négatif,  comme  le  syriaque  oriental 
mâle  et  le  talmudique  ilmâlê.  Quant  au  troisième  mot  oummâla(i), 
écrit  "h  ^I2in,  sa  prononciation  est  donnée  par  Djawâlîqî^  qui  le 
considère  comme  altéré  de  l'arabe  immâ  là.  Souvent  Djawâlîqî 
emprunte  au  dialecte  nabatéen  de  l'Iraq  des  mots  consignés  comme 
des  prononciations  vulgaires  dans  ses  hâta  et  surtout  dans  son 
autre  traité  intitulé  Almou  arrab.  La  comparaison  de  oummâla[i) 
avec  immâ  là  n'est  nullement  forcée;  on  sait  qu'en  Babylonie 
une  voyelle  devant  une  labiale  se  changeait  souvent  en  ou.  Ce  mot 
a  passé  de  la  Babylonie  en  Egypte  où  il  est  encore  usité  dans  le 
dialecte  arabe  de  ce  pays  avec  les  sens  de  «  oui,  sans  doute  », 
«  pourquoi  donc  pas  '?  »  On  dit  aussi  par  abréviation  ummâl,  soit 
pour  affirmer:  «  sans  doute  »,  «  naturellement»,  soit  pour  solliciter 
ou  interroger  :  «  cependant  »  * . 

Les  mots  mâle  et  oummâlê  semblent,  d'après  ce  que  nous  ve- 

'  Voy.  Noeldeke,  Zeitschr.  der  D.  M.  0.,  XXV,  p.  125.  Il  n'est  pas  à  notre  con- 
naissance que  le  mot  màlâ  se  trouve  constaté  en  syriaque  avant  Barhcbrœus,  c  csl-à- 
dire  avant  le  xiii'  siècle. 

*  Vi)y.  Bar  'Ali,  éd.  G.  Hoffmann,  n"'  4128  et  /ilG.'i,  et  Payne  Smith,  Thésaurus 
syr.,  col.  1419  et  1433. 

'  Voy.  le  traité  des  hâta  publié  par  M.  Ilartwij^  Dercnbourg  dans  les  Alorffenlân- 
dische  Forschunfjeji,  Leipzig,  1875,  p.  132- 

*  Voy.  'S\n\.\.ii-]i(iy,G-rammattk  des  arabischen  vulgaer  Dialectes  von  j£l(ji/pCen, Leip- 
zig, 1880,  p.  171,  n.  9.  M.  le  D'  Spilla-Bey  prend  le  mol  oummal  comme  la  forme 
première,  par  contraction  de  immâ  là,  el  il  écrit  en  deux  mots  oummal  ê,  considé- 
rant c'  comme  une  particule  à  part.  La  comparaison  avec  les  autres  dialectes  nous 
obligo  à  rejeter  cette  manière  de  voir. 


NOTES  ET  MELAiN(;ES  '211 

nons  de  dire,  être  d'origine  nabatéenne  et  babylonienne.  L'analogie 
qu'ils  présentent  avec  le  talmudique  -^babN,  autant  pour  la  forme 
que  pour  le  sens,  et  la  circonstance  que  cette  dernière  locution 
se  rencontre  non  seulement  dans  la  Mischna,  mais  aussi  dans 
le  Talmud  de  Babylone  nous  engagent  à  attribuer  -^bwbN  au  dia- 
lecte babylonien.  C'est  une  locution  que  la  langue  vulgaire  de 
cette  contrée  forma  parallèlement  aux  anciennes  conjonctions 
ibN  et  "'bibN. 

Cet  exposé  préliminaire  concernant  l'origine  de  la  conjonction 
•'bTabN  nous  conduit  à  rechercher  les  éléments  qui  entrent  dans  sa 
composition.  Il  serait  assurément  subtil  de  vouloir  établir  des  dis- 
tinctions de  sens  d'après  les  différentes  écritures  ib^bN  et  NbttbN  ; 
les  mots  analogues  que  nous  avons  mentionnés  plus  haut,  mâle 
en  syriaque,  oicmmâlê  en  arabe  vulgaire,  ne  sont  pas  non  plus 
susceptibles  de  prononciations  variant  suivant  les  acceptions  du 
mot.  On  doit  donc  rejeter  avec  Buxtorf  et  M.  J.  Lévy  la  distinction 
qu'on  trouve  dans  Tosaphot  sur  Megilla,  21a,  d'après  laquelle 
NbT^bN  serait  usité  pour  une  hypothèse  négative  :  «  si  ce  n'était 
que»,  et  ''bwbs  pour  une  hypothèse  affirmative  :  «  s'il  était  que  ». 
Il  ne  manque  pas,  en  effet,  d'exemples  qui  contredisent  cette  règle. 
La  voyelle  finale  ê  est  indiquée  indifféremment  dans  les  livres  tal- 
mudiques  par  aleph  ou  par  yod;  dans  le  cas  présent,  la  double 
écriture  était  d'autant  moins  surprenante  qu'elle  suivait  la  double 
orthographe  de  l'hébreu  biblique  ■'bnb  et  Nbib.  Nous  ne  pouvons, 
cependant,  nous  empêcher  de  penser  que  cette  règle  devait  se  rat- 
tacher à  quelque  tradition  des  écoles  juives.  L'arabe  et  le  syriaque 
n'admettent  que  la  négation  là,  lu,  dans  la  composition  de  ces  con- 
jonctions :  lau  là,  ellou  lô.  L'hébreu  xb  ib  et  le  targoumique 
Nbibis  n'ont-ils  pas  été  prononcés  autrefois  loii  lô,  illou  là  ?  Rien 
ne  défend  de  le  supposer.  Les  formes  -^l^ib  et  ■'bibN  indiqueraient, 
dans  cette  hypothèse,  une  modification  de  la  négation  :  le  serait 
contracté  de  la  négation  et  de  l'interrogatif  ai,  "iN,  que  l'on  trouve 
joint  à  d'autres  particules,  comme  le  syriaque /i«i  et  l'arabe  Kai- 
mâ  * .  Nous  serions  tenté  maintenant  d'expliquer  le  syriaque 
lewai  «  puisse. . .  !  »,  targ.  ^ib  -^Nib  «  puisse  !  »,  -^iib^  ■^Nibr:  «  oh  1 
puisse  !  »  par  l'hébreu  nb,  en  ar.  lau,  allongé  au  moyen  de  la  parti- 
cule ai;  ^b  ne  se  rencontre  plus  sous  sa  forme  simple  en  syriaque 
et  dans  les  targoums,  mais  il  existe  encore  dans  les  particules  com- 
posées ellou,  illou.  Une  autre  locution  analogue  est  l'hébreu  bi- 

>  M.  J.  Lévy  dans  ses  dictionnaires,  sous  le  mot  '^bttbN,  voit  dans  "^b  une  abré- 
viation de  rc^b,  mais  cette  explication  n'est  pas  applicable  à  Thébreu  biblique  ou 
n^b  n'existe  pas. 


272  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

blique  -b^N  "^bsj,  nisi  forte,  fartasse.  Nous  voyons  dans  ce  mot  la 
conjonction  In  qui  se  traduit  quelquefois  par  wm  /bWe',  aug- 
mentée du  lâmed  conjonctif  dont  nous  parlons  plus  loin,  et  de  la 
particule  interrogative  ai  dont  il  est  actuellement  question  ;  le 
changement  de  iN  en  ^î<  ne  souffre  aucune  difficulté,  car  cet 
■jK  vient  d'une  diphtongue  au,  comme  le  montrent  l'arabe  et  le 
syriaque,  comp.  l'arabe  lau  avec  l'hébrea  lou  «  s'il  était  que  »  *. 
Le  targoumique  'jiDb^VN,  à  côté  de  'jiD'^brbN,  plaide  aussi  en  faveur 
d'une  ancienne  prononciation  Nb^'?N,  à  côté  de  ■'b^bx.  Il  est  donc 
permis  de  supposer  que  la  double  écriture  Nbib  et  '^b^h  dans  la 
Bible,  NbibN  et  ibibx  dans  les  targoums,  répondait  à  une  double 
prononciation  et  indiquait  une  légère  nuance  du  sens,  la  termi- 
naison <?■  renfermant  une  idée  de  vague  et  de  doute  étrangère  à  la 
désinence  â.  Mais  cette  distinction  n'est  plus  à  faire  pour  le  tal- 
mudique  NbabN  et  ibwbN,  susceptible  d'une  seule  prononciation. 
comme  nous  l'avons  dit  plus  haut. 

Le  second  élément  formatif,  commun  aux  particules  immâlê,  ' 
mâle,  oummâlè  est  n«  ma,  l'interrogatif  indéfini  qui  donne  à  la 
négation  lé  sa  véritable  portée  :  «  n'est-il  pas  ?  » 

Ibnâlê  et  oummâlè  sont,  en  outre,  précédés  de  la  conjonction 
IN  ou  IN  si  qui  se  place  facilement  en  tête  des  particules  condi- 
tionnelles ou  hypothétiques,  comme  le  montrent  le  targoumique  et 
le  syriaque  illou,  ellou,  comparés  avec  l'hébreu  lou,  l'arabe  immâ 
et  immâ  là,  et  le  mandéen  «by^-^n  ou  Nb-rr:  comparé  avec  le  syria- 
que ellâ  (v.  Mand.  Gramm.,%  314).  Dans  ilmâlê  et  oummâlè,  cette 
particule  change  l'interrogatif  «  n'est-il  pas?  »  en  une  conjonction 
conditionnelle  «  si  ce  n'est  pas>3,  «  sinon  ».  Mais,  dira-t-on,  que 
signifie  le  premier  lâmed  ûHbnâlê?  C'est  le  lâmed  conjonctif  qui 
indique  l'hypothèse,  car  ibnâlê  ne  signifie  pas  simplement  «  si  ce 
n'est  »,«  sinon  »,mais«  si  ce  n'était  que  »,  «s'il  était  que  ».  Les  exem- 
ples de  ce  lâmed  abondent  dans  les  particules  hypothétiques  :  héb. 
lou,  ar.  lau,  «  s'il  était  que  »,  contractés  de  la  et  de  hou;  comp.  le 
syriaque  ellou,  le  targoumique  illou  et  l'éthiopien  la  emma,  à  côté 
de  emma;  héb.  lâmmâ,  jjltî  ti,  {itS  Tcoxe,  Ecclés.,  v,  5.  vu,  19,  ou 
Zemâ,  Ezra,  IV,  22  ;  syr.  /em«,  Matth.,  xxvi,  22,  Marc,  xiv,  19; 
plus  souvent  avec  le  relatif  en  tête  :  syr.  dalmâ,  Ezra,  vu,  23,  et 

•  Voy.  les  exemples  cités  par  Gesenius  dans  son  Thésaurus.  En  mandéen,  i:»  si  es 
plus  usité  que  "j^fl,  V.  Mand.  Gramm.,  §  313. 

*  Ewald,  Lehrh.,  p.  805,  note  2,  8«  éd.,  après  avoir  fait  ressortir  les  fortes  raisons 
qui  engafijent  à  considérer  "^b^lN  comme  composé  de  IN  et  de  "^b,  rejette  cette  expli- 
cation et  suppose  une  forme  primitive  "^b'b  analogue  à  ^blb,  laquelle  aurait  perdu 
son  lÂmed  initial.  Mais  une  pareille  perte  n'est  guère  admissible. 


iNOTES  ET  MÉLANGES  273 

targ.  dumâ,  Cant.,  i,  7,  r-siif-q.  Dan.,  i,  10,  irr^sb  -iiiN.  Cependant  ce 
lâmed  peut  aussi  manquer  dans  les  locutions  de  ce  genre  comme 
dans  le  syr.  et  le  targ.  ût,  mischnaï<729,  comparés  avec  dalmâ  et 
n^V'à.  Les  passages  bibliques  que  nous  venons  de  citer  montrent 
suffisamment  que  dans  les  derniers  livres  de  l'ancien  Testament 
la  particule  lemâ,  qui  entre  dans  la  composition  dllmâté,  s'était 
substituée,  sous  l'influence  de  l'araméen  de  la  Babj'lonie,  à  la  par- 
ticule archaïque  )p  ne,  ut  non. 

En  résumé,  la  conjonction  talmudique  ilmâlê  appartient  au 
dialecte  babylonien,  elle  se  compose  des  trois  particules  ■'N,  N«b 
et  ^b. 

RUBKNS   DUVAL. 


NOTES  SUR  ABOU'L  WALID 

I.  Sur  Isaïe,vu,  14.  — M.Neubauer  dans  sa  Notice  sur  la  lexi- 
cographie hébraïque  (p.  171,  n.  2)  a  déjà  lait  observer  qu'Abou'l 
Walid  dans  son  Lexique  cite  deux  fois  la  Bible  chrétienne  (Cf. 
Kitah  el  Oussoul,  col.  135,  1. 24;  155, 1.  15).  Nous  avons  rencontré 
un  troisième  passage  plus  intéressant,  d'où  il  ressort  qu'Abou'l 
Walid  avait  quelquefois  des  controverses  avec  les  chrétiens.  Dans 
l'article  nib:i>  (col.  530  et  ss.)  il  dit  :  «  Je  me  suis  arrêté  plus  long- 
temps au  mot  rjwbr,  parce  que  les  chrétiens  interprètent  mal  le 
verset  d'Isaïe  :  mr,  njzbyr*  risn,  en  traduisant  la  vierge  sera  en- 
ceinte. Dans  tous  les  débats  et  discussions  que  j'ai  eus  avec  eux, 
je  les  ai  réfutés  avec  les  arguments  que  je  viens  de  donner.  »  —  11 
faut  observer  également  que,  dans  le  premier  des  passages  cités 
par  M.  Neubauer,  Abou'l  Walid  parle  du  «  traducteur  chrétien  des 
Psaumes  »  et  ajoute  :  «  Non  seulement  dans  la  version  du  mot 
biba  iPs.,  Lxxxiii,  14),  mais  aussi  en  beaucoup  d'autres  endroits 
on  y  rencontre  des  erreurs.  »  Ceci  prouve  de  la  part  d'Abou'l 
Walid  une  étude  approfondie  de  la  Vulgate. 

II.  Abou'l  Walid  et  le  Targoiun  des  Ilagiographes.  —  On  peut 
s'étonner  à  juste  titre  que,  parmi  les  centaines  de  passages  du  Tar- 
goum  cités  par  Abou'l  Walid,  soit  dans  l'intérêt  de  l'exégèse,  soit 
pour  la  comparaison  des  racines  araméennes  et  hébraïques,  on 
ne  rencontre  nulle  part  le  Targoum  des  Hagiographes.  Abou'l 
Walid  paraît  donc  ne  pas  l'avoir  possédé. 


274  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

III.  Mar  Jacob  le  Pèlerin.  —  Au  cliap.  xxx  de  sa  Grammaire 
{Rikmah,  p.  197),  Abou'l  Walid  parle  d'un  ouvrage  apporté  de  Jé- 
rusalem (u5np?3!-!  n"«n»)  par  '^^^^br^  a^inrî  3p::>"i  n».  Le  dernier  de  ces 
mots  doit  être  changé  en  '^':vb'n  «  originaire  de  Léon  »,  comme  le 
montre  le  passage  suivant  de  Toriginal  arabe,  que  j'ai  pu  consulter 
grâce  à  l'obligeance  de  la  Bibliothèque  Bodléienne  :  n^ni^bN  Nnm 
n-^3  173  -^snibbN  nsiD^N  imrnn  nps»"^  {=-  n»)  'm  Nî-^bx  T^nhi  -ns-i^VN 
T,!''  :û53  iNiDi  DipîobN.  «  Ce  livre  nous  a  été  apporté  de  Jérusalem 
par  Mar  Jacob  le  Pèlerin,  le  scribe  de  Léon.  Il  était  écrit  de  sa 
main.  »  Mar  Jacob  était  donc  connu  d' Abou'l  Walid  non  seule- 
ment comme  originaire  de  Léon,  mais  aussi  comme  «  le  scribe  de 
Léon  ».  Ce  passage  nous  prouve  encore  que  le  livre  qu'il  apporta 
de  Jérusalem  était  écrit  de  sa  main.  On  voit  par  là  quel  cas  il 
faut  faire  de  l'assertion  de  Dukes  [Schiré  Schlomo,  p.  88)  qui 
affirme  que  R.  Jacob  le  Pèlerin  était  «  certainement  Abou'l  "Wa- 
lid ».  Le  surnom  de  ^ainr;  provient  certainement  de  ce  que  Ja- 
cob avait  été  à  Jérusalem.  Ce  pèlerinage  valait  donc  aux  Juifs  de 
cette  époque  le  nom  honorifique  qu'on  donne  encore  aujourd'hui 
aux  Mahométans  qui  se  sont  rendus  à  la  Mecque  et  à  Médine. 

IV.  VAtionyme  de  Jérusalem.  —  Le  livre  apporté  par  Jacob 
faisait  peut-être  partie  des  ouvrages  cités  par  Ibn  Ezra  [Moznaïm, 
init.)  immédiatement  après  ceux  de  Saadia  dans  la  notice  biblio- 
graphique placée  en  tète  de  cette  grammaire.  Abou'l  Walid  ajoute 
que  «  le  livre  que  Jacob  lui  a  fait  connaître  était  l'œuvre  d'un 
Hiérosolomytain  dont  il  ne  sait  pas  le  nom  »,  et  il  en  tire  l'expli- 
cation de  rî-i3>''  nn-i5  (Jér.,  xlvi,  23)  et  la  vraie  leçon  de  n^uî^ 
(Ezéch.,  xxxii,  20 j. 

Budapest,  novembre  1881. 

W.  Bâcher. 


UN  RUDIMENT  DE  GRAMMAIRE  HÉBRAÏQUE  EN  ARABE 

VENU  DU  YÉMEN 

Les  manuscrits  du  Pentatcuque  qui  nous  viennent  du  Yémen  ont 
d'ordinaire,  en  tête,  des  traités  de  grammaire  hébraïque  plus  ou 
moins  étendus.  Peut-être  le  nom  de  grammaire  est-il  bien  pré- 
tentieux, car  ces  traités  ne  parlent  guère  que  de  la  division  des 
lettres  d'après  les  organes  avec  lesquels  elles  se  prononcent,  de 


NOTES  ET  MÉLANGES  275 

la  distinction  entre  les  lettres  radicales  et  serviles,  des  points- 
voyelles,  des  accents  et  de  quelques  règles  masorétiques  sur  les 
lettres  fortes  et  douces  * .  Ils  se  distinguent  peu  de  ceux  que  les 
anciens  lexicographes  juifs,  tels  que  Menahêm,  Hayyoudj,  Parliùn 
et  d'autres,  ont  mis  comme  introductions  en  tête  de  leurs  lexi- 
ques. Nous  avons  publié  en  1871  un  de  ces  opuscules,  écrit  en 
hébreu,  sous  le  titre  de  Manuel  du  lecteur-,  nom  tout  à  fait  arbi- 
traire que  nous  avons  emprunté  à  un  travail  analogue,  composé 
par  R.  Yehouda  ben  Balaam^.  Depuis,  différentes  bibhothèques 
ont  fait  l'acquisition  de  Pentateuques  manuscrits  précédés  de 
quelques  chapitres  assez  courts  en  arabe*,  qui  ne  méritent  certes 
pas  d'être  publiés  en  entier,  mais  qui  contiennent  quelques  pas- 
sages pouvant  jeter  un  peu  de  lumière  sur  deux  termes  obscurs 
employés  dans  notre  Manuel. 

Le  premier  de  ces  termes  est  celui  de  ôgîrâh  ïiVSiN  ^  On 
nomme  ainsi  l'ensemble  des  sept  versets  où,  sans  raison  connue, 
les  masorètes  ont  pourvu  d'un  dâguesch  l'une  des  six  .lettres 
muettes  placées  au  commencement  d'un  mot,  bien  que  le  mot  pré- 
cédent se  termine  par  une  lettre  douce  et  porte  un  accent  con- 
jonctif.  Voici  comment  s'exprime  l'auteur  anonyme  arabe  à  cet 
égard  :  «  Quant  ■àuôgiràh,  qui  veut  dire  ce  qui  réunit,  U.  s'applique 
à  sept  passages,  sans  qu'il  y  en  ait  d'autres  dans  toute  la  Bible, 

savoir,  à  quatre  versets   dans  le  cantique    de  Moïse ,  à  un 

cinquième  dans  Isaïe,  à  un  sixième  dans  Jérémie  et  à  un  septième 
dans  Daniel Contrairement  à  la  règle,  le  dâpuesch  s'y  ré- 
tablit, sans  qu'on  connaisse  la  raison  qui  a  décidé  les  masorètes. 
Il  y  a  ensuite  d'autres  mots  qui  conservent  le  dâguesch  contraire- 
ment à  la  règle  établie  ;  mais  pour  ceux-ci  les  grammairiens  ne 
sont  pas  d'accord  et  on  n'a  pas  pu  se  réunir  à  leur  égard  comme 
pour  les  sept  qu'on  vient  décompter...   Aussi  le  lecteur  est-il 


»  Voici  le  titre  du  manuscrit  de  Cambridge  :  î^!TT'N1T"l  ClTnntiN  V^lb  "^D  3N3 

N-?::.-îbT  û^^r^ubN  "^m  iNnbxbNT  NnbNntti  -jipsbN  ■'m  ^ib7:bNT  ^D-ibNT 
"iN2:nbN3  N!-!nxr)nm. 

«  Journal  asiatique,  1870,  Octob.  Novemb.  Décembre.  Tirage  à  part,  Paris,  1871. 

■■  Voyez  \V.  Wickes,  Treatis',  of  the  accrntnation,  Oxford.  1881,  p.  102. 

*  Deux  exemplaires  de  ce  traité, détachés  du  Pentateuque  dont  ils  faisaient  partie,  se 
trouvent  à  la  Bodléienne.  et  portent  dans  le  Catalogue  de  M.  Neubaucr  les  n"'  2;)20  et 
2521  ;  une  troisièm'i  copie,  précédant  le  PeDtaleuque,*a  été  achetée  par  la  bibliothèque 
de  Cambridge.  Enfin,  nous  avons  sous  les  yeux  une  quatrième  copie,  défectueuse  au 
commencement,  et  qui  a  un  nombre  considérable  de  chapitres  qui  ne  se  trouvent  pas 
dans  les  autres  manuscrits.  Elle  appartient  à  M.  David  de  Gùnzbourg,  propriétaire  à 
Paris  d'une  riche  collection  de  manuscrits  hébreux.  M.  G.,  qui  est  un  jeune  orien- 
taliste distingué,  a  l'avantage  de  pouvoir  utiliser  les  trésors  qu'il  amasse. 

s  Manuel,  i).  7X. 


■J76  KFA'UE  DES  ÉTUDES  JllVllS 

libre  de  lire  ces  mots  avec  ou  sans  dâguesch,  sans  qu'on  puisse 
l'en  Màmer,  puisqu'il  y  a  divergence  dopinion  •  ».  Le  terme 
agir  au  serait  donc  un  dérivé  du  verbe  nsN  «  réunir,  recueillir  ». 

Un  second  terme  grammatical  insuffisamment  expliqué  par 
Tauteur  du  Manuel  est  le  darbân-.  Le  sens  en  est  indiqué  dans 
le  passage  suivant.  Après  avoir  parlé  des  accents,  l'auteur  continue 
ainsi  :  «  Il  y  a  encore  une  figure  nommée  gdiali  (^T':?^)  qui  res- 
semble à  un  tipha  et  n'est  ni  conjonctive  ni  disjonctive...  Elle  n'est 
employée  que  pour  allonger  légèrement  certaines  lettres  et  pour 
y  arrêter  quelque  peu  le  lecteur,  afin  que  le  débit  devienne  plus 
beau  et  plus  agréable.  Les  copistes  la  mettent  ou  la  négligent  et 

'  ■'D  -T^s  Nb  :?2iN1tt    73S    ■'D    ■'!^3   !^:?MN5rN  NM'T'DSn  Ml-'SnNrN    N?:î<53 

iTST-^  "^Tpa  tjn;  r-;372D  -k  û-'i»  cnV  "irm  -^s  ■'•irN  r;N5  nw  -''2  rr^n 

"j-^rï'rx  r?:2n::  i-i'^wm  b^-^n  ■'d  inrnNcbN"i  briN  ^<b^  '^'zb'z  TNb;i 
PÈi-i^d  •;?:  Nnîwxb  ■'d-i  lirn  i^s  n:-^  ino  Nbir;  iw  r•r>n^i^  br;  r:''^  pnrn"r!-f 
Nb  "cyi  nri-,"i  bjiNbiî  nncro  ûn-jd  nn-'b:?  -^ib^  û-irrcûbNi  n-^'iisb  '720731 
"iri-n  biiTNbN  n-iOD  ■'isbiN-  T'S  "iSn  ûbD  un  ']b'i  ■'d  Nnn'?:?  nî:  Dbj>"' 
rr^r:  ^n:^   ûn-'b^   r?:;»  o-^bi   piipnbx  3wNn::N   v^  tlbà  tniob  caT 

.  .  •  .  PNTI'lS'WbN.  Il  ne  peut  pas  y  avoir  de  doute  sur  le  sens  que  ce  grammairien 
attache  au  mot  ôgîrâh.  Mais,  sans  parler  de  ce  que  la  forme  du  mot  a  d'étrange,  la  signi- 
ficaliou  ne  nous  paraît  probable  qu'autant  qu'on  supposerait  un  recueil  masorétique, 
où  Ton  aurait  placé  d'une  part  les  irrégularités  dans  la  ponctuation  sur  lesquelles  tout 
le  monde  aurait  été  d'accord,  et  d'autre  part  les  irrégularités  sur  lesquelles  les  opinions 
auraient  été  divergentes.  La  racine  "|5N  revient  d'ailleurs  dans  le  mot  "jnSN  (tfji'ôn, 
qui  désij.ne  à  l'époque  de  Sa'adiâ  un  lexique,  ou  thésaurus  de  la  langue,  et  qui  pré- 
sente  aussi  une   formation  nouvelle.  —    En  abandonnant  l'explication  proposée  par 

notre  anonyme,  on  ne  peut  pas  méconnaître  que  !^"T^iT!!<  renferme  les  lettres  tT^ÏN 
dans  l'ordre  adopté  par  les  grammairiens  du  "Yémen,  mélangées  avec  le  mot  "ia.  Le 
terme  désignerait-il,  d'une  manière  énigmatique,  un  ôyûh  étranger,  c'esL-à-dire,  qui 
n'a  pas  l'intluence  que  ces  lettres  possèdent  ordinairement?  Enfin,  on  pourrait  en- 
core y  voir  un  amalgame  de  ÎT^IN  et  de  "15^. 

L'ordre  suivi  par  les  grammairiens  juifs  pour  les  quatre  lettres  faibles,  subit  des 
changements,  qu'il  est  curieux  d'observer.  Nous  venons  de  mentionner  le  mot  mné- 
motechnique (cf.  Psaumes,  CJ.^!i.^]^m  les  représente  dans  le  Yémen.  Menahêm  choisit 
NI^T^,  en  pensant  à  Ecclés.,  xi,  3,  ou  bien  au  roi  lêhoii.  Hayyoudj  place  les  lettres 
telles  qu  elles  se  succèdent  dans  l'alphabet. 

Bien  que  l'auteur  du  Manuel  et  celui  du  petit  traité  déclarent  tous  les  deux  que 
le  dâguesch  dans  les  sept  passages  n'a  pas  de  raison  d'être,  ces  passages  cependant 
présentent  un  cas  spécial.  Quatre  fois  le  kaf  pourvu  d'un  dâguesch  n'est  séparé 
d'un  second  kaf  que  par  une  seule  lettre;  deux  fois  il  y  a  trois  mots  fort  courts  qui 
commencent  par  /;,  g  et  y,  et  on  a  aspiré  seulement  la  lettre  muette  du  milieu;  enfin 
une  fois  le  kaf  n'est  séparé  que  par  une  lettre  d'une  seconde  leUre  muette  qui,  dans' 
ce  verset,  est  un  f/ct.  —  Nous  croyons  peu  à  l'arbitraire  chez  les  masorètes,  qui  ont 
<;u  un  sentiment  très  délicat  de  la  prononciation  hébraïque,  et  quand  même  on  rencon- 
trerait encore  dans  l'Ecriture  d'autres  mots  où,  en  appliquant  notre  manière  de  voir, 
le  dâguesch  aurait  dû  être  maintenu  également,  cela  prouverait  ."seulement  que  ces 
passages  ont  passé  inaperçus. 

'  Manuel,  p.  90. 


NOTES  ET  MELAxXGES  277 

disent  :  «  Le  ga'iah  n'a  pas  de  père  »,  c'est-à-dire,  il  n'a  aucune 
racine  dans  la  langue.  Cependant  on  l'emploie  dans  certains  pas- 
sages pour  distinguer  entre  deux  sens  différents  et  diriger  ceux 
qui  manquent  d'expérience...  Puis,  il  y  a  une  figure  nommée 
hmnzah  ou  darbân  (pn'i),  ce  qui  veut  dire  aiguillon.  Le  darbân 
n'est  également  ni  disjonctif  ni  conjonctif  et  s'emploie  seule- 
ment pour  précipiter  avec  énergie  la  lettre  qui  en  est  pour- 
vue. Il  est  donc  le  contraire  du  ga'iaJi,  puisque  celui-ci  pro- 
longe la  lettre,  «tandis  que  le  darbân  ou  harazah  l'entraîne.  Ce 
signe  ne  se  trouve  jamais  ailleurs  que  devant  le  zahèf  haton  ;  il 
se  place  au-dessus  de  la  lettre  et  ressemble  à  un  azlah.  Exemples 
npnrii,  irirrii*  ».  Yehouda  ben  Balaam  qui  connaît  notre  signe 
l'appelle  également  hamzâh,  ce  que  le  traducteur  a  rendu  par  mê- 
iigô.li  {T->'j,^r\'i2)  ;  l'un  et  l'autre  en  indiquent  fort  mal  le  caractère 
et  l'emploie  Du  reste  nous  n'avons  rencontré  ni  ôgîrâh  ni  darbân 
chez  aucun  grammairien  hors  du  Yémen. 

'  inb  Nb  1^7  o-^bi  rrHDtiûbN  b2\y  brro  ■^'m  'tt'J'^  ■'?:d"'  nS^  bso  xpm 
"•nbw\  r;72b:DbN  rsNi  "jN  Nbx  'rsZ^'zhin.  y':^^^  •'by  nisn  ya-^  Nbi  ûi.nd  Nbi 
t|TinbN  yy^  iw"^b  NbN  bi2y  ^r^^  rinTCii  NTai  b:5i^-Nb  b»n72  r^pT^n  ntï^d  ir; 
Sr73  'y-\•J^\^  rtNipbN^  lonn  -^^b  nt^ûi  n:35»  ï-;3  ^op^'^t  xb-^bp  ^^iz 
nN  "j-^N  "ibipi  '^b'ibT  rib^n-i  û^ij'm  i-hizy-^  n.snsbïî  y-:?m  rr-a'wi  r::^^ 

'\:^'-n  nb  bNp^T  ri'ïttr!  ■'WO'^  ^isn  b:DO  'a^^^  Nnb  b^tN  Nb  -«n  ïT^:?5b 

q-inb.\  TiTT^b  b):?-^  n?:;ni  snx^  wsbi  inb  ^b  Ni\x  nr;i  tîî^j^to  ï-im:??oi 
i-tTrrn  rÏTwnbNT  tinnbwX  -^^n  '--^y^^  v^b  n-^r^r.b.s  Ti  ^-^  --^hy  Tn  -^ibN 
ï^mi:  Sn72  !q-,nbN  pis    V-  1^"^"^  1"^P  SipTr^j^^b^  n^^n  ^•^^T\   t^bn 

.Nrrnn'wN  N7:i  '-\f.■2T■^^  \r\•ZT^^  N-iori  nbTNbN 

Une  partie  de  ce  morceau  est  déjà  citée  par  M.  "Wickes,  l.  c,  p.  1 12,  note  1,  avec 
de  légères  variantes.  Les  cinq  mots  qui  suivent  TtlICiTi  manquent  dans  le  ni^:. 
Gïmzbourg.  —  On  voit  par  ce  passage  que  les  mots  pntlb  et  ^ïTrlTin  {Manuel, 
p.  77  et  90)  sont  des  néohébraïsmes  formés  de  l'arabe  "jTt.  (Cf.  i/iii/.,  p.  170,  note  ,3; 
Geiger,  Wissmschaftl.  Zeitsch-ift,  vol.  X,p.  19-20). 

*  Voir  Wickes,  l,  c,  p.  70,  note  10  et  Wolf  Heidcnheim,  Misriipetc  Hatte'-ûmhn, 
fol.  113  i.  On  sait  que  cette  partie  de  Touvrage  est  empruntée  à  Bcn-Balaam. — 
R.  Mosé  de  Londr.es  appelle  ce  signe  :  bpTa  "  bâton  •  (Frensdorlf,  Fragmente,  etc.,  Ha- 
novre, 1847,  p.  27,  1.  1),  ce  qui  ne  diiïère  guère  de  darhân.  Ce  nom  se  rencontre 
aussi  souvent  chez  Yehouda  b.  Yekoutiel  dans  son  En  Halikâré,  voir  surtout  Exode, 
ivi,  18,  Ewald  [Lchriuch  d.  luhr.  Sjirache,  1870,  p.  217)  connaît  bien  notre  signe, 
mais  il  le  confond  avec  la  paschta  :  puis,  il  ne  donne  pas  d'exemple  pour  le  cas  où  il 
y  a  plus  d'une  syllabe  entre  l'accent  et  la  syllabe  fermée,  comme  !T?:rî3:T'|?3T  (Gen., 
VII,  8,  où  l'on  peut  voir  l'observation  de  Heidenheim  dans  le  Soum-Séchél)  ;  enfin,  une 
dernière  condition  de  l'emploi  du  mahkêl  ou  darhân  est  que  la  syllabe  fermée  soit 
précédée  d'une  lettre  ayant  schevâ  mohilc.  Comme  celte  condition  n'est  mentionnée 
nulle  part,  j'ai  trouvé  prudent  de  consulter  M.  le  D"^  S.  Ba-r  à  Bibcrich,  qui  est  cer- 
tainement, en  matière  de  masorah,  la  première  autorité.  M.  Ba^.  dans  une  commu- 
nication épistolaire,  se  déclare  d'accord  avec  moi.  Il  ajoute  :  dans  des  mots,  comme 
"irij^n^nT  [Exode,  xxx,  32),  il  faut  sans  doute  accentuer  lh35n?:m  ;  le  mét^fj  sous 
le  waio  s'est  confondu  avec  le  davhûn  du  nn'm.  Il  eu  est  de  même  pour  ûnbDbl  (»'*., 
T.  IV.  !••> 


278  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Nous  noterons  encore  un  petit  chapitre  qui  traite  des  ifWiârât 
«  les  besoins  »,  qui  sont  au  nombre  de  quatre.  Premièrement,  la 
lettre  a  besoin  d'autres  lettres  pour  former  son  nom,  ainsi  on 
ajoute  lamecl  et  pé  pour  obtenir  le  nom  de  aleph  ;  deuxièmement, 
la  lettre  a  besoin  d'une  ou  de  plusieurs  lettres  pour  former  un 
mot,  puisqu'aucun  mot  hébreu  n'a  moins  de  deux  lettres  ;  troisiè- 
mement, ce  composé  de  lettres  a  besoin  pour  se  prononcer  de 
points-voyelles  appelés  y^ois  (û"^Db52)  ;  quatrièmement,  les  mots  ont 
besoin  d'accents  qui  marquent  les  coupes  des  phrases  et  distin- 
guent souvent  les  temps  et  les  genres. 

J,  Derenbourg. 


TROIS  SCEAUX  JUIFS  DU  MOYEN  AGE 

On  sait  que  les  Juifs  de  l'ancien  Empire  possédaient,  au  mo3'en 
âge,  dans  beaucoup  de  villes,  les  «  droits  de  citoyens  ».  Nous  trou- 
vons assez  souvent,  dans  les  archives  de  ces  villes,  les  brevets 
par  lesquels  le  Conseil  leur  donnait  ou  renouvelait  ces  droits .  On 
n'a  pas  encore  pu  établir  si  des  restrictions  étaient  portées,  et 
lesquelles,  aux  droits  de  ces  citoyens  comparés  à  ceux  de  leurs 
concitoyens  chrétiens,  mais  il  y  a  lieu  de  penser  que  l'intolérance 
religieuse  n'épargnait  pas,  même  dans  les  villes  libérales,  ces  Is- 
raélites privilégiés.  Nous  croyons  donc  que  les  citoyens  Israélites 
qui  dépendaient  immédiatement  de  la  juridiction  impériale  et  qui 
étaient  les  «  serfs  de  la  chambre  impériale  *  »,  formaient  un  certain 
corps  de  «  citoyens  étrangers  »,  de  sorte  qu'ils  ne  pouvaient  être 
investis  de  fonctions  publiques,  que  ces  fonctions  fussent  simple- 
ment honorifiques  ou  rémunérées.  Dans  la  vie  civile,  les  Juifs  de 
ces  temps  n'étaient  pas,  du  reste,  aussi  rigoureusement  séparés  de 
leurs  concitoyens  chrétiens  qu'on  pourrait  le  croire.  Parmi  les  dé- 
crets de  la  ville  de  Zurich  du  xiy°  siècle,  nous  trouvons  souvent  des 
ordonnances  contre  les  repas  somptueux  où  se  rencontraient  les 
Juifs  et  les  Chrétiens,  et  certains  décrets  du  Conseil  condamnent 
des  jeunes  filles  chrétiennes  à  porter  le  chapeau  juif  {Judenhid) 
pour  avoir  mis  au  monde  dos  enfants  do  pères  juifs. 


XXXII,  V2),  oii  le  (larhâa  a  élé- avancé  sur  wâw  qui  doit  avoir  mûig  au  lieu  d'Otre  à  sa 
place  sur  le  haf.  Voir  En  Hahkôri',  sur  Jixode,  xxx,  32,  et  Ileidciiheiiii,    l.  c,  38», 
•  Kammerkncchie, 


NOTES  ET  MELANGES 


279 


Ce  qui  est  sur,  c'est  que  les  Israélites  avaient,  dans  leur  vie  do- 
mestique et  même  synagogale,  des  coutumes  et  des  symboles  em- 
pruntés à  leurs  concitoyens  chrétiens. 

Des  sceaux  qui  se  trouvent  dans  les  Archives  de  Zurich,  et  qui 
sont  apposés  à  des  obligations  signées  par  des  Israélites  de  ce 
temps,  prouvent  ce  fait  singulier  que  les  Israélites  non  seulement 
admettaient  dans  leurs  sceaux  des  légendes  avec  caractères  latins, 
mais  aussi  des  armes  {Wappen],  coutume  qui  venait  seulement 
d'entrer  dans  les  mœurs  des  bourgeois  et  qui,  jusqu'à  la  fin  du 
xiii^  siècle,  avait  été  un  des  privilèges  des  nobles. 

Nous  croyons  qu'il  sera  intéressant  pour  le  lecteur  de  trouver 
ci-après  le  fac-similé  de  trois  de  ces  sceaux;  nous  les  reproduisons 
en  y  joignant  quelques  observations. 


N"  1. 


N"  2. 


N"  3. 


Le  premier  sceau  porte  l'inscription  :  «  S' MOSE,  ûn;?^  -i3  ïTw^d  •  ». 
Au  centre,  on  voit  l'écu  triangulaire  renfermant  trois  chapeaux  de 
Juifs  -  affrontés  par  la  pointe  supérieure.  L'intérieur  des  chapeaux 
est  tourné  vers  les  coins  de  l'écu.  Sur  la  pièce  qui  porte  ce 
sceau  il  y  a  encore  deux  autres  sceaux  qui  ont  les  mêmes  armes*. 
L'un  de  ces  sceaux  appartient,  il  est  vrai,  au  frère  de  notre  Moïse 
(«  S'  GUMPRECIIT,  ûre73  -13  ^^Tiu  »,  c.-à-d.MardochéebarMeua- 
hem);  mais  un  autre  appartient  à  un  Juif  VISLI  («  S'  VISLI 
lUDEI,  r-rcjz  -2  i-^b-ii  »),  et  porte  les  mêmes  armes,  de  sorte  que 
nous  croyons  pouvoir  prendre  ces  tricornes  pour  les  armes  com-, 
munes  des  Israélites  de  ces  régions  et  de  ce  temps,  d'autant  plus 
qu'il  y  a  aussi  dans  les  Archives  do  Carlsruhe  (Bade)  plusieurs 
sceaux  juifs  de  cette  époque,  originaires  d'Ueberlingen,  sur  le  lac 
de  Constance,  qui  portent,  avec  une  légère  variante,  également 
trois  chapeaux  de  Juifs. 


'   «  Sigillum  Mosu  »,  eu  hébreu  :   <  Mosché  Lui"  Menahem 
*  Judenhiitc, 


280  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Je  suis  porté  à  croire  que  le  triangle  connu  sous  le  nom  de 
Magen  David  *  que  nous  trouvons  si  souvent  comme  enseigne 
des  temples  Israélites  en  Allemagne,  et  dont  l'interprétation  et 
l'origine  ne  sont  pas  encore  suffisamment  connues,  malgré  les 
nombreux  commentaires  dont  il  a  été  l'objet,  n'est  autre  chose  que 
ces  trois  chapeaux  de  Juifs  sous  une  forme  un  peu  altérée,  il  est 
vrai.  Je  crois  d'autant  plus  à  cette  explication  que  le  Magen  Da- 
vid porte  encore  aujourd'hui  dans  plusieurs  régions,  comme  en 
Bohême  par  exemple,  un  bonnet  placé  au  centre  et  que  l'on  veut  à 
tort  prendre  pour  la  «  couronne  de  David  »  ou  <(.  le  chapeau  de 
Suède-  ».  Sur  le  drapeau  d'honneur  que  l'empereur  Charles  VI  a 
offert  aux  Israélites  de  Prague  et  qui  est  encore  dans  la  Altneu- 
schul  ^  de  cette  ville,  le  Magen  David  a  également  au  centre  un 
chapeau. 

Le  bonnet  de  Juif  était  le  signe  que  les  Israélites  avaient 
été  d'abord  forcés  de  porter,  et  qu'ils  ont  pris  ensuite  (ce  fait  n'est 
point  sans  analogie)  pour  leur  symbole  national.  Nous  ne  le  trou- 
vons pas  seulement  sur  leurs  sceaux,  mais  encore  comme  ensei- 
gnes sur  les  portes  de  leurs  maisons.  Ainsi,  il  y  a  dans  la  Marht- 
gasse''  de  Zurich  une  maison  qui,  par  erreur,  porte  aujourd'hui  le 
nom  de  Judenhûs  (maison  de  Juif),  mais  qui  se  trouve  encore  dans 
les  registres  des  impôts  du  dernier  siècle  sous  le  nom  de  Juden- 
Jiut  (chapeau  de  Juif). 

Nous  savons  aussi,  par  un  règlement  synagogal  de  ce  temps, 
qu'il  était  défendu  d'aller  à  la  synagogue  sans  porter  le  chapeau 
de  Juif  (en  corne,  in  cornu  ^)  sur  la  tête''. 

Le  Moïse  du  premier  de  nos  trois  sceaux,  et  dont  le  nom  se 
trouve  assez  souvent  dans  les  actes  d'achat  et  de  prêt  de  cette 
époque  qui  existent  encore  aux  Archives  d'Etat  de  Zurich,  avait 
été,  comme  son  frère  Vislin  (dont  nous  avons  aussi  vu  le  sceau)  et 
sa  mèreMinna,  reçu  citoyen  de  Zurich.  Ils  possédaient  dans  l'an- 
cienne Judengasse  (rue  des  Juifs)  une  maison  qui,  lors  de  l'expul- 
sion des  Juifs  de  la  ville  de  Zurich,  en  1348,  fut  acquise  par  le 
bourguemestre  Brun,  dont  le  nom  est  encore  aujourd'hui  inscrit 


•  '  Bouclier  de  David. 

'■'  Les  Juifs  de  Prague  se  sout  distingués  pendant  le  siège  de  cette  ville  par  les 
Suédois  en  IG'iS,  et  on  prétend  que  Pcmpercur  leur  a  permis,  à  cette  occasion,  de 
placer  un  chapeau  de  Suède  dans  leurs  armes. 

■"  Ancienne  synagogue  neuve. 

''  Rue  du  Marché. 

"  Ce  même  nom  de  cornu^  en  français  conie,  est  donné  au  bonnet  semblalilc  des 
doges  de  Venise.  Voir  Littré,  Dict.,  s.  v.  corne. 

"  Ce  passage  est  cité  par  Gùdemann,  0-esch.  des  ]îrz'iehun()swcscns,  II,  p.  201,  mais 
je  crois  que  Tinterprélalion  et  la  correction  do  M.  G.  sont  erronées. 


NOTES  ET  MELAxNGES  281 

sur  les  coins  de  l'ancienne  Judengasse  (aujourd'hui  Brunngasse). 
La  pièce  sur  laquelle  se  trouve  ce  sceau  porte  la  date  de  1329. 

Le  second  de  nos  sceaux  a  la  forme  gothique  en  amande  qui  ai)- 
partient  en  général  aux  prêtres  catholiques.  On  peut  donc  supposer 
que  ce  sceau  appartenait  à  un  Ahronide  ou  à  un  rabbin,  ce  que 
la  légende  du  sceau  aurait  cependant  dû  mentionner,  et  il  est  dans 
tous  les  cas  intéressant  de  voir  les  Juifs  emprunter  aux  chrétiens 
cette  forme  en  amande  des  sceaux.  La  légende  du  sceau  est  :  np;'-» 
bïX:  bi!:T  i-;)2bo  nn,  «  Jacob  bar  Salomon»,  avec  une  abréviation  très 
connue,  et  le  mot  bvz,  bon  augure.  Ullrich  '  a  pris  ce  mot  pour 
biw  «  circonciseur  »,  erreur  qui  a  été  suivie  par  M.  Lœwenstein, 
dans  sa  Gescliichte  der  Ji(de)i  am  Bodensee,  C'est  une  eulogie 
qu'on  mettait  après  son  nom  et  que  nous  trouvons  aussi  dans  l'épi- 
graphe d'un  manuscrit  mentionné  par  M.  D.  Kaufmann  '-. 

Ce  Jacob,  dont  nous  ne  connaissons  pas  l'histoire,  était  «  citoyen 
de  Schafhouse  » ,  comme  le  nomme  la  pièce  à  laquelle  nous  em- 
pruntons son  sceau. 

Le  troisième  de  nos  sceaux  enfin  ressemble  beaucoup  au  pre- 
mier, mais,  au  lieu  de  trois  chapeaux  de  Juifs,  nous  y  trouvons 
trois  petits  brochets  en  spirale,  la  bouche  au  centre.  La  légende 
est  :  «  S'  SUSLIN,  b"T  \>^M2':j  -/'n  '3  bwSTi;i  »  (Israël  b.  Samuel).  Ce 
Suslin  porte,  dans  la  pièce  à  laquelle  le  sceau  est  attaché,  le  nom 
de  Fislin  (petit  poisson),  nom  commun  parmi  les  Juifs  d'Alle- 
magne, et  c'est  à  cause  de  ce  nom  qu'il  a  certainement  adopté  ces 
ai'mes. 

Juiigbunzlau    Bohème),  avril  18S2. 

D--  A.  Kiscii. 


'  Stiiii»iliinrj  jiii/.  (leschirhtcii. 
^  Spurcn  Al  Batlfjvsi'.';,  p.  1  i. 


BIBLIOGRAPHIE 


REYUE    BIBLIOCtPiAPHIQUE- 

2^    TRIMESTRE    1882. 


IIÏliN  nTlblP  llba  Poésies  hébraïques,  par  L.  Rabbiuowicz.  Varsovie,  imp. 
Alex.  Ginsa,  1881,  in-8°  de  64  p. 

"inSN  (Estber),  Tragedia  en  3  actos  del  cele'u  e  escritor  frances  Racine, 
tirada  de  la  escritura  santa,  tresladada  del  frances  per  un  anonimo.  Cons- 
tantinople,  impr.  du  journal  El  Tiempo,  in-8°  de  56  p.  En  judéo-espagnol, 
caractères  rabbiniques. 

Û'^'ISIO  '^7>'n'p'')  'O  Variée  lectiones  in  Mischnam  et  in  Talmud  babyloni- 
cum. . .  auctore  RapbaeloRabbinovicz.  Pars  XI,  tract.  Baba  Bathra.  Mu- 
nicb,  imp.  Huber,  1881,  in-8°  de  468  col.  -25  ff. 

A  la  fin,  commentaire  de  l'édition  de  Pesaro,  à  partir  de  f°  29  a,  à  la 
place  de  celui  du  Raschbam,  qui  se  trouve  dans  les  éditions  ordinaires  (Cf. 
Revue,  III,  p.  129). 

^"'7:"'-3  T>  'D  Jad  Benjamin  uud  WScbem  Mardechai,  entbalt  einc  Abliand- 
lung  liber  Philosophie,  Cabbala,  und  die  goschichllichen  Momente  bis 
zur  Offenbarung,  sodann  die  Verzeichnung  der  620  Gebote.  nach  den 
620  Buchstaben  der  zehn  Geboto,  sammt  genaucr  Erklarung  derselben  ; 
ferner  in  muglichsler -Kiirze  die  Geschichte  der  Philosophie  oder  die 
geistige  Seele  als  Grund  des  Pantheismus  und  Polytheismus,  par  J.  L. 
Rosncr,  rabbin  à  Schaffa  (Moravie).  Vienne,  imp.  M.  Knopflmacher,  in-8" 
de  31  PP.-64  ff. 

Liste  des  613  préceptes  de  la  Loi  et  des  7  préceptes  rabbiniques 
(ensemble  620),  avec  les  620  lettres  des  dix  commandements  en  acrosticbe, 
avec  commentaire  et  dissertation  sur  la  philosophie,  la  cabbale,  l'histoire 
jusqu'à  la  révélation,  l'histoire  de  la  philosophie  ou  l'ûme  intellectuelle 
comme  fondement  du  panthéisme  et  du  polythéisme.  Rien  que  cela  ! 

npîn^;  T^  Relation  du  voyage  de  Sir  Moscs  Montefiorc  en  Russie  en  1872, 
par  Iloyyim  Gucdalla,  traduite  en  hébreu  par  un  ami  de  la  langue  hé- 


BIBLIOGRAPHIE  283 

braïquc.  Londres,    imp.  Valleuline,  iu-8°  de  (4)  2-1  p.  La  préface  (eu  an- 
glais) est  datée  du  14  mars  1882. 

ÏD'^^^rîî'?:!-!  '-\^10  Livre  des  Minhagim  (usages  religieux)  d'Isaac  Tyrnau,  avec 
deux  commentaires,  Zikhron  Aschêr  et  Toledot  EstJier,  par  Salomon  Hirscli 
Schûck,  rabbin  à  Karczag.  Munkacs,  impr.  Pinkas  Blayer;  li'e  partie, 
1880,  in-40  de  87-(3)  ff.  ;  2«  partie,  1881,  in-4"  de  86-(6)  fi'. 

Le  commentaire  ne  nous  paraît  pas  sans  valeur,  surtout  pour  rindication 
des  sources  ou  des  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  la  matière.  L'auteur 
aurait  pu  nous  épargner  ses  théories  philosophiques,  physiques,  chimiques 
et  que  sais-je  encore. 

t5"*w1PlD  "^1:1  '01  Û'^SlblD  tiV  '0  Adam  Mickiewicz.  Le  Livre  de  la  Nation  po- 
lonaise et  des  Pèlerins  polonais,  traduit  en  bébreu  par  le  D'"  Moïse  Asca- 
relli,  avec  une  préface  d'Armand  Lévy.  Paris,  libr.  du  Luxemboxu-g,  1881, 
in-24  de  xvi-82  p. 

Ce  joli  petit  livre,  d'une  parfaite  exécution  typographique,  a  été  imprimé 
par  M.  Cerf,  l'imprimeur  de  la  Revue.  Il  en  a  été  tiré  des  exemplaires  su 
papier  du  Japon,  de  Chine,  de  Hollande,  teinté,  vélin.  Il  se  vend  au  profit 
de  la  souscription  pour  le  monument  qu'on  élève  à  Adam  Mickiewicz,  à 
Cracovie.  M.  Armand  Lévj^  rappelle,  dans  la  préface,  ces  belles  paroles 
écrites  par  M.,  le  29  mars  1848,  dans  le  Symbole  politique  polonais  qu'il 
donna,  en  ce  jour,  à  la  légion  polonaise  créée  par  lui  à  Rome  pour  aider 
l'Italie  à  reconquérir  son  indépendance  :  «  A  Israël,  notre  frère  aîné,  respect, 
fraternité,  égalité  complète  de  tous  les  droits  civils  et  politiques.  •  Ce  même 
jour,  le  roi  Charles-Albert  signait  le  décret  qui  émancipait  tous  les  Israélites 
de  ses  Etats.  Adam  Mickiewicz  a  prononcé  d'autres  paroles  excellentes 
pour  les  Israélites  :  au  Collège  de  France,  à  Paris  (p.  vi),  à  Rome  (p.viii). 
C'est  sur  la  proposition  d'un  Israélite,  M.  Samuel  Alatri,  que  le  conseil 
municipal  de  Rome  a  placé  une  plaque  commémorative  sur  la  maison 
habitée  par  A.  M.  et  son  buste  au  Capitule.  A.  M.  est  mort  à  Constanti- 
nople  en  1835.  M.  le  rabbin  Ascarelli,  en  traduisant,  à  l'occasion  du  25°  anni- 
versaire de  sa  mort,  un  de  ses  poèmes,  a  rendu  au  poète  polonais  un 
hommage  auquel  s'associent  nos  cœurs. 

ûbïJil  '^^'^3'  'O  Aruch  completum. . .  auctore  Nathane  filio  Jecbiclis.  .  .  cdit 
D""  Alexander  Kobut.  Tome  III,  Vienne,  impr,  G.  Brôg,  in-4°  de  400  p. 
allant  de  la  lettre  dalet  à  la  lettre  hêt. 

ÏT^53TO1  N"1T;j>  bv  'î25l^''D  Anecdota  Oxoniensia.  Texts,  Documonls,  and  Ex- 
tracts, chiefly  from  manuscripts  in  thc  Bodleian  and  olher  Oxford  Libra- 
riers.  Semitic  séries,  vol.  I,  part.  I.  Commentary  on  Ezra  and  Nehemian 
by  Rabbi  Saadiab,  cdiled  by  II.  .1.  Malhews.  Oxford,  imp.  Clarendon, 
iu-4°  de  xxviii-32  p. 

Nous  résumons  ici  la  savante  introduction  de  AI.  Mathews.  Le  com- 
mentaire sur  Ezra  et  Néhémie  dont  il  publie  le  texte  se  trouve,  en  partie 
ou  en  totalité,  dans  13  mss.,  sur  lesquels  10  n'indiquent  aucun  auteur; 
l'un  (celui  de  Munich)  indique  à  tort  comme  auteur  Benjamin  b.  Juda 
(M.  M.  prouve  que  cette  indication  est  erronée),  l'autre  (celui  de  Milan) 
indique  comme  auteur  du  commentaire  sur  Ezra  Saadia  Gaon,  et  dans  trois 
de.s  mss.  ce  commentaire  est  précédé  de  celui  de  Daniel  qui  est  imprimé 
dans  les  Bibles  rabbiniques  et  qui  est  attribué  ù  un  Saadia  qu'on  a  re- 
connu depuis  longtemps  n'être  pas  Saadia  Gaon  (Catal.  Bodl.,  p.  219;')). 
Dans  le  ms.  du  British  Mus.  le  comment,  sur  Ezra  et  le  pscudo-Saadia 
sur  Daniel  commencent  également  par  ces  mots  :  in^  "^Î'^TS'D,  allusion  au 
nom  do  Saadia.  Enfin,  trois  écrivains  (Azula'i,  s.  v.  R.  Saadia  Gaon;  Sa- 
lomon   d'Urbiiio,  dans  Okcl  Mord;   Azaria  de   Rossi,   d'après  Zunz,   Ker. 


28/,  REVL'E  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Chem-,  V,  152)  connaissent  le  commentaire  de  Saadia  (ou  Saadia  Gaon, 
d'après  l'un  d'eux)  sur  Ezra.  Il  résulte  de  là  que  notre  commentaire  est 
d'un  Saadia,  et  il  semble  qu'il  soit  de  Saadia  Gaon.  Mais  d'un  côté  M.  M. 
prouve  avec  évidence  que  ce  commentaire  a  les  mêmes  caractères,  la 
même  méthode,  la  même  langue  que  le  pseudo-Saadia  sur  Daniel;  on 
trouve  dans  les  deux  ouvrages,  sur  les  mêmes  mots,  des  explications  iden- 
tiques dans  le  fond  et  dans  la  forme.  Notre  commentaire  sur  Ezra  et  Néhé- 
•  mie  et  le  commentaire  de  Daniel  ont  donc  un  seul  et  môme  auteur,  un 
Saadia  qui  n'est  pas  Saadia  Gaon.  On  a  tour  à  tour  supposé  que  ce  Saa- 
dia est  un  Juif  français  du  xm^  ou  du  xiv®  s.  (Dukes',  Saadia  b.  Nah- 
mani  ^Michael,  Saadia  b.  Jos.  Bekhor  Schor  (Fuerst),  un  Saadia  contem- 
porain de  ce  Jakar  qui  était  élève  de  Calonymos  de  Rome  {Rappoport, 
Bicc-  haitt.,  IX,  33)  et,  par  suite,  vécut  à  peu  près  en  même  temps  que 
Raschi.  C'est  cette  dernière  opinion  qui  a  été  le  plus  généralement 
admise.  Elle  s'appuie  sur  la  prétendue  analogie  d'un  passage  du  pseudo- 
Saadia  sur  Daniel  et  d'un  passage  que  Jakar  dit  avoir  entendu  de  la  bouche 
de  R.  Saadia,  mais  le  passage  du  pseudo-Daniel  et  celui  de  Jakar  ne 
disent  pas  du  tout  la  même  chose,  de  sorte  que  l'identité  du  Saadia  de 
Jakar  et  celle  du  pseudo-Saadia  de  Daniel  ne  s'appuie  sur  rien.  On 
admet  généralement  que  le  commentaire  des  Chroniques  attribué  à  Ra- 
schi a  été  écrit  à  Narbonne  vers  1130-1140  par  un  élève  ou  des  élèves  d'un 
R.  Saadia,  lequel  aurait  donc  été  rabbin  à  Narbonne  ;  mais  cette  hypo- 
thèse repose  sur  des  preuves  que  M.  Math,  a  raison  de  ne  pas  regarder 
comme  concluantes,  quoiqu'il  soit  certain  qu'un  R  Saadia  a  écrit  un  com- 
ment, sur  les  Chroniques,  et  que  le  commentaire  du  pseudo-Raschi  sur  ce 
Livre  a  été  fait  à  Narbonne.  M.  Math,  conclut  comme  suit  :  Notre 
commentaire  sur  Ezra  et  Néhémie  est  sans  doute,  à  en  juger  d'après  son 
caractère  et  sa  phraséologie,  du  xu°  siècle  et  peut-être  antérieur  à  Raschi. 
Un  R.  Saadia  a  composé  le  pseudo-Daniel  et  le  comment,  sur  Ezra-Néhé- 
mie,  dont  les  caractères  sont  si  ressemblants,  «  ou  au  moins  l'un  d'eux  >. 
Cette  dernière  restriction  montre  l'extrême  circonspection  avec  laquelle 
M.  Mat.  étudie  ces  questions  difficiles. 

£!T>2t^  'O  A  Grammar  and  Lexicon  of  the  Hebrew  languagc  eulitled  Sefcr 
Ilassoham,  by  Ralibi  Moseli  ben  Yitshak  of  England,  edited  from  a  Ms.  iu 
the  Bodleian  library  of  Oxford,  and  collated  with  a  Ms.  in  the  Impérial  li- 
brary  of  St-Peterïburg,  with  additions  and  corrections,  by  George  Wol- 
seley  CoUins.  Londres,  libr.  Trûbner.,  imp.  Cerf,  à  Versailles,  in-4°  de 
x-40  colonnes  (ou  v-20  p.). 

M.Neubauera  consacTé,àaLnsVHistoi>-eli(l(fi-.  de  la  France^  lomc'S.X'S.Yll, 
p.  484,  uu  article  assez  étendu  à  Moïse  de  Londres,  ou  Moïse  b.  Isaac,  fils 
de  la  r^N^^wri^  d'Angleterre.  Cet  auteur  a  vécu  probablement  vers  le  milieu 
du  xiii''  siècle.  Il  pourrait  être  originaire  de  France,  ou  avoir  écrit  eu 
France,  car  on  trouve  chez  lui  des  gloses  françaises.  Le  nom  de  sa  mère 
était  Comtesse  (cf.  Contesse,  Revi'e,  I,  p.  68).  L'ouvrage  édité  par  M.  Col- 
lins  a  pour  titre  Cn",:^  =  ^['w'v:.  Il  contient:  1°  une  introduction  gramma- 
ticale; 2°  un  lexique  composé  de  trois  parties  :  verbes,  types  des  substantifs, 
sujets  divers  (adverbes,  nombres,  règles  de  lecture,  accents,  ponctuation, 
mots  chaldéens  de  la  Bible).  M.  CoUins  nous  donne  aujourd'hui  la  pre- 
mière partie  de  ce  travail  et  nous  espérons  que  le  diligent  éditeur  en  pu- 
bliera bientôt  la  suite. 

?N~,w"'  ■^b"i"75  mibin  'O  Biographien  berïihnilcr  jiïdischcr  Gelehrlen  des 
Millclalters,  von  J.  II.  WeLss,  Lcctor  am  Bcth-ha-Midrasch  in  Wieu. 
Ersles  Ilofl  :  Rabbi  Moscs  ben  Maimon.  Vienne,  libr.  Lowy,  1881  ;  in-8" 
de  rw  p.  —  Zweitcs  llcfl  :  Rabbi  Salomon  bar  Jizchok,  gcnannt  Raschi. 
Vienne,  libr.  Lowy,  1882  ;  in-S"  de  72  ]>. 


BIBLIOGRAPHIE  285 

Extraits  du  journal  Beth  Talmud.  Malgjré  les  nombreuses  études  faiies 
sur  Maïmonide  et  sur  Raschi,  on  trouvera  encore  des  indications  nouvelles 
et  bonnes  à  noter  dans  ces  biographies  de  M.  Weiss. 

Auuar  pentru  isracliti...  pe  anul  56-^3  (1882-1883);  publié  par  M.  Schwarz- 
feld.  Bucharest,  imp.  Binder  et  fils,  libr.  Steinberg;  in-8°  de  xiv-114  p. 

Cinquième  année  de  cette  publication.  Cet  annuaire  mérite  d'être  signalé 
à  cause  de  ses  suppléments  historiques,  littéraires  ou  scientifiques  (p.  1 
à  114).  Parmi  ces  articles  nous  signalons  les  suivants  :  1.  Un  Crésus  juif 
sur  la  chaire  de  Saint-Pierre.  (Histoire  de  Petrus  Léo,  fils  d'un  Juil' 
baptisé  de  Rome,  devenant  antipape  sous  le  nom  d'Anaclet  II  (mort  lloS^, 
raconté  d'après  Gregorovius,  Gesch.  der  Stadt  Rom  im  Mittelalter,  Stutl- 
gard,  1869,  vol.  IV,  p.  392.)  —  2.  Légendes 'talmudiques  et  légendes  rou- 
maines, par  le  D""  M.  Gaster.  (Enfant  reconnu,  dans  Baba  batr.,  SS  a; 
esprit  des  habitants  de  Jérusalem  ;  légendes  retrouvées  par  M.  G.  dans  la 
littérature  roumaine  et  dans  d'autres  littératures.)  —  3.  La  Calomnie  du 
sang,  par  Lazar  Schein.  (Elude  historique  sur  cette  calomnie,  avec  indica- 
tions bibliographiques  concernant  la  littérature  roumaine,  et  un  certain 
nombre  de  faits,  provenant  de  cette  superstition,  qui  se  sont  passés  eu 
Roumanie  depuis  1717  jusqu'en  1881.) — 4.  Explication  d'un  certain  nombre 
de  passages  talmudiques,  par  le  D''  C.  Lippe.  —  Biographie  de  Cilibi  Moïse 
(écrivain  roumain,  né  à  Focsani  en  1815,  mort  1SG9},  par  M.  Schwarzfeld. 
— '  Bibliographie. 

Bibliothcca  oricnlalis,  oder  eiue  voUstandige  Liste  der  im  Jalire  1881  in 
Dcutschland,  Frankreich,  England  und  den  Golonien  erscbienenen  Bi'i- 
cher,  Broscbûron,  Zeitscbriften,  u.  s.  w.  ûber  die  Spracben,  Religioneu, 
Antiquitateu,  Literatureu  und  Gescbicbte  des  Ostens,  par  Karl  Friederici. 
6<^  année.  Leipzig,  libr.  Otto  Schulze,  Londres,  Paris,  New- York,  s.  d., 
in-8°  de  76  p. 

Dans  le  chapitre  consacré  à  la  littérature  hébraïque  nous  remarquons  : 
Mgr.  David  :  Gramm.  de  la  langue  araméenne,  Paris  ;  —  Hutcheson  :  The 
Syntax  oî z^ra,  dans  Bibliotheca  sacra,  avril;  — P.  de  Lagarde  :  Erkliirg. 
hebr.  Wôrter  ;  iiber  den  Hebr.  Ephraïm  von  Edessa,  Zu  Genesis  1-38, 
dans  Abhdl.  d.  Golt.  Gesell.  d.  Wiss.,  XXVI  ;  —  Lederer  :  Lehrbuch  zum 
Selbstunterricht  im  Babjl.  Talmud  ;  —  Ncildeke  :  Ueber  den  Gottesnameu 
El,  dans  Monatsb.  d,  Akad.  d.  Wiss.,  Berlin,  sept.-oct.  ;  — Toy  :  The 
Hebr.  Verb.  terminalion  ««,  dans  Trans.  Amer.  Philolog.  Assoc. ,  XI; 
Wijnkoop  :  Darcho- hanuesiqah,  sive  leges  de  accentus  hebr.  linguoî  ascen- 
sione,  Leyde,  libr.  Brill. 

BiCKELL  (Gustavus).  Carmina  Veleris  Testamcnli  metrice.  Ocnipoutc,  libr. 
Wagner,  in-S"  de  iv-236  p. 

Les  travaux  de  M.  Bickell  sur  la  grammaire  hébraïque  ont  fait  quelque 
bruit.  Sur  la  métrique,  il  a  déjà  publié  un  opuscule  intitulé  :  Motrices 
biblicœ  reguhe  exemplis  illustrata;  (1879).  Dans  l'ouvrage  actuel,  M.  B. 
expose,  p.  219  et  ss.,  les  règles  qui  président,  d'après  lui,  à  la  vcrsiûcatioa 
hébraïque.  Elles  partent  toutes  de  ce  principe  que  le  vers  hébreu  est  com- 
posé d'un  certain  nombre  de  syllabes  de  valeur  égale,  comme,  par  exemple, 
le  vers  français,  et  que,  dans  un  même  poème,  ou  dislingue  des  strophes 
oii  alternent,  dans  un  certain  ordre,  des  vers  do  diirérenles  longueurs. 
Les  règles  povir  compter  les  syllabes  sont  assez  compliquées  et  semblent 
d'abord  si  arbitraires  qu'on  se  demande  si,  avec  des  procédés  pareils,  ou 
ne  pourrait  pas  voir  dans  la  prosodie  bibli(jue  à  peu  près  tout  ce  qu'on 
voudrait.  Ainsi,  on  pourrait  à  volonté  compter  ou  no  pas  compter  la 
voyelle  auxiliaire  des  mots  comme  st'/cr,  kénn,  la  voyelle  des  particules 
au  commencement  des  substantifs  ou  des  verbes.  Va  du  futur  avant  les  suf- 
fixes (Ps.jXvui,  'i3),  l'ù  de  piaiiiii,  y^/»»/»?,  etc.,  les  voyelles  qui  commencent 


286  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

les  mots,  sous  certaines  conditions  (p.  293],  etc.  D'après  ce  système,  M.  B. 
transcrit  en  vers,  à  l'aide  de  caractères  latius,  les  Psaumes,  les  Cantiques, 
les  Lamentations,  les  Proverbes,  Job,  des  poésies  isolées  des  livres  histo- 
riques et  prophétiques.  Grâce  à  ces  règles,  et  avec  force  additions,  retran- 
chements et  corrections,  M.  B-  arrive  à  trouver  dans  chaque  morceau  une 
versification  régulière.  Prenons,  par  exemple,  le  Ps.  i^'",  qui  commence  le 
recueil.  Il  serait  composé  de  la.  série  suivante,  où  les  chitlVes  indiquent  le 
nombre  de  pieds  de  chaque  vers  :  12.8.8  |  8.C.  Mais  pour  arriver  à  con- 
former le  Ps.  à  ce  type,  il  faut  :  \°  faire  du  mot  dérekh  tantôt  un  mot  de 
deux  pieds,  tantôt  le  mot  dnrh,  à  un  pied  (v.l  et  6);  2°  lire  le  tétragramme 
tantôt  Jahvé  [2  pieds),  tantôt  Jah  (v.  2  et  6);  3°  supprimer,  sous  prétexte 
de  platitude,  le  mot  letorato  du  v.  2,  au  risque  de  faire  un  vers  encore 
beaucoup  plus  plat  ;  4°  intercaler  arbitrairement  le  mot  hehom  (dans  la  cha- 
leur? compté  pour  1  pied)  après  le  mot  vealéhu  du  v.  3;  ^^  corriger,  d'après 
les  Septante,  dans  v.  b,  al-hêa  en  al  penê  érer  et  ajouter  ces  trois  mots  au 
V.  4.  Il  y  a  pourtant  quelque  chose  de  séduisant  dans  le  système  de  M.  B. 
et  nous  sommes  loin  de  dire  que  tout  en  soit  à  rejeter.  Si  une  partie  seu- 
lement de  ses  règles  se  confirme,  elles  seront  un  instrument  nouveau  et 
remarquable  pour  l'étude  de  la  phonétique  hébra'ique.  Dans  tous  les  cas, 
l'ouvrage  de  M.  B.  est  rempli  d'intéressantes  notes  exégétiques.  Remar- 
quez, p.  212,  l'acrostiche  curieux,  découvert  récemment,  dans  le  chap.  i^'" 
de  Nahum. 

Brigidi  (E.  a.).  Giacobini  e  Realisti  o  il  Yiva  Maria,  storia  del  1799  in 
Toscana,  con  documenti  inediti.  Sienne,  libr.  Enrico  Torrini  ;  in-8"  de 
(iv)-453p. 

Episodes  de  l'invasion  française  en  Italie,  en  1799,  et  luttes  des  Jacobins 
et  des  royalistes.  Le  mot  de  Viva  Maria,  dit  l'auteur,  malgré  son  air 
séraphique  et  la  douceur  des  sentiments  qu'il  éveille  dans  l'âme,  ne  fat 
alors  qu'un  mot  d'ordre  donné  en  Italie,  et  principalement  en  Toscane,  par 
la  noblesse  et  le  clergé,  et  signifiant  :  Mort  aux  républicains  !  mort  aux 
Jacobins  !  mort  aux  Juifs  ! 

Les  passions  politiques  et  religieuses  étaient  excitées  au  plus  haq.t  point 
en  Italie  à  la  suite  de  la  révolution  et  de  l'invasion  françaises.  A  Sienne 
particulièrement,  où  le  pape  Pie  VI,  après  son  départ  de  Rome  au  commen- 
cement de  1798,  demeura  quelque  temps,  l'agitation  des  esprits  était  grande 
cl  l'irritation  des  partis  des  plus  vives.  Elles  s'accrurent  lorsque  les  Français 
y  entrèrent,  le  29  mars  1799.  La  direction  des  affaires  civiles  et  politiques 
fut  confiée  à  Franceso  Abrâm,  citoyen  commissaire  pour  la  ville  et  l'état 
de  Sienne,  délégué  à  cet  effet  par  Charles  Reinhard,  commissaire  de  la 
République  française  en  Toscane.  Fr.  Abrâm  n'était  pas  juif,  mais  en  qualité 
de  libre-penseur  et  de  philosophe  humanitaire,  qui  veut  braver  le  préjugé, 
il  se  montra  tout  de  suite  très  favorable  aux  Juifs,  se  laissa  voir  souvent 
dans  leur  société,  les  invita,  au  grand  scandale  des  Sieunois,  à  la  fête 
nationale  célébrée  le  7  (ou  0;  cf.  p.  237  et  p.  257)  avril  sur  la  place  du 
Campo.  A  Sienne  plus  que  partout  ailleurs  on  se  souvenait  de  toutes  les 
lois  oppressives  édictées  contre  les  Juifs,  principalement  au  xvi"  siècle. 
M.  Brigidi  reproduit  deux  de  ces  édits  (p.  2V2  et  243)  :  l'un  du  13  mai  15G7, 
promulgué  par  le  prince  de  Florence  et  de  Sienne,  se  rapporte  principale- 
ment au  signe  que  les  Juifs  étaient  obligés  de  porter  sur  leurs  vêtements  ; 
l'autre,  du  9  décembre  1572,  promulgué  par  le  prince  de  Toscane,  contenant 
les  dispositions  suivantes  :  Tous  les  Juifs  de  la  Toscane  quitteront  leur 
domicile  et  viendront  demeurer  dans  le  ghetto  de  Sienne;  des  calendes  de 
novembre  jusqu'aux  calendes  de  mai,  ils  ne  sortiront  plus  du  ghetto  à  partir 
de  3  heures  de  la  nuit;  le  reste  do  l'année,  à  partir  de  2  heures  ;  ils  porte- 
ront le  signe  ;  tout  Juif  ûgé  de  quinze  ans  payera  par  an  une  taxe  de  2  scudi 
d'or  ;  la  communauté  payera  le  salaire  de  l'homme  chargé  d'ouvrir  et  de 
fermer  lo  ghetto  aux  heures  voulues  et  de  veiller  à  la  police  du  ghetto.  Ces 


15IBLlOGKAPillE  287 

lois  n-élaient  plus  en  pleine  vigueur  eu  1799,  mais  on  méprisait  les  Juifs, 
oa  chantait  dans  la  rue  la  chanson  baroque  de  Gnora  Lmia  qui  trompe  e  r/oi 
(chrétien)  et  la  chanson  à  boire  de  Baruccahà   {larukh  habba,  mois  hébreux 
empruntés  au  rituel  et  aux  usages  juifs).  Il  va  sans  dire  qua  1  arrivée  des 
Français  toutes  les  lois  d'exception  furent  abolies.   La  reconnaissance  des 
Juif=  fut  si  grande  que  tous  les  soirs  ils  se  rendaient  a  la  Lizza  et   sur  la 
place  du  Campî)  pour  arroser  l'arbre   de  la   liberté  qu'on  y  avait  plante. 
Cependant  les   passions   grondaient   dans  tous   les   cœurs,   et  surtout  les 
passions  religieuses.  Bientôt  toutes  les  images  miraculeuses   la  Madone  de 
Florence  le  Christ  de  Livourne,  la  Madone  de  Prato,  celles  de  Certaldo,  de 
Sienne    de  Montalcino,  firent  des  miracles.  La  Madone  d'Arezzo  surpassa 
toutes  les   autres.  Arezzo  était  le  centre  d'une  vaste  entreprise  de  reaction 
fn    300)    Là  se  trouvait  une  société  cosmopohte    composée  de  capitames  et 
d'émissaires  allemands,  de  conspirateurs  anglais,  de  nobles,  de  F^tres    de 
frères    tous  brûlant  de  faire  une  croisade  contre  la  révolution.  Le  G  mai  1799 
la  Madone  d'Arezzo  fit  un  grand  miracle,  ce  fut  le  signal  d  un  soulevemen 
n-énéral,  au  cri  de  Viva  Maria.  En  très  peu  de  temps,  toute  la  Toscane  fut 
en  feu.  Un  mouvement  parallèle  était  parti  de  Volterre,  ou  les  habitants 
s'étaient  soulevés  le  5  mai  1799.  A  Arezzo,  il  se  forma  une  sorte  de  gouver- 
nement provisoire,  sous  le  nom    de  Députaliou  suprême  et  une  armée  de 
près  de  6,000  hommes,  que  les  conjurés  appelaient  •  1  illustre  ^''^^ee  de  la 
foi  .    Des  bandes  de  paysans  s'enrôlaient  sous  la  bannière  de  Notre-Dan  e- 
de-Secours  {Maria  del  Conforta,  c'est  ainsi  qu'on  appelait,  depms  le  miracle. 
la  Madone  d'Arezzo).  Un  détachement  de  cette  armée  entra  a  Florence 
avant  à  sa  tête  une  aventurière  du  nom  d'Alessandra  Man,  qui  devint  un 
d^s  personnages  importants  de  la  conjuration.  Ces  troupes  ne  demandaient 
qu'à^tuer  et  à  piller  ;  le  ghetto  serait  devenu  leur  proie  sans  1  interven  K.n  de 
rarchevêque  Antonio  Martini,  qui,    déjà  en   1790,  avait  sauve  les  Jui  s  de 
Florence^ttaqués  par  la  foule  (p.  37G).  Le  28  juin  1799,  le  bruit  se  répandit 
que  les  soldats  de  la  foi  arrivaient  à  Sienne.  L'alarme   fut  grande  dans  la 
ville,  car  ces  soldats  passaient  pour  des  brigands  et  des  assassins  (p  o8G) 
Ils  entrèrent  le  même  jour  dans  la  ville,  massacrèrent  les  jacobins  et  les 
JuifT  t  ,  11  r  nt7e  gheUo  (p.  391).  Parmi  les  plus  furieux  on  remarquait  un 
c    t  in  Pettirossi,  judéophobe   distingué  (p.  ^^   et  391).  Les  Juifs  furent 
Ta^^  Chèrement  maltraités.  On  leur   reprochait  ^e   s  être  enro  es  dans    a 
Lrde  nationale,  d'avoir  composé  des  chansons  patriotiques,   da^o,r  a    ose 
Va  brede  la  lib  rlé  (p.  390).  Les  Madoniens  les   firent  mourir  dans  d  hor- 
ribles tourments.  Ainsi  furent  tués,  le  28  juin,  et  brûlés    morts  ou  mourants 
sur  un  bûcher  élevé  sur  la  place  du  Campo.  19  Juifs  dont  les  noms  ont  ete 
cons  rvés  (p.  412).  Le  ghetto   fut   livré  au   pillage,    à   la   destruction,  au 
meurtre    nIs  ne  donnerons  pas  ici  la  longue  liste  de  ces  actes  de  cruauté 
b    3      à    0  )    dont  furent  victimes  le  rabbin  RafTaele  Castelnuovo,  les  fre 
Moïse  et  Gi  iseppe  Gallichi,  Levi  fils  de  Daniel,  Isacco  Galhchi,  deux  fils 
de  San    1  Castelnuovo  et  leur  mère  Nissim,  etc.  Il  va  sans  dire  q- la  syna 
r.o'nie  fut  saccagée.  C'est  à  tort  qu'on  a  dit  [Corrwre  nraeUUco,  numéro  du 
o  oa     1872)  que  levêque  Zondadari  sortit  dans  la  rue  pour  haranguer  le 
assassins  et  arrCter  le  ir  fnreur,  il  se  tint  enfermé  toute  la  journée  dans  son 
paas  (p  '  7  .D-antres  habitants  de  Sienne,  Luca  Marcetto,  S.lvio  Lanz. 
Tiberio'ser.ardi,  etc. ,  donnèrent  au  contraire  asile  aux  Juifs  et  en  sauvèrent 
un  °rand  nombre  au  péril  de  leur  vie  (p.  407-408).  Un  gardien  de  l'Univer- 
silé'lt  lo  FueschU  protégea  dans  sa  fuite  et  cacha  chez  lu.  un  pau^■l^ 
h  f  blëi    nonimé  Levi    (pr^OS).  Un  officier  autrichien,  Carlo  Schne.d  r 
n  mamL;.  on  chef  d'une  ^rtie  de  la  troupe  ^'Are.zo  ar^va   e  soir  men 
dans    la    ville  :   il    exigea  des  Juifs  une  somme  de    '..0.000   Inres,  a%ec   la 
irice  d'incendier  le  .^betto   si  la  somme  n'était  pas    wr  e  dans  un  d 
de  deux  heures.  Il  réduisit  cependant  ses  prétentions  al, .,000  livres,  mais 
Udemand     ensuite  une  nouvelle  taxe  do    10,000  livres  à  fournir  dans  une 
heurrsous  peine,  pour  les   Juifs,    d'être  conduits  enchain  s  a  Arezzo.  I 
furent  plus  tard  indemnisés  par  lo  bon  prince  l'erd.nand  III  (p.   410).   Les 


288  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Juifs  de  Sienne  ont  établi  le  jeûne  du  25  sivan  (correspondant,  eu  Tannée 
1799,  au  28  juin)  en  souvenir  de  ces  horribles  événements. 

Gennarelli  (A.)-  La  persecuzione  degli  Ebrei  specialemente  iu  Romauia  ed 
in  Russia.  (Nuova  Àntologia,  série  II,  vol.  XXXI,  fasc.  4,  15  février  1882.) 

Contient  quelques  renseignements  curieux  empruntés  à  un  travail  de 
Leone  Carpi,  de  18i7,  sur  les  lois  d'exception  relatives  aux  Israélites  et 
sur  la  condition  identique  des  Catholiques  et  des  Juifs  en  Angleterre  et  en 
Ecosse,  où  les  uns  et  les  autres  étaient  encore  relégués  dans  des  quartiers 
spéciaux,  également  méprisés,  réduits  au  petit  commerce  et  à  l'usure.  Dans 
le  préambule,  décret  de  la  fin  du  xv°  siècle,  à  Florence,  pour  la  fonda- 
tion d'un  mont-de-piété  ayant  pour  objet  d'obvier  à  l'usure  des  Juifs.  Dans 
un  autre  passage,  mention  d'une  lettre  de  Paul  III  eii  réponse  à  une  lettre 
du  sultan  Soliman,  qui  avait  recommandé  au  pape  les  Juifs  d'Ancone, 
trop  durement  persécutés  en  rJ6G.  En  parlant  de  l'apologie  des  Juifs  pu- 
bliée par  Massimo  d'Azeglio  en  1817,  l'auteur  fait  mention  d'un  mémoire 
imprimé  en  182G  par  l'avocat  G.  Vicini,  de  Bologne,  qui  fut  plus  tard  pré- 
sident du  gouvernement  provisoire  des  Romagnes,  en  faveur  des  droits  des 
Juifs  dans  les  Etats  pontificaux.  En  Toscane,  les  Juifs  ont  toujours  trouvé 
une  hospitalité  libérale,  comme  on  peut  le  voir  dans  le  beau  livre  de 
l'avocat  J.  Rignano,  de  Livourne,  et  dans  un  travail  que  le  même  Gen- 
narelli a  publié  à  une  époque  où  l'intolérance  commençait  à  poindre  à 
Florence.  —  M.  Lattes. 

Graetz.  Histoire  des  Juifs,  traduit  de  l'allemand  par  M.  Wogue.  Tome  P''  : 
Delà  sortie  d'Egypte  (1400)  à  l'Exode  babylonien  (534).  Paris,  libr.  A. 
Lévy  ;  in-S"  de  297  p. 

L'ouvrage  doit  avoir  six  volumes  :  2.  Exode  babylonien  et  guerre  de 
Barcokebas  ;  3.  Dispersion,  Talmud  ;  4.  Juifs  d'Espagne,  croisades;  5  et 
6.  Des  croisades  à  1848.  Nous  serions  heureux  de  pouvoir  nous  féliciter 
sans  réserve  de  la  publication  française  d'un  ouvrage  dû  au  célèbre  his- 
torien des  Juifs  et  auquel  a  collaboré  notre  cher  maître  M.  Wogue. 

Hamburger  (J.).  Real-Encyclopadie  fi'ir  Bibel  und  Talmud.  Abtb.  II,  lleft 
VII,  Rccht —  Sprichwort.  Strelitz,  chez  l'auteur,  in-8*^  allant  de  p.  977  à 
p.  113G. 

IIOGHMUTH  (Abrabam\  Rabbiner  in  Veszprim.  Gotteserkentniss  uud  Goltes- 
verehung,  auf  Grundlage  der  II.  Schrifl  vmd  spaterer  Quellen  bearbeilcl... 
Budapest,  libr.  Franklin-Verein ;  in-8°  de  207  p. 

Cet  ouvrage  est  une  espèce  de  catéchisme  accompagné  d'explications 
hisloriques  et  scientifiques.  Il  est  divisé  en  4  parties  :  connaissance  et 
amour  de  Dieu,  articles  de  foi  et  de  morale,  morale  pratique,  culte. 

IIORONViTZ  (M.),  Rabbiner.  Frauklurter  Rabbinen,  eiu  Beitrag  zur  Gc- 
scbichte  der  isr.  Gemeinde  in  Frankfurt.  a.  M.  —  I.  Von  R.  Simon  Ila- 
darschan  biss  R.  Jesaia  Ilalcvi  (1200-1014).  Francfort  s/M  ,  libr.  Jaegcr  ; 
in-8°  de  ix-60  p. 

L'avant-propos  contient  une  discussion  sur  la  date  de  l'établissement  des 
Juifs  à  Francfort,  question  fort  controversée  (Voir  D''  Grotefend,  Mit- 
theilungen  des  Vereins  fiir  Gesch.  und  AUerlhmsk.  in  Fr.  a/M.,  vol.  IV, 
fasc.  I;  cf.  Graetz,  VII,  12ii\  L'auteur  explique  ensuite  pourquoi  Simon 
Hadarschan,  l'auteur  du  Yalkut,  est  compté  par  lui  parmi  les  rabbins  de 
Francfort,  quoiqu'un  doute  puisse  encore  être  admis  sur  ce  point.  D'a- 
près une  notice  manuscrite  qui  se  lit  sur  un  exemplaire  imprimé  du  Yalkut, 
l'auteur  se  serait  appelé  R.  Simon  an  der  P/ort  (près  de  la  porte,  peut- 
Olre  à  la  porte  de.s  Pêcheurs-,  p.  VII,  note).  L'auteur  indique,  comme  une 


BIBLIOGRAPHIE  289 

des  sources  de  l'histoire  des  Juifs  à  Francfort/ les  pierres  tumulaires  de 
l'ancien  cimetière  juif;  il  serait  bien  à  désirer  que  les  inscriptions  de  ces 
lierres  fussent  publiées.  .     '.    i       c; 

Voici  une  espèce  de  table  des  matières  de  cette  intéressante  étude     bi- 
mon  Hadarschan  et  le  Yalkut  ;  massacre  de  1241,  où  159  personnes  furent 
tuées   et  1^9  autres  obligées  de  s'enfuir  ;  la  communauté  est  deja  reconsti- 
tuée en  1288;  nouvelle  destruction  de  la  communauté  en  1349    pendantla 
peste  noire,    et   sa  reconstitution  vers   1363;  les  rabbins  Nathan  Epstein, 
gmon    ïlkohen,    Israël    Rheinbach,   Isaac   t"    Eljakim,    etc.  ;    Klieser 
TrTves  (un  des  rabbins  les   plus  remarquables  de   cette  ville)    Abraham 
Naft     Herz    Halevi,  Samuel  B.    Elieser  (synode  et  statuts  faits  a  cette 
éDoaue    1603    et  signature  des  rabbins  de  la  contrée  qui  ont  assiste  a  ce 
svnode    p    4  )  ;  Je^aia  Hor.-itz.  Un  supplément  hébreu  contient  les  pièces 
Vivantes     1.  Liste  nominative  des  martyrs  de  Tan  1241  ;  2.  Statuts  de  en- 
dant  aix    abbins  d'un  pays  d'appeler  devant  leur  juridiction  des  Israélites 
d'im    autre  pays,  faits   dans  un  synode  le  10  elul  1542;  3-  Décision    des 
rabbins  le  Franc  ort  au  sujet  d'un  procès  curieux  raconté  p.  24  ;  la  décision 
Î  da  é    de  la  veille  de  Pâque  1564  ;   4.  et  5.  Pièces  relatives  a  la  même 
question      6.  Engagement  de  Jesaia  Horwilz  comme  rabbin  a  Francfort, 


vers  1606. 


autographié  à  60  espl. 
Katalog  der  Kais.  Universitats  uncl  Landesbibliolhek  in  Strasburg.  Oricnta- 
lische  Handscbriften,  Theil  I.    Strasbourg,   hbr.  Trubner,  1881,  in-4 


(2)-75p. 


'  '  Ce  catalo-ue  comprend  les  mss.  hébreux,  arabes,  persans   et  turcs    il 
(.e  catalo  ue  ""^^  ^  remarquons  les  ouvrages  suivants  : 

a  nour  auteur  M.  o.  J-.anQauei.  inuud  j  ic        -i        .^     i    i  TVT^t^Jn-  Ac  Tîan- 
^Ji    étude  sur  le  calendrier  par  Jaekel  b.  Isaac  Saeke    Mutzig  de  Uap 

compose   probablement  en    i/u-.         u       ,         ,      ,      ,      -navid    h->':5"ir:2 
Mœchingen    (Morhange  ,     demeurant    dans    1  école   de   Da_  id  ^  pn^U 

nô  S  letl  es  d'Italie,  avec  renseignements  historiques,  quelques-uns 
^té  de  1553/  -  n"  37,  documents  et  projets  relatifs  à  1  histoire  des  Juifs 
1  Tr«.^  le  720  à  1784  '  ^^l^n  =  Birié,  nom  qui  existe  encore  a  Metz , 
^^  tn? doute^'Tr'énî  oli^Trenel  ;    Moise    Blien^-oir    .««»«;..     ■ 

.  mI  K»,r  —  7nv?  —  11°  45.  Ne  faut-il  pas  lire  Û-^-^riSïl^w  an  neu  uc 
R^^^Tm'ÎÎsU.    prl  StrlsLourg,  n»cie„  Lparte.„e„t  du  Bas-l«u.. 

Kosso^viTZ.  Canlicum  Canlteorum  ex  hobraco  convo,-Ul  '^'^f^^^ 

■  rru^rl^^rrattrie^^iientausto.  SaLt-P.Cc-sbou..,  )«.-. ;  .»„. 

deuxième,  supplément. 

Texte  non  vocalisé,  avec  traduction  latine  cl  notes. 
---  («ose,^Ça^o.„  aouo...  -.a,.  ...  .j..o.«.^^;.^a^^^ 
rence,  mip.  Le  Monuicr,  m  o    uo  xx  i>.  j-- 
oriculali  di  alcuuc  bibliolhcce  d'Ilalia. 

Ce  catalogue  des  mss.  hébr.  delà  Bibliothèque  Saml-Marc.  de  A  eni.e, 


290  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

renferme  19  numéros.  Le  numéro  13  contient  la  grammaire  (rare)  de  Josef 
Sarko  ;  le  n°  14,  le  grand  ouvrage  philosophique  de  Lévi  b.  Gcrson,  pro- 
bablement sans  la  partie  astronomique. 

Lattes  (M.).  Nuovo   Saggio  di  giuute  e  correzioni    al   Lessico  talmudico 
•   (Levy-Fleisclierl   Rome,  imp.  del  Salviucci,  1881;  in-4o  de  81   p.   Reale 
Accademia  del  Liucei,  anno  CCLXXVIII  (1880-81). 

Le  premier  Essai  d'additions  et  de  corrections  de  M.  Lattes  au  diction- 
naire talmudique  de  Lévy  est  de  1879.  Dans  ce  travail,  M.  L.  ne  s'occupe 
pas  seulement  du  lexique  talmudique,  mais  outre  les  mots  omis  par  Lévy 
dans  les  sources  consultées  par  lui,  M.  Lattes  a  enregistré  les  mots  qui 
se  trouvent  dans  d'autres  ouvrages  (par.  ex.  le  Pirké  de  R.  Eliézer),  les- 
quels, quoique  rédigés  plus  tard  que  le  Talmud  et  les  principaux  Midra- 
schim,  contiennent  des  parties  moins  récentes  et  sont,  par  conséquent,  des 
restes  de  l'ancienne  littérature  talmudique.  De  même,  M.  Lattes  a  enregistré 
les  mots  de  l'hébreu  biblique  qui  se  trouvent  dans  les  sources  talmudi- 
ques,  pour  indiquer  qu'ils  étaient  usités  à  l'époque  du  Talmud.  Enfin  il  a 
donné  des  exemples  tirés  du  Talmud  pour  les  mots  araméeus  que  M.  Lévy 
ne  donne  que  dans  des  exemples  tirés  de  la  Bible.  Cet  essai  va  de  la  lettre 
alef  à  la  lettre  lamed.  Citons  quelques  exemples  qui  montreront  l'utilité  de 
cet  excellent  travail:  N3N  ne  signifiant  pasjo^re,  mais  ayant  simplement 
un  sens  honorifique  ;  la  correction  de  Gabtari  en  Nabtaié,  au  mot  5îp"|3tî  ; 
l'explication  du  nom  Agustos  pour  Augustos  ;  celle  du  mot  i3"'731pTiî,  tiré 
du  grec,  =  le  monde  habité  ;  l'orthographe  NijïDOïî  pour  l'Espagne  ;  etc. 

Ledrain  (E.).  Une  page  de  mythologie  sémitique  sur  uu  petit  bijou  du 
Louvre.  Paris,  libr.  Lemcrre,  in-8°  de  8  p.  Extrait  de  la  Philosophie  x>o- 
sitive,  mars-avril  1882. 

Le  bijou  en  question  est  un  de  ces  petits  cônes  en  agate  que  les  Sémites 
portaient  comme  des  amulettes  qui  devaient  leur  assurer  une  grande  pos- 
térité. La  pomme  de  pin  tenue  par  les  génies  placés  à  la  porte  des  palais 
assyriens  rappelle  également,  par  sa  forme,  ces  collines  sacrées.  Ces 
cônes  seraient  la  réduction  minuscule  des  collines  adorées  primitivement 
par  les  Sémites  (les  bamot)  et  représentées  aussi  par  les  bétyles.  Sur  le 
cône  décrit  par  M.  L.  se  trouve  gravé  uu  dieu  en  costume  persan  de 
l'époque  des  Achéménides  ;  à  ses  pieds,  on  voit  un  disque  lunaire.  Ce 
sont,  sans  doute,  le  dieu-soleil  et  la  déesse-lune,  dont  les  noms  se  re- 
trouvent encore  dans  le  nom  de  bien  des  localités  bibliques  :  Bêt-Sémes, 
Gilgal  (disque  de  la  lune),  Jéricho,  Astarot-Karnaïm  (croissant  à  deux 
cornes).  Enfin,  sur  ce  cône  se  trouvent  deux  colonnes,  dont  l'une  est  atta- 
chée à  la  barque  solaire.  L'une  est  VAsclu'ra  ou  pieu  de  Baal,  l'autre  celui 
d'Astarté. 

Maimonide.  Sefer  ha-Mitzwot.  Das  Buch  der  Gesetze  von  Moscli  beu  Mai- 
muu  in  arabiscbeu  Urlexte  nebst  dcr  hcbr.  Uebersetzung  des  Schclomoh 
b,  Joseph  ibn  Ajab  und  mit  eiucr  deuischeu  Uebcrsetzuug  und  Au- 
merkung  versehen  von  W  Moritz  Peritz.  Theil  I.  Broslau,  imp.  Grass,  iu- 
8°  de  vi-34  +  28  p. 

Contient  l'introduction  et  les  trois  premières  règles. 

MoRAis  (Henry  Samuel).  The  Daggatouus,  a  Iribe  of  Jewish  origin  in  Ibc 
désert  of  Sahara.  Philadelphie,  Edward  Slern,  iu-S-^  de  14  p. 

D'après  «  Les  Daggatoun,  tribu  d'origine  juive...  par  le  rabb.  Mar- 
dochée  Aby  Serour  ;  Paris,  1880.  ■ 

MO.SGOVJTEU  (S.  J.).  llct  Nieuwe  Testament  en  de  Talmud.  l'Mivraison. 
llaarlem,  libr.  Graaf,  in-8o  de  80  p. 


I 


BIBLIOGRAPHIE  291 

Apologie  de  la  morale  religieuse  et  civile  du  Talmud  ;  le  Nouveau  Testa- 
ment serait  en  grande  partie  né  du  Talmud  (p.  ■42),  dont  les  idées  sont  an- 
ciennes, quoique  écrites  et  rédigées  plus  tard.  Passages  parallèles  des 
Evangiles  et  du  Talmud,  p.  73  à  80.  P.  bo,  citation  d'un  ouvrage  (ou  ar- 
ticle ?)  d'Oort,  intitulé  :  Evaugelie  en  Talmud.  L'auteur  promet  trois  autres 
livraisons. 

Parisini  [F.).  I  caulici  di  Salomone  Rossi.  (Gazzetta  musicale  di  Milauo, 
l*-'"  janvier  1882}. 

L'auteur,  bibliothécaire  du  Lycée  musical  de  Bologne,  se  référant  à  un 
article  relatif  à  l'œuvre  de  Salomon  de  Rossi  publié  dans  le  Boccherini, 
journal  musical  de  Florence  (n°  10,  30  oct.  1S8l),  éuumère  les  exemplaires 
plus  ou  moins  complets  de  la  très  rare  édition  priuceps  des  Cantiques  de 
Rossi  (Venise,  1623),  réimprimés  en  partie  par  S.  Naumbourg,  à  Paris, 
187C,  sous  le  titre  de  Recueil  de  chants  religieux.  M.  Parisini  donne  une 
description  détaillée  de  l'exemplaire  presque  complet  que  possède  le  Lycée 
musical  de  Bologne.  Il  ignore  qu'un  autre  exemplaire  assez  complet,  et 
contenant  en  particulier  les  feuillets  qui  manquent  dans  l'exemplaire  de 
Bologne,  était  autrefois  dans  la  bibliothèque  du  grand-rabbin  Marco  Mor- 
tara,  de  Mantoue*  (voir  Carrière  isr-,  I,  p.  124,  note  l).  L'article  de  M.  Pa- 
risini a  paru  aussi  dans  VArpe  du  23  déc.  1881.  —  31.  Lattes. 

Perreau  (P.).  La  Cautica  di  Salomone  ed  i  conimeutatori  isracliti  nel  medio 
evo.  Corfou,  imp.  Nacamulli,  m-8°  de  25  p. 

Nous  avons  analysé  ce  travail  lors  de  sa  publication  dans  le  journal  le 
Mssè,  dont  il  est  extrait. 

Perreau  (Pietro).  1700  abbrevialure  e  sigle  (m3"^n  "^TUiS"!)  ebraiche,  cal- 
daiche,  rabbiniche,  talmudichc,  colle  loro  varie  soluzioni.  Parme,  auto- 
graphié  à  60  exempl,,  iv-SJ:  p.  papier  écolier. 

M.  P.  avait  composé  pour  son  usage  personnel  cette  table  des  abrévia- 
tions initiales,  il  la  livre  aujourd'hui  au  public,  parce  qu'il  a  la  conviction, 
très  fondée,  que,  si  elle  n'est  pas  complète  (et  il  est  impossible  d'en  faire  de 
complètes,  car  la  matière  est  inépuisable),  elle  est  plus  riche  que  toutes 
celles  qui  ont  été  publiées  jusqu'à  ce  jour.  Il  va  sans  dire  que  M.  P.  a 
utilisé  les  travaux  antérieurs  sur  ce  sujet.  Il  en  donne  la  liste  dans  son 
Avertissement.  Sa  table  ne  contient  pas  seulement  les  abréviations  de  la 
littérature  talmudique  et  rabbinique,  mais  celles  de  la  littérature  cabbalis- 
tique,  des  noms  propres  d'auteurs,  des  titres  de  livres,  des  noms  géogra- 
phiques, des  inscriptions  tumulaires  (d'après  Zunz),  etc.  C'est  un  travail  très 
utile  et  très  méritoire. 

ScHERDLix  (E.).  Le  Judaïsme  moderne.  Paris,  imp.  Larousse  [1882]  ;  iu-8° 
de  30  p. 

Extrait  de  l'Encyclopédie  des  sciences  religieuses  de  Lichtenbcrger. 
L'auteur  prend  l'histoire  des  Juifs  en  Europe  à  partir  de  Mendelssohn  et  de 
la  Révolution  française  ;  il  étudie  Icuç  situation  politique  et  civile  dans  les 
dilférents  pays,  les  effe.ts  de  la  Révolution  et  de  la  chute  de  l'Empire  sur 
leur  situation  en  Allemagne,  leur  lutte  pour  l'émancipation  à  Francfort,  à 
Hambourg,  les  polémiques  de  1810,  la  réaction  et  les  excès  de  1819,  sur  les 
bords  du  Rhin,  celle  de  1822  en  Prusse,  l'antisémitisme  de  18i2  en  Prusse 
encore,  la  lutte  pour  l'émancipation  en  Angleterre,  pour  l'abolition  du  ser- 
ment more  judaico  en  France,  les  détestables  lois  d'oppression  qu'ils 
subissent  en  Rtissic,  l'aifairc  de  Damag,  l'histoire  de  la  réfofme  religieuse. 

•  Nous  croyons  que  quelques  fascicules  de  cet  exemplaire  ayant  été  adressés   à 
M.  Naumbourg,  se  sont  perdus  à  la  poste.  —  I.  L. 


292  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

dans  le  judaïsme,  histoire  agitée  et  tourmentée,  qui  a  si  longtemps  et  peut- 
être  si  inutilement  occupé  les  esprits.  II  était  difficile  de  mieux  raconter, 
en  si  peu  de  pages,  les  événements  qui  ont  marqué  dans  le  développement 
du  judaïsme  moderne.  L'auteur  les  a  retracés  à  grands  traits,  comme  il 
convenait,  laissant  de  côté  les  détails,  sans  omettre  rien  d'important  ni  au- 
cun épisode  intéressant.  L'article  se  termine  par  une  appréciation  très  élevée 
du  mouvement  autisémitique  actuel.  Ce  mouvement  procède  à  la  fois  d'i- 
dées religieuses,  sociales  et  politiques.  Les  Juifs  sont  poursuivis  comme 
secte  religieuse,  comme  agents  économiques  importants,  comme  propaga- 
teurs d'idées  libérales.  Ce  n'est  point  par  indifférence,  comme  le  suppose 
M.  Sch.,  que  les  Juifs  de  France  ne  sont  point  venus  au  secours  ue  leurs 
coreligionnaires  allemands,  c'est  par  crainte  de  leur  nuire.  Parmi  les  chrétiens 
qui,  en  Allemagne,  ont  pris  la  défense  des  Juifs,  M.  Sch.  cite  avec  raison 
Vogt,  le  chanoine  Doellinger,  le  D'"  Cassel;  il  faudrait  ajouter  Franz  De- 
litzch.  M.  Sch.  a  des  paroles  touchantes  pour  protester  contre  cette  guerre 
odieuse,  nourrie  de  passions  inavouables  :  l'orgueil  national  et  de  race 
poussé  à  la  folie  depuis  1870,  le  fanatisme  religieux  et  politique,  une 
jalousie  que  rien  ne  justifie  et  qui  repose  sur  de  pures  imaginations.  Il  est 
consolant  de  voir  un  savant  comme  M.  Sch.,  qui,  si  nous  ne  nous  trompons, 
a  été  à  l'école  de  l'Allemagne,  condamner  avec  une  si  grande  énergie  et 
une  sympathie  si  vive  pour  les  persécutés  cette  expédition  honteuse,  qui  est 
une  insulte  à  la  civilisation. 

ScHULTZE  (MarUn\  Handbuch  der  ebraischen  Mythologie.  Sage  und  Glaiibe 
der  alten  Ebraer  in  ibrem  Zusammenbang  mit  den  religiôsen  Anscbau- 
ungen  anderer  Semiten  sowie  der  Indogermanen  und  Aegypter;  2"  édi- 
tion. Leipzig,  libr.  Karl  Scboltze,  in-8''  de  x-294:  p. 

Nous  ne  sommes  pas  eu  mesure  d'apprécier  la  valeur  scientifique  de  ce 
livre,  nous  dirons  seulement  qu'on  y  trouve  des  étymologies  très  hardies. 
Pour  l'auteur,  l'histoire  ancienne  des  Hébreux  telle  qu'elle  est  racontée  dans 
la  Bible,  n'est  le  plus  souvent  que  de  la  mythologie,  de  la  légende,  de  la 
poésie  épique.  Dans  l'histoire  de  Moïse  il  voit  une  espèce  d'odyssée, 
comme  l'Odyssée  des  Grecs  ;  l'histoire  de  Joseph,  serait  l'Iliade  des  Hé- 
breux. Une  belle  personne  (homme  ou  femme)  est  enlevée  de  son  pays, 
ses  compatriotes  la  suivent  pour  la  délivrer,  et,  après  de  longues  difficultés, 
la  ramènent  (morte  ou  vive)  dans  sa  patrie.  Cette  fable  représenterait  le 
mythe  du  Dieu  de  la  lumière,  exilé  pendant  l'hiver,  et  retournant  au  ciel 
à  l'arrivée  du  printemps,  avec  une  suite  nombreuse. —  Autre  exemple:  Le 
cantique  de  Déborah  est  un  mythe  dyonisiaque.  Lorsque,  au  solstice  d'hiver, 
le  soleil  entre  dans  le  signe  du  capricorne  (Jael)  et  recommence  à  monter 
(jaal),  que  le  vin  également  fermente  et  monte  dans  les  cruches,  que  les 
nuées  versent  l'eau  sur  la  terre,  que  les  rues  sont  désertes  et  que  les  pas- 
sants fout  des  zigzags  (pour  poser  le  pied  aux  endroits  que  la  boue  ne  re- 
couvre pas),  les  moissonneurs  sont  en  fête  (boivent  le  vin),  jusqu'à  ce  que 
vienne  Déborah,  la  mère  en  Israël.  Déborah,  l'abeille,  c'est  l'Artémise  des 
Grecs  (appelée  mélissa),  l'amazone  guerrière  (armée  comme  l'abeille), 
sœur  d'Apollon.  Elle  est  représentée  avec  deux  torches  à  la  main,  comme 
Déborah  est  la  femme  àcs  lappidot  (torches).  Cette  même  déesse,  sous 
d'autres  formes,  règne  dans  le  signe  dû  Bélier,  en  mars,  c'est-à-dire  au 
réveil  du  printemps.  On  entend  la  voix  des  moissonneurs  qui  chantent 
dans  les  champs  et  qui  vont  faire  la  guerre  aux  plaines  immobiles  (searim) 
de  blé  !  Puis  vient  la  saison  du  reste  (de  la  vendange),  les  tribus  sont 
louées  ou  blâmées  selon  qu'elles  cultivent  la  vigne  ou  la  négligent.  Le  rai- 
sin toule  dans  le  sang  de  son  jus,  comme  des  cadavres  dans  le  Kison  ;  les 
vendangeurs  le  foulent  et  piaffent  comme  des  chevaux  dans  la  bataille.  Si- 
sara  (le  lait  de  la  bravoure,  c'est-à-dire  le  vin)  est  placé  dans  la  tente,  où 
il  repose,  jusqu'en  hiver.  Jael  revient  alors  avec  le  marteau,  elle  enfonce  un 
piquet  dans  la  tête  du  géant,  et  le  sang  (vin)  coule  par  l'ouverture  béante. 


BIBLIOGRAPHIE  2^"^ 

11  est  clair  qu'on  peut  aller  loia  avec  ce  système  d'interprétalion.  Q^e  de- 
vient, dans  tout  cela,  Thistoire  de  la  guerre  de  Sisara  racoutee  par  la  Bible 
eu  dehors  du  chant  prétendu  dyonisiaque  ?  Les  mythes  auraient-ils  servi  a 
faire  de  l'histoire  ? 
Stade  (Bernhard).  GeschicMe  des  Volkes  Israël,  mit  Illusirationen  uud 
Karten.  Berlin,  libr.  G.  Grote,  1881,  in-8». 

Livraisons  3a  et  40  de  l'AUpemeine  Geschichtë  in  Einzeldarstellungen 
(Encyclopédie  historique),  publiée  par  Wilhelm  Oflken.  Ces  deux  livrais 
allant  de   p     1  à  p.   304,  ne  forment  encore  qu'une  partie  de  1  ouvrage.  11 
faut  se   féliciter   qu'un  travail  aussi   important  ait  été  conhé  à  un  savant 
si  consciencieux  et  si    érudit  que  M.  Stade.  Son  introduction  montre  deja 
avec  quel  soin  il  s'est  proposé  de  procéder  au  travail  et  comment  ,1  se  rend 
compte  des  difficultés  extrêmes  de  cette  œuvre. 
T. FIE  (G  -P  )    Histoire  comparée  des  auciennes  religions  de  l'Egypte  et  des 
peuple^  sémitiques,  traduite  du  hollandais  par  G.  Collins,  précédée  d  une 
préface  par  A.  RéviUe.  Paris,  libr.  Fisclibacher,  m-S»  de  xvi-olO  p. 

Nous  ne  pouvons  pas  faire  ici  l'analyse  détaillée  «if;^^  «^^'^^.S'V.^^.eî- 
divisé  en  trois  livres  :  1.  Histoire  de  la  religion  de  1  Egypte     2.  La  re 
4on  de  Babylone  et  de  l'Assyrie;  3.  La  religion  des  Phéniciens  et  cel  e 
des  Israélites    Dans  ce  dernier  livre,  nous  signalons  les  chapitres  suivants 
(chap    va  à  XVI)  :  Etat  religieux  des  Hébreux  dans  le  pays  de  Goschen 
-le  yahvisme  primitif  et   Moïse  ;  -  le  yahvisme  mosaïque  de  Samuel 
jusqu'au  schisme  des  dix  tribus  ;- la  lutte  du  yahvisme  mosaïque  pour    a 
iuprématie,  de  la  sécession  des  dix  tribus  à  la  ruine  du  royaume  d  Israé 
-^^  'iSalisme  des  nouveaux    prophètes  en  lutte  avec  la  tendance  réaliste 
de  pu     en  plus  prononcée  d'AhaL  à  Amon  ;   -   réalisation  temporaire  de 
rîdéaî  prophétique;  réforme  de  Josias.  le  Deatéronome  ;  -  la  catastrophe 
e     son  lugubre^r^phète;  -  caractère  de  la  religion  d'Israël.  La  conc  u- 
si'oi   de  r auteur  est  que  la  religion  mosaïque  se  distingue  de  toutes  les  reli- 
Aons  des  Egyptiens  et  des  slmites  de  l'Asie  par   le  caractère  à^samteté 
q'  'ele  attribif  à  Dieu  et  au  culte.  On  ne  peut  approcher  D^eu    -    e  voir 
îi    toucher   l'arche,    ni  pénétrer  dans    le   samt    des  saints.    Ce  dieu  est 
ds  r'te    ÎSl  le  fut' également  (p.  .06),  les  ^^^^^^^ff^^ 
nui    le   séparent   des   autres  peuples  lui  mspirent  un  orgueil  qui,   dans  le 
Tamud    ^dégénère  en  véritable  folie  ».  Ces  conclusions  nous  paraissen 
asseTmèsquine^s  pour  un  sujet  aussi  élevé,  et  --P^^f  <!-   ^^^^J^^  ^t 
Hébreux  s'étaieni  faite  de  Dieu,  lors    du  retour  de  1  exi  ,  était  autrement 
Sandc  et^énéreuse.  L'orgueil  national  des  Juifs,  si  malmené  par  M.  T., 
ïetatps^plu     féroce  nfmoins  Justifié  que  celui  des  -très  peuples  qui 
ks   entouraient.   C'était   une  maladie  du  temps,  et  il  semble  bien  que  les 
nations  modernes  la  connaissent  également. 
RENAN  (Ernest).  L'Ecclésiastc  traduit  de  l'hébreu  avec  une  étude  sur  l'âge  et 
le  caractère  du  livre.  Paris,  libr.  Calmann  Levy;  m-8°  de  153  p. 

Nous  avons  déjà  annoncé  VEtude  qui  forme  l'introduction  de  cet  ouvrage 
Ptaui  a   été   publiée  dans    la  Rcvl  des  Deux-Mondes   (voir   plus  haut. 
;.  ^S).  Nous  reviendrons  prochainement  sur  cette  Etude  et  sur  lu  traduction 
de  M.  Renan. 
[Spinoza].  Beuedicti  Spinoza   opéra  quotquol  reporta  sunt  ^■^^-o;'^^*:;';^^^ 
^  J  Van  Vloten  et  J.  N.  Land.  Volumen  prius.  La  Haye,  unp.  N.jholi,  in-h 
de  XI-G30  p. 


20 
T.  IV. 


294  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


PuMicaiions  'pouvant  servi?'  à  l'histoire  moderne  des  Juifs,  du  Judaïsme, 
des  commu?iautés,  des  institutions,  etc. 


Adler  (Hermann).    Récent  Phases  of  Judseopliobia  (Nineteenth    Ccutury, 
Londres,  n"  58,  décembre  1881,  p.  813). 

Réponse  excellente  à  l'article  de  M.  Smith  (voir  plus  loin). 

Debidour  (m.  a.)-  L'abbé  Grégoire.   Nancy,  imp.   Sordoillet,  1881;  in-8° 
de  15  p. 

Viox    (Camille).  L'abbé   Grégoire,  conférence  historique.   Lunéville,  imp. 
nouvelle,  in-8°  de  44  p. 

Friedlaender  (M.)-   Fiiuf  Wochen  in  Brodj  unter  jûdisch-russischen  Emi- 
granten.  Vienne,  libr.  Waizner,  in-8°  de  50  p. 

L'auteur  a  vécu  cinq  semaines  parmi  les  émigrants  juifs  de  Russie  qui 
se  sont  léfugiés  à  Brody  :  il  a  travaillé,  avec  beaucoup  de  cœur  et  de 
dévouement,  de  concert  avec  ^L  Charles  INetter,  à  secourir  ces  malheureux 
et  à  soulager  leurs  souffrances.  Le  récit  de  son  séjour  dans  cette  ville  est 
instructif  et  touchant. 

Die  russischen  Judenverfolgungen,  fûnfzehn  Briefe  aus  Siid-Russland.  Franc- 
fort s/M.,  libr.  Kautfmann,  in-8°  de  61  p. 

Ces  lettres  sont  d'un  témoin  oculaire  ;  elles  ont  une  grande  valeur  histo- 
rique et  sont,  en  outre,  très  émouvantes. 

Le  Juif  russe  jugé  par  lui-même,   par  Arvède  Barine  (Revue  politique  et 
littéraire,  10  juin  1882,  p.  7051. 

Le  titre  de  cet  article  u"est  point  exact,  l'auteur  s'est  servi,  pour  faire 
son  travail,  de  documents  dont  un  grand  nombre  n'émanent  pas  le  moins 
du  monde  des  Juifs.  Certains  passages  de  l'article,  généralement  équitable 
et  bienveillant  pour  les  Juifs,  prêtent  cependant  à  la  critique  et  indiquent  la 
persistance  singulière  des  préjugés. 

Leroy-Beaulieu  (Anatole).  Les  troubles  antisémitiques;  la  persécution  des 
Juifs  en  Russie  (Revue  politique  et  littéraire,  n°  20,  p.  609). 

Détails  sur  la  législation  oppressive  dont  souffrent  les  Juifs  de  Russie, 
sur  les  nombreuses  professions  manuelles  qu'ils  exercent;  contradiction 
entre  les  reproches  qu'on  leur  adresse  et  les  mesures  qui  sont  prises  à  leur 
égard  et  dont  l'unique  effet  ne  peut  être  que  de  perpétuer  les  défauts  qui 
leur  sont  attribués. 

LuBOMiRSKi  (le  Prince).  Jérusalem  :  Juifs,  Chrétiens,  Musulmans  (Nouvelle 
Revue,  13  avril  1882,  p.  589). 

L'article,  conçu  dans  un  esprit  un  peu  singulier,  et  d'une  observation  qui 
nous  semble  superficielle,  est  peu  bienveillant  pour  les  Juifs.  Un  épisode 
curieux  est  celui  d'un  Juif,  autrefois  serf  de  l'auteur  à  Dubno  (et  nous 
croyons  volontiers  que  le  prince  traitait  ses  serfs  avec  la  plus  grande  hu- 
manité), et  qui,  à  Jérusalem,  lui  témoigne  une  certaine  mauvaise  humeur  : 
•  Que  voulez-vous  que  je  vous  donne  en  échange  do  votre  mépris?  Mon 
amitié  peut-être?  »  (p.  597).  Cet  article,  probablement  augmenté,  a  paruiin 
volume  sous  ce  titre  :  Jilrusalem,  un  incrtduU  en  S^errc-kSainte. 


BIBLIOGRAPHIE  295 

Persécution  of  the  Jews  in  Russia,  1881.  Reprinted  from  the  Times  with  Map 
and  Appendice.  Londres,  imp.  Spottiswoode,  in-S'^  de  30  p. 

C'est  le  résumé  le  plus  complet  qui  ait  été  fait  des  persécutions  des 
Juifs  en  Russie  depuis  leur  origine  jusqu'en  décembre  1881. 

Que  faire?  Réponse  à  l'auteur  de  la  situation  en  Russie.  (Nouvelle  Revue, 
15  mai  1882,  p.  241.) 

Réponse  à  un  article  paru  dans  la  même  Revue,  numéro  du  15  février 
1S82.  L'auteur  de  «  Que  faire?  »  pense  que  le  mouvement  contre  les  Juifs  est 
parti  des  nihilistes,  qui  voient  dans  cette  agitation  un  instrument  de  dé- 
sordre et  d'anarchie,  et  que  le  comte  Ignalieff  a  favorisé  «  cette  indigne 
persécution  »  dans  l'espoir  qu'elle  servirait  de  dérivatif  aux  passions  révo- 
lutionnaires. De  plus,  cette  agitation  est  dans  les  desseins  du  parti  pansla- 
viste,  lequel  persécute  également  les  vieux  croyants,  qui  sont  au  nombre 
de  la  millions  et  qu'on  accable  de  vexations.  Le  parti  national  russe,  à  la 
tête  duquel  se  trouve  l'éminent  directeur  de  la  Gazette  de  Moscou,  ne  doit 
pas  être  confondu  avec  le  parti  panslaviste,  car  il  est  beaucoup  plus  sage 
et  plus  modéré.  Cette  assimilation  serait  pour  lui  une  injure. 

RuELF  (J.).  Drei  Tage  in  Jiidisch-Russland.  Francfort  s/M.,  libr.  Kauffmann, 
in-80  de  131  p. 

Relation  de  voyage  intéressante  et  qui  renferme  de  nombreux  renseigne- 
ments sur  la  situation  morale  et  économique  des  Juifs  de  Pologne. 

Smith  (prof.  Goldwin).  The  Jewish  question  (Niueteenth  Century,  Londres, 
n°  56,  oct.  1881,  p.  494). 

Voir,  plus  haut,  H.  Adler. 

ScHWABAGHER  (D'"  Simou  Leou  von).  Uenkschrift  ûber  Entsteliung  und 
Charakter  der  in  den  siidlichen  Provinzen  Russlands  vorgefallenen  Uu- 
ruheu.  Stuttgart,  libr.  Levy  et  Miiller,  in-8°  de  43  p. 

L'auteur  est  rabbin  à  Odessa,  il  est  donc  bien  placé  pour  apprécier  les 
causes  des  persécutions  en  Russie.  Le  mémoire  qu'il  a  écrit  à  ce  sujet  lui 
a  été  demandé  par  le  sénateur,  commissaire  du  gouvernement,  comte  Kutai- 
soil.  L'auteur  proteste  contre  cette  opinion  que  le  peuple  russe  haït  les 
Juifs.  Il  n'en  est  rien,  il  a  seulement  contre  eux  des  préjugés,  et  ces  pré- 
jugés ont  été  exploitéspar  le  parti  révolutionnaire,  surtout  par  la  presse 
populaire,  à  laquelle  M.  Sch.  attribue  un  rôle  prépondérant  (et  peut-être 
exagéré)  dans  les  derniers  événements.  Il  y  a  des  milliers  de  Juifs  en 
Russie  qui  sont  cultivateurs  ou  qui  exercent  les  métiers  les  plus  durs.  Il 
est  donc  faux  qu'ils  repoussent  le  travail  manuel.  Ce  qu'on  peut  reprocher 
aux  Juifs  n'est  que  le  résultat  fartai  de  la  mauvaise  législation  à  laquelle 
ils  sont  soumis.  «  Vestra  culpa  1  » 

Théâtre  de  Campéador.  Le  devoir  du  mari,  la  peur  du  bruit,  David  Rizzio. 
Paris,  libr.  Calm.-Lévy,  gr.  in-S»  de  327  p. 

Notre  excellent  ami,  M.  Hippolyte  Rodrigues,  nous  permettra  de 
mentionner  ici  cet  ouvrage  aimable,  où  respire  une  bonne  grâce  parfaite. 
C'est  ainsi  que  se  délasse  dignement,  entre  deux  ouvrages  plus  graves, 
l'auteur  des  Trois  filles  de  la  Bible,  des  Origines  du  Sermon  sur  la  Mon- 
tagne, des  Midraschim  et  de  tant  d'autres  œuvres  honorables. 

TissoT  (V.).  La  Russie  et  les  Russes.  (Illustration,  à  partir  du  numéro  du 
15  avril). 

Beaucoup  de  détails  sur  les  Juifs,  maig  où  lo  romancier  a  peut-être  plus 
de  part  que  l'observateur  et  l'historien. 


296  lŒVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


Remie  des  périodiques. 


"n^rn  nin  Beth-Xalmud  (Wien,  mensuel).  2*^  année.  =  =  N"  11.  Fried- 
mann  :  Civilisation  du  temps  des  patriarclies  (suite).  —  N.  Briill  :  Origine 
et  développement  de  la  législation  relative  à  la  purification  des  mains. 
—  Feiss-Rosentlial  :  Époque  de  la  rédaction  primitive  du  Targum  On- 
kelos.  —  Une  consultation  de  Rasclii.  —  H.  S.  Slonimski  :  Notes  talmu- 
diques.  —  H.  Oppeuheim  :  Histoire  de  la   Mischna.    —    Une  lettre  de 

Rappoport.  : N°12.  Friedmann  :  Esprit  de  la  haggada  (suite),  —  BrùU  : 

Origine,  etc.  (suite).  —  David  Kaufmann  :  Additions  et  corrections  à  son 
article  sur  Hayyim  ibn  Musa.  —  J.  Reifmann  :  Divers  Tikkuné  So- 
ferim.  —  Traité  des  Bénédictions,  par  Samuel  b.  Hofni,  édité  par 
Weiss.  —  J.  JReifmann  :  Réplique  à  un  article  du  Scaacliar  sur  ses  articles 
concernant  les  mots  syriens  de  la  Bible. 

N°  11.  —  Rosenthal  :  Le  Targum  Onkelos  aurait  été  rédigé  en  Palestine, 
du  temps  de  R.  Akiba.  —  Consultation  de  Rasebi  :  Elle  est  très  courte. 
Un  jeune  homme  et  une  jeune  fille  ont  été  mariés  après  qu'ils  avaient  été 
obligés,  pour  sauver  leur  vie,  de  se  baptiser.  Le  mariage  est-il  valable 
comme  tout  mariage  Israélite?  Réponse  :  oui,  car  les  baptisés  involontaires 
ont  le  cœur  pur. 

N°  12.  —  La  publication  du  traité  de  Samuel  b.  Hofni  mérite  spéciale- 
ment d'être  signalée. 

"1315-!^  Hamtlaber  (Berlin,  bimensuel).  V  année.  =  =  N°  2  à  5.  Elle 
Capsali  :  Relation  d'un  miracle  arrivé  aux  Israélites  de  Candie  en  1537 
et  jour  commémoratif  institué  à  ce  sujet.  =  =  ]Si°  8.  Origine  historique 
du  nom  d'Azulai.  =  =:  N°  9.  Lettre  de  Hayy.  J.  David  Azula'i. 

Nous  n'avons  pas  vu  les  n°'"  0,  7,  10,  11.  Le  n°  12  est-il  le  dernier  de 
cette  publication  ? 

in'il^;^  Haschachar,  die  Moi-genreethe  (Wien,  périodicité  non-indiquée). 
10''  année.  =  =  N^  11.  Smolensky  :  Sur  la  situation  actuelle  des  Juifs. 
Ilillcl  Noah  Steinscbneider  :  Sur  l'article  de  M.  Modlinger  (n"  T)  sur  le 
Midrasek  Lekah  Tob.  —  S.  Rubin  :  Les  Urim  we-Tummim.  —  La  terre 
de  gloire  (suite).  —  Midrascb  Soferim.  —  Histoire  des  peuples  anciens 
(suite). 

Archives  Israélites  (Paris,  hebdomadaire).  43^  année.  =  =  N**  5. 
Ernest  David  :  Histoire  juive,  les  Texeira.  ==  No**  11,  12,  14,  IG,  17, 
II.  Becker  :  Voltaire  et  les  Juifs.  =  =  N"  16.  M.  Schwab  :  Archéologie, 
lettre  adressée  de  Tours  au  directeur  (sur  un  ms.  hébreu  du  Pentateuque 
conservé  à  Tours). 

Académie  des  iuscriptioiis  et  l>clics«leltres,  Coiiiptes-rciidus  (Paris)- 
=:=  4''  série,  tome  IX,  octobre  à  décembre  ISSl  :  Philippe  Berger  :  Note 
sur  les  inscriptions  puniques  qui  figurent  à  l'exposition  des  fouilles  d'U- 
tique.  —  J.  Menant  :  Remarques  sur  des  portraits  des  rois  assyro-chal- 
déens. —  A.  de  Longpérier  :  Monuments  antiques  de  la  Chaldée  rapportés 
par  M.  de  Sarzac. 

Menant  :  Ce  travail  cherche  à  prouver  que,  dans  les  représentations  des 
rois  assyriens  qu'on  trouve  sur  les  monuments,  les  artistes  n'ont  pas  rc- 


BIBLIOGRAPHIE  297 

produit  un  type  conventionnel,  mais  des  figures  ressemblantes,  quoique 
ennoblies,  de  telle  sorte  qu'il  est  facile  de  reconnaître  par  exemple  Tiglat- 
Pileser,  Sargon,  Sennacbérib,  Assarbaddou,  Assurbanipal.  On  distingue 
aussi  les  types  des  peuples,  Susiens,  Hébreux,  Arméniens.  —  Long- 
périer  :  La  Syrie  des  deux  ileuves  {Arani  nehar'ahn)  est  représentée  sur  les 
monuments  par  deux  courants  à  lignes  brisées  ou  ondulées,  repré- 
sentant l'un  le  Tigre,  l'autre  l'Eupbrate.  Il  y  a  un  symbole  de  ce  genre 
sur  les  bas-reliefs  rapportés  par  M.  de  Sarzac.  M.  de  L.  pense  que  les  rois 
de  cette  contrée,  qui  ont  élevé  des  monuments  comparables,  pour  leur 
grandeur,  à  ceux  de  l'Egypte,  devaient  être  très  puissants  et  on  comprend 
qu'ils  aient  facilement  remporté  sur  les  Hébreux  la  victoire  dont  il  est 
question  dans  les  Juges,  chap.  m. 

Das  jiidische  Centralblatt  (Belovar,  bimensuel),  l"""  année.  =:  =  N°  1. 
Wesen  und  Urafang  der  Aggada.  :=  ==  N°  2.  Wesen  (suite).  —  Zur  Ge- 
schichte  der  Juden  in  dem  vereinigten  Kônigreiclie  Kroatien,  Slavonien 
und  Dalmatien.  —  A,  ^A'iinsclle  :  Ibn  Esra  als  Râtliseldicliter.  ==  =  N°  3. 
Wesen  (suite).  —  Ueber  die  Juden  in  Bosnien  und  Herzegovina.  —  Zur 
Geschichte,  etc.  (suite\  =  =  N°  4.  Ueber  den  jiidiscb-spanisclien 
Dialekt.  =  =:  N°  9.  Das  altfranzôsiche  bei  Raschi.  =  =  N-^  10  et  11. 
Ueber  die  spaniscb-portugiesiscben  Juden  der  Gegenwart. —  Das  altfran- 
zôsiche, etc.  (suite}. 

Les  études  sur  l'histoire  des  Juifs  en  Croatie,  Slavonie  et  Dalmatie,  sur 
le  judéo-espagnol  et  sur  les  gloses  françaises  dans  Raschi  sont  particu- 
lièrement intéressantes.  —  Nous  n'avons  pas  les  n°*  5,  6  et  8. 

Fraternitatea  (Bucbarest,  hebdomadaire).  4^  année.  r=  =  N"  3  à  20.  Do- 
cumente istorice  previtoare  la  Evreii  din  Remania. 

Ces  documents  historiques  sur  l'histoire  des  Juifs  en  Roumanie  sont 
très  précieux.  Nous  y  remarquons  tour  à  tour  des  pièces  de  1790  i^du  voivod 
Michel  Constantin),  de  1834,  de  1710,  de  1823  (Jean  Stourdza),  etc. 

Hebr^isohe  Bibliographie  niit72M  (Berlin,  bimestriel).  21*  année.  =: 
=  N"  123-124,  mai  à  août  1882.  Cataloge.  —  Bibliotheken.  —  Elia  del 
Medigo.  —  Grabschriften.  —  Kulturgeschichle.  —  Literaturgeschichte.  — 
Abraham  b.  Schemtob  (Bibago?).  —  Averroes.  —  Berkamani.  —  Ibn 
Efraim.  —  Fcindesliebc.  —  Figura  Sector.  —  Heirathsgesellschaften.  — 
Inschrift.  —  Josef  ha  darschan.  —  Jus  primne  noctis.  —  Kanon  des  A.  T. 
—  Mordechai  b.  Jehosifja. 

Cataloge  :  Notes  sur  un  catalogue  de  livres  hébreux  publié  à  Munich 
par  M.  R.  M.  Rabbinovicz,  1881.  —  Elle  del  Medigo  :  Analyse  d'un  ou- 
vrage de  M.  Dukas,  de  l'année  1870,  avec  notes,  observations,  additions, 
et  extraits  de  deux  mss.  latins  du  Vatican.  —  Grabschrifttn  :  Sur  les 
luchot  abanim  de  M.  Berliner,  avec  notes  sur  la  transcription  et  l'in- 
terprétation des  noms  propres.  —  Kulturgeschichte  :  Sur  un  ouvrage 
d'Abraham  Jagel.  —  Literaturgeschichte  :  Supplément  à  l'article  sur  Elie 
del  Medigo.  —  Jefct  Berkamani.  —  Société  pour  marier  les  jeunes  filles 
pauvres,  en  Italie,  1G4i.  —  Jus  :  Dans  un  ouvrage  sous  ce  litre,  par 
Schmidt(Fribourg  enBrisgau,  1 881  ),  il  est  traité,  p.  103  à  175,  du  fait  qui,  d "a- 
près  le  Talmud,  aurait  amené  le  soulèveiiaent  des  Macchabées.  —  Kanon: 
Article  de  L.  Strack  sur  le  canon  de  l'Ancien  Testament,  dans  la  Real  En- 
cyklopaîdie  fvir  protest.  Théologie,  2°  édit.  ;  Leipzig,  1880,  vol.  VII,  p.  412 
à  4L)1 . 

Dep  Israelit  (Maycncc,  hebdomadaire).  23'  année.  =  =  N°  5.  Nochmals 
ciu  Wort  ûber  die  Lagu  des  Gardons  Edou.  =  =  N*^  9.  Aus  dciî  Verhand- 


298  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

lungen  des  preuss.  Abgeordnetenhauses  vom  25.  Febr.  (Stocker,  etc.). 
=  =z  N°  13-14.  Eine  émeute  Verdâchtigung  gegen  das  Schachten. 

Jonrnal  asiatique  (Paris).  7«  série,  tome  XIX.  =  r-  N^l.  E.Renan: 
Sur  quelques  noms  arabes  qui  figurent  dans  des  inscriptions  grecques  de 
l'Auranitide.  —  H.  Sauvaire  :  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  de  la  nu- 
mismatique et  de  la  métrologie  musulmane.  =  =  N"  2.  Sauvaire  :  Maté- 
riaux (suite). 

Renan  :  P.  19,  quelques  mots  sur  Tenvahissement  de  la  Syrie  par  les 
Arabes  plusieurs  siècles  avant  la  naissance  de  l'islamisme.  —  Sauvaire  : 
Etude  qui  peut  souvent  être  très  utile  pour  les  recherches  archéologiques 
concernant  la  littérature  des  Juifs  qui  ont  vécu  en  pays  musulman. 

Das  jiidische  Lîteraturblatt  (Magdebourg,  hebdomadaire).  11^  année.  = 
=  N°  1.  Ein  Beitrag  zur  Geschichte  der  Frankisten.  —  Jastrow  :  Be- 
merkungen  zu  D'"  Gebhard's  Beitragen  zur  Erklarung  griech.  Wôrter  in 
dcu  Midraschim  und  Talmuden.  =  =  N°  2.  Ein  Beitrag  (suite).  —  Jas- 
trow (suite).  =  =  N'^  3.  Caro  :  David's  Testament.  —  Jastrow  (fin).  =  = 
N°  5.  Ad.  Jellinek  :  Galdos  (auteur  du  roman  Gloria,  1878,  contre  les 
préjugés  religieux).  =  =  N°  6.  J.  Minor  :  Historisches  zurBerliner  Juden- 
frage.  —  Recension  der  Gedenkebliitter  an  Ober-Cantor  Salomon  Sulzer. 
=  =  N°  7.  Minor  (fin,  activité  intellectuelle  des  Juifs  de  Berlin  au  com- 
mencement de  ce  siècle).  =  =  N°  10.  Eine  neue  jiid.  Sekte  in  Russland. 
=  =  N°  12.  Berthold  Auerbach's  Stellung  in  der  deutschen  Literature. 

—  S .  Friedmann  :  Ueber  die  Entstehungszeit  der  Septuaginta.  =  = 
N°  13.  Friedeberg:  KantundMendelssohn.  =  =:  N°  14-15.  Das  Edikt 
vom  11.  Marz  1812.  Zur  Emancipationsgeschichte  der  Juden  in  Preussen. 

—  S.  Friedmann  :  Ueber  unsere  Pessach-Haggadah.  =  =  N°  16.  Friede- 
berg  (suite).  —  Das  Edikt  (suite).  —  Wolffsohn  :  Zur  Geschichte  des 
Aberglauben  im  Talmud.  ^=  =  N°  17.  Wolffsohn  (suite;  si  Abraham 
était  devin;  le  mauvais  œil  ;  Aschmodai). 

Slagazin  fi'ir  die  Wissenschaft  des  Judeiithnms  (Berlin,  trimestriel). 
9"  année.  =  =:  N°  1.  Eduard  Baneth  :  Ueber  den  Ursprung  der  Sadukiier 
und  Boëthosàer.  —  David  Kaufmann  :   Berichtigungen  imd  Erklarungen. 

—  Aus  Briefen. 

Baneth  :  Nous  reviendrons  sur  ce  travail,  qui  paraît  devoir  devenir  fort 
intéressant,  lorsqu'il  sera  plus  avancé.  —  Kaufmann  :  Explications  et  cor- 
rections pour  la  partie  hébraïque  de  l'année  précédente.  — .Notes  de 
M.  Halberstam  sur  le  même  sujet.  —  Aus  Briefen  :  Lettre  de  M.  Rosin 
sur  la  correspondance  dcRappoport  publiée  récemment  par  M.  A.  Harkavy 
et  annoncée  dans  notre  Bibliographie. 

Popiilar  %visscnsch»f(Iiche  Monatsblatter  (Francfort-sur-Mein,  men- 
suel). 2»  année.  =  =  N^  1.  A.  Slein  :  Aus  dcm  Lcben  der  Juden  in  Ara- 
bien.  —  II.  Friedlander  :  Geschichtsbilder  aus  der  nachtalmudischcn 
Zeit.  —  David  :  Semitisches  und  Antisemitisches  in  Oeslerreich-Ungarn. 

—  Eine  neue  jiidische  Secte  in  Russland.  —  Personalien.  =  =  N°  2. 
Stein:  Aus  dem  Leben  (suite).  —  Friedlander  :   Geschichtsbilder  (suite). 

—  D.  Selver  :  Anti-Dûhring.  —  Literarische  Mittheilungcn.  =  =  N"  3. 
A,  Rosenberg  :  Das  Judenthum  und  die  Nationalidee.  —  Friedlander  : 
Geschichtsbilder  (suite).  —  Refcrate,  Personalien.  =  =  N"  4.  A.  Rosen- 
berg (suite).  —  Die  Lcichenfeicr  Berthold  Auerbach's.  —  Referate,  Per- 
sonalien. =  =  N»  5.  Griinebaum  :  Zur  Geschichte  der  Juden  in  der  Pfalz. 


BIBLIOGRAPHIE  20'.i 

—  David  :  Scmitisches  und  Antisemitisches  in  Oesterreich  (suite).  — 
Mittheilungen,  Referate.  =  ==  N"  6.  Grûnel^aum  :  GeschicliLe  (suite).  — 
David:  Semitisches  (suileK  —  A.  Rosenberg  :  Das  Judenthum  (suite).  — 
Duscliak  :  Ticriches  Strafrecht.  —  Referate. 

N"  1.  —  Stein  :  La  vie  juive  en  Arabie,  principalement  d'après  Eben 
Sappir.  —  Friedlànder  :  Mordechai  Meisel,  de  Prague  (né  1528);  R.Lôwe 
b.  Bezalel,  né  1^25  ;  R.  Jesaias  Hurwitz,  né  1570.  —  Personalien  :  80*  an- 
niversaire de  la  naissance  de  M.  le  chevalier  Josef  de  Wertheimer,  à 
Vienne,  24  octobre  1881. 

N'  2.  —  Friedlànder  :  R.  Joël  Serkes,  né  à  Lublin,  vers  IliôO  ;  R.  Lip- 
pmann  Heller,  né  à  Wallerstein  en  1579. 

N°  3.  —  Rosenberg  :  Sur  l'idée  de  nationalité  &\.  l'importance  qu'elle  a, 
surtout  depuis  les  agitations  antisémitiques. — Friedlànder  :  Menascbe  h. 
Israël.  —  Personalien  :  Mort  de  Simon  Szanto,  directeur  de  la  Neuzeit,  de 
Vienne,  le  17  janvier  1882;  né  le  13  août  1819  à  Gross-Kanisza.  Mort  de 
Berthold  Auerbach  à  Cannes,  le  8  février  1882;  né  à  Nordstetten  le  13  fé- 
vrier 1882  (voirn"  4,  p.  90). 

N°  5.  —  Grûnebaum  :  Histoire  des  Juifs  du  Palatinat.  Renseignements 
sur  Spire  datant  de  1010;  sur  Landau,  datant  de  1291  ;  sur  Kaiserslautern, 
datant  de  1315,  etc.  —  Friedlànder  :  Uriel  da  Costa  et  Spinoza.  —  Recen- 
sion  de  Laroche,  drame  en  cinq  actes  de  Ferdinand  Ludwig  Neuburger 
(Frcf  s/m,  1882),  où  est  traitée  la  question  du  mariage  d'un  juif  avec  une 
chrétienne. 

N'-'  6.  —  Grûnebaum  :  Suite,  épisodes  de  la  peste  noire  à  Mayence,  à 
Landau,  Strasbourg,  Spire.  Un  enfant  chrétien  disparu  à  Strasbourg,  en 
1539;  etc.  —  Duschak  :  Sur  la  législation  mosaïque  relative  au  traitement 
des  animaux,  à  propos  d'un  article  de  M.  Lacagne,  professeur  de  droit  pé- 
nal à  Lyon,  dans  la  Revue  scientifique. 

IHonafsschrift  fi'ir  Gesrliichte  und  l¥issenscliaft  des    Judentliums 

(Breslau,  mensuel).  3P  année.  =  =:  N"  4.  W.  Bâcher  :  Die  Agada  der 
Tannaiten.  —  A.  Harkavy  :  Eine  von  Saadia  Gaon  bestatigte  Décision 
des  Exilarchen  David  b.  Sackai.  —  A.  Harkavy  :  Karaische  Deutung  des 
Wortes  ïiiamzêr.  —  J.  Landsberger  :  Geschichte  der  Juden  in  der  Stadt 
Stendal  vom  Endedes  13.  Jahrli.  bis  zu  ihrer  Vertreibung  im  J.  1510.  — 
Jastrow  :  Notiz  (I.  Ein  aller  Copisteufehler  ;  II.  Eine  wandernde  Corrup- 
tion). =  =  N°5.  Graetz  :  Das  Deborah-Lied.  —  W.  Bâcher:  Die  Agada 
(suite).  —  J.  L.  :  Miscellen. 

N"  4.  —  Bâcher  :  Jochanan  b.  Zakkai,  sa  vaste  érudition,  son  applica- 
tion à  l'intelligence  des  textes  bibliques.  —  Harkavy  :  Texte  d'une  formule 
pour  la  confirmation  d'une  décisiou  de  l'Exilarque  de  Babylonie,  David, 
par  Saadia,  chef  de  l'Académie  de  Sora.  C'est  un  document  très  précieux, 
tiré  d'un  ms.  oîi  se  trouvent  encore  d'autres  pièces  de  Saadia.  —  Har- 
kavy :  Passage  d'un  commentaire  caraïte  du  Deutéronome  où  le  nom  de 
mamzSf  est  appliqué  aux  Khozars.  Les  Caraïtes  leur  ont  peut-être  donné  ce 
nom  à  cause  de  l'attachement  des  Khozars  aux  rabbanites.  —  Jastrow  : 
I.  Les  mots  ^153  iSÎTIEi  dans  Gittin^  44a,  doivent  être  lus  "^"l^j^ilD  ("^"n^S 
venant  de  iTJ  pour  i"i5)  ;  c'est  la  corvée  appelée  parangaria.  II.  Corruption 
de  mots  do  la  même  racine,  Bab.  Mec,  83  h  :  N'I^rTlS  pour  NI2T.">;t1D, 
paranijentes,  celui  qui  est  requis  pour  la  corvée. 

N'^  II.  —  Graetz  :  Explications  ingénieuses  de  nombreux  passages  du 
Cantique  de  Dcl)ora.  —  Hacher  :  Zadoc,  Eléazar  b.  Zadoc,  Ilanina,  chefdcs 
prêtres,  Nchunja  b.  Haccana,  Nahum  do  Gimzo,  Bon  Paturi  [Si/'ra,  Lév. 
25,  S6,  et  B.  Mec,  02  a),  Elié/.er  b.  Jacob,  José  Ilaccolien. —  J.  L.  :  Ex- 
plication de  divers  mots  talmudiques  :  'jTnîû'^p  =  centurion,  dans  Sifr^, 
Balac,  131,  p.  47,  édit.  Friedm.  ;  etc. 


300  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

niosè,  Aiitologîa  israelîtîca  (Corfou,  mensuel).  5'^  année  =  =  N"  4. 
P.  Perreau  :  Iiitorno  al  comento  inedito  ebreorabbinico  del  R.  Immanuel 
b.  Salomo  sopra  Giobbe.  —  S.  Morais  :  Autobiografla  di  S.  D.  Luzzatto 
(suite). —  M.Mortara  rNotizia  di  alcune  raccolte  di  Consulti  mss.  di  Rabbini 
italiani  possedute  da  Marco  Mortara.  =  =  N°^  5  et  6.  Perreau  (suite). 
Mortara  (suite). 

Les  notices  de  M.  Mortara  sur  les  consultations  rabbiniques  qu'il  possède 
contiennent  des  renseignements  historiques  utiles. 

Palestine  Exploration  Fund  (Londres,  trimestriel).  =  =  Avril  1882. 
Captain  Conders  Reports.  —  A.  M.  Manlelli  :  Jérusalem,  newly  discove- 
red  Cburch.  —  C.  R.  C:  Note  on  prehistoric  remains  in  Western  Pales- 
tine. —  C.  R.  C:  The  Siloam  Tunnel.  —  W.Wright:  Kadesh  on  the 
Orontes.  —  Assyrian  discoveries  near  Bagdad.  —  E.  A.  Finn  :  Cromlechs 
on  the  East  of  Jordan.  —  C.  Pickering  Clarke  :  The  Mountain  of  the  Scap 
Goat. 

Conder  :  Description  de  nombreux  cromlechs,  restes  d'un  ancien  culte, 
à  l'est  du  Jourdain  et  de  la  mer  Morte,  aux  environs  de  Hesban.  M.  C. 
croit  pouvoir  identifier  les  principaux  groupes  de  cromlechs  avec  Bamot- 
Baal,  et  les  sanctuaires  de  Baal  Peor,  de  Baal  Peor  en  face  de  Jesimon  et 
de  Baal  Peor  dans  la  vallée  du  Jourdain,  où  est  Sittim,  localités  et  monu- 
ments mentionnés  dans  le  Pentateuque.  Description  de  constructions  à 
Amman  et  à  Arak  el  Emir.  —  Note...  :  Monuments  de  pierre  près  de 
Jérusalem  et  à  Gezer.  —  Siloam  tunnel  :  Plan  du  tunnel  maintenant  cé- 
lèbre par  l'inscription  de  Siloé.  Ce  tunnel  part  de  la  fontaine  de  la  Vierge, 
se  dirige  à  l'ouest,  puis  descend  au  sud,  où  il  est  encore  obligé  de  faire  un 
coude  pour  se  diriger,  à  l'ouest,  sur  la  fontaine  de  Siloé.  Ce  tracé  capri- 
cieux est  dû  à  l'inexpérience  des  mineurs  ou  à  la  dureté  plus  ou  moins 
grande  de  la  roche.  Ce  qu'il  y  a  de  curieux  et  d'intéressant  dans  ce  plan, 
c'est  que  vers  le  milieu  du  tunnel,  le  tracé  fait  un  certain  nombre  de  zig- 
zags très  courts.  C'est  là  probablement  que  se  sont  rejoints,  après  des  tâ- 
tonnements, les  deux  tronçons  du  tunnel  qui  a  été  commencé  aux  deux 
bouts.  En  se  rapprochant  les  unes  des  autres,  les  deux  brigades  de  mi- 
neurs qui  avaient  entamé  le  tunnel  aux  deux  extrémités  s'aperçurent 
qu'elles  ne  se  rejoindraient  pas,  et  durent  faire  ce  tracé  en  zigzag  pour  se 
rencontrer.  M.  J.  Derenbourg  a  déjà  fait  ces  remarques  dans  la  Iievue,lU, 
p.  lii:i. 

Israelitischer  Reichs-Bote  (Francfort-s.-M.,  hebdomadaire).  7°  année.  = 
=  N°  35-36.  Karl  Pick  :  Die  Juden  in  Bôhmen  im  14.  Jahrhundert 
(d'après  Israelitischer  Lehrerbote  ?).  =  =^  N°'  39  à  42.  Samuel  Oppen- 
heimer  (suite). 

Revue  de  l'histoire  des  religions  (Paris,  bimestriel).  3°  année,  tome  V. 
=:  =  N°  1,  janvier-février.  M.  Vernes  :  Les  plus  anciens  sanctuaires  des 
Israélites.  —  La  foi  en  la  rédemption  et  au  médiateur.  —  Périodiques  et 
sociétés  savantes.  =  =  N°  2,  mars-avril.  St.  Guyard  :  Bulletin  de  la  re- 
ligion assyro-babylonieune. —  Périodiques  et  sociétés  savantes. —  Biblio- 
graphie. 

N°  1.  —  Vernes  :  Le  premier  de  ces  sanctuaires  est  celui  qui  fut  établi 
par  Mika  [Juffes,  XVII  et  XVIII),  et  dont  la  tribu  de  Dan  enleva  l'image 
et  le  prêtre  pour  les  installer  à  Laïsch.  Les  adhérents  de  ce  culte  prétendent 
que  leur  dieu  a  été  desservi  par  Jonathan,  fils  de  Gersom,  fils  de  Moïse, 
mais  ce  nom  de  Moïse  aurait  été  substitue  par  eux  à  celui  de  Manassé 
(XVIII,  30;  Beuss,  ad.  /oc).  Un  sanctuaire  plus  important  a  été  celui  de 
Silo,  renfermant  une  arche,  probablement  avec  une  pierre  sacrée.  Ces  repré- 


BIBLIOGRAPHIE  301 

sentations  élémentaires  de  Dieu  étant  partout  plus  anciennes  que  les  idoles 
ou  images,  le  sanctuaire  de  Silo,  avec  son  arche  et  sa  pierre,  a  été  ou  pré- 
tendait être  un  des  plus  anciens.  Il  a  survécu  à  la  prise  de  l'arche  par  les 
Philistins,  et  peut-être  existé  jusqu'à  la  chute  du  royaume  des  dix  tribus. 
Sichem,  ancienne  ville  sainte  de  la  Palestine  et  qui  n'a  jamais  oublié  sa 
gloire  passée,  avait  un  temple  de  Baal  Berit,  un  chêne  sacré,  une  stèle, 
symbole  de  Dieu,  consacrée  de  nouveau  et  rendue  sainte  par  Abraham  et 
Jacob.  A  Ofra,  près  Sichem,  était  l'idole  en  or  de  Gédéon-Yerubbaal,  un 
autel,  un  pic  sacré  (aschéra).  A  Bétel  se  rattache  le  souvenir  de  la  pierre 
élevée  par  Jacob  et  du  culte  fondé  par  les  dix  tribus  dissidentes.  Guilgal, 
où  Josué,  après  le  passage  du  Jourdain,  fit  ériger  douze  pierres,  fut  aussi 
le  centre  fameux  d'un  culte.  M.  V.  croit  que  le  récit  de  Josué,  xxii,  con- 
cernant l'autel  construit  avant  (?)  leur  retour  dans  leur  territoire  par  les  tribus 
transjordaniqucs,  a  pour  objet  de  légitimer  et  de  justifier,  au  point  de  vue 
orthodoxe,  l'érection  d'un  autel  à  Guilgal.  Enfin  Gabaon  a  eu,  avant  la 
construction  du  temple  par  Salomon,  un  sanctuaire  vénéré.  Si  l'on  se  rap- 
pelle que  les  prêtres  des  sanctuaires  locaux  devaient,  après  la  conquête  du 
pays  par  les  Hébreux  (cf.  Ezéch.,  xliv,  10-14),  servir  comme  coupeurs 
de  bois  et  porteurs  d'eau  au  temple  des  Hébreux,  on  comprendra  ce  que 
signifie  le  curieux  épisode  des  Gabsonites  raconté  au  livre  de  Josué.  Il 
constate  que  le  clergé  indigène  de  Gabaon  est  soumis  au  Dieu  des  conqué- 
rants. Mais  Gabaon  garde  encore  une  certaine  importance,  comme  le 
prouve  le  sacrifice  que  ses  prêtres  accomplissent  sous  David,  lors  de  la  fa- 
mine, les  sacrifices  que  Salomon  fait  dans  cette  ville,  et  l'attention  excep- 
tionnelle que  la  Bible  accorde  aux  Gabaoniles. 

N°  2.  —  Guyard  :  On  a  inventé,  dans  ces  dernières  années,  une  langue 
dite  sumérienme  ou  accadienne,  qu'on  a  voulu  retrouver  dans  les  textes 
cunéiformes,  et  cette  langue  n'étant  pas  sémitique,  mais  étant,  d'après  les 
savants  qui  appuient  celte  théorie,  antérieure  à  l'assyrien,  on  en  a  conclu 
que  récriture  cunéiforme  et  la  civilisation  assyrienne  devaient  leur  origine 
à  une  race  non  sémitique.  C'est  M.  Jos.  Halévy  qui  a  le  premier,  et  avec 
une  grande  énergie,  combattu  cette  théorie.  M.  St.  Guyard  se  rattache  à 
l'opinion  de  M.  Halévy  et  montre  que  le  prétendu  suméro-accadiea 
n'existe  pas. 

The  Hebrew-Revicw  (Cincinnati,  trimestriel),  2"  volume.  =  =  N°  3. 
M.  Lilieutlial  :  The  Jew  a  riddlc.  - —  Thomas  d'Aquino  in  thc  Jewish  lile- 
raturc  (d'après  Ad.  Jellinek).  — '  M.  Lilienlhal  :  TTn.'nn  Nb  or  the  Blood 
Covenant. 

Lilienthal,  The  Jew  :  Apologie  des  Juifs,  —  Lilienthal,  Blood  Covenant  : 
Coutumes  diverses  chez  les  peuples,  qui  expliquent  la  défense  de  la  Bible  de 
se  percer  les  chairs  (Deut.,  xiv,  l). 

L'Univers  Israélite  (Paris,  bi-mensuel).  37°  année.  =  ^^N"  11.  Schuhl  : 
Préventions  des  Romains  contre  les  Juifs.  =  =  N"  16.  La  Chalitsa  de- 
vant la  loi  française,  lettre  de  M.  'Wogue  et  de  M.  Ch.  Lyon-Caen,  pro- 
fesseur h  la  Faculté  de  droit  de  Paris. 

La  Veu  del  Montserrat  CVich).  =  =  Numéro  du  22  avril  1882,  p.  123. 
Andreu  Balaguer  y  Mcriuo  :  Apuntacions  de  bibliografia  Catalana.  En 
Dalmau  Planes  y  son  traclact  d'Astrologia  que  li  feu  cscriure  lo  rey  eu 
Pcre  m  de  Catalunya  y  IV  d'Arago. 

Nous  avons  analysé,  dans  lo  tome  III  de  la  lievue,  p.  138"130,  un  travail 
de  M.  Stoinschneider  sur  des  tables  astronomiques  rédigées  par  Pierre 
Gilebcrt  et  son  élève  Dalmacius  Planes,  et  remaniées,  dans  un  certain 
système,  pour  le  même  roi,  par  un  Juif  castillan  appelé  Jacob  Carsium. 
M.  St.  avait  cherché  à  fixer  la  date  doTouvragc  original  et  du  remaniement 


302  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

par  Jacob  Carsium  ;  il  en  était  venu  à  cette  conclusion  que  l'ouvrage  de 
Jacob  Carsium  avait  été  composé  vers  1360  ou  un  peu  plus  tard,  et  que  le 
roi  pour  lequel  furent  faits  et  cet  ouvrage  et  celui  de  Gilebert  et  de  D.  Pla- 
nes, n'était  pas,  comme  le  dit  le  prologue  du  ms.  latin  10,263  de  la  Biblio- 
thèque nat.  de  Paris,  Pierre  III,  roi  d'Aragon,  mais  Pierre  IV.  M.  An- 
dréa Balaguer  y  M.  vient  de  faire  une  découverte  qui  confirme  l'hypothèse 
de  M.  St.  et  résout  la  question.  Cette  découverte  consiste  ea  trois  pièces 
dont  voici  l'analyse  :  1.  Le  roi  Pierre,  en  récompense  des  services  à  lui 
rendus  par  Dalmatius  Planes,  et  en  dédommagement  des  dépenses  faites  par 
celui-ci.  pour  certains  livres  d'astrologie  qu'il  a  traduits  [tradidistis]  pour 
le  roi,  lui  accorde  300  florins  d'or  d'Aragon.  Donné  à  Barcelone,  le  6  jan- 
vier 13G7  (Arch.  génér.  de  la  couronne  d'Aragon,  registre  1344,  1"  22  v°)  ; 
2.  Reçu  de  300  florins,  signé  par  Dalmacius  Planes,  à  Barcelone,  le  di- 
manche 24  janvier  1367  (Arch.  des  protocoles  du  district  notarial  de  Barc, 
manuel  des  écritures  du  notaire  Guillem  de  Sant  Hilari)  ;  3.  Le  roi  Pierre 
mande  à  son  trésorier  à  Barcelone  que  Dalmau  Planes,  à  qui  il  a  promis 
12  livres  pour  une  grande  et  solennelle  œuvre  qu'il  a  faite,  se  plaint  qu'il 
lui  reste  dû  encore  une  grande  partie  de  cette  somme  -,  le  roi  ordonne  qu'on 
lui  donne  tout  de  suite  un  à  compte  et  qu'on  lui  paie  le  reste  dès  qu'il  sera 
possible.  Donné  à  Saragosse  le  31  décembre  1381  (Arch.  gén.  de  la  cour. 
d'Aragon,  reg.  1270,  f°  41  r°).  Pierre  III  d'Aragon,  qui  est  Pierre  II  de 
Catalogne,  a  régné  de  1276  à  1285  (à  corriger.  Revue,  ibid.,  p.  139),  ce  n'est 
donc  pas  lui  qui  est  mentionné  dans  ces  pièces.  Pierre  IV  d'Aragon,  qui 
est  Pierre  III  de  Catalogne,  a  régné  de  1335  à  1385  (la  conquête  de  la  Sar- 
daigne  avait  eu  lieu  en  1324,  non  eu  1297;  à  corriger  ibid.).  C'est  ce  Pierre 
qui  a  commandé  des  travaux  astrologiques  à  Dalmatius  Planes,  c'est  lui 
aussi  qui  est  mentionné  dans  le  prologue  du  ms.  de  Paris  sous  le  nom  de 
Pierre  III  (de  Catalogne),  roi  d'Aragon,  de  Valence,  etc. 

Il  'Vessillo  israelitico  (Casale-Monferrat,  mensuel).  30*^  année.  =  = 
No  3.  A.  Pesaro  ;  Cenni  storici  sulla  comunità  isr.  di  Cento.  —  F.  Servi  : 
Samuel  Romanelli  (né  à  Mantoue  le  17  sept.  1757  ;  sou  épitaphe  ;  mort  à 
Casale,  17  oct.  1814"'. 

Zeitschrift  der  dcutschen  niorgenliindisclien  Gesellseliaft  (Leipzig, 
trimestriel).  36"  vol.  r=:  =  N"  l.Nôldeke  :  Article  sur  l'ouvrage:  Wo  lag 
das  Paradies?  de  Fried.  Delitzscli  (voir  Revue,  III,  p.  290). 

Allgcmeiiic  Zeituug  des  Judcnthuins  (Bonn,  hebdomadaire).  45°année. 
=:  =  N°  28.  M.  J.  Schleiden  (notice  nécrologique;  voir  la  Chronique). 
=  =  N°*  30-31.  Moses  Mendelssohn  und  der  Rector  Damm.  :=  =  N°  34. 
Teatru  israelit  (le  théâtre  Israélite  à  Bucharest,  d'après  la  Gazette  de  Co- 
logne). =z=zW  40.  Heinrich  Heine  als  deutscher  Patriot.  =;  =  N°  46. 
Alexander  von  Ilumboldt  und  die  Judcu  (extrait  d'une  lettre  du  12  sept. 
1836).  =  rrN"  48.  Auch  ein  Curiosum  (si  les  Peaux-rouges  descendent 
des  dix  tribus,  etc.,  dans  Otto  Reveutlow,  Amcrik.  Skizzcn).  ==  W  50. 
Ludwig  Barnay  und  Uriel  Acosla  im  Grand-Theatcr  zu  Amsterdam. 

Isidore  Loeb. 


BIBLIOGRAPHIE  303 


Le  Blîstépe  dn  Vîel  Testaînent,  publié,  avec  introduction,  notes  et  glossaire, 
par  le  baron  James  de  Rothschild.  Tome  III.  Paris,  libr.  Firmin  Didot,  1881. 
Ia-8°  de  cxi-428  pages. 


C'est  avec  une  douloureuse  émotion  que  'nous  annonçons  cet  ou- 
vrage posthume  de  notre  regretté  président  de  la  Société  des  Études 
juives.  La  publication  du  Mistére  du  Viel  Testament,  qu'il  avait 
commencée  pour  la  Société  des  Anciens  Textes  français,  est  une 
œuvre  de  longue  haleine  à  laquelle  il  consacrait,  depuis  quelques 
années,  sa  vaste  érudition  et  tous  ses  soins  de  savant  consciencieux. 
Quoique  d'autres  mains  que  les  siennes  soient  appelées  à  l'achever, 
elle  laissera,  dans  la  littérature  française,  un  témoignage  touchant 
de  son  goût  pour  la  science  et  un  souvenir  des  plus  honorables  pour 
le  nom  illustre  qu'il  a  porté. 

C'est  lui-même  qui  avait  imprimé,  dès  le  printemps  de  1881,1e 
texte  de  ce  troisième  volume  ;  il  a  préparé  en  grande  partie  l'introduc- 
tion de  ce  volume,  qui  a  été  complétée  par  ses  amis. 

L'introduction  est  précédée  d'un  extrait  du  discours  prononcé  par 
M.  Gaston  Paris,  président  de  la  Société  des  Anciens  Textes  fran- 
çais, le  21  décembre  1881,  à  la  séance  générale  de  cette  assemblée. 
Nous  devons  à  la  mémoire  du  président  qui  a  fondé  notre  Société  de 
reproduire  ici  quelques-unes  des  paroles  prononcées  par  M.  Gaston 
Paris. 

Le  baron  Nathan-James-Edouard  de  Rothschild  est  né  à  Paris  le 
28  octobre  1844  ;  il  a  été  enlevé  à  sa  famille  et  à  ses  amis  le  23  oc- 
tobre 1881.  C'est  lui  qui,  en  1874,  à  Vichy,  eut  l'idée  de  fonder  la 
Société  des  Anciens  Textes  français.  Il  en  parla  à  M,  Gaston  Paris. 
«  Nous  y  avons  pensé  plus  d'une  fois,  lui  répondit  M.  Gaston  Paris, 
mais  nous  craignons  un  insuccès.  Les  afl'aircs  de  ce  genre  ont  un  côté 
temporel  qui  nous  est  étranger  et  qui  nous  effraie.  —  Sa  proposition 
me  fit  cependant  réfléchir,  continue  M.  Paris,  et  le  lendemain,  je  lui 
dis  en  l'abordant  :  Eh  bien  !  la  société  dont  vous  me  parliez  hier,  nous 
la  fonderons  si  nous  pouvons  la  présenter  comme  ayant  pour  tré- 
sorier le  baron  James  de  Kolhschild.  —  J'y  consens  de  grand  cœur, 
dit-il  aussitôt,  et  la  Société  existait  l'année  suivante.  Vous  savez 
quel  intérêt  il  a  toujours  porté  à  nos  travaux  et  quel  précieux  con- 
cours il  nous  a  donné  et  valu.  Qu'il  fût  un  trésorier  hors  ligne,  c'est 
ce  qu'on  pouvait  attendre  ;  qu'il  fût  en  môme  temps  un  donateur  li- 
béral, on  n'en  était  pas  non  plus  étonné;  mais  ce  qui  surprit  fort 
ceux  qui  ne  le  connaissaient  que  de  nom,  ce  fut  de  trouver  en  lui 
un  excellent  éditeur  de  textes.  Je  ne  parlerai  pas  ici  des  ouvrages 
qu'il  a  publiés  ou  commencés  ailleurs  et  qui  auraient  justement 
fondé  la  réputation  d'un  littérateur  sérieux  ;  mais  le  Mistére  du  Viel 


30 'i  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Testament,  dont  il  a  pu  nous  donner  deux  volumes,  —  et  dont  la 
suite,  grâce  à  la  générosité  de  M'"^  j^  baronne  James  de  Rothschild  et 
à  l'active  amitié  de  M.  Emile  Picot,  ne  nous  fera  pas  défaut,  —  est 
une  publication  hors  ligne.  Pour  les  soins  à  donner  au  texte,  le 
baron  James  étonnait  parfois  les  éditeurs  les  plus  diligents  par  la  ri- 
gueur de  sa  méthode  et  la  minutieuse  exactitude  de  son  travail  ; 
pour  le  commentaire,  il  a  montré  une  information  que  peu  de  sa- 
vants auraient  possédée  au  même  degré...  « 

Nous  pouvons  nous  associer  entièrement,  dans  les  limites  de  notre 
compétence,  à  cet  éloge.  Il  est  justifié  de  nouveau  par  la  Notice  qui 
précède  le  troisième  volume  du  Mistére.  Ce  volume,  qui  va  du  vers 
17,567  au  vers  27,113,  contient  l'histoire  de  Joseph,  la  mort  de  Jacob, 
la  captivité  d'Egypte,  la  vie  et  la  mort  de  Moïse.  Nous  remarquons, 
dans  la  Notice,  les  comparaisons,  encore  plus  nombreuses  que  dans 
les  volumes  précédents,  tirées  de  la  littérature  rabbinique  :  Gomment 
la  femme  de  Putiphar  était  seule  à  la  maison  avec  Joseph  (p.xiiilisez 
rascha,  non  roscha);  pourquoi  Putiphar  était  stérile  (p.  xvii);  pour- 
quoi Pharaon  fit  tuer  les  enfants  mâles  des  Hébreux  (p.  lxxxvii  ;  à 
la  note  1 ,  lire  Zunz,  non  Zung)  ;  etc.  Le  Midrasch  connaît  parfai- 
tement bien  l'épreuve  du  charbon  (pageLxxxviii).  Aux  pages  xxvi  à 
Lxxxii,  on  trouvera  une  bibliographie  extrêmement  remarquable  des 
pièces  dramatiques  dont  Joseph  est  le  héros  :  pièces  latines  (29  pièces), 
françaises  (31  pièces),  béarnaises  (1  pièce),  ladines  (3  pièces),  ita- 
liennes (9  pièces),  espagnoles  (10  pièces),  anglaises  (3  pièces),  néerlan- 
daises (11  pièces),  allemandes  (28  pièces), danoises  (1  pièce),  suédoises 
(3  pièces),  russes  (2  pièces),  serbo-croates  (1  pièce),  polonaises  (1  pièce), 
celtiques  (2  pièces),  sans  compter  les  difïerentes  éditions,  quelquefois 
très  nombreuses,  d'une  même  pièce  et  les  traductions  en  langue 
étrangère,  qui  sont  également  énumérées.  Les  mêmes  indications 
sur  l'histoire  de  Moïse,  qui  a  beaucoup  moins  occupé  les  dra- 
maturges, se  trouvent  p.  lxxxix  et  p.  xc  ;  puis  p.  xcvi  à  p.  c, 
p.  civ  à  cvi,  p.  ex  à  CXI.  On  peut  apprécier  par  ces  seules  indications 
l'étendue  des  recherches  et  le  vaste  savoir  de  M.  le  baron  James  de 
Rothschild.  La  lecture  do  son  dernier  ouvrage  a  réveillé  dans  nos 
cœurs  le  regret  et  la  douleur  de  l'avoir  perdu. 

Isidore  Loeb. 


Torqiicinada.  drame,  par  Victor  Hugo.  Paris,  libr.  Calmanu  Lévy,  in-S»  de  203  p. 


L'Inquisition  est  loin  de  nous,  mais  le  souvenir  de  ses  épouvanta- 
bles autodafé  est  encore  si  vif  qu'on  ne  saurait  prononcer  son  nom 
sans  éveiller  dans  les  cœurs  un  sentiment  de  douleur  et  de  réproba-: 


BIBLIOGRAPHIE  305 

tion.  M.  Hyacinthe  Loyson  s'est  donné  une  peine  superflue  lorsqu'il 
a  récemment,  dans  une  conférence  publique,  pris  à  parti  sur  ce  sujet 
un  prédicateur  de  Notre-Dame.  L'Inquisition  d'Espagne,  au  moins, 
avec  sa  procédure  hypocrite,  ses  hideuses  processions,  ses  cachots, 
ses  tortures  et  ses  bûchers,  restera  à  jamais  exécrée  comme  une  des 
inventions  les  plus  atroces  du  fanatisme  religieux.  Torquemada  n'a- 
point  créé  l'Inquisition,  comme  Victor  Hugo  parait  le  supposer,  car 
elle  existait  longtemps  avant  lui,   sous  un  aspect  moins  barbare,  il 
est  vrai,  dans  le  midi  de  la  France,  mais  il  l'a  introduite  en  Castille, 
il  en  a  été  la  vivante  incarnation.  Victor  Hugo  Fa  fait,  en  un  sens, 
trop  grand.  Son  Torquemada   est  un  génie  sanguinaire,  il  effraie,  il 
épouvante,  il  n'est  pas,  ce  qu'il  devrait  être,  haïssable  et  odieux. 
Lorsque,  repaissant  ses   yeux  du  quemadero  où  gémissent  ses  vic- 
times, il  lance    au  ciel  son  cantique  sauvage  (p.  173),  on  frissonne  et 
on  tremble  comme  devant  un  monstre,  mais  l'impression  est  plutôt 
physique  que  morale.  Cet  homme  n'a  pas  la  moindre  conscience  du 
mal  qu'il  fait,  ce  n'est  pas  un  homme,  avec  un  cœur  et  des  entrailles, 
c'est  une  formule,  un  paradoxe,  le  massacre  par  amour,  l'homicide 
par  charité.  C'est  le  sophisme  d'un  frénétique  ou  d'un  halluciné.  Ces 
théories  féroces  pouvaient  hanter  le  cerveau  de  maint  inquisiteur,  et 
plus  d'un,  en  y  mettant  beaucoup  de  bonne  volonté,  pouvait  s'ima- 
giner qu'en  brûlant  les  Juifs,  l'Inquisition  leur  donnait  une  preuve  de 
charité  angélique,  mais   tout  le  monde  sait  qu'à  ces  beaux  senti- 
ments s'en  mêlaient  d'autres  beaucoup  moins  nobles.  On  n'était  déjà 
pas  si  fanatique  à  la  fin  du  xv°  siècle,  la  politique  avait  bien  sa  part, 
une  part  très  grande,  dans  les  persécutions  contre  les  Juifs.  L'Inqui- 
sition aussi  bien  que  le  roi  d'Espagne  ne  pensaient  pas  seulement  au 
salut  des  âmes  et  aux  intérêts  du  ciel  lorsqu'ils  dressaient  les  bû- 
chers en  permanence  sur  les  places  publiques,  et  Torquemada  n'était 
pas  aussi  inconscient,  aussi  irresponsable  ni  aussi  séraphique  qu'on 
pourrait  le  croire.  Lors  môme  qu'il  eût  été  ce  mystique  sincère  que 
nous  représente  Victor  Hugo,  sa  sincérité  ne  pourrait  pas  l'absoudre. 
Son  erreur  est  trop  grave,  son  assurance  trop  grande,  on  n'a  pas  le 
droit  de  se  tromper  ainsi  et  à  ce  point.  Il  est  bon  de  réfuter  ses  théo- 
ries, il  faut  aussi  flétrir  ses  actes.  Ils  ne  sont  pas  seulement  condam- 
nables parce  qu'ils  sont  absurdes  et  insensés,  mais  parce  qu'ils  sont 
cruels,  inhumains,  injustes,  immoraux.  Il  n'y  a  pas  de  maladie  men- 
tale qui  justifie  de  tels  forfaits. 

Victor  Hugo  ne  les  justifie  pas,  l'ùme  de  l'iuimauité  est  en  lui,  il  est 
le  grand  poète  des  misérables,  le  père  miséricordieux  des  humbles  et 
des  malheureux.  Mais,  dans  ce  drame,  son  cœur  s'est  tu,  impuissant 
peut-être  à  exprimer  sa  douleur.  Ce  qu'il  a  vu  surtout  c'est  le  côte 
extérieur,  dramatique  et  terrible  de  l'Inquisition,  les  san-benitos,  les 
cagoules,  les  bannières  noires,  les  têtes  de  mort,  les  poteaux,  les 
flammes,  les  têtes  hurlantes  des  suppliciés.  L'action  du  drame  est 
peu  de  chose  :  Torquemada  obtient  du  pape  la  permission  d'intro- 
duire l'Inquisition  en  Espagne,  il  fuit  cliasser  les  Juifs,  humilie  le  roi 


306  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

et  couronne  son  œuvre  en  sauvant  à  sa  manière,  toujours  par 
pur  amour,  un  jeune  prince  qui  l'avait  tiré  de  Vin-pace  où  il 
allait  mourir.  La  plus  belle  partie  de  l'œuvre  sont  les  trois  ou 
quatre  tableaux  qui  la  résument.  Celui  qui  termine  le  prologue 
(p.  S7)  et  où  Torquemada  descend  marcbe  à  marche  dans  Vin-pace, 
serait,  à  la  scène,  d'un  effet  prodigieux.  Tout  aussi  dramatique  est 
la  rencontre  de  Torquemada  avec  François  de  Paule  (p.  113),  son 
Irruption  chez  le  roi  au  moment  où  celui-ci  va  céder  à  la  prière  des 
Juifs  et  révoquer  l'édit  d'expulsion  fp.  171),  son  grand  monologue  du 
quatrième  acte  dont  nous  avons  parlé  plus  haut.  Mais  cette  figure 
grandiose  parle  aux  yeux.  Les  personnages  du  drame  sont  pitto- 
resques, magnifiques,  mais  unis,  nus  et  de  bronze.  L'âme  humaine 
est  plus  variée  et  compliquée  que  cela.  Le  pape  signe  en  riant 
l'édit  que  lui  demande  Torquemada  (p.  128),  on  sait  cependant  qu'il 
n'y  a  pas  mis  cette  désinvolture  et  que  la  bulle  n'a  été  accordée 
qu'après  d'assez  longues  négociations.  Le  pauvre  Moïse  b.  Habib, 
le  grand  rabbin  (pourquoi  Victor  Hugo  a  choisi  justement  ce  nom, 
nous  ne  saurions  le  dire),  se  répand  en  lamentations  éloquentes 
(p.  163J\  mais  sa  plainte  n"a  qu'une  note,  le  gémissement;  le  dis- 
cours que  la  jeune  juive  de  Montesquieu  adresse  à  l'Inquisition  est 
bien  plus  fort,  dans  sa  simplicité,  et  plus  touchant.  Le  seul  person- 
nage qui  s'exprime  comme  un  homme,  c'est  François  de  Paule 
(p.  123).  Sa  parole  est  douce,  comme  il  convient  au  bon  ermite,  il  n'y 
manque  qu'un  peu  plus  de  fermeté  et  d'accent.  Cette  protestation 
énergique  que  nous  aurions  souhaitée,  il  aurait  fallu  la  placer  dans 
la  bouche  d'un  Juif  ou  dans  celle  d'un  grand  d'Espagne.  11  aurait 
parlé  au  nom  du  christianisme,  au  nom  de  la  morale  et  des  intérêts 
de  l'État.  A  côté  des  effusions  lyriques  de  Torquemada,  il  eût  été  bon 
et  consolant  de  faire  entendre  la  voix  de  la  raison,  de  la  justice,  de  la 
religion,  de  l'humanité.  Quelque  politique  sage  et  modéré,  quelque 
évoque  véritablement  pieux  s'en  serait  chargé.  Et  nous  aurions  été 
tout  à  fait  soulagés  si  un  chevalier  de  tempérament  moins  calme  ou 
un  Juif  moins  endurant  nous  avait  donné  ce  spectacle  d'une  bonne 
explosion  de  colère  et  d'indignation. 

Isidore  Loeb. 


La  tluivc,  poésie  par  Henuy  Gréville,  dans  la  Revue  politique  et  lill&aire, 
du  7  janvier  1882,  p.  '23-26. 


L'histoire  ([ui  se  déroule  en  traits  rapides  daus  «  La  Juive  »  n'est 
empruntée  ù  aucune  chronique.  L'uclion  se  passe  dans  (^  une  ville 


BIBLIOGRAPHIE  307 

d'Espagne  »,  on  ne  sait  laquelle.  Ni  la  Juive  ni  son  fils  ne  portent 
un  nom.  De  telles  indications  trop  précises  auraient  pu  diminuer  la 
portée  morale  de  la  pensée  philosophique.  Le  plaidoyer  daté  de  fé- 
vrier 1876,  est  prononcé  non  point  en  faveur  d'un  individu,  mais  en 
faveur  d'une  race.  Ce  que  l'auteur  se  propose,  c'est  de  flétrir  non 
point  quelques  hommes,  mais  de  vieilles  institutions  et  de  nouvelles 
tendances  où  l'on  cherche  à  les  faire  revivre. 

La  Juive  vivait  ignorée  dans  une  ville  d'Espagne,  se  tenant  à 
l'écart  «tout  au  bout  du  faubourg»,  habitant  sa  hutte  et  son  tout 
petit  jardin  avec  son  fils,  sans  qu'on  s'occupât,  dans  l'humble  voisi- 
nage, de  sa  foi  judaïque,  lorsque  la  très  sainte  Hermandad,  dont  «  le 
feu  vorace»  lui  avait  jadis  dévoré  son  mari,  parvint  à  découvrir  le 
secret  de  son  origine,  et  la  fit  saisir  avec  l'enfant. 

Une  Juive  autheatique,  ah  !  la  belle  capture  ! 

La  mère,  conduite  devant  «le  juge  triomphant»,  avoua  tous  ses 
méfaits  et  refusa  d'abjurer.  Mais,  par  un  mensonge  pieux,  elle  vou- 
lut sauver  l'enfant.  Ce  n'était  pas  son  fils,  dit-elle;  elle  avait  volé  cet 
enfant  à  Séville,  ayant  eu  le  malheur  de  voir  mourir  le  sien.  Le  len- 
demain matin,  lorsque  l'aube  parut,  les  juges  vinrent  en  pompeux 
équipage  chercher  leur  précieuse  conquête.  L'Inquisiteur  ne  voulut 
même  point  permettre  que,  par  un  dernier  baiser,  la  mère,  «  bête 
immonde  »,  souillât  l'innocence  nouvelle  de  ce  jeune  chrétien 
ressuscité  par  le  Saint-Office.  Et  la  procession  l'emporte  de  force  au 
milieu  du  tapage  : 

L'église  triomphante  acclamait  sa  victoire  ; 
La  Juive  succomba. . .  Levant  son  œil  hagard, 
Elle  appela  son  fils.  L'enfant  dans  son  regard 
Connut  la  vérité!  «  Mère!  •  dit-il.  La  llammc 
Montait. . .  La  femme  juive  à  Dieu  rendit  son  âme 
Heureuse  et  consolée,. et  ne  regrettant  rien. 

Son  fils  n'oublia  point,  et  ne  fut  pas  chrétien. 

Le  lecteur  me  pu'donncra  d'avoir  reproduit,  dans  un  recueil  en- 
tièrement consacré  à  la  science,  le  sujet  et  quelques  vers  de  ce  petit 
drame  où  la  grandeur  des  idées  est  encore  rehaussée  par  la  simpli- 
cité sans  apprêt  du  style  et  la  noble  pureté  de  l'expression.  Je  sou- 
haite d'avoir  pu  mettre,  dans  ma  courte  analyse,  quelque  chose  de 
l'admiratiou  que  m'a  fait  éprouver  la  lecture  de  cette  poésie. 

II.  D. 


CHRONIQUE 


L'allé  Grégoire.  —  Un  comité  s'est  formé  à  Lunéville  pour  élever 
une  statue  à  Tabbé  Grégoire.  Aucun  personnage  de  la  Révolution 
française  ne  mérite  plus  que  ce  modeste  prêtre  la  reconnaissance 
des  Juifs  pour  la  part  qu'il  a  prise  à  leur  émancipation.  On  sait  que 
c'est  lui  qui  remporta  le  prix  proposé  par  l'Académie  de  Metz  sur  la 
question  de  la  situation  sociale  des  Juifs.  Son  mémoire  a  été  im- 
primé sous  le  titre  de  :  Essai  sur  la  régénération  physique,  morale 
et  politique  des  Juifs....,  par  M.  Grégoire,  curé  du  diocèse  de  Metz 
(Metz,  imp.  Claude  Lamort;  Paris,  libr.  Belin,  1789).  La  même  an- 
née, il  écrivit  sa  Motion  en  faveur  des  Juifs,  précédée  d'une  notice  his- 
torique sur  les  persécutions  qu'ils  tiennent  d'essuyer  en  divers  lieux, 
notamment  en  Alsace,  et  sur  V admission  de  leîtrs  députés  à  la  Barre 
de  VAssemllé^  nationale  (Paris,  Belin,  1789).  Son  Histoire  des  sectes 
religieuses  esl  de  1814.  Dans  la  séance  de  l'Assemblée  nationale  du 
3  avril  1789,  il  réclama  lïntervenlion  de  l'Assembléepour  faire  cesser 
les  persécutions  en  Alsace.  Il  plaida  la  cause  de  l'émancipation  des 
Israélites  dans  les  séances  du  28  septembre  1789,  du  28  janvier  1790, 
et  ce  fut  sous  sa  présidence,  dans  la  séance  du  18  janvier  1791, 
qu'une  motion  fut  faite  pour  régler  définitivement  cette  question  ; 
elle  ne  le  fut  cependant  que  le  27  septembre  suivant.  Après  le  pre- 
mier Empire,  l'abbé  Grégoire  vécut  pauvrement  et  nous  nous  rap- 
pelons qu'Adolphe  Crémieux  fut  son  avocat  dans  un  procès  qu'il 
soutint  pour  obtenir  le  règlement  d'une  pension  que  lui  devait  l'État. 

M.  A.  de  Longpérier .  —  M.  Henri-Adrien  Prévost  de  Longpérier, 
membre  de  l'Institut,  ne  à  Paris  le  21  septembre  1816,  est  mort  le 
14  janvier  1882.  C'était,  parmi  les  savants  français,  une  des  person- 
nalités les  plus  remarquables  et  les  plus  sympathiques.  M.  de  L.  s'est 
aussi  occupé  des  antiquités  juives.  Des  communications  de  lui  sur 
des  sceaux  juifs  et  sur  la  ville  d'IIysope  se  trouvent  dans  la  col- 
lection des  Comptes-rendus  de  l'Académie  des  inscriptions,  et  une 
étude  sur  les  pierres  tumulaires  hébraïques  du  Musée  de  Cluny,  à 
Paris,  dans  le  Journal  des  Savants. 

M.  Lilienihal  et  la  Russie.  —  Le  D""  Lilienthal,  rabbin,  né  à  Munich 
en  1815,  est  mort  à  Cincinnati,  le  vendredi  31  mars  1882.  Sa  biogra- 
phie forme  un  chapitre  instructif  de  l'histoire  des  Juifs  de  Russie, 
sur  lesquels  se  portent  en  ce  moment  l'attention  et  les  sympathies 
de  l'ELuope.   11  y  u   environ  quarante  ans,  le  nom  de  M.  Lilienthal 


CHRONIQUE  309 

était  dans  tous  les  journaux.  11  a  eu,  à  cette  époque,  son  heure  de 
célébrité.  Une  généreuse  illusion  l'avait  conduit  en  Russie,  où  il 
devait,  avec  l'aide  du  gouvernement,  régénérer  les  écoles  Israélites. 
De  cruelles  déceptions  l'y  attendaient.  Après  de  louables  efforts, 
rendus  stériles  par  la  politique  changeante  et  finalement  persécu- 
trice du  gouvernement,  il  dut  quitter  ce  pays  le  cœur  plein  d'amer- 
tume et  de  douleur. 

M.  Lilienthal  s'est  d'abord  fait  connaître  par  un  travail  sur  les 
manuscrits  hébreux  de  la  bibliothèque  de  Munich,  publié  dans  le 
Beiblatt  de  \'Allge77i.  Zeitung  des  JudentJmms^  en  1838'.  Peu  de  temps 
après,  il  fut  nommé  prédicateur  et  directeur  général  des  écoles  Israé- 
lites de  Riga.  Voici  dans  quelles  circonstances. 

Riga  était  la  seule  ville  de  Livonie  où,  à  cette  époque,  il  fût  permis 
aux  Israélites  de  demeurer.  La  communauté  Israélite  de  cette  ville 
se  félicitait  d'avoir  deux  siècles  d'existence,  elle  trouvait  sa  situation 
tolérable,  surtout  depuis  l'ukase  du  13/25  avril  4  835,  qui  avait  réglé 
et  jusqu'à  un  certain  point  amélioré  la  situation  des  Juifs  en  Russie*. 
Elle  avait  le  grand  désir  de  fonder  une  bonne  école  et  elle  avait 
publié  un  appel  pour  trouver  un  directeur*.  Cet  appel  fut. renouvelé 
en  '1839,  lorsqu'elle  eut  obtenu  du  ministère  de  l'instruction  pu- 
blique un  décret,  daté  du  12  juin  1839,  qui  lui  permit  de  lever  un 
impôt  spécial  de  50  copeks  pour  l'entretien  de  cette  école^.  Les  Israé- 
lites de  Riga  faisaient  remarquer  avec  bonheur  que  cette  école  était 
la  première  école  juive  de  Russie  placée  sous  l'autorité  de  l'Univer- 
sité, comme  toutes  les  autres  écoles  du  pays  ^  L'école  fut  ouverte  le 
4  5/27  janvier  4  840,  sous  la  haute  direction  de  M.  Lilienthal^  qui 
paraît  avoir  été  désigné  pour  ces  fonctions  à  la  communauté  par 
M.  le  D'"  Philippson,  directeur  deVAllgemeine  Zeitung  des  Judenthums. 
Les  efforts  pour  la  culture  de  la  communauté  étaient  encouragés  par 
le  comte  Ouwaroff,  ministre  de  l'instruction  publique  %  qui,  en 
toutes  circonstances,  montra  les  meilleures  dispositions  en  faveur 
des  Juifs.  L'empereur  Nicolas  envoya  même  à  l'intelligent  prédica- 
teur une  bague  en  brillants,  en  témoignage  de  satisfaction*. 

L'exemple  de  Riga  porta  ses  fruits.  Beaucoup  d'autres  commu- 
nautés russes  voulurent  avoir  des  écoles  nouvelles.  C'était  l'empe- 
reur lui-même  qui  avait  pris,  dans  le  conseil  d'Ktat,  l'initiative  de 
mesures  libérales  pour  le  progrès  de  l'instruction  parmi  les  Israélites. 
Une  enquête  avait  été  ouverte  pour  cet  objet,  et,  le  45  janvier  4841,  le 

>  P.  /i9  et  ss. 

*  La  traduction  de  cet  ukase  important  se  trouve  dans  VAllijenicinc  Zeitung  des  Ju- 
denthums,  1840,  p.  \M  et  ss.  Nous  avertissons  ici  <[u'à  moins  de  mention  contraire, 
toutes  les  citations  de  cet  article  sont  tirées  de  ce  mOnio  journal. 

3  1837,  p.  /.ÎO  et  414. 

«  18:59,  p.  81. 

''  1839,  p.  390. 

«  1840,  p.  174;  221.  2f)9,  339. 

7  1840,  p.  r)27. 

8  1840,  p.  Cil. 

T.   IV.  21 


310  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ministre  de  l'instruction  publique  avait  appelé  M.  le  D""  Lilienthal 
à  St-Pétersbourg '.  M.  L.  fut  chargé  de  chercher  des  professeurs 
en  Allemagne  et  de  préparer  les  plans,  programmes,  projets  néces- 
saires pour  une  vaste  œuvre  de  réorganisation  des  écoles  juives.  Le 
6  mars,  de  retour  à  Riga,  il  pouvait  déjà  dresser  une  liste  de  plus  de 
200  candidats  aux  fonctions  d'instituteur. 

Cependant  les  papiers  restaient  au  ministère  et  les  candidats  se 
découragèrent.  Au  mois  de  décembre  1841,  un  Israélite  de  Wilna 
s'entretint  des  écoles  de  sa  ville  avec  le  ministre  et  il  fut  convenu 
entre  eux  que  M.  L.  se  rendrait  dans  cette  ville  pour  étudier  la 
question.  Il  y  alla  en  janvier  1842'^  La  communauté  avait  déjà 
réuni  un  fonds  de  5,100  roubles  pour  la  fondation  de  l'école  et  tout 
semblait  annoncer  que  le  projet  aboutirait  promptement.  Cependant 
il  y  eut  certaines  résistances  dans  la  communauté.  Il  ne  manquait 
pas  de  gens  pour  dire  que  l'instruction  sans  l'émancipation  rendrait 
les  Juifs  malheureux,  parce  qu'ils  deviendraient  beaucoup  plus  sen- 
sibles à  l'infériorité  légale  dont  ils  étaient  frappés,  et  que  les  jeunes 
gens  élevés  dans  les  écoles  formeraient  une  classe  de  mécontents  qui 
se  plaindraient  des  hommes  et  de  Dieu.  L'Etat  et  la  religion  avaient, 
à  leurs  yeux,  un  égal  intérêt  à  ne  pas  donner  à  la  jeunesse  Israélite 
une  éducation  qui  serait  en  désaccord  avec  la  situation  légale  des 
Juifs  en  Russie.  Ce  raisonnement  était  en  partie  fondé,  si  aucun  rai- 
sonnement pouvait  prévaloir  contre  la  nécessité  de  l'instruction, 
mais  une  grande  partie  de  la  communauté  juive  de  Wilna  désirait 
ardemment  améliorer  les  écoles  Israélites.  On  a,  dans  les  lettres 
d'un  témoin  oculaire,  le  tableau  très  animé  des  discussions,  des 
luttes,  des  espérances  et  des  craintes  qui  partageaient  la  commu- 
nauté et  avaient  enflammé  les  esprits  ^ 

Avant  que  rien  ne  fût  arrêté  à  Wilna,  les  Israélites  de  Minsk 
avaient  appelé  M.  L.  pour  les  aider  également  à  fonder  une  bonne 
école.  Cet  appel  parut  immédiatement  suspect  à  ceux  qui  connais- 
saient cette  communauté.  Elle  passait  pour  un  des  centres  les  plus 
ardents  de  l'orthodoxie  aveugle  et  de  ce  fanatisme  particulier  appelé 
en  Russie  le  hassidisme.  Les  amis  de  M.  L.  craignirent  un  piège  et 
le  dissuadèrent,  mais  en  vain,  de  se  rendre  dans  cette  ville.  Leurs 
appréhensions  furent  justifiées  par  l'événement.  M.  L.  fut  mal 
accueilli,  accablé  d'insultes  et  de  calomnies.  Ce  qu'il  y  eut  de  plus 
l'ùcheux  dans  cette  aventure,  c'est  que  l'opposition  qui  avait  éclaté  à 
Minsk  enhardit  l'opposition  d'abord  timide  de  certains  Israélites  de 
Wilna.  D'un  autre  côté,  les  amis  de  M.  L.  dans  cette  ville  avaient 
fini  par  le  trouver  trop  tiède,  trop  enclin  à  respecter  les  scrupules 
religieux  des  orthodoxes,  ils  ne  lui  prêtèrent  plus  un  appui  aussi 
énergique.  Le   quatrième  jour  de  Pâque,  il  y  eut,  à  Wilna,  une 


•  18'i2,  p.  603. 

«  1842,  p.  S9  et  11)3. 

'  B.  Maudclstmnm,  CallUfhildir,  Wicu,  1877,  2-^^  partie,  p.  IH  cl  ss. 


CHRONIQUE  311 

assemblée  générale  de  la  communauté  où  les  adversaires  de  l'école 
combattirent  avec  la  dernière  énergie.  La  lutte  ne  fut  pas  décisive, 
mais  les  passions  étaient  excitées  au  plus  baut  point  et  M.  L.  lui- 
même  ne  conserva  pas,  dans  ces  pénibles  circonstances,  toute  l'éga- 
lité d'âme  qu'il  aurait  fallu  '.  Il  était  blessé,  irrité,  il  ne  voyait  de 
salut  que  dans  l'intervention  active  du  gouvernement.  D'après  lui, 
le  ministre  de  l'instruction  publique  avait  à  dessein  laissé  la  crise  se 
produire  et  se  développer,  afin  de  connaître  l'état  des  esprits  dans 
chaque  communauté  et  d'abandonner  les  communautés  où  la  majo- 
rité était  contraire  aux  écoles. 

Le  13/25  avril,  M.  L.  se  rendit  à  Saint-Pétersbourg,  pour  rendre 
compte  de  son  voyage  au  ministre,  et,  sur  la  proposition  de  celui-ci, 
l'empereur  signa,  le  22  juin/4  juillet,  un  ukase  dont  voici  les  princi- 
pales dispositions  :  Par  un  rescrit  impérial  du  19/31  août  1827,  toutes 
les  écoles  existant  dans  l'empire,  sauf  les  écoles  militaires  et  ecclé- 
siastiques, ayant  été  mises  sous  la  direction  du  ministère  de  l'instruc- 
tion publique,  celui-ci  était  maintenant  chargé  d'appliquer  cette 
mesure  à  toutes  les  écoles  des  Juifs,  écoles  primaires,  écoles  rabbi- 
niques,  etc.  Une  commission  provisoire,  composée  de  quatre  rabbins, 
un  pour  chacun  des  gouvernements  où  demeurent  des  Juifs,  sera 
nommée  pour  contribuer  à  l'exécution  de  la  mesure  ;  elle  siégera  à 
Saint-Pétersbourg.  En  outre,  sur  la  proposition  du  ministre  de 
l'instruction  publique,  M.  L.  fut  chargé  par  l'empereur  de  parcourir 
tous  les  gouvernements  russes  habités  par  les  Juifs,  afin  de  faire  de 
la  propagande  en  faveur  des  écoles.  Il  dut  se  mettre  en  route  le 
30  juillet/11  août,  et  une  somme-  de  10,000  roubles  fut  mise  à  sa  dis- 
position pour  frais  de  voyage.  Une  lettre-circulaire  du  comte  Ou- 
warofl',  ministre  de  l'instruction  publique,  aux  gouverneurs,  datée 
du  23  juillet/ 4  août,  annonçait  en  excellents  termes  l'intention  for- 
melle de  l'empereur  de  placer  les  écoles  juives  sous  la  direction  du 
ministère  et  d'améliorer  ces  établissements,  en  même  temps  qu'elle 
leur  recommandait  de  bien  accueillir  et  de  seconder  le  directeur  des 
écoles  Israélites  de  Riga,  le  rabbin  D"'  Lilienthal.  Enfin,  une  lettre  du 
même  ministre,  datée  du  22  juillet/3  août,  contenait  des  instructions 
précises  pour  M.  Lilienthal  : 

«  Votre  itinéraire  passe  par  Riga,  Mitau,  Kowno,  Wilna,  Minsk, 
Grodno,  Bialistock,  Zitomir,  Berditschew,  Kamenecz-Podolsk,  Kischi- 
new,  Odessa,  jusqu'à  Cherson;  de  là,  vous  passerez,  dans  le  gouver- 
nement de  Kiew  et  irez  à  Kiew  par  Uman  ;  puis  vous  continuerez 
votre  route  par  Tschernigow,  Mohilew  et  Witebsk,  pour  revenir  à 
Saint-Pétersbourg.  » 

La  lettre  prescrivait  ensuite  à  M.  L.  la  conduite  suivante  :  Visiter 
partout  les  autorités  civiles  et  scolaires,  expliquer  aux  Juifs  les 
intentions  de  l'empereur,  lâcher  d'obtenir  d'eux  le  vitle  des  ressources 
nécessaires,  visiter  leurs  écoles  exisluuleSj  recueillir  sur  elles  des 

>  1842,  p.  OOG. 


312  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

renseignements  statistiques,  s'enquérir  des  jeunes  gens  instruits  et 
de  valeur,  dont  le  concours  pourrait  être  utile;  enfin,  tâcher  d'être 
de  retour  avant  le  15  octobre.  A  cette  époque,  les  séances  de  la  com- 
mission spéciale  des  quatre  rabbins  seront  ouvertes,  et  M.  L.  avait 
reçu  du  ministre  la  permission  d'y  inviter  sir  Moses  Montefiore  et 
Crémieux.  Après  que  la  commission  aurait  délibéré,  on  se  proposait 
de  demander  l'appui  et  le  concours  financier  des  Israélites  des  autres 
pays. 

Avant  d'entreprendre  son  voyage,  M.  L.  rédigea  en  hébreu,  sous  le 
titre  de  î^3>iia'^  ^ny/2,  une  espèce  de  manifeste  où  il  s'etlbrçait  de  pré- 
parer les  esprits  et  de  les  convaincre  de  l'utilité  de  l'œuvre'. 

Les  communautés  juives  parurent  heureuses  de  l'accueillir.  Des 
lettres  de  Mohilew,  où  M.  L.  se  trouvait  en  octobre,  de  Varsovie  et 
de  Berditschew,  indiquaient,  chez  les  populations  Israélites,  un  véri- 
table enthousiasme*.  Il  en  fut  de  même  à  Odessa,  lorsque  M.  L.  y 
vint  à  la  fin  du  mois  d'octobre',  à  Kischinew*.  Le  14/26  janvier  1843 
M.  L.  était  de  retour  à  Saint-Pétersbourg  et  comme  il  craignait  que 
sa  mission  ne  durât  encore  longtemps,  il  donna  sa  démission  de 
directeur  des  écoles  de  Riga^  La  convocation  de  la  commission  des 
quatre  était  attendue  pour  fin  février"  et  on  espérait  que  sir  Moses 
Montefiore  prendrait  part  aux  séances. 

La  commission  se  trouva  formée  à  la  fin  d'avriF.  Elle  était  com- 
posée des  personnes  suivantes  :  le  conseiller  d'État,  chevalier  de 
Wrontchenko,  président  ;  chevalier  Dukstadukschinski,  rapporteur  ; 
D^"  Lilienthal,  commissaire  ;  un  secrétaire,  le  rabbin  de  Wolosni,  le 
rabbin  de  Lubawitz,  le  directeur  de  l'école  Israélite  d'Odessa,  un 
banquier  Israélite  de  Berditschew.  Elle  siégea  jusqu'au  vendredi 
27  aoùt/8  septembre*,  mais  il  se  passa  du  temps  jusqu'à  ce  qu'on 
entendit  parler  de  ses  délibérations  et  des  résultats  qu'elles  avaient 
eus.  Ce  n'est  que  le  13/23  novembre  1844  qu'on  en  put  apprécier  les 
effets  par  un  ukase  de  l'empereur  Nicolas  signé,  à  cette  date,  à 
Gatschinio,  et  contenant  les  dispositions  suivantes''  : 

1*^  Pci-mission  accordée  de  nouveau  aux  Juifs  (en  vertu  d'un  ukase 
de  1804  et  d'un  autre  de  1833)  de  fréquenter  les  écoles  chrétiennes, 
de  fonder  des  écoles  du  l*^^''  ordre  (écoles  élémentaires)  et  du  2°  ordre, 
de  former  des  écoles  rabbiniques  ayant  rang  de  gymnase; 

i°  Les  élèves  juifs  dans  les  écoles  juives  ou  chrétiennes  placées  sous 
la  direction  du  gouvernement,  les  professeurs  chrétiens  ou  juifs  dans 

>  l.s'ri.  ]j.  Oiii  ;  <•!'.,  p.  (;(i2. 

■"  1842,  p.  714.  Tlo. 

'  1842,  p.  760,  et  1S.',;i,  p.  a, 

"  1843,  p.  22. 

•  1843,  p.  131,  M.  L.  lui  remplacé  jcn  octobre  1843;  p.  G4'J. 

•■■  1843,  p.  190. 

"  1843,  p.  310. 

»  1843,  p.  002. 

«  184',,  p.  737. 


CHRONIQUE  313 

les  écoles  juives,  jouiront  de  tous  les  droits  et  privilèges  accordés 
aux  autres  élèves  ou  professeurs. 

Bientôt  après  (13/25  décembre  1844),  parut  un  règlement  du  comte 
Ouwarotï  sur  l'organisation  des  écoles  juives'.  Ce  règlement  con- 
tenait 60  articles  et  organisait,  jusque  dans  le  détail,  les  cinq 
genres  d'écoles  suivantes  :  Ecoles  (élémentaires)  fondées  avec  la  per- 
mission du  ministre,  talmud-tora  pour  les  pauvres  entretenus  par 
des  dons  volontaires,  écoles  privées,  ;g^c/ié^(9^  ou  écoles  talmudiques, 
Mt-hammidrasch  ou  klauses.  Vers  la  fin  du  mois  de  juin,  le  rapport 
général  du  ministère  de  l'instruction  publique  pour  l'année  1844  se 
bornait  encore  à  mentionner  ces  mesures,  sans  rien  dire  des  effets 
qu'elles  avaient  produits-.  Dans  tous  les  ukases  précédents  il  avait 
été  question  vaguement  des  ressources  à  créer  plus  tard  pour  l'en- 
tretien des  écoles  juives.  Ces  ressources  devaient  être  fournies  par  les 
Juifs  eux-mêmes  et  le  gouvernement  n'entendait  y  contribuer  pour 
rien.  Un  ukase  d'octobre  184o  institua,  à  cet  effet,  un  impôt  juif  sur 
les  lumières  que  les  Juifs  ont  l'habitude  d'allumer  pour  célébrer  le 
samedi  et  les  fêtes'.  Un  autre  impôt,  appelé  Korl)  ou  Korbak,  et  qui 
était  autrefois  un  impôt  volontaire  consenti  par  les  communautés, 
plus  le  produit  de  la  ferme  des  imprimeries  hébraïques,  étaient  éga- 
lement consacrés  aux  futures  écoles"^.  Cependant  les  anciennes  écoles 
étaient  maintenues  telles  quelles  et  des  commissions  provisoires, 
nommées  par  le  ministère,  au  nombre  de  97,  leur  accordaient  la 
permission  de  continuer  à  subsister  comme  par  le  passé -'.  Plus  de 
10,000  anciens  instituteurs  avaient  reçu  des  certificats  de  ce  genre. 
Le  rapport  général  du  ministre  de  l'instruction  publique  pour  l'année 
1845,  publié  fin  1846..  se  bornait  à  constater  cette  situation  qu'il 
paraissait  considérer  comme  un  grand  progrès.  Il  résumait  l'état  des 
écoles  juives  en  Russie  par  le  tableau  suivant''  :  • 

'  1845,  p.  6  et  p.  17. 

2  184.'5,  p.  523. 

3  1845,  p.  655  ;  184G,  p.  2fi,  et  p.  232  ;  p.  291,  détails. 

^  La  Iiorobka  ou  kniplia  est  un  impôt  sur  la  viande  de  consommation  tuée  suivant 
les  rites  juifs.  En  Pologne  elle  s'ap^pelle  /;oscheni(f.  Le  produit  de  cet  impôt  devait 
être  exclusivement  employé  en  faveur  des  communautés  juives,  de  leurs  écoles,  de 
leurs  pauvres,  des  cultivateurs  juifs.  Mais  tandis  qu'en  Polof^nc  seule  il  rapporte 
environ  400,000  roubles  par  an,  le  gouvernement  n'accorde,  sur  cette  somme,  qu'un 
faible  subside  de  9,000  roubles  par  an  à  l'hôpital  juif  de  Varsovie  ;  le  reste  rentre 
dans  les  caisses  de  l'Etat  (Louis  Lubliner,  De  la  rondilion  jiolitiqwe  et  civile  des  Juifs 
dans  le  royaume  de  Pologne,  IJruxellcs,  l'"' janvier  1800,  p.  40  et  p.  72^ 

En  Pologne,  il  existait  (et  existe  peut-être  encore)  un  impôt  spécial  payé  jiar  les 
Juifs  des  provinces  qui  viennent  séjourner  à  Varsovie.  Cet  impôt,  appelé  laçzctlel 
(billet  de  séjour),  devait  être  consacré  à  l'entretien  des  écoles  primaires  juives  du 
royaume,  mais  il  n'a  pas  reçu  cette  destination  ni  aucune  autre  connue.  Tout  au  plus 
y  a-t-on  puisé  ce  qu'il  fallait  pour  le  séminaire  rabbiniquc  créé  par  décret  organiipu; 
du  15  novembre  182G,  cl  dont  l'entretien  aurait  dû,  en  vertu  de  ce  décret,  être  à  la 
charge  de  l'État  (Lubliner,  p.  44-45).  Le  ta^zettel  rapportait  environ  700,000  roubles 
par  an  [Iliid.,  p.  68j. 

•  1846,  p.  490. 

fi  1847,  p.  80. 


314  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Ecoles  ayant  rang  de  gymnase —  79     avec     20,436  élèves. 

—  du  2''  rang 447  1 

—  du  1  ^■'"  rang 1 ,047  |  avec      87,935       — 

—  privées 585  ) 

2,158  108,391  élèves. 

En  outre,  cinq  écoles  réelles  israélites  (Odessa,  Riga,  Kischinew, 
Wilna,  Uman)  comptaient  ensemble  273  élèves. 

Toute  cette  grande  agitation,  qui  avait  duré  plus  de  trois  ans, 
n'avait  donc  abouti  à  rien.  Faut-il  attribuer  cet  échec  à  Timpuissancc 
et  à  l'incurie  de  l'administration  ou  à  la  résistance  des  Juifs?  Ni  l'un 
ni  l'autre.  Il  eut  pour  cause  principale  un  changement  profond  qui 
s'était  opéré  dans  l'esprit  de  l'empereur  et  qui  eut,  pour  les  Juifs,  les 
plus  funestes  effets. 

L'empereur  avait  commencé  par  chercher  sincèrement  à  améliorer 
la  situation  des  Juifs,  en  les  laissant  néanmoins  sous  un  régime 
d'exception.  Son  but  était  de  les  assimiler  plus  qu'ils  ne  l'avaient  été 
jusque  là  au  reste  de  la  population  russe.  Mais  une  fois  engagé  dans 
cette  voie,  ses  habitudes  d'esprit  et  son  caractère  absolu  devaient  le 
conduire  plus  loin  qu'il  n'avait  pensé  d'abord.  Puisqu'on  voulait 
transformer  les  Juifs,  pourquoi  s'arrêter  à  des  demi-mesures  ?  Les 
Juifs  ne  seraient  véritablement  russifiés  que  le  jour  où  ils 
auraient  embrassé  la  religion  russe,  et  il  y  avait  des  moyens  de  les 
y  amener.  Il  paraît  hors  de  doute  que  l'empereur  poursuivit  pendant 
quelque  temps  ce  projet  tyrannique.  Il  se  rattachait  à  un  plan  géné- 
ral d'unification  de  la  Russie  par  l'établissement  de  l'unité  religieuse. 
Une  grande  activité  était  déployée,  pour  cet  objet,  dans  les  minis- 
tères pendant  les  années  1844  à  1846,  Les  Juifs  n'étaient  pas  les 
seuls  qu'on  voulut  rattacher  de  force  à  l'Église  dominante,  les  pro- 
testants, les  catholiques,  les  nombreuses  sectes  dissidentes  de  Russie 
furent  également  en  butte  à  des  tentatives  plus  ou  moins  directes  de 
conversion,  mais  les  Juifs  furent  plus  que  tous  les  autres  harcelés 
par  l'administration  et  accablés  de  vexations.  Quelques-unes  des 
mesures  prises  contre  eux  avaient  le  caractère  d'une  véritable  per- 
sécution. Il  leur  semblait  évident  que  ces  violences  étaient  calculées 
et  avaient  pour  objet  leur  conversion.  Comment  auraient-ils  pu 
accepter  d'une  main  aussi  cruelle  le  bienfait  suspect  des  écoles? 

Les  mauvaises  intentions  ou  dispositions  du  gouvernement  parais- 
saient se  révéler  dans  tous  ses  actes.  En  1844,  il  s'était  proposé  de 
faire  traduire  en  hébreu,  à  l'usage  des  Juifs,  les  prières  de  l'église 
russe  ♦.  Un  ukase  du  1/13  février  1845  avait  supprimé  toutes  les 
administrations  des  communautés  juives  et  avait  remis  la  direction 
de  celles-ci  aux  autorités  civiles  -  :  c'était  les  désorganiser  complè- 
tement.   Les  livres  hébreux    étaient  soumis  à  des  impôts  excep- 

'  1844,  p.  437. 

'  1846.  p.  1G5  cl  377-379. 


CHRONIQUE  315 

tionnels'.  La  loi  militaire  surtout  semblait  révéler  la  malveillance 
du  gouvernement  et  aussi  son  intention  d'amener  les  Juifs  de  force 
au  christianisme. 

Depuis  l'ukase  du  i6  août  1827,  les  Juifs  de  la  Lithuanie,delaPodo- 
lie,  de  la  Volhynie,  de  l'Ukraine  et  delà  Nouvelle-Russie,  etc.,  étaient 
soumis  au  service  militaire'.  Il  y  avait,  en  1843,  environ  10,000  sol- 
dats juifs  dans  l'armée  russe,  dont  4,000  matelots,  et  les  officiers 
étaient  unanimes  à  vanter  leur  conduite  et  leurs  bons  services.  Dans 
d'autres  pi'ovinces,  et  particulièrement  en  Pologne,  les  Juifs  n'étaient 
par  astreints  au  service  militaire.  Au  commencement  de  1843,  il  fat 
question  de  les  y  soumettre  tous.  Un  ukase  fut  publié  (ou  préparé?) 
à  ce  sujet,  puis  letiré.  On  prétendait  que  l'empereur  avait  fait 
l'ukase  pour  tirer  les  Juifs  de  leur  isolement,  mais  qu'ensuite  il 
avait  pensé  qu'ils  n'étaient  pas  dignes  de  servir  dans  l'armée*.  Ce- 
pendant le  26  septembre  /  8  octobre  1843  l'empereur  signa,  dans  la 
forteresse  de  Nowo-Georgiewsk,  un  ukase  par  lequel  tous  les 
Juifs  de  Pologne  étaient  soumis  à  la  loi  du  recrutement  militaire  à 
partir  du  1°'' janvier  1844,  l'impôt  de  recrutement  de  105,299  roubles 
argent  qu'ils  payaient  jusque  là  était  aboli,  et  enfin  il  leur  était 
permis,  comme  aux  chrétiens,  de  se  faire  remplacer,  mais  seulement 
par  des  Juifs  *.  Bien  entendu,  cette  mesure  n'était  pas  accompagnée 
de  son  corollaire  naturel  :  l'égalité  des  droits  civils.  La  loi  militaire 
excluait  les  Juifs  des  grades  à  partir  de  celui  d'officier,  un  règle- 
ment de  février  1844  les  excluait  du  service  de  la  garde  et  ordonnait 
que  les  nouvelles  recruesjuives  seraient  toutes  envoj'ées  dans  le  Cau- 
case, pour  la  guerre  contre  les  montagnards,  ou  incorporées  dans 
les  compagnies  d'ouvriers  militaires  *.  On  faisait  remarquer,  en  1845, 
que  depuis  longtemps  aucun  Juif  n'avait  été  nommé  même  au  grade 
de  sous-officier.  Faites-vous  chrétiens,  et  vous  avancerez,  tel  était 
le  langage  que  la  loi  tenait  aux  soldats  juifs.  De  nombreuses  dispo- 
sitions tendaient  à,  hâter  leur  conversion.  Un  Juif  qui  se  faisait  bap- 
tiser était  exempté  du  service  militaire.  En  1843,  un  ordre  secret 
enjoignit  au  procureur  du  Synode  de  faire  faire  un  catéchisme  pour 
la  conversion  des  enfants  juifs  élevés  dans  les  écoles  militaires,  et, 
en  1844,  l'ordre  formel  fut  donné  d'élever  ces  enfants  dans  la  religion 
chrétienne  **.  Pour  apprécier  toute  la  portée  de  cette  mesure,  il  faut 
savoir  qu'à  cette  époque  le  service  militaire  durait  vingt-cinq  ans, 
que  les  communautés  juives  étaient  forcées  do  fournir  chaque  année 
un  nombre  d'hommes  déterminé  qui  pouvaient  avoir  de  douze  à 

»  18/iG,  p.  282  et  749;  1847,  p.  C89. 

»  1843,  p.  205, 

3  1843,  p.  204-205. 

*  1843,  p.  OiiG,  674. 

!>  1844,  p.  678. 

fi  II  l'aut  lire,  sur  tous  ces  faits  et  d'autres  encore,  VAUf/cmnne  ZcUuntj  des  Jinlen- 
tliums,  184ÎJ,  p.  464,  G81,  693  et  suivantes.  On  racontait  ([ue,  dans  une  revue,  l'em- 
pereur ayant  durement  reproché  à  deux  matelots  ju ils  do  ne  pas  se  convertir,  ils  se 
jetèrent  à  la  mer  sous  ses  yeux  (1845,  p.  714). 


316  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

vingt-cinq  ans.  Les  enfants  ainsi  fournis  étaient  élevés  dans  les 
écoles  militaires  et  on  comprend  le  désespoir  des  mères  juives  à  qui 
on  arrachait  leurs  enfants  pour  les  conduire  au  catéchisme.  Les 
scènes  de  séparation  étaient  déchirantes  '. 

Une  autre  persécution  vint  atteindre  les  Juifs  au  moment  même  où 
Ton  prétendait  les  relever  par  la  création  de  nouvelles  écoles.  Un 
ukase  du  20  avril  /2mai  1843  ordonna  que  tous  les  Juifs  demeurant 
dans  une  étendue  de  30  verstes  à  partir  des  frontières  autrichienne 
et  prussienne  seraient  obligés  de  quitter  cette  région  et  d'aller  s'é- 
tablir dans  un  des  17  gouvernements  habités  par  leurs  coreligion- 
naires -.  Cette  mesure  cruelle  décrétait  la  ruine  de  milliers  de  fa- 
milles. Leurs  inquiétudes  furent  d'abord  vives,  puis  on  s'imagina 
que  l'ukase  ne  serait  exécuté  qu'en  partie  et  seulement  contre  quel- 
ques misérables  qui  faisaient  la  contrebande  sur  la  frontière  ^  Bientôt 
on  crut  savoir  qu'une  déclaration  officielle  restreignait  l'ukase  aux 
habitants  juifs  des  campagnes,  beaucoup  moins  nombreux  que  ceux 
des  villes''.  Vain  espoir  !  Au  mois  d'octobre,  les  Juifs  de  Radziwillow 
furent  avertis  que  la  mesure  allait  être  exécutées  Ils  protestaient  en 
vain  contre  l'accusation  de  faire  la  contrebande  en  disant  que,  par 
exemple,  sur  la  frontière  autrichienne  la  plupart  des  contrebandiers 
étaient  des  chrétiens  de  Galicie.  Dans  la  Lithuanie,  les  Juifs  avaient 
prouvé  que,  sur  environ  100  contrebandiers  arrêtés,  ily  avait  à  peine 
5  Juifs.  Tout  fut  inutile,  trente-trois  communautés  juives  de  la  Lithua- 
nie furent  sommées  de  se  retirer  à  l'intérieur  et  on  ne  leur  laissa  le 
choix  de  s'établir  que  dans  7  gouvernements,  tout  en  leur  défendant 
de  s'expatriera  On  estimait  à  30,000  (au  moins  150,000  à  200,000  âmes) 
le  nombre  de  familles  qui  allaient  être  atteintes  et  ruinées  par  l'u- 
kase'' :  leurs  maisons,  leur  mobilier  ne  pouvaient  être  vendus  qu'à  des 
prix  dérisoires,  leurs  moyens  d'existence  leur  étaient  enlevés.  On  com- 

1  Un  ukase  du  4/16  septembre  1843  pour  le  ro_yaume  de  Pologne  donnait  à  l'auto- 
rité administrative  le  droit  de  prendre  au  recrutement  jusqu'à  làge  de  vingt-cinq  ans 
les  Juifs  inculpés  de  vagabondage  ou  de  toute  autre  contravention  aux  lois,  et  ces 
recrues  n'étaient  pas  portées  en  décompte  sur  le  contingent  annuel  à  fournir  par  les 
communautés  juives.  C'était  l'arbitraire  érigé  en  loi  (Lubliner,  p.  73). 

Après  la  guerre  de  Crimée,  le  Comité  hébraïque  (chargé  des  alTaires  juives)  qui 
siège  au  ministère  de  l'intérieur  i'ut  sollicité  en  faveur  des  soldats  juifs.  Le  13  mai  1858, 
il  prit  une  décision  déclarant  qu'il  était  impossible  d'accorder  aux  soldats  juifs  le  droit 
d'avancement  au  grade  de  sous-oflicier  et  d'oflicier,  et  il  s'en  référa  à  la  décision  du 
ministre  de  l'intérieur  sur  l'autorisation  à  donner  aux  soldats  juifs  congédiés  de 
s'établir  librement  dans  n'importe  quelle  partie  de  l'empire  comme  les  soldats  chrétiens 
congédiés.  J^'empcreur  Alexandre  11  écrivit  de  sa  main,  en  marge  :  «  Je  ne  partage 
pas  l'avis  émis  par  le  Comité  hébraïque  [sur  les  restrictions  que  ce  Comité  voulait 
maintenir).  .  Cependant,  il  ne  paraît  pas  que  ces  restrictions  aient  été  levées 
(Lubliner,  p.  24). 

»  1843,  p.  397. 

5  1843,  p.  S74. 

*  1843,  p.  610. 

'  1843,  p.  C98. 

«  1843,  p.  748-7411. 

'  1844,  p.  7;;  et  p.  247. 


CHRONIQUE  317 

prend  leur  douleur  et  leur  désolation.  Mais  la  volonté  de  l'empereur 
était  inébranlable.  Au  mois  de  janvier  1844,  il  accorda  seulement 
quelques  facilités  nouvelles  aux  Juifs  expulsés  :  le  délai  pour  la  vente 
de  leurs  maisons  était  porté  de  deux  ans  à  quatre  ans;  les  Juifs  ex- 
pulsés étaient  exempts  de  tout  impôt  pendant  cinq  ans  ;  la  mesure 
était  provisoirement  suspendue  en  faveur  des  Juifs  possesseurs  de 
grandes  fabriques  ou  à  la  tête  d'industries  importantes  '.  L'adminis- 
tration fit  même  mine  de  vouloir  dédommager  les  Juifs,  et  des  com- 
missions furent  nommées  pour  faire  l'estimation  de  leurs  biens  -, 
Cette  enquête  et  quelques  autres  sur  le  même  sujet  paraît  avoir  eu 
pour  résultat  d'ajourner,  au  moins  pour  les  Juifs  habitant  les  villes, 
l'exécution  de  la  mesure  ^  De  tous  côtés,  du  reste,  des  personnages 
importants  et  même  des  gouverneurs  s'employaient  en  faveur  des 
Juifs.  Finalement,  il  ne  semble  pas  que  l'ukase  ait  été  exécuté.  Il  fut 
remplacé  par  d'autres  lois  d'exception,  non  moins  graves,  et  toutes 
empreintes  d'un  esprit  de  persécution,  parmi  lesquelles  la  défense 
de  vendre  des  spiritueux  (ukase  du  6/18  septembre  1845)*. 

On  parlait  beaucoup  aussi  des  encouragements  donnés,  par  l'Em- 
pereur aux  Juifs  qui  voulaient  devenir  agriculteurs.  Des  colonies 
d'agriculteurs  juifs  avaient  été  créées,  sous  les  auspices  du  gouver- 
nement, à  Cherson,  à  Ekatherinoslaw  et  dans  la  Bessarabie,  mais  les 
subventions  mises  à  la  disposition  des  agriculteurs  juifs  pour  les 
frais  du  voyage,  l'achat  du  matériel  d'exploitation,  etc.,  avaient  fondu 
entre  les  mains  des  intermédiaires  officiels  et  les  Juifs  ne  les  avaient 
pas  touchés*.  Un  rapport  ministériel  de  1859  constatait  qu'il  y  avait 
dans  le  royaume  de  Pologne,  à  cette  époque,  8,000  cultivateurs 
juifs  *.  On  sera  étonné  de  ce  chiffre  quand  on  saura  quels  étaient  les 
singuliers  encouragements  que  le  gouvernement  voulait  donner  aux 
Juifs  agriculteurs.  Un  arrête  du  lieutenant  royal  du  9  avril  .182:i 
avait  autorisé  le  gouvernement  du  royaume  à  concéder  des  terres 
arables  aux  Juifs,  mais  la  concession  était  soumise  à  des  conditions 
impossibles  à  remplir.  Entre  autres,  il  était  interdit  aux  Juifs  de  se 
servir  de  laboureurs  chrétiens,  mais  ceux-ci  leur  étaient  indispensa- 
bles au  moins  pendant  quelque  temps,  pour  leur  apprendre  le  mé- 
tier. En  outre,  une  circulaire  ministérielle  interprétative  ordonnait 
d'offrir  aux  Juifs  des  terres  incultes  ou  des  bruyères  éloignées  des 
forêts  ou  des  métairies  abandonnées  et  dont  personne  ne  voulait  ^ 
On  sait  du  reste  que  les  Juifs,  au  moins  jusqu'en  1860,  ne  pouvaient 
pas  posséder  de  terres  ni  en  Pologne,  ni  en  Russie,  si  ce  n'est  par 
concession  exceptionnelle.  En  1843,  cette  concession  fut  soumise 


»  \u\,  p.  io;i-i07. 

«  1844.  p.  247  dp.  540. 

^  1845.  p.  64. 

*  1X4"),  p.  752. 

'  H.  Mandclslamm,  CuUurbildcr,  Wicn,  1877,  .'!•  partie,  p.  .37. 

''  Lublincr,  p.  67. 

•"  Lublincr,  p.  8-'.'. 


318  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

aux  conditions  suivantes  :  Etablissement  de  23  familles  juives  dans 
les  six  premières  années  de  la  concession,  versement  préalable  de 
430  roubles  à  titre  de  cautionnement  par  famille,  menace  d'expro- 
priation en  cas  de  mort  des  concessionnaires,  faveurs  en  cas  de  con- 
version des  Juifs  colons  au  christianisme  '.  Une  ordonnance  de  1844 
affranchit  de  la  peine  de  la  bastonnade,  en  cas  de  procès  criminel, 
les  Juifs  qui  auraient  obtenu  une  médaille  d'honneur  pour  une  bonne 
administration  agricole  -. 

Une  autre  mesure  enfin,  presque  puérile  en  apparence,  fut  extrê- 
mement pénible  aux  Juifs.  L'empereur  voulut  les  forcer  de  changer 
leur  vêtement  traditionnel  et  de  s'habiller  à  la  russe.  Un  ukase  parut 
pour  cet  objet,  en  1843.  Il  devenait  obligatoire  à  partir  de  1830,  mais 
jusque-là,  les  Juifs  qui  voulaient  garder  leur  ancien  costume  pou- 
vaient se  donner  cette  satisfaction  en  payant  un  impôt.  En  Pologne 
cependant,  on  voulut  que  la  transformation  du  costume  fût  immé- 
diate. Le  7/19  mai  1843,  le  gouverneur  de  Wilna  fit  savoir  à  la  popu- 
lation juive  qu'en  vertu  d'un  ordre  impérial,  les  Juifs  étaient  obligés, 
à  partir  du  13/27  mai,  sous  peine  de  fortes  amendes,,  de  quitter  les 
vêtements  qu'ils  avaient  l'habitude  de  porter  et  de  s'habiller  comme 
les  chrétiens  ;  de  se  couper  aussi  les  cheveux  qu'ils  laissaient  croître 
le  long  des  tempes  \  L'intention  pouvait  être  excellente,  mais  le  pro- 
cédé parut  odieux.  Ce  n'eût  été  rien  si  on  s'était  borné  à  punir  les 
récalcitrants  de  l'amende  ou  de  la  prison,  mais  il  était  brutal  de  les 
saisir  dans  la  rue,  comme  on  faisait,  pour  les  livrer  de  force  au  bar- 
bier. Sans  doute,  les  Juifs  éclairés  ne  demandaient  pas  mieux  que 
d'obéir  à  l'ukase*,  à  Varsovie  beaucoup  prirent  la  chose  en  riant". 
D'autres  souffrirent  cruellement  de  se  voir  imposer  un  vêtement 
nouveau,  et  versaient  des  larmes  de  rage  pendant  qu'on  leur  cou- 
pait les  cheveux  et  la  barbe  ^.  La  police  renonça  probablement  bientôt 
à  exécuter  l'ukase  et  le  principal  effet  qu'il  produisit,  ce  fut  de 
faire  entrer  dans  les  caisses  du  gouvernement  l'impôt  que  payaient 
les  Juifs  qui  voulaient  garder  leur  costume  ^ 

On  pense  bien  que  ces  vexations  et  ces  persécutions,  qui  avaient 
apporté  aux  Juifs  tant  de  préoccupations  et  de  souffrances,  avaient 
fait  oublier  les  écoles.  Cependant  le  mouvement  inauguré  par  le 
D""  Lilienthal  avait  fait  quelque  impression  sur  les  esprits,  on  en  aura 
une  preuve  par  ce  seul  fait  que  la  communauté  juive  de  Minsk,  qui, 
au  début,  avait  montré  la  plus  vive  hostilité  envers  la  réforme 
scolaire,  avait,  dès  1845,  réorganisé  son  Talnmd-Tora  conformément 
aux  prescriptions  ministérielles**,  puis  transformé  cette  école  en 

'  Lubliner,  p,  .'i6-;jS. 

*  Lubliner,  p.  06. 

3  184;},  p.  304  et  300. 

*  1846.  p.  318. 
5  1846,  p.  641. 

*  1846,  p.  ".•)4.  Ces  scènes  nous  ont  été  racontées  par  des  témoins  oculaires. 
7  1846,  p.  490;  1847,  p.  136. 

«  1847,  p.  87. 


CHHONIQUE  319 

école  du  gouvernement  à  partir  du  mois  d'octobre  1847*,  et  enfin 
fondé  deux  bonnes  écoles  nouvelles  vers  la  même  époque-.  Le 
D""  Lilienthal  n'était  plus  là  pour  jouir  du  fruit  de  ses  efforts.  Il  avait 
compris  que  sa  place  n'était  pas  à  côté  d'un  gouvernement  persécu- 
teur. Découragé,  désespéré,  il  avait  quitté  l'Europe  et  s'était  rendu 
en  Amérique.  Le  25  novembre  1845  il  écrivait  de  New-York  à  VAUge- 
meine  Zeitung  des  Judenthums  *  :  «  Recevez  mon  salut  fraternel  et 
joyeux  qui  vous  vient  du  pays  béni  de  la  liberté,  du  beau  pays  de 
l'égalité  civile!  La  vieille  Europe,  avec  ses  lois  d'exception,  m'appa- 
rait  comme  dans  un  rêve,  l'borrible  haine  contre  les  Juifs  en  Russie 
n'est  plus  pour  moi  qu'un  souvenir  nébuleux.  Mon  âme  n'est  plus 
oppressée  par  l'image  effrayante  de  la  tyrannie  et  de  la  persécution; 
ma  poitrine  respire  en  liberté,  mon  esprit  se  meut  sans  entraves  sur 
ses  ailes  et  c'est  avec  allégresse  que  je  voudrais  offrir  aux  hommes, 
qui  vivent  ici  dans  la  concorde,  le  baiser  fraternel  !  » 

Nous  n'avons  que  peu  de  renseignements  sur  la  vie  du  D'-  Lilien- 
thal en  Amérique.  Il  remplit  d'abord  des  fonctions  de  rabbin  à  New- 
York,  puis  fonda  dans  cette  ville  une  maison  d'éducation.  En  1855,  il 
fut  nommé  rabbin  d'une  des  communautés  Israélites  de  Cincinnati. 
Il  devint,  peu  de  temps  après,  membre  du  Board  of  Education  de 
l'Etat  et  on  dit  qu'il  contribua  beaucoup  à  faire  admettre  dans  les 
écoles  les  leçons  de  choses,  pour  lesquelles  il  composa  même  un 
manuel.  En  1872,  il  fut  nommé  directeur  du  Board  de  l'Université  de 
Cincinnati.  Il  a  fondé,  en  1874,  le  journal  Sabbat  School  Visitor''  et  il 
a  pris  une  grande  part,  en  1879,  à  la  fondation  de  la  Rabbinical  lite- 
rary  Association.  Sa  mort  est  une  grande  perte  pour  le  judaïsme 
américain.  —  /.  L. 

Isaac  bar  Schéschet.  —  Dans  l'exposition  artistique  faite  par  l'Aca- 
démie de  Berlin,  se  trouve  entre  autres  envois  de  Wilhelm  Gentz, 
un  tableau  dû  au  pinceau  de  ce  célèbre  artiste  et  qui  intéressera  les  lec- 
teurs de  ce  recueil.  La  Zeitschrift  fur  bildende  Knnst,  de  von  Liitzow 
(178  vol.,  fascic.  2,  n"  56),  contient  une  gravure  de  ce  tableau,  sous  le 
titre  de  :  GedJichtnissfeier  des  Rabbi  Isak  Barschischat  in  Algier 
(Fête  commémorative  de  R.  Isaac  Barschischat  à  Alger).  Ce  rabbin 
est  le  fameux  Isaac  ber  Schéschet  que  les  persécutions  d'Espagne  en 
1391  ont  chassé  au-delà  de  la  mer,  en  Algérie,  et  en  mémoire  duquel. 
les  .luifs  algériens  ont  institué  un  service  commémoratif  annuel  '• 
(voir  Wavnhcim, Kebuçat ml/iktabim,  p.  ]\'\).  Il  résulte  d'une  commu- 
nication qui  m'a  été  faite  par  M.  Gentz  lui-même,  qu'il  se  promenait 
près  de  la  tombe  du  rabbin,  placée  près  de  la  mer  dans  une  situation 
des  plus  pittoresques,  il  ne   savait  rien  de  la  fête  commémorative, 

>  1847,  p.  037. 
î  18'i7,  ]).  090. 
'  18 if),  p.  18. 

*  Ces  renscif^nemenls  sont  tirés  du  Jewish  Messenger  du  7  avril  1882. 
5  Ceci  ne  paraît  pas  exact.  On  va  sur  la  tombe  de  R.  Isaac  b.  Scli.  Icsmomcs  jours 
que  sur  les  autres  tombes. 


320  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

lorsque  soudain  ses  yeux  furent  frappés  par  le  tableau  de  celte  fête, 
qui,  par  sa  signification  profonde,  lui  rappela  les  scènes  émouvantes 
de  la  prière  des  Juifs  au  pied  du  mur  de  Salomon,  à  Jérusalem. 
Enchaîné  par  ce  surprenant  spectacle,  il  resta  jusqu'à  la  nuit  pour 
le  dessiner.  Sans  doute,  tous  les  Juifs  d'Alger,  indigènes  et  étrangers, 
Français,  Espagnols,  Orientaux,  riches  et  pauvres,  s'étaient  associés 
à  la  cérémonie.  Tous  versaient  des  dons  dans  une  caisse  qui  se  rem- 
plit jusqu'au  bord.  Le  monument  sépulcral  était  éclairé,  à  l'intérieur, 
de  centaines  de  lumières  que  les  visiteurs  y  avaient  apportées  à  l'envi. 
Il  y  a  encore  des  doutes  sur  la  date  de  la  mort  d'Isaac  (voir  Abr. 
Cahen,  Les  J l'A fs  dans  VAfriqne  septentrionale,  p.  57-58  ei  ArcJi.  isr., 
1863,  p.  33).  L'inscription  commémorativede  sa  tombe  porte  ces  mots': 
a  Ce  monument  a  été  restauré  par  la  communauté  Israélite  d'Alger 
en  l'honneur  du  rabbin  Isaac  Barschischat,  né  en  Espagne,  décédé  à 
Alger  en  1408,  dans  sa  quatre-vingt-deuxième  année.  »  Sa  tombe 
s'est  conservée,  son  nom  est  resté  célèbre,  et  il  a  maintenant  la  gloire 
d'avoir  été  illustré  par  le  pinceau  d'un  maître.  —  David  Kaufmann. 

Prix  Brunet.  —  M.  Moïse  Schwab,  notre  excellent  collègue  du 
Conseil,  vient  d'obtenir  ce  prix  de  l'Académie  des  inscriptions  pour 
un  travail  de  bibliographie  aristotélique.  [Séance  du  26  mai  1882.) 

M.  J.  Schleiden.  —  Tsous  tenons  beaucoup  à  rappeler  ici  le  sou- 
venir de  ce  savant  qui  a  écrit,  en  faveur  des  Juifs  deux  opuscules 
excellents  et  pour  lesquels  il  a  droit  à  notre  reconnaissance.  M.  Schlei- 
den était  un  naturaliste  distingué,  et,  si  nous  ne  nous  trompons,  ses 
idées  libérales  lui  avaient  fait  perdre  la  place  de  professeur  qu'il 
avait  en  Russie.  On  se  rappelle  la  sensation  que  fit  son  écrit  intitulé  : 
Die  Bedeutu7ig  der  Jiiden  filr  Erhallung  und  Wiederhelebung  der  Wisseri- 
scliaft  im  Mittelaîter  (1877).  Il  a  été  traduit  en  français  [Les  Juifs  et  la 
science  au  moyen  âge,  Paris,  1877)  et  en  italien  (Milan,  1878).  M.  Schlei- 
den a  aussi  écrit,  en  1878,  Die  Roinantilt  des  Martyriums  im  Mittel- 
aîter. (Les  martyrs  juifs  au  moyen  âge.)  Il  est  mort  à  Francfort-sur- 
le-Mein  le  23  juin  1881,  à  l'âge  de  soixante-dix-sept  ans.  (Monat- 
sblatter,  1881,  n"  7.) 

M.  Ernest  Sahatier.  —  M.  Sabatier  est  mort  à  Nîmes  le  13  décembre 
1881,  à  l'âge  de  cinquante-cinq  ans.  Il  a  réuni  et  transcrit  un  certain 
nombre  de  chants  liturgiques  des  Juifs  comtadins  sous  le  titre  de 
Chansons  hébraïco-provençales,  Nîmes,  1874.  Nous  prions  sa  fa- 
mille de  recevoir  l'expression  de  nos  sentiments  de  condoléance. 

'  Elle  a  été  rédigée  par  M.  le  grand  rabbin  Michel  A.  Weill. 


ADDITIONS  ET  RECTIFICATIONS 


A  notre  liste  des  savants  de  Barcelone  (Eevue,  IV,  64),  il  faut  sans  doute 
ajouter  Péreç  de  Barcelone,  cité  dans  le  catalogue  des  ms.  orientaux  de  la 
Bibliothèque  de  l'Université  de  Strasbourg  (voir  plus  haut  p.  289),  à  la 
page  66,  n*^  46.  Ce  Péreç,  auteur  d'un  écrit  de  Cabbala,  pourrait  être  le  Péreç 
b.  Isaac  Cohen  Gerondi,  qui  a  écrit  un  ouvrage  cabbalislique  bien  connu. 
(Voir  Catal.  Bodl.,  p.  2mi.)—  Isidore  Loeb. 

Le  passage  de  Josef  Bechor  Schor  cité  dans  Revue,  IV,  p.  ).48,  se  trouve 
aussi  dans  le  ms.  d'Oxford  du  Paeneah  Raza  sous  la  forme  suivante  (d'après 
une  communication  de  notre  ami,  M.  Ad.  Neubauer)  : 

Llh^vr^  t:"Z^TC  r::D  ^m^ïb  un  "'D  rr^n  xb  û-^'^n:?  in;"!  cnbi  .  rimDnr: 

.  t:3":.'n  "jr-ba  Nsiprb  "j-^mpo 

Pour  l'étymologie  de  ce  mot  leinkauf,  voyez  Grimbaum,  Jiïdisch-deutsche 
Chrestoiiiathie,  p.  473.  M.  Gr.  ne  trouve  pas  de  source  plus  ancienne  pour  leit- 
liauf  ou  laikauf  qvLd  Sârtels  ;  notre  passage  de  Paeneah  Raza  montre  que 
ce  mot  était  usité  à  la  fin  du  xiii'^  siècle,  c'est-à-dire  trois  cents  ans  avant 
Siirtcls.  —  »S'.  /.  Halberstaiit. 

Sur  le  mot  d"ir"P  [Revue,  IV,  p.  1,  note  1)  désignant  la  fête  de  Saint-Jean, 
voir  S.  Kohn,  Die  hebr.  Handschriften  des  ungar.  Nationalnmseufds,  p.  24,  et 
Hebr.  Bibliographie,  XVII,  p.  81.  —  David  Kaufhiann. 

Tome  IV,  p.  11,  1.  25.  Lire  lundi  12  (non  20)  Tammouz  5058.  Cette  date 
correspond  au  23  juin  1298.  —  P.  10,  1.  22  et  p.  11,  1.  28.  Le  6  Tam- 
mouz 5045  n'est  pas  un  vendredi,  mais  correspond  au  mardi  8  juin  1288. 
Il  y  a  donc  une  faute  dans  le  texte.  Il  faut  peut-être  lire  T17:n2  Y'i, 
16  Tammouz,  c'est-à-dire  vendredi  18  juin  1288.  —  P.  10,  1.  23  et  p.  11, 
1.  29.  L'année  5039  n'a  pas  d'Adar  II  ;  le  texte  hébreu  a  du  reste  5049 
(1288,  9),  qui  est  une  année  embolismique  ayant  un  Adar  II  ;  lire  Bérn- 
castel,  non  Berncatsel.  —P.  11,  1.  30.  Lire  5046  =  1286,  ou  5047  =  1287. 
—  P.  25,  1.  7.  Il  faut  sans  doute  lire  'b'î'^  et  non  'b'T'72  ;  cf.  la  traduction', 
même  page,  1.  32.  —  Ibid.,  I.  10  et  1.  35.  Lire  'rf'Ji  au  lieu  de  'n'iî.  —  P.  26, 
lignes  17  à  23.  Il  faut  remplacer  les  années  5133,  5137,  5139,  par  5103,  5107, 
5^09,  et  les  nombres  1373,  1377,  1379,  par  1343,  1347,  1349.  Le  24  Nissan 
etlel'=''Iyyar  5103  tombent  un  samedi  (19  avril  et  26  avril  1343),  tandis  que 
dans  l'année  5133  ils  tombent  un  lundi.  Le  14  lyyar  5107  correspond  au 
mercredi  25  avril  1347  (en  5137,  le  14  lyyar  tombe  le  vendredi  24  avril 
1377).  —  P.  28,  1.  11  et  12.  Evidemment  5109  =  1349,  l'année  de  la  peste 
noire.  —  Presque  toutes  ces  incorrections  que  nous  avons  rectifiées  nous 
ont  été  signalées  par  M.  Emile  Ouverleaux,  sous-directeur  de  la  Biblio- 
thèque royale  de  Bruxelles.  —  Isid.  Loeb. 

Tome  IV,  p.  74,  ligne  4  en  bas.  —  Lisez  comme  suit  :  «  Que  le  nom 
signifie  Petit,  "jUp.  Eu  catalan,  le  mot  maymo  siguitie  «  calme,  lent,  indo- 
lent ».  —  I.  L. 

Ibid.,  p.  114,  note  3,  lisez  22  septembre. 

115,  ligne  29,  lisez  :  il  mourut  le  samedi  27  Ilesvan  5445  (1684). 
117,  dernière  ligue  du  texte,  lisez  nizlid. 

119,  note  4,  lisez  :  Discijjle  du  célèbre  Muïse  Zéchul.  Benjamin 
.S'.  Joua. 
150,  ligne  7  en  bas.  —  M.  l'idol  l''ila  n'a  pas  collaboré  à  la  bro- 
Auguslin  Blasco.  —  /.  L. 


IIM. 

P- 

Ibid. 

!'• 

Ibid. 

P- 

Coen . . 

Ibid. 

p.] 

chure  de  M 

PROCÈS-VERBAUX   DES  SEANCES  DU  CONSEIL 


SÉANCE  DU  30  MAI  1882. 

Présidence  de  M.  Isidore  Loeb. 

Le  Conseil,  après  discussion,  adopte  les  articles  suivants  : 

1°  La  Revue  publie  les  tableaux  des  dates  des  séances  du  Conseil  pour  l'année 
courante. 

2"  Les  membres  de  la  Société  sont  admis  à  faire  aux  séances  du  Conseil  des 
lectures  ou  communications  qui  rentrent  dans  le  cadre  des  études  de  la  Société.  Il  eu 
est  de  même  de  toute  personne  présentée  par  un  Sociétaire.  Les  Sociétaires  et  autres 
personnes  ne  peuvent  user  de  ce  droit  qu'à  la  condition  de  prévenir  le  Président  du 
Comité  de  publication  et  d'administration  huit  jours  au  moins  avant  la  séance.  Ils 
devront  en  même  temps  indiquer  le  sujet  de  leur  lecture  ou  communication. 

3°  Les  communications  et  lectures  sont  rcises  à  l'ordre  du  jour  de  la  séance.  Elles 
peuvent  être  suivies  de  discussions.  Le  président  de  la  séance  reste  maître  de  la 
direction  des  débats  et  peut  lever  la  séance  quaud  il  le  juge  nécessaire.  Des  analyses 
des  travaux  communiqués  sont  insérées  dans  la  Revue. 

L'ordre  du  jour  appelle  l'élection  des  membres  du  Comité  de  propagande. 

M.  Erlanger  propose  que  le  Conseil  s'enquière  d'abord  des  membres  qui  voudraient 
eu  faire  partie. 

L'élection  est  ajournée  à  la  séance  suivanle. 


SÉANCE  DU  27  AVRIL 

Présidence  de  M.  Arsène  Darmesteter. 

Le  Conseil  décide  qu'il  sera  envoyé  une  lettre  aux  membres  du  Conseil  qui  ne 
font  pas  partie  du  Comité  de  publication  et  d'administration,  pour  leur  demander  s'ils 
veulent  entrer  dans  le  Comité  de  propagande. 

Sur  la  proposition  de  M.  Loeb,  le  Conseil  déclare  que  l'Annuaire  pourra  contenir 
dorénavant  une  Revue  générale  des  événements  de  l'année  relatifs  aux  Israélites. 

Plusieurs  membres  font  remarquer  que  l'Annuaire  paraissant  au  mois  d'octobre  ne 
peut  publier  que  les  rapports  de  l'année  précédente,  qu'ainsi  l'Annuaire  qui  paraîtra 
en  1882  ne  donnera  que  les  rapports  lus  dans  la  séance  de  l'Assemblée  générale  de 
l'année  1881.  Ils  estiment  donc  que  cette  publication  devrait  paraître  au  mois  de 
janvier. 

M.  le  Président  serait  d'avis  qu'au  lieu  de  donner  dans  chaque  numéro  de  la 
Rtvxie  une  revue  bibliographique,  ou  fît  paraître  à  la  lia  de  l'année  un  fascicule  à 
part  pour  cet  objet. 

M.  Halévi/  combat  cette  opinion. 

M.  Schwab  voudrait  qu'on  fît  un  rapport  général  sur  tous  les  travaux  de  science 
juive  parus  dans  l'année. 

L'examen  de  ces  diverses  questions  est  renvoyé  au  Comité  de  publication. 

Les  Secrétaires, 
IIautwio  Deuknbourg,  A.  Épura'im. 


Li;  1,'cr^iH  res|ioii>ublf, 

Israël  Lévi. 


TABLE    DES    MATIÈRES 


ARTICLES  DE  FOND . 

Babelon  (Ern.)  et  Schwab  (Moïse).  Un  vase  judéo-chaldéen —  -165 
Cahen  (Ab.).  Les  Juifs  dans  les  colonies  françaises  au  xviii" 

siècle 1 27,  236 

Gross  (Henri).  Notice  sur  Abba  Mari  de  Lunel 192 

Jona  (S.).  Abraham  Joseph  Salonion  Graziani 113 

ELaufmann  (David).  L  Délivrance  des  Juifs  de  Rome  en  looS. . .  88 

IL  Liste  de  rabbins  dressée  par  Azriel  Trabolto 208 

LoEB  (Isidore).  I.  Liste  nominative  des  Juifs  de  Barcelone  en 

4  392 57 

II.  Actes  de  vente  hébreux  en  Espagne 226 

Morel-Fatio  (Alfred).   Notes  et  documents  sur  les  Juifs  des 

Baléares 31 

Neubauer  (Ad.).  I.  Le  Memorbuch  de  Mayence 1 

II.  Documents  inédits  sur  Maïmonide  et  David  Alroï..  173 

Sgheid  (Élie).  Histoire  des  Juifs  de  Haguenau  [suite] 98 

Steijn SCHNEIDER  (M.).  Paul  de  Bonnefoy  et  le  Livre  de  la  foi.. .  78 

NOTES  ET  MÉLANGES. 

Bâcher  (W.).  Notes  sur  Abou'l  Walid 273 

BONNARD  (J.).  Un  alphabet  hébreu  anglais  au  xiv°  siècle 255 

Darmesïeter  (Arsène).  Sur  le  même  sujet 259 

Derenbourg  (Joseph).  Un  rudiment  de  grammaire  hébraïque 

eu  arabe 274 

DuvAL  (Rubens).  Origine  et  formation  de  la  couj onction  talmu- 

dique  Umalé -*^^ 

Halberstam.  Joseph  le  Zélateur '  * ' 

IIalévy  (J.j.  Sens  et  origine  de  la  parabole  évangéliquc  dite  du 

bon  Samaritain -*'-* 

KiscH  (A.).  Trois  sceaux  juifs  du  moyen  ûgc 278 

SiMONSEN  (D.).  Joseph  le  Zélateur '  itj 


324  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


BIBLIOGRAPHIE. 

DuvAL  (Rubens).  I.  Palestine  et  Syrie  :  Manuel  du  vo^'ogeur, 

par  K.  Baedeker 157 

II.  Le  livre  de  Sibawailii,  par  Hartwig  Derenbourg.  . .     158 
LoEB  (Isidore).  I.  Revue   bibliographique,  '!'='•  et  2'^  trimestres 

1 882 U9  et  282 

IL  Le  Mistére  du  Viel  Testament,  par  le  baron  James 
de  Rothschild 303 

III.  Torquemada,  par  Victor  Hugo 304 

IL  D.  La  Juive,  par  Henri  Gréville 306 

DIVERS. 

Chronique 308 

Additions  et  rectifications 161  et  321 

Ouvrages  offerts  à  la  Société  des  Études  juives 160 

Liste  des  nouveaux  membres  de  la  Société  des  Études  juives 

depuis  le  1  <"'  janvier  1 882 1 62 

Procès-verbaux  des  séances  du  Conseil 163  et  322 

Table  des  matières 323 


FIN. 


VKHSAILLKS,     IMPniAJErtlK    CEUF    HT    FILS,    mJE    DUPI.KSSIS,    ÎJO. 


MM.  les  Membres  de  la  Société  des  Etudes  juives 
pourront  recevoir  I'Histoire  des  Juifs  du  Languedoc 
par  G.  Saige,  au  prix  de  10  francs  (11  francs  rendue 
franco),  au  lieu  de  15  francs. 

S'adresser  à  la  Rédaction,  8,  Allée  Verte,  Paris. 


TABLE  DES  MATIERES 


Babelox  (Ern.)  et  Schwab  (Moïse).  Un  vase  judéo-chaldéen 165 

Neubauer  (Ad.).  Documents  inédits  sur  Maïmonide  et  David 

Airoï 173 

Gross  (Henri).  Notice  sur  Abba  Mari  de  Lunel 4 92 

Kaufmann  (David).  Liste  de  rabbins  dressée  par  Azriei  Trabotto  208 

LoEB  (Isidore).  Actes  de  vente  hébreux  en  Espagne 226 

Gahen    (Ab.).   Les   Juifs    dans    les    colonies    françaises     au 

xviii*'  siècle 236 

NOTES  ET  MÉLANGES. 

Halévt  (J.).  Sens  et  origine  de  la  parabole  évangélique  dite  du 

bon  Samaritain 249 

BoNNARD  (J.).  Un  alphabet  hébreu  anglais  au  xiv"  siècle 255 

Darmesteter  (Arsène).  Même  sujet 239 

DuvAL  (Rubens).  Origine  et  formation  de  la  conjonction  talmu- 

dique  Ilmalé 268 

Bâcher  (W.).  Notes  sur  Abou'l  Walid 273 

Derenbourg  (Joseph).  Un  rudiment  de  grammaire  hébraïque 

en  arabe 274 

KiscH  (A.).  Trois  sceaux  juifs  du  moyen  âge 278 

BIBLIOGRAPHIE. 

LoEB  (Isidore).  I.  Revue  bibliographique  :  2°  trimestre  1882 282 

II.  Le  Mistére  du  Viel  Testament,  par  le  baron  James 

de  Rothschild 303 

III.  Torquemada,  par  Victor  HuGO 304 

H.  D.  La  Juive,  par  Henri  Gréville 306 

Chronique 308 

Additions  et  rectifications 321 

Procès-verbaux  des  séances  du  Conseil 322 


Conformément  au  règlement  inlcricur,  les  séances  du  Conseil  sont  suspen- 
dues pendant  les  mois  de  juillet,  août  et  septembre. 

Le  n"  9  contiendra  le  tableau  des  séances  ultérieures.  Tous  les  Sociétaires 
peuvent  assister  à  ces  séances  dans  lesquelles  pourront  être  failes  des  com- 
munications scientifiques. 

Toutes  les  communications  concernant  la  Rédaction  doivent  être  adressées 
à  la  Société  des  Études  juives ,  8,  Allée  Verte,  Paris. 

Les  envois  d'argent  doivent  élrc  adressés  à  M.  Michel  Erlanger,  (résorisr, 
y,  place  des  Vosges. 


PRIX  D'ABONNEMENT  A  LA  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Un  an 25  fr. 

Prix  du  numéro 7  — 


VERSAILLES;   IMl'RIMEUIE  CERF  ET   FH.S,  RUE  UUI'LESSIS,  U'J. 


r 


I 


I 


BÏNDING  SECT.      APR  2  6 1979 


DS  Revue  des  études  juives; 

101  historia  judaica 


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