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Full text of "Revue des études juives"

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REVUE 


DICS 


ÉTUDES    JUIVES 


VERSAILLES 

CERF     ET    C'%    IMPRIMEURS 

?9,   RUE    D0PLES8I8,    59 


■9^^      REVUE 


DES 


ÉTUDES  JUIVES 


PUBLICATION  TRIMESTRIELLE 
DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES 


TOME  VINGT-SIXIÈME 


PARIS 

A     LA  LIBRAIRIE   A.    DURLACHER 

83  '•'%  RUE  LaFATETTK 


vS. 


1893  V^\^5 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


lOl 


http://www.archive.org/details/revuedestudesj26soci 


TYPES  JUIFS 

CONFÉRENCE  FAITE  A  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES 
LE  H  MARS  1893 

Par  m.  le  D^  Victor  JACQUES 

Secrétaire  de  la  Société  anthropologique  de  Bruxelles. 
Présidence  de  M.  Hartwig  Derenbourg,  président. 


M.  le  Président  ouvre  la  séance  en  ces  termes  : 

Mesdames,  Messieurs, 

La  Société  des  Etudes  juives,  fondée  en  1880,  est  aujourd'hui 
dans  sa  quatorzième  année  d'existence.  Elle  a  atteint,  sinon  sa 
majorité  civile,  du  moins  sa  majorité  religieuse.  Telle  est  sa  vita- 
lité qu'elle  n'a  pas  été  compromise  parla  mort,  en  juin  1892,  de 
mon  éminent  prédécesseur  dans  ce  fauteuil,  M.  Isidore  Loeb.  Et 
pourtant  la  Société  s'était  tellement  incarnée  en  lui  que  sa  perte 
aurait  pu  déteminer  une  crise  grave  daas  notre  existence.  Nous 
avons  pleuré  notre  ami  et  nous  avons  manifesté  notre  deuil  en  lais- 
sant vide  la  place  qu'il  avait  occupée  à  peine  un  court  moment. 
Nous  étions   désormais  émancipés,  capables  de  marcher  en  avant 
sans  lisières.  La  présidence  devenait  chez  nous  un  rouage  dont  à  la 
rigueur  nous  pourrions  nous   passer.   La  meilleure  preuve,   c'est 
qu'après  l'avoir  offerte  aux  hommes  illustres  qui  nous  ont  honorés 
en  l'acceptant,  vous  avez  désigné  cette  fois  un  travailleur  de  bonne 
volonté,  vous  apportant  plus  de  zèle  et  d'ardeur  que  de  prestige  et 

ACT.    ET   CONF.  D 


ACTES  ET  CONFÉRENCES 


d'autorité,  que  vous  avez  honoré,  grandi,  rendu  profondément  re- 
connaissant par  vos  suffrages.  Je  suppose  que  vous  avez  voulu 
récompenser  en  moi  ma  passion  inaltérable  pour  le  judaïsme,  mon 
attachement  réfléchi  à  son  glorieux  passé,  la  vivacité  de  maçon-  . 
fiance  dans  son  avenir,  malgré  les  difficultés  de  l'heure  présente.  La 
vertueuse  indignation  des  antisémites  est  un  fanatisme  rachitique, 
importé  du  dehors,  qui  ne  s'acclimatera  pas  et  qui  ne  prendra  pas 
racine  sur  la  terre  de  France. 

Après  vous  avoir  exprimé  ma  gratitude,  veuillez  m'autoriser  à 
prolonger  un  peu  cette  allocution.  Soyez  rassurés  :  je  ne  mettrai 
pas  votre  patience  à  trop  rude  épreuve  et  je  n'oublierai  pas  que  ce 
n'est  pas  moi  que  vous  êtes  venus  entendre.  Mais  les  professeurs 
se  croient  volontiers  en  chaire,  et  les  occasions  de  nous  rencontrer 
sont  si  peu  fréquentes.  Je  voudrais,  si  vous  le  permettez,  avant  de 
vous  présenter  le  héros  de  la  soirée,  vous  dire  encore  quelques  mots 
sur  notre  Société  comme  votre  délégué  auprès  d'elle,  comme  son 
représentant  auprès  de  vous. 

Nous  disposons  de  deux  moyens  pour  entrer  en  communication 
avec  le  public,  notre  Revue  trimestrielle  et  des  conférences  espa- 
cées... trop  espacées  à  mon  gré.  La  Revue  a  fait  son  chemin 
dans  le  monde  savant.  On  la  consulte  et  on  la  cite.  La  table  des 
vingt-cinq  premiers  volume.*,  qui  va  paraître  sous  peu  de  jours, 
facilitera  encore  les  recherches  et  aidera  la  bonne  semence  à  germer 
dans  de  féconds  résultats.  Mais,  si  nos  collections  sont  feuilletées, 
compulsées,  appréciées,  fatiguées  et  usées  dans  les  bibliothèques  de 
France  et  de  l'étranger,  combien  de  nos  souscripteurs,  qui  ne  nous 
abandonneront  jamais,  je  l'affirme  bien  haut  et  ils  ne  me  contredi- 
ront pas,  se  sont  accoutumés  à  ranger  sur  leurs  rayons  nos  fasci- 
cules intacts,  sans  leur  faire  l'honneur,  je  ne  dirai  pas  de  les  étu- 
dier, mais  de  les  couper!  Que  de  fois  les  catalogues  d'antiquaires, 
dans  leur  francl  ise  impitoyable,  nous  off'rent  des  exemplaires  qui 
proviennent,  soit  de  décès,  soit  de  cessions  entre  vifs,  et  qui  sont 
annoncés  commt  étant  «  dans  l'état  de  neuf!  »  Il  y  a  certes  une 
part  de  préjugé  dans  cette  persévérance  à  se  désintéresser  des  ar- 
ticles insérés  dans  notre  recueil.  Je  crois  que,  tel  qu'il  est,  il  gagne- 
rait à  être  mieux  connu,  qu'on  y  découvrirait,  avec  un  peu  d'effort 


TYPES  JUIPS  Ll 


peut-être,  des  échappées  de  lumière  bien  ménagées  sur  des  points 
d'histoire,  sur  des  traditions  populaires,  sur  les  origines,  les 
époques,  les  variations  et  les  dates  de  notre  littérature  dans  l'anti- 
quité, au  mojen-âge  et  dans  les  temps  modernes.  Mais  comment 
convaincre  de  cette  vérité  ceux  qui  se  sont  entêtés  pour  avoir  été, 
de  prime  abord,  effrayés  par  l'aspect  rébarbatif  de  certains  mé- 
moires? On  a  pris  de  mauvaises  habitudes  et  on  s'y  tient.  C'est 
ainsi  que  plus  d'une  page  maîtresse  est  restée  enfouie  dans  cette 
nécropole.  Avouons-le  humblement  :  si  nous  avons  été  punis,  c'est 
que  nous  n'étions  point  sans  faute.  Si  nous  avons  prêché  dans  le 
désert,  c'est  que  notre  voix  ne  portait  pas.  Notre  renom  littéraire 
ne  s'est  pas  élevé  à  la  hauteur  de  notre  renom  scientifique.  Il  faut 
que  la  conciliation  s'opère,  que  de  part  et  d'autre  nous  consentions 
des  sacrifices  réciproques.  Que  nos  collaborateurs,  sans  faire  au- 
cune concession  sur  le  fond,  se  préoccupent  plus  de  la  forme,  qu'ils 
nous  donnent  plus  de  conclusions  et  moins  de  documents.  Mais 
aussi,  que  ceux  que  nous  cherchons  à  gagner  comme  lecteurs  de  la 
Reiniê  ne  nous  réclament  pas  les  agréments  frivoles  des  chroniques 
et  des  romans,  qu'ils  se  résignent  à  l'allure  austère  dont  nous  ne 
nous  départirons  pas,  qu'ils  fassent  quelques  pas  vers  nous,  comme 
nous  sommes  disposés  à  nous  rapprocher  d'eux  dans  la  limite  du 
possible.  Je  n'ignore  pas  que,  si  nous  nous  décidons  à  cette  transac- 
tion, nous  aurons  bien  de  la  peine  à  en  convaincre  les  incrédules,  à 
triompher  d'anciennes  préventions,  à  lutter  avec  succès  contre  un 
verdict  sévère  élevé  à  la  hauteur  d'un  axiome.  On  n'aime  passe 
déjuger.  Un  titre  est  comme  un  drapeau  qui  change  de  main,  qui 
ne  change  pas  de  couleur.  Nous  essaierons  cependant  de  nous  in- 
sinuer adroitement  dans  les  bonnes  grâces  de  nos  fidèles  adhérents, 
et  de  leur  adresser  une  Revue  qui  ne  leur  paraisse  point  par  trop 
illisible.  Que,  de  leur  côté,  ils  s'associent  de  plus  en  plus  à  notre 
œuvre  et  qu'ils  fassent  en  notre  faveur  une  propagande  active  dont 
nous  avons  besoin  ;  les  confidences  de  notre  trésorier,  qu'il  nous 
permette  de  le  répéter,  sous  le  sceau  du  secret,  à  nos  amis,  ont  un 
caractère  moins  satisfait  que  son  optimisme  officiel. 

Si  la  parole   écrite  se  répand  au  loin   et  apporte   un   écho  de 
notre  activité  dans  l'ancien  et  dans  le  nouveau  monde,  les  entre- 


LU  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

tiens  et  les  conférences  peuvent  produire  un  effet  plus  immédiat 
dans  un  cercle  plus  intime.  Un  auditoire,  même  muet,  est  comme 
l'interlocuteur,  j'allais  dire,  comme  l'inspirateur  et  le  collaborateur 
de  celui  qui  lui  adresse  la  parole.  11  y  a  là  un  courant  qui  provoque 
et  qui  arrête  certains  épanchements.  On  s'exprime  tout  autrement 
selon  les  oreilles  qui  écoutent.  La  vraie  difficulté,  c'est  d'attirer  des 
auditeurs,  d'arracher  les  personnes  sur  lesquelles  on  veut  agir  aux 
milieux  divers  qui  nous  les  disputent.  Mais,  pour  l'action  exercée, 
quelle  différence  entre  les  artifices  froids  du  style  sur  le  papier,  et 
la  chaleur  d'une  éloquence  communicative.  Je  suis  un  partisan  ré- 
solu des  conférences,  instruments  admirables  de  vulgarisation, 
sources  d'instruction  grâce  auxquelles  une  sorte  de  solidarité  s'éta- 
blit entre  ceux  qui  y  ont  puisé  eu  commun,  manifestations  élo- 
quentes qui  font  battre  les  cœurs  à  l'unisson,  forces  puissantes  dé- 
terminant l'accord  des  pensées  et  la  cohésion  des  éléments  les  plus 
hétérogènes.  On  y  arrive  de  points  divers  dans  des  dispositions 
individuelles  ;  on  en  sort,  pour  peu  que  l'orateur  ait  imprimé  sa 
marque  sur  des  esprits  malléables,  avec  une  communion  de  sensa- 
tions et  d'idées  qui  a  la  chance  de  survivre  à  l'impression  éphé- 
mère. Il  y  a  là  un  phénomène  physique  et  moral  analogue  à  l'effet 
produit  par  les  représentations  théâtrales  d'un  ordre  supérieur. 
L'émotion  de  chacun  s'accroît  par  l'émotion  générale,  l'ensemble 
des  spectateurs  profite  des  jouissances  accumulées  dans  la  salle, 
les  acteurs,  dans  leur  jeu,  s'échauffent  au  contact  de  la  flamme 
qu'ils  ont  allumée.  C'est  ainsi  que  je  me  figure  l'action  réflexe  du 
conférencier  sur  le  public,  du  public  sur  le  conférencier. 

Le  discours  que  vous  allez  entendre,  et  que  je  crains  d'avoir  trop 
retardé  par  ce  long  préambule,  sera,  je  l'espère,  suivi,  avant  la  fin 
de  1893,  par  plusieurs  autres  conférences.  Des  pourparlers  sont 
engagés  avec  des  savants  et  des  écrivains  dont  nous  espérons  obte- 
nir le  concours.  Nous  avons  déjà  des  promesses  fermes,  mais  que  je 
ne  me  crois  pas  encore  le  droit  de  divulguer.  Vous  aurez  tout  le 
plaisir  d'agréables  surprises. 

Je  vous  promets,  en  attendant,  que  vous  allez  passer  une  heure  à 
la  fois  attrayante  et  instructive.  M.  le  D""  Victor  Jacques,  auquel 
vous  la  devrez,  n'est  pas  seulement,  comme  le  portent  les  cartes 


TYPES  JUIFS  LUI 


d'invitation,  le  secrétaire  de  la  Société  d'Anthropologie  de  Bruxelles, 
il  y  est  aus?i  professeur  de  thérapeutique  à  l'Université,  chef  de 
service  à  l'hôpital  des  orphelines. 

Les  résultats  auxquels  il  est  arrivé  par  une  étude  anthropologique 
portant  sur  l'être  vivant  et  sur  la  conformation  des  crânes  sont 
diamétralement  opposés  à  ceux  que  M.  Ernest  Renan  a  développés 
dans  ses  deux  conférences  mémorables  :  1°  Le  Judaïsme  comme 
race  et  comme  religion,  le  27  janvier  1883,  au  Cercle  Saint-Simon; 
2°  Identité  originelle  et  séparation  graduelle  du  judciisme  et  du  christia- 
nisme, le  26  mai  1883,  à  la  Société  des  Etudes  juives.  M.  Renan, 
avec  sa  merveilleuse  séduction  de  langage  et  de  style,  prétendait, 
en  s'appuyant  sur  une  interprétation  très  personnelle  des  événe- 
ments historiques,  qu'au  point  de  vue  ethnographique,  l'idée  d'une 
race  juive  était  un  leurre,  le  peuple  d'Israël  ayant  été  fortement 
pénétré  d'infusions  étrangères,  et  que  l'unité  apparente  provenait 
d'un  mirage  auquel  l'unité  religieuse  donnait  un  semblant  de 
réalité. 

«  Mon  opinion,  disait  M.  Renan  devant  vous,  est  qu'il  n'y  a  pas 
un  type  juif,  mais  qu'il  y  a  des  tj^pes  juifs.  »  Jusque-là  c'est  bien 
aussi  l'opinion  de  M.  le  professeur  Jacques.  Mais  il  se  sépare  de 
son  prédécesseur  en  ce  qu'il  est  convaincu  que  les  types  juifs  actuels 
sont  en  filiation  directe  avec  les  types  qui  existaient  en  Judée 
avant  la  dispersion,  avant  135  de  notre  ère.  Si  M.  le  professeur 
Jacques  se  prononce  ainsi  en  faveur  de  la  communauté  d'origine 
pour  les  Juifs  de  lignée  authentique,  ce  n'est  point  qu'il  se  soit 
laissé  entraîner  hors  de  la  voie  scientifique  par  des  préoccupa- 
tions apologétiques.  Vous  n'êtes  pas  en  face  d'un  Juif  en  quête  de 
nobles  ancêtres.  M.  le  professeur  Jacques  a  approfondi  cette  ques- 
tion si  intéressante  pour  les  études  juives,  en  l'examinant  du 
dehors,  avec  la  sympathie  dun  esprit  libéral,  avec  le  calme  d'un 
témoin  impartial  et  désintéressé.  Remercions-le  de  l'honneur  qu'il 
nous  fait  de  nous  réserver  la  primeur  de  sa  théorie,  présentée  par 
lui,  ainsi  qu'il  vous  l'a  annoncé  d'avance,  comme  une  étude  d'an- 
thropologie. 


LIV  ACTES  ET  CONFÉRENCES 


M.  le  -D'"  Jacques  répond  : 

Mesdames  et  Messieurs, 

S'il  est  une  question  qui  soit  de  nature  à  vous  intéresser  entre 
toutes,  c'est  bien  celle  des  origines  des  populations  de  religion 
juive  qui  sont  actuellement  répandues  à  la  surface  du  monde 
entier. 

Peu  de  questions  ont  été  autant  discutées,  peu  de  questions  ont 
reçu  autant  de  solutions  différentes,  solutions  qui,  il  faut  bien  le 
dire,  n'étaient  pas  toujours  inspirées  par  l'amour  de  la  vérité,  mais 
qui  étaient  trop  souvent  dictées  par  des  considérations  absolument 
étrangères  à  la  science. 

Si  je  ne  crains  pas  d'aborder  de  nouveau  ce  sujet  devant  vous, 
c'est  parce  que  je  crois  que  beaucoup  de  ceux  qui  s'en  sont  occupés 
n'ont  pas  poussé  assez  loin  leurs  investigations  et  qu'ils  ont,  en 
quelque  sorte,  abandonné  leur  tâche  avant  de  l'avoir  achevée. 

Rappelons,  en  quelques  mots,  les  principales  opinions  qui  ont  été 
présentées  dans  ces  derniers  temps  sur  l'origine  des  Juifs. 

Vous  avez  sans  doute  encore  présente  à  la  mémoire  la  magistrale 
conférence  faite,  il  y  a  quelques  années,  par  Renan,  sur  Le 
Judaïsme  comme  race  et  comme  religion^.  L'illustre  professeur  au 
Collège  de  France  savait  mettre  au  service  d'une  érudition  pro- 
fonde et  d'une  grande  élévation  de  pensées  un  langage  harmonieux 
et  élégant  qui  entrainait  la  conviction  chez  ses  auditeurs,  au  point 
que  ceux-ci  pouvaient  s'imaginer  entendre  leurs  propres  idées  dans 
la  bouche  du  maître.  Mais  Renan  avouait  lui-même  que  sa  science 
n'était  pas  universelle,  quand  il  exprimait  le  regret  de  ne  pas  s'être 
occupé  plus  tôt  du  sujet  qu'il  traitait  ce  jour-là.  Sans  doute,  comme 
historien,  il  était  admirablement  préparé  pour  aborder  la  question 
de  la  religion  juive  ;  mais,  comme  ethnologiste,  les  opinions  qu'il 

*  Rtvue   des  cours  littéraires,  tome  XXXI.  —  Analyse  et  critique,    par  Th. 
Reinach,  daus  la  Retue  des  Etudes  Juives,  1883,  p.  141. 


TYPES  JUIFS  LV 


pouvait  émettre  ne  doivent  pas  être  admises  sans  quelques  res- 
trictions. 

Or,  voici  les  conclusions  de  Renan,  qui  sont,  d'ailleurs,  celles  de 
beaucoup  d'anthropologistes  français,  MM.  Topinard,  Hervé,  Hove- 
lacque  et  d'autres  :  le  judaïsme  est  une  religion,  mais  ce  n'est  pas  un 
fait  ethnographique  ;  il  y  a  peut-être  bien  des  types  juifs,  quoique, 
pour  sa  part,  il  ne  s'en  montre  pas  très  convaincu  ;  mais  la  physio- 
nomie particulière  que  d'aucuns  croient  observer  chez  les  Juifs  est 
bien  plutôt  le  résultat  des  nécessités  sociales  qui  ont  pesé  sur  eux 
pendant  des  siècles,  qu'elle  n'est  un  phénomène  de  race. 

L'opinion  de  Renan  a  fait  autorité,  et  bien  des  personnes  sont 
aujourd'hui  persuadées  que  les  Juifs  actuels  sont  des  gens  qui  pra- 
tiquent la  religion  juive,  mais  qui  n'ont  plus  dans  les  veines  une 
seule  goutte  du  sang  des  anciens  habitants  de  la  Judée.  Renan 
est  cité  par  tous  ceux  qui  se  sont  occupés  de  la  question  après  lui. 
Il  est  vrai  de  dire  que  même  ceux  dont  les  conclusions  s'écartent 
des  siennes  se  plaisent  à  lui  emprunter  ses  arguments  ou  tout  au 
moins  en  tiennent  compte. 

C'est  Renan  qu'invoquait  le  tant  regretté  Isidore  Loeb,  à  la 
science  duquel  je  me  plais  à  rendre,  en  passant,  un  légitime  hom- 
mage, quand  il  écrivait  son  article  Juifs  pour  le  Dictionnaire  de 
Vivien  de  Saint-Martin.  Voici  comment  il  s'exprime  :  «  Pouvons- 
nous  supposer  que  tous  (les  Juifs  modernes)  fussent  des  descendants 
des  Orientaux  venus  de  Palestine  à  une  certaine  époque  et  qui  au- 
raient fondé  des  espèces  de  colonies  dans  certaines  villes"?  Je  ne  le 
crois  pas.  Il  y  eut  sans  doute  en  Gaule  des  émigrés  juifs  qui  remon- 
tèrent le  Rhône  et  la  Saône  et  servirent,  en  quelque  sorte,  de  levain, 
mais  il  y  eut  aussi  une  foule  de  gens  qui  se  rattachèrent  au  ju- 
daïsme par  conversion  et  qui  n'avaient  pas  un  seul  ancêtre  en  Pa- 
lestine. »  Isidore  Loeb  a  contribué,  peut-être  plus  que  tout  autre,  à 
propager  cette  opinion  que  les  Juifs  français,  par  exemple,  sont  le 
résultat  d'un  mélange  d'Aryens  et  de  Sémites,  par  suite  de  nom- 
breux mariages  entre  les  Chrétiens  et  les  Juifs. 

Je  demanderai  à  ceux  qui  partagent  cette  manière  de  voir,  de 
quels  Aryas  ils  entendent  parler,  des  peuples  qui  parlaient  des 
langues  aryennes,  ou  des  peuples  qui  sont  de  race  aryenne.  Il  y  a 


LYl  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

là  une  confusion  de  mots  des  plus  regrettables,  dont  on  n'a  que 
trop  d'exemples. 

En  Angleterre,  nous  voyons  M.  Neubauer  '  faire  également  état 
de  l'existence  de  Juifs  bruns  ou  noirs,  de  Juifs  blonds  et  de  Juifs 
aux  cheveux  roux,  du  prosélytisme  aux  premiers  siècles  de  notre 
ère  et  des  mariages  mixtes  qui  se  pratiquaient  aussi  bien  autrefois 
en  Judée  que  plus  tard,  dans  toutes  les  parties  du  monde,  depuis 
la  dispersion  des  Juifs  sous  Titus  et  Adrien,  pour  rejeter  presque 
complètement  l'existence  d'un  type  ou  même  de  plusieurs  types 
juifs  modernes,  et  pour  conclure,  comme  Renan  et  Loeb,  à  l'unité 
de  religion  sans  l'unité  de  race. 

Nous  sommes  loin,  comme  vous  le  voyez,  des  auteurs  qui  procla- 
ment les  Juifs  une  race  pure  entre  toutes,  comme  le  D""  Andrée* 
et  M.  Joseph  Jacobs  ^,  par  exemple,  et  de  ceux  qui  admettent  au 
moins  deux  types  juifs  bien  déterminés,  comme  le  professeur 
Stieda  *,  le  û''  Blechman/  et  bien  d'autres. 

Je  ne  veux  pas  examiner  un  à  un  tous  les  arguments  de  ceux 
qui  ont  plaidé  des  thèses  aussi  opposées.  Je  me  hâte  de  le  dire,  je 
suis  grand  partisan  de  l'existence  de  plusieurs  types  parmi  les 
Juifs  modernes  ;  mais  je  ne  puis  me  contenter  de  fixer  devant  vous 
le  caractère  vraiment  scientifique  de  ces  types  ;  je  veux  aussi  établir 
la  possibilité  de  leur  filiation  avec  les  anciens  habitants  de  la  Pales- 
tine et  rechercher  enfin  l'origine  de  ceux-ci.  Ce  sont  ces  deux  der- 
niers points  qui  ont  été  le  plus  souvent  laissés  dans  l'ombre  par  la 
plupart  des  auteurs. 

Je  ne  crains  pas  d'aborder,  devant  une  assemblée  comme  la 
vôtre,  ces  questions  peut-être  un  peu  spéciales.  Votre  Société  a 
prouvé,  par  l'intérêt  qu'elle  a  montré  aux  savantes  conférences  en- 

*  Notes  on  the  Race-Types  of  tht  Jews,  dans  The  J.  of  tht  Anthrop-  Listittiti, 
1886,  vol.  XV,  p.  17. 

'  Ztir  Volkskunde  der  Juden,  1881. 
'  /.  of  the  Anthrop.  Jnstitute,  1886,  vol.  XV,  p.  23. 

■*  Ein  Beitrag  tur  Anthropologie  der  Juden,  Archiv.  A  Anthrop-  1882, 
XIV,  pages  61  à  71. 

*  Thèse  inaugurale  publiée  sous  le  même  titre  que  l'ouvrage  précédent  en  1882, 
à  Dorpat. 


TYPES  JUIFS  LVn 


tendues  jusqu'ici,  qu'elle  peut  explorer,  dans  toutes  ses  parties,  le 
champ  des  connaissances  hunaaines.  En  vous  priant  de  bien  vouloir 
me  suivre  aujourd'hui  dans  le  domaine  des  sciences  anthropolo- 
giques, j'ose  caresser  l'espoir  que  votre  promenade  vous  sera  quel- 
que peu  profitable.  Je  tâcherai,  d'ailleurs,  de  la  rendre  aussi 
attrayante  que  possible. 

Le  premier  point  à  établir,  pour  étudier  le  tjpe  ou  les  types  juifs, 
c'est  de  bien  se  mettre  d'accord  sur  ce  qu'on  entend  en  anthropo- 
logie par  le  mot  iijpe  et  comment,  au  point  de  vue  de  cette  science, 
on  détermine  un  type. 

«  La  définition  la  plus  simple  du  type,  dit  M.  Topinard,  est  celle 
de  Cuvier  :  «  Un  ensemble  de  caractères  physiques.  »  Il  y  a,  pour- 
suit le  savant  anthropologiste,  des  types  individuels,  des  types  de 
famille,  des  types  accidentels  et  des  types  ethniques.  Arrêtons-nous 
un  instant  sur  ces  derniers,  car  c'est  sur  eux  que  roule  toute  la 
controverse  qui  nous  occupe. 

Les  types  accidentels  sont  ceux  qui  résultent  «  de  l'action  des 
circonstances  extérieures  de  la  vie,  communes  à  un  même  groupe 
d'individus  :  tels  sont  le  type  des  mineurs  privés  de  lumière,  celui 
des  marins  exposés  à  tous  les  vents,  baignant  dans  une  atmos- 
phère salée  et  se  nourrissant  de  même  ;  celui  des  paysans  de  la 
Bresse  ou  des  Marais-Pontins,  soumis  aux  mêmes  influences  palu- 
déennes ;  celui  des  Irlandais  des  comtés  d'Armagh  et  de  Down, 
dont  parle  Ch.  Hall,  partageant  la  même  misère,  la  même  saleté, 
la  même  alimentation  insuffisante'.  »  L'auteur  auquel  j'emprunte 
cette  citation,  aurait  pu  ajouter  comme  exemples,  d'une  part,  le 
type  des  habitants  des  villes  par  opposition  avec  celui  des  habitants 
des  campagnes,  et  le  type  que  présentent,  heureusement  de  moins 
en  moins  dans  nos  pays  libres,  les  descendants  des  malheureux  que 
l'intolérance  religieuse  du  moyen-âge  avait  relégués  dans  lesghetti, 
mais  qui  s'observe  encore  dans  les  pays  où  les  Juifs  sont  traités  en 
parias. 

C'est  une  grande  erreur  chez  Renan  d'avoir  admis  comme  base 

'   Topinard,  Élémtntt  d'Anthropologie  gén€rale,  1885,  p.  189. 


LVllI  ACTES  ET  COiNFÉRENCES 

de  son  argumentation  ce  type  accidentel  et  d'avoir  méconnu  le  type 
zoologique  ou,  pour  serrer  de  plus  près  la  question,  le  type  de  la 
race,  le  type  ethnique.  Mais  comment  l'illustre  historien  aurait-il 
pu  déterminer  le  type  ethnique  plus  ou  moins  caché  derrière  le 
type  accidentel  ?  Ce  n'est  pas,  comme  il  dit  l'avoir  fait,  en  se 
contentant  de  regarder  les  savants  hébraïsants  qui  allaient  con- 
sulter les  manuscrits  dont  il  avait  la  garde.  La  science  demande 
des  méthodes  plus  précises.  Nous  dirons  donc  quelques  mots 
de  ces  méthodes  et  nous  analyserons  les  résultats  qu'elles  ont 
fournis. 

Une  proposition  qui  a  souvent  été  répétée  en  anthropologie,  c'est 
qu'il  n'y  a  plus  de  races  pures  et  que  tous  les  peuples  sont  le  résul- 
tat de  métissages  plus  ou  moins  nombreux.  Les  voyageurs  qui 
abordent  pour  la  première  fois  dans  certaines  îles  de  l'Océan  indien 
ou  de  l'Océan  pacifique  sont  tout  d'abord  frappés  par  l'air  de  fa- 
mille que  présentent  tous  les  individus  qu'ils  rencontrent,  au  point 
qu'il  est  difficile  de  les  distinguer  les  uns  des  autres  par  quelque 
caractère  bien  apparent.  Il  s'en  faut  donc  de  beaucoup,  quel- 
que exercés  qu'ils  soient,  qu'ils  puissent  déterminer,  à  première  vue, 
les  éléments  ethniques  qui  entrent  dans  la  composition  de  la  popu- 
lation qu'ils  ont  sous  les  yeux.  Je  vous  cite  cet  exemple  parce  qu'il 
est  bien  connu.  Mais  quel  ne  doit  pas  être  l'embarras  de  l'observa- 
teur, quand  il  se  trouve  en  présence  d'une  population  qui  réunit 
les  types  physiques  les  plus  divers  !  Pour  s'y  reconnaître,  il  n'y  a 
qu'une  seule  méthode  siire,  c'est  d'examiner  un  à  un  un  certain 
nombre  d'individus,  de  noter  tous  les  caractères  qu'ils  présentent, 
puis  de  comparer  entre  eux  ces  caractères,  de  manière  à  établir 
leur  prédominance  numérique.  Quand  ce  travail  est  fait  pour  une 
population  donnée,  il  faut  nécessairement,  pour  en  tirer  quelque 
conclusion  utile ,  le  reprendre  pour  toutes  les  populations  voi- 
sines. C'est  alors  seulement  que  l'on  peut  juger  de  la  répartition 
des  caractères  et  déterminer  ceux  d'entre  eux  qui  paraissent  ap- 
partenir plus  particulièrement  à  tel  groupe  de  population  ou  à  tel 
autre. 

Quels  sont  les  caractères  qu'il  est  utile  de  relever  pour  ce  genre 
de  travail?  Les  caractères  proposés  sont  extrêmement  nombreux, 


TYPES  JUIFS  ^^^ 


et  il  faut  l'avouer,  les  anthropologistes  ne  sont  pas  encore  d'ac- 
cord sur  l'importance  qu'il  convient  d'attribuer  à  chacun  d'eux.  Il 
en  est  toutefois  un  certain  nombre  qui  sont  admis  par  tout  le 
monde  comme  des  caractères  de  premier  ordre.  Pour  ne  pas  en- 
trer dans  trop  de  détails,  je  me  bornerai  à  vous  parler  seulement 
de  ces  derniers.  Vous  saisirez,  d'ailleurs,  immédiatement  combien 
il  est  important  de  n'avoir  recours  qu'à  des   observations  bien 


Quand  on  voyage  dans  le  Nord,  dans  les  parties  méridionales  de 
la  Suède  et  de  la  Norwège,  par  exemple,  ce  qui  frappe  le  plus  dans 
l'aspect  général  de  la  population,  c'est  la  coloration  des  yeux  et  des 
cheveux.  Les  yeux  sont  d'un  bleu  pâle  très  doux,  et  les  cheveux 
sont  franchement  blonds.  Dans  le  Midi,  en  Espagne,  en  Italie,  les 
yeux  sont  noirs  ainsi  que  les  cheveux.  La  répétition  de  ces  carac- 
tères chez  un  très  grand  nombre  de  personnes  les  fait  admettre 
comme  caractères  de  race,  et,  en  effet,  ils  constituent  un  élément 
très  important  dans  le  diagnostic  de  la  race. 

Mais  voici  une  remarque  que  chacun  de  vous  peut  faire  :  si  plu- 
sieurs  personnes  doivent  donner  leur  avis  sur  la  nuance  exacte  des 
cheveux  ou  des  yeux  des  populations  qu'ils  ont  à  examiner,  surtout 
quand  il  s'agit  des  couleurs   intermédiaires,  brun  clair  ou  châtain 
pour  les  cheveux,  brun  clair,  gris,   gris  bleu,  gris  vert  pour  les 
yeux    on  peut  être  certain  d'avance  du  désaccord  le  plus  absolu 
dans  le  résultat  des  observations.  11  en  est  de  même  pour  la  colo- 
ration de  la  peau.  C'est  qu'en  effet,  tous  les  yeux  ne  voient  pas  de  la 
même  façon.  M.  J.  Beddoe  remarque  que  les  Anglais,  qui  sont  consi- 
dérés comme  blonds  par  les  Français,  lesquels  sont  d'une  coloration 
de  cheveux  en  général  plus  foncée,  sont  regardés   comme   bruns 
parles  Scandinaves,  qui,  eux.  sont  d'un  blond  plus  clair.  11  faut 
une  très  grande    habitude  pour  pouvoir    rendre  par  le  mot  juste 
une   impression    toute  personnelle.    Aussi    les   sociétés   d'anthro- 
poloo-ie  joignent-elles  toujours  aux   instructions    qu'elles  donnent 
aux  voyageurs    des   tableaux  chromatiques,  numérotés,   donnant 
toutes  les  nuances  des  cheveux,  des  yeux  et  de  la  peau,  afin  d  e- 
tablir  une  concordance    aussi   satisfaisante  que  possible  dans  les 
observations. 


LX  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  coloration  des  yeux  et  des  cheveux  constitue 
des  caractères  ethniques  de  premier  ordre,  et,  en  France,  en  Bel- 
gique, en  Angleterre,  en  Allemagne,  en  Autriche  et  en  Italie,  des 
enquêtes  ont  été  faites  pour  relever  la  répartition  des  nuances  qu'ils 
peuvent  présenter. 

Pour  ne  parler  que  des  résultats  obtenus  en  France,  je  vous  dirai 
que  l'on  a  reconnu  que  deux  grandes  races  surtout  se  sont  partagé, 
d'une  manière  assez  irrégulière,  le  territoire.  Il  existait,  dans  le 
Centre  et  dans  le  Nord,  avant  notre  ère,  une  race  brune  de  cheveux 
et  aux  yeux  foncés  ;  des  invasions  successives,  qui  se  sont  pro- 
longées pendant  plusieurs  siècles  et  dont  la  conquête  franque  par 
Clovis  a  été  l'une  des  dernières  phases,  ont  amené  du  Nord  des 
populations  aux  cheveux  blonds  et  aux  yeux  bleus,  qui  se  sont  peu 
à  peu  fondues  au  milieu  des  populations  autochtones,  tout  en  adop- 
tant et  leur  langue  et  leur  civilisation.  Certains  départements  ont 
absorbé  un  nombre  plus  considérable  de  ces  envahisseurs,  que  les 
anthropologistes  modernes  désignent  sous  le  nom  d'Aryens,  et 
offrent,  par  conséquent,  une  proportion  plus  considérable  de  blonds 
aux  yeux  bleus  ;  d'autres  départements,  surtout  parmi  ceux  qui 
étaient  protégés  par  des  barrières  naturelles,  forêts  épaisses,  mon- 
tagnes peu  accessibles,  marais  étendus,  ou  dont  le  sol  pauvre  ten- 
tait moins  le  vainqueur,  ont  conservé  en  majorité  leurs  anciens 
habitants. 

En  tout  cas,  si  l'on  trouve  partout  des  blonds  et  des  bruns,  en 
proportion  variable,  les  blonds  tendent  à  disparaître,  à  être  absorbés 
au  milieu  de  populations  plus  anciennes.  Dans  le  midi  de  la  France, 
d'autres  races  encore  ont,  sans  doute,  servi  de  substratum  aux  popu- 
lations actuelles,  mais  je  ne  pourrais,  je  le  repète,  entrer  ici  dans 
beaucoup  de  détails  à  leur  sujet  ;  ce  que  je  vous  ai  dit  de  l'impor- 
tance du  caractère  ethnique  tiré  de  la  coloration  des  yeux  et  des 
cheveux  suffira  pour  débrouiller,  à  ce  point  de  vue,  la  question 
qui  nous  occupe. 

Si  nous  consultons,  en  effet,  les  documents  produits  par  les 
anthropologistes,  nous  voyons  que  la  thèse  que  les  Juifs  chassés 
d'Espagne  et  de  Portugal  par  les  édits  de  proscription  de  1492  sont 


TYPES  JUIFS  LXI 


tous  noirs  de  cheveux,  est  loin  d'être  confirmée  par  les  chiffres  ;  de 
même,  les  Juifs  d'Allemagne  et  de  Pologne,  les  Aschkenazim,  ofi'rent 
un  mélange  de  cheveux  blonds  et  de  cheveux  noirs,  d'yeux  bleus  et 
d'jeux  foncés,  bien  qu'ils  soient  habituellement  dépeints  comme 
ayant  des  cheveux  blonds  ou  roux  et  des  yeux  bleus. 

Je  puis  citer  quelques  chiffres  puisés  dans  l'article  publié  par 
J.  Jacobs,  dans  le  Journal  de  l'Institut  anthropologique  de  la  Grande- 
Bretagne  (1886,  t,  XV,  p.  36),  chiffres  d'autant  plus  instructifs 
qu'ils  donnent,  en  regard,  la  proportion  de  cheveux  et  d'yeux  foncés 
pour  le  restant  de  la  population. 


LXIl 


ACTtS  ET  CONFÉRENCES 


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TYPES  JUIFS  LXIII 


Ces  chiffres  suffiraient  à  eux  seuls  pour  démontrer  que  les  per- 
sonnes qui  pratiquent  la  religion  juive  en  Allemagne  et  en  Autriche 
diffèrent,  dans  une  certaine  mesure,  au  point  de  vue  ethnique,  des 
populations  au  milieu  desquelles  elles  vivent,  et  qu'elles  n'ont,  par 
conséquent,  pas  tout  à  fait  la  même  origine.  Les  chiffres  recueillis 
sur  les  Juifs  Sephardim,  non  pas  dans  la  Péninsule  ibérique,  où  ils 
sont  fort  peu  nombreux,  mais  dans  les  pays  qui  les  ont  recueillis  à 
la  fin  du  XV®  siècle,  donneraient  des  résultats  analogues.  Ainsi,  à 
Londres  nous  trouvons  •  : 

YEUX  CHEVEUX 

BLEUS.       GRIS.       BRUNS.  BLONDS.    BRUNS.     NOIRS. 

Juifs 21,3         11,9        66,8  11,9         61,6        26,5 

En  Espagne,  les  statistiques  donnent  les  proportions  suivantes  : 

Yeux  fonce's 41,2        Cheveux  foncés 74,6 

—    bleus 23,9  —        clairs 23,3 

Ces  chiffres  s'éloignent  sans  doute  des  données  fournies  par  les 
statistiques  allemandes,  mais  ils  n'en  démontrent  pas  moins  chez 
les  descendants  des  Juifs  espagnols  la  présence  d'un  élément  eth- 
nique aux  cheveux  blonds  et  aux  yeux  bleus,  réparti,  il  est  vrai, 
dans  d'autres  proportions  que  chez  les  Juifs  Aschkenazim. 

Quant  aux  cheveux  roux,  on  a  beaucoup  discuté  sur  leur  valeur 
et  sur  leur  signification  au  point  de  vue  de  la  race.  Est-ce  la  carac- 
téristique d'une  race,  comme  la  couleur  blonde,  la  couleur  noire  ou  la 
couleur  brune?  n'est-ce,  au  contraire,  qu'une  sorte  de  perversion, 
de  maladie  de  la  couleur  noire  ou  brune,  perversion  que  l'on  a  attri- 
buée aux  mauvaises  conditions  hygiéniques  dans  lesquelles  certaines 
populations  sont  obligées  de  vivre  ?  Je  ne  sais.  Les  deux  hypothèses 
peuvent  être  invoquées  à  l'appui  de  ma  démonstration  :  dans  le  cas 
où  l'on  admettrait  que  le  roux  est  un  caractère  ethnique,  il  serait 
facile  d'établir  des  relations  de  parenté  entre  les  ancêtres  des  Juifs 

'  Comparative  Anthropometry  of  English  Jews,  par  J.  Jacobs  et  Is.  Spielman, 
dans  le  Journal  of  the  Anthropological  InstiHtte,  1889,  t,  XIX,  p.  76- 


LXIV  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

roux  et  la  race  aux  cheveux  roux  et  aux  yeux  gris  verdâtre,  dont 
l'aire  d'extension  a  pu,  dans  l'antiquité,  atteindre  la  Judée,  et  qui 
se  retrouve  aujourd'hui  dans  le  type  finnois  aux  cheveux  roux. 
Dans  le  cas  où  l'on  préférerait,  avec  J.  Beddoe,  la  seconde  explica- 
tion, on  pourrait  démontrer  que  la  misère  physiologique  est  le  par- 
tage de  certaines  communautés  juives  où  l'on  trouve  le  plus  de 
cheveux  roux,  en  même  temps  qu'une  assez  forte  proportion  de 
cheveux  noirs,  dans  les  Principautés  danubiennes,  par  exemple. 

Mais  je  crois  que  ce  point  est  d'importance  secondaire  ;  je  ne  m'y 
suis  arrêté  que  pour  ne  pas  être  accusé  de  négliger  un  fait  auquel 
certains  anthropologistes  ont  attribué  une  haute  importance. 

La  coloration  des  yeux  et  des  cheveux  constitue,  sans  doute,  un 
caractère  des  plus  précieux,  mais  il  en  est  auxquels  nous  attachons 
une  égale  valeur.  Ce  sont,  entre  autres,  l'aspect  de  la  chevelure, 
la  taille,  la  forme  du  nez,  et,  enfin,  ce  que  nous  appelons  les  indices, 
l'indice  céphalique  et  l'indice  nasal. 

L'aspect  de  la  chevelure  est,  en  réalité,  un  caractère  secondaire. 
Il  est  bon  toutefois  de  noter  que  chez  les  Juifs  les  cheveux  ondes 
ou  bouclés  ne  sont  pas  rares.  Il  est  inutile,  je  crois,  de  définir  ces 
termes.  A  côté  de  cette  forme  de  cheveux,  les  cheveux  gros  et 
rudes,  plats,  pour  me  servir  d'une  expression  courante,  se  rencon- 
trent fréquemment  dans  le  type  des  Sephardim,  aussi  bien  que  chez 
les  Juifs  Aschkenazim.  Je  note  simplement  ce  fait  en  passant. 

La  forme  du  nez  a  souvent  été  donnée  comme  l'une  des  caracté- 
ristiques des  Juifs.  Seulement  il  y  a  à  distinguer  deux  formes  bien 
différentes.  Dans  la  première  variété,  le  dos  du  nez  est  étroit  et 
convexe  :  c'est  le  nez  aquilin  des  Sephardim  et  des  Sémites  en 
général.  Dans  la  seconde  variété,  le  nez  est  plus  gros  dans  son 
ensemble  ;  l'arête  du  nez  est  comme  empâtée  ;  ses  ailes  sont  moins 
nettement  dessinées.  On  attribue  plutôt  cette  forme  de  nez  aux 
Aschkenazim.  Si,  au  lieu  de  nous  contenter  de  cette  impression  plus 
ou  moins  sujette  à  caution,  nous  consultons  les  tableaux  dressés  par 
les  anthropologistes,  nous  voyons,  par  exemple*,  la  répartition 
suivante  : 

'  Mayer  et  Koperniçki,  Caractères  phijiiques  des  habitants  de  la  Galicîe  ^ 
Cracovie,  1876,  p.  187,  eu  polonais. 


TYPES  JUIFS  LXV 


POLONAIS.    RUTHENES.  JUIFS. 


Nez  aquilin 

Nez  droit 

Nez  plat  et  gros  , 
Nez  retroussé  . . , 


6,4 

6,1 

30,9 

67,4 

68,1 

59,6 

^5 

11,2 

2,9 

18,7 

14,6 

6,6 

100,0  100,0  100,0 


Or,  les  Juifs  de  la  Galicie  passent  certainement  pour  appartenir 
au  type  des  Aschkenazim. 

M.  J.  Jacobs  '  a  exécuté,  avec  le  concours  de  M.  Fr.  Galton,  ce 
que  l'on  appelle  des  photographies  composites  d'enfants  fréquentant 
une  école  juive  de  Londres.  Il  prétend  que  ce  qui  donne  sa  caracté- 
ristique au  nezjuif,  ce  sont  les  narines.  Si  l'on  cache,  dit-il,  dans  un 
profil  composite,  la  place  des  narines  par  un  petit  morceau  de  papier, 
l'expression  de  race  disparaît  presque  complètement.  On  peut  faci- 
lement répéter  l'expérience  sans  avoir  sous  les  jeux  une  photo- 
graphie composite.  Rien  ne  ressemble  au  profil  du  nez  juif  comme 
le  chiffre  6  dont  on  allonge  la  queue.  Si  l'on  efface  la  boucle,  sa 
ressemblance  n'est  plus  aussi  frappante,  et  elle  disparaît  complète- 
ment quand  on  remplace  la  boucle  par  un  trait  horizontal. 

Ce  n'est,  d'ailleurs,  pas  seulement  la  forme  du  nez  qui  donne  à  la 
physionomie  des  Juits  leur  air  de  famille  :  la  forme  de  la  bouche 
entre  pour  beaucoup  dans  l'expression  du  visage,  de  même  que  l'œil 
et  la  forme  du  front  et  des  pommettes.  Tout  observateur  non  pré- 
venu en  conviendra,  qu'il  examine  des  Juifs  dits  du  type  germano- 
polonais  ou  des  Juifs  du  type  espagnol.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que 
tous  les  caractères  qu  il  aura  notés  chez  l'un  des  deux  types  prin- 
cipaux, il  les  rencontrera,  dans  d'autres  rapports  de  fréquence,  peut- 
être,  mais  il  les  rencontrera  néanmoins  chez  l'autre  type. 

Les  caractères  purement  descriptifs  dont  nous  nous  sommes 
occupé  jusqu'ici,  quelque  importants  qu'ils  soient,  n'ont  pas  la  valeur 
des  caractères  anthropométriques,  c'est-à-dire  de  ceux  que  l'on 
recueille  au  moyen  de  mesures,  ruban  métrique,  compas  d'épais- 
seur, etc.  Parmi  ceux-ci,  comme  je  vous  l'ai  dit,  nous  dirons  quel- 
ques mots  de  la  taille  et  des  indices. 

'  /.  ÂHthr.  Inst.,  t.  XV,  p.  54. 

ACT.   ET  CONF.  K 


LXVI  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

Les  Juifs  doivent  être  rangés  dans  les  plus  petites  tailles  de 
l'Europe,  à  l'exception  des  Hongrois.  Le  chiffre  de  l"*  62  les  place, 
en  effet,  dans  la  catégorie  des  tailles  au-dessous  de  la  moyenne*. 
Nous  vous  ferons  cependant  observer  que,  tout  en  donnant  ce 
chiffre  comme  une  moyenne,  nous  n'hésitons  pas  à  convenir  que 
l'on  voit  des  Juifs  de  taille  plus  élevée,  r",75  ;  mais  aussi  des  Juifs 
de  taille  plus  petite,  ln',50.  L'écart  considérable  entre  les  tailles  les 
plus  élevées  et  les  tailles  les  plus  petites,  28  centimètres,  par  exem- 
ple, chez  les  Juifs  de  Riga,  est-il  de  nature  à  nous  laisser  soupçonner 
un  mélange  de  types?  Nous  ne  possédons  malheureusement  pas 
assez  de  documents  pour  résoudre  la  question.  Nous  savons  que  les 
Juifs  anglais  sont  plus  grands,  l'",'70  ;  mais  ils  font  réellement 
exception  aans  les  tableaux  que  nous  avons  eus  sous  les  yeux. 

Les  anthropologistes  anglais,  Beddoe,  entre  autres,  prétendent 
que  la  taille  est  sujette  à  de  grandes  variations  sous  l'influence  des 
conditions  matérielles  de  l'existence.  Sans  méconnaître  com[>lète- 
ment  cette  assertion,  nous  avouons  nous  ranger  plutôt  à  lavis  des 
anthropologistes  français,  qui  attribuent  à  ce  caractère  une  grande 
importance  au  point  de  vue  ethnique.  La  taille  est  un  peu  moins 
élevée  dans  les  villes  que  dans  les  campagnes,  mais  ce  ne  serait  pas 
un  motif  suffisant  pour  que  les  Juifs  des  parties  occidentales  de 
l'Europe  eussent  une  taille  plus  petite  que  celle  de  la  moyenne  des 
populations  des  villes  qu'ils  habitent.  Le  fait  important  à  considérer, 
c'est  que  les  Juifs  allemands  et  polonais,  aussi  bien  que  les  Juifs  du 
midi,  sont  de  petite  taille.  La  race  blonde  aux  yeux  bleus,  au  milieu 
de  lac^uelle  ils  vivent  si  nombreux  dans  le  Nord,  est  cependant  une 
race  de  grande  taille,  c'est-à-dire  dont  la  moyenne  atteint  au  moins 
1"\'70.  C'est,  pour  le  rappeler  en  passant,  grâce  à  la  présence  de 
cet  élément  ethnique  en  France  que  les  départements  qui  donnent 
le  plus  d'yeux  bleus  et  de  cheveux  blonds,  sont,  en  général,  aussi 
ceux  qui  donnent  la  taille  la  plus  élevée.  Il  est  certain  que  si  les 
mariages  mixtes  entre  Juifs  et  individus  de  race  plus  grande  avaient 
été  aussi  nombreux  que  certains  auteurs  se  plaisent  à  le  dire,  la 
taille  atteindrait  chez  les  Juifs  modernes  une  moyenne  beaucoup 
plus  élevée. 

*  Topinard,  Anthropologie.  1879,  p.  330. 


TYPES  JUIFS  LXVII 


Un  autre  chiffre  qui  a  sa  signification,  c'est  le  rapport  de  la  taille 
au  périmètre  de  la  poitrine.  Ici  encore  les  Juifs  se  trouvent  avoir 
moins  que  la  majorité  des  individus  de  même  taille.  Le  périmètre 
thoracique  doit  dépasser  de  plusieurs  centimètres  la  moitié  de  la 
taille.  Or,  chez  les  Juifs,  ce  périmètre  est  inférieur  à  la  demi-taille 
ou  atteint  tout  au  plus  cette  valeur.  Ce  n'est  pas  là,  à  vrai  dire,  un 
caractère  ethnique  important;  mais  ce  fait  n'en  établit  pas  moins 
une  différence  marquée  entre  les  Juifs  et  les  groupes  de  populations 
au  milieu  desquels  ils  sont  disséminés. 

Comme  vous  le  savez,  on  a  basé,  depuis  le  Suédois  Retzius,  en 
1842,  une  division  des  races  humaines  d'après  la  forme  de  la  tète, 
Si  l'on  mesure  le  plus  grand  diamètre  antéro-postérieur  de  la  tâte. 
et  si  on  lui  compare,  en  le  ramenant  à  100,  le  plus  grand  diamètre 
transverse,  on  obtient  un  rapport  auquel  Broca  a  donné  le  nom 
d'indice  céphalique.  Les  tètes  les  plus  larges  par  rapport  à  la  lon- 
gueur ont  été  nommées  brachycéphales  ;  les  têtes  les  plus  longues 
par  rapport  à  la  largeur,  dolichocépales.  Broca  subdivisa  la  nomen- 
clature en  laissant  ces  noms  aux  groupes  extrêmes  et  en  créant  les 
noms  de  mésaticéphale  pour  un  groupe  moyen,  de  sous-brachjcé- 
phale  pour  un  groupe  placé  entre  les  mésaticéphales  et  les  brachy- 
céphales. et  de  sous-dolichocéphale  pour  un  groupe  placé  entre  les 
mésaticéphales  et  les  dolichocéphales. 

Ces  mensurations  et  ces  noms  s'appliquent  aussi  bien  aux  recher- 
ches faites  sur  les  vivants  qu'à  celles  que  l'on  recueille  sur  des  séries 
de  crânes;  seulement,  dans  le  premier  cas,  le  rapport  des  diamètres 
de  la  tête  porte  le  nom  d'indice  céphalométrique,  et,  dans  le  second 
cas,  le  rapport  des  diamètres  du  crâne  porte  le  nom  d'indice  cépha- 
lique. La  différence  entre  les  deux  indices  est  représentée  en  chiffi-es 
ronds  par  deux  unités  en  plus  pour  le  premier. 

Je  vous  demande  pardon  de  rappeler  ces  détails,  que  beaucoup 
d'entre  vous  connaissent  d'ailleurs;  mais  je  désire  que  tout  le 
monde  comprenne  bien  que,  quand  je  parle  d'un  crâne  qui  a  un  in- 
dice de  82,  par  exemple,  indice  sous-brachycéphale,  il  s'agit  d'un 
crâne  plus  large  par  rapport  à  sa  longueur  qu'un  crâne  que  je  nom- 
merai sous  dolichocéphale  avec  un  indice  de  T6,  ou  dolichocéphale 
avec  un  indice  au-dessous  de  Ib.  Je  n'abuserai,  d'ailleurs,  pas  de 


LXVIll  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

ces  noms  barbares,  inventés  par  des  savants  forts  en  grec,  pour  leur 
commodité,  sans  doute,  mais  sans  égard  pour  les  oreilles  du  plus 
grand  nombre. 

Si  nous  cherchons  donc,  au  milieu  des  groupes  délimités  par  Broca, 
la  place  occupée  par  les  Juifs  des  différents  pays,  nous  trouvons 
que  la  moyenne  des  observations  faites  sur  les  vivants  donne  un 
chiffre  de  83,  c'est-à-dire  que  les  Juifs  sont  des  sous-brachjcé- 
phales,  presque  des  brachycéphales.  Voici  le  tableau  le  plus  complet 
qui  ait  été  publié  jusqu'ici  : 

Noms  (les  observateurs  Nombre  des        P''opoition  pour  100.  j„^.^g 

et  pays  observés.  "''servalions.'^^;;;;;;^-^;;^;^-'^;^       moyen. 


D.ybowski.  Pologne 67  19,4  26,9  53,7  82,2 

Blecbmanu,  Riga 100  3.0  11,0  86,0  83,2 

Kopernicki,  Galicie ;..  313  4,8  10,9  84,3  83,5 

Jacobs,  Londres 363  28,3  28,3  47,4  80 

id.       Sephardim,  Londres.  51  17.0  34,0  39,0  » 

Si  nous  ajoutons  que  les  Allemands  du  Nord  .sont  des  sous-doli- 
chocéphales ou  tout  au  plus  mésaticéphales,  de  même  que  les  An- 
glais, et  que  les  populations  de  la  Pologne  et  de  la  Galicie  sont 
mésaticéphales,  mais  avec  un  indice  plus  bas  que  celui  des  Juifs, 
nous  pouvons  tout  d'abord  en  induire  que  ces  derniers  se  distinguent 
encore  une  fois  nettement  des  autres  habitants  des  pays  qu'ils 
occupent. 

Un  second  point  qui  ressort  de  ce  tableau,  c'est  que  parmi  les 
Juifs,  à  côté  d'un  élément  brachycéphale,  on  constate  l'existence 
d'un  élément  à  tête  plus  allongée.  Faut-il  croire,  d'après  ces  chiffres, 
que  cet  élément  plus  dolichocéphale  est  moins  rare  parmi  les  Sephar- 
dim  de  Londres  que  parmi  les  autres  Juifs  examinés  par  Jacobs  et 
Spielman"?  Nous  serions  tenté  de  l'admettre  si  nous  n'étions  arrêté 
par  une  considération  que  l'on  ne  manquerait  pas  d'invoquer  contre 
nous,  le  petit  nombre  des  observations  faites. 

Il  faut  bien  le  reconnaître,  les  documents  sont  très  pauvres.  Et. 
si  nous  demandons  à  la  craniométrie,  aux  mesures  prises  sur  le 
crâne,  des  renseignements  complémentaires,  nous  nous  trouvons  en 


TYPES  JUIFS  LXIX 


présence  d'une  pauvreté  plus  grande  encore.  Stieda*  n'a  pu  réunir 
que  les  mesures  de  trente-quatre  crânes  d'après  Pruner-Bey, 
Welcker,  Davis,  Weisbach  et  Dusseau.  L'indice  moyen  a  été 
trouvé  de  77,3  (correspondant  à  un  indice  sur  le  vivant  de  79,3). 
M.  Jacobs  a  encore  pu  ajouter  quinze  crânes  de  Juifs  hongrois  me- 
surés par  Lenhossék,  avec  un  indice  de  80,5,  et  cinq  crânes  de 
Juifs  italiens  avec  le  même  indice  moyen.  En  somme,  les  cin- 
quante-quatre crânes  donnent  un  indice  moyen  de  78,5,  franche- 
ment raésocéphale.  Ces  crânes  proviennent  de  différents  pays,  dans 
lesquels  les  populations  sont  ou  bien  plus  brachycéphales ,  ou 
bien  plus  dolichocéphales;  mais  le  nombre  de  ces  crânes  est  trop 
restreint  pour  nous  permettre  de  porter  un  jugement  définitif.  Aussi 
ne  puis-je  approuver  les  auteurs  des  Crania  ethiica,  l'illustre  de 
Quatrefages  et  mon  savant  ami,  M.  le  D""  Hamy,  quand  ils  pré- 
tendent que  «  les  Juifs  d'Occident  s'écartent  considérablement  du 
type  céphalique  de  leurs  ancêtres  orientaux  ;  de  nombreux  mé- 
tissages ont  altéré  la  pureté  de  leur  race,  et,  dés  le  onzième  siècle, 
ils  étaient,  à  Paris,  plus  voisins,  par  le  crâne,  de  la  population 
qui  les  entourait  que  de  celle  dont  ils  tiraient  leur  origine.  Le  ci- 
metière juif  découvert  sur  la  rive  gauche  de  la  Seine,  dans  le 
percement  du  boulevard  Saint-Michel,  au  voisinage  du  Musée  de 
Cluny.. .  a  fourni  onze  crânes  des  deux  sexes,  dont  deux  seulement 
rentrent  dans  le  type  de  la  race.  Deux  autres  sont  mésa1,icéphales  ; 
tous  les  autres  sont  sous-brachycéphales  ou  brachycéphales,  de  82 
à  90  d'indice  -.  » 

Les  collections  du  Muséum  renferment  aussi,  disaient  de  Quatre- 
fages et  Hamy,  quatre  crânes  de  Juifs  d'Algérie,  un  crâne  d'homme 
et  trois  crânes  de  femmes  très  caractéristiques,  présentant  l'allon- 
gement, l'étroitcsse,  l'aplatissement  transversal  et  le  développement 
vertical  de  la  face,  le  front  fuyant,  le  nez  saillant,  étroit,  et  le  maxil- 
laire un  peu  prognathe.  L'homme  a  pour  indice  74,4;  les  femmes 
présentent  l'indice  moyen  de  76,2.  Enfin,  il  existerait  au  Musée  de 
Gœttingue  trois  crânes  de  Juifs,  deux  masculins,  avec  des  indices 

'   Archiv.  f.  Anthrop..  t.  XIV,  p.  68. 

-  Crania  ethnica,  p.  515.  L'indice  moyen  des  6  crânes  masculins  est  de  82,4; 
celui  des  5  crânes  féminins,  82. 


LXX  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

de  li  et  80,2,  et  un  féminin  avec  un  indice  mésaticéphale  de  18. 
Les  conclusions  des  auteurs  des  Cran/a  efhnica  sont  basées  sur  un 
nombre  trop  restreint  de  pièces  pour  que  je  ne  puisse  me  permettre 
de  les  critiquer  dans  ce  qu'elles  ont  de  trop  absolu.  De  Quatretages 
et  Hamy  raisonnent,  en  etfet,  comme  si  tous  les  Juifs  descendaient 
de  Sémites  purs,  c'est-à-dire  d'individus  dont  la  tête  présente  les 
caractères  que  nous  venons  d'énumérer,  l'étroitesse  et  l'allongement 
du  crâne,  le  développement  vertical  de  la  face,  le  nez  aquilin,  en 
même  temps  que  les  cheveux  et  les  yeux  foncés.  Ce  que  nous  pou- 
vons déduire  des  chiffres  fournis  par  l'indice  céphalique,  c'est  qu'il  y 
a,  au  point  de  vue  de  la  forme  du  crâne,  depuis  le  XF  siècle  au 
moins,  deux  types  juifs,  l'un  au  crâne  allongé,  qui  se  rapproche  du 
type  sémitique,  l'autre  au  crâne  court,  et  nécessairement  tous  les 
intermédiaires  entre  ces  deux  types  opposés.  La  coloration  des  yeux 
3t  des  cheveux,  la  forme  du  nez  et  la  taille  nous  permettent  de 
trouver  dans  ces  chiffres  une  confirmation  de  notre  thèse  de  la  plu- 
ralité des  tj'pes  chez  les  Juifs  d'aujourd'hui. 

Mais  avons-nous  quelques  arguments  à  faire  valoir  en  faveur  de 
l'identité  des  types  juifs  modernes  et  des  Juifs  anciens? 

Nous  savons  bien  que,  comme  l'a  fait  remarquer  avec  beaucoup 
de  raison  .^L  Neubauer',  on  ne  possède  pas  de  crânes  d'anciens 
Juifs,  et  qu'il  entre  dans  toutes  les  probabilités  qu'on  n'en  trouvera 
jamais,  le  climat  et  le  sol  de  la  Judée  n'étant  pas  propices  à  la  con- 
servation des  corps,  et  l'embaumement  n'ayant  été  pratiqué  que  très 
exceptionnellement.  Les  termes  de  comparaison  manquent  donc  et 
manqueront  vraisemblablement  toujours. 

Mais  posséderions-nous  même  ces  documents,  n'aurions-nous  pas 
toujours  devant  nous  la  légende  du  prosélvtisme  qui  aurait  altéré  la 
race''  Dès  les  époques  les  plus  reculées,  la  Bible  mentionne  de  nom- 
breux cas  d'exogamie,  c'est-à-dire  de  mariage  entre  Israélites  et 
non-Israélites  ;  la  captivité  n'a  pu  que  favoriser  cette  immixtion  de 
sang  étranger  dans  la  race;   les  distinctions  entre  les  Juifs  men- 

'  JVoles  on  the  Race  Tj/pes  of  the  Jews,  /•  of  the  Anihrop.  Tnstituie,  t-  XV, 
1886,  p.  1:1 . 


TYPES  JUIFS  LXXI 


tionnées  clans  les  textes  sacrés  (Ps.  cxvii,  cxviii,  cxxxvi)  éta- 
blissent la  preuve  de  nombreuses  conversions  au  judaïsme;  des  colo- 
nies juives  existaient  dans  toutes  les  villes  de  quelque  importance 
(Josèphe,  Coy^trp  Apion,  II,  39);  k  Rome,  à  Antioche,  il  était  de 
mode,  surtout  parmi  les  femmes,  d'adhérer  aux  principes  de  la  reli- 
gion nouvelle;  la  loi  (Cod.  Theod.,  LV,  ii)  et  les  conciles  (Orléans, 
en  538;  Tolède,  en  589;  Rome,  en  ^43)  ont  condamné  les  mariages 
entre  Juifs  et  Chrétiens,  c'est  donc  qu'ils  étaient  fréquents. 

Présentée  de  cette  façon,  la  question  du  prosélytisme  est  des  plus 
complexes,  et,  en  réalité,  elle  mêle  des  choses  absolument  dissem- 
blables. 

Prenons  d'abord  les  Juifs  dans  la  dernière  période  de  leur  his- 
toire, c'est-à-dire  depuis  leur  dispersion.  Un  fait  ethnographique  do- 
mine toute  cette  période,  c'est  l'attachement  des  Juifs  à  leur  religion. 
Il  n'y  a  pas  un  anthropologiste  qui  n'admette  que  ce  fait  a  créé  aux 
Juifs  une  situation  tout  à  fait  spéciale,  les  a  placés  dans  des  condi- 
tions tout  à  fait  particulières.  Sans  doute,  l'exil  les  a  dispersés  sur 
tous  les  points  du  monde  ancien  ;  mais  partout  où  existaient  quelques 
familles,  la  petite  communauté  représentait  pour  ses  membres  la  pa- 
trie même  :  au  début,  la  langue,  les  mœurs,  la  religion,  tout  séparait 
les  exilés  des  populations  au  milieu  desquelles  le  hasard  les  avait 
jetés.  Les  croyances  religieuses  de  ces  nouveaux  venus  ont  d'abord 
éveillé  la  méfiance  de  ces  populations,  et  ce  n'est,  sans  doute,  que 
bien  lentement  qu'elles  ont  pu  être  amenées  à  comprendre  ce  que  la 
religion  juive  avait  de  sublime.  Mais,  à  ce  moment  même,  une  autre 
religion  commençait  à  se  répandre  et  trouvait  parmi  ceux  qui  avaient 
entendu  parler  du  judaïsme  un  terrain  tout  préparé  pour  l'ardeur  de 
son  prosélytisme.  Je  crois,  pour  ma  part,  et  c'est  aussi  l'opinion  de 
beaucoup  de  personnes,  que  les  auteurs  latins  ont  très  bien  pu 
confondre  sous  la  dénomination  de  Juifs  les  fils  des  anciens  habitants 
des  bords  de  la  Mer  Morte  et  les  nouveaux  convertis  au  christia- 
nisme. 

Dans  tout  notre  Occident,  notamment,  le  prosélytisme  juif  a  ren- 

'  Celte  citation  est  empruntée  à  l'article  de  J.  Jacobs,  On  the  Racial  charac 
leristics  of  modem  Jeics,  J.  ofthc  Anth.  Imtitut.,  XV,  p.  'i!. 


LXXIl  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

contré  clans  le  christianisme  une  barrière  trop  sérieuse  pour  avoir  pu 
recruter  beaucoup  d'adhérents,  et  je  prétends  que  ceux  qu'il  a  pu 
rallier  n'ont  pas  été  assez  nombreux  pour  modifier  le  tjpe  de  la  race. 
Il  est,  en  effet,  démontré  que  l'adjonction  momentanée  de  quelques 
éléments  étrangers  ne  peut  avoir  qu'une  influence  très  limitée  sur 
les  caractères  physiques  d'un  peuple  ;  au  bout  de  quelques  généra- 
tions, ces  éléments  sont  résorbés  dans  la  masse  et  ne  réapparaissent 
plus  qu'exceptionnellement,  par  atavisme.  Nous  en  avons  sous  les 
yeux  de  nombreux  exemples.  Ainsi,  en  Belgique,  on  admire  les  che- 
veux foncés  et  les  \eux  noirs  des  femmes  de  Bruges,  et  Ton  a  cru 
longtemps  que  l'occupation  espagnole  au  x\i°  siècle  n'était  pas 
étrangère  à  la  présence  de  ces  caractères  ethniques  au  milieu  des 
blondes  populations  flamandes.  On  revient  aujourd'hui  de  cette  opi- 
nion, depuis  que  les  anthropologistes  ont  constaté  que  le  phénomène 
n'est  pas  limité  à  Bruges,  mais  qu'il  se  répète  dans  toute  la  popula- 
tion voisine  des  bouches  de  l'Escaut.  C'est,  en  effet,  que  cette  popu- 
lation est  l'héritière  de  l'ancienne  race  aux  cheveux  et  aux  yeux 
foncés  qui  occupait  toute  la  Belgique  avant  les  mvasions  des  tribus 
germaniques.  Les  anciens  habitants  ont  été  rejetés  par  les  envahis- 
seurs, les  uns,  nos  Wallons  d'aujourd'hui,  dans  les  parties  mon- 
tagneuses et  boisées  du  pays,  les  autres,  dans  les  parties  maréca- 
geuses qui  ont  arrêté  même  les  armes  de  César.  Ce  sont  les 
arrière-neveux  de  ces  derniers  que  nous  retrouvons  aujourd'hui  à 
Bruges,  comme  dans  toute  la  Zélande,  comme  sur  tout  le  littoral 
de  la  mer  jusque  dans  le  Boulonnais,  et  les  Flamands  blonds  n'ont 
pu  les  altérer  au  point  de  leur  faire  perdre  leurs  cavactéres  eth- 
niques primitifs. 

Une  race  reste  pure  quand  elle  est  protégée  par  les  conditions  phy- 
siques du  pays  qu'elle  occupe,  témoin  les  Zélandais  et  nos  Flamands 
de  Bruges,  mais  aussi  quand  elle  se  trouve  placée  dans  certaines  con- 
ditions sociologiijues,  comme  c'est  le  cas  pour  les  Juifs. 

Mais  pouvons-nous  admettre  que  les  quelques  familles  juives  qui 
ont  abordé  jadis  à  Marseille,  aient  pu  à  elles  seules  peupler  la  Gaule 
et  envoyer  en  Allemagne,  en  Pologne  et  en  Galicie  ces  colonies  si 
nombreuses,  dont  les  deux  millions  de  membres  forment  le  tiers  des 
Juifs  du  monde  entier?  Et   pourquoi  pas  V  N'avons-nous  pas  de 


tVpES  juifs  LXXIII 

nombreux  exemples  d'un  bisaïeul  entouré  de  deux  cents  petits-en- 
fants et  arrière-petits- enfants? L'anthropologie  ne  recule  d'ailleurs 
pas  devant  un  pareil  problème.  Elle  a  bien  calculé  combien  il  fau- 
drait de  temps  aux  descendants  d'un  seul  couple  pour  peupler  la 
surface  de  la  terre,  en  limitant  au  même  âge  le  terme  de  la  vie  de 
chaque  individu,  c'est-à-dire  en  faisant  abstraction  de  la  maladie, 
des  guerres,  de  la  famine  et  de  toutes  les  causes  qui,  en  réalité, 
mettent  un  terme  prématuré  à  la  vie  humaine.  Or,  nous  reconnais- 
sons aux  Juifs  certaines  immunités  vis-à-vis  de  quelques  maladies 
qui  déciment  impitoyablement  nos  populations  de  l'Europe.  Et.  de 
fait,  quand  on  considère  les  déplorables  conditions  hygiéniques 
qu'ont  subies  pendant  des  siècles  les  malheureux  confinés  dans  les 
ghetti,  on  doit  reconnaître  à  cette  race  une  vitalité  réellement 
extraordinaire. 

D'un  autre  côté,  nous  savons,  par  les  statistiques,  que  si  la  na- 
talité n'est  pas  beaucoup  plus  élevée  chez  les  Juifs,  la  mortalité 
parmi  les  enfants  en  bas  âge,  cette  grande  cause  de  la  déchéance 
des  peuples,  n'atteint  qu'un  taux  fort  peu  élevé.  Et  cette  survivance 
du  plus  grand  nombre,  loin  d'être,  comme  chez  quelques  peuples  où 
le  sinifigle  for  life  est  poussé  à  ses  extrêmes  limites,  une  causa  d'a- 
moindrissement, devient,  grâce  aux  qualités,  aux  vertus  sociolo- 
giques des  Juifs,  grâce  à  ce  que  j'appellerai  leur  adaptabilité  à  des 
milieux  divers,  ù  leur  faculté  d'acclimatement,  aussi  généralement 
reconnue,  une  cause  de  progrès  de  la  race. 

Avec  un  point  de  départ  aussi  restreint  de  quelques  centaines  de 
familles  juives,  établies  les  unes  en  Espagne,  les  autres  en  Gaule, 
prospérant  les  unes  et  les  autres  au  point  d'être  représentées  au- 
jourd'hui par  près  de  trois  millions  d'individus  en  France,  en  An- 
gleterre, en  Hollande,  en  Allemagne,  en  Pologne,  en  Autriche, 
dans  les  Principautés  l)anubiennes  et  en  Turquie,  comment  se 
pourrait- il  que  certains  caractères  ethniques  n'aient  pas  été  con- 
servés'? Que  l'on  n'oppose  pas  les  cheveux  blonds  des  Aschkenazim 
aux  cheveux  noirs  des  Sephardim.  J'ai  montré  que  les  cheveux  noirs 
sont  relativement  nombreux  chez  les  premiers  et  que  les  blonds  se 
rencontrent  souvent  chez  les  derniers.  Devons-nous  pour  cela  croire 
que  Aschkenazim  et  Sephardim  descendent  de  tribus  différentes, 


LXXIV  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

que  les  Aschkenazim  sont  les  enfants  de  Benjamin,  tandis  que  les 
Sephardim  sont  les  enfants  de  Juda?  Eh  non  !  Cela  prouve  sim- 
plement que  les  familles  établies  primitivement  en  Gaule,  plus  nom- 
breuses sans  doute  que  celles  qui  s'étaient  fixées  en  Espagne,  ren- 
fermaient par  hasard  un  peu  plus  d'individus  aux  cheveux  blonds 
ou  châtain  clair.  Ce  caractère  spécial  a  été  transmis  fidèlement  de 
génération  en  génération,  en  même  temps  que  cet  air  de  famille 
inconstestable  qui  fait,  quoi  qu'en  dise  Renan,  reconnaître  les  Juifs 
dans  la  majorité  des  cas.  Cet  air  de  famille  est  peut-être  quelque 
chose  d'abstrait,  qu'il  est  malaisé  de  définir,  alors  qu'en  réalité 
nous  trouvons,  comme  dans  toutes  les  races,  comme  chez  tous  les 
peuples,  des  différences  profondes  dès  que  l'on  compare  entre  eux 
des  individus  isolés.  Mais  cet  air  de  famille  existe,  et  il  est  frap- 
pant surtout  chez  les  Juives,  dont  la  beauté  proverbiale  rappelle  si 
bien  le  vrai  type  sémitique.  C'est,  d'ailleurs,  une  loi  bien  connue  du 
naturaliste  que  les  mâles  offrent  plus  de  variations  que  les  femelles. 
Dans  l'espèce  humaine,  les  femmes  sont  plus  conservatrices  que 
les  hommes,  aussi  bien,  du  reste,  au  point  de  vue  moral  qu'au  point 
de  vue  physique.  Développer  ici  cette  proposition  nous  entraîne- 
rait cependant  trop  loin  de  notre  sujet,  et  il  est  temps  que  nous 
abordions  la  dernière  partie  de  notre  exposé. 

Nous  nous  sommes  servi  à  plusieurs  reprises  du  terme  :  la  race 
juive.  C'est  le  moment  de  dire  que  nous  entendons  par  là,  non  pas 
l'unité  ethnique,  à  laquelle  le  mot  est  le  plus  souvent  réservé,  mais 
la  nation  dans  le  sens  que  l'anthropologie  attache  à  ce  vocable.  «  La 
nation,  dit  M.  Topinard  ',  est  une  association  politique  engendrée 
par  les  circonstances,  favorisée  par  la  configuration  du  sol,  l'unité 
de  langue  et  l'unité  de  la  religion,  cimentée  par  les  habitudes,  les 
souvenirs  communs  de  gloire  et  de  souffrances  et  très  accessoire- 
ment par  l'intérêt.  )> 

C'est  la  nation  juive,  avant  la  dispersion,  qu'il  nous  reste  à  étu- 

'  Éléments  d'Anthropologie  générale,  p.  212.  Je  cite  M.  Topinard  bien  qu'il 
n'admelle  pas  que  les  Juifs  aient  consliiué  une  nation.  «  Les  Juifs,  dit-il,  ne 
sont  qu'une  fi^déralion  religieuse-  —  Ils  ne  sont  ni  une  nation,  ni  une  race.  » 
Cela  me  semble  une  contradiction  avec  sa  définition  de  la  nation. 


TYPES  JUIFS  LXXV 


dier,  car  nous  croyons  avoir  démontré  la  possibilité  de  relier  scien- 
tifiquement les  Juifs  modernes  aux  anciens  habitants  de  la  Judée. 

Or,  que  savons-nous  de  cette  nation?  Nous  l'avons  dit,  les  docu- 
ments anthropologiques  nous  manquent  complètement,  A  leur 
défaut,  force  nous  est  de  recourir  à  ce  que  l'anthropologie  appelle, 
à  son  point  de  vue,  les  sources  accessoires,  l'histoire  et  l'archéo- 
logie. Nous  ne  demanderons  pour  l'instant  à  l'histoire  que  cette 
seule  mention  de  l'expansion  énorme  du  peuple  juif  après  les 
guerres  d'Alexandre.  Il  est  certain  que  si  les  Juifs  ont  fait  tant  de 
prosélytes  dans  les  villes  de  la  Syrie  et  de  l'Asie-Mineure  et  à 
Alexandrie,  c'est  qu'ils  s'y  trouvaient  eux-mêmes  en  grand  nombre. 
Cette  expansion  au  dehors,  résultat  d'un  accroissement  de  la  po- 
pulation de  la  Judée,  démontre  que  les  progrès  si  remarquables  des 
familles  exilées  en  Gaule  ne  sont  pas  une  vaine  hypothèse. 

Est-ce  à  ce  moment  que  les  caractères  ethniques  des  anciens 
Juifs  fce  sont  altérés  au  point  de  rendre  presque  méconnaissable  chez 
eux  le  type  sémitique?  Nous  ne  le  croyons  pas.  pour  deux  raisons. 
La  première  est  que  les  prosélytes,  recrutés  partout  où  s'établissait 
quelque  communauté  juive,  ne  devenaient  pas  Juifs  par  le  fait  de 
leur  adhésion  à  quelques-uns  seulement,  remarquez-le  bien,  des  prin- 
cipes du  judaïsme,  et  que  la  propagande  juive,  comme  je  l'ai  déjà 
rappelé,  n'a  fait  que  préparer  le  terrain  à  la  propagande  du  chris- 
tianisme. Les  nouveaux  convertis  avaient  disparu  de  l'orbite  autour 
duquel  ils  commençaient  à  graviter,  avant  d'avoir  imposé  leurs 
caractères  physiques  à  la  population  juive  '. 

La  seconde  raison  est  que  le  mélange  des  races  en  Judée  re- 
montait à  une  haute  antiquité,  qu'il  était  bien  antérieur  à  la  cap- 
tivité de  Babylone,  qu'il  datait  de  l'établissement  des  Hébreux  dans 
la  terre  promise. 

M'arrêterai-je,  pour  le  prouver,  à  vous  énumérer  dans  combien 
d'endroits  la  Bible  fait  mention  d'individus  aux  cheveux  blonds  ou 
roux,  de  nez  retroussés    ou  d'yeux    bleus  -.  Cette  énumération  a 

*  J.  Jacobs,  p.  52. 

*  Réserve  faiie  pour  les  yeux  bleus,  car,  comme  le  dit  J.  Jacobs,  p.  48,  les 
savants  ne  sonl  point  d'à 'cord  sur  le  poiut  de  savoir  si  la  Bible  ou  le  Talmud 
ont  un  mot  pour  désigner  la  couleur  bleue. 


LXXVI  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

été  faite  si  souvent  que  je  me  crois  autorisé  à  ne  pas  insister  et  à 
admettre  que  la  variété  des  tjpes  chez  les  anciens  Juifs  n'est  pas 
contestable. 

Un  seul  point  nous  reste  donc  à  examiner.  A  quelles  races,  et  je 
donne  ici  au  mot  race  sa  véritable  acception  en  anthropologie,  à 
ijuelles  races  pouvons-nous  rapporter  les  prototypes  des  anciens 
Hébreux  ? 

Dans  son  étude  sur  le  chapitre  x  de  la  Genèse,  M.  Maurice 
Vernes  '  considère  le  nom  de  Chanaan  comme  «  une  expression 
géographique,  comprenant  l'ensemble  du  pays  dont  les  écrivains 
bibliques  font  la  propriété  irrévocable  des  Israélites  et  dont  les  ha- 
bitants, à  défaut  d'une  extermination  complète  que  réclame  la 
théorie,  doivent  être  au  moins  traités  en  serfs  et  en  gens  de  corvée. 
a  Maudit  soit  Chanaan  1  II  sera  le  serviteur  des  serviteurs  de  ses 
w  frères  (Gen.,  ix,  25)!  » 

Chanaan  est  la  terre  promise  aux  Hébreux  errant  misérablement 
dans  le  désert.  Là,  habitent  les  peuples  que  les  Hébreux  se  sont 
assimilés,  dit  M.  Maurice  Vernes.  Là  habitent  les  peuples  qui  vont 
s'assimiler  les  fils  d'Israël,  dirais-je  plus  volontiers,  mais  qui  vont 
s'assimiler  en  même  temps  le  nom,  la  langue,  les  mœurs,  la  reli- 
gion de  cette  poignée  d'envahisseurs. 

Je  ne  puis  mieux  comparer  le  phénomène  qui  vraisemblablement 
s'est  passé  en  Judée,  aux  origines  du  peuple  juif,  qu'à  ce  que  l'histoire 
nous  apprend  des  origines  du  peuple  français.  Une  population  au- 
tochtone que  certains  anthropologistes  français  appellent  les  Celtes 
et  que  je  désignerais  plus  volontiers,  à  l'exemple  de  mon  savant 
ami  le  D'' Houzé,  afin  d'éviter  l'éternelle  équivoque  entre  les  langues 
et  les  races,  sous  le  nom  de  pré-germaniques,  reçoit  un  premier 
contingent  d'envahisseurs  qui  lui  impose  sa  langue  (la  langue  cel- 
tique apparentée  avec  les  autres  langues  aryennes)  ;  le  mélange 
plus  ou  moins  intime  de  ces  deux  éléments  constitue  la  Gaule. 
L'envahisseur  moins  nombreux  est  cependant  absorbé  en  partie 
par  la  race  vaincue.  Ici  le  problème  se  complique  d'une  nouvelle 

'  Pré-'is  d'histoire  juive  depuis  les  origines  jusijfu'à  Vépoq\ie  persane,  p.  734.  et 
d'autres  ouvrages  du  même  auteur. 


TYPES  JUIFS  LXXVIl 


conquête,  qui  introduit  dans  U  pays  la  langue  et  la  civilisation 
romaines,  sans  apporter  en  méncie  temps  quelque  nouvel  élément 
ethnique  bien  défini.  Enfin,  une  dernière  invasion,  quatre  ou  cinq 
siècles  plus  tard,  vient  remplacer  le  nom  d'une  fiorissante  province 
de  l'empire  romain  par  le  nom  que  se  donnaient  entre  eux  une 
poignée  de  pillards  et  de  brigands,  cousins  germains  des  premiers 
envahisseurs  blonds.  Ils  étaient  bien  une  quarantaine  de  mille,  les 
Francs  qui  ont  donné  leur  nom  aux  Gaulois  :  aussi  n'ont-ils  guère 
modifié  le  type  physique  des  habitants  du  pays  qui  était  devenu 
leur  proie. 

Dans  la  terre  de  Chauaau,  un  peuple  agricole,  formé  lui-même 
d'éléments  divers,  dont  quelques-uns  appartenaient  certainement 
déjà  à  la  race  sémitique,  est  envahi  par  une  tribu  sémitique  no- 
made, les  Israélites.  Tantôt  par  infiltration  lente,  tantôt  par  la 
force,  ceux-ci  finissent  par  imposer  leur  nom  et  leur  religion  à  un 
certain  nombre  de  tribus  chananéennes,  dépourvues  d'organisation 
politique.  La  lutte  a  été  longue,  puisqu'elle  s'est  prolongée  jusqu'à 
l'établissement  de  la  royauté,  et  que,  même  plus  tard,  certains  évé- 
nements —  le  schisme  des  dix  tribus  serait-il  un  épisode  de  cette 
lutte?  —  semblent  n'être  qu'un  écho  lointain  de  la  résistance  des 
premiers  occupants.  Ici  encore  le  problème  se  complique:  Israël 
est  vaincu  par  Babylone,  et  la  captivité  emmène  au  loin  une  notable 
partie  de  la  population,  tandis  que  de  nouveaux  éléments  sont  in- 
troduits par  le  vainqueur  sur  les  rives  du  Jourdain. 

Un  passage  du  Deutéronome  (vu,  1)  nous  montre  de  la  façon  la 
plus  évidente  que  les  Hébreux  n'étaient  que  fort  peu  nombreux  re- 
lativement aux  peuples  qu'ils  ont  trouvés  établis  en  Chanaan  : 
«  Quand  l'Eternel,  ton  Dieu,  t'aura  fait  entrer  au  pays  où  tu  vas 
entrer  pour  le  posséder,  et  qu'il  aura  arraché  de  devant  toi  beau- 
coup de  nations,  les  Iléthéens,  les  Guirgasiens,  les  Amorrhéens,  les 
Chananéens,  les  Phéréziens,  les  Iléviens  et  les  Jéhusiens,  sept  na- 
tions plus  grandes  et  plus  puissantes  que  toi. . .  »  En  se  mélangeant 
à  ces  peuples,  qui  disparaissent  peu  à  peu  de  la  tradition  biblique, 
c'est  encore  une  fois,  nous  l'avons  montré  par  d'autres  exemples 
au  cours  de  cet  exposé,  le  vainqueur  qui  est  absorbé,  mais  en  partie 
seulement,  par  le  vaincu.  Quelle  est  la  part  qui  revient  à  l'un  et  à 


LXXVIII  ACTES  ET  CONFERENCES 


l'autre  dans  la  constitution   ethnique   du  peuple  juif,  c'est  ce  que 
nous  allons  examiner  succinctement. 

Le  tvpe  sémite,  tout  le  monde  est  d'accord  à  cet  égard,  est  re- 
présenté par  des  populations  de  taille  au-dessous  de  la  moyenne, 
au  crâne  allongé,  au  nez  aquilin,  aux  cheveux  et  aux  yeux  noirs. 
Le  peuple  juif  a  gardé  de  son  ancêtre  sémitique,  la  taille,  et,  pro 
partim,  la  forme  du  nez,  la  coloration  des  yeux  et  des  cheveux,  et 
la  forme  allongée  de  la  tête. 

L'ethnologie  figurée  des  monuments  égyptiens  va  nous  dire  à  qui 
il  a  emprunté  la  forme  plus  arrondie  de  la  tète,  les  cheveux  blonds, 
les  yeux  bleus  et  le  nez  plus  gros,  plus  déprimé.  En  effet,  les  admi- 
rables planches  publiées  par  Champollion  ^  Lepsius-,  Rosellini  3, 
et  plus  récemment  les  photographies  prises  par  Flinders  Pétrie  *, 
nous  montrent  que  les  anciens  Egyptiens  savaient  reproduire  avec 
une  fidélité  merveilleuse  la  physionomie  des  peuples  avec  lesquels 
ils  s'étaient  trouvés  en  contact .  Or  ces  documents  nous  font  con- 
naître l'existence  en  Syrie,  à  côté  de  variétés  du  type  sémitique, 
de  peuples  blonds  et  de  peuples  de  race  mongole. 

Nous  savons  que  l'identification  de  ces  peuples  n'est  peut-être 
pas  encore  complète  et  qu'elle  laisse  encore  place  à  la  discussion. 
Toutefois,  l'élément  mongoloïde  hittite,  dont  1  histoire  n'a  pour  ainsi 
dire  fait  que  commencer  l'exhumation,  nous  apparaît  déjà  comme 
ayant  joué  un  rôle  considérable  dans  la  vie  des  peuples  de  la  Syrie 
et  de  l' Asie-Mineure.  Il  y  a  une  trentaine  d'années,  quelques  men- 
tions de  la  Bible  et  des  annales  de  l'Egypte  nous  parlaient  très  va- 
guement de  l'existence  d'un  peuple  héthéen,  hittite  ou  kiiéta.  Au- 
jourd'hui, après  les  travaux  des  Perrot.  des  Sayce,  des  Conier, 
de>  Wright,  des  Puchstein  et  de  tant  d'autres,  nous  savons  qu'une 
nation  belliqueuse,  venue  probablement  du  nord,  avait  formé,  en 
Asie -Mineure  et  en  Syrie,  un  empire  qui  était  arrivé  en  contact,  au 
sud,  avec  les  Egyptiens,  mais  dont  la  puissance  était  déjà  sur  son 
déclin,  à  l'arrivée  des  Hébreux  en  Palestine,  Les  Héthéen  s,  établis 

'    Monuments  de  l'Ègjpte  et  de  la  Nubie,  l.  III,  pi.  238--241. 

*  Denkmâler  aus  ^gypten  itnd  Ethiopien^    III,  135.  136. 

*  Monumenti  slorici,  pi.  CV  et  seq. 

*  /.  ofihe  Anthrop-  Imtit. 


TYPES  JUIFS  LXXIX 


dans  les  limites  de  la  Terre  promise  n'avaient  déjà  plus,  à  ce  mo- 
ment, de  relations  politiques  avec  les  chefs  khétas  d'Hamath,  de 
Kadech  et  de  l'Euphrate.  Ils  se  sont  donc  soumis  assez  facilement 
aux  Hébreux.  La  dernière  mention  qu'en  fasse  la  Bible  nous  reporte 
à  l'époque  de  la  construction  du  premier  temple,  au  chapitre  ix  du 
premier  livre  des  Rois  (20j.  Ce  passage  et  les  suivants  (21,  22,  23) 
prouvent  bien  que  les  Hébreux  constituaient,  au  milieu  des  tribus 
asservies,  uue  sorte  d'aristocratie.  Or  l'histoire  nous  a  fait  voir  le 
sort  réservé  aux  conquérants  quand  ils  sont  trop  peu  nombreux 
pour  résister  à  l'absorption  par  la  masse  du  peuple. 

Le  type  mongolique  des   Khétas  *    figurés   sur   les  monuments 
égyptiens,  aussi  bien  que  dans  les  sculptures  babyloniennes  et  dans 
les  sculptures  hittites  elles-mêmes,  est  très  reconnaissable.  Reste 
donc  la  question  du  type  blond.  Pour  nous,  le  type  blond  est  tou- 
jours par  excellence  celui  de  cette  race  Scandinave  issue  de  Vofjicina 
gentium  de  Jornandès.   Or,  nous  savons  que  les  migrations   des 
blonds  du  Nord,  qui.  à  notre  avis,  sont  les  vrais  Aryens,  se  perdent 
dans  la  nuit  de  la  préhistoire.  Les  monuments  de  la  XVHP  dynas- 
tie nous  parlent  de   peuples  blonds,  les  Tamahou,  qui    assaillent 
1  Egypte  du  côté  de  la  Lybie,  en  même  temps  qu'ils  nous  peignent 
des  peuples  blonds  habitant  du  côté  de  la  Syrie'-.  Est  il  téméraire  de 
rapprocher  dans  uue  même  parenté  ces  types  de  l'Ouest  et  du  Nord- 
Est  dont  la  ressemblance  est  frappante  dans  les  peintures  antiques? 
Et  si  l'on  n'hésite  pas  à  identifier  les  Tamahou  avec  les  blonds  du 
Nord,  peut-on  ne  pas  admettre  que  leurs  hordes  errantes  soient 
arrivées  presque  en  même  temps  en  Syrie  et  en  Lybie.  Le  contact 
de  ces  peuples  aryens  avec  les  peuples  sémites  en  Asie  a,  d'ailleurs, 
fait  l'objet  de  maintes  études  du  plus  haut  intérêt.  Ce  serait  donc  à 
ces  peuples  que  les  anciens  Hébreux  auraient  emprunté  leurs  che- 
veux blonds.  Ces   peuples  blonds   ne  sont  autres  que  les  Amor- 

'  Il  ne  faut  pas  confondre  les  races  d'origine  mongolique,  qui  sont  représen- 
tées par  les  peuples  que  certains  historiens  nommaient  tuurauiens,  avec  les  races 
jaunes  de  l'extiême  Orient,  les  Ciiiuois,  par  exemple. 

*  L'opinion  de  Maspéro  et  de  bien  d'autres  auteurs  (Ilitzig,  Urgeschichu  uni 
Mythologie  dev  Philhter.  Leipzig,  1846)  est  que  les  Philistins,  les  Plichlé  de 
l'Ancien  Testament,  étaient  des  Aryens. 


LXXX  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

rhéens,  apparentés  avec  les  Arméniens,  qui  représentent  encore  au- 
jourd'liui  le  type  blond  dans  toute  l' Asie-Mineure  '.  Mais  comment 
expliquer  que  le  peuple  juif  ait  hérité  de  tel  ancêtre  tel  caractère 
seulement  et  de  tel  autre  ancêtre  un  autre  caractère  ?  Je  ne  pour- 
rais entrer  ici  dans  toutes  les  considérations  que  soulève  le  pro- 
blème si  intéressant  de  l'hérédité.  Mais  je  puis  vous  dire  que  les 
exemples  abondent  de  la  persistance  d'un  caractère  à  l'exclusion 
de  tout  autre.  «  Les  différents  caractères  ou  associations  de  carac- 
tères n'ont  pas  la  même  intensité  de  transmission  »,  dit  M.  Topi- 
nard-.  L'expression  est  très  juste.  J'en  appellerai  au  souvenir  de 
chacun.  V'^ous  avez  certes  remarqué  des  traits  caractéristiques  spé- 
ciaux dans  beaucoup  de  familles.  Il  suffit  d'appliquer  l'observation 
à  l'ensemble  des  familles,  c'est-à-dire  à  la  nation,  pour  trouver  des 
exemples  de  toutes  les  formes  de  l'hérédité. 

Nous  sommes  arrivéau  terme  de  notre  tâche.  Nous  avons  cher- 
ché à  expliquer  d'une  façon  scientifique  la  diversité  des  types  juifs 
modernes  par  la  diversité  des  types  juifs  anciens,  mais  aussi  la 
continuité  de  ces  types  dans  le  temps  et  dans  l'espace.  Nous  ne  sa- 
vons si  nous  avons  pu  faire  partager  nos  convictions.  La  critique 
aura  sans  doute  facilement  prise  sur  notre  travail.  Mais,  sans 
croire  qu'à  la  suite  du  major  Conder  et  de  M.  von  Luschan,  nous 
ayons  définitivement  fixé  l'importante  question  des  origines  juives, 
nous  pouvons  attendre  avec  confiance  les  arguments  de  l'école 
adverse. 

Il  nous  reste  à  remercier  nos  auditeurs  de  la  bienveillante 
attention  avec  laquelle  ils  ont  bien  voulu  nous  suivre  à  travers  nos 
déductions  un  peu  spéciales  ;  ils  nous  ont  prouvé  que  ces  questions 
intéressent  les  profanes  aussi  bien  que  les  anthropologistes. 


'  Von  Luschan,  Die  Anthropologische  Stellung  der  Judeii,  dans  Con-espondenz 
Blatt  fiir  Anthro/i.,  septembre  et  octobre  1892.  Les  Philistins  auraient  été  éffae- 
ment  apparentés  aujc  Amorrhéens-  Ci-  Hitzig,  oj).  cit. 

*  Eléments  d'Anlkrop.  gcnérak,  p.  ÎOi. 


LISTE  DES  MEMBRES 


DE   LA 


SOCIETE   DES    ETUDES    JUIVES 

PENDANT  L'ANNÉE  1892. 


Membres  fondateurs  '. 

1  Camondo  (feu  le  comte  A.  de). 

2  Camondo  (feu  le  comte  N.  de). 

3  GuNZBURG  (le  baron  David   de),    boulevard   des   Gardes-à- 

Cheval,  17,  Saint-Pétersbourg. 

4  GuNZBURG  (le  baron  Horace  de),  Saint-Pétersbourg. 

5  LÉvY-CRÉMiiiUx  (feu). 

6  PoLiACOFF  (feu  Samuel  de). 

7  Rothschild  (feu  la  baronne  douairière  de), 

8  Rothschild  (feu  le  baron  James  de). 

Membres  perpétuels  -. 

9  Albert  (feu  E.-J.). 

10  Bardac  (Noël),  rue  de  Provence,  43  ^. 

11  BisCHOFFSHEiM  (Raphaël),  rue  Taitbout,  3. 

12  Cahen  d'Anvers  (feu  le  comte). 

13  Camondo  (le  comte  Moïse  de),  rue  de  Monceau,  61. 

'  Les  Membres  fondateurs  ont  versé  un  minimum  de  1,000  francs. 
'  Les  Membres  perpétuels  ont  versé  'lOJ  francs  utie  fois  pour  toutes. 
*  Les  S  )ciéiaire3  dont   ie  nom  n'est  pas  suivi   de  la  mention  d'une  ville  de- 
meurent à  Paris. 

ACT.    ET    GONF.  F 


LXXXII  ACTES  ET  CONFERENCES 

14  Dreyfus  (feu  Nestor). 

15  Friedlaxd,  Wassili  Ostrow,  lig.  12,  11°  7,  Saint-Pétersbourg. 

16  GoLDSCHMiDT  (S. -H.',  rond-point  des  Champs-Elysées,  6. 

17  Hecht  (Etienne),  rue  Lepeletier,  19. 

18  HiRSCH  (feu  le  baron  Lucien  de). 

19  Ka.nn  ^Jacques-Edmond),  avenue  du  Bois-de-Boulogne,  58. 

20  KoHN  (Edouard),  rue  Blanche,  49. 

21  Lazard  (A..),  boulevard  Poissonnière,  17. 

22  Lévy  (feu  Calmann). 

23  MoNTEFiORE  (Claude),  Portman  Square,  18,  Londres. 

24  Oppexheim  (feu  Joseph). 

25  Penha  (Immanuel  de  la),  rue  de  Provence,  46. 

26  Penha  (M,  delà),  rue  Tronchet,  15. 

27  Ratisboxxe  (Fernand),  rue  Rabelais,  2. 

28  Reinach  (Hermann-Joseph),  rue  de  Berlin,  31. 

29  Rothschild  (le  baron  Adolphe  de',  rue  de  Monceau, 

30  Troteux  (Léon),  rue  de  Mexico,  1,  le  Havre. 

Membres  souscripteurs  *. 

31  Adler  (Rev.  D''  Hermann\  Queensborough-Terrace,  5,  llydo 

Park,  Londres. 

32  Albert-Lévy,  professeur  à  l'École  municipale  de  chimie  et  de 

physique,  rue  de  Médicis,  5. 

33  Aldrophe  (Alfred),  architecte,  avenue  Malakoff,  7. 

34  Alexandre    Dumas,   membre   de    l'Académie    française,    rue 

Ampère,  11. 

35  Allatini,  Salonique. 

36  Alliance  Israélite  universelle,  35,  r.  de  Trévise  '175  fr.). 

37  Allianz    (Israelitische),   I.  Weihburggasse,  10,   Vienne,   Au- 

trich 

38  Aron,  rue  Lebrun,  30. 

30  ASTRUC,  grand  rabbin,  Waterraael,  Belgique. 

La  cotisation  des  Membres  souscripteurs  est  de  25  francs  par    an,  sauf  pour 
ceux  dont  le  nom  est  suivi  d'une  indication  spéciale. 


LISTE  DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ  LXXXIIl 

40  Bâcher  (D''  Wilhelm),  professeur  au  Séminaire  israélite,  Lin- 

dengasse,  25,  Budapest. 

41  Bamberger,  rabbin,  Kœnigsberg. 

42  Bascfi,  rue  Rodier,  62. 

43  Bechmann  (E.-G.),  place  de  l'Aima,  1. 

44  Bechmann  (J.-L.),  rue  de  la  Chaussée- d'Antin,  45. 

45  Beck  (D""),  rabbin,  Bucharest. 

46  Benel,  rue  de  Sfax,  1. 

47  Bernhard  (M'"'  Pauline),  rue  de  Lisbonne,  24. 

48  BiCKART-SÉE,  boulevard  Malesherbes,  101. 

49  Bloch  (Camille),  archiviste,  Carcassonne. 

50  Bloch  (Emmanuel),  rue  des  Petites-Ecuries,  55. 

51  Bloch  (Félix),  rabbin,  Pau. 

52  Bloch  ^Isaac),  grand  rabbin,  Nancy. 

53  Bloch  (Maurice),  boulevard  Bourdon,  13. 

54  Bloch  (Moïse),  rabbin,  Versailles, 

55  Bloch  (Philippe),  rabbin,  Posen. 

56  Blocq  (Mathieu),  Toul. 

57  Bloch  (Armand),  grand  rabbin  de  Belgique,  Bruxelles. 
5S  Blum  (Rev.  A.).  Los  Angeles,  Californie. 

59  Blum  (Victor),  le  Havre. 

60  Blumknstein,  rabbin   à  Luxembourg,   Luxembourg. 

61  BoucRis  (Haïm),  rue  de  Médée,  Alger. 

62  Bruhl  (David),  rue  de  Chàteaudun,  57. 

63  Bruhl  (Paul),  rue  de  Chàteaudun,  57. 

64  Brunschwicg  (Léon),  avocat,  18,  rue  Lafayette,  Nantes. 

65  Cahen  (Abraham),  grand  rabbin,  rue  Vauquelin,  9. 

66  Cahen  (Albert),  rue  Condorcet,  53. 

67  Cahen  (Gustave),  avoué,  rue  des  Petits-Champs,  61. 

68  Cahen  d'Anvers  (Albert),  rue  de  Grenelle,  118. 

69  Cahen  d'Anvers  (Louis),  rue  Bassano,  2. 

70  Catïaui  (Elie),  rue  Lafayette,  14. 

71  Cattaui  (.losoph-Aslan),  ingénieur,  le  Caire. 

72  Cerf  (Hippolyte),  rue  Française,  8. 

73  Cerf  (Léopold),  éditour,  rue  Duplessis,  59,  Versailles. 


LXXXIV  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

74  Cerf  (Louis),  rue  Française,  8. 

75  Chwolson    (Daniel) ,   professeur   de  langues    orientales ,  rue 

Wassili  Ostrov,  7.  ligne  42,  Saint-Pétersbourg. 

76  Cohen  (Isaac- Joseph^,  rue  Lafajette,  75. 

77  CoH.v  (Léon),  préfet  de  la  Haute-Garonne,  Toulouse. 

78  Consistoire  central  des  Israélites  dk  France,  rue  de  la 

Victoire,  44. 

79  Consistoire  Israélite  de  Belgique,  rue  du  Manège,  12, 

Bruxelles. 

80  Consistoire  israélitiS  de  Bordeaux,  rue  Honoré-Tessier,  7, 

Bordeaux. 

81  Consistoire  Israélite  de  Lorraine  ,  Metz. 

82  Consistoire  Israélite  de  Marseille. 

83  Conslstoire  Israélite  d'Oran. 

84  Consistoire    israéute    de  Paris,  rue    Saint- Georges ,  17 

(200  fr.). 

85  Dalsace  (Gobert),  rue  Rougemout,  6. 

83  Darmesteter  (James),  professeur  au  Collège  de  France,  bou- 
levard Latour-Maubourg,  18. 

87  Debré    Simon),  rabbin,  impasse  Masséna,  5  bis,  Neuilly-sur- 

Seine. 

88  Delv aille  (D""  Camille),  Bayonne. 

89  Derenbourg  (Hartwig),  directeur-adjoint  à  l'Ecole  des  Hautes- 

Etudes,  rue  de  la  Victoire,  56. 

90  Derenbourg  (Joseph),  membre  de  l'Institut,  directeur  d'études 

à  l'Ecole  des  Hautes-Études,  rue  de  Dunkerque,  27. 

91  Dreyfus  (Abraham),  rue  Boulainvilliers,  43. 

92  Dreyfus  (Anatole),  rue  de  Phalsbourg,  15. 

93  Dreyfus  (H.-L.),  rabbin,  Saverne. 

94  Dreyfus  (Henri),  faubourg  Saint-Martin,  162. 

95  Dreyfus  (L.),  avenue  des  Champs-Elysées,  77. 

96  Dreyfus  (René),  rue  de  Monceau,  81. 

97  Dreyfus  ^Tony),  rua  de  Monceau,  83. 

98  Dreyfus   fJacques-H.) ,   grand   rabbin  de   Paris,   rue   de    ia 

Victoire,  12. 


LISTE  DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ  LXXXV 


99  DuRLACHER  (Armand),  libraire-éditeur,  rue  Lafayette,  83  bis, 

100  DuvAL  (Rubens),  rue  Sontay,  11. 

101  Ecole  Israélite,   Livourne. 

102  EiCHTHAL  (Eugène  d'),  rue  Jouffroy,  57. 

103  Engelmann,  rue  deMaubeuge,  16. 

104  Ephraïm  (Armand),  rue  de  Saint-Pétersbourg,  18. 

105  Ephrussi  (Jules),  place  des  Etats-Unis,  2. 
10(5  Epstein,  Grilparzerstr. ,  11,  Vienne. 

107  Erlanger  (feu  Michel). 

108  Errera   (Léo),  professeur  à   l'Université,    place  Stéphanie, 

1,  Bruxelles. 

109  Feldmann  (Armand),  avocat,  rue  d'Isly,  8. 

110  Fischer  (D'' Julius),  Raab,  Moravie. 

111  FiTA   (Rév.    P.  Fidel),  membre  de  l'Académie  royale   d'his- 

toire, Calle  Isabella  la  Catholica,  Madrid. 

112  FouLD  (Léon),  faubourg  Poissonnière,  30. 

113  Franck  (feu  Adolphe). 

114  Franck  (E.),  Beyrouth. 

115  Fuerst  (D'),  rabbin,  Mannheim. 

110  Gautier  (Lucien),  professeur  de  théologie,  Lausanne. 

117  Gerson  (M.-A.),  rabbin,  Dijon. 

118  GiAvi,  Nanterre. 

119  Goeje  (.1.  de),  professeur  à  l'Université,  Leyde. 

120  GoLDSCHMiDT  (  Édouard  de),  boulevard  Haussmann,  1.53. 

121  Gommés  (Armand),  rue  Chégaray,  33,  Bayoune. 

122  Gross  (D"-  Heinrich),  rabbin,  Augsbourg. 

123  Grunwald  (D""),  rabbin,  Jungbunzlau,  Autriche-Hongrie. 

124  Gubbay,  boulevard  Malesherbes,  165. 

125  Gudemann  (D'),  rabbin,  Vienne. 

126  GuizoT  (feu  Guillaume). 

127  Hadamard  (David),  rue  de  Chàteaudun,  53. 

128  Haguenau  (David),  rabbin,  faubourg  Poissonnière,  40. 


LXXXVI  ACTES  ET  CONFKHEiNCES 


129  Halberstam  ,'8.-J.),  Bielitz,  Autnclie-IIonirrie. 

130  IIalkvy  (Josepli),  professeur  à  l'Ecole  des  Ilautcs-Etudos,  rue 

Auraaire,  26. 

131  IIalévy  (Ludovic),  membre  de  l'Académie  française,  rue  de 

Douai,  22. 

132  IIali'ON  (M'"»  S.),  faubourg  Saint-llonoré,  215  (50  fr.). 

133  IlAMMKRSCHLAa,   II,  Ferdiiiaiidstr. ,  23,  Vienne. 

134  Harkayy  (Albert).  l»il)liolhécaire,  Saint-Pétersbourg. 

135  IIaykm  Julien),  avenue  de  Villiers,  63  (40  fr.]. 

136  Heink-Furtado  (M'"o),  rue  de  Monceau,  28  (100  fr.). 

137  Herzog  (Df),  rabbin,  Kapos\\ar,  Autriche-Hongrie. 

138  Herzog  (Henri),  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  Guéret. 

139  Heymann  (Alfred),  avenue  de  l'Opéra,  20. 

140  HiRSCH  (Joseph),  ingénieur  en  chef  des  ponts  et  chaussées,  rue 

de  Castiglione,  1. 

141  Iscii-AVahl  ;D'),  cité  Trévise,  26. 

142  Israelsoiin   J.j,  GorochoAvaja  25,  log.  13,  Saint-Pétersbourg. 

143  IsTiTUio  SUPEHIORE,  sezioue  di  filologia  e  tilosoiia,  Florence. 

144  Jacobsohn  (Hugo),  Kupferschmiedstr..  44,  Breslau. 

145  Jastrow  (D''M.),  rabbin,  Philadelphie. 

146  Jellinek  (D""  Adolphe),  rabbin-prédicateur,  Vienne. 

147  JouRDA,  directeur  de  l'Orphelinat  de  Rothschild,  rue  de  I.am- 

blardie,  7. 

148  Judith  Montefiore  Collège,  Ramsgate,  Angleterre. 

149  Kahn  (Jacques),  secrétaire  général  du  Consistoire  Israélite  de 

Paris,  rue  Larochefoucauld,  35. 

150  Kahn  (Salomon),  boulevard  Baile,  172,  Marseille. 

151  Kahn  (Zadoc),  grand  rabbin  du  Consistoire  central  des  Israé- 

lites de  France,  rue  Saint-Georges,  17. 

152  Kann  (M"""),  avenue  du  Bois  de  Boulogne,  58. 

153  Kaufmann  (David),  professeur  au  Séminaire  Israélite,  Andras- 

systr.,  20,  Budapest. 

154  Kespi,  rue  René  Caillé,  Alger. 


LISTE  DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ  LXXXVII 

155  KiNSBOURG  (Paul),  rue  de  Cléry,  5. 

156  Klotz  (Eugène),  place  des  Victoires,  2. 

157  Klotz  (Victor),  avenue  Montaigne,  51. 

158  KoHN  (Georges),  rue  Blanche,  49. 

159  KoHUT  (Rév.  D""  Alexander),  Beekman  Place,  39,  New-York. 

160  KoMiTET  Synagogi  na  Tlomackiem,  Varsovie. 

161  KoKOVTSOFF  (Paul  de),   Ismailowsky  Polk  3,  rotte  M.    11, 

log.  7,  Saint-Pétersbourg. 

162  Lajeunesse  (Jules),  rue  Cadet,  17. 

163  Lambert  (Abraham),  avoué,  rue  Saint-Dizier,  17,  Nancy. 

164  Lambkrt  (Eliézer),  avocat,  rue  Baudin,26. 

105  Lambert     (Mayer),    professeur    au    Séminaire    Israélite,    rue 
Guy-Patin,  5. 

166  Lassudrie,  rue  Laffltte,  21. 

167  Lazard  (Lucien),  archiviste-paléographe,  r.  Rochechouart,  49. 

168  Lehmann    (Joseph) ,  grand  rabbin ,    directeur    du  Séminaire 

Israélite,  rue  Vauquelin,  9. 

169  Lehmann  (feu  Léonce). 

170  Lehmann  (Mathias),  rue  ïaitbout,  29. 

171  Lehmann  (Samuel),  rue  de  Provence,  23. 

172  LÉON  (Xavier),  boulevard  Haussmann,  127. 

173  Léon  d'Isaac  Jaïs,  rue  Henri-Martin,  17,  Alger. 

174  Levaillant  ,   trésorier  général  de  la  Haute-Loire ,  Saint- 

Elienne. 

175  Leven  (Emile),  rue  de  Trévise,  35. 

176  Leven  (Léon),  rue  de  Trévise,  37. 

177  Leven  (Louis),  rue  de  Phalsbourg,  18. 

178  Leven  (D""  Manuel),  rue  Richer,  12. 

179  Leven  (Narcisse),  avocat,  rue  de  Trévise,  45. 

180  Leven  (Stanislas),  conseiller  général  de  la  Seine,   rue  Miro- 

mesnil,  18. 

181  LÉvi  (Israël),  rabbin,  professeur  au  Séminaire  Israélite,  rue 

Condorcet,  60. 

182  Lévi  (Sylvain),  prof,  à  la  Sorbonne,  place  Saint-Michel,  3. 

183  Lévy  (Alfred),  grand  rabbin,  Lyon. 


LXXXVIII  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

184  LÉVY  (Paul-Calmann),  rue  Auber.  3. 

185  LÉVY  (Charles),  Colmar. 

186  LÉVY  fÉmilei.  grand  rabbin,  Bayonne. 

18^  LÉVY  (Aron-Emmanuel),  rue  Marrier,  19,  Fontainebleau. 

188  LÉVY  (Jacques),  grand  rabbin,  Constantine. 

189  LÉVY  (Léon),  rue  Logelbach,  9. 

19 J  LÉVY  (Raphaël;,  rabbin,  rue  d'Angoulême,  6. 

191  Lévy-Bruhl  (Lucien)  ,  professeur  de  philosophie  au  Lycée 

Louis-le-Grand,  rue  Montalivet,  8. 

192  Lévylier,  ancien  sous-préfet,  rue  Vignon,  9. 

193  Lœwenstein  (D""),  rabbin,  Mosbach,  Allemagne. 

194  Lœwenstein  (MM.),  rue  Lepeletier,  24. 

195  Lœvy  (A.),  100,  Sutherland  Gardens,  Londres. 

196  Lôw  (D'"Imn:ianuel),  rabbin,  Szegedin. 

191  Lyon-Cahen  (Charles),  professeur  à  la  Faculté  de  droit,  rue 
Soufflot,  13. 

198  Mannheim  (Charles-Léon),  rue  Saint-Georges,  7. 

199  Maecus  (Saniel),  Smyrne. 

200  May  (M"'^),  place  de  l'Industrie,  22,  Bruxelles. 

201  Mayer  (Ernestl,  boulevard  Malesherbes,  66. 

202  Mayer  (Félix),  rabbin,  Valenciennes. 

203  Mayer  (Gaston) ,    avocat  à  la    Cour  de  Cassation ,   avenue 

Montaigne,  3. 

204  Mayer  (Henri),  professeur   au  lycée  Condorcet,  rue  Miro- 

mesnil,  18. 

205  Mayer  (Michel),  rabbin,  place  des  Vosges,  14. 

206  Mayrargues  (Alfred),  boulevard  Malesherbes,  103. 

207  Meiss,  rabbin,  Nice. 

208  Merzbach  (Bernard),  rue  Richer,  17. 

209  Meyer  (D""  Edouard),  boulevard  Haussmann,  73. 

210  MocATTA    ( Frédéric -D.),    Connaught    Place,    9,    Londres 

(50  fr.}. 

211  MoDONA   (Leonello) ,    sous-bibliothécaire  de  la  Bibliothèque 

royale,  Parme. 

212  Montefiore  (Mosé),  ministre- officiant,  rue  Paradis,  46. 


LISTE  DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ  LXXXIX 


213  MoRTARA  (Marco),  grand  rabbin,  Mantoue. 

214  Nettb;r  (D""  Arnoldj,  boulevard  Saint-Germain,  129. 

215  Neubauer  (Adolphe),    bibliothécaire  à  la  Bodléienne,  Oxford. 

216  Neumann  (D""),  rabbin,  Gross-Kanisza,  Autriche-Hongrie. 
2n  Neymarck  (Alfred),  rue  Vignon,  18. 

218  OcHS  (Alphonse),  rue  Chauchat,  22. 

219  Oppenheim  (P.-M.),  rue  Taitbout,  11  (50  fr.). 

220  Oppenheimer  (Joseph-Maurice),  rue  Lepeletier,  7. 

221  Oppert  (Jules),  membre  de  l'Institut,  professeur  au  Collège 

de  France,  rue  de  Sfax,  2. 

222  OuLMAN  (Camille),  rue  de  Grammont,  30. 

223  Ouverleaux  (Emile),  conservateur  de  la  Bibliothèque  royale, 

Bruxelles. 

224  Péreire  (Gustave),  rue  de  la  Victoire,  69. 

225  Perles  (J.),  rabbin,  Munich. 

226  Perreau  (le  chevalier),  bibliothécaire  royal,  Parme. 

227  PiNTUs  (J.),  rue  de  Londres,  46. 

228  Popelin  (feu  Claudius). 

229  PoRGÈs  (Charles  ,  rue  de  Berry,  25  (40  fr.). 

230  Propper  (S.),  rue  Volney,  4. 

231  Ragosny,  à  la  Compagnie  générale,  rue  Taitbout,  62. 

232  Rkin'ach  (Joseph),  député,  avenue  Van  Dyck,  6. 

233  Reinach  (Salomon),  ancien  élève  de  l'Ecole  d'Athènes,  con- 

servateur-adjoint du   musée  de  Saint-Germain  ,  rue  de 
Lisbonne,  38. 

234  Reinach  (Théodore),  docteur  en  droit  et  ès-lettres,  rue  Mu- 

rillo,  26. 

235  Renan   (feu  Ernest). 

236  Rheims  (Isidore),  rue  de  Saint-Pétersbourg,  T. 

237  Robert  (Charles),  rue  des  Dames,  12,  Rennes. 

238  Rodrigues  (Hippolyte),  rue  de  la  Victoire,  14. 

239  RoSENTHAL  (Baron  de),  Heerengracht,  500,  Amsterdam. 

240  Rothschild  (le  baron  Alphonse  de),  membre  de  l'Institut, 

rue  Saint-Florentin,  2  (400  fr.). 


XC  ACTES  ET  CONFERENCES 


241  Rothschild   île  baron  Arthur  de^ ,  i  ue  du  Faubourg-Saint- 

Hoiioré,33  '400  fr.). 

242  Rothschild  (le  baron  Edmond  de),  rue  du  Faubourg-Saint- 

Honoré,  41  (400  fr.). 

243  Rothschild    (le  baron  Gustave    de]  ,   avenue    Marign}' ,   23 

400fr.\ 

244  Rothschild  (la  baronne  James  de) ,  avenue   Friedland ,  38 

(50  fr). 

245  Rothsciuld  (M"'«  la  baronne  Nathaniel  de),  faubourg  Saint- 

Honoré,  33  (100  fr.). 

246  Rothschild    (baron  Edouard   de),  2,    rue  Saint- Florentin 

(150  fr.). 
24T  Rothschild     (Baron    Henri    de),    avenue    Friedland,    38 
(2,000  fr.). 

248  RozELAAR  'Lévie-Abrahami,  Sarfatistraat,  30,  Amsterdam. 

249  RuFF,  rabbin,  Verdun. 

250  Sack  (feu  Israël). 

251  Sadoun  (Ruben),  rue  du  Chêne,  4,  Alger. 

252  Saint-Paul  (Georges),  maître  des  requêtes  au  Conseil  d'Etat, 

place  des  Etats-Unis.  8. 

253  Salomox  (Alexis),  rue  Croix-des-Petits-Champs,  38. 

254  ScHAFiiiR  (D),  rue  de  Trévise,  41. 

255  Scheid  (Elle),  rue  Saint-Claude,  1. 

256  ScHREiNER  (Martin),  rabbin,  Budapest. 

257  ScHUHL  (Moïse),  grand  rabbin,  Vesoul. 

258  ScHUHL  (Moïse),  rue  Bergère,  29. 

259  Schwab  (Moïse) ,   sous-bibliothécaire  de  la  Bibliothèque  na- 

tionale, cité  Trévise,  14. 

260  ScHWEiscH,  rue  du  Bouloi,  12. 

261  SÈCHES,  rabbin,  Saint-Etienne. 

262  Sée  (Camille),   conseiller   d'Etat,   avenue   des   Champs-Ely- 

sées, 65. 

263  Sée  (Eugène),  [léfet  de  la  Haute-Vienne,  Limoges. 

264  Si.M0.\  (Josepli\  instituteur,  Nîmes. 

265  Simonsex,  rabbin,  Copenhague. 


LISTE  DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIETE  XCl 

266  SoNNENFELD,  Tue  de  l'Eljsée,  2 

2G7  Spirk,  ancien  notaire,  rue  d'Alliance,  12,  Nancy. 

268  Stein  (L.),  professeur  de  philosophie  à  l'Université,   Zurich. 

269  Stern  (René),  rue  du  Quatre-Septembre,  14. 

270  Stkaus  (Emile),  avocat  à  la  Cour  d'appel,  boulevard  Hauss- 

mann,  134. 

271  Sur.zBBRGER,  Chistnut  Street,  537,  Philadelphie. 

272  Taub,  rue  Lafa jette,  10. 

273  Ulmann  (Emile),  rue  Boccador,  7. 

274  Vernes  (Maurice) ,    directeur-adjoint  à  l'Ecole  des   Hautes- 

Etudes,  boulevard  Saint-Germain,  76. 

275  Vidal-Naquet,  président  du  Consistoire  Israélite,  Marseille. 

276  VoGELSTEiN  (D""),  rabbin,  Stettin. 

277  Weill  (D""  Anselme),  rue  Saint-Lazare,  101. 

278  Weill  (Emmanuel),  rue  Taitbout,  8. 

279  Weill  (Emmanuel),  rabbin,  rue  Condorcet,  53. 

280  Weill  (Georges),  rue  des  Francs-Bourgeois,  13. 

281  Weill  (Isaac),  grand  rabbin,  Strasbourg. 

282  Weill  (Moïse),  grand  rabbin,  Alger. 

283  Weill  (Vite),  rue  de  Lancry,  17. 

284  Weisweili.er  (Charles),  rue  Lafayette,  36. 

285  Wertheimer,  grand  rabbin,  Genève. 

286  Weyl  (Jonas),  grand  rabbin,  Marseille. 

287  WiEXER  (Jacques),  président  du  Consistoire  Israélite  de  Bel- 

gique, rue  de  la  Loi,  63,  Bruxelles. 

288  Wilmersdœrfer  (Max),  consul  général  de  Saxe,   Munich. 

289  WiNTER  (David),  avenue  des  Champs-Elysées,  152. 

290  WoGUE  (Lazare),  grand  rabbin,  professeur  au  Séminaire  Israé- 

lite, rue  de  Trévise,  35. 

291  WoLF,  rabbin,  La  Chaux-de-Fonds,  Suisse. 

292  ZiEGEL  et  Engelmann,  rue  de  la  Tour-d'Auvergne,  34. 

293  Zlmmels  (D""),  rabbin,  Milhr-Ostrau,  Autriche-Hongrie.' 


XCII  ACTES  ET  COxNFERENCES 


MEMBRES    DU    CONSEIL 

PENDANT  l'année  1893. 

Président  d'honneur  :  M.  le  baron  Alphonse  de  Rothschild  ; 

Président  :  M.  Hartwig  Derenbourq  ; 

Vice-prés idenf s  :  MM.  Théodore  Reinach  et  Abraham  Cahen; 

Trésorier  :  M.  Moïse  Schwab  ; 

Secrétaires  :  MM.  Albert  Cahen  et  Maurice  Vernes  ; 

MM.  Albert-Lévy,  Astruc,  Léopold  Cerf,  James  Darmes- 
TETER,  J.  Derenbourg,  Armand  Ephraïm,  Edouard  de  Golds- 
chmidt,  J.  h.  Dreyfus,  Rubens  Duval,  Zaduc  Kahn,  Lucien 
Lazard,  Joseph  Lehmann,  Sylvain  Lévi,  Michel  Mayer,  Jules 
Oppert,  Salomon  Reinach,  Baron  Henri  de  Rothschild,  Vernes. 


MEMBRES    DU    COMITE 
DE  PUBLICATION  ET  D'ADMINISTRATION 

POUR  l'année  1893. 

Président  :  M.  Théodore  Reinach; 
Secrétaires  :  MM.  Albert  Cahen  et  Vernes  ; 

MM.    Abraham   Cahen,   H.    Derenbourg,    J.    H.    Dreyfus, 
ZadocKAHN,  Lazard,  Lehxiann,  Salomon  Reinach,  Schwab. 


VERSAILLES,    CERF    ET    G",  IMPRIMEURS,    RUE   DUPLESSIS,    o9. 


L'OEUVRE   SCOLAIRE 

DES  JUIFS  FRANÇAIS 

DEPUIS  1789 

CONFÉRENCE   FAITE    A   LA    SOCIÉTÉ   DES   ÉTUDES   JUIVES 
LE  6   MAI  1893 

Par  m.  Maurice  BLOCIl 

Agréj^é  des  letlres,  D  recteur  de  l'Ecole  BischoITsheim. 


Présidence  de  M.  lÎARTWia  Deren bourg,  président. 


M.  le  Président  ouvre  la  séance  en  ces  ternies  : 

Je  n'ouvre  point  cette  séance  sans  un  vif  sentiment  d'inquiétude 
que  je  ne  chercherai  point  à  dissimuler.  Non  point  sur  la  rude 
concurrence  que  risquent  de  nous  faire  le  mois  de  mai  et  les 
chaleurs  :  il  vient  de  commencer,  elles  tendent  à  s'adoucir  et 
l'empressement  avec  lequel  vous  avez  répondu  à  notre  appel  me 
rassure  à  cet  égard.  Non  point  non  plus  sur  le  talent  de  notre 
conférencier  :  il  a  fait  ses  preuves  parmi  nou;,  lorsque  l'an  dernier 
il  a  esquissé  la  figure  de  la  femme  juive  dans  le  roman  et  au  théâtre. 
Ses  discours  annuels  à  la  distribution  des  prix  de  la  fondation 
Bischoffsheim  renouvellent  périodiquement  le  même  sujet  par  une 
variété  de  ton  et  d'effets  dans  un  diapason  toujours  égal  de  grâce, 

ACT.    ET    CONF.  ^ 


XCIV  ACTES  ET  CONFÉRExNCES 

de  finesse,  de  charme,  de  maîtrise  dans  l'art  de  bien  penser  et  de 
bien  dire. 

Avec  un  tel  public  et  un  tel  orateur,  vous  avouerez  qu'il  faut 
avoir  l'esprit  chagrin  ou  le  tempérament  bilieux  pour  ne  pas  se 
montrer  résolument  optimiste.  Et  pourtant,  avant  de  vous  donner 
la  parole,  mon  cher  ami,  j'éprouve  le  besoin  de  plaider  votre  cause, 
comme  celle  d'un  inculpé,  auprès  des  dames  présentes.  Je  crains 
pour  vous  leur  courroux.  La  conférence  de  ce  soir  est,  si  je  ne 
m'abuse,  la  première  infidélité  que  vous  commettiez  à  l'égard  de 
votre  sexe  préféré.  Le  sexe  dit  fort  se  prépare  à  en  bénéficier. 
Mais  ne  craignez-vous  pas  la  vengeance  de  vos  admiratrices  qui 
croyaient  vous  posséder  sans  partage,  et  que  vous  contraignez 
à  entendre  de  votre  bouche  des  éloges  pour  les  efforts  des  hommes, 
qui,  avec  la  jalousie  qui  leur  est  naturelle,  vous  reprocheront  votre 
crime  d'apostasie? 

Vous  comprenez  maintenant,  ilesdames  et  Messieurs,  vous 
surtout,  Mesdames,  pourquoi  je  réclame  l'indulgence  en  faveur  de 
votre  captif,  qui  a  poussé  la  témérité  jusqu'à  secouer  votre  joug 
pour  un  soir,  jusqu'à  s'émanciper  pour  qucîlques  heures  à  votre 
détriment.  Jusqu'ici  vous  l'aviez  asservi,  et  ses  chaînes  ne  sem- 
blaient pas  trop  lourdes  à  votre  prisonnier.  Vous  l'absoudrez,  je 
l'espère,  en  faveur  de  son  passé.  Lorsqu'on  1880  il  devint  agrégé 
des  lettres,  sa  place  était  marquée  parmi  les  meilleurs  maîtres  de 
notre  enseignement  secondaire.  Avec  un  rare  discernement,  il 
comprit  que  sa  vocation  l'entraînait  vers  l'éducation  de  la  jeunesse 
féminine,  et  lEcole  Bischolfsheira,  qu'il  dirige  avec  le  concoui's  d'un 
comité  de  dames  patronnesses  sous  l'autorité  de  la  généreuse  fonda- 
trice, sut  le  retenir  par  la  perspective  que  l'essaim  sorti  de  la  ruche 
comprendrait  des  institutrices  et  des  ouvrières,  qu'il  comprendrait 
exclusivement  des  femmes.  Les  livres  que  M.  Maurice  Bloch 
s'est  avisé  de  composer  dans  ses  loisirs  témoignent  de  cette  môme 
partialité,  de  cette  même  prédilection.  Chez  lui,  c'est  toujours  le 
chevalier  servant  des  dames  qui  agit,  qui  parle  et  qui  écrit.  Les 
titres  de  ses  ouvrages  me  dispensent  de  tout  commentaire.  Les 
Mères  des  grands  homme!^  paraîtront  bientôt  en  cinquième  édition; 
la  troisième,  en  1887,  coïncidait  avec  la  publication  par  l'autour  de 


L'OEUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789  XCV 

ses  Epouses  et  sojurs.  Si  l'écrivain  a  l'occasion  de  rééditer  ce  der- 
nier livre,  je  lui  signale,  comme  un  chapitre  complémentaire,  le 
martyre  qu'au  milieu  de  ce  siècle  l'historien  anglais  Thomas  Car- 
Ijle  inlligea  à  celle  qui  eut  l'honneur  d'être  la  compagne  et  le 
témoin  de  sa  vie.  Le  rajon  de  gloire  y  fut  avec  persistance  assom- 
bri par  le  nuage  de  souJfrance.  Les  grands  hommes  sont  trop  absor- 
bés pour  s'épanouir  dans  l'intimité  du  mariage.  C'est  ce  dont 
M.  Bloch  fournira  de  trop  nombreux  exemples,  lorsqu'il  réunira, 
comme  je  le  souhaite  pour  lui  et  pour  nous,  une  galerie  de  portraits, 
soit  dans  une  Biographie  universelle  des  femmes  illustres,  soit  au 
moins  dans  un  Dictionnaire  des  contemporaines. 

Je  termine  par  un  dernier  appel  en  faveur  de  mon  client.  Par- 
donnez, Mesdames,  à  M.  Bloch  son  escapade  d'aujourd'hui,  ne  luj 
tenez  pas  rigueur,  ne  vous  montrez  pas  cruellement  implacables 
pour  celui  qui  vous  aime  tant,  accordez-lui  un  sourire  d'indul- 
gence et,  sans  garder  rancune  à  votre  conquête  d'hier  et  de 
demain,  rivalisez  d'applaudissements  avec  nous  autres  hommes, 
afin  que  le  transfuge  vous  revienne  sans  arrière- pensée  et  sans 
confusion,  afin  qu'il  respire  en  pleine  sécurité  pour  l'avenir,  afin 
qu'il  se  sente  tranquillisé  d'avance  par  votre  attitude  de  bienveillance 
et  de  sympathie  sur  l'accueil  empressé  par  lequel  vous  chercherez 
à  nous  disputer  et  vous  réussirez  à  accaparer  de  nouveau  l'enfant 
prodigue. 


M.  Maurice  Bloch  s'exprime  en  ces  termes  : 

Mesdames,  Messikurs, 

Vous  savez  tous  que  la  Révolution  française  a  émancipé  les  Juifs. 
Mais  le  décret  qui  leur  accordait  les  droits  de  citoyens  suffisait-il 
pour  les  rendre  dignes  de  ces  droits?  Il  fallait  bien  autre  chose 
qu'un  trait  déplume  pour  changer,  avec  leur  situation  civile  et  poli- 
tique, leurs  mœurs,  leurs  manières,  leurs  sentiments,  fruits  de  longs 
siècles  de  misère  et  d'humiliation.  Traités  en  ennemis  par  le  cliré- 


XCVI  ACTES  ET  CONFERENCES 

tien  et  habitués  à  le  regarder  comme  tel,  les  Juifs  entreraient-ils 
sans  arrière-pensée  clans  cette  société  qui  s'ouvrait  enfin  à  eux  ?  Et 
cette  race  de  fripiers,  de  brocanteurs,  de  marchands  de  bestiaux, 
qui  traînait  ses  guenilles  sur  les  routes  d'Alsace  et  de  Lorraine,  se 
tournerait-elle  vers  les  professions  manuelles  ou  les  carrières  libé- 
rales, et  donnerait-elle  à  la  France  des  ouvriers,  des  artistes,  des 
savants?  Surtout  lui  donnerait-elle  de  bons  citoyens? 

La  question  était  grosse  de  difficultés  et  causait  de  sérieuses  ap- 
préhensions aux  meilleurs  amis  des  Juifs,  aux  Juifs  eux-mêmes. 
Détruire  des  usages  séculaires  est  la  plus  redoutable  des  tâches, 
et  les  plus  habiles  y  ont  échoué.  Avec  une  merveilleuse  justesse  de 
coup  d'œil,  nos  coreligionnaires  virent  ce  qu'il  y  avait  à  faire  :  ils  se 
tournèrent  vers  l'avenir  et  regardèrent  les  enfants.  C'est  là  que 
devaient  porter  tous  les  efforts.  C'est  là  que  la  bataille  devait  être 
livrée  et  qu'elle  pouvait  être  gagnée.  Et,  dans  leur  reconnaissance 
pour  la  France,  quelques  Juifs  d'élite  furent  pris  d'un  véritable 
enthousiasme  ;  ils  trouvèrent  dans  leur  cœur  les  plus  heureuses 
inspirations  pédagogiques;  et  à  Metz,  à  Strasbourg,  à  Paris,  à  Bor- 
deaux, ce  ne  fut  qu'un  même  cri  :  «  Des  Ecoles  !  »  —  Ceux  mêmes 
qui  étaient  les  plus  arriérés  et  qui  ne  comprenaient  pas  la  beauté 
du  mouvement  sentaient  vaguement  qu'il  fallait  faire  quelque  chose 
pour  se  rendre  digne?  du  pays  d'adoption,  et  l'on  vit  des  indigents 
qui  se  nourrissaient  d'aumônes,  se  retrancher,  comme  dit  un  rap- 
port, de  ce  strict  nécessaire  dû  à  la  charité  et  apporter  quelques 
sous  pour  que  les  enfants  pussent  apprendre  à  lire  et  à  écrire. 

Oh  1  les  commencements  furent  pénibles  !  Des  locaux,  il  n'y  en 
avait  paî  ;  de  l'argent  il  n'y  en  avait  pas  ;  un  personnel  il  n'y  en 
avait  pas,  et  il  n'y  avait  pas  d'élèves.  Viendront-ils  seulement  à 
l'école,  ces  petits  vagabonds  juifs,  habitués  à  courir  les  rues  pour 
offrir  aux  passants  des  rubans,  des  aiguilles,  des  épingles,  des 
allumettes  ?  On  commence  par  décréter  la  levée  en  masse,  je  veux 
dire  l'instruction  obligatoire.  Tous  ceux  qui  n'enverront  pas  les  en- 
fants à  l'école  seront  privés  des  secours  des  comités  de  bienfaisance. 
C'était  frapper  immédiatement  au  bon  endroit  :  car  la  plupart  des 
Juifs  d'alors  étaient  pauvres,  si  pauvres  qu'un  jour  un  petit  garçon 
ayant  cassé  un  carreau  à  l'école,  le  carreau  du  propriétaire,  qui 


L'OEUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789       XCVII 

exigeait  2  fr.  50  de  réparation,  la  famille  demanda  d'échelonner  le 
payement.  On  convint  que  l'enfant  apporterait  tous  les  jours  un  sou 
à  l'Ecole,  le  sou  de  son  goûter.  Touchés  de  la  privation  qu'il  doit 
s'imposer,  les  petits  camarades  font  une  quête.  L'instituteur  et  son 
adjoint  y  prennent  part.  Savez-vou5  à  combien  se  monte  la  sous- 
cription ?  à  29  sous!  Jugez  de  la  misère  des  Juifs  d'alors  1  S'il  y  a 
ici  des  âmes  charitables  qui  s'apitoient  sur  le  sort  de  notre  petit 
coreligionnaire  privé  de  son  goûter  encore  21  jours,  elles  peuvent 
se  rassurer.  Le  directeur  réunit  les  21  sous  restant  en  faisant  appel, 
comme  dit  le  rapport  officiel,  «  à  la  générosité  de  différents  dona- 
teurs ». 

Forcément  donc,  si  l'on  voulait  réussir,  il  fallait  adopter  l'instruc- 
tion gratuite  et  obligatoire,  et  par  cela  seul  nous  devancions  notre 
époque;  je  parle  de  celle  qui  va  de  1815  à  1830.  Car  vous  pensez 
bien  que  les  guerres  de  la  République  et  du  premier  Empire  mirent 
bien  des  entraves  aux  travaux  scolaires.  Ce  n'est  guère  que  sous  la 
Restauration  qu'on  put  donner  tous  ses  soins  à  l'œuvre  pacific^ue 
des  Ecoles  ! 

Mais  comme  on  sait  rattraper  le  temps  perdu!  Le  mouvement  est 
vraiment  admirable  !  On  ne  trouvera  plus. . .  non  !  nos  dames  pa- 
tronnesses  sont  trop  vaillantes,  nos  administrateurs  trop  dévoués,  et 
nos  directeurs  d'écoles. . .  je  ne  peux  pourtant  pas  en  dire  du  mal, 
j'en  suis. . .  mais  enfin  l'on  ne  trouvera  pas  facilement  des  gens  de 
cœur  comme  il  y  en  avait  alors.  Ils  courent  chez  les  parents  cher- 
cher les  enfants;  ils  s'assurent  matin  et  soir  si  les  petits  vagabonds 
sont  en  classe;  ils  surveillent  les  maîtres  et  font  des  cours,  s'il  le 
faut,  à  défaut  de  personnel.  On  avait  bien  sous  la  main  comme  per- 
sonnel quelques  vieux  talmudistes  passés  maitres  dans  l'art  de  faire 
nasiller  les  enfants  dans  la  tefilah  !  Mais  «l'instruction  doit  être 
la'ique,  comme  elle  est  gratuite  et  obligatoire.  Place  aux  jeunes  qui 
seront  imbus  des  idées  nouvelles,  et  qu'on  a  choisis  parmi  les  plus 
éveillés  pour  les  envoyer  en  hâte  dans  les  écoles  chrétiennes!  On 
les  fera  suivre  des  cours,  des  conférences!  Le  plus  difficile  alors  est 
de  décider  jeunes  gens  et  jeunes  filles  à  entrer  dans  la  carrière.  — 
Aujourd'hui  le  plus  difficile  est  de  les  décider  à  n'y  pas  entrer!  La 
mode,  à  cette  époque,  était,  non  de  passer  les  examens,  mais  de  faire 


XCVIII  ACTES  ET  CONFÉRENCES 


du  trafic...  et  l'avantage  aussi,  il  faut  bien  le  dire.  Il  est  telle 
communauté  où,  pour  compléter  le  traitement  de  l'instituteur  fort 
mal  payé,  les  familles  lui  envoient  chaque  jour  à  tour  de  rôle  un 
petit  pain  et  un  demi-litre  de  vin. 

Ne  plaignons  pas  trop  ces  maîtres  !  Avaient-ils  le  droit  de  se 
plaindre  (juand  ceux  qui  les  dirigent  et  les  surveillent,  sans  même 
être  payés,  se  donnent  tout  entiers  et  se  rédigent  à  eux-mêmes  les 
plus  sévères  règlements?  Il  est  tel  comité  où  l'on  ne  peut  s'absenter 
en  voyage  qu'à  la  condition  de  prévenir  le  président  et  d'indiquer 
d'avance  le  nombre  de  jours  qu'on  restera  absent.  Sinon  les 
amendes  pleuvant!  Une  simple  absence  justifiée  est  insérée  au 
procès-verbal  avec  l'indication  des  motifs  !  Quelle  activité  et  quelle 
correspondance!  Metz,  Strasbourg,  Nancy,  Paris,  toutes  les  Ecoles, 
tous  les  comités  sont  en  relations  continuelles,  se  communiquent 
sans  cesse  leurs  programmes,  leurs  méthodes,  s'interrogent,  se  co- 
pient ,  se  corrigent  mutuellement.  C'est  qu'amis  et  ennemis  du 
Judaïsme  ont  les  yeux  sur  nous,  assistent  en  curieux  à  ces  tenta- 
tives de  régénération  !  Est-ce  une  agitation  de  surface,  ou  bien  le 
mouvement  se  fera-t-il  sentir  dans  les  couches  profondes  de  la  popu- 
lation juive?  Quoi  vraiment!  ces  petits  déguenillés  juifs  pourraient 
égaler  des  chrétiens?  Non,  ils  devaient  les  dépasser.  Et  de  même 
que  la  première  République,  avec  ses  armées  rapidement  organisées, 
avait  remporté  la  victoire,  de  même  les  Juifs,  avec  leurs  pauvres 
écoles  si  mal  logées,  leurs  élèves  recrutés  à  la  hâte,  leur  personnel 
encore  insuffisant,  devaient  sortir  triomphants  de  l'épreuve,  car  ils 
ont  tous,  et  jusqu'aux  enfants,  cette  grande  chose  qui  est  le  gage  de 
tous  les  succès,  la  foi  dans  l'œuvre  entreprise  ! 

On  ne  me  croira  peut-être  pas  si  j'ajoute  qu'on  a  réussi  avant  de 
commencer.  Oui,  les  enfants  ont  fait  des  progrès  avant  que  les 
écoles  ne  soient  ouvertes.  La  chose  est  constatée  avec  surprise  dans 
la  Moselle  par  la  Société  d'encouragement  pour  l'instruction  que 
préside  le  comte  de  Tocqueville  '.  Elle  observe  qu'il  y  a  plus  de 

'  M.  Abraham  Calien  a  reproduit  dans  la  lieiiie  des  Eludes  juives  (avril- 
juin  188t)  un  curieux  règlement  des  Juifs  de  Melz,  datant  de  1089  et  relatif  aux 
écoles  talmudiques.  Ce  règlement  établit  comme  un  système  de  gratuité  ot 
impose  l'obligation  de  l'instruction.  11  faut  ajouter  qu'à  aucune  époque  les  Juifs 


L'OEUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FINANÇAIS  DEPUIS  1780        XCIX 

petits  juifs  sachant  lire  et  écrire  que  de  petits  chrétiens.  C'est  que 
de  simples  particuliers  sans  brevet,  sans  mandat,  réunissaient  les 
enfants  par  groupe  de  10  ou  15  et  leur  enseignaient  le  peu  qu'ils 
savaient.  Quels  devaient  être  les  progrès  quand  l'enseignement 
allait  être  donné  d'une  façon  régulière  et  permanente  ! 

Cet  enseignement  fait  honneur  à  la  sagacité  des  promoteurs  de 
l'œuvre.  Ils  virent  bien  que,  pour  devenir  citoyens  français  et  en 
adopter  les  sentiments,  il  fallait  avant  tout  en  adopter  le  langage. 
Il  fallait  donc  faire  la  guerre  à  ce  jargon  judéo-allemand,  idiome 
barbare,  reste  de  temps  plus  barbares  encore.  Mais  cet  idiome  était 
seul  usité  chez  les  juifs,  et  il  leur  tenait  au  cœur.  Un  trait  du  ro- 
mancier Kompert  le  prouve  bien.  Il  s'agit  d'une  brave  femme  juive 
qui  a  eu  le  malheur  de  voir  sa  fille  épouser  un  chrétien.  Tout  le  monde 
la  maudit,  excepté  la  mère,  qui  nourrit  la  secrète  espérance  que  sa 
fille  a  gardé  des  sentiments  Israélites.  Un  jour,  la  fille  tombe 
malade,  et  la  mère,  à  l'insu  de  tous,  lui  envoie  du  sucre  et  du  café  ; 
puis  elle  interroge  avec  anxiété  le  petit  juif  qui  a  fait  la  commission, 
et  elle  ne  manque  pas  de  demander:  «  Qu'a-t-elle  dit?  A-t-elle 
causé  en  jiidisch-deutsch  ?  »  Tant  il  est  vrai  que  cet  idiome  créait 
comme  un  lien  maçonnique  entre  ceux  qui  le  parlaient  ;  mais  il  sé- 
parait aussi  comme  par  un  fossé  juifs  et  chrétiens,  Juifs  et  Fran- 
çais. Il  fallait  agir  en  conséquence.  Savez-vous  quelle  était  l'infrac- 
tion à  la  discipline  considérée  comme  la  plus  grave,  à  l'Ecole  de 
Travail  de  Strasbourg?  C'était  de  ne  pas  parler  français.  Toutes 
les  rigueurs  du  règlement  tombaient  sur  le  petit  malheureux  surpris 
à  s'exprimer  dans  le  jargon  de  ses  pères  !  Petit  malheureux,  oui 
vraiment  :  il  était  privé  de  son  dîner  le  vendredi  soir,  seul  soir  oii 
il  y  eût  de  la  viande  à  table. 

A  l'école  Israélite  de  Colmar  des  moniteurs  spéciaux  surveillaient 
les  enfants  jusque  dans  les  rues;  eux-mêmes  s'oubliaient  parfois,  et 
c'est  dans  leur  jargon  allemand  qu'ils  défendaient  de  causer  le 
jargon  allemand.  On  trouve  dans  les  règlements  de  l'Ecole  de  Paris 
un  article  qui  peut  surprendre  d'abord,  qui  peut  même  paraître  d'un 

n'ont  été  dans  une  ignorance  absolue  ;  ils  ne  pouvaient  l'être  vu  la  néce-^sité 
pour  eux  de  lire  dans  les  livres  saints.  Tout  enfant  juif  devait  savoir  lire  l'hébreu, 
et  par  cela  inême  il  se  trouvait  moins  étranger  aux  choses  de  l'enseignement. 


ACTES  ET  CONFi: RENCrS 


esprit  étroit  si  l'on  n'y  réfléchit  pas.  Le  voici  :  «  Toute  langue 
étrangère  est  interdite  à  l'Ecole.  »  Toute  langue  étrangère!  tou- 
jours ce  patois  allemand! 

Ah!  certes!  ce  n'est  pas  à  Berlin  qu'ils  allaient  chercher  le  mot 
d'ordre,  ceux  qui  composaient  ces  règlements.  Ils  ne  regardaient 
pas  de  l'autre  côté  du  Rhin,  ces  vaillants  propagateurs  de  la  langue 
française!  Laissez-moi,  à  ce  propos,  évoquer  un  souvenir.  L'ensei- 
gnement du  français  fut  longtemps  négligé,  il  faut  bien  le  dire,  par 
la  France  même,  en  Alsace.  Les  meilleures  familles  qui  S3  piquaient 
de  ne  parler  que  le  français  y  me'laient  constamment  de  l'allemand. 
On  a  publié  dernièrement  les  lettres  des  demoiselles  de  Berckheim, 
Alsaciennes  fort  aimables  qui  ont  écrit  des  choses  charmantes.  On 
y  trouve  des  phrases  comme  celles-ci  :  «  Le  bon  curé  avait  de  la 
peine  à  nous  suivre  sur  la  neige  :  il  stolprait  à  tout  instant.  »  Ce 
verbe  stolprer  de  la  première  conjugaison  sent  singulièrement  la 
frontière  du  Rhin. 

Or,  vers  l'époque  dont  je  parle,  en  1810,  un  siècle  et  demi  après 
la  conquête,  le  recteur  de  l'Académie  de  Strasbourg  recommandait 
avec  insistance  aux  instituteurs  non-israélites  de  l'Alsace  de  donner 
plus  de  place  à  l'enseignement  du  français,  de  faire  parler,  écrire 
3t  compter  en  cette  langue  :  «  la  langue  de  la  patrie,  disait-il,  doit 
être  la  propriété  de  tous.  »  On  voit  qu'il  trouvait  les  plus  précieux 
auxiliaires  chez  les  Juifs  qui,  tout  en  travaillant  à  leur  propre  ré- 
génération, servaient  ainsi  la  cause  du  pays. 

La  langue  française  devenait  si  bien  notre  langue  nationale 
qu'elle  prenait  même  le  pas  sur  la  langue  sacrée,  la  langue  de  la 
Bible  !  —  On  dit  et  l'on  écrit  que  les  Juifs  ne  veulent  être  ni  Fran- 
çais, ni  Allemands,  ni  Anglais,  mais  qu'ils  veulent  être  Juifs.  Est- 
ce  pour  cela  que  l'Ecole  Israélite  de  Bordeaux,  sur  cinq  heures  de 
cours,  en  donnait  trois  au  français  et  deux  à  toutes  les  autres 
branches,  hébreu  compris?  Est-ce  pour  cela  qu'à  Paris  le  règle- 
ment porte  :  «  Bible  trois  quarts  d'heure,  français  une  heure  et  de- 
mie par  jour?  »  Est-ce  encore  pour  cela  que  dans  l'Alsace,  cette 
pieuse  Alsace,  on  met  du  matin  au  soir  sous  les  ^-cux  des  écoliers  la 
carte  de  la  patrie,  non  pas  la  Palestine,  mais  la  grande  carte  mu- 
rale de  la  France?  Rien  qu'en  imposant  à  leurs  coreligionnaires  la 


LŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  I7S9  CI 


laniïue  du  pays  dont  ils  étaient  citoyens,  les  Juifs  ronapaient  à  ja- 
mais avec  le  passé  et  s'attachaient  sans  espoir  de  retour  aux  desti- 
nées du  pays  d'adoption. 

En  même  temps,  le  Consistoire  central  faisait  publier  et  distribuer 
gratuitement  dans  les  écoles  un  excellent  petit  livre,  un  catéchisme 
qui  ne  diffère  de  celui  d'aujourd'hui  que  par  une  chose  :  on  y  avait 
rais  le>  principaux  règlements  du  Grand  Sanhédrin  ;  et  les  enfants 
devaient  les  apprendre  par  cœur.  Pouvaient-ils  ressembler  à  leurs 
devanciers  ces  petits  Juifs  qui  récitaient  à  haute  voix  chaque  jour 
des  choses  comme  celles-ci  : 

«  Le  Grand  Sanhédrin  statue  que  tout  Israélite  né  et  élevé  en 
France,  et  traité  par  les  lois  de  cet  État  comme  citoyen,  est  obligé 
religieusement  de  le  regarder  comme  sa  patrie,  de  le  servir,  de 
le  défendre,  d'obéir  aux  lois  et  de  se  conformer,  dans  toutes  ses 
transactions,  aux  dispositions  du  Code  civil. 

Déclare,  en  outre,  le  Grand-Sanhédrin,  que  tout  Israélite  appelé 
au  service  militaire  est  dispensé  par  la  loi,  pendant  la  durée  de  ce 
service,  de  toutes  les  observances  religieuses  qui  ne  peuvent  se 
concilier  avec  lui.   »^ 

Ne  devait-il  pas  sortir  une  génération  toute  nouvelle,  toute  fran- 
çaise, de  ces  écoles  qui  donnaient  de  tels  enseignements  ? 

Non,  jamais  trafiquant,  jamais  spéculateur  à  la  Bourse,  n'éprouva 
une  joie  pareille  à  celle  des  Israélites  de  Metz,  quand  un  an  après 
l'ouverture  de  leur  école,  ils  mirent  sous  les  yeux  de  leurs  conci- 
toyens les  résultats  de  leurs  travaux  et  de  leurs  efforts  !  Ah  1  ce 
fut  une  date  glorieuse  pour  le  judaïsme  français  que  celle  du 
le'-  octobre  1819,  jour  de  la  première  distribution  des  prix  d'une 
école  Israélite,  quand  le  maire  de  la  ville  de  Metz,  chevalier  de 
l'ordre  royal  et  militaire  de  Saint-Louis,  se  leva  pour  distribuer,  au 
son  des  fanfares  de  la  garde,  des  prix  d'histoire  de  France  et  de 
géographie  de  France,  à  des  petits-enfants  de  porteurs  de  rouelles! 
Avec  quelle  fierté  naïve  le  rapporteur  Gerson  Lévy  vint  déclarer 
que  de  petits  Juifs  savaient  en  français  toute  l'histoire  de  la  race 
mérovingienne! 

En  même  temps,  les  autorités  du  département  admiraient  sur  les 
murs  de  la  salle  une  exposition  de  dessins  de  géométrie  et  d'orne- 


cil  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

ment.  Une  exposition  de  dessin  en  1819  et  dans  une  école  juive! 
Mais  en  1862,  dans  un  rapport  sur  l'enseignement  professionnel, 
un  ministre  du  second  Empire  se  plaint  de  ce  que  le  dessin  est  né- 
gligé dans  les  écoles  et  demande  d'énergiques  efforts  pour  dévelop- 
per dans  le  pays  l'éducation  artistique!  Vous  le  voyez,  nous  devan- 
cions notre  époque. 

Aujourd'hui  l'éducation  physique  tient  le  premier  rang  dans  les 
écoles.  Mais  les  exercices  du  corps  avaient  déjà  place  dans  nos 
écoles  juives,  et  dès  1822  l'école  de  Marseille  donnait  des  prix  de 
natation'.  Elle  donnait  même  un  prix  des  plus  curieux  et  qui 
montre  combien  le  Juif  est  sagace,  novateur  en  matière  pédago- 
gique. Je  trouve  dans  le  palmarès  de  1822  à  Marseille  un  prix  de 
belle  écriture  de  la  main  droite,  et  un  ^rix  de  belle  écriture  de  la 
main  gauche.  Il  y  a  quelques  mois,  une  de  mes  élèves  de  l'école 
Bischoflfsheim,  gauchère  de  naissance,  passait  les  examens  de 
l'Hôtel  de  Ville  et  recevait  les  plus  hautes  notes  en  écriture  et  en 
dessin.  Toute  la  commission  d'examen  admirait  ce  phénomène, 
qu'on  eût  trouvé  des  plus  ordinaires  en  1822  à  Marseille  !  Et  qu'on 
ne  dise  pas  qu'une  main  ne  s'instruit  qu'aux  dépens  de  l'autre  :  ce 
sont  les  mêmes  enfants  qui  remportent  les  prix! 

Je  ne  veux  pas  insister  outre  mesure  sur  les  règlements  de  ces 
premières  écoles -.  Ce  qu'il  faut  surtout  remarquer,  c'est  leur  pro- 
fonde sagesse.  Le  difficile,  quand  on  fait  des  réformes,  est  de  trou- 
ver le  juste  milieu.  Le  judaïsme  avait  alors,  comme  nos  partis  poli- 
tiques, son  extrême  droite  et  son  extrême  gauche.  Il  fallait  ména- 
ger nos  réactionnaires  et  nos  radicaux  (nous  n'avions  pas  d'anar- 
chistes). 

Dans  leur  ardeur  à  se  régénérer,  les  uns  voulaient  voir  le  fran- 
çais prendre  la  place  de  l'hébreu,  non  pas  seulement  à  l'école,  mais 
dans  la  synagogue.  Pour  faire  disparaître  toute  distinction  entre 
Juifs  et  Français,  une  brochure  de  l'époque,  écrite  avec  beaucoup 


*  On  enseignait  encore  la  sténographie  dans  cette  école. 

*  Ils  sont  le  fait  d'une  administration  prudente  et  paternelle.  Ils  défendent 
sévèrement  les  châtiments  corporels.  —  On  multiplie  les  prescriptions  hygié- 
niques :  défense  de  recevoir  un  enfant  à  l'école  après  une  maladie,  s'il  n'a  pas 
un  certificat  du  médecin.  —  Le  bulletin  de  vaccine  est  obli^ratoire. 


L'OEUVRE  SCOEAIHE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789  CllI 


de  verve  demandait,  mon  Dieu  !  une  chose  bien  simple  !  d'aller  au 
temple  le  dimanche  au  lieu  du  samedi. 

Mais  ces  prétentions  justifiaient  les  craintes  des  vieux  Juifs,  qui 
criaient  au  scandale,  à  l'impiété  parce  que  l'on  faisait  autre  chose  à 
l'école  que  du  Talmud  1  Ah  1  ce  furent  de  merveilleux  opportunistes 
que  les  Cerfbeer,  les  Avigdor,  les  Furtado,  les  Gerson  Lévy, 
les  Cahen,  les  Cologna,  les  Gradis,  les  Oulif,  les  Goudchaux  !  J'en 
passe  et  des  meilleurs. 

Ce  dont  je  les  louerai  encore  volontiers,  c'est  d'avoir  apporté 
dans  tous  ces  règlements,  bien  mieux  que  de  la  sagacité  et  de  la 
justesse,  une  rare  élévation  morale.  Je  n'en  veux  pour  preuve  que 
le  moyen  d'assurer  le  budget  et  de  faire  entrer  de  l'argent  dans  les 
éaisses.   J'ai  parlé  plus  haut  de  l'enthousiasme  :  créer  de  l'enthou- 
siasme est  chose  relativement  facile  ;  le  tout  est  de  le  faire  durer. 
Comment  obtenir  des  Juifs  qu'ils  donnent,  non  pas  une  fois,  mais 
encore,  mais  toujours,  pour  l'onivre  scolaire  ?  On  peut  s'adresser  à 
leur  vanité  et  l'on  décide,  par  exemple,  dans  le  Bas-Rhin,  que  les 
noms  des  donateurs  resteront   affichés  pendant  six  mois  dans  le 
lieu  le  plus  apparent  de  l'Ecole.  Cela  ne  suffit  pas.   Il  faut  autre 
chose  que  d'agir  sur  l'araour-propre  ;  il  faut  inculquer  le  sentiment 
du  devoir,  11  faut  faire  comprendre  que  désormais  on  n'est  bon  Israé- 
lite qu'autant  qu'on  est  bon  citoyen,  et  que,  pour  être  bon  citoyen 
il  faut  veiller  à  l'œuvre  scolaire.  On  décide,  à  Paris,  que  toutes  les 
offrandes  pour  les  écoles  seront  inscrites  avec  soin  dans  un  grand 
livre  ;  ce  livre  sera  apporté  dans  le  temple  à  toutes  les  grandes 
fêtes  ;  là,  le  Grand-Rabbin  lira  les  noms  sl  haute  voix  et  bénira 
tous  ceux  qu'il  aura  nommés.  N'y  a-t-il  pas  là  une  haute  leçon  de 
morale,  et  peut-on  faire  entendre  plus  clairement  que  s'instruire 
pour  le  pays  est  le  premier  devoir  du  Juif?  A  Bordeaux,  on  fait 
mieux  encore.  En  excitant  l'émulation  des  donateurs  on  imprime 
le  respect  et  la  reconnaissance  dans  le  cœur  des  enfants.  Et  l'on  ne 
trouvera  pas  souvent  dans  les  paperasses  administratives  un  détail 
aussi  touchant  : 

Ecole  Israélite  de  Bordeaux  :  art.  57  :  «  Tous  les  ans,  la  veille 
du  jeûne  de  l'expiation,  les  élèves  Israélites  de  la  septième  et  de 
la  huitième  classes  seront  conduits  par  le  maître  et  deux  moniteurs 


CIV  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

en  ordre  au  cimetière  pour  y  prier  sur  la  tombe  de  tous  ceux  qui 
auront  laissé  quelque  legs  en  faveur  de  Técole.  »  —  Tout  pour 
l'école  !  tout  par  l'école  I  c'était  bien  l'unique  devise  du  judaïsme! 
—  Dirai-je  maintenant  que  les  femmes  juives  ont  pris  part  à 
l'œuvre  de  régénération  et  qu'elles  ont  suivi  le  mouvement  ?  Ce  se- 
rait mal  les  connaître.  Elles  l'ont  précédé  sur  bien  des  points.  Et 
pourquoi,  lorsqu'il  s'agit  de  l'instruction,  n'auraient-elles  pas  été 
au  premier  rang  à  l'époque  de  liberté?  Elles  y  étaient  bien  à 
l'époque  de  misère  et  d'oppression. Permettez-moi  de  le  rappeler  en 
passant  :  alors  que  les  nobles  châtelaines  du  moyen-âge  venaient 
dans  les  tournois  décerner  des  prix  à  de  fiers  batailleurs,  les 
femmes  juives  donnaient  aussi  des  prix  à  leurs  coreligionnaires 
dédaignés.  Ce  sont  elles  qui  ouvraient  la  bourse  pour  loger,  nour- 
rir, vêtir  nos  pauvres  savants,  qui  étudiaient  dans  l'ombre  et  le 
mystère  !  Ce  sont  elles  qui  fondaient  des  imprimeries  et  faisaient 
publier  à  leurs  frais  les  travaux  de  ces  savants  !  Elle  avait  vrai- 
ment tort  cette  baronne  du  moyen-âge  qui,  ayant  mis  son  carrosse 
en  gage  chez  un  Juif,  refusait  de  le  reprendre  parce  que  la  femme  du 
Juif  avait  osé  s'asseoir  dedans.  Il  est  vrai  que  le  Juif,  tremblant 
pour  son  argent,  s'empressa  de  rendre  le  carrosse  à  la  seule  condi- 
tion de  recevoir  son  capital  sans  aucun  intérêt  !  C'est  ce  qu'avait 
prévu  et  désiré  la  baronne.  —  Mais  à  cette  époque  nos  plus  riches 
héritières  se  faisaient  gloire  d'épouser  le  plus  pauvre,  pourvu  qu'il 
fut  le  plus  savant.  On  cite  même  une  fille  d'Israël  qui,  s'étant  fian- 
cée, recula  son  mariage  pendant  douze  ans  jus(iu'à  ce  que  son  mari 
possédât  le  Talmud  a  fond.  Douze  ans  de  soupirs  sur  le  Talmud 
pour  mériter  celle  qu'on  aime!  Ah!  M"*^  de  Rambouillet  n'avait 
pas  trouvé  cela  avec  le  duc  de  Montausier  !  —  Si  les  femmes  juives 
étaient  si  ardentes  aux  choses  de  l'instruction,  que  ne  devaient-elles 
pas  faire  pour  seconder  leurs  maris  et  leurs  frères  dans  l'œuvre  de 
régénération  ? 

L'école  des  garçons  de  Metz  passe  pour  la  première  ouverte  en 
1818.  ^lais,  dès  1817,  une  jeune  femme  de  Bordeaux  faisait  don 
d'un  local  pour  y  installer  une  école  ;  elle  organisait,  enseignait, 
payait.  Les  dames  bordelaises  se  forment  en  comités  avant  les 
hommes,  et  c'est  à  leurs  seuls  efforts  qu'on  doit  la  création   d'une 


L'ŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789  CV 

école  de  garçons  de  soixante-dix  élèves.  —  Quant  aux  filles,  elles 
sont  plus  empressées  de  venir  à  l'école  que  les  garçons  ;  elles  tra- 
vaillent mieux.  A  Metz,  elles  font  si  bien  qu'on  est  obligé  d'ouvrir 
des  cours  supérieurs  pour  elles  à  l'école  primaire.  C'est  d'une  école 
de  filles  qu'un  inspecteur  non  Israélite  disait  dans  son  rapport  :  «  Je 
n'ai  jamais  vu  d'élèves  qui  écrivissent  mieux  le  français.  »  Mais 
c'est  à  Paris  surtout  que  les  femmes  juives  font  merveille.  Lisez  les 
budgets  d'alors  :  la  plus  grosse  partie  des  recettes  vient  des  quêtes. 
Et  ces  quêtes,  qui  va  s'en  charger'?  Ce  sont  les  dames,  qui  vont  de 
maison  en  maison,  retournant  une  deuxième  fois  là  où  l'on  a  refusé 
une  première  fois.  Dès  1821  le  consistoire  de  Paris  reconnaît  la 
nécessité  de  s'adjoindre  un  comité  de  dames  pour  l'école  des  gar- 
çons, notez-le.  —  On  parle  quelquefois  de  la  sécheresse  des  docu- 
ments administratifs.  Voici  un  arrêté  du  Consistoire  qui  est  du 
dernier  galant  :  il  s'agit  des  collectes  dont  le  soin  va  être  confié  aux 
femmes  :  «  Qui  pourrait,  dit  l'arrêté,  refuser  le  denier  de  la  veuve 
à  ce  sexe  si  intéressant  et  si  admirable?  Qui  pourrait  résister  aux 
charmes  persuasifs  de  ces  dames?»  Le  Consistoire  n'était  pas 
toujours  aussi  aimable.  Un  jour,  dans  leur  beau  zèle,  les  dames 
osèrent  demander  directement  de  l'argent  au  ministre,  oubliant  que 
le  Consistoire  avait  seul  mission  pour  correspondre  avec  le  gouver- 
nement. Messieurs  du  Consistoire  se  fâchèrent  tout  rouge  et  blâ- 
mèrent sévèrement  les  dames.  Elles  firent  une  réponse  des  plus 
spirituelles  (pouvait-il  en  être  autrement?),  et  l'entente  ne  tarda 
pas  à  se  rétablir,  comme  elle  se  rétablit  toujours  entre  gens  de  cœur 
travaillant  à  une  œuvre  commune.  Et  l'on  travaillait  vraiment 
bien!  Et  l'œuvre  portait  ses  fruits!  Dès  18'25 ',  le  préfet  de  la 
Seine  déclarait  que  nos  écoles  juives  pouvaient  servir  de  modèles 
aux  écoles  catholiques  !  Les  fils  des  parias  maudits  cités  comme 
modèles  !  11  n'avait  pas  fallu  cinq  ans  pour  dépasser  ceux  que  nous 
rêvions  à  peine  d'égaler  !  Ah  !  les  petits  vagabonds  juifs  avaient 
senti  l'étincelle  !  Ils  avaient  si  bien  travaillé  qu'en  1829  l'autorité 
supérieure  écrivait  à  Metz  pour  féliciter  l'administration  des  résul- 


'   Eu  1819  déjà  M.  Beugnol  rendait  justice  ù  nos  elTorts  et  parlait  des  heureux 
résultats  dus  ù  l'orgunisation  de  uos  écoles  (Happorl  sur  les  linances;. 


CVl  ACTES  ET  CONFERENCES 

tats  obtenus  !  Telle  était  en  1832  la  bonne  réputation  de  nos  écoles, 
que  le  roi  Louis-Philippe,  la  reine  Marie  -  Amélie  et  la  princesse 
Adélaïde  chargeaient  un  émineat  philanthrope  d'aller  à  la  distri- 
bution qui  devait  se  faire  à  Paris  et  de  remettre  en  leur  nom  trois 
prix  d'honneur  aux  iiarçons  et  trois  prix  d"honueur  aux  filles.  Vous 
jugez  de  l'émoi  de  la  communauté  à  cette  grosse  nouvelle!  Un  re- 
présentant du  roi  à  la  distribution  !  L'instituteur  se  mit  en  frais 
à  cette  occasion  et  dépensa  8  fr.  50  c.  pour  réparer  des  carreaux 
cassés  !  On  fut  si  content  de  part  et  d'autre  qu'on  accorda  au  nom 
du  souverain  huit  jours  de  grandes  vacances  aux  élèves  !  On  n'a- 
vait pas  de  vacances  à  cette  époque.  Enthousiasmés  de  la  bonne 
aubaine,  nos  petits  coreligionnaires  poussèrent  le  cri  de  :  «  Vive  le 
roi  !  »  Huit  jours  de  grandes  vacances  pour  le  cri  de  :  Vive  le  roi  1 
Ce  ne  serait  pas  payé  aujourd'hui  I 

Le  budget  du  comité  des  écoles  pour  1893  est  de  100,000  francs; 
la  population  juive  est  de  50,000  habitants  environ;  cela  fait  2  fr. 
par  tête.  Il  y  a  soixante-dix  ans,  pour  2,000  Juifs,  Metz  dépensait 
plus  de  4,000  francs  :  la  proportion  est  la  même.  Et  ailleurs,  en 
Alsace  et  en  Lorraine  surtout  on  fait  des  efforts  merveilleux,  hors 
de  toute  proportion  avec  les  ressources  des  communautés  pour  sou- 
tenir les  écoles.  Paris,  en  1820,  dépense  4,583  francs  pour  6,000 
juifs.  Crions-le  sur  tous  les  toits,  ce  chiffre  de  4,583  francs!  c'est 
363  francs  de  plus  que  ce  que  Napoléon  le  inscrivait  dans  ses  budgets 
pour  l'instruction  primaire  de  ses  130  départements  !  Voici  ce  que 
dit  Jules  Simon .  dans  son  curieux  livre  de  l'Ecole  :  «  Les  écoles 
primaires  restèrent  abandonnées  à  elles-mêmes.  On  trouve  quel- 
quefois dans  les  budgets  de  l'empire  une  somme  de  4,250  francs, 
accordée  au  noviciat  des  frères  des  Ecoles  chrétiennes.  C'est  tout 
ce  qui  parut  possible  ou  nécessaire  dans  un  temps  où  nous  étions 
maîtres  de  l'Europe.  » 

Puisque  j'ai  cité  ce  livre  de  Jules  Simon,  permettez-moi  de  m'en 
servir  encore.  Les  Juifs  pouvaient  être  fiers  de  leur  œuvre,  quoique 
incomplète,  et  la  France  pouvait  les  applaudir  quand  on  se  reporte 
au  pitoyable  état  de  rinstruction  primaire  de  notre  pays  en  1833. 
Nous  autres  juifs  nous  n'avons  pas  encore  d'écoles  partout  ;  les 
logements  sont  étroits  ;  la  situation  est  précaire  parfois  ;  il  y  a  telle 


L'ŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789        GVH 

communauté  où  une  correspondance  s'engage  entre  le  comité  et 
l'instituteur  pour  savoir  qui  achètera  les  balais.  —  Mais  l'état  des 
choses  n'est  pas  à  comparer  à  celui  que  je  vais  vous  lire  : 

ftTrès  peu  de  communes  ont  une  maison  d'école  ;  c'est  l'excep- 
tion. L'école  se  fait  dans  la  mairie,  dans  un  cabaret,  dans  un  corps 
de  garde,  dans  une  salle  de  danse,  sous  le  porche  d'une  église,  dans 
une  cave  où  l'on  n'entre  qu'en  rampant,  dans  une  sorte  de  bouge, 
sans  air  respirable,  hanté  par  les  reptiles.  L'obscurité  est  si  grande 
que  l'école  est  fermée  trente-neuf  jours  en  deux  mois.  —  Un  ins- 
tituteur loge  son  pourceau  dans  l'école.  Ailleurs  le  maître  et  ses 
élèves  s'installent  dans  l'écurie  pour  avoir  plus  chaud.  Un  inspec- 
teur trouve  une  école  dans  une  cave  où  il  surprend  des  buveurs 
attablés.  Un  autre  arrive  le  lendemain  des  couches  de  la  maîtresse; 
les  couches  ont  lieu  dans  la  salle  d'école  ;  le  marmot  est  là  et  toute 
la  famille  ;  on  y  fait  la  cuisine  ;  il  n'y  a  pas  d'autre  chambre  pour 
le  ménage.  » 

A  Romillj,  l'école  ne  coûte  que  15  sous  par  mois  ;  c'est  trop 
cher  ;  on  la  met  à  12  ;  encore  trop  cher  ;  à  10  sous,  à  8  sous  ;  ils 
n'iraient  pas  pour  rien  !  Dans  les  rapports  des  190  inspecteurs 
les  mots  «  pas  d'école  ou  mauvaise  école  »  reviennent  à  chaque 
page.  Le  conseil  municipal  de  Cognac  prend  une  délibération 
expresse  pour  déclarer  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  fonder  une  école, 
qu'elle  serait  inutile.  Il  y  a  pourtant  dans  la  commune  128  en- 
fants en  âge  d'aller  à  l'école.  A[.  Lorain,  qui  recueille  ces  renseigne- 
ments ,  remarque  avec  tristesse ,  parmi  les  signataires  de  cette 
délibération  le  nom  d'un  ancien  garde  des  sceaux  de  France  I 

Ah!  ce  n'est  pas  au  bas  d'un  pareil  document  qu'on  aurait  trouvé 
la  signature  d'un  de  ceux  qui  me  font  l'honneur  de  m'écouter,  de 
M.  Narcisse  Leven,  qui,  dans  une  séance  générale  de  l'Alliance 
Israélite,  prononçait  ces  belles  paroles  :  «  Les  écoles  !  Il  faut  en 
ouvrir  partout!  11  faut  en  couvrir  l'Orient  et  l'Afrique  !  » 

Nous  sommes  arrivés  en  1833  :  la  loi  Guizot  réorganise  l'instruc- 
tion primaire  en  France.  Petit  à  petit  nos  écoles  deviendront  com- 
munales et  rentreront  dans  le  régime  commun.  Je  crois  inutile  de 
continuer  leur  histoire.  Je  ferai  seulement  observer  (pie  nous 
n'abandonnons  pas  pour  cela  la  partie,  et  je  n'en  veux  pour  prouve 


GVIII  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

que  le  magnifique  groupe  de  nos  écoles  consistoriales  de  Paris  avec 
une  population  scolaire  de  plus  de  GOO  élèves,  un  personnel  des 
plus  vaillants  et  une  administration  d'élite  '. 

Demandons-nous  maintenant  ce  qu'on  a  fait  de  tous  ces  enfants 
que  l'on  envoyait  dans  les  écoles?  —  La  réforme  était  manquée  s'ils 
retournaient  dans  leurs  familles  reprendre  le  métier  paternel.  Il 
fallait  absolument  joindre  à  renseignement  primaire,  l'enseignement 
professionnel.  A  peine  les  écoles  se  sont-elles  ouvertes  que  des 
comités  de  patronage  vont  se  former  de  tous  côtés  pour  placer  nos 
petits  coreligionnaires  dans  les  ateliers.  C'est  toujours  Metz  qui 
donne  l'exemple,  et  dès  1823,  il  y  fonctionne  une  société  d'encou- 
ragement aux  arts  et  métiers  -.  Si  les  parents  sont  trop  pauvres 
pour  nourrir  les  enfants,  des  particuliers  charitables  fourniront  la 
table  et  le  couvert.  Cela  ne  suffit  pas.  Les  enfants  ne  sont  ni  sur- 
veillés ni  instruits. 

C'est  alors  que  s'ouvre  en  1825  cette  magnifique  école  de  travail 
de  Strasbourg  qui  sera  à  jamais  une  des  gloires  du  judaïsme  fran- 
çais. En  1842  se  fondait  l'école  des  arts  et  métiers  de  Mulhouse. 
Et  l'on  peut  demander  à  nos  détracteurs  qui  nous  accusent  de  ne 
pas  aimer  les  travaux  manuels,  combien  il  y  avait  d'écoles  profes- 
sionnelles en  1825  en  France  dans  les  plus  grandes  villes  !  Dans  le 
rapport  de  1862  que  je  viens  de  citer  on  se  plaint  du  manque 
d'écoles  professionnelles  en  France.  On  hésitait  alors,  on  tâtonnait; 
on  cherchait  les  moyens  de  faire  marcher  de  pair  l'enseignement 
manuel  et  l'enseignement  intellectuel.  Une  commission  se  formait 
au  ministère  du  commerce  en  1864  ;  elle  cherchait  des  documents 
de  toutes  parts,  et  elle  ne  dédaignait  pas  de  s'éclairer  auprès  de 

'  Nombre  de  communautés  continuent  à  accorder  une  subvention  aux  écoles 
et  à  compléter  le  traitement  des  maîtres.  —  Des  sociétés  sont  formées  pour 
habiller  les  enfants  pauvres,  pour  leur  fournir  des  livres,  des  cahiers,  pour  payer 
leurs  frais  d  études  dans  des  établissements  supérieurs  d'instruction.  —  La 
Société  des  jeunes  gens  Israélites  de  Colmar  fait  frapper  tous  les  ans  à  Paris  une 
médaille  d  or  et  une  médaille  d'argent  pjur  les  décerner  aux  meilleurs  élèves.  — 
Ailleurs  on  ouvre  des  couri  du  soir  pour  les  adulies. 

Les  jeunes  apprentis  soûl  réunis  solenaellemeut  tous  les  ans  pour  y  recevoir 
des  prix  et  entendre  de  touchantes  exhortations.  Des  outils  d'honneur  sont 
accordés  aux  plus  méritants. 


LCEUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789  CIX 

nos  écoles  juives  de  Strasbourg  et  de  Mulhouse  !  Et  le  président  de 
la  commission,  le  général  Morin,  membre  de  l'Institut,  directeur  du 
Conservatoire  des  arts  et  métiers,  écrivait  aux  administrateurs  de 
l'École  de  Strasbourg  :  «  Messieurs,  j'ai  reçu  et  lu  avec  beaucoup 
d'intérêt  les  renseignements  que  vous  avez  eu  l'obligeance  de  me 
transmettre  sur  les  résultats  de  l'école  des  arts  et  métiers  de 
Strasbourg.  Ces  succès,  qui  sous  une  administration  paternelle  et 
prudente  se  perpétuent  d'année  en  année,  prouvent  que  votre  so- 
ciété d'encouragement  au  travail  a  trouvé  et  réalisé  par  elle-même 
une  des  meilleures  solutions  de  la  difficile  question  de  l'apprentis- 
sage coordonné  avec  l'instruction  nécessaire  à  de  jeunes  ouvriers. 
Je  porterai  tous  les  détails  intéressants  que  j'ai  puisés  dans  ces 
documents  à  la  connaissance  de  la  commission  formée  auprès  du 
ministère  du  commerce  et  je  ne  doute  pas  qu'elle  n'apprécie  comme 
moi  et  la  générosité  des  sentiments  qui  dirigent  votre  société  et  les 
heureux  résultats  qu'elle  obtient.  » 

La  même  année,  un  homme,  dont  on  ne  récusera  pas  la  compé-* 
tence,  le  directeur  de  la  Ligue  de  l'Enseignement,  Jean  Macé, 
déclarait  que  les  écoles  juives  de  Strasbourg  et  de  Mulhouse 
avaient  le  mieux  résolu  en  France  la  question  de  l'enseignement 
professionnel. 

Et,  en  1867,  lorsque  s'ouvre  l'Exposition  universelle,  je  vois  men- 
tionnée, à  côté  des  écoles  nationales  d'Angers  et  de  Chàlons,  l'école 
Israélite  de  Strasbourg  ;  et,  dans  une  notice  sur  les  établissements  du 
Haut-Rhin,  destinée  à  la  même  Exposition,  je  trouve  cette  phrase 
sur  l'école  de  Mulhouse  :  «  A  coup  sur,  une  école  aussi  bien  conçue 
n'a  rien  de  confessionnel  et  présente  des  avantages  si  réels  pour 
l'apprentissage,  qu'il  est  à  désirer  de  les  voir  imiter  ailleurs  dans 
notre  département,  pour  les  enfants  des  diverses  communautés 
chrétiennes!  »  Voilà  ce  qu'avaient  fait  pour  l'enseignement  profes- 
sionnel ces  Juifs  d'Alsace  que  le  député  Rebwel  considérait  comme 
une  bande  d'usuriers  incapables  de  faire  autre  chose  et  dont  il  disait 
à  la  Constituante  :  «  Si  vous  émancipez  les  Juifs  d'Alsace,  je  ne 
réponds  pas  des  suites.  » 

Le  temps  me  manque  pour  entrer  dans  les  détails  d'organisation 
de  ces  écoles.  Il  est  touchant  surtout  de  voir  au  milieu  de  quelles 

ACT.    BT    CONF.  H 


ex  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

difficultés  elles  se  débattent.  Nous  qui  sommes  habitués  à  de  gros 
budgets  et  à  des  écoles  richement  dotées,  nous  pouvons  sourire  en 
voyant  les  souscriptions  qui  soutiennent  ces  établissements  :  il  y  en 
a  de  2  fr.,  de  1  fr.,  de  0  fr.  50  '.  Parmi  les  dons,  je  trouve  jusqu'à 
trois  livres  de  bougies  I  L'œuvre  semble  parfois  compromise  ;  mais 
elle  marche  toujours,  car  elle  est  dirigée  par  des  hommes  d'une  rare 
énergie.  Et,  bien  que  je  ne  puisse  citer  tout  le  monde,  je  ne  saurais 
passer  sous  silence  Louis  Ratisbonne,  de  Strasbourg,  et  Lazard 
Lantz,  de  Mulhouse  !  La  biographie  d'un  homme  comme  Lantz 
devrait  seule  suffire  pour  faire  tomber  les  préjugés  de  l'antisé- 
mitisme. 

Mais  laissons  l'éloge  et  posons  nettement  la  question  :  les  Juifs 
ont-ils  pris  le  goût  des  professions  manuelles?  En  1856,  le  comité 
de  patronage  de  Paris  (car  il  faut  bien  parler  un  peu  de  nos  ouvriers 
de  Paris)  plaçait  9  apprentis  ;  en  1857, 14  ;  en  1859,  27  ;  et  aujour- 
d'hui l'excellente  école  de  la  rue  des  Rosiers  compte,  tant  internes 
qu'externes,  121  apprentis!  Et  sait-on  l'éloge  que  font  de  ces  petits 
ouvriers  les  patrons,  presque  tous  non  Israélites  ?  Us  sont  d'accord 
pour  reconnaître,  quoi?  leur  goût?  leur  intelligence?  Bien  mieux 
que  cela  :  leur  moralité. 

On  dit  que  les  Juifs  ont  de  la  répugnance  pour  certaines  profes- 
sions, celles  qui  sont  trop  dangereuses.  11  serait  plus  vrai  de  dire 
qu'il  est  certains  métiers  plutôt  recherchés  que  d'autres.  Lesquels? 
Parcourez  les  comptes  rendus  de  Strasbourg,  de  Mulhouse,  de 
Paris,  et  vous  verrez  que  ce  sont  les  métiers  de  typographe,  litho- 
graphe, dessinateur,  graveur,  relieur,  c'est-à-dire  tout  ce  qui 
touche  à  l'industrie  du  livre!  Et  l'on  s'étonne  que  les  Juifs  réussis- 
sent 1  On  parle  de  leur  génie  pour  l'intrigue  !  Mais  non  !  Ils  ont  le 
génie  de  l'École  !  Un  jour,  ou  plutôt  un  soir,  M.  Duruy,  alors 
ministre  de  l'instruction  publique,  était  de  passage  à  Strasbourg.  Il 


'  11  est  intéressant  de  relever  parmi  les  souscripteurs  les  noms  de  l'évêque  de 
Strasbourg,  du  pasteur  protestant,  du  président  du  Consistoire  de  la  confusion 
d'Augsbourp,  etc.,  etc.  —  Différents  conseils  municipaux  votent  des  subven- 
tions. —  Les  conseils  généraux  du  Bas-Rbin  et  du  llaut-Rbin  accordent  des 
allocations  annuelles,  parfois  avec  les  cousidérants  les  plus  flatteurs  pour  ces 
établissements. 


L'OEUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789  CXI 

eut  la  curiosité  d'aller  surprendre  nos  petits  coreligionnaires  à 
l'École  de  Travail.  Ceux-ci  venaient  de  terminer  leur  repas  après 
leur  journée  d'atelier  et  se  mettaient  au  dessin.  M.  Duruy  observa 
longtemps  les  élèves  penchés  sur  leurs  cartons,  puis  il  s'écria,  comme 
frappé  d'admiration  :  «  Yous  ne  serez  pas  des  ouvriers,  vous  serez 
tous  des  contre -maîtres,  mes  enfants.  » 

Loin  de  démoraliser  le  pays,  les  Juifs  rivalisent  de  progrès  avec 
leurs  concitoyens.  En  veut-on  la  preuve?  Où  y  avait-il  le  plus  de 
Juifs  en  France  avant  1870?  En  Alsace  et  en  Lorraine.  Sur  neuf 
grands  rabbinats  il  y  en  avait  quaire  en  Alsace  et  Lorraine,  et  cinq 
dans  le  reste  de  la  France,  y  compris  Paris.  Jugez  delà  proportion. 
Eh  bien  1  les  écoles  juives  marchent  au  premier  rang  dans  cette 
Alsace  et  cette  Lorraine.  Et  chose  glorieuse  à  dire  !  cette  Alsace 
et  cette  Lorraine  marchent  elles-mêmes  au  premier  rang  dans  la 
France,  En  1862,  sur  cent  conscrits,  le  nombre  de  ceux  qui  ne 
savent  ni  lire  ni  écrire  varie  de  50  à  70  0/0  dans  le  Finistère,  la 
Haute-Vienne,  les  Landes,  la  Corrèze,  l'Ariège,  les  Côtes-du-Nord. 
La  Moselle  donne  6  0/0  ;  le  Haut-Rhin,  6  0/0,  et  le  Bas-Rhin,  4  0/0. 
En  1869,  le  Finistère  donne  encore  52  0/0;  la  Moselle,  2  1/2  0/0  ; 
le  Bas-Rhin,  1  1/2  0;0  '.  Lorsque  Jean  Macé  lance  ces  biblio- 
thèques populaires  qui  se  sont  tellement  multipliées  depuis,  où 
trouve-t-il  l'accueil  le  plus  empressé?  En  Alsace.  Quel  est  son 
auxiliaire  le  plus  précieux?  Un  Juif  des  plus  instruits,  qu'on  a  vu 
depuis  organiser  un  important  service  de  bibliothèque  à  Paris. 
Chose  curieuse  !  La  première  liste  des  souscripteurs  de  la  Ligue  de 
l'Enseignement  compte  pour  la  France  entière  4,792  noms.  Il  y  en 
a  401  dans  le  Haut-Rhin  seulement,  et  près  de  100  Juifs  ! 

Mais  je  n'ai  rien  dit  encore  de  l'apprentissage  des  filles  !  J'avoue 
qu'il  n'y  avait  pas  là  urgence  comme  pour  les  garçons.  Et  pendant 
longtemps,  et  surtout  dans  cette  Alsace  et  cette  Lorraine  si  éclai- 
rées, on  s'est  contenté  d'apprendre  à  nos  petites  coreligionnaires  au 
sortir  de  l'école  la  science  féminine  par  excellence,  la  science  du 
ménage  !  Ne  disons  pas  de  mal  de  nos  ménagères  juives  d'Alsace, 

'  C'est  dans  le  Bas-Rhin  que  fat  ouverte  la  première  école  normale  d'insti- 
tuteurs en  France.  Moyenne  des  élèves  admis:  100,  dont  10  juifs.  D'après  la 
population  ce  dernier  nombre  ne  devait  pas  dépasser  4  0/0. 


CXn  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

vrais  cordons  bleus  qui  ont  élevé  la  pâtisserie  à  son  dernier  degré 
de  perfection.  Lorsque  Henri  Heine  parle  de  la  joie  causée  en  Eu- 
rope par  la  révolution  de  1830,  il  songe  à  la  pâtisserie  juive  et  il 
écrit  :  «  On  sentait  comme  une  odeur  de  gâteaux  !  »  D'ailleurs, 
s'il  faut  en  croire  un  chroniqueur  des  plus  instruits,  fin  gourmet  à 
ses  heures,  nos  ménagères  juives  ont  doté  Thumanité  d'un  bienfait 
impayable  en  lui  révélant,  à  une  date  relativement  récente,  un 
grand  secret  :  l'art  d'engraisser  les  oies  et  d'apprêter  les  pâtés.  — 
«  La  haine  patiente  des  Juifs,  dit  ce  chroniqueur,  confisqua  cette 
jouissance  pendant  plus  de  douze  siècles  sur  la  chrétienté.  La  cul- 
ture du  foie  gras  était  un  arcane  dont  les  Juifs  de  Metz  et  de  Stras- 
bourg avaient  seuls  la  possession  ».  —  Sait-on  quand  fut  révélé  le 
secret?  Le  jour  où  l'Alsace  devint  terre  française  ! 

Ce  que  Strasbourg  et  Mulhouse  ont  fait  pour  les  garçons,  c'est 
Paris  qui  devait  avoir  l'honneur  de  le  faire  pour  les  filles.  Après  de 
longs  et  glorieux  efforts  des  comités  de  dames  pour  l'apprentissage 
des  filles,  ce  problème  fut  résolu  définitivement  par  la  création  de 
l'Ecole  Bischoffsheim,  d'une  part,  par  l'énergique  impulsion  donnée, 
de  l'autre,  à  la  maison  de  Neuillj.  Je  ne  reviendrai  pas  sur  ce 
qui  a  été  dit  à  ce  sujet  dans  la  Revue  des  Leux-Mondes  de  1887  par 
M.  Maxime  du  Camp.  Je  n'y  ajouterai  qu'un  mot.  En  1889,  le  jury 
de  l'Exposition  qui  a  prodigué  médailles  et  diplômes  à  l'Ecole  de 
Neuilly,  à  l'Ecole  du  boulevard  Bourdon,  à  l'École  de  la  rue  des 
Rosiers,  à  l'Orphelinat  Rothschild,  n'a-t-il  pas  rendu  justice  aux 
efforts  du  Juif  en  faveur  de  l'instruction?  Cette  Exposition  a 
constaté  aux  yeux  du  monde  entier  le  relèvement  de  la  patrie.  Nous 
aussi  nous  avons  fait  voir  à  cette  occasion  nos  écoles  qui  brillaient 
au  premier  rang  et  nous  avons  pu  dire,  comme  la  Cornélie  antique  : 
«  Voilà  nos  trésors  !  » 

Et  ces  écoles  dont  je  parle  s'ouvrent  libéralement  à  tous  les  vi- 
siteurs, mettent  sous  les  yeux  de  tous  leurs  programmes  et  leurs 
méthodes.  On  dit  que  les  Juifs  ne  travaillent  que  pour  eux  et  entre 
eux.  Sans  aller  bien  loin,  je  pourrai  citer,  à  preuve  du  contraire, 
l'Ecole  sœur  de  l'Ecole  Bischoffsheim,  l'orphelinat  Jules  Béer,  de 
Louveciennes,  excellente  école  agricole  destinée  aux  non  Israélites. 
Mais  prenons  nos  écoles  juives  :  elles  comptent  toutes  parmi  leurs 


L'ŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789        CXHI 

professeurs  des  catholiques  et  des  protestants.  Car,  le  Juif  est  tolé- 
rant et  libéral  dans  son  enseignement.  Et  je  ne  sais  pas  de  plus  bel 
exemple  de  tolérance  que  celui  du  séminaire  israélite  de  Paris,  qui, 
pendant  de  longues  années,  confia  l'enseignement  de  la  philosophie 
à  un  non  israélite.  Aujourd'hui  encore,  c'est  un  non  israélite  qui 
enseigne  l'histoire  :  l'histoire  et  la  philosophie,  ce  sont  peut-être  les 
deux  branches  les  plus  hautes  de  l'enseignement.  On  ne  dira  pas  que 
nos  jeunes  rabbins,  instruits  par  des  concitoyens  d'un  autre  culte, 
apprennent  à  mépriser  ce  qui  n'est  pas  juif.  Tout  ce  que  nous  disons 
et  ce  que  nous  écrivons  peut  être  répété  partout.  En  1885,  un  pro- 
fesseur israélite  du  Collège  de  France,  le  regretté  M.  Franck,  fai- 
sait une  leçon  d'ouverture,  qui  fut  reproduite  par  le  Journal  des 
Débats.  Elle  contenait  de  si  belles  pensées  sur  la  religion  qu'elle  fut 
lue  à  haute  voix  en  plein  réfectoire,  où  cela  ?  Au  séminaire  israé- 
lite? Non.  Au  collège  Albert-le-Grand,  à  Arcueil.  Et  l'abbé  Jour- 
dan,   directeur  de  l'Ecole,  écrivait  :   «  Je  n'ai  pas  l'honneur  de 
connaître  M.  Franck,  mais  j'éprouve  le  besoin  de  le  remercier  de 
sa  leçon  d'ouverture.  Ce  discours,  lu  au  réfectoire  devant  tous  nos 
maîtres,  les  a  frappés  par  l'élévation  des  sentiments  et  le  courage 
des  affirmations.  Plaise  à  Dieu  qu'il  dépose  dans  l'âme  de  la  jeu- 
nesse les  germes  d'une  vie  nouvelle  en  ravivant  les  croyances  reli- 
gieuses et  spirituelles  qui  feront  le  salut  et  la  grandeur  de  notre 
pays.  »  Et  de  ce  même  discours  on  retrouve  des  extraits  dans  les 
mandements  des  évêques  de  Nîmes  et  de  Nancy.  Et  dire  qu'il  y  a 
des  gens  qui  nous  accusent  de  vouloir  fermer  les  églises  et  de  tra- 
vailler à  la  ruine  de  notre  pays  ! 

Voici  comment  nous  y  travaillons  :  en  1810,  la  France  était 
vaincue  par  l'Allemagne.  On  se  souvint  aussitôt  que  la  Prusse 
écrasée  à  léna  ne  s'était  relevée  que  par  les  écoles.  On  se  mit  aussi- 
tôt à  l'œuvre  et  l'on  reconnut  que  notre  système  d'enseignement 
était  défectueux  et  avait  besoin  d'être  réformé.  Qui  fut  un  des  pre  - 
miers  à  indiquer  le  remède?  Ce  fut  un  Juif,  Michel  Bréal,  dans  son 
livre  :  Quelques  mots  sur  l' Insiruction  publique,  paru  en  1870. 

Mais  parmi  nos  lois  de  l'enseignement  moderne,  quelle  est  la 
plus  vantée  à  l'étranger,  la  plus  admirée,  la  plus  imitée?  Quelle  est 
celle  qui  a  le  plus  appelé  l'attention  de  tous  les  pédagogues  d'Italie, 


CXIV  ACTES  ET  COiNFERENCES 

d'Allemagne,  d'Angleterre,  de  Hongrie?  C'est  la  loi  sur  l'enseigne- 
ment secondaire  des  jeunes  filles,  si  bien  due  à  l'initiative  d'un  Juif 
qu'elle  en  porte  le  nom  :  on  dit  :  «  la  loi  Camille  Sée  ».  Un  sénateur 
italien,  le  profefseur  Pacchiotti,  publie  un  ouvrage  en  1885  et  de- 
mande que  l'on  crée  en  Italie  des  lycées  déjeunes  filles  analogues  à 
ceux  que  la  loi  C.  Sée  a  institués  en  France.  Le  D""  ^\"ychgram, 
professeur  à  l'Ecole  supérieure  des  filles  de  Leipzig,  déclare  que 
l'enseignement  des  jeunes  filles  organisé  par  la  loi  C.  Sée  aura  une 
influence  capitale  sur  le  développement  et  la  force  morale  de  la 
nation.  Enfin,  disons-le  bien  haut,  un  homme  d'Etat  anglais, 
jurisconsulte  éminent,  qui  a  été  membre  du  Parlement,  juge  du  banc 
de  la  Reine  et,  plus  tard,  membre  du  Conseil  privé,  a  dit  de  cette  loi 
proposée  par  un  Juif  :  «  Je  n'y  vois  qu'un  inconvénient  :  bien 
appliquée,  elle  rendrait  la  France  républicaine  trop  puissante  en 
Europe  !  »  Acceptons-en  l'augure  *  1 

La  loi  C.  Sée  voilà  pour  le  gouvernement.  Mais  ne  doit-on  rien  à 
l'initiative  privée?  Il  y  a  à  Paris  un  excellent  lycée  déjeunes  filles, 
dû  à  cette  initiative  privée  et  qui  a  rendu  les  plus  précieux  services  : 
c'est  le  collège  Sévigné.  Qui  en  fut  un  des  promoteurs,  qui  en  fut, 
si  je  peux  dire  la  cheville  ouvrière?  C'est  un  des  nôtres,  dont  nous 
avons  tous  déploré  la  mort  prématurée,  le  vaillant  et  regretté 
M.  Sacki  Kann. 

Ces  créations  pour  l'enseignement  secondaire  des  filles  se  font 
remarquer  par  leur  caractère  essentiellement  laïque,  laïque  mais 
non  pas  antireligieux.  Et  je  ne  saurais  mieux  faire  que  de  rappeler 
à  ce  propos  le  remarquable  rapport  sur  l'enseignement  des  filles  pré- 

*  On  lit  encore  dans  Jules  Simon  :  «  On  s'est  enfui  préoccupé  sérieusement 
de  l'éducation  des  filles,  de  ce  grand  intérêt  si  maladroitement  et  si  odieusement 
méconnu  pendant  longtemps.  M.  Camille  Sée,  qui  s'est  fait  le  promoteur  de 
1  enseignement  secondaire  des  filles,  a  certainement  rendu  un  grand  service  à 
noire  pays.  Le  gouvernement  et  la  Chambre  ont  bien  fait  de  le  suivre  dans  cette 
loi.  »  Rappelons  que  M.  Sée  consacre  à  son  œuvre  une  publication  périodique 
des  plus  intéressantes  :  La  Revue  de  l'Enseignement  secondaire  des  filles.  On  y 
trouvera  les  meilleurs  matériaux  pour  faire  l'historique  de  l'œuvre  et  l'apprécier 
à  sa  juste  valeur.  On  y  trouve  encore  des  devoirs  corrigés  par  les  meilleurs 
maîtres,  des  analyses  intéressantes  d'ouvrages  anciens  ou  nouveaux.  Rien  n'y 
est  négligé  pour  rendre  service  aux  jeunes  filles  qui  fréquentent  les  lycées  ou 
autres  établissements  d'instruction,  et  au  personnel  enseignant. 


L'ŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789         CXV 

sente  en  1879  par  un  des  nôtres  à  la  conférence  Mole  Tocqueville. 
«  Il  faudra  éviter,  dit  fort  bien  M.  Théodore  Reinach  (car  c'est  de 
lui  qu'il  s'agit),  jusqu'à  l'apparence  de  donner  à  l'enseignement  laïque 
un  caractère  antireligieux  qui  ne  lui  conviendrait  nullement,  »  Quant 
à  la  nécessité  d'élever  le  cœur  et  l'esprit  de  la  femme,  M.  Reinach 
la  justifie  par  des  arguments  dont  quelques-uns  sont  empruntés  d'une 
façon  heureuse  et  piquante  à  l'évêque  Dupanloup  ! 

Mais  je  n'ai  pas  fini  avec  l'enseignement  secondaire  des  filles! 
Avant  ce  grand  mouvement  de  nos  jours,  qui  nous  appartient  en 
grande  partie,  un  effort  avait  été  fait  en  1836,  et  M.  Gréard  en 
parle  longuement  et  avec  admiration  dans  un  rapport  de  1882. 
Est-ce  qu'il  s'agissait  encore  d'un  Juif  ?  Oui  !  Ce  sont  les  fameux 
cours  d'Alvarès  Lévi,  M,  Gréard  rapporte  qu'Alvarès  Lévi  ayant 
reçu  la  croix,  toutes  les  mères  qui  lui  confiaient  leurs  jeunes  filles 
s'étaient  écriées  :  «  Nous  sommes  décorées  1  » 

Morale  et  pédagogie!  voilà  bien  le  Juifl  Voilà  qui  caractérise  en- 
core la  littérature  féminine  juive.  Voilà  aussi  d'où  jaillira  l'inspi- 
ration poétique  1  L'Ecole  !  mais  c'est  le  fond  même  du  drame,  Les 
Ouvriers,  d'E.  Manuel!  Ses  plus  belles  poésies  en  sont  imprégnées  ! 
Et  c'est  bien  un  des  nôtres  qui  devait  traduire  en  vers  cette  grande 
vérité  : 

Au  mal  comme  au  carcan  l'ignorant  est  rive'  ! 
Mais  quiconque  sait  lire  est  un  homme  sauve'  ! 

Mesdames  et  Messieurs,  si  nous  avons  été  battus  par  l'Allemagne 
en  1870,  il  y  a  une  revanche  que  nous  avons  déjà  su  prendre  :  les 
savants  allemands  ont  cessé  de  nous  regarder  de  leur  haut.  Rarement 
les  études  philologiques  ont  été  cultivées  avec  plus  de  succès  ; 
rarement  l'érudition  française  a  brillé  d'un  plus  vif  éclat  que  de  nos 
jours.  C'est  là  une  victoire  morale  où  les  Juifs  ont  leur  part,  leur 
large  part.  Ah  !  j'en  aurais  long  à  dire  sur  le  rang  que  nous  occu- 
pons dans  les  lettres,  dans  les  sciences,  dans  les  arts  et  dans  toutes 
les  carrières  libérales  !  C'est  notre  orgueil  que  cette  jeunesse  Israé- 
lite qui  se  presse  sur  les  bancs  des  établissements  scolaires  et  qui 
n'ambitionne  d'autre  gloire  que  la  gloire  universitaire  !  Le  Juif,  si 
on  veut  l'apprécier  à  sa  juste  valeur,  il  faut  le  chercher  non  dans  la 


CXVI  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

presse  quotidienne  ou  dans  le  bulletin  financier,  mais  dans  les  pal- 
marès des  1  vcées  et  collèges,  lycées  de  garçons  et  de  filles  I  Car  celles- 
ci  ne  sont  pas  restées  en  arrière  et  je  sais  nombre  de  filles  d'Israël 
dont  la  seule  dot,  et  la  plus  belle  dot,  est  le  brevet  supérieur,  le 
diplôme  de  licence  ou  d'agrégation.  Un  ancien  député  de  1848  s'ex- 
tasiait, il  y  a  quelques  années,  devant  les  efforts  des  Juifs  vers  toutes 
les  cariMères  libérales.  Et,  comme  il  en  exprimait  son  admiration  à 
l'un  des  nôtres,  celui-ci  lui  répondit  avec  raison  :  «  Les  Juifs  ont 
renoncé  au  trafic  et  à  l'usure  du  jour  où  la  société  leur  a  ouvert  ses 
écoles.  »  Mais  déjà,  en  1860,  on  pouvait  nous  rendre  cet  hommage; 
en  1860,  déjà  on  citait,  sur  4,000  élèves  reçus  à  l'Ecole  polytech- 
nique en  trente  ans,  plus  de  100  Juifs,  c'est-à-dire  1  sur  40,  alors 
que  la  population  juive,  par  rapport  à  la  population  totale,  est  de 
1  sur  400!  Mais  déjà  en  1830,  M.  Augustin  Périer,  à  la  Chambre 
des  Députés,  parlait  du  rang  honorable  tenu  par  les  Juifs  dans  les 
lettres  et  les  arts,  et  de  leurs  efforts  vers  les  carrières  libérales  • . 
En  1830,  déjà  M.  Périer  et  l'amiral  Verhuell  (un  antisémite,  celui-ci) 
reconnaissaient  les  services  rendus  par  les  Juifs  dans  l'armée.  C'est 
avec  intention  que  je  n'aborde  pas  aujourd'hui  cette  dernière  ques- 
tion qui  m'entraînerait  trop  loin. 

Ce  n'est  pas  non  plus  cette  question  qu'avait  en  vue  ce  vaillant 
Français  de  nos  jours,  non  Israélite,  qui  disait  que  si  la  France  à 
beaucoup  fait  pour  les  juifs,  la  dette  a  été  payée.  Et  celui  qui  s'ex- 
primait ainsi  avait  encore  en  vue  une  œuvre  scolaire,  que  j'ai  tenu 
à  réserver  pour  la  dernière,  la  plus  féconde  de  toutes,  la  plus  belle 
assurément  et  qui  nous  fait  le  plus  d'honneur  :  l'œuvre  scolaire  de 

'  Séance  du  2  décembre  1830  :  «  On  doit  reconiiaîlre  qu'ils  se  montrent  de 
plus  en  plus  dignes  du  nom  français.  L'armée,  le  barreau,  les  lettres  et  le  com- 
merce comptent  des  israélites  distingués.  Les  écoles  élémentaires  se  multiplient 
parmi  eux >  Voir  encore  (séance  du  ?0  décembre^  M.  André,  du  Haut- 
Rhin  :  •  On  voit  les  juifs  se  livrer  à  diverses  professions  de  tailleurs,  forgerons, 
imprimeurs,  graveurs,  horlogers  et  à  d'autres  qu'il  serait  trop  loug  d'énumérer. 
On  en  remarque  qui  sont  cultivateurs.  Vous  distinguez  des  professeurs  de  lan- 
gues anciennes,  de  mathématiques,  des  littératures,  des  poètes,  des  auteurs  de 
tragédies,  de  comédies  et  d'opéras,  des  architectes,  des  peintres,  des  ingé- 
nieurs     Ainsi   les   Juifs   embrassent  aujourd'hui  plus  ou  moins  laigement 

toutes  les  professions  auxquelles  ils  étaient  restés  généralement  étrangers  avant 
1789.  • 


L^UVBE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789       CXVIl 

l'Alliance  Israélite  !  Celle-ci  est  comme  le  résumé  de  toutes  les 
autres  :  elle  comprend  à  la  fois  l'enseignement  primaire,  l'ensei- 
gnement professionnel  et  l'enseignement  agricole.  En  ce  moment 
s'ouvre  l'Exposition  de  Chicago  :  on  y  verra  une  chose  assez  cu- 
rieuse, les  travaux  d'une  école  agricole  Juive  :  c'est  JafFa  qui  a 
envoyé  ses  produits!  Et  je  regrette  de  ne  pouvoir  ici,  à  titre  de 
documents  officiels,  faire  circuler  dans  la  salle  quelques  plateaux 
chargés  de  bonnes  bouteilles  de  vin  de  Jaffa  !  C'eût  été  la  plus 
éloquente  des  statistiques,  surtout  par  cette  température.  Ce  qu'on 
verra  encore  à  Chicago,  c'est  la  plus  belle  carte  de  géographie  que 
j'aie  jamais  vue,  carte  delà  lumière  et  de  la  civilisation  :  l'Asie  et 
l'Afrique  où  un  certain  nombre  de  villes  se  détache  en  gros  carac- 
tères rouges  :  c'est  là  que  l'Alliance  a  ses  écoles.  Ah  !  vraiment 
l'inspecteur  général  Foncin  avait  bien  raison  de  dire  que  l'Alliance 
israélite  a  payé  la  dette  !  M.  Du  Camp  avait  bien  raison  quand  il 
demandait  au  gouvernement  français  d'accorder  le  passage  gratuit 
aux  filles  d'Israël  qui  viennent  à  Paris  «  pour  s'imprégner  de  nos 
idées  et  les  répandre  autour  de  leurs  berceaux,  »  Car  ce  que 
M.  Du  Camp  admire  surtout  dans  l'oeuvre  de  l'Alliance,  c'est  ce 
qu'elle  fait  pour  le  relèvement  moral  de  la  femme  en  Orient.  Ce 
que  M.  Du  Camp  aurait  pu  ajouter,  c'est  le  nombre  des  élèves  non 
Israélites  reçus  dans  ces  écoles  :  il  est  de  254  !  Détail  curieux  1 
le  patriarche  de  Constantinople  envoie  son  neveu  à  l'école  israé- 
lite de  Balata,  Nul   n'est  exclu  ;  toutes  les  religions  s'y  mêlent  : 

Catholiques  romains 86 

Arméniens 18 

Musulmans 22 

Protestants 22 

Grecs  orthodoxes 106 

Devant  de  tels  chiffres  et  de  tels  rés  ultats  il  faut  changer  les 
mots  :  ce  n'est  pas  l'alliance  israélite  universelle,  c'est  l'alliance 
universelle  !  Et  cela  est  si  vrai  que  sa  première  œuvre,  dès  sa 
création  en  1860  a  été  de  recueillir  des  souscriptions,  non  pas 
pour  les  Juifs,  mais  pour  les  Chrétiens,  les  Chrétiens  de  Syrie. 
Ce  fut  même  un  spectacle  des  plus  curieux  que  cette  croisade  du 


CXVill  ACTES  ET  CONFÉRENCES 

XIX*  siècle  contre  le  fanatisme  musulman  et  en  faveur  des  adora- 
teurs du  Christ  devancée  par  l'appel  de  deux  Juifs  :  Crémieux  en 
France  et  Moses  Montefiore  en  Angleterre  1  Voilà  comme  nous 
nous  vengions  des  persécutions  du  moyen  âge  !  Une  Société  de 
1860,  dont  le  nom  seul  indique  le  but  :  «  l'Alliance  chrétienne 
universelle  »  remerciait  chaleureusement  M.  Crémieux  et  faisait 
les  voeux  les  plus  empressés  pour  l'Alliance  Israélite,  dont  la  devise 
allait  être  comme  celle  du  judaïsme  français  lui-même  :  tout  pour 
l'Ecole,  tout  par  l'Ecole  '. 

Cette  devise  n'est  pas  nouvelle  ;  on  la  trouve  déjà  dans  le  Tal- 
mud  et  sous  une  forme  des  plus  originales  :  «  Un  jour  des  rabbins 
vinrent  dans  une  ville  où  il  n'y  avait  pas  d'écoles.  Ils  demandèrent 
à  voir  les  défenseurs  de  la  ville,  on  les  conduisit  devant  les  soldats. 
Sur  quoi  ils  répondirent  que  les  gardiens  de  la  cité  n'étaient  pas  les 
soldats,  mais  les  instituteurs,  et  que  la  ville,  étant  sans  écoles,  se 
trouvait,  par  suite,  sans  défense  *.   » 

C'est  là  le  seul  point,  Mesdames  et  Messieurs,  sur  lequel  les 
Juifs  en  se  régénérant  ne  pouvaient  pas,  ne  devaient  pas  rompre 
avec  le  passé  :  leur  amour  même  des  choses  de  l'instruction. 
—  Et  au  moment  de  clore  ma  conférence  je  ne  peux  m'empêcher 
d'exprimer  un  regret  :  c'est  de  n'avoir  rien  dit  de  la  part  même  que 
le  Rabbinat  français  a  prise  à  l'œuvre  de  régénération.  Aujour- 
d'hui plus  que  jamais  la  prédication  s'ajoute  heureusement  à 
l'œuvre  scolaire.  Plus  que  jamais  Téminent  chef  de  la  Synagogue 

*  Ce  que  j'ai  dit  des  Juifs  français  peut  être  répété  des  Juifs  d'Algérie.  On 
retrouve  les  mêmes  elTjrts  et  les  mêmes  progrès.  Il  y  a  en  Algérie  1  Juif  sur 
100  habitants.  Dans  les  écoles  primaires  on  compte  1  juif  sur  4  élèves  ;  dans  les 
écoles  maternelles  de  même  ;  les  cours  d'adultes  du  soir  donnent  1  Juif  sur 
5  auditeurs. 

*  Rieu  de  plus  curieux  que  l'enseignement  de  la  loi  chez  nos  ancêtres  et  les 
prescriptions  talmudiques  à  cet  égard.  Il  est  bien  des  recommandations  aux 
maîtres  que  ne  désavoueraient  pas  nos  meilleurs  pédagogues  d'aujourd'hui  :  Pas 
de  classes  trop  nombreuses  ;  le  nombre  des  élèves  ne  doit  pas  dépasser  23  pour  un 
seul  professeur.  —  Pas  de  punitions  corporelles  ou  le  moins  possible  ;  il  faut 
caresser  des  deux  mains  et  châtier  d'une  seule.  —  Lo  maître  doit  être  de  préfé- 
rence un  père  de  famille.  —  Il  doit  préparer  sa  leçon  avec  soin  et  prévoir  autant 
que  possible  les  explications  qui  pourront  lui  être  demandées.  A  la  maison, 
l'enfant  répétera  avec  son  père  ou  son  grand-père  la  leçoa  enseignée  par  le 
maître,  etc. 


L'ŒUVRE  SCOLAIRE  DES  JUIFS  FRANÇAIS  DEPUIS  1789        CXIX 

française,  si  vaillamment  secondé,  nous  montre  que  l'Ecole  et  la 
Sj'nagogue  ou  la  Schulil  méritent  bien  de  s'appeler  du  même  nom. 
Je  me  propose  de  revenir  sur  ce  sujet  ;  c'est  ma  seule  excuse  si  je 
n'en  dis  rien  ce  soir. 

Je  terminerai  donc  ma  conférence  en  rappelant  que  déclarés 
citoyens  français  par  décret  de  la  Constituante  les  Juifs  le  sont 
encore  devenus  : 

Parce  qu'ils  ont  fait  de  la  langue  française  leur  langue  na- 
tionale ; 

Parce  qu'ils  ont  conformé  les  programmes  de  leurs  écoles  à 
tous  les  besoins  de  la  patrie  et  à  toutes  les  exigences  des  temps 
modernes  ; 

Parce  qu'ils  ont  pris  la  part  la  plus  active  au  relèvement  moral 
et  intellectuel  de  leur  pays  et  qu'ils  lui  ont  donné  le  meilleur  de 
leur  cœur  et  de  leur  esprit  ; 

Enfin,  parce  que  Juifs  et  Français  ont  ce  grand  caractère 
commun  : 

Us  sont  les  champions  infatigables  de  la  civilisation. 


PROCÈS-VERBADX  DES  SÉANCES  DU  CONSEIL 


SÉANCE  DQ  27  AVRIL  1893. 
Présidence  de  M.  Hartwig  Derenbourg,  préside/if. 

M.  le  Président  annonce  que  la  conférence  de  M.  Maurice  Bloch 
aura  lieu  le  samedi  6  mai.  Le  sujet  en  sera  :  L Œuvre  scolaire  des 
Juifs  français  depuis  1789. 

M.  René  Worms  parlera  à  la  prochaine  Assemblée  générale  sur 
Spinoza. 

Le  Conseil  décide  d'envoyer  une  adresse  à  M.  le  professeur 
Steinthal  à  l'occasion  du  soixante-dixième  anniversaire  de  sa  nais- 
sance. 


SÉANCE  DU  22  JUIN  1893. 

Présidence  de  M.  Hartnvig  Derenbourg,  président. 

M.  le  Président  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  Steinthal,  qui 
remercie  la  Société  des  Études  juives  de  l'adresse  qu'elle  lui  a  fait 
parvenir. 

M.  Lucien  Lazard  déclare  qu'il  se  propose  de  faire  une  confé- 
rence sur  la  Légende  de  l'hostie  de  la  rue  Billetfes,  quand  il  aura 
réuni  tous  les  matériaux  nécessaires,  entre  autres,  toutes  les  repro- 
ductions figurées  sur  les  vitraux  d'église. 

Sont  reçus  membres  de  la  Société  des  Etudes  juives  : 

MM.  le  grand-rabbin  Kayserlixg,  de  Budapest,  présenté  par 
MM.  Zadoc  Kahn,  grand-rabbin,  et  Israël  Lévi  ;  Paul 
DB  KoKOWTSOFF,  de  Saint  -  Pétersbourg ,  présenté  par 
MM.  H.  Derenbourg  et  Oppert. 

Les  Secrétaires  : 
Albert  Cahen, 
Maurice  Vernes. 

VERSAILLES,  CERF  ET  c'',  IMPRIMEURS,  RUE  DUPLESSIS,  59. 


MCHERCHES  GÉOGRAPHIQUES 

SUR  LA  PALESTINE 


I 

LA    FRONTIÈRE    SEPTENTRIONALE    DE    LA    PALESTINE. 

Invarialiiliié  de  la  fronlière  sepientrioriale  du  pays  d' Israël. 

On  est  loin,  jusqu'ici,  d'être  fixé  sur  les  limites  à  assigner  au 
territoire  ocaupé  par  les  Hébreux  au  temps  de  la  conquête,  et, 
en  particulier,  sur  le  tracé  de  la  frontière  septentrionale.  Cette 
dernière  délimitation  est  enveloppée  d'une  telle  obscurité,  que 
M.  Neubauer,  dans  sa  Géographie  du  Tainiud\  a  cru  devoir 
distinguer  trois  frontières  : 

1°  Frontières  imaginaires,  promises  par  la  Bible,  mais  n'ayant 
jamais  été  conquises;  —  au  nord,  le  Ilor  Ilahar  (l'Amanus  du 
Targoum  de  Jérusalem);  vers  l'est,  le  Naliar  (le  fleuve,  l'Eu- 
p h rate) ; 

2°  Frontières  à  l'époque  du  premier  Temple  ;  —  le  territoire 
occupé  s'étendait  au-delà  de  Kezib  (Ecdippa,  Zib),  vers  la  mon- 
tagne Amanus,  au  nord,  et  vers  l'Euphrate,  à  l'est; 

3°  Frontières  après  la  captivité;  —  le  territoire  s'étendait  au 
nord  jusqu'à  Kezib. 

Il  semble  diflicile  de  se  ranger  à  cette  opinion,  lorsque  l'on 
compare  le  tracé  du  livre  des  Nombres  (ch.  xxxiv)  à  celui  du 
prophète  Ezéchiel  (ch.  xlvii). 

Premier  tracé  . 

«  Voici  maintenant  quelle  sera  la  frontière  septentrionale  :  de  la 
grande  mer  vous  tracerez  une  borne  jusqu'au  mont  lier  ;  de  là,  vous 

'  Neubauer,  La  Géographie  du  Talmiid,  p.  5. 

T.  XXVI,  N"  31.  1 


2  RKVL'K  D1-:S  ÉTUDKS  JUIVES 

marquerez  une  borne  jusqu'à  l'entrée  de  Ilamalh  ;  la  frontière  du 
nord  ira  à  Cédad,  poussera  jusqu'à  Zifron  pour  s'arrêter  à  Haçar- 
Enan.  Telle  sera  votre  limite  septentrionale.  » 

Deuxième  tracé  : 

«  Voici  la  frontière  du  pays,  du  côté  du  nord;  à  partir  de  la  grande 
mer,  le  chemin  de  Hethlon  pour  aller  à  Cédad,  Hamath,  Berotha, 
Sibraïm,  entre  la  frontière  de  Damas  et  la  frontière  de  Ilamath  ; 
Hacér-Hatthichon  (cour  du  milieu),  qui  est  sur  la  frontière  du  Hau- 
ran.  Voici  donc  la  frontière  jusqu'à  la  mer  :  Haçar-Enon  (cour  des 
sources),  la  frontière  de  Damas,  puis,  en  allant  au  nord,  la  frontière 
de  Hamath.  C'est  là  la  côte  du  nord.  » 

Malgré  le  manque  de  netteté  qui  caractérise  ces  descriptions, 
on  voit  tout  de  suite  que  les  deux  tracés  ont  trois  points  communs  : 
Cédad,  Zii'ron  (Sibraïm),  Haçar-Enan.  Les  textes  bibliques  per- 
mettent donc  de  conclure,  contrairement  à  l'assertion  de  M.  Neu- 
bauer,  qu'aucune  modification  importante  n'a  été  apportée  au 
tracé  de  la  frontière  septentrionale  de  la  conquête  à  l'époque  des 
Prophètes. 

Rien,  d'ailleurs,  ne  porte  à  croire  que  les  limites  du  territoire 
hébreu  aient  été  déplacées  dans  la  période  historique  qui  suivit  la 
reconstruction  du  Temple. 

Point  où  la  frontière  partait  de  la  cote. 

Au  temps  des  Macchabées,  la  frontière  partait  de  l'échelle 
des  Tyriens  :  il  est  dit,  en  effet,  «  qu'Antiochus  constitua  Simon, 
frère  de  Jonathas,  chef  depuis  l'échelle  de  Tyr  jusqu'aux  fron- 
tières d'Egypte'.  »  Comme  l'on  sait,  d'autre  part^,  que  l'échelle 
des  Tyriens  se  trouvait  à  100  stades  au  nord  de  Ptoléma'ïs,  —  ce 
qui  place  ce  défilé  important  au  Ras  en  Nakoura,  extrémité  de  la 
cliaîne  du  Djebel  el  Mushakkali  ^,  —  l'on  se  trouve  connaître  le 
l>oint  où  la  frontière  se  détachait  de  la  côte  à  l'époque  des  Mac- 
chabées. Par  son  relief,  par  sa  situation  au  nord  de  Zib,  le  Ras 
en  Nakoura  apparaît  comme  le  Hor  Hahar  de  la  Bible. 

Distinction  à  établir  entre  la  Sidon  phénicienne  el  Sidon 
la  grande. 

La  frontière,  partant  du  Ras  en  Nakoura,  devait  suivre  tout 

'  Macch.,  XI,  u9. 

*  Josèphe,  Guerre  des  Juifs,  1,  XI,  c.  X,  2. 

s  Guérin,  Galilée,  II,  p,  1CS. 


KECHERCHES  GEÛGHAFIIItjUES  SUH  LA  l'ALESTINE  [i 

d'abord  la  ligne  de  faîte  du  Djobel  el  Mushakkali,  qui  court  droit 
vers  Test.  Elle  laissait  au  nord,  en  dehors  de  la  Palestine,  la  Sidon 
phénicienne.  Cette  ville  était  donc  distincte  de  Sidon  la  grande, 
située  sur  les  confins  des  territoires  des  tribus  d'Asser  et  de  Za- 
bulon.  Il  est,  d'ailleurs,  possible  de  prouver  que  Sidon  la  grande 
n'était  pas  placée  sur  la  côte  de  la  mer  Méditerranée. 

A  cet  effet,  passons  en  revue  les  diflV'ronts  textes  qui  l'ont  men- 
tion de  Sidon  : 

Premier  texte  : 

«  Zabulon  habile  aux  bords  de  la  mer,  il  habile  près  des  bords  na- 
vigables, et  s'étend  jusqu'à  Sidon  »  (Genèse,  xlix,  13). 

Deuxième  texte  : 

«  La  cinquième  lot  sortit  pour  la  tribu  des  fils  d'Asser,  séparés  par 
familles.  Leur  possession  comprit  Helqath,  Hali,  Bélèn,  Akschaf. 
AUammélék,  Améad,  Mischeal;  la  ligne  de  frontière  touchait  le  Car- 
me! à  l'ouest,  et  le  Schihor-Libnalh  ;  elle  tournait,  au  levant,  vers 
Belh-Dagon,  longeait  Zabulon,  la  vallée  d'Iphthah-El  au  nord  de 
Belh-haémeq,  et  Neïel,  gagnait  Kaboul,  à  gauche,  Ebron,  Rehob, 
Hammon  et  Qana  et  allait  jusqu'à  Sidon  la  grande.  Elle  tournait 
vers  Rama  jusqu'à  la  forteresse  de  Çor  (Tyr),  puis  vers  Ilossa  et 
aboutissait  à  la  mer  près  du  territoire  d'Akzib  »  (Josué,  xix,  21-29}. 

Troisième  texte  : 

«  Asser  ne  déposséda  point  les  habitants  d'Akko,  ni  ceux  de  Si- 
don, ni  Ahlab,  ni  Akzib,  ni  Ilelba,  ni  Afiq,  ni  Rehob.  L'Assérile 
résida  au  milieu  des  Cananéens,  habitants  du  pays,  car  il  ne  les 
chassa  point.  »  (Juges,  t,  31-32.) 

Quatrième  texte  : 

«  4.  Ad  meridiem  vero  sunt  Hevœi,  omnis  terra  Chanaan,  et  Maara 
SIdoniorum  usque  Apheca  et  terminos  Amorrha'i,  li,  ejusque  conti- 
nia.  Libani  quoque  regio  contra  orienlem,  a  Raaigad  sub  monte 
Hermou,  donec  ingrediaris  Emath.  G.  Omnium  qui  habitant  in 
monte,  a  Libano  usque  ad  aquas  Maserephot,  universique  Sidonii.» 
(Josué,  XIII,  trad.  de  la  Vulgate). 

Cette  ville  de  Maara  a  été  retrouvée  par  Robinson  à  Merhar 
(Meâ'rah,  en  hébreu,  et  Merhar,  en  arabe,  correspondent  au  mot 
français  caverne). 

Cinquième  texte.  —  Dans  son  récit  de  l'exode  de  la  tribu  de 
Dan,  l'historien  Josèphe  écrit  : 


4  REVUE  DES  ÉTL'DES  JUIVES 

«  Après  qu'ils  eurent  marché  tout  un  jour  et  passé  la  grande  cam- 
pagne de  Sidon,  ils  trouvèrent  près  du  mont  Liban  et  des  sources  du 
petit  Jourdain  une  terre  fort  fertile;...  ils  y  bâtirent  une  ville  qu'ils 
appelèrent  Dan  '.  » 

Les  Danites  s'étaient  d'abord  rendus  dans  les  montagnes  d'E- 
pbraïm  *.  Le  plus  court  chemin  de  ces  montagnes  à  la  source  du 
Jourdain  traverse  la  région  à  l'ouest  du  lac  de  Tibériade.  C'est 
donc  de  ce  côté,  et  non  sur  le  littoral  de  la  Méditerranée,  que  se 
trouvait  la  plaine  de  Sidon. 

Sixième  texte  : 

«  Josué  et  tous  les  siens  étant  venus  à  l'improviste  vers  les  enne- 
mis aux  bords  du  Merom,  tombèrent  sur  eux.  Jahvé  les  livra  aux 
mains  dlsraël.  qui  les  poursuivit  jusqu'à  Sidon  la  grande,  jusqu'à 
Misreplioth-Maïm  et  jusqu'à  la  plaine  de  Miçpè,  à  l'orient;  les  enne- 
mis furent  écrasés  sans  qu'il  en  restât  personne  »  (Josué,  xi,  7-8\ 

Josué  n'avait  pas  de  cavalerie  ;  s'il  en  avait  possédé  une,  «  la 
cavalerie  et  les  nombreux  chars  ^  ■  de  l'ennemi  n'auraient  pas  été 
pour  ses  soldats  un  motif  d'épouvante,  et  l'on  ne  comprendrait 
pas  la  nécessité  qu'a  éprouvée  l'auteur  du  livre  de  Josué  de  faire 
rassurer  par  Jahvé  le  généralissime  hébreu  : 

«  N'aie  point  peur  en  face  d'eux,  dit  Jahvé  à  Josué,  car  demain, 
vers  la  même  heure,  je  les  jetterai  là  tout  percés  devant  Israël. 
Tu  couperas  les  jarrets  à  leurs  chevaux,  et  tu  mettras  l'incendie 
à  leurs  chars  ^.  •» 

Du  moment  que  Josué  n'avait  pas  de  cavalerie,  il  n'a  pu  songer 
à  poursuivre  l'ennemi  dans  différentes  directions,  et  encore  moins 
à  exterminer  tous  les  fuyards.  La  position  de  Miçpé  au  pied  du 
mont  Hermon  ne  pouvant  être  mise  en  conteste  ^ ,  l'on  ne  saurait 
aller  chercher  Sidon  la  grande  sur  le  littoral  de  la  Méditerranée, 
sans  admettre  par  là  même  que  Josué  éparpilla  ses  soldats  dans 
un  pays  mal  connu,  pour  atteindre  les  ennemis  en  fuite.  Est-il  be- 
soin d'ajouter  que  ceux  qui  veulent  donner  à  Sidon  la  grande 
l'emplacement  de  la  Sidon  phénicienne  ^,  proposent  d'identifier 
Misrephot  avec  Musheirefeh,  situé  sur  la  côte,  au  sud  du  Ras  en 
Nakoura,  et  qu'ils  ne  respectent  pas  l'ordre  d'énumération  des 

•  Antiq.  Jud.^  1.  V,  cap.  m. 

*  Juges,  XVII I. 
^  Josué,  XI,  4. 

*  Ibid.,  6. 

»  •  Le  Hivvite  qui  est  sous  le  Hermon  dans  la  contrée  de  Miçpa  •   (Josué,  xi,  3], 

•  Renan,  .3/i«iio/(  de  Phénicie,  p.  694;  Guerre,  GaliU'e,  II,  p.  167. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        5 

objectifs  de  la  poursuite,  les  fuyards  n'ayant  pu  atteindre  Sidon 
qu'après  avoir  franchi  le  Musheirefeh. 

En  se  plaçant  à  un  point  de  vue  exclusivement  militaire,  on 
doit  supposer  que  les  vaincus  se  sont  enfuis  dans  une  seule  direc- 
tion, par  le  chemin  qu'ils  avaient  suivi  à  l'aller.  Sidon  la  grande, 
Misrephot-Maïm  et  la  plaine  de  Miçpé  doivent  marquer  les  trois 
étapes  de  la  poursuite  commencée  à  Merom.  Ces  trois  endroits 
doivent  se  trouver  échelonnés  du  sud  au  nord.  La  contrée  de 
Miçpé  étant  au  pied  de  l'Hermon,  les  eaux  de  Misrephot  doivent 
correspondre  à  l'Oued  Musheirefeh,  qui  aboutit  au  lac  Ilouleh, 
près  de  la  sortie  du  Jourdain.  S'il  en  est  ainsi,  les  fuyards  eurent 
à  traverser  la  plaine  de  Gennesar,  et,  comme  il  n'existe  dans  cette 
direction  d'autre  plaine  que  celle  d'Esdrelon,  et  que  toute  confu- 
sion entre  les  deux  localités  semble  impossible,  il  faut  placer  à  la 
lisière  de  la  plaine  de  Gennesar  le  site  de  Sidon  la  grande.  Le 
nom  de  Sidon  signifiant  en  lihémcien poisson  *,  c'est  sur  les  bords 
du  lac  de  Tibériade  que  Sidon  la  grande  devrait,  ce  semble,  être 
cherchée. 

L'habitat  des  anciens  Sidoniens  est  donc  bien  fixé  par  la  Bible. 
Il  avait  pour  borne,  au  nord,  le  mont  Ilermon,  appelé  par  les  Si- 
doniens, Sirion  -  ;  de  ce  côté,  se  trouvait  Laïs,  ou  Lésera,  qui  fut 
prise  par  les  Danites  ^  ;  à  l'ouest  du  lac  de  Tibériade  était  Meara, 
et  sur  la  rive  occidentale  de  ce  même  lac,  Sidon  la  grande.  Cette 
conclusion,  au  surplus,  est  absolument  conforme  à  la  tradition  re- 
cueillie par  Justin  *  :  «  Tyriorum  gens  condita  a  Phœnicibus  fuit  : 
qui  terrse  motu  vexati,  relicto  patriœ  solo,  Assyrium  stagnum 
primo,  mox  mari  proximum  litus  incoluerunt,  condita  ibi  urbe 
quam  a  piscium  ubertate  Sidona  appellaverunt  :  nam  piscem  Pliœ- 
nices  Sidon  vocant.  » 

Ainsi,  les  anciens  Sidoniens,  lorsqu'ils  abandonnèrent  leur  pa- 
trie, vinrent  d'abord  se  fixer  sur  les  bords  d'un  lac,  appelé  lac 
d'Aschour,  lequel,  d'après  les  explications  précédentes,  ne  saurait 
être  autre  que  le  lac  de  Tibériade. 

Bien  que  les  Hébreux  ne  réussirent  pas,  tout  d'abord,  à  s'empa- 
rer de  Sidon  la  grande,  les  Sidoniens  furent  refoulés  vers  le  litto- 
ral de  la  Méditerranée,  et,  à  l'époque  de  l'exode  des  Danites, 
Sidon  la  grande  avait  perdu  son  ancienne  importance,  à  supposer 
qu'elle  n'eût  pas  été  déjà  abandonnée.  C'est  de  la  Sidon  phéni- 
cienne qu'il  s'agit  dans  le  passage  de  Josué  relatif  à  la  prise  de 

'  Justin,  I.  XVlII.c.  m. 
*  Deutér.,  m,  9. 
3  Jup;es,  xvni,  27  et  29. 
"  Justin,  1.   XVIII,  c.  m. 


6  REVUE  DES  ÉTLDES  JUIVES 

Laïs  :  a.  La  ville,  ils  la  consumèrent  dans  les  flammes;  rien  ne  la 
put  sauver,  car  elle  était  éloignée  de  Sidon,  sans  relation  avec 
personne  '.  » 

Si  les  Sidoniens  avaient  à  cette  époque  occupé  Sidon  la  grande, 
ils  auraient  vu  arriver  les  Danites,  et  auraient  pu  s'opposer  à 
l'exécution  de  leur  projet. 

La  dualité  de  Sidon  la  grande  et  de  Sidon,  entrevue  par  S.  Jé- 
rôme dans  le  passage  suivant  de  son  Onomaslicon  :  «  Cana  usque 
ad  Sidonem  majorem  (est  quippe  et  altéra  minor,  ad  cujus  distinc- 
tionem  major  luec  dicitur)  »-,  est  donc  bien  démontrée.  Sidon  la 
grande  pourrait,  en  réalité,  s'appeler  Sidon  la  vieille;  la  Sidon 
]thénicienne  est  simplement  désignée  dans  la  Cible  sous  le  nom  de 
Sidon,  sans  épithète. 

Distinction  à  êlaUir  entre  Qédesch  de  Nephtali  cl  une  ville  du 
même  nom,  sise  hors  du  territoire  d'Israël. 

Le  prolongement  du  Djebel  el  Musliakkali  laisse  également,  fort 
au  nord,  et  en  dehors  du  territoire  d'Israël,  un  village  du  nom  de 
Kadès,  qui  a  passé  à  tort  jusqu'ici  pour  la  Qédéscli  de  Xeplitali  •'. 
Il  semble  que  l'erreur,  ainsi  commise,  ait  été  pressentie  par  les 
écrivains  bibliques,  à  voir  le  soin  qu'ils  apportent  à  préciser  la 
situation  de  la  cité  de  Nephtali. 

«  On  consacra  comme  bourgs  de  refuge  :  Qédésch  en  Galil, 
dans  la  montagne  de  Nephtali  *.  » 

«  Dans  la  tribu  de  Nephtali,  ils  (les  Benê-Guérschon,  apparte- 
nant aux  familles  de  Lévi]  obtinrent  un  bourg  de  refuge,  Qédesch 
en  Galil  et  ses  dépendances  '=.  » 

«  De  la  tribu  de  Nephtali,  Qédésch  en  Galil  et  sa  bande  de 
terre  '^.  » 

La  Qédésch  de  Nephtali  pouvait  sans  doute  être  facilement  con- 
fondue avec  une  localité  homonyme,  puisqu'on  jugeait  nécessaire 
de  la  caractériser  par  l'adjonction  des  mots  «  en  Galil  ». 

Et,  effectivement,  il  existait  dans  la  même  région,  mais  en  de- 
hors du  territoire  d'Israël,  une  ville  de  Kadès;  l'historien  Josèphe 
nous  apprend  que  les  lieutenants  de  Déraétrius  occupèrent  une 

1  Juges,  xviii,  2"  et  28. 

*  Onomastica  sacra,  éd.  de  Laf^arde,  p.  ilO. 

3  Carmoly,  Itinrraires  de  la  Terre-Sainte  :  Les  chemins  de  Jérusalem,  p.  264  ;  les 
Sépulcres  des  Juils,  p.  378  et  3'J3  ;  les  Sépulcres  des  l'alriarches,  p.  ioO. 

*  Josué,  XX,  7. 

s  Ibid.,  XXI,  32. 

*  I  Chroniques,  vi.  76. 


RECHERCHES  GEOGRAl'lHQUES  SUR  LA  PALESTINE  7 

localité  de  ce  nom,  voisine  du  pays  de  Tyr  et  do  la  Galilée  :  «   v.-, 

X£i5a30iv    zo'Xiv \ifZ'x\\>   o'faxiv    a'jTT)     rr,;   tî    Tupuov    yr,?    xal    Tr,î   l'ot)!- 

Cette  localité  se  retrouve  au  village  actuel  de  Kadès.  Quant  à  la 
Qédésch  de  Nephtali,  elle  était  placée  plus  au  sud.  Le  livre  do 
Tobie  permet  d'en  fixer  le  site. 

Emplacement  de  Qêdâsch  de  XephtaU. 

L'entête  de  ce  document  porte  que  Tobie  était  originaire  de 
Tliisbé,  localité  située  à  droite  de  Qédésch  de  Nephtali  en  fialilée, 
au-dessus  d'Asser.  Voici,  d'ailleurs,  les  trois  versions  données 
par  les  manuscrits  : 

Codex  VaticanUS  :  «  s/,  ©t^^r,:;,  -ï,  èT-tv  i/.  oî;uov  xjoio);  rr,?  vîf8oi>.£i.ii  èv  tÏ| 
yaXO.afa  'jTTjpâvd)  as/ p.  » 

Codex   SinaitiCUS  :  «  sx  (-y-zCr,^,  r,    èsTtv    ix    Ô£;lôjv  x'joiw;  TT.î    vr^ôïAUji  Èv  tt, 

Vulçale  :  «  ex  tribu  et  civitaie  Nephtali,  qure  est  in  superioribus 
Galileœ  supra  Naasson  post  viam  quee  ducit  ad  occidenlem  in  sinis- 
tre habens  civitatem  Sephet.  » 

Les  deux  premières  versions  établissent  bien  que  la  localité 
voisine  de  la  patrie  de  Tobie  était  Qédésch  en  Galil,  ville  de  Neph- 
tali. Le  Codex  sinaiticus  nous  apprend  même  qu'elle  se  trouvait 
dans  la  Galilée  supérieure^.  La  Viilgr/te,  malgré  la  corruption  du 
texte,  nous  fournit  un  renseignement  concordant  en  plaçant  la 
patrie  de  Tobie  dans  les  environs  de  Sephet,  aujourd'hui  Safed. 
Or,  à  4  kilomètres  environ  au  nord-ouest  de  Safed,  on  trouve 
une  localité  du  nom  de  Kaddita,  dont  l'antiquité  est  attestée 
par  des  citernes  creusées  dans  le  roc  \  Au  nord-est  de  Kad- 
dita, et  à  une  faible  distance,  on  ai)erçoit  le  village  du  Tai- 
taba,  ou  Taithaba,  dont  M.  Guérin  nous  a  laissé  la  description 
suivante:  «Les  maisons  sont  bâties  avec  des  matériaux  basalti- 
ques. Quelques  plantations  de  figuiers  les  avoisinent,  une  source, 
dont  l'eau  est  légèrement  saumâtre,  coule  auprès;  non  loin  de  là, 
sur  un  monticule  bordé  de  gros  blocs  basaltiques,  qui  paraissent 
taillés  par  la  main  de  l'homme,  s'élève  un  oualy  musulman.  Tai- 
thaba a  évidemment  succédé  à  une  localité  antique,  dont  il  sub- 
siste encore  de  nombreuses  pierres,  toutes  basaltiques,  les  unes 

»  Antiq.  JhcI.,  XIII,  5,  0. 

'  Voir,  sur  les  divisions  de  la  Galilée,  Neubauer,  La  G l'ographte  du  Talmud,  p.  1"8 
et  suiv. 

'  Guérin,  Galilée,  II,  p.  'r28. 


8  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

dispersées  ou  employées  dans  des  masures  modernes,  les  autres 
délimitant  de  petits  enclos  '.  » 

De  prime  abord,  on  pourrait  être  tenté  d'établir  un  rapproche- 
ment entre  Teitaba  et  Thisbé,  et  croire  à  une  erreur  d'un  scribe 
hébreu  écrivant  \r  au  lieu  de  :: .  Mais  la  situation  de  Teitaba  au 
nord-est  de  Kaddita  fait  écarter  cette  pensée.  Selon  la  remarque 
faite  par  M.  Scholz,  dans  son  savant  commentaire  du  livre  de 
Tobie-,  l'expression  «  à  droite  »  doit  se  traduire  par  au  sud.  Le 
site  de  Thisbé  doit  donc  être  cherché  au  sud  de  Kaddita.  Or,  dans 
cette  direction,  et  à  1,200  mètres  de  distance,  se  trouve  le  village 
de  Kaïoumeh,  l'Aikiumia  du  Yihous  ha-abot^,  Al-Kadumia  du 
Yihous  lia-Çadikim\  qu'une  tradition  désigne  comme  la  patrie  de 
Tobie  \ 

Ces  diverses  considérations  conduisent  à  accepter  l'identification 
de  Kaddita  avec  Qédésch  de  Nephtali. 

Fixation  de  diverses  localités  jalonnant  le  tracé  de  la  frontière. 

Les  deux  objections  capitales  que  l'on  pouvait  faire  à  une  déli- 
mitation partant  de  l'échelle  des  Tyriens  étant  écartées,  il  est 
permis  de  chercher  à  jalonner  le  tracé. 

L'un  des  points  les  plus  importants  est,  sans  contredit,  Zifron 
(Assçwva  des  Septante,  Sabarim  d'Ezéchiel,  Zafirin  du  Targoum)  ; 
ce  nom  semble  avoir  été  conservé,  sous  la  forme  aia  sufra,  par  une 
source  voisine  de  Kefr  Birim. 

En  Hazor  de  Nephtali,  du  livre  de  Josué,  que  le  Livre  des 
Nombres  appelle  Haçar-Enan  '^,  pourrait  être  cherché  à  Dhahr  el 
Hazarim,  que  la  carte  du  Palestine  Fund  place  immédiatement 
au  nord  de  Ras-el-Ahmar,  ou  encore  à  A'ima  ;  on  trouve  là  deux 
piscines,  dont  une,  profondément  creusée  dans  le  roc,  est  entourée 
d'énormes  blocs  basaltiques,  et  une  source  renfermée  dans  une 
construction  voûtée  soutenue  par  des  arcades". 

Tracé  de  la  frontière  septentrionale. 
Circonstance  digne  de  remarque  :  la  frontière  suivrait  exacte- 

•  Guérin,  Galilée,  II,  p.  443. 

*  Scbolz,  Commentar  sum  Bûche  Tohias,  p.  19  et  suiv. 
3  Carmoly,  Itinéraires  de  la  Terre-Sainte,  p.  448. 

♦  Ibid.,  p.  381. 

5  Guérin,  Galilée,  II,  p,  43.0. 

^  Les  Septante  estropient  le  nom  et  écrivent  'ApTEvaiv. 

'  Guérin,  GahUt,  II,  p.  445. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        9 

ment  la  ligne  de  démarcation  qui  sépare  la  région  des  temples  de 
celle  des  synagogues,  ligne  qui  a  été  très  rigoureusement  déter- 
minée par  M.  Renan,  de  Kasioun  à  Kefr  Birim*. 

La  topographie  justifie  également  ce  tracé,  qui  prolonge  la 
ligne  de  faîte  du  Djebel  el  Mushakkah  par  un  ravin  aux  bords  es- 
carpés, l'Oued  Aouba-,  lequel  marquait,  au  moyen  âge,  la  limite 
septentrionale  de  la  Princée  de  Galilée  ^ 

Utilisant  ces  diverses  données,  on  propose  de  fixer,  comme  il 
suit,  la  frontière  septentrionale  d'Israol  :  du  Ras  en  Nakoura,  elle 
devait  gagner  le  Kh.  Dànian,  suivre  la  crête  du  Djebel  el  Mus- 
hakkah, laisser  au  nord  Aima  ech  Cha'ab,  Kli.  KafkafaetKh. 
Nàsr,  passer  par  le  Kh.  Djardeth  (Sedada,  zasaSax  des  Septante?), 
atteindre  Kh.  el  Adjliyat,  et,  par  une  crête  que  couronnent  les 
villages  de  Kulàt  er  Rahib  et  Tell  er  Rahib,  aboutir  au  Kh. 
Suouait,  puis  se  diriger  sur  Rumeisch  et  Kefr  Birim,  pour  des- 
cendre la  gorge  de  l'Oued  Aouba. 

Une  telle  frontière  laisse  au  nord  deux  localités  dont  le  nom 
trahit  une  origine  étrangère.  Aima  ech  Çha'ab,  Aitha  ech  Cha'ab, 
c'est-à-dire  Aima  des  nations,  Aitha  des  nations,  ou,  mieux, 
Aima,  Aitha  de  Goïm,  en  considérant  Goïm*,  qui  a  la  même  signi- 
fication, comme  un  nom  de  pays^  Elle  tient  également  compte  d'un 
passage  du  livre  des  Nombres  (xiii,  22)  :  «  Montant,  ils  explo- 
rèrent le  pays  depuis  le  désert  de  Sin  jusqu'à  Rehob,  à  l'entrée  de 
Ilamath.  « 

Il  est  curieux,  d'ailleurs,  d'observer  que  la  frontière  actuelle  du 
Liva  d'Akka  est  sensiblement  la  môme  que  celle  qui  vient  d'être 
indiquée  :  elle  englobe,  en  plus,  le  village  de  Farah  situé  au  nord 
de  l'Oued  A.ouba  «. 

Tracé  de  la  froniièi-e  du  nord-est. 

Au  delà  de  Haçar-Enan,  la  frontière  s'infléchissait  pour  courir 
vers  le  sud  : 

«  Puis  vous  marquerez  pour  votre  frontière  orientale  une  ligne 
allant  de  Haçar-Enan  à  Schefam';  cette  limite  descendra  de  Sche- 

*  Renan,  Mission  de  Phénicie,  p.  673  et  761. 
2  Le  pays  d'Aup  du  Mohar. 

*  Rey,  Colonies  françaises  en  Syrie,  p.  433. 

*  Genèse,  xiv,  1  ;  Juges,  iv,  13. 

5  F.  Lenormant,  Les  Origines  de  l'histoire,  II,  2«  partie,  p.  77. 

6  Voir  l^énumération  des  villages  appartenant  au  Livà  d'Akka,  Palestine  Explo- 
ration Fund,  Quarterly  Statcment,  année  1887. 

'  Les  Septante  écrivent  IsTiçaixàp. 


10  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

fam  à  Ribla  ',  à  Torient  de  Aïn,  puis,  continuant,  elle  frappera  le 
rivage  oriental  de  la  mer  de  Kinéret,  descendra  au  Jourdain  pour  se 
terminer  au  Yam-Hammclah  (mer  de  sel)  *.  » 

Cette  traduction  fait  de  Aïn  une  localité  :  la  Vnlgale  porte: 
contra  fontem  Daphnim,  la  version  des  Septante:  £7:'v -r.-rà; ;  il 
paraît,  donc,  plus  correct  de  prendre  ces  leçons  en  considération 
et  de  traduire  «  à  Ribla,  à  l'orient  des  sources  ou  de  la  source.  » 
D'autre  part,  la  Viilgaie  rend  le  texte  hébreu  par  les  mots: 
contra  orientera  ad  mare  Cenereth.  On  est  donc  en  droit  d'adopter 
la  version  :  «  la  ligne  gagnera  vers  l'Orient  la  mer  de  Kinéret  ». 

Si  l'on  cherche  à  appliquer  ce  tracé  sur  le  terrain,  on  fait  suivre 
à  la  frontière  l'arc  elliptique  dessiné  autour  d'Alma  comme  foyer 
par  l'Oued  Aouba  avant  son  débouché  dans  la  plaine.  On  attribue, 
donc,  au  territoire  d'Israël  le  Kh.  Kasioun,  qui,  d'après  l'inscrii)- 
tion  découverte  par  M.  Renan  \  en  faisait  partie  intégrante  au 
iF  siècle  de  l'ère  chrétienne.  On  y  voyait,  au  moyen  âge,  d'an- 
ciens tombeaux  juifs  ^.  De  semblables  sépultures  se  retrouvent  au 
village  de  Fera'ra  •,  situé  au  sud  de  Kasioun. 

De  Fera'm  part  la  chaîne  du  Djebel  Kenaan,  qui  court  vers  lo 
sud  gagner  les  bords  du  lac  de  Tibériade.  Cette  chaîne  devait, 
d'après  son  nom,  appartenir  au  pays  de  Canaan  ;  peutêtre  même 
en  formait-elle  la  bordure. 


La  région  des  sources. 

On  doit  se  demander  quelles  étaient  ces  sources  remarquables 
situées  à  la  limite  du  paj's  :  il  ne  faut  pas  songer  aux  trois  belles 
fontaines  qui  ont  été  signalées  sur  la  rive  occidentale  du  lac  de 
Tibériade  j)ar  tous  les  voyageurs,  puisque,  d'après  le  texte  donné 
plus  haut,  Ribla  ne  pouvait  se  trouver  sur  le  bord  du  lac.  En  exa- 
minant attentivement  la  carte  du  Palestine  Fnnd,  on  découvre 
entre  Kh.  Kasioun  et  Fera'm,  ou  plutôt  entre  le  village  de  Marous, 
.situé  au  sud  de  Kasioun,  et  Fera'm,  un  chapelet  de  dix  sources, 
(jui  semblent  bien  être  les  sources  cherchées.  Cinq  d'entre  elles 
sont  à  faible  distance  de  Fera'm. 

Si  Fera'm  n'est  pas  la  Ribla  du  Livre  des  Nombres,  il  devait  en 
être   peu  éloigné.    ^  Au-dessous  de  ce  village,  nous  dit  M.   de 

'  Leçon  des  Septante  :  Rr,),à. 

'  Nombres,  xxsiv,  10-12. 

^  Heiian,  Mission  de  P/iénirie,  p.  "'•i-'Tt). 

■*  Carmoly,  Iiin(fraires  de  la  Tene-Sninte,\t.  41"):  Guérin,  Galilée,  II,  p.  447-449. 

5  Carmoly,  ihid.,  p.  378;  Guérin,  ihid.^  Il,  p.  4n3. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA   PALESTINE  11 

Saulcy',  qui  l'appelle  Ferâ'eum,  et  à  gauche  du  chemin  que  nous 
suivons  en  nous  dirigeant  au  nord-est,  aussitôt  que  nous  avons 
débouclié  de  l'Ouad,  sont  des  ruines  considérables  consistant, 
comme  toujours,  en  blocs  de  lave  qui  jonchent  le  sol,  mais  personne 
ne  peut  me  donner  le  nom  de  ces  ruines.  » 
Le  savant  voyageur  ajoute  : 

«  Du  même  point  voisin  du  village  de  Ferâ'eum,  où  Ton  entre  on 
plaine,  ou  aperçoit,  à  droite  (dans  la  direction  du  sud-sud-est],  une 
colline  assez  longue  et  étroite,  dont  Taxe  est  directement  du  nord  au 
sud,  et  qui  porte,  à  sa  pointe  nord,  deux  forts  mamelous  successifs, 
placés  dans  Taxe,  et  couverts  de  ruines  très  considérables  en  blocs  de 
lave,  autant  que  j'en  ai  pu  juger,  à  la  distance  de  deux  kilomètres 
environ,  qui  me  séparait  de  l'extrémité  de  la  colline.  Celle-ci  semble 
dominer  toute  la  plaine,  que  devait  nécessairement  commander  la 
ville  placée  sur  ce  point.  Elle  a  dû  être  très  considérable,  car  ses 
ruines  s'étendent  jusqu'aux  coteaux  qui  dominent  l'Ard-el-Kheylh. 
Sans  doute  la  partie  la  plus  ancienne  de  celte  ville  fut  une  forteresse 
qui  occupa  la  colline  allongée  que  j'ai  décrite,  et  ce  n'est  que  posté- 
rieurement que  la  ville  étabUe,  sous  la  protection  de  la  forteresse, 
se  sera  étendue  à  l'ouest  dans  la  plaine  et  jusqu'aux  coteaux  op- 
posés. » 

Ces  ruines  portent  sur  la  carte  du  Palestine  Fund  le  nom  de 
Tell  el  Kusak  ;  M.  Guérin,  qui  les  a  visitées,  les  appelle  Tell  el 
Kassab  (Tell  des  roseaux)  et  leur  consacre  la  notice  suivante  : 

«  Au  bas  de  la  colline  ou  du  Tell,  une  enceinte  eu  blocs  volcaniques, 
la  plupart  bruts,  d'autres  grossièrement  taillés,  environnait  jadis  un 
village  aujourd'hui  complètement  renversé.  Quant  au  Tell  lui-même, 
il  avait  été  entouré  également  d'une  enceinte.  Son  plateau  supérieur 
et  ses  pentes  sont  parsemés  de  blocs  basaltiques,  provenant  de  murs 
el  de  constructions  démolies  -.  » 

Ribla^  était  en  dehors  du  territoire  d'Israël;  d'après  le  second 
livre  des  Rois  '*,  comme  d'après  Jérémie,  il  appartenait  au  pays  de 
Hamath.  Aussi  serait-il  mieux  placé  à  Tell  el  Kassab,  dans  la 
plaine,  qu'à  Fera'ra  sur  la  crête  du  plateau. 

Cette  position  se  trouve,  d'ailleurs,  à  cheval  sur  le  chemin  me- 
nant des  bords  du  lac  de  Tibériade  au  fameux  passage  du  haut 

'  De  Saulcy,  Voyage  en  Syrie  et  autour  de  la  mer  Morte,  II,  p.  522. 

»  Guérin,  Galilée,  I,  345. 

'  On  Iroiive,  pour  ce  nom,  les  formes  Rebla,  lîeblatha,  en  prec  *Pag/otà|i,  'Pz- 
êXaÔâ  et,  par  suite  d'une  erreur  évidente  de  lecture  des  Iradudeurs  des  écrits  do 
Jérémie  (xxxix,  7  ;  lu,  '.*,  10,26,  27)  et  d'Ezéchiel  (vi,  4\  Aeèlrbi. 

"  11  Rois,  xxm,  33  ;  xxv,  21. 


12  REVL'E  DES  ETUDES  JUIVES 

Jourdain,  le  Djisr  Benât  Yà'kub  ;  ce  qui  s'accorde  parfaitement 
avec  les  détails  fournis  par  le  second  livre  des  Rois,  qui  nous 
montre  le  roi  de  Babel  établi  à  Ribla,  où  le  roi  Sédécias  et  les 
principaux  chefs  du  palais  faits  prisonniers  à  Jérusalem  lui  sont 
successivement  amenés. 

Avant  de  porter  un  jugement  définitif  sur  la  délimitation  qui 
vient  d'être  esquissée,  il  parait  indispensable  d'essayer  de  recons- 
tituer la  géographie  des  tribus  d'Asser,  de  Zahulon  et  de  Nephtali 
qui  occupaient  la  majeure  partie  de  la  Galilée,  et  de  voir  comment 
leurs  territoires  se  trouvaient  encadrés. 


II 

GÉOGRAPHIE    DE   LA   GALILÉE   D'APRÈS    LE   LIVRE   DE    JOSUÉ. 

Le  relief  du  Thabor  le  désignait  comme  borne  à  des  territoires 
de  tribus.  Aussi  ce  mont  fut-il  choisi  pour  point  commun  aux  trois 
frontières  de  Zabulon,  d'Issachar  et  de  Nephtali. 

Frontière  d'Issachar  avec  Nephtali. 

Le  livre  de  Josué  décrit  comme  il  suit  la  frontière  d'Issachar 
et  de  Nephtali  '  : 

Leur  frontière  (des  Benè-Neplitali)  allait  de  Héleph,  du  Chêne  de 
Caânannim,  d'Adami-Hannéqéb,  et  d'Iabneel  jusqu'à  Laqqoum  et  se 
terminait  au  Jourdain.  » 

0  Et  cœpit  terminus  de  Heleph  et  Elon  in  Saananira,  et  Adami 
quee  est  Neceb,  et  lebnael  usque  Lecum  :  et  egressus  eorum  usque 
ad  Jordanem.  »  (Vulgate.) 

'i  Ka\  £YËvr;eTi  -rà  i^ia.  atjxûv  Moo>à[i,  xa\  Mô)>>à,  xat  BeceiAÛv,  xa\  'Ap{i£,  xa\  Na- 
e6x,  xa\  'lïe8a[JLal  'ùo;  A(o5di[i'  xa\  èYîvr;9r,!7av  al  5t£çoooi  aJ-roO  'lopôivr,?.  »  (Sep- 
tante.) 

La  fixation  sur  le  terrain  du  tracé  ainsi  défini  est  singulière- 
ment facilitée  par  Tindication  fournie  par  le  Talmud  -  des  noms 
portés  à  l'époque  du  second  Temple  par  les  différentes  localités  qui 
s'y  trouvent  désignés  :  Méhélef  ^  aurait  pris  le  nom  de  Hélef  ;  Mea- 

•  Josué,  XIX,  33. 

»  Neubauer,  La  Géographie  i/u  Talmud,  p.  224  et  22u. 

3  Mcft)i[ji  optov  >'ïç6a),£Îix,  d'Eusèbe  ;  Meeleb,  terminus  Ncpthalim,  de  S.  Jérôme, 
Onomastica  sacra,  éd.  de  Lagarde,  p.  280  et  139. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        13 

Ion,  Elon,  «  chêne  »,  serait  devenu  Ayalon  ;  Beçaananim  est  rendu 
par  Agnia  de  Kedesch,  le  «  bassin  de  Kédesch  »  ;  Adami,  que, 
par  suite  d'une  erreur  de  lecture  du  mot  hébreu,  les  Septante  ont 
appelé  'Apixë,  au  lieu  de  'Aoi^é,  aurait  porté  le  nom  de  Damin; 
Hannéqéb  Naêèx  des  Septante),  localité  distincte  d'Adami,  aurait 
fait  place  à  Çaidatha;  Yabneel  ('iïf6a!i,ai)  se  traduirait  pas  Kefar- 
Yamah;  et  Lakoum  (Auôâ}!)  par  Loukim  ou  Loukis. 

Le  voyageur  qui  suit  le  chemin  allant  de  S.-Jean-d'Acre  à  la 
sortie  du  Jourdain  du  lac  de  Tibériade,  après  avoir  franchi  le 
plateau  au  nord  du  Thabor,  descend  l'Oued  el  Mu'allakah,  et 
passe  au-dessous  du  village  de  Kefr  Sabt,  bâti  sur  les  ruines  d'une 
bourgade  antique*.  Il  gagne  le  village  de  Damieh,  identifié  par 
M.  Guérin  avec  l'ancien  Adami  ^  Poursuivant  sa  route  le  long  des 
pentes  qui  bordent  à  l'ouest  le  Sahel  el  Ahma,  il  parvient  au  Kh. 
Bessum,  dont  le  rapprochement  avec  BiffEfidv  s'impose;  il  laisse  à 
gauche  dans  la  plaine  Kh.  Seiyâdeh  (Ciadatha  ?),  et  se  dirige  sur 
le  Tell  en  Nâ'am,  proche  de  Beit-Jenn  ;  gagnant,  enfin,  les  bords 
d'un  ruisseau,  il  passe  au  pied  de  la  hauteur  que  couronne  le  vil- 
lage de  Yamma,  dans  lequel  M.  Guérin  a  reconnu  Kefar  Yamah^, 
et  atteint  le  Jourdain  à  El  Abeidiyeh.  Sur  les  hauteurs  qui  bordent 
à  l'est  le  Sahel  el  Ahma  et  séparent  cette  plaine  du  lac  de  Tibé- 
riade, se  trouvent  des  ruines  appelées  Kédés. 

Ainsi  la  plupart  des  noms  portés  par  les  localités  échelonnées 
sur  la  route  parcourue  rappellent  des  localités  antiques  situées  sur 
la  frontière  des  deux  tribus;  de  là,  un  ensemble  d'identifications 
qui  s'impose. 

On  peut  donc  affirmer  que  Nephtali  englobait  tout  le  bassin  de 
l'Oued  Fejjas.  La  frontière  suivait  la  ligne  de  faîte  qui  limite  ce 
bassin  au  sud,  attribuant  à  Nephtali  les  terres  de  Kefr  Sabt  (Umm 
el  Alak,  jadis  Mealon),  Damieh  (l'ancienne  Adami),  Kh.  Bessum 
(autrefois  BetretiiV.»,  ou  Agnia  de  Kédesch),  Kh.  Seiyâdeh  (Çaidatha, 
llanekeb),  Yemma  (jadis  Kefar  Yama,  Yabnéel),  et  elle  aboutissait 
au  Jourdain,  vis-à-vis  les  ruines  de  Delhemiyeh  (l'ancien  La- 
choum). 

Seul  l'emplacement  de  Méhélef  reste  indécis.  Peut-être  faut-il  le 
chercher  à  Esh-Sheyerah,  localité  élevée  sur  les  ruines  de  Deir 
Hànin,  où  se  tenait  jadis  le  marché  hebdomadaire  de  bestiaux, 
depuis  transféré  à  Khan  el  Toudjar  «  khan  des  marchands^  ». 

1  Guérin,  GalilCe,  I,  p.  266. 
»  Ibid.,  I,  p.  266. 
'  Ibid.,  p.  268. 

*  Palestine  Exploration  Fttnd,  Qiiarterly  Statement,  année  1889,  p.  78,  article  de 
^L  Schumaclier, 


14  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


Frontière  coimnune  aux  tribus  de  Zahulon  et  d'Issachar. 

La  frontière  de  Zabiilon  et  d  Issachar  est  d(jcrite  comme  il 
suit '  : 

«  Le  troisième  sort  qui  monta  fut  pour  les  Benè-Zeboulouu,  divisés 
par  familles,  et  dont  la  fronlirre  allait  jusqu'à  Sarid.  Elle  montait 
vers  l'ouest  à  Mareiila,  touchait  Dabbéscheih  et  le  torrent  qui  est 
devant  loqnetim.  De  l'autre  côté  de  Sarid,  à  l'orient,  là  où  le  soleil  se 
lève,  la  limite  gagnait  Kislotb-Tbabor,  atteignait  Daberalb  et  mon- 
tait à  laphia.  » 

c  -10.  Ceciditque  sors  tertia  filiorum  Zabulon  per  cognaliones 
suas  :  et  factus  est  terminus  possessionis  usque  Sarid. 

»  11.  Ascendilque  de  mari  et  Merala,  et  pervenil  in  Debbaseth, 
usque  ad  torrentem  qui  est  contra  leconam. 

»  42.  Et  revertitur  de  Sared  conlra  orienlem  in  fines  Ceseleth- 
thabor  :  et  egreditur  ad  Dabereth  ascendilque  conlra  laphie.  »  (Vul- 
gate.) 

«  10.  Kal  £:f,A6îv  6  xAT.po?  ô  Tf^TOî  toj  Za6c'j)>(bv  y.i-zk  or^aou;  aOttov  scTot  xk 
8cta  TT,ç  ■/.'XT,fovo[i{aç  aJTtov,  E^îoîxywîvà  ïpia  «./Ttôv, 

11.  Y,  ôi^aïsa  xal  MaYîAôài  y.al  T'jvâ-iîi  àirl  Bai6ipa6a  et;  ty,v  r^pTT''  ^t  -'"' 
Xatà    TTfOJWTTOV    'l£x[xâv. 

8pia    Xaiïî^fo6a'i9,    xat    ùsî.E'jcïTai   È::^    AaêifibO,    xa\    7:fo;ava6r;jeTai  ItC:  «J'a^yai.  » 
(Septante.) 

Cette  description  présente  cette  particularité  qu'elle  n'a  pas  pour 
point  de  départ  Tune  des  extrémités  de  la  frontière  méridionale  de 
Zabulon,  le  mont  Thabor,  mais  un  point  médian  caractéristique  de 
cette  frontière,  Sarid,  et  qu'elle  est  scindée  en  deux  tronçons,  par- 
tie occidentale,  partie  orientale.  Aucun  texte  ne  révèle  la  position 
de  Sarid;  ce  qui  ne  laisse  pas  que  d'être  fort  embarrassant. 

Heureusement  que  l'on  possède  des  renseignements  qui  permet- 
tent de  préciser  les  sites  respectifs  de  Kislot-Tabor  et  de  Daberet. 

S.  Jérôme-  traduit  comme  il  suit  un  passage  de  VOnomaslicou 
d'Eusèbe^,  relatif  à  'AyEcïXwe  :  «  Acbaseluth,  civitas  tribus  Tssa- 
cbarS  appellatur  autem  et  quidam  vicus  Chasalus,  juxta  monlem 
Thabor,  in  carapestribus,  in  octavo  milliario  Diociesareœ  ad  orien- 
tem  respiciens  ».  Ce  village  porte  aujourd'hui  le  nom  d'Iksal  \ 

'  Josué,  XIX,  lU-12. 

*  Onomastica  sacra,  éd.  de  Lagarde,  p.  94. 
s  Uid.,  p.  223. 

♦  Josué,  XIX,  18. 

»  Guérin,  Galilée,  I,  p.  108  et  109. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE  lu 

DabéretlP,  que  S.  Jérôme  désigne  par  le  nom  de  Dabira,  et 
Eusèbe  par  celui  de  Aa^ïipa,  était  un  petit  village  de  la  montagne  du 
Thabor,  dépendant  de  Diociesarea.  11  s'appelle  maintenant  Da- 
bourieli  -. 

L'on  voit,  donc,  que  la  l'rontière,  avant  de  s'élever  dans  la  mon- 
tagne, à  lapliia  (Kh.  Kibsany  ou  Kh.  Umm  Jebel?],  suivait  la 
lisière  septentrionale  de  la  plaine  d'Esdrélon.  Le  sentiment  de  la 
continuité  conduit  à  placer  Sarid  à  l'extrémité  du  massif  monta- 
gneux de  Nazareth  qui  s'avance  en  saillant  dans  la  plaine  d'Es- 
drélon. Or,  précisément  en  ce  point,  sur  la  carte  du  Palestine 
Fand,  se  trouve  une  localité  du  nom  de  Tell  Shadud.  Or,  «  rien  de 
plus  facile,  paléographiquement  parlant,  que  la  contusion  de  d  et 
de  r  dans  tous  les  types  de  l'écriture  hébraïque^  ».  Tell  Shadud 
est  donc  bien  certainement  la  localité  cherchée. 

Le  point  terminus  de  la  frontière  est,  à  l'occident,  le  torrent  en 
face  de  leconam  [loqneâm,  "kxfidv).  Cette  localité  était  voisine  du 
Carmel  :  dans  l'énumération  des  rois  vaincus  {)ar  Josué'  figure  le 
roi  d'Ioqneiim  au  Carmel  (Jaclianan  Carmel i,  'Je/.btx  toO  x-rpukA,  hxovàia 
ToO  repjik>.).  Robinson  a  proposé  de  placer  leconam  au  Tell  Kaimoun 
qui  s'élève  au  pied  du  Carmel,  à  une  faible  distance  au  sud  du 
Nahr  el  Mekhatta^  Les  raisons  qu'il  donne  en  faveur  de  son  opi- 
nion n'ont  pas  paru  décisives  à  M.  Guérin,  et  l'on  est  d'autant  plus 
fondé  à  rejeter  avec  lui  l'idenlilication  mise  en  avant,  que  la  carte 
du  Palestine  Fand  attribue  à  l'une  des  deux  grandes  cavernes  voi- 
sines de  Scheikh  Abreik  le  nomdeMgh"'  el  leheunam,  dans  lequel 
il  est  impossible  de  ne  pas  reconnaître  le  nom  de  la  ville  de  Josué. 

Entre  Tell  Shadud  et  Scheikh  Abreik,  la  frontière  passait  : 
1»  par  Merala  (Medala,  Mayî).5à);  2°  par  Debbaset  (?ai9âpi6a;,  localité 
bâtie  sur  une  hauteur  isolée  dans  la  plaine,  à  en  juger  par  la  signi- 
fication de  son  double  nom  (Debbaset,  bosse  semblable  à  celle  du 
chameau"  ;  Betaraba,  maison  de  la  plaine). 

On  peut  considérer  que  la  limite  avait  été  tracée  presqu  en  ligne 
droite  du  saillant  de  la  chaîne  des  collines  de  Nazareth  à  l'extré- 
mité des  hauteurs  qui  fermaient,  vers  l'occident,  la  grande  plaine 
d'Esdrélon,  et  on  peut  placer  Magekla  au  Tell  Ghalta,  et  Debbaseth 
au  Tell  Mùwâjeh. 

*  Onomastica  nacra,  p.  11  u  et  250, 

î  Guérin,  Galilée,  ï,  p.  140-142  ;  De  Saulcy,  Dictionnaire   iopo;jraphi',ue  ahrégé  Je 
la  Terre-Sainte^  p.  109. 
'  F.  Lenorraant,  L's  Origines  de  l'histoire,  t,  tl,  2«  part.,  p.  143. 

*  Josué,  XII,  22. 

5  Biblical  Researches,  t.  III,  p.  115. 

*  Guérin,  Hamarie,  t.  II,  p.  244. 

'  De  Saulcy,  Dictionnaire  topographi'jiie  alr<^gi'  de  la  Tem-Hainte,  p.  114. 


16  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


Frontière  méridionale  de  la  irihu  d'Asser. 

On  a  été  conduit  à  tracer  une  grande  ligne  de  démarcation  du 
Jourdain  au  Carmel.  11  est  curieux  de  voir  comment  cette  ligne  se 
poursuivait  jusqu'à  la  mer.  Contrairement  à  ce  que  l'on  pourrait, 
de  prime  abord,  supposer,  elle  n'avait  pas  pour  prolongement  le 
faîte  du  Carmel. 

Un  district  d'Asser  s'étendait,  en  effet,  au  sud  de  cette  chaîne. 
La  preuve  en  est  que  la  ville  de  Dor  (aujourd'hui  Tantouralij  for- 
mait une  enclave  de  Manassé  dans  Asser'. 

Ce  district  correspond  au  territoire  visé  par  le  passage  suivant 
du  livre  de  Josué-  : 

«  Leur  possession  [des  Benè-Ascher)  comprit  Helqat,  Ilali,  Bétèn, 
Akschaph,  Allammélek,  Ameiid,  Mischeal  ;  la  ligne  de  frontière  tou- 
chait le  Carmel,  à  l'ouest  et  le  Schihor-Libnath  ;  elle  tournait,  au 
levant,  vers  Beth  Dagon,  etc.  » 

«  23.  Fuitque  terminus  eorum  Halcalh,  et  Chali,  et  Belen,  et 
Axaph. 

«  26.  Et  Elmelech,  et  Amaad,  et  Messal  :  et  pervenit  usque  ad 
Carmelum  maris  et  Sihor  etLabanath. 

»  27.  Ac  reverlitur  contra  orientem  Belhdagon.  »  (Vulgate.) 

c   25.   Kal  £Y£vr;Or,  Ta  ooia  àJtwv  'EE£>,-x£6.  xà{    ^h\fs,  xot\    Bai6ôx,  xa\   Ksàï), 
»   26.  Kal    E>,'.a£A£^,   xa\    Aiiu.X,    xa\  Maasià'    xa\    cjvây-n  Tij  Kap[iT;)v(j),   xaià 
OdXaaaav,  xat  -zCt  Sicov,  xat  AaêaviO. 

»   2T.   Ka\  i-t7Tféy£i  à~h  àva-o)v':iv  Y,7vio'j   xal  BaiSï^îvÈO.  »    (SeplantC.) 

Sur  les  sept  villes  énumérées  tout  d'abord,  trois  peuvent  être 
immédiatement  retrouvées  : 

Hall  —  Scheikh  Helou,  sur  la  rive  gauche  du  Nahr  el  Akhdar; 

Beten,  BaiBè/.,  —  non  pas  le  village  de  Beten  indiqué  par  S.  Jé- 
rôme, au  huitième  mille  à  l'est  de  Ptolémaïs,  mais  plutôt  une 
localité  voisine  du  Birket  el  Batîkh,  lequel  se  trouve  au  nord-est 
et  à  faible  distance  de  Scheikh  Helou; 

Mischeal,  Mai^ixX',  ville  lévitique,  placée,  d'après  Eusèbe,  au  bord 
de  la  mer  et  au  pied  du  Carmel  —  aujourd'hui  Misaleh  ou  Mithilia, 
à  droite  de  la  route  d'Athlit  au  cap  Carmel  et  à  une  heure  au  nord 
d'Athlit^ 

Les  quatre  autres  villes  appartenant  évidemment  au  même  dis- 

>  Josué,  xvir,  11. 

*  Josué,  XIX,  25-27. 

*  Josué,  XXI,  30;  I  Chron.,  vi,  74. 

*  De  Saulcy,  Dictionnaire  topographique,  p.  228. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        17 

trict,  l'identification  quelquefois  proposée'  d'Akschaph  avec  le 
Kh.  Iksaf,  situé  au  nord  de  la  Palestine,  à  quelques  kilomètres  au 
sud  du  Nahr  el  Kasimiyeli,  doit  être  en  tout  cas  écartée.  Mieux 
vaut,  sans  nul  doute,  retenir  la  version  des  Septante  Kzh-s  et  songer 
au  village  d'Echfaïa,  parfois  dénommé  Kefaïa*. 

On  respecte  ainsi  l'ordre  d'énumération  des  villes  d'après  leur 
situation  géographique,  en  remontant  du  sud  vers  le  nord. 

Le  livre  de  Josué^  et  le  premier  livre  des  Chroniques*,  dans 
rénumération  des  villes  lévitiques  d'Asser,  placent  entre  Helqat 
et  Mischeâl,  la  ville  d'Abdon,  Aa66ùv,  "aôowv.  A  cette  localité  corres- 
pond la  ruine  d'Abdoun,  située  au  sud  de  Tantourah,  sur  le  bord 
du  Nahr  ed  Dufleh. 

Au  nord  des  sept  villes,  le  Garmel  s'avançait  dans  la  mer; 
au  pied  des  pentes  du  versant  septentrional  de  cette  montagne 
coulait  le  Schihor  Libnath,  dont  l'identification  avec  le  Nahr  el 
Mukhatta  paraît  s'imposer.  En  remontant  le  cours  de  cette  ri- 
vière, la  frontière  atteignait,  vers  l'orient,  une  localité  d'Issa- 
char^,  appelée  Bet  Dagon,  dont  on  ne  connaît  pas  l'emplacement 
(Tell  Kaimoun  ?j. 

On  rejette  donc,  comme  on  le  voit,  les  leçons  de  la  Vulgate  et  des 
Septante,  donnant,  au  lieu  du  nom  composé  Schihor-Libnath,  les 
noms  de  deux  localités  distinctes  :  Sihor,  Shôv,  Sior  de  S.  Jérôme, 
sttip  d'Eusèbe;  Labanath  (S.  Jérôme),  Aa6avi9  (Eusèbe).  La  raison  en 
est  que  le  nom  de  Schihor  est  attribué  par  le  livre  de  Josué 
(xiii,  3)  au  cours  d'eau  formant  la  limite  de  la  Palestine  et  de 
l'Egypte,  et  aurait,  d'après  S.  Jérôme",  la  signification  de  petit  ou 
impétueux  :  Sior  parvulum  sive  turbulentum;  il  s'agirait  donc, 
d'un  torrent.  Il  est,  dès  lors,  naturel  que  ce  torrent  se  ditférencie 
par  un  nom  particulier,  Libnath,  des  cours  d'eau  semblables  de  la 
région. 

Villes  de  la  région  méridionale  de  Nephtali. 

La  géographie  talmudique"  divise  la  Galilée  inférieure  en  deux 
parties  :  le  pays  de  la  plaine  et  le  pays  de  la  vallée,  lequel  corres- 
pond au  cercle  de  Tibériade,  le  Kada  Tabariya  actuel.  C'est  dans 

'  Guérin,  Galilée,  II,  p.  269, 

*  Guérin,  Samarie,  II,  p.  303. 
^  Josué,  XXI,  30. 

*  1  Chron.,  vi,  74, 

5  De  Laj^arde,  Onomastica  sacra,  p,  236. 

«  Ibid.,  p.  30. 

7  Neubauer,  Géographie  du  Taltnud,  p,  178, 

T.  XXVI,  N°  51,  2 


18  HEVUIÎ  DES  ÉTUDES  JUIVES 

cette  dernière  région  qu'il  faut  chercher  les  villes  de  Xephtali 
"visées  au  vers.  35  du  chapitre  xix  de  Josué  : 

«  Il  y  avait  dans  le  territoire  comme  places  forles  :  Çiddim,  Çer, 
Hammal,  Râqqat,  Kinnerel.  » 

0  35.  Givilales  munitissimœ,  Assedim,  Ser,  Emalh  et  Reccath  et 
Cenereth.  » 

«  35.  Kal  ai  7:d)k£iî  Teij^rjpeiî  twv  'rup{(ov  Tûpoç,  xal  ÛULaflaoaxkO ,  xa\  Ke- 
vepcO.  » 

[ieTalmud  de  Jérusalem  '  nous  a  conservé  les  appellations  de  ces 
cinq  villes  au  temps  du  second  Temple  :  Haçidim  est  devenu  Kefar 
Hattya  ou  Hitya,  Çer  et  Hamatha  ont  conservé  leurs  anciens 
noms,  Tibériade  a  remplacé  Raccath,  et  Guinosar  Kinnéret. 

Hacidim  paraît  devoir  être  cherché  à  l'extrémité  méridionale  du 
territoire,  près  du  passage  du  Jourdain  Jisr  es  Sidd.  La  force  de 
l'assiette  de  El  Kerak  fait  songer  à  placer  en  cet  endroit  la  ville  de 
Cer.  Hammatha,  dont  le  nom  indique  l'existence  d'eaux  thermales, 
a  été  retrouvé  au  Kh.  el  Hammam^.  Tibériade  a  certainement  suc- 
cédé à  Raqqat  \ 

Ces  quatre  localités  se  trouvent  énumérées  dans  l'ordre  géogra- 
phique en  allant  du  sud  au  nord.  C'est  donc  au  nord  de  Tibériade 
qu'il  faut  chercher  le  site  de  Kinnéret. 

La  version  araméenne  du  livre  de  Josué  s'accorde  avec  le 
Talmud  pour  rendre  Kinnéret  par  Guinosar  ;  l'existence  d'une 
ville  de  Kinnéret,  située  sur  les  bords  du  lac  auquel  elle  avait 
donné  son  nom,  ne  saurait  être  mise  en  doute  ;  mais  on  doit  être 
moins  affirmatif  au  sujet  de  l'existence  d'une  ville  de  Guinosar. 
L'historien  Josèphe  nous  décrit  bien  la  plaine  de  Gennesar,  de 
30  stades  de  long  sur  20  de  large,  retrouvée  par  M.  de  Saulcy  au 
nord  d'El  Mejdel,  mais  il  a  soin  d'ajouter  que  cette  plaine  avait 
donné  son  nom  au  lac;  par  là  même,  il  autorise  à  contester  l'exis- 
tence d'une  ville  de  Guinosar,  et,  par  suite,  il  permet  de  chercher 
l'emplacement  de  Kinnéret  ailleurs  que  dans  la  plaine  de  Genne- 
sar. Dans  ces  conditions,  la  position  d'El  Mejdel,  au  nord  de  Tibé- 
riade et  sur  les  bords  du  lac,  semble  de  tous  points  convenable. 

Frontière  commune  à  Nephtali  el  à  Zcibulon. 
La  région  méridionale  de  Nephtali.  à  laquelle  ces  cinq  villes  ap- 

»  Neubauer,  Gi'Ofjraphte  du  Talmud,  p.  207. 
*  Guérin,  Galilée,  1,  p.  270. 

•■'  De  Saulcy,  Gf'oyraphie  comparée,  daos  le  Journal  des  Savants,  de  sept.  1879, 
p.  542. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE  19 

partenaient,  confinait,  à  l'ouest,  au  territoire  de  Zabulon.  Le  livre 
de  Josué  nous  a  conservé  deux  descriptions  de  la  frontière  qui  sé- 
parait les  deux  pays, 
l""®  description  *  (frontière  de  Zabulon). 

«  De  là  (de  laphia),  elle  (la  limite)  passait  vers  l'est,  au  levant,  à 
Ghitlha-Hefer,  el  à  Ghilla-Qaçin,  allait  à  Rimmon,  suivait  son  tracé 
jusqu'à  Nea,  tournait  au  nord,  vers  Hannathon.  » 

«  13.  Et  inde  pertransit  usque  ad  orientalem  plagam  Gethefer  et 
Thacasin  :  et  egredilur  in  Remmon,  Amlhar,  et  Noa. 

»  14.  Et  circuit  ad  aquilonem  Hannathon.  »  (Vulgate) 

KaTaaè[x,  y.cà  SisXsûjïTai  Itzi  "P£[x,tjitovaà  Ma9apao;«. 

0   14.   Ka\  'K=ptî>k$y(Jâtari  ôpia  irX  Jîoppâv  l-\  AawO.   »  (Septante.) 

2«  description  -  (frontière  de  Neplitali,  à  partir  du  Thabor). 

«  Elle  (la  frontière)  se  dirigeait,  à  l'ouest,  vers  Aznolh-Thabor  et 
gagnait  de  là  Houaqoq.  » 

«  34.  Revertiturque  terminus  contra  occidentem  in  Azanotthabor 
alque  inde  egreditur  in  Hucuca.  »  (Vu'gate.) 

«  34.  Kal  èrtiuTpéi|/£i  xd  8pn  èrl  9i>>o(T7av  èv  'A96a6(bp,  xal  5iîXêû«Tai  ixei6ev 
"ixavàt.  »  (Seplaute.) 

Cherchant  à  appliquer  ces  descriptions  au  terrain,  on  est  tout 
d'abord  conduit  à  identifier  Aznoth-Thabor  avec  le  village  Lou- 
bieh  bâti  sur  les  ruines  d'une  bourgade  antique,  dont  le  nom  nous 
est  ra|)pelé  par  le  vocable  du  Oualy  voisin,  Neby  Esnâd  Ibn 
Amun  ^. 

La  frontière  devait  suivre  d'abord  la  ligne  de  faîte  passant  par 
ce  point,  au  lieu  de  gagner  par  un  crocliet  El  Meched,  localité 
éloignée  du  Thabor,  dont  on  a  fait  la  patrie  du  prophète  Jonas*, 
Gath  en  Hefer,  Te^yo-oép.  Il  semble  naturel  d'attribuer  à  Zabulon 
tout  le  bassin  de  l'Oued  elJerâban  (qui  correspondrait  au  nezpï  des 
Septante  et  auquel  appartient  El  Mechhed)  ;  on  engloberait  pa- 
reillement dans  le  territoire  de  cette  tribu  le  Sahel  el  Buttauf,  la 
plaine  d'Asochis  •  de  Josèphe  ;  KaTac-ix  ou  Thacasin  pourrait  être 
placée  à  l'extrémité  orientale  de  cette  plaine  au  Kh.  Umra  el 
Amed  ^. 

'  Josué,  XIX,  13  et  14. 

»  Ibid.,  34. 

3  A  l'enconlre  de  cette  opinion,  il  faut  ciler  le  passage  de  S.  Jérôme  conrorme  à 
l'indication  de  VOnomasticon  d'Eusèbe  :  •  Azanoth  terminus  Nephihali.  Est  aulem  et 
nunc  vicus  ad  regionem  Diocœsarefo  perlinens  in  campcslnbus.  i 

*  II  Rois.  XIV,  25. 

•'•  Vie  de  Josè/ihe,  §    il  ;  Guérin,  GaUUc,  I,  p.  494. 

«  Guérin,  GaltUe,  I,  p.  361, 


20  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

La  suite  de  l'analyse  des  traductions  données  plus  haut  ne 
laisse  pas  que  d'être  embarrassante.  Le  texte  de  la  Vulgate  parle 
de  trois  localités  :  «  et  egredilur  in  Remmon,  Amthar  et  Noa.  » 
M.  Ledrain  traduit  :  «  allait  à  Rimmon,  suivait  son  tracé  jusqu'à 
Nea  »  ;  il  ne  s'agit  plus  que  de  deux  localités.  Les  Septante,  enfin, 
écrivent  :  xa\  SieXsûastai  én\  'P£|ijxwvaît  MaOapao^ot  ;  ils  n'indiquent  donc 
qu'une  localité. 

M.  de  Saulcy,  frappé  de  ces  divergences,  a  cherché  à  trancher 
la  difficulté.  «  Les  deux  mots  Remmon  et  Amthar,  dit-il,  ne 
forment-ils  qu'un  seul  nom  de  lieu?  Gela  nest  pas  démontré.  La 
traduction  du  texte  hébraïque  en  fait  deux  lieux  distincts  ;  mais 
la  présence  de  l'article  ha  avant  le  mot  Amtliar  dans  le  texte 
hébreu,  me  parait  justifier  l'adoption  du  nom  complexe  Remmon- 
Amthar  '.  » 

Le  nom  de  El  Muntar,  porté  par  la  cime  du  massif  monta- 
gneux compris  entie  l'Oued  et  Haniam  el  l'Oued  er  Rubudiyeh, 
tendrait  à  justifier  cette  oiunion.  Les  ruines  du  Kh.  Sebana,  qui 
couronnent  cette  montagne,  correspondraient  donc  à  l'antique 
Remmon  Amthar.  Mais  quelle  est  cette  Noa  dont  l'emplacement 
reste  encore  indéterminé?  Continuant  à  se  laisser  guider  parles 
formes  du  terrain,  on  est  ara^né  à  en  chercher  le  site  à  l'extré- 
mité du  massif  montagneux,  dont  il  vient  d'être  question,  c'est  à- 
dire  précisément  à  côté  de  la  fontaine  Ain  el  Modouarah  et  consé-^ 
quemiuent  auprès  du  site  de  Ca[)harnaïim.  Or,  peut-on,  un  seul 
instant  admettre  l'existence  côte  à  côte  de  deux  localités  appelées 
l'une  Noa,  l'autre  Naum  ?  On  se  trouve  ainsi  conduit,  d'une  façon 
bien  inattendue,  à  identifier  la  Noa  biblique  avec  le  Capharnaiim 
du  Nouveau-Testament. 

Enfin,  le  site  de  Houqqoq  est  connu  :  la  localité  antique  a  fait 
place  au  village  de  Yakouk. 

En  résumé,  le  tracé  de  la  frontière  de  Nephtali  et  de  Zabulon, 
peut  être  défini,  comme  il  suit  :  de  Loubieh  la  limite  se  dirigeait 
sur  Nimrin,  descendait  l'Oued  el  Hamam,  contournait  le  pied  des 
hauteurs  bordant,  à  l'ouest,  l'ancienne  plaine  de  Génésar  jusqu'à 
la  rencontre  de  l'Oued  el  Rubudiyeh,  qu'elle  remontait,  passant 
ainsi  à  faible  distance  de  Yakouk. 

Cette  avancée  du  territoire  de  Zabulon  jusqu'au  bord  du  lac  de 
Génézareth  est,  d'ailleurs,  établie  par  un  passage  de  Josèphe-  : 

Za6ou^(ovÎTai  ôè  t^v  në;^pi  revvTjaapCriSoç   xaÔTjxouffav  ôl  rspl  KdpjiT,'Xov  xal  SâXaujav 

'  De  Saulcj-,  Dictionnaire  topographique,  p.  2o8. 
«  Ant.,  V,  i. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        21 

Il  en  résulte  que  le  territoire  de  Nephtali  était  coupé  en  deux 
parties,  reliées  tout  au  plus  par  une  étroite  bande  de  terrain,  une 
partie  méridionale,  qui  vient  d'être  décrite,  une  partie  septen- 
trionale, qui  spra,  un  peu  plus  loin,  envisagée. 

Emplacement  de  quelques-unes  des  localités  de  Zabulon. 

Le  livre  de  Josué  achève,  comme  il  suit,  la  description  du  tracé 
de  la  frontière  de  Zabulon  : 

«  (La  limite)  tournait  au  nord  vers  Hannathon  et  aboutissait  à  la 
vallée  d'Iphthah  El.  De  plus,  il  y  avait  Qallat,  Nabalal,  Schimron, 
Ideàla,  Belléhem.  » 

«  14.  Et  circuit  ad  aquilonem  Hanatlion  :  suntque  agressus  ejus 
vallis  Jephtahel, 

»  15.  Et  Catelh,  et  Naalol,  et  Semeron  et  Jedala  et  Bethlehem.  » 
(Vulgale.) 

«  14.  KaX  "Rtitiîktùdtxa.:  8pttt  £it\  Soppâv  éizl  'A[Jià)9,  xa\  îrtOLi  i\  StéÇoôoî  aùxwv  é-K 

»  i5.  xal  KaTavà9,  xal  NaêaJc>»,  xa\  Svjioùv,  xa\  'kpij^ià,  xa>.  Bat9(i(iv,  t  (Sep- 
tante.) 

Voici,  d'après  le  Talmud  ',  les  appellations,  à  l'époque  du  second 
Temple,  des  cinq  villes  dont  les  noms  terminent  cette  description  : 
Ketonith,  Mahloul,  Simonia,  Hiriyeh,  Beth-Lehem-Cerieh.  Trois 
de  ces  localités  s'identifient  d'une  façon  certaine  avec  Malûl,  Sé- 
mùnieh  et  Betli-Lahm. 

La  région  où  aboutit  le  tracé  est  par  là  même  définie,  et  l'on 
reconnaît  dans  le  Sahel  el  Buttauf  la  vallée  d'Iphtah-El.  A  la  tête 
de  cette  vallée  se  trouvent  des  ruines  considérables  appelées  Khar- 
bet  Nathef,  sur  lesquelles  doit  se  porter  l'attention  de  celui  qui 
recherche  l'emplacement  d'Hanathon'. 

D'après  cela,  la  limite  de  Zabulon  aurait  remonté  le  cours  de 
l'Oued  er  Rubudiyeh,  serait  passée  entre  Kh.  Djemieh  et  à  A'ila- 
boun,  et,  laissant  au  midi  Kh.  Nathef,  aurait  suivi  la  ligne  de  faite 
du  bassin  du  Sahel  el  Buttauf, 

Frontière  d'Asser  et  de  Zabulon. 

«  Elle  (la  frontière)  tournait,  au  levant,  vers  Beth-Dagon,  longeait 
Zabulon,  la  vallée  d'Iphihah-Kl,  au  nord  de  Relh-haémeq  el  Neïel; 
gagnait  Kaboul  à  gauche,  Ebrou,  Keh<>b,  Haminon,  Qana  et  allait 
jusqu'à  Sidon  la  grande.  Elle  tournait  vers  Rama.  >> 

1  Neubauer,  Géographie  du  Talnmd,  p.  189. 


22  REVUE  Di:S  ETUDES  JUIVES 

«  27.  Ac  revertilur  contra  orienlem  Bethdagon  :  et  pertransit  usque 
Zabulon  et  vallem  .Tephlahel  contra  aquilonem  in  Belhemec  et  Neïel. 
Egredilurque  ad  lœvara  Cabul, 

»  28.  et  Abran,  et  Rohob  et  Haœon  et  Gana,  usque  ad  Sidonem 
magnam, 

»  29.  Revertiturque  in  Horma.  »  (Vulgale.) 

«  27.  Kal  ém^xoi'liîi  àr.b  âvaTo'Xwv  f,)^{oy  xa\  Bai^f(t'Ai,  xai  TJwiÇti  tw  Za6oy>.wv 
xa\  "Exval,  xal  *6ai7,>.  xaxài  ^oppâv,  xa\  £iîe).e  JTEtai  spia  SutBaiëiiOiik,  xaV  "Ivar,)., 
xa\  ûieXî'JTStai  eU  Xuêajioaojii^, 

»   28.  xal  "E)»6wv,   xa\  'Paàê,    xat    E!Jie!J.aùv,    xal   Kav^iàv   ewç   1;5côvoî  ttiç   jiî- 

■i)  29.  Kal  otvacTTpë-^ît  tôt  8ita  el;   'Paiiîi.  »  •Septante.) 

La  plupart  des  localités  énumérées  dans  cette  description  nous 
sont  demeurées  inconnues.  Une  seule  a  conservé  son  nom  à  tra- 
vers les  âges,  Kaboul.  Mais  ce  vestige  permet  presque  de  reconsti- 
tuer le  tracé  de  la  frontière. 

Elle  suivait  la  chaîne  des  collines  qui  ferme,  à  l'ouest,  la  plaine 
d'Esdrelon.  Après  avoir  franchi  l'Oued  el  Melek,  qui  reçoit  les 
eaux  du  Sahel  el  Buttauf,  elle  devait  suivre  l'exliême  lisière  de 
ce  bassin,  parvenant  ainsi,  à  gauche,  c'est-à-dire  au  sud  de  Ka- 
boul. Se  continuait-elle  par  la  vallée  du  Medjdel  Keroum.  «  limite 
naturelle  entre  la  haute  et  la  Basse-Galilée  '  )3,  ou  bien  suivait- 
elle  la  lisière  du  bassin  du  Sahel  el  Buttauf,  on  ne  saurait  le 
dire.  A  l'appui  de  la  première  solution  ,  on  pourrait  invoquer 
l'identification  d'Ebron  "e).6ùv  des  Septante,  avec  le  village  d'El 
Baneh  -,  celle  de  Rehob  'Paà6  avec  le  village  de  Nachef,  voisin  de 
rOualy  Scheik  Rabià  ,  celle  de  Hammon  EEisixaùv  avec  le  Kh. 
KemraanehS  et,  enfin,  celle  de  Qana  Kaveiv  avec  Deir  Hanna; 
mais  ce  sont  là  des  bases  bien  fragiles.  A  rencontre,  on  pourrait 
faire  valoir  que  la  vallée  du  Mijdel  Keroum  aboutit  presque  à 
Er  Rameh,  le  Rama  de  la  frontière;  il  faudrait  donc  que  le 
territoire  d'Asser  eût  présenté  à  ce  point  un  étranglement,  eût 
formé  un  couloir  aboutissant  à  Sidon  la  grande,  pour  que  le 
tracé  par  la  vallée  du  M«^jdel  el  Keroum  pût  être  accueilli.  Mais 
que  l'on  se  décide  en  faveur  de  l'un  ou  de  l'autre  système,  il  n'en 
reste  pas  moins  à  déterminer  le  point  où  aboutissait  cette  partie 
de  la  frontière  :  usque  ad  Sidonem  -niagaam. 

On  a  de  tout  temps  été  fort  embarrassé  pour  donner  de  ce  pas- 
sage une  interprétation  complètement  satisfaisante.  Le  Midrasch  * 


»  Guérin,  Galilée,  I.  p.  72. 

*  Ibid,,  1,  p.  4'io. 
»  Ibid.,  I,  p.  455. 

♦  Neubauer,  Géographii  du  Talmud,  p.  295. 


RKCHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE  23 

nous  a  transmis  l'opinion  de  deux  docteurs  ;  Tun  identifie  Sidon 
la  grande  avec  Bagdal  de  Yo,  ou  mieux  Migdal  de  Yo,  localité  qui 
nous  est  absolument  inconnue.  L'autre  traduit  par  Zeboud  de  Gue- 
lilah  et  désigne,  par  conséquent,  le  Kli.  Zeboud,  sur  la  crête  à 
l'ouest  de  Meiroun.  Cette  version  est,  d'ailleurs,  en  contradiction 
avec  la  suite  de  la  description  de  la  Irontière  d'Asser,  laquelle  de 
Sidon  la  grande  gagnait  Horma,  puis  Hosa  (localité  correspondant, 
ainsi  qu'on  le  verra  plus  loin,  au  village  do  Sasa  situé  près  de 
Meiroun).  Le  texte  biblique  place  Sidon  la  grande  à  une  distance 
notable  d'Hosa  ;  le  contraire  ressortirait  de  l'admission  de  l'inter- 
prétation du  talmudiste. 

L'on  a  été  amené,  au  début  de  ce  travail,  à  exposer  les  raisons 
qui  militent  en  faveur  d'un  site  voisin  de  la  côte  du  lac  deGénéza- 
reth  et  de  la  plaine  de  Gennesar.  Il  faut  cependant  reconnaître  que 
cette  solution  soulève,  elle  aussi,  des  objections.  Le  territoire  d'As- 
ser se  serait-il  donc  avancé  en  coin  dans  celui  de  Nephtali,  comme 
il  a  été  constaté  pour  Zabulon?  Asser  aurait-il  confiné  en  un  point 
au  littoral  du  lac  de  Génézareth?  S'il  en  avait  été  ainsi,  Sidon 
aurait  occupé  la  colline  d'Abou  Chouched,  clef  de  la  plaine  de 
Gennesar  :  «  c'était  une  place  forte  dont  un  glacis  de  blocs  de 
basalte  garantissait  les  abords'  ».  Betli  Saïda  aurait  été  un  ves- 
tige de  cette  ancienne  Sidon. 

Mais  comment  concilier  ces  explications  avec  la  situation  attri- 
buée par  Eusèbe  à  'Eixdx  :  Suvàirtst  t'.j  ZaëouXwv  à:tô  toO  vo'tou  xal  tô)   "A  <TT;p 

xaTct  eâXaasav,  OU  encore  avec  la  description  du  tracé  de  la  frontière 
de  Nephtali  :  «  gagnait  de  là  Houqqoq,  touchait  au  sud  Zeboulon,  à 
l'ouest  Ascher  »  ?  Il  faut  donc  admettre  que  dans  l'exposé  du  tracé 
de  la  frontière  d'Asser,  on  a  assimilé  à  Sidon  la  grande  la  Meara 
Sidoniorum,  aujourd'hui  El  Mughar,  à  l'ouest  de  Yakùk. 

Localités  de  la  région  septentrionale  de  Nephtali. 

Avant  de  déterminer  la  frontière  commune  aux  tribus  de  Neph- 
tali et  d'Asser,  il  y  a  lieu  de  rechercher  les  positions  à  attribuer 
aux  localités  de  la  région  septentrionale  de  Nephtali.  Ces  localités 
sont  les  suivantes  -  : 

«  Adama.  Rama,  Haçor,  Qédesch,  Edréi,  Eu-Haçor.  IréÔn,  Migdal- 
El,  Horem,  Beth-Anath,  Beth-Schémesch.  » 
«  36,  et  Edema,  et  Arama,  Asor, 
»  37.  et  Cèdes,  et  Edrai,  Enhasor. 

'  De  Salulcy,  Géographie  comparée.  Journal  des  savants,  septembre  1879,  p.  5;<9. 
»  .losué,  XIX,  36-38. 


24  HE  VUE  DES  ETUDES  JUIVES 

»  38.  et  JeroD  etMagdalel,  Horem  elBelhanalhet  Belhsames.  »(VuIt 
gâte.) 

»  36.  xal  ApiialÔ,  xal  Apa^,X,  xal  Aawp 

))  37.  xa\  Kâôcç,  xa\  'Adaapl,   xal  "Kti^ti  Aobp, 

»   38.  xa\  Kîpwè,   xal  Mï-ya^^aflix,  xal  BaiOBaji?,  xa\  eesïajJLÛ;.  » 

L'énumération  des  localités  de  la  région  méridionale  de  Neph- 
tali  ayant  été  faite  en  allant  du  sud  au  nord,  il  y  a  lieu  de  croire 
que  le  livre  de  Josué  a  respecté  dans  la  suite  de  la  liste  le  même 
ordre  géographique.  On  a  précédemment  déterminé  la  position  de 
Qédesch,  à  Kad<litha  :  les  villes  d'Adama,  Rama  et  Haçor  doivent 
donc  être  cherchées  au  sud  de  Kadditha.  Le  site  de  Rama  a  été 
retrouvé  à  Er  Rameh  '.  Haçor  doit  être  placé  soit  au  Kh.  Zeboud, 
soit  au  Kh.  Chema,  où  l'on  remarque  plusieurs  cavernes  funé- 
raires, creusées  dans  le  roc,  et  un  immense  sarcophage  bisome 
qui  porte  le  nom  de  Sirir-.  Enfin,  Edema,  Apaa-e,  pourrait  être 
identifié  avec  le  Kh.  Oreimeh  situé  sur  le  bord  du  lac  de  Geneza- 
reth.  0  La  colline  désignée  sous  le  nom  de  Tell  el  A'rimeh  a  plu- 
sieurs étages  successifs,  qui  ont  été  régularisés  par  la  main  de 
l'homme.  La  partie  supérieure  affecte  la  forme  d'un  petit  pla- 
teau oblong  jonché  de  débris  de  poterie  et  qu'environnait  jadis  un 
mur  d'enceinte  qui  a  été  presque  complètement  rasé  ^.  »  Ireon 
(leron)  ne  semble  pas  pouvoir  être  ailleurs  qu'au  Kharbet  Yarin. 
«  La  petite  ville  de  ce  nom  occupait  les  pentes  et  le  sommet  d'une 
colline  qu'environnait  jadis  un  mur  d'enceinte  construit  avec 
des  blocs  de  grand  appareil  et  réguliers  '♦.  » 

Des  sites  de  Kadditha  et  de  Kh.  Yarin,  on  déduit  l'emplacement 
d'Edraï,  'Aîsapi  au  Tell  el  Meïdan  près  de  Ras  el  Ahmar,  où  la  carte 
du  Palestine  Fwid  indique  une  ruine  dénommée  Dhahr  el 
Hazarim.  En  Hyzor  serait,  ainsi  qu'il  a  été  dit,  à  Aima. 

Il  semble  qu'au-delà  d'Ireon,  l'énumération  des  villes  de  Neph- 
tali  se  poursuive  dans  la  direction  de  l'ouest.  Deux  de  ces  localités, 
Bethanath  et  Bethsaraes,  ne  purent  être  prises  par  les  gens  de 
Nephtali  ■•  ;  elles  devaient  donc  occuper  un  site  naturellement  fort. 
Cette  considération  appelle  l'attention  sur  les  ruines  de  Kh.  Ka- 
thamoun*^  et  de  Kh.  Rouies',  ces  dernières  voisines  d'un  haut  lieu 
Kenanéen,  comme  le  témoigne  l'existence  du  Oualy  abou  Elioun. 

'  Guérin,  Galilée,  I,  p.  4.">3. 
»  Ibid.,  H,  p.  433. 
>  Ibid.,  I,  p.  214. 

♦  Ibid.,  II,  p.  134, 
5  Jupes,  I,  33. 

*  Guérin,  Galilée,  II,  p.  86. 
?  Ibid.,  II,  p.  73. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQIES  SUR  LA  PALESTINE  25 

Quant  aux  deux  autres,  il  est  difficile  d'établir  des  conjectures  sur 
leur  situation  ;  le  nom  de  l'une  d'elles,  Horera,  se  rapproche  toute- 
fois du  nom  de  Djebel  Haramun  porté  par  une  montagne  à  l'ouest 
de  Yarun. 

Tracé  de  la  frontière  de  Nephtali  et  d'Asser. 

Malgré  l'incertitude  qui  plane  sur  les  emplacements  de  cer- 
taines des  villes  de  Nephtali,  il  est  possible  de  déterminer  le  tracé 
de  la  frontière  commune  à  Nephtali  et  à  Asser. 

Voici  comment  cette  limite  est  définie  par  le  livre  de  Josué  '. 

«  (De  Sidon  la  grande)  elle  tournait  vers  Rama  jusqu'à  la  forteresse 
de  Çor,  puis  vers  Hossa,  et  aboutissait  à  la  mer  près  du  territoire 
d'Akzib.  Il  y  avait  là  Oumma,  Apheq,  Rehob.  » 

»  29.  Revertiturque  in  Horraa  usque  ad  civitatem  munilissimam 
Tyrum,  et  usque  Hosa  ;  erunlque  exitus  ejus  in  mare  de  funiculo 
Achziba  : 

a  30  Et  Amma,  et  Aphec  et  Rohob.  » 

«  '29.  Ka\  dtvaaTpi'jsi  xàc  5pia  ei;  Paiià  xal  'éto;  itTjYTiî  MafffaauàT  xa\  twv  Tupiwv, 
xat  àvaaTp^t|/Et  ih  6p'.A  èirl  'laaVf ,  xat  îd'zii  i\  Sié^oSoç  ajToO  i\   Bâ^aaaa  xal  Airo^^ê, 

»  30.  xa\  'Ap-/6ë,  xa\   Atpèx,  xal  PaaO.  » 

On  a  indiqué  plus  haut  la  position  de  Rama  et  celle  d'Haçor. 
Hossa,  Osa  de  S.  Jérôme,  usa  d'Eusèbe,  semble  pouvoir  être  iden- 
tifié avec  la  localité  actuelle  de  Sasa,  qui  d'après  l'itinéraire  du 
voyageur  Isaac  Chalo  (1334)-,  dépendait  de  la  tribu  d'Asser. 

On  peut,  d'après  cela,  admettre  que  la  frontière  suivait  la  ligne 
de  faîte  marquée  sur  la  carte  du  Palestine  Fwid  par  les  sommets 
Jebel  Tawil,  J.  Sod,  J.  el  Hanbely  à  l'est  de  Kefr  Anan,  J.  Umm 
Harûn  à  l'est  de  Ferradieh  et  de  Er  Rameh,  J.  el  Murabba,  et  J. 
Mugharet  Shekâb  qui  commandent  le  Kharbet  Samurah,  Kh. 
Zebiid  à  l'ouest  du  Kh.  Sheraa,  Jermuk  près  du  village  du  même 
nom,  J.  er  Zebâik,  J.  ed  Dô,  c'est-à-dire  la  ligne  de  partage  des 
eaux  coulant  au  Jourdain  et  à  la  Méditerranée.  Cest  là  une  fron- 
tière naturelle  bien  accusée  par  le  relief  du  terrain  ;  elle  aboutit 
d'ailleurs  au  village  de  Sasa. 

La  frontière  devait  laisser  au  nord  toutes  les  eaux  coulant  au 
Nahr  Kâsmyeh,  (Litany)  ;  elle  gagnait  donc  par  le  Kli.  Menarah 
le  sommet  du  Jebel  Adâther,  puis  atteignait  Kh.  er  Rouiess. 

>  Josué,  XIX,  29,  30. 

«  Guérin,  aalilée,  II,  p.  94. 


26  HEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


Conclusion. 


Cette  revue  des  villes,  des  territoires  de  Zabulon,  d'Asser  et 
de  Nephtali  justifie  d'une  façon  presque  absolue  les  indications 
données  sur  le  tracé  de  la  frontière  septentrionale  de  la  terre 
d'Iraël.  On  constate  toutefois  que,  dans  sa  partie  médiane,  le  tracé 
doit  être  reporté  un  peu  plus  vers  le  nord. 

On  va  maintenant  demander  aux  documents  assyriens  une  véri- 
fication décisive  des  résultats  obtenus. 


III 

LA  CAMPAGNE  D'ASUR-NASIR-AB'AL  DANS  LE  PAYS  DE  PATIN. 

L'inscription  des  annales  d'Asur-nâsir-ab"al'  (88.5-860  av.  J.-C.) 
donne  le  récit  fort  instructif  d'une  campagne  du  monarque  assy- 
rien qui  l'amena  des  rives  de  l'Euphrate  aux  confins  du  pays 
d'Israël,  et  de  ces  confins  au  littoral  phénicien. 

a  Je  partis  de  Bit-Adini,  franchis  l'Euphrate  aux  hautes  eaux,  sur 
des  embarcations  de  peaux  de  mouton,  je  m'approchai  de  Gargamis. 

Je  reçus  le  tribut  de  Sangara ,  roi  du  pays  Hatti J'incorporai 

dans  ma  colonne  les  chars,  les  cavaliers  et  les  hommes  légèrement 
armés  de  la  ville  de  Gargamis.  Tous  les  rois  de  leurs  contrées  se  pré- 
sentèrent à  moi,  embrassèrent  mes  pieds  ;  je  pris  leurs  otages  :  ils 
s'élancèrent  devant  moi,  dans  la  direction  du  Liban.  Je  partis  de 
Gargamis,  traversai  les  collines  Munzigani  et  Hamurga,  laissai 
Ahâmu  sur  la  gauche,  m'approchai  de  Hazazi,  la  ville  de  Lubarna 
le  Patinien.  Je  reçus  de  l'or  et  des  étoffes  de  lui.  Je  poursuivis  ma 
route,  franchis  l'Apri  et  y  établis  un  campement.  Je  m'éloignai  de 
l'Apri,  et  m'approchai  de  Kunulua,  la  capitale  de  Lubarna  le  Pati- 
nien. En  face  de  mes  armes  puissantes,  de  ma  bataille  terrifiante,  il 
eut  peur,  et,  pour  sauver  sa  vie,  se  mit  à  mes  pieds.  Je  reçus  de  lui 
comme  tribut...  Je  lui  fis  grâce,  incorporai  dans  ma  colonne  les 
chars,  les  cavaliers,  les  hommes  légèrement  armés  des  Patiniens  ;  je 
pris  leurs  otages.  Là,  je  reçus  le  tribut  de  Gusi  de  Jahana...  Je 
m'éloignai  deKunalua,  capitale  de  Lubarna  le  Patinien,  je  franchis 

*  J.  Oppert,  Histoire  des  empires  de  Chaldi'e  et  d'Assyrie,  Versailles,  1865;  Rod- 
well,  dans  les  Records  of  the  Past.  (III)  ;  Sclirader,  Keilinschriften  und  Geschichts- 
forschung,  p.  181  et  suiv.  ;  Peiser,  dans  la  Keilinschriftliche  Bihliothek,  1,  p.  107  et 
suiv. 


RECHERCHES  GEOGRAPHIQUES  SLR  LA  PALESTINE  27 

(l'Arantu),  je  campai  sur  les  bords  de  l'Arantu.  Je  m'éloignai  de 
j'Aranlu  et  m'engageai  dans  les  monts  Yaraki,  Ja'luri.  Je  traversai 
le  pays  .  ..ku,  je  campai  sur  le  bord  du  Sangura.  Je  m'éloignai  du 
Saagura,  et  m'engageai  dans  les  monts  Saraliui,  Girpâni.  Je  campai  à 
;  j'entrai  dans  Aribua,  forteresse  de  Lubarna  le  Palinien,  et  la 
plaçai  sous  ma  domination  immédiate.  Je  recueillis  les  moissons  du 
Luhuli  et  les  mis  en  tas.  Je  donnai  une  tète  dans  son  palais,  et  établis 
là  des  colons  assyriens.  Pendant  qu'ils  se  maintenaient  dans  Aribua, 
je  conquis  les  villes  du  Luhuti,  massacrai  leurs  nombreux  défen- 
seurs, et  mis  ces  villes  à  feu  et  a  sac.  Je  fis  empaler  les  prisonniers 
en  face  de  ces  villes.  Puis,  je  me  dirigeai,  du  côté  du  Liban,  montai  à 
la  grande  mer  du  pays  Aharri.  Je  puiifiai  mes  armes  dans  la  grande 
mer  et  fis  des  sacrifices  aux  Dieux.  Je  reçus  les  tributs  des  rois  du 
littoral,  de  Surra  (Tyr),  Siduu,  Gubal  (Byblos),  Mahallata,  Maisa, 
Kaisa,  du  pays  Aharri  et  d'Armada,  au  milieu  de  la  mer...  Ils 
embrassèrent  mes  pieds.  Je  montai  sur  les  cimes  de  l'Hamanus.  J'y 
fis  des  poutres  de  cèdres,  de  cyprès...,  j'otfris  un  sacrifice  aux 
Dieux.  J'élevai  une  inscription  sur  les  exploits  par  moi  accomplis.  » 

Ainsi,  Asur-nasir-abal  pénétra  en  Syrie  par  le  pays  de  Gar- 
garais  ;  il  partit,  donc,  de  la  région  de  TEuphrate  comprise  entre 
Biredjik  et  l'embouchure  du  Sadjour,  pour  marcher  sur  Hasaz, 
aujourd'hui  Azas,  à  une  journée  au  nord-ouest  d'Alep.  Il  traversa 
l'Apri,  rivière  qui  porte  aujourd'hui  le  nom  dAfrim  et  qui  déverse 
ses  eaux  dans  le  lac  d'Antioche  ;  puis  il  pénétra  dans  Kounouloua, 
capitale  du  pays  de  Patin,  et,  après  un  nouveau  passage  de  rivière,  . 
fit  halte  sur  les  bords  de  l'Arantou,  l'Oronte  des  classiques,  aujour- 
d'hui appelé  Nahr  el  Asy. 

Un  coup  d'œil  jeté  sur  la  carte  de  Peutinger  nous  montre  que 
la  route  suivie  par  le  conquérant  doit  coïncider  avec  la  voie  allant 
du  Zeugma  à  Gephyra  par  Azas  (Thuraej  et  Gindares,  Dans  ce 
trajet,  Asur-nasir-abal  traversa  les  cantons  moniueux  de  Moun- 
zigan  et  de  Hamourga,  pour  lesquels  aucune  identiflcation  n'a  été 
jusqu'ici  proposée. 

Position  du  pays  Ahâmii. 

Il  laissa  sur  la  gauche  le  pays  Ahamu  ou  Aliana,  dans  lequel  il 
faut  reconnaître  soit  la  contrée  de  Merabedj,  soit  la  région  d'Alep  ; 
et,  comme  le  souverain  d'Ahanu,  Gusi,  vint  rendre  hommage 
au  monarque,  à  Kounouloua,  il  semble  rationnel  d'admettre  qu'il 
ht  cette  démarche  quand  déjà  le  conquérant  était  parvenu  à  proxi- 
mité de  sa  résidence,  et,  par  conséquent,  d'établir  un  rapproche- 
ment entre  le  pays  d'Ahanu  et  la  contrée  d'Alep. 


2S  RKVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


Emplacement  de  la  ville  Halmân. 

Mais  s'il  en  est  ainsi,  où  placer  la  ville  de  Halmân,  que  l'on  a 
souvent  assimilée  à  Haleb  ? 

Cette  ville  ne  devait  pas  dépendre  du  pays  d'Ahamu.  Du  moins 
voit-on  la  prise  d'Halmàn  par  Salmanasar  II,  dans  sa  6«  campagne, 
précédée  de  l'acte  d'hommage  que  fit  au  conquérant  Arami.  fils  de 
Gusi.  Dans  cette  campagne  \  Salmanasar  partit  de  la  ville  d'As- 
sur-Utir-Asbat,  située  sur  la  rive  droite  de  1  Euphrate  et  sur  le  bord 
du  fleuve  Sagaru  (le  Sadjour  actuel),  pour  marcher  sur  Halmân,  il 
offrit  là  un  sacrifice  au  dieu  Dadda  de  Halmân,  puis  il  se  porta 
sur  les  villes  du  pays  d'Amat,  Adennu,  Masgâ,  Argana  et  Qarqara, 
et  vint  ensuite  se  heurter  aux  forces  de  Dadda-ldri,  roi  du  pays 
d'Imerisu,  d'Irhulini,  du  pays  d'Amat  et  des  12  rois  du  pays  Hatti 
et  du  bord  de  la  mer. 

Halmân  était  donc  le  centre  d'un  culte  au  dieu  Dadda.  La  mon- 
tagne voisine  de  Membedj  s'appelle  Djebel  Dur  Dadda,  et  Membedj 
a  toujours  été  une  ville  sainte. 

Dans  la  10«  campagne,  Salmanasar  mit  à  sac  les  villes  de  San- 
gar  de  Gargamis,  puis  s'empara  d'Arnê,  ville  royale  d'Arami  et 
de  100  de  ses  villes.  11  vint  ensuite  se  heurter  aux  forces  de  la 
coalition  déjà  combattue  dans  la  6«  campagne. 

La  lutte  recommença  entre  les  mêmes  adversaires  dans  ia 
11«  campagne.  Salmanasar  s'empara  de  97  villes  de  Sangar,  de 
100  villes  d'Arami,  puis  il  marcha  sur  les  villes  d'Amat,  Astamaku, 
aujourd'hui  Tell  es  Stoummak  ou  Stuma-,  et  quelques  autres 
villes.  Après  avoir  défait  les  coalisés,  il  s'empara,  au  retour, 
d'Apparazu,  ville  forte  d'Arami,  et  reçut  alors  le  tribut  du  roi  de 
Patin. 

Dans  sa  première  campagne,  Salmanasar  revenant  du  mont 
Atalur  sur  la  côte  de  la  mer,  s'empara  des  villes  de  Tayà. ..  de 
Hazazu  (Asaz  [)récédemment  pris  par  Asur-nasir-ab'al),  de  Lulia, 
de  Butamù,  villes  du  roi  de  Patin,  et  reçut  alors  le  tribut  d'Arami, 
fils  de  Gusi. 

De  ces  renseignements  il  résulte  que  le  pays  d'Ahanu  successi- 


'  Amiaud  et  Scheil,  Les  Inscriptions  de  Salmanasar,  II,  p.  39,  41. 

*  «  A  dix  minutes  au  nord  du  village  de  Sluma,  à  gauche  de  la  route  se  trouve 
une  ruine,  en  grande  partie  couverte  de  terre,  dont  personne  ne  put  me  dire  le  nom. 
Du  genre  des  pierres  employées  à  la  construction,  j'ai  pu  conclure  que  ces  ruines 
sont  antérieures  à  la  coiiquêle  niusuimaDe.  >  Sachau,  Seise  in  Si/rien  und  Mesopo- 
tamien,  p.  100.  Burckhardt  avait  jadis  signalé  également  Tell  Stommack,  colline 
isolée  paraissant  l'œuvre  de  l'homme  {Meisen  in  Syrien,  p.  212). 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SLU  LA  PALESTINE  29 

vement  gouverné  par  Gusi  et  par  Arami,  son  fils,  confinait  à 
l'ouest  et  au  nord  au  pays  de  Patin,  et  au  nord -est  au  pays  de 
Gargamis.  Le  pays  d'Halmân  était  au  sud  de  ce  dernier  pays. 

Au-delà  de  Kunalua,  Asur-nàsir-ab'al  franchit  une  rivière  dont 
le  nom  se  trouve  mutilé  sur  la  pierre  ...tu:  ce  n'est  pas  évi- 
demment de  l'Afrim  qu'il  s'agit  ici,  mais  d'un  autre  cours  deau; 
la  syllabe  finale  conservée  étant  la  même  que  celle  du  fleuve 
Araantu  nommé  aussitôt  après,  on  en  a  conclu  naturellement  que 
le  conquérant  assyrien  était  passé  avec  ses  bandes  armées  sur  la 
rive  gauche  de  l'Oronte. 

PosUion  du  pays  dCIaluri. 

Cette  interprétation  est,  en  quelque  sorte,  justifiée  par  le  rap- 
prochement que  l'on  peut  établir  entre  le  pays  d'Ia'turi  et  Yliu- 
rœorum  gentem  signalée  par  Pline  '  dans  son  énuméralion  par 
ordre  alphabétique  des  diverses  cités  et  populations  de  la  Cœié- 
Syrie. 

Une  inscription-,  publiée  en  1745,  nous  fait  connaître  que  les 
Ituréens  habitaient  le  Liban  :  «  Idem  jussic  Quirini  aduersas 
Jlureos  in  Libano  Monte  casteUiim  eorum  cœpUy>.  Cette  don- 
née concorde  avec  les  deux  passages  de  Strabon  relatifs  à  ce 
peuple  ^. 

«La  région  montagneuse  des  Ituréens  »,  dit-il  d'abord;  puis 
après  avoir  parlé  de  la  Laodicée  libanienne,  il  ajoute  :  des  «  Itu- 
réens et  des  Arabes,  tous  bandits,  occupent  toute  la  région  monta- 
gneuse. »  La  position  de  cette  Laodicée  étant  connue  par  l'itiné- 
raire d'Antonin  [route  d'EtJiesa,  Homs,  à  Heliupoli,  Baaibeck,  à 
XVIII  railles  romains  d'Emesa),  les  ruines  en  ayant  été  retrouvées 
par  M.  Sachau'*  à  l'extrémité  sud  du  lac  de  Kédes  à  Tell  Nébî 
Mindù,  on  est  fixé  sur  la  région  du  Liban  occupée  par  les  Ituréens. 
Cette  région  convient  bien  au  pays  d'Ia'turi,  et  l'on  peut  consi- 
dérer comme  acquise  l'identification  du  pays  d'Ia'turi  et  de  la  con- 
trée des  Ituréens. 

Le  nom  du  fleuve  franchi  par  Asur-nasir-ab'al  est  donc  bien, 
comme  on  l'avait  conjecturé,  l'Araantu,  l'Oronte. 

'  L.  V,  c.  XIX. 

'  Van  der  Miedea,  Disputatio  critica  ad  marmor  vctiis  inquo  de  P.  Sulptcio  Qui' 
rino,  de  censu  Syria,  de  Itureis.  Trajecti  ad  Hhenutn,  1743. 
»  L.  XVI. 
*  Sacliau,  Revse  in  Syrien  wnd  Mesopotamien,  p.  b8. 


30  REVUK  DES  ÉTUDES  JUIVES 


Position  du  pays  d'Varahi. 

Après  avoir  traversé  ce  cours  d'eau,  le  conquérant  assyrien, 
pour  atteindre  le  pays  d'Ia'turi,  dut  traverser  les  monts  Yaraki. 

Ce  nom  semble  avoir  subi  la  même  transformation  que  la  Jé- 
richo biblique,  aujourd'hui  appelée  Errilia.  On  retrouve,  en  effet, 
sur  la  rive  droite  de  TOronte  le  Djebel  er  Riha.  Son  identification 
avec  le  pays  Yaraki  se  trouve  justifiée  par  le  passage  suivant  de 
l'inscription  du  Taureau  •  :  «  Dans  la  11^  année  de  mon  règne,  je 
partis  de  Ninive.  Pour  la  9*  fois,  je  passai  FEuphrate  dans  sa  crue. 
Je  m'emparai  de  9*  villes  de  Sangar,  je  m'emparai  de  100  villes 
d'Arami ,  je  les  renversai,  je  les  détruisis  et  les  livrai  aux  flammes. 
Je  pris  le  long  de  TAmanus  'Hamani  ,  je  franchis  la  montagne 
d'Yaraku,  et  je  descendis  aux.  villes  du  prince  d'Amat.  Je  m'em- 
parai d'Astamaku  avec  quelques  autres  villes...  »  Or,  précisé- 
ment l'on  retrouve  au  pied  du  Djebel  er  Riha  la  localité  antique 
de  Stouma  ou  Tell  Stoumak. 

11  est  également  question  de  la  montagne  Yaraki  dans  un  frag- 
ment d'inscription  de  Tiglath  Piléser  III  *  : 

'(  La  ville   Us(?)-nu-u,  la  ville  Si-an-nu  du  liltoral  avec  les 

villes jusqu'à  la  montagne  Sa-u-i,  aux  monls  du  Liban,  et  ils 

subjuguèrent  (?)  le  pays  Ba- -li-sa-bu-na  jusqu'à  la  montagne  Am- 
ma-na,  à  la  montague  du  Aw-bois,  le  pays  Sa-u  tout  entier,  le  dis- 
trict de  Kar-Rammàn  ;ou  Kar  Dadda),  la  ville  Ha-la-'rik-ka',  le  dis- 
trict de  Nu-ku-di-na,  le  pays  Ha-su,  avec  les  villes  autour  de  la  ville 

A-ra-a ensemble,  les  villes  aux  alentours,   la  moutagne  Sa-ar- 

bu-u  a  toute  entière,  la  ville  As-ha-ni,  la  ville  Ja-da(la)-bi,  la  mon- 
tagne Ja-ra-ku  toute  entière,  la  ville  Il-li-la-ar-bi,  la  ville  Zi-ta-a-nu, 

jusqu'à  la  ville  A-ii-in-ni la  ville   Bu-ma-mi.  19  cantons  de  la 

ville  Hamalli  avec  les  villes  qu'ils  renferment. ...» 

Si  l'on  reprend  cette  énumération  en  sens  inverse,  on  est 
amené,  contrairement  à  l'opinion  de  M.  Sachau  \  qui  veut  re- 
trouver l'Ellitarbi  de  Tiglath-Piléser  III,  dans  une  localité  située 
entre  Alep  et  Antioche,  et  appelée  en  syrien  Lîtâreb,  en  arabe  El- 
Atharib,  (Attâpêai  de  l'empereur  Julien*),  —  à  placer  Il-li-ta-ar-bi 
au  nord  du  Djebel  er  Riha,  à  Idlib. 

*  Amiaud  et  Sclieil,  Les  Inscriptions  de  Salmanasar,  p.  53. 

*  k'eilinscfi'i/îiche  Bihliothek.  t.  II,  p.  27. 

'  Sitzunq.sberichie  d.  K.  Preissische  Akai.  der  W^ssensckaflen,  1892,  20-21  ; 
Sachau,  Mt'muire  sur  la  ijivgrapkie  historique  de  la  Syrie  septentrionale. 

*  Juliani  Imperatoris  ipistola,  27. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        31 

Ja-da(ta)bi  et  As-ha-ni  correspondraient  à  deux  localités  visi- 
tées par  EH  Smith  *,  dans  sa  route  d'Idlib  à  Schoghr,  Burdsch 
Hâb  (l'Haab  ou  Hap  des  croisés)  '^  et  Kanis  en  Nahleh. 

A-ra-a  serait  TArra  de  l'Itinéraire  d'Antonin  sur  la  route  de 
Beroa  à  Epiphania,  aujourd'hui  Maaret-en-Noaman.  C'était  déjà 
du  temps  de  Yakubi  (vers  891  de  l'ère  chrétienne)  une  ancienne 
cité  en  ruines  ^. 

Le  pays  Hasu  comprenait,  sans  nul  doute,  les  territoires 
de  deux  localités  aujourd'hui  dénommées  Khirbet  Has  et  Has, 
dont  l'antiquité  est  attestée  par  des  inscriptions  des  iv«  et 
v^  siècles,  recueillies  par  MM.  Waddington  et  de  Vogïié*. 

Tous  ces  pays  et  localités  se  trouvent  échelonnés  dans  une 
même  direction,  ce  sont  les  jalons  de  la  route  parcourue  en  sens 
inverse  par  Tiglath  Piléser  IK,  et  cette  route  eût  mené  certaine- 
ment à  Apamée  ^aujourd'hui  Kal'at  el-Mudik),  si  cette  ville  eût 
alors  existé. 

On  ne  saurait  en  douter  en  retrouvant  sur  la  rive  gauche  de 
rOronte,  près  d'un  gué,  à  une  demi-heure  au  sud-ouest  du  village 
de  Skélebijjé,  le  Tell  el  Kottra  ^ ,  dont  le  rapprochement  avec 
Hatta-[rik-ka]  paraît  naturel. 

Apamée  n'avait  donc  pas  encore  de  norn  dans  l'histoire  du  temps 
de  Tiglat  Pileser  III,  mais  le  pays  qui  devait  en  constituer  plus  tard 
le  territoire  s'appelait  Nu-ku-di-na.  Malala  •"•,  en  attribuant  à  Apa- 
mée comme  premier  nom  celui  de  *apvaxTi,  nous  a  peut-être  trans- 
mis la  tradition  altérée  de  l'état  primitif  du  pays  :  il  aura  écrit  <i>ap- 

vaxTfi  au  lieu  de  Ka»apNax£6. 

La  route  par  laquelle  TiglathPiléser  III  franchit  la  chaîne  du 
Liban,  en  venant  de  la  côte,  nous  est  inconnue  ;  elle  traverse  une 
région  qu'aucun  voyageur  n'a  jusqu'ici  explorée. 

De  cette  digression,  il  est  permis  de  conclure  que  le  nom  d'Ya- 
raki  a  été  surtout  attribué  à  l'époque  assyrienne  au  massif  mon- 
tagneux d'Er  Riha,  situé  sur  la  rive  droite  de  l'Oronte;  mais  rien 
ne  s'oppose  à  ce  que  les  monts  situés  sur  la  partie  correspon- 
dante de  la  rive  gauche  aient  porté  le  même  nom. 


»  Rilter,  Syrien,  t.  II,  p.  Wj'i. 

*  Rey,  Colonies  fi-anques  en  Syrie,  p.  341. 

*  Guy  Le  Siraiif^e,  Palastina  tinder  thc  Moslems,  p.  495. 

*  Ph.  Le  Bas,  Voyage  archéologique  en  Grèce  et  en  Asie-Mineure,  t.  III,  explication 
des  inscriptions,  p.  616. 

5  Burckhardi,  Rcisen  in  Syrien,  p.  242. 

6  Malala,  p.  2(l3. 


32  RKVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Situation  de  la  rwière  Sangoura. 

Après  avoir  quitté  les  montagnes  d'Iaturi,  Asur-nasir-abal  tra- 
versa un  pays,  dont  le  nom  nous  est  parvenu  sous  une  forme 
mutilée.  .  .  ku,  pour  gagner  les  bords  de  la  rivière  Sangoura. 
Qu'il  ne  sagisse  pas  d(3  laffluent  de  TEuphrate  qui  porte  le  nom 
de  Sadjour,  le  Sagura  des  inscriptions  de  Salmanasar  II,  cela  ré- 
sulte de  la  marche  même  du  conquérant  remontant  le  cours  de  la 
vallée  de  l'Oronte. 

Cette  direction  mène  à  la  source  du  Xalir  el  Andscliar,  que  les 
géographes  arabes  appellent  Aïn  el  Jarr.  «  Ici,  nous  dit  Abulféda, 
sont  des  ruines  de  constructions  en  énormes  pierres;  il  se  trouve 
à  un  mille  au  sud  de  Baalbeck.  A  Aïn  al  Jarr  commence  la  grande 
rivière  qui,  sous  le  nom  de  Litany,  traverse  la  Bikaah.  » 

Sangura  s'est  transformé  en  Angar  (prononcez  Andjar)  par  la 
perte  de  la  sifflante  initiale. 

Les  ruines  dont  parle  Abulféda  frappent  aujourd'hui  encore 
l'attention  des  voya*^'eurs,  qui  ne  manquent  pas  d'aller  les  visiter, 
en  se  rendant  de  Beyrouth  à  Damas;  elles  sont  situées  à  une  faible 
distance  au  nord  de  la  route  qui  relie  ces  deux  grandes  cités. 
Cette  voie  gagne  un  peu  plus  loin,  par  un  col  très  bas,  la  tête  de 
rOued  at  Teim,  qui  court  droit  du  sud  vers  le  lac  Hùleh.  Faut-il 
voir  dans  ce  nom  une  transformation  du  Saratin  assyrien,  on  n'ose- 
rait l'affirmer  ;  mais,  en  revanche,  on  croit  pouvoir  avancer  que  la 
partie  inférieure  de  cette  vallée  avait  pris  le  nom  d'un  torrent  qui 
s'y  déversait,  l'Ain  Djerfa,  l(;quel  tirait  son  nom  d'une  localité 
antique  située  sur  ses  bords  \  et  qu'elle  correspondrait,  dès  lors, 
au  pays  montueux  de  Girpa  des  Assyriens. 

Situation  du  pays  Luituti. 

Celte  opinion  est  corroborée  par  l'existence  d'une  grande  plaine 
au  (It^bouché  de  la  vallée.  C'est  la  plaine  de  Mispé,  que  le  livre  de 
Josué  place  au  pied  de  l'Hermon.  Elle  confine  au  lac  el  lluleh  sur 
la  rive  occidentale  duquel  s'étend  l'Ard  el  Kheit  ou  le  pays  de 
Klieit;  l'Ai  Khait  de  Dimaski*,  le  pays  de  Luhuti  d'Asur-nasir- 
ab'al. 

Le  conquérant,  en  arrivant  dans  la  plaine,  avait  rencontré  la 

>  Guérin,  Galilée,  II,  p.  287. 

*  Le  Sirange,  Palastina  under  the  MosUmi,  p.  484. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        33 

route  qui  a  dû  depuis  les  temps  les  plus  reculés  relier  Tyr  à  Damas, 
et  qui  figure  sur  la  carte  de  Peutinger  parmi  les  voies  romaines. 
C'est  le  chemin  qu'il  prit  au  départ  d'Aribua  ;  il  gagna  la  côte 
phénicienne,  et  la  suivit  en  se  dirigeant  vers  le  nord. 

Déductions  à  tirer  du  bulletin  de  campagne  d'Asur-nâsir-ab'al. 

Cette  campagne  d'Asur-nâsir-ab'al  nous  fournit  de  précieux 
renseignements. 

On  est  tout  d'abord  frappé  de  voir  le  conquérant,  après  avoir 
précipité  sa  marche  vers  le  sud,  se  détourner  brusquement  vers 
l'ouest  et  gagner  la  côte.  On  ne  saurait  expliquer  ce  mouvement 
par  l'existence  d'obstacles  naturels.  Il  paraît  plus  vraisemblable 
d'attribuer  la  résolution  d'Asur-nâsir-ab'al  au  respect  que  lui  ins- 
pirait le  peuple  avec  lequel  il  aurait  dû  lutter,  s'il  avait  poursuivi 
sa  course  vers  le  sud  au-delà  du  pays  de  Luhuti.  Les  Assyriens 
ne  s'étaient  pas  encore  attaqués  au  pays  de  Bit-Omri,  alors  gou- 
verné par  le  roi  Jéhu  :  ils  évitèrent  de  l'envahir,  et  s'ils  occu- 
pèrent le  territoire  des  Danites,  qui  avalent,  du  reste,  probablement 
échappé  depuis  longtemps  à  l'influence  d'Israël,  ils  gagnèrent  la 
côte  sans  pénétrer  sur  le  territoire  des  Bit-Omri. 

Ces  déductions  confirment  les  considérations  qui  ont  été  pré- 
sentées sur  la  limite  septentrionale  de  la  Palestine. 

Le  bulletin  de  campagne  d'Asur-nasir-ab'al  nous  montre  égale- 
ment quelle  était  à  cette  époque  l'importance  du  royaume  de 
Patin.  Il  s'étendait,  au  nord,  au  delà  d'Asaz,  et  allait,  au  sud, 
jusqu'à  la  vallée  du  Jourdain. 

Ce  royaume  ne  devait  pas  tarder,  d'ailleurs,  à  subir  un  premier 
démembrement.  A  Liburna  succéda  le  roi  Sapalulme  ',  auquel  Sal- 
manasar  II,  dans  sa  première  campagne  (859),  infligea  une  san- 
glante défaite.  Après  sa  mort,  la  partie  méridionale  de  Patin 
constitua  le  royaume  d'Amat  (854)  sous  l'autorité  d'Irliulini  -  ;  le 
royaume  de  Patin  fut  réduit  aux  cantons  du  Nord  avec  Girparuda 
pour  chef  =*.  Tandis  qu'Irhulini  défendait  son  indépendance  contre 
les  rois  d'Assyrie,  Girparuda  se  faisait  leur  humble  vassal  ;  il  eut 
pour  successeur  Lubarni.  Celui-ci  ne  garda  pas  longtemps  le  pou- 
voir; il  fut  massacré  par  ses  sujets,  qui  appelèrent  à  leur  tête 
Surri  (832).  Cette  révolte  devait  être  la  conséquence  d'une  réaction 

'  Amiaud  et  Scheil,  Les  Inscriptions  de  Salmaiiasar,  II,  p.  17  ot  19. 
»  lbid.,Tp.  37,  41.  53,  57. 
'  Ibid.,  p.  39,  .^5. 

ï.  XXVI,  N»  51.  -i 


31  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

contre  l'influence  assyrienne.  Car  on  voit  Salmanasar  II,  à  la 
nouvelle  de  l'insurrection,  marcher  sur  Xvinulua,  la  capitale  de 
Patin,  et  frapper  lourdement  les  chefs  du  mouvement  national'.  Il 
imposa  à  Patin,  pour  roi,  Sâsi,  fils  d'Ussà,  et  fit  dresser  sa  propre 
statue  dans  le  temple  érigé  aux  dieux  de  Patin,  au  milieu  de  la 
capitale  du  royaume. 

Après  Sasi,  le  pays  dut  être  gouverné  par  des  administrateurs 
assyriens.  L'on  cesse  dès  lors  de  rencontrer  dans  les  listes  de  tri- 
butaires l'hommage  d'un  roi  de  Patin.  Il  y  eut  sans  doute  diffé- 
rentes tentatives  de  rébellion  parmi  les  vaincus,  car  l'on  voit 
figurer  dans  les  listes  d'éponymes-  sous  Rammân-Niriri  III,  en 
l'an  806,  une  campagne  contre  Arpad  (auj.  Tel  Erfât),  en  l'an 
805,  une  autre  contre  Azaz,  et,  sous  Asurdan,  en  l'an  754,  une  nou- 
velle contre  Arpad.  Sous  Tiglath  Piléser  III,  la  révolte  fut  parti- 
culièrement sérieuse  :  il  fallut  faire  pendant  trois  années  (742-'740) 
le  siège  d'Arpad  ;  une  quatrième  campagne  fut  même  nécessaire 
pour  pacifier  le  pays. 

Sur  les  ruines  du  pays  de  Patin,  un  nouveau  royaume  avait 
surgi,  le  royaume  d'Unki\  Son  souverain,  Tutammu,  n'était  pas 
bien  disposé  pour  les  Assyriens;  Tiglath  Piléser  s'empara  de  sa 
capitale  Kinalia ,  et  fit  dresser  son  trône  au  centre  du  palais  royal  ; 
il  soumit  le  pays  d'Unki  et  mit  à  sa  tête  un  administrateur  assy- 
rien. Il  déporta  sans  doute  la  plupart  des  habitants  du  pays,  car  il 
jugea  utile  d'amener  des  captifs  d'origine  étrangère  : 

«  600  captifs  de  la  ville  d'Amlati  des  Damuni;  5,400  captifs  de 
la  ville  de  Dur,  j'établis  comme  colons  dans  la  ville  de  Kunalia, 

les  villes  Huz('?)arra,  Tai,  Tarmanazi,  Kulmadara,  Hata- 

tirra,  Sagillu  du  pays  Unku.  » 

Quelques-uns  de  ces  noms  ont  survécu  pour  nous  montrer  que 
le  royaume  d'Unki  n'était  pas  réduit  à  la  plaine  de  l'Amk,  VUnchœ 
de  Quinte-Curce%  mais  qu'il  comprenait  encore  les  environs  du 
Djebel  Sém'àn.  Comment,  en  effet,  ne  pas  reconnaître  Hatatirra 
dans  le  vilage  deKhatoura^,  Huzarru  dans  la  localité  voisine 
d'Azéri*^,  Sagillu,  avec  suppression  de  la  sifflante  initiale,  dans  les 
ruines  imposantes  de  la  petite  vallée  d'Anguli  ',  Taï  dans  les  ruines 


»  Ibid.,  p.  67. 

*  Schrader,  Die  Keilinschriftentind  Jas  Altc  Testament,  p.  481,  483  et  487. 

*  Smilh,  Assyriaii  Discuveries,  p.  274;  Schrader,  Die  Ketliiischriflen  und  das  Aite 
Testament,  p.  249,  K'cilinschriftlichc  Bihliothek,  II,  p,  29. 

■*  De  rébus  gestis  Alexandri  Magiii,  IV,  1, 

5  Ph.  Lebas,  Voyage  areh^ûlogi(jue,  t.  III,  p.  6"2o. 

^  Note  de  voyage.  M.  Sachau  appelle  ce  village  Hazre. 

'  Hitler,  Syrien,  p.  1648. 


RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES  SUR  LA  PALESTINE        35 

voisines  du  village  de  Kefr  Tâi  •  ?  N  était  la  syllabe  finale  de  Tar- 
manazi,  qui  se  retrouve  dans  les  noms  actuels  de  certains  villages 
de  la  r(5gion,  Teftenâz,  Armenaz,  on  serait  tenté  de  chercher  le 
site  de  cette  localité  antique  dans  le  village  de  Tarmanîn. 

Malgré  toutes  les  mesures  prises  pour  l'asservissement  du  pays, 
les  habitants  ne  demandaient  qu'une  occasion  pour  recouvrer  leur 
indépendance.  Ils  écoutèrent  donc  volontiers  les  propositions 
d'Iaubi'd  d'Amat  et  se  déclarèrent  indépemlants.  Mais  les  troupes 
de  Sargon  -  en  eurent  vite  raison,  et  Arpad  fut  une  nouvelle  fois 
repris  (720). 

C'est  ainsi  que  disparut  à  son  tour  de  l'histoire  le  peuple 
de  Patin. 


G.  Marmier. 


1  Sachau,  Reisen  in  Sijnen^  p.  4o9. 

*  Keilinschriftliche  Bibliothek,  t.  II,  p.  '61. 


QUID  JUDi:0  CUM  VERRE  ? 


Plufarque,  dans  la  Vie  de  Cicéron,  rapporte  un  bon  mot  célèbre 
qui  aurait  été  prononcé  à  l'occasion  du  procès  de  Verres  K  Voici 
ce  pMssage,  dans  la  familière  version  d'Amyot  :  «  Lps  Romains 
appellent  un  pourceau  qui  n'est  point  châtré  Verres,  c'est-à-dire  un 
verrat.  Or  y  avoit-il  un  nommé  Cécilius,  fils  d'un  serf  afifranchy, 
qui  estoit  soujjçonné  d'adhérer  à  la  loy  des  Juifs.  Cestuy  Cécilius 
vouloit  débouster  les  Siciliens  de  cette  accusation  de  Verres  et  que 
la  charge  de  l'accuser  luy  fust  baillée  à  luy  seul.  Cicéron,  se 
moquant  de  cette  sienne  poursuite,  luy  dit:  Quelle  chose  peut  avoir 
un  juif  à  démesler  avec  un  verrat?  »  Et  le  naïf  traducteur  ajoute 
en  note:  «  Pour  autant  que  les  Juifs  ne  mangent  point  de 
chair  de  pourceau.  » 

La  traduction,  ou  pour  mieux  dire  la  paraphrase  d'Amyot,  est 
exacte  sauf  en  un  point;  les  mots:  di:e\sue£pixb;  fivBfuwdî  y  sont  rendus 
par  «  fils  d'un  serf  affranchi  »  '.  Amyot  s'est  sans  doute  souvenu 
d'un  texte  classique  de  Suétone  -,  suivant  lequel,  dans  l'ancienne 
langue  romaine,  le  moi  liberliniis,  dont  à7:£>.£u9£ptxo';  est  l'équivalent, 
désignait,  non  Taffranchi  lui-môme  —  ou  plutôt  ne  désignait  pas 
seulement  l'affranchi  lui-même,  —mais  le  fils  d'affranchi.  Or,  sans 
vouloir  contester  le  témoignage  de  Suétone,  il  faut  observer  que 
son  renseignement  se  réfère  exclusivement  à  l'époque  tout  à  fait 
archaïque,  «  au  siècle  d'Appius  Claudius  et  quelque  temps  après  ». 
Rien  de  plus  naturel  que  d'admettre  qu'à  cette  époque  reculée  le 
mot  lihertinus  ait  eu  un  sens  large,   correspondant  à   la  durée 

'  Plutarque,  Cic,  1  :  B£ppr,~»  oî  'Pwaaîoi  tàv  £XT£T|xr,iiévov  yoîpov  xaXovatv. 
fi;  ovv  à7r£),£"j6£pixà;  âv6pft>;To;  Êvoxo;  -ùi  io'joatsîiv  ivOjxa  KcxO.ioç  èooûXeto  Trapwdà- 
|x£vo;  Toù;  Six£),iwTa;  xaTTjyopEtv  toù  BÉppou,  <  Ti  'lovSaîw  îîpô;  yolç,ow  ;  »  êçr, 
Kixéptov. 

*  Ricard  traduit  plus  exactement  ;  >  un  atrramhi  i.  Friedlander  traduit  comme 
Amyot  :  €  ein  von  Freiijelassenen  stanimender  Jude  [l)   ».  Drumann  hésite. 

*  Suétone,  Claud.,  24.  Appium  Cacum...  Uhertitiorum  filios  tn  senatum  adlegisse 
docuit,  ignanis,  temporibus  Appi  et  demceps  aliquandiu  libertinos  dictos  non  ipsos 
(on  a  proposé  :  non  modo  ipsos)  qui  manu  emitterentur  ,  sed  ingenuos  tx  his 
frocreatos. 


QUID  JUD/EO  CUM  VERKE  ?  37 

même  des  incapacités  multiples  qui  atteignaient  les  affranchis  et 
leur  postérité;  mais  il  est  bien  certain  qu'au  temps  de  Cicéron,  et 
à  plus  forte  raison  au  temps  de  Plutarque,  le  mot  libertlnus  n'avait 
plus  que  le  sens  étroit,  seul  connu  de  l'empereur  Claude,  où  il 
désigne  l'affranchi  lui-même,  l'ancien  esclave  délivré  par  la  manu- 
ynissio.  Entre  les  mots  lihertus  et  liberthms  il  n'y  a  pas,  comme 
se  l'imaginaient  les  érudits  de  la  Renaissance*,  une  différence  de 
génération,  mais  simplement  une  différence  de  point  de  vue: 
llberlus,  c'est  l'affranchi  envisagé  dans  ses  rapports  avec  son 
patron;  libertlnus,  c'est  l'affranchi  considéré  en  lui-même,  dans 
sa  condition  sociale  et  juridique.  Les  témoignages  de  ce  t'ait  ont 
été  réunis  par  M.  Mommsen  ;  il  en  conclut  avec  raison  que,  «  dans 
la  littérature  qui  nous  est  connue,  Ubertinus  n'a  jamais  d'autre 
signification  que  celle  d'affranchi  2.  »  Liberthms  liomo,  que 
Plutarque  traduit  par  àire^sueepixôi:  àvBpwitoç,  est  exactement  synonyme 
de  Ubertinus;  je  n'en  veux  pas  d'autre  preuve  que  ce  texte 
des  Verrines  ^  :  P.  Trebonius  viros  bonos  et  honestos  corn- 
plures  fecit  heredes,  in  ils  fecit  suuni  liberium...  Equili  romàno 
tamlocupleii  libertimis  fiomo  sit  hères?  Et  dans  presque  tous  les 
passages  où  Plutarque  emploie  les  mots  ànzKz'jUçi-Kà^  ou  èî£>.£ii9sptxdî*, 
le  contexte  lui-même  indique  de  la  manière  la  plus  évidente  qu'il 
est  question,  non  de  fils  d'affranchis,  mais  d'affranchis  proprement 
dits.  Concluons  de  là  que,  chez  l'auteur  latin  auquel  Plutarque  a 
emprunté  son  anecdote,  Cécilius  était  bel  et  bien  qualifié  d'ancien 
esclave  et  qu'il  convient  de  modifier  ainsi  son  signalement: 
«  Cécilius,  affranchi,  soupçonné  de  judaïsme  ». 


Après  avoir  rectifié  la  traduction  du  texte  de  Plutarque,  nous 
pouvons  aborder  l'examen  de  fond,  c'est-à-dire  rechercher  la 
portée  et  l'autorité  qu'il   convient  d'attribuer  à  ce  texte.  Cette 


'  On  s'élonne  de  rencontrer  encore  ceUe  doctrine  chez  des  auteurs  contemporains 
comme  Herzofr. 

*  Mommsen,  Droit  public  romain,  trad.  fr.  (VI,  2),  p.  4,  note  2.  Cp.  Lemonnier, 
Etude  sur  la  condition  privée  des  a/franchis,  p.  6,  suiv. 

'  Cicéron,   Verr.,  Il,  i,  47,  §  123. 

*  Ce  sont,  outre  notre  texle.  Syll.,  1  (un  àTV£/î"jOEf.ty.ôç  dt/OpwTco;,  soupçonné  ilc 
receler  un  proscrit,  est  précipité  de  la  roche  Tarpéienue);  S  (Sulpicius  vend  le  droit 
de  cité  È?£).£'j6£pixoï;  xal  fjLîtoixot;)  ;  33  (Sylia  distribue  des  terres  (jli'jxoi;  xai  xaôdtp- 
aaatv  £$£),£y6£pixoî;V,  Anton.,  ri8  i^les  infïénus  sont  frappés  d'un  impôt  du  quart  du 
revenu,  les  £Ç£),£\jÔ£pixoî  du  8»  du  capital). 


38  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

portée  serait  très  grande  s'il  fallait  en  croire  plusieurs  historiens 
modernes  :  on  a  vu  dans  notre  anecdote,  en  effet,  la  preuve  unique, 
mais  décisivp,  de  l'existence  d'une  colonie  et  d'une  propagande 
juives,  en  Italie,  plusieurs  années  avant  la  prise  de  Jérusalem 
par  Pompée,  événement  auquel  Philon  rattache  l'origine  de  la 
population  Israélite  de  Rome  '.  C'est  en  ce  sens  que  se  sont  pro- 
noncés, par  exemple,  Ernest  Havet-,  M.  Friedlaender  ^  et  tout 
récemment  M,  Hild,  dans  son  substantiel  travail  sur  les  Juifs  à 
Rome  devant  Vopinion  et  dans  la  littérature'^.  «  Le  procès  de 
Verres,  dit  ce  dernier  auteur, étant  de  dix  années  "■  antérieur  à  la 
guerre  de  Judée,  si  le  bon  mot  prêté  à  Cicéron  n'a  pas  été  fabri- 
qué après  coup,  il  est  pour  le  moins  curieux  d'observer  que  déjà 
alors  il  y  avait  à  Rome  des  Juifs  et  que  l'on  plaisantait  publique- 
ment les    particularités  de  leur  culte.  » 

La  restriction  indiquée  par  cette  phrase  «  Si  le  bon  mot  n'a  pas 
été  fabriqué  après  coup  »  fait  honneur  au  sens  critique  de  M.  Hild, 
mais  elle  est  loin  d'être  suffisante:  il  est  facile,  en  effet,  de 
démontrer,  non  seulement  que  le  mot  prêté  à  Cicéron  n'est  pas 
authentique  —  ce  qui  n'aurait  qu'une  importance  biographique 
assez  secondaire,  —  mais  qu'il  n'a  jamais  pu  être  prononcé  parce 
qu'il  implique  à  la  fois  une  erreur  de  fait  et  une  erreur  de  droit. 

En  effet,  le  Cécilius  dont  il  est  question  dans  ce  texte  de 
Plutarque  n'est  pas  un  inconnu.  Nous  possédons  encore  le 
plaidoyer  que  Cicéron  prononça  pour  écarter  ses  prétentions  au 
rôle  d'accusateur  de  Verres  :  c'est  le  discours  communément  inti- 
tulé Dlvinatio  in  Q.  Caecilium,  et  ce  discours,  ainsi  que  les  scolies 
du  pseudo-Asconius  qui  s'y  rapportent  '^,  nous  fournissent  plusieurs 
renseignements  intéressants  sur  le  compte  du  personnage.  Nous  y 
apprenons  qu'il  s'appelait  Q.  Csecilius  Niger  et  qu'il  était  origi- 
naire de  Sicile  ou,  du  moins,  domicilié  dans  cette  province  {domo 
Siculus)'.  11  avait  un  frère  puîné  du  nom  de  Marcus,  que  Cicéron 

*  Philon,  Légat,  ad  Caium,  23. 

*  E.  Havet,  Origines  du  christianisme,  II,  loO.  Dans  ce  morceau,  Havet  passe  sous 
silence  la  libertinif^  de  Cécilius. 

*  Friedlaender,  Romische  Sittengeschichie  (6*  éd.),  III,  621,  nolo  12. 
<  Berne  des  Études  juives,  VIII  (1884),  p.  24. 

5  Plus  exactement  :  sept  années.  Le  procès  de  Verres  est  de  Pan  70  av.  J.-C,  la 
prise  de  Jérusalem  de  63. 

6  Cicéron  d'Orelli,  V,  2,  p.  97-124. 

'■  Ps.-Asron.,  p.  98  :  Q.  Cœcilius  Xi^er,  domo  Siculus  et  queestor  Verris  (c'est  à  tort 
qu'on  a  parfois  corrigé  domo  en  homoj;  p.  121  :  Sœpe  in  Ccecilium  uliturhoc  con- 
vicio,  ut  illuM  non  Romanum,  sed  Siculum  dicat.  En  effet,  Cicéron,  parlant  des 
•rrieis  de  Cécilius  contre  Verres,  dit  f§  53)  ;  Ceteri  Siculi  ultorem  invenerunt,  et 
c'est  sans  doute  en  ce  sens  qu'il  faut  entendre  la  phrase  du  §  4,  ainsi  transmise 
dans  les  meilleurs  manuscrits  :  Q.  Cacilium,  qui  prtesertim  quaestor  in   sua  provincia 


QUID  JUD.EO  CUM  VERRE?  39 

appelle  lectissimus  atqv.e  ornalissimus  adolescens  K  Quintus  fut 
lo  questeur  de  Verres  peniiant  une  partie  de  son  gouvernement; 
au  cours  de  ses  fonctions,  il  se  brouilla  avec  son  préteur,  mais,  s'il 
faut  en  croire  Gicéron,  il  s'était  réconcilié  avec  lui  avant  son 
départ  et  laissa  même  auprès  du  gouverneur  prévaricateur  son 
frère  ainsi  que  son  secrétaire,  Potamon. 

Maintenant,  il  importe  de  remarquer  que,  dans  tout  le  cours  de 
ce  plaidoyer,  où  Gicéron  n'épargne  à  son  adversaire  ni  les  dures 
vérités,  ni  les  insinuations  désobligeantes,  où  même  son  origine 
sicilienne,  dont  Gécilius  tirait  un  argument  en  faveur  de  ses  préten- 
tions, devient  un  prétexte  de  raillerie  et  de  suspicion,  il  est  remar- 
quable, disons-nous,  qu'on  ne  découvre  pas,  dans  toute  cette 
diatribe,  la  moindre  allusion  ni  à  la  condition  d'affranchi  de  Gé- 
cilius, ni  à  son  affiliation  au  judaïsme,  c'est  à-dire  précisément 
aux  deux  points  où  se  résume  le  signalement  donné  par  Plu- 
tarque.  Et  cependant  quels  arguments  eussent  été  plus  propres  à 
exciter  le  rire  du  tribunal  et  à  jeter  le  discrédit  sur  le  compé- 
titeur de  Gicéron,  objet  essentiel  d'où  dépendait  l'issue  du  débat 
engagé  ? 

Pour  parler  du  judaïsme  d'abord,  quoique  cette  religion  ne  fût 
alors  guère  connue  à  Rome  qu'à  travers  les  écrivains  grecs,  elle 
était  déjà  frappée  de  la  défaveur  générale  qui  s'attachait  à  tous  les 
cultes  exotiques,  aux  «  superstitions  barbares  »,  comme  s  'expri- 
maient les  Romains  de  vieille  roche.  Soixante-dix  ans  auparavant 
le  préteur  Hispalus  avait  expulsé  de  la  capitale  les  ambassadeurs 
de  Simon  Macchabée,  qui  se  livraient  à  la  propagande  religieuse  -. 
Depuis  lors,  les  Juifs  n'avaient  pas  reparu  à  Rome,  mais  tous  les 
Romains  que  leurs  affaires  ou  leurs  études  amenaient  en  Orient 
avaient  eu  l'occasion  d'y  rencontrer  des  spécimens  de  la  race  is- 
raélite  répandus  à  travers  toute  l'Asie-Mineure.  Gicéron  lui-même 
devait  en  avoir  connu  pendant  son  séjour  prolongé  en  Grèce  et  en 
Asie  (19-11  av.  J.-G.),  et  c'est  sans  doute  dans  les  leçons  de  son 
maître  d'éloquence,  ApoUonios  Molon,  auteur  d'un  pamphlet 
classique  contre  les  Juifs  •■^,  c'est  aussi  dans  son  commerce  avec 
le  philosophe  Posidonios,  qui  ne  leur  était  pas  plus  favorable,  qu'il 

fuùset.  Sur  le  sens  du  mol  'Jomns,  synonyme  de  orif/o.  cf.  Mommsen,  op.  cit., 
(VI.  2),  p.  /i26,  n»  3. 

»  Divin.,  IX,  29. 

*  Valère  Maxime,  I,  3,  2,  avec  les  observations  de  Schiirer,  Geschichte  (2°  éd/, 
II.  505. 

^  Alexandre  Polyliistor,  l'r.  o,  chez  Eusèbe,  Prœp,  evang.,  IX,  19  :  ô  oï  Tr,v  ct-j- 
(îAîuïiv  TYjv  xaxà  'loySaiwv  Ypâ>^a;  Mo),»-/.  Cet  ouvrage  est  souvent  cité,  sans  indica- 
tion précise,  par  Josèphe.  Sur  les  rapports  de  Cicérou  avec  Molon  et  Posidonios, 
cf.  Plut.,  Cic,  II. 


40  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

puisa  les  éléments  de  cet  «  antisémitisme  »  un  peu  superficiel  dont 
le  Pro  Flacco  nous  a  conservé  le  témoignage.  Pour  peu  donc  que 
Céciliuseùt  été  judaïsant  ou  suspect  de  l'être,  Cicéron  n'aurait  pas 
manqué  d'en  tirer  matière  à  plaisanterie  dans  ce  long  plaidoyer 
tout  farci  d'attaques  personnelles.  Le  nom  même  de  Verres,  avec 
son  double  sens  injurieux,  lui  en  procurait  le  prétexte  en  rappe- 
lant l'aversion  bien  connue  des  Juifs  pour  la  viande  de  porc*. 
Le  fait  est  que  Cicéron  ne  s'est  pas  privé,  pas  plus  dans  les 
Terrines  que  dans  ce  plaidoyer  même,  du  calembour  facile,  iné- 
vitable, qu'appelait  ce  nom  malencontreux  -,  mais  de  juifs  et  de 
judaïsme  pas  un  mot,  et  si  jamais  Varguïiientum  ex  silenlio  a 
pu  être  de  quelque  poids,  c'est  assurément  dans  une  occasion 
pareille.  On  peut  donc  affirmer  hardiment  ou  bien  que  Gécilius  ne 
judaïsait  pas  ou  bien,  ce  qui  revient  au  même,  que  ni  Cicéron  ni 
son  auditoire  n'en  avaient  aucun  soupçon. 

Il  en  va  de  même  du  reproche  de  liberiimlé.  Ce  reproche  est  la 
monnaie  courante  de  la  polémique  du  i^"  siècle;  il  s'étendait  même 
aux  simples  descendants  d'un  affranchi.  Antoine  faisait  un  crime  à 
Octave  d'avoir  eu  un  affranchi  pour  trisaïeul  ^.  Horace  est  las  de 
s'entendre  traiter  de  «  fils  d'afiVanchi  »  \  On  peut  être  sur  que  si  Cé- 
cilius  avait  eu  du  sang  d'affranchi  dans  les  veines,  à  plus  forte 
raison  s'il  avait  été  lui-même  un  ancien  esclave,  comme  l'aflirme  le 
texte  de  Plutarque,  Cicéron,  qui  savait,  suivant  les  besoins  de  la 
cause, flatter  les  passions  populaires  ou  les  préjugés  aristocratiques, 
y  aurait  trouvé  le  thème  d'inépuisables  moqueries.  Or,  non  seule- 
ment on  ne  rencontre  pas,  dans  tout  le  discours,  une  phrase,  un 
mot  qui  puisse  s'interpréter  dans  ce  sens,  mais  encore  nous  avons 
vu  que  Cicéron,  parlant  du  frère  de  son  adversaire,  M.  Cécilius, 
se  sert  d'expressions  qui  auraient  paru  singulièrement  déplacées, 
à  propos  d'un  aâ"ranchi  :  lectissbmis  atque  ornatissiraus  adoles- 
cens.  Ajoutons  que  le  seul  fait  de  l'existence  de  ce  frère  suftirait 
à  rejeter  le  témoignage  de  Plutarque,  car,  en  droit  strict,  un 
affranchi  ne  peut  avoir  de  frère,  pas  plus  qu'il  n'a  de  père  ou 
d'aïeux  ;  la  parenté  servile  n'a  pas  de  valeur  légale;  cela  est  en- 


•  Posidonios  est  le  premier  écrivain  frrec  connu  qui  fasse  allusion  à  ceUe  aversion  : 
voir  chez  Diodore  de  Sicile  ifr.  xxxiv,  1)  le  récit,  extrait  de  Posidonios,  de  la  profa- 
nation du  temple  et  des  Livres  saints  par  Anliochos  Epiphane. 

*  Divin.,  XVII,  5"  :  Sed  repente  e  vestigiu,  ex  homine  [tanquam  aliquo  Circœo  po- 
culo)  factus  est  Ven-es.  Ps-Ascon.,  ad  loc.  :  lUa  enitn  sues  ex  hominthus  faciebat. 

•*  Suétone,  Aug.,  2  :  M,   Ântonius  libertinum  et  prcarum  exprobrat. 

'  Horace,  Sat.,  I,  6,  45-6  :  Quem  rodunt  omnes  libertine  pâtre  natum.  Ailleurs, 
suivant  la  line  remarque  de  M.  Lemounier,  Horace,  cédant  au  préjugé  commun, 
félicite  Mécène  de  ue  pas  s'attacher  à  ia  naissance  des  gens,  quali  sit  guisque  parente 
Natus  dti»i  ingenuus  [Sat.,  I,  6,  "i. 


QUID  JUD/EO  CUM  VERRE?  41 

core  vrai  au  début  de  l'époque  impériale,  cela  est  vrai  surtout  à 
l'époque  républicaine  où  nous  sommes. 

Mais  l'argument  le  plus  décisif,  et  qu'on  s'étonne  de  ne  pas  ren- 
contrer sous  la  plume  des  commentateurs  de  Plutarque  et  de  Ci- 
céron,  c'est  que  Gécilius  Niger  a  été  questeur  en  Sicile  et  que  de  pa- 
reilles fonctions  étaient  incompatibles  ave;  une  naissance  servile. 
L'exclusion  des  libertini  du  jus  honorum,  c'est-à-dire  du  droit  aux 
magistratures  soit  romaines,  soit  même  municipales,  est  un  principe 
qui  n'a  pas  même  eu  besoin  d'être  formulé  dans  un  texte  de  loi 
spécial,  tant  la  coutume,  le  mos  majoriim,  l'avait  formellement 
consacré  *.  On  scruterait  toute  l'histoire  de  la  république  romaine, 
même  aux  époques  troublées  où  la  sévérité  des  comices  se  relâcha 
parfois  en  faveur  des  fils  d'affranchis  ^  sans  découvrir  un  seul 
exemple  de  dérogation  au  principe  en  ce  qui  concerne  les  affranchis 
eux-mêmes.  Pour  détenir  en  qualité  de  magistrat  une  parcelle  de 
la  majesté  du  peuple  romain,  de  même  que  pour  entrer  à  la  curie, 
l'ingénuité  était  absolument  de  rigueur;  c'est  bien  inutilement  qu'on 
tâcherait  d'argumenter  contre  cette  vérité  de  fait  d'une  affirmation 
volontairement  exagérée  de  Philippe  V  de  Macédoine,  proposant 
à  une  ville  thessalienne  en  cette  matière  l'exemple  libéral  de  la 
république  romaine-'.  En  plein  siècle  d'Auguste,  Tite-Live,  prêtant 
au  tribun  Canuléius  un  discours  en  faveur  de  l'émancipation  po- 
litique des  plébéiens,  le  fait  parler  ainsi:  «  Parce  que  nous  ou- 
vririons aux  i)lébéiens  l'accès  des  dignités  suprêmes,  en  serait-ce 
fait  de  l'empire  ?  et  ces  mots  un  plébéien  consul  exciteront-ils 
autant  de  scandale,  que  s'il  était  question  d'élever  au  consulat  un 
esclave  ou  un  affranchi*?»  Impossible  d'exprimer  plus  claire- 
ment que  pour  un  Romain  du  temps  d'Auguste,  à  fortiori  pour 
un  Romain  du  temps  de  Cicéron,  l'élection  d'un  affranchi  à  une 
magistrature  curule  ou  même  plébéienne  représentait  l'abojnina- 

»  Mommsen,  Droit  public  romain  (trad.  l'r,),  II,  136-7.  En  ce  sens  tous  les  auteurs 
compétents  :  Marquardt,  Lange,  Rein,  Herzog,  Schiller,  Karlowa,  Willems,  Le- 
monnier. 

»  Tels  sont  les  cas  rapportés  par  Appien,  B.  L'iv.,  I,  33,  el  Dion,  LUI,  27.  Cp. 
Cic,  Pro  ClKOiliû,  132;  Dion,  XL,  63  ^(ils  d'allranchis  exclus  du  Sénat).  «  Quant 
aux  allranchis  eux-uièmes,  dit  Momrasen  {l.  cit.),  on  n'en  rencontre  qui  soient  ma- 
gistrats qu'à  l'époque  de  la  décadence  la  plus  complète  (Vita  Comm.,  6;  Elag.,  11), 
et  encore  toujours  probablement  avec  la  concession  de  l'ingénuité  lictive.  > 

s  Lettre  de  l'iiilippe  V  au  peuple  de  Larissa  [Ath.  Mittheiluufjen,  VU.  65,  1.  31  s.)  : 
oi  'PwfJLaîoi . . .  ol  xai  xoù;  oixé-rac  otxv  èXeuOEpaxjw^iv  uîioa&cy.ôfxîvot  il;  tô  7ro).iT£Ujxa 
xai  TÙ)v  àf,-/.£Û.)v  [j.£[i:aot]oovT£;.  «  Scme  Anyabe,  dit  M.  Mommsen  [Hermès,  X\Il, 
481 1,  ist  eiitioe.der  ûheitrieben  oder  es  sim/  udter  den  Frcigelassenen  auck  deren  Des- 
cendcnlen  mitverstanden.  » 

*  T.  Live,  IV,  'i,  '  :  et  perinde  hoc  valet  plcbeius  consul  fiât  tanquam  sermm  aut 
Ubertinum  aliqins  consulem  futurum  dicat.  La  leçon  des  éditions  plebtius  ne  consul 
fiât  n'olfre,  pour  moi,  aucun  sens. 


42  llEVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

tion  de  la  désolation,  la  fin  du  monde,  comme  l'eût  été  l'élection 
même  d'un  esclave.  Concluons  que,  si  Q.  Cécilius  Niger  a  été 
questeur  en  Sicile  —  et  cela  est  certain,  —  iTest  non  moins  certain 
qu'il  n'était  pas  de  condition  libertine,  et  que  Plutarque  ou  sa 
source  se  sont  trompés  '. 


II 


Nous  venons  de  démontrer  —  un  peu  surabondamment  peut- 
être  —  que,  des  deux  qualificatifs  accolés  par  Plutarque  au  nom  de 
Cécilius,  l'un  est  invraisemblable,  l'autre  impossible  :  autant  vaut 
dire  que  l'anecdote  elle-même  est  controuvée  et  ne  saurait,  par  con- 
séquent, servir  de  preuve  à  l'existence  prétendue  de  communautés 
juives  en  Italie  et  en  Sicile  antérieurement  à  l'an  63  avant  J.-C.  Ce 
résultat  est  important  pour  l'histoire,  mais  il  ne  suffit  pas  aux  exi- 
gences de  la  critique.  Plutarque  est  un  historien  de  bonne  foi  et 
de  médiocre  imagination  :  on  ne  saurait  le  soupçonner  d'avoir  fa- 
briqué de  toutes  pièces  cette  anecdote,  dont  le  fond  aussi  bien  que 
la  forme  trahissent  une  source  romaine;  il  faut  donc  essayer  de 
déterminer  quelle  est  cette  source,  et  aussi,  par  suite  de  quelle  con- 
fusion volontaire  ou  involontaire  l'anecdote  a  pu  prendre  naissance. 
Ici  nous  quittons  les  certitudes  pour  les  conjectures  :  je  demande 
l'indulgence  pour  les  miennes. 

L'histoire  littéraire  connaît  un  autre  personnage  du  nom  de 
Cécilius,  Sicilien  comme  l'adversaire  de  Cicéron,  et  dont  on  racon- 
tait aussi,  mais  à  meilleur  droit,  ce  semble,  qu'il  était  de  condition 
libertine  et  de  religion  juive.  Je  veux  parler  de  Cécilius  de  Calacté, 
rhéteur  célèbre,  dont  les  nombreux  ouvrages,  aujourd'hui  perdus, 
ont  été  souvent  cités  et  plus  souvent  mis  à  contribution  depuis 
Quintilien  jusquà  Athénée -.  La  biographie  de  ce  personnage  ne 
nous  est  guère  connue  que  par  un  article  de  Suidas,  dont  voici  le 
début  :  «  Cécilius,  Sicilien,  de  Calacté,  qui  est  une  ville  de  Sicile. 
Rhéteur  et  sophiste,  florissait  à  Rome  sous  César  Auguste  et  jus- 
qu'à Hadrien  (?).  Suivant  quelques-uns,  il  était  d'origine  servile> 

*  Je  n'insiste  pas  sur  le  cognomen  Niger,  qui  n'indique  pas  nécessairement  un 
ingénu.  Le  seul  Caecilivis  Niger  connu  d'ailleurs  est  un  Espagnol  mentionné  par  le 
continuateur  de  César,  Bell.  hisp..  35. 

*  Les  Iragments  de  Cécilius  ont  éié  recueillis  par  Th.  Burckhardt,  Bàle,  1863;  le? 
fragments  historiques  seulement  par  C  Mûller,  Fr.  hist.  grœc,  III,  330  sq.  Voir, 
en  outre,  R.  Weise,  Quastiones  Caciiiante,  Berlin,  1888  (non  vidi ;  cf.  Bnrsians 
Jahresbericht  1890,  I.  p.  67',  et  Tarticic  Je  Caccialanza  dans  la  Rivista  di  filologia, 
XVIII,  1-73. 


QUID  JUD^O  eu  M  VERRE  ?  .13 

s'appelait  d'abord  Archagathos  et  professait  la  religion  juive*  ». 
A.  part  la  bévue,  due  peut-être  à  un  glossateur  ignorant,  qui  pro- 
longe la  vie  de  Cécilius  jusqu'au  règne  d'Hadrien  2,  la  notice  de 
Suidas  paraît  puisée  à  bonne  source  et  mérite  toute  créance.  Le 
nom  romain  Cécilius  porté  par  ce  rhéteur  grec  s'explique  fort  bien 
par  un  affranchissement  dû  à  un  membre  de  la  gens  Caecilia,  pro- 
bablement un  Métellus  ;  les  Metelli  étaient  les  patrons  de  la  Sicile  •\ 
et,  si  l'on  voulait  désigner  le  mannmissor  probable  de  Cécilius,  on 
n'aurait  que  l'embarras  du  choix  entre  L.  CaBcilius  Métellus,  succes- 
seur de  Verres,  un  questeur  du  même  nom  *,  etc.  On  pourrait  même 
penser  à  Q.  Csecilius  Niger  lui-môme,  le  questeur  de  Verres,  «t 
supposer  que  l'auteur  copié  par  Plutarque  a  simplement  confondu 
l'affranchi  avec  le  patron.  A  l'appui  de  l'origine  sicilienne  et  servile 
de  Cécilius  on  peut  citer  l'histoire  des  guerres  d'esclaves  de  Sicile, 
dont  il  était  l'auteur  ^  Le  nom  même  d'Archagathos  que  Cécilius 
aurait  porté  avant  son  affranchissement  a  une  physionomie  bien 
sicilienne  :  sur  quatre  personnages  connus  de  ce  nom,  trois  étaient 
Siciliens «,  et  le  nom  se  rencontre  maintes  fois  dans  les  inscriptions 
de  l'île'.  Enfin,  le  judaïsme  de  Cécilius  trouve  une  confirmation 
indirecte,  mais  remarquable,  dans  un  passage  célèbre  du  Traité 
du  sublime.  Cet  ouvrage,  quoique  dirigé  contre  certaines  théories 
du  rhéteur  de  Calacté,  paraît  avoir  fait  de  larges  emprunts  au  livre 
analogue  qu'il  avait  composé  sur  la  même  matière.  Or,  au  cha- 
pitre IX  du  Traité,  l'auteur  anonyme  donne,  comme  un  exemple 
du  sublime,  l'un  des  premiers  versets  de  la  Genèse  :  «  Dieu  dit  que 
la  lumière  soit,  et  la  lumière  fut  ;  que  la  terre  soit,  et  la  terre  fut  ». 
Ces  paroles  sont  attribuées  par  lui  «  au  législateur  des  Juifs,  qui 
n'était  pas  le  premier  venu  ».  Suivant  l'ingénieuse  hypothèse  de 
Schurztleisch  et  de  Roper^  reprise  i)ar  plusieurs  critiques  contem- 
porains, il  est  infiniment  probable  que  l'auteur  du  Traité  n'a  pas 
eu  directement  connaissance  du  texte  de  la  Genèse;  il  a  dû  trouver 

>  Suidas,  s.  V.  KaixO.io;  :  . . .  'Atto  6oy).wv,  w;  xtvsç  l(7T0f,riy.aTi,  xal  Tipôxsfov  [xÈv 
xa).oiJ!JL£vo;    'Af/âyaôc;,  Tf|V  ôk  66?av  'louôaio;. 

>  C.  Millier  suppose  que  Suidas  (ou  le  glossateur;  a  confondu  Cécilius  de  Ca'.aclé 
avec  le  jurisconsulle  Sextus  Cœeilius  (Gel!.,  xx,  1). 

3  Ps-Asconius,  in  Divin.,  p.  100,  Or.  Comparer  le  nom  Cn.  Pompeius  porté  par  un 
rhéteur  contemporain,  ami  de  Denys. 

*  Kaibel,  Insc.  Sicil.,  282. 

5  Athénée,  VI,  p.  272  F  (=  fr.  1,  Millier). 

8  Le  fils  et  le  petit-fils  d'Apatliocle  et  un  citoyen  d'Halus,  Veri:',  IV,  2.%  §  51.  Cl. 
aussi  l'amiral  syracusain  Agatharchos,  Diodore,  XIII,  13,  2. 

:  Kaibel,  Insc.  SiciL,  n"'  210-212,  317,  330,  376,  421. 

s  Philologiis,  I,  631.  Cf.  Berjrk,  Griech.  Lileraturgcschichte,  IV,  553,  note  52,  qui 
rejette,  avec  raison,  l'hypothèse  d'une  interpolation  juive  ou  chrétienne;  (de  même 
Bernays,  Gesammelte  Âbh.,  I,  353). 


44  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

la  citation  toute  prête  chez  son  devancier  Cécilius  et  la  liberté  même 
de  la  paraphrase  favorise  cette  conjecture  :  le  prosélyte  citait  de 
mémoire  et  fort  inexactement,  car  les  mots  «  Que  la  terre  soit  » 
ne  se  lisent  nulle  part  dans  la  Bible. 

Tenons  donc  pour  avéré  que  le  rhéteur  Cécilius  de  Calacté  était 
un  affranchi  judaïsant,  ce  qui  ne  veut  pas  dire,  comme  on  Ta  sou- 
vent interprété,  juif  ou  syrien  d'origine.  Quelques  philologues*  ont 
prétendu  que  le  renseignement  de  Suidas  était  le  résultat  d'une 
confusion  avec  le  Cécilius  de  Plutarque;  cette  opinion  ne  sou- 
tient pas  l'examen  :  pour  la  réfuter,  il  suffit  de  remarquer  que 
Suidas  fournit  un  détail  précis,  qu'on  chercherait  vainement 
chez  Plutarque  :  le  nom  Archagathos  porté  par  Cécilius  avant 
son  affranchissement.  Quant  à  identifier  les  deux  personnages, 
comme  on  l'a  également  proposé,  la  chronologie,  pour  ne  par- 
ler que  de  cette  raison,  s'y  oppose  absolument.  Q.  Cécilius 
Niger,  l'adversaire  de  Cicéron,  questeur  en  1^  av.  J.-C,  doit 
être  né  aux  environs  de  l'an  100  ;  Cécilius  de  Calacté  est  un 
contemporain  de  Denys  d'Halicarnasse,  qui  l'appelle  son  «  cher 
ami-»,  et  fut,  comme  lui,  élève  d'ApoUodore  de  Pergarae^, 
dont  Auguste  suivit  les  leçons  dans  sa  jeunesse;  sa  floraison  se 
place  donc  en  même  temps  que  celle  de  Denys,  dans  le  dernier 
quart  du  i^''  siècle  av.  J.-C,  ou,  comme  s'exprime  Suidas,  sous 
Auguste.  Il  est  donc  impossible  que  les  deux  Cécilius  n'en  fassent 
qu'un;  mais,  d"autre  part,  comment  admettre  que  deux  person- 
nages du  même  nom,  l'un  et  l'autre  Siciliens,  à  trente  ou  quarante 
ans  d'intervalle,  aient  été  tous  les  deux  d'origine  servile  et  con- 
vertis à  la  croyance  juive?  L'histoire  ne  se  répète  pas  à  ce  point  et 
de  pareilles  coïncidences,  il  faut  le  dire,  frisent  l'impossibilité  :  il 
ne  nous  reste  donc  plus  qu'à  admettre  que  le  signalement  authen- 
tique de  Cécilius  de  Calacté  a  été,  par  erreur,  transporté  sur  le 
compte  de  Cécilius  Niger,  et  que  cet  anachronisme  a  suggéré  le 
ieu  de  mots  prêté  à  Cicéron,  à  moins,  au  contraire,  que  le  désir  de 
justifier  un  mauvais  jeu  de  mots  n'ait  suggéré  l'anachronisme. 

Mais  quel  peut  être  l'auteur  de  cette  étrange  confusion?  Encore 
une  fois,  ce  ne  peut  être  Plutarque  lui-même,  mais  l'écrivain  plus 
ancien  qu'il  a  copié.  Or,  si  l'on  lit  avec  attention  la  Vie  de  Cicé- 

>   Vossius,  Toupius,  Bernhardy.  Cf.  C.  MuUer,  Frag.  hiat.  Grœc.,  III.  331. 

-  Lettre  à  Pompée,  c.  3  (11,  113  Gros >  Les  deux  rhéteurs  sont  nommés  conjoin- 
tement par  Quintilien,  111,  1,  IG,  dans  une  énumération  chronologique.  La  question 
de  leur  priorité  respective  a  souvent  et  vainement  préoccupé  les  philologues. 

5  Quintilien,  IX,  1,  12.  Apollodore  florissait,  suivant  saint  Jérôme,  vers  63  av. 
J.-C.  Un  autre  indice  que  Cécilius  survécut  longtemps  à  Cicéron,  c'est  qu'il  écrivit 
un  parallèle  entre  Cicéron  et  Démoslhène  (Dcnjs  d'Halicarnasse  et  Suidas,  loc.  cit.  ; 
Plut.,  Demosth.,  3). 


QUID  JUDiEO  CUM  VERRE?  45 

ron,  on  reconnaît  sans  peine  que,  pour  le  fond  du  récit,  !e  bio- 
graphe grec  a  suivi  une  source  unique  et  très  sûre,  probable- 
ment la  biographie  latine  de  Tiron  ',  en  y  intercalant  des  détails 
accessoires  empruntés  à  la  correspondance  même  de  Cicéron  ou 
à  divers  auteurs  contemporains.  Ce  fond  proprement  historique 
est  saupoudré  d'une  série  d'anecdotes  et  de  bons  mots,  dont  la 
rédaction  porte  un  air  de  famille  et  révèle  également  une  souice 
romaine.  On  ne  saurait  douter  que  cette  source  ne  fût  le  recueil 
en  trois  livres  de  Joci  Ciceronis,  qui  courait  sous  le  nom  de  Tiron, 
et  qui  est  cité  plusieurs  fois  depuis  Quinlilien  ^  Quintilien  lui- 
même,  bon  juge  en  pareille  matière,  suspectait  l'authenticité  de 
ce  recueil  :  utinam  libertus  eiiis  Tiro,  dit-il,  aut  alius  quisqids 
fuit  qui  très  Me  de  rj  libros  edidit,  parcius  dictomm  tiionero 
indulsisseil  Si,  comme  tout  porte  à  le  croire,  l'anecdote  sur 
Cécilius  dérive  du  recueil  des  Joci,  il  faut  voir  dans  ce  fait  une 
confirmation  des  doutes  de  Quintilien  ;  car  il  est  peu  croyable 
que  le  confident  et  ami  de  Cicéron,  affranchi  lui-même  et  ayant 
eu  à  souffrir,  comme  tant  d'autres,  des  préjugés  sociaux  et  des 
inégalités  politiques  dont  cette  classe  de  citoyens  était  l'objet,  il  est 
peu  croyable,  dis-je,  que  Tiron  ait  pu  confondre  l'ancien  adver- 
saire de  son  patron  avec  son  confrère  en  IWertinité  q\.  en  littéra- 
ture, Cécilius  de  Calacté.  Une  pareille  erreur  de  perspective  n'a 
pu  être  commise  qu'à  distance,  quelque  temps  après  la  mort  du 
plus  jeune  et  du  plus  célèbre  des  deux  Cécilius,  sans  doute  aussi 
quelque  temps  après  la  mort  de  Tiron.  Or,  Tiron  étant  mort  cen- 
tenaire vers  Tan  20  après  J.-C.  »,  c'est  à  cette  époque,  au  com- 
mencement du  règne  de  Tibère,  qu'on  placera  la  rédaction  du 
livre  des  Joci.  L'erreur  palpable  dont  l'auteur  est  convaincu 
dans  le  cas  de  Cécilius  est  de  nature  à  ébranler  notre  confiance 
dans  la  véracité  du  recueil  tout  entier,  et  les  futurs  critiques  de 
Plutarque  feront  bien  de  passer  au  crible  tous  les  renseigne- 
ments dérivés  de  cette  source  qu'on  lit  dans  la  Vie  de  Cicéron. 
Au  reste,  l'emploi  inconsidéré  qu'en  a  fait  Plutarque  n'est  pas  la 

•  Cf.  Peler,  Quellen  Plutarchs,  p.  129  suiv.  Tiroa  est  cité  expressément  deux  fois 
(c.  XLi  et  xi.[x). 

«  Quintilien,  VI,  3,  5;  VIII,  6,  73;  Macrobe,  II,  1,  12  ;  Scol.  Bob.,  in  Se«^, 
p.  309  Or.  Un  recueil  analogue  avait  été  entrepris,  du  vivant  même  de  Cicérun,  par 
C.  Trebonius  (Cic,  Ad  fam.,  XV,  21).  et  Macrobe,  II,  1,  13,  cite  un  mol  de  Cicé- 
ron, d'après  une  compilation  (les  Lucubrationes'i)  de  b'urius  Bibaculus.  Jules  César 
avait  inséré  des  «  mois  >  de  Cicéron  dans  une  compilation  du  même  genre  [Ad 
fam.,  IX,  16,  4  ;  cf.  Suétone,  Jul.,  56). 

»  Saint  Jérôme  (sur  Eusèbe),  ad  ami.  Abr.  2013  (=  i  av.  J.-C.)  :  Tiro...  usqiie 
ad  ccntesimum  annuni  consenescit.  Il  ne  faut  pas  conclure  de  la  date  de  celle  mention 
que  Tiron  tût  né  en  104,  car,  en  50  avaui  J.-C,  Cicéron  le  qualide  encore  d'adoles- 
cens  [ad  Att.,  VI,  7,  iin.). 


46  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

seule  légèreté  de  ce  genre  qu'on  soit  en  droit  de  reprocher  au 
biographe  de  Chéronée  :  on  sait  depuis  longtemps  que  si  Plutarque 
a  droit  à  notre  estime  par  son  talent,  son  érudition  et  son  honnê- 
teté, le  sens  critique  n'est  pas  son  fort.  Mais  comment  justifier 
que  l'érudition  moderne,  d'ordinaire  si  soupçonneuse,  n'ait  pas  été 
plus  clairvoyante  que  l'aimable  biographe  dans  un  cas  où  la 
fraude,  pour  ainsi  dire,  éclatait  aux  yeux.  ! 

Pour  nous  résumer,  voici,  croyons-nous,  les  conclusions  qu'on 
peut  tirer  de  cette  analyse  : 

Cécilius  Niger,  l'adversaire  de  Cicéron,  l'ancien  questeur  de 
Verres,  n'était  ni  juif  de  religion,  ni  affranchi  de  condition. 

Si  on  lui  a  attribué  cette  double  qualité,  c'est  par  une  confusion 
avec  son  homonyme  et  compatriote  le  rhéteur  Cécilius  de  Calacté. 

Le  mot  Qiiid  Jiidœo  cum  Verre?  est  apocryphe.  Plutarque  l'a 
emprunté  sans  réflexion  au  recueil  des  Joci  Ciceronis  attribué, 
sans  doute  faussement,  à  Tiron. 

Il  n'y  a  aucune  raison  d'admettre  l'existence  de  communautés 
juives  ou  d'une  propagande  juive  en  Italie  ou  en  Sicile  avant  la 
prise  de  Jérusalem  par  Pompée  '. 

Théodore  Reinach. 


1  Je  ne  puis  terminer  ce  travail  sans  exprimer  le  vœu  qu'il  se  trouve  un  savant 
Israélite  pour  reconstituer  la  personne  et  l'œuvre  de  Cécilius  de  Calacté.  L'absence 
totale  de  son  nom  a  lieu  de  surprendre  dans  l'excellent  ouvrage  de  Schûrer  ;  Graelz 
ne  le  mentionne  pas  davantage.  Quoique  juif  de  religion  seulement,  et  non  de 
naissance,  Cécilius  a  droit  à  figurer,  comme  Hellène  judaisant,  à  côté  de  la  pha- 
lange des  grands  Juifs  hellénistes,  Anstobule,  Philon,  Josèphe.  11  serait  piquant 
de  montrer  ce  fin  restaurateur  de  l'atlicisme  en  littérature,  faisant  adhésion  au  ju- 
daïsme en  religion,  et  témoignant  par  là  que,  si  la  lumière  du  beau  rayonne  de  l'acro- 
pole d'Athènes,  c'est  ailleurs  que  l'humanité  doit  chercher  le  pain  de  l'âme. 


LE  VAV  CONVERSIF 


On  sait  qu'en  hébreu  la  même  forme  verbale  qui  sert  de  passé 
exprime  le  futur,  lorsqu'elle  est  précédée  de  la  conjonction  vav, 
et  que,  inversement,  la  forme  employée  pour  le  futur  prend  l'ac- 
ception du  parfait,  quand  elle  est  précédée  de  la  même  conjonction 
(ponctuée,  à  la  vérité,  un  peu  différemment)  '.  Ce  phénomène 
doit-il  s'expliquer  par  l'hébreu  seul,  ou  bien  la  comparaison  des 
autres  langues  sémitiques  peut-elle  nous  aider  à  le  comprendre? 
Voilà  ce  que  nous  voudrions  examiner  dans  la  première  partie  de 
ce  petit  travail.  Dans  une  seconde  partie,  nous  rechercherons 
dans  quelle  mesure  les  différents  livres  de  la  Bible  observent  la 
règle  du  vav  conversif. 


EXPLICATION    DU    VAV   CONVERSIF. 

Ewald-,  Buttcher  ^  et  d'autres  grammairiens  modernes  ont 
remplacé  le  nom  de  vav  conversif  par  celui  de  vav  consécutif. 
Cependant  Ewald  lui-même  reconnaît  que  le  terme  de  vav  conver- 
sif est  admissible  si  l'on  entend  par  là  qu'après  ce  vav,  l'imparfait 
est  substitué  au  parfait  et  réciproquement.  11  ne  deviendrait  im- 
propre que  si  l'on  attribuait  au  vav  même  le  pouvoir  de  changer 
le  passé  en  futur  et  vice  versa^.  Comme  en  grammaire,  la  ter- 
minologie est  toute  de  convention,  nous  ne  voyons  aucun incon- 

•  Quand  le  futur  est  au  mode  impératif,  il  n'est  pas  modifié  par  l'emploi  de  la 
conjonction  vav,  par  exemple,  !l3T3NT  ..."rb    'ib  (Gen.,  xii,  1  et  suiv.). 

*  Grammatik  der  hebrdischen  Spracke,  1835,  p.  161, 
•*  Attsfnhrliches  Lehrhich  d.  hebr.  Sj)>'',  p.  192. 

♦  Ibid.,  1870,  p.  594,  n.  2.  Voir  aussi  Kœaig,  Lehrgebâude  der  hebrcbischm  Sprache^ 
p.  162. 


48  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

vénient  à  garder  le  nom  de  vav  conversif.  Au  contraire,  le  terme 
de  vav  consécutif  a  le  désavantage  d'impliquer  une  théorie  qui 
est  loin  d'être  démontrée.  D'après  Ewald,  on  emploie  l'imparfait 
après  le  parfait,  parce  que  l'action  exprimée  par  le  second  verbe 
est  la  conséquence  de  l'action  exprimée  par  le  premier  verbe, 
exemple  irr^i  i-2i<  «  Il  a  dit  en  sorte  que  cela  fut  ».  L'exemple  est 
très  bien  choisi,  mais  il  ne  suffit  pas  à  justifier  l'emploi  général  de 
l'imparfait  à  la  place  du  parfait.  Parce  que,  de  deux  actions  coor- 
données, la  seconde  est  souvent  amenée  par  la  première,  s'ensuit- 
11  que  la  conjonction  et  soit  constamment  à  interpréter  par  «  en 
sorte  que  *  »  ? 

Ensuite,  comment  se  fait- il  que,  si  un  mot  quelconque  sépare  la 
conjonction  du  verbe,  on  ne  puisse  plus  employer  l'imparfait? 
L'action  est-elle  moins  consécutive  quand  le  verbe  est  précédé  du 
sujet  ou  d'un  adverbe  ? 

La  théorie  d'Ewald  est  encore  plus  arbitraire,  quand  il  s'agit 
d'expliquer  comment  le  parfait  précédé  de  la  conjonction  se  substi- 
tue à  limparfait.  Ewald  se  contente  de  dire  que  l'imparfait  consé- 
cutif a  pour  contre-partie  le  parfait  consécutif,  comme  si,  par 
amour  de  la  symétrie,  il  avait  fallu  compliquer  la  syntaxe 
hébraïque  '  ! 

Nous  conserverons  donc  la  dénomination  du  vav  conversif,  sans 
attacher  au  mot  plus  d'importance  qu'il  ne  convient.  En  effet,  non 
seulement  on  ne  peut  admettre  que  le  vav  produise  une  interver- 
sion des  temps,  mais  encore  il  faut  se  demander  si  réellement  un 
temps  se  substitue  à  l'autre.  En  d'autres  termes,  au  lieu  de  croire 
qu'une  même  forme  prend  des  acceptions  opposées,  il  faut  voir  si, 
au  contraire,  il  n'y  a  pas  eu  fusion  de  formes  primitivement  diffé- 
rentes, et  c'est  pour  retrouver  ces  formes  dans  leur  état  originel, 

'  Il  est  bon  de  noler  que  là  où  le  vav  a  incontestablement  le  sens  de  pour  que, 
en  sorte  que,  on  emploie  bien  Timparfair,  mais  le  vav  prend  un  scheva  et  non  un  petah. 
Le  verbe  est  alors  le  plus  souvent  au  mole  impératif.  Nous  citerons  comme  exemples  : 
"IjTCN"''!  Gen.,  xui,  20;  p^Dl  (=  ppTll)  Ex.,  ii,  7;  rî13SNT  »*»!''.,  xiv,  4,  17; 
1N2"^T  î*«rf.,  N-PI  Lév,,  IX,  6;  nTD"'"l  Nomb.,  xxiii,  19;  ûnSn"*!  ibid.,  rinp^'T 
Deut.,  XXX,  12,  13;  i;y?3"0"^T  ibid.;  r!rO:'jT  ibid.  ;  ai*5:>iîT  I  Sam.,  xii,  3  ;  -^nm 
IRois,  I,  2,  3i"C21  ibid.,  xii,  9;  Tn''0"'T  Û^NCî^l  Isaie,  xli,  29;  ir;S"i;T  ib., 
LUI,  2;  irn7:n:i  if>i'l.;  ITri  Ez..  sn-,  7;  by^^^  ibid.-,  pa-^n  Osée,  XIV,  10; 
ûrT«T  ibid.  ;  NCNT  Ps.,  lv,  13;  "inONI  ibid.;  -IT^UÎ^'T  ibid..  cvii,  43;  ISriSniT 
ibid.;  •r.yz'"i  Job,  xxxviii,  13;  l3i\"T'"l  ibid.,  14;  ir'?''!  ibid.,  35;  "n?:N"'T  ibid.; 
S'îCNT  ibid.,  xl,  3;  ■|2"^",:;"^1  Lam.,  i,  19;  '7?:n:NT  ibid.,  ii,  13.  De  même,  après 
^yfzb,  exemples  'C'Sn  Ex.,  xxiii.  12;  nb"'2C""i  n7:"'"w"'T  l^'T^  Is..  xli,  20  ;  i;"«2m 
irrNm  ibid.,  xliu,  10;   "l-lSO'^'  Ps.,  lxxviii.  6;  ■173-«U;"'T  ibid.,  7. 

»  Pour  Bôttcher,  le  futur  et  le  parfait  coasécutifs  ont  le  même  sens  que  le  futur  et 
le  parfait  sans  vav.  Il  est  inutile  de  dire  combien  on  est  forcé  de  torturer  les  textes 
pour  justifier  celte  assertion. 


LE  VAV  CONVERSIF  49 

qu'il  y  a  lieu  de  faire  intervenir  les  autres  langues  sémitiques. 
C'est  ce  que  nous  allons  essayer,  tout  en  reconnaissant,  par 
avance,  le  caractère  très  hypothétique  de  nos  conclusions. 

Tout  d'abord,  il  faut  bien  remarquer  que  ce  n'est  pas  l'adjonc- 
tion de  préfixes  ou  de  suffixes  qui  fait  qu'un  verbe  devient  futur 
ou  passé.  Il  semble,  il  est  vrai,  que  la  différence  essentielle 
entre  la  forme  du  parfait  et  celle  de  l'imparfait  consiste  en  ce  que 
l'un  est  suivi  des  affixes  pronominaux,  tandis  que  l'autre  en  est 
précédé;  mais  il  est  facile  de  démontrer  que  la  place  des  pronoms 
ne  détermine  pas  le  temps.  En  effet,  si  des  pronoms  seuls  dépen- 
dait le  sens  du  verbe,  les  affixes  une  fois  enlevés,  le  thème  du  par- 
fait devrait  être  le  même  que  celui  de  l'imparfait.  Or,  si  l'on  sup- 
prime -T  dans  \-npD  et  n  dans  ipsN.  Tpji  et  npç  diffèrent  encore 
beaucou}).  La  véritable  caractéristique  du  parfait  est  que  la  pre- 
mière radicale  a  un  a,  celle  de  l'imparfait  que  la  première  con- 
sonne a  un  scheva  '. 

En  outre,  nous  trouvons  en  assyrien  les  préfixes  employés  aussi 
bien  pour  le  parfait  que  pour  l'imparfait,  ce  qui  prouve  qu'un 
verbe  avec  préfixe  n'est  pas  nécessairement  un  imparfait. 

Enfin,  de  quelque  façon  qu'on  explique  le  phénomène  du  vav 
conversif,  on  est  obligé  de  reconnaître  qu'un  verbe  avec  préfixe 
peut  s'employer  pour  le  parfait  et  qu'un  verbe  avec  suffixe  peut 
servir  d'imparfait. 

Cela  posé,  voyons  si  la  forme  ':^-:^,  qui  est  un  futur,  est  iden- 
tique avec  ips-^în),  qui  sert  de  passé.  La  même  question  se  posera 
pour  nps  et  ipsn. 

On  a  remarqué  depuis  longtemps  qu'avec  le  vav  conversif  on 
emploie  le  futur  apocope,  qui  est  identique  avec  le  futur  impératif 
et  répond  au  conditionnel  arabe.  Ainsi,  on  dit  '^yz'^  à  l'indicatif, 
mais  TpD;^  à  l'impératif  et,  avec  le  vav  conversif,  npo^n  ;  de  môme, 
nrû^  à  l'indicatif,  aiy-j  à  l'impératif  et  nx-n  (pause  ncp)  ;  de 
même  encore  nsç»,  "jd»  et  IdI'I*.  Or,  il  est  curieux  de  noter  qu'en 


'  Nous  essayons  ailleurs  de  démontrer  que  l'absence  de  voyelle  sous  la  première 
radicale  n'est  pas  due  à  la  présence  des  préfixes,  et  que,  avant  même  que  les  pro- 
noms se  lussent  soudés  au  verbe,  i'imparlait  n'avait  pas  de  voj'elle  sous  la  première 
radicale. 

*  Si  le  futur  impératif  et  le  parfait  préfixé  ont  une  même  origine,  c'est  cependant 
par  une  fausse  analogie  que  ce   dernier  a  pris  à  la    1"  personne  la  terminaison  îi 

Cette  terminaison,  d'ailleurs,  est  rare  dans  les  parties  anciennes  de  la  Bible.  Au  sin- 
gulier, on  la  trouve  :  Gen.,  xxxii,  6  ;  Nombres,  viii,  19  ;  Juges,  vi,  6.  9.  10  ;  x,  12  ; 
XII,  3  ;  II  Sam.,  vu,  10  ;  xii,  18  ;  xxii,  24  ;  Jér.,  si,  18  ;  xxxii,  9  ;  Ez.,  m,  3  ; 
IX,  8  ;  XVI,  tl  ;  Ps.,  m,  6  ;  vu,  5  ;  lxix,  11,  21  ;  cxix,  3;i,  59,  106,  147,  158,  162  ; 
Job,  1,  15,  16,  17,  19;  xix,  20;  EccL,  i,  17;  Dan.,  vai,  13,  15,  17;  ix,  3,  4;  Esd., 
T.  XXVI,  H"  51.  4 


50  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

arabe  même  le  conditionnel  est  quelquefois  l'équivalent  du  parfait. 
Après  la  conjonction  in  «  si  »  on  emploie  indifféremment  le  par- 
fait ou  le  conditionnel.  Après  la  négation  lai/i  on  emploie  le  con- 
ditionnel dans  le  sens  du  parfait.  Inversement,  le  parfait  sert 
d'optatif  comme  le  conditionnel  dans  des  formules  telles  que  rxiirn 
!-;y?kN  «  Dieu  ait  pitié  de  lui  ».  Il  est  permis  de  conclure  de  là  que 
la  forme  verbale  qui  exprime  l'impératif  peut  servir  en  même 
temps  de  parfait.  On  comprend  que,  lorsqu'on  énonce  un  ordre  ou 
un  souhait,  on  le  considère  comme  étant  dt^jà  accompli.  S'il  en 
est  ainsi,  on  conçoit  que  "pD"^!  soit  un  parfait,  car  ce  n'est  pas  la 
même  forme  que  l'indicatif  futur  ;  c'est  une  forme  identique  à 
l'impératif  et  qui  sert  de  parfait  à  côté  de  ij^z. 

En  assyrien  ifqud  est  toujours  un  parfait  et  répond  donc  exac- 
tement à  l'hébreu  "pD"',  quand  il  est  précédé  du  vav  conversif.  En 
éthiopien  yafqecl  n'est  pas  non  plus  le  futur  indicatif,  mais  seule- 
ment l'optatif.  On  se  sert  pour  l'indicatif,  comme  en  assyrien, 
d'un  autre  thème,  ainsi  qu'on  le  verra  plus  loin. 

De  la  comparaison  de  ces  différentes  langues  il  ressort,  à  notre 
avis,  que  la  forme  p'ul  {p'al,p'U)  n'est  par  elle-même  ni  un  passé, 
ni  un  futur,  et  c'est  pourquoi  elle  a  pu  devenir  l'un  et  l'autre.  En 

VII,  28  ;  VIII,  15,  16,  17,  25,  26,  28  ;  ix.  3,  6,  15  ;  Néh.,  i,  4  ;  ii,  1,  9,  13  ;  vi,  8, 
11,  12;  VIT,  5;  xiir.  7,  8.  9,  10,  11,  13.  17,  19;  xxi,  22,  30.  Au  pluriel  on  ne  la 
rencontre  que  Gen.,  xLiii.  11  ;  Ps.,  xc.  10;  Esd.,  viii,  23,  31 .  Là  même  où  la  ter- 
minaison rt  ne  s^est  pas  introduite,  lanalogie  du  iutur  impératif  a  eu  pour  effet  de 
substituer  le  p"iO  au  D*5n  et  du  p"in  au  i"|^  (sauf  "TjblNT  Deut.,  sxix,  i;  Amos, 
II,  10;  n^NT  Jér. .  xxxii,  10).  Ce  qui  prouve  qua  Torifrine  la  1"  personne  avait  la 
même  vocalisation  que  les  autres  personnes,  c'est  que  les  maires  lectiones  manquent, 
surtout  dans  les  parties  anciennes  de  la  Bible.  Ainsi  :  û\yNT  Gen.,  xxiv,  il  ; 
Deut..  X,  5;  Is..  li,  6;  Jér.,  xiii.  2;  N3N1  Ex.,  xxix,  4;  ypsi  Lév.,  xx,  23; 
Vn2NT  ibid.,26;  "^r'^iNl  Deut.,  ix,  21;  ni'ïîT  IRois.ii.42;  NnnNT  i'*.,  xviu,  13  ; 
DpNI  n  Rois,  m,  21;  ISNT  Jér..  xlii,  21  ;  N:C"|NT  Ez.,  xxviii,  18;  "inONT  «'*  , 
XXXIX,  23;  2"tî5N1  Zach.,  vi,  1;  "riDNT  ibi(f.,  xi,  8.  Le  i/od  se  trouve  dans  Jos.. 
XXIV,  6,  8;  I  Sam.,  x,  18  ;  xii,  1  ;  Is.,  xlvih,  ;i  ;  Jér.,  ii,  7;  xi,  8  ;  Ez..  xxxvi, 
19;  Amos,  ii,  9,  11;  Zach..  xi,  13;  Mal,,  i.  3;  Néh..  n,  18,  20;  iv.  7;  Il  Chr,, 
VI,  11  ;  le  tav.  Ez..  m,  23  ;  Néh.,  n,  15  ;  iv,  8  ;  II  Chr.,  vi,  10.  Dans  les  verbes  à 
troisième  radicale  i/od,  la  première  personne  est  souvent  apocopée,  Gen.,  xxiv,  46; 
Ez.,  VI,  3;  Nomb,,  xxiii,  4  ;  Deut.,  m,  18;  ix,  15.  10;  x,  3  ;  Jér.,  xv,  6;  Ez.,  i,  4  ; 
XI,  16;  XII,  7;  Zach.,  iv,4;  Ps.,  xviii,  24  ;  xxxviii,  15  ;  LXix,  12;  Néh.,  i,  3;  ii,  15. 
Le  futur  terminé  en  n  est  cependant  aussi  fréquent,  Gen..  xxiv,  48;  Deut.,  i,  16, 
18;  Jufî.,  XII,  3;  I  Sam,,  xxvi,  21  ;  II,  Sam.,  vu,  9  ;  Is.,  vi,  1;  Jér.,  xiii,  2  ; 
XXXI.  25;  xxxii,  9,  13;  Ez„  i,  1;  viii,  2,  10;  xvi,  8;  Am.,  iv,  10;  Ps.,  xiv,  11,  21; 
Prov.,  XXIV,  32  ;  Job,  vu,  20.  Il  est  dillîcile  do  déterminer  si  n  représente  la  con- 
traction de  la  voj-clle  radicale  avec  la  terminaison  n  ou  bien  si  c'est  seule- 
ment la  vo3'elle  radicale,  les  verbes  en  yod  n'étant  pas  toujours  apocopes 
même  aux  autres  personnes;  ainsi  I  Rois,  xviii,  32,  42;  xix,  8;  xxii,  35,  54 
II  Rois,  i,  10;  II,  14  ;  m,  2  ;  iv,  23  ;  xiii,  11  ;  xxii,  19;  Jér.,  xx,  2  ;  xxivi,  26 
xxxvii,  21;  xixviu,  16;    xliv,  17;  LU,  37. 


LE  VAV  CONVERSIF  .^1 

assyrien,  elle  est  devenue  parfait;  en  éthiopien,  optatif.  En  arabe, 
yafqiid  a  pris  différents  sens  à  l'aide  des   désinences.   Avec  u 
[yafqud-n),  c'est  un  indicatif;  avec  a,  c'est  un  subjonctif;  sans  dé- 
sinence, c'est  un  conditionnel  ou  un  optatif  et  quelquefois  un  par- 
fait. L  hébreu  a  eu  très  probablement  pendant  une  certaine  période 
les  mêmes  distinctions,  mais  les  désinences  des  modes  dans  les 
verbes,  comme  celle  des  cas  dans  les  noms,  sont  tombées  et,  par 
suite,  il  n'est  plus  resté  que  l'indicatif  et  l'impératif,  celui-ci  em- 
ployé également  comme  passé  de  l'indicatif  après  le  vav.  La  diffé- 
rence de  vocalisation  entre  3r::\  par  exemple,  et  n=:3\  entre  vpD-^ 
et  '7;?2-'  ne  s'explique  que  si  l'on  suppose  que  l'indicatif,  en  hé- 
breu, comme  en  arabe,  avait  une  terminaison,  tandis  que  l'impé- 
ratif n'en  avait  pas.  En  effet,  le  pno  de  nr^îM^rovient  d'un  ancien 
tt  long,  tandis  que  le  abn  de  3=:;-^  provient  d'un  ancien  u  bref.  Vu 
était  bref  à  l'impératif  parce  qu'il  se  trouvait  dans  une  syllabe 
fermée  [ijasub],  tandis  que  1'^^  de  l'indicatif  était  dans  une  syllabe 
ouverte,  la  troisième  radicale  étant  suivie  d'une  voyelle  yasii-hu. 
De  même,  dans  r ps'^  le  pnn  provient  d'un  l  qui  était  dans  une  syl- 
labe ouverte  :  yafqidu,  tandis  que,  à  l'impératif,  la  syllabe  était 
fermée  yafqid  :  L'i  s'est  alors  changé  en  ni:.  Le  subjonctif,  ayant 
eu   primitivement   une  désinence,    ne  pouvait  pas  être   vocalisé 
autrement  que  l'indicatif,   une  fois  la  terminaison  disparue.  Pour 
le  sens,  le  subjonctif  se  rapprochait  davantage  de  l'impératif,  c'est 
pourquoi  on  trouve  ce  dernier  mode  après  certaines  conjonctions, 
telles  que -^biN  (Gen.,  XXXII,  30;  1  Rois,  xviii,  5,  27  ;  Jér.,  xx,  10; 
XXI,  2;  xxvi,  3;  xxxvi,  7),  pizh  '  et  après  le  vav,  quand  il  signi- 
fie «  pour  que  »  -. 

Ainsi,  au  lieu  d'admettre  que  YpD;«T  est  un  imparfait  qui  a  fini 
par  devenir  un  parfait,  parce  qu'il  était  employé  à  la  suite  du  par- 

>  Voyez  les  exemples  ci-dessus,  p.  48,  n.  1, 

«  C'est  peut-être  aussi  le  subjonclirqu'il  faut  voir  dans  Pimparfail  après  TwN,  exemple 
^■^'«^1  TN  [Ex.,  XV,  \).  En  elfet,  en  arabe  on  trouve  idhait  employé  d'une'  manière 
analogue  avec  le  subjonctif.  Il  est  vrai  qu'en  arabe  le  verbe  ainsi  employé  indique 
une  action  future,  tandis  qu'en  bébreu  il  a  ie  sens  du  passé;  mais  on  comprend  que 
l'imparfait  subjonctif  dépendant  de  TN  puisse  s'appliquer  à  tous  les  temps.  ->,v^i 
dans  -i^a-^  TN,  n'est  donc  ni  l'indiccuif,  qui  ne  saurait  désigner  qu'une  action  future' 
m  limperatil,  car  il  faudrait  n'ç;^^  mais  le  subjonctif  régi  par  TN.  On  peut  égale- 
ment supposer  que  la  désinence  a  de  la  1"  personne  du  futur  impératif  (nipDN)  est 
identique  à  l'a  du  subjonctif.  On  a  comparé,  il  est  vrai,  et  avec  raison,  celte  termi- 
naison, ainsi  que  l'a  de  l'impératif  avec  l'énergique  arabe,  mais  la  question  est  de 
savoir  si  l'énergique  arabe  ne  peut  être  expliqué  de  la  même  façon.  Au  lieu  de  dire 
que  n^  dans  nbapN  est  pour  an,  il  est  plus  simple  dire  que  an  dans  aqtulan  ou 
anna  dans  aqtulanna  est  composé  de  a,  plus  la  particule  na  (bébreu  Nï).  Le  redou- 
blement du  noun  dans  anna  étant,  comme  le  daguescb  de  N".  diVà  la  pre.=sion 
(p'^m)  exercée  sur  la  particule  monosyllabique. 


52  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

fait,  nous  croyons  que  ipc'^  et  nps^i  sont  deux  formes  différentes 
{yafqûdu  et  yafqud),  qui  se  ramènent,  à  leur  tour,  à  une  même 
forme  [pqud)  de  sens  indéterminé. 

Si  la  différence  grammaticale  qui  existe  entre  ipp*;  et  "pv'i  ^st 
encore  visible  dans  certains  verbes,  il  semble  bien  que  12°  ^t 
^p2îl  soient  une  même  forme.  Mais  là  encore  il  faut  se  défier  des 

•-T 

apparences,  car  la  grammaire  comparée  montrera  qu'en  réalité, 
nous  avons  devant  nous  deux  formes  qui  ne  sont  pas  identiques. 
Que  la  forme  pa'al  puisse  exister  comme  futur,  c'est  ce  que  nous 
montrent  l'éthiopien  et  l'assyrien.  L'impaifait  indicatif  dans  ces 
deux  langues  a,  il  est  vrai,  des  préfixes,  mais  nous  avons  déjà  dit, 
que  la  place  des  affîxes  pronominaux  n'a  pas  d'importance.  Ce  qui 
est  essentiel,  c'est  la  vocalisation  du  thème  verbal;  or,  en  éthio- 
pien et  en  assyrien,  la  première  radicale  a  un  a  à  l'imparfait  : 
[yefaqed^  ipaqid).  Toutefois,  et  c'est  là  un  point  capital,  ce  thème 
se  distingue   du  thème  du  parfait  hébreu,   grâce  à   la  place  de 
Vaccent  tonique.  Dans  le  thème  du  parfait  hébreu,  la  deuxième 
syllabe  a  le  ton,  comme  le  prouvent  les  nombreux  dérivés  du  par- 
fait, qui  allongent  la  seconde  voyelle,   exemple  lips  (de  paqâd) 
correspondant  à  i-s,  t^^d  correspondant  à  ^-d  (paqid)  et  -npo  à 
npt.  Au  contraire,  l'imparfait  assyrien  a  le  ton  sur  la  première  syl- 
labe radicale,  comme  on  le  voit  par  le  redoublement  fréquent  de  la 
seconde  radicale  :  ipâqqid  pour  ipaqid.  C'est  également  la  voyelle  a 
qui  est  accentuée  dans  yefaqed  en  éthiopien.  Et,  de  même  que  le 
parfait  pa'al  a  donné  naissance  à  des  noms  avec  deuxième  voyelle 
longue,  de  même  l'imparfait  pà'al  et  surtout  pâ'il  a  donné  nais- 
sance à  des  noms  avec  première  voyelle  longue,  dont  le  plus  im- 
portant n'est  autre  que  le  participe  actif  5;?i^  {depail).  L'allonge- 
ment de  la  voyelle  provient  sûrement  du  ton,  qui  primitivement  était 
sur  la  première  syllabe  de  bj'is,  et  qui  n'a  changé  de  place  que  lors- 
que les  suffixes  des  cas  sont  venus  s'attacher  aux  noms.  Le  ton  a 
passé  à  la  seconde  syllabe,  mais  la  voyelle  longue  est  restée.  Le 
participe  a  donc  pour  origine  le  thème  du  futur.  Les  grammai- 
riens arabes  ont  senti    l'affinité  du    participe  et  de  l'imparfait, 
car,  pour  eux,  l'imparfait  est  le  remplaçant  du  participe  :  bro'ïN 
bj^Nobb  ynî<i?:'5i<.  En  hébreu  même,  le   participe  actif  exprime 
très  souvent  une  action  qui  va  s'accomplir,  par  conséquent  future. 
A  côté  du  participe,  il  est  probable  que  la  forme  po'al,  comme 
ub^y,  les  adjectifs  de  la  forme  pa'al,  comme  23a,  et  pV'êl  (pour 

'  On  ne  peut  rien  conclure  de  l'accentuation  de  TpD  même,  parce  que  radjonclion 
des  suffixes,  puis  leur  chute,  a  modifié  raccenluation  des  mots  hébreux. 


LE  VAV  CONVERSIF  53 

pa"êl],  comme  533>,  où  le  daguescli  doit  avoir  pour  cause  l'accent 
tonique  primitif,  se  rattaclient  à  l'ancien  \m\)a,\:i-à\ipa'alo\ipa'ilK 

On  est,  dès  lors,  amené  à  supposer  que  la  forme  pa'al,  qui, 
précédée  de  vav,  exprime  en  hébreu  le  futur,  dérive  de  la  forme 
pa'al  avec  ton  sur  la  première  syllabe.  La  ressemblance  absolue 
des  deux  formes  'jpo  et  ^pai  ne  serait  donc  que  secondaire.  Peut- 
être  même  la  différence  primitive  du  ton  a-t-elle  laissé  une  trace 
dans  l'accentuation  actuelle  de  ^^npD  et  \mpDT.  Le  premier  est 
b:>bw  et  le  second  5>-ib72.  Il  est  admissible  que  -«mpD  a  conservé  le 
ton  sur  la  seconde  syllabe,  comme  cela  était  même  avant  l'adjonc- 
tion des  suffixes,  tandis  que,  dans  ^^^pD^,  le  ton  qui  était  à  lori- 
gine  sur  la  première  syllabe  n'a  pas  empêché  le  suffixe  pronomi- 
nal d'être  accentué,  et  s'est  réduit  à  un  semi-ton  *  ou  contre-ton, 
les  règles  de  la  prononciation  ne  permettant  d'accentuer  que  la 
dernière  ou  l'avant-dernière  syllabe  des  mots.  Il  est  vrai  qu'à  la 
pause  ^mpDT  est  byb?2,  mais  l'analogie  des  formes  pausal^s  a  pu 
exercer  ici  d'autant  plus  son  influence  que  les  exemples  de  verbes 
avec  la  conjonction  vav  terminant  une  proposition  devaient  être 
assez  rares  '. 

En  résumé,  dans  la  langue  sémitique  primitive  il  y  aurait  eu 
pour  le  qal  *  deux  formes  fondamentales  :  l'une  pa'al  {pa'il  pa'ul), 
lorsqu'elle  avait  le  ton  sur  la  deuxième  syllabe,  était  un  passé, 
et  lorsqu'elle  avait  le  ton  sur  la  première  était  un  futur,  et  l'autre, 
p'al  [p'U,  p'iil),  ne  désignait  pas  à  l'origine  un  temps  déter- 
miné, mais  est  devenue  ensuite,  suivant  les  dialectes  ou  suivant 
les- désinences  qu'elle  a  prises,  un  imparfait  ou  un  parfait. 

Pourquoi  pa'cU  (passé)  et  pâ'al  (futur)  ont-ils  reçu  en  hébreu 
des  suffixes,  tandis  que  p'al  a  reçu  des  préfixes?  Nous  hasarde- 
rons la  supposition  suivante.  On  sait  qu'en  hébreu  on  a  l'habitude 
de  mettre  le  mot  imiiortant  en  tète  de  la  proposition.  Or,  pa'âù  et 
pâ'al  paraissent  avoir  exprimé  des  actions  précises  et  détermi- 

»  11  est  probable  que  le  dague  ch  du  puH  et  la  voyelle  longue  du  pôêi  ont  uue 
origine  semblable,  mais  ce  n'est  pas  ici  le  lieu  d'y  insister. 

*  Si  la  voyelle  de  la  première  radicale  n'est  pas  tombée  complètement,  cela 
lient  d'abord  à  ce  que  cttle  voyelle  avait  primitivement  le  ton,  mais  aussi  à  l'analo- 
gie du  parlait  ipD.  Les  deux  formes  pâ'al  et  pa'âl  ont  fini  par  être  assimilées  com- 
plètement, tout  en  n'étant  pas  accentuées  de  la  même  manière. 

*  11  faudrait  mudilier  en  ce  sens  ce  que  nous  disions  de  l'accent  tonique  en  bébreu, 
Revue,  XVI,  p.  76.  La  supposition  qu'il  y  avait  une  tendance  à  commencer  les 
mots  par  une  syllabe  non  accentuée  devient  inutile.  Pour  les  irapariaits  apocop'^s 
comme  Dti"'T,  nous  croyons  que  la  conjonction  et  le  prétixe  réunis  l'emportent  sur  le 
monosyllabe  verbal;  c'est  pourquoi  le  préfixe  a  le  ton.  A  la  pause,  c'est  le  thème 
verbal  qui  reprend  la  suprématie.  Cette  raison  peut  expliquer  aussi  l'accentuation  de 
"rnpDT  à  la  pause. 

*  Les  autres  formes  ont  dû  se  modeler  sur  le  qal. 


54  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

nées  :  le  verbe  est  alors  mis  avant  le  sujet;  au  contraire,  p'al  ex- 
primait à  l'origine  une  idée  indéterminée  et  vagae  ;  le  sujet  a 
alors  pris  la  première  place,  et  est  resté  comme  préfixe,  alors 
même  que  p'al,  grâce  aux  désinences  de  mode,  avait  fini  par 
prendre  des  acceptions  plus  nettes. 

A  l'aide  des  hypothèses  déjà  formulées,  on  comprend  aussi 
pourquoi  l'hébreu  a  réparti  les  passés  et  les  futurs  de  telle  sorte 
qu'on  em[)loie  "»mp2  et  Tp^Ni  comme  passés,  ipîx  et  "^mpsT  comme 
futurs.  En  effet,  le  parfait  TinpD  a  conservé  son  accentuation  pre- 
mière, la  notion  de  passé  qu'il  exprime  n'est  donc  pas  obscurcie; 
or,  comme  c'est  naturellement  le  premier  verbe  dont  on  se  sert 
qui  doit  indiquer  clairement  le  temps  auquel  on  pense,  %-i'ip:  de- 
vait logiquement  être  employé  en  tête  d'une  série  de  passés.  Pour 
un  second  verbe,  il  était  moins  nécessaire  d'employer  une  forme 
très  précise.. Or,  l'esprit  sémitique  a  une  tendance  à  commencer 
une  seconde  proposition  par  où  la  première  a  fini.  On  dira,  par 
exemple  :  Pierre  est  bon  et  mauvais  est  Paul.  C'est  ce  que  les 
Arabes  appellent  laff  loanaschr  (enveloppement  et  développe- 
ment), et  on  peut  y  comparer  la  disposition  des  inscriptions 
houstrophedon,  qui  vont  de  droite  à  gauche  puis  de  gauche  à 
droite.  Le  sujet  dans  -ripa  étant  après  le  verbe,  on  est  porté  à 
continuer  par  le  sujet  et  à  donner  seulement  ensuite  le  verbe  : 
'i'pr:iiii'\  fera  donc  la  suite  de  \-i'7p:.  On  se  sera  habitué  plus  tard  à 
employer  toujours  avec  le  vav  ipsx  comme  passé. 

Par  cela  même  que,  avec  le  vav,  npDX  servait  de  passé,  sans 
vav  (et  avec  désinence  u)  il  devenait  un  futur  plus  net  que  \-inpD 
tjui  n'avait  même  plus  son  ancienne  accentuation;  il  a  donc  été 
employé  comme  premier  verbe,  et,  toujours  en  vertu  du  laff 
loanaschr,  "^mps,  en  tant  que  futur,  a  pris  le  second  rang  ;  et  de 
même  que  npESn  était  devenu  définitivement  un  parfait,  \Tîp-:T 
est  devenu  définitivement  un  imparfait. 

lî  reste  encore  à  expliquer  pourquoi  la  conjonction  vav  a  de- 
vant les  préfixes  un  petah  et  est  suivie  d'un  dagiiescli.  Mais  ici 
nous  n'avons  qu'à  suivre  Bottcher,  qui  a  comparé  avec  beaucoup 
de  raison  le  ;ifia/î  avec  daguesch  qu'on  trouve  dans  n^sa,  r^as. 
Lorsque  deux  particules  monosyllabiques  s'agglutinent,  on  est 
porté  à  prononcer  plus  fortement  la  seconde  consonne,  de  façon  à 
donner  plus  de  corps  au  mot  ainsi  formé.  Bien  que  les  préfixes 
pronominaux  précédés  du  vav  ne  se  détachent  pas  du  verbe,  ils 
forment  néanmoins  avec  le  vav  une  particule  composée  '.  Dans  le 

'  Le  daguesch  qui  suit  le  hé  interrogatif  dans  une  consonne  avec  scheva  a  peut-être 
la  même   origine.    Primitivement,   ce   daguesch  aura    été   mis    dans  les  prépositions 


LE  VAV  CONVERSIF 


Tiitur  impératif,  le  vav  n'est  lié  qu'accidentellement  au  préfixe, 
c'est  pourquoi  il  garde  sa  ponctuation  ordinaire. 


II 

EXCEPTIONS  A  LA  RÈGLE  DU  VAV  CONVERSIF. 

Si  nous  quittons  le  terrain  des  hypothèses  relatives  à  l'origine 
de  la  règle  du  vav  conversif  pour  en  examiner  l'application  dans 
les  différents  livres  de  la  Bible,  nous  constatons  que  dans  la  pre- 
mière partie  de  la  Bible,  qui  va  de  la  Genèse  aux  Rois,  on  n'em- 
ploie que  très  rarement  le  vav  coordinatif  à  la  place  du  vav  con- 
versif. Il  est  même  probable  que  les  exceptions  qu'on  y  trouve  sont 
dues  à  la  négligence  des  copistes,  quand  ce  ne  sont  pas  de  simples 
fautes  de  ponctuation.  Les  remarques  suivantes  le  montreront. 

Dans  la  Genèse  on  trouve  quatre  fois  la  3«  personne  masc.  sing. 
du  passé  hifil  précédée  du  vav  coordinatif,  à  savoir  :  iTpNm  (xv, 
6),  np^'r>^  (xxi,  25),  r^boï^T  (xxxi,  7),  o-inr^T  (xxxiv,  5).  On  re- 
marque qu'aucun  des  quatre  mots  n'a  de  i/od  entre  la  deuxième 
et  la  troisième  radicales,  et  cette  coïncidence,  qui  ne  peut  guère 
être  fortuite,  nous  fait  croire  que  ces  mots  ne  devraient  pas  être 
ponctués  comme  des  passés,  mais  que  ce  sont  des  infinitifs  abso- 
lus, comme  innîi  (Gen.,  xli,  43),  nmrîT  (Ex.,  xxxvi,  7),  etc.  Les 
ponctuateurs,  plus  habitués  par  le  langage  rabbinique  aux  passés 
avec  vav  coordinatif,  qu'aux  infinitifs,  auront  pris  ces  verbes  pour 
des  passés.  La  vraie  vocalisation  de  ces  mots  serait  donc  :  l^pN^tn, 
n^im.  tlbriïii  ià-in!in.  Dans  la  Genèse  (xxviii,  ti),  on  rencontre 
encore  nbon  comme  passé,  qu'il  faut  peut-être  lire  aussi  nrin.  Le 
verset,  d'ailleurs,  parait  altéré,  -^"13  et  isnnn  étant  redondants. 

Dans  l'Exode  on  trouve  r^D^^  (xxxvi,  38  ;  xxxviii,  2S),  p':;ni 
{ib.),  yirpi  (xxxix,  3),  que  nous  serions  disposé  à  prendre  pour  des 
infinitifs  :  ^tsitn,  P"ù?m,  yipn. 

-ûTi  (Nombres,  xxin,  19)  en  parallélisme  avec  n7ûLX  est  peut-être 
une  faute  pour  nm . 

yWwHi  (Deut.,  II,  30)  doit  aussi  sans  doute  êlre  lu  y^CwSi. 

Dans  Josué  vi,  8,  13,  on  rencontre  i:>pm,  mais  dans  ce  même 

2,  'D,  b,  qui,  avec  le  he',  formaient  une  particule  composée,  comme  dans  Û'^ïtl/ûS!!. 
Puis,  on  aura  mis  le  dapuesch  là  même  où  les  lettres  b,  0,  3  étaient  de  la 
racine,  comme  n3n3^i,  et  finalement  dans  toutes  les  lettres,  exemple  r^îT^C". 


56  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

verset,  on  trouve  aussi  yipni^  ce  qui  nous  autorise  à  penser  que 
dans  i:?pm  il  y  a  eu  transposition  du  vav. 

Le  cantique  de  Déborah  (Ju<,'es.  v)  contient  trois  passés  avec 
vav  dans  le  verset  2ô  :  rritnsi.  riTcbm,  n^bm,  à  côte  de  npnr  sans 
vav.  On  peut  supposer  que  le  vav  des  autres  verbes  est  dû  à  une 
erreur.  Avec  les  termes  parallèles  on  laisse  facilement  la  conjonc- 
tion de  côté*.  De  plus,  rtxnn  est  précédée  de  rcN-i,  qui  termine 
par  un  vav  ;  ce  vav  aura  pu  se  dédoubler.  Les  Juges  présentent 
encore  le  mot  bsn  (vu,  L3),  que  nous  lirons  Vz:^ ,  cf.  yis;-!  (ibid., 
V,  19)  et  "ib^'i  (xvi,  18),  qui,  s'il  n'est  pas  une  faute  pour  l'^y^'i, 
pourrait  être  ponctué  i?:?i. 

Dans  I  Sam.,  iv,  19,  nr:i  est  certainement  une  erreur  pour  rri, 
comme  suite  de  npbn  bx.  —  Le  mot  n7:NT  (v,  7),  s'il  n'est  pas 
pour  m73NT  ou  i-'i7;n"'t,  peut  être  considéré  comme  un  imparfait  : 
«  Et  les  (gens  d'A.sdod)  disaient  ».  Il  est,  en  outre,  possible  que 
iNn"""!  dans  ce  verset,  vienne  de  ï<-p  et  aurait  dû  avoir  un  méicg 
sous  le  yod;  dans  ce  cas,  au  lieu  de  i-i/:Nn,  il  faudrait  i-i::n\  et 
le  sens  serait  :  Et  les  gens  d'Asdod  craignirent,  car  ils  disaient 
ainsi.  —  rt'p'-.'i  (xxvi,  9)  peut  être  lu  r:p:n,  s'il  n'y  avait  pas  primiti- 
vement rîpn. 

Dans  le  second  livre  de  Samuel  (vu,  11),  on  rencontre  T'srri, 
mais  le  passage  parallèle  des  Chroniques  (1,  xvii,  10)  a  la  leçon 
exacte  i;n%  car  c'est  le  prophète  qui  annonce  que  David  bâtira 
un  temple.  Le  mot  'n  est  donc  de  trop;  il  est  d'ailleurs  redondant 
avec  'r,  de  la  fin  du  verset-.  Puis  -farm  (xii,  31),  qui,  s'il  n'est 
pas  un  imparfait,  peut  se  lire  T'arriT,  Le  yod  se  trouve  assez 
souvent  à  l'infinitit' absolu  (Is.,  i.ix,  4;  Jér.,  x,  5;  xiii,  32 ;  xxxvi, 
16;  XLiv,  4,  17;  Amos,  ix,  8;  Zach.,  xi,  10.  Quelquefois  même, 
le  yod  a  fait  ponctuer  la  seconde  radicale  d'un  pin,  de  sorte  que 
l'infinitif  premier  a  été  remplacé  par  le  second  (Josué,  iv,  3;  Jér., 
X,  33  :  Ez.,  vji,  14  ;  xxi,  31  ;  Ps.,  lxxvii,  2).  —  Nous  changerons 
également  b?;-!  (xiii,  18)  et  ncn  (xvi,  16)  en  br;i  et  nr:?"!. 

Dans  le  premier  livre  des  Rois  yb-pi  (vi,  32,  35)  et  nciii  {ibid). 
nous  paraissent  également  des  infinitifs.  Le  passé  y  a  été  substi- 
tué, comme  dans  les  passages  semblables  de  l'Exode.  L'infinitif 
devait  être  employé  surtout  là  où  l'on  racontait  une  série  d'opéra- 
tions. Pour  nrir'm  (viii.  47)  il  n'y  a  guère  à  douter  que  le  vav  ne 
soit  de  trop,  car  i::?':;n,  qui  vient  après,  n'a  pas  la  conjonction,  et 
le  vav  de  n3N::n,  qui  précède,  a  pu  facilement  se  dédoubler.  Dans 

'  Voir  plus  loin  p.  58. 

•  Le  verset  des  Chroniques  est  lui-même  altéré  :  au  lieu  de  rC^^T,  il  faut  ri"<3  "^S, 
le  D  est  tombé  à  cause  de  "jb,  et  le  yod  a  été  changé  en  vav. 


LE  VAV  CONVERSIF  37 

le  passage  parallèle  II  Chroniques,  vi,  ST,  il  y  a  r.-^^y^  sans  vav, 
par  contre  on  y  lit  n;:>':;-n.  -  m^i  (xi,  10,,  i^73rm  (xn,  32)  i^pom 
(xiv  21)  seront  à  lire  comme  des  infinitifs,  n^m  (xx,  21),  après 
■^11,  est  sûrement  mal  ponctué  pour  rîpm  . 

Dans  le  deuxième  livre  npbi  (xiv,  14),  inOT  (xviii,  4),  n-,wi  et 
nn^T  (ibicl.)  sont  aussi,  selon  nous,  des  infinitifs  absolus.  On 
trouve,  il  est  vrai,  nc-'-inm  (xviii,  36),  mais  le  passage  parallèle 
d'Isaïe  (xxxvi,  21)  a  it:-'-in"'i.  De  même,  au  lieu  de  i;n;"i  (xix,  18), 
le  texte  d'Isaïe  (xxxvii,  19)  porte  iinsi,  ce  qui  vient  à  l'appui  de 
notre  opinion  que  tous  ces  passés  avec  vav  non  conversifs  ont 
été  simplement  mal  ponctués,  et  nous  corrigerons  de  la  même 
façon  r!2m  (xxi,  4),  n"a:>r!-i  {ib.,  6),  ;rn:i  et  noyn  {ibid.).  —  Dans 
XXI,  13,  le  sens  même  indique  que  '^sm  r:n?2  ne  sont  autre  chose 
que  des  infinitifs  absolus,  et  qu'il  faut  ponctuer  -^èrn  nn^.  Toute 
une  autre  série  de  passés,  au  lieu  d'infinitifs,  se  trouve  au  cha- 
pitre xxiii  :  n"::;t  (4),  n^3"::m  (5),  yn^si  (8),  n^-jt  (10),  nT:;n  (14). 
De  même,  nb^m  (xxiv,  14),  xron  (xxv,  29)  et,  enfin,  V::nt  (ibid.), 
si  ce  n'est  pas  un  imparfait. 

Ce  qui  nous  porte  à  croire  que,  dans  toute  cette  partie  de  la 
Bible,  il  n'y  a  pas  lieu  d'admettre  des  passés  avec  vav  non  conver- 
sif,  c'est  qu'on  ne  trouve  presque  jamais  que  la  3^  pers.  masc. 
sing  C'est  seulement  dans  Juges,  v,  26,  qu'on  trouve  la  3^  pers. 
féminin.  Quant  à  la  3^  pers.  pluriel  (Josué,  vi,8, 13;  II  Rois,  xviii, 
36;  XIX,  18)  et  à  la  l"""  pers.  plur.  (I  Rois,  viii,  47),  les  passages 
parallèles  nous  fournissent  les  leçons  correctes.  Ce  serait  un  ha- 
sard extraordinaire  qu'on  ne  trouvât  pas  d'exemple  de  ce  passé  à 
la  1"  et  à  la  2«  personne,  si  réellement  les  auteurs  avaient  employé 
le  vav  non  conversif. 

Avec  les  livres  prophétiques  proprement  dits,  on  voit  apparaître 
le  vav  coordinatif  à  toutes  les  personnes  du  passé,  ce  qui  ne  per- 
met plus  de  recourir  à  des  corrections  pour  supprimer  les  excep- 
tions à  la  règle  du  vav  conversif. 

Dans  Isaïe,  les  exemples  sont  encore  peu  nombreux  et  même 
dans  deux  passages,  nari  vp'C  (viii,  8),  -cbiz-i  (mcDl  b'^^m  iii2:) 
(xxxi,  5),  on  est  obligé  de  remplacer  les  passés  par  des  infinitifs 
absolus.  Dans  Jérémie,  ils  sont  plus  fréquents,  et  encore  davantage 
dans  Ezéchiel.  Dans  les  douze  petits  prophètes,  ils  sont  relative- 
ment rares.  Ces  exemples  sont  : 

Isaïe  ;  m^Di  (v,  14),  n-)-"!,  ibid,  ^^r:;^r^^?'  (xliii,  12), 
n:??2cm?  {ibid.),  ■•mnirîi  ?  (iô.,  14);  m-bim  (lv,  10),  nnrûicm 
(ib.),  in3i(îô.),  n^bi:ni  (11),  n-j^b^Mi  (lvi,  1) 

'  Les  verbes  marqués  d'ua  point  d'interrogation  peuvent  à  la  rigueur  être  pris  pour 
des  futurs. 


o8  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Jérémie  :  r;n-05i  (vu,  28),  1521  (/&.,  31),  imbiDNi  (x,  25),  iw^Vsmt 
(xiv,  3],  Tisni  {ibid.),  rincm  (xv,  9),  nnïJT  (xxii,  16),  n;a:>T  (ib.), 
iDm  (xxxvii,  15),  Tjr\^i  (îb  ),  ibDSi  (xlvi,  6),  3ï5m  (xLix,  30),  nsm 
(l,  43),  TîSb;i  (li,  56),  T,y:i^  (lu,  33),  bsNT  iibidX 

Ezéchiel  :  n^rri  iNSt^i  (ix,  1),  ûnN5«n  (xi,  6),  ûn-^Tm  (xiii,  81, 
^-^nnD^^  (xvii,  24),  lïja-'n  (xix,  12),  ^n3^ïïr;^  (xx,  22),  n-^n^i  (xxiii, 
40),  na-w-»!  [ib.,  41),  n73p5n  (xxv,  12),  û-n  (xxxi,  lOj,  ûnnn^m  (xxxv, 
13),  n5-i-35'r;T  (xxxvii,  2),  -^ntain  {ib.,  1),  ^-i\n-,t  (î6.,  8),  \nNa:m 
{ib.,  10),  mnNT  (iô.,  11),  r!rT«rî2i  (xxxix,  8),  Tn^i  (xl,  24,  35;  xli, 
13,  14),  nbisT  (xLii,  15),  ^ïtî-^^tim  [ib.]. 

Joël  :  'T^V^am  (i,  7);  Amos  .-  nn-on  (i,  11),  r;bDNi  (vu,  4);  Michée  : 
riTjT  D72"n  (v,  7);  Nahimi  :  nm:!?  (m,  17). 

Les  Hagiograplies  fournissent,  bien  entendu,  un  nombre  consi- 
dérable de  passés  avec  vav  non  conversif.  Tl  y  en  aurait  peut-être 
encore  davantage  dans  les  livres  poétiques,  si  le  vav,  comme  une 
foule  d'autres  particules,  n'était  très  souvent  laissé  de  côté.  Par 
contre,  il  est  vrai,  on  peut  se  demander  si,  dans  les  passages  où 
l'on  trouve  le  vav  coordinatif,  ce  n'est  pas  un  copiste  qui  l'a  ajouté, 
tandis  que  dans  le  texte  primitif  il  n'y  avait  pas  la  copule.  C'est 
surtout  pour  les  termes  à  peu  près  synonymes  que  le  vav  est  sup- 
primé, comme  on  le  voit  déjà  dans  Nombres,  xxiv,  9,  ns"::  ^'HD  ; 
Juges,  v,  27,  '2D3  :?n:3,  etc. 

Dans  les  Psaumes,  les  exemples  sont  :  -mcnriT  (xxii,  15),  Vddît 
(xxvii,  2),  \-tit:?:t  (xxviii,  7),  ■^32:>t  (xxxiv,  5),  nay^T  (11),  is-m 
(xxxvii,  14),  ^-^1:3'^;■l  (xxxviii,  9),  nritrri  (lxxxvi,  13),  -:r7:n;n  (17), 
■^nïXî'nn  cxxxi,  2),  inii  (cxxxv,  12),  -r^a^'m  (cxxxvi,  14),  in;T  (21). 

Dans  les  Proverbes  on  trouve  seulement  np-^mm  (vu,  13),  npoîi 
(ib.);  mais  il  faut  dire  qu'il  y  avait  bien  peu  d'occasions  de  mettre 
le  vav  devant  le  passé. 

Nous  notons  dans  Job  :  û"'3'C!-!t  (i,  5),  nV^'m  [ib.],  is-im  (ib.), 
^m2Tîm  (ix,  30),  ^npiiin  (x,  14),  no-isi  (xi,  13),  thnt  (xvi,  12), 
Tibbs'T  (15),  -lïTiifom  (xviii,  11),  n^bys-i  (xxviii,  21),  n^nniT  (xxix, 
8),  '^n'îmm  (xxxii,  16),  nani  (xxxv,  6).  Le  plus  souvent  les  verbes 
sont  coordonnés  sans  vav. 

Dans  les  Cantiques  nous  relevons  seulement  ■«nn'-'^T  (1,  3). 

Dans  Ruth  (iv,  7)  on  trouve  insT  .-.tiba^  mais  le  sens  demande 
bien  plutôt  in:-!  ...fibo. 

Les  Lamentations  ne  fournissent  pas  un  seul  passé  avec  vav 
coordinatif. 

L'Ecclésiaste ,  au  contraire ,  nous  en  donne  de  nombreux 
exemples.  Nous  nous  contentons  de  donner  les  renvois  :  i,  12,  16; 
II,  5,  9,  11,  12,  13,  15,  17,  18;  iv,  4,  7  ;  viii,  15  ;  ix,  14,  15,  16. 


LE  VAV  CONVERSIF  59 

Les  livres  historiques  d'entre  les  Hagiograplies  présenteraient 
sans  doute  bien  plus  d'infractions  à  la  règle  du  vav  conversif,  s'ils 
n'imitaient  pas  le  style  des  livres  plus  anciens  Dans  p:sther  la  règle 
est  même  strictement  observée,  car  le  seul  passé  avec  vav  errai 
(m,  12)  doit  certainement  être  lu  ûnnsi,  comme  viii,  8'.  Dans 
Daniel  on  remarque  rn^N-n  (viii,  1],  '^\h':ir:^  (U),  i3r:;-im  iris-i 
n5i-i7ûT  (IX,  5),  ^n\Nm  (x,  1),  -nsm  (14).  Dans  Esdras  :  Tio^n  (m, 
10),  aoriT  (VI,  22),  ni<"::5n  (viii,  36),  •^ntjbssT  (ix,  6),  nnii  (13).  Dans 
Néhémie  :  irx^im  (ix,  7),  r.^Toyw  (x,  33),  NirwsT  (xiii,  1),  û^nnr^a^ 
(.30).  Dans  I  Chroniques  :  ^2n\sm  (xvii,  11)  %  \-n5^3i-n  (xxviii,2); 
II  Chroniques  :  ^^niDbttm  (i,  8),  ^nnnm  (vu,  12),  ^-^^a^pm  (16), 
T^pcriT  (xii,  10),  \mr^m  (xix,  3),  y::y^  (xxix,  6),  lîonpm  ^19),  ;^;m 
(xxxiii,  4),  q'^asT  ^n^  1-::::)^  (6),  nnci  (14),  lV2yT:^  (19). 

Certains  passages  des  Chroniques  sont  d'autant  plus  intéres- 
sants que  la  comparaison  avec  les  passages  parallèles  des  Rois 
montrent  la  différence  de  style  des  deux  ouvrages.  Ainsi  ^nD'r7ûr^^ 
(II  Chroniques,  i,  8)  ne  se  retrouve  pas  dans  le  texte  correspon- 
dant I  Rois,  m,  6,  de  même  ^mnm  (vu,  12),  ^^o•^pi^^  (16). 

L'étude  du  futur  indicatif  avec  vav  coordinatif  donne  les  mêmes 
résultats  que  celle  du  parfait.  Les  exceptions  dans  la  première 
partie  de  la  Bible  (Pentateuque  et  premiers  Prophètes)  sont  encore 
plus  rares  que  pour  le  parfait,  ce  qui  nous  autorise  d'autant  plus 
à  considérer  ces  exceptions  comme  des  fautes  de  ponctuation. 
Dans  la  Genèse  nous  rencontrons  uîn-;!  (xxii,  17),  qu'il  faut  lire 
probablement  O^^T  ;  on^^T  avec  deux  yod,  comme  impératif,  se 
trouve  XXIV,  60.  Dans  l'Exode  on  peut  noter  n^am  (xix,  3;,  qui 
est  en  parallélisme  avec  -it^wNpi.  Nous  inclinons  à  corriger  ce  mot 
en  n^srî-i  comme  infinitif.  La  ponctuation  avec  ^n:i  est  [)eut-ôtre 
encore  un  indice  de  la  véritable  leçon.  Cependant,  la  tournure 
poétique  de  la  phrase  permettrait  d'y  voir  une  sorte  de  futur  im- 
pératif dans  le  sens  de  l'indicatif,  comme  les  livres  poétiques  et 
prophétiques  en  fournissent  de  nombreux  exemples  ».  i^n^n  (xxvi, 

»  On  remarquera  aussi  que  la  Megilla  n'emploie  jamais  Tp  pour  TiJïî,  bien  qu'on 
y  trouve  des  termes  de  bas  hébreu  comme  13N,  D']?.  etc. 

»  Le  passage  ^l'^TTorî  ÛINn  niPS  ■^;n"'N-n  est  évidemment  altéré,  et  le  pas- 
sade correspondant  de  II  Sam.,  vu.  19,  qui  porte  Û-îNH  Pmn  PNn,  l'est  encore 
plus.  Peut-être  y  avait-il  quelque  chose  comme  35  ">3  '^jn"'N"in  (le  n  étant  dé- 
composé en  "<  et  5,  et  -|"l  réunis  en  D)  nbr:3b  DIT'  Nin  «  et  tu  m'as  lait  voir 
que  lui  aussi  (Salomon]  s'élèvera  bien  hauli. 

»  Voyez  Deut.,  sxviii,  8,  21,  36;  xxxii,  8;  1  Sam.,x,  8;  Is.,  xxvn,  6;  xsxv,4; 
L,  2  ;  kzéch.,  iii,  3;  xiv,  7  ;  Osée,  vi,  1;  xiv,  6,  "  ;  Joël,  ii,  20  ;  Michée,  m,  4; 
iv,  6  ;  V,  8  ;  VI,  14  ;  Soph.,  ii,  12;  Zach.,  x,  7  ;  Mal.,  ii,  12  ;  Ps.,  xi,  6  ;  xji,  4  ; 
XXV,  9;  XLvii,  4;  Lviii,  5;  lxxi,  21;  lxxii,  13;  xc,  3;  civ,  19;  cvii,  33,  35; 
Prov..  XV,  25;  Job,  x,  IG,  17,  27;  xv,  33;  xvi,  21  ;  xviii,  9,  12;  xx,  23;  xxii,  28; 
XXIV,   215;    XXVII,    22;   xxxiii,  21;    xxxiv,  29,  37;    xxxvi,  14,    1o;   xxxviii,    4,  5; 


60  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

24)  et  noST>i  xxviii,  28),  s'ils  ne  sont  des  impératifs,  doivent  être 
changés  en  ttii  et  ic::"n.  Dans  le  Lévitique  (xxvi,  43)  il  y  a  à 
remarquer  y~ni,  qu'on  pourrait  prendre  pour  un  impératif  et 
traduire  «  pour  qu'elle  compense  »;  il  est  plus  probable  qu'il  faut 
lire  rii-im,  comme  au  verset  34. 

Dans  Deutéronome,  ii,  4,  où  l'on  trouve  ûStt  ictT^'^T,  le  texte  est 
visiblement  altéré  ;  il  semble  que  l'on  doit  lire  cï^t:  iN-,'n.  On  aura 
peut-être  trouvé  choquant  que  les  enfants  d'Israël  aient  eu  à  re- 
douter leslduméens  et  on  aura  interverti  maladroitement  les  per- 
sonnes, car  as-:  ■,N","^"'  devant  cr-i?:'c;:T  n'a  pas  grand  sens.  — 
TnNr-i  (xxxii,  41)  devrait  être  ponctué  Tniîri  après  \-^irw,  qui  est 
un  parfait  '. 

XL,  9;  Lara.,  m,  iiO;  Dan.,  ix,  25;  xi,  10,  16,  17,  18,  25,  28.  —  Pour  quelques 
verbes,  comme  "i31^  (Ps.,  xlvii,  4).  DÏ2N''  (lviii,  oJ,  le  "i"!^  peut  s'expliquer  autre- 
ment. Ainsi  que  M.  Barlh  l'a  montré  [Z.  D,  M.  G.,  XLIII,p.  1"7  et  suiv.),  ces  verbes 
sont  probablement  au  qal,  et  ont  l'imparfait  en  »  comme  "jp"^.  Nous  en  dirons  autant 
de  t]3in  (Gen.,  iv,  2),  t]3T»  (Lév.,  v,  6;  Nomb..  v.  7;  xii,  19;  Joël,  ii,  2\  J]OJ< 
(Ez.,  V,  16),  qui,  malgré  le  abn.  nous  paraissent  appartenir  au  qal.  De  même  f|CN 
avec  p""in,  mais  sans  j/o(f,  Gen..  viii,  21  ;  Ex.,  x,  29.  En  efl'et,  le  gai  esi  presque  seul 
employé  au  participe  et  au  passé.  L'impératif  :iso  (Is.,  xix,  1,  et  Jér.,  vu,  23),  qui 
a  le  sens  de  00^,  vient  aussi  réellement  de  ClC^.  et  non  pas  de  î^20,  qui  signiGe 
•  exterminer  ».  C'est  sans  doute  par  suite  d'une  fausse  anaiof^ie  que  ce  verbe  a 
été  emploj'é  comme  hifil  dans  Cl"^Cir!b  'Lév.,  xix,  25;  Eccl.,  m,  14;  Esdras,  x, 
10;  II  Chr.,  XXVIII,  i3),  TEOini  (Ps..  lxxi,  14  ;  Eccl.,  ii,  9]  et  nSDlJI  (1  Rois, 
X.  7.  au  lieu  de  quoi  on  trouve  II  Chr. ,  ix,  6  :  PDO^). 

'  C'est  surtout  dans  Isaïe  qu'on  trouve  le  vav  ponctué  comme  coordinatif,  là  oîi  le 
sens  naturel  demanderait  le  vav  conversif,  et  presque  toujours  à  la  1"  personne. 
m^rXT   (viii,  2],  -PCNI    (X,  13),  T^mNI    [ihid.],   pTnNI    (xlii,  6],   "J-IJTNT   (l'i-X 

'^rnsi '(«*.),  bbnxT  .x'lui,  28;,  rimNi.  (»*.)•  nrN'rii  (xlvh,  9),  r::?r:"wNT 
(xLviii,  3\  na^sT  (xLix,  5),  "iriD-isNT  (ù,  2),  ir:3-,N")  ji*.),  nns-ixi  (lvh,  17),' 

S]i:pMT   («■*.),     inNEISI    (18),   "irtTCNT    \ib.],    ÛDCXT     i'*.),    ÛDT!î<"i  '  (Lxni,    3). 

20-2-iNi  |«*.),  n  («■*.),'  a-^aNi  (o),  Q7:in"ûN"i  («*.;,  onsNi  (6),  D-b':;»!  (<*■). 

T^TiNT  {ib.),  TCJ^':^  [1-  ^''Cîî^"^  Lxiv.  4).  En  denors  d'Isaïe  on  peut  noter  CHiNT 
(Juges,  VI,  9),  nnbwNT  nnnrwST  [ib.,  xx,  6),  inrnTCNT  (il  Sam.,  I,  10). 
"^C-NI  (Ez.,  XVI.  10),  UNT  (Osée,  XI.  4),  5>n5NT  (Job,  m,  11\  ap'wNT  («*.,13). 
Il  est  possible  que  les  ponclualeurs  aient  cru  que  les  prophètes  voulaient  parler 
d'événements  futurs,  et  non  du  présent  ou  du  passé.  Il  nous  paraît  difficile  d'expliquer 
autrement  cette  anomalie.  Ibn  Djanah.  à  la  fin  de  la  Eisàlat  altaqrib  irattashîl 
[Opusc,  p.  338-342;,  croit  supprimer  la  difficulté  en  disant  que  les  Hébreux  em- 
ploient le  lutur  au  lieu  du  passé,  et  trouve  étrange  que  l'auteur  du  Livre  des  Sons 
ait  expliqué  le  pelah  de  inrmTONT  par  le  fait  que  celui  qui  prétendait  avoir  tué 
Saùl  avait  menti.  Il  est  fort  possible,  quoi  qu'en  dise  Ibn  Djanah,  que  les  ponctua- 
teurs  aient  voulu  indiquer  en  mettant  va  pour  ta  que  cet  homme  s'était  levé  pour 
achever  Saûl,  mais  ne  l'avait  pas  tué.  puisque  c'est  Saûl  lui-même  qui  s'est  percé 
de  son  épée.  Dans  ks  passages  des  Juges  et  de  Job,  les  ponclualeurs  ont  sans 
doute  vu  des  verbes  exprimant  une  conséquence  (cf.  ci-dessus,  p.  48,  note  1).  — 
"lttr\23"^T    (Michée,  vi,  16)  doit  sans  doute  être  corrigé  en  m52ï)  "'S. 


LE  VAV  CONVERSIF  61 

Le  vav  est  sans  doute  de  trop  dans  ^;'7:c■'^,  Josué,  vu,  9.  Le 
dernier  mot  du  verset  précédent  étant  t'i-'in,  le  vav  final  a  pu  être 
redoublé  par  inadvertance. 

Ni  dans  les  Juges,  ni  dans  Samuel,  ni  les  Rois,  on  ne  trouve  de 
vav  coordinatif  devant  l'imparfait  indioalif. 

Par  contre,  on  en  rencontre  en  abondance  dans  les  Prophètes  et 
encore  davantage  dans  les  Hagiographes.  Nous  notons  : 

Isaïe  :  ûin;->"i  (v,  29),  thn-^t  (ib.),  'ji^bs^^  {ib,),  DrrrT  (30),  -cî^^-im 
(xiii,  13),  •\'\^2S^■^^  (xiv,  10),  -,r::-'-\  (xxvin,  25),  cd:>"J"'T  (xxxv,  4], 
v2b^^-\  (xLi,  11),  nnnN-^T  (ib.),  pnm  (14),  cincni  (xlii,  14),  n^n^^T  (21), 
yn-ci  {23},  bban-ii  innc-^T  (xliv,  17),  -i7:.S"'t  O'^.)-  -s^i  (xlvii,  11), 
N2m  {ib.),  n7:m  (l,  2),  cn-'-'T  (lvii,  13). 

Jérémie  :  -^a-im  (ii,  22),  ind^t  (m,  18),  i^nt  (?iii,  19),  mm  (xiii, 
17),  i-np:T  (?  xiv,  22),  ti^n'^t  (xvi,  19),  pT^a^i  (xix,  8;  xlix,  17), 
^-lp^">■l  (xxxi,  36),  vn-^^  (xlii,  17),  iD-j"i:ii  (xlvii,  2),  xstit  (xlix, 
22),  ons^T  [ib.],  ■lN-l^m  (li,  40),  ^:?^^•\  (58). 

Dans  Ezéchiel  on  trouve  très  peu  d'exemples,  qui  même  ne  sont 
pas  très  certains  :  r!\yy^i  (?  xii,  25,  28),  bis^T  (xiii,  11),  nn^rT  (xl, 
42;  1.  in-3"').  Cela  pourrait  tenir  à  ce  que  Ezéchiel  est  le  moins 
poétique  des  prophètes,  et  qu'il  se  permet  moins  de  licences  gram- 
maticales; mais  comment  se  fait-il  que  ce  soit  chez  lui  qu'on  ren- 
contre le  plus  d'exceptions  pour  le  passé?  Il  faut  donc  constater 
simplement  celte  particularité  du  style  de  l'auteur  d'Kzéchiel. 

Parmi  les  petits  prophètes,  c'est  Osée  qui  emploie  le  plus  le  vav 
coordinatif.  Les  exemples  sont  :  Osée  :  t::3ii  (iv,  19),  ^''•?ii^  (v,  14), 
lïNDn^T  (VI,  1],  iSTuan^T  {ib.),  n^nn  (2),  cnoNi  (x,  10),  mvT  (14), 
in-in-'i  (xi,  10),  ^-ii  (XIV,  6),  ^n^i  (7),  nniD^n  (8).  -  Joël  :  bym  (ii, 
20).  —  Amos  :  ba-'i  (v,  24),  n-'ipm  (ix,  10).  —  Michée  :  nnoiT  (m, 
4),  ;om  (VI,  14),  t*:î2^i  (vu,  16),  iwxn^i  (17),  '^^y::D^'!  (1.  '^^bcm,  vu, 
19).  —  Habacuc  :  i-con"'1  (i,  15),  "^-^a-^i  [ib),  Tjp-^T  (IG),  itj.s-'t  (6), 
i^p-^T  (7),  n:>5-^ii  (13),  Niiin  (m,  5).  —  Sophonie  :  -j-^i  (ii,  12],  naNii 
{ib.),  ûo^i  {ib.}. 

Dans  les  Hagiographes,  les  Psaumes  nous  fournissent  beaucoup 
de  futurs  avec  vav  non  converslf,  mais  c'est  surtout  dans  Job  qu'ils 
abondent.  Ni  le  Cantique,  ni  Ruth,  ni  Esther  n'en  présentent  un 
seul  exemple. 

Nous  nous  contentons  ici  de  citer  les  passages,  qui  sont  : 
Psaumes  :  ii,  12;  v,  4  (?),  12;  vu,  10;  xviii,  47;  xxv,  9  ;  xxxvii, 

29,  40;  LXix,  9  (?)  ;  li,  9  ;  lv,  20  ;  lix,  5,  7,  13,  15;  lxix,  36;  lxxi, 
21;   Lxxif,  4;  Lxxiii,8;   Lxxxiii,  4;   xci,  14,  16;    cii,27;  civ,  19, 

30,  32;  cvii,  20,  42;  cxxxix,  10. 

Proverbes  :  i,  16;  xiii,  5;  xv,  25  ;  xxiii,  16;  xxv,  5  (à  côté  de 
n::"^t  v.  4). 


62  RKVUE   DES  ÉTUDES  JUIVES 

Job  :  V,  18;  vi,  18 ;  vu,  21  ;  ix,  11  ;  x,  16,  17;  xi,  10,  11  ;  xii, 
15;  XIII,  19,  24,  26,  27;  xiv,  21  ;  xv,  2,  30,  33;  xvi,  21  ;  xvii,  9; 
XVIII,  4,  7,  14;  XIX,  2,  5;  xx,  8,  13,  23;  xxi,  12,  17.  19;  xxn,  11, 
19,  26,  27,  28;  xxiii,  15;  xxiv,  23,25;  xxvi,  11;  xxvii,  21,  22, 
23;  xxix,  11,  25;  xxx,  22;  xxxi,  17;  xxxiv,  25,  29,  37;  xxxvi, 
11,  12;  XXXVII,  15  ;  xxxix,  21  ;  xl,  29, 

Lamentations  :  m,  19  (?),  50,  G6  ;  iv,  21. 

Ecclésiaste  :  viii,  10, 12. 

Daniel  :  ix,  25;  xi,  5,  6,  7,  10,  11,  15,  16,  17,  18,  25,  28,  36,  42, 
45;  XII.  4,  10,  12,  13. 

Néhémie  :  m,  14,  15;  ix,27;  x,  32. 

II  Chroniques  :  vu,  14,  20;  xii,  8,  20,  21  (1.  r.Tiar,)  ;  xxiv,  13. 

Plusieurs  des  observations  que  nous  avons  faites  pour  le  parfait 
s'appliquent  à  l'imparfait,  notamment  en  ce  qui  concerne  les  livres 
historiques  lies  Hagiograplies.  Pour  les  livres  poétiques,  il  semble 
qu'on  ait  aimé  remplacer  souvent  l'indicatif  par  l'impératif ',  et 
il  est  tr^s  possible  qu'on  se  soit  habitué,  par  suite,  à  mettre  le  vav 
coordinatif  devant  l'imparfait.  En  effet,  le  vav  coordinatif  est  très 
correct  devant  l'imparfait  et  l'impératif,  et  comme  on  était  porté  à 
remplacer  l'indicatif  par  l'impératif,  l'emploi  du  vav  coordinatif 
est  devenu  naturel. 

Pour  terminer,  nous  dirons  que  si  on  conclut  de  la  régularité 
grammaticale  des  textes  à  leur  ancienneté,  on  voit  que,  d'une  ma- 
nière génf^rale,  l'étude  du  vav  conversif  confirme  les  grandes  divi- 
sions de  la  Bible,  telles  que  la  tradition  les  a  établies.  Le  Penla- 
teuque  et  les  livres  dits  des  premiers  Prophètes  (Josué,  les  Juges, 
les  Rois)  représentent  la  partie  la  plus  ancienne  de  la  littérature 
hébraïque,  tandis  que  les  Hagiographes  en  sont  la  partie  la  plus 
moderne.  Quant  aux  Prophètes  proprement  dits,  ils  occu[)ent  une 
place  intermédiaire  au  point  de  vue  de  la  correction,  et  seraient, 
par  conséquent,  postérieurs  à  toute  la  série  des  livres  historiques. 
Nous  livrons  cette  conclusion  à  l'appréciation  des  critiques  de 
la  Bible. 

Mayer  L.^mbert. 

'   ^'oyez  ci-dessus,  p.  bO,  note  3. 


ÉTUDE  DE  LEXICOGPiAPHIE  TALMUDIQUE 


UNE  VIEILLE  CONTROVERSE  AU  SUJET  DE  Kitott 
(Lament.,  III,  12.) 


Dans  le  Midrascli  Echa  Rabbati  se  lit  la  controverse  suivante, 
au  sujet  du  verset  de  Lament.,  m,  12  ;  NW-nns  -i7:n  nn  I\s-n7:x  iinn 
r3i:3  NTîT  r\-2  D"'-ii73  bon-::  nijrn  n-nps  i^n  "im  NO-'nssNb.  Evidem- 
ment, dans  ce  verset,  c'est  le  mot  rare  de  Nna^,  qui  se  retrouve 
encore  deux  fois,  sous  la  forme  plus  correcte  de  t.'t^'û  (^ISara., 
XX,  20;  Job,  XVI,  2),  qui  donne  lieu  à  cette  explication.  Autant  la 
seconde  interprt^tation,  sur  laquelle  nous  reviendrons,  d'ailleurs, 
encore,  est  facile  à  comprendre,  autant  la  première,  grâce  aux  deux 
mots  étrangers  qui  y  sont  employés,  est  obscure.  Les  commen- 
taires ne  savent  guère  qu'en  faire.  L'un  de  ces  doux  mots  étran- 
gers NToma  a  déjà  été  justement  identifié  par  Mussafia  avec  le  mot 
latin  parma,  «  bouclier  ».  Aussi  cet  auteur  écrit-il  le  mot  soit 
Nttnn,  soit  Nwnt,  et  le  cite  sous  ces  deux  rubriques  (voir  Koliut, 
Ariccfi  Completum,  I,  159  a;  VI,  429  6).  Toutefois,  il  est  inutile 
de  condamner  la  leçon  n72T",3,  le  changement  de  la  voyelle  a  en 
ou  dans  les  mots  étrangers  qui  passent  en  hébreu  étant  démontré 
par  maint  exemple  (voir,  par  exemple,  ■jinpn»  =  MkxeSwv,  xbpoiD, 
dans  le  Targoum  sur  II  Sam.,  xxiii,  8,  qui  vient  du  latin  fas- 
ciculus). 

Mussafia  explique  également  l'autre  mot  étranger  de  notre  pas- 
sage par  un  mot  latin  :  spams,  «  javelot,  dard»  [yiz  r:-n  '\y:ibn 
pp  n"«:n,  voir  Kohut,  I,  195  a).  Au  point  de  vue  phonétique,  il  iVy 
aurait  rien  à  objecter  à  cette  identification.  Mais  comment  cette 
explication  concorde-t-elle  avec  le  contexte?  Lévy,  I,  130 &,  admet 
les  explications  de  Mussafia  et  traduit  ainsi  :  «  Gomme  un  bouclier 


U  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

contre  le  javelot  w,  et  il  ajoute  ce  commentaire  :  «  Je  fus  placé  là 
comme  un  bouclier  pour  être  transpercé  par  le  javelot».  Tl  semble 
donc  croire  que,  dans  le  passage  en  question  du  Mldrasch,  le  mot 
yn  n'est  pas  traduit  par  «  flèche  »,  mais  par  «javelot  »,  et  que  le 
mot  N-::?j  est  rendu  par  «bouclier».  M.  Kohut  (I,  195a)  se 
range  à  l'avis  de  Mussafia  et  de  Lévy,  mais,  probablement  pour 
rendre  compte  du  mot  yn  du  texte,  il  ajoute  celte  remarque  que 
NsnîDN  doit  aussi  être  traduit  par  «flèche»,  d'après  le  persan 
1-iûD  (siparî).  Il  est  clair  que  ces  explications  n'indiquent  pas 
la  signification  exacte  du  Midrasch.  En  effet,  il  ne  s'agit  là 
nullement  du  sens  de  yn,  mais  de  celui  do  n-,'j?2,  et  il  n'est  pas 
probable  qu'au  lieu  de  &  flèche  »,  on  ait  parlé  sans  aucun  motif  d'un 
«javelot».  Quant  à  la  remarque  ajoutée  par  M.  Kohut,  elle  est 
inadmissible,  car  le  mot  persan  qu'il  cite  est  une  expression  rare 
néo-persane,  usitée  pour  désigner  une  espèce  particulière  de 
flèches  (voir  Vullers,  I,  204  b). 

C'est  l'Arouch  qui  nous  mettra  sur  la  bonne  voie  pour  com- 
prendre notre  passage.  Nous  y  trouvons,  en  effet,  la  forme  origi- 
nelle de  ce  passage  du  Midrasch,  et  cela  même  en  deux  endroits, 
sous  la  rubrique  -ip  13  (Kohut,  VII,  185  a)  et  sous  celle  de  wSS^'^ssn 
(Kohut,  I,  195  a).   Sous  la  première  rubrique,  nous  lisons  :  pnn 
n^ocnp?:  VDrro  û^^n  nmp^  ^t^.s  N^nii  irm  ND^-sDxb  ^n-:^  yin 
nnTjiy  ï^TTi  "3  ;  sous  l'autre,  R.  Nathan  cite  seulement  la  pre- 
mière moitié  de  la  controverse  :  NO"'-iDDNb  ■^-!7:n  "iizd!  l^n-i.  Celte 
citation  nous  révèle  ce  fait  intéressant  que  le  Midrasch  rapporte 
la  controverse  des  savants  babyloniens  {]'^r'\  irnn)  et  des  docteurs 
palestiniens  (NDm  lî^",)  au  sujet  du  mot  ntj»,  et  que,  dans  la  pre- 
mière des  opinions  émises,  on   se  sert   d'un  seul  mot  étranger 
(Nw-^-icrN)  pour  expliquer  le  mot  du  texte.  Faut-il  identifier  ce  mot 
étranger  avec  ie  latin  spams,  comme  le  font  Mussafia  et  les  Ipxi- 
co"-raphes  modernes  qui  l'ont  pris  comme  modèle  ?  En  aucun  cas. 
Car  nous  ne  pouvons  admettre  que  les  docteurs  babyloniens  du 
iv«  ou  du  v«  siècle  aient  em[)loyé  un  mot  latin  pour  expliquer  un 
mol  biblique;  d'autre  part,  l'explication  de  ntjt:  par  «javelot  »  ne 
donnerait  aucun  sens  plausible.  Nous  avons  plutôt  le  droit  d'expli- 
quer î^c-iDCN  par  un  mot  persan,  bien  que  d'ailleurs  les  mots  de 
cette  |irovenanco  soient  rares  dans  le  Midrasch  palestinien.  Il  n'est 
pas  difficile  de  trouver  ce  mot  persan.  Ce  n'est  pas  le  mot  rare  cité 
par  M.  Kohut,  mais  le  mot  usuel  employé  pour  désigner  le  bou- 
clier, sipa7%  siparî,  dont  l'emploi  général  est  attesté  par  les  di- 
verses locutions  citées  par  Vullers  (I,  202  a).   Dans  les  écoles  ba- 
byloniennes on  expliquait,    d'après  ce  que   nous  apprend  notre 
Midrasch,  le  mot  n^uts  par  «  bouclier  »,  sans  doute  parce  qu'on  le 


ÉTUDE  DE  LEXICOGRAPHIE  TALMUDIQUE  65 

faisait  dériver  de  1:23  «protéger,  conserver)^.  Le  mot  est  donc 
considéré  comme  analogue  à  i:.;;  (de  •;;;),  qui  signifie  à  propre- 
ment parler  «  protection  »  (contre  les  traits).  «Gomme  le  bouclier 
est  atteint  par  les  flèches  —  tel  serait  donc  le  sens  du  verset  bi- 
blique, —  ainsi  les  souffrances  m'ont  atteint.  »  Le  mot  persan 
""nsD  fut  conservé  dans  la  source  palestinienne,  et  cela  avec  la  ter- 
minaison araméenne  Nn  et  le  n  prosthétique,  d'où  t^n-^-i^Siî  '.  Cette 
leçon  était  sans  doute  la  leçon  originale  dans  Echa  Kabbati,  et 
M.  Kohut  dit  aussi  (I,  195  «)  qu'elle  se  trouve  dans  le  manuscrit 
de  l'Arouch.  Nni-iooN  a  pu  se  transformer  facilement  en  nd"'-iîcn. 
Ce  mot  persan  du  Midrasch  palestinien  fut  accompagné,  comme 
cela  arrive  souvent,  d'une  glose  explicative  où  l'on  citait  le  mot 
latin  «parma  »,  qui  y  correspond  exactement.  La  glose  devint  par- 
tie intégrante  du  texte,  de  là  la  leçon  qui  se  trouve  dans  nos  édi- 
tions :  N0"'-,2SNb  N73-naD  -. 

En  ce  qui  concerne  l'explication  des  docteurs  palestiniens,  nous 
la  trouvons  citée  dans  un  autre  ouvrage  midraschique  comme  étant 
la  seule  qui  fasse  autorité.  Dans  le  Midrasch  Tanhouma,  au  com- 
mencement de  la  section  û-^^it^  (éd.  Buber,  p.  48),  nous  lisons,  dans 
une  sentence  de  l'amora  palestinien  Hanina  b.  Papa  (fin  du 
\iv  siècle,  voir  mon  Aggada  der  paldst.  Amorder,  I,  480)  :  pi 
nain   riTib  ynb    s^^tjto^    •^:n"'i:-'T    inop    '^-n  bN-r::'^    no*D   n-i?:» 

a-'-no'^r!  in-^by  û\S3  i-'-ns-rr::  i^t  bD  b^T::-'  '^d  r^x  m^^i:?  rrnpm 

Cette  explication  de  n-i::73D,  donnée  sous  forme  de  comparai- 
son, complète  bien  l'explication  plus  concise  attribuée  aux  doc- 
teurs palestiniens.  Du  reste,  dans  le  Midrasch  Echa,  l'agadiste 
palestinien  Rabbi  Juda  dit  aussi  très  brièvement  :  m^a/^  ■'s-ias'^-i 
lbns2.  «  il  m'a  donné  la  force  de  résister  à  toutes  les  épreuves  ». 

Dans  l'explication  donnée  par  les  Palestiniens,  confirmée  dans 
deux  passages  du  Midrasch,  Nia»  est  expliqué  par  le  mot  hébreu 
ïTTip,  «  poutre  dressée  verticalement  et  servant  de  cible  aux 
flèches  ».  C'est  le  sens  généralement  donné  aujourd'hui  au  mot 
biblique  :  «but,  cible  ».  A  proprement  parler,  il  faudrait  l'appeler 
«  poteau-cible  ».  Le  verbe  a^irn,  dans  Lament.,  m,  12,  et  le  verbe 
û'^prr,  dans  Job,  xvi,  12,  prouvent  que  les  explications  des  écoles 
palestiniennes  se  rapprochaient  autant  que  possible  du  sens  du 
mot  biblique.  Le  Targoum  emploie  dans  les  deux  passages,  ainsi 

'  A  la  vérité,  celle  inlcrprélation  porlail  î^rT^noONÎD  et  non  'DD5<b,  leçon  qui  est 
aussi  dans  la  version  or'jiinale  de  l'Arouch. 
*  A  côté  de  Nn'^nsOND,  on  a  mis  le  mol  correspondant  N73T123. 

T.  XXVI,  ^o  al.  3 


66  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

que  dans  I  Sam.,  xx,  20,  une  expression  évidemment  grecque. 
Quoiqu'il  n'y  ait  pas  d'exemple  où  ce  mot  soit  employé  dans  ce 
sens  spécial,  ce  mot  rend  aussi  la  signification  étymologique 
de  n-iL;?:  :  c'est  le  mot  no-^^Vd  (voir  Arouch,  .v.  ??.  C3b£;Kohut, 
VI,  338;  Levy,  Targ.  Wortey^b.,  II,  -267  «),  probablement  iden- 
tique à  (sûMtç.  Aquila,  sur  I  Sam.,  xx,  20,  rend  aussi  le  mot  par 
9u)vaxô.  Cependant,  on  lui  attribue  aussi  la  traduction  du  mot  par 
axo~oî  (lat.  scopus),  que  nous  trouvons  dans  les  Septante  sur  La- 
ment.,  m,  12,  et  sur  Job,  xvi,  12  (voir  Field,  Ilexapla,  I,  523j. 

La  poutre  servant  de  cible  dans  les  exercices  de  tir  à  l'arc  était 
d'usage  constant  et  général  en  Palestine,  comme  le  prouve  la 
mischna  de  Kelini,  XII,  1,  où  nous  lisons  :  yd  r.aiz'^  n-^irnr;  nmp 
mina  !:-"i"^ON  :  «  le  poteau  servant  de  cible  fait  partie  des  objets  qui 
peuvent  devenir  impurs  \  et  le  poteau  des  condamnés,  le  yllori, 
auquel  les  prisonniers  sont  attachés,  ne  devient  pas  impur». 
Déjà  dans  i'Arouch,  ce  passage  de  la  Mischna  et  celui  iVEcha  rab- 
bati  expliqué  ici  sont  mentionnés  dans  un  même  article  (art.  ip, 
13;  Kohut,  VII,  185  a].  Cependant,  le  sens  de  l'expression  de  la 
Mischna,  attesté  par  tant  de  passages,  a  été  mal  entendu  des 
lexicographes.  M.  Kohut  place  en  tète  de  l'article  mentionné  l'ex- 
plication suivante  :  nmp,  «  étui  »;  a-'iirn-  n-y,  «  carquois».  En 
cela  il  suit  également  Lévy,  qui,  dans  son  dictionnaire  (IV,  275 a), 
donne  pour  r;-.ip  deux  significations  :  1°  a  poutre,  pale  »  et,  au 
figuré,  «  demeure,  étui  »  ;  2"  «  carquois  ».  L'adoption  du  sens 
figuré  a  étui  »  a  pour  unique  but  de  rendre  plausible  le  sens  de 
«carquois».  Or,  pour  ce  dernier  sens,  on  cite  seulement  les 
passages  de  Kelim  et  du  Midrasch  Echa,  placés  dans  TArouch 
sous  la  même  rubrique.  Il  est  étonnant  que  les  deux  savants 
auteurs  qui  se  sont  occupés  du  dictionnaire  talmudico-midra- 
schique  n'aient  pas  remarqué  qu'il  était  impossible  d'expliquer 
rrri';)  par  «  carquois  »,  tant  au  point  de  vue  de  l'étymologie  qu'au 
point  de  vue  intrinsèque.  Cependant,  pour  ce  qui  concerne  le  pas- 
sage de  la  Misciuia,  on  peut  les  excuser  par  ce  fait  que  quelques 
commentateurs  expliquent  aussi,  dans  ce  passage,  les  mots  n-np 
z^'j.^  par  (  carquois  ».  Naturellement.  Maïraonide  n'est  pas  de  ces 
derniers.  Dans  son  commentaire  sur  la  Mischna,  il  explique  cette 
ex[iression  par  les  termes  suivants  :  Nrr^s  "iST»  nncb  E-^icnn  v^•p^ 
y-M'?N,  ce  que  M.  Derenbourg  traduit  fort  bien  par  ces  mots  à-i-npT 
m:272b  ûnb  inp-^  nCwS  r-n^-^-,  z^-ir-  (voir  m-i-:2  "no,  I,  113).  La 
traduction  hébraïque  du  commentaire  sur  la  Mischna,  telle  que 
nous  l'avons  dans  nos  éditions,  porte  :  na  lo-'îr-'  y::  Z'^'zrr,  nmpn 

'  Parce  qu'il  a  aussi  une  partie  en  fer,  dit  Maïmonide. 


ÉTUDE  DE  LEXICOGRAPHIE  TALMUDKjUE  67 

ynin  (comme  s'il  avait  lu  ariDbwS  «n-^D  biT^)  et  ne  donne  pas  une 
idée  claire  de  l'objet  décrit.  R.  Simson  de  Cliinon  donne  l'exidii  a- 
tion  suivante  :  û^^nn  nx  "2  'po-'iD?:*::  rtscN  wvn  'D'''Zr~  n-np.  Il 
voulait  évidemment  parler  du  carquois  dont  il  emploie  le  terme 
biblique.  Mais  il  ajoute  encore  que  l'Arouch  aurait  expliqué  le  mot 
d'après  le  passage  du  Midrascli  qui,  dans  Lament.,  m,  12,  rend 
iii'Jii2  par  n^'^r-  n-np.  Il  semble  que,  d'après  R.  Simson,  l'expres- 
sion signifie  aussi  dans  le  Midrascli  Echa  «  carquois  »;  de  là  vient 
sans  doute  qu'au  lieu  de  lire  nn  D'^m^û  b^rta,  il  lit  D"'">:5p'>:;p7û  bzrrcj 
nn,  ce  qui  rappellerait  le  cliquetis  des  flèches  dans  le  carquois 
(nous  reviendrons  plus  loin  sur  cette  variante).  R.  Obadia  de  Bar- 
tinoro  donne  deux  explications  :  izi-'irnr.a  rtDOX  ■'cn^wn  n"»N 
ynb  rrroT^n  v^j-iq^^^  p-^j^i  -3  n-^n^T^  .  R.  Israël  Lipschiitz,  dans 
son  petit  commentaire  sur  la  Mi:<clina  ('-■:;"'  y~\'  '"^d  uy  m''r::73, 
Vilna,  1851],  dit  simplement  D-^irnb  -eon.  Cette  explication  erro- 
née a  été  malheureusement  aussi  adoptée  par  MM.  Levy  et  Kohut, 
comme,  avant  eux,  par  Mussafia  ',  et  ainsi  un  point  de  lexicologie 
et  d'archéologie  a  été  rendu  incompréhensible. 

Il  nous  reste  encore  à  éclaircir  un  point  de  notre  passage  mid- 
raschique.  Dans  les  éditions,  l'interprétation  que  nous  avons 
reconnue  comme  celle  des  docteurs  palestiniens  est  ainsi  con- 
çue :  nsss  N^m  r;3  t::m;2  Vd-o  û-'^rn  tn-npD.  Au  lieu  de  o'^-n?:, 
l'Arouch  porte  Li'^'C^'Zi-p'D  (voir  plus  haut),  et  R.  Simson,  sur 
Kelim,  L  c,  a  û-'Opop?:.  Cette  dernière  forme  se  trouve  en- 
core dans  une  autre  source  citée  par  M.  Kohut  (VII,  185  rt, 
note  1);  en  outre,  M.  Kohut  cite  comme  «lapsus»  la  leçon 
de  l'édition  d'Amsterdam  de  l'Arouch  :  a'^'JUJip?^.  Or,  c'est  pré- 
cisément cette  dernière  leçon  qui  est  la  bonne,  comme  il  est 
facile  de  le  démontrer.  Le  verbe  lû'Cip  a,  en  effet,  la  signification 
de  «tirer»  (cf.  les  passages  cités  dans  le  Targ.  Wlhtetbuch  de 
Levy,  II,  392  Z^,  ;  Neuh.  WorLerbuch,  IV,  395  &,  et  par  M.  Kohut, 
Vn,  223  &-)  et  spécialement  «tirer  avec  des  flèches».  Ce  sens 
se  rattache  au  sens  primitif  de  la  racine  e^cp  «  être  droit, 
prendre  une  direction  droite»,  d'où  le  sens  abstrait  de  «vérité, 
droiture  ».  rtn  n"^:ûwp?2  '::d- signifie  donc,  cf  sur  lequel  tous  tirent 
ou  visent    avec    leurs  flèches  0.    On    peut  admettre  une  forme 


1  Mussafia  dit,  au  sujet  de  Tart,  -|p,  13  iKohut,  "VII,  183  rt)  :  "jT^'^n  TCÎ1"!"'3 
t^3  ÛTI'T^O  Û"»^nr;'0  "CwN  "^7311.  H  a  donc  lilléralement  l'explication  d  Obiidia 
de  Bardiioro  ;  seulement  il  l'ait  encore  un  rapprochement  avec  un  mot  latin.  Le  mot 
que  M.  Kohut  a  népliijé  de  sifrnaler  est  corijtns,  «carquois»  (et  aussi  ■  llèche  •!. 
D'après  Mussafia,  le  p  de  nmp  i'erail  donc  partie  de  la  racine  du  mot  et,  par  suite, 
le  mot  fait  chez  lui  eacore  l'objet  d'un  article  spécial  (Kohut,  VII,  219  «V 

*  Voir  aussi  mon  Agada  der  Tannaitcn,  II,  100. 


68  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

pôêl,  à  moins  qu'on  ne  préfère  s-^r'-rpTs  {piel,,  comme  étant  la 
leçon  originale.  Le  mot  £2^::c-72  pouvait  devenir  facilement 
a-'C-np?:  et  — en  raison  de  l'opinion  erronée  que  nous  avons  si- 
gnalée plus  haut  chez  R.  Simson  de  Gliinon  —  de  2^w-:;-ip-:  on  a 
fait  i2"'\:;p-:;p?: .  Dans  le  texte  même  du  Midrasch,  le  mot  D-^aap», 
qui  est  rare,  a  été  remplacé  par  c^-r:.  Si  on  ajoute  encore  que, 
dans  notre  passage  midraschique,  la  formule  originale  indiquant 
les  auteurs  de  la  controverse  (Vam  pa-i  et  som  i:an)  est  rempla- 
cée par  l'indication  plus  générale  'x  nm  'n  -n  V''*"^-'^  Ti^.  on 
reconnaîtra  par  cet  exemple  frappant  quelles  modifications  nom- 
breuses le  texte  du  Midrasch  a  dû  subir,  parfois  môme  après  qu'il 
était  déjà  fixé  comme  œuvre  de  littérature. 

W.  Bâcher. 


SI  LES  MORTS  ONT  CONSCIENCE 
DE  CE  QUI  SE  PASSE  ICI-BAS 


La  vie  d'outre-tombe  est  un  mystère  qui  a  tourmenté  les  doc- 
teurs du  Talmud.  Si,  à  la  vérité,  les  écrits  rabbiniques  sont 
plus  sobres  que  ceux  des  chrétiens,  par  exemple,  quand  ils 
traitent  de  ces  questions,  ils  nous  ont  pourtant  laissé  maintes 
preuves  des  discussions  que  soulevèrent  ces  problèmes  insolubles. 
Il  y  a  surtout  une  page  du  Talmud,  Berahhot  18  a-19«,  qui,  à  ce 
point  de  vue,  est  intéressante  à  étudier  pour  l'histoire  de  la  pen- 
sée juive.  Ce  passage  nous  rapporte  deux  discussions  relatives  à 
la  question  suivante  :  Les  morts  ont-ils  conscience  des  choses  de 
ce  monde  ? 

Un  jour  que,  Rabbi  Hiyya  et  R.  Yonatan  se  promenant  dans  un 
cimetière,  R.  Yonatan  laissait  les  ciclt  de  son  vêtement  traîner 
sur  le  sol,  R.  Hiyya  lui  conseilla  de  les  relever  pour  que  les  morts 
ne  dissent  point  :  «  Demain,  ils  viendront  à  nous  et  aujourd'hui  ils 
nous  raillent  »  (car,  dans  la  tombe,  les  morts  n'accomplissent 
plus  les  prescriptions  religieuses).  R.  Yonathan  lui  répliqua  :  Les 
morts  en  ont-ils  donc  conscience?  n'est-il  pas  dit  dans  la  Bible  que 
les  morts  ne  savent  rien  (Ecclésiaste,  ix,  5)? 

Les  morts  dont  parle  ce  verset,  répondit  R.  Hiyya,  ne  sont  pas 
les  morts  véritables,  mais  les  méchants,  qui  de  leur  vivant  même 
sont  déjà  appelés  morts. 

L'opposition  entre  les  deux  opinions  est  donc  très  nette,  R.  Yo- 
nathan ne  paraît  pas  douter  de  l'ignorance  des  morts,  tandis  que 
R.  Hiyya  croit  en  la  persistance  de  la  connaissance  chez  les  morts. 

Le  Talmud,  pour  résoudre  la  question  laissée  pendante,  cite  une 
autre  discussion  de  docteurs.  Les  fils  de  R.  Hiyya,  dont  il  vient 
d'être  parlé,  éprouvant  une  fois  quelque  peine  à  se  souvenir  dn 
leurs  leçons,  se  demandèrent  :  «  Notre  père  a-t-il  conscience  do 
notre  ennui?  »  L'un  d'eux  répondit  :  Non,  car  il  est  écrit,  dans 
Job,  XIV,  21  :  «  Les  fils  souffrent,  et  il  ne  le  sait  pas,  ils  sont  dans 


70  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

le  chagrin,  et  il  n'en  a  pas  connaissance  ».  —  Erreur,  r^^partlt 
l'autre,  car  le  verset  suivant  porte  :  «  Mais  sa  chair  souffre  à  son 
sujet,  et  son  âme  est  en  deuil  sur  lui.  »  En  outre,  Rahbi  Isaac  a  dit 
que  les  vers  l'ont  autant  souffrir  les  morts  que  les  aiguilles  la  chair 
des  vivants.  —  Peut-être  sentent-ils  leurs  propres  souffrances, 
mais  non  celles  des  vivants.  —  Erreur  encore,  car  il  résulte  d'une 
herelta  qu'ils  savent  ce  qui  se  passe  parmi  les  hommes.  Un 
homme  pieux  ayant  entendu  la  conversation  de  deux  esprits,  l'un 
d'eux,  l'année  suivante,  dit  à  son  camarade  qu'il  ne  voulait  plus 
rien  lui  communiquer,  attendu  qu'un  vivant  avait  surpris  leurs 
propos.  —  Peut-être  ces  esprits  étaient-ils  si  instruits,  parce  qu'ils 
avaient  été  renseignés  par  un  mort.  —  Nouvelle  preuve  :  Zeïri 
avait  confié  de  l'argent  à  son  hôtesse  ;  de  retour  d'un  voyage,  il 
apprit  qu'elle  était  morte.  Il  se  rendit  alors  au  cimetière  pour  de- 
mander à  la  défunte  où  était  déposé  son  argent.  Elle  le  lui  révéla 
et  ajouta  :  c  Dis  à  ma  mère  de  m'envoyer  mon  peigne  et  mon 
pinceau  de  coheul,  par  telle  et  telle  qui  doit  venir  demain  ».  Les 
morts  savent  donc  bien  ce  qui  se  passe  sur  la  terre.  —  Peut-être 
est-ce  Douma,  l'ange  préposé  aux  morts,  qui  leur  fournit  ces 
renseignements.  —  Nouvelle  preuve  :  Le  père  de  Samuel  avait 
reçu  en  dépôt  la  fortune  d'orphelins.  Son  fils  alla  au  cimetière 
demander  à  son  père  où  l'argent  était  caché.  Après  divers  inci- 
dents, il  vit  son  père  moitié  riant  et  moitié  pleurant.  Pourquoi 
pleurais-tu?  lui  dit-il.  — Parce  que  bientôt  tu  vas  venir.  —  Et 
pourquoi  riais-tu  ?  —  Parce  que  tu  es  bien  considéré  en  ce  monde, 
—  Puis  son  père  lui  apprit  où  était  l'argent.  —  Donc  les  morts 
savent  ce  qui  concerne  les  vivants.  —  Peut-être,  en  raison  même 
de  la  considération  dont  était  entouré  Samuel,  avait-on  annoncé 
d'avance  sa  venue  prochaine. 

Tous  les  épisodes  de  cette  discussion  ont-ils  figuré  dans  l'entre- 
tien des  fils  de  R.  Hiyya  ou  ont-ils  été  réunis  par  le  rédacteur 
du  Talmud,  la  question  importe  peu  :  cette  page  est  un  échantillon 
certain  des  controverses  auxquelles  donnait  lieu  le  problème  dont 
nous  nous  occupons  ici.  La  même  page  du  Talmud  ajoute  à  ce  su- 
jet encore  d'autres  propos  de  docteurs  et  d'autres  exemples. 

On  peut  y  joindre  Sahhat,  152  a,  qui  rapporte  l'opinion  de  Rab 
Ilisda,  de  R.  .luda,  de  R.  Abbahou  et  d'autres  rabbins,  qui  pa- 
raissent tous  admettre  la  persistance  de  la  sensibilité  chez  les 
morts,  au  moins  pendant  un  temps  déterminé. 

La  page  de  Berakhot  ne  laisse  pas  de  nous  étonner.  Ces  histoires 
citées  à  l'appui  des  opinions  des  docteurs  choquent  notre  goût,  et 
l'on  se  demande  si  vraiment  de  graves  rabbins  ont  pu  invoquer  des 
arguments  de  cette  nature.  Le  rédacteur  du  Talmud  n'a-t-il  pas 


SI  LES  MORTS  ONT  CONSCIENCE  DE  CE  QUI  SE  PASSE  ICI-IUS  71 
oublié  le  granum  salis  qui  peut-être  accompagnait  ces  paroles? 
C'est  ce  qu'on  croirait  volontiers,  si,  à  la  même  époque,  d'autres 
théologiens  n'avaient  pas  discuté  la  même  question  en  invoquant 
de  semblables  arguments.  Oui  s'attendrait  à  trouver  dans  saint 
Augustin  la  répétition  et  comme  l'illustration  de  la  page  du  Tal- 
mud  ?  C'est  cependant  ce  dont  on  se  convaincra  après  avoir  lu  les 
quelques  passages  que  nous  tirons  de  deux  de  ses  œuvres.  Sur  le 
Psaume  cviii,  il  dit  : 

«  Est-ce  que  les  morts  ressentent  de  la  douleur  de  ce  qui  arrive  à 
leur  famille  après  leur  trépas?  Ou  faut-il  croire  qu'ils  en  ont  la  con- 
naissance, puisque  leur  sentiment  est  tout  entier,  loin  de  la  terre,  au 
bonheur  ou  au  malheur,  selon  leurs  mérites?. le  répondrai  d'abord 
que  c'est  une  grande  question,  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  discuter  en  ce 
moment,  à  cause  du  long  discours  qu'elle  exigerait,  de  savoir  si  les 
esprits  des  morts  connaissent  et  jusqu'à  quel  point  et  comment,  ce 
qui  se  passe  parmi  nous.  Mais,  en  outre,  je  puis  vous  dire  en 
quelques  mots  que  si  les  morts  n'avaient  aucun  souci  de  nous,  le 
Seigneur  n'aurait  pas  mis  dans  la  bouche  du  riche  tourmenté  dans 
les  enfers  ces  paroles  :  «  J'ai  cinq  frères  sur  la  terre,  je  voudrais 
qu'ils  ne  vinssent  pas  en  ce  lieu  de  torture  »  (Luc,  xvi,  28). 

Saint  Augustin  ne  se  prononce  pas  nettement  sur  cette  question, 
il  se  réserve  de  la  reprendre.  Elle  est  traitée  tout  au  long  dans 
l'opuscule  intitulé  :  De  cura  gerenda  pt^o  mortiiis. 

Gh.  X.  On  raconte  quelques  apparitions  qui  paraissent  pouvoir 
entrer  comme  matière  dans  cette  discussion.  On  dit,  donc,  que  des 
morts  ont  apparu,  soit  pendant  le  sommeil,  soit  d'une  autre  ma- 
nière, à  des  personnes  vivantes,  lesquelles  ignoraient  complètement 
où  leurs  corps  gisaient  sans  sépulture,  puis  leur  ont  indiqué  le  lieu 
et  les  ont  priées  de  leur  procurer  le  tombeau  dont  ils  étaient  privés. 
Si  nous  répondons  que  cela  est  faux  ,  nous  paraîtrons  contredire 
d'une  manière  presque  arrogante  les  écrits  de  certains  chrétiens,  et 
le  sentiment  de  ceux  qui  se  portent  comme  témoins  de  ces  appari- 
tions. Mais  on  peut  répondre  qu'il  ne  faut  pas  supposer  que  les  morts 
ont  agi  réellement  de  la  sorte  parce  qu'on  les  aura  vus  dans  son 
sommeil  dire,  montrer  et  demander  ces  choses...  Je  croirais  donc  ici 
à  l'intervention  des  auges,  soit  que  Dieu  le  permette  ou  l'ordonne, 
lorsque  les  morts  paraissent  dire  quelque  chose  pendant  le  sommeil 
sur  la  sépulture  de  leur  corps,  quoique  les  intéressés  l'ignorent  com- 
plètement. 

Voici  un  fait  :  Etant  à  Milan,  nous  avons  entendu  raconter  qu'un 
créancier,  voulant  réclamer  une  dette,  se  présenta,  avec  la  recon- 
naissance d'un  défunt,  devant  son  fils,  qui,  ignorait  ([ue  son  père 
l'eût  payée,  et  que  ce  jeune  homme  fut  vivement  attristé  et  étonné 
que  son  père  ne  lui  en  eût  rien  dit,  quoiqu'il  eût  fait  son  testament. 


72  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Gomme  il  était  tourmenté  de  cette  atraire,  son  père  lui  apparut  dans 
son  sommeil  et  lui  indiqua  l'endroit  où  était  le  papier  qui  annulait 
la  reconnaissance.  Le  jeune  homme  trouve  ce  papier,  le  montre  au 
créancier,  dont  il  repousse  la  demande  injuste,  et  reprend  le  billet  qui 
n'avait  pas  été  rendu  à  son  père,  quand  il  paya  la  dette.  On  pense 
alors  que  l'âme  de  cet  homme  s'est  mise  en  peine  pour  son  fils, 
qu'elle  est  venue  l'avertir  pendant  son  sommeil  de  ce  qu'il  ne  savait 
pas  pour  le  tirer  d'une  grande  inquiétude. 

Ch.  xir.  Un  homme,  nommé  Curma,  au  municipe  de  Tullium,  près 
d'Hippone,  pauvre  curial,  à  peine  magistrat  de  son  endroit  et  simple 
paysan,  tomba  malade  et  dans  un  tel  état  de  létiiargie  qu'il  était 
comme  mort  pendant  quelques  jours...  Cependant  il  voyait  plu- 
sieurs choses  pendant  son  sommeil,  et  s'étant  enfin  comme  réveillé 
après  plusieurs  jours,  il  raconta  ses  visions.  Et  d'abord,  sitôt  qu'il 
ouvrit  les  yeux  :  «  Qu'on  aille,  dit-il,  à  la  maison  de  Curma  le  for- 
geron et  qu'on  voie  ce  qui  s'y  passe  ».  On  y  va  et  on  trouve  qu'il 
était  mort  au  moment  même  où  l'autre  reprenait  ses  sens  et  revenait 
presque  à  la  vie.  Oa  l'interroge  et  il  dit  que  le  forgeron  avait  reçu 
l'ordre  de  comparaître  quand  lui-même  fut  mis  en  liberté,  et  qu'il 
avait  distinctement  entendu  là  d'où  il  revenait  que  ce  n'était  pas 
Curma  le  curial,  mais  Curma  le  forgeron  qu'on  avait  ordonné  d'a- 
mener au  séjour  des  morts. 

Saint  Augustin  ajoute  qu'il  y  aurait  cru   s'il  n'avait  cité  des 
hommes  qui  se  trouvaient  encore  parmi  les  vivants. 

Si  les  âmes  des  morts  s'intéressaient  aux  affaires  des  vivants,  si 
ces  âmes,  quand  nous  les  voyons,  nous  parlaient  dans  le  sommeil, 
il  s'ensuivrait,  pour  ne  pas  citer  d'autres  personnes,  que  ma  pieuse 
mère  serait  toujours  avec  moi  chaque  nuit,  elle  qui  m'a  suivi  sur 
terre  et  sur  mer  pour  vivre  avec  moi.  Je  ne  croirai  donc  pas  qu'en 
devenant  plus  heureuse  dans  une  autre  vie,  elle  soit  devenue  insen- 
sible à  ce  point,  que  quand  mon  cœur  est  affligé,  elle  ne  console  pas 
son  fils  dans  la  peine,  lui  qu'elle  aimait  si  tendrement  et  qu'elle  ne 
voulait  pas  voir  dans  le  chagrin.  D'un  autre  côté,  il  nous  faut  réflé- 
chir à  cette  parole  du  Ps.  :  Mon  père  et  ma  mère  m'ont  abandonné, 
mais  le  Seigneur  m'a  pris  sous  sa  garde  (Ps.,  xxvi,  40).  Si  nos  parents 
nous  ont  abandonnés,  comment  s'intéressent-ils  à  nos  soucis  et  à  nos 
affaires?  Et  si  les  parents  sont  indifférents,  quels  sont  les  autres 
morts  qui  s'inquiéteront  de  ce  que  nous  faisons  ou  de  ce  que  nous 
soutTrons  "?  Voici  encore  ce  que  dit  le  prophète  Isaie  :  «  Tu  es  notre 
père,  car  Abraham  nous  a  oubliés  et  Israël  ne  nous  a  pas  connus  » 
(i.xiii,  16).  Si  ces  grands  patriarches  ont  ignoré  ce  qui  concernait  un 
peuple  qui  descendait  d'eux  et  qui  avait  été  promis  à  leur  foi  comme 
une  nation  de  leur  race,  comment  les  morts  s'occuperaient-ils  de 
connaître  et  de  proléger  les  aflaires  et  les  entreprises  des  vivants? 
Comment  appelons-nous  bienheureux  ceux  qui  sont  morts,  avant 


SI  LKS  MORTS  ONT  CONSCIENCE  DE  CE  QUI  SE  PASSE  ICI-BAS        73 

que  ne  fussent  arrivés  les  maux  qui  ont  suivi  leur  mort,  s'ils  éprou- 
vent, même  après  leur  mort,  les  misères  qui  accablent  la  vie  hu- 
maine?..  .  Les  âmes  des  morts  sont  donc  dans  une  demeure  où  elles 
ne  voient  rien  de  ce  qui  se  passe  ou  arrive  aux  hommes  pendant 
leur  vie. 

Ch.  XIV.  Mais  comment,  dira-t-on,  Abraham  ne  savait-il  rien  de 
ce  qui  se  passait  sur  la  terre,  puisqu'il  savait  que  les  hommes  avaient 
Moïse  et  les  prophètes  et  qu'en  les  suivant  ils  éviteraient  les  sup- 
plices de  l'autre  monde  (Luc,  xvi,  27).  Il  savait,  de  plus,  que  le  riche 
pendant  sa  vie  avait  vécu  dans  les  délices  et  le  pauvre  Lazard  dans 
les  peines  et  les  souffrances?. . .  Je  réponds  qu'il  les  ignorait  lorsque 
les  vivants  étaient  encore  sur  la  terre,  mais  après  leur  mort,  suivant 
les  révélations  qu'a  pu  lui  faire  Lazare,  il  les  a  connues,  pour  ne  pas 
démentir  cette  parole  du  prophète  :  «  Abraham  ne  nous  a  pas 
connus  •. 

Ch.  XV.  Il  faut  donc  reconnaître  que  les  morts  ne  savent  pas  ce 
qui  se  passe  sur  la  terre  pendant  que  les  choses  arrivent,  mais 
qu'ensuite  ils  eu  ont  connaissance  par  ceux  que  la  mort  envoie  dans 
l'autre  monde...  Les  anges  qui  président  à  l'administration  des 
choses  de  ce  monde  peuvent  aussi  faire  aux  morts  quelques  révéla- 
tions. 

Saint  Augustin  finit  par  confesser  son  embarras;  la  raison  lutte, 
chez  lui,  avec  la  foi,  je  veux  dire  la  foi  en  ces  récits,  qu'il  ne  vou- 
lait pas  révoquer  en  doute,  et  qui  était  égale  à  celle  qu'il  profes- 
sait pour  l'Ecriture  Sainte. 

N'est-il  pas  intéressant  de  rencontrer  chez  des  théologiens  qui 
paraissent  être  aux  antipodes,  dont  les  uns  vivent  en  Palestine  et 
en  Babylonie,  loin  de  tout  centre  de  culture  générale,  et  les  autres 
en  Afrique,  nourris  des  lettres  classiques  et  de  la  philosophie,  des 
ressemblances  aussi  frappantes  dans  les  préoccupations,  dans  la 
manière  d'argumenter,  dans  la  méthode  d'interprétation  des  faits 
et  même  dans  la  nature  des  récits  qu'ils  invoquent  à  l'appui  de 
leur  thèse  ou  qu'ils  veulent  concilier  avec  leurs  théories  ? 

Il  est  impossible  de  penser  à  des  relations  directes  ou  indirectes 
sur  ce  point  entre  la  scolastique  juive  et  la  théologie  chrétienne  : 
la  seule  parenté  qui  leur  donne  cet  air  de  famille  est  celle  de  l'es- 
prit humain,  qui,  sur  des  données  semblables,  travaille  partout  et 
toujours  de  la  même  façon.  La  croyance  en  l'immortalité  de  l'âme, 
commune  aux  rabbins  et  aux  pères  de  l'Eglise,  aboutissait  naturel- 
lement à  cette  autre  que  les  morts  ont  conscience  de  ce  qui  se  passe 
ici-bas.  Certains  textes  bibliques  semblent  contraires  à  cette  idée, 
il  s'agissait  de  les  concilier  avec  la  croyance:  les  méthodes  din- 
terprétation  sont  partout  les  mêmes.  D'autre  part,  chez  les  Juifs 


74  HEVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

comme  chez  les  Chrétiens,  à  côté  d'une  théologie  qui  avait,  d'ail- 
leurs, toutes  les  peines  du  monde  à  se  débrouiller  au  milieu  des 
croyances  les  plus  disparates,  courait  une  théologie  populaire, 
agissant  beaucoup  sur  l'imagination  et  créant  des  faits,  et  qui,  dé- 
daignant ce  dédoublement  de  l'âme  et  du  corps,  se  représentant 
les  trépassés  comme  des  êtres  d'une  matérialité  un  peu  différente 
seulement  de  celle  des  vivants,  les  faisait  vivre  dans  les  régions 
souterraines  ou  dans  l'atmosphère  terrestre,  tout  près  encore  de 
ce  monde  et  intervenant  encore  dans  les  choses  d'ici-bas.  N'est-ce 
pas  un  peu  l'antécédent  du  spiritisme  de  nos  jours  ?  La  théologie 
officielle  ne  pouvait  faire  fi  de  sa  rivale,  et  force  lui  était  de  s'ac- 
commoder de  ses  exigences.  La  conciliation  s'obtenait  au  prix 
de  sacrifices  pénibles,  et  ce  sont  ces  luttes  que  nous  révèlent  le 
Talmud  comme  saint  Augustin. 

Israël  Lévi. 


LE  YALKOUT  SGHIMEONI 

ET  LE  YALKOUT  HA-MAKHIRI 


C'est  la  juste  cause  d'un  ami  commun  que  je  viens  défendre  ici. 
Il  s'agit  de  notre  fidèle  conseiller  en  matière  de  littérature  rabbi- 
nique,  lo  Yalhout  Schimeoni.  C'est  grâce  à  lui  que  cette  littérature, 
d'un  accès  si  difficile,  nous  est  devenue  aisée  à  parcourir  et  que 
nous  possédons  certains  textes  sous  leur  aspect  original. 

Or,  notre  auteur  favori  est  menacé  en  ce  moment  d'avoir  un  ri- 
val dans  un  autre  ouvrage  composé  d'après  le  même  plan,  le  Yal- 
kout  de  Makhir  ben  Abba-Mari.  M.  Spiro  va  publier  la  partie  de 
ce  Yalkout  sur  le  livre  d'Isaïe,  et  M.  Gaster  celle  qui  concerne  les 
petits  Prophètes.  Assurément,  le  Schimeoni  ne  saurait  être  sup- 
planté par  ces  publications,  pas  même  dans  le  cas  où  le  reste  de 
l'ouvrage  de  Makhir  viendrait  à  être  retrouvé  et  édité.  En  effet, 
le  Schimeoni  embrasse  tout  le  canon  biblique,  tandis  que  le  Yal- 
kout de  Makhir  se  rapporte  seulement  à  Isaïe,  à  Jérémie,  à  Ezé- 
chiel,  aux  Psaumes,  aux  Proverbes  et  à  Job.  Il  n'est  parvenu 
jusqu'à  nous  que  les  parties  relatives  à  isaïe,  aux  petits  Prophètes 
et  aux  Psaumes.  Le  Schimeoni  n'a  donc  pas,  comme  on  le  voit, 
à  craindre  cette  concurrence. 

Cependant,  ou  essaie  d'enlever  au  Schimeoni  la  situation  privi- 
légiée qu'il  occupait  jusqu'ici.  En  annonçant  sa  publication  dans  la 
Revue  (t.  XXV,  p.  44),  M.  Gaster  soutient  que  le  Makhiri  est  anté- 
rieur au  Schimeoni  et  qu'il  a  été  utilisé  par  ce  dernier  dans  sa 
seconde  partie.  M.  Gaster  attribue,  en  conséquence,  une  impor- 
tance considérable  au  Makhiri  et  arrive  à  cette  conclusion  qu'il 
faut  donner  la  préférence  au  Makhiri  pour  fixer  les  leçons  des 
textes  originaux.  Or.  les  raisons  que  M.  Gaster  donne  de  son  opi- 
nion sont  loin  dêtre  convaincantes,  et  son  hypothèse  nous  paraît 
absolument  inadmissible.  C'est  ce  qui  nous  a  déterminé  à  prendre 
ici  la  défense  du  Schimeoni. 


76  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Tout  d'abord,  M.  Gaster  cherche  à  déblayer  le  terrain  sur  le- 
quel il  édilie  son  hypothèse.  Comme  nous  venons  de  le  dire,  le 
Yalkout  de  Makhir  ne  commente  que  quelques  parties  des  Pro- 
phètes et  des  Ilagiographes,  tandis  que  le  Yalkout  Schimeoni 
s'occupe  de  tous  les  livres  du  Canon.  Cette  circonstance  gêne 
beaucoup  la  thèse  de  M.  Gaster.  En  effet,  si  Schimeon  connaissait 
les  sources  relatives  aux  livres  sacrés  qui  ne  sont  pas  commentés 
dans  le  Makhiri,  pourquoi  n'aurait-il  pas  trouvé  aussi  bien,  sans 
l'aide  de  ce  dernier,  les  sources  intéressant  les  autres  livres 
saints?  Cette  considération  seule  rend  invraisemblable  la  dépen- 
dance du  Schimeoni  vis-à-vis  du  Makhiri.  Pour  combattre  cette 
objection,  M.  Gaster,  dès  le  début  de  sa  dissertation,  émet  cet 
argument  que  la  deuxième  partie  du  Yalkout  Schimeoni  (sur 
les  Prophètes  et  les  Hagiographes)  n'est  pas  du  même  auteur 
que  la  première  partie.  En  outre,  la  deuxième  partie,  qui  serait 
imitée  du  Makhiri,  est  considérée  par  M.  Gaster  comme  anté- 
rieure à  la  première.  M.  Gaster,  pour  réduire  à  néant  l'objec- 
tion que  nous  avons  indiquée,  raisonne  de  la  façon  suivante  :  Si 
l'auteur  de  la  deuxième  partie  du  Yalkout  n'est  pas  celui  de  la 
première  partie,  il  ne  peut  plus  être  considéré  comme  étant  très 
versé  dans  la  littérature  rabbinique,  et  rien  n'empêche  plus  d'ad- 
mettre que  le  Schimeoni  II  a  copié  le  Makhiri.  Mais  M.  Gaster  se 
trompe  dans  son  raisonnement.  L'objection  conserve  sa  force, 
même  dans  le  cas  où  la  deuxième  partie  du  Yalkout  Schimeoni 
serait  d'un  autre  auteur,  car  Yalkout  II  s'occupe  de  beaucoup  de 
livres  bibliques  pour  lesquels  il  n'y  a  pas  de  Makhiri.  On  en  con- 
clura que  Técrivain  qui  a  été  capable  de  composer  un  Yalkout  sur 
les  premiers  Prophètes,  le  Cantique  des  Cantiques,  Ruth,  les  La- 
mentations, l'Ecclésiaste,  Esther,  Daniel,  Ezra,  Néhémie  et  les 
Chroniques,  n'avait  nul  besoin  de  se  mettre  à  la  remorque  de 
Makhir  pour  commenter  les  autres  livres  bibliques. 

La  question  desavoir  si  le  Yalkout  Schimeoni  est  l'œuvre  de 
deux  auteurs  ayant  vécu  à  des  époques  différentes  est  importante 
en  soi,  et  il  vaut  la  peine  de  peser  avec  soin  les  motifs  que 
M.  Gaster  donne  à  l'appui  de  son  assertion. 

Son  premier  argument  est  tiré  de  la  nature  des  renvois  du 
Yalkout  Schimeoni.  M.  Gaster  dit,  p.  44  :  «  Si  l'on  examine  les 
renvois  de  la  deuxième  partie,  on  remarque  qu'ils  se  rapportent 
toujours,  sauf  de  rares  exceptions  ^  aux  passages  contenus  seule- 

»  Pourquoi  M.  Gaster  ne  cite-l-il  pas  ces  <  rares  exceptions  •  ?  —  Sur  Proverbes. 
§  953,  je  trouve  le  renvoi  suivant  :  p-inN  OTniipS  120"  riD3  Tm  r;2"*i<a 
'73  T7213.  Or,  dans  le  "jl-inS  DIIÛÎip,  imprimé  a  la  fin  de  la  1"  partie  de  Vedilio 
princeps,  il  n'y  a  rien  de  pareil.  Peut-être  le  passage  en  question  manque-t-il,  ou  la 


LE  YALKOUT  SCHIMEONI  ET  LE  YALKOUT  HA-MAKHIRI  77 

ment  dans  cette  deuxième  partie  et  jamais  à  ceux  du  Pentateuque. 
Si  les  deux  parties,  comme  on  l'admet  communément,  étaient 
l'œuvre  d'un  même  auteur,  on  ne  s'expliquerait  pas  pourquoi  il  se 
serait  interdit,  dans  la  deuxième,  de  renvoyer  à  la  première,  aussi 
bien  qu'il  renvoie  à  des  passages  de  la  môme  partie.  Il  faut  donc  en 
conclure  que  ces  deux  parties,  indépendantes  l'une  de  l'autre,  sont 
dues  à  deux  écrivains.  » 

Cet  argument  perd  toute  sa  valeur  dès  qu'on  se  rend  compte  du 
caractère  du  Yalkout.  Celui-ci  cite  in  extenso  les  interprétations 
rabbiniques  au  sujet  de  chaque  verset  de  l'Écriture  Sainte,  et  ne  se 
contente  pas  d'indiquer  les  livres  et  les  chapitres  qui  contien- 
nent ces  interprétations,  car  il  veut  épargner  au  lecteur  le  soin 
de  faire  des  recherches.  Le  Yalkout  se  compose  de  deux  parties, 
qui,  à  cause  de  leur  grande  étendue,  se  trouvaient  renfermées  dans 
deux  recueils  différents.  Fidèle  à  son  principe,  le  compilateur  ne 
pouvait,  dans  une  partie,  renvoyer  à  des  paragraphes  contenus 
dans  l'autre  partie.  D'ailleurs,  le  lecteur  pouvait  être  en  posses- 
sion de  l'une  des  parties,  sans  posséder  l'autre.  D'un  autre  côté,  il 
eût  été  peu  pratique  pour  l'auteur  de  répéter  dans  le  même  volume 
les  mêmes  choses  à  propos  de  différents  versets.  De  là  vient  que  le 
Schimeoni  ne  renvoie  qu'à  des  paragraphes  de  la  même  partie.  En 
outre,  il  n'est  pas  sûr  que  les  renvois  proviennent  de  l'auteur.  Qui 
sait  s'ils  ne  sont  pas  l'œuvre  des  copistes  ? 

M.  Gaster  invoque  aussi  le  fait  que  beaucoup  d'ouvrages  utilisés 
dans  une  partie  du  Schimeoni  ne  le  sont  pas  ou  le  sont  fort  rare- 
ment dans  l'autre*.  C'était  dans  l'ordre  naturel  des  choses.  C'est 
ainsi,  par  exemple,  qu'en  s'occupant  du  Pentateuque,  le  rédacteur 
étudia  surtout  les  Midraschim  sur  le  Pentateuque,  même  ceux  qui 
étaient  peu  répandus.  Dans  la  rédaction  de  la  deuxième  partie,  ce 
sont  principalement  les  Midraschim  sur  Samuel  et  les  Psaumes  qui 
ont  été  mis  à  contribution.  Naturellement,  les  Midraschim  les  plus 
importants  et  les  plus  généralement  répandus  sur  la  Bible  ont  été 
également  utilisés  dans  la  seconde  partie.  Des  Midraschim  plus 

2»  partie  avait-elle  un  IlinX  0"1l351P  qui  a  été  perdu.  En  tout  cas,  ce  fait  atteste 
le  plan  unitaire  des  deux  parties.  Dans  la  l"  partie  de  X'editio  princeps,  on  renvoie 
souvent  à  ce  0112 jlp. 

•  M.  Gaster  (p.  45,  n"  11)  compte  parmi  les  ouvrages  utilisés  dans  Yalkout  I,  et 
non  dans  Yalkout  II,  la  Pesikta  rabhati.  P.  47,  il  donne  une  liste  des  ouvrages  dont 
Makhir  a  fait  des  extraits  et  dans  laquelle  celte  Pesikta  ne  figure  pas,  et  il  dit  :  •  On 
!e  voit,  c'est  la  même  liste  que  nous  a  fournie  Yaikout  II,  à  l'exception  de  la  Pesikta 
rabhati*.  Comment  concilier  les  deux  assertions  de  M.  Gaster?  Eu  réalité,  Yal- 
kout II  cite  très  fréquemmeot  la  Pesikta  rabbati,  et  Yalkout  I  la  cite  également, 
quoique  plus  rarement.  Voir  la  table  de  l'Introduction  de  Buber  à  la  Pesikta, 
p.  xxvii.  Yalkout  II  a  beaucoup  dt  sources  que  Makhir  ne  connaît  pas  ;  voir 
plus  loin. 


78  lîEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

petits  et  moins  populaires,  tels  que  le  r;:DwS  "w-.ito,  le  li'D"'"!  w-iir  et 
d'autres  de  ce  genre,  ont  été  négligés  par  le  rédacteur.  Il  faut  aussi 
tenir  compte  du  fait  que  la  rédaction  d'un  ouvrage  comme  le  Yal- 
kout  a  nécessité  un  certain  temps.  L'auteur  n'a  probablement  pas 
toujours  demeuré  dans  le  même  endroit  et  n'avait  pas  toujours  les 
mêmes  livres  à  sa  disposition. 

M.  Gaster  dit  encore  ;  «  En  oulre,  il  y  a  différence  entre  les 
deux  auteurs  pour  la  manière  de  citer  les  sources;  le  premier,  par 
exemple,  ne  se  sert  de  l'expiession  vague  w---:  qu'une  cinquan- 
taine de  fois,  et  le  second  plus  de  trois  cent  cinquante  fois  dans 
un  volume  beaucoup  moins  grand  que  Yalkout  I  ». 

M.  Gaster  ne  procède  guère  selon  la  méthode  d'une  saine  cri- 
tique. Il  établit  combien  de  fois  l'expression  cm»  se  trouve  dans 
les  éditions  postérieures  du  Yalkout,  sans  faire  attention  à  la 
provenance  et  à  la  signification  de  ce  mot.  Or,  il  faut  voir  par  le 
contenu  ce  t[ue  l'on  entendait  par  c-n?3,  s'il  s'agissait  d'un  Midrasch 
Inconnu,  ne  pouvant  être  qualifié,  ou  d'un  Midrasch  bien  connu 
sur  le  livre  dont  il  est  question.  En  outre,  dans  des  recherches  du 
genre  de  celles-ci,  il  n'est  permis  de  tenir  compte  que  de  Veditio 
princeps,  car  les  additions  des  éditions  postérieures  n'ont  naturel- 
lement pas  d'importance  pour  le  plan  d'un  ouvrage.  "Cî-it:,  dans  son 
sens  primitif  [un  Midrasch),  est  employé  encore  plus  rarement 
dans  la  deuxième  partie  du  Yalkout  que  dans  la  première,  "r-n» 
dans  le  second  sens  [le  Midrasch)  se  trouve  en  particulier  très  fré- 
quemment dans  la  seconde  partie,  mais  seulement  dans  les  édi- 
tions postérieures,  et  non  dans  l'édition  irrinceps  et  dans  les  an- 
ciennes éditions.  Même  celles-là  n'ont  fréquemment  le  mot  cm^ 
que  dans  les  livres  de  Samuel,  des  Psaumes,  des  Proverbes  et  dans 
trois  Megillot,  tandis  que  dans  les  autres  livres  cette  expression 
ne  revient  pas  souvent.  M.  Gaster  admettra-t-il  ici  aussi  différents 
auteurs  ?  Du  reste,  voici  comment  les  choses  se  sont  passées. 
VéùWÀonpr inceps  sur  Samuel,  les  Psaumes,  etc.  a  négligé,  dans  la 
plupart  des  cas,  d'indiquer  la  source,  quand  il  s'agissait  d'un  des 
Midraschim  sur  les  livres  que  commentait  le  Yalkout.  Les  éditions 
postérieures  complétèrent  ce  qui  manquait  en  mettant  chaque  fois, 
en  marge,  le  mot  -wm».  De  là,  dans  les  éditions  postérieures, 
la  fréquence  du  mot  c-n*:  dans  les  chapitres  relatifs  aux  livres 
de  Samuel,  des  Psaumes,  des  Proverbes,  du  Cantique  des  Can- 
tiques, de  l'Ecclésiaste  et  des  Lamentations.  Les  anciennes  édi- 
tions n'ont  pas  une  seule  fois  le  mot  c-n?:.  Le  Yalkout  sur  Samuel, 
en  beaucoup  de  passages,  indique  comme  source  7Nr:'C  n~5s;  en 
beaucoup  d'autres  endroits,  il  néglige  d'indiquer  la  source,  lors- 
qu'il fait  des  emprunts  au  Midrasch  Samuel.  Ici,  les  éditions  pos- 


LE  YALKOUT  SCHIMEONI  ET  LE  YALKOUT  HA-MAKHIRI  79 

térieures  ont  mis  en  note  :  '«rni^:.  C'est  ainsi  que  nous  trouvons  en 
marge  :  "w-in7û,  à  côté  de  irNToo  m^N.  Nous  pouvons  donc  être  sûrs 
que  bNi7:'0  m^x  provient  de  l'tidition  prliiccps,  tandis  que  le  mot 
UJ-n72  n'a  été  ajouté  que  plus  tard.  De  môme,  les  anciennes  édi- 
tions désignent  le  Midrasch  sur  les  Psaumes  par  les  mots  •::-i'i?2 
nrj  nnrc  (§  699  et  826),  et  les  nouvelles  par  le  mot  c-nTa.  Dans 
l'édition  princeps  (et  dans  les  anciennes  éditions),  je  ne  trouve  un 
uî-i'i-a  spécial'que  sur  les  Proverbes  et  Esllier.  Peut-être  les  mots 
■•b^D^:  et  -c-nicnN  ont-ils  été  omis.  Dans  Hulh,  il  y  a  partout  l'indi- 
cation r-n  •:;-n:2  ;  dans  Misclilè,  §  944,  il  y  a  aussi -^b-::»  amw. 
Dans  tous  les  cas,  l'édition  princeps  n'a  l'indication  ■:5mw  que  pour 
Misclilè  et  Esther.  En  outre,  le  sens  de  ce  mot  de  "sT-nw  est  tout 
autre  que  dans  la  première  partie  et  dans  certains  passages  de  la 
seconde  partie  du  Schimeoni. 

M.  Gaster  ajoute  :  «Dans  les  citations  de  Berescliit  Rabba,  celui- 
ci  (Yalkout  I)  ne  manque  presque  jamais  (excepté  quatre  fois)  d'in- 
diquer le  chapitre.  Yalkout  II  l'omet  plus  de  cent  cinquante  fois  ». 
C'est  là  une  énumération  bien  inutile.  Dans  l'édition  princeps^ 
les  chapitres  du  Ber.  Rabba  ne  sont  pas  même  indiqués  une  seule 
fois,  ni  dans  la  première  ni  dans  la  seconde  partie.  Le  Yalkout  sur 
Genèse  y  est  divisé  en  chapitres  selon  le  modèle  du  Ber.  Rabba, 
et  c'est  pourquoi  il  ne  serait  pas  nécessaire  d'indiquer  ici  le 
numéro  des  chapitres  de  ce  Midrasch  '.  D'ailleurs,  le  Yalkout  sur 
les  quatre  autres  livres  de  Moïse  ne  cite  pas  non  plus  les  cha- 
pitres du  Ber.  Rabba.  M.  Gaster  aura  encore  eu  recours  à  une 
édition  postérieure  et  s'est  donné  ainsi  une  peine  inutile. 

M.  Gaster  dit  encore  que  parfois  le  texte  d'une  citation  dans 
Yalkout  1  est  autre  que  dans  Yalkout  II.  D'après  M.  G.,  cette  cir- 
constance prouve  que  les  deux  parties  sont  dues  à  des  auteurs 
différents. 

La  divergence  des  textes  cités  par  le  Yalkout  est  un  fait  connu 
depuis  longtemps  et  qui  a  été  expliqué  d'une  manière  satisfaisante 
par  MM.  Jellinek*  et  Friedmann"'.  Du  reste,  dans  la  même  i)artie 

*  Dans  l'édilioa  princeps,  les  noms  des  sources  se  trouvent  dans  le  texte,  et  sur  la 
Genèse  ils  se  trouvent  partois  devant  1  indication  des  chapitres.  De  là  vient  que  sou- 
vent, au  premier  abord,  il  semble  que  les  chapitres  de  Ber.  K.  sont  indiqués  :  par 
exemple,  n"D  "«"ID  ""3,  1":û  ^i'OID  n"3,  etc.  Or,  les  mots  ^":3  T't'C.D  etc.  ne  se 
rapportent  pas  à  Ber.  H.,  mais  au  Yalkout.  C'est  ainsi  qu  il  y  a  aussi  Z'^Z'i^JZTt  p"IS 
n"""  nC"lD,  î<"3  n':,"lD  -|"'33N,  N"D  'ns  N73in;n.  —  L'éd.  de  Venise  et  celle  de 
Cracovie  ne  donnent  les  chapitres  de  Ber.  R.  qu'en  partie  sur  la  Genèse  parce  que, 
d'après  la  division  en  chapitres  du  Yalkout  sur  Genèse,  il  était  facile  d'indiquer  les 
chapitres  du  Ber  R,  Paitout  ailleurs,  même  dans  ces  éditions,  ces  chapitres  ne  sont 
pas  indiqués. 

*  Bel  ha-Midrasch,  VI,  xxiv. 

*  Sifrè,  Introduction,  ch.  vi. 


80  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

du  Yalkout,  il  y  a  divergence  dans  les  textes.  Qu'on  compare,  par 
exemple,  la  citation  de  Baba  Kamma,  38 &,  dans  Yalkout  I.  §  86  • 
et  §808-,  la  citation  de  Berescliit  Rabba  ch.  i  dans  Yalkout  II 
§460  (éd.  de  Salonique,  §  322  des  éditions  postérieures  =!)  et  §836*. 
Il  y  a  beaucoup  de  ces  divergences  dans  une  seule  et  même  partie, 
et  elles  ne  prouvent  nullement  que  différents  auteurs  aient  tra- 
vaillé à  chaque  partie. 

Ensuite,  M.  Gaster  procède  à  la  confrontation  du  Yalkout  Schi- 
meoni  avec  le  Yalkout  ha-Makhiri.  Il  énumère  ^,  non  sans  com- 
mettre des  erreurs,  les  manuscrits  qui  existent  de  ce  dernier,  il 
donne  ensuite  une  liste  des  ouvrages  que  Makhir  a  utilisés  et 
ajoute,  p.  48  :  «  C'est,  on  le  voit,  la  même  liste  que  nous  a 
fournie  Yalkout  II  (à  l'exception  de  la  Pesikta  Rabbati)  ;  la 
coïncidence  n'est  évidemment  pas  fortuite  et  on  ne  s'explique- 
rait pas  que  deux  auteurs  diff'érents  se  fussent  rencontrés  dans 
la  connaissance  des  mêmes  Midraschim  et  dans  l'ignorance  de 
certains  autres.  C'est  l'indice  certain  d'une  parenté  entre  les 
deux  recueils  ».  —  Or,  la  liste  de  Makhir  n'est  nullement 
identique  à  celle  de  Schimeon.  Chacun  des  deux  compilateurs 
a  utilisé  des  ouvrages  que  l'autre  ne  connaissait  pas.  Par 
exemple,  Schimeoni  II  cite  :  Abkhir,  Pesikta  Rabbati,  Agarlat 
Samuel^  et  Midrasch,  sans  désignation  plus  précise,  Makhir  ne 
connaît  aucun  de  ces  Midraschim.  De  son  côté,  Makhir  utilise  : 
Schemot  rabba,  Bammidbar  rabba  (voir  plus  loin),  Midrasch  Job^ 
ainsi  qu'un  Midrasch  sur  i-rnài.  Tous  ces  Midraschim  sont 
ignorés  de  Schimeon.  Le  Midrasch  sur  les  Psaumes  est  appelé  par 

'  a.sT^  [n]-i72Npn  ...ï-T'apr:  r^^  .••ï-iw7:m  r-i:>3nî<  mr:5  -,rj 
ï-iivj:   l'r^-'NT    ...irî3  t^d?   N-^-i^rN  nh   n'?i  ni-    T\r:T\'iiz    ...sx   p 

»  r^'z^^•:lz  ...rwSiT:  r-t\-i-'-ip-!  ...f^i-;:-  VJ*-  V"''-  ••■'""'  '"  ^''■'"■''^  '''''- 
. . . ï-^^-^1-,p-i    T-i-vv'^    T^wSi    ...ï-!-'-,:?j:  p<-^-i;:i<   m:*^  b^x  Nbn    xin 

f<5  ^"ili'il  ^■'"m^'^X  i'î'^DNT  .  Celle  cilatioa  se  rapprocliC  davanlaj,'e  du  texte  de 
Nazir,  23*. 

M?:"i-i"!3  nm?:  n"«r;  "::n3'^»   i-i7:N"^   Nr::   ...'?d   'r:::^v    '-  ^'.^   .n"3 
♦  yp-i  b-  "i7:i-n2   nn::  rr-  bsr-'?:  ûnrix  n--'  xb-w. 

5  Le  Yalkout  ha-Makhiri  sur  Isaïe  et  les  Psaumes  est  déjà  mentionné  par  les 
Î2"':"w"'  TS'J  et,  à  sa  suite,  par  Woll,  I,  n'  1419,  ninri  "nO  et  Q-^bin:!"  Cw. 
M.  Gaster  ignore  enraiement  que  la  prél'ace  du  Makhiri  a  été  déjà  publiée  par  Stra- 
schoun  dans  n:7:N*  ~"'~p,  de  Fin,  p.  304. 

"  Dans  la  liste  de  M.  Sleinschneider  [Cat.  Lug.  Batac,  p.  348)  et  dans  celle  de 
M.  Gaster  ne  figurent  ni  la  Pesikta  H.,  ni  bNi:2">i;  mSN.  Makhir  aurait-il  réellement 
ifruoré  ces  Midraschim  ? 

■ï  Daprès  Neubauer,  Cat,,  n"  167,  M.  Gaster  ne  dit  mot  du  Midrasch  Job,  dont 
l'existence  est,  sans  raison,  encore  contestée;  voir  Brull,  Central-Anzeiger,  p.  35,  Les 
mots  :  ...£1^0173  3T^X  "(3"!T70T  (Schimeoni,  II,  897)  sont  probablement  interpolés. 


LE  YALKOUT  SCHIMEOM  KT  LE  YALKOUT  HA-MAKH1R[  81 

Schimeon  (dans  la  V^  et  la  2«  parties)  2r^  inrc  "::-n7:,  tandis  que 
Makhir  l'appelle  û^brrn  '^îm?:.  Comment  parler  dans  ces  conditions 
d'une  «  coïncidence  »  ? 

Pour  prouver  que  Schimeon  a  copié  Makhir,  M.  Gaster  donne 
des  extraits  de  Makhir  sur  Isaïe  et  Ohadia,  et  dit,  p.  48  :  «  Ces 
passages  sont  choisis  à  dessein,  parce  qu'ils  sont  caractérisques  pour 
la  richesse  des  citations. . .  Ces  citations,  comme  on  peut  le  voir, 
sont  intéressantes;  elles  réunissent  les  principaux  ouvrages  dont 
s'est  servi  Makhir  et  particulièrement  des  fragments  de  ce  Mid- 
rasch  sur  le  Cantique  qui  semhle  avoir  péri...  Mais,  ce  qui  est 
plus  important  pour  l'étude  que  nous  poursuivons,  nous  y  recon- 
naissons aisément  les  morceaux  qui  ont  servi  à  constituer  Yal- 
kout  II,  plus  complets  et  disposés  autrement  que  dans  celui-ci. 
Malgré  ces  différences,  ce  sont  évidemment  les  mêmes. . .  Tout  ce 
que  nous  reproduisons  du  Makhiri  se  retrouve  dans  les  §§  284  et 
285  du  Schimeoni.  Il  en  est  de  même  pour  le  chapitre  sur  Obadia. 
Là,  l'auteur  du  Schimeoni  a  encore  abrégé  plus  que  dans  Isaïe  ». 
Les  citations  de  Makhir  de  a^von  n^a  nn:in  sont  réellement  inté- 
ressantes, mais  le  fait  en    lui-même  n'est   pas  nouveau.  Il  y  a 
quelques  années  que  nous  avons  démontré  qu'il  existait  autrefois, 
indépendamment  de   notre   Midrasch  sur  le  Cantique,  un  autre 
Midrasch  sur  le  même    livre   que   Hillel   et  Abraham,    fils  de 
Maïmonide,   nomment  également  a^i^cn  -i^ai  m:;-.  Yalkout  II 
connaissait   lui    aussi  ce  Midrasch  ».    Pour   ce  qui   concerne  la 
confrontation   du  Schimeoni  avec  le  Makhiri,  il  n'y  aurait  rien 
d'étonnant  à  ce   que  deux    compilateurs  se  rencontrassent  sur 
quelques  points.  Mais  qu'on  compare  Schimeon  avec  Makhir  même 
pour  ces   points  et  qu'on   voie  s'ils   ont  entre   eux  la  moindre 
ressemblance.  M.  Gaster  se  tire  d'embarras  en  prétendant  que 
Schimeon  a  abrégé  et  transposé  le  texte  de  Makhir.  Or,  il  a  sim- 
plement omis  de  citer  certains  passages  que  Makhir  a  cités,  et,  ce 
qui  est  encore  plus  décisif,  il  a  donné  des  passages  qui  n'ont  pas 
été  cités  [)ar  Makhir.  Par  exemple,  §  283  :  . .  .iiz-iiz   ^-nioDrx  -i"wS 
^MN  Nan...  cf.  §  125.  Et  plus  loin  §  285  :  inn  w3d  2r  3NT  ist 
mns-  -i72N\:;.  Avec  la  meilleure  volonté  du  monde,  comment  dé- 
couvrir ici  la  moindre    dépendance  de    Schimeon  vis-à-vis   de 
Makhir  ? 

Je  me  suis  arrêté  longuement  aux  preuves  alléguées  par  M.  Gas- 
ter parce  que  je  tenais  à  rectifier  les  faits  dénaturés  par  lui  au 
profit  de  Makhir. 

Si  on  examine  sérieusement  la  question  et  si  on  accorde  quelque 

>  Eldad,  p.  7'.l. 

T.  XXVI,  no  ;.i.  e 


82  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

crédit  aux  résultats  de  la  critique  littéraire  historique,  il  n'y  a 
plus  le  moindre  doute  au  sujet  de  l'antériorité  du  Schimeoni. 
Notre  histoire  littéraire  est  arrivée,  en  ce  qui  concerne  les  Miilra- 
schim,  à  certaines  conclusions  qui  sont  tellement  sures  qu'elles 
peuvent  et  doivent  servir  de  base  dans  les  recherches  ultérieures. 
Il  est  établi  que  le  Rabba  sur  Exode  et  les  Nombres  ont  été  réunis, 
sous  leur  nom  actuel,  seulement  vers  la  fin  du  xu"  siècle.  Des 
auteurs  du  xi»  et  du  xii^  siècles  ne  connaissent  pas  encore  ces  Mid- 
raschira '.  Gomme  l'auteur  du  Yalkout  Schimeoni  ne  les  connaît 
pas  non  plus  (ni  dans  la  l'"  ni  dans  la  2"  |)artit'),  il  a  dû  vivre  à 
une  époque  où  ces  Midraschim  n'existaient  pas  encore;  car,  s'ils 
avaient  existé,  ils  n'auraient  pas  échappé  à  l'attention  de  cet  au- 
teur familiarisé  avec  toute  la  littérature  rabbinique^  L'auteur  du 
Yalkout  Schimeoni  a  donc  vécu,  au  plus  tard,  vers  la  fin  du 
xiP  ou  au  commencement  du  xiii''  siècle^. 

Appliquons  maintenant  le  même  critérium  à  Makhir.  De  la  liste 
formée  par  MM.  Steinschneider  et  Gaster  des  Midraschim  utilisés 
par  Makhir,  ainsi  que  des  extraits  publiés  dans  la  Revue,  il  res- 
sort que  Makhir  connaissait  déjà  le  Midrasch  Schemot  rabba  et 
Bammidbar  rabba.  Mahhir  a  donc  vécu  après  Vauteivr  du  Yal- 
kout Scliimeoni,  qui  ne  connaissait  pas  encore  ces  Midraschim. 

La  question  de  savoir  si  le  Makhiri  mérite  d'être  i)ublié  dépend 
naturellement  de  ce  qu'il  renferme.  En  général,  nous  ne  pouvons 
attendre  grand'chose  de  ces  sortes  d'abrégés.  Ordinairement,  on 
n'y  trouve  que  des  redites.  Les  choses  vraiment  neuves  et  les  va- 
riantes importantes  auraient  pu  être  citées  comme  extraits.  Une 
édition  critique  du  Yalkout  Schimeoni  serait  sûrement  plus  utile 
que  la  publication  de  beaucoup  de  Midraschim.  Mais  nous  com- 
prenons que  chacun  ait  à  ce  sujet  sa  manière  de  voir.  En  tout 
cas,  il  nous  paraît  inutile,  pour  rehausser  le  mérite  de  l'ouvrage 
qu'on  édite,  de  lui  attribuer  une  valeur  qui  lui  manque. 

A.  Epstein. 


'  Cf.  Zunz,   G.   V.,  2«  éd.,  269,  2-3,  et  mes  Beitrâge,  68,  7o. 

'  Cf.  Rappaporl,  Kcicm  Chemed,  Vli,  4  ;  mou  Simon  Kara  et  le  Yalkout  Schimeoni, 
§6. 

*  Zuuz,  ihid,,  312-313.  Azaria  Oc  Kossi  (;^*'^2  "^TiN,  tli.  xix)  a  vu  un  manuscrit 
du  Yalkout  de  l'an  1310. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE 


Nous  allons  essayer  d'esquisser  ici  l'histoire  d'une  des  familles 
juives  les  plus  importantes  et  les  plus  illustres  de  l'Italie.  Cette 
histoire  présentera  certainement  des  lacunes,  car  il  existe  des 
solutions  de  continuité  dans  l'ensemble  des  documents  que 
nous  possédons.  Mais  nous  nous  contenterons  de  la  raconter 
telle  qu'elle  ressort  des  informations  que  nous  avons,  espé- 
rant qu'un  jour  de  nouvelles  découvertes  viendront  combler  les 
vides. 

L'aïeul  de  cette  famille,  Yeliiel  ben  Matatia,  établi  à  Pise  au 
commencement  du  xv''  siècle,  présentait  déjà,  ce  semble,  les 
traits  essentiels  que  nous  retrouverons  chez  ses  descendants. 
Ainsi,  il  occupait  une  place  importante  dans  sa  communauté,  dans 
la  société  et  la  littérature  de  son  époque.  Quand  les  délégués  des 
communautés  italiennes  se  réunirent  à  Bologne,  le  18  mai  1415, 
pour  délibérer  sur  les  mesures  à  prendre  afin  d'enrayer  les  persé- 
cutions, il  représenta  dans  cette  assemblée  les  Juifs  de  Toscane  '. 
La  réputation  de  sa  maison  s'était  répandue  dans  toute  l'Italie,  et 
le  poète  et  grammairien  Joseph  Zarko,  renseigné  sur  Yehiel  par 
son  maître,  Profiat  Duran  Efodi,  se  plaça  sous  le  patronage  de  ce 
Mécène  juif,  qui,  «'occupant  lui-même  de  poésie  hébraïque,  proté- 
geait tous  ceux  qui  la  cultivaient'-.  Dans  l'année  1413,  notamment, 
Joseph  chanta  en  toute  circonstance  les  louanges  de  son  protec- 
teur et  amphytrion.  Avant  de  se  présenter  chez  lui,  il  s'était  fait 
précéder  d'une  épitre  poétique,  où  il  se  recommandait  d'Efodi.  Il 
plaça  ensuite  des  vers  composés  eu  l'honneur  de  Yehiel  dans  l'ora- 
toire que  celui-ci  avait  établi  dans  sa  maison,  sur  le  calendrier 
mural  qui,  selon  l'usage  italien,  était  appendu  dans  la  synagogue, 

*  Voir  Halberstani,  dans  Gratz-Jubdsr.hrift^  "12^  P~a^,  p.  5?),  note  11. 

'  Voir  Pièces  justificatives,  1,  Josepli  b.  Isaac  Zarko  a  écrit  son  nom,  à  la  dale  du 
8  septembre  1417,  dans  le  ms.  d'Oxlord  n"  2391.  N'oir,  sur  le  nom  de  Zarko,  Isidoro 
Locb,  BÉJ.,  XVI,  3o,  noie  2. 


8'4  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

sur  le  siège  de  Yehiel,  lorsque,  après  une  maladie,  il  reparut  à 
loffice  divin.  En  offrant  à  Yehiel  un  exemplaire  de  «  l'ennerai  des 
femmes  >-,  composé  à  Barcelone,  en  1208,  par  Juda  ben  Sabbataï 
Hallévi  ',  ou  peut-être  d'un  pastiche  qu'il  avait  fait  de  cette  œuvre, 
il  accompagna  ce  cadeau  d'une  dédicace  poétique.  A  en  juger  par 
les  éloges  que  lui  décerne  son  protégé,  Yehiel  connaissait  la  litté- 
rature rabbinique  ainsi  que  les  sciences  de  cette  époque. 

Cinquante  ans  plus  tard,  la  réputation  d'un  autre  Yehiel  de  Pise, 
célèbre  par  sa  fortune,  sa  générosité  et  son  savoir,  s'étend  jusqu'au 
delà  des  frontières  de  la  Toscane  et  de  l'Italie.  Il  avait  fondé  à 
Pise  une  banque  de  prêt,  qui  fut  la  source  de  sa  prospérité,  mais 
faillit  aussi  causer  sa  ruine.   Excitée  par  les  prédications  d'un 
fanatique,  peut-être  de  Bernardin  de  Feltre,  qui  ne  se  lassa  pas  de 
s'élever  contre  les  richesses  de  ce  Juif  de  Pise-,  la  foule  envahit 
sa  maison  pour  la  mettre  au  pillage,  sans  toutefois  causer  de  dom- 
mages sérieux.  Ces  désordres  paraissent  avoir  eu  lieu  en  14*1.  A 
ce  moment,  Yehiel  était  déjà  en  correspondance  avec  Don  Isaac 
Abravanel,  à  qui  il  fît  sans  doute  part  de  cet  événement,  puisque 
dans  la  réponse   qu'il  lui   adressa  l'année    suivante,    en   1472^, 
Abravanel  commence  par  lui  exprimer  des  condoléances.  Yehiel 
jouissait  d'une  très  grande  considération,  car  Abravanel  engagea 
les  ambassadeurs  Lopo  de  Almeida  et  le  savant  médecin  Joâo 
Sezira,  que  le  roi  Alphonse  V  de  Portugal  envoya  auprès  du  pape 
Sixte  IV,  à  faire  une  visite  à  Yehiel.  Ces  ambassadeurs  étaient  eu 
même  temps  chargés  de  remettre  de  précieux  cadeaux  à  Yehiel  et 
à  sa  femme  de  la  part  d'Abravanel  et  de  son  épouse,  entre  autres, 
pour  la  maîtresse  de  la  maison,   une  esclave  de  grande  valeur 
qui  était  depuis  longtemps  dans  la  maison  du  docteur  Sezira,' et 
pour  Yehiel  de  précieux  manuscrits  exégétiques,  parmi  lesquels 
se   trouvaient    des    ouvrages  d'Abravanel   lui-même.  C'est  que 
Yehiel,  tout  en  se  consacrant  à  ses  affaires  et  à  ses  relations  de 
société,  ne  négligeait  pas  la  science.  Il  avait  demandé  à  Abrava- 
nel, pour  sa  bibliothèque,  un  exemplaire  du  commentaire  de  David 
Kimhi  sur  les  Hagiographes^.  Du  reste,  il  semble  que,  par  les 
soins  d'Abravanel,  la  collection  de  Yehiel  s'enrichit  de  beaucoup 
d'ouvrages  d'auteurs  judéo-espagnols.  C'est  de  lui  aussi  que  Yehiel 
reçut  les  ouvrages  d'Efodi  et  de  Joseph  ibn  Schem  Tob,  que  son 
petit-fils  Yehiel  Nissim  sut  si  bien  utiliser  plus  tard.  De  ses  deux 
fils,  Isaac  et  Samuel,  l'aîné,  Isaac,  était  alors  déjà  assez  âgé  pour 

'  Kaufmann,  dans  \es  Goltingischc  Gelekrtc  Anzâgen,  l"juia  18So,  p.  440  et  suiv. 

'  Graelz,  Geschtchte,  VIII,  3*  édit.,  24L),  note  1. 

'  Otar  Nechmad,  éd.  Blumeufeld,  II,  tJo  et  suiv. 

*  Ibid.,  69. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  85 

qu'Abravanel  pût  lui  adresser  ses  compliments  ^  Ces  fils  reçurent 
une  éducation  soignée,  comme  des  adeptes  de  la  science,  et  non 
comme  des  marchands.  Le  savant  juif  Jean  Alemanno.  maître 
et  ami  de  Pic  de  la  Mirandole,  paraît  avoir  vécu  plusieurs  an- 
nées sous  le  toit  de  YehieP.  Dans  l'automne  de  l'année  1488,  il 
trouva  de  nouveau  un  accueil  hospitalier  dans  la  maison  de  Yehigl, 
qu'il  appelle  son  protecteur  paternel,  et  il  y  commença  son  com- 
mentaire sur  le  Cantique  des  Cantiques  ^  Isaac  et  Samuel  aimaient 
la  science  comme  leur  père,  et,  comme  lui,  ils  étaient  en  relations 
avec  des  savants.  A  ce  moment,  Isaac  correspondait  déjà  person- 
nellement avec  des  écrivains,  qui  lui  dédiaient  des  ouvrages.  Isaac 
ben  Samuel  ben  Ilayyim  Sefardi,  qui  habita  Naples  de  1487  à 
1492,  lui  dédia,  sous  la  forme  d'une  missive,  son  commentaire  de 
la  lettre  cabbalistique  attribuée  faussement  à  R.  Ilaya  Gaon  *. 

Cependant,  avant  de  mourir,  Yehiel  éprouva  l'inconstance  du 
sort  et  eut  à  supporter  de  douloureuses  épreuves.  Une  de  ses  filles 
paraît  avoir  cédé  aux  séductions  de  la  société  chrétienne  qu'elle 
fréquentait  et  avoir  abandonné  la  religion  de  ses  pères  \  Cette  fille 
s'appelait,  croyons-nous,  Rica.  Cette  apostasie  surprit  et  affligea 
Abravanel,  qui  était  alors  lui-même  très  malheureux,  se  voyant 
forcé,  par  suite  de  circonstances  encore  ignorées,  de  rester  éloi- 
gné de  Lisbonne  depuis  trois  ans;  il  avait  dû  interrompre  sa  cor- 
respondance, autrefois  si  régulière,  avec  son  ami  le  plus  cher.  Il 
s'efforce  de  surmonter  sa  [)ropre  douleur  pour  consoler  Yehiel, 
qu'il  appelle  «  un  prince  en  Israël  ».  Il  lui  rappelle  que,  d'après  le 
dire  des  rabbins  [Moed  Katon,  20&),  le  résultat  de  l'éducation  ne 
dépend  pas  du  mérite  des  parents  et  que  dans  tout  champ  poussent 
des  chardons  entre  les  é[)is.  Mais  il  ne  parle  qu'avec  timidité, 
comme  s'il  craignait  d'élever  la  voix  à  un  moment  où  la  blessure 
est  encore  si  récente  et  si  cuisante.  C^^pendant,  même  dans  ces 

«  Bévue  (hs  Et.  j.^  XII,  256  :  i-ii:»:?:  "«îîp  TCwS  TT.SW  '"  NTM  "û'^Xn 
Vm-nn  ■'3-l-n  Vl-n^Oinm  "in"^32  DNS  "^^biro.  Ci'.  Hebr.Bihlwgr.,  V,  28,  note  1. 
Le  turuotn  de  5m  que,  selon  l'usaj^e  Je  son  temps,  Yehiel  ajoute  à  son  nom  est  ex- 
pliqué par  Zunz  [Ges.  Srhnfle»,  111,  20")  comme  une  abréviation  des  mots  ^pz'^^ 
'"72  IllCn  fie  Proverbes,  viii,  35.  Voir  Sleinschnoider,  ffebr.  Bihliogr.,  XIV,  86. 
Abraham  Molal,  à  la  lin  de  son  T^t;  r~nri,  donne  la  même  explication  de  3"n,  et. 
de   plus,  il  ajoute  la  suivante  :  ^n'îXTj  ^ni'Cl  xbl  (Pf.,  xviii,  22).  Voir  Jellinek, 

T'^Trr!  on::;ip,  2»  édii.,  p.  is. 

3  Perles,  RÉJ.,  XII,  243.  noie  4. 

♦  Berliner,  Mafjazin,  I,  30,  et  Sleinschnei.îer,  Hehr.  BibL,  XIV,  86. 

*  Graetz,  Geschicfite,  VIII  (3*  éd.),  359,  note  2.  Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  B. 
Zimraels,  rabbin  b  Miihrisch-Ostrau,  la  copie  des  lettres  d'Abravanel  publiées  aux 
Pièces  justificatives,  II,  1-4,  d'après  le  ms.  Haiberr^çr^  n:  10  i.  Pour  le  nom  de  Rica, 
voir  plus  loin. 


86  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

douloureux  épanchements,  on  retrouve  les  préoccupations  habi- 
tuelles du  savant.  Abravanel  voudrait  rentrer  en  possession  des 
ouvrages  d'Efodi  et  de  Joseph  ibn  Schem  Tob,  qu'il  avait  prêtés, 
pour  les  copier,  à  son  ami,  et  il  recommande  à  Yehiel  de  les  lui 
envoyer  par  son  ami,  le  médecin  Asolo  Mendez.  En  même  temps  il 
lui  demande  de  lui  (aire  parvenir  les  productions  de  la  littérature 
juive  de  l'Italie,  il  désirait  surtout  connaître  les-  commentaires 
d'Iramanuel  b.  Salomon  sur  le  Pentateuque  et  les  Prophètes. 

Parmi  les  entants  de  Yehiel  auxquels  Abravanel  envoie  ses  sa- 
lutations, il  ne  nomme  que  son  flls  aîné,  Isaac,  et  sa  fille  qui  avait 
épousé  un  certain  David  et  qui,  peut-être  à  cause  du  nom  de  David 
porté  par  son  mari,  est  appelée  Ahinoam  (II  Sam.,  xxv,  43). 
Samuel  était  évidemment  encore  trop  jeune  pour  être  connu 
d'Abravanel  '. 

Les  souhaits  de  son  ami  ne  se  réalisèrent  pas  pour  Yehiel.  Il 
semble  que  cet  homme,  précipité  à  l'improviste  du  sommet  de  son 
bonheur,  se  soit  lentement  consumé  par  le  chagrin.  Quand,  à  ses 
anciennes  peines,  vint  s'ajouter  pour  lui  la  douleur  de  voir  mourir 
sa  femme,  il  déclina  peu  à  peu  et  succomba  lui-même  le  10  fé- 
vrier 1490.  Quoiqu'il  lut  mort  très  âgé,  il  fut  pleuré  partout 
comme  s'il  était  décédé  à  la  fleur  de  l'âge.  Son  vénérable  ami  Don 
Isaac  Abravanel,  des  savants  et  des  poètes,  comme  Abraham 
Hayyoun,  de  Lissabos,  et  Isaac,  de  Fez,  pleurèrent  sa  perte  irré- 
parable dans  des  lettres  touchantes  qu'ils  s'empressèrent  d'écrire 
à  son  fils  aîné  Isaac-.  On  a  même  enregistré  pour  la  postérité 
l'heure  de  sa  mort  :  c'était  à  six  heures  du  matin,  le  19  Adar  I 
de  l'an  5250.  Des  poètes  et  des  écrivains  comme  Eliézer  Ezra  de 
Vol  terra,  Salomon  de  Camerino^  et  l'astronome  Abbamare  Hal- 
fon*  le  pleurèrent  dans  des  élégies  et  des  lettres  de  condoléances 
qu'on  possède  encore  aujourd'hui. 

Quelle  que  soit  la  part  qu'on  doive  faire,  dans  ces  poésies,  à 
l'exagération,  il  n'est  pas  contestable  que  la  personnalité  de  Yehiel 
se  dégage  de  toutes  ces  manifestations  comme  une  personna- 
lité remarquable.  Sa  maison  de  commerce  dut  jouir  de  la  plus 
grande  renommée  en  Italie  et  à  l'étranger,  où  il  fit,  du  reste,  lui- 
même  plusieurs  voyages.  Les  aumônes  qu'il  distribuait  avec  une 
libéralité  princière  étaient  accordées  aux  nécessiteux  de  toutes  les 

»  V^oir,  aux  Pièces  justificatives,  III,  la  leUre  d'Abravanel  tirée  du  ms.  du  Brilish 
Muséum,  Add.  'Z'I'Zy  (aulrefois  m?.  Almanzi  . 

*  \'oir  Pièces  justificatives.  II.   2-4. 

'  M.  Herliner  {Magazin,  XVI,  ;jO)  dit  que,  d'après  le  poème  d'Abbamare,  dans  le 
ms.  de  Naples,  III,  p.  12,  Yehiel  serait  mort  à  Lacques. 

»  Neubauer,  RÉJ.,  IX,  153,  note  1.  Cf.  Pièces  justifie  itives,  III,  1-3. 


LA  FAMILLE  DE  YEIIIEL  DE  PISE  87 

contrées  qui  venaient  implorer  sa  cliarité.  Son  influence  auprès  des 
grands  du  pays  (Hait  toujours  au  service  de  ses  coreligionnaires 
opprimés,  qui  s'étaient  habitués  à  chercher  auprès  de  lui  aide  et 
protection.  Familiarisé  avec  la  littérature  rabbinique  et  la  philo- 
sophie, il  n'était  heureux  que  quand  il  pouvait  consacrer  ses  rares 
moments  de  loisir  à  l'étude  de  la  Loi.  C'est  pourquoi  le  deuil  causé 
par  sa  mort  fut  si  général,  comme  la  communauté  de  Pise  le  dit 
dans  sa  lettre  de  condoléance,  opuscule  homilétique  qu'elle  fit 
composer,  selon  l'usage  du  temps,  par  Salomon  de  Camerino. 

Cependant  l'éclat  de  sa  maison  ne  disparut  pas  avec  lui.  Ce  fut 
surtout  son  fils  aîné  Isaac  qui  suivit  fidèlem.ent  les  traditions  pa- 
ternelles. Lorsque,  deux  ans  et  demi  après  la  mort  de  Yehiel,  se 
produisit  la  catastrophe  qui  frappa  les  Juifs  d'Espagne,  et  que  tous 
les  grands  ports  de  la  Méditerranée  étaient  encombrés  de  navires 
portant  des  exilés,  Isaac  de  Pise  devint  pour  ces  malheureux 
comme  une  Providence.  Ils  n'oublièrent  jamais  ce  qu'il  fit  à 
lui  seul  pour  la  délivrance  de  ceux  qui  abordèrent  dans  le  port 
très  fréquenté  de  Pise.  Guedalya  ibn  Yahya  entendit  encore 
parler,  quoique  d'une  façon  vague  et  inexacte,  des  œuvres  de 
charité  d'isaac  de  Pise,  qui  furent  même  entourées  de  l'auréole 
de  la  légende.  En  effet,  le  récit  de  Guedalya  relatif  aux  quatre 
vieillards  annonçant  à  Isaac  qu'un  de  ses  descendants  jetterait 
sur  sa  maison  un  vif  éclat  par  son  érudition  rabbinique  (cet 
Abraham  de  Bologne  qui  fut  enlevé  prématurément  en  pleine 
vigueur  intellectuelle),  ce  récit,  disons-nous,  n'est  autre  chose  que 
reX[)ression  de  ces  sentiments  de  gratitude  transfigurés  par  la 
légende*.  C'est  avec  lui  qu'Isaac  Abravanel  continua  la  corres- 
pondance amicale  qu'il  avait  entretenue  si  longtemps  avec  son 
père.  Une  lettre  d'isaac  à  Abraham  Hayyoun,  lequel  paraît  avoir 
été  déjà  l'intermédiaire  entre  Yehiel  de  Pise  et  Don  Isaac  Abra- 
vanel, est  devenue  l'unique  témoignage  littéraire  qui  nous  soit 
resté  de  la  main  de  ce  fils  aîné  de  Yehiel  de  Pise  "-. 

Samuel,  le  fils  cadet  de  Yehiel,  jouissait  également  d'une  répu- 
tation considérable.  Un  manuscrit  de  la  Derossiana  de  Parme, 
contenant  la  troisième  partie  du  Code  de  Maimonide  ^,  porte  encore 

'  n?3pr;  n^'CrO,  éd.  Venise,  iVàh.  L'h^pollK-se  de  LuzzaUo,  dans  Hebr.  Bibl., 
V,  147,  que  la  relalion  de  Gusdalj-a  se  rapporte  à  Ifaa>!  est  conlirmée  par  les  paroles 
de  son  neveu  Yehiel    dans   riatroduclion   du  n"lN:p  P~;73  :  Û^^ISNb  1X^   "1?2N 

n-12:  irT'nNîû  c-'N  t^tn  t-iss  î— n*::^  ic;ï<  rDi  srmi:  T't:  ncr:  r,-z 
V?  i-î-73  û"':-ip  ibna  ban  vpna   i-i\s'-  iV?r;-û  "'nT«r  r;y  yri^-j^^. 

*  Voir  cette  lettre  aux  Pièces  justificatives,  II,  4. 

^  Voir  ms.  de  Rofsi  121)0.  Sur  la  dernière  page  se  trouvent,  daprès  une  commu- 
nicalion  qui  m'est  faite  par  M.  Leonello  Modona,  les  signatures  suivantes  : 


88  HEVlll;;  DES  KTUbES  JUIVES 

son  nom  et  celui  de  sa  sœur  Rica,  qui  évidemment  savait  aussi 
l'hébreu;  ils  ont  inscrit  leurs  noms  dans  ce  livre,  encore  du  vivant 
de  leur  [)ère,  dans  la  maison  paternelle.  Samuel  parait  être  resté 
encore  plus  fidèle  qu'Isaac  aux  études  auxquelles  il  s'était  voué  dès 
l'enfance  et  avoir  fait  de  sa  maison  un  centre  de  réunion  pour  les 
savants,  qu'il  aimait  à  protéger.  Toutefois,  son  activité  dura  peu. 
Il  'ut  enlevé  Jeune  à  l'affection  des  siens,  laissant  un  fils  de  trois 
ans  auquel  il  avait  donné  le  nom  de  son   père,  Yehiel  Nissim. 
Toutes  les  nobles  aspirations,  toutes  les  belles  qualités  de  la  fa- 
mille se  retrouvèrent  chez  cet  enfant,  qui  était  ap[)elé  à  ajouter 
à  l'éclat  de  la  maison.  Il  fut  élevé  par  sa  mère  Laura,  encore 
fort  jeune  quand  elle  devint  veuve,  et  la  mère  de  celle-ci,  Sara, 
remarquable   par   sa   pitié    et   sa  science,  et  dont  un  des  deux 
frères,  Sabbataï,  habitait  la  Turquie,  où  il  exerçait  la  médecine, 
et  l'autre  Jérusalem.  Selon  les  traditions  de  la  famille,  on  le  pré- 
para à  devenir  à  la  fois  un  savant  et  un  négociant.  Il  épousa  une 
fille  de  l'illustre  famille  d'Ascher  ^leschouUam  de  Venise*,  nom- 
mée Diamante,  et  ensuite  il  fonda  à  Pise  une  maison  qui  continua 
les  traditions  brillantes  de  la  famille. 

Comme  son  aïeul,  Yéhiel  établit  une  synagogue  dans  sa  maison. 
Malgré  ses  occupations  commerciales  et  ses  études,  il  trouva  le 
temps  d'écrire  de  sa  propre  main  —  c'était  un  habile  calligraphe 
—  un  rouleau  de  la  Loi  pour  le  service  de  son  oratoire.  Trois  géné- 
rations florissaient  presque  simultanément  dans  cette  maison  :  il 
y  avait  sa  mère  Laura,  sa  grand'mère  Sara,  et  la  nièce  de  celle-ci, 
Debora,    flile   de   son    frère   de  Jérusalem.   Un    homme  érudit, 

!-,NT  vnrr    f>:c"«s7:  x"'-»--'   &"-n   bN"«n''  -"nr:"i7:D3  rxiT:"^  -"rsi  .1^ 

•(en  caraclcres  carres)  aVr'iSi 

•  iri*  ■'-1DD73  "'2N  C":;t  "'7:0   pn72-  n? 

t<rs-m7:  -i"]!:-'   carcT:  Tr!-:r  "^^w^   ■'r.'TN'b  p  n"-«'T"'   ctot:  -^rN^-i 

.NC^î-:  C--  'nxb  "727 
.;?2-,*.]  ■'^N  ■':-ï<V  rn  np"»-,  "'3:n  .3 
.-";•  Ne"'c-o  Vn'i?:',::  ".^d   p  ^"■'"'T"'  ^■'r"'"  bsT"'  ■'r:»  .6 

Ce  ms.  n'est  donc  pas,  comme  de  Kossi  et,  après  lui,  Zunz  [Kercm  Chemed,  V,  155) 
l'indiquent,  un  manuscrit  de  la  maiu  de  Samuel,  mais  porte  seulement  sa  sifrualure. 
Sa  sœur  Hica  (cf.  Zunz,  Ges.  Schi-iften,  II,  o9]  y  a  apposé  aussi  sa  signature  comme, 
plus  lard,  son  neveu  Yehiel.  Peut-être  l'auteur  du  ms.  est-il  Menahem  de  Terra- 
cena  ;  cf.    ms.  Oxford  1  i9l,  dans  le  Catalogue  de  M.  Neubauer. 

'  J'emprunte  tous  ces  détails  au  Journal  de  David  Ueiibeni,  d'après  la  copie  faite 
sur  l'original,  qui  est  j.erdu  ;  cette  copie  est  à  la  bibliothèque  du  Séminaire  israélite 
de  Bresiau.  Le  nom  d'.\sclier  était  encore  usité  dans  la  branche  de  la  famille  des 
Mefchouliara  (ixée  a  Vienne.  Voir  Iiischri/icn,  éd.  L.-A.  Frank!,  n»'  179,  197  et  304. 
Sur  le  .Meschoullam  de  Venise,  voir  Berliner,  S-^raN  riD?.  150,  198.  Au  sujel  du 
nom  de  Diamante,  v.  Zunz,  /.  r.,  II,  o7. 


LA  FAMILLK  DE  YEHIEL  DE  PISE  8'J 

Salomon-Rapharl  Cohen,  de  Prato,  près  de  Florence,  dirigeait 
Téducation  de  cette  jeune  fille,  qui  lisait  TEcriture  sainte  dans  le 
texte  et  connaissait  les  prières  et  les  usages  rituels  aussi  bien  que 
quiconque.  Outre  leurs  œuvres  pieuses,  les  femmes  de  cette  maison 
pratiquaient  les  arts  de  la  musique  et  de  la  danse.  Des  notabilités 
chrétiennes  fréquentaient  la  maison  et  la  villa  de  Yehiel,  merveil- 
leusement située  hors  de  la  ville  et  reliée  à  celle-ci  par  la  rivière 
navigable  de  l'Arno.  Un  magnifique  jardin,  où  s'élevait  une  colline 
couverte  d'un  bois  d'oliviers,  entourait  cette  résidence  d'été.  Un 
jeune  homme  du  nom  d'Emmanuel  secondait  Yehiel  dans  ses 
affaires.  Une  nombreuse  domesticité  peuplait  la  maison,  montée 
sur  un  pied  princier. 

On  était  en  l'an  1525,  lorsque  Yehiel  reçut  la  visite  du  célèbre 
David  Reiibeni.  Quoique  cet  aventurier,  qui  voulait  se  faire  passer 
pour  le  Messie,  n'eût  pas  reçu  l'éducation  littéraire  et  mondaine 
qu'il  aurait  fallu  pour  apprécier  la  manière  de  vivre  raffinée  et 
la  haute  culture  de  la  famille  de  son  hôte',  qui  tenait  quelque 
chose  de  l'humanisme  du  temps,  il  subit  quand  même  jusqu'à 
un  certain  point  l'influence  de  cette  maison  de  patriciens  juifs, 
qui  occupait  un  rang  particulièrement  brillant  dans  une  com- 
munauté composée  en  grande  partie  de  familles  sans  fortune-. 
David  avait  fait  la  connaissance,  à  Rome,  d'un  cousin  de  Yehiel, 
Daniel  de  Pise  ^,  évidemment  un  fils  de  son  oncle  Isaac,  qui  s'était 
établi  à  Florence  et,  par  suite  de  l'étendue  de  ses  relations  com- 
merciales, avait  acquis  une  telle  considération  qu'il  pouvait  fré- 
quenter librement  la  cour  du  pape  Clément  VII.  Daniel  avait  pris 
sous  sa  protection  ce  personnage  qui  se  disait  délégué  des  dix  tri- 
bus. Lorsqu'au  printemps  de  1525,  David  quitta  Rome  sans  qu'il 
put  encore  se  rendre  auprès  du  roi  de  Portugal,  Daniel  lui  recom- 
manda de  demander  l'hospitalité  à  son  pieux  et  savant  cousin  de 
Pise.  Etait-ce  la  croyance  qui  existait  en  Italie,  aussi  bien  chez  les 
chrétiens  que  chez  les  Juifs,  à  l'existence  d'un  puissant  empire 

•  Cependant  David  Reiibeni  aussi  célèbre  Yeiiiel  et  sa  noaisou  en  ces  mots  : 

''"'jy    "ïrb    rimnc    in-'m    "c^Tipr:  i-y    ï^-^bcn-pa  r.'p^i  roc;"!    npi'^ 

t-i"i73  nai^nr:  ns'^pTr!  û^n  mi2  inn  i^nt  iT'a  irr»  Nirj  a"'"'3yb  dt» 
riT^3    inn  î^^n  r;-ic  • 

'  David  Heûbeni  l'ait  la  remarque  suivante  : 

£2--'br  Dm^i. 

'  Peut-èire  Samuel  ben  Daniel  de  Pise,  le  proprinlaire  du  ms.  Oxford  n"  23S,  sur 
lequel  il  a  écrit  son  nom  en  janvier  156'i,  éiait-il  son  fds,  t  criant  le  nom  de  son 
oncle  Samuel? 


90  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

juif  formé  par  les  dix  tribus  au-delà  du  fleuve  Sambation  *,  ou 
était-ce  l'audace  imperturbable,  la  fermeté  de  convictions  et  Pas- 
cétisme  extraordinaire  de  David  Reiibeni  qui  déterminèrent  les 
membres  de  la  famille  de  Pise,  d'ailleurs  si  lettrés  et  mondains,  à 
ouvrir  leur  cœur,  leur  main  et  leur  maison  à  ce  singulier  hôte?  Ce 
qui  est  certain,  c'est  que  pendant  toute  la  durée  de  son  séjour  en 
Italie,  David  Reïibeni  resta  leur  hôte  gâté.  Pendant  près  de  sept 
mois,  Yehiel  l'hébergea  dans  sa  maison;  il  lui  avait  fait  aménager 
un  appartement  au  premier  étage.  Les  dames  rivalisaient  avec 
les  hommes  d'égards  et  de  bons  procédés  envers  David.  Quand  il 
se  livrait  à  ses  macérations,  jeûnant  six  fois  pendant  six  jours 
successifs  chaque  fois  et  se  livrant  ensuite  à  un  jeune  de  quarante 
jours  interrompu  seulement  tous  les  trois  jours  par  un  repos,  elles 
se  rendaient  près  de  lui  pour  ranimer  ses  esprits  abattus  et 
l'égayer  au  moyen  de  danses.  La  curiosité  publique,  que  cet  aven- 
turier savait  exciter  au  plus  haut  degré,  amenait  les  personnalités 
les  plus  considérables  dans  la  maison  de  Yehiel  et  dans  sa  villa, 
où  il  avait  conduit  David  à  cheval  pour  le  faire  changer  d'air  et  le 
distraire.  La  population  chrétienne  de  la  ville  alla  même  jusqu'à 
lui  donner  des  sérénades.  Un  trait  qui  caractérise  bien  la  manière 
de  vivre  large  et  libérale,  tout  à  fait  à  la  mode  italienne,  de  cette 
pieuse  famille,  et  qui  offre  un  véritable  intérêt  au  point  de  vue  de 
l'histoire  des  mœurs,  c'est  que  Yehiel  accompagna  son  hôte  pour 
aller  visiter  les  grandes  curiosités  de  Pise,  la  cathédrale,  le  baptis- 
tère et  le  Campanile.  Toutefois,  David  Reiibeni,  dans  ses  notes,  ne 
fait  aucune  remarque  au  sujet  de  l'inclinaison  de  la  Tour  penchée. 
L'importance  des  relations  commerciales  entre  les  maisons  de 
Y^ehiel,  de  Pise,  et  de  Daniel,  de  Florence,  est  attestée  par  ce  fait 
rapporté  par  David  qu'un  jour  Yehiel  alla  encaisser  chez  son 
cousin  une  créance  de  quatre  raille  ducats. 

Un  seul  membre  de  la  famille  Pise,  Ismaël  de  Rieti,  beau-frère 
de  Yehiel,  riche  et  bien  connu,  qui  s'était  fixé  à  Sienne-,  ne  paraît 
pas  avoir  partagé  l'enthousiasme  des  siens  et  de  ses  compatriotes 
pour  le  frère  du  roi  Joseph,  du  désert  de  Chabor.  Il  lui  offrit,  il 
est  vrai,  lui  aussi,  une  large  hospitalité,  mais  à  la  question  que 
David  lui  posa  s'il  n'aimerait  pas  mieux  Jérusalem  que  Sienne, 
il  opta  franchement  pour  Sienne.  Cette  réponse  ainsi  que  le  refus 
qu'il  opposa  à  notre  aventurier  de  lui  accorder  de  larges  subsides 
valurent  à  Ismaël  de  Rieti  d'être  blâmé  vivement  dans  le  journal 
de  David  Reûbeni.  Ce  blâme  ne  diminua  en  rien  la  vénération 

'  Cf.  Kaiilmann,  Jewish  Qua.terly  Reticn:,  IV,  503  et  suiv. 

*  N;"^'^3    "i^ys    "Ij^mSN    ribnil   i:mbl7;i,    c'est  ainsi   que    s'exprime    encore 
Hanania  Eliakim  Kieti;  v.  Morlara,  N"'7N:2"'N  ^"^^n  m^T'i,  p.  5'i,  note  2. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  91 

d  Immanuel  b.  Isaac  de  Latès,  pour  Ismael  de  Rieti,  dont  il 
instruisit  les  petits-fils',  et  l'estime  que  lui  témoij,niait  son  beau- 
l'rère  Yeliiel,  qui  appelle  sa  maison  «un  sanctuaire  royal  de  la 
Tora  et  de  la  science  ^  »  où  il  eut  la  joie  d'acquérir  l'amitié  du 
célèbre  savant  Yohanan  ben  Joseph,  de  l'illustre  famille  des  Trêves, 
qui  y  séjourna  comme  hôte.  Ismaël  di  Rieti,  qui  n'avait  qu'à  se 
conformer  aux  traditions  de  sa  famille,  se  consacra  à  toute  sorte 
d'œuvres  pieuses,  et  son  exemple  fut  suivi  par  son  flls  Moïse.  Ce 
dernier  fut,  lui  aussi,  un  bienfaiteur  pour  les  Juifs  de  la  Toscane. 
Quand  un  mouvement  hostile  se  produisit  contre  eux,  dans  le 
Conseil  de  la  cité  d'Empoli,  et  que,  dans  leurs  prédications,  les 
prêtres  interdirent  aux  chrétiens  tout  commerce  avec  les  Juifs, 
leur  défendant  même  de  les  servir  le  jour  du  Sabbat,  ce  fut  Mo'ïsè 
ben  Ismaël  qui  fournit  l'argent  nécessaire  pour  aller  à  Rome  et 
obtenir  du  Pape  un  bref  en  faveur  des  Juifs  de  cette  localité  ^. 

A  l'époque  où  David  Reùbeni  demeurait  dans  la  maison  de 
Yehiel  à  Pise,  celui-ci  avait  déjà  commencé  à  former  sa  biblio- 
thèque, qu'il  paraît  avoir  considérée  comme  son  bien  le  plus 
précieux.  Pour  posséder  les  ouvrages  existant  seulement  dans 
des  manuscrits  très  rares,  il  les  copiait  de  sa  propre  main.  C'est 
ainsi  qu'il  copia  de  1503  à  1504  la  traduction  hébra'ique  du  com- 
mentaire d'Averroès  sur  les  3'^  et  4»  livres  de  la  Physique,  d'Aris- 
tote*.  En  1524,  il  fit  copier  par  Benjamin  ben  Jacob  Camondo  % 
exilé  espagnol  originaire  de  Fez  et  résidant  à  Pise,  la  traduc- 
tion hébraïque  de  Moïse  b.  Salomon  de  Salon  du  grand  com- 
mentaire d'Averroès  sur  les  quatre  livres  de   la   Métaphysique 

'  Voir  ses  Consultations,  éd.  M. -H.  Friedlauder  (Vienne,  1800^  p.  121  :  Ti'rjîC: 

SNr-:'^   i"7:r!   t37:i-i7:n   rr-nn    Vi'zi   T^cr    y-ixa    bn;   2-'n:  •c\s:: 
\-i:?-:   snnrNv:   n-.in  T^ra  ■'ïa'?  iT^bb  irr^aa  2Ct>  TiT^na   b"j  "iircViîj 

Ï'T'j:"'::    m:.:':    S:'::3.  P.  123,  il  y  nomxe  aussi  son  fils  Sabbalai  Elhanan  el  son 
lils  aine  Moïse  de  Kieti. 

'  Lettre  de  Yehiel  à  Yolianan  Trêves  :  ■l"-i~T2  ^f^i   Dl'rN"    r"^22    "Tni;"    '^l'^Z 

Ti'Anb  ^b?:   cip-:    r-fa  in-'n  -ex  t^-îr-'O    -i^ra  "^uw»--:    '^Nr^^-w-' 
mii'nbi  . 

'  D'après  une  lettre  d'un  contemporain,  commençant  par  ces  mots  :  bN"',"C^  r'^22 
"n'ni'O  ■|;"'N-1  r;:XpOi:31  ■«b^•::■'^<  ■•aOT'.  et  conservée  dans  deux  de  mes  collec- 
tions manuscrites  de  Intires  d'Italie,  sous  les  numéros  48  et  71  :  ".yiN   "INlD^n  nrr: 

"jnb:?»  y^tn•^  -,\aN  So  -7^2  -,21^'  :]32  bi-c^  ><i-    .i^-^- 

♦  Ce  manuscrit,  qui  appartenait  précédemment  à  S.  Schônblura  {Hdn-.  Biblio'/r., 
XIV,  84),  appartient  maintenant  à  la  bibliollùMjue  de  la  Cour  de  Vienne  (ms.  170); 
V.  Brûli,  Jahrlucher,  VIII,  167,  noie  2.  T'en  rVZ  P3L:  'r  '3  Cl"'  correspond  au 
lundi  \*'  janvier  1504. 

5  Ms.  Modène  LXXV  (Catal.  de  S.  Jona).  Cf.  Sleinschneider,  dans  la  Jubehchrin 
de  Zunz,  p.  19  et  suiv. 


92  HEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

d'Aristote.  Vers  la  fin  de  l'année  lo2r),  il  copia  le  texte  da  Zohar 
sur  dix  péricopes.  A  cette  époque,  cet  ouvrage  n'existait  encore 
qu'en  manuscrit  '.  Raphaël  Salomon  ben  Jacob  Cohen,  de  Prato, 
qui  remplissait  dans  sa  maison  les  fonctions  d'instituteur  et  qu'il 
chargea  plus  tard  d'accompagner  David  Reùbeni  au  Portugal, 
fut  aussi  employé  par  lui  comme  copiste  -.  Mordekhaï  ben  Ja- 
cob Rosello  3  a  vu  dans  sa  bibliothèque,  probablement  après 
l'expulsion  des  Juifs  de  Naples  en  1540,  un  très  ancien  manus- 
crit de  contenu  cabbalistique,  attribué  à  R.  Hamaï.  \Jn  fait  qui 
prouve  que  Yehiel  n'était  pas  seulement  versé  dans  la  littérature 
juive,  mais  possédait  aussi  des  connaissances  profanes,  c'est  qu'il 
sut  écrire  pour  David  Reùbeni  une  lettre  destinée  au  roi  de 
Portugal,  qu'un  marrane,  ami  de  David  et  devenu  prêtre,  se 
chargea  de  remettre  au  souverain. 

Tout  en  ne  s'occupant  de  science  qu'en  amateur,  Yehiel  devint 
un  éminent  écrivain.  S'adonnant  de  préférence  aux  études  philo- 
sophiques, familarisé  avec  les  philosophes  juifs  ainsi  qu'avec  les 
philosophes  grecs  et  arabes,  dont  il  connaissait  les  ouvrages  par 
des  traductions,  il  était  resté  néanmoins  inébranlable  dans  ses 
convictions  religieuses  et  continuait  'à  croire  résolument  que  la 
religion  est  indépendante  de  la  philosophie.  Aussi,  lorsqu'il  vit 
pour  la  première  fois  l'ouvrage,  alors  encore  manuscrit,  de  Yedaya 
Penini,  qui  défendait  les  droits  de  la  philosophie  contre  R.  Salomon 
ben  Adret,  il  n'hésita  pas  à  protester  nettement,  quoique  en  termes 
mesurés,  au  nom  des  principes  du  judaïsme,  contre  les  assertions, 
d'habitude  si  judicieuses,  de  cet  auteur,  en  tant  qu'elles  attribuaient 
à  la  philosophie  une  suprématie  illégilime  sur  la  foi.  Son  livre, 

•  Mss.  Paris,  n">  "83,  214  a.  D'après  une  communicalioa  de  M.  Schwab  à  M.  Israël 
Lévi,   la   signature  est   ainsi   conçue  :    rX^H''    ''2?N3  b""*   "'^"^ri  "^^N  ^r'^z'-'CT") 

£2"i"'  ND"'-:  -i^:'2   r":    'tn',?:^:;  i"?::  ■p■'^i:^;  wN^xb    '[^   t*<o-'c   •w\n   ['^s: 
bD  ms-^  nD  -.•:;i<b  n'r-rm  nacn   n:-  rz'::   t'-:z-  ":;"7nb  ar:"»  Y'::  t 

'  Le  Calendarium  de  la  Laurenliana  (Biscioni,  p.  333)  porte,  d'après  la  copie  de 
M.  le  rabbia  S. -H.  Marf,'ulies,  la  sij.'nalure  suivante  :  HT^'^O    '?N£~1     "VîCr;     ^IS 

n'TN-  nnVr;  ^r-yz^-z  tjwS-iîtû   nnbï  inrr;  2-r-^  -,'-;'3'3  •\':i'''  inm 
"i:>nT   b2T   Nir;  zi  r^isnb    inST""    '-   p<d^s-:    -i':!'-   bNr:o   '-l'r;'?:'^ 

A  la  lin  se  trouve  :    ^;2T^    'n    l'^'^    î*<0'^î"«    Vsi^UJ    '"^-b    "la    b^T!^    "'bc 

irN  v-iT  rnîT  ■':'-,n  "«rN  12  ms-b. 

Le  ms.  Oxford  911,  qui  a  éié  écrit  en  1538  par  Raphat-1  Cohen  de  Prato,  est  pro- 
bablement aussi  venu,  comme  le  ms.  de  Rossi,  de  la  bibliothèque  de  Yehiel  de  Pise 
entre  les  mains  de  H.  Nalhaniel  Trabotto.  La  leçon  "llJi*"!!^,  après  le  nom  de  Salo- 
mon Cohen,  dans  Graelz,  Geschichte,  IX',  340.  est  donc  condrmce. 

3  Cf.  Zunz,  Nnchiraj,  p.  49,  note  1  ;  ms,  Oxford  1633  (Calai.  Neubauer,  p.  577), 
Sleinscbneider,  Calai.  Monac.,  n»  49. 


LA  FAMILLE  DE  YliHlEL  DE  PISE  93 

écrit  dans  une  langue  pure  et  élégante,  prouve  que  l'auteur 
possédait  une  solide  érudition  philosophique.  Comme  le  titre  l'in- 
dique, cet  ouvrage  était  offert  par  Yehiel  au  public  comme  une 
pieuse  oblation  de  son  zèle  religieux.  Yuhanan  Trêves  lui-même, 
savant  et  célèbre  interprète  du  Mahzor  romain*,  qu'il  api)rit  à 
connaître  et  à  estimer  dans  la  maison  d'Ismaël  de  Rieti,  et  qui 
résidait  alors  à  Sabionelta,  avait  accepté  la  dédicace  de  ce  remar- 
quable ouvrage,  dont  il  rehaussa  encore  la  valeur  en  lui  adressant 
le  14  Tammouz  1539  la  lettre  de  remerciments  que  Yehiel  inséra 
dans  son  livre.  L'ouvrage  devait  se  terminer  par  un  poème,  que 
Raphaël  Salomon  Cohen,  de  Prato,  avait  écrit  en  son  honneur. 

Yehiel  de  Pise  se  révèle  dans  cet  écrit,  qui   mériterait  d'être 
publié,  comme  un  des  derniers  grands  représentants  de  la  pensée 
philosophique  parmi  les  Juifs.  L'esprit  de  Zerahya  ben  Schealtiel 
et    de  Hillel   de  Vérone,   pour  ne    nommer   que    ses  prédéces- 
seurs italiens ,   parait    revivre    en    lui .    Parfois   le   critique    se 
montre,  dans  son  ouvrage,  juge  et  connaisseur  plus   compétent 
que  le  panégyriste  ;  Yehiel  est,  en  tout  cas,  supérieur  à  Yédaya 
Penini  par   la  profondeur  de  la  pensée.    Ses  citations,   dont  il 
use  d'ailleurs  modérément,  prouvent  qu'il  connaissait   et    com- 
prenait   la  littérature  philosophique.    Aristote  et    ses  commen- 
tateurs, Thémistius  et  Alexandre  d'Aphrodise,  et  tout  particulière- 
ment Averroès,  lui  sont  familiers.  Il  connaît  aussi  bien  le  système 
d'Avicenne  que  les  écrits  d'Alfarabi  et  d'Algazzali,  qui  lui  étaient 
accessibles  dans  les  traductions  hébraïques,  et  il  semble  môme 
familiarisé  avec  les  philosophes  modernes  d'Italie  ainsi  qu'avec 
les  ouvrages  d'Agostino  de   Sessa*,   nommé  Niphus.   Sa  biblio- 
thèque dut  être  tout  particulièrement  riche  en  ouvrages  de  théo- 
logie juive  et  en  ouvrages  manuscrits  de  penseurs  et  d'interi>rôtes 
juifs  qui  étaient  alors  peu  connus.  Les  tendances  de  son  esprit  le 
rapprochaient  surtout  de  Juda  Hallévi  et  de  Moïse  ben  Nahman, 
dont  il  invoque  souvent,  dans  son  argumentation,  le  commentaire 
sur  le  Pentateuque  et  les  dissertations  philosophiques.  Mais  il  pro- 
fessait aussi  l'admiration  la  plus  respectueuse  pour  Maïmonide, 
dont  il  vantait  en  termes  éloquents  les  services  rendus  au  j  udaïsme. 
Toutefois,  malgré  sa  déférence  pour  ses  maîtres,  il  savait  rester 

•  Yehiel  cite  déjà  dans  son  livre  le  commentaire,  qui  avait  été  imprimé  dès  1Ô-40  à 
Bologne.  Cf.  la  dédicace  de  ce  livre  et  la  réponse  de  Yoliauan,  Pièces  justifica- 
tives, IV. 

*  Cf.  Tiraboscbi,  Storid  délia  Icllemtura  italiana  (éd.  Venise.  17-24),  VII,  572  et 
suiv.  ;  Renan,  Averroi's  et  l' Avert-nisme,  s.  v.  ;  Pietro  Uignisco,  ^icoletto  Vernia  studi 
storici  sulla  filosofia  padocana  nclh  2.  meta  dtl  secolo  decimogiiarto,  p.  60  et  suiv.,  et 
Perler,  BeUriige,  182.  Yehiel  le  menlionne  loé  et  33a  avec  la  qualilicaiion  sui- 
vante :  ND-^OTS  nr::Di3N   ii-ma   rrr;  tcx  cn-nsn  '"'EioiV-^sn  îits. 


94  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

indépendant  et  rejeter  une  opinion  même  quand  elle  était  défendue 
par  un  Hasdaï  Crescas  et  un  Joseph  Albo. 

Cette  indépendance  d'esprit  lui  a  permis,  malgré  son  zèle  pour 
les  spéculations  philosophiques,  de  contester  la  supériorité  de  la 
philosophie  sur  la  religion  et  même  de  lui  interdire  toute  ingé- 
rence dans  le  domaine  de  la  foi.  Selon  lui,  aucune  des  vérités  en- 
seignées par  la  tradition  orthodoxe,  soit  dans  le  domaine  de  la  mé- 
taphysique, soit  dans  celui  de  la  psychologie,  n'a  pu  être  découverte 
par  les  efforts  combinés  des  penseurs  de  toutes  les  époques.  L'his- 
toire de  chaque  problème  nous  montre  une  série  de  contradictions 
et  de  vains  efforts  s'annihilant  mutuellement.  Là  où  Yedaya  veut 
voir  les  titres  de  gloire  de  la  philosophie  et  les  services  rendus 
par  elle  à  la  religion,  Yehiel  voit  une  lutte  stérile,  un  mouvement 
sans  but,  une  espèce  de  cercle  vicieux.  En  essayant  de  prouver 
ses  assertions,  Yehiel  expose  l'histoire  des  théories  psycholo- 
giques avec  une  grande  compétence  et  un  esprit  de  critique 
acérée.  L'Ecriture  sainte  n'a  pas  besoin  du  secours  de  la  philo- 
sophie. Même  la  ïora  toute  seule  suffit  pour  enseigner  au  croyant 
l'idée  de  Dieu  dans  sa  pureté,  il  n'a  qu'à  développer  d'une  façon 
logique  les  indications  si  claires  qu'elle  donne  à  ce  sujet.  Les  rai- 
sonnements des  phiiosoi)hes,  ardus  et  impossibles  à  comprendre 
sans  effort  et  préparation,  sont  sans  valeur  pour  la  foule  et  sans 
action  sur  ses  croyances  religieuses.  La  certitude  absolue,  la  vérité 
incontestable  ne  peuvent  être  acquises  avec  les  moyens  dont  dis- 
pose notre  seule  raison.  Celle-ci  ne  peut  donc  jias  prétendre  s'éri- 
ger en  juge  des  convictions  religieuses.  Quand  Maïmonide  essaie 
d'expliquer  les  lois  cérémonielies  par  des  motifs  rationnels,  il 
échoue  dans  sa  lâche,  ne  donnant  que  des  explications  faibles  et 
insuffisantes.  La  soumission  absolue  de  Yehiel  à  la  tradition  ex- 
plique son  respect  pour  la  Cabbale,  le  Zohar  et  ses  interprètes.  Elle 
fait  aussi  comprendre  que  cet  esprit,  nourri  des  œuvres  philosophi- 
ques anciennes  et  contemporaines,  ait  pu  accorder  sa  confiance  et 
offrir  l'hospitalité  à  un  rêveur  et  un  aventurier  comme  David 
Reùbeni  et  qu'il  ait  énergiquement  protesté  contre  l'épître  de 
Yedaya  glorifiant  la  philosophie  et  les  services  rendus  par  elle  à 
la  religion.  Sa  foi  absolue  dans  la  révélation  et  la  tradition,  sa 
croyance  à  l'impuissance  de  la  raison  nous  expliquent  sa  vie 
et  ses  opinions  scientifiques. 

Plus  tard,  Yehiel  Nissim  semble  avoir  occupé  la  présidence  du 
Collège  rabbinique  de  sa  ville  natale.  Il  est  consulté  pour  des 
procès  et  des  questions  rituelles,  à  l'égal  des  plus  hautes  autorités 
rabbiniques  de  son  époque.  Si  naguère  les  études  philosophiques 
occupaient  principalement  son  attention .  il  s'adonna  désormais 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  95 

avec  beaucoup  d'ardeur  à  Tëtude  du  Talmud,  à  laquelle  les  Juifs 
de  l'Italie  allaient  bientôt  être  forcés  de  renoncer.  Car  le  moment 
approche  où  dans  toutes  les  villes  de  l'Italie,  le  tribunal  de  l'inqui- 
sition confisquera  les  exemplaires  du  Talmud.  Ce  fut  le  9  sep- 
tembre 1553,  pendant  le  Nouvel-An  juif,  que  l'Eglise  fit  brûler  les 
exemplaires  du  Talmud  sur  tous  les  bûchers  dont  elle  pouvait  dis- 
poser. Yehiel  de  PJse  lui-même  dut  livrer  au  bourreau  ses  exem- 
plaires du  Talmud.  Nous  avons  encore  une  consultation  de  lui, 
datée  de  l'été  de  1555',  où  il  rappelle  ce  malheureux  événement 
et  où  il  déclare  qu'il  ne  jieut  apiiuyer  sa  décision  que  sur  les  ou- 
vrages de  casuistique  qu'on  lui  a  laissés  "-.  Dans  cette  consul- 
tation, il  se  montre  partisan  tervent  de  la  tradition  talmudique, 
ne  tenant  aucun  comi)te  des  usages  locaux  les  plus  anciens  quand 
ils  sont  contraires  à  la  lettre  et  à  l'esprit  de  la  loi.  S'il  en  avait  le 
pouvoir,  dit-il,  il  déracinerait  toutes  les  coutumes  qui  se  sont 
introduites  illégalement  dans  le  rite  italien  ■^.  Versé  dans  la  litté- 
rature rabbinique,  complètement  familiarisé  avec  la  tradition,  il 
cherche  néanmoins  à  se  former  une  opinion  personnelle,  lorsque 
le  contrôle  lui  est  possible.  A  l'exemple  de  Nahmanide,  il  essaya  de 
fixer,  comme  il  le  rapporte  dans  la  même  consultation,  au  moyen 
d'un  sicle  qu'il  avait  reçu  de  Jérusalem  en  1527,  le  poids  exact  de 
cette  monnaie  et  sa  valeur  en  monnaie  toscane  *. 

'  Cr.  Monlcfiorc,  dacs  Revue  des  Éludes  juives,  X,  lSt6.  Daas  le  ms.,  qui  appartient 
à  M.  le  grand-rabbia  Zadoc  Kahii  et  qui  est  sous  mes  yeux,  grâce  à  l'obligeauce  du 
possesseur,  les  consullalions  liioloT  portent  les  signatures  suivantes:  loo,  rîNI^"! 

pD5  Y'i'J  "17:p  ':j-in  CwNt  f^D-'Dtt  t=;"n  ^wS-tp  -i"-ir;7:33  ri"rr:-  ; 
15»),  P01273    Vt  ^î<i70'::    "13    '■'02   SwN'^r"'    ppn    Tnns   Y'5  '-i;r;i 

psb  12"'''0  "ÎT^D  r,"0;  1'T",  '■'Oj  bS'^n'^.  De  celte  signature,  il  résulte  que  3'>'>n 
b"î  W^Oj  '^HVyC  l"33  D^'Dj  ■1;2"ND3  a''C",  que  M.  Perles,  Beitriuje,  1io, 
note  1,  et  ^L  Ncubauer,  Revue,  IX,  153,  considèrent  comme  le  pelit-Cls  de  Yehiel 
de  Pise  l'ancien,  n'est  pas  le  même  que  celui  dont  il  est  question  ici  et  ne  fait  pas 
partie  de  la  l'amille. 

*  N"  155,  i.  c,  il  est  dit  :  '"^"ixir;   V't  'ipoiDr;  ■'nm?:   :-,t^x-i  ^■':n-i 

£=î<  -^3  "J7J73  i:-|-b3  Ti7:bnr:  "^nm::  '-pj?-!  ^<■'2r;b  b^i:  Nbn  -bwxr; 
;."730T  -•:^i2  "irai  -"r;  '^-^T:;  "i:n  tz-^7:^::  -iwN  b"î  '^pci^r;  ^z>  br 
b"T  npr-»  iria""!  i:3t  "J^s-ir;  c-'rnnwsr;  "^bTi.-i. 

»  ibid.  :  r-.i:::"::  bu:  sniTo  t^-sbwS  r-.ns  r-cbb  ■'nx-r::  :ir!;7:  riT  V'"^"' 
'r-iïm  p  iNv^-jW'  b^bro  'nnx  '•':;r;;T:  c-'C  17:3  vbr  irc-b  ^V''^"»^ 
"b-'n  ^o\s  "^Ni  b"n  ■'pSD  -ia3  'i-,a-  -ikSUJT  ï-n^-inm  r-.ipsr- 
1-'j:'3  3"a  5-;7:-  ht  rjcsn:  a.x  r^bsnrtb  :3"n  ■'-uS-i  V''^"'  "i~:^"'^2S 
n"n3  nniN  nrain  r;:\T:;  -cn-  rairr. 

*  l'iid.  (cf.  Zuiiz,  Zur    Gesch.,    556;  :    '^D   C]n33    b"T    'j"37i"ir;    b'^i'ino    ^^i"^ 

ï-n:nbï53  nmx  ibpoi  bp^n  m^:in7ûi  '^■j>'::i-  isrs  ^^•T:;  n-nnr: 
bina  rvo  S"-  -^""c-i   nan   m-3  wno;a   snsT   '-^pis  ■'i:n  nmï«:i:72i 


96  REV^UK  DES  ETUDES  JUIVES 

Dans  le  procès  que  le  médecin  vénitien  Joseph  Tamari  avait 
intenté  à  son  beau-père,  Samuel  b.  Moïse  Venluro/.zo,  de  Pérouse, 
et  qui  préoccupa  une  grande  partie  des  plus  éminents  rabbins  con- 
temporains de  l'Italie  et  des  autres  pays,  Yehiel  Xissim  lui  aussi 
fut  prié  en  1Ô59  de  fournir  un  mémoire'.  Dans  la  même  année 
il  écrivit,  sous  le  nom  de  «  la  Vie  éternelle  »,  son  traité,  divisé  en 
16  chapitres,  sur  les  prescriptions  rabbiniques  concernant  le 
lirèt  et  l'usure  -. 

A  partir  de  cette  époque,  nous  ne  savons  plus  rien  de  lui.  Nous 
savons  seulement  qu'il  mourut  avant  1572  et  que  sa  précieuse 
collection  de  livres  et  de  manuscrits,  à  laquelle  il  tenait  tant,  fut 
vendue  et  dis[>ersée.  Du  moins,  Azarj'a  de  Rossi  rapporte,  dans 
le  second  appendice  de  sa  <>  Lumière  des  yeuxo,  qu'il  avait  acquis 
des  livres  provenant  de  la  succession  de  Yehiel  Nissim,  de  Pise, 
parmi  lesquels  se  trouvait  un  précieux  manuscrit  très  ancien 
d'une  autre  traduction  du  commentaire  de  Maïmoniie  sur  le 
xi°  chapitre  de  la  Mischna  de  Synhédrin^. 

Nous  sommes  beaucoup  moins  renseignés  sur  un  autre  petit-fils 
du  vieux  Yehiel  de  Pise,  sur  Abraham  ',  fils  de  son  premier-né 
Isaac.  Quoique,  suivant  l'expression  de  Guedalya  ibn  Yahya,  il 
aitlaissé  à  samort,  survenue  dans  la  fleurde  l'âge,  des  enfants,  delà 
fortune  et  de  la  considération,  et  qu'on  ait  trouvé  dans  sa  succes- 
sion quelques  ouvrages  composés  par  lui,  ni  l'histoire  des  juifs 
italiens,  ni  l'histoire  de  la  littérature  ne  savent  rien  de  lui.  Une 
seule  consultation,  qui  nous  a  été  conservée  parmi  les  consultations 
de  Menahem  Azaria  de  Fano,  sous  le  n»  106,  et  est  une  savante 
dissertation  sur  la  manière  d'écrire  les  phylactères,  est  l'unique 


pp-i7::-i  ri'i-ij:  ^o^^  '■'prix  ""xn  nn-rxi:?:!  imwS  \-i"rp"wT  t>:"2mr 
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nr"^  TN  r"n:i  '-  'z  c  ",n  Vn  s^ini:  qsD  ■^pnx  -^lin  -^iio  anc  'z 
— rri    ■^7:n;-.r   i-'eCwN  'wS    -^Trc    t^im   i-'nc  ':;  rrr::   m:,r:z   r^i^r: 

r<nm^  t\^'-:z^  -«p:  :]0373  '■'priN  "^^n  "j-ir  anc  'n-  -^nbia  ncc-: 
n-nn  bo  b-p/::. 

»  Voir  Brull,  Jahrbiicher,  I,  111,  noie  122;  ::""'2?:  n"TC  H,  139.  Joseph  Tamari 
est  celui  dont  j'ai  parlé  dans  Jacish  Quartcrly  Revuw,  II,  299  et  suiv. 

*  Zunz,  dans  Kerein  Chemed,  V,  15o,  ce  que  M.  Neubauer  [RÉJ.,  X,  153.  note  2) 
n'a  pas  \u. 

'  Zunz,  /.  c. 

*  Dans  ^VDn.  n"  66.  il  est  question,  par  erreur,  de  la  discussion  des  trois  fils 
d'Abralidiu  de  Pise  au  sujet  de  la  succession  ;  c'est  de  la  succession  d'Abraham 
Pesaro  qu'il  s'agit,  d'après  Cat.  Bodl.  2224.  D'après  les  renseignements  que  je  dois 
à  l'obligeauce  de  M.  le  chev.  Malagola,  directeur  des  archives  de  l'Etat  à  Bologne,  il 
ne  s'est  rien  conservé  sur  Abraham  dans  les  documents  des  Archives. 


LA  FAMILLE  DE  YEIIIEL  DE  I^ISE  <j7 

témoignage  de  son  érudition  talmudique,  qui  lui  a  valu  le  titre 
honorifique  de  gaon.  Ce  queGuedalya  ibn  Yaliya  dit  de  lui  répond 
bien  à  l'idée  que  nous  nous  faisons  des  membres  de  la  ramille  Pise, 
qui  étaient  tous  élevés  pour  devenir  des  savants.  C'est  probable- 
ment lui  qui  adressa  des  vers  à  Josef  Haccoben,  le  chroniqueur, 
après  avoir  lu  son  poème  sur  les  trente-trois  beautés  de  la  (èmme 
et  les  vers  faits  sur  le  même  sujet  par  Josef  b.  Aliron  Lévi,  le  beau- 
frère  de  Josef  Haccohen.  Josef  lui  répondit,  en  ajoutant  des  vers 
en  l'honneur  de  Fiametta,  femme  de  cet  Abraham*. 

Un  poème  d'EliaLevita,  conçu  dans  la  manière  d'Ibn  Ezra,  mais 
où  l'on  ne  trouve  ni  son  heureuse  facilité  ni  son  esprit  pétillant, 
nous  présente  aussi  Abraham  de  Pise  comme  un  poète  de  talent, 
devant  lequel  il  est  forcé  de  s'excuser  d'avoir  osé  faire  vibrer  les 
cordes  de  la  lyre  '-. 

David  Kaufmann. 


PIEGES  JUSTIFICATIVES 


Poésie  de  Joseph  h.  Isaac  Zarko. 

M  s.  Halhentam,  251,  f"  94  a- 97  a  i  Judith  Collège]. 

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•  Voir  Isidore  Lofcb,  HÉJ.,  XVI,  29. 

*  Dans  le  Catal.  Rabiuowitz  (n»  10)  du  5  Tammouz  1SK7,  est  mentionné  sous  le 
II»  180,  un  poème  qui  doit  avoir  été  adressé  par  Elia  Lévita  à  Abraham  de  Pise. 
Ce  poèmp,  dont  ]'ai  essuyé  de  corrif;er  de  mon  mieux  les  fautes  et  la  division  délec- 
lueuse,  m'a  élé  communiqué  par  mou  ami  S.-J.  Halberslam  de  Bielitz,  dans  la 
collection  des  manuscrits  duquel  ce  manuscrit  porte  maintenant  le  n"  496.  Voir 
Pièces  justificatives,  \ . 

T.   XXVI,  N»  ôl.  7 


>JS  HliVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

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LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  {i'J 

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M::.3  Ï-1D1  -jrnbcb  'i-.'^r'N 

i5an  rsi^b  ND33-i  mac 

•:i3D  nbriirn  bwST::i  mp?:  rh'CJZJib  bnisn  "nN73n  n-i:-:  ■'te  bi::  -s 

r^x72  :?"3  'inn?:  '::r3  -^-^n  irjbrb  '^ntp  'n  bbi^n  c=rnn  î<;2-n  Nj-it: 

•^3;  b:'T  -,-i:d  b:>  t:z-^-P':;3  nu:  i^n-i  ^y  l^-^tz  "'pi::^  "-2:'  ■':::p7:  nns 

*TC  iTûbirb  c-<bT  C7:x]  sbnrb  -irby»  "inr  ^an  n-^r>  -z  rcziz  y-ri 

pnNT  sisv  ■'ax  rn-^33  T':>i:r;  bm^ 

nb  Nb  n-'-;  br  nn:?»-i70  -isicrt  Nir;  r^ovi 

nbca  Nd^T 

"IZiii  "«-inN  Dsnnb  l:^  bs  ti-'o:  ï-ii::>  tz^Mi^N  ir7r::»n  bjî 

ppr:  tj:'i  "jPiry  nbx'w  -rnx  ûN3  tzi-^r;  r;7:i  m::  rr^ 

n73N">  n-îcN  Trrn  in  N::?:b  n"«3:b  ribx  ■'«bi 

•ibc73  N'w-'T  "ibip  l'n  ^s  v:Tirb  13:^7; 

a'^'C^pr?:?  137270  trn3b  tj-  irn  bi7:n  vr,  -^y^VT:  r-innn 

siujiNbnmriTas  Dîvaninx  -ro  mm-172  tic:n  b:?  s-innss  ^r 

ûi*J3  n3nî<72  ib  ;r!  nNbsD  ^^  ipbn  r-,:?:  bi<ini  Tcn  s-,3r:y  -;wX 

r-T:c3  rî-nr-  nn?:*:;  av3  n-nm  ï:2"0'2  b-n:ir:  -"z  bv  im-ribn 
riT  -iian  i;î<-ip  i''^"  ^:î<~P^  2?::  n-  T-i-,r;  ^b  inic;>  n-;DT:r; 

•  =  Douze  sirophes. 

»  Sophon.,  m,  18  ;?)  ryxi  "S"- 

'  DaDiel,  i,  5. 


100  KEVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Tiby  î— i-nc  13  p-iNT  S)D*p  n"nî  p  bx  rx-ipb  ii^n 

ra:an  r-^n^ 
Y«:.'w^"i  nT'nn?  nVn  ^^wv  ar  "=  v=~  i-î<  "i~-  "'"^  *- "  ''"^ 

rr-r  "irn  a":?:  bipn  -.■'CX  r';:;  TwN  vmbir;  b?  bs 

î-n7:n  ■'ni:  aTonb  mi:  -^^wa-b  nbn;  tcn  ■^T's: 

r-î"nra  aibc  r-^-^n  -i^sb::  Tj-'pcnb  "na:?  ■'bs  nb*:; 

an-aa  bi:?  -2".a;n.  ipr: 


.■mbra  -inab^ïi  n-ia  aiar  ■'ba  -^irp  V-^  -na 

i-nn  bipa  a-,  i:bn:iNi  mix  ibi  n*  b:'  bî<b  "ji-m 


IL 


1. 

Lettre  (Vlsaac  Ahraranel. 

Ms.  Haloerstam,  lOi,  f.  49 è. 

.  b"pii:T  bx;a-;aN  pni:"'  -pT  ara 
ynx  PN  'r,  n-,u;r  ava  /"«bi-a  a-M  ■':n?:anr.  ,  a"'':xb  m:):-:"  n^;: 
-•wN  £2?  \-^a-.  -.^rm  /?aiN  i7:a  rrrav  y-.x  rsan-n  rjaia  r!-7:n 
acT»"  arn  :=ca:b  :airi  ^rnari  aria  o?2b  ï-irr^n  naipa  ■'a:N 
y--\^  '-p'-n  bx  ,"!wS7j  naa  -laia  -lîb-  y-iNn  ;-x  ::-,a':."b  xa  ■'a  ,r-;a 
aas  "'n-'a  bnwsa  Nax  un  ,y-)Na  n;T  r:  Ti-iina  arir:  s-^?;''a  as  "«a 
^r^-b  r-irc  irx  ai<  .nmcK  "^-«ti  norT^a  ■^ris:'»  "w-i?  b?  !-ib:?N 
as  ;iP:',7:n  VT'^  rira"-w\  'pbwS  'ra  ^^-^ra  nTnx  rrb^b  )^•n  'ibna 
;-:*:  r-!y-:b  iranx  xbi  i\-'.TnN  ns-^rr;  y-i^N^a  Na  -la-irT:  "«a\s  risns 
na  Y'~»^(~)'^i  V'iî'a  ::rc7:  ^-Na  -"a  nTr;  'ttît  ^Y'"**  aibcbi  Y- 
-.•-wN  a-;p"^  aar:-"  -^r-aT  /"'■:7r:  i^a  ".msTsi  -ina?^  '"':ï3  '5  ï-it 
■•bs-i  ^i-'a  r-i:r;:a  -n7:'w^i  iitt'  "rn^icr  ba  '^^-!DO  nana  ,"ni:"' 
riT  'uiNT  ,pi:i«  \s-ia  -^T^  aj:i:-i  ^na  -îi-,-:n  tarira  -rw-^-:a  m-:? 
xaT  Ni:-»  T'ar  xam  ,"i"'ra«  mia  -ir-i  ';ia;i:;(b):'?:-i  ivay^'z  irrnr 
■'a-:  'pr*:'-  -«ai  .  na-:  ^an  ■'bn  ba  a::i  xa"::!  "la'w:  ab  t»«JD"i'' 
^N  -,aT  px:  "jr-ic?:  '  Sa:r;-iax  -•  '-ns  na?  •'a::  y-xa  '•'-lai? 
,'-    tzcb   "iTna'jn::!   *{\mNba:   "in-ia:.   xa"   bab    -■'J?:-    "^ri»?:':;-: 

'  Abraham  Havyoun, 


LA  FAM[LLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  101 

ir;nr;:33  ■^":;d3  riariîîu:  nN  rii<-,N  r^D^N  ^-.■^72N  ,  "in"^  -"b  ni:  ,  rî^bri 
bip  -^bip  NON  nsw  ,1-10370  -.t:m  rwir^?:  Dicr  pn^a  nab  aTj2i 
"^17:3  ']b»i-!  nj^'::b  Nnb  i^n  ywro  ^D3n  tm33>  bpn  ti:-ip  tnn^D  riî-i 
S:?  -i2ibT  ']mN  s=rab  CwS  -s  ,  t=^T>::a  -,ï:t  î-iiitot  ^pncsn  -vn 
l3>»bT  -^nn  cnra  ^mx  a^pti  i^Tobi  >7oin;  ^nan  '^nrj  '^nn-:  ^ab 
mb  D-!U3  n-'ir!  -ion^  ■c-inp  "^nipa  ï-rcin  m-n  "onn  nb  J-ic:' 
t*<îcnD   r-n7o"i-7:n  s— iijnbn    r-ijn?3^n   t-mai   yns    •^:d    br    v-îd    't> 

!-!Nb72  ^nob  y-iNr:  b^  Nbr;  '^:'n  i^;d  n^-bn  "^anb  ;n^  !-i7ob 
fcs  ^<br:  /"«uînr!  'pbxa  'mna  pn  •n"'73-'i  'n  nwS  larr  '■'cai  Q"'\2;;n 
.  3;:;!^  '-nia  ■;%\i  pn  isbn  w^n  •ira  D5  cs'iiî  ■';3  ta-i  roD  lan  i;3 
iy73bT  lac.  n-in-»  !-ibT7:;i  -ip^  niryb  rmxai:  '-  Y-'-~  yisn-'  ■'Tobi. 
S;»  t=pir:  13:;  û^i:;3  rirn  î-iznn  "jvm  rinx  -n;»  nann  npr  Nb 
tnmz'Cj  b^  n3-ij'  nn:î<i  ir^^  mnpb  -i'>::ï«  rr^-nc  i;:.-.:!  ncNr;  r-Tnx 
DTN*-  n:::br;  x-jitod  t:-^by^  an  ^n  mx  piî<rT>  ri7:  ,"î3b  crr?^  ribj 
ï-ns  tnxn  nx  'ipbN  rr::;'  '^72bi3'br:  ,  inbo  biN->r  nr:  t>:;d;  ubT:-^ 
ï^b  \:;^N  CN  r-773Ma  dn  yiNb  '^xa  iiniN  nrr;  ^rinc  r-rn?:  rcs: 
•c:?  b-i-i^a  pp^    ,  am^  m7:   ara  n-^m  ib-wa'i  cmipc   rra    ,  r-t^r- 

.  S'oT'  "wT:p  ûbawS- 


Lettre  (Vlsaac  de  Fez  à  Isaac  de  Pisc. 

Ih.,  f.  53  a. 

npb-   bx  "'•wî:;    r;baN  ^,'û^2^  !-;-oa  :'-ni  'n  '■'pbx  bx   -^cn-i  v:;Nn 
CM  ^ty  s^To-w-a  !-i:r;    ,b"::T   "jrp    "^^ax  -:-t    non?:  n;b  'V?5«r:  cw* 
Nbn  î-T^n-»  b-^n  p  N-ir:T   'n  T'a   i:m?3  ';n-'  •^7:  i-icai   -^ab   iiton"»  xb 
aN  f  72Ti7oa    ^irTv:;    ,  r-i7:iNr;  -^rs  br   t«::wS    cn^n   ba-:    r-,n7o  riN-i"' 
'"'^n3   Tira  imNnb  ■'b:;-.    iniTonp"'    Nb  icn  br    cv  rT::pb   T.->aa  Nb 
r-nrN  y""iï«  "-î<   ^P">:;ni  ■'33b  n:,:  npib  ■'d   ns  ■'b  i->Jo  nnri   .  nn-r; 
bav   mnapb   wNim  13:»  p72n  -^nTii  N3  idn  n;n  ,\xi-i  i-^r  i;-n':;n  Nb 
'"'pbN  NT^  nci   ûP    w-^N  bN  V2r::i  r-i^n"«   ^73    ,irT'3b   "n:*   31*:;''  Nb 
'■'Toan  riwX-iN  ^a  -crr  ■«■:t  baN-i  -7:  an-^raVwT  (•?!nnp  "1:117:2  r-17:  -ici 
^mN-l  -i-inN  tz:z'zr,  :-!m7:N  \n-i7:N   a";-    ,£arî"'br  naan  r:7:-n  im7:i 
■••^JDïT    i3N-iNT   ï-rabN   '"'7:"::3    ^b    -^-2   ,  lî^^ai    -ra    n-iisr:    î^n7:r:    -a 
tT'DiN    ar    \-Ti72a    ^r    mhya    ^cva    -i3n  •'b  'jn*'    rz    ^'în':    '-:?'':ir- 
'"'■î7:n2r;  r;r  nmN  sac:  ^br  m7:i:na   i-iaw  ■jn-'   r:    ,  mr  i:-:;p3N 
t:;n  b-iNïî3  "h  in-»   "'7:    ,  3-1   bbir  Ni:i7oa  ■'r:'3  ■'n-'-'r:  31  if 21  sn:-: 
pin?:  qribii  rb:,-"    -|e:"i   vb:*  ■'■;"'    rr^i^N    ,lisc  ppir":  r-pbn  tac 


102  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

t-iNT  "'■'irn  \i7:r!:  f-i^T  .uîe:  3-'":;7:b  ■'b  r-rr^  tz::i;'b  r<£-,':-,  -czib 
T^nc  •i:b  -,nrî  ,  nb  i-ircib  *c:i2nb  '-«pb^r;  r;cr  .—wSt  ■'nb  bx  n-iCN 
.n-cTcn-t  ;?-ii::  "ins^;    ...-i2T  "î^-^tin  -,2  'ivnsN  :D'i;;7:lp?:  ï»<b7:7: 

ï-ict:   i:b    mi:    nmr    ,11-'^-    'ip'-3    n^'ipn   in:-   pwN    -3-?:  r-.-ip-' 

r>:::r;iT  ^<■m   N-.r;   rîM    ,r;-iNEn    tc   ib  ncrb    r;':r;b?û    .  .  .  i:?:?: 

.  ûib-w  ne  ":;*  ""awS*  ï-,-AS'Erbi  nbrirb  !-(b:?7:b  nbrr: 

3. 

Lettre  d'Isaac  de  Fez. 

Ib.,  f.  .5.5  *. 

'^'.zi  t=;N  \n7:A::;"i   -^n-n  '^■'r^b  rn  \mb"'r;r:   'vr;    ,:-.■:   N'-ri   b-,*;:. 
iTrN:    "-2r    •^riî  -^^    -"rr:'-:b    r-^iinb    bnx    n-r:    21^-    /-^nar^   ax 
■'2  "^r-iTinb  -^s   •^-12"!   r-bnn  sztt!    r-17    ,  "^rr-^'w":  ^w\  n^n   ln"«-i32 

/-ipbx  'r:  inN   '■'Tn    -n-ii:^    r-r-,"r,j:  -i^:::    S"::t    'nsb  'rns 

.nrrnn^a  crr^r  m^iiD  -.'ï^i  "b--  m-'— ^  rr^-rr  ï*«î-nr;:i  -i^tn  rr: 
ion"'  T':3   t:"';2r!"i    ■i\m;3  r-i:3-    /cprs  rnr-,N  '-  »— .n-:   bx^N  \s 

ï-^N  •'?:"'2  s^-'n:  -irc^:  ::cr;  ^'^rp  '^w"'  bwX  ■'zrrb  br;:a  ,imrn 
■71221  s-^c^j  Twi:'  Y'  l*^"^  fîbxr;  '■'•:"'-  r.sbT::-,  ,«?;:"•  yrj^  -icr-: 
T':-:  mN-,b  r-nxn^rr  os:-,  r--b2w-r;2  ttc  miris  \-in-i  Y-r:: 
r-i7:nî<r7   ■':r   S:'    tcn    c-n-    br?:    r-;-:rm   ...'■'pbwN   "rs   r-.-,N-r 

4. 

Lettre  cCIsaac  de  Pise  à  Ahraliam  Hayyowi. 

Ib.,  f.  o5  b  s. 

n":;i'72  '^\-Tir2j:N  r-r-:;??:  -120  r^b;?:  -wvs  r->:r,  ,^"1br:p  "^rs:: 
■'-.m  m:*:;"  by^  'nbr'n]p'j'\  r:r2  -;:;n  'p'rx  nrr^:  2r27;r;T  r:7:2n 
TT'N''T  \-^-:"ibwS  r-i-':p  ■'r-îp  r^::-,  '^•'T'  i::"i2  -,"w\s  n-rcn  r— .:.wNr; 
,  in^CN  zi-ç'  £2in::  "{■'srr  Sj:2t  'It::'  rrrN  ■'r  'Nin  ^-hn  ^rr 
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LA  FAMILLE  Dli  YEHIEL  DE  PISE  U13 

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Cisr;  ,  rr^Ti  -lonD  -^rao?:  '^■'rn:'  ^nin  ■'i-ip-::')  \nbDN  ti:"'-,"'3N  cnb  t=:n 
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■ice;  î-iK  r-,T^nnb  Tnr.  ^dvd  !nc:>  f-iwST  mn-'r:  'n  t-iN72  ,  ■';n72nr 
"'jN  .  ri^DT'  r;3T  'pbN  ncy-'  riD  yson  -jï:  cdîi  ^b^j  r-nmx  bu  "^d 
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—wS    3-":;wS  r-,wST   .r2b-i:'3  ib   nrs-::  i72'ip7372  "îvbr  Sî<  Ti-ai    '-^r 
.    .    .  m-'iN   nnx   r!72i  ']72'3   ^-l::y   -rns;  Nb   ■'D  ■'rnv72"i  "'2'ibN   "'3b 
is-ii    "î^bwS   3-np  S3   £ii'72T;  "^b  lo^^y  un  d3  "^d    ,  T^"'"b   î-rr-.rNi 
'"ib-::  :22-c:72i  1-.72N  -i3T  H::?  mm  St«  c-is  Tipob  nsbnn  tn  p  13-.  1723 
■in3nNi  ^p-^n  3-ip72  rtT  bb:.3  "^br;  "'3b  t*<b  'jib-in"'  nbnp"  D"':c  "723  ht 
tz^n  r,^^y  ODDb  n\-^:yr:  pii:3T  ir;j-i72  c\s  nnSD  ^n  rr^rc:  t<b  y.:^: 
'ro    -^CNT  &"'-i72T  "'TI33)   ^3î<  '^iiit    f-nNCD   mur"  ~cn  ïnE:i:72n 
-;nDD  -i:'-iT  "'272  nDïîn  ^<b^  "irr^a  3-ip73  riariNn  m3Db  ^b■2^^  Kb  S=;-'3-i 
a-'n72-i:i  a-'c:;   '^n;'72-:;72  Sx  t:"''-iD  ']P"ji3yb  t="':"i3:  r-ir:'  iinr  tn 

•  Abraham  Havvoun  et  Isaaf  Abravanel, 


lOi  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

naars  IN  TiDU'Ci  p^yin  ■':s:"i  -^ririD  'p  r^nNi  yzr,  t^-iojzj:  '^^'z'^n  nr^îr-: 
£2r:i  "^mwS  '^:n^i  '^''rN  rrc   — 'N^  "rp  "^^n  -jrp  t:''C'«  nby^o  rib:?»5 

.  "b  "i:"'DT'  f>"'n  m2"CT 


III 

1. 

Lettre  cl'Isaac  Abravanel. 

Ms.  du  British  Muséum,  Add.  37.12!),  f-  t89  b. 

.''N"»?  V'ir;  imiN  bx 

-;::wX  -i"»:??:  '^nrn  nnpbn::  ^itn  qsrn  bnr:  'n  -^r-rb-:   sj^pr:  Nif  ■'ir 
T-i-«   T>nN   *':dw   nrm:72-iN3  î»^a  n^-^rnbns  n?2  mbr  -"^  ,rî3-ip3  -^^rïM 
■'b  riT   .  nm   "^b-^  v:rb  'n  ins  •'r-:?:    nri-r:  nnn  ■';e'^    wN3  'n  "fb? 

r-n:2r:  ^tovz  ']-iib  \n::o  "ti^s  j— wN  ttw::;  \-ibn2  \-2Tr'  r:"*;'::  cb-:; 
-i"is:i2  y"iN2  i:"!  ;•;  •irT'Tn  .•^n-'2  "'2"':n  ■'T'b''  *:3  t^-^rmi  \-n;a 
-,n?:T  '-5"'n  bx  ^t;?:  ,n;*C"i  m^-iD  m^^  Y-"'  z"'^-"'  "'""^  si""-' 
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^3  -nic?:i  -iT"ir73  'r:::  ^rj'  sst  .  ^-îbx":  c^m::  i^r:  tz^rrcN-irr 
-,3T  -iwN  mpr  ,r!bn"r!  b^i  nn'ir::^  Sx  TiVJ  -iv  ^nxa  Nbi  n-'-irrî 
-ji:>-;  nbnnn  ■'briN  ti:'::  rrr;  — cn  ,r:y  \n3n  -i-^^'r:  ,inm  Y-'^~ 
m^T  n^2o  nbrN  rnrEnrT:^;  ninn  ::r;b?D  "[nj^-a  c-iist:  ■'rrN  ctt; 
n:n  ^n-'Tirr'b  bn;i  -nnn  n-ioî  ni«L2n  ■'br  r"::n  n;  bx  .n-'i:::  ti" 
■^rii'b  rnbcT  ,^pi3::-i?j  -«rrs  Tinx  y^~1z  inxiijm  "^tin  rcs  n;  n-c 
•C"<wb  2Tw-'T  i;b  'n  n-T-."'  nsT  ^-^vrr  Sr::2  ï>jbT  '"vzi  t«<b  --r 
2-.p"«  in;Nn  nnm  ^;D:^  rnn  cn  irniCT  2ib"::rîT  D-i-^nr:  ai::b  -rb:* 
•:;i3lS  i^b  TwX  ,^mz'C^  y.^-^  nr-wX  r:3r«::i«  tn  ,û"'i:ir;  'j-'a::  ir-nTs 
■immn    m:3-;p    pn    ^"r^b     n-rr:    ,û''7:'^    mm-'.N  ^-\'2^y   ■'::-'3r:3 

.■'23b  cr  -;CN3i  v^si-i 
•]b-'  "Cîres  r;b*ip    c-'pn-.-:  V"N-:  ■^■':r  P3  rr-o  r;rr:w77   t-î3  •'r 
n7:-':D    "^b^    ns    r:"n33    ,y".N    sr"»-:":;::    Y-'-^'i^   ^rirv-n   c^ri'w-   "ry 


LA  FAMILLE  DE  YEIIIEL  DE  PISE  10?) 

rT?2i'u  "i7:r'  £>ib  Svir:  î^bn  J-imn^  r;-i">»r;  ,  vrci  snn  ::^n;  ra 
172:'   r-a    Sjy    ■'îimN    tn-^nKi:    ;n7ûO-3    imr:    .  ^«3    i-in"»-,!    r:a 

'-  nN  nnTr  riisDiwNT  rtD-^x  nsi/ûNb  t<<b-  û'^">:;'',-!pT  ûimn::  û-^'zrr,::! 
bi:3  Dnp73  ';"7:y3  1^  bi:?;  \y  û-iisl^jM  n3":jv-  bN-r:;-!  cinp  nN  n::»*-'; 
■•jm»  iNb?:  p  '^y  Li''i2'0'a  nbD3  ^-'X  .  -^n^ï^n  qan^n  b::3  r;7::nr; 
t^b  y^^^2  nr^s"'  nsb  m;nb  ii-i-jî-!"^  ir;»!n  ^"«n  "'a^b  -C",-!?:!  ,  nbnbn 
s-^xrjn  '^l'im  — i-^  — '::n  •:i"'wS'r;  ;nn7:  r::^*  nn  nr-nx  c'-nN)  nnbr 
nNT  r!;r:  ^ab  Sx  ai'tiîN  pnt  .  mr-n  ma-,  m-i::  -,mwN2:?:  mzy  Mb 
n;p  m::  û">r  r^5p  y-iN3  p^ii:  v^"*  V^^  "^^ûip?:  CwS-i?:  ms'ipn 
31U3  anr:^  ibn-'  bNiO'  •^;a72  û'^oïn  •^'d  ï\ii  ^'^inorii  -lOirrr  -DûStrb 
rmb;'?:-  — "^c  ibip  yina  z'i?:"^"'  m'T'Tjt  û-'rD  Nin  v:  ,vp  p:>  n:? 
rm;r  ^ip  i^b;'  nnan  pD-^r;  p;a  n^r;  ■'D  i^'^n  '^•û-'  b:^  b-^^-'T  nwa-» 
,3m  a-n  '-sn^  y-iNn  "nn.-  ><ir-;  rir  ^i<-i  ,y"iNb  y^:^r>  '— .-^ToTn  bipT 
tzi-ibsTo  û-^bai  û-'3n7D"i  o-'orîj  ibnx  "^inn  '-T:;nii  npi^r  yT^  nnc 
"IN  QT'  TiD'C^  f-ibi  0"iD  —'.in;'-'  r><b  vbr  ar.c  ,  n-r  -^b-i  û-'ïtj 
ï=i"'-i73~  ■'72  ribi'-inr;  onD  nrap  pn  ,  ir7:n  oia  '-  ^-^73  .  t;r:T' 
DwX  Tinj'b  i^wN  ûTN  "'^  y-DH^:  ^wS  !n7onn  bx  !-;DwN  p  dn  ,  a^-nN7:r; 
D^:ib5T  û-'n-iO  '  ■';'it7:t  -^in  ■•la  .  nb  n?:!:-'  «b  nTim  yip">ii  r;7D-7Nr; 
n7:  ,û-23-  ibwX  ii-ibiûi'  PNi  ,nninb,  i-^brab  -i-i7j">r!  T:;ir  inx  r:::n 
£*<:  û^-:;  nn^s  nan  /C7:\::rT  fnnn  -«luir;  Sa  yNi  rrrr::  H'-  rr^-c 
r<bD"i723  ,'^T>i:37:  n^'-i  ^,nyr;i  ,  "^-nnT:  i7ao  ■'-■'  br-  b^'  '-b  mnr 
yNT  Nin  '^pbtîb  ::D"»:î7ar;  ^■d    ,  ï-it   r:7:   ^ri  nr  r:7D  -ci-inn  bx  ']-:72 

•  r;73  n:?  riT^  n;nN 
::"-'Dn"iD  1"^  û'^"imn72  ^nbi"'o  ■'3sb  Tinbo  Tw*n  a'^-iDor:  ^2n  ■'3wS 
La'^j(n)pn3'*D  "^30  un  '^-nnD  ■^;-:  -bnN  S"t  21:3  a-»:;  [";i(p  :]a"i"'  '-im 
yiSr?:  ibàîN  ^laipmr:  ■i^  b;'  an-^N  r!;[n](p)  ^ann  par  ^b  yxi 
^an  arta  niN-ib  nn-^an  ib^  □N'^nrrb  N-^nr;  ynN3  ^PwX  "icx  ■'ainx 
'nn  ■^c-nD7:T  ^^bN72  a"'-inN  ^2:^  ^la'c:  r-cb  -^d  "^N^sn  J— ,"!n:>72  nra 
,a^S"'a^r!  Sri  rn-nnn  bjj'  ']cm73  r-i-'aa  Tir  ■iN:i7:j  ax  Sniîto:? 
12N   m?2bbT  ><^r:  min    ;  n::NT   lan   ^Tzy  r-ii\i^rT  ^nnyb  -im  -iiaT 

.\saT  "'T'  br  maT  yb:ib5;:i  a-^a-^-i:!: 
■'nx  incNi  1111  .  i7:a\a  br  m'ya7:rî  ^r^m  r-i-  -;b  t*^npi  pni:"'3 
■lanpi  r:73r;  Y>^"!p7:  bN  iNia"»  rrTon  '^■^}:bn  -^uXiCTi  ban  nibr-iïT;  an: 
nan  arr^bN  ,  an-'NitNiirm  ana  n730  ^x  r— ."'■^m  '■'pbN  t-ia-,p  "^^bx 
ï-i2-i2  aTaTr">  bN  n:3NT  ^on  m::  mana  wsan  a-^bri  .rz'b'C  --: 
']n"«ciNn7o  "^ninnN  a-^ia^"'  riob  \-n2N  nabrin-  tcn  'xm  ."rcyr^  'n 
,nN73  t^îsc"»  '^n-^nn^i  ^t  -^ba  nr  na-ia  nr>a7:b  Y''  t>^*^^'  "--  !T'2i''i 
nbr72b  nbirr;  Y'^sra  ,  m:i"w\s-,-  nî-^arr  t<bi  ab  ancjan  nn-^'-aa 
■j-ian  Nia-i  "'D  'na  b-':in  rîai-'.i:  ']n'',72Nb  narn  "^221 .  '-  ncr-^  p 
.  "jnbr?:  ^t^  br  ara   "'pi:"ir:  "^nia  ^"nc::  a"'-iar-  '■nb-'"': 


106 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


.-'   -."^x  T^r  ^-Tra  t:'^-:c  n-i-,  nc-ica  sns 


:n  H'rç-   v^-;n 


^m  cr-.r  rN?  -mr  nrcri   :r 


2. 


L'Elégie  d'Abbamare  Chalplion. 


bsw  -i?3ir;  '^im  5"«rorîb 

V2':;i  r;r  r-r^rr^  t^n  ■:;'^-i 

"ji^r^NS  nrc-«  n^T'  m-. 

bz:   vnx  Vd  tîs   ?:>  Ti\x-, 

i:nN  31-11  'rx:y  -nss  V^  br 
•jitt'pn   brin  r-3N  b=^: 
■i:7:T3  riTr  n::*^:  Nb  s:7:wX 

m2i£  r'i"'-:bu;r:  br  itt' 
ir?  rrpNi  -p^  brn   i^bx 

m:i3rr:   :.-r;   br   3"^'   cw»  N",r; 


r>'r.^-iir\  rrs 


1?:'::  bî^-^r:'^  '-  i'^*-" 
r;;?:-^   r;3n3b  p^ij:  -37 
■■^r  ■^:3b  !:-,i  3-^1  b--j 
rr.t^  ^r.vz^  ^iN  bx  -.cn  w\S' 
V   CN  "3   wiwX  "3  ';"'■;  r^b  -,?:l\"' 
nrn  xr^N   br  'r-^n:  -«r^ipi 
-,*;-  -■ 'r  b33  -wN-T  -.wiir:; 

-.-r^"  3-  b3w-:  b3  -nirr 

:r^:3n  3-,t:  r-:N  -31  br 
npN  rinr  T'zm  nj:p7:T 
iny«2-  n::n  M::3n  rv:;x-i 
-bD  ppiT)2  iTr::   "ir;- 
inbiaD  riiiD  "jT^b  :-,23 

•  Daniel,  iv,  20. 


^-•w-:  nrr  rin^s  :vb  ï^îin 

-iP3b    ■'33    l'^b"'   3-ir3 

•'"T  ■'b3  -r  ■'m  [■'l'D'r;;  rrrp 
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1T"^n^  s-31  irp3;  Si^ 

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LA  FAMILLE  DE 

■^rN2  r;nr   n^r;  nnx  tcn 
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*  Nedarim,  40  c 
■ï  II  Sam.,  n,  26. 
^  Nombr.,  V,  14. 


YEHIEL  DE  PISE 


107 


15  "[ni  CiC  -^2  ïï-^N  32t: 
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ni-ii'i::  VjD  2"»:i"'br2  2b 
"limcN  rtor  y"^?2N  -i'rp2 

'  Eu  prose  et  eu  poésie,  Isaïe,  xxvn,  3 
et  Lx,  21. 

*  Ps..   XLVIII,  15. 

*  Lév..  I,  4. 

*  Haqii/a,  II,  7. 
5  Hofiiga,  ISA. 


108  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

2:^1:  -^^-n  nnin  "^iTob;:'!?  'm^br  i:3n3  -o  -irra 

Nipsi  ipr  i;n-  rc-c  "-i*^':  b-  VP'w  [N]n]bi  r;T3  [NKDb 

^Cr^bc  PNi  ûr5:b  ayc?:-  rairx-:   -,b-»-:N   r.'jrr^  nh 

ï-îbns   bN  NiDb  r-ny-'i  ^-'^  Nb  m-,  n-np  b:7:i 

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]^r.",  "pzj:  z-iy73T  h-tt: 

'  Dieu,  I  Sam.,  ii,  2. 
*  Lévit.,  XI,  22.  1  Ketoubot,  104  a. 

'^  HonUin,  44  A.  s  Ps.    xxiii,  o. 

*  Daniel,  iv,  9. 


-nx^z  r;»nrr   -,rpTj:  -nr   "- 


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LA  FAMlLLli  DE  V 

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prn:  b^  ■'r  -^tbfz''   pn^b  ■;-: 

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a-i'^c:  "';a:a3  rTniN 
iTinD  Nb?a  m-ip-»  mNr 
a*^'::np  v^  i?:-  p-nn  V^'"!^ 
m:2T  biisi  Y'"!!^  bx-i-:'»:; 
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2-::nb  a:^   nx*:;  "i-'-nn  "'t:-^-: 
T'-:!::!  ni::  T^nx  nrn  yr?: 

Ti^^Tib  an::  ni3D  nod 
arr^sia  ya  n^nn  aib-::  »-ii::? 
'T«":n  r;^r:"'  1TwN-i   wnpT:   aip» 
an-'nwS  aip7:n  a^Nib):  -^j^n 
mma  nby-3   2-7  mine:: 
an  bwS-^,"w"'b  ii-iDT  ""r^wS' 
»m3N  n'wy?:  '-  n"ij:-i3 
pin  pmb  a'^:2  icr^ 
mn-'i:  b>'  aipbi  niriD  ba 
pnn  pnc   a"'?:r  "rr^r,  -^-ni 
•i^2'0  ^j-na  ■':?:"'r;  -nfzy 
pni:m  n-:N'  V"  l'i"^ 


EHIEL  bE  FISE 


109 


niNs::  "'2X57:  TwS   ■^rr'N-i 

ariri^!?!  "j-mr   liTi:"» 

mN"i"«a;:  a-'K'^'-CT:  a-'rDixr; 

anbo?::  a"^2aa  •'r\N-, 
~ù2'c:i  r;-i:*a  ar  r:nb: 
amn-nx  1102:"'  a:;  a-iin 
1^:?  n-T^  "c?:"::   ■"n-'wS" 
mn'c::  y::n  a-nx  nbiaT 
T:ib  Nb  •o-'Nai  -nnx  Tni; 
"iinn  170  nb-:;  ^xb?:  \-i\s-i 
p-iT  biibsb  m;"'27:   T!-« 
-iin27:   -1"'^  ba  br  "«ax  ■'bn:;:: 
p-i2a  r^N:!:^  rioio  ti-'X-. 
nsm?:  aTibx  ni-n 
p-r:i  r|:2r«a  ban  a-'?:2 
rsbir::  y-iNn  tt'^-î 
"TipT:  pN  as  ir!2T  nnn 
n22"ir-:  r;7:ip«2i  prTr 
■'.''pr,^  -VTZ'-i  -iip?:  \-i"'N- 
m'j-  ■'i:?  H"'?:-'::  ■t^2 
-:"'P"'  "wi:sî   m?:  br  qa  iNn?:'^ 
"i-iy  in-i-inî*  ■'h  ba  ^-^"■^<-l 
np-'a  'j-'b'^  b2  a"îN  "raiN 
rnii:-  nmT  'n  '^xbT: 

•n-n::   n-j:t'  ]r^n  ■^p-'N-, 
-i7:;3  n^T  nriDin::   nba 
'--,2\a  PNT  Bibnn  -ion?:  nx 
-iT:  "'b  -!?:  a"ib"::bT  \-i7:p  -^tn 
rrii'r;  "^'in-:  nps;  17:  ^-^:2 
-17::   in-^n  ■''mn  ■'j^n 
i-n'~  -:d   -^2  ■'w2:  prrn  -17: 
a^2i2:  ^-^ina  -^t^  id-i 
-rn^na  i:n"'i  'ro"* 
j-iaiToa  ib   '-1-  -'im  ii-.x  ■'in 
Li'^TZ'^r,  ba  "«ab  ■':■':•  T'- 
avala aip7:n  s-p:  "jab 
a"'7:"ri;27:  bi-p  "'■".nx  r'':CwS- 
-13S"'  a"'b"'r  cnp  ÏT^r/rx 
a"'"':in:  —12-  a'^a-::  a"'"a~ 


s  Ez.,  xxviii,  14. 

'•  Allusion  à  Exod,,  xxxix,  9. 


»  Juj<.,  VII,  1o. 

'  Nom.,  xsxiii,  24. 


no  HEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

m:?n   n-,j:  rr.z-z   -."Z-^  -,7:Vj::  t-x  Z'çizr,  "^n-a 

a^^nirm  rrir:  ■i"':2  "rr?:  -iX^rr;?  ^''rn  -j:;  ":j:' 

min  ■'rc  i\-^"i:2b  s;  Nw-i  17:31^2  -b  n-tr-  •^-r.: 

2*7:1-7:  Vx— w"'  zy  v^Tip  -.x:  sn  -=  r,y~,  r-.T;  "^-i-in 

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.  .  .  "1*:  x-N  '■;"  csi-irn  Zw",''   *'::   -N"* 

[A  suivre. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN 

AU  DIX-NEUVIÈME  SIÈCLE' 


I 


LES  JUIFS  SOUS   LE  GOUVERNEMENT   DU  SULTAN  MAHMOUD   II 

(1808-1839). 

La  journée  du  35  juin  1826,  où  le  corps  des  Janissaires  fut  dé- 
truit par  le  sultan  Mahmoud  II,  marque  une  (^re  nouvelle  dans 
l'histoire  des  Juifs  d'Orient,  la  classe  la  plus  malheureuse  des 
rayas.  Caries  Janissaires  avaient  fait  beaucoup  de  mal  à  nos  mal- 
heureux coreligionnaires.  Au  moindre  prétexte,  ils  allaient  mettre 
à  sac  les  quartiers  juifs.  Du  témoignage  des  écrivains  les  moins 
impartiaux,  presque  tous  les  grands  incendies  qui  éclatèrent  à 
Constantinople  durant  plus  de  trois  siècles  prirent  naissance  dans 
les  quartiers  juifs,  où  les  Janissaires  les  allumaient  sans  aucun 
scrupule. 

Pourtant,  à  en  croire  les  récits  de  témoins  oculaires,  contempo- 
rains du  règne  de  Mahmoud  II,  les  Juifs  consentaient  souvent,  à 
leur  corps  défendant,  il  est  vrai,  à  devenir  les  amis  des  Janis- 
saires. Il  n'était  pas  rare,  en  effet,  de  les  voir  fraterniser  ensemble 
dans  l'ivrognerie  et  la  débauche.  Mais,  en  général,  la  disparition 
des  Yénl-Tchérl  fut  un  véritable  soulagement  pour  les  Israélites. 
Les  survivants  de  l'ancienne  génération  se  souviennent  encore  de 
la  fumée  qui  enveloppait  les  collines  de  Stamboul  le  jour,  où, 
d'ordre  impérial,  le  feu  avait  été  mis  aux  casernes  de  cette  solda- 
tesque. Les  Juifs,  réunis  sur  les  hauteurs  de  Ilaskeuy,  suivaient 

•  [Gel  article  est  extrait  d'uu  travail  très  considérable,  rédigé  à  Constaiiliuople  par 
un  professeur  de  l'Alliance  Israélite.  L'auteur  a  eu  à  sa  disposition  de  nombreux 
documents  judéo-espagnols  que  Ton  ne  saurait  trouver  ailleurs  et  des  traditions  d'uu 
caractère  parfois  légendaire,  mais  on  comprendra  que  les  écrits  des  luslorieos  occi- 
dentaux ne  lui  aient  pas  tous  été  accessibles.  —  Ri^d.] 


1!2  RIÎVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

avec  anxiété  le  drame  terrible  qui  se  déroulait  sur  la  place  de  l'Ât- 
Méïdan.  Beaucoup  de  Janissaires  déguisés  vinrent  même  se  réfu- 
gier dans  des  maisons  juives. 

On  attribue  à  Mahmoud  II  un  mot  célèbre  qu'il  aurait  prononcé 
vers  la  fin  de  sa  vie  :  «  Nous  désirons,  aurait-il  dit,  que  les  Musul- 
»  mans  ne  soient  considérés  comme  tels  que  dans  les  mosquées,  que 
»  les  Chrétiens  ne  soient  chrétiens  que  dans  leurs  églises,  et  que 
y>  les  Israélites  ne  soient  Israélites  que  dans  leurs  synagogues.  Je 
»  veux  que,  hors  de  ces  lieux,  où  tous  rendent  également  hom- 
»  mage  à  la  divinité,  ils  jouissent  des  mêmes  droits  politiques  et  de 
»  ma  protection  paternelle.  " 

Néanmoins,  soit  qu'il  lui  ait  été  impossible  de  rompre  complète- 
ment avec  les  anciens  préjugés,  soit  pour  des  raisons  fiscales,  soit, 
enfin,  à  cause  des  rapports,  parfois  trop  amicaux,  des  Israélites 
avec  les  Janissaires,  ni  Mahmoud  II,  ni  ses  ministres  ne  se  mon- 
trèrent très  bienveillants  pour  les  Israélites. 

Dès  l'avènement  de  Mahmoud  II  180^),  Baïrakdar-Pacha  disait 
des  Juifs  qu'ils  étaient  «  les  plus  vils  des  raj^as  '  »,  les  accusant 
de  se  livrer  à  un  agiotage  honteux  dont  les  charges  de  l'Empire 
étaient  l'objet. 

En  1830,  par  suite  de  la  pénurie  du  Trésor,  l'impôt  de  capitation. 
le  Kharadj,  fut  porté  de  quatorze  à  trente  piastres  *.  Deux  faits 
où  le  gouvernement  impérial  ne  fut  absolument  pour  rien  causèrent 
aussi  de  regrettables  préjudices  aux  Israélites.  Noi^s  voulons  par- 
ler de  l'afïaire  Farhi  à  Saint-Jean-d'Acre  et  de  la  pendaison  du 
patriarche  Grégoire  à  Constantinople. 

Les  Farhi  sont  une  des  anciennes  familles  de  Damas,  dont  les 
ancêtres  n'avaient  probablement  jamais  habité  en  Espagne.  En 
1SI8,  un  membre  de  cette  famille,  Ilaïm  Farhi,  résidait  à  Saint- 
Jean-d'Acre.  C'était  un  homme  très  pieux,  très  riche  et  sur- 
tout très  infiuent  auprès  du  gouvernement  ottoman.  Mahmoud 
avait  une  telle  confiance  dans  l'intégrité  et  le  jugement  droit  de 
cet  homme,  que  c'était  sur  ses  rapports  que  le  gouvernement 
destituait  ou  nommait  le  Pacha  de  Saint-Jean-d'Acre.  Par  égard 
pour  Farhi,  les  pachas  qui  se  succédaient  dans  ce  poste  dis- 
pensaient les  Israélites  d'Acre  de  la  capitation  ainsi  que  de  toute 
autre  taxe. 

Au  commencement  de  ce  siècle,  Ahmed  Djezaïr,  celui  que 
les   Français    surnommèrent  Ahmed   le    Boucher  ou    le    Cruel, 

•  La  Jonquière,  Turquie,  \>.  407. 

*  Ed.  Entrelharrit,  La  Tnnjuie  et  le  Tanziinat,  p,  25. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN    AU  XIX^  SIÈCLE  tl3 

usurpa  le  pachalik  de  Saint-J^an-d'Acre.  Une  fois  maître  du 
pouvoir,  il  perdit  de  rf^putation  Farhi  auprès  des  habitants; 
il  alla  jusqu'à  1  insulter  publiquement  et  lui  infligea  la  dernière 
des  humiliations  en  lui  crevant  un  œ  1  et  en  lui  coupant  le 
bout  du  nez.  A  la  mort  d'Ahmed  Djézaïr,  ses  fonctions  furent 
confiées  à  Suleyman  Pacha,  qui,  vers  1818,  fut  remplacé,  à  son 
tour,  par  Abdullah-Pacha. 

Fils  d'un  bey  mnrt  j^une,  Abdullah  avait  été  adopté  dans  son 
enfance  par  Haïm  Farhi,  qui  éleva  le  jeune  musulman  avec  une 
sollicituile  toute  patnrnelle  et  réussit,  plus  tard,  à  le  faire  nommer 
aux  fonctions  élevées  qu'il  exerçait.  Docile,  dans  les  premiers 
temps,  aux  conseils  de  son  bienfaiteur,  Abduilah  songea,  dès  la 
seconde  année,  à  secouer  cette  tutelle.  Les  reprochf^s  que  Farhi 
se  permit  alors  d'adresser  à  son  ingrat  entant  d'adoption  causè- 
rent la  perte  du  vieil  Israélite.  En  effet,  la  vf^ille  du  mois  d'Eloul 
de  l'année  5578  de  la  Création  (1818),  des  émissaires  d'Abdalah  se 
rendirent  chez  Farhi  et  l'étranglèrent  à  la  façon  orientale,  en  lui 
passant  le  lacet  traditionn^^l  autour  du  cou. 

Le  lendemain,  tous  les  biens  de  la  victime  furent  confisqués  par 
le  Pacha,  qui  défen<lit  même  d'ensevelir  le  cadavre;  on  l^j^ta  à  la 
mer.  Tous  les  Israélites  d'Acre,  de  Safed  et  des  environs  furent  em- 
prisonnés jusqu'à  ce  qu  ils  eussent  payé  les  impôts  arriérés  dont 
ils  avaient  été  dispensés  jusqualors.  Ces  malheureux  durent 
vendre  jusqu'aux  objets  de  première  nécessité  pour  acquitter  les 
redevances  exigées  par  le  pacha. 

A  ia  nouvelle  de  l'assassinat  de  Haïm  Farhi,  ses  trois  frères, 
Salomon,  Raphaël  et  Moïse,  qui  habitaient  Damas,  écrivirent 
aux  Israélites  influents  de  Constantinople,  notamment  à  TchMébi 
B^hor  Carmona,  pour  le  pri^'r  de  demander  lustice  au  sultan. 
Carmona  obtint  du  Cheikh-ul-Islam  un  fetva  par  lequel  le 
gouverneur  de  Damas,  celui  d'Alen  et  deux  autres  pachis  furent 
tenus  de  prêter  mainforte  aux  trois  frères  Farhi  contre  Abilul- 
lah  Pacha.  Au  reçu  du  fetva  ces  pachas  vinrent  mettre  le 
siège  devant  Acre.  Le  blocus  durait  depuis  quatorze  mois,  et 
la  lamine  était  devenue  telle  que  les  assiégés  allaiHnt  imman- 
quablement se  rendre,  lorsque  Abduilah  conçut  le  projet  de  se 
débarrasser  d3  Salomon  Farhi,  le  plus  acharné  de  ses  ennemis, 
en  le  faisant  poignarder.  Les  deux  autres  frères,  découragés, 
quittèrent  le  champ  de  bataille  et  retournèrent  à  Damas.  Il  était 
temps,  d'ailleurs,  car  les  pachas  qui  avaient  e'ubrassé  la  cause 
des  Farhi,  fatigués  de  ce  long  siège,  ne  combattaient  i-lus  qu'à 
contre-cœur.  D'autre  part,  Abduilah  s'était  adressé  au  l'ameux 
Méhémet  Ali,  d'Egypte,  le  priant  d'intercéder  en  sa  faveur  auprès 

T.  XXVI,  N»  51.  8 


114  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

du  sultan  afin  qu'on  levât  le  siège.  Au  reçu  de  la  lettre  de  Mëlié- 
met-Ali,  Mahmoud  se  mit  en  colère,  car  tout  cela  s'était  passé  à 
son  insu.  Sur  son  ordre,  le  cheikh-ul-islam  fut  exilé  pour  avoir 
signé  le  fetva.  Quant  à  Tchélébi  Behor  Carmona ,  le  souverain 
fut  vivement  irrité  de  son  intervention  et  le  lui  fit  sentir  quelques 
années  plus  tard  ' . 

L'exécution  de  Grégoire,  patriarche  grec  de  Constantinople, 
fut  indirectement  la  cause  du  massacre  de  plusieurs  milliers  de 
Juifs.  Voici  ce  qu'ont  rapporté  sur  cet  événement  quelques  témoins 
oculaires-.  En  1821,  les  Grecs  insurgés  avaient  capturé  dans 
l'Archipel  un  vaisseau  venant  de  la  Mecque  et  avaient  maltraité 
les  passagers,  le  mollah  de  la  Mecque  et  son  harem.  Ces  cruautés, 
exercées  sur  des  femmes  enceintes  et  sur  un  vieillard  vénéré  pour 
son  haut  rang  dans  la  magistrature  ottomane,  excitèrent  au  der- 
nier degré  l'indignation  des  musulmans.  Le  27  avril  1821,  premier 
jour  de  la  Pâque  chrétienne,  le  Grand-Vizir  Benderli-Ali-Pacha 
se  rendit  chez  le  Patriarche  de  Fanar,  suivi  d'un  bataillon  de  Ja- 
nissaires. Par  l'ordre  de  Benderli,  le  Patriarche  fut  saisi  et  pendu 
en  présence  de  la  foule,  à  la  porte  de  son  palais. 

Aux  assistants,  composés  surtout  de  Grecs,  étaient  venus  se 
mêler  quelques  Juifs,  que  la  curiosité  seule  avait  attirés.  Benderli- 
Ali-Pacha  les  ayant  remarqués ,  les  interpella  en  ces  termes  : 
«  Soyez  les  bienvenus  [hoche  gueldeniz],  vous,  Juifs  I  Le  voilà 
»  pendu,  votre  ennemi  et  le  nôtre  1  Trainez-le  à  la  mer;  je  vous 
»  l'ordonne.  » 

De  gré  ou  de  force,  trois  Israélites  dont  la  chronique  a  conservé 
les  noms:  Montai,  Bitchachi  et  Lévy,  traînèrent  le  cadavre 
jusqu'au  rivage  de  la  Corne  d  Or.  Ce  simple  fait  donna  naissance 
à  une  légende  absurde.  Les  Grecs  firent  d'abord  circuler  le  bruit 
que  les  Juifs  avaient  inspiré  au  gouvernement  l'idée  de  ce  meurtre. 
Puis,  quand  cette  nouvelle  arriva  en  Grèce,  elle  avait  été  tellement 
exagérée  qu'on  racontait  que  c'étaient  les  Israélites  de  Gonstanti- 
nople  qui  avaient  pendu  le  Patriarche.  On  estime  à  5,000  le 
nombre  des  Juifs  massacrés  à  cette  occasion,  en  Morée,  par  la  po- 
pulace grecque.  Il  se  trouve  encore  des  historiens  grecs  qui  rap- 
portent cette  histoire  avec  des  réfiexions  peu  obligeantes  pour  nos 
coreligionnaires. 

Trois  familles  Israélites  jouèrent  un  rôle  important  sous   le 

'  Ce  récit  est  extrait  du  Maassé  Si-eti  Israël,  ouvraf^e  judéo-esp.,  page  68. 
*  Ces  souveoirs  oui  été  mis  par  écrit  par  nous,  il  y  a  sept  ans. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX*  SIÈCLE  115 

règne  du  Sultan  Mahmoud  :  ce  furent  les  Gabaï  (Yéhazkel  Ga- 
baï),  les  Adjiman  et  les  Carmona.  Toutes  trois  eurent  une  fin 
tragique. 

Yéhazhel  Gabaï,  surnommé  Yéhazkel  Bagdadli,  était,  au  com- 
mencement de  ce  siècle,  le  plus  riche  banquier  de  Bagdad.  Vers 
1811,  le  gouverneur  de  cette  ville,  Suleyman-Pacha,  ayant  refusé 
de  fournir  de  l'argent  et  des  troubles  au  Sultan  Mahmoud,  fut 
déclaré  rebelle,  et  on  lança  contre  lui  un  mandat  darrêt.  Plusieurs 
émissaires  secrets,  qui  étaient  venus  de  Constantinople  à  Bagdad, 
furent  successivement  dépistés  par  Ips  espions  de  Suleyman-Pacha, 
qui  les  fit  mettre  à  mort.  L'ex-réiss-eff^-ndi  Tlialat  dressa  alors  un 
piège  à  Suleyman,  en  se  servant  dans  ce  but  de  Yéhazkel,  Cette  fois, 
Suleyman  fut  pris  et  Thalat-effendi  put  envoyer  dans  la  capitale  la 
tête  du  rebelle. 

Arrivé  à  Constantinople,  Yéhazkel  obtint  la  protection  du  favori 
impérial,  Hallet-Effendi,  et  devint  banquier  de  la  cour  (Saraf- 
Bachi).  Il  acquit  dès  lors  une  grande  influence.  Destitutions  de 
ministres,  nominations  à  des  postes  importants,  condamnations, 
pensions,  on  pouvait  tout  obtenir  par  son  interméliaire,  car 
Hallet-Effendi  ne  refusait  aucune  faveur  à  son  prot(^gé.  Celui-ci 
se  promenait  dans  la  ville  à  cheval,  toujours  escorté  d'une  garde. 
Il  inspirait  à  la  foule,  par  ses  fonctions  ainsi  que  par  son  carac- 
tère digne  et  sérieux,  autant  de  terreur  que  les  Janissaires.  A 
cette  époque  déjà,  les  Arméniens  commençaient  à  prendre  une 
grande  influence  auprès  du  gouvernement,  et  Juifs  et  Arméniens, 
ces  deux  classes  de  rayas  qui  se  méprisent  encore  mutuellement, 
se  détestaient  déjà  à  cette  époque. 

Par  son  influence,  Yéhazkel  avait  fait  mettre  à  mort  le  chef  de 
la  famille  Allah-Verdoglou,  ainsi  que  deux  de  ses  frères  qui  rem- 
plissaient des  fonctions  importantes  à  la  Sublime-Porte.  Tous 
trois  avaient  été  pendus  à  la  porte  de  Validé-Han  à  Stamboul. 
Yéhazkel  était  parvenu  même  à  faire  exiler  le  fameux  Cazaz- 
Arétoun  (Artin),  également  Arménien,  qui  occupait  le  poste  élevé 
de  directeur  de  l'Hôtel  des  Monnaies. 

Rappelé  de  l'exil  au  bout  de  quelque  temps,  Cazaz-Arétoun  jura 
la  perte  de  Yéhazkel.  Il  appela,  dans  ce  but,  l'attention  du  sultan 
Mahmoud  sur  la  fortune  colossale  du  Juif.  Profitant  de  la  disgrâce 
où  venait  de  tomber  Halet-Effendi,  Cazaz-Arétoun  réussit  par  de 
perfides  insinuations  à  faire  envoyer  son  adversaire  en  exil  à 
Adalia  (Asie  Mineure),  où  on  le  mit  bientôt  à  mort  (1820-1826}, 
Depuis  cette  époque,  les  Arméniens  lisent,  dit-on,  tous  les  ans 
dans  leurs  églises  en  souvenir  de  la  disparition  de  leur  ennemi 
acharné  un  récit  parodié  de  l'histoire  d'Esther,  récit  où  Yéhazkel 


116  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

joue  le  rôle  d'Aman,  Cazaz-Arétoun  cnlui  de  Mardochée,  et  la 
femme  du  cëlèbre  Arménien  celui  d  Esther*. 

Lps  Adjiman.  — Plusieurs  membres  de  la  famille  Adjiman  fu- 
rent pen  laitt  longtemps  attach'^s  au  gouvernement  ottoman  en 
qualité  de  trési'riers  des  arm^^ps  et  iiitenda'its  g/'néraux  du  corps 
des  Janissaires.  Ils  portaient  le  titre  de  Odjnh-  Baziriani  ou 
Odjah  Snrnfi  D-^jà  du  temps  de  Sélim  III  ^1789  1808),  le  vieux 
Mi^ir  A'Iiiman  avait  pu,  par  son  influence,  f^ire  élever  au  rang  de 
S'iha  Bachi  un  simple  Janissaire.  Oa  ne  sait  pour  quel  motif 
Adjiman  s'attira  plus  tard  la  colère  de  ce  même  fonctionnaire.  Un 
jour  qu'Adjimaii  était  dans  l'antichambre  du  Saka-Bactii,  celui  ci 
l'invita  à  une  audience  pour  parler  d'affaires  Adjiman  se  rendait 
auprès  du  ministre  par  un  ciuloir  étroit,  quand  tout  à  coup  il  se 
sent  t  saisir  à  la  gorge;  en  un  clin  d  œ  1,  le  fatal  lacet  eut  ac- 
compli son  œuvre  :  Adjiman  était  étranglé. 

Mf^ir  fut  remplacé  dans  ses  fonctions  successivement  par  Yankov 
et  Baruch  A'ijiman,  deux  frètes,  qui  eurent  également  une  fin 
traifique.  Enfin  le  dernier  fonctionnaire  ne  ce  nom.  Isaïe  A'ijiman, 
fut  etrang'é.  p;ir  ordre  supt^rieur,  sous  le  règne  du  sultan  Mah- 
moud II,  après  le  massacre  de»  Janissaires. 

Les  Carmona-.  —  Cnrmonn,  ou  mieux  encore  Tchélébi  Bf^hor 
Carmona,  fut  assurément,  parmi  les  trois  familles  dont  nous  ve- 
nons de  parler,  l'homm^  qui  joua  le  plus  grand  rôle  sous  le  règne 
du  sultan  Mahmoud  II.  Possesseur  d'une  immense  fortune,  cet 
Israélite  céb  bre  portait  le  titre  de  Schipichi-BascJd  ^  Ainsi  que 
Yéhnzkel  Gabaï  et  Adjiman,  dont  il  était  l'ami,  Carmona  rem- 
plissait les  fon«tions  de  banquier  de  la  Cour,  ou  plus  exactement 
celles  de  fermier-gt^néral.  Carmona,  en  sa  qualité  de  Juif,  avait 
comme  adversaire  l'Arm^^nien  Cazaz-Ar>^touii. 

En  L*<2fi,  apri^s  la  destruction  d^^s  Janissaires,  Carmona  restait 
comme  un  vestige  vivant  de  la  milice  disparue  avec  laque  le  il 
avait  entretenu  les  plus  cordiales  relations.  La  vie  du  Juif  ne  tenait 
plus  qu'à  un  cheveu  :  Carmona  devait  irrévocablement  succomber 
SO.JS  la  moindre  calomnie.  Ce  fut  l'implacable  Cazaz-Arétoun  qui 
se  chargea  de  ce  rôle.  Au  cours  d'un  de  ses  entretiens  avec  le 

'  Bien  des  gens  croient  à  celle  légende.  Que  cette  cérémonie  soit  tombée  ou  non 
en  désuétude  aujourd'liui,  il  est  probable  qu'elle  lut  célébrée,  du  moins,  à  l'époque  où 
se  produisit  cet  événtmeui  tragique. 

*  Les  Carmona  sont  dongiue  espagnole.  Il  existe  en  Espagne  une  ville  portant 
ce  nom. 

*  Mot  à  mot  :   «  Fournisseur  en  chef  dalun.  » 


LES  JUIFS  DE  L'KMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX'^  SIÈCLE  117 

Sultan:  «  Savez-vous,  Padicliâli,  lui  dit-il,  que  vous  partagez  votre 
pouvoir  avec  un  maître  non  moins  puissant  que  vous  ?  —  Qui  donc 
est  cet  impudent?  s'écria  le  Souverain.  —C'est  le  Scliaptclu- 
Bachi,  reprit  Arétoun.  —  Qu'on  le  mette  à  mort!  »  répondit  le 
Sultan. 

Garmona  habitait  dans  un  village  du  Bosphore  ,  à  Courou- 
tchesmé.  Son  vaste  conac  était  situé  sur  le  bord  de  la  mer.  Un  ven- 
dredi soir,  au  moment  où  toute  la  famille  réunie  célébrait  la  fête 
du  Sabbat,  on  a()erçut  de  la  fenêtre  une  barque  à  douze  rameurs. 
Ce  n'était  pourtant  pas  la  première  fois  que  la  sultane  validé 
transmettait  des  ordres  au  banquier  juif  à  des  heures  indues  de 
la  nuit.  Cependant,  pressentant  un  malheur,  les  Carmoiia  atten- 
dirent les  visiteurs  avec  anxiété  On  vit  e  trer  bi-ntôt  au  conac 
deux  nègres  qui  demandèrent  à  voir  Tchéiébi-Béhor  Carmona. 
On  raconte  que  le  trère  cadet,  Hezkia  Carmona,  s'étant  présenté 
le  premier  et  ayant  décliné  son  nom,  les  nègres  se  dirigèrent  vers 
l'aîné.  Ils  1  étranglèrent  avec  le  cliâie  qui  lui  servait  de  ceinture, 
enve'oppèrent  le  cadavre  dans  une  natte  d'osier  et  retendirent 
devant  la  porte  du  couac.  Le  lendemain  matin,  la  sultane  validé, 
qui  avait  beau'-oup  d'estime  pour  Tchélébi-Bolior  et  avait  appris 
sa  mort,  se  rendit  à  Couroutchesmé,  où,  saisie  de  pitié  à  la  vue  du 
cadavre,  elle  fit  procéder  à  l'intiumation. 

Dès  que  la  triste  nouvelle  se  répandit  dans  la  ville,  —  c'était  un 
samedi  matin,  —  ce  fut  un  cri  d'angoisse  dans  toute  la  com- 
munauté israt^lite.  Tous  les  Juifs  valides,  jeunes  gens  et  vieiil-.rds, 
se  rendirent  en  foule  au  Bosphore  pour  assister  aux.  funérailles. 
Toute  la  communauté  prit  le  deuil,  et  la  semaine  fut  consacrée  au 
jeûne  et  aux  prières.  Quelques  jours  après,  le  frère  du  défunt, 
Hezkia  Carmona,  fut  exilé  par  ordre  du  Gouverneiiient.  Le  sou- 
venir de  ce  meurtre  a  été  transmis  aux  générations  futures  par 
quelques  strophes  touchantes,  malgré  leur  forme  naïve.  Encore 
aujourd'hui,  après  trois  quarts  de  siècle,  des  personnes  pieuses 
chantent  sur  un  ton  plaintif  ces  couplets  le  soir  de  l'anniver- 
saire de  la  destruction  du  Temple  (  Tischa-Beab),  faisant  coïn- 
cider ainsi  la  perte  de  ce  bienfaiteur  Israélite  avec  la  disparition 
du  Sanctuaire. 

Voici  ces  strophes,  transcrites  du  judéo-espagnol  en  caractères 
latins. 

Ajuntemos  mis  hermanos  Banim  Yethomim*  quedimos 

A  cantar  esta  endecha  Como  huerfanos  sin  padre, 
Porque  mos  corto  las  manos 

El  Uio  en  esta  echa.  »  Mots  hébreux  :  enfants  orphelins. 


U8 


REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


Los  ojos  al  Dio  alce'mos 
Que  de  mas  mal  mos  guadre. 

Tchëlébi  '  Béhor  Carmona, 
Afamado  por  el  mundo 
De  los  Judios  corona, 
y  Adiman  el  segundo. 

De  ve'er  como  Io3  mataron 
A  cada  imo  de  una  muerte, 
De  los  ojos  mos  saltaron, 
Sagrimas  como  la  fucnte. 

Echado  en  la  cama, 
Para  ahogar  lo  viiïeron, 
Que  cosa  es  esta  flama  ? 
Ni  ellos  lo  supieron. 

Venga,  my  senora  madré. 
Que  me  bese  y  que  me  abrase, 
Presto  que  no  se  detadre, 
Que  no  quede  sin  contenlarse. 

Zabit',  por  toda  la  casa, 
Como  fortuna  capitana 
Su  madré  se  quema  en  casa 
^laùiando  por  la  ventana. 

Hazino  no  estuvites 
Be'hor-atchi  *  my  preciado 
En  subito  me  te  fuites, 
Sin  culpa  y  sin  pccado. 

Todo  el  mundo  lo  lloruron 
Por  que  era  vauy  amado, 
De  los  ojos  me  lo  quitaron 
Sin  culpa  y  sin  pecado. 

Lloremos  y  indecbemos 
Por  el  mal  que  mes  vino 
Si  mil  afios  biviremos, 
No  mos  sale  del  tino. 

Cuando  à  la  madré  la  quitaron 

Del  conac  afuera 

Por  delanlre  la  passaron, 

Para  que  tal  senor  echado  viera. 

'  Mot  turc  :  Seigneur. 
'  Mot  turc:  la  police. 
*  Diminutif  de  Béhor. 


La  lagrima  no  mos  se  enchuga 
Ni  de  noche,  ni  de  dla 
De  boltar  y  veer  que  nos  manca 
Lo  bueno  de  la  Juderia 

Muncho  sospiro  y  ancia 

Y  ayuno  y  endecba 
Mos  vino  à  la  Juderia 
Mas  y  mas  à  la  compania 

No  bavia  mas  que  este  bueno 
En  la  Juderia  entera 
Mo  lo  quilo  el  Dio  presto 

Y  lo  écho  en  la  lierra. 

Sudores  de  la  muerte 
Travo  el  por  hacer  heschbon  ' 
Mischné-  de  tierra  le  mando 
Grande  Albon  ^  le  travo. 

Od  *  sovre  esta  angucia 
Lloremos  y  endechemos, 

Y  alos  cielos  travemos, 

Y  demandemos  justicia. 

Por  el  haber^  de  la  Puerta...  ? 

Gracioso  y  piadoso; 

De  que  fue  esta  rebuelta 

No  tuvimos  reposo. 

Sédacoth  que*  este  dava 
En  el  mundo  no  havia, 
A  todo  el  mundo  hartava 
Mas  y  mas  à  la  juderia 

Cuando  fue  escapado  del  Heschbon^ 
Que  salio  oïgoun^ 
Al  cavo  fue  ahogado 

Y  su  hermano  soursoun  ' 


'  Mol  hébreu  :   compte,  calcul, 

'  Mot  hélireu  :  miuistre. 

3  Mot  hébreu  :  peur. 

*  Mot  hébreu  :  encore,  de  plus, 

5  Mot  turc  :  avis,  nouvelle. 

«  Mot  hébreu  :  aumônes. 

'  Mot  hébreu  :  compte. 

^  Mot  turc  :  convenable. 

'  Mot  turc  :  en  exil. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX''  SIÈCLE  119 

Rogemos  al  Podcroso  M  MaschiaU'  lo  veremos 

Que  en  paz  mos  venga  presto  '  Acintado  en  su  sia 

Y  ternemos  grande  gozo  „..,.,.,!,  .    t^    i 

,  r,    ,    ;      ,,-.  j       u  î  1  Tepbilotli*  à  nuesto  Padre 

Con  el  Belh-ha-Mikdasch  *  puesto        ^''''" 

Que  mo  lo  aga  alegna 

Chélamim  '  allégarémos  Presto  que  no  se  detadre 

Dia  cada  dia  Y  mos  amostre  maravilla. 

TRADUCTION 

Réunissons-aous,  mes  frères, 
Pour  chanter  celte  complainte, 
Car  dans  celte  circonstance, 
Dieu  nous  a  tranché  les  mains. 

Nous  voilà  devenus  orphelins. 

Pareils  à  des  enfants  sans  père. 

Levons  les  yeux  au  ciel, 

Pour  qu'il  nous  protège  d'un  plus  grand  malheur. 

0  Seigneur,  Béhor  Carmona, 
Si  renommé  dans  le  monde  ! 
0  vous,  couronne  des  Juifs  1 
Et  vous,  Adjiman  le  second  ! 

A  voir  comme  on  leur  a  infligé 

A  chacun  une  maie  mort, 

De  nos  yeux  ont  jailli 

Des  larmes,  comme  d'une  fontaine. 

Encore  couché  au  lit, 
On  est  venu  l'étouffer  : 
Qu'est-ce  donc  que  cette  bagarre? 
Eux-mêmes  n'en  savent  rien. 

Viens  donc,  ma  chère  mère  :  disait-il, 

Baise-moi,  embrasse-moi. 

Vite,  ne  tarde  point, 

Ne  te  refuse  pas  cette  satisfaction. 

Des  soldats  tout  autour  de  la  maison! 
On  dirait  une  tempête  terrible  ! 
Sa  mère  se  désole  à  la  maison 
El  va  pleurant  par  la  fenêtre. 

*  11  s'agit  du  Messie.  '  Mot  hébreu  :  le  Messie. 

*  Mot  hébreu  :  le  Sanctuaire.  *  Mot  hébreu  :  prières. 
'  Mot  hébreu  :  sacrifices. 


120  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Elle  dit  :  Ta  n'as  point  été  malade 
0  Bélior,  mon  bien-aimé  ! 
Te  voilà  parti  subitement, 
Sans  aucun  tort  ni  péché. 

Tout  le  monde  Ta  pleuré, 

Car  il  était  très  aimé. 

On  nous  l'a  pris  sous  nos  yeux, 

Il  n'avait  commis  aucun  tort,  aucun  péché. 

Pleurons  et  lamentons-nousl 

Car  il  nous  est  arrivé  un  grand  malheur. 

Quand  nous  vivrions  mille  ans, 

Nous  ne  pourrions  l'oublier, 

Lorsque  la  mère  fut  sortie 

Hors  du  palais, 

On  la  fît  passer  par  devant  le  cadavre 

Pour  qu'elle  l'aperçût  étendu  à  terre. 

Nos  larmes  ne  tarissent 

Ni  la  nuit  ni  le  jour, 

En  sougeant  que  nous  n'avons  plus 

Ce  qu'il  y  avait  de  bon  en  Israël. 

Des  soupirs  et  du  chagrin, 

Des  jeûnes  et  des  complaintes, 

Voilà  le  lot  d'Lsraël, 

Pariiculièremeut  de  la  ci-devanl  assemblée. 

Il  n'y  avait  que  cela  de  bon 
Dans  tout  Israël  ; 
Dieu  nous  l'a  enlevé  trop  tôt 
Et  l'a  jelé  au  tombeau. 

Il  a  souffert  le  martyre 

Lorsque  le  Sultan  l'invita  à  rendre  des  comptes, 
Lorsque  le  Souverain  envoya  le  ministre 
Une  grande  frayeur  le  (Carmona)  saisit. 

Oui,  dans  ce  malheur  extrême 
Pleurons  et  lamentons-nous! 
Implorons  le  ciel 
Et  demandons  justice  ! 

Lui  qui  était  beau  et  charitable  1 

Il  est  incroj'able  que  la  Porte  1  ait  ainsi  traité  ! 

Oh  !  depuis  celte  infortune 

Nous  n'avons  pas  eu  un  jour  de  repos  ! 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX«  SIÈCLE  121 

Il  prodiguait  si  généreusement  des  aumônes, 
Qu'il  n'avait  pas  son  pareil  au  monde  ; 
Il  satisfaisait  tout  le  monde 
Et  particulièrement  Israël. 

Quand  il  eut  rendu  ses  comptes 
A  la  satisfaction  générale, 
Il  fut  néanmoins  étouffé, 
Et  son  frère  exilé. 

Prions  le  Tout- Puissant 
Que  le  Messie  nous  arrive  bientôt. 
El  nous  serons  bien  heureux 
En  revoyant  le  Sanctuaire  rebâti. 

Nous  offrirons  des  sacrifices 
Régulièrement,  tous  les  jours, 
El  nous  verrons  le  Messie 
Sur  son  siège  assis. 

Prions  notre  Père 

De  nous  changer  ce  jour  en  allégresse, 

Et  vile,  sans  plus  tarder, 

Qu  il  nous  fasse  voir  ce  miracle. 

Il  ne  sera  pas  sans  intérêt  de  rapprocher  du  récit  de  ces  meurtres, 
récit  recueilli  de  la  bouche  de  témoins  oculaires,  la  version  oiflcielle 
qu'en  donne  l'historiographe  de  l'Empire,  Loutfi-Effendi  '  : 

« Après  le  massacre  des  Janissaires,  écrit-il,  le  banquier  des 

»  Janissaires  (Odjak  Sarafi'j   avait  à  recevoir  des  sommes  cousidé- 
»  rabies  de  plu.sieurs  minisires  : 

LIVRES    TURQUES  : 

55.062  09  de  Sirozlou-Yossuf-Pacha,  gouverneur  d'Alep. 
2.6»'I  43  du  guuverueur  de  Sivas, 
7.428  89  du  gouverneur  de  Karamanie. 
4.912  01  d'Osman-Pacha,  gouverneur  de  Kaïsarieh  (Cé- 

sarée). 
7.712  83  d'Ibrahim-Pacha,  gouverneur  de  Braïla  (vilayet 

du  Danube). 
8.07^  45  d'Omer-Pacha,  gouverneur  de  Salonique. 

Total..,.     83.o7ti  72  ^ 


1  Voir  Loutfi-Effendi,  Taarikh-t  Loutfi,  1"vol.,  p.  245-246. 
'  Il  s'ujîit  d'isaïe  Adjiman. 

*  11  laut  remarquer  que  la  monnaie  turque   a  quintuplé  de   valeur  depuis  cette 
époque. 


122  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

»  Or,  le  gouvernement  avait  besoin  de  cet  argent  pour  la  cons- 
»  truction  des  casernes,  destinées  à  la  nouvelle  armée. 

»  Aussi,  peu  de  temps  après  la  destruction  des  Janissaires,  on 
»  arrêta,  a  l'Hôtel  des  Monnaies,  VOdJak-Ba::iriam\ 

I  Chaplchi-Bachi  {Béhor-Carmona},  qui  était  un  parent  par  al- 
»  liance  d'OdJaA-Baziriani,  et  qui,  par  l'entremise  de  ce  dernier, 
»  était  en  relations  avec  la  Cour  et  gagnait  des  sommes  cousidé- 
y>  râbles,  se  rendit  à  l'Hôtel  des  Monnaies  pour  porter  caution  en 
»  faveur  d'Adjiman  (samedi  9  ziihadjé').  Néanmoins,  quelque  temps 
»  après,  on  les  étrangla  tous  les  deux  et  on  confisqua  leurs  biens. 

»  H  faut  remarquer  que,  quelque  temps  avant  la  destruction  des 
»  Janissaires,  à  l'époque  du  recensement  de  ces  derniers,  Carmona 
»  avait  dit  un  jour  à  Husséin-Pacha  :  «  Parviendrez-vous  jamais  à 
»  réformer  ces  corps  datant  de  cinq  siècles  pour  en  faire  des  soldats 
»  disciplinés?  Vous  vous  exposez  à  un  grand  danger.  Vous-mêmes 
»  (les  ministres),  tâchez  de  sauver  vos  têtes.  i) 

«  A  ce  moment-là,  Adjiman  se  trouvait  dans  l'embrasure  d'une 
»  fenêtre  de  cette  salle  et  riait.  » 

Par  ces  paroles  imprudentes  et  ce  sourire  moqueur,  les  deux  fonc- 
tionnaires juifs  s  étaient  attiré  la  rancune  du  ministre,  qui  ne  tarda 
pas  à  se  venger. 

Comme  on  le  voit,  le  récit  officiel  de  Loutfi-Effendi  ressemble  à 
celui  des  témoins  oculaires.  Ils  ne  diffèrent  entre  eux  que  sur  un 
point  :  sur  le  prétexte  invoqué  par  le  Gouvernement  pour  se  dé- 
barrasser do  ces  deux  hommes. 

Au  règne  du  sultan  Mahmoud  se  rattache  la  conquête  de  la  Syrie 
par  Ibrahim-Pacha  et,  conséquerament,  les  souffrances  qu'endu- 
durèrent  les  Israélites  de  Palestine  à  cette  occasion.  Voici  les  faits 
tels  que  les  raconte,  dans  un  livre  intitulé  Imré-Bina(\).bQ-ô3), 
le  rabbin  Ishak  Farhi,  pieux  voyageur  qui  a  écrit  dans  ses  loisirs 
un  grand  nombre  d'ouvrages  de  morale  pratique  en  judéo-espa- 
gnol. Le  13  Nissan  5594  fl834),  c'est-à-dire  l'année  où  Méhémet- 
Ali,  pacha  d'Egypte,  s'était  rendu  indépendant,  à  la  veille  de 
Pâques,  Ibrahim-Pacha  entra  à  Jérusalem  sans  y  rencontrer  au- 
cune résistance.  Toute  la  population  accueillit  même  avec  joie  le 
jeune  général.  Il  séjourna  dans  la  Ville-Sainte  douze  jours,  pen- 
dant lesquels  il  organisa  une  espèce  de  conseil  municipal  composé 
de  douze  membres,  dont  neuf  musulmans,  un  Israélite,  un  Armé- 
nien et  un  Franc.  Ce  conseil  fut  chargé,  entre  autres  choses,  de 
recruter  des  soldats  parmi  les  Turcs  et  les  Fellahs  de  la  ville  et  de 

»  Voir  à  ce  sujet  Tnarih-i  Loutfi^  2'  vol.,  p.  203-20-i. 
'  La  date  de  l'année  n'est  pas  indiquée. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX^  SIÈCLE  123 

la  banlieue  et  de  les  faire  exercer  militairement.  Ces  ordres  une 
fois  donnés,  Ibrahim  partit  pour  Jaffa,  ne  laissant  à  Jérusalem 
qu'une  garde  de  800  soldats  nizams. 

Quelques  jours  après,  les  habitants  de  Jérusalem  a3'ant  demandé 
au  conseil  municipal  d'être  dispensés  du  service  militaire  et  n'ayant 
pas  obtenu  satisfaction,  un  certain  cheikh,  Cassim-el-Ahmed,  et 
ses  deux  fils  organisèrent  une  révolte  de  Fellahs.  Les  rebelles,  au 
nombre  de  5,000,  s'introduisirent  dans  la  ville  et  se  jetèrent  sur  les 
Nizams.  Dans  celte  bagarre,  plusieurs  maisons  juives  furent  pillées. 
Le  gouverneur  de  la  forteresse  ordonna,  à  son  tour,  aux  Nizams  de 
piller  toutes  les  maisons  des  Turcs,  parce  qu'ils  avaient  favorisé 
l'entrée  des  Fellahs.  Les  Nizams  profitèrent  de  cette  occasion  pour 
piller  égdleraent  les  habitations  juives.  Le  lendemain  matin,  on  apprit 
qu'une  bande  de  Fellahs  s'étaient  introduits,  la  nuit,  dans  le  quar- 
tier juif,  y  avaient  violé  des  femmes  et  dérobé  beaucoup  d'objets. 
Une  foule  d'Israélites  se  rendirent  alors  chez  le  grand-rabbin  de 
la  ville,  Rabénou  Béhar  Abraham,  pour  le  mettre  au  courant  de  ce 
malheur.  Le  khakham  Bachi  fit  preuve  alors  d'un  grand  courage. 
Il  fit  venir  les  chefs  des  Fallahs  chez  lui  et  leur  dit  :  «  Mes  braves, 
sans  doute,  vous  avez  besoin  d'argent.  N'est-il  pas  honteux  pour 
vous  de  piller,  lorsqu'il  serait  si  simple  de  nous  demander  ce  qu'il 
vous  faut?  Je  vous  accorderai  volontiers  tout  ce  dont  vous  avez 
besoin,  pourvu  que  vous  protégiez  les  Juifs.  »  Et,  ce  disant,  il  leur 
remit  une  forte  somme  d'argent.  Les  Fellahs  se  mirent  aussitôt  à 
parcourir  les  rues  juives  en  criant  qu'ils  prenaient  sous  leur  pro- 
tection les  Israélites,  et  que  ceux-ci  pouvaient  vaquer  sans  crainte 
à  leurs  affaires.  On  profita  de  ce  répit  pour  donner  la  sépulture 
aux  victimes  des  derniers  massacres.  Néanmoins,  malgré  les  pro- 
messes des  Fellahs,  plusieurs  magasins  juifs  furent  encore  pillés 
dans  la  nuit. 

Dès  qu'Ibrahim-Pacha  fut  informé  de  l'émeute  des  Fellahs,  il 
accourut  à  Jérusalem  et  y  rétablit  le  calme. 

Les  Fellahs  commirent  les  mêmes  violences  à  Safed. 

A  Plébron,  les  habitants  ayant  opposé  quelque  résistance  à 
Ibrahim- Pacha,  celui-ci  permit  à  ses  soldats  de  piller  la  ville  du- 
rant trois  jours.  Les  Égyptiens  se  ruèrent  sur  les  maisons  juives 
et  les  pillèrent,  au  point  qu'ils  laissèrent  les  habitants  littéralement 
nus.  Parmi  les  personnes  qui  moururent  dans  ces  massacres,  on 
cite  R.  Ishak  Ben  Yakar  et  R.  Issakhar  Ilasson. 

La  ville  de  Safed,  éprouvée  par  le  choléra  en  1832,  fut  détruite, 
ainsi  que  Tibériade,  parle  tremblement  de  terre  de  18.37;  tous  les 
habitants,  sans  exception,  y  périrent.  On  comptait,  à  cette  époque, 
400  Israélites  à  Tibériade  et  2,000  à  Safed.  Parmi  ces  derniers,  on 


124  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

cite  trois  grands  rabbins  :  R.  Nissim  Zérahia  Azoulaï,  R.  Tchélébi 
Sarfati  et  R.  Abraham  Anhori. 


II 


LES   JUIFS    SOUS   LE  REGNE   DU   SULTAN   ABD-UL-MEDJID 

(1839-1861). 

Si  les  Israélites  de  Turquie  doivent  au  sultan  Mahmoud  II 
d'avoir  été  délivrf^s  des  outrages  et  des  excès  continuels  des  Ja- 
nissaires, ils  sont  également  redevables  à  Abd-ul  Meiijid  de  leur 
situation  actuelle.  En  effet,  ce  Padichah,  inspiré  par  des  idées  de 
tolérance  et  cédant,  sans  doute,  à  l'impulsion  du  siècle  et  aux 
vœux  des  puissances  étrangères,  osa,  malgré  l^s  préjugés  sécu- 
laires, mettre  sur  le  même  pied  les  rayas  et  les  musulmans.  Gest 
ainsi  qu'en  leur  qualité  de  rayas,  les  Israélites  bénéficièrent  de 
tous  les  privilèges  et  libertés  concédés  aux  chrétiens  (grecs,  armé- 
niens, bulgares,  etc.)  par  les  chartes  ottomanes  désignées  sous  le 
nom  dn  Hatfi-Cherif  ou  Haili-Houmayoun.  D-puis  la  promul- 
gation de  CHS  chartes  (1833),  le  téraoignagn  des  Juifs  est  reconnu 
devant  les  tribunaux,  la  torture  est  supprimée,  ils  ne  sont  plus 
exposés  aux  confiscations,  et  les  personnes  dont  ils  ont  à  se 
plaindre  sont  punies,  quels  que  soient  leur  rang  et  leur  dignit^^.  En 
deux  mots,  on  a  assuré  depuis  cette  époque  aux  Israélites  1  invio- 
labilité de  leurs  [>ersonnes  et  le  respect  de  leurs  biens. 

La  proclamation  du  Hatti  Chérit"  de  Gui  Khané  eut  lieu  à  Top 
Kapnu  (Stamboul),  dans  les  jardins  du  palais  impérial,  le  3  no- 
vembre 1839,  au  milieu  d'une  telle  aifluence  de  monde  que  des 
détachements  de  troupes  étaient  échelonnées,  pour  maintenir  la 
foule,  à  travers  toute  la  place.  Fait  bien  nouveau,  le  Grand-Rabbin 
(Khakham-Bachi)  R.  Mosché  Fresco  et  des  notables  i?-raelites,  des 
banquiers  pour  la  plupart,  prirent  place  auprès  des  dignitaires  de 
l'Empire,  des  Vizirs,  des  Pachas,  du  Gheikli-ul  Islam,  des  Ulémas, 
des  patriarches  et  des  ambassadeurs  européens.  C'est  alors  qu'en 
présence  du  Souverain,  le  ministre  di-s  affaires  étrangères,  Réchid- 
Pacha,  lut  à  haute  voix  cet  acte  important,  dont  nous  ne  repro- 
duisons que  les  paragraphes  relatifs  aux  Juifs  : 

«  Tout  le  monde  sait  que,  dans  les  premiers  temps  de  la  monarchie 
oitomane,  les  piécepies  glorieux  du  Corau  el  les  lois  de  l'empire 
étaient  une  règle  toujours  honorée.  Eu  conséquence,  l'empire  crois- 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XIX»  SIECLE  125 

sait  en  force  el  en  grandeur,  et  tous  les  sujets,  sans  exception, 
avaient  acLfuis  au  plus  haut  degré  l'aisance  et  la  prospérité.  Depuis 
cent  ciuquanle  ans,  une  succession  d'uccidents  et  de  causes  diverses 
ont  fait  qu'on  a  cessé  de  se  conformer  au  code  sacré  des  lois  et  aux 
règlements  qui  en  <iécouleut,  el  la  force  et  la  prospérité  antérieures 
se  sont  chjugées  en  faiblesse  el  en  appauvrissemeul  :  cest,  qu'en 
efïet,  un  empire  per  1  loule  stabilité  quand  il  cesse  d'ob?erver  ses  lois. 

D  Ces  insliiuiions  doivent  pnucipalement  s'appuyer  sur  trois  prin- 
cipes, qui  sont  :  1°  les  gardulies  qui  assurent  à  nos  sujets  une  par- 
faite sécurité  quant  à  leur  vie,  a  leur  honneur  et  à  leur  lortuue  ; 
2"  un  inoile  régulier  d'asseoir  et  de  prélever  les  impôls;  3"  un  mole 
également  régulier  pour  la  levée  des  soldais  et  la  durée  de  leur  ser- 
vice. 

»  Et,  en  effet,  la  vie  el  l'honneur  ne  sont-ils  pas  les  biens  les  plus 
précieux  qui  existent?  Quel  homme,  quel  que  t>oit  l'éioigneinent  que 
son  caractère  lui  inspire  pour  la  violence ,  pourra  s'empêcher  d'y 
avoir  recours  et  de  nuire  par  là  au  gouveruement  et  au  pays,  si  sa 
vie  el  son  honneur  sont  mis  eu  danger?  Si,  au  contraire,  il  jouil,  à 
cet  égard,  d'un^  sécuriié  parfaite,  il  ne  s'écartera  pas  des  voies  de  la 
loyauté,  et  tous  ses  acles  concoarronl  au  bien  du  gouvernement  et 
de  ses  frèn-s. 

I)  S'il  y  a  absence  de  sécurité  à  l'égard  de  la  fortune,  tout  le  monde 
reste  fioid  a  la  voix  liu  prince  et  de  la  patrie;  personne  ne  s'oc<;upe 
du  progrès  de  la  forluue  publiijue,  absorbé  par  ses  propres  in- 
quiétudes. Si,  au  contraire,  le  citoyen  possède  en  sécurité  ses  pro- 
priétés de  toute  nature,  alors  plein  d'arleur  pour  ses  affaires,  dont  il 
cht-rche  à  élargir  le  cercle,  afin  d'étendre  celui  de  ses  jouissances, 
il  Sent  chaque  jour  redoubler  en  son  cœur  l'amour  du  prince  et  de  la 
patrie,  le  dévouement  a  sou  pays.  Ces  sentiments  deviennent  en  lui 
la  Source  des  actious  les  plus  louables. 

»  G't-sl  pourquoi,  désormais,  la  cmse  de  tout  prévenu  sera  jugée 
»  publiquement,  conformé. uent  â  noire  loi  diviue  après  enquéie  et 
»  examen,  et,  tani  qu'un  jugeinenl  régulier  ne  sera  point  iuiei  venu, 
»  personne  ne  pourra,  aecrèieineul  ou  publiquement,  faire  périr  une 
»  autre  persouue  par  le  poisou  ou  par  tout  autre  supplice. 

»  Il  ne  sera  permis  à  personne  de  porter  atteinte  à  l'honneur  de 
»  qui  que  ce  soit. 

»  Chacun  aura  la  possession  de  ses  propriétés  de  toute  nature,  et 
a  en  disposera  avec  entière  liberté,  sans  que  personne  puisse  y  por- 
»  1er  obstacle  ;  ainsi,  par  exemple,  les  héritiers  inno'-.euls  d'un  cri- 
»  minei  ne  seront  point  privés  de  leurs  droits  légaux,  et  les  biens 
»  du  criminel  ne  seront  pas  coiifisqués. 

»  Ces  concessions  impériales  s'étendant  à  tous  nos  sujets,  à  quel- 
»  que  religion  ou  secte  quiis  appartiennent,  is  en  jouiront  sans 
»  excepliou.  Une  sécurité  parfaite  est  donc  assurée  par  nous  aux 
»  habitants  de  l'empire  dans  leur  vie,  leur  honneur  et  leur  fortune, 
»  ainsi  que  l'exige  le  texte  sacré  de  notre  loi.  » 


126  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Quatre  ans  après,  en  1843,  Mé'ijid  contresigna  pour  ainsi  dire 
à  nouveau  l'acte  solf^nnel  de  1839  en  autorisant  le  grand-vizir 
Riza-Pacha,  au  début  de  son  ministère,  à  prononcer  l'allocution 
suivante  devant  le  clergé  grec,  arménien  et  Israélite  de  Smyrne, 
de  Cliio  et  de  Cavalle  réuni  dans  l'Ile  de  Mételin  •  : 

«  Le  Sultan,  notre  maître  et  notre  père  à  tous,  est  venu  parmi 
»  nous  comme  au  milieu  d'une  famille  dont  la  joie  fait  sa  joie,  dont 
»  les  douleurs  sont  les  siennes.  Il  connaît  trop  les  obligations  que  la 
»  divine  Providence  lui  impose,  pour  ignorer  ce  qu'il  doit  à  son 
»  peuple,  ce  qu'il  doit  au  nom  de  ses  ancêtres,  ce  qu'il  se  doit  à  lui- 
»  même.  Aussi  me  trouvé-je  heureux  de  vous  dire  de  sa  part  que, 
»  tout  en  vous  eiîorçant  de  remplir  vos  devoirs  de  fidèles  sujets, 
»  vous  ne  devez  pas  douter  un  instant  de  sa  justice.  Alnsuhnans, 
»  chrétiens,  Israélites,  vous  êtes  tous  les  sujets  d'un  même  empereur, 
•  les  enfants  d'un  même  père.  S'il  est  parmi  vous  des  opprimés, 
»  qu'ils  se  montrent,  l'intention  bien  formelle  de  Sa  Majesté  étant 
»  que  les  lois  qui  sauvegardent  la  vie,  l'honneur  et  les  biens  de  tous 
»  ses  sujets  soient  strictement  observées  dans  son  empire  .  • .  Mu- 
i>  siilrnans  ou  chréciens,  riches  ou  pauvres,  fonctionnaires  civils,  mi- 
»  liiaires  ou  religieux,  que  tout  sujet  ottoman  ait  donc  pleine  con- 
j)  fiance  dans  le  souverain  qui  tient  la  balance  égale  pour  tous;  que 
»  tout  coupable  tremble,  que  tout  homme  de  bien,  que  tout  bon  ser- 
»  viieur  attende  sa  récompense.  » 

Lorsque  Reschid-Pacha  fut  nommé  Grand-Vizir  en  1846,  son 
premier  acte  fut  un  manifeste  analogue  à  celui  qui  avait  signalé 
l'entrée  de  Riza-Pacha  aux  affaires  ;  il  était  plus  explicite  en  tant 
que  confirmation  de  la  charte  de  1839. 

Dans  le  cours  d'un  voyage  que  fit  Abdul-Médjid  au  printemps 
de  1846,  le  ministre,  s'adressant  au  nom  de  son  souverain  aux 
représentants  des  communautés  non  musulmanes  convoquées  à 
Andrinople,  prononça  les  paroles  suivantes  : 

«  Sa  Majesté  l'Empereur,  de  même  qu'Elle  veut  le  bonheur  de 
»  ses  sujets  musulmans,  veut  aussi  que  les  Chi^étiens  et  les  Juifs, 
n  qui  sont  également  ses  sujets,  jouissent  de  tranquillité  et  de 
»  protection.  La  différence  île  religion  et  de  secte  ne  concerne 
»  qu'eux;  elle  ne  nuit  pas  à  leurs  droits  ;  et  comme  nous  sommes 
»  tous  sujets  d'un  même  gouvernement  et  concitoyens  nés  dans  un 
»  même  empire,  il  ne  convient  pas  que  nous  nous  voyions  d'un 
»  mauvais  œil.  Notre  souverain  répand  également  ses  bienfaits  sur 
»  toutes  les  classes  de  ses  sujets,  et  il  faut  qu'elles  vivent  en 
»  bonne  harmonie  entre  elles  et  travaillent  ensemble  à  la  pros- 
»  périté  nationale.  » 

*  Engelhardt,  La  Turquie  et  le  Tanzimat,  68. 


LES  JUIFS  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  X1X<^  SIÈCLE  127 

Depuis  son  avènement  jusqu'à  sa  mort,  on  peut  dire  que  le 
Sultan  Médjid  signala  chaque  jour  de  son  règne  par  une  nouvelle 
concession  ou  faveur  accordée  aux  raj^as  et  conséquemment  aux 
Israélites.  Ainsi,  le  Kharadj  (impôt  de  capitation  payé  par  les 
rayas),  qui  avait  été  porté  sous  Mahmoud  II  (1830)  de  quatorze  à 
trente  piastres,  fut  ramené  sous  Médjid  au  chiffre  primitif.  En  outre, 
suivant  une  ordonnance  du  15  juin  1850,  le  Kharadj  devait  être 
perçu  dans  les  provinces  par  les  primats  des  quatre  nations  (com- 
munautés grecque  orthodoxe,  arménienne  orthodoxe,  arménienne 
réformée  et  juive);  les  primats  devaient  faire  la  répartition  da- 
près  la  fortune  de  chaque  sujet  et  consigner  l'impôt  perçu  au  pa- 
triarcat ou  dans  les  mains  du  Hahham-Bachi,  d'où  il  serait  versé 
au  Trésor  Impérial  '. 

Une  nouvelle  ordonnance  du  1  mai  1855  fit  savoir  aux  ambas- 
sadeurs que  la  Sublime-Porte  abolissait  le  AV^ararf^  et  admettait 
les  rayas  dans  l'armée  et  dans  l'administration.  Ces  derniers  pou- 
vaient même  être  élevés  au  grade  de  colonel  et  au  rang  de  fonc- 
tionnaires civils  de  première  classe  *. 

La  cérémonie  de  Gul-Hané,  du  3  septembre  1839,  se  renou- 
vela le  18  mai  1856,  lors  de  la  proclamation  du  «  Hatti-Hu- 
mayoun  ». 

Ce  nouvel  édit  aussi  fut  lu  solennellement  à  la  Sublime-Porte, 
par  le  secrétaire  du  grand-vizir,  en  présence  des  ministres,  des 
hauts  fonctionnaires,  du  scheikh  ul-Islam,  des  patriarches,  du 
grand-rabbin  Yaakov-Béhar  David  et  des  membres  les  plus  consi- 
dérables des  différentes  communautés  religieuses. 

Cet  écrit  était  ainsi  conçu  ^  : 

«  Qu'il  soit  l'ait  en  conformité  du  contenu! 

A  loi,  mon  grand  vizir  Méhémet-Emia,  Ali  Pacha,  décoré  de  mon 
ordre  impérial  du  Medjidiô  de  première  classe  et  de  l'ordre  du  Mé- 
rite personnel  ;  que  Dieu  t'accorde  la  grandeur  et  double  ton  pou- 
voir I 


•  La  Jonquière,  Histoire  de  Turquie,  p.  508. 

'  Engelhardt,  La  Turquie  et  le  l'anzimat,  p.  126,  Nous  devons  ajr.uler  que  devant 
les  ditûcullés  que  présenta  l'application  de  la  rét'orrne  du  service  militaire,  réforme 
qui  avait  pour  but  de  réunir  musulmans,  chrétiens  et  Israélites,  on  y  renonça;  on 
admit  provisoirement  le  système  de  remplacement,  qui  dure  encore.  De  plus,  à  l'an- 
cien Kharadj,  qui  tenait  lieu  d'impôt  du  sanj^,  on  substitua  une  taxe  d'exonf^ration  : 
le  Bàlel-ij- Ask6ryek.  Seuls  les  rayas  de  Constantiuonple,  chrétiens  et  juifs,  furent 
dispensés  de  cet  impôt;  nos  coreligionnaires  des  provinces  ainsi  que  les  chrétiens 
payent  actuellement  ce  droit. 

*  Nous  avons  mis  en  italiques  les  passages  qui  concernent  parliculièrement  les 
Israélites. 


128  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Mou  désir  le  plus  cher  a  toujours  été  d'assurer  le  bonheur  de 
toutes  les  classes  des  sujets  que  la  divine  Providence  a  placés  sous 
mou  sceptre  impérial,  et  depuis  mou  avènement  au  trône,  je  n'ai 
cessé  de  faire  tous  mes  efforts  dans  ce  but.  Grâces  en  soient  rendues 
au  Tout- Puissant  !  ces  efforts  incessants  ont  déjà  porté  fies  fruits 
utiles  et  nombreux.  De  jour  eu  jour,  le  bonheur  de  la  nation  et  la 
richesse  de  mes  Étals  vont  en  augmentant. 

Dé.-irant  aujourd'hui  renouveler  et  élargir  encore  les  règlements 
nouveaux  établis  dans  le  but  d'arriver  a  obtenir  un  état  de  choses 
conforme  à  la  dignité  de  mon  empire  et  à  la  position  qu  il  occupe 
parmi  les  nations  civilisées  et  les  droits  de  mon  empire  ayant  au- 
jourd'hui, par  la  fidélité  et  les  louables  efforts  de  tous  mes  sujets  et 
par  le  concours  bienveillant  et  amical  des  grandes  puissances,  mes 
nobles  alliées,  reçu  de  l'extérieur  une  consécration  qui  doit  être  le 
commencement  d'une  ère  nouvelle,  je  veux  en  augmenter  le  bien- 
être  et  la  prospérité  intérieure,  le  bonheur  de  mes  sujets  qui  sont 
tous  égnus  à  mes  yeux  et  me  sont  également  chers,  et  qui  sont  unis 
enlie  eux  par  des  rapports  cordiaux  de  patriotisme,  et  assurer  les 
moyens  de  faire  croître  de  jour  en  jour  la  prospérité  de  mon  empire. 

J'ai  donc  résolu  et  j'ordonne  la  mise  à  exécution  des  mesures 
suivantes  : 

I.  —  Les  garanties  promises  de  notre  part  à  tous  les  sujets  de  noire 
empire  par  le  Hatli-Humayoun  de  Gulkhaué  et  les  lois  du  Tanzimât, 
sans  distinction  de  classe  ni  de  culte,  pour  la  défen=e  de  leur  hon- 
neur, sont  aujourd'hui  confirmées  et  consolidées,  et  des  mesures 
efficaces  seront  prises  pour  qu'elles  reçoivent  leur  plein  et  entier 
effet. 

II.  —  Tous  les  privilèges  et  immunités  spirituelles  accordées  ab 
antiquo  à^t  la  part  de  mes  ancêtres  et  à  des  dntes  postérieures,  à 
toutes  les  communautés  chrétiennes  <»u  à  d'autres  riies  non  musul- 
mans établis  dans  mon  empire,  >ous  mon  égide  protectrice,  sont 
confirmés  et  maintenus.  Chaque  communauté  chrétienne  ou  d'nutre 
co'iifes>io7i  non  mnsnlma-e  sera  tenue,  uans  un  délai  fixé,  et  avec  le 
concours  dune  commission  formée  ad  ho  ".  dans  son  sein,  de  procéder, 
avec  ma  haute  approbation  et  sous  la  surveillance  de  ma  Siiblirae- 
Porte,  à  l'exameu  de  ces  immunités  et  privilèges  actuels  et  d'exa- 
miner et  soumetire  à  ma  Sublime-Porte  les  réformes  exigées  par  le 
progrès  des  lumières  et  du  temps.  Les  pouvoirs  concédés  aux  pa- 
triarches et  aux  évêques  des  rites  chrétiens  parle  sultan  Mahomet  II 
et  ses  successeurs  seront  mis  en  harmonie  avec  la  situation  nou- 
velle que  mes  intentions  généreuses  et  bienveillantes  assurent  à  ces 
communautés. 

III.  —  Le  principe  de  la  nomination  à  vie  des  patriarches,  après  la 
révision  des  règlements  d'élection  aujourd'hui  en  vigueur,  sera 
exactement  app'i'jué,  conformément  à  la  teneur  de  leur  bérat  d  in- 
vestiture Les  patriarches,  les  métropoliiains  (archevêques),  délé- 
gués, évêques,  ainsi  que  les  grands  rabotas,   prèieroul  serment  à 


LES  JUU'S  DE  L'EMPIRE  OTTOMAN  AU  XLX'  SIÈCLE  129 

leur  entrée  en  fonctions  d'après  une  formule  concertée  en  commun 
entre  ma  Sublime-Porte  et  les  chefs  spirituels  des  diverses  commu- 
nautés. 

IV.  —  Les  redevances  ecclésiastiques,  de  quelque  forme  et  de 
quelque  nature  qu'elles  soient,  seront  supprimées  et  remplacées  par 
la  fixation  des  revenus  des  patriarches  et  chefs  de  communautés,  et 
par  l'allocation  de  traitements  et  de  salaires  équitablement  propor- 
tionnés à  l'importance,  au  rang  et  à  la  dignité  des  divers  membres 
du  clergé.  Il  ne  sera  porté  toutefois  aucune  atteinte  aux  propriétés 
mobilières  et  immobilières  des  divers  clergés  chrétiens.  L'administra- 
tion temporelle  des  communautés  chrétiennes  ou  d'aîilres  commu- 
nautés non  musulmanes,  sera  placée  sous  la  sauvegarde  d'un  Conseil 
choisi  dans  le  sein  de  chacune  desdites  communautés,  parzni  les 
membres  du  clergé  et  des  laïques. 

VI.  —  Des  mesures  énergiques  seront  prises  par  ma  Sublime- 
Porte  pour  assurer  à  chaque  culte,  quel  que  soit  le  nombre  de  ses  adhé- 
rents, la  pleine  liberté  de  son  exercice. 

VIL  —  Vu  que  tous  les  cultes  sont  et  seront  librement  pratiqués 
dans  mes  États,  aucun  sujet  de  mon  empire  ne  sera  gêné  dans  l'exer- 
cice de  la  religion  qu'il  professe  et  ne  sera  d'aucune  manière  inquiété 
à  cet  égard.  Personne  ne  pourra  être  contraint  à  changer  de  religion. 

VIII.  -  La  nomination  et  le  choix  de  tous  les  fonctionnaires  et  em- 
ployés de  mon  empire  étant  entièrement  dépendants  de  ma  volonté 
souveraine,  tous  les  sujets  de  mon  empire,  sans  distinction  de  natio- 
nalité, seront  admissibles  aux  emplois  publics  et  aptes  à  les  occu- 
per, selon  leurs  capacités  et  leur  mérite,  et  conformément  à  des 
règles  d'une  application  générale. 

Tous  les  sujets  de  mon  empire  seront  indistinctement  reçus  dans  les 
écoles  civiles  et  militaires  du  ffouvernement,  s'ils  remplissent  d'ailleurs 
les  conditions  d'âge  et  d'examen  spécifiées  dans  les  règlements  orga- 
niques desdites  écoles. 

IX.  —  Toutes  les  affaires  commerciales,  correctionnelles  et  crimi- 
nelles entre  des  musulmans  et  des  chrétiens  ou  autres  non  musul- 
mans, ou  bien  entre  des  chrétiens  ou  autres  de  confessions  diffé- 
rentes non  musulmanes,  seront  déférées  à  des  tribunaux  mixtes. 

X.  —  L'audience  de  ces  tribunaux  sera  publique,  les  parties  se- 
ront mises  en  présence  et  produiront  leurs  témoins,  dont  les  déposi- 
tions seront  reçues  indistinctement,  sous  un  serment  ^xè\.é  selon  la 
loi  religieuse  de  chaque  culte. 

XL  —  Les  procès  ayant  trait  aux  afl'aires  civiles  continueront 
d'être  publiquement  jugés  d'après  les  lois  et  les  règlements,  par 
devant  les  conseils  mixtes  des  provinces,  en  présence  du  gouverneur 
et  du  juge  du  lieu.  Les  procès  civils  spéciaux,  comme  ceux  de  suc- 
cession ou  autres  de  ce  genre  entre  les  sujets  d'un  même  culte,  chré- 
tien ou  autre,  non  musulman,  pourront,  à  leur  demande,  être  en- 
voyés par  devant  les  conseils  des  patriarches  ou  des  communautés. 

XII.  —  L'égalité  des  impôts  entraînant  l'égalité  des  charges, 
T.  XXVI,  no  a.  9 


130  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

comme  celle  des  devoirs  entraîne  celle  des  droits,  les  sujets  chré- 
tiens et  des  autres  cultes  non  musulmans  devront,  ainsi  qu'il  a  été 
antérieurement  résolu,  aussi  bien  que  les  musulmans,  satisfaire  aux 
obligations  de  la  loi  de  recrutement.  Le  principe  du  remplacement 
ou  du  rachat  sera  admis.  11  sera  publié,  dans  le  plus  bref  délai  pos- 
sible, une  loi  complète  sur  le  mode  d'admission  et  de  service  des 
sujets  chrétiens  et  d'autres  rites  non  musulmans  dans  l'armée. 

XIII.  —  Comme  les  lois  qui  régissent  l'achat,  la  vente  et  la  dis- 
position des  propriétés  immobilières  sont  communes  à  tous  les  su- 
jets de  mou  empire,  il  pourra  être  permis  aux  étrangers  de  posséder 
des  propriétés  foncières  dans  mes  Étals,  en  se  conformant  aux  hns  et 
aux  règlements  de  police,  en  acquittant  les  mêmes  charges  que  les 
indigènes,  et  après  que  les  arrangements  auront  eu  lieu  avec  les 
puissances  étrangères. 

XIV.  —  Les  impôts  seront  exigibles  au  même  lUrede  tous  les  sujets 
de  mon  empire,  sans  distinction  de  classe  ni  de  culte. 

XV.  —  Les  chefs  et  U7i  délégué  de  chaque  communauté  désignés  par 
ma  Sublime-Porte  seront  appelés  à  prendre  part  aux  délibérations  du 
conseil  suprême  de  justice  dans  toutes  les  circonstances  qui  intéres- 
seraient la  généralité  des  sujets  de  mon  empire.  Ils  seront  spéciale- 
ment convoqués  à  cet  effet  par  mon  grand  vizir. 

Fait  à  Gonstantinople,  dans  la  première  décade  du  mois  de  dje- 
maziulakhir,  le  deuxième  de  l'année  1272  (18  février  1856). 

En  résume,  cette  seconde  charte  contient  les  dispositions  sui- 
vantes en  faveur  des  Juifs  : 

1"  Sécurité  pour  chacun  dans  sa  vie,  dans  son  honneur  et  dans 
sa  fortune; 

2°  Égalité  de  tous  devant  la  loi; 

S**  Admission  de  tous  les  sujets  aux  emplois  publics  et  au  ser- 
vice militaire; 

4"  Liberté  des  cultes  et  de  l'instruction  publique  avec  quelques 
restrictions  administratives  ; 

h''  Égalité  devant  l'impôt  ; 

6°  Égalité  des  témoignages  en  justice  ; 

7°  Révision  des  privilèges  et  immunités  des  communautés  non 
musulmanes,  sauf  maintien  de  leurs  immunités  et  privilèges  pu- 
rement spirituels; 

8°  Représentation  équitable  de  ces  communautés  dans  les  con- 
seils provinciaux  et  communaux  et  dans  les  conseils  suprêmes  de 
justice  ; 

9°  Suppression  dans  les  actes  officiels  de  toute  appellation  in- 
jurieuse pour  les  rayas. 

{A  suivre.)  M.  Franco. 


NOTES  ET  MÉLANGES 


NOTES  COMPLÉMENTAIRES 

SUR  LE  REPOS  SABBATIQUE  DES  AMES  DAMNÉES 


Notre  article  sur  le  repos  sabbatique  des  âmes  damnées  [Revue, 
t.  XXV,  1)  nous  a  valu  quelques  communications  que  nos  lecteurs 
nous  sauront  gré  de  leur  faire  connaître.  Nous  publierons  en  même 
temps  quelques  notes  complémentaires  sur  certaines  des  questions 
que  nous  avions  touchées  incidemment  dans  ce  travail. 

1.  Origine  de  la  croyance  au  repos  sabbatique  des  âmes 

damnées. 

Notre  savant  collaborateur  M.  A.  Epstein  me  fait  remarquer 
que,  dans  le  livre  des  Jubilés,  les  anges  célèbrent  le  sabbat  au  ciel 
comme  les  hommes  sur  la  terre.  Ce  serait  un  argument  de  plus  en 
faveur  de  l'hypothèse  que  j'ai  soutenue,  à  savoir  que  la  croyance 
au  repos  sabbatique  des  damnés  «  découle  de  la  sainteté  dont 
était  revêtue  l'institution  du  sabbat  :  le  sabbat  est  trop  saint  pour 
n'être  prescrit  qu'au  monde  terrestre,  tout  l'univers  visible  et  in- 
visible y  participe  ».  Le  témoignage  du  Livre  des  Jubilés  serait 
d'autant  plus  précieux  qu'il  nous  montre  bien  avant  Josèphe  la 
sainteté  mystique  attribuée  au  sabbat. 

Je  ne  nie  pas  ce  qu'a  de  séduisant  ce  rapprochement,  mais  peut- 
être  la  conception  du  Livre  des  Jubilés  doit-elle  s'expliquer  autre- 
ment que  celle  dont  nous  nous  sommes  occupé.  Ce  n'est  pas  seule- 
ment, en  effet,  le  sabbat  qu'observent  les  anges,  mais  encore 
toutes  les  fêtes  et  nombre  de  rites,  avafït  l'institution  même  de 
ces  iirescripiions  religieuses. 


132  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

C'est  la  même  idée  mystique  qui  a  fait  imaginer  un  autel  céleste 
qui  correspond  à  l'autel  terrestre,  des  sacrifices  offerts  par  l'ange 
Michel  ',  et  qui  a  fait  créer,  avant  le  monde,  la  Loi,  le  Temple,  le 
Messie,  etc.-.  C'est  une  de  ces  spéculations  qu'on  croirait  volontiers 
alexandrines,  si  on  ne  savait  pas,  par  le  Livre  des  Jubilés  même, 
qu'elles  appartenaient  à  ces  cercles  palestiniens  qui  avaient  une 
certaine  culture  philosophique  ou  qui  avaient  à  compter  avec  les 
exigences  d'esprits  nourris  de  lectures  grecques.  On  n'accorde  pas 
assez  de  place,  d'ordinaire,  dans  l'histoire  des  idées  religieuses,  à 
ce  monde  juif  qui  tenait  le  milieu  entre  les  Pharisiens  de  l'Ecole 
et  les  théologiens  d'Alexandrie  :  la  plupart  des  apocryphes  palesti- 
niens ont  vu  le  jour  dans  ces  cercles,  et  même  beaucoup  de  ces 
doctrines  ont  survécu  dans  le  Talmud,  malgré  la  réaction  qui  sui- 
vit le  triomphe  du  christianisme. 

D'un  tout  autre  caractère  est,  semble-t-il,  l'idée  qui  est  l'âme 
de  la  croyance  au  repos  sabbatique  des  damnés  :  on  n'a  pas  voulu 
ajouter  à  la  sainteté  du  sabbat,  le  rendre  plus  vénérable  encore  : 
on  s'est  contenté  d'en  tirer  la  conclusion  logique.  S'il  était  permis 
d'instituer  une  distinction  qui  généralement  porte  à  faux,  on  pour- 
rait dire  que  ces  idées  mystiques  sont  des  constructions  savantes 
de  l'école,  tandis  que  la  croyance  au  repos  sabbatique  des  damnés 
est  de  création  populaire. 

M.  Epstein  rapproche  encore  de  notre  croyance  ce  trait  de 
Pirké  R.  Eliézer  qui  fait  intercéder  le  sabbat  en  faveur  d'Adam 
pour  implorer  son  pardon.  Bien  que  cet  ouvrage  midraschique  ne 
doive  être  consulté  qu'avec  défiance  pour  établir  les  doctrines  qui 
avaient  cours  dans  les  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne,  car  il 
se  ressent  des  procédés  des  Pères  de  l'Eglise  et  s'abandonne  vo- 
lontiers à  des  spéculations  mystiques  qui  lui  sont  personnelles, 
néanmoins  cette  donnée  intéressante  cadre  trop  bien  avec  celles 
que  nous  avons  relevées,  pour  que  nous  n'acceptions  pas  cet  argu- 
ment qui  confirme  notre  thèse. 

2.  Là  défense  de  boire  V après-midi  du  sabbat. 

Nous  avons  dit  l'incertitude  du  texte  sur  lequel  est  fondé  cet 
usage  [Wid.,  6).  Parallèlement  à  celui  du  Midrasch  sur  les  Psaumes 
que  nous  avons  cité,  il  faut  placer  celui  qu'on  lit  dans  un  py  p  -no 
publié  par  M.  Jellinek  {Bet  Hamidrasch,  V,  p.  43)  :  «  Les  morts 
ont  une  grande  cour;  devant  cette  cour  est  un  fleuve  qui  sort  du 

•  Haguiga,  \'2b. 

*  Pesahim,  54  a;  Nedaritn,  39  i;  Merkilta,  16,  32;  6'tA^Deut.,  xi,  lU,  etc. 


NOTES  ET  MÉLANGES  133 

jardin  d'Eden,  et  devant  les  fleuves  est  une  campagne.  Tous  les 
vendredis,  entre  l'heure  de  Minha  et  la  prière  du  soir,  on  fait  sor- 
tir les  esprits  des  morts  de  leur  retraite  [wn^r^^  n-^nr),  et  on  les  fait 
paître  dans  cette  campagne,  et  ils  boivent  de  l'eau  de  ce  fleuve. 
Aussi  quiconque  boit;  de  l'eau  le  sabbat  entre  Minha  et  la  prière  du 
soir  vole-t-il  les  eaux  des  morts.  Lorsque  la  communauté  des  fi- 
dèles dit  :  nn3?3r!  'r;  ni<  isin  (commencement  de  la  prière  du  soir), 
ils  retournent  dans  leurs  tombeaux.  Dieu  les  fait  revivre  (sans 
doute  le  sabbatj  et  les  remet  sur  pied,  vivants  et  fermes.  Tous  les 
morts  Israélites  se  reposent  le  sabbat  et  viennent  en  foule  chanter 
devant  Dieu  et  se  prosterner  dans  les  synagogues.  Tous  les  sabbats 
et  les  néoménies,  ils  ressuscitent  de  leurs  tombeaux  et  viennent 
se  soumettre  à  Dieu  et  se  prosterner  devant  lui  (conformément  à 
Ezéchiel,  xlvi,  3  ;  Isaïe,  lxvi,  23)  ». 

Ce  texte,  mal  rédigé,  embarrassé  de  contradictions  inextricables, 
est  évidemment  un  remaniement,  gauchement  exécuté,  du  mor- 
ceau du  Midrasch  sur  les  Psaumes,  et  si,  comme  le  veut  M.  Horo- 
witz,  il  est  de  R.  Eliézer  le  Grand  de  Worms  (1050)  »,  l'altération 
se  comprendra  mieux  encore.  Une  des  modifications  qui  nous  inté- 
ressent le  plus  ici  est  celle  qui  porte  sur  la  défense  de  boire  l'après- 
midi  du  sabbat  :  tandis  que  le  Midrasch  sur  les  Psaumes  parle  de 
tous  les  jours,  ce  passage  restreint  la  défense  au  sabbat.  Ce  chan- 
gement s'imposait,  puisque  la  raison  de  cette  prohibition  y  est 
également  présentée  sous  un  autre  jour  :  ce  n'est  plus,  comme 
dans  le  Midrasch,  tous  les  soirs,  mais  le  sabbat  seulement  que  les 
morts  ont  licence  de  se  répandre  dans  la  campagne.  Mais  ces 
textes  étaient  si  mal  établis,  qu'une  copie  exacte  du  morceau  que 
nous  venons  de  citer,  et  qu'a  bien  voulu  nous  communiquer 
M.  Epstein,  donne,  au  lieu  de  sabbat,  les  mots  :  la  veille  du  sabbat. 
Gomme  les  esprits  des  morts  sortent  de  leur  retraite  le  vendredi, 
avant  la  nuit,  c'était  à  cette  même  heure  qu'ils  devaient  se  res- 
taurer. 

Ces  deux  versions  d'un  même  texte  nous  expliquent  la  discus- 
sion de  R.  Tara  et  de  R.  Meschoullam  :  c'est  un  exemplaire  sem- 
blable à  ce  dernier  qu'avait  entre  les  mains  R.  Meschoullam  et 
qu'il  opposait  à  celui  de  son  contradicteur.  Quant  à  l'opinion  des 
Gaonim  rapportée  par  l'auteur  du  Schibboulé  Halléket,  elle  s'ap- 
puyait sur  la  version  conservée  dans  le  Midrasch  sur  les  Psaumes. 

Une  notice  du  Mahzor  VUrij  (p.  111)-  nous  dira  même  dans 

'  Supplément  au  Beth  Talmitd,  I,  p.  2. 

»  Bien  curieuse  est  la  leçon  de  cet  ouvraf^-e  :  L'usage,  d'après  lui,  de  ne  pas  manger, 
vient  «  de  ce  qu"il  est  dit  :  Qui  mange  l'après-midi  du  sabbat  vole  les  vivants  et  les 
morts  ». 


134  HEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

quelles  régions  respectives  circulaient  ces  différentes  versions  : 
elle  nous  apprend  que  cette  interdiction  de  manger  l'après-midi  du 
sabbat  était  inconnue  des  Juifs  de  Provence  et  de  Narbonne.  C'est 
donc  une  variante  seulement  qui  a  donné  naissance  à  un  rite.  Il 
semble  même  que  c'est  à  R.  Tam  en  personne  qu'on  peut  en  rap- 
porter l'introduction,  car  dans  la  France  du  nord  même  l'usage 
n'était  pas  observé  scrupuleusement  du  temps  de  ce  rabbin  ;  nous 
le  voyons,  en  effet,  se  fâcher  contre  ceux  qui  l'enfreignent  —  à 
leur  insu  probablement  —  et,  semble-t-il,  parce  qu'une  fois  que 
des  Israélites  de  Lorraine  étaient  attablés  l'après-midi  du  sabbat, 
ils  avaient  été  exposés  à  un  danger  * . 

3.  Le  repos  sabbatique  des  damnés  et  la  commémoration 
des  morts. 

On  a  aussi  voulu  rattacher  à  la  croyance  au  repos  sabbatique  des 
damnés  un  autre  usage,  celui  de  la  commémoration  des  morts, 
nVwSj  P-irTn.  Cidkiya,  l'auteur  du  Schibboulé  Halléket,  dit,  en 
effet  :  «  Après  la  lecture  de  la  Haftara,  il  est  d'usage  de  commé- 
morer les  morts.  D'après  mon  frère  R.  Benjamin,  cette  coutum»; 
s'explique  ainsi  :  Comme  c'est  un  jour  de  repos,  même  pour  les 
morts,  il  est  juste  de  rappeler  leur  nom  pour  le  i^epos  et  la  béné- 
diction et  de  prier  pour  eux  »  (§  81,  p.  59  de  l'éd.  Buber), 

Il  semblerait  que  cette  prière  serait  plus  opportune  les  autres 
jours  où  les  morts  ne  jouissent  pas  de  ce  repos.  Cette  explication 
boiteuse  trahit  l'embarras  des  casuistes  à  justifier  l'institution  de 
cet  usage.  Mais  elle  est  personnelle  à  ce  R.  Benjamin  ;  d'ailleurs, 
elle  suppose  établie  universellement  la  coutume  de  célébrer  ce  rite 
tous  les  samedis,  tandis  que  d'après  certains  casuistes,  il  n'est 
prescrit  que  pour  le  jour  de  Kippour.  Nous  ne  voudrions  pas 
insister  outre  mesure  sur  ce  point,  nous  proposant  de  traiter  ici 
prochainement  de  l'histoire  de  cet  usage  de  la  commémoration 
des  morts. 

4.  Le  repos  sabbatique  des  damnés  et  la  prière 'p'^'S.  '^rn-ii:. 

Les  plus  anciens  casuistes  ne  connaissent  à  l'institution  de  cette 
prière  d'autre  motif  que  celui  qu'en  a  donné  Mar  Sar  Schalom 
[Revue,  ibid.,  ô).  Ainsi  Raschi,  Pardès,  4;  R.  Tam,  Sèfer  Haya- 
schar,  620  ;  Mahzor  Vitry,  p.  111  et  179  ;  Méir  de  Rothembourg, 
d'après  le  ■':»n5r!  'o  (éd.  Bloch,  p.  311),  etc. 

'  \o\x  Teschubot  Méir  de  Rothenhuig,éà.^\oc\i.)^.  ;it1 ,  passage  tiré  du  ^ÏT^nir;  'w- 


NOTES  ET  MELANGES  1:35 

Le  Zoliar,  II,  156  a,  cela  va  sans  dire,  s'est  range  à  cet  avis, 
mais,  renchérissant  comme  de  coutume,  il  justifie  le  nombre  des 
phrases  de  cette  prière,  qui  est  de  trois,  en  le  rattachant  à  celui 
de  trois  personnes  qui  seraient  mortes  le  samedi  après-midi, 
Joseph,  Moïse  et  David  '.  11  va  sans  dire  que  la  version  de  cette 
prière  est  celle  qui  distingue  la  liturgie  espagnole. 

5.    Le  mot    9Ep-:X|jiap£sxa6a. 

M,  le  rabbin  Simonsen,  de  Copenhague,  propose  une  très  ingé- 
nieuse hypothèse  pour  expliquer  ce  terme  obscur  qui,  d'après  la 
Vision  grecque  de  saint  Paul,  doit  traduire  le  mot  rr^ibrrr,  Alléluia 
{Revue,  ibid.  J3,  note  2).  Au  Psaume  cxlvii,  après  le  mot  n-'ibbir:, 
la  Peschitto,  pour  rendre  l'hébreu  Tniz'  an::  i:d,  dit  n7:T«b  n:j. 
Qu'on  suppose  que  le  t  ait  été  lu  -i,  et  le  n,  n,  confusions  très  fa- 
ciles en  syriaque,    on   obtient  la  leçon  ec|î£X[jwtp:iia6a,  au   lieu  de 

OcPî^pia'sjiapa. 

Israël  Lévi. 


PINAMOU,  FILS  DE  KAHÎL 


Une  remarquable  communication  de  mon  ami  Edouard  Sachau  à 
l'Académie  de  Berlin  le  1  avril  1892  m'avait  révélé  le  royaume  de 
Scham'al  (bNTO'i),  à  la  frontière  septentrionale  la  plus  reculée  de 
la  Syrie  [Scha'm),  avec  une  capitale  fortifiée  par  une  quintuple 
enceinte,  sur  l'emplacement  du  village  aujourd'hui  appelé  Sen- 
djîrlî.  C'est  sur  cette  terre  inconnue  que  des  recherches  heureuses, 
poursuivies  en  1888,  1890  et  1891  par  le  Comité  de  l'Orient  fondé 
à  Berlin  en  1887,  ont  fait  découvrir  deux  inscriptions  sémitiques, 
où  figure,  incidemment  dans  l'une  à  la  ligne  5,  comme  le  per- 
sonnage principal  dans  l'autre,  le  roi  de  Ya'dî,  b^p  na  irro  (1.  1, 
14,  21). 

Ces  vieux  monuments  nous  font  remonter  au  viii*  siècle  avant 
notre  ère,   le  roi  d'Assyrie  Tiglat  Pileser   III,  qui  y  est  men- 

•  D'après  Schabtat,  30  a. 


136  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

tionné,  ayant  régné  de  745  à  121.  Je  reviendrai  peut-être  dans  la 
Revue  sur  l'interprétation  de  ces  textes  vénérables,  après  que, 
dans  l'hiver  de  1893-1894,  ils  auront  servi  de  thème  à  des  discus- 
sions, à  des  colloquia,  comme  l'on  disait  au  moyen-âge,  dans  ma 
conférence  d'épigraphie  à  l'École  des  hautes-études  (section  des 
sciences  religieuses). 

Pour  aujourd'hui,  je  veux  me  borner  à  quelques  observations 
d'onomastique  sur  les  deux  noms  propres  du  père  et  du  fils  dont 
j'ai  donné  la  transcription  en  caractères  hébraïques.  J'en  cherche- 
rai l'étymologie  exclusivement  sur  le  terrain  du  sémitisme  sep- 
tentrional, sans  entrer  dans  des  polémiques  avec  les  savants  qui 
soutiennent  une  opinion  contraire  ou  différente. 

La  forme  sous  laquelle  se  présente  dans  les  deux  inscriptions 
le  nom  du  roi  se  transcrit  nriD.  La  terminaison  en  est  évi- 
demment cet  Ole  final  si  fréquent  dans  les  noms  propres  de  la 
Nabatée,  de  Palmyre,  de  toute  la  région  araméenne.  On  en  trou- 
verait des  parallèles  en  arabe  et  en  éthiopien.  Le  deuxième  terme  du 
composé  qui  précède  me  paraît  être  n:  ,  contracté  de  û:>2  «  dou- 
ceur, grâce,  délices  ».  Il  semble  que  les  orthographes  Giddeneme 
et  Namgidde  (Schroder,  Die  phi'mizische  Sprache,  p.  128)  repo- 
sent sur  la  faculté  de  supprimer  le  'ain  dans  ce  mot.  La  fragilité 
de  cette  consonne,  lorsqu'elle  n'est  pas  initiale,  est  attestée  par  des 
exemples  comme  mn  «  Ruth»,  pour  m:'i;  nmoï  «  Abdère»,  à 
côté  de  n^^mar;  "«rD  pour  i;:i'D,  dans  le  nom  du  roi  de  Citium 
'jn"''^72D  nûiiaroî  ô  KtTisûç  ;  daus  53  écourté  de  byn  (Schroder,  ibid., 
p.  89  ;  cf.  Annibal,  Asdrubal,  Adherbal)  ;  dans  r-nnujna:» ,  pour 
nnrcrnni'  (Schroder,  ibid.,  p.  89  et  94)  ;  etc.  Quant  au  i)êh  initial, 
ma  première  pensée  avait  été  de  le  rattacher  à  "jd  «  face  »  dont  le 
noun  aurait  été  absorbé  par  le  noun,  première  lettre  de  nam,  de 
telle  manière  que  la  comparaison  avec  Tanit  face  de  Baal  se  serait 
imposée.  Après  mûre  réflexion,  je  crois  plutôt  que  ce  d  représente 
le  vieux  monosyllabe  sémitique  qui  exprime  «  la  bouche  »,  en  hé- 
breu rjEj  avec  ses  analogues  en  arabe,  en  assyrien,  en  éthiopien. 
En  dehors  des  noms  propres  hébreux  bb-'s  et  onrE,  qu'on  explique 
généralement  comme  «  la  bouche  de  l'assemblée  «  et  «  la  bouche 
d'airain  »,  je  suis  amené  à  cette  conclusion  par  deux  ordres  de 
comparaisons  :  tout  d'abord,  si  l'Ancien  Testament  ne  renferme 
aucun  passage  relatif  à  «  une  bouche  de  charmes»  c;*:  -^s  en  re- 
vanche, on  y  lit,  d^une  part,  ■'D-^-irwN:,  «  les  paroles  de  ma  bouche» 
(Proverbes,  xix,  15),  d'autre  part,  ayi-inwN  «  les  paroles  de 
charme  »  ^ibid.,  xv,26).  Ensuite,  il  me  parait  impossible  de  ne  pas 
croire  à  une  analogie  d'origine  entre  iris  et  le  nom  presque  iden- 


NOTES  ET  MÉLANGES  137 

tique  ^my,  porté  par  deux  personnages,  dans  la  partie  araméenne 
du  Corpus  inscriptionum  semiticarum,  n"  213,  1.  1,  3  et  6  (p.  250) 
et  234,  l.  2  (p.  269).  'Ênnamou  me  paraît  désigner  l'œil  plein  de 
charme,  comme  Pinamou  la  bouche  pleine  de  charme.  Le  roi  de 
Ya'di  est,  de  par  son  nom,  le  Chrysostôme  de  son  époque. 

Quant  à  son  père,  il  est  désigné  par  les  trois  consonnes  bnp, 
pour  lesquelles  je  repousse  énergiquement  les  étymologies  à  fleur 
de  terre  qu'on  a  ramassées  sans  peine,  et  je  m'efforce  de  creuser 
plus  avant  dans  un  sol  résistant.  Là  encore  il  ne  faut  pas  s'aven- 
turer à  distance  du  terrain  solide  que  fournissent  les  idiomes  sé- 
mitiques du  nord,  et  je  leur  demande  la  solution  du  problème. 
Seulement  cette  fois,  je  préfère  renverser  les  rôles  en  commençant 
par  émettre  mon  hypothèse  sauf  à  essayer  ensuite  de  la  justifier 
par  les  arguments  qui  me  Tont  suggérée.  A  mes  yeux,  bip  est, 
dans  une  écriture  parcimonieuse,  la  représentation  d'un  nom 
propre,  composé  de  N^ip  «  appelé,  choisi  »  et  de  bx  «  Dieu  »,  équi- 
valent araméen  de  la  locution  hébraïque  nVn^^  n^na  que  les  Sep- 
tante traduisent  ïy.\zy^xhc,  xuptou. 

Le  premier  terme  de  la  composition,  un  participe  passif  de  la 
première  forme,  avec  b.s  comme  second  terme,  a  des  analogies 
dans  l'onomastique  de  l'Ancien  Testament.  Je  citerai,  comme 
extérieurement  semblables,  avant  tout,  bx^-^T^^  (cf.  in^"i"'Tl))  puis 
aussi  bNn32 ,  bwNin3>n ,  bxi^p  ,  peut-être,  en  dépit  de  Tinsertion  d'un 
schin,  bN'^^in??.  Ce  n'est  pas,  du  reste,  le  point  qui  prête  le  plus 
à  la  controverse  et  j'aborde  immédiatement  la  défense  de  ma 
seconde  assertion. 

Est-il  admissible  que  le  nom  du  dieu  bwN  soit  réduit  à  sa  plus 
simple  expression  par  aphérèse  de  Yalif,  le  lâméd  subsistant  seul 
pour  le  rappeler  à  la  fin  d'un  composé?  Ma  réponse  à  la  question 
ainsi  posée  n'est  pas  douteuse  pour  qui  a  lu  mes  prémisses.  Oui 
certes,  et  les  exemples  ne  manquent  pas  à  l'appui  d'une  supposi- 
tion que  je  voudrais  changer  en  certitude  pour  les  esprits  non 
prévenus. 

La  possibilité  de  supprimer  Valif  initial  dans  les  noms  propres 
composés  où  ahoû  «  père  »  et  ahhoû  «  frère  »,  placés  en  tête,  sont 
reliés  par  l'état  construit  à  un  autre  substantif,  est  un  axiome 
admis  généralement  dans  le  vocabulaire  phénicien,  historique  et 
géographique,  de  Syrie  et  d'Afrique.  Mais,  ni  dans  Bomilkar,  ni 
dans  Boùfarîk,  ni  dans  Hiram,  Valif  n'est  protégé  par  son  entou- 
rage. 11  était  isolé  en  avant  et  on  Ta  retranché.  La  ressemblance 
est  déjà  plus  grande,  si  l'on  compare  v^'-'î^y  pour  i^cc^n^r  dans 
la  deuxième  inscription  phénicienne  d'Abydos  [Corpus  inscrip- 
tionum  semiticarum,  pars  prima,  I,  p.  121). 


138  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Mais  où  la  fragilité  de  YaLif,  aussi  bien  dans  élôha  iUâh  arabe") 
«  dieu  »  que  dans  El  ou  //,  apparaît  nettement,  c'est  d'abord  dans 
le  nom  du  dieu  national  des  Arabes  Allah  =  Al-ilâh  «  Le  dieu  », 
dans  l'orthographe  écourtée  bna:^  admise  en  arabe  pour  'Abd 
AUâh  Adh-Dhahabi,  Al-Mouschtarik,  p.  338),  dans  r;b-::*c  pour 
rsbNnro  sur  un  bronze  himyarite  du  Musée  Britannique  Corpus 
inscriptionum  semiticarum,  pars  quarta,  I,  p.  111-11-2),  c'est, 
d'autre  part,  dans  nb'iro,  pour  rrî<i;'r.  sur  le  monument  himya- 
rite 9  du  Louvre,  c'est  dans  l'orthographe  du  Coran  DjahrU  pour 
désigner  l'ange  Gabriel,  dans  l'orthographe  arabe  Roûbil  ('?oûpi{ko^ 
de  Josèphe)  pour  Ruben,  le  fils  aîné  de  Jacob,  avec  une  intention 
étymologique  révélée  par  Josèphe,  dans  le  nom  arabe  bs-.x  I/-bil 
(en  grec  "Ap6rM)  pour  désigner  la  ville  voisine  de  Mossoul,  où  la 
tradition  place  la  victoire  d'Alexandre  sur  Darius,  tandis  que 
l'une  de  ses  homonymes  de  Syrie  est  appelée  dans  Hosée  (x, 
14)  VNSnxrr^D,  c'est  dans  des  transcriptions  grecques  telles  que 
'pâp?i).oç,  'Pâ,s;5Y)).oç  ^en  arabe  Rabbil),  où  il  semble  que  bi<3-i  soit 
devenu  bni,  un  proche  parent  en  onomastique  de  notre  b^p 
fvoir  Corpus  lascripliomim  semilicarum ,  pars  quarta,  I,  p.  29"). 

Je  conclus  en  lisant  Pinamou,  fils  de  Karil,  les  deux  noms 
propres  signifiant,  celui-là  l'homme  à  la  bouche  charmante,  celui- 
ci  l'élu  du  dieu  II. 

IIARTWIG  DeRENBOURG. 


BIBLIOGRAPHIE 


REYUE    BIBLIOGRAPHIQUE 

r-  TRIMESTRE  1892  ET  l"'"  TRIMESTRE  1893. 

{Les  indication:;  en  français  qui  suivent  les  titres  hébreux  ne  sont  pas  de  l'auteur  du  livre, 
mais  de  Vautcur  de  la  bibliographie,  à  moins  qu'elles  ne  soient  entre  rjmllemets.) 

1.  Ouvrages  hébreux. 

mbinJ  ^^Tib-  Halachoth  Gedoloth  nach  dein  Texte  der  Handschrift  der 
Vaticana,  hrsgg.  u.  mit]  krilischeu  Noten  versehen  von  D''  J.  Ilildeshei- 
mer.  IV.  Lieferung,  Einleilung  u.  Register.  Berlin,  impr.  Itzkowski,  1892; 
in-8"  de  p.  viii  +  162  p.  (Publication  de  la  Société  M'kizè  Nirdamim). 

Celte  livraison,  qui  est  la  dernière,  renferme  une  introduction  un  peu 
brève,  puis  la  table  des  versets  bibliques,  des  citations  de  la  Mischna,  de  la 
Toseita,  des  deux  Talmuds,  des  Midraschim  halachiques  et  agadiques,  des 
noms  dés  Gaonim  qui  y  sont  mentionnés  et  uu  vocabulaire  des  mots  difli- 
ciles.  Ces  tables  seront  très  précieuses  pour  les  travailleurs.  Nous  y  aurions 
aimé  un  index  des  matières,  qui  aurait  été  surtout  utile  pour  les  sujets 
qui  sont  par  hasard  traités  dans  les  chapitres  où  on  ne  les  chercherait  pas. 

nm  non  'D,  3«  partie  portant  le  titre  de  Î^O^^p  PEDin,  Commentaire  de 
la  Toset'ta,  Seder  Kodaschim,  par  David  Pardo,  publie  par  Jacob  Matalon. 
Jérusalem,  impr.  Frorakin,  1890;  in-F  de  146  flf. 

nilD  ûnn  'D  Novelles  talmudiques  par  Mosché  Sofer,  édil.  par  Àron 
Simha  Blumentlial.  Jérusalem,  1893  ;  in-P  de  li  ff. 

^ZV  nb^bD  '0  Klilalh  Jofi  entbalt  die  Geschichte  der  berûhmteslen  Rabbi- 
neru.  Schriftstcller  von  Polen  u.  Litthauen,  nebst  kritischen  Anmerkun- 
gen  von  Chaim  Nathan  Dembitzer  [2^  partie].  Cracovie,  impr.  Josef 
Fischer,  1893  ;  in-S"  de  152  ff. 

bxT»::''  by  m-ltar;  m-npb  'd  Recueil  de  documents  divers  sur  l'histoire 
des  Juifs  en  Pologne  aux  xvii"  et  xvni"  siècles,  réunis  par  Ilayyira  Jona 
Gourland  et  publiés  par  David  Kahana,  avec  la  biographie  de  Gourland. 
Odessa,  impr.  Abba  Douchna,  1893;  in-8o  de  93  p. 


140  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

5"D"1  m*lbirb  'o  Sludien  ùber  Saadia  Alfajumis  Leben  von  David  Kohn. 
Cracovie,  impr.  Josef  Fischer,  1891  ;  in-S"  de  36  p. 

Il  esl  fâcheux  pour  cette  étude,  d'ailleurs  bien  faite  et  consacrée  surtout 
au  'JT^jXr!  'O  et  au  ^1?J"  'C  que  la  récente  publication  de  notre  savant 
collaborateur  M.  Harkavj-  lui  enlève  aujourd'hui  tout  intérêt, 

«ITH^i  ^5?^;7j  'O  Origine  des  usages  des  Juifs,  par  Abraham  Eliézer  Hir- 
schowitz.  Vilna,  impr.  Katzenellenbogen,  1892;  in-8°  de  120  p. 

Cet  essai  ne  manque  pas  d'intérêt.  L'auteur  a  eu  la  louable  idée  de  re- 
chercher les  premières  traces,  l'origine  et  l'histoire  des  coutumes  ritué- 
liques.  Malheureusement,  il  n'a  pas  eu  à  sa  disposition  tous  les  matériaux 
indispensables  à  de  pareilles  recherches.  Il  se  contente  trop  facilement  de 
citer  le  Tour,  sans  remonter  plus  haut.  Qu'on  compare,  par  exemple,  le 
chapitre  relatif  au  repos  des  morts,  à  la  prière  p~i  'TPpi^,  avec  ce  que 
nous  en  avons  dit  [Revoie,  XXV,  1).  et  on  verra  tout  de  suite  avec  quelle 
rapidité  a  travaillé  M.  H.  et  le  peu  d'ouvrages  qu'il  a  consultés.  En  outre, 
trop  souvent,  comme  ses  confrères  de  TEst,  il  se  laisse  aller  à  des  déve- 
loppements qui  n'ont  rien  à  faire  dans  une  étude  scientifique.  Enfin,  et 
surtout,  il  a  eu  le  tort  de  faire  une  place  trop  grande,  dans  son  ouvrage, 
aux  prières  rituelles,  qu'on  peut  bien  appeler  usages,  mais  qu'on  ne  s'at- 
tendait pas  à  trouver  ici.  Il  aurait  pu  d'autant  mieux  retrancher  ces 
pages  que  le  travail  a  déjà  été  fait  par  un  maître  dont  l'autorité  est  incon- 
testée. S.  Baer,  dans  son  Ahodat  Israël.  Mais  il  paraît  que  ce  livre  n'est 
pas  connu  en  Russie,  au  moins  de  M.  H.,  qui  y  aurait  beaucoup  appris. 
Malgré  tout,  l'ouvrage  de  M.  H.  rendra  des  services  à  ceux  qui  sont  un 
peu  pressés. 

rm"^ï;p  !lN73  "iT^N/û  Ouvrage  cabbalistique  de  Menahem  Azaria  de  Fano, 
e'dite'  par  Pinbas  Cohen  Friedmann.  Munkac?,  impr.  Blayer  et  Kohn, 
1892;  in-4°  de  'l  p. 

QTDUJ  pn73  "120  Hebrâische  Prosodie  von  Immanuel  France?;,  zum  ersten 
Maie  edirt  u.  mit  einer  Einleitung,  Anmerkungen  u.  Beilagen  versehen 
von  Heinrich  Brody.  Cracovie,  impr.  Josef  Fischer,  1892  ;  in-S"  de  105  p. 
(Publication  de  la  Société  M'Kize  Nirdamîm.) 

"i^p  ubii'  Le  petit  monde,  revue  mensuelle  consacrée  à  la  jeunesse,  publiée 
par  Ben-Jehuda,  J.  Grazovski  et  David  Judelowilz.  1°''  numéro,  te'bet  5653. 
Je'rusalem.  impr.  Abraham  Moïse  Luncz,  1892;  in-8'^  de  16  p. 

Les  directeurs  de  cette  publication  ont  droit  à  la  reconnaissance  des 
hébraisants  pour  les  efforts  qu'ils  ne  cessent  de  faire  afin  de  vulgariser  la 
connaissance  de  l'hébreu.  Ces  efTorts  ont  déjà  été  couronnés  de  succès,  car 
la  jeunesse  des  colonies  Israélites  de  la  Palestine  parle  aujourd'hui  l'hébreu 
avec  une  facilité  remarquable. 

V'^a  ^<-\y  '3  Novelles  sur  le  Schoulhan  Arouch  Hoschen  Mischpat,  par  Sa- 
lomon-Juda  de  Sziget.  M.  Siget,  impr.  Mendel  Vider,  1891  ;  in-f°  de 
165  ff,  -)-  tables  de  matières. 

mn^NTO  ÎTi^r  Asara  Mamurolh  zur  Vcrlheidigung  des  Judenthums, 
seiner  Prophelen  und  Gelehrten.  Drohobicz,  impr.  Zupnik,  1892  ;  in-8" 
de  79  p. 

Verbiage. 

ÏTiûtt  rbî^p  Bibliotheca  Friedlandiana.  Catalogus  librorum  impressorum 
hebrseorum  in  Museo  asiatico  imperialis  Academifç  Scientiarum  Petro- 
politanœ  asservatorum,  Opéra  et  studio  Samuelis  Wiener.  Fasc  I,  N. 
S*-Petersbourg,  Eggers  et  C*%  1893;  in-é"  de  <26  p. 


BIBLIOGRAPHIE  141 

"l'^Stttln  D"1l351P  Bibliographie  des  ouvrages  be'breux  relatifs  aux  noms  de 
localite's,  des  cours  d'eau  et  de  personnes  pour  la  rédaction  des  actes  re- 
ligieux, par  Ad.  Jellinek.  2'^  cdit.  revue  et  augmentée.  Vienne,  Ch.  D. 
Lippe,  1893;  in-S''  de  24  p. 

Il  est  superllu  de  recommander  aux  savants  ces  précieux  index  dont 
l'éloge  n'est  plus  à  faire  et  que  l'auteur  trouve  moyen  d'enrichir  encore. 

D"3tt"lî^  OnUjip  Bibliographie  des  ouvrages  relatifs  au  Mischné  Tora  de 
Moïse  Maïmonide,  par  Ad.  Jellinek.  2°  e'dit.  revue  et  augmente'e.  Vienne, 
Ch.  D.  Lippe,  1893;  in-S»  de  48  p. 

Contient  en  appendice  des  extraits  du  commentaire  de  R.  Malhatia  Hayi- 
çhari  sur  le  Pirké  Abot,  du  DIU  "IT^  'O  de  R.  Isaac  ben  Pulcar,  une 
lettre  du  fils  de  R.  Senior  Zalmann  de  Lodi  sur  son  père  et  Napoléon  1", 
des  extraits  d'un  divan  jérusalmite  et  des  énigmes. 

CnonO  n3p  Biographies  juives,  par  Elazar  Kohn.  Lemberg,  Margosches, 
1892;  in-8»  de  125  £f. 

"Tini  d""l?173  nimïîn  "^"iru;  'o  Rabbi  Meir's  von  Rolhenburg  bisher 
unedirte  Responsen  nach  Ilandschriften  hrsgg.  u.  mit  kritischen  Noten 
versehen  von  Rabbiner  Moses  Bloch.  II.  Lieferung  (Schluss).  Berlin,  impr. 
Itzkowski,  1892  ;  in-8<»  de  p.  245-348.  (Publication  de  la  Société  M'kizè 
Nirdamim.) 

2.  Ouvrages  en  langues  modernes. 

Bâcher  (Wilhelm).  Die  jiidische  Bibelexegese  vom  Anfange  des  zehnten 
bis  zuni  Ende  des  fïinfzehnten  Jahrhunderts.  Trêves,  Sigmund  Mayer, 
1892  ;  in-8"  de  102  p.  (Extrait  de  Winter  et  Wiinsche,  Die  jiidische  Lil- 
teratur  scit  Abschluss  des  Kanous.) 

Bericht  (Elfter)  ûber  die  Lehranstalt  fiir  die  Wissenschaft  des  Juden- 
thums  in  Berlin.  Voran  gehen  :  Die  Responsen  des  R.  MeschuUam,  Sohn 
des  R.  Kalonymus,  von  D»"  Joël  Miiller;  Die  Trauerrede  an  der  Bahre  des 
verewigten  Docenten  Herrn  Dr.  David  Cassel,  von  Dr.  S.  Maybauni. 
Berlin,  impr.  Rosenthal,  1893;  in-4o  de  28  p. 

BissEL  (Edwin-Cone).  Genesis  printed  in  colors,  showing  the  original 
sources,  from  which  it  is  supposed  to  bave  been  compiled,  with  an  intro- 
duction. Hartford,  Conn.,  Belknap  et  Warfield,  1892  ;  in-S"  de  xvi  +  59  p. 

Black  (J.-S.).  Book  of  Judges.  With  map,  introduction  and  notes.  Londres, 
Cambridge  Warehouse,  1892;  in-18  de  112  p. 

Blake  (Buchanan).  How  to  read  Isaiah  ;  being  prophecies  of  Isaiah  (cb.  i- 
xxxix)  arranged  in  order  of  time  and  subject,  with  explanations  and 
glossary.  2«  ëdit.  Edimbourg,  Clark,  1892;  in-8''  de  189  p.  +  1  carte. 

Blake  (Buchanan).  How  to  read  the  Prophets;  being  the  prophecies,  arran- 
ged chronologically  in  their  historical  setting.  With  explanations,  map 
and  glossary.  Part  III.  Jeremiah.  Edimbourg,  Clark,  1892;  in-8°  de 
282  p. 

Blake  (Buchanan).  How  to  read  the  Prophels  ;  being  the  prophecies  arran- 
gea chronologically  in  their  historical  setting,  with  explanations,  maps 
aad  glossary.  Part  \.  Containing  Jonah,  Amos,  Hosea,  Zechariah  (ix-xiv), 


UZ  REVUE  DES  ÉTUDES  JLIVES 

Micha,   Nabnm,  Zephaniah,   Ilabakkuk,  Obadiah   aud  Joël.  Eiliiubourg, 
Clark,  1892:  in-8°  de  244  p. 

Brown  (Francis).  A  Hebrew  and  English  lexicon  of  the  Old  Testament, 
wiih  an  appendix  conlaining  Ibe  biblical  Aramic.  Part  I.  Oxford,  Cla- 
rendon  Press,  1892;  in-4'^  de  xii  +  88  p. 

Gheyne.  Aids  to  the  devout  study  of  criticism.  Part  I.  The  David-Narra- 
tives. Pari  II.  The  book  of  Psalms.  Londres,  Unwin,  1892:  in-8°  de 
396  p. 

Chwolson  [Daniel).  Das  Iczle  Passamahl  Christi  u.  der  Tag  seines  Todes 
nach  den  in  Uebereinstimmung  gebrachten  Berichleu  dor  Synopliker  u.  d. 
Evaugelium  Johannis,  nebst  einem  Anhang  :  Das  Verbaltniss  der  Phari- 
siier,  Sadduciier  u.  der  Juden  ûberhaupt  zu  Je>us  Christus  nach  den  mit 
Ililfe  rabbinischer  Quellen  erlâuterten  Berichten  der  Synopliker.  Saint- 
PéLersbourg  (Leipzig.  Voss),  1892;  in-4°  de  viii  +  132  p.  (Mémoires  de 
l'Académie  impériale  des  Sciences  de  Saint-Pclersbourg,  vii'^  série, 
lome  XLI,  no  1). 

Un    de    nos    collaborateurs   rendra  prochainement  compte  de   ce  savant 
travail. 

COHN  (T.).  Israels  Gemeinschaftsleben  mit  den  vorchristlichen  Vôlkorn. 
Berlin,  Lesser,  1893;  in-S»  de  viii  +  33  p. 

CooKE.  The  history  and  song  of  Deborah,  Judges  iv  and  v.  Oxford,  Clarcn- 
don  Press,  1892:  in-8^  de  57  p. 

DiENSTFERTiG  (Mcyr).  Die  Prophelologie  in  der  Religionsphilosophie  des 
ersten  nachchrislllcben  Jahrhucderls,  unter  bes.  Beachlungen  d. 
Verschiedenheit  in  d.  Auffassungeu  d.  Philon  von  Alexandrien  u.  des 
Flavius  Josephus.  Inaug.  Dissert.  Erlangen-Breslau,  1892;  in-8°  de  33  p. 

DiEULAFOY  (M.).  L'acropole  de  Suse.  d'après  les  fouilles  exécutées  en  1884, 
1885  et  1886.  4«  partie  :  l'Apadana  et  l'Ayadana.  Paris,  Hachette,  1892; 
in-40  de  p.  323  à  446. 

Driver.  A  treatise  on  the  use  of  the  tenses  in  Ilebrew  and  some  other  syn- 
taclical  questions.  3.  éd.,  revised  et  improved.  Oxford,  Clarendon  Press, 
1892;  in-8"'  de  xv  +  306  p. 

EvETTS  (B.  T.  A.).  New  light  on  the  Bible  and  the  Holy  Land,  being  an 
account  of  some  récent  discoveries  in  the  East.  Londres.  Cassel,  1892; 
in-8<»  de  480  p. 

Faye  (E.  de).  Les  apocalypses  juives.  Essai  de  critique  littéraire  et  théolo- 
gique. Paris,  Fischbacher,  1892;  in-S"  de  226  p. 

Gbunbaum  (m.).  Neuc  Beilrâgc  zur  semitischen  Sagenkunde.  Leyde,  Brill, 
1893;  in-8«  de  291  p. 

Grutzmagher  (g.  K).  L'nlersuchuug  \iber  den  L'rsprung  der  in  Zachar. 
9-14  vorliegenden  Profetien.  Inaug-Dissert.  Heidelberg-Berlin,  1892;  in-8» 
de  51  p. 

Halevi  (Jehuda^  Divan.  Eine  Auswahl  in  deulschen  Ueberlragungen  von 
Abr.  Geiger,  S.  Heller,  S.  J.  Kiimpf,  S.  Kristeller.  Jul.  Landsberger, 
M.  Levin,  Mor.  Rappaporl,  Michael  Sachs,  A.  Sulzbach,  Mor.  Slcinscbnei- 


BIBLIOGRAI'UIK  1-43 

der  u.  A.  Berlin,  Hugo  Schiklbcrger,  1893;  in-lS"  de  ITA  p.   (Scbriften 
des  Vereins  fur  jûdische  Ge>;chichte  u.  Lilteralur.  Bd.  l.\ 

Très  jolie  édition,  précédée    d'une    élude  populaire  de  M.   Karpeles  sur 
l'auleur. 

Hamburger  (J.).  Keal-Encyclopadie  fur  Bibel  u.  Talmud.  Supplement- 
band  HI  zur  Abieilung  I  u.  H,  nebst  Hauptregisler,  deutscb  u.  bebraisch, 
zu  allen  Teilen  dièses  Werkes.  Leipzig,  K.  F.  Kôbler,  1892  ;  in-S"  de  15G  p. 

HosMEH  (J.  K.).  Ilistoria  de  los  judios  de  las  edades  antigua,  média  y  mo- 
derna.  Version  espanola ,  por  Eduardo  Toda.  Madrid,  Murillo,  1892; 
in-4'J  de  xxn:  +  436  p. 

Jabrosbericbt  des  jiidiscb-thcologiscben  Scmiuars  Fraenckerscbcr  Slilluug. 
Voran  gebt  :  Anleitung  und  Tabcllen  zur  Vcigleicbuiig  jûdiscber  u.  cbnsl- 
licher  Zeitangaben,  von  D'-  B.  Zuckermann,  brsgg.  von  D''  M.  Braiin. 
Breslau,  Scbesiscbe  Bucbdruckerei,  1893  ;  in-8°  de  4G  p.  +  2  tables  +  xi  p. 

Kampfmeyer  (G.)-  Aile  Namen  im  heutigen  Palaslina  u.  Syrien.  I.  Nanien 
des  Alten  Testaments.  luaug.  Dissert,  Leipzig,  1892  ;  in-8o  de  94  p. 

KiRKPATRiCK.  The   doctrine    of  Ibe  prophcts.   Londres,  Macmillan,   1892; 

in-8o  de  540  p. 
KôHLER  (A.).  Lebrbuch  der  bibl.  Geschicbte  d.   Alten  Teslam.  IL  Ilaifte, 

2.  Tbl.  3.  Lfg.  Leipzig,  Deichert,  1892  ;  in-8'^  de  p.  313-674. 

KoiîUT  (Alexander).  Discussions  on  Isaiab  (cb.  LU,  13  (L,  and  ch.  LllP, 
from  an  unpublished  manuscript  of  Ibe  sixteenlh  cenlury  witb  prelimi- 
nary  notes.  Chicago,  impr.  Reform  Advocatc,  [1893];  in-18  de  33  p. 

KOHUT  (Alexander).  Sccular  and  tbeological  studies.  Tbc  extent  to  wbicb 
Ibey  are  both  necessary  for  the  rabbi  ;  tbe  nature  and  varietics  of  sucb 
studies.  S.  1.  n.  d.;  in-8°  de  13  p. 

KUTNA  (S.  N.).  Die  Schœpfungslehre  der  mosaischen  Urkundc  innerbalb  der 
Grenzen  der  blossen  Vernunft.  Przcmysl,  impr.  Schwarz,  1892  ;  in-8° 
de  70  p. 

C'est  un  commentaire  scientifico-philosophico-lhéologique  des  premiers 
récils  de  la  Genèse.  Dans  ces  considérations,  où  lemidrasch  et  la  mythologie 
se  coudoient  sans  se  fâcher,  il  ne  manque  pas  d'aperçus  intéressants.  11  y 
a  malheureusement  des  gens  qu'ell'rayent  ces  hautes  spéculations.  Ont-ils 
tout  à  fait  tort  ? 

L.*.G.\RDE  (Paul  de).  BibliotheCiB  syriacœ  a  P.  de  L.  coUecUe  quœ  ad  philo- 
logiam  sacram  pertinent.  Gœtticguc,  Dictericb,  1892;  iu-4o  de  403  p. 

Leroy-Beaulieu  (Anatole).  Les  Juifs  et  l'antisémitisme.  Israël  chez  les  na- 
tions. Paris,  Calmann-Levy,  1893;  in-18  de  xi  -f-  441  p. 

Leroy-Beaulieu  (Anatole).  The  Jew  and  anti-semitism,  translated  from  tbe 
Revue  des  Deux-Mondes  by  Rev.  A.  Blum-  Los  Angeles,  Cincinnati  et 
Chicago,  Léo  Wise,  ,1893];  in-8"  non  pagine-. 

Lewin  (Louis).  Rabbi  Simon  ben  Jochai,  ein  bistorisches  Zeilbild  ans  dem 
zweitennachchrisllichen  .Jahrhundcrt  nach  den  Quellen  dargeslellt.  Franc- 
fort s/M.,  J.  Kauffmann,  1893  ;  in-8'^  de  94  p. 

Lombay  (G.  de).  Au  Sinaï.  Palestine  et  Syrie.  Paris,  Leroux,  1892;  in-18 
de  225  p. 


144  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Macpherson  (J.).  The  universal  Bible  diclionary,  based  upon  the  lalest  au- 
thorities.  Londres,  Hadder,  1892  ;  in-S^  de  350  p. 

Maurice  (F.-DO.  Patriarchs  and  lawgivers  of  Ihe  Old  Testament.  Nouvelle 
e'dition.  Londres,  Macmillan,  1892;  in-8'*  de  380  p. 

Maurice  (F.-D.).  The  prophels  and  klngs  of  the  Old  Testament.  Nouv. 
e'dit.  Londres,  Macmillan,  1892  ;  in-8°  de  514  p. 

Meyer  (F.-B.;.  Moses,  the  servant  of  God.  Londres,  Morgan,  1892;  in-8° 
de  192  p. 

MONTEFiORE  (C.-G.)-  Leclures  on  the  origin  and  growth  of  religion  as 
illustrated  by  the  religion  of  the  ancient  Ilebrews.  Londres,  Williams  et 
Norgate,  1892  ;  in- 8°  de  xxiv  +  576  p. 

Neteler  (B.).  Stellung  der  altteslamentlichen  Zeitrechnung  in  der  alto- 
rientalischen  Geschichte.  2.  Untersuchung  der  Zeitraûme  von  Salomo  bis 
Noe.  Munster,  Theissing,  1893  ;  in-8«  de  23  p. 

NicoL.  Récent  explorations  in  Bible  lands.  Edimbourg,  Young,  1892  ;  in-12 
de  76  p. 

Niese  (B.).  Josephi  epitomse  adhuc  inedilse  pars  V.  Marbourg,  1892;  in-4* 
de  p.  145-209. 

Peters  (D.  iSorbert  i.  Die  Prophétie  Obadjahs,  untersucht  u.  erklart.  Pader- 
born,  Schonigh,  1892  ;  ih-8o  de  vu  +  140  p. 

Popper  (Morizi.  Die  Inschriften  des  alten  Prager  Judeafriedhofes.  I.  Helt. 
Brunswick,  impr.  Appelhans  et  Pfenningstorflf,  1893  ;  in-8°  de  42  p. 

POERTNER  (B.).  Die  Autoritat  der  deuterocanonischen  Biicher  des  Alten 
Test.,  nachgewiesen  aus  den  Anschauungeu  d.  paliistin.  u.  hellenist. 
Judenthums.  Munster,  Aschendotï,  1893  ;  in-8o  de  67  p. 

Pressel  (W.).  Der  Thalmud  vor  dem  Schwurgericht  am  Ende  des  XIV. 
Jahrhund.  Leipzig,  Dôrffling,  1893;  in-8°  de  68  p. 

Programm  der  Realschule  der  israelitischen  Gemeinde  (Philanthropin)  zu 
Frankfurt  A/M.  Ostern  1893.  Contient  :  \°  Die  Arithmetik  des  Elia  Mis- 
rachi,  von  Gustav  Wertheim  ;  2°  Schulnachrichten,  vom  Direcklor  D"" 
Baerwald.  Francfort,  impr.  Kumpf  et  Reis,  1893  ;  in-4"  de  76  p. 

Ra\vicz  (M.).  Der  Traktat  Sanhédrin  (nach  der  Wiener  Ausgabe  vom  1867) 
ins  Deutsche  ûbertr.  u.  mit  erlautern.  Anmerkungen  versehen.  Franc- 
fort s/M,  A.  J.  Hofmann,  1892  ;  in-8o  de  ix  +  543  +  xviii  p. 

Renan  (Ernest).  Histoire  du  peuple  d'Israël.  Tome  IV.  Paris,  Calmann- 
Lévy,  1893  ;  in-8«  de  407  p. 

RuBiN  (S.).  Heidenthum  u.  Kabbala.  Die  Kabbal.  Myslik,  ihrem  Ursprung 
•wie  ihrem  Wesen  nach,  griindlich  aufgestellt  u.  populiir  dargestelll. 
Vienne,  Bermann  et  Altmann,  1893  ;  in-8o  de  114  p. 

Ryles  (H.-E.).  The  books  of  Ezra  and  Nehemiah.  Wilh  introduction,  notes 
and  maps.  Londres,  Cambridge  Warehouse,  1893  ;  in-12  de  400  p. 

Sacerdote  (Gustavo\  I  codici  ebraici  délia  Pia  casa  dei  neofiti  in  Roma. 
Rome,  impr.  de  l'Acad.  dei  Lincei,  1893;  iu-4'^  de  41  p.  (Tirage  à  part  des 


BIBLIOGRAPHIE  445 

Memorie  doUa  Clas.-!c  dL  Scienze  morali,  storiclie  e  filûlogiclie  de  la  Reale 
Accademia  dei  Liucei,  vol.  X,  parte  1*.) 

SCHOLz  (A.).  Zoit  u.  Orl  der  Entslehung  dcr  Bûcher  d.  Allen  Testam. 
Wurzbourg,  1893  ;  in-4"  de  35  p. 

ScHULTZ.  Old  Testament  Iheology,  Ibe  religion  of  révélation  in  ils  pre- 
christian  stage  of  development.  Translated  from  the  4th  german  edit.  by 
J.  A.  Paterson.  Edimbourg,  Clark,  1892  ;  in-8°  de  920  p.  2  vol. 

Siegfried  et  Stade.  Hebr.  Wôrterbucb  zum  Allen  Testannent.  Leipzig, 
Veit,  1893  ;  in-8°  de  p.  481-978.  Conlient  la  dernière  partie. 

Spexçer  (F.-E.).  Did  Moses  write  the  Pentaleucb  afler  ail?  Londres, 
Stock,  1892  ;  in-8"  de  288  p. 

Thorne  (h.).  Notable  sayings  of  the  great  teacher  and  clher  biblical  stu- 
dios ;  fifty-two  bible  readings.  Sterling,  Drummond,  1892  ;  in-S*  de  250  p. 


3.  Publications  pouvant  servir  à  Vhistoire  du  Judaïsme  moderne. 

Antisemiten-Spiegcl.  Die  Anlisemiten  im  Lichte  des  Christenthums,  des 
Rechtes  und  der  Moral.   Danzig,  A.  W,  Kafemann,  1892  ;  in-8°  de  387  p. 

BiMSENSTEiN  fD''  Albert).  Judaïsme  et  Autise'mitisme.  Paris,  Durlacher, 
1893  ;  in-8°  de  32  p. 

Crémieu-Foal  (Ernest).  La  campagne  antisémiliquo  :  les  duels,  les  respon- 
sabilités ;  mémoire,  avec  pièces  justificatives.  Paris,  impr.  Alcan-Le'vy, 
1892  ;  in-4"  de  103  p. 

HiRSCH  (Mendel).  Das  reine  Menschenlhum  im  Lichte  des  Judenlhums. 
Francfort  s/M.,  J.  Kaufifmann,  1893  ;  in-8''  de  36  p. 

Kahn  (Zadoc).  Religion  et  patrie,  deux  allocutions  prononcées  à  la  syna- 
gogue de  la  rue  de  la  Victoire,  novembre  1892  (1°  au  service  funèbre  du 
capitaine  Cre'mieu-Foa  et  du  lieutenant  Valabregue  ;  2"  à  l'occasion  du 
de'part  des  se'minaristes  israe'lites  pour  l'armée).  Paris,  impr.  May  et 
Motteroz  [1892j  ;  iu-8"  de  32  p. 

KA.TZ  (Albert).  Der  wahre  Talmudjude.  Die  wichtigsten  Grundsalze  des  lal- 
mudischen  Schrifftthums  ùber  das  sittliche  Leben  des  Menschen  ùbersetz 
u.  in  70  Capileln  systematisch  geordnet.  Berlin,  Aponant,  1893  ;  in-8* 
de  XV  +  165  p. 

Lafargues-Decazes.  L'Hermine.  Paris,  Savine,  1893;  iu-18  de  324  p. 

C'est  un  tableau  de  la  magistrature  juive  qui  ne  manque  pas  de  saveur. 
•  Le  héros,  Gis  d'un  israélite  bordelais,  fait  payer  en  faveurs  gratuites,  à 
une  coureuse,  l'ordonnance  de  non-lieu  dont  elle  est  l'objet,  bien  qu'elle  ait 
été  prise  en  llagrant  délit  de  tentative  d'assassinat.  Il  fait  avorter  la  l'emme 
d'un  magistral  qu'il  a  détournée  de  ses  devoirs.  Chargé  de  poursuivre  ce 
crime  dont  il  a  été  l'inspirateur,  il  en  accuse  un  de  ses  anciens  rivaux.  Il 
abuse  de  ses  pouvoirs  pour  enlever  à  ce  dernier  des  dossiers  importants 
sur  un  ministre  en  exercice  et  dont  il  se  sert  ensuite  pour  s'assurer  l'impu- 
nité de  ses  prévarications.  >  Ce  compte  rendu,  que  nous  empruntons  au 
Polijliiblion,   Jicviie  bthliographirjue  universelle,    1893,  quatrième  livraison, 

T.  XXVI,  N"  51.  lu 


1',G  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

est  suivi  de  cette  apprécialion,  qui  donnera  le  ton  d'une  certaine  presse  qui 
s'ellorce  de  paraître  impartiale  :  >  Non,  franchement,  ce  n'est  pa?  possible,  et 
M.  Lafarpue-Decazes  exaprère  :  si  l)as  tombée  que  soit  notre  mafristralare 
épurée,  elle  ne  contient  pas  des  maltaileurs  d'un  pareil  calibre.  Celle  exa- 
gération diminue  la  portée  morale  et  le  caractère  venj^eur  de  son  livre.  Il 
pouvait  montrer  (ce  qui  est  vrai)  que  le  juif,  termite  démoralisateur,  a 
aujourd'hui  pénétré  dans  tous  les  rouages  de  notre  monde  politique  et 
social,  et  qu'il  y  poursuit  implacablement  son  œuvre  de  décomposition.   • 

Landsberg  I  m.  G.^.  History  of  the  persécutions  of  Ibe  Jews  in  Russia. 
4"  éd.  [Boston,  Ilollander,  Bradsbaw  et  Folsom,  1892]  ;  in-S"  de  G2  p.  -|- 
divers  appendices  entremêlés  de  portraits  et  d'annonces. 

Low  (Immanuel).  Mozes  Aldasa,  predikacio.  Szegedin,  [1892   ;  in-4''de20p. 
Souvenir    aux   savants    Israélites    décédés    dans   l'année    1892  :    Chajim 
Nalan   Dembizer,    Isidore   Loeb,    David   Cassel,    Jacob  Lévy,    Juda    Leb 
Gordon. 

PoHi.MANN  (Walter>  Das  Judenlhum  und  sein  Recht.  6*=  édition.  Neuwied 
a/Rhein  et  Leipzig,  Louis  Heuser,  1893  ;  in-8"  de  43  p. 

ScHRATTENHOLz  'Josef).  Gfosspapa  Stocker.  Ein  Beitrag  zur  Descendenz- 
Theorie  des  modernen  Antisemitismus.  Dùsseldorl',  impr.  Ed.  Linlz, 
[1892]  ;  in-8°  de  35  p. 

Simon.  Die  rituelle  Schlachtmethode  der  Juden  vom  Slandpunkt  der  Krilik 
u.  der  Gesctiicbtc.  Francfort  s/M.,  J.  Kauffmann,  1893;  in-S"  de  41  p. 

Situation  [La)  de«  Juifs  en  Russie,  rapport  adresse'  au  gouvernement  des 
Etats-Unis  par  ses  délègues,  MM.  J.-B.  Weber  et  D""  W.  Kempster  (tra- 
duit de  ranglai><).  S.  1.  n.  d.  [Paris,  1893]  :  in-S"  de  147  p. 


LoDS  (Adolphe).  Le  livre  trEnocli,  frag,nents  grecs  dt'couverts  à  Akhmin  [Haute- 
Egypte],  publiés  avec  les  variantes  du  texte  éthiopien,  traduits  et  annotés.  Paris, 
Ernest  Leroux,  1892  ;  in-S"  de  lxvi  +  198  p. 

On  pourrail  composer  une  petite  bibliothèque  avec  les  écrits  di- 
vers auxquels  a  donné  naissance  la  découverte  déjà  fameuse  de 
M.  Bouriant.  C'est,  d'ailleurs,  un  des  spectacles  les  plus  curieux 
offerts  aujourd'hui  parla  science  que  cet  empressement  fébrile  à  tirer 
parti  des  trouvailles  récentes  :  c'est  à  qui  arrivera  le  premier  dans  ce 
steeple-chase  d'un  nouveau  genre,  et  11  semble  que  Ton  doive  gagner 
ses  galons  a  distancer  ses  rivaux  de  quelques  longueurs.  Il  ne  faut 
pas  trop  se  plaindre  de  celle  précipitation,  si  elle  a  pour  effet  de 
réveiller  l'activité  scienliiique  et  si  n'entrent  dans  la  lice  que  ceux 
qui  se  sont  déjà  entraînés  par  une  préparation  sérieuse. 

M.  L.  se  préparait  depuis  longtemps  à  l'élude  du  livre  d'Enoch,  et 
la  découverte  de  M.  Bouriant  a  été  une  bonne  fortune  pour  lui, 
puisqu'elle  ajoutait  rintcrèl  de    l'actualité   au    travail   qu'il   avait 


BIBLIOGRAPHIE  1 'i7 

entrepris.  Peut-être  y  avons-nous  perdu  un  excellent  ouvrage  que 
l'auteur  n'aura  plus  le  courage  d'écrire.  Il  faudra,  probablement, 
nous  contenter  du  commentaire  partiel  que  nous  donne  aujourd'hui 
M.  L.,  au  lieu  d'un  traité  complet  dont  il  avait  sans  doute  réuni  les 
éléments,  à  moins  qu'une  nouvelle  bonne  fortune  ne  mette  au  jour 
le  complément  de  ces  fragments  grecs.  Par  là  aussi  s'explique  la 
composition  de  cette  monographie,  dont  l'aspect  déroute  un  peu, 
surtout  dans  l'introduction  et  le  commentaire.  Dans  l'introduction, 
une  étude  générale  sur  le  livre  d'Enoch,  qui  ne  tire  aucun  éclaircis- 
sement nouveau  des  fragments  grecs  qui  viennent  dêtre  exhumés  ; 
dans  le  commentaire,  des  notes  de  toute  nature,  étudiant  le  fond 
comme  la  forme  et  qui  le  plus  souvent  ne  se  rattachent  aucunement 
aux  leçons  fournies  par  le  texte  de  Gizeh.  On  voit  que,  somme 
toute,  nous  reprochons  à  M.  L.  sa  trop  grande  complaisance  pour 
nous. 

Disons  tout  de  suite  que  M.  L.  est  au  courant  de  tous  les  travaux 
qui  ont  devancé  le  sien.  Le  résumé  qu'il  trace  de  l'histoire  du  texte 
et  des  questions  relatives  à  l'origine  du  livre  dit  tout  ce  qu'il  faut  en 
savoir.  Si,  cependant,  nous  étions  en  présence  d'un  véritable  traité 
sur  la  matière,  nous  demanderions  à  l'auteur  la  permission  de  ne  pas 
l'en  croire  sur  parole  sur  la  distribution  qu'il  fait  des  diflerents  mor- 
ceaux de  cette  œuvre  composite.  Pour  lui,  celte  apocalypse  est 
constituée  de  fragments  ainsi  répartis:  1°  Les  paraboles  (ch.  37-71, 
avec  des  interpolations),  ayant  un  auteur  spécial  ;  2"  les  morceaux 
relatifs  à  Noé  (54,  7-55;  60;  65-69,  25),  interpolations  ultérieures, 
ainsi  que  les  ch.  106,107  61108;  3°  les  ch.  1-16  ;  21-36;  72-82;  91, 
1-11  ;  92  ;  94-105,  qui  forment  le  corps  même  du  livre.  Quant  aux 
deux  grandes  visions,  si  elles  ne  faisaient  pas  partie  de  l'ouvrage 
principal,  elles  lui  étaient  certainement  apparentées. 

M.  L.  s'en  lie  plus  à  ses  vues  personnelles  pour  la  question  de  date. 
Il  a  très  bien  reconnu  qu  Enoch  s'inspire  de  Daniel  et,  par  consé- 
quent,  est  postérieur  à  la  révolte  des  Macchabées  ;  qu'ayant  été 
écrit  en  hébreu  ou  en  araméen,  il  ne  peut  être  l'œuvre  d'un  chré- 
tien. Ces  points  sont  aujourd'hui  acquis.  Peut -on  faire  un  pas 
de  plus  et  assigner  une  date  précise  à  ces  morceaux  qui  cons- 
tituaient l'original  ?  M.  L.  essaie  d'y  arriver  en  étudiant  l'état 
social  que  retlèle  cette  apocalypse.  Que  peuvent  être  ces  pécheurs 
qu'Enoch  poursuit  de  sa  haine,  riches,  occupés  uniquement  à 
boire  et  à  manger  et  à  jouir  de  toutes  les  voluptés,  qui  violent 
la  loi,  nient  la  rémunération  après  la  mort,  ne  croient  pas  aux 
«  tables  célestes  »  où  sont  inscrits  les  péchés  des  mortels,  sinon  des 
Saducéens  vus  par  un  llasid'?  Ces  épicuriens  cruels  sont  au  pouvoir, 
donc  sont  ceux  qui  ont  profité  de  la  rupture  de  Jean  Ilyrcan  avec  les 
Pharisiens.  Cette  peinture  conviendrait  mal  à  l'époque  qui  précéda 
ce  grand  revirement,  alors  que  les  Hasidim,  malgré  leurs  défiances 
croissantes,  pouvaient  encore  espérer  le  triomphe  de  leurs  idées.  Eu 
outre,  les  païens  n'apparaissent  pas  comme  les  maîtres  d'Israël,  ce  qui 


148  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

exclut  immédiatemenl  l'époque  des  Macchabées  et  les  temps  qui  ont 
suivi  l'intervention  des  Romains  dans  les  affaires  juives.  Le  livre  a 
donc  été  écrit  dans  les  dernières  années  du  ii'^  siècle  ou  dans  la  pre- 
mière moitié  du  i*^'^  siècle  avant  l'ère  chrétienne.  C'est,  d'ailleurs,  à 
ces  conclusions  que  sont  déjà  arrivés  Hilgenfeld  et  M.  Baldensperger. 

Nous  nous  défions  de  ces  constructions  savantes,  car  il  est  si 
facile  d'en  élever,  d'après  les  mêmes  procédés,  et  de  toutes  différentes. 
Tout  d'abord  M.  L.  suppose  acquis  ce  qui  est  plus  contestable  qu'on 
ne  croit  d'ordinaire.  Est-on  si  sûr  que  cela,  eu  effet,  que.  aux  yeux 
des  Pharisiens,  les  Saducéens  aient  été  des  espèces  de  païens,  les 
héritiers  directs  des  grécolàtres  voués  à  l'exécration?  Les  discussions 
que  soutenaient  les  deux  partis,  au  rapport  du  Talmud,  ne  nous  lais- 
sent aucune  impression  de  ce  genre.  On  n'aurait  pas  disputé  sur  des 
points  de  détail,  si  on  avait  été  séparé  par  un  fossé  si  profond-  Et  si 
ce  sont  les  Saducéens  que  vise  l'auteur,  pourquoi  pas  la  moindre 
allusion  aux  prêtres,  qui  en  étaient  les  chefs?  Enfin,  à  moins  de 
croire  que  ce  Hasid  soit  un  Pharisien  parfait,  qui  a  épousé  toutes 
les  haines  de  son  parti,  les  rivalités  des  Saducéens  et  des  Pharisiens 
ont-elles  à  ce  point  inquiété  les  esprits,  fait  voir  tout  en  noir  et 
attendre  je  ne  sais  quel  cataclysme?  Or,  un  Pharisien  pur  sang,  cet 
auteur  ne  peut  l'être,  ce  n'est  pas  un  docteur  de  lécole,  il  est  trop 
imprégné  de  la  culture  grecque.  Les  traits  de  sa  description  convien- 
nent infiniment  mieux  aux  hellénistes  :  «  le  jour  de  l'angoisse  »  n'est 
pas  dans  l'avenir,  c'est  la  crise  présente,  où  les  pieux  sont  persé- 
cutés ;  «  le  jour  où  disparaîtront  tous  les  ennemis  et  où  les  justes 
seront  sauvés»,  est  celui  qui  verra  la  punition  des  grécolàtres.  Si 
l'auteur  se  couvre  du  nom  d'Enoch,  c'est  qu'Enoch  appartient  à  une 
génération  de  pécheurs  et  seul  a  mérité  les  faveurs  de  Dieu,  de  même 
que  les  Hasidim,  les  pieux,  sont  peu  nombreux  en  regard  des  philhel- 
lènes.  Ce  qu'il  veut,  c'est  surtout  rassurer,  consoler  et  encourager 
ceux  qui  sont  restés  fidèles  à  leur  Dieu,  qui  ne  se  sont  pas  révoltés 
contre  lui.  et  ce  dessein  se  comprenait  surtout  dans  cette  période 
troublée  où  les  hellénistes  avaient  repris  le  dessus.  Si  les  païens  ne 
sont  pas  voués  à  la  malédiction,  et  même  sont  traités  avec  plus  de 
sympathie  que  ces  ennemis  intérieurs,  c'est  que  ces  frères-trans- 
fuges sont  doublement  coupables.  Si.  enfin,  l'auteur  ne  paraît  pas 
savoir  que  son  pays  est  encore  soumis  à  la  Sj'rie,  c'est  qu'au  fond, 
les  Hasidim  tenaient  moins  à  leur  indépendance  nationale  qu'à  leur 
indépendance  religieuse  et  étaient  assez  indifférents  à  leur  situation 
politique,  qui  durait  depuis  des  siècles. 

On  voit  comme  il  est  facile  de  tirer  des  conclusions  historiques  de 
ces  tableaux  dont  le  vague  ouvre  libre  carrière  à  l'imagination. 

Où  nous  serons  tout  à  fait  d'accord  avec  M.  L.,  c'est  dans  la  déter- 
mination de  la  patrie  de  cet  ouvrage.  Il  n'est  pas  douteux  que  ce 
pays  est  la  Palestine,  et  quand,  s'en  p«'enant  à  l'opinion  de  M.  de  la 
Faye,  qui.  ne  retrouvant  pas  dans  le  livre  d'Enoch  ce  qui  constitue 
«la  substance  du  judaïsme  palestinien»,  en  fait  une  œuvre  judéo- 


BIBLIOGRAPHIE  149 

alexandrine,  il  lui  demande  «  si  nous  connaissons  assez  bien  ce  qui 
constitue  la  substance  du  judaïsme  palestinien  pour  déterminer  ainsi 
ce  qui  peut  et  ce  qui  ne  peut  pas  avoir  été  écrit  en  Terre-Sainte  », 
nous  applaudissons  sincèrement. 

Les  chapitres  consacrés  à  l'étude  comparée  des  différents  textes  du 
livre  d'Enoch  sont  traités  avec  beaucoup  de  soin  et  une  minutie 
digne  de  tout  éloge.  M.  Lods  montre,  par  des  exemples  topiques, 
que  le  texte  grec  qui  a  servi  au  traducteur  éthiopien  (A.)  et  celui  de 
Gizeh  (G.)  sont  de  la  même  famille,  et  que  ni  A.  ni  G.  ne  dépendent 
de  celui  dont  le  Syncelle  nous  a  conservé  des  fragments  (S.).  S.  est 
presque  toujours  en  désaccord  avec  A.  lorsque  A.  diffère  de  G.,  ce 
qui  prouve  que  G.  est  plus  exact  que  A.  et  est  resté  plus  fidèle  à 
l'original.  D'ailleurs,  beaucoup  de  variantes  de  l'éthiopien  peuvent 
être  mises  sur  le  compte  du  traducteur  éthiopien  et  des  copistes  de 
la  traduction.  Le  nouveau  texte,  d'une  part,  rend  au  texte  éthiopien 
une  valeur  qu'on  lui  déniait,  et,  d'autre  part,  met  en  garde  contre  les 
déductions  qu'on  tirait  trop  facilement  de  menues  particularités  de 
cette  traduction  :  cette  version  a  été  faite  avec  soin,  mais  par  un 
auteur  qui  ne  craignait  pas  d'écourter  et  de  modifier  quand  il  lui  en 
prenait  fantaisie. 

Le  texte  de  Gizeh  nous  éclairera-t-il  enfin,  sur  la  langue  dans  la- 
quelle a  été  rédigé  l'original?  M.  L.  examine  ce  point  avec  beaucoup 
de  sagacité.  Il  reconnaît,  d'abord,  que  l'auteur  lisait  la  Bible,  non  dans 
la  version  des  Septante,  mais  dans  l'hébreu.  D'autre  part,  le  traduc- 
teur, par  une  méprise  heureuse,  a  gardé  des  expressions  de  l'original 
qui  sont  incontestablement  sémi-tiques  ;  telles  sont  [xaôpopa,  «  désert  », 
«ouxtt,  a  antimoine  ».  Mais  M.  Lods  n'ose  pas  opter  entre  l'araméen  et 
l'hébreu.  Nous  devinons  l'origine  de  ses  scrupules  :  il  était  arrêté  par 
les  arguments  de  M.  Joseph  Halévy,  qui  soutient  que  le  livre  d'Enoch 
a  été  écrit  en  hébreu.  M.  Halévy  s'appuie  surtout  sur  les  étymologies 
de  l'auteur,  qui  révèlent  sa  connaissance  de  l'hébreu,  comme  celle  du 
mot  Yared  par  «  descendre  »,  de  Hermon,  par  «  Herem  »,  etc.  Mais 
ces  preuves  ne  me  semblent  aucunement  convaincantes:  tout  Juif  qui 
écrivait  alors,  même  à  Alexandrie,  savait  assez  la  langue  sacrée  pour 
découvrir  de  pareilles  étymologies.  L'auteur  en  fait  aussi  qui  suppo- 
sent la  connaissance  de  l'araméen,  comme,  par  exemple,  celle  de 
Arakiel,  qu'il  dérive  de  Arka  «  terre  ».  En  sommes-nous  réduits  à  ne 
point  pouvoir  nous  décider?  Aucunement,  des  mots  comme  Madbora 
et  Phouca  ne  laissent  aucun  doute  :  ils  ont  une  terminaison  nette- 
ment araméenne.  L'auteur  était  d'autant  plus  incité  à  se  servir  de 
celte  langue  qu'il  s'inspirait  du  livre  de  Daniel,  écrit  en  araméen, 
pour  la  plus  grande  part. 

Ce  qui  donne  le  plus  d'intérêt  à  la  découverte  de  Gizéh,  c'est  que 
nous  ne  sommes  plus  réduits  maintenant  à  la  traduction  éthio- 
pienne, dont  la  fidélité  et  la  précision  pouvaient  toujours  être  sus- 
pectées, pour  l'étude  du  ch.  22,  qui,  comme  l'a  bien  vu  M.  L.,  est 
une  des  pages  les  plus  importantes  pour  l'histoire  des  doctrines 


loO  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

eschalologiques  chez  les  Juifs.  Ce  chapitre  esl  la  première  descrip- 
liou  minutieuse  de  la  vie  d'oulre-lombe  et  le  premier  essai  de  coor- 
dination des  idées  éparses  sur  la  rémunération  future.  Au  couchant 
est  une  haute  montagne,  dans  laquelle  sont  pratiqués  quatre  creux 
profonds,  trois  obscurs,  l'autre  lumineux.  Ces  cavités  sont  destinées 
aux  esprits  des  âmes  des  morts,  qui  s'y  rassembleront  et  y  seront 
enfermés  jusqu'au  jour  du  grand  jugement.  Chacun  de  ces  empla- 
cements est  aflecté  à  une  catégorie  de  morts  ;  l'un,  où  se  trouve  la 
source  d'eau  lumineuse,  aux  esprits  des  justes  ;  un  autre  aux  pé- 
cheurs qui  n'ont  pas  été  punis  sur  la  terre,  et  dont  les  esprits  souf- 
friront des  tourments  et  supplices  des  esprits  maudits  jusqu'au 
grand  jour  du  jugement,  un  troisième  aux  esprits  de  ceux  qui  de- 
mandent justice,  pour  avoir  été  tués  aux  jours  des  pécheurs;  le 
quatrième  aux  esprits  des  hommes  impies  qui  ne  seront  pas  punis 
au  jour  du  jugement,  mais  qui  n'auront  pas  part  à  la  résurrection  ; 
M.  L.  s'arrête  longuement  sur  cette  description,  dont  tous  les 
détails,  d'ailleurs,  sont  loin  d'être  clairs,  et  en  lire  des  conclusions 
qui  méritent  d'être  disculées.  M.  L.  remarque,  d'abord,  que  l'au- 
teur du  livre  d'Enoch  était  fam.iliarisé  avec  la  mythologie  grecque, 
c'est  ainsi  que  les  fils  de  Dieu  sont  par  lui  assimilés  aux  Titans;  le 
séjour  des  morts  est  placé  à  l'extrême  Occident.  «  Si,  continue  M.  L..., 
un  Juif,  adversaire  déclaré  de  la  civilisation  païenne,  a  pu  admettre 
dans  son  œuvre  des  conceptions  dont  l'origine  était  aussi  aisément 
reconnaissable  à  l'œil  le  moins  exercé,  ne  doit-on  pas  s'attendre  à 
trouver  chez  lui  l'influence  d'idées  beaucoup  plus  générales,  par- 
tant beaucoup  mieux  faites  pour  é'insinuer  dans  l'esprit  même  de 
ceux  qui  les  combattaient?  •->  On  devine  la  suite  du  raisonnement  : 
«  Cette  double  idée  d'une  rémunération  commençant  immédiatement 
après  la  mort  et  de  la  persistance  de  l'âme  individuelle  au-delà  de  la 
tombe  »  est  «  en  rapport  avec  la  doctrine  platonicienne  de  l'immor- 
talité de  rame  et  avec  la  conception  classique  de  l'Hadès  ». 

Je  ne  contesterai  pas  l'influence  qu'ont  exercée  souvent  les  idées 
régnantes  sur  la  théologie  juive  ;  mais  cette  action  n'a  été  possible 
qu'autant  que,  de  bonne  foi,  l'esprit  juif  croyait  trouver  dans  les 
spéculations  étrangères  l'écho  de  ses  propres  pensées;  des  doctrines 
diamétralement  opposées  aux  siennes  l'auraient  certainement  cho- 
qué et  rendu  rebelle.  Or,  s'il  était  vrai,  comme  on  le  prétend  com- 
munément, que  la  croyance  en  un  autre  monde  était,  non  seulement 
étrangère  au  Judaïsme,  mais  même  niée  résolument  par  lui,  ce 
serait  un  phénomène  bien  étrange  que  cette  croyance,  en  opposition 
tranchée  avec  la  théologie  biblique  et  de  provenance  grecque,  aurait 
été  introduite  chez  les  Juifs,  par  ceux  qui  étaient  les  adversaires 
intraitables  de  l'hellénisme,  par  les  Pharisiens,  successeurs  des  Ilas- 
sidim,  qui  avaient  lutté  désespérément  contre  l'invasion  de  la  cul- 
ture grecque  en  Judée.  De  deux  choses  l'une  :  ou  ces  cro^^ances 
eschalologiques  avaient  leurs  racines  dans  le  Judaïsme,  soit  dans  le 
populaire,  soit  parmi  les  savants,  dans  ce  cas,  il  importe  peu  que  tel 


BIBLIOGRAPHIE  1»;! 

OU  tel  détail  de  ces  croyances  ail  été  emprunté  aux  Grecs;  où  elles 
étaient  foncièrement  neuves,  dans  ce  cas,  le  Pharisien  le  moins 
fanatique  ne  les  aurait  jamais  accueillies.  Assigner  une  date  précise 
à  l'éclosion  d'une  conception  aussi  grave  que  celle-là,  c'est,  comme 
pour  tous  les  problèmes  qui  veulent  découvrir  les  origines,  faire 
œuvre  vaine.  En  tout  cas,  le  livre  d'Enoch,  qui  essaie  de  concilier 
l'idée  d'une  rémunération  immédiate  et  celle  de  la  résurrection, 
trahit  un  état  de  croyance  qui  rejette  bien  loin  dans  l'antiquité  des 
idées  qu'on  prétendait  dater  du  livre  de  Daniel. 

En  outre,  l'auteur  ne  peut  être  pris  pour  le  porte-parole  du  phari- 
saïsme,  puisqu'il  se  distingue  très  nettement,  par  plusieurs  points, 
de  la  doctrine  officielle  des  Pharisiens.  Ainsi,  la  Mischna  de  Sanhé- 
drin, XI,  3,  montre  que,  tout  eu  étant  d'accord  avec  le  livre  d'Enoch 
pour  exclure  de  la  résurrection  certaines  catégories  de  pécheurs,  les 
Pharisiens  admettaient  aussi  la  mort  totale  comme  punition  de  cer- 
tains crimes,  solution  inconnue  à  notre  apocalypse.  M.  L.  a  eu  tort 
de  ne  pas  comparer,  en  effet,  les  descriptions  d'Enoch  avec  celles 
que  nous  ont  conservées  les  livres  tulmudiques  :  il  aurait  découvert 
que  le  livre  d'Enoch  ne  peut  être  considéré  comme  l'importateur  eu 
Judée  des  doctrines  eschatologiques  qui  out  prévalu  généralement 
plus  lard,  il  eu  diffère  trop  et  par  ce  qu'il  dit  et  par  ce  qu'il  ne  dit 
pas.  Il  atteste  seulement  la  liberté  avec  laquelle  chacun  traitait  ces 
redoutables  questions  et  se  représentait  le  lendemain  de  la  mort. 

C'est,  d'ailleurs,  le  côté  faible  de  la  plupart  des  savants  non 
Juifs  qui  étudient  le  mouvement  des  idées  aux  environs  de  l'ère 
chrétienne.  M.  L.  a  bien  senti  qu'il  y  avait  intérêt  à  éclairer  le 
livre  d'Enoch  à  la  lumière  des  données  talmudiques  et  midras- 
chiques.  De  là,  dans  ses  commentaires,  bien  des  mésaventures  que 
nous  n'aurons  pas  la  cruauté  de  relever.  Il  ne  suffit  pas  d'invoquer 
le  témoignage  d'écrits  hébreux,  encore  faut-il  n'en  pas  ignorer 
l'âge.  La  belle  autorité,  par  exemple,  que  le  Yalkout  Badasch,  pour 
l'explication  d'idées  antérieures  au  christianisme  :  un  ouvrage  du 
xv!!"^  siècle,  fait,  en  Pologne,  à  l'aide  de  traités  cabalistiques! 

Ces  menues  critiques  n'atténuent  en  rien  ni  le  bien  que  nous 
pensons  de  la  science  de  M.  L.,  ni  la  reconnaissance  que  nous  lui 
devons.  Son  étude  se  recommande  par  le  sérieux,  la  conscience  et  la 
bonne  foi. 

Israël  Lévi. 


CORRESPONDANCE 


Dans  le  numéro  précédent  de  la  Remœ  (tome  XXV,  p.  116-121), 
M.  Immanuel  Lœw  a  contesté  la  justesse  de  quelques  étymologies 
que  j'ai  proposées  dans  mon  Aruch  compJdum.  Qu'il  me  per- 
mette de  répondre  ici  brièvement  à  ses  critiques. 

M.  L.  prétend  qu'il  faut  lire  nT':-i:;-i:i,  au  lieu  de  nrîisn:;.  Cette 
correction  a  contre  elle  les  textes  imprimés  et  mss.  11  ajoute  que 
je  n'ai  pas  compris  mon  propre  article  sur  nr^'^sns,  dans  Aruch, 
II,  241.  Une  pareille  assertion  mérite  à  peine  d'être  réfutée.  Je 
n'ai  pas  dit  dans  l'Index  vocabulonim  italicorum  (p.  vi,  note  1)", 
comme  M.  L.  prétend,  que  pour  R.  Nathan  minsns  est  la  même 
chose  que  porlulaca  (porcellana),  mais  j'ai  dit  que,  pour  mon 
compte,  j'ai  montré,  en  m'appuyant  sur  l'explication  de  Moussafia, 
que  ce  mot  désigne  le  lotus  égyptien,  et  que,  par  conséquent,  le 
mot  ir-"'"i  =  lotus  peut  être  expliqué  par  l'italien  ■'p-li:'5^D  =  por- 
tulaca,  par  lequel  R.  Nathan  [Aruch  completum,  III,  395  a)  ex- 
plique d'habitude  "j-^ncnc  ou  ni:ib;bn.  Dans  Vlndex^  je  n'ai  cité 
aucune  preuve  à  l'appui  de  mon  opinion,  mais  je  vais  le  faire  ici 
en  me  servant  des  paroles  de  M.  L.  Voici  ce  qu'il  dit  dans  ses 
Pflanzen7iamen,  p.  321,  au  mot  wnsiD  :  «  Dans  les  Reisen  de  Pe- 
termann,  II,  144,  c'est  berbîn;  dans  le  Liban  ferfahin;  à  Bey- 
routh, haqla  ;  chez  les  Bédouins,  huaerde.  C'est  une  espèce  de 
trèfle,  propre  à  la  consommation  [pourpier]  ».  Je  pourrais,  à  mon 
tour,  dire  que  M.  L.  n'a  pas  compris  son  propre  article,  puisque, 
pour  expliquer  un  mot  signifiant  trèfle,  il  met  entre  crochets  le 
mot  pourpier.  Il  a  donc  commis  la  même  erreur  que  celle  qu'il 
me  reproche.  J'ajouterai  que  M.  Eisler  [Beitrâge  zur  ralihini- 
schen  Sprach-v.  Alterthiirashunde,  IV,  154)  a  rendu  également 
le  ■ipN'ïNit-nD  de  VArouch  par  portulaca. 

En  disant  que  le  mot  iN'^i:7D::np  est  mal  imprimé  dans  VIndex, 
M.  L.  aurait  dû  ajouter  qu'il  est  correctement  écrit  dans  le  corps 
de  l'ouvrage  (VII,  122  &).  —  Je   maintiens  l'explication  que  j'ai 


CORRESPONDANCE  1o3 

donnée  de  mmp.  Le  reproche  que  M.  L.  me  fait  d'avoir  indiqué  le 
terme  hongrois  pour  mieux  faire  comprendre  le  mot  italien  me 
paraît  bien  puéril. 

M.  L.  ne  veut  pas  accepter  mon  explication  du  mot  ■'N?:-;,  mais 
il  se  garde  bien  d'en  proposer  une  autre. 

Pour  N7:r:,  j'ai  reconnu  moi-même  la  justesse  de  l'étymologie 
indiquée  dans  les  PfJanzenn.  de  M.  L.,  et  j'ai  également  cité  Ilay 
Gaon  (Aruch  complet.,  VI,  365). 

Je  connaissais  et  ai  mentionné  l'opinion  de  M.  L.  relative  au 
mot  Nnran  {Ariich,  III,  441  &]. 

Quiconque  lira  mon  article  sur  3i:n  {Aruch,  III,  473  a)  verra 
que  j'y  ai  examiné  à  fond  les  sources  et  que  je  n'avais  nullement 
besoin  de  citer  M.  L. 

Je  trouve  inutile  de  répondre  aux  autres  observations  de  M.  L. 
Je  ne  veux  pas  dire  par  là  que  toutes  les  explications  que  j'ai 
données  dans  mon  Aruch  soient  bonnes,  et  je  serai  toujours  heu- 
reux d'accepter  les  rectifications  qu'on  voudra  bien  proposer, 
quand  elles  seront  appuyées  sur  une  science  impartiale. 

Neiv-York. 

Alexandre  Kohut. 


CHRONIQUE 


L'accusation  du  meurtre  rituel.  —  M.  Henry  Gaidoz  a  rendu 
compte,  lui  fiussi,  dan?  son  journal  [Mélusine,  t.  VI,  n^'  8,  mars-avril 
1893"  de  l'ouvrage  de  M.  Strack  qu'a  si  bien  analj^sé  notre  savant  col- 
laborateur M.  Salomon  Reinach  [Revue,  XXV,  161).  M.  Gaidoz,  qui  est, 
on  le  sait,  un  des  maitj-es  incontestés  des  études  de  folk-lore,  dont  re- 
lève l'accusation  du  meurtre  rituel,  a  résumé  en  termes  très  précisée 
qu'il  faut  penser  de  cette  queslioa,  quia  fait  couler  déjà  autant  de  sang 
que  d'encre.  Nous  reproduisons  ici  ces  lignes,  auxquelles  nous  sous- 
crivons sans  réserve  : 

«  Cette  accusation  contre  les  Juifs  parait,  dit  M.  Strack,  ne  pas  en- 
core avoir  tout  à  fait  sept  siècles  d'existence  :  en  effet,  on  n'en  a  pas 
de  témoignage  plus  ancien.  Mais  rien  ne  prouve  qu'elle  n'ait  pas  existé 
plus  anciennement  encore,  et,  pour  nous,  il  faut,  pour  l'expliquer,  re- 
monter à  l'auliquilé  elle-même,  avant  la  naissance  du  christianisme. 
Voici  comment  nous  nous  expliquons  ce  développement  psychologique 
et  historique. 

I»*  Daus  le  monde  antique  la  sorcellerie  employait  pour  ses  rites  du 
sang  et  d'autres  parties  du  corps  humain,  et  oa  immolait  souvent  des 
enfants  dans  ces  rites. 

2°  Les  premiers  chrétiens  passaient  pour  sorciers,  ils  étaient  accusés 
de  magie  et  poursuivis  à  ce  titre;  on  leur  attribuait  donc  les  rites 
coupables  de  la  magie,  y  compris  l'infanticide,  comme  l'atteste  Tertul- 
lien.  —  Le  populaire  payen  attribuait  donc  aux  chrétiens,  alors  secte 
peu  nombreuse,  mal  connue,  haïe  et  méprisée,  ce  que  le  populaire 
chrétien  attribuera  plus  tard  aux  Juifs,  devenus  eux-mêmes  au  milieu 
des  chrétiens  une  secte  peu  nombreuse,  mal  connue,  haïe  et  méprisée. 

3°  Le  christianisme  triomphe,  mais  les  croj'ances  populaires  restent 
les  mêmes,  et  l'accusation  de  meurtre  rituel  se  déplace.  Les  catholiques 
étant  la  majorité  dominante,  l'accusation  se  porte  sur  les  sectes  héré- 
tiques ;  puis,  quand  1  hérésie  est  étoufTée  dans  le  sang  et  dans  le  feu 
des  bûchers,  Taccusalion  se  porte  sur  les  Juifs.  Ce  qui  faisait  la  force 
de  cette  accusatico,  c'est  que  les  pratiques  et  les  croyances  de  la  ma- 
gie, héritage  de  l'antiquité  pré-chrétienne,  avaient  survécu  dans 
l'ombre  au  milieu  de  la  société  chrétienne,  que  l'on  continuait  à  égor- 


CHRONIQUE  ^55 

ger  des  eufants  pour  mêler  leur  sang  aux  philtres,  à  fabriquer  des 
chandelles  de  graisse  humaine  pour  se  rendre  invisible,  a  eventrer 
des  femmes  eoceinles  pour  leur  arracher  leur  fruit,  etc.  Des  crimes, 
provoqués  par  ces  croyances,  se  commettaient  encore  chez  nous  dans 
les  derniers  siècles;  et  il  s'en  commet  encore  de  notre  temps  dans 
l'Europe  orientale,  comme  on  peut  le  voir  par  les  exemples  qu  a  re- 
cueillis M  S.  Cet  état  psychologique  de  la  société  chrétienne  exphque 
pourquoi  cette  accusation  portée  contre  les  Juifs  paraissait  si  natu- 
relle aux  chrétiens  ;  les  chrétiens  attribuaient  simplement  aux  Juils 
leur  façon  de  penser. 

40  Le's  pratiques  de  la  magie  s'effacèrent  peu  à  peu  chez  les  chrétiens 
par  suite  du  progrès  des  idées  ;  mais  la  vieille  accusation  portée  contre 
les  Juifs  subsista,  parce  que  rien  n'est  aussi  tenace  qu'une  tradition 
dans  les  couches  populaires  que  l'instruction  n'atteint  pas,  et  aussi 
parce  qu'elle  faisait  en  quelque  sorte  partie  d'un  programme  de  pas- 
sions nationales  et  sociales.  » 

M   S   se  propose  de  publier  une  nouvelle  édition  de  son  ouvrage  et 
demande  qu'on  l'aide  à  rendre  plus  complète  encore  son  étude.  Xous 
nous  permettrons  de  lui  signaler  un  ordre  d'investigations  que  nous 
avons  vainement  cherchées  dans  son  travail  :  pour  prouver  qu  au  tond 
de  cette  accusation  il  n'y  a  qu'une  croyance  populaire  d'un  caractère 
universel,  et,  on  peut  le  dire,  pré-historique,  sans  lien  avec  la  réalité, 
il  suftii  d'essayer  de  reconstituer  le  scénario  des  prétendus  faits  repro- 
chés aux  Juifs  et  de  noter  les   motifs  attribués  à  ces  meurtres  soi- 
disant  rituels.  Rituel  est  un  mot  qui  fait  penser  à  des  formes  rigides, 
inflexibles.    Or,    rien  de    plus   variable  et  que  ce  scénario  et  que 
ces  explications  :  impossible  de  mettre  d'accord  toutes   ces  inven- 
tions. Qu'exige  ce  rite?   l'efîusion  du  sang?  La    victime  est    très 
souvent   simplement   noyée.    -    Faut-il   dans  ce  but    un   garçon, 
une  lille,   un  homme?   Tout   ce   qu'on  voudra,    cela    dépendra   du 
cas  qui   aura  réveillé   la  croyance.  —  A  quel  moment   de   l'année 
doit    s'accomplir    ce   rite   monstrueux?  A  la  Pâque  juive   ou   aux 
Pâques  chrétiennes,  ou  n'importe  quand?  On  n'y  regarde  pas  de  si 
près,  et  l'accusation  se  produit  à  n'importe  quelle  occasion.  On  ne  sait 
même  pas  toujours  que  la  Pùque  juive  parfois  retarde  de  plusieurs 
semaines  sur  celle   des  chrétiens.  -  Ces  martyres  chrétiens  ne  se 
révèlent-ils  pas  d'une  manière  miraculeuse?  Eu  un  temps  ou  le  mi- 
racle est  à  Tordre  du  jour  et  où  le  merveilleux  joue  un  rôle  dominant, 
c'est  par  des  signes  miraculeux  que  se  découvrent  ces  meurtres, 
une  auréole  de  feu,  par  exemple,  planant  sur  la  surface  de  l'eau  qui 
recouvre  le  cadavre,    l'odeur  exquise   du  mort   et,   ce    qui  atteste 
le  crime  mieux  que  les  aveux  des  coupables  arrachés  par  la  torture,  ce 
sont  les  miracles  dont  est  le  théâtre  la  tombe  de  la  victime.  Aujour- 
d'hui, où  il  faut  compter  avec  le  scepticisme,  ce  décor  a  été  supprime. 
sans  que  la  crovance  s'en  soit  trouvée  diminuée.  —  Pourquoi,  main- 
tenant, ce  meurtre?   Pour  rééditer  le  crucifiement  du  Christ,  pour 
percer  dans  le  chrétien  le  Christ  qu'il  représente,  pour  la  fabrication 


lo6  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

des  pains  azymes  (concepliou  très  moderne),  pour  ne  pas  sentir  mau- 
vais, pour  faire  des  philtres,  pour  arrêter  le  sang  de  la  circoncision, 
pour  guérir  les  maladies  secrètes,  pour  la  cérémonie  des  fiançailles, 
pour  asperger  les  doigts  des  Aronides  bénissant  le  peuple,  pour  faci- 
liter les  accouchements,  pour  rendre  les  sacrifices  I)  agréables  à 
Dieu,  pour  asperger  le  corps  des  Juifs  morts,  en  disant  :  Si  le  Messie 
des  chrétiens  est  le  vrai  Messie,  que  ce  sang  innocent  te  procure  la 
vie  éternelle,  pour  enlever  les  deux  doigts  que  les  enfants  mâles 
portent  en  naissant,  etc.  ?  Même  chaos.  Il  n'y  a  d'invariable  que  la 
crédulité  populaire,  l'obsession  du  mystère  du  saug.  Seulement,  ces 
variations  ont  leur  histoire,  elles  ne  sont  que  des  transformations,  et 
c'est  cette  histoire  qui  mérite  la  peine  d'être  écrite.  Ce  sera  un  des 
plus  curieux  chapitres  des  annales  des  aberrations  humaines. 


L'Histoire  du  peuple  d'Israël  de  M.  Renan.  —  Le  4"  volume  de 
l'Histoire  du  peuple  cV Israël  d'Ernest  Renan  vient  de  paraître.  Il  serait 
inutile  de  dire  pour  la  centième  fois  le  genre  d'intérêt  qui  s'attache  aux 
productions  historiques  du  grand  écrivain.  Ce  volume  accuse  encore 
mieux  les  procédés  qui  ont  déjà  été  remarqués  dans  les  précédents  : 
comparaisons  inattendues  entre  le  passé  et  le  présent,  modernisa- 
tion des  choses  et  des  gens  d'autrefois.  Ce  qui  frappera  les  hommes 
du  métier  dans  ces  pages,  c'est  l'invincible  horreur  du  vide  que 
l'auteur  a  gardé  jusqu'au  bout.  Les  grandes  lacunes  des  documents 
historiques  de  ces  temps  ne  sont  pas  pour  l'embarrasser,  il  les 
comble  par  des  allusions  lointaines  relevées  dans  les  livres  bibliques 
ou  à  l'aide  de  considérations  inspirées  par  ce  silence  même.  Pour  le 
futur  biographe  qui  étudiera  ce  que  M.  Renan  a  pensé  des  Juifs,  ce 
volume  ofï'rira  une  moisson  dont  la  richesse  ne  pourra  que  l'effrayer. 
Rien  de  plus  curieux  que  ces  portraits  du  Juif  jetés  à  tout  propos 
avec  une  singulière  intrépidité.  Quel  type  complexe  et  contradictoire 
que  cet  être  de  raison  qui  s'appelle  le  Juif!  —  Nous  recommandons 
aux  éditeurs  la  correction  des  mots  hébreux,  qui  ont  été  estropiés 
par  l'imprimeur.  Peut-être  aussi  feraient-ils  bien  de  modifier  telle 
traduction  qui  ne  peut  s'expliquer  que  par  une  étrange  inadver- 
tance. Ainsi,  les  derniers  mots  de  la  sentence  d'Antigone  de  Socho 
(p.  281)  sont  ainsi  rendus  :  «...  et  la  rosée  du  ciel  sera  sur  vous.  » 
Le  texte,  on  le  sait,  porte  :  c  ...  et  que  la  crainte  du  ciel  ^02^ 
sur  vous.  »  M.  Renan  a-t-il  confondu  le  mot  mora  «  crainte  »,  avec 
moré,  «pluie  »,  et  l'optatif  tihi  avec  le  futur  teyihyél  Ou  est-ce  une 
correction  voulue  ? 


Les  Juif  s  dans  les  inscriptions  de  Tell-el-Amarna.  —  Journal 
Asiatique  (t.  XX,  I8O2,  p.  287).  —  On  avait  l'ait  grand  l)ruit  de  la  pré- 
sence du  mot  Juif  dans  une  de  ces  fameuses  inscriptions.  Le  P.  De- 
lattre  n'a  pas  de  peine  à  montrer  que  le  P.  Scheil.  qui  avait  lancé, 
d'ailleurs  sous  toutes  réserves,  cette  trouvaille,  a  été  dupe  d'une  sim- 


CHRONIQUE  157 

pie  homonymie.  Le  mot  ya-u-du  ne  signifie  pas  nécessairement  juif, 
mais  peut  èlre  de  la  racine  mr  c.  être  témoia  ».  Quel  que  soil  d'ailleurs 
le  sens  à  attribuer  à  ce  mot,  il  suffit  de  lire  le  contexte  pour  recon- 
naître, avec  le  P.  Delaltre,  que  la  mention  de  soldais  juifs  ne  se 
comprendrait  pas  dans  ce  passage. 

Senior  Sachs.  —  Le  18  novembre  dernier  s'est  éteint  à  Paris  un 
des  vétérans  de  la  science  juive,  Senior  Sachs,  né  le  17  juin  1815,  à 
Keidan  (gouvernement  de  Kowno,  Russie,  d'où  le  nom  de  Keidansky 
qu'il  porte,  par  exemple,  dans  le  Hajonah).  Doué  d'un  esprit  très  pé- 
nétrant et  d'une  vaste  érudition,  Sachs  a  surtout  porté  son  activité 
sur  la  littérature  de  la  renaissance  juive  au  moyen-âge.  Ses  travaux 
sont,  pour  la  plupart,  consignés  dans  les  différentes  revues  qu'il  a 
fondées  lui-même.  Il  a  successivement  dirigé  :  1"  Hatechija,  2  parties, 
Berlin,  4800-4857  ;  2"  Hajonah,  Berlin,  »8SI  ;  un  supplément  de  ce  re- 
cueil, intitulé  Kanfe  Jonah,  porte  la  date  de  1848  ;  3°  Keretn  Chemed, 
suite  de  l'ancien,  2  parties,  Berlin,  1853-1856;  4"  À'aa;o?i,  Paris,  1860- 
1872.  Ce  ne  sont  pas  seulement  ses  Revues  qui  ont  eu  ce  singulier 
sort  de  rester  à  l'élat  d'amorce;  de  son  Schir  Easckirim,  cantiques  de 
Salomon  ben  Gabirol,  Paris,  1868,  un  de  ses  meilleurs  ouvrages,  il  n'a 
paru  qu'une  livraison;  de  son  Catalogue  de  la  bibliothèque  de  Gunz- 
bourg,  que  les  trois  premières  feuilles  (in-4°).  Nous  touchons  là  un 
des  défauts  de  sa  manière  de  travailler,  qui  est  en  même  temps  un 
éloge  de  sa  conscience  exigeante  :  il  voulait  épuiser  toutes  les  ques- 
tions qu'il  abordait.  Aussi  ses  notes,  qui  toujours  écrasent  le  texte, 
sont-elles  de  véritables  articles  d'érudition.  Sa  vocation  de  biblio- 
graphe s'était  dessinée  de  bonne  heure,  il  a  ajouté  des  compléments 
au  -j^bon  de  Zunz  et  a  publié,  avec  notes,  le  Catalogue  des  mss.  de 
Zunz.  Sa  collaboration  aux  journaux  hébreux  a  été  des  plus  fécondes, 
et  puisque  la  mode  est  aux  réimpressions,  nous  souhaitons  qu'il  se 
trouve  un  jeune  savant  et  un  éditeur  assez  dévoués  pour  réunir  tous 
ses  articles  épars.  Les  derniers  qu'il  ait  eu  la  joie  de  voir  impri- 
més, et  qui  ont  paru  dans  le  Hahoker  (Revue  hébraïque)  de  Salomon 
Fuchs,  montrent  ce  qu'on  pouvait  encore  attendre  de  sa  plume  infa- 
tigable. 

David  Cassel.  —  David  Cassel  (né  le  7  mars  1818  à  Glogau),  qui 
vient  de  mourir  à  Berlin  (24  janvier  1893),  n'a  pas  joué  dans  la  science 
juive  un  rôle  aussi  marquant  que  Senior  Sachs,  ni  même  que  son 
frère  Selig  Cassel,  l'auteur  de  l'article  Juifs  dans  l'Eûcyclopédie  d'Ersch 
et  Gruber,  devenu  plus  tard  le  Pasteur  Paulus  Cassel.  Mais  dans  sa 
sphère  modeste,  il  n'a  pas  laissé  de  rendre  de  sérieux  services  par 
les  excellents  matériaux  qu'il  a  mis  à  la  disposition  des  étudiants.  On 
lui  doit  :  1»  Pla7i  der  Eeal-Enc'/clopâdie  des  Judenthums  ^Krotoschiu, 

1844,  8")  :  —  2°  Ziir  Verslùndigung iiber j'àd. ReformbeslrebungeniBtxViQ, 

1845,  %°)  \  —  Z''  Liber Kore  ha- Dorot,  scripsit  Conforte,  denuoedidit,  tex- 


158  RKVUK  DES  ÉTUDES  JUIVES 

tum  emendavit,  inlroduclionem,  notas  et  indices  (Berlin,  1846,  i"^  — 
4°  Ausfilhrliches  Sach-und  Namensregister  211  de  Rossts  historischern 
Wùrterlmch  derj'dd.  Schrillsleller  u.  ikrer  TFer^g (Leipzig,  1846,  8°);  — 
5"  Tschitbol  ha  Geonim  Kadmonim  (Berlin,  1848,  4",  :  —  6°  Die  Cullns- 
frage  in  der  jiid.  Gcmeiude  in  Berlin  Berlin,  ISiiO,  8")  ;  — 7"  Édition, 
avec  introduction  et  notes,  du  Meor  Enat/im,  d'Azaria  de  Rossi  '  Wilna, 
18(36,  8«  :  —8c  Édition  avec  traduction  et  notes  du  Sefer  Ha  Cozari  deK. 
.Tuda  ha-Lévi  Leipzig.  18fi9,  S*»:  ;  —  9"  Sabbalh-Slunden,  Belefirung  u. 
Erbaming  (Berlin,  1868,  8")  ;  —  10°  Htbraisch-deuisches  \V (Merbuch  nebst 
Paradigmen  der  Snbstantiva  u.  Verba  (4*=  éd.  Breslau,  l.sso,  80;  ;  —  no 
Die  Apccri/phen  nach  dem  griech.  Texte  bearbeittt  Berlin,  1871,  8°)  ;  — 
M"  Die  bibl.  Geschichte  fUr  die  Israël-  Jugend  Berlin,  1872,  S^')  ;  —  13" 
Édition  de  la  Grammatik  der  hebr.  S prache  d'Arnheim  Berlin,  1872,8*'); 
—  14°  Geschichle  der  jUd-  Literalur.  \.  Die  bibl.  v.  poH.  Lileralur  :  IL 
Die  prophet.  Literatur  (Berlin,  1872-74,  8°  ;  —  \o'^  Leitfadeii  fUr  den 
Untevricht  in  der  jiid.  Geschichte  n.  Literatur  (Berlin,  1878,  8°;i;  —  16° 
Lehrbncli  derj'ùi.  Geschichte  u.  Literatur  L.eipzig,  1879,  8°^  ;  — 17°  Josef 
Karo  u.  das  Maggid  Mescharini  (Berlin,  1888,  4°).  —  Il  a  aussi  donné 
des  articles  aux  revues  scientifiques,  entre  autres  :  Die  Psalmenilber- 
schriften,  in  hritischer,  histor.  u.  archàolog.  Hinsicht,  Liter.-Biatt 
d. Orient,  is40;  Zar  Geschichte  jiid.  Zustdide  in  der  py rendis chen 
Halbinsel,  Zeitschrift  f.  d.  relig.  Interessen  des  Judenthums  (1846). 

Revue  sémitique.  —  Le  premier  numéro  de  cette  nouvelle  pu- 
blication a  paru  le  l"  janvier  dernier.  Quelques  personnes  ont  ex- 
primé, dans  la  presse,  le  regret  de  voir  ainsi  se  disséminer,  dans  des 
l'euilles  de  plus  eu  plus  nombreuses,  des  études  qui  gagneraient  à 
être  réunies  dans  un  même  recueil.  S'il  est  vrai  que  le  lecteur  ail 
à  se  plaindre  de  cette  dispersion,  nous  nous  félicitons,  pour  nous, 
d'une  généreuse  rivalité  qui  prouve  un  réveil  incontestable  des  re- 
cherches désintéressées.  Cette  diversité  même  de  revues  ne  saurait 
que  plaire  à  ceux  qui  aiment  avant  tout  lïndépendance  et  qui 
apprécient  la  liberté  d'allures  des  savants,  même  quand  elle  n'est 
pas  conforme  à  leur  goût.  En  tout  cas,  un  nouveau  recueil  sera 
toujours  le  bienvenu  qui  permettra  à  M.  Halévy  de  déployer  à 
son  aise  sa  vaste  érudition,  ses  fantaisies  brillantes,  son  admi- 
rable science  des  langues.  Nous  n'avons  aucun  doute  sur  la  vi- 
talité de  la  Revue  sémitique  :  s'il  ne  faut,  pour  lui  prêter  longue 
vie,  que  des  travaux  originaux,  M.  Halévy  est  assez  fécond 
pour  la  soutenir  à  lui  seul.  H  le  montre,  d'ailleurs,  dans  ce  pre- 
mier fascicule.  Sauf  deux  courts  articles  dus  à  MM.  Alfred  Boissier 
et  Perruchon.  tout  le  numéro  est  rempli  par  M.  Halévy.  qui  y  a 
fait  entrer  les  chapitres  xxvi,  xxvii  et  xxviii  de  ses  Recherches 
bibliques,  publiées  déjà  à  part,  et  des  notes  importantes  sur  la  Corres- 
pondance d'Aménophis  III  et  d'Aménophis  IV,  sur  les  inscriptions 
déjà  fameuses  de  Zindjirli,  sur  les  inscriptions  anatoliennes 
et   sur   le    prétendu  dieu    minéeu    Allah.   Les  personnes  qui  sui- 


CHRONIQUE  ^S9 

vaieat  avec  intérêt  les  éludes  de  notre  cher  confrère  sur  If^s 
premiers  chapitres  de  la  Genèse  retrouveront  dans  ces  Recherches 
miiques  le  même  art  à  se  jouer  des  difficultés,  la  même  hardiesse 
de  combinaisons  et  les  mêmes  merveilleuses  élymologies  qu'ils 
admiraient  dans  leurs  aînées. 

Que  M.  llalévy  veuille  bien  accepter  l'expression  de  nos  vœux 
les  plus  sincères  pour  le  succès  de  son  entreprise.  Qu'il  nous  per- 
mette aussi  de  lui  signaler  une  certaine  méprise  d'ordre  technique 
qui  pourra  déconcerter  ses  lecteurs  :  ceux-ci  seront  étonnés  de  trou- 
ver à  la  première  page  d'une  nouvelle  publication  un  chapitre  xxvi. 
Il  eût  été  bon  de  prévenir,  au  moins  en  note,  que  ces  éludes  fout 
suite  à  d'autres  qui  ont  paru  ailleurs. 

Les    inscriptions  sémitiques  de  Zindjirli.  —  La   découverte 
de  ces  inscriptions  aura  le  même  retentissement  et  une  portée  aussi 
grande,  au  moins,  que  celle  de  la  célèbre  stèle  de  Mésah.  On  sait  que 
Te  Comité  oriental  de  Berlin  ayant  fait  pratiquer  des  fouilles  à  Zind- 
jirli, dans  la  Syrie  septentrionale,  a  eu  la  bonne  fortune  d'exhumer, 
entre  autres,  deux  inscriptions  dont  les  caractères   paléographiques 
appartiennent  à  la   même  famille  que  ceux    des  monuments  phéni- 
ciens et  hébraïques.  Bien  plus,  comme   sur  la  stèle  de   Mésa,   les 
mots  sont  séparés  par  un  point,  ce  qui  en  rend  la  lecture  plus  aisée. 
La  langue  est  incontestablement  sémitique,  mais  forme  un  dialecte 
à  part.  Dans  quelle  famille  doit-elle  se  ranger?  La  lutte  est  déjà 
ouverte    sur  celte  question,   les   uns  opinent  pour   l'araméeu,   les 
autres  pour  Ihébréo-phénicien.  Les  premiers  s'appuient  principale- 
ment sur  le  vocabulaire,  qui  renferme,  en  effet,  beaucoup  de  termes 
araméens;   les  derniers  sur  les  ilexions  grammaticales,  qui  se  rap- 
prochent beaucoup  plus  de  celles  de  l'hébreu  et  du  phénicien.  Il   est 
inutile  de  dire  que  ce  sont  les  partisans  de  celte  dernière  hypothèse 
qui    paraissent   avoir   raison  :    ce  qui    distingue  une   langue,  cest 
moins  le  contenu  du  vocabulaire,  que  la  grammaire;  l'anglais  pour- 
rait avoir  absorbé  encore  plus  de  mots  français  qu'il  n'en  renferme, 
qu'il   n'en  resterait  pas  moins  une   langue  germanique.  Les  consé- 
quences de  cette  découverte,  comme  le  dit  très  bien  M.  llalévy,  pour- 
ront exercer  une  sérieuse  inauence  sur  l'exégèse  biblique.   Les  con- 
clusions  qu'on  tirait  jusqu'ici,  pour  établir  l'âge  de  certains  livres 
de  l'Écriture,  de  l'existence  de   prétendus  aramaïsmes  deviendront 
caduques  s'il  est  prouvé  que  ces  particularités  dialectales  appartien- 
nent également  à  une  autre  langue.  Cette  langue  était-elle  celle  dos 
Hittites  ?  C'est  ce  que  soutient  M.  llalévy,  mais  son  opinion  n'a  pas 
encore  rencontré  une  adhésion  générale.  Disons,  en  terminant,  que  le 
Comité  de  Berlin  vient  de  publier  le  fac-similé  de  ces  inscriptions 
dans  le  7«  fascicule   des  Publications  du  Musée  de  Berlin  et  que 
M.  1).  II.  Muller  en  a  donné  une  transcription  en  caractères  hébreux 
avec  une  étude  très  complète. 


160  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

La  Revue  hébraïque  Hahoker.  —  Cette  Revue,  dirigée  par 
M.  Salomon  Fuchs,  et  dont  on  avait  déjà  enregistré  le  décès,  vient  de 
secouer  son  long  sommeil  ;  les  9*^,  10"  et  1 1^  livraisons  ont  paru  en  un 
seul  fascicule.  Elles  sont  tout  entières  remplies  par  une  nouvelle 
édition  des  Halakhot  Pesoîicot,  avec  notes  de  M.  Joël  Millier.  Les  pé- 
riodiques sont-ils    destinés    à    des   réimpressions   d'ouvrages? 

M.  Fuchs  doit  avoir  là-dessus  d'autres  opinions  que  nous.  Mais  pour- 
quoi une  9«  livraison,  alors  que  la  6^  n'a  même  pas  encore  vu  le  jour  ? 

Les  Rabbins  français.  — Nous  pouvons  annoncer  a  nos  lecteurs 
que  le  XXXI'^  volume  de  VHisloire  littéraire  de  la  France  consacré 
aux  rabbins  français  du  xiV  siècle  va  très  prochainement  paraître. 
M.  Xeubauer  a  donné  le  bon  à  tirer,  même  des  Indices. 


ADDITIONS  ET  RECTIFICATIONS 


T.  XXV,  p.  53.  L'introduction  du  Yalkout  Makbiri  a  été  déjà  imprime'e 
daus  le  r;;7:N3  rrï-ip  de  Fùnn,  p.  304.  —  P.  "75.  La  poésie  û"'-2:7:  HDD  est 
imprimée  dans  "^sn  "'"im  d'Edelmann,  p.  15  ;  cf.  aussi  mon  Catalogue, 
n"  393.  —  P.  205,  noie  2.  blb^n  doit  être  une  faute  pour  bi:ib;r;.  — 
P.  246-"/.  L'hvpolhèse  faite  sur  Genèse,  xxvii,  33,  a  e'te'  déjà  e'mise  par 
Senior  Sachs,  dans  Haschachar,  1869,  VII,  p.  63.  —  P.  256.  J'ai  moi-même 
fait  remarquer,  dans  le  Bet  Talmud,  IV,  256,  que  tT'IT  "^3^  daus  cette  Con- 
sultation doit  être  lu  en  un  seul  mot,  !T^"^"^,T"'2N.  —  S.-J.  Halberstara. 

P.  182,  1.  22,  au  lieu  de  TT^i'irî,  lire  iT^rr;  ;  1.  23,  après  '^yn  \nXD,  il 
manque  (17,  12  d'en  bas)  ;  noie  1,  1.  2,  après  les  mots  hébreux  manque 
(18,  15  .  —  P.  188,  1.  5,  au  lieu  de  «  morceau  qui  suit  »,  lire  «  morceau 
précèdent  qui  manque  ».  —  P.  194,  1.  27,  au  lieu  de  21,  8,  lire  21,  18  ; 
1.  5  du  bas,  au  lieu  de  jeudi  4,  lire  vendredi  5.  —  P.  198,  1.  17,  corrigez  15 
en  25  ;  dernière  ligne,  au  lieu  de  !^;i"in5,  lire  !^5"i?i;.  —  Porges. 

P.  254,  note  2,  u-ib'::  est  l'abréviation  de  D-^nrj  ûr:'^  "{nsb  rr^rpï:.  — 

M.  Schuhl. 


Le  gérant, 

Israël  Lévi. 


VERSAILLES,    lUPRIMERIB    CERF    ET    C'°,    RUE   DDPLE8SIS,    59. 


LE  TITRE  DU  LIVRE  DES  MACCHABÉES 


I 

SARBET    SÂRBANEEL. 

A  propos  de  son  oxi)lication  du  Psaume  i,  Origène  donne  la 
liste  des  livres  de  la  Bible  selon  les  Hébreux.  Puis,  il  ajoute  :  è;(o 

êà  TO'JTWv  Izxl  Tct  MaxxajîûtCxà  àrsp  â-iyéypa-Tr-ai  ilap^TiO  Xappav:;^. 

Ce  passage,  cité  par  Eusèbe  (Histoire  de  l'Eglise,  VI,  25)  et  par 
saint  Jérôme  [Prologus  (idlcalus),  nous  apprend  que  les  livres 
des  Macchabées  avaient  pour  titre,  selon  les  Hébreux,  ces  mots  : 
Sarheth  Sarbanéel,  dont  le  sens,  jusqu'ici,  a  échappé  à  toute 
interprétation. 

Transcrivons  ces  deux  mots  en  caractères  hébraïques.  Le  pre- 
mier n'offre  aucune  difficulté  :  c'est  évidemment  :::'^3n;i^  l'équi- 
valent araméen  de  l'hébreu  -^-yà  bâton,  sceptre,  tribu,  famille, 
généalogie.  Pour  le  deuxième,  nous  ne  savons  pas  encore  si  le  s 
doit  être  rendu  par  o  ou  o.  Adoptons  provisoirement  cette  der- 
nière orthographe,  que  nous  justifierons  plus  tard.  Nous  obtenons 
alors,  pour  le  second  mot,  bN-^înio  et,  pour  le  titre  tout  entier,  la 
transcription  suivante  : 

Nous  sommes,  dès  à  présent,  arrivé  à  ce  premier  résultat,  que 
le  livre  des  Macchabées  avait  pour  titre  :  «  La  Famille  »  ou  «.  La 
Généalogie  de  Sarbanéel». 

Poursuivons  maintenant.  Nous  noterons,  d'abord,  que  la  pré- 
sence du  noun  ne  saurait  nous  arrêter  :  il  peut  provenir,  soit  de 
la  nasalisation,  soit  du  pluriel  à  forme  araméenne.  La  suppression 
de  cette  lettre  nous  fournit  l'orthographe  b^n-ic  Remarquons 
encore  qu'il  est  indifférent  d'écrire  bx  ou  rr*;  que  bN:n:,  par 
exemple,  est  l'équivalent  exact  de  rî">3n3;  que,  par  suite,  nous 
sommes  autorisé  à  substituer  au  mot  '?wS*3-io  le  mot  rr^mo,  qui  a 
même  valeur  et  môme  signification. 

T.  XXVI,  N"  52.  Il 


102  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Nous  savons  maintenant  que  la  version  araméenne,  aujourd'hui 
perdue,  du  livre  des  Macchabées,  était  intitulée  :  VN^no  ;::"'3t«:: ; 
le  second  de  ces  mots  équivalant  à  r-r^-z  :  La  famille  Sarabel  ou 
Sar-abiali. 

Nous  sommes  immédiatement  conduit  à  penser  que  Sarabel  ou 
Sarabiali  figure  dans  ce  titre,  parce  que  c'était  là  le  véritable 
nom  de  famille  des  Ilasmonéens.  Chacun  sait,  du  reste,  que  l'épi- 
tliète  de  Macchabëes,  qui  a  prévalu  plus  tard,  n'est  qu'une  généra- 
lisation du  surnom  donné  au  héros  Juda  Macchabée.  Je  vais 
essayer  de  démontrer  qu'il  faut  résoudre,  comme  je  viens  de  l'in- 
diquer, l'énigme  présentée  par  ce  mystérieux  Sarbellt  Sarbanéel 
d'Origène. 

Le  Talmud  de  Jérusalem  [Taanit,  ch.  iv)  nous  offre  une  discus- 
sion sur  la  destruction  de  Jf'rusalera,  qui  eut  lieu  le  9  Ab.  La  Be- 
raïta  s'exprime  de  la  manière  suivante  : 

«  Nous  avons  appris  que  R.  Yossé  *  dit  :  Le  jour  où  fut  détruit 
le  temple  était  la  fin  du  samedi  et  la  fin  de  l'année  sabbatique,  et 
le  tour  de  la  garde  du  temple  était  à  Yehoyarib  î3"'-,->--"'),  le  9  Ab; 
et,  la  deuxième  fois,  iLen  fut  de  même.  Lors  des  deux  destruc- 
tions, les  Lévites  étaient  debout  sur  l'estrade  et  disaient  :  c  Et  il  a 
fait  retomber  sur  eux  leurs  péchés  et,  à  cause  de  leur  scélératesse, 
il  les  a  anéantis;  il  les  a  anéantis,  lÉternel,  notre  Dieu!» 
(Psaumes,  xciv,  23;. 

R.  Lévi  -  dit  :  t>:rT>-in-ic-:  -^^■z'^^Z'z  rinp  yrr^r^  l-r^y  •^r-'v^rr 
«■"■•Nrcb  «  Yehoyarib  est  un  homme;  Méroun,  une  ville;  ""'^-iC-: 
veut  dire  :  il  a  livré  le  tera[)le  aux  ennemis.  » 

Il  y  a,  ici,  un  derascha  très  remarquable.  R.  Lévi  nous  apprend 
que  :m"'n-"'  est  un  homme;  que  'jtt'»  est  une  ville;  et,  enfin,  que 
■^•'a-icr':  signifie   :  il  a  livré  la  maison  (le  temple)   aux   ennemis. 

'  R.  Yossé  avait  la  tradition  des  faits  historiques  réunis  dans  le  Seder  Oiam  Hahha 
qu'on  lui  attribue.  La  citation  du  Yerouschalmi  que  nous  reproduisons  se  distinjîue 
par  de  très  légères  variantes  du  texte  correspondant  du  Seder  Oiam  Rabba 
(ch.  xxx). 

*  Il  n'est  pas  sans  importance  de  constater  que  R.  Lévi  semble  s'être  occupé  spé- 
cialement de  frénéaloçries.  Nous  en  avons  la  preuve  dans  le  passage  suivant  du  Ye- 
rouschalmi    [Taanit,    IV]    :  ;^-<b w"l-;''2    IN^::    '{"'SnT'    ï—i'î^Tj    ^"Ô    "'n"     "l'r^V 

V:  rnDrr:    r-.'x-^i:.  )2   ricNT    p   r]:!:i   p   '•>^'^r,   v^    -*'"    '"'^   3-m 

'^-r-j-^zN  p  ^Tw^u  ^:3::  na-i  n^'-  'd-  im:^:.:  V-  "">"'  >•-  '"'"" 
r-;":r;:  ^r:   i—rizr,:  ■'z-i  nr-i  p   m:T^   ■'Z'zf^   NnD'rn  "2-1  "3  ■'ct'    ■'a-i 

Nr'wlPrî.  «  Rabbi  Lévi  dit  :  on  a  trouvé  à  Jérusalem  un  rouleau  traitant  de  gé- 
néalogies, et  il  y  est  écrit  :  Ilillel  descend  de  David  ;  Ben  Yasaf,  de  Açaph  ;  lien 
Siïit  Hakaçat,  de  Abner  ;  Ben  Koubicin,  de  Achab  ;  Ben  Calba  Scheboua,  de  Caleb  ; 
R.\anaï,  de  Alaï  deYehoud,  de  Sepphoris  ;  Rabbi  Iliyya  le  Grand,  des  enfants  de 
Schephatia  ben  Abital  ;  Rabbi  Yossé,  de  la  maison  de  Rabbi  Halaphla,  des  enfants 
de  Yonadab,  tils  de  Recbab  ;  Rabbi  Néhémie,  de  Néhémie  le  Tirschata.  > 


LK  TlTRlî  DU  LIVRE  DES  MAGCHAljEES  1C3 

R.  Lévi  n'a  lu  que  ces  trois  mots,  par  lui  commentés,  et  il  les 
explique  de  manière  ;i  nous  faire  bien  comiirendre  que  Yelioyarib 
de  Méroun  a  livrt^  le  temple  aux  ennemis. 

Poursuivons  maintenant  notre  citation  : 

«  H.  Beracliia  dit  :  i3  i3-idi  "n::"»::  hv  t^:^  t=;'  ^"-i-  t-î"'  nn-'ir;"' 
';'^m:-':i:b  nbrirîi  anbac  fipMzy  Ti-nv  ini  jt<  cmo-'j:  pi?::?  Ti-^yr. 
L-iT^iïT^  signifie  :  Dieu  a  disi)utc  contre  ses  enfants,  parce  qu'ils  se 
sont  révoltés  et  insurgés  contre  lui  ;  et  û^ms"'::  pit::'  ï-t'^T'  veut 
dire  :  Dieu  a  connu  le  dessein  profond  caché  dans  leurs  cœurs 
(dans  le  cœur  de  ceux  dont  il  vient  de  parler,  de  ses  enfants),  et 
il  les  a  exilés  à  Sepphoris  ». 

La  version  de  R.  Berachia  ditî'ôre,  à  plusieurs  points  de  vue,  de 
celle  de  R.  Lévi,  Le  nom  d'homme  n-'T'nr;"'  est  décomposé  en  "■' 
n"!"!"  :  Dieu  a  disputé,  explication  tout  à  fait  conforme  à  celle  de 
Yerroubbaal  :  Bal  a  disputé  ;  rr»  remplace  simplement  Baal.  La  syl- 
labe "i-'3  du  mot  ■''3";C'?3,  prise  par  R.  Lévi  pour  l'équivalput  de  r^3, 
maison  ',  signifie,  pour  R.  Berachia,  contre  lui.  Enfin,  R.  Lévi  ne 
connaît  pas  trois  mots  nouveaux,  fournis  et  commentés  par  R.  Be- 
rachia :  a-'-n-:"'^  "p^izy  ï-t'^'T'.  N'oublions  pas,  pour  bien  com- 
prendre le  sens  du  commentaire  de  R.  Berachia,  que,  suivant  la 
Mischna,  le  Babli  et  le  Yerouschalmi,  une  des  dix  schechina 
avait  été  transportée  à  Sepphoris.  Remarquons  encore  que  les 
deux  auteurs  juxtaposent,  non  sans  intention,  le  premier  a-'-pin"' 
et  x^-vû  et  113-1073  ;  le  second,  a^n-'ir!-'  et  nnnoT  tijj-j. 

Le  Yephè  Maréh,  commentaire  de  R.  Samuel  Yaplié  Aschke- 
nasi,  explique  très  clairement  ces  interprétations  :  «  R  paraît,  dit- 
il,  que  dans  le  livre  de  généalogie  (on^)  des  veilles  des  prêtres 
étaient  écrites  ces  paroles  :  i^^-iCTa  '(TT'W  ni-iiin"*  ;  et  que  dans  la 
veille  de  ï-rir'-'i"'  étaient  écrits  ces  mots  :  a^-n^ij:  -l'^y  m^yr. 
R.  Lévi  explique  ces  mots  en  disant  que  ni->,iir!i  est  le  nom  d'un 
homme,  et  •ji-i-'îa ,  le  nom  de  la  ville  qu'ils  habitaient  -  ;  que 
ii^-iDW  est  là  parce  que,  dans  leur  temps  (de  veille),  le  temple  a  été 
livré  entre  les  mains  des  ennemis,  comme  il  est  dit  plus  haut. 
R.  Berachia  explique  le  premier  mot  ainsi  :  v:a  tiy  n^nr;  i-r 
«  Dieu  a  disputé  avec  ses  enfants  »  et,  de  même,  il  explique  T~ry-,^ 
Viis^i:  ?^^2'J  par  tiV^r;  p  hvi  ^2:2^  r-ipr::*  ti-^v  t-i^  :•-;' 
t:nN:2n3  "ji-nDiib  «  Dieu  a  connu  le  dessein  profond  qui  était  dans 
leurs  cœurs  et,  pour  cette  raison,  il  les  a  exilés  à  Sepphoris,  à 
cause  de  leurs  péchés  ». 
Le  livre  qui  portait  le  titre  de  Sarbeth  Sarbanéel  renfermait  la 

*  13  est  mis  souvent  pour  n^D.  Nous  en  avons  un  exemple  plus  haut,  dans  la  liste 
généalogique  citée  par  R.  Lévi. 

*  De  la  ville  à  eux  assignée  en  leur  qualilc^  de  prêtres. 


164  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

généalogie  des  lïasmonéens  et  constituait  le  véritable  livre  des 
Macchabées.  L'apparition  de  ce  volume  était  politiquement  indis- 
pensable. La  situation  de  Jean  Hyrcan  était,  en  effet,  assez  déli- 
cate; ce  prince  passait  pour  être  né  d'une  mère  ï-ibbn.  Gela  résulte 
indiscutablement  du  passage  où  Flavius  Josèphe  (Antiquités,  XIIL 
18)  raconte  les  origines  de  la  brouille  de  Jean  llyrcan  avec  les 
Pharisiens.  Il  était  donc  nécessaire  d'établir  la  filiation  légitime 
du  grand-prêtre  ;  de  là,  le  livre  qui  nous  occupe  et  auquel  le  Tal- 
niud  fait  évidemment  allusion,  lorsqu'il  nous  dit:  ■c"'^',  r-i'n  -«rpT 
rr'.TZ'cn  n-'a  nVs>3  innD  «  Les  anciens  des  écoles  de  Tlillel  et  de 
Schammaï  écrivirent  le  livre  de  la  maison  des  Hasmonéens.  » 

Cette  œuvre  était  donc  d'origine  purement  pharisienne. 

Plus  tard,  lorsque  Jean  Hyrcan  et  ses  successeurs  furent  deve- 
nus partisans  de  la  secte  saducéenne,  les  Pharisiens  persécutés 
se  vengèrent  en  commentant  avec  malveillance  le  nom  de  ces 
Hasmonéens,  passés  dans  le  camp  de  leurs  ennemis.  Les  textes 
que  nous  avons  reproduits  sont  des  exemples  de  ces  sortes  d'inter- 
prétations, auxquelles  le  nom  des  Macchabées  se  prêtait  admi- 
rablement. Et  c'est  ici  que  nous  arrivons  à  la  partie  principale  de 
notre  démonstration. 

Les  Hasmonéens  descendaient  de  la  famille  des  colianlm  dont 
l'aïeul  était  Yehoyarib.  I  Macchabées,  ii,  1,  nous  voj'ons  «  Matha- 
tliias,  fils  de  Jean,  fils  de  Simon,  sacrificateur  des  fils  de  Yoarib  ». 
De  même,  I  Macchabées,  xiv,  29,  «  Simon,  fils  de  Mathathias,  fils 
des  fils  de  Yoyarib  )).  Flavius  Josèphe,  de  son  côté  (Antiquités,  XH, 
8),  nous  transmet  une  généalogie  plus  complète  :  «  Mathathias, 
dit-il,  fils  de  Jean,  fils  de  Simon,  fils  d'Hasmonée,  qui  habitait  à 
Modin,  était  sacrificateur,  de  la  lignée  de  Yoyarib.  » 

Ce  nom  de  Yoyarib  revient  dans  la  Bible  sous  différentes  formes. 
I  Chroniques,  ix,  10,  et  xxiv,  7,  nous  trouvons  l'orthographe 
complète  r-'-.-jir:";,  pour  le  nom  de  la  famille  de  prêtres  chargée  de 
la  première  des  vingt-quatre  veilles  du  temple.  Néhémie  (xi,  5  et 
10;  XII,  6  et  19)  écrit  3—,'i\  Ezra,  viii,  16,  enfin,  emploie  ces  deux 
orthographes  :  a-^-p  et  n"'-''^i\  Dans  tous  ces  passages,  il  est  ques- 
tion de  la  même  famille,  de  celle  qui  donna  naissance  aux 
Macchabées. 

Or,  il  suffit  de  comparer  I  Chroniques,  ix,  10  et  11,  avec  Néhé- 
mie. XI,  10,  11,  et  XII,  6,  12,  15  et  11»,  pour  s'assurer  que  cette 
famille  n^-i.-iir;-'  est  identiquement  la  même  que  la  famille  des 
ri^-,7:^  qui  figure  dans  Ezra,  vu,  3;  Néhémie,  xi,  ll,etxii,  15; 
et  ^Chroniques,  v,  32,  33;  vi,  37,  et  ix,  11 . 

Nous  ne  pouvons  manquer  d'être  frappés  de  ce  fait,  que  le  sens 
des  mots  a^'n^irr'  et  ni"»-,?:  est  le  même  :  ces  deux  expressions,  en 


LE  TITRE  DU  LIVRE  DES  MACCHABÉES  165 

effet,  peuvent  se  traduire  par  celui  avec  qui  Dieu  dispute,  ou 
celui  qui  dispute  avec  Dieu,  se  révolte  contre  Dieu. 

Si,  après  avoir  fait  cette  observation,  nous  remarquons  que 
•^173  se  rend  totijours,  en  araméen,  dans  le  sens  de  révolté,  par 
mo,  nous  nous  trouvons  en  présence  de  trois  termes  syno- 
nymes :  n-'-i"',  "^iM  et  nno;  et  les  trois  noms  formés  de  ces  racines, 
Yehoyarib,  Merayot  et  Sarabel  sont  synonymes,  eux  aussi,  et  dé- 
signent une  seule  et  même  famille,  celle  des  Hasmonéens. 

Nous  comprenons  maintenant  dans  quelle  intention  R.  Lévi 
associe  a^-i-'i--'  à  "j-n-^?:  et  à  -1^2-1072  ;  nous  saisissons  pourquoi 
R.  Berachia  a  voulu  juxtaposer  n-^-i-'ir;"'  à  innoT  nn^ao.  Ces  deux 
auteurs  entendaient  commenter,  par  une  triiile  derascha,  le  nom 
détesté  des  Macchabées  sadducéens. 

Nous  nous  rendrons  compte  aussi  du  motif  qui  poussait  R.  Be- 
rachia à  introduire  dans  la  discussion  et  à  commenter  celte 
phrase  :  n-^TiD^i:  pMzy  ^-^^;'"^  Néhémie,  xi,  10,  nomme,  en  effet, 
parmi  les  Cohanim,  :^^-)lv  13  ri^s-n-;.  Yedaya  appartenait  donc,  lui 
aussi,  à  la  famille  de  Yehoyarib  et  avait  droit  à  sa  part  dans  la 
derascha  tendencieuse  dirigée  contre  les  Hasmonéens. 

Toutes  les  obscurités  du  texte  talmudique  disparaissent  dès  lors. 
Les  mots  cités  par  K.  Lévi  et  R.  Berachia,  qui,  au  premier  abord, 
semblaient  incompréhensibles,  prennent  un  sens  net  et  précis  et 
nous  permettent  de  retrouver  la  signification  du  titre  rapporté 
par  Origène.  Sarabel,  en  un  mot,  est  un  synonyme  de  Yoyarib,  et 
le  titre  araméen  sappr.e  sappavseX  doit  être  transcrit  bN'^:n-iD  a-'ano, 
l'équivalent  de  bwSn-iD  "jno,  et  se  traduire  La  famille  Sarabel  ou 
La  finnille  des  Hasmonéens. 

II 

SARAMEL. 

Le  résultat  auquel  nous  sommes  arrivé  va  nous  conduire  immé- 
diatement à  expliquer  un  passage  du  premier  livre  des  Maccha- 
bées incompris  jusqu'à  ce  jour. 

Nous  lisons,  I  Macchabées,  xiv,  27,  28  :  «  P]t  ils  écrivirent  sur 
des  tables  d'airain,  qu'ils  placèrent  sur  des  colonnes,  sur  la  mon- 
tagne de  Sion  ;  et  voici  la  copie  de  l'écrit  :  Le  18  EIoul  de  la  cent 
soixante-douzième  année,  qui  est  la  troisième  annétî  du  grand- 
prêtre  Simon,   dans  Saramel. . .  »  Lo  texte  gre<î  porte  :  -t-j-.o'j  étoç 

Or,  nous  ne  trouvons  nulle  i)art  la  moindre  trace  d'une  localité 
du  nom  Aq  Saramel.  Déplus,  il  n'eût  guère  été  logique  d'assem- 


166  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

hier  le  peuple  à  Saramel  pour  placer  une  inscription  à  Jérusalem. 
11  paraît,  enfin,  bien  extraoïxlinaire  que  le  grand-prêtre,  dans  un 
acte  aussi  solennel,  ne  soit  désigné,  (1rs  le  début,  que  par  le  nom 
de  Simon,  sans  indication  immédiate  du  nom  de  famille. 

Ma  conclusion  est  que  Saramel  ligure  ici  le  nom  de  famille 
Sarabel.  La  permutation  de  3  avec  »  est  très  fréquente.  C'est 
ainsi,  par  exemple,  que  nous  trouvons  ir^-isTD  pour  \^r:^z-2  et  mina 
pour  n"T)/:  ;  c'est  ainsi  encore  que  la  version  des  Septante,  au 
lieu  de  Sennachérib,  écrit  ii^wa/ripiii;  sans  compter  bien  d'autres 
cas  de  ce  genre,  qui  nous  autorisent  à  faire  cette  correction.  Quant 
au  mot  àv,  il  aura  été  ajouté  plus  tard,  à  une  époque  où  le  copiste, 
ne  pouvant  comprendre  que  Saramel  avait  été  écrit  par  erreur 
au  lieu  de  Sarabel,  y  vit  un  nom  de  ville  et  voulut  compléter  un 
texte  qui  lui  semblait  défectueux. 


III 

MACCHABÉE. 

Enfin,  puisqu'il  est  question  ici  de  la  famille  des  Macchabées,  je 
veux  encore  ajouter  à  ce  qui  précède,  une  dernière  remarque. 

Le  surnom  de  Juda  ne  me  paraît  pas  avoir  été  expliqué  d'une 
manière  satisfaisante.  Il  est  bien  improbable  que  cette  épithète 
vienne  de  P3pS],  raarleau.  Le  premier  livre  des  Macchabées,  ii, 
•2,  nous  dit,  en  effet,  au  sujet  de  Matliathias  :  t  Et  il  avait  cinq  fils  : 
Yohanan,  surnommé  Kadis;  Simon,  surnommé  Thassi;  Juda,  sur- 
nommé le  Macchabée;  Eléazar,  surnommé  Avaran  ;  Jonathan, 
surnommé  Apphus.  »  Josèphe  (Antiquités,  XII,  8)  donne  la  même 
liste,  avec  une  légère  variante  :  «  Il  avait  cinq  fils  :  Jean,  sur- 
nommé Gaddis;  Simon,  surnommé  Mathes  ;  Juda,  surnommé 
Macchabée  ;  Eléazar,  surnommé  Auran  ;  Jonathas,  surnommé 
Aplius.  » 

Il  résulte  de  ces  deux  textes  que  les  fils  de  Mathathias  portaient 
des  surnoms  tirés  de  noms  de  villes  ou  de  contrées.  Je  crois  que 
Juda  ne  fait  pas  exception  :  que  son  surnom  vient  de  n*:2~'':  et 
doit  s'écrire,  sous  sa  forme  complète,  ^;3p»  comme  celui  du 
héros  de  David  nommé  I  Chroniques,  xii,  13.  Le  noun  disparaît 
dans  les  langues  sémitiques  aussi  fréquemment  qu'il  s'introduit 
par  nasalisation.  C'est  ainsi  que  -^j-yz'z  sera  devenu  ■'nr-:,  dont, 
plus  tard,  on  aura  voulu  faire  ''3p73,  que  l'on  comprenait  mieux. 

Senior  Sachs. 


INSCRIPTION  JUIVE  DES  E^'VIlîO^S  DE  COIÎAÏÏI^OPLE 

L'inscription  qu'on  va  lire  a  été  copiée,  il  y  a  quelques  années, 
avec  trois  autres  textes  funéraires  sans  importance,  par  M.  G. 
Abdoullali,  photographe  à  Constantinople  ;  elle  provient  d'une 
localité  ai)pelée  Arnaut-Kcui  (village  des  Albanais),  située  sur  les 
pentes  seiitentrionales  du  mont  Alem-dagh,  en  Bithynie^  La  copie 
de  M.  Abdoullah,  communiquée  d'abord  au  docteur  A.  Mordtmann, 
antiquaire  distingué  de  Constantinople,  a  été  publiée  en  fac-similé 
par  M.  A.  Sidéropoulos,  dans  un  des  derniers  fascicules  du  Syl- 
logue  littéraire  hellénique  de  cette  ville-.  Comme  les  publications 
de  cette  excellente  société  sont  malheureusement  peu  répandues 
en  Occident,  je  crois  être  utile  à  nos  études  en  reproduisant  ici  un 
calque  exact  du  fac-similé  en  question  ;  je  le  fais  suivre  d'une 
double  transcriptions  en  minuscule,  l'une  littérale,  l'autre  cor- 
recte; dans  celle-ci,  j'ai  résolu  les  abréviations  de  l'original, 
ajouté  les  accents  et  rétabli  l'orthographe  classique. 

n  AA^  ^N 

e  pas  couloiulra   avec  un  autre   Arnaut-Keui,  situé  sur  la  rive  européenne  du 
t,  entre  Kouroutchesmé  et  Bebek. 


»  N 
détroi 

'O  .,    .x.uv...i*vi..vojTioAsi     r-A/r|Vtxo;  çi/oÀOYixo;   ai^UoroÇ-    llapap-r,aa    toO   !(:)  = 

TOaO'J.    '^      ■^'    "^  •       -•  ■        --     -■  r    r     '. 


âv    KwvT-avT'.vo'jTTÔXsi    'EX),r|Vtxô;  oaoXoyixô;   c<jII(jvo(,.    llapàp-r,a 
P.  21  (Constantinople,  1891). 


168  Ri:VLE  DES  ETUDES  JUIVES 

XîWV.    UplVT,. 

C'est-à-dire  : 

'EvOxoî  xaTïxîTTa'.  SavÇiTi;,   uî^;   FîpovTfo'j  ~p(eT,3'JT£po'j'),   YpaïAaïTîli;   xal  èiria- 

«  Iji  est  couché  Sanbatis,  fils  de  Gérontios  preshyteros,  scribe 
et  président  des  Anciens.  Paix.  » 

L'origine  juive  de  notre  texte  est  attestée,  non  seulement  par 
son  contenu  et  par  la  formule  terminale  "Eipvïi,  qui  traduit  l'hé- 
breu El"::":;,  mais  par  la  présence  des  symboles  caractéristiques,  le 
chandelier  à  sept  branches  et  le  rameau  de  palmier,  que  M.  Ab- 
doullah  a  signalés,  mais  négligé  de  reproduire  dans  son  fac-similé. 

L'orthographe  barbare,  à  laquelle  nous  ont  habitués,  d'ailleurs, 
les  inscriptions  funéraires  juives  de  cette  époque,  témoigne  d'une 
prononciation  déjà  très  voisine  de  celle  des  Grecs  actuels.  Le 
lapicide  emploie  indifféremment  z\.  pour  i  et  i  pourri;  ai  s'échange 
avec  £,  0  avec  to;  les  consonnes  doubles  sont  supprimées  (Ypaixa- 
TEj;).  On  notera  particulièrement  la  graphie  jyo;  pour  uJ.dî,  intéres- 
sante pour  l'histoire  du  gammi  intervocalique  ;  c'est  la  première 
fois,  si  je  ne  me  trompe,  qu'on  la  rencontre;  une  inscriptiou 
chrétienne  d'Assos  avait  déjà  fourni  ûyeioO  pouruî.oO*. 

Le  nom  du  défunt  se  lit  sxvSi-:'.;,  flls  de  rEsôv-no:.  lavCixtî  est  une 
forme  nouvelle  d'un  nom  dont  on  avait  déjà  rencontré,  dans  les 
textes  ou  les  inscriptions,  les  variantes  suivantes  : 

zavêiT'.o;,  Coy^x>-  itiscr.  grœc,  IV,  8912  (Bithynie,  chrétienne). 

i:àv6aTo;  (?),  C.  I.  G.,  III,  4074  (Ancyre,  chrétienne"?) 

sagÊiTi;,  C.  /.  G.,  IV,  9910  (Rome,  juive). 

xar^iTiî,  C.  /.  G.,  IV,  9723  (Rome,  chrétienne).. 

iiaÇêaTio;,  Syuéslus,  ép.  60  ;  Socrate,  Ilist.  eccL,  V,  21,  O  (15). 

Comparez  aussi  E:-x(x6iTio;  dans  l'épitaphe  juive  de  Korykos  en 
Lycie  {Revue,  X,  76;. 

Tous  ces  noms  propres,  auxquels  correspond  la  forme  hébraïque 
Sabbalaï,  dérivent  évidemment  du  nom  du  Sabbat,  et  c'est  par  la 
synagogue  qu'ils  ont  passé  dans  l'église  primitive.  Le  remplace- 
ment du  double  b  par  le  groupe  nb  ou  mb,  que  l'on  constate  dans 
les  formes  xavêxTi;,  iiavêiTioî,  i:'iv6a-o;  [?],  EJ5ï|;.6iTio;,  est  uu  phénomène 
fréquent  dans  les  idiomes  sémitiques.  C'est  ainsi  que  le  fameux 

'  Sterrett,  Paperx  of  the  american  school  at  Athens,  I,  85,  n"  lxsu.  Cf.  Blass, 
Ueber  die  Ausspracht  dea  Grierhischen  (3°  éd.),  p.  107  suiv. 


INSCRIPTION  JUIVE  DES  ENVIRONS  DE  CONSTANTINOPLE  160 

fleuve  intermittent,  que  Josèphe  {B.  Jud.,  Vil,  5,  1)  appelle  2a66a- 
Tixo'ç,  est  désigné  dans  le  Midrascli  {Bereschit  Rabba,  ch.  2)  *  sous  le 
nom  de  ';n33r;o,  Sambation  ;  ou  encore  {ihicL,  ch.  73,  72  /y), 
ivjnio,  Sanbalion.  La  même  l'orme  se  trouve  dans  le  Talmud  de 
Jérusalem,  Sanhédrin,  c.  x,  ad  fin.,  29  c. 

Le  nom  du  père,  Gerontios,  a  une  physionomie  tout  hellénique  ; 
il  dérive  de  la  racine  ysfwv,  vieillard.  Il  est  à  remarquer  que  le 
nom  ne  se  rencontre  pas  à  l'époque  classique  ;  on  ne  le  voit  appa- 
raître qu'à  l'époque  chrétienne,  soit  dans  les  inscriptions  (C  /.  G., 
9148  et  9804)  '\  soit  dans  les  textes  :  il  est  porté  notamment  par  un 
général  de  l'empereur  Honorius  (Olympiodore  de  Thèbes,  §  16  z= 
F.  B.  G.,  IV,  59).  On  le  trouve  aussi  dans  la  littérature  talmu- 
dique  :  il  est  question  d'un  médecin  juif  appelé  Bar-Gliiranli, 
contemporain  de  R.  Jérémie,  c'est-à-dire  au  milieu  du  iv*^  siècle 
(T.  de  Jérus.,  Béça,  I,  T,  p.  60  c")  ^  D'après  cela,  on  serait  tenté  de 
voir  dans  rspdvTto;  l'équivalent  d'un  nom  hébreu  ou  araméen  ayant 
la  môme  signification.  L'araméen  N3D  [Saba)  est  employé  en  Ba- 
bylunie,  non  seulement  comme  épithète  disi;inctive,  mais  comme 
nom  propre. 

Les  titres  ou  dignités  que  nous  rencontrons  dans  notre  inscrip- 
tion sont  au  nombre  de  trois  :  TrpîïCj-rspoi;,  j-paaaaTe'j?,  i-z:7-%\r,c,  Twv 
iraXaitov . 

rpa[Aij.aTS'j;,  <c  écrivain  »,  qui  dans  l'épigraphie  classique  a  le  sens 
de  secrétaire  ou  greffier,  est  ici  l'équivalent  de  Thébreu  1210  ;  c'est 
le  terme  consacré  dans  le  langage  du  Nouveau-Testament  pour 
désigner  ceux  qui  sont  versés  dans  l'étude  de  1'  «  écriture  »,  c'est- 
à-dire  de  la  loi.  Le  titre  de  ypafiiJLaTEùî  a  fini  par  se  confondre  avec 
celui  de  Rabbin,  «  Monseigneur  »,  qui  n'était  à  l'origine  qu'une 
appellation  honorifique,  employée  en  adressant  la  parole  aux 
lettrés,  aux  docteurs  de  la  loi.  Le  terme  grec  ligure  fréquemment 
dans  les  inscriptions  funéraires  juives  de  Rome,  datant  du  ii^  au 
iv«  siècle  de  l'ère  chrétienne  ^.  On  voit  que  les  Juifs  de  la  région 
byzantine  en  avaient  conservé  également  l'usage. 

L'expression  très  curieuse  ÈTtiTTctTïiî  t(ov  -iraXaicôv  se  rencontre  ici 
pour  la  première  fois.  On  ne  saurait  douter  que  sous  ce  terme 

*  Dans  le  Talmud  de  Babylone  {San/u'driii,  60  I))  et  Beresrhit  E.,  2,  sect.  11, 11  r^, 
on  trouve  la  forme  réfrulière  'jT'^iaD,  Sabbation  (grec  i^aSSaTîtov).  Cf.  Jacob  Levy, 
Neuhebra'isches  Wôrterbuch,  s.  v.;  Neubauer,  G<fog.  du  Talmud,  p.  33. 

-  Le  fragment  romain  (Kaibel,  Insc.  Sicil.,  1519),  où  on  lit  seulement  rKPGNTiO, 
me  parait  être  ép;alement  de  provenance  chrétienne. 

*  L'équivalence  i^JjI'^^  =:  Pïpovxio;  est  signalée  par  Ziinz,  Namcn  der  Jnden 
[Ges.  Sc/iriften,  II,  8).  Elle  m'a  été  indiquée  par  M.  Clermont-Ganneaii, 

*  Garrucci,  Cimitiro  deyli  antichi  Hbrei...  Vigna  Randanini,  p.  42,  46,  47,54,  55, 
59,  61.  Du  même,  Dissertozioni  archeoïo'jiche.  11,  165  (n»»  20,  21)  et  182  (n°  21j. 


170  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

assez  poétique  de  r.a'Ki.'.oi  on  ne  doive  reconnaître  les  «  anciens  », 
a-'ïpT,  de  la  communauté,  beaucoup  plus  ordinairement  désignes 
sous  les  noms  de  itpsaêjxEpot  ou  de  yepdvTïî  '.  Si  le  lapicide  s'est  servi 
de  cette  expression  insolite,  c'est  peut-être  par  un  scrupule  de 
lettré,  pour  éviter  la  répétition  du  mot  rps^sëùzs^o^,  employé  quel- 
ques lignes  plus  haut  ^.  Quant  au  mot  èncTiTr,?,  il  se  rencontre  plu- 
sieurs fois,  dans  l'Evangile  selon  saint  Luc,  dans  le  sens  de 
«  maître,  rabbin  »  en  parlant  à  Jésus  ^  ;  mais  ce  n'est  évidemment 
pas  dans  cette  acception  que  la  pris  l'auteur  de  notre  iiiscriiition. 
'EriJTirr.î,  qualifié  par  le  génitif  qui  suit,  ne  peut  signifier,  d'après 
l'étymologie  et  l'usage,  que  présidrnl.  C'est  en  ce  sens  qu'on 
disait  à  Athènes  è-uxàTT,;  tûv  Tîcoéopuv,  è-isTâTr,ç  -rtov  rp'jTâvsuv,  pour  chef 
ou  président  du  bureau  de  l'assemblée  du  peuple,  chef  ou  prési- 
dent des  Prytanes  (commission  de  permanence  du  sénat^.  Dès 
lors,  rèr:ffTctTT,i;  twv  -rraT^aiùv  de  notre  épitaplio  n'est  autre  que  le 
président  des  Anciens,  le  chef  de  la  yspouaia,  (conseil,  sanhédrin) 
de  la  communauté  juive  dont  le  village  d'Arnaut-Keui  occupe  le 
site  (à  moins,  ce  qui  est  toujours  possible,  que  l'inscription  n'ait  été 
transportée  d'ailleurs).  Ce  fonctionnaire  est  ordinairement  désigné 
à  Rome  et  à  Naples  sous  le  titre  de  yepousifltpx^î.  à  Venouse  sous 
celui  de  Yspou^tàp^^wv '*  ;  il  ne  doit  pas  être  confondu  avec  l'àp/wiivat- 
Ytoyoç,  dont  les  fonctions  étaient  exclusivement  relatives  au  culte, 
tandis  que  les  Anciens  et  leur  président  s'occupaient  de  tous  les 
intérêts  matériels  de  la  communauté  et  en  particulier  de  l'admi- 
nistration financière  et  judiciaire.  Je  ne  connais  aucun  texte  qui 
nous  donne  l'équivalent  hébreu  du  titre  de  Gérousiarque;  on  peut 
conjecturer  QispT  "JNn. 

La  sigle  UoS  de  la  ligne  5,  donne  lieu  à  une  petite  difficulté.  La 
résolution  de  l'abréviation  n'est  pas  douteuse  :  c'est  une  des  plus 
communes  dans  l'épigraphie  grecque  tardive  ^  Mais  on  peut  hé- 
siter entre  les  lectures  irp^EdêûTcpoî)  et  xp'caêuTépou).  Dans  la  dédicace 
juive  de  Smyrne  (C.  I.  G.,  9897),  la  même  abréviation,  employée 
dans  deux  lignes  successives,  doit  s'interpréter,  la  première  fois, 
par, le  nominatif,  la  seconde,  par  le  génitif.  Si  je  me  suis  décidé 
ici  pour  la  seconde  interprétation,  c'est  par  des  raisons  tirées  du 
contexte.  Le  mot  izozcëù-ct^cK,  fréquemment  employé  dans  la  litté- 

1  PhiloQ   chez  Eusèbe,  Prœp.  evang.,  viii,  7,  11^  :  twv  ÎEpswv  oé  ti;  6  Tta^ywv  r,  xwv 

*  Il  aurait  pu  écrire  yîp&vîojv  :  peul-Otre  a-t-il  évité  ce  mot  à  cause  du  nom  propre 
TîpovTto;  ? 

3  Sa.nt  Luc,  v,  5  ;  viii,  2-i  et  'i5  ;  ix,  33  et  49  ;  xvii,  13.  Cf.  Schiirer,  Geschichtc, 
II.  257-8. 

"  Schiirer,  II,  ol7,  notes  ÎÛ6-108. 

5  Cf.  Salomou  Reinach,  Traita  d't'j)igraphie  grecque^  p.  234. 


INSCKII'TION  JUIVE  DES  ENVIRONS  DE  CONSTANTINOPLE  171 

rature  évangélique,  désigne  les  membres  ordinaires  soit  du  sanhé- 
drin de  Jérusalem,  soit  des  petits  sanhédrins  locaux  ',  en  d'autres 
termes,  les  Anciens;  il  est  donc  exactement  synonyme  du  mot  ica- 
Àotid;,  employé  à  la  fin  de  notre  insciiption.  Or,  il  n'est  pas  raison- 
nable de  supposer  que  le  même  personnage  soit  désigné,  à  la  fois, 
par  le  titre  de  «  sénateur  »  et  de  «  président  du  sénat  »  ;  la  fonc- 
tion la  plus  importante,  qui  suppose  et  absorbe  le  degré  inférieur, 
doit  seule  être  mentionnée.  Nous  en  conclurons  que  l'abréviation 
np'^  doit  se  traduire  ici  par  nf.ssgjT^pou  :  Gérontios,  le  père,  était 
simplement  un  «  ancien  »,  un  membre  du  Conseil  local;  son  fils 
arriva  à  la  dignité  de  président  du  même  Conseil.  Notons,  en  ter- 
minant, que  le  titre  de  -jrpEsêûxefo;  figure  très  rarement  dans  l'épi- 
graphie  juive,  sans  doute  parce  que  la  qualité  de  simple  membre 
du  Conseil  paraissait  trop  peu  importante  pour  être  commémorée 
dans  une  épitaphe.  M.  Schûrer  observe  -  qu'on  ne  l'a  pas  ren- 
contré une  seule  fois  dans  les  inscriptions  juives  de  Rome;  aux 
deux  seuls  exemples  qu'il  en  ait  cités  d'autre  provenance  —  l'un 
de  Smyrne  (C.  /.  G.,  9897),  l'autre  de  Korykos  (Revue,  X,  76)  — 
s'ajoutera  désormais  celui  d'Arnaut-Keui. 

Théodore  Reinach. 


*  Saint  Luc,  vu,  3  :  TipeiêuTEpoi  ttôv  'lo-joaîtov   (à  Capernaiim) 
2  Geschichte,  II,  518. 


INFLUENCE  DK  r.ASCHI 

ET  D'AUTUES  COMMENTATEURS  JUIFS 

SUR   LES 

POSTULEE  PERPETUEE  DE  NICOLAS  DE  LYRE 


Dans  cette  étude,  nous  nous  proposons  de  montrer  dans  quelle 
mesure  l'exégète  Nicolas  de  Lyre  s'est  inspiré  de  Raschi  et  des 
autres  commentateurs  juifs,  dans  ses  célèbres  Poslillœ  perpetuœ 
(1293-1332).  Nous  nous  attacherons  surtout  à  examiner  attenti- 
vement les  passages  des  commentaires  qui  permettent  de  faire 
ressortir  les  caractères  distinctifs  de  l'esprit  de  Raschi  et  de 
l'exégèse  de  Lyre.  A  ce  point  de  vue  particulier,  les  commentaires 
de  ces  deux  auteurs  sur  les  Psaumes  offrent  des  matériaux  très 
riches,  parce  que,  de  l'avis  des  personnes  compétentes,  ce  sont  là 
leurs  meilleurs  ouvrages  '. 

Mais  avant  d'aborder  notre  sujet,  nous  croyons  utile  de  dire 
quelques  mots  des  travaux  qui  ont  déjà  été  publiés  sur  la  question 
dont  nous  nous  occupons  ici.  Dans  les  plus  anciens  ouvrages  sur 
Lyre  -,  il  est  surtout  question  de  ses  opinions  théologiques  et  de 
son  origine-*.  D'autres  auteurs  ^  citent  ce  fait  à  l'honneur  de  Ra- 

*  Voir  Fr.  Delilzsch,  Einlcitunij  in  den  Psalter  i1867).  p.  41  ;  voir  aussi  une  étude 
rie  M.  Fischer  sur  les  Postille  de  Nicolas  de  Lyre  dans  Zeitschrift  fiir  protestantischc 
Théologie,  t.  XVI,  462  année  1889].  Du  reste,  les  Po67i7/<e  sur  les  Psaumes  furent 
traduites  de  bonne  heure  en  allemand.  J'ai  la  copie  d'une  traduction  allemande  dont 
les  mss.  se  trouvent  à  Vienne  et  qui  porte  la  date  de  1456;  elle  a  été  faite  par  un 
moine  qui  appartenait  au  même  ordre  que  Lyre.  Cf.  Joseph  Kehrein,  Zwr  Geschichte 
(1er  deutschen  Bibelûbersetzung  vor  Luther,  p.  22. 

*  Cf.  G.-W.  Meyer,  (leschichte  (1er  Exejeae,  I,  100,  et  Dieslel,  Geschichte  des  A. -T. 
ta  de>-  christl.  Kirrhe,  1'J8,  uolc  2. 

3  G<'senius  [Geschichte  der  hehr.  Sprache  und  Schrifl]  et  Delitzsch  [Ei/ilettimy  in 
dcn  Pfalter,  41)  le  croient  d"ori{^ine  juive.  Merx  et  Fischer  combattent  cette 
opinion. 

*  Zuiiz,  Etude  sur  liaschi  dans  Ztschr.  f.  Wissenschaft  des  J'identhiims,  I,  86 
(1823).  CI.  Graetz,  Vil.  513. 


INFLUENCE  DE  HASCIIl  SUR  NICOLAS  DE  LYUE  173 

schi  que  Lyre  a  beaucoup  utilisé  son  commentaire.  D'autres', 
enfin,  font  observer  que  Lyre  a  indiqué  dans  une  phrase  latine  le 
quadruple  sens  que  Técole  cabbalistique  donne  de  chaque  mot. 
Voici  cette  phrase  :  Litcra  gesia  docci ,  quid  credas  AUegoria,  Mo- 
ralis  quid  agas,  qiio  tendas  Anagogia.  Mais,  en  réalité,  il  ne  s'est 
occupé  que  de  deux  sens,  le  sens  littéral  ou  historique  et  le  sens 
mystique  ou  allégorique.  Ce  sont  principalement  MM.  Diestel  et 
Siegfried  ^  qui  ont  étudié  la  question  qui  fait  l'objet  de  notre  tra- 
vail. Les  recherches  de  M.  Merx^  touchent  également  à  notre 
sujet,  car  en  parlant  des  anciens  commentateurs,  il  s'occupe  éga- 
lement de  Raschi  et  de  Lyre  et  indique  les  idées  herméneutiques 
de  ce  dernier.  Enfin,  M.  Fischer*  a  publié  un  travail  dans  lequel 
il  étudie  Nicolas  de  Lyre  comme  théologien,  et,  dans  ce  but,  jette 
un  coup  d'œil  rapide  sur  ses  travaux  exégétiques.  Nous  sommes 
d'accord  avec  M.  Fischer  sur  la  valeur  de  Lyre  comme  théo- 
logien, mais  nous  contestons  le  jugement  qu'il  porte  sur  notre 
auteur  comme  philologue,  jugement  qui  diff'ère,  du  reste,  de  l'opi- 
nion de  la  totalité  des  historiens.  Nous  examinerons,  d'ailleurs, 
dans  le  chapitre  suivant  les  arguments  de  M.  Fischer. 

Les  savants  ont  généralement  admis  que  Nicolas  de  Lyre,  à  en 
juger  par  ses  Postillœ  sur  l'Ancien-Testament,  savait  bien  l'hé- 
breu et  était  familiarisé  avec  les  interprétations  rabbiniques  de  la 
Bible.  M.  Fischer  est  d'un  avis  contraire.  D'après  lui.  Lyre  a  pris 
le  texte  de  la  Vulgate  pour  base  de  son  travail  et  n'a  eu  recours 
au  texte  hébreu  que  pour  des  détails,  mais  jamais  pour  déter- 
miner le  sens  d'un  verset  complet.  Ses  connaissances  gramma- 
ticales aussi,  dit  M.  Fischer,  étaient  médiocres  et  ne  lui  ont  pas 
permis  de  remanier  le  texte  de  la  Vulgate.  Examinons  ces  diff'é- 
rents  points  de  près. 

Les  endroits  où  Lyre  s'occupe  de  grammaire  hébraïque  sont  peu 
nombreux,  parce  qu'en  réalité,  des  remarques  grammaticales  au- 
raient eu  peu  d'intérêt  pour  la  catégorie  spéciale  de  personnes 
auxquelles  Lyre  destinait  son  travail.  Il  a  voulu,  en  ett'et.  expli- 
quer en  latin  «  la  Bible  latine  pour  ceux  qui  savent  lire  et  écrire 
le  latin.  >>  On  rencontre  pourtant  dans  son  commentaire  sur  les 

>  Schmiedl,  Studien  ilher  jirl.  inshcsoudere  jiid.-arab.  Helitjionsphilosophic,  Vienne. 
1869,  p.  22S  et  229. 

ï  Siegfried,  Raschi's  Einfltiss  auf  Nicolaus  de  Lyra  und  Luther. . .  dans  Archiv  fiir 
wissenuh.  Erforschung  d.  A.  T.,  I,  428-/156,  et  II,  39-65. 

*  A.  iMerx,  Die  Prophétie  des  Joël  und  seine  Auslegcr,  Halle,  1879. 

*  M.  Fischer,  Des  N.  de  Lyras  Postillœ  perpetnm  in  V.  et  N.  Testament um  m 
ihrem  eiqenthiimlichem  Unterscl.iede  von  der  gleichzeitigen  Schriftausleijiinj,  dans  la 
Zîschr.  /'tir  prot.  neol.,XY,  462  (1889). 


174  RKVUE  DliS  ÉTUDES  JUIVES 

Psaumes  un  certain  nombre  d'observations  grammaticales.  C'est 
ainsi  qu'à  propos  de  Psaume,  v,  1,  il  remarque  que  «  dans  le 
mot  Hanchilot,  la  sj'llabe  Ha  ne  lait  pas  partie  du  substantif, 
mais  indique  l'article  '  ».  Même  observation  au  Psaume  viii,  à 
propos  du  mot  n-nsn.  Dans  le  Psaume  ix,  1,  à  propos  des  mots 
pb  mr-br,  il  parle  de  l'usage,  en  hébreu,  du  singulier  pour  ex- 
primer un  collectif.  En  passant  en  revue  les  diverses  interpréta- 
tions auxquelles  a  donné  lieu  ce  passage  difficile,  il  dit  que,  pour 
quelques-uns  de  nos  «  docteurs  »,  doctores  tïostri,  ces  mots  font 
allusion  à  la  mort  des  premiers-nés  en  Egypte,  et  que,  au  point 
de  vue  grammatical,  on  ne  peut  rien  objecter  contre  l'emploi  de 
p  pour  t]-^;2.  Du  reste,  dit-il,  Raschi  également  explique  p  comme 
si  c'était  un  pluriel  -. 
Voici  ce  que  dit  Rascbi  sur  ce  passage  :  m?:  "r:?  n^;::?  "«rx  1;:nt 

'•^•i   t:^:fr:j-^   2-.pm   tnpTi:    n'rjip,-'. 

C'est  également  à  Pvaschi  que  Lyre  emprunte  ce  principe  gram- 
matical que  la  négation  qui  se  trouve  dans  la  première  partie  du 
verset  peut  se  rapporter  aussi  à  la  seconde.  Ainsi,  pour  Ps.  l,  8,  il 
dit  :  «  Holocausta  autem  iua  in  cons.  meo  sunt  semper.  In  Ilebr. 
et  in  transi.  Hier.  ^  habetur  :  et  holocausta  tua  coram  me  snaL 
semper,  et  secuiidum  quod  dicit  Ra.  Sa.  et  bene,  ratione  huius  co- 
pulativîe  et  ly  «  non  »  quod  est  in  principio  versus  hic  resunii- 
tur,  et  est  sensus  :  et  holocausta  tua  non  sunt  coram  rue  semper 
i.  e.  de  cetero  mihi  accepta.  Et  hoc  modo  loquitur  scriptura 
psalmi  pnecedentis  ubi  dicitur  lix,  9)  :  Non  dabil  Deus  plaçât io- 
nem  suam  et  pretuon  yedemptionis  animœ,  subintelligitur  simili- 
ter  non  dabit».  Raschi  dit,  en  effet, '^r.s  SwN   '^h'^-n  "^-^n^T  br   Nb 

On  voit,  par  ce  dernier  exemple,  que  les  remarques  grammati- 
cales de  Lyre  lui  servent  en  même  temps  à  améliorer  le  texte, 
contrairement  à  l'assertion  de  M.  Fischer.  Nous  pourrions  multi- 
plier ici  les  exemples,  mais  nous  citerons  de  préférence  les  pas- 
sages où  Lyre  invoque  l'autorité  de  Raschi  et  surtout  ceux  où  il 
est  question  de  modifications  apportées  à  l'arrangement  de  ver- 

•  Ad  ciijus  intellcctuin  sciendum,  quod  in  hac  diclione  <  llanecbilolh  »  -lia  » 
non  est  de  subslantia  vocabuli,  sed  est  arliculare  accusalivi  casus  in  hebraeo. 

*  Alio  modo  sifrnat  juvenlutem,  sicut  <  aima  »  in  Ilebr.  sijinal  juveuculam,  et  banc 
sequilur  Ra.  Sa.  diîeus  quod  David  in  Spiritu  sanclo  prwvidit  juvenes  fortes  capli- 
vandos  per  Komanos  etc.  —  et  sic  est  sensus  tituli  pra-licti  «  super  juventulem  iilii  » 
i.  e.  filiorum. 

'  Lyre  parle  ici  de  la  .  'l'ranslalio  hier,  juxla  Ilebr.  vcrilalem  >,  qu'il  oppose  à  la 
•  Translatio  tomm.  »  ou  «  Transi,  noslra  »,  c'est-à-dire  le  Psaltertum  gallicanum. 
Cf.  Merx,  Joël,  p.  201,  et  Bleek,  Einleiiung  in  da$  A.-T.,  5»  édil.,  Berlin,  188C, 
p.  55o. 


INFLUENCE  DE  RASCHI  SUR  NICOLAS  DE  LYRE  175 

sets  et  parfois  de  psaumes  entiers.  Ainsi,  déjà  avec  Ps.  ii,  1,  com- 
mence toute  une  série  de  corrections,  c'est-à-dire  que  Lyre  pro- 
pose de  supprimer  des  additions  qui  se  sont  glissées  dans  le  texte 
du  Psalt.  gall.  Voici  ce  qu'il  dit  :  «  Sciendum  igitur  quod  iste 
psi.  in  Ilebr.  et  in  transi.  Hier,  quae  est  iuxta  liebraicam 
veritatem  est  omnino  sine  titulo  etsi  in  aliquibus  libris  inve- 
niatur  aliquis  titulus  ut  Psalmus  David  vel  aliquid  huius  niodi, 
non  est  de  textu,  sed  est  appositus  ab  aliquo  expositore  siciit  et 
in  multis  aliis  psalmis,  propter  quod  de  titulo  psal.  (prout  com- 
muniter  scribitur  in  BibliisJ  parum  est  curanduni.  » 

A  Ps.  II,  7,  il  dit  :  «  Prœdicans  prœceptum  élus,  in  llebr. 
habetur  :  Xarrado  Dci  prceception  vel  statutwn  et  est  princi- 
pium  versus  sequentis  (  r;nr;i  pn-bx  nn^ON  )  et  similiter  est  in 
transi.  Hier.  i.  Hebr.,  quod  exponit  Ra.  Sa.  ut  sit  verbum  ipsius 
David  dicentis  Dominus  prœcipit  milii  ut  enarrem  aliis  quod 
sequitur.  w 

Il  corrige  donc  ici  (jus  en  Dei,  divise  mieux  le  verset,  et  s'ins- 
pire, pour  sa  traduction,  du  texte  hébreu  et  du  commentaire  de 
Raschi.  Au  verset  12,  il  dit  que  nn  ip03  a  été  traduit  de  diverses 
manières,  parce  que  les  mots  p">:;3  et  nn  ont  des  sens  variés  en 
hébreu,  et,  finalement,  il  adopte  l'interprétation  des  «  aliqui 
Hebr.  »,  c'est-à-dire  la  signification  messianique  que  le  Midrasch 
donne  à  ces  mots. 

A  Ps.  XIV,  4,  il  corrige  le  texte  latin  en  coupant  autrement  le 
verset,  d'après  le  texte  hébreu.  Pour  xlii,  3,  il  traduit  :  «  Anima 
mea  ad  Deum  (brtem  vivum  pn  bî<b)»,  et  relève  l'erreur  commise 
par  d'autres  traducteurs  qui  ont  écTÏi  font em  au  lieu  de  f'o/irin, 
soit  à  cause  de  la  ressemblance  des  lettres,  soit  à  cause  du  verset 
précédent  où  il  y  a  «  cervus  ad  fontes  aquarum  ».  De  même,  dans 
Ps.  XLviii,  4,  xLix,  12,  et  lui,  6,  Lyre  corrige,  d'après  le  texte 
liébreu,  une  série  d'erreurs  qui  se  trouvent  dans  le  texte  latin. 
Voici  ce  qu'il  dit  à  propos  de  Ps.  lv,  15  :  «  I)i  clomo  Del  anihulii- 
vimus  ciim  consoisn.  In  hebr.  hab.  cicm  fremUii,  i.  e.,  cum  turba 
magna,  ut  exponit  Ra.  Sa.  »  Raschi  dit,  en  effet,  "ir-^n  mn-'  -"^.w 
Dr    m'in  ujrrin    ...-no   p^-^72':'  û'^b-'^-i . 

A  XLVi,  3  et  4,  il  utilise  le  texte  hébreu  pour  indiquer  la  liaison 
existant  entre  les  deux  versets  ;  au  verset  8,  il  lit  û'^n'rN  'y^'\^^^,  et 
considère  à  tort  ï:"'^;■?^î,  non  comme  la  fin  du  verset  8,  mais  comme 
le  commencement  du  verset  9.  A  Ps.  lviii,  9,  Lyre  ne  s'atta- 
che pas  seulement  au  sens  des  mots,  mais  modifie  totalement 
la  signification  donnée  à  ce  verset  par  la  Vulgate.  Dans  i.xxxvii, 
0,  il  rappelle  une  explication  de  Raschi.  Dans  cv,  1,  il  explique 
le  mot  n^V^'^r:,  disant  qu'il  est  composé  du  mot  "iVb-  et  de  n^ 


17Ô  REVUE  DES  ETLDES  JUIVES 

et  V.  '2?,,  il  (lit  que  partout  où  le  latin  a  «  .Egyptus»,  l'hé- 
])rpii  a  n-'-i:': .  A  propos  de  c.xxx,  4,  il  change  l'explication 
de  la  Yulgate  et  déclare  se  rallier  à  l'interprétation  de  Rasclii. 
Enfin,  pour  Ps.  cxlv,  dont  les  versets  se  suivent  dans  Tordre 
alphabétique  et  où  manque  le  verset  commençant  par  le  noiin, 
il  dit  que  la  Vulgate  a  interpolé  le  verset  Fidelis  dominus , 
car  il  ne  se  trouve  pas  dans  l'hébreu.  Ces  nombreux  exemples 
prouvent  que  Lyre  s'est  écarté  de  la  Vulgate  pour  le  sens  de 
versets  entiers  et  même  pour  la  coupe  d'une  série  de  versets. 
S'il  se  rapporte  le  plus  souvent  à  la  Transldl.  Hier,  juxla  Helir. 
ver.,  il  se  permet  aussi  parfois  de  donner  une  autre  traduc- 
tion, basée  sur  le  texte  hébreu.  Du  reste,  pour  la  manière  de  di- 
viser les  Psaumes,  il  est  en  opposition  avec  la  Transi.  Hier., 
quoiqu'il  se  tienne  en  apparence  à  la  division  adoptée  par  la 
Vulgate  '.  Ainsi,  à  propos  du  Ps.  xxxiii,  il  dit  :  «  Huic  psal.  non 
prœmittitur  tit.  in  Hebr.  propter  quod  dixerunt  aliqui  quod  non 
est  distinctus  a  prcecedenti  :  et  occasione  huius  dicti  respexi  très 
Biblias  Hebr.  et  très  libros  Hebraicos  editos  super  librum  psal.  et 
in  omnibus  inveni  hune  psal.  distinctum  a  prœcedenti  non  solum 
in  signatione  per  spacium  vacuum  inter  duos  psal.  sed  etiam  in 
quotatione,  quia  iste  psal.  apud  Hebr.  quotatur  32,  praecedens 
autem  31,  et  eodem  modo  in  transi.  Hier.  i.  Hebr.  distinguitur  a 
pnecedenti  per  literam  magnam  capitalem  in  principio  et  per 
quotationem  :  quia  hic  psal.  ab  eo  quotatur  32  et  praecedens  31.  » 
Il  fait  une  observation  analogue  pour  le  Psaume  xliii,  et  il  admet, 
contrairement  à  saint  Jérôme,  que  les  Psaumes  lxx  et  lxxi  ne 
forment  qu'un. 

Dans  cette  question  de  la  division  des  Psaumes,  comme  dans  les 
objections  qu'il  fait  parfois  à  la  traduction  adoptée  par  la  Vulgate, 
Nicolas  de  Lyre  fait  preuve  d'esprit  critique  et  il  montre  qu'il  pos- 
sède les  qualités  nécessaires  pour  la  saine  interprétation  d'un 
texte,  tenant  compte  du  contenu  du  pa>;sage  à  expliquer,  n'accep- 
tant qu'avec  réserve  les  traductions  existantes,  comparant  entre 
eux  le  plus  de  mss.  possible  et  osant  avoir  une  opinion  personnelle. 

Quel  profit  Nicolas  de  Lyre  tira-t-il  des  autres  sources  rabbi- 
niques  ?  On  connaît  le  passage  de  sa  deuxième  préface  de  la  Ge- 
nèse, où  il  s'élève  avec  force  contre   les  tendances  mystiques  de 

'  Lyre  réunit  les  Ps.  0  cl  10,  à  l'exemple  du  Psalt.  f/all,  et  de  deux  mss.  de  Kenn. 
et  deux  mss.  De  Hossi,  et  reste  en  arrière  d'un  numéro  sur  noire  énuméralion  jus- 
qu'au Ps.  147,  V.  11.  Cf.  Breilhaupt,  Psalmi,  p.  5,  note  \'.\  :  ....  Vel  Psalmus  ille 
qui  jam  in  exemplari  hebr.  est  decimus,  u-late  R.  Salomonis  Jarchi  conjunctus  fuit 
psalmo  nono  >. 


INFLUENCE  DE  RASCHI  SUR  NICOLAS  DE  LYHK  177 

l'interprétation  des  rabbins.  Il  s'en  prend  surtout  aux  nombreuses 
légendes  rapportées  par  le  Talmud  et  le  Midrascli  au  sujet  du 
Léviathan  et  du  fameux  Beheniot  de  Job,  xl,  15,  et,  dans  cette 
polémique,  il  n'épargne  pas  plus  Raschi,  pour  qui  il  [trofesse  pour- 
tant d'habitude  une  profonde  estime,  que  les  autres  rabbins.  Tl 
combat  une  première  fois  les  croyances  Israélites  au  sujet  du  Lé- 
viathan, à  propos  de  ce  que  Raschi  dit  sur  Job  :  pi'j  niTonn 
T'n::'5  ',  il  y  revient  à  propos  du  commentaire  de  Raschi  sur  Ps.  l. 
10  :  r-iyyy  Nino  "rr^v-  mii'Db  'îpin?:r;  Nin  C]Vw\  "^-nn^  m?:r;3 
...ûT'b  D'^1^  c^bx,  il  en  reparle  à  Genèse,  i,  où  pourtant  Raschi 
rapporte  la  légende  du  Léviathan  sans  dire  qu'il  y  croit,  et  enfin 
il  recommence  ses  attaques  à  propos  de  Ps.  xxix,  9.  Tl  attribue 
même  à  Raschi.  au  sujet  de  ce  verset,  une  explication  qu'on  ne 
trouve  dans  aucune  édition. 

Nous  devons  ajouter  que  ces  polémiques,  comme  le  dit  Lyre 
lui-même,  sont  «  très  rares  »  et  peu  variées.  Par  contre,  il  y  a  un 
certain  nombre  de  midraschim  que  Lyre  accepte  pour  son  compte. 
C'est  ainsi  que,  se  référant  à  Raschi,  il  raconte  à  plusieurs  re- 
prises un  miracle  qui  s'est  produit  lors  do  l'inauguration  du  temple 
par  Salomon  (à  propos  des  Psaumes  24,  30  et  132).  C'est  ainsi 
également  qu'il  parle  de  la  délivrance  miraculeuse  des  enfants  de 
Korah.  Raschi  cite  encore  d'autres  midraschim  dont  Lyre  accepte 
les  uns,  rejette  les  autres,  et  parfois  passe  totalement  sous  si- 
lence. Mais  comme,  en  général,  Raschi,  dans  son  commentaire 
sur  les  Psaumes,  ne  rapporte  que  peu  de  midraschim,  nous  ne 
pouvons  pas  nous  rendre  exactement  compte  si  Lyre  était  fami- 
liarisé ou  non  avec  la  littérature  rabbinique. 

Une  fois,  à  propos  du  Ps.  vu,  Lyre  cite  un  passage  du  Targoum 
d'après  Raschi.  11  dit  :  '<■  Et  ideo  est  alla  expositio  quam  sequitur 
Ra.  Sa.  et  Jonathan  fîlius  Oziel  in  transi.  Chaldaica,  quod  Chus, 
sive  Chusi,  est  hic  nomen  appellativum  et  significat  y^]thiopem  et 
vocatur  hic  ^Ethiops  ipse  Saul,  eo  quod  fuit  denigratus  infamia  et 
moribus.  »  Le  passage  du  Targoum  est  ainsi    conçu    :   «  N'^nrnr 

ITû-'îa  UTJ  l-^wn  ^""p  -13  ^iNOT.  »  Raschi  adopte  cette  explication 
en  disant  :  «  t-T3T«:3?3  SiNO  ti^  n-nrn  !n3TC7j  ^'::^'D  rrj  .'\:5"iD 
T«u:y733 . 

Parfois  Lyre  s'appuie  sur  la  littérature  rabbinique,  soit  pour 
('claircir  des  points  importants,  tels  que  la  division  des  Psaumes, 

*  L'édition  de  Bùle  ne  donne  pas  le  commentaire  de  Raschi  sur  Job,  mais  ces  mots 
s'y  trouvent  certainement,  car  Breithaupt  les  rend  ainsi  :  •  Behemolh,  pripparalum 
est  (istud  animal)  in  fulurum.  i 

ï.  XXVI,  N°  W.  li 


178  HKVL'E  Di:S  ÉTUDES  JUIVES 

soit  pour  combattre  une  explication  de  Rasclii.  Pour  le  premier 
cas,  nous  avons  cité  précédemment  un  exemple,  à  propos  du 
psaume  43.  Le  Midrasch  Tehillim  *  ^o'mt  les  Psaumes  42  et  43, 
ou  plutôt,  sans  faire  aucune  observation  pour  le  P:>aume  43,  il 
indique  le  Psaume  44  (irîTNa  ûTj'rN)  comme  le  43^,  mais  à  partir 
de  45  il  suit  l'ordre  habituel.  Nous  avons  déjà  vu  que  pour 
-13  ip'C;  (Ps.  II,  12),  Lyre  oppose  l'explication  du  Midrasch  à 
celle  de  Raschi.  Du  reste,  à  plusieurs  reprises,  Lyre  montre  qu'il 
connaît  le  Midrasch.  Ainsi,  à  propos  de  Ps.  xiii,  2,  Raschi  dit  : 
.-xa-j  Itnt:;"'  Vs  b-'n-iîm  r,-p::b?:  imx  ly.D  z^jzyz  rnix  .n:n  ";;• 
Lyre  désigne  nominativement  les  quatre  royaumes  auxquels  Raschi 
f;ut  allusion.  Or,  ces  noms,  il  ne  pt-ut  les  connaître  que  par  le 
Midrascli.  Ainsi,  on  lit  dans  Beréscliit  Rahba,  §2  :  w-'pb  p  'o  'n 
,-i«Nr::  /?n3  ï-rirb:3  -m  ^imn  nn-r;  y-Nm  .r-n-'sbrn  «"«-ip  nns 
,'^'112  ï-n3b72  iT  ,ir:-,3i  ;  (-;  î-t'72-T')  nmn  !-i:rn  V""î<~  ^'î*  '^r-'N-i 
,  "iT»  ïmisbn  iT  ,  ycT^^  -,  (">  -ircs)  i^izr,  r^s  K^^-b  nb-rin^i  ,  ^tz^v:: 
lanD  ,tz;!-;b  niriN  nn-ina  irîTnT'T:;^  b^Tw"'  rc  \rrw  -r-wn-w 
■iT  «l^inn  "«îD  hy  ,h:NTC-'  T;bN3  pbn  t::b  "jw-j  -ircr;  "j-ip  '^y 
'isn  ûn-n-  irs  "ipn  anb  "j-x"::  -;'•::--  r-nrb?: .  Et  même  là  où  le 
Midrasch  est  très  obscur,  Lyre  indique  clairement,  et  avec  des 
observations  historiques,  les  nations  dont  il  s'agit. 

W  y  a  principalement  trois  psaumes  auxquels  Lyre  se  voit  con- 
traint, dans  l'intérêt  de  la  tradition,  de  donner  une  signification 
messianique,  et  pour  se  justifier  de  ne  pas  se  ranger  à  l'avis  de 
Raschi,  il  s'appuie  sur  les  mêmes  autorités  que  lui,  et  montre 
ainsi  qu'il  sait  les  interpréter  avec  indépendance.  Il  s'agit  du 
Ps.  80,  où  Lyre  se  réfère  au  Beréscliit  liabba,  §88  :  -rc  -.n^'^T 
. .  .bx-ic  ibN  ,-':3b73  "isa  T^^:r,^  û'^pcrn  ;  du  Ps.  45,  où  il  appuie 
son  interjirétation  messianique  sur  les  paroles  suivantes  du  Tar- 
gouni  :  N":;:  -^r^-:  :]i-ir  .Nn-^c-a  Nsb):  ^^itro  ;  et,  enfin,  du  Ps.  110,  où 
il  sait  opposer  avec  habileté  un  autre  passage  du  Targoum  à  l'ex- 
plication de  Raschi.  D'ailleurs,  pour  ce  Ps.  110,  Lyre  fait  appel  à 
toute  son  érudition  rabbinique.  Voici  ce  qu'il  dit  d'abord  :  «Et 
haec  est  sententia  Ra.  Barachite  exponentis  super  Gen.  illud 
Tlirenorum  cap.  v,  2;  Pupilli  facli  siuans  absque  pâtre,  Deus 
sanctus  et  b-'nedictus,  ait  Israël,  vos  dixistis  coram  me  «  Pupilli 
facti  suraus  absque  pâtre  »  redemptor  quem  ego  ex  vobis  suscitabo 
sine  pâtre  erit,  sicut  scriptum  est  Ps.  109  (Ps.  ex,  v.  3).  De 
matrice  aurora;  tibi  ros  intàntiiê  tua  >».  En  réalité,  il  comprend 
mal  les  paroles  de  R  Berakhya,  qui  fait  allusion  à  Esther  et  non 
au  Messie.    Ce  passage  est   ainsi  conçu  :   ■'ib  'i    nc3   rr-''^  'n 

*  Je  me  sers  de  l'édilioQ  de  Daniel  Bomberg,  Venise. 


INFLUENCE  DE  RASCHI  SUR  NICOLAS  DE  LYi;z  179 

Nb  •'n?:3  ûrw  T^rz^nb  ■!\n:r  ■^îwt:;  VwXiir;  qx  ,  tiO-'-'n  .3J<  '5\st  nr-rs 
-incwX  N'r:  ï-îonr:  pn  I^in  "n^n  (3  inox)  n"r!-  ûwNI  sn  wxb  ï-r^rr^ 
QNT  3N  nb  V'^  "^^  ■'"''"'  '""^  •  P^^  contre,  il  rapporte  exactement, 
à  propos  de  Ps.  xviii,  36,  un  passage  du  Midrasch  Tehillim. 

Lyre  ne  se  contente  pas  de  citer  le  Midrasch,  il  fait  aussi  usage 
de  la  littérature  rahbinique  postérieure.  Ainsi,  il  mentionne 
K.  Moïse  Darschan,  si  fréquemment  nommé  par  Raschi.  Il  connaît 
également  Maïmonide,  comme  le  prouve  ce  passage  de  sa  préface 
des  Psaumes  :  «  Rabbi  Moyses  dicit  in  libro  directionis  perplexo- 
rum...  »  Toutefois,  le  More  Ncboi'.k/wu  de  Maï.nonide  n'a  jias 
exercé  sur  lui  une  influence  aussi  grande  que  sur  un  autre  doc- 
teur chrétien  du  moyen  âge,  Albert  le  Grand'.  Il  ne  reproduit 
les  vues  de  Maïmonide  que  pour  les  combattre,  à  l'instar  de  beau- 
coup d'autres  docteurs  de  l'Eglise.  Du  reste,  on  se  trom.perait  eu 
concluant  de  ce  chapitre  que  Lyre  avait  quelque  faible  pour  les 
interprétations  messianiques  des  rabbins;  il  en  était,  au  contraire, 
l'adversaire.  11  n'invoque  les  autorités  rabbiniques  que  pour  jus- 
tifier son  oi)inion  dans  le  cas  où  elle  est  conforme  à  la  tradition, 
mais  contraire  à  celle  de  Raschi. 

On  voit  donc,  par  les  exemples  que  nous  venons  de  donner,  que 
Lyre  était  non  seulement  capable  d'utiliser  avec  indépendance  !e 
Targoum,  le  Midrasch  et  les  ouvrages  hébreux  postérieurs,  mais 
qu'il  était  familiarisé  jusqu'à  un  certain  point  avec  la  littérature 
midraschique  (Berèschit  Rabba,  Midrasch  Eclia,  Midrasch  Tehil- 
lim") et  d'y  trouver  les  passages  dont  il  avait  besoin. 

Il  nous  reste  encore  à  appeler  l'attention  sur  deux  noms  men- 
tionnés par  Lyre  dans  des  passages  où  l'on  s'attendrait  à  rencon- 
trer le  nom  de  Raschi.  Il  dit  à  propos  de  Ps.  11,  7  :  «  Ego  hoclie 
r/enui  ie  :  quod  exponit  Ra.  Josej>/i  sic  :  «  magnificavi  te,  consti- 
tuens  te  principem  super  populum  Israël,  qui  dicitur  primogenitus 
filius  meus,  et  per  consequens  tu  spécial!  modo  es  filius  meus.  » 

Raschi  dit  la  même  chose,  en  s'en  référant  à  II  Sam.,  ch. 
m,  V.  18  :  i7:i^pr''  tim  •'-^^^z•2  -^23  V"''^"'?"  SwNTw-'b  w\x-i  .-PwX  ■'::: 
ï^wV  i'-^'JiN  nT7  ■^n^r  T^n  ^"-  -i?3N  ttd  -1:2x3  -i?:md-:j  ^J2^  ^1^  br 
13D  ■':2b  nnx  ab"'3-w3T  bx-r:;-'. 

De  même,  dans  son  commentaire  sur  Ps.  l,  il  attribue  à  un  Rabl 
Samuel  Hebrœiis  une  opinion  qui  semble  avoir  été  celle  de  Raschi. 
Il  dit  que,  d'après  ce  R.  Samuel,  l'arrivée  du  Messie  sera  annoncée 
par  des  miracles,  entre  autres,  «  scilicet  quod  omnes  judaM,  per 
orbem  dispersi,  quasi  in  momento    congregabuntur  ad  ipsum  in 

'  Cf.  Joël,  Verhœllniss  Albevi  des  Qrosscn  m  Moses  Maimonides,  Breslau,  1863. 


180  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Hierusaleru,  et  secundum  hoc  exponit,  quodsubditur  :  Congregate 
illi  soMCtor  eius.  »  Raschi  dit  :  ï«»:-,p''  ^rrJ^  .  ■'•7'^on  ■'b  idon 
V:"^»"!  \snm  pD:^  -^-n:?  -i7:i<:c  i-"-'"  »"n^*?^~  ^5  iedno  y-iNii  D-^Jicb 
(■7  -iv:;)' 

Les  deux  passages  se  retrouvent  chez  Breithaupt,  on  ne  peut 
donc  pas  supposer  que  c'est  par  erreur  que  Lyre  a  mentionné 
les  noms  de  Joseph  et  de  Samuel.  De  qui  s'agit-il,  en  réalité? 
On  sait  que  parmi  les  continuateurs  de  Raschi,  deux  savants  se 
distinguèrent  particulièrement,  Joseph  ben  Simon  Kara  et  Sa- 
muel ben  Méir,  et  que  Joseph  ajouta  des  gloses  au  commentaire 
de  Raschi  sur  le  Pentateuque.  Ce  sont  là  certainement  les  person- 
nages nommés  par  L3Te,  Nous  devons  ajouter  que,  contrairement 
à  l'assertion  de  Geiger,  Joseph  Kara,  d'après  le  commentaire  de 
Lyre,  écrivit  également  des  gloses  sur  les  Psaumes,  et  que  des 
passages  du  commentaire  de  Samuel  ben  Méir,  comme  le  suppose 
avec  raison  Geiger,  se  sont  glissés  dans  le  commentaire  de  Raschi. 
Il  est  donc  prouvé  par  ce  qui  précède,  non  seulement  que  Lyre 
doit  beaucoup  à  Raschi,  mais  aussi  que  le  commentaire  de  Lyre 
peut  servir  pour  faire  une  étude  critique  de  Raschi. 

Après  avoir  essayé  de  déterminer,  dans  ce  qui  précède,  l'étendue 
et  la  solidité  des  connaissances  bibliques  et  rabbiniques  que  Lyre 
avait  principalement  acquises  par  l'intermédiaire  de  Raschi,  nous 
allons  comparer,  dans  la  suite,  le  contenu  même  des  commentaires 
des  deux  auteurs.  Pour  les  divers  points  de  cette  étude,  nous 
suivrons  la  méthode  que  Lyre  a  employée  dans  l'interprétation  de 
chaque  Psaume.  Il  s'occupe  d'abord  de  l'auteur,  étudie  ensuite 
l'épigraphe  et  s'occupe  enliu  du  contenu. 

La  manière  dont  Raschi  divise  les  Psaumes  n'offre  rien  de  parti- 
culier. Raschi  s'en  tient  aux  cinq  livres.  Lyre,  au  contraire,  dans 
Ps.  I,  déclare  qu'il  est  impossible  de  retrouver  aucun  ordre  dans 
le  Psautier.  Les  Psaumes  ne  sont  rangés,  dit-il,  ni  d'après  l'é- 
poque de  leur  composition,  ni  d'après  leurs  auteurs,  dont  les  mor- 
ceaux sont  souvent  séparés  les  uns  des  autres  et  éparpillés^  ni 
d'après  leur  contenu.  Il  établit  les  divisions  suivantes  : 

Ps.  1.  Introduction,  composée  par  Ezra,  le  compilateur  des 
Psaumes. 

Ps.  2-144.  La  partie  principale,  consacrée  à  la  glorification 
de  Dieu. 

Ps.  145-150.  Fin. 

Ce  qui  nous  importe  le  plus,  c'est  que,  d'après  Lyre,  il  n'existe 
aucun  rapport  entre  l'époque  de  la  composition  d'un  psaume  et  la 
place  qu'il  occupe.  Lyre  répète  son  jugement  à  propos  du  Ps.  72, 
où  il  s'agit  d'expliquer  la  contradiction  qui  existe  entre  la  phrase 


INFLUENCE  DE  RASCHI  SUR  NICOLAS  DE  LYRE  181 

finale  "m  mbcn  ibD  et  ce  fait  que  plus  loin  on  retrouve  des 
psaumes  attribués  à  David.  Ici  également  Lyre  reconnaît  qu'il  se 
range  à  l'avis  de  Rasclii,  d'après  lequel  les  Psaumes  ont  été  ran- 
gés dans  l'ordre  où  ils  furent  trouvés.  On  s'explique  ainsi  que 
le  Ps.  144  (145),  qui,  en  réalité,  est  le  premier,  se  trouve  placé  à  la 
fin  du  livre,  et  que  le  Ps.  72,  composé  le  dernier,  est  placé  au  mi- 
lieu du  livre.  «  Et  liane  solutionem  tangit  Ra.  Sa.  in  glossa  sua.  » 
En  effet,  Raschi  dit  :  mbcn  ibx  b^  ibD  r^m  nî-rna-i  .nn  mbsn  ibs 
!-i-:o:?i  nip  -^jI  ^-nzn'o  iiij  ^n^  ,mT  aa  by  -iDor:  bs  bib^b  nn 
"ii'^i,  (II  Samuel,  23)  b^TO""  mn-'T^T  û-^i'D    N-ip2   Nirio  ûo  b:>   û-iipT 

■  Cll-^720    ITDTC  ,    (Job  ,     24)  a?»     •\12-\-\     1733     ,  "iWi-^inDÎ    173D    ibD     ^nnob 

nniN^jT  n-i•p^'n  V^"^""  i"2ip73a  -n?:T)3rT  nnDS  Nb  Nin  p  dnt  ;  (Jér.,  2) 

Ce  passage  est  de  la  plus  grande  importance,  parce  qu'il  ne 
contient  pas  seulement  une  vue  exacte  sur  la  rédaction  du  Psau- 
tier, mais  aussi  une  réfutation,  appuyée  sur  des  raisons  gramma- 
ticales, de  cette  opinion,  devenue  traditionnelle  chez  les  Juifs,  que 
David  est  l'auteur  de  tout  le  Psautier  '.  Cette  tradition  avait  été 
également  introduite  par  saint  Augustin  dans  l'Église,  et  Lyre  ne 
se  lasse  point  de  la  combattre  à  toute  occasion.  Paul  de  Burgos, 
dans  ses  Additiones,  ne  se  montre  pas  moins  infatigable  à  ré- 
futer Lyre.  Il  nous  semble  que,  sur  ce  point,  la  postérité  n'a  pas 
mis  assez  en  lumière  le  mérite  de  Raschi  et  de  Lyre. 

Le  passage  talmudique  auquel  Raschi  fait  allusion  se  trouve 
dans  Pesahim,  127  a  :  -i-ron  ni-n«i<r:  f-nn3':jin  bo  nToix  '73  'n 
■"ip-^n  bN  ,-^"w"'  13  ^T^  mb-'-:n  ibD  ,-i73Nro  /p73î<  -nn  piD  s^-^br-;!-! 
V5N  bD  Nbx  ^b■z. 

Voici  encore  deux  autres  passages  du  Talmud  qui  nous  inté- 
ressent :  Pesah.,  121  «.  bu:  r-i'n73wX73  ï-tno^'n  b"n^-i  n?3NT  ... 
,'V'û'2  ,-11737733  ,b''riï:733  ^'jis-'Ds  ,mi:"'33  :  tzi-ibrin  noo  -i73i«  ns'o 
n"'ibbr!3  ,r!wsnir;3  ,r:b"'2n3  ^nbirins  ,-«t::n3;  B.  Bâfra,  Hb  :  n^t 
■'rb73  -^"y  .  iTCi^in  ca-x  """y  ,  CL"^:pT  n-icr  ■>"i'  f^brrri  nso  anr) 
:]ri<  ^"i'i  /"jim"!"^  "•"-'   /p-r;  ^"y  ,  rT::?3   -""y  ,  cmsN  -^"y   ,pni:. 

Raschi  a  combiné  ensemble  ces  deux  derniers  passages  dans 
son  commentaire  sur  Ps.  i,  1,  où  il  dit:  !rn'0:'3  .■«r-'Nn  •'TwN 
^T^^us  ,-n73T3  ,li5-';3  ,mi:;3  :  rt-  -iso  -'.■3n:  n73T  buj  r-n:icb 
nnc:'  -ï^îd  ;in^V5br:3  ,"'-.cn3  ,î-ii<mn3  ,!-td-i33  ^n'^-'îro  /5br:3 
,r:73bo  ,-'iT  ,^T>r73  ,£3r!-i3N  ,pni:  ■'Db73  ,£2^wX  :  imn73wSO  □TwS  ^:3 
rr^n  gin  ï=;"«n;3iN  o-^  /pmT'  by  VP'^^'^i  /^imp  -^n  nc^OT  ,r|DN 
e»^bN  iriT  nDD3":;  vimT^  '{■'N  t=<"^-i73nN  a-'n  ,a-'73TT  i-i3i3  3inDa  1733 
b^","::'^  bi'i  vb:?  inni^o  m-i"»u  bo  t^'^j'^nm  immri  D'û  b:? . 

'  Voir,  sur  l'exislence  de  cet'.e  tradition  chez  les  Juifs,  Graelz,  Geschichted.  Judcn, 
VI,  p.  S3. 


182  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Dans  ce  passade,  Raschi  s'écarte  du  Talmud  sur  deux  points  : 
au  lieu  de  dire  -^T"  by  nTi,  et  de  considérer  David  comme  le  seul 
auteur  du  Psautier,  il  le  range  simplement  parmi  les  dix  prétendus 
auteurs  des  Psaumes,  et,  de  plus,  il  émet  des  doutes  sur  la  per- 
sonnalité de  Yedouloun. 

Lyre  rapporte  inexactement  ce  passage,  il  omet  le  nom  d'Adam 
et  adopte  celui  de  Yedoutoun,  En  réalité,  tout  cela  a  peu  d'impor- 
tance, car  Raschi  ne  prend  pas  au  sérieux  la  liste  de  B.  Batra. 
Nulle  part  il  ne  reparle  d'Adam  et  de  Melchissédek  comme  au- 
teurs de  psaumes,  et  pour  le  Ps.  89,  attribué  par  les  docteurs  à 
Abraham,  Raschi  s'en  tient  à  l'épigraphe,  qui  en  accorde  la  pater- 
nité à  Éthan.  Lyre  est  d'accord,  sur  ce  point,  avec  Raschi. 

Pour  Raschi,  Hèman  ne  semble  pas  avoir  été  un  psalmiste, 
mais  était  simplement  chargé  de  réciter  le  Psaume  88,  composé 
par  les  fils  de  Coré.  Il  dit  :  l'^os  Li'«"nT>::72r;  \)2  inx  -^--TNn  V^"*"^ 

Lyre  croit  que  Raschi  reconnaît  Hêman  comme  auteur  des 
Psaumes,  car  il  dit  :  «  Ra.  Sa.  dicit  quod  materia  hujus  psalra. 
sunt  afFlictiones. . .  quos  prievidit  Ileman  Ezraita.  » 

Au  sujet  de  Yedoutoun,  Raschi  rapporte  les  diverses  opinions 
existant  au  sujet  de  ce  mot,  les  uns  le  considérant  comme  un  nom 
de  personne,  d'autres  comme  un  nom  d'instrument  de  musique, 
d'autres  enfin  comme  un  mot  dérivé  de  ni  et  faisant  allusion  au 
contenu  du  Psaume.  A  Ps.  "77,  il  se  range  à  la  dernière  opinion.  A 
Ps.  39,  Lyre  considère  Yedoutoun  comme  un  auteur,  et  à  Ps.  77,  il 
adopte  l'opinion  de  Raschi,  qui  attribue  ce  Psaume  à  Assaf  et 
explique  le  mot  Yedoutoun  par  le  mot  n. 

Raschi  dénie  à  Saloraon  la  paternité  qui  lui  était  attribuée  des 
Ps.  72  et  127.  Lyre  suit  Raschi  pour  le  Ps.  72,  mais  il  s'écarte  de  lui 
pour  le  Ps.  127,  en  disant  que  l'explication  de  Raschi  est  con- 
tcaire  à  I  Rois,  viii  et  à  II  Chroniques,  v,  et  il  déclare  Salomon 
auteur  de  ce  Psaume. 

La  tradition  attribue  à  Moïse  non  seulement  le  Ps.  90,  qui  porte 
son  nom,  mais  aussi  les  dix  suivants,  jusqu'à  100  inclusivement. 
Raschi  cite  cette  opinion  pour  le  Ps.  90,  l'accepte  pour  le  Ps.  91, 
et  ne  fait  aucune  remarque  pour  les  autres.  Lyre  dit,  comme  Ra- 
schi, que  ces  onze  psaumes  répondent  aux  onze  bénédictions  de 
Moïse  dans  rtr-.nn  pnt,  mais  adopte  pour  le  Ps.  95  l'opinion  de 
saint  Paul,  qui  l'attribue  à  David,  et  dit  que  le  Ps.  99,  qui  men- 
tionne Samuel,  ne  peut  pas  être  non  plus  de  Moïse. 

jN'eumann. 
[La  fin  prochainement.) 


LES  RELATIONS  HÉBRAÏQUES 

DES   PERSÉCUTIONS   DES   JUIFS 

PENDANT    LA    PREMIÈRE     CROISADE 

(suite  et  fin  '). 


Dans  un  précédent  numéro  delà  Revue  (XXV,  181),  nous  avons 
examiné  quelle  est,  à  notre  avis,  la  source  des  trois  principales  re- 
lations publiées  i>ar  la  «  Commission  historique  pour  l'histoire  des 
Juifs  en  Allemagne  »  sur  les  persécutions  des  Juifs  pendant  la 
première  croisade.  Il  nous  reste  à  indiquer  le  contenu  de  quelques 
appendices  et  de  deux  autres  relations  plus  courtes  publiées  par 
cette  Commission,  à  étudier  en  détail  le  texte  hébreu  et  la  traduc- 
tion allemande  et  à  faire  connaître  les  corrections  et  les  modifi- 
cations qui  nous  paraissent  devoir  y  être  apportées. 

Le  premier  appendice  (p.  31)  raconte  la  reconstruction,  faite  en 
1104,  de  la  synagogue  de  Mayence,  brûlée  en  10&6.  Le  deuxième 
contient  le  récit  de  la  persécution  de  Blois  et  des  événements  de 
Loches,  de  l'année  1171,  contemporains  de  cette  persécution.  Ce 
récit  (p.  31, 1.  6  du  bas  —  34,  1.  5],  n.it  à  l'instigation  de  R  Jacob 
ben  Méir,  est  dû  probablement  à  Barukh  ben  Méïr  d'Orléans.  Ensuite 
vient  une  lettre  des  notables  de  Paris  relative  à  ces  faits  (p.  34, 1.  0 
—  1.  23),  et,  à  la  fin,  une  autre  lettre  concernant  les  mêmes  évé- 
nements, adressée  par  une  personne  notable  de  Tours  à  R.  \omtob 
pour  être  communiquée  à  Rabbênou  Tarn  (p.  34,  i.  24  —  p.  3o). 
L'auteur  de  cette  dernière  lettre  est  peut-être  Barukh  ben  David 
Haccohen,  nommé  p.  33  et  p.  68.  Il  est,  en  effet,  raconté  (p.  68, 
1.  10)  que  sou  intervention  auprès  du  comte  de  Blois  en  faveur 
des  Juifs  de  cette  ville,  injustement  condamnés,  était  restée  in- 
fructueuse, tandis  qu'il  réussit  à  obtenir  la  grâce  des  autres  Juifs 

'  Voir  Revue  des  Éludes  juives,  tome  XXV,  p.  181. 


18/i  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

(iemeur(^s  sur  les  terres  du  comte,  moyennant  une  somme  d'ar- 
gent (68,  1.  13,  on  parle  de  mille  livres,  et  p.  34,  avant-dernière 
ligne,  il  semble  qu'il  s'agissait  de  cent  livres).  D'après  34, 1.  4  du 
b.,  c'est  l'auteur  de  la  lettre  adressée  à  Yomtob  qui  réussit  à  prix 
d'argent  à  l'aire  remettre  en  liberté  par  le  comte  de  Blois  des  Juifs 
emprisonnés  et  baptisés  de  force  ;  nous  supposons  donc  que  les 
deux  relations  se  rapportent  au  même  fait,  et  nous  en  concluons 
que  1  auteur  de  la  lettre  de  la  relation  I  est  le  Barukh  ben  David 
Haccohen  nommé  dans  la  relation  IV. 

M.  Bresslau  (Introduction,  p.  xxv)  dit  que  la  lettre  écrite  par 
Jacob  d'Orléans  (Rabbonou  Tarn),  au  nom  de  la  communauté 
d  Orléans,  se  trouve  dans  le  manuscrit  de  Londres  de  la  relation 
de  Salomon  ben  Siméon  ;  cette  assertion  est  doublement  erronée. 
Ce  n'est  pas  Jacob  d'Orléans  tué  à  Londres  pendant  l'émeute  de 
1190,  mais  Jacob  ben  Mé'ir  de  Karaerupt,  le  petit-fils  de  Raschi, 
connu  sous  le  nom  de  Rabbênou  Tam,  et  mort  à  la  lin  de  1171, 
qui  a  écrit  la  lettre  mentionnée  par  P^phra'im  de  Bonn  (68,  3  du  b.) 
comme  étant  la  source  à  laquelle  il  a  puisé  pour  sa  relation.  De 
plus,  ce  n'est  pas  cette  lettre  qui  se  trouve  en  appendice  dans 
le  ras.  de  Londres,  mais  une  relation  envoyée  d'Orléans  à  Rabbê- 
nou Tam  sur  les  événements  de  Blois,  et  dont  Ephra'im  de  Bonn 
parle  (08,  1.  16)  également. 

Outre  cette  méprise,  fâcheuse  à  coup  sur,  M.  Bresslau  en  a  com- 
mis une  autre  p.  xv,  note  10,  oii  il  confond  R.  Salomon  ben  Isaac 
(Raschi)  avec  R.  Simon  b.  Isaac.  En  tout  cas,  M.  Baer,  auquel 
M.  Bresslau  se  réière,  est  innocent  de  cette  confusion.  Le  plus 
grand  historien,  s'il  ne  connaît  pas  l'hébreu  à  fond,  —  et  M.  le 
prof.  Bresslau  avoue  qu'il  ne  possède  pas  cette  langue  —  ne  peut 
être  à  l'abri  de  ces  erreurs  désagréables. 

Nous  avons  déjà  parlé,  dans  notre  article  précédent,  des  relations 
I,  II  et  III.  Le  numéro  IV  (p.  oS-lb]  est  une  relation  d'Ephraïmde 
Bonn  concernant  les  persécutions  de  la  deuxième  croisade,  avec 
(les  appendices  relatant  également  des  persécutions  de  la  seconde 
moitié  du  xir  siècle.  Le  texte,  publié  pour  la  première  fois  par 
M .  Wiener  dans  son  appendice  à  la  traduction  allemande  de  VÉ^néh 
Hahbahha  (Leipzig,  1858;,  est  réédité  avec  des  notes  critiques,  d'a- 
près quatre  manuscrits  qui  contiennent  aussi  le  numéro  II. 

Le  numéro  V  ('p.  76-78)  est  le  fragment  d'une  relation  où  Éléazar 
ben  Juda  rapporte  des  désordres  qui  se  produisirent  contre  les 
Juifs  de  Mayence  en  1187  et  1188  ;  ce  fragment  est  publié  pour  la 
première  fois  d'après  un  manuscrit  de  Saint-Pétersbourg. 

Les  textes  hébreux  ont  été  édités  par  les  soins  de  M.  Stern. 
Préalablement,  M.  Neubauer,  avec  l'aimable  obligeance  et  la  cons- 


LES  RELATIONS  HÉBRAÏQUES  DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS         18o 

cience  qui  1(3  caractérisent,  avait  accompli  le  travail  ditficile  do 
copier  les  manuscrits  conservés  en  Angleterre  et  à  Saint-Péters- 
bourg, (le  les  comparer  entre  eux  et  d'en  indiquer  les  variantes. 
Ces  textes  sont  suivis  (p.  81-219)  de  la  traduction  allemande  faite 
par  M.  S.  Baer  et  revue  par  M.  Basrwald.  Le  traducteur  (voir 
Introduction,  p.  xxvii)  s'est  imposé  la  tâche  de  rendre  le  texte  de 
l'original  aussi  fidèlement  que  possible. 

En  tête  des  textes  hébreux  se  trouve  une  petite  préface  où  l'édi- 
teur énumère  les  documents  manuscrits  qu'il  a  utilisés  (p.  vii-xii). 
Suit  alors  une  étude  critique  des  relations  des  croisades  par 
M.  Bresslau  d».  xiii-xxix).  Un.  index  des  noms  de  lieu  et  do  per- 
sonne et  une  liste  de  fautes  d'impression  terminent  l'ouvrage. 

Déjà,  dans  notre  précédent  article,  nous  avons  eu  occasion  de 
relever  des  incorrections  dans  le  texte  imprimé  et  la  traduction 
des  trois  [trincipales  relations  '.  Nous  allons  faire  ici,  en  détail,  ce 
travail  de  critique  pour  tous  les  morceaux  contenus  dans  le  volume 
publié  i)ar  la  «  Commission  historique  ». 

Voici  pour  le  texte  -  : 

1,  10,  lire  [Dmonjn  nnp  (comme  ;i6,  10)  ;  1,  12,  au  lieu  de  N"w;,  1. 
CN-OD  (comme  36,  42)  ;  1,  4  du  bas,  au  lieu  de  nN7:::i.  1.  "î72i:T  ;  i,  der- 
nière ligue,  après  b"N  11  manque  le  mol  npr"'.  —  3,  2,  au  lieu  de 
D"':"a3m,  1.  u"'3:iDr;i  ;  3^,  7,  le  mot  lD"'2Dn  (avec  le  sens  iutrausiiif)  est 
confirmé  par  le  mot  ■I0"';3n  qui  se  trouve  dans  le  passage  parallèle, 
31,  21  ;  il  ne  faut  donc  pas  le  corriger,  comme  le  propose  M.  Siern, 
en  iDjDn.  La  correction  proposée  par  M.  Slern  de  D'T^^m  (3,  9  d.  b.), 
qui  rappelle  Ps.,  lxiii,  11,  en  ûTi^iom,  n'est  pas  nécessaire.  De  même, 
M.  Stern  a  eu  tort  de  remplacer  par  nbrr  "»n7j  les  mots  "o":  "«-i»  de 
4,  8  (trad.,  p.  89,  note  77),  expression  qui  est  imilée  d'Isaïe,  xl,  15, 
•"^^2  -i7:d  Li-^Vj,  )ri.  —  4,  7  du  bas,  au  lieu  de  nnx,  1.  ibx  (comme 
6,  22).  —  .'),  14  du  bas,  au  lieu  de  ipT,  I.  'ipT;  5,  13  du  bas,  au  lieu 
de  Ti-^ii-iD,  1.  in"«i-in3  (comme  lignes  7  et  9  du  bas);  5,  10  d.  b.,  lire 
vpy  (corrigé  à  tort  en  i733>  par  M.  Baer,  93.  9);  5,  9  du  bas,  au  lieu 
de  i-i3yn''C  1.  i"i3y^O,  et  a"nDn72  n'a  pas  besoin  de  modification  ; 
f),  6  d.  b.,  au  lieu  de  pb,  l.  p"5  mip  (comme  52,  11  d.  b.).  —  6,  1, 
au  lieu  de  rrim,  I.  •^rr'T;  6,  16,  avant  ipnm,  l.  inan  (comme  53,  o)  ; 
6,  8  du  bas,  au  lieu  de  n:?i3"w%  1.  ;nn"0  (de  même  26,  13);  6,  5  du 
bas,  au  lieu  de  m^n'^T:,  l.   rT<:;r:'5?:.  —  lo,  6,  au  lieu  de  rîD"',   l.   'si 

'  Nous  sif^nalons  ici  quelques  fautes  qui  se  sont  glissées  dans  notre  article  précé- 
dent. T.  XXV,  p.  184,  1.  21,  au  lieu  de  nT^J'in,  1.  TT^^r».  —  Uid.,  1.  21,  après 
les  mois  hébreux,  il  manque  l'indication  du  passage  (17,  \'l  d.  b.l.  —  Ibid.,  note  1, 
i.  2,  après  les  mots  hébreux,  il  manque  l'indication  (18,  15).  —  P.  194,  1.  1"  du  bas, 
au  lieu  de  21,  8,  lire  21,  18.  —  Ibicl.,  1.  3  d.  b.,  au  lieu  de  jeudi  le  4,  lire  vendredi 
le  5.  —  P.  198,  dernière  ligue,  au  lieu  de  ^S'inS,  lire  rî51"3- 

*  11  est  entendu  que,  dans  ce  qui  suit,  le  premier  chill'rc  indique  la  page  et  le 
deuxième  la  ligne. 


186  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

(deux  fois);  10,  H,  après  a"*bî,  il  n'y  a  pas  de  pause,  mais  il  y  en  a 
une  1.  9,  après  ribbi"  ;  il  n'y  en  a  pas  non  plus  après  ne  ligne  14  (cf. 
le  passage  parallèle  53,  22-251. —  11,  9,  au  lieu  de  Trciy,  1.  -'w? 
(comme  dans  le  passage  parallèle  56,  20);  11,  16,  il  faut  com- 
pléter la  lacune  d'après  .o6,  8.  —  13,  11  du  bas,  au  lieu  de 
m-nr-.  1-  n-,rjp  (cf.  rî3:?-in  r-ivjp,  Is.,  i,  13);  13,  12  d.  b.,  au 
lieu  de  i-rpnm  du  ms.  corrigé  faussement  en  rpnm,  1.  rî'^'pnn.  — 

15,  10,  devant  le   mot  "nx,  il  semble  qu'il  manque  le  mot  ",-.  — 

16,  13,  au  lieu  de  0"':£n3,  1.  i-'ii-^  (faute  d'impression);  16.  15,  au 
lieu  de  '~!^.  1.  173  ;  16,  17,  il  faut  probablement  compléter  la  lacune  par 
h^^n":"»"],  et  non,  comme  M.  Slern  le  propose,  par  ii:C2pn'^"i;  qui  se 
trouve  déjà  dans  la  ligne  précédente.  —  17,  13,  au  lieu  de  T'T'STS,  le 
sens  réclame  'j'^T'r?:  J^p-^N]  ;  au  lieu  de  luSna-o,  1.  In-itj,  et,  au  lieu  de 
-rN-i.  1.  irïîi.  —  18,  13,  il  faut  effacer  le  mot  nsm  ;  18,  U,  au  lieu  de 
"bine  1.  r::-'?"irî"w  ;  18,  23.  au  lieu  de  ■'irr,  ce  qui  est  tout  a  fait 
dénué  de  seus,  il  faut  probablement  "rr  qui  devait  être  suivi  de 
quelques  autres  mots,  puis  venaient  sans  doute  les  mots  proposés 
par  M.  Slern  comme  complément,  d'après  le  second  récit  parallèle 
(peut-être  [icrNr:;  s-«-,m:rî;  -^rr  iwSn  -,wNd,  semblablement  à  17,  il 
du  bas);  18,  3  d.  b.,  après  le  mot  "nxrb,  il  manque  probablement 
encore  "TN?:  comme  20,  11,  et  dans  le  récit  parallèle  41,  18).  —  20,  7. 
au  lieu  de  iriN^,  1.  ir-.fîn  20,  12,  au  lieu  de  -"-c-n^p,  1.  -^ci-p  ;  20.  21, 
au  lieu  de  w-'rcn?:-,,  1.  ccn^T;  20,  22,  au  lieu  de  c^brri.  I.  c-^-ir':i, 
et,  au  lieu  de  :>izrz'-:,  1.  ri^^îb.  —  21,  2,  au  lieu  de  b^'o^,  I.  b-'"-'^-'; 
2L  0  du  bas,  au  lieu  de  nrnn:,  1.  nr-.n:.  —23.  8,  devant  CTnb,  il 
manque  le  mot  ncc^  ou  r,yz-z:i  :  cette  dernière  date  serait,  il  est 
vrai,  fausse,  mais  elle  concorderait  avec  les  autres  dates  fausses  in- 
diquées 20,  10.  et  21,  18.  —  2i,  12  d.  b.,  au  lieu  de  vnrisb,  1.  vnnNi. 

—  26,  22.  au  lieu  de  SDa.  1.  crb.  —  27,  3,  au  lieu  de  t-^n.  1.  cn^bx, 

—  28,  6,  au  lieu  de  iD-^binbi.  I.  nr-'b-rtbv.  28,  14,  au  lieu  de  dIwXt:.  1. 
c-N":-;  28,  21,  au  lieu  de  T^npc2.  1.  rzz-py::^:  28,  22,  au  lieu  de 
z-^:zm  et  ûb'a-jm,  l.  ::"io-';rr;-i  et  r-b^^-jm;  28,  23,  après  le  mot 
cr.  il  manque  probablement  a-.  —  29,  10,  au  lieu  de  Insv:.  1.  mrsc  ; 
29,  11,  devant  'iz,  manque  le  mot  ";;:  ;  29,  15,  au  lieu  de  n::p.  1-  r,:ip 
(comme  p.  30);  29,  9  du  bas,  au  lieu  de  C'^;273,  l.  D-'O''::?:.  —  30,  23, 
au  lieu  de  bbc^,  le  sens  exige  ri'h'cz  ;  30,  8  du  bas,  après  rrr-:^!.  il 
manque  le  mot  n:;TS.  —31,  1,  il  manque,  après  le  mot  -rbmx,  les 
mots  I7i:-i  52,  ou  bien  il  faut  lire  à  la  place  de  r::T,  b^  ;  31,  2,  de- 
vant "PJ',  manque  le  mot  "'S;  31.  21,  au  lieu  de  i:r::-,  l.  'ùirsn; 
31,  5  du  bas,  au  lieu  de  !:;•=,  1.  zz'z:  au  lieu  de  cr,  1.  ::;•-;  au  lieu 
de  zy^.  1.  zr:  31,  4  du  bas,  au  lieu  de  -.r'>^,  1.  -iP'';  31,2  du  bas,  au 
1  eu  de  r.z-.zzr.  1.  rr.-.zzr;  après  mrrn,  manque  le  mot  "7"'.  —  32,  U, 
^:?^:i^^,  l.  :fr^z'r,  32,  22,  au  lieu  de  -m"i7j\  1.  ■irrr'TO"'.  —  33,  21,  au 
lieu  de  r;:m,  1.  nn:m  ;cf.  67,  8  du  b.).  —  34.  4,  au  lieu  de  nb^^p,  1. 
bs-'p;  3i,  6  du  bas,  au  lieu  de  nb-nnDr,  I.  r:b'r.rzTz;  34,  3  du  bas, 
au  lieu  de  3"p,  il  faut  probablement  2"p  (cf.  35,  19^;  34,  2  du  bas,  au 
lieu  du  second  ib,  1.  -^b.  —  35,  17,  au  lieu  de  -nr-  -|'br,  l.  nrr:;-  ^r  ; 


LES  RELATIONS  HÉBRAÏQUES  DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS         187 

35,  2  du  bas,  le  point  final  après  ûib'iiî  doit  être  effacé  et  il  faut  lire, 
à  la  suite,   n-''   ip--::-  orj3  mza-  pr^n  rc,   r-.Nr^ri  pni:  rnnr:» 

37,  3,  au  lieu  de  n?Dn  1.  nban  ;  37,  «6,  au  lieu  de  r:;T«psn,  1  .r;'7"'p2n; 
37,  19,  au  lieu  de  :nT,  1.  n^iT;  37,  20,  au  lieu  de  T:-\'Jiy,  il  vaut  mieux 
lire  nTij^',  comme  dans  S.;  au  lieu  de  ^nT:i,  1,  M"na,  comme  dans 
I  Ghron.,  iv,  23;  37,  3  du  bas,  au  lieu  de  DT!--jn,  1.  ûinTC-'i, 
comme  dans  0.  et  2,  12.  —  38,  15,  après  le  mot  --nnpb,  il  manque 
sans  doute  le  mot  □"'Wn;',  comme  2,  11  du  bas;  38,  3  du  bas,  de- 
vant r->yij>  manque  le  mot  "^rx.  —  40,  18,  au  lieu  de  ■^"vSS,  1.  "^jiMn; 
40,  24,  au  lieu  de  V^bn,  I.  "j'o-^bn.  —  41,  10,  au  lieu  de  Dmn?:?, 
1.  nmn7:b,  comme  dans  S.  et  B.;  41,  12,  au  lieu  de  n;inp3i,  1.  liinpn'T, 
comme  B.  et  18,  20;  41,  15,  au  lieu  de  D-nM,  1-  ûi-.-i:o.  —  43.  7,  au 
lieu  de  ^■'"icn  anb  iiTm,  1.  -icn  ib  -iTm  (comme  dans  le  passage 
parallèle  23,  13).  Il  n'y  a  pas  à  songer  ici,  comme  le  croit  M.  Baer, 
p.  163,  note  30,  à  une  autorité  municipale  comme  les  échevins,  mais 
il  est  question  d'un  des  fonctionnaires  de  la  ville  1"':'"  TJ,  qui 
avait  négocié  avec  les  croisés  au  sujet  des  Juifs  (cf.  23, 11  et  s.,  et  43, 
4  et  s.);  43,  7,  au  lieu  de  Nbi,  il  semble  qu'il  faut  Tïîi;  43,  4  du  bas,  au 
lieu  de  inosn,  !•  noans.  —  44,  4,  au  lieu  de  'ii'2y\  nnî'^^,  1.  -inr:^ 
inn:?  (comme  dans  S.  et  B.,  et  le  récit  parallèle  23,  3  du  bas).  —  45,  8, 
au  lieu  de  ûr.X,  1-  ûniiN,  comme  dans  0.;  45,  14,  au  lieu  de  Dicr,  1. 
c-iDD;  au  1.  de  ûwn,  il  faut  peut-être  1''T^  ûirm  (I^-  V"*  an-n)  ou  arni 
I^T^;  45,  16,  au  1.  de  I^SwX,  1.  V^î*^"^;  45,  7  du  bas,  au  lieu  de  rT^-i?0,  1. 
n-ir>r.  — 46,  1,  au  1.  de  r;72ip72,  i.  2-:ip'?a  ,  46,  2,  au  1.  de  V-,  il  faut  peut- 
être  n. 

47,  7  du  bas,  au  I.  de  ^'1^o,  h  "i-no\  —  48,  5,  au  1.  de  !i2r-'i, 
1.  r,:z^-\  (comme  47,  5);  48,  5  du  bas,  au  lieu  de  "pn"',  1-  ini"».  —  49,  3, 
au  lieu  de  i.x-^n,  1.  ^wS^^^  ;  49,  6,  au  lieu  de  np-^i,  1-  "inp-'i;  49,  8,  au 
lieu  de  nm^7:i'a,  il  faut  probablement  ij-^pr:rib;  49,  11,  au  lieu  de 
-imoTjH,  1.  ~72iD7:r;;  49,  13,  au  lieu  de  nVriD,  1.  ûbiD;  49,  45,  au 
lieu  de  "'Di73"'j3,  1.  idi73'^D2;  49,  18,  au  lieu  du  second  idOîjji,  lire 
nb07:;i  ;  49,  derii.  1.,  au  lieu  de  mT'Ur:,  1.  m-^Tiin.  —  50,  13, 
au  lieu  de  3::;o,  1.  nic:'^;  50,  17,  au  lieu  de  iDnn,  i.  irnn  (faute 
d'impression)  ;  50,  22,  au  lieu  de  irmpb,  1.  n-,pb  (comme  11,  14  du 
bas,  cl  5(i,  3  du  bas),  et,  au  lieu  de  3?nDi,  1.  3rn3  ;  50,  2i,  au  lieu 
de  VT^T  i.  Y~\^'i-  —51,  1,  il  faut  insérer  fin  dans  le  texte,  au  lieu  de 
nriN  ;  51,  9,  au  lieu  de  'C^,  qui  est  impossible  ici,  1.  ût:î  ;  51,  11,  au 
lieu  de  D"ci,  1.  ^3-::n;  51,  9  du  bas,  au  lieu  de  D-^iirpn.  i-  û-'r::pi;  51, 
2  et  1  du  bas,  au  lieu  de  D"i3-'-i  nn;^  3^3D  'r^'-i,  qui  ne  donne  pas 
le  sens  véritable,  il  faut  probablement  mDm  t]-':-n^i'r;  n:i;D  (comme 
dans  le  passage  parallèle  4,  8  du  bas).  —  53,  10,  au  lieu  de  prn-:::ç:3, 
1.  pbnor:;^;  53,  10  du  bas,  au  lieu  de  n:onb73  dans  le  ms.,  1.  n^:<-':iz 
(et  non,  comme  M.  Stern  corrige,  mr-bw).  —  54,  12,  au  lieu  de  nr7:T 
DDins^  n-^'oz,  1.  n7:-73  n•'OZ'^D^:^  (comme  55,  14);  54,  15,  au  lieu  de 
npnT73,  1.  mpmT.  —  55,  19,  au  lieu  de  Q^:r:73, 1.  û^:?::»:?:  ;  55,  22,  après 
■«nbrn,  il  n'y  a  pas  de  pause,  mais  elle  est  après  cbn^  (cf.  10,  9  et  s.); 


188  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

S"),  5  du  bas,  au  lieu  de  "irr"'"?.  I.  c::"^*:',  comme  10,  17.  —  '66,  '6,  au 
lieu  de  rî'T'i:^   (ms.  iT^icr).  I.  -^-iViiD.  —  57,   7,  le  texte   du  ms.  de 
Darmstadt  s'arrête  au  milieu  de  la  phrase,  au  mot  T^T^sm  ;  suit  la 
remarque  du  copiste  que  M.  Stern  {ibid.,  note  e]  a  si  mal  comprise  : 
:t:2  ""i*!"  "^rN  "jîon  ^ms.  -,:nj  "".en,  «  ici  il  manque  je  ne  sais  com- 
bien ».  Les  lignes  serpentées  qui,  dans  le  ms.,  surmontent  ces  mots 
elles  suivants  —  ce  signe  est  employé  fréquemment  dans  les  mss. 
hébreux  du  moyen  âge  et  est  bien  connu  —  auraient  dû   appeler 
l'attention  de  l'éditeur  et  lui  faire  comprendre  que  c'est  le  copiste, 
et  non  l'auteur,  qui  parle.  Cela  eût  évité  à  M.   Stern  une  grosse  er- 
reur, qui  a  déterminé  chez  M.  Baer  une  faute  de  traduction  et  poussé 
M.  Bresslau  à  émettre  des  hypothèses  fausses.  —  58.  4,   au  lieu  de 
n-mrb,  1.  r;-irirb.  —  .59,  4  et  12,  au  lieu  de  n^Nrr,  i.  b::wNr:  «l'abbé  » 
(cf.  Revue,  III,  13,  et  IX,   4(i\  On  se  demande  comment  l'éditeur  et 
le  traducteur  (p.  188,  note  14,  il  y  a  tcir  «  nous  »)  ont  pu  songer  a 
expliquer  ce  nom  par  »  Haber  ».  —  fiO,  15,  au  lieu  de  npi'ri,  I,  liiy'  ; 
60,  18,  au  lieu  de  ■n7:yT,  il  vaut  mieux  lire  niîcyi,  comme  dans  O.  — 
(31.  2  du  bas,  au  lieu  de  Dv^,  1.  ûrb.  —  62,  6,  le  mot  Nbnais  de  notre 
texte  parait  être  le  mot  exact,  taudis  que  le  mot  N'iVr;::'!:;  proposé 
par  M.  Stern  et  adopté  par  le  traducteur  (p.  192',   et  qui  est  aussi 
indiqué  dans  l'index  des  noms  comme  la  véritable  leçon,  parait  faux, 
car  une  source  indépendante  de  la  relation  d'Ephraïm  de  Bonn,  que 
l'éditeur  a  négligée,  porte  Nb"«"'rmi5.  Dans  la  liste  des  noms  des  mar- 
tyrs de  Worms  publiée  par  M.  Jellinek,  xrm  b-pn  Nr-'r:-m  cn:::ip, 
Vienne,  1880,  p.   5.  il  y  a  une  pièce  portant  celte  inscription  :  nbNT 
•i":rn  rvcn  'jT'D   n"-,3  NT-^ir-pii  •'•::-\-ç  ^^^^'C,  et  mentionnant  parmi 
les  martyrs  rr3:::r;  Nb-^T;::!:;  n~7:.  Or,  contrairement  à  l'indication  de 
l'épigraphe,  ce  document  ne  donne  pas  les  noms  des  martyrs  de  1096, 
mais  de  ceux  de  1146.  comme  le  prouve  la  comparaison  de  ces  noms 
uvec  ceux  qu'on  trouve  chez  Ephraïm  de  Bonn.  —  62,  9,  au  lieu  de 
m.s".  1.  "n^T  ou  ""N"i.  —  63. 1,  au  lieu  de  "^^n.  !.  nzsN;  après  ~:iiD, 
il  faut  un  point;  au  contraire,  le  point  après  r;:^::?:^  doit  être  effacé; 
63,  2,  au  lieu  de  Spbn,  1.  npbn;  63,  3,  au  lieu  de  r::.n:2r;b,  1.  r;5- aT»b, 
et  au  lieu  de  DpTnb.l.  npTnb  ;  63, 12.  au  lieudem^im.l.n^irî"  ^comme 
dans  Jér.,  v,  13);  G3,  13,  au  lieu  de  crr^rnb.  1.  2"''?-',   "^b,  et  au  lieu  de 
rr:\---,:i?:.  l.  z-  rrrr^-z  :  63,  i7,  au  lieu  de  bb-n.  1.  bbn;  63,  18,  au  lieu 
de  n-ii:,  1.  --j:  ^comme  dans  Jér.,  iv.  31);  63,  19,  au  lieu  de  ynn^i. 
1.  Vinri;  63,  21,  devant  ^b  "^rT,  il  manque  le  mot  bx.  —  64,  3,  au 
lieu  de  "i^rrb.  il  faut  probablement  "121D  ;  au  lieu  de  p-mnTjr;,  il  faut 
probablement  lire  nTin/ûr:  ;  64,  4,  au  lieu  de  !^:"i,  1.  "^"i,  comme 
dansO.;  64,  16,  au  lieu  de  ^"cci,  qui  n'a  pas  de  sens,  il  faut  peut- 
être  lire  03  rmci  (cf.  l'expression   talmudique  ^2    ■':n   r:::w-:l  ou 
Sr'w?:-'-!.  —  63,  10  du  bas,  au  lieu  de  Dit")'',  qui  ne  donne  pas  de  sens, 
1.  3Cin"',  comme  dans  S.  —  66,  7,  au  lieu  de  irbm.  I.  i:b  nn  (corrigé 
dans  l'errata  en  isbiD,  ce  qui  est  faux).  —  67,  8,  le  mot  ■'bai^a  des 
manuscrits,  qui  est  exact,  a  été  corrigé  à  tort  par  M.  Stern  en  "'bsnn, 
car  il  s'agit  ici  de  chaînes  pbnr),  et  non  de  cordes  Cbin)  de  fer; 


LES  RELATIONS  HKBH AILLES  DES  PËHSECUTlU.NS  DES  JUIFS  Ib'J 
67,  H,  le  mot  nriD,  que  M.  Stern  a  laissé  tel  quel  dans  le  texte  et  que 
M.  Baer  (200,  2  du  b.)  a  traduit  par  «  halle  er  die  Sache  beilegea  wol- 
len  »  et  qui  ne  peut  signifier  autre  chose  sinon  «  er  zerschnitt»,  est 
tout  à  fait  impossible;  il  faut  sans  doute  lire,  comme  dans  S.  et  B., 
nnD,  d'après  le  passage  parallèle  33,  18;  67,  3  du  bas,  au  lieu  de 
TT^TO"»,  !.  "i"'?:"'  ;  67,  avant-dernière  ligne,  au  lieu  de  'ONT,  1.  ciNi.  — 
69,  o  du  bas,  au  lieu  de  "inDi?:"»:),  il  faut  sans  doute  "ins  iJzb.  —  70, 
avant-dernière  ligne,  au  lieu  de  n73p3,  I.  r;::pD.  —  71,  M  du  l)as,  au 
lieu  de  -nTND,  1.  "i"::n3,  comme  dansO.  et  B.  ;  71,  8  du  bas,  au  lieu  de 
laniDi,  1.  insc-^,  comme  dans  0.;  71,  dernière  ligne,  au  lieu  de 
i::w-iro'i,  l-  r;i:-irji. 

76,  5  du  bas,  au  lieu  de  "'ibr  ûO  nnbbp,  lisez  ■'ibn  'D'ût,  nbb"^ 
(cf.  Deut.,  XXI,  23).  —  77,  10,  au  lieu  de  ûDT'aT,  lisez  ûD"i">m  ;  77,  I8, 
au  lieu  de  by,  L  bj<;  77,  4  du  bas,  devant  ion,  il  manque  le  mot 
V^.  —  78,  u  du  bas,  au  lieu  de  mbob,  L  mb'^îT. 

En  outre,  il  y  a  encore  deux  corrections,  indiquées  par  M.  Stern 
dans  la  liste  des  errata,  p.  223,  qui  sont  inexactes;  il  faut  laisser  tel 
quel  le  texte  du  ms.  :  i^'  U,  24,  ûmi<  innpDi  ne  peut  être  corrigé  en 
ûmN  i"i3pi,  la  forme  nif'al  employée  de  cette  façon  particulière 
faisant  partie  des  particularités  grammaticales  du  texte  que  l'édi- 
teur (Introduction,  p.  xi)  a  déclaré  ne  pas  vouloir  corriger  (cf.,  par 
exemple,  18,  20  et  30  ûmN  mnpai,  23,  l,  nbis  n,N  iL:n"::ro);  2°  le  mot 
ûnn::3,  46,  2,  que  M.  Stern  change  en  ani:3,  p.  223,  est  exact  et  a  ici 
la  même  signification  que  Qin::3i  de  6,  4  du  bas. 

La  traduction  allemande,  due  à  M.  Baer,  laisse  moins  à  désirer. 
Elle  est  le  plus  souvent  exacte,  mais  on  trouve  encore  trop  d'erreurs 
et  d'inexactitudes '.  Ainsi,  M.  Baer  traduit  û">innr;  par  die  Irrendeii 
«  ceux  qui  errent  »,  et  a"'ji"i"'?r;  par  die  Stœdler  «  les  citadins  ».  Celle 
traduction  n'établit  pas  une  distinction  assez  nette  entre  les  û"':^*in  et 
les  Û"'3TT':?,  parfois  même  on  est  tenté  de  croire  que,  pour  le  traduc- 
teur, les  deux  mots  désignent  une  même  catégorie  de  personnes 
(par  ex.,  90,5  du  b.,et  texte,  4,  12  du  b.,  ynxrr'rrT  a''2T-i"'i'm  avinn). 
Kn  efîèl,  il  semble  donner  au  mot  û'':^"in  sa  signification  morale  «  ceux 
qui  errent,  qui  commettent  des  erreurs  »,  c'est-à-dire  les  hérétiques. 
Eu  réalité,  û"'::''in  désigne  «  les  croisés  »  et  D"'DTT':?  «  les  bourgeois  », 
Bïirger,  et  non  pas  «citadins  ».  Le  mot  ~iO  est  également  mal  traduit 
en  plusieurs  endroits.  Au  lieu  de  parler  d'  «  emplo3'és  [Benmten)  et 
domestiques  de  l'évêque  »,  le  traducteur  parle  (86.  20)  de  «  princes 
{Fursten)  et  domestiques  de  l'évoque  »  (3,  3,  VTayi  t"-)",::;.  Il  en  est  de 
même  p.  86,  17,  et  176,  dernière  ligne,  où  il  parle  des  «  princes», 
des  «  nobles  princes  »,  86,  2  du  bas,  et  177,  12,  du  «  parent  princier  ». 
l'ârstlichen  Verioa?idten,  de  l'évêque,  175,  15  du  bas.  Or,  il  s'agit,  non 
pas  de  noblesse  princière,  mais  d'employés  de  l'évêque. 

'  Bien  que  nous  écrivions  ici  pour  des  lecteurs  français,  nous  croyons  devoir  cor- 
rifrer  par  les  expressions  allemandes  convenables  la  traduction  allemande  de  M.  Baer. 
lia  français,  ces  corrections  perdraient  une  partie  de  leur  valeur. 


190  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

M.  Baer  lit  les  lettres  '-,'=  placées  devant  les  noms  propres  «  bar  » 
et  dit,  p.  91,  note  <J3,  que  c'est  le  mot  13  «  fils»  (Prov.,  xxxi,  2i.  Or, 
tous  les  manuscrits  ont  'n'^  avec  les  signes  d'abréviation  :  cela  prouve 
clairement  quil  ne  faut  pas  lire  -,5  mais  ^2T  p.  Du  reste,  par  piété 
filiale,  un  fils  n'aurait  jamais  consenti  à  prendre  le  titre  de  P.abbi  sans 
le  donner  au  père.  Quant  à  la  manière  dont  les  noms  hébreux  sont 
transcrits  dans  la  traduction  allemande,  elle  est  très  défectueuse, 
mais  comme  il  n'existe  pas  de  règles  pour  celte  transcription,  on 
comprend  qu'elle  présente  des  inconséquences,  même  dans  un  ou- 
vrage scientifique. 

Le  nombre  des  passages  mal  traduits  ou  du  moins  inexactement 
rendus  est  considérable.  Ainsi  88,  8,  ce  n'est  pas  a  ueber  diesalles  », 
mais  «  fur  ailes  dièses  »  (texte  pnt  b^  b:?i  ;  cf.  3,  1 1  et  87.  2,  nï  br  «  da- 
fiir  »)_  _  89, 1 9  a  été  mentionné  plus  haut,  à  propos  de  "'^t  ■^-,73  (4,  81.  — 
89,  2\,  il  faut,  non  pas  0  ereifert  »,  mais  «  vollauf  beschaftigt  w  (texte 
Cinn::).  —  93,  9,  ce  n'est  pas  :  e  Auch  ich  wiil  bei  ihm  hier  bleiben  », 
mais  «  auch  ich  will  mein  Volk  zuriick  halten  »  (texte  "'7:^   nr^'r).  — 
94,  H,  r!72~?7j    ■'n'^wT:,  d'après  Is..  xxviii,  6,   qui  est  expliqué  dans 
Meguilla,  \ob,    par   --nn   V:;    r;::nV7:a   imn  N-:;nrj    T>-,  doit  être 
traduit  par   «  die  in  religiosen  Streitfragen  Bescheid  ^"ussten  ».  — 
102,  21,  il  ne  faut  pas  «  Damais  fingen  die  Irrenden  an  den  Namen 
ihres  Erlosers  zu  entweihen  »,  mais  a  Dann  fingen  die  Kreuzfahrer 
an  den  ^'amen  des  Gekreuzigten  zu  preisen,  denn  sie  hatten  ..  ihren 
Muth^^-illen  getrieben...  und  sie  erhoben  ihre  Fahnen  (texte  10.  9  TS 
rbn?  ib-'nrr;;  cf.  33,  10  du  bas;  Vrnb  est  ici  à  la  place  de  br-?\  — 
i03,  4  du  bas,  ce  uest  pas  «  So  werde  (sprach  er)  dièses   Blut  zur 
Yersohnung  mir»  qu'il  faut  traduire,  mais  ce  sont  des  paroles  de 
l'auteur  a  môge  mir  dièses  Blut  zur  Silhne  fiir  aile  meine  Yergehun- 
gen  gereichen  »  (teste  12.  6  du  bas).  —  108,  14,  il  ne  faut  pas  «  man 
stiess  »,  mais  «sie  stemmten  ihre  Fusse  gegen  die  Schwelle  ^  (texte 
r::~ppmi.  —  113,  13,  il  ne  faut  pas  «  dass  falsch  der  Glaube  ist,  den 
sie  sich  gebildet  »,  mais  «sie  erkennen  nicht  den  der  sie  erschalTen 
hato  (texte,  17,  13,  v.  plus  haut).  —  118,  7,  la  traduction  de  -.wND 
■iT:>  INI  a  als  sie  ihn  ohnmachtig  liegen  sahen  »  n'est  certainement 
pas  exacte  (texte,  18,  13  du  bas,  voir  plus  haut);  118,  5  du  bas,  le  mot 
n'-b"^  ne  signifie  pas  «  Kinder»,   mais   «  Jungfrauen  ».  —  120,  4  du 
bas,  il  faut,  non  pas  :  «  die  Wasserteiche,  in  die  sie  gelaufen  \varen  », 
mais  «  die  W.  aus  denen  sie  entkommeu  ^\"arenI)  (texte  CTû    ""riiîîr; 
2^:2  "Nii"' w;.  —  1 22,  2,  ce  n'est  pas  o  aus  dem  Stamme  Dan  »  qu'il  faut 
traduire,  car  des  traces  de  la  tribu  de  Dan  n'existent  guère  en  Alle- 
magne, mais  il  faut  dire  sans  doute  a  aus  dem  Stamme  derer  die  das 
Richteramt  liben  »  ;  peut-être  y  a-l-il  aussi   dans  les  mots   ancw 
•"Z'r,  une  allusion  à  IGhron.,  xii,  33,  nrnrr^   "^rir  ■■■;""  "jn,  a  quoi 
on  pourrait  rattacher  également  ï^'ûnba   ■^a-'C»  d'Is.,  xxvm,  6,  dans 
le  sens  talmudique  cité  plus  haut,  et  rirnb»  "'D-n:?,  43,  7  du  bas.  — 
132,  4  et  s.,  ce  n'est  pas  a  Sie  beschenkten  »,  mais  «  Wir  beschenk- 
ten  »  (texte  ^^r","!,  comme  3,  i  du  bas);  il  ne  faut  pas  traduire  :  «  un- 


LliS, RELATIONS  HÉBRAÏQUES  DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS         101 

sere  bosen   Nachbareu  unler  den  Sliidtera  »,  mais  :  «  unsere  buseu 
Nachbareii,  die  Bïirger  »;  il  ne  faut  pas  dire  vt  dass  man  ihr  Vermogen 
weggenommen  batte  t),  mais  «  da  nahmeD  sic  (die  Juden)  ibr  Geld  » 
(texte  nnO"i  n^M^u   inpbi).   —  'I33,  2,  il  ne  faut  pas  :   «  entsclilos- 
sen    sie    sicb  »,  mais    «  verspracben    sie  »     (texte   iiTZH  cf.  "it^Nt, 
31,  '10,  et  'i-\)2iii,  26,  dernière  ligne).   —  134,  8  du  bas,  au  lieu  de 
«  dann  trat  der  Oberste  des  Biscbofs   und  der  Beamten  »,  il  faut  : 
«  dann  trat  der  Oberste  der  Garde  des  Biscbofs  und  die  Beamlen  » 
(texte  û-i-ioni   ]^'DÀr^,  bo  Nni:^î  -lO).  —  138,  13,  il  ne  faut  pas  :  «  der 
Freund  Israels  »,   mais  «-.  das   Lichl  Israël»  »  (texte  b^-i'^T"^  -niî''^).  — 
'lo9,  5,  non  pas  «  durch  die  Grenze»,   mais  «  durcb  sein  ganzes  Ge- 
biet  »  (texte  ibin:^    b^n).  —  141,  6  du  bas,  ce  n'est  pas  :  <r  und  jeden 
Tag  kamen  Zûgler  »,    mais    «  und  jeden    Tag  kommen  Ziïgler  »,  cf. 
23,  7.  Le  passage  suivant  est  emprunté  presque  mot  à  mot  à  Jér., 
XII,   3,   et,   par  conséquent,   doit  être  traduit  :  «  Du  aber,   Ewiger, 
ûberlieferesiedemTode  »  (texte  ûwi"'~pr;i  r:"i"'3?2!jj.  —  142, 11,  il  ne  faut 
pas  traduire  :  «  die  ganzeNachbarscbaft  der  Juden  »,  mais  «  das  ganze 
Judenviertel  ».  Il  en  est  de  même  p.  143,  1.  14  et  13.  M.  Baer  n'a  pas 
compris  le  mot  t^JiD'::,  qui  se  trouve  fréquemment  dans  le  Talmud.  — 
144,  6,  ce  n'est  pas  «  sJnd  wir  nicbl  zu  diesem  Tage  erkoren  »,  mais  «  ist 
das  nicbt  der  Tag  an  dem  wir  (von  Gott)  erkoren  werden  ?  »  (texte  Nbn 
ij"-in33  d-T"  i-îT,  cf.  2,  1  :  vsDb  nnas  -m-  riTi).  —  147,  14,  il  ne  faut  pas 
a  bier  sind  »,  mais  «  und  einen  Scbuldenerlass  von. . .  »  (texte  n'ni, 
1.  nnsm,  33,  21,  V.  plus  baut).  — 150,  17,  ce  n'est  pas  ><  ob  sie  aucli 
iliren  Feinden  also   tbun  dûrfen  »,  mais   «  ob   unsere   Ilasser  aiso 
ihun  dûrften  (texte  ^;NV«7p  p  rcy^   ÛN);  150.  7,  il  ne  faut  pas  <  deu 
Knaben  »  (au  sing.),  mais  le  pluriel  «  die  Knaben  ».  — 152,  .",  doit  être 
rattacbé  à  ce  qui  précède  et  traduit  ainsi  :   «  Liebe  zur  Tugend  und 
Hass  gegen  den  Frevel,  Wohlgefallen  an  der  Wabrbeit  und  Verwer- 
l'en  dtr  Liige,    Rediicbkeit  der  Zunge,  Festbaiten  an  Einsicbt  und 
Sicbfernbalten  vomZorne».  — 135,  3,  au  lieu  de:  «  liess  die  Glaubens- 
Ireue   sicb   biudou  »,  il    faut  :   «  beobacbtete  sie  ibr  Gottesgebot  » 
(texte  mans  niT^p^n,  1.  n-i:ji2    rrT^pDn),  — 153,  7,  au  lieu  de  «  ge- 
fàdige»,  il  faut  traduire  :  «  (vor  Gott)  woblgefàllige  ».  —  155,  12,  au 
lieu  de  a  als  bewahrte  Krone  »,  il    faut   «  eiugebunden   und  eiuge- 
scblossen  ist  sie  (in  den  Bund)  mit  dem  Kouige  in  seiuem  Ileim  » 
(texte  "nn:!  ^bî^n  D3>  mini:  mirs').  —159,  2,  au  lieu  de  «  Seide  »,  il 
faut  traduire  :  «  Purpur  »  (texte  *30i)  ;  139,    10  du  bas,  au  lieu  do 
Π sie  konnen  nicbt  vertauscbt,  nicht  verwechselt  werden.),  il  faut 
traduire  «  au  ibrer  Statt  giebt  es  keinen  Ersatz»  (texte  1"^N  nnmTjn 
';"'D"'bn).  —  165,  dernière  ligne,  au  lieu  de  «  aucb  in  der  dorligeu  Ge- 
gend  gelegen  »,  il  faut  traduire  :  «  dort  wo  sie  (die  Stadt  Altenabr) 
eben  liegt  »  (texte  D'J    Nin  nOwSn).  On  veut  dire  que,  tandis  que  le 
rillage  d'Altenabr  doit  être  désigné  d'une  manière  précise  par  cette 
indication  «  bel  Jûlich  »,  la  situation  de  la  mile  d'Altenabr  peut  être 
présumée  connue.  — 166,  10  du  bas,  au  lieu  de  «  ich   wauke   und 
scbwanke»,  il  faut  traduire  :  <■;  icb  klage  »  (texte  nlijn.s).  — 167,  5,  texte 


lVt2  REVUE  DES  ÉTL'DES  JL'IVES 

45,  7  du  bas,  il  l'aul  «  die  geriistet  wareu  zum  ofrenllichen  Geisles- 
kampfe  mit  lioher  Kraft,  Thùrme  der  Eiusicht»,  —  170,  12  du  bas.  au 
lieu  de  «  uad  die  beschwerliehe  Reise  mitmacht  »,  il  faut  «  und  den 
Wegbahnt»  (texte  "^m  m:i'5, 1.  "^m  mr^r".  — 473,  18,  au  lieu  de  «des 
gelehrten  R.  »,  il  faut  e  des  Mar  »  (texte  "n73,  50,  19,  1.  n»,  comme  il 
est  établi  par  Jclliuek,  N7""'7:"T^nT  D";:3:ip,  4,  7).  —  175,  23,  au  lieu  de 
«Dort  predigten  sie  »,  il  faut:  ffDaun  fingen  sie  aa  zu  predigeu  » 
(texte  rrnpb  "ib-^rirn  tn).  —  183,  10  du  bas,  au  lieu  de  <<  So  begaonen 
damais  die  Irrendeu  ihre  Greuelihaten  imlS'amen  des  Gekreuzigten  », 
il  faut  traduire  :  «  Danu  fingen  die  Kreuzfabrer  an  den  Namen  des 
Gekreuzigten  zu  preisen  (texte  bbnb,  dans  le  sens  de  bbr;b)  uad  erho- 
ben  ihre  Fahne...  »  cf.  10,  9  et  s.,  et  102,  21  et  s.).  —  186,  5,  au  lieu 
de  «  das  ist  mir  nicht  naher  bekaunl  geworden  »,  il  faut  :  «  hier  fehlt 
Ich  weiss  nicht  wie  viel»,  c'est  une  remarque  du  copiste  concernant 
la  défectuosité  de  son  texte»  (texte  37,  7,  v.  plus  haut).  —  187,  8,  au 
lieu  de  «  er  muge  einherziehen  »,  il  faut  traduire  :  «  zur  Betrtibniss  » 
(texte  nnmrb,  1.  n-irii'b;  cf.  Vn-;,::''  n^:?,  I  Rois,  xviii,  17).  —  190,2, 
au  lieu  de  «  Dranger  und  Irrende  »,  il  faut  «  feiudliche  Kreuzfabrer  » 
(texte  'D''yrji  C'^T'i:»).  —  192,  13,  au  lieu  de  906,  1.  907,  et  au  lieu  de 
1146,1.  1147  (texte  ""pnn  nr^3,  il  est  certain  que  cette  leçon  est  la 
bonne,  le  mot  rimant  avec  "pim].  Ibidem,  au  lieu  de  «  ward  mein 
Blut  geschwacht  und  vergossen  »,  il  faut  traduire  :  «ward...  ver- 
gossen  und  abgezapft  »  texte  Tpim  p7:i-  -^^ot).  —  193,  14,  au  lieu  de 
'(  Man  knifî  sie  an  den  Hànden  »,  il  faut  «  man  schlug  sie  mit  den 
Handen  ».  —  194,  4,  au  lieu  de  «  Kein  Rednerist  nicht  mehr  in  ihr  a, 
il  faut  «  und  sprachlos  (vor  Schrecken)  sind  sie».  —  19i,  7  du  bas, 
au  lieu  de  «  dir  gab  ich  mein  Blut  bei  meiner  Beschneidung  schon  », 
il  faut  traduire  :  «  Bleibe  nicht  ruhig  bei  meiner  Niedermetzelung  » 
(texte  ■'b-'7:r:2  ^h  ■'Tct  ibs])  ;  cf.  Is.,  lxii,  7,  et  Ps.,  cxviir,  10: 
ûb-^rtî'.  —  193,  17  et  s.,  la  traduction  de  64,  4  et  s.  est  incomplète. 
nsi^D  r;j:n  (cf.  "^3^3  yn,  Abot,  v,  20)  n'a  pas  été  traduit;  un  est  un 
vocatif  et  non  un  génitif,  puisque  le  mot  est  précédé  de  "ido!^;  eufîu 
..."isrb  imrb  *in:r  rp  ne  peut  signifier  :  ■<  der  Herr  batte  ihn  fiir 
seine  Gemeiude  als  Siihne  bestimmt  »,  mais  cela  signifie  :  c  ô  Herr. . , 
mtigest  du  ihn  als  Siihne  fïir  seine  Gemeinde  hingegeben  habeo  >-; 
c'est  là  une  pensée  qui  revient  souvent,  par  exemple  17,  17  ;  43,  12  du 
bas.  —  197,  5,  au  lieu  de  c.  sie  starben  vor  Ermattung  bel  der  Fabrt 
ïiber  das  Meer  »,  il  faut  traduire  :  «  sie  wurden  schlaflT  und  standen 
davon  ab  ûber  das  Meer  zu  fahren  »  (texte  ma;*?:  n:?5DT  ^y:.TZ,  cf. 
I  Sam.,  XXX,  10,  n^r'/j  mis  .  —  197,  4  du  ba.s,  au  lieu  de  «  von  der 
Mahlzeit»,  il  faut  traduire  :  «  nachder  Mahlzeitw  (texte  ""iron  nnN). 
—  497,  3  du  bas  et  s.,  au  lieu  de  c  er  wird  das  Blut  zeichnen  »,  il  faut 
traduire  «  Es  wird  das  Blut  aufwallen  »  (texte  OlDl"',  1-  ODin"').  — 
200,  2  du  bas,  au  lieu  de  «  batte  er  die  Sache  mit  Geld  beilegeu  ^\  ol- 
len  »,  il  faut  traduire  :  a.  fing  der  Herrscber  von  Geld  zu  sprechen  an  » 
(texte  ^rcn::  "jiiibw-  nn-:).  —  201,  3  du  bas,  au  lieu  de  «  blos  ihre 
Seelen  \saren  enttlohen  »,  il  faut   «  blos  ihre  Seelen  waren  in  Feuer 


LES  RELATIONS  HÉBRAÏQUES  DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS        193 

entllohen  »  (texte  t;n?;]">r5  nDTO  p-|  nsT03  Nbi ,  cf.  33,  12  du  bas, 
où  il  est  dit  û^^p  C1i;t  htjcd  pd^O,  à  rapprocher  de  Sanhédrin,  52  a! 
et  du  Midrasch  sur  Lév.,  x,  2-3,  où  il  est  aussi  question  des  «âmes 
qui  sont  cousumées  et  des  corps  qui  restent  iniacis  »;.  —  203,  \,  au 
lieu  de  «  So  der  Inlialt  »,  il  faut  c.  So  der  Wortlaut  »  (texte  licbrr  riT). 
—  206,  o  du  bas,  au  lieu  de  «  Zollbeamten  »,  il  vaut  mieux  traduire  : 
«  Steuerbeamlen  »  (texte  û-^ODTO).—  207,  \  ïj,  au  lieu  de  «  ehe  man  uoch 
sie  wieder  eingesehlossen  halte  »,  il  faut  traduire  :  «  ehe  sie  sich  zur 
Ruhe  begeben  hatlen  »  (texte  Tn::o''  Dtj);  207,  7  du  bas,  au  lieu  de 
«  uud  er  antwortete  »,  il  faut  :  «  und  er  zeigte  sich  gnu'lig  »  (texte 
nxnnzi).  —  211,  15,  au  lieu  de  c  gegen  die  wiiden  VOiker  »,  il  faut 
«  gegen  die  Mohamedaner  »  (texte  :  D-'N-iD  employé  comme  paraphrase 
de  û^bLSy7r:;^  d'après  Oen..  xvr,  12)  —  214,  1  i  du  bas,  au  lieu  de  «  an 
einem  ihrer  Festtage:»,  il  faut  «an  S'-Aegidien  »  (texte  i<b-':;a,  Saint- 
Gilles,  le  1"'  septembre).  —  21-),  6,  au  lieu  de  «  und  Ekron  »,  il  faut 
«  und  sie  zerstùrt  »  (lire  dans  le  texte  DTip:>T,  et  non  "jTipri);  215,  12, 
au  lieu  de  «  das  so  genannle  Grab  des  Gekreuzigten  »,  il  faut  tra- 
duire «  das  Grab  des  Gekreuzigten»  (texte  76,  5  du  bas;  v.  plus 
haut;.  —  216,  4,  au  lieu  de  «  bestimmten  »,  il  faut  traduire  «  sprachen 
unler  Thriinen  und  er  (der  vorhergenanute  Vorbeter)  gab  ihnen  den 
Segen  dazu  »  (texte  ûDT^m  -^^Dn,  1.  DDl^ai  "'333).  A  ceux  qui  s'olfraient 
pour  jeûner  le  lundi  et  le  jeudi,  rofficiant,  conformément  à  une 
pieuse  coutume,  adressait  une  bénédiction  pendant  l'olfice 

Outre  ces  inexactitudes,  il  faut  encore  relever  ce  fait  que  le  même 
mot  est  parfois  traduit  de  façons  différentes.  Ainsi,  le  mot  no  est 
traduit  p.  84.  12,  par  «  Lager  »,  et  113,  3  du  bas,  par  <(  Partei  »;  ""Nd^ 
13.5,  5,  et  137,  9,  «  Gemeinderechner  »,  et  104,  3  et  16,  et  184,  der- 
nière ligne,  «  Gelderheber  »  ;  û"'ynn  est  traduit  deux  fois  exactement 
par  «  Kreuzfahrer  »,  91,  2  et  4,  mais  partout  ailleurs  par  «  Irrende  »  ; 
ibirijT,  31,  13  «  beschlitzt»,  et  ibid.,  14  o  gerettet  » -,  "^"iD,  qui  signifie 
toujours  «Sladt»  (ainsi  Mors  est  appelée  p.  43  tantôt  "^id,  tantôt 
"vy,  et  Niirb-^N  "j-iD,  la  ville  d'Altenahr,  est  ainsi  appelée  pour  la 
distinguer,  p.  45,  de  N-i'^rb\s  103,  le  village  d'Altenahr)  est  traduit 
118.7  du  bas,  121,  6,  130,8  du  bas,  138,  14, 160,  2  du  bas,  par  «  Dorf  », 
tandis  que,  121,  11  ;  130,  6  du  bas;  142,  2  du  bas;  165,  7  du  bas  et 
ailleurs,  M.  Baer  le  traduit  par  «  Stadt»;  T^no.  86,  20,  «  Fiirsten  », 
86,  2  du  bas,  «  seine  Grossen  »,  87,  1,  «r  seine  Hoheû  »;  134,  11,  il  y  a 
la  traduction  exacte  «  seine  Beamten  ». 

Pour  la  traduction,  la  Commission  historique  avait  résolu  (Intro- 
duction, p.  xxvii  et  s.)  que  le  traducteur  ne  rendrait  pas  littérale- 
ment le  sens  des  expressions  et  tournures  de  phrase  employées  dans 
les  relations  hébraïques  pour  désigner  les  objets  et  les  pratiques  du 
culte  chrétien.  Il  est  évident  qu'il  était  impossible  de  transcrire  lit- 
téralement ces  paraphrases  renfermant  souvent  une  raillerie.  Ces 
expressions  étaient,  en  eflét,  employées  par  pure  habitude  par  les 
Juifs  d'alors,  sans  qu'ils  songeassent  au  sens  réel  du  mol  et  à  l'in- 
sulte qu'il  renfermait  originellement.  Il  serait  donc  injuste  d'accu- 
T.  XXVI,   N°  52.  13 


10 i  REVUE  DES  ÉTUUES  JUIVES 

ser   les  écrivains  qui  se  servaient  de  ces  expressions  davoir  voulu 
proférer  inleulionuellement  des  injures  Contre  les  chrétiens.  Celte 
circoLSlance  a  été  reconnue  par  la  Commission  historique,  qui  ren- 
voie ù  ce  sujet  au  travail  d'ensemble  de  Zunz  [Synag.  Poésie,  448  et 
suiv.'.  Elle  a  encore  fait  valoir  un  autre  motif  pour  sa  résolution, 
elle  a  pensé  qu'une  transcription  littérale  de  ces  termes  injurieux 
choquerait  les  lecteurs  modernes.  Elle  a  donc  décidé  qu'au  lieu  des 
expressions  usitées,   on  emploierait   les  mots  véritables,   tels   que 
a  Kirche  »,  «  taufen  »,  eu  marquant  ces  passages  d'un  astérisque  et  en 
donnant  une  fois  pour  toutes  en  note  la  traduction  littérale.  Mais,  d'a- 
près nous,  c'est  trop  ou  trop  peu.  C'est  trop,  en  ce  sens  que  si  la  Com- 
mission historique  craignait  de  choquer  les  lecteurs  modernes  par 
ces  expressions  injurieuses,  elle  n'aurait  pas  dû  signaler  ces  pas- 
sages à  l'alleulion  par  des  astérisques  et  des  notes.  D'autre  part,  pour 
éviter  une  interprétation  fâcheuse  de  ces  passages,  il  eût  été  oppor- 
tun de  déclarer  expressément  dans  l'Introduction  qu'on  s'est  abstenu 
généralement  de  les  traduire  littéralement,  et  d'ajouter  que  ces  pas- 
sages, même  dans  leur  sens  littéral,  ne  peuvent  pas  passer  comme 
des  témoignages  de  l'intolérance  juive  vis-à-vis  des  chrétiens  :  c'é- 
taient des  cris  de  colère  arrachés  par  la  douleur  aux  Juifs  maltraités 
et  martyrisés  de  la  façon  la  plus  cruelle  par  les  chrétiens  au  nom  du 
christianisme  lui-même.  Qu'on  lise  les  relations  des  croisades,  où  l'on 
voit  couler  à  flots  le  sang  des  Juifs  massacrés  innocemment,  et  on 
reconnaîtra  que  ce  n'était  pas  la  faute  des  Juifs,  si  des  sentiments 
d'hostilité,  de  vengeance  et  de  mépris  sont  nés  dans  leur  cœur  contre 
l'Église  chrétienne  et  tout  ce  qui  dépendait  d'elle  et  si  ces  sentiments 
se  sont   fait  jour  par  des  termes  injurieux  dans  les  écrits  juifs  du 
temps.  Mais,  quoique  tout  esprit  impartial  comprenne  et  pardonne 
ces  imprécations  des  victimes  contre  leurs  bourreaux,   nous  esti- 
mons que  la  Commission  historique  eût  été  mieux  inspirée  en  lais- 
sant de  côté  les  astérisques  et  la  traduction  littérale  de  ces  termes 
injurieux,  La  science  exige  naturellement  qu'on  laisse  dans  le  texte 
hébreu  tous  les  mots  injurieux,  sans  y  rien  changer,  ^'ous  aurions 
aussi  compris  que  dans  un  commentaire  philologique  et  exégétique 
sur  le  texte  hébreu,  on  eût  traduit  littéralement  tous  ces  passages. 
Mais  pour  la  science  historique,   que  la  Commission  avait  surtout 
en  vue,   il  suffit  d'une   traduction  ne  s'attachaut  pas  servilement 
à  la  lettre,  mais  rendant  le  plus  fidèlement  possible  le  sens,  ^■ous 
devons    ajouter    que  M.   Baer  a  parfois    placé    des  astérisques   là 
où  il  s'est  écarté,  dans  sa  traduction,  du  texte,  parce  qu'il  croyait  à 
tort  que  ce  texte  renfermait  quelque  terme  injurieux.   Ainsi,  89,  4 
du  bas,  il  traduit  n:\-nrn   '^-,^3  ^texte  4,  12)  par  «  Weg  zu  Christus  » 
et  surmonte  ces  mots  d'un  astérisque,  tandis  qu'il  siguitiait  c  Weg 
unserer  Irrfahrt  »,  c'est-à-dire  la  croisade  (il  a  traduit  pourtant  avec 
exactitude  m^-nn  nobb,  82,  12,  et  mm   ^mn  nobb,  131,  7  du  bas); 
de  même,  il  traduit  (90,  7  du  bas)  mi'nb  Y^-ib,   «  zum  Erloser  wal- 
fahreu  »,  avec  un  astérisque,  quoique,  dans  les  deux  cas,  le  mot  r;~n 


LES  RliLATlUNS  HÉBRAÏQUES  DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS         l'Jo 

soit  employé  dans  le  sens  de  «  faire  la  croisade  »,  sans  aucuu 
sens  injurieux.  Du  reste,  cette  racine  T'rJB  a  embarrassé  M.  Baer. 
Comme  nous  l'avons  déjà  fait  remarquer  plus  haut,  il  voit  deux  fois 
dans  le  mot  Li^y^^\  une  expression  injurieuse,  «  ceux  qui  sont 
dans  l'erreur  »  au  sujet  de  leurs  croyances,  pour  désigner  les 
croisés,  et  alors  il  y  ajoute  un  astérisque,  mais  partout  ailleurs 
il  omet  l'astérisque.  —  Les  notes  accompagnant  la  traduction 
témoignent  de  la  compétence,  du  zèle  et  de  la  conscience  du 
traducteur,  mais  ici  aussi,  il  y  a  bien  des  choses  à  rectifier  et  à 
suppléer.  La  note  77  de  la  p.  89  (v.  plus  haut)  et  la  note  91  de 
la  p.  91  sont  inexactes.  "Cip  ""C^N  n'est  pas  seulement  usité  pour 
])arler  des  martyrs  (cf.,  par  exemple,  28,  9  du  bas),  mais,  d'après 
Exode,  xxii,  30,  c'est  un  terme  désignant  les  Israélites  en  géné- 
ral. —  142,  note  293,  le  chiffre  836,  abréviation  du  millésime  48.j6, 
est  exactement  la  valeur  numérique  des  lettres  ponctuées  dans 
les  mots  cités  dans  le  texte  d'après  Lament.,  ir,  20  :  j-,r;^  2N 
iS"'2:T    "iriD   ■i"-'  "j-ipfbà-  — 144,  note  288,  au  licu  deRamru,  l.Rameru. 

—  448,  note  318,  in73"r;"c:  ne  peut  être  rapporté  qu'à  ceux  qui  s'échap- 
pèrent du  feu.  —  163,  note  30,  au  lieu  de  n''"iwr!,  le  texte  hébreu  doit 
porter  "l'û,  et  le  "lO  retournant  à  la  ville  est  le  même  que  celui  qui  est 
allé  au  devant  des  croisés  hors  de  la  ville,  à  163,  6.  —  197,  la  note  48 
est  fausse.  Il  est  fait  allusion  ici,  non  à  la  fable  du  renard  dont  parle 
Roschi,  et  qui  ne  serait  pas  de  mise  ici,  mais  à  celle  qui  se  trouve 
dans  Midrasch  raiba  sur  Esther  3,  1.  La  fable  est  dirigée  ici  natu- 
rellement aussi  bien  contre  les  chrétiens  que  contre  les  mahométans. 

—  116,  note  19o,  il  fallait  renvoyer  à  Midrasch  rabba,  ch.  lxx,  sur 
Genèse,  xxix,  24.  —  116,  5,  du  bas,  il  y  aurait  eu  lieu  de  renvoyer  au 
Memorbuch  de  Mayence  [Revue,  VII,  p.  9),  d'après  lequel  le  martyre 
des  Juifs  de  Cologne  n"jnn  nnsii'n  n"in-:72  aurait  eu  lieu  le  lende- 
main de  la  fête  de  la  Pentecôte.  —  168.  7,  il  manque  l'indication  de 
la  source,  qui  est  le  Yalkout,  ch.  xx,  et  X^v  p  "ISD  dans  le  Belhha- 
iVidrasck  de  Jellinek,  t.  II,  n°  6.  —  211,  19  (v.  plus  haut).  Pour 
quelques  noms  de  martyrs  (p.  23,  31,  44,  48,  .jO,  61,  62),  il  aurait  fallu 
aussi  tenir  compte  de  la  Hazkara  de  Worms  publiée  par  M.  Jellinek. 

L'identification  des  noms  de  lieu  n'a  pu  se  faire  avec  une  certitude 
ol)solue  pour  tous  les  noms.  Ainsi,  par  exemple,  an,  p.  63,  est  iden- 
tifié avec  Ilam,  dans  le  déparlement  de  la  Somme,  ce  qui  est  contesté 
par  M.  Neubauer  {Revue,  III,  14,  note  3).  —  pn?,  p.  63.  devient 
douteux  par  suite  de  l'existence  de  trois  endroits  portant  le  nom  de 
Careulau  ou  Charenton.  —  rJT,  p.  25,  qui  est  remplacé  à  p.  28  par 
nV:j,  est  énigmalique  ;  la  relation  parallèle  d'Eliézer  b.  Nathan, 
p.  46,  6,  au  lieu  des  mots  û-'-^nsm  b":;i3i  N:i-iDm  de  I,  a  simplement 
Nr-N-iSai.  Comme  la  relation  I,  p.  28,  après  une  courte  notice  sur  les 
événements  de  Ralisboune,  en  a  une  bur  n""0  et  ne  parle  pas  du  tout 
de  Prague,  il  y  a  lieu  de  supposer  que  la  persécution  juive  à  Prague 
se  rattachait  étroitement  à  celle  de  b\rT  ou  ï<r«r,  et  que,  par  suite, 
Prague  et  bon  étaient  des  villes  voisines.  Cette  hypothèse  estconfir- 


196  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mée  par  le  récit  de  28,  7  du  bas,  dont  il  résulte  que  les  Juifs  habitant 
l'Autriche  p'iinri  y~\^,  cf.  30,  lu)  étaient  considérés  comme  les  coreli- 
gionnaires les  plus  proches  des  Juifs  de  Nbu:.  L'Autriche  et  la  Bohème 
avaient  été  réunies  peu  de  temps  auparavant  (1081-1083)  sous  la 
domination  du  duc  AVratislaw  II  de  Bohême;  c'est  pourquoi,  il  est 
absolument  logique  que  les  croisés,  d'après  la  relation  I,  citent  aux 
Juifs  bohémiens  de  Nbc  l'exemple  de  leurs  frères  autrichiens  qui 
ont  subi  le  martyre.  L'indication  de  la  page  29,  3,  disant  qu'en  face 
de  la  ville  de  Nbw  il  y  avait,  de  l'autre  côté  du  fleuve,  une  autre 
ville,  permet  de  supposer  que  cette  autre  ville  était  Prague.  Le  mot 
û"»"'r;am  qui  vient  après  le  mot  b'Ci^  ne  serait  donc  pas,  comme 
M.  Baer  l'indique  (p.  131),,  Pappenheim,  mais  signifierait  (1.  D"'"^~23) 
«  en  Bohème  ».  On  ne  comprendrait  pas  non  plus  que  l'auteur  de  la 
relation  I,  qui  rapporte  les  faits  dans  leur  ordre,  fasse  suivre  les 
noms  de  Trêves,  Metz,  Ratisbonue,  Prague  et  bCT  du  nom  de  Pappen- 
heim, et  qu'après  avoir  parlé  en  détail  de  Trêves,  Metz,  Ralisbonne 
et  Nr'C,  il  ne  dise  pas  un  mot  de  Pappenheim,  quoique,  en  sa  qualité 
de  Maj^ençais,  il  ait  dû  entendre  plutôt  des  récits  concernant  cette 
ville  que  touchant  des  communautés  juives  de  la  Bohème  ou  de 
l'Autriche.  La  seconde  relation  ne  sait  rien  non  plus  d'une  persé- 
cution qui  aurait  eu  lieu  à  Pappenheim  en  1096,  pas  plus  que  le 
Memorbuch  de  Mayence. 

Aronius  {liegesten,  n'^  200)  croit  qu'on  pourrait  identifier  cette 
ville  au  nom  énigmatique  avec  Prague,  si  Prague  n'était  citée  à  côté 
d'elle.  Peut-être  s'agit-il  d'une  ville  située  en  face  de  Prague,  sur 
l'autre  rive  de  la  Moldau,  par  exemple,  "Wissegrad.  On  s'expliquerait 
ainsi  que  la  relation  I  concernant  Prague  et  "Wissegrad  (bciai  Nr^Nnsa 
ï:""^r;3n"i,  i.  CTrsn  "nricim  iSJ^nsn)  se  contente  d'une  seule  com- 
munication relative  à  Wissegrad  et  que  la  relation  II  ne  mentionne 
que  Prague,  où  les  Juifs  aient  eu  à  souffrir  des  croisés.  Le  récit 
dans  I,  p.  28  et  s.,  est,  en  tout  cas,  exagéré  à  la  manière  d'une 
légende  et  repose  sur  des  rapports  venus  de  loin  ;  le  chiflre  de 
1,000  cavaliers  chrétiens  armés  et  de  oOO  cavaliers  juifs  ne  prouve 
qu'une  chose,  c'est  que  c'était  une  grande  ville  et  une  grande  com- 
munauté juive.  Il  ressort  aussi  de  cette  phrase  de  la  relation  "'CrN 
N5C  "y^vz  T^riO  ...C'Cn  (28,  9  du  bas)  que  celte  communauté  était 
très  considérée.  Un  document  de  l'an  1091  (Aronius,  Regesten,  n^  173) 
parle  du  faubourg  de  Prague  et  du  village  de  Wissegrad,  où  demeu- 
raient des  Juifs  très  riches. 

M.  Bresslau  (Introd,,  p.  xx,  note  10)  observe  avec  raison  que  pour 
le  nom  de  lieu  !:"'":b^72,  30,  16,  il  est  difficile  de  songer,  comme  le 
veut  M.  Baer.  p.  140,  note  2S2,  à  Leiuingen;  Aronius  l'identifie 
avec  MùUheim  {lièges (en ,  n'^  185)  ;  mais  alors  il  faudrait  lire 
D''r:jbntt[73].  —  p-na:T"^}3,  30,  17,  est  sans  doute,  comme  on  l'observe 
p.  141,  note  283,  Wieselburg,  en  Hongrie,  et,  par  suite,  ne  doit  pas 
être  corrigé  en  p~n3:T"'N,  car  Wieselburg  (en  hongrois  Mosovj')  s'ap- 
pelait autrefois  Mosenburg,  castrum  Mosonium.  Il  faut  donc  rétablir 


LES  RELATIONS  HÉBRAÏQUES   DES  PERSÉCUTIONS  DES  JUIFS        197 

P'-i"i3:t"'W  dans  le  texte  hébreu,  30,  M,  et  dans  l'index  aussi  il  faut, 
au  lieu  de  p"n3jT''N.  p"n33r73.  Les  noms  de  lieu  Leiningen  el  Pap- 
penheim,  quoique  probablement  inexacts,  se  trouvent  dans  la  tra- 
duction comme  dans  lïndex  sans  point  d'interrogation.  b'Ci^  (Nbo) 
manque  dans  l'index,  parce  qu'on  n'a  même  pas  essayé  d'identifier 
le  mot.  Par  contre,  l'index  aurait  dû  avoir  le  nom  de  ^^cbm'O  (p.  62), 
Sluhlbach  (?),  p.  iO.i. 

Du  reste,  l'index  n'est  pas  fait  avec  toute  l'exactitude  désirable. 
Les  noms  de  Dani  ("^n)  et  de  Meir  1"'N7û  'n  auraient  pu  être  omis,  le 
premier  n'étant  qu'un  nom  biblique  employé  dans  un  sens  mali- 
cieux, et  le  dernier  faisant  partie  d'une  citation  talmudique.  Par 
contre,  pour  quelques  noms  de  personne,  il  n'indique  pas  la  page  où 
ils  sont  cités,  par  exemple  pour  Juda  bar  Isaac,  il  manque  l'indica- 
tion, p.  13;  de  même,  pour  Nathan  bar  Samuel,  il  n'indique  pas  la 
page  74;  pour  Kachel,  la  page  l'S;  pour  Samuel,  la  page  60.  Il  y  a 
aussi  des  omissions,  par  exemple,  le  nom  hébreu  im"^  pour  Jean  : 
"iZJTX  à  propos  d'Ollo;  au  lieu  de  Isebel,  il  faudrait  Isabelle  (épouse 
du  comte  ïhiébaut  de  Blois);  pour  Juda  b.  Abraham,  il  aurait  fallu, 
outre  N1T»,  mentionner  ^nn"i;  au  lieu  de  Ramru,  1.  Rameru;  enfin, 
il  y  a  des  fautes  d'impression,  par  exemple,  û'^'^Mjbn,  1.  û"^rîDbT(?); 
Nb-'D''"'.  1.  Nb-'n;-^-';  N;-bi:bi2,  i.  Nrb^biD.  L'utilité  de  l'index  aurait 
beaucoup  gagné  si,  comme  pour  le  mol  Beiuricli,  où  les  dilTérenls  per- 
sonnages qui  portent  ce  nom  ont  été  distingués  par  des  indications 
plus  précises,  on  avait  employé  ce  procédé  régulièrement  pour  dis- 
tinguer les  noms  hébreux;  ainsi,  par  exemple,  au  lieu  de  Abraham 
(nr;-i3N),  20,21,  60,71,  72,  il  faudrait  Abraham  (Dm2N\  60;  Abraham 
tbar  Juda),  mi-i  nn  û-nnx,  20,21;  Abraham,  le  scribe  de  Carentan 
'i:::;-ip;û  -iDion  û--i3N,  71  et  72.  —  Au  lieu  de  Joseph  (Cidt^),  1o,  3o,  42, 
il  faudrait:  Joseph  (bar  Abraham)  D""i2N  "i3  C^DT^,  42;  Joseph  bar 
Kalonymos  Oi7a"'jVr'p  "13  C^OT*,  15:  Joseph  Haccohen  irisn  t\OV,  35.  — 
Des  épithètes  comme  "^ibn,  I^D",  ou  des  titres  comme  "^Nnsï^,  binsn, 
lpT~,  "["nn,  ou  des  désignations  par  le  nom  du  lieu  d'origine,  comme, 
par  exemple,  -pW'ibTiT:  ';"'!0"':3  ou  n-pe":;?:  ipTr;  t]Oi-'  'na  0"if:^;ibp 
auraient  dû  être  cités  régulièrement  daus  l'index,  et  non  excep- 
tionnellement. 

Ces  observations  faites,  il  est  de  noire  devoir  de  proclamer  hau- 
tement que  la  Commission  historique  a  rendu  un  service  sérieux 
à  l'histoire  juive  en  publiant  le  second  volume  des  QuelLen,  qui 
renferme  les  divers  documents  que  nous  venons  d'analyser. 

PORGÈS. 


LES  JUIFS  DE  CANDIE 

DE  1380  A  1483 


On  sait  peu  de  choses  de  l'histoire  des  Juifs  de  Candie  au  raoj-en 
âge,  comme,  d'ailleurs,  de  celle  de  beaucoup  d'autres  régions. 
Aussi  faut-il  accueillir  avec  empressement  tous   les  renseigne- 
ments   propres  à    combler   cette   lacune.    La   Bibliothèque   des 
Ecoles  françaises  d'Athènes  et  de  'Rome  vient  de  s'enrichir  d'un 
nouveau  fascicule,  le  61^,  qui  rf^pond,  en  partie,  à  ce  desidera- 
tum, en  fournissant  quelques  notices,  qui  ne  manquent  pas  d'in- 
térêt, sur  la  condition  des  Israélites  Candiotes  de  1380  à  1485'. 
L'auteur  de  cette  publication,  malheureusement  posthume,  Hippo- 
lyte  Noiret,  avait  dépouillé  les  papiers  du  sénat  de  Venise  pour 
ce  qui  concerne  la  domination  de  la  république  sur  l'île  de  Crète 
pendant  ce  laps  d'un  siècle.  11  avait  anah'sé,  résumé  et  quelquefois 
copié  in-extenso  toutes  les  pièces  qui  rentraient  dans  son  pro- 
gramme, se  proposant  de  poursuivre  ses  recherches  et  d'écrire 
une  histoire  de  cette  ile  fameuse.  Il  est  bien  fâcheux  qu'il  n'ait  pu 
lui-même  présenter  ses  trouvailles  et  les  accompagner  d'un  com- 
mentaire qui  leur  aurait  restitué  leur  véritable  caractère.  Les  his- 
toires écrites  uniquement  d'après  des  documents  officiels  sont  le 
plus  souvent  des  trompe-l'œil,  car  elles  risquent  de  ne  présenter 
qu'un  côté  de  la  vie,  et  non  le  plus  intéressant  ;  il  faut  qu'elles  ne 
négligent  pas  les  autres  sources  d'information,  si  elles  veulent 
être  complètes  et  fidèles.  L'histoire  juive,   en  particulier,  telle 
qu'on  est  en  train  de  la  constituer  avec  les  données  empruntées 
aux  archives,  a  bien  chance  de  rester  stérile  ou   de    répandre 
des  idées  fausses  si  elle  ne  profite  pas  des  secours  que  peuvent  lui 
prêter  les  écrits  juifs  ;  outre  qu'elle  est  nécessairement  partiale, 
puisqu'elle  n'écoute  que  des  voix  généralement  hostiles  à  ceux 

•  Noiret  (Hippolyte),  Documents  ini'dits  pour  servir  à  l'histoire  <h  la  domination 
vénitienne  en  Crète  de  1580  à  1483,  tirés  des  archive,^  de  Venise.  Pans,  Thonu,  1892; 
ia-8<>  de  xx  +  601  p. 


LES  JUIFS  DE  CANDIE  DE  1380  A  148o  199 

qu'elle  étudie,  elle  les  voit  sous  un  jour  que  modifierait  sûrement 
la  connaissance  des  manifestations  diverses  de  leur  activité. 

Qui  ne  lirait  que  les  notices  ou  analyses  de  ce  volume  et  se  for- 
merait là-dessus  un  jugement  sur  les  Juifs  de  Candie  serait 
bien  surpris  ensuite  par  le  tableau,  malheureusement  un  peu  trop 
technique,  que  M.  Steinschneider  a  tracé  de  leur  activité  litté- 
raire, justement  dans  cette  période  qui  s'étend  de  la  fin  du  xiv" 
à  celle  du  xy«  siècle  *.  C'est  l'époque  de  la  floraison  des  études 
scientifiques  et  littéraires  des  Juifs  de  cette  île,  renaissance 
dont  témoigne  à  lui  seul  le  nom  des  Del  Medigo.  Pour  qu'une 
population  pieuse  comme  celle  de  cette  île,  qui  renfermait  dans 
son  sein  jusqu'à  des  Kabbalistes,  ait  donné  le  jour  à  des  savants 
instruits  dans  les  sciences  classiques  et  philosophiques,  il  faut 
supposer  qu'elle  n'y  était  pas  si  détestée  qu'on  le  dit,  ni  qu'elle  ne 
se  composait  que  d'âpres  usuriers  et  de  sordides  marchands.  La 
France  a  bien  vu  au  xiv^  siècle  les  Juifs  honnis  et  maltraités  à 
cause  de  leurs  usures,  mais  ces  Juifs,  revenus  avec  la  guerre  de 
Cent  ans,  n'étaient  que  des  prêteurs  d'argent  :  aussi  de  leur  tra- 
vail littéraire  point  de  trace.  La  production  littéraire  est  un 
sérieux  critérium  de  la  condition  sociale. 

Ces  réserves  faites  d'avance,  examinons  ce  que  nous  révèlent 
ces  documents. 

Pour  le  gouverneur  de  l'île,  et,  par  conséquent,  pour  le  Sénat 
vénitien,  les  Juifs  avaient  le  tort  d'être  riches  ou  de  passer  pour 
tels.  C'est  le  motif  qu'on  invoque  toutes  les  fois  qu'on  veut  leur 
imposer  de  nouvelles  taxes,  par  exemple  en  1387  *,  en  I39."3  *, 
en  1439*,  ou  qu'on  restreint  leurs  droits,  comme  en  1412.  En  cette 
année,  on  se  plaint  qu'ils  accaparent  tout,  à  Rethimo,  qu'ils  sont 
les  maîtres  des  deniers  et  des  hommes,  qu'ils  possèdent  toutes  les 
boutiques  de  la  place  de  celte  ville  et  des  alentours  ■'. 

*  Candia,  Cenni  di  storia  letteraria,  tlans  Mosè,  Antologia  israelitica,  Corfou,  Il 
(1879). 

»  Page  13,  25  février  1387  :  taxe  de  2000  liyperpères.  t...  Sicut  notum  est  ia 
civilate  aostra  Candide  et  per  insulam  saut  quamplures  Judei  cum  niaximo  haverc 
et  valde  diviles,  qui  consecunlur  in  illa  civilalu  et  in  tota  insula  inasimam  iitililatein 
et  corr.modum  cum  modico  onere  suo.  •  Colle  nouvelle  taxe  nannule  pas  les  pré- 
cédentes. 

*  l'âge  71   :  nouvel  impôt  de  3,000  hyperpères. 

*  Page  387,  21  février  143'.t. 

"'  Page  213,  27  octobre  1412.  «...  exposuci-unl  quod  Judei  dicte  terre  (Rethimo), 
non  conlenti  de  ulilitaiihus  et  inexlimabilibus  lucris  que  consequunlur  ex  usuris  et 
colleganf.is,  caniuiit  lolum  lucrnro  et  conviamen  quod  consequiiur,  in  illa  terra,  ex 
arte  et  exercicio  mercantie,  in  tautura  quod  dici  pot^sl  quod  ipsi  Judei  sint  domiui 
denariorum  et  hoininum  iliius  terre  et  districtus,  et  ulterius  quod  ipsi  Judei  occu- 
pant quasi  omues  staliones,  appotbecas  et  magaceua,  tam  posila  super  plaUa  Kctbimi 
quam  cire»  et  prope  ipsam  plaleam.  • 


200  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Les  taxes  pleuvent  sur  eux  dru  comme  grêle  :  en  1387,  2500 
liyperpères  en  plus  des  1000  h^-perpères  qu'ils  payaient  jusque 
là  »  ;  en  1395,  3030  liypprpèrps  (p.  71).  En  1403,  c'est  sur  eux 
que  retombe  la  charge  d'acquitter  la  moitié  des  frais  de  rt^pa- 
ration  d'une  partie  des  murs  de  Candie,  parce  qu'ils  profiteront 
particulièrement  de  ces  travaux  -.  En  1407,  ordre  est  donné  au 
gouvernement  de  Crète  denlever  les  immondices  déposées  par  les 
particuliers  ou  se  trouvant  sur  les  voies  publiques  :  les  Juifs  doi- 
vent supporter  le  cinquième  de  la  dépense  (p.  175).  Or,  il  faut 
observer  que,  même  au  temps  de  leur  plus  haute  prospérité,  les 
Juifs  de  Crète  n'ont  pas  dépassé  le  chiffre  de  1.160,  sur  une 
population  de  près  de  200.000  habitants.  En  1439,  il  leur  est 
enjoint  de  payer  annuellement,  et  pendant  trois  ans,  4.000  ducats 
pour  subvenir  aux  frais  de  la  guerre,  alors  que  les  habitants  des 
cités  et  bourgs  de  Crète  et  de  Sithie  n'ont  à  verser  qu'une  somme 
égale  et  pour  une  fois  seulement  (p.  387). 

Les  impositions  extraordinaires  du  genre  de  celles-ci  sont  les 
plus  lourdes,  mais  non  les  moins  fréquentes  ;  elles  sont  motivées 
toujours  par  l'état  de  guerre,  qui  est  presque  la  condition  normale 
do  la  république  vénitienne  en  ce  siècle  ;  elles  sont  le  plus  souvent 
de.stinées  à  l'armement  de  galères.  En  1402,  ordre  du  Sénat  d'ar- 
mer deux  galères,  aux  dépens  des  habitants  de  Candie,  pour  la 
défense  de  la  Crète  contre  les  Turcs  (p.  123);  même  ordre  en 
1431  (p.  350j  et  en  1432  (p.  354)  ;  en  1465  et  1485,  c'est  pour 
les  fortifications  de  Candie  qu'il  est  fait  appel  à  leurs  subsides 
(p.  498  et  552).  Or  la  part  contributive  des  Juifs  dans  ces  dépenses 
est  toujours  énurme. 

Ce  ne  sont  pas  les  seuls  services  qu'ils  rendent  à  la  République  : 
ils  sont  tenus,  à  toute  réquisition,  de  prêter  au  gouvernement  de 
l'ile  les  sommes  fixées  par  le  Sénat  ;  il  faut  voir  en  1447,  sous 
quelles  peines  ils  sont  condamnés  à  s'exécuter  et  promptement  ^. 

'  Page  13,  25  février  1387.  L'hyperpère  était  une  monnaie  d'argent  valant  1/4  ou 
1/6  de  ducat. 

*  Page  143,  28  mars  1403  :  .. .  passus  vigenti  vel  circa  de  muro  circum  Candidam 
a  parle  pouenlis  ubi  est  Judatcha. 

*  Page  417,  27  décembre  1447.  «  Cum  his  elapsis  diebus  accepte  l'uerint  mutuo  a 
Judeis  terre  firme  cerle  pecunie  pro  armamento  galeoaorum  Pddi,  et  conveniens  siî  ut 
Judei  a  parte  maris  et  presertim  ci^itatis  oostre  Candide,  qui  sunl  multi  et  potentes, 
contribuant  ad  expeditionem  istorum  VU  galeonorum,  qui  ordiuati  suui  armari  et 
pro  aliis  expensis  occurenlibus  ad  Arsenatum  nostrum.  Va  dt  pars  quod  Judei  civi- 
talis  Canaide  l'enerantes  teueanlur  accoinodare  nostro  dominio,  pro  dicta  causa, 
ducatis  quinque  milia  auri.  Et  ut  imprestntiarum  haberi  possint  iste  pecunie,  com- 
milldtur  auctoritate  buius  Consi.ii  Gubernaioribus  Iniroyiuum,  ut  accipiant  per 
cambium  cum  eo  quaiu  miuori  damuo  fieri  potest,  dictas  pecuuias,  quas  mitiaut  ad 
solvendum  in  Crela  nostro  Regimiui  Crète,  de  bonis  dictorum  Judeorum.  Et  ut  illi 
qui  exbursabunt  de  liinc  dictas   pecunias   habeant  certitudmem  suarum  pecuniarum, 


LES  JUIFS  DE  CANDIE  DE  1380  A  1485  201 

Ils  prêtent  au  gouvernement  de  Crète  lors  de  la  guerre  avec  les 
Génois;  en  1392,  il  leur  est  dû  encore  20.000  hy|.erpères  que  la 
Seigneurie  s  engage  à  rembourser  (p.  51).  En  1410,  le  sénat  pres- 
crit l'emprunt  d'une  somme  de  2.000  écus  pour  l'expédition  de 
troupes  à  Négrepont  et  pour  quelques  autres  dépenses  :  si  on  ne 
trouve  pas  d'autres  prêteurs,  on  devra  recourir  aux  Juifs  (p.  202). 
Ce  sont  des  banquiers  dont  la  caisse  est  toujours  mise  à  contri- 
bution. Mêmes  instructions  en  1413  (p.  219),  en  1414  (p.  224j,  en 
1416  (p.  242\  en  1421  (p.  287).  On  leur  emprunte  20.000  ducats 
en  1431  (p.  372)  ;  5.000  en  1447  (p.  417)  ;  3.000  en  1452  (p.  435), 
en  déduction  de  leurs  impositions  ;  1.000  en  1464  (p.  492),  en  plus 
de  1.000  qu'ils  sont  tenus  de  payer  '. 

Les  Juifs  ont  conscience  des  services  qu'ils  rendent  à  la  Répu- 
blique, et  parfois,  pliant  sous  les  impôts  dont  on  les  accable, 
ils  ont  le  courage  de  réclamer  contre  ces  abus,  en  invoquant  ces 
titres  et  même  d'autres  qui  ne  sont  pas  assez  clairement  spécifié.^. 
Ainsi,  en  1389,  Sabbatoi  Retu,  Melchior  Gassan  et  Justof  Missin, 
Juifs  de  Candie,  en  leur  nom  et  au  nom  de  toute  la  communauté 
Israélite  de  Crète,  protestent  contre  la  taxe  de  2.500  hyperpères 
qui  a  été  ajoutée  à  celle  de  1000  hyperpères  qu'ils  payaient  jus- 
que là  ;  ils  font  ressortir  les  actes  méritoires  qu'ils  ont  accomplis 
pendant  les  guerres  de  la  république  et  en  d'autres  circonstances, 
soit  en  s'associant  gracieusement  et  à  titre  onéreux  aux  travaux 
du  port  et  à  d'autres  œuvres  utiles,  soit  en  prêtant  de  grosses 
sommes  avec  de  grands  risques  et  sans  profit  ^.  Ces  faits  sont 
attestés  par  des  hommes  de  condition  noble,  entre  autres  par 
l'ancien  duc  de  Crète.  Le  Sénat,  reconnaissant  la  manière  louable 
dont  les  Juifs  se  sont  comportés  en  ces  circonstances  et  aussi  leur 

ex  nunc  captum  sit  quod  si  dicU  Judei  Crète  non  solverent  cum  effectu  intra  unum 
mensem  dictas  pecunias  post  presnntalionem  lilerarum  cambii  in  Crela,  cadant 
absque  remissione  ad  penam  quarli,  de  qua  pena  tercium  sil  Re^2:iminis  Crète,  ter- 
cium  illorum  qui  focerint  cambia,  et  aliud  tercium  nostri  comanis.  Et  nihilomiaus 
teneatur  Uegimen  Crète  infra  dictuin  mensem,  sub  pena  ducatorum  \"  cuilibet 
eorum,  in  suis  propriis  bonis,  providere  cum  elFectu  ad  solvendum  cambia,  que  mil- 
tentur  de  bine  ad  solvendum  de  bonis  Judeorum  predictorum.  Et  si  dicte  pecunie  re- 
periri  non  possent  do  hinc,  pro  mittciido  ad  solvendum  in  Cretam  per  cambium, 
provideat  dictum  Rejiimen  exigere  infra  dictum  mensem  post  receptionem  lilerarum 
nostrarum,  dictas  pecunias,  sub  omnibus  pénis  predictis,  et  exinde  aul  medio  cambio- 
rum  aut  aliter  provideat  quod  infallauter  habeamus  quam  celerius  licri  potest  de 
hinc  iulegram  summam  ducatorum  V™  ducatorum,  etc. 

'  La  République  en  agissait  de  même  avec  les  Juifs  du  continent,  ainsi,  entre 
autres,  lors  de  la  guerre  contre  la  ligue  de  Cambrai;  voir  Cassel,  art.  Juifs,  dans 
VBneyrlopédie  d'Ersch  et  Gruber,  p.  159  b. 

'  Page  26,  25  mai  138'J  :  ...  allegantes  multa  laudabilia  opéra  quîE  feceruni  in 
guerris  nostris  et  aliis  occurenlibus,  sciiicet  in  laborcrio  porlus  et  aliis  necessitatibus 
in  insula  nostra  Crète,  gratis  et  liberaliter  ac  per  modum  mutui  in  multa  pecunio 
quantitale,  cum  ipsorum  incommodo  non  modico  et  jactura.  » 


202.  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

situation  précaire,  réduit  la  taxe  annuelle  à  2.000  hyperpères  '. 
En  1415,  les  Juifs  font  encore  une  fois  entendre  leurs  plaintes, 
mais  l'éditeur  a  négligé  de  nous  les  transmettre. 

On  aurait  tort  de  croire  que  là  se  bornait  la  part  qu'ils  prenaient 
aux  charges  de  l'île.  En  1392  (p.  52),  on  voit  qu'ils  doivent  monter 
la  garde,  toutes  les  nuits,  au  nombre  de  douze,  sur  la  partie  des 
remparts  appartenant  à  leur  quartier.  En  1395  (p.  Il],  ils  en  sont 
exemptés,  mais  on  leur  fait  payer  cette  faveur.  C'est,  d'ailleurs, 
la  règle  que  l'on  suit  toutes  les  fois  qu'on  croit  leur  accoriler  une 
grâce.  En  1386  (p.  12),  ceux  de  Rethimo  obtiennent  la  permission 
de  rouvrir  une  sj'nagogue  fermée  par  Pietro  Grimani,  ancien  gou- 
verneur, mais  à  la  condition  de  contribuer  aux  travaux  de  cons- 
truction du  port  pour  la  somme  de  800  hyperpères. 

En  échange  de  ces  impositions  ordinaires  et  extraordinaires, 
quelle  conduite  le  Sénat  et,  par  conséquent,  le  gouvernement  de 
l'ile  tiennent-ils  à  leur  égard  ?  A  l'étranger,  on  les  protège.  Un  Juif 
de  Candie  ayant  éprouvé  en  1411  d  \s  dommages  de  la  part  d'un 
Sicilien  dans  les  eaux  de  Rhodes,  le  Sénat  charge  l'ambassadeur  en 
Sicile  de  s'informer  du  fait  (p.  211).  On  voit  bien  l'intérêt  qu'y  avait 
la  république.  Dans  l'île  même,  une  fois  le  Sénat  intervient  pour 
défendre  de  poursuivre  un  Juif  accusé  d'extorsions  et  de  vols  *. 

Mais,  par  contre,  toutes  les  fois  que  la  politique  exige  de  res- 
treindre la  liberté  des  opérations  de  commerce  et  de  banque  des 
Juifs,  on  les  sacrifie  sans  peine  au  désir  de  plaire  aux  popuhUions. 
D'ailleurs,  c'est  le  siècle  de  la  réaction  économique;  dans  tous 
les  pays,  surtout  dans  les  pays  latins,  des  mesures  sont  prises  pour 
enrayer  le  mouvement  commercialdes  Juifs  et  pour  favoriser  leurs 
concurrents  chrétiens.  A  comparer  la  législation  nouvelle  à  la- 
quelle sont  soumis  les  Juifs  de  Candie  avec  celle  qu'on  décrète  alors 
dans  les  autres  États,  on  reconnaît  qu'il  souffle  partout  un  même 
vent  de  protectionnisme. 

A  Négrepont,  il  leur  est  interdit,  en  1402,  d'acquérir  dans  la  ville 
ou  au  dehors  aucun  bien  territorial  ou  immeuble,  excepté  dans  la 
partie  de  la  ville  qui  a  été  affectée  à  l'ancienne  juiverie.  i''n  outre, 
comme  ce  quartier  des  Juifs  a  trop  de  portes  qui  leur  permettent 
d'entrer  et  de  sortir  et  de  commettre  beaucoup  de  choses  mauvaises 
et  immorales,  il  est  prescrit  de  les  murer  et  fermer  à  l'exceiition 

'  «...  (idelia  portamenta  Judeorum  prediclorum  ia  serviciis  nostris  gesta  tempori- 
bus  opportunis.  • 

*  Page  3G9,  23  décembre  1432.  Le  Juif,  de  Relhimo,  se  nomme  Crossone. —  L'an- 
née precédenic,  30  mars  l''i33  (p.  3n8l,  le  Sénal  avait  ordonné  des  poursuites  contre 
le  Juil  Otiaviaiius  Bunaiuta,  de  Candie,  sur  riusligation  duquel  quelquespersonaages 
sélaienl  livrés  à  la  vente  des  cbarges  publiques. 


LES  JUIFS  DE  CANDIE  DE  13S0  A  US^j  203 

des  trois  portes  principales  de  la  juiverie.  Enfin,  la  juiverie  ne 
pourra  être  étendue,  sauf  par  grâce  spéciale  de  la  n'^pubiique 
(p.  131).  Négrepont  devançait  ainsi  de  quatre  années  les  avantages 
que  l'île  de  Cor  fou  obtint  contre  les  Juifs  '. 

Bien  plus,  les  Juifs  ne  pourront  tenir  boutique  en  dehors  de  leur 
quartier  :  telle  est  la  n'-gle  qui  doit  être  observée  dans  toute  l'île. 
Nous  ne  savons  quand  fut  prise  cette  mesure,  elle  doit  être  con- 
temporaine de  cette  institution  des  ghetti.  En  tous  cas,  le  recteur 
de  Rethimo,  Ser  Marcus  Marcello,  ayant  accordé  à  Salomon,  fils 
de  feu  Lazzar  de  Meir,  et  à  ses  fils  et  descendants,  d'avoir  des  bou- 
tiques (stationes  et  appothecœ)  hors  de  la  juiverie,  des  plaintes 
sont  portées  en  1412  au  Sénat  de  Venise,  qui  révoque  ce  privilège 
et  déclare  que  les  Juifs  devront  à  Rethimo  se  conformer  à  ce  qui 
se  fait  à  Candie  et  à  La  Canée  (p.  213). 

En  1423,  la  loi  édictée  pour  Négrepont  en  1402  et  pour  Corfou 
en  1406,  est  généralisée  pour  tout  le  territoire  de  la  République  : 
les  Juifs  ne  pourront  plus  acquérir  d'immeubles  "^  sous  peine  de 
confiscation,  moitié  pour  le  dénonciateur,  moitié  pour  le  trésor; 
il  leur  est  accordé  un  délai  de  deux  ans  pour  vendre  tous  ceux 
qu'ils  possèdent. 

Mis  en  goût  par  ces  rigueurs,  les  concurrents  des  Juifs  deman- 
dèrent au  Sénat  de  mieux  les  protéger  encore  et  d'interdire  aux 
Juifs  de  servir  à  l'avenir  de  courtiers  et  aux  chrétiens  de  les  em- 
ployer comme  tels.  Ce  projet,  présenté  par  deux  conseillers  de  l'île, 
fut  approuvé  en  1433  ^. 

Mais  c'est  surtout  dans  les  entraves  apportées  à  leurs  opérations 
de  prêt  que  se  manifeste  cette  réaction.  Que  les  Juifs  fussent  sur- 
tout des  banquiers  alors,  c'est  ce  que  n'explique  pas  seulement 
l'état  social  du  temps,  mais  encore  l'organisation  même  de  l'île*. 
La  république  vénitienne,  après  être  devenue  maîtresse  de  Candie, 
avait  tout  d'abord  laissé  aux  habitants  leurs  terres  et  leurs  pos- 


'  Revue  des  Etudes  Juives,  t.  XXIII,  p.  1)9,  On  voit  ([ue  les  Corlîotcs,  pour  appuyer 
leur  demande,  pouvaient  invoquer  un  précédent.  En  tout  cas,  l'identité  des  dillerenls 
articles  des  deux  roLrlemenls  n'est  pas  fortuite. 

*  Pajie  297,  26  septembre  1423  :  ■  Quod  est  contra  diviuurn  mandatum  et  in  onus 
ac  infamiam  nostri  dominii,  et  quod  pejus  est,  nisi  de  salibri  remedio  provideretur, 
ipsi  in  brevi  tempore,  pro  inajori  parte,  possiderent  in  aliquibus  terris  et  locis  noslris 
plures  domos  et  possessionesquam  chrisliani,  >  Le  Sînat  avait  renouvelé  la  même  dé- 
fense à  ceux  de  Venise,  lu  2  mars  de  la  inènie  année  ;  voir  FTchr.  Jiifilin//r.^  \'l,  66, 

3  Page   3;:;0,  22  septembre  1433, 

*  Les  Juifs  s'adonnaient  aussi  à  la  médecine  dans  l'île,  on  le  voit  suffisamment 
par  ies  noms  de  médecins  cités  par  M.  Steinschneider;  mais  nos  documents  !e 
montrent  également  :  le  j>  septembre  1441  (p.  399)  le  Sénat  met  bon  ordre  à  la  fraude 
de  beaucoup  de  gens,  surtout  de  Juifs  qui,  sous  prétexte  qu'étant  médecins,  ils  ont 
des  lettres  d'exemption  de  la  république,  ne  pa3'aient  pas  certains  impôts. 


204  REVUE  DES  ETUDES  JL'IVES 

sessions,  mais,  dans  la  suite,  elle  les  avait  confisquées  pour  les 
attribuer  aux  colonies  militaires,  formées  de  nobles  et  de  citoyens 
vénitiens,  qu'elle  envoya  dans  l'île  :  dans  ce  système  féodal,  il  n'y 
avait  pas  de  place  pour  les  Juifs.  Comme  ailleurs  aussi,  les  besoins 
des  populations  nécessitaient  le  concours  de  prêteurs,  mais  ces 
besoins  étaient  surtout  produits  par  l'avidité  du  fisc.  En  effet,  ces 
vassaux,  pour  prix  des  terres  que  leur  conférait  la  R'^publique, 
étaient  tenus  de  payer  un  impôt  considérable  appelé  tie'rs  du  fro- 
ment :  c'était  le  tiers  de  la  récolte,  fixé  d'avance.  Si  l'année  était 
mauvaise,  c'était  la  ruine  pour  eux,  puisque  l'impôt  absorbait  tout 
le  revenu  des  terres  :  d'où  nécessité  de  recourir  au  crédit.  De  là 
aussi  toutes  ces  hypothèques  prises  par  les  Juifs  sur  les  propriétés 
de  ces  colons,  et  qui  faisaient  si  souvent  craindre  que  les  Juifs  ne 
s^emparassent  de  l'île  entière.  Pour  remédier  au  mal.  sans  dimi- 
nuer la  source  de  ses  revenus,  le  Sénat  de  Venise  mit  en  jeu 
deux  systèmes.  Tantôt,  il  réglementait  les  opérations  de  prêt  en 
réduisant  le  taux  de  l'intérêt.  C'est  ce  qu'il  fit  en  1398  à  La 
Canée  (p.  94).  Les  Juifs  de  cette  ville  prêtaient  à  25  0,0,  tandis  que 
dans  les  autres  parties  de  l'île,  ils  ne  prélevaient  que  12  OyO  (taux 
légal,  d'après  le  droit  romain)  :  il  leur  est  enjoint  de  ne  plus  pren- 
dre davantage,  sous  peine  de  perdre  capital  et  intérêts,  lesquels 
seront  attribués  par  tiers  à  l'accusateur,  au  recteur  et  au  trésor 
public.  Ou  bien  on  ne  leur  permet  plus  que  de  prêter  sur  gages 
mobiliers,  comme  en  1449  (p.  424  et  4-25).  La  recommandation 
était  presque  inutile,  puisqu'il  leur  était  défendu  de  devenir  pro- 
priétaires de  biens  mobiliers.  —  Tantôt  on  protégeait  les  vassaux, 
en  imposant  un  concordat  entre  créanciers  et  débiteurs.  C'est  à 
cette  mesure  qu'on  eut  recours  en  1411,  pour  certames  catégories 
de  Candiotes  qui  avaient  quitté  l'île  ou  qui  vaguaient  dans  la  cam- 
pagne. Mais,  séduits  par  ce  moyen  commode  de  gagner  du  temps, 
beaucoup  de  colons  avaient  usé  de  la  même  faculté,  quoiqu'ils 
fussent  dans  l'aisance.  L'abus  parut  choquant  au  Sénat,  qui, 
en  1415,  déclara  qu'il  était  juste  que  chacun  payât  ses  dettes, 
étant  donné  l'utilité  du  séjour  des  Juifs  dans  l'île.  Les  intéressés 
résistèrent  ;  les  Juifs  et  les  vassaux  envoyèrent  des  délégués 
à  Venise.  Le  Sénat  ordonna  de  constituer  une  commission  de 
trois  nobles  chargés  de  s'enquérir  de  la  condition,  des  res- 
sources et  des  revenus  des  vassaux  qui  étaient  entre  les  mains 
des  Juifs  et  de  concorder  les  débiteurs  avec  leurs  créanciers. 
Mais  on  ne  trouva  pas  trois  nobles  qui  ne  dussent  aux  Juifs; 
trois  proviseurs  furent  alors  délégués  de  Venise  pour  constituer 
ce  tribunal.  En  1418,  l'affaire  était  loin  d'être  terminée,  malgré 
.  le  terme  fixé  pour  le  concordat;  sur  1970  personnes  inscrites, 


LES  JUIFS  DE  CANDIE  DE  1380  A  l^iSo  205 

338    seulement    avaient    été   concordées.    Elle    traînait    encore 
en  1420  '. 

Il  ne  faudrait  cependant  pas  croire  que  les  Juifs  aient  toujours 
été  des  créanciers,  ils  ont  connu  aussi  quelquefois  la  condition  de 
débiteurs.  En  1387,  un  certain  Philippe  Pisansano  a  été  mis  en 
prison  pour  non  paiement  de  taxes  et  de  fermages.  Il  est  relâché 
parce  qu'il  est  un  bon  et  fidèle  sujet  et  que  des  Juifs  lui  doivent  de 
l'argent  (p.  H).  Eu  1421,  un  an  après  les  démêlés  que  nous  venons 
de  raconter  et  qui  semblaient  indiquer  que  toute  la  noblesse  était 
ruinée  au  profit  des  seuls  Juifs,  trois  nobles,  SerNicolaus,  Ser  Fran- 
ciscus  et  Ser  Paulo  Gorrario,  ont  pour  débiteur  un  Juif,  Ghersen, 
fils  de  Salomon,  habitant  de  Rethimo,  énormément  riche,  qui  leur 
doit  une  somme  considérable  (p.  288). 

Il  est  difficile  de  suivre  les  vicissitudes  des  Juifs  pendant  ce 
siècle,  les  notices  qui  pourraient  jeter  quelque  lumière  sur  ce 
point  sont  trop  clairsemées.  En  1389,  les  Juifs  se  plaignent  du 
déclin  de  leur  situation,  qui  a  empiré  à  cause  de  la  diminution  de 
leur  nombre  et  de  leurs  affaires,  tant  à  la  suite  des  épidémies  qui 
sévissent  dans  l'ile  que  du  déparfde  beaucoup  des  leurs  ^  En 
1395,  pour  justifier  l'établissement  d'un  nouvel  impôt,  le  Sénat 
allègue,  entre  autres,  l'immigration  de  nouveaux.  Juifs  riches 
(p.  71).  Ges  nouveaux-venus,  comme  le  fait  remarquer  une  note, 
étaient  peut-être  des  exilés  de  Venise,  d'où  un  décret  du  27  août 
1394  avait  décidé  leur  expulsion  pour  l'année  1396.  Peut-être 
aussi  étaient-ce  des  Espagnols  qu'avaient  fait  fuir  les  terribles 
événements  de  1391.  D'ailleurs,  par  sa  situation,  la  Crète  devait 
attirer  les  voyageurs,  et  l'on  voit,  par  les  noms  des  écrivains  qui  y 
vécurent,  qu'elle  servit  de  refuge  même  à  des  Allemands  K 

Trouve-t-on  dans  les  documents  que  nous  étudions  le  souvenir 
de  quelque  épisode  de  l'histoire  des  Juifs  de  Gandie  à  cette  époque? 
L'éditeur  le  croit,  et  lai,  qui  d'ordinaire  se  montre  très  sobre 
d'annotations,  ne  craint  pas  de  voir  dans  les  décrets  de  1449,  qui 
réglementent  l'usure  aussi  bien  des  Chrétiens  que  des  Juifs,  le 
contre-coup  d'un  événement  raconté  par  la  Creta  sacra  (t.  II, 
p.  382-83).  «  Les  Juifs,  dit-il,  montraient  alors  en  Crète  une  grande 

•  Voir  p.  239,  242,  244,  245,  262,  264,  274. 

*  Page  26,  25  mai  1389.  On  voit,  entre  autres,  Abraham,  fils  de  Léon,  de  Candie, 
écrire  un  ouvraj^e  à  Barcelone  en  1378,  alors  qu'en  \Ti-\  il  copiait  encore  à  Candie 
la  traduction  hébraïque  des  Éléments  d'Euclide.  Voir  Steinschneider,  }h\<l.,  III  (1880), 
p.  55.  Peut-être  Hiyya  h.  Juda  de  Candie,  qui  écrivit  vers  140:>  des  traités  d'éthique 
a  Padoue,  élail-il  de  ces  émi;j;rés  récents  {ibid.,  p.  283). 

5  La  famille  des  Del  Mediaio  venait  d'Allemagne. 


206  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

mauvaise  vol(3uté  à  l'égard  des  chrétiens,  les  accablant  par  une 
usure  intolérable  et  même  allant  jusqu'à  crucifier  des  agneaux.  » 
Un  peu  plus  d'érudition  lui  ata^ait  appris  que  cette  accusation 
saugrenue,  diminutif  de  celle  du  meurtre  rituel,  était  classique  au 
moyen  âge.  Encore  au  xvii«  siècle,  ce  bruit  était  accré(iité  dans  le 
Comtat  Venaissin.  D'après  André,  sous  l'épiscopat  d'Horace  Cap- 
poni,  en  1603,  le  vendredi  saint,  les  Juifs  auraient  traîné  à  Carpen- 
tras  la  croix  dans  la  boue  et  auraient  crucifié  ensuite  un  agneau. 
On  punit  les  coupables,  et  l'évèque  fit  dresser  devant  la  cathédrale 
de  Saint-Siffrein  une  grande  croix  avec  cette  inscription  :  Ilora- 
tius  Capoiiiiis,  episco]).  Carpentor.  Florent inus,  crucem  hanc 
sumptihus  Hehrcieorum  erexii  ui  quam  irriserani  magh  cons- 
j'jicîiam  venerandani  aspicereni  *.  Il  est  à  remarquer  que  cette 
inscription  passe  sous  silence  ce  prétendu  crime.  Mais  la  légende 
n'était  pas  bien  sûre  d'elle-même,  car,  au  dire  de  Cottier,  «  le  délit 
qu'on  reprochait  aux  Juifs  de  Garpentras  et  dont  ils  étaient 
restés  convaincus,  par  suite  d'une  procédure  prise  en  cette  occa- 
sion, était  d'avoir  mis  en  croix  un  homme  de  paille  le  vendredi 
saint  en  dérision  de  la  religion  catholique  -  ». 

Les  documents  publiés  par  Noiret  nous  donnent  la  version  au- 
thentique du  règlement  de  1387  (22  janvier)  concernant  les  Juifs 
de  Corfou.  Les  lecteurs  de  cette  Revue  se  rappellent  qu'il  a  été 
signalé  ici  même,  mais  l'analyse  en  est  si  vague  et  si  brève,  négli- 
geant les  parties  les  plus  intéressantes,  qu'on  se  demande  .si  le 
texte  dont  s'est  servi  l'auteur  de  l'article  était  bien  fidèle  à  l'ori- 
ginal ^  Voici  le  bref  résumé  de  cette  pièce  : 

Les  Juifs  ne  pourront  être  lésés  ni  molestés  par  les  recteurs 
(gouverneurs  de  district  nommés  par  le  Sénat  de  Venise)  dans 
leurs  sépultures  par  la  mise,  dans  leur  cimetière,  de  fourches 
auxquelles  sont  suspendus  les  voleurs  et  autres  délinquants;  ils 
ne  seront  pas  forcés  de  jouer  le  rôle  d'exécuteurs  ni  de  garder  les 

'  Pour  qui  a  l'haLilude  de  ces  sortes  d'inscriptioDS,  celle-ci  ne  vise  pas  un  fait  par- 
ticulier, niais  le  crime  originel  des  Juifs.  11  est  bien  évident  que  c'est  l'inçcriptiou 
qui  a  donné  naissance  à  la  lépende.  En  veut-on  une  preuve  indéniable"?  C'est  à  celte 
époque  que  Capponi  faisait  des  embellissements  considérables  à  la  cathédrale,  et  c'est 
juste  à  ce  moment  que  les  Juifs  se  seraient  avisés  de  ce  sacrilège,  pour  permettre  à 
l'évèque  d'ajouter  cet  ornement  à  ceux  dont  il  enrichissait  l'église  ! 

^  Le  dernier  Bulletin  de  l'Alliance  israélite  universelle  (1893,  n"  îî)  peut  servir  à 
illustrer  ces  récits;  on  y  voit  que  la  croyance  n'a  pas  perdu  de  sa  vitalité.  Un  porte- 
faix juif  de  Magnésie  ayant  été  chargé  de  conduire  un  cheval  chargé  de  bois,  au 
retour  l'animal  cria.  Les  Grecs  poussèrent  alors  des  cris  d'horreur  et  répandirent  le 
bruit  que  les  Juifs,  n'ayant  pu  se  procurer  du  sang  chrétien,  s'étaient  servi  de  celui 
d'un  animal. 

»  Revue,  t.  XXIII,  p.  OC. 


LES  JUIFS  DE  CANDIE  DE  1380  A  l/.So  207 

prisonniers  ;  ni  de  comparaître  en  jaslice  les  jours  de  lears  fêtes, 
sauf  en  cas  de  nécessité  ;  ils  ne  seront  pas  plus  imposés  que  les 
autres  «  in  facto  armandi  ipsa  ligua,  barchas  vel  alla  navigia  ne- 
cessaria  »  ;  ils  ne  seront  pas  obligés  de  prêter  leurs  lits  (eorum 
lectos),  ni  leurs  auimaux  ni  rien  d'autre  pour  Fusage  des  recteurs 
ou  celui  de  leur  famille  ;  ils  ne  feront  que  quatre  gardes  par  an, 
comme  les  chrétiens. 

Ils  devront  porter  certains  signes  sur  la  poitrine  ou  ailleurs 
comme  par  le  passé  ;  les  recteurs  devront  tenir  la  main  à  l'exécu- 
lion  de  cette  loi. 

Comme  ils  sont  accoutumés  par  un  antique  usage  à  recevoir  des 
pierres,  à  certains  jours  de  l'année,  du  haut  des  murailles  ou  des 
tours,  surtout  par  les  officiers  publics,  dans  Tintention  de  leur 
extorquer  de  l'argent,  ce  qui  est  contre  toute  humanité,  à  l'avenir 
ils  ne  pourront  aucunement  être  lapidés  par  les  chrétiens,  officiers 
ou  autres,  de  nuit  comme  de  jour,  si  ce  n'est  modérément  et  par 
ceux  qui  en  ont  l'habitude  depuis  longtemps,  et  seulement  aux 
heures  où  les  litanies  passent  par  la  juiverie,  suivant  l'usage  et  la 
foi  des  Grecs  ' . 

La  pièce  se  termine  par  i'énuraération  des  précautions  prises 
pour  empêcher  que  les  Juifs  soient  trop  victimes  des  usuriers 
chrétiens  ^. 

Or  ce  règlement  est  presque  entièrement  la  copie  d'un  privilège 
accordé  aux  Juifs  de  Corfou,  en  1332,  par  Philippe,  prince  de 
Tarente.  «  Parmi  d'autres  documents  conservés  par  la  synagogue 
des  Juifs  à  Corfou,  dit  Mustoxidi,  se  trouve  une  lettre  de  Philippe, 
prince  de  Tarente.  Dans  cette  pièce  adressée  aux  autorités  de 
Corfou,  Philippe  se  plaint  comme  d'une  injure  et  d'une  tache  im- 
primée à  son  gouvernement  que  les  décrets  rendus  par  lui  en  fa- 
veur des  Juifs  de  la  ville  et  de  l'Ile  de  Corfou  ne  soient  pas  exé- 
cutés. Les  fonctionnaires  enlevaient  les  lits,  les  vêtements,  les 
meubles  et  les  bêtes  des  Juifs  ;  ils  s'emparaient  de  leurs  personnes 
et  les  obligeaient  à  servir  gratuitement  comme  marins  sur  les 
vaisseaux  de  guerre  ;  ils  les  obligeaient  à  comparaître  devant  les 
tribunaux  le  samedi  ou  de  travailler  le  samedi  et  les  autres  jours 

»  Ilem  cum  dicli  Judei  es  aaliquata  consueludiae  sinl  solili  lapidari  aliquibus 
diebus  anni  a  meniis  vel  lurribus  civitatis,  maxime  per  ofûciales  iatendeales  dicla 
causa  ab  ipsis  pecuaiam  extorquarc,  quod  est  contra  omaem  humaaitalem,  quod  de 
celero  ipsi  Judei  nuUo  modo  lapidari  possint  ab  aliquibus  chrisliauis,  ollicialibus  vel 
aliis,  de  nocle  vel  de  die,  nisi  moderato  per  illos  qui  aaiiquilus  lacère  solili  erant,  et 
illis'horis  tanlummodo  quibus  lilaaie  Irauseimt  pi^r  Judaicbam  suam,  juxta  morem  cl 
lidein  Grecorum. 

»  On  ne  nous  donne  pas  le  texte  de  ce  dernier  para-raplie,  il  serait  intéressant  de 
le  connaître  [Misti  del  Senato,  Rey.  40-60,  1»  58  verso). 


208  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

de  leurs  fêtes:  ils  dressaient  des  gibets  sur  les  tombeaux  juifs, 
forçaient  les  Juifs  d'exécuter  les  condamnations  à  mort  et  les 
autres  peines  infligées  aux  malfaiteurs. . ,  *  ». 

Mustoxidi  aurait-il  tronqué  ce  document,  ou  le  Sénat  de  Venise 
aurait-il  accueilli  d'autres  plaintes  qui  ne  s'étaient  pas  encore  fait 
entendre  en  1332?  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  intéressant  de  noter 
cotte  coutume  de  la  lapidation,  qui  rappelle  singulièrement  celle 
qui  sévissait  à  Béziers  et  dont  se  rachetèrent  les  Juifs  en  1100, 

Nos  documents  (p.  329'  nous  ont  également  conservé  le  texte  de 
la  décision  prise  en  1429  par  le  Sénat  de  Venise,  pour  interdire 
aux  patrons  de  navire  de  prendre  à  bord  (pour  la  Palestine)  des 
Juifs  ou  leurs  marchandises  ,p.  329).  On  sait  qu'un  Juif  allemand 
de  Palestine  avait  obtenu  du  Sultan  le  tombeau  des  Rois,  qui  jus- 
que-là était  dans  le  monastère  des  Frères-Mineurs.  Là-dessus  le 
pape  Martin  V  lança  une  bulle  qui  défendait,  sous  peine  d'excom- 
munication, aux  patrons  de  navire  de  prendre  à  bord  des  Juifs  ou 
leurs  marchandises  pour  ces  lieux.  Un  moine,  gardien  du  couvent 
des  Franciscains  du  Mont-Sion,  vint  soumettre  la  bulle  au  Sénat, 
qui  fit  écrire  à  tous  ses  officiers  de  tenir  la  main  à  l'exécution  de 
cette  interdiction,  à  l'aide  de  peines  pécuniaires.  Ces  ordres  furent 
envoyés  le  4  juin  1429  à  Corfou,  Modon,  Coron,  en  Crète,  à  La 
Ganée,  Rethimo  et  Nègrepont  -. 

Israël  Lévi. 


»  Revue,  t.  XXUl,  p.  65. 

*  Od  trouvera  des  détails  sur  celte  affaire  dans  M.  Lattes,  Di  un  divieto  fatto  dalle 
republica  Veneta  ai  pelegrini  ehyei  di  Falestina,  Ârc/iivio  Veneto,  t.  V,  \''  partie.  Cf. 
Monatischrift,  XXII,  •282;  Graelz,  VIII,  4  48.  —  Il  est  curieux  que  nos  documents 
n'aient  conservé  aucune  trace  d'une  hisloire  contée  tout  au  lonjr  dans  'E))r,viy.à  àvÉxoo-a 
de  N.  Sathas,  Athènes,  1867,  p.  xsvi  et  suiv.  En  1403.  une  conspiration  lut  ourdie 
par  Silios  Blastos  contre  la  domination  vénitienne  en  Crète;  mais  elle  fut  dénoncée 
au  Conseil  des  X  par  un  prêtre  et  un  Juif,  nommé  David  lils  d'Elie  Mauro^ronato.  En 
1462,  nouvelle  conspiration  dirigée  par  Jean  Gavala,  et  dénoncée  par  les  mêmes 
personnages.  Le  conseil  des  X,  en  récompense  des  services  rendus  j^ar  Maurogonalo, 
lui  vola  un  certain  nombre  d'avauta''es. 


UNE  LETTRE  D'âBRâHàM  HA.-YAKHINI 
A  NATHAN  GAZATI 


Pendant  son  séjour  en  Italie,  le  savant  libraire  R.-N.  Rabbi- 
nowitz  acquit,  en  1887,  une  collection  de  lettres  et  autres  docu- 
ments relatifs  au  Pseudo-Messie  Sabbataï  Cevi.  Cette  collection, 
que  j'ai  achetée,  contient  les  pièces  suivantes  : 

1»  Le  récit  de  Barukh  d'Arezzo,  intitulé  bNT>::^  -^-ab  iinDT  (voir 
Graetz,  Geschichte  d.  Juden,  X,  notes,  p.  xxvi),  en  deux  exem- 
plaires; l'opuscule  mi»  ^3i:  des  frères  Francis  (imprimé  dans  le 
T»  by  y^2^'p,  I,  101)  et  d'autres  documents  encore. 

2°  Quelques  autographes,  tels  que  la  lettre  du  collège  Kélér 
Tora  d'Amsterdam  à  Sabbataï  Cevi,  signée,  entre  autres,  par  Ben- 
jamin Moussatia  (imprimée  dans  le  -ini:  baiD  nj:-'2C  mirp  de  Sas- 
portas,  Amsterdam,  25  &;  la  renonciation  de  Nathan  écrite  sous 
la  pression  du  collège  rabbinique  de  Venise  (imprimée  dans 
r;^ma  i'i'::yn  et  mN^pn  n-.m)  ;  une  lettre  d'A.-M.  Kordozo  de  l'an- 
née 1614  (reproduite  dans  le  bms  n^^i:  complet  que  je  possède 
en  ms.),  etc.,  etc. 

3'^  Copies  de  lettres  relatives  à  Sabbataï  Cevi,  dont  la  plus 
importante  est  la  lettre  d'Abraham  ha-Yakhini  à  Nathan,  que  je 
publie  plus  loin.  Abraham,  savant  prédicateur  de  Constantinople, 
fit  une  propagande  active  en  faveur  de  Sabbataï  Cevi  (voir  Sas- 
portas,  l.  c,  12«),  et  Nathan  fut  un  de  ses  principaux  collabora- 
teurs. Il  est  intéressant  de  savoir  dans  quels  termes  ils  parlent 
entre  eux  de  leur  Messie. 

Cette  lettre  nous  fait  connaître  un  épisode  galant  de  la  vie  de 
Sabbataï  Cevi  ainsi  que  d'autres  détails  qui  étaient  ignorés  jus- 
qu'à présent.  Elle  ne  donne  ni  date,  ni  nom  de  destinataire,  mais 
il  ressort  de  son  contenu  (§  9)  qu'elle  a  été  écrite  vers  1673  et 
adressée  à  Nathan. (§  1),  pour  lui  recommander  un  certain  Elie,  de 
la  Pologne  (§  13  et  14),  qui  se  rendait  à  Sofia,  où  résidait  alors 
Nathan.  Quelques  passages  de  cette  lettre,  qui  ont  une  teinte 
T.  XXVI,  no  32.  u 


210  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mystique,  sont  assez  obscurs;  j'essaierai  de  les  expliquer  dans  des 
notes.  Je  donnerai  également  quelques  éclaircissements,  à  l'aide 
de  documents  imprimés  ou  manuscrits,  sur  les  personnes  et  les 
événements  dont  Abraham  fait  mention. 
Voici  la  lettre  : 

;m;3N":;r!  nrinrm  m^rr-  Vd  ^r^i"^  ,(2'n:"-^r;  ^l1•^^<r;•^  ^•^nvi'r: 
"ipn73  ,n'::T:;7:i  p":;'rr:r;  n"N"'V'^-  "m  ri^Virm  r"rri::;r!  '"ly  b"5?3 
ï">Ty^r!  mN-"-  mcTs  ,n:n~n  mrrîpn  rwj-^i-'  mc-rr-i  p-ipn72rir! 
,(?)r-n:-iD  b=i  mTi::<r!   n::r-':r:    m-;D   ^-ncn    r-n-i-an    (?  5-,vir:;ri) 

ï-n-'pîN-  rT'73-';sr!  mbrc-r:  nn— :  /  r:;-,::  cvnn  rr'rr)  n^s-',  ■'^bx 
î^bbD  -TirD-v::  ^-l-lP  p-c::  ,r-,-i:nD  "jn  r^s-^j^  û-'pbN  rrr^wx::  rnrz 
im-i  bpCTo  ,m;:p_72  m  ';i7:-iw\"i  n-'^n  nsd  ■^;d  T"nN7:^  r^xr^r  N3pn:i 
r-nD'CDn73-  r;Nb;-'  -w\?;'7p  :=:-n-;  (?  t^nn)  r;T-i3  r-trm  niz'zn  mn 
bsn  nnbi-  r:rNn  Nb  ^y  "irT^N",::  bis:;  pn-?:  .ni;:;-  bx  n-'"'N"om 
t>:b3  b'^'^y  ti^r^br-  'cn^wn  mire-  "w^îj  ,  j— n;ir-in"i  nb^-^nr: 
î-în722m  vip-n  tz^^n-  n-]:-iN3  -p-^io  t-T'"wD:?3  mnN-  Nr-;3  -n 
r-nrin373n  h^D  tiD/û:  Tr^a  ûm^j  -^tî^  n::"c»  ,rTi;ir::r:  bsn  xsb:? 
-ip-^  Sdi  mmj^r:  brn  m-ib  yisi  m:»  br3  ï^t'7:-';-:-i  r-irrstnr; 
ï-;ib  nr-'-nn  -r'::p  sriTr:  nnï^a  ,ï-n;-^r»m  ïm-ir;;ri  brn  -i:"^;'  r;pN-i 
r-îNbDïn  in-ûCD  t^"^-  nnx  i"ii:"i"'b  rrn  ï~in2  l-'i«b^:?  ';-'7:di3  r-nap 
-irtiTT  NbsiTû  "nïî  bD3  innm  l^b:?  -ip-3  -insiTa  -iTrw  .mian  "["^n  nn 
Nb  û3>  bi'  nnxn  ^2:2  -cns-»  nii:  :i-i'>:;d  nr-i:»  noi-pn  nr7:'w:  -.-^nT?: 
V>:î"'"ip  r^'^''^^  )^^'2-^  Nim  anbon  rris  û"'pTw:?  ri?:::b  t^jbpT^  ,n-;i3 
-no  û-'-onp  -no  nonnn  ti:^  tdt'3  ^-'^  ">::np7j  ,r-n;-i5n  -in^v  sm-iTn73r! 
--r:-:-  in-nn  bnp  rtii-'b:»:!  ^tin  y-ûCTo  .mr.sbr  r:7:o  bano  m-irtij 
,e<"':o"in3  pp'":r7o    1^^121   'j-'-im  V^'T^    Ni:'-i"'b  t*«î"w\Ni    N::n    t]">bn7o 

"•-in  lo-'n  "^b  N-m  t-»::-':^  N-in;-  "jn^  h:N  'n  -i3i  Ti-'n  1n2  irnb 
•jnr-i  bo  ï-<3n  irbx  ribso:  -^o  "iro?:b  r-îNir-i  V'^  l^i"'  "'^^  '"'^ 
r-nobn  a"'m7jr;  n;  "i-,t'  ';^;^-l^:n■l  1^!^-n•:;:  brn  ]r.t,-\  'j;"2C  ir-'^ 
■«niN  m-)?:  -^lisn  bo  -,po73  .  ï— nnsr  ■'rni  r- ii;7:bN  iiûdct:  ^''^i-pa 
!-!:'Tw^2  r-is-^':  r^:n7:N3  i:n7:i  iwxc-j  ^\sib^-:  -^rn^xn  t=-o  (^-'ïnNi 
t-'pbN"  "'^■'^^  ">r"npn  nrn-i  !-i72ip  -nj^-ian  ^Tcn  riTcrna  b2bî7û 
■i2-'o-^-n73  ^■'innb  irn7:b73  nrpp'^'^'^  irccîb  ï-im^To  "ins  — ',cn 
îZiV-*^"  'ir7:=n3  "imrT::^  inannpn  —ri-::  2b  -,;33b7:  i:2:7:n73 
K-n:  nnN  -lanb  -n;*  r|-'onN  !-t72t  n^bsiTon  inv::-3  (?  rr^p'^Nri) 
.^■^•w-rnr;  -^-.^t   -no  Y-"'^"'  ^"'  ^"'pbNr;  •w\n  -w-np"  irn-i  rirN 

'  Allusion  au /SV/e>'  Yeciia,  IV,  12. 


UNE  LETTRE  D'ABRAHAM  HA-YAKHIM  A  NATHAN  GAZATI  211 

^"1^-72  i;pi-in3  TwN  an:?!:?:-  rz-^nr:  n-'Y?"'  nn-i-j  a-iio  rn^o 
mttv::-!  m;rT3  r^ib^;  r]-^::  q-^-j  co-jna  d^-:>  dwS  nb^^n-'T  ■•pbi*- 
ï=7:t    !i<-'p^    cmnx    n^nnp    n-i^Tj   i-D"«DD    i::'b3   b^srn  dinwt  ->ro 

•^nn   Sn    nrb-^    r-.sirjr;    tsipT^bi   niïmp    n-i    a-i:?):    -^d    tsmwS^i:?: 

.mr;n  tzîrsb 
TnN  Trx  nb^n  zixnD  rns  ■'r?:ca  -^d   r-rJ^"-!-  'CM-pr,  irnnbi   .3 
"rpiTûD  ■^mKj::'  n72Nn  rtsr;  nn-iN^^r;  D-^nwr;  û-'c;î<-  nbwS  sn"i7:i:r  br 

n3>i3  -^nbi  ^i=:-':Dbi  ti^xn  v^  ysp^ai  ^bn::  ^:nt  csbir-  it:  ûrr^-'n 
■^îD-3  SnN  nb-^bn  V'n  nnbN  -rij^ro  ■'jTJî3  t^bn  a-'^j-r:  ab  ir  -Cîîn 
■0^5  ric-in  M  n;:  !-t-i7:t  î-rbnna  ï-Tp;>i:  p:'::NT  ^b  -r^n-  bN-;^^  br 
r-inn  ■'3273  tîî-"'  -^d  clts  ■'ct  tri-'n-i^ûi  fDin  "ir^n  sV'**" 
ly  x^  i;->;TiN  mT  p  V'"^  "^  '"'^"'  "''"'"î^i  i=:'':'«^b-2r;n  tî-^-iorcr: 
tzinrobn  cn   f<::n    cnxTD    r-in^^n;-!    !-î.s2    r-7;r;   !m-nc72-   in-r^c 

^573  "int<  nsn-i  in-'ni:  ts-'-yi^nn-'-i  a-'mnT  ti:-'"wi;n-:  ^^^r  'j''?:'^  p 
rc-isbT  nn  Y-'-"  i-''2^~i<  ~wS  S-^nn-b  gt-^  r-îrb;n  S.sTw-^ 
T^n-^iN  "^r)  h::?  a-^n3Nj  -^^r  S=i  y-,N  "'i^p  tn  inbnrn  nsno-T: 
n:3T:*"^    e*^b  i-317:n    V-^^  '^    '-^^   ^^'^   ''"'^"^   "'^  imrv-   av.'^o 

.ïn2i7:b  û-b  nain  'r.-n  ûV2 
i;"';TrN'  rn-nm  (nm-ivj)  mnrj  b:^  n:Nn-3n  n;i:i  si:^*n  no  ^-^v^!3^.  .4 
rrbwS  rii'TT'  D"'-in?2D  b-'bn  din^c  rrsn  -ibr;  'r,  ■^^■'ik  vn-'is  ns-'-î-i  rrn 
bipi  r^p-i-^i  -im:3r!  ni-  -^d  bNTw"'  "Ctip  ir-mp  m-ii  br  ûi-in-" 
y"i7:3  mob  *n5i»nri  V-"'^  '"'^  ''"^^  ^'"^'^  "':ii*7û">::  rr^nî?  N-ip-'T  r;pr-j: 
(•?07:'^)  û:*  û"0  Tio^  -^în  ■^n"'w\s-i3  •in-'b:'  n-'banb  "-^n-iny  rr'nDî  as 
'nrb73  5 bN-i •>::■'  -n::'  t-i't'z-^iz  pp  n-'^o^N  a">r73T  ^bN:?7ûC'^  p:. 
■tt^'t;  "«b"»::  "'72;'  nnpa  ""^nnTjo  ai"'  l''72by  '^Tcbyb  bnnnn  Nb  ■>- 
^-nna  a^bnwx:;  in3:>^  t^^^nn  y:'  ^  "cm  1pn7o  ^nnb  S^:;-^  ''b^s 
■CN1  n3\Nn  -^n  ♦bNi"::"^  nrr»  n^i^n  nns'^  ''0.  "i^sï^  ■';n73n3)  "laoï^ 
asN  arT3   ''^isn^b  aip   a;nT   mn    innb   Ni^  a  a  in 73   (?">:;Nr;3i 

»  Allusion  à  j/e«flAo^  09  «  :  rfi^?:  Hci^D  rbr::  b-'s  ■^■:n  "3  ■^7;"i  "^rn 
vin  rr^a  "^-in  rîN"'pn"i« 

*  Nathan  fut  excommunié  à  Conslanliuople  [cf.  "^n:»:  ^^"i^  Pli"^jl,  *?d.  Amster- 
dam, 45].  Comme  Abraham  ne  voulait  ni  approuver  cette  excommunication,  ni  se 
déclarer  partisan  de  Nathan,  il  allait  et  venait  pendant  la  cérémonie  de  l'excommu- 
nication. Cf.  Menokot,  mb  :  a'^icbi  ri^Nn  )')2  "iiSN  n"'2ri  173  Tn;ri  bnN- 

*  Voir  mXDpn  nilP,  2a,    Nathan    s'appelait  autsi    y73"'D3  ;  de    là,    PN    llPa 

*  Les  lettres  de  ces  mots  valent  814,  comme  les  lettres  du  nom  de  "^SiC  "^PD"^. 
'  Les  lettres  de  ces  mots  valent  815,  comme  les  lettres  de  ^2it  ^NP3w. 

*  Allusion  à  Bcreschit  rabha.  ch.  xliv  :  pn72i:.*  "^PiaT  . .  .a'"lJD  'y'-'^  "iCJ'^'vlîa? 


212  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

*3n    3-1:?   t^N    D-i''3Ni   n-nirn   niiin   annb  >im    "^j^d»   c:nn 

n\n   s-^:    nVi    a-^:    -^sn  s-^nai-    nbwS    iriT-n  '«liTipr;  nrn-i    .5 
T'"ip7:T  nr:i";N  r;"::^::^    pisn-'i    "sb   mz'C   -j""'pn    -,cc::    msa   cbiD 

■^n?:  ■^D»  f  :t»::n"i  û"'7:'«b  hrnm-iïb  ^i^r;'a  m^'d  ïioy  cpbNrr  ""D 
Tbïbïb  nD  "jnnnD  ûnb  "jm;  r;"npr;  mo  mn?:  «ni:  no  rî:' 
■^D-nn  :-::-  r-nnn  n-n  mb^cinm  ,"^n^7:N!-i  n-i'CTob  lEnnbn 
irn-i    i^Db    r-m;Ni    mr:2n    r-n.x-ir:b     \-ind    t-<bi    •^z^'^yn    ::":;Dr; 

i-in-no  î><-'m3-',rm  ï-rbnar:  •::T^p^^  irmb  -,e5n  ï-!-:"i  ••; 
rTomwSTon  mjî'ir!  ûr  D"':T'brr;  T^np-r  ']-i-;  i;i:itn  ïrcro  p^-d  ■i:-i-'i'3 
£2mpD  nn-^s  rir-irr  nNT  ts-'b^yro-^r!  ns-'Lîi'n  r!E^::ym  mr  ib  ion 
Y'y  "^rwon  -^rrr:  "^.n  Ti-'irn  r^mm  ir^an  r^bi  i^'T'  xb  -^d  !-f3-,7:b 
•'D  i-tb-'bn  nb-^bn  i"n  ï=;"'N-n:rî  T^oy-j  ^r  Nb  nin  r>:b2:r;  lip-rir: 
■i"nD  'r:  o-jp?:^  bbi^Tw^T  -^"1:3  inba  nn^iWN  '—.jtnri  ■'rr^i  -i7:n  Nin 
on-p  nriiiN  tsynn  -::b  -^abn  \-i-i-:n  b^x  :?-!V  i:inN  n^rx^  t'T' 
s-iN  nncrs  lionp  nnNT  Szsbnj'  iin  ï*<^r:  i-î.Nbcïrr  '^n;-i72N?3  bjîTji 
Nb  ^nDiiT  ■^-im  a:'  ■'3  'OTi'pTi  ira-i  ■'-.;♦:£  r<!ir;  n-  r^-^mnK  anb 
r-i:ia;  r-tmcm  i^is:  ^v^  'c^'n-p  ne  t^d73  r:30Na  ^;•  ■'n:?n  "nprr» 
■^"j?  i:7:n3  n-«07ar;  ^:i7:n3  bN-ic-^  nbo^i  Nbo  T"-2-pT,  oin-i  Nb  r;7ab 
r-i7:N3  T^Oi'»  ^rio  un  "^3  ^t  -inx  -7  î-i-.inr-:  it.  cs-in-ii;  a'^Oi*?^ 
hrx-iw"'  r-inbb^  ^piops  "^ba  rii<b"i::>  Nn'':Dm  ■'^^■'pnb  "j-iIut:  r-îinrNT 
tzir^n  tz^-^yiv  srN  ano   r:;:3  r,"2'pr>   tb-'or-'  r:7:b  n-^rn^a  turso 

bN-io-'  omp  ws-n;n  '  r;Tn:N  -^3  tz^p^Nn  o^s  irn-Nb  rin  .7 
5>32:wN3  '•'DN  T^  tibco  "^nb  Sr  r-ibr-'  ><b  -^3  V-"~  iniX3  -^b  nbo 
nmn  Sy  ip;i?2N  -ribNn  i'^CD  t;5T  ^îd-iin^û"  ï-n^:-  bo  !-i;:2p 
r-:r"i30  -ibsT  pDD  ibn  imiN  ■^nn-r  hî3i  rnonb  i:t^-i  i-fn  '^^o 
sn-iwX'o  Nim  —.37  13  mb-^-:;  ir  rrin  ï-nr:-  PwSj:-::  t=v:->r;  r::ipbT 
"'ZDS  ib-^r;  ns  ^.pobp  ".i:  ^d  r>î-,i:  Nbi:  no;»  tz-'pbsr:  "^3  nbo 
ai-iNn  û5  m-i  t:"i^7û  npiN  ^-!wN-,-i  ba  ■^33  £3331»  o?:?:  'nNn  T3N 
\-iOTiN  npib   -^rTîN   !-ï-ûb    1:7:7:    î-rnpb'w    mi'3    ■lr:^^i<b  ^.TjH  'xr; 

*  Voyez  la  uole  -i   de  la  paj^e  précédeule. 

«  On   lit  dans   le   •  Livre    de    Zeroubabel  •     [Bel    ha-Alidrasch,    II,    56)  :  mTûyT 

T'bN  iNi:">i  ...-'bN  n7:N"^i  ..."';7:7:  bNO  b33TiT  nwN-'T  1^^^  ';Tn::a» 
13  •ia'^3"'i  ...n-'OT:  Nin  ■':n  bwX-'T:^'  p  -iton-'  nnbi  b^nc*^  "'7:3n  bD 
...1P1M  n-'T3    npNO    17:3    ir:i73ii    D''?:3nrT.  Cf.    b3i:  Pir-'ii:  mifp 

■^212,  éd.  Amsterdam,  11  b.  Je  ne  connais  pas  le  nom  de  TITi'  "^""lî:  comme  désignation 
du  Mitatron;   il  dérive  peut-être  du  nom  de  bN'^'SIT:  (Yalkout  Reub('ni,  éd.  Ams- 
terdam, 27  a).  Ailleurs  [Hékhalot,  ch.  xxvi)  ce  nom  de  Mitatron  s'écrit  ^N'^IS"!?:. 
'  C'est  sous  ce  nom  que  Sabbalaï  Cevi  est  souvent  désigné  par  ses  partisans.  Le 

mot  !TT'73N  est  une  abréviation  de  ^1^T^  ûlT^  i:3b7:  i;:nN. 


UNE  LETTRE  D'ABRAHAM  HA-YAKHINI  A  NATHAN  GAZATI  213 

bnan?^  vod:^!  iiONin  oi-iNr:  p  nwNa  pr;  r^3^n  ^^^n  riïJaDri  tn 
"^r)!  m-^bN:>;jc-'r!  riNTr:  riToiNn  bD  -^23  nmiN  p  t^mc  t3'03 
Qw3  nb-T!  riT  ''^lipic  î»<-n;rî  t«<bDrf  r:T  t-i7DbT  -,72 nb  t-'mDn;^ 
n-i  !-T3  nbu:  i^b  ir-i^inNi  r-io-nN^ri  Ti-'^y^T,  ]-!2  n:3  Kiri'j  irîiiN 
nrîTiN  r-i;i72N  -«pb^^  T'C:??^  iNboî  (i.  nsnT^xail  î-iditonst  mT^xn 
n;in-i  nbn  û'^'::-'  n7:i<  bx  î*^;n  -idt  mpn  f'pbx  -nnD  bn^  i"'rD:?3 
So-2  i-^nnb  -im  ■'i:n  in  "ai   ijb  "vI^-id-io   ts^bnns    tziron-i   o^^pr^ 

ï-IjKNS  y-i^  —.ly-  ni:?:  n::'-!b  û^pbwN-  c^x  ir^mx  ?-ti:i-i  dn  .8 
!-n-'3:?  r-nm:;  i-tn"in;n  r;-  nx  Sdin  ht  rrbTi:;  s*<"imn-i;*3  N'^n  -"d 
t::n  m^o:D  ■^rnn  D-^n-i  D'^»"'  -t  ■'"DGn  'n  'n  a-^-in-b  ib-^nnri  un 
!-i3-in  iN-'i:!?:!  riT  rnx  nt  ij-^'^Db-  -^d  ï-i-ipw  tsnb  r;-ipT  ma  xb 
tp^\^  iMzi^  ^n^D  ■>":?  ^:"|;^n^{  s-in  t«:)-i50  ii^n  S:ib5  û-iiab  tzii-rss 
•:pOD  -^D  Ssbri  Mt  bDT  &n:?u;-i3  1313-1  "713133  mps  ^d  Ssbsrs 
£]iDn:?3n  "[in  bn:i  np-ibn?:  bD2  n^tti  ûmi-iTDNs  mpiirn  b^  nr  -inx 
1D1N3  tnii^'i  31  Si3b3  -|irr;  !r-5b3b3n:i  n-  ar  ht  &i-!DiDr7 
113  N"D  miinN  i\x"i  ^ï^^^  V^^  apc-  11N  mbu:  iwi  jznbïj  i^ws-^ 
t3ri3  !-t3r!N  ûr;3  tib-::  3b3  n72N3  î:3i-i7:N2rr  nsiiiiN  '— nn  i;i«n?d 
DrNi  nuTa  niû^  ûTi  nnirpc  a:?  nibiis  ûiT^n-n  m:'*i-n  -inN  -nni 
p^::   r-;-i72   Nn^i    î-,ij«3i:    '1-1    pni   ^y    t3m»-«b\:;  niNirnb   tL^biai 

.V:ni  ittwS  T713  lï-iDiiN  3ia  b:3i  nbi:73 
t:X]nn-:r;  'nr;  ib  -idiO'J  J-i»  lyb  n-ini  onp!-:  i2i3-ib  -idoni  .0 
^.TjNi-i  "iipor  b:'  ibisibN57û  ûvrî  N3  i"-id  Snts?^  'r;-i3î<  '-ir;7:3) 
nbo  V'-i3  v>:;n-ip  ^5^^173  t3n-i3N  '-in7:D  tabon  'n-  1:2  ^b 
DiTJ3ip-  innD  ib—ibwxsb  nib">:;rî  n33i  .  .  .  -pj'td  n3i3nwNb  oi-!-j3ip 
ï^ibo  'm  bN-i"::-'  "Ci-p  r3;r3  ^d  3mD  r',ibbD3T  ûï3  ncN  tiT^Dnrr 
iTbi5  i"bn-  t-i3'0  "CNi  bo  £217:1  n::p^  ay  ybn-  r-i3C7:  ";i3i" 
."-îi-  Nb  12  ipriT:  ^N3b  ûo  ii^Nm  ^n  ^2  i3irb  ■1313TÎN  rni72i< 
1313-1  ■'2  !-i"-ii  i3i:-nNb  3m2  i3  t;:;T  p"3b  ï-i3"C3  r-nb:irib  -i-iîcn 
ni-i3T  PN"  aiipi  p"iom  piDpn  ipî<i333  -jiwX  ?-i":î<  N133  Nin  lainprr 
■ipri-îi  rnNT  rr:  ip-i2r:  Nb  b3i<  ,')-:nt  V-N  3inp3  i3i;T7î<  nbspi  12 
■— ,7:.x  -j2  12  i-i:r>:;LN-i32  yj2'C  bip  p3  IwX  -c-ir^iz   r-rvcrib  -2t  CwS  in 

.'n  -,-:w\i  p  )i2i<  ninio  riT:  nini 
oiiL2;-ipr;  piprN\r  ï-i::"i-n  ■cmpr;  1313-1  3P2  ipb3p  ^321  .10 
"iï:i2r!  r:TC  ib  p^-jtp-o  n:i3i3  13N  p7:n  ^j<3i  i-i7:nx]3  ip-no  -iCwX 
':;T;pr!  1313-1  -11321  Sisbi::*-  iiT^y  ni32  by  :2y:yi  iMir:  mi:a  13N  ^2 
S211  17J  12  t=ii'ayj2-iz  luyin  t=ii03  bD::3  131^1  -i3nb  b2iwS  xb  nini 
CLipbNn  oiwX  1313-1  ib  bin»ii  ni-ionn  ibx  bo  n32rî  ti:3iiT3  bi3ob 
i33r;i  ai7:M-ir:  3N  t2in-i7:r!  Drni  iy  b-i37o  3br;i  353  iibp  b2r:  12 
i23w\  tipbNH   -ciN   cnp-  1313-1  niTobp  12  172X3  3b3  in-i"::b  piT?: 

.''w13N   Nbl    Di2b72    "153    "^b^   101331    !-n31N1 

Sni7:o    n"-ir!i732  fcinr;   ipi:^*i  is-'o  tsban   'nb   3-1   ûibo    .11 


214  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

tvj")  "-22   ztr-.'::  ipbn  -,w\s  r-.^n^ziab  ir-;i'r:--b  xb   t2"«pbsr;  'c\s 

ï-tDnb/û  bNTw-i  by  r;"wr-«  ni-  b^x  't;?  n"OT  "j-in-ir!  "ja  ^<r:-  '-,d 
hi)  r;?jD  "j-io^n  l^D-'bp  M!>:d  :n-irT^T  ^iD-'pb  E--:r:n  m  "^^r::"^  ir^ 
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bNi^w  riOT"  by-ï  ';-'Nb''3'-  'j-'Nb-^:?  'j-'-'n  -m  111m  'j'^^n  ï»<biD  b:?  pb-^^ 
c^nb»  nn-»  "<"iï5  (i.  t««îbr:  — .7:^1  -"s)  r^bi<  ■'a  î»-!--p  i:n  ■fvam 
riba;  -lai  i:?->  ndi  >^/2n-m  •p:2^yb  Cnrao  t2'';-«r;:r  ('n  '■>  rr^rw"') 
ï-î-a    -^m  imm  TwD:a  pain   ï-7:?'ir;  pn  bsb:;  Nir;   ï-i:?-)   na-   -i^-ici 

.rîaiPD  û-i-ipo  ?-ib57:a  nirn 
r-;br;wS  tz-^pb^n  •w"'N  C"np-  irai  ■'îDb  "jrnp-:  ■^p.sa  itpr  .13 
--nana-:;  -^-n  Db-^rn  'nn  c^sr;  phin  b::*  rian  -ansn  riprcna  r:D 
ï^-^-paN  -^irz  nb"i-:.  a-T  în-iLira  iDi;2"a  — :pdi72  rcaba  -iTnm 
im-îPO  ima^-i"-  r-rn-073  î-^-iinbiD  y-iN  ■^b-n:i72  a"'T'aN  CLi:a-i  û"'sab 
r-iT»  ■^ai  loin-»  b:?  tn-'T^:'/:!  irribN  'n  an-  Swa  r-i"iJ<DPbT  -jiaab 
û-^-nasr;  Tfcr,  û-^ia-.r!  r-ibNn  ni-  b"7  ■'"wi  b'-r-n  ira-i  bc  -,-'p-i:a 
b^Tw-i  baa  in-^a  -^7:1  "jna  rrz^r,:  .'-î-npno  p-,-!73  ■'•c:î<  ûbn:?»  "i"c;wS 
IIP»  r-î-jp^T  r]-'-n  id  —, a-^;  npnicxjn  ^aia  b:^  Si:;  pa-n7o  "«i«m 
Nb^-'r;  "3372  l1"'730  nt^  '  V'-^mya  irstiaD  ■^pi:p72t  \x-ipa  nrr'N  p-'OTDi 
qi:::?  r-i-^pbxr;  r;7:an-  r-.:i::Na  "^i-.a  r-ri:-,7:N  cw  t-^cip  N^rTCT 
n-T>N7:-  im-N  pn7:x  r:n\s"^  laT  r;"a  n-nca  ni7:rb  rra'-'i  n-'-a 
■'-,Nn  wTTpr;  ira-  î:^'  a"aip  'jT'brr:  ''-r'r:ia  ^«^-,-,:  cibn  abm 
nb:;--'  n-.-T:  'p-^7:wN-  rrc^z  r.-ziia  t^.D-^na  ■i;7373  ^t^t  r,"y  ^^-:<T-, 
-ppan.N  zb-,r  ï-ar:i\n  Pinp-^  ï-mi72n  Pibiba  lac  laiNa  ';7:i<i  i-^x 
a-^ra-n  n--p^r;--"i  -:i7:i<r:  -nx  ao  la  in"'")-  m^yr,  r;s  iNaai 
iP2i72Na  "tJzy  xirti  aa-ipa   ';\n   rrn  ba-    rn'iP  ""ti  ■'b"a  a'7:iT;r; 

.  n7:T;7:-  apbripb  "^n  sbn 
uPiirpo    ar  ribbir;72r:    riK-'DiDb   pabb    tzz    a-   am  r,:r,^    .14 
ab  br  lani  bx-ic-^   -nx  ■'•wi-pb  nrnpm   q-^-2*  -an  a"'7:-7a  r:bb-,;7a 
ipb7:n  iva  nr-i-'bN.  -i/'-in  br  n\vc-'   n-c-;-   pnx    r<in  bTT:.r;  — N-;r: 

•   Midrascli  nnaTN  n bi<  {Bot  ha-Mùlriuch,  11,  GS). 
»  Hèkhalot  rahbati  [ilid.,  111,  88). 

3  Imité  de  N"nr;;-  Nj'iXia  [Sanhédrin,  \',a).  Par  le  mol  de  'jnm72,  Abraham  fait 
peut-être  allusion  a  Nathan. 


UNE  LETTRE  D'ABRAHAM  IlA-YAKHINl  A  NATHAN  GAZAT!  215 

ib  b7ûi5  ^7:y  ^D  inb.sc  r:-\s  "ib  t<:b7:^n  in^::bn  ^iwX  mny  ■jz'îûb 
iru-i  nb  ^p::r  bLs  ^n-pp-=  ^^r:^z^  vrr-N  cbn?  r-r^s  -^d  mon 
r-wii'nc-'  ir::-i  D^  snvpbiîr:  ^^-n■i7û  ■'s  br  r-;*:;"'^  p  ""^  'Ci-çr. 
n-^-i-'nwsn  rr^iibnD  -^îa-.îû  vi:3  n-'-iivo  cm^o  n733  ï7:"--'i  n^x-i-'n 
bob  nb  N-,n  n-^m  n^^ni::r!  ûbiy  ■«■^nb  û-idt  û^pbx  ^r^b;:  r!;--i 
br  n^v.-û  r.conn  ~b  n^rr  ^-nn:?3  D5i  ar!^Dn:a  bs  b--^5  -ion  n^vj 
o-npr:  v.^^n  u^bon  Nin  cioi^  map:>::  nnx  ('?)  qor  ^3N  ^d  -pyr. 
rcDi-jH    nb^En    ^nb^cnb   ûo    ^:n    Nmpn    û-^^'O    û'cb  ^mr:;^   bsi 

.V^i*"!  IT^N  w-i-pn  irni-ib  nfov  ûibo 
£=r;n  û^7:^2  !-Tn-''7cN  n^7:rNa  n^-'"'"  "^  ^''~  ^V'^  ^^  •''■' 
-,"-,n  --n  p^iirî  n-n  qis  -iït  --nh?:  V':p  m:o  Se  2-=)-n=>:n 
i^m;D73  in:i72J<  ^o;n  n-ann  mbn73  hj->:rwx::  f-  V'n2  in-rN 
mpn  tnmcnn  rx  n-i^'72  n-m  rT'-i^  ir;i-N  nx  r-ncn  v-:;rn 
tsn^n  nn^2  aa  ^d  S-bj-  yn^v  bx  (b^)  '-  n-=  ir.-hv  m-7:"i  ^nt:;- 
nso-  TCND  -i^:>T  n^i>  bon  !-!:i72Nn  n-wX72T  nancn-  tn  -i-n>"73  r-r- 
£i;^D-nn7:n  tD^72^3  ■îw\7:  -N7J  i:2r;ï«  ir;nwSi  ^-i^b  ns  on-pn  nrzn? 
rm::-on  Sd  n-^D  f-^sn  'zo  -b-  V^D^n  ^;n7:  >ii;^  rn:m  ;=r:r7 
rionnx  r--^n-   n=  nb  c->  -^3  r^ona  nb  r.n-i  -wV2i02  ûc   imnsD-c? 

-mis:;    S  NI  73  c    '-n73D  V'^*"  n">^'"P    f^"'^""^  -""•   ^"^'^'^    "''^  „ 

^3   ,3    ^^5    Pjç    û^3cr2n  a--i2-3    r-îT^rùb   m-psb    n-^p373    ip^3 
s^bij^b   1730    'n^    oTip    3b    ri:n30^    Sn    v:d    rrbnN    ^:2    rnr^n 

r-^  poi:  onp-  ir^n  on-p  --t  Si::  bN  r:nnro73    N3  -:ni 
rrb^^   i2np   £=73ii^  ib-  ûnn^  i--î  n-T-i  niN  n^N"^  mo  5N   t-î:r:N 
iNn-  i3nb^   ^.3>'   n^3^iNi   nnno-  vbx    Snto^    Sd    -^r^*?    irr-N 
n-n  -'1  n^:-.  c:no33  -,3ro^  ^<"^  r^ripn   ûnb   sn-nr  ^bi  to-d-i 
,_    „^^-  ,.....^,  ^s,-,   î^''3  ^rhb  3:-.    r<b  n-^^n^    i=m  ibrN-  vi-t^^p 

.•i>:Ni  I7:i<  i^b-r^  !-T3^or,3 
1-i:-n-.  i:x   rr-^no;  y-ii  bx  ir;Tis  ro-bn  r-.nNnn  n^n  bn    -1'  _ 

3p:<n  -;3b  n7:o-^n  vj-;v  vsn^  r^i  n:o  rtr--i  't=:-J-in3  r"-^^" 
'nb  ï-in-m  t=2"^>3y  ^ro-i  qi-io-^  -nv7:r:  b.v  nr3  .  .3r::>  riov  ^o  vS 
N-J37:i  -nm  :;:>b3  mr:bm  -:mN  13^'  n\--73  -d  ■';73N1_  V-^^  no-r:;- 
Sso  ^315^  3-1  a^pmr;  t]pin"i  a^n^^'-  ?v^  ^°"'  -310^3  r:r-3  r-"* 
_,.,3,-;  5:::n-i3N  •^3N  n-:>]C   ■^:r-3  r-73  --t  ^m73  -^b  rnn  -=o   --3 

Dans  cette  lettre,   l'auteur,  après  avoir  accumulé  les  épithètes 

i  Dans  r:73ipr:  Tli'^O,  §  67.  Kordovcro  croit  que  le  C-Jim  ^073  répond  au  T 
du  tétragramme. 


216  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

les  plus  élogieuses  en  l'honneur  du  destinataire,  qu'il  dcjsigne  clai- 
rement par  le  nom  de  Nathan  (§  1),  dit  à  son  correspondant  qu'il 
a  été  profondément  allligé  et  violemment  irrité  des  outrages  dont 
lui,  Nathan,  a  été  victime  de  la  part  d'une  foule  méchante  et 
impie.  11  déplore  surtout  qu'on  ait  eu  l'audace  d'excommunier 
ce  Nathan  (§  2  et  3).  Apre?  ce  préambule  assez  long,  l'auteur 
parle  avec  admiration  du  Messie  (Sabbataï  Gevi)  et  des  vi- 
sions concernant  le  Messie  f§  4  et  5).  Puis,  il  raconte  que 
Sabbataï  a  enlevé  une  fiancée  et  refusé  de  la  rendre  à  son  fiancé, 
quoique  celui-ci  affirmât  qu'il  avait  déjà  eu  des  rapports  in- 
times avec  elle  et  exprimât  la  crainte  qu'elle  ne  fût  enceinte. 
Cette  jeune  fille,  que  Sabbataï  a  convertie  à  l'islamisme  nsiarm) 
ti''"rNr7:'j''r;  r',-:'^:^:'^),  a  mis  au  monde  un  fils  qui  ressemblait 
à  son  fiancé.  Il  était  donc  prouvé  par  là,  dit  Abraham,  que  le 
vrai  père  était  le  fiancé.  Du  reste,  Sabbataï  a  affirmé  par  serment 
à  Abraham  qu'il  n'avait  pas  touché  à  la  jeune  fille,  et  Abraham 
explique  le  rapt  commis  par  Sabbataï  comme  un  de  ces  actes  mys- 
tiques par  lesquels  le  Messie  essayait  de  réparer  les  bouleverse- 
ments produits  dans  les  régions  célestes  (Z''iv'-:y  t^rp-r).  Cet  en- 
fant, malgré  sa  ressemblance  avec  le  fiancé  de  sa  mère,  passe 
pourtant  pour  le  fils  de  Sabbataï  auprès  des  musulmans  (nrnN-  bD 
n'^bay^'C^-  rNTr:).  Abraham  ajoute  que  cet  épisode,  qui  eut  lieu  à 
Constantinople  en  1666,  causa  une  vive  surexcitation  parmi  les 
Juifs  de  cette  ville  et  produisit  de  nombreuses  défections  parmi  les 
partisans  de  Sabbataï.  Abraham  lui-même  s'en  étonne,  tout  en 
déclarant  qu'il  n"a  aucun  doute  sur  la  correction  de  la  conduite  de 
Sabbataï,  qui,  pour  lui,  est  le  vrai  Messie.  Mais  il  ne  peut  s'em- 
pêcher d'exprimer  sa  surprise  que  le  Messie  accomplisse  des  actes 
qui  égarent  la  foule  et  l'éloignent  de  lui.  Il  trouve  aussi  singulier 
que  l'enfant  fût  élevé  comme  fils  de  Sabbataï,  tout  en  ayant 
comme  père  l'ancien  fiancé  de  sa  mère.  Il  prie  donc  Nathan  de 
lui  donner  des  explications  sur  les  faits  et  gestes  du  vrai  Messie 
(§  6  et  7]. 

Abraham  ajoute  que  depuis  que  Nathan  a  été  excommunié  et 
expulsé  de  la  communauté,  la  discorde  sévit  parmi  tous  les  Juifs 
de  Constantinople,  excepté  parmi  les  partisans  de  Sabbataï  »?;  8  . 
Il  lui  raconte  ensuite  qu'Abraham  Mendal,  arrivé  de  Gallipoli,  lui 
a  rapporté  que  Mikhael  Kordozo,  de  ...  a  envoyé  à  Nathan  un 
opuscule  où  il  annonce  qu'avant  que  l'année  5434  (16'74)  soit 
écoulée,  tous  reconnaîtront  Sabbataï  comme  Messie  •  (§  9). 

'  Ce  fait  est  con6rmé   par    Sasportas.    On   lit,    en    effet,   au    commencement    de 
la  quatrième   partie  du   122:     'rm;     Pir-^li:,    ms.  :   bm3    nil-'S:    -,S073    'T    p'în 


UNE  LriïTIlE  D'ABHAIIAM  HA-YAKIliNI  A  NATilAN  GAZATI  217 

Après  s'être  excusé  de  n'avoir  pas  encore  traduit  (p\n:>î<o), 
faute  de  temps,  le  mémoire  qu'il  a  composé  par  ordre  de  son  ami 
(§  10),  il  adresse  ses  salutations  à  Samuel  Primo  (;^  11)  et  à  Aliron 
(^  12).  Il  parle  ensuite  avec  éloge  d'Elie,  de  Pologne,  porteur  de  sa 
lettre,  qu'il  recommande  chaleureusement  à  Nathan  (i^  13).  Cet 
Elie  était  déjà  un  partisan  dévoué  de  Sabbataï  Cevi,  lors  de  son 
séjour  à  Smyrne.  Plus  tard,  il  s'établit  dans  la  Galilée  supérieure, 
et  quand  il  fut  dénoncé  comme  adepte  du  pseudo-messie,  il  se  ré- 
fugia à  Sofia  (§  13-15).  Nulle  part  il  n'est  fait  mention  de  cet  Elie, 
qu'Abraham  désigne  comme  un  descendant  de  Raschi.  En  général, 
Sabbataï  Cevi  eut  de  nombreux  partisans  en  Pologne.  On  sait  que 
Tauteur  célèbre  du  nn"  "'-nij  envoya  son  fils  et  son  beau-fils  à 
Constantinople  pour  rendre  hommage  à  Sabbataï  *,  et  que  de 
nombreuses  communautés  polonaises  lui  députèrent  encore  des 
délégués  quand  il  avait  déjà  embrassé  l'islamisme  -.  Ce  furent 
les  Hassidim  et  les  Frankistes  qui  profitèrent  ensuite  de  l'agitation 
créée  en  Pologne  en  faveur  de  Sabbataï. 

Il  ressort  des  ij  11,  13  et  14  que  la  lettre  d'Abraham  à  Nathan 
fut  envoyée  à  Sofia  ^,  et  que  Samuel  Primo,  le  secrétaire  de  Sabba- 
taï Cevi,  se  réfugia  aussi  dans  cette  ville.  Les  partisans  compromis 
de  Sabbataï  paraissent,  du  reste,  s'être  plu  à  Sofia,  dont  les  Juifs, 
d'après  l'affirmation  d'Abraham,  s'étaient  déclarés  en  très  grande 
partie  en  faveur  du  pseudo-messie  (Tfiy  nnii).  Enfin,  le  §  16  parle 
d'un  Samuel  Gandor,  qu'Abraham  prie  d'écrire  de  temps  à  autre 
à  sa  femme,  qu'il  paraît  avoir  laissée  à  Constantinople.  Ce  Gandor 
accompagnait  d'habitude  Nathan  dans  ses  voyages;  il  s'était  éga- 
lement rendu  avec  lui  à  Sofia.  Baruk  raconte  (p.  14)  :  t::nd  ^rr-\ 
ni'T^n    Zi'^b   inx-^^  -.■^rn    ■'•:::w\    "ir^wwD   ,  "'biDn:'^'-i-;:Nb  ir:   'n   ni-ip- 

s-irc^c  ripn  b-n  s-'^p?:!  ,131:20"'  [rr^]  h:r  cnb  'j-'.su:  i\-nn:23m 
3rr)-  i-Ti  .  nbix:;-  DOiDnn  n-':^  bD  by  rrrcn  CN-in  i"br<- 
■':n  rc-2y  !-î:m  . . .  li'in  >^brî  :  lo^rô  t:"!"i::"w72N  i.sDb  nrso 
ï:;î<-,a  i"Dnr;  nrC2  .  V^'P"  ^^  ^'^^  xirr::  1-172  -c-iui^  l'^yo 
bniD  rii-^i:  ni'zy  Cf.  .  rnbiNr.r:  -b^nn  aib":;b  irrxipb  ^<3^:  nr-w- 
^Di:,  p.  -ri. 

*  Ce  fait  est  rapporté  dans  nN^pn  min  d'Emden,  éd.  Lemberg,  p.  14. 

*  Voici  ce  que  raconte  Baruk  d'Arezzo  (bXTw"^   ""^Db  lll^"!,  p.  08]  :  mb'^ripr; 

tiTiibo  rbN  inbc  ii-'r-nx  "nno  m -73  'j-'b-iin^o  mc-npn  irT^'c^i 
'-I  3--  !-i"jr72  "'u;;wS'i  czc  -^"CjN  C2-^i^cnn  c^^obcn  a-»3n-  n"- 
ap;'-'  'n  ^ib"*^'-"  ^3";"?3  'n  ,  "i-'iûcnpT:  ou)  ';-^a"::inp3  — iTr-'bN 
Nim  iiîDb  iw\i3"'i  .y-TTcp?:  •miri"»  '-n  ^n-^Di^o   rryc^   '-:    ,-,wNnc: 

*  Nous  savons  encore  par  une  autre  source  que,  vers  la  fin  de  sa  vie  agitée, 
Nathan  s'établit  à  Sofia  et  y  mourut  en  1680  (voir  Graetz,  Gesch.  d,  Judcn,  X,  notes, 
p.  lui). 


218  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

kN  ,  3-in  ■'Db  ûi?7D  iDbr;  ::773Da  ^i^rTîN  t^*T^5  un?  z't^Nw  n:: 
,'z-cb  N2^-j  n^^wTi  n3\X"^  ib  -ijjib  ni7:rn  '-  iwX  '-  ■rxnpb  inb-j 
",m?:">-ir;rr  nbios^x  "i^rm  2m  .  t:-^  br  ï-rbpn  -,2T  r-x-^  i"-  nt:-:: 
y-iii  bx  -i-:;'  -t;:;  iSxT:"w)  'nm  î»>:ir;  "fb^i  .r-rbb  i-ir-i-ism 
. . .  !-TNii:"«mb  »— rrb  ^^  ^^-,1  r-T^rwSs  -t-r-r:  ys-'i  . . .  MN-'Tirr: 
(Sni7:"C    '"!)    crnr;  cr     nyjp    r--N    ï-ir^^^    -m::o   nb-^b   nnrm 

. . .  "m:3 
Avant  de  terminer,  nous  allons  encore  donner  quelques  infor- 
mations sur  l'aventure  galante  de  Sabbataï  Cevi  à  Gonstantinople. 
Aucun  des  nombreux  documents  qui  s'occupent  du  pseudo-messie 
ne  dit  un  mot  de  cette  histoire,  et  pourtant  nous  devons  l'accepter 
comme  vraie,  car  Abraham  ha-Yakhini,  qui  la  rapporte,  était  un 
fervent  adepte  de  Sabbataï  et  connaissait  certainement  ses  faits  et 
gestes.  Je  mVxplique  ainsi  ce  silence.  Diverses  relations  s'accor- 
dent à  attribuer  à  Sabbataï  un  fils  du  nom  d'ismaël,  mais  diffèrent 
entre  elles  au  sujet  de  la  mère  de  ce  fils.  Dans  une  lettre  qu'il 
adressa  de  Chio  aux  frères  de  Sabbataï  Cevi,  Nathan  fait  les  pré- 
dictions suivantes  au  sujet  de  cet  Ismaël  :  "^n-T^  "'~  r::?:N:  li'-n 
Tbi;  n-'n"'!  ,rz'Z  ''r^azrz'C^  ''■2'z  \-rwb  'rb^:  p  nir>  rr-  ^-'.y 
Sn;'::"c-'  'h  -,7:n:  -pb^n  ,rma  an  n:::?:  n-:-'::-'  -Z'O  :;'"'  pn  /o'^r.-n 
■■'n  ''Ti^r^  -•7-'  û^N  t^-iD  7-rrr  >^'im  (Gen.,  xvii,  18)  "^-^rsb  rrin-» 
ï-n»nNb  i—nizy-'i  tii-'p  i-t^-n  "i--^  b^'  ^d  [ibid.,  xvi,  12)  ^n  bs 
mna  rnncr:^  yen  yx  "r  .iirN"'  ^;b\:: .  Ce  passage  se  trouve  dans 
le  ■'2::  bm:  n^-'j:  complet  de  Saspoi-tas,  f'  124,  que  j'ai  en  ms. 
L'ouvrage  imprimé,  qui  est  très  abrégé,  ne  donne  pas  cette  lettre 
de  Nathan,  mais  il  y  fait  allusion  dans  les  lignes  suivantes  :  n^-n 
.  .  .  "-j:  \nrwb  "bn:  p  ■;-  tznb  p:  -.wN*  m^n  '\\ri  r-c  ir^rczVi 
.  .  .-,7:x  'NT!   "irNn^:^   xb-n    .  .  .  r-r-i-^-^pr;  tîb    r;:vcN-r:   nrsi::   cn 

iTjO  toinp-'  Nb  p  ib  -ibn  DwX  i-iTN  ""rN  ti::n  .  r-înmr;  in^b  ex 
.(éd.  Amsterdam,  p.  35  j-^z^i  bai2  n:i:"'i:  -^r^-p)  bN^'?:w'  ex  -^r  b^-w-^ 
-i^-'T  D":i  riT  yr::!  .  .  .  s-'C^-jn:  ï-nCDian  pinn-^  -z-rz  ^n  "'^3 
.— r-nptn  Nb  "^wi  .  .  .  '"tn;-;---^  t:-  t>i'-ipT  p  ib  ï—.t:"'  t  (ir:? 
r-î:;'7:'wn  fc-.n  ^:tni  ,  ?:::c  tz-::  bc)  in-i^jn  m^N-ib  :;■'-"•  ^r';' 
''-^iiz"!Z'Z^b'\  -i7:wS;  i-'b:*  -n::'^i<3  ib  -bi:ri  pnci  /T"rCjb  nmpp-îî- 
ï-n7:"iNn  br  p-b  n-'w/:-  Y-'-'^  "i-  """""i  (Gen.,  xvii,  20)  ^Tr':a 
(ny*':?  "n3>pj.  D'après  ce  passage ,  Ismaël  aurait  eu  pour  mère 
l'esclave  que  Sabbataï  épousa  après  sa  conversion  à  rislamisme-. 

>  Abréviaiion  de  T'iZ'i',  TT^IS,  nnS'J,  ~1Z.  Voir  Aboda  Zara,  36  J. 

»  Graelz,  Gesch.  d.  Jiiden,  X,  notes,  p.  l.  L'ouvrafre  "^ZiC  m;'~,"X7:  dit  qu'elle 
était  polonaise,  se  uoiumait  Gertrude  et  faisait  partie  du  harem  au  sultau,  qui  l'oifrit 
coœuie  présent  à  Sabbataï  Cevi.  Ce  livre  parle  encore  d'autres  léinmes  de  Sabbataï, 
mais  il  contient  de  nombreuses  erreurs  et  ne  mérite  aucune  créance. 


UNIÎ  LETTRE  D'ABRAHAM  HA-YAKHINI  A  NATHAN  GAZATI  210 

Abraham  Cuenqui  *  dit  que  la  mère  d'Ismaël  était  Sara  la  polo- 
naise, la  deuxième  ou  la  troisième  femme  de  Sabbataï.  Baruk 
d'Arezzo  dit  également  dans  son  bvN-'J-'  -^s^?  1ti:3T,  p.  18  :  nON  nnx 

.  .  .  nrr-.r   -1-3   nwS  b?a  ifz:iyi  i^^r^  û-'73-«  ï-iitoo   pT  /p   "ib  n^m 
r-î73"w    n.\  Nnp"'")  m  ib  mb->  in^n  ,-'3Ti73   bi<r7:ci   i7:o   n^^   N^p-'i 
(le  nom  manque).  Dans  une  lettre  adressée  à  Josei)h  Philosophe, 
père  de  la  troisième  ou  de  la  quatrième  femme  de  Sabbataï-,  celui- 
ci  donne  une  troisième  version,  d'après  laquelle  la  mère  d'Ismaël 
aurait  été  la  fille  de  ce  Joseph.  Il  dit  (Baruk,  dans  TnDT,  p.  22)  : 
^3b   -i"i3\:j72-  ni-  y-iNn  b:'   'j^-^rûr,  >ii-   ^o^^^  uybart  ■«i:^^  "^j-ni^ 
'^ibwX   ^^a  i"-in"i  "]:nn    •^:n    ']\^   -laann  mNas:  'n  û03    .  .  .  y^xr: 
■^n;"!"»    \-T':;-i  \-nnwS    nriDj*   f<T;    ln7:n  ï-ro'i-   h?3^7a    •^nCwNi    n-n-n 
...l-i-ûy   'nb  nn   ûiDnn  t=;rT-i3NT  bayi^'::^   n— ,2-r;  T-r:-2  ^vd   ^^7:n 
On  voit  donc  combien  les  indications  relatives  à  la  mère  d'Is- 
maël concordent  peu  entre  elles  ;   à  mon  avis,  elles  sont  toutes 
fausses.  En  réalité,  la  mère  d'Ismaël  était  la  fiancée  dont  parle 
Abraham  ha-Yakhini,  mais    on    désigna  Ismaël  comme  fils   de 
Sabbataï  pour  laire  croire  à  la  réalisation  de  la  prédiction  de 
Nathan.  On  comprend  alors  pourquoi  on  ne  nomme  jamais  cette 
fiancée  comme  mère  d'Ismaël,  car  il  aurait  i)aru  scandaleux  que 
Sabbataï  eût  eu  des  relations  avec  la  fiancée  d'un  autre.  C'est  pour 
cette  raison  que  les   écrivains   désignent  comme  mère  d'Ismaël 
tantôt  l'esclave  épousée  i)ar  Sabbataï,  tantôt  Sara,  tantôt  la  fille 
de  Joseph. 

A.  Epstein. 


»  Dans  le  mi<jpn  PIIH  d'Emdea,  à  la  fin  de  la  troisième  rclalion. 

2  L'ouvrafje  J'Eindcn,  p.  3,  donne  le  nom  de  la  première  l'urnme  sinyrniole  de  Sab- 
bataï ;  celui-ci  dut  la  répudier.  D'après  les  récils  suspecis  du  "i^li  m;'mJî"J.  Sab- 
bataï aurait  épousé  a  Saionique  une  deuxième  lemme  ut  l'aurait  éf;alt::meui  n-pudiee. 
Après,  il  se  maria  avec  Sara  la  poloiiiiise.  Doiii;  la  iille  de  Joseph  qu'il  épousa  ensuite 
était  sa  troisième  ou  sa  (piatrièmc  lemme.  M.  Graetz  (X,  notes,  p.  lu)  la  désif^ue 
inexactement  comme  sa  «  deuxième  lemme  •.  Du  reste,  il  parle  lui-même  (X,  206), 
d'après  ^3^  n"l""nN73  (et  non  d'après  Barulih)  de  deux  leiumes  que  Sabbataï  a  ré- 
pudiées avant  d'épouser  Sara. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE 

(suite  et  fin  ') 

PIÈGES  JUSTIFICATIVES 
III 

3. 

Lettre  de  la  communauté  de  Pise. 

-c^2  p"p  TwX-:   r"y  î:"-ti   bx-'r:"'  -i"-irn7:D  ^'.ib  r,:irr.  zy  -rp 

niT'rDO  "^D  "^"13"  ï--brîP  .ia  ri7:'w'  tizr;  "ib'Pi  p-ii:  "^^n  V:i"'  b-^s 

■^-^i   ■p-''  -::-':'   r-:Vrw\  z-.ii  n:":N-  .  r^^:N^   'j-i:i-'  n':j  tcx   £2ip?:a 

:=:'^-2r;"i  'i-iC  C-^nn  r^3-  \nr7:."j  "jy  t-;"  ^"^iza-m  r-r.TiZ-  urT, 
J-ibN  "7^3  turr^mTonnsn  -^-m  tr^-'p-bn  i^-'irnb  ni?:;'  n::p  t=:"'":;"iw''T 
r;"o'î:  p"p  n:n:NT  y-iNn  bD  "p^x  b:'  n?:o:?n  -iniiT!  ^:n  ^:-:j  û-'n-jvr: 
CN"!  wi-.nrs  'ir-^n  £z"'2'v:)t^  irreN  S=;3-,pm  2--'bi<  '-^^n-ip-  î^"1j:-' 
ytr,  ^-,1-  î-<:iT:b  r-i2n-sj<i  nd  ri7:npi<  pb  .  ^wSib  iz:;  -,2b  n*::  wsb 
•jm;   tojbi   ■'2:n   ti:''-!3T  c-^n    Nb  -ex::-!  .  m^T  1:^21-  •'-^jz   nN:wb 

. . .  -::-N   "ww^  TN 

br  -i2j:rr-'  Nb-,  czb  :ns-'  t<bc  Eii-i<-  "^irib  -.cen  'N  -'-  n--  r::N- 

•zzrrby  bn^rnb  ûin  n-'-'n'C  b"T-i  i;?:*:;  DmN  by  pw  bDT  a-'m-ipr:  -nr- 
T^ni^bT  T^Nwb  Si*  -iD  !-î-nn  !-t-i72X  .  C'^r-Dn  nnnîN):  ciwS-'irir:  ^wN 
rimnpr;  i-ibipar;  in-,ni<bT  -prxbi  innbT  1:2b  T^n^sbi  ir^sb  rbwS  n-npn 

•  Voyez  plus  haut,  p.  83. 

*  L.    N"~|"^,    voir   Zunz,  Gesammelte   Schriftcn,   III,    208,  ou   T"ni,  abréviation  de 

n^nNT  i"'72n-i  ■^:"<nt3"',  Ps.,  cxix,  ". 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  221 

nnN  nom  nnx  tii2::>  "lir^  ^■d  -^d  '{y  ,  'ijt  T^n^bn  iWNb  'rx::  t^n  ■'to 
ti7:no  5"t  '^-;^3-n  :  tnbD  V5":;bnc3  nni«  T:;m  Tnx  Ci:^'?:!  X  ûd;  ('xr:) 
TON  ^-nrî  b^  nVn  'iniD-  :û-:;d7:  !-tt  pv  Nb  nnoN  î*«ibî<  i-.n-:;  i^x 
.'7û^:^^  rsNbn  iT^xb  '"na  tiûnsm  i-iN->rb  un  "^^  'kn  bbs  'j-n  -«d  i;n7:wX 
S^  to:i  -i7:Nrîb  ">ni<-i  r-i^r;  -.-,/:n  t^b  ^n  ■'s  n-  i-^iza  izuTzar, 
"■-a  tsiry  mnDrr  n-in»  N-^n  Da  nPT^-b  !-!-ii:>-l3](3)  •c-'N-  rrjx 
^^^z'z  ^^T  Hrr  •c-'  s:n  .  thn  Tonb  T<m  £27:3  'ip^d  "inN  TwI^t 
ïz;:^;"  !-:3p:i  -i:t  îiz-wN-  ^<-,33  -i"::nd  "'D  '7:wN  r:"r  tri-^bnipr--: 
'jn-'^nn  rT'-::^-^  rmcc:-  bD  p  ts-'job  :D"nN  !-7:3;t  oinn  nnx 
^mn  brn  •  nTiDrr^  -^nnN  nobnin  iN-in;  r-'n:;iT  m;iT  r-72p:i  id- 
n[3][2*  'WNT  inCwS  Nbx  TiNO  i\x  ûnrN  n":»  irin^j^p  '-jntû  N3  r-iT- 
'^;::^2^  inx  ûi::^'  ::bbr3  ^^bN  bs  ^rprrbi  .  a-^b  -,2^12  '■'rw\i  'nbsb  'ib-: 
.ûn-'b:'  "jrnNrnbT  3j::^n-b  ûip^nm  a--:'n3  ri-nîN-T  ^inirr;  N3  nnwX 
ï-îSWtt  tmo^b  ^~iD  'r-ib'i-i  mnx  ï-id'^'  r-:c',>'-  t=;irn:b  n-n  b-w-m 
TwN::!  ibcbp-:;;  ir^N--  -,rrm  ncr:^?:.  -jn?:  mj?  brc  r^--r;  n-,rD 
-n:'r!3  ]::  bza'j  ]rcii--  n^D-  t:^;'^  r^r;-  m--~-  V-  î^'^"*  brwSn 
T^m-ip  s-nrs::?::  t=;i::^'  b:N:i  -nrD  ibxrs  -,:n3T  -iw\x  r-ibwX  brr:  -rnwX 
uJTîp  •jiriwX  '7:i<  r:;3  n.xn  ...  n-.-o^  'pbn-j  pbm  !-!:■;;•  ^^■^n  '7:-  ncx 
"ION  ï-iTûD  -Tin  N3  bx  'rN  !-!"^-i73  vnx  t:;:  imn^^  m-im  br  'r: 
iinNTD  bi:N-a  n-r:  ^-ii-  by^  ...  itJ2  -^irn  bDN-^T  -iwn  nn-!73  nrxica 
b2N  m3D  inm;73  û"m  bN"'^n"'  n"-im72D  izivr,  ro'CJZJz"?  bm^rr  mN7:r: 
t=!rT«br  NbT  ...  n3>nï:"«  Nb  t^tn  i"n22-^  1153  '^^-a^z'zrn  Qi^ntîîb  t-;-  n^D 
2:wynr!bi  in^nrib  irb^»  tss  -^d  nnn  linirrrn  !-iTr:  ba.sr:  "jn;  nsb 
",:-)rwX  Tc:;  n^n  'r,  rr::-2  v.sn  mn  -^d  i;ci<n  b:fi2  inpbm  nnpcn  br 
û-'pinnn")  û-'m-ipr:  'r,  m:'  bbo  bi'  û:i  -^d  inbn  lî-'b:^  î«bT  .  rr^n;  ibirs 
■13  ^nîirnb  fa-irr  hy  bai70  ^<^^  -ion  baNrr  ■'3"'72  V-  ""'"<  "'  ""- 
!-îC7:72  !=5T  '-:i:n  id2i  bwSTO-'  r-i-in  b=i  tDD-^HwNT  pio:73  :-;t  id7:dt 
b52  i7:o  rr^-  bTi:;  nin  w\sr:  -^o  .  riT  by  rî^N-i  npbn  bNi72*>::T  "j-insi 
t=:.  .  S2'7:^  nn-,N  -i3iy  25  î-nn7:r;  bD2  rr--  Y'^^  i:?7:"-i  fi:;- 
rr^"  c:^"j  .  -cipr^  Sx  ixnn  ibip  y72"C-3  ii-n-'  rb:^  y-,N-  ï-ni:p 
nv-np  j-,V73bo  ^r72  Sd3  '^bripr:  'Tib^-  r-iwSn  TPn-npai  i%m-m2 
p^b=p  bN  Nab  i;n7:wX  uni  .  m::';  Nb  1:7:73  '\r,:2  -cw  irr^rT^b  rwz^nz'i 
^\  TwN2-i  .  3-170  i-i-rc  xbT  ir:"'  Nb  ■'d  pp-'  xb  i-it  i\nib-p  -nro 
inairrm  ba^xn  pnibcp  bx  xnb  -,wCwS  \x  ^p  SP^brp  bwS'  N^b  -icdn 
bD3  1-i-^r,  c-i-p  '"^nbwX  ■c^\  •'r  n--  i<-i:m  "Ciip-  •w\s-  br  -^ram 
irr^r?:  'n  ce  rr^n  bbin-j  iwSi2-:  -^y  -ciz'Cj  rn"272  .  vc^'t:  brni  rD-n 
bx  i3Tcn  c::-cr:  N3  iy  ipuî^ia  I7:ip3  -^7:0  rnv  -ipn  -n^<D  b"-! 
mbsPT  pi;np  nrc'pn  p-,N-nr;-:  r^cn-'  Nb  t^7:p  û-j  nro"'  tcn  r:ip?2 
m:T^Tn-2  a-^s-'j'cn  a:;  ■'a  -,7j1wN  l:;'::3i  ai-^r;  bD  'n  PwX-,-'^  rr-riT  i-p-ci 
NST»  abij'72  rrr;  nô   .  a-'r^b^'s   rrr;  pm   inDCTo  ■'by  pi7:i:p3   r-rb'b 

*  Job,  XLi,  9. 


222  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

-.::-:  hrra  "T:^  Nbr;  -.en  T-r^r,  -w'wS-  ri^r:  r,^  ■'r  .  r-;:rr  r^p  nVcr 
-,3  ï-:cri:  'n  n-;-!  "^^  br'c-T  r-ir-aPT  n7::nn  -.2  rr  -■'i  nc-np^c 
ï— ,\--ii<:r:  nj^zrr;  n-.r:  "i-rs'wT   'î"i2::ir'r:   tir   pwN   ...  -inVrir    r-i^rniT 

.  :=:^-^o  NTi  12b  ï— nx  Nb  nrN— 1  -2-1-  f^::?:  rT;-,r--i  r-,::"'"'in73 
-w=wN  ^s  ■'2  "^-.Tci^^  P-!T  rîî  r,-  t=-'-rno  "^^-z-;  .sbn  '-^-.n  '::wX-'  !:ni 
n-.TûN  '7i:'n  £:::''2"'"'nn;:-  'r^-::    r^n:Nrn   innri;'-    î—.-'brn   bwX    t«<nb 

r"-i  N"i3:-i  -:i-:  c^:£-  ■':-w::  ^-.\-  '2  '-^n-w:-  \-n2-i  rrrr--^  ",3d 
NT!  "^CN   -"'îT'-in  [n]in;7oo:72T  •^■'^-ix  -im  Nin  t^n  r;7:"iNr:  "i?:    nrr 
r:::-Nr:  1?:  -2;'  an^n  rs  û-^-bx  ■'"■'  -iîT'^-'t  '-irm   'knt:^  "ri-^b:?  -i^i 

"n-^  D"^r2-n  ■>:•::  T^b:>  np'i::-'  p  -i7:j:rn  ins  nrn  nrp  vb^  £::"»i-ûir 
-îcnb  p-i  rrr:"'  Nb  Itsj:^-  -3  ••■2:^^:1  nnis  nm  .'-î?:n:m  lis-j:;'-  b"-i 
nbD  -."war;  -iCwNIst  ce»  npib  -"wN  n^j^Nn  bïî  i3Ti:["i][-<)  -i":j3-  "j-rs  ^:ti2 
r:br)  "jt::}:;':-;  n'^n^u:  -iiNi  p  nirto  ns:-*  inrû  nr  sv  Sut"  Y-"*"^ 
n-iT:;:  -n-:.  '■:n  b"7n  "itTjI  f:Tbi  ri'n  t:?  t::"i"'  bî<  ûT'tû  ncm  Y-"'""' 
-.wN  '::-  bx  ::-,wr  r^:vr;r:  rrn-  -,-wS:-.  .  nb-  •;?:  rrr-^-'-w  r*:-  br 
...n7:"''^pT  r"'n:î::  n-Nw:  r;7:r;:r;  t-rr--c  'Mi~  p  r':-^^pT  r-riii:  r-;:»-; 
br3  3b"w  rTTn  c-'Nr;  r'T>  T.rzn  "rza  fiTJZi^r,  nrr.r-  -inx  12  r;7"i 
r;:;3-i  ::pwr:  r-:N  rmrT:  "inm:r  r-,"<r;  n-i-nn^  "{rT^rry::  n-irrb-cn  -«rr: 
T^T?:  c^rn:!  ::-"'u;n-3  ■jn-'n-n-j:'!  D^n^riT;  C'p''-:i-  -i";;3  -":;;  ir-pm 
r-T;::;  iS"«-r;  r;2"'u;"'z  •zrz'ro  D"'2-:;t'  a^p-'iii  n";*  n-.7:wN3  "^^  .  nr-^r".:) 
--^-'^-,^r^  û"i7:N[n]iD;T  .  t2bi3>b  Y-'^  "'"■'  --"'"'  ->^"'  '^=-''  "'"'^  'i"'^^ 
r-''-r;N  z"-,;2](3'  ::"'2-,i:r;  zrr:^2  ■^■w?"':-!  nn"';:;"?:  b>'  -tz  i:^-,"'  h-'-n-z 
r~-.wszp  p-,zN-i  r-zN-  f^.—jiy  tz~  ^':zr!  -n  nz.sr;  r~rr2  "'--wS 
.  ïi:mnwS  z-:2  r-,N=m  tz^;z  -^in  c^^p"  !n-!::r  'nrrr;  '7:^7:3  D-^iz- 
"ws:b  !-ir,p?:r!  ■>r:i:r:  -.zcr:  bx  i::-,"'  r-r:->30  t^tt:  t:"^r"i  c-.7:N[2]r'i 
rtin-^  TwwND  -^n  .  !-n-,"cb  pirT:  br-  r:";»  it7:-i  rtibi  û'^n:^:-  z-^-^nn 
a^brwS?:  ■':-'/:t  i".:im  ■ji-'t  tsnb  rrnrsT  ï-!nc;:3  "-n  abirn  ■^■'na  aiwNr; 
";CN  ■'ni:;r!  -n^n  y^'c-2  "Ctzr,  5:rnp  p  nsirrm   r|i:jr;  ï=;T'pb  STiii^; 

-,-î:i3  r;2n::b  i;i-,2t  Tbn  ûb'cr:  c^n^-  -mj:  "-r  ;  -Nzb  a-'T^rr  -.:r;:N 
TtZiy  n"''»n  •■;:-  -,wN  a-^nn  a^-^n  a-'X-ip;  anr:  "^nni?  t:^  TwwX  a-'p-'-ii:- 
Prnn  m7:bn3  i""wr:  ■^aiTz  T^:n  nj«  *]'^"it7:  2x-c  ^^:'  ba  "a  ï-iti 
ncw^i  ^i^y  Sa  imTo  -^-nN  -^a  tiNT  -n»  r-ra-in  -nao  !-î\-n::72  ai-'pi 
r!\a"i:?r!  Nin  nbsa  T'b:'  V-"'^  a"': a-  -^t^  br  d*^*:;?:!  f  na73  -pcrTa 
.  m72ip7j  iroa  rr-nn-  p  i-î\s-i  !-;t  hy  «■'372  -«"m  .  "n  r.'•,^:?  ib^an 
'72N  .  -,a  'jz^:  i-,7:  T;"y  ira^sn  aa'^aN  amax  bx  rj'^ar;  nricNnlain) 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  223 

Tûc*  PN  DnnaN  hy  ^"^  N-^nn  iST^b  aDCSn  t-ipn:c  ï-^.Tw:i'b  -^"i  ']-- 
in-^3  nDT  ■^nnwX  t=;r;-i3N  br  ■'"■^  N-ian  ';:?73b  '7ox  r;7:b  ':3^m  n^b:?  -i2T 
"jr^wb  mnDb  nb  rrrr  .  nm»  -«-inN  tsmnx  ^z?  >«î^3'^  !-t73  "^d  nnnx 
CLmnN  b:^   '7:wX  t^bwS  -i~t  — wN  mnx  "n-'n  bv  mw-iT   ts-^b:?   N"'a- 

L'i-'n  ûr:  nCwX  n-'^'n-  "j-ia  'n  -^"b  nToir  n;i"i:?  an-inwX  ibwxsi  DwSa:'  '^^212 
r-rrb  r^7:T7^  z-^jj-o  DwX   t-rriT  n\:;-iD3  Ni:?:»-!  s:;  .  ^^T-  !z:bn;'3   ï-in:? 
'7:n    r-n::72T   rrnn   m7ûbb  non  -^r-n  :^"'TT'  tr:^:nb  nx-  ï-nD-rtn  b:? 
^-nn  ^nDbm  '^n^nn  ^nT::a   tsn   -imb   !=;3-'j3  ï-iwX  tzim.x  c:n-72bT 
TwN  r/crar,  b;'   sr;^:3   rz-^i  û2^7:-^  12-,-'  'ir72b  .  'vr,   ^7:1^31  '^nDoai 
tziDb    nnb   ,  y-Mir,  by   û"'7:cn   '^72''n    t^rib    nnb    û3■'m:3^^b   i"-'    -•::  w- 
h^:>  Q-'-^n  ï=!ni^*   ibxD    mnor;  'zzrrby    ï-7br7:o   Nb.\  mrrb  ib  rrr: 
.  "07Û73  y-xn  b^'   yiwN-  b:?    L]^7:ar:  ''T:'^:)  '7:nc   i7:d  yn^s- 
ûTO-b  5Db   ■û'^  r;7;D  "^:tti  l]"^'^:-'^:-  cpx  2b  b:^   i7:-'wi  ini  r;ni' 
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ûn-Tn-Tjiix  '7:nb  -^-î  n'm  .  Nb72N  arrrn-iiriwS-i  3"n:<  '7:nt  .  m:""'  am7:-::: 
^■^n;-  -i'c\  j— n-ijiiwX  ri'vao  by  TiTonb  rrrrr'  't  f-iwxa  a:?:»  c^bwN 
^y  "npnb  i;b  •o-'  r-rn:>  .  £*<b7:N  t3-b  r-innitiN  't  '72N  nbN3  T^iab 
-iinbT  "ci-nb  ^-^^  !-;-i73NT  .  mNb73  '72-  r-!7:7:  ibbn  r-M-ii:iN  n^cr; 
t=i-^:3LS  awN  iwX  3-T  IN  no3   f^in   ûwsrî  ï-îbs-   î-.i-jciwsr;  "'"iNb7a  nnwS 


224  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

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i-ii'ib  ""wt:  i-Twpn  "n^*  .  rrr'bsnTs  Nbn  mai::  frriN  Nb  ant  t><b-i 
bx  ï-ix::M  '%nr-;2  -,:iNr;b  crn"»  ncN  -nn  in  :ib-:;  n^bt:  'izr,  un 
-n-inru;  ::r7:D  .  -nx]:?:  «bi  t:*:,-!  î-rN"in  Tin  m-ij:'.NT  :>b'3  m-ii:nî< 
-i2:Nr;b  ni-  sa  i3-ii  -.^tn  nsb?:  '72r!  rrn  r;:m  inx-^'^o  ni'  ûna 
'7:nb  ^2b  '^nc:  '^■'N  -i7:Nm  3-^-wn  cnt  .  rm-ijriN?:  mn  NiiT^T  '\nDnD 
r^nb  b-^nr  nrr  nON  p-'ni  -wW^n  mxb»  '72r:  rrn  i-iba-  m-ii:iNr;"w 
l-^b-2  ^a-'-wN  -^rx  .  !-rbN3  cnm  ';2X-'  î«<b  fbpn-:;  bp  s^bm  .  mn 
r^T-,:iiN  "^r   '::ibi   nanb  "^ncb   b^*    -,rb^i   -^n  -.2-;  -^"^   m-i  -^2   '■:iî<t 

^^"^"■'"lU^r;  t=-wsr;  ^:d  bi'  ^i2n-i7:r;  ciribN  mi  r^in  riTr;  n-nr; 
ti;^;'3"w  br  )-!bj:N:T  -"rn"^  b;-  ^-rn;  — wN  rrnr,  N-r:  .  N-np  i"""  -wN 
rrr-  ><--  .  ax'^b-N-i  Swsbria  '^y  mrr.  ncx  mnr;  ni-  .  frpîn 
r;;-i2-'  p  abs  br  -r:  -,wwN  m-ir;  n:-  .  ",-'*  P  r-wi-"'  by  nn:  -,'wi« 
TJN  m--  wN--  .  r-w-'bN  br  r-ibrcNri  in^bx  b;*  nn:  -,cï<  mn-  n'- 
.  -^îicb  bi'  "inb7:i  •'a  -,n-  '"'nb^  mi  ';:n3  r:"r  ^b;:r:  nn  b;?  nra 
■^-bx  m-,  in-r;  m-,r;c  ni-  n72w\  '?:ibi  n'cnb  r;?:  "wW*  rrnr  bsri 
nn  TwN  m-in  N-,r;  Ti^rr-c  ^:?:wxr;  r-cT  -,wN  rrbwX  br  br  -n: 
r»-!":.^  br  rr^rr^'N  ^:n  r-ra-— ,  r-:="j  "^-na  r;;r;  .  Y-  T-'-  '""  »"iT^,:i:^i<r; 
.  r<b?:s  r:=^;^-^^-::-,N^  "i^:  "-.'rx;  ^^  n-i  .  -^-"rn  sn  f^:2  1:'  ^"im 
nwDH  snN  Nb-:  .  'i:n  r^rana  '^rîbx  m-i  imN  Nb-jwNi  hrNbirnn  '■:wN':t 
nnir;  apr  abrn '7:n:t  .r;7:rn  m"i  "jn^  si^v  n^rrn  mi  ibnb  ï-itj  2b 
m-i  "jwXD  tjN  r-;?:r-  m-i  ib-b  T-iu  .  •^-^r^a  c^b?:-^-!  i»?  mini»  mi 
ï-TCîîo  '^Tso  "'D  !-f;:rn  mn  Nb?:  ■;-:  p  rcnrr^i  rw^rT'3  '7:n;  .  nrrn 
m-in  Nir;  .  r;7:Dn  m-i  'jîîd  t]N  -rrn  mn  prib  1-172  .  i-ib:?  vt^  dn 
pbn:-  Nirn  lu»  n2'-7:-'3  rî--7:3  i;b  nbs-^w  r!">"r73r5  Y"^"  ^^  "'.Nin-'  -i':;n 
.  ">"•>  m-i  ^'hy  ï-imi  in  "n^ND  ijTM-n  iï^dt  ncN  r-,-n:i"iî<  ï-îC"::b 
t-iO"^T  •'"''  ^wSn-'T  nrn  m-i  .  rî-nnrii  i-(::.y  mn  .  rirm  !-î72Dn  nn 
ms  •^■'Ni  !-îT2  r>-  tn-iibn  tsbiD  -^d  Nnn  nns  nitiN  ibhT,  ï-m:i:ni< 
n;*  rr^y\  nra  2?  ï-T:rn  ":-  ^z  .  ■n-irn-'  Nbi  -nrbr-  --iit?-'  irry-i 
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"iDT  !n7:2n  «"^n  '»"i  r-,K-."^  \r,  '^rz-.-z  ^-î7:rnn  £=;•  r;w\n\":  .  isiai-i"" 
nnwX  finiT:  mpr^mm  abn  rmn;  riii-i-'  nma:^  ti'  ni:yi  .  r;ra  :-i7: 
^:n  .  — 'r  -îr-ib::  im-.a  bcnri  -."laa::  fïiN  "^-iN  m::  '-^psid  piwxrr; 
u5  ""n"7  ""lan  »~'.x  i'^p"^  "riNrî  "^3  ""lanp"'  nT2  î~i7  2^2  t~TTr;  '^"nr; 
.  nnn  ipanrrn  tc  t^TwSn  rrri-'w  bwS  S'nbwxr:  Ti'cy  n"  r-:7:rb  r^7  PwS 
r:bN  bD  qncn   n;i   cs-ia   Nj:-:n   r^n-irr;   q-o   nri    cn-î:j  'n  j-în^-^t 

'■^nsTD  tzbw^  'n  i—wS— '21   i:7:-!p  TwwXD  "rn^s   -,i:-wS  tz.'-:'--!  ■>"-•  mx-.-» 

..m:3b':;-i  î-nsbr:    ptiLiin  '^~  vr:  m:y  -^n   i-i:";^  n'-   ■'"■'   ï-iwNT" 

13»«  bsxn  n";'  C-n  bN-in"»  n"-ir!i7:D  m:7:r!  b:'  r-ir;  -icn  m-.r;  Nin 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  UE  PISE  223 

Dr:  nïîN  bn  ^^  û-^nii  ti'ï^  bD  -i'^iînd  ti-^iz-^y:-  T^;nb  i-imwS  b-^re^iT 
b-I:i?3r^  u)\x!-i  n^UN  .  ib  ï-td^ï:  Drr;  -^T^rJN  .  ^t>::i;'  r:^!-;  xin  ^•''c^y 
ri"-nb  trin  ",mi:i»  nx  tn^n^n  ri^mi:»  ûrpbi  nmn  'n7:bnb  i-^sn 
lipm  nTn  ûbn^n  ';r!\-n-iD  b^iN  q-inc  D"'-im  ibx  û-,7:n  b"n  -i7:N7:D 
rî-nn  nnwbnb  v:i  b"75«n  t2-iDO?2m  ibbrDn  tcn  .  xar:  abirb  sn-û-'-'p 

r!72D  '\\03rî'  1133    ÛDM    1ir\y'   INT    .  "liT?:-!    -1CN3    r^^T73^    riDIT   Min    "13 

tzjisb-^nsr;  ncx    vhit,   ï-im::n  ï-rbren  b:?  ûnrnbT   mmnb  tzDb   •::■' 

T-i-'y^:\-Qi-i  'r-ir\y   miiriN  noo  71-^:73  t-inx  '^oibn  biN^b  c-^  T,Dy 
rrinnoT  Nb  -^în  rîro::^  ^bi  nïrju'ON  Nb  -^în  .r:n':::û3i  !-i;::73cn  ^\x 

'irr  n:;"jr:b  '^mi  xn^j  is-r;  tx  rjwSi  rinnb  rrmi^ob  iini  pb  .  Ti-j-jp 
:  nN3N  ^ONrD  ûnb  r;\sm  mm^xn  ïm-ii:iwy 
tri-'j-'-^Dp  b"n  '■^;i-';pr!  mbnî  -iirix  ><-'r7  i-i-^j^-'n':jn  ï-ibrert  dnt 
î*<nb  TTiT  WV273  i-i72rî  -ion  tz^Db;:  nbi^Di  qosi  ariT  11:13  û-'''inî< 
r-iv>:;r!3  û-'-'nbN  û-^r^rp  ':3r:  nCwV  ï-n"n73w\r!  mniïiN  'in  j-ibra  bx 
yiN  ^nn  t=:y  Mmn  "nT^bn  i-îs"^  D^nn  '73N«d  ';r!"':-'72b  t-n-^^jbarr 
'■'j^'-^no  J-ibn:r!  b"-i  -lirixr;  hti  ^tto  .  ^ly  nnDO70  tirr'rj  my-^^vo 
■^70  ti7:n  b"nb  ^2:7:3  -i3d  13  riTT  .m7ji";prT  'i-  m-ii^iNn  br  nw-i 
n'^a73m  mrjrt  D"nNi  ri"n3  nbnn  ^1373  r!",in-Ti  ib  n"'3r;i  t^3n  ib  n7:a 
û"^7:t;72  t3-^3i-^3p  by  DNT  .  r773n3  Nb3  r,ii•^^r>  ';\xi  !-[N"n-  N-^rr  -t::« 
ûn3nr;bi  bbnbi  rminb  •w-'O  '■'■'ni::"  d''3-'-'3pr;  by  \::"d  riDD  tL-iiic-ix 

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C'-.T  bN-^m  -i"'im7:33  ii*i:733  [I.  ûbs]  3b3  i3-':7:o  m-T-û  ^30  "ibi< 
"in  n\\-i73  in  nbc-isT^i  nbncD  r!7:n3  n"i\N-i  nisb  Nn  •  V33b  ûb-'n3-i 
n3m3r7  ûDoi-nn  nïJN  !TO-n"«r!T  nbn3r7  b:^  pT  nbirb  in  ûD^nN  mirr 
lin  b:'  r;iN-i  û3)b  ï<i3n  i-i3T  pimbi  .  n33t  r!T3  ûiinj:3  Dun  DDbi  nb 
tsibuin  in?3N3  iinxb  eiDii  r-ibN\:;73  didt  t:np  nci*  !=idi3n  m7:n3 
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ï-îTr;  tsbiz'r;  un  r-invu3  ^y  Sun  .  nnnoiT  nnpiT  in  •\':i-\y  1313^ 
r-nT03  br  r;7:DT  )-t7:D  nnN  br  iinnoi  eiîî  Tipi  'nb  nniri  'i3is:pn 
. .  .  ûn3rTb-i  nmnb  iin-io  'p:D^r>  Dnb  i\n  1  cn  ûbi^'  ■'in 
D1D  t2:Db  r:p"w\NT    r-iT  br   !-i-n-i3   ri\s-i   û3b  ^ididint  -0^73   dnt 

...23b  'n  r-ni:i  n?:  t:nij<-n  in3'730n  id  irainsn 
■i7oicn   Nbi    miruin    t«^b  £33i-bN    i"ib  tpx  £12133   'insn  "i7:n 
nnmoTQ  ar  s-rbh^HNlT:  nn^in  N^iTjn  nirt  p'1023  .  n72b  dd-'3i:?  113  nn-ip 

Nb    ITON   ibND    Nirt    "ICN    D"n073    t«<np73    "iminb    t3373Nr!    n3Opn370    iDb 

.  'N  i"ib  anN  {=1133  iD  PTob  tz3Di3iy  113  nnip  it^iop  Nbn  mnsnn 
r-itoip-i  113-1  iTcb:3  Nim  -mi^nn  Nb  br  nbnn  -i3nb  i:n3S  lis-'ni: 
TîTi^niT  .  tDi-m:)  iNi:i  tzsiwSi  3py  m:ii  js^nni  is-îi^i  nn:*  i^  i?23: 
.  l^•]'^  yn-iN  ^3  13  .  ^y^■^'::H7:  i-TTn  nn^ri  -inN  qTriNr:  .  fjDOT:^ 
iiNirs  13  qN  '7:^5  nT3  rt^c-n  .  3-1  n^'  rTn3nr)m  113-1  iiob  t=ib30 
Îi3i:5»3i  b3N3  ï-113-irîb  11N-1  11N  'lainpn  bv  3i::>nr!bi  h53Nrnb  Nin 

T.  XXVI,  nO  52.  15 


226  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

N3b\><  [i]rt)-n3  "jrû?»  n-'-"'  ^^^^:inn  Nb  "^3  'jza:  in  .  \sn73  -inv  Ninn 
t^b  '^-n  S::'  ^*^a■'^  ï-Tnn':;n"i  rini-r  ircb  î^in'j  '  -"mcrN  ■ii:-'i:pT 
TT-'N  nbn  n;NT  n"r  r-irb*:;  Drn-  'tzh^zz-)  c^:--  nsD  nx  r-i-'n\:;n 
i^vcn  t<bT  'mb  Ei"«sim  nDï;pi37a  1id3  b:?  -invw-'  t^rr^j^aT  .  rî:n«"« 
Nbm  c-'^yn  b::s  -mp  V'^  "^^  "'^  ''^"''"'''  'S^'-'^  c^t:»  1^3  rnnnp 
n-p  rCwS-i  ::-,7:"'  -^3  cnt  '"^rriD  "JwS-n  cn  ^d  bcT:  r-imp  ircb  v^ 
^:  '■;n  f<"'3:r!  pi  .  £3wX"i3  rin-ip  innp^  c<!b  m:?  '7:î<:t  .  t-Jin 
nm  br  Ti::-,b  tzs  -^d  k^  ^b  t>ibN  .  r-T:jTi7a  r^ro  bn  mpiTo  wN-i 
■^p;i  mp  tz-a-  r-i^rrc^  piNs  \xn:3  -.nr  i-i^rr  Nb-,::  ■'oam  n:£3'r: 
ivri  r-î3"wn/23  ';:V5D  ti:^^:-':?  r^  ^"nwX  in»N  nn  b^T  bsT:  nrn:?: 
t^m  .  û^:vn  tL-^-iT^in  r;2-:in7:3i  -nana  b"i  frj'n  tL-^ibn-  ■^T'-an 
.  -a'wnrn  N3-  nbn  "ji^::;'!  -n^nn  rîNin  -rpm  ■'nm  ii-int  br  TTîTrib 
V3  ?-n3-Ji::b  rm  ib"'^  ''-^'-"^  C:=^:v  i-^a  in^  '^'^n:  nin-in  br  t^x 
Chn](72l-j  bN  v\-j^r,  Ii2^-j^  is^-jn  bx  173D  -^in-i  "jiob  prib  rî73  ."j^r^' 
ibnb  -,5aNj"i  n:^-':"^:'  pn  Vxs  'r^s;  ri^'^n?:-  b:?  twX  .  -naT  p:;b  ind  ^wN 
.-3':;n»n  S:>  "i^D  £]N  .rrTCnrn  S:?  i3  iiiin-c  ^^r^*  v^  iTi^ïb 
r:£3  ï«<"ir!0  "Tiim  rij-^pn  nnx  ï^tî"»  npmrîn  riï  Srn  Tnwnb  ^«î2^ 
r;nT:i  --im;  -i2D  -^d  -^n-î»  -im"'  r:'^-"'  Nbc  nacny^n  î-sino  nbn  linirri 
fin-::  -^ob  ri7:b  riT  S^t  .iD72np  t:;nd  sbr:  p  nrn-:;-^-  r-,72r;  S:? 
SL^sar;  nnjr^^rr»  ï^bc  TwDîî  "^n  un  ein  r\"nr,  'iza  .  i^rr-^-bx  ■^""'b  tisnis 

tob  "^iN-n  .t3bi::'b  ""dik  "^m  "«rm-in  Ds-^nx  "i2K  î*<br;  i-iTo  ^i2':i:Ài-> 
n»  Tio^Tan  i"""  nw:;'^  -nTa7:rî  '72K»d  ûD3  rî7:"c  Nin  -i":;Nr  na  mjjcb 
T>Di«  pbnn  m2'zrt  s^np"»  pbn  'idt  t'Ois'd  Snic-'  n;:'::^  ir^nna  'inD 
5)11-1  inT^nn  id  fiTjCi  t^^n  tcnd  faiiin  T'cs>-a  tj:i2  i-iT^tt  inN 
i;t»-i  "iCND  VDma  '^bini  initrb  !-i7:in73  û-imiur;  n-'u::?):-  Dnii«3 
"o  rj5r!  .  13  nK'o-"  tziDn  nb-.-^i  p-^ni:  "^nx  b-^:»-»  b-^:  pio^n  izTp'û  htz^ 
S?  nN-  b:'  '\'2r,  riTon:  npb-  bx  ï-iiniN2  r-ii\x-i  ^:n^2-  fan  d-^îd» 
Dro-jrî  Nin  TwN  bwS-1  .  DDTîbiî  n72wV  ^jzy  i7:n;  i7:n;  pb  misrj  "î-nn 
irnin-wS  ''r:z  'C■\■2■^'^^  i;7:nr  3v>a''i  "t  S^^st:  i;73n3'^i  tiS7:n3-^  ^-lnNr^ 
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sbwi-i"'3  "c-ipn  n?3nN  bs  irs^anbi  bar^r^  ms  i:b  inb-:;^  D'-  citid: 
■'2;n  p  i;7:r;:n  iTjN  tcn  c-'io  '^n^no  r-,"'n;:wsr^  riTzrr.-  -inn  f^  -^d 
rr^a  bs  ■>72"«3i  ir72">3i  S=;3"'7:"'3  ht  -■tt'i  i7:m:r  t3boi-i"'3i  2D72n;î< 

.  V-N  r.iNi-i  lî-'S"':'')  bN")0"^ 

.  'ri  nbo  l72t<i  1Ȕ<  'obiyb  'n  ^i-i3 

•  Daniel,  iv,  11 , 


LA  FAMILLE  DE  YElllEL  DE  HSE 


227 


Vélégie  de  BezaleL  de  Sarteano. 

Manuscrit  Halberstai/i,  iOO  (JudUh  Collcrje). 


TwN  N3b  ÛINnD  ITwTa  NT' 

•^TH  rtibT?:  "'Tn  Nb  ir-PN 
TOTi  -ib^n  -im»  -•3^3' 

Top  3-n  nTonba  nnD  n:' 

nn-133  13D13  rti'no  niin-» 

c-^binrir!  rj'nob  û-'T^nbD 

ri2"i:^7:  PNnpb  !-!S-ir7o 

û-^bnbn  anp  ne  bbnb 
n-ip  Dr3  nN3  nn-^m  ■«u-'N 

a-'bnnî  Dn^-ipb  û^n  ■'rm 

n-ip-«  ■^b'iT  ins  û:?  'nao 
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a-ip3>n  nb;;:  i^n::!  û-^iNb 

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abn  Nbn  p-iD  ûy  nsnb 

abp7a  abp72  Dn"'3Db  nprii: 

rnbs'Tabïî  «■^■'b73D  Di-i73  N2i: 

ûm^n^b  nyo-^  nsTnriNb 

nbDiN  'UN  anbn  q:'T3 


rir-'p  m-i  i-j^d  ■^-s:-  ■'-ny 
-1»  "îcct:!  Mbb-^  ■':?'''7:'cr-; 

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-i»5  T^on  amy  i"'3»'i 

m  ny  3>nTi  n^nx  i^ni 

rïKin  T'n  bN  iT^on  r;\x 

bN-io-ib  -iD  i7:d  131:; 

r;72nr!70T  -liC  n;?3  ûrsb  niNb 

bNn  ûo  nN  Qv^ip»  rr^N 

bN:;n?i  -^ribsb  nxT:  "i73"wb 
amb  D'or:   ^<3r  nCN  rr'wX 

IDN    71-13^2    y-lNH    X\V 

1305  "11-12:3  3''-!2  n"'3  r:\si 
-ICI 3-'  ib^n  û-i-noxb 

-I"::  rî\NT  pr)  n'^3:  r;\s 

ne  3  bDb  mnnn  ■'ribs 

D"'^pi  "^'n  '^bx  non  -ibib 
Tiaba  TN  nn-.os  t^nu:?: 

0"'1    Ûl-rt   IIDS  n-|Ttt73 


228 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


n:ii5  D-172  -ipn  iy  mr;: 

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bc:  "Tin  in-^n  3-ip--?:"i 

lîT'anb  b:'  r-n^siPT:  m^n 
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in-'bira  b^^  rôni  rib:? 

-iNn  nb-  ïmbinn  rî'nbn 

inb  iw-  -jp-.D  ly  -li'-^^r! 

-iNc:  ■>»  "irbN  'nb  •^7: 

-."«-■^n  r<'3i  ir:ny  mnc 

"iNDri"»  -^73  irns-in  tinoN 

mn"'  irm«  N3  p"»  -'jz  "iH 

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b-:;  2wNi  rrnx-w  bip  ::n  riwS 

m-O-ipT  Û-«-;dO    13-1    QNT 

biriN  p  bs»  D"iDo  TNb; 

m::np73  irr^Vî-i  bi'  û^^: 

C''p?:y737:  -:N-ipn  'r,^^ 

r-nr^bx  i-^ini  nvz^^\'^  ^la 

D-ip^»  -1»  n-'T:'^  ■«723'  pbn 

nnD3  D"ip»3  Nbi  Dnn  on-î7: 

D-'p^Ta  û-<"noN  imii:"'  Sw 


ûnpTn2  r:\sin«  a'^:T'?^ 

û-wVi?:  r:"'2':;T'T  bnn 

nriTairb  c-^i*":;:?!»  d-'O-'N* 

nb:?-!  -^3  t>.5  û-i-i^iN  ibN 

nb:;-'  -«^  r^c  in  nxi  -«r 

bi3"^  ï-»!bi  nTD  û-ii:y  b-'n 

nb^'  bi25a  -im-i-i  lanb 

baon  ns-'N  fwn  nxnr  n^-'N 

n:?-in  m^nb  b^-in  n^s-'N 

bnnn  nD-'N  Tibn:  -«bnn 

nyc  np-iN  \-!::npn  r-iiST^ 

^ws:  J— ,N  np  r-,-rc-i-iD  i-^t^-, 

r,y'c  ibi  3-tcpn  t^b  ti:-; 

■^"ccn  qbï<b  ;"n  p:w 

"cnnb  c:""  it^n-i  "1-7x2 

n\:;iV-  -1-,  -inN  m?"»:;  wCr 

wnn  Nb  -iiN  ■^n-T'  --p  -^"wT-'J 

rçir,  ■'TN  nrnbrm 

"w-ip  p-iN  nnçp  iTOO  riDC 

nprix:-!  nrc  d-'?::?^  -.nc: 

:?72w;  r-nn-nn  :?n-iN»  bipn 

np'ijii  nn::  nrn  m^r 

yizi  ai-iT:  y-iN  2-j  -.n:b 

Trrij  nn:N  '73"'.37i-i 

:>M'i::n  c-n  brbr-'  ï><b  m-i 

n-'n:  ■'nab  naos  td 
-.72^3  -732  nbi  \^j  nb  -«s 

T:r  ^rw-i  "ircN-nn  Ki:"^"! 

mnn  pniï-'  n-in-'n  cp 

',12'C  ^a^iT'^  bwS-i/j-:;  •'-in 

mvn  nii  yjzn  ■'nnb  -ni: 

bNW'wi  x^K"^  -^^22  nbip  in-» 

mn  in-»  v2d  ï-ij'd'^  bwT 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE 

CN-np  rnîb  !-;t  ïibbnb 


229 

nnaa  n3-»i2  m-i  ^"«n  iir: 


iban  bs'  u:"iN  ûmNSD73  ^J2p 
m-i-^o  ■|72'7p  :nN3  nxnpbn 

•ibi7373  û-^ivaN  moD3  iiTan 

t^nxn  ly  lîb  iî  nstNnpn 

ibo^  i3bDN^  ^-in: 

NDD-in  biD  p  Nb-'i'b  nno 
■'n3u:73i  n72i:?33  lîTr^ 
s^-irr^brya  "'b-'Ta  "^sr:  b^n 

■^n2i3  yo-ib  "ib;:::^  ■'Nn 

']i3>  i-^NTo  HDn  n-Tinn 

■'nXDUJ  '^"'3N  ni23i  '^Tor  -^n^-:; 

^nscrb  û-innD  nno^p 

nDp72  !^;"ia"i  rr^n  -^mpT^ 
^'a-n  -IDD72  boa  bD  s-^O"^  Nb 

z'TCi'^  -^n  rrrin  n-i"::^ 
n-i^-^  rbriN  û-^353  m::>-ib 

^TCi    1N2    1720   t»<-lp   p   bT 

m»  IN  1-^è  aÏD  nb  '7707:  pnnr: 
rr^Ta  ddint  b■^^3n  bn3r: 
mp-o  ']-n  ^<b^  '^b  ribi:«è 

n-'n  ■'snN  nn^o  rr^n  ■'sam 
ma  pnn72  rmirprr  bstj 

r!;n"i  ns  bo  dn  ^nbrin 

■^s^o-ip  m3D  nnx  bsb 

ï^sri  r;72  -«D  "jD-iy  ■'b-'DOn 

"iDiin  np-iT  nnmn  mnD 
■^D-^pian  iin:i  ni::*  np:? 


br737û  pb  -lUTOT  ba  bN 
rrmi!:  bip  ï»<b  û"^  1-173^523 

r!r!Da7ûi  r!nD"»:î7o  d^i  d^  ba 

1Tn7:ri  sm-irta  nbipb 
ibpbpn-'  m7:inm  r-nr-iyTo 

ibo-^i  mN-173  ^•^b^^3J 

rriitTo  r;ï:N3  ■'bsu:  ■'dd 

ibD  ns'TonT:  ^^:•^v^  ■'•«tni 

min  -ins  3T  DN  >^nrr  a3>72" 
■^p-iTn  in72  y-iN  ûT^n  bsî 

^pbn  t^bi  bb-i3  riT  bbviî  un 

■'b^Tp  "^3  ^33  ■''73b  ib 

ipbn  rn373  "nr;a  rîiD73  -icnn 

■^Vn  r!■'r^  obi^b  "'TD^a  !^t 
n'Ty  b^  by  mbysn  ■'72n 

"'bbN  ^'IN  "'WD3  -ltt3  rTS3J< 

'n  pyiujnb  b-Ti-^i  31:: 
nnno  ><"ir;  bab^  mi:  ^rrz 

■"STN   bN   t>i3   nïNîl    -13>-|0 

bbw  î>ii£i733i  55in  pTan  bip 

"'j^y  IN-I    'N  J-11wN-|721 

bbsi  anD3  d-'HT:!::  ûs  û-'O'^ 

bbriTo  b3  rîbir  riTon  'vTsds 

mibip  i7:-«r3-'  t.iz'o  û-'bi^'r; 

D-'Niri'^  a-^TiT»  nnTûob 

mbinttai  D-^sins  rtnx-ipb 


•230 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


"nf:  '-''2  "iwS  w-^Nr:  "«-^rN 

1-c  ■'-lin  nNi33  "^labi 

t^-.n:  yc^  >iT,  rr^2',  z^^n 
■io-inb  ^<]:■'  Ve-i:'?: 

Tin  nbn  c^TriD  bip  ii:?  •;■>{< 

^inT'  ■'nwi  m^N  ^•^73  "iWNb 

Ti"iN  Tnm  "'m72:!i:i*3  inpn 

t«-:3C  biD'^  Nb  C|bn  c'Cin 
nms"'  nsrn  nr2-i<  b:^ 

S":  IN  nrnb  in  P7:-;;:nN 

r-i-iD-i  TN  c-'iTO  E|-ibn  ûi 

>j--i  .-n-:;^  -jp^  -inn  -15*: 

r-.-w-'  i^b  ::rsr;-i  Cim  -,",p 

irn-'  wNb  c^:t::72  û-^-ipTci 

pc  ï-.i7:i  pin-i  ';in::n 

niN-ib  n:û3i7:  r-:-:;^  -iib-'  ncN 

T'-.wNT  Tj-  Tozn  bD 

mN  û\-i73b  ûi  n-'-^nb  rr- 

r-,nwSi  n-^r:  Nb  -m-::: 

T-1-N-:  nrcn  y-wsn  in^v 

nns"'  u^'û  bx  -,3  p-' 
TTiNb  ni:n  m-nNB  ""r'^ 

!-;3--'    pT  2"C  ppi  bl"ii 


n--,iS7:  ■j-'i-r  ■^•.N-, 


'  ) 


nn 


TimD  by  ncitt  n2  e«<b  ibi< 


-,N2  ■'b;*  T-rj-izi  21-1  b:b 

ûibnb  ITî?:  riai-n  m:rb 

nib7  ûc  in»  n";  i?:  zy 

ûibc  rN:!:"i::D  ■■':"'r'2  "'n''"'— 

r-,ibrr  i^Nb  ^b:*D  b-i  rx 

"^rriwS  ûiptt  2in-in  kt:  phn 
nibi-in  ^^mp^::  -:2n  i^n 

Y'i'^^  3-1  ûb-iCi  spniin 

ni:n3  bD  br  ^nod  i-:i-in  r:3 

'^b/û  1:2  nyrciin  mN-ib 

-i}:iN  11-  11-  ^ii7:-;2 
'^r-'-witt  "la"""  ""Ncr  b::î< 
-,::-:  --  bD  -îPD^:  -|nr3 

'^rc:  ::-iL3  aibi  inrb  ^d 

iNb^iP  crn-îT!  ibo 

"^r-iT  p:î-it  Dr:  bs  brn 

■'Nm  ^pzy-n  i-,r:p- 

"'.vcm  ptwe:-  bs  br 

"1:13  p"i;*2  in'wP  r;-: 

ni-,  -12D  13  "ipbnn  ^n?:-:: 

-i:d  -nN73  PN  bxr: 

r^2:br^  -i.^»  -■'■>::3  c^n  bzrr: 

pim::  p"ib;*7:  r;-:D  -c^b 

r;i:in72  i^-rb  niiinTo  tn  PwV^ 

P"i3"iwm  pi-^n:  p-r^b*:: 

qbîî  i:?:  ppx  -^-o"  xb 

'j-w-'p  :-:  -1";  nini  Vd 

pbp  y-wST  z^r-":b-p  z-i^r 

"(Vw^Ns  iN"^:  r:;'::"w  yx 

■;-2CaT  7;-CN3  pd-ij:3 

•jTcb  bD3  a^-ir:»:  nbx 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE 

■jïin'  n-'t^  "7-13  "j-^bn 


231 


bna  "TDn73  rî3"'*n  mp): 

bnr  Tia^  Tin  ■'ai:  '«in"" 

ûbw3  b^tî  roo  r;723n  \^^z"a 

bmr:  TN^a  ûn-iNon  b"""7:ir:b 

Dbys  nirt  bN  £*^m^  d"''^n  yiN 
■Ti-iN  17^^'  "11""^"  p*ij:n 
dbir  nr  ■mNTD  "icrp  ^<b 


ûTO  "«D  p-iTO  bD  br  -in 
■^niDb  n72:i:i'2  nbo  p 


']n3  ■^ri-i  -^n  ^::n  pr  pn 

1730  rrj'-i?:  nnia"  -n-i::^  -nii: 

^l-ia  -173N3  p30  û-'-'H  pb 

IToN  l7ûN  nbirb  D"^^p  bx 

ûbn3>  N-nn  bxb  nna  ûbï:3i  un 


D;'r_^'  bs  b:>7o  !-:n72  rir^an 

"IDUÎTiS  117073  a30  -I2'û: 

û-^snTo  pmb  i\mp:v 

1D3  uni  bN^n-'  "jiN^n 

1:313  i^7:n  i3na  ïS^nTo 

û-'-im;*  ûi-;  ï:npn]i3  noss 
nn::"'  cd-'D  "7û'::ni  >*:::n  bri 


nr;-ir;7  v^"*  l'i''^  D?"i;'r:  3rj3 
Ijniom  r-irrs3  r<-n3  b:^' 
ir>j:  me  rmnsN  131  cn 


IV 

Inlroduclîon  ri  fin  du  mN3p  nn373  d'après  le  manuscrit 
de  Manloue. 

r-!7D5n  ï-îïTob  ib  («m"T'^-ii:72  nrniN  ia  rnT:;yb  inD  pbn  ûip-j-) 
;-iT7:  .  t;-«72^Nbi  y-iN  ■^3b7a  hîwS-Tw^  r-,"iN3^  nu:  .  !-i2i3m  r-)im 
tbo  ins  tmb:?7:r;  .?-n73i2:m  rr  ib  .  ti:'^7:n-ici-!  l»i  ï-rmbTor; 
"n3D  13  n":£i  lîm-i  i"nn73  Cibon  c^nn  3rcnn  Viipn  ,?-ii7:\sn73 
•i>o'ibc3  "c-nin  r-iN73  .  "riD-iin  !-i"-bT  o"'nT'na  rjOT^  n"nr:7o  n^Dnn 
1"-  N"N   '133  13   û-^Dj  bx-'H-'   l:'^73\n  311  n'^7:-'  pp  T^'73:?3'v::  -iir::n 

•31  ûibo    .  nd-^dt:  rî"r;bT  bNi7:">::: 

rr^b^n  ■^D  .  nt:bm73  riTosort  i72"=or;  ûbD  (b":^  pbn  £=iip-:r;) 
iirû  '0\x  ^r  'n  i-ib7:n3  ^3:^3  ^r-;7:  "in"'r;b  tiiwxr;  r^j«m3  n:i5 
Nin  iCwN  mm7:r!  nr  y^r  û;7:w\i  .û"':"':r3"j  3il^3  ^--'by  inmirnsi 
CwNi  "inbiT  ûr  I3nn73"i  p3nP72  im-»-  1:^-3  "13  t^i:?:"'  ,DnwX3  rrbir.o 
nbiron  ?-,nt  13  ^-:J:7:n  Nb  ■'n-r;-^  n^m  r-,ir"77crî  r:T  !rT>r;  Nb 
r<ip:  sb  n-bn  n"3r;  ■>;"^73  1N0  b:'  m^sr;  nby^  rr^by  i^n  s-tNbsîin 
t>ii3y:j  inwXi  .ztc  rr^n  Nb  pb  mip  -^s  ■^-ti'^  inT^r:  i-jt  bs  cic< 
î^ip-^i   t=!Ni3  !-!3p3i  13T  Ii3n"^  ii7oî<  •\T^A^    ûTN   î<ip;    £*»:mi3nr; 

*  Note  de  M.  le  rabbia  Jaré. 


232  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

n;^?:  .  ût-:?  pVnn  r;3r;i<m  .  ï-înnsr;  n-ir:i:?:N3  nVx  y-^^^  ab 
i—i^-ar,  tz:bir7:  r-:br7:b  -nri  .^"':?n72r!  ranx  -:W72  .  s-ij^r;  rnni* 
b2w\  nn^-.prii  rr'^-'îr-sr:!-  ni-^im-TD  na'in  rr^nbn  in^rN  ncN  rin-'tiNn 
t*;-'-  t-^N-i  c-^^rm-in  z^^-cf:-  a-'rjyr;  ^cncn  npaiîT  nnno;  N-^n 
Nnp3T  rî":^'  ir^x  ar!"i3N  r^b^'  r;by  t:;n  rr^ni^aNrr  ribn^r;  nbr^rr 
Tw'N  "131::  ï-TNiii;:  l^'X  ■'D  t=b-,:'?:  pcrr  t><b  rirbi  "nmwX  £z--,=i< 
t<">r;    '^s    .■'NTin    n3nc-:ri    m^-'    r-73Dr;    -i-oa    ■'n    icsn-   -ib   r-i-ip"' 

rrrra  h5"T-i  Ij^d  i-ivii  tcn  r-,\-i-'7:Nr;  t<p-,-:nr!  N^n  ^ntt 
~n"i;n  ""rc  S^-'W  i:b  n-  r/'D  ":d  »-im  imNi  ■'-.n^N  'n:-^  .r^Mz'.'p'û 
in-'a  -.wN  c^i;^"»:!  -■"'rs  "'::-'N'^-i:::  bxrwc-'  -i"-îr;i73  "'ô"'5  r|ibNr;  r-i-ian 
n'^Trb  "cv  ^"^=1  """icn  "^b  r;7:r  .  ï-iTi^rbi  rTi"nb  ^bi2  'cçiz  n"»3 
■^CNT  iTjji:»  Ï-I73  .  ri-m7:nrî  ']'^P-,b?72  mnb  ^^^bwX  ■^•^^;  insor: 
ï-nppnT»  i-n-nnr:  m-,7:N  .  ^%ni-,::N  ^snb  ■i::b7:j  htd  .  ']\-nbr;n 
ï-TT'pnr!  mibann  ^->?:N^;  'jT'r'r!  i— ,^7:n-m  ntNn  b-bi'3  frrrw 
'):iD"'T  ippi  iiTcbrr!  "^73  "^rs  '^:'  qn"!":::  ^mm  .  t««i-i7::iT  ^<nj-lr:^ 
nrcîwri  ïnn^-iKn  ^3^-l^  toni  ar;\-nb:i>*7û3  a-iT-ib^r;  -irmj>"'  -icN  pn 
t^-izy  bipn  r-niîr>r72  tzi-^-inb  tî-'s  -i:::^:  -^bo  ■c-'i<  .t^3i:  ■'srnbn^ 
ib7;3i  &ab  nai  ^n  îmmr:  r-.-inVwn  3-^",r-b  ibs"'  Nbn  ï-imns 
"i^TiTan  ^r-n  -jr:  nb  t^wSI  rrn-^TjNr;  t-J2-wN-  ^-;'w  :=r;^::b?j 
CTiS  bi'  nDT'îûin  "Ti^abnr:  ""wi-,"!  b"'3\:j"'"i  v^"'  n-p-  in;:D  m;;i3r-- 
n;irn73  by  ^n•^'ùyrib^  û-«-i3  by  û3-'i:r;b  ninn^Bcr:  mnr"»  î^Tcn""  rTcNn 
r-i"D  b:»  3T2b  bsT"  T'Nt  .  ûism  CLmNsn  r-n::ri  ûs-n^i  fcrinb 
■^nns^yT:  boT  Gip  ■^■j-'/û  i-i"y  ^-^mnN  ,  r-,Ti"'7:Nri  rr^inn  ctj 
v-  ûno  bb?:"»  ■'X:  ==n-nn  nma:;  no  tcn  bis-ic^n  rî-mnm  r',•)z^1'pl- 
13-13^3  nnn  .mby-jm  Tv^T^n  m'in^.mj'^  itî  Dn?^  m-'-nr!-!  m;:r: 
iT!  £2-73  Qn-imsT  cn^-nPDD  t:-->;-«7:b  ï-tîcrm  c^"i«:ir;  pnno'CT:  bs 
mb-iba  bD3  PNT  ïnjp'iiTa  û'^153  t3;2">3  h^iia  1x1372  *]:>  0730  n"iT7:73 
■'cbN  ■'ONi  ■^3ip3  i-'r;  tibi:?73  ~."CN  t3'ni35rî  r,J2r>  r:N"'b:3"'Ni  ï— i-:-,:^ 
!nb3N  s-3nb  t3rî"'E3;33  ppTn-  -^d  '-  ']i-i3  -pr  ï-ipni  .  ^n-,*C"' 
m-np-  -'■z  r-.7:i<p"'  ']''by  pT]y  nosTsb  P"w3b  tpib730  r-ir3\::b 
pv:;-»  "!3b3  iT  xbi  ."^riTT:  ppciD  r!3">N  31G  r:b':;  >*ï-':c3Nb  p-i7in 
r|N  SZN  '3  .ï— .i3b-r!  ■^3"':r3i  r-iT'iiTûbpn  PTT«pn3  en  izy  p  i:b 
t303  '^^■^i•^"'  mbi'7:r!  i-ip-'i  "py-  "'bii:i  û"'N'«:;3i  c^wn"  û''"«::i-,n3 
^311373  is-^t;  inx  •i3ibi  .  î3-''T!i3P73i  n'^3'::i-'  n-^Tsrsb  nn''  i3pt'-3 
.  T'33wS  T'CD  Dip73  r-i:'nT«  ""wd:i  2\Nbs;  D^b73  ']"'D73  t^^-^riip  n"wN 
3r!T  ni::3T::73  •c'ip  cpin  ■'mPD  3PiNib73  .  ^-rvs  »— 'u  ■^33» 
r-TP7:nb73  Dinbb  -;-;"'3  r-ivs-'D  3in  rnnpb  ^r\i2i<-  r^ss  ï-iip\:;in73 
c"'-ir;*-\n73ni    û'^-iNîP7jn  ni3    f-iPiP72N    S3'   yczz   ppbi    !-nin   S'O 

'  Baba  Mecia,  85  a. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  233 

•'pian  S-n:i  i-n3iin72r:  s-naort  '.-^t:  mbN  bD  in  .  t:>  irr^n  riNï; 
■^w  bD  ï-nnis-'  Nb  û-oû  -icn  ï-it:?  nanx  -^mN  -^na-N  cni  ■^sd^t 
ûnpwX  r!723  rnn:?T  .  ']Cd53  ï-i-',i":;p  ^csït  -«mw  ■^"inwX  -'D  :]Xt  Tivr! 
in-in-j  ■^3Wo  i-tD'^N  ^3'^^"!^  r!7oa"i  riD  ï-ij:"in  riT^m  'n^  "^îd  pn 
mr^rn  bo  '|\x  ^-ibn  "^pn  im^  -la^^t  n-'^n2:3r;  n-^n-^WNr!  ï-mn^n 
s-in5N  Y^  r-iN3in  noN  !-T::ûpr-;  nî<T  ^-1^;tt3  dn  "id  t^-inrib  v^s 
"îi'ii  .  ln^-^D-l^^  ^nar:  ^7ûcbT  rrrnnn  -lOx  mN'pr:  nn^?: 
■«-13T  nc<  z"i2'OD  l3"'2:;  qi'^îdn  ""jO  v^  cûircbi  nrnb  3b  ']-i::t'  ^"n 
^"T  Ti^yi^  '-\  ûDn-  hsinsn  o\Nr;  .û-^-innTo  in"»  irro  imn-i 
T^-im  S3>  pbinn  -^îni  .  mb::;nnn  n-i5N  rm-ii-  irn:iî<3  •^c-i-inr; 
'P''i:z'n  nN  p'^n:in"i  ir:-::  nm  î^n-'  n-TrbNt-:  nri  mmD7û  ï-inrîï?^ 
!-io-npn  in-nn  ^yii  cnbD  -^sn  't  m7:nb72  ■'::  û-^jD  mx-'Oi  ■'nb272 
■"bixn  DN1  .y-iNn  "•»■>  b3)  'iir  ^-l720;^  "^ni")  rx  "jn^  "^"f  !~i"'':3~i 
nbiN-  on-'\-n  "'n3r::73  l-^bn  tn  £=^n?:iN72  Tiba  tz-'ian  n"ri  nic?:"' 
-i-njnttn  i^T-  nrobn  t-\^p^y■l21l  mn-iu)b  q-ni:):  .  s^own  -i2:ipb 
udct:  "ji:?  r-iï?  od-'t  ii-^iî-i-j  ono"^T  n^T^irp  nb">r-'T  i-ny  fnz^rf^ 
mno  ;ii72nri  ^D3  ion  ripmn  t-iaor!  nT^xn  ^-JT:  t^tn  br^an 
I333r:  1-iDon  b"T  bTi:;r;  n-in  cdisî  -iCi<  mT^bo  r-:;^?)^  rmi'ï-iTjr: 
■jn  pi:nn  ';••■'  Kst»::"'  •^■jtj  cni  ^nî<73  !nbia7o  mnDin  rtman  .  N"n 
'^mnTûN  '-np737j  :?iD">::-b  nD3  -^-itn;  ^:^7:"'i  "ç^mnDca  t-i::Nr: 
n^3  '^p-'n  r-nip  ^52:3  q^nno-b  3wS\n-  ^nny  br  ^n-n-C"'  ^z-^-'^iz-ci 
izn^  Y'  rn.xmr;  ton  TDnn  ï-in  n:  np  nn^n  .  r^;■l:^:^;  rn2i7:Nr! 
.cnbOT  dbi:>b  '^-i3:>  m-'a  '^-nn-i  "jnDnnTOT  ."'•wd:  -^nm  t>i-'n  -iri:» 
p"Db  S'^'^  nro  p"  n"-i  no-ioto 

o^ma   iDnv   '?"-ii^73S   ûb^rr  dDirtn   n-^^urro    nniDT^   nm'On    n-tî  pntt 
.t«^D'2-û    D"'Dj  bî^-rp   '-i-b 

•'ibu:  bN"''7a73T  11:373  rin^N  .b^-ic^n  bii:;"i  -10 
■131:  rm"T'7:T  ïT'p''pDa  l^oanb  ■^rN'n  r-î73C2r!  Tîbn  y-iNn  !:]:r72 
ï— np'Oin'û  riDiD  mpn-'-în  î— .ippii^a  m-nn::  r-n-i7:N  -^r^yj^'O  pi"7i:b 
!-:3"0-^T  rroN-i  rî7a"npn  rnnnwS-  f-nmazT!  n-nano  b:'  t-nb35i73 
173  "1313  n"'ibn  ni-^r-^N  ■'d  •  n*-bi"  iirirD  Nbi  .  r!73mrî  npbn;  Nb  nTnn 
riDi-irT'  mn-r:  "jnby73  n3i3  nmj73  n3r:j<  p-i  n^-^'n'Cj^r,  û-'-i3nr! 
mbr73n  b33  1.^73  nbi:;  -^d  n^m"'  •^02:1  nr-'T'T  n73bo  b3  3 
.  n3-J3  »  r-n;iD  ï-it^d  ^30  nrsbn  ^n  r-iT'rm?3m  r-iT^-'b^'on 
N-CNT  ymi':  i-'-n;*;  ion  -rinDT  i-n^n-j  Nb  y-iwX3  ■'nsba  npy  c:n 
3«30n  icni  3bn  b-oxb  -1730  irmi:^^;'  rmprr  t»<r^03  173iî:73  ^p:;n 
lî-^oTû    tZ3\si:v    ï=m3i-    n^m    nmrrm   mmrr;    r-n-ppn3  i;oc: 

»  Soucca,  32  a. 
*  Berachot,  30  a. 


234  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

nîPwn  £*<bi  nnsnn  Nb  î-iT^rbcr;  Sd3  T>nbibD  nnrîNi  mT?:Nr: 
'r-î-.n-j  5np::3  rrcîTwT  ï-î-,p^*  -ins  ï-îsn;  ^r:;  17:71  tz-p»  b:3 
î^b  -iSNn  i:m:'  nb^-cnn  -^jj  -^sbi:  hy  Sin-::  •'■^m  t>t;b\N  rrjTrpn 
b  w  3  n-'bnbom  bnsn  'j-'îîi  n\mb"'btt  E)-jp72  pin-7ST  T'mpsT'  n3b"«  C]ap'^ 
^pbN    ^r    i\niî<îb    i-^p-^c:-:    iT-.-Ti-^    -,-;r7:2    -,cîî    SL-'irtr:    ^3t    sz"» 

11-inN  nnb  -,Dio^  -n"3[n](n;s  pim»  ï-TwN-ù  V"=  T"  "-î<  2^"»"^  P  aa 
■^iib.N  !-!rri  •t;-"^"'  br  tznnD  t^  rD'sn  ï-ôi?:b"i  niNb  pn  -ib:? 
''~^-  !^br;  IN-:  'i-,'?:^  tz-^rca  l[-n  r57:2n2  Swxb  bb»  ■»»  "^yn^r-i 
.  ï-ib-'nnr:  ■'^-,c;  r-r^^cNr;  ci-ibnpM  r-îbi:D  ^,1-^:1x1  y-iwX  "^r^Tj  bD 
!-!n:^in  r-i^bcT:  ipn  ipm  luX  t=;''-;^r!  am  n-irn-  bn:;  tz^n  r,- 
■in-,î<2n  :?i-iT  £]-rni  n-rr:  m^Y'^  n^x  nbiii  -nrinn  nbi  --^bvwa 
cp-'T  rr^mranN  1:133  .^b-^nb  i-^:!-!:?-!!  lab  r*::  riTnTiD'^  i::73  "TCN3 
"l-iTi  .nbi  r-.-'b:;  -:•-:-•  -,;'-i"r;  r-.bc-u:  bx  rrro  '^-'n  j-7':in"i  ^,"'^^7:r 
bi:;b:;-  333  >*"j-';t'3D  y-.N  ''rD"'b:?3  !-;-in-,''d  n-i-ipT:  rib:;:-!  ro; 
Src3  -rrnr  t5-,i  p'c;  i-i^ri"^  !-î-it:2  im  rrT^nnn  un  nr^^m 
!~t"2nb  ^Dn  r"iNi3n7:3i  ^■'"nnn  t:-'E:3  mirijrp  !nb:::3  £::''bpNr; 
i-13"^-;  e-iD-iD  rr^y^  tz^^^'icr;  "jt:  bN-,w'  Y-'^  ^^'^^  "'-"'"3  ^~^•'-  p 
3:3"'b  -iip3  TwN  3nTNb  ii:3b3  -i-^tn  t-,n-  r-nbc  ^^-,-  ■wN-,3  -3 
ti:-'^7:^:Dr;  !=:pn-ppn3  bNi:iT  3-1  j?-»':;-!?:  f'n  n-'-ibK  niD-i;*?:  rivp3 
-,CN3  !=:-^7:3in7:  c»3n  !-r-2r:i  tDbi:'  ^:-ii<5  f  ;2ii:^'r;  ys  n-'-xnb 
i::^-^  12  ■'rwV  î^-,%-i72-i  .  r-npibr;7:r:  rbss  '^m3n  mr^wn  ^ir!^  p-:: 
tz-^rs  r-r:::p  r3i:N  ::"^cin  id  û^pd  b3r;3  ^-nN  ■iDT«r"«  in  ^-lb;b■l; 
"•br-wS  £="'p3-r:  "j-^s  mn  ln-r;i  n^csi  ;:;r:5  -^SN  inrrN  c=-a 
m:?:!  .  nb:;:rr;r;  nP3  .  tzrr^-sr  "^rc»  D"'31pd  nr:  ^»îbr^  f>i-,2:r: 
7-r::jV  -w-b^ra  p-,:-:::  pb";3si  ^313  cv4b3  pb3  si-'^bT:  in-'ro  ,r',^i'p 
n3cb  =;•::  ^■•;pi;  ibxi  -bN  '3  \-3-:;r:  pi^-i  3*~"'  prnb  r-ss: 
pt'-j:::  p-piic:-  ■'"w':3  t^b  ■^3  PT^P3".r  pt'N~3  S'^ti  J^'pbx  ■'-,3T 
PT-^bi:i3  Pir-i3-3  pvb:'  Pibsi  !-::r!  pi^n  "^s  pv-,3r-  rr^Tyn 
Gipw»  piToniT:  pittN-n  \3-«33  pi7ûbi2W  p-i3ia  îi:'';3N"i  nvbs-i?^ 
r-i;p3  pib-;'  17:3  r^iTT^s  ';r:\-mbip  piKipm  ^^y'Jir>■z  in3-i  cnp 
~:ip7:i  Cpbx  r-i"'3  3wN  ^3  r-:-  yj^i  î-n-ib*:;"!  p-,3i::"i  sm^b^j  'n 
tn-'HTysT  y-iN3  -i7:i":;i  n-i::"«3?:  yii-^br  'i"'--'-;p  »— wv:  r,rzz  3'^-p  S'?: 
■b  ip-«  -ri  "]pbi'7:b  "jn  p  pIwXTwPI  .  tz;-'b-iii7:  t3-';"::;:3  f^rprra 
■':^"ibu;3  c-r-wS'  t^-:pi  "ip---  S2;*i:3  r-ii-rb  i—^z'v^  fr.-^z  -3n 
rr-wN-    -b'.-.s   -b:?7:  nbr::   r-ibrpi   'jp-'   ■'::"i  '^p'3  31:1:  31-;   -P3":»i 

.  t^::-':i^3372   mbci  "^pri ^•^3 
.  ::"j:-  t^-^p   !"■'  'i   ct" 
:b"T  \3"«'-:-i::  ris*"'  -i"-33  "jrr-^ 

'  Berachot,  19  *. 

*  Mahkot,  12  4,  et  Kiddouschin,  \0b. 

3  Pea,  II,  1 . 


LA  FAM1LL15  DE  YEHIEL  DE  PISE  l:3o 

.iz^^zfr,   ^'D'2   ii:nD3  mni^ni-;   vmbr?^   ".on    prnm    -i-^'iNr:  b^^,^^r^ 
-iDT   .  ï^o'STa    'p'n:!''   '-13    t=;":n   S.s'^n-'   n"--'':    .  £=^-i3'a3   :?m2   itto 
:]2-nDr!b   3>3an   -^abi:    m^'jTo   ni-   -v^n  r-î3-,3b  t=:-'":J-np"i   t^p-^n:^: 
!-T'-i72N     ■'b3":;73    îi^ipbb    .  i-i^j^mn    ■^3o;o3    Tinw^Di    .  r-T-::Dnn    b:i3 
.  £3"'7jib"«:::?:T    t2-i'-i\x«    .  !=i"'73r;:3   ^vob  riTT    .  rr'-np-o    ^iw\*3?2    3i.N-wbi 
ppnr":j73   n^'s::?:  ïr^iNn   rvrîb   .t=i-'-iJ:i;r;  nn37:  ^'3:33   SLwin   nn.xn 
-,003  -,pinr!  nsT  -i"::î<d  inx  r30  s-ir-'T'  ûy   riTi    .  :=m3ir;   j-i^'-ib 
■^Di-n  "'jpn   "•mn   ■^o-'.t   .  -inî*    T^^ranb  -^lor;    .  ^inNO   i-ijz-^i  zyiz'cr, 
.  !nb:\T  bi'  ta-^sin    .  ^^^-nnb^   b3>   £=mp"io    .  ^n\npn  ■^cp3^:T   r-ninn 
p-i3    -ip^-nTû    ,  ï-T^m3\n;b    -Hw^t    rr'brr.b    13     -pr;    .  lnb::3    ii;^3'>::"ii 
r;":;np3":5  -i3T  bob  liOwXi-  n:r3w^5  n"n    .  !n^i-i33  •^^3p?2    .  ^-î^-l•^-or3 
.n^T-j-ibi  n-nn-   3mN  b"T  ■'ipT  "uni  b^^n-'  n""ir;7a  bwXT:J-'3  bm^n   tû 
mns    in"'3    .  !-I^-l-|^:■a   r-n3'n-)3  >c3n   30    .  n-mT'-;-'  -pbN   inrû   n^a 
î-î3ii£i3    .  f<nn;'7:c-   md    ^y^^^   b^    .  inm:»    1x1:73"'    t^o    .  innmb 
^-53)1  n-ib  03wS   Nb  TT   bs   .  r-7::3n  !-i3-ir!    ï-tn-i    13b   (•.')  ï-i-i^-in-ipT 
T:nb  ,  tzi'^oiN   û;*i  'n  û;»  3i:j    .  ti:-'"c-in  ï=3m  cnb  113;    •  r-!;:ibi'n 
Sdi    .  t=^D72i'5    VJ3    rrnp^r!   ï-i"nn3    vr-jD    .  t:3^r:N:    n--?:-'?:   ins 
.  in-'-iî"'   r-rnr^r:  -ni:3>  -^jû    nnb    .  rbx    S'^-.o   .  T'bbn-j    !=i"':i'73Twr! 
^^012  ciTiD  1730    .iLDDi    13^7  inb7:03    n-ii:   r<b    .ini-ii:'^  cin   i^^-'T' 
-1^5-1:1:3  Nb   .  t=i'^i3T   nni::-'  bo  t3DiD3  -^Nb^o  b-»:::»   .  idid  iy'\  ûbirn 
mb:y  nriwN"!    .  tzimp^n  •'•d^i^i^  nN3    nNb»3)  ûN  "^D    .  f-i-^KNin   'CN'n3 
^"1372  ibrN    .  non   b::3   non   iTinn   t'Ds  iTnp  .  t:"^7:-n73  ■'T^cb  i w35 
!-."-    •  t:r;"mb:;r?a    "w:    xb    .  t=;r!-^"T^3   tnTn3N    -^or?:  ithn    .  t^"7j7û 
mxo;-  .m73Dn3  rr^n   nb   tcn   b";   -pn-^^    n"nD  ■'Tn    -nn:-!   iin^ 
•  î«3'-n  ii3N'7  m-^nr;3T   .  r-n'n7:n  w-»j<  b^-^no   .  smT^  nor  .  mTD-im 
nb;*m    ù'iTi-M    t=!^723    bb'Z    .  !-î3:io   n;?:?:   "lOwX    !-T-.p    ï-irr^-   Nb 
.ts^in  û-'Ta  r72"'?3    .  t:-'D">::ro   t:pbi   rr-nn-   -^^r-s  t-ir-p,    .n'erra  nnro 
nvvTDS   MTi-    .  mN35    r-,im-i    pn   ni-    .  !=:\Ni:T'    wTpn    p    -^d 
■^':::wN  Sdi    .  t2""T:C  nro  t=ic::2   niD    .  t=-'-,icNb    nx'::    -.?:n    .  r-iiwS?:^: 
■j-iT^:;-'  pT^i^"'  nnx  ï-id    czbo    .1-133  i-inwX7a   c\n  iojî    ."nto  ï-nbs 
tn"'3    .  nb    T!-'?o   fnp    .  ibns  b3n   T'p-13  n-i^wSr;    .  nbbnTo   ^nn'O  h:? 
Ti'^H'C  f^-jn  r-,wS-i^3   ncN  ■'3N  -^r-iiN   3^-;-  c:.    .  ibbr;?:   :.-::Vw^  n?L:3 
— ini<   ']-n   ^"t    hDi<n730    '-in    S'J<t>:3"'3    yr^zr^    '::^iir,    .  p<^"'3bD    nb 
inpii:  .  nbrin  Ti-j^yiz  i-arw    .  t^rf-^n  ■^73"'7:73  nbi  ribi    .  t3nTi-i3-'nD 
,  5r:"'rjr;  nmnr!  r^rjii^  thn   n3''73-'3    .Mb^'T^b   Toynb  !-t303t  r:3n-i 
minn    inb^-'    '-533    -53372    .  t3i-'7:-,2::;'r!    snv^onr;    -^-ied    ibî<7:03i 
137372  -)":;n   n5<    .  t=:n73  inos   p<:b  .  t=ir:b  iri  s— ,-'3   ir-^3    .  i=;r:3nr;i 
im7:3)    .  tiDD:  Cjncrs   rî-nnn  t=inb  bioNb   -'d    .  rc-.-;^    ^37:1  .rwp3"> 
.  — , v-    -^mN  '-  m-i    .  -i-^'jim   pprr   -^sn  tns    •  ria-^   t<bi    rrrr  î»<b 
:rzj    t<h    .  S=ir;%mi:?:i    ï=;-%-ipn    qmbi    .  r3rnn'i3py    ^-nx    rirbb 
.  tzirî-TnyiOD  -irN   :^i3Db73  -^bsi   li'ms  î»<bi   .  izsn^mri?:    "'3b  -nnN 
PN  1NC3"  .  Qi-no  Nbi  m73bi:  [.û]"'-iop   -^b::'  -lop  pTr;  b.-b5  -^3  !:]Ni 


236  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

•^•wN-i  n-iUr  "^i/û»  "inpb  .  mwrTT  ii-in  r]N2  .  nwnî^  i-ittiia  "'bs'?^  ■«T'ti 
!=:'^rT:;y«:;  r^nn    .  t2-^;i:j:;'  -^rr  i^nr:    -tz-^rc  -cb'::  p  -^zni  b"T  n"n 

rri.sr;  ']-n  ir-i"  pnt  .  i-'d-'n-  >^b  -^^xb  -,T:iNn  .ts-^ipT  ■'-j  ><cn 
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LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  PISE  237 

aTj:i    .  -lOTOm   SDOnn    ir^nm   jn-i^ix   tn-r^ar,  ■'-13-  b^r:   ^-^^n 

onp  t=i-'^73-'OwS73  J-inn  .  D73n  y-iwX-  nsbw  ^^  ti72N3  .?-nbs::-r;2 
.  opb  tn-'n  rr^rîT  .  ^pm"'  t-^ib^-  T'7û  t:)J^^  •  0-3-1 /:b  Gn3i73ïn 
b:?T     .  C=;">"ip"'    ti;ir;D'û    .  ti:-'"im    r^p     ir-iDina   •>:;"'    DN    """d    mw^rri 

.npnb^i    l^n^wx    -nsn   so    p   xb   ton    .  t^-'^an  !-i73-i:'n  ^is:p2 
-ixn;   TJN3    .rnp:?}:  risrin   ■^^'::'nb   irnp    .npisb  nsT  nn^n  m^^ 
t^b  bDb^  CwSD   -^ab^  nn^-    .  npix  nrs    :'^an?3-   mnîra  ta^îob 
lî^nbN    'nb    %nNDp    ^<Jp    •  S^^r!73   bnp    tï):    pNO    bnp    .  S=)1N 
■^nb   bN   •^jN  %-!-i7ûn   .  !~T~::^'  ir;::N"ib  r<"«n  "iu:n    .  M-nnrjr;   "in-nrbi 
.  ai   siiNi  -j^Ta   ûN    .  '  a-ib  maD  ypbnn  ^n   'n  bib-^n    'C-iia   cnp7J3 
iD  "^n\N-n  Soin  ï-td:d\st  ']\x    ■'D    .J-insim  n-i-i  I^nt    k3  i-iwnpN 
ï-ir:;'-j   ibn-'   -Di    .Tû-j"i-T«    a-'bbiyD    norm   .Ti:mr    "irn-iin    -^yjs 
t=Y^^fn72  -0^7:^    .yiirpT  ::>l:'i  nspa   rn^mDiwsT  n^m^no  r:"«DiD::72i 
S::r    .t:n-nT72n   ïnN^nb    in-^on^    Dm    .t=^nD3   "^^5^2    ip^DO^   .  yii:pa 
CDnr;  o^sn  bx  n^cnb    .  ^10:0    ■^;n7û    ïnNT   .  -^n-jab  ï-t.s^p   ^n^a  p 
ivn  rauD    .ï-Tbm:i    rm^^t:    r-ira    a^nm    r-ii:p3   ^d    i:>^mribT  ^  T5r: 
n.sian   rtb   rîbz-'n  •'Nib-    .  nbnon    n.sT  iDinn  no-inujs   ^o   .  riDii:73 
■jD  .lU-^-innbi  diT^b  .•^:tid-'  -^nvbDT    .  ■^3i3"«C'^   ■'di^'D  -^o   s^nt    •  r:bi'm 
i-im-iKN  noN  .■a-'Nb  iia^  pibnb  -^iNm   -O-^nTo  o\s  -^r^'n  û^n  "'nx 
û^bsnn   r.^^-p   nbwî  n^^nn  "{\ni    .  m7:-n  m3.v>r2    .  n7:Nm    •  o^a^ribN 
.  SibD    ina^n;    ^m    ibtJiD    iJ^'^aT    .  Sibm   ma:;   nn    b^    ï^nb^? 
— :\:;î<   o-'Nb    -^li^n    T-^^r,   xbi   .  invo-  insm    .Tir-'T'   nicip  Tn^-i 
><b  -^D-iDT   .  r-T7j3nn  TJir72  n:^'2"iD   >>ib   ■'r;'    nox    ^bm    bn    ■^îiwd 
D^nmn  mmn.-   -anbi  -jbî^r:   ■'-cb   N2b   .  rT73-TOr!  y-i  no37a   Nb7:nD 
yN    o    -^nona    »"7a     •  t=:-'7ûDnr;    -^rr^:    iwsbi:;i     .  y7:v    p^n::'    p^'^iJ 
oinsb  n3N  û'^n-'-'inM    .r;i:-i3>7:3  rniD  tirD72ri  n^;   .  ini:^  y^si   -rrn 
la^-inno    £=-    C=n     .  rn-,rin    m;i72w\r:i     .  m:'-;n    ^binbn    ynn;bT 
::d':;?3   inb    .  J-ninb  pnbnb  "^"ix-;  m^Dn    .i;nbnD   irr'n'wm    •  "i:n73ii< 
t=p-n3;  b^c-b   .  ambro  -:in  n:^m7:    ton  t=:^r72  ■«-isdt  •  ï-r-nsnr; 
r:7:"0    ^^N-p^  nNTr:   nnriwS'r!  ^nnan   p  bi'    •  ùn-nNi    ds^'ji:  -i^srsbi 
-iN-wb   ^«i•^^:   ton     .  m-nnbi   bxn    tziob    ■'HNjpb    mx^pr;     nn:73 
.  D^;nî<  -a-T'  TON  •o-'Nb    .  it.-'jd    non    Nbi    •  î-i-nNi  nbni:  m?:3nn 
n^T^-"    .  in-^-'b):    -^DraT    .  injinn  n-^nai    •  in7:Dn  y203  f^js  b-«r:^-'"i 
p'ON    .:?^-iDr!b   moni  rinrin  û:»   s-iN-^D-^oib-^on    mnaoi   •  :?'^t  C|N 
ynN    V'^ia    .  r^?:NN    mnronr;    n-nnn   mr"n    .  r-ir^Nr;  p::?o?:    r:? 
.  n-'D"'  PN  n"^Toni   ar::'-  r- .-iwN-irtb  .  ri^-.p  na-n-iai 

»  Berachol,  l'ail. 


238 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


(iDor^  q-icb  -iCN)   nsn-jï?    TT,n 


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.  ibcT:  NC-^i   ibnp    û"""!"  ni-  s:;   ,  n-iriNr:  "^-la-; 


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N"ipj  bNn-'^a        no-^dt:  b^-'n-'     rion  i^b:?  bsia     n-j  2-i  •^t-'N  Nim 


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bx  c-«n-'  '-iri?3"' 
n«:?  i::au5  "«tn 


Le  poème  cVElia  Bahour. 


Aïs.  Halberstam,  4t)6. 

.b"7  nd-^dt:  rri-i^KX  -,"-nr:b  inb-^ri  pip'i'sr;  N-'btî  'n  r,'::-j  n-'C 

5  £-7:3  ■^n.\73  mrj:   "^-^-ini  ûnnaNb  -;on  rr:;;"^  bs  [N»]  n":' 

anaa  min  ib  i»t«_  Nb  a:;     ♦ii-  '\-^fz'}2y]  nm;:  2^'  Nb  'jnîab  ■'Tin 

ûnsD  -"rT^  sginrap  i^y  [nb]  ib  rjrnis  r;7jn  n"î  Nb 

ûrr^boa   Ni:«:  -i":;n  bs  m  [arrj-'Sinî  i"^3  mpnbn  m73rn 

Dm:   -«nND  ""aab  «  i-inx  ■^r-rz^y-n  yiz'::  "i"'  br  "jn 

(?)  ûmn  17:3  (?)  û-^b»  Nbi  nsn        la  Nin  nCwS  p  -^b  (nj-^rr'  -^Nibr: 

ûin  -^aab  iMirTiN-i   TN73  ai::  û-^Nb»  û-^na  -r^aa  r;:r; 


'  L'acrostiche  de  ce  petit  poème  donne  :  Yehiel,  et  celui  de  l'autre  :  Raphaël. 
'  Voir  Zunz,  Synagogale  Poésie,  p.  445. 

*  C'est  Barzilaï,  d'après  II  Samuel,  xix,  39. 

*  Ezéch.,  XXXI,  8. 

5  Comp.,  II  Sam.,  xxi,  10. 

*  Ensuite,  depuis  ce  temps. 


LA  FAMILLE  DE  YEHIEL  DE  FISE  239 

[I-  tm^iD]  '  csmwD  TCJN  "^--2^  235  HToo     [1.  tM]  mT  pbn  iiy  ûm73D  [■i>xnx 
'ar;  n-^npn    a^nov   ^d'^ntû  "^b  3-j[i-'i  T'a  ■':■:':>  -i2?n 

ûrT'^on»:   ano   (1)335  "7i:>-i7a    "niTob  "inob  [i.  ^b  ■';nî<  in:]  'n  "'b  "{pd 
=  riDCN  Tn3    [  1.   b::i»  ]    b'Oi;j  Ni:7û;  ncN  N3    a"';::»^  "p  -^^ 

[I.  a-TJ   -ipi]   an   loip-^ 

am:  "C-^nd  n^nx  Nbi  -tî.x  113:?  i:i<T  «  (?:  qs  lis-'  p  V^ 

an    n:ci;:3    mbip    b'in   ■'3["'n]  ■'niD  b>*3   'in3\:;  -,-'w3   p-^ocN 

[1.  anN::i733] 
t-jnioib'j     ";a    C^IjS     £3^-13  p-i  hd   ^wt   p'i  "'-itdt  p  b:' 

.  8  ii.   an   B-iobo] 

»  Comp.  Ps.,  Lxii,  2  [1.  an7:^^]. 

*  Plus  de  mille  florins.  Cf.  GeQ.,  xiv,  o,  I  Rois,  i,  41,  et  Ps.,  cxix,  72. 

*  Allusion  à  l'origine  allemande  d'Eiia  Bdhour,  nn  p  étant  le  sobriquet  des 
Juifs  allemands,  en  Italie,  mais  le  mètre  est  encore  en  désordre.  J'espère,  du  reste, 
revenir  un  jour  sur  l'histoire  du  nom  riH  1:3  daos  ce  sens. 

*  Is.,  L,  4. 

5  Communication  de  M.  Abraham  Epstein. 

6  Peut-être  :    ^D   '^•^:2^    ^p    Y^. 

"^  Probablement  :  ma  bouche  manque  d'expressions  pour  les  exprimer  [ces  louanfres 

•«n3"i). 

*  Le  nombre  des  hémistiches  est  de  30,  car  le  poème  contient  lo  vers  ;  n"D  don- 
nerait 28. 


LE  TRESOR  DES  JUIFS  SEPHARDIM 

JVoles  SU/'  les  fa //tilles  françaises  is?YiéiUes  du  rit  porhigais^ 

IV. 

ÉTAT-CIVIL    DES    ISRAÉLITES   FRANÇAIS    AVANT    LA   RÉVOLUTION. 


Établissement  de  l'élat-civil  en  France  en  1539  ;  le  clergé  catholique  en  est  charj^é; 
les  Juifs  d'Alsace-Lorraine  et  ceux  de  Guienne  en  ont  cependant  un  particulier. — 
Mariages  israélites  reconnus  valides  par  les  Parlements;  ces  tribunaux  imposent 
même  le  léviral.  —  Familles  Pereira-Brandon,  Peixotto,  Telles-Dacosta,  Ca- 
rasque  ou  Carrasco,  et  Teiles-Arary.  —  Constatation  des  décès.  Actes  mortuaires 
de  Daniel  Lopes-Laguua  et  d'un  fils  de  Jacob  Péreire,  premier  instituteur  des 
sourds-muets  en  France.  —  Famille  Lopes-Laguna  ou  Lagonne.  —  Registres  des 
naissances,  à  Metz  depuis  1717,  à  Bordeaux  depuis  1706;  le  Thezoro  de  ios  circum- 
sidados.  Famille  de  Mezas  ou  de  Mezes.  Parler  des  Juils  bordelais  plutôt  portugais 
qu'espau'nol.  —  Traduction  anglaise  du  rituel  hébraïque  en  i729.  Le  mohel 
M.  I.  Henriques,  de  Londres.  —  Circoncisions  retardées  pour  cause  de  maladie. 
Opérations  faites  sur  des  adultes  ou  des  vieillards  venus  de  la  Péninsule.  Familles 
Ribeire,  Lopes-Pereire,  Machuca  ou  Machouque.  —  Prénoms  et  noms  de  familles 
des  Juifs  bordelais. 


Personne  n'io:nore  que  la  tenue  régulière  des  registres  de  l'état- 
civil  date,  en  France,  de  IVMit  de  Villers-Cotterets  il"  aoi^it  1539), 
confirmé  plus  tard  par  diverses  ordonnances  ro^'ales. 

Ces  actes  du  pouvoir  central  confièrent  au  clergé  catholique  l'en- 
registrement des  naissances,  mariages  et  décès.  L'édit  du  mois 
d'octobre  1685  est  très  explicite  à  cet  égard.  Il  exclue,  en  réalité, 
des  avantages  d'un  état-civil  authentique  tous  les  Français  hété- 
rodoxes, a  Par  exception,  rappelle  Dalioz  -,  les  Réformés  et  les 
»  Juifs  d'Alsace  avaient  des  registres  particuliers  tenus  par  leurs 
»  pasteurs  et  rabbins.  » 

En  fait,  les  Protestants  seuls  durent  attendre  jusqu'au  18  no- 
vembre llHl,  pour  avoir,  dans  le  reste  du  royaume,  le  droit  de 

*  Voir  Revue,  t.  XX,  p.  287,  et  t.  XXV,  p.  97  et  235. 

*  Répertoire  de  Législation,  Y»  Acte  de  l'État-civil,  section  I,  1Ù. 


LE  ÏHÉSOU  DES  JUIFS  SEPIIARDIM  2 'il 

faire  enregistrer  aux  greffes  des  tribunaux  les  naissances  et  les 
décès  de  leurs  coreligionnaires. 

Quant  aux  Juifs  des  provinces  autres  que  l'Alsace-Lorraine,  ils 
eurent  assez  tôt  un  état-civil  officiellement  reconnu. 

Pendant  la  période  du  «  catholicisme  apparent  »,  les  Juifs  por- 
tugais, venus  comme  Nouveaux-Chrétiens,  conservèrent  leur  cou- 
tume nationale  :  ils  se  firent  baptiser,  marier  et  enterrer  comme 
s'ils  avaient  été  les  plus  fervents  catholiques.  Les  registres  des  pa- 
roisses de  Bordeaux,  —  la  cathédrale,  Sainte-Eulalie  et  Saint-Éloi 
notamment,  —  conservent  de  nombreuses  traces  de  cette  manière 
de  faire. 

Dès  qu'ils  pratiquèrent  exclusivement  le  judaïsme,  les  Israélites 
bordelais  eurent  un  état-civil  particulier  dont  les  Parlements  re- 
connurent le  caractère  légal. 

Pour  ce  qui  est  du  mariage,  il  se  célébrait  à  la  synagogue,  après 
la  rédaction  d'une  Ketoiiba,  écrite  en  hébreu  et  en  espagnol.  Ce 
document  était  précédé  d'un  contrat  par  devant  notaire,  conte- 
nant une  promesse  d'union  avec  engagement  de  «  faire  faire  la  cé- 
»  rémonie  suivant  l'usage  et  la  coutume  de  la  Nation  »  juive  por- 
tugaise. Telle  est,  par  exemple,  la  formule  que  nous  trouvons  dans 
l'acte  de  mariage  de  Ribca  Nunes  ',  fille  de  feu  Semuel  Nunes  et 
de  Rachel  Nunes,  avec  Elle  Pereyra  Brandon,  demeurant  tous  deux 
au  Bourg-Saint-Esprit  (Bayonne),  fiancés  le  3  octobre  1759. 

Les  deux  témoins  de  cette  pièce  sont  chrétiens  :  Pierre  Dargenton, 
marchand  et  jaugeur  juré  de  Bayonne,  et  Martin  Depeton,  praticien. 
Elle  est,  en  outre,  signée  par  la  mère  de  la  future,  par  ses  frères 
Abraham  et  Moïse  Nunes,  par  ses  oncles  Jacob  Dacosta.  Moyze 
Nunes  et  Jacob  Gommes  Fonseca,  et  par  ses  cousins  Izac  Ferre  et 
Izac  Gommes  Fonseca.  Du  côté  du  mari,  nous  trouvons  les  signa- 
tures de  ses  frères  Semuel  et  Salomon  Pereira  Brandon,  de  ses 
cousins-germains  Moyze  et  Izac  Brandam,  et  de  son  cousin  par 
alliance  Izac  Silva  Valle. 

A  plusieurs  reprises,  les  tribunaux  eurent  à  se  prononcer  sur  la 
validité  du  mariage  more  judaico.  Ils  lui  reconnurent  toujours 
pleine  et  entière  authenticité. 

Vers  1779,  notamment,  Charles-Paul-Joseph  Peixotto  -,  seigneur 
de  Beaulieu,  intenta  une  action  en  nullité  de  mariage  à  demoiselle 

*  Minutes  de  Cassolet,  notaire  royal  au  Bourp-Saint-Esprit,  dont  le  successeur 
actuel  est  M"  Jourdàa,  notaire  à  Bayonne.  —  Nous  devons  l'obligeante  communica- 
tion de  ce  document  à  M.  Sommer,  de  Biarritz. 

*  Archives  du  Consistoire  Israélite  de  Bordeaux,  Registre  des  délibérations  de  la 
Nation  Portugaise  depuis  le  il  mag  lllO,  n»  478,  l»  1'23,  et  n»  482,  ('•  120  r»  (20  juin 
et  20  août  nSO)  ;  Malvezin,  Hist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  230. 

T.  XXVI,  N°  52.  \: 


2.2  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Meiides  Dacosta,  qu'il  avait  épousée  à  la  synagogue  portugaise  de 
Londres  en  17G2.  Gomme  il  était  originaire  de  Bordeaux,  leChâtelet 
de  Paris  le  renvoya  devant  le  bet-din  de  cette  communauté  par 
arrêts  des  10  mai  et  20  juillet  1779. 

Le  Parlement  de  Bordeaux  alla  plus  loin  :  il  admit  la  légalité  du 
lévirat  '  : 

En  1768,  le  17  avril,  Blanche  Silva,  veuve  de  Jacob  Telles 
Dacosta,  demanda  la  haliça  à  son  beau-frère  Daniel  Telles 
Dacosta,  qui  la  refusa.  Le  rabbin  assembla  le  ljel-din,q\\\  ordonna 
audit  Daniel  d'avoir  à  se  soumettre  à  la  cérémonie  dans  un  délai 
de  trois  jours  -.  Il  n'obéit  pas  à  cette  sentence,  et  le  Parlement  ' 
dut  l'y  contraindre  par  arrêt  du  7  mai  suivant. 

Cette  famille  Telles  Dacosta  était  portugaise,  établie  à  Bordeaux 
dès  la  fin  du  xvi"  siècle. 

Le  29  novembre  1697,  «  Biaise  Dacosta  Teilles,  marchand  i)or- 
tugais  »,  fît  enregistrer  ses  armoiries  :  «  d'azur  à  un  pal  d'or  acosté 
de  deux  lis  au  naturel  *.  »  Syndic  de  la  Communauté  de  Bordeaux  ^ 
en  1745,  il  portait  le  prénom  de  Biaise  {)0ur  la  vie  civile  et  celui 
d'Abraliam  dans  les  actes  religieux.  Il  eut  au  moins  deux  fils  :  — 
l^"  Daniel  Teilles  Dacosta  '^,  circoncis  le  27  août  1706,  filleul  de 
Jacob  Gommes  Silva  ;  —  2°  Ahraliam  Teilles  Dacosta  ",  le  6  jan- 
vier 1709. 

Nous  trouvons  encore,  à  Bordeaux,  vers  cette  époque,  les  bran- 
ches suivantes  de  cette  famille  : 

I.  —  Jacob  Teilles  Dacosta,  dont  la  femme,  Racket,  eut  trois  fils 
circoncis  aux  dates  ci-après  :  —  1°  Daniel  ^,  17  février  1713,  filleul 
de  sa  mère  et  de  Gabriel  Gommes  Silva  ;  —  2°  Salomon  ^,  6  février 
1714,  tilleul  de  son  père  et  de  sa  tanteRachel  de  Silva  ; — S°  Abra- 
ham '",  8  janvier  1715. 

II.  —  Samuel  Teilles  Da  Coste,  qui  eut,  de  sa  femme  Sara,  un 
fils  nommé  Moïse  ",  circoncis  le  24  avril  1726,  ayant  pour  pari-ain 

*  D'après  le  Deutéronome,  xxv,  .o  et  6,   c  lorsque  deux  frères  demeurent  ensemble 

•  et  que  l'un   d'eux  sera  mort  sans  enl'ant,    la  temme  du   mort    n'en  épousera  point 

•  d'autre  que  le  Irère  de  son  mari  »  ;  mais  elle  peut  être  déjjagée  de  celte  oblif^aliou 
jjar  une  cérémonie  dite  ï"!^"^^"- 

*  Archives  du  Consistoire  de  Bordeaux,  Registre  des  délibérations  depuis  le  II  mai/ 
4110,  n»  367,  f»  91,  17  avril  1768. 

3  Malvezin,  Hist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  280. 

*  Bibliothèque  nationale  à  ^a.x\s.  Armoriai  général,  Guienne  (texte),  p.  82b. 
5  Malvezin,  loc.  cit.,  p.  218. 

'•  T/iezoro  de  las  circttmsidados,  A.  f°  1. 

7  Ibidem,  A.  1»  3. 

8  HAdem,  A.  f»  7. 

9  Ibidem,  A.  f»  8. 

'0  Thezoro  de  los  circumsidados,  A.  f*  li. 
"  Ibidem,  A.  f"  34. 


LE  TRESOR  DES  JUIFS  SEPHARDLM  243 

un  autre  Moïse  Telles  Dacosta,  représentant  Benjamin  Carasque  ^ 

Moïse  de  Samuel  Telles  Dacosta  se  convertit  au  catholicisme  à 
l'âge  de  quarante-deux  ans.  Il  fut  solennellement  baptisé  en  1768, 
dans  l'église  Saint-André  de  Bordeaux;  son  parrain  fut  M.  de 
Farges  et  sa  marraine  Adélaïde  Dillon.  îl  fit  batipser,  en  même 
temps,  sa  fille  Éléonore,  âgée  de  six  ans  :  le  comte  Alexandre 
de  Ségur  et  Madame  Éléonore  Dillon  la  tinrent  sur  les  fonts  bap- 
tismaux "-. 

Je  ne  sais  quels  degrés  de  parenté  originaire  existaient  entre  les 
Telles  Dacosta  et  les  Telles  Arary,  dont  l'un,  Jacob,  eut  deux 
fils  :  —  1"  David  Teilles  Arary  ^,  filleul  de  Racliel  Teilles,  le  28 
mars  17U);  —  2°  Abraham  Ai^ary  Teilles  '*,  filleul  de  sa  grand' 
mère  Judith  Teilles,  le  15  juin  1720, 

Pour  ce  qui  est  des  décès,  les  déclarations  s'en  faisaient  au  greffe 
des  justices  royales  dans  les  provinces.  A  Paris,  on  les  signifiait  au 
lieutenant-général  de  police,  qui  mandait  un  commissaire  au  do- 
micile du  défunt  et  délivrait  ensuite  le  permis  d'inhumer. 

C'est  ce  qui  advint  notamment  pour  le  premier  Israélite  enterré 
au  petit  cimetière  de  la  rue  de  Flandre  ^. 

Le  8  mars  1780,  par  devant  Jean  Graillard  de  Graville,  conseiller 
du  roi,  commissaire-enquêteur  au  Châtelet  de  Paris,  comparaissent 
les  sieurs  «  Aaron  Vidal  et  Benjamin  Mendez,  Juifs,  demeurants  en 
»  cette  ville,  Rue  Saint-André-des-Arts,  sindics  et  anciens  sindics 
»  en  place  d3  la  Nation  Juive  i)ortugaise.  »  Ils  déclarent  que  «  Da- 
»  niel  Lopes  Lagonna,  negotiant,  Juif  natif  de  Bordeaux,  âgé  de 
»  près  de  vingt-trois  ans,  est  décédé  hier  soir  à  huit  heures,  à  la 
»  suite  de  maladie,  en  une  chambre  qu'il  occupoit  avec  la  veuve 
y  Lagonna,  sa  mère,  au  premier  étage  sur  le  devant  d'une  maison 
»  ditte  le  Collège  d'Autun,  sis  Rue  Saint-André-des-Arts.  »  Le  ma- 
gistrat va  constater  le  décès  avec  eux  et  avec  «  Jacob  Dacosta, 
»  m[archan]d  Juif,  trouvé  dans  lad[ite]  chambre,  demeurant  Rue 


•  Benjamin  Carasque,  —  ou  plutôt  :  Rodrigues  Cahrasgo,  —  eut  une  fille  Sara, 
avec  laquelle  il  fut  parrain  dWarou  Alvares  de  Paz,  le  23  nov.  1740,  et  qui  épousa 
un  sieur  Mondes  Corre.  On  voit  encore,  à  Bordeaux,  une  liarhel  Carrasco  Cardoze, 
marraine  de  Salomon  Lopes,  le  16  mai  l'olj,  et  de  David  Isaac  Torres,  le  30  janv. 
l'ol.  La  famille  Carrasco  porte  un  nom  qui  peut  être  rapproché  de  Carvalho,  puisque 
ces  deux  mots  signilient  cligne,  l'un  en  espaj^nol  et  laulre  en  portugais.  Les  Carrasco 
étaient  originaires  d'Kspa^me,  pa^'s  d'oii  vint,  à  Bordeaux,  Joseph  C'arasco,  circoncis 
à  vini.'t-cinq  ans,  le  17  lévrier  1709.  [Theznro  de  los  circumsidados,  A.  1"  57  ;  B.  f"  22, 
n»  138,  29,  n°  183,  et  33,  n°  209  ;  A.  1°  3.) 

*  Malvezin,  Uist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  164. 

*  Theeoro  de  los  circumsidados,  A.  f»  15, 

♦  Ibidem,  A.  f°  17. 

5  Léon  Kabn,  Hist.  do  la  communautc  israélite  de  Paris.  Le  Comité  de  Bienfai- 
sance, ch.  VII,  p.  103. 


2/i4  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

»  de  l'Hirondelle,  Hôtel  de  Reiras.  »  A  la  suite  du  procf^s-verbal 
vient  l'ordonnance  du  lieutenant- général  de  police  portant  que 
«  le  corps  dud[it]  Lagonna  sera  inhumé  nuitamment,  sans  bruit, 
»  scandai,  ni  appareil  dans  le  cimetière  des  Juifs  à  la  Villette,  en 
»  la  manière  accoutumée  K  » 

La  formule  du  permis  d'inhumer  ne  paraît  pas  avoir  toujours 
comporté  que  la  cérémonie  aurait  lieu  «  nuitamment,  sans  bruit, 
»  scandale,  ni  appareil.  »  On  peut  le  vérifier  par  le  document  sui- 
vant : 

«  Le  décès  de  Samuel  Pereire,  âgé  de  huit  ans,  fils  du  sieur  Jacob 
»  Rodrigue  Pereire,  agent  de  la  Nation  Juive  Portugaise,  et  de  Me- 
»  rian,  sa  femme,  a  été  constaté  ce  jourd'huy  par  nous  Hugues- 
»  Philippe  Duchesne,  con[seill]er  du  Roy,  com[missai]re-enquesteur- 
»  examinateur  au  Gh[àte]let  de  Paris,  et,  ensuite  de  notre  procès- 
»  verbal,  est  une  ordon[nan]ce  de  Monsieur  le  L[ieutenan]t-général 
))  de  Police,  rendue  sur  les  conclusions  de  Mons[ieu]r  le  Procureur 
»  du  Roy,  le  tout  en  datte  de  ce  jour,  qui  ordonne  que  Ir  cadavre 
»  dud[itj  Samuel  Pereire  sera  inhumé  à  la  Villette,  dans  le  cimetière 
»  des  Juifs  de  la  Nation  Portugaise,  en  la  manière  accoutumée,  et 
»  enjoint  aux  officiers  du  guet  et  de  police  de  prester  main  forte  si 
»  besoin  est  et  en  sont  requis.  —  Fait  à  Paris,  en  notre  hôtel,  le 
)»  six  mai  mil-sept-cent- quatre-vingt. 

»  Com^e  Duchesne.  » 

Le  Daniel  Lapes  Lagonna,  qui  fut  enterré,  à  Paris,  le  8  mars 
1780,  appartenait  à  la  famille  Lopes  Laguna,  qui  tire  son  nom  de 
la  ville  de  Laguna  de  los  Negrillos  -,  où  existait,  au  xv«  siècle, 
une  communauté  Israélite  ^. 

La  transformation  de  Laguna  en  Lagona  était  éminemment 
française.  On  en  trouve  un  curieux  exemple  dans  Rabelais  *. 

Daniel  Lopes  Laguna  était,  comme  on  l'a  vu,  natif  de  Bordeaux. 
Il  y  avait  été  circoncis  le  26  mai  1756,  ayant  pour  marraine  sa 
grand'raère  Esther  de  Pas  ^.  Son  père  Juda  cCIsaac  Lagoune  ou 

'  Celte  pièce,  ainsi  que  la  suivante,  nous  a  été  très  oblij.'^eamment  communiquée 
par  M.  Eugène  Pereire,  membre  du  Consistoire  central  des  Israélites  de  France, 
arrière-petit-fils  de  Jacob  Rodrif;ues  Pereire  qui  fut,  on  se  le  rappelle,  le  premier 
syndic  des  Juils  portugais  de  Paris  et  le  premier  instituteur  des  sourds-muets  en 
France. 

*  Laguna  de  los  Negrillos  est  un  gros  bourg  de  la  province  espagnole  de  Léon. 

*  Amador  de  los  Hios,  Historia  de  los  Judios  d'Espana,  t.  III,  docum.  III, 
p.  598. 

*  Gargantua,  1.  I,  ch.  v  (t.  I,  p.  100.  Paris,  1887).  Rabelais  dit  Lagona  éclatera,  en 
basque,  pour  Laguna  edatera. 

5  Thezoro  de  los  circumsidados,  B.  f»  .'{1,  n"  193.  —  Sa  tombe  n'existe  plus  au  ci- 
metière israélite  de  la  rue  de  Flandre, 


LE  TRÉSOH  DES  JUIFS  SEPHARDIM  245 

Lopes  Lagowie  S  né  en  1712,  avait  eu  quatre  autres  fils  :  1^  Ja- 
cob'-, filleul  de  son  grand-père  paternel,  le  l^r  novembre  1740  ; 
2»  S(xmuel\  circoncis  le  4  janvier  1743;  3°  Isaac  *,  filleul  de  Sara 
Lagonne,  le  26  février  1754;  4°  Benjamin  %  opéré  le  14  juil- 
let 1761. 

Parmi  les  Lopes  Lagiina,  fixés  à  Paris,  nous  devons  mentionner 
les  suivants,  dont  les  tombes  se  voient  encore  au  cimetière  de  la 
rue  de  Flandre  : 

ICI  REPOSE  LE  CORPS  d'ABHAHAM  LOPES  LAGUNA  NÉ  A  BOR^  DÉCÉDÉ 
LE  19  JUIN  1807  ÂGÉ  DE  58  ANS.  LE  TEMPS  MAITRE  DE  TOUT  l'A 
RETIRÉ  DE   CE  MONDE  AVEC  TOUT  «    LES  REGRETS  DE  SA  FAMILLE. 

C'était  le  frère  des  divers  Lopes  Lagonne  dont  nous  avons 
donné  les  noms  ci-dessus. 

ICI  REPOSE  LE  CORPS  DE  RACHEL-SILVA-LOPES  LAGONNA  NÉE  A 
BOR^  ÂGÉE  DE  44  ANS  DÉCÉDÉE  LE  12  NOV««^  1806.  ELLE^  FUT  BONNE 
ÉPOUSE  ET  TENDRE  MÈRE.  LE  TEMPS  MAÎTRE  DE  TOUT  l'a  MOISSOxN- 
NÉE  A  LA   FLEUR  DE  SON  AGE. 

A  Bordeaux,  il  n'existe  ni  au  Consistoire  ni  à  la  mairie,  d'an- 
ciens registres  des  décès  de  la  communauté  israélite.  Celle  de 
Bayonne  en  a  fourni  au  moins  un  aux  archives  municipales'  ;  il 
remonte  seulement  au  xviii«  siècle. 

A  Metz,  on  signale  :  1°  plusieurs  registres  de  naissances,  ma- 
riages et  décès,  paraphés  par  le  président  du  baillage  '*;  2"  «  un  re- 
»  gistre  des  décès  des  membres  de  la  communauté  israélite  de 
»  Metz"  depuis  sa  fondation  et  dont  le  premier  inscrit  porte  la 
»  date  du  dimanche  27  Tamouz  -irj  =  1564.  Ce  registre  est  la 
»  propriété  de  la  Confrérie  des  Inhumations.  Les  premiers  statuts 
»  de  cette  confrérie  datent  de  1621.  » 

Pour  ce  qui  est  des  naissances,  Metz,  qui  possède  un  registre 

1  Thezoro  de  los  circumsidadon,  A.  f°  6. 

«  Ibidem,  A.  i"  27. 

3  Ibidem,  B.  f»  1 ,  n"  4. 

*  Ibidem,  B.  f»  27,  n"  171. 

5  Ibidem,  B.  f»  39,  n»  2'i9. 

^  Copie  textuelle. 

7  Ce  manuscrit  porte  la  cote  GG15  ;  il  nous  a  été  signalé  par  M.  E.  Ducéré,  sous- 
bibliothécain;  archiviste  de  Bayonne. 

8  Archives  isrm'lites,  t.  LX.  (1848),  p.  162-ir,3.  D'après  les  renseignements  fournis 
dans  cet  article,  il  existe,  au  grelle  du  tribunal  de  Metz,  un  registre  commun  pour 
les  naissances,  mariages  et  décès  depuis  1717,  et  un  registre  séparé  pour  les  nais- 
sances depuis  1770. 

^  Cette  communication  nous  a  été  faite  dans  une  lettre  de  M.  le  grand-rabbin 
Isaac  Weil.  du  2  avril  1889. 


2i6  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

de  1717,  vient  après  Bordeaux,  comme  nous  allons  le  constater. 
Dans  cette  dernière  communauté  les  registres  n'étaient  pas  remis 
en  double  au  greffe  de  la  justice  royale.  M.  Henri  Gradis,  dont  les 
travaux  historiques  sont  bien  connus  et  qui  appartient  à  l'une  des 
plus  anciennes  familles  du  judaïsme  français,  nous  assure  môme  ' 
que  «  les  registres  des  Mohelim  n'ont  jamais  figuré  dans  les 
»  archives  de  la  communauté  de  Bordeaux.  » 

Celui  que  nous  avons  souvent  cité  sous  le  titre  de  Thezoro  de 
los  circiimsidados  appartient  actuellement  aux  archives  munici- 
pales de  Bordeaux  -.  11  y  est  venu  en  vertu  de  la  loi  des  20-25  sep- 
tembre 1792,  dont  le  titre  VI,  art.  2,  portait  que  «  tous  les  re- 
»  gistres  [du  culte],  tant  anciens  que  nouveaux,  seront  déposés 
>)  dans  la  maison  commune  ». 

Une  note,  placée  à  la  fin  du  volume  ^,  est  ainsi  conçue  :  «  Je 
»  certifie  que  le  présent  registre  contient  les  actes  des  circonci- 
»  sions  faites  par  feu  mon  grand-père  Jacob  Mezes  et  feu  mon 
»  père  Abraham  Mezes.  —  Bordeaux,  le  30  septembre  1793.  — 
»  E.  Jacob  Mezes.  »    - 

Ce  registre  porte  le  titre  suivant  dépourvu  de  tout  ornement  : 

X  n  E  >:  o  Ft  o 

De  los  circumsidados.  Que 

haze  iahacob  de  r//ezas  etnpesando  de 

edad  deSo.  anos  el  todo  seapor  honra 

Gloria  y  loor  del  eterno  dios  di- 

zerael  suplicando  hicmildemente 

su  divina  majestad  que  circon- 

sida  nuestros  corasonnes  por  seruirlo  con 

amor    y    temor    alleyando  todo  jserael 

a  los  dias  del  bien  prometido.  A.71ietl, 

Bquc  sea  en  nuestros  • 

ordeaZ.      A  j^   Deadciv 

anno  oA66.  que  corresponde  a  28.fcurero 
170G 

'  LeUre  à  l'auteur  du  5  avril  1889. 

*  GG800  lis  du  Répertoire  général.  —  Nous  tenons  à  remercier  Lieu  piiicèrement 
M.  Léopold  Delisle,  administraleur  de  la  liihliolhèquc  nationale,  pour  le  bienveillant 
empressement  avec  lequel  il  nous  a  procuré  le  moj'en  de  prendre  connaissance  à  Paris 
de  ce  curieux  manuscrit  bordelais. 

'  Deuxième  partie,  i"  46  v». 


LE  TRÉSOR  DES  JUIFS  SEPHARDIM  2.7 

Je  crois  inutile  de  rectifier  l'orthographe  espagnole  de  ce  titre 
dont  voici  la  traduction  :  Tréfior  des  circoncis  que  fait  Jacob  de 
Mezas,  commençant  à  l'âge  de  2-i  ÇLns-  Le  tout  soit  pour  L'hon- 
neur, La  gloire  et  la  louange  de  r Eternel  Dieu  d'Israël.  Sup- 
pliant Sa  divine  Majesté  qu'il  circoncise  nos  cœurs  pour  le  ser- 
vir avec  amour  et  crainte,  rapprochant  toid  Israël  du  bien 
promis  {que  ce  soit  de  nos  jours).  Amen.  Bordeaux,  ii  Adar, 
an  Ù466,  qui  correspond  au  28  février  ilG6. 

Les  mots  nrj  p^on  peuvent  se  traduire  :  A  bon  signe,  à  bon 
augure. 

Ce  manuscrit  forme  un  volume  in-8°  d'environ  20  centimètres  et 
demi  de  hauteur  sur  15  centimètres  et  demi  de  largeur.  Il  est  re- 
couvert de  veau  fauve  et  contient  106  folios  dont  les  30  derniers 
sont  blancs.  En  général,  le  recto  seul  '  est  couvert  d'une  écriture 
dont  l'ampleur  varie  sensiblement,  puisque  l'on  trouve  33  lignes 
au  folio  1  de  la  première  partie  contre  17  au  folio  45  de  la  seconde. 
Les  lettres  sont  toutes  dépourvues  d'ornement,  sauf  le  titre  initial 
dont  quelques  caractères  ont  des  filets  rouges  et  verts  ou  noirs  et 
verts. 

Le  Thezoro  est  divisé  en  deux  parties  qui  portent  une  pagina- 
tion originellement  différente.  Chacune  des  circoncisions  a  un 
numéro  d'ordre  dans  la  seconde  partie  seulement.  Depuis,  l'on  a 
écrit,  à  l'encre  rouge,  de  nouveaux  chiffres  qui  se  suivent  sans 
égard  à  la  division  en  deux  parties  primitivement  établie.  Cette 
nouvelle  numération  est  inexacte  -  ;  elle  ne  correspond  pas  au 
nombre  des  actes,  aussi  avons-nous  tenu  compte  de  l'ancien  ordre 
pour  toutes  nos  citations. 

La  seconde  moitié  du  manuscrit  porte  le  titre  suivant  :  nrj  17:03 
.  bNi"»:;-'  -^ribN  ^^  ûca.  Thezoro  de  los  circumsidados  que  haze  Ab"' 
de  Mezes  empesando  de  Edad  de  45.  afios.  Eltodo  seapor  honra, 
gloria  loor  del  Eterno  Bios  dizerael  suplicando  humildemenlc 
sudiuina  majestad  que  circonsida  nuestros  corasonnes  par  se- 
ruirlo  con  amor  ytemor.  allcgando  todo  Iscrael  a  los  dias  dcL 
bien  Prometido  que  sea  en  nuestros  dias.  Arncn.  Bordeaux  a.  .9. 
de  ab  So02.  Dia  de  tishabeab  que  corresponde  a.  9.  de  agosto 
il 42.  Ab.  Dêmêzês.  Moel. 

Comme  on  le  voit,  sauf  la  date  et  le  prénom  du  Mohel,  les 
deux  titres  sont  semblables.  Aux  mots  nrj  17:03  {à  bon  signe],  on 

'  La  première  parlie  a  deux  folios  écrits  au  verso,  le  41»  et  le  o8^  La  seconde  par- 
tie présente  le  même  cas  au  verso  du  litre  et  aux  f«  4,  19,  30  et  46. 

»  Le  manuscrit  contient,  d'ailleurs,  une  erreur  aux  t°«  44  et  suiv.  de  la  2'  partie. 
Le  mohel  a  répété  les  mêmes  numéros  de  280  à  284. 


248  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

a  cependant  ajouté  :  VwS—w"' ""Vn ■^•^  2^2, a2<  nom  du  Dieu  d'Israël^. 

Le  texte  du  Tliezoro  est  en  espagnol  du  ["  1  ("28  février  1706)  au 
f°  28  (17  février  1723),  puis  en  français,  sauf  le  titre  de  la  seconde 
partie,  ainsi  qu'une  note  inscrite  au  verso  du  f°  58  et  concernant 
la  famille  de  Mezes. 

L'espagnol  employé  par  l'auteur  du  manuscrit  est  très  incorrect, 
plein  d'expressions  portugaises  :  le  mois  de  janvier,  en  castillan 
lne7"0,  est  écrit,  par  exemple,  Icviero-  ou  même  lanciro"^,  ce  qui 
correspond  au  portugais  Janeiro. 

Le  français  du  bon  mohel  ne  vaut  guère  mieux  :  tantôt  il  le  mêle 
à  l'espagnol  dans  des  phrases  comme  celles-ci  :  Sara  da  Costa 
madré  de  ranfan^,  —  Moshe  [liijo]  del  Mon.  ^  le  H.  H.  Atias^  ;  — 
tantôt  il  emploie  des  expressions  telles  que  nore'  pour6r«e.  Quant 
à  l'orthographe,  c'est  de  la  haute  fantaisie  :  etictinle  devient  an 
sainte,  mère  se  transforme  en  niaire^,  etc. 

La  famille  de  Mezes  ou  de  Mezas,  à  laquelle  nous  devons  le 
Thezoro  de  los  circumsidados,  n'a  pas  laissé  de  descendants  mâles 
directs  dans  la  population  Israélite  française.  Cependant  comme 
elle  se  rattache  par  de  nombreuses  alliances  à  beaucoup  d'autres 
familles,  nous  en  donnerons  la  généalogie  : 

Les  de  Mezes  ou  de  Mezas  sont  originaires  de  Portugal.  Ils  érai- 
grèrent  d'abord  en  Hollande.  L'un  d'eux,  Abraham  Jahacob  de 
Selomofi  de  Meza,  fut  grand  rabbin  d'Amsterdam  ;  il  y  publia,  en 
1524  (in-4"),  un  recueil  de  Meditaçùes  sacras  ou  sermoes  varios 
composios  e  récit  ados  n'este  KK.  de  T. T.  °. 

Son  petit-fils,  Christoplie  Rodrigues  Meze,  s'établit  à  Bordeaux. 
11  fut  pèi-e  de  Enimanuei  Meze  *",  mort  vers  1688  et  qui  figure, 
sous  le  nom  de  Manuel  de  Messe  •',  comme  expulsé  de  Bordeaux 
par  l'arrêt  du  Conseil   du  20  novembre  1684.   Sa  veuve,  Marie, 


1  II  y  a  lieu  de  faire  observer  que  les  N  et  5  sont  liés  et  londus  eu  un  seul 
carap.lère. 

*  Thezoro,  A.  f»'  3,  4  et  5,  ligne  5. 
»  Ibxdem,  A,  l-  5, 1.  9. 

*  Ibidem,  A.  f°  34,  1.  18. 
3  Ibidem,  \.  f-  40,1.  \. 

6  Ibidem,  A.  f»  57,  1.  3.  —  Le  mot  nore  correspond  au  portugais  nora.  M.  Kayser- 
ling  a  publié,  dans  la  Revue  des  Études  juives,  t.  XXII,  pp.  123-124.  une  liste  des 
mots  espagnols  conservés  dans  le  parler  des  Juils  de  Bordeaux  et  de  Bayonne  ;  il  y  a 
lieu  d'observer  que  ces  mots  paraissent,  en  partie,  plus  portugais  qu'espagnols  :  faja, 
prononcé  fascha  =  faxa,  desapegar^  etc. 

■  Thezoro,  A.  fo  41,  1.  17. 

s  Ibidem,  A.  f«  40,  1.  3. 

*  Innocencio  da  Silva,  Diccion.  bibliogr.  portug.,  t.  I,  p.  1. 
>»  Malvezin,  Hist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  134. 

"  Archives  nationales.  E  1827. 


LE  TRÉSOR  DES  JUIFS  SEPHARDIM  249 

Lopes  '  n'en  demeurait  pas  moins  dans  cette  ville  en  1717,  rue 
des  Ayres. 
Emmanuel  de  Mezes  eut  quatre  fils  : 

I.  _  jacol)  de  Mezas,  qui  Cut  mohel  du  28  février  1706  au  16  fé- 
vrier 1742,  c'est-à-dire  jusqu'à  sa  mort,  ainsi  qu'on  peut  le  cons- 
tater par  l'inscription  de  sa  tombe-  : 

S^  DEL  PiO  VMILDE.  VIRTVOsO  Y.  PiADOSO.  AYASIS.  ANIHBAD.  YSRAEL. 
YAHACOB.  DE.  MEZES  MOEL.  Y  FVNDADOR.  DE.  LA.  S^-^  JEBRA.  F»  A, 
6.  DE.  ADAR.  SENi.  5502.  QVE.  CORESPONDE.  A  12  MARCO  1742. 

De  son  mariage  avec  une  demoiselle  Dacosta,  il  eut  deux  fils, 
Abraham,  dont  nous  parlerons  ci-après,  et  Moïse^,  circoncis  le 
2  août  1706. 

n,  _  Abraham  de  Mezes,  connu  sous  le  nom  à: Alexandre 
Mèze,  et  associé  avec  son  père\  Il  eut  un  fils  %  dont  j'ignore  le 
prénom,  et  qui  fut  circoncis  le  28  juillet  1717. 

III.  —  Isaac  de  Mezes,  marié  à  Rebecca  Gommes «,  dont  il  eut 
une  fille,  Rebecca'' ,  et  sept  fils  circoncis  aux  dates  suivantes  : 
1"  Elie^,  le  15  aoiit  1707  ;  —  2°  Emmanuel- Jacob  ^  le  20  février 
1709;  —  '2>°  Samuel,  le  8  juin  1710;  —  4°  David,  le  15  septem- 
bre 1713;  —  5»  un  autre  enfant  nommé  aussi  David  '",  le  18  oc- 
tobre 1714  ;  —  6°  /l braham^',  le  27  novembre  1721  ;  —  7°  Isaac, 
le  15  novembre  1722,  filleul  de  sa  mère  Rebecca  Gommes. 

IV.  —  Daind  de  Mezes  eut  également  huit  enfants  :  —  1°  Abra- 
ham'%  le  5  novembre  1706;  —  2^  Mardochée '\  le  5  mars  1708, 

»  Francisque  Michel,  Hist.  du  commerce  à  Bordeaux,  ch.  xlvi,  t.  II,  p.  426,  note  2. 

2  Ciraelière  Israélite  du  cours  Saiat-Jeau  à  Bordeaux.  —  Cette  inscripliou,  qui 
est  accompagnée  des  insignes  du  mohel,  veut  dire  :  Sépulture  du  pieux,  humble,  ver- 
tueux et  religieux  13DDn  O-'OT!  -Jacob  de  Mezes,  mohel  et  fondateur  de  la  sainte 
confrérie.  Il  mourut  le  6  d'adar  seni  6502,  qui  correspond  au  ti.  mars  1742. 

3  Thezoro,  A.  i»  1. 

*  Maivezin,  Hist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  171. 

5  Thezoro,  A.  1"  12. 

6  Ibidem,  A.  f"  8  :  elle  est  marraine,  le  29  mars  1714,  de  son  neveu  Jacob  Pcreira 
Soares. 

'  Ibidem,  B.  1"  6,  n"  31  :  elle  est  dite  Rtbica  de  Isaac  de  Mezes. 
5  Ibidem,  A.  (•  2. 
9  Jbidcm,  A.  f»  3. 
10  /hulem,  A.  f»  4. 
"  Ibidem,  A.  ("  7. 
»2  Ibidem,  A.  f"  8. 
>3  Ibidem,  A.  1»  22. 
'*  Ibidem,  A.  1»  26. 
•■  Ibidem,  A.  1»  1. 
»*  Ibidem,  A.  f»  2. 


2o0  REVUE  DES  ETL'DES  JUIVES 

filleul  de  sa  grand'mère  Baesa;  —  ^°  Emviianuel- Moïse  ^,  le 
10  mars  1700;  —  4"  Juda-Macchabée'^,  le  3  décembre  1714;  — 
5°  Isaac'^,  le  23  octobre  1718;  —  6°  Jacob*,  le  12  septembre  1720, 
filleul  de  sd. mère Esther  de  j\Jezas;  — 7"  ^arou^,  circoncise  deux 
mois,  le  29  juillet  1723,  filleul  de  son  oncle  Aaron  Baesse;  — 
8o  Samuel^,  circoncis  normalement  le  22  septembre  1725,  «  filleul 
de  sa  mère  Anna  Baesse"  »,  et  père  lui-même  de  deux  fils  :  David^, 
opéré  le  26  octobre  1754,  et  Isaac  '',  circoncis  le  26  janvier  1760. — 
Je  ne  sais  trop  à  quelle  branche  de  la  famille  de  Mezes  il  faut  rat- 
tacher les  trois  sœurs  Rebecca,  Rachel  etAbigaîl,  qui  furent  réin- 
tégrées, le  15  juillet  1758,  par  ordre  du  roi,  dans  le  couvent  des 
Ursulines  de  Bordeaux,  où  leur  mère  s'était  retirée  pour  se  con- 
vertir 10. 

Parmi  les  autres  membres  de  cette  nombreuse  famille,  nés  avant 
le  xix^  siècle,  je  citerai  Esther  de  Mezes,  dont  la  tombe  se  trouve 
à  Paris  1'  et  porte  l'inscription  suivante  : 

ici  REPOSE  ESTHER-DÉsiRÉE  MÉZÈS  ÉPOUSE  d'aBRAII.\M  5:iLVEYRA 
DÉCÉDÉE  LE  9  FÉVrIeR  1860  ÂGÉE  DE  77  ANS. 

De  tous  les  de  Mezes,  les  seuls  qui  présentent  un  intérêt  historique 
sont  évidemment  ceux  qui  remplirent  les  fonctions  de  Mohelini  à 
Bordeaux,  au  xvrii«  siècle.  Le  premier,  comme  nous  l'avons  dit, 
fut  Jacob,  qui  eut  pour  successeur  son  fils  Abraham.  Celui-ci  fut 
péritomiste'2  du  9  août  1742  au  26  janvier  1775.  Il  mourut  en  1780, 
ainsi  qu'on  peut  le  constater  par  l'inscription  de  son  tombeau '^  : 

S^  DEL  ZELOSO  Y  BIeNAYENTURADO  AYASis.  VEAKiciIBAD  ABRAHAM 
DE  MEZAS  FUNDADOR  DE  LA  IIEBRA  Y  DE  HATERET  ZEQUENIm.  MOKL 
DEbTE  KAAL  KAUOS  F"  A  23  DE  KÎSLEU  5547  Q.  CORRESPONDE  A  21 
X"'"^  DE  1780.  S    A.  G.  D.  L.   g.  A. 

»  Thezoro,  A.  f»  3. 
*  Ibidem,  A.  i"  8.. 
3  Ibidem,  A.  foU. 
"  Ibidem,  A.  f»  18. 
5  Ibidem,  A,  f»  29. 
«  Ibidem,  A.  1»33. 

'  Il  faut  lire  :  «  Filleul  de  sa  grand'  mère  •,  cnr  Esther,  femme  de  David  de  Mezes, 
vivait  encore  le  29  janvier  1760  [Thezoro,  B.  1"  38,  n"  241). 

8  Ibidem,  B.  i"  28,  n»  176. 

9  Ibidem,  B.  f»  38,  n»  241. 

*"  Malvezin,  Rist.  des  Juifs  à  Bordeaux,  p.  I00-I06. 

1'  Cimetière  du  Montparnasse,  Sépulture  Silveyra. 

"  Secoude  partie  du  Thezoro  de  los  circumsidados. 

'^  Cimetière  israélile  du  cours  Saint-Jean  à  Bordeaux.  Dans  le  leste  espairnol  les 
caractères  suivants  sont  tous  liés  :  .A  et  D,  A  et  N,  A  et  H,  A  et  V,  A  et  L,  .\  et  M, 
H  et  D,  D  et  E,  M  et  E,  U  et  E.  En  voici  ia  traduction  :  S(fptHture  du  z-'lé  et  bien- 
heureux narrm  C'^iri  Abraham  de  Mezas,  fondateur  de  la  Ccnfrérie  et  [de  la  So- 


LE  TRÉSOR  DES  JUIFS  SEI^HARDIM  2ol 

Ce  saint  homme  eut  deux  fils  et  trois  filles  :  I.  —  Emmanuel- 
Jacob,  né  1  le  5  janvier  1729  et  circoncis  le  12  du  même  mois  -;  du 
24  avril  1754  au  22  février  1*759,  il  remplaça  son  père  comme  péri- 
tomiste  ^,  et  ce  fut  lui  qui  remit  le  Tfwzoro  de  los  circumsidados , 
en  1793,  à  la  municipalité  de  Bordeaux''. 

IL  —  Rachel  de  Mezes,  née  ^  le  24  août  1732.  Elle  épousa  Abra- 
ham Miranda'',  vers  1751, 

III.  —  Rebecca,  née"  le  12  avril  1735,  mariée^  le  6  décem- 
bre 1758. 

IV.  —  Sara^,  née  le  11  janvier  1738  et  morte  en  bas  âge. 

V.  —  Isaac,  né^°  le  7  août  1747,  circoncis'*  le  15  du  même  mois. 

Le  Thezoro  de  los  circumsidados,  auquel  sont  empruntés  ces 
détails,  ne  renferme  pas  toutes  les  circoncisions  faites  à  Bordeaux. 
Les  de  Mezes  n'étaient  pas  les  seuls  mohellm  de  la  communauté  : 
on  peut  citer  notamment  Moïse-Israël  Henriques  «  de  Londres  '-  », 
comme  ayant  fait  une  cinquantaine  de  circoncisions '^  du  4  juin  1726 
au  13  mars  1740. 

On  sait  que  la  communauté  portugaise  de  Londres  fut  établie 
vers  1655,  à  la  suite  de  la  mission  du  célèbre  lisbonnais  Manassé 
ben  Israël ,  envoyé  auprès  de  Cromwell  par  les  Sephardim 
d'Amsterdam.  Plusieurs  des  membres  de  cette  fté'/îJ/«  anglaise  ont 
grandement  honoré  les  noms  de  plusieurs  familles  de  Bordeaux  et 
de  Bayonne  :  Josué  da  Silva,  David  et  Joseph  Pardo,  etc. 

L'auteur  de  la  présente  étude  a  trouvé  à  Bordeaux  et  conserve 
un  manuscrit  qui  peut  fort  bien  avoir  appartenu  au  mohel  Hen- 
riques, de  Londres.  Il  est  daté  de  cette  ville  :  Londini.  Anno  1729. 

ci('té]  llatéret  Zequenim,  mohel  de  cette  sainte  communauté.  Il  mourut  le  2<î  kislev 
Sôi7,  (pii  correspond  au  '^1  décembre  ilHO.  Les  lettres  S.  A.  G.  D.  L.  G.  A.  si'jni- 
fieut  :  Su  aima  goze  de  la  gracia  anunciada.  —  Qtie  son  âme  jouisse  de  la  (jrûce 
annoncée. 

1  Thezoro,  A.  f°  38. 

2  Ibidem,  A,  f°  58  V". 

3  Thezoro,  f»'  27,  n"^  173  et  174  ;  29,  n"*  182  et  183  ;  30  r",  n"'  183  et  187;  30  v°  ; 
31,  n»  1D3  ;  etc.,  etc.  ;  37,  n°»  231  et  234. 

*  Ibidem,  B.  1°  46  v". 
5  Ibidem,  A.  f»  58  v». 

8  Ibidem,  B.  f"  21,  n"  133  :  Acte  du  13  décembre  1750  :  «  Pareins  Ab™  Miraade, 
»  mon  bcau-l'rère,  et  Rachel  Mezes,  ma  GUe,  sa  promize.  • 
'  Ibidem,  A.  f»  58  V". 

8  Ibidem,  B.  i"  36,  n"  229. 

9  Ibidem,  A.  1  ■  58  v». 
"  JbHem,  A.  1»  58  v, 

»«  Ibidem,  B.  1°  14,  n"  84. 
'•^  Ibidem,  A.  ("  34. 

'3  Ibidem,  A.  f"^  34,  35,  38  à  42,  44,  46  à  49,  51  à  54,  56  et  58;  B.  (•  2,  u<"  9  et  12, 
et  i"  9,  n"  52  et  54. 


2o2  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

25°  Augusii.  C'est  un  volume  de  24  centimètres  de  hauteur  sur  en- 
viron 18  de  largeur.  L'écriture  en  est  fort  belle.  Il  contient  4  feuillets 
l)rél)minaires  et  "710  pages  de  10  lignas,  encadrées  d'un  filet  rouge. 

Le  titre  de  ce  manuscrit  n'existe  que  sur  le  dos  du  volume  et 
porte  cps  mots  :  Common  prayers.  Hehrew.  C'est,  en  effet,  une 
traduction  anglaise  du  rituel  ;  elle  ne  paraît  pas  dé[)ourvue  d'intérêt 
au  point  de  A'ue  du  judaïsme  britannique. 

Le  péritomiste  Moïse-Israel  Henriques,  auquel  appartinrent 
nos  Common  Prayers,  épousa  une  fille  du  sieur  Isaac  Fernandez. 
Il  eut,  de  ce  mariage,  quatre  enfants  circoncis  à  Bordeaux  aux 
dates  suivantes  :  Isaac  \  le  17  mai  nSl  ;  Joseph-,  le  29  décem- 
bre 1732;  Abrahnm\  le  19  avril  1738;  olJacob\  le24  juillet  1740. 
La  circoncision  d'Abraham  Henriques  porte  la  mention  que  voici  : 
«  Ab""  de  Moshe  Israël  Henriques,  [âgé]  de  8  jours.  Pareins  : 
■»  Joshef  Henriques  MeJine  et  Ribica  Lamego.  Mohel  :  le  père  de 
)>  lanfan.  Et,  à  4  heures  de  laprès  midi,  il  i  est  survenu  unne  hémo- 
»  rogie  de  san  fort  considérable,  laquelle,  sur  l'istant,  moy,  Jb.  de 
»  Mezes,  ay  arété  ». 

Il  y  a  lieu  de  faire  observer  que  les  mohelim  bordelais  n'hési- 
taient jamais  à  retarder  «  le  berit^  «lorsqu'une  maladie  quelconque 
eût  rendu  l'opération  dangereuse. 

Le  13  septembre  1714,  par  exemple,  on  circoncit  un  fils  (VAbra- 
ham  MacUouqiia,  âgé  de  i)lus  de  8  jours,  en  faisant  observer  qu'il 
ne  l'a  pas  été  en  temps  voulu,  «  par  aver  sido  enfermo^  ». 

Le  sieur  Macliouqiia  (ou  mieux  :  Machuca),  dont  il  s'agit,  eut 
deux  autres  enfants  :  Isaac',  le  10  février  1713,  et  Jacob^,  le 
17  janvier  1716.  Sa  sœur,  Ruchel  Machuca'\  tigure  comme  mar- 
raine d'Isaac  d'Aguilar,  le  20  mars  1719. 

Autre  exemple  de  circoncision  retardée  :  —  Le  12  mai  1760,  Da- 
vid Ribeyre^"  fut  opéré  à  l'âge  de  4  mois  «  par  maladie  ».  Cet  enfant 
appartenait  à  la  famille  portugaise  Ribeira  '•,  dont  la  branche  éta- 

1  Thezoro  de  los  circumsidados,  A.  f"  40. 
»  Ibidem,  A.  f"  42. 

*  Ibidem,  A.  i"  33. 

♦  Ibidem,  X.  f"  56. 

•  Thezoro,  B.  f"  7,  n"  41.  —  rT^-;3. 

fi  Ibidem,  A.  i"  8.  —  «  Pour  avoir  été  malade.  • 

7  Ibidem,  A.  1°  7 , 

8  Ibidem,  A.  f"  10. 

9  Ibidem,  A.  f»  ITi. 

">  Ibidem.  li    f"  19  V»,  n.  123. 

•1  Je  crois  qu'il  y  eut  aussi  une  famille  RiBEino.  dont  le  nom  devint  également  Ri- 
beire  en  français.  A  Peyrehorade,  nous  trouvons  Antoine  Ribeyrou,  expulsé  par  lar- 
rèt  du  Conseil  de  1684,  et  Mardor.hée  Rivera,  mort  eu  1661,  d'après  M.  Henry  Léon, 
Hist.  des  Juifs  de  Bayonne,  ch.  xs. 


LK  TRKSOH  DKS  JUIFS  SEPHARDIM  2133 

Llie  à  Bordeaux  ont  pour  chef  Isaac  Ribeyre,  qui  eut  de  sa  femme 
Rebecca  :  1°  une  fille',  mariée  à  Moïse  Dacosta;  —  2'^  Salomon 
Ribeyra-,  circoncis  le  22  juin  H 10,  et  père  lui-même  (VIsaac\  le 
24  janvier  HSO;  —  3«  Esther,  marraine  de  son  neveu  Isaac  de 
Salomon  Ribeyre  ;  —  4«  Jacob,  père  de  David  Ribeyre,  dont  nous 
avons  parlé  ci-dessus. 

Je  citerai  un  troisième  et  dernier  cas  de  circoncision  tardive.  Il 
s'agit  de  Da7îiel  Lopes  Pereire,  «  né  le  16  janvier  HôO  et  [qui] 
À)  n'a  été  sirconsi  que  le  20°  jour  de  sa  nesanse,  et  ce  cauzé  par 
»  vnne  anflure  et  jnflammation  qui  lui  estoit  survenue"  ».  C'était 
le  petit-fils  de  Jacob  Loppes  Pereyre  ^  «  venu  de  Portugal  »  on 
juin  1747.  Cet  immigré  épousa,  à  Bordeaux,  une  demoiselle  Rebecca 
Torres  «,  dont  il  eut  :  1°  Joseph  ',  le  9  décembre  1758,  et  2°  le  David, 
susnommé  ®. 

Pour  les  circoncisions,  on  faisait  choix  d'un  parrain  et  d'une 
marraine,  chargés  de  tenir  l'enfant  pendant  l'opération.  On  les 
prenait  généralement  parmi  les  proches  parents.  Nous  trouvons 
comme  parrains  :  le  grand -père,  l'oncle,  le  père  et  rarement  le 
frère.  La  grand'mère,  la  tante,  la  cousine,  et,  parfois,  la  mère  ou 
la  sœur  figurent  comme  marraines. 

On  pouvait  être  parrain  par  procureur,  et  la  marraine,  désignée 
par  la  famille,  pouvait  être  remplacée  en  certains  cas.  Un  acte  du 
14 décembre  1731,  par  exemple,  porte  la  mention  suivante  :  «  David 
i>  de  Abraham  Keiros,  [circoncis  à  l'âge]  de.  8.  jours.  Pareins  : 
«  Abm  Lameyre  et  Ester  Carbaillo,  sa  sœur;  et,  se  trouvant 
»  ansainte,  [elle]  a  donné  la  inisba  à  Ester  Fonsèque  ^  » 

»  Thezoro,  A.  1»  53,  et  B.  !"  6,  n"  31,  —  7  juin  1738  et  23  sept.  1744. 

»  Ibidem,  A.  f"  10. 

3  Ibidem,  A.  f°  fi4 . 

*  Ibidem,  B.  f°  38,  a»  242. 

^  Ibidem,  B.  f-lS,  n»  79. 

6  Ibidem,  B.  f°  42,  n"  269  =  2ijn. 

7  Ibidem,  B.  f"  36,  u"  230. 

8  Avant  que  Jacob  Lopes  Pereire  n'arrivât  de  Portutral,  nous  trouvons,  dans  le 
Thezoro,  A.  f°  22,  à  la  date  du  13  juillet  1721,  la  circoncision  de  David  dJsaac  Loppes 
Pereira,  .  venido  de  Espa^na  .,  ù-é  de  17  ans.  -  M.  Eug.  Pereire  a  eu  l'obli^^eance 
(le  me  communiquer  une  lettre  de  M.  Ambroise  Tardieu,  historiojjraphe  de  1  Au- 
vergne, siirnalaiit  un  .  Lopez  Peruira,  grand  armateur  à  .\lger  en  1  ;20  ■• 

»  Thezoro,  A.  1-  41.  —  La  iamille  Qukiroz.  dont  le  nom  est  écrit  Keiros,  Keyros, 
Kayros  et  Cuiras,  est  ori'.'inaire  de  Poriugal.  Le  chef  de  la  branche  bordelaise  parait 
être  Abraham  Mendcs  Queiroz,  père  de  :  1'  Isaac  Quetros,  père  lui-même  d  un  autre 
Abraham,  circoncis  le  3  janv.  1738  :  2»  Rachel  Mendes  Keyros;  —  3'  Moise  Mendes 
A'«»-o5,  circoncis  le  8  juillet  1729;  —  4'  David,  dont  nous  avons  parle  c.-dessus; 
5<>  Aaron  Mendes  Keiros,  dont  le  (ils  Moise  eut  pour  parrains,  le  16  fevr.  1742,  ses 
grands-oarents  Abraham  Vitoria  et  Rebecca  Mendes  Cayros.  —  Abraham  Kayros 
hgure  comme  •  vishayeul  à  Tanfan  .  dans  l'acte  de  circoncision  d'Abraham  '^«rrea 
Déballe,  le  13  nov.  1772  (Thezoro,  A.  f"'  52,  55,  38,  41,  58,  et  B.  1°  4b,  n»  284 
=  289). 


234  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Lorsque  le  circoncis  avait  plus  de  5  mois,  il  n'avait  généralement 
pas  de  marraine,  mais  seulement  un  bulial  br?.  Cependant  David 
Mandes  ^  opéré  le  3  mai  llôS,  eut  pour  parrain  son  grand-père 
David  MendesMadeyre  -  et,  pour  marraine,  sagrand'môre  Rebecca 
Mendes  ;  il  fut  tenu  par  Jacob  Mendes  son  père. 

Sur  6  enfants,  âgés  de  1  à  3  ans,  on  en  trouve  deux  qui  eurent 
une  marraine  à  leur  circoncision  ;  mais  il  faut  reconnaître  qu'ils 
appartenaient  à  des  familles  notables. 

Puisque  je  parle  de  l'âge  des  circoncis,  il  est  curieux  de  voir 
comment  se  répartissent,  à  cet  égard,  les  divers  actes  du  Thezoro 
Lie  los  circumsidados  : 

Sur  "755  circoncis,  il  y  en  a  :  617  opérés  dans  les  délais  pres- 
crits par  la  loi  religieuse  ;  3  de  1  mois  ;  5  de  2  mois  ;  1  de  3  mois  ; 

1  de  4  mois  ;  1  de  5  mois  ;  1  de  6  mois,  et  1  de  7  mois  ; —  1  de  1  an; 

2  de  2  ans  ;  3  de  3  ans  ;  4  de  4  ans  ;  3  de  5  ans  ;  1  de  6  ans  ;  6  de 
7  ans  ;  1  de  8  ans  ;  1  de  10  ans  ;  4  dé  11  ans  ;  2  de  12  ans  ;  2  de 
13  ans  ;  3  de  14  ans  ;  5  de  15  ans  ;  2  de  16  ans  ;  5  de  17  ans  ;  5  de 
18  ans  ;  2  de  19  ans  ;  4  de  20  ans  ;  2  de  21  ans  ;  6  de  22  ans  ;  5  de 
23  ans  ;  4  de  24  et  4  de  25ans  ;  1  de  26  ans  ;  3  de  27  et  3  de  28  ans  ; 
4  de  30  ans  ;  1  de  34  ans  ;  2  de  35  ans  ;  4  de  36  ans  ;  1  de  37  et 
1  de  39  ans  ;  4  de  40  ans  ;  1  de  41  et  1  de  44  ans  ;  2  de  45  et  2  de 
48  ans  ;  1  de  49  ans  ;  7  de  50  ans  ;  3  de  52  ans  ;  1  de  58  ans  ;  3  de 
60  ans  ;  4  de  65  ans  ;  et,  enfin,  1  de  68  ans  ! 

La  plupart  des  adultes  venaient  d'Espagne  ou  de  Portugal. 

Pour  tous  les  cas  particuliers,  on  avait  recours  au  jugement  du 
rabbin,  ainsi  que  nous  le  verrons  dans  un  autre  chapitre. 

Une  des  grandes  difficultés  que  présente  la  reconstitution  de 
Tétat-civil  des  Israélites  Sei)hardim  provient  de  leur  habitude  d'a- 
voir deux  prénoms,  l'un  civil  emprunté  au  catholicisme,  l'autre 
purement  biblique.  Quelque  chose  d'analogue  se  faisait  déjà  du 
temps  des  Séleucides.  En  Portugal,  surtout,  le  double  prénom  était 
commun  :  le  célèbre  instituteur  des  sourds-muets,  Jacol)  Péreire, 
s'appelait  Francisco-Antonio  dans  son  pays  ■''. 

Des  nombreuses  coïncidences  que  j'ai  notées,  je  crois  pouvoir 
conclure  que  l'emprunt  du  prénom  chrétien  ne  se  faisait  pas  tou- 
jours arbitrairement  :   c'est  ainsi  que  le  nom  juif  ^&rrt/ia?ii' est 

>  Thezoro,  B.  f»  23,  n°  161. 

*  Les  Mendes  Madeyre,  ou  plutôt  Madeira,  viennent  de  Portugal.  Outre  le  David 
Mendes  Madeyre,  circoucis  a  7  mois  et  dout  nous  venons  de  parler,  nous  trouvons,  à 
Bordeaux,  un  Isaac  Mendes  Madeyre  qui  lut  parrain  de  son  petit-iils  Isaac  Mendes 
Veif^^a,  le  19  mai  1755  {Thezoro,  B.  f»  29,  n»  183  bis] . 

3  Notons,  en  passant,  que  son  petit-fils  le  fameux  économiste  Emile  l'creire  avait 
reçu,  à  la  synagogue,  le  prénom  de  Jacob  » 


LE  TRESOU  DES  JUIFS  SEPHARDIM  235 

g*^n(^ralpment  transformé  en  Antonio,  celui  de  Jacob  en  Francisco  ; 
quant  au  mot  Jacques  (ou  Diego)  ce  n'est  qu'une  altération  de 
l'hébraïque  Jacob.  De  Hahn,  'w'^n,  les  Espagnols  juifs  faisaient 
volontiers  HUln,  Jain,  Chaïm,  Jai/m,Ja'hn,  que  l'on  peut  rappro- 
cher du  James,  si  commun  chez  certains  Israélites  de  nos  jours. 

Le  prénom  juif  du  premier-né  était  toujours  celui  du  grand-père 
paternel.  Le  parrain  ne  paraît  pas  avoir  eu  d'influence  sur  le  choix 
des  noms  donnés  aux  autres  enfants. 

Voici,  avec  leurs  transformations  en  judéo-bordelais  *,  la  liste 
des  prénoms  employés  au  xyiii®  siècle  :  Abraham  ;  Isaac  :=  Jshak 
ou  Jsac  ;  Jacob;  Moïse  =  Moshe  et  Moseh  ;  David  ;  Joseph  = 
Joshef;  Haïm  =:  Jaïn  et  Jaïm,  très  commun  chez  les  Avignonais  ; 
Aaron  ;  Daniel  ;  Mardochée  =  Merdoxay,  Mordojay  ;  Benjamin  ; 
Israël  =  /.serae/!;  Raphaël;  Samuel  =  5'em«e^;  Salomon  =  Salomo; 
Salom,  fréquent  chez  les  Avignonais;  Aser  ;  Baruch  ;  Besalel  ; 
Galef  ;  Elle  =  Eliau;  Eliézer  ;  Elisaman  ;  Emmanuel  =  Ymanoel 
et  Manuel  ;  Gabriel  ;  Gad  ;  \::-r^  =  Herson;  Jonathan  ;  Josué  = 
Jeosua,  Jeosuan ;  Juda  =  Jehuda,  Jewla\  Manassé  =  Menaslic\ 
Manoah  ;  Macchabée  ;  ^'r^w  =  Mesidman  ;  Nasaoth  ;  Isathan  ; 
Néhémie  ;  Nissim  ;  Noë  =  Noa,  Nohac,  Noue  ;  Pinhas  ;  Ruben  ; 
Sebi  ;  Simon  ;  Tobie  ;  Jonas  ;  et,  enfin,  parmi  les  très  rares  : 
Alchanan,  Abiou,  Jesurum,  Joha  et  Semah. 

Les  doubles  prénoms  étaient  peu  communs  ;  les  triples  excep- 
tionnels. 

Pour  ce  qui  est  des  femmes,  elles  portaient  soit  des  noms  bibli- 
ques ^,  soit  des  noms  profanes.  Ceux-ci  étaient  presque  toujours 
très  gracieux  :  Blanche,  Belle,  Rose,  Gentille,  Reine,  Régina, 
Réginette,  etc. 

La  plupart  de  ces  prénoms  sont  très  anciens  dans  le  Judaïsme 
français  :  Reine,  Bonne,  Belle,  appliqués  à  des  femmes  Israélites 
étaient  en  usage,  dès  l'an  1292,  dans  la  Communauté  de  Paris  ^  ; 
sur  une  inscription  du  Moyen-Age,  à  Dijon  *,  on  lit  le  charmant 
prénom  de  Florette. 

En  ce  qui  concerne  les  noms  patronymiques,  les  Juifs  hispano- 
portugais  en  eurent  un,  constamment  le  même,  depuis  leur  éta- 

'  Nous  les  classons  par  ordre  de  fréquence  :  les  plus  communs  en  têle.  —  Les 
mois  soulignés  sont  les  formes  usitées  à  Bordeaux,  au  xviii'  siècle. 

*  \  oici,  par  ordre  de  fréquence  et  avec  leurs  alléralions  bordelaises,  les  principaux 
prénoms  de  femmes  :  Rachel;  Eslher  ;  Sara  ;  Rebecca  =  Hibicca,  Ribka  ou  Jiihcu, 
Mica;  Abigaïl  =  rarement  Abiar/uil  ;  Marie  =  Mirian,  Merian;  Judith  =  Judique; 
Léa  ;  Anna  =  Chana  ou  Jana  ;  Sephora  =  Sipora  ;  Thamar  ;  Débora,  etc. 

*  Henri  Legrand,  Paris  sous  Philippe-le-Bel,  p.  178  :  Rôle  de  la  taille  à  Paris. 

*  Le  rabbin  Gerson,  Pierres  tunmlaircs  hébraïques  de  Dijon,  dans  la  Rev.  des 
Étud.  juives,  t.  VI,  p.  22o. 


•2o6  RKVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

blissement  en  France.  Tout  à  fait  au  début  de  leur  immigration, 
ils  conservèrent,  quelque  temps,  un  double  nom  suivant  la  coutume 
de  leur  paj's  d'origine  '.  Depuis,  ils  ne  portèrent  plus  que  celui  de 
leur  père,  comme  il  est  d'usage  en  France. 

Les  Avignonais,  fondus  actuellement  avec  les  Sephardim,  ne 
se  servaient  de  leur  nom  de  familles  que  pour  la  vie  civile.  En 
voici  un  exemple  : 

Les  héritiers  du  sieur  Abraham  Vidal,  de  Paris,  —  en  faveur 
desquels  le  droit  d'aubaine  fut  aboli  comme  nous  l'avons  écrit  pré- 
cédemment-, —  produisirent  diverses  pièces  d'état-civil. 

L'un  de  ces  actes  fut  un  certificat  délivré  le  26  janvier  1784  par 
D.  Silveyra  %  «  S3'ndic  général  et  Agent  de  la  Nation  Juive  Portu- 
»  gaise  et  Espagnole  à  Paris  ».  Il  est  dit  que  Abraham  Vidal,  mort 
à  Paris  le  21  décembre  1783,  habitant  cette  ville  depuis  45  ans  et 
«  un  des  premiers  fondateurs  de  l'École  Gratuite  de  Dessin  »,  était 
né  à  Bordeaux,  en  1720,  de  Blanche  Ravel  et  de  Joseph  Vidal, 
<(  ainsi  qu'il  appert  du  registre  de  circoncisions  ».  Or  ce  registre 
porte  simplement,  à  la  date  du  31  août  1720  :  «  Abraham  [fils]  de 
»  Joseph-Haïm  fils  de  Noé  ;  parrains  :  son  frère  Noë  et  Rachel 
»  Perpignan*  ». 

Non  seulement  les  Juifs  Portugais  ont  constamment  porté  un 
même  nom  de  famille  depuis  leur  établissement  en  France  ;  ils  ont 
•encore  poussé  le  zèle  jusqu'à  franciser  ces  noms,  comme  ils  fran- 
cisaient leur  esprit  et  leur  cœur  :  Pereira  est  ainsi  devenu 
Péreire  ;  de  Cardozo  on  a  fait  Cardoze  ;  de  la  Penâ  s'est  trans- 
formé en  Peigne  ;  et  Del  Valle  a  parfois  été  littéralement  traduit 
en  Duval. 

L.  Cardozo  de  Béthencourt. 


'  Les  Espagnols  et  les  Portugais  joigaent  habituellement  le  nom  du  père  et  celui 
de  la  mère  ;  mais  les  Espagnols  mettent  celui-ci  le  second  avec  la  particule  y,  tandis 
que  les  Portugais  en  font  le  premier.  Rodrigues  y  Cardozo  désigne  en  Espagne  un  en- 
fant d'un  sieur  Rodrigues  et  d'une  dame  Cardozo  ;  en  Portugal  cela  signifierait  :  fils 
d'une  dame  Rodrigues  et  d'un  sieur  Cardozo. 

^  Voir  chapitre  i. 

3  Marlineau,  Mémoire  pour  les  héritiers  d'Abraham  Vidal,  Juif  portugais,  p.  30. 
(Pdris,  1784,  in-4°.) 

♦  Thezoro  de  los  circumsidados,  A.  i"  19. 


NOTES 


SUR 


L'HISTOIRE  DES  JUIFS  DE   SAXE 

(suite  et  fin  ') 


II 


La  Rt^forme  eut-elle  une  influence  favorable  sur  la  situation  des 
Juifs?  Il  semblerait  que  non,  car  bientôt  après  cet  événement 
plusieurs  villes  de  Saxe  et  de  Thuringe  défendirent  aux  Juifs  d'y 
séjourner,  en  leur  refusant  «  l'eau  et  le  feu  ».  En  1543,  sous  le 
règne  du  prince-électeur  Maurice,  ils  furent  chassés  de  Zwickau, 
où,  sous  le  margrave  Frédéric,  en  1308,  on  leur  avait  permis 
d'habiter-.  Un  fait  analogue  eut  lieu,  dans  la  même  année,  à 
Plauen.  Auguste,  successeur  du  prince-électeur  Maurice,  se  mon- 
tra encore  moins  favorable  aux  Juifs;  il  leur  interdit  rigoureuse- 
ment le  séjour  de  tout  son  pays.  Les  villes  et  surtout  les  corpora- 
tions en  faveur  desquelles  «  le  père  Auguste  »  avait  ainsi  agi 
n'étaient  pas  encore  satisfaites  des  mesures  prises  contre  les 
Juifs.  A  la  diète  de  l'année  1565,  on  reçut  une  adresse  des  villes  — 
la  copie  se  trouve  aux  archives  de  Leipzig  —  se  plaignant  qu'on 
tolérât  rà  et  là  des  Juifs,  «  qui  s'occupaient  non  seulement  du 
commerce  de  velours,  de  soie  et  de  toile,  mais  aussi  d'usure». 
Une  ordonnance  du  prince  Auguste,  édictée  à  Freiberg  le  5  octobre 
1554,  et  défendant  aux  Juifs  le  commerce  d'argent,  renouvela  et 
aggrava  les  ordonnances  de  ses  prédécesseurs.  Nous  y  lisons  : 
«  Aucun  Juif  ne  recevra  l'hospitalité  de  nuit  dans  nos  villes  mi- 
nières, et  nos  sujets  seront  punis  de  contrainte  par  corps  en  cas  de 
transgression.  Si  un  Juif  est  pris  en  faute,  la  moitié  de  tout  ce 

'  Voyez  Revue,  t.  XX.V,  p.  217. 

»  Tittmann,  Cleschichte  Heinrich  des  Erlauchten,  t.  I,  p.  393. 

T.  XXVI,  N»  52.  17 


238  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

qu'il  a  sur  lui  reviendra  à  celai  qui  Taura  arrêté.  S'il  récidive,  on 
lui  infligera  un  châtiment  corporel  et  ses  biens  seront  con- 
fisqués '.  )' 

A  partir  de  ce  moment,  non  seulement  les  Juifs  n'avaient  pas  le 
droit  de  passer  la  nuit  à  Freiberg,  mais  même  quand  leurs  affaires 
les  obligeaient  à  y  faire  un  court  séjour,  ils  devaient  se  faire  ac- 
compagner, contre  une  taxe  fort  élevée,  par  un  employé  de  police. 
La  nécessité  de  cette  surveillance  est  expliquée  dans  les  Annales 
de  Freiberg,  de  A.  MoUer,  par  le  fait  suivant  :  «  Année  1621.  Le 
24  juin,  plusieurs  Juifs  ont  été  arrêtés  à  Freiberg  pour  permettre 
Texamen  de  leurs  marchandises;  on  y  trouva  beaucoup  d'ar- 
gent caché.  Il  y  en  avait  aussi  dans  un  double  fond,  ainsi  que 
dans  les  poches  de  leurs  vêtements  et  dans  leurs  ceintures  ;  de 
même,  les  havresacs,  les  selles  et  les  harnachements  des  che- 
vaux étaient  remplis  de  monnaies  hors  cours.  On  leur  prit  tout 
l'argent  et  le  cuivre  acheté  par  eux,  d'un  poids  total  de  deux  cents 
quintaux,  et,  sur  l'ordre  du  prince,  tout  fut  envoyé  à  Dresde.  » 

On  peut  pourtant  prouver  par  des  documents  que  ce  commerce 
illicite  de  monnaies  défectueuses  n'était  pas  toujours  exercé  par 
des  Juifs.  Le  prince  électeur  Georges  I",  dans  une  lettre  adressée 
à  la  municipalité  de  Leipzig,  en  date  du  3  décembre  1621,  rend 
responsable  de  la  circulation  des  monnaies  tous  les  industriels  et 
commet^çanls  àas,  y'iWQs,  saxonnes-.  M.  G.  Beutel,  de  Dresde,  a 
publié  dans  les  Mittheilungen  fur  Gesch.  der  Stadt  Meissen, 
plusieurs  documents  concernant  le  système  de  monnayage  de 
l'année  1621  ^,  et,  entre  autres,  une  pièce  nommant  plusieurs 
personnes  qui  ont  été  citées  devant  le  tribunal  sous  l'accusation 
d'avoir  fait  le  commerce  des  monnaies  et  parmi  lesquelles  ne  se 
trouve  aucun  Juif. 

Gomme  le  règlement  édicté  sous  le  prince  Auguste  contre  les 
Juifs  voyageant  en  Saxe  empêchait  beaucoup  de  grands  commer- 
çants de  visiter  la  foire  de  Leipzig,  on  en  atténua  la  rigueur 
dans  l'intérêt  de  cette  ville.  Le  2  octobre  1682  Jean-Georges 
accorda  certains  privilèges  aux  Juifs  étrangers  fréquentant  la 
foire  de  Leipzig.  Il  faut  ajouter  qu'on  n'était  pas  seulement  intolé- 
rant envers  les  Juifs  *,  mais  envers  tous  ceux  qui  ne  professaient 
pas  la  religion  reconnue  par  le  pays,  comme  le  prouve  le  vœu 
exprimé  par  les  représentants  des  États  à  la  Diète  de  168.j  :  a  Qu'il 
ne  soit  pas  permis,  disent-ils,  dans  le  pays  de  Son  Altesse,  aux 

»  Cod.  Aug.,  t.  II,  art.  80. 

'  K\o\.zsc\\^  Mûnzgesckichtc,  t.  Il,  308. 

^  Mitûmlungen  des  Vereins  fur  Geschichte  d.  Stadt  ifeissen,  p.  453. 

*  Sidori,  Geschichte  der  Juden  in  Sachse>i,  p.  o1. 


NOTES  SUH  L'IIISTOIHE  DES  JUIFS  DE  SAXE  2o9 

personnes  des  autres  confessions  de  faire  partie  des  corporations 
et  encore  moins  d'obtenir  les  privilèges  de  citoyen  ». 

Un  peu  plus  tard,  le  20  septembre  1693,  Jean-Georges  IV, 
animé  de  sentiments  de  malveillance  à  l'égard  des  Juifs,  écrivit  à 
leur  sujet  à  la  municipalité  de  Leipzig  :  «  Ne  voulant  pas  intro- 
duire chez  nous  les  superstitions  des  Juifs,  vous  devez  sévèrement 
défendre  à  ceux  qui  arrivent  chez  vous  d'observer  la  fête  des  Ta- 
bernacles et,  en  général,  de  célébrer  leurs  faux  offices  divins.  » 
Le  sort  des  Juifs  s'améliora  lorsque  Frédéric-Auguste  monta,  en 
1(594,  sur  le  trône  de  Saxe.  Déjà  le  12  février  1695,  il  intima  l'ordre 
à  la  municipalité  de  Leipzig  de  permettre  à  son  «  hofjud  «Berend 
Lehman  de  Ilalberstadt,  et  au  «  hofjud  »  Leffmann  Berentz,  de 
Hanovre,  ainsi  qu'à  ses  deux  fils,  d'ouvrir  pendant  la  foire  une 
boutique,  sans  leur  faire  payer  une  taxe  plus  élevée  qu'aux  autres 
marchands.  Ce  n'est  qu'après  des  ordres  réitérés  que  la  munici- 
palité de  Leipzig  tint  compte  du  désir  du  prince.  Mais,  lorsque  le 
6  avril  1698,  le  prince  ordonna  à  cette  municipalité  d'autoriser  les 
Juifs,  pendant  la  durée  de  la  foire,  à  célébrer  le  service  divin 
dans  leurs  demeures  et  à  emporter  leurs  morts  contre  le  paiement 
de  12thalers,  la  municipalité  fît  de  sérieuses  représentations,  dans 
une  adresse  du  10  juin  1698,  où  elle  en  appelait  aux  anciennes  tra- 
ditions. Lorsqu'en  1699,  le  Consistoire  et  les  représentants  des 
États  demandèrent  à  leur  tour  qu'on  défendît  aux  Juifs  de  célébrer 
les  offices  en  temps  de  foire,  Frédéric-Auguste  céda  par  le  rescrit 
du  4  janvier  1704*. 

La  famille  de  Berend  Lehmann,  dont  il  est  question  plus  haut, 
occupait  une  situation  privilégiée  en  Saxe,  parce  que  le  chef  de  la 
famille,  né  en  1659,  à  Ilalberstadt,  avait  rendu  des  services  impor- 
tants au  prince  Frédéric-Auguste  I«''.  Ainsi,  il  lui  avait  procuré 
l'argent  nécessaire  pour  obtenir  la  couronne  de  Pologne,  en  1697,  et 
payer  ensuite  les  frais  du  couronnement  à  Varsovie.  Dans  ce  but, 
il  avait  négocié  la  vente  du  droit  de  bailliage  sur  Quedlinbourg, 
acquis  en  1697,  au  prix  de  340,000  thalers,  par  l'Etat  de  Brande- 
bourg. La  comtesse  Konigsmark,  supérieure  du  couvent  de  Qued- 
linbourg, parle  en  termes  peu  aimables  de  Mo)isieur  Lehmann  et 
se  plaiiit  qu'un  Juif  ait  conclu  cette  affaire.  Vchse  afhrme  que  ce 
fut  aussi  Lehmann  qui  négocia,  en  1706,  l'emprunt  nécessité  par 
l'invasion  de  Charles  XII,  roi  de  Suède.  Berend  Lehmann  est 
mentionné  dans  les  actes  du  conseil  général  de  1708  comme  ayant 
rendu  des  services  d'argent  et  négocié  le  rachat  du  bailliage  de 
Borna.  Dans  la  lettre-   qu'il  adressa,  le  22  septembre  1707,  au 

*  Vogel,  Leipzigcr  Annalen. 

*  Emil  Lehmann,  Ber  polnisckc  Résident  Berend  Lehmann,  p.  13. 


260  REVUE  DES  ETL'DES  JUIVES 

Statthalter,  pour  lui  demander  son  avis  sur  la  pétition  de  B.  Leh- 
raann,  concernant  son  établissement  et  celui  de  sa  famille  à 
Leipzig  et  à  Dresde,  le  roi  de  Pologne  parle  des  «  fidèles  services  » 
et  des  «  sentiments  dévoués  »  de  Lehmann.  Dans  une  lettre  en- 
voyée de  Dresde  le  27  mars  1708,  le  roi  parle  en  termes  analogues 
de  J.  Meyer,  de  Hambourg,  et  de  son  fils  aîné,  qui  s'établirent  avec 
leurs  familles  et  leurs  domestiques  à  Dresde. 

Le  8  mai  1708,  le  roi  de  Pologne,  électeur  de  Saxe,  écrivit  de 
nouveau  à  la  municipalité  de  Leipzig  en  faveur  de  B.  Lehmann  et 
de  Leffmann  Berentz,  disant  «  que  suite  devait  être  donnée  à  ses 
ordres  ".  Mais,  malgré  la  bienveillante  intervention  du  prince,  les 
Juifs  ne  purent  obtenir  la  liberté  de  leur  culte  pendant  la  durée  de 
la  foire  à  Leipzig. 

Leur  situation  n'était  pas  meilleure  à  Dresde.  Le  12  décembre 
1705,  les  épiciers  et  les  commerçants  se  plaignirent  à  la  munici- 
palité «  que  les  Juifs  occupassent  des  ouvriers  de  leur  secte  et  se 
réunissent  pour  leurs  cérémonies  religieuses  ».  Une  enquête  faite  le 
23  décembre  1705  montra  qu'en  tout  quinze  Juifs  habitaient 
Dresde  '.  On  leur  permit  quand  même,  comme  dit  Sidori,  d'établir 
une  Betsluhe,  un  oratoire.  Les  représentants  des  Etats  en  furent 
fort  mécontents,  et,  pour  les  apaiser,  le  roi,  dans  son  discours  de 
fin  de  session,  en  1711,  dit  v  qu'il  ne  permettrait  pas  aux  Juifs 
d'exercer  leur  culte  >;.  Exception  fut  faite  par  lui  en  faveur  de  la 
famille  Lehmann.  Dans  un  rescrit  du  25  avril  1711,  il  autorise  le 
ti  résident  Lehmann  et  son  fondé  de  pouvoirs  J.  Meyer,  à  célébrer 
le  service  divin  d'après  le  rite  juif,  mais  sans  bruit  et  sans  cris 
dans  la  maison  qu'ils  habitaient  à  Dresde,  ou  celle  qu'ils  habite- 
raient à  l'avenir  ».  En  même  temps  il  ordonnait  «  que  les  livres  de 
prière,  tables  ou  tout  autre  objet  enlevé  de  la  maison  seraient 
restitués  à  Meyer  ». 

On  se  montrait  moins  tolérant  pour  les  Juifs  étrangers.  En  1708, 
on  bannissait  les  Juifs  de  Pologne,  de  Silésie,  de  Moravie,  de 
Bohême,  de  Saxe,  en  leur  interdisant  de  venir  visiter  les  foires  en 
qualité  de  marchands  ambulants,  excepté  celles  de  Leipzig  et  de 
Naumbourg.  Du  reste,  B.  Lehmann  et  J.  Meyer  s'adressèrent  eux- 
mêmes  au  roi  à  plusieurs  reprises,  pour  empêcher  l'aftluence  des 
Juifs  étrangers.  Ce  n'était  pas  par  la  crainte  de  la  concurrence, 
mais  uniquement  «  pour  tenir  éloignés  des  éléments  qui  auraient 
pu  justifier  la  défense  d'admettre  des  Juifs  «.  Les  privilèges  dont 
jouissaient  les  deux  familles  sus-mentionnées  excitèrent  l'envie  et 
la  haine,  et,  en  1716,  les  représentants  des  États  se  plaignirent  que 

*  E.  Lehmann,  Dcr  polnische  Résident  B.  Lehmann,  p.  13. 


NOTES  SITR  L'HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  SAXE  2fil 

le  culte  Israélite  fût  exercé  dans  la  résidence  électorale.  En  même 
temps,  les  commerçants  de  Dresde  exposèrent  leurs  griefs  contre 
les  Juifs,  disant  «  qu'ils  s'arrogeaient  le  droit  de  faire  le  com- 
merce, sous  le  faux  prétexte  qu'ils  se  trouvaient  au  service  du 
roi  ».  Après  plusieurs  tentatives  pour  acquérir  une  propriété,  B. 
Lehmann  fut  autorisé,  par  rescrit  royal  du  17  mars  1718,  à  occu- 
per le  «  Postliaus  »  dans  la  Pirnaisclie  Gasse  »  (aujourd'hui 
V.  Landhausstrasse  »),  pendant  vingt  ans,  contre  le  paiement  de 
13,000  tlialers.  Lehmann  et  Meyer  y  étahlirent  une  maison  de 
banque  ',  mais  il  paraît  qu'ils  vendaient  également  au  détail  de  la 
soie  et  des  denrées  coloniales.  Fournisseurs  d'une  cour  qui  aimait 
le  luxe,  leurs  affaires  prirent  une  grande  extension.  Le  l^r  sep- 
tembre 17-20,  J.  Meyer  donna  dans  sa  maison,  meublée  avec  luxe, 
une  grande  fête,  à  laquelle  prirent  part  le  prince  et  la  princesse  '. 

La  confiance  dont  jouissaient  B.  Lehmann  et  J.  Meyer  à  la  cour 
et  de  la  part  du  gouvernement  était  méritée,  malgré  l'hostilité 
qu'une  grande  partie  de  la  population  de  Dresde  leur  montrait  et 
malgré  les  critiques  amères  des  auteurs  contemporains.  C'est 
ainsi  qu'en  parlant  de  la  bonté  de  Frédéric-Auguste  b^,  qui,  en 
1720,  quand  le  prix  des  vivres  était  très  élevé  à  Dresde,  fit  impor- 
ter de  grandes  quantités  de  blé,  son  biographe  Fassmann  s'ex- 
prime en  ces  termes  malveillants  :  «  Mais  comme  l'afïaire  a  passé 
par  les  mains  des  Juifs,  il  faut  se  demander  si  le  prix  du  blé  a  été 
mis  à  la  portée  des  pauvres,  ainsi  que  Ta  voulu  et  ordonné  le 
roi  ».  Il  est  pourtant  avéré  que  J.  Meyer,  chargé  par  conces- 
sion royale  de  l'approvisionnement  de  Dresde,  fit  venir  à  ses  frais 
plus  de  quarante  mille  boisseaux  de  blé  de  l'Elbe  inférieure  et 
même  de  Danzig,  vendant  le  boisseau  à  3  thalers,  1.5  groschen. 
La  foule  venait  journellement  en  telle  affluence  devant  la  maison 
de  Meyer  que,  pour  maintenir  Tordre,  il  fallait  l'aide  des  soldats  ^ 

La  bienveillance  que  le  prince  témoignait  à  quelques  Juifs  pro- 
voqua à  Dresde  et  dans  d'autres  villes  de  Saxe  des  adresses  et 
des  plaintes  sans  nombre.  Le  renouvellement  du  privilègf;  accordé 
au  «  Mimzjud  »  Gad  Lévy  fit  dire,  en  1725,  aux  représentants  des 
États,  «  qu'à  Leipzig  aucune  fourniture  de  monnaie  ne  serait  né- 
cessaire ».  Longtemps  le  gouvernement  résista  à  ces  pétitions. 
Mais  lorsque,  dans  leur  adresse  du  22  mars  1728,  les  représentants 
exigèrent  de  nouveau  «  que  les  Juifs  fussent  complètement  élimi- 
nés et  le  traité  du  Postliaus  rompu  »,  le  gouvernement  céda  et 
publia,  en  avril  de  la  même  année,  un  édit  en  vertu  duquel  tout 

»  Vehse,  Geschichle  der  Eofe^  Haus  Sachsen,  t,  V,  13. 

*  Hasche,  Diplotn.  Geschickte  Dresdens,  t.  II,  p.  70. 

^  M.  B.  Lindau,  GescMchtc.  der  Residenzstadt  Dresden,  552. 


262  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

commerce  était  interdit  aux  Jaiis.  «  Nous  voulons  imposer  des 
limites  plus  strictes  aux  Juifs  et  nous  confirmons  votre  décision  à 
l'égard  de  G.  Lévj-.  »  La  maison  de  Lehmann  avait  déjà  beaucoup 
souffert  dans  les  dernières  années,  par  suite  des  restrictions  ap- 
portées peu  à  peu  à  son  commerce:  le  12  avril  1728,  tout  com- 
merce industriel  lui  fut  interdit,  avec  ordre  de  vendre  toutes  les 
marchandises  dans  un  délaide  trois  mois.  Toutes  les  réclamations 
furent  vaines.  Avec  la  mort  de  B.  Lehmann,  survenue  en  1730, 
et  la  prohibition  de  tout  commerce,  suivies  de  la  faillite  de  plu- 
sieurs de  leurs  olients  distingués,  les  maisons  Lehmann  et  Me3'er 
déclinèrent.  Cependant  Elias,  un  des  (ils  de  B.  Lehmann,  fut 
nommé,  un  peu  plus  tard,  à  un  poste  de  confiance.  Bien  qu'on 
permît  aux  familles  Lehmann  et  Meyer  de  continuer  à  habiter  le 
Posthaus,  elles  le  quittèrent  en  1733,  une  émeute  populaire  leur 
ayant  fait  craindre  que  la  population  ne  se  portât  aux  pires  excès 
contre  eux.  Leur  maison  devint  alors  l'hôtel  des  Postes  ', 

Déjà  le  12  mai  172.5,  une  ordonnance  défendit  le  séjour  de  Dresde 
à  tout  Juif  n'appartenant  pas  à  la  domesticité  d'un  «  Hofjud  »  et 
non  pourvu  d'un  permis  visé  par  le  Gouverneur.  A  plusieurs  re- 
prises, les  représentants  avaient  proposé  de  ne  permettre  aux 
Juifs  de  séjourner  dans  le  pays  qu'au  temps  des  foires^.  Le  4  avril 
1733,  le  prince  Frédéric-Auguste  II  imposa  à  tous  les  Juifs,  sans 
distinction  d'âge,  qui  traversaient  le  i)ays,  le  paiement  intégral  de 
la  taille.  Sur  les  réclamations  des  Juifs  de  Dresde,  présentées  par 
Elias  B.  Lehmann,  l'ordonnance  fut  maintenue  seulement  pour  les 
adultes,  tandis  que  les  enfants  au-dessous  de  dix  ans  étaient 
exemptés  de  l'impôt.  Elias  B.  Lehmann  fut  reconnu  comme  re- 
présentant des  Juifs  de  Dresde,  et  on  établit  ainsi  la  taxe  de  la 
future  communauté  religieuse  de  cette  ville  •''. 

A  la  suite  de  nouvelles  plaintes  des  commerçants  de  Leipzig, 
Frédéric-Auguste  II  renouvela  aux  Juifs  la  défense  d'avoir  un 
magasin  public  et  do  séjourner  à  Leipzig  au-delà  de  la  durée  des 
foires.  Pour  faire  enlever  le  droit  de  séjour  à  Leipzig  au  «  Aliinz- 
jud  »  Lévy,  on  l'accusait  de  faire  le  commerce  de  monnaies  hors 
cours  et  de  ne  pas  envoyer  tout  le  métal  acheté  par  lui  à  la  Mon- 
naie. Les  fonctionnaires  furent  alors  invités  à  faire  attention  que 
le  privilège  de  Ci.  Lévy,  pour  la  fourniture  des  monnaies,  ne  fût 
pas  exploité  par  lui  pour  faire  le  trafic  de  marchandises  en  de- 
hors de  la  foire  \ 

'  Hasche,  Dresdner  Merkwiirdigkeiten,  2«  partie. 

*  M.  B.  Lindau,  Gesch.der  Residenzst.  Dreitilen.  p.  604. 
'  Sidori,  Gcsch.  der  Juden  in  Sachsen,  p.  73. 

*  Ibid.,  p.  77,  80. 


NOTES  SUR  L'HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  SAXE  263 

Sur  la  proposition  des  représentants  des  États  du  18  juillet 
1746,  une  nouvelle  ordonnance,  du  16  août  de  la  même  année, 
limita  le  commerce  et  le  séjour  des  Juifs  à  Dresde,  Ils  n'avaient 
pas  le  droit  de  construire  une  synagogue,  ni  de  posséder  un  local 
pour  célébrer  en  commun  le  service  divin.  Chacun  était  tenu  de 
faire  ses  prières  tranquillement  dans  sa  propre  maison.  Seuls 
furent  tolérés  les  Juifs  qui  possédaient  une  permission  du  prince 
ou  un  passeport  du  gouvernement.  Ces  derniers  étaient  obligés 
de  déclarer  une  fois  par  mois  leur  domicile  et  l'état  de  leur 
famille  '.  Lorsqu'en  1749,  l'impôt  fut  augmenté  à  Leipzig  et  à 
Dresde,  la  «  taille  »  des  Juifs  fut  élevée  dans  la  même  proportion. 
Mais,  malgré  ces  fortes  impositions  et  des  restrictions  multiples, 
le  nombre  des  Juifs  augmenta  dans  ces  deux  villes,  principalement 
à  cause  des  guerres  de  l'époque,  qui  rendaient  le  contrôle  difficile. 
En  1750,  fut  fondé  à  Dresde  la  caisse  de  secours  pour  malades 
Israélites,  dont  les  statuts  et  les  comptes  forment  les  documents 
les  plus  anciens  de  la  communauté  Israélite  de  Dresde  ^.  Bientôt 
après,  les  Juifs  obtinrent  un  endroit  spécial  pour  enterrer  leurs 
morts,  qu'ils  avaient  dû,  jusque-là,  transporter  à  grands  frais  à 
ïeplitz.  Frédéric-Auguste  II  leur  assigna,  par  un  rescrit  du  mois 
d'avril  1750,  un  terrain  situé  «  sur  le  sable  »  devant  Neustadt, 
sans  cependant  leur  donner  le  droit  d'y  construire  une  maison.  Ils 
avaient  à  payer  pour  cet  emplacement  une  somme  de  1000  tha- 
1ers,  et,  de  plus,  pour  chaque  enterrement,  15  thalers  pour  un 
adulte  et  7  pour  un  enfant  au-dessous  de  12  ans.  In  peu  plus  tard, 
on  leur  permit  de  construire  une  maison  pour  le  fossoyeur,  qui  de- 
vait être  chrétien.  Il  avait  l'ordre  de  s'opposer  à  tout  enterrement 
si  préalablement  on  ne  lui  avait  pas  remis  quittance  des  frais  dus 
à  l'état  civil.  Ce  cimetière  fut  inauguré  en  nSP. 

En  1794,  un  débat  s'éleva  entre  les  Juifs  de  Dresde  pour  décider 
si  tous  les  membres  de  la  communauté  avaient  le  droit  détre  en- 
terrés dans  ce  cimetière,  droit  contesté  par  les  anciens  et  les  des- 
cendants des  familles  qui,  en  1751,  avaient  acheté  le  terrain. 

Pendant  la  guerre  de  Sept-Ans,  de  nouveaux  Juifs  vinrent  s'éta- 
blir à  Dresde,  sans  y  être  autorisés,  mais  aussitôt  la  paix  conclue, 
ils  furent  expulsés.  Sous  le  règne  de  FrédcTic-Auguste  III,  une 
nouvelle  ordonnance,  publiée  en  1772,  proclama  qu'aucun  Juif  ne 
serait  toléré  à  Dresde  sans  l'autorisation  spéciale  du  prince  ré- 
gnant. 

On  devait  faire  le  relevé  des  habitants  juifs  trois  fois  par  mois, 

*  Émil  Lehmann,  Det-  poln.  liesident  B.  Lehnann,  p.  68. 

*  Sidori,  Gesch.  der  Juden  in  Sachscn,  p.  86. 

3  Ilasche,  Dnsdiier  MerkicUrdigkeUen,  p.  751. 


264  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

afin  qu'on  pût  mieux  se  rendre  compte  de  leur  nombre.  Us  auraient 
le  droit  d'habiter  1'  «  Altstadt  »  ,  mais  seraient  exclus  des  fau- 
bourgs et  de  la  «  Neustadt  «.  Les  Juifs  étrangers,  de  passage  à 
Dresde,  seraient  conduits  par  les  gardiens  au  bureau  de  la  ville, 
où  ils  paieraient  un  «  groschen  »,  en  échange  duquel  ils  rece- 
vraient un  permis,  qu'ils  devraient  rendre  à  leur  sortie  de  la  ville  '. 
Lorsqu'en  1777,  plusieurs  Juifs,  par  suite  de  ce  règlement  sévère, 
furent  expulsés  de  Dresde,  ils  sollicitèrent  l'intervention  de  Moïse 
Mendelssohn  ;  celui-ci,  qui  connaissait  le  baron  de  Ferber,  cham- 
bellan du  prince,  lui  écrivit  le  19  novembre  1777  une  lettre  émou- 
vante, où  nous  lisons  :  «  J'apprends  qu'on  chasse  de  Dresde  plu- 
sieurs centaines  de  mes  coreligionnaires.  Parmi  eux,  il  s'en  trouve 
plusieurs  que  je  connais  personnellement  et  de  Thonnêteté  des- 
quels je  suis  sûr.  Ils  ont  perdu  leurs  biens  et  ne  sont  pas  en  état 
de  s'acquitter  des  lourdes  charges  qui  pèsent  sur  eux.  Ce  n'est 
certes  pas  par  paresse  ou  par  un  trop  grand  luxe  qu'ils  se  sont 
ruinés.  Où  voulez-vous  que  ces  malheureux  se  rendent  avec  leurs 
femmes  et  leurs  enfants  innocents?  Où  pourraient-ils  trouver  pro- 
tection, si  le  pays  qui  a  englouti  leur  fortune  les  rejette?  L'expul- 
sion est  la  punition  la  plus  dure  pour  un  Juif,  c'est  plus  que  le 
bannir  de  son  pays,  c'est  l'exterminer,  puisque  de  toutes  les  fron- 
tières le  préjugé  le  chasse  à  main  armée  -. . .  » 

A  la  fin  de  la  guerre  de  Sept-A.ns,  le  nombre  des  Juifs  de 
Dresde  était  d'environ  900,  en  1783,  de  932,  en  ISOO,  de  1031.  Ce 
nombre  diminua  pendant  l'occupation  française.  La  communauté 
iuive  de  Dresde  ne  comptait,  en  1815,  que  500  âmes,  en  1830, 
après  de  longues  années  de  paix,  742,  en  1832,  seulement  712,  en 
1834,  682,  en  1837,  647,  et  en  1843,  seulement  626  âmes.  Cette 
communauté,  qui,  au  commencement  de  ce  siècle,  se  réunissait  en 
sept  différents  locaux  privés,  pour  le  service  divin,  eut  un  centre 
de  ralliement  quand  elle  eut  i)lacé  à  sa  tête  le  rabbin  D.  W.  Lan- 
dau. Venu  en  1803  de  Polnisch-Lissa  à  Dresde,  il  y  resta  jusqu'à 
sa  mort,  survenue  en  1818.  Les  Juifs  furent  admis  à  prendre  part 
à  la  solennité  qui  eut  lieu  le  7  juin  1815,  à  l'occasion  du  retour  du 
roi  Frédéric-Auguste  de  la  captivité.  Le  cortège,  qui  alla  à  la  ren- 
contre du  roi,  comprenait  également  quarante  délégués  juifs  con- 
duits par  le  rabbin  Landau  "*. 

Par  un  rescrit  du  20  juillet  1818,  le  gouvernement  permit  aux 
Juifs  d'apprendre  les  métiers  dont  les  corporations  avaient  jusque- 
là  le  monopole.  Mais  dès  le  20  octobre  de  la  même  année,  sur  les 

'  M.  B.  Lindau,  Geschichte  der  Residenzstadt  Drcsden,  p.  707. 

*  JJoses  Mendehsohns  gesammclte  Schriften,  Leipzig,  1844,  t.  V,  p.  544. 

'  M.  B.  Lindau,  Gesch.  der  Res,  Dresden,  p.  827, 


NOTES  SUR  L'HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  SAXE  26o 

instances  pressantes  de  la  population,  le  rescrit  fut  révoqué.  Après 
la  mort  du  rabbin  Landau,  ce  fut  le  savant  B.  Béer  (né  le  20  juillet 
1801,  mort  le  P-"  juillet  1861)  qui  fut  nommé  chef  religieux  de  la. 
communauté  de  Dresde.  Pendant  que  le  rabbin  Lippmann  Lévy 
faisait  les  sermons  traditionnels  pour  les  membres  âgés  de  la  com- 
munauté, B.  Béer  réunissait  autour  de  lui  la  jeune  génération  et 
prononçait,  à  partir  de  1826,  en  sa  qualité  de  président  de  la  Société 
de  secours  pour  les  malades,  des  homélies  en  langue  allemande.  A 
l'occasion  du  centième  anniversaire  de  naissance  de  Moïse  Men- 
delssohn,  il  fonda,  le  10  septembre  1828,  le  iMendelssolin-Verein, 
dans  le  but  de  développer  le  goiit  de  «  l'industrie,  de  l'art  et  des 
sciences  dans  la  jeunesse  de  Dresde,  et,  en  général,  de  relever 
l'état  intellectuel  des  Juifs  *  ».  Les  Juifs  ne  jouissaient  cependant 
pas  des  droits  civils.  Pour  se  marier,  il  fallait  des  démarches  coû- 
teuses dont  le  résultat  dépendait  de  l'avis  du  Conseil  de  la  ville. 
Entravés  dans  leur  commerce,  ils  espéraient  en  vain  que  le  mouve- 
ment de  1830  améliorerait  leur  situation.  Mais  la  population  trou- 
vait qu'ils  avaient  déjà  trop  de  liberté.  C'est  ainsi  que,  dans  une 
pétition  adressée  au  gouvernement,  la  bourgeoisie  de  Dresde  récla- 
mait «  protection  contre  les  Juifs,  qui,  trop  favorisés,  travaillent 
de  tout  côté  à  s'approprier  les  biens  de  la  bourgeoisie  ^  ».  B.  Béer, 
dans  toute  une  série  de  brochures,  réclama  l'amélioration  du 
sort  des  Juifs.  En  1833,  il  obtint  un  premier  résultat.  A  la  suite 
d'un  mémoire  rédigé  par  lui  et  apostille  par  le  professeur  Krug, 
représentant  de  la  première  Chambre  saxonne,  celle-ci  prit  una- 
nimement la  résolution  de  prier  le  gouvernement  royal  de  faire 
réviser  la  législation  régissant  les  Juifs  et  d'améliorer  leur  situa- 
tion civile.  La  première  Chambre  demandait  qu'il  plût  à  Sa  Ma- 
jesté et  à  Son  Altesse  royale  le  régent,  après  révision  de  la  légis- 
lation existante  concernant  les  Juifs,  de  promulguer  une  loi  pour 
l'amélioration  de  leurs  droits  civils,  et,  sans  attendre  cette  loi, 
d'abroger  la  mesure  de  police  obligeant  les  Juifs  qui  traversaient  la 
ville  de  Freiberg  à  se  faire  accompagner  par  un  garde  payé  par 
eux  ^  »  Le  futur  roi,  le  prince  Jean,  membre  de  la  première 
Chambre,  prononça  ces  paroles  mémorables  :  «  Je  suis  confus  que 
dans  le  pays  oii  je  vis,  des  habitants  en  soient  encore  à  réclamer 
l'égalité  *.  »  Le  27  février,  la  deuxième  Chambre  vota  comme  la 
première,  mais  le  4  mars,  à  la  suite  d'une  pétition  des  Corpora- 

*  Emil  Lehmann,  Ein  Halb-Jahrhuniert  in  der  tsr.  Religionsgemeindc  :u  Dresdeii, 
p.  10;  M.  B.  Lindau,  Gesch.  der  Rt>s.  Dresden,  889. 

*  M.  B.  Lindan,  Gesch.  der  Hes.  Dresden,  p.  849. 

*  Sidori,  Gesch.  der  Juden  in  Sachsen,  p.  115  et  116. 

*  E.  LehmanD,  ibid,,  p.  12, 


2fir,  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

tions,  elle  modifia  la  proposition  en  ce  sens  «  que  le  gouvernement 
consentit  à  proposer  la  loi  en  question,  à  la  session  suivante  des 
Représentants  et  à  ne  pas  permettre  jiisque-là  l'établissement  des 
Juifs  étrangers  «.  Le  30  octobre  1834,  la  deuxième  Chambre 
accepta  les  résolutions  de  la  première.  Le  20  décembre,  l'ensei- 
gnement juif  fut  i)lacé  sous  la  direction  du  Ministre  des  Cultes  et 
de  TEnseignement  public.  On  permettait  aussi  aux  Juifs  d'ap- 
prendre un  métier  et  de  l'exercer  ;  l'impôt  pour  le  mariage  était 
aboli,  de  même  que  la  défense  de  demeurer  à  Dresde-Xeustadt 
et  dans  les  faubourgs.  Finalement,  la  loi  du  18  mai  183'7  autorisa 
les  Juifs  de  Leipzig  et  de  Dresde  à  former  une  communauté  reli- 
gieuse et  à  posséder  un  temple  commun.  «  Cette  loi,  écrit  M.  Leh- 
mann,  qui  parait  inconnue  même  aujourd'hui  de  beaucoup  de 
personnes,  transforma  la  situation  des  Juifs  à  Dresde  et  à  Leipzig. 
Les  associations  religieuses  devinrent  des  communautés,  le  culte 
privé  devint  un  culte  public,  la  religion,  d'abord  défendue,  puis 
tolérée,  devint  une  religion  légalement  reconnue,  la  religio  tôle- 
rata  devint  religio  recex)ta  ^  » 

Après  la  mort  d'Abraham  Lippmann  Lévy,  survenue  le  30  avril 
183.5,  Zacharias  Frankel,  rabbin  de  Tepliz,  fut  élu  grand-rabbin 
df  Dresde  Entré  en  fonctions  le  29  mai  1836,  il  inaugura,  le 
1  août,  l'Ecole  communale  juive,  formée  de  deux  écoles  privées. 
En  même  temps,  il  s'efforça  de  faire  construire  une  synagogue 
unique  pour  remplacer  les  divers  locaux  existants.  Après  de  nona- 
breuses  difficultés,  la  peu  riche  et  peu  nombreuse  communauté 
réunit  les  moyens  nécessaires  pour  acheter  le  terrain,  et  la  pre- 
mière pierre  fut  solennellement  posée  en  présence  de  deux  mi- 
nistres et  de  toutes  les  notabilités  de  la  ville  *.  La  synagogue  fut 
inaugurée  le  8  mai  1840  ^ 

Une  loi,  du  16  août  1838,  accordait  aux  Juifs  de  Dresde  et  de 
Leipzig  un  certain  nombre  de  droits  civils  ;  par  une  autre  loi,  du 
W)  mai  1840,  le  gouvernement  modifia  la  forme  injurieuse  du  ser- 
ment juif,  qui,  cependant,  ne  fut  entièrement  aboli  que  le  20  jan- 
vier 18*9.  L'égalité  civile  fut  accordée  «  aux  Saxons  de  confession 
juive  «d'abord  en  1849,  et  ensuite  constitutionnellement  garantie 
par  la  loi  du  3  décembre  1868.  La  loi  fédérale  du  3  juillet  1869 
(étendue  depuis  IS'O  à  tout  l'empire  allemand),  abolit  toutes  les 
restrictions  qui  avaient  leur  source  dans  la  différence  des  confes- 

'  E.  Lehman,  Ein  Halb-Jahrhundert  in  der  Relig.  Gem.  Dresden,  p.  13. 

«  lèid.,  p.  28. 

»  M.  B.  Lindau,  Gesch.  d.  Ees.  Dresden,  p.  900. 


NOTES  SUR  L'HISTOIRE  DES  JUIFS  DE  SAXE  267 

sions,  en  statuant  que   la  faculté  d'Atre  représentant   ou  fonc- 
tionnaire public  est  indépendante  de  la  confession  K 

Frankel,  grand-rabbin  de  Dresde,  quitta  cette  ville,  le  6  août 
1854,  pour  prendre  la  direction  du  séminaire  de  Breslau.  Il  fut 
remplacé  par  ^Volf  Landau,  également  vénéré  pour  les  services 
qu'il  rendit  comme  prédicateur,  rabbin  et  homme  de  bien.  Lan- 
dau est  mort  le  24  août  1886,  et,  depuis  cette  date,  la  commu- 
nauté de  Dresde  a,  comme  directeur  spirituel  M.  T.  Winter.  Son 
président,  depuis  le  9  février  1869,  est  M.  E.  Lehmann,  député, 
dont  les  efforts  incessants  pour  l'amélioration  du  sort  des  Juifs 
de  Dresde  et  de  toute  la  Saxe,  méritent  une  vive  reconnaissance. 

Ce  que  B.  Béer  fit  pour  la  communauté  de  Dresde,  Jacob  Na- 
chod  l'a  fait  pour  la  communauté  de  Leipzig.  Il  a  commencé  par 
établir  des  liens  entre  tous  les  Juifs  de  Leipzig  en  fondant  «  la  So- 
ciété des  Amis  »,  qui,  dans  la  suite,  donna  naissance  à  la  commu- 
nauté de  Leipzig.  Klle  eut  pour  premier  prédicateur  M.  Adolphe 
Jellinek,  qui  y  resta  jusqu'à  1856,  et  fut  ensuite  nommé  à  Vienne. 
Son  successeur  fut  M.  Goldschmidt.  Depuis  sa  mort,  M.  Porgès 
continue  l'œuvre  bienfaisante  de  ses  prédécesseurs.  En  18'79,  fut 
fondée  la  communauté  de  Chemnitz,  en  1880,  celle  de  Zittau,  et 
en  1884,  celle  de  Plauen.  En  d'autres  villes  de  Saxe  vivent  égale- 
ment des  Juifs,  sans  cependant  être  assez  nombreux  pour  former 
des  communautés.  La  communauté  de  Dresde,  qui,  en  1843,  ne 
comptait  que  626  âmes,  en  contenait  2,595  en  1890.  Dans  cette 
môme  année  de  1890,  il  y  avait  dans  toute  la  Saxe  9,368  Juifs. 
Depuis  deux  ans,  peu  de  Juifs  étrangers  sont  venus  s'établir  en 
Saxe,  car  ce  pays  paraît  devenir  le  centre  de  l'agitation  antisémi- 
tique. Les  Juifs  ne  forment  partout  en  Saxe  que  3  0/00  de  la 
population  totale,  et,  dans  ces  conditions,  il  est  vraiment  excessif 
de  les  considérer  comme  un  danger  social. 

Depuis  mille  ans,  les  Juifs  de  Saxe  se  sont  avancés  peu  à  peu 
des  ténèbres  vers  la  lumière.  Aujourd'hui,  on  leur  conteste  de 
nouveau  une  partie  de  leurs  droits,  mais  c'est  un  temps  d'arrêt 
dans  la  marche  du  progrès  qui  ne  durera  pas.  Gomme  l'a  déjà  dit 
en  1844  M.  de  Mayer  dans  la  Chambre  des  députés  saxons  en 
citant  la  parole  de  Grégoire:  «  La  grande  question  est  finalement 
celle  de  savoir  si  les  Juifs  sont  des  hommes.  » 

A.  LÉVY. 

'  E.  Lehmann,  Ein  Halh-Jah-hnndert  in  d.  R:l.  Gem.  Dresden,  p.  39. 


TRÂNQUILLO  YITA  CORCOS 

BIENFAITEUR  DE  LA  COMMUNAUTÉ  DE  GARPENTRAS 


.l'apporte  ici,  comme  un  hommage  à  la  mémoire  de  notre  re- 
gretté ami,  Isidore  Loeb,  cet  appendice  à  l'histoire  des  Juifs  de 
Garpentras.  dont  il  a  dessiné  les  lignes  principales  de  main  de 
maître.  Je  dois  la  lettre  d'où  j'ai  tiré  la  présente  étude  à  l'obli- 
geance de  son  possesseur,  notre  savant  collaborateur,  M.  Abraham 
Epstein  de  Vienne.  La  netteté  et  la  beauté  de  la  calligraphie,  la 
variété  des  signatures,  l'adresse  et  les  plis  qui  montrent  encore  la 
forme  première  de  la  lettre  à  laquelle  il  ne  manque  que  le  cachet 
qui  la  fermait,  tout  prouve  que  nous  sommes  en  présence  de  l'ori- 
ginal de  la  missive  adressée  par  la  communauté  de  Garpentras, 
ses  notaires,  ses  rabbins  et  ses  administrateurs,  la  veille  du  jour 
de  Kippour  de  l'année  1711,  à  Hiskia  Manoah  Ilayyim  Corcos,  rab- 
bin et  secrétaire  de  la  communauté  de  Rome.  Les  différents  noms 
de  ce  rabbin  sont  reproduits  dans  leur  ordre  successif  dans  des 
versets  bibliques  placés  à  la  fin  des  divers  paragraphes.  Gette 
lettre  devait  servir  à  justiiier  à  ses  yeux  les  membres  de  la  com- 
munauté et  à  l'assurer  de  leur  gratitude. 

Ce  rabbin  distingué  de  la  communauté  de  Rome,  descendant 
d'une  famille  de  Juifs  castillans',  comme  Aboab  le  rapporte  dans 
sa  Nomologia,  p.  360,  apparaît  ici  pour  la  première  fois  comme 
bienfaiteur  des  Juifs  résidant  hors  de  Rome  dans  les  Etats  de 
l'Eglise.  Lors  de  son  entrée  dans  le  Conseil  de  la  communauté,  an- 
térieurement à  l'an  1692,  il  fréquentait  déjà,  comme  on  le  faisait 
ressortir,  les  palais  des  plus  grands  princes  et  cardinaux,  dont  il 
était  fort  estimé  à  cause  de  son  érudition  -. 

*  Je  suppose  que  les  trois  frères  qui  disposaient  d'une  fortune  de  plus  de  700,000 
couronnes  dont  parle  Manassé  b.  Israël,  dans  sa  déclaration  à  la  République  anglaise 
(Kaj'serling,  p.  76,  noie  201  a),  étaient  les  trois  banquiers  romains  Elie,  Josué  et 
Ephraïm,  61s  de  Salomon  Corcos,  qui  vivait  vers  lo6();  voir  Berliner,  dans  la  Juhel- 
schrift  de  Hildesheimer,  lo9,  161. 

*  Berliner,  l.  c,  164  :   C;7;cm    C'?"!*^    Z^".'^    -'C    '^llbz^    Z'^l    'ZV'T't    ''^-"i 


TRANQUILLO  VITA  CORCOS  269 

C'est  grâce  à  cette  influence  dont  il  jouissait  auprès  de  la  cour 
papale  et  qu'il  devait  aussi,  en  partie,  à  sa  réputation  de  médecin, 
qu'il  put  intervenir  efficacement  en  faveur  de  la  communauté 
juive  de  Carpentras.  Son  nom  était  aussi  estimé  chez  les  Juifs  du 
Gomtat  Venaissin  que  chez  ceux  de  sa  communauté  natale,  Rome. 
La  renommée  de  ce  rabbin,  qui  avait  ses  entrées  chez  les  cardi- 
naux, était  venue  jusqu'à  eux.  La  reconnaissance  pour  son  inter- 
vention salutaire  était  si  vive  à  Carpentras,  que  son  nom  fut  ins- 
crit dans  les  annales  de  cette  communauté  et  de  toutes  les  com- 
munautés de  la  région,  comme  celui  d'un  bienfaiteur  inoubliable. 
Pour  une  communauté  au-dessus  de  laquelle  planait,  comme  un 
nuage  toujours  menaçant,  le  danger  de  l'expulsion  que  l'on  ne 
cessait  de  demander  au  pape  ',  où  chaque  incident  donnant  lieu  à 
des  attaques  contre  les  Juifs  devenait  un  prétexte  de  vexations  et 
de  procès  sans  lin,  il  était  d'une  importance  capitale  d'avoir,  au 
siège  même  de  la  papauté,  un  défenseur  ayant  l'oreille  des  auto- 
rités ecclésiastiques. 

C'est  à  lui  que  la  communauté  envoya  des  délégués  lors  de  nou- 
velles complications  qui  surgirent.  Un  de  ces  délégués,  du  nom  de 
Josué,  est  cité  comme  l'auteur  de  la  calomnie  dirigée  contre  Cor- 
cos.  On  ne  sait  pas  au  juste  la  nature  de  cette  affaire;  en  tout  cas, 
il  réussit  de  nouveau  à  faire  rendre  justice  à  la  communauté.  Vai- 
nement le  procureur  essaya  de  susciter  de  nouvelles  difficultés, 
grâce  aux  prétendues  obscurités  du  texte  du  bref  papal. 

La  consternation  de  la  communauté  fut  d'autant  plus  grande 
en  apprenant,  par  une  lettre  de  leur  protecteur,  écrite  en  italien, 
que,  par  suite  de  querelles  entre  les  délégués,  la  calomnie  avait 
osé  s'attaquer  à  son  nom  respecté  et  qu'il  avait  été  accusé  de  s'être 
approprié  illégalement  une  somme  qui  lui  avait  été  confiée.  En 
présence  de  ces  soupçons  révoltants,  les  sentiments  de  gratitude 
de  la  communauté  se  manifestèrent  avec  une  force  et  une  vivacité 
irrésistibles.  On  lui  fit  savoir  qu'on  n'avait  jamais  osé  lui  deman- 
der le  moindre  compte  de  sa  gestion  des  sommes  mises  à  sa  dispo- 
sition. On  était,  disait-on,  intimement  persuadé  que  l'intérêt  qu'il 
témoignait  aux  communautés  et  la  connaissance  qu'il  avait  de  la 
situation  à  Rome  le  détermineraient  à  employer  l'argent  de  la  ma- 
nière la  plus  utile  à  son  but. 

Les  noms  des  signataires  de  cette  lettre  se  retrouvent  encore,  en 
partie,  dans  les  rôles  des  contributions  de  Carpentras  des  années 
1G69  et  1679,  publiés  par  M.  Loeb  [REJ.,  XII,  -216). 

Les  secrétaires  de  la  communauté  mentionnés  dans  la  lettre  sont 

•  JjOeb,  dans  la  Jieoue  des  Etudes  Jinves,  XII,  109. 


270  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Jacob  Lunel,  qui  signe  du  nom  d'un  des  accents  de  la  Bible,  Yerah 
ben  Yomo,  allusion  à  la  ville  de  la  lune,  Lunel,  et  expression  de 
sa  modestie  (il  ne  se  compare  qu'à  la  lune  à  peu  près  visible), 
Menahem  Lion  et  Israël  Lévi  (?)  ;  ces  deux  derniers  font  pré- 
céder leur  nom  de  pareilles  formules  de  modestie.  Comme  il  est 
déjà  question  en  IGTQ  de  la  veuve  de  Jacob  de  Lunel  [ibicl.,  217], 
notre  Jacob  est  sans  doute  le  petit-fils  de  ce  dernier.  Ont  signé 
comme  assesseurs  du  tribunal  rabbinique  de  Carpentras  :  Isaac. 
de  la  famille  Roquemartine,  qui  comptait  à  Carpentras  de  nom- 
breux et  riches  représentants,  Juda  délia  Roque  et  Mordachay.. . 
Le  premier  administrateur  est  Àbram  de  Roquemartine.  C'est  pro- 
bablement le  même  que  celui  de  la  liste  de  IblQ,  mais  ce  ne  peut 
être  guère  celui  qui  vivait  encore  en  lloi  {ibid.,  219).  Joseph  de 
Milhaud ,  qui  a  signé  comme  deuxième  administrateur,  peut 
être  le  Jassé  de  Milhaud  qui  apparaît  encore  (p.  220)  en  1754  ; 
c'est  sans  doute  en  cette  année  1754  qu'il  mourut,  puisqu'à  cette 
date  il  est  question  de  sa  veuve.  La  famille  à  laquelle  il  apparte- 
nait, fort  répandue  à  Carpentras  S  d'où  elle  était  originaire,  a 
produit  beaucoup  d'hommes  renommés  dans  l'histoire  et  la  littéra- 
ture des  Juifs  français.  David  Lion,  qui  a  signé  comme  troisième 
Parnes  ou  administrateur  de  la  communauté,  pourrait  être  iden- 
tifié avec  le  David  Lion  que  nous  trouvons  encore  en  1754  dans 
une  liste  destinée  au  censeur  des  livres  de  Carpentras-. 

David  Kaufmann. 


PIÈCE  JUSTIFICATIVE. 

-laT  b2>^  mno  ba  nb:;^  nb  .  ab-i3:;b  c-^rn  a-ic-^i  nncb  nDTiî  nai'^rr: 
N-^nn[i.  nnNj-i^'-iN  .n-'îsoi  NiiD-ncnx  bD  "«rîb  .r;"<':;im  r^-^y  ib  .nby: 
!-jbj»  .  Nn3\-i73  '^jim  NPîpbN  .  Nnr-?:  lyba  b'zi  •'N^"  mb  .^  r^i-^nim 
Nj-173  ■';?:-'r:  irzy  pmr;  c^ûd  ûTci-irr;  r^-b^r;  T>"r,  .  Nn-ino7:T  Nnpi?::' 
n"-i3  Dnpmp  'c^^n  n^ziz  rr^pm  -i"-irî?:D  is:n-n 

»  Cf.  D.  Kaufmann  dans  Luncz,  Jcrusalem,  III,  10".-107.  Josepli  nN-'bi?:T  a 
contresifrué,  en  qualité  d'assesseur  du  rabbinat  de  Carpentras,  le  D^5i"l  'ûDUJD  "ITO 
y'N"î-:"^S"1Np  'p"'P  j^TtZfZ-,  Amsterdam,  1741. 

«  Loeb,  JtEJ.,  XXIll,  147. 

^  Daniel,  m,  2, 


TUANQLIILLO  VITA  CURCOS  271 

nam  ï^3^;^{  nnnb  nnnbo  ribcs  mas  hyi2  riins  iisabnus  n^r:?:  SlX 
rjTimar)  nnn  mr?  ,"irb:?  m^D  ï:ip727:  rVs--;:!  ^bici^  riDVjn  ^;-,^n■' 
Tcy^  "73  "iD  riT^-'Vrr;  nbnsT  r;\:J^n^!  "Jn  Tip"'::  "ip"'  -p*^  i;n:2":;;-i  -,:Dn5 
niDi)  ri7  v^^  •'^'^"'^  ?-i3"'T:>7an  ri-ipn  -^bn»  rrms  r-iSc:p  T^p  "^n-Tw 
ti:''!:;^  t;-'n-3"ib7:DT  i->d-'"ip  "'bi^-nD  1:3-^  Kpibn?:  '«::i2b  ■'b372  ï-!-3i-,i' 
-i-^pn  5N  viD  nmpm  ao-'T  .  ■'inid  nj:m:i7:T  nrc  iT:;b3  t^b-^bp  >>j;o'^bn 
ïnN  -naT  r^^^■l3^n  nx  rrr^T  ï-!bpD"«T  ripT:»^!  in^imrj  -n:i  ^la: 
N-i^  b::  TCN  mpbinn  mmimisy  osn  n"in^::  nxT  ns  ri^n  .  mm::-,D 
bNi  Ï15DD!-:  "^wN-i  b.x  .'ib::'  t::n  nih  -^3  bso^  !i:?3:;"i  nr;  bsT  t^"«:;r 
p-3r  î^nn  ti-^p?^:?^:  p73:'m  inbousn  SD-^an  n^sisr  tb  ïmb:>-:r:  nn 
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t=!Ti7a  l'J  c-'baoi  ti^bT  mnsnb  nn3T73  br  J-nbr7:3  nbr  £=3  tzibrr; 
■'niD-'T  t=i^Ti73:>'  V-  !=i"^3br!7a  nîb  \r^'A  û-'bn:^^:  scd  ts'-i:  ijb  no;n 
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mbrb  n;3p  û-^nois  V^  ^-^ob  irN-'-J-  1:3b  pN:;  tCwN  i:b  i"nsb  n:rN 
m-iD:'  "^ri  T^b;-i  j-iidd  m-icrb  i;r:ir:  sb  fs^i^n  -^b^n  û-^Tw^d  -i3N 
t>*b  1-^'.r•,^  i=ib-i::'3  v3-j  n^-'  nnD  -ic^n  i^Tj'O  iî^t^  r;:-  -^d  ib  nnr 
^-^3'::■'b^  lîT'sm  iDTcb  -«i;  ■'sr  ^m722  irN"i  ^cntû  ■^::nn  ncb  -;:nr! 
y-D  -i2"]:>i  ins-^n?:  -i'>a«  bnnsri  -io:n  Nnn  nbi-;»  mnn?:  p-b  -jps  «-"byT^ 
n^^-^bx;!-!!  -n2-'-rn  n-^n-inb  ^n  .im^wX  b:'  idj^-w-^  i:rp''  r::^  ci-.c-'  cn  ■'2 
^3[DK3/b  û^yn-'i  û^ib:;  iÈd  n-;  b:?  n^n  ncî^n  pr^:^  xb  nnaa  rnssb 
■ijbT  .  !-im25r!T  nbinsrr  nb  ^d  iTi^:i">  \ri^-j^  vKin  brn  tzbi:?  \S3  b: 
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\n  Sic.si  r-t-n35i  i-i::;'  m-i  vssnn  mn  ri^x  i7û  .  £=-'D-irj7:-i  a^cino 
ï-iD-inr;  ■»»  ï-jbwca  û-^to  — !-is:  ■«»  .  n^nanm  bDCr;  -^bbiCT:  b:?  m-- 
£:'^bb72-iN-i  ,  û-^bn  nD:>?a  fpr;  -^m  .  nnïi'srj  bD  rrp-:;-  !-i:m721  rriT^bm 
i-n-'Ta  S:>  i-'3T'3'i  iT^y  nbD3  iy-i5  crr^D-in  pn  ^">:5n  mbciD  îs-^D-ia 
— ,iN  b'::  !-îpi3N  irr^b  nsTonT:  '—• ::n  n:'  ï-rnix"^::):  b:'  r72"'"'pT  J-n-:!? 
ijbsnb  i;7:a  it  ri":;-i  £ii\-',n3-  itûi  f^tipr:  172  iib-i:::  nn-inn  mns 
D^:-^^  nan  iDO  b:?  mn^  Nnn  «bn  ûb"i372  i-bn^-':  n-^D-n  no-iEb  isr-'^n 
nr-:23>7272  n:72n3  ^"CN  Nin  rri  ■'D  innwX  -mb  ■— ^^no"'  '|:'72b  i:nbnpb 
";oi7272  0^5  nr:2iD  r-i-CT^i  irbr  n;;-i3  n-iT^  ï-Ti:?72"i  irT"  in3i::?72T 

»  II  Rois,  XX,  13. 


272  RKVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

VN  —"«liN  rtivr;  i^^-^n  r^n;i  !-!5'3  t^m^cbs  Tiiy  anwn  mity  sdn  a-nTci 

ûo^r  îib  rîniTT  ïT^rn  ncî  riitr:!  ntîxn  pn  ipbTon  rr'b:?  mr573  rr^ss^ 

'm*:73  rrrrr;  r;NL:7:n      ,      rr'rrrs  nd-i7:t  rtpn^  •«r"':^  £:?  i-a'::  ■'n-ii 

m-^nm  isnsN  "^"3  nrsnbîû;  -icisb  ï-tm-j  piTnnbi  -i-'rnb  inir-i  5*3-:;  rsc 
nîir  ni-iriN  T^n  inrr  n-^CN-iTo  i:b  T^rr  *— CwX  ït'^  ■jrri-'T:  m-r;  nns 
by  ^^p"cb  aT^n  bD  nn?:-'pi  irn':;  m7:--ij:yni  T-irn  ir-nD^a  'cjzzt,  rxirai 
i3tt;mci  û5  -1:^1:;  r;:r;-i  is^bN  riN-^n-'T  ï^marr  by  Tipo-^i  d-'^wcnn  \-ib-î 
r-)-i-''^u;  ûnn  mr^i  irT^n  "liT-iir;  n-irnN  î-nmbi  ï-i^irn  r!:r;wS  '^'tic 
Sï-.n  ::5*n  r— ,wSt  i^pd-'  -iCN  irmbibi  brb  i::"7--  pi  !-t::t;t  rinn^s 
PwNi  r-îp-nn  it^  pn  ir^n  tjn  "^inNi  .  a-^:-,  n-":-^  nny  p-ib  p-^D^y^ 
^3»  i3D-ip3  hîbn  n;3bi  lîi^a  mn  irpp"^::!!  ip-n3:ii  ispp  ît:;;-o  bD 
v-inn  'iipw-i  p<-'b-L:\x  ircbn  !-t3iPD  -i"iP37:73  irbi<  r;mbc  r-i-i:i\x 
1-bN  mbcn  r.^yizn  p-^Tnr;  -i""ipS7:  -icn  isb  2pd  i:mbu5  ^^lairt"  -)"722":j 
rr^n  Nbi  riT  t^b  ibip  y'2'O':  NbT  û-'-iai  "{"«nt  -i7:in  v^  "'^  rîTiarm 
r<bbr-3  i^bi  -i-:p\s  ^<:3'-lD7J  -iNb  t^ppy;3':j  ■'xm  ir;;^  yiz'O  t^sbn  ib 
V^b  ïm3cn?3  nrcnbi  pn:*  p^ni:  b:'  nmb  T^'^nrb  rib-^bm  om  -i?:n\N 
bbD  Nccn  N2->bT  n"n  ^û"n3  r-,i3bDib72  vt^  ririripo  22b  im  tz^cr 
NPiL^TDm  p::n"i  pii:  iicy?:  b::T  p72N  ipbiyso  p7:n  hy\t>  Nir:  — wN 
"D  î>c:-îwS"7  N-.oyD  "iTirr^bi  b''L:n-'b  a-^pcc  PiTbi  ï-îd  rrz^Y-^  ''^~'~>  î^"'"^ 
■—a:!  -iwN  r:7:  bD  -^d  ûbi/:?  nb  b^  nbr  Nbn  û-'miTm  Nin  "^pc  niu: 
■r:b  rrna  "irrN  izizy  r\rcy7  b-^nrin  nCwS  bm  t'-p  ip-:n"i  non  irbr 
^■p'^y  b::  cy-iPinb  -;'iP:D7:b  cip::  ii^-->  "-,cn  '^-ira  2on:  ir-!-ip::i  c2wS2i 
-,ninpm  ii:-^;:nr;  rtprn  Cip^-^oin  i:pn  i^r:  c-'-ûbc  rjbwS  -ir-^mr::  cnt 
3b  5m  Sun  ■'3  n*  "jw  ht  pn:53  nn  ht  ?-n:53  r^T  û'^-îîdwt  ûbvc^np 
q^Dr;  în-p-b  n^n  tiCDr;  -n5-:b  n;*!!:?:  til:::^  -12^1  ^zn-^b:?  lycnb  'j^ni 
piDb):b  D'^"'yi:7;Nb  ir:  -,rD  '^•:;n  Sri  vrm  rnLis  13  pvwi'b  nb  "[ips 
smNirvm  Pi5;3;r;  mr-b  i;3b3  v^n  "^^n-.^  n-nsTji  — ins-j  t*^i!-!  bar: 
TwN  vpt;72  "— riN  nriirr'ic  "inN  û:*  "jw^i  iiy  x-p  n-'îo  T's:-;  riT:  bsT 
^1^5  û-'P-j  h?::»  ■'3bir;3  isrp-'  ■'7:1  .rrcir  5«<ir;  r-T3i?:N3i  r-,':T:n  t'T' 
irpDO  nïïn->733  cn-ib  r\mh  £]nT^  i-^bNir.  br  tcï^i  r|n:'*  eii^d  D-'Tûon 
mN->  t^^p-iD  i^d;n3  ';-2"^'  t>ibb7:bi  rrij^T^bi  mx-ib  'b^->r>  nPD  bN 
ro"ip  ûip;û3  L!ip"«  "'■ûi  'TIN  ■^r!3  r;b:r-«  ■^'":  '^n  .  vrrb  bbnb  PTnrtb 
bip  13-inpD  b:?  d:7on  Np-^mi  Np-im  ^mx  -o  lii-'-iy-b  m3D  mp7:3 
i;p3io  PN  tL-'pni  Vpi^~  ^">^Nb  'j-'ppoTj  i\si  tz-'ir:  û-^ir:!  a-^v^T: 
^  D^'^n  yr  ircb  NDn73  irpr::c;'b  -^in^-iI  irrrrb  yvnjz  iPii 
pb3p  173  :inr  tcni  ipinn  r::;'-^  '-i\::n7:  iT^rrib  lïT^rtTn  '-i"iP373 
t^np .  pi-i:i-'Nrî  ib  i;-i07ja  —int*  !-i:ni  rtwNbrti  rbi*  ï-iimbo  pn:;\sr: 
toîbi  bpnb  Nb  iTCNi.bïj  ir->srD  — nx  lira  ^li-jb  t-^ir-^i  ûr!3  r::ci 
:?i3ï:r:73  CwX  a"^72i  ncnbcr;  omoT:  i;\s  pnswn  I7j\::  i-i::îo  •T^7:nnb 

1  Gen.,  vin,  9. 
*  Argent,  Q^i2l. 
'  Prov.,  XV,  4. 


TRANQUILLO  VITA  CORCOS  273 

17:t3  n"d  ln;n  aà  Dnp73  bD3  rirbr;  m':j-i  d^i  ^îïoî^t:  in  •:innr;72  in 
N-no  pT  b2T  my  tnpTn»  nrKO  D'^-'is  r!N573  t>:T"D'«riMr:  r>:r;r  -iCN 
irtT  ir-inN  ^dod*'  Nbi  ï:Dn-«  Nbo  iDb  -i»n  p-n  1^  D'«a  inbb  in^nn^  n-'spn 
ûin3:yTD73  iD'^iaT  "IjTOwS  Y""^^"^  "'-"'^  ^''"'^'^  T'''^'^  "'""^^  •  '^''"'^■'  ^"^"'^  '-^ 
TTD'^JDbi  ir-inN  r^-n-ib  Nnb7a  N-'bn  rr^T^nbi  yon  bDbn  nr  bob  t^ii  nnn 
■^anp-'nn  ^dD2  anrcn  nnas  -lanrr  tiiooin  "naso  iT'rWT  ir'^rs'wa 
Nbi  t^:>-^"i  ^<b  i;i:72Nn  m"!  l^y  riopan  -i""inD73  i:b  anD  — wNd  curîbo 
■^nbs  n3n3XT  , -02073  -nwNb  •^<■']:^^!  ly  ûn[— i];in:;  -ion  riwS  nmb  y^-^-^ 
bizy  ^ON  nb733'  bai  z's-'  mr-'^-'  r:72Dn  m:j  mnniû  n»D  nrsob  3>iT>n 
p-ipa  ny^nn  -l'D-isn  r:D  13^  dnt  ,  r;j<-nnm  nnon  r:T2  p-^csn  «bi 
NOC73  n"'3  n-ibi  -lanD  ib^j:'  bon  p-in"'  ib  rï<i  a^bb-?:  n-nom  a-'-iai 
-iDO  CNi  binp  n-^m  np-'rT  nrnx  12  o-^o  -'.a-in  n:?i::b  yp  o-^  r::n 
N;b  n\xT  'j-'onî  bai  .  nb:3n  '-nDO  N3\n  nh  Nb^b  t«-:7jb:?  -^Nnn  n'ni:73 
S^b^  rjbiDO  nbiy  p-ipD  lin^  1"l^b^D  rî;p:n  ir:pi  s-<^720  bs  mnn 
n-':>o»b  pinb  y«3D73D  T^b:'  nTijn  imiDO-a  -"tt^  i:PN7ai  ûonT^T  im-iay? 
^Dr  T^mDia  b:^  :?do  T^b:»  m:>-'T  :?-'co-'i  r^-'DV  —  ys073b  b''::N?2b 
'n  m03  iT'Dn  mna  la-'Oinbi  )V':>y  irinbi  d'inné  û-'*^n  '— ison  ûnn-'T 

yN-iiaro^Np  ^''p  ■'5-^rî372  ■^o^-iD  T'bj-i  msib  D-'-nnn073T  D-':?mDn  avN3 
.   .  nrzy  mbnais  ni:-^  -nob  3":?nn  nro  "^''v  a-i3>  yN-Tjro-iwXp  no 

ipi-in  ûrî-i3N      nrans»ipn-n  pn^^       n"-idd  np:?^  i72i^  p  n"-!"" 

Oins  (?)  nr::-iï<72  V^t  b"';TbT  "  iTo^-b  n-j  -^-it:! 

D3-1D  ax^b^MT  qor   r^n  ri^pn^bi  rmrr»    »  ûmnn  p  n:->NO  3ip3  y^i:r 

03-lD  pN^b  in  y^l  (•?) .  •  .N    ■^DTITD  IIN^^  Ûn373 

NnTon  N-)DO  (?)  ■^■ibri  bi<T«-> 
Sur  l'adresse  : 

y:>n  .  r-ninnso  "^-iwS  .  triNcn  bp»  Tiy  rn;a73  .  rriiSTor!  ■'Sd  biw  bx 
^Nno"»  ï-t:'i-i  n"r:    .n^p73i  nna    .n-'pnca  «in  T'nn  .^«i-n3^  ""ip^ 
t>ï-nn3T  ws:^i:i3  mn-jn  q^32ir:  .  -i^ni<^T  î-nin  b-^nr  .  n^ib  iii:  5m3- 

■«"-13  oip-iip  ai-^n  n"i:73  "irr'pTn  i"-in73Db 
m-«3n  ■'73in3 


»  Z)mfl»,  V,  10. 
*  Berachot,  40  o. 


T.  XXVI,  N»  52. 


18 


NOTES  ET  MÉLANGES 


LES  POINTS-VOYELLES  EN  HÉBREU 


Graetz  '   a  montré  que  le  système  hébreu  des  points-voyelles 
n'est  nullement  emprunté  au  syriaque,  comme  on  avait  cru  pou- 
voir l'affirmer  en  se  fondant  sur  la  ressemblance  toute  fortuite  de 
quelques  signes.  D'après   lui,   le  système  babylonien  dérive  des 
maires  lectionis  n,  ^\  en  y  joignant  Vy .  Toutefois,  le  ûbn  et 
tout  le  système  palestinien  auraient  pour  origine  un  ancien  point 
diacritique,  usité  aux  premiers  temps  de  la  Massore.  Graetz  s'est 
appu3^é,  pour  prouver  l'existence  de  ce  point,  sur  l'emploi  des 
termes  hyVû  et:-;b»,  par  lesquels  la  Massora  finalis  et  le  traité 
Ohhla  loeoMla  désignent  des  séries  de  couples  de  mots  ne  dif- 
férant entre    eux  que  par  une  voyelle  soit  dans  le  préfixe,  soit 
même  dans  la  racine.  Les  mots  bi'b?:  sont  ceux  qui  auraient  eu  le 
point  supérieur,  et  les  mots  y^b'ù  ceux  qui  étaient  pourvus  du  point 
inférieur.  Le  point  supérieur  aurait  été  employé  pour  marquer 
soit  la  voyelle  pleine,  par  opposition  au  schera  ou  aux  voyelles  qui 
le  remplacent,  soit  les  voyelles  essentiellement  longues,  et  le  point 
inférieur  aurait  désigné  les  voyelles  relativement  courtes  et  le 
sclieva.  Il  est  étrange  que  Graetz,  après  avoir  rei)roché  (p.  351)  à 
Frendsdorff  d'avoir  parlé  de  la  différence  des  voyelles  au  point  de 
vue  de  la  quantité,  reprenne  (p.  357),  au  moins  en  partie, la  même 
théorie,  sans  paraître  se  souvenir  des  objections  qu'il  y  avait 
faites  lui-même.  La  valeur  quantitative  des  voyelles  ne  paraît  pas 
avoir  été  considérée  par  les  Massorètes,  puisque  le  tVn  n'est  pas 
plus  long  que  le  ■'-,^1  et  que  le  y7:p  se  trouve  avoir  le  point  tantôt 
en  haut,  tantôt  en  bas.  Le  principe  qui  paraît  avoir  guidé  les 

'  Monatsschrift,  1881,  p.  348-367  et  3yo-4U5. 


NOTES  ET  MÉLANGES  270 

Massorètes  est,  selon  nous,  la  distinction  des  voyelles  hautes  et 
basses,  fondée  sur  la  prononciation  de  ces  voyelles.  La  bouche  se 
relève  plus  pour  prononcer  o  ou  ou  que  pour  (7,  et  s'abaisse  encore 
davantage  pour  r  et  pour  i.  Cette  distinction  est,  en  réalité,  la 
même  qu'a  faite  Jacques  d'Edesse  en  parlant  de  voyelles  pleines 
et  voyelles  grêles,  et  l'on  comprend  pourquoi,  en  syriaque,  le 
point  était  mis  en  haut  pour  les  voyelles  pleines,  et  en  bas  pour 
les  voyelles  ténues. 

Mais  une  fois  qu'on  distingue  les  voyelles  hautes  des  voyelles 
basses,  les  termes  ^^^12  et  y-ib?3  employés  par  la  Massore  peuvent 
s'appliquer  aux  voyelles  elles-mêmes,  sans  qu'il  soit  nécessaire  de 
recourir  à  l'hypothèse  d'un  point  diacritique.  On  pourrait  donc 
admettre  que  les  signes  des  voyelles  existaient  déjà  au  temps  de 
ces  travaux  massorétiques,  qu'ils  aient  eu  alors  leurs  noms  par- 
ticuliers, ou  qu'ils  fussent  encore  innommés. 

Même  en  supposant  que  ce  point  diacritique  existât,  il  pourrait 
servir  difficilement  à  expliquer  l'origine  du  nbn,  puisqu'il  était 
employé  également  pour  d'autres  voyelles;  et  il  serait  étonnant 
que  tandis  qu'on  recourait  aux  consonnes  pour  marquer  toutes 
les  voyelles,  pour  le  ûbn  seul  on  aurait  pris  l'ancien  point,  doublé 
pour  la  circonstance. 

La  manière  dont  Graetz  explique  la  formation  du  ■'-lir  (p.  402) 
est  aussi  des  plus  forcées.  D'après  lui,  le  ■'"ii:  étant  considéré 
comme  composé  de  a  +  i,  les  deux  points  seraient  l'un  pour  l'alef 
et  l'autre  pour  le  yod. 

Nous  croyons  qu'on  peut  trouver  une  origine  plus  simple  aux 
signes  du  i-ii:  et  du  û'?n.  Le  Talmud  fait,  comme  on  sait,  le  plus 
large  emploi  des  maires  lectionis  pour  marquer  les  voyelles. 
A  côté  des  voyelles  simples,  il  y  a  encore  des  diphtongues  qui  sont 
désignées  également  à  l'aide  des  lettres  i  et  ■>.  Pour  la  diphtongue 
ay,  on  redouble  généralement  le  yod,  exemple  :  ■^n">"'M  (1.  "'*?"!'?), 
et,  à  la  fin  des  mots,  dans  le  Talmud  de  Babylone,  on  l'écrit  par 
■^N  ("^N»  =  "^H),  tandis  que  dans  le  Talmud  de  Jérusalem  on  met 
deux  yod  ■'t:  ("^rt).  Pour  la  diphtongue  aiv,  on  redouble  le  vav, 
exemple  :  Nina  =  n;")5^  ou  bien  on  l'écrit  in  (exemple  :  mù  =Vp)^ 
ou  encore  à  la  fin  des  mots  on  se  sert  de  v,  exemple  :  t^'wT:' 
(1.  r>p53>),  parce  que  le  suffixe  de  la  troisième  personne  mas- 
culin singulier  dans  les  noms  pluriels  s'écrit  r  et  se  prononçait 
aïo  (aou). 

Or,  les  diphtongues  ay  et  aw  se  rapprochent  beaucoup  pour 
le  son  du  -"-is  et  du  ûbn.  On  sait  que  les  Juifs  occidentaux  pro- 
noncent le  ns  ey  ou  ay,  et  le  cbn  non.  Il  ne  faut  pas  y  voir  une 


276  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

altération  récente  de  la  prononciation,  car  l'hébreu  biblique  lui- 
même  fournit  la  preuve  que  le-^-i:!:  etlenbn  devenaient  facilement 
des  diphtongues.  La  Massora  ponctue  ûrjTi"'  alors  que  la  voyelle 
é  du  lamed  est  attestée  par  les  anciennes  versions.  La  stèle  de 
Mesa  donne  pour  a;'_:-ir;  pnn  qui  indique  une  prononciation 
X:"".  A  côté  de  l'hébreu  ai"'  et  du  targoumique  NToi"",  le  syriaque 
ponctue  n::v. 

Le  son  de  la  diphtongue  ay  ne  différant  pas  beaucoup  de  é,  il 
est  naturel  qu'on  se  soit  servi,  pour  distinguer  é  de  i,  du  signe  qui 
marquait  oy,  à  savoir  les  deux  yod.  Il  faut  bien  penser  que  la 
ponctuation,  à  l'origine,  était  un  aide-mémoire.  Elle  devait  rap- 
peler les  sons  plutôt  que  les  représenter.  On  pouvait  donc  se 
contenter  d'un  à  [leu  {)rès,  et  l'enfant  à  qui  on  mettait  le  signe  i"' 
sous  ou  sur  la  lettre  savait  qu'il  ne  fallait  pas  lire  i,  mais  é. 

Les  deux  points  du  abr;  babylonien  s'exi)liquent  d'une  manière 
analogue.  Nous  avons  vu  que  la  diphtongue  aïo  pouvait  être 
marquée  par  -ii .  Ce  signe  aura  été  appliqué  au  cbn  et  sera 
devenu  i,  puis  : ,  le  trait  du  rav  s'étant  réduit  à  ne  plus  être 
qu'un  point. 

Une  fois  que  l'origine  des  signes  "  et  "  avait  été  oubliée,  il  est 
possible  qu'on  ait  inventé  un  signe  de  plus  pour  Va  bref,  en  pre- 
nant la  position  oblique  f.-)  des  deux  points  comme  représentant 
une  voyelle  intermédiaire  entre  la  voyelle  haute  cbn  (:)  et  la 
voyelle  basse  "i-,2£  ' ..  . 

Il  est  difficile,  quoi  qu'en  ait  dit  Graetz,  de  ne  pas  reconnaître 
une  grande  analogie  entre  le  système  palestinien  des  points* 
voyelles  et  le  système  babylonien,  et  nous  croyons  même  que 
celui-là  n'est  que  le  développement  de  celui-ci.  Le  pnn  7  et  le 
■'-.i:  ("]  sont  identiques.  Le  nns  (n)  est  la  simplification  du  signe  n  , 
le  y7:p  r  ne  diffère  guère  de  " .  Si  dans  certains  manuscrits  le 
y«p  est  composé  d'une  barre  et  d'un  point  détaché,  il  n'est  pas  du 
tout  prouvé  que  ce  soit  la  forme  primitive.  Le  tDbn  et  le  pno  seuls 
diffèrent  dans  leur  forme  actuelle.  Enfin,  le  '^^o  n'existe  pas 
dans  le  système  babylonien,  et  c'est  la  preuve  que  le  système  pales- 
tinien est  plus  moderne  :  si  le  "disd  était  une  voyelle  aussi  an- 
cienne que  les  autres,  il  tirerait  son  nom,  comme  toutes  les 
autres,  de  sa  prononciation  ;  or,  le  b-io  est  ainsi  appelé  à  cause 
de  sa  forme  (.,},  qui  ressemble  à  une  grappe.  Il  doit  donc  être,  en 
quelque  sorte,  une  variante  d'un  autre  signe,  dont  il  se  sera  déta- 
ché à  l'aide  d'une  légère  modification.  Le  bi;D  répondant  le  plus 
souvent  au  nra  dans  le  système  babylonien,  nous  sommes  porté 
à  croire  que  les  trois  points  du  biSD  sont  les  trois  extrémités  du 
signe.  La  forme  primitive  du  bnso  aurait  été  ^, . 


NOTES  ET  MÉLANGES  277 

Le  point  du  obn,  qui,  seul  de  toutes  les  voyelles  palestiniennes, 
se  place  au-dessus  des  consonnes,  s'explique  facilement  d'après 
ce  que  nous  avons  dit  plus  haut  du  ûbn  babylonien.  Le  cbn  étant 
marqué  par  v,  il  suffisait,  quand  le  vav  était  dans  le  mot,  de 
mettre  un  yod  au-dessus  :  on  savait  que  le  vav  ne  devait  pas  se 
prononcer  n,  mais  aou  (ou  ô).  On  a  ensuite  employé  ce  ?/orf  su- 
périeur, même  quand  le  vav  n'était  pas  écrit.  Il  ne  pouvait  se 
confondre  avec  le  yod  =  i,  puisque  celui-ci  était  placé  en  bas. 

Le  point  qui,  dans  le  vav,  marque  le  son  on,  est  peut-être  aussi 
la  réduction  du  vav  usité  en  babylonien,  de  sorte  que  ^  serait 
pour  il. On  l'aura  mis  au  milieu  du  vav,  pour  qu'il  ne  se  confondit 
pas,  soit  avec  le  yod  du  ûbn  ou  du  pnn,  soit  avec  le  ;ri7a  et  les 
accents.  Cette  hypothèse  permettrait  de  croire  que  le  signe  primi- 
tif de  la  voyelle  on  n'avait  {)as  la  môme  forme  que  le  daguesch. 
Quant  au  signe  ~ ,  il  a  peut-être  aussi  pour  origine  v  Les  deux 
points  d'en  haut  et  d'en  bas  représenteraient  les  extrémités  du 
grand  vav,  et  le  point  du  milieu  le  petit  vav  '. 

Si  le  S3^stèrae  palestinien  est  plus  compliqué  et  plus  difficile  à 
expliquer  que  le  système  babylonien,  cela  tient  sans  doute  à  ce 
qu'il  aura  été  fixé  officiellement  beaucoup  plus  tard.  Les  formes 
primitives  des  signes  auront  subi  plus  de  changements.  En  l'ab- 
sence de  manuscrits  anciens,  on  est  malheureusement  réduit  à 
des  hypothèses  plus  ou  moins  vraisemblables. 

Mayer  Lambert. 


NOTES  EXEGÉÏIQUES 

I 

Genèse,  xv,  17. 

Les  exégètes  ne  paraissent  pas  avoir  été  étonnés  par  le  mot 
lujy  -nin  qui  apparaît  dans  la  scène  de  1'  «  alliance  entre  les 
morceaux  ».  Pourtant  on  se  figure  malaisément  ce  que  peut  être 

'  Si  les  points  sont,  comme  nous  le  croyons,  la  réduction  de  traits,  on  pourrait 
aussi  penser  que  les  deux  points  du  srAeoa  proviennent  d'ua  ancien  trait  vertical  dont 
on  se  serait  servi  en  Palestine,  tandis  qu'en  Babylouie  on  se  servait  du  trait  hori- 
zontal supérieur.  On  aurait  alors  une  curieuse  analogie  dans  les  deux  points  verti- 
caux qui,  en  éthiopien,  séparent  les  mots.  Ces  deux  points,  en  eilet,  ne  sont  autre 
chose  que  la   barre  verticale  usitée  eu   himyarite. 


278  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

un  four  de  fumée',  et  encore  plus  difficilement  ce  qu'il  peut 
représenter.  Nous  ne  vo3'ons  nulle  part  dans  la  Bible  le  min 
apparaître  autrement  que  comme  limage  du  feu  destructeur 
(Is.,  XXXI,  9  ;  Mal.,  m,  19;  Ps.,  xxr,  10)  ou  d'une  chaleur  exces- 
sive (Osée,  Yii,  4,  6;  Lament.,  iv,  32).  Autre  obscurité,  le  texte 
nous  dit  que  le  brandon  de  feu,  qui  accompagne  le  ycy  -,"i:n,  passe 
entre  les  morceaux.  En  est-il  de  même  du  four,  ou  bien  reste-t-il 
sur  place  ? 

Nous  pensons  qu'avec  une  légère  correction  on  lève  toutes 
ces  difficultés.  Au  lieu  de  Ti:n,  il  faut  lire  •mjd  (ou  n^rr).  Le  plu- 
riel v--  Pi"i?:\-i  se  trouve  Joël,  m,  3,  et  Gant.,  m,  6,  et  est  traduit 
partout  le  monde  colonnes  de  fumées.  Le  sens  primitif  du  mot 
est  «  palmier  M.  Le  mot  ^a'j  ncN,  bien  qu'au  singulier,  doit  natu- 
rellement se  rapporter  aussi  bien  à  V-^"  ""-'"i  qu'à  'JN  i-^sb.  La 
colonne  de  fumée  et  le  brandon  de  feu,  passant  entre  les  morceaux, 
représentent  la  divinité  qui  conclut  l'alliance  avec  Abraham  (v.  18). 
l'cy  "i'Zri  et  ex  -■'sb  sont  les  équivalents  des  ^zv  "ircJ  et  cn  l'^zv, 
qui  guident  les  Hébreux  dans  le  désert.  Nous  croyons  inutile  d'ex- 
pliquer que  le  72  a  pu  se  décomposer  en  n  ;,  et  l'on  ne  trouvera 
sans  doute  pas  la  correction  trop  hardie. 


n 

Exode,  xxiii,  2. 

Dans  ce  verset  on  prend  généralement  rrnb  comme  pluriel  de 
TrJi  et  on  traduit  :  pour  (faire)  le  mal.  Mais  ri:— i  signifie  bien  plu- 
tôt malheur  que  mal,  et  pourquoi  le  pluriel  ?  Nous  proposons  de 
voir  dans  nynh  l'infinitif  du  piel  der;:5>-i,  qui  se  trouve  dans  Juges, 
xiv,  20  (~:"ij  avec  le  sens  du  êti\^  l'ami,  l'associé  (r-'.).  Ici  on 
pourrait  admettre  l'acception  de  «  avoir  des  égards  »,  que  présente 
l'arabe  -^rn  à  la  troisième  forme,  minb  a-^^i  nnx  rr-r\  ab  serait 
donc  le  pendant  de  inns  bi  m-n  Nb  et  nous  traduirions  :  Tu  ne 
suivras  pas  le  parti  des  puissants  ^  pour  être  partial  (envers  eux). 

Mayer  Lambert. 


1  M.  Wogue  traduit   "ll'n   par  tourbillon,    mais   sans   expliquer    comment    "nsn 
peut  avoir  ce  sens. 

*  C'est  le  sens  que  0*31  nous  paraît  avoir  ici,   comme  dans  Job,  x.\xv,  9.  û'^2") 
est  alors  l'opposé  de  bl. 


NOTES  ET  MÉLANGES  279 


On  lit  dans  llabaccuc,  m,  6  :  un:*  nn-^  ?-Ti<n  ^x  ^mr.-^  n::^' 
nb  Dbiy  riD^bri  ûbn:r  m:^a:^  ino  n:^  ^nnn  iii:i=n^n  -  Pour  expli- 
quer la  fin  de  ce  verset,  tous  les  commentateurs  ont  donne  au 
mot  tbi:',  dans  nbvj  nno^bn,  le  sens  de  bnn,  univers.  Mais  jamais, 
dans  la  Bible,  ûb^^^  n'a  ce  sens,  il  signifie  «  éternel,  perpétuel  >>; 
plus  tard  seulement,  dans  la  langue  rabbinique,  nbi^'  désigne  «le 
inonde,  l'univers  «.  Nous  proposons  donc  de  corriger  niD^^n  en 
ni-n  et  de  lire  nb  Db^3>  mbs^n.  Le  passage  de  Habaccuc  devient 
alors  très  clair  S  le  prophète  dit  ceci  :  «Des  montagnes  existant 
depuis  un  temps  immémorial  se  briseront,  des  collines  destinées  a 
durer  toujours  s'aflaisseront,  mais  les  palais  de  Dieu  subsisteront 
éternellement».  A  mon  avis,  les  Soferim  ont  changé  mbD^n  en 
m^^bri,  à  cause  du  passage  d'Osée,  viii,  14,  où  le  prophète  re- 
proche à  Israël  u  d'avoir  oublié  son  Créateur  et  construit  des  pa- 
lais »  parce  que  Dieu  ne  devait  avoir  qu'un  seul  palais  ou  un  seul 
sanctuaire,  celui  de  Jérusalem.  C'est  pourquoi  les  Soferira  ont 
remplacé  partout  le  pluriel  mbD-n  par  le  mot  niD^bn. 

La  correction  que  nous  proposons  pour  Habaccuc  est  également 
vraie  pour  Ps.,  lxviii,  25,  où  nous  lisons  :  û^nbN  r^^^-^^  iNn 
cnon  ^3b73  ^bN  mr^D-.  En  laissant  ce  verset  tel  qu'il  est,  on  ne 
comprend  pas  du  tout  son  rapport  avec  la  suite  :  nnx  n-^TJ  ^J2^? 
mw'^^-  niPD  û-::*2.  Mais,  si  on  corrige  mDV:,n  en  mDD^n,  tout  ce 
passage    devient    clair  :   ^^b):  ^b.s  rmbD^n  a^nbi*  ^^nnbD^n  vsn 

bi^no^  (nnp7:73)  nip5:«  'n  û^-b5<  ô^n?)  n^ns  mbnp7:n.  «  Ils  ont  vu 
tes  palais,  ô  Dieu,  . .  .(où  l'on  entend  tes  chants,  car)  les  chanteurs 
marchent  devant,  suivis  de  joueurs  d'instruments  de  musique... 
bénissez  (ils  bénissent)  Dieu  dans  les  assemolées. . .  » 

Dans  Ps.  xxii,  4,  dans  le  passage  :  nibnn  2cv  •::t!P  nn.xi 
^s,^'0-  le  mot  mbnn  me  semble  aussi  devoir  être  corrige  en 
^,^^,^;  Jusqu'à  présent,  on  a  toujours  été  obligé  d'expliquer 
•ht:5-^  mb-n  par  «  les  louanges  adressées  par  Israël  »  a  Dieu.  Ur, 
inbnn  suivi   d'un    nom  de  personne  ne    signifie   pas  :    louange 

.  Surtout  si  on  le  compare  à  Ps.  xxix,  9  :    ^'^^''^'^\- ' '^'^^^^Jl^^jl^^lZ 


280  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

exprimée  par  cette  personne,  mais  adressée  à  cette  personne.  Je 
crois  donc  que  là  aussi  il  faut  lire  Vnt:;"'  nbrr-'n  nci"'  '. 

Dans  Jérémie  également  (vu,  4),  les  Soferim  paraissent  avoir 
supprimé  le  pluriel  mbD-n  Le  prophète  dit  :  bx  ûDb  nn:2an  bx 
-Ton  'r,  br^-  '-  bs-^n  'n  r^Ti  -i7:î<b  -,p'wr!  i-,2i.  Bien  des  com- 
mentateurs ont  déjà  essayé  d'expliquer  ce  pluriel  r;73n,  qui  n'a  pas 
de  raison  d'être  ajirès  le  singulier  bD-^n.  Il  est  très  probable  qu'à 
l'origine,  le  texte  disait:  nbr-^n  'n  bs-^n  -i7:Nb  np"::  "^lan  bx... 
r,'A2n  '-.  «  N'ajoutez  pas  foi  aux  paroles  mensongères  de  ceux  qui 
vous  disent  :  c'est  le  sanctuaire  de  Dieu,  ce  sont  les  sanctuaires 
de  Dieu»'.  On  sait,  en  effet,  que  dans  le  royaume  de  Juda  ii  n'y 
avait  jamais  eu  qu'un  sanctuaire,  celui  de  Jérusalem,  tandis  que 
le  royaume  d'Israël  en  avait  contenu  plusieurs.  Mais  les  Soferim 
n'ont  pas  voulu  laisser  ce  pluriel  et  l'ont  remplacé  par  deux  sin- 
guliers; de  là,  dans  ce  verset,  trois  fois  le  mot  bD-^n.  Le  mot  nizr, 
était  resté,  par  inadvertance,  du  texte  primitif,  où  il  se  rapportait 
à  nbs-'îi. 

Besredka. 


UNE  ALLUSION  A  L'HISTOIRE  CONTEMPORAINE 

DANS  L'AROUCH  DE  R.  NATHAN. 


Dans  son  édition  de  VArouch,  M.  Kohut  nous  fait  connaître  les 
mots  rimes  par  lesquels  R.  Nathan  a  terminé  chaque  partie  de 
son  grand  dictionnaire  (à  la  tin  de  chaque  lettre).  La  finale  de  la 
lettre  »  est  ainsi  conçue  : 

■'no'^p  t=i-'prt)2T  !-nyrî73 
n-i-j:»  obo  '^-ira  (1.  ■^3T'3Jn)  ■'"l'^narr 

L'épithète  appliquée  à  Dieu,  dans  la  première  ligne,  est,  comme 
M.   Kohut  le  remarque  avec  raison,  empruntée  à  Daniel,  ii,  21, 

V^ib»  D'^pn7JT  i^obT:  rny-12.  Seulement,  à  cause  de  la  rime,  i-^^biz 
a  été  changé  en  no-^p.  Cette  explication  suffit  pour  l'intelligence 
du  mot  "'"icp,  mais  le  fait  anormal  d'appeler  Dieu  «  Celui  qui  ôte 

»  Cf.    Isaïe,    VI,    1    :    T^bTCT    NCn    Û",    t>!DD  bv   '2'::^    "^^IN    PM    ï-Tî^nNI 


NOTES  ET  MELANGES  2f<l 

et  qui  établit  les  empereurs  »  paraîtra  toujours  singulier  dans  une 
prière  où  il  s'agit  de  demander  à  Dieu  la  force  de  continuer  l'ou- 
vrage commencé.  Peut-être  est-il  permis  de  supposer  que  cette 
épithète  a  été  inspirée  à  R.  Nathan  par  quelque  événement  sur- 
venu à  l'époque  où  l'ouvrage  a  été  composé.  R.  Nathan  a  terminé 
VArouch  en  l'an  1101  et  il  y  travaillait  vraisemblablement  depuis 
de  nombreuses  années.  Or,  c'est  dans  cette  période  qu'eut  lieu  la 
lutte  entre  le  pape  Grégoire  VII  et  l'empereur  Henri  IV.  En  107', 
Henri  IV  fut  destitué  et  Rodolphe  de  Souabe  fut  nommé  empereur 
des  Allemands.  En  1081,  Hermann  de  Luxembourg  fut  nommé 
également  empereur,  en  opposition  contre  Henri  IV  ;  il  se  démit  en 
1087.  Conrad,  le  fils  aine  de  Henri  IV,  depuis  1087  roi  élu  des 
Allemands,  fut  déclaré  déchu  de  sa  dignité  en  1098.  Dans  l'empire 
byzantin  aussi,  les  années  1056-1081,  depuis  Michel  VI  jusqu'à 
l'avènement  d'Alexis  P»-  Gomnène,  furent  marquées  par  des  chan- 
gements continuels  de  règne.  R.  Nathan,  qui  vivait  à  Rome  et 
travaillait,  à  cette  époque,  à  son  grand  ouvrage,  était  certaine- 
ment au  courant  des  événements  contemporains.  Les  nouvelles  de 
la  destitution  et  de  l'intronisation  d'empereurs  dans  l'Est  et  le 
Nord  pénétrèrent  sans  doute  jusque  dans  la  paisible  retraite  de 
notre  savant.  Il  n'est  donc  pas  surprenant  qu'il  ait  fait  allusion  à 
ces  événements  par  une  heureuse  réminiscence  d'un  verset  de 
Daniel,  auquel  il  apporta  une  habile  modification  nécessitée  par  la 
rime,  en  invoquant  Dieu  comme  l'auteur  des  grands  événements 
historiques  et  en  l'appelant  «  Celui  qui  dépose  et  élève  les  empe- 
reurs ».  Peut-être  sa  phrase  avait-elle  à  l'origine  une  plus  grande 
analogie  avec  la   phrase  de  Daniel  et  était-elle  conçue  ainsi  : 

Budapest,  mars  1893. 

W.  Bâcher. 


UN  ÉPISODE  DE  L'HISTOIRE  DES  JUIFS  EN  ESPA&NE 


Le  manuscrit  hébreu  n"  585  de  la  Bibliothèque  nationale 
(f.  92a,&),  qui  est  un  vol.  de  Mélanges,  sans  tête  ni  fin,  renferme 
un  feuillet  isolé  qui  raconte  un  épisode  de  l'histoire  des  Juifs 
d'Espagne  : 


282  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

r-n3-i  tm-is£  nniaao  ï-risna3  msbttjj  'nbs  itto  r^Tti  «"^Nin  .  .  . 
r-i-;N   ■'T'  S:?   13b    TT^jm  ■— ,cnd  i;3    ï-nmx   by   maa-ibi  n-iDbNb 
Sd73  np-^   -iST  123  û''bNr!  iDin    J— i«N    p     ...  !-i?2irT72r;     j-nsiN 
t^^bcbD   !-:2-n^    ■'"'^  r-n?:N2T   rrin  m-^   rrii^rbi    minbi   rnyzn   ibD 
—.p-'  e-^ro    w^n    p  "inTTî   ûi'  b-^scnb  d"il]t  r;N-i7:b    "!72n3   r<E"'-in 

nD3  ^D  "j-rb  imN  ■ibT;"'T  iTim  im-:-';-:  ■^^i-'i  i-Tin  ii:j:i;' 
K-iib-'Zjop  r-nDb7:7o  niD  '-o  ^«i-|p;  cipT^a  :->-p-!n  tisi  ^in:i 
nm2-«bi-«T  in  mn^x  m-^ni^nb  rnsD  shn  tt^7:ii  r-inos'j  J-i25>nn 
tz"'?:-'  i;3  Si'  bn^r^i  — îsin  pn  r'^o  t«3n*i  i-î:î<i  T-iza  tznrr 
^"'::rib  lopnb  £i">::-'-;;n  ■'nn  ■'nnc  '-^y  r-;22i  Y-~  Y^"^""  tL"'^"' 
r:bij<a  bzwS  -^in  bwX  --iN  '3  -i72i<"'T  ."-rbii:»  rrrnn  Tin-'i  loo:  m»» 
^•w\s'  ^,y  n:  r>ibi  :::p\::  i^^bi  ibo  Nb  tn^^io  't  riT  vb'^/sb  ■^i::p 
■i"':-im  12-71  12C2  i"i:j'a  "jn-ii  inN«  ibxo  ^"On  ^33  im^ii  iwNi:73 
ï-iisb»  i-rc  i:3  pn   r^-^n'-i  i^i^pi    loisn    Sdt:    niai    min   qoiii 

.  .  .  1i:4-iN 
■'TC1  Y'^"  ^-  "i^""^"!  Tî^'2  P^"^  Ti""  f^i<  i;p"nr;  l'n;»  nini 
t2ipn;i  "^bîin  &03  3r33  noN  nn^n  Y^'-^"  "i^"'"'  ^^"^^  -^  t<3i:- 
1231  r-î-rs  CNn  t:;;  czipci  sion^û  i^^sb  niro''  w-'.s  h:r  -,om 
r-i2-:  1DCD  P3p-o  î-î-bn'  w\x-  Sn-io^  ^D3  -^b-^sTN  û;»n  i3  r:;-i  b.si 
■iiri:  Tn-K}  qoD  yinsb  n^n  î-îîûin-û  hrs  iwn  ib  '^bn  brN  -t^ 
TiD^r,  ^i-'n  -pirirn  smiar  -^d  sp^t'  w-ip  ;-it  ïzipn  n"-'  -b"-" 
^"   ib7:np    .  .  .  VPD w  b-  b^  b;'    ^i7:nb  bwSic-^b  pn  m-:;'o  n-t; 

.  .  .  1PD13D  o-'Ni  o^ï^   .  .  .  bN-;:;"' 
ï-iDttD  ip"'5r?:r;  r-ipi^oni   tz!-'^i:wrr  nr;"«  nri:  riDi"'  ^n  -incb 
5-ii7jw3  i2p;   ION  'zz'^iz'ri  -■'   ^,17:^-l^   ■,■'37:    -^Piinb    .  .  .  mbi    it» 
^121  i;-^D  bD2    .  .  .  pTî  iriD   Pi^Tû  ùPiorp  d:' 

Tout  ce  récit  peut  se  résumer  en  ces  mots  :  Un  enfant  de  cinq 
ans,  enlevé  de  Castille  par  des  brigands,  finit  par  être  retrouvé; 
le  père,  un  certain  «  Joseph»  (dont  on  ne  sait  rien  de  plus  que  le 
prénom),  se  dépouilla  de  tout  son  avoir  [lour  racheter  son  tils,  et  il 
le  conduisit  en  Aragon,  sous  la  protection  du  roi  de  ce  pays. 

A  quelle  date,  ou,  du  moins,  à  quelle  époque  approximative  pla- 
cer cet  épisode  ?  Si  encore  le  roi  d'Aragon  visé  dans  ce  récit  était 
désigné  nominativement,  le  lecteur  serait  fixé.  Toutefois,  pour 
nous  orienter,  consultons  l'histoire  des  Juifs  en  Espagne.  A  l'avè- 
nement de  Henri  de  Transtamare,  des  hordes  de  gens  armés, 
moins  militaires  que  brigands,  dévastaient  le  pays  à  la  faveur  de  la 
guerre  civile.  Tandis  que  dans  un  grand  nombre  de  provinces  à  la 
l'ois  les  Juifs  étaient  alors  persécutés  (13'Jl),  ceux  d'Aragon  avaient 
prudemment  cherché  refuge  à  la  cour  en  mettant  tous  leurs  biens 
à  la  disposition  du  gouvernement,  comme  l'indiquent  deux  textes  : 


NOTES  ET  MÉLANGES  283 

1°  une  lettre  publique  adressée  par  Hasdaï  Crescas  à  la  commu- 
nauté Israélite  de  Perpignan;  2°  une  note  d'Efodi  dans  l'Introduc- 
tion à  sa  Gtammaire  hébraïque^ 

De  plus,  selon  Llorente-,  les  Juifs  avaient  une  certaine  influence 
sur  Juan  I  d'Aragon  (1378-93),  prince  remarquable  par  sa  douceur 
et  son  amour  des  lettres.  Ces  circonstances  favorables  ne  se  re- 
trouvent plus  au  siècle  suivant,  lorsqu'eut  lieu  l'exil  général  des 
Juifs  d'Espagne,  puis  celui  du  Portugal.  En  réunissant  ces  données, 
on  arrive  à  assigner  pour  date  possible  de  cet  épisode  les  dix  der- 
nières années  du  xiv^  siècle. 

Qui  sait  si  la  page  que  nous  publions  n'est  pas  un  fragment  du 
rm73an  li-i^T,  ouvrage  perdu  de  Profiat  Duran  Efodi,  dont  Abra- 
vanel,  dans  ses  ^^n•^^^2  r\rjyz^,  a  conservé  de  notables  parties  (cf. 
Graetz,  ibid.,  p.  404)? 

M.  Schwab. 


UN  CHANT  NUPTIAL 


M.  D.  Kaufmann  a  publié,  dans  le  numéro  48  de  la  Revue,  au 
sujet  d'un  exemplaire  du  Mahzor  romain,  la  remarque  manus- 
crite suivante  : 

.b"j-  -^mr-i  '=>"y  'idi  nbDi  irn 

Où  se  trouve  ce  chant  nuptial  qui  était  connu  communément 
chez  les  Israélites  italiens?  Certainement,  ce  n'est  pas  celui  qu'a 
publié  M.  Kaufmann.  Nous  croyons  l'avoir  trouvé  dans  un  ma- 
nuscrit écrit  en  Italie  et  conservé  à  la  bibliothèque  épiscopale  de 
Tolède. 

Voici  ce  chant,  -i»t,  tel  qu'il  est  dans  le  manuscrit  : 

''0^  T12"»  n'5D\::?a  riwN  nb  :»nTb  nbboiT:  -b=)  nb  •yr.aî'i 

»  Graelz,  t.  VIII.  p.  68  et  409. 

*  Hiitoire  de  l'Inquisition,  t.  I,  ch.  v. 


284  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

,  moi  BmnN  'n  '^nsD     nbsi  irn  nsma"' 

!-iNbn  bn-i  np:-'  'n  "^nar    nbr-,  ^rn  -is-na*' 
r-7Db«!r;-inDNT  p-'nirn-'STiT: '-^-nr    nr=-  i»"^"  irma-' 

Le  compositeur  de  ce  chant  est.  selon  l'acrostiche,  Eléazar,  peut 
être  Eléazar  Kalir.  Au  reste,  ce  chant  avec  le  refrain  laT^T  inD"«  est 
imprimé  dans  le  Mahzor  romain  ',  le  même  Mahzor  qui  se  trouve 
la  possession  de  M.  D.  Kautmann. 


M.  Kayserling. 


*  Landshutb,  Amude  ha-Ahoda^  I,  43. 


BIBLIOGRAPHIE 


REYUE    BIBLIOGRAPHIQUE 

2«  TRIMESTRE  1893. 

{Les  indications  en  français  çui  suivent  les  titres  hébreux  ne  sont  pas  de  V auteur  du  livre, 
mais  de  Vauteur  de  la  bibliographie,  à  moins  qu'elles  ne  soient  entre  ffuillemets.) 

1.  Ouvrages  hébreux. 

onn    -lIN   '0   Commentaire    du   livre    des  Proverbes  et  de  Zacharie,  par 

Berisch  Goldenberg.  Tarnopol,  impr.  Alkalay  à  Presbourg,  1892;  in-S» 

de  74  p. 
©-nD72  N-ipW  3ï<ni  «  Mikra  Meforache.  Méthode  pour  l'étude  de  la  langue 

et  de  la  grammaire   hébraïque,  éléments  d'histoire    Israélite,   sentences 

morales,  etc.,    par  S.  Flah.  »   Tunis,  impr.   internationale,  1892;    m-S» 

de  160  p. 
I^"»?:  D"^-ni  ■'nnDW  Correspondance  de  Juda  Jacob  Néhama  avec  dififérents 

savants  et  rabbins.  1'°  partie.  Salouique,   1893;  in-S"  de  184  p. 
n"n  nsian  bN-lï5"^  ynsb  3>07:  Voyage  en  Palestine  en  l'année  2040,  par 

A.-L.  Lewinski.  Odessa,  Abba  Douchna,  1892;  in-S"  de  66  p. 

bNlT^O   '0    t]"':iWN-i    Û"'N"'3D    Liber   Samuelis.    Textum    masoreticum    ac- 
curatissime  expressit,  e  fonlibus  Masorœ   varie  illuslravit,  notis  crilicis 
confirmavit  S.  Baer.   Leipzig,  Tauchnitz,  1892;  in-8o  de  iv  +  156  p. 
^3b20!^  Considérations  sur  le  livre    de   Ruth,   par  Joël    Libusch   Herzop. 

Varsovie,  impr.  Ginz,  1892  ;  in-8o  de  32  p. 
a^3N  ^n-lO  Jugendblûthen.  Erzahlungen  u.  literarische  Beitràge  von  Isidor 

Brustiger.  Lemberg,  Ehrenpeis,  1892;  in-8'^  de  70  p. 
n-i^N^DNn  nablB  '-I  Beitràge  zu  Salomo  Da-Pieras  Lebeu  u.  Wirken  nebM 
Auszùgen  aus  seinem  Diwan.  von  Heinrich  Brody.  Berlin,  imp.  Ilzkowski, 
1893;  in-8°de  37  p. 


286  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


2.  Ouvrages  en  langues  modernes. 

Annuaire  des  Archives  israélitcs  pour  l'an  du  monde  5654  (1893-1894), 
10*  année,  par  H.  Prague.  Paris,  |1893'  ;  in-32  de  IIG  p. 

Contient  :  Revue  de  l'année  israélite  56o2-o65P>,  par  H.  Prapue  ;  Goud- 
chau  et  la  duchesse  d'Orléans  (17o2-17o5),  par  Léon  Kahn;  les  Juifs  de 
Paris  pendant  la  Révolution,  la  femme  de  Chabot,  par  le  même. 

Baentsch  (B).  Das  Heiligkeits-Gesetz  Lev.  XVII-XXVI.  Eine  histor.-krit. 
Untersuchung.  Erfurl,  Gûlher,  1893;  in-8'>  de  vu  -\-  153  p. 

Barth  (J.).  Etymologische  Studien  zum  semitischen,  insbesondere  zum 
hebr.  Lexikon.  Leipzig,  Ilinrichs,  1893;  in-8°  de  76  p. 

Berger  (Samuel).  Quam  notitiam  linguœ  hebraicse  habuerinl  cbrisliani 
medii  îevi  temporibus  in  Gallia.  Paris,  Hachette,  1893  ;  in-8°  de  61  p. 

Le  prochain  numéro  contiendra  un  compte-rendu  développé  de  cette 
savante  monographie,  qui  n'est  pas  moins  intéressante  pour  l'histoire  des 
études  chez  les  chrétiens  que  pour  celle  de  la  langue  hébraïque  au 
moyen  âge. 

Bloch  (Philipp).  Die  General-Privilegien  der  polnischen  Judenschaft.  Po- 
sen,  J.  Jolowicz,  1892;  in-8°  de  120  p.  (Erweiterter  u.  verbesserter  Son- 
derabdruck  ans  derZeitschrift  der  histor.  Gesellschaft  f.  d.  Provinz  Poseu, 
Bd.  VI). 

Charles  (R.-H.,.  The  bock  of  Enoch.  Translaled  from  professer  Dilmann's 
elhiopic  text,  emented  and  revised  in  accordance  with  hilherto  uncollated 
ethiopic  mss.,  and  with  Ihe  Gizeh  and  olher  greck  and  latin  fragments, 
v,-hich  are  hère  published  in  full.  Londres,  Frowde,  1893  ;  in-8<^  de 
380  p. 

FuRST  (A.).  Christen  u.  Juden.  Licht-  u.  Schattenbildcr  aus  Kirche  u.  Sy- 
nagoge.  Strasbourg,  impr.  strasb.,  1892;  in-8''  de  316  p. 

Gerson  (M. -A.).  Essai  sur  les  Juifs  de  la  Bourgogne  au  moyen  3ge.  Dijon, 
impr.  Berlhoud,  1893;  in-S"  de  68  p. 

Cet  ouvrage  nous  est  arrivé  trop  tard  pour  que  nous  puissions  en  rendre 
compte  dès  à  présent;  nous  nous  acquitterons  de  ce  soin  dans  le  prochain 
numéro.  Disons,  tout  de  suite,  que  cette  étude  est  complète,  et  même  ren- 
ferme des  documents  inédits. 

IIackmann  (H.).  Die  Zukunftserwartung  d.  Jesaia.  Gœltingue,  Vanden- 
hoeck,  1893  ;  in-8''  de  iv  +  174  p. 

Hamburger  '  J.).  Real-Encyclopi\die  fur  Bibel  u.  Talmud.  Dritte  durchgese- 
hene  u.  verbesserte  Auflage.  Leipzig,  Kôhler,  1892;  in-8°  de  1102.  Con- 
tient la  partie  biblique,  i 

Hamburger  (Leopold).  Die  Miinzpràgungen  wâhrend  des  letzten  Aufstan- 
des  der  Israeliten  gcgen  Rom.  Berlin,  impr.  Pormetter,  1892;  in-8''  de 
108,  plus  une  planche. 

IlELLER  (S.).  Die  echten  hebraischen  Melodieen,  Uebersetzungen.  Aus  dem 
Nachlasse  hrsgg.  von  Prof.  D-"  David  Kaufmann.  Trêves,  Sigmund 
Mayer,  1893;  in-S"  de  xxiv  +  284  p. 


BIBLIOGRAPHIE  287 

Il  est  iimlile  de  faire  l'élo-zie  de  l'introduction  de  ce  charmant  petit  vo- 
lume il  safût  de  dire  qu'elle  est  sortie  de  la  plume  savante  de  notre  excel- 
lent collaborateur,  M.  Kaulmann,  qui  trouve  le  moyen  de  se  délasser  de. 
ses  travaux  ordinaires  en  publiant  les  œuvres  posthumes  des  écrivains  qu'il 
a  connus.  Dernièrement  il  éditait  ainsi  celles  de  Hajî,  aujourd  hui^  c  est  le 
tour  de  ces  poésies  qu'avait  polies  et  serties  avec  amour  le  rejrretté  Sehg- 
maun  Heller.  Ce  sont  des  traduclious  des  morceaux  les  plus  caractéristiques 
de  nos  poètes  du  moyen  â-e  ;  comme  de  juste,  la  place  de  laveur  a  été 
réservée  à  Juda  Halévi,  à  Salomon  ibn  Gabirol  et  a  Abraham  ibn  Ezra.  11 
est  fâcheux  qu'il  ne  se  soit  encore  trouvé  personne  parmi  nous  pour  iaire 
passer  dans  notre  langue  les  plus  belles  de  ces  productions  poétiques. 

HOLST.  Der  Prophet  Elias.  Ein  alttestara.  Geschichts-  u.  Charakterbild. 
Riga,  Hœrschelmann,  1893;  in-12  de  xiii  +202  p. 

Jacobs  (Joseph).  The  Jews  of  Angevin  England.  Documents  and  records 
from  latin  and  hebrew  sources  priuled  and  manuscript  for  the  firsl  time 
collected  and  translated.  Londres,  David  Nuit,  1893;  in-8"  de  xxix + 
425  p. 

Jagig.  Slavische  Beitrage  zu  deu  biblischen  Apocryphen.  I.  Die  altkirchen- 
slav.  Texte  d.  Adambuches.  Vienne,  Tempsky,  1893;  in-4°  de  104  p. 
(Extr.  des  Denkschr.  d.  k.  Akad.  d.  Wissenschaft.) 

Jahresbericht  der  Landes-Rabbinerschule  in  Budapest  fur  das  Schuljahr 
1892-1893.  Voran  geht  :  Der  Vertrag  nach  raosaisch-  talmudischem  Rechle 
von  Rabb.  Moses  Bloch.  Budapest,  1893  ;  in-8o  de  108  -f  32  p. 

Judith  Montefiore  Collège,  Ramsgale.  Report  for  the  year  (18^)2-1893).  To- 
gether  wilh  Origin  and  sources  of  the  Shulchan  Aruch,  and  the  Sefer 
Assufoth,  by  M.  Gaster.  Londres,  impr.  Wertheimer,  1893;  in-8"  de 
74  p. 

Kennard.  Philistines  and  Israélites,  a  new  light  on  the  world'.s  hislory. 
Londres,  Chapman,  1893;  in-8''  de  250  p. 

Klostermann  (A.).   Der  Pentateuch.   Beitrage  zu   seinem  Verstandniss  u. 

seiner     Entslehungsgeschichte.     Leipzig,     Deicherl,     1893;     in-8"     de 

vu  +  447. 
KoGHENMEiSTER.   Die  Todtenbcslatlungen  der  Bibel  und  die  Feuerbcslal- 

lung.  Stutgard,  Schweizerbart,  1893;  in-S"  de  x  -f  163  p. 

Lattes    (Guglielmo).   Educazione    e    civilta    israelitica.    Livourne ,    impr. 

Belforte,  1892;  in-S"  de  86  p. 
Ledrain  (E.).  La  Bible,  traduction  nouvelle  d'après  les  textes  hébreu  et 
grec.  T.  VIII.  Œuvres  morales  et  lyriques.  II.  Psaumes,  Job.  Paris,  Le- 
merre,  1893;  in-8o  de  475  p. 
Ley  (J).  Historische  Erklâfung  des  2.  Teils  des  Jesaia,  Capitol  40  bis  Ca- 
pitel  6G,  nach  den  Ergebnissea  aus  den  babylonischen  Keilinschrifton. 
Marbourg,  Elwert,  1893;  in-8«  de  xii  +  160  p. 

MuNGH  (G.-N.).  Die  Zaraat  (Lepra)  der  hebr.  Bibel.  Einleilung  in  die  Ge- 
schichte  des  Aussalzes.  Mit  2  Lichtdrucktafeln.  Hambourg  et  Leipzig, 
Voss,  1893;  in-S"  de  167  p. 

Neubaur  (L.l.  Neuc  Mitleilungen  iiber  die  Sage  vom  cwigen  Juden.  Leip- 
zig, Hinrichs,  1893;  in-S"  de  21  p. 


288  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Nobel  (Rabbiner  Josef).  Hermon,  Versuche  ûber  Israel's  Lebensideen  iin 
Geiste  des  agadischen  Schrifllhums.  Halberstadt,  impr.  Schilling,  1892; 
in-80  de  334  p. 

Perles  (J.)-  Beitragre  zur  rabbinischen  Spiach-  u.  Alterthumskunde.  Bres- 
lau,  impr.  Schotllainder,  1893;  in-8°  de  49.  (Tirage  à  part  de  la  Monats- 
schrift  fiir  Gesch.  u.  Wissench.  d.  Judenlhums,  37''  année). 

Picard  (Charles).  Sémites  et  Aryens.  Paris,  Félix  Alcan,  1893;  in-18 
de  104  p. 

Rémy  (Nahida).  Cultursludium  iiber  das  Judenthum.  Berlin,  Cari  Duncker, 
1893;  in-8de322  p. 

ScHLATTER  (D.-A.l.  Zur  Topographie  u.  Geschichte  Palaslinas.  Calw  et 
Stuttgart,  Vereinsbuchhandlung,  1893;  in-8°  de  viii  -(-  432  p. 

Smyth  (J.-P.).  How  God  inspired  the  Bible.  2«  éd.  Dublin,  Eason,  1893; 
in-80  de  230  p. 

Testament  (The)  of  Abraham,  the  Greek  text  by  Montagne  Rhodes,  wilh 
exlracls  from  the  Arabie  version  of  the  testaments  of  Abraham,  Isaac 
and  Jacob,  by  W.-E.  Barnes.  Cambridge,  University  presse,  1892; 
in-8o. 

Theologischer  Jahresbericht,  hrsgg.  v.  H.  lloltzmann.  12.  Bd.,  die  Litera- 
tur  d.  Jahr  1892.  1.  Abtheil.  Brunswick,  Schwetschke,  1893  ;  iu-S"  de 
148  p.  Contient  l'exe'gèse,  par  Siegfried  et  Holtzmann. 

WORDSWORTH  (Elizabeth).  The  decalogue.  Londres,  Longmans,  Green  et 
C»,  1893;  in-8»  de  xxiii  +  240  p. 


3.  PnUicatio7is  pouvant  servir  à  Vhistoire  du  Judaïsme  moderne. 

Balis.  Moderne  Teutonen.  Schauspiel  in  vier  Akten.  Berlin,  Bibliogr.- 
Bureau,  1893  ;  in-8°  de  91  p. 

Bericht  der  dritten  Generalversammlung  des  Vereines  zur  Abwehr  des  An- 
lisemitismus.  1893.  Vienne,  imp.  Jacobi,  1893;  in-8°  de  16  p. 

BiRNBAUM  (Nathan).  Die  nationale  Wiedergeburt  des  jiid.  Volkes  in  seinem 
Lande,  als  Miltel  zur  Lôsung  der  Judeufrage.  Vienne,  1893;  in-8°  de 
44  p. 

BôGKEL  (Otto).  Die  Quintessenz  der  Judenfrage.  Berlin,  Dewald,  [1893]  ; 
in-8°  de  24  p. 

Caro  (Leopold\  Die  Judenfrage,  cine  ethische  Frage.  Leipzig,  Grunow, 
1892  ;  in-80  de  66  p. 

DECK.ERT  (Josef).  Ein  Ritualmord,  aktenmâssig  nachgewiesen.  4«  éd. 
Dresde,  Gloss,  1893  ;  in-8o  de  39  p. 

Deutscher  "Weckruf,  von  einem  deutschen  Manne.  Berlin,  Hoppner,  1892  ; 
in-8°  de  32  p. 

Erdmannsdôerpfer  (Hans  Gustave  Die  Juden  u.  die  Choiera.  Eine  intolé- 
rante Streilschrift.  Leipzig,  Werther,  1892  ;  in-8"  de  32  p. 


niBLIOGRAPHlE  289 

Ethischo  (Die)  Rewegung  im  Judentbum.  Ernste  Gedanken  eines  Modernou. 
Berlin,  Scbildberger  [1893]  ;  in-8"  de  10  p. 

Fall(G.-H.),  Die  rechllicbc  Stellung  der  Juden  in  Œslcrreicli.  Vienne, 
Verein  zur  Abwcbr  des  Antisemilismus,  1892  ;  in-S"  de  14  p. 

FôRSTER  (D''  Paull.  Talmud  u.  Sebulchan  Arucb.  Breslau.  Geschafslelle 
des  deulscb-sozialen  Provinzial-Verbaudes,  1892  ;  iu-8°  de  54  p. 

Frank  (D''  Friedricb).  Die  Kircbe  u.  die  Judeu.  2^  éd.  Ralisbonne,  Manz, 
1892;  in-8»  de  77  p. 

FREDERIC  (Harold).  Tbe  new  exodus,  a  study  of  Israël  in  Russia.  Londios, 
1892;  in-8°  de  300  p. 

Freimut  (Bernardin).  Altjiidiscbe  Religionsgebeimnisse  u.  neiijiidiscbe 
Praktiken.  Munster,  A.  Russell,  1893  ;  in-S»  de  144  p. 

Frikdemaxn  (Edmund).  Antisemilismus  im  alten  Rome.  Berlin,  Cari 
Dunckcr,  1893  ;  in-8°  de  16  p. 

Friedenheim  (Constantin-Ignaz-Anton).  Die  Irrthiimcr  u.  Geheinanisse  des 
Judentbums  nachgewiesen  aus  der  Vernunfl.  der  hl.  Schrift,  besonders 
aus  dem  Talmud  u.  anderen  rabbiniscben  Scbriftem  von  dem  jûdischen 
Convertiten. . .  Neu  brsgg.  mit  einem  Vorwort  von  Anton  Cbristianus. 
Wurzbourg,  Bueber,  1893  ;  in-8°  de  165  p. 

Gereckk  (Adolf'.  Die  Verdienste  der  Juden  um  die  Erbaltung  u.  Ausbrei- 
tung  der  Wissenscbaften.  Zuricb,  Scbabelitz,  1893  ;  iu-S»  de  45  p, 

GiESE  (W.).  Die  Juden  u.  die  deutscbe  Kriminalstatistik.  Leipzig,  Grunow, 
1893;  in-8«  de  107  p. 

H.  (E.  V.).  Adel  und  Judenfrage  vom  Standpunkte  des  Adels.  Franclort, 
Fœsser  [1893]  ;  in-S"  de  138  p. 

Heimberger  (Josepbl.  Die  staalskircbenrechtlicbe  Stellung  der  Israeliten 
in  Bayern.  Fribourg  en  Brisgau,  Mobr,  1893  ;  in-S»  de  207  p. 

HiRSCH  (Marciîs).  Kulturdefizit  am  Ende  des  19.  Jahrbunderls.  Francfort- 
s/Mein,  J.  Kauffmann,  1893;  in-S^  de  140  p. 

Isgfi-Berlix  (J.).  Die  jûd.  Unabbângigkeit.  Berne,  Nydegger  et  Baumgart, 
1892;  iD-8»  de  11  p. 

Jagobowski  (Ludwig).  Wertber,  der  Jude.  Moderner  Roman.  Berlin,  Huff- 
scbliiger,  1892;  in-18  de  350  p. 

Jude  (Der).  Zeitgemasse  Belracbtung  von  einem  katboliscben  Geisllicben 
der  Erzdiôzese  Gnesen-Posen.  Posen,  Jolowicz,  1892;  in-8°  de  20  p. 

Juden  (Die)  u.  das  Cbristenblut.  Gescbicbtlicbe  Bcilragc  zur  Frage  des 
jiid.  Blutrituals.  Leipzig,  Germanikus- Verlag,  1892;  in -8*^  de  xv 
+  40  p. 

Judentbum  (Das)  in  Œsterreieh  u.  die  Wiener  Presse,  von  einen  Œster- 
reicher.  Hanovre,  Westen,  1893;  in-8^  de  36  p. 

Jiidiscbe  (Die)  Invasion  u.  das  katboliscbe  Deutscbland.  Eine  Rede  an 
die  deutscbe  Nation  von  Philippikus  einem  Katboliscben  Deulscben. 
Leipzig,  Rust  [1893];  in-S"  de  47  p. 

T.  XXVI,  N»  52.  1S 


290  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Kleinpaul  (Rudolf).  Menschenopfer  u.  Ritualmorde.  Leipzig,  Schmidt  et 
Gùnther  [1892]  ;  in-8»  de  80  p. 

KoNiEGKi  (Hermann).  Feuerfunken,  Vier  antisemitiscbe  Trutziieder.  Berlin, 
Dewald  [1893]  ;  4  p. 

KoNiECKi  (Hermann).  Quousque  tandem  oder  das  Neujahrspastmahl.  Anti- 
semitisches  Schauspiel  in  1  Akt.  Berlin,  Dewald,  [1893]  ;  in-8o  de  16  p. 

KoNiECKi  (Hermann).  Wuotan.  Die  Gôtterdàmmerung  unserer  Zeit.  Berlin, 
Dewald  [1893]  ;  in-S»  de  112  p. 

Landgraf,  wordc  hart.  Ein  Mahnruf  an  das  deutsche  Volk  in  zwolfter 
Stun,de.  Volkswirlschaftliche  Oper  (mit  Ballet)  in  5  Akten,  etc.,  von 
eincm  deulschen  Nationalôkonomen.  Berlin,  Dewald  [1893]  ;  in-8° 
de  48  p. 

Lksz  (II.  K.).  Alban  Stolz  u.  die  Juden.  Ein  zeitgemasser  Beitrag  zur  Jn- 
denfrage  liir  das  deutsclic  Volk.  Munster,  Adolf  Russell,  1893;  in-S" 
de  80  p. 

Levy  (Emile).  Les  quatre  enfants  de  la  Hagada,  sermons.  Bayoune,  impr. 
Lespés,  1893;  in-8o  de  22  p. 

LôHNEYSEN  (Heinrich  Erbr.  v.).  Antisemitismus  und  Niicbslenliebe.  Berlin, 
Waltber,  1893;  in-8°  de. 35  p. 

Meurin  (Mgr  Léon).  La  Franc-maçonnerie,  synagogue  de  Satan.  Paris, 
Victor  Retoux,  1893;  in-8o  de  556  p. 

Mgr  Meurin,  archevêque-évêque  de  Port-Louis,  membre  de  la  S.  J.,  a 
découvert  dans  les  rites  et  les  doctrines  maçonniques  l'intluence  ou 
plutôt  la  suite,  entre  autres,  de  la  Kabbale.  Il  s'étend  longuement  sur  les 
liens  qui  unissent  la  doctrine  maçonnique  au  laimudisme,  et  il  insiste  sur 
raciion  des  Juifs  dans  les  loges.  Sa  charité  chrétienne,  que  nous  n'osons 
comparer  à  sa  science,  lui  fait  résoudre  ainsi  la  question  juive,  puisque 
question  il  y  a  ;  t  L'expulsion  des  Juifs  d'un  pays  est  un  manque  de 
charité  et  de  justice  envers  les  pjys  voisins  sur  lesquels  on  décharge 
ces  vers  rongeurs.  Elle  est  également  une  mesure  trop  dure  contre  ceux 
d'entre  les  Juifs  qui  ne  sont  pas  coupables  des  crimes  de  la  poignée  auda- 
cieuse qui,  au  moyen  de  la  franc-maçonnerie,  exploite  les  nations.  Il 
suffirait,  nous  croyons,  de  défendre  aux  Juifs  les  occupations  de  banquiers, 
de  marchands,  de  journalistes,  de  professeurs,  de  médecins  et  d'apothi- 
caires. » 

Nathan  (Paul).  Xanten-Cleve.  Belracbtungen  zuin  Prozess  Buschhof. 
Berlin,  II. -S.  Hermann,  1892  ;  in -8°  de  16  p.  (Separat-Abdruck  aus  der 
«  Nation  ^>). 

Naudh  (H.).  Die  Juden  u.  der  Deutscbe  Staat.  12'  éd.  augm.  Leipzig, 
Beyer  [1893,  ;  in-8o  de  182  p. 

NoviKOFF  (Fedor  de).  Das  jiidische  Russland.  Entbiillungen  u.  Aufkla- 
riingen  i'iber  die  russiscbe  Judeufrage.  Berlin,  Paul  Ileicben  .1892];  in-S» 
de  112  p. 

Olscher  (Bruuo).  Die  Judcnlau.s  im  Cbristenpelz.  Ernste  'Wortc  iiber  den 
Ruin  des  Mittelstandes  durcb  den  Juden  u.  durch  die  jvid.  Gescbafts- 
kniff.  Berlin,  Paul  Ileicben  [1893  ;  in-8"  de  24  p. 


BIBLIOGRAPHIE  291 

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tomn  spent  wilh  him  in  Russia  and  Austria.  Londres,  W.  Heinemann 
1892;  in-16  de  xxii  -f-  130  p.,  avec  illustrations  de  l'auteur. 

Pressel  (Wllhelm).  Der  Thalmud  vor  dcm  Schwurgericht  am  Ende  des 
XIX.  Jahrhunderts.  Leipzig,  Dôrffling  et  Franke,  1893;  in-S"  de  08  p. 

Reinhardt  (August  von).  Die  Judenfrage  u.  der  Freimaurerhund.  Ulm. 
H.  Kerler,  1893;  in-16  de  79  p. 

Roi  (J.-F.-A.  de  le).  Die  Mission  der  evangclischcn  Kirche  an  Israël.  Go- 
tha, Pcrthes,  1893;  in-S"  de  147  p. 

Saldenhofen  (Fr.  v.j.  AusgewiUiltes  i'iber  «  Auserwahlte  Volk  ».  Neuer 
Beitrag  zur  Klïirung  u.  Lôsung  der  Judenfrage.  Wurzbourg,  Etlinger, 
1892  ;  in-8"  de  80  p. 

ScHER?F  (Joh.).  Das  Eintefest.  Ein  humoristisch-patriotisches  Feslspiel. 
[Berlin,  Hoppner,  18931  ;  12  p. 

Schutzjudeu  oder  Staalsbûrger  ?  von  einem  jùd.  Staatsbiirger,  3"  éd.  Ber- 
lin, Schweitzer  et  Mohr,  1893;  in-B"  de  27  p. 

Stahl  (Lorenz).  Der  Fluch  auf  Juda.  Berlin,  J.  von  Groningen,  1893;  in-S" 
de  40  p. 

Stein.  Der  grosse  Prophet  (Reclor  Ahhvardt),  Eiu  Malin-u.  Abschicdswort 
an  meine  anlisemitischen  Freunde.  Berlin,  Groningen,  1892;  iu-8" 
de  47  p. 

Stragk  (Hermann  L.\  Die  Judcn  diirfen  die  «  Verbreclier  von  Religions 
wegen  »  genanut  wcrden.  Berlin,  Wallher,  1893;  in-B»  de  30  p.  iSchrilten 
des  Institutum  judaïcum  in  Berlin,  n"  15). 

Tilles  (Sally-Simou).  Die  Mischpoke  ini  Bcrliner  Buchhandel.  Moment- 
Photographiecn  ans  den  Kreisen  unscrer  israelitischen  «  Herren  Kol- 
legen  ».  OfTener  Brief  an  den  Joùrnalislcn  D""  Isidor  Fcilchenfeld,  2*^  éd. 
Berlin,  Paul  Heichen,  1892  ;  in-8''  de  36  p. 

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Walch  (J.-G.-A.).  Die  Judenfrage,  cine  von  Staals  wcgen  zu  behandelnde 
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Waldhausen  (Robert).  Jùd.  Erwerbslebeu.  Skizzen  aus  dem  sozialeu  Leben 
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Zangwill  (J.).  Childern  of  the  Ghetto  beiug  Pictures  of  a  peculiar  people. 
2  vol.  Philadelphie,  Jewjsh  publication  Societv,  1892;  in-8"  de  451 
+  328  p. 


2.(2  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Zukunft  (Diej  des  Deulschen  Judenlhums  von  eincm  Juden.  Dresde, 
Damm,  1891;  in-8«  de  13  p. 

4.  Périodiques. 

"ipinn  «  Revue  hébraïque»  ^;Vienne,  Scholzgasse,  2,  mensuel).  V  année 
1892-1893.  =  =  N*'"  7-8.  A.  Harkawy  :  Fragment  d'un  commentaire  sur 
le  Pentateuque  d'un  Caraïte  ancien.  —  A.  Epstein  :  Études  critiques  : 
P  le  petit-fils  de  R.  Juda  Hanasi,  la  permission  d'étudier  le  grec  pour  la 
famille  de  R.  Gamliel;  2°  si  les  auteurs  lialakhiques  ont  interprète  le 
texte  biblique  à  l'aide  de  la  langue  grecque;  3°  altération  du  texte  du 
Tanna  de  R.  Eliahou  par  l'auteur  du  Zikoukin  denoura;  4"  les  divinités 
présidant  au  l*^""  de  l'an.  —  S.  Fuchs  :  Le  Sèfer  Otiot  Haimanim  de  R.  Juda 
b.  Balaam.  —  A.  Neubauer  :  Extrait  d'un  ouvrage  de  grammaire  ms. 
écrit  en  arabe.  —  H.  Brody  :  Dialogue  de  Libni  et  Schime'i  d'Immanuel 
Franzos.  =  =  N^' 9-10-11.  Edition  nouvelle  des  Etilakhot  Pesoukot  des 
Gaonim  avec  notes  par  Joël  MùUer. 

Archives  Israélites  (Paris,  hebdomadaire).  54^  année,  1893.  =  =  N°  5. 
Moïse  Schwab  :  Une  fausse  antiquité'  he'braïque  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale. =  =  N°  6.  Albert  Bloch  :  L'e'tymologie  du  mot  chimie.  =  =  N°  16. 
Isidore  Cahen  :  Ad.  Franck.  =  =  N°  24.  Léon  Kahn  :  Les  Juifs  de  Paris 
pendant  la  Révolution  :  la  femme  de  Chabot  [Leopoldine  Frey  ;  Chabot 
fut  guillotiné  avec  les  comtes  Emmanuel  et  Junius  Frey,  ses  beaux- 
frères]  (suite,  n''  25). 

11  Corrîere  israelitico  (Trieste,  mensuel).  30^  anne'e,  1892.  ^  =  N°  7. 
G.  Cammeo  :  7  Terafim  [Suiie,  n°  8).  —  Leone  Racah  :  Il  Talmud  {suite, 
qo  8).  =  r=  îs°  9.  Cav,  Prof.  David  Terracini,  rabbino  maggiore  di  Asti. 
—  G.  Cammeo  :  Il  libero  arbitrio  nella  Bibbia.  =  =  N°  11.  G.  Cammeo  : 
Arli  e  mestieri  nella  Bibbia,  =  =  N°  12.  Margulies  :  Dell'  influsso  del 
Giudaismo  suUa  coltura  dell'  Umanita  (discours).  —  Samuel  Colombo  : 
Rab-Azulaï. 

Jiidisehes  Litleratur-Blall  (Magdebourg,  hebdomadaire).  21®  anne'e, 
1892.  r=  =  NO  40.  Moritz  Rahmer  :  Ueber  die  Thierquâlerei  nach  den 
Grundsaizen  des  Judenthums  (iuile,  n"^  41-42).  —  Goldfahn  :  Eine  aile 
Syuagogenorduung  [suite,  n"*  45,  46j.  =  =  N'^  41-42.  M.  Grûuwald  : 
Urspruug  der  Tischzuchen.  =  =  N°  43.  Gross  :  Sethiten  u.  Kaiuiten.  — 
G.  Wolf  :  Ein  privilegium  odiosum.  —  Ad.  Jellinek  :  Der  Anfang  des 
Midrasch  rabba  zur  Genesis..  =  =  N°  44.  E  Landau  :  Die  gegensinnli- 
chenWarter  im  All-u.  Neuhebraischen  (fin,  n°  4.ô).  =  =  N°  45.  S.  Gelb- 
haus  :  Ueber  miltelhochdeutsche  u.  jûd.  Litteratur  (suite,  n"^  46  et  47;. 
;=  =  N°  47.  A.  Kaminka  :  Talmudische  Bibelexegese  im  Targutn  Jona- 
than. =  =  No  49.  Karl  Ochsenius  :  Die  Juden  in  Nordafrika.  —  A.  Jel- 
linek :  Senior  Sachs.  =  =  N°  50.  Die  Religionsphilosophie  Saadja's 
(suite,  n°=  51,  52;.  =  S.  Gelbhaus  :  Ueber  den  Iwein  Harlmann's  von 
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alte  Synagogenordnuug,  Das  Buch  des  Propheten  Jonas  [suite,  n'S).  =  = 
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stein  :  Vertheidigung  eines  Mendeissohn'sclicn  Beweises  gegen  die  An- 
griffe  K  an  t 's.  —  Salomou  Buljer  :  Der  Midrasch  Ilaflarot.  ^  ^  N°  9. 
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frage,  cine  ethischo  Frage  »  [suite,  n"^  10,  13).  —  S.  Schweinburg-Eiben- 
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/.,  XXV,  58).  =  =  N"  11.  David  Ileiniich  MOlIer  :  Die  neuesten  Aus- 
grabungen  in  Syrien.  —  Bloch  :  Die  Etymologie  des  Wortes  Chemie.  = 
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gung  des  Maimouides  (suite,  année  1893,  n°  1).  —  M.  Rosenmann  :  Dar- 
stellungen  aus  dem  inneren  Lebeu  der  spanischen  Juden  im  xv.  Jahr- 
hundert. —  E.  Goitein  :  Das  Vergcltuugsprincip  im  biblischen  u. 
talmudischen  Strafrecht  (suite,  annc'e  1893,  n"  1).  —  Emanuel  Blûth  : 
Joseph  Kimhi  u.  seine  Grammalik.  —  Samuel  Krauss  :  Die  romischea 
Besatzungen  in  Paliistina.  —  D.  Hoffmann  :  Die  Antonirms-Agadot  im 
Talmud  u.  Midrasch.  —  Steinschneider  :  I.  Miscellen,  II.  Diplomatische 
u.  kritische  Genauigkeit.  =:  =:  2'' année,  1893.  N'^  1.  Salomon  Fuchs  : 
Studien  ûber  Abu  Zakarija  Jahja  Ibn  Bal'am. 

Tlie  nienorah  moiitly  (New-York\  XIIl"  vol.,  1892.  =^  =  N"  4,  octobre. 
Kayserling  :  The  first  Jew  on  American  soil.  =  =  N°  5.  novembre. 
G.  A.  Kohut  :  Mendelssohniana.  ^=  =  N°  6,  de'cembre.  Alexander  Ko- 
hut  :  Références  to  Columbus  and  Araerica's  discovery  in  contempora- 
neous  hebrew  literature.  =  =  XIV«  vol.,  1893.  îs"  1,  janvier.  Aaron  : 
The  Megillah  ol'  Saragossa.  =  ^=  N°  3,  mars.  Jewish  genius  and  jewish 
intellcctuaîity,  adapted  from  the  article  of  Anatole  Leroy-Beaulieu  in 
the  Revue  des  Deux-Mondes.  =  =  N"  4,  avril.  Grossmanu  :  Baruch  Spi- 
noza. —  Jewish  names,  adapted  from  the  frencli  of  Anatole  Leioy- 
Beaulicu  :  The  language  of  the  Jews. 

IHonatssrlirîrt  Tiir  Geschiclite  iind   Wissenschaft   des    Judenthunis. 

3'7"  année.  1892;  nouvelle  se'rie,  1'^  anne'e.  ^=:  =--  N"  1,  octobre.  Roscii- 
thal  :  Das  Sikarikon-Geselz  [suite,  n"^  2  et  3).  —  J.  Perles  :  Beilriige  zur 
rabbiiiischen  Sprach-und  Alterlhumskunde  (suite,  n°^  2,  3,  4  et  8).  — 
D.  Kaufmann  :  Das  Alter  der  drei  Benediclionen  von  Israël,  vom  Freien 
und  von  Mann.  —  Philipp  Bloch  :  Die  In^^TO  "'Tl"!"',  die  Mystikor  der 
Gaoonenzeit,  und  ihrEinfluss  auf  die  Liturgie  (suite,  n^^  2,  G).  —  Alexan- 
der Kisch  :  Das  Testament  Marduchai  Mcysols  (suite,  n"  2,  3  et  1\  — 
Max  Freudcntbal  :  Die  ersten  Emancipationsbestrebungon  der  Judcn  in 
Breslau  (suite,  n'^''  2,  4,  5  et  7).  -^  =^  N°  2,  novembre.  A.  Epstein  : 
Pseudo-Saadja's  und   Elasar  Rokeach's  Commentare  zum  Jezira-Buche. 


294  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Die  Reccnsion  Saadja's  [suite,  n°  3).  —  Moritz  Steinschneider  :  Mi?:cellen 
{suite,  n°=  3,  4,  5  et  7).  =  =  N°  3,  décembre.  D.  Kaufmann  :  Ziir  Ges- 
cbichte  derEuphemieen.  —  David  Rosin  :  Eine  Lûcke  im  religionsphilo- 
sopbischen  \Yerke  des  Gersonides.  =  =  N'^  4,  janvier  1893.  M.  Giide- 
mann  :  Neutestamenlliche  Studien  [suite,  n°^  fî,  7  et  8).  —  A.  Schwarz  : 
Die  erste  halachische  Controverse  {fin,  n°  5).  —  J.  Theodov  :  Der  Midrasch 
Bereschit  Rabba  {suite,  n"  5).  —  M.  Gaster  :  Das  Schiur  Komab  \fi,i, 
n°  5).  ==  N°  5,  février.  S.  J.  Halberstam  :  Notizen.  =  =  N»  6,  mars. 
Epstein  :  Studien  zum  Jezira-Buche  u.  seinem  Erklârern.  —  Kaufmann  : 
Die  Verbeerung  von  Ungariscb  Brod  durcb  den  Kuruzzenûberfall  vom 
14.  Juli  1683  {suite,  n°  7).  =  =  N°  7.  avril.  J.  Derenbourg  :  Ueber  einige 
dunkle  Punkte  in  der  Gescbicbte  der  Juden.  ^  =  N°  8,  mai,  Kaufmann  : 
Der  Stammbaum  des  R.  Eleasar  Fleckeles,  eine  Ahnenprobe  Moritz 
Hartmanns. 

Israelitische  Honatsrhrift.  (supplément  de  la  Jûdiscbe  Pre?se,  Berlin). 
23«  année, 1892.  ==  N°  9.  D.  Hoffmann  :  Zur  Erkliirung  des  Hùttenfestes. 
^=  =  N"  10.  E.  M.  :  Die  Kircbe  u.  die  Juden.  =  =  N»  11.  Frankel- 
Grùn  :  Die  Wiener  Emigranten  in  Kremsier.  —  S  Rotbscbild  :  Ans  dem 
Wormser  «  Maaseb  Nissim  Bucbe  ».  =  ^=  1893.  N°  1,  M.  Weinberg  : 
Die  Almosen-Verwaltung  der  jiid.  Ortsgemeinden  im  talmud.  Zeitalter 
{suite,  n'"*  2.  3,  5).  =  =  N'*  2.  Versucb  der  Erkliirung  eines  dunklen  Aus- 
druckes  (le  mot  "51"^),  =i  =  N°  4.  M.  Simon  :  Die  mitteleuropaïscbe  Zeit 
u.  der  jûd.  Kaleuder.  —  D'"  Hoffmann  :  Zum  Pessacbfeste.  =  =  N°  5. 
A.  von  MôUondorf  :  Professor  Robling,  D""  Justus  u.  Cari  Paascb  {5«t7tf, 
n"  6).  =  =  N'^f).  Papst  Nicolau-;  V  gegon  die  Blutbescbuldigung. 

Die  Xeuzeît  Vienne,  bebdomad.).  32"^  an.,  1892.  =  =  N°45.  Friedlânder  : 
R.  Jebuda  II  und  die  Ordination  (Semicba)  {suite,  n»  46).  =  r-=  N**47. 
Engelmann  :  Bisebofe  jiidiscber  .Abstammung,  =  =^  N"  48.  Senior  Sacbs. 
—  Ad.  Kurrein  :  Das  Idéal  Israels  u.  dessen  Friedenslebeu  {suite,  n"^  50, 
51,52,53).  =  =  33*  année,  1893.  N"  3.  J.  :  Aus  kabbalistiscben  u. 
cbasidaischen  Kreisen  {suite,  n'^5).  —  A.  KO  rein  :  Das  Idéal  Israels  u. 
dessen  Friedensleben  [suite,  n''*  4,  5).  ^  =  N''  4.  David  Cassel.  —  Fa- 
bian  Jolies  :  Talmud,  Spinoza  u.  Gôthe.  =  =  N'^  5.  Ad.  Jellinek  :  Das 
Gedilcblniss  dos  jiid.  Stammes.  =  =  >s''  7.  S.  Scbweinburg-Eibenschutz  : 
Der  erste  jûd.  Advocat  in  Oesterreich  (20.  Juli  1790)  (suite,  n'^"  10,  11).  = 
=  N'*  21  :  Max  Weissberg  :  Zur  Genesis  des  Iheoretischen  Anlisemi- 
tismus. 

Die  Judiscke  Presse  (Berlin,  Lebdùmadaire).  23*^  année,  1892.  =  =  N"  42. 
Micbel  Erlanger.  =  =  N°  45.  Bibjrfeld  :  Professor  Strack  ûber  don  Blut- 
mord  [suite,  n"^  4(5,  47).  --  =  24'-  année,  1893.  N»  1.  Adolf  Blumenthal  : 
In's  Marcbeualbum  vom  «  rituellen  Morde  ».  =  =  N°  4  David  Cassel. 
=  =  N°  8.  D--  Jakob  Ecker  {suite,  n"-  9,  10.  12).  =  =  N»  11.  Wer  sind 
die  «  Akum  »  des  Schulcban  Aruob  ?  {suite,  ij°  12).  =  =  N°  17.  Die 
Juden  u.  die  Kriminalstalistik  {suite,  n""*   18,  19). 

The  Jewish  qaarterly  Review  (Londres).  4"^  vol.,  1892.  ^^  =^  N°  17, 
octobre.  Ad.  Neubaucr  :  M.  Isidore  Loeb.  —  Rev.  C.  Taylor  :  The  dirge 
of  Coheletb.  —  S.  Schecbler  :  Notes  on  bebrew  mss.  in  tbe  university 
library  of  Cambridge.  —  Leopold  Cohn  :  Tbe  latèst  researches  on 
Philo  of  Alexandria.  — Joseph  Jacobs  :  Further  notes  on  the  Jews  of 
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commentatorofhis  Sephcr  ha-Galui;  A  lalmndical  proverb  in  Petrouius  ; 

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Kùhut  :  Professor  Graetz  on  D''  Kohut's  «  Talmudical  Miscellanies  ». 
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daisra.  —  Schechter  :  Noies  on  hebrcw  Mss.  in  the  university  library  of 
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tuagint.  —  Neubauer  :  Bibliography,  1891-92.  —  Crilical  notices.  —  Nole.^^ 
and  discussion  :  Bâcher  :  An  allcged  old  source  on  the  Jews  ia  Yemen  ; 

—  Skipwith  :  Graelz's  remark  ou  «  Apodasmo  Judteorum  capta  »  ;  — 
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M.  D.  Davis  :  Isaac  of  Ilurford.  =  =  N'^  19,  avril.  D.  Kaufmann  :  The 
Htz  Chayim  of  Jacob  b.  Jehudah  of  London  and  the  history  of  his  ms.  — 
Conybeare  :  On  the  jewish  aulhorship  of  the  Testaments  of  the  twelvc 
Patriarchs.  —  K.  Kohler  :  The  pretalmudic  haggada.  —  Adolf  Bûcbler  : 
The  reading  of  the  Law  and  Prophets  in  a  triennal  cycle.  —  M.  Hyamson  : 
Aulhorily  and  dogma  in  Judaism,  a  reply.  —  Crilical  notices.  —  Notes 
and  discussion  :  Richard  GoUhcil  :  The  family  Almanzi  ;  —  Abrahams  : 
Samuel  Porlalconi's  proposed  restrictions  on  games  of  chance  ;  —  Skip- 
with :  On  sorae  misplaced  passages  of  scripture. 

Revue  de  l'hlsîoire  des  religions  (Paris,  bimestriel).  13"  anne'e,  1892. 
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Hébreux  à  l'ëpoque  des  Juges.  =  =  N»  2.  L.  Horst  :  Eludes  sur  le  Deu- 
téronome.  IL  Les  sources  et  la  date  du  Deutéronome  (/?«)• 

Revue  sémitique  (Paris,  trimestriel).  1'°  année,  1893.  =  =  Janvier. 
J.  Ilalevy  :  Recherches  bibliques.  XXVI,  Les  descendants  de  Sem  et  la" 
migration  d'Abraham.  XXVII,  Un  gouverneur  de  Jérusalem  vers  la  fin 
du  xv«  siècle  av.  J.-C  XXVIII,  La  crealion  et  les  vicissiludes  du  pre- 
mier homme  (suite,  n»  d'avril).  —  Du  même  :  Deux  inscriptions  sémi- 
tiques de  Zindjirli.  =  =  Avril.  J.  Ilalévy  :  Les  deux  inscriptions  hé- 
te'ennes  de  Zindjirli. 

L't'nivers  israélii*e  (Paris,  bimensuel).  •1"''  année,  1892-1893.  -=  =  N"  3. 
L.  SVogue  :  Michel  Erlanger.  —  A.  Lévy  :  Les  Israélites  de  Lyon  {suite, 
n»*  5,  13,  18).  =  =  N°  7.  L.  Woguc  :  Senior  Sachs.  =  =  N"  8.  llerr- 
maun  :  Un  document  israelite,  prière  pour  la  reine  (le  10  mars  1*7(38,  à 
Bordeaux).  =  =  N°  16.  L.  Wogue  :  Adolphe  Franck. 

Il  Vessillo  israeiîtioo  (Casal-Monferral,  mensuel).  40«  année,  1892. 
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triel). 12°  année,  1892.  =  =  2»  semestre.  C  Bruslon  :  Les  cinq  docu- 
ments de  la  loi  mosaïque.  —  Julius  Ley  :  Origenes  iiber  hebr.  Melrik 
—  Th.  Slockmayer  :  liai  Lucian  su  seiucr  Sepluagintarevisiuu  die  Pos- 
chito  bemilzf?  —  J.  J.  P.  Valelon  :  Das  Worl  rr^nn  in  den  jehovistischen 


2%  HKVDE  DES  ETUUES  JUIVES 

und  deutoronomischen  Slùckea  des  Ilexateuchs,  sowie  in  den  vcrwandlcn 
historischen  Bùchcrn.  —  Karl  Buddc  :  Zum  hobr.  Klagelied  [suite'K  — 
Stade  :  Bemerkungen  zum  Bûche  Jeremia.  —  Bibliographie.  =  =  13^  an- 
née, 1893.  =  =  1"  semestre.  Silberstein  :  Uebcr  den  Ursprung  der  im 
Codex  Alexandrinus  und  Valicanus  des  drilten  Kœnigsbuches  der 
alexandrin.  Ueber^jetzung  ûberlieferten  Textgeslallt.  —  Eckardt  :  Der 
Sprachgebrauch  von  Zach.  9-14.  —  Fries  :  Parallèle  zwiscben  den  Kla- 
gcliedern  Cap.  IV,  "V,  und  der  Maccabaerzeit.  —  Cheyne  :  The  Ninetenlh 
Chapter  of  Isaiah.  —  Bâcher  :  Jehuda  Ibn  Balaams  Jesaja-Commentar. 
—  Ans  einem  Briefe  Nôldekes'.  =  Couard  :  Gen.  15,  12-1(5  und  sein  Ver- 
haltnis  zu  Ex.  12.  40.  —  Ilackmann,  Erklàrung.  —  Bibliographie. 

Allgemcine  Zeiiung  «les  Jiidentliums  (Berlin,  hebdomadaire}.  56°  an- 
née, 189^.  =:  =  îs»4l.  Emil  Franzos  :  Moriz  Rappaporl  fs«2Ye,  n°*  43, 
44,  46,  4").  :=  =  N°  42.  S.  Fessier  :  Die  Satire  u.  die  Stellung  dos 
Judenlhums  zu  ihr.  =  =  No44.  G.  Karpeles  :  Erinnerungen  an  Henriette 
Herz.  =  =  N°  45.  Leopold  Katz  :  Zur  Geschichte  der  jûd.  Melodien,  Kol 
nidre.  —  M.  Silberstein  :  Die  Mélodie  des  Neilah-Kaddisch.  =  =  N°  47. 
A.  Ackermann  :  Der  jiid.  Vorsangerdiensl.  =  =  N°  49.  Emil  Lehmann  : 
Zacharias  Frankcls  Berufung  nach  Berlin.  =  =  N"  50.  J.  Horowitz  :  Die 
sozialen  Instilutionen  dos  Mosaismus  u.  der  platonische  Staat  {suite, 
no^  51  et  52].  =  =  N°  52.  Félix  v.  Luschan  :  Die  anthropologische  Stel- 
lung der  Juden  C/?«,  n"  53).  —  Richard  M.  Meyer  :  Bcrthold  Auerbach 
(/?»;  n"  53V  =  =  57e  année,  1893.  N°  2  Emil  Schifif  :  Seligmann  Heller. 
=  =  N°  3.  David  Cassel.  ^  =  N°  6.  M.  Kayserling:  Die  jûd.  Bevôlkerung 
in  Spanien.  —  Blumenau  :  Etwas  ûber  jûd.  Namen.  —  Gelbhaus  :  Ueber 
das  zweite  Targum  zum  Bûche  Eslhcr.  =  =  N°  12.  Nathan  Grun  :  Die 
bibl.  Schiiflerklarungen  eines  Kaisers  (Frédéric  II)  (fin,  n"  14).  ^=  ■= 
N°  13.  H.  Sleinthal  :  Das  Buch  Daniel  u.  dessen  Einflu&s  auf  die  Folge- 
zeit  {fin,  n"  14).  =  =  N"  15.  E.  Baumirarten  :  Isak  Noe  Mannheimer.  = 
=  N"  16.  H.  M.  Cohn  :  Die  Kriminalstalistik  nach  Koufessionen.  =  = 
M"  19.  M.  Kaj'serling  :  Ein  ungedruckter  Briet  Moses  Mendelssohn's  u. 
seiner  Frau.  =  =  N°  20.  Stier  :  Das  «  Massa  *  des  Propheten  [suite, 
n^^  21  et  22). 


5.  Notes  et  extraits  divers. 

-  Revue  rétrospective,  9"  année,  octobre  1892  fp.  257  et  suiv.).  Un  policier 
homme  de  lettres  :  l'inspecteur  Meusnier  il748-1757),  par  Paul  d'Eslre'e.  — 
Les  Juifs,  dans  la  deuxième  moitié'  du  xYiii"  siècle,  ne  pouvaient  de- 
meurer à  Paris  que  «  trois  ou  six  mois  sur  le  visa,  par  le  lieutenant  de 
police,  d'un  passe-porl  que  délivraient  aux  intéressés  les  intendants  de 
leur  province,  ou  les  ministres  secrétaires  d'Elat.  Un  inspecteur  de  police, 
spécialement  chargé  de  cette  mission,  vérifiait  les  papiers  des  Juifs  cl 
chassait  impitoyablement  de  Paris  ceux  qui  n'étaient  pas  en  règle.  S'ils 
n'obe'issaieut  pas  à  ses  injonctions,  ils  e'taienl  conduits  au  Forl-LEvèquc 
ou  à  Bicêlre-  Tapin  el  Langlade  furent  les  premiers  inspecteurs  de  police 
auxquels  incombèrt-nt  ces  fonctions.  Legrand  leur  succe'da,  qui  neut  ni 
la  conscience,  ni  l'honnêteté'  de  ses  prédécesseurs.  Cet  agent  pre'varica- 
teur  fermait  les  yeux  lorsqu'il  était  grassement  paye',  et  se  montrait  sans 
pitié  pour  les  pauvres  diables  incapables  d'acheter  son  silence.  La  Coni- 


BIBLIOGRAPHIE  297 

munaulé  juive  (?),  rançonnée  par  Legrand,  le  dénonça,  sur  la  double 
initiative  d'Assur  Mayer,  facteur  de  l'électeur  de  Cologne,  et  de  Bernard 
Valahrègue,  interprète  du  Roi.  Le  premier  de  ces  Israélites  était  un 
espion  allemand,  le  second  un  honnête  homme,  fort  estime  à  la  Biblio- 
thèque royale.  Sa  plainte  fut  écoulée,  et  Legrand  invité  à  fournir  des 
explications.  Il  prélendit  que  ses  accusateurs  lui  avaient  tout  simplement 
fait  des  cadeaux.  Il  n'en  fut  pas  moins  suspendu  de  ses  fonctions. 
Mais,  pour  leur  édification  personnelle,  le  lieutenant  et  les  inspecteurs  de 
police  chargèrent  Meusnier,  au  commencement  de  1752,  d'ouvrir  une 
enquête  sur  les  faits  reprochés  à  leur  collègue  et  de  leur  en  communiquer 
le  résultat.  » 

C'est  ce  rapport  de  Meusnier  que  publie  M.  d'Estrée. 
Legrand  avait  commencé  par  être  puni  par  la  privation  de  son  poste. 
Une  vingtaine  de  Juifs  avaient  été  entendus  et  s'accordaient  à  dire  que 
le  sieur  Legrand  n'avait  point  sollicité  les  présents  qu'ils  lui  avaient  faits 
depuis  trois  ans,  en  faveur  des  étrennes,  par  récompense  des  peines  qu'il 
se  donnait  pour  l'enregistrement  de  leurs  passeports,  quoiqu'ils  n'eussent 
jamais  rien  donné  aux  sieurs  Tapin  et  Langladc,  ses  prédécesseurs.  » 
Seul  Bernard  de  Valabrèguc  <-  insistait  pour  le  contraire  ».  Il  semblait 
donc  prouvé  à  Meusnier  que  le  sieur  Legrand  n'avait  pas  exigé  de  pré- 
sents ni  pris  de  l'humeur  contre  ceux  qui  ne  voulaient  pas  «  contribuer  ». 
«  11  était  encore  moins  prouvé  qu'il  eût  eu  de  l'indulgence  pour  aucun 
en  particulier,  au  préjudice  de  son  devoir  et  en  considération  des  présents 
manuels  ou  annuels  qu'il  en  aurait  reçus.  » 

Meusnier  s'était  adressé  au  juif  Moyses  Elias,  pour  avoir  des  rensei- 
gnements, et  celui-ci  avait  répondu,  de  Strasbourg,  par  une  lettre  des 
plus  explicites  :  Legrand,  prctendait-il,  ne  tourmentait  pas  les  Juifs  qui 
le  payaient  :  seulement  lui,  Moyses  Elias,  avait  résisté  à  ses  tracasseries, 
parce  qu  il  était  au  service  du  Roi.  D'autre  part,  Bernard  de  Valabrèguc 
redoublant  d'animositë  contre  Legrand,  Meusnier  demande  un  suppie'- 
ment  d'enquête.  11  dresse  une  liste  de  te'moins  qu'il  faudra  interroger, 
pour  savoir  ce  qu'ils  pensent  de  Bernard.  Ce  sont  Manuel  de  Léon, 
Raphaël  de  Léon,  Salomon  Benjamin,  Olry  Gain,  Israël  Dalpuget,  Lazare 
Dalsace,  Samuel  Jonas  Lévy,  Daniel  Gunlz,  Joseph  de  Valabrèguc, 
Assure  Mayer,  Lange  de  Sazia,  Abraham  Vidal,  Jacob  Goldschmidl.  Ils 
demeuraient  pour  la  plupart  chez  des  particuliers  ou  à  l'hôtel. 
On  ignore  la  suite  qui  fut  donnée  à  cette  affaire. 

Dunionl,  qui  remplaça  Legrand,  touchait  600  livres  pour  la  surveil- 
lance «  des  Juifs  et  des  charlatans  ».  Ces  appointements  modestes  ex- 
pliquent, en  partie,  la  conduite  des  inspecteurs. 

=  On  lira  avec  intérêt  l'étude  que  consacre  au  poète  juif  Sem  Tob  M.  Mar- 
celine Mendez  y  Pelayo,  dans  sa  Biblioteca  dass'ca,  Antologia  de  poetas 
liricos  castellams  desde  la  fonnacion  del  idioma  hasta  nuestros  dias.  Madrid, 
Viuda  de  Ilernando.  1890-92,  in-12. 

=  Notre  cher  Président,  M.  Ilartwig  Derenbourg,  vient  de  terminer  la 
Vie  d'Ousatna,  dont  le  premier  fascicule  (ch.  i-iv)  a  paru  en  1889.  Celle 
partie  est  beaucoup  plus  volumineuse  que  la  précédente,  puisqu'elle  va 
de  la  page  203  à  730.  Il  ne  nous  appartient  pas  de  faire  l'éloge  de  cette 
savante  publication  ;  qu'il  nous  soit  permis  seulement  de  féliciter  M.  H. 
Derenbourg  de  ce  beau  travail  qui  fait  honneur  à  sa  haute  science. 

=  «  De  quelques  faits  relatifs  à  l'histoire  de  la  circoncision  chez  les  peuples 


298  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

de  la  Syrie  ».  Sou^  ce  titre,  M.  Théodore  Reinach  vient  de  publier  dans 
r Anthropologie  une  curieuse  note  que  nous  allons  re'snmer.  D'après  Hcro- 
dole  (II,  104),  «  les  Colques,  les  Égyptiens  et  les  Éthiopiens  ont  seuls 
pratiqué  la  circoncision  dés  l'origine.  Les  Phéniciens  et  les  Syriens  de 
Palestine  reconnaissent  eux-mêmes  qu'ils  ont  appris  celte  coutume  des 
Egyptiens.  »  Qui  sont  ces  Syriens  de  Palestine?  Les  Juifs,  comme  le 
croit  Josèphe  ?  Rien  ne  le  prouve,  Ile'rodote  n'a  jamais  mis  les  pieds  en 
Judée,  il  ne  connaît  de  visu  que  la  côte.  La  Syrie  de  Palestine  est,  pour 
lui,  la  côte  syrienne  comprise  entre  Joppe'  et  la  frontière  de  l'Egypte, 
c'est-à-dire  la  contrée  habitée  par  les  Philistins.  Ce  sont  donc  les  Philis- 
tins dont  veut  parler  Hérodote  ;  d'ailleurs  Palestine  vient  de  Philislée.  Il 
est  vrai  que,  d'après  la  Bible,  ceux-ci  e'taient  incirconcis.  Mais  les  Philis- 
tins du  temps  d'IIe'rodote  élaient-ils  semblables  aux  contemporains  de 
David  '?  Ils  ont  pu  subir  l'influence  de  l'Egypte.  Peut-être  aussi  ne  for- 
maient-ils plus  alors  qu'une  population  mêlée,  depuis  la  déportation  en 
masse  qui  suivit  la  conquête  de  la  Philistée  par  Nabuchodonosor.  Peut- 
être  est-ce  pour  cette  raison  que  les  derniers  prophètes  n'^appliquenl  plus 
le  terme  injurieux  d'incirconcis  aux  Philistins.  Au  contraire,  Eze'chiei 
range  encore  les  Sidoniens,  c'est-à-dire  les  Phéniciens,  parmi  les  incir- 
concis. Or  le  texte  d'Hérodote  constate  l'existence  de  celte  pratique  chez 
ce  peuple  vers  445.  Ne  doit-on  pas  en  conclure  que  la  circoncision  avait 
pénétre'  en  Phe'nicie,  sous  l'influence  e'gyplienne,  enlre  ïtlh  et  445.  Mais, 
d'après  Hérodote  aussi,  lès  Phéniciens  eu  rapport  de  commerce  avec  les 
Grecs  ne  pratiquaient  plus  cet  usage.  Ainsi,  les  Idume'ens,  qui  circon- 
cisaient leurs  enfants  d'après  Je'rémie  (ix,  2G),  devaient  avoir  aban- 
donné cette  coutume,  puisque  Jean  Hyrcan,  en  125,  la  leur  imposa 
de  force.  Ces  résultats  sont  intéressants  pour  l'histoire  des  mœurs 
religieuses. 


Grunbaum  (M.)  Xeue  Boitrsoge  rnv  seiiiîtisehen  Sagenkuiide. 

Leyde,  E.  J.  Brill,  1893;  iu-8°  de  291  p. 


Ce  titre  de  «  Nouvelles  contributions  »  l'erait  croire  à  un  premier 
ouvrage  de  ce  nom  :  bien  habile  celui  qui  le  découvrirait.  Evidem- 
ment M.  G.  a  pensé  à  l'article  qu'il  a  publié,  il  y  a  une  dizaine  d'an- 
nées, dans  le  Journal  asiatique  allemand  (t.  XXXI).  Ces  «  Nouvelles 
contributions  »  rappellent,  d'ailleurs,  par  plus  d'un  point  leurs 
devancières.  Celles-ci  avaient  séduit  par  la  richesse  des  informations 
et  le  luxe  des  comparaisons,  mais  elles  avaient  un  peu  rebuté,  même 
les  savants,  par  leur  décousu  et  leur  aspect  rébarbatif.  L'introduction 
du  présent  volume,  qui  est  une  sorte  de  longue  causerie  à  bâtons 
rompus  sur  la  Agada,  évoque  le  souvenir  de  cet  article,  non  seule- 
ment par  les  chapitres  qui  n'en  sont  qu'une  répétition,  mais  par  la 
confusion  et  l'absence  de  plan.  Pour  comble  de  malechance,  l'auteur, 
dans  son  horreur  des  tables  de  matière  et  de  tout  point  de  repère 
propre  à  soulager  et  à  aider  le  lecteur,  n'a  même  pas  eu  la  pensée  de 


BIBLIOGRAPHIK  299 

diviser  en  paragraphes  ces  nombreuses  dissertalioas  et  observations 
de  détail. 

Au  moins  le  corps  même  de  l'ouvrage  a-t-il,  celte  fois,  de  grandes 
sections  commandées  par  le  sujet.  Ce  sujet,  le  titre  n'en  donne 
qu'un  aperçu  très  général  ;  en  réalité,  c'est  un  parallèle  entre  les 
traditions  ou  plutôt  les  midrascliim  juifs  et  musulmans  sur  les  héros 
de  l'histoire  sainte.  Tout  le  monde  sait  que  le  Coran  et  les  commen- 
tateurs de  ce  livre  relatent  une  foule  de  légendes  qui  illustrent  le 
texte  biblique.  Ces  légendes  ou  midraschim,  Geiger  l'a  déjà  mon- 
tré en  partie,  sont  empruntées  pour  la  plupart  aux  Juifs;  cepen- 
dant, il  est  arrivé  bien  des  fois  que  de  prêteurs  ceux-ci  sont 
devenus  emprunteurs,  les  Musulmans  ayant  pris  goùl  à  ce  jeu 
littéraire  et  ayaut,  eux  aussi,  appliqué  leurs  broderies  sur  le  tissu 
biblique. 

A  notre  sens,  une  élude   sur  cette  question  d'histoire  littéraire 
et   religieuse  devrait  être   ainsi   conduite  :   1°  on    comparerait  les 
midraschim  musulmans  à  ceux  des  Juifs;  2°  on  essaierait  d'établir 
les  liens  de  parenté  qui  les  unissent  ;  3-  on  chercherait  les  raisons 
des  transformations  subies  par  ces  légendes  dans  leur  migration. 
A  dire  vrai,  même,  une  étude  de  ce  genre  qui  remplirait  ce  pro- 
gramme ne  serait  pas  encore   complète.  Elle  ne  serait  vraiment  fé- 
conde qu'à  la  condition  de  nettement  marquer,  pour  chaque  Irait 
agadique,  s'il  est  manifestement  juif,  par  le  tour,  le  caractère,  les 
préoccupations  qui  l'ont  créé,  ou,  si  ne  se  rattachant  ni  à  la  Bible, 
ni  aux  conceptions  proprement  midraschiques,  il  ne  rentre  pas  dans 
le  folk-lore  universel  dont  les  limites  territoriales  sont  invisibles.  Mais 
pour  mener  à  bonne  fin  de  pareilles  recherches,  il  faut  avant  tout 
tlxer  l'âge  extrême  et  même  la  patrie   d'origine  des  recueils    qui 
nous  ont  transmis  ces  agadot.   Pour  les  auteurs  musulmans,  qui 
ont  un  état  civil,  la  précaution  est  inutile  ;  elle  est  indispensable 
pour  les  compilations  midraschiques,  qui    sont   anonymes.  11   est 
évident  qu'un    ouvrage   écrit   en  pays  musulman,   bien    après   la 
conquête  de  Mahomet  et  qui  porte  des    traces  incontestables  d'in- 
filtrations arabes,  ne  peut  être  invoqué  seul  pour  justifier  l'origine 
juive  de  midraschim   musulmans.  Les  lecteurs  dépourvus  de  no- 
lions  exactes  sur  l'histoire  de  ces   écrits  seront  toujours   tentés  de 
les   placer   tous  sur  le  même  plan  et  à  une  époque  très  ancienne. 
On  objectera  que  celte  histoire  littéraire  n'est  pas  encore  assez  sûre 
d'elle-même.  A  quoi  nous  répondrons  qu'il  y  a  certains  points  sur 
lesquels  personne  ne  discute   plus,    et   que   même   ceux  qui   sont 
encore    contestés    peuvent    être    étabUs   avec    une    approximation 
suffisante.  Or,  de  ces  divers  points  que  nous  venons  de  signaler, 
M.  G.  n'en  a  traité  le  plus  souvent  que  deux,  le  premier  et  le  troi- 
sième. D'où  celle  conclusion  que  le  lecteur,  devant  ce  savant  travail, 
se  trouve,  sauf  de  rares  exceptions,  dans  le  même  embarras  qu'autre- 
fois devant  les  Biblische  Legenden  der  Muselmamir  de  G.  Weil  : 
il  lui  faudrait  un  cicérone.  Ainsi,  p.  65,  M.  G.  s  exprime  comme  suit 


300  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

(cette  citation  donnera,  d'ailleurs,  une  idée  de  la  manière  de  l'auteur)  : 
«  Dans  le  ïalmud  (Erubin,  ^8  b ,  il  est  raconté  qu'Adam  jeûna  pen- 
dant 130  ans  et  pendant  le  même  laps  de  temps  se  tint  à  l'écart 
d'Eve.  Dans  le  Pirké  R.  Eliézer  ch.  20)  il  est  dit  qu'il  se  baigna  dans 
le  fleuve  du  Gichon  et  jeûna  pendant  sept  semaines,  au  point  que 
son  corps  ressembla  ;i  une  passoire  ;  il  pria  Dieu  de  lui  pardonner  et 
Dieu  exauça  ses  supplications.  Dans  Tabari  et  Ibn-el-Atir  il  est  ra- 
conté que  Dieu  dit  à  Adam  de  bâtir  la  maison  sainte  (la  Kaba)  et  que 
Gabriel  lui  montra  le  cbemin  et  lui  apprit  les  cérémonies  du  pèlerinage, 
ce  qui  est  raconté  aussi  par  Jakut  et  Baïdawi.  En  outre,  il  est  raconté 
qu'Adam  et  Eve  jeûnèrent  pendant  40  jours,  qu'Adam  se  tint  à  l'écart 
d'Eve  cent  ans  et  que  Dieu  accueillit  cette  pénitence  avec  renvoi  à 
Sour.  2,  3o  ;  7,  22;  ».  Et  c'est  tout.  Une  pareille  juxtaposition  de 
textes,  assurément  commode  pour  l'auteur,  laisse  le  lecteur  dans 
l'incertitude,  si  elle  ne  l'induit  pas  en  erreur.  Celui-ci  ne  pourra 
s'empêcher  d'être  frappé  de  l'analogie  et  il  conclura  forcément  à  une 
parenté  entre  ces  relations.  On  aiguise  sa  curiosité  sans  la  satisfaire. 
Tout  au  plus  infèrera-t-il  de  l'ordre  dans  leq'uel  sont  cités  ces  divers 
textes  que  c'est  des  Juifs  qu'est  venue  aux  Musulmans  cette  tradi- 
tion. Une  simple  notice,  placée  en  tète  du  volume,  sur  l'âge  et  la  pro- 
venance des  Midrascbim  aurait  mis  eu  garde  contre  ia  témérité  de 
pareilles  conclusions,  car  elle  aurait  appris  que  le  Pirké  R.  Eliézer 
est  une  œuvre  postérieure  au  triomphe  de  l'Islam  et  est  farcie  d'élé- 
ments non-juifs.  Ici,  d'ailleurs,  M.  G.  ne  s'est  pas  acquitté  entière- 
ment de  sa  tâche,  car,  contrairement  à  son  habitude,  il  a  négligé  un 
autie  ordre  de  références,  les  sources  chrétiennes.  Il  semble  n'avoir 
pas  noté  dans  le  livre  d'Adam,  que  cependant  il  connaît  et  cite  par- 
fois (ainsi,  p.  67  ,  une  analogie  frappante  avec  le  Pirké  R.  Eliézer  et 
les  auteurs  arabes,  surtout  avec  ceux-ci,  car  la  Kaba  s'y  trouve  déjà 
en  germe.  Cette  lacune  est  d'autant  plus  regrettable  que  la  présence 
de  cette  agada  dans  trois  écrits  chrétien,  musulman  et  juif  soulève 
un  problème  curieux  que  nous  avons  essayé,  dans  celte  Revue,  de 
résoudre.  Nous  avons  cherché  à  démontrer  que  l'auteur  du  Pirké  R. 
Eliézer,  en  cette  circonstance,  s'était  inspiré  de  Popuscule  chrétien. 
M.  Epstein,  dont  la  compétence  en  ces  matières  est  suffisamment  con- 
nue, s'est  prononcé  en  faveur  de  noire  In'polhèse.  Nous  pouvons  nous 
être  trompés  l'un  et  l'autre,  encore  aurious-nous  désiré  savoir  pour- 
quoi. En  tout  cas,  les  textes  musulmans  se  rattachent  incontesta- 
blement à  la  Vie  d'Adam.  Peut-être  aussi  M.  G.  a-t-il  négligé  de 
propos  délibéré  cette  référence,  parce  qu'il  n'accorde  guère  de  crédit 
à  ce  Livre  d'Adam,  qui,  sous  la  forme  qu'il  connaît,  la  version  éthio- 
pienne, parait  relativement  récent  et  est  assurément  postérieur 
a  l'hégire.  Seulement,  outre  cette  version  et  même  outre  celle, 
l'arabe,  qui  lui  a  donné  naissance,  il  en  existe  deux  autres,  en  grec 
et  en  latin,  qui  attestent  la  haute  antiquité  de  cet  apocryphe,  qui 
selon  certains  savants,  à  tort  suivant  nous,  aurait  été  écrit  au  i"' 
siècle  de  notre  ère. 


BIBLIOGRAPHIE  301 

Quant  à  la  quatrième  partie  du  plan  que  nous  avons  esquissé 
plus  haut,  personne  n'était  mieux  qualifié  que  M.  G.  pour  la  réaliser, 
ses  travaux  précédents  l'ont  montré  avec  éclat.  Il  est  bien  dommage 
qu'il  ne  s'en  soit  pas  avisé.  Ainsi,  à  propos  de  l'invention  du  feu,  il 
eût  été  bon  d'avertir  que  ce  récit  n'a  rien  de  particulièrement  juif,  et 
qu'il  n'a  même  aucun  lien  avec  la  Bible.  C'eût  été  ouvrir  la  voie  à 
de  nouvelles  recherches  ;  le  lecteur  plus  curieux  aurait  lu  avec 
fruit  l'excellent  chapitre  consacré  à  cette  question  par  M.  G.  lui- 
même  dans  le  Journal  asiatique  allemand. 

Par  contre,  il  faut  louer  sans  réserve  M.  G.  de  la  manière  dont  il 
a  traité  le  troisième  sujet  :  il  a  très  bien  mis  en  lumière  les  préoc- 
cupations théologiques  qui  ont  déterminé  la  prédilection  des  Arabes 
pour  certains  héros  de  la  Bible  et  qui  leur  ont  fait  modifier  certains 
traits  que  la  tradition  juive  leur  prête.  De  même  que  les  Chré- 
tiens, les  Musulmans  ont  vu  dans  l'histoire  sainte  une  figure  de 
la  religion  nouvelle,  mais,  comme  cette  histoire  leur  est  parvenue 
avec  tous  les  ornements  dont  l'a  chargée  la  Agada,  c'est  l'hisloire 
des  patriarches  telle  que  l'a  représentée  la  Agada  qui  est  devenue  le 
type  de  celle  de  Mahomet.  Les  savants  juifs  qui  ne  sont  pas  versés 
dans  la  littérature  arabe  sauront  gré  à  M.  G.  de  leur  avoir  fourni 
les  éléments  de  comparaisons  instructives  et  d'études  très  intéres- 
santes de  folk-lore. 

Voyons  maintenant  dans  le  détail  comment  s'est  acquitté  de  sa 
tâche  M.  G.,  quel  parti  il  a  tiré  des  sources  juives.  Nous  n'avons  pas 
l'intention  d'exercer  ce  contrôle  sur  tout  le  travail  de  l'auteur,  notre 
critique  portera  seulement,  comme  nous  l'avons  fait  jusr[u'ici,  sur  le 
premier  chapitre,  consacré  à  Adam  :  ab  uno  disce  omnes. 

M.  G.  traite  d'abord  de  la  création  d'Adam  et  d'Eve,  de  leur  chute 
et  de  leur  étal  après  le  péché  ;  il  donne,  à  ce  sujet,  tout  le  matériel 
de  la  Agada  juive.  Ici  déjà,  nous  constatons  un  manque  de  rigueur 
dans  la  citation  des  sources.  Il  est  évident  qu'il  faut  indiquer  avant 
tout  les  textes  les  plus  anciens  qui  ont  conservé  ces  détails.  Au 
sujet  de  la  durée  du  séjour  d'Adam  dans  le  Paradis  qui  ne  fut 
que  de  douze  heures,  M.  G.  renvoie  à  la  Pesikia  de  R.  Kahana  et  à 
Vayikra  Rabba  ;  or  il  fallait  nommer  tout  d'abord  Sanhédrin,  38  b.  — 
Plus  loin,  à  propos  des  suites  du  péché  d'Adam,  on  se  réfère  à 
Bamidbar  Rabba  11  et  Pesikia  de  R.  K.,  44  b.  Il  est  pour  le  moins 
imprudent  de  placer  B.  R.  avant  la  Pesikia,  qui  lui  est  bien  anté- 
rieure. Il  valait  mieux  renvoyer  à  Cantiq.  R.,  m,  7,  qui  donne  un 
meilleur  texte  que  la  Pesikia,  et  même  a  conservé  le  passage  entier 
dont  Sifré,  Nombres,  v,  3,  n'a  retenu  qu'un  extrait.  —  Au  sujet 
de  la  longueur  du  corps  d'Adam  avant  sa  chute,  on  renvoie  à  M. 
Tanchuma,  à  la  Pesikia  et  aux  autres  passages  cités  par  M.  Buber. 
Pourquoi  passer  sous  silence  le  ïalmud,  Hayiga,  \la\  Sanhédrin, 
38,  en  10  a;  et  Bereschit  Rabba,  12  et  19  ? 

Nous  ne  reprocherons  pas  à  M.  G.  d'avoir  négligé  nombre  d'i'[)i- 
sodes  intéressants  imaginés  par  la  Agada,  puisqu'il  ne  réunit  que 


302  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

ceux  qui  prêtent  à  des  comparaisons  avec  les  écrits  musulmans.  Il  y 
en  a  cependant  qui  méritaient  d'être  relevés  :  ce  sont  ceux  qui  son'' 
en  opposition  bien  tranchée,  soit  avec  ces  midrasehim,  soit  avec  les 
idées  théologiques  des  chrétiens  et  des  musulmans  et  qui  oflrent 
matière  à  cousidéralions  suggestives.  Par  exemple,  en  regard  des 
textes  chrétiens  et  musulmans,  qui  font  d'Adam  le  tjpe  de  Jésus  ou 
de  Mahomet,  et  un  roi,  prêtre  et  prophète,  il  était  bon  de  placer  les 
opinions  des  docteurs  qui  s'évertuent  à  charger  Adam  de  tous  les 
crimes  possibles,  l'opposition  des  auges  qui  veulent  empêcher  sa 
création. . . 

Certaines  lacunes  sont  surprenantes,  des  références  indispensables 
que  le  premier  venu  peut  faire  sont  mises  on  ne  sait  pourquoi. 
Ainsi,  p.  67,  M.  G.  rapproche  bien  les  textes  talmudiques  et  midras- 
chiques  relatifs  aux  sœurs  jumelles  de  Caïn  et  d'Abel  des  récits  ana- 
logues des  chrétiens  et  des  musulmans,  mais  il  oublie  le  principal, 
à  savoir  le  Livre  des  Jubilés,  qui  donne  même  le  nom  de  ces  femmes. 

On  nous  permettra  de  nous  arrêter  ici  :  les  critiques  que  nous 
continuerions  de  faire  fatigueraient  par  leur  monotonie.  M.  G.  vou- 
dra bien  n'y  voir  qu'une  preuve  de  l'intérêt  avec  lequel  nous  l'avons 
lu  et  de  la  haute  estime  dans  laquelle  nous  tenons  ses  travaux. 

En  disant  ces  mots,  nous  n'ignorons  pas  qu'ils  n'arriveront  pas  à 
leur  adresse,  M.  G.  en  est  encore  à  ne  pas  se  douter  de  l'existence 
de  notre  Revue  ;  nous  le  regrettons  vivement. 

Israël  Lévi. 


^NlTûUJ    ">IÎ"i~72    Midi'aseli    Samuel,  avec  des  notes    et   un  commentaire  pré- 
cédés d'une  introduction,  par  Salomon  Buber.  Cracovie,  1893,  in-S»  de  142  p. 


L'infatigable  maître  des  études  midraschiques  vient  de  donner  aux 
amis  de  ce  genre  de  littérature  une  nouvelle  preuve  de  sa  féconde 
activité.  M.  Buber,  qui  a  publié,  il  y  a  deux  ans,  le  Midrasch  Tehil- 
lim,  fait  paraître  aujourd'hui  un  nouvel  ouvrage,  de  moindre  étendue, 
le  Midrasck  Samuel.  Cette  fois,  il  n'a  eu  à  sa  disposition  aucun  ma- 
nuscrit pour  son  travail.  Le  seul  qu'il  eût  pu  utiliser,  le  ms.  563  de 
la  bibliothèque  de  Rossi  à  Parme,  est  incomplet  et  incorrect,  et  ne 
lui  a  servi  que  pour  comparer  entre  elles  les  diverses  leçons.  Pour 
l'édition  du  M.  Samuel,  il  a  suivi  Védii^ion  pr inceps  de  Consiantinople 
(1522)  et  celle  de  Venise  (lo46},  qui  fut  faite  d'après  la  précédente.  Il 
est  vrai  que  le  manque  de  manuscrits  n'a  pas  d'importance  considé- 
rable pour  le  Midrasch  Samuel,  car  son  texte  ne  parait  avoir  subi 
que  des  modifications  insignifiantes  et  peu  nombreuses.  Sauf  deux 
interpolations  faciles  a  reconnaître  (ch.  iv,  p.  oï,  et  ch.  xxxri,  p.  140 
jusqu'à  la  tin),  il  n'y  a  rien  été  ajouté.  M.  Buber  établit  aussi  que 


BIBLIOGRAPHIE  303 

tous  les  extraits  de  notre  ouvrage  rapportés  dans  les  auteurs  an- 
ciens depuis  Rasclii  se  trouvent  dans  le  texte  édité. 

Quoique  faite  sans  l'aide  de  manuscrits,  l'édition  Buber,  qui  est  la 
reproduction  de  l'édition  prlnceps,  est  appelée  à  rendre  des  services, 
car  elle  nous  donne  le  texte  sous  une  forme  et  avec  des  additions 
telles  que  nous  pouvions  les  allendre  de  ce  véritable  maître  dans 
l'art  d'éditer  des  midraschim.  Pour  eu  faciliter  la  lecture,  il  a  divisé 
les  chapitres  en  paragraphes  numérotés,  bien  séparés  les  uns  des 
autres;  les  citations  bibliques  sont  accompagnées  de  l'indication 
des  passages.  Un  commentaire  rend  compte  avec  précision  des  rap- 
ports existant  entre  les  divers  passages  du  Midrasch  Samuel  et  les 
passages  parallèles  de  la  littérature  talmudique  et  midiaschique.  Ce 
commentaire  contient  naturellement  aussi  des  explications  de  fond 
ainsi  que  l'interprétation  des  mots  étrangers  difficiles,  qui  se  ren- 
contrent, du  reste,  en  assez  petit  nombre.  Comme  toutes  les  éditions 
de  M.  Buber,  celle-ci  est  précédée  d'une  introduction  complète  riche- 
ment documentée.  Qu'il  me  soit  permis  de  faire  au  sujet  de  cette 
introduction  les  quelques  remarques  suivantes. 

Dans  le  premier  chapitre  ;p.  7-9),  M.  Buber  traite  du  titre  de  la 
rédaction,  de  la  date  et  de  la  patrie  du  Midrasch  Samuel.  A  signaler 
l'intéressante  indication  où  il  dit  que  Raschi,  qui  est  le  premier 
à  en  parler,   appelle  une    fois    notre   Midrasch   V'iVO  irN   --"o 
'nb  rir:;rb  ny,  d'après  les  premiers  mots  de  ce  recueil,  et  que  partout 
ailleurs  il    l'appelle    bi<n72'::  '72 ,  bxi/rûT  r-rr^^  ou  nso  "«lîni::   m>x 
bvSiTûO.  M.  Weiss  {Dor  Dor  Medorschaw,  III,  277),  sans  citer  un  seul 
exemple  et  sans  pouvoir  invoquer  l'autorité   de  Zuuz,  avait  émis 
l'hypothèse  que  le  Midrasch  Samuel  a  emprunté  bien  des  passages 
au  Talmud  de  Babylone  pbnnr:  )i2  p^^3>^:  ûn?:N73  nnirr).  Cette  hypo- 
thèse est  fausse.  M.  Buber  prouve  par  une  série  d'exemples  que  noire 
Midrasch,  quand  il   est  en  présence    de   deux  versions  diflérentes 
d'une  agada,  l'une  palestinienne  et  l'autre  babylonienne,  donne  tou- 
jours la  préférence  à  la  première.  Il  aurait  encore  pu  citer  comme 
exemple  la  sentence  d'un  amora  babylonien,  que  le  Midrasch  Sa- 
muel (ch.  II,  §  10)  rapporte,  non  comme  elle  se  trouve  dans  le  Tal- 
mud babylonien  (Eroubin,  6i  a),  mais  selon  la  version  du  Jeruschalmi 
(Teroumot,  ch.  i,  40  c).  Il  n'appelle  pas  non  plus  l'Amora  babylo- 
nien N3n-  3-1  nn  «nn,  mais,  à  la  manière  palestinienne,  an  "3  N2N 
N;"irî(voir  Frankel,  introduction  au  Talmud  de  Jérusalem,  jG  b,.  Il 
semble  que  ce  passage  de  jér.  Teroumot  ait  échappé  à  M.  Buber,  car 
p.  ol,  note  39.  il  ne  le  cite  pas,  et  il  ignore  aussi  que  le  passage  V-^ 
^5,3-  ^y  -13^5  bnD^  i^NO  ^70  53  r">"-^'''  QUI  suit  la  sentence  d'Abba 
b.   Houna.  ne  se  rapporte  pas   à    b.    Eroubin,  64  «,   mais  est  em- 
prunté littéralement  a  jer.  Teroumot,  40  rf,  où  -172N  Xr.^^  n'est  qu'une 
abréviation  erronée  de  r^'2ï<  V^^-  D'après  cela,  il  faut  aussi  corriger 
la  remarque  de  M.  Buber  dans  l'Introduction,  p.  3,  dernière  ligne, 
^baaa  an::wX-:blv=:.   M.    Weiss   généralise    le   fait   de    cet  unique 
exemple  où  le  Midrasch  Samuel  désigne  par  l'expression  n"N  Vsn 


3ri4  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

les  écoles  babyloniennes  et  dit  :  «  Le  fait  que  ce  Midrasch  à  plu- 
sieurs reprises...  »  t'na  r:rn  by  in:m22  1'^-i7:n  l^zn  n^-cy^b  t-,7:n-:t. 
Les  sentences  d'Amoraïm  babyloniens  qu'on  rencontre  dans  notre 
Midrasch  n'afTaiblissent  en  rien  son  caractère  purement  palestinien, 
car  ces  sentences  sont  également  empruntées  a  des  sources  pales- 
tiniennes comme  le  montre  l'exemple  de  Rabba  b.  Houna.  Il  faut 
donc  corriger,  dans  ce  sens,  ce  que  M.  Buber  dit  p.  3,  L  10  :  a^T 
bNT«r-'  y-iN  ■':n  nvz'C  cbo  nn  nn  û-«-i3T'n  û-'Nti7:n  n7:uj.  Du  reste, 
cette  correction  est  faite  tacitement  dans  la  liste  des  noms  établie 
par  M.  Buber. 

Zunz  indique  comme  date  probable  de  la  composition  du  Midrasch 
Samuel  le  commencement  du  xi<^  siècle  [Gotlesd.  Voitrage,  p.  270), 
mais  M.  Buber  montre  que  les  arguments  invoqués  par  Zunz  ne  sont 
pas  probants.  De  fait,  notre  Midrasch  a  dû  être  composé  beaucoup 
plus  tôt. 

Dans  le  second  chapitre  de  l'introduction  (p.  9-14),  nous  trouvons 
la  nomenclature  des  sources  auxquelles  l'auteur  du  Midrasch  Sa- 
muel a  puisées.  La  Mekhilta  y  est  représentée  par  deux  exemples. 
Mais,  en  réalité,  aucun  des  deux  n'est  emprunté  directement  à  la 
Mekhilta.  En  eflet,  le  premier  exemple  (ch.  v,  §  8)  contient  une  sen- 
tence de  l'agadiste  R.  Lévi  (rapportée  par  Josua  de  Siknin),  qui  re- 
produit sans  aucun  doute  une  phrase  de  la  Mekhilta.  L'autre 
exemple  (ch.  xviii,  §  1)  rapporte  une  sentence  de  R.  Hanina  qui  dé- 
bute par  un  passage  de  la  Mekhilta.  Du  reste,  pour  prouver  qu'avant 
de  cl  àtier  les  nations,  Dieu  punit  leurs  génies  tutélaires  au  ciel, 
llanina  cite  d'autres  exemples  bibliques  que  la  Mekhilta.  Au  sujet 
de  la  remarque  de  M.  Buber,  note  I,  p.  98,  nous  ferons  observer  que 
dans  Bereschit  rabba,  ch.  xxviii,  ce  n'est  pas  Hanina  mais  Jonathan 
qui,  sur  la  demande  de  Hanina,  explique  Job,  xxxiv,  2.o  (cf.  mon 
Agada  der  falastin.  Amoràer,  I,  83  et  s.)  Parmi  les  exemples  cités 
par  M.  Buber  pour  prouver  que  le  Midrasch  Samuel  a  utilisé  le  Sifré, 
il  en  est  deux  (xiv,  3  et  xix,  3)  qui  ne  sont  pas  directement  em- 
pruntés à  cet  ouvrage,  mais  sont  des  sentences  de  l'agadiste  sus- 
nommé R.  Lévi  (rapportée  par  Josua  de  Siknin),  s'appuyant  sur  des 
passages  du  Sifrè.  Deux  autres  de  ces  exemples  [n,  13,  et  32,  1) 
montrent  par  leur  formule  initiale,  im"'  p  lir":^  "'m  "':n,  qu'ils 
sont  empruntés  au  Midrasch  des  Tannaïm.  Cette  même  formule  ini- 
tiale se  trouve  dans  le  passage  unique  (ch.  vu,  2)  que  M.  Buber  cite 
pour  prouver  que  le  Midrasch  Samuel  a  utilisé  la  Pesikta  rabbati.  La 
source  primitive  de  ce  passage  est  donc  le  Midrasch  des  Tannaïin 
(sur  Deut,,  xxii,  7),  où  la  Pesikta  a  ensuite  puisé. 

Comme  source  de  notre  Midrasch  apparaît  tout  dabord  le  Talmud 
de  Jérusalem,  et,  parmi  les  ouvrages  midraschiques  palestiniens,  on 
trouve  cités  le  plus  fréquemment  Bereschit  rabba  et  Vayikra  rabba; 
en  seconde  ligne,  nous  trouvons  les  Midraschim  des  cinq  Meguillot 
et  l'ancienne  Pesikta  i^di  R.  Ivabana-,  ainsi  que  le  Midrasch  Tan- 
bouma,  dont  il  y  a  quelques  rares  citations.  Cependant,  les  exemples 


BIBLIOGRAPHIE  305 

réunis  par  M.  Buber  pour  indiquer  les  diverses  sources  de  notre 
Midrasch  ont  besoin  d'un  examen  attenlif.  C'est  ainsi,  par  exemple, 
que,  ch.  v,  §  13,  le  dialogue  entre  José  ben  Halafta  et  une  matrone, 
sur  Dieu  considéré  comme  auteur  des  mariages,  doit  servir  à  prouver, 
d'après  M.  Buber,  que  le  Midrasch  Samuel  aurait  utilisé  comme 
sources  quatre  ouvrages  midraschiques  différents,  et  cela,  parce 
que  ces  quatre  ouvrages  rapportent  le  même  dialogue,  savoir  Bc- 
res'hit  rabba  (ch.  lxviii),  Vaijih'j,  rahba  (cli.  viii),  PesiUa,  Il  b 
et  Tanhouma  N^n  "^D  (chez  M.  Bab3r,  p.  14,  n"  17,  il  y  a,  par  erreur, 
N:i:n  "^s].  Or,  précisément  pour  cet  exemple,  il  se  trouve  que,  dans  le 
Midrasch  Samuel,  le  récit  de  cette  anecdote  diffère  en  beaucoup  de 
points  de  détail  de  la  version  des  ouvrages  midrastîhiques  mention- 
nés, de  sorte  qu'aucun  d'eux  ne  peut  être  considéré  comme  la  source 
du  Midrasch  Samuel.  Mais  en  aucun  cas,  M.  Buber  n'avait  le  droit  de 
prouver  par  cet  exemple  l'utilisation  de  quatre  ouvrages  différents. 
De  même,  le  second  exemple,  servant  à  prouver  l'emploi  du  Tan- 
houma pour  l'Exode  (dans  les  éditions  ordinaires)  doit  être  écarté, 
car,  comme  M.  Buber  l'indique  lui-même,  pour  le  ch.  xxiii,  §  2,  c'est 
Koh.  roMa  qui  a  servi  de  source.  Ce  procédé,  suivi  dans  l'introduc- 
tion, et  consistant  à  indiquer  tous  les  ouvrages  qui  rBuferment  un 
pas-age  comme  sources  de  ce  passage  a  été  employé  également  ail- 
leurs par  M,  Buber.  C'est  ainsi,  par  exemple,  qu'il  cite  dans  la  liste 
des  passages  empruntés  au  Talmud  de  Jérusalem,  le  passage  vu,  2, 
qu'il  mentionne  ensuite  comme  unique  emprunt  fait  à  la  Pesikta 
rabbati  (dont  nous  avons  parlé  plus  haut).  Dj  plus,  ce  même  pas- 
sage doit  prouver  que  le  Midrasch  Samuel  a  utilisé  le  TcDihoumi  sur 
Deutéronome.  Ces  observations  suffisent  pour  montrer  comment 
M.  Buber  a  été  amené  à  grossir  indûment  les  listes  du  second  cha- 
pitre de  l'introduction  et  à  ranger  sans  raison  tel  ou  tel  ouvrage 
midraschique  parmi  les  sources  du  Midrasch  de  Samuel. 

M.  Buber  cherche  aussi  à  établir,  par  une  assez  longue  série 
d'exemples,  que  le  Midrasch  Tehillim  a  été  utilisé  par  le  Midrasch 
Samuel.  Mais  un  examen  plus  minutieux  des  treize  exemples 
cités  montre  qu'il  faut  le  rayer  de  la  liste  des  sources  de  notre 
Midrasch.  Le  passage  du  chap.  in,  §  3,  est  emprunté,  comme 
M.  Buber  l'indique  lui-même,  à  jer.  Megiùllci,  lie  Pour  le  passage  de 
9,  2,  à  la  fin,  dont  M.  Buber  croit  voir  la  source  dans  le  Midrasch 
Tehillim,  106,  1,  une  étude  plus  attentive  montre  clairement  que  ce 
passage  est  mentionné  dans  le  Midrasch  Samuel  sous  une  forme 
plus  ancienne  et,  en  tout  cas,  différente.  Il  s'agit  d'une  sentence,  éga- 
lement intéressante  par  son  contenu,  de  l'Amora  palestinien  Eléazar 
(ben  Pedat).  Dans  le  Midrasch  Samuel  elle  est  conçue  dans  les  termes 
suivants  : 

i-i-'TTn  n*i  m  Di;5^  1'^^::)^y  i-!"3pr:  rroT  nn-j'n  7'j  lO"*  !^"~  t^T-s 
n-nai  3>;2t:j  onDm  v^i^"  "^"'"^^   "«u-aibi  i^b:;-i3  LD-'C-DTai  vT'a  ::i'::D7a 

Dans  le  Midr.  Tehillim.,  nous  lisons  : 

T.  XXVI,  n"  5-2.  20 


306  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

ï-iibins  mxbî:  ï-i":;iy5  dts  Tn:  r:N-i  n^rs  p  nîrbN  ■'3-]  ^^n 
ï^:;  yi-27:   -«rn:!  r-;::):-    by    t^-jwX    "rii-^D...  :?nv    T725    t»^ir:   -nab 
rSD'??:  en:-  n-a  i^rs-,  ::rwîb  Kn-r  irr  -cnrr;  (■.')  rrb  c-^^nn  ni7:7b 

.17:^  r;"npn  î-icy  m^bs  r!7:ri  :?-t^  irxi 

Oa  voit  facilement  que  nous  sommes  ici  en  présence  de  deux  ver- 
sions différentes  de  la  même  sentence  agadique,  dont  l'une  se  réfère 
à  Job,  37,  5,  et  l'autre  à  Ps.  136,  4.  Il  n'est  pas  nécessaire  de  prou- 
ver que  la  version  originale  est  celle  qui  a  été  conservée  dans  le  Mi- 
drasch  Samuel.  Cela  est  déjà  démontré  par  le  fait  que  ce  dernier 
appelle  le  mo^'en  dont  Dieu  s'est  servi  pour  avertir  le  dormeur  du 
danger  qui  le  menaçait  le  rr'îTn  mn,  l'esprit  de  trouble  el  de  dé- 
sordre qui  agit  inconsciemment.  Ce^e  idée,  n'étant  plus  familière  à 
l'auteur  de  la  version  postérieure,  est  laissée  de  côté  par  lui,  ce  qui 
rend  son  récit  plus  obscur.  Les  autres  exemples  montrent  aussi 
que  le  Midrasch  Samuel  renferme  une  version  plus  ancienne  de  ces 
passages,  en  tout  cas  différente,  reposant  sur  d'autres  sources,  orales 
ou  écrites,  de  l'Agada .  et  qui  n'est  pas  empruntée  au  Midrasch 
Tehillim.  Ainsi  comparons  W,  1,  avec  Ps.  7,  2  :  Dans  le  Midrasch 
Samuel,  la  controverse  à  propos  de  I  Samuel,.  4,  12,  débute  par  une 
introduction  usitée  dans  les  anciens  ouvrages  midraschiques  :  "'ib  '"i 
l'n-ii  1'\')2''0  "^n"!  ;  suivent  ensuite  les  trois  opinions.  Dans  le  Mi- 
drasch Tehillim,  il  n'y  a  que  ces  dernières,  et  cela  avec  l'omission  de 
parties  essentielles.  Il  serait  trop  long  d'examiner  ainsi  en  détail  les 
autres  exemples.  Comme  preuve  typique  des  variations  de  la  tradi- 
tion au  sujet  de  la  même  expression,  il  faut  signaler  les  différences 
existant  entre  Midrasch  Samuel,  16,  2,  et  Midrasch  Tehillim  94,  3. 
Il  est  certain  que  le  Midrasch  sur  les  Psaumes  n'a  pas  pu  être  uti- 
lisé par  l'auteur  du  Midrasch  Samuel.  Ce  dernier,  au  contraire, 
comme  le  prouve  la  disposition  de  son  contenu,  est  plus  ancien  que 
le  Midrasch  Tehillim. 

Le  troisième  chapitre  de  l'Introduction  (p.  14-26)  donne  une  liste 
alphabétique  des  Tannaim  et  des  Amoraïm  mentionnés  dans  le  Mi- 
drasch Samuel,  dans  le  genre  des  listes  données  par  M.  Buber  pour 
le  Tanhouma  et  le  Midrasch  Tehillim.  Au  sujet  de  la  liste  du  Tan- 
houma,  j'ai  proposé  naguère  des  corrections  dans  la  Monalsschrift 
de  Graelz  cannée  1885,  p.  Sol-5o4).  La  présente  nomenclature  con- 
tient aussi  des  oublis  et  des  erreurs  que  je  vais  passer  en  revue 
en  suivant  l'ordre  alphabétique  des  noms. 

n:i-  21  -i3  N3N  '"I.  Le  'n  devant  le  nom  doit  être  supprimé,  car  dans 
le  passage  en  question  (2, 10)  le  nom  est  écrit,  comme  dans  le  Talmud 
de  Jérusalem,  N:ir;  a-  na  NaN.  Il  s'agit  du  docteur  connu  dans  le 
Talmud  babylonien  sous  le  nom  de  Kabba  (=  R.  Abba},  fils  du  célèbre 
chef  d'école  de  Sora  (voir  au  sujet  du  petit  nombre  d'exemples  de  son 
Agada,  mon  Agaia  der  hahyl.  Amo'der,  p.  63,  note  18).  Dans  le  ^^- 
der  Haddorot,  il  y  a,  par  erreur,  ';"'aTi-'l  p"D,  au  lieu  de  mrTim  p"s; 
M.  Buber  ne  l'a  pas  remarqué  et  cite  le  passage  dans  jér.  Erouàiii,  18c: 


BIBLIOGRAPHIE  307 

'î"';n  na  'j'^niî  'n.  Comme  M.  Buber  lui-même  le  prouve  dans  une 
noie,  "13  est  mis  pour  "i"3  =  im  a":;a.  De  même,  il  faut  corriger  -i3 
en  "^n-i  t^'2  dans  les  articles  r;-'3-i3  "^an  ,NvrT  "^n-i  -12  Nvon  N3  'n 
,  pni:i  '1  'nn  iti"'  'n  ,  rioi""  -12  N;-in  'n  ,  nhwN  nn  vs:i-  '-i  ,  pn^:-'  -^n-i  -13 
■i3"^"'i<  'n  n3  pT'  'n-  Il  est  vrai  que  M.  Buber  rectifie,  en  partie,  ces 
erreurs  dans  ses  notes,  mais  il  n'aurait  pas  dû  accueillir  dans  sa  liste 
des  noms  faux. 

■^-123  -13  •'3i\^î  '-).  Au  lieu  de  "la-^iN,  lire  I3"'\x. 

■'pT'N'-i  IN  ■'pnN  '1.  C'est  une  erreur  fort  étrange  pour  IN  "^tN  'n 
■'T^'^N  'n.  Les  notes  que  M.  Buber  a  consacrées  à  ce  paragraphe  de  sa 
liste  ont  les  noms  exacts. 

"iT^bN'-i.  C'est  l'Amora  Eléazar  ben  Pedat.  Il  faut  donc  effacer  un 
des  passages  cités  (9,  8),  parce  qu'il  s'agit  là  du  Tanna  Eléazar  ben 
Jacob  (voir  Agada  der  Tannaïten.  II,  286). 

ITS^'^bN'l.  A  la  fin  de  l'article,  M.  Buber  renvoie  à  sa  liste  du  Tan- 
houma,  p.  44,  note  23.  Or  là  il  dit  simplement  que  c'est  un  des  der- 
niers Amoraïm.  Un  examen  plus  approfondi  des  quatre  passages  du 
Midrasch  Samuel  cités  dans  l'arlicle  sur  ce  docteur  montre  de  quels 
docteurs  il  s'agit  en  réalité  dans  ces  passages.  Ainsi,  dans  3,  o,  on 
lit  :  {«rrn  n3  ^z>v  'n  D"w3  "it;'vn  'n.  Ici ,  il  s'agit  certainement  de 
^jvh^  '"1  (Eléazar  ben  Pedal),  soit  que  la  conjecture  de  M.  Buber 
(p.  93,  note  8)  soit  exacte,  soit  qu'Eléazar  rapporte,  comme  ailleurs 
aussi,  une  opinion  de  José  ben  Hanina  (v.  Ag.  der  paldst.  Amorâer, 
I,  422).  Dans  5,  2,  ""«U'^i  'm  nTi'"'-N  'i,  on  parle,  sans  aucun  doute, 
du  Tanna  Eliézer  ben  lI^Tkanos.  Dans  24,  8,  -iT^"^bN  'i  2C3  3-1  "Mza, 
il  faut  probablement  lire  "iT;'bx  'i  CC3  inaN'-i.  Abbahou,  le  célèbre 
Amora  de  Césarée,  rapporte  souvent  des  sentences  d'Eléazar  ben 
Pedat.  Dans  le  Talmud  babyl. ,  Alegiiilla,  1 6  a,  c'est,  en  effet,  à  Abbahou 
qu'est  attribuée  l'opinion  en  question  ;  primitivement  elle  apparte- 
nait donc  à  R.  Eléazar.  Dans  29,  1,  n\::3  nî-d  "i3  N3X  '-n  r!"'Di3  'n 
nT::'"<5N  '"1,  il  faut  lire  également  "iTi'bx  'n,  et  il  s'agit  d'Eléazar  ben 
Pedat. 

■'DV  '-I  -13  -iTi'-'bwS  '-1  el  3p3>i  p  -iT::'-'i:wN  'n,  lisez  :  -iT:?bN, 

A  la  lettre  N,  il  manque  l'article  :?"i?:'::  p  -iTy^iS  '"i,  qui  est  nommé 
32,  i.  Voir  au  sujet  de  ce  passage  Agada  der  Tannaiten,  II,  388, 
note  4. 

N2ir!  '-1  ti-c^i  ■'•^33  '-1.  Aux  explications  de  M.  Buber  sur  <8,  t  (p.  99, 
note  S)  je  préfère  la  version  du  passage  parallèle  de  Koh.  Rabba 
sur  7,  16,  rr^-iis  '-1  n"J3  Nîin  'i  (v.  Agada  d.  Tann.,  II,  543),  car  il  n'a 
pas  existé  d'Amora  du  nom  de  Benaya  ou  Baunaya  parmi  les  der- 
niers Amoraïm.  Il  s'agit  plutôt  du  Beuaya  qui  faisait  partie  de  la 
dernière  génération  des  Tannaïles,  et  c'est  en  son  nom  que  l'aga- 
diste  palestinien  Houna  a  rapporté  cette  sentence. 

N:irr  -^s-i.  a  la  fin  de  l'article,  M.  Buber  dit  qu'il  s'agit  de  Houna 
de  Sora,  le  célèbre  disciple  de  Rab  et  de  Samuel.  En  réalité,  dans  la 
plupart  des  exemples  cités,  ce  n'est  pas  de  ce  dernier  qu'il  est  ques- 
tion, mais  de  l'Amora  palestinien  du  iv"  siècle  meulionué  ci-dessus 


308  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

et  qui  s'appliqua  à  rapporter  des  sentences  agadiques  d'auteurs 
anciens. 

Np"'-)T '-1.  Les  mots  'oy  'iîT'I  induisent  en  erreur  ici,  comme  dans 
l'article  :i"~''"i  ba  n;2  ■^7:'■'b^^  'i.  attendu  qu'il  s'agit  d'une  sentence 
du  Tanna  Eliézer,  fils  de  José  le  Galiléen,  rapportée  par  R.  Yohanan 
et,  après  lui,  par  l'Amora  Zerika.  Par  contre,  dans  l'article  sur  "jn:*"'  '"i. 
il  est  dit  avec  raison  ^;r:n  'i  a^*  ~n-'2  j<-i3D  Nr;-  'i  Dans  une  sentence 
rapportée  seulement  dans  Midrasch  Samuel,  2'j,  2,  on  trouve  m'^zu  'i 
Niso  Nr;n  'i  aaa  ncî  -12.  Au  lieu  de  niîs  n^:-  '1,  M.  Buber  veut 
lire  N-i:3  3"i,  mais  en  ce  cas  il  faudrait  dire  "13  n:^zr>  '1  a":;^  wxnsa  ni 
N3D.  Il  est  sans  doute  plus  simple  et  plus  exact  d'identifier  ce  Nr:"  '"i 
N-îDa,  qui  ne  se  retrouve  nulle  pirt  ailleurs,  avec  N"ip  Nr:n  'i,  cir 
le  mot  N"ip  a  lecteur  de  la  Bible  »  est  synonyme  de  N":Da  *  maître 
d'école  ».  Et  de  fait,  Hanina  «  le  lecteur  de  la  Bible  »  était  maître 
d'école  (V.  mon  Açaia  der  pcilasl.  Ainorân\  1,6),  et  comme  il  vécut  dans 
la  première  moitié  du  irr  siècle,  Hanina  ben  Papa  fin  du  ni''  siècle, 
voir  l.  c.,  p.  480   peut  avoir  rapporté  une  tradition  en  son  nom. 

ly.ZTi  'n.  Lire  ";••:"  '-i,  car  il  s'agit  de  Hanina  ben  Hama. 

P',3'j.  L'indication  5X172-  a-j:3  nn-j  (2:5,  3)  est  difficile  à  consi- 
dérer comme  exacte,  le  Talmud  babyl.  ne  parlant  qu'une  fois  d'un 
Amora  du  nom  de  ms::  ai.  Il  me  semble  que  ma'j  provient  de 
mxaa,  qui  se  trouve  quelques  lignes  plus  loin.  Peut-être,  eu  raison 
du  passage  qui  vient  après  et  qui  parle  de  la  mission  de  Yohanan 
auprès  des  savants  babyloniens,  faut-il  corriger  la  première  indica- 
tion ainsi  bN'i':-  a"Ja  niwXa'j  ;n?:x  ";•-"'  l^a-i. 

■'ana  rmr!"^.  M.  Buber  dit  simplement  que  ce  nom  est  identique 
avec  "la-ia  pi"*  de  Kiddoiischin,  21  b.  La  vérité  est  qu'il  s'agit  de  Juda, 
fils  de  Hiyya  (voir  Ag.  d.  pal.  Am.,  I,  51). 

■^OT»  '1.  Gomme  de  nombreux  personnages  portent  ce  nom,  M.  Ba- 
ber  renvoie  ici  à  a.  l'Introluclion  au  Talmud  de  Jérusalem  »  de 
Frankel.  Il  admet  donc  que  les  passages  cités  sous  ce:te  rubrique 
émanent  d'Amoraïm.  Mais,  en  réalité,  dans  cinq  des  neuf  cas  cités 
(2,8;  5,13;  8,  4;  13,  8;  27,  5),  il  s'agit  du  Tanna  José  ben  Halafia. 

Nr-n -la -laT»'-).  Au  lieu  de  rj^aa  -iTi'-^bx'n,  lire  'a  -i7:??n '-),  car 
Eléazar  ben  Pedat  rapportait  au  nom  de  José  ben  Hanina. 

''V?  p  liJ^To-j  'n.  Il  n'y  a  pas  d'auteur  de  ce  nom  y.  Graetz,  Monats- 
Schrift,  1885,  p.  Soi)  ;  la  véritable  leçon  est  celle  que  M.  Buber  (p.  100, 
note  8]  cite  d'après  le  Yalkout  :  '^^'z)  la  yjiri"'  '"i. 

Indiquons  encore  ici  le  contenu  sommaire  des  autres  chapitres  de 
l'introduction  de  M.  Buber.  Le  chap.  iv  (p.  27-28)  contient  la  nomen- 
clature des  expressions  étrangères  dont  il  est  question  dans  le  com- 
mentaire; dans  chap.  v  (p.  28-32)  se  trouve  une  liste  des  auteurs  qui 
ont  utilisé  et  citent  le  Midrasch  Samuel,  depuis  Raschi,  au  xi'^'  siècle, 
jusqu'à  l'auteur  du  Yalkout  Relibéni  (mort  en  1673  ;  riMaa,  p.  3î, 
1.  8,  est  une  faute  pour  :iN"isa);  le  chap.  \i  (33-36)  décrit  le  ms.  de 
Parme,  n<>  o'33,  qui,  outre  le  Midrasch  Samuel,  contient  encore  beau- 
coup d'autres  écrits  de  contenu  divers  ;  le  chap.  vu  (36-37)  décrit  les 


BlBLIOGRAPnili:  300 

deux  précédentes  éditions  du  Midrasch  Samuel  ;  le  chap.  viii  (37-40) 
énumère  les  passages  du  Yalkout  Schimeoni  où  se  trouvent  des  ex- 
traits du  Midrasch  Samuel  parfois  sans  indication  de  source. 

En  dehors  des  services  incomparables  qu'il  a  déjà  rendus  à  la  lit- 
térature midraschique,  M.  Bubcr  s'est  acquis  un  nouveau  titre  à 
notre  reconnaissance  en  publiant,  dans  une  édition  fort  belle,  un 
ouvrage  qui  ne  manque  pas  de  valeur  et  contient  de  nombreuses 
traditions  agadiques  sans  doute  anciennes.  Les  notes  dont  il  a  accom- 
pagné cet  ouvrage  en  rendent  la  lecture  plus  facile  et  plus  instructive. 
Nous  lui  en  exprimons  publiquement  noire  gratitude  et  formons  le 
vœu  qu'il  continue  à  rendre  de  tels  services  à  la  science. 

Budapest,  mars  1893. 

W.  Bâcher. 


CORRESPONDANCE 


RÉPLIQUE  DE  M.  BACHER  A  M.  HIRSCHFELD 

M.  Hirschfeld  a  cru  nécessaire  de  répondre  longuement  [Revue, 
XXV,  260)  aux  remarques  que  j'ai  eu  l'occasion  de  faire  dans 
mon  compte -rendu  de  son  Arabie  Chrestomathy  (ibid.,  151). 
Si  je  réplique,  à  mon  tour,  au  plaidoyer  de  M.  Hirschfeld,  ce  n'est 
certainement  pas  pour  maintenir  à  tout  prix  mes  observations 
et  mes  corrections,  mais  pour  rectifier  toute  une  série  d'erreurs 
qui  se  sont  glissées  dans  sa  réponse  et  faciliter  l'étude  des  divers 
morceaux  qu'il  a  édités  dans  sa  Chrestomathy. 

Je  remercie,  avant  tout,  M,  H.  de  nous  avoir  appris  que  c'est 
faute  de  place  suffisante  qu'il  a  dû  s'abstenir  de  nous  donner  des 
informations  sur  les  sources  de  ses  morceaux  choisis.  Qu'il  me 
permette  pourtant  de  lui  faire  remarquer  que  tous  ceux  qui  veu- 
lent utiliser  son  ouvrage  lui  auraient  su  gré  de  publier  quelques 
pages  de  texte  en  moins,  afin  de  se  réserver  de  la  place  pour  une 
introduction.  M.  H.  dit  aussi  qu'il  a  «  donné  aux  textes  extraits 
des  mss.  du  Eritish  Muséum  les  numéros  et  les  titres  que  ces  mss. 
portent  dans  le  catalogue  officiel  manuscrit.  «  Par  là,  il  veut  sans 
doute  réfuter  les  objections  que  j'ai  faites  au  sujet  du  morceau 
qu'il  a  emprunté  au  n"  2524  du  Br.  M.  et  qu'il  indique  comme  un 
chapitre  du  Sèfcr  Bammizvôt  de  laqub  al-Qirqisâni.  J'avais 
dit,  en  effet  [ilnd.,  155),  que  la  teneur  du  morceau  ne  concorde 
pas  avec  l'indication  de  M.  H.,  mais  est  conforme  à  la  description 
que  M.  Hart^vig  Derenbourg  a  donné  de  ce  ms.  [Rei'ue,  XXIIl, 
284).  M.  H.  s'est  abstenu  de  s'arrêter  à  mes  objections  et  de 
nous  faire  savoir  si  l'erreur  provient  de  sa  part  ou  de  celle  de 
M.  Derenbourg.  Grâce  à  l'obligeance  de  M.  Adolphe  Biichler, 
je  suis  en  mesure  de  pouvoir  affirmer  que  le  ms.  2524  ne 
porte  nullement  le  titre  de  mi£?:rî -idd  de  laqub  Qirqisânî  ;  il 
contient  un  certain  nombre  de  chapitres  relatifs  à  la  dogmatique 


CORRESPONDANCE  311 

et  est  désigné,  avec  raison,  par  M.  Derenbourg,  comme  un  recueil 
de  «  fragments  d'un  ^iha  biïN  SNns  caraïte  ».  Ce  ms.  ne  contient 
plus  que  les  chapitres  suivants,  munis  de  numéros  et  d'épigraphes  : 
chap.  7  (avec  la  fin  du  chap.  6),  10,  11,  12,  13,  14,  15,  16  (c'est  ce 
dernier  chap.,  46  a-  49  h,  qui  a  été  édité  par  M.  Hirschfeld),  17,  18, 
19,  20,  22,  23.  Le  ch.  1  a  cette  épigraphe  caractéristique  :  ^NibN 

N-a'î^bx,  et  le  chap.  17  est  intitulé  :  bmp  )'û  •'b:^  n-ibx  ■'d  'rbx  axabN 
'ÏDNinbJO.  D'après  la  communication  de  M.  Biichler,  le  n°  2525, 
que  M.  Derenbourg  désigne  comme  un  «  abrégé  du  mjt?^  'o  d'Abou 
Yousouf  Iakoub  al-Kirkisànî  »  contient,  en  réalité,  un  exposé 
des  commandements  rattachés  au  Décalogue,  mais  ne  fournit 
aucun  indice  qui  permette  d'en  attribuer  la  paternité  à  Kirki- 
sânî.  Il  semble  donc  que  ce  que  M.  Dsrenbourg  en  dit  n'a  que  la 
valeur  d'une  hypothèse.  Comme  on  attribue  à  Kirkisânî  (voir 
Pinsker,  Likkoutè  Kadmoniyot,  p.  192  et  84,  et  Fûrst,  Gesch.  des 
Karàerthums,  II,  112)  un  livre  de  dogmatique  ('j-'nbN  b-i^rx)  et  un 
livre  de  préceptes  (m^i^r;  "ii:o),  le  contenu  du  ms.  2524  peut,  à  la 
rigueur,  être  considéré  comme  son  œuvre,  mais  en  aucun  cas 
M.  H.  n'a  le  droit  d'appeler  ce  ms.  m::?:-  nsD,  car  il  ne  contient 
évidemment  que  des  chapitres  d'une  dogmatique. 

M.  H.  dit  à  propos  de  mes  corrections  :  «  Plus  de  deux  tiers  des 
corrections  qu'il  propose  ne  sont  pas  justifiées.  Il  y  a,  d'abord, 
toute  une  catégorie  de  fautes  d'impression  relevées  par  M.  B.. . 
Ce  sont  les  lettres  avec  points  diacritiques.  »  J'avais  fait  observer, 
moi-même,  à  la  fin  de  mon  compte  rendu,  que  dans  la  liste  des 
corrections  j'avais  «  noté  même  de  simples  fautes  dimpression.  » 
Je  dois  pourtant  ajouter  que  M.  H.,  qui  déclare  non  justifiées  «  les 
deux  tiers  »  de  mes  corrections,  se  trompe  dans  sa  statistique. 
Sur  90  corrections,  environ,  que  j'ai  indiquées,  il  en  accepte  lui- 
même  une  bonne  moitié  (près  de  50),  puisqu'il  n'en  dit  rien,  et 
dans  ce  nombre  il  se  trouve  tout  au  plus  dix  fautes  d'impression 
produites  par  les  points  diacritiques.  Reste  près  de  40  de  mes  obser- 
vations auxquelles  M.  H.  a  répondu.  Mais  j'ai  le  regret  de  cons- 
tater que  M.  H.  n'est  pas  très  heureux  dans  ses  réfutations,  car  il 
s'est  exposé  à  encourir  le  reproche  de  n'avoir  pas  compris  divers 
passages  des  textes  qu"il  a  édités.  Comme  il  conteste  le  bien-fondé 
de  mes  observations,  je  me  vois  forcé  de  les  justifier. 

D'après  M.  H.,  «  b\xnoNbi<  est  très  rare,  mais  non  incorrect. . . 
b\s-iof<  bN,  proposé  par  M.  B.,  n'a  guère  de  sens  ».  Je  rappellerai 
à  M.  H.  que  Saadia  traduit  toujours  b^Tw-^  n-'n  et  np:?"  r"»a  par  bx 
b-iN-iSN  et  aipy  bx  (voir  sa  traduction  d'Isaïe  éditée  par  M.  J.  De- 
renbourg, 2,  6  ;  5,  7;  10,  20;  29,  22;  40,  3;  48,  1).  Du  reste,  le 


312  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

passage  de  l'original  hébreu  de  Meguillat  Anlioclms  correspon- 
dant au  passage  en  question  du  morceau  arabe  de  la  Chrestoma- 
thie  (p.  5,  1.  21)  a  :  rxTw^  rfs.  Et  de  fait,  la  vraie  traduction 
arabe  du  mot  n-'n,  dans  le  sens  de  «  famille,  descendants  »,  est  bx 
âl).  —  «  1,  22,  1^2  est  bien.  »  Voici  le  passage  entier  :  û-irr'  Nbi 
rr^ti  "iNS  IN  N72  ï-î-irr  :?pT  -;:  "iX  zb?  li*  xbwS  -aVx.  Il  n'est  défendu 
d'employer  le  blé  x>3ur  du  pain  azyme  que  si  Von  sait  que 
de  l'eau  est  tombée  dessus  oit  qu'il  a  été  dans  Veau.  Je  ne  sais 
vraiment  pas  quel  sens  peut  donner  la  leçon  "ji^n  maintenue  par 
M.  H.  —  Je  suis  d'accord  avec  M.  H.  quand,  à  propos  de  15,  15, 
et  d'autres  passages,  il  dit  que  dans  l'arabe  vulgaire,  le  suffixe  in 
est  séparé  du  mot  auquel  il  appartient,  car  moi  aussi  j'ai  consi- 
déré ce  suffixe  comme  provenant  de  la  nounnation.  M.  H.  a  donc 
eu  raison  de  séparer  "(N  du  mot  précédent,  si  tous  les  ms.  l'écrivent 
de  cette  façon.  M.  H.  ajoute  :  «  Quant  à  l'exemple  17,  20,  l^ri 
IX  risN-^ii:  Th  —  que  M.  B.  a  bien  voulu  lire  inp^n-^':;,  je  ne  sais 
pas  pourquoi  —  il  n'est  que  nominatif.  »  C'est  là  une  erreur;  en 
réalité,  l^rs^^iï:  est  à  l'accusatif,  conformément  au  principe  suivi 
par  l'arabe  vulgaire  et  aussi  par  les  écrivains  juifs,  qui  mettent  le 
sujet  à  l'accusatif  quand  il  suit  "jn^.  Ainsi,  N'?in  "iNn,  il  y  avait  un 
homme.  Ct\  Vollers,  dans  la  Zlschr.  der  deulschen  morg.  Gesell- 
schafl,  t.  XLI  (188*),  p.  388.  —  «  15,  21  et  26  nr-^nr-::,  ce  mot 
ne  peut  pas  être  corrigé,  parce  qu'il  est  ainsi  écrit  deux  fois  dans 
le  ms.,  qui  est  unique.  »  Elle  est  bien  singulière,  cette  règle  de 
critique  qui  consiste  à  écrire  un  mot  avec  une  orthographe  vi- 
cieuse, ne  donnant  aucun  sens,  sous  prétexte  qu'aucun  ms.  n'in- 
dique l'ortliographe  correcte  de  ce  mot.  Du  moins,  M.  H.  semble- 
t-il  reconnaître  que  ce  mot,  que,  par  suite  d'un  petit  changement, 
je  lis  ninr^"»:;  —  c^ip",  ne  signifie  pas  «  doute  »,  comme  l'indique 
son  glossaire,  mais  «  vieillesse  ».  Il  aurait  donc  dû  accepter  ma 
correction  avec  empressement.  A  propos  d'autres  corrections 
encore  que  j'ai  proposées  et  dont  M.  H.  semble  avoir  reconnu  la 
justesse  (17,  20;  19,  8,  et  passim),  il  dit  qu'il  n'a  pas  changé  l'or- 
thographe vicieuse  du  mot,  parce  qu'il  se  trouve  ainsi  écrit  dans 
le  ms.;  mais  il  aurait  au  moins  dû  rectifier  ces  mots  dans  ses  notes 
de  la  fin  ou  dans  son  glossaire.  —  A  33,  6,  j'ai  proposé  d'ajouter  un 
mot.  M.  H.  dit  :  «  Il  n'y  a  rien  à  mettre  avant  T:zt:  \y.  »  "Voici 
le  pa.>sage  :  nrpri:  r;:'wN  yjz'C  l-,zzz  ^r  pnVwX  nr  b'çr\  Y-^"--  En 
ajoutant  '^np"',  ce  passage  aurait  un  sens  :  Peut-être,  diras-tu  :  ne 
vois-tu  pas  que  Dieu  dit  de  lui-môme  (Exode,  xxii,  22)  :  «  J'en- 
tendrai ses  cris'!  »  —  A  54,  9,  si  l'on  ne  veut  pas  ajouter  rxDPwSr, 
il  faut,  du  moins,  mettre  ce  mot  à  la  place  de  s'NrrNS.  —  55,  15, 
il  faut  ajouter  r::r  (et  non  pas  n::*,  comme  je  l'ai  écrit  par  erreur), 


CORRESPONDANCli;  313 

parce  b\^{pT  n-':;?:  est  la  traduction  de  -i7:wN'i  r,zy.  —  61,  25,  Moïse 
ibn  Ezra  dit  :  rn-^LS  Y-  ^"^^  î<^  "^^'û  ï^Tv^n  yj2i  û^t:jm  "[.s  ^o:>n.  J'ai 
corrigé  î-î^-cJwX  ^'îrà  en  t:;lS  yizi,  parce  que  cette  rectification  seule 
donne  un  sens  aux  paroles  de  Moïse  ibn  Ezra  :  «  Il  est  possible 
que  û^^^N  soit  le   pluriel  de  nc.x,  forme  masculine  de  nn-CcX.  « 
Conformément  à  l'habitude  des  anciens  exégètes,  Moïse  ibn  Ezra, 
au  lieu  de  mentionner  simplement  le  mot  n-iCN,  cite  un  passage 
(Deutér.,  xvi,  21)  où  se  trouve  ce  mot.  M.  H.  ne  reconnaît  pas 
que  -i::n72  est  à  l'état  construit  avec  . .  .ran  ^b  ;  c'est  pourquoi  il  a 
mal  compris  ce  passage  et  rejeté  ma  rectification.  —  «  76,  5,  et 
94,  13,  je  maintiens  ûNp\  comme  dans  le  ms.  »  Et  pourtant  ces 
deux  passages  ne   se  comprennent    qu'avec   CNpr  L'auteur  dit 
qu'il  n'expose  qu'une  partie  des  arguments,  et  que,  par  analogie 
(OwS-^p),  on  peut  deviner  les  autres  :  Nti  ■'pwN3  cxp-i  n73  ...-iDiJî  -^s^b 
îT^b3?  N?-!;x]  r-n^j'-^a  ûb  et  :  ■'pN^bx  c^p^  a-^^-j  n^.  Cf  la  formule  si 
fréquente  :  n-'by  ûpi.  —  «  81,  8,  il  faut  laisser  bNn.  »  J'ai  corrigé 
en  '^n  (hall)  parce  que,  d'après  le  sens,  ce  mot  ne  peut  être  que 
l'infinitif  de  la  1'°  forme  de  la  racine  bn,  avec  la  signification  de 
a  délier,  pei mettre  »,  en  hébreu  n\n-  ;  b.sn,  «  état  »,  est  impos- 
sible. —  Je  suppose  qu'à  81,  entre  les  lignes  16  et  17,  il  y  a  une 
lacune,  parce  que  le  texte  annonce  trois  espèces  (•'i^rT:  r:ni<bh) 
de  r;it7:i:j,  et  qu'il  n'indique  pas  toutes  les  trois  (cf  1. 18  ■'2:-;:bN  ain 
inbxnbkN).  Le  premier  'i3:>n  de  1.  17,   qui  est   suivi  do  l'explica- 
tion relative  à  l'impureté  produite  «  par  le  contact,   le  trans- 
port ou  le  fait  de  se  trouver  sous  le  même  toit  »,  ne  peut  nul- 
lement se  rapporter  au  dernier   mot  de  la  ligne  16,  n7:r:ir,):bx, 
qui  désigne  la  deuxième  catégorie  de  nwS72ro  —  «  81,  19,  Çm-i  est 
bien  (t  est  mater  leclionis)  ;  cf.  Glossaire  (à  corriger  dans  Al- 
Khazari,  p.  196,  1.  9)  ».  M.  II.  a  tort  de  vouloir  remplacer  la  leçon 
correcte  de  son  édition  du  KJiazari,  d'où  ce  morceau  est  extrait, 
par  la  variante  incorrecte  quMl  donne  ici,  car  ce  mot  ne  dérive 
pas  de  bn»  mais  de  bnx,  et  est  le  passif  de  la  2"  forme  (you'ahhalou) 
ou  de  la  4"  forme.  Les  deux  formes  signifient  «  rendre  ou  croire 
quelqu'un  digne  de...  »,  avec  la  préposition  b  devant  le  complé- 
ment. Ainsi,  nbb  bm^  n?^  veut  dire  :  «  ce  qui  est  déclaré  digne  de 
Dieu,  ce  qui  est  consacré  à  Dieu.  »  Ibn  Tibbon  traduit  le  passage 
en  question  du  Khazari  :  û-^nb^b  •vii'iipjj  Nina  T\)2.  —  «  88,  12 
■«biNbN  est  impossible,  peut-être  'Vîn.  »  M.  II.  parait  n'avoir  pas 
compris  ce  passage,  ni,  par  conséquent,  ma  rectification.  Voici  le 
passage  en  entier,  qui  est  l'explication  d'Exode,  xxiir,  5  :  ylb^ 
rii:*Nott  i")Db  ^1yb>!^.^  p^^itbN  ûn?:^  -^ïy.jb.sT  inrbwX  in  ^=7bN   ']N:r:;3 
^bisbN  '^•^^■û  172  nT^ns  p">ns:bN .  L'auteur   veut  dire  que  la  Tora, 


314  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

en   nous   ordonnant    d'aider   à    relever  un  animal   succombant 
sous  sa  charge,  ne  parle  que   de  l'animal  appartenant  à  notre 
ennemi,  parce  qu'on  sait  que  le  même  précepte  s'applique  à  l'ani- 
mal de  notre  ami  «  par  voie  de  raisonnement  a  fortiori  ».  Les 
mots  entre  guillemets  sont  la  traduction  de  -^b-N^N  pnu  Itt,  ex- 
pression arabe  qui  répond  à  l'hébreu  ■;::•::  bs  "yniz  ou  bp  yniz 
T:^m.  Le  terme  "^biN  (aulâ)  sert,  en  quelque  sorte,  d'introduction 
aux  raisonnements  de  ce  genre;  c'est  dans  ce  sens  qu'il  est  em- 
ployé dans  ce  morceau  même,  à  la  ligne  L5  (-^biN  nriDb).  En  ponc- 
tuant d'abord  -^'^ibN  et  ensuite  -«bibN,  M.  H.  donne  à  la  phrase  un 
sens  que  je  ne  saisis  pas.  —  A.  92,  14,  il  y  a  frrjsbtî  y-rn  in  iDn- 
En  changeant  "j^s  en  1^%  on  a  ce  sens  :  On  raconta  cl" un  prêtre .  Je 
ne  comprends  pas  pourquoi  M.  H.  dit  que  «  tout  ce  passage  est 
douteux  et  probablement  altéré  ».  —97,  8,  je  regrette  que  M.  H.  ne 
veuille  pas  accepter  ma  correction,  pourtant  bien  simple  et  bien 
évidente,  de  ûnnxT  en  nn"iî<T.  Ses  objections  n'atfaiblissent  nulle- 
ment la   valeur  de  mes  observations  concernant  la  traduction 
qu'il  donne  des  mots  î2inK  et  û",2n  ;  car,  en  traduisant  ces  mots 
par  «  most  sacred  »  et  .«  suprême  »,  il  ne  donne  pas  de  sens  sa- 
tisfaisant  à   la  phrase.  Je  maintiens  donc  le  changement    que 
j'ai  proposé.  —  99,  9,  les  mots  -,r:N"iN'bïî  yr:J  is    iTcbc^   ^b   li* 
•'!^Ni;bNT  ne  se  comprennent  que  lorsque  le  deuxième  "jn  est  cor- 
rigé en  \y  :  Qu'ils  ne  soient  pas  exempts  d'observer  tous  les 
coûimandernents  et  toutes  les  défenses,  car  le  verbe  ûbo  doit  être 
suivi  de  •;:'.  —  104,  3,  j'ai  changé  "làxT  en  i-iiiNi,  parce  que  ce 
verbe  (4^  forme  de  ^-,aj  se  rattache  à  -r.Si:  de  p.  103,  1.  24  (-ncî 
•jsbN  r-r-  •'^y  nbs  -isDb.s  T-ih.si  . . .  -iDCbx,  il  s'agit  de  l'interpréta- 
tion allégorique  de  YEcclésiaste).  A  cette  correction  si  simple  et  si 
nécessaire,  M.  H.  objecte  que  «  dans  na^sT,  n  est  mater  lectio- 
nis  «.  Je  ne  comprends  vraiment  pas  la  remarque  de  M.  H.  Il  me 
semble  évident  que  le  ^  est  la  conjonction  et  que  le  wS  est  la  lettre 
caractéristique  de  la  4''  forme.  M.  H.  veut-il  peut-être  lire  wa- 
djarà  et  considérer  le  verbe  comme  étant  à  la  l-""  forme  '?  Mais 
ce  verbe  a  comme  sujet  les  exégètes  nommés  p.  103,  1.  23  (ûip).  — 
A  105,  8,  pour  traduire  lï-ircr  -i33  ^-sL'ïî  pn  (Eccl.,  ii,  12),  le  texte 
arabe  dit  :  mr:in  itib^'D  ip  ^•:;''  Nb  -^bx.  J'ai  corrigé  -^bx  en  ■'Vdn 
(=  -îUîwX)  ;  on  trouve  de  même,  à  la  ligne  23  :  Nb  "^nbM  ^btt'?N  ''zy^ 
r:pb=  r::N  t::.  M.  II.  dit  :  «  lire  yc  Nb  ».  Il  paraît  donc  reconnaître 
l'exactitude  de  ma  correction,  mais  il  a  tort  de  changer  Y-"'  Nb  (là 
youschakkou)  ;  tout  au  plus  faut-il  ajouter  r;:N  devant  ^p.  —  106, 
16.  On  ne  comprend  les  mots  n^j^np  b:?à^  iwS  Dby>D  et,  1.  18,  ûb 
Tiii'^'p  bi'i»'^  IN  ûb:>\  qu'en  corrigeant  ix  en  i^n  «  où  »  :  où  il  place 
son  pied.  M.  IL  persiste  à  laisser  1î<.  —  110,  1.  Comme  un   cb  n.x 


CORRESPONDANCE  315 

p^-is  ne  se  comprend  pas,  j'ai  changé  ûb  en  o>b  et  un  en  un,  parce 
que  un  c^b  est  d'un  usage  fréquent  chez  les  auteurs  philoso- 
phiques et  est  rendu  en  hébreu  par  ûo  V'"*-  Le  sens  serait  :  puis- 
qiCil  n'y  a  pas  de  secte  qui  ait  une  autre  opinion.  M.  H.,  renonçant 
ici  à  son  principe  de  ne  rien  changer  au  ms.,  dit  :  «  probablement 
on"»  »;  mais  cette  correction  ne  donne  pas  de  sens  satisfaisant.  — 

117,  23.  Dans  riiriNïïXDbNT  ^nb  bn  nanN  N73,  j'ai  corrigé  inb  ba 
en  nnbb.sn,  ce  qui  signifie  alors  :  ce  qui  est  établi  par  la  tradition 
et  le  témoignage  des  yeux.  M.  H.  dit  :  «  nnb  ba  est  correct  », 
mais  il  n'indique  pas  quel  est,  dans  ce  cas,  le  sens  de  la  phrase.  ~ 

118,  5,  n\^n5T  est  imprimé  sans  point  diacritique  sur  (ou,  d'après 
le  système  de  M.  H.,  sous)  le  5;  j'ai  dit  qu'il  laut  ce  point.  Je  ne 
sais  pas  pourquoi  M.  H.  maintient  5  sans  point.  —  A  121,  8,  mon 
exemplaire  a  maa,  sans  point  sur  le  n  ;  j'ai  remarqué  qu'il  faut 
un  point.  M.  H.  dit  :  «  il  y  a  3=1:23,  la  correction  proposée  est  donc 
inutile.  »  Son  exemplaire  aurait-il  sur  le  n  le  point  qui  manque 
dans  le  mien  ? 

Après  avoir  ainsi  défendu  contre  les  objections  de  M.  H.  la  très 
grande  partie  des  corrections  que  j'ai  proposées,  je  me  plais  à 
reconnaître  qu'il  y  en  a  un  certain  nombre  que  M.  H.  a  eu  raison 
de  déclarer  inutiles  ou  inexactes.  Ce  sont  les  suivantes  :  2,  8  ; 
31,  24;  79,  13;  80,  12;  110,  1  ;  110,  26  ;  114,  21.  Puisse  cet  aveu 
prouver  une  fois  de  plus  à  M.  H.  que  dans  mon  premier  article 
sur  sa  Chrestomathy ,  comme  dans  la  présente  réplique,  je  n'ai  été 
guidé  que  par  l'amour  de  la  vérité. 

W.  Bâcher. 

Budapest. 


CHRONIQUE 


La  dissolution  du  Sanhédrin  en  1807.  —  On  s'était  toujours 
demandé  la  raison  de  la  brusque  dissolution  du  Sanhédrin  réuni  à 
Paris,  par  Kapoléon  I'^'",  en  1807.  Un  passage  des  Souvenirs  du  comte 
Chaptal  en  donne  une  singulière.  «  Dans  le  temps  qu'il  avait  réuni 
les  Juifs  en  Sanhédrin  à  Paris,  j'assistai  un  jour  à  son  dîner  où  il 
causait  gaiment  de  diverses  choses.  Tout  à  coup  entre  le  cardinal 
Fesch,  avec  un  air  très  préoccupé  qui  frappa  l'Empereur.  «  Qu'avez- 
vous  donc?  lui  dit-il.  —  Ce  que  j'ai,  c'est  facile  à  comprendre.  Com- 
ment !  Vous  voulez  doue  la  fin  du  monde  ?  —  Eh  !  pourquoi?  répartit 
l'Empereur.  —  Ignorez-vous,  reprit  le  cardinal,  que  l'Écriture  an- 
nonce la  fin  du  monde  du  moment  que  les  Juifs  seront  reconnus 
comme  corps  de  nation?  —  Tout  autre  eût  ri  de  cette  sortie  du  car- 
dinal. Mais  l'Empereur  changea  de  Ion,  parut  soucieux,  se  leva  de 
table,  passa  dans  son  cabinet  avec  le  cardinal,  en  sortit  une  heure 
après.  Et,  le  surlendemain,  le  Sanhédrin  fut  dissous.  »  Mes  souvenirs 
sur  Napoléon,  par  le  comte  Chaptal,  publiés  par  le  vicomte  A.  Chaptal. 
Paris,  Pion  et  Nourrit,  1893. 

Le  rôle  des  Juifs  dans  la  propagation  des  contes.  —  Celait, 
depuis  l'apparition  du  Pantchatantra  de  Benfey,  un  dogme  univer- 
sellement admis  que  tous  les  contes  et  fabliaux  sont  l'œuvre  de 
l'Inde.  Les  savants  s'ingéniaient  à  raconter  la  marche  de  celte  inva- 
sion de  l'Occident  par  l'Orient,  c'était  à  qui  marquerait  avec  le  plus 
de  sûreté  les  étapes  de  celle  migration  des  productions  bouddhiques. 
Les  Juifs  avaienl  aussi  leur  rôle  dans  ce  voyage.  Comme  pour  la 
philosophie,  ils  avaient  été  des  rouliers  littéraires,  des  intermédiaires 
entre  les  musulmans  el  les  chrélicDS.  En  efîet,  le  Pantchatantra, 
source  de  toutes  ces  fictions,  a  été  traduit  du  sanscrit  en  pehlevi,  du 
pehlevi  en  syriaque,  du  syriaque  en  arabe,  de  l'arabe  en  hébreu,  de 
l'hébreu  en  latin.  Ils  étaient  donc  un  anneau  dans  la  chaîue  de  la 
tradition.  Ces  prémisses,  malheureusement,  reposaient  sur  une  affir- 
mation qu'on  avait  négligé  de  contrôler,  à  savoir  que  le  Pantcha- 
tantra, avec  ses  dérivés,  est  positivement  la  souche  des  contes  et 


CHRONIQUE  317 

fabliaux  populaires.  Or,  ces  ouvrages  sont  toujours  restés  enfermés 
dons  les  cercles  lilléraires  ;  jamais  leurs  contes  n'ont  pénétré  dans 
le  peuple  pour  y  vivre  et  durer.  Quant  aux  contes  populaires,  ils 
n'offrent  aucun  indice  qui  permette  de  leur  assigner  une  origine  in- 
dienne ;  ils  sont  pour  la  plupart  universels  et  internationaux.  Telle 
est  la  thèse  que  vient  de  soutenir  et,  à  notre  sens,  de  démontrer 
M.  Joseph  Bédier,  avec  une  rigueur  de  méthode,  un  brio  juvénile  et 
une  science  que  nous  ne  craignons  pas  de  taxer  d'admirables. 
{Les  fabliaux,  études  de  lillérature  populaire  et  dViistoire  littéraire  du 
moyen  âge  ;  98o  fascicule  de  la  Bibliothèque  de  l'École  des  Hautes- 
Éludes,  sciences  philologiques  et  historiques).  Son  ouvrage  est  un 
des  plus  remarquables  qui  aient  vu  le  jour  depuis  celui  de  Benfey. 
Encore  une  idole  de  renversée  !  L'auteur  de  ces  lignes  ne  s'en  plain- 
dra pas,  car  il  s'était  déjà  attaqué  à  celte  superstition  dans  les  éludes 
qu'il  a  consacrées  à  divers  contes  juifs. 

Les  inscriptions  sémitiques  de  Zindjirli.  —  Nous  nous  étions 
trop  pressé  d'affirmer  (lue  la  langue  de  ces  inscriptions  est  hébréo- 
phénicienne.  Une  lecture  plus  attentive  montre  qu'elle  ne  se  distingue 
pas  seulement  par  le  vocabulaire  en  partie  araméen,  mais  encore  par 
certaines  flexions  grammaticales  propres  à  cet  idiome.  Le  problème 
posé  par  celte  découverte  est  donc  des  plus  curieux  au  point  de  vue 
linguistique  :  celte  nouvelle  langue  offre  le  plus  étonnant  mélange 
de  mois  et  de  formes  caractéristiques  de  l'hébreu  et  de  l'araméen.  On 
n'avait  jamais  vu  pareil  éclectisme. 


ADDITIONS  ET  RECTIFICATIONS 


T.  XXV,  p.  44-52.  —  La  préface  de  Yalkoul  Makbiri  a  déjà  été  publie'e 
par  feu  Straschoun,  dans  ses  additions  au  Kiria  Néémiaa  de  Finn  (Vilna, 
18'j0,  p.  33i-335).  L3  ms.  dont  s'est  serv^i  Straschoan  ne  lui  appartenait 
pas,  comme  semble  le  croire  M.  Gaster,  il  faisait  partie  de  la  ricbe  et  pré- 
cieuse coUecliou  de  livres  imprime?  et  manuscrits  de  Josepb  de  Vixsen 
(voir,  sur  cette  bibliothèque,  Zunz,  Zur  Geschichte,  p.  244,  Qi  Kiria  Néémana, 
ibii.).  Malheureusement,  celte  bibliothèque  est  devenue  la  proie  des 
flammes,  ainsi  que  notre  ms.  probablement.  L'ouvrage  de  S.  Finn,  à  cause 
de  sa  rareté',  n'e'lant  pas  à  la  porte'e  de  tous,  il  ne  sera  pas  inutile  de  noter 
ici  les  variantes  que  le  teste  de  Straschoun  offre  avec  le  texte  de  M.  Gaster 
et  de  comple'ter  les  lacunes  que  pre'senle  ce  dernier. 

Texte  de  M.  Gaster.  Texte  de  Straschoun. 

Ligne  4,  t::^  vû;>t 

Ibid.,  irc:  irc"» 

Ligne  5,  ^;::2  ^rsb 

—  8,  V-T  lincnn  (du  verbe  t-Jr:]   ';«''  linonr: 

—  9,  ]T2-  b^bi  Ti'TJob  yen  ^>y',i2  rrb 
Ibid.,  D-'pn  (Sir.  corrige  en  '{■'n-ip!  VP"'-^ 
Ligne  12,  "li'lD  (mieux  à  cause  de  la  rime)  ~y^D 

—  13,    "^-172    3N  ■'-^7:  î<2N 

—  14,   ■'~l?:    3N  "'IN?:    N2X 

—  17,  "^V   :.":':::  "b  ■'b  r7:Tw' 

—  18,  13   nj:-i^23  N:ci^r2 

—  20,  lacune  n"":;'? 

—  21,  lacune  wnTTj 

—  24et25,  'nm  'în"»  't'  "'r>r;ûT  2V.^  zvn  •'r:;-:  2v.s  3"<b.-:n  a\s''20 

—  26,  n^iCT  r;;y::T 

Ibid.^  lacune  "7:^"":    N?    "'ZXT 

Ligne  27,  ^2*^73  ^a 

—  28  et  2d,  lacune    ""D    "«nx   rr^n   -1333    nVi  i.-i"»w;'  ■i-i32b  nVi 

nsn'jrib   -n-sn-b   ï-ra    i""^*    nsT-  r!3.S77:n 
pn    J-T^a  Hr-o  mp-i;\n    -b^îwS"  ■'S  -^Nrrribi 

^"irin?  \-^:ir   m'rzn   -r3-:;n-:  -^pv    ^3» 

—  31,  nm72T  nnT:2i 

—  34,  t:;n'i  n«as 

—  35,  -^fyn  bN":;x  -iTr  n3N'::î< 

Les  deux  premiers  versets  de  la  fin  manquent.  —  /.  Israelsohn. 


Le  gérani, 

Israël  Lévi. 


TABLE  DES   MATIERES 


REVUE. 

ARTICLES  DE  FOND. 

Bachkr  (W.).  Élude  de  lexicographie  talmudique 03 

Gardozo  de  Béthenco'Jrt.  Le  trésor  des  Juifs  Sephardim  {suite).  2*0 

Ei'STEiN  (A.).  L  Le  Yalkout  Schimeoni  et  le  Yalkout  Ha-Makhiri.  7o 

IL  Une  lettre  d'Abraham  Ha-Yakhiui  à  Nalhau  Gazati  ...  209 

Franco.  Les  Juifs  de  l'Empire  ottoman  au  xix«  siècle h\\ 

Kaui'-mann  (David).  I.  La  famille  de  Yehiel  de  Pise 83  et  220 

IL  Trauquillo  Vita  Corcos,  bienfaiteur  de  la  communauté 

de  Garpentras 2G8 

Lambert  (Mayer).  Le  vav  conversif 47 

Lévi  (Israël).  L  Si  les  morts  ont  conscience  de  ce  qui  se  passe 

ici-bas 69 

IL  Les  Juifs  de  Candie  de  1380  à  1i8o 198 

LÉVY  (A.).  Notes  sur  l'histoire  des  Juifs   de  Saxe  (/7?i) 259 

Marmier  (G.).  Recherches  géographiqu  es  sur  la  Palestine 1 

Neumann'.  Inûuence  de  Raschi  et  d'autres  commentateurs  juifs 

sur  les  Postillce  perpetiKB  de  Nicolas  de  Lyre 172 

PoRGÈs.  Les  relations  hébraïques  des  persécutions  des  Juifs 

pendant  la  première  Croisade  {fin) 183 

Reinach  (Tnéodore).  1.  Q,i.ùd  JiUcRo  cum  Verre 3(> 

IL  Inscription  juive  des  environs  de  Constantinople 1ti7 

Sachs  (Senior).  Le  titre  du  livre  des  Macchabées 161 

NOTES  ET  MÉLANGES. 

Bâcher  (W.).   Une  allusion  à  l'histoire   contemporaine  dans 

l'Arouch  de  R.  Nathan 280 

Besredka.  mD-'br!  —  mbD-<n 279 

DKRENBOURa  (Harlwig\  Piuamou,  fils  de  Karil ISo 

Kayserlixg.  Un  chant  nuptial 283 

Lambert  (Mayer).  L  Les  points-voyelles  en  hébreu 274 

IL  Notes  exégéliques 277 


320  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

LÉvi    Israël).  Noies  complémeulaire?  sur  le  repos  sabbatique 

des  âmes  damoées i  31 

Schwab  (Moïse).  Uq  épisode  de  l'iiislolre  des  Juifs  d'Espague.. .     281 

BIBLIOGRAPHIE. 

Bâcher  (W.).  Midrasch  Samuel,  édité  par  Salomoa  Bubsr 302 

LÉVI  (Israël).   I.   Revue  bibliographique,   4°   trimestre   1892   et 

l<=- trimestre  1893 139 

H.  Le  livre  d'Eûoch,  fragmeuts  grecs  découverts  à  Akhmia, 

par  A.  LoDS 1 46 

m.  Revue  bibliographique,  2-  trimestre  189i 283 

IV.  Neue  Beitrœge    zur   semitischea   Sagenkunde,    par 
M.  Grunbaum 298 

Correspondance 139  et  310 

Chronique 132  et  316 

Additions  et  rectifications 160  et  318 


ACTES   ET   CONFERENCES. 

Bloch    Mourice).  L'œuvre  scolaire  des  Juifs  français,  confé- 
rence          xcrri 

Jacques  (Victor).  Types  juifs,  conférence xlix 

Vernes  (Maurice).  Rapport  sur  les  publications  de  la  So- 
ciété pendant  l'année  1892 xxi 

Assemblée  générale  du  28  janvier  1893 i 

Allocation  prononcée  à  l'Assemblée  générale  par  M.  Théo- 
dore Reinagh,  président v 

Pfo:ès-verbaux  des  séances  du  Conseil xlvie  et  cxx 

Liste  des  membres  de  la  Société  des  Études  juives  pendant 

l'année  1 892 lxxxi 


FIN. 


VEaS.MLLES,    IMPRIMERIE   CERF    ET    C'°,    59,    RUE    DUPLESSIS. 


DS 

loi 

t. 26 


Revue  des  études  juiyes; 
historia  judaica 


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