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Full text of "Revue des études juives"

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ÉTUDES    JUIVES 


VERSAILLES  —  IMPRIMERIES  CERF,  59,  RUE  DUPLESSIS 


REVUE 

DES 


ÉTUDES  JUIVES 


PUBLICATIOiN  TRIMESTRIELLE 
DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  ÉTUDES  JUIVES 


TOME  TRENTE-NEUVIÈME 


PARIS 

A    LA  LIBRAIRIE   A.    DURLAGHER 

83  *»'•,  RUE  LAFAYETTE  l\X>  VJ! — ^ 

1899  t*^ 


loi 


LES 

NOUVEAUX  FRAGMENTS  IIÉBRIUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE 

DE  JÉSUS,  FILS  DE  SIRA 


Ceux  qui,  comme  nous,  ont  saiué  avec  joie  la  découverte  des 
premiers  fragments  hébreux  de  l'Ecclésiastique,  ou  Sagesse  de 
Jésus  fils  de  Sira,  attendaient  avec  impatience  l'apparition  des 
nouveaux  morceaux  du  même  ouvrage  retrouvés  par  le  savant 
M.  Schechter.  Leur  attente  est  aujourd'hui  satisfaite*,  et  il  en  est 
qui,  au  premier  moment,  regretteront  d'avoir  vu  leur  vœu  exaucé. 
Il  n'y  eut  qu'un  cri,  lors  de  la  publication  des  ch.  xxxix-xlix  : 
voilà  enfin  l'original  de  cet  écrit  fameux,  voilà  un  livre  de  plus  à 
faire  entrer  dans  la  collection  biblique  !  Ainsi  s'exprimait  le  plus 
illustre  des  sémitisants  contemporains,  M.  Nœldeke.  Les  hébraï- 
sants  ou  simplement  les  amateurs  d'hébreu,  ceux  qui  dès  leur 
tendre  âge  se  sont  nourris  de  la  littérature  juive,  manifestèrent 
quelque  hésitation  —  tel  l'auteur  de  ces  lignes  —  :  la  langue  de  ces 
fragments,  coulante  en  certains  chapitres,  est  tellement  rocail- 
leuse en  d'autres,  si  différente  de  tous  les  spécimens  connus  de  la 
littérature  ancienne,  le  style  en  est  si  gauche,  la  grammaire  si 
excentrique,  le  vocabulaire  si  distant  de  celui  des  plus  récentes 
parties  de  la  Bible,  que  le  doute  était  bien  permis.  Seulement, 
comme  les  simples  impressions  ne  sont  pas  admises  en  science, 
force  fut  bien  de  s'incliner  devant  une  démonstration  qui  parut  in- 
vincible :  de  l'original  hébreu  il  n'existe  que  deux  versions  directes, 
la  grecque  et  la  syriaque;  toutes  les  autres  procèdent  de  celles-ci. 
Or,  l'une  et  l'autre  fourmillent  de  contre-sens,  de  non-sens  ou  de 
faux  sens  qui  s'expliquent  par  le  texte  hébreu  retrouvé  :  n'est-ce 

*  The  Wisdom  of  Ben  Sira.  Portions  of  the  book  Ecclesiasticus  from  hebrew  ma- 
nuscripts  in  the  Cairo  Genizah  collection  presenled  to  the  Uaiversity  ot  Cambridge 
by  the  editors,  by  S.  Schechter  and  G.  Taylor. 

T.  XXXIX,  no  77.  1 


2  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

pas  la  preuve  irréfutable  que  c'est  bien  l'original  ?  Ce  fut  à  cette 
conclusion  qu'aboutirent  indépendamment  les  uns  des  autres,  et 
les  premiers  éditeurs,  MM.  Schechter,  Neubauer  et  Cowiey,  et 
ceux  qui  reprirent  leur  travail,  comme  MM.  Halévy,  Smend, 
Schlatter,  Kahna  et  nous-même,  et  tous  les  savants  sans  excep- 
tion qui  étudièrent  le  texte,  comme  MM.  Nœldeke,  Bâcher,  Fran- 
kel,  Kaufmann,  Taylor,  Blau,  etc.  Aussi  dans  la  collection  des 
Apocryphes  de  Kautzsch  a-t-on  pris  pour  ba^e  de  la  traduction  de 
ces  chapitres  le  texte  hébreu  de  Cambridge  et  d'Oxford. 

Il  y  a  quelques  mois,  M.  Margoliouth  poussa  un  cri  d'alarme  *, 
mais  qui  ne  rencontra  pas  d'écho.  Tout  le  monde  s'est  trompé, 
s'écria-t-il  ;  cet  original  hébreu  est  l'œuvre  d'un  Juif  persan  qui 
a  retraduit  dans  cette  langue  une  traduction  persane  faite  à  l'aide 
de  la  version  grecque  et  de  la  version  syriaque.  Et  c'est  ainsi, 
ajoutait-il,  que  l'unanimité  des  savants  a  commis  une  erreur  de 
date  d'une  dizaine  de  siècles! 

La  démonstration  de  M.  Margoliouth  ressemblait  fort  à  ces  jeux 
d'esprit  auxquels  on  s'amuse,  même  en  Angleterre  :  avec  les 
arguments  dont  il  se  sert,  on  a  prouvé  que  l'œuvre  de  Shakespeare 
est  de  Bacon. 

Et  il  se  trouve  que  les  nouveaux  fragments  —  tout  en  lui 
donnant  tort  —  confirment  eu  partie  sa  thèse.  Il  nous  est  pénible 
d'en  convenir  ;  il  est  particulièrement  douloureux  à  celui  qui  a 
mis  sur  le  titre  de  son  édition  :  texte  original  hébreu  d'avoir 
à  le  déclarer  :  cet  <s  original  »  n'est  [)as  l'original  —  à  moins  de 
supposer  que  les  chapitres  xxxix-xlix  n'ont  pas  le  même  auteur 
que  ceux  qui  les  précèdent  et  les  suivent.  Ce  serait  une  solution 
désespérée  à  laquelle,  pour  l'instant,  nous  croirions  indigne  de 
nous  de  recourir.  Nous  dirons,  dans  la  suite  de  cette  étude,  les 
raisons  de  le  supposer,  mais  aussi  celles  qui  empêchent  de  s'y  ar- 
rêter. En  science  aussi  il  faut  dire  :  crrare  humanum  est,  sedpei^- 
severarc  diabolicum. 

Nous  ne  nous  attarderons  pas  à  rendre  complu  de  l'édition  que 
nous  avons  sous  les  yeux;  nous  ne  dirons  même  pas  aussi  longue- 
ment qu'il  le  faudrait  tout  le  bien  que  nous  pensons  du  travail  de 
MM.  SchechtfT  et  Taylor,  qui,  par  leur  traduction  et  leurs  com- 
mentaires si  nourris,  ont  rendu  un  service  signalé  aux  études 
hébraïques  et  aux  étudiants.  Nous  voulons  aller  au  plus  pressé  et 
montrer  que  nous  nous  trouvons  bel  et  bien  en  présence  d'une 


*  Theori(jin  of  the  «  Original  Hebreio  •  of  Ecclesiasticus.  Cf.  R^vue^i.  XXXVIII, 
p.  306. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉBREUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE  3 

retraduction,  et  non  de  Toriginal.  Puis,  nous  tâcherons  de  d^ter- 
min(^r  la  valeur  du  texte  qui  nous  a  été  ainsi  conservé  par  le 
traducteur,  car  si  notre  hébreu  n'est  pas  l'original,  il  peut  re- 
présenter telle  forme  se  rapprochant  de  l'original  plus  que  les 
deux  versions  connues  jusqu'ici. 

Les  fragments  nouveaux  proviennent  de  deux  manuscrits,  les 
ch.  XXX,  11 — XXXI,  11;  xxxii,  1 —  xxxiii,  3;  xxxv,  9  —  xxxvi,21; 
XXXVII,  27  —  xxxviii,  27;  xlix,  12  — li,  30,  du  môme  ms.  que  les 
feuillets  déjà  édités,  et  les  ch.  m,  6  —  vu,  29;  li,34  — xvi,  26,  d'un 
autre,  différent  à  divers  points  de  vue.  C'est  du  premier,  comme 
il  est  naturel,  que  nous  nous  occuperons  tout  d'abord  ^ 

Quelques  arabismes. 

Ces  nouveaux  fragments  présentent  la  singularité  que  nous 
avons  déjà  relevée ^  dans  les  fragments  édités  par  MM.  Neubauer 
et  Gowley.  Nous  avons  fait  observer,  en  effet,  qu'aux  ch.  xxxix, 
25,  et  XL,  1,  Thébreu  pbn  «  donner  en  partage  »  est  traduit  dans 
les  deux  versions  grecque  et  syriaque  par  «  créer  ».  Tous  les  exé- 
gètes  ont  expliqué  cette  variante  par  l'arabe  phn^  qui  signifie 
«  créer  ».  Mais  comment  se  rendre  compte  de  cette  confusion? 
Ben  Sira  aurait-il  lui-même  employé  le  mot  hébreu  en  lui  donnant 
l'acception  qu'il  a  en  arabe?  Ce  n'est  pas  possible;  la  langue 
hébraïque  ne  manque  pas  de  synonymes  de  s^nn  c<  créer  ».  D'ail- 
leurs, on  retrouverait  des  traces  de  cette  acception  du  verbe  dans 
les  dialectes  rabbinique  et  néo-hébreu.  Donc,  il  est  certain  que,  si 
Ben  Sira  s'est  servi  du  terme  pbn,  c'est  en  lui  conservant  son  sens 
ordinaire  de  «  donner  en  partage  ».  Dans  ce  cas,  il  est  impossible 
de  comprendre  par  quel  miracle  le  petit-fils  de  l'auteur,  vivant  en 
Egypte,  où  l'on  parlait  le  grec,  se  serait  avisé  de  confondre  ce 
mot,  courant  en  hébreu,  avec  un  terme  de  l'arabe  lui  ressemblant, 
alors  que  tout  porte  à  croire  qu'il  ignorait  cette  langue,  et  aussi 
par  quel  miracle  l'auteur  de  la  version  syriaque  aurait  commis 
la  même  méprise  extraordinaire  ;  et  cela  plusieurs  fois  l'un  et 
l'autre.  Il  faut  donc  de  toute  nécessité  admettre  que  ce  verbe 

^  Pour  lâge  de  ce  ms.,  nous  avons  mamlenant  un  point  de  repère  sérieux.  L'écri- 
ture est  de  la  même  famille  et  probablement  de  la  même  école  de  scribes  qu'un  acte 
signé  de  la  main  de  Houschiel  de  Kairouan,  qui  fut  Gaon  à  la  tin  du  x*  siècle. 
M.  Schechter  a  publié  un  fac-similé  {Je/v.  Quart.  Review^  t.  XI,  p.  643)  de  cette 
pièce,  retrouvée  également  dans  la  queniza  du  Caire".  On  remarquera  aussi  que  l'écri- 
ture des  notes  marginales  ressemble  étounumment  à  celle  des  feuillets  ms.  du  Talmud 
de  Jérusalem,  provenant  du  même  endroit  et  édités  par  M.  P.  de  KokowstoU. 

2  Jievue,  t.  XXXVill,  p.  307. 


\  KEVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

hébreu  est  une  traduction  fautive  de  Tarabe  —  et  la  confusion 
était  d'autant  plus  facile  que  le  verbe  prn  convenait  fort  bien  au 
contexte  —  ou  le  résultat  d'une  assimilation  inconsciente  faite 
par  un  Juif  parlant  l'arabe. 

La  remarque  n'avait  pas  manqué  de  nous  embarrasser,  mais 
nous  ne  nous  croyions  pas  autorisé  par  un  seul  exemple  à  heurter 
le  sentiment  universel  des  savants. 

Les  nouveaux  fragments  nous  fournissent  un  troisième  spéci- 
men de  l'emploi  de  ce  verbe  pbn,  là  où  G.  et  S.  portent  «  créer  ». 
Il  n'y  aurait  pas  lieu  de  s'y  arrêter  plus  que  la  première  fois,  si 
dans  le  même  verset  n'apparaissait  pas  une  singularité  de  même 
nature.  Le  distique  (xxxviii,  1)  est  ainsi  conçu  :  n^'nsi  '^:Db  ndi")  ■'3>n 
bN  pbn  inî<  a^. 

Le  mot  ^'S'-\  est  intraduisible,  car  il  ne  répond  à  aucune  forme 
hébraïque  acceptable.  Une  variante  marginale  —  qui  n'est  peut- 
être  qu'une  correction  conjecturale  —  le  remplace  par  n:?"i,  qui  a 
l'avantage  d'être  grammatical,  mais  non  d'être  plus  clair.  Le 
verset  signifierait  : 

«  Pals  le  médeciû  avaut  son  besoin  (d'en  avoir  besoin  '}, 
Car  -  lui  aussi,  Dieu  Ta  fait.  >> 

On  conviendra  que  le  verbe  «  paître  »  ne  fait  pas  trop  bonne 
figure  dans  la  phrase. 
G.  traduit  : 

Tt[JLa  '.arçov   ttocç  Taç  yscta;  aùrou 
xal  yàp  auTÔv   exticcV    g   xùS'.gç. 

«  Honore  le  médecin  pour  le  besoin  (jue  tu  en  as, 
Car  lui  aussi,  le  Seigneur  l'a  créé.  » 

S.  dit: 

•^n^^in  usnbwS  inb  "o^^  ba):  ^b  w^^'nns  «b  t:^  n-^OwS  np-« 

a  Honore  le  médecin  avant  d'en  avoir  besoin. 
Car  lui  aussi,  Dieu  l'a  créé^  » 

Justement  cette  sentence  a  été  conservée  par  le  Talmud.  R.  Eléa- 
zar  (Amora  du  iif  siècle),  qui  cite  souvent  VEœlésiasliqiie,  la 
mentionne  sous  cette  forme  araméenne  : 

^b  ^TJirn  wNb^  ^y  N-«&Nb  "i-^p^s 

«  Hojiore  le  môdecin  avant  d'en  avoir  besoin  *.  » 

*  Ou,  d'après  la  variante  marginale  :  t  Selon  Ion  besoin.  » 

*  «  Car  •  est  à  la  marge. 

'  A  celte  version  correspond  la  ^.lose  marginale. 

*  J.  T'ianit,  GG  d. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  HEBREUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE  o 

Bien  mieux,  le  Midrasch  Tanhouma  [Mihèç,  10)  fait  dire  textuel- 
lement à  H.  Éléazar:  «  Il  est  écrit  dans  le  livre  de  Ben  Sira  : 
Honore. . .  •  » 

Cet  accord  entre  les  différentes  traductions  plaide  en  faveur  du 
sens  de  «  honorer  »  pour  le  premier  mot  ;  le  contexte  l'exige 
également. 

Or,  curieuse  coïncidence  :  ^y^  —  et  sous  la  même  forme  gram- 
maticale —  signifie  en  arabe  honorer^  !  Ici  encore,  il  nous  paraît 
impossible  que  Ben  Sira  se  soit  servi  de  cette  racine  avec  ce  sens 
et  que  tous  les  traducteurs,  sans  se  donner  le  mot,  aient  inter- 
prété avec  la  même  sûreté  ce  terme  inconnu  à  l'hébreu  ^. 

On  comprend  maintenant  plus  facilement  la  quantité  d'ara- 
dismes  qui  se  remarquent  même  dans  les  ch.  xxxix-l. 

Le  dilemme  que  nous  avions  formulé  plus  haut  s'impose  donc 
avec  force  :  notre  texte  hébreu  est  une  traduction  de  l'arabe,  ou 
une  traduction  due  à  un  Juif  parlant  l'arabe.  La  première  hypo- 
thèse ne  peut  aucunement  se  soutenir,  ainsi  qu'on  va  le  voir.  Nous 
allons,  en  effet,  montrer,  par  un  morceau  assez  long,  que  l'hé- 
breu est  une  traduction  d'une  version  syriaque  ;  ce  morceau  est 
celui  qui  termine  l'ouvrage,  li,  13-20. 

l'acrostiche  alphabétique. 

On  sait  que  ce  couplet,  d'après  M.  Bickell,  formait  dans  l'original 
un  acrostiche  alphabétique.  La  version  syriaque  permet  de  le 
retrouver  facilement.  A  cause  de  la  parenté  du  syriaque  avec 
l'hébreu,  S.  a  même  conservé  à  leurs  places  respectives  les  lettres 

n  U5  .p   i:  D  3^  ,.^  b  "^  ..; n.  Dans  l'hébreu  hgure-nt  :  i< 

n  ,^  p  i:  D  3»  .5  73  ,."«  ,n.  L'hébreu  ne  contredit  donc  pas  l'hy- 
pothèse de  M.  Bickell.  Ce  n'est  certainement  pas  par  hasard  que 
précisément  les  initiales  des  douze  dernières  lignes,  par  exemple, 
sont  les  initiales  des  12  dernières  lignes  d'un  acrostiche  alpha- 
bétique. 

Si  notre  texte  représente  l'original,  comment  s'expliquer  les 
exceptions  :   pourquoi   les   lignes  3,  4,  5,  6,  7,  9,  11,  12,  15,21 


*  La  maxime  est  encore  citée  comme  proverbe  et  traduite  en  hébreu  dans  JExode 
Rahba,  21. 

*  Les  éditeurs  signalent  ce  rapprochement,  ou  plutôt  expliquent  l'hébreu  par  cette 
racine  arabe. 

'  On  pourrait  encore  citer  IVinpIoi,  xssi.  2.  du  verbe  T*^^tT  (=  arabe  faraâja; 
mais  l'exemple  est  moins  probant  que  Its  tiuliçt^,  car  la  lociue  existe  auss}  tu 
^raméen. 


0  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

n'ont-elles  pas  l'initiale  qu'on  attendrait?  En  admettant  toutes  les 
altérations  que,  par  profession,  les  copistes  sont  susceptibles  de 
commettre,  comment  imaginer  que  même  le  plus  ignorant  ma- 
nœuvre, ne  découvrant  pas  cette  particularité  qui  devait  lui 
crever  les  yeux,  ait  si  maladroitement  et  comme  à  dessein  dé- 
naturé ou  bouleversé  le  texte  primitif? 

Il  faut  procéder  maintenant  à  la  contre-épreuve  :  les  irrégu- 
larités de  l'acrostiche  s'expliquent-elles  par  l'hypothèse  d'une 
traduction?  Cette  contre-épreuve  va,  croyons-nous,  lever  tous  les 
doutes. 

Prenons  le  verset  28,  qui  devrait  commencer  par  un  'J5  :  il  a  en 
tête  un  "I,  bien  que  le  verset  précédent  ait  déjà  pour  initiale  cette 
lettre.  Il  est  ainsi  conçu  : 

•^n   i2pn  2ïin   C]D5t  ■^nny^n  ^iMzb  "ïy'Jz^  û-in-i 
M.  Taylor  traduit  : 

«  Ecoutez,  vous  nombreux,  mon  enseignement  dans  ma  jeunesse, 
et  vous  acquerrez  par  moi  de,  l'argent  et  de  Tor'.  » 

M.  Taylor  fait  suivre  le  mot  nombreAix  d'un  point  d'interroga- 
tion :  il  a  été  choqué  avec  raison  de  la  singularité  de  ce  vocatif, 
aussi  baroque  en  hébreu  qu'en  français-.  Mais  ce  n'est  pas  seule- 
ment ce  vocatif  qui  déconcerte,  c'est  la  phrase  tout  entière.  De 
quoi  s'agit-il,  en  effet?  L'auteur  vient  de  dire,  si  nous  en  croyons 
l'hébreu  : 

a  Voyez  de  vos  yeux  que  j'ai  été  petit,  que  je  m'y  suis  tenu  (à  la 
sagesse;  et  l'ai  trouvée  »  : 

Il  ajouterait  donc  :  «  Ecoutez  mon  enseignement  dans  ma  jeu- 
nesse, w  Ces  mots  n'auraient  de  sens  que  si  l'on  pouvait  tra- 
duire :  «  Écoutez  l'enseignement  que  j'ai  recueilli  dans  ma  jeu- 
nesse »,  mais  les  règles  de  la  syntaxe  hébraïque  s'opposent  à 
une  telle  interprétation.  Remarquons,  en  outre,  qu'au  lieu  de  : 
«  Vous  acquerrez  par  moi  de  l'or  et  de  l'argent  «,  le  g(^nie  hé- 
braïque réclamerait  plutôt  :  «  Vous  acquerrez  })ar  elle  »  (la 
sagesse). 

Consultons  maintenant  les  versions.  G.  porte  : 

*  Ilear,  ye  many  (?),  my  teaching  in  mv  youth  : 
Aud  ye  shall  gel  silver  and  gold  by  me. 

*  Le  mol  ne  peut  pas  être  le  sujet  du  verbe  au  passé^  car  la  tiu,  comme  le  contexte, 
exige  un  impératif. 

*  11  faut  sans  aucun  doute  "^nb^aj'l,  *  j'y  ai  travaillé  •,  comme  en  S. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  IIKBREUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE  7 

«  Echangez  l'enseignement  contre  une  grande  somme  d'argent, 
Et  vous  acquerrez  par  elle  beaucoup  d'or  '.  » 

On  voit  tout  de  suite  que  le  vocatif  qui  nous  avait  embarrassé 
fait  défaut.  D'autre  part,  quelle  que  soit  la  teneur  authentique  de 
la  fin  dn  premier  hémistiche,  elle  n'offre  aucune  analogie  avec 
celle  de  l'hébreu  :  «  dans  ma  jeunesse  ».  Le  verbe  grec,  enfin,  ne 
correspond  nullement  à  celui  de  l'hébreu.  Bien  certainement  donc, 
ni  G.  n'est  la  traduction,  même  incorrecte,  de  notre  hébreu,  ni 
celui-ci  celle  de  G.  Par  contre,  dans  le  second  hémistiche,  G.  a 
gardé  sans  aucun  doute  le  rell-it  de  l'original  en  mettant  «  par 
elle  »  et  non  «  par  moi  ». 

S.  :  ^n  "("i^pn  N3n"n  N72Noi        m^'T  "id  "«îDbTt  vjfz^ 

«  Écoulez  mon  enseignement,  si  petit  qu'il  soit, 
Et  vous  acquerrez  par  moi  de  l'argent  et  de  l'or.  » 

Cette  fois  la  ressemblance  est  frappante  :  '•ssbT'  i:>^^  est  le 
calque  fidèle  de  i^iTob  "i:>'d^  ;  le  second  hémistiche  est  exactement 
le  même  dans  les  deux  textes;  bien  mieux,  "^n  «  par  moi  »  se  trouve 
également  en  S. 

Seulement  nous  constatons  deux  divergences  :  1°  point  de  pen- 
dant au  vocatif  «  nombreux  »  ;  2°  niJ'T  ^D  «  quoique  petit  »  à  pre- 
mière vue  est  à  cent  lieues  de  «  dans  ma  jeunesse  »,  Tnn^'sa. 

Comment  s'expliquer  à  la  fois  ces  ressemblances  et  ces  diver- 
gences ?  De  la  façon  la  plus  simple  si  nous  prenons  la  peine  de 
comparer  le  verset  hébreu  précédent  à  S.  et  à  G.  Bien  que  nous 
l'ayons  cité  déjà,  nous  le  reproduisons,  corrigé  : 

«  Voyez  de  vos  yeux  que  j'ai  été  petit, 

Que  j'y  ai  travaillé  et  l'ai  trouvée  (la  sagesse).  » 

G.  :  I'Sets  £v  o(pGaX[xoTç  uawv,  ot».  oX''yov  IxoTT-'ada 
xai  sùpov   IjjiauTto  ttoXXyiV  àvaTraucrcv. 

«  Voyez  de  vos  yeux  que  j'ai  peu  travaillé, 

Et  ai  trouvé  par  moi-même  beaucoup  de  repos  (?)  » 

«  Voyez  de  vos  yeux  que  j'y  ai  peu  travaillé, 
E(  l'ai  trouvée  noonàreiisc  'en  grande  quantité).  » 

*  Ou  le  texte  pjrec  est  très  corrompu,  ou  le  traducteur  s'est  complètement  mépris 
sur  le  sens  do  l'hébreu  ;  il  faut  peut-être  lire  :  xal  ttoXùv  àp^upiov  xctl  ttoXùv  xp'JfJÔv... 


8  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

La  ressemblance  des  deux  versions,  qui  sont  indépendantes,  té- 
moin le  mot  àvaTiaucv,  étrange  en  G.  et  absent  en  S.,  atteste  que 
tel  était  bien  l'original,  qu'il  est  facile  de  reconstituer  :  ûD">r3>n  iwsn 

La  fidélité  des  deux  versions  est  confirmée  par  le  verset  16,  qui 
en  est  une  sorte  de  doublet  : 

G.  I  éxÀ'.va  oÀiyov  to    où;  [xou  y,y.\   £û£;àuiY,v, 
xal  ttoXÀTiV  eûçGv  £[j,auTco  Traioeîav. 

«  J'ai  prêté  2^^  peu  l'oreille  et  l'ai  reçue, 

Et  ai  trouvé  par  moi-même  beaucoup  d'instruction.  » 

S.  n'a  que  la  seconde  partie  du  verset,  pour  des  raisons  que 
nous  dirons  plus  loin  : 

<•  Et  j'ai  trouvé  beaucoup  d'instruction.  » 

L'hébreu  n'a  également  que  ces  mots  : 

n:>'i  tin::?:  i-innm 
c.  Et  j'ai  trouvé  beaucoup  de  science.  » 

Tout  s'éclaire  maintenant  :  le  vocatif  û'^n^  «  nombreux  »,  qui  est 
en  tête  du  verset  28,  provient  du  mot  î^'^^o  qui  termine  le  verset  2*7 
en  S.,  et  voilà  pourquoi  l'acrostiche  est  dérangé.  La  ligne  com- 
mençait par  1^730,  à  supposer  que  S.  ait  conservé  le  mot  hébreu 
de  l'original. 

Qu'on  ne  dise  pas  que  c'est  un  copiste  qui  a  placé,  à  tort,  û'^an 
à  cette  place,  car  ce  mot  ne  peut  en  aucune  façon  se  rattacher  à 
rr^PN^^.  C'est  bel  et  bien  un  contre-sens  grossier. 

Du  même  coup  s'explique  le  terme  incongru  ^-n'-l:'53  «  dans 
ma  jeunesse  »,  qui  nous  avait  choqué,  avec  raison.  C'est  un  nou- 
veau contre-sens,  non  moins  grossier  que  le  précédent  :  le  traduc- 
teur juif  a  pris  nirr  "ir>  «  quoique  petit  »,  pour  n3n  ^ij't  id  «  quand 
j'étais  petit  (jeune)  »,  mots  qu'il  avait  lus  au  ver.<et  10  a.  Et  c'est 
ainsi  que  «  ma  science,  si  petite  qu'elle  soit  »  est  devenue  «  ma 
science  dans  ma  jeunesse».  Autre  contre-sens  de  même  nature  au 
verset  27  :  les  mots  du  syriaque  nb^3>  in  i^yii  «  j'y  ai  peu  tra- 
vaillé »  sont  devenus  :  «fai  été  petit  et  y  ai  travaillé  ». 

Voilà  plus  qu'il  n'en  faut  pour  assurer  avec  certitude  que  ce 
chapitre  est  traduit  du  syriaque. 

Pour  terminer  cet  ordre  d'observations,  considérons  le  ver- 
set 26.  Au  lieu  de  commencer  par  DD^int^iit  «  votre  cou  »,  exigé 

*  Ou  peut-êlre  Tlll  M\nNi:?3"l. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  IIKHI'.KUX  DE  L'ECCLESIASTIQUE  0 

par  l'acrostiche,  il  porte  ds'^'-in'i::i  «  et  votre  cou  ».  Ce  malencon- 
treux vav  a-t-il  été  ajouté  pai*  le  caprice  d'un  copiste  inattentit? 
Aucunement  :  il  est  ju-^tem^^nt  dans  le  syriaque. 

On  demandera  peut-être  par  quel  hasard  l'héhreu,  n'étant 
qu'une  traduction  de  S.,  a  pu  garder  tant  de  vestiges  de  l'acros- 
tiche de  l'original.  C'est  qu'il  ne  pouvait  en  être  différemment. 
Comment,  en  effet,  rendre  autrement  : 

liiniit  que  par  d^ni^ii:,  nsêî  que  par  "^rt^, 

N3"»-ip       —         r:m-)p,  ^t"       —       ^^^ 

la  troisième  personne  fém.  du  futur  que  par  n? 

Nous  ne  parlons  pas  de  ini  =  nn*^,  "^d  r=  "^tdid  ou  \nnns  =  nnnD> 
Ifc^^  =:  iTH,  qui  s'imposaient  au  traducteur.  Mais  partout  où  le 
terme  syriaque  n'avait  pas  de  correspondant  hébreu  commençant 
nécessairement  parla  lettre  requise  par  l'acrostiche,  le  traducteur, 
comme  on  le  devine,  s'est  peu  soucié  d'une  nécessité  qu'il  ignorait. 
C'est  ainsi  qu'au  verset  23,  où  Ton  attendrait  un  d,  il  y  a  i:d  = 
rjD  de  S.  (û^biDD  ''bwN  -iîd).  On  a  cru  que  l'acrostiche  est  fourni  par  le 
mot  d-^bso,  qui  aurait  été  placé  par  erreur  à  la  tin  de  l'hémistiche. 
Mais  il  n'en  est  rien,  car  G.  et  S.  s'accordent  à  mettre  ce  terme  à 
la  fin.  Il  y  avait  très  i)robablement  dans  l'original  :  tto. 

Enfin,  l'hébreu  n'a  même  pas  les  vingt-deux  vers  que  commande 
l'acrostiche  alphabétique.  Ici  encore  cette  circonstance  prouve 
que  loin  d'être  l'original,  ce  n'est  que  la  traduction  du  syriaque, 
car  précisément  cette  version  a  passé  plusieurs  versets,  conservés 
en  G.  La  coïncidence  serait  curieuse  si  elle  ne  se  comprenait  pas 
admirablement. 

Nous  allons  tout  de  suite  avoir  la  preuve  et  de  la  suppression 
de  ces  versets  et  de  la  dépendance  étroite  de  l'hébreu  par  rap- 
port à  S. 

Au  premier  verset  du  couplet  (verset  13)  on  lit  : 

«  J'ai  été  jeune,  je  l'ai  désirée  et  recherchée.  » 

Le  morceau  étant  complètement  séparé  des  chapitres  précé- 
dents, qui  parlent  de  tout  autre  chose,  on  ne  voit  pas  à  quel  mot 
se  rapporte  le  pronom  féminin  :  «je  /'ai  désirée,  je  Tai  recher- 
chée ».  Or,  en  S.  même  particularité  : 

Que  ce  substantif  féminin,  qu'on  devine  aisément,  ait  nécessai- 


10  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

rement  figuré  dans  une  phrase  précédente,  cela  Ta  de  soi;  G.  le 
confirme,  car  il  a  gardé  le  verset,  disparu  en  S.,  où  la  sagesse 
est  nommée  en  loutes  lettres. 

Autre  exemple  de  semblables  omissions  en  S.  et  en  H.  et  dues, 
en  S.,  à  rétourderie  du  traducteur  : 

Le  verset  14  de  H.  est  ainsi  conçu  : 

myi  %iwS2:73  nn^im        '^m-i:?S3   rrbDn  bbens^ 

«  J'ai  fait  des  prières  dans  ma  jeunesse, 
Et  j'ai  trouvé  beaucoup  de  science.  » 

C'est  la  traduction  exacte  de  S.  : 

fi<3Dbv  r-iniD'^UN  "^rion   N:^{  -n3>T  ":r)  !-;mbiS  rr'biti 

Or,  ce  verset  est  formé  de  deux  hémistiches  appartenante  deux 
versets  différents,  à  savoir  14  a  et  16  &  de  G.  :  S.  a  sauté  par  inad- 
vertance deux  distiques.  En  G.,  14  a  est  commandé  par  14&,  et  16  ù 
par  16a,  ce  qui  exclut  l'hypothèse  d'une  addition  en  G. 

14  a    :    'éxt   civ    V£OÇ  ^    (?)   7]E''0l»V  TTESt  a'JTT,;, 

&  :  xai  etoç  SG/XTOu  £X^r|T£(70L)  aùx'/jV. 

«  Dans  ma  jeunesse  j'ai  prié  pour  elle  (pour  l'avoir), 
El  jusqu'à  la  fm  je  la  rechercheiai.  » 

Quant  au  verset  16,  nous  l'avons  déjà  reproduit  plus  haut  et 
nous  avons  montré  que  l'authenticité  en  est  corroborée  par  le 
V.  28  ^ 

D'après  M.  Taylor,  le  premier  hémistiche  de  S.  correspondrait 
à  16a  de  G.;  le  texte  courant  serait  une  corruption  de  r">b:iî<i 
■•jlk^  «  et  j'ai  penché  mon  oreille  ».  Ddus  ce  cas,  notre  démonstra- 
tion serait  plus  éclatante  encore  :  l'hébreu,  non  seulement  serait 
la  traduction  du  syria(jue,  mais  le  calque  d'un  exemplaire  de  ce 
texte,  corrompu  et  défiguré.  Toutefois  la  conjecture  de  M.  Taylor 
me  paraît  peu  convaincante,  elle  n'explique  pas  le  pléonasme 
nmbi£  et  la  disparition  de  "'j'in. 

De  quelque  façon  donc  qu'on  retourne  ce  verset  hébreu,  on 
constate  qu'il  reproduit  servih'ment  S  ,  qui  sûrement  a  altéré 
l'original. 

Si  nous  voulions  entrer  dans  le  détail,  nous  pourrions  apporter 
d'autres  preuves  que  notre  hébreu  n'est  qu'une  traduction  de  S. 

•  On  £v  vèÔTr.Ti  [j.o"j  ;  en  tout  cas,  svavxi  vaoO  doit  être  corrigé  d'après  ce  sens,  cir 
autremeul  on  ne  comprendrait  pas  la  suite. 

*  La  i-')ni[iuiaisoii  Tr.onlre  même  qu'il  faut  probablement  rayer  àvâirauffiv  en  G. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉBREUX  DE  I^ECCLÉSIASTIQUE         11 

Avant  de  passer   à  un  autre  chapitre,  nous  en  produirons  en- 
core une. 
Au  verset  18,  on  lit  : 

((  J'ai  eu  l'intention  de  bien  faire, 

EL  je  ne  changerai  pas  l'ayant  Irouvé.  » 

On  ne  saurait  désirer  de  ressemblance  plus  grande. 

En  G.,  à  "^cini^  Nbi  répondent  les  mots  :  xal  où  [xy,  alcr/uvOa)  «  et 
je  ne  serai  pas  déçu  ».  Le  traducteur  grec  a  donc  lu  ■ci3i<,  qui  se 
confond  très  fréquemment  avec  muiN.  Or,  c'est  précisément  ce 
verbe  qui  serait  de  circonstance  en  hébreu,  plutôt  que  ^zim. 

Est-il  étonnant,  après  tout  cela,  que  notre  morceau  alphabé- 
tique renferme  des  rabbinismes  d'une  époque  récente,  tels  que 
"i^NT  "i>5<  1^3  Il'isnn,  et  ^^'ii'n  n-^n? 

De  ces  rabbinismes  nous  en  rencontrons  en  grand  nombre  dans 
les  chapitres  que  nous  allons  étudier  maintenant  à  un  autre  point 
de  vue. 

VERSETS   TRADUITS  DE   DEUX    FAÇONS    DIFFÉRENTES,    DONT 
UNE    SUREMENT   d'APRÈS    LE    SYRIAQUE. 

Ce  qui  frappe,  au  premier  examen,  dans  les  ch.  xxx  et  suiv., 
c'est,  à  côté  des  rabbinismes  et  surtout  des  aramaïsmes,  le  grand 
nombre  de  doublets,  de  versets  consécutifs  exprimant  de  deux 
façons  différentes  la  même  pensée. 

1.  xxx,  17  : 

172ND  3NS7D  ûbiy  nm3"i  N1Ï5  '^^n'n  t-n^b  :iri2 

17013?  35^570  biNUî  TT^bi  d^y-i  w^^niz  m72b  m:: 

2.  /&.,  20  : 

n3Nn?3T  ^13^5  pnrr^  (lire  o'^no)  û'^T'O  "n^UNis 
nbin3  tzy  ib  ijaw  p 

3.  XXXI,  4  : 

l.ib  iim  Nb  msr  dnt  iniD  nonb  ^:y  bj2y 

4.  /&.,  10: 

n-iNsn  ib  ïi^m  ûib^D  ib  rr^ni 

nnfi^snb  ^b  îr^rrN  i^-^n  ûib^a  m:D-ia  ^^ 

•    niNsnb  ^b  N-^n  r">n  ûbuj-^i  isna  "^a 


12  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

5.  xxxir,  4  : 

6.  7&.,  10  : 

•jn  ri'^:"^  n::"?  "^rebi 

7.  y^.,  14  : 


2rTT  D-^^  b:>  ûmnr) 
^^DDi  ^cD  im  nnT  T^2i:: 

p^3   r!::^''  n-in  "^rnb 
p-13  ni::*^  "inn  "^rob 


8.  7^.,  16  : 

ti^b'D   in"^j:v  m::n  m-^^m 

9.  7&.,  17  : 


npb  np^  bt<  -^iron  'i::-m 


s-nnDnn  na*^  (à  la  marge  D?:n)  ûrn  ^"^n 
(à  la  marge  r;^Dn)  ri7:nD  nc::"^  Nb  cm  •::\y 


10.  Ib.,  22  : 


11.  Ib.,  23: 

ms:^  -i7jt:j  rib^  n':;ny  b:D  ^:d 


r]nri73  ^"i^n  r::23n  bN 
tz-^^'-cn  ^-nn  n:2  2n  bx 

"]'»rD3  -n7:'0  "^-^D-i^  b23 
^•*rc2  -nTS'c;    ^"^c^??:    b^n 


Ces  sortes  de  doublets,  il  est  vrai,  ne  se  retrouvent  plus  dans 
les  chapitres  xxxv  et  suivants.  On  tirera  de  cette  circonstance  des 
conclusions  que  nous  prévoj'onset  que  nous  discuterons  plus  loin. 
Pour  l'instant,  force  nous  est  de  confesser  qu'une  telle  siiif^ularité 
prouve  à  elle  seule  que  notre  texte  n'est  i)oint  l'original.  Ce  qui 
corrobore  cette  observation,  c'est  qu'en  réalitt^,  souvent  les  deux 
leçons  représentent  l'une  un  texte  semblable  à  G.  -,  l'autre  S. 

Ainsi  le  n"  1  a  est  de  tout  point  conforme  à  G.  : 

xpEtacrcov  Oàvaxoç  uttes  ^coTjV  Trixpàv, 

xat  avaTrauij'.;  auovo;  yj  àpp(6ffTr,[xa  'éjxixovov. 

«  Mieux  vaut  la  mort  qu'une  vie  douloureuse, 
EL  le  repos  éternel  qu'une  longue  maladie.  » 


*  On  pourrait  en  citer  encore  daulres,  mais  ces  exemples  suffisent. 
'   Nous  ne  disons  ]»as  qu'elle  est  une  traduction  de  G. 


LES  NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉBREUX  DE  I/ECCLÉSIASTIQUE  13 

1  b,  au  contraire,  est  conforme  à  S  : 

a  II  vaut  mieux  mourir  qu'une  vie  malheureuse, 

Et  descendre  dans  le  scheol  qu'une  soulIVance  persistante.  » 

2  <'^  =  G.  :  to(77r£0  £Ùvouyoç  7r£piXa(x6âv(ov  Tiac-OÉvov  y,y).  CTsvà^wv. 

«  Comme  un  eunuque  qui  embrasse  une  jeune  fille  et  gémit.  » 

2&  =  S.  :  wsnbinn  mb  ^^"i^  \xm^^,iû  ']\^. 

«  Gomme  un  eunuque  qui  couche  près  d'une  vierge.  » 

Inutile  de  poursuivre  la  comparaison,  chacun  la  complétera  à 
son  gré. 

Le  dernier  exemple  que  nous  venons  de  relever  mérite  quelque 
attention,  car  il  nous  livre  la  clé  du  problème.  Plaçons  l'hébreu 
en  regard  du  syriaque  : 

H.  :  ïibnra  û3^  lb  i;t2iio  p 

S.  :  t^nbnra  mb  '^To'n  iî:?3^n72  p 

L'analogie  dans  les  termes  est  curieuse,  en  particulier  celle  de 
"jttNS  et  wSîTD^nXD.  Or,  que  signifie  \12)X2  en  hébreu?  C'est  un  adjectif 
ayant  le  sens  de  «  véritable,  fidèle,  sûr  ».  Que  vient  faire  cet  ad- 
jectif dans  cette  phrase?  M.  Schechter  suppose  qu'il  y  avait  dans 
l'original  p2i<  «  gardien  »,  et  que  le  copiste,  sous  l'influence  du 
motl72ND,  qui  termine  le  verset  17,  l'a  remplacé  par  ce  dernier. 
Mais  l'hypothèse  est  insoutenable,  car,  premièrement  le  contexte 
exige  impérieusement  le  mot  D">nD  «  eunuque  »  ;  y^z^  «  gardien, 
nourricier,  précepteur  »  n'a  aucunement  ce  sens  ;  en  second  lieu, 
s'il  y  avait  eu  \12^  dans  l'original,  G.  et  S.  ne  s'accorderaient  pas 
à  traduire  ce  mot  par  «  eunuque  ».  La  présence  de  l'adjectif  ITOi^i 
ne  peut  donc  s'expliquer  que  d'une  façon  :  le  traducteur  juif  n'a 
pas  compris  le  terme  syriaque  s^STD^riTo',  qui  veut  dire  eunuque, 
comme  dans  I  Rois,  xxii,  9  ;  II  Rois,  ix,  32  ;  Actes, viii,  27,  etc.  ;  il 
l'a  rendu  comme  si  c'était  simplement  l'adjectif   <  fidèle^  ». 

Voilà  la  preuve  indéniable  que  ce  n'est  pas  seulement  dans  le 
morceau  final,  que  nous  avons  étudié,  mais  encore  dans  les  autres 
chapitres,  que  notre  texte  hébreu  procède  au  moins  partiellement 
d'une  traduction  syriaque. 

*  L'arabe  qui  suit  S.  ne  s'y  est  pas  trompé  :  il  rend  le  mot  par  al  'hasiyyott 
•  eunuque  » . 

2  11  y  a  cependant  une  autre  explication  possible  :  Is  traducteur  avait  écrit  '{73N 
et  c'est  un  copiste  qui  a  mis  'J73î<;  :  mais  la  conclusion  serait  la  même  :  "JT^X  vien- 
drait de  S. 


14  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


AUTRES    PREUVES    QUE    L'HÉBREU    EST    LA    TRADUCTION 

DU    SYRIAQUE. 

Reste,  il  est  vrai,  un  moyen  d'écarter  cet  argument  :  ces  dou- 
blets conformes  à  S.  ont  peut-être  été  ajoutés  à  l'original,  qui 
s'accorde  avec  G.;  de  la  marge  où  ils  étaient  consignés  d'abord, 
ils  seront  entrés  ensuite  dans  le  corps  du  texte*.  Mais  cet  expé- 
dient ne  peut  se  défendre,  car  nous  allons  trouver  d'autres  spé- 
cimens de  confusions  analogues  dans  des  versets  qui  ne  sont  pas 
des  doublets. 

A  la  suite  du  verset  sur  lequel  nous  venons  de  nous  arrêter, 
on  lit,  v.  21  : 

«  Ne  livre  pas  ton  âme  au  jugement  ;  » 

puis  23  b  : 

^)^^  :j-iï^  û'^^n  "^D 
«  Car  le  jugement  en  a  tué  beaucoup.  » 

Ces  propositions  sont  assez  obscures  ;  elles  déconcertent  encore 
plus  quand  on  consulte  le  contexte.  L'auteur  développe  cette  idée 
que  la  bonne  humeur  et  la  joie  sont  la  santé  du  corps,  tandis  que 
le  chagrin  vieillit  avant  le  temps  et  abrège  la  vie.  Or,  S.  porte  : 

V.  21  :  ^U)D3  NsnV?  bnn  5<b 

«  Ne  livre  pas  ton  âme  au  chagrin.  » 

V.  23  &  :  NS-ni  Vjp  i^w^sobn  Vj-a 

«  Car  le  chagrin  en  a  tué  beaucoup.  » 

Le  mot  Nj"n  a  été  pris  pour  î^ri^  !  M.  Taylor,  il  est  vrai,  sup- 
pose que  le  texte  portait  im-i,  lequel  se  retrouve  dans  une  va- 
riante du  Phhé  Aboi,  ii.  Le  Malizor  Vitrij,  au  lieu  de  nn-iTa 
n^i^i,  a  inTi  nniTD.  Mais  la  correction  n'est  pas  nécessaire  et  rien 
ne  prouve  qu'au  temps  de  Ben  Sira  le  mot  existât  déjà. 

*  Cela  même  prouverait  qu'il  existait  une  traduction  hébraïque  d'une  version  sy- 
riaque, ou  que  le  copiste  —  sinon  lautcur  —  consultait  un  texte  syriaque. 

»  Môme  emploi  du  mot  l"!,  chap.,  xxxviii,  18. 

*  Qu'on  n'oppose  pas  ce  lait  que  dans  l'écriture  syriaque  le  vav  et  le  yod  ne  se 
ressemblent  pas  autant  qu'en  hébreu,  car  rien  ne  dit  que  le  syriaque  dont  procède  la 
traduction  hébraïque  n'ait  pas  été  é-rit  en  caractères  hébreux,  comme  le  targoum  des 
Proverbes,  qui,  comme  on  le  sait,  est  syriaque^ 


LES  iNOUVEAUX  FRAGMENTS  JIKBliEUX  UE  L'ECCLÉSIASTIQUE  lij 

Evidemment,  si  nous  n'avions  que  cet  exemple  de  la  If^'gèreté  du 
traducteur,  mieux  vaudrait  s'en  tenir  à  cette  conjecture,  si  forcée 
qu'elle  soit.  Mais  il  en  est  bien  d'autres  où  l'influence  du  syriaque 
est  transparente. 

Dans  le  même  chapitre,  on  lit  : 

V.  15  TDtJ  ■^n-'iî^  "nu)  "^"^n 

V.  16  ûis:?  nuî  ^U5i:>  bv  n^Di:'  l'^i^ 

«  Je  désire  plus  la  vie  de  que  l'or.  » 

«  Il  n'y  a  pas  de  richesse  qui  vaille  plus  que  la  richesse  de 
des  os.  » 

Nous  avons  laissé  en  blanc  la  traduction  de  ^"^,  lequel  ne  peut 
signifier  que  «  nombril  »  TiiJ,  ou  «  prince  »  nb.  On  reconnaîtra 
sans  peine  qu'aucun  de  ces  deux  mots  ne  convient  au  texte.  A.  la 
marge  on  voit  n^o  «  chair  »  et  ^-^v  «  richesse  »*  au  verset  15, 
et  ^i^t5  au  verset  16.  Ni  l'un  ni  l'autre  de  ces  substantifs  ne  nous 
tirent  d'embarras  ;  même  ^i^o  «  chair  »,  qui  est  le  moins  étrange, 
ne  saurait  donner  un  sens  raisonnable  :  «  la  richesse  de  la  chair 
des  os  (ou  du  corps)  »  ne  convient  pas  au  texte,  qui  exige  ici  le 
mot  «  santé  ».  C'est  le  mot  qui  se  lit  précisément  en  G.  et  en  S. 
Or,  en  syriaque,  î^n"i^  et  5<n"n"'^u:  signifient  «  santé  »;  ce  sont  les 
deux  termes  dont  se  sert  la  Peschito  dans  ce  passage  -.  Le  traduc- 
teur s'est  contenté  de  l'hébraïser. 

Souvent  même  il  conserve  l'expression  araméenne  presque  sans 
rien  y  modifier,  Ainsi,  xxx,  12,  t]"^D  ==  TÇ'd\  23,  :»^-'d  =  5"^d  ;  xxxi, 
7,  nbpn  =  î^nbpin  ;  8,  \M212  —  i<3n«73  :  xxxii,  11  h,  ^n^n?  tjd  =.  -i::d 
^n^'nb;  19,  bpnnr=  bpnn  ;  xxxviii,  25  tZ,  rnr:^iDT  =  nn^js^r::!,  etc. 

Inutile  de  souligner  l'importance  de  ces  ressemblances  verbales. 

La  cause  est  maintenant  entendue  :  les  nouveaux  fragments 
portent  la  trace  visible  qu'ils  ne  sont  —  au  moins  pour  un  certain 
nombre  de  chapitres  —  qu'une  letraduction  en  hébreu  d'une 
version  syriaque. 

Nous  comprenons  maintenant  les  syriacismes  qui  se  ren- 
contrent dans  les  ch.  xxxix-xlix,  et  dont  nous  avions  trop  vite 
fait  bon  marché.  Ils  méritent  d'être  étudiés. 

Israël  Lévi. 

[A  suivre.) 

*  Nous  parlerons  plus  tard  ife  ces  doubles  gloses  marginales. 

*  Le  traducteur  arabe  ici  encore  a  bieu  compris  S.  :  il  rend  le  mot  par  si^h'/iaiotin 
«  santé  »,  qui,  comme,  eu  syriaque,  signifie  également  validité. 


LE  WMÎ  ATnÉME^'  EN  LIO^'^ECR  D'IIYRCAN 


Le  décret  athénien  en  l'honneur  d'IIyrcan,  que  nous  a  trans- 
mis Josèphe  (Ant.  jiid.,  XIV,  8,  5),  a  plus  occupé  jusqu'à  pré- 
sent les  philologues  classiques  que  les  historiens  du  peuple  juif. 
L'incertitude  de  la  date  de  ce  document  est  sans  doute  la 
cause  de  cette  indifférence.  Je  crois  donc  utile  d'essayer  de  fixer 
les  idées  à  cet  égard  ;  mais,  tout  d'abord,  il  importe  de  restituer 
le  texte  exact  du  décret,  fort  maltraité  par  les  copistes.  Je  ferai 
usage,  à  cet  effet,  des  règles  désormais  bien  connues  auxquelles 
obéissait,  à  l'époque  alexandrine,  la  rédaction  des  décrets  athé- 
niens. 11  y  avait  là  une  sorte  de  protocole,  invariablement  fixé 
dans  son  ordre  et  dans  son  style,  et  dont  les  greffiers  ne  de- 
vaient pas  s'écarter.  Lorsque,  dans  un  document  lapidaire  ou  raa- 
nuïîcrit,  ce  protocole  n'est  pas  observé,  on  est  en  présence  d'une 
faute  du  graveur  ou  du  copiste,  que  la  critique  a  le  droit  et  le  de- 
voir de  rectifier.  Dans  le  cas  particulier  qui  nous  occupe,  nous 
risquons  d'autant  moins  de  nous  «égarer  que  nous  possédons  deux 
décrets  (réunis  sur  une  même  stèle)  de  la  même  année  que  le  dé- 
cret en  faveur  d'IIyrcan  [Corp.  viser,  aitic,  II,  470).  Je  crois 
utile,  avant  d'aller  plus  loin,  de  reproduire  parallèlement  les  pro- 
tocoles (le  ces  deux  derniers  décrets  (1.  1  et  iU  et  suiv.)  dont  les 
petites  lacunes  ont  été  comblées  avec  certitude  *. 

'AyaOr,  TÛ/Y,.    'i']-l  'AyaOoxÀÉO'jç  àp/ovTo;,  kr.\  tt,;  (  A'.avT^oo;  tsitt,;; 

irouTavctaç,  Y|  EuxV?,;  Z£vivo[pou  AlOaX''oT,ç]  £vpau.aàT£U£v,  (  BoT,8fO[JL'.wvoç 

/    nuavov!/uovo; 

TôTcâûi    l-\    o£xa,    TSTasTY,   xai  0£xiTY,    )  TY,;    -p'jTavs-'a;  ÈxxXYjTia    xupi'a 

[ÈV      TÙi        OsaTpoJ    •     Ttuv]     TTSOÉOpcOV     lz£'J/Y,Ol^cV     (      'AtTeXXYjÇ    '  AY,U.O(p(ôvT0Ç 

(     'IJXid6topo;       *J>tXci)v(6ou 

*  Je  respecte  scrupuleuseruenl  l'orlhographe  de  1»  pierre,  qui  est  très  capricieuse 
en  ce  qui  ooueerue  Viola  muet. 


LE  DÉCRET  ATHENIEN  EN  L'HONNEUR  D'HYRCAN  17 

SouvieÙç  sItcsv... 

Je  passe  maintenant  au  décret  de  Josèphe  *  : 

{Iniitidé.) 

'Etti  'AyaOoxXéouç  àû/ovxoç,  [exl  T'r,ç  ...''oo;  OcxàrriÇ  TTOUTavsiaç  (*),  y,'.] 
EùxXf|Ç  (S)evàvooou  (A10aX''oYjç)  (^)   £Yûaau,àT£'j£|v],    Mouv.yiwvoç  (^)  £V0£- 

XûtT'/lt,   [£vB£xàTY|[]  ('*)   TY,Ç    7rOUTaV£''aç,   £XXAYj<7'.àç  Y~^^!-'-^'^"1'î  (^)  £V    TWt    Ôtà- 

Tpcot ,     TÔîiv    7rpo£Opwv     £7r£t]yYjCî<c(Ç)£V  (^)    Aojc-66£Oç   [...ou](")    'Ep/'.ôfjç    xat 

■<[ol>  (^)   (TUaTCpÔEOûOl  '    [£00^£V]  (*]  TCûl  OYjfJLWC.    AtOVUClOÇ  AlOVUdlOU    [déjUÛ- 

tique](*°)  £l7r£v  • 

{Considérants.) 

'E7r£toYj    "Ypxavôç   'AÀ£;àvopou,  koy'.zzeuç   xal  lOvàoyYjt;    tcov   'loiioactov, 

SiaXEXsï    XOtVYjt  T£    TCOl   OYjJXOOt   Xat    cotai  TCOV    TToXlTCOV   èxàaXOJt   £UVOU(;    ojv(**), 

xai  7rà<7Y|t  /pco[X£voç  TCEpi  auToùç  (7:rou8Y|[,  xai  Toùç  TrapaYtvojxÉvouç  'A6*/jvai(i>v 
Yj  xaxà  7Cp£cê£''av  yj  xax  '  totav  Tipo'^affcv  (^-)  Trpbç  aùxbv  vizooéy^eicci  cpiXocppovtoi; 
xai  Tcpo7t£[Jt.7r£i  XYjç  àffcpaXouç  aùxûv  k-KccvôZou  TrpovooujXEvoç  '  è|JLapxupYj67|  (xsv 
xal  7rpôx£pov  ttegi  xoùxwv  ,  AEAOX0AI  ûk  xat  vuv  —  0£oooa'iou(?)  (*^)  xou 
0£ooc6coi»  (?)  SouvtÉcoç  £lr7'r]Y')^(7a[J!-£Vou  xat  TiEpt  xyjç  xàvûpbç  ap£XY,ç  ÛTrofJivYj- 
ffavxoç  xbv  O'îijxov  xal  6'xt  7rpoaîp£(Jtv  £^£t  ttoieTv  7][xaq  o  xi  ttox  àv  ûûvYjxat 
aYaôbv  •  — 

{Dispositif.) 

Ti{JLY[<7at  xbv  àvopa  ypucàii  (7X£cpàvcot  àpi<yx£ta)i  xaxà  xbv  vojiov  (**)  , 
xal  axiiccci  aùxou  Etxbva  /aXxY^v  Iv  X(J5i  x£tx£V£c  xou  Ay,[xou  xal  xaiv  Xa- 
pixojv  ('5),  àv£i7r£Tv  8È  xbv  crvÉcpavov  âv  xwi  ÔECtxpwt  Atovixriotç  (**),  xpaYwi- 
5(îiv  x(J5v  xatvcov  àYO[X£vojv,  xal  IlavaÔYjvacwv  xal  'EXsugivicdv  <[xal]>(*') 
£v  xotç  Y^p-vtxoTç  àYWfftv  • 

l7rt|jt,£XYi6Yivat  0£  xobç  cxpaxYjYOuç  (*^),  S'.ajxÉvovxt  x£  aùxwt  xat  [Bia]cpi>- 
Xaxxovxt  (*'■')  XY,v  Tcpbç  Yjtxaç  £uvotav  £lvat  Tiav  o  xi  av  ÈTrtvoYiCwixEv  £lç  xtjiYjv 
xal  J(âptv  xY^ç  xàvopbç  cjttouByjÇ  xal  QtXoxt[jt.taç,  iva  xouxcdv  Y^vo^-évcov  (*•) 
^atvYjxat  b  ôY|txoç  Yjtxcov  a7:o3£yb[jt,£voç  xoùç  kycL^olx;  xal  xyjç  TrpoffY^xoûffYi; 
a[xotêY|<;   à^twv    xal    l,ri'kixi(j[itiG]i    [tuocvxeç]  xY|(ç)    7i£pl    Yjjxaç    a7rou8Y,(;)  x(b)v 

(coBe)  X£Xt[XY|[X£v(o)v  ('**)• 

£X£ar6ai  B£  xal  TrpsaêsTç  [fp£Tç]  (*^)  1^  aTiàvxcov  'A6Y)vata)V,  oÏTiveç  to 
vpYj<pt(7[ià  x£  aùxàit  xopLtouat  xal  TiapaxaXÉaoïxitv  TTpoaBfiçafjiEvov  xàç  xi(xà; 
TTEtpacôat  xt  7roi£Ïv  àyaObv  yjjxcov  àfil  xy,v  TrbXtv. 

^  Je  place  entre  [  ]  les  lettres  que  je  supplée,  entre  <  >  celles  que  je  supprima, 
entre  (  )  celles  que  je  corrige. 

T.  XXXIX,  N"  77.  2 


18  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Notes  critiques. 

1.  La  mention  de  la  prytanie  (12*  partie  de  l'année,  pendant 
laquelle  chacune  des  douze  tribus  présidait,  à  son  tour,  aux  af- 
faires publiques)  est  indispensable.  —  L'année  d'Agathocle  (ainsi 
que  celle  d'Aristarque  qui  la  précède)  a  sûrement  douze  mois,  car 
dans  le  premier  décret  de  Théodotos,  le  14  Boédroraion  correspond 
au  14"  jour  de  la  prytanie,  dans  le  second,  le  16  Pyanepsion  cor- 
respond au  lô'^jour  de  la  prytanie.  Ces  coïncidences  ne  peuvent 
avoir  lieu  que  dans  une  année  commune;  donc,  dans  notre  décret, 
la  prytanie  doit  avoir  le  même  numéro  d'ordre  que  le  mois  Muny- 
chion,  c'est-à-dire  10  ;  de  là  ma  restitution  osxxtt,;.  Quant  au  nom 
de  la  tribu,  on  ne  peut  le  deviner,  car  c'est  le  sort  qui  désignait 
l'ordre  où  elles  fonctionnaient;  tout  ce  qu'on  peut  affirmer,  c'est 
que  ce  n'était  ni  l'Aiantis  qui  exerça  cette  année  la  troisième  pry- 
tanie (1"  décret  de  ïliéodotos),  ni  la  Cécropis  qui  exerça  la  4« 
(2^  décret),  ni  l'^Egéis,  car  le  président  des  proèdres  est  du  dème 
d'Erchia,  lequel  faisait  partie  de  cette  tribu,  et  il  est  de  règle  que 
la  tribu  prytanisanle  ne  contribue  pas  à  la  formation  du  bureau 
(Aristote,  République  athénienne,  c.  44). 

2.  Josèphe  :  EùxXtiç  Msvàvopo'j  'AXiaouaio;.  La  faute  Mîvavooou  pour 
Zevàvopou  est  vénielle,  mais  il  n'en  est  pas  de  môme  d"AAiaojc7ioç 
pour  A10aXioY,ç  (ce  dernier  nom,  qui  a  péri  dans  l'intitulé  du  pre- 
mier décret  de  Théodotos,  est  conservé  intégralement  dans  le 
second)  ;  l'erreur  se  trouvait  peut-être  déjà  dans  le  document 
d'archives  utilisé  par  la  source  de  Josèphe;  il  est  plus  vraisem- 
blable qu'elle  ait  été  commise  par  un  ancien  —  peut-être  par 
suite  d'une  abréviation  mal  résolue  —  que  par  un  copiste  by- 
zantin. 11  ne  peut  être  question  de  distinguer  les  deux  gref- 
fiers ;  de  nombreux  exemples  prouvent  qu'à  l'époque  alexan- 
drine  le  y^ajAixaTsùç  xarà  TvpuravEiav  —  maigre  son  nom  et  la  formule 
consacrée  TisuTavciaç  y-  £Ypa[j.{jLàT£U£v  b  Scîvy.  —  restait  en  fonctions 
toute  l'année. 

3.  Mouvi/uovos,  orthographe  des  inscriptions  (et  de  la  première 
main  du  ras.  F).  Vulgairt- nient  Mouvu/y.tovo;. 

4.  Rétabli  parDindorf.  On  pourrait  aussi  écrire  5£xxTr,'.,le  2«  dé- 
cret de  Théodotos  prouvant  que,  dans  certains  mois  de  l'année 
d'Agathocle,  la  date  prytanique  était  d'un  jour  en  retard  sur  le 
quantième  mensuel. 

5.  Leçon  de  FAMW.  L  donne  yivoasvY,;,  P  àyojxsvYjÇ  que  préfère  à 
tort  Niese.  Cf.  Aristote,  c.  42,  4  :  xbv  S'udrepov  (èv.ayTov)  kxxXy\c'.x; 
ev  xàit  ôeaTûcoi  Y£vojx£vrjç.  Au  reste,  la  formule  épigraphique  (voir  plus 


LE  DKCREÏ  ATHÉNIEN  EN  L'HONNEUH  D'HYRCAN  i'à 

haut  le  décret  de  Tliéodotos)  est  simplement  £xy.}.Y,(j''a  (x^çf-a)  Iv  hti- 
T^w.  et  il  est  possible  que  le  texte  ait  été  remanié. 

0.  Les  mss.  ont  Ituî'V/j'^'.^sv,  mais  cette  forme  est  à  peu  près  sans 
exemple  dans  les  décrets  (cf.  pourtant  C/A.y  II,  117,  a  3;  Diog. 
Laert.,  VII,  10).  Voir  Droysen,  Hermès,  XVI,  p.  192. 

1.  Le  patronymique  du  président  est  de  règle  depuis  l'an  314/3 
avant  J.-C. 

8.  L'article  n'est  jamais  exprimé. 

9.  Suppléé  par  Bœckli. 

10.  Le  démotique  de  l'auteur  du  décret  ne  manque  jamais  de- 
puis l'an  350. 

11.  Leçon  de  P  (L^tin  :  fîdelis  eooistetis).  FLA.MW  :  s-jvowv. 

12.  Tipocpac'.v  manque  dans  P  et  n'est  pas  indispensable. 

13.  Leçon  de  FLAMW.  Le  ms.  Pet  la  version  latine  ont  A'.ovjff-'ou, 
que  préfère  Niese,  mais  qui  n'est  vraisemblablement  qu'un  écho  du 
liovitaiou  de  l'intitulé.  Dumont  a  proposé  d'identifier  ce  personnage 
avec  (■')z6orjTo:i  A'.oocopo-j  Xlo'jvtc'j;,  auteur  des  deux  décrets  CIA,  II, 
4^0.  La  conjecture  est  séduisante  (car  Szooorjioç  est  un  nom  assez 
rare  *,  et  la  faute  Wsoôcoo&u  pour  A'.oocooou  facile),  mais  n'est  pas 
indispensable.  —  On  ne  s'explique  pas  que  V  «  introducteur  »  de 
la  question  (clcTiYYi'TâîJ.cvoç)  et  l'auteur  du  décret  soient  deux  per- 
sonnaofes  différents  ;  je  ne  connais  pas  d'exemple  identique.  Natu- 
rellement le  cas  est  tout  différent  lorsque  la  question  est  mise  à 
l'ordre  du  jour  par  les  stratèges  (cf.  le  décret  d'Éphèse  ap.  Jos., 
Ant.,X.[V,  ^  2(32  :  Nt>c7.v(op  cîTtsv,  £'.(7Y|YY,r7aa£vcov  T(ov  (7TpaTT,ywv).  L'ex- 
plication la  plus  vraisemblable  est  que  Théodosios  avait,  dans  une 
assemblée  précédente,  saisi  le  peuple  d'une  motion  tendant  à  de- 
mander au  Sénat  un  ■Kooèo6'kvj[ky.  sur  la  question.  Au  retour  de  ce 
TTpoêouXcufi-a,  l'initiateur  de  la  motion  se  trouvant  empêché  de 
venir  à  l'assemblée,  le  projet  de  décret  fut  présenté  par  Dionysios. 
Cf.  le  cas  d'Héraclide  de  Salamine,  CIA.,  IV,  2,  119  b:  la  pre- 
mière motion  a  pour  auteur  Télémachos  d'Acharnés,  le  -^o^jo-j- 
X£u[jt.a  Géphisodote  d'Acharnés,  et  le  décret  définitif  de  nouveau 
Télémachos.  Toutefois  les  deux  cas  ne  sont  pas  exactement  pa- 
rallèles et  dans  notre  décret  il  n'est  pas  question  de  la  SouXtj. 

14.  xaxà  TGV  v6[jLov.  Les  couronnes  d'or  décernées  par  le  peuple 
athénien  ne  pouvaient  dépasser  une  valeur  de  1,000  drachmes 
d'argent,  c'est-à-dire  un  poids  de  50  statères  d'or,  d'après  la  rela- 
tion entre  les  deux  métaux  existant  à  l'époque  alexandrine. 

15.  Ce  sanctuaire  était  souvent  affecté  aux  statues  des  bienfai- 

*  Cependant  il  se  rencontre  à  cette  époque  :  CIA.,  II,  985  (archonte),  BCH., 
XI,  263  (statuaire),  ih.,  XIII,  270  (père  d'un  éphèbe  sous  Héracleidès),  CIA.,  11,470, 
1.  94  (éphèbe). 


20  BEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

leurs  de  la  République  (voir  les  inscriptions  citées  par  Escher, 
art.  Charités  dans  Pauly-Wissowa,  col.  2154).  Il  était  situé  sur 
l'agora,  au  Nord  du  prétendu  Theseion.  Cp.  Homolle.  BCH., 
XV,  367. 

16.  Cette  formule  se  retrouve  dans  le  décret  CIA.^  II,  328; 
c'est  à  tort  qu'on  l'a  attribuée  «  à  l'imagination  de  Fr.  Lenor- 
mant  ».  Toutefois  la  formule  ordinaire  est  A'.gvjgcwv  tûv  Iv  àcTsi 

xaivoTç  xpayoJOoTç. 

n.  Kal  supprimé  par  Niese.  Les  IlToXsaaTa,  souvent  associées  aux 
deux  autres  fêtes  gymniques,  ne  figurent  pas  non  plus  dans  ClA.^ 
470,  1.26. 

18.  On  s'attendrait  à  ce  que  les  mots  £7:'.a£)vr,6Y|va'.  —  c7TsaTr,youc  se 
rattachassent  à  la  proclamation  de  la  couronne,  par  exemple  :  tt,; 

ol  àvayop£u«r£u)ç  tou  dTsoâvo-j  âTr'.a.,  etc.  (cf.  CIA.^  IV,  2,  417  Ô).  Il  m'a 

paru  trop  hardi  de  corriger  le  texte  en  ce  sens. 

19.  PVE  et  Niese  :  cp-jX-ixTovr-.. 

20.  PE  et  Niese  :  yivojxévojv. 

21.  Les  mss.  ont  :  xal    ^YjXojafit   ty,v  TwêoI   Vjixi;  <77:ouÔT|V   tôjv  (V.  :  èx 

Tcov,  Gutschmid  :  ixa^xo;  TwvjvjôTj  xcTtaYijxévwv.  Ce  texte  est  sûrement 
corrompu  ;  je  n'ai  cherché  qu'à  rétablir  le  sens  probable. 

22.  Le  nombre  des  ambassadeurs  paraît  indispensable.  TPEIG 
a  pu  tomber  après  IIPECBEIC. 

Traduction. 

«  Sous  l'archonte  Agalhocle,  pendant  la  dixième  prylanie,  celle  de 

la  tribu ,  ayaut  pour  greffier  fiuclès,  fils  de  Xéuaudros,  du  dème 

d'Aithalé,  le  11  Munychion,  11»^  jour  de  la  prytauie,  rassemblée  étant 
réunie  au  ihéàire,  les  suffrages  furent  recueillis  par  Dorothée,  fils  de 

,  du  dème  d'Erchia,  président  des  proèdres,  et  par  ses  collègues. 

Le  peuple  a  décidé,  Dionysios,  fils  de  Diou3^sios,  du  dème  de ,  a 

proposé  : 

»  Attendu  que  Hyrcan,fils  d'Alexandre,  grand  prêtre  et  ethnarque 
des  Juifs,  témoigne  constamment  sa  bienveillance  à  noire  peuple  en 
général  et  à  chacun  des  citoyens  en  parliculier.  mettant  tout  sou  zèle 
à  les  servir,  qu'il  acueille  avec  empressement  les  Athéniens  de  pas- 
sage dans  son  pays,  soit  en  ambassade,  soit  voyageant  pour  une 
alï'aire  privée,  et  qu'il  les  rapatrie  en  veillant  à  ce  qu'ils  s'en  re- 
tournent eu  sùrele  ;  desquels  faits  déjà  précédemmout  il  a  été  rendu 
témoignage,  et  plaibc  au  peuple  maintenant  —  Théodose,  fils  de 
Théodore,  ayant  introduit  la  motion  et  rappelé  au  peuple  la  vertu  de 
ce  personnage  et  sa  volonté  de  nous  faire  tout  le  bien  qui  est  en  son 
pouvoir  : 

))  Il  sera  décerné  à  Fyrcan  une  couronne  d'or,  en  récompense  de 
son  mérite,  selon  la  loi,  et  on  lui  érigera  une  statue  en  bronze  dans 


LE  DÉCRET  ATHExNIEN  EN  L'HONNEUR  D'HYRCAN  21 

le  sanctuaire  de  Démos  et  des  Charités;  la  couronne  sera  proclamée 
dans  le  théâtre  aux  fêtes  de  Dionysos,  quand  on  jouera  les  tragédies 
nouvelles,  ainsi  qu'aux  concours  gymniques  des  Panathéuées  et  des 
Eleusinies  ; 

»  Les  stratèges,  tant  qu'il  persévérera  dans  ces  sentiments  et  dans 
cette  bienveillance  à  notre  égard,  pourvoiront  à  ce  qu'il  reçoive 
toutes  les  marques  d'honneur  et  de  reconnaissance  dues  à  son  zèle 
et  à  sa  générosité,  afin  que,  par  cette  conduite,  on  sache  comment 
notre  peuple  accueille  et  récompense  dignement  les  hommes  de  bien 
et  que  tous  rivalisent  de  zèle  à  nous  obliger  en  voyant  les  hon- 
neurs dont  il  aura  été  l'objet  ; 

»  On  élira  trois  ambassadeurs,  choisis  parmi  tous  les  Athéniens, 
qui  lui  apporteront  le  présent  décret  et  l'exhorteront  à  accepter  ces 
honneurs  et  à  s'efforcer  toujours  d'obliger  notre  cité.  » 

Les  Juifs,  on  le  sait,  ont  eu  deux  grands  prêtres  du  nom  d'Hyr- 
can  :  Jean  Hyrcan  l^''  (135-105  av.  J.-G.  j  et  son  petit*fils,  Hyrcan  II 
(78-40  av.  J.-C).  Duquel  des  deux  est-il  question  dans  notre 
dpcret  ? 

Josèphe,  dont  l'opinion,  à  vrai  dire,  est  de  peu  de  poids,  rap- 
porte notre  texte  à  Hyrcan  II,  et  t^lle  est  aussi,  avec  des  nuances 
de  détail,  la  thèse  de  Keil,  Ritschl,  Schœmann,  Kœhler,  Men- 
delssohn,  Latischeff,  Ad.  Schmidt  et  Unger.  Au  contraire,  Cor- 
sini,  Clinton,  Meier,  Dittenberger ,  Grosberger,  Damont,  S.  Rei- 
nach,  Homolle,  Sohùrer,  Wilhelm  [1)  se  sont  prononcés  en  faveur 
d'Hyrcan  I<"\  D'ailleurs,  entre  les  partisans  d'un  même  Hyrcan, 
les  avis  diffèrent  sur  l'époque  précise  :  ainsi,  tandis  que  la  plupart 
des  partisans  d'Hyrcan  I®""  songent  aux  premières  années  de  son 
principal  (entre  132  et  129),  M.  Homolle  se  prononce  pour  l'avant- 
dernière  106/5;  de  même,  parmi  les  savants  favorables  à  Hyr- 
can II,  Kœhler  remonte  aux  années  69-62,  Mendelssohn  indique 
avec  précision  l'an  62,  d'autres  descendent  jusqu'à  la  fin  du 
règne  (Ritsch  :  46;  Unger  :  48),  etc.  *. 

*  Cf.  Keil,  Rheinisches  Muséum,  XV III,  p.  61  ; 

Ritschl,  Rh.  Mus.,  XXVIII,  611  ; 

Schœmani),  (iriechische  Alterthûmer,  II  (3»  éd.),  p.  532; 

Kœhler,  CIA.,  11,1,  p.  266; 

Mendelssohn,  Rh.  Mus.,  XXX,  424; 

Latischeil,  BCH,  V.  25u  : 

Ad.  Schmidl,  Ne^ie  Jahrbilcher,  1884,  p.  694;  1887,  p.  112; 

Unger,  Sttzunffsberichte  de  lAcadémie  de  Bavière,  1897,  p.  126;  cf.  Biichler,  To- 
biaden  und  Oniaden,  p.  i;{8; 

Corsini,  F  asti  attici,  1,  181  ;  IV,  114; 

Clinton,  Fam  hellenici,  ad  an,  131; 

Mêler,  Index  atticorum  archontum  quipost  olymp.^  121,  2,  etc.,  Halle,  1854.  Com- 
mentatio  secunda,  p.  79; 

Dumont,  Essai  sur  la  chronologie  des  archontes  athéniens  postérieurs  à  la  /22» 
Olympiade  (Pans,  1870),  p.  29; 


22  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

On  n'attend  pas  de  moi  une  discussion  détaillée  de  tous  les  ar- 
guments mis  en  avant  dans  cette  controverse.  Il  y  en  a  qui  sont  de 
pur  sentiment,  comme  lorsque  M.  Kœhler,  tout  en  rapportant  le 
décret  à  Hyrcan  II,  s'efforce  d'en  faire  remonter  la  date  le  plus 
haut  possible  sous  prétexte  que  les  caractères  de  l'institution 
éphébique,  dans  le  décret  CIA.,  470,  sont  plutôt  ceux  du  ii'^  siècle 
que  du  i®'"  :  c'est  réellement  être  bien  affirmatif  sur  un  sujet  où 
nos  lumières  sont  des  plus  incertaines.  De  môme  l'identification 
du  cosmète  Ejooçgç  Eùoôçou  'A/coooùatoç  dans  ce  décret  (l.  33)  avec 
l'enfant  Eùoocoç  Eùoo^o-j,  de  la  tribu  Hippothontis,  vainqueur  sous 
Phaedrias  (CIA.,  II,  446)  vers  150, est  dénuée  de  toute  preuve. 

Je  me  contenterai  donc  de  rappeler  brièvement  l'argumentation 
de  M.  Homolle.  Ce  savant  fait  observer  que  ©sôootoç  AtoBcosou 
Souvtsuç,  auteur  des  deux  décrets  CIA.,  470,  figure  comme  épimé- 
lète  dans  une  inscription  délienne  *  [BCII.,  VII,  304)  dont  la  date, 
fixée  par  le  grand  prêtre  Hélianax,  paraît  être  101  av.  J.-C,  -  et 
dans  une  autre  (  BCH. ,  VI,  498)  comme  prêtre  d'Aphrodite  Syrienne , 
dont  le  culte  fut  introduit  à  Délos  en  110.  Dès  lors  l'archontat 
d'Agathocle  devrait  tomber  entre  110  et  101  av.  J.-G. 

Ce  raisonnement  pèche  par  la  base  en  ce  qu'il  suppose  l'iden- 
tité du  Théodotos  Diodôrou  des  inscriptions  déliennes  et  du 
Théodotos  Diodôrou  des  décrets  athéniens.  On  peut,  avec  tout 
autant  de  vraisemblance,  voir  en  eux  des  homonymes,  l'aïeul  et  le 
petit-fils,  en  se  souvenant  que,  dans  beaucoup  de  familles  athé- 
niennes, les  noms  se  reproduisaient  régulièrement  de  deux  en 
deux  générations.  Si  Théodotos  I"  a  pu  exercer  vers  101  de 
hautes  fonctions  à  Délos,  son  petit-fils  a  pu,  soixante  ans  plus 
tard,  en  exercer  à  Athènes  :  c'est  à  peu  près  l'intervalle  que  l'on 
observe  dans  les  cas  pareils,  par  exemple  entre  le  ministère  de 
Gasimir-Périer,  premier  du  nom  (1832),  et  celui  de  son  petit-fils 
(1892).  Dès  lors,  a  priori.,  les  inscriptions  déliennes  ne  sauraient 
être  opposées  à  l'opinion  de  Josèphe,  et,  en  faveur  de  cette  opi- 
nion, on  peut  faire  valoir  les  arguments  positifs  suivants  : 

1°  Le  bénéficiaire  de  notre  décret  est  appelé  'Vf.xavb;  'AÀ£;âvopotj. 

S.  Reinach,  Jîev.  nrch.,  1883,  II,  p.  99  suiv.  ; 

Grasberger,  Actes  de  VAcad.  de  Wurzhounj,  18G2; 

Homolle,  Bull.  Corr.  kell.,  X,  2ri,  et  XVlî.  14;i  ; 

Scbijrer,  Gcschxchtc  des  jûdischoi  Voikes,  11  (o'î  éd.),  p.    »3,  noie  113; 

Wilhclm,  an.  Aijathokles  dans  la  S'  éd.  de  la  Realencyclopàdic  de  Pauly-Wissowa. 
(Cependant  cet  excellent  savant  s'exprime  avec  des  réserves  qui  semblent  annoncer 
un  chanfremeul  d'opinion.^ 

'  et.  Saloœon  Heiuach,  Revue  archéologique,  1883,  II,  p.  99  suiv. 
«  Homolle,  BCB.,  VllI,  102.  X.  26. 


LE  DECRET  ATHENIEN  EN  L'HONNEUR  D'HYRCAxN  23 

Or,  Hyrcan  !•"*  fêtait  fils  de  Simon;  Hyrcan  II  était  fils  d'Alexandre 
(Jannée).  Il  faudrait  donc  admettre  que  Josf'jphe  ou  l'auteur  plus 
ancien  auquel  il  a  empriintf^  notre  document  en  a,  de  propos  déli- 
béré, falsifié  le  texte  en  substituant  'AX£;-ivûso'j  à  i;:ao>vo;  :  il  est 
impossible  de  deviner  la  raison  d'une  pareille  fraude;  celles 
qu'imagine  M.  Homolle  sont  confuses  et  peu  vraisemblables. 

2"  Hyrcan  est  qualifié  de  àp/isss'j;  xal  £Ovxç/y,ç  twv  'lo-joatcov.  Le 
titre  d'ethnarque  appartenait  sûrement  à  Hyrcan  II,  sinon  dès 
l'origine,  du  moins  depuis  l'an  47  av.  J.-G.  A  cette  époque,  en 
effet,  César  disposa,  dans  un  décret  officiellement  communiqué 
aux  Sidoniens  et  conservé  par  Josèphe  [Ant.  jud.,  XIV,  §  194, 
Niese):  'Yoxavbv  'AXeçàvooo'j  xai  xà  rsxva  aùtou  k^vioyccç  'louoatwv  clva'.. 
Ce  même  titre  lui  est  appliqué  dans  plusieurs  autres  actes  officiels 
(XIV,  i>  200,  par  César;  §  210,  par  le  Sénat;  i^  211,  par  César; 
§  226,  par  Dolabella).  Au  contraire,  les  actes  officiels  relatifs  à 
Jean  Hyrcan  I^""  —  décret  de  Pergame  (XIV,  247),  lettre  des  Lao- 
dicéens  (XIV,  241)  —  lui  donnent  simplement  le  titre  de  grand 
prêtre. 

3°  Les  considérants  de  notre  décret  supposent  non  seulement 
que  de  nombreux  Athéniens  avaient  eu  l'occasion  de  traverser  les 
possessions  d'Hyrcan  pour  leurs  affaires  privées,  mais  encore  que 
des  ambassades  athéniennes  avaient  dû  emprunter  son  territoire. 
Au  temps  d'Hyrcan  I^^  pareil  fait  n'est  pas  croyable.  La  politique 
de  ce  prince,  comme  le  montre  sa  conduite  envers  Samarie,  n'était 
rien  moins  que  philhellénique.  De  plus  — je  l'ai  démontré  ailleurs 
—  sa  domination  sur  les  villes  de  la  côte,  même  Joppé,  fut,  jus- 
qu'au bout,  des  plus  incertaines,  et  c'est  dans  ces  villes  que  les  né- 
gociants athéniens  pouvaient  avoir  affaire  *.  Sous  Hyrcan  H,  les 
choses  avaient  bien  changé.  Joppé,  la  Tour  de  Straton  (Césarée) 
étaient  alors  des  villes  juives;  Hyrcan  et  son  tout-puissant  mi- 
nistre Antipater  étaient  bien  en  cour  auprès  de  César  et  d'An- 
toine. Le  commerce  avec  l'Arabie,  avec  la  mer  Rouge  passait 
désormais  par  le  territoire  juif.  On  comprend  "que,  dans  ces  con- 
ditions, les  Athéniens  aient  eu  intérêt  à  cajoler  l'ethnarque  de 
Jérusalem.  Bientôt  ils  devaient  ériger  à  Hérode  une  statue,  dont 
la  base  s'est  conservée  [CIA.,  III,  1,  550);  la  statue  votée  à 
Hyrcan  n'a  donc  rien  qui  puisse  nous  étonner,  encore  qu'elle  ait 
dû  choquer  l'orthodoxie  du  prince-pontife,  scrupuleux  observateur 
du  Décalogue. 

4"  Dans  le  décret  éphébique  de  Tarchontat  d'Agathocle  (CL4., 

^  On  peut  remarquer  que  dans  la  liste  des  Etats  auxquels  les  Romains,  vers  la  fin 
du  priacipat  de  Simon,  recommandaient  les  Juifs  (I  Macc,  xr,  12  suiv.)  Athènes 
ne  figure  pas. 


24  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

II,  470)  est  mentionné  (col.  I,  1.  1071  un  éphèbe  du  nom  de 
KaXXtxpaTiôr,ç  Suvopôfxou  STeic'.suç.Or,  une  inscription  contemporaine 
d'Auguste  [CIA.,  III,  109-110)  mentionne  un  gymnasiarque  Syn- 
dromos,  fils  de  Gallicratidès.  Dans  les  familles  athéniennes,  les 
noms  se  reproduisent  généralement  de  deux  en  deux  générations. 
Le  Syndromes  du  n°  109  est  donc  bien  probablement  le  fils  de 
Gallicratidès  du  n»  470  :  dès  lors  ce  dernier,  et,  par  suite,  l'ar- 
chonte Agathocle,  est  un  contemporain  d'Hyrcan  II.  Je  ne  donne, 
d'ailleurs,  cet  argument  que  sous  toutes  réserves,  car,  au  lieu  de 
deux  générations,  il  aurait  pu  s'en  écouler  quatre  entre  les  deux 
Syndromos. 

5<*  L'orthographe  du  décret  CIA.,  470,  où  les  zo^a  muets  sont 
souvent  supprimés,  indique  le  i^''  siècle  plutôt  que  le  ii«.  Il  en  est 
de  même  de  la  forme  des  lettres  dans  une  autre  inscription  du 
même  archontat,  une  dédicace  d'éphèbes  au  Pirée  {BCH.,  XIII, 
269=C/^.,IV,  2,  1226  c^).  Si  la  reproduction  du  Corpus  est 
exacte,  de  pareilles  formes  de  lettres,  avec  leurs  apices  con- 
tournés, la  barre  transverse  du  F  dépassant  considérablement  à 
gauche,  seraient  inouïes  au  ii»  siècle. 

6°  On  remarquera  que  dans  la  liste  de*?  fêtes  où  sera  proclamée 
la  couronne  d'Hyrcan  manquent  les  nToÀcaara  ;  or, celles-ci  fi^rurent 
encore  dans  le  décret  de  Tarchontat  de  Phaidrias(C/.4.,  Il,  446)  du 
milieu  du  ii"  siècle  et  dans  celui  de  Médeios  {ib.,  467)  qui  parait 
être  de  l'an  100. 

Nous  pouvons  dès  lors  considérer  comme  démontré  que  l'ar- 
chontat  d'Agathocle  —  qui  entraîne  avec  lui  tout  un  groupe  d'ar- 
chontats'  —  se  place  au  i*^""  siècle  et  que  le  décret  athénien  vise 
Hyrcan  II  et  non  Hyrcan  P^  Peut-on  en  fixer  la  date  avec  un  peu 
plus  de  précision?  Hyrcan  H  a  exercé  le  souverain  pontificat  pen- 
dant près  de  quarante  ans  (78-40  av.  J.-C),  mais  avec  de  nom- 
breuses intermittences  et  dans  des  conditions  bien  diverses.  De 
78  à  69  le  pouvoir  politi(]ue  fut  tout  entier  aux  mains  de  sa 
mère  Aiexandra,  qui  frappa  monnaie  en  son  propre  nom  et  dont 
le  nom  figurait  seul  dans  les  actes  officiels,  même  dans  les  actes 
de  l'état  civil  (.losèphe ,  Vita,  ^  5  Niese).  De  69  à  63  régna 
effectivement,  sinon  légalement,  Aristobule  IL  De  57  à  47,  sous 
le  régime  inauguré  par  Gabinius,  Hyrcan  fut  réduit  à  ses  fonc- 
tions de  grand  prêtre,  et  le  pays  fut,  en  fait,  gouverné  par  les 
Romains.  Les  seules  périodes  qui  puissent  donc  sérieusement 
entrer  en  ligne  de  compte  sont  les  années  63  à  57  et  47  à  40. 

*  Héracleidès,  Sosicratès,  Âristarcbos,  Dionysios  meta  Paramonon,  etc. 


LE  DÉCRET  ATIIKMKN  EN  L'HONNEUR  D'IIVI^CAN  2.') 

Entre  les  deux,  on  peut  hésiter,  mais  j'estime  que  la  période  47-40 
est  de  beaucoup  la  plus  probable.  En  effet,  il  n'est  nullement 
prouvé  que  Pompée,  en  63,  ait  donné  à  Ilyrcan  le  titre  d'ethnarque 

—  Josèphe  ne  parle  que  vaguement  de  IOvo-j;  7:po<7Ta7'>y.  (XX,  §  244) 

—  tandis  que  nous  savons  positivement  qu'il  lernçut  de  César  en  47. 
De  plus,  la  politique  philhellénique,  spécialement  philafhénienne, 
impliquée  par  notre  décret  convient  tout  particulièrem<^nt  aux 
dernières  années  d'Hyrcan,  où,  sous  le  nom  du  vieil  ethnarquo,  le 
gouvernement  appartenait,  en  réalité,  à  Antipater  et  à  ses  fils, 
dont  on  connaît  les  tendances  hellénistes.  Quelques  années  plus 
tard,  Athènes  «  regorgeait  »  des  offrandes  d'Hérode  (Josèphe, 
Guerre,  I,  §  425). 

Dans  le  texte  des  Antiquités,  le  décret  des  Athéniens  est  précédé 
des  lignes  suivantes,  qui,  à  en  juger  par  la  transcription  de  Jo- 
sèphe, feraient  partie  du  préambule  du  décret,  mais  qui,  en  réa- 
lité, doivent  en  être  séparées  : 

7C£ij.7tT7]t  aTT'.ovTOç,  (a)7rco66r|  *  Tocç  aTç.aTY|Yor;  'liriO'.ffaa  'AOY|Vaûov. 

«  Sous  le  prytane  et  prêtre  Dionysios,  fils  d'Asclépiadès,  le 
5®  jour  avant  la  fin  du  mois  Panémos,  le  décret  (suivant)  des  Athé- 
niens a  été  remis  aux  stratèges.  » 

Ces  lignes  énigmatiiues  ne  comportent,  à  mon  avis,  qu'une 
seule  interprétation  :  le  décret  athénien  en  faveur  d'Hyrcan  n'a  pas 
été,  malgré  les  dispositions  formelles  du  libellé,  porté  directement 
à  Jérusalem;  les  ambassadeurs  athéniens  se  sont  contentés  d'en 
remettre  la  copie  aux  magistrats  d'une  ville  amie,  qui  se  sont 
chargés  de  la  transmettre  aux  intéressés  :  c'est  dans  les  archives  de 
cette  ville  amie  que  Josèphe  ou  plutôt  son  précurseur  (Nicolas  de 
Damas?)  en  a  trouvé  et  copié  le  texte.  Quelle  peut  avoir  été  cette 
ville?  Elle  doit  remplir  les  conditions  suivantes  :  P  avoir  une 
constitution  grecque,  des  stratèges^  un  prytane  éponyme  qui  était 
en  même  temps  prêtre^;  2'  être  amie  et  voisine  de  Jérusalem; 
3^  être  en  relations  étroites  avec  Athènes.  Il  me  semble  que,  de 
toutes  les  villes  de  la  côte  syrienne  auxquelles  on  pourrait  i)enser 
(Gaza,  Ptolémaïs,  Sidon,  Béryte,  etc.;,  c'est  Ascaloii  qui  répond  le 
mieux  à  ces  données.  Nous  ignorons,  il  est  vrai,  le  détail  de  sa 
constitution,  mais  elle  était  certainement  grecque,  la  ville  jouis- 
sant d'une  complète  autonomie  depuis  104  av.  J.-C,  époque  de 

^  Mps.  sTTEOoOr,  ;  corr.  Krebs. 

'  Je  ne  connais  aucune  cilé  grecque  où  Ton  observe  cette  particularité. 


26  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

son  ère.  Il  est  bien  certain  aussi  que  le  calendrier  macédonien 
(auquel  appartenait  le  mois  Panémos)  y  était  en  usage,  comme 
dans  les  autres  villes  de  cette  côte.  Le  nom  Asclépiadès,  porté  par 
le  père  du  prytane  éponyme,  rappelle  le  culte  ascalonitain  de 
Asclépios  ÀcovTou/o:;  auquel  Proclus  adressa  un  hymne  (Marinus, 
Vita  P7'0Cli,  c.  19).  Les  bonnes  relations  d'Ascalon  avec  les  Juifs 
sont  attestées,  entre  autres,  par  le  choix  que  fit  César  de 
ville  avec  deux  autres,  pour  y  graver  son  traité  d'alliance  avec 
Hyrcan  {Ani.  jud.  ,  XIV,  §  lOl).  D'autre  part,  nous  con- 
naissons, dès  le  iii®  siècle,  des  commerçants  d'Ascalon  établis  à 
Athènes  [CIA.,  II,  3,  2836;  cf.  CIA..  III,  2,  2388  et  9j  et  à  Délos 
[BCII.,  VIII,  p.  128,  133,  488),  et  même  un  éphèbe  d'Athènes  de 
naissance  ascalonitaine  (II,  1,  46*7,1.  148)  Enfin,  l'intervalle  de 
deux  mois  et  demi  qui  s'est  écoulé  entre  le  vote  du  décret  athé- 
nien (11  Munychion  =  avril)  et  sa  remise  aux  autorités  de  la  cité 
intermédiaire  (25  Panémos  z^  juin)  correspond  parfaitement  à  la 
distance  maritime  qui  sépare  Athènes  d'Ascalon. 

Nous  ne  quitterons  pas  ce  sujet  sans  rappeler  que  Mendelssohn  * 
a  cherché  à  préciser  encore  davantage  la  date  de  notre  décret  en 
y  rapportant  les  mots  qui  se  lisent  quelques  lignes  plus  haut  chez 

Josèphe  :  xx-jTa  èy^VcTO  k-\  'Toxavou  àc/'.sssto;  xxi  âOvàsyou  Ito-j;  kvixou 

[i.Y,vôç  riavstxou.  A  la  vérité,  dans  le  texte  de  Josèphe,  ces  mots  se 
réfèrent  au  sénatusconsulte  romain  rendu  en  faveur  des  Juifs  , 
sous  la  présidence  du  préteur  L.  Valerius.  Mais,  outre  que  tout  le 
monde  est  d'accord  aujourd'hui  pour  reconnaître  que  ce  sénatus- 
consulte est  beaucoup  plus  ancien  qu'Hyrcan  II,  la  date  énoncée  au 
texte  est  celle  des  ides  de  déce)nb)'e  et  ne  saurait  donc  correspondre 
au  mois  de  Panémos  (juin).  Mendelssohn  a  donc  supposé  que  la 
notice  de  Josèphe  s'est  trompée  de  place  et  concerne,  en  réalité,  le 
décret  athénien,  ou  plutôt  sa  remise,  qui  est  effectivement  du  mois 
Panémos.  Mais,  en  admettant  cette  hypothèse  pour  vraie,  il  paraît 
impossible  qu'une  ville  autonome,  chargée  de  la  transmission  d'un 
décret  étranger,  l'ait  enn^gistré  sous  l'année  régnale  d'un  prince 
étranger.  Il  faudrait  alors  supposer  que  les  mots  èx-.  'Tpxavou 
. . .  èOvip/ou  ont  été  ajoutés  par  Josèphe  et  que  l'acte  original  était 
simplement  daté  «  de  l'an  IX,  mois  Panémos*  ».  Cet  an  IX  pour- 
rait alors  être  compté  selon  l'ère  césarienne,  de  septembre  49 
av.  J.-C,  et  la  date  indiquée  correspondrait  à  juin  40  av.  J.-C, 

•  Commcntatia  de  S.  C.  J^nmanomm^  etc.  dans  Ritschl,  Acta  toeietatis  philol.  Lips.f 
i87î).  p.  31  ei  J{h.  AJuseurn^  XXX,  p.  424. 

»  Mendelssobii  admeUait  qu'il  s'agit  bien  de  l'tn  IX  d'Hyrctn  II,  pour  lui  62  §▼. 
J.-C.  Homolle  corrige  9  en  29  et  aboutit  à  Tau  106/5  {29«  d'Hjrcan  !•'  !) 


LE  DECRET  AT[fE.NIEN  EN  L'HONNEUR  D'fïYHCAN  27 

c'est-à-dire  quelques  mois  à  peine  avant  Tinvasion  d'Antigone  et 
des  Parthes  qui  mit  fin  au  principat  d'Hyrcan.  Malheureusenaent 
rien  ne  permet  de  croire  que  cette  ère  ait  jamais  été  en  usage  à 
Ascalon,  où  l'on  ne  connaît  que  l  ère  de  l'autonomie  (104  av.  J.-G.) 
et  l'ère  de  Gabinius  (57  av.  J.-C).  Sous  ce  rapport,  Gaza,  où  l'on 
connaît  l'ère  dite  de  Pompée  (61  av.  J.-C),  donnerait  peut-être 
un  résultat  plus  satisfaisant,  mais  rien  ne  prouve  qu'Hyrcan  portât 
le  titre  d'ethnarque  dès  52*. 

Il  faut  savoir  borner  notre  curiosité  et  ne  pas  compromettre 
par  d'indiscrètes  conjectures  un  résultat  solidement  acquis  :  le  dé- 
cret athénien  d'Hyrcan  concerne  Hyrcan  II  et  a  été  rendu  dans 
les  dernières  années  de  son  principat. 

Théodore  Reinach. 

*  L  ère  Césarienne  de  49  ou  48   av.    J.-C.   a    élé   employée  à  Laodicée  et  à  Pto- 
lémais,  qui  peuvent  également  entrer  en  ligne  de  compte. 


ISRAËL  ET  JUDA 


(suite  et  fin  ') 


Revenons  maintenant  au  temps  où  les  deux  Etats  hébreux  sub- 
sistaient encore  côte  à  côte.  Nous  croyons  avoir  établi,  dans  le 
chapitre  précédent,  leur  opposition  au  point  de  vue  religieux  et 
montré  comment  les  fondateurs  de  leur  religion  respective  sont 
devenus  les  héros  d'histoires  merveilleuses.  Moïse  chez  les  Judaïtes 
et  Josuéchez  les  Israélites  du  Nord.  Mais,  en  ce  qui  concerne  la 
période  suivante  jusqu'à  l'établissement  de  la  royauté,  le  livre  des 
Juges  et  les  premiers  chapitres  du  livre  de  Samuel  nous  rapportent 
déjà  une  partie  de  ce  qu'on  avait  l'habitude  de  raconter  chez  les 
Israélites  du  Nord  de  ces  temps  anciens,  surtout  au  sujet  des 
guerres  et  des  hommes  des  diverses  tribus  du  Nord  qui  en  furent 
les  héros.  De  la  tribu  de  Juda,  au  contraire,  il  ne  nous  a  pas  été 
transmis  de  traditions  populaires  de  ce  genre  et  nous  n'avons 
presque  aucune  relation  la  concernant  durant  cette  période.  Car  ce 
que  le  chap.  i  du  livre  des  Juges  rapporte  des  guerres  et  des  con- 
quêtes de  cette  tribu  ne  porte  pas  le  caractère  de  la  légende,  et  le 
seul  récit  historique  qui  s'y  trouve  paraît  être  la  prise  de  Hébron 
par  Caleh  et  de  Debir  par  Othoniel  (10-13;  cf.  Jos.,  xv,  13-17); 
mais  ces  conquêtes  doivent  avoir  été  faites  aussitôt  après  l'installa- 
tion de  la  tribu  de  Juda.  Tout  le  reste  de  cette  relation  est  ou  bien 
une  anticipation  sur  ce  qui  s'est  passé  à  l'époque  de  David-,  ou 
une  pure  liction  de  1  époque  de  l'exil  ou  d'après  Texil  ^ 

»  Voir  Revue,  t.  XXXVIII,  p.  172. 

*  Comme,  par  exemple,  la  conquôie  des  villes  des  Philistins  (v,  18). 

•  Par  exemple,  la  victoire  de  Bezek  (▼.  4  et  s.\  ainsi  que  la  prise  et  l'incendie  de 
Jérusalem  (v.  8),  —  du  reste  en  contradiction  avec  le  v.  21.  —  Quant  à  la  ville  de 


ISRAËL  ET  JUDA  29 

Le  récit  qui  suit  concernant  une  grande  victoirt  que  le  môme 
Othoniel  aurait  remportée  sur  un  roi  de  Mésopotamie  (ch.  m,  8-11) 
qui  portait  le  nom  bizarre  de  «  Kûschan  à  la  double  méchanceté  », 
sans  qu'on  indique  de  quel  peuple  il  était  le  roi,  est  aussi  d'in- 
vention tardive.  Ce  roi  aurait  tenu  Israël  tout  entier  asservi 
pendant  huit  ans,  mais  Othoniel  l'aurait  vaincu.  On  ne  dit  pas 
où  se  serait  livrée  cette  bataille.  Cette  courte  et  sèche  relation 
n'est  donc  pas  une  tradition  populaire.  Et  comme,  à  cette  époque, 
Othoniel  non  seulement  ne  pouvait  plus  être  un  guerrier  bien 
vaillant,  mais  pouvait  difficilement  être  encore  en  vie*,  ce  récit 
ne  contient  guère  d'élément  historique.  Il  ne  peut  être  que  le 
maigre  produit  issu  de  l'imagination  d'un  rédacteur  postérieur 
à  l'exil  en  vue  d^associer  aussi  un  schophet  judaïte  aux  scho- 
phetim  du  Nord.  La  seule  chose  qui  soit  relatée  au  sujet  de  la 
tribu  de  Juda  pendant  cette  longue  période,  et  nous  l'apprenons 
par  un  récit  des  Israélites  du  Nord,  c'est  le  fait  qu'à  l'époque 
de  Samson,  elle  était  sous  la  domination  des  Philistins  *.  Ainsi 
Juda  limitait  son  cycle  de  légendes  au  fondateur  de  sa  religion, 
tandis  que  les  Israélites  du  Nord  retendaient  aussi  à  la  vie  na- 
tionale. Juda  cherchait  surtout  à  développer  ses  convictions  re- 
ligieuses ;  pour  les  Israélites  du  Nord,  leur  nationalité,  leur  ori- 
gine et  leur  histoire  n'avaient  pas  moins  d'importance,  et  c'était 
là  ce  dont  ils  s'enorgueillissaient.  Après  le  règne  du  roi  David, 
l'orgueil  national  commença  aussi  à  s'éveiller  dans  la  tribu  de 
Juda,  au  souvenir  de  ce  grand  prince  sorti  de  son  sein  ;  mais 
jusque-là,  cette  tribu  ne  comptait  guère  de  héros  de  guerre.  Même 
en  ce  qui  a  trait  à  David,  on  relate  fort  brièvement  ses  victoires 
et  ses  conquêtes;  le  point  auquel  on  attache  une  importance  par- 
ticulière, dans  les  récits  qui  le  concernent,  c'est  sa  piété  et  sa 
soumission  envers  Dieu,  sa  contrition  et  son  humilité  après  ses 
fautes. C'est  dans  un  but  d'édification  que  ses  fautes  sont  étalées  sans 
pitié;  Dieu  lui  pardonna  en  raison  de  ses  vertus.  Il  reste  le  favori 

Bezek,  elle  était  placée  très  loin  du  territoire  judaïte  (I  Sam.,  xi,  8)  ;  mais  le  roi  de 
Bézek,  Adoni  Bezek,  paraissait  identique  avec  Adoni-Cédek^  roi  de  Jérusalem  (Jos. , 
X,  1);  cf.  Malkicédek,  roi  de  Salem  (^Geu.,  xiv,  18).  Notre  relation  serait  une  imi- 
tation du  récit  de  Josué  attribuant  la  victoire  de  Josué  aux  Judaïtes. 

^  Othoniel  est  désigné  comme  un  i'rère  cadet  de  Caleb  (Juges,  i,  13),  qui,  d'après 
un  autre  passage  (Jos.,  xiv,  10),  cinq  ou  sis  ans  après  [''entrée  dans  le  pays  de  Ca- 
naan, avait  atteint  Tàge  de  quatre-vingt-cincj  ans.  Même  si  nous  ne  tenons  compte 
que  du  livre  des  Juges,  Uthouiel,  à  la  mort  de  Josué  —  d'après  le  cliap.  i  — ,  était 
déjà  dans  la  maturité  de  Tâge.  Et  voici  qu'on  soutient  qu'il  aurait  encore  survécu 
à  la  génération  suivante  et  aurait  été  encore  ea  activité  comme  général  d'armée  à 
l'époque  où  le  souvenir  des  miracles  divins  opérés  par  l'intermédiaire  de  Josué  était 
déjà  effacé  (Juges,  ii,  10)  ! 

*  Juges,  XV,  11» 


30  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

de  Dieu,  qui  lui*  promet  la  durée  éternelle  de  sa  dynastie.  Dans  le 
cours  des  temps,  sa  personnalité  s'élève  jusqu'à  devenir  l'idéal  du 
roi  pieux,  dont  les  désirs  et  les  aspirations  ne  tendent  qu'à  jouir  de 
la  présence  de  Dieu.  Ainsi,  on  composa  en  son  nom  ou  on  lui 
attribua  des  chants  qui  forment  la  plus  belle  parure  de  sa  cou- 
ronne et  qui  respirent  la  piété  la  plus  intense,  l'humilité  et  la  sou- 
mission devant  Dieu.  Sa  renommée  n'est  pas  due  à  ses  exploits 
héroïques  et  à  ses  conquêtes,  mais  à  ses  sentiments  religieux  et 
moraux.  Ceci  est  bien  conforme  à  tout  le  prophétisme  judaïte,  qui 
avait,  d'ailleurs,  des  affinités  avec  le  caractère  et  l'esprit  de  la 
tribu. 

Chez  les  Israélites  du  Nord,  par  contraste  avec  la  tribu  de  Juda, 
la  conscience  de  leur  nationalité  était  bien  vivante  et  puissante. 
Nous  disions  plus  haut  qu'ils  étaient  fiers  de  leur  origine.  En  effet, 
si  nous  examinons  attentivement  le  livre  de  la  Genèse,  il  nous 
apparaît  généralement  comme  une  œuvre  des  Israélites  du  Nord  ; 
il  est,  en  partie,  l'œuvre  d'Ephraïm-Manassé,    quoiqu'il    ait   été 
remanié  après  coup  par  une  main  judaïte  et  qu'il  ait  encore  reçu 
des  additions.  Cela  ressort  déjà  de  l'ampleur  avec  laquelle  Thistoire 
de  Joseph  nous  est  racontée  et  de  la  glorification  de  ce  patriarche. 
Il  est  évident  que  les  légendes  sur  Joseph  se  formèrent  chez  les 
-tribus  qui  lui  devaient  leur  origine  et  qui  s'enorgueillissaient  de 
l'avoir  pour  ancêtre.   Nous  relèverons  dans   la  suite    quelques 
détails  à  l'appui  de  notre  hypothèse  ;  nous  le  ferons  également  en 
ce  qui   concerne  les   trois    patriarches,  dont  nous   considérons 
l'histoire  également  comme  le  produit  de  l'psprit  des  Israélites  du 
Nord.  Nous  nous  bornerons  ici  à  appeler  l'attention  sur  ce  point 
que  les  tribus  du  Nord,  se  distinguant  en  cela  de  Juda,  prirent  le 
nom  à'Israël  d'après  leur  troisième  patriarche,  bien  qu'elles  ne 
refusassent  point  à  Juda  la  même  attribution  d'origine.  Mais  Juda, 
comme  nous  le  verrons  plus  loin,  se  souciait  peu  de  cette  origine, 
tandis  que  les  tribus  du  Nord  en  étaient  fières  ainsi  que  de  leur 
nom  d'Israël.  En  effet,  ce  nom  signifie  :  «  Victoire,  domination  », 
et  la  légende  se  forma  que  Dieu  avait  donné  ce  nom  au  patriarche 
Jacob,  qui    l'avait  vaincu  lui-même'.   La   conservation   de  cette 
incroyable  légende,  qui  n'a  rien  de  similaire,  môme  dans  la  mytho- 
logie grecque,  montre  par  elle-même  que  sa  patrie  est  plutôt  le 
Nord  que  le  pays  de  Juda,  où  la  conception  plus  pure  de  l'idée  de 
Dieu  dos  pro{)liètes  l'eût  sûrement  combattue  et  détruite.  La  même 
remarque  s'impose  pour  quelques  autres  traits  des  premiers  récité 
de  la  Genèse  :  ainsi,  le  récit  de  la  promenade  de  Dieu  dans  le 

t  Gen.,  XXXII,  2b-29. 


ISHAKL  tT  JUUA  31 

jardin  d'EdenS  celui  des  fils  de  Dieu  épousant  les  filles  de 
l'homme*,  celui  qui  raconte  comme  Dieu  se  réjouit  de  l'odeur 
agréable  des  sacrifices  ^  celui  qui  montre  Dieu  descendant  sur 
terre  pour  visiter  la  tour  de  Babel  '*.  Des  conceptions  aussi  naïves 
de  la  Divinité  et  surtout  de  Jélioya  ne  pouvaient  avoir  cours  que 
chez  les  Israélites  du  Nord,  où  les  conducteurs  spirituels  du  peuple, 
les  prêtres  et  les  propliètes,  loin  de  chercher  à  ennoblir  les  idées 
sur  Dieu,  s'efforçaient,  au  contraire,  de  troubler  son  esprit  par 
des  croyances  et  des  pratiques  superstitieuses  ^. 

Au  point  de  vue  du  sentiment  nationaliste  aussi,  les  Israélites  du 
Nord  et  Juda  présentaient  un  vif  contraste,  qui  s'explique  ai- 
sément. Les  régions  conquises  i)ar  Israël  étaient  cultivées  depuis 
longtemps,  occupées  par  une  population  agricole  plus  ou  moins 
dense,  que  les  tribus  conquirent  peu  à  peu  et  où  elles  durent  elles- 
mêmes  se  livrer  aux  travaux  agricoles.  Nous  ne  savons  pas 
combien  d'années  il  a  fallu  pour  achever  la  conquête,  mais  fina- 
lement elle  fut  complète.  Dans  ces  luttes  pénibles  pour  assurer 
leur  existence  nationale,  les  Israélites  du  Nord  virent  se  développer 
leur  courage  militaire,  l'amour  de  l'indépendance  et  même  de  la 
domination.  Sans  doute,  ils  subirent  plus  d'une  défaite,  mais  ils 
supportèrent  toujours  le  joug  avec  impatience,  se  recueillant 
pendant  quelque  temps,  sachant  mettre  à  leur  tête  quelque  vaillant 
guerrier  qui  les  conduisait  à  la  victoire  et  leur  rendait  leur  indé- 
pendance. Ils  avaient  donc  le  droit  de  se  montrer  fiers  de  leur 
nationalité  sous  le  nom  d'Israël. 

D'autre  part,  le  pays  occupé  par  la  tribu  de  Juda  consistait 
principalement  en  vastes  surfaces  de  terres  arides  et  en  mon- 
tagnes rocheuses.  Ce  pays  était  donc  plus  propre  à  l'élève  du 
bétail  et  à  la  vie  nomade  qu'à  la  culture,  et  sans  doute  la  plus 
grande  partie  de  la  tribu  continua  encore,  jusque  sous  le  règne  de 
David,  sa  vie  nomade  dans  des  districts  faiblement  peuplés.  Un 

»  Gen.,  III,  8. 

*  Geo.,  VI,  2. 

*  Gen.,  VIII,  21. 

*  Gen.,  XI,  0. 

5  L'hypothèse  que  les  récits  de  la  Genèse  ont  été  formés  chez  les  Israélites  du 
Nord  explique  aussi  le  mieux  la  conlradiclion  au  sujet  de  Torigine  du  nom  de  Dieu 
«  Jéhova  »  euire  ce  livre  et  Exode,  m,  14  et  suiv.,  et  vi,  3.  D'après  ces  derniers  paî^- 
sages,  ce  nom  dans  sa  i^igniticaiion  universelle  n'a  été  révélé  qu'a  Moïse,  tandis  que 
la  Genèse  dit  qoie,  déjà  a  l'époque  d'Enos,  on  commença  à  invoquer  le  nom  de  Jé- 
hova (Gen.,  IV,  26),  que  les  patriarches  l'invoquaient  éfi;alement  (Xll,  8:  xiil,  4; 
XXI,  38;  XXVI,  25)  ei  qu'il  était  usiié  généralement  (ix,  26  ;  xiv,  22;  xvi,  5;  xxiv, 
3,  50  et  s.;  xxvi,  29.  etc.).  Les  passages  cités  de  l"Exode  exprimeraient  les  vues  des 
prophètes  judaites,  tandis  que  chez  les  Israélites  du  Nord  régnait  l'opinion  que  le 
nom  a  existé  et  était  usité  de  temps  immémorial,  comme  El^  Elobim,  Schaddaï,  sans 
avoir  une  signitication  plus  haute. 


32  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

pareil  genre  de  vie  prédispose  l'iiomme  à  l'humeur  pacifique  et 
à  la  contemplation  ;  à  moins  qu'il  ne  s'agisse  de  la  défense  per- 
sonnelle, i!  ne  prépare  guère  à  l'art  de  la  guerre.  Juda  s'accom- 
modait donc  de  la  domination  étrangère  plutôt  que  de  s'exposer 
par  sa  résistance  aux  dangers  de  la  guerre  et  à  être  troublé  dans 
ses  paisibles  occupations.  L'habitude  de  la  vie  nomade  amena  les 
Judaïtes  à  laisser  l'orgueil  national,  la  soif  de  la  renommée 
guerrière  et  des  conquêtes  s'affaiblir  à  un  point  extrême.  Au  lieu 
de  développer  les  tenôances  7iafionoMstes,  ils  cultivèrent  le  senti- 
ment religieux,  qui  devint  d'autant  plus  fort  chez  eux,  surtout 
dans  le  sens  moral  vers  lequel  Moïse  le  dirigea  ;  ceci  explique  le 
développement  du  prophétisme  d'ordre  plus  élevé  qui  se  produisit 
parmi  les  Judaïtes. 

Cette  absence  de  courage  guerrier,  ce  défaut  d'amour  de  l'indé- 
pendance, cette  facilité  à  ployer  la  nuque  sous  le  joug  des  Philis- 
tins, durent  singulièrement  rabaisser  la  tribu  de  Juda  aux  yeux  de 
leurs  frères  d'Israël  et  les  éloigner  d'elle.  Le  mépris  qu'ils  avaient 
pour  elle  paraît  se  refléter  dans  l'unique  récit  que  nous  possédions 
sur  la  tribu  du  Sud  et  provenant  des  Israélites  du  Nord.  Le  héros 
de  la  tribu  de  Dan,  Samson,  qui  infligea  aux  Philistins  de  si  rudes 
défaites,  s'était  réfugié  dans  une  des  grottes  du  territoire  judaïte. 
Les  Philistins  l'y  poursuivirent,  ce  qui  fut  naturellement  fort 
désagréable  aux  Judaïtes.  Au  nombre  de  trois  mille  hommes,  ils 
se  rendirent  auprès  de  Samson,  le  sommant  de  se  laisser  lier  pour 
être  livré  aux  Philistins,  car  ceux-ci  dominaient  sur  eux.  11  con- 
sentit à  la  condition  qu'on  ne  lui  fit  aucun  mal.  Et  ainsi  il  fut  lié  et 
livré'.  —  Ce  récit  présente  les  Judaïtes  sous  un  jour  absolument 
défavorable  :  il  montre,  en  premier  lieu,  leur  lâcheté,  puisqu'ils  se 
réunirent  en  si  grand  nombre  contre  un  seul,  fut-ce  un  Samson  ; 
il  montre  aussi  la  bassesse  de  leurs  sentiments,  leur  servilité  dé- 
ployée au  détriment  d'un  membre  de  leur  nation,  et  cela  dans  le 
but  d'être  plus  vite  délivrés  de  l'eiuiemi  ! 

Il  est  encore  une  autre  raison  qui  dut  contribuer  beaucoup  à 
rabaisser  la  tribu  de  Juda  aux  yeux  des  tribus  du  Nord,  et  dont  les 
écrits  bibliques  ne  disent  rien.  C'est  un  fait  que  Juda  n'était  pas 
une  tribu  purement  Israélite.  Notamment  Caleb  et  Othoniel,  les 
seuls  qui  soient  nommés  cc^mme  guerriers  et  conquérants  judaïtes, 
n'étaient  pas  des  Judaïtes,  mais  des  chefs  ou  des  noms  de  clans 
iduméens.  En  effet,  Caleb  est  toujours  désigné  comme  «  Kenizi  »  et 
Othoniel  «  comme  flis  (descendant)  de  Kenaz  «;  or,  Kenaz  est  le  nom 
d'une  tribu  ou  d'un  clan  iduméen  *.  Ce  fait,  comme  nous  l'avons  dit, 

'  Juf^es,  XV,  11  et  suiv. 

*  Geuèse,  xxxvi,  11 -xv,  15,  42.  Le  iail  que  le  chroniqueur,  si  abondant  en  matière 


ISRAËL  ET  JUDA  33 

est  passé  sous  silence  pour  des  raisons  faciles  à  comprendre.  Cepen- 
dant dans  le  livre  de  Josué,  il  est  resté  des  traces  de  ce  fait,  en  ce 
qui  concerne  Caleb.  En  effet,  il  y  est  dit  :  «  Ilébron  resta  la  posses- 
sion héréditaire  de  Caleb  le  Kenizi,  parce  qu'il  se  consacra  à 
Jéhova,  le  Dieu  d'Israël  *.  »  Et  ailleurs  :  «  A  Caleb,  fils  de  Yephuné, 
il  (Josué)  donna  une  part  au  milieu  des  fils  de  Juda,  suivant  le 
commandement  donné  par  Dieu  à  Josué  ^.  »  Caleb  et  Otlioniel 
n'appartenaient  donc  pas  à  la  tribu  de  Juda.  De  môme  que  le  clan 
Kenizi,  celui  des  Kéni^  s'unit  à  la  tribu  de  Juda,  probablement 
avec  beaucoup  d^autres  clans*.  C'est  sûrement  à  cause  de  ce  mé- 
lange avec  Edom  que  celui-ci  a  été  considéré  comme  le  frère  de 
Jacob-Israel  ^  et  identifié  avec  le  légendaire  Esaù,  ce  qui  n'est  pas 
le  cas  pour  Amalek,  par  exemple,  lequel,  quoique  cité  aussi  comme 
descendant  d'Esaii  ^,  ne  s'est  pas  mélangé  avec  Israël.  C'est 
aussi  à  ce  mélange  avec  Israël  que  nous  devons  la  conservation 
de  la  généalogie  et  de  la  chronique  des  rois  iduméens.  Autre- 
ment les  Hébreux,  et  particulièrement  les  Judaïtes,  n'auraient 
eu  aucun  intérêt  à  la  posséder.  Le  chapitre  xxxvi  de  la  Genèse, 
qui  y  est  relatif,  est  donc  d'origine  iduméo-judaïte  \  tandis  qu'un 
autre  passage  de  ce  livre,  qui  appartient  au  cycle  des  légendes 
des  Israélites  du  Nord,  compte  les  clans  Rènl  et  Kenizi  parmi 
les  nations  dont  Dieu  a  promis  de  donner  le  pays  aux  Hébreux  ^. 
La  citation  de  ces  clans  aurait-elle  servi  par  hasard  à  diriger 
une  attaque  contre  la  tribu  de  Juda  ?  —  D'autre  part,  on  s'ex- 
plique aussi  de  cette  façon  pourquoi,  chez  les  Judaïtes,  l'ima- 
gination n'a  rien  inventé,  excepté  en  ce  qui  concerne  Moïse 
et  David.  Cette  tribu  ne  pouvait  sous  aucun  rapport  s'enor- 
gueillir de  son  développement  national.  S'il  est  donc  établi,  comme 
nous  le  croyons,  que,  dès  l'époque  des  Juges,  il  y  eut  de  l'éloi- 
gnement  entre  Juda  et  les  Israélites  du  Nord  et  si  ceux-ci  re- 
gardaient le  premier  avec  une  certaine  hauteur,  ce  sentiment  de 
mépris,  surtout  chez  la  tribu  d'Ephraïm,  qui,  en  raison  de  sa 
puissance,  donnait  le  ton  aux  autres,  dut  se  changer  en  amer- 
tume et  haine,  lorsque  cette  tribu  de  sang  mêlé  parvint  par  David 

de  généalogie,  les  fait  descendre  de  Heçroû,  le  pelit*tils  de  Juda  (I  Ghron.,  ii  et  iv, 
13),  ne  prouve  rien. 

*  Jos.,  XIV,  15. 
«  Ibid.,  XV,  13. 

'  La  version  des  LXX,  qui  donne  "^pb^^ïl,  au  lieu   de  Û3>n  (Juges,   i,  16),  est 
sans  doute  tendancieuse. 

*  Voir  I  Sam.,  xxx,  26  et  s. 

s  Deut,,  XXIII,  8;  Obadia,  10  ;  Malachie,  i,  2. 

*  Gen.,  XXXVI,  12. 

^  Sans  doute  aussi  xxxii,  4-xxxui,  17. 

*  lhid.\  XV,  19  et  s. 

T.  XXXIX,  N°  77.  3 


34  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

à  la  suprématie  sur  les  autres  tribus.  La  manière  dont  David 
et  Saloraon  traitèrent  celles-ci,  comme  nous  l'avons  vu,  ne  pou- 
vait que  maintenir  en  éveil  et  même  fortifier  les  sentiments  d'ani- 
mosité  contre  Juda,  et  ils  se  manifestèrent,  en  effet,  en  récits  à 
tendance. 

Nous  considérons  comme  une  fiction  tendancieuse  de  ce  genre, 
composée  en  vue  de  rabaisser  la  tribu  de  Juda  —  car  il  ne  peut 
être  question  d'un  état  de  choses  réel  —  le  récit  du  péché  commis 
par  le  Judaïle  Akhan  à  l'occasion  de  l'interdit  prononcé  contre 
Jéricho  et  tout  ce  qui  s'y  trouvait,  péché  en  punition  duquel  il 
aurait  été  lapide  et  brûlé  avec  ses  fils  et  ses  filles  et  tout  ce  qui 
lui  appartenait  —  au  mépris  de  la  loi  des  prophètes  judaïtes 
(v.  plus  haut)  *. 

Un  autre  récit  tendancieux  de  ce  genre  nous  montre  le  père  de 
la  tribu,  Juda  lui-même,  profitant  de  l'absence  de  Ruben,  l'aîné 
des  fils  de  Jacob,  pour  persuader  à  ses  frères  de  vendre  Joseph 
comme  esclave  au  lieu  de  le  tuer,  ce  qui  ne  leur  eiit  été  d'aucun 
profit,  et  tirant  de  cette  vente  vingt  pièces  d'argent*.  Toute- 
fois, cette  tendance  se  manifeste  beaucoup  plus  clairement  et 
d'une  façon  plus  nette  dans  le  chapitre  suivant  de  la  Genèse  (cha- 
pitre xxxviii). 

Ce  chapitre,  qui  interrompt  l'histoire  de  Joseph,  contient  une 
histoire  de  famille  de  Juda  qui,  soit  dit  en  passant,  est  chronologi- 
quement invraisemblable  '',  et  où  nous  relevons  les  points  suivants  : 
Juda  se  sépare  de  ses  frères  et  épouse  une  Cananéenne*,  — ceci 
est  sûrement  une  allusion  à  la  séparation  de  la  tribu  de  Juda 
d'avec  les  autres  tribus  et  à  son  mélange  avec  des  éléments 
indignes.  De  ses  trois  fils,  les  deux  aînés  sont  frappés  de  mort  par 

*  Jos.,  VII.  Dans  un  cas  analogue,  Lévit.,  xxiv,  10,  on  fait  ressortir  que  le  cou- 
pable était  un  Egyplien. 

'  Gen.,  xxxvii,  26. 

^  En  etl'et,  en  admettant  que  Joseph  n'ait  été  ûgé  que  de  dix-sept  ans  quand  il 
fut  vendu  (Gen.,  xxxvii,  2),  il  s'écoula  depuis  ce  moment  jusqu'à  son  élévation  au  rang 
de  vice-roi  d'Egypte  treize  ans  [ibid.,  xli,  46).  Ensuite  vinrent  les  sept  années 
d'aboudanco  et  deux  années  de  lamine  [ibid.,  XLV,  6).  Ce  l'ut  alors  que  Joseph 
fit  venir  son  père  en  Egypte  avec  toute  sa  lamille.  Et  c'est  dans  le  cours  de  ces 
vingt-trois  années  que  se  seraient  passés  tous  les  événements  suivants  :  Juda  se 
marie  et  engendre  successivement  trois  fils;  l'aîné  grandit,  se  marie  et  meurt;  le  se- 
cond, qui  épouse  la  veuve,  meurt  également.  La  veuve  attend  ensuite  que  le  troi- 
sième fils  de  Juda  soit  grand  et,  celui-ci  n'ayant  pas  voulu  1  épouser,  clic  a  com- 
merce avec  Juda  lui-même  et  elle  met  au  monde  des  jumeaux.  Or,  non  seulement  ses 
deux  fils,  mais  aussi  les  fils  de  l'un  d'eux  sont  comptés  parmi  les  soixante-six  per- 
sonnes qui  accompagnèrent  Jacob  en  Egypte  [ibid.,  xlvi,  12,  26). 

*  Le  lait  ((ue  chez  les  Israélites  en  considérait  comme  peu  convenable  le  ma- 
riage avec  une  Cananéenne  ressort  de  Gen.,  xxiv,  3  et  xxviii,  1,  8,  ainsi  que  de 
la  remarque  qui  est  faite  à  propos  d'un  fils  de  Siméon,  que  sa  mère  était  une  Cana- 
néenne. 


ISRAËL  ET  JUDA  35 

Dieu  à  cause  de  leurs  péchés.  Seul  le  troisième  fils  de  la  Cana- 
néenne, Schéla,  contribue  à  former  la  tribu  de  Juda  *.  Mais  le 
noyau  et  l'aristocratie  de  la  tribu,  ce  furent  les  descendants  des 
deux  frères  jumeaux  Péréç  et  Zérah,  que  Juda  eut  de  sa  bru, 
c'est-à-dire  quasi  ou  réellement  par  voie  incestueuse,  qui  les 
formèrent.  En  effet,  légalement  celle-ci  était  aussi  destinée  comme 
femme  à  Schéla.  —  Il  est  évident  que  ce  récit  ne  repose  sur 
aucun  fait  réel,  mais  il  est  caractéristique  que  la  légende  popu- 
laire ne  se  soit  occupée  que  des  affaires  de  famille  de  Juda  et  nulle- 
ment de  celles  d'aucun  autre  chef  de  tribu.  Comme  les  détails 
sont  de  nature  diffamatoire,  la  légende  ne  peut  s'être  formée  que 
dans  le  Nord,  en  vue  de  rabaisser  la  tribu  de  Juda.  D'autres  récits 
qui  accusaient  trop  nettement  cette  tendance  ont  été  sans  doute 
supprimés  par  les  rédacteurs. 


VI 


La  tribu  de  Juda,  de  son  côté,  n'avait  pas  de  sentiments  hostiles 
contre  les  Israélites  du  Nord;  elle  cherchait,  au  contraire,  comme 
nous  le  constatons  par  les  discours  des  prophètes,  à  se  réconcilier 
avec  eux,  mais  sous  la  bannière  de  sa  propre  doctrine  religieuse 
et  de  la  dynastie  de  David.  Quant  aux  légendes  des  Israélites  du 
Nord,  Juda  ne  pouvait,  il  est  vrai,  les  réfuter  —  la  critique  histo- 
rique n'existait  guère  dans  l'antiquité  —  mais  il  n'en  tenait  pas 
compte.  Pour  les  Judaïtes,  l'histoire  au  point  de  vue  religieux 
commençait  avec  Moïse,  et  au  point  de  vue  politique  avec  David. 
Ils  ne  s'intéressaient  guère  aux  trois  patriarches.  Dans  les  livres 
des  prophètes  et  dans  les  écrits  historiques  qui  proviennent  de 
Juda,  il  est  rarement  question  des  patriarches.  Une  fois  seu- 
lement, le  prophète  Osée  cite  quelques  traits  de  la  vie  du  pa- 
triarche Jacob,  mais  de  quel  ton  railleur  !  c<  Dans  le  sein  maternel, 
Jacob  trompa  par  ruse  son  frère  et,  dans  sa  vigueur,  il  lutta 
contre  Dieu.  Il  vainquit  l'ange  et  le  terrassa  ;  l'ange  pleura 
et  le  supplia  (de  lui  rendre  la  liberté),  disant  qu'il  le  (re)trou- 
verait  à  Béthel,  et  là  il  nous  parle  (en  réalité).  Mais  Jéhova 
est  le  Dieu  Jéhova;  c'est  là  son  nom-  I  »  c'est-à-dire  comment 
peut-on  dire  de  lui  pareille  chose  I  —  Et  plus  loin  :  «  Jacob  s'enfuit 
aux  champs  d'Aram,  Israël  servit  pour  une  femme;  oui,  pour  une 

*  Nombres,  xxvi,  20. 

*  Osée  XII,  4-6;  cf.  Ex.,  m,  15. 


36  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

femme,  il  garda  les  troupeaux.  Mais  Jéhova  fit  monter  Israël 
d'Egypte  par  un  prophète  (Moïse),  et  c'est  par  un  prophète  qu'Israël 
fut  gardé  *.  »  Evidemment  Osée  raille  ici  les  légendes  frivoles  des 
Israélites  du  Nord  touchant  le  patriarche  Jacob,  auquel  on  attri- 
buait la  fondation  de  Béthel  comme  lieu  de  culte.  Il  oppose  au  rusé 
Jacob  le  prophète  Moïse,  au  culte  païen  de  Béthel  la  haute  signifi- 
cation du  nom  de  Jéhova,  et  termine  son  discours  par  ces  mots 
sévères  :  «  Ephraïm  a  excité  jusqu'à  l'amertume  le  Seigneur,  et 
celui-ci  lui  fera  expier  le  châtiment  de  son  crime  et  rejettera  sur 
lui  sa  honte  *.  » 

Il  semble  que  le  prophète  Amos  ait  aussi  voulu  railler  l'origine 
attribuée  aux  hauts-lieux  (Bamot)  comme  remontant  aux  patri- 
arches, quand  il  donne  au  nom  du  patriarche  Isaac  (pni:'')  la  forme 
pnuji  et  prête  ainsi  au  mot  «  les  hauts-lieux  d'Isaac  »  le  sens  de 
«  lieux  de  plaisir  ^  ».  Il  est  vrai  que  les  deux  formes  ont  la  même 
signification  «  le  riant,  le  jouant,  le  réjoui  ».  Mais  quand  on  désigne 
quelqu'un  par  son  nom,  on  ne  pense  guère  au  sens  abstrait  du 
mot.  Si  on  donne,  au  contraire,  à  ce  nom  une  forme  nouvelle,  on  le 
fait  avec  l'intention  d'appeler  l'attention  sur  le  sens  et  le  plus  sou- 
vent sur  le  sens  injurieux  du  mot.  En  modifiant  le  nom  du  pa- 
triarche et  en  l'appelant  pnu)'»,  le  prophète  a  voulu  faire  ressortir 
la  bassesse  de  ce  nom  ainsi  que  des  «  hauteurs  »  et  de  la  «  maison  » 
(d'Israël)  dont  on  faisait  remonter  l'origine  au  patriarche.  Ou  bien 
le  véritable  nom  lui  était  inconnu  et,  s'il  en  est  ainsi,  cela  prouve 
bien  combien  peu  les  Judaïtes  s'intéressaient  aux  patriarches. 

En  général,  les  prophètes  et  les  poètes  judaïtes  ne  s'occupaient 
pas  du  passé,  mais  de  l'élévation  religieuse  et  morale  du  peuple 
dans  le  présent  et  pour  l'avenir.  Du  passé,  ils  ne  relèvent,  en  fait 
d'incidents  importants,  que  la  délivrance  miraculeuse  d'Israël  de 
l'Egypte,  la  conclusion  de  Talliance  avec  Jéhova,  rompue  plus  tard 
par  le  peuple,  et  les  prodiges  accomplis  par  Dieu  pendant  la  mi- 
gration à  travers  le  désert.  Pour  eux.  Moïse  était  l'intermédiaire 
divin,  et  il  est  caractéristique  comme  Isaïe,  le  prophète  de  l'exil, 
parle  encore,  dans  une  prière  \  de  Moïse,  d'une  part,  et  des  patri- 
arches, d'autre  part  :  «  Je  me  souviens  des  anciens  jours  de  Moïse, 
son  serviteur,  le  pasteur  de  son  troupeau  \  Où  est-il,  Jéhova,  qui 
leur  fit  traverser  la  mer  et  qui  mit  en  lui  (en  Moïse)  son  esprit 

'  Osée,  xir,  13,  et  suiv. 
»  IbuL,  XII,  15. 

•  Amos,  vu,  9,  1G.  Dans  Psaumes,  cv,  9,  on  emploie  la  dernière  forme,  sans  doute 
d'après  Amos,  sans  qu'on  remarque  le  sens  caché. 

*  Isaïe,  Lxiii,  7-19. 

»  Au  lieu  de  IDT^T,  il   faut  lire  nDTwSI  ;  au  lieu  de  173:^,  lire  1137,  et,  après  ce 
mot,  il  faut  mettre  is^^  r^i'n    HN. 


ISRAËL  ET  JUDA  37 

saint?  De  son  bras  glorieux,  il  dirigea  la  droite  de  Moïse  et  il 
fendit  les  eaux  devant  eux...;  il  les  dirigea  à  travers  los  flots, 
comme  un  coursier  dans  la  steppe,  sans  qu'ils  bronchassent*... 
N'est-ce  pas  toi  qui  es  notre  père,  car  Abraham  ne  nous  connaU 
'pas,  Israël  (Jacob)  ignore  qui  nous  sommes.  C'est  toi,  Jéhova, 
qui  es  notre  père,  qui  de  toute  éternité  t'appelles  notre  Sauveur*.  » 
Ainsi,  pour  notre  prophète,  ce  ne  sont  pas  les  patriarches,  pas 
même  Abraham,  l'ami  de  Dieu  %  qui  ont  de  l'importance,  mais 
c'est  Moïse,  par  qui  Dieu  a  accompli  de  si  grandes  choses. 

Il  est  à  présumer  que  lors  de  la  destruction  du  royaume  du  Nord 
et  de  l'immigration  de  ses  prêtres  et  de  ses  prophètes,  les  légendes 
de  ce  pays  se  sont  aussi  acclimatées  peu  à  peu  dans  le  pays  de  Juda. 
De  même  que  les  idées  et  les  coutumes  religieuses,  les  traditions 
historiques  des  Israélites  du  Nord  s'y  répandirent  librement  grâce 
à  elles.  Lorsque  le  royaume  du  Sud  fut  détruit  à  son  tour  et  que 
Juda  fut  exilé  en  Babylonie,  le  sens  des  souvenirs  historiques 
s'éveilla  aussi  en  lui.  En  dehors  de  l'organisation  de  la  future  vie 
sociale  et  religieuse  pour  l'époque  où  le  retour  dans  la  patrie, 
qu'on  croyait  assuré,  serait  réalisé,  et,  outre  les  productions  re- 
ligieuses et  autres  auxquelles  se  vouèrent  dès   lors    les  esprits 
débarrassés  de  leurs  préoccupations  politiques,  les  lettrés  s'adon- 
nèrent au  soin  de  rassembler  des  documents  historiques  et  de  les 
coordonner  en  ouvrages  complets.  Les  traditions  des  Israélites 
du  Nord  furent  également  recherchées,  mais  tout  leur  travail 
fut  mis  au  service  de  l'idée  religieuse  et,  pour  cette  raison,  porte 
l'empreinte  de  cette  tendance.  Tout  ce  qui  ne  répondait  pas  à  leurs 
idées  sur  l'action  de  Dieu,  sur  la  destinée  de  son  peuple  élu,  les 
auteurs  bibliques  ne  pouvaient  le  considérer  comme  exact.  Ainsi  les 
documents  et  les  traditions  des  temps  anciens,  grâce  à  des  additions 
et  à  des  suppressions,  furent  ramenés  à  une  forme  pragmatique. 
Cette  direction  dans  la  manière  de  traiter  l'histoire  d'Israël  fut 
aussi  suivie  par  les  rédacteurs  postérieurs  à  l'exil,  jusqu'à  ce  que 
les  ouvrages  historiques  de  la  Bible  reçussent  leur  forme  actuelle. 
C'est  de  leur  point  de  vue  religieux  actuel  qu'ils  considéraient  les 
événements  du  passé,  et  ils  les  modifiaient  en  conséquence,  sans 
croire  commettre  une  infidélité  *.  Il  est  certain  que  beaucoup  de 
détails,  peut-être  même  des  écrits  entiers,  qui  auraient  pu  nous 


*  Isaïe,  Lxiii,  11-13. 
»  Ihid.,  16. 

^  Jbxd.,  Lxi,  8. 

*  Ainsi  purent  se  former  les  livres  des  Chroniques,  qui  diffèrent  tant  des  livres  de 
Samuel  et  des  Rois,  parce  qu'ils  poursuivent  une  tendance  beaucoup  plus  prap^- 
matique. 


38  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

mieux  renseigner  sur  l'histoire  d'avant  l'exil  et  le  développement 
religieux  des  Hébreux  ont  été  supprimés.  Cependant  nous  savons 
gré  aux  rédacteurs  bibliques  d'avoir  conservé  beaucoup  de  choses 
qui  nous  permettent  de  nous  faire  une  idée  de  cette  histoire.  A.  vrai 
dire,  il  faut  en  rendre  grâce  aux  compromis  acceptés  par  les  partis 
en  ce  qui  concerne  la  législation,  qui  ont  fini  par  émousser  de  plus 
en  plus  les  contrastes.  De  môme  qu'on  accueillit  dans  la  Loi,  dans 
la  Tora,  beaucoup  d'idées  religieuses  et  de  coutumes  des  anciens 
Israélites  du  Nord,  de  même  on  accepta,  mais  plus  franchement 
encore,  les  documents  et  les  traditions,  tant  pour  la  Tora  que 
pour  les  livres  historiques. 

Il  nous  semble  que  c'est  de  cette  manière  que  le  problème  de  la 
formation  du  Pentateuque  et  des  livres  historiques  de  la  Bible  peut 
se  résoudre  le  plus  aisément.  La  succession  chronologique  et  le 
nombre  de  leurs  auteurs,  dont  la  critique  biblique  s'occupe  prin- 
cipalement, si  toutefois  on  peut  les  fixer,  sont  des  questions  d'ordre 
secondaire.  En  tout  cas,  celles-ci  ne  peuvent  être  traitées,  à  notre 
avis,  sans  tenir  compte  de  l'opposition  essentielle  qui  exista  entre 
les  Israélites  du  Nord  et  Juda. 

Israël  Sack. 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE 

DE  L'AN  70  A  L'AN  500 


L'organisation  de  la  justice  juive  en  Palestine  après  la  destruc- 
tion du  Temple  n'est  pas  aisée  à  déterminer.  Les  détails  que  nous 
donnent  à  ce  sujet  les  écrits  de  l'époque  sont  peu  abondants  et 
variés,  et  leur  manque  de  précision  impose  la  nécessité  de 
recherches  minutieuses.  Nous  allons  réunir  ici  tout  ce  que  nous 
avons  pu  trouver  sur  ce  sujet  ;  notre  récolte  n'aura  pas  un  intérêt 
de  premier  ordre,  elle  ne  révélera  presque  rien  de  nouveau  :  notre 
ambition  s'est  bornée  à  faire  un  relevé  aussi  complet  que  possible 
de  tous  les  renseignements  que  le  Talmud  fournit  touchant  les  tri- 
bunaux juifs  et  les  docteurs  qui  exercèrent  la  justice. 

On  sait  que,  lors  de  la  chute  de  Jérusalem,  Jabné  devint  le 
centre  du  judaïsme  pour  la  Terre-Sainte.  Un  véritable  tribunal  y 
fut-il  organisé  dès  lors  sous  la  présidence  de  Yohanan  b.  Zaccaï, 
avec  des  pouvoirs  étendus  au  point  de  vue  de  la  juridiction  *  ? 
Nous  ne  voudrions  pas  nous  borner  à  répondre  à  cette  question 
par  l'affirmative.  D'après  une  source  très  ancienne  *,  ce  que 
Yohanan  sollicita  et  obtint  tout  d'abord  des  autorités  romaines,  ce 
fut  une  certaine  indépendance  en  matière  religieuse,  la  création 
d'un  centre  religieux  ^.  A  ce  moment,  malgré  la  protection  de  la 

*  Schûrer  (III,  3°  édition,  p.  19G  et  saiv.)  dit  avec  beaucoup  de  réserve  :  «  Sans 
doute  le  peuple  juif  se  créa  bientôt  un  nouveau  centre,  grâce  au  tribunal  de  Jabné, 
Mais  ce  dernier  n'était  qu'un  tribunal  de  jurisprudence,  dont  les  décisions  n'avaient 
qu'une  valeur  théorique.  »  —  "Weinbcrg,  Monatsschrift,  1897,  p.  501,  ne  donne  au- 
cune preuve  tirée  de  l'époque  qui  nous  intéresse  confirmant  son  assertion  que  les 
Juifs  jouissaient  d'une  véritable  juridiction. 

«  Alot  di  B.  Nathan,  iv  :^i-;^72bnb  nn  iirÛ5<1  nsn""  Nb5<  ^212  UJpnTD  "rN 
rrnitTD  bD  ïin  r7w:J:i*5<1  ?lb2n  ïin  ynpî^T  «  Je  ne  te  demande  que  Jabné  pour 
y  enseigner  à  mes  disciples,  y  établir  des  prières  et  y  accomplir  toutes  les  prescrip- 
tions religieuses.  • 

'  C'est  sans  doute  à  cela  que  se  rapporte  l'expression  1"i:i  SmS'lb  r!N!n 
tl3D'^DU5  (j.  Sanh.,  30  a),  d'après  laquelle  les  communautés  devaient  demander  les  dé- 
cisions à  Jabné  ;  cf.  p.  40,  note  2. 


40  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Cour  impériale,  une  mesure  aussi  importante  pour  les  intérêts  du 
judaïsme  n'était  guère  à  espérer  *. 

C'est  uniquement  au  point  de  vue  religieux  qu'on  consentit  à 
placer  Jabné  au  niveau  de  la  ville  sainte,  et  les  consultations 
adressées  par  les  Juifs  de  Tétranger  à  l'Académie  de  Jabné  ne 
visaient  que  des  questions  religieuses  -.  C'est  aussi  le  domaine  où 
se  renfermèrent  les  réformes  de  Ben  Zaccaï  ^.  Aussi  n'oserais-je 
pas  décider  si  son  Bet-Din  de  Berour-Hayil  était  un  véritable  tri- 
bunal *.  Il  y  aurait  lieu  de  se  demander  également,  d'après  cela,  si 
la  première  rédaction  de  la  loi  sur  le  Siliarihon  appartient  à  notre 
époque  '.  Cependant  il  existe  un  passage  instructif,  pour  fixer  les 
prérogatives  de  Jabné,  qui  mérite  d'être  cité  ;  ce  passage  dit  qu'un 
condamné  à  mort  ne  peut  pas  être  exécuté  à  Jabné  et  doit  être 
amené  à  Jérusalem  ^.  Si  cette  opinion,  qui  est  celle  de  R.  Akiba, 
devait  avoir  un  autre  intérêt  qu'un  intérêt  académique,  il  faudrait 
autant  que  possible  la  placer  à  l'époque  des  grands  succès  de  Bar- 
Cochba.  Peut-être  se  berçait-on  de  l'espoir  de  rétablir  l'ancien 
Sanhédrin  et  Akiba  voulait-il  sauvegarder  les  droits  de  la  capi- 
tale vis-à-vis  de  ceux  de  Jabné.  Rabban  Gamaliel  II  montre  un 
zèle  ardent  pour  relever  l'autorité  de  l'Académie,  mais  il  est  très 
douteux  qu'il  voulût  la  transformer  en  tribunal  régulier.  Il  est 
vrai  qu'on  fixa  le  règlement  '  et  l'organisation  extérieure  ^  selon 

*  Baba  Batra,  10  a,  il  est  raconté  que  les  neveux  de  Ben  Zaccaï  eurent  à  souiFrir 
des  exactions  romaines,  —  sans  doute  encore  sous  le  règne  de  Vespasfen. 

«  Voir,  par  exemple,  ffoullin,  AS  a  :  "iby"|    nw^'^Û    rr^n    oT    nb"^   l'2^  y^brMl 

n32">b  Q"'b:in  ;:jibo  n^o:'  ••j^  rr^bj»  ;  voir  aussi  Sa«/j.,  33  a  :  nisn  rTjy?^ 
n2n"«n  n^'n'Dn  "^^Db  rr^D^To  Nm  ...rsb*»:)  DNn  nbpr:;.  Soit  dit  en  passant, 

il  n'y  a  pas  de  conclusion  à  rattacher  à  l'expression  Q">b^1  wJibw)  (cf.  Jelski,  Die 
innere  Einrichtung  des  qrosscn  Synedrions  in  Jérusalem,  p.  69),  car  elle  se  retrouve 
encore  à  une  époque  très  tardive,  dans  la  bouche  d'Abbaï  {Houllin,  lia]  et  de 
R.  Isaac  Napha  {Kiddouschin^  59  a,  bli^b  i:biSï<  nb3>"^0   ly  )D12T't). 

'  Yoir  Mischna  Bosch  Hasch.,  iv,  1  ;  ses  discussions  avec  les  Sadducéens  on  matière 
d'aiïaires  de  succession  (cl.  Baba  Batra,  W^b]  pourraient  bien  être  de  l'époque  anté- 
rieure à  Tan  70,  car  il  avait  déjà  à  ce  moment  une  certaine  autorité,  ci.  Mischna 
Sahhat,  xvi,  7,  xxii,  3,  et  j.  Subb.,  15  d,  au  sujet  de  son  séjour  de  18  ans  en  Galilée. 

^  Cf.  Sanh.,  32  *  :  b">n  ^^1nb  T"3">"1  nnJ<  riD""  Yn  nnX  ^bn  •  Va  à  la  suite 
du  meilleur  Bel-Din,. . .  de  l\.  Yohanan  b.  Zaccaï  à  Berour  IIa3il.  »  Le  paragraphe 
additionnel  :  b'TI  ^"1*33  "i-ïl  1"lî<  ...û'^n"!  bip  fi<*n,  provient,  comme  on  sait, 
d'un  autre  passage  et  s'est  glissé  dans  ce  texte  (et.  j.  Ketoub.,  25  ci. 

5  Mischna  Guittin,  v,  6  ;  cf.  Graetz,  IV,  note  2;  Rosenthal,  Monatsschrift,  1892, 
p.  2  et  suiv. 

•  Mxschna  Sanh.,  xi,4   :  ï-r53'^3'^  'l"33  Nb"l  "in-'^'^MJ  ^"33  Nb  IPiS  ^^l^'^^  l^^N 

y"^,  ^^11  D'^b'iîiT^n'j  bTi:in  i"2b  nnî^  \^byi2  Nbx. 

'  Cf.  Jelski,  /.  cit.,  p.  SI  et  suiv. 

8  l'os.  Sanh.,  viii  (éd.   Zuckerm.,  p.   427),  au    sujet    du  récit  concernant  l'ancien 

Sanhédrin,  dit  :  rT^n  ns^-^n  DOV  bN-«b?2:i  't  rT»r:u:D  pi^ii  "la  nU'bwN  n"wX 

ipT  hy  aO'T'  'THN  1112  •'3D721  lbN72's::73  r^^'j'p'^^  1^72^73  '\^2':i^^  nnwST  N35< 
"ipT  bO  mas  •'jD73  "|j'^73'^7r  «  H.  Eléazar  b.  Çadok  dit  :  Lorsque  R.  Gamliel 
siégeait  à  Jabné,  mon  père  et  un  autre  [sic^  se  tenaient  a  sa  droite  et  les  anciens  à  sa 


I 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE,  T)E  L'AN  70  A  L'AN  oOO  41 

l'ancien  modèle,  mais  il  me  semble  que  c'était  seulement  en  vue  de 
décisions  et  de  discussions  rituelles.  Vers  la  fin  de  son  patriarcat, 
les  rapports  avec  Rome  étaient  sans  doute  relativement  favorables. 
Il  avait  des  relations  tant  avec  les  Romains  dans  la  capitale  * 
qu'avec  le  proconsul  ^  et  son  cercle  d'action  semble  aussi  s'être 
élargi.  Le  gouvernement  lui  envoya,  paralt-il,  une  délégation 
pour  étudier  les  coutumes  et  les  lois  juives,  et  cette  mission  eut, 
en  somme,  un  résultat  favorable  ^. 

D'après  une  discussion,  sans  aucun  doute  postérieure  de  beau- 
coup à  l'événement  %  il  était  assisté  de  R.  Josué  ben  Hanania, 
exerçant  les  fonctions  de  Ab  Bet-Din,  lequel  avait  peut-être  le 
droit  de  prendre  des  décisions  en  matière  de  droit  civil  ^. 

Ses  autres  contemporains  et  les  membres  de  l'Académie  exer- 
cèrent également  un  pouvoir  juridique,  sans  qu'on  remarque  à 
leur  sujet  qu'ils  aient  eu  besoin  de  l'autorisation  de  Jabné.  Simon 
b.  Nanos  est  renommé  comme  un  connaisseur  très  distingué  de 
la  jurisprudence  ^.  R.  Ismaël  est  connu  comme  un  juge  incorrup- 
tible ^  Eléazar  b.  Azaria  —  dont  un  document  peu  sùr^  fait  un 

gauche.  Et  pourquoi  un  homme  se  tenait-il  près  de  l'ancien  à  sa  droite  ?  Pour  ho- 
norer l'ancien.  »  Le  second  «  à  sa  droite  »  indique  clairement  que  par  «  ancien  •  on 
désigne  Gamliel  ;  il  n'y  avait  donc  qu'un  seul  personnage  assis  à  la  droite  du  pa- 
triarche CtHN)  ;  que  signifie  alors  «  mon  père  et  un  autre  »  ?  Dans  j.  Sanh.,  19  <*,  on 
lit  T^HNI  N35<  •  mou  père  et  son  frère  »  ;  en  raison  de  cette  leçon,  je  propose  de 
lire  T^ TIN  iS3N  «  Abba,  son  frère  »,  et  je  rapporte  cette  expression  à  Abba,  le 
frère  et  gendre  de  Gamliel  (voir  Yebamot,  15  a). 

*  Voir,  au  sujet  de  son  voyage  à  Rome,  Si/'rè,  ^"py,  §  43  et  passages  parallèles. 

«Voir  Sanh.,  Ma  :   ^riw\  In:::b'»::73    r-iTiJn    brûb  "|br;\D  :i"n3   r-io:'72i 

fc<'^"n03,  et  Baia  Kamma,  p.  83  a,  et  passages  parallèles  au  sujet  des  choses  permises 
au  ^"~\  rr^lD  en  raison  de  ses  rapports  ol'ticiels  avec  le  pouvoir,  rniDb73b    'j'^3Tip. 

>  J.  Baba  Kamma,  4  b  :  mTo'^b  t-nr^T^nûir^o^^  "'DUî  niDbTD  nnb'::'::  ii'::yi2 
...bN'«b7û;  pn73  nmn  ;  babu,  ib.,  38  a:  biTN  J-iyc^rr  ^bciTo  nnb'O  "inm 
bNnuî"^  ■^7:5n. 

'*■  Ibid.^  lib,  il  est  dit  (|ue  Gamliel,  voulant  affranchir  son  esclave,  ne  fit  pas  la 
chose  régulièrement  :  1"3"N  yUîirr^  '"1  Nm  "l"3  "^DD^  &<bn  j^"l  iDN'13.  A  quoi  ou 
ajoute  que  le  cas  de  K.  Gamliel  doit  être  distingué  des  autres,  car  ce  n'était  pas 
devaut  le  Bet-Din.  A  celte  observation  il  est  répliqué  que  cependant  R.  Josué  était 
Ab  Bet-Din.  Voir  encore,  à  ce  sujet,  j.  Schebouot,  36  c. 

'  Bapoport,  Erech  Miilin,  s.  v.  1"DN,  p,  2,  attribue  au  Ab  Bet-Din  des  pouvoirs 
en  matière  de  jurisprudence  civile,  tout  en  ne  teuanl  pas  compte  de  ce  passage. 

8  Voir  la  sentence  de  R.  Ismaël,  Mischna  B.  Batra,  x,  8  :  pioy^  û'^DJl'^O  ni£"l^ïl 

■"S^m  piD^b  riiTT^rri   ^^-n   hM^  ^-\^^\n':^  3>ii:p73  *;\\o  r-n3i737a   ■'2"«n3 
^  Ketoicbot,  105  a  :  niujwSn  N"ia:i   Nirt"  rvb  \n"'\x  :5>":i"«bwX  12  b.X5>7o\a"»  'n 

Nmb  ^b  NDb"«OD  b"N  -«b  n"^î<  N^T  b"N  nn  (cf.  encore  Guittin,  58  a  :  5<b 
bN"l\2î"^3  rr^mn  nm!!^  "ly  ti^'û'$^'ï2  tl^lZ'^  "I^TT).  Le  passage  de  Baba  Kamma, 
80  a,  où  il  est  dit  de  R.  Ismaël  que  sa  maison  paternelle  périt  parce  qu'ils  pronon- 
çaient en  matière  civile  isolément  (T^rfS  mD173?3  "D'^T  X^T\)  est  digne  de  re- 
marque. Toutefois,  dans  ce  passage  il  faut  préférer  la  leçon  "^"TIT^  'J13^72UJ. 

8  j.  Berach.,  1  d  :  Y^  IT^D  3i<  imN  '13''73  (voir  encore  Jelski,  l.  c,  p.  34  et  s. 
et  la  note] . 


42  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Ab  Bet-Din  —  prononce  un  jugement  dans  la  cause  de  Boethos  qui 
est  portée  devant  lui  *.  Dans  une  discussion  avec  Eliézer  *  b.  Hyr- 
kanos,  ses  adversaires  invoquent  une  décision  qui  remonte  peut- 
être  à  une  époque  plus  ancienne.  Une  déclaration  digne  de 
remarque  est  celle  de  Tarfon  ^  qui  recommande  de  ne  pas  porter 
les  litiges  devant  un  tribunal  païen  ;  lui-même  résout  des  ques- 
tions juridiques  qui  lui  sont  adressées*.  Ce  cas  arriva  encore  plus 
souvent  à  son  illustre  collègue  Akiba  ^  qui  paraît  aussi  avoir  joui 
d'une  légitime  considération  comme  juge  ^ 

Pendant  les  grandes  insurrections  qui  se  terminèrent  par  la 
révolte  et  la  soumission  de  Bar  Gochba,  les  droits  des  Juifs  furent 
certainement  restreints  en  ce  qui  touche  l'administration  de  la 
justice.  L'ordination  fut  défendue  sous  peine  de  mort ',  et  très  peu 
de  rabbins  purent  la  recevoir  secrètement.  R.  Simon  b.  Gamaliel 
—  le  nouveau  Nassi  —  eut  d'abord  à  souffrir  beaucoup  de  désagré- 
ments de  la  part  des  autorités  romaines  s,  mais  il  put  bientôt  pro- 

»  Baha  Mccia,  63  a  :  lîliu:  nO>'0  'J"'3'1T  p  OlP-^n^  l'.'CiyiZ  ri^IITl^  -|"J< 
ÏT'IT;-'  *J3  î<""1  C"^  '^.'ZJ2,  et  Tos.,  ibid.  (éd.  Zuck.,  p.  379)  et  Mischna  B.  21.,  v,  3  : 
D'^^^Dn  L."y  nor  Y'^M  p  Din"'^  ^m  ^Dl.  Au  sujet  de  ses  rapports  avec 
Boethos,  voir  encore  B.  Batra,  13  ô  :  ...l-^ilT    \2    Din^DD    irCVlZ    ï-îlin^   "l"N1 

»  Mischna  B.  Batra,  ix,  7  :  -^^ab":;  1):i<n  ïl^3>72  hTr^^N  'nb)  1?  n^wS 
♦..t^^'lS'l  riî^  l?3'^'^p1  ...bSTl,  décision  de  rAcadémie  datant  peut-être  encore 
d'avant  l'an  70, 

»  Cruittin,  88  a  et  passages  parallèles  :  r;nXO  ÛlpTD  DD  n^lN  IIDnz:    'l  Ï^'^H 

•jîlb  ppTîlb  ;  une  autre  leçon  porte,  il  est  vrai  :  T^i<;3  'l- 

*•  On  connaît  la  décision  qu'il  rendit  à  Lydda,  Baba  Mecia,  49  b,  et  il  est  ca- 
ractéristique que  les  marchands,  mécontents  de  lui,  lui  dénièrent  le  droit  de  pronon- 
cer des  jugements    dans  cette  ville;  cf.   encore  B.  Kamma,  103  b  :  T>Sr!3    î^'w^T^ 

liD^'j  '1  ''isb  Nan  ...û^n  ^52  "«ro:?:  npbo  'rnwX. 

N3">p:?  "^3"!  DN  lbi^'01,  Muchna  B-  Kamma,  viii,  6:  m:N"i  :i"-.Sw  nnï<D  r:w:';2T 

T1T  m^îT:  'T  rib  in^b  in-«-«m  r^n^p^*  "^nn  ^izh  t^^:i  -^r:::!  r:*:;wsn; 
Mischna  Nedarim,  ii,  w  :  nn^PD  r^rT^n  ïiNsn  inci^?:  mr^  'iMwSn  ï-icrT:"! 
^•v^usn    *-i3"û    "iDiTD    ï-inwN  ib^DkN   M.t^n^pi*  'n  "^^sb    t>i2i  "j-^-n    'Sn. 

11  est  intéressant  que  ce  dernier  passage  soit  une  allusion  à  un  événement  de  la  vie 

dWkiba,    cf.  j.  Sabb.,  Id,  au    sujet  de  la  femme  dWkiha  :  Nn:''"'bp7:   N:3T7û   nîn 

^<nmwX3  -^yb  Nim  rr^b  Narrai  «\r^-n. 

«  J.  Sa>ih.,  18  A  :  mr?  rT^Tj'.p  'j-«^i?2  ^3*3  Stn  c!  ^3  wSir:  •!::  t{3;^pr  'n 
n^tpy  "^iîb  ^<b^  'rr  ■'-Db  ^^n7:ir  szpn  "^tj  ^:2b  1■^?^T'  mn  ï-r^b  n?:N 
rjDT^  p. 

"  Voir  Sanh.,  14  rr.  au  sujet  de  Juda  b.  Baba  et  des  cinq  (plutôt  six)  docteurs  qui 
reçurent  l'ordination. 

**  Taatiit,  29  «,  on  raconte  que  R.  Gamliel  fut  persécuté  par  les  Romains  et  ne 
fut  sauvé  que  grâce  au  dévouement  d'un  grand  romain;  cependant,  au  lieu  de  R. 
Gamliel,  il  faut  sfiremcnt  lire  Simon  b.  Gamliel  (cf.  Gra^tz,  IV.  noie  18).  Ces  con- 
fusions ne  sont  pas  rares,  cf.,  y^ar  exemple,  Ab.  Zara,  20a  :  '5'2'w'"3  ï~îC^?3 
rr^a^î  n^3  r;bi*?3   "^3:;  by   rrrriJ,  ou  il  faut   lire  5"n  ;  j-  i^->id..  40c,  et  Mischna 


LKS  JlTiKS  JUIFS  EN  PALKSIIMO,  hK  lAVN  To  A  L'AN  '.m  -'«S 

céder  à  la  convocation  du  Sanhédrin  à  Ouscha,  où  des  questions 
juridiques  furent  également  débattues  K  Du  reste,  Simon  b.  Gam- 
liel  rendit  souvent  des  décisions  en  matière  de  droit  civil  *  aussi 
bien  que  ses  collègues,  sans  que  nulle  part  il  soit  question  d'un 
tribunal  central  jusqu'au  moment  où  l'Académie  d'Ouscha  exerça 
son  action  ^.  Parmi  les  contemporains  de  notre  Nassi,  nous  trou- 
vons d'abord  R.  Yosé  b.  Halafta,  qu'il  tenait  en  grande  estime, 
s'occupant  de  questions  juridiques*.  Par  contre,  à  l'époque  de 
Simon  b.  Yohaï,  le  droit  de  juger  en  matière  de  questions  d'ar- 
gent fut  aussi  enlevé  aux  Juifs  ■•,  ce  que  Graetz  rattache  à  la  révolte 
qui  aurait  eu  lieu  sous  Antonin  le  Pieux  ^. 

Eroîibin,  vi,  2,où  ilt  aut  aussi  remplacer  ^""i  par  5"312)*1,  suivant  la  baraïtab.,  68  3.  — 
Ib.^  le  patriarche  est  appelé  ûH^nr»  b>'3;  Abr.  Krochmal,  Scholieii  mm  babl.  Talmud^ 
dit  que  ce  mot  est  mis  ici  pour  Ûnn  «  sceau  >,  qui  était  l'insigne  de  la  dignité  de 
patriarche,  et  nous  trouvons  le  patriarche  Juda  III  en  possession  d'un  anneau  pré- 
cieux (cf.  Moed  Kat.^  12  6  ;  Uroubin,  69  a].  Cf.  aussi  la  remarque  ingénieuse  de  Jelski, 
.  cit.,  p.  'îS,  note  2. 

*  Au  sujet  des  dispositions  qui  y  furent  prises,  voir  Ketonb.^  50a;  j.  ibid.,  28  i  : 

Remarquons,   à  ce  sujet,   ce  qui  est  dit,  h.  ibid.  ;  bi<    T3T372Î1    Ij'^pnn    t*<i'J1î<a 

KbT  ':j7:n^  nnv  ?3T2b  ujpn'^  in&<3  Tv^v*i2  ...•::):nt3  "nnv  T^Tn-» 
^T^yj  '-1 135DT  ninn  ...33':j'«  '^  inb  -«nT^N-i  nnu:-^  'n  i3?3-i  i-i^nn  ib  n'^:n. 

Dans  la  première  partie,  le  mot  lïiN  est  décidément  étrange.  Quand  on  dit  de 
quelqu'un  32^"^  'n  1572T  TT^inn,  ce  n'est  plus  un  anonyme  quelconque.  Je  ne  crois 
pas  me  tromper,  en  lisant  ici  "ilTINS  •=:  Elischa  b.  Abouya.  Nous  savons  que  son  père 
faisait  partie  des  gens  riches  de  Jérusalem  (cf.  j.  Rag.^  11b]  ;  le  fils  devait  donc 
aussi  avoir  eu  do  la  fortune.  Je  ne  voudrais  pas  me  prononcer  sur  la  question  de  sa- 
voir si  "IJIN  a  été  transformé  intentionnellement  en  ^riN,  afin  de  ne  pas  attribuer 
à  un  apostat  une  intention  si  généreuse.  — Cf.  encore,  pour  ce   passage,  j.  Pea,  9  h  : 

SN-^b^ij  p^  nb  nb'vij    vdidd  b^D    p-^bn!!-!  "i^i^t:    nnuîi    '-i3-   nc:^'^; 

le  fait  que  ces  docteurs  habitaient  déjà  Ouscha  avant  l'assemblée  du  Sanhédrin  est 
déjà  indiqué  par  j.  ibid.  :  N^lJ^b  X:\''\y^    Nb   :\"ni-  Cf.  encore  la  note  3. 

2  MiscimaB.  Mecia,  viii,  8  :  ^1^3^72  NDi  ...yn^i):  nD"c:uî  TH^sn  mci:^  nuji'?: 

3  Cf.  eacore  Baba  Batra,  28  b  :  b^r'^^MJ"'  'n  i^'OlwN  ^IDbirt  \iXn  ;  il  y  eut  donc 
antérieurement  déjà  des  synodes  à  Ouscha.  Pour  l'époque  postérieure,  cf.  ihid.,  146  a 
au  sujet  de  cadeaux  de  noce  :  "^ssb  rrr^::!!  "lUJ  NHi^  'H  nb^H  t^^bn  y\^ 
NWiNb    d'^)D!Dn.  Quant  à  l'époque  de  ce  R.  Aha,  cf.  Ketouhot,  88  (^  :  t^ni<  31  "1)35< 

*  Cf.  le  passage  de  la  Mischna  cité  à  la  note  2  ;  Tos.  Maccot,  i,  3  (p.  438)  :  *i:2'»î3 
fnnTGlDïn;   mais  particulièrement  j.   Sanh.,   18a  :   "JinN  Nnabn    13    "^Ol"^    "1 

■^3wS  "jib  n73wN  r-imn  ]^^  lis^inu:  sn^To  b:^  ...ï-rrjip  ';^T^73  02  nn  in^ 
insb  n}:N  i<3'7  1112  ^li^j-^br  '[■^bnp?^  ...n^in  i^t  i'Ti^  -^3^^^. 
»  J.  Sanh,,   2ib  :  bwSnuj-^T^    m^iT^?:    -«2^1    ibz::    inT    p    '>u"-)     -^^j-^a 

ITT'?^     Û^lDn    N^-^b"!    N27an"l   T«n3   ■"'^''^J'-IwN.  h  est  à  remarquer  que  R.  Simon, 
qui  fut  tant  persécuté  par  les  Romains  (cf.  Sabb.,  33  b),  était  le  fils  d'un  homme  qui 
paraît  avoir  été  en   relation   avec    le  gouvernement  [Pesakim,  112a),  et  que  son  tils 
fut  au  service  de  Rome  (cf.,  plus  loiu,  au  sujet  d'Eléazar  b.  Simon).' 
^  Geschichte  d.  Juden,  IV,  note  20. 


44  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Nous  ne  savons  rien  de  précis  des  relations  du  patriarche  Juda  I 
avec  l'autorité  romaine,  le  conimerce  qu'il  aurait  entretenu  avec 
l'empereur  ayant  été  contesté  *.  Peut-être  pourrait-on  trouver 
des  traces  d'exactions  commises  alors  par  les  Romains  *  ;  mais,  en 
général,  le  patriarche  semble  avoir  joui  de  pouvoirs  étendus  et  les 
relations  entre  les  Juifs  et  les  païens  paraissent  être  devenues 
plus  étroites  *.  Juda  Ha-Nassi  procéda  au  remaniement  définitif 
de  la  loi  du  Sikarikon*  et  prononça  encore  d'autres  arrêts  de 
droit  *.  Il  faut  faire  ressortir  surtout  qu'à  partir  de  ce  moment, 
l'ordination  ne  pouvait  être  conférée  que  par  la  maison  du  pa- 
triarche '^  et  que  les  communautés  instituaient  leurs  juges  sur  sa 
recommandation  '.  Du  reste,  Juda  établit  pour  leurs  votes  une 
règle  fixe  ^,  mais  il  semble  cependant  qu'alors  aussi  —  comme 
pour  le  cas  du  Sikarikon  —  l'Académie  se  constitua  en  tribunal. 

»  Cf.  ihid.,  note  23. 

2  Cf.    B.   Batra,    Sa  :   ÎT^^^pb     IHw^    N^^-Jt^     lî^CI    Nb^b:D    ^fZl    t^lï^ï^^ 

•«sn^  ;  »it<^.,  i43fl  :  i5"naDNi  -«yn^N  î<r>b?3  ^3^   -n'^iî^  «b^DS  1721  N"inn 

■^H"!  *173N.  Cf.  aussi  Pes.,  112  è  :  parmi  les  quatre  choses  que  Rabbi  recommande  à 
ses  fils  0^7211  V^  ^"niy  nnnn  b^T  ;  la  formule  ^b  inD'vi:?:  &<^:b-I  appartient, 
il  est  vrai,  à  une  époque  postérieure.  Il  faut  aussi  remarquer  sa  recommandation  à 
son  successeur  [Kctoub.,  103  b)  :  Qi73*73  ^nt<'^u53  MMS  «  Exerce  le  parlriarcat  au 
moyen  de  la  corruption  »  (suivant  la  leçon  de  Raschi  et  de  l'Aruch).  L'inauthenticité 
de  celte  expression  ainsi  que  de  celle  qui  suit  Û'^'T^?3bn3  H*112  p1"lT  «  répands 
la  terreur  sur  les  disciples  »  me  paraît  certaine  ;  ces  paroles  ont  dû  être  mises 
dans  la  bouche  du  patriarche  mourant  par  quelque  malveillant  (peut-être  S"iDp  "ID^ 
afin  de  faire  connaître  que  les  principes  du  patriarcat  [ibid.,  mî<"^Ui3  "^"llDi  étaient  la 
sévérité  et  la  corruption.  —  Il  est  possible  aussi  qu'au  lieu  de  Q'^7û^3.  on  doive  lire 
C^TOTH^,  •  à  Paide  des  Rornains  ».  Pour  les  rapports  de  Rabbi  avec  les  Romains, 
il  est  caractéristique  qu^il  n'était  j^uère  au  courant    de   leurs  usages;  voir    B-Batra^ 

164  J:  û'^nuî  i^aiTD  r!2u;  Y-'^  ^t  r-T?:^^^  bo  n:\n372  lp  -^a-ib  i-^s",!  b"Nr 

'  C'est  de   cette  époque  que  date,  sans  doute,  Texpression  [Tos.   B.  Mecia,  v,  20, 

p.  382;  j.  t3/</.,  10c)  :  Sn-t:j-»  ^137:0  "^i^  ...t*^D-i"TJ'^DwX  ^15   T>:^'::  bi<i^\ 

*  Cf.  Mischna  Gîiittin,  v  [Tos.,  p.  328)  :  DN^  1j73:1  n""'3  n"'C"in  ■'3"1 
lain  3""^  llp'^'lpDïl  "^DD^  ïnnMO.  L'éd.  de  Cracovie  du  Talmud  de  Jérusalem 
porte  ^"3  2'^'wTn  i'IUTÏT^   'H,  ce  qui  est  une  fausse  transcription  de  "^"DT- 

*  Cf.,  par  exemple,  j.  Schcb.,  37a  :  "^Dl  i^cb  N3  ïlC^Tû,  où  il  s'agit  de  ques- 
tions de  prêt;  j.  Ketouh.^  25a  :  "^a^  "^^DD  ND  r:w53?73,  où  il  s'agit  de  droit 
matrimonial  ;  ibid.^  34  r,  est  douteux,  parce  que  ^("DUJ"!  est  désigné  comme  *7j'^pT  ; 
j.  B.  M.,  8r,à  propos  d'une  trouvaille  ;  9  c,  à  propos  d'un  dépôt  :  b.  B.  il/.,  73a, 
R.  Ismai'l  l'entretient  d'une  décision  concernant  des  achats  et  ventes. 

«  J.  Sanh.,  19  a  :  iiTH  vT^T^bn  pwN  ï-i37i7:  ^HwNi  nriN  b^  n^n  n:rw\x"ia 
VN  N"«;2:2r!  r-i3>ib  «bu:    n:70'::    n''-^^   'i-i?2wS    riTn  n^ab  nns   ipbm 

"^1373  Vy^'û    (voir   pour  l'époque    postérieure,    Yoma,    78  a  :  "^sb    ITT^in    riT  "^DT 

'  Sur  la  demande  de  la  communauté  de  Simonis,  Rabbi  lui  envoie  Lévi  comme 
juge  ;  cf.  j.  Yebam.^  13a,  et  passages  parallèles. 

»  6'flnA.,  30  a  :  '^bnr\i2  Tin  n"»!  \n:?3t  -«inni   N3^37:?3  N^n   wn:n*  m  n7:N 

^^25"^^ 3  ;  d'après  Uuittin^  59  a,  cela  se  rapporte  au  vote  concernant  la  loi  du  Sika- 
rikon. Il  est  quelque  peu  surprenant  que  Rab  fût  adjoint  au  vote  quoiqu'il  n'eût  pas 
reçu  l'ordination  ;  son  ordinatiou  —  d'ailleurs  incomplète  —  n'eut  lieu  qu'avant  son 
départ  pour  la  Babylonie  ;  voir  6'a»A.,  5  a. 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE,  DE  L'AN  70  A  L'AN  500  45 

Un  contemporain  de  Rabbi  —  R.  Eléazar  b.  Simon  —  présente 
l'administration  de  la  justice  à  cette  époque  sous  un  jour  très  défa- 
vorable et  blâme  les  juges  qui  infligeaient  injustement  des  châ- 
timents corporels  *.  On  sait  qu'Eléazar  consentit  à  faire  pour  le 
gouvernement  romain  l'office  de  bourreau  *,  et  il  s'est  formé  à 
son  sujet  la  légende  que  même  après  sa  mort  il  a  encore  rendu 
des  arrêts  ^.  R.  Ismaël  b.  Yosè  —  qui  fut  aussi  quelque  temps  au 
service  des  Romains  *  —  fut  le  modèle  de  l'incorruptibilité  *  et, 
suivant  toute  apparence,  un  juge  très  recherché  ^. 

Le  successeur  de  Rabbi,  Gamliel  III,  était  tout  à  fait  sous  l'in- 
fluence des  docteurs  et  dut  aussi  faire  des  concessions  à  l'Acadé- 
mie au  sujet  de  l'ordination  \  Cependant,  au  dehors  il  était  res- 
pecté comme  un  grand  dignitaire  ^.  Le  directeur  de  l'Académie, 
sous  son  patriarcat,  R.  Hanina  b.  Hama,  est  souvent  nommé 
comme  juge  »,  et  l'ami  de  Rabbi,  Hiyya  le  Babylonien,  est  égale- 

«  5aW.,  139  a:  ûir-^nr;  tb^  û"'r\a-i  ÏTJ72  ...iiy^û^a  '-13  ti"-i  ût::72  \\b>jU3  -l"N 
ûn^iTnb  bpTD   T>a3>3^,  et  Sanh.,  98a:  '\^yl2^  '13  N"-|  ûiu:7û  ^Nbwu:  n"N 

b^nW^T:  Ûi-i::iUJl  Û-^UDITD  b^  ^b^^X  ^y  N2  in  p  ';"^t<.  H  est  intéressant 
qu'on  représente  l'état  de  choses  à  Babylone  à  celte  époque  comme  voisin  de  la  bar- 
barie, cf.  Ouittin,  14  3,  etj.  Kidd.,  64  a,  où  on  raconte  que  R.  Ahaï  b.  Yoschia  envoya 
un  jour  deux  de  ses  collègues  à  Nehardéa  pour  encaisser  de  l'argent  et  que  ceux-ci 
coururent  un  danger  de  mort;  il  faut  encore  noter  que  R.  Ahaï  lui-même  paraît  avoir 
été  enseveli  dans  le  voisinage  de  Nehardéa,  voir  Sabb.,  152  b. 

*  B.  M.,  83  5  :  ^n::  0"^Dn   t<pi    pS^^JUJ    '-13  niybi^  'nb  ï-rvnt^.  Cf.  Graetz, 
(2«éd.),  IV,  p.  227. 

*  73.,  84  3  :  n^nbTû  -i7:t  !-i\nb?3  -172  -i72N  î^^ib  -«-in  -^n  \nN  -nn  ^^ 
a'^'^n  rTn&<  "^^ibs  uj-it^  i-i-^'n-^byn  xb-p  p^ss. 

^  B.  M.,  ibid.  :  r^-ib  ï-Toy?2  ^sn  ^"D  N-J7:  "'Oi"'  'hd  bx^'^û'C'^  'n  qi<r 

5  Ketoub.,\<ddb  :  '^n'^^^2   rTim    !-I-'0"'-li<   b^^-l  ï-nïl   ^OT^    '-12    bN3>72U:"'   n 

V3''"'ipi  pam  "^TiT  nn-it?  '^b  NDb"^OD  b"t<  "^b  n^i^  Nri  ...rr^b. 

^  J.  Sckebouot,  37  fl,  au  sujet  du  fermier  de  Bar-Zaza  qui  conBa  à  quelqu'un  une 
livre  d'or  ;  cf.  aussi  B.  M.,  73  a,  et  B.  Batra,  59  3,  au  sujet  de  discussions  entre 
voisins;  Sanh.^  29  6,  au  sujet  du  testament  d'un  homme  surnommé  a'^DwîT  N"1333' 
"nS^lî^  «  la  souris  couchée  sur  des  dinars  ». 

^  Selon  moi,  la  suite  de  l'expression  de  j.  Sanh.^  19  a:  NbOT  .••l^'^pnm  1-lTn 
n"">3   nyn73    Nbt<    !nD7273   iS''':::^    Nrr^,   se   rapporte  à    son   époque. 

*  LMnsigne  de  sa  dignité  était  peut-être  la  clef  d'or  qu'il  avait  l'habitude  déporter; 
voir  j.  /Sa33.,  Sa  ;  -iT^n  sriT  bw  nnD7:T  .,»b->->ub  in"^  "^n-in  :\"-|.  Voir  encore, 
au  sujet  des  honneurs  rendus  à  ses  fils  à  Caboul,  Semahot,  viii,  où  il  faut  évidem- 
ment lire,  au  lieu  de  bnnb  "^NDT  pb,  bl^Db  *'NDT  'nb  ;  voir  à  son  sujet, 
Vayikra  Babba,  xx,  rn7D  "^-inj^  au  début,  et,  au  sujet  du  séjour  des  fils  de  Gam- 
liel à  bn^D,  Pesahim^  51  a. 

®  J,  Ketoub.,  2o3,  à  propos  de  questions  de  droit  matrimonial;  de  même,  ibid., 
29  3;j.  B.  M.,  12c,  à  Sépphoris  au  sujet  d'une  maison  ;  j.  Gittin,  45c?,  au  sujet 
d'un  esclave  fugitif;  B.  Batra^  126  3,  à  propos  d'allaires  de  succession  ;  ibid.,  164  3, 
on  lui  présente  un  UTIDD  ^JH  avec  la  mention  de  l'année  du  règne  de  l'àpycov.  Le 
contexte  indique  un  àpycov  païen  (comme,  par  exemple,  j.  Berachot,  9  a  :  '^^y 
^iTOpTO  Dp  Nbl  NilD'l'N)  ;  cependant  il  est  peu  probable  que  dans  la  rédaction  d'une 
lettre  de  change  on  ait  parlé  de  la  date   d'entrée  eu  fonctions  d'un  proconsul.  On 


46  Rb:VUK  DES  ÉTUDES  JUIVES 

ment  désigné  comme  tel  '.  Rabbi  Yonathan  était  aussi  connu 
comme  un  bon  juge,  et  sa  valeur  fut  même  reconnue  par  un  Ro- 
main *.  On  cite  aussi  des  arrêts  rendus  par  d'autres  disciples  de 
Rabbi,  par  exemple  Bar-Kappara  et  le  père  de  R.  Hoschaya  ^, 
Josué  b.  Lévi  *,  ainsi  que  R.  Banaah,  qui,  ayant  été  accusé  auprès 
du  gouvernement,  obtint,  par  l'habileté  de  sa  conduite,  son  acquit- 
tement et  l'autorisation  de  TEtat  à  juger  ^  ;  R.  Yolianan  aussi 
possédait  peut-être  le  droit  d'infliger  des  peines  corporelles  ^. 
C'est  à  cette  époque  qu'appartient  aussi  Isaac  b.  Hakoula  \  qui 
rendait  des  sentences. 

Nous  arrivons  maintenant  à  la  période  des  Amoraïm  et  nous 
devons  faire  remarquer  ici  que  les  exilarques  de  Babylonie  pa- 
raissent avoir  eu  une  compétence  plus  étendue  que  les  patriarches 
de  Palestine.  Les  exilarques,  ayant  une  position  officielle,  ont  dû 
exercer  le  pouvoir  judiciaire  ^  et  prononcer  même  de    graves 

sait  qu'il  y  avait  aussi  hors  de  Palestine  des  archontes  juifs  (cf.  Schurer,  Gemein- 
dtverfassung  der  Juden  in  Ro7n  (Leipzig,  1879),  p.  20  et  suiv.,  et  ibid,^  p.  23)  et 
que,  d'après  une  source  ancienne,  leur  élection  avait  toujours  lieu  en  Tischri. 

1  R.  Hiyya,  Sanh.,  p.  5«,  dit  de  lui-même  '•\-^r\^':i  m517372  "^n  p  Î<3N  115D  ; 
voir  au  sujet  de  son  activité,  B.  B.,  59  h^  à  propos  de  querelles  entre  voisins,  B.  M., 
17  fl,  dans  le  procès  de  OIj'^"))^  '"i3  "^iSnnUÎ  avec  sa  hru  (aussi  dans  j.  Scheb.y 
37  a);  j.  B.  M.,  12c,  au  sujet  des  deux  partis  dans  l'Académie  ;  j.  Scheh.,  37  rf,  au 
sujet  du  dépôt  confié  par  le  fermier  de  Bar  Zaza  ;  j.  Sanh.,  18 i,  R.  Yohanan  se  pré- 
sente devant  lui  pour  une  aiïaire  personnelle  et  Hiyya  s'adjoint  un  de  ses  disciples 
pour  rendre  l'arrêt. 

*  Cf.  j.  B.  B.,  13  c  :  !mm  ^•^J2^^  ^n  l?:n  i^im  niNna  1^^î^  Nirr  ]r\:v  'n 

fc^TirT^T  "jirîrîbN  ^"^na  ^UH  p53  „X3  nn  Nirr  n^b  ;  la  même  chose  est  racontée 
un  peu  dill'éremment  dans  b.,  (iO  a,  de  R.  Yaimaï,  sans  qu'il  y  soit  question  toutefois 
des  Romains. 

^  J.  Scheb.,  37  1,  dans  le  procès  de  R.  Marinus  avec  sa  bru  devant  R.  Marna,  père 
de  Bar  Kappara,  et  R.  Hoschaya, où  il  faudrait,  au  contraire,  lire  R.  Hama,  père  de 
R.  Hoschaya,  et  Rar  Kappara,  comme  ailleurs,  par  exemple  j.  Nidda,  50  c. 

*  Voir  j.  Guittin,  45  rf,  Josué  b.  Lévi  avec  R.  Hanina  au  sujet  d'esclaves  fugitifs  ; 
c'est  aussi  en  compagnie  de  ce  collègue  qu'il  se  rendit  à  Césarée  chez  ràvO-JT^axo; 
(cf.  j.  Ber.y  9  a),  qui  lui  témoigna  beaucoup  d'égards. 

"  Cf.   le  passage  intéressant  de    B.    B.,  58  fl,  à  sou  sujet  :   ^"2    N:i'"iip    "îb^i^ 

«bm  "^^riD  wNbn  v::^^^)^  t^^i^:?:  p^^)3  Np^  \N'nrT^D  "in  ^*::\N  -^n^rN  t^Db» 
li'i'^iT  wNnnM  nn^b  \NrT  "^biD  D^^m  b\sir;  inT:^  ...irnu^nn  irn^n.N  -^^-^12 

NS'^T.  Lo  même  reproche  fut  adressé  à  peu  près  à  la  même  époque  à  R.  Schila, 
Berach.,  58  fl  (sans  doute  à  Nehardéa,  cf.  Ycb.,  121  a)  :  5^n3i  "^N^b  rT^^T^!;  Nb"^"»:;  1 

Npn  \N^ir;^n  î^nn:,  ^n  5«n\N  n^wN  NDb?:  "^n  Ni:-np  br^s  bîwX  r\^n:ii2  b^yzii 
ND?3-ir;  Nbn  Ni^i  i^n. 

^  Voir  j.  iVfl,  15  rf,  où  R.  Yonallian,  chcrciiant  ù  exhorter  quelqu'un  .i  remplir 
ses  devoirs  de  piété  filiale,  R.  Tannai  lui  dit  :  r;■'J^n■^Dr  Nb  m'':!  «  pourquoi  ue 
l'y  forcez-vous  pas?  .  ;   cf.  avec  ce  passage  Kttoub..  i\ib. 

'  Voir  j.  B.  Batra,  \'ib,  ù  propos  de  troubles  causés  par  les  voisins. 

«  B.  Kamma,  58  3  :  -^b  r:72b  rTwNDncT  Nn  i\'<"'^  NPib:;  um  "^^i. 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE,  DE  L'AN  70  A  L'AN  SOT)  W 

peines  corporelles*.  Cependant  le  patriarche  Juda  JI^  le  fils  de 
Gamaliel  III,  avait  aussi  des  pouvoirs  étendus,  ce  qui  s'explique  si 
nous  admettons  avec  Graetz  qu'il  était  l'ami  de  l'empereur 
Alexandre  Sévère  ^.  —  Il  avait  sans  doute  aussi  des  insignes  de  sa 
haute  dignité''  et  pouvait  faire  procéder  à  des  exécutions  par  ses 
gardes  du  corps  ^.  —  Cependant,  à  une  certaine  époque,  il  paraît 
avoir  eu  beaucoup  à  souffrir  des  exigences  du  gouvernement  \  Il 
chercha  à  se  tirer  d'affaire  en  chargeant,  contre  tout  usage,  les 
docteurs  d'impôts  %  bien  que  les  Romains  eux-mêmes  affran- 
chissent les  docteurs  juifs  comme  leurs  propres  savants  ^  de  toute 
contribution*.  Par  ces  procédés  et  surtout  par  son  népotisme  en 
ce  qui  concerne  la  nomination  de  fonctionnaires  et  de  juges  in- 
dignes ",  il  se  rendit  impopulaire  chez  beaucoup  de  docteurs.  — 
C'est  aussi  à  cette  époque  que  Simon  b.  Lakisch  a  dû  prononcer 
son  arrêt  de  condamnation  contre  les  juges  *". 

La  première  place  parmi  les  docteurs  de  cette  génération  re- 
vient à  R.  Yohanan.  Il  jouit  d'une  grande  considération  comme 

*  Voir  Sanh.^  27  a,  où  il  est  dit  que  l'exilarque  voulait  faire  crever  les  yeux  à  un 
meurtrier  présumé;  au  sujet  delà  considération  dont  il  jouissait,  voir  j.  Ber.,  it,  10  : 

u:'in  i&<  n:j3p-iN  ^ui-p  NDb?3  ^'^^'p  b^b:?  1^)3  nn72wXT  ...nmi  rr^-^n'-i  -i)jî< 

Nnibi;  (cf.  aussi  Schebouot,  6b,  et  j.  itt  loco]. 

*  G.  d.  /,,  IV,  note  23.  Je  liens  encore  à  appeler  l'attention  sur  le  passage  si  inté- 
ressant de  VHi&t>  Aug,  Alex.  Sev.,  ch.  xlv  (cité  par  Th.  Reinach,  Textes  des  au- 
teurs grecs  et  romains  relatifs  au  Judaïsme,  p.  349)  :  «  Dicebat  grave  esse,  cum  id 
Christiani  et  Judaei  facerent  in  prœdicandis  sacerdotibus,  qui  ordinandi  sunt,  non 
fieri  in  provinciarum  rectoribus.  »  M.  Reinach,  note  1,  pense  aux  «  membres  des 
synhédrins  locaux  ».  —  Il  faudrait  aussi  rapprocher  de  cela  le  passajçe  d'Orig.,  ad 
A  fric,  14  :  yîyvsTai  ôè  xal  xpiTr,p'.a  ).£X-o6ôtw;  xarà  tôv  v6;j.ov  xal  ûi/.àî^ovxal  Ttva; 
Tùv  £711  T(o  Oavàxrp.  ..  Graetz  (ibid)  le  rapporte  à  Tépoque  de  Juda  Ili,  environ  en 
240,  peu  de  temps  après  la  mort  d'Alexandre  Sévère. 

*  On  sait  qu'il  avait  une  garde  de  Goths,  j.  Horayot,  il  a  :  UÎDnT^b  'j'^'^mS  tlbo 

'::V5  po"n  n^;  Ber.,  44  a  :  rmnnî^  "l'^Dib^n  rîwN"";:::  •'"-i  mu:?^  riirr  (soit  dit 

en  passant,  R.  Nahman  en  Babylonie  paraît  aussi  avoir  eu  une  garde  du  corps,  voir 
Kidd.^  33a:  INTl^  *TT12373  'J7jn3  1"!,  peut-être  les  gardes  du  corps  de  l'exilarque; 
nous  trouvons  aussi  des  serviteurs  goths  chez  R.  Abbahou,  j.  Yomtob,  COc).  Peut-être 
Juda  II  possédait-il  aussi  un  uniforme,  voir  B.  B .,  111  a,  où  R.  Yannaï  dit  de  lui  : 
"'i<'»  rr^nbir^T  ^J^i  "^rr^i^,  j.  Sanh.,  20  c,  R.  Hanina  l'exhorte  à  mettre  son  vêtement 
d'apparat,  alin  qu'on  puisse  contempler   t  le  roi  dans  sa  gloire  >. 

•^  i.  Keioub.,  33a:  r;^"^?^  p^DwNi  nN'i'::3  ■'"m  ^r\'2v  '^-«pb  \2  "::"-i  ■•n'^tî^; 
Nidda,  h-ia  :  N':;-ib3  m'^J  Hw^'^os  "«"nb  mTj.N  i3m^  'n  br^s. 

"  Voir  Ber.  R.,  78,  et,  au  sujet  de  son  caractère,  Weiss,  li'Jim  "m  "in,  III, 
p.  67  et  s. 

"^  et.  Kuhn,  Die  bûrgerlirhc  und  stâdtische  Verwaltnng  des  rômischeti  Reiches^ 
1'-  partie,  p.  83  et  s. 

*  Voir  les  ordonnances  y  relatives  (années  330  et  331)  dans  God.  Théod.,  titre  8,  §2. 
"  Voir  les  passages  cités  souvent,. 5rt«/^.,  7,  et  j.   liikkourim,  m,  3. 

'"  Sabb.,  139a  :  ibt<  û^D  ibN:;3   û:d"^dd  'J^pb  p  '0"n  nr:iJ2  w:^  n"« 


48  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

juge*,  et  ses  relations  personnelles  avec  les  fonctionnaires  ro- 
mains paraissent  avoir  été  excellentes  ^.  De  même  que  R.  Yohanan 
alla  consulter,  pour  des  affaires  personnelles,  ses  collègues  plus 
anciens  '\  il  vit  ses  collègues  plus  jeunes  solliciter  ses  décisions  *, 
et  il  était  souvent  requis  pour  des  questions  juridiques  ^  Cepen- 
dant il  faut  toujours  répéter  qu'à  cette  époque  encore,  il  n'est  pas 
question  d'une  instance  supérieure,  et  qu'il  n'y  a  pas  trace  d'un 
tribunal  général. 

Simon  b.  Lakisch,  qui  avait  des  juges  de  son  temps  une  opinion 
si  défavorable  (voir  p.  47,  note  10)  et  qui  approuvait  les  procédés 
un  peu  vifs  de  son  famulus  vis-à-vis  d'un  mannequin  érigé  en  juge 
par  le  patriarche  ^,  était  lui-même  un  juge  très  estimé.  Un  fait  ca- 
ractéristique au  point  de  vue  de  sa  situation,  c'est  qu'il  fut  consulté 
comme  juge  par  deux  familles  distinguées  de  Sépphoris,  à  propos 
d'une  affaire  qui,  il  est  vrai,  était  plutôt  une  affaire  d'étiquette  \ 

»  Voir  j.  Sanh.,  2\a  :  rT^-i2nb  lu  iTjN  N">:Drj3N:3  ]^i  iib  riiH  MJs  "12  ^^nn 

•^by  bnp?Û  n72N  ">""n  nW;  tàid.,  on  parie  des  N^mOTÛ  m5<D"13',  que  Simon  b. 
Lakisch  désigne  comme  n'ayant  pas  d'autorité;  Sanh.,  23a,  c'est  R.  Yohanan  qui 
montre  de  la  méfiance  à  leur  égard. 

«  Voir  j.  Ber.,  9a  : -133^  imcim  bnm  Nn'^D'isD  '^'Ki^'p  n-TT»  mn  i^nT»  'n 
p-^D^  Nirt  rr^^-iD^  n-^oiToin  rr'DiDD.x  iib  "i?2N  ...Dp  Nbi  n:i2-in. 

3  J.  Sanh.,  \Sa-b  :  nn  r>^:i^  :i^r\^^i<  nn-i  n^^n  'n  ^72^'p  1^T^7:  b->T&«  pnT<  'n 
T^wbn. 

*  J.  B.  B.,  16  b,  "Eléazar  et  Simon  b.  Yakim  lui  soumettent  un  cas  relatif  à  une 
affaire  de  succession  ;  B.  M.,  48  b,  il  rend  une  décision  dans  une  all'aire  commer- 
ciale où  était  engagé  R.  Hiyya  b.  Josef  ;  j.  B.  B.,  17a,  dans  une  alîaire  concernant 
une  sœur  de  Simon  b.  Abba  ;  j.  Sanh.,  21  c?,  R.  Lévi  (cf.  sur  lui  Bâcher,  A>jada  der 
palàst.  Amoràer^  II,  p.  7,  note  6)  vient  chez  Eléazar  au  sujet  de  l'achat  d'une  maison 
el  est  renvoyé  à  R.  Yohanan,  de  même  Eumachos  au  sujet  d'un  moulin. 

5  j.Ketoub.,  2Sd  :  ^"^^n  "{iT  ii^'p^y  b"wN  pm^  'n  "^arib  np^î  Nnpi:';  j.  B. 

Meçia,  Sb  et  64  i,  à  propos  d'objets  trouvés;  ibid.,  9c,  à  propos  d'all'aires  commer- 
ciales; j.  Kidd.^  60a,  à  propos  d'une  esclave;  ibid.^  62c,  à  propos  d'objets  mis  en 
gage  ;  ^.  Batra^  143  a,  etj.  B.  B.,\la,  à  propos  d'atfaires  de  succession  :  t<'^n3Iû3 
NSbc  "^""1  ÏT^D^NT  ;  Ketotib.^  84  i,  dans  l'affaire  d'une  de  ses  propres  parentes,  ce 
qui  prouve  également  que,  pour  ces  sortes  de  décisions,  il  ne  peut  être  question  d'un 
véritable  tribunal.  Enfin,  il  faut  encore  voir  B.  K.^  99  b,  où  R.  Yohanan  prend  une 
décision  relative  à  la  responsabilité  du  schohol  dans  la  synagogue  des  Méoniles 
CjiyTDl  Nnr::^);  cf.  Sabb..  139  A  :  'jl^'TDT  NP'^UilD  "^32  Hin  «121^  "«DN  n"N 
(naturellement  cela  se  passe  à  Tibériade).  Un  passage  intéressant  à  ce  sujet  est  celui 
de  j.  Sanh.,  20  d,  fc^-^nnUT  Nn"*rD32  •^^^y•}2  "^OV  'Cil,  c'est-à-dire  Nn'J2D2 
llJ'TD^,  il  parla  dans  l'assemblée  de  ses  concitoyens. 

•'  Sank.,  7  //;  Juda  b.  Nahmani,  le  'JTDIimrDO  de  Simon,  insulte  publiquement  un 
juge  institué  par  la  maison  du  Prince  el  promet  aussi  une  grave  punition  au  patriarche 
lui-mOrae,  sans  doute  en  vertu  de  la  sentence  de  Simon  citée  en  cet  endroit  :  5"nX 
n"l':\N  y'^^'2  ibN:^  ll^rt  IS'^NO  I'^'^I  T'TDy?:^  b:D.  Au  sujet  de  ses  rapports  avec 
Juda  b.  Nahmani,  cf.  encore  Keloubot,Sb. 

7  J.  iTorayot,  48  r  :  N73r»::2  'l'^bii'O  N-'^riDT  tî^::Tib2  5mDi:2  Yyi';  vn"!»"" 
m-^pb  '2  \:)"nb  n^bwSnCwN  w^r'rp  b^y^'D  11^2  linis  dt*  bD2  n-^d^t.  H  n'est  pas 

possible  de  savoir  si  ces  pou>veuT>i;' faisaient  partie  d'un  conseil  juif. 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE,  DE  L'AN  lu  A  L'AN  5o0  49 

On  mentionne  encore  beaucoup  d'autres  décisions  prononcées 
par  lui';  parfois  on  cite  de  lui  des  arrêts  en  opposition  avec 
ceux  de  l'Académie*,  ce  qui  est  une  nouvelle  preuve  que  celle-ci 
ne  se  constitua  pas  en  tribunal.  —  Simon  b.  Lakisch  prononça 
aussi  des  sentences  pénales  ^  et  infligea  des  amendes  considé- 
rables *. 

Yosè  b.  IlanJna,  un  des  plus  anciens  disciples  de  Yohanan 
(voir  Frankel,  Met)ô  hayerousclialmi,  p.  102^),  fut  de  la  part 
de  la  postérité  l'objet  de  louanges  pour  sa  science  juridique'-, 
et  il  paraît  avoir  eu  Toccasion  d'employer  ses  connaissances 
théoriques*^. 

Le  successeur  de  R.  Yohanan  — -  Eléazar  b.  Pedat  —  fit  preuve 
d'une  grande  réserve  vis-à-vis  des  Romains",  et,  comme  juge,  il 
fut  d'une  extrême  modestie  ^. 

Il  était  déjà  en  fonctions  à  la  mort  de  son  maître,  d'abord,  il  est 
vrai,  seulement  comme  président  de  la  communauté '^  Il  eut  fré- 
quemment à  exercer  ses  fonctions  déjuge  *^ 

Au  sujet  de  la  situation  du  patriarche  Gamaliel  IV,  nous  ne 
savons  pas  grand'chose;  cependant  la  considération  dont  jouissait 

'  J.  Kilaïm,  31a,  Simon  b.  Lakisch  fait  payer  R.  Eléazar;  Alaccot,  5a,  une 
femme  dont  les  témoins  furent  plusieurs  fois  convaincus  de  mensonge  vient  devant 
lui  ;  Ketoubot,  84  b,  le  procès  d'un  parent  de  R.  Yohanan. 

>  ù.B.  B.,  16  0  :  n73-ip  ûp  n-'jin">"«m  "i^n-i  ^72ip  ^'\1^y  n^b  mn  Tj-icûot"  'n 
^••ODsb  mn  b^T  n^b  -i?2N  w^pb  "O-^i. 

^  Cf.  le  passage  déjà  ciié  :  j.  Ketoub.,  33  a  :  •^"-\1  ina.''  'O^'pb  ]'2  '^''^  '^D'^'^K 
n-'ryj  p-iDwST  îluS^OS. 

*  J.  B.  K.,  6c:  -on  n^^ip  i^^m:?  Nn5<  HD-'Dn  HD  tllV  '"ib  T«Dpw\  "JS  13  IH 
anni'l  ii^'^^b  rt^DjpT   i::">pb,  etj.  Ketoub.,  2Sd,  au  sujet  d'Ouscha  :  ni<  TiDp72 

«"in  Nr3n  nn  •^"-\  -«nTawN  in^m  "jpTn. 

5  B.  K.,  39  a,  Rabba  dit  de  lui  :  Nj^IT  NpTOI^'b  ^\'^T\Z^  N3"^-«l. 

^  J.  B.  M.,  11  a,  au  sujet  d'une  dispute  de  R.  Nehémia  avec  ses  journaliers.  11  est 
à  noter  que  le  même  fait  est  rapporté,  B.  A/.,  83a,  de  Rab  et  Rabba  b.  Hanna  (c'est 
ainsi  qu'il  faut  lire  et  non  "iD  1:2,  cf.  Sanh.,  5  a). 

'  Voir  j.  Sabbat^  8  c  ;  le  même  fait  est  rapporté  Berachot,  62b,  où  évidemment,  au 
lieu  de  ÏINDTD,  il  faut  lire  nj^TSl'H  (cf.  la  confusion  si  caractéristique  de  B.  K., 
117  a,  où  les  Perses,  '^J<0"!D>  sont  transformés  en  Grecs,  ^î<jT^,  et  réciproquement, 
pour  ne  pas  dire  que  les  Romains  n'usaient  pas  de  représailles). 

*  Voir  sa  sentence  Sank.,  1  b  :  Clp  ^V  '''C^<•^  hv  JCD"^  Nbo  '{'^'^ib  'J'^j73  «  D'où 
sait-on  que  le  juge  ne  doit  pas  opprimer  le  peuple  saint  ?  » 

'  "Voir  pour  le  premier  point,  le  passage  cité  p.  48,  note  4,  j.  Sanh.,  2\d;  pour  le 
second,  B.  B.,  Ib,  où  Eléazar  adresse  à  Yohanan  une  demande  sur  une  question 
d'impôt  et  Yohanan  répond  mnTQDTJ  rî3  J'^p'^jD  '^Tyb^^^,  d'où  on  conclut,  d'après 
j.  Péa^2\  a,  ODTD  i^l^^  "iTJ'b  '"1  qu'il  occupait  les  fonctions  de  président  de  la  com- 
munauté (cf.  Bâcher,  Agada  d.  pal.  Amorâer,  II,  p.  7,  notes  4  et  5,  contre  Weiss,  III, 
p.  88)  ;  au  sujet  de  ses  capacités  comme  Paruass,  voir  la  sentence  de  R.  Yohanan 
Sabb.,  114  a,  et  Toma,  22  i. 

*°  Cf.  j.  Kttoubot,  30(/,  au  sujet  des  biens  d'orphelins,  de  concert  avec  des  col- 
lègues ;  j.  B.  Batra,  16 <i,  à  propos  de  questions  de  droit  matrimonial  ;  B.  K.,  117  J, 
R.  Abba  se  présente  devant  lui  au  sujet  d'un  procès. 

ï.  XXXIX,  N«  77.  A 


50  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

son  contemporain  R.  Abbahou  auprès  de  l'autorité  permet  de  croire 
que,  lui  aussi,  il  avait  avec  celle-ci  d'excellents  rapports.  Abahou 
était  le  représentant  reconnu  du  Judaïsme  devant  le  pouvoir  ro- 
main ',  et  il  parait  avoir  eu  le  droit  d'inflii^er  des  châtiments  cor- 
porels 2.  11  parvint  à  apaiser  la  colère  du  proconsul  ^  qui  menaçait 
de  frapper  ses  collègues.  Il  avait  coutume  de  prononcer  des  arrêts 
seul*,  et  il  est  remarquable  qu'un  jour  un  de  ses  collègues,  plus 
jeune  que  lui,  lui  fit  le  reproche  d'être  partial  en  faveur  du  Pa- 
triarche ^ 

Les  sources  deviennent  un  peu  plus  abondantes  quand  nous 
passons  à  l'histoire  de  l'époque  de  Juda  III  et  de  ses  successeurs 
au  Patriarcat.  —  Au  temps  de  Juda  III^  nous  trouvons  dans  les 
communautés  de  Palestine  des  agents  du  pouvoir  exécutif,  sorte  de 
policiers  %  et  le  Patriarche  paraît  avoir  eu  un  extérieur  digne  de 
ses  fonctions  '. 

Nous  savons,  par  des  sources  non  juives  et  peut-être  aussi  par 
des  sources  juives^,  qu'il  y  avait  une  classe  de  nobles  juifs  qui 
avaient  le  privilège  de  rendre  des  arrêts  de  droit,  mais  il  est  diffi- 
cile de  prouver  qu'ils  avaient  véritablement  la  haute  juridiction*. 

1  Bâcher,  l.  c,  p.  94,  daprès  Ketouèot,  17  :  salutation  solennelle  adressée  à  Abba- 
hou par  la  matrone  du  proconsul. 

»  Voir  j.  Bikkourim,  64  a  :  n:)^odd  by  rp^^nn^T  in2N  't  VZ'ip  Nim^  i<nx 

*  Le  l'ait  fut  soumis  à  K.  Abbahou,  qui  le  fit  étendre  ipour  lui  inlliger  la  llagellalion)  ». 
'  J.  Meguilla^  74  a,  et  plus  loin,  p.  51,  note  2. 

*  J.  Sanh.^  18  a:  V">^P"'   Nm-i73    Nnc:D3   y''^   n^TT»   mn    inns  '-i 

ÏTi72-);ib.  J.  K'toubot.  33  a,  il  juge  une  atlaire  conceruant  une  veuve  ;  B.  K., 
112  b,   un  dillérend  entre  R.  Jéréniie  et  son  heau-irère. 

'■■  HaçjiiKja,  'Oc,  Pesifda  di  R.  l'ahnn  (<;d,  Buber,  p.  120  ^1  :  rtbw  N'^'^wD  pT'  'H 

xnnp  "^"niûwD  inb  pn^-'x  nnwS  inb  i^bv  ..."^on  'nbi  n^T  '-^.b  «  H.  Juda,  le 

Patriarche,  envoya  H.  Hiyya  et  U.  Assi  dans  une  localité.  Les  gardiens  de  !a  ville 
vinrent  près  d'eux...  •  ;  une  autre  leçon  porte  :  ^<'^ZJJO^  S^îT^lÛT^  Cl  «  le  chef  de 
la  garde  et  les  gardes  ». 

''  Juda  111  avait  un  anneau  précieux  [M.  K.  12/',  et  passages  parallèles),  saus 
doute  comme  insigne  de  ses  fonctions;  j.  Sabb.,  8c,  il  est  parlé  de  Liermania  son 
serviteur,  ÏT^ID^  N'^i?j"l3  ;  peut-être  avait-il  des  esclaves  germains,  comme  son  pré- 
décesseur Juda  11  avait  des  Goths. 

^  Code  Théod.,  XVI,  litre  8,  §  8,  de  Tan  392,  traite  de  la  plainte  des  primates  au 
sujet  de  ceux  qui  rendent  des  arrêts  juridiques  saus  en  avoir  le  droit  (au  sujet  des 
«  primates  »  de  l'époque  postérieure;  voir  ibid.,  §  29  :  primates  (jui  in  utriusque 
Paiiestiuîc  synednis  nomiuantur  .  Frankel  [Meho  hai/er  ,  05  a]  cite  à  ce  propos  j.  Ye- 
bamol,  16  :  HZIZ  '"1  '^JZ^'p  "^^^  llZiD"*";^  IH;  cependant  le  passage  cité  par  moi 
montre  que  les  «  primates  »  alias  «  majores  »  étaient  aussi  des  juges  ayant  reçu 
Tinvestilure  ;  ci',  la  note  suivante. 

'•'  Contre  Weinberg  (cité  p.  39,  note  1)  ;  Code  Théod.,  II,  litre  !,  §  10,  ne  prouve  rien; 
il  est  dit  là  que  les  Juifs  sont  soumis  à  leurs  *  majores  »  en  ce  qui  concerne  les 
prescriptions  rituelles  ;  cf.  interprétation  ibid.  :  «  alla  vero  negotia  qus  noslris  legibus 
conlinculur  et  ad  forum  respiciunt,  apud  Judicem  provinciiv. . ,  » 


LES  JUGES  JUIFS  EN  PALESTINE,  DE  L'AN  70  A  L'AN  500  .*>1 

Il  faut  noter  aussi  que,  dès  cette  époque,  on  trouve  en  Palestine 
des  juges  particuliers  non  Israélites'. 

A  la  tête  des  docteurs  de  la  génération  de  Juda  III  se  trouvaient 
R.  Ami  et  R.  Assi.  Leurs  relations  avec  les  Romains  ne  paraissent 
pas  avoir  été  bonnes.  Un  jour,  dans  le  procès  d'une  femme  juive 
(Tamar),  ils  prononcèrent  un  jugement  qui  lui  était  défavorable; 
la  femme  se  plaignit  auprès  des  autorités,  et  l'affaire  ne  fut  aban- 
donnée que  par  l'intervention  d'Abahou^.  —  Un  cas  caracté- 
ristique pour  la  situation  d'Ami  est  le  suivant  :  Ami  fit  un  jour 
une  trouvaille;  sur  le  point  de  s'en  emparer,  il  aperçut  un  Romain 
et  en  conçut  une  grande  frayeur,  d'où  le  tirèrent  seulement  les 
paroles  calmantes  de  l'innocent  spectateur  ^ 

Tous  deux  paraissent  avoir  été  souvent  rais  à  contribution*. 
Cependant  R.  Ami  s'imposa  une  certaine  réserve  comme  juge,  ce 
qui  nous  explique,  d'après  une  expression  empruntée  à  une 
source  sans  doute  secondaire  S  le  peu  de  décisions  rendues 
par  lui*'. 

Enfin,  mentionnons  encore  quelques  docteurs  cités  comme  juges 
pour  cette  époque  et  la  suivante  :  R.  Abba  b.  Mammal  ',  R.  Isaac 

*  Tel  "AXeçi;  à  l'époque  de  R.  Mana  (voir  Frankel,  l.  c,  p.  64  a). 

«  j.  Jtfe^.,  74fl  :  nanpn    nbTi<    n72nb    lin   ■^?3"'N  'm   î^d"'  'n  ï^^^n  'n 
»  ^.  Jf.,  28é  :  Npn  Ï-7N73T-1  nn  rT»^Tn   ""niin  Nnms  hdOw^  V2ii   n 

5<Db)3b  «  H.  Ami  trouva  une  bourse  de  dinars.  Un  Romain,  voyant  qu'il  tremblait, 
lui  dit  :  Prends-la,  nous  ue  sommes  pas  des  Persans  pour  dire  que  les  trouvailles 
appartiennent  au  roi.  » 

*  Cf.    Sabb.,   10  a  :    "^-ITONT   N'^ilT    N"12:^Î<    ^HDD    ^^rt    NnJ^'JT    NP^UÎ    bDT 

"•n-'b'i  biy-^b  ^<r^  rT>b  n-^^sT  nd\x  \s. 

»  Tanhouma,    D"'t2Dw73  (cité    par    Bâcher,    Agada   d.  pal.    Amorâer,  II,  p.  155, 

note  5),  Assi  dit  :  irT^^no  b:'  iinom  1"«T  inN  N»'::  n^nn  -^^n  ï-i"«b:'  "^sn 

bNl^ïS"^  blU  Û!T^3^T  Sni'^J'b  blD"^  «...  j'aurai  peut-être  à  rendre  des  comptes 
parce  que  j'aurais  pu  juger  les  procès  des  Israélites.  » 

«  Voir  Ketoub.,  32  a,  pour  des  aflaires  de  droit  matrimonial;  j.  B.  B.,  16  b,  au 
sujet  de  la  sœur  de  R.  Hanina  qui  avait  légué  à  celui-ci  sa  fortune  et  l'avait  en- 
suite cédée  par  une   vente    à  son  mari;  j.  Guittin.,  4o  fl,  pour  des  alTaires  de  prêt; 

B.  B.  33  b  :  ^53N  'm  rT'72pb  NHwX  îi"«n3n73  î<D33  ^lûm  Nin:;  ^^'r[T^  ;  ib.,  59  o, 

où  il  est  question  de  tlpTn  ;  *^-.  143  b.  en  matière  de  partage  entre  frères  et  sœurs. 
Un  irait  caractéristique  du  sens  juridique  de  R.  Ami  :  B.  B.,  60  fl,  raconte  que 
R.  Ami  avait  excité  par  sa  fortune  des  troubles  publics  et  qu'un  autre  qui  se  trouvait 
dans  le  même  cas  fut  pris  à  partie  grossièrement  par  R.  Ami,  qui  l'invita  à  mettre  fin 
à  ce  désordre.  Gomme  on  lui  demandait  pourquoi  il  ne  le  faisait  pas  lui-même,  il  in- 
voqua le  prétexte  de  sa  notoriété.  R.  Yonathan  et  Yannaï  (cf.  p.  46,  note  2)  agirent 
dans  un  cas  semblable  d'une  manière  plus  délicate.  R.  Ami  avait  peut-être  le 
pouvoir  d'iuiliger  des  châtiments  corporels,  cf.  j.  Kidd.,  61  a  :  ÎT^^DIDb  JT'b  T\^Tl^ 
"^  B.  B.,  59  fl,  à  propos  de  querelles  entre  voisins  :  ^TaN  '"IT  ÏT'Tapb  "^D^T  NinH 

57373  '3  N"-i^  rj-'T^pb  ï-i-^mu:. 


52  UKVUE  DES  ÉTUUES  JUiVES 

Napha*,  R.  Abba',  R.  Juda  b.  Pazi^,  R.  Yirmiya*,  R.  Isaac 
b.  Tabelaï,  •'■'bn-j  nn  S  R.  Nassa  S  R.  Haggaï  ",  R.  Aha  %  R.  Yona 
et  R.  Yosé  9  et,  enfin,  R.  Mana*". 

En  jetant  un  coup  d'œil  sur  l'ensemble  de  ces  matériaux,  nous 
arrivons  à  cette  conclusion  qu'il  n'existait  pas  de  tribunaux  au 
véritable  sens  du  mot,  fonctionnant  d'une  manière  permanente, 
Nous  trouvons  surtout  des  juges  isolés,  ayant  des  pouvoirs  plus 
ou  moins  étendus,  mais  exerçant  leur  action  dans  un  domaine 
restreint,  avec  l'autorisation  ou,  du  moins,  la  tolérance  des  auto- 
rités. Des  cas  comme  celui  que  rapporte  Origène  (cf.  p.  47,  note  2) 
ne  se  retrouvent  pas;  s'ils  se  sont  produits  réellement,  ce  sont  des 
excès  et  des  abus  qu'on  croyait  pouvoir  commettre  impunément,  à 
certaines  époques,  mais  qui,  d'autres  fois,  étaient  sérieusement 
réprimés  (cf.  Gode  Théod.,  xvi,  titre  8,  §  22,  au  sujet  des  abus  de 
pouvoir  du  dernier  Gamliel). 

H. -P.  Chajes. 


*  Ketoub.,  84^,  son  procès  contre  la  maison  du  patriarche  ;  B-  B.,  170  a,  R.  Isaac 
b.  Joseph  eut  un  procès  avec  R.  Abba,  dont  il  tut  le  juge.  J.  Sanh.^  18  a,  à  propos 
d'une  affaire  entre  R.  Abba  et  Benjamin  b.  Yéphet  plaidée  devant  lui,  nous  apprend 
qu'il  était  régulièrement  investi  [TinJj'l'O  ^^^  l'onctious  juridiques. 

*  Il  intervient  avec  R.  Ami  dans  une  procédure  juridique,  v.  Scheb,^  32a;  B.  K.^ 
33è,  il  était  assis  auprès  de  R.  Ami;  Kcioub.,  Sib,  il  montre  une  attitude  très 
ferme  vis-à-vis  de  la  Cour. 

^  Juda  b.  Pazi  rendit  des  décisions  relatives  à  des  successions,  j.  B.  B.,  16a.  A 
noter  le  passage   de  j.  Sank.,  2'id  :  N'ÛIITO    ^ni    Nn''b"'^'b     p^bo    ""TD    "13    "'"l 

•'"in  13^1  "^njT  no  'n  "ib  iii^a  nô   riT  VppTD  din  ^zn   "^rû    n^s-n 

'in  nSîT  «  Gomme  il  regardait  deux  hommes  qui  se  disputaient,  ceux-ci  lui  dirent  : 
«  Ne  t'occupe  pas  de  nous,  car  nous  sommes  deux  et  toi  tu  es  seul  »  ;  il  semble  que 
les  deux  parties  craignaient  d'être  ûél'érées  au  tribunal. 

*•  Il  se  prononce  au  sujet  des  biens  de  veuves,  j.  Ketoub.^  34  o;  j.  Kedd.y  65  a,  au 
sujet  d'un  dépôt  qu'on  niait  ;  B,  K.,  112  ô,  il  soutient  un  procès  contre  le  beaulrère 
de  R.  Abahou. 

■*  J.  B.  X.,  3a,  estimation  d'un  dommage;  j,  B.  M.,  8i,  affaire  de  trouvaille. 

'  J.  B-  M.,  9  i,  concernant  un  dépôt;  ibid.^  \\d^  au  sujet  de  location  de  maisons; 
j.  B.  B.,  13  b,  au  sujet  de  querelles  entre  voisins. 

'  Il  avait  peut-être  le  droit  d'inlliger  des  châtiments  corporels,  cl.  j.  Kidd.,  64  a  : 
'^'^D'^T  ^n"^"^  «  Quil  vienne  et  qu'il  soit  llageilé  »,  au  sujet  de  Jacob  de  Nabouria. 

**  Il  avait  coutume  de  rendre  des  arrêts  de  toute  sorte,  cl",  le  passage  si  souvent 
cité  de  j.  Sanh.^  18  ô. 

^  Ils  rendirent  des  arrêts  sans  13et-Din,  cf.  jS«mA.,  l.  cit.;  j.  B.  B-,  13  è,  à  propos 
de  querelles  entre  voisins. 

*"  R.  Mana,  dans  j.  Guittin,  46a.  se  prononce  au  sujet  d'une  esclave  en  fuite; 
j.  Kidd.,  64  a,  en  matière  de  prêt;  dans  j.  Ketoub.,  33  b,  il  se  livre  à  une  controverse 
avec  le  juge  païen  Ale:^is  au  sujet  du  mode  d'assignation. 


SUR  LA  SÉMANTIQUE  DIÎS  MOTS  TALMUDIQUES 

EMPRUNTÉS  AU  GREC 


Dans  l'avant-dernier  numéro  de  la  Revue  (XXXVIII,  141), 
M.  Furst  pose  le  principe  suivant  :  «  Jamais  on  n'a  le  droit  d'at- 
tribuer à  un  mot  étranger  un  sens  autre  que  celui  qu'il  a  dans  la 
langue  même  d'où  il  est  pris,  surtout  quand  c'est  sur  un  seul  pas- 
sage douteux  qu'on  s'appuie.  Il  faudrait,  tout  au  moins,  apporter 
d'autres  passages  où  toute  autre  signification  serait  impossible.  » 
Comme  c'est  surtout  moi  que  M.  Furst  vise  ici,  on  me  permettra 
de  discuter  le  bien-fondé  de  cette  sorte  d'axiome. 

On  lit  dans  la  Tosefla  Soiicca,  iv,  28  (p.  200,  éd.  Zuckerman- 
del)  :  «  Miriam,  fille  de  Bilga  \  renonça  à  la  religion  de  ses  pères 
et  épousa  un  «  soldat  »  des  rois  grecs  ("rni^  :jr"n5b  nN'sa-'Si  rjDbrîi 
•[V  "«sbTo^o) -.  »  Le  mot  ::r'i'iD  «  soldat  »  est  certainement  le  grec 
(>TpaTicoTY|Ç,  mot  qui  n'a  jamais  d'autre  signification  que  guerrier, 
soldat.  Cependant  lDV"î^d  dans  le  texte  cité  de  la  Tosefta  désigne, 
non  un  simple  soldat,  mais  plutôt  quelque  officier  supérieur,  puis- 
qu'il y  a  immédiatement  après  :  \r^  ''^biz'n  «  des  rois  de  la  Grèce  »  ; 
il  s'agit  donc  d'un  des  princes  grecs  qui  certainement  ne  ser- 
vaient pas  dans  l'armée  romaine  comme  simples  soldats,  mais  en 
qualité  d'officiers  supérieurs. 

Le  sens  du  passage  demande  cette  interprétation  indépen- 
damment du  mot  qui  y  est  employé,  car  on  admettra  difficilement 
que  Miriam,  la  fille  distinguée  d'un  prêtre,  ait  accordé  sa  main  à 
un  simple  soldat,  pour  l'amour  de  qui  elle  avait  môme  abjuré  sa 
foi  ^  L'expression  «  des  rois  de  la  Grèce  »  pourrait,  à  la  vérité, 
surtout  d'après  la  variante  du  Talmud  palestinien,   signifier  que 

'  De  la  famille  sacerdotale  Bilp:a. 

«  Dansj.  Soueca,  55  a?  :  «j-Ti  n^n  m^'T^  b^73  ;  Soncca,  ^Ob  :  £215-1^  "«^'^^^a. 

'  La  véritable  expression  est  m72n'w32  ;  daus  le  Talmud  babylouien  on  a  mis,  à 
cause  de  la  censure,  'r^:^1  m"'73n.  —  Une  pareille  substitution  se  trouve  dans  la 
sentence  de  R.  Aha,  Midrasch  sur  Samuel,  ch.  xix,  au  coramencemeot  :  ^"0  TT'i'7 
^70'^,  mais  le  Yalkout^  sur  Isaïe,  §  338,  porle  m?:^.  Popper,  The  censorship  of 
Behrev'  Bcoks  (New- York,  1899),  ne  meuiionne  pas  iadUe  censure. 


54  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

l'homme  était  un  soldat  de  Varmée  des  rois  grecs,  mais  la  contex- 
ture  de  la  phrase  indique  certainement  que  l'homme  lui-même  fai- 
sait partie  des  rois  grecs.  Rabbinowicz  note,  d'ailleurs,  dans  son 
Dikdiikè  Soferim  sur  Soucca^  la  variante  û'^m"'  '^:DnDr;?:  «  des 
éparques  (eTras/o-.)  des  Grecs  y>.  D'après  cela,  •^^nsnTo  ^nx  lûT^'inD 
û'^3iT>  ne  peut  signifier  que  :  «  Un  soldat  parmi  les  éparques  grecs  », 
et  le  «  soldat  »  devait  lui-même  être  un  des  éparques.  L'expres- 
sion a  le  même  sens  que  dans  ce  passage  de  Taanit^  18  ô  :  '",i:p"«3 
ïT^rt  t3"'3iT  "^D^CNTs*  ^'n^  «  Nicanor  était  un  des  éparques  grecs.  « 
L'époux  de  Miriam  était,  de  même,  un  des  éparques  des  Grecs, 
ou,  d'après  une  leçon,  un  des  rois  grecs;  ce  n'était  donc  pas 
un  simple  soldat,  mais  un  officier  d'un  grade  élevé.  Le  Talmud 
n'aurait  pas  appelé  un  tel  homme  cûvtid,  si  ce  mot  signifiait  sim- 
plement c<  soldat  »  comme  en  grec,  et  non  officier. 

Un  passage  de  j.  Schehalim^  49  a,  conduit  au  même  résultat.  Un 
prêtre  infidèle  avait  revêtu  de  précieux  vêtements  du  grand  prêtre 
un  «  soldat  »,  'jTpaT'.o'jTY,;  (::r::-m&'^N).  Ce  soldat,  en  mettant  Thabit 
pontifical,  avait  eu  pour  toute  jouissance  de  pouvoir  se  vanter 
qu'il  s'était  pavané  dans  le  riche  costume  du  grand  prêtre  juif,  et 
pour  satisfaire  cette  vanité  d'un  moment,  il  paya  8,  selon  d'autres, 
12  pièces  d'or.  Ce  guerrier  ne  devait  pas  non  plus  être^un  simple 
soldat,  mais  un  officier  supérieur.  Et  cependant  il  s'appelle  crsa- 
TicoTY,;  dans  le  Talmud.  Dans  le  Midrasch  du  Cantique,  m,  G,  dans 
un  passage  écrit  en  araméen  et,  par  suite,  riche  en  archaïsmes, 
le  guerrier  s'appelle  Nrai<n::D'^i<  =  (yTpaxTjYoç  =  pra^fectus  =  gé- 
néral, ce  qui  met  hors  de  doute  le  sens  d'uffÎGier  pour  aTan::D"'N. 
Mais  ce  que  le  Midrasch  entend  par  stralegos  ressort  avec  la 
plus  grande  évidence  du  passage  du  Yelamdènon  Aruch,  s.  v. 
•^i'^iûnaON),  où  il  est  dit  :  «  Un  strategos,  c'est-à-dire  un  héros  que 
l'on  voulait  mettre  à  la  tête  d'une  armée  »  (br  im27:b  i^pn^ 
N-^u^uCî^),  autrement  dit  un  général.  Or,  comme,  d'après  moi, 
avan::D^«  équivaut  dans  certains  cas  à  sh^aiegos,  la  même  défini- 
tion s'applique  aussi  à  ce  mot,  et  effectivement  il  ne  saurait  être 
question  que  d'un  officier  supérieur  dans  notre  récit. 

Nous  avons,  dans  un  autre  cas,  cette  même  substitution  de 
<iTpaTi{6Tr,ç  à  ffTpaTYjydç.  Dans  Genèse  Rabba,  lxxxii,  8,  se  lit  le 
récit  suivant.  Au  temps  d'une  persécution  contre  les  Juifs,  deux 
disciples  de  R.  Josué  (b.  Ilanania)  changèrent  de  vêtements  pour 
se  rendre  méconnaissables.  Un  ^TpaxiatTriç  (arinD)  les  rencontra  et 
leur  dit  :  «  Si  vous  êtes  des  disciples  de  la  Loi,  sacrifiez-lui  votre 
vie.  «  Pseudo-Raschi  fait  sur  ce  passage,  en  se  fondant  sur  le 

*  Dans  le  ms.  de  Munich  :  ^S*1D?1. 


SUR  LA  Sémantique:  des  mots  talmudiques  55 

sens  gf^néral  de  la  phrase,  la  remarque  très  juste  que  cMtait  un 
fonctionnaire  (njiTQtj);  Fauteur  du  commentaire  Matnot  Kehouna 
est  (également  dans  le  vrai,  quand  il  dit  que  c'était  un  fonction- 
naire de  la  cour  impériale.  Mais  cette  explication  acquiert  une 
certitude  parfaite  par  la  variante  du  Yalkout  \  où  le  fonctionnaire 
g'appelle  D"i:^"JTt:s^i^,  <7ToaTY,Yoç. 

On  peut  établir  avec  assez  de  certitude  le  rang  du  ::r'TnD  dans 
l'administration  romaine,  grâce  au  passage  de  Nombres  Rabha, 
XV,  n,  où  l'on  qualifie  la  hiérarchie  administrative  d'indigne  et 
de  factice  :  «  L'avancement  d'Ksaù  (Rome)  est  toujours  un  abais- 
sement (t<^n  mn*^  înbDUJ  I^Vji^].  Aujourd'hui  il  est  éparque  (did^dî<), 
demain  vicaire  (ps),  après-demain  cornes  (D"'72np),  enfin  soldat 
(::v'ino).  Voilà  par  où  passent  tous  leurs  grands  !  w  L'ironie  de 
l'expression  s'explique  par  ce  fait  que  des  fonctionnaires  civils  de- 
venaient des  militaires  et,  comme  tels,  avaient  un  rang  inférieur 
à  celui  qu'ils  occupaient  dans  le  civil.  Il  ne  peut  être  question 
d'une  dégradation  pénale,  car,  dans  ce  cas,  le  condamné  perdrait 
ses  grades  simultanément  et  non  successivement.  Ce  qui,  dans 
l'administration  romaine,  semble  choquer,  d'après  le  Midrasch,  est 
surtout  ceci,  que  des  fonctionnaires  qui  occupaient  de  hautes  situa- 
tions dans  l'administration  civile  perdaient  leurs  charges  quand  ils 
devenaient  militaires.  Mais  ces  fonctionnaires  avaient  le  droit  d'en- 
trer dans  l'armée  avec  le  grade  de  centurion  -,  de  sorte  que  le  mot 
LûVllD,  qui,  dans  le  Midrasch,  indique  le  grade  inférieur,  ne  saurait 
désigner  un  simple  soldat,  mais  un  officier,  fût-il  d'un  rang  mo- 
deste. Celui  qui  antérieurement  était  un  cornes,  ne  pouvait  pas  léga- 
lement, en  entrant  dans  l'armée,  tomber  au  rang  de  simple  soldat. 

Dans  l'histnire  bien  connue  du  fils  et  de  la  fille  de  Rabbi  Ismaël 
b.  Elischa,  qui  à  Rome  échurent  à  deux  maîtres  et  qu'on  voulait 
marier,  il  est  dit  {Guitiin,  58  «)  qu'ils  échurent  à  deux  seigneurs 
(û"'3"i"ii^  ^5;a)  ;  or,  dans  Echa  Rabbali,  i,  10,  où  la  même  histoire 
est  racontée^,  il  est  dit  que  chacun  d'eux  échut  à  un  uti^d  ;  ici 
encore  ce  mot  ne  peut  pas  avoir  le  sens  du  grec  arpaTuÔTYp,  car  ces 
prisonniers  de  qualité  ne  devinrent  certainement  pas  le  lot  de 
simples  soldats. 

*  Sur  Genèse,  t:^  136,  fol.  42»  de  l'éd.  Venise.  Le  Yalkout  a  encore  cette  importante 
addition  OTIip'^DN  :  un  £lralè.<e  hérétique.  Dans  Yallcout  sur  Isaïe,  i^  263,  il  y  a 
^73173  inx  tûT^Uni2DN.;  d'après  quoi  cet  ofticier  aurait  été  un  Juif  converti.  L'opi- 
nion de  M.  Schiatter  (Zur  2'opagraphie,  p.  oiî,  note  1\  que  le  mot,  si  discuté  de 
0^tnL]0"lD^^  n'esi  autre  chose  que  OlCJIIûO'^îrN,  àroaTa-r,;,  gagne  par  cela  en  vrai- 
semblance. 

*  Jung,  Leben  und  Sitten  der  Borner  in  der  Kaiserzeif,  II,  84. 

^  Ici  ce  sont  les  enfants  du  prêtre  Sadok  ;  il  y  a,  d'ailleurs,  beaucoup  d'autres  di- 
vergences dans  les  deux  passages. 


56  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Nous  resterons  dans  ce  même  domaine  de  la  hiérarchie  mili- 
taire en  fixant  le  s^ns  du  mot  I^TTID  dans  un  cinquième  passage. 
Dans  j.  Ketouboi,  25c,  se  trouvent  les  mots  :  orrin^jC^N  N!!^©  r^v^^ 
nbnn  hyy^  :  «  Ils  (les  Romains)  ordonnèrent  que  le  jus  yrimœ 
noc/û  a[»partieiidrait  au  cToaTuoTT,?  *  ».  Dans  le  passage  correspon- 
dant de  b.  Keioiiboi,  3&,  le  dignitaire  s'appelle  nrc'j;  dans  plusieurs 
Midraschira  et  Pioutim  postérieurs,  c'est  tantôt  i;niyr\z=  ^vz^-^^-» 
tantôt  ûiD^Di^  =  £7rap/oç  ^  De  tout  cela  on  peut  conclure  avec 
certitude  que  ar::"i:ûD"'î<  dans  le  Talmud  de  Jérusalem  est  le  même 
mot  que  -ics::,  *ii?3r<n  et  Diri'n^N.  En  d'autres  passages  ^  qui  rap- 
pellent cette  ordonnance  barbare,  on  ne  se  sert  pas  du  mot  étran- 
ger, et  Thébreu  emploie  le  mot  h^1:^  u  le  grand  »  [Genèse  Rabba, 
XXVI,  5,  et  Yalkout  Genèse,  §  43). 

Les  expressions  liTo^n  et  bii^  démontrent  suffisamment  qu'il 
s'agit,  non  d'un  petit  fonctionnaire,  mais  du  gouverneur  de  la 
Palestine  lui-même,  notion  très  importante  pour  Ihistoire  du  mot 
cTGaT'.o'jTYjÇ  dans  le  langage  des  Juifs  *. 

Ce  mot  peut,  en  effet,  servir  de  point  de  départ  pour  les  re- 
cherches sématologiques  sur  les  mots  empruntés  au  grec  et  au 
latin.  Cf.  aussi  Deutér.  Rabba,  ch.  m,  3,  où  ';"«::"i::D"'i<  est  à  côté 
du  'j-'rcnnba,  fiouAsuTa-. 

C'est  avec  intention  que  j'ai  choisi  ce  terme  militaire  afin  de 
pouvoir  traiter  la  question  soulevée  par  M.  Furst  à  propos  du 
sens  de  l;v:h  =  ae^ilôv  z=  légion.  Dans  Berachot,    32  b   (bD   b^'i 

'  CT^ÛiltÛO'^N  est  naturellement  une  erreur,  au  lieu  de  C^T^IjII^C^t*.  '^oir  ma 
remarque,  Jievuc,  XXIX,  39,  note  3.  J'y  ai  traité  amplement  tout  le  sujet  dans  mon 
article  sur  la  /rVc  de  Hanoncra. 

2  Revue,  ib.,  p.  41.  note  1.  Ajouter  Midrasch  Ï^^T^H  TV^VIZ  Mngaziti^lW.  1876, 
partie  hébraïque,  p.  39-40),  où  le  di<^nilaire  s'appelle  encore  llTjSn. 

*  Jievue,  ib.,  p.  41,  note  3.  Ou  trouve  aussi  une  allusion  a  celte  coutume  dans 
Midrasch  Afffjada,  éd.   Buber,   I,   59  :    '^Dbl   MbriD   nblP^rî    D^  D^IC   rT^n*«:5 

bN-!r.3  -iiyc  N"ip3- 

"  Qu'il  me  soit  permis  d'ef'lleurer,  au  moins  dans  une  note,  une  question  se  ratli- 
chant  aux  passages  ci-dessus.  Dans  mon  travail  sur  Hanoucca,  Revue,  XXIX  et 
XXX,  j'ai  parlé  àw  jus  prima  noctis  introduit  par  les  Romains  comme  d'un  tait  his- 
torique. Coniiairement  à  M.  Israël  Lévi,  qui  relègue  tout  cela  dans  le  domaine  de 
la  table  [Revue,  XXX.  220  et  suiv.),  je  puis  citer  une  source  très  ancienne  :  Me- 
chilta  sur  t^Cn  ^D.  à  la  tin  :  m'»::  ^15D   l^by    aCD2  bNIC    i:n3'0    n3T  bDTO 

21^3  i7û'^"^pnj  ibw\  ^nn  rib^n::")  r.mn  m?2bm  rîb"^7:i,  ce  som  des  persécu- 
tions historiquement  démontrées  tant  au  sujet  du  sabbat  qu'au  sujet  de  la  circonci- 
sion et  de  l'étude  de  la  Loi.  Dans  ce  cas,  ^ib'^ara  doit  aussi  êti-e  historique.  11  ne 
peut  être  question  du  bain  rituel  des  hommes,  pour  lesquels  le  bain  n'a  pas  une  im- 
portance assez  fxrande  pour  être  conquis  au  prix  de  la  vie;  mais  il  s'agit  du  bain 
des  femmes,  et  nous  savons  que  les  Midraschim  plus  récents,  que  M.  Israël  Lévi  traite 
de  tables,  l'ont  débuter  la  persécution  par  l'interdiction  du  bain  rituel.  Comme  fait 
à  comparer,  je  citerai  ce  que  rapporte  Nôldeke,  Histoire  des  Perses  et  des  Arabes  au 
temps  Jeu  Sasitnides  (Leyde,  1879],  p.  196.  198  :  Chcsrau  Parvez,  roi  >.e  Perse, 
demande  des  femmes  arabes  pcar  èou  sérail,  ('hez  les  Nesloriens,  cet  ordre  avait  pour 
conséquence  un  •  jeûne  des  vierges  ». 


SUR  LA  SÉ^fANTIO(JE  DES  MOTS  ÏALMUDIQUES  o7 

Nnaoa  û-^^V:)  12  •^DNnn  "jv^bi  iv^b),  la  signification  de  «  légion  »  est 
hors  de  to.ut  doute,  malgré  l'opinion  de  Levy  et  Kohut.  Sur  ce 
point,  je  suis  d'accord  avec  M.  Furst,  comme  on  peut  le  voir  dans 
mon  dictionnaire.  Le  sens  du  pas-age  est  simple  et  clair  quand  on 
range  les  termes  particuliers  à  la  division  de  farmée  romaine  con- 
formément aux  faits  historiques.  On  compare  le  ciel  étoile  à  la 
belle  organisation  de  l'armée  romaine.  Les  divisions  de  l'armée 
romaine  sont  rangées  dans  l'ordre  suivant,  d'après  les  éditions  : 
1°  iT^b  (Xsyecov);  2o  inrûr!")  ;  3"  irjnp  ;  4«  N"i::D:i.  Dans  Raschi,  on  lit 
î<"i::D"':i  )y^'^p  iT'^b;  le  n^  2  manque;  mais,  comme  Raschi  emploie 
cependant  dans  son  explication  quatre  termes,  le  mot  )r^r'n  devait 
se  trouver  primitivement  dans  son  texte.  Ce  mot  est,  d'ailleurs, 
confirmé  par  l'Arouch,  qui  lui  consacre  un  arMcle  particulier. 
S.  V.  yr^Tn,  il  donne  la  série,  évidemment  inexacte:  l^  l"!^""); 
2**  *;v5b.  L'article  *|Tib  dans  l'Arouch  ne  montre  pas  la  suite  des 
grades  ;  l'on  ne  peut  non  plus  tirer  un  texte  sûr  des  DiMnhè 
Soferim.  Chose  étonnante,  le  vrai  texte  a  été  conservé  dans  une 
poésie,  dans  le  'niri"'  de  sabbat  Nahamou  (fite  allemand)  : 

n"Ti33>3  \rûiirr\  iTj^p  yr^^b  b^n  \n-iL]u:n 

«  Une  quantité  '  d'étoiles  il  créa  au  camp  de  l'armée  -,  autant 
que  les  jours  de  l'année  solaire. 

J'ai  confirmé^  pour  elle'*  l'armée  des  légions,  des  cohortes,  des 
manipules.  » 

L'ordre  hiérarchique  n'a  subi  ici  qu'une  légère  altération.  \\ 
doit  y  avoir  tout  d'abord  b^t,  comme  dans  le  texte  du  Talmud  ;  à 
part  cela,  la  hiérarchie  est  tout  à  fait  exacte  ^  D'après  cela,  nous 
avons  (1)  b-^n,  (2)  xàcTpov,  (3)  cohors^,  (4)  manvpiilus' .  D'après 
la  division  ancienne,  chaque  légion  renfermait  30  manipules. 
Lorsque  cette  division  fut  abolie,  la  légion  eut  10  cohortes,  et 

'  N131  indique  ici,  non  un  nombre  déterminé,  mais  simplement  «  une  foule  ».  Le 
texte  du  Talmud  porte  NID"!  "D^N. 

*  N^nD!l,plus  exactement  NlUO-'i  ;  on  le  trouve  aussi  dans  le  Midrasch  avec  p  ; 
c'est  castra,  xàaxpov,  camp. 

'  "^muS^n,  de  "itûw,  sif^nilie  :  donner  l'assurance,  contlrmer  par  lettre. 

'*  miaya  se  rapporte  dans  le  Piout  à  "jn^ii  nS- 

=•  et.  Bâcher  {Agada  der  pal.  Anioriier.,  1,  396),  qui  a  vu  dans  ces  mots  aussi  cette 
hiérarchie.  11  croit  que  "IlZûni  a  le  sens  de  manipule.,  sens  qui  résulte  aussi  de  mon 
explication  [Lehnwôi-ter,  11,  r>74j  ;  mais  M.  Bâcher  comme  feu  Perles  {Monatsschrift, 
1892,  p.  111)  donne  une  fausse  élymoloj^ie  de  "llium. 

•  En  grec  KÔpTY]!;,  d'où  "llllûlp. 

'  IIlSÏI"!  est  probablement  api0|xoc  (voir  mon  Dictionnaire)  =  numerus=zmanipulus. 


Î5S  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

chaque  cohorte  ô  centuries  de  100  hommes  ;  la  légion  se  com- 
posait donc  de  60  centuries  ^  Comme  les  nombres  60  et  100  ne 
figurent  pas  dans  la  description  du  Talmud  et  comme  on  n'y  trouve 
que  le  nombre  30,  il  s'ensuit  que  le  Talmud  ne  s'est  pas  appuyé 
sur  cette  division  de  l'armée.  A  propos  d'une  Inscription  prove- 
nant de  Bosira,  Waddington  fait  la  remarque  suivante  [Inscrip- 
tions grecques  et  latines  de  la  Syrie,  p.  458  a)  :  «  Le  mot  niinie- 
riis,  àpt6[j.o;,  désignait,  au  cinquième  siècle,  un  corps  de  fantassins, 
généralement  de  la  milice  palatine;  ...je  ne  trouve  nulle  part 
d'indication  sur  le  nombre  de  soldats  qui  composaient  un  nume- 
rus;  mais  les  7mmeri  étaient  des  corps  ayant  leur  existence  propre 
et  différents  des  légions.  »  Dans  le  Talmud  il  ne  s'agit  certainement 
pas  de  tels  numeri;  ici  c'est  une  subdivision  de  la  légion,  telle  que  le 
manipulus.  La  légion  se  composait  ordinairementde  6,000  hommes, 
se  répartissant  en  30  manipules  ;  chaque  manipule  comprenait 
donc  200  hommes.  Il  est  impossible  que  le  Talmud  ait  tiré  de  là 
le  nombre  astronomique  365.  C'est  plutôt  le  nombre  total  des  lé- 
gions qui  sert  de  base  à  la  division  talmudique.  Ce  nombre  était  de 
25  à  la  mort  d'Auguste,  il  s'éleva  à  30  dans  le  premier  siècle,  et  fut 
portée  33  par  Septime-Sèvére -.  L'armée  impériale  tout  entière 
représentait  un  effectif  de  250  à  330,000  hommes.  Le  nombre  30 
est  donné  exjjlicitemHnt  dans  le  Talmud  comme  celui  d^s  légions 
(irikb  û^Dbu:i.  Quant  à  d'autres  unités,  le  nombre  30  est,  à  la  vérité, 
faux  ;  peut-être  a-t-il  été  mis  à  côté  des  autres  unités  pour  simpli- 
fier. Mais  le  nombre  365,000  se  justifie  suffisamment  par  le  total  de 
l'armée  romaine  ^  Je  traduis  maintenant  le  passage  :  pour  chaque 
planète  j'ai  créé  30  armées  (b-^n)*  ;  pour  chaque  armée  %  j'ai  créé 
30  camps  {castra)  ;  poar  chaque  cam[),  j'ai  créé  30  légions  ^  ;  pour 
chaque  légion,  j'ai  créé  30  cohortes;  pour  chaque  cohorte,  j'ai 
créé  30  manipules;  j'y  suspendis  3()5,000  étoiles  (la  description 
revient  ici  à  la  planète)  d'a[)rès  le  nombre  des  jours  de  l'année 
solaire  (mille  étant  pris  comme  unité).  D'après  cela,  il  ne  peut 

'  Korbi^^er,  Hel'.as  und  h'om,  \"  partie,  111,  261  ;  Marquardt,  Sfaatsvenvaltung, 
II.  334. 

«  Junj;,  /.  <•.,  II,  78. 

>  Il  laut  retenir  comme  une  bonne  version  :  "^DbN  iHUÎTSm  D^'ûCl  mN73  'ùlîbU) 
NIST,  si  l'on  ne  donne  pas  à  Ni:3*l  son  sens  exact,  et  l'on  obtient  ainsi  365  pour 
les  jours  de  l'année,  eu  supprimant  les  mille,  bien  entendu.  N'attendons  pas  de  celte 
comparaison  entre  les  étoiles  et  Tarmée  romaine  une  classiQcalion  d'une  concordance 
scrupuleuse. 

*  Cela  n  est  pas  fonde  en  réalité,  car  la  plus  grande  unité  est  la  légion;  pour  faire 
ressortir  cependant  l'harmonie  existant  dans  le  système  planétaire,  on  choisit  avec 
intenliou  la  division  en  beaucoup  d'éléments. 

•  Pour  toute  Parmée  serait  plus  exact. 

'  Plus  exactement  i  dans  les  30  camps  se  trouvent  30  légions* 


SUR  LA  SÉMANTIUI;K  DlilS  MOTS  TALMUDIOUES  m 

donc  être  question  de  l'explication  donnée  par  Levy  et  Kohut, 
qui  prétendent  que  ivib  désigne  dans  ce  passage  un  olficier. 
Ces  commentateurs  sont  partis  de  ce  point  de  vue  :  le  mot  hy 
revenant  dans  chaque  membre,  les  termes  particuliers  doivent 
désigner  un  supérieur  ou  un  officier;  mais,  en  réalité,  le  mot 
n'est  employé  que  pour  le  l^""  membre  :  bîToi  bvn  bD  by,  et 
tout  le  passage  se  trouve  modifié  de  la  façon  que  nous  avons 
exposée. 

Je  suis  encore  de  Tavis  de  M.  Furst,  contre  Levy  et  Koliut, 
quand  il  traduit  les  mots  û-^uip  m:T«:b  ■•jia  dans  j.  Taanil,  65^  : 
«  Deux  léf^ions  dures  (belliqueuses  ou  cruelles)  »,  et  non  «  deux 
officiers  durs  w  ;  cela  est  vrai  aussi  de  j.  Smicca,  55  b  :  Ipn  mr7:":;5 
•^msviibb,  «  vous  (femmes  juives)  devez  être  complaisantes  pour 
mes  légions  »,  et  non  c<  pour  mes  capitaines  ».  Par  contre,  j'ai 
admis  dans  mon  dictionnaire,  auquel  M.  Furst  se  réfère,  que  dans 
une  parabole  du  Midrasch  Tanhouma,  )v:b  indique  un  soldat  //«r- 
ticiUier.  Voici  le  texte  :  nn^?3  n-^-^n  ^bT^n  "ni?:'^  )v:^b  ûbi^n-j  imsa  «  IL 
est  d'usage  qu'un  légionnaire  qui  se  révolte  contre  le  roi  soit 
puni  de  mort  ^  »  D'après  moi,  il  ne  peut  être  question  ici  de  toute 
une  légion,  car,  outre  que  "jv^b  eût  été  pris  au  féminin-,  l'expres- 
sion nn^To  ri'^'^n  s'applique  plutôt  à  un  individu  qu'à  une  légion  en- 
tière. De  plus,  dans  Yalhoui,  i  706,  il  y  a  à  ce  sujet  :  û"''^n  ib  ©"> 
«  a-t-il  une  vie  ?  »  Je  ne  crois  pas  qu'une  telle  expression  puisse 
se  rapporter  à  une  collection  d'hommes  ;  en  tout  cas,  il  faudrait 
drib  dans  la  suite  de  la  phrase.  L'argument  de  M.  Furst,  que  le  plu- 
riel est  employé  tout  de  suite  après  ("i2  Trù2^  nnsD  ibi^n),  n'est  pas 
probant,  car  on  ne  peut  parler  qu'au  pluriel  d'Israël,  avec  qui 
l'on  compare  la  marche  en  avant  de  ce  militaire. 

Quant  au  passage  de  Pesikta,  182  a  [Léviiique  Babba,  xxx,  6  ; 
Yalliout,  ^  651),  où  l'on  raconte  qu'un  'jv:;b  allait  percevoir  le  tribut 
d'une  province,  M.  Furst  admet  également  qu'il  ne  peut  parler  de 
toute  une  légion,  puisque  dans  le  cours  du  récit,  on  parle  plu- 
sieurs fois  de  iv^b  comme  d'une  seule  personne.  M.  Furst  lit  donc 
^'^yyh  rr:  legatus,  au  lieu  de  lv:ib,  ce  qui  est  contraire  à  la  tradition  ; 
l'expression  "jr^b  est  concordante  dans  les  trois  sources  nom- 
mées, dans  VAroiiCh  et  dans  Matnot  Kehouna^.  Dans  le  cours 
du  récit,  le  mot  se  transforme  en  i^sv^b  dans  une  phrase  ara- 

»  Tanhouma  Balak.  12;  éd.  Buber.  18. 

*  iT'^.^b  est  aussi  bien  masculin  que  fémlDin;  le  pluriel  est  pourtant  le  plus  souvent 
m3')'^:ib,  très  rarement  ';'>2T^ab.  Cf.  m3"l'^:;b  "^niU  ''non  "^3^]  dans  Pesikta,  éd. 
Buber,  4  a,  et  Midrasch  Tehillim.  iciii,  7. 

•  11  y  a  aussi  ycy^  dans  un  ms.  de  M.  E.  Adler,  de  Londres,  qui  contient  de» 
ta^Uip'^b  du  Midrasch  Rahha, 


fO  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

méenne.  Une  telle  concordance  serait  inexplicable  si  le  mot  était 
corrompu  '. 

Examinons  encore  un  passage  se  rattachant  à  ce  sujet.  Dans 
Tanhouma  Vayèscheb,  3,  se  lit  le  récit  suivant  :  Antonin  vint  à 
Césarée  et  manda  Rabbi  le  Saint.  Son  fils,  R.  Siméon,  et  R.  Hiyya 
le  Grand  l'accompagnèrent.  Là  R.  Siméon  vit  un  iv^h  beau  et  dis- 
tingué, dont  la  tête  atteignait  le  chapiteau  des  colonnes  -.y^'^'n  t:în^ 
ti-^i^yzy  bu;  c'r^bNtpb  (lire  c^-^bN^p  —  xsoaX-:;,  xEcpaÀiooç).  n  dit  à  R. 
Hiyya  :  «  Vois  comme  les  veaux  d'Esati  sont  engraissés  !  »  Alors 
Hiyya  l'emmena  dans  la  rue  et  lui  montra  un  panier  plein  de  rai- 
sins et  de  figues,  sur  lequel  se  posaient  des  mouches.  R.  Hiyya 
lui  dit  :  «  Ces  mouches  ressemblent  à  ce  li'i^b.  »  Lorsque  R.  Siméon 
revint  près  de  son  père,  il  lui  raconta  ce  qu'il  avait  dit  et  ce  que 
R.  Hiyya  lui  avait  répondu.  Alors  son  père  lui  dit  :  «  Ces  légions 
n'ont  point  de  destination  dans  l'avenir  (û^;id5  "jri^  nb&i  d'^sr^b^ 
ûibiDb),  mais  Dieu  fera  un  jour  accomplir  sa  mission  hmn-'bïj)  par 
les  mouches.  »  Le  même  passage  est  cité  dans  Yelamahiou,  dans 
VArouch,  s.  ?;.,bcp,  H,  et  également  comme  provenant  du  Yelam- 
dènou  dans  Yalhoat  Mechiri  sur  Isaïe,  vu,  18. 

Que  signifie  ir:ibici?Si  iv:b  était  comme  d'habitude  un  collectif, 
on  ne  dirait  pas  dans  le  cours  du  récit  :  "i'::i^  û"'jr^b  «  ces  légions  ne 
sont  propres  à  rien  »,  puisqu'il  n'était  question  que  d'une  légion; 
mais  si,  dès  les  premiers  mots,  "jv^b  signitie  le  légionnaire,  il  est 
bien  compréhensible^  que  l'on  dise  ensuite  :  «  Ces  légionnaires  ne 
serveni  à  rien  »  ;  l'emploi  du  pluriel  dans  la  suite  du  récit  montre 
précisément  qu'il  faut  considéier  iv^b  comme  un  nom  singulier,  et 
non  comme  un  collectif.  L'Aronch  aussi  emploie  le  pluriel  dans  la 
suite  :  t:->^nt33>  b*::  VbD"'p[b]  ^'^y^^io  [û]!-î'^':5Nn  d-in^D  nss  "ini<  ir^b  (éd. 
Soncino,  1517).  L't:x pression  «  l^urs  tètes  »  montre  implicitement 
que,  dans  la  phrase  précédente,  )T^h  désigne  chaque  individu  de 
la  légion,  un  soldat  particulier  -.  Je  ne  conçois  pas,  d'ailleurs, 
comment  on  pourrait  dire  d'une  légion  entière  :  sa  tête  atteignit 
au  chapiteau  des  colonnes,  comme  il  est  écrit  dans  Tanhouma. 
On  choisit  de  grands  gaillards  pour  la  garde  royale  de  Prusse  ;  on 
ne  peut  cependant  pas  dire  :  la  garde  prussienne  atteint  au  cha- 

'  Dans  le  passan;e  correspondant  de  Tanhouma  Jitnor,  18  (éd.  Buber,  26).  il  y  a,  à  la 
vérité,  ri'^bo  =  iïiessa<^er,  qui  ri'pond  a  Icgatus ;  mais  dans  le  cours  du  récit,  on  ap- 
pelle le  lonciioniiairc  coiislammenl  "^J^ni^.  ^^"2^  ==  percepteur,  si  bien  que  nous  sommes 
forcés  de  voir  dans  TT^b'^U  uu  équivalent  de  lT^:;b.  La  remarque  dans  mon  diction- 
naire est  de  moi,  ft  iiou  de  I.  Lôw,  comme  lecrit  M.  Fursl.  Il  faut  remarquer, 
comme  Buber  l'a  déjà  l'ait,  que  dans  la  parabole  analogue  (j.  Sonera,  53  r\  il  ny  a 
pointue  mot  étrant'cr  du  tout,  on  y  trouve  seulement  "inî*  •  un  quelconque  ». 

»  Le  commentaire  du  Ta.ibouma  C]CT^  y^  dit,  a  la  vériié,  pour  p'^sb,  b'^n, 
comme  par  habitude,  sans  même  soupçonner  le  sens  spécial  du  mot  dans  ce  passage. 


SUK  LA  SÉMANTIQUE  DES  MOTS  TALMUDIQUES  61 

piteau  des  colonnes.  Ici  encore  le  sens  exige  que  ';T';b  indique  un 
légionnaire,  un  soldat  particulier  d'une  légion  '. 

Le  mot  DibD\^  =r  'vy°^  olTve  une  parfaite  analogie  avec  l'expli- 
cation du  mot  iv^h  que  nous  adoptons.  Ce  mot,  qui  est  un  col- 
lectif, est  aussi  devenu  un  nom  singulier.  On  trouve  dans  Sifrè 
Deut.,  ^  25  (p.  10  a  de  l'éd.  Friedmann)  :  Drî^onbDij^n  n^:iii'n  vn*:: 
«  Ils  (les  peuples  chananéens)  étaient  nombreux  dans  leurs  vXoç.  » 
Le  pluriel  ne  peut  pas  être  pris  dans  le  sens  de  foule,  car  ce  n'est 
pas  le  collectif  «  foule  »  qui  pouvait  être  nombreux,  mais  les  indi- 
vidus particuliers  formant  dans  leur  ensemble  la  collectivité.  On 
trouve  dans  Tosefla  Pesahim,  iv,  3  (p.  163,  éd.  Zuckermandel)  : 
«  Un  jour  le  roi  Agrippa  voulut  savoir  quel  était  le  nombre  de  la 
foule  ^.  »  Le  mot  '}-'DibD"ii<  employé  dans  cette  phrase  ne  saurait 
par  lui-même  avoir  un  sens  collectif,  car  le  substrat  du  dénom- 
brement n'était  pas  la  foule,  mais  les  individus  de  cette  foule. 
Cf.  Nombres  Rabba,  vi,  9,  où  l'on  trouve  très  correctement  au 
singulier  5<oib:Dii<n  na-inD. 

Nous  pouvons  faire  la  même  remarque  à  propos  du  mot  5<"^"«2C25< 
çcv'^a  ((  mercenaires  w,  qui  se  présente  quelquefois.  Comme  le 
mot  est  un  collectif,  il  ne  devrait  pas  avoir  de  pluriel  en  hébreu, 
et  cependant  nous  lisons  'j^-'DDdj^  dans  Tosefla  Schebiit^  v,  21 
(p.  69),  où,  à  la  vérité,  d'anciennes  éditions  portent  n"^jD3K,  qui  est 
peut-être  plus  correct  (cf.  Mischna  Demaï,  m,  1).  Mais,  si  5«"«jDdn 
signifie  un  soldat  unique,  sens  que  le  mot  grec  lewix  n'a  jamais, 
nous  comprenons  pourquoi  on  a  formé  le  pluriel  l-i-ijODi^.  Pour  le 
mot  çsvi'a,  qui  ne  se  présente  que  très  rarement,  cette  modification 
de  sens  est  restée  à  l'état  de  tentative  dans  le  langage  des  Juifs. 
Pour  le  mot  Icgio,  fréquemment  employé,  ce  déplacement  de  sens 
a  pu  se  produire  naturellement,  sans  blesser  l'esprit  de  la  langue. 
En  principe,  nous  ne  pouvons  donc  nullement  admettre  que  les 
mots  grecs  et  latins  qui  ont  passé  dans  le  Talmud  et  le  Mi- 
drasch  ne  puissent  jamais  modifier  leur  sens,  ainsi  que  le- prétend 
M.  Furst. 

Budapest,  mai  1899. 

Samuel  Krauss. 


*  L'expression  niTT^bO  qui  se  rapporte  aux  mouches,  mais  s'applique  dans  la 
comparaison  aux  soldats  de  la  lé<,Mon,  prouve  que  le  terme  rpb'J,  qui  a  été  discuté 
plus  haut,  peut  aussi  remplacer  "JT^JiD. 

*  I'^oVpISIN  bU3  Û'^3^'^3"*73   11123,  Ure  î:!:i"<:'^7û.  Dans  b.  Pesahim^  04  Z»  :   •^D^bD^i< 

bi<■^D^ 


LETTRES  DE  SGHESGHET 

B.    ISAAG   B.    JOSEPH   BENVENISTE   DE    SARAGOSSE 
AUX  PEINCES  KÂLONYMOS  ET  LÉYI  DE  NARBONNE 


Grâce  au  goût  des  amateurs  de  poésie  hébraïque  et  grâce  aussi 
au  hasard,  des  monuments  de  l'histoire  juive,  d'ailleurs  si  pauvre 
en  documents,  nous  ont  été  conservés;  c'est  ainsi  que  nous  est 
parvenue  une  liasse  de  lettres  manuscrites  de  l'historien  Joseph 
ha-Cohen  ^  Elles  nous  renseignent  sur  l'active  correspondance  qui 
existait  entre  Saragosse  et  la  communauté  de  Narbanne  *,  jadis  si 
florissante  et  si  célèbre.  Les  noms  des  «  princes  »  (les  chefs  de 
Narbonne  s'intitulaient  ainsi)  Kalonymos  b.  Todros  et  Lévi  b. 
Moïse,  à  qui  ces  lettres  et  ces  poésies  sont  adressées,  donnent  une 
valeur  et  un  éclat  tout  particuliers  aux  produits  de  la  muse,  d'ail- 
leurs sans  prétention,  du  poète.  Ce  poète  porte  le  nom  de  Sches- 
chet;  mais  quel  était  ce  Scheschet,  et  de  quelle  époque  sont  ces 
lettres?  Le  nom  de  Tun  des  correspondants  —  Kalonymos — ne 
nous  est  d'aucun  secours  pour  le  découvrir.  11  se  retrouve  trop 
souvent  dans  la  maison  princière  de  Narbonne  ^  pour  pouvoir, 
à  lui  seul,  fournir  le  moindre  indice  sur  la  date  de  nos  documents. 
Nous  pourrions  avec  la  même  vraisemblance  les  placer  à  la  fin  du 
xiP  siècle,  ou  à  la  fin  du  xiii%  et  même  au  commencement  du 
xiv«,  où  nous  voyons  le  prince  Kalonymos  b.  Todros  et  Salomon 
Ibn  Adret  se  donner  la  main  pour  interdire  l'étude  de  la  philo- 
sophie et  de  la  physique  *.  Lévi  b.  Moïse  est,  d'autre  part,  un  nom 

*  Voir  la  description  qu'en  a  faite  Is.  Loeb,  Revue,  XVI,  p.  32.  Qu'il  me  soit  permis 
de  remercier  ici  V Alliance  israélite  universelle  d'avoir  mis  si  gracieusement  ce 
recueil  de  lettres  à  ma  disposition. 

'  Cf.  Gross,  Gallia  Judaica,  p.  401-30. 

»  Ihid.,  406-8. 

*  m&<Dp  nn372,  p.  136. 


LETTRES  DE  SCIIESCHET  63 

trop  peu  connu  pour  que  nous  puissions  affirmer  que  les  lettres 
soient  adressées  au  prince  Lévi  dont  on  trouve  des  traces  à  Nar- 
bonne  vers  la  fin  du  xu®  et  au  commencement  du  xiii"  siècle  *. 

Mais  une  date  conservée  dans  un  poème  de  Scheschet  adressé  à 
Lévi,  et  qu'on  n'a  pas  assez  remarquée  jusqu'ici,  fera  disparaître 
toute  incertitude  sur  l'époque  de  la  rédaction  de  ces  lettres. 
L'année  54,  dit  Scheschet,  qui,  d'après  la  valeur  numérique  des 
lettres  hébraïques  (13),  signifie  l'année  de  deuil  et  de  lamentation, 
est  passée,  et  une  nouvelle  année,  l'année  155,  qui  en  hébreu  {TiZ'p) 
signifie  «  acquisition  »,  annonce  le  plaisir  et  la  sociabilité,  par 
l'acquisition  damis  qu'elle  promet.  Comme  les  deux  années  consé- 
cutives sont  désignées  par  les  nombres  54  et  155,  il  faut  naturel- 
lement prendre  54  pour  154.  Mais  gardons-nous  de  faire  précéder 
ces  nombres  du  millésime  5000,  comme  on  pourrait  être  tenté  de 
le  faire  ;  cela  nous  reporterait  aux  années  1394-5,  c'est-à-dire  en 
un  temps  où  les  noms  mentionnés  ici  ne  se  rencontrent  ni  à  Sara- 
gosse  ni  à  Narbonne.  Ces  nombres  indiquent,  conformément  à 
l'usage,  les  années  de  l'almanach  juif,  auxquelles  il  faut  ajouter 
mentalement  4800,  ce  qui  nous  conduit  à  admettre  les  années 
1194-5  comme  date  certaine  de  ces  documents.  Et  maintenant 
seulement  nous  sommes  sûrs  que  Kalonymos  b.  Todros  et  Lévi  b. 
Moïse,  à  qui  Scheschet  s'adresse,  sont  bien  les  princes  de  Nar- 
bonne qui  nous  sont  connus  par  d'autres  documents  de  la  fin  du 
xii«  siècle. 

Scheschet  Benveniste  est,  comme  il  apparaît  dès  sa  première 
lettre  à  Kalonymos,  un  enfant  de  la  communauté  de  Naibonne, 
qu'il  nomme,  en  rapprochant  son  nom  de  mots  hébreux  sonnant 
de  la  même  façon,  le  flambeau  de  l'intelligence*;  il  la  désigne 
comme  la  source  d'où  coulent  dans  toutes  les  directions  des  flots 
d'érudition.  Comme  il  y  avait  des  rapports  de  parenté  entre  Sches- 
chet et  la  maison  princière  de  Narbonne,  il  pourrait  eff'ectivemeiit 
être  le  fils  de  ce  prince  Isaac  Benveniste  qui,  en  1215,  convoqua  à 
Saint-Gilles  toutes  les  communautés  de  France,  de  Narbonne  à 
Marseille,  afin  de  choisir,  sous  la  présidence  du  prince  R.  Lévi, 
celui  qui  serait-  député  à  Rome  pour  prévenir  ou  combattre  en 
temps  utile  les  décisions,  menaçantes  pour  le  judaïsme,  que  pour- 
rait prendre  le  pape  Innocent  IV  ou  le  concile  de  Latran  ^.  Ainsi 

*  Gross,  ibid.,  407. 

*  nS"*:!  "12.  Benjamin  de  Tudèle,  parlant  de  Narbonne,  dit  :  riT^lip    "T^^    i<Tn 

De  même  Meiri,  à  la  tin  de  son  iulroduclion  hislorique  au  commentaire  à'Abot  :  IT^T 
'  ^^Tin"^    L32^,  éd.  M.  Wiener,  p.  114,  allemand,  p.  233.  L'identification  de  cet 


64  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

s'expliquerait  la  désignation  de  Scheschet  comme  prince,  titre 
qu'il  était  autorisé  à  porter  s'il  descendait  d'une  maison  princière 
et  s'il  était  lils  d'isaac  Benveniste. 

Peut-être  pouvons-nous,  d'après  ces  lettres,  rapporter  à  la  date 
de  1194  la  mort  de  Kalonymos  b.  Todros,  que  Benjamin  de  Tudèle 
trouva  à  la  tête  de  la  communauté  de  Narbonne  *.  En  effet,  dans 
les  premières  lettres,  on  s'adresse  à  Kalonymos  comme  au  prince 
de  Narbonne,  titre  qu'il  partage  avec  Lévi  b.  Moïse;  mais  plus 
tard,  et  particulièrement  dans  le  poème  qui  seul  nous  fournit  la 
date  certaine  du  commencement  de  155  (fin  de  1194),  L^^vi  seul  est 
mentionné  comme  prince  ;  on  peut  donc  admettre  que  Kalonymos 
est  décédé  dans  l'année  1194. 

Lévi  et  Kalonymos  étaient  cousins  :  c'étaient  les  fils  des  deux 
frères  Moïse  et  Todros.  Lorsque  Juda  b.  Salomon  al-Harizi 
visita  Narbonne  dans  ses  voyages,  la  dignité  de  prince  avait  été 
accordée  à  R.  Lévi  ^.  C'est  sous  sa  présidence  qu'eurent  lieu  les 
délibérations  de  Saint-Gilles  provoquées  par  la  crainte  qu'inspi- 
raient aux  Juifs  du  sud  de  la  France  les  résolutions  du  concile  de 
Latran.  Les  dernières  années  de  la  magistrature  de  Kalonymos 
furent  troublées  par  des  événements  auxquels  Scheschet  Ben- 
veniste fut  également  mêlé. 

Un  membre  de  la  communauté  de  Narbonne  semble  avoir  fait 
une  telle  offense  au  prince  Kalonymos,  que  celui-ci  repoussa  avec 
aigreur  toutes  les  tentatives  de  rapprochement  faites  dans  la  suite 
par  l'insulteur  repentant;  bien  plus,  il  repoussa  même  l'interven- 
tion de  R.  Scheschet  et  prit  mal  les  conseils  qu'il  lui  prodiguait. 
C'est  en  des  termes  qui  témoignent  de  la  profonde  vénération  dont 
Kalonymos  é^ait  entouré  de  toute  part,  que  Scheschet  demande 
pardon  pour  l'homme  qui  a  osé  porter  atteinte  à  l'honneur  du 
prince,  et  il  le  fait  sans  même  vouloir  se  donner  l'apparence  de 
conseiller  le  chef  célèbre  de  Narbonne,  qui  n'avait  besoin  ni  de 
ses  exhortations  ni  de  ses  avis.  Scheschet  semble  avoir  eu  des 
relations  d'amitié  plus  intimes  avec  le  collègue  et  successeur  de 
R.  Kalonymos,  avec  son  cousin  R.  Lévi  b.  Moïse.  Quand  il  se 
donne  constamment  pour  son  frère  cadet,  cela  peut  n'être  que 

Isaac  a  élé  faite  par  Is.  Loeb,  Revue,  XVII,  92.  La  correction  proposée  par  M.  Gross, 
tbid.^  652,  qui  dit  qu'au  heu  de  fils  du  Nassi  de  Narbonne,  on  doit  lire, />érc,  ne  peut 
réfuter  cette  supposition  luicincuse. 

ûTwS  l'^wST  y-iNn  ib'ODD  r-i5<73  nrp-ipT  mbn:  ib  C"»i  ion*»::  r^jiDTD  iM 

npTnn  "127372  np"*'?   blD"'.  Cf.  Saige,  Les  Juifs  de  Languedoc^  p.  70. 

'  "^DITSSnn,  ch.  xLvi,  éd.  Lagardo,  p.  166,  M.  Dans  mou  ms.  du  Tahkemoni,  le 
passage  est  ainsi  conçu  :  N-i\:;:rî    "II"!   rT>n    '^Î<"^C:  D'wl    rî:Tn-l2b   \nDbn   0^721 


rêxpresglon  de  gon  amitié  pour  cet  homme  qu'il  admir»  et  glorlfle 
avec  tant  d'emphase,  mais  le  ton  des  lettres  et  les  détails  (jui  s'y 
trouvent  disséminés  sur  la  famille,  montrent  avec  certitude  que 
c'étaient  (ies  liens  de  parenté  qui  unissaient  d'une  manière  étroite 
ces  deux  rabbins.  La  note  dominante  des  lettres,  leur  unique  objet, 
pour  ainsi  dire,  est  le  désir  ardent  de  voir  enfin  R.  Lévi;  ce  désir 
devint  une  espérance,  et  se  changea  bientôt,  grâce  aux  nouvelles 
qui  venaient  de  Narbonne,  en  une  attente  certaine;  la  chaleur  du 
sentiment  transforma  sa  prose  en  poésie. 

La  dernière  lettre  de  Scheschet  à  R.  Lévi  nous  introduit  dans  le 
cercle  intime  qui  l'entourait.  Sa  maison  de  Saragosse  avait  été 
jadis  animée  par  trois  fils  et  une  fille.  Lorsque  la  mort  lui  eut  en- 
levé deux  de  ses  fils,  le  troisième  devint  son  appui  et  sa  consola- 
tion. Vers  le  déclin  de  la  vie,  ce  troisième  fils  lui  fut  également 
ravi.  La  nouvelle  de  ce  malheur  excita  à  Narbonne  même  la  plus 
vive  sympathie.  Des  lettres  de  consolation,  des  lamentations  pro- 
voquées par  le  cruel  événement  lui  arrivaient  du  pays  natal  et 
témoignaient  de  l'intérêt  qu'on  ne  cessait  de  porter  au  parent 
éloigné.  Dans  sa  robuste  confiance  en  Dieu,  il  adjure  ses  amis  de 
mettre  un  terme  à  leurs  plaintes  impies,  qui  semblent  accuser  le 
destin;  qu'ils  exhortent  plutôt  la  malheureuse  mère  et  la  sœur 
désespérée  à  modérer  leur  douleur  et  à  se  résigner  à  l'exemple  du 
père.  Un  frère  aîné  de  Scheschet,  Joseph  Benveniste,  qui  portait 
le  nom  de  son  grand-père,  était  probablement  accouru  de  Nar- 
bonne pour  rer.dre  visite  aux  affligés;  ce  fut  lui  qui  fut  chargé  de 
la  réponse  que  Scheschet  faisait  à  tous  ses  amis,  mais  qui  était 
adressée  particulièrement  au  chef  de  la  communauté. 

Il  mentionne  encore  dans  son  entourage  un  ami  nommé 
R.  Juda,  qu'il  nous  présente  comme  son  maitre  et  qu'il  nous 
vante  en  termes  très  élogieux.  R.  Juda  avait  été,  du  vivant  de 
R.  Kaionymos,  chargé  d'une  lettre  de  son  ami  et  élève;  il  avait 
aussi  eu  la  mission  de  dissiper  par  des  explications  verbales  la 
mésintelligence  qui  était  née  entre  R.  Kaionymos  et  Scheschet  par 
la  fausse  interprétation  de  l'intervention  de  ce  dernier  dans  le 
procès  de  Narbonne. 

Nous  faisons  encore  la  connaissance  d'un  autre  intermédiaire 
entre  R.  Kaionymos  et  R.  Scheschet,  à  l'époque  où  celui-ci  nour- 
rissait encore  l'espoir  de  pouvoir  un  jour  saluer  le  vieux  prince  de 
Narbonne;  c'était  un  jeune  homme  nommé  Abraham,  qui,  malgré 
sa  jeunesse,  était  l'ami  des  deux  personnages.  Ces  lettres,  si  pauvres 
en  faits  utiles  pour  l'histoire,  offrent  un  autre  sujet  d'observa- 
tions. La  langue  des  lettres  et  des  poésies  qui  leur  servent  d'intro- 
duction ou  qui  y  sont  intercalées,  avec  leurs  rythmes  et  leurs 

T.  XXXIX,  N»  77.  *  5 


66  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

mètres  si  variés,  nous  permettent  de  jeter  un  coup  d'œil  sur  la 
culture  donnée  à  Narbonne,  où  le  jeune  Scheschet  fut  instruit.  Le 
niveau  littéraire  si  élevé  de  cette  correspondance  entre  amis  est 
un  témoignage  que  la  civilisation  hispano-arabe,  qui  avait  répandu 
en  Provence  le  goût  de  la  poésie  et  de  l'élégance  de  la  langue  hé- 
braïque, s'était  aussi  acclimatée  à  Narbonne  et  avait  accès  jusqu'à 
la  cour  des  princes.  On  trouve  avec  plaisir  dans  leur  correspon- 
dance la  langue  biblique  dans  toute  sa  pureté,  sans  l'incohérence 
résultant  des  passages  mal  assortis,  rapportés  de  toutes  parts  et 
péniblement  rapprochés.  Les  allusions  à  la  Mischiia  et  au  Talmud 
sont  relativement  encore  très  rares;  la  prose  est  encore  affranchie 
de  cet  amas  inextricable  de  citations  rabbiniques  confuses  qu'on 
cherche  encore  à  cacher  et  à  embrouiller  par  subtilité,  comme 
nous  le  montrent  abondamment  les  lettres  du  temps  de  la  discus- 
sion au  sujet  du  More  et  du  Se  fer  Madda  de  Maïmonide  dans  le 
recueil  d'Abbamari.  Les  poètes  de  la  brillante  époque  hispano- 
arabe  sont  encore  dans  toutes  les  mémoires,  et  plus  d'un  vers  de 
Scheschet  est  une  réminiscence  d'un  des  grands  poètes  de  l'Es- 
pagne, sa  seconde  patrie,  et  cela  à  son  insu.  Celui  qui,  sans  néces- 
sité, rien  qu'en  sacrifiant  au  goût  de  son  entourage,  avait  tissé 
dans  ses  lettres  des  vers,  avait  acquis,  dans  la  langue  hébraïque  et 
dans  le  style  poétique,  une  maîtrise  qui  éclate,  non  seulement 
dans  sa  correspondance  familière,  mais  aussi  dans  des  travaux 
plus  ou  moins  longs;  ce  qui  nous  permet  d'assigner  à  R.  Scheschet 
une  place  dans  la  littérature  de  son  temps. 

Il  ne  serait  donc  pas  impossible  que  le  Scheschet  Benveniste,  qui, 
d'après  les  indications  d'Abraham  Zacuto  %  aurait  composé  en 
1203  un  poème  de  146  strophes  en  l'honneur  de  Joseph  et  de 
Salomon  Ibn  Schoschan  de  Tolède,  ne  fût  autre  que  notre  Sche- 
schet b.  Isaac  b.  Joseph  de  Narbonne. 

David  Kaufmann. 


.rrnny  mn   f^mm  s^n-   ni^T^V  r-rm:?:!    .rrn:  rr^Vr  'Cînpn 

»   Youhasin,  éd.  Filipowski,   p.    22*.)    :   p     bllSr:    N"^'»:::::    \1    PUÎC     N:3"n 

la  TN  rr^n  :i"Dpnm  D"^cVn  nynnx  nr:53  ^"lyp  •l^^3  "T'a   rror    nujsa 
■^:3  n^buî  'n  pon  [lire  :  -i^nbni  rrabi  qor  'nb  rin  na-'UîT  fsu:  a":^ 

r^blIÛ-^bl-J?:  V^'^V::.  Cf,  m.  Steinschneider,  jy^/T.  7ii7*/.,  XIII,  107. 


LETTRES  DE  SCHESCIIET  67 

,ï-Tm23  ^Db   onb   Nsr^  1-1:12121  bNT»::^3  dnt  n^r  tntd    nr^r;  t»<^r: 

,rt^mi::?i7jb  tot^t  rrbipb  "1^73-^  n'^p^mm  tz^mnprr  y-Nr:  -^no  bsi 
ï-TDn  ^^n  .y'nwsr:  b^n  iiTn  "lirno  l=:rt  Nbr;  -inj:^  n^zn  r^iiip::  nxi 
mN   mp'srnb   ïmnn2    bD    hNir"«](Nj:r)  nn    nu:wS    !="^^n    a"^?2    mp':?: . 

Dm  .mmrnrj  amn  amT^n  *;'Jn  nsina  a-'pbN  ^n^c:  rribî<b  bm:im 
me  ns  rt-iTD-»  n^N  fi<nr:^?3i  ,mm-i73*v:J73  b:^  d-^-iTai^n  ,mmN3j:  tn-:: 
rîn:^:^  nrrtb  inb  by  nby^  ncN  t<irî  nT\x-i  ,rT'm-im73  nc  xbi 
,nnpn  l"^^  nm^n  î-i?3nb  bDix  mnnn  ppr:  ■'2Dm  .mmnp:'3  ni:-»  «bi 
,!-i-iDy  Y^iwn  riO'rp  bD^r:  n:;3  rrinn'^Trn  ,mmby72  -l'^'on  ^-',"i'::y:rj 
riariNn  rn-^nnn  tt»  im:  17:^^21  nu:">  nbn  ,mmj3"*i:7:^  in  n"n  r]NTw 
m7û:Dn73  tzrr^nns  a-^i^nr;  ûnbujb  bwSTj:T  .rPwS-^CD  r;^'::  -"rsa  bN  oib'ûm 
ûriNT  .^n-nm  Dmpn  'T!72'::b'i  ,t2mi:?3  û-^-^pb  "^^^r;  ^îjm  .mN-npT 
b"^L:r;b  "^cd:  by  ,n3  "^itcn  biD  n^^î^i  }^"iwsn  -^om  D"^'C3nprr  -"m^-i  ^nx 
^'»::n  ^d  ï-i'û:'^"!  ,3>7o^n  "^ij^T  "^STiir:  ï-i-i'::^n  "^mm  ■•b:'  -nir 
"INI"»  Nb  ^y  bwN  Nipb  ^-^siiirn  '^■'nt  ,^j"no\n  csnoiTom  ,^2^^72bn 
£=;n::>Ti  Gni^i  .amnb  ^^'D':jrn2  ûmry  s-nNn73  n:j  "^r)  ^n^'Tsc-»  Nbn 
rni:p73  ^inn  r::ï-;i  .£2r!'^m3'wn73  -^mn'srnTa  r<bn  "'sm  cmrm  Nb  -«^ 
tzmon  N3w\  Nbi  nuîT^  "^sn  un  ,^i2^b  ^r^-^by  -^y^i^ij  ^n^x'^r:  ^-riin^a 
mo^n  v^  ï^*bi  *ûn73  ndt  t*^-»-  t=2i73r;7:  t>ib  ,nnp^  arrn  ■i'.iîdî  ^d 
&N1  nb  by  ii^"^'::^  ^<b^  irTo'i:"^  J*<b  ^:d  "^mms^i  ,!nnir"i3  on  ini:"i:o 
,ib3p-'  f^TDO  û'iîb  r^bi  TiJi'i  û^'^nm  r-iTOwSn  i\b  t=^-^pb  inT:^"' 
,^12^  nmb  S^nnrt  "^^  ■'n::>iv  "^nnb  £:5:>'^m?3i  ■'7:^52  CDb  'i^riTom 
"2"ii:-n  T\yi   "^^b   ûn73    i^n   ^<b  nci<   "^s    m73:ib   -^-in";  n^n    ^<b  ^5< 

r^'SD"^  tz^T^n"»  ûrsn  i-^m  [N]"r;'72U5T  ,£2-i^nTnb  nbc5  t=^"^D  b::^  -nn:^ 
nm  tz^DN  ^nN  ûin^ii  li5n  b^n  ,û3  ["inN]  m::  pn  n::Tj^t  ,û3nb 
M.b  larnNi  tDDnpi^i:  bipb  yn'^-^i  û3'»3d  N'ij^  nS'nn  br  Dnn  icn 
û^mnj^a  sn^n'::"'  Nbi  rr^n'O""-!  ,irm73ip)2  biDb  t^^o-^T  ,nbD  rroy^ 
snuj3n  p  C]Dv  nn   pHir-»  -q   ppr;  n\a;::    .tsb"::    ^bi    isb    i-nD"::"^i 

.^nopno 

^  Il  veut  dire,  d'après  I  Samuel,  vi,   19  :  soixante-dix    personnes,  un    Sanhédrin 
de  gens  de  Narbonne,  valent  autant  que  cinquante  mille  autres. 

*  II  Chron.,  XII,  14. 

'  Ces  vers  proviennent  d'un  poème,  dont  le  mètre  est  le  suivant  : 
_i^ —  \u  — —  V 

Il  faut  donc  les  distribuer  ainsi  : 

-ion  N3^<  t*^b-i  y::v  -«^n  iin 
r:-ip"^  ù^^y'n  -^dd^  [c^^brt]  ^^  di 
^<b■l  DriTo  t<bT  N-^rr  tziîiTarsTD  xb 

*  Ezécb.,  VII,  11. 


^73njr^  'rr^3C7ûr;  ûiDnn  t<">i:j2rî  nbin^rn  nncrn 

i"-i:   "'ib  'n 

iNba  ,inDD  n^riiNb  im^n  nmo  r-nb:b  biD^  £2-73  "j^nt  .nc^ 
.^^iDu:  v^  arDCi-i  tzb.ND  "in^Nn  ^d  tzirr^-iai  -PN^nb  nr^  t>ij:72b 
p  b:'  ,u^i''  r-12-ii  r>^  >i"irî  -^^  "^j'or^  ■•b  ï-i^n  n:p-  i-i::?':;7ai 
r-mirn  "C'N  pni:"b  ""n^c^n:  pcnn  r-iro  ^ipt:  ripicn-  cn  r^.abn 
"n72io  ';7:î<jn  r^xn  "^d^n  -iTONb  rnn^nD  >^bi  r-i5<-i?:3  m  nn-iî<T 
,i^nm&<  ^72-^73  inTS-»  r<!b  ton  r-oiTSNn  ^72  "mpTj  .vaniNb  î-i-^nnn 
■^3>-n  "^nN  ^D  bn  ,">nn::n  m  '^'s::î<  Y^72n  bN  "^nbcwsi  nzb  mry 
■n^n  ^mn^n^  ïmn:iiN  b^i  \n3r;N  n^n  jmnnE:73T  \nrb73n  nm» 
^nnnN3  ^^un  p"»  /V^P^  T"^^  "^"^^  ^^  "'"'''^  r^"i73Ni  ,^r\uiD 
.-^anD-sUin  l]-^i^:^3  t=î3'i  ."^^n-^ip  '^j73wN2-  "jL^jion  qo22T  ,^::n-,7:x- 
bDTî  ^i<  "^^n  ^12"*  bD  m:'  .-^^n-cnbn  mm  nim  ^-iin-iND  "^^-rniT^m 
nbiy  rrbrN  T^^Dbi  "nn:^\x  '^nnriwX  tz:bj:i  ,TT>inncn  r-T>-n  *]'c:ip 
';i^^î   '^bi  ."^nbnn   '^nN73T    -«^^u:^  p7j    r-Tni<    ^d   ^nmm   \nn:72    n"«"ipNT 

^^la^bn  *  ::::ipnwN  ['7^7272ipnm]  (^^7::72i  "i-inm)  iiiiz'o  rn^ban  n:cn 
NUîN  Nbi  ."^^z^  hv  ta-'inwS  n^pbN  "^b  rr^m  wsb  ,ï-iN:p  b^^'7:D  r-î::^^ 
^N\::   ^N  ^larN   aï^ri   ,^12'::^  ^^mpm  ^^mnTS'Ci    ,^<rwb  "|?2'û   nx 

■«ro  "^"nrN  £2N  npa  i^'  ï-ij:?ni  ,"}nnb  m::iNT  /"^anx  n^a  riN 
,^nm  -i^-isb  ^n^N-n  y^bip  ■'^7:021  ,"i^bbr!7:'i  '^n72an  ir:nNi  -  "c^bx 
—ION  r-iDHNn  '^::du:?3  nbwNi  .^î^bN  rn-c:i7:  w\Kn'"T^wS  i^bi  ri:w\  t^b 
in^n  rnNi  "13-N  ^D  "CDH  r-<::^  Nb  r-i:p  ^"^.nr  lar  ,r:Db  tz-^'Jn 
ï-î^-n  î<b  '7:Nb  ib  ^-i-idto  ^-lnnw\  »*-in  ^:wNi  ,t:2bi:'b  nm^n  ^:u\  ri:-n 
rimoD  nnN\::i  ,r-i7  D-^prib  r-i^bj?  n^-^t  ^rmj^-'"'  VwCsbT  v:"':'3  n^'n 
.■nnN  mon  nrab  Try^  r-iwN  nrc-»  t<bT  ,:^"-i:i"'  t^b  r-rn^iyT 
.nDiD  -^b:?  rnoT^  tiNn  nn^^  Nb  tzibon  "^wNb?:  n7:r;7:n-'  szwX  "«d 
"-n72'>::n  rrnNT  /n::D  î— i">"'np  riN  ï-i3i<  tjn  n:?  ■'ibn  rni<  r;:i<  xb 
,[■«  (ilPD-nD  yi"^  nn73Dn  m-i3  5<im  ,V3TwNn  nmb  "^-i^n  "^n?:"»:;  nu.\\  bD 
0"'2nN  n-T  "«siTOi'D  bip  ^yl2'::b^  .vr^'i  -^-i^i  n2-j^-«i  ,^^:irb  r72;a">i 
/  in-'-in  imi^  "^sob  ^didnt  ttdwS  ^tn  ,i^:Db  in  ^n^i:?:  -^d  \nyT^T 
nb    y^HwS    minb     -1-173-73 m    *i:bbrîN    yiyQ    ■'biibiim     3:;iri    '^j^7û3i 


•  Prov.,  viii,  17,  et  Ps.,  cxxii,  20. 
'  Comp.  Isaïe,  XL,   IS. 

•'  J05.,   \V,    1(). 

'*  11  ISam..  VI.  IC). 


LETTRES  DE  SCHESCHET  «9 


113  Di^û-^ribp  N33-1  bi^isï-:  N-^^^rr  ."i^^inn   t=:-pbN  î^'^'^ijî  ,i3rN  mn 

^•iDD    s^-ipnn    -lUîN    tD-^n^i^^i   n-i^m  -l'^nnrr    iD7:-rr:  -iim   ^Pl^'in 

smiai  ;D-"ijnn  ^1^:3  c^b-i7:?3  *^n2ni<  -û^'Oiz  x::r>  ^nb  b:'  •'73"i":;m 
Cddh-»!  m-i  ^br  r^rz  ,r^u:3br:  ^mi<  niwNDnbi  mn^b  nCwN  ,r-tDCT 
^oip  ^'n'::^  m^  -^yi  ï-id  -:>  ■^n'^i  .-^îT'rn  ib^^ci  — n?::-  -^^b 
^D  ,n:D  -^n-iirr  c^bi  "^dd  br  ^cnt  n-,^nt  /  mm  ^^ny  nmpnrr 
r-ib^:  pw^  ,ni2  •^ryi'^  ^ibT  'TwX)^  wN-nD  !-iw\'T':i  ,^n\\-,  SiT:;  pTon 
^731^^1  ,n?:Dnb  -«b  -^nn  ^biN  "C^nnNi  '«cb  -t^  tn-^cNi  ,n7a^î<  ■'bi? 
•^^jT    ,i?:;'T  jn;iDP  13>   s^ib   bn^    "^721   r^ir:  lii^b'vi:    "yb?:   ",3i    "•"w^^3 

m^N  PN  tnyib  N3  ^PiDjb  i^^  m  imp^o-  ti:nwX  ^:3  ^biNt  ,i?3r 
n'iJN  t:D">-nn:ir:i  ,^pb3rn  -«pn::-  -^^sb  "n-ûrb  bziN  •]^^^  ^:îî-i  ,^2nb3 
-17313?  nwN3pn  '^wS  ^vzyi  .ûmDDb  Y-^"  mNP-  "jj^'  ivrzv  nir^  ^b^  nbu; 
r-ix  n^'j:rbi  ,Dn-^bî<  m"c:;b  nnb  ^n  n^y  ^^roa  —7  ■>^:")  ,Si:n"^-inNV3 
^<b^  ■':r3">  ■^p"^:\"û  tI:^«^  ,r;jj'N  rnn5<  n^mm  !-T7û'^Nn  -în  Dm:D 
'^^y  ly^D  bDi  "ijDTPa  r-iPN  D^pb^x  c^^'^îî  ■^;tin  ^zyu'O  [n](N)y»:;î< 
,:^nD':jp  p^i:!^!  ,tny^'\  n7:Dn  ?n"iyrj:-«  pin  ^:^y  ï^jIt:^  ■'d  yn*^ 
pin"i7:"i  ^•^l'jy  mDip  L31d\:;p  ^-ry  n.NnT^b  "^^j^-)  :  n^Dir^  '"n">D">73m 
r-ir:»3  ip"û  ^p73  j'mam  .^mnp  s^b  "]^m7:nb?a  ^-imb  ï^7:nb?3 
^^rj'  tniDbytz  1-172  by-)  .mnc"^  mm  •::i7:p  yMi2  ^b7:b  TwW  'jp^n- 
tzi72Ti  Dnbn  £3^3^'-ip73rT  .'^^SDb  j-iT^b  \pnb"j  TwN  ^pd-n  r-iiwsn7û 
•^Pi::?-»  inDi  ï-iwsn^n  ^-nt  ,"^^r:'2  p  nNi:?:"»  ^biN*  ,^3i:i-^.  n3773  br 
1iy  npsb  '^'T^m  iP"ii:-j  D^'^pbi  yiio'cb  pn  -i7:ib  ^pncn?:;^^  nbr  xbi 
tnî<  rmNb73b  ,"]^-in>î  t^3N  ^;ni  '4:in7:bi  nbobi  PD''b-i  rnanbi 
^N  J7:u:b  .^PNmn  ^"^^p  '"^^^n  bs  mnpc73  îz;n^n  ""-rm  ,"|"'-i3T 
p2w\7oi  "^nb  ï-T^^^■^^;  ,^Pj"i7:k  ^:>  ly-ï  yl^^r>  -^dd  ■'pt:^  '^.'CN*  ^nm 
,p3  ^nriN  cnb  ^:dt  3^73^73  "^nnb  q-'im  c^bi  ,\n72ipi  p"'7n73  -^^n  ^d 
r-nbsDn  ^moM  n[^]s£173  ,n735nn  h]in)7-i  nb:;7j  s^ir:  *^73''73  '-î^ndt 
■^"iNT  ]nn  "^nir  ■•y^p?:!  "«DibN  mToi  ■•nTn  ,m?3n  T'n  pimnb  mnD:>73 

•  I  Rois,  XVIII,  45, 
'  Job,  xxxix,  2K. 

■''  /AfV/.,  XX VII,  6. 

*  Isaït',  xxxiii,  Ifi. 


70  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

pnr  "^ntî  ■'j"'3'n  "jn  -"nj^::?:  csni  .""jN-ip  t«<b  "^"372  iTiDn  csi^t:  hd 
.^DN^a-"  T^m  rrin  b^T  ,">jp'vi;"'  nnp-i  i^rûT  ^3n-::b  û-i-nr;::  d^td  -^by 
mN73  Ij-^hn  bri  /jbnr  mm:?:  "^73  b^-'-i  .^jv^^i'^  T«2-m  ^^rî^-p  nm^r-, 

nn  .i"û'»::3  ^i^nnbT  inn^b  "^DMjbiD  im^  nbi  yà  "^ib  'n  n7:n:r; 
■^D^D   b^3i  ,£^u:i3   '••jfi<  "^nb   by    GiDn^riN  '^d'u12   yen   ^d  ï-iinh  Y"^ 

DD^nN  "^T^u:  Dmm  ,ûDir.3  r-nj72nb    cnnsb   û-'^-'b^sr;  û:'  o:Dnb  ^ld2 
:  *D  ^:2oipNnNO  i:  "^Tb  -q  pHii"^  nn  ppn  n"»a'c; 


biiî  oi-i^n;::  wNjnn  bn:;-  nicdtt 
■^ab  bj?  "^nrjnN  ^121  "^T^ipm   ^n^tîm  ^"-nn   ^n^bm    "^n-inn  ^n2C3 

'^■^j^'n  r-J2rn  .^bnnN  ^nb"i-i:i  miNsn  np^m  '^-innN  ^7:C2i  nwNDnx 
^b  û-i'-jb  ,?nj:jp  "T^p  ïn-'->b;5>  nnnî^n  "no"»  br  ^b  rmrnb  ^mr^rr 
♦^îz^nb^Di  n72N  ^-11273"!  ,1133  >«iDDi  ïTinN*  "inb-^T  mn-'T"  m::?:  Dw 
yn^n  b^'  "^jkNi  !n7ûDnm  bscn  ^7:^:^3  n'en"»  [nn^x  ■'D  ■^p^'T'  "^s  b:'! 
m^  ?-iND73  Nbn  ,r;n::D  tzna  n::?^"'  szni  ^-^D-^yfD  •^-i^t  p  by 
^mir-^bT:  -«bno  "^^itip  "^nriNT  ,^ni73b  "^72721  ,-^»nnpb  "^pbn  ";n?DDn 
■^n3  rn'»::^^  tznbuib  "^wNnpn  \-ninn's:;"  "^"".nN  f^ip?:  ■>2;m  /  \napb 
n-tna  '^nN  "«niD  n^N  ût^td  t=b:>3  xb  "137:72  "^-im  br)  n'wW  tsbijT; 
"^nNnb  Ti^'cn  ';72t<2T  no-"  nbm  ,i^m73'*:3  '^iT^wNm  r-i7:Nn  ,r>nr^i^ 
"23  bDb  in^bi  3î<5  ï-rny  n:>T  tn7:t  /"^npTn  "^hd  bism  *  i\'^7:n](ipn73) 
'^:s>Ti-«7:i  "«nw^  bn  b::'  p  bi'  ,Ti^73w\r;  ^n::v  ■»n  \nyn^i  ^^-l72\::  \-^3r;N 
Sj^m  3nD3  '^^b^'T  '^'^bN  "^rinm  nt*N  b^  ""r^T  ,^\-npDm  ']'^m7:Nn 
^s  ^yiz^:^  ^^ynjz  ^"^^7:3'^  "^ry  irrDT  "^rTî^  nbb^c  -i'Jn  tsr-:  ne 
■^nauîn  t^bi  "^n^-n^  «b  ^mnn  «nn  îni:p3  y:3b  •û''N  2b  by  mby 
izjipnD  Nb  n^N  bD  o-^^pnbi  '  nb-^a^nb-i  inn  r-iN  ujipb  tz;^^  ^d  nanb 
mibnb    "^nb   br    rsnbr    r<bT  "«mn*!    c^^bn  ,ib'i3:i7:    -^bip  nx    yizvb 

*  C'est  la  première  lettre  des  mots  suivants  :  DP^n  b^'C 
»  Il  Rois,  IV,  10. 

»   EccL,  V,  1. 

*  Rutb.  II,  2. 

'  =  "^DN  i  comp.  Prov.,  xix,  il ,  Isaie,  iLviii,  9. 
"  Ex.,  XIX,  Î2. 
'  Jbid.,  23. 


LETURES  DE  SCHESCHET  71 

Grr^iDb   'i?:!:^   !-ipn   n^\x   TjIqv   ^:n    bD    mnD    t^bn  ^nn^n   bp73rji 
'^^^i:-|  ^3  *  ^r-,wNTD]  •^b:^  tnn^n  riT^b  ^21^  'r-,i<-i  .bbp;:  '^pb>n  ,bbn73 
r-iN  t*<:u5bT  ,^"«3mN  nw\  rrnriNb  ,^mit?3  D-i^pb-i  ,^:i:in  m^b-jb   pn 
■^nnwsn    .^nb-n    "^pntdi    ,^•^nNDn    "]nb^n:i    tn-Ncn    np^n    "^d  ^'^^j^rr:; 
miDTb  *^nn  'C^î<  3PD  HDO  "^D  ^ni<  "jr-'mi<  'nbN-  rn7aNm  û'^nmrî 
qoN  ■'UJ-'b'Jn   tzi^b  m'^^'n    iNna-   -^d    i^m-bn    pn::j:r;bT    i73"^r   mx 
■^nD'iJ    t^bn    'i^scb    m[mn]nn;ï^b   cvjnb  -it^wNI  rî^7ûDn"i    n^yn   ■^:pT 
,r-ib3p  NbT    ">b   — nD    t::nd    rb::'   —nT^n    ncN    '"td    bnpbn    rn73-i?3 
Qinn  "iDD  "^bi*  nb\::"'i  .mzD'::    cnd    i^b:^   '^n^^m    n'cp  ncp   ^^3:^1 
i^nm    nn7aj<    b3^    t-^^-^^^^û     ï-iispTi    CDbnp   ^t^dh   r-)i:p?3   rn73"'nn2 
■«nnwN    ^n   ']-i?2î<3  /'*  mnnD  ncN   ^-idoto    "«rpiin    nniDT  rr^rTs  rsnNT 
,i2ii:n  ^3£72  b-jn"^  £3Dii:-n   ^d^id    ITnn  n-Nip''  "^^^d  Sj'  n735<   'n'vZJX 
m3>nbi   ,^^D  r-iN  SiwN^ab  ^^bt«  nr^  ,121:*    b:'  q^oim    iDbTin  Sbpn 
rT"::3>7D    Nbn   ^ni  ht  c^bi   -^b  m^   p  s^bi  ."^^rab  n^nn   inb^pn   CwS 
■«nnnD   ï-isn    '^ni:::'    "^pan    ^d    r^t<    b^uj    "icn    nn.x   r-imcn  ^byn 
&r)-nai:  n^bD72   rtbnn   nb^nTD  ujpnb   iniiy^NT    -«nab    vn^'iim   vb^ 
nujD5   bj'  noN   — now^bi   n^nD  £Z)u:3   ^uS'".pb  in-'nznb  ^7:5<  tcwN  bDtDi 
"^•^jDb   N3b   riT  "^^.nNi  r;:i-în:3   r-r-nn-   -iDon  c^npb    m:^    nby^  bnb 
■^■19:^  &Dm  b"n:iT   ^<v--b  -^iws-i::  ï-iwN-i^m   r,y'j'Drin  Snpn   ^DpT  a^r 
T'by  ^iT:;n  -iujn  b^n  ^ri  ibnpi   ^^ds?:   i^'wDn    -^nn^^  nn-ibo   ^pab 
ib  mnobn  M2nm  ibnpb   ^(b  ï-tnd  rror*^  ro  !=:n  ^d  yii"»  '^3"TwS   rinNT 
ri-iD-«n    ^mn  v^  "ip'^nnn  r^bi   m-^^-p  n^y    in^yn  Nbi    nb^n7:r5  ly:: 
^'i'Qyb  ^T^nn  in  ^-i^dp  j-tt   ■^>ji  b^'^um  m^^'n  rm73  nn?2b   ^73^1 
r-iTsi::'?   û^^p-«   cn  "^-^^Db  pnnTo   ^3N   baN  .û^wST  t^-^pb^  ^^^y2  n^D-^rt 
rnirm    bnpnTo    nni    p-i    i^br    — nur    r<b"i     ibnpb    ■^nnwN    n'OwND 
■'mu:nnbi    vby    nns^n    ûinn    nso    ■'bw^?  mbuîbT    û-i^Dnm  CD^spin 
p  ^nnN   nnîrtbi  ^3Db  inm'jn  t^^^  E^n*^  ■n':J^î  "^nn^x   ib-jabT  ly^'pb 
'T'bN  nn^b  ^b    !nb-«bn   -^dnt  ,''^"3  21::=)  ^3ii:n  ^nn^s  mDbbn  ^mn^D 
rTu:rn  nnî<T  ^n\Dp3T   ^D:Ly    "(rmnb    pn    rr^J^n  e^bn   nu::r   iTjba 
.■«by  miin   T*::w\  bD  n\::yNT  tD^^p^<   ^d.st   n?2iN  ^mm  ."i^r^^a  muD 
■•DDT   ,S3bu3   "imn  "«D  -nj'T'n  ^-^nm   r?2;::b    ■^n-i73'v::73  b;'    -i73iy  •^yjni 
r-,D32i?3  iD^rj'  T73n72  ûbu)  bN  r^"np  •'iwN  Tpian    GL:i:jn  TnnN  3-1 
■•i^^^Di  -«ib  n  n-p-^n  tDDnrr    bi^^rr  t^^':::rr  irnwX    ,^2u:wN■^  by^    ninn 
<*nbnD3  nDnoTJi  taDnnriwsa  -iN2n?:n  ,CDib'j  "^b  rr^n"»  QD73"ibu5  n.x 

»  Il  Sam.,  XIV,  13. 
>  II  Chr.,  XXXII,  1. 

*  Job,  XXXV,  1. 

*  Ex.,  XXXII,  32, 
Isaïe,  XXXII,  5. 

*  I  Sam.,  XXVI,  19. 


72 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


t]OV  ^3  pnit"^  n3  tnuîuî   lap^^  tnis'^nN  tD^n-i::/:   ï^nNb^5    l^oit^ 


tosnî-f  ?iby73!-f  bi^i^f  N-i:55t-f  î-tti!t>i  bNn':î"«  NSit  -no  î-iTiyrï^    ^"^^ 


Mètre 


:  ^Ton  bj'  q-iciN  c->ib  :>3nt< 

:u;?DK  î-rrj'  3:du;nt  ^b 

:*U573"«  t^b  in^D  •'D  "irt73 


^*ïb  "j^   b5>  Y'  ■^^'«^ï^  ï^Tsp 
IN  '^Db'i:    t]i::pN  rmb-^b?^! 

■'n;::-iN  ^nn-x   ï^73b3? 

-n   -"in  b^bi  nb  -',^n'« 


•^îD  piDD3   nmNTsri   br:  'CJ^^i^n  [NK^lî^-^r^n  t^nnrjn  rr^^zisn    ^';!5;,'nO 

^nbb  pm  ^72N    p  ^^nN"i  .innn73  nbb    pmn   mnN  •'•"ir^D"' 

p2n  ^3^n   an?:    ,"^^bw^  ï-tpm  ^^p^n  !n"^5<    "i3?3?2    Cs-^pm    't*"'^'^    "1-3 

'IJ'    ^n273NrT    I**îbl    T\yi2''D    .";CD!1S    TON    "0"lDb     C]"^Dirr     p     bïT    &b"ID72 

!-in"i33b  û'^nn  t=^72  ib^i^  t^ib  ncN  ."îp^-n  -Cl\  ^nb^  npc:  nci< 
•^nî^  J-n^D3  ^D  pn  ."imn  n-iibn  nr.s  ^d  /V"721wS  r^^oin  î3t^  b^m 
."iNnrr^    pinn73    nnc^    un    /nmnN     bN      r:Cw\    rmnb'::73    rT2-i73Nrr 

.^bnnNi  ï^'::3N  iTDOm  .-nspn  TPinN^  t^w^î  bT;:»n  "^riN  "j^bN  rT,PN 

bN  tznpTD  n-^nn:  tnt  "^bN  nniN  r-tD  b^  riD  n"nT!3  î^b"i  i-tx-irn 
npNT  /  tznborr  -^hp^td  ^-«-^n;!  .nnriwsn  r-nj:DM;73  n::3T  .mT'T'n 
iN'^iiP  iD'D^by  wiib^n  bDT  ^n^n  irnN  "i:dn  mn  ,i:ni:?3  l'^s'  n^N*"»:;:"! 
^pD73  G^p^riN  '^72  ^p^DN  b5>  5m:?n  ppn  as^nwX  :  aibu;  r- n^sc^a 
ïlOT»  nn  pni:^   nn  ppn  r-i'j-^D  .ûDpprcp  'wN  pidto^  ^r^'^yz^  i^nidi 

:  !-rau:ip"iNO 

*  Deut.,  xxiii,  26. 

*  Comp.  Ex.,  XIII,  22. 
^  Deul.,  XIII,  7. 

*^    Ps.,  LXXVIII,  21. 

■  Ex.,  XXVI,  17. 
®  Isaïe,  Liv,  2. 

'   Ps.,  XLII,  2. 

*  Jér.,  XXX,  13 


LETTRES  DE  SCHESCHET 


73 


p  i'-i3  ^ib  n  bin^îi    c^^ii53rr   tssnrr    ïi735nïm    b:;"s:în  ^"5^    ^  bj^^ 


'  T 

:  in-in73b   in^s  p;D3  :n'v2;n"^ 
:  in73i3n  nnj^n  tni  îisibnn 


: \j ^ :  Mètre. 

.-ni"!  J-n3   Sx  *  innpn  -m: 
.b-'b  "ih]hmb  nî<i:b  bzn  1C3; 

,13   L^v   rmwNT  r:^'   b^;-^i  vp^"* 

,Nir;  ^ibz;  Ni:73:   Nbi  «b  irt 

,r-in^3  nnp   D"'"'pi   -;CN  nN7a 


"lin:    linj    "^nb  /^  m::?:    t::Db   ^»i^3N    ^nDnN    r^brn",    ,r;i'::w\    tzz^bN 
nniN    m-i^nn    t^bi  r-iNn723   n'j::^  -y    ^mTjib'^   mn:73    D^b    î-t:m 

(jj  'u  ur 

:  en  :  -"isopio  yz  ^dt"  "in  pni:"«  nn  yû-pr^   î-ido  .1;^;::   rim 


w  — 


:  Mètre 


:  "inuj  mby  ^n^ipi  ^  ^"ns 
:  ^  nnip  ";mN  ^n-m  ^'t^y 

:  nriN  nnToiN  riTo  iin  rTN:iM(3) 

:  '^nnu;*^  c*<im  ^-^mb  -nN"^ 

:  "inn  ^d^  r;Dib?û  ci'^iiTD 

:  nnD[7o](n)  ri^Dn  td  ti^bnT:^  nj"ip 

:  hn](N)on  "]^Ni  nm  DipTo  nr^ 

:  "innn  inb  ^n  û^t^t»  bDTo 

:  nn7û  ^7373  mpN*  ?nT  -73 


,ï-TlD-'5    ^N73    ^^    13'Cm    ID-lN 

.a-^-^n  n"ip73  "^d  ";mN3  -n^b 

.•^:d  ï-n5<m  ^nb  -;b  pcn 

,^3  nN  ^by  i-m:^D[D]r,  ^in 

,b'»ui73  b-n  ']ib7:b  3Ts:;nn  ^-^n 

^i^^n  t^bi  ynwX   ^b.x  nnon 
,Nb  ûN  Y'^'*^  r^'  rmwS"i?3  na 


^  =  Explorateur. 

'  =  T3*ip3,  quand  il  s'approche. 

>  Il  laui  ^peut-être  lire  ce  vers  :  -i173T  0"ID  ïni^S  ïinp  tZ'^'^p  ION  r:N'2 
^rTl  tn735<3  et  traduire  ainsi  :  Que  l'ami  qui  remplit  son  vœu  accepte  ie  Us 
[=.  1'Q^'0  la  capitale  de  la  Perse]. 

^  Ex.,  XXXV,  25. 

*  =  De  Ion  absence. 

*  A  cherché. 

^  Lisez  tjS^Sf.î  ^saïe,  lviii,  13,  yn  =  Tt^^l  ;  Eccl.,  ix,  7. 

*  Et  ton  ami  seul  doit  être  (noir)  dans  les  ténèbres? 
»  Jér.,  XIV,  18. 


74  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

*  1'^??.")  ""'^  1">2"^  ûip^  ,nb  •^-i^n"  2-1^  'iN^  ^b"ip 

:  *|73T  n72D  îipm   nDi:'  ,y-;n  ï^dt  r^jzi<  ^^b  -^"ûs: 

:  ';73::m  ^n-in   -11:^3  s^dd  /^npwS  tnyï  ^ms   ■^b:'    nisn 

•I^QN  n7:k\  *bN  ^:3"^n  :::>n-'  /pc-»  nzrîNn   r-.nn  -id?3 

.rîDnj^  rn::'T>  c*^bi  ï-inn^n  ^-^pn  "■i-:5b  ^b  n-^n  "^icdd  ^ab  V^'»^ 
n7oip7û  yii^n  ,m^bi2  "^isb  n^npnb  pcn  -"niD  -"P'cjb  -janb  ^Nbr  -j^w^i 
"^n^n  -n^3  Nn  ï-innibi  rîD-iLsb  !-i^-ind  Y^"*"*'-"  !^2"ît  r^'^i 
^DbT  *nnND  bDin  ï*<d  -^d  ^  1:1^:;  -nn72T  p-^rrrr  nnc  -^rsT^  I72::m 
p'cnn  r-i-^fiTQ  -^d  it^^'it  ^in^^-'  ^^n"i-i  bs  .irn^'û  bnpi  imN:»  b-^sn-û  pp 
riD  -l'^i^wX   r-Tnnwsn  "^n  ^^^dt^3'"i  br;3"«  C]ipm  ."^^^d   myo^  i^'im  mnn 

^p^ûi  n^n-  smnbn  b:'  r-iip-j  np"v:;b  ^<b  -«d  ,niNb  r-m^i^n  *^ti3d 
-by  ^"^w^:p  '';?3-'?3  bm?:  N^m^j  \n^'^rî  -.x  ,-i-^n:i-  'î73  my::3  tzi-«;Db  np*:; 
innNi  .^nboD  mi  in  ■— .cx  n'ci  ^d  r-i-^nw-b  ,^[n]b::r  ynx 
';'^N73T  .r-nno  ]^nm  r-73n.x-  ^— i  r-r.\brTi  n-n  ^1^-73  "iT^bn  5=n 
^u^iTDn  ']b73rî  -^^Db  inn'ijbi  .r-jmini'  mnrb  "]3b  mv:;m  nno^ 
"l'siJN  ï=5^\unpn  ^-«mni^  r<DD  br  ^n^'CJii^  Ti<  .nnnr:  rr^n  'tîd  by 
nnt<  n^pb.x  t^i-icoT  .irb^*  "]7:a  s^-ip-^T  -ij:i'  'Jj"")^  n-rîm  ynxa 
^narTwX  rnnb  «mp  :  ^  tzibcn  >^3"^  n72"ip72  bi'  tzrn  b^T  .irDinn 
î-imT'T'  b-i^  D^niTO  .nnb  nn:;^  bw\  ^rn^nN^  -^-^n  rnrz  /  rrn  ^LTDn 
.■^UDipNnwNo  J^'D  CjOT»  ^3  pn::^  -";3  n'j-j  v^P~   1^^^^*  .nn^nna  p^Tn?3n 


Tionn  N^'J^TT  ^i:^in2  av'^N  î<^\:;2  .n::in3  n73'w3  i3  nos  ,n:np-i    v^ 
"^Tjh  rT:;73  n:3-i  ^n.-r:  wN^'i::-  p  "«i5   r>i:3-i  nnrzn 

p\-mbnn  i-T3m   ^-^.npm    \-Tjmi  "^rcb    i^n   yp-^-s  r-nnwN    Hi^DI^^ 
•'Ty  ^njD-Q  in:m  .i-dd  me-  ni:n  \'^3't>t  .pn   t<L:vD 
miDD^i  ,nyn7:n   rnj'nbi  ,n'i2r>   ■'d    tzinobn    .tt^i^tt    -^jnp  riab  ""nbi 
c^bn  ,ainob   pN    c^bi  ,:>-i:b    in;    ^^N^7:    Nb   nny  ^y^   .•ns^anrr 
p  b^'  .!-I3^^7J   n2Nb7:m   nizp  srm    .mmDb  û^7j  «bi  ^nyab  tny 

*  rr;  Et  ton  âme  n'a  pas  leuvie. 
'  Deut,,  xxxii,  15,. 

»  Ps.,  L,  16. 

*  Isaïe.  II,  10. 

5  Deut.,  XIV,  24. 

*  p,  'O,  n,  les  lettres  du  mot  pian. 
^  Ex.,  xviii,  23. 

*  Isaïe,  LXii,  4. 

9  Comp.  i^uiJa  Kamma,  i,  1. 


LETTRES  DE  SCHESGHET  n 

•^sr-'iinb  *]^32  r-nbnbi  ^Dnnbi   .tzb'^ab  ^b  biNUîb  r*<2wS-i  ^nii  ^n-ijip 

.-"aopno  yz  qoT^  "p  phl:*»  nn  •;::?"    ï^'^^'^i    rnnxD   -)5<2n:2 


Mèlre 


-;U73  r-iujwST  mni<  rnbnn   '^b   m*::» 
:  ï^.2   rjTviîTob   mb"^  bN?a  ^b   r-ibD 

t<b  "^Dis-i   .!i:Db72   in-non  ram   .ïiDb?ûrj   tznin  ynrî  ï-it  T'a     ,-]^,-; 

^•^3D    r-nbnbn    ,t3"ibu5    '^:''^72U3nb    p^    ^^-^iN-b    n:'^    ^nbiD^ 

n2b  n^-^  TNT  ,ûb'::n  t^nb  ^■'733'd  n-T^bi  .^plX  oinn72n    bD  isr-'mnb 

1"ûprr  ^^HN    ."^mnNn  iNDH^ûn  ,"|nnDn  piTn?3r:    ."^nnriwX   itû^nî  :  tzib-vD 

iij  <i) 

(yl  suivre.) 


UN  RECUEIL 


DE 


CONSULTATIONS  INÉDITES  DE  RABBINS 

DE  LA  FRANCE  MÉRIDIONALE 

(suite  •) 


VIII.  Isaac  h.  Mardochée  et  le  Kol  Nidrè.  —  On  connaissait 
l'existence  d'une  lettre  d'Isaac  ben  Mardochée  sur  Kot  Nidrê.  Gar- 
moly  déclarait  l'avoir  lue  dans  un  ouvrage  de  Josepli  Alas^chkar,  in- 
titulé û^^nrr  y:^  ^'^'^';  mais  il  n'entrait  pas  dans  son  prou^ranime  de 
la  reproduire,  ni  même  de  l'analyser.  Le  traité  d'Aïaschkar  étant 
resté  inédit,  c'est  une  bonne  fortune  pour  nous,  comme  on  le 
verra,  de  retrouver  cette  consultation  dans  notre  recu^^il  (n*^  67, 
f-  r29&-131). 

Elle  n'offre  pas,  en  effet,  un  intérêt  dépure  curiosité;  eUe  relate 
un  épisode  nouveau  dans  l'histoire  du  rite  de  Kol  Nldrè,  qui  a 
soulevé  tant  de  polémiques,  et  nous  instruit  de  l'opinion  d'un  rabbin 
célèbre  en  son  temps  sur  cette  question  si  controversée. 

Comme  tout  le  monde  le  sait,  Kol  Nidrè  est  une  formule  récitée 
trois  fois  par  le  ministre  officiant,  au  commencement  de  l'office  de 
la  veille  de  Kippour,  pour  annuler  les  vœux  et  interdits  volon- 
taires violés  par  oubli  ;  elle  a  pour  complément  ce  verset  du  Lévi- 
tique,  qui  en  fixe  le  caractère  :  «  Il  sera  pardonné  à  toute  la 
communauté  des  enfants  d'Israël,  car  tous  ont  agi  sans  prémé- 
ditation. » 

»  Y o\r  Remie,  t.  XXXVIII,  p.  103. 
'  Oçar  Nchmad,  III.  p.  107. 


Ce  rite  n'est  probablement  pas  antérieur  à  l'époque  des  Gaonim  i 
en  tout  cas,  il  est  inconnu  du  Talmud,  et  plusieurs  Gaonlm  luttent 
contre  son  introduction.  Tel  Natronaï,  qui  vécut  au  ix"  siècle  :  «  Ni 
dans  les  deux  académies  (Sora  et  Poumbadita),  dit-il,  ni  en  Ba- 
bylonie,  pareil  usage  n'existe,  que  ce  soit  à  Rosch  Haschana  ou  à 
Kippour  ;  nos  ancêtres  ne  l'ont  jamais  observé,  mais  nous  n'ij^no- 
rons  pas  qu'il  s'est  répandu  dans  mainte  contrée  ^  »  Ce  n'est  donc 
pas  l'œuvre  des  Gaonim,  c'est-à-dire  des  autorités  officielles  du 
Judaïsme  d'alors,  ni  des  Académies  qu'ils  présidaient.  Amram 
Gaon,  l'auteur  du  Siddour  (Rituel),  ne  le  connaît  encore  que 
comme  une  coutume  particulière,  qui  est  loin  d'être  universelle- 
ment admise-.  D'autres  Gaonim  font  éjzalement  leurs  réserves  sur 
la  validité  de  ce  rite;  tel  le  Gaon  Haï,  fils  de  K.Nahschon^. 
Les  rabbins  espagnols  manifestèrent  la  même  hostilité  ;  comme 
le  dira  Isaac  b.  Mardochée,  Alfasi  et  Maimonide  ne  mentionnent 
même  pas  cet  usage  ;  les  plus  illustres  commentateurs  et  décision- 
naires,  encore  au  xiv^  siècle,  comme  R.  Nissim  (Ran)  *  et  Isaac 
b.  Scheschet  (Ribasch)  ^  ne  veulent  pas  en  entendre  parler.  Même 
l'auteur  du  Tour,  Jacob  b.  Ascher,  malgré  son  origine  allemande 
et  son  respect  de  la  tradition,  ne  dissimule  pas  sa  répugnance  à 
l'enregistrer  dans  son  code,  et  il  s'excuse,  en  quelque  sorte,  en 
constatant  que  ce  rite  s'est  répandu  partout. 

Ceux  mêmes  des  rabbins  qui,  à  l'origine,  avaient  donné  l'hospi- 
talité à  cet  usage  dans  leur  Rituel  ne  manquèrent  pas  d'en  mar- 
quer nettement  la  signification  et  la  valeur,  afin  de  prévenir  toute 
équivoque.  D'après  Saadia,  la  formule  ne  s'applique  qu'aux  vœux 
collectifs  i\Q  la  communauté;  voilà  pourquoi  elle  se  complète  par 
le  verset  du  Lévitique,  qui  parle  de  la  communauté  des  enfants 
d'Israël.  Mais  les  vœux  des  particuliers,  nul  ne  saurait,  s'il  les 
violait,  échapper  aux  responsabilités  qu'en  entraine  la  trans- 
gression^. 

Au  contraire,  pour  R.  Tam,  la  formule  n'est  faite  que  pour  les 
vœux  que  chacun  prononce  par  devers  soi,  car  elle  annule  les  vœux 
dont  on  ne  s'est  pas  souvenu;  or,  les  vœux  coUectits,  on  se  les  rap- 
pelle toujours'.  L'usage,  ajoute  ce  rabbin,  qui,  à  la  différence  des 

'  Schaarè  Teschouba,  143  ;  Hemda  Gnenouza,  6,  etc. 

*  P.  47  de  l'éd.  de  Varsovie. 

'  Schaarè  Teschouba,  143;  Kosch,  sur  Toma,  viii,  Im. 

*  Dans  son  commentaire  sur  Nedarim,  23  b. 

"*  Cité  par  Joseph  Caro,  Bet  Yo&ef,  Orah  Haijyim,  619. 

*»  Tour  Orah  Hayyim,  619  ;  Rosch,   sur  Yoma,  viii,  lin,  cite  lu  formule  de  Saadia, 
qui  est  la  même  que  celle  du  Siddour  de  R.  Amram. 
'  S^/~er  Hui/aschar,  144. 


78  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Espagnols,  y  était  très  attaché,  a  été  institué  à  une  époque  ancienne 
—  au  temps  des  Tannaïm  —  à  cause  de  la  légèreté  avec  laquelle 
on  formait  des  vœux  :  on  a  voulu  parer  ainsi  aux  conséquences 
surnaturelles  de  l'inexécution  de  ces  engagements  volontaires. 

Haï  Gaon,  ne  se  jugeant  pas  sans  doute  assez  fort  pour  abolir  le 
rite,  en  a  modifié  la  formule  de  manière  à  la  rendre  inoffensive, 
pour  ainsi  dire;  voici  celle  qu'il  avait  imaginée  :  «  Tous  les  vœux 
Ht  interdictions  que  nous  nous  sommes  imposés  depuis  le  dernier 
Kippour  jusqu'à  celui-ci,  et  que  nous  avons  violés  par  oubli  ou 
involontairement,  nous  prions  Dieu  de  nous  les  pardonner  ;  que 
nos  vœux  ne  soient  pas  des  vœux,  pour  que  nous  en  soyons  cou- 
pables, que  nos  interdictions  ne  soient  pas  des  interdictions  pour 
constituer  des  péchés,  que  nos  serments  ne  soient  pas  des  serments 
pour  que  nous  soyons  châtiés,  comme  il  est  écrit  :  Il  sera  par- 
donné à  toute  la  communauté,  etc.  *  »  —  De  la  sorte,  il  ne  pouvait 
y  avoir  le  moindre  doute  :  il  ne  s'agit  pas  d'annuler  rétroactive- 
ment des  vœux  qui  n'ont  pas  été  remplis,  mais  de  demander  à 
Dieu  d'en  pardonner  la  transgression  involontaire. 

Isaïe  de  Trani  l'Ancien  donnait  un  autre  motif  à  l'institution  de 
cette  coutume.  Le  Kippour,  dit-il,  amène  le  pardon  des  fautes  dont 
on  s'est  repenti.  Mais  il  est  une  catégorie  de  péchés  pour  lesquels 
la  simple  pénitence  ne  suffit  pas.  Ainsi,  celui  qui  était  obligé  par 
la  loi  d'apporter  des  sacrifices  de  péché  n'était  pardonné  qu'après 
avoir  rempli  cette  condition.  Pareillement,  ceux  qui  ont  fait  un 
vœu,  par  exemple  de  donner  une  certaine  aumône,  ne  peuvent 
rentrer  en  grâce  auprès  de  Dieu  qu'après  s'être  acquittés  de  leur 
vœu.  Mais  il  peut  arriver  que  le  fidèle  ait  oublié  l'engagement  pris 
par  devers  soi,  le  Kippour  n'aurs>-t-il  pas  son  efficacité  ordinaire  à 
cause  de  ce  manque  de  mémoire?  C'est  pour  remédier  à  ce  mal 
possible  et  prévenir  cette  éventualité  qu'a  été  établi  cet  usage  :  les 
membres  des  communautés  annulent  les  uns  pour  les  autres  les 
vœux  transgressés  involontairement  afin  que  le  Kippour  ait  son 
ple^n  effet  2. 

La  plus  originale  interprétation  du  Kol  Nidrè  est  celle  de 
R.  Benjamin,  frère  de  l'auteur  du  Schibbotdè  Hallékef,  dont  l'es- 
prit indépendant  est  bien  connu  :  d'annulation  de  vœux,  il  ne 
peut  être  aucunement  question  ;  toute  parole  ayant  ce  but  serait 
sans  portée.  Ce  que  le  fidèle  demande  à  Dieu  le  jour  de  Kippour, 
c'est  de  lui  pardonner  d'avoir  prononcé  des  vœux  :  le  Talmud  ne 
dit-il  pas  que  formuler  un  vœu,  c'est  élever  un  autel  sur  un  haut 
lieu,  et  l'accomplir,  c'est  offrir  sur  cet  autel  interdit  un  sacrifice? 

*  Cité  dans  le  Schihboulé  HalUket,  ^  317,  p.  295  de  l'éd.  Buher. 
»  Ibid.,  p.  294. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  LXKDITKS  DE  RABBINS  7'.» 

C'est  ainsi  que,  d'après  la  Bible,  les  vœux  annujf^s  par  le  pouvoir 
compétent,  comme  ceux  de  la  femme  par  son  mari,  de  m^me  que 
ceux  qui  ont  été  accomplis,  comme  celui  du  Nazir,  nécessitent 
encore  le  pardon  divin  ' . 

Cette  diversité  dans  l'explication  du  rite  recouvre  une  unanimité 
parfaite  dans  le  sentiment  des  rabbins  qui  le  proscrivaient  comme 
de  ceux  qui  le  prescrivaient  :  le  respect  de  la  parole  donnée,  la 
crainte  non  avouée  que  l'ignorance  se  croie  autorisée  à  violer  des 
engagements  sacrés.  On  dirait  même  qu'une  telle  éventualité  leur 
a  toujours  paru  impossible,  car,  à  ma  connaissance,  pas  une  fois 
ils  n'expriment  cette  crainte;  ce  qu'ils  redoutent,  c'est  que  le  popu- 
laire ne  finisse  par  prendre  à  la  légère  les  vœux  et  engagements 
de  cette  nature. 

Aussi  quand  l'apostat  Nicolas  Donin  accusa  le  Talmud  de  per- 
mettre la  violation  des  serments  et  engagements  pris  envers  le 
prochain -,  Yehiel  de  Paris  eut-il  le  droit  de  protester  avec  indi- 
gnation contre  cette  infamie:  jamais,  dit-il,  ces  annulations  de 
vœux  n'ont  visé  que  des  vœux  faits  par  devers  soi  ^;  quant  à  la 
formule  de  Kol  Nidrè,  elle  est  suffisamment  expliquée  par  le  verset 
qui  la  suit:  elle  veut  remédier  aux  conséquences  des  violations 
involontaires  des  vœux'^.  Nulle  loi,  ajoute-t-il,  n'a  recommandé  si 
sévèrement  que  la  nôtre  le  respect  de  sa  parole;  même  si  notre 
engagement  doit  tournera  notre  détriment,  l'Ecriture  ^  veut  que 
nous  y  restions  fidèles.  Ainsi  fit  Josué  envers  les  Gabaonites  ''\ 
quoi  qu'il  eût  été  trompé  par  eux  \ 

»  Schibhoulé  Halléket.  p.  294  de  l'éd.  Buber. 

'  Dans  les  Extractions  (voir  Loeb,  Revue,  II,  p.  267.,  il  est  dit  :  •  Et  quiconque 
veut  n'être  pas  tenu  d'observer  son  serment  n'a  quà  protester  au  commencement  de 
l'année  que  les  vœux  et  les  serments^  qu'il  pourra  faire  dans  l'année  sont  nuls.  •  Re- 
marquer que  dans  le  texte  visé  ici  il  îi'est  pas  parlé  de  serments,  mais  de  vœux. 
D'après  le  Vikkouah  de  R.  Yehiel,  Nicolas  Donin  t'ait  une  confusion  —  volontaire  — 
analogue  :  n^^'2  1173^  ^Tlj  1?3"«^pn-'  Nb'i:  ï-t^ITin  D^T1j3  ND^^«  1^y^ 
■'l'TS  b'D  ^ITON'^T  d'ails  Do-  «  En  outre  il  est  écrit  dans  le  traité  Nedarim:  *  Qui- 
conque veut  annuler  ses  vœux  doit  dire  à  Kippour  la  formule  Kol  Nidrr.  >  Or  on 
verra  plus  loin  que  le  texte  ne  parle  pas  de  Kippour,  ni  de  Kol  Ni'lrr. 

•  Dans  la  Confessio  magistri  Vivo  {■=  Yehiel)  on  lit  :  «  XXIL  Dixit  tamen 
quod  hoc  intelligit  de  volis  vel  juramentis  vel  promisis  factis  ad  seipsum  et 
non  ad  alium.  »   Voir  Revue,  III,  p.  56.  Dans    son    Vikkouah,  Yehiel  dit,  en  effet  : 

Nbx  Y^'^i  ';mN  ir^rr  myinDi  Dm3  'j^n^n?:  rm-jT^nn  'y^  nnrwXpm 
D";n  V^  i^"^3nb  û^N  l^3'w*i  û"^"n:  b^wX  pn  pbn  û-^nn^b  i^nt  i?:::yb 
nn:s>n»  NbN  -isr-tb  bi'D^. 

''  "^D  ...my  b^b  nbom  Ns^ob  b^c::  ■^n'is  bd  by  r!:>nn  rbwVo  n"::NT 
iniîD  ûnN  b'^UD^  Nb'CJ  m5y:;n  pn  i^^^dj:  i:r:wN  "j^n  n:..vo3  Dm  brb 
:i:n;r3  inyinuin  iî<. 

"^  Psaumes,  xv,  4. 

•  Josué,  IX,  18. 

^  Vikkouah,  p.  7, 


L'aocusation  de  Nicolas  Poniri  entra  dans  l'arsenal  de  la  polé«» 
mique  anti-juive;  elle  servit  dans  un  grand  nombre  de  contro- 
verses. Aujourd'hui  encore  et  presque  annuellement,  l'ignorance 
naïve  ou  volontaire  de  cuistres  imbéciles  dénonce  à  la  vindicte 
publique  la  scélératesse  des  Juifs,  qui,  moyennant  la  récitation  de 
cette  formule  commode,  acquièrent,  selon  eux,  la  liberté  de  violer 
sans  scrupule  tous  leurs  engagements. 

Une  modification  fut  apportée  à  la  formule  par  R,  Tam,  le 
célèbre  rabbin  champenois  du  xii^  siècle.  Aux  mots  :  «...  depuis 
le  dernier  Kippour  jusqu'à  celui-ci  >j  furent  substitués  ceux-ci: 
«...  depuis  ce  jour  de  Kip[)Our  jusqu'au  Kippour  prochain  *  ». 

R.  Tam  est-il  vraiment  l'auteur  de  cette  réforme?  D'après  les 
termes  du  Sèfer  Hayaschar,  il  n'aurait  fait  que  s'approprier  l'opi- 
nion de  son  père,  le  fameux  gendre  de  Raschi.  Mais,  d'après  cer- 
tains textes,  cités  par  M.  Epstein,  le  changement  est  l'œuvre  de 
Méir,  le  célèbre  ministre-officiant  de  Worms  ;  le  père  de  R.  Tam, 
qui  a  habité  quelque  temps  cette  ville,  a  pu  en  rapporter  la  nou- 
velle formule-. 

La  raison  de  ce  changement  était  purement  scolastique,  c'était 
le  scrupule  d'un  talmudiste  épris  de  logique  et  voulant  de  la  consé- 
quence, même  dans  les  usages.  Or,  le  rite  de  Kol  Nidrè  n'a  d'autre 
point  d'appui  qu'un  texte  talmudique  ainsi  conçu  :  «  Quiconque 
ne  veut  pas  le  maintien  de  ses  vœux  doit,  au  jour  de  Rosch  Has- 
chana,  déclarer  que  tous  les  vœux  qu'il  prononcera  dans  l'année 
sont  abolis,  mais  il  faut  qu'il  se  souvienne  de  cette  condition  au 
moment  du  vœu^.  »  Ce  texte,  avec  cette  restriction,  est  assez 
étrange  ;  aussi  est-il  corrigé  par  tel  docteur  du  Talmud.  Bien 
mieux,  il  a  pour  but  d'exphquer  un  passage  obscur  de  la  Mischna, 
qui  ne  dit  rien  de  semblable.  Quoi  qu'il  en  soit,  comme  c'est  le 
seul  fondement  possible  de  notre  rite  et  qu'il  parle  du  futur  et  non 
du  passé,  il  était  logique  de  modifier  dans  ce  sens  la  formule  con- 
sacrée. D'autres  considérations  d'ordre  talmudique  sont  encore 
mises  en  avant  par  R.  Tam,  mais,  en  réalité,  celle  que  nous  ve- 
nons d'exposer  est  la  principale. 

La  correction  souleva  une  véritable  temi)ête,  même  parmi  ceux 
qui  n'étaient  pas  opposés  à  la  récitation  de  l'ancienne  formule. 
Même  le  Rosch  (Ascherb.  Yehiel),  qui  naquit  et  vécut  longtemps 
en  Allemagne,  où  R.  Tam  était  une  autorité  indiscutée,  déclare 
nettement  mauvaise  cette  rédaction  et  décide  qu'il  faut  en  revenir 
à  l'ancienne.  C'est  à  cet  avis  que  se  conforme  son  fils,  l'auteur  du 

*  Sé^cr  Haijaschar,  144. 

ï  Voir  l'anicle  de  M.Epslein,  dans  i«:<rr«tf,  XXXV,  p.  244-245. 

■•'  Kcdarm,  23  /j. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  LNÉDITES  DE  RABBINS  81 

rowr*;  pareillement  Tauteur  du  Schibboulé  Halléhet,  quoiqu'il 
fût  le  disciple  des  savants  français'.  Isaïe  de  Trani  l'Ancien,  dont 
ce  dernier  invoque  la  démonstration,  et  Ibn  Giat,  cité  par  le 
Manhig^  réfutent  victorieusement  Topinion  de  R.  Tara. 

C'est  à  la  fois  et  sur  le  principe  même  de  la  récitation  du  Kol 
Nidrè  et  sur  la  formule  à  adopter  qu'Isaac  b.  Mardochée  fut 
consulté. 

Sa  réponse  n'est  point  faite  pour  surprendre,  elle  est  entière- 
ment conforme  à  l'esprit  qui  inspire  toutes  ses  Consultations. 

Il  commence  par  déclarer  qu'il  a  déjà  étudié  la  question  dans  son 
commentaire  sur  Nedarim.  Puis  il  attaque  de  front  tout  de  suite 
le  raisonnement  de  R.  Tam,  dont  il  reproduit  sommairement  les 
termes.  Il  invoque  contre  ce  docteur  Isaïe  de  Trani,  dont  l'opinion, 
dit-il,  s'accorde  avec  celle  de  Saadia,  puis  Ibn  Giat,  déjà  cité  par 
le  Manhig, 

L'ancienne  rédaction  de  la  formule  doit  donc  être  préférée  à  la 
nouvelle,  dans  les  communautés  où  le  rite  est  en  vigueur.  Mais  ce 
rite  lui-même  est  erroné,  l'opinion  des  rabbins  espagnols,  de  la 
Babylonie  et  des  deux  Académies  lui  étaient  ou  lui  sont  contraires; 
or,  ce  sont  ces  autorités  qui  sont  nos  guides.  Voilà  pourquoi  aussi 
Alfasi  et  Maïmonide  n'ont  pas  mentionné  cette  coutume,  qui  heurte 
les  principes  de  la  tradition.  Il  ajoute  ce  détail,  qui  ne  manque  pas 
d'intérêt  :  «  Elle  a  été  abolie  dans  la  plupart  des  communautés  où 
il  y  avait  des  rabbins  considérables  et  érudits.  »  De  fait,  nous 
savons  par  le  Manhig  qu'en  Provence,  c'est-à-dire  dans  le  Midi 
de  la  France,  elle  existait  à  la  fin  du  xii®  siècle.  C'est  donc  bien 
d'une  abolition  que  parle  notre  Isaac.  Du  temps  de  mon  père, 
dit-il  ensuite,  je  n'ai  vu  à  Narbonne  ni  ailleurs  personne  qui  eût 
l'idée  de  réciter  le  Kol  Nidrè,  et  ainsi  en  est-il  de  nos  jours, 
a  Le  ciel  me  garde,  telle  est  sa  conclusion,  d'inciter  ainsi  à  des 
erreurs,  car  à  quels  préjudices  n'expose  pas  cette  coutume  les 
particuliers  et  les  communautés  !  Un  jour  de  pardon  et  d'amen* 
dément,  où  les  scrupules  doivent  s'aiguiser,  comment  prononcer 
de  telles  paroles  ?  » 

Israël  Livi. 
[A  suivre.) 


*  Or  ah  Eayyim,  619. 

«  §  317,  p.  293  del'éd.  Buber. 

'  P.  59  h. 

T.  XXXIX,  NO  77. 


.82  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


APPENDICE 


VII 

^:f  ^r\b2fJ2  n^iN-^i  ^m^D  aujr:  b">is"^  î-îbyDrj  l'^un  -^rTaTa  Kînuî 
^v  Wn  nn73«b    "^iN-i   toN  D'«n'iTn72rî   r-iirpn  mn^rt  -^ms  bn  nos 
r-j-tïT^^  ûN   n»N''\D  tz-^SD  nrN  b^  ïht  insd-^uji  ><b   un  ta-^-nsDn 

b"n  T^nya  nT>3  n^Ds^-^;::  rr):    bs  n-^n?:  -«Nsn  irsr  r^-^nv^a   i^  j-ith 

^ss-iN  rjbN^n  t-iNT2  "«b  n^-is^  î-i?:  "^"^ssb  nir-iN  m^i:i'»y  nn^sT 
î-Il:'i3  in:>T  T^bN^a  n^a  in'ï:zi>2  Y^  ^ms  ^'SsrsT  ,^a  t>ii:ii5b  ano?a 
^-iToiNi  ûi-ns  n:D0?3a  ■>nnN''2ï3  n?:  û:?  127:52  -^bitN  r<i:73;r!  ^sb  nîa 
'nnsn  riDsrj  by  t-iD-iir  ■'Da  ni:p  n7:ib  isrî3  "^n^s  bs  bus  nosr:  riT 
^sbn  ,m?D3ipr;T  m:>"ia^m  û-'noNm  Dmsr;?:  ^2to  hj:  n'^nnb  û-'mTnTsa 
ib  Yi<^  nai  Ntnu:  riTi-r  ^mrr  bj^  û-^m:  nn*»:!  b"T  apr-^  '"^a-ib  rs^pnn^ 
D-i-ns  rT5>anî<  's  ns-^sujo  nm^a  sna^^rj  nbm  5<nD3n  laa^^a  bbs  ï:-iU3 
taT^73  i-ims  NsnoNT  nmînTDa  r-T>:;!iT  ^'lai  v-ns  iTa-^-ipri  «bu:  niri-im 
î-73m  .'-luî-^n  -iDoa  'ins^a  15:3  b^n  «ar:  ûmcaïi  ût»  i:>  r-iT  û-i-nDS 
ns'a^arj  nsia?:^  rs?^  anpn  bax  iNt)  n':îp  Ninuj  î-t53  b"T  ann  p^nnrr 
n^o-iob  "^iN-i  Y^^  ^"^  N"*^  ï^3^73n  nniN?:  nTob^rj  i->irT»:j  NnTaiin  ^m^s 
ï-T;a-n73b  nao  t^srn  na  t*^3irî  a-i  ^'i-i72Nn5  a^ana  la  ïsinbi 
riînn^r  lias  Na-in  t^a-^bN  '7::\a  muîTs^  ^"nr^  bj'  '-^s  Kp-ica 
■^nna  nb  "^îm  ai-i:^!  '""d  -^T^ino  rib  D-^no  N:n  t*^an  b"N  "lai 
•'Db'^s  t**ibT  ■^a'^n  "^n  nu:c3  "^DNa  «nnanN  r<bi  'Tr">bN  'm  «rr^-'anniN 
t^anai  «in  "^NTiai  Npnca  ï-r-^b  nu5-n  r-iNi  ûmsa  t^bipb  nr53 
Gfi<i  ,naTUJ  naob  nnom  n7:"ino  t^-^rr^T  it  rrr^TTo  '""Da  'r-jtps 
•mnnu)  toms  bD  in;DNb  'wiNm  noniNT^ri  ï-nrs  'd  i2nrj:73  n^sNn 
D''-iD"i73  an  -^in  ûiba  'wn  «b  i">7:"«-'p  p  ^m  "^2^53  ûnp?273  Nax'::  ir  i^a?: 
wir;  \srî  "«sa  \s2n  '7jbNT  nDi73  ■i5\s  'in  D"^7:am  nDi73 '73"im 'T^^-'bN  'n 
ï-T^b  i-inn^T  t^nsDina  '7::'-j  "•înpna  eanrt  /pa-n  Ka^bx  ■'2^7:  t^b 
'2"^y73U)T  'iDT  -nn-"  Nb-::  i:^  i73i:r  "^-112  nD-'^sb  n73  'Ty^bx  'nb  pa-i 
n2C7:r^  '-^d  -^anb-i  jh""  '?33Tj  wN-'nna  Na-n  «na  mTD  pan  '•'•tnt  î-i2"^73 
b:>  n^202  û-'-n2a  UJ5<-1  mbp  i^r;2"«  «bï:  "^nD  "^a  inao  dot  "ip:>rt  ht  br  it 
i72i::>  ■^m2a  riTa  b^yM2  •^N2n!rfO  n-^wS  i*»!  n^^is^a  v^*'»^  ûnt  nin  iT^abn 

*  Nedarim,  1'\  b, 

Ǥ144. 

'  Nedarim,  ibid.  • 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  LXÉDITES  DE  RABBLXS  83 

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!-T3Uî7:n  -nana  0011073  mono  -nNsb  '-«dn'U   iTaonob  "^i^-i  i^t<  o^-,-7:o 
/liTsno  p  m-nnb  moxu:  p;a   bo   'i^t^^po  bor;  i\n^  d":?nt  iT'pon 
ms'ioujn  Nin  O'^noNm  ts-'-nsn  uy  m^snoso  ono^  rsTa  *  Sb?:'::  '^y^ 
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t-nw\zj!i  ibN  Sou)  pso  VN  •'O  nsiiuîn  îrny  v^^^    "^^  ta^^iN^aan 
m  rr^noa  '-^nio  nooTa  û'^niDon  or  û^n  NbN  la  n-iOTa  \^i^^  «lan  boi 
îTTbi  ûip^  1720  -^b-iua  ^Nia72  p  to:»  û-innsnT:  T^nrw  î-î»   nn'«ïii 
■«nu5a   r^b  V^m3  i"'»   înTn  liu5ba   tobi^n  ii«a  •'NSinaa   an    ano 
Nbi  î-T3«jn  ujNna  t^^b  o-^nn^  n-^nnb  baaa  tDip73  boa  «bi  mariai 
'101  -^noNi  •'ma  bo  '731N  miitnN  nNMJa^:  ',3^73^  t^bx  û-^nicon  tara 
pN  pHi:"»  '■'an  't-101  ,'D"y  i3-^nian73  i3y73\a  t^bi  lî-^Nn  i^b  i3n  Sa» 
ta-^ma  mnnna   '731N  i3ni   b"Ti  tamson    or  mobna  b"T  n-^^^a 
to-^msai  ,13^73^5  Nibi  i3n»b  aà  !-TTn  ^i^boi  t-m  mooa  mj'ia^oi 
î-i3Uîn  ^Nna    ni73:>"^   nsiDn   bo  im3  i»'>'^prT»  Nb^  Mirinrt  '-^ona 
'■'»''pi   n"'N3nb   ï-j"^baa   m3n  ny\i3a   mot  •'n  '■^^p73i  'ioi    *n73«''i 
ïiaa  '73N  t^an  noi  ^iot  nm"^  >*b;î)   labai   •'3n   "-^aN  '73»  .ta-^msb 
nb  û-^no  i^3n    ny  'ioi  •'snNT  ''«73  ^'n'»  t^bn   ï-t3U}n  ^«na  •'3nNl 

»  Lire  bb073^. 
*  Saadia. 


84  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

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b^'iD  mïjyb  î-ib-^bm  ,û-^N'«paT  a-^bTra  a">?3an  tona  iin^a  m?:ip7art 
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I 


LA  LUTTE 

ENTRE 

ISAIE,  FILS  D'ABBi  MARI,  ET  YOHANAN,  FILS  DE  MATATIA 

POUR  LE  RABBINAT  DE  FRANCE,  A  LA  FIN  DU  XIV®  SIÈCLE 


On  connaît,  par  les  Consultations  d'Isaacb.  Scheschet  (Ribasch), 
le  différend  qui  troubla  la  communauté  Israélite  de  Paris  peu 
d'années  avant  l'expulsion  de  1394*.  Matatia,  grand  rabbin  des 
Juifs  revenus  en  France  en  1359,  était  mort  et  avait  eu  pour  suc- 
cesseur son  fils  Yohanan,  qui  ne  manquait  pas  d'une  certaine  ins- 
truction, comme  on  peut  le  voir  par  ses  lettres.  Le  nouveau  grand 
rabbin,  reconnu  par  le  pouvoir  royal,  avait  déjà  pris  possession 
de  ses  fonctions  ;  il  présidait  l'école  rabbinique  de  Paris  et  avait 
môme  formé  des  élèves  —  au  nombre  de  trois  —  devenus  dignes 
d'exercer  le  ministère  sacré.  Tout  d'un  coup,  un  disciple  de  son 
père,  Isaïe,  ou  Oschaya,  fils  d'Abba  Mari,  appelé  encore  Astruc, 
vint  lui  signifier  son  congé  en  produisant  un  brevet  du  fameux 
rabbin  viennois  Méir  Halévi ,  qui  l'investissait  du  pouvoir 
suprême  rabbinique  et  déclarait  passible  de  l'excommunication 
quiconque  ne  se  soumettrait  pas  à  son  autorité. 

L'ingérence  d'un  rabbin  étranger  était  déjà  par  elle-même 
extraordinaire;  mais,  au  profit  de  qui  s'exerçait-elle?  Au  profit 
d'un  intrigant,  dépourvu  de  scrupules,  qui  avait  déjà  su  tirer  parti 
de  son  audace  turbulente  :  n'avait-il  pas  déjà,  par  la  menace  d'une 
destitution,  amené  un  certain  R.  Simson  à  lui  donner  sa  nièce  en 
mariage?  Et  maintenant  il  ne  craignait  pas  de  s'en  prendre  au 
fils  de  Matatia,  montrant  la  gratitude  qu'il  gardait  au  maître  qui, 
non  seulement  l'avait  instruit,  mais  encore  élevé  et  entretenu  de 
ses  deniers.  Il  était  arrivé  à  ses  fins,  son  ambition  était  satisfaite  ; 

»  N"  268-272. 


86  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

mais  à  quoi  faisait-il  servir  son  succès  ?  Au  lieu  de  diriger  les 
réunions  académiques  à  l'époque  traditionnelle,  selon  l'usage 
français,  il  battait  les  chemins,  à  cheval,  faisant  métier  d'agent 
matrimonial*.  Quant  à  R.  Yohanan,  qui  nous  dépeint  sous  ces 
couleurs,  peut-être  noircies,  son  rival,  il  s'était  déjà  vu  aban- 
donné de  ses  élèves. 

Yohanan,  au  lieu  de  faire  appel  au  bras  séculier-,  exposa  ses 
doléances  aux  rabbins  de  Catalogne.  Cette  province  comptait  alors 
les  savants  les  plus  estimés,  les  célèbres  Isaac  b.  Scheschetet 
Hasdaï  Crescas  ;  c'était  là  aussi  que  son  père  avait  pris  ses  grades, 
à  l'école  de  R.  Nissim  et  de  R.  Péréç.  En  plusieurs  circonstances, 
d'ailleurs,  lui-même  avait  eu  déjà  recours  aux  lumières  des  rab- 
bins catalans.  La  lettre  qu'il  adressa  à  ces  deux  docteurs  renom- 
més et  les  réponses  qu'il  en  reçut  se  trouvent,  comme  on  sait, 
dans  la  collection  des  Consultations  de  Ribasch  ;  comme  on  le  sait 
aussi,  ces  deux  autorités  se  prononcèrent  en  sa  faveur. 

Une  troisième  personne  intervint  dans  la  discussion  :  ce  fut 
Moïse  Halawa  de  Tortose  ^  La  Consultation  qu'il  envoya  à 
Yohanan  était  en  partie  connue,  pour  avoir  été  signalée  par 
M.  Steinschneider  dans  son  Catalogue  des  manuscrits  hébreux  de 
la  bibliothèque  de  Leyde  (page  223).  L'illustre  bibliographe  s'était, 
il  est  vrai ,  trompé  :  il  avait  attribué  le  document  à  Ribasch, 
malgré  la  note  marginale  d'un  propriétaire  du  ms.  le  déclarant 
écrit  par  Moïse  Halawa.  Graetz,  n'ayant  aucune  raison  de  révoquer 
en  doute  l'assertion  de  M.  Steinschneider,  a  rapporté  à  Isaac 
b.  Scheschet  certains  détails  biographiques  contenus  dans  la 
lettre  ;  c'est  ainsi  qu'il  a  fait  de  ce  rabbin  un  centenaire. 

M.  Halberstam  s'est  aperçu  de  l'erreur  et  a  revendiqué  pour 
Moïse  Halawa  la  paternité  de  cette  lettre*.  Il  eût  suffi,  du  reste, 
de  comparer  le  texte  de  celle-ci  avec  la  réponse  de  Ribasch,  qui 
est  imprimée,  pour  s'apercevoir  de  la  confusion.  En  1873  parais- 
saient à  Jérusalem  les  Novelles  de  ce  Moïse  sur  le  traité  Pesahim^ 
et  r  «  approbateur  »  de  cette  édition,  Abraham  Aschkenazi,  dé- 
clarait avoir  en  sa  possession,  sous  le  numéro  133  d'un  ms.,  une 
lettre  dudit  Moïse  Halawa  écrite  à  propos  de  la  lutte  entre  Yoha- 

»  \i  ^^\Db  aii'ib  b-^nn-^  ûTD^isn  ^rx:)yD  T\yy^^^r\  i?^^  ^'^^  ^'■'jnai 
D'^iTiT  mnob  IN  ■^jbs  nab  "^DbD. 

*  D'après  la  lellre  de  Ribasch,  il  avait  été  reconnu  rabbin  des  Juifs  de  France  par 
le  pouvoir  royal. 

*  Ce  nom  s'écrit  de  plusieurs  façons.  Dans  le  ms.  de  Leyde  dont  nous  allons  par- 
ler, il  est  orthographié  :  ïlt^TII^bNn  ;  pareillement  dans  la  noie  marginale  du  ms, 
de  M.  E.  N.  Adler. 

*  Voir  Hebr.  Bibliogr.,  18''3,  p.  74.  Son  opinion  a  été  adoptée  par  M.  Weiss, 
Dor  Dor  Wedorschaio^  V,  p.  1896,  note  5, 


LA  LUTTE  ENTRE  ISAIE  ET  YOHANAN  87 

nan  et  Oschaya,  et  contenant  les  mômes  détails  biographiques  que 
le  ms.  de  Leyde. 

Ce  ms.  d'Abraham  Aschkenazi  est  maintenant  en  la  possession 
de  M.  Elkan  Adler,  qui  a  déjà  mis  la  main  sur  tant  d'ouvrages 
précieux.  Avec  sa  permission,  nous  publions  ici  la  réponse  de 
Moïse  llalawa,  qui  intéresse  l'histoire  des  Juifs  de  France  *. 

Cette  lettre  egt  malheureusement  écrite  dans  le  style  déplorable 
du  temps  ;  ce  ne  sont  que  tours  de  force,  vrais  feux  d'artifice  de 
centons  bibliques  et  talmudiques  ;  les  calembours  n'y  manquent 
môme  pas,  et  le  scribe  les  a  soulignés.  Une  traduction  de  ces 
quelques  pages  serait  fastidieuse  ;  il  suffira  de  résumer  les  trop 
courtes  lignes  qui  ont  un  intérêt  historique. 

L'auteur  dit  qu'il  n'a  pas  l'habitude  de  se  prononcer  sans  avoir 
entendu  les  deux  partis  ;  mais,  en  la  circonstance,  l'abstention  et  le 
silence  seraient  coupables.  Matatia  a  rendu  de  grands  services  à 
ses  coreligionnaires  de  France  ;  souvent  il  a  arrêté  des  mesures 
fâcheuses  que  voulait  prendre  contre  eux  le  gouvernement.  Son 
fils,  Yohanan,  est  un  savant  connu,  et  il  vient  d'exposer  ses  do- 
léances aux  rabbins  de  Catalogne.  Juda  b.  Eliézer  (le  même  qui 
s'était  rendu  chez  Isaac  b.  Scheschet)  s'est  présenté  à  son  école 
porteur  de  la  lettre  du  plaignant.  Il  a  vu  aussi  une  pétition  signée 
de  la  majorité  des  membres  de  la  communauté  de  Paris.  Pour  lui, 
il  ne  connaît  personnellement  ni  Méir  Halévi,  ni  son  protégé  ;  il 
rend  hommage  à  leurs  mérites;  mais  il  croit  devoir  s'adresser  aux 
rabbins  de  France  et  d'Allemagne  pour  leur  signaler  le  scandale 
produit  par  ce  différend  :  quelle  impression  doivent  produire  ces  di- 
visions sur  les  Israélites  et  leurs  adversaires,  particulièrement  sur 
les  gens  du  peuple*.  Il  a  quatre-vingts  ans  et  a  vu  autrefois  en 
Catalogne  nombre  de  rabbins  remarquables  par  leurs  vertus  ;  dans 
sa  jeunesse,  il  a  grandi,  à  Barcelone,  à  l'école  de  Salomon  b.  Adret, 
en  compagnie  du  fils  de  celui-ci  ;  il  dit  l'éclat  de  la  renommée  de 
ce  maître  ;  puis,  il  a  vu  les  deux  astres,  R.  Péréç  et  R.  Nissim  ; 
il  n'a  pas  craint  d'être  en  désaccord  avec  eux,  et  jamais  on  ne  l'a 
traité  avec  hauteur.  Les  autres  rabbins  du  pays  non  plus  n'ont 

'  Ce  ms.  reoferme,  eotre  autres,  dix-neuf  Consultations  rangées,  comme  dans 
celles  du  Raschba,  sous  la  rubrique  des  localités  consultantes  :  Monzon,  Alcaniz, 
Majorque,  Paris,  Calalayub,  Barcelone,  Cervera,  Braga  (eu  Aragon),  ou  plutôt 
Berga  (tli'lD)  (Catalogne),  proche  de  Cervera,  Saragosse.  Le  nom  de  l'auteur  n'y 
figure  jamais  ;  cependant,  dans  la  pièce  que  nous  publions,  le  prénom  tout  au 
moins  est  suffisamment  indiqué  par  les  mois  ïllij;  ÏTlID.  C'est  à  la  marge  éga- 
lement qu'un  des  propriétaires  du-  ms.  attribue  à  ce  rabbin  ces  lettres.  Dans  la 
préface  du  ms.,  on  dit  aussi  que  l'auteur  doit  en  être  Moïse  Halawa  ^écrit  ici 
tlNlbn,   comme  dans   les  Consultations  du  Ribasch,  qui   le   cite  n«»  69,  395,  396). 

*  D'après  le  tezte,  il  s'agirait  de  convertis. 


88  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

jamais  exercé  d'autorité  despotic^ue;  soucieux  de  ne  pas  profaner 
le  nom  de  Dieu,  ils  n'ont  jamais  imposé  aux  communautés  des  dé- 
crets ;  jamais  ils  n'ont  empiété  sur  les  droits  de  leurs  collègues 
pour  en  tirer  profit;  ils  avaient  l'amour  désintéressé  de  l'étude  ; 
même  réduits  à  la  misère,  ils  n'ont  jamais  pensé  à  rendre  des 
arrêts  pouvant  leur  être  profitables.  Pour  lui,  voilà  trente-cinq 
ans  qu'il  est  à  Tortose  :  jamais  il  n'a  brigué  ni  honneurs  ni  émolu- 
ments, pour  battre  monnaie  de  sa  science  ;  il  a  préféré  entretenir 
sa  famille  modestement.  Pourquoi,  répond-il  après  cette  critique 
ass^z  vive  de  la  conduite  dlsaïe,  pourquoi  avez-vous  dépossédé 
Yohanan  de  ses  droits  ?  Rendez-les-lui;  réconciliez  les  deux  ri- 
vaux. —  11  oublie  seulement  de  dire  par  quel  moyen. 

La  lettre  de  Moïse  Halawa,  comme  celles  d'Isaac  b.  Scheschet 
et  de  Hasdaï  Crescas,  doit  être  antérieure  à  l'année  1391  ;  autre- 
ment on  y  entendrait  l'écho  des  épouvantables  massacres  qui  dé- 
cimèrent alors  les  Israélites  d'Espagne  et  ravirent  à  Crescas  son 
fils.  Nous  ne  savons  pas  la  suite  qui  fut  donnée  aux  remontrances 
des  trois  rabbins  catalans.  Bientôt  l'expulsion  de  1394  devait  ren- 
voyer dos  à  dos  les  deux  rivaux.  La  situation  des  Juifs  de  France, 
surtout  depuis  la  mort  de  Charles  V,  avait  été  en  s'assombrissant. 
Les  désordres  qui  marquèrent  l'année  1380  à  Paris,  puis  la  révolte 
des  Maillotins  faisaient  prévoir  le  sort  qui  les  attendait.  Si  quelque 
chose  peut  témoigner  de  l'incertitude  de  leur  condition  dans  cette 
seconde  moitié  du  xiv®  siècle,  c'est  précisément  la  décadence  des 
écoles  rabbiniques  et  la  pauvreté  de  la  France  septentrionale  en 
docteurs  distingués,  qui  expliquent,  en  partie,  l'inconvenance  de  la 
conduite  de  Méir  Halévi.  Sauf  ces  deux  compétiteurs,  aucun  nom 
de  rabbin  de  cette  région  ne  nous  est  parvenu.  Et  le  fait  se  com- 
prend trop  bien  :  les  Juifs  qui  avaient  passé  un  contrat  temporaire 
avec  Jean  le  Bon  n'étaient,  en  réalité,  qu'une  compagnie  de  ban- 
quiers, de  prêteurs  d'argent.  Dans  l'acte  de  1360,  le  roi  ne  parle 
que  de  deux  «  maîtres  de  la  loi  »  qui,  assistés  de  quatre  autres 
Juifs,  ont  droit  de  signaler  au  pouvoir  ceux  de  leurs  coreligion- 
naires indignes  de  rester  dans  le  royaume.  La  science,  pour  fleu- 
rir, a  besoin  de  calme  et  de  sécurité. 

Israël  Lévi. 


LA  LUTTE  ENTRE  ISAIE  ET  YOHANAN 


NOTE  ADDITIONiNELLE  SUR  MOÏSE  HALAWA 

J'ai  eu  Toccasion  de  consulter  le  ms.  de  Leyde  (Warner,  n°  50) 
auquel  M.  Israël  Lévi  fait  allusion. 

Les  32  premières  pages  contiennent  27  consultations,  dont  17 
correspondent  à  17  de  celles  qui  sont  attribuées  à  Moïse  Haiawa 
(ou  Haiiwa)  dans  mon  ms.,  que  j'appellerai  ms.  de  Smyrne.  Dans 
celui-ci,  il  est  dit  que  les  réponses  de  Moïse  Haiawa  sont  au  nombre 
de  19  ;  mais,  en  réalité,  il  n'y  en  a  que  18,  numérotées  125-142.  — 
Des  n  Consultations  du  ms.  de  Leyde,  8  y  sont  expressément  dites 
de  R.  Moïse,  tandis  que  toutes  les  autres  sont  attribuées  par  le 
copiste  au  Ribasch.  De  là  la  confusion  dans  laquelle  est  tombé 
M.  Steinschneider.  — •  Des  10  autres  consultations  de  ce  ms.,  deux 
seulement,  qui  ne  se  trouvent  pas  dans  celui  de  Smyrne,  sont  sû- 
rement de  R.  Moïse,  et  c'est  sans  doute  par  erreur  que  trois  autres 
lui  sont  assignées.  Cinq  de  ces  huit,  qui  proviennent  de  rabbins 
contemporains,  figurent  dans  le  ms.  de  Smyrne. 

Les  pages  33-59  du  ms.  de  Leyde  ne  sont  pas  d'une  seule  et  même 
main  ;  elles  renferment  nombre  de  consultations  intéressantes  ; 
Tune  d'elles,  p.  40  &,  est  justement  de  Yohanan  b.  Matatia,  grand 
rabbin  de  Paris;  une  autre  est  de  son  frère  Joseph,  à  moins  que 
ce  nom  ne  soit  un  lapsus  pour  Yohanan*. 

Aux  localités  relevées  par  M.  Lévi  dans  mon  ms.,  celui  de  Leyde 
ajoute  :  Trina  (?),  Gérone,  ^'J5i73p  (?)  et  Solsona  (n5Ti5bi;z5). 

Les  Novelles  de  Moïse  Haiawa  sur  Pesahim  auxquelles  renvoie 
M.  Lévi  donne/it  une  autre  orthographe  du  nom  de  ce  rabbin.  Elles 
projettent  quelque  lumière  sur  ce  personnage.  Le  hahham  baschi 
Abraham  Aschkenazi,  dans  son  approbation^  cite  des  paroles  élo- 
gieuses  de  Joseph  ibn  Leb  sur  Moïse  Haiawa,  placé  par  lui  sur  le 
même  rang  que  le  Ribasch. 

De  l'expression  d'Abraham  Aschkenazi,  "^"n,  je  conclus  qu'il 
n*était  pas  le  propriétaire  du  ms.  de  Smyrne  ;  on  le  lui  avait 
seulement  prêté.  Lui-même  cite  Azoulaï  qui  aurait  connu  ces  Con- 
sultations de  Moïse  Haiawa.  Or,  précisément,  Azoulaï  est  le  seul 
auteur  qui  fasse  mention  des  ouvrages  riDiinn  riTn,  û^D"«^nn  mpnn  'o, 
n^ïîN'in  l^i^  et  autres  abrégés  des  ^'wS'nn  n'Vo,  qui  se  trouvent  dans 
le  ms.  de  Smyrne.  Il  est  donc  permis  d'en  induire  qu' Azoulaï  a  vu 
ou  môme  possédé  ce  ms.  Je  l'ai  acheté  l'automne  dernier  à  Smyrne 

*  Sur  ce  Joseph,  fils  de  >Iatatia,  voir  Neubauer,  Les  écrivains  juifs,  p.  411. 


r  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

du  propriétaire  d'une  petite  yeschiba  à  Bournarbaschi,  près  de 
Smyrne.  J'en  donnerai  une  description  détaillée  dans  le  Jeivish 
Quarterly  Revieio. 

E.-N.  Adler. 


APPENDICE 


nni*»  Nb«5  jnD*n3t3  nnu)  "»ibîi  n^N?3  'n  nnta    by   it  fiai^'n 

ûînb  !rîN-i"^T  tonb  nai:\  û-^^du:  ''m?:^  D\man  û^nbN  aan  rj:>a5!i  bN 
Nirn  ÛU573  ^-^^îDb  Taim  bD^nn  un  «y-^p-i  ûi-i  •!:>  .û-'ssd  -^^unD  nbj'Tab 
lab  n^  a^:?  ï-it  "^121  ,ï-T3>"ipn  ^n-^  an73  nsD  torj?3  ,•>"■>  nani  ï-rnn 
tDPD-^bna  ib^urj''  t'^i^n  in  ,si2mT"jai  ûnnitna  dni:-«n?:a  noab 
^iDN  bST  -"ny  ^y^  Sd  rnv  ï-rj^n  luîi  t-n:>i7a  bn  ,tsnaba  lao^ 
•'bNiuî  a-^ujnb  Nibu)  "^d  '^'i^^n  "^nsDit  •^priT^n  "^s-n  ^au5  •^51^5 
IN  i:?iaa  -aia^rr^  t<b;D  r-nnai  \-iuîn53  Sn\:î3  rr^nt^  n:^  ^-lan 
■•ujnn  t^b  t-iia'«-i«a  «b  mm^sa  .^n  "^dn  t]«  ï-J3yfi<  tni  ."^a-iy 
nnn  bn  ^"joibn  ,^pa  nmnib  bis*^  ■'S'^i^  ïjpia?:n  ntb  as^N  /■'D-iNn 
to'^d'iîriTa  tDiu)b  *innn  tsjb  bi^i^n  St  •'Sd  t^on  «b  ï-n?:^  nninm 
nd  maa  .fuj^N  «np»  tDd-ib&i  ,n:>pab  t:^DD-im  mo-'^ûbi  'niNb 
fc^-^nriTa  'n  a-nn  ûnn^m  tonj^T^  ,2  ^v^i-is  toD-^bs^  "^sbaip  û-'UJinp  tab^ 
r-iDnira  ^;2în  ïj^pn  û3>  tan  .i-ni  ■'sa  hy  v:»n  ma-i  û'^Tsys  S"t 
'in"'5  în::nbT  ^vDatî  j-tdddd  ,ti5  maïab  na^n  t-n^bî^  nm^  na's 
NiiT-^i  .nypna^  i-^y  "^Nia^oD  T^n*^  Sab  Y:^'^^o^  ^aipn  ipm  -ipm  itwS 
np"n  /n?3-iisn  i^D^^i  3^a3  ,rm  iDn^  i">3i:3  ^tïn  "-liTDT  i:^T:i^  ^an 
a-in^iT  ,î-i3>nT>  nuîN  iDa  ):nv  'n  a-in  t^in  ,np"n  r^'i^yiz  nnp-i7a 
D;ns  y7:uJ3    ainpî:    'n^y^  ,^y^^12   ï-ira  "^^^T^bT  i-«73tanb  tsîriTsDn 

*  Jeu  de  mots  sur  le  nom  de  l'ami  de  David  ;  ici  l'expression  sifçniGe  :  Je  ne  suis 
pas  un  homme  pressé  ni  long. 

>  Jeu  de  mois  sur  le  nom  des  Pharisiens  employé,  d'après  la  Mischna,  dang  celte 
phrase,  par  les  Sadducéens  disculant  avec  leurs  adversaires  :  le  mot  a  ici  soit  le  sens 
de  «  saints,  ascètes  >,  qui  était  usuel  en  France  au  xiii*  siècle,  soit  peut-être  celui 
de  «  Parisiens  ». 

>  Il  faut  probablement  va'^lfc*,  comme  dans  Isato,  ix,  10. 


LA  LUTTE  ENTRE  ISAIE  ET  YOIIANAN  91 

ï2:DU5t<  "^aanTa  in^u)  n^oix  t^i"*^  nT:''^bN  'na  min'»  'n  nsnn  iirKbTD 
mbnp  by  nsTai  y-'^iiDm  vpf^^i  "^^  ^"3  """i^ï^  ^^''-'^'^  'n  mn  Niin 
»^2J"n3  nnai  ^'''^îî^'»  "^^n  p'^ii:"'  r>tin*i  n"3  NJ"»?\aiN  ^'-i  n-in  r-is-ii: 
,ujnab  rrbs   vd  m»   .'-i-i^"'  h^unt    !-t:>inuîai   nbN3   y^T:^n   racn 

•'D  N4n"'T  .^^-^ncnb  tD-iaiurt  T^\ay?:^  ,y3D«  ism*»  'n  nnn   ab  na^rr 

^^2îN!D  ,yn''  t]N  rr'nit''  ,t-iNTïn  yiKa^  in  û">rnvn  Snt  ,:>'«5?2n 
rtspn  rrni^i  ^inyjz^  ^:y•ï2'^  nrDtfcO  ï-iTainn  ini^a  irriaNa  li-^^n 
r*ïb^  .^t^oK'i  •'sn»  y^^  ûy  d-iTco  nobn^TaD  tn-^K-iD  ^n«:i  mira 
rï3  nsbbT  .nitns  t^b  un  ,t-T«-nna  oa  nvrib  ru^n  ta^N  b^  Sp^ 
CBsn  *j''t3bn^  ,t>Jit'«  'n'2121:  /t^oob  N'^'^^n  tn^wn  m272i  ,no:  t^b 
Tba  rTiS3  frnb:^  t-inniss  tsi-^m  t^di  î-nino  insiu?:;:}  tnvr^  uy 
tniujyb  iiitnuî  i-'cmujna  î-ra-^uî'»  ^'ap*^  Sn  K-'^tuin  '-i  ann  nr^an 
t^bn  .nîit'^bna'j  ts^a  )nnv  b^n  ,i^3>^is»a  «bn  N?3pa  «b  ,ï-Ti:-'n?a 
*irib  fcaNi  .ï-Tif^aD  in  t-rn^  l-^na  R^-ibi  n^n?:  by  ï-risn^D  :?iap  ^na 
rjD'^tt  m^m  ,ï-T:>'^;2îDa  a'i'^rTi  t-ritiit-i  rTN7ûrL3D  t-nN!;3a  iTinny 
•ïb  innsDT  rD'^y  imN  ,i-nD^nnb  '^iNn\2:  "^yab  may^  ■'Id  i^Nitnb  nsns 
^tnis-^a  Nb  *ta:^D  T^DDb  a^D'»  ^<b  iTiJabn  iD'>Nu:b  în72i  ^t-nsibn 
m-nsa  n^T»  i-r-iv  rj^T'  .imsian  aim  ï-T»^n  ain  137373  bap  t>ib 
V"iNb  '-i''N73:n  l-'Nya  'n  a'^ni  /  msitj»  '^3'''i  ï^-'ia  in73N  l^T^  l"»'!''  n\-i^ 
imiaai  ispm  i-^pnrri  —in  ^:do  s'^pnn  ^-imtD  n^rjTtj  tambi 
rpma  .itn  yiz'ûb  innin  m?3buja  la  (?)  ■«DpTi'^73  y^iz'Qr^  t2"'"'î<a  inbnni 
•iTT^Ki  t^b  .^^-^^ainb  hd  ^iia^  .i-^irTap»  ta'^-i"'^::'  nptnai  'j"«onT»b  naî?: 
,rn:'''&D  b5  b3>i  nan  b^  by  pnpn?3  ,n3^na  1*133  nnan  ,ï-i5i73n  bs 
1N05  .nmort  b'n^Ts  'ïi  Id^  iy  bni?a::  ,n-iD">i  pi:*^  in-iwssn  ••ais 
tsb^a  i^n:)  nb  .ni*'  -«ba  ^y  toib^  ani  ,nniT  uî?3;aD  iids  î-r-^n^ 
N-'j'TaiN  '1  a-in  toa  ,ï-T5>''-iD  ■^:3-ia  133-1  ■>::b73  i^»  ,i3Nb;ai  rr-^rT»  ib'O 
r<bi  l'TT'N-i  t<b  .itr'-^n^'^i  iïii:73î<-»  ,inan^i  irra-ia-'  ,irîr'>;:5v  rr' 
Nini  î-T^'i^a'»  T'm33-i';3  î-i3ibi:'i3  1N33  vn3>730  Itn  ;>53':5b  .vnnsn 
/:nin  ta^M  'i3'i:'53  tob:j'3i  Km;5<i  t^nso  ■^-1303  .j^ncnn  t^nbabs 
vpn3  n"«53m  ,ï-i3ian  in:'i73UJ3  '13b  tnby  .ï-iiuî  #'-inni  \rpr!3 
riNi  t-iDniS3^  to-isTi-i  i3"^Ti<n  T330&<a^  ta-i^Dn  ij'tsu:  /,  /.  M3^'«aN 
r-n73Uî73  ni533nïi  .nn:*iNïi  n^5i<n  nniwN  i3nv  'n  ann  ^iS7a  "n^Ni 
û-^Tairinn  m-inx  r-i-i:^Ni  ,isiy  '^'173^  t-.3ni3i  nnsa  ni3i?3  ns-^i  nD3i 
bs  r-iypyp73  ribip3  .^ans  n3in73  ïj-^-ist  bDi  .tans   br^^p  3n  ï-t3 

*  Nn)3i25,  ûin,  •'i^3- 

>  Des  bouquets  de  myrte,  Schaèbat,  33  i. 

*  Voir  j.  ^^f:a,  61  c  :  proverbe  appliqué  à  Baba  b.  Boula,  qui  répudiait  Tenseigue- 
ment  de  son  maître  :  le  taret  sort  du  bois. 

^  Faut- il  lire  û:^5? 
s  Sanhédrin,  1  b, 

*  Je  ne  comprends  pas  le  jeu  de  mots. 


^  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

,î-Tà>BN  ni'bv'D  î-Tnt:jïm  {?)ti^53M  S:>T  la-^-itt  St!i':5  -^^îS  î-T-T^aî^ 
«tsiD^n^îDi  ''iip  T135  b3>  -^SN  on  .m'iD  sn"«5^ri  û':?-!  m-icm3  mn^n  c^ 
ra  'iDNb?:  (sic)  ï-i2y>  i-j72i  ,SD:D"^n593  tsiD-'N^i^  ii«  .to^-^nN  nn^ax*^  în^ 
,t3'>'7n\n73rr  y-i^rj  ■^^syTs  û-^n-n  î-ïjn-inïi  bip  îit:  fa^n3:?n  -^Sï^b^a 
,t*^Dinn  15311  "b'^a  ,ï-i3Tn:>i  bD3  n-)i73'*a  innna  "i&^-i  ï-rs^un  TT^as"' 
,tstMrr  p?oyn  *im5>n  ,ï-ir)bnD  îriTb  î-tt  ^m':  i^n  to-'^^n  •^"i^Tsbn 
•)y3  tD:\  iiS3  ^n^'b  "^-im  p  b3>  ,ri:^"T-iT  «b  yn^n  12^723  t'^j'iiûî 
(«ic)  113  ûvn  "^iD^N  /ïij'T  Nb  U5*^i<')  ïT'^a  *  "1^533  •''ÛD5  ï-i53n  ûnnD?3a 
î-i72rî  ,tD^23n  rT72ST  t>^■^3^b■Jp3  tn'^by  •'in  t'^scb?:  Tr^Kn  ,û"'253U5 
'«a-'i^  toniwS  min  in:>3i  ,û^3-i?3"id  m^:^^2  û-^Nb?:  .û-'Sittnpn  tz^niaarr 

^^3^3  b"T  m-n«  p  ï-Tt:b;D  'n  3-in  Suî  nuî-ii?3  ^"^33  N:ibi:-i33 
m?2  nirp  ^m?::^  ûu:t  h^td  inn  n-'n  b"T  153  3-in  ûy  rr'srr  n-nn 
vnnNT  /ép  3b2T  ^\a;zîD  bii:^  y-i^n  JniD33  br  î-pn  nm^n  ,■»?:■' 
û"«mNia  b"T  tD-^DS  '"I  3*1^1  b"7  y-iD  '1  3-irT  û-^bTisn  im-nN«n  •^n-'Ni 
Nbi  ,t2nb  d'''-i3i  •^nsï-in  t3n3i\an  byi  ,.'^fc<72U)T  bbm  nn'D  p  Sbna 
D'^33-in  -in-T  .mN!»  Tjn  "^iTsuin  «b  ,r!3riN73  n3i  ib3p')  ,Dn)3:>  "^nTaDOS 
bp733  rjpm  'T'3  tDn">b3'  ^ib^ab  tD''73n3  CDruN-^^aa  isna  Nb  y-i«3  tûn 
^rT3N  'n3)  ,t-n3iDp  •'i:>3  tDn-'byja  "n-^Dm  .nismij'  n'Cî3b  ,rT:>iis-i 
tiv2Q  n3r)b  tD-ion  ,yT3>T  V^-^ip  ^m:)  /*  y-iw^s  ibN3  t^3«  'm 
mbnpn  bx  tonnn  n^so  inbu)  «b  ,nT>i3!n  y3  Sbnn->  t^V:) 
n»sT  n3  n^b  ^^-nn  nr  m^nbi  ûp'^^ob  «nn  ni  i^asb  r-iT'im  m"«u} 
tspbb  i'T>3n  b^3:^3  cdd:  ton?:  inî<  yx  .n3'5-)7:n  f-iwsn  nm^Ton 
D'^pDi3'  .ny^zss  iw^  b::'»Di<  ,im-n5ûT  nxi^  nTiDb  .mms  mcnbi  tni-n» 
tziK  qx  yNTD-^D  t^b?2D  nnn^3n3  ri:^:\i3  mDb?3  yNi  ,n73\ab  ï-i-nn3 
■jmn  Nb  ,ir-T:>3y:5  bn^^bn  p^n3>  rjo3?:b  ,t**iiû"'ab  "^id  nb  n-in  t*^b 
Uî'»z5  riDD  i:'^i  '"«DN  r-nwsan  r|03  ,qujn  rjOD  too-'Db  b-'unb  t-nx-nn 
n20  tt5?3m  i3"^^bia  riT  nuîiiû-i-j  rT-i">:'n  '»n3':5"«\n3  ■^SwX  in  .n^?3 
''n'^3  \ns2n3  ,ï-n"in  bu)  n*ins3  iiîTon^anb  n-n'iîn  nnw^  ^idi-i  Nib 
î-i5n73  ci03?3  ."""iD  IN  m3)  m3i:b  (s«c)inDTTi  Nb  ,î-nr::^:3T  bp'0?2a 
to-'DibN  Dn.xi  ,)ny^m  "^id  pn  '"'"id  ■'D^d  "^mTOw^  t>»bi  ^mir  t)OD  i» 
■»::  b3>  bi::'  13  tDnNi:?^  ï^t:  .bt^nwSm  3nTn  hstt:  .Sw^-i^a*»  •^sbx  -^-lO 
t^n3D  1T  "^t^  b:'  ts.x  ,inb"n:i  m-iwSDn  1pvz^  .inpTn?:  ipin  tmmn 
^n3n  i\^  nsNU)  tasn  i-itowX  ''-in  ,n\-i^  rrn  'loix  nr  nipibn  tn^y^ 
/l\n  t^bi  mn  3-'3^i  tD''"'5  "^3)  NnrToob  in-i72wS  dNi  ,mnnb  \s'Ȕ}n 
ï-TDbn  157:72  n72b3>n5  tD''5<"»33  b^  131  ,»mn:'  O'12'D  ,mn3'  no73  r^bm 
ns-^T  b:^  S3ipn  ,n:>vj  riDbn  "13*73  t^it?:*'  cnt  ,n3'i5T  nbnTa  yna 
,t3^bibn  lanp    ,tD"'b"'L:Nn  "^bnwS    ,n:^^iSpT   17:    ms-^  i"3   birs  ib   ^b"^ 

*  Dittographie. 
«  5o<a,  40  a. 

*  Est  malade,  délicat. 

'»  Proverbe,  Mequilla,  183  :  à  moitié  dormant,  à  moitié  éveillé. 

î  Allusion  à  Baba  Batra,  145Ô  :  m3>1?3W   b^S  1T  0733   "T^nj^  n\2573  ITy* 


LA  LUTTE  ENTRE  ISAIE  ET  YOHANAX  03 

rns^vb  r^iuy  TT'Tnn  /><:2-i  rj7:a  ,r-T:>^SDT  nsnna  ,t;"^brD  "^an 
1D  î-i:»;a  "^i:»  t^inn  a-in  S::2^t  .rrro  ^xnb  n-.p'»  pî<i 
ip^Tnn  D"«i:nr;  man  'n  "^bs  "^n'IJis  innn  .n:?::!  *n:72  in\s  ib  i-t:^*» 
nn.s  bs  nny^  n-nn  bu:  J-in?2nb72  ^bD  na'^':in  ,n"^,nDT  n::i:i  pTa 
173  npbn?3n  ni<  ms^bT  ,!-i:>':jdwS  nwnbîjn  n^ci  n^?20  pin  *i::i<'» 
,npbn?2  by  ban  ,nra-ii<  ts^Ta  "^id  iw^b?:  npr^un  p  nx  ^,&<an 
rr^OD  nuTsb  rTibp'JîT  ^T:>^bt<  'ns  n?2Dn3  b-n:i  ûa  ,r-î?2cb  '^Swsn 
npibn^j  la-i"'  r^b'^a  .b^aiD  nann  nvnb  ,n?ab  ^^d  bsi  ,t**i?:b:^  \sna 
'in  pa  &ibu5  "ib-^zûrn  .'anin  'oa  ami  ^b  nwt^"»  t^bo  ,bN",w^3 
îmnNT  nans  ton-^D-'a  ij^iim  n^nn?3.  la  i:m"'  'n  a".m  t^v::iî< 
yn&<n  nan  ^n-«i:-i?3  .r-r-iD-::  itt  n-nn  it  i-it^n*'  id  .nm^i  ï-in7:'J 
nnu  N-^n  to.s  mao  "^rî*  ï-i73  u:i"nn  înTa  u5-nD?:a  aipsb  ,ï-i:>n 
Mbuî  rt:pnn  ûnt  mann  TiwS-^  ,mai:n  ain  na  n^s^^b  vbisi  vn'J 
t^in  CDt<  •,«  ,iii:^n  n«  "^w^d  n:>T  «■•n  nr::n  "^nba  na-^o*'  :'"iapb 
inwX  ;d\xdt  .nrpaa  nnn  ïn73r!aD  ii<i:D  'n  m:^  n^nn  id  iir^nb 
■jDbi  i-iD->  lann  ma-'O"»  txyjj-p  na-in  t*<b«  ']->-inx  î^b  ,ï-jr-,i:a 
^•»D-j  l'ciD-'X  n^a  i-iUT  "^bp'::!  in?3.sb  t^irr  ^m  mina  î-iDbn  «:i?:n 
(•SIC)  *io'^b7:a  nsn'j:?:  nam  ,r!^Diob  ï-iv^j-^nTûT  n-'ujnb  î-t«di3?3  •'p■^■'^^ 
i^Tou:  «b'::D  tn^^'iy  by  û"»\awSn  Sbm  .Nîrr^srm  N-noa  ,5*^na\n73 
mannb  Dab  S«  a'<u:nbT  .p  S:'  ir;?:D  la'::-»  t*<bu:i  p-is  Sa 
n^&<?:  'n  ■^T'^bm  /to-i-ian  ib.sa  -^riJ  noDa  ,t3m?2«  ûnann  na^'c^a 
n-«a  brja  b:^  min"^  'n  nt:»  t^b  ,Q\î5wS-ia  cdtûOwX  av:;nb  C3^:i-l::p 
«l-i'^ainpi  "«suja  ,CL"»uîp?3T  û-^'^a^n^?:  riT  nx  riT  nn-»  c^b-j  ^is  £2":;-n7a 
na-i7an  i^n  b^^  ,MDbna  û'^3">->ni:?3n  u^-^y::  'n  am»  a\nD  r^npn 
,3>ai33  ûiii^m  nu:p  p^y^7:^  .nar::?:  nanwS  mmara  na^\a^a 
Sd  n"nn  bu5  ï-r-insi  nari"»  t*^b  û-^b-^-^na  p^i:  as^aTiT  la  :?3i?:3 
S:^  baai  ,bn  b:>D  inxT  /l^nn  bya  "in.s  ,b•J^3^  t*»<a  biii-'b  î-^i:^-l^ 
«^m  r^-i-ian  t^-^n  '^•^2^b^  -nnb  .ï-ti-^dd  i-^t  i\s  ^Vr.x  ^y  nbwsb  paa 
■^bns  nn3  13b  iT'ns  ,nDbn  ûd?^  î-îT^b^^ns  t*^b  \-i:>t^  .t^^"»::!  Nb 
n-iainb  t*j;b  .nnmo?:  nani^T^  ïnsn  i:^  ^^-la^  /  nSn  nn^-r  "^b^a-J 
pn  ,t-np  -^To-inT:  "^d:*  b:^  "^bip  t=:-n73a  ^'^«'Jnbi  y-iwS  "^isy^  -no-^Toa 
'^by  '^i2t<'>  t<b^  ,n-i:^Nn  nai  ripin  nx  û^-'pb  ,ni"nD  tins  inwS  bab 
l'^a;^  la^iitr  C3"«»n-i  isbn  tDDb  irr^  "^lUî  bi<  ,inyD:  t<^^2  pwS"»  b« 
,ïn-nna  mciST  /ïn-nan   nujm  .D-'sn   t]33  n-^uîn    tnt    D"'7:p  ta^an 

*  Le   mot  N3    qui,  d'après    le   Talmud,  est  synonyme  de  prière  :  Nbî<    N3    1^5^ 

nujpa. 

*  Jeu  de  mots  sur  ce  verbe,  qui  est  ici  pris  &\i  piel  :  «  a  nommé,  proposé  ",  tan- 
dis que  dans  la  locution  '^y:ù^  71370  lïT^N,  il  est  au  kal  :  *  à  compté  », 

^  Baba  Mecia,  59^. 

*  Pesahim,  66  a, 

"  Kiddouschin^  52  3  =  Natir,  49  h. 

"  Jeu  de    mots    sur    Nehardéa  (dans  la  phrase   relative  à    Samuel)  :   fleuve  do 
Science. 
"^  4  L'abeille  »  et  ooa  Débora)  comme  dans  Juges,  y,  1. 


04  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

la-'iT'   ^ï^»*»   is-'^'^sT  tos-'^'^n  .n^nisn    t-ix  tosi  ,t3'^»*ia    n^riciri 

nbiso  t3bi:>3  i:3T''  .û-'Tabuîn  n-iT^onn  ûy  ,t=^^r    ^m«b  'n  .ri^'^ain 
D'^p-'nitb  "îiDisn  'uî-^a  iïn-i*»  .û'^'^nits  û-^-^nTîN  ^a'^'^nn  -n^a  -n^-^b  ^tin 

to^  'U513  ?nyn'«n  ms^  b:?  omnr^  ny^  bisai  n:»  bsa  tssnarj» 

/  mit  nmn  mnm  nnn«a  lab  b:?  tasTiaD 

*  Cesl-à-dirc  :  Moïse. 


LES  JUIFS  DE  TARASGON 

AU  MOYEN  AGE 


Les  documents  que  nous  publions  aux  Pièces  justificatives  sont 
extraits  des  Archives  municipales  et  des  Registres  des  notaires  de 
Tarascon*.  Le  plus  ancien  de  ces  documents,  relatifs  aux  Juifs 
de  cette  ville,  porte  la  date  du  15  décembre  1283.  C'est  un  acte  de 
vente,  faite  par  Jacob  Banhola  *  et  Estlier,  femme  de  Boniac  de 
Bagnols,  tutrice  de  ses  enfants,  à  Bérenger  Catalan,  notaire,  pour 
le  prix  de  18  livres,  d'une  censé  de  31  sous  à  percevoir  sur  5 
sestérées  de  terre  situées  à  Jarnègue^.  Le  prix  de  cette  vente 
devait  servir  au  paiement  de  la  dot  de  Tharascone,  fille  de  Boniac, 
qui  était  assistée  de  Durant  Roget,  son  mari,  et  de  Josse  de 
Béziers,  son  oncle*. 

'  Nous  adressons  ici  nos  plus  vifs  femerciements  à  M»  Charles  Mourfetj  l'érudit 
archiviste  de  la  ville  de  Tarascon,  qui  a  hien  Voulu  nous  aider  dans  nos  recherches 
et  mettre,  avec  une  extrême  bienveillance,  à  notre  disposition  les  Registres  des  no- 
taires déposés  dans  son  étude. 

«  Le  nom  de  Banhola  figure  sur  une  liste  de  Juifs  de  Carpentras,  RevUe  des  Études 
juives,  t.  XII,  p.  195. 

•  Jarnègue,  ou  Gernica,  était  une  île  du  Rhône,  entre  Beaucaire  et  Tarascon.  C'est 
dans  cette  île  qu'était  situé  le  plus  ancien  cimetière  deS  Juifs. 

*  Annodominice  Incarnationis  M.CC.LXXX.III.  scilicet  idus  decembris Ego 

Jacob  Banhola,  judeus,  et  ego  Ester,  uxor  Boniaci  Banhole  condam  [de  Tharascone], 
tulrix  liberorum  meorum,  nomine  dicto  tutorio  specialiler  pro  solvenda  dote  Tharas- 
cone, fi[lie  mee  et  dicti]  Boniaci  condam,  Duranteto  Rogeli,  marilo  dicteiTharascone, 

présente  et  volenle lasse    de  Biterris,    avunculo  predictorum    liberorum*.... 

vendimus vobis  Berengario  Catalani,  notarié,  et  Berlrando  fratribus.  . . . .  pre- 

cio  XVIII  librarum  proviucialium  coronatorum jus   percipiendi,  causa  dorainii 

et  senhorie  in  festo  sancti  Michaelis,  censualiter  et  annualim  XXXI  solides  provins 
cialiuna  coronatorum,  quos  habemus  et  percipimus  super  quinque  cestariatas^terre,  sit 
plus  sive  minus,  site  in  Gernica,  quas  tenent  Rajmundus  Martini  et  heredes  Martini 
Bocherii  condam [Archives  municipales,  II,  1.) 


06  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

A  cette  époque,  la  communauté  juive  de  Tarascon,  dont  il  est 
impossible  de  préciser  la  date  de  la  fondation,  avait  déjà  acquis 
une  grande  importancp.  La  taille  à  laquelle  elle  était  soumise 
s'élevait  annuellement  à  41  livres  5  sous*.  Elle  comptait  plus 
de  cent  familles  et  avait  à  sa  tête  trois  rabbins  distingués  : 
R.  Eliézer,  fils  deR.  ImmanueP,  R.  Josué,  son  frère,  et  surtout  le 
savant  R.  Salomon,  de  Salon,  délégué,  par  les  communautés 
juives  de  la  Provence,  avec  R.  Mordekhaï  ben  Joseph  d'Avignon, 
auprès  de  Charles  l^''  pour  solliciter  sa  protection  en  faveur  des 
Juifs  contre  les  inquisiteurs,  qui  leur  avaient  imposé  une  marque 
plus  grande  que  celle  qu'ils  avaient  jusqu'alors  portée  et  extorqué, 
sous  forme  d'amendes,  des  sommes  d'argent  considérables. 
Charles  l^""  accéda  à  leur  demande,  tout  en  exigeant  que  les  Juifs 
fussent  tenus,  comme  auparavant,  de  se  faire  reconnaître  au  moyen 
des  anciens  signes  ^. 

Un  autre  de  ses  rabbins  fut  R.  Israël  de  Valabrègue,  disciple  de 
R.  Immanuel  et  savant  fort  estimé*,  qui,  sous  le  nom  de  Rotelus 
d'Olobrega  (Valabrègue),  était,  avec  Salve,  de  Digne,  et  Bonfils,  de 
Beaucaire,  Juifs  d'Arles,  commissaire  à  la  répartition  de  la  taille 
qu'en  1299  les  Juifs  avaient  promise  au  comte  de  Provence  ^  Cette 
taille  s'élevait  à  2,000  livres  par  an.  En  présence  du  peu  d'em- 
pressement que  les  Juifs  apportaient  au  paiement  de  leurs  dettes, 
le  sénéchal,  Hugues  des  Voisins,  donna  Tordre  d'arrêter  tous  ceux 
qui  étaient  coupables  de  ne  s'être  pas  acquittés  en  temps  utile  de 
leur  part  contributive  et  de  confisquer  leurs  biens  au  profit  de 
l'Etat.  Nous  ignorons  si  les  Juifs  de  Tarascon  furent  au  nombre 
de  ceux  que  vint  frapper  l'ordonnance  du  sénéchal.  Mais  un  docu- 
ment conservé  aux  Archives  départementales  des  Bouches-du- 
Rhône  contient  l'inventaire  des  vêtements  confisqués  sur  ceux  qui 
étaient  fixés  dans  la  viguerie  d'Aix.  Il  y  est  question  de  :  «  corsets 
fourrés  «  garda  cossia  cum  pennis  cabricorum  »,  de  tuniques  de 
couleurs  diverses,  de  manteaux  «  chlamides  »,  de  guêtres  garnies 
de  fourrures  «  gamachia  de  viridi  cum  penno  leporum  »,  de  voiles 
bleus  «  capitigia  blava  »,  de  couvertures  de  mousseline  jaune 

•  Archives  départ.,  série  B.  2024.  En  1304,  la  taille  des  Juifs  de  Sisleron  était  de 
28  livres  13  sous  ;  ibid.,  B.  2010. 

'  R.  Eliézer  a  composé  plusieurs  ouvrages,  mais  il  ne  reste  que  sa  correspondance 
avec  R.  Samuel  d'Agde.  Son  père,  Immanuei,  appartenait  à  une  famille  de  savants 
établie  à  Tarascon  dès  la  première  moitié  du  xiii«  siècle. 

3  Scha.  Yek.,  114  ;  cf.  Papon,  ffist.  gén.  de  la  Ptovence,  III,  61,  preuves  XV,  et 
Bardinet,  Eevue  hi^tor/çue,  année  1880. 

*  Neubauer,  Les  Rabbins  français^  p.  688.  R.  Israël  est  l'auteur  de  nombreux  ou- 
vrages qui  nous  sont  inconnus,  voir  Gross,  Gallia  Judaica,  p.  25. 

'  Camille  Arnaud,  Essai  sur  la  condition  des  Juifs  en  Provence,  p,  24. 


LES  JUIFS  Dl-:  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  17 

«  de  sento  groco  »  (pro  sindone  croceo)  et  d'un  grand  nombre  de 
livres  hébreux  '  ». 


Il 


On  sait  qu'en  vertu  de  l'édit  royal  du  22  juillet  1306,  tous  les 
Juifs  de  France  furent  obligés  de  quitter  le  royaume.  Ceux  du 
Languedoc  se  réfugièrent,  en  gramie  partie,  en  Provence,  où 
Charles  II  les  reçut  avec  bienveillance.  A  Tarascon  surtout  ils 
furent  accueillis  avec  faveur  et  traités  à  l'égal  des  autres  citoyens. 
On  leur  permit  d'y  faire  librement  le  commerce,  d'acquérir  des 
biens,  meubles  et  immeubles,  et  d''exercer  les  fonctions  publiques 
de  péagers  2,  courtiers,  banniers  ^,  marchands  de  grains  et  de 
farines,  vendeurs  à  l'encan,  etc. 

Cette  situation  prospère  ne  tarda  cependant  pas  à  être  profon- 
dément troublée.  Jaloux  de  leurs  privilèges  et  immunités  et  plus 
encore  du  rôle  prépondérant  des  Juifs  qu'ils  lui  représentèrent 
comme  a  Xristiane  persecutores  fidei  et  hostes  etiam  crucifixi  », 
les  habitants  de  Tarascon  sollicitèrent  du  roi  Charles  II,  au  cours 
d'un  séjour  qu'il  fit  en  Provence,  leur  exclusion  de  toutes  les  fonc- 
tions publiques.  Leur  démarche  fut  couronnée  d'un  plein  succès. 
En  effet,  le  9  février  1308,  Charles  II,  considérant  «  qu'il  ne  faut 
pas  élever  les  Juifs  par  la  faveur,  mais  les  rabaisser  comme  blas- 
phémateurs du  nom  chrétien  »  quia  igitur  judei  non  sunl  aiol- 
lendi  f avoribus  set  tanquain  blasphemi  nomviis  Xristiani  potins 
deprai-iendi,  enjoint  au  viguier  et  au  juge  de  Tarascon  l'ordre  de 
ne  plus  confier  à  l'avenir  d'emploi  public  aux  Juifs,  qui  devront 
être  remplacés  par  des  chrétiens  dans  les  emplois  qu'ils  occupent 
actuellement*. 

Cette  ordonnance  ne  fut  pas  exécutée  avec  beaucoup  de  rigueur. 
Nous  trouvons,  en  effet,  sur  les  listes  des  propriétaires  juifs  de 
Tarascon,  listes  que  nous  publions  plus  loin,  deux  Israélites,  As- 

*  Blancard,  Inventaire  sommaire  des  arch.  dép.  des  Bouches-du-Rhône,  B.  142. 

'  Dès  la  deuxième  moilié  du  xiii«  siècle,  deux  Juifs  de  Tarascou,  Mosse  et  Crescas, 
furent  admis  a  aliermer  les  péages.  Cartul.  de  Vahbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille^ 
t.  I,  p.  87. 

'  Les  banniers  sont  des  appariteurs,  des  oorteurs  d'avertissements.  Une  note  de 
clavaire  nous  apprend  qu'en  1  U6  le  juif  Rouget  reçut  4  11.,  pour  avoir  porté  des 
lettres  du  conseil  du  Roi  aunonçant  la  prolongation  de  la  trêve  conclue  entre  le  roi 
René  et  le  roi  d'Aragon  {Arch.  dép.^  B.  2040). 

*  Pièces  justificatives^  n»  I.  Le  roi  Robert  interdit  également  aux  Juifs  l'tccès  des 
fonctions  publiques,  ibid.,  n»  VI. 

T.  XXXIX,  N®77.  7 


98  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

truc  de  Salves  et  A.struc  Bonicien,  exerçant  tous  deux  l'office  de 
vendeurs  à  l'encan,  «  d'encantayre  ». 

La  Communauté,  d'ailleurs,  jouissait  alors  d'une  grande  pros- 
périté. Elle  comptait  dans  son  sein  quatre  médecins  :  Bellant, 
Rocei  Vivas,  Rossel  Gomprat  et  Rossel  Ferrier.  Des  savants  des 
communautés  voisines,  chassés  par  Pliili[)pe-le-Bel ,  vinrent  y 
chercher  un  refuge  et  s'y  livrer  à  leurs  études  favorites.  Tel  fut 
surtout  le  cas  du  célèbre  philosophe  et  exégète  Joseph  Caspi,  Don 
Bonafous  de  Largentière,  qui,  après  un  court  séjour  à  Arles,  se 
fixa,  avec  son  fils  cadet  Salomon,  à  Tarascon,  où  il  acheva  plu- 
sieurs de  ses  ouvrages  '.  Le  philosophe  Samuel  ben  Yehouda, 
connu  vulgairement  sous  le  nom  de  Miles  de  Marseille,  y  résida 
également  de  1329  à  1330  avec  son  frère  En  Bondavi  *. 

Mais  le  plus  illustre  de  tous,  celui  qui  jeta  le  plus  vif  éclat  sur 
la  Communauté,  fut,  sans  contredit,  un  de  ses  enfants,  le  savant 
mathématicien  et  médecin  Im^manuel,  fils  de  Jacob,  surnommé 
Bonfils,  dont  les  ouvrages,  principalement  les  Tables  astrono- 
miques intitulées  :  «  Les  six  ailes  »,  eurent  un  si  grand  succès  ^. 

C'est  en  vain  que  le  roi  Robert  avait  imposé  aux  Jaifs,  pour 
l'exercice  de  la  médecine  et  de  la  chirurgie,  la  condition  de  ne  pas 
visiter  les  malades  chrétiens  avant  leur  confession  ou  commu- 
nion* ;  c'est  en  vain  encore  que  les  conciles  d'Avignon  de  1326 
et  1337  leur  avaient  interdit  de  servir  de  médecins  aux  chré- 
tiens^. Pareille  défense  ne  pouvait  rester  longtemps  en  vigueur 
à  une  époque  où  les  médecins  juifs  s'imposaient,  pour  ainsi  dire, 
aux  chrétiens,  heureux  de  recourir  et  à  leurs  connaissances 
étendues.  Aussi  les  médecins  juifs  furent-ils  nombreux  en  Pro- 
vence. On  sait  que  l'un  d'entre  eux,  Bendig  Ahym  (Hayyim) 
d'Arles^,  fut  attaché  à  la  personne  de  la  reine  Jeanne  en  1369.  La 
Communauté  de  Tarascon  en  comptait  six  au  commencement  du 
XV®  siècle  :  Comprat  Asser,  Bonjuhas  Qua^sin,  Bonjuhas  Asser, 
Rossel  Vivas,  Rossel  Ferrier  et  Reliant,  qui  fut  appelé,  en 
1419-20,  avec  Bénédit  Du  Canet  d'Arles'  et  Mosse  Marveaux  ^ 
de  Marseille,  à  donner  ses  soins  à  Louis  XI*". 

•  Neubauer,  Les  Babbins,  \).  47". 

•  Munk,  Mélanqes  de  philosophie  juive  et  arabe,  p.  490;  cf.  Neubauer,  Les  Rabbins^ 
p.  561. 

•  Voir  sur  Immanuel,  fils  de  Jacob,  Neubauer,  Les  Écrivains  juifs,  p.  692  et  suit 

•  Camille  Arnaud,  Essai,  p.  36  et  37. 

•  Depping,  Les  Juifs  dans  le  moyen  âge,  p.  205. 

•  Arch.  départ.,  B.  5. 

'  Maestro  Bendig  d'Arles. 

•  Ou  Mosse  Maman,  Barthélémy,  Les  médecins  à  Marseille,  p.  29. 
'  Ils  reçurent  pour  leurs  honoraires  20  florins.  Arch.  d^p.,  B.  272. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  99 


III 


I/apparition  de  la  peste  noire  qui,  en  1348,  avait  envahi 
l'Europe,  jeta  la  plus  grande  consternation  en  Provence.  Une 
population  en  délire  se  rua  sur  les  Juifs,  qu'elle  arxusait  d'avoir 
empoisonné  les  rivières,  les  puits  et  les  fontaines.  On  massacra 
ces  malheureux,  sans  distinction  d'âge,  de  sexe  et  de  condition. 
Le  pillage  succéda  aux  massacres,  malgré  les  ordres  de  la  reine 
Jeanne,  qui,  à  la  prière  du  pape,  Clément  VI,  avait  essayé,  mais 
en  vain,  de  les  arrêter  ^ 

En  présence  de  «  l'état  misérable  des  Juifs  de  Provence  décimés 
par  l'épidémie  et  plus  encore  par  les  massacres  que  les  chrétiens 
en  ont  fait,  parce  qu'ils  croyaient  voir  en  eux  les  auteurs  de  la 
maladie  »,  la  reine  Jeanne  enjoignit  aux  sénéchaux  et  trésoriers 
des  comtés  de  Provence  et  de  Forcalquier  de  ne  plus  exiger  des 
Juifs,  pendant  un  laps  de  dix  ans,  le  paiement  intégral  de  2,000 
livres  de  leur  taille  annuelle,  mais  seulement  celui  de  la  moitié  de 
cette  somme'. 

La  comtesse  de  Provence  fit  plus  encore.  Elle  prit  les  Juifs  sous 
sa  royale  protection  et  les  défendit  contre  toutes  les  accusations 
dirigées  contre  eux.  C'est  ainsi  qu'un  chrétien,  Jean  Boyer,  se  vit 
condamner  à  une  amende  de  IG  sous  pour  avoir  dit  en  public  que 
le  massacre  des  Juifs  de  Tarascon  et  d'Apt  était  légitime  ^  C'est 
ainsi  encore  qu'un  autre  chrétien,  Huguet  de  Mons,  fut  obligé  de 
payer  une  amende  de  5  sous  pour  avoir  dit  devant  le  bailli  au 
Juif  Duranton  Meir  qu'il  ne  disait  pas  la  vérité*.  Pareille  condam- 
nation de  5  et  de  10  sous  fut  infligée  à  Pons  Gervais  pour  avoir 
appelé  traître  Vidon  d'Avignon,  et  à  Guillaume  Busol,  qui  avait 
saisi  et  déchiré  une  lettre  qu'un  Juif  avait  dans  la  main  ^ 

Mais  la  bienveillante  sollicitude  de  la  reine  Jeanne  à  l'égard  des 
Juifs  se  manifeste  surtout  dans  les  Coutumes  de  Tarascon,  rédigées 
à  Casasana  (Italie)  le  15  juillet  1345.  Ces  Coutumes  contiennent 
cent  cinquante-quatre  articles,  dont  quatre  sont  consacrés  aux 
Juifs  6. 

Elle  leur  interdit,  il  est  vrai,  de  travailler  les  dimanches  et  jours 

»  Bévue,  XII,  p.  51. 
>  Arch.  dép.,  B.  2564. 
»  Ibid.,  B.  2030. 

♦  Ibid.:^  note  du  clavaire  Guillaume  Fabre. 
»  Jbid.,  B.  2027  et  2029. 

*  E.  Bondurand,  Les  Coutumes  de  Tarascon. 


100  BEVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

de  fêtes  S  elle  les  oblige  à  avoir  une  boucherie  spéciale  et  défend 
aux  chrétiens  de  vendre  leurs  viandes  et  d'abattre  leurs  animaux, 
sous  peine  d'une  amende  de  50  sous-;  mais,  pour  tout  le 
reste,  elle  les  met  sur  un  pied  de  parfaite  égalité  avec  les  autres 
habitants;  elle  veut  qu'à  l'exemple  des  chrétiens,  ils  contribuent  à 
l'entretien  des  gardes  ruraux  préposés  à  la  surveillance  des  ré- 
coltes, des  propriétés  et  des  digues  destinées  à  préserver  le  terri- 
toire des  inondations  du  Rhône  et  de  la  Duransole,  elle  exige  qu'ils 
soient  soumis  à  toutes  les  autres  tailles,  à  l'exception  de  celles 
qui  sont  payées  par  les  gens  de  Tarascon  à  la  Cour  royale,  et  cela 
«  quia  judei  ipsi  habent  talliam  quam  solvant  curie  ^  ». 

Plus  bienveillants  encore  étaipnt  les  sentiments  que  leur  témoi- 
gnait sa  lille,  Marie  de  Blois.  Dans  ses  Staiuta  nmnicipalia  ville 
régie  Thai-asconis,  qui  portent  la  date  du  13  mars  1390,  Marie 
de  Blois,  maintient  d'une  manière  absolue  les  droits  des  chré- 
tiens et  des  Juifs^;  elle  veut  que  justice  soit  faite  à  la  Commu- 
nauté de  Tarascon  tam  judeis  quam  christianis  ^  et  que  tous  les 
biens  de  ses  sujets,  qu'ils  soient  juifs  ou  chrétiens,  leur  soient 
conservés  ou  rendus  ^. 


IV 


Tel  était  l'état  des  Juifs  lorsque,  vers  la  fin,  du  xiv«  siècle,  les 
syndics,  s'inspirant  de  l'exemple  de  leurs  prédécesseurs,  les  dé- 
noncèrent, à  leur  tour,  à  la  reine  Jeanne  comme  les  ennemis  de 
la  foi  chrétienne,  et  lui  demandèrent  de  leur  défendre,  à  l'avenir, 
de  demeurer  et  d'introduire  leurs  marchandises  dans  les  maisons 


*  Ilem,  statuimus  quod  judei  vel  judee  non  operenlur  per  1res  dies  Natalis  Domiai, 
nec  in  Epiphania,  nec  in  diebus  dominicis,  nec  iu  t'esto  beale  Marie,  nec  in  die  Ve- 
neris  sancta,  nec  in  die  sabbati  sancla,  nec  iu  die  Pasche,  nec  in  craslinum,  nec  in 
Ascensione  Domiui,  nec  in  die  Penlhecostes,  uec  in  crastino,  nec  in  t'esio  sancli  Jo- 
lianuis  Baptiste  et  sancte  Marthe,  et  Omnium  Sanclorum  sub  peua  decem  solidorum, 
quorum  medietas  sit  accusantis.  Bondurand,  p.  80. 

*  Art.  Gvi  et  Gvii  des  Coutumes. 

*  Bondurand,  p.  f)3. 

*  Bondurand,  ibid.,  p.  <S4.  —  El  primo,  quod  villa  Tharasconis  ac  hominesejus- 
dera  et  babitanles,  tam  christiani  quam  judei,  in  quibuscumque  suis  bonoribus,  pri- 
vilegiis,  frauquesiis,  libertalibus,  usibus  et  cousuetudinibus  observari  debeant  et  per- 
petuo  remancre  ac  libère  uti  etgaudere,  etc. 

*  Ibid.^  art.  v.  Item,  quod  tiat  justitia  communitati  Tharasconis  et  civibus  ejus- 
dem,  lam  judeis  quam  christianis  etc. 

**  Jbid.,  art.  vi.  liem,  quod  omnia  bona  mobilia  et  immobilia  etc.  civibus  et  habi- 
tatoribus  Tliarascuuis,  christianis  et  judeis,  siut  eis  salve  et  salva,  etiam  intégra 
pleno  jure  etc.  Cf.  art.  ix  des  Coutumes. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  101 

habitf^es  par  des  chrétiens.  Ils  sollicitèrent,  en  outre,  de  la  comtesse 
de  Provence  Tautorij^ation  de  l^s  faire  rentrer,  avec  leurs  fa- 
milles, dans  leur  ancien  quartier  avec  défense  d'en  sortir,  sous 
aucun  prétexte,  pendant  la  semaine  sainte.  Exception  seule  devait 
être  faite,  en  cas  de  nécessité  absolue,  en  faveur  des  médecins. 
La  réponse  ne  se  fit  pas  longtemps  attendre.  Par  des  lettres-pa- 
tentes du  28  octobre  13'î7,  la  reine  Jeanne  ordonna  à  Fouquet 
d'Agoult,  sénéchal  de  Provence  et  de  Forcalquier,  de  faire  droit  à 
la  demande  des  habitants  de  Tarascon,  «  si  tant  est  que  tel  ait  été 
l'ancien  usage,  ainsi  que  ces  derniers  le  lui  ont  représenté  »  si  ita 
est,  ut  exponitiir^  et  verilas  concordet  asserlis  ^ . 

Dès  que  ces  lettres  lui  furent  parvenues  (27  décembre  1378),  le 
sénéchal  enjoignit  aux  officiers  royaux  de  s'informer  si  les  mai- 
sons occupées  i)ar  les  Juifs  étaient  suffisantes  pour  les  contenir, 
et,  dans  1h  cas  affirmatif,  de  leur  faire  réintégrer,  sans  retard,  leur 
ancien  domicile.  On  convoqua  aussitôt  un  conseil,  auquel  assis- 
tèrent, avec  les  syndics  et  le  vigui^r,  les  bayions  Maystre  Rocel 
Ferrier  et  Crégut  de  Capestang.  D'un  commun  accord  on  fixa  les 
nouvelles  limites  de  la  Carrière,  et  l'on  décida  que  ceux  d'entre  les 
Juifs  qui  dempureraient  en  dehors  du  quartier  nouvellement  dési- 
gné seraient  tenus  d'y  rentrer  dans  un  délai  de  deux  mois,  sous 
peine  d'une  amende  de  100  livres,  sans  jamais  pouvoir  en  sortir, 
en  portant  leurs  tabliers  et  éventaires  «  tabulas  et  botiquas  »,  ex- 
cepté aux  jours  de  marchés  et  de  foires.  Seuls  les  colporteurs  qui, 
de  tout  temps,  avaient  été  autorisés  à  circuler  avec  leurs  mar- 
chandises à  travers  les  rues  de  la  ville  échappèrent  aux  ri- 
gueurs de  ce  règlement,  dont  acte  fut  dressé  en  présence  des  syn- 
dics, représentant  les  habitants  de  Tarascon,  et  du  viguier, 
agissant  au  nom  des  Juifs  -. 

On  ne  fut  pas  entièrement  satisfait  à  Tarascon  de  ces  mesures 
restrictives  imposées  aux  Juifs.  Non  contents  de  les  avoir  sous- 
traits au  contact  des  chrétiens,  les  habitants  de  cette  ville  vou- 
lurent encore  les  obligera  porter  sur  leurs  vêtements,  en  un  endroit 
apparent,  la  marque  infamante  qui  devait  les  désigner  à  la  risée 
de  la  populace.  Les  syndics  veillèrent  à  la  rigoureuse  observation 
du  statut  du  roi  Robert,  lequel,  en  cas  de  contravention,  pronon- 
çait la  confiscation  du  vêtement  couvrant  la  partie  supérieure  du 
corps,  et  en  partageait  la  valeur  entre  le  lise  et  le  dénonciateur '\ 
En  conformité  de  ce  statut,  tombé  depuis  longtemps  en  désuétude,  la 

*  Pièces  justificatives^  n»  II. 

»  Ibid.,  n«  III. 

»  Camille  Arnaud,  p.  52, 


102  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

confiscation  fut  pratiquée,  en  1378,  sur  Vidon  de  l'Hôtel  S  con- 
damné, en  outre,  à  une  amende  de  10  sous  pour  avoir  crié  : 
«  Alarma  !  Alarma  !  »  sur  une  place  publique,  pendant  que  le 
sous-viguier  lui  enlevait  sa  tunique  *. 

Ce  n'étaient  pas  là,  d'ailleurs,  les  seules  vexations  auxquelles 
les  Juifs  fussent  en  butte.  On  se  rappelle  que,  d'après  les  Coutumes 
du  15  juillet  1345,  ils  étaient  dispensés  de  contribuer  aux  tailles 
payées  par  les  autres  habitants  à  la  Cour  royale.  Une  délibération 
du  Conseil,  du  11  décembre  1381,  les  soumit  au  paiement  de  toutes 
les  taxes  locales  ^  Une  autre  délibération,  du  30  octobre  1382,  leur 
interdit  de  posséder  à  l'avenir  des  terres  et  des  vignes  dans  le  ter- 
ritoire de  Tarascon,  et  défendit  aux  chrétiens  de  labourer  leurs 
champs  ou  de  les  prendre  à  ferme*.  Une  troisième  enfin,  datée  du 
11  novembre  1382,  leur  enjoignit  de  se  défaire  de  leurs  terres 
et  de  leurs  vignes,  ainsi  que  de  leurs  troupeaux,  dans  l'espace  de 
temps  compris  entre  la  date  de  l'arrêté  et  le  jour  de  la  Pentecôte  *. 

Mais,  sMl  était  agréable  aux  habitants  de  Tarascon  d'humilier  les 
Juifs  et  de  les  mettre  au  ban  de  la  société,  il  ne  leur  déplaisait  pas 
non  plus  de  recourir,  le  cas  échéant,  à  leur  fortune.  Cette  fortune, 
bien  modeste  comme  on  le  verra,  n'était  pas  le  produit  de  l'usure, 
ainsi  qu'on  l'a  prétendu,  mais  le  fruit  d'un  travail  acharné,  le  ré- 
sultat d'une  économie  bien  comprise.  Du  reste,  ce  n'est  pas  l'usure 
que  les  habitants  de  Tarascon  reprochent  aux  Juifs.  Aucun  docu- 
ment ne  contient  une  accusation  de  cette  nature.  Ils  ne  veulent 
pas  leur  interdire  le  commerce  d'argent,  la  banque,  le  prêt  à  inté- 
rêts ou  sur  gages  ;  ce  qu'ils  demandent,  c'est  que  l'intérêt  de  leur 
argent  ne  soit  pas  trop  élevé,  exagéré,  mais  convenable  «  compe- 
tens  ^  »,  qu'ils  n'inquiètent  pas  surtout  leurs  débiteurs  chrétiens 
pendant  les  guerres  et  les  troubles  ' ,  mais  qu'ils  fournissent,  au  con- 
traire, aux  syndics,  lorsque  les  circonstances  le  commandent,  le 
moyen  d'empêcher  l'ennemi  de  traverser  le  Rhône  et  de  s'emparer 
de  leur  ville.  Il  n'en  coûta  nullement  aux  Juifs  de  répondre  à  ces 
légitimes  exigences,  et  c'est  avec  le  plus  grand  empressement  qu'ils 
mirent  à  la  disposition  des  syndics  les  ressources  qui  leur  étaient 


*  Probablement  Vidon  de  Sostal,  au  lieu  de  Lostal.qui  signifie  «  Hôtel  »  ou  maison. 

*  Dum  subvicarius  allevaret  lunicam  dicli  Vidoni  inveulam  absqiie  rola.Arch.  dép.^ 
B.  2.  2036.  —  Un  Juil  d'Apt,  Abraham  Cohea,  tut  condamné  pour  le  même  motif 
en  1345-46.  Ibid.,  B.  1G87. 

"  Arch.  mumcijj.,  BB.  1,  f«  188. 
•^  Ibid.,  {0  2,22. 
»  Ibtd.,  {'  224. 

«  Arcf>.  tnunicip.,  BB.  2,  f"  33. 

^  Allusion   aux  troubles  excit'^:8  par  le  sénéchal  Balthasar  Ipinoli  et  la  faction  de 
Charles  de  Durasqui,  en  1383,  qui  avaient  répandu  la  terreur  en  Provence.  2bid.^(*  2*, 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  103 

nécessaires,  en  1389,  «  per  la  dispensa  de  la  ribiera  de  Roze  que 
las  gens  d'armas  non  passesson  en  Prohensa'  »,  et,  en  13î)3,  pour 
la  \e\ée  d'une  troupe  chargf^e  de  barrer  le  passage  du  fleuve  à 
Raymond  de  Turenne,  qui,  à  la  tête  d'une  bande  de  «  gens  de  sac 
et  de  corde  »,  s'était  jeté  sur  la  Provence*. 


A  l'exemple  de  sa  mère,  Marie  de  Blois,  Louis  II  d'Anjou, comte 
de  Provence,  se  montra,  dans  toutes  les  circonstancps,  favorable 
aux  Juifs.  Ceux-ci,  pleins  de  gratitude  envers  leur  protecteur, 
apportèrent  non  seulement  une  grande  exactitude  au  paiement  des 
tailles  auxquelles  ils  étaient  soumis,  mais  consentirent  même  à 
lui  accorder  des  subsides  volontaires.  Louis  II  ne  tarda  pas  à  leur 
témoigner  sa  reconnaissance  en  les  défendant  contre  les  habi- 
tants de  la  Provence,  qui,  à  la  fin  du  xiv^  siècle,  avaient  voulu  les 
contraindre  à  contribuer  aux  taxes  et  impositions  dues  au  roi,  et 
en  rendant  en  leur  faveur  un  arrêt  (9  décembre  1400)  qui  les  dis- 
pensait de  toute  nouvelle  charge  et  interdisait  aux  chrétiens  de 
leur  causer  aucun  dommage  ^.  Sa  protection  s'étendit  particulière- 
ment sur  les  Juifs  de  Tarascon,  auxquels  il  accorda  une  Sauve- 
garde* spéciale  qui  obligea  les  habitants  de  Tarascon  à  pourvoir 
à  leur  défense  et  à  veiller  à  la  conservation  de  leurs  biens. 

Mais,  toujours  jaloux  de  ses  libertés  et  privilèges,  le  Conseil 
chargea  deux  de  ses  membres,  Guimet  de  Grota  et  Poncius  Cha- 
berti,  notaire,  de  se  rendre  à  Aix,  auprès  du  roi,  et  de  lui  faire 
entendre  ses  doléances^,  [1*^'' avril  1404].  Louis  II  accueillit  avec 
bienveillance  les  deux  délégués  et,  par  un  arrêt  du  13  avril,  spé- 
cifia que  la  Sauvegarde  nouvellement  accordée  aux  Juifs  ne  sau- 
rait en  rien  porter  atteinte  aux  privilèges,  statuts  et  immunités  de 
la  communauté  de  Tarascon  ^ . 

Cette  condescendance  de  Louis  II  n'altéra  pourtant  pas  ses  sen- 
timents bienveillants  pour  les  Juifs,  qui,  sous  son  règne,  purent  se 
livrer  sans  entrave  au  commerce,  à  la  médecine,  à  l'exercice  des 

»  Ibid.,  ce.  128. 

*  Hon.  Bouche,  Hist.  de  Provence,  t.  II,  liv.  IX,  sect.  iv. 
'  Pièces  justificative.^^  n"  IV. 

'*  Nous  De  connaissons  pas  les  termes  exacts  de  ce  document  dont  il  sera  souvent 
question  dans  la  suite  de  ce  travail. 

*  Arch.  municip.,  BB.  3. 

*  Ibid.,  BB.  5;  et,  A  A.  5. 


10'5  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

métiers,  à  l'affermage  des  droits  du  fisc  et  des  revenus  des  clavai- 
reries.  L'un  d'entre  eux,  Ferrer  Vidas,  remplissait  à  Tarascon  les 
fonctions  de  péager  '.  Durantet  de  "Malguer  (Melgueil)  était  tisse- 
rand «  telier  »,  Dieu  lo  sal,  maître-maçon  «  peirier-  ».  Salomon 
Nasin  était  clavaire  à  Istres  ^,  Josse  Rouget  à  Berre,  pendant  que 
Crétudet  avait  la  ferme  des  droits  sur  les  marchandises  et  les 
amendes*.  G  est  un  Juif,  Caravjdon  Cresque,  qui,  en  1432,  fournit, 
moyennant  10  florins,  les  300  tuiles  employées  à  la  toiture  de 
la  Cour  royale  ^  ;  c'est  un  autre,  Salomon  de  la  Roche,  qui  per- 
çoit, en  1471,  un  florin  pour  «  une  robe  de  vert  baiihée  »  à  mestre 
Jehan  le  bourreau  ^  ;  c'est  Salomon  de  Nevers,  qui  fournit  à 
l'église  de  Lyon  des  pièces  d'étoffe  en  soie  et  en  or  '  ;  c'est  enfin 
le  Juif  Abraham  auquel  s'adressent  les  clavaires  pour  l'achat  et  la 
reliure  des  registres,  des  courroies  en  cuir,  du  papier  et  de  la 
cire  ^. 

Quant  aux  médecins,  ils  continuaient  à  être  en  honneur.  En 
dehors  de  ceux  dont  nous  avons  parlé  ^,  les  archives  municipales 
nous  ont  conservé  les  noms  de  :  Bonjuzas  Nathan,  Jacob  de  Lunel, 
Maystre  Aaron,  Comprat  Mosse,  Mosse  Meyr,  Toros  Nathan, 
Bonjues  Orgier,  Salves  Avigdor,  Nathan  Nathan,  Dieulosal  de 
Largentière,  Mordecays  Cohen  et  Joseph  ben  Joseph  '«. 


VI 


Louis  III  continua  les  traditions  libérales  de  son  frère.  Pour 
soustraire  les  Juifs  à  l'arbitraire  des  tribunaux,  il  nomma  des 
conservateurs  de  leurs  privilèges  auxquels  la  connaissance  de  leurs 
délits  était  seule  réservée**.  Ces  places  étaient  recherchées  par  les 
plus  grands  seigneurs  de  la  Provence.  Charles  de  Castillon,  baron 


*  Nous  n'avons  pas  pu  trouver  aux  archives  le  document  qui  relate  ce  fait.  Voici 
dans  quels  termes  il  est  sij^nalé  dans  l'inventaire  de  M.  Paul  Meyer  :  «  Sec  s'en  lo 
registre  du  péage  de  Tharascon  translatât  de  ebraye  en  romans  per  Ferrer  Vidas, 
Jusieu,  loqual  avia  de  sos  predecessors  anciens  exactors  dudit  péage.  » 

'  Voir  liste  des  Juifs,  au  prochain  numéro. 
3  Arch.  départ.,  B.  2,  1634. 

*  Jbid.,  1636. 

»  Jbid.,  B.  2039. 

*  Ibid  ,  B.  2U43. 

''  Bédarride,  Les  Juifs  en  France^  ?•  317  ;  cf.  Depping,  p.  198. 

'  Archives  municipales,  CC.  125. 

»  P.  4  et  5. 

"  Cité  par  Gross,  Gallia  judaica,  p.  250. 

»»  Bédarride,  p.  320,  et  Depping,  p.  207. 


I 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  lOîS 

d'Aubagne,  Jean  de  Matlieron  et  Jean  de  Forbin  furent,  tour  à 
tour,  investis  de  ces  fonctions.  Un  document  que  nous  publions 
aux  Pièces  justificatives  tf'^moigne  de  la  reconnaissance  que  les 
Juifs  avaient  pour  leur  protecteur  royal.  C'est  le  testament  fait, 
en  1426,  par  Franqua,  femme  de  Maystre  Comprat  Asser ,  qui 
lègue  un  florin  d'or,  de  monnaie  courante,  à  Louis  III,  comte  de 
Provence. 

Il  nous  paraît  intéressant  de  reproduire  ici  les  principales 
clauses  de  ce  testament. 

Pour  le  salut  de  son  âme  et  le  rachat  de  ses  péchés,  Franqua 
lègue  : 

Au  luminaire  de  la  synagogue 2  fl.  1/2 

Pour  la  réparation  du  cimetière 2        » 

A  Vital  Meyr,  fils  de  Meyr  Comprat,  son  fils 25         » 

A  Maystre  Salomon  Dieulosal,  son  frère 5         » 

A  Dieulosal,  fils  de  Salomon  Dieulosal 5        » 

A  Vital,  fils  d'Astruc  de  Largentière. 5        » 

A  Rpginette,  fille  d'Astruc,  une  robe  «  de  griso  ». 
A  Sterette,  femme  de  Meyr  Comprat,  un  de  ses  manteaux. 
A  Mondinette  d'Avignon,  sa  cousine,  ses  robes  de  semaine,  à 
l'exception  d'une  qu'elle  destine  à   Blanquette,  femme   de 
Vital  de  Sostal. 
A  Gresquet,  fils  de  Maystre  Dieulosal  de  Largentière      3  fl. 

Les  légataires  universels  désignés  dans  le  testament  sont  : 
M""  Bondavin,  Comprat,  fils  de  Blanqua  et  de  M'^^  Comprat  Asser, 
son  mari,  et  ses  petits-fils,  Mosse  et  Vital  Meyr^ 

Nous  croyons  devoir  joindre  à  ce  document  un  autre  que  nous 
avons  eu  la  bonne  fortune  de  trouver  dans  les  minutes  du  notaire 
Jean  Muratoris.  C'est  un  contrat  de  mariage  dressé  le  4  Heswan 
5207  (24  octobre  1446)  dans  la  maison  de  Dieulosal  de  Tarascon, 
entre  JosseduCaylar2,filsde  Cresquetdu  Caylar,  Juif  de  Tarascon, 
et  Duranta  du  Barri,  fille  de  Bonnefille  et  d'Abraham  du  Barri, 
Juif  d'Arles  ^.  La  dot  de  Duranta  y  est  estimée, en  robes  et  joyaux, 
à  100  florins.  Gresquet,  père  de  l'époux,  s'engage  à  pourvoir, 
pendant  dix  ans,  à  l'entretien  de  son  fils,  de  sa  belle-fille  et  de 
leurs  enfants  à  venir.  Le  Juif  Abraham  Soff'er  figure  au  nombre 
des  témoins  de  cet  acte*. 

*  Pièces  justificatives^  n»  VIII. 

'  Villai^e  du  département  de  l'Hérault,  non  loin  de  Lodève. 

'  Voir  sur  l'origine  de  del  Barri  ou  de  Barrio,  Revue^  l.  XV,  p.  37  et  48.  Cf.  Saige, 
Les  Jui/s  du  Lanf/uedoc,  p.  223.  —  Les  ancieaaes  vihcs  du  midi  de  la  France  possé- 
daient des  rues  dénommées  du  Barri,  du  Rempart.  Le  nom  de  del  Barri  pourrait,  à 
notre  avis,  désigner  le  Juif  qui  habitait  le  Barri,  c'est-à-dire  la  rue  dq  Rempart. 

*  Ptècts  justificatives^  n">  XIIL 


106  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


VII 


Les  historiens  de  la  Provence  s'accordent  généralement  à 
considérer  le  règne  du  roi  René  comme  le  plus  heureux  pour  les 
Juifs.  Ils  enregistrent  un  édit  de  ce  prince  les  autorisant  à  pra- 
tiquer la  médecine,  le  commerce,  les  arts  et  tout  trafic  quelconque 
et  à  occuper  les  emplois  publics  de  péagers  et  de  procureurs  fiscaux 
dans  les  juridictions  seigneuriales*. 

Cette  dernière  assertion  des  historiens  n'est  point  fondée,  du 
moins  en  ce  qui  concerne  Ips  Juifs  de  Tarascon.  On  sait  que  peu 
de  temps  après  son  mariage  avec  Jeanne  de  Laval  (octobre  1445), 
le  roi  René  vint  en  Provence.  Les  députations  des  principales 
villes  se  réunirent  pour  donner  à  leurs  souverains  des  marques 
d'affection  et  de  fidélité.  Arles,  Aix,  Tarascon  et  Saint-Rémy  leur 
offrirent  des  coupes  et  de  la  vaisselle  d'argent.  Les  Juifs  de  la 
Provence  leur  firent  un  cadeau  du  môme  genre-.  Craignant  sans 
doute  que  la  reconnaissance  du  roi  ne  se  manifestât  en  faveur  des 
Juifs,  les  syndics  de  Tarascon,  toujours  jaloux  des  immunités  de 
leur  Communauté,  lui  demandèrent  la  confirmation  du  privilège 
que  le  roi  Robert  leur  avait  jadis  accordé  et  qui  interdisait  aux 
Juifs  l'exercice  des  fonctions  publiques  de  vendeurs  à  la  criée,  de 
péagers,  de  concessionnaires  du  sestérage%  etc.  René  se  rendit  à 
leurs  sollicitations  et  par  un  édit,  daté  du  20  septembre  1460, 
ordonna  que  le  privilège  de  la  Communauté  de  Tarascon  fût 
observé  dans  toute  sa  rigueur  «  inviolabiliter  et  ad  unguem  »  et 
quf^  nul  Juif  ne  fût  dorénavant  admis  a  une  charge  publique,  sous 
peine  d'une  amende  de  50  marcs  d'argent^. 

Il  ne  semble  pas  cependant  que  les  Juifs  aient  eu  beaucoup  à 
souffrir  de  cette  concession  arrachée  à  la  faiblesse  du  roi.  Ils 
vivaient  alors  dans  les  relations  les  plus  cordiales  avec  les  chré- 
tiens, et  il  n'était  pas  rare  de  voir  les  plus  grands  dignitaires  de 
l'Église  elle-même  prendre  un  Israélite  à  leur  service.  Un  document 
du  l«''juin  1425  nous  montre,  en  effet,  l'évêque  de  Gap,  Laugier 
Sapor,  louant  comme  domestique,  pour  la  durée  de  deux  mois  et 
demi  et  au  prix  de  3  florins  d'or,  Mayron  de  Meyrargues,  Juif  de 
Tarascon  s. 

*  Nostradamus,  Histoire  de  Provence^  partie  6. 
>  Ihid. 

*  Tribut  levé  sur  chaque  setier  de  blé  vendu  au  marché. 
^  Pièces  justi ficatives,  n"*  VI. 

*  Ibid.,  u«  X. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  107 

René,  d'ailleurs,  était  loin  de  leur  être  hostile.  Il  rendit  même 
en  leur  faveur  une  ordonnance  (18  mai  1454)  aux  termes  de 
laquelle  il  les  maintenait  dans  leurs  anciens  usages  en  môme  temps 
qu'il  diminuait  les  rigueurs  de  Tf^^dit  de  Charles  II  relatif  au  port 
de  la  roue  et  confirmait  les  médecins  dans  l'exercice  de  leur  art  *. 
Il  en  donna  lui-même  un  exemple  en  attachant  à  sa  personne  le 
médecin  juif,  Abraham  Salomon,  qu'il  exempta  de  tout  impôt  ju- 
daïque*. Il  se  faisait,  il  est  vrai,  très  largement  payer  des  faveurs 
qu'il  accordait  aux  Juifs  en  les  soumettant  à  une  taxe  de  2,160 
florins,  sans  compter  les  impôts  extraordinaires  de  18,000  florins  * 
que  les  communautés  juives  de  Marseille,  de  ïarascon,  d'Arles 
et  de  Salon  s'étaient  engagées  à  payer  au  comte  de  Vaudemont, 
grand  sénéchal  de  Provence,  et  qu'il  donna  l'ordre  à  Jean  Girard, 
commissaire  royal,  de  lever  à  son  profit  en  M^O-TI  ^.  Cest  ainsi 
encore  qu'en  1474-'75  il  enjoignait  au  Président  de  la  Chambre 
des  Comptes  de  faire  acquitter,  dans  le  délai  de  six  mois,  par  les 
Juifs  de  Tarascon  le  subside  de  8,000  florins  qu'il  leur  avait 
imposé,  sous  peine  d'emprisonnement,  d'amende  de  30  marcs 
d'argent  et  de  confiscation  de  leurs  biens '*,  et  qu'en  1415-'76,  il 
contraignit  les  Israélites  de  la  Provence  à  lui  fournir  une  nou- 
velle contribution  de  4,000  florins  \ 

Pendant  ce  temps,  les  syndics,  toujours  fidèles  aux  prescriptions 
de  la  Sauvegarde,  veillèrent  à  la  sécurité  des  Juifs  et  les  défen- 
dirent contre  toute  injure,  attaque  ou  violence.  Il  suffisait  qu'un 
chrétien  traitât  un  autre  de  juif  pour  qu'aussitôt  une  condamna- 
tion s'ensuivît.  Nous  trouvons,  en  effet,  relatée  dans  les  comptes 
de  Guillaume  Yoti,  clavaire  en  1475,  une  amende  de  cette  nature 
infligée  à  un  habitant  de  Tarascon  qui,  au  mépris  de  la  Sauve- 
garde, avait  dit  à  Jean  VioUet  :  «  Jusieu,  et  pagaras  lo  vin  ^  » 
Partout,  d'ailleurs,  les  Juifs  sont  placés  sur  le  même  pied  que  les 
chrétiens;  ils  jouissent  des  mêmes  droits  et  sont  soumis  aux 
mêmes  taxes  que  les  autres  habitants  ^  Ils  font  partie  des  confré- 
ries au  même  titre  et  dans  les  mêmes  conditions  que  les  chrétiens. 
Celle  des  porte-faix  se  composait,  en  1467-68,  de  vingt-deux 
membres;  les  Juifs  qui  y  figurent  sont  au  nombre  de  quatre  : 
Mosse  Aym,  aliàs  Pape,  Benyon  Mosse,  Haurahami  Carabidas  et 

«  C.  Arnaud,  p.  39  et  52. 

*  Depping,  ibid.,  p.  206. 

•  Archives  départementales^  B.  1390. 

♦  Ibid.,  B.  1393. 

*  Ibtd.,  B.  2489. 

•  Ihid.,  B.  2043.  Cf.  B.  2038. 

'  Eevu»  du  langues  romanes,  année  1897,  p,  224-226. 


lA 


108  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Vidon  Josse  ^  Si,  par  un  statut  local,  le  jeu  de  dés  entre  Juifs  et 
chrétiens  était  interdit  à  Aix,  sous  peine  d'une  amende  de  50  sous, 
dont  le  tiers  revenait  au  dénonciateur^,  il  n'en  était  pas  de  même 
à  Tarascon,  où, en  vertu  de  l'article  96  des  Coutumes,  confirmé  par 
le  roi  René,  ce  jeu  était  également  défendu  à  tous  les  habitants 
sans  aucune  distinction.  Mais  de  peur  de  succomber  à  la  tentation, 
les  Juifs  prenaient,  par  acte  notarié,  l'engagement  de  s'en  abstenir 
et  s'imposaient  même  quelquefois  des  amendes  volontaires.  Nous 
possédons  deux  actes  de  ce  genre.  L'un,  daté  du  19  septembre 
1438,  est  relatif  à  Mosse  Salomon,  Juif  de  Tarascon,  qui  s'engage 
à  ne  jouer  aux  dés  ni  à  aucun  autre  jeu  pendant  une  année,  sous 
peine  de  10  florins,  applicables,  par  moitié,  à  la  Cour  royale  et  au 
dénonciateur^.  L'autre  concerne  maître  Jacob  de  Lunel,  qui,  le 
3  janvier  1441,  promet  de  s'abstenir,  à  l'avenir,  de  tout  jeu,  sous 
peine  d'une  amende  de  35  florins  à  distribuer  comme  suit  :  10  flo- 
rins au  fisc,  5  au  viguier,  5  au  juge,  5  au  dénonciateur,  5  au  lumi- 
naire juif  et  5  à  l'aumône.  En  cas  de  refus  de  l'un  d'eux,  sa  part 
sera  partagée  entre  le  fisc  et  le  dénonciateur*.  Maître  Jacob  de 
Lunel  était  un  médecin  fort  estimé  à  Tarascon.  Nous  avons  de  lui 
un  certificat  que,  de  concert  avec  maître  Guillem  Biroier,  il  a 
délivré,  le 5  février  1424,  à  «  dona  Philipa  Grilla  »,  des  Baux,  pour 
la  déclarer  indemne  de  la  lôpre.  L'original  de  ce  document  que 
nous  reproduisons  ici  se  trouve  à  l'étude  de  M.  Mourret,  quia  bien 
voulu  nous  le  communiquer  : 

A  la  discreta  dona  Philipa  Grilla  als  Baus  sia?i  dadas. 

Dona  Philipa,  nos  nos  recomandam  à  vos  et  vos  fasem  asaber  que 
Anthoni  Bouier  si  nos  a  die  que  vos  vos  duplavas  quel  el  fos  loquat 
del  mal  de  Sant-Lase,  per  que  non  vos  plasia  que  el  demores  en 
vostre  ostal.  Per  que  vos  fasem  asaber  que  el  nos  ha  requerit  de  sou 
bon  grat  que  hom  vegues  sa  aurina  et  que  hora  lo  feses  sayuar  et  que 
li  palpes  tota  sa  persoua,  per  veser  si  el  era  ren  toquât  de  la  dita 
malautia;  et  sapiat  que  nos  avem  vistz  l'aurioa  et  son  sanc.  De  que 
en  sa  aurina  ni  en  son  sanc  non  avem  trobat  nengum  senial  de  la 
dita  malautia,  et  son  sanc  avem  trobat  bon  et  pur  et  net,  après  que 
avem  fait  las  provas  que  lo  libre  manda  fayre  en  lo  sanc.  Item  11 
avem  regardât  tota  sa  persona,  loqual  non  hi  avem  trobat  neguna 
macula  ni  en  sos  pes,  ni  en  sas  cambas,  ni  en  sos  brasses,  ni  en  sas 
mas,  et  lo  avem  proat  que  ha  bon  asentiment  en  lo.s  menbres,  los- 


*  Archives  municipales^  BB.  10. 
'  G.  Arnaud,  ouvrage  cité,  p.  39. 

*  Pièces  justificatives^  u°  VU. 

*  Ibid.,  D«  XI. 


LES  JUIFS  DE  TARASCOX  AC  MOYEN  AGE  lOJ 

quais  déu  aver  boa  asealiment.  Per  que  disem  que  quant  a  présent 
non  li  trobarn  nenguna  malaulia  ni  nengun  mal  per  que  bon  lo  degia 
deslonia  ni  duptar.  Diéu  sia  an  vos.  Script  a  Tbarascon  a  V  de 
febriar  l'an  mil  Illl  c.  et  XXIIII. 

los  tos  vostres  Mayslre  Jacob  de  Lunell, 
fisiciau,  et  maystre  Guillem  Biroier, 
surgia  et  barbia  de  Tbarascon'. 

En  Provence,  le  droit  de  cité  était  soumis  à  des  principes  inva- 
riables. Chacun  avait  la  liberté  de  domicile  et  pouvait  s'établir  où 
il  voulait.  Mais  pour  être  réputé  citoyen  d'une  commune  dont  on 
n'était  pas  originaire,  il  fallait,  suivant  le  statut,  s'y  fixer  effecti- 
vement et  y  transporter  la  plus  grande  [)artie  de  ses  biens.  Cette 
déclaration  devait  être  faite  par  un  acte  notarié  ^.  Les  registres  du 
notaire  Pierre  Margoti  nous  ont  conservé  un  acte  de  citadinage 
(Cieutadanagium)  de  ce  genre  dressé  le  22  avril  1467  en  faveur  de 
Mordacays  Vidal  Cohen,  Juif  de  Salon.  En  présence  de  Gévonime  de 
Manellis,  représentant  le  viguier  de  la  cour  royale,  et  des  syndics 
Francisque  Genoyne  et  Pierre  Aycard,  «  après  avoir  rendu  hom- 
mage aux  qualités  et  aux  vertus  des  habitants  de  Tarascon  et 
reconnu  que  les  privilèges,  franchises,  libertés,  immunités  et  nom- 
breuses prérogatives  dont  jouissait  leur  ville,  rendaient  évidente 
sa  supériorité  sur  toutes  les  autres  cités  de  la  Provence  et  de  l'Oc- 
cident »,  Mordacays  Vidal  Cohen  est  proclamé  nouveau  citoyen 
«  civis  novus  »  et  admis  à  jouir  de  tous  les  droits  attachés  à  ce 
titre.  Suivant  la  règle  appliquée  à  tout  étranger,  juif  ou  chrétien, 
il  s'engage  à  convertir  la  majeure  partie  de  ses  biens  meubles  et 
immeubles,  à  s'établir,  dans  un  délai  de  trois  ans,  à  Tarascon  ou 
son  territoire  et  à  participer,  à  l'égal  des  autres  citoyens,  aux 
tailles,  questes,  chevauchées,  etc.  Il  promet  d'observer  fidèlement 
les  clauses  du  contrat  et  jure  :  «  ad  aquineam^  ». 


VIII 


L'année  1484  fut  une  année  malheureuse  pour  les  Juifs  de  la 

*  Pièce  annexée  aux  notes  brèves  du  notaire  Antoine  Chapati,  vol.  4  (1425-1426). 

*  Julien,  Nouveau  commentaire  sur  les  statuts  de  Provence^  cité  par  Fabre,  Histoire 
de  la  Provence^  t.  III,  p.  46. 

'  Pièces  justificatives^  n»  IX.  Ailleurs  on  lit  quinia  on  aquinaJVoïv  Arnaud,  Essai, 
p.  61  et  62.  Le  même  serment  est  prêt<^,  en  1441,  par  Jacob  Bonet  Avieudor  de 
Tarascon,  Pièces  justificatives,  n»  XVII.  —  D'après  M.  ^euhauer,  Hevue,  X,  p.  307, 
le  met  aqiiinea  représenterait  le  terme  hébreu  'J'^Dpn.  Nous  croyons  plutôt  qu'il  s'agit 
du  mot  laiiu  quinio,  le  nombre  cinq,  par  allusion  aux  cinq  livres  de  la  loi  de  Moïse. 


110  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Provence.  Le  13  Nissan  5244  (8  avril),  une  bande  de  Dauphinois, 
d'Auvergnats  et  de  montagnards  provençaux,  venus  à  Arles  pour 
faire  la  moisson,  se  jeta  sur  les  Juifs,  les  pilla  et  démolit  la  syna- 
gogue*. Les  mêmes  excès  se  renouvelèrent  à  Aix  le  10  mai-.  La 
communauté  juive  de  Tarascon,  où  les  malheureuses  victimes  de 
l'émeute  s'étaient  réfugiées,  ne  subit  aucun  acte  de  ce  genre.  Sur 
l'ordre  du  sénéchal  de  la  Provence  et  en  exécution  des  clauses  de 
la  Sauvegarde  royale,  le  Conseil,  afin  de  mettre  les  Juifs  à  l'abri 
de  toute  attaque  «  ut  thucius  custodientur  »,  les  fit  rentrer,  pen- 
dant les  moissons,  dans  le  château  et  donna  l'ordre  de  fermer, 
durant  les  fêtes  -,  les  portes  de  la  ville,  à  l'exception  de  deux  dont 
la  garde  fut  confiée  à  la  milice  urbaine.  Il  fit  placer,  en  outre,  des 
hommes  armés  devant  les  maisons  de  la  Carrière  et  élever,  aux 
frais  des  Juifs,  des  barrières  (cancellos)  sur  lesquelles  il  ordonna 
de  placarder  la  Sauvegarde  '*. 

Le  8  juin  de  la  même  année,  averti  par  les  syndics  d'Arles  de 
l'intention  des  moissonneurs  de  se  rendre  à  Tarascon  et  de  s'y 
livrer  au  massacre  des  Juifs  et  au  pillage  de  leurs  biens,  le  Conseil 
nomma  capitaine  de  la  milice  un  de  ses  membres,  Pierre  Poitevin, 
et  le  chargea,  en  cette  qualité,  de  visiter  la  Carrière  et  de  veiller, 
avec  un  nombre  de  soldats  suffisant,  à  la  sécurité  de  ses  habitants. 
Il  délégua  en  même  temps  à  Beaucaire  le  syndic  Ponce  et  le  con- 
seiller Jean  Salellas,  avec  mission  pour  eux  de  s'entendre  avec  les 
riverains  et  autres  habitants  au  sujet  de  l'aide  que,  le  cas  échéant, 
ils  devaient  leur  prêter  contre  les  envahisseurs  de  leur  territoire. 
Le  Conseil  fit  parvenir  également  au  sénéchal,  avec  la  réponse  de 
la  communauté  de  Tarascon,  les  lettres  qui  lui  furent  adressées 
par  les  syndics  d'Arles  et  l'invita  à  lui  faire  connaître  les  mesures 
qu'il  comptait  prendre  dans  l'intérêt  cîe  la  défense  des  Juifs  ^. 

De  nouveaux  troubles  éclatèrent  à  Arles  pendant  l'été  1485.  Des 
officiers  de  police  même  furent  maltraités  par  les  moissonneurs.  A 
cette  nouvelle,  le  Conseil  se  réunit  aussitôt,  et,  dans  sa  séance  du 
10  juin,  à  laquelle  assistèrent  les  bayions  de  la  communauté,  il  fut 
convenu  d'un  commun  accord  :  ]"  que  pendant  toute  la  durée  des 
moissons  les  Juifs  s'entermeraient  avec  leurs  familles  dans  le  châ- 
teau; 2°  que  leurs  maisons  et  leurs  biens  seraient  placés  sous  la 
garde  du  capitaine  de  la  milice,  Pierre  Poitevin,  et  de  25  hommes 

*  Bévue,  t.  XII,  p.  18,  note.  Cf.  Bardinet,  Eevue  historique^  188Û,  et  Deppiog, 
p.  208. 

'  Bouche,  Chronogr.  de  Provence,  t,  II,  p.  494. 

'  Les  lêtes  do  la  Pentecôte,  de  saint  Jean-Baptiste  (24  juin)  et  de  sainte  Marthe 
(29  juillet). 

'*  Pièces  justificatives^  n"  XU. 

5  Ibid.,  n"  XU. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  111 

arra(^s  auxquels  les  Juifs  alloueraient,  outre  la  nourriture,  une  in- 
demnité de  4  gros  par  homme  et  par  jour;  3°  que  des  sentinelles 
seraient  postf^es  aux  portes  de  la  ville  aux  frais  des  Juifs. 

Le  même  jour,  le  Conseil,  d'accord  avec  les  bayions,  délégua  un 
de  ses  membres,  Raymond  de  Vite,  auprès  du  roi  de  France,  avec 
une  co[)ie  des  lettres  des  syndics  d'A.rles,  informant  ceux  de  Ta- 
rascori  des  douloureux  événements  qui  venaient  de  se  passer  dans 
leur  ville,  et  chargea  le  viguier,  de  Lobières,  son  assesseur, 
Genoyne,  et  les  conseillers  Jean  Salellas  et  Guillaume  Bernard,  de 
prendre  toutes  les  mesures  qui  leur  seront  dictées  par  l'intérêt 
général  des  habitants,  juifs  ou  chrétiens  ^ 

On  ne  se  lit  aucun  scrupule  à  Tarascon  d'enfreindre  ces  mesures. 
Des  notables  même  pénétrèrent  dans  la  Carrière,  se  ruèrent  sur 
les  Juifs  et  jetèrent  à  terre  la  Sauvegarde.  Le  roi  de  France  au- 
quel la  communauté  juive  avait  fait  parvenir  ses  doléances  de- 
manda raison  au  Conseil  de  ces  métaits,  et  celui-ci  se  vit  obligé, 
le  16  décembre  1485,  de  lui  présenter  ses  excuses  par  la  bouche  de 
son  ambassadeur,  Jacob  de  Angelo,  de  démentir  les  faits  allégués 
par  les  Juifs,  et  de  lui  donner  l'assurance  du  dévouement  que  les 
habitants  de  Tarascon  professaient  pour  la  Majesté  royale,  dont 
ils  ont  toujours  été  et  seront  toujours  les  fidèles  sujets  -. 

Ce  danger  à  peine  conjuré,  un  nouveau  malheur  menaça  la 
communauté  juive.  Au  mois  de  janvier  1488-89,  pour  des  motifs 
que  nous  ignorons,  une  émeute  contre  les  Juifs  éclata  à  Tarascon 
même.  Fidèle  à  la  Sauvegarde,  aux  termes  de  laquelle  il  était  con- 
traint de  protéger  les  Juifs  contre  toute  violence,  le  Conseil  intima 
à  leurs  bayions  l'ordre  d'élever  à  l'entrée  de  la  Carrière  des  bar- 
rières plus  solides  que  les  premières,  et  de  faire  construire  des 
portes  assez  larges  pour  permettre  à  des  voitures  chargées  ou  non 
d'y  passer.  Il  décida,  en  outre,  conformément  aux  Lettres  royales 
qui  venaient  de  lui  être  adressées  (11  juin  1488-89):  1°  que  la 
Sauvegarde  serait  fidèlement  observée  ;  2*^  que,  pendant  les  jours 
de  fête,  toutes  les  portes  de  la  ville  seraient  fermées  à  Texception 
de  celles  de  Saint-Jean  et  de  Madame  ;  3^  que  des  hommes  armés 
seraient  placés  auprès  de  ces  portes  qu'il  appartiendrait  au  viguier 
et  au  capitaine  de  faire  également  fermer  quand  ils  le  jugeront 
nécessaire  ;  4.^  que  les  hommes  armés  auraient  soin  d'interdire 
l'entrée  de  la  ville  aux  moissonneurs  porteurs  d'armes  ou  de 
bâtons  ferrés,  mais  les  obligeraient  de  les  déposer  dans  la  maison 
la  plus  rapprochée  de  ces  portes  ^. 

*  Pièces  justificatives^  n»  XII. 
>  Ibid. 
»  Ibid, 


112  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Grâce  à  ces  précautions,  les  Juifs  purent  encore  une  fois 
échapper  à  la  fureur  de  leurs  ennemis.  Mais  un  nouvel  orage 
s'amoncelait  sur  leurs  têtes,  qui  eut  pour  eux  les  conséquences  les 
plus  désastreuses.  Fatigués  de  se  soumettre  plus  longtemps  aux 
prescriptions  de  la  Sauvegarde,  les  habitants  de  Tarascon,  à 
l'instar  de"  ceux  des  autres  villes  de  la  Provence,  les  accusèrent 
non  plus  seulement  d'être  les  ennemis  de  la  foi  chrétienne,  mais 
surtout  de  commettre  «  usures,  rapines  et  autres  maulx  innumé- 
rables  *  ».  Charles  VIII  écouta  leurs  doléances,  et  par  des  lettres- 
patentes  du  22  mai  1496,  enjoignit  au  grand  sénéchal,  au  viguier  et 
au  juge-mage  de  Tarascon  '<  de  faire  vuider  et  de  chasser  les  dits 
Juifz  et  Juives  de  la  dite  ville,  ressort  et  viguerat  d'icelle,  sans  plus 
les  souffrir  y  demourer,  habituer,  aller,  venir,  passer,  séjourner, 
ne  résider  en  aucune  manière  »  et  ce  «  dedens  le  quinziesme  jour 
de  juillet  prochainement  venent  et  sans  plus  de  terme  ou  res[)it  » 
et  «  nonobstant  oppositions  ou  appellations  et  autres  faictes  ou  a 
faire,  relevées  ou  a  relever,  et  tous  lesdits  procès  et  procedeures, 
meuz  ou  autres  qui  se  pourroyent  mouvoir  pour  retarder  le  par- 
lement des  dits  Juifz  delà  dite  ville,  ausquelz  ne  voulons  doresen- 
navant  iesdits  Juifz  estre  admis,  oyz  ne  receuz*  ». 

L'arrêt  fut  irrévocable,  et  c'est  avec  un  serrement  de  cœur  que 
les  Juifs  de  Tarascon  furent,  eux  aussi,  contraints  de  prendre  le 
dur  chemin  de  l'exil  et  d'abandonner,  sans  espoir  de  retour,  une 
ville  au  bonheur  et  à  la  prospérité  de  laquelle  ils  n'avaient 
jamais  cessé  de  travailler.  Ils  se  retirèrent  dans  le  Comtat-Ve- 
naissin. 

Salomon  Kahn. 
(A  suivre,) 


*  On  remarquera  que  c'est  la  première  fois  que  le  reproche  d^usure  est  adressé  aux 
Juifs  de  la  province. 

>  Pièces  jusUficaiiveSj  n°  XIV. 


MENAHEM  AZARIA  DI  FANO 


LE   PORTRAIT    DE    R.    MKNAHEM    AZARIA    DI   FANO. 


La  barbe  de  R.  Menahem  Azaria  di  Fano  a  donné  lieu  naguère 
à  une  controverse.  Lorsque  R.  Sabbataï  Biir,  dans  la  seconde 
moitié  du  xvii^  siècle,  eut  à  résoudre  la  question  de  savoir  s'il  est 
permis,  d'après  la  Kabbale,  de  se  couper  la  barbe  avec  des  ciseaux, 
il  rechercha  tout  d'abord  comment  agissait  à  cet  égard  le  héros  et 
adepte  de  la  Kabbale  en  Italie,  celui  qui  connaissait  le  mieux  ies 
doctrines  d'Isaac  Louria  *.  Réputé  pour  sa  science  et  ses  habitudes 
de  vie  comme  le  principal  représentant  de  cette  doctrine  secrète 
en  Occident,  il  pouvait,  en  raison  de  sa  qualité  de  disciple  de 
R.  Israël  Saruk,  être  considéré  comme  le  disciple  presque  immé- 
diat de  Louria.  Sabbataï  Bar  eut  surtout  l'occasion  de  connaître, 
par  son  maître  Isaac  Beréchia  de  Lugo  ^,  neveu,  gendre  et  disciple 
de  R.  Menahem  Azaria,  les  habitudes  de  ce  maître  de  la  Kabbale. 
Il  prétend  avoir  appris  ainsi  que  Menahem  Azaria,  suivant  les 
idées  cabbalistiques  qu'il  professait,  se  taillait  la  barbe  tous  les 
vendredis  en  l'honneur  du  Sabbat,  selon  la  coutume  des  Italiens, 
et  que  son  exemple  était  imité  par  ses  disciples;  parmi  ces  der- 

*  p^:'  -|N3,   n"    70  :    ^^N^n    p^H    TJ-^H     \n-ipm     \nCÎ'n     "^UÎSÎ    N43NT 

rj-i-^n  rr^rt  'ia"5>  bD  -«s  i-id3  hy  "^n^T^n  b"piirT  i^ndt^  y"i2^n  s-^n^n 
riN-ibNiû^N  :^t:jJ2^  rr^sp-^na  nsno7ûT  rr^'jwNnn  ï*<:in  mpi  rî^a.sn 
TiJwN  b"p"i^T  "^""iw^n  n72^n73  t^^nm^  N-nn^wS  r^r?:^^  «n'^un  bDwS"«  '^m 
Sdt  vi2-^  ^^o  ly  i^hd  ^r)T  nm  ^"n^n  uyi:i2  y"i2^r,  ba  icm^ûb  n3 
pT  rr^n  TT^?:bm  -nsn  isnn  nnn  m?:  "^^  "^ws  inn^  T^nr^bn 
nns  'rnb  ;::b'an  t2\nuJT  nyz)  Nb  ^"ab  \"T^trT::  pn-»  ^2yj2  by^  2-in 
mn-i  d-is^D  -^-i^rr  ■oni  niy^  vd  b.s  mm  bnpi  mnon  r.j2i2  vin  p^ti 

*  Cf.  Kaut'mann,  dans  Jewish  Quartcrly  Meview,  VIII,  51  o,  et  Mevue,  XXXV    86 
et  s.,  89. 

T.  XXXIX,  no  77.  « 


114  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

niers  se  trouvait  R.  Ahron  Berachia  de  Modène*,  le  pieux  et 
célèbre  auteur  du  Maahar  Yabok^  au  sujet  duquel  R.  Sabbataï 
pouvait  fournir  un  témoignage  oculaire. 

Se  méprenant  sur  le  sens  de  ce  îémoignage,  R.  Moïse  Sofer  * 
s'imagina  que  R.  Menahem  Azaria  di  Fano  ne  souffrait  aucun 
poil  sur  son  visage  et  était,  en  quelque  sorte,  le  type  du  compro- 
mis entre  les  habitudes  cabbalistiques  et  l'usage  de  se  tailler  la 
barbe.  R.  Moïse  Sofer  confondait  ainsi  R.  Menahem  Azaria  di 
Fano  avec  Josef  del  Medigo,  dont  le  disciple  Moïse  Metz,  dans  la 
biographie  de  son  maître  dédiée  au  caraïte  Zérah  b.  Nathan,  rap- 
porte qu'il  était  Tennemi  du  port  de  la  barbe  ^.  En  outre,  R.  Moïse 
Sofer  n'a  tenu  aucun  compte  de  la  réfutation  du  témoignage  de 
R.  Sabbataï. 

R.  Josef  b.  Emmanuel  Ergas,  plus  tard  rabbin  de  Florence,  qui 
eut,  presque  un  siècle  plus  tard,  l'occasion  de  se  prononcer  sur  le 
mémoire  de  R.  Sabbataï^  ne  se  borne  pas  à  mettre  à  néant  l'argu- 
mentation de  ce  dernier;  il  réfute  aussi  son  assertion  concernant 
R.  Menahem  Azaria*.  R.  Benjamin  Cohen  Vitali  de  Reggio,  un 
oracle  digne  de  confiance  en  matière  de  Kabbale,  étant  donnée  sa 
qualité  de  disciple  de  R.  Moïse  Zacut,  soutint  contre  Ergas  la  véra- 
cité du  mémoire  de  R.  Sabbataï  en  général,  et  en  particulier 
l'exactitude  de  son  allégation  quant  à  la  barbe  de  R.  Menahem 
Azaria.  R.  Benjamin  Cohen  était  môme  en  état  d'invoquer  sur  ce 
point  un  témoignage  contemporain  authentique,  le  portrait  du 
maître  de  la  Kabbale  lui-même,  qu'il  avait  vu  à  Mantoue.  Sur  ce 
portrait,  la  figure  de  R.  Menahem  Azaria  aurait  été  toute  couverte 
de  barbe,  ce  qui  démentait  complètement  le  dire  de  R.  Sabbataï. 

Or,  il  se  trouve  que  le  portrait  que  R.  Benjamin  Cohen  avait  vu 
existe  encore  à  Mantoue.  Grâce  à  une  communication  de  mon  ami 
M.  Jaré,  qui  s'est  souvenu  que,  du  temps  de  son  enfance,  le  por- 


*  Cf.  Zunz,  Literatui'  ffcschichte,  p.  424  et  s. 

*  n'VS  "JDIO  ûnn  ^\"^'0,  n°  lo9.  Cf.  M.  Straschuo,  dans  n572t^3  nnp  de  S.  I. 
Funn,  p.  375,  noie  17. 

3  Ibid.  :  Vpu:  to'^P"«wX::  5<"in2p73  n"U5"«ri  V:)y  Ti^^in  pT.  Comme  Straschuo 
l'a  déjà  reconnu,  R.  Moïse  Sofer,  par  une  erreur  de  mémoire,  a  allribué  à  Menahem 
Azaria  les  indications  se  rapportant  à  Josef  del  Medifço.  Josef  del  Medigo  trace  lui- 
même  ce   portrait  par    Tinlermédiaire   de   son  disciple   Mosé    Mclz,    ûî'^Jî,  !•  29 a: 

y3^b    naiî  "j:>7:  lîpT  pN   D"'bnbn   rmiiTip  nmn"::  "rr^^n    m"i:>o 

*  t]3v  "^-lai,  n«>  25  :  )r^^n  l-'7:"':3  -imn7:73  ni  by  \n-,pn  "^sn  ^^y^ 
^r2ob  lin  Yi^  p\a:'  n.Nn  ^-i3t  b"7T  -«b  n^•c^^  i<"y^  ^^^:^^'\  "T^ra  ^"^3 
iNao  mm-jn  rî?2D7j  rîwNmnn  -"bm  vzy  ip'::^nr!  naD  "^s  tsn'^bj' 
•jpT^  ^^^m  n"nbT  ynni^  mii:  nDrj:?2a  ■'n\N-i  ■^r.NT  NnDbnD  t^^n  DU) 

1n^'^y  b\D  wND"i:i3  nzn^Ti  it  "^-im  ^^y  vr,M:>  bs  by  Nb?^. 


MENAIIEM^AZARIA  DI  FANO  113 

trait  de  Menahem  Azaria  avait  été  trouvé  à  Mantoue  et  qu'il  avait 
été  acheté  pour  être  donné  à  l'école  de  la  Confrérie  Schem  ToJ)^ 


MENAHEM  AZARIA  DI  FANO. 


j'ai  pu  faire  exécuter  une  photographie  de  ce  portrait;  quoiqu'il 
soit  fortement  assombri,  on  y  voit  encore  les  traits  pétillants 
d'esprit  de  l'illustre  rabtin  de  Reggio,  et  nous  avons  là  une  image 
du  maître  de  la  science  talmudique  et  de  la  Kabbale. 


H6  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Un  simple  coup  d'œil  jeté  sur  le  portrait  donnera  la  solution  du 
différend  entre  R.  Sabbataï  Bar  et  R.  Josef  Ergas.  Biir  n'a  pas  été 
induit  en  erreur  par  celui  qui  l'a  renseigné.  R.  Isaac  Berachia,  le 
frère,  gendre  et  disciple  favori  de  Menahem  Azaria,  lui  tenait  de 
trop  près  pour  lui  avoir  fait  une  déclaration  inexacte  au  sujet  de 
l'extérieur  du  vénéré  maître.  Cependant  sa  déclaration  ne  portait 
pas  sur  l'absence  de  barbe,  mais  sur  les  soins  donnés  à  la  barbe. 
C'est  ce  qui  est  prouvé  par  le  portrait  qui  nous  montre  une  barbe 
coupée  régulièrement,  nullement  inculte  et  abandonnée.  D'autre 
part,  nous  trouvons  aussi  la  confirmation  de  l'assertion  de  R. Ben- 
jamin Cohen,  qui  prétend  que,  d'après  le  portrait  de  Mantoue, 
Menahem  Azaria  portait  une  barbe  couvrant  tout  le  visage,  les 
lèvres,  le  menton  et  les  joues  ^  Enfin,  le  portrait  confirme  aussi 
la  description  que  Yedidia  Caro  ,  petit-fils  de  R.  Josef  Garo , 
a  faite  de  la  personne  de  R.  Menahem  Azaria  di  Fano  à  David 
Conforte  ^  Lorsqu'il  fut  admis  à  voir  l'ami  de  son  grand-père  dans 
sa  maison  à  Mantoue,  où  celui-ci  le  reçut  avec  la  plus  vive  cor- 
dialité, en  raison  de  la  vénération  et  de  l'affection  que  R.  Menahem 
Azaria  avait  depuis  sa  jeunesse  pour  Josef  Caro,  il  crut  voir  appa- 
raître, selon  sa  propre  expression,  un  ange  du  Seigneur.  Le  por- 
trait nous  a  conservé  encore  un  reflet  de  cette  apparition  em- 
preinte de  grandeur,  rehaussée  par  la  dignité  de  toute  la  personne 
et  la  bonté  que  respire  cette  tête  de  penseur. 


II 


LEPITAPHE    DU    TOMBEAU    DISPARU   DE    R.   MENAHEM   AZARIA 
DI  FANO   A  MANTOUE. 


R.  Menahem  Azaria  di  Fano  avait  été  longtemps  rabbin  à 
Reggio;  par  ses  élèves,  par  sa  piété  ascétique  et  par  sa  vaste  éru- 
dition, il  s'était  rendu  célèbre  de  son  vivant  dans  toute  l'Italie,  et 
sa  gloire  s'étendit  môme  bien  au  delà  des  frontières  de  ce  pays.  Il 
passa  à  Mantoue  les  dernières  années  de  son  existence,  et  le  petit- 
fils  de  R.  Joseph  Caro,  Yedidia  Caro,  y  fréquenta  sa  maison  •'. 
Comme  on  n'a  trouvé  aucune  trace  de  son  tombeau  à  Mantoue,  on 

*  Cf.  Kaufraann,  Mo7iatsschrift^  XLI,  700  et  s. 

'  m  min  Nmp.  i*  42*  :  ïiN-i^ûT  bmp7:i  bna  TDn  ïi^nuî  m:'  "^b  ncoi 

'  D.  Couforle,  m-n^TÏ!  HTT^'^s  1»  42  3. 


MENAIIEM  AZARIA  Dl  FANO  117 

pouvait  être  certain  que  cette  tombe,  si  religieusement  conservée 
par  les  générations  successives,  n'a  pu  être  détruite  que  par 
quelque  cataclysme  ou  quelque  catastrophe  :  effectivement,  c'est 
le  jeudi  14  avril  1831  que  l'armée  autrichienne,  dit-on,  a  démoli 
son  tombeau;  à  cette  occasion  Lelio  Cantoni  a  copié  l'épitaphe  et 
l'a  ainsi  sauvée  de  l'oubli.  Je  la  publie  ici  pour  la  première  fois, 
d'après  la  communication  qu'en  fit  le  rabbin  de  Mantoue  Isaïe 
Lévi  au  rabbin  de  Ferrare  Giuseppe  Jaré. 

M">i53   "laiT^na   i-i^ûn'ip  tiDi:?73 

rîTU)  pub  t]"o  tnr^u 

rr^ibnti   toipTo   mn^pn  ï-iTonp^a 

ïT^iitn  I53yb  inb3>!D  ^ï:n 

î-T^ib:i  ^Dyib  'n:^^^^  b'D  ci:»i 

Ti^^y  j-T'T^it'>  ï-7&<"«^a  t-iib"'irN 

î-i-^iiD  iiïT'n  *n"^isb  iu5d3i 

.bp"-ii:T 

Un  examen  un  peu  attentif  de  l'inscription  montre  que  ce  mo- 
nument n'a  pu  être  celui  qui  a  été  érigé  immédiatement  après  le 
décès  de  R.  Menahem  Azaria,  survenu  le  5  août  1620,  mais  que 
c'était  une  restauration  du  tombeau  primitif  tombé  en  raines  ou 
démoli.  Cela  ressort  déjà  de  la  date  qui  ne  mentionne  ni  le  mois  ni 
le  jour.  A  la  vérité,  à  la  seconde  ligne  de  cette  épitaphe  rythmée, 
il  manque  tout  un  quart  du  vers  primitif;  mais  là  aussi  l'année 
seule,  et  non  le  mois  et  le  jour  du  décès,  aurait  pu  être  donnée. 
Les  premières  lignes  du  poème  affirment,  d'ailleurs,  expressément 
que  ce  n'était  pas  là  le  monument  original,  mais  une  restauration  : 
«  C'est  l'ancienne  demeure,  la  tombe  de  R.  Menahem  Azaria  qui  a 
été  reconstruite  ici  »,  avec  le  millésime  1620  sur  la  pierre  d'assise 
ou  pierre  originale,  comme  on  l'appelle  dans  le  second  vers.  La 
place  de  la  pierre  n'était  pas,  comme  nous  l'apprenons  dans  la 
troisième  ligne,  tout  à  fait  celle  de  l'ancienne;  elle  était  seulement 
dans  le  voisinage  du  monument  tombé  en  ruines,  du  tombeau  pri- 
mitif. Les  trois  premières  lignes,  malgré  leur  rédaction  poétique, 
nous  donnent  donc  l'indication  rigoureusement  historique,  qu'en 
cet  endroit,  à  la  place  de  l'ancien  caveau  détruit,  la  piété  de  la 
communauté  ou  celle  des  admirateurs  du  défunt  lui  avait  érigé  un 
nouveau  tombeau.  Peut-être  les  vers  suivants  ne  sont-ils  que  la 
répétition  du  poème  gravé  jadis  en  honneur  de  R.  Menahem  Azaria 


118  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

sur  sa  pierre  tombale  :  «  Voici  le  lieu  de  repos  destiné  à  Thomme 
qui,  de  son  vivant,  s'était  élevé  si  haut,  et  dont  Télévation  avait  été 
si  agréable  à  son  peuple.  Aucune  science  n'était  étrangère  à  son 
esprit;  les  quatre  mondes  de  la  Kabbale,  celui  de  l'Émanation, 
celui  de  la  Création,  celui  de  la  Formation  et  celui  de  l'Activité 
étaient  comme  un  livre  ouvert  devant  ses  yeux.  Son  âme  était 
déjà  durant  son  pèlerinage  terrestre  exclusivement  consacrée  à 
son  Créateur,  ce  que  prouvaient  et  sa  vie  ascétique  et  ses  médi- 
tations sur  les  questions  métaphysiques.  Ainsi  se  perpétue,  conclut 
l'épitaphe,  le  nom  de  R.  Menahem  Azaria,  qui  est  parvenu  à  l'im- 
mortalité sous  celui  de  Rma  di  Fano.  » 

On  ne  sait  si  ces  éloges  sont  ceux  du  tombeau  primitif  ou  ceux 
du  monument  funèbre  érigé  pour  remplacer  le  premier;  en  tout 
cas,  ils  sont  un  témoignage  de  la  considération  et  du  respect  dont 
jouissait  R.  Menahem  Azaria  dans  la  ville  où  s'exerça  son  activité 
dernière,  et  ils  complètent  dignement  le  portrait  de  ce  savant 
intéressant. 

David  Kaufmann. 


LE  JUIF  DANS  LA  COMÉDIE 

AU  XVIir  SIÈCLE 


Les  auteurs  des  savantes  monographies  qui  nous  ont  fait  con- 
naître la  condition  des  Juifs  en  France  au  siècle  dernier  sont  d'ac- 
cord pour  nous  la  représenter  à  la  fois  comme  précaire  et  suppor- 
table K  Ils  nous  enseignent  que,  sans  doute,  on  n'avait  pas  révoqué 
la  déclaration  royale  du  23  avril  1615  qui  les  avait  bannis,  mais 
que  les  Juifs  y  contrevenaient  sans  trop  de  difficulté.  Ils  nous 
montrent  que  les  commerçants  protestaient  souvent,  avec  l'appui 
des  autorités  municipales,  contre  la  permission  expresse  ou  tacite 
qu'on  donnait  aux  Israélites  de  venir  vendre  sur  les  foires,  mais  ils 
nous  apprennent  que  souvent  les  Intendants  ou  les  Parlements 
prenaient  parti,  dans  l'intérêt  des  consommateurs,  pour  ces  négo- 
ciants ambulants  qui  vendaient  à  meilleur  marché.  Ils  constatent 
qu'on  ne  leur  permettait  pas  plus  chez  nous  qu'ailleurs,  je  ne  dis 
pas  d'exercer  les  professions  libérales,  mais  d'entrer  dans  une 
corporation;  mais  ils  nous  suggèrent  la  réflexion  qu'étant  don- 
nées les  mœurs  du  temps,  les  Juifs  gagnaient  à  être  officiellement 
bannis,  car  ils  échappaient  par  là  aux  distinctions  humiliantes 
qu'on  leur  imposait  là  où  ils  étaient  officiellement  tolérés  '.  Ils  re- 
connaissent formellement  que  la  haine  dont  les  Israélites  avaient 

*  Voir,  dans  la  Revue  des  études  juives,  M.  N.  Roubin,  La  vi«  commerciale  des 
Juifs  comtadins  en  Languedoc  (t.  XXXIV,  p.  276  et  suiv.  ;  t.  XXXV,  p.  91  et 
suiv.  ;  t.  XXXVl,  p.  75  el  suiv.)  ;  M.  Saloraon  Kahn,  Les  Juifs  de  Montpellier  au 
XVIII'>  siècle  (t.  XXXIII.  p.  283  el  suiv.);  M.  Léon  Brunschvic^;^,  £es  Juifs  en 
Bretagne  [ihid.,  p.  88  el  suiv.);  NJ.  II.  Monin,  Les  Juifs  à  Paris  à  la  fin  de  l'ancien 
régime  (t.  XXili,  p.  85  et  suiv.). 

*  Voir,  dans  la  Eerue  des  Études  juives,  Le  chapeau  jaune  chez  les  Juifs  comtadins, 
par  M.  Jules  Bauer  (t.  XXXVl,  p.  53)  ;  ces  Juifs  ayaut  demandé  eu  1776  à  Olre  dé- 
barrassés du  chapeau  el  allégué  l'exemple  de  la  France,  qui  ne  l'imposait  pas,  l'au- 
torité ponlilicale  répondit  que  si,  en  France,  on  ne  les  astreignait  pas  à  le  porter,  c'est 
qu'ils  n'y  existaient  qu'en  contrebande. 


120  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

tant  souffert  était  chez  nous  à  peu  près  éteinte  :  «  La  question  juive, 
dit,  par  exemple,  M.  Roubin,  ne  fut  en  Languedoc  (au  xviii®  siècle) 
qu'une  dos  formes  de  l'éternelle  concurrence  entre  marchands 
indigènes  et  étrangers,  entre  défenseurs  de  vieux  privilèges  et 
partisans  de  la  liberté  industrielle  et  commerciale.  » 

C'est  précisément  cette  sage  et  loyale  conclusion  que  je  voudrais 
fortifier  par  un  coup  d*œil  rapide  sur  le  théâtre  français  du 
xviip  siècle.  La  matière  est,  je  crois,  neuve  encore.  Deux  spiri- 
tuels conférenciers  ont  traité,  l'un,  M.  Abraham  Dreyfus,  du  Jidf 
au  théâtre,  l'autre,  M.  Maurice  Bloch,  de  la  Femme  juive  dans 
le  roman  et  au  théâtre  *  ;  mais,  pour  ce  qui  regarde  la  France, 
l'un  et  l'autre  n'ont  cherché  que  dans  notre  siècle.  D'autre  part, 
M.  Herbert  Garrington,  dans  sa  thèse  intéressante ,  Die  Figur 
des  Juden  in  der  dramatischen  Liiteratur  des  XVI IL  Jahr* 
hunderis  (Heidelberg,  Pfeffer,  1897),  n'a  pas  interrogé  notre  ré- 
pertoire. 

Comparons  donc  ce  que  nos  comédies  du  xviii^  siècle  nous  ap- 
prennent à  ce  que  nous  enseigne  le  théâtre  des  nations  étran- 
gères. 

A  la  suite  du  roman  de  Gellert,  La  comtesse  suédoise,  et  sur- 
tout de  Nathan  le  Sage,  le  fameux  drame  de  Lessing,  un  certain 
nombre  d'auteurs  dramatiques  allemands  attaquèrent  l'animad- 
version  dont  souffrait  dans  leur  pays  la  communauté  Israélite.  En 
Angleterre,  Sheridan  et  Richard  Cumberland  combattirent  sur  la 
scène  pour  la  môme  cause.  Mais  il  est  manifeste  que  c'est  précisé- 
ment l'âpreté  tenace  du  préjugé  de  leurs  compatriotes  qui  provoqua 
leur  générosité.  La  philanthropie  qui  les  animait  souleva  plus  d'une 
réplique.  — Le  vieux  théâtre  allemand,  dit  M.  Carrington,  repré- 
sentait le  Juif  comme  un  fanatique  qui  égorge  des  enfants  pour 
employer  leur  sang  dans  des  cérémonies  religieuses,  tandis  qu'à 
partir  de  la  Réforme,  Israël  fut  ménagé  sur  la  scène,  parce  que  les 
protestants  s'en  prirent  de  préférence  aux  catholiques  et  parce 
qu'ils  avaient  une  vénération  particulière  pour  l'Ancien  Testa- 
ment. —  Toutefois,  je  remarque  que  les  protestants  d'Allemagne 
répétèrent  fort  souvent  le  reproche,  fréquemment  adressé  aux 
princes  dans  les  Mystères  germaniques,  de  tolérer  les  Juifs  ; 
c'était  aussi  un  de  leurs  griefs  contre  le  gouvernement  pontifical 
(Janssen,  V Allemagne  et  la  Réforme,  V,  501-2).  Puis,  sans  doute, 
dans  le  dernier  quart  du  xviii°  siècle,  les  auteurs  allemands  qui 
peignent  de  mauvais  Juifs  prennent  soin  quelquefois  d'assurer  que 

*  La  première  de  ces  conférences  est  du  l*""  mars  18S6,  la  deuxième  du  23  jan- 
vier 1892;  elles  ont  été  publiées  dans  des  volumes  supplémentaires  de  la  Revue  des 
Etudes  juives,] 


LR  JCIF  DANS  LA  COMÉDIE  AU  XVllI»  SIKC^R  121 

ce  sont  là  des  exceptions  qui  se  rencontreraient  aussi  parmi  les 
chrétiens;  mais  enfin,  en  1800,  on  jouait  encore  en  Bavière  une 
pièce  où  des  Juifs  sont  massacrés,  à  la  joie  de  l'auteur,  pour  avoir 
comploté  contre  des  chrétiens  et  surtout  outragé  des  hosties  ;  dans 
une  autre  pièce,  jouée  à  Berlin  en  1804,  on  les  peint  comme  des  usu- 
riers, et  l'on  demande,  dans  un  appendice,  qu'on  les  force  d'abjurer; 
dans  la  même  ville,  en  1815,  une  autre  pièce  les  montre  s'exploitant 
de  père  à  fils.  Quand  on  ne  cherchait  pas  à  entretenir  le  populaire 
dans  sa  haine  contre  eux,  on  s'appliquait  du  moins  à  l'entretenir 
dans  son  mépris  à  leur  égard  ;  on  faisait  d'eux  des  poltrons  ou 
des  sots  que  leur  entourage  bafoue.  Les  dramaturges  qui  les  dé- 
fendent n'attestent  pas  seulement  la  vivacité  du  fanatisme  qu'ils 
combattent  :  ils  le  ménagent  quelquefois.  Ainsi  Schroder,  qui, 
dans  son  remaniement  de  V Ecole  du  scandale,  marque  plus  ex- 
pressément encore  que  Sheridan  la  bonté  du  Juif  employé  au  re- 
dressement des  torts,  donne  une  teinte  comique  au  rôle.  Il  en 
était  de  môme  en  Angleterre,  où  les  preuves  du  mépris  public 
pour  les  victimes  de  l'oppression  séculaire  se  rencontrent  jusque 
chez  des  auteurs  qui  ne  travaillent  nullement  à  la  perpétuer; 
ainsi,  dans  VHérUicre^Q  Burgoyne,  une  coquette  se  dit  capable 
de  dérober  cent  cœurs  et  de  les  fondre  ensemble  comme  les  Juifs 
font  pour  les  objets  qu'ils  volent  afin  qu'on  ne  puisse  les  re- 
prendre  (IV,  1).  Dans  la  Belle  artificieuse  de  Miss  Cowley  (1780), 
un  personnage  déguisé  en  Juif  dans  un  bal  masqué  s'attire  ces 
quolibets  :  «  Va-t-en  bien  vite  à  Duke's  place  (où  il  y  avait,  pa- 
rait-il, une  synagogue)  prêcher  tes  confrères,  et  engager  la  tribu 
à  souscrire  pour  le  soutien  du  pays  aux  dépens  duquel  tu  t'es  en- 
graissé! Où  sont  vos  Josués  et  vos  Gédéons?  Eh,  ils  sont  tous 
changés  en  usuriers,  fripiers  et  colporteurs!  (IV,  1).»  A  la  scène 
suivante,  une  dame  raille  ce  faux  Juif  sur  son  embonpoint,  qui 
annonce  qu'il  est  lévite  :  a  Y  a-t-il  longtemps,  lui  dit-elle,  que  tu  te 
nourris  aux  frais  des  chrétiens,  mon  ami  ?  »  Gumberland  prête 
beaucoup  de  charité  à  son  Mosès  dans  Les  Juifs,  mais  il  fait 
aussi  de  lui  un  avare  qui  croit  devoir  acheter  par  des  redouble- 
ments de  parcimonie  le  droit  de  faire  du  bien  ;  à  la  suite  d'une 
libéralité,  il  se  promet  de  dîner  de  la  fumée  des  cuisines  d'un 
alderman  *. 

Il  est,  au  contraire,  frappant  de  voir  que  la  comédie  française 
s'interdit  presque  absolument  les  invectives  et  les  sarcasmes  aux- 
quels on  se  complaisait  encore  dans  le  théâtre  anglais  et  allemand. 

*  Je  m'appuie,  pour  ces  faits  empruntés  à  la  littérature  anglaise  et  allemande,  sur 
M.  Carringtoa;  j'y  ajoute  seulement  de  mon  fonds  ceux  qui  sont  tirés  de  Burgoyne  et 
de  Miss  Cowley. 


m  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Je  trouve  à  peine  çà  et  là  un  mot  dit  en  passant  qui  marque  du 
mépris  pour  les  Juifs  ;  et  encore  est-ce  d'ordinaire  un  terme  géné- 
ral qui  ne  vise  personne.  Le  baron  d'Esparville,  dans  le  Philo- 
sophe sans  le  savoir  de  Sedaine,  à  qui  les  négociants  n'ont  pas 
voulu  escompter  une  bonne  lettre  de  change,  dit  :  «  Tous  ceux 
que  j'ai  vus  jusqu'à  présent  sont  des  Arabes,  des  Juifs,  pardonnez- 
moi  le  terme,  oui  des  Juifs.  Ils  m'ont  demandé  des  remises  consi- 
dérables, parce  qu'ils  voient  que  j'en  ai  besoin.  »  (V,  4.)  Il  y  a 
loin  de  ce  mouvement  de  vivacité  aux  brocards  que  les  dames 
mêmes,  dans  d^autres  pays,  ne  trouvaient  encore  ni  trop  inhumains 
ni  trop  usés.  Riccoboni,  au  III^  acte  de  ses  Caquets  (1161),  a  rem- 
placé le  marchand  arménien  des  Peitegolezzi  délie  donne  de  Gol- 
doni  qu'il  imite,  par  le  Juif  Ménéchem,  et  il  faut  bien  avouer  que 
ce  petit  colporteur  à  barbiche  qui  vend  dans  les  cafés  des  lunettes, 
de  petits  oiseaux,  des  tire -bouchons,  des  boucles  d'Angleterre 
n'a  pas  fort  grande  mine  ;  il  parle  en  jargon.  «  Moi,  dit-il  à 
M.  Renaud,  son  compagnon  de  voyage,  qui  lui  demande  une 
adresse,  moi  connaît  tout  les  rues,  mais  non  pas  tout  le  bour- 
geois. Il  est  ici  le  port  d'où  part  les  bateaux  qui  vont  dans  le  Nor- 
mand. »  M.  Renaud  cherche  avec  anxiété  un  certain  Adrien  et  en 
donne  ce  motif:  «  Hélas,  il  y  a  douze  ans  que  je  lui  ai  confié  ce 
que  j'avais  de  plus  cher  au  monde.  »  —  «  De  l'argent?  »  dit  naï- 
vement Ménéchem.  Mais  on  ne  lui  impute  pas  la  moindre  pecca- 
dille dans  toute  la  pièce.  «  Vous  avez,  dit-il  à  M.  Renaud,  emporté 
votre  femme  et  laissé  votre  fille?  je  n'aurais  point  fait  cette  chose- 
là.  »  Mais  c'est  là  un  lazzi  traditionnel  sur  les  femmes.  Babet,  qui 
se  croyait  fille  d'un  batelier  et  qui  un  instant  se  croit  fille  de 
Ménéchem,  s'en  désole,  et  tout  le  monde  estime  que  ce  n'est  pas 
sans  motif;  mais,  et  ceci  est  significatif,  le  fiancé  de  Babet,  tout  en 
gémissant,  dit  à  Ménéchem  :  «  Ne  prenez  point  cela  en  mauvaise 
part,  monsieur!  mon  dessein  n'est  pas  de  vous  offenser.  »  Un 
confrère  de  Ménéchem,  le  colporteur  Ezéchiel,  dans  la  Mar- 
chande de  dijoux  de  Carmontelle  est  raillé  et  dupé;  mais  il  faut 
voir  comment  et  par  qui  :  il  offre  dans  un  café  des  montres,  des 
tabatières,  des  étuis  à  M.  de  la  Griffe  :  «  Monsieur  le  marquis,  dit 
le  colporteur,  achetez-moi  quelque  chose;  je  ferai  pon  marché  ». 
M.  de  la  Griffe  :  «  Oui,  et  tu  me  tromperas.  »  —  «  Non,  Monsieur, 
je  jure  sur  mon  honneur.  » —  «  Oui,  l'honneur  d'un  Juif.  y>  — 
—  «  Monsieur,  vous  croyez  pas  vous  autres;  mais  je  suis  pour 
tire  la  vérité.  »  —  «  Je  t'en  réponds.  Je  sais  bien  que  vous  êtes 
charmés  de  tromper  un  chrétien.  »  Mais  nous  sommes  déjà  infor- 
més que  M.  de  la  Griffe^  et  son  ami  M.  Bontour  sont  deux  filous  et 
qu'ils  viennent  d'envoyer  chercher  leur  digne  compère,  M.  Paffe, 


LE  JUIF  DANS  LA  COMEDIE  AU  XVIII»  SIKCLR  123 

pour  escroquer  le  pauvre  bijoutier  ambulant.  En  efïet,  M.  de  la 
Griffe  marchande  une  boîte  d'or,  tombe  d'accord  sur  le  prix,  que 
Bontour  trouve  fort  raisonnable,  tire  sa  bourse  après  avoir  em- 
poché la  boîte  ;  mais  Paffe  arrive  et  s'adressant  à  M.  de  la  Griffe  : 
«  Ah,  je  vous  trouve  donc  enfin,  monsieur!  »  Et  il  lui  donne  un 
soufllet,  dont  il  s'excuse  aussitôt,  prétendant  s'être  trompé,  puis 
s'enfuit.  M.  de  la  Griffe,  sensible  à  l'honneur,  met  l'épée  à  la  main, 
court  après  lui,  suivi  de  Bontour,  laissant  sa  bourse  sur  la  table. 
c  Pardi  1  s'écrie  Ezéchiel,  voilà  un  grand  malheur  que  cette  honnête 
gentilhomme  il  a  reçu  là  !  »  Il  ajoute  philosophiquement  :  :<  Si 
la  première  il  est  tué,  l'autre  il  viendra  toujours  ;  je  reste  ici 
auprès  de  son  bourse.  »  Mais  il  déclare  ne  pas  vouloir  touchera 
la  bourse,  qui  est  son  garant,  avant  le  retour  d'un  des  deux  ad- 
versaires. Naturellement  on  apprend  bientôt  que  ceux-ci  sont  les 
meilleurs  amis  du  monde,  et  la  bourse,  qu'Ezéchiel  ouvre  enfin 
devant  témoins,  ne  contient  que  des  liards.  Le  Juif,  on  le  voit,  a 
sinon  les  rieurs,  du  moins  les  honnôtes  gens  de  son  côté.  Dans 
la  farce  de  Boindin,  le  Port  de  mer  (1704),  Ilazaëi-Raza-Nimbrod- 
Iscarioth  Sabatin  est  un  usurier  qui  professe  qu'il  n'y  a  point  de 
don  père  de  famille  qui  ne  doive  faire  au  moins  une  ban- 
queroute en  sa  vie.  Il  en  prépare  une,  en  conséquence,  pour  doter 
sa  fille  Benjamine,  qu'il  veut  marier  malgré  elle  à  un  pirate; 
mais  l'amoureux  de  sa  fille  a  fait  main  basse  sur  les  pierre- 
ries d'un  oncle  ,  et  emploie  à  défendre  ses  prétentions  matri- 
moniales deux  valets  fripons ,  dont  un  galérien.  On  procède 
autrement,  Shakespeare  nous  l'a  appris,  quand  on  veut  faire  res- 
sortir les  vices  d'un  paria.  Le  Juif  portugais  Lemos,  dans  le  Pinto 
de  Lemercier  (joué  en  1800,  composé  deux  ans  auparavant)  est 
plus  naïf  que  ne  l'est  d'ordinaire  un  grand  négociant;  il  prend 
pour  une  marque  de  confiance  la  communication  de  nouvelles  qui 
courent  la  ville  ;  moyennant  un  intérêt  discrétionnaire,  il  prête  au 
duc  de  Bragance  l'argent  destiné  d'abord  à  payer  ses  ouvriers,  et 
se  soucie  peu  s'il  provoque  ainsi  une  mutinerie  contre  le  résident 
d'Espagne,  sur  qui  il  promet  de  rejeter  la  faute  (II,  6)  ;  mais  il  tra- 
vaille par  là  sans  le  savoir,  à  l'affranchissement  du  Portugal,  et 
c'est  surtout  ce  que  le  spectateur  voit  dans  la  scène.  Le  ban- 
quier Gripper  qui,  dans  la  Petite  école  des  Pères,  écrite  par 
Etienne  et  Gaugiran-Nanteuil  au  lendemain  de  la  Révolution 
(1802),  paraît  vêtu  en  incroyable,  qui  offre  un  tour  de  promenade 
dans  sa  voiture  et  un  dîner  pour  le  lendemain  aux  débiteurs  insol- 
vables dont  il  vient  de  saicir  l'hôtel,  est  un  Juif;  mais  les  dissi- 
pateurs qu'il  trouble  dans  leur  quiétude  ne  s'en  prennent  ni  à  sa 
race  ni  à  sa  religion.  Il  parle  et  agit  simplement  comme  tout  ami 


124  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

décidé  du  profit  et  du  divertissement  :  «  Ma  foi,  écoutez  donc!  dit- 
il.  A  Paris,  les  affaires  comme  les  affaires  et  les  plaisirs  comme 
les  plaisirs  !  on  fait  saisir  un  homme,  ça  n'empêche  pas  de  dîner 
avec  lui.  » 

Les  comiques  français  du  xviii«  siècle  font  même  souvent  comme 
leur  gouvernement  :  ils  feignent  d'ignorer  la  présence  des  Juifs. 
Plusieurs  de  leurs  personnages  doivent  être  des  Israélites  d'après 
leur  nom  et  leur  profession,  mais  rien  autre  dans  la  pièce  n'en 
avertit.  Un  personnage  nommé  Trapolin  dit  d'un  autre,  dans  Les 
agioteurs  de  Dancourt  (1710)  :  «  C'est  un  Juif,  un  altéré,  qui  sait 
bien  que  cela  [l'argent]  est  bon,  et,  pourvu  qu'il  trouve  à  gagner 
gros  avec  sûreté,  il  ne  refuse  point  de  bonnes  affaires,  ce  fripon- 
là.  »  (II,  5.)  L'homme  qui  s'exprime  ainsi  est  peut-être  un  chré- 
tien, d'autant  plus  qu'ailleurs  il  s'écrie  :  «  Est-ce  que  je  suis  un 
Juif,  un  Arabe  ?  »  (III,  9.)  Mais  ce  qui  est  certain,  c'est  que  le  prê- 
teur qu'il  qualifie  de  Juif  est,  non  Tusurier  Zacharie  dont  Trapolin 
est  bizarrement  qualifié  filleul,  mais  un  certain  Craquinet  dont  il 
est  lui  Trapolin  l'associé.  C'est  à  se  demander  à  quelle  communion 
appartient  Zacharie.  De  même,  les  noms  seuls  de  la  veuve  du  ban- 
quier Abraham  et  des  membres  de  sa  famille  nous  font  suspecter 
qu'AUainval  nous  introduit  par  son  Ecole  des  Bourgeois  (1728) 
dans  le  monde  Israélite,  car  leurs  travers  sont  simplement  ceux 
des  roturiers  enrichis  qui  veulent  s'allier  avec  la  noblesse  ruinée; 
encore  l'auteur  leur  ouvre-t-il  les  yeux  à  temps;  M™°  Abraham 
éconduit  enfin  l'impertinent  marquis  Moncade  à  qui  elle  allait 
donner  sa  fille.  Même  incertitude  sur  la  nationalité  d'Isaac  Gripon 
qui,  dans  une  comédie  de  Voltaire  (la  Femme  qui  a  raiso7i^  1749), 
déploie  un  peu  trop  de  zèle  pour  bien  établir  ses  enfants;  même 
incertitude,  dans  une  pièce  du  premier  Empire,  pour  l'âpre  mar- 
chand de  tableaux  Jacob  qui  hésite  longtemps  à  se  mésallier  en 
acceptant  pour  gendre  le  fils  d'un  peintre  de  mérite  {Laniara  ou 
le  peintre  au  caMret  par  Barré,  Radet,  Desfontaines  et  Picard, 
1809). 

La  réserve  de  Voltaire,  dans  la  pièce  que  nous  citions  tout  à 
l'heure,  est  d'autant  plus  frappante  qu'on  sait  que  dans  ses  ou- 
vrages de  polémique  religieuse,  il  malmenait  fort  les  Juifs;  elle 
prouve  que  c'était  à  la  Bible,  à  la  préface  de  l'Evangile,  si  je  puis 
m'exprimer  ainsi,  que  Voltaire  en  voulait  et  non  aux  Juifs  de  son 
temps.  Les  contemporains  ne  s'y  trompèrent  pas.  La  preuve  en 
est,  d'une  part,  que  les  quolibets  de  Voltaire,  qui  trouvaient  d'or- 
dinaire tant  d'écho,  ne  provoquèrent  aucune  recrudescence  de 
haine  ou  de  mépris  contre  les  Juifs,  d'autre  part  que  ce  fut  un 
prêtre  catholique,  l'abbé  Guénée,  qui  répondit  à  Voltaire  et  que 


LE  JUIF  DANS  LA  COMÉDIE  AU  XVIII»  SIÈCLE  12o 

ce  prêtre  rendit  aux  Juifs  de  son  temps  le  plus  honorable  té- 
moignage, les  plaignit  du  traitement  qu'ils  essuyaient  en  Alle- 
magne, admira  la  constance  avec  laquelle  ils  demeuraient  fidèles 
à  leur  foi.  L'accueil  fait  quelques  années  auparavant  par  l'A- 
cadémie des  sciences  et  par  le  gouvernement  à  l'invention  phi- 
lanthropique de  Jacob  Rodriguez  Pereire,  le  premier  instituteur 
des  sourds-muets ,  avait  témoigné  de  l'afifaiblissement  des  pré- 
jugés; non  seulement  cet  agent  dévoué  des  Juifs  portugais  de 
Bordeaux  avait  reçu  une  pension  et  le  titre  d'interprète  du  roi, 
pour  l'espagnol  et  le  portugais,  mais  des  ecclésiastiques  accep- 
taient qu'il  enseignât  le  catéchisme  à  ses  élèves,  tâche  dont  il  s'ac- 
quittait, de  l'aveu  de  ces  prêtres,  avec  loyauté  et  succès;  si,  plus 
tard,  l'opinion  oublia  Pereire  pour  l'abbé  de  l'Epée,  c'est  là  une 
de  ces  vicissitudes  que  la  légèreté  humaine  suffit  à  expliquer*. 
MM.  Abraham  Dreyfus  et  Maurice  Bloch,  dans  leurs  piquantes 
conférences,  ont  dit  avec  raison  que,  durant  notre  siècle,  les  dra- 
maturges avaient  souvent  prêté  à  la  femme  juive  un  charme  irré- 
sistible, fatal.  On  n'en  était  pas  encore  là  au  siècle  dernier,  mais 
on  s'y  acheminait.  Dans  le  Pmto  de  Lemercier,  le  zélé  agent  du 
duc  de  Bragance  croit  devoir  présenter  l'un  à  l'autre  un  cordelier 
et  un  capitaine  qu'il  a  enrôlés  dans  sa  conspiration  ;  mais  ces  deux 
auxiliaires  ne  se  connaissent  que  trop  :  «  C'est  toi,  cafard,  s'écrie 
le  capitaine.  —  C'est  toi,  damné  1  répond  le  religieux.  Un  excom- 
munié qui  fait  outrage  au  ciel  par  son  amour  pour  une  Juive  I  » 
Le  militaire  réplique  :  «  Un  moine  qui  se  hasarde  à  me  trouver 
chez  elle  !  »  Le  capitaine  refuse  d'entrer  en  affaires  avec  le  corde- 
lier, qui  de  son  côté  le  qualifie  d'hérétique.  Ils  se  menacent  l'un  de 
l'opinion  publique,  l'autre  du  Saint-Office.  Heureusement  Pinto 
affirme  que  le  capitaine,  en  allant  chez  la  Juive,  prétendait  seule- 
ment se  distraire,  boire,  la  consoler  de  quelque  chagrin,  et  que  le 
moine  entendait  uniquement  la  convertir.  Ils  en  tombent  d'accord 
et  la  conspiration  se  renoue  (I,  10).  Dans  les  Caquets  de  Ricco- 
boni,  lorsqu'un  personnage  s'étonne  que  la  gracieuse  Babet  soit 
fille  d'un  Juif,  un  autre  répond  qu'il  a  vu  de  jolies  Juives  à  Metz. 
Dans  le  Port  de  mer,  on  vient  de  définir  ainsi  Sabatin  :  a  Tiens, 
l'usure,  la  dureté,  la  défiance  et  la  fraude,  le  parjure  avec  quelques 
règles  d'arithmétique,  n'est-ce  pas  ce  qu'on  appelle  ici  M.  Sa- 
batin? »  L'interlocuteur  réplique:  «  Justement.  Mais,  en  récom- 
pense, la  générosité,  la  tendresse,  la  franchise  et  la  constance 
avec  une  taille  divine,  le  visage  le  plus  gracieux,  les  yeux  les  pUs 

*  Sur  J.  R.  Pereire,  aïeul  des  deux  célèbres  banquiers,  voir  le  livre  de  M.  Edouard 
Seguin,  Paris,  Baillère,  1847. 


126  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

brillants  du  monde  et  mille  autres  menus  attraits,  c'est  ce  qu'on 
appelle  ici  Benjamine.  » 

Dira-t-on  que  la  mansuétude  de  l'opinion  en  France  à  l'égard 
des  Juifs  n'était  qu'une  indifférence  expliquée  par  leur  petit 
nombre?  Sans  doute,  ils  ne  formaient  chez  nous,  d'après  de 
récents  calculs,  qu'une  faible  partie  de  la  population  puisqu'on 
pense  qu'à  Paris  ils  ne  devaient  pas  être  plus  de  sept  à  huit  cents  '. 
Mais  ils  ne  passaient  nullement  inaperçus;  on  ne  les  oubliait  en 
aucune  façon,  et  c'est  très  sciemment  qu'on  les  laissait  tranquilles. 
Mercier  les  croj'ait  très  nombreux  à  Paris,  erreur  qui  prouve  la 
liberté  d'action  dont  ils  jouissaient;  il  ajoute  en  effet  que,  sans 
avoir  de  synagogue,  ils  exerçaient  sans  entraves  leur  culte  à  huis 
clos  :  «  La  tolérance  de  l'administration  à  cet  égard,  dit-il,  ne 
saurait  aller  plus  loin.  »  Il  constate  que  leur  commerce  est  libre, 
que  leurs  mariages  sont  valides,  et  il  cite  cette  curieuse  anecdote  : 
un  Juif  allemand  venu  de  Hollande  et  propriétaire  de  la  seigneurie 
de  Péquigny,  à  qui  on  disputait  le  droit  de  nommer  aux  cures  qui 
dépendaient  de  sa  terre,  a  réclamé  devant  les  tribunaux  et  gagné 
son  i^rocès  [Tableau  de  Paris,  chap.  cxx)  *.  Voici  une  circonstance 
qui  prouve  combien  le  public  était  guéri  des  anciennes  haines.  Sous 
Louis  XV,  un  riche  Israélite  nommé  Dulys  voulut  faire  assassiner 
par  un  valet  un  violoniste  de  l'Opéra  qui  lui  disputait  le  cœur  de  la 
cantatrice  Pélissier;  le  coup  manqua;  on  pendit  le  valet^  et  Dulys 
qui  n'était  pas  alors  en  France  fut  traité  de  même  par  effigie  : 
l'occasion  était  belle  pour  le  fanatisme,  et  pourtant  c'est  à  la 
Pélissier  seule  que  les  chansonniers  s'attaquèrent  (v.  le  Chan- 
sonnier historique,  recueil  Clérambault-Maurepas,  V,  p.  253-6). 

La  vraie  cause  de  la  tolérance  dont  jouissaient  les  Juifs  était 
dans  l'esprit  philosophique  qui  grandissait  sans  cesse  chez  nous,  et 
j'ajoute  dans  la  générosité  naturelle  de  notre  nation;  j'en  trouve 
une  preuve  dans  l'histoire  même  des  derniers  abus  de  l'intolérance 
religieuse  en  France.  Car  il  est  remarquable  que,  si  nos  pères 
eurent  le  tort  d'applaudir  à  la  révocation  de  TEdit  de  Nantes  et  si, 
durant  la  première  moitié  du  xviii°  siècle,  on  continua  de  tour- 
menter les  Jansénistes,  du  moins  la  comédie  ne  s'associa  pas  à 
ces  injustices;  on  cite  quelques  pièces  de  vers  composées  contre 
les  protestants  3;  les  Jésuites  tournèrent  quelquefois  en  ridicule 
sur  leurs  théâtres  particuliers  les  derniers  adversaires  de  la  Bulle 

-  Article  précilé  de  M.  Monin. 

2  C'est  Liclmann  Calmer  ;  voir  Isidore  Locb,  Un  baron  juif  français  au  zvm'S'èrh^ 
dans  VÂnniiaire  dts  Archives  tsrai'lif(s,  2'  année,  p.  25-36. 

a  Lenient,  Poésie  patriotique  en  France  dans  les  temj)S  modernes,  Paris,  Hachette, 
1894,  t.  I,  p.  411. 


LE  JUIF  DANS  LA  CUMEDIE  AU  XVIU'  SIECLE  127 

Unigenilus^;  mais  les  scènes  publiques  respectèrent  les  sectes 
persécutées.  Une  autre  preuve  nous  sera  fournie  par  l'égal  apai- 
sement dont  témoignait  alors  à  l'égard  des  Juifs  le  théâtre  d'une 
autre  nation  latine  qui  recommençait  à  penser  en  lisant  nos  écri- 
vains :  ritaiie. 

Jadis  le  théâtre  s'y  était  moqué  des  Juifs,  sans  y  mettre,  d'ail- 
leurs, ràpreté  des  races  anglo-germaniques.  Dans  l'Arétin,  on  voit 
quelques  méchants  tours  joués  à  des  Israélites.  Par  exemple,  dans 
la  Cortigiana,  un  certain  Rosso,  qui  a  fait  tous  les  métiers  et  pro- 
fessé toutes  les  religions,  aperçoit  le  Juif  Romanello  qui  arrive  en 
criant  :  «  Ferraille  à  vendre  !  »  Il  lui  marchande  un  j  ustaucorps  pour 
lui  et  un  froc  pour  un  frère  qui  est  religieux;  il  prie  le  Juif  d'es- 
sayer ce  froc  pour  en  montrer  l'eifet.  Romanello  lui  fait  l'article. 
Rosso  se  mêle  de  le  convertir;  le  Juif  s'y  prête  fort  peu;  Rosso  lui 
vante  pourtant  tous  les  bénéfices  d'une  conversion  publique  :  «  Le 
jour  de  ton  baptême,  tu  auras  un  bassin  plein  d'écus;  Rome  en- 
tière courra  te  voir  couronner  d'olivier...  Tu  mangeras  du  porc. 
Plus  de  signe  rouge  sur  la  poitrine!...  Plus  d'enfants  pour  te 
poursuivre  à  coups  d'écorce  d'orange,  de  cosses  de  melon  et  de  ci- 
trouilles I  Ainsi  fais-toi  chrétien,  fais-toi  chrétien,  fais-toi  chré- 
tien 1  J'ai  voulu  te  le  dire  trois  fois.  »  —  «  Je  ne  veux  pas^  répond 
Romanello,  je  ne  veux  pas,  je  ne  veux  pas.  Tu  vois  que  moi  aussi 
je  sais  me  répéter.  »  Rosso  se  déclare  alors  quitte  avec  sa  cons- 
cience, et  il  y  paraît;  car,  pendant  que  le  Juif  se  retourne  sur  sa 
demande  pour  qu'on  juge  si  le  froc  tombe  bien  par  derrière,  Rosso 
s'enfuit  avec  le  justaucorps.  Romanello  le  poursuit,  mais  Rosso  le 
dénonce  à  une  patrouille  de  sbires  comme  un  moine  qui  sort  d'un 
lieu  suspect  et  qui  a  voulu  lui  faire  un  mauvais  parti.  Romanello 
s'écrie  qu'il  est,  non  pas  moine,  mais  Juif;  il  n'y  gagne  rien;  les 
sbires  l'injurient,  l'arrêtent  et  lui  promettent  une  bonne  cor- 
rection pour  lui  apprendre  à  outrager  la  religion  en  endossant  un 
froc.  Le  malheureux  finit  pourtant  par  avoir  satisfaction  ^  Mais, 
au  XVIII®  siècle,  le  Juif  ne  paraît  pour  ainsi  dire  plus  sur  le  théâtre 
italien.  L'hypocrite  don  Pilone,  dans  la  pièce  de  ce  nom  que  Gigli 
a  tirée  du  Tartufe  (1*711),  est  un  Juif  faussement  converti  au 
christianisme,  mais  on  ne  l'apprend  qu'à  la  fin  et  dans  le  moment 
où  l'auteur,  pour  accumuler  sur  lui  tous  les  péchés  de  la  création, 
nous  expose  d'une  seule  haleine  qu'il  a  fait  de  la  fausse  monnaie, 

^  Voir  la  Bibliotheca  scnptorum  societatis  Jésus,  au  mot  Bougeant. 

*  Acte  IV,  se.  i5,  16,  17;  V,  24,  23.  Voir  aussi  du  même  Arétin,  Il  Marescalto^ 
III,  i,  2.  Il  n'y  a  pas  non  plus  beaucoup  de  bienveillance  pour  les  Juifs  dans  un  épi- 
sode de  V Anfiparna&o  d'Orazio  Vecchi,  opéra-boulle  de  1597,  dont  on  trouvera  une 
analyse  sommaire  dans  les  Rivolutioni  del  teatro  musicale  italiano  d'Arleaga^  2*  édi- 
tion, Venise,  1785t 


128  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

épousé  cinq  femmes,  enlevé  des  religieuses,  et  qu'on  l'a  brûlé  en 
effigie  comme  sorcier.  Goldoni  mentionne  un  Juif  qui  prête  sur 
gages  à  la  troisième  scène  du  premier  acte  de  la  Famiglia  delV 
aniiquario ;  \\  ïiO\xs  Qïi  présente  ailleurs  un  autre  qui  veut  qu'on 
appelle  négoce  et  non  usure  l'intérêt  exorbitant  qu'il  tire  de  ses 
sequins  de  mauvais  aloi  ;  mais  nous  nous  arrêtons  à  peine  à  ces 
calculs,  occupés  que  nous  sommes  des  désordres  du  ménage  pa- 
tricien qui  recourt  à  lui  [Putta  onorata,  III,  1,  2.)  Si,  à  la  fin  de 
1798  et  au  début  de  1799,  le  peuple  applaudit  avec  fureur  11  ma- 
trimonio  edraico  qui  tournait  en  ridicule  les  cérémonies  juives, 
s'il  faillit  se  portera  des  violences  sur  les  Israélites,  ce  fut  surtout 
par  représailles  contre  des  farces  anti-catholiques  et  contre  le  gou- 
vernement des  Français  que  Souwaroff  allait  momentanément 
détruire;  le  cri  de  Francesi  ladri  !  alternait  avec  celui  de  Morte 
agli  edrei  *  /  Dès  avant  l'arrivée  des  Français,  la  tolérance  était 
déjà  passée  en  fait  dans  les  mœurs  de  l'Italie.  J'ai  même  cité 
ailleurs  le  passage  où  un  auteur  tragique,  Pierjacopo  Martelli,  a 
osé  mettre  dans  la  bouche  d'un  Juif  une  éloquente  malédiction 
contre  l'autodafé  où  son  père  a  laissé  la  vie  2. 

Donc  il  est  vrai  que,  si  certains  préjugés  haineux  régnent 
longtemps  sur  toute  la  terre,  ils  trouvent  dans  les  génies  divers 
des  peuples  des  auxiliaires  qui  les  fortifient  ou  des  adversaires 
qui  les  combattent.  Notre  ingénuité  a  été  toute  surprise  quand, 
après  nos  malheurs,  on  nous  a  appris  qu'en  Allemagne  l'école 
enseignait  aux  enfants  à  détester  la  France  et  qu'aujourd'hui 
encore  ce  charitable  enseignement  forme  un  des  points  sous-en- 
tendus des  programmes  de  l'éducation  germanique.  Mais  de  tout 
temps,  dans  les  races  du  Nord,  on  a  inculqué  dès  le  berceau  à  la 
jeunesse  les  haines  que  l'on  croyait  utiles.  Dans  une  des  comédies 
allemandes  analysées  par  M.  Garrington,  Der  i^edliche  Bauerund 
der  grossmïdige  Jude  de  Pauerbach  (Vienne,  1774),  un  enfant  qui 
a  reçu  un  thaler  d'un  Juif  demande  à  sa  mère  s'il  peut  l'accepter, 
car  le  maître  d'école  dit  à  ses  élèves  que  les  Juifs  ne  sont  au  monde 
que  pour  tuer  les  chrétiens,  qu'ils  les  exècrent  tous,  qu'ils  empoi- 
sonnent les  fontaines,  volent  et  mettent  cruellement  à  mort  les 
enfants,  et  qu'il  permet  à  ceux-ci  en  conséquence  de  leur  jouer 

tous  les  tours  possibles. 

Charles  Dejob. 

*  Sur  cet  incident,  voir  p.  120  cl  suiv.  du  livre  de  M.  Paglicci  Brozzi,  Sul  teatro 
giacohino  e  antigiacobino  in  Italia^  t7i)G-1S0i),  Milan,  Pirola,  1887;  j'en  dois  la  con- 
naissance à  M.  A.  d'Ancona,  de  même  que  pour  VAnfiparnaso  précité.  Sur  les  farces 
anti-catholiques,  voir  Giov.  De  Castro,  Milano  e  la  repuàblica  cisalpina^  Milan,  Du- 
molard,  1879,  p.  120  et  suiv. 

«  Voir  mes  Études  sur  la  tragédie^  Paris,  Colin,  1890^  p.  124-125i 


NOTES  ET  MÉLANGES 


LE   RESSENTIMENT   DE  GAIN 


Parmi  les  incidents  mentionnés  dans  les  premiers  chapitres  de 
la  Genèse  et  qui  arrêtent  Tattention  de  l'exégète,  le  récit  relatif  à 
la  colère  et  au  crime  de  Gain  (iv,  3  et  suiv.)  présente  de  grandes 
difficultés.  La  brièveté  du  récit  a  ouvert  un  vaste  champ  aux 
hypothèses,  et  les  commentateurs  paraissent  avoir  rivalisé  de 
conjectures  pour  expliquer  ce  crime  et  établir  une  relation  vrai- 
semblable entre  la  cause  et  Teffet.  Tous  sont  d'accord  pour  ad- 
mettre que  c'est  la  jalousie  qui  amena  la  chute  de  Gain,  mais  ils 
ne  s'entendent  pas  sur  l'origine  de  cette  jalousie.  Les  uns,  en 
vrais  policiers  modernes,  mêlent  une  femme  à  ce  drame,  une  fille 
d'Adam  et  d'Eve  qui  avait  épousé  Abel,  mais  était  aimée  passion- 
nément de  Gain  ;  d'autres  prétendent  que  la  rupture  entre  les  deux 
frères  eut  pour  origine  des  discussions  d'intérêt  [Genèse  R.,  xxii  ; 
YalUoia,  §  38;  cf.  PlrUè  de  R.  Eliézer,  xxi)  ou  des  discussions 
métaphysiques  [Targown  Yerousch.).  Mais  comme  le  texte  ne 
présente  aucune  trace  des  explications  de  ce  genre,  les  pasch^ 
tanim  les  ignorent  ;  ils  attribuent  la  querelle  de  Gain  et  d'Abel 
au  fait  que  Dieu  rejeta  l'ofi'rande  du  premier  et  accepta  celle 
du  second.  G  est  là  l'explication  traditionnelle  mise  en  avant  par 
Josèphe  {Antiquités,  I,  2,  1),  acceptée  par  les  premiers  com- 
mentateurs tels  que  Raschi  et  Ibn  Ezra,  et  suivie  par  les  mo- 
dernes comme  Fiirst,  Luzzatto  (arf  l.)  et  Geiger  [Nachgelassene 
Schriften,  IV,  223).  Gomme,  d'un  autre  côté,  les  professeurs  d'ins- 
truction religieuse  enseignent  cette  explication  à  leurs  élèves  et 
que  les  orateurs  sacrés  l'exposent  en  chaire,  nous  sommes  tous 
convaincus  que  Gain  a  tué  son  frère  parce  que  Dieu  l'avait  moins 
bien  accueilli  qu'Abel. 

Mais  comment  Gain  put-il  savoir  que  Dieu  se  prononçait  contre 

T.  XXXIX,  N«  77.  9 


130  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

lui?  D'anciens  et  de  modernes  commentateurs  ont  répondu  à  cette 
question.  Ils  affirment  qu'un  feu  descendit  du  ciel  et  consuma  le 
sacrifice  d'Abel,  mais  laissa  intacte  l'offrande  de  Caïn  [Pesikta, 
Raschi,  Ibn  Ezra,  Bahya  et  même  Fiirst  et  Luzzatto).  En  réalité,  la 
Bible  ne  parle  pas  plus  de  ce  mythe  prométhéen  que  de  la  rivalité 
d'amour  ou  des  discussions  économiques  et  philosophiques. 

Cette  explication  traditionnelle  présente  encore  d'autres  diffi- 
cultés qu'il  est  inutile  d'exposer  ici.  Mais  je  pense  que  nous  en 
avons  dit  assez  pour  prouver  qu'elle  doit  être  rejetée  et  remplacée 
par  une  autre,  plus  naturelle  et  plus  conforme  au  texte.  Voici  cette 
explication  :  L'acte  d'Abel,  qui  offrit  un  sacrifice  à  Dieu,  irrita 
Caïn.  Caïn  est  l'aîné  de  la  famille,  il  croit  que  lui  seul  a  le  droit 
d'offrir  des  sacrifices.  En  voyant  son  frère  suivre  son  exemple,  il 
en  est  fâché,  parce  qu'il  considère  son  acte  comme  une  audacieuse 
témérité,  comme  un  empiétement  sur  son  droit  d'aînesse.  Lisons 
maintenant  notre  texte  : 

bNT  ,nnn2}2  bxi  ban  bx  'n  ysi^^)  ';n3bn73i  isxi:  mnD373  Nnrj 
bK  'n  "i73N">i  .T«2D  "[bD-»-!  -IN72  "{"^pb  -in"«i  :  (n^'UJ  ^<b  ■inn2?3  bxi  VP 
t^b  DN1  ,nN;D  n->:2"«n   un  Nbn  ?*|"'Dd  nbss  !-i73b-i  "]b  nnn  nTsb  vp 

/iDT  ymn  r-iNZjn  nnob   a-aTi 

Ce  texte  ne  prouve-t-il  pas  avec  évidence  que  Caïn  jugea  qu'Abel 
commettait  une  impertinence  en  offrant  un  sacrifice  ?  L'expression 
Nin  ûa,  qui  serait  autrement  superflue,  est  mise  ici  pour  faire  res- 
sortir cette  idée;  "^"inn  Nbi<  û:^ '(■'N,  disent  les  Talmudistes  (^'^^/i^r 
/?.,  I,  9).  Elle  signifie  ici  que  l'acte  d'Abel  est  considéré  comme 
étrange*,  et  qu'il  lui  a  été  inspiré  par  le  désir  de  rivaliser  avec 
Caïn. 

Il  me  semble  que  les  Massorètes,  en  rattachant  les  mots  Y'^  bxi 
ïi:^tt3  Nb  inn373  bt^T  à  Vpb  nn"»"!,  ont  voulu  appeler  l'attention  du  lec- 
teur à  la  fois  sur  la  faute  de  Caïn  et  sur  la  conséquence  immédiate 
de  celte  faute,  conséquence  qui  est  mentionnée  avant  la  faute 
elle-même.  Que  Caïn  ail  commis  un  délit,  tout  !e  monde  l'admet. 
C'est  dans  ce  sens  que  les  parnphrnses  de  la  Bible  prennent  les  mots 
r\\x^  a-iUTi  Dî^  î^bn  (ïargoum  Onkelos  et  Yerousch.);  les  Midras- 
chim  et  les  commentateurs  postérieurs  traduisent  également:  «  Si 
tu  t'amendes,  je  te  pardonnerai  »  y^ny^^y  by  bmtD  "^^s  [Genèse  R., 
L,  c.  Cf.  Jean,  m,  12).  Mais  en  quoi  consistait  cette  faute?  Est-ce 

*  Elia  Wilna  [Addéret  Eliahou,  ad  l.]  l'ait  ceUe  même  remarque  :  D3  53^1 
D'^niD'^Srj  mi£737D  "n:2D  ■\"JU5  •  l^t  Abel,  bien  qu'il  lût  exempt  de  loblige- 
Vioo  d'apporter  des  prémices » 


iNOTES  KT  MELAiNGES  131 

dans  le  genre  d'offrande  qu'il  présenta  à  Dieu?  Certainement  non. 
Gain  était  agriculteur  et  offrit,  par  conséquent,  des  produits  du  sol 
(Cf.  Ihharim,  m,  ch.  7).  Lécole  qui  considère  la  foi  comme  supé- 
rieure à  l'acte  prétend  que  Caïn  manquait  de  foi  (Hébreux,  xi,  4), 
tandis  que  Josèphe  et,  après  lui,  les  Midraschim  {Genèse  R.,  Yal- 
hout,  §  35)  affirment  que  l'offrande  de  Caïn  elle-même  présentait 
des  défectuosités.  L'expression  nwn»  "^"idw  prouve,  selon  eux,  qu'il 
avait  choisi  des  fruits  de  qualité  inférieure  nbnsDn  1?3  ^  Maison 
voit  que  toutes  ces  explications  sont  forcées.  Et  pourtant,  du  mo- 
ment que  Dieu  a  rejeté  l'offrande  de  Caïn,  il  faut  bien  admettre 
qu'il  s'était  rendu  coupable  d'une  faute?  Laquelle? Il  s^était  mis  en 
colère. 

Quant  au  terme  n^o,  je  crois  qu'il  signifie  ici  «  supériorité,  pré- 
éminence», comme  ni^ïJ  nn*^  dans  Genèse,  xlix,  3;  cf.  Habaccuc,  i, 
7;  Psaumes,  lxii,  4,  etc.  C'est  ce  sens  que  lui  donnent  Nahmanide, 
Sforno,  Elle  Wilna,  Luzzatto.  Ainsi  Nahmanide,  après  avoir  cité 
les  exfdications  traditionnelles,  ajoute  :  rr^rr^  'y^'û'^n  ûû<  T\y*^  hv^ 
"iiD^rî  nnî^  -«D  ^■'HN  hy  n^uj  ^n-^  Y^-  ^^  Selon  moi  :  si  tu  agis  bien, 
tu  auras  la  supériorité  sur  ton  frère,  car  tu  es  l'aîné.  »  En  réunis- 
sant donc  ce  verset  au  verset  qui  précède  immédiatement  rrnn  ivzh 
yzii  "1^33  îiTobi  ^b,  il  faut  traduire  ainsi  :  «  Pourquoi  es-tu  irrité  et 
pourquoi  es-tu  attristé?  (Est-ce  parce  que  tu  t'imagines  que  ton 
frère  plus  jeune  veut  empiéter  sur  ton  droit  d'aînesse?)  Situ  agis 
bien,  tu  auras  la  supériorité,  et  si  tu  n'agis  pas  bien,  le  péché 
campe  à  la  porte  »,  c'est-à-dire  tu  tomberas  de  plus  en  plus  bas, 
même  si  tu  es  l'aîné. 

Notre  explication  écarte  les  difficultés  et  rend  toute  l'histoire 
claire  et  compréhensible.  La  colère  de  Caïn  (verset  5  &)  a  son 
origine  dans  la  rivalité  de  son  frère  (v.  4  a)  ;  comme  il  a  montré  de 
l'irritation.  Dieu  a  rejeté  son  offrande  (v.  5  à),  l'avertissant  que  sa 
situation  dans  le  monde  dépendra  uniquement  de  sa  conduite  (v.7). 
Mais  cet  avertissement  n'eut  aucune  influence  sur  l'esprit  irrité  de 
Caïn,  et,  comme  des  pensées  coupables  conduisent  à  des  actes 
criminels,  il  finit  par  tuer  son  frère  (v.  8)  et  devenir  errant  et 
fugitif. 

Il  résulte  de  ce  qui  précède  que  notre  texte  (v.  3-7)  doit  être 
traduit  ainsi  :  «  Dans  le  cours  du  temps,  il  arriva  que  Caïn  apporta 
des  produits  de  la  terre  comme  offrande  à  Dieu.  Abel,  lui  aussi, 

*  Arnheim  (éd.  Zunz)  et  Fùrst,  tout  ea  s'écartant  de  la  lettre  de  l'interprétation 
tarpoumo-midraschique,  en  conservent  l'esprit.  Ils  traduisent  ainsi  :  DN  N5n 
nt^'lD  D^Û'^n  :  «  N'eu  est-il  pa?  ainsi  ?  Tu  offres  de  beaux  présents  ou  lu  n'en  offres 
pas.  »  Mais  nous  objecterons  à  cette  traduction  qu'elle  suppose  une  ellipse  assez  grave, 
l'omission  du  mol  nn573. 


132  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

apporta  des  premiers  nés  de  son  troupeau  et  des  meilleurs.  Le 
Seigneur  agréa  Abel  et  son  offrande,  mais  il  n'agréa  pas  Caïn  et 
son  offrande,  parce  que  Caïn  était  en  colère  et  que  son  visage  était 
abattu.  Le  Seigneur  dit  à  Gain  :  Pourquoi  es-tu  en  colère  et  pour- 
quoi ton  visage  est-il  abattu?  Certes!  si  tu  agis  bien,  tu  auras 
la  supériorité  !  et  si  tu  n'agis  pas  bien,  le  péché  campe  à  la 
porte.  » 

WilmingtoD,  N.  C,  juin  1899. 

S.  Mendelsohn. 


UN   PASSAGE  DIFFICILE  DU  YALKOUT 


Dans  le  Yalkout,  sur  Ps.,  xc,  1,  il  est  dit  :  ^"^sî  'n'C^fzh  nbsn 
nbyi::^  nriN  nm  ..."«U"^n  2*<?:b  D^prx  dni  c^pbu^  ï-iTsb  •:;"•«  dx  D^pb^n 
r^b^y  ^"3  nc73  "^dît^p  n^o  '^V2^p  3:2  Nr^in  riTD  '^u^n  Nip:  r-ib:>53b 

Que  signifie  'iDi  ribiy  Y'n  rsoTû  ^ob^op  n-io  ■'i^np? 

M.  Low,  dans  l'ouvrage  de  M.  Krauss,  5.  v.  p^12^o,  veut  changer 
Y'n  ïi^72  "^Db^^p  n-^D  "^n^j-ip  n::  l'^ii-in  1112  en  D'^pnToo  "^i^np  n::  i-^Lim  'n'û 
n^DTou)  ""sb  et  traduit  :  «  Qu'est-ce  qu'une  mèche  allumée  en  face  de 
chandelles?  Pa?xe  que  Moïse  descendit  comme  mortel,  etc.  ».  Mo- 
dification et  traduction  ont  le  tort  de  ne  pas  bien  rendre  V^in, 
qui  ne  signifie  pas  «  mèche  allumée  »,  mais  primitivement  «  ci- 
trouille »  et  ensuite  «  luminaire  »;  cf.  Sa7ih.,  14  a  :  «"nnn  «rirna, 
termes  dont  les  dames  du  palais  impérial  saluèrent  R.  Abbahou 
et  qui  signifiaient  «  lumière  éclairante  »  ;  Be?-.  r.,  85  :  Nr^ia 
fc^nPNT  «  la  lumière  de  la  ville  »,  allusion  au  sens  de  yro. 

Au  lieu  de  "^Db^^p  n^o,  il  faut  donc  lire  :  "^n^sip  n-j  l^i:"ii  n73 
D3Db^Dp,  «  qu'est-ce  qu'une  (simple)  lumière  en  (ace  d'un  phare? 
Moïse,  le  mortel,  monte  vers  Dieu,  qui  est  tout  en  feu  et  dont  tous 
les  serviteurs  sont  de  feu.  »  (u:i<  "ibnso  rî"3prt  b^5<  rib^y  i"3  rîC)3 
TUN  mnO!n"i).  Moïse  est  la  lumière  en  face  de  Dieu  et  de  ses  anges, 
qui  ne  sont  que  du  feu;  Dieu  et  ses  anges  sont  comparés  à  des 
phares,  en  présence  desquels  Moïse  est  une  simple  lumière. 

De  même,  dans  Ps.  rahba,  sur  Ps.,  xc,  5,  il  faut  corriger  :  rm 
'iDi  i"n  rtu:7D  "^i^ip  n-j  pnTo-^o  riTo  pn?3"^o  ■«■iTDnp  n-j  'j'^inn  en  :  rj  i-^iria  i-m 
u:n  i^riTsi:?:"!  uiuS  ib-i^^D  n"3pn  bi:^  1rh^y  i"n  rvQi2  s^sob-^Dp  ■«iTDip. 

La  façon  de  lire  et  de  traduire  de  M.  LOw  est  viciée  par  le  sens 


NOTES  ET  MELANGES  ]Tj 

donné  à  l'^irna  et  parce  qu'il  méconnaît  le  terme  de  comparaison, 
ropposition  de  «  lumière  »  avec  le  feu  de  Dieu  et  des  animes.  Dans 
la  phrase  ;255<  n^n-iU5»T  lUwS  ibi^u:  n"nr7,  il  faut  orDi^op  en  face  de 
I''ii:i3.  Il  est  évident  que  l'Aggadiste  n'a  pas  pu  comparer  Dieu  à 
une  chandelle.  Moïse  «  le  mortel  »  est  une  (simple)  lumière  ;  Dieu 
et  ses  anges  sont  des  phares,  lûnb  ;dî^. 

J.   FURST. 


POÉSIES  DE  MOÏSE  IIAYYIM  LUZZATTO 

POUR    FÉLICITER    SES    AMIS    PROMUS    DOCTEURS    EN    MÉDECINE 

ET    EN    PHILOSOPHIE 


Parmi  les  hommages  qu'on  adressait  à  un  Juif  qui  avait  obtenu 
le  diplôme  de  docteur  en  philosophie  et  en  médecine  à  l'Université 
de  Padoue,  l'usage  s'était  établi  qu'un  poète  ami  le  félicitât  en  vers 
hébreux.  C'était  habituellement  un  sonnet,  que  les  imprimeries  de 
Padoue  ou  de  Venise  publiaient  sous  forme  de  feuilles  détachées 
ornées  de  dessins  et  de  festons.  On  s'f^st  peu  occupé  jusqu'ici  de 
la  bibliographie  de  ces  feuilles,  qui  jetterait  un  jour  intéressant 
sur  la  culture  des  Juifs  dans  ces  derniers  siècles. 

Beaucoup  de  noms  de  ces  poètes  nous  échappent,  parce  que, 
selon  la  mode  italienne,  ils  se  cachent  sous  des  abréviations  que 
savaient  déchiffrer  les  contemporains,  mais  qui  pour  nous  sont 
devenues  des  énigmes.  A  en  juger  par  les  noms  qui  nous  sont 
donnés  en  entier,  les  plus  notables  pratiquaient  cette  habitude 
d'adresser  des  vers.  Ainsi  Yesaya  Bassan  composa  une  poésie 
hébraïque  à  l'occasion  de  l'examen*  de  médecine  et  de  philosophie 
passé  le  14  août  1716  à  Padoue  par  Zebouloun,  fils  du  médecin 
et  homme  d'État  Israël  Conegliano.  Abraham  Baruch  Piperno 
a  fait  entrer  cette  pièce  dans  son  recueil  de  poésies  italiennes- 
hébraïques  *. 

Comme  ces  poésies  n'étaient  que  des  pièces  de  circonstance, 
leur  date  n'est  pas  indiquée.  Or,  elles  ne  présentent  de  valeur  qu'ù 


*  Cf.  Kaufmann,  Dr.  Israël  Conegliano,  p.  99,  note  1  et  IX. 

'  3;;^  bip,  9  a. 


i3\  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

la  condition  de  pouvoir  être  rapportées  à  leur  date  exacte.  Ainsi,  à 
côté  de  la  poésie  sur  Zebouloun  Gonegiiano,  j'ai  pu  déterminer  et 
utiliser  d'autres  de  ces  compositions,  comme,  par  exemple,  celles 
qui  se  rapportent  à  Saiomon  Gonegiiano  ^  et  au  médecin  franc- 
fortois  Benjamin  Wolf  Buschbaum  -. 

A  l'exemple  de  Yesaya  Bassan,  son  grand  disciple  Moïse  Hayyim 
Luzzato  fait  partie  de  ces  poètes  qui  célèbrent  les  succès  univer- 
sitaires de  leurs  amis.  Les  feuilles  détachées  sur  lesquelles  ont 
paru  ses  poésies  sont  très  rares.  Elles  ne  nous  renseigneraient 
pas,  d'ailleurs,  sur  leur  âge,  vu  qu'elles  ne  portent  aucune  date. 
Ce  n'est  que  par  les  immatriculations  de  l'Université  de  Padoue 
que  j'ai  pu  marquer  chronologiquement  Tordre  de  ces  poésies  et 
apporter  quelques  nouveaux  éclaircissements  pour  la  biographie 
si  obscure  de  ce  grand  poète. 

De  très  bonne  heure,  il  se  met  à  composer  des  pièces  de  ce 
genre.  Les  étudiants  venus  à  Padoue  des  pays  les  plus  éloignés 
recherchent  l'amitié  de  Luzzatto,  encore  tout  jeune.  Il  a  seize  ans 
à  peine,  quand  il  dédie  un  sonnet  à  Élie,  fils  de  Samuel  da  Con- 
sigli  2  de  Rovigo,  qui,  le  26  arùt  1723,  est  promu  docteur  en  phi- 
losophie et  en  médecine. 

Le  23  octobre  1724,  son  ami  Emmanuel,  fils  de  Raphaël  Calvo 
de  Livourne'*,  passe  son  doctorat.  Emmanuel,  qui  lui-même  culti- 
vait la  poésie  hébraïque,  a  dû  reconnaître  de  bonne  heure  le  talent 
de  son  ami,  avec  qui  il  resta  toujours  étroitement  lié.  La  poésie  que 
Luzzatto  composa  à  l'occasion  du  succès  d'Emmanuel  est  un  té- 
moignage de  leur  amitié. 

La  pièce  où  Luzzatto  compare  à  l'échelle  de  Jacob  les  échelons 
de  la  connaissance  franchis  par  un  de  ses  amis,  était  probable- 
ment adressée  à  Jacob,  fils  de  Moïse  Alpron  de  Rome  ^,  qui  avait 
obtenu  le  diplôme  de  docteur  le  20  août  1727. 

Un  sonnet  demeuré  inconnu  jusqu'ici  est  celui  que  Luzzatto 
écrivit  le  10  octobre  1727,  lors  du  succès  d'Élie  Gesana  de  Gorfou. 

De  l'année  où  le  malheur  commença  pour  Luzzatto  date  la  poésie 
où  il  a  célébré  la  promotion  de  Saiomon,  fils  d'isaac  Lampronti,  de 
Rome  (5  mars  1734). 

Le  sonnet  à  neuf  syllabes  sur  Élie  da  Gonsigli,  qui  est  une  des 


*  Voir  Dr.  Israël  Conegliano,  p.  7,  note  3  et  II. 

>  Mcnatsschrift,  XLI,  133. 

>  Cf.  Almanzi,  HTon  'Ù'^'Z,  HI,  U4,  note  61,  et  Carmoly,  Hist.  des  médecins  juifs, 
p.  241. 

*  Almanzi,  l.  c,  117,  note  60,  143,  et  Carmoly,  l.  c,  241  et  suiv. 

■^  Il  y  a  un  autre  Jacob  Alpron,  fils  d'Aron  Aiprou.  de  Zante,  qui  passe  son  doctorat 
à  Padoue  le  18  mai  1734. 


NOTES  ET  MÉLANGES  13S 

premières  productions  de  Moïse  Hayyim  Luzzatto,  df^cèle  d^jà  les 
qualit(^s  de  premier  ordre  qu'on  constate  dans  ses  œuvres  de  l'âge 
mùr.  La  langue  est  élégante  et  pur<i  de  toute  em{)liase  ;  le  poète 
se  joue  des  difïîcult<^s  de  l'hébreu.  «  L'enseignement  prodigué 
à  des  intelligences  bornées  ressemble  à  l'action  d'ensemencer  un 
terrain  pierreux,  qui  use  les  instruments  avec  lesquels  on  le  tra- 
vaille, sans  donner  de  moisson  ;  mais  l'esprit  de  Consigli  est  comme 
un  jardin  où  poussent  et  se  pressent  les  fleurs  de  la  connaissance. 
C'est  pourquoi,  au  jour  de  son  succès,  les  splendides  manteaux  de 
la  philosophie  et  de  la  médecine  le  drapent  et  les  sciences  se  ré- 
jouissent de  lui  ceindre  le  front  d'une  couronne  de  lauriers.  » 

Luzzatto  s'élève  au  plus  beau  ton  lyrique  dans  son  sonnet  à  Élie 
Cesana.  <(  De  tout  temps,  les  sages  ont  montré  que  l'homme  est  la 
proie  de  la  mort  et  que  c'est  un  vain  effort  de  vouloir  attribuer  la 
vie  au  mortel.  Décevantes  sont  toutes  les  sources  de  notre  sagesse, 
chaque  pas  que  nous  faisons  pour  mieux  savoir  glisse  dans  le  vide 
et  se  perd  dans  la  nuit.  Pour  Éiie  Cesana  seul  la  loi  de  la  nature 
semble  avoir  fait  exception.  Quand,  pareil  au  prophète  dont  il 
porte  le  nom,  il  prend  l'essor  vers  les  régions  de  l'inconnu,  l'im- 
pénétrable s'ouvre  à  ses  yeux  et  il  scrute  les  profondeurs  les  plus 
secrètes,  et,  pareil  à  Élie,  il  ressuscite  des  morts,  se  rend  maître 
des  maladies,  sans  avoir  besoin  de  les  longuement  soigner  ». 

David  Kaufmann. 


APPENDICE 


I 


tor  ,D-«-i-';2:rj  bipa  rin73u:  bnpn  "jt::^  bip  ,^^10,   Npn  ntst»  "^«rr 
^Di?2m  r-iiNH  Nm    nnbnn  "i"'5"«    ■'dt  ."«Tan   "'b    •;'«    \n-i73Ni  ,  "^732:^5 


♦inanx  r-in«N5 


nmisp"'' t<roT  ^i2y  nrnr  p 

yy^^^  p^-ib  t:mN  ^l'2^y  b^ 
nma^*»  ^nb  ûtn  bm  nny^a 


136  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

r-i\ann  ^î^d  -^r)  •^t-^T'  p  t*^b 

ï-i55':j  y^^5  "in  t-is'^T  r:72Dn 
mxnb  b-^yiz'D  t^iD-iTji  npn?: 

lUNirib  ^n  nps^"^  ««bn  û-'-^n  r;\a?3 


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ly:^^''  p^-ib  tL-^-^n  u;^Nb  r^^?3 

i::'nT"«  t<id  ib    cpnb  î3-«'::'>n 

i33b"^i  T^in^  liry.:  t^nv: 

nno  "TN7:  ^lî-^N  roinn  ms^r 

^pbn   tn^'}2  Nb  ^i"»-!^  p  t^^b 

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anp   '^mnb  r-rsn"'  nbb    ^-^n  rir 

"-inu:  ND"!"^  t<b   rr^n*^  în?2  )n 

sb  "ima  niniN 


I 


*  Sanhédrin,  Ma. 


BIBLIOGRAPHIE 


REVUE   BIBLIOGRAPHIQUE 

3'   TRIMESTRE  1899. 


{Les  indications  en  français  qui  suivent  les  titres  hébreux  ne  sont  pas  de  V  auteur  du  livre^ 
mais  de  l'auteur  de  la  bibliographie,  à  moins  qu'elles  ne  soient  entre  guillemets.) 


\.  Ouvrages  hébreux. 

Û''b©T^''  Ï1313  'D  Homélies  et  oraisons  funèbres  de  Samuel  Mohilewer  et 
de  Hildesheimer,  par  Hayyim  Ouri  Kahan.  Wilna,  impr.  Metz,  1899; 
in-80  de  40  p. 

D'^^bx  nj'l  Histoire  de  la  théologie  juive,  par  Simon  Bernfeld.  Varsovie, 
Société  Ahiasaf,  1897-1899;  in-8o  de  609  +  xx  p. 

^■^bl!>  "nas'b  "^"in  Noies  et  documents  sur  Thistoire  de  la  colonisation  juive 
en  Palestine,  par  Moïse  Leb  Lilienblum.  Varsovie,  Société' Ahiasaf,  1899; 
in-80  de  162  p. 

û''725;Drj  n3T  Novelles  sur  la  Bible,  par  Moïse  Galante,  éd.  par  Moïse  Stern- 
berg.  Podgorze,  impr.  Deulscher,  1898;  in-4o  de  30  p. 

pHit^  S'HT  Commentaire  sur  le  Akèdat  Yishak  d'Isaac  Arama,  par  Ephraïm 
Isaac  Preskel.  Wilna,  impr.  Metz,  1899;  in-4"  de  79  p. 

p"'^"ltl73  "^^îîTT^n  Novelles  sur  le  Semag,  Hilkhot  Pésah,  par  Joseph  Co- 
lon, e'd.  par  P.  Z.  Schwarlz.  Munkacs,  impr.  Kohn  et  Klein,  1899;  in-8° 
de  20  ff. 

"•nsi  MS'^M  '»15'm73  Midrasch  Echa  Rabbathi.  Sammlung  agadischer  Aus- 
legungen  der  Klagelieder  herausgegeben  nach  einer  Handschrift  aus  der 
Bibliolhek  zu  Rom  Cod.  J.  I,  4,  und  einer  Handschrift  des  Brilish  Mu- 
séum Cod.  2*089,  kritisch  bearbeitet,  commeutirl  und  mit  einer  Ein- 
leitung  versehen  von  Saloraon  Buber  in  Lemberg.  Wilna,  Romm, 
1899  ;  in-8°. 

C'est  une  bonne  fortune  pour  nous  chaque  fois  que  M.  Salomon  Buber, 
ce  chercheur  infatigable,  met  au  jour  quelque  trésor  caché  de  la  littérature 


138  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

agadique.  Aujourd'hui  ce  savant  nous  présente  un  midrasch  sur  les  Lamen- 
tations, lequel  porte  le  nom  de  Midrasch  Echa  Rabbati,  puur  se  distinguer 
d'un  midrasch  plus  couri,  le  Midrasch  Echa.  Eu  tête  du  véritable  Midrasch 
Echa  se  trouvent  trenie-six  Pelihôt  (coni'orméœeni  à  la  valeur  numérique 
du  mot  HD'^J<),  qui  sont  de  date  beaucoup  plus  récente  et  qui  sont  tirées  du 
Midrasch  Echa,  de  la  Pesikta.  de  Kohéiet  Rabba,  du  Sifra  et  du  Sitré,  ainsi 
que  M.  B.  nous  le  démontre  minutieusement.  —  M.  B.  dérive  avec  raison  le 
terme  de  «  Pelihôt  »  de  ce  fait  que  cuacune  des  irenie-six  sections  débute 
par  ces  mots  :  riDD  ^jlbs  "^Dl,  «  Rabbi  un  tel  commença  son  homélie  ».— 
Suivant  notre  auteur,  le  véritable  Miirasch  Echa  aiiraic  été  rédigé  en  Pa- 
lestine après  le  Talmud  de  Jérusalem,  au  iv*  siècle  de  l'ère  chrélienne.  Le 
rédacteur  de  ce  Midrasch  n''a  pas  connaissance  du  Talmud  de  Babylone,  et 
il  utilise  la  Mischna,  la  Tosetta,  la  Mechilta,  le  Sifra,  le  Sitré  et  le  Talmud 
de  Jérusalem.  —  Quelques  observations  de  détail  :  A  la  Peliha  10,  M.  B.  cor- 
rige justement  c<^31725n  en  N'^jl73in.  —  A  la  Pet.  o,  dans  la  phrase  713^^33 
n"lN  b^  D^obp  "^nbcnC,  il  taut  lire  D''Dn"^bp  au  lieu  de  Û'obp, 
comme  Sachs  a  corrigé,  1.  162  :  y.),r)pot  «  sort  ».  —  A  la  Pet.  12.  le  mot  6<ip"l 
de  Nnpnn  n-'D'nNS  b^^y  Nb  i<-172T  n^T^n  bD  doit  sa  traduire  .  Taifligé, 
l'attristé  ».  «  Celui  qui  entonne  un  chant  ue  produit  aucun  eiîet  sur  l'oreille 
de  l'affligé.  »  La  Peschito  traduit.  Gen.,  xxiii,  2,  TH'O  TDOb  par  'l^ip^lTab 
n-lO  bj',  et,  ibid.,  L,  10,  elle  rend  bns  1D0«  Ù'O  ■nDD"'T  par  mp-iNT 
^<^3'^  ^<n'^^p■^73  "llZn-  Le  moi  Ipl  a  pris  en  syriaque  le  seus  de  «  por- 
ter le  deuil  ».  —  A  la  Pet.  26,  ^L   B.  remarque  que,   dans  la  phrase  n^^p 

ibu:  iiLD-ipnopb  n-n  nniN  rî'c:^'»::,  Moussaiia  explique  pa'^p-iDp  par 

n3n?3T  bTIT  ttDi£.  A.  sa  suite,  il  a  pensé,  comme  aussi  Levy,  Kohut  et 
Krauss.  à  è^épxETOç,  exe^citus.  Cela  ne  peut  pas  être  exact,  car  l'^î  n'aurait 
pas  manque  en  tête;  et  puis  ce  serait  matériellement  taux,  vu  que  David 
n'avait  pas  destiné  Jérusalem  à  son  armée.  Cosi  le  mot  xaïaapoxoiTi'ov 
•  cour  royale  »  :  David  avait  fait  de  Jérusalem  la  résidence  delà  cour  royale. 
Dans  Schir  Haschir.  R.,  .s.  v.  WZ^'^  PTC^rî,  il  y  a  ibia  pa''P"I^P  bD  buS 
l'^T^yi  «  il  prit  toute  sa  cour  (c'est-a-àire  toutes  les  personnes  de  sa  cour) 
et  tous  ses  serviteurs  ».  Là  non  plus  le  contexte  n'admet  pas  le  sens  à'exer~ 
eitus.  —  Au  chap.  4  du  Midr.  Echa,  ces  mots  du  texte  p-1^  "jTIJ^  pST 
sont  suivis  de  cette  phrase  :  "nTa^?  nn5<  CS-'D  Ul^^yn  "ND  W^TZn  nDK 
ïn3'^"inm  O^npIOn.  il  faut  lire  D'^~lp"'OÏ^  •'  les  sicaires  »,  et  non  pas, 
comme  tait  M.  B.,  Û'^pnon  «  les  Sarrasins  ».  En  même  temps  qu'ils  brû- 
lèrent les  provisions  de  troment,  les  sicaires  rompirent  les  conduites  d'eau 
qui  partaient  de  la  source  d'Etham.  —  "jn^D  ne  vient  pas  de  aOpEiv  «  traî- 
ner »,  mais  de  aàpov  «  ordure  ».  «  Ils  disaient  :  i(J2Z2  TT1D  ^  K.  Abbia 
dit  :  T11D  est  grec  et  signifie  :  ordure  ;  donc  N73C3  imO  ■  ordure,  impu- 
reté ».  —  /.  Fûrst. 

tt5D5!l  nri73123  Livre  de  morale  en  jude'o-allemand,  éd.  par  J.  Krausz. 
2"  partie.  Pacs,  impr.  Rosenbaum,  1899;  in-8"  de  85  fif. 

Û'^bïin  'o  Les  Psaumes  avec  le  commentaire  Spy*^  nD^S,  pai- Jacob  Heil- 
pern.  Lemberg,  impr    Rohatyii,  1899  ;  in-8*'  de  60  tf. 

d'^5^3rr  •^'n^'D  n^l^Ton  mi:nwS3  U^-^nni  nmnn  'o  Traduction  hébraïque  de 
l'ouvrage  de  M.  Giidemann,  Geschichte  des  Krziehungsicesens  u.  der  Cultur 
der  abendlàndischen  Jiiden  wdhrend  des  Mittelatters,  par  A.  S.  Friedberg. 
3*^  partie  (correspondant  à  Geschichte. . .  dtr  Juden  in  Deutschland  loàhrend 
des  XIV.  und  XV.  Jahrhunderts).\ aTSo\ie,  Socie'té  Ahiasaf,  1899;  in-8** 
de  xii  -H  '^61  p. 

Comme  le  précédent  volume,  ceiui-ci  a  été  revu  et  augmenté  par  l'auteur, 
qui  a  ajouté  à  la  lin  divers  textes  empruntés  à  ses  Quellenschriftcn  zur  Ge- 
schichte des  Vnterrichts  u.  der  Erzxehung  bei  den  deutschen  Juden.  La  tra- 
ductiou  est  excellente  et  se  lit  avec  le  plus  grand  plaisir.  U  taut  féliciter  la 


BIBLIOGRAPHIE  139 

Société  Âhiasaf  d'avoir  fait  entrer  cet  intéressant  ouvrage  dans  sa  bibliothèque 
de  vulgarisation  hébraïque. 

•^SITa^nn  <  Tachkemonl  »  Jehuda  Alcharisi's  Makamen.  Kritischo  Ausgabe 
nach  zwei  Mss.  des  Brilish  Muséum  in  London,  nebst  lilerarbisloriscLen 
Erlauterungen  und  einer  biograpbischen  Einleitung,  von  A.  Kaminka. 
Varsovie,  Socie'té  Ahiasaf,  1895-1899;  ia-16  de  538  -f-  li  p.  (6^  partie  de 
b^lUî"'  "litnN,  collection  de  poésies  hébraïques). 

Ce  sout  des  bijoux  typographiques  que  ces  petites  éditions  des  poètes  du 
moyen  âge.  Format,  netteté  et  beauté  des  caractères,  perfection  île  l'impres- 
sion, tout  s'accorde  à  rendre  plus  attrayante  la  lecture,  de  ces  productions 
de  limagination  juive.  On  sait  le  charme  qui  se  dégage,  en  particulier,  de 
cette  imitation  de  Hariri.  Il  faut  louer  M.  Kaminka  de  n'avoir  pas  chargé  de 
notes  ces  pages  étinceiantes  d'esprit,  qui  prouvent  bien,  comme  le  voulait 
l'auteur,  que  Thébreu  se  f)lie  aisément  à  tous  les  usages.  L'introduction 
placée  à  la  fin  du  volume  et  Tiudex  sont  faits  avec  le  plus  grand  soin.  Peut- 
être  M.  Kaminka  exagère-t-il  en  disant  que  Harizi  est  le  premier  auteur 
qui  ait  écrit  de  nouveau  en  prose  biblique. 


2.  Ouvrages  en  langues  modernes. 

Abrahams  (I.)'  Chapters  on  Jewisb  literaLure;  Ihey  open  with  the  fall  of 
Jérusalem  in  the  year  TO  of  the  current  era,  and  end  with  the  dealh  of 
Moses  Mendelssohn  in  1786.  Philadelphie,  Jewisb  public.  Society  of 
America,  1899  ;  in-12  de  2*75  p. 

Adler  (Rev.  D').  The  Norlh  London  pulpit.  A  spécial  séries  of  sermons 
delivered  ai  the  Norlh  London  Synagogue.  N"  10  •  Religious  versus  poli- 
tical  Zionism.  Londres,  Alfred  J.  Isaacs,  1898  ;  18  p. 

Appel  (M.).  Predigt  bei  dem  Gottesdienst  zur  Eroffnung  der  zw^eiten  ordent- 
lichen  Tagung  der  Israël.  Landessynode  des  Grossherzogtums  Baden. 
Carlsruhe,  impr.  Malsch  et  Vogel,  1898  ;  10  p. 

Bâcher  (Wilhelm).  Die  alteste  Terminologie  der  jiidischen  Schriftauslegung. 
Ein  Wôrterbuch  der  bibelexegeliscben  Kuustsprache  der  Tannaiten. 
Leipzig,  Hinrichs,  1899  ;  gr.  in-B^^  de  viii  +  207  p. 

M.  Bâcher  ne  nous  laisse  pas  le  temps  de  souffler.  A  peine  avons-nous 
annoncé  le  dernier  volume  de  son  Agada  der  Amorder  (voir  Revue ^ 
t.  XXXVIIl,  p.  286),  qu'il  nous  faut  maintenant  signaler  à  l'admiration  du 
lecteur  un  nouvel  ouvrage,  non  moins  utile,  du  même  auteur.  C'est  un  dic- 
tionnaire de  tous  les  termes  techniques  employés  dans  l'interprétation  du 
texte  biblique  par  les  plus  anciens  commentateurs  juifs,  à  savoir  les  Tan— 
naïm.  Ces  termes  se  rencontrent  surtout  dans  les  Midraschim  halachiques, 
la  Mechilta,  le  Sifra  et  le  Sitré.  L'explication  qui  en  est  donnée  est  corro- 
borée par  des  citations  nombreuses  et  bien  choisies.  En  particulier,  M.  B. 
mérite  nos  félicitations  pour  son  soin  à  noter  les  diliérences  de  phraséologie 
des  deux  écoles  de  ces  interprèles,  celles  d'Ismaël  et  d'Akiha.  Est-il  néces- 
saire d'ajouter  que  la  science  grammaticale  et  lalmudique  de  Téminent  pro- 
fesseur de  Budapest  fait  de  chaque  article  une  petite  monographie  parfaite 
de  tout  point  ?  Cet  ouvrage  sera  un  instrument  de  travail  nécessaire  à  tous 
les  étudiants  et  même  aux  talmudistes  de  profession.  Nous  espérons  bien  que 
ce  n'est  là  que  le  commencement  d'une  série. 

Ball  iC.-J.).  Light  from  the  east,  or  witness  of  the  monuments  :  ah  in- 
troduction to  study  of  biblical  archaeology.  Londres,  Eyre,  1899  ;  in^i* 
de  314  p. 


1/iO  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Ba-SSet  (René).  Les  Apocryphes  e'thiopiens,  trad.  en  français.  IX.  Apo- 
calypse d'Esdras.  Paris,  Bibliothèque  de  la  haute  science,  1899  ;  in-8° 
de  139  p. 

Si,  comme  nous  en  exprimions  le  regret  dernièrement,  il  nous  faut  déplo- 
rer le  manque  d'une  traduction  française  des  Apocryphes  et  pseudépi- 
graphes  bibliques,  par  contre,  grâce  à  M.  René  Basset,  nous  pouvons  nous 
féliciter  de  posséder  maintenant  une  colleclioii,  excellemment  faite,  des  Apo- 
cryphes rédigés  en  éthiopien.  De  ces  ouvrages,  beaucoup  ne  nous  inté- 
ressent pas  directement,  car  ils  sont  chrétiens  ;  mais  plusieurs  autres  sont 
d'origine  juive,  certains  même  sont  les  seuls  vestiges  d'écrits  juifs  qui  se 
sont  perdus,  tels  que  le  livre  d'Enoch,  le  livre  des  Jubilés,  l'Ascension 
d'isaïe.  De  ceux-ci,  M.  Basset  n'a  encore  publié  que  la  traduction  de  l'As- 
cension d'Isaïe,  mais  il  nous  promet  pour  bientôt  le  complément.  Aux  écrits 
qui  sont  l'œuvre  de  Juifs,  mais  qui  nous  ont  été  conservés  en  d'autres 
langues,  appartiennent  le  Livre  de  Baruch, 'dont  la  version  française  ouvre 
la  collection,  et  le  4»  livre  d'Esdras,  dont  la  traduction  vient  de  paraître,  11 
est  heureux  qu'une  telle  entreprise  ait  été  confiée  à  un  savant  comme 
M.  Basset,  car  ce  n'est  pas  seulement  un  éthiopisant  distingué  qui  a  déjà 
fait  ses  preuves  par  diverses  publications  de  textes  geez,  mais  c'est  encore 
un  érudit  très  avisé,  au  courant  de  la  littérature^  comme  on  dit  en  Alle- 
magne, familarisé  avec  les  exigences  de  la  science  moderne.  Ou  pourra 
s'en  rendre  compte  dans  l'introduction  du  présent  fascicule,  qui  constitue 
une  substantielle  monographie  du  sujet.  M.  B.  commence  par  passer  en 
revue  les  diflérentes  versions  de  l'oriKinal,  écrit  en  langue  grecque,  d'après 
lui  :  syriaque,  éthiopienne,  arabes  (au  nombre  de  deux],  arméniennes  (l'une 
d'après  le  grec,  l'autre  daprès  le  latin),  enfin  latine  (deux  groupes  de  mss.. 
espagnol  et  irançais).  Il  passe  ensuite  à  l'examen  de  l'unité  de  composition  du 
livre.  Avec  raison,  il  rejette  l'hypothèse  de  Kabisch.  adoptée  par  M.  de  Faye, 
qui  y  retrouve  plusieurs  morceaux  indépendants,  d  a  ires  divers.  Puis,  après 
une  analyse  très  sobre,  il  rapporte  les  nombreuses  opinions  émises  sur  la  date 
'  de  la  rédaction  et  se  rallie  à  celle  qui  la  fixe  en  l'an  97.  C'est  aujourd'hui 
l'avis  qui  semble  prévaloir.  Ensuite,  il  traite  des  additions  qui  caractérisent  la 
version  latine  et  en  forment  les  chap  i-ii  etxv-xvi.  Les  premiers  oui  vu  lejour 
en  Egypte,  ou  ne  sait  quand  ;  les  autres,  comme  l'a  démontré  von  Gulschmidt, 
ont  été  écrits  après  260.  Le  tout  a  été  traduit  en  iatiu  a  ores  cette  date  et 
avant  saint  Ambroise,  Enfin,  le  dernier  paragraphe  de  l'introduction  est 
consacré  à  l'iulluence  du  livre  d'Esdras,  en  particulier  sur  le  Rituel.  — 
La  traduction  suit  le  texte  édité  par  DiUmaun;  elle  est  accompa^'-née  d'un 
commentaire  qui  signale  principalement  les  variantes  du  latin,  du  syriaque  et 
de  l'arabe;  le  fond,  comme  il  était  naturel,  y  est  peu  étudié.  Les  leçons  qui 
distinguent  la  ^ersion  éthiopienne  ne  sont  pas  très  importantes;  elle»  sont 
imprimées  en  italiques,  pour  la  commodité  du  lecteur.  Pour  que  cette  édi- 
tion se  suiTit  à  elle-même,  M.  Basset  a  eu  la  bonne  idée  d'y  joindre  la  tra- 
duction des  éditions  latines.  A  tous  ces  titres,  il  a  droit  à  notre  reconnais- 
sance, et  nous  espérons  pouvoir  bientôt  lui  adresser  les  mêmes  éloges,  quand 
il  nous  aura  donné  le  complément  de  sa  collection,  que  nous  attendons  avec 
impatience. 

Beitrâge  zur  Fôrderung  christlicher  Théologie,  hrsgg.  von  A.  Schlatler  u. 
H.  Creraer.  3.  Jahrgang,  1899;  4.  Heft.  Giilersloh,  Bertelsmann,  1899; 
gr.  in-8o.  (Gootient  :  Schlalter  :  Jochanan  ben  Zakkai,  der  Zeitgenosse 
der  Apostel). 

Bertholet  (a.).  Die  israelitischen  Vorstellungen  vom  Zustand  nach  dem 
Tod.  Vortrag.  Fribourg-en-Brisgau,  Mohr,  1899;  gr.  in-S*^  de  ;U  p. 

Bible  (La),  traduite  du  texte  original  par  les  membres  du  rabbinat  français 
sous  la  direction  de  M.  Zaioc  Kahn,  grand  rabbin.   Tome  l""  (Penta- 


BIULIOGKAFUIE  141 

teuque-Premiers  Prophètes).    Paris,   Durlachcr,    1899;    in-8"  de  viii  -|- 

486  p. 

Nous  avons  déjà  parlé  de  cette  nouvelle  traduction  française  de  la  Bible 
(t.  XXXVIII,  p.  306)  ;  elle  comptera  parmi  les  œuvres  les  plus  méritoires  du 
rabbinat  de  France.  Elle  l'emporte  incontestablement  sur  ses  devancières 
par  la  manière  rigoureuse  dont  le  texte  a  été  serré  de  près,  par  la  qualité 
solide  de  la  langue  et  l'agrément  du  style. 

Bible  (La)  de  la  jeunesse,  traduite  de  l'hébreu  et  abrégée  par  les  membres 
du  rabbinat  français,  sous  la  direction  de  M.  Zadoc  Kahn,  grand  rabbin. 
Tome  1^""  (Penlateuque-Premiers  Prophètes).  Paris  Durlacher,  1899;  in-8'* 
de  405  p. 

C'est  la  même  traduction,  mais  élaguée  en  certains  chapitres.  Les  sup- 
pressions ne  sont  pas  nombreuses  ;  peut-être  auraient-elles  dû  Têtre  davan- 
tage. 

Brown  (B.-H.)-  The  land  of  Goshen  and  the  Exodus-  Londres,  Stanford, 
1899  ;  in-8°  de  86  p.  +  2  cartes  +  4  planches. 

BûGHLER  (Ad.).  Die  Tobiaden  u.  die  Oniaden,  voir  Jahresbericht  (VI). 

Chajes  (H. -P.).  Proverbia-Studien  zu  der  sogenannten  Salomonischen 
Sammlung,  c.  x-xxii,  16.  Berlin,  Schwetschke  u.  Sohn,  1899  ;  in-8°  de 
VII  -]-46  p. 

Chauvin  (Victor).  La  récension  égyptienne  des  Mille  et  une  Nuits.  Bruxelles, 
Office  de  publicité,  1899;  in-8°  de  121  p.  (Bibliothèque  de  la  Faculté  de 
philosophie  et  lettres  de  l'Université  de  Liège.  Fascicule  VI). 

M.  V.  Chauvin,  professeur  a  TUniversilé  de  Liège,  s'est  déjà  fait  avanta- 
geusement connaître  par  sa  Bibliographie  des  ouvrages  arabes.  Ce  travail 
colossal  doit  embrasser  tous  les  ouvrages  arabes  ou  relatifs  à  la  langue  ou  à 
la  linërature  arabe  parus  depuis  1810.  Le  dernier  fascicule,  consacré  à 
Louqmane  et  les  fabulistes,  Barlaam,  Antar  et  les  romans  de  chevalerie,  est 
une  mine  de  renseignements  pour  les  amateurs  de  folk-lore.  La  présente 
étude  dont  nous  allons  rendre  compte  rentre  dans  le  même  domaine  ;  c'est 
un  chapitre,  ce  semble,  de  la  section  consacrée  aux  Mille  et  une  Nuits, 
Quel  point  de  contact  otfre-t-elle  avec  les  recherches  que  nous  poursuivons 
dans  cette  Revue^  c'est  ce  que  va  montrer  tout  de  suite  l'analyse  de  cette 
monographie.  On  a  déjà  reconnu,  dit  M.  V.  Chauvin,  que  bon  nombre  des 
récils  des  Mille  et  une  Nuits  ont  été  composés  en  Egypte  —  après  le 
triomphe  de  Tlslam,  cela  va  sans  dire.  Ils  sont  lœuvre,  d'après  M.  Ch.,  de 
deux  auteurs,  l'un  original  et  spirituel,  l'autre  sans  talent,  qui  aurait  re- 
manié et  peut-être  réédité  ce  recueil.  Ce  dernier  est  probablement  un  Juif 
converti  à  l'islamiïime.  Son  orijiine  est  attestée  par  les  éléments  de  prove- 
nance juive  qui  sont  entrés  dans  sa  rédaction,  et  sa  religion  par  l'ortho- 
doxie musulmane  de  ses  opinions.  Or,  précisément,  il  existe  dans  les  Mille 
et  une  Nuits  une  coUpction  de  dix-huit  contes  dont  le  caractère  juif  est  in- 
déniable, comme  l'a  montré  déjà  feu  J.  Perles  [Monatsschnft,  1873).  C'est 
ce  Juif  converti  qui  a  introduit  ce  petit  recueil,  qui  forme  bloc,  dans  la 
grande  collection.  D'autre  part,  certains  contes,  comme  celui  de  Djamasp 
et  la  reine  des  serpents,  qui  comprend  celui  de  Djanchah  et  de  Beloukia, 
sont  sortis  d'une  plume  juive  :  Beloukia  est  un  roi  Israélite,  il  y  est  ques- 
tion d'un  Berachia,  d'Adam,  de  Sdlomon  et  de  Jérusalem;  on  y  mentionne 
la  tradition  du  lleuve  sabbatique,  auprès  duquel  s'élève  une  ville  juive  ;  un 
Arabe  y  rend  visite  à  Harout  et  Marout  (Gog  et  Magog)  sous  la  conduite 
d'une  Juive,  etc.  Ces  contes  sont  de  la  même  main.  On  y  remarque  un 
grossissement  fatigant  des  faits,  la  reprise  fréquente  des  mêmes  épisodes, 
l'abus  du   merveilleux.  Voilà  qui  va    permettre  de   reconnaître   la  gritfe  de. 


142  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

noire  rédacteur  dans  d'autres  contes,  qui  n'ont  rien  de  juif.  On  découvrira 
particulièrement  qu'il  a  repris  à  sa  manière  des  histoires  dues  au  premier 
conteur  égyptien.  Son  travail  est  donc  celui  d'un  éditeur,  et  il  faut  lui  attri- 
buer la  recension  égyptienne  des  Mille  et  une  Nuits.  —  Quant  aux 
contes  juifs  qui  composent  la  petite  collection  dont  nous  avons  parlé,  ils 
sont  extraits  d'un  livre  de  Wahb  ibn  Mounabbih  (il  en  sera  question  plus 
loin),  qui  ne  peut  être  que  les  Choses  d'Israël,  ouvrage  destiné  à  prouver 
que  la  rétribution  divine  s'exerce  déjà  ici-bas.  Wahb  l'a  écrit  sur  le  modèle 
du  Hibbour  Maasiot.  «  Ce  livre  juif,  dit  M.  C.,  a  certainement  été  populaire 
chez  les  Israélites  et.  contrairement  à  ce  que  pense  M,  Lévi.  il  doit  avoir 
des  racines  dans  la  littérature  talmudique  ;  du  moins,  plusieurs  citations  que 
nous  donnons  des  contes  du  livre  des  Choses  d'IsraH  nous  semblent 
le  prouver.  Quant  à  la  date  du  livre  juif,  nous  la  croyons  très  ancienne.  H 
nous  semble  permis  de  penser  qu'il  était  connu  des  Juifs  qui  vivaient  autour 
de  Mahomet  et  qui  y  auront  puisé  certaines  historiettes  dont  on  retrouve  la 
trace  dans  le  Coran.  •  —  Maintenant  quel  est  cet  auteur  juif  de  la  recen- 
sion égyptienne?  Pour  répondre  à  celte  question,  il  faut  remarquer,  dit 
M.  C,  qu'il  y  a  eu  peu  de  Juifs  qui  ont  pris  le  turban,  d'autre  part,  que 
les  Juifs  ont  toujours  témoigné  peu  de  goût  pour  les  Mille  et  une  Nuits. 
Or,  il  existe  une  œuvre  juive,  PHisloire  du  Jérusalemite,  attribuée  au  fils  de 
Maimonide,  qui  est  traitée  tout  à  fait  à  la  manière  des  contes  des  Mille  et 
une  Nuits  :  voilà  notre  auteur  trouvé.  M.  C.  ajoute  qu'il  ne  se  dissimule 
pas  le  caractère  cotjjectural  de  ses  conclusions  ;  cet  aveu  arrête  les  objec- 
tions que  soulève  cet  échafaudage  d'hypothèses.  Mais  puisque  M.  C.  nous 
a  fait  l'honneur  de  nous  ciier,  pour  nous  contredire,  nous  prendrons  la  li- 
berté de  l'informer  de  l'erreur  dans  laquelle  il  est  tombé  eu  ce  qui  concerne 
le  Htbbour  Maasiot.  Ce  livre,  contrairement  à  ce  que  suppose  M.  C,  qui 
n'a  pu  le  lire,  puisqu'il  n'a  jamais  été  traduit,  est  un  recueil  factice  de 
contes  et  d'anecdotes  de  toute  espèce,  qui  circulaient  isolément  ou  par  petits 
groupes.  C  est  ainsi  que  dans  les  mss.  on  en  rencontre  tantôt  un,  tantôt  plu- 
sieurs. Ils  sont  entrés  par  parties  dans  diverses  collections  factices  de  Maa- 
siot, tels  le  ms.  d'Oxt'ord  que  nous  avons  analysé  ici  [Revue,  XXXIII, 
p.  47),  celui  du  Vatican,  n°  285  ;  tel  encore  celui  qu'a  édité  M.  Gasler 
[Eevîie,  XXXI V,  p.  153).  Un  livre  intitulé  Hibbour  Maasiot ^  la  littéra- 
ture n'en  connaît  pas  avant  l'imprimerie  ;  c'est  un  éditeur  qui,  utilisant 
un  ms.  où  se  trouvait  justement  cette  collection  factice,  s'est  avisé  de 
donner  ce  nom  à  cette  collection.  Il  ne  tant  donc  pas  dire  que  ce  livr/: 
était  populaire  chez  les  Israélites,  ni  qu'il  était  connu  des  Juifs  qui  vivaient 
autour  de  Mahomet;  certains  morceaux  qui  le  composent  actuellement 
l'étaient  peut-être  en  ces  temps  recules,  voilà  tout  ce  qu'il  est  possible  de 
conjecturer.  Le  caractère  i'actice  du  recueil  expliquera  la  confusion  commise 
par  M.  C.  à  propos  des  cinç  contes  du  Hibbour  Maasiot  que  nous  avons 
publiés  dans  M(^lusine.  «  Le  livre,  dit  M.  C,  doit  avoir  des  racines  dans  la 
littérature  talmudique.  »  En  etfet,  dans  ce  livre  figurent,  par  exemp'e,  l'his- 
toire d'Alexandre  et  du  roi  de  Cassia,  de  Salomou  et  Asmodée,  de  David  et 
Isbi  Benob.  Ayant  justement  consacré  une  étude  à  chacune  de  ces  légendes, 
nous  n'étions  pas  sans  savoir  que  diverses  parties  du  Hibbour  Maasiot  ont 
leurs  racines  dans  le  Talmud.  Ce  que  nous  avons  publié  dans  Méiusine, 
c'est  un  extrait  de  ce  recueil  ;  et,  en  présentant  ces  cinq  coules  aux  lecteurs, 
nous  laisions  appel  à  leurs  lumières,  avouant  n'eu  avoir  pas  trouvé  trace 
dans  le  Talmud  ni  le  Midrasch.  Cet  appel  lancé  il  y  a  près  de  quinze  ans 
est  resté  sans  réponse.  M.  René  Basset  a  publié  depuis  dans  la  Revue  des 
Traditions  populaires,  XIU,  p.  222,  un  texte  de  Kazwini  qui  est  identique  a 
l'un  de  ces  contes.  Kazwini  dit  qu'il  provient  des  Histoires  des  Israélites, 
c'est-à-dire  de  Wahb.  Cela  prouve  seulement  que  ce  conte,  et  non  pas  né- 
cessairement les  autres,  était  connu  déjà  au  vin»  siècle.  —  Les  Appendices  du 
travail  de  M.  C.  en  sont,  à  nos  3'eux,  la  partie  la  plus  instructive.  L'auteur  a 
réuni  tout  ce  qu'on  ptat  savoir  sur  ce  Wahb  ibn  Mouuabbih.  C'était  le  des- 
cendant d'un  officier  perse  établi  dans  le  Yémen  ;  il  vit  le  jour  dans  celte 


HIBLKJGRAFHIE  U3 

proviDce  au  vu*  siècle  et  mourut  âgé  de  90  ans  vers  728.  Son  père,  qui 
était  Juif,  avait  embrassé  l'Islam  du  temps  de  Mahomet;  d'après  un  au- 
teur, il  serait  né  lui-même  dans  le  Judaïsme.  Ce  fut  un  écrivain  très  fé- 
cond; on  lui  doit  en  particulier  une  Histoire  des  Prophètes  dont  il  reste 
des  (ra^meuts,  et  qui,  comme  on  le  sait,  raconte  la  vie  des  patriarches  en  se 
servant  des  broderies  du  Midrasch.  Son  livre  des  Choses  d'Israël  était  un 
recueil  d'anecdotes,  de  contes  et  de  légendes.  M.  C.  essaie  de  le  recons- 
tituer à  l'aide  des  ouvrages  qui  lo  citent  ou  paraissent  l'utiliser.  Une 
catégorie  de  ces  contes  est  forméo  de  la  petite  collection  des  Mille  et  une 
Nuits,  la  deuxième  comprend  ceux  que  les  auteurs  arabes  attribuent  for- 
mellemenl  à  Wahb,  enùn  une  troisième  peut  être  rapportée  à  cet  écrivain 
à  cause  de  leur  caractère  juif.  Chacun  de  ces  contes  est  résumé  et  accom- 
pagné d'une  notice  littéraire  oii  sont  indiqués  avec  soin  les  références.  Nous 
sommes  étonné  que  M.  C.,  toujours  si  bien  informé,  à  propos  du  serment 
éludé  (le  bàlon  creux)  nait  pas  indiqué  la  source,  qui  se  trouve  dans  le 
Talmud.  Ensuite,  M.  C.  reproduit  les  cinq  contes  du  Hibbour  Maasiot  que 
nous  avions  publiés  dans  Mélusine.  Enfin,  il  recherche  quel  est  l'auteur 
du  préambule  du  roman  d'Anlar.  Comme  ces  pages  contiennent  l'histoire 
d'Abraham  et  celle  du  chameau  borgne,  qui  sont  d'origine  juive,  il  en  con- 
clut qu'elles  sont  également  l'œuvre  du  pseudo-Maïmonide.  Toutes  ces  con- 
jectures sont  évidemment  risquées,  mais  elles  méritent  raitention,  et  c'est  à 
ce  titre  que  nous  les  recommandons  aux  savants  juils. 

Cheyne  (M.-A-)-  Das  religiôse  Leben  der  Juden  nacb  dem  Exil  Deutsch 
von  H.  Stocks.  Giessen,  J.  Ricker,  1899  ;  gr.  in-S*^  de  xii  -{-  264  p. 

Cheyne  (M.-A.\  The  book  of  the  prophet  Isaiah.  Critlcal  édition  of  the 
Hebrew  text,  arranged  in  cbronological  order  and  printed  in  colors,  ex- 
bibiting  tbe  composite  stiucluie  of  tbc  bock;  witb  noies.  Leipzig,  Hin- 
ricbs,  1899  ;  gr.  in-S^  de  206  p.  (Tbe  sacred  books  of  Ibe  Old  Testa- 
ment... uuder  tbe  editorial  direction  of  P.  Haupl). 

Dictionary  of  tbe  Bible,  dealing  witb  ils  language,  literature  and  con- 
tents; éd.  by.  J.  Haslings.  Vol.  2.  Feing-Kinsman.  Edimbourg,  Clark, 
1899  ;  in-8''  de  886  p. 

DÔLLER  (J  ).  Rbylhmus,  Metrik  und  Stropbik  in  der  bibliscb-bebrâiscben 
Poésie,  systemaliscb  dargestelitl.  Paderborn,  F.  Scbôningb,  1899;  gr. 
in-S**  de  vu  +  100  p. 

DuRiEa  (Louis).  Le  prolétariat  juif  en  Algérie.  Paris,  libr.  de  la  Revue  so- 
cialiste, 1899;  gr.  in-8«  de  23  p.  (Extrait  du  n'^  1"3  de  la  Revue  so- 
cialiste). 

Feuchtwang  (David).  Kanzelreden.  I.  Teil.  Francfort.  J.  Kauffmann,  1899; 
in-S»  de  218  p. 

Floexner  (C).  Ueber  den  Cbarakter  deralttestamentlicben  Poésie.  Beuthen, 
Haenel,  1898;  in-l»  de  23  p. 

Fluegel  (Maurice).  Tbe  Zend-Aresla  and  easlern  religions.  Comparative 
législations,  doctrines  and  rites  of  Parseism,  Brabmanism  and  Bud- 
dbism;  bearing  upon  Bible.  Talmud,  Gospel,  Korau,  tboir  Messiah- 
ideals  and  social  problems.  Baltimore,  H.  Fluegel,  1898;  in-8*^  de  224  p. 

Gaster  (M.).  Tbe  Cbroiiicles  of  Jerabmeel,  or  tbe  bebrew  Bible  bistori- 
ale,  being  a  collection  of  apocrypbal  and  pseudo-epigrapbical  books 
dealing   witb  tbe  bistory  of  tbe  world  from  tbe  création  to  tbe  deatb  of 


144  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Judas    Maccabeus,  translated,   logether  with    an   introduction,    critical 
notes,  a  full  index  and  five  facsimiles.  Londres,    Royal  asiatic   Society, 
1899  ;  in-8°  decxii  +  341  p.  (Oriental  translation  Fund,  new  séries,  IV). 
Mériterait  un  compte  rendu  détaillé. 

Gesenius  (W.)-  Hebraisches  und  aramàiscbes  Handwôrterbucb  ùber  das 
Alto  Testament-  In  Verbindang  mit  ProÊf.  Albert  Socin  und  H.  Zimmern 
bearbôitet  von  Prof.  D""  Frants  Bahl.  13.  Auflage.  Leipzig,  Vogel,  1899; 
gr.  in-80  de  xii  -f  1030  p. 

GiBSON  (E.-G.-S.).  The  book  of  Job,  with  introduction  and  notes.  New- 
York,  The  Macmillan  G^,  1899  ;  in-8°  de  xxx  -|-236  p. 

Haguenauer  (p.).  Les  Soubbotniky,  ou  une  secte  judaïsante  de  Russie. 
Epinal,  impr.  Klein,  1899;  in-8«  de  17  p. 

Hoonacker  (a.  van).  Le  sacerdoce  le'vitique  dans  la  loi  et  dans  rhistoire 
des  Hébreux.  Louvain,  Islas,  1899  ;  gr.  in-8o  de  x  -f"  465  p. 

Jahrbuch  fiir  jûdische  Geschichte  und  Literatur,  hrsgg.  vom  Verbande  der 
Vereine  fnr  jûdische  Geschichte  u.  Literatur  in  Deutschland.  II.  Band. 
Berlin,  Albert  Katz,  1899  ;  in-8»  de  265  p. 

Table  des  matières  : 

Martin  Philippson  :  Jahresrûckblick  ; 

Gustav  Karpeles  :  Literarische  Jahresrevue; 

H.  Steinthal  :  Die  Idée  der  Weltschôpfung; 

Wilhelm  Bâcher  :  Drei  Bibelûberseizungen  (celles  des  LXX,  de  Saadia 
et  de  Mendelssohn)  ; 

Martin  Schreiner  :  V^as  lehrten  die  Pharisaer  ? 

A.  Sulzbach  :  Die  Roraulussage  im  Taimud  und  Midrasch  ; 

AdoH  Schwarz  :  Die  Hochschulen  in  Palâstina  und  Babylon  ; 

A.  Harkavy  :  Anan,  der  Stilier  der  Karaischen  Secte  ; 

D.  Kaufmann  :  R.  Naltali  Cohen  im  Kample  gegen  Chajjua  (paru 
d'abord  dans  notre  Revue]  ; 

M.  Brann  :  Aus  Salomon  Munk's  nacbgelassenen  Briel'en  ; 

H.  York-Steiner  :  Maskir,  novelle  ; 

J.  Lowenberg  :  Die  schwarze  Riwke. 

Miiiheiluiigen  aus  dem  Verband  der  Vereine  fiir  jûdische  Geschichte  und 
Literatur  in  Deutschland. 

Jahresbericht  (VI  )  der  israelitisch-theologischeu  Lehranslalt  in  Wien  fur 
das  Schuljahr  1898-1899.  Vorangeht  :  Die  Tobiaden  u.  die  Ouiaden  im 
II.  Makkabaerbuche  u.  in  der  verwandten  jiidisch-hellenistichen  Lit- 
teratur.  Unlersuchung  zur  Geschichte  derJuden  von  220-160  u.  zur  jù- 
disch-hellenislichen  Lilteralur,  von  Prof.  D""  Adolf  Riichler.  Vienne,  Ver- 
lag  der  Israël. -theol.  Lehranstall,   1899  ;  in-8°  de  232  p. 

M.  Théodore  Reinach  rendra  compte  prochainement  de  celte  imporUnle 
élude. 

Kent  (C.-F.).  A  history  of  the  Jewish  people  diiring  Ihe  Babylonian,  Per- 
sian  and  Greek  periods.  New-York,  Scribner's  sons,  1899;  in-12  de  xx 
-I-  380  p. 

Kittel  (R.).  Profetie  und  Weissagung.  Vortrag.  Leipzig,  Hinrichs,  1899  ; 
gr.  in-8*'  de  25  p. 

KOKowSTOFF  (Paul  de).  Etsche  odin   rukopisny  fragment  ierusalimskaho 


BIBLIOGRAPHIE  145 

talmuda.   (Un  nouveau  fragment  manuscrit  du  Talmud   de  Jérusalem). 

Sainl-Pe'tersbourg,  impr.  de  l'Académie  impe'riale,  1898  ;  in-4''  de  p.  195- 

207  +2  facsimiiés. 

Reproduclioa  de  deux  feuillets  ms.  du  Talmud  de  Jérusalem,  provenant 
de  la  guenixa  du  Caire  {Baba  Kamma,  ^  a-^  c,  cl  6ô-6c).  Les  variantes  sont 
surtout  orlhograpbiques  ;  quelques-unes  sont  assez  curieuses  :  ^fi<  pour  I^È^ 
(mais  ir«)  ;  p  pour  ^^3  ;  i^b  pour  l^b  ;  en  général,  1'^  à  la  fin  y  est 
remplacé  par  le  n  :  'n'^n,  et  non  fc^lH;  "^Slbo  \r"«N  est  écrit  '^sVîD'ÛX. 
Plusieurs  citations  de  baraita  sont  différentes  de  notre  texte  et  d'accord  avec 
la  Tossella. 

Leimdôrfer  (D.).  Zur  Kritik  des  Bûches  Esther.  Francfort,  J.  Kauffmann, 
1899  ;  15  p. 

Mackie  (g. -m.).  Bible  manners  and  customs.  New-York,  Fleming  H.  Ré- 
veil, 1899;  in-12de  175. 

Magnier.  Critique  d'une  nouvelle  exégèse  critique.  Paris,  Lethielleux, 
1899  ;  in-16  de  91  p. 

Manassewitsgh  (B.).  Die  Kunst  die  hebrâische  Spracb  durch  Selbstunter- 
ricbt  scbnell  u-  leicht  zu  erlernen.  2.  neu  bearbeitete  Auflage.  Vienne, 
Pest,  Leipzig,  Ilartleben,  [1899]  ;  in-16  de  xiv  -f-  172  p. 
Fait  avec  beaucoup  d'intelligence. 

Marqoliouth  (D.-S  ).  The  origin  of  the  «  Original  Hebrew  »  of  Ecclesias- 
ticus.  Londres,  J.  Parker,  1899  ;  in-é"  de  20  p. 

YoirHevue,  t.  XXXVill,  p.  306,  et,  plus  haut,  p.  1. 

Neteler  (B.)'  Das  3.  und  das  4.  Buch  der  Kônige  der  Vulgata  und  des 
Urlextes  iibersetzt  und  erklârt.  Munster,  Theissing,  1899  ;  gr.  in-8°  de 
viii  +  338  p. 

NiGOL  (T.)-  Récent  archseology  and  the  Bible.  Londres,  Blackwood,  1899; 
in-80  de  346  p. 

Poppér  (William).  The  censorshlp  of  hebrew  books.  New-York,  the  Kni- 
kerbocker  Press,  1899;  gr.  in-S"  de  viii  -f-  156  +  plusieurs  fac-similés. 

RosENAGK  (L.)-  Die  Fortschritte  der  hebr.  Sprachwissenschaft  von  Jehuda 
Chajjiig  bis  David  Kimchi  (X.  bis  XIII.  Jahrhundert).  I.  Theil.  Francfort, 
J.  Kauffmanu,  1899;  gr.  in-S'^  de  viii  +  47  p. 

SCHEGHTER  (S.),  aud  Taylor(C.).  The  Wisdom  of  Ben  Sira.  Portions  of 
the  book  Ecclesiasticus  from  the  hebrew  manuscripts  in  the  Cairo  Ge- 
nizah  coUeclion  presented  lo  the  University  of  Cambridge  by  the  editors. 
Cambridge,  Uoiversity  Press,  1899  ;  in-4o  de  lxxxviii  -f  68  +  24  (texte 
hébreu)  p.  (plus  2  fac-similés  du  fragment  Lewis). 

Voir  plus  haut,  p.  1. 

Schwab  (Moïse).  Le  ms.  n"  1380  du  fonds  hébreu  à  la  Bibliothèque  natio- 
nale, supplément  au  Vocabulaire  de  l'Angelologie.  Paris,  Klincksieck, 
1899;  in-40  de  50  p.  (Tiré  des  Notices  et  extraits  des  manuscrits  de  la 
Bibliothèque  nationale  et  autres  bibliothèques,  t.  XXXVl). 

Description  d'un  ms.  du  niTO^D^  "^^"IW,  ouvrage  cabbalislique  de  Moïse 
Zacuto,  enrichi  d'additions  du  copiste,  qui  a  vécu  au  xviu»  siècle. 
T.  XXXIX,  no  77.  10 


146  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

SÈCHES  (Edgard).  La  concorde,  sermon.  Saint-Etienne,  impr.  de  la 
«  Loire  républicaine  »,  1898;  16  p. 

Steuernagel  (C.)-  Das  Buch  Josua,  ûbersetzt  u.  erklârt.  Goltingue,  Van- 
denhoeck  et  Ruprecht,  1899;  gr.  in-8°  de  118  p.  (Hand-Kommeotar  zum 
Alten  Testament,  hrsgg.  von  W.  Nowack). 

Stewart  (R.-L.).  The  land  of  Israël  :  a  lext-book  on  the  physical  and 
historical  geography  of  the  lîoly  Land,  emboyding  the  results  of  récent 
researchs.  New-York,  Fleming,  H.  Réveil,  1899;  in-12  de  352  p.  + 
17  cartes. 

Tyler  (Thomas).  Ecclesiastes.  An  introduction  te  the  book;  an  exegetical 
analysis,  and  a  t''anslation  with  notes.  A  new  édition.  Londres,  D.  Nutt, 
1899;  gr.  in-8«  de  xi  +  168  p. 

Usener  (H.).  Religionsgeschichtliche  Untersuchung.  3.  Theil.  Die  Sinlfluth 
sagen.  Bonn,  Cohen,  1899  ;  gr.  in-8°  de  x  -|-  279  p.  -|-  une  planche. 

Wellhausen  (J.).  Skizze  und  Vorarbeiten.  6.  Hefl.  Berlin,  G.  Reimer, 
1899,  gr.  in-8''  de  vin  +  260  p. 

Renferme,  entre  autres,  des  études  sur  les  Psaumes,  •  le  fils  de  l'homme  », 
la  littérature  apocalyptique,  les  verbes  faibles  en  hébreu.  Montre  que  le 
4«  Ezra  a  été  écrit  originairement  en  hébreu  et  qu'il  est  postérieur  à  l'Apo- 
calypse de  Baruch. 

Winckler  (h.).  Altorientalische  Forschungen.  2.  Reihe.  II.  Band.  2  Heft. 
Leipzig,  E.  Pfeiffer,  1899;  gr.  in-S^  de  p.  241-320. 

Contient,  entre  autres,  l'époque  de  l'arrivée  d'Ezra  à  Jérusalem,  notes  sur 
le  livre  de  Jonas,  de  Judith. 

Year  book  of  Central  conférence  of  American  rabbis,  1899  =  5659.  Cin- 
cinnati, impr.  May  et  Kreidler,  1899  ;  in-8°  de  218  p. 

Ziemssen  (0.)'  Die  Bibel  in  der  Geschichte.  Beitrâgc  zur  Bibelfrage  u.  zu 
einer  Geschichlsphilosophie  vom  Mittelpunkte  der  biblischen  Anschau- 
ung.  Gotha,  Thienemann,  1899  ;  gr.  in-8°  de  xi  -j-  120  p. 


3.  Périodiques. 

the  American  journal  of  semitic  languagesand  lifcrafures  (Chicago, 
trimestriel).  Vol.  XV,  1899.  =  =  N°  4,  juillet.  =  =  Morris  Jastrow  : 
Adam  and  Eve  in  Babylonian  literalure.  —  C  Lcvias  :  A  grammar  of 
the  Aramaic  idiom  conlained  in  the  Babylonian  Talmud.  III. 

The  Jcwish  quarterly  Review  (Londres).  =  =  Vol.  XI,  1899.  =  = 
N°  44.  G.  Margolioulh  :  Responses  of  Maimonides  in  the  original  Arabie. 
—  T.  K.  Cheyne  :  The  N.  Arabian  land  of  Musri  in  early  Ilebrew  tra- 
dition. —  Du  môme  :  Gleanings  in  biblical  criticism.  —  Miss  Nina  Da- 
vis :  Poetry,  the  âges  of  raan.  —  A.  Feldman  :  The  Bible  in  neo-hebraic 
poetry.  —  Morilz  Stcinschncidcr  :  An  introduction  to  tbe  Arabie  litei'a- 
ture  of  the  Jews  [suite].  —  L  Abrahams  :  Professer  Scliiirer  on  lifcundcr  the 
Jewish  law.  —  S.  Schechter  :  Geniza  spécimens.  A  letter  of  Chuahiel.  — 
W.  Bâcher  :  Notes  on  the  critique  of  the  text  of  the  Targum  of  the  Pro- 
phets.  —  D.  Kaufmann  :  Joseph  ibn  Vcrga's  extract  from  the  Cairo-Me- 


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a  logend  buscd  of  a  name.  —  Du  môme  :  Jcdidiah  of  Rimini,  or  Amadeo 
di  Moïse  de  Kecanati.  —  D.  S.  Margolioulh  :  A  Jewish-persian  law  report. 

—  Samuel  Krauss  :  «  Euilat  »  in  the  LXX.  —  E-  N.  Adler  :  A  hebrew 
ms.  illustrated  by  Giotto.  —  Du  môme  :  Lay  poems  of  Bagdad.  —  Cri- 
tical  notices. 

MoiiaCsscItrift  fiir  Geschichte   and    Wissenschaft   des   Jadonthiims 

(Berlin).  =  =  43«  année,  1899.  =  =  N^  6,  juin.  J.  Ziegler  :  Die  hagga- 
discbe  Exégèse  und  der  einfacbe  Wortsinn  {fin),  — J.  Guttmann  :  Aus 
der  Zeit  der  Renaissance  (Nicolas  de  Cusa,  Jacobus  Faber  Stapulensis, 
Bonet  de  Lattes,  Carolns  Bovillus).  —  A.  Feilchenfeld  :  Die  àlteste  Ge- 
scbichte  der  deutschen  Juden  in  Hamburg  {suite,  n°  7).  —  M.  Stein- 
schneider  :  Die  ilalieniscbe  Litteratur  der  Juden  {suite^  n°  7).  —  J.  Kron- 
berg  :  Die  Vertrelung  der  Dûniier'scben  Talmud-glossen  im  «  Israelit  ». 
=  =  N^  7,  juillet.  Zuckermandl  :  Nacblrag  zu  meiner  Tosefta-Ausgabe. 

—  Louis  Ginzberg  :  Die  Haggada  bei  den  Kircbenvàtern  u.  in  der  apo- 
krypbiscben  Litteratur  {suite).  —  H.  Brody  :  «  Gabirol  u.  Samuel  der 
Fùrst  ».  —  David  Kaufmann  :  Das  Huldigungsgedicbt  Salomon  Ibn  Gabi- 
rols  fiir  Samuel  ba-Nagid. 

Bévue  biblique  internationale  (Paris,  trimestrielle)  =  r=  8®  anne'e, 
1899.  ==  N°  3,  juillet.  Lagrange  :  Le  Sinaï  biblique.  —  D'  Rouvier  : 
Ptolc'maïs-Acé.  —  Lévesque  :  Les  mots  égyptiens  dans  l'bistoire  de  Jo- 
sepb.  —  Germer  Durand  :  Epigrapbie  palestinienne,  nouveaux  milliaires. 

—  Clermont-Ganneau  et  Lagrange  :  Gezer.  —  Vincent  :  Notes  arcbéolo- 
giques  et  nouvelles.  Les  fouilles  anglaises  à  Tell  Zakariya. 

Zcitsohrift  fur  die  alttestamentliche  Wissenscliaft  (Giessen,  semes- 
triel). ==:  19°  année,  1899.  =:=  N»  2.  W.J.Moulton  :  Ueber  die  Uener- 
lieferung  und  den  textkritiscben  Wertb  des  dritten  Esrabucbes.  —  Ed. 
Kônig  :  Syntactische  Excurse  zum  Alten  Testament.  —  Eberbard  Bau- 
mann  :  Die  Verwendbarkeit  der  Pesita  zum  Bucb  Ijob  fur  die  Textkri- 
tik.  —  Karl  Albrecbt  :  Zum  Lexikon  und  zur  Grammatik  des  Neuhe- 
brâiscben  (Tarsis  des  Mose  ben  Ezra).  —  Adolf  Bûcbler  :  Zur  Gescbicbte 
der  Tempelmusik  und  der  Tempelpsalmen.  —  Bacber  :  Bine  verkannte 
Redensart  in  Genesis,  20,  10.  —  Jacob  :  Bericbtigung  zu  Mandelkern's 
(grosser)  Konkordanz  ;  — '  Zu  Bacber's  Bemerkungen.  —  Kaban  :  Eine 
Erwiderung  auf  D»"  Mandelkern's  Pro  domo.  —  Bibliographie. 


4.  Notes  et  extraits  divers, 

-  =  La  condition  des  Juifs  dans  la  société  hellénique  et  romaine.  —  Nous 
analysons  maintenant  l'article  Judaei  que  M.  Théodore  Reinach  a  publié 
dans  le  Dictionnaire  des  Antiquités  et  que  nous  avons  annoncé  dans  le 
dernier  numéro  de  cette  Revue.  «  La  distribution  géographique  de  la  race 
des  Juifs,  le  régime  civil  auquel  ils  étaient  soumis  [chez  les  Grecs  et  les 
Romains],  l'organisalion  juridique,  la  condition  économique  et  sociale  de 
leurs  communautés,  les  succès  de  leur  propagande,  qui  a  préparé  Tavèue- 
ment  du  christianisme,  enfin  le  premier  contre-coup  du  triomphe  de  la 
religion  nouvelle  sur  leur  situation  légale,  tels  sont  les  sujets  i>  traités 
dans  cet  article.  —  I.  «  Le  premier  et  le  plus  remarquable  phénomène 


148  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

que  présente  le  judaïsme  à  Tépoque  gréco-romaine  est  sa  dispersion  à 
travers  le  monde  me'diterranéen.  »  M.  R.  attribue  à  celte  dispersion  pour 
cause  la  plus  notable  «  les  destinées  si  agitées  et  finalement  si  désas- 
treuses du  judaïsme  dans  son  pays  d'origine  »,  et,  à  ce  propos,  il  trace 
un  résumé,  excellemment  présenté,  de  la  situation  de  la  Judée  depuis  le 
retour  de  la  captivité  de  Babylone  jusqu'à  la  prise  de  Bétar  (135).  — 
II.  M.  R.  passe  ensuite  aux  causes  particulières  qui  ont  provoqué  la  dis- 
persion des  Juifs  dans  les  pays  grecs  et  romains.  Peut-être  ici  aurait-il 
fallu,  à  la  suite  de  Renan  et  de  Wellbausen,  indiquer,  au  moins,  l'attrac- 
tion qu'exerça  sur  les  populations  pauvres  la  fondation  de  l'empire  ma- 
cédonien :  l'Egypte  et  la  Syrie  furent  pour  elles  comme  V Amérique  en  ce 
siècle,  et  les  Juifs  qui  pliaient  sans  doute  sous  le  poids  des  impôts  de  la 
hiérocratie  dominante  émigrèrent  vers  ces  pays  neufs  tout  comme  les 
Grecs.  M.  R.  montre  surtout  l'action  exercée  sur  ce  mouvement  d'émi- 
gration par  «  les  révolutions  qui  se  succédèrent  en  Cœlé-Syrie  :  les  Juifs 
qui  avaient  lié  partie  avec  l'un  des  compétiteurs  aimaient  mieux  le  suivre 
dans  sa  retraite  que  de  s'exposer  aux  vengeances  du  vainqueur.  » 
«  D'autre  part,  pendant  les  guerres  du  iii^  et  du  ii®  siècle  av.  J.-C,  des 
milliers  de  Juifs  furent  faits  prisonniers,  réduits  en  esclavage  et  passèrent 
de  main  en  main  et  de  pays  en  pays  jusqu'à  ce  que  Taffranchisseraent  les 
délivrât. . .  Ils  trouvaient  facilement  des  coreligionnaires  disposés  à  payer 
leur  rançon.  Les  inscriptions  de  Delphes  nous  ont  conservé  le  souvenir 
d'un  de  ces  affranchissements  d'esclaves  juifs  à  prix  d'argent.  Le  célèbre 
rhéteur  Céiicius  de  Calacté  était  aussi  d'origine  un  esclave  juif.  » 
«  Le  Juif  affranchi,  au  lieu  de  retourner  en  Palestine,  se  fixait  ordinaire- 
ment dans  son  dernier  pays  de  séjour  et  s'y  groupait  avec  ses  frères  pour 
former  une  communauté.  D'après  le  témoignage  formel  de  Philon,  la 
communauté  juive  de  Rome  devait  ainsi  son  origine  à  des  prisonniers  de 
guerre  libérés;  l'importance  politique  qu'elle  avait  acquise  dès  le  procès 
de  Flaccus  (en  59  av.  J.-C.)  [et  que  Cicéron  exagère  probablement  à 
dessein]  ne  permet  pas  de  croire  qu'il  s'agisse  des  quelques  captifs  amenés 
par  Pompée  (63  av.  J.-C),  mais  bien  des  prisonniers  faits  dans  les 
guerres  antérieures,  en  Asie  Mineure,  par  exemple.  Les  grandes  insur- 
rections juives  sous  Vespasien,  Trajan  et  Hadrien,  avec  leur  issue  désas- 
treuse, jetèrent  sur  le  marché  des  myriades  de  captifs  juifs;  transportés 
en  Occident,  ils  devinrent  [peut-être]  le  noyau  des  communautés  d'Italie, 
d'Espagne,  de  Gaule,  etc.  A  l'émigration  politique,  à  la  vente  des  pri- 
sonniers de  guerre  s'ajoutent,  comme  sources  de  la  diaspora,  les  déporta- 
tions plus  ou  moins  volontaires  exécutées  par  divers  gouvernements,  soit 
pour  châtier  la  nation  au  col  rebelle,  soit  pour  peupler  des  cantons 
déserts  de  leurs  États...  Plusieurs  princes,  sans  recourir  à  des  moyens 
aussi  violents,  s'efforcèrent  avec  succès  d'attirer  des  colons  juifs  dans 
des  villes  nouvellement  fondées  en  leur  concédant  d'importants  privi- 
lèges :  ainsi  firent,  sinon  Alexandre,  du  moins  Séleucus  Nicator,  Ptolé- 
mée  Philadelphe,les  successeurs  d'Antiochus  Epiphane  s^à  Antioche),elc.» 
«  En  dernier  lieu,  il  ne  faut  pas  oublier  que  les  Juifs  étaient  une  race 
féconde.  La  Judée,  pays  assez  peu  fertile,  dut  être  promplement  surpeu- 
plée; il  fallut  essaimer...  »  Et  les  Juifs  émigrent  comme  les  Égyptiens, 
les  Syriens,  les  Phéniciens  qu'on  rencontre  alors  dans  les  mêmes  régions 
et  propageant,  comme  les  Juifs,  leurs  cultes  nationaux;  «  mais  le  Juif 
émigrait  plus  facilement,  parce  que  sa  religion  était  attachée  à  un  livre, 
non  à  un  lieu;  puis,  grâce  à  la  haie  que  des  pratiques  profondément  enra- 


BIBLIOGRAPHIE  149 

cinées  faisaient  autour  de  ses  croyances,  il  ne  s'absorbait  pas  dans  les 
populations   avoisinantes.  Une   propagande  religieuse  des   plus    actives 
faisait,  au  contraire,  de  ciiaque  petit  groupe  de  familles  juives  un  centre 
do    cristallisation   autour   duquel    venaient    s'agglome'rer    de    nombreux 
prosélytes  de  race  étrangère  dont  beaucoup  devenaient  à  la  longue  des 
juifs  véritables.  On  peut  dire  que,  si  le  prosélytisme  n'a  pas  été  le  but  de 
]a  diaspora,  il  a  puissamment  contribué  à  la  consolider  et  à  l'accroître.  » 
M.  R.  montre  ensuite,  d'après  les  auteurs  anciens,  que  le  judaïsme  était 
alors  répandu  dans  toutes  tes  parties  du  monde  civilisé.  Puis,  à  l'aide  des 
inscriptions,  dont  le  nombre  augmente  sans  cesse,  il  dresse  la  nomencla- 
ture de  toutes  les  provinces  et  localités  où  a  été  signalée  l'existence  d'une 
communauté  juive,   en  Asie,    Asie  Mioeure,  Europe    et  Afrique.   Cette 
partie  du  travail  de  M.  R.,  qui  ne  prête  pas  à  une  analyse  et  qui  a  dû  lui 
coûter  les  plus  laborieuses  rechercbes,  est  une  des  meilleures  et  des  plus 
utiles.  Quanta  fixer,  même  approximativement,  le  chiffre  de  la  population 
juive  dans  la  diaspora,  c'est  impossible,   et  à  cause  de  la  rareté'  des  ren- 
seignements et  parce  que  ces  renseignements  n'intéressent  qu'une  région 
limitée  dans  un   temps  déterminé.  Ils  étaient  nombreux  en  Syrie,  parti- 
culièrement à  Antiocbe,  en  Egypte,  où,  d'après  Philon,  ils  formaient  le 
huitième  de  la  population,  plus  tard  en  Cyre'naïque,  à  Chypre,  en  Méso- 
potamie. A  Rome,  dès  le  temps  d'Auguste,  ils  étaient  plus  de  huit  mille. 
—  III.  «  Cette  expansion   du  judaïsme  dans  le  monde  gréco-romain  ne 
laissa  pas  de  rencontrer  de  vives  re'sistances.  La  bourgeoisie  des  villes 
grecques  était   mal  disposée  envers  les  nouveaux  venus;   leur  particula- 
risme religieux  et  national,  leur  mépris  hautement   affiché  des    cultes 
grecs,  des  spectacles,  des  gymnases,  bref  de  tout  ce  qui  constituait  la  vie 
commune  d'une  cité  hellénique,  peut-être  aussi  la  crainte  secrète  de 
trouver  en  eux  des  concurrents  commerciaux,  enfin  l'efficacité   de  leur 
propagande  religieuse   contribuaient   à  l'impopularité   des  Juifs.    Dans 
certaines  villes,  comme  à  Parium  (et  non  Paros),  à  Traites,   des  décrets 
formels  interdirent  l'exercice  du  culte  et  la  pratique  des  rites  juifs-    On 
connaît   les  tentatives  faites  par  les  villes  d'Ionie  pour  l'expulsion  des 
Juifs,  l'hostilité  qui  régnait  entre  eux  elles  Grecs  dans  toute  la  Syrie,  les 
massacres  de  l'an  66,  les  boucheries   qui  éclatèrent   presque  au  même 
moment  sous  Trajan  en  Mésopotamie,  à   Chypre,   à   Cyrène,   la  guerre 
d'extermination  qu'à  Chypre  surtout  les  deux  partis  se  firent,  les  rivalités 
polémiques  de  plume,  les  explosions  populaires  dont  Alexandrie  fut  le 
théâtre.  Contre  cette  intolérance  jalouse  de  la  bourgeoisie  grecque,   les 
Juifs  trouvèrent  des  protecteurs  efficaces  dans  les  monarques   hellénis- 
tiques d'abord,  puis  dans  les  Romains.   On  peut  dire  que,  sans  les  vues 
larges  et   cosmopolites  des    diadoques,  qui    favorisaient,  dans  l'intérêt 
même  de  leur  pouvoir,  le  mélange  et  la  pénétration  des  races,  la  diaspora 
juive  n'aurait  pu  ni  se  fonder,  ni  se  maintenir.  »  Si  les  Romains  d'abord 
montrèrent  peu  de  disposition  à  recevoir  les  Juifs  parmi  eux,   «   Jules 
César,  qui  interdit  tous  les  coliegia  étrangers  à  Rome,  fit  une  exception 
formelle  en  faveur  des  Juifs,  dont  il  était  l'obligé  ».  La  suite  de  leur  his- 
toire sous  les  empereurs  est  connue.  «  A  aucune  époque,  Tantijudaïsme 
ne  fut  pour  le  gouvernement  romain  un  article  d'exportation.  »  «  De  très 
bonne  heure  Rome  avait  fait  alliance  avec  les  Juifs  de  Palestine  —  les 
premiers  de  tous  les  Orientaux  —  et  par  cette  alliance  plusieurs  fois  re- 
nouvelée, entretenue  à  prix  d'or,  elle  avait  contracté  l'engagement  moral 
de  de'fendre  la  liberté  religieuse  des  Juifs  émigrés  partout  où  s'exerçait 


150  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

son  influence.  »  «  En  recueillant  la  succession  de  la  Mace'doine,  de  Per- 
game,  des  Séleucides  et  enfin  des  Lagides,  Rome  hérita  de  leur  protection 
envers  les  Juifs  dispersés  contre  la  malveillance  et  les  tracasseries  des 
villes  grecques  passées  sous  sa  tutelle.  C'est  surtout  depuis  Jules  César 
qu'elle  prit  à  cœur  ce  devoir.  »  On  connaît  l'action  heureuse  des  Hérodes 
auprès  des  empereurs  en  faveur  des  Juifs  de  la  diaspora.  Les  Césars  se 
montrèrent,  en  somme,  équitables  envers  eux-même  après  l'insurrection 
de  66-70.  «  Le  judaïsme,  pendant  tout  l'Empire  romain,  resta  une  religion 
autorisée  [religio  Ucita)  et  même  singulièrement  privilégiée.  »  —  IV.  «  Voici 
en  quoi  consistaient  ces  privilèges  :  1°  Les  Juifs,  là  où  ils  étaient  légale- 
ment établis,  ne  pouvaient  être  expulsés  sans  une  décision  expresse  de 
l'autorité  suprême...  »  2° «Dans  leur  quartier,  ils  avaient  le  droit  d'élever 
une  ou  plusieurs  maisons  communes  qui  servaient  de  lieux  de  réunion 
pour  les  prières  et  la  lecture  de  la  Loi  :  c'étaient  les  synagogues... 
Quelquefois  les  autorités  elles-mêmes  désignaient,  et  sans  doute  con- 
cédaient gratuitement  le  terrain  où  devait  s'élever  la  synagogue... 
Quelques  synagogues  paraissent  avoir  possédé  le  droit  d'asile...  En 
dehors  de  leurs  synagogues,  dont  quelques  ruines  ont  subsisté,  les  Juifs 
avaient  des  cimetières  spéciaux  disposés  comme  les  catacombes  chré- 
tiennes... Synagogues  et  cimetières  étaient  placés  sous  la  protection 
.  des  lois.  Les  premières  furent  souvent  menacées  d'incendie  après  le 
triomphe  du  christianisme,  et  il  fallut  des  sanctions  pénales  énergiques 
pour  les  préserver. . .»  3»  aLe  culte  juif  comportait,  outre  les  réunions  quo' 
tidiennes  de  la  synagogue,  la  célébration  du  Sabbat  et  des  autres  fêtes, 
dont  quelques-unes  étaient  accompagnées  de  repas  en  commun,  l'observa- 
tion des  lois  alimentaires  et  de  pureté,  la  circoncision,  bref  l'ensemble 
des  coutumes  des  ancêtres.  Le  libre  exercice  de  ces  coutumes  était  garanti 
aux  Juifs  par  la  loi...  Une  seule  coutume,  la  circoncisioD,  fut  momen- 
tanément défendue  par  Hadrien,  et  cette  interdiction  fut  une  des  causes 
do  la  révolte  de  132.  Plus  tard,  on  se  contenta  d'interdire  la  circoncision 
des  non-juifs,  défense  qui  rentre  dans  un  autre  ordre  d'idées.  »  On  leur 
accorda  «  la  dispense  du  culte  des  empereurs,  qui  ne  fut  menacée  sé- 
rieusement que  sous  Caligula...  »  4°  «  Chaque  communauté  juive  est 
autorisée,  au  moins  tacitement,  à  se  donner  une  organisation  autonome, 
à  la  fois  administrative,  financière  et  judiciaire.  Il  ne  faudrait  pas  se 
hâter  d'en  conclure,  comme  on  l'a  fait  quelquefois,  que  les  aggloméra- 
tions juives  fussent,  en  pays  grec,  assimilées  de  plein  droit  aux  associa- 
tions religieuses  païennes  {thiases,  éranes)  qui  jouissaient  d'importants 
privilèges  juridiques. . .  Aucun  texte  officiel  ne  nous  montre  jamais,  en 
pays  grec,  les  communautés  juives  proprement  dites  officiellement  quali- 
fiées de  tkiases...  Leur  situation  était  plutôt  comparable  à  celle  des 
groupes  de  citoyens  romains  dans  les  cités  helléniques  :  elles  formaient, 
comme  ceux-ci,  un  petit  État  dans  l'État,  ayant  sa  conslilution,  ses  lois, 
ses  assemblées,  ses  magistrats  particuliers,  tout  en  jouissant  de  la  pro- 
tection générale  des  lois  de  la  cité...  Un  seul  texte,  de  provenance 
romaine,  semble  considérer  les  communautés  juives  comme  des  thiases, 
mais  ce  mot  traduit  ici  le  latin  collegia;  c'étaient,  en  tout  cas,  des 
collegia  imparfaits,  qui  ne  jouissaient  pas  de  la  personnalité  civile,  ni, 
par  conséquent,  du  droit  de  posséder  des  capitaux  ou  des  immeubles  : 
un  rcscrit  de  Caracalla  déclare  nul  un  legs  fait  à  Vuniversitas  des  Juifs 
d'Antioche.  »  —  Ce  derr.ier  point  est,  à  ma  connaissance,  rais  pour  la 
première  fois  en  lumière  par  M.  R.  —  «  L'organisation  intérieure  de  ces 


BIBLIOGRAPHIE  151 

petites  «  cite's  »  juives  était  calque'e  sur  celle  des  communes  grecques.  » 
Elle  a  été  trop  souvent  décrite  pour  que  nous  jugions  utile  de  résumer  ce 
chapitre,  dont  Schûrer  a  dcjà  fourni  toute  la  matière.  Nous  relevons 
seulement  un  détail  qui  nous  paraît  contestable.  <^  A  côté  de  l'archonte, 
chef  de  l'administration,  on  trouve,  dans  beaucoup  de  communautés,  un 
ou  peut-être  plusieurs  àpxiauvàywyoi,  chefs  de  la  synagogue  frabbins?)...  » 
La  parenthèse,  à  notre  avis,  doit  être  raye'e;  l'archisynagogue  correspond 
au  rosch  hakenérset,  qui  désigne  seulement  le  président  de  l'assemblée  de 
la  synagogue,  mais  non  le  rabbin.  Si,  d'après  Justin  Martyr,  l'archisyna- 
gogue proche  le  jour  du  sabbat,  c'est  au  même  titre  que  les  autres 
membres  de  la  synagogue.  Il  ne  fallait  pas  être  rabbin  pour  commenter 
le  texte  biblique.  —  5°  «  Les  communautés  juives  avaient  certainement 
le  droit  d'imposer  leurs  membres  pour  subvenir  aux  frais  communs,  par- 
ticulièrement à  l'entretien  de  la  synagogue  »,  mais  les  détails  manquent 
sur  la  nature  des  taxes  qu'elles  prélevaient.  La  principale  contribution 
était  celle  du  didrachme,  due  par  chaque  juif  adulte  du  sexe  masculin  et 
destinée  à  alimenter  le  trésor  du  temple  de  Jérusalem.  On  sait  que  les 
sommes  recueillies  ainsi  par  les  communautés  étaient  centralisées,  con- 
verties en  or  et  transportées  à  Jérusalem,  que  plusieurs  fois  des  villes 
grecques  et  le  gouvernement  romain  voulurent  arrêter  cette  exportation 
d'or,  que,  plus  tard,  César  et  Auguste  autorisèrent  de  nouveau  ces  en- 
vois. Après  la  destruction  du  temple,  Rome  décida  que  cet  impôt  serait 
perçu  par  elle  et  versé  au  trésor  de  Jupiter  Capitolin.  «  Telle  fut  l'origine 
du  flscus  Judaicus,  impôt  doublement  pénible  aux  Juifs  et  dont  la  percep- 
tion, par  des  procureurs  ad  hoc  {procuratores  ad  capitularia  Judaeorum)^ 
d'après  des  registres  où  devaient  s'inscrire  tous  les  circoncis,  donna  lieu, 
notamment  sous  Domitien,  aux  vexations  les  plus  odieuses.  Nerva  abolit 
les  abus  et  les  délations,  mais  non  l'impôt  lui-même,  qui  était  encore 
perçu  au  temps  d'Origène.  Il  y  a  lieu  de  croire  qu'il  fut  peu  à  peu  rem- 
placé par  des  exactions  régulières,  souvent  prélevées  à  l'improviste,  et 
qui  furent  définitivement  abolies  par  Julien;  à  cette  occasion,  il  détruisit 
les  registres  fiscaux  où  étaient  inscrits  les  Juifs.  »  —  6*^  «  Les  commu- 
nautés jouissaient  du  privilège  de  juger  elles-mêmes  leurs  affaires  liti- 
gieuses, d'avoir  leurs  propres  juges,  leur  propre  code,  ces  lois  mosaïques 
commentées  avec  tant  d'ardeur  par  les  rabbins,  et  que  Juifs  et  judaïsants 
étudiaient,  à  l'exclusion  du  droit  romain,  comme  Juvéual  le  constate  avec 
indignation...  En  matière  civile,  l'autonomie  des  Juifs  ne  s'appliquait 
en  principe  qu'aux  affaires  où  les  deux  parties  étaient  juives;  dans  un 
procès  mixte,  même  si  le  défendeur  était  juif,  le  tribunal  local  ou  romain 
e'tait  seul  compétent. . .  En  matière  pénale,  au  début  de  l'ère  chrétienne, 
les  magistrats  juifs  exerçaient  un  pouvoir  disciplinaire  étendu,  compor- 
tant le  droit  d'incarcérer  et  de  flageller;  mais  il  ne  semble  pas  que  leur 
juridiction  s'étendît  aux  délits  de  droit  commun,  et,  en  tout  cas,  elle  ne 
comportait  pas  le  droit  de  prononcer  des  sentences  capitales.  L'autono- 
mie juridique  du  rabbin  subsista  même  après  l'admission  des  Juifs  à  la 
cité  romaine;  ce  fut  alors  que  la  juridiction  suprême  du  patriarche  de 
Tibériade  prit  le  plus  d'importance;  Origène  prétend  qu'il  prononçait  et 
faisait  exécuter  des  sentences  de  mort,  mais  de  pareilles  décisions 
n'avaient  certainement  pas  une  valeur  légale  —  Origéne  lui-même  atteste 
qu'en  Judée  la  juridiction  criminelle  a  passé  aux  Romains  — ,  et  si  elles 
s'exécutaient,  c'était  en  secret,  comme  les  jugements  de  la  Sainte-Vehme 
,  au  moyen  âge.  Nous  verrons  que  le  Code  Théodosien  ne  laisse  aux  tribu- 


162  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

naux  rabbiniques  que  le  caractère  d'une  juridiction  arbitrale  et  Yolon- 
taire.  »  —  7°  «  Les  monarchies  hellénistiques  avaient  astreint  les  Juifs 
au  service  militaire  et  en  avaient  obtenu  parfois  de  bons  résullals.  Toute- 
fois le  service  en  campagne  était  difficilement  compatible  avec  l'observa- 
tion rigoureuse  des  lois  alimentaires  et  du  repos  sabbatique...  De  là 
résultaient  parfois  des  inconvénients. . .  Les  Romains,  malgré  l'assistance 
très  efficace  que  César  avait  reçue  des  Juifs  en  Egypte,  les  exemptèrent 
complètement  du  service  militaire,  peut-être  moyennant  une  indemnité 
pécuniaire.  —  V.  «  Si  les  Juifs  étaient  des  perigrini  privilégiés,  ils  n'en 
étaient  pas  moins  des  perigrini,  c'est-à-dire  privés  de  tous  les  droits  et 
honneurs  auxquels  donnait  accès  la  qualité  de  citoyen  dans  les  villes 
grecques  comme  dans  l'État  romain;  outre  tous  les  impôts  de  droit  com- 
mun, ils  étaient  soumis  aussi  à  des  taxes  spéciales,  dont  les  citoyens 
e'taient  exempts...  Toutes  ces  entraves  inspirèrent  aux  Juifs  l'ambition 
d'obtenir  le  droit  de  cité. . .  Mais  cette  prétention  impliquait  une  contra- 
diction... parce  que  les  Juifs  voulaient  cumuler  les  droits  de  citoyens 
avec  le  maintien  de  leurs  prérogatives...  En  outre,  la  cité  antique  re- 
posait essentiellement  sur  l'adoration  de  dieux  communs  à  tous  les 
habitants  de  la  cité,  et  c'est  à  quoi  les  Juifs  ne  pouvaient  évidemment 
consentir  sans  renier  leur  raison  d'être.  »  Ce  chapitre  tranche  définitive- 
ment, à  notre  sens,  une  des  questions  les  plus  difficiles  de  l'histoire  des 
Juifs  dans  la  diaspora.  «  En  pays  grec,  dans  les  villes  qui  avaient  des 
institutions  républicaines  —  les  seules  où  le  titre  de  ciloj^en  eût  une 
valeur  réelle  —  les  aspirations  des  Juifs  paraisssnt  être  demeurées  sans 
résultat,  au  moins  jusqu'à  la  conquête  romaine;  les  assertions  contraires 
des  historiens  juifs  [dire  plutôt  de  Josèphe]  ne  doivent  être  accueillies 
qu'avec  la  plus  grande  méfiance...  A  Cyrène,  les  Juifs  prétendaient 
avoir  obtenu  des  Ptolémées  Visonomia,-  mais,  sous  cette  expression  vague, 
on  ne  peut  entendre  que  Visoieleia,  l'égalité  devant  l'impôt,  qui  leur  fut, 
en  effet,  confirmée  par  Agrippa...  Il  y  a  un  peu  plus  d'apparence  dans 
l'assertion  de  Josèphe  d'après  laquelle  Scleucus  Nicalor,  dans  les  villes 
fondées  par  lui,  y  compris  Antioche,  aurait  accordé  aux  Juifs  le  droit  de 
bourgeoisie  (itoknzloL)  et  l'égalité  sociale  (laoTi|ji(a)  avec  les  Hellènes  et  les 
Macédoniens. . .  Malgré  tout,  ces  privilèges  ne  paraissent  pas  avoir  com- 
pris la  participation  au  gouvernement  de  la  cité...  Pareillement  à 
Alexandrie...  Philon  met  une  certaine  affectation  à  déclarer  que  les 
Juifs  considèrent  comme  leurs  «  véritables  patries  »  les  pays  où  ils 
habitent,  et  il  est  possible  que  le  droit  de  cité  véritable  ait  été  accordé 
individuellement  à  certains  Israélites  —  saint  Paul,  par  exemple,  se 
disait  citoyen  de  Tarse  —  mais  nous  n'avons  aucun  exemple  d'une  con- 
cession collective  de  ce  genre.  A  défaut  du  droit  de  cité  grecque,  les 
Juifs  se  rabattirent  sur  le  droit  de  cité  romaine,  qui  conférait,  même  en 
pays  grec,  de  grands  avantages.  Ici  ils  furent  plus  heureux...  Cepen- 
dant le  Juif  devenu  citoyen  romain  ne  paraît  pas  avoir  possédé  le  jus 
honorum,  et  il  en  était  de  même  du  Romain  d'origine  qui  embrassait  la 
religion  juive.  La  loi  ne  fut  modifiée  sur  ce  point  que  par  une  constitu- 
tion de  Sévère  et  de  Caracalla...  Dès  cette  époque,  la  notion  du  droit 
de  cite  local  s'était  fort  obscurcie  dans  les  esprits  et  s'effaçait  devant  la 
conception  plus  large  de  la  nationalité  romaine,  adéquate,  ou  peu  s'en 
faut,  à  la  qualité  môme  d'homme  civilisé  habitant  l'Empire.  Bientôt 
paraissait  la  constitution  de  Caracalla  qui,  dans  un  intérêt  fiscal,  oc- 
troyait ou  imposait  le  droit  de  cité  romaine  à  tous  les  sujets  de  l'Empire. 


BIBLIOGRAPHIE  153 

En  vertu  de  cette  constitution,  les  Juifs  acquirent  de'sormais  sans  con- 
teste le  jus  konorum  et  l'exercice  de  tous  les  droits  civils,  connubium, 
commercium,  testamenti  factio^  môme  la  tutelle  sur  des  non-juifs.  Toute- 
fois, comme  ils  avaient  été  des  peregrini  privilégiés,  ils  restèrent,  à 
certains  égards,  des  cives  privilégiés;  ils  eureut  tous  les  droits  des 
citoyens,  ils  n'exercèrent  parmi  les  devoirs  que  ceux  qui  n'étaient  pas 
en  conflit  avec  leurs  libertés  religieuses...  Parmi  ces  privilèges  figura 
encore  quelque  temps,  outre  Texemption  du  service  militaire,  celle  des 
charges  plus  onéreuses  qu'honorifiques  de  la  curie.  »  —  VI.  M.  R.  passe 
ensuite  à  la  description  de  l'état  social  et  économique  des  Juifs,  de  leurs 
occupations,  de  leurs  relations  avec  les  païens.  11  remarque  très  juste- 
ment que,  presque  jamais  avant  l'époque  médiévale,  les  Juifs  ne  sont 
cités  comme  pratiquant  le  commerce  d'argent,  la  banque  ou  l'usure.  — 
VII.  Ce  qui  dislingue  les  Juifs  de  la  diaspora,  c'est  l'ardeur  de  leur  pro- 
sélytisme, l'activité  de  leur  propagande  religieuse.  Le  tableau  de  celte 
propagande,  les  motifs  du  succès  qu'ils  remportèrent  ont  déjà  été 
maintes  fois  tracés.  M.  R.,  dans  un  raccourci  puissant,  résume  tout  ce 
qui  a  été  dit  déjà  à  ce  sujet,  en  y  ajoutant  des  observations  très  fines.  Le 
gouvernement  romain,  après  70,  «  prit  des  mesures  sévères  pour  empê- 
cher désormais  les  Juifs  de  faire  des  recrues,  que  le  patriotisme  romain 
considérait  comme  des  déserteurs...  »  «  Les  succès  attestés  de  la  pro- 
pagande  juive,  les  lois  sévères  qui  furent  nécessaires  pour  l'arrêter,  mo- 
difient l'impression  que  font  naître  les  jugements  des  écrivains  anciens 
sur  les  Juifs.  C'est  la  preuve  qu'à  tous  le  judaïsme  n'apparaissait  pas 
comme  un  objet  d'horreur,  une  superstition  folle,  elc.  Il  a  rencontré, 
dans  la  foule,  comme  dans  l'élite  dégagée  des  préjugés  nationaux,  de 
nombreuses  sympathies.  »  —  VIII.  Lorsque  l'Empire  romain  devint 
chrétien,  <'  le  judaïsme  se  trouva  dans  la  situation  difficile  d'une  mino- 
rité religieuse  incoercible  et  suspecte  d'esprit  de  propagande.  On  ne 
ressuscita  pas  contre  lui  les  anciennes  exclusions  fondées  sur  des  dififé- 
rences  nationales  :  un  siècle  après  l'édit  de  Caracalla,  il  ne  pouvait  plus 
être  question  de  nationalités  diverses  dans  l'immense  unité  de  Vorhis 
romanus.  C'est  presque  uniquement  comme  secte  dissidente  qu'il  fut 
envisagé  et  rangé  dans  la  même  catégorie  que  les  hérétiques,  les  cœli- 
colœ  et  les  païens  eux-mêmes.  A  ce  titre,  dans  une  société  de  plus  en 
plus  fondée  sur  l'union  de  l'Église  catholique  et  de  l'État,  il  ne  pouvait 
manquer  d'être  l'objet  de  restrictions  sévères  de  la  part  du  législateur. 
On  peut  suivre  les  progrès  de  cette  sévérité  dans  les  nombreuses  consti- 
tutions rendues  par  les  empereurs  chrétiens  et  conservées  par  les  Codes 
Théodosien  et  Justinien,  depuis  celles  de  Constantin,  qui  sont  encore 
empreintes  d'un  véritable  esprit  de  tolérance  et  de  neutralité  religieuse, 
jusqu'aux  mesures  presque  draconiennes  des  fils  et  petits-fils  de  Théo- 
dose. Naturellement,  il  faut  aussi  tenir  compte  des  dispositions  indivi- 
duelles des  empereurs  :  à  cet  égard,  l'attitude  brutale  des  fils  de  Cons- 
tantin contraste  avec  l'humanité  de  Jovien  et  de  Valentinien,  sans  parler 
de  Julien.  Le  langage  suit  la  même  évolution  que  la  pensée  :  il  prend  un 
ton  de  plus  en  plus  méprisant  ;  bientôt  le  nom  de  judaïsme  n'est  plus 
prononcé  sans  être  accompagné  des  épilhètes  les  plus  injurieuses  :  c'est 
une  secte  funeste,  honteuse,  sacrilège,  perverse,  abominable;  leurs  réu- 
nions sont  impies,  etc.  Rarement  le  mot  de  secte  est  remplacé  par  celui 
donation  :  preuve  curieuse  que  le  judaïsme  au  iv®  siècle  était  en  train  de 
dépouiller  son  caractère  national  et  qu'il  ne  l'a  repris  peu  à  peu  que 


454  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

sous  la  pression  d'une  législation  restrictive.  »  M.  R.  résume  ensuite  les 
dispositions  générales  de  celte  législation.  Nous  avons,  pour  arrêter  ici 
notre  analyse,  une  raison  que  nous  sommes  heureux  de  communiquer  à 
nos  lecteurs  :  nous  publierons,  dans  la  collection  des  Fontes  rerum 
judaîcarum  entreprise  par  noire  Société,  une  étude  détaillée  et  complète 
de  M.  Tliéodore  Reinach  sur  ce  sujet,  que  notre  excellent  collaborateur 
s'est  contenté  d'effleurer  dans  son  article.  Dans  notre  abrégé  de  ce  tra- 
vail, nous  avons  omis  à  dessein  tous  les  faits  cités  par  l'auteur  à  l'appui 
de  ses  assertions,  de  même  que  l'indication  des  sources  et  références 
mises  en  notes  ;  nous  avons  voulu  seulement  amorcer  la  curiosité  de  nos 
lecteurs  et  les  inciter  à  se  reporter  à  l'article  lui-même,  dont  il  serait 
guperflu  de  faire  l'éloge. 

z=ir=.  Le  Congrès  de  Vhistoire  des  religions.  —  La  Commission  d'organisation 
du  Congrès  de  l'Histoire  des  religions,  qui  se  tiendra  à  Paris,  en 
septembre  1900,  a  rédigé  un  programme  «  des  questions  qui,  dans  chaque 
section,  lui  paraissent  utiles  à  étudier  et  de  nature  à  provoquer  des 
rapports  ».  Nous  croyons  devoir  en  extraire  celles  qui  intéresseront  les 
lecteurs  de  notre  Revue  : 

AssijrO'Chaldée  ;  Comment  concilier  la  croyance  à  l'éternité  du  monde 
chez  les  Chaldéens  avec  les  données  sur  la  création  du  ciel,  de  la  terre, 
des  dieux  et  des  astres?  Quelles  étaient  au  juste  les  idées  sur  l'abîme 
primordial  et  le  chaos  enfantant  l'univers  ?  Quelle  était  la  relation  de  ces 
croyances  avec  la  tradition  juive  d'un  dieu  créateur  sans  commence- 
ment? 

Judaïsme  :  P  De  la  contribution  que  les  découvertes  de  l'archéologie 
et  de  l'épigraphie  sémitiques  apportent  à  la  connaissance  de  la  religion 
du  peuple  d'Israël  pour  les  périodes  antérieures  à  Esdi-as  et  à  Néhémie. 

2°  Indiquer  et  décrire,  d'après  les  sources  bibliques  et  profanes  et  les 
monuments  épigraphiques,  les  sanctuaires,  tombeaux,  lieux  de  culte  et 
de  pèlerinage  en  Palestine  et  dans  les  régions  voisines  (Syrie,  Phénicie, 
Idumée,  Péninsule  sinaïtique). 

3^  Réaction  du  Christianisme  sur  le  Judaïsme. 

4°  Valeur  documentaire  du  Talmud  et  de  ses  annexes  pour  l'histoire 
des  idées  religieuses  et  des  rites  chez  les  Juifs  et  pour  l'histoire  du  Chris- 
tianisme naissant. 

Christianisme  :  PL'essénisme  peut-il  être  considéré  comme  un  des  fac- 
teurs du  Christianisme  originel  ? 

2*^  Quelle  est  la  part  des  antécédents  grecs  et  celle  des  antécédents 
juifs  dans  l'élaboration  de  l'ancienne  eschatologie  chrétienne? 

3°  Les  sources  antiques  (grecques,  latines,  arabes,  juives  et  byzantines) 
auxquelles  ont  puisé  le  plus  les  théologiens  de  l'Occident  au  moyen  Age. 

«  Ce  programme  n'est  ni  exclusif,  ni  limitatif.  Les  communications  sur 
»  des  sujets  qui  n'y  sont  pas  portées  seront  admises  également...  » 
Nous  engageons  vivement  nos  confrères  à  prendre  part  aux  travaux  de 
ce  Congrès. 

=  =  La  revue  Mimisrach  Umimaarabh,  dirigée  par  M.  Ruben  Brainin  a  cesse 
d'être  mensuelle  (l'a-t-elle  jamais  clé?)  Un  quatrième  fascicule  vient  do 
paraître  (Berlin,  impr,  Ilzkowski).  Il  contient,  entre  autres,  une  biogra- 
phie d'Elic  Wilna  par  l'éditeur,  le  commencement  du  Tose/  Eammekané, 
avec  notes  de  M.  Zadoc  Kahn\  Iggéreé  Eappetira  du  philosophe  Abu 
Belir  ibn  Elziiig,  éd.  par  M.  Schreiner  ;  notes  diverses  sur  l'histoire  des 


BIBLIOGRAPHIE  1îî5 

mathomaliqucs  chez  les  Juifs,  par  M.  Stcinschnoidcr  (citations  de  Lévi 
bon  Gerson,  d'Isaac  b.  Salomon  b.  Çadok  ben  Albarav  (Alhadav),  de 
Farisol  BoLarel  d'A.vignon)  ;  une  fausse  introduction  de  Maïmonide  au 
livre  de  Job,  par  S.  Mandelkern. 


Kaufmann   (David),  Per  a  FUhrcr  »  maimûni's    In   dcp   Weltlitteratup. 

(Tirage  à  part  de  VArchiv  filr  Geschichte  der  Philosophie,  t.  XF,  11°  3,  p.  330-374, 
Berlin,  1898), 

Pour  mesurer  toute  l'importance  d'une  grande  production  philoso- 
phique du  passé,  à  côté  de  l'étude  directe  et  interne  de  l'œuvre,  il  y  a 
un  réel  intérêt  à  rechercher  quelle  en  a  été  la  fortune  auprès  des  con- 
temporains et  de  la  postérité  et  quelle  inûuenceelle  a  exercée.  Certains 
livres,  en  effet,  ont  joui  de  bonne  heure  d'une  renommée  universelle 
et  l'on  ne  peut  marquer  exactement  leur  place  dans  le  développement 
de  l'esprit  humain  que  si  l'on  possède  bien  l'histoire  de  leur  diffusion 
dans  le  monde  intellectuel.  De  ce  nombre  est  le  Dalâlet  el  Hairîn 
(Guide  des  Egarés)  de  Moïse  Maïmonide,  dont  l'apparition  a  été  un 
événement  et  qui  a  très  tôt  pénétré  dans  la  «  littérature  universelle  ». 
M.  D.  Kaufmann  a  eu  l'heureuse  idée  de  suivre  les  destinées  du 
«  Guide  »  depuis  son  achèvement  eu  1190  jusqu'à  ces  tout  derniers 
temps  et  il  a  réuni  dans  une  étude  très  attachante,  publiée,  l'an 
dernier,  sous  le  titre  de  :  Der  F'ùhrer  Maimûni's  in  der  Weltliiteratur, 
tout  ce  qu'il  a  trouvé  de  renseignements  épars  dans  les  dissertations 
et  revues  sur  l'influence  du  Guide  et  sur  les  éditions  et  traductions 
qui  en  ont  été  faites,  en  y  ajoutant  maint  renseignement  personnel  du 
plus  haut  intérêt.  La  grande  diffusion  du  chef-d'œuvre  de  Maïmonide 
témoigne  pour  M.  K.  de  l'importance  des  doctrines  qu'il  renferme.  Il 
estime  que  l'illustre  Salomon  Munk,  suivi  par  Uebergew,  n'a  pas 
suffisamment  rendu  justice  à  Maïmonide  en  ne  faisant  de  lui  qu'un 
intermédiaire  éminent  entre  la  philosophie  péripatéticienne  et  le 
judaïsme,  d'une  part,  le  judaïsme  et  la  scolastique,  de  l'autre.  Le 
Guide,  selon  M.  K.,  a  réellement  fait  époque  dans  la  philosophie 
générale  de  l'humanité,  malgré  son  caractère  nettement  confessionnel, 
qui  le  distingue  d'un  ouvrage  comme  le  Fons  Vitœ  d'Ibn  Gabirol,  et 
il  abonde  vraiment  en  notions  neuves,  en  orientations  nouvelles  et 
durables.  Nous  ne  discuterons  pas  ces  vues,  qui  ont  d'ailleurs  été 
développées  plus  longuement  par  M.  K.  dans  un  précédent  ouvrage 
[Geschichte  der  Atlrlbutenlehre,  Gotha,  4  877),  et  nous  laisserons  les 
historiens  de  la  philosophie  déterminer  la  part  exacte  qui  revient  à 
Maïmonide  dans  les  progrès  de  la  philosopliie  religieuse.  Quoiqu'il 
en  soit,  c'est  une  excursion  fort  attrayante  que  de  parcourir  avec 
M.  K.  les  pays  et  les  époques  à  la  recherche  des  différents  avatars 
du  Guide. 


156  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

M.  K.  montre  d'abord  l'extraordinaire  activité  qui  régnait  dans  les 
grands  centres  musulmans,  juifs  et  chrétiens  au  xii«  siècle,  cet  c.  âge 
d'or  de  la  traduction  »,  l'ardeur  avec  laquelle  on  faisait  passer  en 
hébreu  et  en  latin  les  productions  capitales  de  la  théologie  arabe  et 
de  la  philosophie  grecque,  ce  qui  n'empêchait  pas  les  haines  de  re- 
ligion d'être  très  vivaces,  puisque  cest  l'époque  des  Croisades  et 
bientôt  celle  de  l'Inquisition.  A.  vrai  dire,  si  l'on  étudiait  ainsi  avec 
acharnement  les  théologies  adverses,  c'était  généralement  moins 
par  amour  désintéressé  de  la  culture  scientifique  que  pour  s'exercer 
à  une  polémique  forte  et  nourrie.  On  tenait  à  se  bien  connaître  pour 
mieux  se  combattre.  Mais  quand  l'ouvrage  était  solide,  comme  le 
Guide  des  Égarés,  on  ne  laissait  pas  d'en  faire  son  profit.  M.  K.  passe 
en  revue  tour  à  tour  la  version  arabe  (l'original),  les  versions  hé- 
braïques, la  version  latine,  enfin  les  versions  anciennes  et  modernes, 
en  langues  vivantes. 

Voici,  brièvement  résumée,  son  exposition. 

Peu  de  temps  après  l'achèvement  du  Guide,  des  copies  de  l'original 
arrivèrent  dans  le  Sud  de  la  France  et  parvinrent  entre  les  mains  du 
premier  traducteur  hébreu,  Samuel  ibn  Tibbon.  La  Bibliothèque 
Nationale,  à  Paris,  possède  des  fragments  d'un  des  plus  anciens 
manuscrits  arabes  du  Guide.  Des  commentaires  arabes  dus  à  des 
Musulmans  attestent  le  succès  rapide  de  l'ouvrage.  Joseph  Caspi 
{Bonafoux  d'Argentières)  relate  dans  un  écrit  composé  à  Tarascon 
en  1329,  que  dans  les  écoles  supérieures  des  Musulmans  à  Fez,  des 
Juifs  faisaient  des  conférences  aux  étudiants  arabes  sur  le  Guide.  Il 
n'y  avait  que  les  chapitres  où  Maïmonide  traite  de  la  prophétie  qui 
pouvaient  déplaire  aux  sectateurs  de  Mahomet. 

Moins  de  dix  ans  après  l'apparition  du  Guide,  Samuel  ibn  Tibbon, 
de  la  grande  famille  des  traducteurs  juifs  établis  à  Lunel,  se  mit  en 
devoir  de  le  traduire  en  hébreu.  La  tâche  était  ardue,  l'hébreu 
n'étant  pas  fait  pour  l'abstraction  et  la  dialectique  et  ne  possédant  pas 
de  terminologie  pour  les  sciences.  Cependant  Samuel  ibn  Tibbon  vint 
à  bout  de  sa  tâche  et  il  eut  soin  de  s'assurer  le  concours  de  l'auteur 
lui-même,  qui  vérifia  l'exactitude  du  ms.  arabe  et  expliqua  au  tra- 
ducteur les  passages  difficiles.  Cette  traduction,  achevée  à  Arles,  le 
30  novembre  1204,  quelques  jours  avant  la  mort  de  Maïmonide, 
possède,  grâce  à  ces  garanties  de  fidélité,  une  valeur  inappréciable. 
Immédiatement  copiée  à  un  grand  nombre  d'exemplaires  et  répandue 
partout,  elle  eut  une  influence  considérable  sur  le  judaïsme.  Elle 
révolutionna  vraiment  la  prédication,  l'exégèse,  l'idéal  juifs.  Après 
quelques  orages  violents,  —  conséquence  inévitable  de  toute  innova- 
tion importante  dans  la  sphère  de  la  croyance,  —  qui  ne  durèrent 
d'ailleurs  que  deux  ou  trois  générations,  le  More  Xebouchim,  litre  de 
la  traduction  d'Ibn  Tibbon,  était  adopté  définitivement  dans  le 
judaïsme;  et  désormais  ce  ne  sont  partout  qu'hommages  enthou- 
siastes à  l'auteur.  Une  preuve  de  la  vénération  qu'on  lui  témoigna, 
c'est  que  la  traduction  d'Ibn  Tibbon  eut  l'honneur  d'être  un  des  pre- 


BIBLIOGRAPHIE  iïjl 

miers  ouvrages  sortis  des  presses  de  Gutenberg  et  fut  certainement 
imprimée  avant  1480. 

Mais  la  traduction  d'Ibn  Tibbon,  à  cause  de  sa  fidélité  même,  était 
peu  intelligible  à  la  masse.  Le  traducteur  parlait  arabe  en  hébreu. 
C'était  bon  pour  les  savants.  Le  vulgaire,  même  lettré,  désirait  un 
livre  écrit  dans  un  hébreu  plus  limpide.  De  Marseille  ou  d'Espagne, 
—  on  ne  sait  au  juste,  —  on  chargea  Juda  Alharizi,  poète  espagnol 
très  renommé,  dont  le  Divan  était  déjà  fort  répandu,  de  faire  une 
nouvelle  traduction  du  Guide  en  hébreu.  Mais  si  Alharizi  était  un 
littérateur  de  talent,  c'était  un  philosophe  et  un  savant  médiocre. 
Son  œuvre,  d'une  grande  beauté  de  forme,  fourmille  d'inexactitudes 
et  de  contresens,  bien  qu'il  eût  eu  à  sa  disposition  la  traduction  de 
son  devancier.  Ses  inadvertances  le  firent  tancer  par  Ibn  Tibbon  lui- 
même  et  par  le  fils  de  Maïmonide,  Abraham,  pourtant  réputé  pour 
son  indulgence.  La  postérité  a,  d'ailleurs,  généralement  ratifié  le  ju^ 
gement  sévère  des  connaisseurs.  La  traduction  d'Alharizi  a  été  im- 
primée pour  la  première  fois  en  4851  seulement,  à  Londres,  sur  un 
manuscrit  unique  de  la  Bibliothèque  Nationale  de  Paris,  datant  de 
1234.  Cette  édition  est,  naturellement,  très  fautive  et  ses  imperfections 
ne  sont  pas  toutes  imputables  à  Alharizi.  Il  serait  à  souhaiter,  dit 
M.  K.,  qu'on  pût  établir  le  véritable  texte  de  la  traduction  d'Alharizi, 
d'autant  plus  que,  si  inférieure  qu'elle  soit  à  celle  d'Ibn  Tibbon,  elle 
a  une  importance  bien  plus  considérable  au  point  de  vue  historique  : 
c'est  elle  qui  a  servi  de  base  à  la  version  latine  qui  fit  connaître  le 
Guide  au  monde  chrétien. 

Celte  version  latine,  quand  fut-elle  composée  et  par  qui?  On 
Tignore.  Mais  on  peut  tenir  pour  certain  qu'il  en  exista  une  dès  le 
début  du  xiii"  siècle.  Les  hommes  les  plus  considérables  de  la 
chrétienté,  les  plus  illustres  moines  dominicains  et  franciscains 
montrent  une  connaissance  approfondie  du  Guide  de  R.  Moïse  le  Juif, 
comme  on  l'appelle  dans  la  scolastique.  M.  K.  énumère  les  différents 
auteurs  qui  en  parlent  et  note  que  ce  ne  sont  pas  seulement  les 
parties  philosophiques,  mais  les  thèses  essentiellement  juives  qui 
retiennent  l'attention.  Alexandre  de  Haies,  Guillaume  d'Auvergne, 
Albert  le  Grand,  Thomas  d'Aquin,  Vincent  de  Beauvais,  Duns  Scot, 
s'inspirent  indéniablement  de  Maïmonide.  Enfin,  M.  K.  rappelle,  après 
M.  Gûdemann,  l'extraordinaire  inûuence  du  Guide  sur  l'empereur 
lettré  Frédéric  II  Barberousse,  qui  expliqua  la  Bible  selon  la  méthode 
même  de  Maïmonide.  Une  découverte  récente  a  confirmé  l'existence, 
dès  le  xiue  siècle,  de  la  version  latine  du  Guide.  J.  Perlés,  le  regretté 
rabbin  de  Munich,  a  retrouvé  en  1875  un  manuscrit  de  cette  version, 
qui,  outre  sa  valeur  intrinsèque,  a  jeté  un  jour  curieux  sur  la  traduc- 
tion latine  parue  en  1520,  à  Paris,  et  due  à  l'évêque  de  Nebbio, 
Augustin  Giustiniani.  On  s'est  aperçu,  en  effet,  que,  loin  d'avoir  fait 
une  œuvre  originale,  Giustiniani  s'était  contenté  de  recopier,  en 
l'arrangeant  un  peu,  l'ancienne  version  latine,  représentée  aujourd'hui 
par  le  manuscrit  de  Munich.  Il  n'y  a  donc  eu  pour  tout  le  moyen  âge 


158  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

qu'une  traduction  latine,  et  une  traduction  anonyme.  Elle  a  beau 
recevoir  les  tilres  les  plus  variés,  suivant  les  auteurs  qui  en  parlent 
(le  mot  Guide  est  traduit,  en  effet,  pardireclio,  direclor,  dux,  demons- 
tralor,  director,  doctor,  elle  mot  Égarés  parneutrorum,  perplexorum, 
errantiuni,  nutantium,  dubitantium,  titubantium),  il  s'agit  toujours, 
selon  M.  K.,  de  la  même  version. 

-  La  seconde  traduction  latine  qui  ait  paru  depuis  le  moyen  âge, 
abstraction  faite  des  mss.  qui  n'ont  pas  encore  été  étudiés  et  qui  peuvent 
receler  une  autre  version  ancienne,  est  celle  de  Jean  Buxtorf  le  Jeune, 
qui  date  de  1629.  Cette  traduction,  indépendante  de  l'ancienne,  a  été 
faite  sur  le  More  d'Ibn  Tibbon.  L'œuvre  de  Buxtorf  eut  tant  de  vogue 
qu'un  collectionneur,  Jacob  Roman,  voulut,  dès  1634,  éditer  à  Gons- 
tantinople  une  polyglotte  du  Guide  qui  aurait  compris  le  texte  arabe 
en  caractères  hébraïques,  la  version  d'Ibn  Tibbon  et  celle  de  Buxtorf. 
C'est  par  la  version  de  Buxtorf  que  Leibnitz  et  Scaliger  ont  connu  et 
admiré  Maïmonide.  Mais,  quelle  que  soit  la  supériorité  de  cette 
version  sur  la  version  latine  primitive,  M.  K.  pense  qu'il  y  aurait  un 
grand  intérêt  à  établir  un  bon  texte  de  cette  dernière,  puisque  c'est 
sur  elle  que  la  scoiastique  a  travaillé. 

Nous  arrivons  maintenant  aux  langues  modetnes  et  d'abord  à 
Tèspagnol.  Menendez  Pelayo,  dans  son  Historia  de  los  heterodoxos 
Espanoles,  avait,  en  1877,  signale  incidemment,  et  pour  la  première 
fois  sans  doute,  la  version  castillane  du  Guide.  M.  Mario  Schiff  a,  tout 
récemment,  en  1897,  au  cours  de  ses  études  à  la  Bibliothèque 
nationale  de  Madrid,  étudié  le  premier  cette  version;  il  a  consigné 
ses  remarques  dans  la  Revista  crilica  de  Historia  y  Literatura  (II, 
p.  160-176).  Chose  curieuse,  c'est  au  moment  où  rinquisition  allait 
sévir  le  plus  cruellement  contre  les  Juifs  qu'on  éprouva  le  besoin  en 
Espagne  de  traduire  l'œuvre  de  Maïmonide  dans  la  langue  nationale. 
Cette  version  fut  faite  dans  le  premier  tiers  du  xv^  siècle,  par  Pedro 
de  Tolède,  apparemment  un  juif  converti,  sous  le  patronage  d'un 
membre  d'une  des  plus  nobles  familles  castillanes,  Gomez  Suarez  de 
Figueroa.  Bien  que  sachant  l'arabe,  Pedro  n'a  pas  traduit  le  Guide  sur 
l'original,  dont  il  n'y  avaitsans  doute  plus  d'exemplaires  en  Espagne. 
Il  connaît  les  deux  traductions  hébraïques  précitées  et  d'autres 
encore.  Il  accorde  la  palme  à  celle  d'Alharizi.  De  sûrs  indices  (tels 
que  la  division  en  178  chapitres;  Ibn  Tibbon  divise  en  177)  montre 
que  c'est  celle-là  qu'il  suit.  La  publication  prochaine  de  celte  ver- 
sion castillane  aura,  entre  autres  mérites,  celui  de  concourir  à 
l'établissement  du  texte  si  fautif  de  la  version  d'Alharizi.  M.  K.  ne 
nous  dit  pas  (est-ce  une  omission?)  le  titre  de  la  traduction  de  Pedro 
de  Tolède. 

Avant  la  découverte  de  cette  traduction,  c'était  la  version  italienne 
qui  passait  pour  la  plus  ancienne  eu  langue  moderne.  Or  elle  est 
d'environ  cent  soixante  ans  postérieure  à  celle  de  Pedro.  On  n'en  a 
que  deux  exemplaires,  tous  deux  en  caractères  hébraïques  :  l'un 
appartient  à  la  Bibliothèque  royale  de  Berlin,  l'autre  à  la  collection 


BIBLIOGRAPHIE  \yj 

de  J.  B.  de  Rossi.  C'est  en  io81  ou  ^583  que  parut  VEruâAzione  de 
Confusiy  due  à  Amadeo  bea  Moses  de  Recanati,  copiste  renommé, 
poète  et  prosateur  de  talent,  précepteur  du  fils  d'Isaac  ben  Juda 
d'Urbino.  Il  dédia  son  œuvre  à  un  personnage  qui  n'est  autre,  selon 
M.  Steinschneider,  que  le  célèbre  rabbin  et  cabbaliste  Menahem 
Azaria  de  Fano.  Amadeo,  rempli  de  vénération  pour  Maïmonide,  le 
comparait  à  Euclide,  à  Galien,  le  déclarait  plus  divin  que  Piaton, 
plus  savant  astronome  que  Ptolémée.  La  version  d'Amadeo,  inspirée 
de  celle  d'ibn  Tibbon,  est  écrite  dans  une  langue  que  l'auteur  a 
cherché  à  rendre  très  claire  et  accessible  ainsi  à  tous  les  lecteurs 
italiens. 

On  ne  connaît  pas  d'autre  traduction  jusqu'au  xix°  siècle.  Cepen- 
dant l'œuvre  de  Maïmonide  ne  cessa  pas  d'exercer  son  influence 
durant  ces  trois  siècles  d'intervalle,  témoin  les  éditions  de  Thomas 
Hyde  et  d'Edouard  Pococke  [Porta  Mosis),  Ht  les  doctrines  de  Men- 
delssohn  et  de  Salomon  Maïmon,  dont  le  Guide  a  été  le  point  de 
départ. 

Après  une  nouvelle  traduction  hébraïque  de  presque  toute  la 
première  partie ,  faite  par  Mendel  Lewin  de  Satanow  à  Zolkiew, 
en  1829,  on  commence  à  traduire  le  Guide  en  allemand.  Simon 
B.  Scheyer  traduit  la  III«  partie  (Francfort-sur-le-Mein,  1838),  Furs- 
tenthal,  la  P'°  (Krotoschin,  1839).  Mais  ces  travaux  partiels  sont 
bien  éclipsés  par  l'édition  monumentale  du  Guide  arabe  et  la  traduc- 
tion française  de  Salomon  Munk  (1836-1866).  M.  K.  rend  un  chaleureux 
hommage  à  ce  magistral  effort  scientifique.  L'œuvre  de  Munk  sert  à 
son  tour  à  d'autres  travaux.  Grâce  à  elle,  M.  E.  Stern  traduit,  en  1864, 
la  IP  partie  du  Guide  qui  manquait  encore  à  la  version  allemande. 
Puis  vient  \q  Guida  degli  Smarriti,  traduction  italienne  due  à  David 
Jacob  Maroni,  rabbin  de  Florence  ^Livourne,  1870-1876),  la  traduction 
hongroise  de  Moritz  Klein  (1878-1890).  La  traduction  anglaise,  The 
Guide  of  the  perplexed  de  M.  Friedlaender  (Londres,  1881-1883),  est  un 
travail  plus  indépendant. 

En  terminant,  M.  K.  constate  avec  regret  que  la  langue  allemande, 
seule  dans  la  littérature  savante  de  ce  temps,  manque  encore  d'une 
édition  et  d'une  traduction  homogènes  du  chef-d'œuvre  de  Maïmonide. 
Il  estime  qu'il  y  a  encore  à  faire,  même  après  Munk,  tous  les  mss. 
notamment  n'ayant  pas  encore  été  mis  au  jour.  Quant  à  nous,  félici- 
tons-nous de  ce  que  la  science  juive  française,  généralement  avare  de 
ses  efforts  en  ce  qui  concerne  la  traduction  de  nos  grands  auteurs  du 
moyen  âge,  ait  au  moins  imposé  à  l'admiration  et  à  la  reconnaissance 
du  monde  savent  le  grand  travail  de  Munk  sur  l'œuvre  capitale  de  la 
pensée  juive  au  moyen  âge,  sur  ce  Guide  des  égarés  dont  M,  K.  nous 
a  excellemment  raconté  l'éclatante  fortune. 

Julien  Weill. 
Mars  1899. 


leO  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


ADDlTlOiNS  ET  RECTIFICATIONS 


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T.  XXXVIII  ; 

Pago    91,  ligne    7  d'en  bas,  au  lieu  de  n:n53  "»"■»  "^IT'I,  lire  ïnSH»  '^"''  Û  ÎT^I 
93      »      9  » 

100       »      6  E> 

105       »    18  » 

115  »     10  » 

116  »      9  »  Û'^bcnn?:  peut-être  to'ibnDny 

(comme  "^mn»  )2y  "^nbnD:,  Genèse,  xxx,  8) 

118  »     12  »  n^^ ,  lire      in^» 

119  »     9  »  mniTai     »    nri5n72T 

120  »    15  »  mab     »       n-iab 

S*  /•  Halbersiam. 
Ihid.,  187,  note  2.  Au  lieu  à  savoir  y  lire  ^n  /"ac*  i^. 


Le  gérant  : 

Israël  Lévi. 


VER  SAILLKS,    IMPRIMERIES   CERF,    59,    RUE   DUPLFSSIS. 


■À 


SUR 

m  PASSAGE  DE  FLAVIUS  JOSÈPHE 

(ANTIQ.  JUD.,  XII,  4,  §  155). 


La  préparation  d'un  ouvrage  sur  la  politique  extérieure  des 
Lagides  à  la  fin  du  iii«  et  au  début  du  ii^  siècle,  et  la  lecture  des 
savantes  études,  récemment  publiées,  de  MM.  Wellhausen  *, 
Willrich  *  et  Bùchler  ^  ont  ramené  mon  attention  sur  un  passage 
de  Flavius  Josèphe  qui  a  donné  lieu  à  plus  d'une  controverse,  et 
d'où  l'on  a  voulu  tirer  d'importantes  conséquences  historiques. 
J'ai  cru  m'apercevoir  et  je  vais  essayer  de  montrer  que  tous  ceux 
qui  se  sont  occupés  de  ce  texte  ont  négligé  une  précaution  essen- 
tielle :  c'est,  à  savoir,  de  l'interpréter  avec  exactitude.  Si  je  ne 
m'abuse,  ce  qui  s'y  trouve  est  fort  différent  de  ce  qu'ils  ont  pensé 
y  trouver  ^ 


I. 

Rien  n'est  si  connu,  dans  les  Antiquités  Judaïques,  que  le  cha- 
pitre IV  du  livre  XII.  Flavius  Josèphe  y  raconte  (du  §  158  au 
§  223'),  d'après  un  chroniqueur  qu'il  n'a  pas  nommé,  comment  le 

*  Wellhausen,  Israûitische  und  Judische  Geschi^hte,  3«  éd.,  Berlin.  La  première 
édition  de  cet  excellent  ouvrage  remonte  déjà  à  quelques  années;  la  troisième  et  der- 
nière, fortement  remaniée,  a  paru  en  1897. 

'  Willrich,  Jtiden  und  Griechen  vor  der  makkahaischen  Hrhebung^  Gôtlingen,  1895. 

*  Biichler,  Die  Tobiaden  und  die  Oniaden  im  II  Makkabâtrbuche  und  in  der 
verwandten  jûdisch-hellenistischen  Zitteratur,  Vienne,  1899, 

*  Il  va  sans  dire  que,  dans  la  présente  étude,  je  me  suis  constamment  servi  de 
la  belle  édition  de  Josèphe  que  nous  a  donnée  M.  Ben.  Niese. 

'  A  partir  du   §  228,  après  uae  digression  où  il  est  parlé  des  relations  du  grand- 
prêtre   Osias   avec  le   roi   de  Lacédémone  Areus,  commence  un  récit  nouveau    dont 
Hyrkan  est  le  seul  héros,  et  qui   présente  de  sérieuses  apparences  historiques  ;  cf. 
T.  XXXIX,  N°  78.  11 


162  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

grand-prêtre  Onias  gardait  pour  lui  les  tributs  destinés  au  roi 
d'Egypte,  et  faillit  de  la  sorte  attirer  sur  la  ville  de  Jérusalem  les 
plus  grands  malheurs  ;  comment  son  neveu  Joseph,  fils  de  Tobie, 
habile  intrigant,  profita  de  ses  fautes,  s'insinua  dans  les  bonnes 
grâces  du  Ptolémée  et  de  sa  femme  Gléopâtre  par  les  bassesses  et 
les  bouffonneries  qui  ont  réussi  auprès  des  khédives  de  tous  les 
temps,  se  fit  adjuger  et  conserva  pendant  vingt-deux  ans  la  ferme 
des  impôts  de  la  Koilé-Syrie,  et  acquit  ainsi  des  richesses  colos- 
sales; comment  il  eut  un  fils,  Hyrkan,  qui,  venu  tout  jeune  à  la 
cour  d'Egypte  par  ordre  de  son  père,  le  distança  de  beaucoup  en 
souplesse  et  en  friponnerie  \ 

Ce  récit  des  aventures  de  Joseph  et  d'Hyrkan,  où  Ton  démêle 
tout  de  suite  bien  des  traits  légendaires,  recouvre-t-il  un  fond 
d'histoire  vraie,  ou  n'est-il  qu'un  roman  à  prétentions  historiques, 
imaginé  pour  les  besoins  d'une  de  ces  polémiques  qui  mettaient 
aux  prises,  à  l'époque  hasmonéenne,  les  différents  partis  de  la 
nation  juive  ?  C'est  une  question  qu'on  a  beaucoup  agitée,  et  qui, 
vraisemblablement,  fournira  matière  encore  à  de  longues  dis- 
cussions-.  Mais  il  est  certain  que  Flavius  Josèphe  ne  se  l'est  pas 
posée  :  il  a  tenu  pour  véridiques  les  faits  mentionnés  dans  la 
chronique  qu'il  consultait,  et  les  a  transcrits  ou  résumés  sans 
défiance.  De  plus,  dupe  en  cela  d'une  méprise  qu'on  a  depuis 
longtemps  relevée^,  il  a  cru  qu'ils  s'étaient  passés  sous  le  règne 

Wellhauseo,  242;  Wilirich,  94  ;  Bûchler,  91-93.  Josèphe  doit  l'avoir  emprunté  à  une 
chronique  différente  de  celle  qui  lui  a  fourni  ses  §  158-223,  et  qu'il  a,  du  reste,  tort 
mal  raccordée  à  la  première.  Nous  n'avons  pas  a  nous  occuper  ici  de  ce  second  récit. 

^  Ce  résumé,  dénué  de  gravité,  de  ramusante  histoire  des  Tobiades  est  emprunté 
(sauf  quelques  mots  ajoutés  çà  et  là  pour  préciser  cartains  détails)  à  Renan,  Hist. 
d'Israël,  IV,  273-274. 

*  Schlatter,  Eupolemos,  644  [je  n'ai  pu  consulter  cet  ouvrage];  "Wellhausen,  242; 
Wilirich,  94  et  suiv.,  considèrent  l'histoire  des  Tobiades  comme  une  ticlion  •  tendan- 
cieuse »,  où  se  retlète  l'image  déformée  de  quelques  événements  authentiques. 
Stark,  Gaza,  412  et  suiv.,  et  Bûchler,  96  et  suiv.,  estiment,  au  contraire,  qu'elle 
est,  dans  l'ensemble,  digne  de  créance. 

'  Sur  la  méprise  ({u'a  commise  ici  Flavius  Josèphe,  voir  Wellhausen,  241; 
Wilirich,  95;  Mahally,  216;  Biichler,  44.  —  On  sait  qu'un  interpolateur  ancien  de 
Josèphe  a  écrit  au  §  158  (cf.  163)  :  eîç  ôp-VYiv  èxtvr,oev  (Onias)  tôv  ^olgiHx  nTo).£|iaïov 
[tôv  EÙ£c>y£Tr,v,  ô;  ^v  Tiaryip  toO  «l>i)>07ràTopoç]  — ,  et  qu'Eusèbe  [Chron.^  li,  120, 
éd.  Schoene)  place  en  247,  année  de  l'avèuement  d'Evergèles,  le  début  de  l'admi- 
nistralion  du  fermier  Joseph,  fils  de  Tobie.  Stark,  Gâta,  ^12-416;  Mahairv,  EmjK 
of  the  Ptolem.,  217  et  suiv.  ;  Schiirer,  Gesch.  des  jûd.  Volkes,  III,  3»  éd.,  75,  note  7, 
ont,  en  partie,  adopté  celte  chronologie:  suivant  eux,  le  Tobiade  aurait  été  fermier 
des  impôts  de  la  Koilé-Syrie  sous  les  règnes  d'Evergèles  et  de  Philopator,  soit  en- 
viron de  229  à  207;  et  je  dois  dire  qu'après  un  attentif  examen  des  textes,  leur 
opinion  me  paraît  digne  de  quelque  considération.  Bûchler  (59  et  suiv.;  74-75)  pense 
que  les  années  220-198  marqueraient  les  limites  de  la  gestion  de  Joseph,  en  sorte  que 
celui-ci  aurait  été  au  service  de  l'Egypte  durant  le  règne  presque  entier  de  Philo- 
pator et  les  premières  années  du  règne  d'Epipbanes.  C'est  un  système  qui  se 
heurte  à  quantité  d'iuvraisemDlances  et  qu'un  ne  peut  raisonnablement  soutenir. 


SUR  UN  PASSADE  DE  FLAVIUS  JOSÉPHE  163 

de  Ptolémëe  V  Épiphanes,  après  que  ce  prince  eut  épousf^^  Cléo- 
pâtre,  fille  d'Antiochos  III.  C'est  pourquoi,  au  chapitre  iv  de  son 
livre  XII,  l'histoire  du  fermier  Joseph  et  de  son  fils  se  trouve 
précédée  du  préambule  que  voici  :  (§  154)  txsTà  ok  xauta  '^-.À-'av  xal 

•juovoàç  7:00?  nToÀ£|jLa?ov  'AvTtoyoç  ETro'.YjTaTO  xat  oioojiT'.v  aÙTcji  T7)V  Ô'jy^t- 
TÉoa  KXiOTziz^OLV  TTûôç  yaaov  Traûa/worjCa;  auToJ  ty,?  /coO/rjç  Supiaç  /.al 
JiajjLapstaç  xal  'louoaiaç  xai  <I>oiviXY,(;  cpspvYji;  ctvô[xaT'..  —  On  sait  d'ail- 
leurs que  ces  li^çnes  renferment  une  grave  erreur  historique*  : 
il  se  peut  qu'en  196,  lorsquMI  lit  sa  paix  avec  lui,  ou,  en  193,  lors- 
qu'il lui  donna  sa  fille,  Antiochos  III  ait  promis  à  Ptolémëe  V 
de  lui  restituer  la  Koilé-Syrie  récemment  conquise-;  mais  un 
texte  tout  à  fait  formel  de  Polybe,  pour  ne  parler  que  de  celui-là, 
démontre  de  façon  péremptoire  que  la  promesse  ne  fut  jamais 
tenue  ^. 

A  ce  préambule  succède  immédiatement,  dans  le  chapitre  iv  de 
Flavius  Josèphe,  une  phrase  (§  155)  sur  laquelle  vont  porter  toutes 
mes  observations  et  qui  fera  proprement  l'objet  de  cette  étude. 

Elle  est  ainsi  conçue  :  y.y.\  O'.a'.ç-sÔévxwv  sic  k^oo-zéoouç  toÙç  paT'.Xéa; 
T(ov  <pôpcov  xàç  lo''aç  exaTTO».  twv  £7r'(rY,{jLojv  ojvouvto  Trarpioaç  (popoXoyeïv 
xai  (7uva6po''J^ovTcç  xb   TrpoTXcxayixsvov    xîoaAa'.ov   xoTç  ^OLG'.XeZmv   sxéXo'jv. 

*  La  même  erreur  se  retrouve,  comme  on  sait,  dans  Appien  {St/r.,  5,  374,  Men- 
delss.)  :  xal  llTo),eaa{ti)  [j.ï\  s:  AïyuTrxov  £(TT£),).e  K/EOTtàrpav  rriv  SOpav  £7rtxXyi«Tiv, 
Tcpoïxa  Xupiav  xrjv  xoî/.r,v  eTcioiooO:. . .  ;  et  aussi  dans  Eusèbe  {Chron.,  II,  124,  Schoene) 
et  dans  S'  Jérôme  [In  DanteL,  xi,  17),  qui  tous  deux  copient  probablement  Por- 
phyre, il  n'y  a  aucune  raison  de  croire  que  Josèphe  en  soit  le  premier  auteur;  Josèphe, 
Appien  et  Porphyre  ont  puisé  bien  plutôt  à  une  source  commune. 

*  Le  contlit  qui  s'éleva,  en  173,  entre  Philométor  et  Antiochos  IV  (voy.  Polyb., 
xxviii,  1,  5)  implique  l'existence  de  ces  promesses.  C'était  d'elles  que  s'autorisaient  les 
ministres  alexandrins  pour  réclamer  la  rétrocession  de  la  Koilé-Syrie  ;  voir  Polyb., 
XXVIII,  20,  9  :  £^apvou(X£voç  (Antiochos)  t9iv  ôtxoXoyiav  r^v  êçaaav  ol  xaxà  ty;v 'A).c$âv- 
ôpEiav  YEvÉtrOai  riTo)>£[j-a(ci)  Tûi  veoxjtI  [xerriX^axon  Trpoç  'Avtio/_ov  tov  èxeîvou  iraTÉpa 
ÔTi    XaêEiv  aÙTÔv  èv  çepvr,  xoî).r,v  Xupiav,  Ôt'  £),à[xpave  K^Eouàrpav. 

*  Le  texte  de  Polybe  dont  il  s'agit  ici  est  celui-ci  :  ^xxviii,  1,  2-3)  eiuvépaivE  ôè 
xpatEÎv  Tov  'AvTioxov  (Antiochos  IV)  tûv  xaxà  xoiXyiv  Suptav  xai  ^oivtXY]v  TrpayaotTwv* 
èÇ  ou  vàp  'AvTÎoxo;  ô  Tiatyip  toO  vuv  >>£yo[jl£vo'j  paaiXéco;  èvîxrjOE  tt^  TTîpl  xo  Ilàviov 
(x.àx'd  xoù;  lIxoX£(jLaîou  ejTpaxYiyoû;,  à7c'  èxôÎvwv  xwv  ypovtov  ètîeiôovxo  îrotvTî;  ol 
7rpo£tpYiu.£vot  xô';!©!  xoî;  èv  i^upiot  paaiXeùaiv.  —  Dautre  part,  il  faut  tenir  compte 
eacore  des  indications  suivantes  :  1°  11  est  dit  que,  pendant  sa  guerre  contre  Rome, 
dans  l'hiver  de  191-190,  Antiochos  III  armait  des  Hottes  en  Ph€nicie  :  Liv.  [=  Polyb.], 
xixvii,  8,  3;  App.,  &ijr.,  22,  392  (Mendelss.].  —  2°  Sous  le  règne  de  Séleukos  IV, 
nous  voyons  la  Koilé-Syrie  et  la  Phénicie  administrées  par  un  stratège,  ApoUonios, 
tils  de  Thraséas,  l'onctiounaire  aux  ordres  du  roi  d'.\sie  :  II  Macch.,  m  5;  m  7; 
IV,  4.  —  3*  Sous  le  même  règne,  l'histoire  d'Héliodore  —  qu'elle  soit  d'ailleurs  véri- 
table ou  apocryphe  —  atteste  a  chaque  ligne  que  la  domination  syrienne  s'étendait  à 
la  Koilé-Syrie,  à  la  Phénicie  et  à  la  Judée  :  Il  Macch.,  in,  7  et  s\iiv.;  notamment, 
m,  8  et  m,  13.  —  4"  Le  fait  que  Ptolémée  Epiphanes  se  préparait,  vers  la  hn  de  son 
règne,  à  envahir  la  Koilé-Syrie  et  à  la  conquérir  par  les  armes  (Diod.,  xxix,  29 
Dind.  ;  Ilieron.,  in.  Daniel.^  xi,  20)  est  sans  doute  une  preuve  assez  manifeste 
qu'elle  avait  échappé  à  la  domination  des  Lagides.  —  Gomp.,  en  général,  Slark 
428-429,  et  Biichler,  45-47. 


165  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

On  n'a  jamais,  à  ma  connaissance,  donné  de  ces  mots  qu'une 
seule  traduction,  celle-ci  :  «  Les  tributs  [de  la  Koilé-Syrie]  ayant 
été  partagés  entre  les  deux  rois  [c'est-à-dire  entre  Antiochos 
et  Ptoléméej,  les  principaux  de  chaque  nation  achetaient  le  droit 
d'imposer  leurs  concitoyens,  et,  réunissant  la  somme  prescrite, 
la  remettaient  aux  deux  souverains  [d'Asie  et  d'Egypte].  »  Per- 
sonne ne  s'est  avisé  d'émettre  le  plus  léger  doute  sur  l'exactitude 
de  cette  version.  Elle  est  adoptée  par  tous  et  constamment  repro- 
duite; elle  est  traditionnelle,  elle  est  consacrée. 

Seulement,  tandis  que  de  nombreux  érudits  *  faisaient  bon 
accueil  à  la  phrase  ainsi  traduite,  acceptaient  sans  déflance  le 
renseignement  qu'ils  y  trouvaient,  et  tenaient  donc  pour  assuré 
qu'à  partir  de  196  (ou  de  193)  les  impôts  de  la  Koilé-Syrie  furent 
divisés  par  moitié  entre  Antiochos  et  son  gendre- ,  d'autres,  en  ces 
temps  derniers,  et  notamment  Bûchler,  l'ayant  regardée  de  plus 
près,  y  ont  découvert  de  grandes  difficultés,  l'ont  jugée  beaucoup 
plus  embarrassante  qu'instructive,  et  finalement  ont  renoncé  à 
faire  état  de  l'assertion,  trop  suspecte  à  leurs  yeux,  qu'elle 
contient  ^  Je  pense  que  ceux-ci  ont  vu  plus  clair  que  leurs  pré- 
décesseurs ;  et,  reprenant  une  partie  de  leur  argumentation,  la 
développant  aussi  et  la  fortifiant  de  remarques  nouvelles,  je  vou- 
drais tout  d'abord  faire  paraître  combien  fondées  sont  leurs  cri- 
tiques, motivées  leurs  inquiétudes  et  justifiées  leurs  répugnances. 


IL 


J'écarte  de  la  présente  recherche  tonte  considération  extrinsèque, 
et,  partant,  toute  considération  tirée  soit  de  l'étude  de  l'histoire, 
soit  de  la  lecture  d'écrivains  autres  que  Josèphe;  je  m'en  tiens  au 

1  Voir:  Droysen,2)e  Lagidarum  regno,  8  {=  KL  Sehriften^ll,  360);  Sharpe-Jolo- 
■wicz,  Gesch.  Egyptetis,  1,  247,  avec  la  noie  de  Gutschmid;  Mommsen,  Rôm.  Gesch.^ 
1,  275,  note  1  ;  Slark,  412,  427;  A.  Heyden,  Mes  ab  Antiocho  111  Magno. ..  gestae^ 
56;  Schaeiderwirlh,  Die  polit.  Beziehung.  der  Rômer  tu  Aegypten,  15,  19;  Rospatt, 
Philolog.,  XXV,  44  et  noie  1  ;  Tetzlatf,  De  Antiochi  III  Magni  régis  relus  gestis. . ., 
34  ei  noie  1  ;  Kenan,  Hist.  d'Israël,  IV,  263  ;  Holm,  Gricch.  Gesch.,  iV.  434;  Wilcken, 
ap.  Pauly-Wissowa,  aux  mots  Antiochos  III,  2466,  et  Antiochos  IV,  2471-2472,  cf. 
Droyscû,  Kl.  Schriften,  11,  433,  noie  à  360  b  ,•  MahalPy,  Emp.  of  the  Ptolemies,  306  ; 
Slrack,  Dynast.  der  Ptolem.^  91  et  note  4;  Niese,  Gesch.  der  maked.  Staat.,  II,  674 
et  note  2. 

*  C'est  là,  du  reste,  eu  tout  état  de  cause,  une  conclusion  trop  hâtive,  et  qui, 
même  si  la  phrase  de  Josèphe  signiliait  ce  qu'on  lui  fait  signifier,  sertit  bien  difficile 
à  admettre.   Voir  p.  175,  note  1,  mes  remarques  sur  ce  point. 

^  Wellhausen,  228  et  note  1.  241;  WiUrich,  95;  Bûchler,  47.  On  trouvera  plus 
loin  la  citaliou  intégrale  des  passages  visés  ici  par  référence. 


I 


I 


SUR  UN  PASSAGK  DE  FLAVIUS  JOSKPIIE  \f,r, 

simple  examen  de  la  phrase  en  discussion  et  de  son  contexte,  et  je 
pose  cette  question  :  Traduite  comme  on  fait  d'ordinaire,  la 
phrase  qui  forme  le  §  155  du  livre  XII  des  Antiquités  Judaïques 
offre-t-elle,  au  lieu  où  on  la  trouve,  un  sens  naturel  et  conve- 
nable? Cadre-t-elle  avec  les  parties  de  texte  qui  l'environnent? 
A-t-elle  du  rapport  et  se  lie-t-elle  à  ce  qui  la  précède  et  la  suit? 

Rappelons  ce  qui  vient  avant  elle.  Flavius  Josèphe  nous  in- 
forme  dans  son  v::^  154  —  j'ai  cité  le  texte  plus  haut  —  qu'An- 
tiochos,  ayant  traité  avec  PtoléméeEpiphanes  et  l'ayant  pris  pour 
gendre,  lui  fit  abandon  des  provinces  de  Koilé-Syrie,  de  Samarie, 
de  Judée  et  de  Phénicie,  qui  formèrent  la  dot  de  Cléopâtre.  Manifes- 
tement, pour  toute  personne  d'esprit  non  prévenu,  il  s'agit  là  d'une 
donation  intégrale  que  ne  limitait  ni  ne  tempérait  aucune  réserve; 
d'une  cession  pure  et  simple,  en  suite  de  quoi  les  provinces  cédées 
furent  soumises  à  l'absolue  souveraineté  et  devinrent  la  pleine 
propriété  du  roi  Lagide  :  d'où  cette  conséquence  que  les  tributs 
qui  y  étaient  perçus  durent  être  désormais  versés  en  totalité  au  fisc 
égyptien.  Cependant,  tout  de  suite  après  (^  155),  on  nous  déclare, 
sans  nul  avertissement,  que,   dans  le  temps  qui   suivit  la  paix 
conclue  entre  les  deux  monarchies  orientales,  les  impôts  syriens 
appartenaient  moitié  au  roi  d'Asie,  moitié  au  roi  d'Egypte.  Voilà 
vraiment  qui  était  bien  inattendu  :  il  faut  convenir  que  la  secousse 
est  brusque  et  la  surprise  forte.  Dira-t-on  que  Flavius  Josèphe  a 
cru  qu'Epiphanes,  par  l'effet  d'un  arrangement  diplomatique  très 
singulier  et  dont  on  ne  trouverait  pas  facilement  d'autre  exemple, 
n'exerçait  sur  la  Koilé-Syrie  qu'une  domination  incomplète,  et, 
possédant  la  terre,  n'avait  droit  qu'à  partie  de  l'argent  que  la  terre 
rapportait?  Mais  la  chose,   en  raison  de  son  étrangeté  même,  eût 
mérité  qu'il  y  insistât  d'abord  et  qu'il  la  spécifiât  en  termes  exprès, 
au  lieu  de  s'en  tenir  à  cette  formule  générale  :  Tuapa/topT^aa;  aùroi 
(Antiochus)  tti?  xoiXtjç  Hupi'aç cpspvTiç  ovoaaTi,  qui  devait  néces- 
sairement prêter  à  erreur  ^  A  tout  le  moins,  la  première  phrase 
étant  ce  qu'elle  est,  pour  qu'on  pût,  sans  soubresaut,  passer  à  la  se- 
conde, Josèphe  aurait-il  dû  ajouter  quelques  mots  d'éclaircissement, 
formant  transition  :  le  lecteur  réclame  d'instinct  une  phrase  inter- 

*  Bien  que  je  me  sois  interdit,  dans  la  présente  discussion,  tout  rapprochement 
entre  notre  texte  et  ceux  d'autres  auteurs,  il  m'est  impossible  de  ne  pas  l'aire  observer 
en  note  que  ni  Appien,  ni  Porphyre  (dans  Eusèbe  et  saint  Jérôme^  qui  ont  cru, 
comme  Josèpbe,  qu'Antiochos  III  avait  rendu  la  Koilé-Syrie  à  Epiphanes,  ne  disent 
un  mot  du  partage  des  tributs  qui  aurait  accompagné  la  rétrocession  de  la  province. 
Comment  supposer  cependant  qu'ils  n'aient  pas  eu  connaissance  d'un  l'ait  si  particulier 
et  si  important,  ou  que,  l'ayant  connu,  ils  l'aient  jugé  peu  digue  de  mention?  Le 
silence  qu'ils  ont  gardé  aurait  dû  seul  iaire  naître  des  doutes  sur  le  sens  géneraie- 
pient  attribué  à  notre  §  155. 


166  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

médiaire,  restrictive  de  la  première,  par  là  explicative  de  la 
seconde,  dont  le  sens  soit  celui-ci  :  «  Le  traité  qui  cédait  la  Koilé- 
Syrieà  Ptolémée  maintint  d'ailleurs  formellement  les  droits  d'An- 
tiochos  à  la  moitié  des  tributs  payés  par  les  habitants.  »  Toute 
liaison  de  cette  sorte  faisant  défaut,  il  ne  reste  qu'à  constater  ici 
un  désaccord  trop  apparent'.  Entre  les  conclusions,  que  rien 
n'atténue,  qui  se  dégagent  naturellement  et  légitimement  de  la 
première  phrase,  et  l'indication  que  renferme  la  seconde,  il  y  a 

heurt.  Les  mots   ôiatpeôévTojv twv  oôpojv  sont  en  contradiction 

avec  ce  qui  les  précède,  bien  loin  qu'ils  s'y  adaptent. 

S'adaptent-ils  mieux  à  ce  qui  les  suit?  Il  ne  semble  guère.  Ce 
qui  les  suit,  on  le  sait  déjà,  c'est  l'histoire  du  Tobiade  Joseph.  Or, 
s'il  est  un  fait  qui  ressorte  avec  certitude  de  cette  histoire,  telle 
que  Flavius  Josèphe  l'a  reproduite^  c'est  qu'au  temps  où  se  pas- 
saient les  événements  dont  elle  parle,  la  Koilé-Syrie  obéissait 
sans  nulle  restriction  à  l'autorité  du  roi  d'Egypte  ^.  A  chaque 
ligne,  on  peut  le  dire,  le  Ptolémée  nous  est  représenté  comme  le 
maître  du  pays  :  il  en  tire  des  impôts  qu'il  afferme  en  personne 
et  dont  il  a  lui-même  fixé  le  montant  (§  169  ;  cf.  \lh-Vl^)  ;  il  y 
expédie  des  troupes,  peut  y  installer  des  colonies  militaires  et 
en  chasser  les  habitants  (§  180  ;  159)  ;  il  y  entretient  un  corps  de 
fonctionnaires  (§  220);  il  donne  pleine  faculté  à  ses  agents  de 
traiter  avec  la  dernière  rigueur  les  contribuables  récalcitrants,  les 
autorisant  à  réduire  leurs  villes  par  la  force,  à  prononcer  contre 
<'ux  des  condamnations  à  mort  et  à  opérer  la  saisie  de  leur  fortune 
(§  181-183);  toute  offense  faite,  en  Koilé-Syrie,  à  sa  personne  ou 
à  sa  maison  est  réputée  crime  de  lèse-majesté  et  punie  par  la 
confiscation  des  biens  du  coupable  au  profit  de  son  trésor  fg  1*76; 
cf.  181  ;  183)  ;  enfin,  lorsqu'il  lui  nait  un  fils,  les  principaux  des 
villes  syriennes,  prenant  en  hâte  le  chemin  d'Alexandrie,  s'em- 
pressent à  le  féliciter  et  lui  apportent  des  présents  (i^  196).  En 
revanche,  qu'on  examine  le  récit  d'un  bout  à  l'autre,  on  n'y  dé- 
couvrira nulle  mention  du  roi  d'Asie;  pas  un  mot  n'a  trait,  pas 
une  allusion  n'est  faite  à  une  action  quelconque  exercée  par  lui 
dans  les  provinces  jordaniques  ^  Rien  de  plus  signiticatif  que  ce 
contraste.   Pour  un  lecteur  sans  parti  pris,  tout,  dans  l'histoire 

*  Cf.  Bûcbler,  47  :  a  Dièse  Meldung,  die,  im  Get/ensatze  zu  der  vorhergehendeo, 
von  der  Provinz,  nicht  mehr  als  dem  ausschliesslicheu  Besitze  der  Ptolemiier,  sondern 
uDvermiltelt  nur  voa  dereu  Sleuern  spricht..,   • 

*  Cf.  Biichler,  ,S4  :  •  Koilwsyrieu  isl  souach  durcbgeheuds  als  eine  Provini 
Aegypleu's  dargeslellt. . .  »;  Schûrer,  111,  75,  note  7  :  «  Auch  setzt  die  ganze 
ErzJlhlung  voraus,  dass  Palâslina  damais  noch  den  Ptolemaern  gebôrte.  » 

^  Ct.  Slark.  414;  Buchler,  47-iS  .  «  Sie  [die  Tobiadengeschichle]  keine  Spur 
syrischer  Verwaltung  zeigt.  » 


SUR  UN  PASSAGE  DK  FLAVIUS  JOSKIMIK  167 

des  iTobiàdes,  exclut  et  exclut  absolument  l'idée  d'un  partaî^e, 
aboutissant  dans  le  fait  à  uneco-suzeraineté  des  deux  cours  orien- 
tales, tel  que  celui  qu'on  suppose  avoir  été  établi  en  196  ou  193. 
Je  puis,  en  vérité,  me  dispenser  d'insister  là-dessus  plus  longue- 
ment, tant  les  observations  faites  par  d'autres  sont  déjà  con- 
cluantes '  et  tant  la  lecture  du  texte  de  Flavius  Josèphe  est  à  elle 
seule  décisive.  ^ 

DAs  lors  il  faut  le  reconnaître  avec  simplicité  :  la  phrase  qui 
mentionne  la  «  oiatpsffiç  twv  «poptov  »  —  ou  qui  passe  pour  la  men- 
tionner —  demeure  isolée  dans  notre  chapitre  iv  ;  elle  y  reste  à 
l'état  d'accident,  inexpliqué  et  déconcertant;  non  seulement  elle 
ne  se  rattache  à  rien  de  ce  qui  l'entoure,  mais  elle  est  en  opposi- 
tion avec  tout  ce  qui  l'entoure.  Et  ainsi,  Ja  présence  de  celte 
phrase  dans  ce  chapitre  est  injustifiable  et  incompréhensible;  l'on 
ne  sait  à  quoi  elle  rime,  et,  bref,  elle  a  tout  l'air  de  n'exprimer 
qu'une  ineptie. 


III 


Ni  Wellhausen,  ni  Willrich,  ni  Bùchler  n'ont  reculé  devant  cette 
affligeante  conclusion  ;  et  c'est  de  quoi  je  ne  puis  que  les  ap- 
prouver. Seulement,  ils  ont  jugé  bon,  dans  leur  embarras,  d'in- 
fliger à  Flavius  Josèphe  le  rcMe  de  bouc  émissaire*  ;  et  c'est  en 
quoi  je  crains  qu'ils  n'aient  péché  fort  inutilement  par  témérité. 
A  les  en  croire,  de  Josèphe  viendrait  tout  le  mal.  Ne  sachant  que 
faire  de  la  phrase  qui  les  gêne  et  qui  nous  gêne,  ils  lui  en  imputent 
aussitôt  l'entière  paternité  et  l'en  déclarent  l'unique  auteur  :  tan- 
dis que,  dans  son  chapitre  iv,  le  §  154,  d'une  part,  l'histoire  des 
Tobiades,  de  l'autre,  sont  des  morceaux  empruntés,  c'est  lui  et  lui 
seul  qui,  de  but  en  blanc  et  sans  que  rien  dans  ses  sources  l'y 
invitât,  aurait  imaginé  cette  «  oiatp£(7iç  xcov  cpdpcov  »,  cause  de  tant 

*  Slaik,  Bûchler,  Schiirer,  dans  les  passages  précédemment  visés  ou  cilés.  Cf. 
Wellhausen,  241  ;   Willrich,  98. 

*  Wellhausen,  241  :  •  Die  Behauplun;^,  dass  sich  die  beiden  Mâehle  in  die 
Einkiinl'le  des  Landes  geieilt  hâlten,  ist  eine  Verle^enheilsauskunlt  des  Josephus, 
die  den  Vorausselzuugen  der  Erzâhlung  selber  nicht  gereclit  wird  •  ;  cf.  228,  note  1. 
—  Willrich,  95  :  «  Josephus...  half  sich  mit  der  Verlegcuheilsannahme,  dass  Au- 
l'ochos  der  Kleopalra  die  Sleuern  Syriens,  Phouikien's,  Samareia's  als  Mitgift  gege- 
ben  habe.  »  —  Bùchler,  48  :  €  So  erweist  sich  die  Nachncht  von  der  Theilung  der 
Ëinkûnfte  als  vôUig  unhaltbar  und  sie  ist  als  eine  durch  nichts  begrilndete  Verle- 
genheitsannahme  des  Josephus  anzusehen,  die  zur  Erklàrung  des  Berichtes  nicht 
verwendet  werden  darf.  » 


168  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

de  tracas  pour  ses  lecteurs.  Il  sera  permis  de  trouver  que  c'est  là 
une  conjecture  un  peu  prompte,  et  qu'on  a  trop  négligé  de  l'ap- 
puyer de  raisons  valables.  Mais  le  plus  grave,  c'est  qu'elle  a  le 
tort  de  n'avancer  guère  les  choses,  ou,  à  parler  franc,  qu'elle  ne 
les  avance  pas  du  tout.  Car,  la  responsabilité  de  Josèphe  fùt-elle 
établie,  —  et  elle  ne  l'est  pas,  ne  peut  pas  l'être  S  —  il  s'agirait 
toujours  de  comprendre  comment  il  a  pu  risquer  une  affirmation 
qui  ne  s'accorde  ni  avec  ce  qu'il  a  rapporté,  une  ligne  plus  haut, 
du  traité  conclu  entre  Antiochos  III  et  Ptolémée  V,  ni  avec  le 
long  récit,  relatif  aux  Tobiades,  dont  il  Ta  fait  suivre  pendant 
plusieurs  pages  -.  Là  est  tout  le  problème,  et  qu'on  ne  résout  pas. 
Alléguer  ou  sous-entendre  que  Josèphe  est  un  pauvre  esprit  et 
un  historien  confus  (ce  que,  d'ailleurs,  je  n'ai  garde  de  contester) 
serait,  en  l'espèce,  une  explication  vraiment  trop  simple  pour 
que  personne  la  pût  estimer  suffisante. 

Peut-être,  avant  de  charger  Josèphe  ou  tout  autre  de  l'absurdité 
qu'on  aperçoit  ici,  eùt-il  été  d'une  sage  méthode  de  commencer  par 
rechercher  où  réside  exactement  cette  absurdité.  Se  trouve-t-elle 
dans  le  texte,  ou,  d'aventure,  ne  serait-elle  pas  simplement  dans  la 
version  qu'on  en  a  faite?  L'interprétation  traditionnelle  des  mots 

o'.atpsOÉvTcov Tojv  c^ôocov  ne  mène  à  rien  de  raisonnable  :  voilà 

qui  est  dûment  acquis.  Mais  il  reste  ù  voir  si,  à  l'interprétation 
traditionnelle,  il  n'est  pas  loisible  d'en  substituer  une  meilleure. 

*  On  voit,  par  la  noie  2  de  la  page  précédente,  que  le  terme  de  t  Verlegenheitsan- 
nahme  »  a  fait  fortune.  Suivant  les  trois  auteurs  que  j'y  ai  cités,  Josèphe  se  serait  trouvé 
dans  un  grand  embarras,  d'où  il  n'aurait  pu  se  tirer  que  par  un  expédient  de  ren- 
(tontre,  à  savoir  par  raffirmalion  aventurée,  contenue  dans  son  §  15.*).  Mais  j"avoue  qu'à 
l'examen  les  angoisses  de  Josèphe  ne  mapparaissent  pas  avec  tant  de  clarté.  Willrich 
(95)  explique  du  mieux  qu'il  peut  en  quoi  elles  auraient  consisté  :  —  Josèphe  savait 
que  la  Koilé-Syrie,  conquise  par  Antiochos  III  de  203  à  198,  demeura  en  son 
pouvoir  même  après  le  traité  de  196  et  le  mariage  de  Cléopâtre;  —  mais  il  croyait 
savoir  d'autre  part,  que  l'histoire  des  Tobiades  était  contemporaine  du  règne  de  Pto- 
lémée Epiphanes;  —  or,  cette  histoire  lui  montrait  un  Ptolémée  (qu'il  pensait  donc 
être  Ptolémée  V)  levant  des  impôts  en  Koilé-Syrie;  —  pour  expliquer  ce  fait, 
Josèphe  s'est  ainsi  vu  réduit  à  supposer  qu'Antiochos  111  avait  renoncé  en  faveur  de 
son  gendre  à  la  moitié  des  tributs  payés  par  les  Koilé-Syriens.  Voila  qui  est  bien 
déduit  et  qui  serait  spécieux,  n'était  qu'on  débute  dans  celte  argumeutaliou  par  un 
postulat,  à  mon  avis  inadmissible.  Où  prend-on  que  Josèphe  savait  qu'après  19r>  la 
Koilé-Syrie  resta  au  pouvoir  des  Séleucides?  Il  l'a  si  peu  su,  qu'il  déclare  préci- 
sément le  contraire,  et  que,  dans  la  phrase  qui  forme  sou  §  154,  il  attribue  catégo- 
riquement au  roi  d'Egypte,  nous  l'avons  vu  de  reste,  la  possession  de  la  province.  La 
vérité,  c'est  que  It  problème,  dont  le  §  155  des  Antiquités  Juda?çues.  si  l'on  en 
croit  nos  critiques,  serait  la  solution  désespérée,  ne  s'est  jamais  posé  a  l'esprit  de 
Josèphe. 

*  Voyez  la  juste  remarque  de  Buchler,  47  :  «  Bleibt  es  noch  immer  tinverstandlich, 
wie  Josephus  die  Theilung  der  Steuern  unter  die  beiden  Kônige  mit  dem  in  der 
Tobiadengeschichle  Erzahlten  in  Einklang  gebracht  hat.   » 


SUR  UN  PASSAGK  DK  KLAVIIJS  JOSKLMIi:  l»y.j 


IV. 


Ce  qu'on  aurait  dû  remarquer  depuis  longtemps,  c'est  que  la 
phrase  en  discussion  est  au  moins  équivoque.  On  peut  la  traduire 
comme  on  a  toujours  fait,  sauf  à  s'engager  dans  l'impasse  que  j'ai 
signalée  et  que  d^autres  avaient  signalée  avant  moi  ;  on  peut  aussi 
en  proposer  une  traduction  difl'érente.  Le  point  capital  ici,  c'est 
évidemment  la  signification  des  mots  oî  àa-pôTEso-.  [îix^'.ÀET; ,  to^ç 
pafftXeUfTtv.  Tout  le  monde  s'est  mis  en  tète  qu'ils  désignent  les  rois 
d'Asie  et  d'Egypte  :  mais  il  n'y  a  à  cela  nulle  nécessité.  Dans  la 
phrase  (§  154)  qui  précède  immédiatement  la  nôtre,  il  est  fait 
mention  d'Antiochos  III,  de  Ptolémée  V  et  de  Cléopâtre.  On  voit 
mal  pourquoi  les  àfx-^orspo,  [iactXsTç  seraient  les  deux  premiers  per- 
sonnages plutôt  que  le  second  et  le  troisième.  Le  fait  est  que,  si 
nous  nous  reportons  à  l'histoire  du  Tobiade  Joseph,  dans  la  partie 
de  cette  histoire  où  est  raconté  le  séjour  d'Hyrkan  en  Egypte, 

nous  lisons,  au  §  208  :  xal  tç-sîç  oiaÀ'.Tifov  Yjasca;  ô  '^'sxavbç  -/iTTcaTaxo 
Toùç  paffiXéaç"  ol  oï  acrasvtoç  aùxôv  eloov...,  et,  au  J^  218  :  o  ô"Toxavbç 
O'j;  tuvr|(TaTO  TraTÔa;  àxarov  xai  TraoOevo'jç  ToaauTaç...  TrpoaYjvayîv  xoùç  akv 
T<o  PaffiAcï,  xàç  oï  xr,  KXcOTTOtxoa"  tcxvxojv  oï  Oa'j[i.a(7xvx(ov  xy,v  Tra:-'  zA-iox 

xwv  oo)0(ov  TToXuxÉXs'.av  xal  xwv  [iaa'. Xîojv  aùxtov  *...  Personne  ue  niera 
que,  dans  ces  deux  passages,  le  titre  de  paatXstç  s'appUque  au  roi  et 
à  la  reine  d'Egypte.  Il  en  peut  être  de  même  dans  celui  qui  nous 
occupe.  De  sorte  que  rien  ne  sera  plus  légitime  que  la  version 
suivante  :  «  Les  tributs  [de  la  Koilé-Syrie]  ayant  été  partagés 
entre  les  deux  souverains  de  l'Egypte,  les  principaux  de  chaque 
pays  achetaient  le  droit  d'imposer  leurs  concitoyens,  et  remet- 
taient au  roi  et  à  la  reine  le  montant  des  tributs,  qui  avait  été  fixé 
à  l'avance.  » 

Philologiquement, cette  traduction  est  irréprochable,  et  j'estime 
qu'elle  donne  un  sens  parfaitement  plausible.  Il  faut  cependant 
prévoir  une  objection.   Plusieurs,   sans   doute,  auront  peine   à 

*  L'expression  ot  paoïXôt;,  «  les  rois  »,  désignant  le  roi  et  la  reine  d'Egyple,  était 
si  bien  passée  dans  Tusage,  à  la  basse  époque  alexandrine,  qu'on  la  retrouve  même 
chez  les  Latins.  On  lit  dans  T.  Live  :  Alexandream  ad  Piolemctum  et  Cleopatram 

reges  M.  Atilius,  M'.  Acilius  lejjati dona  tulere  [xxvii,  4,  10  ;  —  Legati  ab  Plc- 

lemaeo  et  Cleopalra  rer/ibus  ^Egypti  gratulanles  quod  M'.  Acilius  consul  Auliochum 
refçem  Graecia  expuli^set  venerunt;  —  re^es  .Egypti  ad  ea  qua;  censuisset  Senatus, 
paratos  fore,  gratise  regibus  aclsD  (xxxvii,  3,  9-11);  —  Priœi  Alexandrini  legati  ab 
Ptolemfeo  et  Cleopatra  rerfibus  vocati  sunt  (xliv,  19,  6);  —  Ee  gi  bu  s  JEgypii^  Ptole- 
mtfco  Cleopatraeque,  si  quid  pcr  se  boni  commodique  evenisset,  id  magno  opère 
Senatum  laplari  (xlv,  13,  7). 


170  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

admettre  ce  partage  des  impôts  provinciaux  qu'auraient  consenti, 
selon  notre  explication,  le  roi  et  la  reine  d'Egypte  :  ils  allégueront 
probablement  que  l'histoire  des  Lagides  ne  nous  a  rien  révélé 
de  tel,  et  que  nul  écrit  d'origine  alexandrine,  nul  document 
public  des  temps  ptolémaïques  arrivé  jusqu'à  nous  n'offre  trace 
d'un  pareil  lait.  Il  se  peut;  mais  la  question  n'est  pas  de  savoir 
si  le  partage  dont  il  s'agit  a  été  un  fait  réel  ;  la  question  est  de 
savoir  si  le  chroniqueur  anonyme  à  qui  Flavius  Josèphe  emprunta 
l'histoire  des  Tobiades  —  car  il  n'y  a  nul  motif  pour  faire  inter- 
venir ici,  comme  on  l'a  voulu,  la  personne  même  de  Josèphe  — a 
pu  en  avoir  l'idée  et  croire  à  sa  réalité.  Or,  la  chose,  à  la  réflexion, 
est  tout  à  fait  vraisemblable.  La  plupart  des  critiques  s'accordent 
aujourd'hui  à  reconnaître  que  cet  anonyme,  —  sans  doute  un 
habitant  de  la  Saraarie  \  —  rédigea  sa  narration  à  une  époque 
assez  basse  :  certainement  après  193,  à  cause  du  nom  de  Cléopâtre 
qu'il  donne  à  la  reine*;  très  probablement  dans  le  courant  ou 
vers  la  fin  du  ii^  siècle^;  peut-être  même,  comme  le  suppose 
Willrich^  après  Tannée  107,  en  raison  de  la  mention  spéciale 
qu'il  fait  de  la  ville  de  Skythopolis.  Il  paraît  donc  sur  qu'il  écrivait 
dans  un  temps  oîi,  en  vertu  d'un  régime  qui  datait  du  règne  de 
Philométor%  les  reines  d'Egypte  étaient  associées  officiellement 
et  dans  les  formes  les  plus  solennelles  à  l'exercice  de  la  puissance 
royale.  C'était  là  une  particularité  propre  au  royaume  Lagide, 
sans  analogue  dans  les  autres  monarchies,  dont  notre  auteur, 
comme  tous  les  étrangers,  ne  pouvait  manquer  d'être  frappé.  II 
en  a  été  vivement  frappé  en  effet  :  la  preuve  en  est  que, sans  souci 
ou  plut(3t  sans  soupçon  de  Tanachronisme,  il  l'a  transportée  dans 
son  récit,  bien  qu'il  s'agisse  dans  ce  récit  d'  une  époque  fort  anté- 
rieure à  celle  où  vivait  le  narrateur.  Ce  qu'on  observe,  dès  qu'on 
parcourt  l'histoire  des  Tobiades,  c'est  que  Cléopâtre  y  occupe 
presque  autant  de  place  que  Ptolémée  "  :  non  seulement  le  roi 
paraît  ordinairement  accompagné  de  la  reine';  non  seulement 
les  deux  souverains  font  ensemble  accueil  aux  étrangers  de 
marque'';  non  seulement  la  reine  reçoit  d'eux  les  mêmes  hom- 

1  Willrich,  99-100,  101-102;  Buchler.  80  el  suiv.,  95. 

2  Voir  Buchler,  106. 

*  Buchler,  même  pajfe. 

'*  \\'illrich,  98-99.  Voir  cependant  les  objcclious  de  Buchler,  '0,  note  74. 
»*  Su'dck,   Di/>i.  de,-    Pfolctn.,   2-3,   32;    cf.    Wilcken,   Berl.    Philol.   Wochensckr., 
1896, 1493, 

^  Buchler,  106,  a  déjà  laii.  avec  raisou.  celle  remarque. 
7  §  171  ;  208  el  suiv. 

*  Mêmes  passages. 


SUR  UN  PASSAGE  DE  FLAVIUS  JOSEPHE  171 

mages  et  les  mêmes  présents  que  le  roi  *  ;  mais,  de  plus,  on  nous  la 
montre  participant  aux  affaires  publiques  :  c'est  ainsi,  pour  citer 
un  trait  caractéristique,  que  l'ambassadeur  Athénion,  à  son  retour 
de  Judée,  l'informe,  aussi  bien  que  Ptolémée,  des  résultats  de  sa 
mission^.  Visiblement,  pour  riiistorien  de  Joseph  et  d'Hyrkan, 
l'Egypte  —  l'Egypte  de  tous  les  temps,  à  l'image  de  celle  du  sien 
—  était  un  pays  où  les  reines  étaient  les  égales  des  rois.  Plein  de 
cette  idée,  on  comprend  que,  par  une  suite  facile  d'exagérations, 
il  se  soit  persuadé  que  cette  égalité  se  retrouvait  en  toutes  choses; 
qu'ainsi,  les  deux  souverains  avaient  l'un  et  Taulre  un  droit  pareil 
sur  les  revenus  de  l'Etat;  qu'en  conséquence,  ils  les  divisaient 
exactement  entre  eux;  et  que  les  impôts  des  provinces,  partagés 
par  moitié,  allaient  remplir  à  la  fois  et  le  trésor  du  roi  et  celui  de 
la  reine.  Ce  qui  put  rendre  Terreur  plus  aisée,  c'est  qu'au  temps 
où  fut  composée  la  chronique  qui  célébrait  la  fortune  des  To- 
biades,  la  Palestine  ayant  cessé  depuis  bien  des  années  de  dé- 
pendre de  la  monarchie  Lagide,  ses  relations  avec  l'Egypte 
s'étaient  sensiblement  relâchées  :  rien  d'étonnant  si,  chez  les  Hé- 
breux demeurés  au  pays,  on  n'avait  plus  alors  qu'une  connais- 
sance assez  incertaine  des  règles  de  l'administration  alexandrine. 
Ainsi,  l'objection  qu'on  pouvait  d'abord  être  tenté  de  m'opposer 
se  laisse  facilement  écarter.  —  A  peine,  à  présent,  est-il  besoin  de 
faire  remarquer  par  quels  avantages  se  recommande  l'interpréta- 
tion nouvelle  que  j'ai  proposée.  Avec  elle  s'évanouissent  toutes  les 
difficultés  qu'entraînait  l'interprétation  traditionnelle  et  qui,  tout 
à  l'heure,  nous  arrêtaient.  Les  incohérences  et  les  contradictions 
relevées  plus  haut  disparaissent;  tout,  maintenant,  se  suit  bien  et 
marche  à  souhait  :  —  Les  pays  syriens  ont  été  cédés,  en  toute 
propriété,  par  Antiochos  à  son  gendre;  —  Ptolémée  et  Gléopàtre 
s'en  sont  partagé  la  jouissance;  —  tous  les  tributs  que  doivent 
ces  pays  sont  donc  désormais  affermés  et  perçus  pour  le  compte 
de  la  couronne  égyptienne,  avant  d'être  versés  entre  les  mains 
du  roi  et  de  la  reine;  —  l'histoire  du  fermier  Joseph  nous  montre 
précisément  comme  il  est  procédé,  au  nom  de  l'Egypte,  à  leur 
adjudication  et  à  leur  rentrée.  On  le  voit  :  la  phrase  relative  à  la 
«  Siatpedt;  twv  <^6oojv  »  n'est  plus  pour  causer  au  lecteur  ni  gêne  ni 
surprise;  elle  renferme  une  indication  qui  se  concilie  sans  nulle 
peine  avec  les  données  du  contexte.  A  la  vérité,  il  peut  sembler  au 
premier  moment  que  cette  indication  n'avait  rien  d'indispensable 


*  §  208;    217.    Comp.,  au  §  185,  ce  qui  est  dit  des  cadeaux  que  Joseph  expédie, 
de  Syrie,  au  roi  et  à  la  reine. 
«  §  167. 


172  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

et  qu'on  l'eût  omise  sans  dommage;  je  crois  cependant  que  nous 
nous  apercevrons  dans  un  instant  qu'elle  n'était  pas  superflue. 


On  ne  s'étonnera  pas,  au  point  où  nous  sommes  parvenus,  que 
ma  traduction  me  paraisse  devoir  être  préférée  à  celle  qui  a  eu 
cours  jusqu'ici.  J'ose  me  flatter  que  quelques-uns  de  mes  lecteurs 
partagent  déjà  cette  préférence.  Ils  sont  en  droit,  toutefois,  d'at- 
tendre de  moi  un  supplément  de  preuve  qui  lève  tous  leurs  doutes 
et  fixe  leur  opinion.  Le  mieux,  certainement,  serait  que  quelque 
passage  de  notre  chapitre  iv,  inintelligible  ou  peu  intelligible  tant 
qu'on  s'en  est  tenu  pour  le  .^  155  à  l'ancienne  interprétation, 
s'éclairât,  grâce  à  la  nouvelle,  d'une  pleine  lumière.  Il  me  semble 
que  ce  cas  se  présente  et  que  les  §  177-178  nous  viennent  fournir 
à  propos  la  confirmation  souhaitée. 

On  nous  raconte  là  comment,  le  jour  où  devait  être  adjugée,  à 
Alexandrie,  la  ferme  des  impôts  de  la  Koilé-Syrie,  le  Tobiade 
Joseph  se  lit  fort,  en  présence  du  roi,  de  tirer  des  contribuables 
une  somme  double  de  celle  qu'offraient  ses  concurrents,  les  autres 
candidats  à  la  ferme.  Le  récit  se  poursuit  ainsi  :  zoZ  oï  paaiXéo); 

7;0£ct)ç  àxouaavToç  xat  w;  au^ovTi  tYjV  Trpôffooov  aÙTOu  xaxaxupouv  ttjv  ojvTjV 

TWV    TsXwV    £X£lVO)    OYjaaVTOÇ,     £pOJJL£VÛU    û£    S.I   XOÙ    TOÙç   £YYU'iri<70{Jl.£V0UÇ   aUTOV 

£;(£t,  ccpoop'  à(7T£icDÇ  à7i£xpivaT0"  ((  oojao)  yàp,  £i7r£v,  àvôpcoTTOuç  àyaôoùç  xai 
xaXoùç,  oTç  oùx  à':ri(7Trj(7£T£  *.  »  AÉyEtv  81  xoûxouç  oI't'.veç  eIev  ecxovtoç, 
«  auTOv,  eItiev,  m  pa(7i)v£u,  es  t£  xai  Tr,v  yuvaTxa  Tr,v  cYjV  ûttIû  ÉxaxÉpou 
{xÉpouç  £yYUT,(70[JL£vouç  oiotoixt  <^G'oi?^^.  »  r£Àà(7aç  8  b  nToX£{i.aToç 
cuv£y(6pY|C£V  aÙTw  oiycc  T(ov  ôixoXoyouvxov  iyzw  rà  T£Ar|.  Ce  qui,  tra- 
duit littéralement,  veut  dire  (on  ne  saurait  citer  une  traduction 
plus  littérale  que  la  version  latine  reproduite  dans  l'édition  Di- 
dot)  :  «  Quum  autem  rex  ista  libenter  audivisset  dixissetque  se 
ei,  ut  qui  reditus  suos  augeret  et  ampliflcaret,  vectigalia  addicere, 
praoterea  vero  id  eum  interrogaret  ecquos  sponsores  dare  posset, 

*  Le  manuscrit  P  {Palatinus  du  Vaticau)  donue  àuiaTyiGETat.La  leçon  à7ri(jr»iffST£ 
est  celle  de  VEpitome  de  Josèphe;  elle  ne  peut  faire  l'objet  du  moindre  doute,  et  c'est 
avec  pleine  raison  qu'on  l'a  reçue  dans  la  vulgale. 

*  Dans  la  vulpate.  on  lit  SiôcofAÎ  oo'..  La  présence  du  second  mot  se  concilierait 
assez  mal  avec  Pinterprélatiou  que  je  proposerai  plus  loiu  ;  en  etiet.  comme  on  le 
verra,  ce  n'est  pas  au  roi  seul,  c'est  au  roi  et  à  la  reine  que  Joseph  doit  olfrir  des 
garants.  Mais,  précisément.  M.  Théodore  Reinach  veut  bien  me  faire  remarquer  que 
le  mot  (701  est  omis  dans  le  manuscrit  {E)  de  VEpitome,  dont  les  leçons,  pour  les 
1.  Xl-XV  des  Antiquités  Judaïques  (cf.  Niese,  Fi.  Josephi  Opéra,  III,  praef.,  xxxvi), 
méritent  souvent  la  plus  séneusr  considération. 


SUR  UN  PASSAGE  DE  FLAVIUS  JOSKPIIE  173 

festive  admodumrespondit  :  «  Dabo  enim,inquit,bonos  et  honestos 
homines  quibus  non  dif/îdelis.))  Quamque  iuberet  [rex]  ut  qui  sint 
isti  diceret,  «  Te  ipsum,  subiecit,  o  rex,  coniungemque  tuam  pro 
iilraque  parie  sponsores  do.  w  llic  subridens  Ptolema'us  ei  vecti- 
galia  sine  fideiiussoribus  addixit.  » 

Je  crois  que  cet  entretien  du  roi  et  de  Joseph  n'a  jamais  ét(5 
pleinement  compris.  Il  est  deux  endroits,  en  effet,  où  me  semblent 
avoir  bronché,  sans  exception  *,  les  traducteurs  ou  commentateurs 
que  j'ai  consultés.  A  tous,  autant  que  je  puis  voir,  le  verbe  au 
pluriel  àTTicTrirrcTs,  d'une  part,   les   mots  0~kp   ÉxaTÉpo-j  aéio-j;,  de 
l'autre,  ont  causé  le  môme  grand  embarras.  Citons  quelques  exem- 
ples. Le  vénérable  Arnauld  d'Andilly  écrit  -  :  «  Le  roy  vit  avec 
plaisir  que  Joseph  augmentoit  ainsi  son  revenu;  mais    il    luy 
demanda    quelles  cautions  il  luy  donneroit.  Il  luy  répondit  de 
bonne  grâce  qu'il  luy  en  donneroit  d'excellentes  et  telles  qu'i^  ne 
pourrait  les  refuser.  Le  roy  luy  ayant  commandé  de  les  nommer, 
il  luy  dit  :  «  Mes  cautions,  sire,  seront  Votre  Majesté  et  la  Reine, 
qui  tous  deux  répondrez  pour  moy.  »  C'est  se  tirer  d'affaire  com- 
modément, mais  en  manquant  à  tous  ses  devoirs  de  traducteur  : 
au  pluriel  oLTzicTr^dzzz  qui  le  gênait,  on  voit  qu'Arnauld  a  substitué 
tout  simplement  un  singulier,  puis  que,  par  un  escamotage  oppor- 
tun des  mots  (j-ïo  éxxTÉpou  [xéûouç,  il  a  supprimé  la  seconde  des  deux 
difficultés  qu'il  avait  à  résoudre.  Moins  cavalière,  l'interprétation 
du  P.  Gillet  n'est  guère  plus  satisfaisante  ^  :  a  Le  roi  accepta  avec 
plaisir  des  off'res  qui  augmentoient  aussi  considérablement  ses 
revenus...  Mais  avez-vous,  dit-il  à  Joseph,  des  cautions  à  donner  V 
Oui,  répondit  agréablement  ce  jeune  homme,  j'en  ai;  ce  sont  des 
gens  de  bien,  fort  solvables,  et  dans  lesquels  vous  aurez  pleine 
confiance.  Et  qui  sont-ils,  poursuivit  le  roi?  Vous-même,  d'une 
part,  répliqua  Joseph,  et  la  reine,  de  l'autre,  vous  répondrez  l'un 
et  l'autre  pour  moi.  »  Il  est  manifeste  que  les  mots  ûTcàp  éxaTÉpou 
{AÉpou;  sont  ici  pris  à  contre-sens;  et  pour  ■Ji■:zlfJzr^alzt,  si  on  Ta 
prudemment  rendu  par  un  pluriel  qui,  au  premier  abord,  peut 
faire  illusion,  il  apparaît  trop  cependant  que  ce  n'est  qu'un  faux 
pluriel,  et  qu'au  verbe  le  traducteur  donne  pour  sujet  Ptolémée, 
ce  qui,  sans  doute,  est  un  peu  osé.    Whiston,  dont  la  version 
anglaise  est  justement  appréciée,  ne  se  montre,  dans  le  passage 

*  Peut-être  cependant  la  vérité  a-t-elle  été  entrevue  par  MalFahy  {Emp.  of  the 
Ptolemies,  218)  :  «  .  ..  Josephus  offers,  by  way  of  joke,  the  king  and  queen  as 
sureties  to  themselves  on  his  part.  *  Le  savant  historien  n'a,  du  reste,  pas  mieux 
compris  que  les  autres  commentateurs  en  quoi  consiste  la  plaisanterie  du  Tobiade. 

*  Œuvres  de  Josèphe,  Paris,  1667,  I,  43. 

>  Œuvres  de  Josèphe,  Paris,  1756,  II,  497. 


174  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

qui  nous  intéresse,  guère  supérieur  à  ses  confrères  *  :  «  The  king 
was  pleased  to  hear  that  offer,  écrit-il . . .  But  ^vhen  he  asked  him 
this  question  :  «  Whether  he  had  any  sureties,  that  would  be  bound 
for  the  payment  of  the  money?  »,  he  answered  very  pleasantly  : 
«  I  will  give  such  security,  and  those  of  persons  good  and  respon- 
sible,  and  which  you  shall  liave  no  reason  to  distrust.  »  And  when 
he  badehim  narae  them  who  they  were,  he  repiied  :  «  I  give  thee 
no  other  persons,  o  king,  for  my  sureties  than  thyself  and  this  thy 
wife,  and  you  shall  be  security  for  hoth  parties,  w  Assurément, 
«  you  shall  hâve  no  reason  to  distrust  »  est  une  traduction  exacte 
de  a  olç  GÙx  aTctcTYjTcTô  )) ,  pulsquo  l'anglais  suit  ici  le  grec  mot  à 
mot;  mais  quel  est  le  sujet  du  verbe,  et  d'oii  vient  que  ce  sujet  est 
au  pluriel?  Voilà  ce  qu'on  aimerait  à  savoir, ce  que  Whiston  aurait 
dû  indiquer,  et  sur  quoi  il  glisse  prestement.  Le  lecteur  ignorant 
quelles  personnes  représente  le  pronom  «  you  »,  la  phrase  de 
Joseph  en  demeure  parfaitement  incompréhensible.  Quant  à  tra- 
duire ÛTîko  £xaT£poi»  [jt,£pouç  par  «  forboth  parties  »,  c'est  un  contre- 
sens (si  ce  n'est  un  non-sens?)  qui  égale  pour  le  moins  celui  du 
P.  Giliet^. 

Ajoutons  maintenant  que,  chez  tous  ces  interprètes,  la  seconde 
réponse  faite  au  roi  par  le  fermier  Joseph,  —  laquelle,  au  dire  de 
son  biographe,  est  pourtant  extrêmement  plaisante  (ccpôSp'  àarsctoç 
àTTsxptvaTG  2)  —  nous  paraît  à  nous  singulièrement  froide  et  tout  à 
fait  dépourvue  d'agrément.  Ptolémée  exigeant  de  lui  des  cautions, 
au  moment  où  il  lui  va  confier  la  ferme  de  la  Koilé-Syrie,  le 
Tobiade  déclare  qu'il  choisit  pour  garants  et  le  roi  lui-même  et  la 
reine.  Franchement,  à  qui  persuadera-t-on  que  cela  soit  fort  spiri- 
tuel? Convenons  qu'il  est  impossible  de  goûter  le  sel  de  cette  niaise 
turlupinade,  et  difficile  même  de  lui  trouver  un  sens.  S'il  suffit 
d'elle  pour  que  le  roi,  ravi,  ne  se  tienne  pas  de  joie,  comme  il  est 
dit  au  §  178,  c'est  que  vraiment  sa  bonne  volonté  était  grande 
ou  que  les  dieux  l'avaient  fait  d'un  heureux  naturel. 

*  Antiqtnties  of  the  Jewi  (1737),  p.  491  de  l'éd.  de  1897. 
.  *  Lumbroso  [Rcch.  sur  l'Economie  politique  de  VEgypte,  325)  a  présenté  des 
mêmes  mots  une  explication  originale,  qui  mérite  d'être  citée  :  •  Joseph,  dit-il, 
s'étant  proposé  pour  la  ferme  ei  des  imi)ôis  et  du  revenu  des  confiî^cations  (cf.  §  176  : 
aÙTÔ;  6è  oiuXantova  (rip-riv  Tôiv  Te).û)v]  ôcocreiv  tjttktxvsïto  xai  twv  àtxapTÔvxtov  el;  tÔv 
oîxov  aÙTOy  xà;  oùataç  àva7i£|x<|'îiv  aOxo)  •  xaî  yàp  xoOxo  xoî;  xéXeai  (juvsTriTrpdcaxexo), 
le  roi,  après  la  lui  avoir  adju{^ée,  demanda  aussitôt  queUes  étaient  ses  cautions.  Le 
fermier  promit  alors  des  fidéijusseurs  diurnes  de  toute  confiance,  et,  pressé  de  les  in- 
diquer, déclara  que  celaient  le  roi  et  la  reine  qu'il  donnait  cocnme  f^arants /jour  l'un 
et  Vautre  revenu  (ÛTràp  exaxepou  p-épou;)  ».  Cette  interprétation  est  ingénieuse,  mais 
tirée  de  bien  loin  et  trop  compliquée  ;  je  ne  pense  pas  qu'on  puisse  s'y  tenir.  Ce  qui 
sulfirait,  au  surplus,  à  la  faire  condamner,  c'est  qu'avec  elle  la  plaisanterie  de  Joseph 
demeure  aussi  peu  intelligible  qu'avec  les  précédentes. 

'  §  178. 


SUR  UN  PASSAGE  DE  FLAVIUS  KJSKPHE  175 

Mais  cependant  tout  change  et  tout  s'arrange,  sitôt  qu'on  entend 
la  phrase  . .  .o'.a'.ûEOév-rwv  . .  .roiv  'fosov  comme  j'ai  proposé  tout  à 
l'heure  qu'on  l'entendît.  D'abord,  on  démf^le  sans  peine  la  signifi- 
cation des  mots  (jtzïo  àxaTÉpou  [xÉsouç  :  les  deux  «  aÉçr,  »  sont  les 
deux  parts  des  impôts  syriens,  afférentes  l'une  au  roi,  l'autre  à  la 
reine.  Pour  chaque  part  il  faut  une  caution;  ainsi,  chacun  des  deux 
souverains  a  besoin  d'un  garant  :  de  là  la  phrase  de  Joseph  :  oojtco 

vas...    àvOs(.')-0'j;.  .  .    oU   où/c  '/-'.tt/iTstî,     OÙ    le    verbe    à-'.TTYjTSTS    a 

naturellement  pour  sujets  Ptolémée  et  Gléopâtre.  Et  quant  à  la 
plaisanterie  du  fermier,  on  voit  nettement,  à  présent,  en  quoi  elle 
consiste;  si  elle  ne  mérite  pas  l'éloge  trop  .véhément  qu'en  fait  le 
narrateur,  elle  ne  laisse  pas  néanmoins  d'être  assez  gentiment 
malicieuse  :  au  roi,  Joseph  offre  pour  garant  sa  femme;  à  la  reine, 
il  offre  son  mari;  les  deux  époux  devront  répondre  l'un  pour 
l'autre.  —  Ainsi,  l'explication  que  j'ai  donnée  du  .§  155  une  fois 
admise,  les  .^«^j  n7-I78  se  trouvent  expliqués  du  même  coup  dans 
toutes  leurs  parties,  et  rien  ne  subsiste  des  obscurités  qu'on  y 
rencontrait.  Je  ne  pouvais,  en  vérité,  désirer  une  contre-épreuve 
plus  concluante,  ni  par  où  apparût,  avec  plus  d'évidence,  la  nécessité 
de  l'interprétation  que  j'ai  adoptée.  Celle-ci  nous  livre  le  mot  d'une 
énigme,  insoluble  jusque-là,  et  qui  avait  rebuté  les  plus  clair- 
voyants. 


VI 


Les  résultats  très  simples  auxquels  aboutit  cette  étude  doivent 
être  précisés  en  peu  de  mots  : 

l**  Les  manuels  d'histoire  ancienne  nous  enseignent  communé- 
ment qu'après  le  mariage  de  Gléopâtre,  fille  d'Antiochos  III,  avec 
Ptolémée  V  Epiphanes,  les  revenus  de  la  Koilé-Syrie  furent  attri- 
bués mi-partie  au  royaume  d'Egypte,  mi-partie  au  royaume  d'Asie. 
Cette  opinion  doit  être  abandonnée.  Elle  se  fondait  uniquement, 
prêtant  d'ailleurs  aux  plus  graves  objections  historiques  *,  sur  une 

•  On  est  en  droit  de  s'étonner,  en  effet,  que  les  critiques  qui,  comme  Mommsen. 
Wilcken,  Niese,  sont  convaincus  —  et  convaincus  avec  juste  raison  —  que,  de- 
puis le  début  du  m»  siècle,  la  Koilé-Syrie  dépendit  complètement  des  Séleu- 
cides,  puissent  croire  en  même  temps  au  partage  des  tributs  de  la  province. 
On  serait  curieux  de  savoir  par  quel  biais  ils  accordent  ceUe  croyance  avec 
l'affirmation  si  catégorique  de  Polybe,  reproduite  plus  haut  —  èîrst'ôovTo  uàv-rî;  ol 
itpoetpYijjLévoi  TOTTOi  TOÏç  èv  Supta  paa-.XeOaiv  (xxviii,1,  2-3)  — ,  et  avec  les  passages  si 
explicites  du  11»  livre  des  Macchabées,  qui  nous  montrent  Héliodore,  agent  de  Sé- 
leukos  IV,  réclamant  pour  son  prince  les  trésors  déposés  dans  le  temple  de  Jéru- 
salem. Ce  sont  là  des  textes  dont  il  est  impossible  de  taire  bon  marché;  et  force  est 
de  reconnaître  qu'ils  contredisent  tout  à  fait  l'hypothèse  du  partage. 


176  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

certaine  façon  de  traduire  une  certaine  phrase  de  Flavius  Josèphe. 
Or,  cette  traduction,  inacceptable  à  première  vue  en  raison  des 
contradictions  qu'elle  introduit  dans  le  texte  de  l'historien,  est 
manifestement  viciée  par  le  plus  fâcheux  contre-sens.  Il  ne  s'agit, 
dans  la  phrase  en  question,  que  d'un  prétendu  partage  des  impôts 
de  la  Koilé-Syrie  entre  un  roi  et  une  reine  d'Egypte. 

2**  J'ajoute  que  ceux-ci,  bien  qu'ils  portent  les  noms  de  Ptolémée 
et  de  Cléopâtre,  n'ont  sûrement  rien  de  commun  avec  Ptolémée 
Epiphanes  et  la  fille  d'Antiochos  III.  Comme  l'atteste,  en  effet,  le 
rapport  que  nous  avons  établi  entre  elle  et  un  passage  de  l'histoire 
des  Tobiades  (^  177-178),  la  phrase  où  il  est  parlé  du  partage  des 
tributs  émane  du  même  écrivain  à  qui  est  due  cette  histoire  :  c'est 
de  lui  que  Flavius  Josèphe  l'a  prise  ou  en  a  pris  les  éléments.  En 
sorte  que  le  Ptolémée  et  la  Cléopâtre  associés  pour  la  «  ota-'peffiç 
Tojv  oopo)v  »  ne  sont  autres  que  les  souverains»  d'un  caractère  un  peu 
trop  légendaire,  mais  certainement  antérieurs,  s'ils  ont  existé,  à 
l'époque  d'Epiphanes,  qui  sont  censés  avoir  été  les  protecteurs  du 
fermier  Joseph  et  de  son  fils  Hyrkan  '. 

3»  Si  Flavius  Josèphe  a  reproduit  volontiers,  d'après  sa  source, 
la  phrase  qui  a  été  l'objet  d'un  si  long  malentendu,  la  raison 
en  est  sans  doute  que,  rapportant  l'histoire  des  Tobiades  au 
temps  qui  suivit  le  mariage  d'Epiphanes  avec  Cléopâtre  et  pen- 
sant, d'autre  part,  que  la  Koilé-Syrie  avait  formé  la  dot  de  la 
princesse,  il  estimait  tout  naturel  qu'elle  eût  gardé  des  droits 
personnels  sur  les  revenus  de  son  apport.  Au  surplus,  la  présence, 
dans  le  chapitre  IV,  du  §  155  était  nécessaire  pour  que  le  lecteur 
de  ce  chapitre  eût  la  claire  intelligence  des  ,^  177-178. 

4<>  En  somme,  Josèphe,  tout  à  fait  conséquent  avec  lui-même,  a 
simplement  cru,  lorsqu'il  écrivait  son  §  155,  ce  qu'il  croyait  déjà 
en  écrivant  le  §  154  :  que,  depuis  1&6,  les  provinces  syriennes 
étaient  retombées  dans  la  dépendance  exclusive  de  l'Egypte.  C'est 
la  même  erreur  qui  se  trouve  dans  les  deux  passages  et  qui  se 
poursuit  de  l'un  à  l'autre.  Il  est  singulier  qu'on  ne  s'en  soit  pas 
avisé  plus  tôt. 

Maurice  Holleaux. 

'  Cf.  plus  haut,  p.  162,  note  3.  Remarquons,  en  tout  cas,  que  si  l'on  admet  leur 
existence  réelle,  le  nom  de  Cléopâtre  est  lorcément  inexact,  puisque  la  première 
roine  d'Epypte  qui  l'ait  porté  est  la  l'cmme  d'Epiphanes. 


LES 

NOUVEAUX  FRAGMENTS  llÉBUEUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE 

DE  JÉSUS,  FILS  DE  SIRA 

(suite  *) 


Avant  de  poursuivre  la  démonstration  que  nous  avons  entre- 
prise, il  nous  faut  signaler  la  publication  de  deux  nouveaux 
feuillets  du  manuscrit  du  Caire  dont  nous  nous  occupons  pour  le 
moment.  M.  G.  Margoliouth  (qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec 
M.  D.-S.  Margoliouth,  l'auteur  de  la  notice  dont  nous  avons  parlé 
plus  haut,  p.  2)  a  édité  dans  le  dernier  numéro  du  Jewish  Quar- 
terly  Review  (octobre  1899,  p.  1  et  suiv.)  deux  fragments  qui  com- 
plètent ceux  de  Cambridge,  le  premier  s'insérant  entre  les  p.  12 
et  13,  le  second  entre  p.  16  et  \1  ;  l'un  va  du  ch.  xxxi,  12,  à  31  ; 
l'autre  du  ch.  xxxvi,  19,  à  xxxvii,  26.  Le  premier  feuillet  pré- 
sente tous  les  caractères  qui  distinguent  celui  qui  le  précède  et 
celui  qui  le  suit  ;  notamment  il  est  chargé  de  doublets  s'accor- 
dant,  Tun  avec  la  version  grecque  (G.),  l'autre  avec  le  sy- 
riaque (S.). 

Or,  ici  encore,  dans  les  doublets  conformes  à  S.,  nous  consta- 
tons des  indices  indéniables  d'une  traduction  hébraïque  de  S., 
traduction  même  mal  faite,  à  l'occasion. 

»  Voir  plus  haut,  p.  i.  — MM.  Rubeus  Duval  et  Bevau  ont  bien  voulu  me  faire  re- 
marquer que  T1>*T  ID  (plus  haut,  p.  7)  ne  peut  avoir  le  sens  de  «  quoique  petit  »,  et 
que  "lîl  *113^T  ne  signilie  pas  «  peu  ».  Eu  ce  cas,  l'hébreu  ne  serait  donc  coupable  que 
d'avoir  reproduit  servilement  S.  Mais,  à  ma  décharge,  je  dois  dire  que  je  n'ai  pas  été 
seul  à  commettre  cette  erreur.  La  traduction  laline  de  la  Peschito.  dans  la  Polyglotte 
de  Walton,  dit  également  :  «  Audite  doctrinam  meam  licet  extguam  »,  et  <  parum  in 
ea  laboravi  ».  Bien  mieux,  l'arabe,  qui,  comme  on  le  sait,  est  la  version  de  S.,  rend 
pareillement  Itl  II^^T  par  îlbvp,  «  peu  »  ;  quant  à  Ti^^T  TfD,  il  le  traduit  «  par 
un  bref  langage  ». 

T.  XXXIX,  no  78.  12 


178  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Ainsi,  on  lit,  ch.  xxxi,  13  a-13d  : 

:  n:^-i  ^y  nyi  ^s  '  ^dt  A  *  

:  N"ia  fc^b  istt»  yn  b»  «sittj  ^-^y  t-\  B 

:  *  yi2^n  iiyni  ts-'asTsn       i''^  ^y^tn  na^  bD  ""Sd»  ïit  ""D  B 

r^^b  D3  bD  -^sdt:  ^  p  bs»  buS  pbn   Nb  i^^yn  ^  y^  A 

Citons  la  traduction  de  M.  G.  Margoliouth  : 

«  Souviens-toi  qu'un  mauvais  œil  est  une  mauvaise  chose, 

Dieu  hait  celui  qui  a  un  mauvais  œil, 

Et  il  n'a  rien  créé  de  pire; 

C'est  pourquoi  à  toute  occasion  l'œil  laisse  couler  (des  larmes), 

Et  de  la  face  court  la  larme. 

Dieu  n'a  rien  créé  de  pire  que  l'œil, 

C'est  pourquoi  de  la  face  de  tous  court  son  humidité.  » 

Rien  de  plus  instructif  que  de  placer  en  regard  de  ce  texte  G. 
et  S.  : 

G.  '.  [xv'/^ffÔTjTt  oTt  xaxbv  oc:>OaX{xb;  ttovyjoo;. 

otà  toOto  7.710  TravToç  Tcpoccôiiou  oaxpuEi. 

«  Souviens-toi  que  c'est  une  mauvaise  chose  qu'un  œil  mauvais 
(avide)  ; 
A-t-il  été  créé  quelque  chose  de  pire  que  l'œil  ? 
C'est  pourquoi  de  toute  face  il  pleure.  » 

S.  :  «nn  Nb  M5tt  nj-^nTi  5<!rjbfcîN3D  Nr:>  m;iî"^m  ba73 

ny'm  5<ttT  Ns-N  ))2^       n:i'>y  »y^i  n^izb^  D*ip  p  N^n  ban 

«  Car  Dieu  déteste  la  méchanceté  de  l'œil, 
Et  il  n'a  rien  créé  de  pire  '  ; 

*  La  lettre  A  désigne  le  premier  doublet,  B  le  second. 

*  En  marge  yz  •  sache  »,  qui  est  une  correction. 

*  En  marge  ^''^TD- 

*  En  marge  3>'^Dn,  qui  est  un  essai  de  correction. 

*  En  marge  :  (?)  b  pbn  '12  yi,  qu'il  faut  probablement  lire  bN  pbn  ;  la  phrase 
peut-être  est  inlerrogalive,  comme  en  G. 

*  Eu  marge  :  "'SDbTD  h'D  hy,  leçon  fautive  pour  le  deuxième  mot. 

'  A  ce  propos,  montrous  par  un  exemple  avec  quelle  circonspection  il  faut  invo- 
quer les  preuves  eu  faveur  de  Toriginalilé  du  texte  hébreu.  A  bM  NSTtU  \^y  yy 
correspond  en  S.  :  «nbN  N:D  Hj'^y  !m;a"'m  ba)2  «  Dieu  hait  la  méchanceté  de 
l'œil.  »  Or  le  contexte  exige  que  l'original  ait  porté  «  l'œil  mauvais  »,  ce  qui  se  lit 
précisément  en  H.  M.  Margoliouth  fait  remarquer,  à  ce  propos,  que  S.  a  lu  *ny  y*^,  au 

lieu  de  y^,  et  il  en  déduit  avec  apparence  de  raison  que  H.  est  bien  l'original.  Or, 

l'arabe,  ^u»  traduit  S.,  suppose  la  lecture  fe<U}^a  M3V,pe&diDt  exact  de  H. 


NOUVEAUX  FRAGMENTS  IIÉBHEUX  DK  L'ECCLÉSIASTIQUE  179 

C'est  pourquoi  devant  (ou  avant)  toute  chose  *  l'œil  tremble 
Et  de  la  lace  coulent  les  larmes.  » 

Nous  ne  chicanerons  pas  M,  G.  Margoliouth  sur  tel  ou  tel 
détails  de  sa  traduction  que  nous  ne  saurions  accepter,  nous  nous 
arrêterons  seulement  sur  les  deux  mots  que  nousy  avons  soulignés. 
«  C'est  pourquoi  »  répond  difficilement  à  ht  "^d,  qui  peut  unique- 
ment signifier  «  car  celui-là  »,  ou  «  car  cela  ».  C'est  sous  l'in- 
fluence du  contexte  que  M.  Margoliouth  a  rendu  ainsi  ces  deux 
vocables,  peut-être  aussi  à  la  lumière  du  doublet  qui  suit,  où  il  y 
a  p  hy\  qui  effectivement  veut  dire  «  c'est  pourquoi  »,  et  qui  cor- 
respond exactement  à  o'.à  touto  employé  ici  par  G.  D'où  vient 
donc  cette  sorte  de  variante  incorrecte  ?  Il  suffit  de  se  reporter  à  S., 
dont  rhébreu  est  ici  le  calque  parfait,  pour  s'en  rendre  compte  : 

Les  deux  premiers  mots  signifient  bien  «  à  cause  de  cela  », 
«  c'est  pourquoi  »  ;  mais  b::?2,  pris  seul,  se  rend  exactement  par 
■«D,  et  N^rr  par  riT  :  c'est  une  traduction  littérale  et  absurde. 

Nous  pourrions  produire  d'autres  exemples  de  pareils  contre- 
sens qui  se  rencontrent  dans  ce  feuillet,  mais  comme  ils  nous  en- 
traîneraient dans  de  longues  discussions  de  détail,  nous  préférons 
nous  borner  à  celui-ci,  qui  est  topique  et  sur  lequel,  à  notre  avis, 
toute  contestation  est  impossible. 

Qui  plus  est,  tous  les  commentateurs,  entre  autres  Edersheim, 
M.  Félix  Perles-  et,  en  dernier  lieu,  M.  Ryssel,  s'accordent,  avec 
raison  ce  semble,  à  voir  dans  le  dernier  vers  de  S.  une  double  tra- 
duction :  û^itt  b'D  ûnp  )12  «  devant  (ou  avant)  toute  chose  »  est  la 
traduction  de  l'hébreu  b'D  "^sdj:,  et  Ni:N  lt)  «  de  la  face  »  est  une 
autre  interprétation  du  même  mot,  analogue  à  celle  de  G. y  de 
ipêjne  que  i^5>)o"T  N3>m  est  une  variante  de  ]''y  s'-'Tn,  variante  con- 
forme à  la  traduction  de  G.  On  sai.t,  en  effet,  que  la  Peschito  a 
subi  une  revision  d'après  G.  M.  Perles  explique  même  très  ingé- 
nieusement la  cause  de  ces  divergences  :  le  texte  aura  porté  : 
T\iyM2  «  tremble  »  —  S.,  lu  r\yi:ïyi  «  pleure  »  par  G.  Quoi  qu'il  en 
soit,  si  vraiment  S.  est  fait  de  deux  traductions  différentes,  l'hé- 
breu reproduit  non  seulement  une  version  syriaque,  mais  encore 
celle  de  la  Peschito  révisée,  et  nous  avons  ici  un  doublet  formé 
d'une  double  traduction  ! 

*  L'arabe  a  peut-être  bien  compris  le  sens  de  cette  proposition  en  disant  :  «  avant 
tout  autre  organe  ».  C'est  la  traduction  qu'adopte  M.  Hyssel,  dans  2)t«  Apokryphen 
u.  Pteudepigrapken  des  Alten  Testaments^  de  Kautzsch. 

«  Be^ue,  XXXV,  p.  62. 


180  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Autre  particularité  remarquable  que  nous  avons  déjà  constatée 
et  sur  laquelle  nous  avons  appelé  l'attention  :  emploi  du  verbe  pbn 
dans  le  sens  de  «  créer  ».  Cette  fois  il  ne  peut  plus  y  avoir  de 
doute  sur  l'acception  dans  laquelle  l'auteur  prend  ce  mot  :  il 
figure  dans  un  doublet  où  il  correspond  à  ^nn  «  créer  »  employé 
dans  l'autre  doublet*. 

Bien  mieux,  ce  verbe  est  employé  plus  loin,  dans  un  doublet, 
au  passif  [nifal]  :  ^^'yn  pbro  b^rih  Ninn  «  Et  il  (le  vin)  a  été  créé 
dès  l'origine  pour  la  joie  *  »  (xxxi,  27  d).  Là  aussi  ce  verbe  est  le 
synonyme  de  «  créé  ^>  employé  d'abord  en  A  :  '^^'Z^'2. 

Nous  allons  tout  de  suite  dire  l'importance  de  ce  détail,  dans  la 
question  que  nous  examinons,  et,  pour  cela,  nous  demanderons  la 
permission  de  laisser  pour  un  instant  le  chapitre  que  nous  avions 
annoncé  dans  notre  précédent  article. 

Des  savants,  dont  je  ne  veux  pas  dire  dès  à  présent  le  nom,  et 
dont  je  pourrais  invoquer  l'autorité  avec  une  certaine  fierté, 
ont  bien  voulu  m'écrire  qu'ils  adoptaient  mes  conclusions  en  ce 
qui  a  trait  et  au  morceau  final  et  aux  doublets.  Pour  le  morceau 
final,  si  je  comprends  bien  leur  sentiment,  c'est,  à  leurs  yeux,  un 
couplet  ajouté  à  tel  manuscrit  de  l'ouvrage  auquel  il  manquait  et 
qu'un  lecteur  savant  a  emprunté  à  la  version  syriaque.  Cette  con- 
jecture est  celle  qui  m'était  venue  tout  d'abord  à  l'esprit.  Pour 
les  interpolations,  qu'entend-on  par  là?  Sont-ce  les  deux  doublets 
qu'on  appelle  ainsi,  ou  simplement  celui  qui  s'accorde  avec  S.? 
Dans  le  premier  cas,  la  concession  serait  de  poids,  car  elle  consa- 
crerait le  triomphe  de  ma  thèse. 

En  eff'et,  de  quelque  façon  qu'on  considère  l'emploi  du  verbe 
pbn  dans  le  sens  de  créey\  qu'on  y  voie,  comme  nous,  l'infiuence 
de  l'arabe,  parlé  par  l'auteur  de  notre  texte  ^  ou  la  recherche  d'un 
écrivain  prétentieux,  il  est  indéniable  qu'il  détonne  :  il  caractérise 
le  style  d'un  auteur  qui  n'écrivait  pas  comme  tout  le  monde.  Per- 
sonne ne  s'inscrira  en  faux  contre  cette  affirmation.  Eh  bien,  si 
ce  verbe  avec  cette  acception  émaille  tout  aussi  bien  les  préten- 
dues interpolations  que  le  texte  soi-disant  original,  c'est  donc 
que  tinter polateur  et  l'auteur  de  notre  texte  hébreu  sont  une 

*  M.  G.  Margolioulh  est  forcé  de  convenir  que  A  est  sûrement  le  doublet  de  B. 
Plus  loin  il  l'ait  la  même  concession  pour  les  versets  15-16,  et  même  il  conlesse  que 
B  provient  de  S.  Mais,  dit-il,  un  exemple  —  s"il  ny  en  avait  qu'un  !  —  n'est  pas 
sultisant  pour  infirmer  la  thèse  généralement  admise. 

*  Cf.,  XXXIX,  25,  '»Dî<"l73  pbn,  qui  correspond  à  «  a  été  créé  »  en  G.  et  en  S. 

*  Pour  répoudre  a  une  observation  de  M.  Bacber,  il  me  sera  permis  de  rappeler 
que  je  n'ai  jamais  supposé  que  le  traducteur  eût  sous  les  yeux  un  texte  arabe  écrit  en 
caractères  hébraïques,  ni  qu'il  se  soit  proposé  d'écrire  en  arabe.  S'il  s'est  servi  de  ce 
verbe  comme  synonyme  de  5<n:2,  c'est  par  une  confusion  due  à  la  circoûslaace  qu'il 
parlait  l'arabe. 


NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉBREUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE  181 

seule  et  même- personne.  On  ne  soutiendra  pas,  je  pense,  que  Tin- 
terpolateur  supposé  se  serait  ingénié  à  imiter  les  idiosyncrasies  de 
l'auteur. 

Mais  peut-être  seul  le  doublet  emprunté  au  syriaque  est-il  une 
interpolation,  et  l'autre,  d'accord  avec  G.,  représente-t-il  l'ori- 
ginal, bien  conservé  par  cette  version.  Nous  allons  voir  que  cette 
solution  ne  peut  pas  se  soutenir. 

DOUBLETS   TRADUITS   l'UN  DU   SYRIAQUE,    L'AUTRE   DU  GREC. 

Nous  avons  déjà  fait  remarquer  que  certains  doublets  corres- 
pondent l'un  à  S.,  l'autre  à  G.  Tout  d'abord,  nous  avions  quelque 
répugnance  à  supposer  chez  notre  traducteur  la  connaissance  du 
syriaque  et  du  grec.  En  admettant  même  que  les  deux  doublets 
étaient  son  œuvre  —  ou  celle  du  prétendu  interpolateur  —  nous 
pouvions  croire  qu'il  avait  consulté,  non  G.,  mais  la  traduction 
syriaque  de  G.,  qui  existe.  On  sait,  en  effet,  que  la  Syro-Hexa- 
plaris  retrouvée  par  Ceriani  est  une  version  de  G.  Mais  il  nous  a 
fallu  renoncer  à  cette  conjecture,  qui  n'explique  pas  le  fait  — 
capital  en  la  matière  —  de  contre-sens  provenant  d'une  mau- 
vaise lecture  de  G.  Si  des  erreurs  imputables  à  cette  cause  se 
rencontrent  dans  les  doublets  conformes  à  G.,  il  ne  restera  plus  de 
doute  qu'ils  ne  proviennent  directement  de  cette  version.  Or,  c'est 
ce, que  nous  montre  un  examen  minutieux  de  l'hébreu. 
G.  est  ainsi  ainsi  conçu  au  ch.  xxx,  18-20  : 

àyotOà  £XX£yujj.£va   Ètti  (jTOjxaT'.  xsxÀs'.ctxsvoj 

Ti  (TujxipépEt  xàpTTWff'.ç  elo(oXco  ; 

OOTS  Y'^'P   sSsTat,    OUT£  \L'}\   oacDsavO'fi. 

ouTwç  b  lx8ioxa>xdfJL£vo(;  ùtto  xupiou  ^XÉttwv  Iv  ocoOaXtxoTç  xal  (TTôvxJ^cdv, 

oxyTrep  Euvouyoç  7r£p'.Xa[ji.6àv{jûv  Tiapôévov  xai  axsvàî^tov, 

ouTto;  ô  7co'.c5v  Iv  Siot  xDiaaTa. 

((  Des  biens  répandus  sur  une  bouche  fermée, 

Ce  sont  viandes  placées  sur  une  tombe. 

A.  quoi  sert  une  offrande  à  une  idole  ? 

Elle  ne  mange,  ni  ne  sent. 

Ainsi  celui  qui,  tourmenté  par  Dieu, 

Voyant  de  ses  yeux  et  soupirant. 

Comme  un  eunuque  embrassant  une  vierge  et  soupirant. 

Ainsi  celui  qui  fait  malgré  lui  la  justice.  » 

Il  s*agit,  comme  le  montre  très  clairement  le  contexte,  du  riche 


182  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

que  la  maladie  empêche  de  jouir  de  ses  biens.  La  pensée  se  déroule 
donc  avec  une  limpidité  parfaite  à  travers  toutes  ces  comparai- 
sons, dont  la  dernière  est  particulièrement  frappante  :  le  riche 
malade  voit  de  ses  yeux  les  mets  qui  lui  plaisent,  mais  ne  peut 
pas  y  toucher  et  s'en  afflige,  comme  l'eunuqae  qui  presse  en  ses 
bras  une  vierge.  Mais  que  viennent  faire  les  derniers  mots  : 
«  Ainsi  celui  qui  fait  malgré  lui  la  justice»?  Ils  ne  peuvent  se 
comprendre  que  si,  détachant  le  premier  hémistiche  de  son  cadre, 
on  en  a  fait  une  pensée  indépendante  :  «  Comme  Teunuque  qui 
embrasse  une  vierge  et  soupire,  ainsi  est  celui  qui  fait  la  justice 
malgré  lui.  »  Mais  il  est  manifeste  que  cette  réflexion  serait  ici 
un  hors-d'œuvre  déplacé.  Or,  justement  certains  mss.  n'ont  pas 
cette  finale,  et,  d'autre  part,  elle  se  lit  déjà  au  ch.  xx,  3,  où  elle 
est  plus  en  situation.  Aussi  Fritzsche  déclare-t-il  que  ces  mots 
sont  une  interpolation  qui  s'est  glissée  ici,  attirée  par  le  pre- 
mier hémistiche,  qui  précisément  l'accompagne  aussi  au  ch.  xx. 
M.  Ryssel  supprime  même  l'hémistiche  et  ne  le  traduit  pas. 

Or,  l'hébreu,  qui  suit  G.  dans  tout  ce  morceau,  se  termine  éga- 
lement par  cette  interpolation  : 

::D'»3t)  o:iNn  mui:^  p  n2Nn?:T  niJ^s  parr^  o-^no  niOND  A 

Si  la  conclusion  de  Fritzsche  s'impose  —  et  c'est  notre  aris,  — 
la  présence  dans  l'hébreu  de  cette  finale  révèle  une  traduction 
faite  sur  une  version  grecque  déjà  contaminée  ^ 

*  M.  Ed.  Kônig,  qui  tient  pour  l'orifrinalité  de  tout  le  texte  hébreu,  et  mëtne  des 
doublets,  interprète  les  deux  formes  du  verset  20  b-c  d'une  manière  bien  laite  assuré- 
ment pour  déconcerter  'The  Exposttory  Times,  XI,  p.  174  ,  Il  faut  reproduire  inté- 
gralement son  commentaire  pour  ne  pas  prêter  au  soupçon  d'avoir  à  dessein  défiguré 
sa  pensée.  «  Le  vers.  20  è  porte  en  H.  :  «  Comme  un  eunuque  embrasse  une  jeune 
lille  et  s'afllige  »,  et  ces  mots  se  rattachent,  comme  le  montre  le  «  comme  »  ("iCêO), 
à  ce  qui  précède.  Puis  vient  :  «  Ainsi  celui  qui  rend  ie  jugement  avec  vioieuce  •; 
ensuite  :  «  Comme  un  gardien  de  harem  [sic]  qui  dort  avec  une  vierge.  »  Car  "î^ 
1?36<2  est  une  fausse  leçon  de  l72î<-2,  résultant  d'une  dittographie,  et  "JT^N*  est  le 
confident  par  excellence,  c'est-à-diie  le  gardien  du  harem.  Le  professeur  Margolioulh 
dit  que  certainement  le  premier  des  trois  hémistiches  est  une  imitation  de  G.,  tandis 
que  le  troisième  correspond  à  S.  Mais  ce  n'est  pas  exact.  Il  n'est  pas  nécessaire  de 
regarder  *lJZii^  comme  une  imitation  du  syriaque  *j?2^n?3.  De  p'iis,  comme  il  a  été 
déjà  dit,  27-5<2D  doit  avoir  été  la  forme  écrite  telle  qu'elle  existait  lorsque  les  lettres 
finales  n'étaient  pas  encore  employées.  Encore  une  fois,  la  pensée  du  premier  hé- 
mistiche et  celle  du  troisième  ne  sont  pas  identiques,  et  l'infidélité  de  la  part  d'un 
gardien  de  harem  était  chose  possible,  comme  on  le  voit  par  les  mots  é7ri6y}i.ia 
E'jvou/ou . . .  du  ch.  XX,  .3  a.  et  par  la  discussion  du  mariage  de  l'eunuque  Putiphar 
dans  Êbers,  Aegypten  u.  die  Bûcher  Mose's,  29S.  Finalement,  si  l'auteur  de  H.  avait 
eu  devant  lui  le  texte  de  G.  et  celui  de  S.,  il  aurait  laissé  20  a  de  G.  (outu);  6  éx- 
5t'i)x6ii£vu;. . .)  et  19c-rf,  20a  de  S.  (•  Ainsi  le  riche  qui  n'use  pas  de  ses  biens  et 
voit  de  ses  yeux  et  soupire  »].  I  es  vues  du  professeur  Margoliouth  sur  l'origine  des 
trois  hémistiches  de  H.  ne  sont   donc  pas  plausibles.  »  Pour  répondre  à  une  pareille 


NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉBRfeUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQLK  183 

Cet  exemple,  sMl  montre  que  A  dérive  d'un  mauvais  texte  de  G., 
ne  prouverait  pas  qu'il  en  provient  directement,  puiâqiie  l'hémis- 
tiche se  lit  dans  la  Syro-Hexaplaris. 

Mais  voici  une  autre  preuve  qui  se  suffit  à  elle-même  et  qui 
atteste  l'emploi  direct  de  G.  Nous  la  tirons  du  ch.  xxxi,  4  : 

ib  nna  «b  mr  û&^i  ins  nonb  -^^y  b»:?  B 

interprétation,  il  suffira  de  citer,  non  pas  les  trois,  mais  les  quatre  hémistiches  de  H. 
et  de  les  comparer  avec  les  versions  : 

£2Dtt373  03"i«a  H'^y  p  nsNnToi  my3  pan-»  ono  ")\dnd  a 

«  Comme  un  eunuque  qui  embrasse  une  jeune  fille  et  s'afflige  ;  ainsi  celui  qui  fait 
lé  hied  (ou  qui  rend  justice)  malgré  lui.   » 

La  pensée  se  suffit  à  elle  même  et  est  indépendante  de  ce  qui  précède.  Le  premier 
hémistiche  est  une  comparaison  destinée  à  éclairer  la  proposition  principale  :  •  Ainsi 
celui  qui  rend  justice  malgré  lui  »,  et  cette  proposition  jure  avec  le  contexte  qui  parle 
du  chagrin  du  riche  qui  ne  peut  jouir  de  ses  biens.  Or,  c'est  exactement  ce  qu'on  lit 
en  G.  dans  quelques  manuscrits  seulement  : 

&sittp  eOvoOyo;  7:£p'.),aijLoàv(j)v  îtapOévov  xai  oTîvàî^wv, 
oOtw;  ô  Ttouîiv  èv  ^là  xpifiaxa. 

^'T'^2   ^p2f2  ■^"■^T   nbinn  t:y  ib  173&<5   p  B 

«  Ainsi  le  fidèle  qui  passe  la  nuit  avec  une  vierge  et  Dieu  lui  en  detnande 
compte.  > 

La  proposition  est  cette  fois  le  comnlément  de  ce  qui  précède  :  «  Ainsi  le  riche  qui 
Tolt  (le  ses  yeux  ses  biens  et,  ne  pouvant  en  jouir,  s'afflige,  tel  l'eunuque  qui  passe 
la  nuit  avec  une  vierge,  et  Dieu  lui  en  demande  compte.  » 

Comment  supposer  qu'un  auteur  aurait  lait  de  la  m/me  comparaison  d'abord  une 
pensée  indépendante,  puis  le  complément  de  ce  qui  précède  cette  pensée?  Or,  jus- 
tement on  lit  en  S.  le  pendant  exact  de  l'hébreu  : 

111^2  y^D  N-'-iTaT   Nnbin2  imb  yz^n  n393">!-s72  ^-«ît 

•  Comité  un  eunuque  qui  jjasse  la  nuit  devant  une  viet^e,  et  le  maître  lui  en  de- 
mande compte.  » 

Bien  mieux,  il  y  a  en  S.  un  terme,  1?3'ir!72,  qui  est  courant  en  syriaque  pour  eu- 
nuque, tandis  que  "JT^NÎ  n'est  jamais  pris  dans  ce  sens  en  hébreu.  Si  toutes  ces 
ëlranj^elés  tie  s'expliquent  pas  de  la  manière  la  plus  simple  par  l'hypothèse  d'une 
double  traduction  laite  sur  G.  et  S.,  il  faudra  créer  une  nouvelle  logique  à  l'usage  de 
la  critique.  (Nous  ne  faisons  pas  élat  de  la  méprise  que  peut-être  H.  a  commise  en 
prenant  î<'^n72  pour  •  Seigneur  »,  «  Dieu  »  au  lieu  de  «  maître  »,  qui  cadre  mieux 
avec  le  contexte.) 

A  notre  explication,  qui  rend  compte  de  toutes  les  singularités  de  H.,  il  faudrait 
préférer  celle-ci  : 

{"  L'original  comportait  deux  prooositions,  l'une  indépendante  du  sujet  et  l'autre 
le  complétant,  et  toutes  les  deux  avec  la  même  image  ; 

2°  De  ces  deux  propositions,  G.  en  a  pris  l'une,  et  S.  l'autre; 

3*  L'original  avait  "jTONjD  (ce  qui  ne  remédie  à  rien,  d'ailleurs),  et  un  copiste  a 
lu  à  tort  ]73KD  p,  et  par  le  plus  grand  des  busard?,  S.  avait  sous  les  yeux  déjà 
cette  faute,  bien  qu'il  n'eût  pas  le  même  texte  que  G. 

^*  ^73N3  signifierait  «  confident,  gardien  de  harem  » ,  sens  inconnu  absolument  à 
la  Bible. 

Pour  nous  convaincre  d'erreur,  il  faudra  non»  opposer  des  argumenta  plus  solides. 


484  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

«  Le  pauvre  se  fatigue  pour  les  besoins  (littéralement  le  manque) 
de  sa  maison, 
Et,  s'il  se  repose,  il  devient  indigent. 
Le  pauvre  travaille  pour  diminuer  sa  force, 
Et,  s'il  se  repose,  cela  ne  lui  profite  pas. 

Le  premier  verset  est  traduit  de  S.,  comme  le  démontrent  suffi- 
samment :  l*  un  contre-sens;  2°  le  maintien  d'un  mot  de  S.  qui 
n'est  pas  usité  en  ce  sens  en  hébreu.  Après  avoir  dit  :  le  riche  tra- 
vaille pour  amasser  de  la  fortune  et,  lorsqu'il  se  repose,  il  en  tire 
une  jouissance,  S.  continue  : 

«  Le  pauvre  travaille  pour  les  besoins  (littér.  le  manque]  de  sa  vie, 
Et  s'il  se  repose,  il  devient  indigent.  » 

L'adjectif  ^^^5£  ofl're  une  ressemblance  singulière  avec  n^"'^^  ; 
seulement  c'est  uniquement  en  araméen  que  ce  terme  a  le  sens 
d'  «  indigent  »  ;  en  hébreu  —  et  encore  dans  l'hébreu  de  la  Mi- 
schna  —  il  signifie  «  nécessaire,  ayant  besoin  de  ».  Voilà 
pour  le  syriacisme  ,  et  voici  pour  le  contre-sens.  On  remar- 
quera que  l'hébreu  dit  maison  là  où  S.  met  vie.  C'est  qu'en  sy- 
riaque ^"^lyyy  signifie  aussi  bien  maison  que  vie  :  la  confusion  était 
donc  facile.  Reste  à  prouver  qu'en  cette  phrase  le  mot  syriaque 
veut  certainement  dire  vie.  Il  suffit,  pour  s'en  assurer,  de  con- 
sulter G.,  qui  porte  : 

«  Le  pauvre  travaille  dans  le  manque  de  vitres  (de  moyens  de 
vivre,  de  subsistances)  *.  « 

Tandis  que,  si  S.  voulait  dire  maison,  on  ne  s'expliquerait  pas 
la  variante  vie  de  G.,  il  y  a  identité  absolue  entre  G.  et  S.,  si 
le  mot  \XMT\y  doit  se  traduire  par  vie, 

A  correspondant  à  S.,  on  est  tenté  de  voir  dans  B  le  pendant  de 
G.  Mais  comment  vivre,  ou  vie,  aurait-il  pu  devenir  force  ?  De  la 
façon  la  plus  simple  :  le  traducteur  a  pris  ftou  pour  piaç.  Cette  con- 
fusion est  des  plus  fréquentes. 

Pour  qu'il  ne  reste  pas  le  moindre  doute  sur  cette  méprise,  de- 
mandons-nous si  l'original  hébreu  n'était  pas  force  et  si  ce  n'est 
pas  un  copiste  qui  a  lu  |îiou  au  lieu  de  p-aç.  S.  répond  surabondam- 

*  Il  y  avait  sans  doute  dans  1  original  T1DM73  et  ÏTTl^, 


i 


NOUVEAUX  FRAGMExNTS  HEBREUX  DE  L'ECCLESIASTIQUE  185 

ment  à  ce  point  d'interrogation  :  le  mot  iriD,  force,  ne  correspon- 
drait ni  à  maison,  ni  à  xnvre. 

Cet  exemple  nous  fournira  également  la  preuve  que  notre  tra- 
ducteur —  ou  notre  interpolateur  —  n'a  pas  utilisé  la  Syro-IIexa- 
plariSj  car  cette  version  a  ici  nti,  qu'il  aurait  sûrement  rendu 
par  v^n  ou  d'^'^n. 

Voici  une  autre  preuve  analogue  à  la  première,  montrant  que 
H.  a  suivi  une  recension  de  G.  altérée.  Nous  la  citons  de  préfé- 
rence à  d'autres  que  nous  pourrions  encore  invoquer,  parce  que 
M.  G.  Margoliouth  veut  justement  y  trouver  un  argument  en  fa- 
veur de  sa  thèse  (xxxi,  21). 

t-in3  Nis^m A 

En  S.  on  lit  : 

«  Si  tu  as  été  forcé  dans  les  mets  (si  lu  as  trop  mangé), 
Eloigne-toi  du  milieu  de  la  société  et  tu  seras  à  Ion  aise  ». 

àvàcra  |X£(707ropojv  xai  avaTrauT*/-,. 

«  Si  tu  as  été  forcé  dans  les  mets, 

Lève-toi  marchant  au  milieu  {sic)^  et  repose- loi.  » 

La  comparaison  des  deux  versions  atteste  que  le  texte  original 
comportait  cette  idée  que  le  convive  qui  s'est  laissé  entraîner  à 
trop  manger  doit  quitter  la  société,  la  table. 

Or,  le  ms.  248  de  G.  a,  à  côté  de  [xe^ouopiov^  sas^rov  «  vomis  »  ; 
pareillement  le  latin  :  surge  e  medio,  evome  et  refrigerahit. 
M.  Rj'ssel,  à  la  suite  d'autres  commentateurs,  suppose  que  'éfxsffov 
est  une  dittographie  de  [xsdOTropcov;  cette  conjecture  parait  ex- 
cellente. 

Or,  il  est  visible  que  Txyp  de  H.  doit  ici  se  traduire  «  vomis  -»  (de 
la  racine  N"ip)  ^.  Vraisemblablement  A.  disait  comme  S.  :  «  éloigne- 
toi  du  milieu  de  l'assemblée  ».  Notre  hébreu  proviendrait  donc  en- 
core une  fois  d'un  mauvais  texte  de  G. 

M.  G.  Margoliouth  tire  de  ce  passage  une  conclusion  bien  dif- 

*  C'eFt-à-dire  :  lève-loi  du  milieu  du  festiu.  La  Syro-Hexapîaris,  qui  reproduit 
servilement  G.,  a  :  N15  flS'itTO  \12  D'^.p  «  lève-loi  du  milieu  de  la  société  »,  leçon 
qui  est  confirmée  par  le  latin  et  S. 

>  Le  premier  est  probablement  une  faute  de  copiste  pour  û^p  =  àvâdTa. 


186  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

férente.  Il  traduit  :  «  espère,  espère  (keep  on  hoping),  et  tu  âe^âs 
à  l'aise  ^> .  Ce  mot  espère,  ajoute-t-il,  a  été  mal  compris  ;  con- 
fondu avec  î-îNp,  il  a  donné  lieu  à  la  version  «  vomis  «.  Voilà  donc 
la  preuve  que  H.  représente  bien  l'original. 

Est-il  nécessaire  de  dire  que  sûrement  l'original  ne  parlait  pas 
d'espoir?  M.  G.  Margoliouth  nous  en  dispense,  car,  en  note,  il  dé- 
truit lui-même  son  argumentation  :  «  It  is,  indeed,  not  impossible 
that  mp  actually  represents  a  corrupt  form  of  a  word  coming 
from  the  rootN"'p  (vomir).  » 

Les  doublets  que  nous  venons  d'examiner  sont  donc  bien,  daris 
leur  double  forme,  de  doubles  traductions,  faites  Tune  sur  le 
syriaque,  l'autre  sur  le  grec,  et  la  conclusion  que  nous  en  avons 
tirée  reste  entière  :  celui  qui  en  est  l'auteur  est  probablement 
l'auteur  de  partie  ou  de  la  totalité  du  restant  de  Touvrage. 


PROCÉDÉS    DE  REDACTION   DtJ   TRADUCTEUR  JUIF. 

Nous  pourrions  insister,  pour  la  défense  de  notre  thèse,  sur  le 
grand  nombre  d'à  peu  près  qui  s'observent  dans  le  texte  hébreu 
et  spécialement  sur  le  vague  de  certaines  expressions  qui  dans 
l'original  devaient  être  plus  précises  et  qui  dans  les  versions 
grecque  et  syriaque  le  sont  encore  :  un  tel  vague  est  assurément 
le  fait  d'un  traducteur  embarrassé  qui  ne  trouve  pas  dans  son 
vocabulaire  le  terme  propre  convenant  à  la  situation.  Peut-être 
reviendrons-nous  sur  ce  point  dans  la  suite.  Mais  dès  à  présent 
nous  pourrons,  à  l'aide  des  doublets,  saisir  sur  le  vif  un  pro- 
cédé du  traducteur  qui  éclairera  d'un  nouveau  jour  certaines 
particularités  qui  avaient  fait  illusion  dans  les  chapitres  édités 
en  1897. 

Un  des  indices  qui  ont  fait  croire  tout  d'abord  à  rori<2:inali(é  du 
texte  hébreu  découvert  dans  la  gueniza  du  Caire,  c'est  la  présence, 
dans  ces  fragments,  d'un  grand  nombre  de  centons  bibliques, 
ceyito7is  qui  ne  s' accordent  pas  toujours  avec  G.  et  Si.  Il  parais- 
sait peu  probable  qu'un  retraducteur  eût  retrouvé  si  heureuse- 
ment sous  ces  versions  la  citation  biblique  qui  s'y  cache.  Ces  cen- 
tons ont  permis,  en  outre,  de  déterminer  les  livres  bibliques  dont 
Ben  Sira  s'était  le  mieux  nourri  ou  qui  étaient  connus  de  son 
temps. 

Les  doublets,  qili  nous  ont  déjfi  fourni  tant  de  ronseignetnents 
sur  le  caractère  du  texte  hébreu,  vont,  à  notre  avis,  modifier  sen- 
siblement notre  jugement  sur  ces  centons. 


NOUVEAUX  FRAGMENTS  IIÉRREUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQUE  iHl 

Reprenons  le  ch.  xxxi,  13,  qui  a  fait  plus  haut  (p.  174)  l'objet 
d'un  commentaire. 

nnb   03  b'D  -^ac»  p  by  ba^  pbn  aub  v^'3  :?n  B 

«  Dieu  n'a  rien  créé  de  pire  que  l'œil, 

C'est  pourquoi  devant  tout    (ou   à   cause   de  tout)  sa  fraîcheur 
s'enfuit*.  » 

Nous  avons  déjà  dit  que  ce  doublet  correspond  à  G.,  tandis  que 
les  quatre  hémistiches  précédents,  qui  expriment  la  même  idée, 
font  pendant  à  S.  Seulement,  le  second  hémistiche  de  ce  dou- 
blet, dans  ses  deux  derniers  mots,  offre  peu  d'analogie  avec 
G.  Celui-ci  dit  simplement  :  pleure  (oaxp'jsi),  et  cette  version 
de  G.  est  confirmée  par  S.  Non  seulement  notre  hébreu  n'em- 
ploie pas  ce  verbe ,  mais  encore  il  dit  le  contraire  :  l'œil  de 
l'envieux  ne  pleure  pas  à  tout  propos,  il  perd  sa  fraîcheur,  ou, 
plus  exactement,  son  humidité.  Si  tel  avait  été  l'original,  à  sup- 
poser que  ni  G.  ni  S.  n'eussent  jugé  à  propos  de  reproduire  l'image, 
ils  se  seraient  certainement  inspirés  de  l'idée  qu'elle  exprime  ;  ils 
ne  se  seraient  pas  concertés,  à  plusieurs  siècles  de  distance,  pour 
traduire  «  son  humidité  s'enfuit  »  par  «  verser  des  larmes  »  ;  il  est 
même  vraisemblable  qu'ils  auraient,  Tun  ou  l'autre,  conservé 
quelque  vestige  de  la  métaphore.  Notre  hébreu  ne  peut  se  com- 
prendre que  d'une  façon  :  le  traducteur,  pour  faire  montre  d'élé- 
gance  et  ne  point  répéter  les  termes  mêmes  dont  il  s'était  déjà 
servi  (et  c'est  pour  cela  aussi,  sans  doute,  qu'il  met  pbn,  au  lieu  de 
fct'13,  déjà  employé  plus  haut)  a  emprunté  à  ses  souvenirs  bibliques 
due  métaphore  qui  lui  paraissait  s'appliquer  à  la  circonstance, 
bien  qu'en  réalité,  elle  ait  une  tout  autre  signification.  A  propos 
de  Moïse,  le  Deutéronome,  xxxiv,  1,  dit  :  D5  Nbi  '\^'*y  nrrjD  &«b 
nnb  «  Son  œil  ne  s'était  pas  affaibli,  et  sa  fraîcheur  n'aimit  pas 
fui.  )3  Le  procédé  du  rédacteur  éclate  ici  dans  toute  sa  naïveté,  et 
c'est  précisément  celui  de  beaucoup  de  traducteurs  juifs  de  nos 
jours  qui,  séduits  par  des  réminiscences  de  la  Bible,  usent  de  l'Écri- 
ture per  fas  et  yiefas^  sans  crainte  des  à-peu-près  et  même  des 
contre-sens  *. 

Or,  ce  n'est  pas  seulement  dans  les  doublets  que  nous  voyons 
fleurir  ce  genre  de  traduction.  Au  ch.  xxx,  22,  on  lit  : 

*  M.  G.  MarfTolioulh  traduit  l'expression  par  «  son  humidité  court  »  ;  maison  si- 
gnifie fuit^  et  non  court. 

*  C'est  pour  une  raison  du  même  ordre  qu'apparaissent  en  H.  tant  d'expressions 
bibliques  rares  ou  même  uniquc<t  :  ainsi  procédaient  les  pattanim,  dont,  d  ailleurs, 
nos  fragments  adoptent  souvent  la  langue  et  certaines  hardiesses  grammaticales.  Nous 
reviendrons  sur  ce  point  dans  la  suite. 


188  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

«  La  joie  du  cœur,  c'est  la  vie  de  l'homme, 
Et  le  plaisir  de  l'homme  prolonge  sa  colère.  » 

Sans  recourir  aux  versions,  on  devine  tout  de  suite  qu'au  lieu 
de  «  sa  colère  w,  il  faut  ici  «  ses  jours  »  ou  «  sa  vie  ».  Effective- 
ment les  deux  versions  s'expriment  ainsi.  La  faute  est  due  à  une 
réminiscence  de  Proverbes,  xix,  11  :  isi^  '^nNïi  d"ii<  h'D'û  «  L'intel- 
ligence de  l'homme  prolonge  sa  colère  (le  rend  longanime).  » 


QUELQUES    SYRIACISMES    DANS   LES   DERNIERS   CHAPITRES. 

Venons-en  maintenant  aux  syriacismes  qui  se  rencontrent  dans 
dans  les  ch.  xxxix-xlix.  Qu'on  ne  s'attende  pas  à  en  trouver  une 
profusion,  surtout  si  on  néglige  les  gloses  marginales.  Ces  deux 
chapitres,  qui,  pour  notre  confusion,  ont  été  découverts  les  pre- 
miers, sont  singulièrement  mieux  soignés  que  ceux  que  nous  ve- 
nons d'étudier,  et  l'auteur  n'y  répète  pas  tous  les  termes  emprun- 
tés, dans  nos  nouveaux  fragments ,  directement  au  syriaque.  C'est 
ainsi  que  le  verbe  «  broncher,  trébucher  »,  n'y  est  plus  rendu  par 
bpn,  mais  par  bnîD;  «  pierre  d'achoppement  »  par  nbpn,  mais  par 
tiîpnîo;  «  chagrin  »  par  1"^^  ou  in,  mais  par  n:iî<'7.  Si  donc  l'auteur 
s'oublie  parfois,  il  faut  enregistrer  ces  défaillances  de  son  atten- 
tion comme  des  aveux  involontaires  du  rôle  qu'il  a  joué. 

Nous  ferons  d'abord  entrer  sous  cette  rubrique  un  exemple  qui 
n'est  pas  à  proprement  parler  un  syriacisme,  mais  —  ce  qui  est 
plus  probant  —  une  fausse  traduction  d'un  mot  syriaque  ou  ara- 
méen  mal  lu. 

A  la  fin  du  ch.  xlvi,  vers.  20,  à  propos  du  prophète  Samuel,  il 
est  dit  : 

vsn^  ijb'nb  ^:>'^^  uîn^s  nm?3  "^nnN  û:i"i 

«  Et  même  après  sa  mort,  ayant  été  consulté, 
Il  révéla  au  roi  ses  voies.  » 

Au  lieu  du  mot  souligné,  on  attendrait  plutôt  sa  fin.  C'est  ce 

qu'on  lit,  en  effet,  en  G.   :    xai    OttÉos'.^sv  paatÀel  tt,v  xeXeuTrjV    aÙTOu. 

L'original  portait  donc  irT^nnN. 

Pour  expliquer  cette  singularité,  nous  avions  supposé  que  la  le- 
çon originale  était  in^ii^  ou  rmnni^  «  ses  voies  »  (terme,  il  est  vrai, 

*  Ce  mot,  qui  choque  ici,  correspond  à  S.  :  '{irTj'^N. 


NOUVEAUX  FRAGMENTS  HÉimEUX  DE  L'ECCLÉSIASTIQLL  189 

impropre),  leçon  que  rem[)la(;a  un  copiste  étourdi  par  le  syno- 
nyme riD^ii.  Et  précisément  on  lit  en  S.  nnm».  C'était  un  expédient 
désespéré.  La  solution  est  infiniment  plus  simple  maintenant  que 
nous  sommes  affranchis  de  l'idée  préconçue  que  notre  texte  hébreu 
représente  l'original  :  G.  a  conservé  la  version  primitive,  in-^-inx, 
qui  convient  au  sens;  S.,  confondant  ce  mot  avec  vmmN,  Ta  cor- 
rectement rendu  par  son  équivalent  syriaque  nnmî^,  et  H.,  tradui- 
sant S.,  l'a  correctement  rendu  aussi  par  son  équivalent  hébreu 
ordinaire  t:d^i. 

Nous  passons  maintenant  aux  syriacismes  proprement  dits.  Nous 
ne  tirons  pas  parti  des  racines  verbales  inconnues  à  l'hébreu  et 
usitées  en  syriaque,  et  que  notre  auteur  ne  se  fait  pas  scrupule 
d'employer.  Tel,  par  exemple,  le  verbe  niTi,  en  hébreu  «  triom- 
pher »,  pris  dans  le  sens  de  luire  comme  en  syriaque  (xliii,  5 
et  13)*.  Si  le  doute  était  permis  en  1897,  il  ne  l'est  plus  aujour- 
d'hui, car  au  ch.  xxxii,  9,  dans  deux  doublets,  ce  verbe  est  em- 
ployé incontestablement  dans  ce  sens  de  «  luire  »  :  p"i2  nL:j-«  "i^in  "^SDb 
«  avant  la  grêle  luit  l'éclair  ».  L'exemple  le  plus  probant  de  sy- 
riacisme  nous  est  fourni  par  cet  hémistiche,  xlii,  12  :  û'^'ûa  rr^m 
Tinon  bi<  «  Et  qu'elle  ne  bavarde  pas  (ou  n'entre  pas  en  concilia- 
bule) au  milieu  des  femmes.  »  G.  a  ici  âv  ixécw  «  au  milieu  »  et  S. 
ns'^n,  qui  a  le  même  sens.  L'hébreu  rrin  est  donc  sûrement  le  sy- 
riaque nrn,  qui  se  prononce  n^n.  C'est  ce  que  MM.  Neubauer  et 
Cowiey  ont  reconnu,  d'ailleurs.  —  Les  mêmes  éditeurs  ont  vu  éga- 
lement que,  XL,  16,  nD:^,  bord,  est  le  syriaque  5^C3^. 

Pour  les  gloses  marginales,  il  ne  peut  y  avoir  le  moindre  doute  : 
de  même  que  dans  les  nouveaux  fragments  on  trouve  ûid 
«  bouche  »  pour  r»D,  dans  les  autres  on  lit,  par  exemple ,  iii2'^o 
«  trésor  »  pour  *i^nè^  (xli,  12,  14). 


CONCLUSION    PROVISOIRE. 

Il  nous  faut  donc  constater  qu'en  un  chapitre  —  le  morceau  final 
—  IL  dépend  étroitement  de  S.  ;  que  dans  les  doublets  H.  s'inspire 
également  de  S.  et  même  de  G.  ;  que  certains  termes  caractéris- 
tiques se  rencontrent  également  dans  les  ch.  xxxix-xlix  et  les  pré- 
cédents ;  que  des  syriacismes  ne  font  pas  complètement  défaut 
dans  les  parties  les  mieux  rédigées.  Si,  en  de  très  nombreux  pas- 
sages, H.  n'était  pas  différent  à  la  fois  de  G.  et  de  S.  et  si,  en 
d'autres,  il  ne  représentait  pas  sûrement  une  version  plus  proche 

*  Tel  aussi  le  verbe  m^^n^ïlb  «  pour  raconter  »  (xliv,  8),  de  raraméen  N3^nU3i< 


ieO  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

de  l'original  que  G.  et  S.,  la  solution  serait  toute  simple.  Mais  le 
problème  est  bien  plus  complexe  ;  il  faut,  pour  essayer  d'en  ve- 
nir à  bout,  l'examiner  sous  toutes  ses  faces,  et  nous  ne  pourrons 
le  tenter  qu'après  avoir  étudié  les  fragments  qui  proviennent  d'un 
îtwtre  manuscrit,  appelé  A.  par  les  éditeurs.  C'est  ce  que  nous 
ferons  dans  les  chapitres  qui  vont  suivre  *. 

Israël  Lévi. 

(A  suivre.) 

*  Nous  réservons  pour  la  suite  rexamen  de  cette  question  :  pourquoi  les  doublets 
ont-ils  disparu  dans  les  ch.  xxxiv  et  suiv.,  s'il  est  vrai  qu'ils  aient  digparu  réelle- 
ment. —  Revenant  sur  la  première  partie  de  cette  élude,  nous  citerons  encore 
l'exemple  de  deux  versets  —  qui  ne  sont  pas  des  doublets  —  et  qui  portent  la  marque 
indéniable  de  leur  provenance  de  S. 

Après  avoir  dit  :  Quel  est  l'homme  qui  a  accompli  cette  merveille  de  résister  aux 
dangers  de  la  fortune,  notre  texte  ajoute  : 

«   Quel  est-il  que  nous  nous  attachions  à  lui  ? 
El  il  a  eu  la  paix. . .  >  (xxxi,  10). 

La  marge  porle'pn^Jîïl  (solécisme)   «  Quel  est  celui  qui  s'est  attaché  à  lui  •. 
G.  a   sûrement  ici  la  bonne  leçon  :  «  Quel  est  celui  qui,  éprouvé  \,^v  lui  (rargent), 
s'en  est  tiré  à  son  avantage?  »  Ce  qui  suppose  pour  l'original  :  pT2D!rî  ÏIT  Nl!l  "^73 

(ûb^D  ïT^m  ou)  obia-^T  in. 

Le  dernier  mot  fait  exactement  pendant  à  Û^?2n  iX^lZ^  du  verset  8.  C'est  ce  qui  a 
été  déjà  observé  par  Edersheim  et  M.  Ryssel. 
Or,  en  S.,  on  lit  : 

NTûbo  nb  Nim  rib  pn^n^^  Nsn  is» 

«   Quel  est  celui  qui  s'y  est  attaché  et  a  eu  la  paix.  • 

Notre  hébreu  a  donc,  à  son  insu,  reproduit  les  deux  contre-sens  de  S. 

XXXII,  12  : 

:  bD  nonn  Nbi  bx   nwS-i''n  X\:r^  ûb^ui 

«    ...  fais  ce  qui  te  plait, 

[Mais]  avec  la  crainte  de  Dieu  et  non  avec  le  manque  de  tout.   • 
G.  ei  le  contexte  attestent  qu'il  faut  «  et  non  avec  impiété  ».  Or,  S.  dit  justement 
la  même  chose  que  notre  hébreu  : 

N3"iDin2  Nbi  NnbNT  rjnbnin 

s.  a  lu  "lOnS  le  mot  TDln^  de  l'original,  ou  un  copiste  a  écrit  NÎ^Oina  au  lieu 
de  NTOiriD.  Le  traducteur  hébreu  a  reproduit  sans  broncher  ce  non-sens  et  a  ajouté 
le  mot  bD,  d'après  Deut.,  xxviii,  48  et  57,  suivant  le  procédé  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut,  p.  l87.  —  Cet  exemple  est  particulièrement  instructif. 


sn^iir^iD-  ^D*-in 


«  LES  GENS  SUBTILS  DE  POUMBEDITA  » 


Ceux  qui  ont  étudié  le  Talmud  savent  que  parfois  certaines  dif- 
ficultés qu'on  y  rencontre  proviennent  de  ce  qu'on  y  trouve  des 
variantes  dont  la  divergence  peut  avoir  au  point  de  vue  tiala- 
cliique  des  conséquences  très  importantes.  C'est  pourquoi  Rabbè- 
noQ  Tam  et,  avant  lui,  R.  Guerscliom,  «  la  lumière  de  l'exil  »,  ont 
menacé  d'anathème  celui  qui,  à  la  légère,  sans  avoir  des  preuves 
convaincantes,  corrige  les  versions  du  Talraud  en  vertu  d'un 
simple  raisonnements  Lorsque  la  contradiction  de  deux  ver- 
sions peut  amener  une  différence  halachique,  les  rabbins  s'ef- 
forcent, par  une  discussion  très  approfondie,  de  rétablir  le  texte 
véritable  avec  toutes  les  conséquences  qui  en  découlent.  On  voit 
donc  que  la  fixation  exacte  du  texte  est  utile  au  point  de  vue  de 
la  Halacha.  Quant  à  l'Aggada,  on  s'eff"orce  moins  d'établir  un  texte 
correct,  parce  que  les  variantes,  dans  ce  domaine,  sont  indiffé- 
rents pour  la  pratique. 

On  cherche,  de  même,  à  bien  déterminer  le  nom  du  docteur 
auquel  on  attribue  telle  ou  telle  opinion.  Le  Talmud  Babli  surtout 
procède  avec  beaucoup  de  soin  pour  faire  connaître  avec  exacti- 
tude les  auteurs  des  diverses  Halacliot,  et  il  va  parfois  jusqu'à  ca- 
ractériser tel  docteur  par  des  signes  distinctifs  pour  l'empêcher 
d'être  confondu  avec  un  homonyme*.  Gomme  nous  l'avons  déjà 
(iit,  on  ne  retrouve  pas  cette  minutie  et  cette  exactitude  dans  TAg- 

*  Voir  la  préface  du  Séfer  Hayaschar. 

»  Schabbat,  54  ô:  b•^•^y'Ki^  )mv  'i  ■'D'ibn  N:nT  ■'NH  ^3  b^  ^^^^  -ino  "«bisa 
ln3T«  'n;  Bèça.  28  è  :  nD"»3:n  nbp73  -)DN  tnmbn  T^r)b73  nn  m7an:n  r-nnc'j 

«■>Db73    3n;    Pesahim,    113  ô    :   ■'b^^n    qoi^    NIH   p^lH    '»::^N    S)DT^    Nin 

NmaNT  onsD  p  pn»"»  "an  Nin  «n^'^'^an  «n«. 


192  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

gada  ;  là  règne  un  certain  désordre  en  ce  qui  concerne  les  noms 
des  docteurs  et  les  textes  eux-mêmes.  On  sait  que  les  différents 
Midraschim  présentent  de  sérieuses  variantes  pour  un  même 
texte.  La  cause  en  est  facile  à  comprendre  :  les  docteurs  qui  ont 
achevé  la  rédaction  du  Talmud  ont  été,  par  suite  du  manque  de 
temps,  pressés  de  rédiger  tout  ce  qui  avait  rapport  aux  nom- 
breuses Ilalachot  sans  pouvoir  s'occuper  de  l'Aggada.  La  Hala- 
cha  elle-même  présente  des  parties  inachevées,  tels  les  traités  qui 
s^occupent  des  semences  (û"'3>it  "no),  delà  pureté  et  de  l'impureté 
(tmnn::  ^^d)  et  d'autres  traités  qui  ne  sont  que  d'une  importance 
secondaire.  Si  les  docteurs  ont  commenté  et  rédigé  le  traité  des 
sacrifices,  qui  paraît  moins  urgent  (D"'":3"ip  mo),  c'est  qu'après  la 
catastrophe  qui  avait  entraîné  la  destruction  du  temple,  ils  avaient 
conservé  le  secret  espoir  de  voir  la  nationalité  juive  reconstituée  *  ; 
les  Halachot  contenues  dans  ce  traité  étaient  donc  pour  eux  de 
la  plus  haute  valeur. 

Voici  un  exemple  qui  montre  combien  le  Talmud  s'applique  à 
déterminer  nettement  la  personnalité  des  auteurs  des  Halachot. 
Nous  lisons  dans  Sanhédrin,  17  b  :  -"sa  •'TD^ni^T  'n^^y  Nn-^'7a72iDT  '^D">nn 
5<nm  «  Les  gens  subtils  de  Poumbedita  sont  Eiïa  et  Abimi,  fils  de 
Rehaba  ^  »,  c'est-à-dire  que  chaque  fois  que  le  Talmud  mentionne 
les  «  gens  subtils  de  Poumbedita  »,  il  a  en  vue  Eïfa  et  Abimi,  fils 
de  Rehaba^.  Cette  version  est  contraire  à  un  autre  passage  du  Tal- 
mud *,  où  il  est  dit  :  yn^b  rji:inn  nbiy  Yt<  i<n"«'72?3-iD'7  ■'cnn  n?:» 
...ism"^  '"11  n^?:pb  Tmri"^  nn  nnbo  «  Les  gens  subtils  de  Poumbedita 
disent  que  la  défense  faite  par  la  Tora  de  ne  pas  manger  les  fruits 
d'un  arbre  avant  trois  ans,  à  partir  du  moment  où  il  a  été  planté, 
ne  s'applique  qu'aux  arbres  de  la  Palestine;  R.  Juda  a  commu- 
niqué cette  opinion  à  R.  Yohanan. . .  »  Pour  comprendre  la  con- 
tradiction existant  entre  ces  deux  passages,  il  est  nécessaire  d'en- 
trer dans  quelques  détails  chronologiques. 

Après  la  mort  de  R.  Houna  (298  de  l'ère  vulgaire),  chef  de  l'école 
de  Sora,  ses  disciples  se  rendirent  auprès  de  R.  Juda,  chef  de 
l'école  de  Poumbedita  •'  ;  un  de  ces  disciples  était  Rabbah  ("12  nai 

*  Voir  Schabbat,  12  b  ;  Taanit^  17  b  ;  Bèça,  5  b  ;  Rosrh  Easrhanu,  30  a,  etc. 

'  L'orlho^'raphe  du  nom  crEila  varie  :  on  écrit  Î^D^M.  ND^X,  ns^J",  ND"^^.  De 
même,  le  nom  de  N^TTl  se  termine  tantôt  par  un  N,  tantôt  par  un  H- 

*  Nous  devons  faire  remarquer  que  les  «  j^eus  subtils  de  Poumbedita  »  ne  sont 
mentionués  que  deux  l'ois  dans  le  Talmud.  Il  est  plus  que  probable  que  c'est  à  cause 
de  leur  subtilité  même  qu'on  n'a  pas  pris  leurs  décisions  en  considération,  de  même 
qu'on  n'a  pas  voulu  accepter  les  décisions  halachiqucs  de  R.  MéKr  à  cause  de  sa  trop 
grande  linesse;  cf.  Eroubin,  13  i. 

*  Kiùdouschi'n,  29  a. 

"  Voir  Lettre  de  U.  îScberira. 


LES  GENS  SUBTILS  DE  POUMBEDITA  193 

■^3!nn3)  *.  Quand  R.  Juda  fut  mort  (300  de  l'ère  vulgaire),  Rahbali 
lui  succéda  et  eut  pour  disciple  Eïfa,  comme  le  prouve  un  passage 
du  Talmud  '.  Rehaba  («ann),  qui,  d'après  la  version  de  Sanhédrin 
que  nous  avons  rapportée,  serait  le  père  d'Eïl'a  et  d'Abimi,  a  été, 
comme  Kabbah,  le  disciple  de  R.  Juda  à  Poumbedita,  et  un  de  ses 
disciples  les  plus  attentifs,  car  il  s'efforçait  de  répéter,  sans  y 
changer  un  mot,  ce  que  son  maître  lui  avait  enseigné  \ 

Or,  s'il  est  vrai  que  Rehaba  a  été  le  disciple  de  R.  Juda  à  Poum- 
bedita et  son  fils  Eïfa  celui  de  Uabbali  à  la  même  école,  comment 
peut-on  admettre  que  R.  Juda  ait  communiquai  à  R.  Yohanan,  en 
Palestine,  l'opinion  d'Eï(a  et  d'Abimi,  comme  une  opinion  accré- 
ditée et  méritant  d'être  soumise  à  l'approbation  d'un  des  plus 
grands  docteurs  de  ce  temps,  puisque,  du  vivant  de  R.  Juda  ils 
devaient  encore  être  très  jeunes?  De  plus,  puisque  R.  Yohanan 
s'est  élevé  avec  indignation  contre  «  les  gens  subtils  de  Poumbedita  » 
à  cause  de  leurs  opinions  halachiques  *,  on  peut  en  conclure  que 
ce  n'étaient  pas  de  jeunes  disciples  sans  autorité,  mais  des  docteurs 
renommés,  dont  les  décisions  étaient  acceptées  par  le  public.  D'ail- 
leurs, les  fils  de  Rehaba  qui  sont  toujours  cités  dans  le  Talmud 
sous  le  nom  de  îînnn  •'in,  «  les  fils  de  Rehaba  »,  sont  non  seulement 
postérieurs  à  R.  Juda,  mais  aussi  à  Rabbah  et  à  R.  Joseph,  succes- 
seurs de  R.  Juda  à  l'école  de  Poumbedita  ^. 

Nous  croyons  donc  que  la  leçon  exacte  de  Sanhédrin  est  celle 
que  donne  R.  Hananel  ^  :  ïinn'n  '^3n["i]  '^1T'2^'\  nd"»:?  ^rr^^n^iDi  •>D"«"in 
«  Les  gens  subtils  de  Poumbedita  sont  Eïfa  et  Abimi  et  les  fils  de 
Rehaba.  »  D'après  cette  leçon,  Eïfa  et  Abimi  n'étaient  nullement 
les  fils  de  Rehaba  ;  ils  vivaient  en  même  temps  que  R.  Juda  à 
Poumbedita,  et  ce  sont  leurs  décisions  rituelles  que  R.  Juda  a  fait 
connaître  à  R.  Yohanan,  en  Palestine,  et  qui  jouissaient  d'une  si 
grande  autorité.  A  notre  avis,  ils  sont  différents  des  docteurs  por- 
tant le  même  nom  et  qui  furent  élèves  de  Rabbah. 

D'autres  textes  talmudiques  prouvent,  d'ailleurs,  l'existence  de 
docteurs  du  nom  d'Eïfa  et  d'Abimi  et  contemporains  de  R.  Juda. 
Ainsi,  un  Abimi  a  eu  des  discussions  halachiques  avec  Rab  Hisda 
et  R.  Nahman  ;   ce  dernier  lui  demanda  même  de  résoudre  une 

«  Cf.  Srouhin,  40  b,  où  Rabbah  dit  :  "^n  '^NnN   ■'5   Nwirr    2"|    13    N3''nrj   "^D 

mirT"  3-1 

>  Schebouot,  28  ô. 
3  Ber achat,  33  i. 
*  Kiddouschin,  39  a. 

»  Schabbat,  103  a  :  IT^NT:^  ->3D73  1^T"'''1-|n  n?3J<T   CjOV  n-)-)   ^31  ^T'nyp  "^«Ta 
«3nn    ""Dn    Ï13  l^p    l-T»  nî<;  cf.  ^anÂerfri»,  26  a. 
^  Voir  la  nouvelle  édition  de  Vilna,  ad.  l. 

T.  XXXIX,  nO  78.  13 


194  RKVUE  DKS  KTUDKS  JUIVES 

Halacha'.  Or,  R.  Hisda  vivait  à  Cafri  et  R.  Nahraan  était  chef 
d'école  à  Néhardéa  au  temps  où  R.  Juda  dirigeait  l'école  de  Poum- 
bedita  '.  De  môme,  il  y  avait  à  cette  époque  un  autre  docteur  du 
nom  d'Eïfa  qui  était  en  relations  avec  Rabba  bar  bar  Hana.  Ainsi 
le  Talmud  dit  ^  :  ■;:n'i-'  'm  -«^wn  pni^  n:n  nn  nn  nnnb  no-'i^  rrb  -itdn 
fc^r^n  'nD  Tn3>D  pK  pm"»  'id  in^ay*  «  Eïfa  disait  à  Rabba  bar  bar 
Hana  :  «  Vous,  disciples  de  R.  Yohanan,  vous  suivez  l'opinion  de 
R.  Yohanan  ;  nous,  nous  suivons  l'opinion  de  R.  Hanina.  »  Fai- 
sons remarquer,  en  passant,  que  Raschi,  s'appuyant  sur  la  leçon 
inexacte  de  Sanhédrin,  dit  ici  également  qu'Eïfa  est  le  tlls  de  Re- 
liaba  de  Poumbedita. 

Pour  déterminer  l'époque  à  laquelle  vivait  Eïfa,  il  faut  tout 
d'abord  déterminer  la  personnalité  de  Rabba  bar  bar  Hana,  car 
il  semble  y  avoir  eu  deux  docteurs  de  ce  nom,  l'un  du  temps 
de  Rab  (mort  en  248  de  l'ère  vulgaire),  et  l'autre  du  temps  de  R. 
Juda,  chef  de  l'école  de  Poumbedita  (mort  en  300  de  l'ère  vul- 
gaire). Ainsi,  le  Talmud  dit  :  «  Une  fois  Rabba  bar  bar  Hana,  se 
trouvant  à  Poumbedita,  n'alla  pas  assister  aux  conférences  de 
R.  Juda  ;  celui-ci  envoya  son  domestique  pour  le  faire  venir, 
même  de  force  *.  »  Ce  Rabba  semble  donc  avoir  été  l'inférieur  de 
R.  Juda.  Ailleurs  le  Talmud  dit  :  «  Rabba  bar  bar  Hana  étant  tombé 
malade,  R.  Juda  et  les  docteurs  allèrent  le  visiter  et  lui  deman- 
dèrent de  leur  résoudre  une  difficulté  rituelle'.  »  Ici,  il  doit  s'agir 
d'un  autre  Rabba  ;  on  ne  peut  pas  admettre  qu'un  docteur  de  la 
valeur  de  R.  Juda,  chef  de  l'école  de  Poumbedita,  et  d'autres 
docteurs  considérables  soient  allés  visiter  et  interroger  sur  une 
Halacha  ce  même  Rabba  bar  bar  Hana  que  R.  Juda  avait  traité 
en  inférieur  en  l'obligeant  à  assister  à  ses  cours  ? 

Le  Séder  Haddorot,  sans  avoir  aperçu  la  difficulté  que  nous 
avons  signalée,  admet  qu'il  y  avait  deux  docteurs  du  nom  de 
Rabba  bar  bar  Hana;  l'un  (celui  qui  reçut  la  visite  de  R.  Juda) 
était  le  disciple  de  R.  Juda  le  Saint,  le  rédacteur  de  la  Mischna, 
et  l'autre  le  disciple  de  R.  Yohanan,  qui  jamais  ne  quitta  la 
Palestine  pour  aller  en  Babylonie'.  Nous  ne  voulons  pas   en- 

*  Menahot,  7  a. 

*  Kiddouschin,  10  a.  Voir  Lettre  de  R.  Scherira  Gaon. 
»  Schabbat,f>Qb. 

*  Le  Sédei'  Haddorot  veut  maintenir  la  leçon  d'Abraham  Zaccut,  qui  ■  Nob'^S» 
leçon  reproduite  dans  le  Dikdouké  Soferim  de  Rabbinovitz.  Mais  celui-ci  fait  remar- 
quer que  la  version  imprimée  est  la  plus  exacte;  elle  est,  d'ailleurs,  celle  de  R. 
Hananel  (dans  la  nouvelle  édition  de  VilDa). 

»  Schaàùat,  1 48  a. 

^  Ouiuin^  IG  a  et  Mb. 

'  Voir  Séder  Haddorot  au  nom  de  Éob'^K  et  au  nom  de  ïnsn  13  "13  tia"!. 


LES  GENS  SUBTILS  DE  POUMIiEDITA  195 

trer  dans  le  détail  des  objections  que  l'on  peut  élever  contre  cette 
hypothèse  du  Séder  ffaddorot,  parce  que  cela  nous  mènerait  trop 
loin.  Disons  seulement  que,  si  Ton  peut  admettre  à  la  rigueur  qu'il 
y  ait  eu  deux  docteurs  homonymes,  il  est  inadmissible  que  ces 
deux  docteurs  aient  eu  chacun  un  grand-père  portant  le  même 
nom,  ou  alors  le  ïalmud  de  Babylone,  avec  son  exactitude  bien 
connue,  aurait  certainement  cherché  à  les  distinguer  d'une  manière 
quelconque.  D'autre  part,  on  ne  peut  pas  non  plus  admettre  l'opi- 
nion du  Youhasin,  qui  écrit  le  nom  d'un  de  ces  docteurs  avec  un 
K  (Nn^)  et  l'autre  avec  un  n  (tii'n)  *,  ce  qui  est  contredit  par  tous 
nos  textes  talmudiques,  où  ce  nom  est  toujours  écrit  avec  un  n 
(riai).  Du  reste,  on  ne  peut  pas  tenir  compte  du  changement  de  la 
lettre  insensible  qui  termine  un  nom.  Ce  changement  est  très  fré- 
quent dans  le  Talmud  Babli  et  surtout  dans  le  Yerouschalmi, 
comme  on  l'a  vu  plus  haut  pour  nnn'i  et  ns"^»  -. 

Nous  proposons  une  autre  solution  de  la  difficulté.  Le  disciple 
de  R.  Juda  le  Saint  qui  reçut  l'investiture,  grâce  à  l'intervention 
de  son  oncle  R.  Hiyya,  lorsqu'il  alla  en  Babylonie,  était  !in^ 
nsn  ^3  (Rabba  fils  de  Hanah)  3,  connu  dans  le  Talmud  de  Jérusa- 
lem sous  le  nom  de  nsn  li  s^iî^  ou  tisn  ^n  «n.  C'est  à  ce  docteur 
que  R.  Juda  et  les  autres  rabbins  sont  allés  rendre  visite  et  à  qui 
ils  ont  demandé  de  résoudre  une  Halacha.  Donc,  dans  le  passage 
où  il  est  question  de  cette  visite,  il  faut  remplacer  nsn  ^n  ^3  nm 
(Rabba  bar  bar  Hana)  par  nsn  na  nnn  (Rabba  bar  Hana)*.  Quant 
au  docteur  qui  portait  le  nom  de  Rabba  bar  bar  Hana,  il  n'était 
nullement,  comme  les  Tosafites  l'ont  dit  et  comme  on  l'a  cru,  le 
fils  de  nsn  1:1  Nnt^  ^,  car,  dans  ce  cas,  pourquoi  son  nom  est-il  ac- 
compagné du  nom  de  son  grand-père  et  non  de  celui  de  son  père, 
qui  était  cependant  illustre  et  très  connu  ^  ?  En  réalité,  il  n'existe 
aucun  lien  de  parenté  entre  ces  deux  docteurs  ;  ils  n'étaient  même 
pas  compatriotes.  Rabba  bar  Hana  était  né  en  Babylonie^  dans  la 
ville  de  Gafri  '  ;  Rabba  bar  bar  Hana  était,  au  contraire,  Palesti- 

*  Ibid. 

*  Voir  plus  haut,  p.  192,  note  3. 

*  Sanhédrin,  5  a.  On  voit  par  ce  passage  que  Frankel,  dans  son  Mabo  Eaye- 
rouschalmi,  à  l'article  î-jan  *12  N35<,  se  trompe  en  disant  que  ce  docteur  est  toujours 
resté  en  Babylonie  et  n'a  jamais  été  en  Palestine. 

*  Lorsqu'on  trouve  dans  le  Talmud  un  passage  où  Rabba  b.  b.  Hana  est  men- 
tionné à  côté  de  Rab  et  ses  contemporains,  il  faut  lire  :  Rabba  b.  Hana. 

'  Voir  Sanhédrin,  5  a. 

«  L'explication  de  R.  Méïr  de  Lublin  d-^bmb»  Û""in73)  sur  Tosafot,  l.  c,  est 
forcée,  la  question  reste  toujours  ;  pourquoi  le  nom  de  !i3n  ^3  "13  Ï13*1  est-il 
accompagné  du  nom  de  son  grand-père  et  non  pas  de  celui  de  son  père  ?  Voir  Fran- 
kel, ib. 

'  Sanhédrin,  5  a. 


196  i  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

nien  *  et  c'est  pourquoi,  quand  il  fut  en  Babylonie,  il  suivait  en 
cachette  les  us  et  coutumes  palestiniens*.  D'ailleurs,  on  ne  lui 
connaît  aucun  maître  babylonien. 

A  l'arrivée  de  Rabba  bar  bar  Hana  à  Poumbedita,  R.  Juda  était 
déjà  très  âgé,  car,  lorsque  le  docteur  palestinien,  avant  d'at- 
teindre cette  ville,  avait  passé  d'abord  par  Sora^,  il  y  avait  ren- 
contré, non  pas  R.  Houna,  qui  était  déjà  mort,  mais  son  fils.  Or  l'on 
sait,  d'une  part,  que  R.  Juda  est  mort  deux  ans  après  Houna*,  et, 
d'autre  part,  que  ce  docteur  a  vécu  jusqu'à  un  âge  très  avancé  ^. 
Il  est  donc  de  toute  évidence  que  le  chef  de  l'école  de  Poumbedita 
était  très  vieux  lorsque  Rabba  bar  bar  Hana  vint  dans  cette 
ville  ^,  et  c'est  sans  doute  à  cause  de  l'autorité  que  lui  conférait 
son  grand  âge  que  R.  Juda  a  obligé  le  docteur  palestinien  à  suivre 
ses  conférences. 

Revenons  maintenant  à  Eïfa.  Nous  avons  rapporté  plus  haut 
les  paroles  de  ce  docteur  à  Rabba  bar  bar  Hana  :  «  Vous,  disciples 
de  R.  Yohanan,  vous  suivez  l'opinion  de  votre  maître,  tandis  que 
nous,  nous  suivons  celle  de  R.  Hanina.  »  Comme  nous  l'avons  vu 
à  propos  des  gens  subtils  de  Poumbedita,  l'autorité  de  R.  Yoha- 
nan était  très  grande  chez  les  docteurs  babyloniens.  Une  fois, 
dans  une  discussion,  R.  Juda  dit  :  «  Je  ne  reviendrai  sur  ma  dé- 
cision que  lorsque  tu  m'auras  apporté  une  lettre  de  la  Palestine  », 
c'est-à-dire  de  R.  Yohanan  \  De  même,  Rabba  bar  Nahmani,  dis- 
ciple de  R.  Juda,  quand  il  voulait  faire  accepter  ses  interdictions 
par  le  public,  disait  :  «  R.  Yohanan  a  envoyé  une  lettre  de  la  Pales- 
tine pour  dire  que  c'est  défendu  ^.  »  Peut-on  alors  admettre  que 
le  docteur  du  nom  de  Eïfa  qui  parla  à  Rabba  bar  bar  Hana  avec 
une  certaine  désinvolture  de  R.  Yohanan  fût  le  jeune  Eïfa,  disciple 
de  Rabba  bar  Nahmani  ?  D'ailleurs,  Rabba  bar  Nahmani  et  son  col- 
lègue R.  Joseph  discutent,  dans  un  passage  du  Talmud^  sur  la  fa- 
çon dont  Rabba  bar  bar  Hana  avait  rapporté  une  Halacha  au  nom 

*  Une  anecdote  racontée  dans  le  Talmud  semble,  il  est  vrai,  contredire  cette  asser- 
tion [Yoma,  9  è).  On  y  dit  qu'une  fois  que  Kesch  Lakisch  se  baifi;nait  daus  le  Jour- 
dain, Rabba  b.  b.  Ilana  lui  ayant  tendu  la  main,  il  lui  dit  :  Je  vous  déteste  vous 
autres  (Babyloniens,  qui  n'êtes  pas  revenus  en  Judée  du  temps  d'Ezra).  Mais  le 
Talmud  lui-même  doute  de  Tautbencité  de  ce  récit.  Cf..  Cant.  Rabha^  vni,  9,  une 
apostrophe  analogue  adressée  par  un  Palestinien  à  R.  Zeira. 

*  Pesahim^  51  a,  et  Rabbènou  Ascher,  ad.  l. 
»  Ibid. 

*  Voir  la  Lettre  de  Scherira. 
5  Moed  Katan,  28  o. 

«  Guittin,  19*. 

'  Saba  Batra,  41  b' 

«  Sehabbat,  115 a. 

*  Baba  Kamma^  51  b. 


LES  GENS  SUbTILS  DE  POUMBKDITA  l'J7 

de  R.  ManiS  ce  qui  ferait  croire  que  Rabba  bar  bar  Hana  n'exis- 
tait plus  lorsque  cette  discussion  eut  lieu.  Donc  Eït'a,  le  disciple  de 
Rabba  bar  Nahmani,  ne  pouvait  pas  avoir  eu  d'entretien  avec  Rabba 
bar  bar  Hana.  En  admettant  môme  que  Rabba  bar  bar   llana  ait 
vécu  encore  du  temps  de  Eïfa,  il  aurait  été  déjà  très  avancé  en  âge, 
car  Rabba  bar  bar  Hana  est  arrivé  en  Babylonie  du  temps  Rabba, 
fils  de  R.  Ilouna-.  Nous  devons  donc  admettre  que  le  Eïfa  qui 
s'est  entretenu  avec  Rabba  bar  bar  Hana  n'était  pas  le  jeune  Eïfa, 
disciple  de  Rabba  bar  Nahmani,  mais  un  docteur  du  môme  nom, 
d'une  renommée  égale  à  celle  de  Rabba  bar  bar  Hana  et  qui  vivait 
à  l'époque  des  deux  grands  docteurs  babyloniens,  R.  Houna,  chef 
de  l'école  de  Sora,  et  R.  Juda,  chef  de  l'école  de  Poumbedita.  Et, 
en  effet,  à  cette  époque  l'autorité  de  R.  Yohanan  n'était  pas  encore 
reconnue  en  Babylonie,  comme  le  prouve  l'exemple  suivant.  Plu- 
sieurs docteurs,  tant  babyloniens  que  palestiniens,  rapportaient  au 
nom  de  R.  Yohanan  des  Halachot  devant  R.  Hisda  ;  ce  docteur 
leur  répondit  en  des  termes  peu  flatteurs  pour  R.  Yohanan  :  )i^i2 
^ai  IsriT^  '"ibi  ^b  n"'"'ir  :  «  Qui  t'écoutera,  toi  et  ton  maître  R.  Yoha- 
nan 3?  )j  De  même,  quand  Oula,  docteur  palestinien,  rapportait  un 
jour  une  halacha  au  nom  de  R.  Yohanan  devant  R.  Nahmann,  doc- 
deur  babylonien,  contemporain  de  R.  Hisda,  ce  docteur  dit  à  Oula  : 
n-'b  N3'^n->"'2£  Nb  ïT^^nsn  pm*^  'i  "^b  mi2i^   dN  t-^nb^rr  «  Je  jure  par 
Dieu  que  si  R.  Yohanan  m'avait  dit  lui-môme  cette  halâcha,  je  ne 
l'aurais  pas  écouté*.  » 

Il  n'est  donc  pas  étonnant  qae  Eïfa  se  soit  exprimé  devant  Rabba 
bar  bar  Hana  au  sujet  de  R.  Yohanan  de  la  môme  façon  que 
R.  Hisda  et  R.  Nahman. 

En  résumé,  à  l'époque  de  R.  Juda,  chef  de  l'école  de  Poumbe- 
dita, il  y  a  eu  deux  docteurs  du  nom  de  Eïfa  et  Abimi,  et  la  ver- 
sion de  R.  Hananel  dans  Sanhédrin,  ^ly^i'ari  H'D'^v  ixrr^yn^'Di  •^D'^^n 
N3n"i  ''5n['i],  se  trouve  pleinement  justifiée.  D'après  cette  version,  la 
périphrase  Nn"^"i37aiD^  '^D'^nn  «  les  subtils  de  Poumbedita  o  ne  désigne 
nullement  des  docteurs  contemporains  des  fils  de  Rehaba.  Eïfa  et 
Abimi  vivaient,  en  effet,  comme  nous  l'avons  vu,  du  temps  de 
R.  Juda,  chef  de  l'école  de  Poumbedita,  qui  a  communiqué  leur 

*  Ce  R.  Mani  vivait  du  temps  de  R.  Yohanan.  Voir  Menahot,  21  a. 

*  Il  faut  remplacer  Rabba  b.  b.  Hana  par  Rabba  b.  Hanin  dans  les  passages  où  ce 
docteur  s'entretient  avec  Abbaï  ;  voir  Eroubin,  45a,  ei  Pesahim,  51  a,  correction  de 
Salomon  Louria. 

*  Pesahim,  ZZb ;  Schehouot,  10^,  et  Meïla,  Ma.  Il  se  pourrait  cependant  que  R. 
Hisda  ait  reconnu  plus  tard  l'autorité  de  R.  Yohanan,  car  il  rapporte  lui-même  des 
halachot  au  nom  de  ce  docteur.  Cf.  Pesahim,  Ml  a;  Baba  Baira,  120 ô;  Aboda 
Zara,  11  i  ,-  Maccot,  23  a. 

^  RoulUn,  124. 


198  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

décision  rituelle  à  R.  Yohanan.  Or,  celui-ci  est  mort  en  590  de  l'ère 
des  Séleucides  (m-iattJ  V^^^)  ^^  ^^^  ^^  l'^^^e  vulgaire.  R.  Juda  est 
mort  en  610  de  l'ère  des  Séleucides  ou  300  de  l'ère  vulgaire.  R.  Juda 
a  eu  pour  successeur  Rabba  bar  Nahmani,  qui  dirigea  pendant 
vingt-deux  ans  l'école  dePoumbedita.  Après  sa  mort,  son  collègue 
R.  Joseph  lui  succéda  et  fut  chef  d'école  deux  ans  et  demi,  tandis 
que  nous  voyons  les  fils  de  Rehaba  prendre  part  pour  la  première 
fois  aux  discussions  de  l'école  après  la  mort  de  Rabba  bar  Nah- 
mani et  de  son  collègue  R.  Joseph  *. 

L.  Bank. 

*  Voir  plus  haut,  p.  193,  note  5. 


i 


UNE  VIEILLE  LISTE  DE  LIVRES 


Parmi  ses  manuscrits  qui  proviennent  de  la  Gueniza  du  Caire, 
M.  Elkan  N.  Adler,  de  Londres,  a  trouvé  une  vieille  feuille  jaunie 
renfermant  une  liste  de  livres  semblable  à  celle  que  j'ai  publiée  et 
étudiée  dans  la  Revue  [i.  XXXIl,  p.  126  et  suiv.).  Cette  feuille,  que 
son  obligeant  possesseur  a  bien  voulu  m'autoriser  à  reproduire, 
offre  des  particularités  très  intéressantes.  Quelques-unes  me  sont 
demeurées  incompréhensibles;  aussi  je  m'empresse  d'appeler  sur 
elles  l'attention  de  nos  collaborateurs,  afin  qu'ils  exercent  leur 
sagacité  sur  les  parties  que  je  n'ai  pu  déchiffrer  et  nous  en  ap- 
portent l'explication. 

La  feuille,  d'une  largeur  de  13  centimètres  sur  une  longueur 
égale,  est  chargée  d'écriture  sur  les  deux  côtés.  La  partie  supé- 
rieure est  intacte  ;  les  deux  marges  sont  un  peu  entamées,  et  le 
texte  a  eu  à  soufïrir.  Quant  au  bord  inférieur,  il  a  été  sensible- 
ment atteint;  probablement  il  en  manque  une  bonne  partie,  si 
bien  que  certains  numéros  de  la  liste  ont  disparu  et  que  d'autres 
sont  devenus  illisibles.  Le  texte  est  de  l'arabe  écrit  en  caractères 
hébreux  au  type  oriental.  Les  points  diacritiques  manquent  tout 
à  fait  pour  b  [=  £j  et  n  (=  o)  ;  pour  à  (=  ^),  le  point  ne  se  trouve 
que  rarement  ;  il  se  voit  parfois  pour  isi  (=  ^Jp)  et  b  (=  Là).  Quel- 
quefois ]e  dhamma  est  indiqué,  souvent  le  teschdîd;  une  fois  le 
point-voyelle  hébreu  géré  se  trouve  placé  au-dessus  de  la  lettre, 
selon  le  système  babylonien  (voir  n"47). 

Je  vais  reproduire  le  texte  exactement  comme  le  donne  la 
feuille,  avec  les  signes  ;  je  reproduis  aussi  l'aspect  des  lignes 
avec  leur  différence  de  longueur.  Pour  plus  de  commodité,  j'ai 
numéroté  les  articles. 

Recio. 

bT^K  K7373  "^b"!  C-')  :»-ii<D  bN  nan 
y[^]-y^  NbT  rj-'nxD 

bDiTsbN  a^nr)  t-in^DÀ^n  obn^^r;  r-n7a^N  ûbr  ît^d  hra]  * 

•  Les  caractères  arabes  employés  dans  cet  article  viennent  de  l'Imprimerie  Nationale. 


200  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

:r;:5i'^"n  niDism  ïiididi  nr^iîrr  ^Nn  J-JSNTn  rr^D  'ibàâ  p-i  ^TL:i^]  ' 

î-T^Dln]  riNit^&^bN    3Nn:D   ît^d  it:;-)  ^    mmu^n   ï-t^d  nb:i73   iT[:xn]   * 

1^1  tn^n  aN  p-^b:>n  c^scn  cnbi  ■c'nprî  inbro 
^D  iTÀi  '    ^N'^yNbNi  n^irsybN  ■'d  tzNbD  n^D   im  ^   n:î<Tn  iTi[i]  ^ 

tD^n»  "^^-litb  f-na-^p  rr^s  im  *^    ^5&<nD3>  n^D  in-'D  it:^^]  " 

nninbb  n^nN^-i-i  it:*!  *^   id-i^tji  n:NTm  rnins;::  ï-i^d  -iTi[i]  ^^ 

•sUTinn  D^^^p^  n:N7n"i 

T^  rr^D  luh]  " 

Verso. 

n5>^  î-î"'D  p"iTN  nban  im  ^^    mm  nn7:[o  "^dj  yni^  r!3NTn  it:t  '^ 

n^NTn  it:it  "    rnwN3nN::7:T  r-n^ii-iiT^i  D[.-]bN  mp^n  n^-:  im  " 

nymnNT  mDNb72  mn«  n-«ODm  b:Dn?3bt<  3Nn:D  173  2N3  mo  itsi  " 

nsn-ib   pnbN   •ibi'  ri'i-in   ûN-'pbN  -^br  inbN  idd  raxnD  rpD  im  " 

b"T  r^-^^yo 
n^n'^bb  im  '*   risinn  x-nsnToT  m'is^o  isnnb  mbitbx  mai  rr-'D  im  '° 

mc^D  t2iïb 
n^3  nb572  msT  r53U573  ^^•\'72^  û-^ix^-iT  ÙNsbwX  ini  "    ?nTC-n7j  im  " 

pn  ^b:j3  hT]:iT  '^   n-.DDTa  ■^N3i73u:n 
153   n3sn373  S^NO-i  "it:;i  ^*^    ri^:t<i:n   i-ny   !i^d   pnn  nbsTs   its-i  ^^ 

sior  "i  bxD-in 
■i53nb  b-^ND^û  msi  DN^Nn^bN  -"D  "im  '*    -^îNisr  n:'':;  me  im  '^ 

b"T  rr^n^D 

tzîNDpN  3Nns  t-T^DT  "^DTDipbb  !ibD53  rr^DT   nN3n5<D73  r:-«D  nT:^i  *' 

[.-•3]  in  b)::^  V:  r-nN73abN 
l-^^STDi  mp5>bN  r^D  -it:j"i  *'   pi'2  ibài  -iN3>;aNi  b-^Non  ^173:173  im  *« 

it:ii  ""    î<i\N  PwSTNnDN  im  '■    pnNiDbwX  ^by  nNTwN-i:DN  mo  im  ^^ 

:-iN2nîo?3 


UNE  VIEILLE  LISTE  DE  LIVRES  201 

rj3NTn  [mil  "    ...iu5  rr'DT  nwspsbN  -"d  im  "   ^^73  n^c  C]-ob  it>t  " 

n'^"i:>7a  rrisT  nj:t«  im  " 

Pour  ce  qui  concerne  le  titre  de  la  liste,  seule  la  deuxième  partie 
en  est  compréhensible.  En  voici  la  transcription  en   caractères 

arabes  :  ^Ijj  i/^  ^xr^U  J^î  CiU  kiUi.   Ce  qui  signifie  :  «  Gela  est 

de  ce  qui  a  été  mis  de 'côté  et  ne  doit  pas  être  vendu.  »  Il  peut 
s'agir  d'un  stock  en  librairie  dont  une  partie  est  objet  de  vente  et 
dont  l'autre,  comprise  dans  la  liste,  doit  être  réservée.  De  ce  que 
certains  livres,  notamment  des  rituels,  se  trouvent  en  nombreux 
exemplaires,  nous  sommes  fondés  à  conclure  que  nous  n'avons 
pas  affaire  à  une  collection  privée,  mais  à  des  livres  en  magasin. 

Un  seul  mot  de  la  première  moitié  est  intelligible,  c'est  o-^S  ; 
toutefois  il  n'est  pas  bien  clair,  car  son  sens  habituel,  qui  est  celui 
de  «  preuve,  argument  »,  ne  s'explique  guère  ici.  Quant  au  mot 
suivant  li'is^îDbN,  après  lequel  on  peut  encore  distinguer  les  restes 
d'un  n  et  d'un  1,  je  ne  le  comprends  pas  du  tout. 

Les  numéros  de  notre  liste  de  livres  sont  désignés  comme  m. 

D'ordinaire,  ce  mot  (Iv^)  signifie  un  «  tome  »  (voyez,  par  exemple, 
la  désignation  des  trois  parties  du  Dalâlat  -  alhâlrin  de  Maï- 
monide).  Ici  ce  mot  marque  le  «  volume  ».  Certains  volumes 
portent  chacun  un  titre,  tels  autres  réunissent  chacun  diff'érents 
ouvrages  ;  parfois  ils  renferment  des  morceaux  de  nature  très 

diverse.  Il  arrive  qu'au  mot  "lU  est  ajouté  le  mot  yynyn  (^y^), 
afin  d'indiquer  que  le  volume  est  un  recueil  de  pièces  variées 
(13,  19.  44). 

Certains  numéros  sont  aff'ectés  de  signes  extérieurs.  Un  volume 
est  appelé  obJûJ,  «  petit  »,  ou  «  joli  »  (n°  51).  De  certains  il  est  dit 

qu'ils  sont  ^Jii,  «  nus  »,  probablement  «  non  reliés  »  (n^^  21,  22, 

44)  ;  d'autres  qu'ils  sont  ^<^Xrs:,  «  reliés  en  cuir  »  (n°'  3,  4,  5).  Deux 

numéros  sont  dits  ^^  *>^,  «  reliés  en  fin  parchemin  »  (n*^  35,  39), 

dont  (jjj  *xX:??  (n^^  34)  est  une  variante,  et  peut-être  aussi  *xX^  (y^ 

(n°  2)  ;  toutefois  cette  dernière  expression  peut  signifier  aussi  que 
le  livre  même  est  en  fin  parchemin  et  qu'il  est  relié  en  cuir.  Au 
sujet  d'un  volume  contenant  une  poésie  (25),  nous  lisons  qu'il  est 

^^y  *xÀ^  «  en  cuir  bleu  ». 
Pour  ce  qui  est  des  genres  littéraires  représentés  dans  notre 


202  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

liste,  ce  sont  les  ouvrages  liturgiques  qui  prédominent.  Le  terme 
habituel  pour  désigner  les  ouvrages  liturgiques  est  rij^tn  (io!^), 
substantif  arabe  formé  de  ^m,  employé  à  la  place  de  "TiTD  ou  de 
mm^o.  Nous  retrouvons  ce  mot  dans  le  titre  d'un  ancien  recueil 
liturgique  des  Karaïtes  (voir  Pinsker,  Likhouté  Kadmoniot, 
appendice,  p.  137).  Les  numéros  suivants  de  notre  liste  sont 
donnés  comme  r;:NTn  :  7,  27,  40,  53,  54;  pour  d'autres  (17,  20,  41, 
47),  ns&^m  figure  à  côté  d'autres  morceaux.  Pour  deux  numéros, 
on  indique  les  fêtes  auxquelles  est  destinée  la  liturgie  du  volume  : 
no  2  pour  Rosch  Haschana,  Soukkot,  Hanoukka  et  le  7^  jour  de 
Pâque  (désigné  par  y-Qy^^,  parce  que  la  péricope  de  ce  jour  com- 

mence  par  ce  mot,  Ex.,  xiv,  80)  »  ;  n°  24,  n^nn  nn^uî  i  Ja>^  ïiîNTn, 
«liturgie  spéciale  à  la  fête  de  la  réjouissance  de  la  Loi*  ».  Un 
volume  du  recueil,  n^  17,  contient,  outre  n^Nm,  des  mnau),  par 
où  il  faut  entendre  des  hymnes  religieuses  (cf.  dans  la  prière  du 
matin  —  ^tdnu)  ^n^in  —  l'expression  m-i'^^m  mraTi;a  ^^bbns  et  dans 
nnnuî"'  l'expression  nn^ji  "r^-^  ;  voir  aussi  dans  le  Siddour  de 
Saadia  (Steinschneider,  Cat.  Bodl.,  col.  2204)  l'arabe  n"'nNonb«. 
Un  autre  volume  (n°31)  est  composé  de  prières  de  pénitence,  de 
Selihot  pour  le  Kippour^.  Le  1"i)3Td  est  nommé  particulièrement 
dans  un  recueil  (n°  47)  sous  la  forme  du  pluriel  arabe  1"^7:i<TD 
{^jm\jj)).  Dans  le  même  volume  se  trouvait  aussi  une  akéda,  poème 
liturgique  sur  le  sacrifice  d'Isaac  appartenant  aux  Selihot.  La  poésie 
liturgique  des  soirs  de  fête,  Maarib  *,  est  également  représentée 
{n°  55).  —  Le  n^  12  renferme  des  lamentations  (Kinot),  non  sur  le 
9  d'Ab,  mais  d\n'7D  "^s-^itb,  «  sur  les  morts  ».  On  ne  savait  pas  jus- 
qu'ici, à  ma  connaissance  du  moins,  qu'il  existât  des  recueils  par- 
ticuliers de  lamentations  funèbres. 
On  trouve  des  pièces  de  poésie  profane  désignée  sous  le  nom 

arabe  yi^  dans  les  n"'  11,  15,  25,  37.  Dans  deux  d'entre  eux 
(11,  37)  la  poésie  est  expressément  appelée  «  poésie  hébraïque  » 
(jl^jjt.i).  Il  est  probable  que  les  deux  autres  numéros  conte- 
naient des  pièces  de  poésie  arabe.  Un  recueil  (13)  renfermait  des 

morceaux  métriques,  en  arabe  ^^')y>  (?^P'w  en  hébreu). 
La  littérature  midraschique  n'est  rei)résentée  par  aucune  œuvre 

*  Cf.  dans  Zudz,  Literaturgcsch.  d.  si/naq.  Poésie,  p.  69,  le  Yocer  de  la   Pâque: 

tlîl^Jti  bN  T:iV'\  ;  le  J^CT^I  u:n"I?3  dans  le  Beth-Eamidrasch^  1,  35-5",  de  Jellinek; 
le  y^'^.'^l  Diann  dans  Zunz,  tV^,  p.  22.  note  1. 

*  Gt.  Zunz,  té.,  p.  82  et  suiv.  ;  RituSy  p.  86  et  suiv. 

'  Voir  Zunz,  Die  synag.  Poésie  d.  Mittelalters,  p.  76. 

*  Voir  Zunz,  Literaturgeseh.  (\  syn.  Poésie^  p.  73. 


UNE  VIEILLE  LISTE  DE  LIVRES  203 

marquée  d'un  nom  spécial.  Nous  apprenons  seulement  que  les 
n°"  17  et  51  renferment  du  '»Dm73,  les  n"»  10,  26,  32,  des  nT::-n72. 
Ce  pluriel,  dans  la  langue  de  Maïmonide  par  exemi)le,  désigne  la 
totalité  de  la  littérature  midraschique  (voir  mon  livre  :  Die  Bibel- 
exegese  Moses  Maimûnis,  p.  35  et  suiv.).  Il  ne  faut  pas  con- 
fondre avec  ces  mu5"n72  le  pluriel  arabe  pk^n'^'t,  que  portent  cinq 
numéros  de  notre  liste  (4,  13,  39,  42,  44).  Ce  pluriel  arabe  corres- 
pond au  pluriel  hébreu  mu3n"î,  que  Maïmonide  emploie  constam- 
ment avec  Tarticle  arabe  (voir  ib.,  p.  33  et  suiv.,  Revue,  XXIII, 
312).  Il  semble  que  ces  n5^^N"i"i  renfermaient  des  interprétations 
agadiques,  vraisemblablement  des  extraits  du  Talmud  et  du 
Midrasch. 

Un  volume  comprenait  des  Halachot  (43).  S'agit-il  des  Halachot 
Guedolot?  Nous  ne  saurions  le  dire.  Même  incertitude  au  sujet  des 
msbnji  *>o|^  du  n°  3.  Le  titre  peut  signifier  «  Remarques  utiles 
sur  les  Halachot  »,  et  il  serait  question  des  Halachot  Guedolot. 
Dans  le  môme  volume,  il  y  avait  encore  une  «  Explication  d'ex- 

pressions  »  (lâtiJI  UîTriD).  Ce  mot  vise  peut-être  des  expressions 
des  Halachot  Guedolot  ou  duïalmud  (voir  Revue,  XXXII,  128). 
Dans  le  n°  33,  un  écrit  est  désigné  comme  suit  :  «  Expressions 
(tâUJI)  des  traités  mischnaïques  Zeraïm  et  Moëd  »;  c'étaient  peut- 
être  des  articles  empruntés  aux  glossaires  sur  la  Mischna,  comme 
en  composèrent  les  Gaonim  Soherira  et  Haï  (voir  Lehen  u.  Werhe 
des  AhulivaUd  Merwân  Ibn  Uanâh,  [>.  85  et  suiv.)  L'\  n°  28  avait 
un  commentaire  sur  les  principaux  travaux  interdits  le  sabbat 
(m5Nb?D  mnt^  j.a**^â.)),  donc  sur  le  vif  chapitre  de  la  Mischna 
de  Schabbat.  Halacliique  était  probablement  le  contenu  du  mor- 
ceau dit  QiLsipb  qui  occupe  la  première  place  dans  le  recueil  n"  13 
(cf.  û-»r5î<nn  173  d-iLûtpb  =  vrùM2i2  ^t^i12  û-'-Jipb,  Revue,  XXXII,  128). 
Quant  aux  n^*^  6  et  30,  qui  portaient  le  titre  «  La  table  sacré i  et 
les  pains  de  proposition  »,  «  Les  offrandes  sacerdotales  »,  je  n'en 
saurai  déterminer  le  contenu.  Avaient  un  titre  arabe  et  étaient 
probablement  écrits  en  arabe  les  n^"  38  et  34  :  «  Des  témoignages  » 

(cybl^-^î  «j)  et  «  Le  livre  sur  les  parties  de  l'impureté  lévitique  » 

(  ms^waji  ALj\  v'^^-  Pour  ce  dernier  écrit  le  nom  de  l'auteur 
était  indiqué,  mais  sur  notre  feuille  il  est  devenu  illisible.  Peut- 
être  pourra-t-on,  par  voie  de  conjecture,  compléter  le  com- 
mencement qui  nous  a  été  conservé  et  qui  est  ,,,3  p.  Les  msTyUn 
du  n°  5  sont-elles  des  Consultations  de  Gaonim?  Impossible  de 
l'affirmer  ;  aussi  bien,  ce  peut  être  le  titre  d'un  ouvrage  de  polé- 
mique. Par  contre,  on   peut  considérer  comme  des  réponses  le 


204  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

n**  36,  u  Lettres  missives,  extrait  de  Tensembie  des  lettres  missives 

de  R.  Joseph  »  (£]Dr  '"i  J^-^^  (^  i^X^oJ  JuL^j).  Gomme  notre  liste 

a  vu  le  jour  très  probablement  avant  le  xii^  siècle  et  en  Orient, 
ce  R.  Joseph  ne  saurait  être  R.  Joseph  b.  Migasch,  disciple 
d'Alfasi,  mais  lun  des  Gaonim  du  nom  de  Joseph  (voir  Millier, 
Einleitung  in  die  Responsen  der  bal)y  Ionise  lien  Gaonen,  p.  79). 
Le  n°  50  renferme  des  lettres  échangées  probablement  entre 

hommes  savants  (cz^LaoIX!*)  ;  dans  les  n°'  26  et  45,  il  en  est  question 
également. 

Le  n»  33  contient,  outre  le  glossaire  sur  une  partie  de  la  Mischna 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  le  «  Rouleau  de  la  maison  des  Asmo- 

néens  »  en  traduction  arabe  (y^ZjJ>  "^NjIT:'»::»!  rr^n  nb:»2).  L'auteur 
des  Halachot  Guedolot  (éd.  Hildesheimer,  p.  615)  donne  le  même 
titre  au  Rouleau  des  Asmonéens.  Dans  les  ms.  yéménites  il  est 

souvent  question  d'une  traduction  arabe  de  ce  Rouleau  (car  SjZJu» 
ne  signifie  pas  ici  «l  commenté  »,  mais  «  traduit  en  arabe  »)  ;  dans 
son  Arabie  Chreslomathy  (voir  Revue,  XXV,  153],  M.  Hirschfeld 
a  publié  un  de  ces  textes.  Cf.  Harkavy,  Leben  u.  Werhe  Saadias 
(en  hébr.),  1,  205  et  suiv.  ;  Gaster,  The  scroll  of  the  Hasmo- 
neans,  p.  9). 

Avant  de  parler  des  écrits  de  Saadia  dont  il  est  question  dans 
notre  liste,  je  citerai  un  ouvrage  anonyme  avec  titre  arabe  qui  est 
désigné  expressément  comme  n'étant  pas  juif.  C'est  le  premier 

numéro,  qui  est  ainsi  décrit  :   ^x^^^y   nh^yn  m?:iw^  1^^  àoJ  ^^ 

Jii-*X-Lî  iJ<-sS (X  Volume  qui  renferme  de  la  science  des  non-juifs, 

avec  le  titre  Kitâb-al-madhal  (Livre  de  l'introduction)  ».  Il  est 
probable  qu'il  s'agit  de  l'ouvrage  astrologique  d'Abou  Maaschar 

(ix«  siècle)  j.xAxJt  JiwjCJI  (Introductio  major).  Voir  Steinschneider, 
Die  hebr.  Uebersflzungen  d.  Mittetaltem,  p.  567  et  sqq.  Le  n"28 
renfermait  un  chapitre  du  même  ouvrage  (J^Ovli  t-»U^  ^  oL). 
Je  n'ai  pu  déterminer  ce  qui  se  trouve  au  n«  6  sous  la  rubrique 
^Liîjili  c-jLlS  «  Livre  de  la  claire  explication  ».  Je  connais  un  écrit 
d'un  auteur  postérieur  à  Maïmonide  qui  portait  comme  titre 
<x^îyiJl    ^Lwi.)î,   ou    plutôt   AxitUi^Ji    *XfilyiJî    ^LàjÎ   «   Explication 

clair(3  des  fondements  de  la  religion  »  (voir  Neubauer,  Catalogne 
de  la  Bodléienne,  n°«  626  et  1313).  Il  se  pourrait  que  le  n°  6  de 
notre  liste  offrit  un  contenu  analogue. 

Parmi  les  écrits  de  Saadia,  notre  nomenclature  cite  principale- 
ment ceux  qui  ont  trait  a  la  Ilalacha. 


UNE  VIEILLE  LISTE  DE  LIVRES  203 

1.  Le  n°  28  signale  comme  dernière  pièce  les  «  quatre  portes  de 
Rabbènou  Saadia  >:.  Le  n"  41  parle  des  m^^mes  «  quatre  portes  ». 
Nous  ne  connaissons  pas  d'ouvrage  du  Gaon  portant  ce  nom; 
mais  comme  il  existe  un  écrit  halacliique  du  Gaon  Haï  intitulé 
m:>inu)  "^ly^  *,  nous  pouvons  en  inférer  que  nos  «  quatre  portes  » 
étaient  un  ouvrage  similaire.  Les  rm^iTar]  ■•m  "^ly^  et  les  ^^yo 
hi:>n2^,  qu'un  ms.-de  la  Bibliothèque  de  Parme  attribue  à  Saadia, 
ne  sauraient  être  dues  à  sa  plume,  ainsi  que  l'a  montré  Stein- 
schneider  (Cat.  BodL,  col.  2161). 

2.  Le  n°  13  parle  d'un  écrit  sur  1'  «  impureté  et  la  pureté  ». 
C'est  évidemment  le  rririLii  ïtNT:::  'o,  qu'on  cite  comme  un  ouvrage 
du  Gaon  (voir  Rapoport,  Bihhouré  Haitilm,  IX,  28,  note  19  ;  Stein- 
schneider,  ib.,  col.  2162). 

3.  Le  n"  20  renferme,  outre  de  la  liturgie  (nDS^m),  un  écrit  sur 
r  «  intercalation  »  et  un  autre  sur  «  la  fixation  de  la  néoménie  ». 
Le  premier  serait  en  arabe,  attendu  que  le  titre  marque  l'article 
arabe  [^'yyy  Jî).  Il  s'agit  sans  aucun  doute  du  mn^:'  Ji  c-^LjcS^de 
Saadia,  que  le  Fihriste  mentionne  parmi  les  écrits  de  ce  Gaon 
(voir  Poznanski,  y^i^7i5/i  Quarterly  Review,X,260).  L'autre  écrit, 
désigné  par  les  mots  de  o^inn  '0"\Tp,  avait  vraisemblablement  le 
même  contenu  que  l'ouvrage  de  Saadia;  il  ne  saurait  donc  être  de 
lui.  Joël  Millier,  dans  son  introduction  aux  écrits  halachiques  de 
Saadia  {Œuvres  complèles  de  R.  Saadia,  t.  IX,  p.  xvii  de  la 
partie  hébraïque),  cite  aussi  un  livre  du  (raon  sur  '^a^inn  ^aiTp. 
Mais  ce  n'est  pas  le  titre  d'un  ouvrage  ;  MïiUer,  qui  à  ce  sujet 
renvoie  à  J.  Q.  R.,  V,  190,  a  rendu  par  u)in-  i^M'^'p  l'anglais 
«  Galendar  w,  sans  faire  attention  que  ce  terme  s'appliquait  au 
mn-":?!!  'D  de  Saadia. 

4.  Le  n°  8  est  ainsi  conçu  :  ^Lt^ill^  iijAaj<jt.\\  ^^  -H^,  «  Traité  sur 
la  Pentecôte  et  sur  les  fêtes  ».  Il  est  possible,  quoique  peu  pro- 
bable, qu'il  soit  question  de  l'écrit  de  Saadia  sur  les  fêtes.  Cet  écrit, 
que  Saadia  appelle  ^Ltilî  cjU^  dans  son  Séfer  Haggalouï  (voir 
Harkavy,  /.  c,  p.  153;  ib.  212  et  suiv.)  était  en  hébreu  et  aurait 
porté  un  titre  hébreu  dans  notre  liste.  La  mention  spéciale  de  la 
Pentecôte  indique  que  dans  l'écrit  en  question  cette  fête  était  l'objet 
d'une  étude  particulière  et  vraisemblablement  d'une  polémique. 
Il  se  pourrait  que  cet  écrit  intitulé  -:^5fùt  une  partie  de  l'ouvrage 
polémique  de  Saadia  contre  IbnSâqeveihi,  ouvrage  qui  porte,  entre 
autres,  sur  la  Pentecôte  (voir  /.  Q.  R.,  IX,  435  ;  X,  253).  Le  titre 
et  le  commencement  manquaient  probablement  au  n»  8,  en  sorte 
qu'au  lieu  du  titre,  on  a  donné  une  indication  sur  le  contenu. 

*  Voir  Steinsclineider,  Cat.  Jiodl.,  col.  -1028. 


206  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

5.  Le  n*^  28  signale  expressément  Saadia  comme  étant  l'auteur 
d'un  ouvrage  d'ordre  polémique.  En  voici  la  transcription  arabe  : 

Vt  TT^y^  is-ia^ib  ^^  Ji^  »:>;^  ..UiiJl  Ji^  ^^\  j^éS^ ^JjS .  Parmi  les 

écrits  polémiques  connus  de  Saadia,  il  n'y  en  a  pas  qui  ait  ce  titre, 
dont  la  signification  est  la  suivante  :  «  Écartement  de  la  réfutation 
du  «  Kiyâm  »  et  sa  réfutation  selon  la  vérité  ».  Or,  nous  savons 
qu'un  écrit  de  Saadia  portait  ce  titre  :  a^Îv-ï^J^  J^  A^^  cjUlS 
AAjc^vJi,  «Défense  des  lois  religieuses  révélées*  ».  Cet  écrit  est 
donc  désigné  au  n°  28  par  -IxaJ^  f^t  nous  apprenons  par  le  titre 
que  le  Gaon  prit  sa  plume  contre  une  réfutation  caraïte  de  cet 
écrit  et  réfuta  la  réfutation.  Peut-être  cet  ouvrage  est-il  identique 
à  l'écrit  polémique  contre  Ibn  Sàqeveihi  dont  nous  avons  parlé 
plus  haut.  Dès  lors  nous  devons  admettre  que  ce  dernier  dans  son 
œuvre  polémique  contre  les  Rabbanites  et  contre  Saadia  a  eu  par- 
ticulièrement en  vue  le  «  Kitàb  alkiyàm  »  de  Saadia. 

6.  Le  n'^  38  parle  de  «  Questions  »(JjL-.j«)  de  Saadia.  Peut-être 
s'agit-il  de  questions  halachiques  et  de  réponses  qui  y  furent  faites. 

7.  Le  n<>  30  renferme  un  écrit  de  Saadia  sur  c  L'obligation  de  la 

prière  »  {ri^^vo  isnnb  i^^W  S-^?*'^)-  C'est  le  titre  de  l'introduction 
du  Siddour  du  Gaon  (voir  Steinsclineider,  Cat.  Bodl.,  col.  2204  : 

8.  Le  n"  21  offrait  un  extrait  du  commentaire  de  la  Bible  de 
Saadia;  car  c'est  probablement  ainsi  qu'il  faut  entendre  ces  mots 

rtnTiToJÎ  jj*.|Pj.AâJCi2=>j.x>*^5*.  Par  conséquent  «tafsir»  ne  signifie 
pas,  comme  d'ordinaire,  la  traduction  arabe  de  Saadia,  mais  son 

Commentaire  sur  le  Pentateuque  (habituellement  ^j^). 

9.  Il  est  possible  que  le  n"  22  ait  contenu  le  commentaire  de 
Saadia  sur  la  Genèse.  Il  faudrait  compléter  san  par  [n'^n^o  npan  ; 
voir  les  n°*  28  et  29.  Les  lettres  qui  se  trouvent  à  la  fin  de  la  ligne 

sont  inintelligibles.  Il  faut  admettre  que yûvi)!  c-îbL5~était  le  titre 
du  commentaire  de  Saadia  sur  le  Pentateuque  ,nT»3).  Cela  confir- 
merait l'indication  qui  se  trouve  dans  Neubauer  [Cat.  Bodl.,  n" 626, 
col.  121),  suivant  laquelle  le  commentaire  de  Saadia  sur  le  Penta- 
teuque est  cité  sous  la  dénomination  de  (lisez  nrtTî^bs  ^)  ni^riTbx  nj^riD. 

^0.  Le  livre  sur  le  langage  (^ÎI  ^)  du  n»  9  était  peut-être  le 

ikxUî  cjLlj  de  Saadia  ou  une  partie  de  ce  livre  (voir  mon  ouvrage  : 
Die  Anfaenge  d.  hebr.  Gramnratik,  p.  39). 

»  Voir  Poznanski,  J.  Q.  Review,  X,  259. 

*  Cf.  le  r-i"'\::x-ia  n"'DDn  -i::nb73,  de  KirkisâQi  [Steinsehneider-Ftstschrift,  p.  214  ; 
Brody.  Eehr.  BxbUogr.,  II.  lOUl. 

*  Dans  l'index  (col.  1063,  eu  haut),  il  y  a  1î<r;7i<b;<  3i<n3. 


UNE  VIEILLE  LISTE  DE  LIVRES  ml 

11.  Le  n«  14,  sans  nommer  le  Gaon  même,  nous  donne  le  titre 
arabe  complet  d'un  de  ses  ()uvra«,'es  philologiques,  qu'il  appelait 

en  hébreu  1in:*«n  'o.  Car  jj^i^*^  J^i  c-^LlS  n'est  que  le  titre 

complet  supposf^  par  M.  llarkavy  {Leben  u.  Werhe  des  Gaon  Saa- 
dia,  p.  30),  dont  Tabrégé  jl^î^^x^l  ç^US' est  employé  par  S. 
même  dans  l'introduction  au  Srfer-  Ha(jgal(nu,  tandis  que  l'ad- 
versaire de  Saadia,Mebasser,  a  Tabrëgéjji-iJi  Jj-oî  cjliLST  Le  titre 
entier  tel  qu'il  se  trouve  dans  notre  catalogue  porte^*i.XJ  au  lieu 
de^^x^l.  Grâce  à  cette  nuance,  le  titre  prend  un  autre  sens,  car 

alors  ^yo\  ne  saurait  signifier  «  racines  »  (fondements,  principes) 
de  la  poésie,  mais  les  racines  de  la  langue,  et  le  sens  du  titre 
serait  :  «  Livre  des  racines  pour  la  poésie  hébraïque  *  >>.  Ce 
sens  correspond  mieux  au  contenu  de  l'ouvrage.  L'Agron  est  un 
vocabulaire  double,  où  les  mots  sont  rangés  par  ordre  alphabé- 
tique des  initiales  et  des  finales,  et  il  a  pour  objet  de  faciliter  leur 
tâche  aux  chercheurs  d'acrostiches  et  de  rimes.  Saadia  donne 
les  racines,  c'est-à-dire  les  formes  verbales  reconnues  par  lui 
comme  telles  ;  donc  le  livre  pouvait  à  bon  droit  s'appeler  «  Livre 
des  racines  ».  Ainsi,  le  dictionnaire  de  rimes  de  Saadia  aurait  eu 
le  même  titre  que  plus  tard  le  grand  dictionnaire  d'Abouhvalid. 

Le  fait  que  notre  liste  compte  tant  d'ouvrages  de  Saadia  prouve 
qu'elle  est  d'une  époque  où  on  lisait  beaucoup  les  œuvres  du  Gaon. 
Aux  n<^^  29  et  38,  on  accole  au  nom  de  Saadia  la  formule  usitée 
pour  les  défunts  (V't  —  rcrch  ^3^-l^T).  Donc  il  y  a  apparence  que 
notre  liste  date  du  siècle  qui  a  suivi  sa  mort.  Cette  supposition 
est  confirmée  par  la  présence,  dans  notre  liste,  d'un  auteur  qui  fut 
au  nombre  des  plus  éminents  savants  karaïles  et  qui  florissait  vers 
la  fin  du  ix«  et  le  commencement  du  x^  siècle,  par  conséquent  peu 
avant  Saadia,  de  Daniel  al-Kumisi,  sur  qui  nous  sommes  informés 
grâce  à  Kirkisâni  mieux  que  ne  l'était  Pins^ker  {LihkoiUé  Kadmo- 
niot,  I,  48  ;  II,  188).  Voir  Harkavy,  VHP  vol.  des  Ahhandlungen 
d.  Russ.  archaeol.  Gesellschafl,  pp.  280  et  316;  J.  Q.  R.,  Vil, 
692  et  suiv.  ;  VIII,  681  et  suiv.  ;  IX,  436.  Le  n^  45  contient  un 
écrit  de  lui,  qui  porte  comme  titre  le  simple  mot  de  a  Question  » 

(iJL^).  Peut-être  était-ce  un  chapitre  de  son  m:t?3ri  'o  écrit  en 
hébreu.  Qu'au  milieu  d'une  collection  d'ouvrages  essentiellement 
rabbanites  nous  rencontrions  un  écrit  karaïte,  cela  n'a  rien  d'éton- 
nant pour  qui  sait  l'ardeur  de  polémique  où  Karaïtes  et  Rabbanites 
étaient  montés  au  temps  dont  date  notre  liste.  Il  semble,  du  reste, 

*  H  faudra  donc  rectitier  ma  traduction  «  Livre  des  principes  de  la  prosodie  »  [Die 
hebr.  Sprachioisienschaft  vont  10.  bis  IS.  Jahrh.^  p.  16). 


208  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

que  Daniel  al-Kumisi  n'était  pas  trop  mal  vu  des  Rabbanites, 
parce  que,  comme  nous  l'apprend  Kirkisâni,  il  s'attaqua  plus  tard 
à  Anan,  le  fondateur  du  Karaïsme,  et  l'appela  D^b-^DiDri  ;Di^n. 

Le  n«  19  renfermait  aussi  un  écrit  d'Anan  [l^yb  ^^],  qui  n*est 
pas  plus  clairement  désigné. 

Si  la  petite  feuille  de  papier,  à  laquelle  cet  article  est  consacré, 
offre  maints  détails  intéressants  pour  l'histoire  de  la  littérature 
juive  du  moyen  âge,  d'autre  part,  elle  présente  quelques  énigmes 
dont  je  n'ai  pu  trouver  la  clé  et  que  je  signale  à  la  sagacité  de  nos 
savants. 

1.  Que  signifie  ïntîTNnD5<  (transcription   arabe   :    «^î)^^]    ou 

iiyl^V^Î)?  Ce  mot  revient  dans  deux  numéros  (16  et  49)  et  dans 

un  troisième  (48),  il  est  accompagné  d'une  expression  non  moins 

énigmatique  :  ^a-^^N^sb^  '^by  (=  jii^^\j.À}\  J^).  On  pourrait  consi- 
dérer nj^T^^i^i^  comme  une  arabisation  de  *^^t'^^n,qui  signifierait 
«  Prédications  ».  Mais  où  ce  mot  a-t-il  ce  sens?  Ce  n'est  qu'en 
néo- syriaque  que  niDj^  et  en  arabe  vulgaire  que  \j^  signifie 
«  prêcher  1  )>.  Si  ^\j\S\  signifie  «  prédications  »,  ©"^^î^nD  peut 
passer  pour  le  pluriel  arabe  de  ^^'9'^^?  «  section,  péricope  ».  Le 
n«  48  nous  donnerait  des  vl  Prédications  sur  les  péricopes  hebdo- 
madaires ».  Toutefois  cette  explication  me  paraît  problématique. 

2.  Que  veut  dire  le  titre  du  n°  18  :  n-nnbb  nN-isiTT?  Si  tii^nî^irv 
était  une  arabisation  de  ni-ii:i"«^  qui  désignerait  les  poésies  litur- 
giques de  la  prière  du  matin,  que  signifierait  nmnbb?  Dans  les 
n^^  23  et  55  on  peut  encore  distinguer  les  premières  lettres  de  notre 
mot  énigmatique  *. 

3.  Que  signifie  aUJI,  dont  parle  le  no52? 

4.  Que  signifie,  dans  le  n^  6,  )'^i  n-«3  nx  (3-4*J?  Ce  mot  arabe 
peut  avoir  le  sens  «  extrait  »  ;  et  l'œuvre  signalée  serait  alors 
extraite  de  l'œuvre  complète,  dont  l'auteur  aurait  été  connu 
comme  «  Ab-Dêt-Dîn  »  (chef  du  tribunal). 

Enfin,  mentionnons  que  pour  le  n°  35  et  la  deuxième  moitié  du 
du  n°  19  le  contenu  n'est  marqué  que  par  ces  termes  généraux 

UuôUoj  »*Xfi  «  une  certaine  quantité  d'ouvrages  ». 

W.  Bâcher. 

*  Voir  Krauss-Lôw,  Griechische  und  lateinische  Lehnwœrter^  11,  297  b. 

'  M.  Steinschneider  m'écrit  qu'il  ne  se  souvient  pas  d'avoir  trouvé  les  pluriels 
125''^i<"1D  et  n5<1Ni:T^.  Mais  il  m'indique  le  pluriel  arabe  ■T^TN:i73  de  mT573,  cité 
dans  son  dernier  catalogue  [Virzeic/uiiss  der  hebr.  Handschri/'len  der  kOn.  Bibliothek 
in  Berlin,  Zweitc  Abllieilung,  p.  81  b,  note  3),  et  le  pluriel  "î'^lN'IO  de  11*10,  qu'il  a 
trouvé  quelque  part. 


\ 


LA  GRANDE  SYNAGOGUE  DE  SEGOVIC 


Le  dernier  Boletin  de  la  Real  Academia  de  la  Hisloria  de 
Madrid  (octobre  1899)  contient  sur  une  antique  synagogue  de 
Ségovie  un  article  extrêmement  intéressant,  que  nos  lecteurs 
nous  sauront  gré  d'analyser  en  détail. 

L'église  dite  du  Corpus  Chrisii  de  Ségovie,  qui  fut,  il  y  a 
quelques  mois,  la  proie  des  liammes,  était  une  ancienne  synagogue 
dont  l'origine  se  perd  dans  les  premiers  temps  de  l'histoire  de 
la  péninsule  ibérique.  Cet  ancien  monument  judaïque  passait  à 
juste  titre  pour  un  des  plus  beaux,  joyaux  arcliitectoniques  de  la 
Vieille-Gastille.  Bien  que  transformé  depuis  le  commencement 
du  xv°  siècle  en  un  temple  catholique,  dépendant,  en  dernier  lieu, 
de  l'ordre  des  Sœurs  Franciscaines,  il  gardait  de  sa  destination 
première  un  caractère  particulier  que  n'avaient  pu  effacer  les 
changements  apportés  à  son  aménagement  intérieur.  Les  clichés 
que  l'on  trouvera  plus  loin  et  qui  ont  été  gracieusement  prêtés 
à  la  Revue  par  l'Académie  Royale  d'histoire  de  Madrid  suf- 
fisent à  le  montrer  d'une  façon  saisissante.  Le  premier  de  ces 
clichés  reproduit,  d'après  une  photographie  de  M.  Joaquim  Maria 
Gastellarnau,  l'aspect  actuel  de  l'intérieur  de  l'ancienne  synagogue 
avec  ses  arcades  entourant  la  nef  centrale  et  ses  murs  épais, 
noircis  par  l'incendie.  Le  second  donne  un  plan  de  la  construction, 
dans  lequel  les  lignes  pleines  indiquent  les  murs  de  la  primitive 
synagogue,  et  les  autres  ceux  dont  l'édiOcation  fut  nécessitée  ulté- 
rieurement par  la  nouvelle  affectation  de  la  bâtisse.  Ce  plan  est 
une  réduction  du  plan  de  l'église  et  du  couvent  du  Corpus  Chrisii 
levé  par  les  soins  de  M.  Odriozola,  architecte  municipal  de  la  ville 
de  Ségovie. 

Cet  édifice  existait  déjà  au  moment  où  Alphonse  VI  entra  dans 
la  ville  en  conquérant.  Une  autre  version  cependant  n'en  ferait 
remonter  la  construction  guère  au  delà  du  règne  d'Alphonse  X, 
dit  le  Sage.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  les  Israélites  y  ont 

T.  XXXIX,  N"  78.  14 


210 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


pratiqué  le  culte  jusqu'en  1410.  Ce  fut  cette  année  seulement  que, 
prenant  prétexte  d'un  sacrilège  imputé  à  quelques  rabbins  par  la 
clameur  publique,  la  reine  Gatalina,  mère  de  Jean  11^  chassa  les 
Juifs  de  la  ville  et  fit  don  de  leur  synagogue  à  l'évêque  D.  Juan  de 
Tordesillas.  Celui-ci  l'affecta  au  culte  catholique  sous  l'invocation 
du  Coî'pus  Chrisli  et  la  donna  aux  moines  Jérômes  de  Parraces. 


Fi(/.  -/.  —  Aspect  acluel  de  l'intérieur  de  l'ancienne  synagogue  de  Ségovie. 


Elle  resta  en  leur  pouvoir,  et  toujours  consacrée  au  culte  catho- 
lique, pendant  plus  d'un  siècle  et  demi.  En  1572,  Manuel  et  Antonio 
del  Sello  et  la  femme  de  ce  dernier,  Doua  Juana  de  ïapia,  l'ac- 
quirent pour  y  installer  les  Sœurs  Franciscaines,  qui  en  demeu- 
rèrent maîtresses  jusqu'à  nos  jours. 

De  ce  rapide  historique  on  peut  conclure  que  la  synagogue  a  dû 
subir  depuis  l'expulsion  des  .luifs  au  moins  deux  transformations  : 
la  première  quand  les  moines  de  Parraces  s'y  sont  établis,  et  la 
seconde  quand  on  en  a  fait  la  chapelle  d'un  couvent  de  Sœurs 
Franciscaines.  Le  problème  qui  se  pose  donc  tout  d'abord  consiste 


LA  GRANDE  SYNAGOGUE  DE  SÉGOVIE  211 

à  déterminer  la  nature  et  l'étendue  des  travaux  effectués  pendant 
le  séjour  des  moines.  Or,  dans  ce  qui  a  été  la  synagogue,  M.  Gastel- 


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Fig.  2.  —  Plan  de  la  construction. 


larnau  n'a  pas  trouvé  la  moindre  trace  d'une  modification  pouvant 
être  attribuée  à  cette  période.  Incontestablement,  dit-il,  l'affec- 
tation de  l'ancienne  synagogue  au  culte  catholique  n'a  pu  se  faire 


212  RK VUE;  DES  ETUDES  JUIVES 

sans  qu'on  y  introduisît  quelques  modifications  ;  seulement  il  n'en 
reste  pas  trace.  Peut-être  ces  modifications  se  réduisirent-elles  à 
l'érection  d'un  autel  à  la  place  du  sanctuaire.  Mais  si  on  ne  trouve 
pas  le  moindre  vestige  d'aucun  travail  des  moines  dans  la  syna- 
gogue, on  peut  affirmer^  en  revanche,  que  la  construction  du  cou- 
vent actuel  est  presque  entièrement  leur  œuvre.  Il  y  avait  autre- 
fois, à  côté  de  la  synagogue  et  y  attenant,  une  maison  qui  devait 
servir  d'habitation  au  grand-rabbin.  C'est  sur  son  emplacement 
que  fut  élevé  le  couvent.  Celui-ci,  d'après  M.  Casteilarnau,  ne 
saurait  remonter  au  delà  du  xv«  siècle,  étant  donnée  la  nature  des 
matériaux  employés  à  sa  construction.  Les  portiques  de  la  cour 
intérieure  et  la  galerie  supérieure  du  couvent  qui  se  conservent 
encore  debout  avec  leurs  colonnes,  leurs  chapiteaux  de  granit  et 
leurs  voûtes  surbaissées  portent  la  marque  de  l'époque.  On  peut 
en  dire  autant  du  portique  de  l'église  marqué  en  A  (fig.  2).  En 
efifet,  l'arc  de  cette  entrée  est  en  pierre  granitique,  comme  les 
colonnes  de  la  cour  du  couvent,  et  cette  sorte  de  pierre  ne  se 
trouve  pas  employée  dans  les  travaux  incontestablement  plus 
récents  comme  les  murs  désignés  dans  le  plan  que  nous  repro- 
duisons par  les  lettres  BBB,  GG  et  H  (fig.  2).  On  conçoit,  d'ail- 
leurs, que  les  moines  aient  voulu  se  ménager  une  entrée  dans 
l'église  en  A,  l'entrée  du  couvent  donnant  sur  une  cour  de  ce 
côté.  Autrement  ils  eussent  été  obligés  de  faire  un  détour  pour 
pénétrer  dans  l'église,  soit  par  la  grande  porte  NN  sur  la  façade 
de  la  primitive  synagogue,  soit  par  la  porte  P  ménagée  sur  l'un 
des  côtés  du  temple. 

Dans  son  histoire  de  Ségovie,  Colmenares  a  écrit  quelque  part 
que  de  son  temps  l'église  du  Corpus  Cliristi  «  fut  renouvelée  »  (en 
nuestros  dias  se  renovo  aquella  fabrica),  et  M.  Casteilarnau,  qui 
rapporte  ces  paroles,  y  voit  une  confirmation  de  l'avis  qu'il  émet 
sur  les  autres  constructions  ajoutées  à  la  primitive  synagogue  en 
outre  du  couvent  et  de  la  porte  A.  Mais,  en  l'absence  même  de 
tout  document  contemporain,  aujourd'hui  que  le  feu  a  dépouillé 
les  murs  de  ses  revêtements,  on  distingue  avec  la  plus  grande  faci> 
lité  ce  qui  a  été  bâti  presque  vers  le  commencement  du  xv<^  siècle 
de  ce  qui  est  postérieur.  11  suffit,  dit  M.  Casteilarnau,  du  plus  léger 
examen  pour  être  frappé  par  les  différences  qui  existent  entre  le 
solide  maçonnage  ancien  et  les  murs  ajoutés  depuis.  On  peut  même 
fixer  à  peu  près  la  date  de  quelques-unes  de  ces  constructions. 
Le  presbytère,  par  exemple,  en  forme  de  croix  grecque,  surmonté 
d'une  coupole  hémisj)hérique,  a  dû  être  bâti  à  une  époque  relati- 
vement récente,  probablement  vers  le  milieu  du  xviii«  siècle, 
comme  l'indique  son  style  néo-classique  de  l'ordre  toscan.  Peut- 


LA  CHANDK  SYNAC.OdUK  DK  SKfîOVlK  213 

être  môme  est-ce  plus  particulièrement  à  son  achèvement  que  lait 
allusion  Golmenares  dans  le  passage  de  l'histoire  de  Ségovie  que 
nous  avons  cité. 

Il  ne  saurait  être  douteux  pour  quiconque  examine  le  plan  (fig.  2) 
que  les  parties  au  trait  plein  représentent  bien  les  seuls  vestiges 
de  l'ancienne  synagogue  qui  subsistent  debout,  comme  le  veut 
M.  Castellarnau.  En  effet,  les  murs  que  Ton  voit  indiqués  en  BBB, 
GG    et  II  constitueraient  de    véritables  excroissances  architec- 
toniques  dans  une  synagogue.  Ils  se  comprennent,  au  contraire, 
à  merveille  si  l'on  considère  les  nécessités  créées  par  la  présence 
de  sœurs  recluses.  Ceux  qui  furent  chargés  d'aménager  l'ancienne 
synagogue,  de  manière  que  les  religieuses  pussent  assister  aux 
offices  sans  communiquer  avec  la  partie  du  temple  accessible  au 
public,  ne  pouvaient  manquer  d'imaginer  la    cloison   BBB.   La 
portion  E  de  la  nef  centrale  fut  ensuite  séparée  des  parties  laté- 
rales pour  former  le  chœur;  mais,  ses  dimensions  étant  exiguës 
on  le  prolongea  au  travers  de  l'ouverture  NN,  en  construisant  les 
murs  GG  et  H.  Ce  qui  le  prouve,  c'est  que  tous  ces  m.urs  n'ont  au- 
cune liaison  avec  les  murs  qui  constituaient  la  primitive  construc- 
tion et  ne  sont  qu'adossés  aux  anciennes  parois  de  la  synagogue. 
On  peut  encore  faire  remarquer  que  les  murs  GG  et  II  se  trouvent 
trop  rapprochés  de  la  muraille  d'enceinte  de  la  ville  pour  avoir  été 
bâtis  par  ceux  qui   élevèrent  la   synagogue.    Cette  construction 
remonte,  en  effet,  comme  nous  l'avons  dit,  au  règne  d'Alphonse  X, 
si  ce  n'est  à  une  époque  antérieure.  Or,  tout  le  monde  sait  quel 
rôle  avaient  dans  les  guerres  de  cette  époque  les  murailles  des 
villes.  Peut-on  dès  lors  admettre  que  l'on  eût  permis  aux  Juifs  de 
Ségovie  de  construire  leur  synagogue  adossée,  pour  ainsi  dire,  à 
la  muraille  de  la  ville?  Même  après  que  la  synagogue  fut  affectée 
au  culte  catholique,  en  1410,  les  moines  de  Parraces  n'osèrent  pas 
construire  leur  couvent  aussi  près  de  cette  muraille.  A  la  fin  du 
XVI"  siècle,  alors  qu'on  ne  faisait  déjà  plus  la  guerre  de  la  même 
façon,  c'était  tout  autre  chose,  et  les  architectes  des  Sœurs  Fran- 
ciscaines n'avaient  pas  à  se  gêner. 

Dès  lors,  il  devient  loisible  de  reconstituer  les  dispositions  pre- 
mières de  l'antique  synagogue  de  Ségovie,  telle  qu'elle  devait  être 
vers  1410,  date  de  l'expulsion  des  Juifs.  Elle  occupait  vraisembla- 
blement une  surface  rectangulaire  limitée  par  quatre  murs  épais, 
dont  trois  subsistent  encore  (fig.  2,  partie  en  traits  pleins).  Les 
murs  latéraux  dirigés  dans  le  sens  Nord-Sud  (VV  et  PA),  la  façade 
JJ  regardant  le  Sud,  l'ouverture  qu'on  y  remarque  ayant  dû  ré- 
pondre évidemment  à  l'entrée  principale.  Le  mur  qui  devait  clore 
l'enceinte  de  la  synagogue  du  côté  Nord  a  dû  être  démoli  lors  de 


21/i  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

la  construction  du  presbytère.  C'est  là  que  devaient  se  trouver  le 
tabernacle  et  le  sanctuaire. 

Nous  avons  dit  que  l'ouverture  NN  devait  répondre  à  l'entrée 
principale  de  la  synagogue.  En  effet,  les  pans  de  murs  JJ  n'en- 
closent que  les  deux  nefs  latérales  de  la  construction,  laissant 
ouverte  la  nef  centrale.  Leurs  extrémités  NN  présentent,  en  outre, 
des  particularités  qui  ne  s'expliqueraient  pas  sans  l'existence 
d'une  porte  à  cet  endroit.  D'abord,  dans  une  étendue  de  2™,50 
environ,  à  partir  de  NN,  les  murs  JJ  sont  formés  par  des  blocs  de 
pierre  calcaire,  et  c'est  le  seul  endroit  où  cette  espèce  de  pierre  se 
trouve  employée.  Ensuite,  ils  sont  renforcés  extérieurement  par 
deux  gros  piliers  carrés  d'environ  0'",'73  centimètres,  également  en 
pierre  de  taille.  Finalement,  de  chaque  côté  de  l'ouverture  NN, 
en  dedans,  se  trouvent  deux  demi-piliers  d'où  partent  les  arcades 
qui  partageaient  antérieurement  l'ancienne  synagogue  en  trois  nefs, 
comme  nous  le  montrerons  tout  à  l'heure,  et  ces  piliers,  eux  aussi» 
sont  en  pierre  calcaire.  Ne  voit-on  pas  que  tout  cela  n'a  eu  qu'un 
but,  donner  plus  de  solidité  aux  extrémités  NN  des  murs  qui 
ferment  les  nefs  latérales,  afin  qu'ils  pussent  porter  l'arc  de  la 
porte  principale  de  la  synagogue?  On  peut  observer  encore  le 
point  de  départ  de  cet  arc,  qui  aura  été  démoli  au  moment  où, 
voulant  élargir  le  chœur,  on  a  élevé  les  murs  GG  et  H,  comme 
nous  l'avons  expliqué. 

La  synagogue  devait  avoir  encore  une  autre  entrée  :  celle  que 
nous  avons  indiquée  en  P  et  qui  a  subsisté  toujours.  Il  est  visible, 
en  effet,  qu'elle  n'a  pas  été  pratiquée  depuis  la  nouvelle  affectation 
de  la  bâtisse.  On  peut  supposer  qu'elle  desservait  la  nef  réservée 
aux  femmes,  car  on  ne  voit  pas  qu'il  y  eût  dans  la  synagogue  un 
autre  endroit  qui  leur  fut  destiné.  Là  devaient  se  borner  les 
ouvertures  primitives,  car  les  fenêtres  qui  existent  aujourd'hui 
sur  la  paroi  VV  y  ont  été  vraisemblablement  pratiquées  depuis. 
Tel  est  du  moins  l'avis  de  M.  Castellarnau. 

Si  maintenant  nous  voulons  nous  faire  une  idée  de  la  distribu- 
tion intérieure  de  la  synagogue  en  nous  aidant  des  vestiges  qui  en 
subsistent,  voici  la  description  qu'en  donne  M.  Castellarnau  : 

«  L'enceinte  de  la  synagogue  était  partagée  en  trois  nefs  par 
deux  majestueuses  arcades  dont  les  arcs,  en  fer  à  cheval,  s'ap- 
puyaient sur  des  piliers  octogones.  Arcades  et  piliers  se  conservent 
encore  debout  (voyez  le  cliché  fig.  1).  Ces  deux  arcades  se  com- 
posent de  cinq  arcs  chacune,  mais  il  devait  y  en  avoir  sept  primi- 
tivement. Les  deux  premiers  s'appuient  sur  les  demi-piliers  octo- 
gones en  pierre  qui  se  trouvent  de  chaque  côté  de  l'entrée  princi- 
pale (NN  fig.  2),  et  les  derniers  sur  les  pilastres  qui  soutiennent 


LA  GRANDE  SYNAGOGUE  DE  SÉGOVIE  215 

les  arcs  tores  du  presbytère.  La  hauteur  de  ces  arcs  est  celle  des 
nefs  latérales,  mais  intérieurement,  par-dessus  ces  arcs  et  jusqu'au 
toit  de  la  nef  centrale,  se  déroulait  une  précieuse  suite  de  vingt- 
six  arcs  soutenus  par  vingt-sept  colonnettes.  Du  côté  Ouest,  ces 
arcs  se  sont  écroulés  pendant  Tincendie,  et  ceux  qui  restent 
debout  menacent  ruine,  car  la  paroi  qu'ils  ornent  n'était  qu'une 
cloison  reposant  sur  les  cimaises  qui  supportaient  les  poutres  de 
la  nef  latérale,  lesquelles  se  sont  carbonisées  par  l'action  du  feu  et 
réduites  en  cendres  par  endroits.  Ces  arcades,  qui  de  tout  temps 
furent  aveugles,  n'avaient  qu'un  but  ornemental  et  sont  formées 
par  des  arcs  en  fer  à  cheval  reposant  sur  des  demi-colonnes 
géminées  à  fût  cylindrique.  La  décoration  des  archivoltes  est 
formée  tantôt  par  cinq  lobules  qui  altèrent  un  peu  leur  forme  de 
fer  à  cheval,  tantôt  par  un  simple  feston.  Au  point  de  rencontre 
des  arcs,  il  y  a  une  rosace. 

a  Un  bandeau  décoratif  se  déroulait  le  long  des  arcades,  au- 
dessous  des  arcatures  de  la  corniche,  et  entre  celle-ci  et  les  arcs 
une  frise  composée  de  deux  larges  bandes  séparées  par  une  autre 
plus  étroite  dans  l'arcature  de  l'Est.  Ces  bandeaux  furent  détruits 
à  la  suite  de  quelque  ravalement. 

«  L'ornementation  des  chapiteaux  des  piliers  octogones  qui 
soutiennent  les  arcades  est  extrêmement  originale  et  délicate.  Elle 
est  constituée  par  des  palmes  gracieusement  entre-croisées,  de 
façon  à  former  des  losanges  dont  les  extrémités,  réunies  deux  à 
deux  en  forme  de  volute,  s'enroulent  au-dessus  d'une  pomme 
de  pin.  Il  y  a  vingt-quatre  volutes  à  chaque  chapiteau,  deux  à 
chacune  des  faces  de  la  colonne  et  une  à  chaque  arête.  Les  volutes 
se  trouvent  ainsi  disposées,  de  façon  à  occuper  le  centre  de  chacun 
des  vingt-quatre  losanges  dans  lesquels  l'entrecroisement  de  la 
tige  des  palmes  partage  le  chapiteau.  »  L'ensemble  de  cette  orne- 
mentation devait  être  d'un  effet  très  heureux. 

Toute  la  décoration  de  la  synagogue,  tant  celle  de  l'arcature 
supérieure  que  celle  des  chapiteaux,  frises  et  rosaces,  était  en 
plâtre  et  se  trouvait  fortement  détériorée  à  la  suite  des  nombreux 
blanchissements  qu'elle  avait  dû  subir.  Aujourd'hui  que  le  feu  a 
passé  par  là,  il  n'y  a  que  de  rares  endroits  où  l'on  peut  voir 
encore  des  vestiges  de  cette  ornementation.  Aucun  des  chapiteaux 
dont  nous  venons  de  donner  la  description  n'est  intact,  et  ce  n'est 
qu'en  les  complétant  les  uns  par  les  autres  que  M.  Gastellarnau  a 
pu  les  reconstituer  comme  ils  étaient  aux  beaux  jours  de  l'antique 
monument  judaïque. 

Même  le  revêtement  à  la  chaux  a  disparu  des  piliers  et  des 
arcades  sous  l'action  des  flammes,  mettant  à  nu  les  briques  de  la 


216  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

construction.  Elle  fait  honneur  aux  ouvriers  qui  l'ont  édifiée  en 
des  temps  lointains,  car  on  n'y  découvre  pas  la  moindre  fissure, 
et  ces  parois,  vieilles  de  six  siècles,  paraissent  inébranlables,  tant 
leur  aspect  est  solide.  Rien  n'a  bougé  ;  pas  une  brique  ne  s'est 
ébranlée.  Piliers  et  arcades  se  dressent  d'aplomb  comme  au  temps 
où  les  achevèrent  les  habiles  artisans  qui  les  bâtirent. 

En  accomplissant  son  œuvre  de  destruction,  le  feu  a  ainsi,  du 
même  coup,  mis  à  néant  la  légende  du  sacrilège  imputé  à  quelques 
rabbins  en  1410,  et  qui  servit  de  prétexte  à  leur  expulsion  et  à  la 
confiscation  de  leur  synagogue.  Les  briques,  que  les  flammes  ont 
mises  à  découvert,  attestent  qu'elles  n'ont  eu  à  subir  aucune  recons- 
truction à  aucune  époque.  Que  devient  dès  lors  le  récit  du  frère 
Alonzo  de  la  Espina,  disant  qu'après  que  les  rabbins  eurent  commis 
leur  abominable  crime,  «  la  synagogue  fut  violemment  secouée 
avec  grand  bruit  et  fracas,  si  bien  que  ses  piliers  et  ses  arcs  se 
fendirent  ».  Et  pourtant  ce  récit  trouva  créance  jusqu'au  xvii^ 
siècle.  Golmenares,  dans  son  Histoire  de  la  très  ancienne,  nohle 
et  loyale  ville  de  Ségovie,  publiée  en  1637,  dit  en  parlant  du  pré- 
tendu sacrilège  :  «  Toute  la  synagogue  trembla,  les  arcs  et  les 
piliers  se  fendirent  et  restèrent  ainsi  jusqu'à  nos  jours  ».  De 
sorte  que,  dit  M.  Gastellarnau,  d'après  Golmenares,  les  piliers  et 
les  arcades  de  la  synagogue  seraient  restés  dans  ce  triste  état 
pendant  environ  deux  siècles  et  demi,  depuis  1410  jusqu'en  1037. 
Or,  aujourd'hui  nous  pouvons  constater  que  jamais  aucune  brisure 
ne  s'y  est  produite,  ni  les  piliers,  ni  les  arcades  ne  portant  la  trace 
d'aucune  restauration.  G'est  également  à  tort,  dit  encore  M.  Gas- 
tellarnau, que  M.  José  Maria  Guadrado,  dans  son  livre  Souvenirs 
et  'beautés  de  V Espagne  (1865-1872),  dit  que  l'on  voit  dans  le  mur 
du  fond  de  la  synagogae  une  fente  qui  remonte  au  moment  où, 
par  suite  du  sacrilège  des  rabbins,  la  synagogue  fut  secouée  dans 
ses  fondements.  On  voit,  en  effet,  sur  le  mur  indiqué  en  II  (fig.  2) 
une  fente,  mais,  ainsi  que  l'a  démontré  M.  Gastellarnau,  ce  mur 
n'a  jamais  appartenu  à  la  synagogue.  Si  M.  Guadrado  pouvait  la 
voir  aujourd'hui,  il  s'en  apercevrait  tout  le  premier. 

La  très  érudite  communication  de  M.  Gastellarnau,  que  nous 
venons  d'analyser,  présente  donc  le  double  intérêt  de  nous  donner 
une  reconstitution  minutieuse  d'un  des  plus  anciens  monuments 
judaïques  de  l'Espagne  et  de  faire  bonne  justice  d'une  vieille 
légende  que  des  auteurs,  d'ordinaire  plus  circonspects,  avaient 
rapportée  jusque  de  nos  jours  sur  la  foi  des  chroniqueurs  du 
XVII®  siècle. 

Oscar  d'Araujo. 


LETTRES  DE  SCHESGHET 

B.    ISAAG   B.    JOSEPH   BENVENISTE   DE   SARAGOSSE 
AUX  PRINCES  KALONYMOS  ET  LËYI  DE  NARBONNE 

(suite  et  fin*) 


tnnfc<T  .^ïiSDnN    ^b   -^rî  ïinnnbT  ï-r^'n^b   ■^nars.s  y-isa    ^b^^^  Dip 
"^?a   nba   "^b   t-in3T  ,">5nn3    nasn    yiwS    "D    ï-riDn::    "^b  rorr 
mb  '^b.inrj  nîm  .^n-innb    ■'Dss  î-rnbiDi   nso^s   ^N73   "^5   ,^n3ti&« 

p-^TriTan  .^nnnî*  It^î^s  i  ûbu:  :f^i2W2  nvj  ^'0373  bip  :>n73u;b  t-nni^ap 


V  :  Mètre 


:  vp-i'an  by  ta-iN  32b  Tnrr^  pi  .■•aab  ^nn  '^•'^bn  yDC^*;? 

:  vpiiT?:  tzirt  \soDi  ^^T^T»      ,by  ^"«"'bn  pbm  ûb':3  rr^n 
:  rpbn  'nuî^  •'ïi"»  tn  ""pbm       ,pbnn  ^nnrj.sn  ûpbn  "«dd 

.^nbnsa  pmm  pTnnm   ,y2^b^   iDy?3U5D  '^i-i'^D'n  m^itr    !-i5ban 

*  Voir  plus  haut,  p.  62. 

*  Gen.,  XIII,  17. 
'  Jos.,  XV,  19. 

*  Ps.,  LXVIII,  14. 

5  Allusion  à  son  nom  Scheschet;  n\13\IÎ  "^p^H  =  Û'^p^M  nUJUJ. 

»   Ps.,  LI,10. 


218  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

pnis-^  •Ta  lapïi  t-r^a^u  ûibu:  msn  D^n-ja73  m::^;:^^^  ,^3  r;n!auî3T  nb"«;2 


."^"jDpnD  ciDi"»  ^a  pni:-'  na  nuîuî  iTOwX^r;  lap^  "l'^nx  .imriwNa 


:  Tib5  ^->b&<"i  ■'lin  in^  ^b 

iip"'  (?)Tn^r;  t^n^a  bx  db^D  riNn 

:  ny  ^bbsai  "^ri^J  iXii  ^ai 

:  T"ip  ^tDibu:  n3>ib  -«abi 

:  iiNnu  ^T'U^i  ^nra  d""  "^i;*! 

:  "n^nin  "Tn  nna  bn^b  ^^n^a 

:  «iinn  '^b  -in[rî]T  ^m::  u^^^Jn  "p 

*  TiiT  ^^"'j^Ni-ib  puîn  m  "^^^ttii 


\j w  :  Mètre 

,yi*nwN  T^-lHwST  "^25^73    ^H^^ 

,T-ia:\  ^«"^b  n^N  \naniN  -^^^^^ût 
,mbTi:xa  Y'*"!""  "^^^  ï^^^  l^ 

.•^TiwS^û  b^  -«sa  d5>  "«a-ip  C]nDDD5< 

,'^"'P':jn  na^Toa  ^zvy^  '^y^n^ 

,*;ï-î  "^^"ii  "^aab  li^T»  d"'\a3  ■''t> 

,pn\25n  ^nm  np"^  ■•a)  ^b  in  mNiu:n 

,d'^"'n  d^'pbi^  "^id  iwS  ^^20  m^-i 


.ïT^bî*  rt-^m-is  ^-lya^i  trijwX-i  b:^  pon  mbi^  nbd  ant  ^na^wS  n^ll^il^ 
mx-ib  TT^ip  /ï-T^b3>  tD-^nii:  npTUîn  ^■'piit^  nra'ui 
^d-'^'ns  :>auîî<  t^b  ^-«i^T  ,';;a\x  t^b  dw^  ùibni^  *]"«&<t  ,^?:ibna  ^n3"i?:»-i 
t<)3ir  Nbi  tznbb  a^^-i  r^b  ,)x^^  i;a-<  nv  bda  bd\s  ••sn  ^npv:în  tz-nbi 
to-'j^ia  asj^nnbn  ^idd  -"T^^îj?:  mi-ibi  /  ^nan  3'72\::b  twX  "^a  t^-^^b 
bN  rjD  n\aî<  ^v  -«aab  UTp'O"^  towS  na.iwxn  "^n  .^n-^u:  d'^:'5T  ,^m-i'>73T 
'nfcîTir  pTsUm  rra  r-np^^j^m  ,^fa  "la'iN  t-nT'na  ï>ibT  in&<-i):a  ï-ra 
n-'-ia  -ûin^  Ti<n  ,^?:^  ^iDUîn  ""^^i  tn'np:  dpwXT  .^t^:'  i5"^Tn  ï-innx 
'inanwS  "^Da  ^2^^^  ^-ny?2i  ,^nbr;n  ■'-l'^'^a  -inr:î72  .a-ibcrri  riariNn 
Vl^Pïi  T-hn   .^mn^a  i^^Tn  S2?  -inn^?2r;  /^nprûn  \n73  ^n7:  n-nT72T 

.•^:30ip"iD  ^o^^  "ia  pni:"^  na  rr^ua 


*  Ex.,  XXXV,  25. 

*  Ez.,  IX, 4. 

^  CVest  la  même  chose  pour  moi,  de  voir  Ion  visage   ou    mon   Dieu,  ma  vie  ou  ta 
grâce. 

*  Zachar.,  iv,  2. 

"  Com.  Il  Rois,  VI,  25  :  d"^"!^,  voisins. 
^  Amos,  VIII,  11. 

^  Viviûant  en  élernuant  (corop.  II  Rois,  iv,  35     les  morts  entre   les  gens  de  ton 
amour. 


LETTRES  DE  SCHESCIIET 


219 


:  Mèlre 


:  mt]^:>2T  Tin  ^r?3"^3  -^rs 

:  t-n)2':J3  Nb  ^'d  d"'':J\x  n^r) 

:  n"i^2"ibyn  y^v  Mb  ^n 

:  *  m7:pn3  ■^nn'^^iî  Y^  ^^ 


:^  "^m  mn  "«b^  ^-^s^  iriT^n  "^Ni-n 

:  TiiDi  T^iT  n"iï-î  ^bnn  "^îoibnm 

:  «"^npb  ^^T  ""ID  '^^^{  nab  na  '':)  mt^i 
pnnT5<  ln-«ji3  b^a  Y^'^^^ï^"' 


,nn&<  Y^T  pmN  ^m 
,r!i:i  -i?2Nn  nirrn  b5< 
,"inN  n-iT  *]?27a  pn-i3 

-in  ^3^  ya'û  tDma  ^b  «n 

u iw»  :  Mèlre. 

.'^'isî  ^nsi^^n  rîTn&<  v^"*^  ^^i 

,^71-17:11  y^prsn  "^rè^-ir:  "^mn:: 

,r-n72?2  ybnn  ■'Ods  "^m^n^T 

,^?a^  ?n"iDai::b  ûv::^  "^rs^  ym 

,Sd?3  nnn  ^n  biD  b:>  û-i  mb^ 


:  bin7j  "^33  b  nsb  m&i'^  «b  û-.'iTaiNi  ,nn:i  n^uî  bs  ^b:?  n">':5  m^nb  d">r;7:n 

:  bin7:  b3>  '  p3i  b&<  -^ssb  Ti:^  bsn  /  nind  n^uîrs  ""DN  p  V^r  -"D  n:'! 

:  b^n7:  u:^prîT  j'-it:  m::  b">'isr5b  ,n^d72  iw  "^23  n*^©  d:'  i-i-^uî  rtî^-i 

:  «  bin?:  nnn  û^t  ■lîais::^  ^^'rb?^  -«  "^D  bbr;nr:n  K\:::nrj  bx  «-"Uîs 

ni-rnnsN  m-i''^72  n^p^r\>2i2  i^'^'^n  T'-T'Uî")  ti-ito^*  û^^sm  ,i3\-i:>7:'7  mn.x 
in  nujti  yprs  n:^  "i:^  ^nt^ni  i-«^rT  dt»  -it:t<  ^nnwS  r-in:»  ^n 
ïsnnnb  2b  by  n93^  Nbi  ,^^m3d'n73  ^i^y^  ■nriwN  3>"n7:  ,"]n3'TJ-'  n?2isn 
bm  pii:^  ï;\n  bs  is-ibN  n^nps   n^m  .^\-i72    nx   nvnnbi  .'r^-^^rn^b 

»  Job.,  XXII,  29. 

•^    Ps.  XLV,   15. 

'  Mon  âme  est  déposée  chez  toi,  et  ceux  qui  me  voient  sont  étonnés  comment   je 
peux  vivre  sans  âme. 

*  Ps.,  GXVI,  8. 
'  Job,  XI,  4. 

«  =  nd-id73. 

*  Ps.,  GXXXIX,   18. 


220  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

,i5\-ivbs  ''^^b'^12  û''p5N3î<r!'i  t3^n2&<5î-n  ,irmr:;n^  -«:2'n"i  *  ces  n?a  "iIî^x 

.lip^Dî-?  -inp-i  l'^-'T  ,n3b^st<n  n"i"n?:n  ûnbi  ^3b^^:rT  iii"»!-;  ^^wt  /i^b^rr 
*]inn  nny  ï-rnN  .ib.  rr^r?  n»  i:::''t^  Nb  ,ibb:n  b^rr  i^^-in"^-!  ir^înan 
f^i   ^""Ti"!  bnpb    y^^T  ^to^'cns    nt^-ipb    t2:>Dn  û:?dd   Y^n  bx  ï-i 

3>7û'*::b  mmtîp  n^-^STî^n  .^■'Sd  in  t-nM-ibn  ,']n"7r:  tsrsn  mmb  r-n-^ibn 
iD-^T^i  .'^riN^pb  ni<irb  ^mb^î^s  mbp  irb'.^T  ^  ^v^i^  t-noiD  bip 
tna  pu55b  to-^Diis  ns5   m^b^o    iS'^mnsujT  "^^^Niir   pnnb   »  r-ir^ui-is 

,r-nbr;n  n*^^  i^^sb  n5"'-i:'5'i  irrpn  ,T»3cb  ■nsn^DbT  TTsb  in  S"«:'t:i 
H'T^i"'  ®  tniin?:  biDb  t\0iii2  in^pn  T^riN  i^si  ,'^nbïin:n  ms^bi  *nnr::b 
b&^iuj  ,tznbt:n  mr:  "^1^:3?:  ,']'^^"in  -^^b  t^^^ir  mm^n  ^^biT  br  n^in 
,^puîn  T^n  n^?:5rî  .'^nsrîN  ^"^dn  .ûib^  ûVr::  tan  bipn  N-npi  cib^b 
■^■jopno    h  C]DV    nn    pnii"'  nn  i"^P^   *'^^^  .^m^m    ^i:snb   -107351 

.tDibuj  'nipi  ^nsn  "^n*^  p057a  '^laj»  bNi?2'0 


*7ia:D  p  ^ib  n  laiDii-i    nuîïi   tvs-^'^îsn  tnirni  ni^7:b  nsrji   p^^ 
£72  nu:73   13 nn  bnsn  tDOnii  N-«;:53r: 

-u v^ -u \j :  Mètre 

l^^w^n  Nb  "^n  "^puîn  .uni  ^:ib   m^iD    ;^]|-j 

j  *1^72t<n  ï-rb-iN^uîN  iwS  .b-ii^Toujn  rî5^7:wX5<  DwS 

î  )''i2  V'ûi  b5  nbi  T'D'Ki  ."^SN  tsn^rTsb  "•in 

«^n\ï5p  '^-l'ini  «■'Drj^un  %n3ï-!î<  t-,nni  ^nit<  'pi\:jj*n  'S  Y-    DIlOTi 

T^s  yn&^n  ^31  r3  ^-lvr^21  ."^sinn  '^'iiid  n33^bi  r^y2-:iri  ^npion 
^nîiN  ,'^3p''ni[n](!-j)i  ^3  pn'Ti^  .•^iipcn  Nb  aibcbi  /33Tyn  "^nm  ■•nMlTiy 
t:ia  r-n33  \nu5  "^b  ï>iD  nsn  :>":n  "«nN  n3  b^  .•^aNis^aKu::)»^  nms 
^'^^bt^  irinN  N3  i-iN^itiî^  .ittîitîn  n-'i'm  t2'wi  .rrnriN  [n^  1  nw^rr 
p    by    -^^  nn^    ï-T::yn  bwN   "^i-ij^i  "^nbb  pn  .T^s-'i'a  dtjd  pb   nuî^'i 

*  Isaïe,  XXXII,  2. 

»  Ex.,  XXXII,  1,  23. 
'  Nombres,  xxiv,  1. 

*  Jér.,  XLvii,  1. 

*  Comp.  la  prière  nl^'ÛJD. 
^  Nombres,  x,  25. 

'  Job,  X,  3. 

*  Ps.,  cxix,  4. 
»  Jér.,  IX,  2. 

*»  Lament.,  m,  12. 


LETTRES  DE  SCIIESCHET  221 

br  aD\D733  -^SwX^nm   .yi'A-^  Nb  r;n:ir-i  nmoD  p  b:'   ,n73î<b  ^b  ^n-1373 

niN  "^b  inm  /  i^^-^nm   ■'273'ibnm  ,"':7:n:n   ']7:-ibc    -«nann   ,'^'^r:?3  in 
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'^ '^ V^ '^ 


Mètre 


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—  ^ :  Mèlre 


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:  rTwS7ji:  t3i7:b  f<b  ^d  ^b  N7:i:n  :  nny-i  ^nm  rToabi  D:?nn 

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:  J-tN}:-'  "n-iT»  ^n3^3  ■^'ijd^  .^mx  -^nani^-i  \npr::n  3i-i?2 

:  Hw^s^TD  {sbT  Y^  ^^''^^  ^^T  r;^3n:iti)  .ï-imwN  ■^^72"'  nsio  ;jy3  nr3-i 

:  r;N-ip3  n-iDm  p::n  nr::  ts^mn  .nïp  nr::i  n-i3i'  i:  r-irj  riDn 

:  "^  nNn33  nonn  \N-n  i-iton-»  iv  .ï-izûpujj?  r-13  pws;::  m: 3  -^bitt 

'nwN3nrî  '^m^b  wNbr)  [n-«33i  ('^■^-13)  "^dd:  .ïidddd  ■^3'"'3'J3  nb  -nnT  wNinpb 

,2"i2  -ib  n  ^72n:r;  -ip-ir:  ûiDnr;  «v^jin  ^-132^  nm  ^ids-^»"^  i^s^*  n^x-^uja 

3i:3nb    '133b    û:'    "^d    ^3nD    -«dto  ^^y7:'J^    .szib'J    3-1    •^73"::3    Nnpn 
rx2'0NT  "^b:;"!  br  '^3T?2:'m  mn  "«3  t>i3m  ,"]:in3  rnn?30T  m^rTa  cs'^'^pbT 

.'■^b^<  -13172  b^p 

^  Gen.,  XIX,  6-7. 

^  Eccl,  XII,  14. 

^  Isaïe,  XXXVIII,  16. 

♦  Il  veut  dire  :  '^UJDÎ.  d'après  Gaut.,  v,  6. 
'  Le  jour  que  lu  la  trouves. 

*  Jér.,  xxxr,  22. 
^  Isaie,  XLii,  22. 
®  Ezécli.,  II,  2. 


222 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


^ \j 


:  ipTnnn  r-jnriNn  ""nwoTDT 
:  ipD-in"«  ^nariN  ni33   T^b:^ 


Mèlre 


,ip3i2  iriNiD  ^Tii  nbT  -j^^ 

-j^-i  pin-!73b  rîN-i"^  ï-TTb  riT  in 

,TN"i  nm^  t^sim  mpnnb  nn?3 

,T^Di  "iTûbis  riTnn  ^j^n  1"«3' 


:  ipiif'  T^n?jt<  DN  nosn  in  ^b  ,n3n"^  tx  t-iyiD  u:p2n  tiitt 


■ln^^-lpb  nNi:b  "nnn  "in?û^"i  inan 

:  Mèlre 


:  •  ^riN  ri3N  (lacune)  b2 


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_  V \j —• 


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p-^niî^  1113   1.]  (1113  p^n-iN)  un:: 
•^by  1N7D   nins  inptcn  i*^  ^N 


-nnb  '^n   •ib"'bi  i7ai'' 

nns  "^b^n  ^nNipb 

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■^n  nnN   ^b  n"«;aN 

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w — I w —  :  Mèlre 

•^nN  ■'SD  nNHN  "^biN  nn?3iN  û« 

^N  "^îii:-)  i3")i:-n  -^^b::  isb 
r-iNT  b'p*J^  oaN  \nbn:i  \n"'a 


»  Ps.,  Gvii,  27. 
'  Isaie,  XXVI,  19. 
»  Gant.  II,  14. 
^  Nombres,  ii,  2. 
»  Jér.,  II,  20. 

•  =:  Car  lu  es  tout  louange. 

'  Il  m'est  impossible  de  dire  :  peut-être  verrai-je  mon  frère  sans  me  mettre  en  che- 
min immédiatement. 


LETTRES  DE 

•^bN  "^rr»  mbs  *  '^^b  "^iv  -^bti 

inii^nD  Nb  ^:d  ^^^  ^'^"i  ^^'^^^ 
Tiaiin  nN  û'»y  "nr;  ■^3:3>  "^noT 

•  ^\nTnwS  y-iîîr;  a-j-'?:^   -«d  b:' 

\nN-i2n  t-iwN  biDNb  "^inb  "^nN 
^nj-ibn  "i^VJ  ""niDi'»::  byi  tzini 

TiinnNb  arjrî  nnn^t  ï^bn  rj-^bnwN 
^■'nD"'bn  Nn  ^:'  qbn  riNii^N  ^b 

\n7i-|3>b    Î-ÎNIN    ^Nb73     tm73T    "^bwN 

\-i:'i?:u:  ir?:'»::  in-im  '^'»::Tn  "^in 

\"i-ii:3  \mws  !-i3y  Nim  n?3ws 

\-n'7^T»  inDi?2  bs  r;?3^bD  ^:p-> 

•^n2i?2N  v»^"  ^^^  "^'^^  "^"^^ 
\nb!-!n  5<i!-;  "^D  l'^n^  nnniDN  [\1  N)b 

•^n:»"^:;-"  r5n">rî  pnb  pT  û-im 
:  \-n^nb  r-nmj<  -"b  d?:"'':;^  mmwX 


SCHESCHET  223 

m;a-*  bab  :>n05  03  ^rrro  dr  "«d' 

■^D  c-^mb  '  -i?:j:  li:»:!  b::^  mn 
riN-n  nu::^?:  b:^  n?:nr  bt<i  nra 

TbN'»:;  nnb  dvn  17:t  bnn 
dibc  n^HD  "^b  DT-nr)  a^^b?:  nxn 

^n:  y-iwS3  y:32  -"b  n^ziy  r-i:^ 
niDTN  n:'i  riT  bj^  b^;bî<  r:n7:':;î<  ";^î< 

^b  rrsnî  yiN  b:'  ^nsN  'J2'::i< 

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t2n:î<i  pDNnM  cmiD  br  ex 
tzws  D'Anna  o-^nin  ds  y-iNa  y-.N 

■^r^  t^bi  vbx  PNJib  brn  ■^u;^: 

^inn^T  cibnn  ^2  -i3T«  n^DT 

•^b   2^'^T:b  "mn  n7:rj  nu^wS  bsn 

pn  bann  NiiT:"^   t^b  ';7:ws:  nx 

NI-  '"  r]^n::'i  bn:;  c^^-in:?:-!  d^n 

3?n  d"«:'"n  d^ns  d^nN  xbn  rbd 

^-l■':p^  ^nr;"»  myi  ^7:"^73 

n^pDTû  ^2wS  "  "«ib  nN  \nnd  nvnb 

"iDiD  'ûy2  dindi  ^t«  r;-j2  ^nx 


r-T^n'^îv  t-Td  TbdwS-i  ?-n2d':J72d   Nb  ^'»dN  îidnm  r-idvj    y-iwX  '^n 
Tndj^T  T^n^-i  yntîïi  "^nN  ^:^yn  ^om  "jm  ,\-iNa  '*!-i2  bd  ^nd^''  r<bi 

*  Lévi  b.  Moïse. 

*  Juges,  VI,  37. 

=»  II  Rois,  XXI,  27. 
"*  Gen.,  IV,  16. 
»  Ps.,  VI,  7. 
^  Gen.,  XLVii,  11. 
'^  Isaie,  XLii,  14. 

*  Job,  XIV,  14. 
9  Ez.,  m,  24. 

"»  Baba  B.,  12  a. 

*^  L-aïe,  xLiv,  5. 

'*  C'est  lui,  l'ami  sans  pareil,  qui  dévore  les  frères,  qui  ue  sont  que  des  pièges,  et 
les  amis,  qui  ne  s'avisent  que  du  mal;  et  si  c'est  moi  qui  rends  ce  témoignage,  alors 
il  est  vrai. 

>3  Mal.,  II,  4  :  avec  Lévi  b.  Moise. 

**  Deul.,  VIII,  9. 


224  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

•mN  to\s^ip  .T'rpn  toi'^îi^T  \n'^NO  ts-i^msT  -^niN  f'N':;:?:  ."^nNi:?: 

•^msT^n  Si:  mn  'n^si-i  "^sn  net?  r-i:'  bs3  -^b  m;::  i:rN  !-it 
•^■^SD  "mwx  m-ip7a  mx-ibi  Y^''^'^  *^^^  ^^-'^  Sdin  f^bi  pim?: 
T^D  p^asbT  TiNii:  by  Scsbi  ^n  pmb  ^ï-Twnm  nmncn  -^uîca  •^by^ 
msnTD  "^b  ^npb   "^:s   to-^bn?:    rrib-nsT   n^Tn  y-iNn   ^s■'':;:■l  .";"^r3>T 

bN:'»^:^  m:DT  m^  "^^a  r-nn  r;2i?:t<a  riniNn  ,\n^n3  mbinnn  Sswt 
■«■^n  bi*i5ïi  "^HN  '^  rîPN  -«b  ^72^3  t*^-np  p-n-.?:  -^îsm  .\n':;-iN  Snt:j"^t 
«331  d:^?3  [D]-n73  r<'»a:rT  «■'Uj:n  ^^nr;  -^niiTa  y^'z^  "^rc-^T  mx  "^m-i 
'^■^33  nbnt:  .t^-'H  ■^tq"'  bs  ^nnTw"^T  '  ^^bwN  Tib-"  szîib':;m  ma^r:  ^ib 
\n  t<:ii2i<  i^Tob  ^riNi  ."^-^d^t  "^sy^nrîbT  ."^-irob^j  m::  in-iDin  -^n^îb 
ïi3îiws  r-npD3  -«npD"!  "mbom  ts-^^nn  "{nN  \n-'-i2  -^d  i-inii  ^^^'j^y^ 
ï-nmt<3  nDini  ^'^■'bN  rnibD  ,^n^"i3D  p-«Tn7an  ^nnriN  nn:'  ,^&ib'ji 
.^lûopno  ^'D  C]^"'"'  "i*^  P"^"'  "^'^  fn'^ua  ^^hn   ,^Dn  Sj' 


rr  /*"^72wX  p373  ■inwNi:'»  t=Tir  /' ^cn  t^3-«i  -nxb  rn7n\xi  yn 
rn-iT^  ^'^  ï-for^  v^^yn  3i::r7  ï^in  n  *^  "imnTD  -173'»::  ■^rr'  npb  n  i»">3 
\n3Du:  ^72ïi  T^3sbT  ,\nb3p  •^n7:wsb  m72N  vt  pi  pii:^  zû^r^n  "^b^^n 
■i7j'::n  ncN  ;ai^pn  n^sn  rr^m  ,^-^D■^D  :>"•-  br  rz-zi  /•"•\-'y5-«:i  •«3"«-i,-«ii 
n72wNT  ,l:"^:2  no:>  ti:-':u573  hj(n)nwS  p  b:>  ^n:nnb  V"*^  /'s=î\Nnp3  ^^N 
^72N-'  r-i7ai  ,n:?-in  "ob^ai  ii:\^a  rrsOT  /'nb^NC  S2N  ^:3  bx  m^s  -«d 

*  Hos.,  XI,  7. 

*  Gen.,  XLI,  51. 
'  Eslh.,  V,  13. 

''  Gen.,  XXXII,  26. 

»    Ps.,  XLII,    12. 

•^  Isaïe,  xLiii,  1. 

^  Allusion  à  la  pièce  :  ?^3^DJ  nmw73. 

«  Mal,  II,  5. 

*  Isaïe,  Lx,  17. 

"»   Job,  VI,    11. 

"  Lis.  bcN;  tbid.^  XXX,  26. 
12  7^jV/.,  1,21. 

1'*  1  Chr.,  XIII,  Î9. 
1'  Jér.,  XI,  12. 
^^  Jacob  =  Israël. 
^^  Gen.,  xxxvii,  33. 


LETTRKS  DE  SCIIESCHET  225 

.^"n^<?:  "]'::n-i    ,»i"i2;a   t**J3    j[n](:i)Db    tziNnon  ,»  in3-»o    p-,i<  bsb^bi 

11:^  "^^tcn  Ï-T73  "^D  .\npD«nm  -"îd  \"^i:n"n  "^nT^ninn  trî^nnn  ■^r?;*::'! 
tz:n3  ^b  v^"*  "^'^^  tz^:^  i:>^:im  .mxm  ^w;an  -^b  ^":;n  !n:m  .s^^ns 
r-ipii:  "n:'  "^b  ïht^t  ,vbj<  ^bin  ^:ni  '^m-ip  "^itp  "^d  ^r:?':^i  ^ycn 
nriDb  t:^n^:n?:rî  b^b  bbsa  n^T  r::r:T  .rb^'  bnNnnbi  TDob  ''priib 
■^n-iirn  -"d  \nrT^T  ti:nN  -^rtî^  .::"i2n  fcïi?3  ^n^b  n-^cnb  v^  ""^  ■«:?:n:b 
pitnn  n^m  .DnbDNnn  "^ba^bT  tzn^^a  "^bn  îDnb7:n  "^bri  tz^b  -iii: 
^D  ,t:r;-im7:  ^pn:>r:  bapb  n:i<?3  -^"Css  ^.x  ^tz^-^mT^inrr  -^nbnp 
.ûiDbip  fcnrtb  ûnb^^m  ï-ib:?73b  ûn^^si  .sz^^rjbN  b::r  tzrcirprn 
rîitnmi  ribr)  n^^-i  ï-rn  «  bN-i'^ii"»?:  '125  rsb^iT  npb:  ii-i^r:  — iTCwS-"  [-jwN't 
173  ï-T^rr  bsrî  ^' •ca^cin  nnn  \a-Tn  bs  i\x  '""hn  N3  Sn  'b^n  rrc:' 
in»  tzi'^-i'::'!  D-^Db?:  ■'as  '77:n  -^-nna  ï-ttod  ."  "lorn  bî<  nvj  b^m  .nom 
inn-»  i:?a73  f^m::!  ti-^p-^^i:  f  T^om  D"^n">dd  n?:^!  ,tzr^2N  ■'■'na 
bnn?:  '-^-b^b  t*^-jn73  ■'b  nb-^bn  "^it^i  /^  tzrr'in  b[N](:>)  ï-7b\sc  û-^b^x 
'^  "^nnb  C]nn"«  t^bi  p^ntihic^)  "^rpisra  -^n  î-iy;3  it»  cn  "^d  iri  p-^Tjjnb 
■^DmN  t=:nwSi  ,^-ii:T«  liirn  liirnn  Sap?2T  ,'^-ii:"'  b:^  '-in^n?^  ^:iti  "^d 
ri?273Tv:jn  nn[D]N2n  imn^T  ,r;^i?3b:iT  nb-i2*:;rr  ■i?:^  ■i7:n:  ■^7:n:7:i  -^n^* 
mn73b  .msDbn  ^ni::>^  -^sii:-!  -^-inwST  ,!-T:i'7:cn  •^b^pb^  DDbnpb  cznt 
riNbi  2Nb  inb  rr^nt^  -^în  ,Qr;"«b2wN7j  tznrnbn  .p^DD  by72  nr72T 
"i3ï<7:  fc5<T  .in^bws  iiis-ia  n:2NT  .irr^SD  t*<':;NT  litcn  [N][n)b7:NT  pbi 
ï-iïm  y?  nvjr;  -JUJosb  nnnt^  -^sn  .pb  mnn'^r  -^-inwN  rrr^bm  2n:nb 
nisnpnm  t^DT»  n:pTnn  tsin  "^bNi:»  onwST  ,J-Tr::rn  p^rra  nnarr 
,nc^^  t<-i2  "^d  y-ir  ^92^3  pr>a  û:'  n-^nb  .n-iT^b  pb  r-n-^nb  ,t:rbD 
^•^25  p-^niTT  /**  i:>'^?3^r:  tznnaa  ûD\m5"ibm  aanpri:  bipi  /'m720  a^ 
N^riT  p-im  û-^'JN  y"^  i\ov  'n  t^-^^asr:  bi^sn  •^nwN  "22  nsm  ''  i:'-«c-in 
^2  priiT"»   "Îd  V^p!^  tn^^  .tsnbu:   tz^s^-^^'C-^T  TiiïT    -«nb    s^r-^in-' 

.''aDipNnNo  JD  nc:2  p  rjOT» 

'  Eccl.,  II,  23. 

«  Rulh,  IV,  15. 

*  Isaie,  XXX,  13 

*  Eccl.,  XII,  1. 

'  Lament.,  iv,  18. 

6  II  Sam.,  XIX,  29. 

7  1  Sam.,  II,  3. 
»  /6t(/.,  IV,  22. 
«  Isaie,  X,  23. 

10  Gen.,  XIX,  1. 
»i  Eccl.,  I,  9. 
n  /A»rf.,  III,  20. 
13  Gea.,  XXXVII,  35. 
'■*  Job,  XXVII,  G. 

15    Ps.,XLVI,  9. 

le  Isaac,  LViii,  4. 
17  Job,  XXXIV,  17. 

T.  XXXIX,  N»  78.  15 


UN  RECUEIL 

DE 

CONSULTATIONS  INÉDITES  DE  RABBINS 

DE  LA  FRANCE  MÉRIDIONALE 

(suite  •) 


YIII-IX.  Samuel  Sulami  et  David  ben  Saïd  Sali  ["^vbo).  —  La 
Consultation  qui  occupe  les  f°*  38a-44a  fut  envoyée  au  célèbre 
Samuel  Sulami  qui  joua  le  rôle  que  l'on  sait  dans  la  lutte  engagée 
dans  le  Midi  de  la  France  (1303-1306)  contre  les  études  philoso- 
phiques. L'homme  qui  provoqua  cette  levée  de  boucliers  par  les 
excès  de  son  interprétation  allégorique  de  l'Écriture  était  Lévi  ben 
Abraham  de  VilletVanche,  et  Samuel  Sulami  avait  recueilli  chez 
lui  riiérétique  :  conduite  blâmable,  qui  lui  attira  la  colère  des  sa- 
vants de  Narbonne,  ennemis  de  ces  nouveautés  subversives.  On  ne 
mettait  pas  en  doute  ses  qualités,  sa  droiture  et  sa  charité;  mais 
on  lui  reprochait  d'avoir  accordé  son  appui  à  ce  révolutionnaire. 
C'est  ce  que  lui  écrivit  en  propres  termes  Salomon  ben  Adret, 
l'autorité  rabbinique  la  plus  vénérée  du  temps.  Que  n'imitait-il 
l'exemple  de  ses  ancêtres,  qui  étaient  les  plus  grands  savants,  en- 
tendez les  plus  grands  talmudistes,  du  pays  !  Ces  remontrances 
finirent  par  avoir  raison  du  courage  de  Samuel  Sulami,  qui 
engagea  son  hôte  à  quitter  sa  maison -. 

Sulami  avait-il  donné  dans  l'hérésie  reprochée  à  son  ami?  Don 
Grescas  Vidal  a  beau  se  porter  garant  de  sa  piété,  il  semble  bien 
qu'il  ait  suivi  le  même  courant.  C'est  ainsi  qu'il  avait  admis  avec 
empressement  une  doctrine  de  Salomon  b.  Adret,  d'après  laquelle 
la  révélation  du  Sinaï  fut  uniquement  une  vision  prophétique. 

*  Voir  Revue,  t.  XXXVlll,  p.  1U3,  et  plus  liaut.  p.  76,  ou,  au  lieu  de  Vlll,  il  iaut 
lire  VII. 

*  \o\T  sur  cet  épisode  Mmhat  Kenaot,   lelUes  12.  14,  15  et  17,  p.  46-56,   el  Neu- 
bauer-Renao,  Rabbins  français,  p.  658. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  DE  HAHHLNS  111 

Seulement  il  avait  mal  compris  la  pensée  du  maître,  qui  n'était 
pas  si  hardi  et  restait  attaclié  à  l'opinion  traditionnelle  ^ 

On  aimerait  à   pénétrer  plus  intimement  dans  la  pensée  de 
Salami.  Mais  il  ne  nous  est  rien  resté  de  ses  écrits,  bien  qu'il 
ait  cultivé  la  poésie  en  môme  temps  que  la  science  talmudique. 
Force   nous   est,  pour  essayer  de  reconstituer  sa  physionomie, 
de  nous  en  tenir  aux  Consultations  qu'il  sollicita   de  ses  cor- 
respondants. On  connaissait  jusqu'ici,  outre  la  lettre  dont  nous 
venons  de  parler,  quatre  réponses  de  Salomon  b.  Adret  à  ses  ques- 
tions*. Je  ne  suis  pas  sûr  qu'il  faille  y  joindre  une  autre  lettre  du 
même  Salomon  à  un  certain  Samuel  résidant  à  Narbonne  ^  Grâce 
au  compilateur  de  notre  manuscrit,  nous  sommes  maintenant  en 
possession  d'une  nouvelle  Consultation  —  et  peut-être  môme  de 
deux  —  à  destination  de  notre  rabbin,  n'émanant  plus  uniquement 
de  Salomon  b.  Adret.  Il  s'en  est  môme  fallu  de  peu  que  la  lettre  de 
Samuel  Sulami  nous  lut  conservée  :  le  copiste  malheureusement 
l'a  trouvée  trop  longue  et  dénuée  d'intérêt  au  point  de  vue  rahbi- 
nique,  en  dépit  —  ou  à  cause  —  de  son  mérite  littéraire  *. 

Les  qualités  poétiques  de  notre  auteur  sont  vantées  par  son  cor- 
respondant ;  dans  le  fatras  de  compliments  hyperboliques  dont  il 
l'accable,  il  relève  surtout  son  talent  de  versificateur  et  note  que 
la  question  de  Sulami  était  rédigée  dans  une  langue  imagée  qui 
évidemment  n'était  pas  d'usage  courant  dans  ces  sortes  d'écrits. 
Effectivement  plusieurs  passages  de  la  lettre  de  Samuel  Sulami, 
bien  qu'écourtés,  sont  en  prose  rimée.  La  matière  prêtait  peu  cepen- 
dant à  des  tours  de  force  littéraires.  Samuel  Sulami  rapportait  un 
cas  qui  avait  provoqué  dans  sa  ville  des  discussions  et  il  reprodui- 
sait les  arguments  des  deux  partis,  avec  une  impartialité  qui  n'était 
peut-être  qu'apparente.  Sa  lettre  est  certainement  antérieure  à 
l'année  L303,  qui  vit  le  commencement  de  la  lutte  dont  il  a  été 
question  plus  haut,  car,  s'il  s'était  déjà  signalé  aux  foudres  des 
rabbins  attachés  à  la  tradition,  son  correspondant  ne  lui  décer- 
nerait pas  les  éloges  pompeux  qu'on  lit  en  tête  de  sa  réponse.  Il 
ne  semble  pas  qu'il  habitât  déjà  Narbonne,  oii  nous  le  trouvons  en 
cette  année,  —  il  était  vraisemblablement  à  Perpignan  ^ —  car 

*  N»  234  de  la  coUecliou  de  Salouique,  rapproché  de  Dihré  Eéfeç^  d'Edelmann,  p.  S. 
2  Ea  ms.  à  la  Bibliothèque  Bodléienne,  Mich.  46,  f*  81  b-^la. 

»  Ed.  de  Salûnique,  n°  182.  Quand  toutes  les  Consultations  de  Salomon  b.  Adret 
auront  culiu  vu  le  jour,  peut-être  y  trouvera-l-ou  encore  d'autres  documents  relatil's 
à  Samuel  Sulami. 

*  «  Cette  Consultation  a  été  envoyée  à  Samuel  Sulami,  mais  je  n'ai  pas  trouvé  le 
nom  de  l'envoyeur.  La  réponse  (il  faudrait  plutôt  :  lu  question  i  dudit  Samuel  étant  trop 
longue,  à  mon  humble  avis,  malgré  son  élégance  poétique,  a  cause  du  peu  de  raisons 
et  de  preuves  invoquées  par  les  deux  partis,  je  ne  Tai  pas  copiée.   . 

»  C'est  là  que  Salomon  hen  Adiet  lui  adresse  sa  lettre  sur  la  RevéUtion  du  Sinai. 


228 


REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


le  rabbin  consultant  lui  écrit  :  «  Tel  n'était  pas  l'usage  dans  )iotre 
ville  de  Narbonne,  métropole  en  Israël  pour  sa  science,  ni  à 
Béziers,  ni  à  Montpellier,  ni  à  Lunel  ». 

De  notre  lettre  il  y  a  donc  peu  de  renseignements  à  tirer  sur  le 
caractère  de  Sulami  ;  mais  peut-être  serons-nous  plus  heureux  en 
la  comparant  avec  celle  qui  suit. 

La  Consultation  qui  dans  notre  ms.  occupe  les  f°^  44a-57a,  à  la 
différence  de  celle  qui  la  précède,  est  revêtue  de  la  signature  de 
son  auteur,  qui  est  David  ben  Saiil  Sali  ('«j'bi:)  ;  par  contre,  le  nom 
du  destinataire  manque.  Or,  l'envoyeur  de  la  première,  dont  nous 
ignorons  l'identité,  invoque  le  témoignage  de  son  maître  et  rap- 
porte un  fait  qui  se  passa  dans  la  maison  de  celui-ci  ;  précisé- 
ment témoignage  et  fait  se  retrouvent  exactement  dans  la  seconde  : 
c'est  donc  un  disciple  de  David  ben  Saiil.  C'est  même  un  disciple 
trop  fidèle,  car,  non  content  de  suivre  la  doctrine  de  son  maître,  il 
copie  sans  vergogne  de  longs  passages  de  la  Consultation  de  ce 
dernier,  qui  était  mort  et  ne  pouvait  plus  se  plaindre  du  larcin  *. 
Mais  ce  ne  sont  pas  seulement  les  arguments  du  correspondant 
anonyme  de  Samuel  Sulami  qui  se  rencontrent  dans  la  Con- 
sultation de  David  b.  Saiil,  on  y  revoit  aussi  un  morceau  ca- 
ractéristique de  la  lettre  de  Sulami.  Qu'on  confronte  les  deux 
morceaux  : 


Lettre  anonyme. 

X^riyi  p-^TH^  "^T^T^  ^-in^N-i  ï-rsri 
f^bbr)©   n2n::n  «p-^-"  tano  moN 

Nb  x^-^iy  bNn^">  ^h'n  d^hni  rnin*» 
13b   ^nnns  cd:^i    "jibin    na-^n^D 


Lettre  de  David  b.  Saîil. 

b^  Sbp  bN  Û02T    SbD^T    onsD 
.riT  Ni:?:  p-'n  ^^Ti7:b 


1  11  joint,  d'ailleurs,  à  lamcnlioQ  de  son  maîlre,  la  formule  employée  pour  les  défunls. 
>  Comparez  à  ces  paroles  p.  239,  ligne  28. 

»  PirkgR.  EiUzer,  xlvii  :  t3"«"inm  on3D  'Ttzy  n7^^^<  ^y^i'nn  nry^bx  'n 
i"n  ûnnn  mmbn  hy  3nD3U5  nnDi  ^-nDTsn  wo  tio3  ^niï;'»  by 
t]n33>n  bo  ûr-i^a  b^T^J^X]  tîn«  nnuj''  «bu:  "jinnnn  T'a  û-inai  p"«byn 
Qba-i  ODn«  on  -^3. 


UN  HECUKIL  DE  CONSULTATIONS  DE  RABBINS  229 

On  remarque  même  dans  la  phrase  amputée  par  Davil  b.  Saùl 
le  style  de  Sulami,  qui  emploie  la  prose  rimée  dans  des  questions 
de  casuistique. 

Les  deux  Consultations  auraient-elles  donc  eu  un  môme  destina- 
taire? Ce  n'est  pas  impossible,  car  voici  d'autres  raisons  qui  cor- 
roborent riiypothôse  suggérée  par  le  rapprochement  que  nous  ve- 
nons d'instituer.  Dans  sa  lettre,  David  b.  Saiil  reproche  à  son  cor- 
respondant d'avoir  emprunté  ses  opinions  erronées  au  Sèfer 
Halerowyia,  parfois  tronqué  ou  mal  compris,  et  d'avoir  trop  sou- 
vent préféré  l'avis  de  l'auteur  de  ce  livre  (Baruch  b.  Isaac)  à  celui 
des  autorités  les  plus  compétentes;  il  consacre  môme  tout  un  mé- 
moire à  la  réfutation  de  ses  thèses.  Or,  l'élève  de  David  b.  Saiil 
dit  à  Samuel  Sulami  :  «  Le  grand  maître,  l'auteur  du  S.  Haie' 
rouma,  ion  ami,  a  décidé  d'une  façon  moins  rigoureuse  ^  »  L'iro- 
nie est  transparente,  surtout  si  on  se  rappelle  que  Baruch  b. 
Isaac  était  mort  depuis  nombre  d'années  ;  elle  vise  la  préférence 
de  Sulami  pour  les  opinions  de  ce  dernier,  préférence  qu'il  avait 
probablement  affichée  dans  sa  lettre.  Le  ton  de  la  réponse  de  Da- 
vid b.  Saiil  ne  contredit  aucunement  cette  supposition  :  c'est  celui 
d'un  homme  d'âge  parlant  à  un  homme  instruit,  assurément,  mais 
qui  demande  à  s'instruire  encore.  Aussi  bien  est-ce  un  véritable 
questionnaire  que  Sulami  soumettait  à  David  b.  Saiil,  pour  un 
traité  qu'il  avait  déjà  composé  ou  qu'il  se  proposait  de  rédiger  à 
l'usage  de  ses  élèves. 

S'il  en  était  ainsi,  la  surprise  de  Sulami  n'a  pas  dû  être  mince 
en  retrouvant  sous  la  plume  du  disciple  les  paroles  qu'il  avait  déjà 
lues  dans  la  réponse  du  maître  !  Mais  voici  qui  sera  plus  intéres- 
sant :  les  thèses  rabbiniques  soutenues  par  Samuel  Sulami  —  à 
supposer,  comme  il  vient  d'être  dit,  son  identité  avec  le  corres- 
pondant de  David  b.  Saiil  —  sont  d'une  hardiesse  telle  que  le  rab- 
bin consultant  ne  peut  retenir  sa  stupéfaction,  et  rien  de  plus 
instructif  que  les  remontrances  sévères  qu'il  lui  adresse.  Pour 
l'amour  de  Dieu,  qu'il  renonce  à  de  telles  opinions  qui  seraient 
mortelles  pour  le  Judaïsme;  qu'il  se  garde  bien  d'enseigner  ces 
nouveautés  dangereuses  !  De  grands  savants,  des  hommes  saints 
ont  illustré  son  pays,  tels  Abraham  Ab  Bet  Din,  Abraham  b.  Da- 
vid de  Posquières,  Zerahia  Halévi  :  aucun  d'eux  n'a  jamais  admis 
les  licences  que  Sulami  considère  comme  acquises.  Et  à  plusieurs 
reprises,  David  ben  Saiil  fait  entendre  les  objurgations  les  plus 
solennelles,  suppliant  son  ami  d'avoir  plus  de  respect  pour  des 
principes  qui  s'imposent. 

>  On  lit  une  fois,  il  est  vrai,  l'épilliète  «  mon  pèrei,  "^at^;  mais  c'est  probablement 
un  lapsus  calamiàu  copiste  pour  "^Slî^,  employé  constamment  dans  le  reste  de  répîlre. 


230  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Ces  principes  ont  trait,  il  est  vrai,  à  des  questions  qui  n'ont  rien 
de  philosophique  ;  mais  l'attitude  qu'aurait  prise  Samuel  Sularai 
dans  l'interprétation  de  la  jurisprudence  rabbinique  s'accor- 
derait fort  bien  avec  l'empressement  qu'il  met  à  se  rallier  au 
rationalisme  apparent  de  Salomon  ben  Adret  et  avec  sa  con- 
duite envers  Lévi  b.  Abraham.  Gomme  il  avait  accepté  la  pré- 
tendue thèse  du  savant  espagnol,  qui  souriait  à  ses  idées,  il  fait 
sienne  la  jurisprudence  des  rabbins  septentrionaux,  moins  sévère 
que  celle  de  ses  compatriotes,  car  ce  qui  fait  pousser  ces  cris  de 
terreur  à  David  b.  Saûl,  c'est,  en  fait,  la  doctrine  de  R.  Tam  et  des 
rabbins  de  la  France  du  Nord.  Les  représentations  de  David  b. 
Saiil  ne  l'auront  pas  complètement  converti,  car,  s'adressant  plus 
tard  au  disciple  de  ce  dernier,  il  ne  craint  pas  de  mettre  en  avant 
des  arguments  qu'il  avait  déjà  entendus  condamner.  Il  est  vrai 
qu'il  les  place  dans  la  bouche  de  ses  compatriotes  qui  inclinaient 
à  une  solution  favorable  aux  intérêts  en  cause. 

Quel  était  ce  David  b.  Saiil  Sali  ?  Le  nom  de  Sali  a  été  porté 
par  plusieurs  personnes  et  semble  la  traduction  de  Laroque.  La 
Roche,  Roque. ..,  terme  géographique  qui  s'applique  à  de  nom- 
breuses localités.  Mais  parmi  ceux  qui  ont  pris  ce  nom  qualifi- 
catif et  qui  nous  étaient  connus  jusqu'ici  aucun  ne  s'appelait  David 
b.  SaùP. 

David  b.  Saiil  est  le  nom  d'un  disciple  du  célèbre  Salomon  de 
Montpellier-,  qui  prêcha  en  1239  une  sorte  de  croisade  contre  les 
écrits  de  Maïmonide  ;  il  s'associa  à  la  campagne  entreprise  par  son 
maître.  C'est  vraisemblablement  le  môme  que  consulta  Samuel 
Sulami.  Il  s'était  alors  écoulé  quelques  années  depuis  cette  lutte, 
car  David  b.  Saiil  parle  de  Moïse  de  Coucy,  dont  l'ouvrage  ne  fut 
terminé  qu'en  1250^  ou  même,  d'après  Isaac  de  Lattes,  en  1282*. 

David  b.  Saiil,  suivant  son  propre  témoignage  a  composé  des 
Novelles  talmudiques,  d'^uîiTn  (f'^44&).  Il  semble  s'être  livré  au 
commerce  des  vins,  car  il  raconte  un  incident  qui  se  produisit 
dans  sa  maison,  lors  d'un  achat  de  cette  boisson  qu'y  vinrent 
faire  des  Juifs  d'Espagne.  En  un  autre  passage  il  rapporte  que 
souvent  il  a  fait  cuire  le  vin. 

Israël  Lévi. 
[A  suivre.) 


*  Gross,  Gaîlia  judaica,  p.  271  . 

'  Meïri,  introduction,  Bet  Hahehira  ;  Isaac  de  Lattes,  Saaré  Cion^  p.  41. 

*  Gross,  Qallia  judaica,  p.  558,  d'après  Zunz. 

*  Schaaré  Cion^éà.  Buber,  p.  i3.  Voir  cependant  ci-après,  p.  240,  note  1, 


UN  RECUEIL  1)K  CONSULTATIONS  DE  MAHBINS  23! 


APPENDICE 


VIII-IX 

.^72borî  r«i73\a  -i"n!ib  nribio  !-i3v:;n  (33  o^ 

,c:'^nu572b  niib  "]bnr:   marr  i-^^d  irm  f'-ic^T   û-'m^s  dbiD  îii'^i^is 
•'b:»  n^iy   nan:*  rn?:^   '^-i'ti  mi^'n  bibc^jn  i^-^rr  t-1^3   bx  ^:.s^3r: 
izi^'j^o  ^^:J2'cr]  vn^*^  vûî  D-^bnsD  tD^bna    on-'aD    t:^73  ibs'j    ibiT 
bs'^un  'j-'^^^b  inn5i  nï-!5  -«t:   mN':;b  v:;'^n   r»a-n  n^^n  ï-nrnN  r^iinsn 
r-iNT  Ti?2N''"i  in7:m  i^n->  inm-»  tn  i^u^d  "inwSD  tzb^  ûborr  rmb:'73a 
•ji^Nirr  û'^73T'   IN  ûT*   -^^N  ^N  i3'^5^5>3  n^bsi  t^TT  '^"•«  nN73  r:n^n 
t=ii::s>D  ,d^7ûu;rj    y^:^i2  i^^m  r-iirnwS  21:173  t)"bo    n:m    nbv    tziwX 
m-iiNTD  t]-^bT-î:;rs  rTi-iiN7ûn  ûr;^  tz-^pnMin  Nin  "i"»rîn  nr:::b   tz"'?:ar^ 
nriT   t-ii:Tv:î7:73  '^nn^iwX   ^^^'2^  ^mN^n  ^m^N  ■':^<  û>t   r-i2"i7:wsm  r-nn 
^ST^rn  C)-ii:7:2  ï-iwsar:    r;?3"':>5"i    ïn-nn2  riso    h:ibD72  ribibD    în'::n2b 
n"«ib   •^nm  [38  6]  ta^-iyao   ppiT?:   b:5>Db  r<i:n  iD^r;  Y^-'»^    '^-^  "'^ 
tm53  t]3Dir:    mipD    ar    ::r;T  "^mn    ^^mn:;-i:ib     tzi"^p::'T  "]":;5<-',3    in 
rf«nni<  mbmn  m^b^T:  ïn-iss  m^sn  n*ar  n^nb  rr^mnp'^a  n:i-'b'n 
•ji^nb  nns  n\nin53  b^  n-icn  m:j'^2:p  m-iN2  mbriNT  m«   r^^mr-l 
mnii:  tm-iiiiN   nii:^*  rriirp   t^b  n^pi    r-13  ^t«    nnim  rT^m?:b"vr 
•n^^NTa  ï-iTbn  *7i:r!  bî<  iiyn  "|-ii73  t-nno  ûwXt  rTinc'  m2-!7:m  mnp"» 
"ip:^  n-*-!  :2-ibpb  ■^:k-«'»::na  ■'Si^  i">5yrt  V"'^    ^"^^^    V^^  bnbin-«  "in^on 
■«n-iD  nizp   ny  \Nis  un:: 3  nn^rr   -ipjn  b^  ^^2^<^  in-'Ci  2n3?:r:  nnN 
^nN^nrt  ^m73    ^rrcii  "]bsu:    tn^^J  -"D  ^n^^T»   •^^•'2:1  ■^nrn"'  in^-i  "jn^ 
nnowm  N-ipTnn    ûi<    tn^n  b^   ^N-'aN   ï-in^^T   i-sb^n  &D"n3   ny^rb 
pm  ^nbi<u:2  ^:ii-i  p-^cnb  nm  nnc  •^3173D  o"'D3'73  np-irj  i*^r2   ^C5< 
Sn-i'cj-«   v^^'^  ^n^-^bT:    rmn:^   ^^D12  ::pbn?arTi    pi^rr  "«Db    nbN"::rt 
l'^'^n  i72u:i    tz"«    ^-n  iiD^binbi  "nuîD  V"*    s^npb   "^i^n    to:^  qnnu^rj 
tD^npDm  rtb3>7:b73   r-nDi:i73rî  tznoi  in-^uJNnn    û-^'iiT^ba    y:^    m-'zna 
P"in73  T^'^a  tnDTr;  br  tz':;"i   n^i  tsn^iry  "]\-im  r-.iTnna  û^b^uîa    t::n 
•^irm  -T^'^^a  r-n\mN   ^i:n    nn^na    "j-i-id    r-ibirn    ncD   tzrr^by    anai 
tsiN  V^'*^   inno?2  -n73'::b  ûn?:^  ^»i'ln  ^bm   nrann  "«rD-ia  r-irm» 
&■»  abn  rîrson  !-i:i^bîm  ^Vj^  inana   p'j  bD  i-ian  T'ao  n?:  ■^■^"JtJ 
'inwX   b»3b    t>ii:"'i    ^s'^^    -^^b   ipso  -«t  onb  ■^bwSiu:^n   T^a  rt^n  c^^bi 
f-TDbm   n^Don  naD  nr^^borr  ï-rrsob  ai\::b  -ithcdi  mit  ib  nnpb 


232  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

r-i3nD  m  byi  û-^^o"^  n5):':î  Y-^'^  ^'^^^  1"""^  !i'"";ntî  i-iNitb  '^'nitn^n  Tih 
ûya73  i-^n^n?:  ".lî^n  i^^rr  "j-^nDiwN  '»r^^  rîT2  ^'^:>r;  "i^sn  2b  pbn">a  ■^i">T^ 
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...nn^  biDn  ^-^^la  ^<b  b5<-i'::"«  bo  ';2"i7:?3  b:' 
•^nst  "inSTob  i^NUî  ::'û"i3  yip  ib  n\r^  ûsi  ■^t^t--  nmnso  i-t7:"i  [40  ^] 

■»pDDnT^b3>  ■i5''u:pm  nsn^an  gstûn  t^bipb  N':;":în  ^^^nn  pOD  '^snbN 
tor-»  tsno  ^iDt^  i-isi^n  pnn^D  '^l'^n"'  ']\n\Nn  ri:!i  ,i3b^  tms-iu 
^y  tmnrî  ^uînd  t=i^c:u)2  onsD  tn73  torûi'ip  c:'«bbsu:  nanST 
''-nn  '^p'^Dn  J-I5UJ  ^UJT  û^ujb^b  2"inp  ht  i-T\n^N-io  •'i-nDT  ^^mri 
-i^^iTTo    p-^r:  -'3''-ji73b  isn   '"•s^nitn    -^oJ^n?:!::  'T:'"'bN   'n    nnT^N'::  'T^'-^bti 

n-j-'H^  tî-i^.n  noiTû*!!:  ûr*^  cdpo  idns  r^b  i^-^^3>  tzNTw"»  "^b?: 
VN  Ï-7T  ^s^i  ^rr^ïi  ï-i5^7ûti  "^^sn  i-^5pnu3  i3b  *T-ûn5  to:-i  "i-^bin 
r-nmnsn  r-i\m&<r{  diSTo^ib  ■in"'73r!m  fnnniD'ia  ïitoi  (?)  to-^isb  ^-^-i^ 
p^pY?  ^^nit  p  "^D  n72N  -^bon  5ii>3  i-^^irm  tinon  -{^"«stn  ncT^ 
M.tmbi"i:i  snT^nna   bnx  tzsrr^D  ^m  y^r^  t'^p'^'iTao   i^pinpnn 

...tonin  ^inr:  tonnn  m  ^^ujis  t<bN  15*^^  î-it  bD  &;:î3N5 
■^-iiDi  b^  15^^   ^na73r:  '-«snt  b"T  Sni7ou5  '-"n")  'no  it7:  !-ibi'7:i 

n^ND  t<^3Dr!  ntîT  n^ont^ri  b::^  Jtid  i;^n^  t^b  tzibo-i  on  b2i<  i^b^t 
l^tîUJ"!  rr^riT^pb  ujn  r^b  it  t^nno  by:2  t^i^ip  (en  marge  ^^nwn)  n-^^n 
^12^  ïiT  — !^^r:  b"T  np:j>^  '"^n^  toril  nii'rn  nDd"«  fon  "np-ipi  m?:  nb 

...b-^jb  \nan5;a 
bia  m-^nn  v^  l'^pbn^  C?)  -^a^a  iiirr  isbuî  s-)V2nn\:j    r-i^noo  !-j7:t 
tD^T  b"T  i-ijzb-û  '"^n-i  St)   'i\n-i3-i   t203   nranD   po    yr  Suîb  s^iH 
tzin^t^n  pînb  tnnu5n  ni^n  p  nmou:  ts"n  '"^^it:    r!\x-i   mwN^rr  nn^^ 

S-^pnb  -irmn-iT^  ï-it  '^art  ^3bnp  nsr:  t2"^73r!  "sd  br  û-^bp  m-^nb 
p'TD  ifi<  2p3  ^3>3  bpbpnnb  t=:^m3T  û-^pn  tz-^-iDsnuî  niarn  -^o  ^nnn 
:?"3  12 nn  a^n  an::  "iiuîbn  ï-iTm  q-^^Tbi    nip:b    c^n""    n:\^    -^^irt 

*rîbNO  r-imuîna 
l^r^mr::  ta^r::  r;7:5  tow  -'D  yi  û"n  'n7j  ïi\sn  nwsari'::  n72i  i^i^j 

l-'iioî  V^">  ^""1  P^-^  î^'2  bd3  *;'^pnn7:i  v^sin  r-,Dni:3  -^id  rm 
nnp"^  ^b  rî73  •^n"«"i  b"T   d"37:-ir^  'rnd^a  nanrDUj  n-n  d:;i  ,-mm7:  ^nn» 

'  ffoullin,  4  ^^ 

*  Ici   vient  la   cilalion  d'un  passage  de  la   Consullalion  de  David  b.  Saiil,  qui  se 
trouve  au  f»  53  ô. 


IN  RKCUEIL  DE  CONSULTATIONS  DE  RAUBINS  233 

•^D^n  t'T^n    mr^i   ts^T^n   iibb-j:  ^d   m<i  ^d  n3»n::u:    rn^sn    m.*i:7:^ 

■»2n3    û'^b"n:in    t:-^-"!-):!    dni  ..,2":?  û"^TwD    npTnn    ^nt::"»  ^d   ^3 

ï*^mny37:  -inrin  v^  minb  nnr::  ts?:^:^  T:;rT  r-Pjvr&^-ir;  c:r:iD 
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'nyû^  inp^  û"»n:DTjn  niTo-ip^rr  ■^^jsnu)  13^1:73  ti::7:NrT  Tnn*^  n^p^T 
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Sy  111m  ^rîri  "^î^sm  i\mn-i  "^SDb  to-^nnin  rrii-irn  !-Twsn73rî  br 
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^i?:a  mON  b"T  ■i3\ninn73  isbnp  pi  -nD^N  ^n  nsnrû  b^n  ï-ni:n5<n 
^■^NT    T3  153    ï:ni   ::3>t3   ndiiJ^n  "j^N'^a  i*^^  -it<CD  t^irr    nrr::  rrra 

Cs-^n-i  i2n2C  1735  "]03nnb  -^nNir!  v^n  bj»  t^bx  ■^1:1  y:;?:  ^:'  i"iTa 
510D  N''2n  DNU)  ^^21  ^^73  b-^auîa  SoD-»  naT73  ^nr^bi  ib  r*^73^b  v^'^t 
Vî^'b  bnt<  m-jpr:  'i^ij'b  t^bx  «n^n  mwX\y  t<373rn  ^DlX  fc<b  r<m 
"]"io3b  "^iNi  nr^^ï-î-'n  ût  j^n'r  m  n-irnsu:  V''!^  i^  '^o^"*  ï^'^b  ^idd 
*n\rdi  bam  û^w  t*»iin  -.b^d  imx  i^Nn-i  n^ona  nin  n-iyn3  attn 
i73d  inb'o  ^3^3  v^i'^'^n'^  tz-^-i^rro  '731b  i^b  ^^^  ^i^""  -''  ï^pnîb 
now  n3T73  "^nrib  ^oi<3\D  -no^rs  ^d  Nbu:  nnT73  "a^b  V'^^'2n73  irN^i) 
p^  Sd  inb  ';\x  \^y2^  i^piT  -[nb  u:-"  ^3fc<  ^oin73  nrr::  tznb 
^D5  ';\si  qbN^  iHwX  t^inc  ujan  a:'^]  b-in-ja  ^D2b?3  n3'373^  t^bu: 
iwS'Cd  Ninn  ■'im  '^s  S"^2C3  in'^i<i?3i  V2Tû  n:n":;3  tîbi  V::^  m 
bdo  n73us^n  nr  r-iN  n^d->   j*<bi  y^"^  Nb  ï-TwNinrj'sa  mrn  (42  i)   /r-nr'' 

.,.r!\n\::3   -1^73  isb^u   tni3">'^3  ^Vj^  ri73 
j^-^nn  i^m\s-i    ^in^i    ^^n    1^73    ^n^rr    -^n-i   nnri    &:t  (43  i; 

*  Ililchot  Maachalot  Asourot,  mu,  3. 

'  C'est  l'opinion  que  Maïmonide  rapporte  au  nom  des  D*13>)3  "'S^J^^  {Bilchot  Maa- 
chalot Asourot,  XI,  10].  Cette  opinion  a,  d'ailleurs,  été  repoussée  presque  universelle- 
ment, entre  autres  par  Nahmanide,  R.  Jona,  Salomon  b.  Adret,  Ascher  b.  Yohiel. 

^  Ce  sont  presque  textuellemeul  les  arguments  de  David  b.  Saûl  qu'on  lira  plus 
loin,  p.  237. 

*•  Ce  paragraphe  est  un  mélange  curieux  des  paroles  textuelles  de  David  b.  S;iûl 
et  de  celles  de  Salomon  b.  Adret  citées  en  marge  par  le  copiste,  voir  plus  loin,  p.  237, 
note  3.  L'auteur  avait-il  sous  les  yeux  la  Consultation  de  ce  dernier,  bien  qu'il  n'en 
parle  pas,  ou  serait-ce  Salomon  b.  Adret  qui  l'aurait  pillé  ? 

"  Il  oublie  de  dire  que  c'est  à  son  maître  qu'il  a  emprunté  toute  cette  discussion. 


634  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

tn^OJ2i2  nn&<  Mn\nn3  ib  -^n   i^n  ^i-.^Vna  ^,::T3r^  Vu;in^  i^-»'!  ï-i-ni 

l-i^a  ■'i:;  :?573  ';n''»'^'2rî  ■'-imb  ri7:'»:jb  i\\  pb  ,Nr?2'^3  r^^z-^Dnbi 
,rTT3  bbr)  i-'-nin»  ^^y!2  '^2in:i  -^-in^  1\s\d   ':j3-î  t:vi2  s-,m-i?nn  i5b\a 

nrr^rj^  irjDbc)  m-ma  m^N  nn  isnr::  J-ntiip^^n  nab  !it  Ds'utî  V"* 
s'nnNb  mnp  s^iinu)  ï-rtn  nTi3  p-^u  b:D  irons?:  s=!5"iDi:  nmc: 
,:?"3  iS'^iiTo'ip  ms  onrib  isb  ^^'^  rîTosnm  nt^-i'^r!  it:  bbio  'r-i"i-n*i 
Ta"»  M::"i2  nrb  tn^non  tzmn  ^inn  tzmn  tz:^::):  TTr*^  un  t::?:» 
Î-JT3  y^ij"*  t^b  dnninD  rma  &:>  ■i:3"i?:d"'0  ^7:  by  c-'wsn  ns^p  anb 
tt52T  U3>73a  i"»"^  n\nnb  ba^  ,"i:72ir  Nb  J-rbNn  û-^nni  •'D  n*t5  ncnr: 
a^'To  lDiU5'>  "infi^T  ^riN  S:d  "Id  ï-n7::D  i^t^o  nbn^  inD^'ir;  •'N'ti  ï-it 
Jmn^bi  biiDî^b  '^HuN  Sd:'  rr;^i  "^"i^r;  ts:?  "irtr".::'''!   ï-ib-na  ts'jsa  '::m 

tD^i2  tor:3b  Tn'N'-irr  "^d  ^y  ir^vû^ip  ispn^iD  "^is  :?i72t:  S^ir^a 
'^EN  S-^^iïib  ?n"'Drtn  ^ni  '^yi2  nsn^*::  i3pn"«  pi^rsTo  b^irnb  irnT'nnT: 
1^1  ^»5^ir^r5b  m^issn  is^nins^iîT  to-^iiir:  rj^my  ibrsvi  r573  1^73 
f-iir-i^iD  ^^'n  î-tt  '^j<^"i  t^b^  ^hn  ^nbo  b:?  is^sj'  tninuîbT  15b  sitTjbi 
.tDS"^"»  ûnD  i-inn  i^ïbTî^  "^^m  ^y^iz  n-iT:*  «bîM  -«sn  r-ii-'nn  ^ns 
Ntb&<  -«"la  y:^i2  t-i'Trri  rsr^^^s  t*^bo  '7:ni<\:î  Tnz'Ci  n-nnn  ï-t-^n-i  ti7 
t^73t22^  1"'-«i  "jb  '7j"«''p  r^Tî'T  ::bm72  SbD  ■i:\T>a  ^oîb  ■^-int::  l'^-'a 
tD5i  û^N73::  torr;  irm:*'"'  bs  \s'7ii  *73:^"«n3  '-«ûwN  hst?:  -^Drib  biDs 
173^  Nb  rîT  bs  d^T  y-iwxb  riirnna  v^'^::  ■i">rr  Dïi\n"ir-i  3-1  snn  û"'73''3 
SiDDï^  l-^tî"!  "^liTTo  t^irso  nn^  bdn  n::':îD  !-innr;o  i7:bb  inra  naibn 
rrè^T^iiûrî  v^^  ""2^  "n^î  13"^^  nbi^i:*  s-i-^nna  ujn^  ;:::>?3  b-iDD  -^d  in  nr: 
ïTinn  rî::;2JD  r<b  "^id^  "na  iNbi  bsn'T  i-i7:ai  ^"«dT  (44  «)  ,nnr: 
mmn^'n  "^^^  b3>  t^irs  'j-'a  — id:  r<bb  biD^n  nd:  "j-^n  pibnb  13b  ^wto 
i3b3pT    i52nd^    1735    1"id:n    -nit    t<b«    n2i-i:?n    n*»    ^y    ■■,:->5<b 

.!-ï"3^  n2'^mn"i73 

■^DNîiyû  t>ib  "^^ûbDi-i  b^<n7:\::  'n  tsdrtn  bi<   nnbvû   narrnrr  r-iNT 

tnvN-n  m3:>a  ^5^732  inirbn  tnnnirn  riUJ-ibnr:  \-i3?-!  -^sb  ^-n^r  c*<bb 
•'-ima  •'b  "^n  ï-i\'iT  nmN  ^-lpnyr^  î<b  tL-^-ioiwsrî  nmm  ';'i-i\n?3n  "^nana 

."1730  n:2T3  Nbuî  dwST  tzrnrî  ï-it 

^\aN  dt>n^i  d^D  t^bi  nbnor:  d\a  î-13  ^dT3  ^d3  V"*  "'^''''^  ï-i3v:în 

.T«bwX  nnbio 

■«5tè<d    ï-Tb53-i   ynwsa  :?73':î5i    :'^i3  "^d  ^b   rnnb'::o   \xnd  ^r'^N*  ^:j< 
^bipb  \n3^730  p5<  ■<"-«  n^-T^i   r-.^T  mm    mcim  nrdn  ^^j:y  -i'>l\x 
*^ndnî<    •'by  ï-t-id'»d    -^d    ^nbwNO    mi<b53b    ^\-iii:73dT    ^■'-ld^d  \nwxm 

*  Voir  plus  loin  également,  p.  237,  1.  4  d'en  bas. 


UN  HECrEIL  DE  CONSULTATIOxNS  DE  RAHIUNS  iTU) 

■«3^r!?:3    nby  ^on*    n^   ^2nd-i  %n-i::    ai"3   ^^'^''^    "-,i:ipn  ::"ip3î<i 

Sbp   r.N  t2'>am  bbD^T   dwd  ^t::'    'ist   t:'^::w3  tL-'::D    s=^u;:wX  •(ws::n 

n^iDîi  ton-^-int^i  rtTb  ï-tt  iTJir:'  l^-ir:  -•3'^''::?  bD  ^n?:ob  rit^*::  — .iion 
l"»^!-:  tziNT  -^^-N  2n3  ,tsvpb  id-^^id»  n^T  ï-tt  ^n  v^iHwNt  tz^bzn 
t-in53  innuîn?ûT  î-ib:>}:b  ^Vj^r-^  ri^T  rrb^^T^b  û^3i:-irim  n-j72b  y^::^ 
tDNT  v^Tà  ^nD3  ^*n"i  V^^'»^  ï-i\n':j3  -^mToMJ  'i^i  v^:'?:  ^in?3  [44 3] 
n\n\:j2  -im7:  -iK^am  5>:;72n  t-nn-'no  ^-«b'^jnb  ^ni:  inncn?:  Vjyi^  t<b 

^i3n  n'^D::nb  nDVj   t^n^   ^"idk    biDr:   -^ws^n  rr^D-jnb  ncrj  r<:D^t<n 

r-inib  b"^i  ,ï-i^ioN  tn'j^r:  bs  -^^d  br  n-^s-j^rb  ncn-jT  ■i::^^?:  t2ip73  b:r 
in'it:^  t<^?:n  rr^n'^un  moN  t^-jj^td  ^^n^j  n-i^a  inacnT^  '^SwXT 
,S"T  i"3î<n"n  r^^ian'vD  -^nsni:  nnrj  ■^nniD  p-'.Dsb  "^ryi  tiNi  /ïnspa 
r<bi  nm^a  ^t^uîrîi  i3>:i73  t=;ip^  '^'^b^î?:'::  r<btî  nr3  Nb  Kirj  ïnsn 
'tt53  'n72Ni    ■'fi^TD  bi'  ns7:D   -^biNi    ,y:^'n'n   mn^so  ^-iV^anb  ^nisn 

brsn  '"^-iT^wS  imbisujt<  poD7:'7  tznuj?:'!  •^-i'^t:  i''"»2  mbcûi?:  mbi^'r^n 
■^UJ-nna  -«nanr)  pT  ,^d3  V""  l'^^^^b  'n^N  -"733  "^sm  ïnmina  r-.sn 
tzs-isir^nn  v^x  t:N-i  ,\nDni:  air;  b:>  b"T  i"3N"nïi  ï-T7:n\D  rr?:  y-inb 
nniD^  '^ncni:  nnn  "^-inn^  ^b  r-TN-i3  "^nii  t^na  ^nb  ncia  tzi<  ••s 
ri7û"ib  ï-ii:n  "^iD  173223^  Niir^T  ,^m73  'iN'»::m  i3^:>73  r<bN  ^''b'::73  v^'^*'^ 
S:3^3m  manD  'l^y  ,n"'carîb  nciiûb  "«npn  r<irj  npc73  czip7:T 
t:^:n  û-'iiinn  ï-rbnnDb  hvû'^b  ^ni:  Sibis  i-^^n  ûtî  m^nb  did3 
^ibi:  Nin  tzN  D"i:3nu3  î-t73i  ^^1:733  v-^n  t^np'»  c*»jb'»y  ^1^  ';"»3n-i3?73 
ï-TD-i  ■i3'^73  li-^i^o  t^,:;b  i-r^Tnrr  û5<i    TT^Tnr:b  ^lOwS  ^v^   "12  r:3   tz.x 

...'  iD''^'  iba373T  i"*br 
în73  "^SDi  T^nn^  bs  bj'  ^nnnîD  ï-ibnn  "^^  •^i'iî^b  3''^'in73  "'33m  [4oci] 
inbuib  D'Ti3ipïi  ■'npn3?m  S^r:  ^nn^  •^nni^'i  \-ib3p  ^sb  •^3'^y3  ï-iwS-i3":5 
TinTm  *]^"in^  S:'  12  I3"i3nr:b  M73"i-in!-!  ^2D  uîpnb  ^nDb733  ^^bî^ 
0"i:d3  ba"i3n  î-it  nnpb  tD073  ^s  \"^.t<i:73  r-î3m  ,nT  n5<  "^nnnDT 
t**i3in  3-n  ^<r^  nnn  t>nr;i  ^""-12^73  ^^p^pnu:  n73  mnD  &•::  îism 

...fnib  •^3m:;-i:i  n-'Tnm 
nT«3  ûmm  nnD73T  ■«•i:;n  )i2  npbu:  npips  m:^"!  mnniD  m:?i 
ï-Tai3>3  tna  np-ib^!  ^sb  nm73  M37373  v^^y  û^bi^n  t<b'o  i.y  ï-Tjr23\r73 
î-iT  by  nN73  \nfc<bD3  ^^"j'  î-i73\nnnbT  i^no  î-i^b3>  nnb  ^■•ni:  -«lir:  173 
Nbx  "'^S3rî  173  ï-ipips  na"i:^n  n:*  np-^b  n\n73  ï-in^'j  n2v»::3  riN^bs 
,i73mn3  n30D"'*::   1l^   r-T37373   13"^^   tz-^by»  Nbc  rrnpba  nn.x  "]^ni:o 

*  Voir  plus  haut,  p.  228. 

*  Nous  passons  la  réponse,  qui  n'oli're  rien  de  parliculièremenl  intéressant. 


236  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

•'nnNi     n7û-nnr:    -idd   ^i-in-i    tana  \nan3  ht  (iSè)  ...  Sntw"»    -^ti 

toio  d'03  riT  '^^-^!-:  «b  t^inuî  ^<b2^  tviban  ^^^by  c*<-«b£r:b 
l"^-^  'j'^iip^  i-n!>3-ip73  i^rr::  r^ns^on  t=-«->pb  in-iiDTo  mvjo  ^<bwx  n-i 
ï-T^r^  Nin  tiST  c^nn  to^^a-^  i-^^r^  1r^3  rirr:;^  r-nsmrî  nv:;^:ir;  itj 
1^  ^r^Ti  t^-^^iin  t*^7:uî  ':;"in5  t<b  rjrbi  ï-irn  ::>nr!  ^n:^  b:'  TiJzn 
moN  1573»  ir:>  fbriTî  fcNn  'boi-i^r:  ^<■^nr!^  nnOwXi  n'^i-'sno  i-i^r: 
t<bo  •^I72;b  ninrr  nn^i  ,ï-Tt<b7:2  *i\nnb  c^o  ^'wi:5<i  -i?2N  psom 
b::^  t^-'iap"!  '1:^1  ,m:jj)2  N^i:irî  tzN  "t^id^  "•}:  MNb7:n  '"^dni  rTNb?:^ 
tJiuî^D  n^n'iin  i"iDNU5  r<pi5^  Ninn'T  î-iuî^t:  ï-i^ûi-^.nn  idd  b:>n  n^.rt 
'{\x  'jTjpb  nnn:D  -«"irî'va  ^'^b:^  niTonb  O"  nni-^i  — ini^i  .bi-i^r  ^idd 
bNiui-^  -1WU51  "^i^r:  ^-n  uni  ^  niDD  n^n  "^DwNi  n:;^  ^issr;  'Dy  i^^nn 
INID  nnnD  nsrs  ,ï-T\-iu)n  -iidn  n^nnn  bî^nui^  id:::i  n^n  r:;:  ^^b•>a 
^iDN  n^3  ^ijH  t=;':3  5>53  t^bu5  b^^n^"»  -iTû^uj  itî  mD^)  rr^rr  '^2N"»a 
•(T^jb  tnnnr)  ^.s  '73:13  'j-i'^tî'is  b^i^i  ";iïd3  t3v:;73  j>ïin  ir^Ti  ,ï-i\-t:îd 
ï-7i:n  J-TT  rinN  "]n  '^ai-i^Dn  b:in'7  ^iD3  n^iDTn  r<b':5  b"T  ï-i\u?3  '-1  nnrr 
nnNi  ,"^1:1:1  lt3  J-iai3>n  t-15  np"^b  nnnrtuj  "^nn^i  snnno  p  û&<i  ^72ib 
2r\^^  nw  DiniDb  nnsïi  n>3b  b"T  ï-t:î73  'n  nnn  iicb  ii<s  t-.3n:DU3 
l-^-^n  V''^3'u:  t)"yi<^  niDim  n:^  157352  i-^npib  "j^ni  "j173D3  ï-rbrT^b 
n^  np-'b  iDiN'::  -"nï!  /^ninb  in^  t^bi  v^tm  û-^sirnnrî  ty  nniy» 
dbi3^  •^31^:^53  bnpuî  rsTrr  bi^:\rî  nnn  '^inn  r-irar:  nn^i  ."^isn  173  n^i-n 
Kbi  uJin-^Dn  '53:13  ^DitîO  Î-T73  -i\nr:b  n53nn!i  -ido  •^-i3'7  tnnpbi 
n73n    ^3&<   -13^  CjlO  (46û)..,'rtT   JnN    ÏIT   tzs^niD   ^n3Tû   t^bw\  i^y 

^7373  ^ni"i  -^isni  ,p  V'^"!^^  ^^^  '^^^  P""^*^^  1^^"^  "^^^^  '-^^  ^""^  '^^ 
^UJK   iiirm  ;:;pi73b  ^b  ï-i^rr»  id  ^idd53  r;T  13^  mn73b  u:p373i  -ii^ 

nris-"  ']-*.n3  i:-iT«  "•-n3  17:^3 
Se  ';^73^"C73\:i  l-^oij'iD  ^1131  1"'''^  1^^^  '-^  ^'*^  ^^'*"'  ^^^""^  "Ti- 
n53  r'i^  '^^''^  ^^^  nnnuj  r;7a  tii"^35y3  ^53  t=:.\i  r73'»:î?3r5  ■^-lp53  n^;'^53 
nr  û:^  ^3  ■^rt<ir73  p  "^inNi  ...3":'  -ini73  nb5'73b'û  !-t731  ,ni3wSi  ii33'j 

...i3icb  nn^pi  ï-i73i"^nr!  -1^053  tnNirin 
y^r.ii  "^-ino  nm73  in\nnrT::  1^373  S'::i373  i-^-^i  n3n3  'iri  (46 A) 
in\n'inu2  ';v3i  mposi  n3n30  nti  ...3"::>  -ini?3  i^b^u  n\n:ib&<3 
•j-^N'::  '':,^yn  rn^^is  b3&<  b"T  "^^isr;  '^3-1  d^3  p  i:3n3  ^3  mi2i<  -ini73 
t^bni  V""  '^'^'^  ^^^  ^^^  ï-;rpnn3'7  n-rcwS*  "^wN^rn  p  m-iinb  "ini 
nin^i  Nb  iroirn*:)  n^^<1  V''!^  f^^  V'"'"'*'^'^'^  ir^rtuj  \n\\'i  sni3n  t2'^73yD 

...r;\-i-ino  bb3  13  13:  n^r^  t^bi  i73:5':2i  irsis 
irt<i    b-^fc^ir;   niNUî    in  C3^  "jr73  13  3-iyn:":J  V"^t   n3r3i  (47  oj 
^,ni73i    ^D:n73    li-^Ni    n3Uî3i    S013733  t^in    •'-in    n3î73  "«3:15  ■'in-i 

*   Paroles  de  Maïmonide,  /itV/.,  xi,  11. 

»  Vient  ensuite  la  discussion  de  ropinion  de  l'auteur  du  S.  Haterouma. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  DE  RABBINS  237 

iNb^aT  l"*"»  137:73  ispn  tD-^^inso  û"^n33^  tanmo  D"'u::n  t3\N3n  r.r^zz 
"^nbNUJi  •'bisT  •'bD  b:D3  n-iTri  "12737:  i:n3T  \:J2T  inpb  ']d  -ihnt  û"^bn:i  !i:^bD 
\-n-im  ^^y  :>:732  ti:'  nsj^"»  r^br:  "ib^^rrb  ti7:wNt  p  rr:?  r!72b  tznb 
Si"T:>rî  nn^nn  n-^nTon  ^^^r5  ï-id^n  -^td  \nn7:NT  mb-n;  min  r-17  by 
rtiiîTD  i"n  "^3  "^b  Ti72wNT  S"t  ^mnn  "^scb  ■^-in^  "^n^Linm  \ni:-n  (47*)  mir, 
Ss  i-iTQN  pT  !-îT  ^'21  V">°^N  V*Nn  '^7D::n  bD  t::?:^  p  arr;  b"T 
nrtu:  î^irr  ^V2^  niDNT  -^rs^a  nmrr  '-nnn  ^:n  t=::ii  /  nvn  •^izzn 
•ii^rî  13  '-)">:d'^  '^^ni  SbD  12  ns3  ^21  u^t:  mn-n^^n  ^i^^:)  '{■«■'  -inc^  Nin 
"ï-^-;^  c^bu:  n7Dib  t:n3>T  tst^i  ,^03b73  r:?:^;::  '::dt  in  nnrrr:; 
112^  ^Dsnrib  -^iN-ir:  i-i-^n  b:j>  r^bx  inî^  Nb  -^i:;  r:?:  b^i  ûr-i-^  cro  by 
S^::\an  bos"^  '^7od  h^tt:  ^2::t  "{b  r<73^b  )W2^  ^b"T  riuî?:  'nn  2d^'o 
t^372nn  1DN  >«ïb  «m  biDD  t^irr»  ^<•^nn  tiiNO  13  nn^nr::  ^m  ::r72 
l'i^n  biODD  rr^ûb  ^"iD3  'i^D^'b  b25<  ï-Ti:2pn  ]'^^yb  t^bx  ujn-îT  -nxw 
1b  n\N  n^apnb  ^103  V^  '3"^:^bD7:  Nbn  ^<7a^"^  Tb^cNT  '1:^1  ,"^22 
r-ip^-iT  i-^irb  'n?:^^^:)  ^i03b  n^Di  San  in  2-n::>7:r:  "c^nn  ^72*>73b 
t^m  w^iQ  r^in  ibND  imN  l'iNin  r^n  tD'rn  rî7:ri3  tin  d-i^tid  szt 
S::n  "^sr;  '"id^t  u:nn::  n-'b  s^irii  bb:D  np">-iTb  -^ini  i:\s  mn  szt 
r-n'iin:'n  *j"i-i"^7Qni3  tzi-^ir^n^a  nTDib  isb  v^t  iiy^i  (48 «)  ...r-jpnîb  t^st 
S*^nu:n  ^iD3b  iniN  -ibos-^o  nnîTD  -^aiib  t2"i-i^7:n73  nîwN'U  17:d  tonba 
■ji-^ri  tiTû  ï-i3nu33  Nbn  Sb^  12  -id3  v^"i  ^'^^'^  "^^^^  t^nrr::  uîm  ^^72 

4..'*  V"^  "1^'^'^  !n73'm  ib^nuja 
•^n^rt  12  :>:;3ï:  labuî  bMîi272  V'::  îrjT73  î-tn-iît  "^inx  n2nD'j  r;7:-i 
ï-J7a  "^Db  "^DN  rT?:n  ,:2"3'  ^^pDn03  rTin'::n  b:'  rii^i  iy;732  -idn3  t^b 
l"""^  n'*"«n^  b:'  tnpDnoD  ïn72b  ;2:2n  ^3^73  12  2-i3?n3'»a  ';■«"'  by  t-ipsco 
^oib  ■^iNi  iD-'N!  tD-^nnN  tD"'-i2'n  ^21  n2-in  12  2nyn3\::  bai272 
t>in"^T  Dsn  diujb  I'^n  "^n  ."^ir^n  0:5^  imnu:b  nm7:  Dr:^-i2T  "^cb  \xnT 
tionob  2ia  t^bi  ;2J2T  a^»?:  12  2-iyn3\:5  i"i">  «bi  ï-tt  r^b  iT\r:b  lï^jz'C 
d-^^uîn  nn->n  in2  :\i!i3b  ir^na  &îbu5  m-i^rr^m  imbT7:\  mibip  m-iinbi 
bd  b:'  p  b:'  mmT  r-J3'2nt<b  2nnpn  ï-tth  1112  pu:  bD  mn2i:'n 
nriTiTûT  n-^HT  n"^nTrîb  ■^i&<-iu:  17ûd  ^TrîT72  -«sn  ï-Iw^th  nn^Nn  ■^-)2i 
s-i2nd'i3  r-nnnN  d:^t  nb^rr  r-nb-n^n  mnn-'rîn  Doisb  r<ba  '^"i72D 
Û3-INU)  û-^uî^N  iN2'^  Nbia  ^1125  "^isb  2inDb  ^l'^ny   i:^'::  i7:d  T'poD2 

*  Maïmonide,  ihid.,  ix,  10. 
>  Voir  plus  haut,  p.  233. 

3  En  marge,  le  compilateur  ajoute  :  \:J2T  12    p3M:  t<"n2    N"2UJnn    2n5    pT 
^DD  1"'"'    t]'lUJ72    "12    UJ"«   ^21    -^yn    12    inî    t2N    b2i<    172i''J    n3n':;3"0    13^ 

^32  ^03b73  i-'^37:d  p"^»  D"^i:\n  n2T72n  ^2:^  by  iniwN  1^^0212  ';\s'c;  Vr  'wX 
)y^'^  pb  MJ"»  n2N  nom?:  p^  pb  -idn:  n2T73b  nowssn  bD  f^buj 
^''s'  pb  i^'^  V^^^' 

*  2é.,  9. 


238  REVUE  DES  ÉTUDES  JUiVi!.S 

ini2^  n7:iU5î-.  Tii^iitn   -«nVn   c>ibnpr!    rT>rT^T  ^^nm):  ^•i?3bb   to"'5i:irT 

n's  i?3:>^\a  'ry  :?:?33  -iDî^'^b  i"^^  i-^n  ib  eu:  -iî:"ib  ^njn  ^D\a  r-j.\-i: 
S-nsrî  DDnn  p  \nbnp  "j-iUîbr;  nT2  t::^N  ...y?ûin  ï-i^nu;»  i2^n 
imnTj^T  nn^n  ispT  V'itT  »n^73buî  n  n-in  ûcn  ^-^''ya^  b^T»;::  'n 
Snnn  lir^s  y^^-inn  ^^^^^^  '^^-^  "'^'''^  ^^7373  yciy-i  r-nn'ûb52  ■'^7::ib 
irî<^  ^03  V"»  ysyb  y^ann  t^nps  j*<in  pn  >i^TDT  i::-!^'::^»  in 
©in  ^''-^n  "^ibn  riT  y^i  ,t=n-,n  ^inn  ti:mn  "^n::  ^nt  r^Ton  nDW 
bnpDTûr;  nn'i  r-rn  ^a^n  ift*  tz^7:^a  ^a'inn-'  13  ncN  t^ian  -^Db  t<bN 
M.nanD'ja  i?25  nnsuî  b"T  npy^  '"^a-i  û^as  \ny72'::  ^n  /c5t:îi  -^p:?  in  Ni:/û3T 
ï-isn^n  Nb'::  nb-^sN    bN-iuJ-'  b;a  y    ■^■i:r;  ^03    tzi^T  man^T  (490) 

aauî  oi^ûbpn'i:  «b^  ^nabn  n:D2r  nb^  -^biNi  b"T  '^"'::-i  "^d  bj?  -^rcin 
lUjy^T  m5»73  inb  "imDi  'idt  nnn2\:;b   n?3-ib   •im7:i   man^i   ,"|3\:;n723 

yiiDn?:  "^din^  -inwSi  ...'d^  n^DnujrjbTj  ^ab  '^os  y^n  -i::n^nb  "nox  nan^T 
■^D"i:3  "^■'-iNnb  "^b  rr^r:  ^^^Vizh  n^br;  i-^nm^o  "n»bbn  r-n-;ir;bT  b■»y^r^b 
l-n^'ub  ûn5<  b'DV  t^buî  mot^  Nino    r-173   nwsabi   3>^mr:bT    niDbrirj 
to-^Ta^^an  mnsb  '-istp?:    r^inuî    'd':>'n    moNn    n&<    -r^nrîb    n^i^sbD 

...  JnvN-irr' 
ûnuî  û-^ïja::  1"i^d  irîUîTDD  nr7an  nnis^nst  ^D3nr:5  y"""!  tnnnDT  (49  è) 

../!:3'  nN2r:3  imoN  ';-«t^u;3?: 
i3^Nï)  •'cb  ï-i'TiïDn  nniTa^  n^si^  n^?32  n-irn:o   i"»"^  ^^''^''  nan^T 
t>ib  t^"im  b"T  Tn'Nan   'nsc;   ^7373   r-i.sirin    rjT   'D"y    r^^-^cb  '•■i.n-i 
r-i-i73N"i  r-iDDin  r:nN"i   t::^Db  0^:2  vm:  Nin  "^5  ib  r-iN-ir:;  r<bwS  ans 

...m-in"»:;b  "^iNn  i:\s*o 
yn  r-ipbm  nn^rî  b^   •^inb    ^d:    V**    ï"'"i:'7:3    rnnnD*û  r-î?2  b::i 

...'^  bnb"i27:  "^rri^b  mcn  ",2^  pp  m^^i: 
s":'  tz:bi:?b  yniDN  dit:  in^bi'  in:  Nbu:  szn7:-w"i  î-,Dnr-i  ^r;Oû) 
^^^!^  b-n:  rsTom  .rîbi'rri  NiT^-in  t^im  b"T  np:"^  '-^an  •^nann  rîT3  nosn 
^\^  ï-îTn  172T3  ybOD73  VN'i:  "^sb  1722::?  ir^  &no  br  Sp^7:-:;  ■^73 
n^73n73  ri^n  p  t::;^  17311:2  i^anD  i^n^Ni  ,ïz^n':w-  br  -;d  irr  ''.^?3n73 
13N  VNT  ,0^7373  tD^i73n  pa  r::^  ^<b  dn  tsiD^b  d\'m1  tz^r^nna 
Ti73n3  yn   riTn   npbn  r^b  tzi-^piocn  (on//)   nNC  tzrn    -,^-«,D^b  t=^nr3 

,"n73n:  !*<bb 
VN©    'nnwN73   ûrpmnina  tD-^isn    y^    np-'b    y-l^n73   c-^i    T'2:^^-) 

>  Probablement  =  "Ti  0^73  "^IT^. 

'  C'est  peut-être  celui  qui  vivait  à  Lunel  vers  1105,  vo  r  (iros-,  n.  2SI. 
^  Jusvinel. 

*  Nous  passons  plusieurs   pars'îraphes  où    l'aulour  reprend  sou    correspondaul  <ie 
n'avoir  pas  élé  assez  complet  ou  d'avoir  mal  opiné. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATlOiNS  DE  RABRINS  23U 

!-TN3nn    — im73u:    -«la    pirn   3>:i?jd   tî-^T    ï-irrr    172T3    1"«dc273    i-»»© 

"innDb  rnuj;am  ^anbn  nr  D2:d3  -id  Tn^na  Ti^nToi  fTsu:»  \n^^m 
V^DDTî  v^'^  T'posn  m73ip73  r;7:33  riT  oru^  mnî^T  td  p-^Tnnbn 
bDT  D^N-)i7ûNT  tz;^N3n  irman  -^-im  -np^'bi  y-ncbi  o-inb  ï-iin  "jTsTa 
n2:r  t:^23-n  û^^iNi  ï-twdt    b'it'T    to-^snN^n    bD    -nsm    "ipocj    ï-r^a 

ûn-iDN  'n  ^a-npn  ain  û-^bms  tzi^:2-n  D-^-iJi^p  r-iNTn  y-i^a  rn  3"np 
t2-'bnn:i  û^Ts^n  ï-itodt  mt^dt  S"t  n^nnT  'nm  l'n'^'n'm  n"3  2« 
•^-n   "n^Dï<  "^DT  ,m  nn^  -iToib   t=in:'T  by  r-ib:^    ^bi  ts-^nb^  ^2Nb733 

\nu5  t:"^C"i:>i  t:m:>-j3  D"'p"nwNT  t=:P2"i7:N  pTnb  c^^jrnn?^  ct'  bsa 
Dn-ina  nnacn  ûnD"'br;3  toiD-n  bj'i   Dn\-i;an   doid  by   dh-'^ï-d   :ny^ 

•^3Db  iDD2b  Dmn^^in  rT«2a  137273  tn^nbic:  ûn^:^"':;)^  y-^r,  t2t<^^ina 
■^nnpn  ts:^    .ûms"»"»    ^iz'ûh    tznvan    bD3    1:73^   V-^"^-""    V"^^'»'"'"'  ^"^ 

t=5^D3b  CD73nb     ûbDt<3     T"3'n    "^^Db     Q-'Na      Û^UÎTpn     D'^TO'^D    "^D     TiD-m 

nnm  tziD-'osi  tDDbTo  noa  mp733  Dnbn  r-n^nb  quj  nn^To  :=cn? 
Iiy  mnb  Dî^iaa  Tiz'O  b^a  inN  ba  "j-iTau  pi  aa-'o:  i-^-^  ina"^  1731 
VwNUj  Tn72N-«  '^-'N'i   tDD"ii<    Dnbi  taujD:^  y    "j^nriJT    V'^pi'^    t:3i:^    br 

...ïnT"  ûip7:a  ^30:73 
ï-iNbn  Nb  T^bN  na^  ■iwS'::^  dnt  rrN-i  aa  ï-tn-i  -^ax  nnt<i  ...  (5i  a) 
n7D:i  s*<bT  p  poD  Nb  rnanau:  r;73  ^nNL:73'j  !-i7:-nnn  "iSaa  t]N  "^d 
SDrr^ma-ini  a^irin  m^-^"^  np*^b  yb-^^n  -c-^a  *— i^aino  ^bs*  — .n-^nb 
^,DiN  n^na  b"-  pn^^  '-1  ann  lai  b-inrir;  ann  du: a  n':-iwN  ^a  nni^T 
1\\;a  pa  n::5>^"'  '^d5<i  iT^rinb  nnN  v^'^  T"»^  V373au:  nann  .^t  djut: 
D:i  r-iTa  d:i  *Tio\Nb  r-mnai  r-m73^  ri^Nm  Nin  "iia:  û:*m  "j-^aa:?: 
y'^'t2^  ar-^  ti:nD  V"^^*'^'^^  "^naia  p-^îriTo  i\n\N-i  ^-wSi  .a-^'i^n  r-nra:ia 
(I.  rnpDDT)  npoDT  t]"ia  "iri  'Qir\i2  nanau:  ï-j;iaa  ib^SwX  ^la 
Tij'ïi  riTaiinn  nsa  Sya  ann  ri^m  ^-it^u:  ct::  t^ba  ûn^-iana 
j^rirj  n?3i:y  ■^i^r;  p  Nb.s  g^td^  bicû-^b  rn^ri-i  ri-ir:  t^b  apr*^  '■•anu: 
i^nbN  t-i-nm  laba  û\-bN  r-iN-i""  t^jn  'c\n  bab  nb^bn  Mb->bm  ,ia 
jNian  Nb^  -^na  -niDa  t*<ab-,  imN  n^arnbi  .'-tt-  -lan.T  ainab  lanpa 

,in^  br  nbpn 
uî-^i  ,r-;\-i^a  -im72T  to^-coa  b:3a  ûr"«  ano  nain^Ti  nana  '^^y 
^p3^  rpnu:a  ca"'n\n73r:  -^-lan  m^-cy  p"y  nai  -lab  riwNrna  i^^-^i^jz 
baT  ta"^3iwN:in  Saa  13^^:73  Nb  ï-iTa  d:t  ...nba::  tznoiNn  -^-laii 
-in">nb  yi:Di:73-i  ne  nirna  C3u:r;  "^uj^t^  ta-^ma^n  D-^b-n;::  ta-'^aann 
,«^2:in  v^^2  ta'^\a;aa  tzii-'-'  tano  n\-in;a  -^ts  br  ï-i7:n  -^rj^  ^^ntst  (5i  b) 
'^ws  ï-i";a  naTiNa  r-ian  t-iN  m-imon  ?m\s-irî  ba  ainab  ■•njm 
■^bnbT  ainabT  m"i:3b  ■^nbia*'  Nb  r-inn^N  £vînao73a  t>C33?  n^j^'j  -.-3*2 
,\nj:î:n   ^3"i3:-i  s-n^a^b  ^î<  nî  t-iN  as  ama  \T«"'n  tvib  ^nariN 


240  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

t^5T  p^n  niT^bnn  Nb  t^mTDwSi  N2n  ûT^ab  c*^bT  i:m"'  'nb  t*<b  '7352 
t*»ib  "^^  ton"*n?2rî  nvNn  m^nbi  ^^iT^'^ab  rsitTi  "^n^^r?  "i.swt  ■^7:bc*n-'3 
!-TTn  "imrr::  r-T-iDir:  dt^to  n^Tn  y-iN2  inTo^*"»:)  irmnn  br)3  i::?):'»:: 
^•^Dnrr   nnn  'i^j^ti    tzx   {:]&<"i  ,nn^nb    r-i2nDO  ^"«br   \nwsb2:T  "-in-^nb 

^^ON"»  ib^DNT  *  ■inj'O  Sr)  1.S  in:>-'0  Sd  iTin  s^bi  m  Tn-» 
î-îT  biD  t^y  irsTNn  i^^^^ûu:  t^ibuj  riTo  tzi^-iw^n  it  ï-TwN-nrj  ï-tj':;du) 
tzi'^Dnm   û^bin:»   "^d    b3^  '-no'^N  nn   r^nv::   n^Tn  yn^a   n\nnb  ^^ 

■^n^Nn  p  nnNT  .in^a^nnn    nso  \n^Nn":5   ûiip   "^nan^    rr;    b^  ma-i 

Sisn    Tisiianm    ,b"T    np:s?i  -^^inn    t2UJ3    p    nnDu:    ïn73"nnr;    ncca 

•'nnni^T   ■'1-'  b:?  "«mi:    £z!->ddi  -icn   n^s  sinsb   -^b^»  "^ab   '^bw^i  vnm 

.M^nbN  "■nm  C]ion  "l'ibis    mn^b  \n^ii:  n:m  ^nabn  rtbr   TwN  ?-ik 

b^n  rn-innm  Nb-^ïprio  p  im*^  vn  ï^b  b"T  '\-ii3-i  p  anD  S"t 
tiy  npTna  npm"i?2T  n"imnt3  Nb^apm  {^2  a)  b'^i{^^  ^ni<  -^bs^  T»::n3 

„."7i5n  ^2TN73  'THND  r<-«n  nm  m^ann 
/3:>  r-Tn3>  i-^piiN  12\N\D  t^y'^12  ^isn  3>^^  ^iDT^b  n:n3T  nanDi 
m^^wSi  -^D  "^\unN  r^b  "^^wS  û:v  riT  t2:>::3  p-'Tnrsb  rr^r::!  ï-idd"»  rr^n 
•— i"nnb  û-^^D?:  ']"'n'^Ni  -i'::nd  n73  "^b  itût  "^abb  r;D  n««  ^d  nîaiNT 
•^3  ts:;'!  /:5-n^D3  û^-ian^orr  b^T  tD-^DiNsn  bsi  irmnn  nnoN^a  1112 
r-iTn  n"«72n72  Jn-^n  np:'-'  ^3n-l  -^d  Tr?3  rî?2Tinn  -idd  byn  -^s  n^Ni 
13  r:;rû  '^^:^T:  p  cdn  "^^  d-^tît  nnpb  -^la  y:732  Sp*^73  rr^n  t^bo 
t35>ab  Ï-I-J13  nin  vnN  bNi73'::  123-1"::  -^'d'^^wNi  '72:^3  'r-i\NnD  n3b3 
'iy  t<bT  -irr^nn  riT  r-i3n5  nn^i  .riTn  17373  1^^0:73  v^s'ij  '7:int  î-tt 
■133^73^^  t*^bT  i^wX-i  ï*^b  ynï-î  :;rî2?:rt  nn  :n:?23  imx  nrsp'^r  Nb« 
•^»Dn  bD-i  •^m3-i  bs  tt^î^-i  ^d  t]^^  n-nn  ■^:3  Dnp733  p  r^n:-::  ub^yJ2 
^^y  "«r)  yi?3":J7a  \-i-':y2  p  bj*  m."i"id\s  "13  iiinrj  £z-«72yD  nT:^  imi 
!-TTn  v^T^  "^^  i"»'^^"^  "^■'^^'*  "^"^"^  n\n"»a3  '-«DwX  ar^  ï-in  itit^t  'ny^ 
ûn"'m3î<  noy  nuJwSD  û-^b^Ds  -^scb  ^D3  \nb3b  sn-rs-nT:  û^i:;n  i3'j 
T172N  n\at<  ^nx  t:s"^D3  1">"^  mn':jb  D5in3  N3bT  nN^b  DrT^r:^3  nxT  bp:T 
■1172N  n3S-i   Dnv>::y73   "nT^b^T   D"^i:i3  •i3-ii'n^T  tzn^so:   imm    mn  ■'D 

...Dn\m:3  ûicts  £22^"^  b:>i  '\-n3"i 
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1  Dans  le  Sonar/,  f»  S5  a  de  rédition  de  Venise,  Moïse  de  Coucy  se  borne  à  rap- 
porter ropinion  biea  connue  de  Uabbénou  Tam.  Peul-êlre  est-ce  en  se  rendant  en 
Espagne,  où  il  nous  dit  lui-même  avoir  prêché  sur  celle  question,  que  Moïse  de 
Coucy  a  l'ait  connaître  aux  rabbins  du  Midi  de  la  France  la  jurisprudence  adoptée 
dans  le  Nord. 

>  Voir  Guittin,  76  i. 

'  Ce  mémoire  additionnel  occupe  les  f<"  m  b-lîl  a  de  notre  ms. 

*  t  Cannelle  >,  robinet,  généralement  ea  bois,  qu'où  met  aux  tonneaux  ou  aux 
Cuves  pour  tirer  les  liquides. 


UN  RECUEIL  DE  CONSULTATIONS  DE  RABBINS  2'.1 

ta-'N^i3n  "^-nD  i^*^  r-iNb»  'bNTop  û\N'::nD  D-iia  "«sd  m  dn-::  ^■'^3173 

'iDi  v^^^  3inp'>î:  bi^"''»^    'd'^wS   y:^    b^    û-«pi3pm   r-i3n::T  ^o3  *) 
X'^^^y  î^riN  npD  -^^N  nn:>i  ,3"r   nin  v^^^  v^^^^^   i^"*'^  ^-'"^  "^^""^ 
nby?3b  -^n-iTiN^a   1533  n^nuj3  '"«dn  "«"la  rsw  "i-^rnb  r-^N3  nn^;25  ï-Tî<n". 
rrr  ^y^  "»d   "^^b^  ^nn?:^   p  by   ...r-rin   172T3  v-^-'^    T^'^^    "czyûn 
ï-TT  û:'^?:   nn-T-^  dnt  ^n")^-»  bsb  'C'p^n^  no    br:;^?:  -niri  C]:3    py 
...nbD  !-rb::3  nn^pîo    nbn^no  n-iti-s   rr^n'ija  tt^it'  p  n?:^  nNsrra 
^pjn  p  f-iTH  D3>an  n-^îrib  ©p3N  nm«  -^iTTî^  nN?3  "nb^o  nsm 
n?2bb    '^"«'T'  nsn   ï-it3    t*^i:v37ai    ï-itto   ûs-i    nin    nn^sb  21::   «b   ■'D 
r-ram.'^T^   b:'   nmn  bbtirn   t»<b"::  '^tid  ■'^:Nb  m-nnbn  ^-^T^wbrib 
p  ^3»    ""D    "^nbirrT    "Uidî   r-iK    "^snt  *|ino    tz5^?:i-i723'i   *^ny  D'^^uîs 
■^san   mn  i"'b'^?3   ^n^b-n    -^d   ^-i?3N  ^sb  n^v   ■•na-i    ^n-in-im  ■^nbNirr 
ibr)  nbr  nsm  -nn«   5153  -mn  Ti&^-ia  ■'snînN  nbns  rra^m  '^3np"^i:rî 
minn  pi  riDiDsn  ^-nn  p  no  n^ar::  d-ibs^û  û-iboi  d"':^-!  i^bD  û^2t:î72p 
"•irnn    nn^     r^im    ^iT^bnn    poy?:     ^o    qwS    ^i73b:;i    53     :-TDn73Nm 
by  m-.nyD    tntt^rî  ■'-m    mm    D\sb    rr^n"'    ï^':j73rr    "^d    n-i^'arnb 
r-iN  ûvpb  "^D   q.x  n-i73C?3b  mn72'::?3n  "n:b    mri    mnujyb  "]m:    p 
r-iN  mxn::  ■»"■«  pn*"  "^bn^x   rn-n:m   ^^^orr  û"'7:Dnr;  r-n:pn   qpin    ^d 
niNsn  m-i-'D2:b-i   -«ni:    r-iTJj'b  i?3''    nr'^jb  n^n^i    n-iNO^rt  rT^-iwS':jrT 
n"i::n  r-iiprb  ■in?2N3  n30-'-TT«   rDsb  irmnM  i^bnnn    "nox    ûTibxm 
T'Dm7a  nDnn  ^^'^^^3'■l    i\mpm  i-icûdot^  vmi:?3  m73'::bT  "i^r^^n  nuj-rn 

"lisipa  2mr)rT  T^3î-îî<2  pNDn  nsbi  ^in^D  mb'û  ^b  n^jx  b^n  toibuî 

."•yb^t  b^NO  '-13   ITT  nb 


*  «  Semai,  semau,  assemal,  benne  servant  au  transport  de  la  vendange  en  Lan- 
guedoc »  {Dictionnaire  de  Mistral).  Dans  du  Gange  on  trouva  semalis,  semalum^ 
«  vasis  genus  •  avec  des  exemples  du  Midi. 


T.  XXXIX,  H»  78.  IG 


L'INVENTAIRE  DU  MOBILIER 

ET  DE  LA  BIBLIOTHÈQUE 

D'UN  MÉDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE 

AU  XIV^  SIÈCLE 


Le  document  que  nous  publions  plus  loin  nous  a  été  remis  par 
M.  Estanislas  Aguilo,  archiviste  de  Majorque,  qui  Ta  copié  du 
registre  d'un  notaire  de  cette  ville.  C'est  l'inventaire,  après 
décès,  des  biens  mobiliers  de  la  femme  d'un  médecin  juif  de  Ma- 
jorque, nommé  Léon  (en  hébreu  Juda)  Masconi.  La  femme,  Muna, 
était  morte  laissant  pour  héritier  le  fils  qu'elle  avait  eu  de  son 
premier  mariage  avec  Davin  (David)  Xulelli.  En  l'absence  de 
ce  fils,  Maymon  Xulelli,  la  bru,  Gracettia,  intervint  pour  faire 
dresser  un  état  des  meubles  trouvés  après  le  décès  de  sa  belle- 
mère.  Signèrent  comme  témoins  :  Moxin  (Moïse  ?)  Bonanin,  Ayhon- 
nagar,  Joseph  ben  Maimon  Alatzar  (Eléazar),  Abrafira  (Abraham) 
ben  Maimon  Alatzar  et  Issachu  (Isaac)  ben  Gabis. 

Cet  inventaire  se  divise  en  deux  parties;  la  première  formée 
par  les  meubles,  ustensiles  de  ménage,  instruments  de  médecine, 
vêtements  etc.,  la  seconde  par  la  bibliothèque  de  Léon  Masconi. 
Ce  document  est  intéressant  à  plus  d'un  titre.  Par  la  première 
partie,  nous  pouvons  pénétrer  dans  l'intérieur  d'un  Juif  aisé;  par 
la  seconde,  il  nous  est  permis  de  constater  les  livres  dont  se 
servait  un  médecin  juif  instruit. 

Pour  le  tableau  n°  1,  nous  avons  demandé  à  M.  Ilildenfinger, 
ancien  élève  de  l'Ecole  des  Chartes,  d'identifier  les  différents 
objets  qui  s'y  trouvent  catalogués.  C'est  son  travail  que  nous 
publions  ici.  Les  chiff'res  mis  entre  parenthèses  renvoient  aux 
lignes  du  document  A. 


LNVKNTAIKE  DU  MOBILIEU  D'UN  MÉDECIN  JUli'  DE  MAJORQUE       2/i3 


I. 


Voici  d'abord  deux  lits  complets  (1),  avec  leurd  matelas  ''2), 
leurs  traversins  (3),  une  courte-pointe  de  bouracau  bordée  (13), 
trois  courtines  (9-11),  dont  une  ornée  d'un  dessin  en  damier  et 
brodée  de  fils  de  laiton  (10),  et  cinq  couvertures  (4,5,  12,  64,  129), 
dont  une  d'étamine  à  raies  rouges,  et  une  autre  jaune  et  rouge, 
doublée  de  vert.  La  literie  comporte  encore  deux  sacs  de  couchage 
que  l'on  devait  bourrer  de  paille  ou  de  feuilles  (14).  A  côté,  deux 
tables,  une  longue  (39)  et  une  ronde  (40),  et  cinq  armoires  ou 
coffres  (32,  33,  105,  109,  139),  couverts  de  cuirs  ou  d'étoffes  » 
(15,  38).  Ces  huches  servent  aussi  de  sièges  -.  Mais  le  mobilier 
compte,  en  outre,  trois  bancs  (34,  60),  et  ces  sièges  peuvent  être 
rendus  moins  durs  par  des  coussins  (63),  dont  quelques-uns,  ou- 
vrés de  soie  (104),  ou  ornés  de  nœuds  de  rubans  (68),  ne  sont  pas 
sans  élégance.  Des  tapis  (8),  des  candélabres  ou  des  lampes  (28,36), 
un  cadran  (135),  un  écritoire  (44),  des  œufs  d'oiseau,  d'autruche, 
décorés  (25,  26),  contribuent  encore  à  l'ornement  de  la  salle. 

La  batterie  de  cuisine  comprend  trois  bassines  (21,108),  dont 
une  de  cuivre  étamé  ;  deux  petits  chaudrons  (27),  une  terrine 
verte  (46),  une  casserole  à  couvercle  (76),  une  poêle  (56),  sept 
pots  (53-57),  et  trois  broches  (52).  La  ménagère  a  à  sa  disposition 
de  nombreux  récipients  :  un  pot  où  elle  met  sa  farine  (45),  une 
cruche  de  cuir  à  col  de  laiton  (134),  une  aiguière  de  terre  blanche 
(41),  deux  amphores  et  un  llacon  de  verre  (140),  une  bouteille  (132), 
un  barrillet  de  cuir  (79),  et  six  tonnelets  (43).  Ajoutons-y  un  en- 
tonnoir de  laiton  (77).  Deux  mortiers  de  pierre  (55),  et  de  cuivre  (19), 
peuvent  servir  soit  à  des  usages  domestiques,  soit  à  des  usages 
médicaux.  Le  couvert  comporte  neuf  plats  de  terre  (37),  des  gobe- 
lets de  fer  (51),  une  tasse  (138),  une  cuiller  ou  plutôt  une  écu- 
moire  (86),  un  couteau  de  table  et  deux  tranchoirs  de  bois  (54). 
Enfin,  deux  tamis  (50),  et  une  corbeille  (83?)  de  jonc,  différentes 
mesures  de  laiton  (22?  23),  deux  cadenas  (29),  des  sacs  (58),  des 
planches  (59),  complètent  ce  matériel. 

La  garde-robe  est  bien  garnie  :  on  y  trouve  jusqu'à  quatre  tu- 
niques d'homme  ou  de  femme(69,  70,  71, 118),  et  cinq  de  ces  larges 
vêtements  appelés  à  Majorque  gramasia  ou  gramalla  (71,  103), 
et  tovallola  (94-99).  A  côté,  un  surplis  d'étamine  (100),  et  un  bur- 

*  Voy.  aussi  73,  pièce  de  cuir  ronde  munie  d'anneaur. 
'  C'est  le  sens  littéral  de  arquibanchum  (33),  arche-banc. 


244  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

nous  blanc  (110?),  deux  cottes  de  laine,  dont  une  doublée  de  jaune 
{72,  91),  deux  jupes  (107,  127),  une  cotte-hardie  de  dame,  de  cou- 
leur sombre  (125),  un  farset,  sorte  de  pourpoint  ouaté  que  l'on 
portait  sous  la  cuirasse  (96).  Le  costume  peut  être  complété  par 
une  capuche  (71),  des  bonnets  de  laine  noirs  et  blancs  (75),  des 
souliers  jaunes  à  la  mode  arabe  (136),  et  différents  menus  objets 
de  cuir,  tels  que  ceinture  avec  ou  sans  boucle  (88,  101),  sacs 
rouges  (20),  bourses  longues  à  deux  anneaux  (82). 

Gomme  linge,  à  la  mort  de  Muna,  il  reste  dans  les  armoires  trois 
chemises  de  femme  (67,  92),  deux  serviettes,  dont  une  à  franges 
(106,  131),  et  deux  nappes  (93). 

On  peut  encore  mentionner  les  armes  :  écu  (49),  lance  (48),  fer 
de  lance  (24?)  un  carnier  (47),  et  des  rênes  (81),  —  et  des  objets 
précieux  d'or  (111),  et  d'argent  (112,  113),  auxquels  on  joindra  des 
écheveaux  de  filet  de  soie  teints,  dont  le  poids  est  scrupuleusement 
noté  (114-117). 

Il  faut  ajouter  à  cette  énumération  différents  objets,  tapis,  bi- 
joux, livres  (128),  vêtements  (35),  qui  avaient  été  soit  donnés  en 
gage  à  Masconi  ou  à  sa  femme  (35),  soit  inversement  remis  par 
Masconi  ou  sa  femme  à  des  débiteurs  (128,  130)  *. 

Deux  catégories  d'objets  sont  particulièrement  intéressantes  à 
signaler  dans  cet  inventaire  :  ceux  qui  indiquent  que  l'on  se  trouve 
dans  un  intérieur  Israélite,  —  le  sceau  de  laiton  qui  sert  à  mar- 
quer les  azymes  de  Paque  (78),  et  les  tafellim  où  l'on  peut  recon- 
naître les  tephUin  (137),  —  et,  d'autre  part,  ceux  qui  devaient  être 
plus  particulièrement  utiles  au  médecin  et  au  savant:  les  forces 
(31),  les  instruments  de  fer  et  les  flacons  de  laiton  (84),  les  tubes  à 
eau  chaude  (85?),  l'astrolabe  (126)  et  les  trébuchets  (80?),  le  réci- 
pient à  onguent  (30),  les  poudres  médicinales  (87),  et  enfin  la 
grande  collection  de  pierres  aux  couleurs  variées  que  renferment 
plusieurs  vases  ou  sacs  de  cuir  et  d'étoffe  (120-124). 

Par  inadvertance,  dans  le  premier  tableau  s'est  glissée  la  men- 
tion de  deux  manuscrits  ;  l'un  est  le  fameux  Yosiphon  ;  le  nom  de 
l'autre  doit  être  mal  orthographié.  Ce  n'est  vraisemblablement  pas 
un  traité  d'Avicenne,  comme  on  pourrait  le  croire  au  premier 
abord,  car  nous  verrons  par  la  suite  que  le  nom  du  philosophe 
arabe  s'écrit  autrement  dans  ce  document. 


>  L'inventaire  comprend  de  plus  sous  les  n»' 90,  9?),  112,  120,  130,  133  un  certain 
nombre  d'objels  que  nous  n'avons  pu  identifier. 


INVENTAIHE  DU  MOBILIER  D'UN  MÉDECLN  JUIF  DE  MAJOHQUE       "HCÔ 


IL 


Le  second  chapitre  de  l'inventaire  se  lit,  en  général,  avec  faci- 
lité, malgré  les  erreurs  nombreuses  commises  par  le  scribe.  Nous 
avons  pu  identifier  à  première  vue  les  ouvrages  suivants  : 

6.  MaraJiot  atseten  —  Inuîn  mî<n?3  u  Les  couleurs  de  l'urine  ». 

Il  existe  plusieurs  traités  de  ce  nom. 

7.  Dicfiduch  —  pnip^,  Grammaire,  terme  générique,  ou  titre  de 

l'ouvrage  de  Moïse  Kimhi. 
9.   Abe7iroet   (à  lire  Abenrosi)  r=  ^u5n  inî^  «  Averroes  »,  sans 
doute  le  commentaire  de  ce  philosophe  sur  Aristote. 

11 .  Aamet  ben  abrakim  =z  Amet  ben  Ibrahim  [ibn  al-DJezzar]. 

12.  Beuraiiora  =  n'Tinn  m^n  «  Commentaire  du  Pentateuque  ». 

14.  Beur  abii  nasser  =  -iLrsnnwS  'iii^n  «  Commentaire  [sur  Aristote] 

d'Abou  Nazar[Al  Farabi]  ». 

15.  Marahot  eloym  =,  ûTîbwX  ^\^^^n,  Explication  des  visions  pro- 

phétiques, par  Hanoch,  fils  de  Salomon  el  Konstantini. 

16.  Aayjuncla  ~  PPM^  ^n.  Roman  philosophique  d'Abou  Bekr 

Mohammed  ibn  Totaïl,  trad.  par  Moïse  de  Narbonne. 

17.  Boaran  leben  iamUus  =  DVTobijnb. . .,  «  . .  .de  Ptoléoaée  ». 

18.  Retuguot  {k  Vive  Reiiiquot)  =  [qoD]  mpnn-i,  traité  de  gram- 

maire de  Joseph  Cas[)i. 

19.  Butsol  quesep  —  tjDD  nirinp,  Nomenclature  des  ouvrages  de 

Joseph  Caspi  faite  par  lui-même. 
21.  Mispar  =  'hddtd,  Traité  d'arithmétique,  probablement  d'A- 
braham ibn  Ezra. 

23.  G^^r^m(?5=  Jérémie. 

24.  Alatsenderos  =  DinnsoiDbwS,  Commentaire  d'Alexandre  d'A- 

phrodisias  sur  Aristote,  ou  Roman  d'Alexandre. 

25.  Arbaneueym  —.  û\s"'33  vdt^^  «  Les  quatre  prophètes  »  (?) 

28.  Arguzer  lebenrost  =  Y'on  pi<b  î<Ti:i-ii^  «  Ardjouza  »,  traité  de 

médecine  en  vers  d'Averroes,  ou  plutôt  commentaire  de  cet 
auteur  sur  l'Ardjouza,  traduit  par  Moïse  ibn  Tibbon. 

29.  Perus  joonatan  =  "inDT» '^ann-^D  «  Commentaire  de  Jonathan  ». 

30.  Gaiiia  qiiosef  —  t]DD  y^i^.  Explication  de  certains  mystères 

du  Pentateuque,  par  Joseph  Caspi. 

32.  Perus  albunasser  —  ni:3  "iai<  dtt'd  «  Commentaire  d'Abou 
Nasar  [al  Farabi]  ». 

34.  Agorat  qnesef  vaabiei  quesef=  t]DD  "^sxxi  t]DD  n"Ti:.n,  Com- 
mentaire sur  Ezra  et  les    Chroniques,  et  Explication  des 


246  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mystères  des  livres  des  Prophètes  et  des  Hagiographes,  par 
Joseph  Caspi. 

35.  E  endeel  (à  lire  eiideel)  den  atiora  vaaiichma  =  Y^  binnïi 
n^oiDrim  rtninn,  Traité  sur  l'accord  de  la  religion  avec  la 
philosophie,  par  Averroes. 

37.  Aasiet  aasliirlau  =  nb^^'û':£,i^'n  n^^y  a  La  confection  de  l'as- 
trolabe »,  peut-être  d'Aboul  Kasim  ibn  Alsafar  traduit  par 
Jacob  b.  Makhir. 

39.  Asente  =  inarr  «  Traité  de  l'urine  )5,  par  Isaac  Israéli. 

42.  Nîttua  =  mn3  «  Traité  de  dissection  »  (?). 

43.  Elmenahac  —  Almanach,  peut-être  celui  de  Jacob  b.  Makhir. 
45.  Messiaa  vetesboret  =  nmnram  nn^uj»,  Traité  de  géométrie 

d'Abraham  b.  Hiyya. 

48.  Âsamaayim  vaaolam  =  ûbi^m   û'^Ts^ïi.    Probablement  le 

commentaire  d'Averroes  sur  le  traité  du  ciel  d'Aristote, 
traduit  par  Salomon  ibn  Ayoub,  ou  le  traité  du  ciel  et  du 
monde,  traduit  par  Zacharia  b.  Isaac  et  aussi  par  Galo- 
nymos  b.  Calonymos. 

49.  LaqiiOtot  —  niaipb. 

51.  Omse  tora  =  n^in  '^'^^mn  [n^ïî^n]  «  Pentateuque  ». 

52.  Pirque  rabi  elielzer  =z  iT3>'^bN  'n  '^p'iD,  le  Midrasch  bien  connu. 

53.  Adenegueref  [k  lire  Adenequesef)  ben  neiieym  =  cjod  "^stî^ 

l:"'5^'^n5n  de  Joseph  Caspi  ;  voir  n°  34. 

54.  Terguz  —  ûinnn  (?). 

55.  Be7i  sina  =  nd^^d  pN,  Avicenne. 

56.  jSatzir  vbenachmela  —  ^b^^rr  pi  n'^TSïi  «  Le  prince  et  le  der- 

viche »,  traduction  hébraïque  du  roman  de  Barlaam  et 
Joasaph,  par  Abraham  b.  Hasdaï. 

59.  Tamealloot  =  mb^'îsrj  (?),  Traité  théologique  de  Schem  Tob 

Falaquéra  (?). 

60.  Hit  cabu   aynmahim  =  û-^tîî-;  nip"»  ["i53Nt)],   de  Samuel  ibn 

Tibbon. 

61.  Otoiasamaym  =  d"^»U5ïi  mm^,  Traité  des  météores  d'Aris- 

tote, trad.  par  Samuel  ibn  Tibbon. 

62.  Itgiierret  baaleaym  =.  û'^-'n  "^b^^a  rrm,  «  Chapitre  sur  les  ani- 

maux »,  extrait  de  l'Encyclopédie  Les  frères  de  la  'pureté, 
trad.  de  l'arabe  par  Calonymos  b.  Calonymos. 

64.  Yilin  —  "i-^bin,  Traité  du  Talmud. 

65.  Perech  Elech  =  pbn  p"iD,  Chapitre  du  traité  talmudique  Sati- 

hédrin. 

67.  Seferaamunot  =   ni3"i52Nn  ^dd.   Livre    des    croyances    de 

Saadia. 

68.  Baleaym=:  d"'"'n  '^byn  Si  ce  n'est  pas  un  double  du  n*>  62,  c'est 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  DM'N  MEDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE        247 

peut-être  le  commentaire  d'Averroes  sur  le  Trait<^  des  Ani- 
maux d'Aristote,  trad.  par  Juda  b.  Jacob,  ou  par  Jacob  b. 
Machir. 

69.  Adenegnesef  —  t]SD  '•3-i&^,  voir  n°«  34  et  53. 

70.  Sefer  abmisnot  (à  lire  peut-être  abmisuot]  =  mxTsn  noo  (?). 

Livre  des  préceptes  de  Moïse  Maïmonide  ou  de  Moïse  de 
Goucy.  Le   mot  nDO  n'irait  pas  avec  m2;a»r:,   pluriel  de 
Mischna. 
1\.  Maguilla  =  nb:\^,  Traité  du  Taimud.  Pour  le  rouleau  d'Es- 
ther,  voir  plus  loin. 

72.  Sazut  mos  nahim  =  û'«3Ti<7D  mns:,  Deux  petits  traités  gram- 

maticaux d'Abraham  ibn  Ezra. 

73 .  Tergii  =.  tl^y^T\. 

74.  Peruix  azarot  =  miïiTM  ^di^t^d,  Commentaire  du  poème  de 

Salomon  ibn  Gabirol,  par  Isaac  b.  Todros. 

75.  Surat aares  =  yn^n  mi^  «  La  forme  de  la  terre  »,  par  Abra- 

ham b.  Hiyya. 

77.  Alaritzi  =  "^v^nha^,  Makames  d'Al  Harizi. 

78.  Melmat  =  ^12^12.  Probablement  le  tD^TTDbnti  n^b72  de  Jacob 

Anatoli. 

82.  Nessin  =  û'^uja  (?).  Est-ce  l'ordre  Naschim  de  la  Mischna? 

83.  Seliot  =  mtT^bD,  Poésies  synagogales. 

84.  Periis  coelet  =  nbnp  ujyi^d  «  Commentaire  de  l'Ecclésiaste  ». 

85.  Periis  mixle  =  "ibu:^  ujtt'd  «  Commentaire  des  Proverbes  ». 

86.  Asnequesef  =r  t]Dri  •^i'ri^.  Encore  l'ouvrage  de  Joseph  Caspi 

(voir  n««  34,  53  et  69). 

87.  Hiihiic  mataesbon^  innianii  n92Dn  «  Science  du  calcul  ». 

88.  Elmensori  =  Almançouri  de  Rhazes. 

91.  Tergum  neueym  —  d'^i^'^nD  tr\y^r\.  Traduction  araméenne  des 

Prophètes.  Les  précédents  sont  vraisemblablement  ceux  du 
Pentateuque  (voir  n°»  54  et  73). 

92.  Maquillara  (à  lire  Magiàllam)  =  nb^To  «  Rouleau  »  d'Esther. 

93.  Jasqiiel  treaasar  =  -lUJ:^^  ■•"in  bt^pTrr^   «  Ezéchiel  et  les  douze 

petits  Prophètes  ». 

94.  Medraix  Atzita  =■  rr^Tn  u:'Ti?3,  Midrasch  du  Cantique  des  Can- 

tiques. 

95.  Ta f sir  xera  /ora  —  ïTTin  mo  n-iODri  (?)  Traduction  et  commen- 

taire de  Saadia  sur  le  Pentateuque,  en  arabe.  Conjecture 
très  aventureuse. 

96.  Perus  Rabi  Salamo  =  n72b;i5  'n  ^i'T'D  «  Commentaire  de  Ras- 

chi  ». 

98.  Seferasamim  =  û->53D!i  'o  «  Traité  des  ingrédients  ». 

99.  Mitlal  =z  bb5?3  d'Averroes. 


248  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

100.  Se  fer  ammidot  =  nm^n  nsD,  Ethique  d'Aristote,  ou  com- 

mentaire d'Averroes  sur  cet  ouvrage. 

101 .  Sedermoei  ^  ^yM2  "Tto  «  Ordre  des  fêtes  »  de  la  Mischna. 

102.  J\/ûz?<2r,  voir  n<»21. 

103.  Mosue  (lire  mosne)  ay  junira  =z  w^^^yti  "'Stî^^  «  Les  balances 

des  spéculations  )>,  traduit  en  hébreu  par  Jacob  b.  Makhir 
ibn  Tibbon,  alias  Don  Prophiat. 

104.  Magnifiât  setarbn  =  û'^nno  nbs?2,  Traité  d'astronomie  ano- 

nyme, ou  peut-être  explication  du  commentaire  d'Ibn  Ezra 
par  Samuel  Motot. 

105.  Sefernmsarim  =dnD?3'o  «  Livre  de  morale  ». 

106.  Mosnesedech  =  p^x  ''3tn?2  «  Les  balances  de  la  vérité  »  de 

Gazzali,  trad.  par  Abraham  b.  Samuel  ibn  Hasdaï. 

108.  Perus  ahenrost  —  "W^  \'2^  x^ym  «  Commentaire  d'Aver- 

roes » . 

109.  Cozar  =  •^'-i';^::,  Théologie  de  Juda  Halévi. 

110.  Elynegisci  =  Almageste.  Probablement  le  sommaire  d'A- 

verroes, trad.  par  Jacob  Anatoli. 
m.  Hicgayen  lebenrost  =  ^;a"i  p^b  iv^r;,   Commentaire  d'A- 
verroes sur  la  logique  d'Aristote,  trad.  par  Jacob  b.  Abba 
Mari. 

115.  Ruaen  =  in  m^i,  Introduction  au  Guide  des  Egarés  de  Maï- 

monide  attribué  à  Jacob  Anatoli. 

116.  Parasio^  —  nr^zjnD. 

in.  Petiai  annuis  nayot  =  dtsu:?:?:  nn^iD  a  Introduction  à  la 
Mischna  «  (?). 

118.  Jaimatiu  =  s-^ns  n'^N\ 

119.  Josua,  Livre  de  Josué. 

120.  Dichduch  e  RabMjazuda  —  irv\iv  'n  "^pi'ip^,  Titre  général  des 

ouvrages  grammaticaux  de  Juda  Hayyoudj  (?) 

122.  Mispatiyn  =  û'^aDïî». 

123.  Olaucaian  =  pp  nb'V  «f  Microcosme  v  de  Joseph  ibn  Çaddik, 

trad.  en  hébreu. 

124.  Perus  Sirasiri  ~  û">n"»©rj  n'^uî  \di*t^d  «  Commentaire  du  Can- 

tique des  Cantiques  ». 

125.  Perus  Jzop  —  m\s  ^rr^D  «  Commentaire  de  Job  ». 

126.  AtzaraiihU  Alzahravi.  Sur  les  saignées,  ou  les  manipula- 

tions. . .  ? 

130.  Arhiza  lebensina  =^  «rs  ps^b  «nn^,  Traité  de  médecine  en 

vers  d'Avicenne. 

131.  AyhenJHChdan,  double  du  n*^  16. 

132.  Se  fer  ammisnot,  double  du  n°  70. 

133.  Hicdiisi  =  û-^wiTn  (?),  Novelles  talmudiques  (?), 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  D'UN  MÉDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE       2VJ 

134.  Sone  annassim  =  û'^uîsn  nsitd  «  L'ennemi  des  femmes  »  de 

Juda  b.  Schabbetaï  Lévi  de  Barcelone. 

135.  Dinin  =  û"'r'7  «  Décisions  rituelles  ». 

144.  Moceannebu  quim  r-i^  û'^Dixn  H'y^fD,  Traduction  du  Guide  des 

Egarés  de  Maïmonide. 

145.  Dest  ahpilosofim  =  û-^DioibEn  r\'\y^  «  Les  opinions  des  Philo- 

sophes  »,  encyclopédie  extraite  des  ouvrages  d'Averroes 
par  Samuel  ibn  Tibbon. 

146.  Seferabperaqidm  =  )2'^p^z>r^  'o  «  Les  traités  d  d'Hippocrate, 

ou  les  Huit  chapitres  de  Maïmonide  {'!) 

147.  Tafillot,  rituel  de  prières. 

Nos  identifications  sont  le  fruit  d'un  examen  rapide;  elles  se- 
ront complétées  et  rectifiées  dans  le  prochain  numéro  par  M.  Stein- 
schneider,  Téminent  bibliographe,  qui  a  bien  voulu,  sur  notre 
prière,  se  charger  de  cette  tâche  \ 

On  remarquera,  dans  notre  inventaire,  le  grand  nombre  d'ou- 
vrages de  Joseph  Caspi.  On  s'étonnera  moins  de  cette  particularité 
quand  on  se  rappellera  que  ce  savant,  qui  avait  l'humeur  voya- 
geuse, séjourna  pendant  six  mois  à  Majorque.  Il  y  fut  sans  doute 
en  relations  avec  Léon  Masconi. 

On  remarquera  également  la  longue  liste  d'ouvrages  d'Averroes 
qui  garnissaient  la  bibliothèque  de  ce  médecin.  C'est  un  témoi- 
gnage de  plus  de  la  faveur  que  l'Averroïsme  avait  rencontrée  chez 
les  Juifs  méridionaux  au  xiv^  siècle. 

Israël  Lévl 


APPENDICE 


Die  martis  sexta  mensis  noverabris  aonoa  nativitate 
Domini  millésime  000**  l^''  quinto. 

Noverint  universi  quod  cum  Muua,  uxor  Magistri  Leonis  Masconi 
alias  Jahuda  Masconi  cognominati,  judei.fisici  Majoricarum,pronuac 
et  diu  est  a  terra  Majoricarum   absentis,  que  in  ejus  ultimo  lesta- 

*  M.  Steinschneider  nous  prie  d'appeler  l'attention  des  lecteurs  sur  les  n»*  1,  3,  4, 
b,  13,  20,  22,  26,  44,  57,  107  et  121,  doul  le  déchiffrement  est  très  dilùcile. 


250  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

mento  heredem  suum  sibi  instituit  universalem  Maymonum  Xulelli, 
filium  comunem  sibi  el  Davino  Xalelli  primo  viro  suo  quondam, 
die  presenti  viam  universe  carnis  faerit  iugressa,  et  spatio  orule 
unius  nondum  lapso  solile  sépulture  more  judayco  fuerit  tradita  ;  et 
in  Majoricis  nuUa  persoua  sil  seu  reperiatur  de  consanguiuitate  vel 
affiûitate  dicti  Magistri  que  de  bonis  ipsius  valeat  ordinare  nec  ipsa 
manutenere  seu  deffendere,  ob  quod  de  facili  ipsa  bona  possenl 
deperdi  vel  alias  occultari,  maxime  cum  ipsa  bona  tantum  stent  in 
bonis  mobilibus,  puta  libris  et  utensilibus  domus  ;  propterea  ego 
Gracieta,  uxor  dicti  Maymoni  Xulelli,  pro  nunc  etiam  a  terra  Majori- 
carum  absenlis,  qui  bona  predicta  hereditario  nomine  dicte  Mune 
matris  sue,  habet  obligata  pro  magnis  pecunie  quanlitatibus,  voleus 
providere  ut  bona  predicta  salva  fiant  dicto  Magistro  et  suis,  taliier 
quod  ex  ipsis  bonis  dictus  Maymonelus  maritus  meus  possit  jus  sibi 
et  super  ipsis  bonis  pertinens  consequi  et  habere,  bona  ipsa  sub  mea 
custodia  retinendo,  de  bonis  ipsis  propter  doli  maculam  evitandam 
omnemque  fraudis  suspilionem  tollendam,  et  ut  bona  ipsa  periciitari 
seu  modo  aliquo  deperdi  non  possint  per  excursum  temporis,  obli- 
vionem  vel  alias  qualitercumque,  prout  ipsa  bona  per  me  inventa 
fuerunt  in  quodam  hospitio  Samuelis  de  Malicha  judei  intus  callum 
judaycum  Majoricarum  scituato,  in  quo  dicta  Muna  dum  in  humanis 
agebat  ex  conducto  morabatur,  et  alibi,  presens  inventarium  seu 
repertorium  facere  procuravi  prout  sequitur,  signo  laudabili  sancle 
cru  *  cis  presedente  : 

—  A  — 

1  Primo  enim  confiteor  invenisse  in  dictis  bonis  duos  lectos  enca- 

xiatos 
Item  duo  matalafîa  modica 
Item  duo  traverseria  plumbe 
Item  duo  cooperloria  rupta 
5  Item  unum  coopertorium  lividum  de  })urdo 
Item  unam  confessam  sive  catifiam  novam 
Item  aliam  caiifiam  modici  valoris 
Item  duos  tapits,  alterum  novum  et  alterum  vêtus 
Item  unam  cortinam  aliter  vocatam  quella  panni  de  lino 
10  Item  unam    cortinam    duarum    telarum   scacalam   garnitam  de 

auripello 
Item  aliam  cortinam  modicam  modice  valoris 
Item  unam  flassiatam,  aliter  vocalum  alquisseni,  staminis,  cum 

barris  virmiliis  in  quolibet  capite 
Item  unum  barraganum  listatum  vêtus  et  ruptum 
Item  duas  marficas  canamassii  vacuas 
45  Item  unum  trocietum   barragani    listatum,  modicum,  oldanum, 

abtum  ad  cooperiendum  tecbam 
Item  unum  storium  album  primum  de  Alacanto 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  D'UN  MEDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE        251 

Item  quatuor  linleamina  raodica  panni  de  stupa  et  de  brimo 
Item  quasdam  oras  vitreas  encaxialas 
Item  uaum  morterium  cum  sua  manu  de  cupro 
20  Item  duos  sachos  corii  virrailii 

Item  duas  bassinetas  modicas  de  lautono 
Item  unam  conquetam  de  lautono  raodicara 
Item  quinque  setres  de  lautono 
Item  uuum  vomerollum  modicum  de  lautono 
25  Item  tria  ova  de  strurcio  cum  earum  garnimentis 
Item  duo  ova  anatarum  cum  earum  garnimentis 
Item  duos  calderonos  modicos 
Item  unum  candelabrum  modicum  de  lautono 
Item  duo  cadenala  ferri  cum  earum  clavjbus 
30  Item  unam  capsietam  modicam  de  lautono  tenendi  unguentum 
Item  duas  forfices  modici  valoris 
Item  unum  armarium  plice 
Item  unum  arquibanchum  trium  caxiarum 
Item  duo  banchalia  longa 
35  Item  unum  epitogium  panni  lane  de  burello,  forratum  panni  albi, 
et  unam  tunicam  lividam  hominis,  que  stant  in  pignore  pro. . . 
Item  duas  lampades  vitreas  albas 
Item  novem  perapsides  terre  de  Malicha 
Item  unum  corium  vêtus  cooperiendi  caxiam 
Item  unam  mensam  longam 
40  Item  unam  mesiam  votundam 

Item  quandam  alfabiam  terre  aygaderiam  albam 
Item  unum  storium  pilosum  depictum 
Item  sex  carratellos 
Item  unum  scriptorium  fustis 
45  Item  unam  alfabiam  terre  farineriam  vacuam 
Item  unum  librellum  viridum  modicum 
Item  unum  carnerium  corii 
Item  unam  lanceam 
Item  unum  scutum 
50  Item  duos  garbellos  sparti 
Item  quasdam  craticulas  ferri 
Item  très  asts  de  ferro 
Item  sex  ollas  terre  novas 
Item  duo  cissoria  fustis 
55  Item  unum  morterium  lapidis 
Item  unam  sartaginem  modicam 
Item  unam  ollam  terre  magnam 
Item  duos  sachos  canamacii  modicos 
Item  très  postes 
60  Item  uuum  scannum  modicum 
Item  duo  coopertoria  rupta 
Item  unum  almutum  fustis 


2b2  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Item  quatuor  coxiaos  lini  repletos  de  melxino 

Item  unum  coopertorium  sindonis  crocei  et  virmilii  coloris  barra- 
tum,  forratum  forratura  coloris  viride 
Go  Item  unum...  barraganum 

Item  uDum  liûleameu  abrigandi 

Item  unam  camisiam  domine 

Item  unum  pulvlnar  sive  coxinum   operatum  de  sirico  virmilio 
cum  flochs 

Item  unam  tunicam  hominis  panni  morati 
70  Item  unam  tunicam  domine  moraiam 

Item  gramasiam,  tunicam  et  capucium,  panni  de  borrogonato 

Item  unam  cotam  hominis  panni  lane  viridi  coloris  cum  forratura 
sindonis  crocei  coloris 

Item  unum  corium  rotundum  virmilium  cum  anulis  circumcirca 

Item  unam  troceum  corii  albi  de  servo 
75  Item  quasdam  bonetas  laneas  albas  et  nigras 

Item  unam  cassoUam  magnam  de  lautono  cum  ejus  coopertorio 

Item  unum  ambutum  de  lautono 

Item  unum  sigillum  de  lautono,  abtum  ad  signandum  panes  festi 
pasche 

Item  unum  barrallum  de  corio 
80  Item  unam  capsiam  miganatam  cum  duabus  balansietis  modicis 

Item  duas  régnas  corii 

Item  unum  marsupium  sive  bursa  corii  longa  cum  duobus  anulis 

Item  unum  servitorium  sparli  depiclum 

Item  unam  bursam  de  corio  scacalam  cum  aliquibus  ferramentis 
et  aliis  frasquis  de  lautono  olficii  de  sirorgia,  et  cum  uno  règle  de 
lautono 
85  Item  unam  senalliamcum  aliquibus  canonibus  de  lautono  faciendi 
aquam  ardentem 

Item  unam  cuylleriam  de  lautono  perforatam 

Item  unum  sarronum  cum  quodam  saculo  panni  in  quo  sunt 
alique  pulvure  médicinales 

Item  unam  corrigiam  corii 

Item  unum  par  caligarum  domine  panni  virmilii 
90  Item  unam  melafiam  domine  abrigandi 

Item  unam  cotam  panni  lane  coloris  lividi 

Item  duas  camisias  domine 

Iiem  duas  mapas 

Item  quandam  tovaliollam 
95  Item  unum  sospeale  de  noguerio 

Item  unum  farcietum  de  sindone  crocea  et  duo  paria  manicarum 
ejusdem  farcieti 

lîem  unam  captiam  albam 

Item  unam  aliam  captiam  de  sindone  crocei  coloris 

Item  duas  tovalliolas  operatas  de  sirico 
100  Item  unum  superpellic'.um,  vocatum  sisit,  destamenya 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  DX'N  MÉDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE        253 

Item  unam  corrigiam  corii  absque  sivella 
Item  quandam  gramasiam  virmiliam  de  stamenya 
Item  unam  capcietam  depictam  cum  quatuor  compassés 
Item  duo  pulvinaria  operata  de  sirico 
105  Item  unam  caxiam  modicam  cum  suis  pedibus 
Item  uuam  savanam  oldanam 
Item  unam  aljubam  all)am  modici  valoris 
Item  unam  bassinam  de  cupro  slagneatam 
Item  unam  techam  modicam 
110  Item  unum  albarnus  album  destamenya 
Ilem  quandam  camissam  auri  modicam 
Item  duas  zabegias  garniias  argent! 
Item  unam  tabulam  argenteam  parvam  scriptam 
Item  quindecim  gansayas  de  fîladissio  tincto  diversis  coloribus, 
pondérantes  très  libras 
115  Item  quinque  libras  et  decem  oucias  de  sirico  colorato  diversis 
coloribus 
Item  très  gansayas  de  sirico  crudo  torto,  ponderis  sex  unciarum 
Ilem  duodecim   uncias   et  raediam    de    sirico   miganato  fluxio 

colorato  et  crudo 
Item  quandam  tunicam  domine  panni  lane  coloris  lividi  obscuri 
Item  aliara  tunicam  domine  panni  lane  viridam 
120  Item  unam  matracam  corii  virmilii  et  unam  serpeyeriam  cum 
aliquibus    lapidibus   coloris   albi  moradeganls,  ponderantibus 
cum  dictis  matraca  et  serpeylleria  viginli  novem  libras 
Item   unum    sarronum   corii    album  cum   aliquil)us   lapidibus 
quasi  similibus  lapidibus  supradictis,  ponderantibus   viginli 
novem  libras  et  mediam 
Item  quinque  sarronos  corii  modicos  cum  lapidibus  quasi  vir- 

miliis  ponderantibus  viginti  libras  et  sex  uucias 
Item  duos  saculos  panni    lini  cum   aliquibus  lapidibus   quasi 

albis  ponderantibus  triginta  quatuor  libras 
Ilem  unam  senalliam  et  duos  pitalfos  sive  cadafets  corii  cum 
aliquibus  lapidibus  coloris  cineris  quasi  similibus  ad  copinnes, 
ponderantibus  triginta  libras  et  sex  oncias 
125  Item  unam  coiam  ardidam  domine   panni  lane    coloris  lividi 
obscuri 
Item  duos  estorlaus  de  lautono 
Item  unam  aljubam  de  sindone 

Item  unam  quellam  de  sindone,  unam  savanam,  unum  batem 
sive  ligar  domine,  unum  anulum  auri,  unum  librum  papireum 
vocatum  Visenna  et  unum  librum  papireum  vocatum  Jucifon, 
que  omnia  supra  proxime  dicta  tenet  in  pignore  Ayhon  Natgar 
judeus  pro  triginta  tribus  libris  et  undecim  solidis,  sibi  restan- 
tibus  ut  asseritur  ad  solvendum  ex  majori  pecunie  summa 
Item  unam  vanovam 
130  Item  très  carcins  de  sindone,  que  stant  pênes  Septahum  uxorem 


2b4  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

dicti  Ayhon  Natgar,  pro  decem  et  novem  libris  que  sibi  ut 

asseritur  debentur 
Item  unam  savanam  cum  voriis  lividis 
Item  mediam  butam 

Item  unum  stoig  decorio  abtum  ad  tenendum  ferraturas 
Item  unam  e;erriam  corii  enseratam  a  parte  interiori,  cum  buca 

sive  coUo  de  lautono 
135  Item  unum  quadrant  fustis  cum  suo  estoig 
Item  duo  socolares  crocei  coloris  sarracenicas 
Item  unum  tafellim  in  quodam  slogio  virmilio 
Item  unum  mcnile 
Item  unam  tecbam  modicam 
440  Item  duas  amphoras  vitreas  modicas 
Item  unum  barrale  vilrei 
Item  unum  cultellum  taular 
Item  unam  rexacham  fustis 

—  B  — 

Item  unum  armarium  aliter  vocatum  alguetzena  fustis,  intus  quod 
inveni  libros  sequentes  : 

Et  primo  inveni  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis 
vocatum  aimatar 

Item  alium  librum  papireum  vocatum  tacuna  adassa  cum  coo- 
perlis  albis 

Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocantum^e/îz- 
rat  sedech 

Item  unum  librum  papireum  vocatum    maseaarecena  cum  coo- 
perta  virida 
5  Item  unum  librum  papireum  cum  cooperta  alba  vocantum  Biur 
ter  quet  aies 

Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis   albis  vocatum 
Marahot  atseten 

Item  unum  librum  papireum  et  pergameneum  cum  coopertis  vir- 
miliis  vocatus  dichduch 

Item  unum  librum  papireum  vocatum  oja^  amarim  cum  cooper- 
tis albis. 

Ilem    unum   librum    papireum    cum    coopertis    albis    vocatum 
abe7iroet. 
10  Item  unum  librum  papireum  vocatum  zoliha  enahin  cum  coo- 
pertis albis. 

Item  unum  librum  papireum  vocatum  aamet  ben  aàrahim  cum  coo- 
pertis albis 

Item  unum  librum  papireum  vocatum  Beurattora  cum  coopertis 
albis 

^  Ou  Ma. 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  D'UN  MÉDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE         2^o 

Item  uaum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatutn  zeguer 

annef 
Item  uaum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Beu- 

rabunasser 
15  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum  ma- 

rahot  eloym 
Item  unum  librum  papireum  coopertum  coopertis  viridis  vocatum 

aayjuncta. 
Ilem  unum    librum    papireum   cum   coopertis    lividis    vocatum 

Boaran  lehen  tamiius 
Item    unum    librum    papireum   cum    coopertis    albis    vocatum 

retuguot 
Item  unum  librum  unum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vo- 
catum Butsob  quesej) 
20  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Sefer  an  muça 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Mispar  cum  coopertis  vir- 
miliis 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Sefer  aat  air  a  cum  coopertis 

albis 
Item  unum  librum  pergameneum  coopertum  cum  coopertis  virmi- 
liis vocatum  geremies 
Item  unum  librum  papireum  cum   oopertis    albis  vocatum    alat 

senderos 
23  Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

arhanemy7n 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Quilep  alguide 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Qicitep 

elbeege 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  arguzer 

Itben  rosé 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatuQi  ;?grM^ 

joonatan 
30  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

gauia  quosef 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  aena- 

rim  paazemamuim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  wocalnm  per us 

albunasser 
Item  unum  librum  papireum  coopertum  de  albo  vocatum  Exuiaa- 

refe  laaluerat 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  Ago- 

rat  (juesef  vaatiiet  quesef 
35  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis    virmiliis  vocatum 

E  endeel  ben  altora  vaauckma 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  sefer 

âmes  sadin 


256  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Item  unum  librum    papireum    cum   coopertis   viridis  vocatum 

bel  enus 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vccatum  aasiet 

aasturlau 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  asente 

{aseten) 
40  Item  UDum  librum  papireum  volutum  in  uno  coreo  virido  vocatum 

sefer  aagves 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  Quitep 

elbul  be  Issach 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis   vocatum 

NiUna 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Elmenahac  cum  coopertis 

virmiliis 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Asela 

etduye 
45  Item   unum  librum   papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Messiaa  vêtes  boret 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  de  Medissina 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  de  medessina 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  pergameneis  vocatum 

asamaaym  vaaolam. 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  laqvotoi 
50  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  axi 

mateix^ 
Item  quinque  libros   pergameneos  cum  coopertis  virmiliis,  cum 

clavibus  et  tancadors'^  de  laulono,  vocatos  Omse  tora 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  pergameneis  vocatum 

Pirgue  rabi  elietzer 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  ade- 

negueref  ben  neneym 
Item  unum  librum  papireum  et  pergameneum  cum  coopertis  virmi- 
liis vocatum  Tergvz 
55  Item  unum  librum  papireum  cum  copertis  albis  vocatum  b»,n  sina 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  natzir 

vbenachmela 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Beur 

aegues 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  lividis  vocatum  BeuV' 

benatzere 
Item  unum  librum  cum  coopertis  albis  vocatum  tamealloot 
60  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  hit 

cabu  ammahim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  otota* 

samaym 

^  «  Ainsi  même  > ,  mots  catalaus. 
'  Agrafes,  fermoirs. 


INVF.NTAIRK  DU  MOMILIEIt  IVUN  MKDKCIN  JUIF  DE  MAJOUijUE         r^? 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Quelisbe 

vdepne 
Item  uuum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  ttçuer- 

ret  baaleaym 
Item  unum  librum  papireum  et  pergameneum  coopertum  cum 

postibus  vocatum  vtlin 
65  Item  uuum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Verech 

Elech 
Item  unum   librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis   vocatum 

Sadot  Ahuiorre 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Seferaamunot 
Item  unum  librum  papireum  cum   coopertis  virmiliis  vocatum 

Baleaym 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  adeiie- 

guesef 
70  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Sefer 

ahmisnot 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Maguilla  cum  coopertis  albis 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Sazut 

mos  nahlm 
Item  unum  librum  papireum  et  pergameneum  cum  coopertis  albis 

vocatum  Terga 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis   vocatum 

peruix  azarot 
75  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  Surat 

aares 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum  Se- 

ferlison  liissach  aessiraeli 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  alarilzi 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  melmat 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Ellon 

annefes 
80  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Quiéep 

elahim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  Quitep 

elahim  helarbi 
Item  unum  librum  papireum  etpergdmeneum  cum  coopertis  albis 

vocatum  nessin 
Item  unum  librum  papireum   cum    coopertis  virmiliis  vocatum 

Stiliot 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Perus 

coelôt 
85  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Perus  7nixle 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

asïieqiLesef 

T.  XXXIX,  N°  78.  17 


258  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  huhuc 

metaesbo/i 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  El- 

mensori 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocantum  onis 
algarip 
90  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum  Ay^/t^r- 
aafla 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum  Ter- 

gum  neueym 
Item  unam  maquillam  pergamenei 
Item  unum  librum  pergameneumcum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Jasquel  treaasar 
Item  unum  libram  papireum  cum  coopertis  croceis  vocatum  Me^ 
draix  Aizita 
95  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis   virmiliis  vocatum 
tafsir  xera  tora 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Perus  Rabi  salamo 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis   virmiliis  vocatum 

ffaraig  alculup 
Item  unum  librum   papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Sefarasamim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis    virmiliis  vocatum 
Mitlal 
dOO  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  croceis  vocatum  Sefer 
ammidot 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  seder- 

moet 
Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  voca- 
tum Mispar 
Item  unum  librnm  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Mosue  ay  junim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Ma- 
guitlat  setarim 
405  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  s$fer 
musarim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  croceis  vocatum  Mos- 

nesedech 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Sefer  apanaguim  ben  ueoat 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  croceis  vocatum  Pe- 
rus aheiirost 
Item  unum  librum  pergameneum  vocatum  cozar  cum  coopertis 
virmiliis 
410  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 
Elmegisci 


INVENTAIRE  DU  MOBILIER  D'UN  MÉDECIN  JUIF  DE  MAJORQUE         259 

Item  uimm  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Mc- 

gayen  îebenrost 
Item   unura  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

abaacauanot  Daniel 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Perus 

lifematiuy 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Ce- 

lesmis 
\  \  5  Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Ruaen 
Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  voca- 
tum Parasiot 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  petiat  annuis  nayot  cum 

coopertis  albis 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

jairnatiu 
Item  unum  librum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  voca- 
tum Josua 
120  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Dichduch  e  Rabbi  jazuda 
Item  unum  librum  pergameneum  cum  postibus  vocatum  Sefer 

annuore 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Mis- 

patim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  viridis  vocatum 

olaucatan 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  preus 

Sirasiri 
425  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Perus 

hop 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Atzarauhi 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 
vchmei  annigum 

Item  unum  librum  cum  coopertis  albis  vocatum  aleotguedarim 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Mocatil 
430  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Ariuza 

lebensina 
Item  unum  librum  papireuai  cum  coopertis  albis  vocatum  ayben- 

juchdan 
Iten  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Sefer 

ammis  not 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  hic  dusi 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Sone 

annassim 


260  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

135  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  pergameneis  voca- 

tum  Diiiin 
Item  unum  librum  papireum  cum  postibus  de  medessina 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  vocatum  Sefer 

attanon 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  albis  de  medessina 
Item  cayranos  ^  pergameneos  Biblie 
440  Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  lividis  vocatum  Sejer 

isdot 
Item  decem  et  septem  libros  papireos  scriptos  in  algaravia 
Item  Iriginta  duos  libros  papireos  seiiptos  littera  moriscba 
Item  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Sîuha  enaym 
Item  unum  Jibrum  pergameneum  cum  coopertis  virmiliis  Mocean- 

nebuquim 
145  Ilem  unum  librum  papireum  cum  coopertis  virmiliis  vocatum 

Dest  abpilosofim 
Item  unum  librum  papireum  vocatum  Seferabperaquim  cum  coo- 
pertis virmiliis 
447  Item  unum  papireum  croceum  vocatum  tafillot. 

Hec  et  non  alla  bona etc. 

Testes  inde  sunt  :  Moxinus  bonanin,  Ayhonnatgar,  Jucefus  ben 

maymon  alatzar,  Abrafim  ben  maymon  alatzar  et  Issachu  ben 

cabis,  judei. 

[Archives  notariales  de  Majorque,  Cahier  des  testaments  et 
inventaires  du  notaire  Nicolas  ProhoMy  années   1575 

à  1577.) 


LES  JUIFS  DE  TARASCON 

AU  MOYEN  AGE 

(suite  et  fin  *) 


IX. 

Quartier  des  Juifs.  —  Synagogue.  —  Population. 

A  Tarascon  les  Juifs  occupaient  un  quartier  spécial.  Ce  quar- 
tier s'appelait,  en  général,  la  Carrière  des  Juifs,  «  Carriera  )>  ou 
«  Carrieyra  dels  Jusieus  »,  ou  tout  simplement  la  Carrière.  On 
trouve  quelquefois  aussi  le  nom  de  Universitas  Judeorum  (1378), 
de  Juzataria  ou  Jussataria  (1441),  de  Juateria  (1488).  Il  embrassait, 
d'un  côté,  la  partie  de  la  rue  du  château  comprise  entre  la  Cour 
royale,  aujourd'hui  Maison  Philippe,  et  le  château,  et  de  l'autre, 
celle  qui  séparait  la  Traverse,  aujourd'hui  rue  des  Juifs,  du  cou- 
vent des  Bénédictines  de  Saint-Honorat-.  En  1378,  il  devint  un 
véritable  ghetto.  A  cette  époque,  en  effet,  sur  les  réclamations 
des  habitants,  qui  les  accusaient  d'avoir  franchi  les  limites  qui 
leur  étaient  de  tout  temps  assignées,  on  les  obligea,  suivant  la 
convention  conclue  entre  les  syndics  et  leurs  bayions,  Rocel 
Ferrier  et  Crégut  de  Capestang,  d'établir  leurs  demeures  à  partir 
des  maisons  du  notaire  Pierre  Marcelhani  et  de  Gaufridi  Bar- 
berii  jusqu'au  couvent  des  religieuses,  d'un  côté,  et  depuis  la 
maison  de  Barthicholi  jusqu'au  monastère  et  au  four  exclusive- 
ment, de  l'autre.  On  leur  permit  toutefois  de  s'étendre,  en  cas  de 
nécessité,  jusqu'à  la  rue  Ponce  Truqui  (rue  des  Baptêmes),  à  la 
condition  de  ne  faire  ni  porte  ni  ouverture  quelconque  sur  cette 
rue,  qui  conduit  vers  l'Eglise  Sainte-Marthe  ^. 

*  Voir  le  dernier  numéro,  p.  95. 
'  Pièces  justificatives,  n°  11. 
>  Ibid.,  n°  m. 


262  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Nous  n'avons  trouvé  aux  archives  municipales  aucun  document 
qui  nous  permette  de  préciser  l'emplacement  de  la  synagogue  ou 
Ecole,  a  Esquola  ».  Une  note  de  clavaire  de  1368  nous  fait  con- 
naître qu'à  cette  époque  la  communauté  payait  au  fisc  un  impôt 
de  10  oboles  d'or  pour  la  possession  de  la  synagogue  et  du  cime- 
tière qui,  en  1487,  figurent  à  l'avèrement  pour  la  somme  de 
37  florins  et  6  gros  *. 

Dans  la  viguerie  de  Tarascon,  le  rapport  ordinaire  de  l'aflfoua- 
gement  à  la  population  était  de  deux  cents  âmes  par  feu.  Au 
xiv«  siècle,  Tarascon  comptait  95  feux  et  19,000  habitants,  y 
compris  ceux  des  hameaux  circonvoisins.  La  communauté  juive 
s'élevait  alors  au  chiffre  de  35  propriétaires,  dont  le  revenu  ap- 
proximatif porté  à  l'avèrement  était  de  10,000  florins.  On  ne 
saurait  nous  taxer  d'exagération  en  évaluant  au  double  ceux  qui 
ne  possédaient  ni  maisons,  ni  champs,  ni  vignes,  soit  en  tout 
105  familles.  En  1400,  le  nombre  des  propriétaires  juifs  s'élevait  à 
42,  avec  un  revenu  de  3,880  florins;  en  y  ajoutant  les  membres 
qui  ne  figurent  pas  sur  les  registres  cadastraux,  nous  trouvons, 
d'après  le  calcul  ci-dessus,  126  familles.  En  1442,  la  communauté 
possédait  44  propriétaires  et  132  familles  ;  elle  en  comptait  40  en 
1459  et  61  en  14S7,  soit  120  et  183  familles. 

Cimetière. 

Les  Juifs  avaient,  au  moyen  âge,  deux  cimetières  à  Tarascon. 
L'un  était  situé  dans  l'île  de  Jarnègue,  près  de  l'ancienne  Com- 
manderie  de  Saint-Antoine  ;  l'autre  se  trouvait  en  dehors  de  la 
porte  Gondamine,  entre  la  route  de  Maillane  (Gamin  de  nostra 
Dona  de  Most)  et  le  chemin  de  Saint-Georges  (Gamin  de  Virles). 
Ge  dernier  est  désigné,  dans  un  document  du  13  mars  1426  ',  sous 
le  nom  de  «  simienterium  Judeorum  »,  ou  «  sumenterium  antiquum 
magnum  »,  et  dans  un  autre,  daté  du  10  mars  1526-27,  sous  celui 
de  «  Gementeri  des  Jusioux  » .  11  devint,  à  cette  époque,  la  propriété 
de  la  ville,  qui  l'acheta  pour  le  prix  de  10  écus  au  soleil,  que  lui 
avait  avancés  noble  Johan  de  Lobières.  Elle  fit  construire  sur  son 
emplacement  un  hôpital  pour  les  pestiférés  ^. 

1  Archives  municipales,  CC,  29. 

'  Pièces  justificatives^  n»  Vill. 

*  «  ...Et  primo  es  ordennat  que  sian  ramboursatz  per  lo  tresaurier  S'  Michellet 
Bochet  à  noble  Johan  de  Lobières  dexs  escuz  au  soleiih  que  el  a  prestat  a  la  villa 
per  comprar  au  nom  de  la  villa  los  enfruchs  del  Jardin  que  l'on  solie  appellar  lo  ce- 
mentcri  ûes  Jusioux  per  tayre  ung  bospital  per  meclre  los  malades  et  ensessitz  d«  la 
peste,  etc.  »  Arch.  municip.,  BB.  14. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  A(jE  263 


BOUCHERIE. 

Les  Juifs  possédaient  également  une  boucherie  spéciale.  En 
vertu  des  articles  106  et  107  des  Coutumes*,  ils  devaient  avoir, 
sous  peine  d'une  amende  de  10  sous,  un  étal  en  dehors  de  la  bou- 
cherie des  Chrétiens,  auxquels  il  était  défendu,  sous  la  même 
peine,  d'acheter  ou  de  vendre  les  viandes  des  Juifs.  Une  amende 
de  50  sous  était  infligée  à  tout  boucher  qui  aurait  fait  abattre  ses 
animaux  par  un  Juif.  Voici,  d'autre  part,  les  statuts  de  la  boucherie 
israélite,  trouvés  dans  les  minutes  du  notaire  Jean  Muratoris 
(1441)  et  publiés  par  M.  Charles  Mourret  dans  le  journal  Le  Con- 
ciliateur, de  Beaucaire  (n^  du  21  avril  1895)  : 

SeguQ  si  los  capitolz  de  la  gabella  de  la  carn  de  la  Juzatarie  '  de 
TharascoD,  per  dos  ans  acomensant  a  Sant  Miquel,  mil  IIIIc.  XLI. 

Premieramenl,  que  tota  carn  de  buou,  vaca,  moutun,  feda,  cabra 
ho  boc  que  si  sagate^  al  luoc  de  Tharascon  ho  en  son  terrador, 
deia  ^  pagar  lo  masellador  de  aquelas  carns,  fossan  per  vendre  a 
menut  ho  per  son  hus  ho  en  calque  maniera  que  fossan  que  saga- 
tessan,  de  tan[l]  que  fossan  que  si  sagatessan  de  tant  que  fossan  de 
ley,  so  es  asaber,  j  denier  per  lieura  de  so  que  pesarien  una  cascuna 
de  las  dichas  carns;  et  aquo  sie  tengut  de  pagar  lo  masellador  tautost 
quant  seran  passadas,  davant  que  ause  spessar  las  dichas  carns,  et 
aquo  sus  pena  de  dos  florins  applicant  la  miclat  al  senhor  et  l'autra 
al  comprador*  de  la  gabella,  douant  tôt  empero  al  pes  de  las  dichas 
carns  l'avantage  que  dona  la  villa  a  rason  de  quintal. 

Item,  que  tôt  cabrit  ho  anhel,  entre  lo  près  de  dos  gros,  pague  très 
dénies,  et,  entre  lo  près  de  quatre  gros,  deia  pagar  VI  deniers,  et 
quant  sera  a  major  près,  deia  pagar  XVIII  deniers,  et  aysso  fins  a  la 
festa  de  Pandegostas  et  d'aqui  anavant*,  si  dejan  pesar  et  pagar  j.  d. 
per  lieura. 

Item,  tôt  anhel,  cabrit  que  si  sagaie  de  nengun  jusieu  per  sa  pro- 
vesion,  sie  tengut  de  pagar,  de  mens  de  dos  gros,  ren;  et  de  dos  gros 
entre  quatre,  VI  den.,  et  d'aqui  en  avant  XII  deniers,  mais  que  non 
0  fassa  per  revendre. 

Item,  qui  lot  frachan  '  de  buou,  de  vaca,  de  vedel,  déjà  pagar  lo 

*  Bondurand,  ouvrage  cité,  p.  64  et  65. 

*  La  communauté  des  Juifs. 

'  On  sait  que  les  Juifs  tueut  les  bêtes  de  boucherie  suivant  un  procédé  particulier. 
Ce  procédé  qui  consiste  à  couper,  par  une  large  incision  dans  le  cou,  les  grosses 
artères  qui  s'y  trouvent,  s'appelle  en  hébreu  ïlI^'^n'J,  mot  dont  la  racine  ^H'J)  a 
formé  le  verbe  sagaier. 

*  Deia,  du  verbe  dever,  devoir. 

*  L'acheteur,  l'adjudicataire  de  la  gabelle  •  delà  carn  ». 

*  5'n  avant. 

''  Frachan,  frechan,  fressure. 


264  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

moselador  d'aquelas  carns  a  rason  de  III  den.,  per  gros,  et  lo  frachan 
de  feda,  moutun,  boc  et  cabra,  per  la  testa,  j.  patac,  de  la  levada, 
j.  patac,  et  de  lo  ventre,  j.  patac. 

Item,  que  totas  carns  de  aquelas  sobrenomadas,  frescas  ho  saladas, 
que  porte  jusieu  ho  jusieva,  extranhi  ho  privât,  d'autra  part  en 
aquesta  villa,  ho  que  fossa  tramessa,  ho  en  qualque  maniera  que 
pervengues  a  nengun  juzieu,  la  déjà  arasonar  '  et  pagar  al  culhidor 
ho  al  comprador  de  la  dicha  gabella,  j.  d.  per  lieura  de  so  que  pesara, 
et  de  las  carns  que  non  si  aparten  de  pesar,  déjà  pagar  en  la  ma- 
niera que  desus  si  conten  ;  et  eysso  sus  la  pena  sobre  deia  '  aplica- 
doyra  coma  desus  et  de  perdement  de  la  carn,  et  que  la  déjà  ara- 
sonar  dedins  j.  jourt  natural. 

Item,  que  nengun  juzieu,  strani  ho  privât,  non  ause  sagatar  ni 
baycar  ^  en  aquesta  villa  si  non  aquelz  que  seram  comesses  per  la 
part  dels  ballons  et  del  gabellier  et  aysso  sus  la  pena  sobre  dicha 
aplicadoyra  coma  desus. 

Item,  que  nengun  juzieu  non  ause  far  comprar  carn  a  nengun 
crestiau  a  fin  de  si  desaquitar  de  la  susdicha  gabella  sus  la  pena 
sobra  dicha  aplicadoyra  coma  desus. 

Item,  es  de  pati*  que  la  carriera  an  lo  comprador,  que  iadicha 
carriera  sie  tenguda  de  aver  masellier  per  los  dichs  dos  ans,  et,  ai 
cas  que  la  dicha  carriera  non  aurie  masellier,  que  fossan  tengutz  de 
pagar  al  comprador,  per  semana,  huech  gros. 

Il  n'était  pas  rare  de  voir  les  Juifs  affermer  à  des  Chrétiens  le 
revenu  de  leur  boucherie  et  la  gabelle  de  leur  vin^  C'est  ainsi  que 
le  26  avril  1441,  maître  Salves  Avieudor,  Rossel  Ferrier,  Cassin 
Bonjues,  bayions,  Ferrier  et  Boniaquet  du  Pont,  auditeurs  des 
comptes,  et  Bonjues  Nathan,  cèdent  la  gabelle  de  la  viande  et  du 
vin  à  M^  Michaël  Guiberti  pour  une  durée  de  deux  ans  au  prix  de 
200  florins''.  Cette  vente  fut  confirmée  le  10  mai  par  Jacob  Bonet 
Avieudor,  qui,  en  prpnant  l'engagement  de  se  conformer  aux 
clauses  du  contrat,  jure  «  per  quiniam  "  w. 

On  sait  qu'il  était  défendu  aux  Juifs  de  vendre  la  chair  de  leurs 
animaux  dans  la  boucherie  des  Chrétiens.  Ce  règlement  ne  fut  pas 
toujours  exactement  observé,  et  les  Juifs  eurent,  de  temps  en  temps, 
la  faculté  d'avoir,  à  la  boucherie  même,  des  établis  où  leur  viande 
était  débitée  aux  clients.  Mais  des  réclamations  ne  tardèrent  pas 
à  se  produire,  probablement  de   la  part  des  bouchers  chrétiens 

*  Déclarer.  —  Culhidor  :=  agent  chargé  de  percevoir,  culhir,  la  gabelle. 

*  Lire  sobre  dicha. 

^  Probablement  de  la  racine  'ipD,  examiner, 

*•  Il  est  convenu  que 

"  Voir  aux  Pii'res  justi/iratives  les  sljiluts  relatifs  à  la  gabelle  du  vin, 
•*  Piecci  justificatives,  n°  X\'i. 
^  Ibid.,  n»  XVil. 


I 


LES  JUIFS  DE  TAHASCON  Al'  MOYEN  Af.E  2r»n 

désireux  de  supprimer  la  concurrence  que  leur  faisaient  les  Juifs, 
et  les  syndics  se  virent  obligés,  le  27  avril  1461,  de  demander  au 
viguier  de  la  Cour  royale  d'interdire  à  Carcassonne  ou  à  tout 
autre  Juif  de  vendre  ni  poisson,  ni  viande  à  la  poissonnerie  et 
à  la  boucherie  des  Chrétiens  \ 


Liste  des  Juifs  de  Tarascon. 

1350-1487. 

Ces  listes  sont  extraites  des  registres  cadastraux  (CC.  25,  26,  27, 
28  et  29)  et  des  minutes  des  notaires  Antoine  Chapati  et  Pierre 
Margot  (vol.  96,  f°77).  Celles  des  registres  nous  font  connaître  le 
revenu  approximatif  de  la  fortune  des  Juifs,  suivant  la  déclaration 
(avèrement)  faite  par  chacun  d'eux  sous  la  foi  du  serment.  En 
1350-1400,  ce  revenu,  provenant  de  maisons,  champs,  vignes, 
créances  et  marchandises,  s'élevait  à  10,000  florins,  ainsi  que 
l'indique  la  note  ci-jointe  du  registre  CC.  25  : 

Summa  totalis  dicti  avarementi  ipsorum  Judeorum  de  rébus,  tam 
mobilibus  quam  immobilibus  supra  descriplis,  est  florenorum  très 
milia  ducentorum  quinquaginta  quinque  et  médium. 

Item  pro  ipsorum  debitis  pro  quibus  et  de  eorum  mercaturis  et 
pecuniis  concordaveruut  cum  universitate  loci  Tharascouis  de 
eorum  volunlate;  quorum  debitorum  et  mercaturarura  restarent  in 
summa  florenorum  sex  millia  septingenti  quadraginta  quatuor  cum 
dimidio. 

Et  sic  ascendit  universaliter  averamentum  dictorum  Judeorum 
concorditer  factum  ad  florenos  decem  milia. 

Liste  de  io50-'lÏ00. 

Maystre  Bellant,  Bellant,  surgiant  2,  Juzieu.  .   .  385  llorins'. 

Durant  Soffe[rl 351  2— 

Durant  de  Carpentras,  Juzieu 15      — 

Astruga,  molher  (femme)  de  Couprat  Sotler  .  .  111  2— 

*  «   Quod  sindici  et  accessor  requirant  dominum    vicarium  vel  judicem  curie 

régie  presenlis  ville  quatenus  habeant  prohibare  Carcassone  ac  quibusvis  aliis  Judeis 
ne  de  cetero  habeant  vendere  pisces  neque  carnes  \n  piscaria  nec  macello  chnstiauo- 
rum,  propter  quam  plurima  scandala  hujusmodi  racione  oriri  possini  christiaais,  cum 
Judei  sint  inimici  christiane  religionis.  »  Arch.  municip.,  BB.  9.  —  27  avril  1461. 

*  Surgiant  =:  chirurgien.  Un  médecin  de  ce  nom,  Dollan  Bellant,  vivait  à  Car- 
cassonne au  XIV"  siècle,  Deppiug  ouvrage  cite,  p.  18i.  Un  J ait"  de  Carpentras  portail 
également  ce  nom  en  1357,  i^etJwe,  Xll,  p.  193. 

*  Le  florin  vaut  12  gros  et  le  gros  S  patacs. 


266  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Maystre  Rocel  Vivas 25      — 

Vidal  Profach 70      — 

Maystre  Rossel  Conprat 76      — 

Ferron  Bonafos 18      — 

Bonafilha,  molher  de  Macip  de  Montelhs*  ...  5<      — 

Astruc  Rossel 262      — 

Mosson  Vidal  de  Tarascon 91      — 

Garacausa  *,  Juzieu 10      — 

Gresquet  de  Draguinham  (Draguignan)  ....  151/2— 

Astruc  de  Salves,  encantayre  ' 341/2 — 

Gregut  de  Gabestanh  ^ 193      — 

Vidal  Bonafos 1441/2— 

Rossel  de  Perpignan 42      — 

Salamitas  Asser 541/2 — 

Vidon  Vidon,  Juzieu 100      — 

Jacob  Bedos,  Juzieu 127      — 

Maystre  Rossel  Ferrier  ^ 219      — 

Vidal  Bonfilh  de  Aviûhon  e  Bonaon*  ...     50  )  _ 

Filli  sieu,  Gomprat  Bon  non 30  ) 

Vivon  Mosse  Gerondin  (de  Girone) 30      — 

Salomon  de  Masselha' 137      — 

Bonafos  Vidal 137      — 

Sammiel  Bonjuzas 301      — 

Juffetde  Glarmont^ 791/2— 

Vidal  d'Alès  ^  et  Durand  Talvian,  Juzieus  ...  40      — 

Asser  Meyr,  Juzieu 55      — 

Samiel  Josep[h] 55 

Durantet  de  Malguer  •",  telier  " 1341/2— 

Grescas  de  Gadenet 16      — 

Bonjuzas  Gassin,  Juzieu 48      — 

Liste  de  UOO. 

Ferrier  Bonafos 146      — 

Maystre  Bellant** 160      — 

*  Monteux,  Vaucluse.  Voir  Revtie,  XII,  p.  196. 

«  Ou  Carcause,  Bévue,  XII,  p.  141  et  194;  tôtrf.,  XVI,  p.  74. 
»  Vendeur  à  l'encan.  Un  Astruc  de  Sauves  ou  de  Salvis  demeurait  à  Montpellier, 
en  1293-94,  Revue,  t.  XXII,  p.  265.  Cf.  XII,  p.  193. 
«-5  Bayions,  en  1378. 

•  Ou  Boiian,  Revue,  XII,  p.  193. 

7  Salomon  de  Marseille  peut  être  identiGé  avec  Salomon  ben  Josepb  qui  sign»  une 

lettre  de  protestation  contre  Abba  Mari  et  qui,  de  Montpellier  où  il  était  fixé  en  1306, 
s'était  retiré  à  Tarascon.  Les  Rabbins  français^  p.  693. 
•  Clermont,  Hérault. 
^  Alais,  Gard. 

"  Melgueil  ou  Mauguio,  Hérault. 
**  Tisserand. 
*«  Probablement  le  fils  de  Maystre  Bellant,  chirurgien.  Voir  liste  précédente, 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  267 

Bonet  Rossel ^00      — 

Mondina,  molher  de  Asser  Mehyr 

Maystre  Gonprat  Asser ^l'O      — 

Maystre  Bon  Juhas  Quassin 60      — 

Cresquas  de  Draguinhan 

Astruc  de  Largenlière <0      — 

Los  hères  (les  hoirs)  de  Durant  Sofre[r] 

Stela  de  la  Roche  ' 

Bonafilha  de  Monlelhs 

Salamonet  Jacob "^2      — 

Salamitas  Asser 103      -- 

Astruc  Bonicien,  encantayre  ' 

Vidal  destela  " 8      — 

Léon  Vidas,  filh  de  Vidon 

Astruc  de  Tolon  * ^02      — 

L'esquola  dels  Juzieus 

Rossel  de  Perpinhan ^0      — 

Jufet  de  Glermont 

Compradet  de  Milhau  * 

Bonet  del  Pont* 64      — 

Astruguet  de  Nemze  ' 

Vidai  Bonafos 140      — 

Los  hères  (les  hoirs)  de  SamielJossea/m^quodon    103      — 

Vidal  Proffach 12      — 

Samiel  Bonjuhas 4301/2— 

Mosson  Vidal 34      — 

Bonjuhas  Salomon 128      — 

Maj'stre  Eoujuhas  Asser 100      — 

Vivas  Mosse 50      — 

Riqueta,  molher  de  Cresquas  ProfTach 50      — 

Crégut  de  Quabeslainh  * 192      — 

SalamonetetDavinet,heres  de  Durant  de  Melguer'  131 1/2— 

Mayrona,  molher  de  Astruc  Rossel 304      — 

Cavet  ou  Gonet  Bedos 152      — 

Abraam  Proffach 

Maystre  Rossel  Vivas 131      — 

*  Pour  Estelle.  La  Roche  ou  La  Roque  est  uo  nom  de  famille  eacors  aujourd'hui 
en  usage  chez  les  Juifs  et  les  Chréliens  du  midi  de  la  France. 

«  Voir  p.  266,  note  3. 

*  D'KBtelle  ou  Étoile,  près  de  Valence,  Drôme. 

*  Toulon. 

»  Ou  Milhaud,  Gard. 

*  Hameau  faisant  partie  de  la  commune  du  Canet,  Hérault. 

^  Nîmes.  11  s'agit  probablement  du  rabbin   don  Astruc  Salomon   Abigdor.  Voir 
Gross,  Gallia  judaica^  p.  334  et  398. 

*  Capestang,  Hérault. 

»  Voir  Revue,  XII,  p.  194, 


268  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

Dieus  lo  sal,  peirier  ' 7      — 

Maystre  Rossel  Ferrier 7461/2 — 

Habrahamet,  filh  de  Dieulosal 

A  la  suite,  cette  note  :  c  Summa  hospiciorum,  terrarum  et  vinearum 
Judeorum  ITI*'  VHP  LXXX  llor.  ^> 


Liste  des  Juifs  de  Tarascon,  tirée  d'un  acte  ayant  pour  titre  : 

Empcio  capagiorum  carerie  Judayce  pro  Rostagna  Corpe,  uxore 
nobilis  Johannis  Lambertini,  ucerii  armarum  doraini  nostri  Régis 
Sicilie,  de  Tharascone. 

(Antoine  Chapat,  notaire,  acte  du  29  novembre  U24; 
Étendues,  vol.  20.) 

Magisler   Compratus  Asser.  Astruc  Macipi. 

Natan  Bonjuzas'.  Abram  Aym. 

Caravido  ^  Cassini  Bonjuzas. 

Boiimus  ou  Botinius*.  Josep  de  Sancto-Gervasio'®. 

Jacob  Bonet  Avieusor^  José  de  Gastris. 

Vitalis  de  Sostal  K  Clara  Orgiera. 

Isaac  d'Agde  et  Aaron,  son  parent.   Jacob  Aym. 

Abram  Levi.  Salamo  de  Malguer  **. 

Abramet  du  Pont.  Isaac  de  Lattes  ''. 

Astruc  de  Largentière.  Boniac  du  Pont. 

Mosse  Aym  ^  Roget'^ 

Comprat  Salomon.  Salamonet  Soffe  [r]. 

Isaac  de  Posquières.  Ferrier  de  la  Rocbe. 

Gresquet  Revel.  Jacob  du  Pont. 

Mosse  Daram.  Bonjuzas  de  Malguer  et  Mayrone. 

Tbolo.  Abram  Soffe  [rj. 

Isaac  de  Tri tis*.  Juffet  Jamelis. 

Samuel  de  Gastris  ^  Léo  Gohen. 

*  Maître-maçon. 

*  Peut-être  le  même  que  le  médecin  Bonjues  Nathan,  mentionné  par  Bayle,  Le» 
médecins  d'Avignon,  p.  68. 

3  Ou  Caravida,  nom  fort  répandu  dans  le  midi  de  la  France. 

*  Voir  sur  ce  nom  Loeb,  Un  procès  dans  la  faviille  des  Un  Tihhon,  p.  15,  et  Revue, 
Xll,  p.  196,  et  XVI,  p.  82. 

'  Pour  Avijfdor.  Un  des  bayions  en  1441. 

*  Léon  Vidal  de  Sostal,  un  des  membres  du  collège  rabbinique  de  Monlpelliet 
char^^é  de  recueillir  des  témoignages  relativement  à  un  procès  qui  eut  lieu,  en 
138b-88,  à  Arles  pour  une  question  de  mariage.  Gross,  ouvrage  cité,  p.  334. 

'  Pour  Ilayymi. 

**  Trets,  Bouches-du-RhAne. 

'•'  Castries,  Hérault. 

'0  Saint-Gervais,  près  de  Bagnols,  Gard. 

^*  Melgueil  ou  Mauguio,  Hérault. 

»»  On  trouve  un  Isaac  de  Lattes  dans  le  Dauphiné  en  U47.  Revue,  IX.  p.  237, 

»>  Ou  Rouget. 


LES  JUIFS  DE  TAUASGON  AU  MOYEN  AGE  269 

Samuel  Abram.  Ferrier  Vidas  Rocell. 

Magister  Jacob  de  Lunel.  Salomou  Boniac  et  son  fils. 

Bonet  du  PoDt. 


Liste  de  i442. 

(Registre  ce.  27.) 

Siec  si  raveramenl  des  Jusuoz. 

Maystre  Bonjuzas  Nathan  ' 593  florins.  Gros. 

Gassin  Bonjuzas 78      —  » 

Jacob  Haym 91       —  » 

Ferrier  de  la  Roche 155      —  » 

Maystre  Jacob  de  Lunel 61       —  6 

Glara  Orgiera 25      —  » 

Abram  Levi 4i/2 —  »» 

Abraham  SofTer  ' 71      —  » 

Ferrier  Vidas 281      —  » 

Meyr  Gomprat 58      —  9 

Jozept  Hayn 30      —  » 

Abraham  du  Pont 10      —  » 

Samiel  deTolon  * 110      —  » 

Bonjuzas  de  Gaslries 91      —  6 

Vidon  du  Pont 32      —  6 

Salamias  de  Lunel* 57      —  6 

Dieulosal  de  Largentière 80      —  » 

Isaac  de  Carcassonne 47      —  6 

Dieulosal  Soffer 60      —  » 

Boniaquet  du  Pont^ 253      —  » 

Boniaquet  Cohen 10      —  » 

Dieulosal  de  Sam  Paul  * 29      —  v 

Salves  Avigdor 3      —  9 

Bonnizas  de  Malguel  ' 60      —  » 

Mordacays  de  Nantris* 1â      —  » 

Samiel  Bonafos 60      —  ^ 

Abraham  Hayn 9      —  6 

*  BoLJuzas  Nathan  appartenait  à  la  célèbre  famille  Nathan  dont  l'activité  littéraire 
et  scientifique  remplit  le  xiv*  et  le  xv«  siècles.  Voir  sur  cette  famille,  Neubauer,  Les 
écrivains  juifs  français^  p.  573  et  suivantes  ;  cf.  Gross,  ouvr.  cité,  p.  9  et  10, 

*  Les  huit  premiers  noms  de  cette  liste  figurent  déjà  sur  la  précédente. 

*  Toulon. 

*  S'agit-il  de  Salamias,  fils  de  David  de  Lunel,  auteur  d'un  Traité  sur  Us  fièvres  f 
Voir  Neubauer,  ouvraije  cité,  p.  733. 

*  Auditeur  des  comptes  en  1441. 

*  Saint-Paul,  Drôme. 

'  Malguel  =  Mauguio. 

*  Peut-être  Nant,  Aveyron? 


270  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Samiel  Habran 24  —  6 

Vidon  Josse 54  —  » 

Mordacays  Astruc 29  —  6 

Lunella 120  —  » 

Mosse  Salomon  * 35  —  » 

Salvet  du  Pont 53  —  » 

Mordacays  Maximin  ' 18  —  » 

Astruc  Parus 40  —  » 

Maystre  Aaron 42  —  » 

Posquièras 9  —  » 

Astruc  de  Milhau 2  —  » 

Gara  Vidon 42  —  » 

Maystre  Rossel  Vidas 24  —  » 

Cresquet  Revel 73  —  » 

Josse  de  Gastries 43  —  6 

La  molher  de  Gervais 40  —  » 

Vidal  Astruc 38  —  » 

Liste  de   Uô9. 

(Registre  CC.  28.) 

Salamias  Ferrier 466  4  > 

Aron  Levi 476  4/2  »  » 

Abram  Aym 278  10  » 

Rossel  Ferrier 471  6  » 

Meyr  Gomprat 69  44  > 

Durand  Natan 482  6  » 

Grescas  Ferrier 487  »  » 

Salamias  de  Lunel  • 149  4  » 

Bonjues  de  Malgue  (Melgueil) 92  6  » 

Mosse  Meyr^ 68  8  2 

Jacop  de  Lunel 85  6  » 

Grescas  de  Tholon  (Toulon) 49  »  » 

Dieulosal  de  Largentière 74  »  » 

Samiel  Bonafos 55  6  » 

Gomprat  Soffer 50  »  » 

Bonjues  de  Gastries 98  9  4/î 

Blanqueta  et  Arsiela,    sœurs,    filles    de 

Grescas  Revel oO  »  » 

*  Voir  sur  Mosse  Salomon,  plus  haut,  p.  108. 

*  Probablement  de  Saint-Maximin,  Var. 

•  Vt)ir  liste  précédente. 

♦  Un  document  que  nous  publions  aux  Pièces  justificativei  nous  «pprend  que  MoftÉe 
Meyr  était  médecin  à  Tarascon.  Au  mois  d'août  1456,  il  maria  son  ûls,  Comptai 
Mosse  de  Valabrègue,  avec  Regina,  lille  du  médecin  Toros  Nathan.  Mossoa  Sâlomon 
Soffer,  Juif  de  Tarascon,  servit  d'intermédiaire  pour  ce  mariage  et  reçut,  à  cet  effet, 
5  florins.  Pièces  justificativts^  n»  XV. 


LES  JtJIFS  DK  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  2ll 

Vidon  Samuel 44  9  » 

Salvon  du  Font 198  1  f2 

Boniaquet  Cohen 187  10  » 

Boniac  du  Pont 413  10  v 

Vidal  Baron 61  »  » 

Rossel  Israël 2  »  » 

Josse  du  Gaylar 14  4  » 

Vidon  de  Cassin 217  6  » 

Vidal  Cohen 4  6  » 

Samillon  Bolin 12  »  » 

Menasse  Tonian 54  6  » 

Margalia 100  »  » 

Astruc  de  Milhau 56  G  » 

Bonafos  Falco 64  »  » 

Salves  Avigdor 58  2  » 

Maystre  Bonjues,  juzieu  de  Marcelha  *  .   .50  »  j> 

Bon  nom  Mordocays 35  9  » 

Vidalon  Astruc 42  3  » 

Ysaac  de  Garcassonne 73  6  » 

Isaac  Samiei 28  6  » 

Stireta  ',  molher  de  Mosse  Salomon  ...  35  »  » 
L'amorna'de  la  carriera  dels  jusieus  de 
Tharascon  que  pren  très  barraux  de  vin 

que  son  taxas  a  quinze  florins 15  »  » 

Liste  de   1487. 

(Registre  CC.  29.) 

florini.  Groi.  Palacs. 

Boniaquet  Gobent 3  6  » 

Maystre  Salves  Anguidor  (Avigdor).  .   .  »  »  » 

Maystre  Bonjues  Orgier  ^ 10  »  » 

Salves  de  Narbonne »  >'  » 

Saiamias  Ferrier 120  11  4 

Aron   Lévy 27  1  4 

Abram  Aym 54  »  6 

Salomon  de  la  Roche  5 13  6  4 


*  Sans  doute  le  même  que  Maystre  Bonjudas  ou  Bonjues  Orgier  qui  figure  sur  la 
liste  de  1487. 

'  Pour  Esther. 

■  Amorna  ou   Armona  =   Aumorne  ou  Aumône,  c'est-à-dire  la   caisse  de  bien- 
faisance. 

*  11  s'agit  probablement  ici  de  Bonjues  Orgies  ou  Orgier  qui  figure  sur  la  liste  des 
médecins  de  Marseille.  Voir  Bévue,  VU,  p.  294. 

*  Un  médecin  juif  d'Avignon  portait  le   nom  de   Salomon  de  la  Rocbe,  Jievu$f 
V,  307. 


272  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Florins. 

Rossel  Ferrier 39 

Durant  Nathan 8 

Maystre  Nathan  Nathan 56 

Jacob  Nathan 56 

Grescas  Ferrier 31 

Salamias  Lunel -12 

Vidal  de  Lattes 10 

Astruc  de  Beaucaire 1 

Bonjues  de  Melgre  (Melgueil) 33 

Jacob  de  Marguel  (id.) 44 

Mosse   Meyer 29 

Crescas  de  Toulon 9 

Dieulosal  de  Largentière» 1 

Samuel  Bonafos 14 

Bonafos  de  Castries 12 

Sauvon  du  Pont 31 

Boniat  du  Pont 14 

Profach  du  Pont 26 

Vidal  Baron 11 

Menasse  Thomam* 10 

Astruc  de  Milhau 4 

Josse  de  Milhau » 

Bonaffos  Falco 18 

Bon  non  Mordecays 13 

Vidalon  Astruc 7 

Ysaac  de  Garcassonne 11 

Ysaac  Samuel  ^ 1 

Jacob  du  Gaylar 11 

Jesse  Aym,  alias  Pape  de  Ghâteau-Re- 
nard,  (nom  effacé  le  1"  septembre  1487 
et  remplacé  par  Mosse  et  Durant  Aym, 

frères) 3        3        4 

Gonet  Sanoch »        »        » 

Isaac  Nathan 13        4        » 

Les  hoirs  de  Meyr  Gomprat 8        9        » 

Jacob  de  Lunel '^ 12      10  1/2» 

Blanqueta  et  Arselia,  sœurs 8        6        » 

Rossel  Israël »        3        » 

Josse  de  Gaylat  (du  Gaylar) 1        9        4 

Vidon  Gassin 22      10        3 

Vidal  Gassin »        »        » 

*  La  liste  des  Juifs  de  Carpeatras  ea  11322  coniieul  le  uom  de  Dieulosaut  de  Lar- 
gentière.  Revue,  XII.  p.  197. 

*  Peut-être  pour  Taman  ?  Voir  Revue,  XII,  p.  194. 

»  Voir  liste  des  Juil's  de  Garpeniras,  Revue,  ibid.,  p.  197. 

*  Revue,  ibid.,  p.  198. 


Groi. 

Pataei, 

5 

2 

6 

6 

6 

» 

10 

1 

10 

4 

101, 

/2. 

)> 

» 

7 

9 

9 

» 

1 

3 

9 

3 

1 

5 

4 

2 

8 

2 

8 

6 

6 

4 

11 

2 

8 

2 

1 

1 

6 

6 

6 

6 

6 

6 

» 

» 

4 

4 

1 

4 

10 

)) 

8 

4 

9 

» 

Groi. 

PaUcs. 

6 

6 

13 

» 

LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  273 

Florioi. 

Vidal   Cohen » 

Samilloa  Botin » 

Margalia 20        »        » 

Lo  Moro,   jusieu  ' »        »        » 

Ferrier  et  Mosse   fauco  (Falco) ,   frères, 

jusyeus 45        »        » 

Abram  et  Salomon  Isaac,  frères 3        »        » 

Jesse  Mosse,  fils  de  Johan  de  Grimaut.   .43       1        6 
Starta    (Stareta)  ' ,  femme  de  Johan   de 

Grimaut 9       6        » 

Ayssernida,  femme  de  Maystre  Nathan, 

juive  de  Pertuis  * 17       1        4 

Vidon  du  Pont,  habitant  des  Baux.  ...        2       6        » 
L'armona  de  la  carriera  dels  Jusieux  de 

Tharascon  que  prent  très  barraux  de 

vin  tauxat  a  très  florins,  gros,  non,  an 

agut  la  mucha 4        »        » 

Lostal  en  que  si  len  la  signagoga  et  lo 

cemeteri  dels  Jusieux  es  tauxat  a  trente 

set  florins,  gros  sieis  * 37       6       » 

Nous  possédons  une  autre  liste  de  Juifs,  dressée  vers  1475  et 
insérée  dans  un  accord  intervenu,  à  cette  époque,  entre  la  Com- 
munauté juive  et  Antoine  Camot,  marchand  d'Avignon,  au  sujet 
du  paiement,  par  voie  de  taille  et  de  capage,  d'une  somme  de 
2,700  florins  =.  Cette  liste  contient,  outre  les  trente-sept  premiers 
noms  qui  figurent  sur  celle  de  1487,  ceux  de  : 

Maystre  Gomprat  Mosse.  Eligon,  fils  d'Habram  Haym. 

Israël  Mosse.  Isaac,  fils  de  Manasses  Thoman. 

Haron  Orgier*.  Astruc  Cohen. 

Bonjues  Rossel.  Mosse  Haron  Lévi. 

Ismaël  Samuel.  Vidon  Jesse. 

Vital  Astruc.  ,       Boniaquet,  fils  de  Salomon  de  la 

Bonjues  de  Castries.  Roche. 

1  Est-ce  un  sobriquet  ou  s'agil-il  d'un  Juif  originaire  soit  de  Mur.s  (Vaucluse)  ou 
de  La  Mure,  dans  le  Dauphiné? 

>  Pour  Esther. 

'  Astruc  Nathan  était  médecin  à  Pertuis,  Bardinet,  Revue  Historique  année  1880 
p.  43. 

*  N.  B.  Il  est  fait  observer  que  les  chiffres  ci-dessus  sont  les  plus  élevés  qui  soient 
portés  à  l'avèrement  et  qu'ils  ont  été  successivement  réduits  à  la  suite  des  ventes 
forcées  imposées  aux  Juifs. 

*  Pierre  Margoli,  notaire,  Èt«îndues,  vol.  96,  f»  77. 

6  Peut-être  le  même  que  Aron  Orgerii  que  l'on  trouve  à  Marseille  vers  1492 
Rwue,  IX,  67. 

T.  XXXIX,  nO  78.  18 


274  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Maystre  Mordecays  Cohen.  Davin  de  Perpignan. 

Habram  Isaac.  Bencion  Parat. 

Josse  Soffer.  Mancip  Cohen. 

Mancip,  fils  de  Boniac  du  Pont.  Josse  Salamias. 

Boniac  de  Milhau.  Mordecays  de  Nanthoan(?). 

Josse  de  Lunel.  Habram  Garavidas. 

Les  hoirs  de  Maystre  Dieulosal  de  Salves  Samuel  de  Lunel. 
Largentière. 

Salomon  Kahn. 


PIÈGES  JUSTIFICATIVES 


I. 

Charte  de  Charles  II  défendant  aux  Juifs  l'exercice  des 
fonctions  publiques. 

—  9  février  1308».  — 

Karolus  secundus,  Dei  gratia  rex  Iherusalem  et  Sicilie,  ducatus 
Apulie  et  principatus  Capue,  Provincie  et  Forcalquerii  ac  Pedimontis 
cornes,  vicariis  et  judicibus  Tharasconis  presentibus  videlicet  et 
futuris  fidelibus  suis,  gratiam  suam  et  bonam  voluntalem.  Pro  parte 
consilii  ac  universitatis  hominum  Tharasconis,  fuit  nobis  uoviter 
supplicatum  quod  cum  Judei,  christiane  persecutores  fidei  et  hosles 
etiam  crucifixi,  passim  admitantur  in  dicto  castro  ad  gerendum 
officia  aliqua,  puta  ad  pouderandum  bladum  et  farinara  necnon  ad 
subastandum  publiée  seu  faciendum  incantuni;  per  quos  equidem 
fraudes  comituntur  et  multe  malicie;  propler  id  quod  viri  catholici 
zelo  christianitatis  non  leviler  indignantur;  exinde  providere  beni- 
gniter  dignaremur  circa  abusum  hujusmodi,  presertim  cum  ad  of- 
ficiorum  gestioneni  ipsoram  orthoduxi  sufficieutes  iuibi  valeant 
reperiri.  Quia  igitur  Judei  non  sunt  atollendi  favoribus  set  tanquam 
blasphemi  nominis  christiani  potius  depravendi  (?),  fidelitati  veslre 
districte  precipiendo,  mandamus  quatenus  ex  nune  Judeis  aliqua 
publica  non  comitatis  officia;  quin  imo  a  jam  comissis,  eos  prorsus 
amovere  curetis,  assumpturi  ad  illa  christianos  ydoueos  atque  pro- 
bos.  Safficit  enim  quod  Jadeos  ipsos  juxta  tolerantiam  humanitalis 
causa,  sic  pieLas  christiana  sustiaeat,   ut  tamen  eos  in  aliquo  non 

*  Archives  municipales,  GCr,  40. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  275 

extollal.    Présentes  auiem  litteras,  post  convenienlem pre- 

sentanti  efficaciler  in  antea  volituras.  Data  Massilie,  anno  Domini 
MoGGCVlII»  die  IX"  februarii  VI°  indictionis,  regnorum  nostrorum 
anno  XXIIIP. 

Cote  :  Quod  Judeî  non  audeantexercere  aliquod  publicum  oficium. 
Privilegi  que  los  Juzieus  non  deian  exercir  offici  public. 


II. 

Lettres  patentes  de  la  Reine  Jeanne  du  28  octobre  4Z77  K 

Johanna,  Dei  gracia  regina  Iherusalem  et  Sicilie,  ducatus  Apulie  et 
principatus  Gapue,  Provincie  et  Forcalquerii  ac  Pedimontis  comi- 
tissa,  senescallis  comitatuum  nostrorum  Provincie  et  Forcalquerii  ac 
vicariis  loci  Tarasconis  de  comitatibus  antedictis  vel  eorum  alteri, 
presentibus  et  futuris,  fidelibus  noslris,  graciam  et  bonam  volun- 
tatem.  Nuper  pro  parle  uuiversilas  hominum  loci  Tarasconis  nostro- 
rum fidelium,   per  eorum   spéciales  ambassiatores  seu  syndicos  ad 
Guriam   nostram  missos,  continuit  exposicio   reverens  facta   nobis 
quod  in  dicto  loco  Tarasconis  est  magna  quantitas  Judeorum  ini- 
micorum  fidei  christiane,  qui  licet  morari  consueverint  ab  antiquo 
in  aquantono  seu  gradivio   curie  versus  occidentem  eundo  versus 
castrum,  recto  tramite,  et  redeundo  per  traversiam  versus  ecclesiam 
monialium  saucti  Ilonorati;  quodque  in  edomada  sancta,  scilicet  a 
die  mereurii  sancta  u&que  ad  festum  Kesurrectionis  exclusive,  in  car- 
rerias  exire  causa  aliqua,  nisi  esset  medicus  et  pro  expressa  neces- 
sitate,  aliquateuusnousolebant;  nunc  tamen  non  verentur  inhabitare 
cum  eorum  neplianda  lamilia  mixtim  cum  Ghristiauis  eisdem,  et  multi 
eorum  conversari  iu  hospiciis  propriis  Ghristianorum  ipsorum,  mer- 
eau  tes  ibidem  et  alla  pro  libito  excerceutes  ipsorum;  quo  sequitur 
quod  nedum  rancores  et  odia  in  Ghristianos  eosdem  surrepunt,  immo 
Ghristiani  ipsi  consciencie  morsum  ipsorum  perniciosa  actione  cau- 
sante consequenter  incurruut;  super  quo,  pro  ipsorum  exponencium 
parte  provisionis  nostre   remedio  suppliciter  implorato,  nos  super 
hiis  observari  volentes  peniius  quod  est  fieri  antiquitus  consuetum, 
volumus,  et   fidelilati  vestre  de  certa   sciencia   nostra  presencium 
tenore  eomictimus  et  mandamus  quatenus,  si  ita  est,  ut  exponitur, 
et  Veritas  concordet  assertis,   quod  dicti  Judei  habitare  consueverint 
separati  a  Ghristianis  in  loco  predicto  et  non  alibi,  vos  et  vestrum 
quilibet,  prout  ad  vos  spectaverit,  morem  hujusmodi  solitum  et  anti- 
quum,  inhabilaudo  in  loco  predicto  separatim  a  Ghristianis  eisdem 
et  honeslestando,  per  Judeos  eosdem  in  dicta  sancta  edomata  obser- 
vari mandelis  ac  eciam  faciatis  per  oportuna  juris  remédia,  prout 
vobis  vedebitur  expedire.  Présentes  autem  licteras,  postquam  eas 

*  Archives  municipales,  GG,  40. 


276  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

inspexeritis,  quantum  et  quando  fuerit  oportunum,  pro  cautela  resti- 
tui  volumus  présentant!,  premisso  modo  vim  etefficaciam  habituras. 
Datum  Neapoli  per  virum  magnificum  Ligorium  Surulum  de  Nea- 
poli,  militem,  logothetam  et  prothonotarium  regni  Sicilie,  collatera- 
lem  consiliarium  et  fidelem  nostrum  dilectum.  Anno  Domini  millé- 
sime GCGLXXVIP  die  XXVIIP  mensis  Octobris  prime  indictionis, 
regnorum  nostrorum  anno  XXXV". 

G.  Petrillus  de  Americo. 

Privalage  contra  los  jussieus. 


iir. 

In  nomine  Domini  nostri  Jhesu  Ghrisli,  amen.  Anno  incarnacionis 
ejusdem  millesimo  GGGLXXVIIIo,  die  uliimo  mensis  januarii,  se- 
cunde  indictionis,  régnante  serenissima  principissa  domina  nostra 
domina  Johanna,  Dei  gracia  Jérusalem  et  Sicilie  regina,  existente 
féliciter  amen.  Ex  série  hujus  presentis  publici  instrument!  cunctis 
pateat  evidenler  quod  constituti  nobilis  Guillermus  Raynerii  et  dis- 
crettus  vir  Raymundus  Corderii,  sindici  et  sindicariis  nominibus 
universitatis  hominum  Tharasconis,  in  presencia  viri  egregii  Georgii 
de  Montemalo,  vicarii  et  capitauei  curie  reginalis  Tharasconis,  in 
nostra  curia  more  majorum  pro  Iribunali  sedentis,  et  presentibus 
ibidem  magislro  Rocello  Ferrerii,  surgico,  Gregudeto  de  Gapdesta- 
gno,  judeis,  baylonis  universitatis  Judeorum  dicti  loci,  exhibuerunt 
et  presentaverunt  eidem  quasdam  patentes  litteras,  emanatas  a  viro 
magnifico  domino  Fulcone  de  Agouto,  Vallium  Rellanie  Lucique 
domino,  comitatum  Provincie  et  Forcalquerii  senescallo,  a  tergo 
ipsarum  magno  senescallie  sigillo  in  cera  rubea  solito  more,  ut 
primo  facie  apparebat  sigillatas;  quas  execucioni  débile  juxta  conti- 
nenciam  earumdem  in  singulis  capitulis  petierunt  demandari  et  con- 
tinenciam  inipsis  mandare  observari,  prout  in  ipsis  litteris  scribitur, 
precipitur  et  mandatur;  quorum  litterarum  ténor  de  verbo  ad  verbum 
sequitur  et  est  talis  : 

Fulco  de  Agouto,  miles,  Vallium  Rellanie  Lucique  dominus,  comi- 
tatuum  Provincie  et  Forcalquerii  senescallus,  officialibus  reginalis 
curie  loci  Tharasconis  ad  quos  spectat  et  présentes  pervenerint  cui- 
libet  vel  locatenentibus  eorumdem,  presentibus  et  fuluris,  salutem  et 
dilectionem  sinceram.  Pro  parte  universitatis  hominum  dicti  loci 
presentate  fuerunt  nobis  noviter  quedam  reginales  patentes  liltere 
majestatis  suae   sigillo  magno  pendenli  in  cera  rubea  more  solito 

[sigillate],  tenorem  qui  sequitur  per  omnia  continentes*  : 

Supplicato  nobis  itaque  pro  parte  qua  supra,  ut  ad  exequtionem 
prescriptarum  litterarum  procedere  benignius  diguaremur.  Nos 
mandata  dominica  exequi  cum  débita  reverencia,  ut  convenit,  cu- 

^  Suit  la  transcription  des  lettres  patentes  de  U  reine  Jeanne  du  28  octobre  1377. 


1 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  277 

pientes  et  facere  quod  est  justum,  volumus  et  vobis  auctoritate 
reginali  qua  fungimur  tenore  presencium  precipiendo  mandamus, 
quatenus  si  dicti  Judei  predicti  loci  de  Tliarascone  infra  confines  in 
ipsis  litteris  reginalibus  expresses  habent  et  habere  possunt  man- 
siones  débitas  ad  sufficientiam  eorumdem,  Judeos  ipsos  infra  illos  et- 
non  alibi  eorum  mausiones  facere  et  tenere  faciatis,  et  alia^  in  pre- 
dictis  litteris  reginalibus  expressata,  sicut  justuna  convenit,  obser- 
vari.  Datum  Aquis  per  virum  nobilem  dominum  Veranum  Sclaponi, 
magne  reginalis  Curie  magistrura  rationalem,  locumtenentem  ma- 
joris  judicis  comitatuum  predictorum,  anno  Domini  CGGLXXVIIIo 
die  XVII»  decerabris,  secunde  indiclionis. 

Et  dictus    dominus  vicarius   et   capitaneus   cum   quanta   decuit 
reverenlia  et  honore  receptis  prescriptis  litteris,  sibi  per  dictos  sin- 
dicos  presentalis,   mandata   dicti   domini  Seuescalli  prout  tenetur, 
exequcioni  demandare   eupiens,    visis    et    inspectis    ac   diligenter 
examinatis  litteris  prescriptis  ac  tenore  ipsarum   in  singulis  suis 
capitulis  attento,  in  dicta  curia  more  majorum  pro  tribunali  sedens, 
presenlibus  sindicis  prelibatis,  et  exequcionem  tieri  de  conlentis  in 
eisdem  postulantibus  juxta  continenciam  earumdem,  citatis  et  evo- 
catis  ad  ipsius  domini  vicarii  et  capitanei  presenciam  Cregudeto  de 
Capdestagno  et  magistro  Rocello  Ferrerii,  judeis,  baylonis  universi- 
tatis  Judeorum  dicti  loci  de  Tharascone,  ibidem  etiam  presentibus, 
audientibus  et  intelligentibus,  exequendo  ordinavit  et  declaravit  et 
in  preceptum  dédit,  quod  Judei  prelibati  omnes  universaliler  ab  hac 
die  in  antea  stent  et  stare  debeant  et  mansionem  faciant  perpetuam 
a  domibus  magistrorum  Pétri  Marcelhani,  notarii,  et  Gaufridi  Bar- 
berii  exclusive,  ab  ipsis  domibus  citra,  videlicet  versus  castrum  et 
usque   domos   conventus   dominarum   monialium  dicti  loci  eundo 
versus  dictum  castrum  et  usque  domum  Barthicholi  eundo  per  car- 
reriam  versus  monasterium  predictuni  et  usque  furnuiii,  excludendo 
furnum.  Et  nichilominus  cognovit  et  ordinavit  et  declaravit  quod,  eo 
casu  quo  nécessitas  adesset  et  hoc  facere  v^luerint,  Judei  ipsi  possint 
se  relargare  et  edifficare  rétro  hospitia  eorumdem  usque  carreriam 
Poncii  Truqui,per  quam  progredilur  ad  ecclesiam  sancle  Marthe,  cum 
hac  condicione  quod  Judei  januas  seu  portas  nec  exitum  facere  possint 
rétro  in  carreria  predicta  prefati  Poncii  Truqui.  Et  predicta  omnia 
superius  declarata  prefatus  dominus  vicarius  et  capitaneus  ordinavit 
perpetuo  tenaciter  observari,  juxta  contineuciam   et  tenorem  litte- 
rarum  prescriptarum,  jubens  nichilominus  et  mandans  quod  Judei 
omnes   comorantes  extra  limites  predictos  se  reduxerint  hinc  per 
totum  futurum  mensem  febroarii,  sub  pena  librarum  centum  coro- 
natorum,  sic  quod  de  cetero  extra  limites  ipsorum  tabulas  [et]  botigas 
conducere   et    merchemoniam   vendere   in    mansiouibus  ipsis   non 
présumant,  nisi  in  diebus  martis,  que  est  dies  fori,  et  in  nundinis 
quibus  sit  licitum  tabulas  et  botigas  conducere,  quantum  durabuut 
dies  nundinarum  et  dies  fori  predicti,  excludendo  illos  qui  ad  collum 
vel  aliter  res  vénales  per  locum  ipsum  defferunt;  q[u]inymo  licitum 


278  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

sit  eisdem  res  ipsas,  ut  consueveruat,  portare  vénales  per  locum 
ipsum.  De  qiiibus  omnibus  dicti  syndici  publicum  instrumentum 
sibi  fieri  nominibus  quibus  supra  postularunt,  jubens  idem  do- 
minus  capitaneus  fieri  instrumeutum  pro  parte  universitatis  Judeo- 
rum  predictorum.  ActumTharascone,  ubi  supra,  in  presencia  nobilis 
Mercuroni.  Mercuerii  senioris,  magistri  Bernard!  Doati  nolarii,  Fir- 
mini  Garenci,  dicli  loci,  et  magislri  Lombard!  de  Pinhano,  notarii, 
dicte  curie,  testium  ad  premissa  vocatorum  et  rogatorum.  Et  me 
Stephani  Brocherii,  notarii  publie!  de  Sancto-Vincentio,  dyocesis 
Ebredunensis,  in  comitatibus  Provincie  et  Forcalquerii  auctoritate 
reginali  conslituti  et  nunc  dicte  curie  reginalis  ïbarasconis  vice- 
notarii,  qui  requisitus  et  rogatus  hanc  cartam  publicam  scripsi  et 
signo  meo  solito  signavi. 


IV. 

Action  intentée  par  la  Communauté  de  Tarascon  contre  les  Juifs  habitant 
la  même  ville  afin  de  les  contraindre  à  contribuer  aux  tailles  et  impo- 
sitions; arrêt  rendu  en  leur  faveur  et  fondé  sur  un  privilège  accordé 
aux  Juifs  par  Louis  II,  comte  de  Provence^. 

—  9  décembre  1400  — 

Ludovicus  secundus,  Dei  gratia  rex  Jérusalem  et  Sicilie,  Ducatus 
Apulie,  Dux  Andegavie,  comictatuum  Provincie  et  Forcalquerii, 
Genomanie  ac  Pedemontis  cornes,  vicariis  et  officialibus  aliis  curiarum 
nostrarum  civitaium  Massilie,  Arelatensis  et  Aquensis^  necnon  ville 
Tharasconis,  ceterisque  lam  officialibus  quam  comissariis  per  alias 
civitates,  loca  et  castra  dictorum  comitatuum  nosirorum  Provincie  et 
Forcalquerii,  ad  quem  spectare  poterit,  presentibus  et  futuris  et  cui- 
libet  vel  locateneutibus  ipsorum,  fidelibusnostris  dilectis,  graciam  et 
bonam  voluntatem.  Licet  -ex  capilulis  in  diversis  consiliis  genere- 
libus  trium  statuum  diclorum  comitatuum  nostrorum  Provincie  et 
Forcalquerii  factis,  capitulatum  et  ordinatum  extiterit,  quod  omnes 
et  quecumque  persoue  locorum  diclorum  comitatuum,  cujuscumque 
status  seu  condictionis  existant,  teneantur  et  debeant  pro  bonis  et 
rébus  quibuscumque  ipsorum  et  facultate  illorum,  cum  hominibus  et 
personis  universitatum  locorum  in  quibus  et  ipsorum  territoriis  ipsa 
bona  possident,  contribuere  et  solvere  in  talliis  et  impositionibus 
pro  solucione  donorum  majestati  noslre  concessorum,  ut  in  ipsis 
capitulis  lacius  continetur  ;  quia  tamen  Judei  dictorum  comitatuum 
nostrorum  Provincie  et  Forcalquerii  et  terrarum  eis  adjacentium, 
majestati  nostre  multa  donaria  obtulerunt  et  oflerunl  et  per  nostram 
curiam  exhiguntur  ab  eis,  que  multo  plus  ascendunt  quam  ea  que 
solverant  seu  solvere  possent  pro  bonis  et  rébus  ipsorum  cum  uni- 

1  Archives  municipales,  FF,  5. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  279 

versitatibus  ipsorum  locorum  in  talliis  et  oneribus  incumbentibus 
eis,  ex  quo  non  debent  racionabiliter  dupplici  ouere  agravari,  nec 
umquam  fuit  intencio  nosira  talis  ;  ea  propler,  in  hiis  merilo  provi- 
deotes,  volumus  et  vobis  harum  série  de  nostra  certa  scienlia  preci- 
pimus  et  mandamus  quathenus  Judeos  ipsos  utriusque  sexus,  qui 
nunc  sunt  et  pro  tempore  fuerint  in  ipsis  comitatibus  et  terris  adja- 
centibus  eis,  ad  solveudum  pro  bonis  et  rébus  ipsorum  que  habenl 
seu  ipsos  habere  continget  in  illis  cum  universitatibus  lerrarum, 
civitatum  et  locorum  ipsorum  comittatuum  et  terrarum  eis  adjacen- 
tium,  et  in  talliis  et  imposicionibus  ac  oneribus  pro  premissis  donis 
nobis  factis  seu  in  futurum  faciendis,  indictis  et  indicendis  ac  illorum 
solucionibus  de  cetero  in  personis  vel  bonis  ad  cujusvis  instanciam 
nuUathenus  raolestetis  vel  agravestis  aut  molestari  seu  agravari 
parciamini  quoquomodo,  quantum  indignacionem  nostram  et  penam 
nostro  vobis  iufulgeudam  arbitrio  cupitis  non  subire.  Quinymo,  si 
quid  fortasse  contra  formam  presencium  fieri  contingeret  autquomo- 
dolibet  actemptari  contra  eos,  in  génère  vel  specie,  illud  revocetis  et 
redducatis  slatui  premitivo  capitulis  specialibus  seu  generalibus  ac 
ordinacionibus,  et  litteris  in  conlrarium  factis  et  concessis  ac  forsilan 
faciendis  et  concedendis,  nonobstantibus  quibuscumque,  presentibus 
opportunis  inspectis  remanenlibus  présentant!.  Daium  in  civitate 
nostra  Massilhie  per  egregium  et  nobilem  virum  Johannem  Loveli, 
railitem  consiliarium  et  fidelem  nostrum  dilectum,  mandate  nostro 
locumtenentem  majoris  judicis  comitatuum  predictorum.  Anno 
Domini  millesimo  quadringentesimo  nono,  die  prima  mensis  decem- 
bris,  lercie  indictionis,  regnorum  vero  nostrorum  anno  vicesimo  sexto. 
Per  regem,  Matbeo  de  Bellavaiie,  milite  présente.  P.  de  Rosseto. 
gratis  reglstrata. 

V. 

Lettres  patentes  du  roi  Louis  II  par  lesquelles  il  est  spécifié  que  la 
sauvegarde  accordée  aux  Juifs  ne  doit  pas  porter  préjudice  aux  privi- 
lèges de  la  Communauté  '. 

—  13  avril  U04  — 

Ludovicus  secundus,  Dei  gracia  rex  Jérusalem  et  Sicilie,  ducatus 
ApuUe,  principatus  Gapue,  dux  Andegavie,  comitatuum  Provincie 
et  Forcalquerii,  Genomanie,  Pedimontis  et  Ronciacii  cornes,  vicario 
et  judici  ville  nostre  curie  Tiiarascouis  ac  ceteris  officialibus  nostris 
presentibus  et  futuris  in  dictis  comilalibus  nostris  Provincie  et  For- 
calquerii consiiluiis,  quacumque  premineucia  uolenlur,  quibus 
présentes  littere  pervenerint  eorumque  cuilibet  vel  locateneniibus 
eorumdem  fidelibus  nostris,  graciam  et  bonam  volunlatem.  Cum  per 

^  Archivei  municipales,  AA,  5. 


280  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

majestatem  noslram,  Judei  omnes  in  dictis  comitatibus  nostris  habi- 
tantes, positi  et  retenti  noviter  extiterint  sub  salvagardia  et  protec- 
tione  nostra,  et  propterea  per  sindicos  et  consilium  dicte  ville  nostre 
Tharasconis  supplicatum  querelando  exititerit  eidem  majestati  nostre 
quod  ipsa  salvagardia  de  directe  redundat  contra  eorum  privilégia  et 
libertates  tam  per  majestatem  nostram  qiiam  predecessores  nostros 
eisdem  bénigne  concessa  ;  Nos  cupientesque  ipsos  supplicantes  sub- 
ditos  nostros  in  eorum  privilegiis  et  libertatibus  manutenere  cum 
deliberatione  nostri  exislentis  consilii,  tenorepresencium  deciaramus, 
quod  propter  ipsam  salvamgardiam   non   intendimus  nec  intencio 
majestatis  nostre   fuit  nec  est  derrogare  nec  prejudicare  in  aliquo 
directe  vel  indirecte,  libertatibus  et  privilegiis  dictorum  subdictorum 
nostrorum  ville  nostre  Tharasconis,  premisso  modo  concessis,  sed 
ipsa  privilégia  et  liberlates  observare  intendimus.  Qaocirca  vobis 
antediclis  officialibus  nostris,  tenore  presentium  precipimus  et  man- 
damus    expresse    quatenus    formam    declarationis   hujusmodi    per 
majestatem  nostram  factam  temporibus  vestrorum  officiorum  invio- 
labiliter  observetis  et  observari  faciatis,  si  indignationem  majestatis 
nostre  cupitis  evitare,  presentibus  débite  exequtis  remanentibus  ad 
cautelam  présentante  Datum  in  villa  nostra  predicta  Tharasconis  per 
nobilem  et  egregium  virum  Poncius  Cayssii,  licenciatum,  primarum 
appellationum  et  nuUitatum  dictorum   comitatuum  judicem,  man- 
date  nostro  munc  vacante   officio   majoris  judicis  locumtenentem, 
consiliarium  nostrum  fîdelem  dilectum,  die  tercia  décima  aprilis, 
anno  Domini  millesimo  quadringentesimo  quarto,  xii«  indictionis. 

VI. 

Lettres  patentes  du  roi  René  données  à  Tarascon  le  20  septembre  H60^. 

(h'xtrait.) 

Item  pariter  supplicant   dicti  sindici    [ville    Tharasconis] 

dicte  sacre  Régie  Majestati  quathenus  E.  S.  R.  M.  dignetur  con- 
firmare  eidem  universitati  quodam  privilegium  per  bone  memorie 
tune  dominum  Jherusalem  et  Sicilie  regem  Robertum  concessum,  ne 
Judey,  christiane  prosequlores  fidey,  hosles  etiam  Grucifixi,  in  antéa 
admictantur  ad  gerendum  officia  publica  in  locopredicto  Tharasconis, 
puta  ad  ponderandum  bladum  vel  farinam,  necnon  ad  subastandum 
publiée  seu  faciendum  iuquantum  vel  quodcumque  aliud  publicum 
officium  ;  et  de  novo  etiara,  si  placet,  dicte  universitati  concedere,  ne 
in  anlea  contra  quemcumque  christianum  portare  habeant  quascumque 
licteras  a  curia  camere  rationum  civitatis  Aquensis  aut  quacumque 
alia  curia  emanandas.  nec  illas  exequi  lacère,  nisi  esset  pro  eorum 
propriis  debitis,  cum  multos  fraudes  dietim  in  premissis  fiendis 
ipsi  Judey  comictant  et  multas  malicias  et  dolozitates  ac  extortiones 

'  Archives  municipales,  AA,  5. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  Ar.K  281 

illicilas  et  maxime  contra  orthodoios  seu  chrislianos  ;  et  hoc,  si 
placet,  sub  formidabili  pena,  ut  illius  metu  a  premissis  fiendis  om- 
niDO  désistant.  —  Tenor  responsioiiis  :  Viso  per  génies  sui  consilii 
privilégie  premencionato,  Regia  M.  jubet  ipsum  privilegium  inviola- 
biliter  et  ad  unguem  observari,  et  in  illius  observacionem  prohibet 
omnibus  et  singulis  Judeys  ne  quevis  officia  publica  in  eadem  villa 
Tharasconis  directe  vel  indirecte  assuraere  vel  exercere  présumant, 
et  sub  pena  quinquaginta  marcharum  argenti  pro  quolibet  et  vice 
qualibet  qua  contra  factum  fuerit  incurrenda.  VA  preterea  ipsa  R.  M. 
variis  atque  plurimis  justis  respectibus  mola,eisdem  Judeys  et  cui- 
libet  ipsorum,  ut  comissariis,  portum  licterarum  sue  curie  camere 
sub  pena  predicta  inlerdlcit  et  prohibet  suis  officialibus  presentibus 
et  futuris,  etiam  sub  eadem  pena,  inhibendo  ne  Judeos  ipsos  contra 
formam  dicti  privilegii  aut  presentis  responsionis  seu  concessionis 
ullo  modo  de  cetero  admictant,  licteris  quibuscumque  contrariis  non 
obstantibus  in  hac  parte. 

VII. 
Pro  regia  curia  Tharasconis. 

Anno  quo  supra  et  die  décima  nona  septembris.  Mosse  Salamo, 
judeus  de  Tharascone,  ex  certis  de  causis  animum  suum  juste  mo- 
ventibus,  promisit  non  ludere  ad  taxillos  nec  aiiquo  alio  ludo  quo- 
cumque  in  quo  currat  argentum,  hinc  ad  sanctum  Michaellum  nec 
a  festo  sancti  Michaellis  proxime  futuro  in  unum  annum. 

Et  casu  quo  contrarium  faceret,  se  submisit  ad  penam  decem 
florenorum,  aplicandorum  medietalem  curie  Tharasconis  et  aliam 
denuncianti. 

Quam  penam  in  se  liberaliter  et  voluntarie  assumpsit  et  com- 
mlssam  esse  voluit,  me  nolario  stipulanti  pro  fisco. 

Obligavit  bona  sua  curie  Tharasconis.  x 

Juravit. 
Renunciavit. 

Actum  Tharascone  in  domo  mei  nostarii,  presentibus  Trophimo 
Bernardi  et  Merigono  Auffandi. 

(Notes  brèves  du  notaire  Antoine  Chapati.  Vol.  18,  i°  461".)  [1438]. 

VIII. 

— - 13  mars  1425  (Nouveau  style  1426)  — 

Pro  Franqua,  uxore  magistri  Comprati  Asser,  judei  phisici  de  Tha- 
rascone, teslamentum  ultiraum. 

Anno  et  indiclione  quibus  supra  et  die  décima  tercia  mensis 
marcii.  Noverint  universi  etc.  quod  cum  nil  morte  cercius  sit  ni- 


282  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

chilque  incercius  hora  mortis  et  omnia  sint  hominum  tenui  pen- 
dencia  philo  et  subito  casu  que  valuere  ruuntelc. 

Idcirco  ego  Franca,  uxor  niagistri  Gompratri  Asser,  Judei  phisici 
de  Tliarascone,  sana  mente  per  Dei  graciam,  licet  lauguens  et  debilis 
corpore  etc.  in  mea  bona  et  saaa  coufitens  memoria,  si  me  permiserit 
divina  potencia  etc.  meum  testamentum  ultimum  nuncupativum  el 
mea  ultima  voluntas  ac  novissimum  elogium  facio  in  modum  qui 
sequitur  Infrascriptum. 

Inprimis  quandocumque  viam  universe  carnis  ad  mandatum  divi- 
num  me  ingredi  contiugerit  etc.  animam  meam  seu  ppirilum  meum 
recommendo  in  manibus  altissimi  Greatoris,  Dei  vivi  etc.  et  pre- 
cibus  profetarum  Abram,  Ysac  et  Jacob,  Moysi,  Arou,  Danieiis  el 
Elie  at  Ennoc,  servitorum  Dei  etc.  Et  eligo  sepulluram  corpori  meo 
in  simienterio  Judeorum  dicti  ioci  Tharasconis,  siiuato  extra  portale 
Condamine,  vocatum  sumenterium  antiquum  magnum. 

Et  primo  lego  et  dari  jubeo  de  bonis  meis  illustrissimo  principi  et 
domino,  domino  régis  Ludovico  lercio,  Dei  gracia  Jherusalem  et 
Sicilie  etc.  unum  florenum  monele  currentis  semel  tantum  solven- 
dum. 

Et  pro  forefactis  meis  sertis  et  incertis  esmandandis  [el]  resii- 
tuendis,  accipio  de  bonis  meis  michi  a  Deo  collatis  florenos  auri 
quinque,  valoris  cujuslibet  illorum  XX!!!!»'  solidorum  monele  cur- 
rentis in  Tharascone,  dandos  et  distribuendos  amore  Dei  pro  salule 
anime  mee  et  in  redempcione  meorum  pecaminum. 

Et  primo  lego  de  dictis  quinque  tlorenis,  amore  Dei,  luminarie 
scole  seu  sinagogue  presentis  Ioci  Tharasconis  duos  florenos  cura  di- 
midio. 

Item  lego  de  dictis  quinque  florenis,  amore  Dei,  in  reparacioue 
sumenterii  antiqui  Judeorum  Tharasconis  alios  duos  florenos  cum 
dimidio. 

Item  lego  de  aliis  bonis  meis  Vitalo  Meyr,  judeo  de  Tharascone, 
phelezeno  meo,  filio  Meyr  Gomprati,  iilii,  mei,  amore  Dei,  vigiuti 
quinque  florenos  monete  currentis  in  Tharascone. 

Item  lego  de  aliis  bonis  meis  magistro  Salamono  Dieulosal,  fratri 
meo,  jure  institucionis  pro  omni  jure  sibi  competenli  in  et  super 
bonis  meis,  quinque  florenos. 

Ilem  lego  de  aliis  bonis  meis  Dieulosal,  filio  magistri  Salamonis 
Dieulosal,  pro  omni  jure  competenli  in  et  superomnibus  bonis  meis, 
quinque  florenos. 

Item  lego  de  aliis  bonis  meis  Vitalo,  filio  Astrugii  de  Largentiera 
affini  meo,  quinque  florenos. 

Item  lego  de  aliis  bonis  Reginete,  fille  Astrugii  de  Largentiera, 
unara  meam  rampam  *  de  griso. 

Item  lego  Sterele,  uxori  Meyr  Gomprati,  filii  mei,  unum  ex  meis 
mantellis,  illum  quem  placibit  gadiatoribus  meis  iufrascriptis. 

*  Pour  raupam. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  283 

Item  lego,  amore  Dei,  Mondete,  consobrine  mee  de  Avinione, 
omnes  raupas  measde  sobre  semana,  excepto  unam  quam  dari  jubeo 
Blanquette, uxori  Vilalis  Vidas  de  Sostal.arbilrio  gadiatorum  meorum 
infrasciiptorum. 

Item  lego,  jure  instilucionis,  Meyr  Gomprat,  filio  meo,  quinque 
solidos,  et  quod  plus  in  bonis  meis  petere  non  possit,  quacumque 
racione  sive  causa,  in  quibus  ipsum  Meyr  heredem  particularera 
iDStituo. 

Item  de  aliis  bonis  meis  cuilibetex  gadiatoribus  meis  infrascriptis 
unum  florenum  semel  dumtaxat  solveudum. 

Item  lego  de  aliis  bonis  meis,  amore  Dei,  Gresqueto,  (îlio  magistri 
Dieulosal  de  Largentiera,  très  florenos  semel  dumiaxat  solveudos. 

Et  quia  heredis  institucio  est  capud  et  fandamentum  etc.  igitur  in 
omnibus  autem  aliis  bonis  meis,  mobilibus  et  immobilibus  seseque 
moyentibus,  Juribus,  actionibus  et  racionibus  quibuscumque,  pre- 
sentibus  et  futuris,  ubicumque  sint  et  qualiacumque  fuerint  aut 
quocumque  nomine  noncupeniur  seu  eciam  censeantur  et  in  quibus- 
cumque locis  consistant,  michi  heredes  meos  universales  iustituo  et 
ore  meo  proprio  nomiuo  et  esse  voio,  videlicet,  magistrum  Bonda- 
vinum  Gomprati,  filium  meum  communem  et  magistri  Gomprali  As- 
seris,  mariti  raei,  in  medietatebonorum  meorum  ;  in  aiia  vero  medie- 
tate  Mosse  et  Vitalem  Meyr,  Iraires,  phelczenos  meos,  filios  Meyr 
Gomprati,  filii  mei  commuuis  et  dicti  magistri  Gomprati  Asser,  ma- 
riti mei  ;  in  alia  medietate  bonorum  meorum  predictorum,  substi- 
tuendo  dictos  phelezenos  meos  ad  invicem,  ila  quod  pars  primi  mo- 
rientis  sine  liberis  legiiitnis,  a  suo  cGr[)ore  procreatis,  [lerveuiat  ad 
superstitem  eorumdem,  ordiuando  quod  omnia  bona  mea  vcndi  de- 
beant  et  distrahi,  ita  quod  ipsis  disiractis  vel  non  dislraclis,  fructus 
pecuniarum  ex  bonis  distratrendis  habendarum,  vel  bonis  meis,  si 
Don  dislrahanlur,  perveniantcommuniter  tanlum  modo  ad  utilitatem 
omnimodam  dictorum  heredum  meorum  supra  descripiorum,  et  non 
alias  neque  aliter;  declarando  quod  licet  de  jure  quitquid  filius  ac- 
quirit,  aquiritur  patri  ;  quo  ad  fructus  volo  et  ordiuo  magistrum 
Gompratum  Asser,  maritum  meum,  esse  exemptum  a  percepcioue 
dictorum  fructuum  et  eciam  predictum  Meyr  Gomprat,  lilium  meucn, 
patrem  dictorum  Mosse  et  Vilalis,  phelezenorum  meorum,  heredes 
institutorum,in  medietate  quorumcumque  bonorum  meorum. 

{blanc  dans  le  texte), 
Executores  facio. 

[blanc  dans  le  texte). 

Acta  fuerunt  hec  in  domo  dicti  magistri  Gomprati  Asser,  presen- 
libus  nobili  Ferario  de  Tharascone,  Stéphane  Vianesii,  Stephano 
Porterii,  Stephano  Duranti,  et  Philipoto  de  Sancto  Genesio,  Gui- 
goneto  Fabri,  et  Bernardo  Garneri,  tam  de  Tharascone  quam  habi- 
tatoribus. 

(Chapati,  N.  B.  1425,  f*  388). 


284  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

IX. 
Cieutadanagium  'pro  Mordacays  Vital  Cohen^  jtideo  de  Salone  *. 

In  nomine  Domini  Dostri  Jhesu  Christi,  amen.  Anno  Incarnatiouis 
ejusdem  Domini  millesimo  quadriugentesimo  sexa^esimo  seplimo  et 
die  vicesima  seeunda  mensis  aprilis,  régnante  triumphaliter  victo- 
riosissimo  etc.  Noverint  universi  seriem  hujus  presentis  publici  ins- 
trumeuti  inspeciuri  quod  existens  et  personaliter  constitutus  ante 
preseDciam  uobilis  viri  Geronimi  de  Manellis,  locumtenentis  nobilis 
viri  Jacobi  de  Manellis,  ejus  fratris.  Curie  Régie  ville  Tharasconis 
viguerii,  Mordacays  Vidal  Cohen,  judaeus  de  Salone,  presenlibus  no- 
bili  et  honorabili  viris  Francisco  Genoyni  et  Petro  Aycardi,  sindicis 
dicte  ville  Tharasconis,  dicens  scire  et  ex  sui  cerla  sciencia  tenere 
firma  instructione  condigna,  Tharasconenses  cives,  tam  infra  pre- 
sentem  villam  quam  extra,  fulgere  in  pluribus  et  diversis  locis  pa- 
trie Provincie  et  patrie  Lingue  Occitane  privilegiis,  franchesiis,  liber- 
tatibus,  immunitatibus  et  prerogativis  pluribus,  quadam  digna  ho- 
noris preferencia  nobilitate  decorari  ;  ex  quibus  decus,  comodi- 
tatem  et  presidia  singulariter  consequntur;  et  ipsarum  libertatum, 
privilegiorum  et  franquesiarum  quibus  seu  quarum  suffragiis  deco- 
rari merito  postulat  velut  ipsius  ville  cives,  pari  preferentia  honora- 
biliter  valeant  prefulgeri,  cum  sit  presto  ipse  Mordacays  Vidal  Cohen 
pro  suorum  facultate  bonorum,  ut  cives  dicte  ville  prout  et  alii  cives 
ejusdem  onera  equidem  tollerare;  ea  propler  prefato  domino  vice-vi- 
guerio  humiliter  supplicavit,  quatenus  ipse  Mordacays  Vidal  Cohen 
in  civem  dicte  ville  Tharasconis  graciose  dignetur  admiclere,  cum 
libertatum  munimiue  quibus  ubilibet  freti  sunt  tam  in  personis 
quam  bonis  cives  ipsius  ville  ;  qui  quidem  dominus  viguerius  dicte 
prebens  requisicioni  assensum,  prius  dicto  supplicante  in  domini 
vice-viguerii  manibus  ad  aquineam,  more  judayco,  prestito  jura- 
mento,  quod  fieri  premissa  nuUathenus  requirit  in  fraudem,  dolum 
et  lezionem  curie  régie  vel  alicujus  persone  cujuspiam,  ipsum  Mor- 
dacays Vidal  Cohen  aliorum  ejusdem  ville  civium  cetui  aggregando 
in  civem  presentis  ville  Tharasconis  recepit  cum  libertalibus  et  im- 
munitatibus aliis  civibus  dicte  ville  attributis  ab  antiquo  cum  pactis 
sequentibus.  Et  primo  fuit  de  pacto  inier  dictum  Mordacays,  ju- 
deum,  novum  civem  et  ipsos  dominos  sindicos,  videlicet  quod  dictus 
Mordacays  Cohen  tenebilur  et  prout  dicta  facere  promisit  majorera 
partem  bonorum  suorum  couvertere  in  bonis  mobilibus  et  immobi- 
libus  infra  présentera  villara  Tharasconis  seu  ejus  territorium  infra 
très  annos  a  die  presenti  in  antea  computandos.  Quibus  sic  peractis, 
dictus  Mordacays  Vidal  Cohen,  judeus,  novus  civis,  ipsi  domino 
vice-viguerio  vice  et  nomine  prefati  domini  noslri  Régis  et  suorum 

*  Pierre  Margoti,  nolaire,  ^dI.  07,  i"  30.  Ëlendues. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  285 

successoruin  ac  ofQcialium  suorum  et  per  ipsum  dominum  vigueriurn 
et  cuilibet  eorumdem,  promisit  et  sollemniter  coQvenit  fore  eis  per 
imperpeluum  conliouatis  aclibus  obedieos  et  fidelis,  dampna  et  mala 
quecumque  et  discriminosa  pericula  si  que,  quod  absil,e  longius, 
meditarentur  seu  possenL  quovismoiio  inLueri  pretextu  adversus 
dictam  Regiam  Excelleuciam  ac  officiarios  seu  Curiam  ejus,  palam 
generari,  publiée  vel  occulte,  totis  suis  viribus  evictare  vel  manifes- 
tare  confeslim  et  eoruin  compendia  ultroneo  animo  procurare.  Rur- 
sum  etiam  ipse  civis  novus  noviter  receplus  promisit  et  efficaciler 
conveuit  dictis  dominis  sindicis  et  michi  notario  subscripto  nomiue, 
loco  et  vice  universilatis  hominum  presenlis  ville  Tbarasconis  et 
singularium  personarum  ejusdem  quorum  iuterest  et  poterit  inte- 
resse, ac  predictis  dominis  sindicis  ac  michi  notario  ipsis  et  cuilibet 
eorum,  solvere  et  contribuere  pro  valore  et  modo  facultatum  suarum 
sine  perpendicionis  obstaculo  in  taliis,  questis,  muluis,  daticiis  et 
adempris  dicte  ville,  in  cavalcaiis  et  excubiis  pro  dicta  villa,  cum 
casus  coutingerit  accedendi,  ac  eliam  angaria  et  peraugaria  ac  cetera 
alla  omnia  onera  dicte  ville  pro  suorum  facultate  bonorum  suppor- 
tare,  prout  dicte  ville  cives  alii  supportabunt,  necnon  ubilibet  etiam 
Tbarasconenses  consulatui  ville  Tbarasconis  assistere  et  subesse 
promisit  et  nichilominus  cum  uxore,  liberis  et  familia,  si  quas 
habet,  infra  presentem  villam  Tharascoois  facere  stagiam  et  fovere 
larem  lumenque  ac  omnia  et  quecumque  ad  honorem  et  fidelilatem 
ac  comodum  dicte  ville  pertinentia  vel  pertiuere  videbuntur,  trac- 
tabit,  faciet  et  complebit  pro  posse  suo,  et  quod  nunquam  erit  in 
consilio  vel  in  facto  quod  dicta  villa  Tbarasconis  et  cives  ipsius 
amictant  seu  perdant  honorem  suum  aut  jura  sua  vel  bonum  sla- 
tum  eorum,  nec  erit  aliquo  tempore  dicte  ville  in  dampnum  de  suis 
secreiis  vel  juribus  aut  aliis  que  ad  honorem  et  ulilitatem  ac  como- 
dum ipsorum  videbuntur  pertinere.  Que  omnia  prefatus  Mordacays 
Vidal  Goben,  civis  novus  noviter  receptus,  acteudere,  complere  et 
inviolabiter  observare  promisit  et  juravit  ad  aquineam,  more  judayco, 
una  cum  reffectioue  omnium  dampnorum  et  interesse  propterea 
quoquomodo  fiendorum  et  substinendorum.  Pro  quibus  omnibus  te- 
nendis,  actendendis,  complendis,  prefatus  Mordacays,  judeus,  novus 
civis,  obligavit,  yppolliecavit  et  submisit  se  ipsum  ac  omnia  bona 
sua,  mobilia  et  immobilia,  presencia  ac  fulura,  viribus  curiarum 
presentis  ville  Tbarasconis,  Gamere  Rationum  Aquensis  et  episcopalis 
Avinionis  et  generaliter  cujuslibet  alterius  secularis  Gurie  infra  co- 
mictatus  Provincie  constitute,  sub  omui  juris  et  facti  renunciacione 
ad  bec  necessaria  pariter  et  cautella.  De  quibus  omnibus  premissis 
tenendis,  dicti  domini  sindici  et  novus  civis  pecierunt  eis  fieri  pu- 
blicum  instrumentum  per  me  notarium  subscriptum. 

Actum  Tharasconein  domo  heredum  Anthonii  de  Vivariis,  presen- 
tibus  ibidem  nobili  Elziario  Albe,  filio  coudam  domini  de  Ruppemar- 
tina,  et  Micbaelle  Lipassi  de  Tbarascone,  testibus  ad  premissa  vocatis. 

Et  me  petro  Margoti  notario. 


286  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 


X. 


Obligacio  pro  eodem  reverendo  in  Christo pâtre  domino  Leodegario, 
Dei  gracia  Vapincensi  episcopo  *. 

Anno  et  indictione  quibus  supra  et  die  veneris  prima  mensis  junii. 
Sit  notum  etc.  quod  MayroQUS  de  Meyrarguis  judeus  de  Tharascone, 
gratis  et  ex  ejus  certa  sciencia,  bona  fide  ae  sine  omni  dolo,  per  se  et 
suos  etc.  promisit  solempniter  et  convenit  et  se  locavit  cum  reverendo 
in  Christo  pâtre  domino  et  domino  Leodegario,  Dei  gracia  Vapincensi 
episcopo,  ibidem  presenli,  stipulanti  et  recipienti  pro  se  et  suis  etc., 
videlicet  a  die  lune  proxime  veoienti  in  duos  menses  et  médium 
proxime  futuros,  adfaciendum  suas  dicli  domini  episcopi  opéras  etc. 
pro  precio  seu  salario  dictorum  duorum  mensium  cum  dimidio  trium 
florenorum  auri,  valoris  cujuslibet  illorum  viginti  quatuor  solidorum 
etc.,  quos  realiter  habuit  reali  et  continnua  numeracione  precedenli 
in  meris  grossis. 

Pactum  etc. 

Excepcioni  etc. 

Promisit  servire  legaliter  etc. 

Pro  quibus  obligavit  se  et  personam  suam  realiler  et  persoùaliter 
curiis  camere  racionum  Aquensis  et  presentis  loci  Tharasconis,  curie 
parvi  sigilli  Montispessulani  et  Gabeolis,  curie  camere  apostolice 
domini  nostri  Pape  ejusque  audiLoris  et  vice-auditoris  etc. 

Ita  actendere  etc. 

Juravit  etc. 

Renunciavit  etc. 

De  quibus  etc. 

Actum  Tharascone,  presentibus  nobili  Eymerico  de  Tharascone, 
nobili  Petro  de  Cardenis  et  domino  Anthonio  Robaudi,  presbitero, 
habitatoribus  Tharasconis. 


XI. 
Pro  curia  '. 

Anno  quo  supra  et  die  tercia  mensis  januarii.  Cum  niagister  Jacob 
Jacob  de  Luuello.  judeus  presentis  ville  Tharasconis,  assueverit 
ludere  ad  tacillos,  que  fueruut  sibi  multum  dampnosa  et  inhonesta; 
eterat  sibi  difTamacio,  dicens  se  non  posse  astinere  a  premissis,  niai 
mediautibus  infrascriptis. 

Hinc  fuit  et  est  quod  anno  et  die  supra  proxime  descriptis,  prefatus 
magister  Jacob  Jacob  de  Lunello,  scienter  et  sponte  et  ex  motu  suo 

*  Notes  brèves  du  notaire  Aatoine  Ghapati,  vol.  2.  f»  62.  !•'  juin  1425. 

*  Noies  brèves  du  notaire  Jean  Murajre,  vol.  59, f»  13  1441), 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  281 

proprio,  gratis  promisit  et  solempniterconvenit  raichi  notario  publico 
infrascripto,  ut  et  tanquam  communi  et  publiée  persone,  presenli, 
stipuiumi  et  recipieiili  noiniiie  el  vice  oiniiiurn  et  sirjf<ulorijm  'quorum 
interest  et  intéresse  poterit  lu  futuruiii,  qiiod  ipse  non  ludet  ad 
ludum  taciilorum  nec  ad  aliquern  aliuin  ludum  ad  argeiituin  nec 
valorem  argent),  et  hoc  sub  pena  pro  vice  qualibet  trigenia  quinque 
florenorum,  aplicandorum  decem  tlor.  fisco  illius  loci  in  quo  depre- 
heuderetur  ludentem,  quinque  Qor.  vicario,  quinque  tlor.  judici, 
quinque  flor.  accusanli  et  quinque  flor.  luminarie  Judée  et  quinque 
tlor.  elemosine,  quam  penam  in  se  gratis  assu[m]psit  et  voluit  quod 
domini  vicarius  nec  judex  nec  aliqua  alia  persona  possint  illam  sibi 
remictere  ;  et  casu  quo  aliquis  remicteret  partem  suam,  quod  illa 
pars  illius  remictentis  perveniat  et  pervenire  debeat  medietatem  fisco 
et  aliam  denuacianti. 

Et  predicta  actendere  promisit 


Actum  Tbarascone  in  apotheca  mei  notarii,  presentibus  Anthonio 
de  Balma,  Jacobo  Laugerii. 
Et  me  Johaune  Muratoris. 


XII. 

Délibérations  du  Conseil. 

Item  fuit  ordinatum  quod  omnes  judei  teneantur  solvere  pro 

eorum  mercaturis  et  deuariis  in  gabella  universitatis  Tharasconis  ad 
racionem  ad  quam  levantur  '. 

Item  fuit  ordinatum  quod  judei  non  debeant  tenere  viueas 

vel  terras  in  lerritorio  Tharasconis,  prout  coutinetur  in  privilégie 
nobis  super  hoc  concesso,  nec  exercere  alia  que  per  privilégia  uosira 
seu  staluta  Provincialia  suut  eis  totaliler  interdicta  ;  nec  quod  aliquis 
christianus  audeat  vel  présumât  laborare  seu  recipere  vineas  seu 
terras  ad  facheriam  seu  allas  '. 

Item  fuit  ordinatum,  volente  et  consenciente  domino  vicario 

predicto,  quod  ipse  precipiat  judeis  quod  in  tempus  debitum  per 
eundem  eisdemprefixum  vendant  et  vendere  leaeanlur  terras,  vineas 
et  possessiones  quascumque  quas  lenent  in  enervacionem  seu  lesio- 
nem  ac  prejudicium  statuloruni  seu  privilegiorum  uostrorum.  Kl  de 
precepto  ad  uostri  cautelam  inde  conficialur  iuibi  inslrumentum. 

Et  inhiberi  eisdem  ne  *  tenere  averia  nec  alia  contenta  in  privilegio 
dicte  universitati  concesso  *. 

»  BB,  1,  l»  188",  11  décembre  1381. 

*  Ibid.,  fo  222,  30  octobre  1382. 

*  Pour  non. 

*  Ibid.,  i*  224,  11  novembre  1382. 


288  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

Item,  quod  judei    hujus   universitatis  habeant   de   eorum 

pecuniis  lucrum  competens  et  non  ultra  *. 

Item,  quod  predicti  ambaxietores  conentur  obtinere  licteras 

a  domino  vice-senescallo  quod  Judei  nullos  vexare  habeant  qui  eisdem 
reperia[n]tur  obligati,  donec  et  quousque  pax  et  tranquillitas  in 
Provincia  evenerit  super  insultu  et  guerris  in  Provincia  nunc  exis- 
tentibus  ;  ad  que  fuerunt  electi  Guillermus  Raenerii  et  Rostagnus 
Radulphi'. 

Àmhaxiata  super  salvagardia  Jtuteorttm. 

Ipsi  inquam  consiliarii  unanimiter  et  concordiler  ordinaverunt  et 
expresse  concluserunt  quod,  juxta  assignationem  factam  per  dominum 
nostrum  Regem  dominis  sindicis  et  nonnullis  consilariis  ipsius  uni- 
versitatis, ad  accedendum  Aquis  [et]  ejusdem  domini  nostri  Régis  ac 
sui  consilii  deliberationem  audieudum  super  salvagardia  Judeorum 
comitatuumProvincie  et  Forcalquerii  per  eundem  dominum  nostrum 
Regem  noviter  concessa,  accedere  debeant  duo  probi  homines  ipsius 
consilii  ;  et  ad  hoc  eligerunt  nobilem  Guimetum  de  Grota  et  magistrum 
Poncium  Gbaberti,  notarium  '. 

Quod  mutuentur  sive  manuleventur  a  Judeis  hujus  loci 

floreni  auri  centum  pro  expeusis  exercitus  antedicti  faciendis  tam 
per  terras  quam  per  aquam.  Et  quod  dominus  vicarius  et  judex 
hujus  loci  pro  premissis  dictos  Judeos  non  astringant  nisi  de  hiis 
quibus  requisiti  extiterint  per  dictos  sindicos". 

Quod  haleantuT  lit  ter  e  super  salvagardia  Judeorum. 

Quod,  quia  dominus  noster  Rex  per  suas  patentes  litteras 

posuit  in  sua  salvagardia  omnes  Judeos  comitatuum  Provincie  et 
Forcalquerii;  et  super  hoc  fuit  preconizalio  facta  ;  prefalusque  do- 
minus noster  Rex  ad  supplicationem  ipsius  universitatis  concessit 
litteras  universitati  eidem  ,  per  quas  voluit  propter  salvagardiam 
hujusmodi  non  prejudicari  libertatibas,  privilegiis,  statutis  et  immu- 
nitatibus  ipsius  universitatis  ;  littere  ipse  habeantur  et  oblineantur 
ut  in  futurum  et  perpetuo  constare  valeat  de  premissis  '. 

Pro  Judeis  presentis  ville. 

Item,  in  quo  quidem  consilio  fuit  ordinalum  quod,  vise  mandate 
regio  et  mandato  domini  magni  Provincie  senescalli  super  salvagar- 
dia Judeorum,  quod  parendo  diclis  mandatis  regiis  et  in  exequtio- 

»  BB,  2,  f«23,  19  juillet  1384. 
»  Ibid.,  f"  2  v°,  3  décembre  1383. 
»  BB,  3,  21  mars  140;M404. 

*  BB,  4,  22  octobre  1393. 

*  BB,5,  t°  1,  1"  avril  1404. 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  289 

nem  eorum  et  ut  providealur  indempnitati  habitancium  presentis 
ville  et  etiam  dictis  Judeis  providealur,  ita  quod  dicti  Judti  manu- 
teneanlur  sub  dicta  salvagardia  regia,  absque  aliqua  infrinclione 
ejusdem  ;  fuit  ordinalum  quod  dicti  .Tudei  vadant  ad  casirum  pre- 
sentis ville,  ut  thucius  custodiantur,cum  eorum  familia,  et  la  eodem 
permaneant  durante  tempore  messium;  et  quod  non  aperiantur  nisi 
duo  portalia  in  diebus  festivis,  in  quibus  ponantur  custodes  sumpti- 
bus  dictorum  Judeorum  ;  et  etiam  providealur  eisdem  Judeis  de  cerlo 
numéro  hominum  armatorum  ad  custodiendum  domus  dictorum 
Judeorum  ;  et  in  eadem  carreria  fiant  cancelli  in  quibus  afiigatur 
salvagardia  domini  nostri  Régis.  Et  omne  hoc  fiât  sumptibus  dic- 
torum Judeorum  *. 

In  quo  quidem  consilio  fuit  ordinatum  quod  visa  liclera  advisa- 
menti  trausmissa  presenti  consilio  per  dominos  Arelatenses  super 
ceditione  et  manipolio  ac  congregalione  gencium,  faclis  in  dicta  civi- 
late  arelatis,  ad  veniendum  ad  presenlem  villam  Tharascouis  ad 
deslruhendum  et  abolinandum  Judeos  ville  Tharasconis  ;  quod  per- 
sistendo  ordination!  supra  fade,  eligatur  unus  nobilis  de  presenti 
consilio  qui  ponatur  in  locum  cappitaney  presenlis  et  cui  comictalur 
quod  habeat  onus  custodire  et  visitare  carreriam  dictorum  Judeorum 
cum  gentibus  armalis  sibi  necessariis,  sicut  sincanteneriis  et  aliis; 
et  omnia  predicta  fient  sumptibus  dictorum  Judeorum. 

Et  ad  hoc  faciendum  fuit  electus  nobilis  Petrus  PeylaviniV 

Pro  eisdem. 

Item  fuit  ordinatum  quod  eligantur  duo  de  presenti  consilio  qui 
accedere  debeant  Bellicadrum  ad  conferendum  et  comunicandum 
cum  dominis  de  Bellicadro  et  eis  notifficandum  mandata  domini  nos- 
tri Régis  et  domini  magni  Senescalli  super  custodia  dictorum  Judeo- 
rum et  licteram  missoriam  dominorum  Arelatensium  ad  fines  ut  ri- 
bayrerii  et  alii  gentes  dicte  ville  Bellicadri  sint  advisati  quod,  si 
requirerentur  per  dominos  de  presenti  consilio,  quod  pro  servicio  dicti 
domini  nostri  Régis  sint  presto  et  parati  eumdem  consilium  juvare  ; 
et  fuerunt  electi, 

Dominus  Poncii,  sindicus. 

Et  dominus  Johannes  Salellas  ^ 

Pro  eisdem. 

Item  fuit  ordinatum  in  dicto  consilio  quod  lictera  missoria  traus- 
missa presenti  consilio  per  dominos  de  Arelate,  et  responcio  eisdem 
dominis  Arelalensibus  facta  per  presenlem  universitatem  mandetur 

*  BB,  12,  fo  142,  29  mai  1485. 
>  BB,  12,  f»  142  v»,  8  juin  1485. 
»  BB,  12,  fo  142  V»,  8  juin  1485. 

T.  XXXIX,  N°  78.  19 


290  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

apud  dorainum  magnum  Senescallum,  ut  ipse  dignetur  et  vellit  man- 
dare  comodo  (quomodo)  provider!  voluerit  ;  et  hoc  sumptibus  dicto- 
rum  Judeorum  '. 

Pro  éisdem  Judeis. 

In  quo  quidem  consilio  primo  fuit  ordinatum  quod,  iatellecto 
tenore  processus  facti  ia  civitate  Arelatis  contra  illos  cappitaneos 
tumulti  facti  in  eadem  civitate,  vocentur  et  appellentur  Judei  pre- 
sentis  ville  Tharasconis  in  présente  consilio  et  notifficetur  eis  ténor 
dicti  processus  et  multa  alla  que  remoslrari  debent  eis.  Qui  quidem 
Judei  vocati  fuerunt.  Et  ipsis  vocatis  et  preseutibus  et  de  eorum 
concensu  et  beueplacito,  intellecto  per  eos  tenore  dicti  processus,  fuit 
ordinatum  quod  ipsi  Judei,  cum  eorum  familia  et  bonis,  si  eis  videa- 
tur,  redducantur  infra  castrum  regium  presentis  ville  Tharasconis, 
ut  tute  custodianlur,  tantum  quantum  durabunt  messes  in  presenti 
villa  et  ejus  territorio.  Et  pro  custodia  domorum  et  bonorum  qui  in 
eis  domibus  dimictere  voluerint,  conducantur  per  cappilaneum,  vi- 
delicet  nobilem  Petrum  Peytavini,  viginti  quinque  homines,  cum 
stipendiis  taxatis  ad  grossos  quatuor  pro  singulo  homine  et  pro  quo- 
libet die  ac  nocle  et  etiam  victu  prestando  eisdem  hominibus,  ultra 
dicta  stipendia,  et  hoc  tam  diebus  festivis  quam  non  festivis  ;  et 
omnia  fiant  sumptibus  et  expensis  dictorum  Judeorum.  Et  ultra  hoc 
ponantur  custodes  in  portalibus  presentis  ville,  etiam  sumptibus 
eorum  \ 

Pro  dictis  Jiuleis. 

Item,  plus  fuit  ordinatum  quod  pro  parle  dictorum  Judeorum 
mandetur  apud  dominum  nostrum  Regem  cum  copia  processus  facti 
contra  dictos  cappitaneos  dicti  tumulti  facti  in  dicta  civitate  Arelatis 
et  copia  lictere  missive  et  transmisse  presenti  consilio  per  dominos 
de  Arelati,  ad  advisandum  nos  de  dicto  tumultu  ;  et  [adj  hoc  facien- 
dum  fuit  electus  Raymonetus  de  Vite,  de  concensu  dictorum  Judeo- 
rum, et  sibi  ordinatum  exsolvi  pro  suo  viagio  sexdecim  iloreni  per 
dictos  Judeos. 

Item,  plus  fuit  ordinatum,  actento  quod  consiliuni  non  polest  con- 
gregari  nisi  cum  magna  et  maxima  pena  et  difhcultale,  quod  eli- 
ganlur  quatuor  in  comitiva  domini  viguerii,  domini  de  Lupperiis 
et  sindicorum,  qui  habeant  potestatem  provideudi  super  hiis  que  ne- 
cessaria  fueriut  pro  comuni  utilitate  et  custodia  dictorum  Judeo- 
rum. Et  fueruut  electi  dominus  accessor  Genoyni,  doniinus  Johannes 
Salellas  et  Guilhermus  Bernardi  ^ 

»  BB,  12,  fo  1/,2  V»,  S  juin  1485. 
^  Rli,  12,  {^  143,  Kl  juin  I48j. 
»  BB,  12,1°  143,  10  juiQ  148o. 


LES  JUIFS  D\ï.  ÏARASCON  AU  MOYEN  AGE  291 

Ordinatio  contra  Judeos. 

Item,  plus  fuit  ordinatum  quia  juxta  lenorem  lictere  nobis  trans- 
misse per  serenissimum  dominum  nostrum  Regem  et  secundum 
quod  ex  ea  potest  percipi,  Judei  exposuerunt  multa  falsa  dicte  régie 
Majestati  contra  presentem  universitalem,  dicentes  aliquos  ex  majo- 
ribus  presentis  universitatis  fecisse  multa  mala  dictis  Judeis  et  sal- 
vagardias  eis  datas  in  terram  projesserunt,  et  multa  alia  crimina 
présent!  universitati  imponenda.Et  quia  dicta  universilas  non  débet 
lalia  pati  neque  substinere,  fuit  ordinatum  quoi  mandelur  unus 
homo  pedester  ad  dominum  Jacobum  de  Angelo,  embassiatorem 
transmissum  apud  dominum  nostrum  Regem  cum  licteris  scribendis 
per  dictam  universitatem,  quallienus  dcbeat  remostrare  régie  Majes- 
tati quod  Judei  false  et  injuste  [dixerunli  et  quod  contrarium  est 
Veritas,  quoniam  uunquam  fuimus  neque  erimus  nisi  boni  et  fidèles 
subdicti  et  subjecti  dicto  domino  nostro  Régi.  Et  quod  per  thesau- 
rarium  presentis  universitatis  exsolvantur  dicto  nuncio, dicto  domino 
Jacobo  destinando  et  missuro,  quindecim  tloreui  '. 

Pro  universUate,  ad  causam  custodie  Judeorum. 

Iq  quo  quidem  consilio  fuerunt  lecte  lictere  magnifficorum  domi- 
norum  de  maguo  consilio  regio  super  facto  custodie  Judeorum,  et 
intellecto  tenore  earum,  omnes  uuanimiter,  nemine  discrepaute, 
concluserunt  et  ordinaverunt  quod  dicti  Judei  conserveutur  ab  omni 
oflensa  ;  et  quod  omnia  portalia  claudantur  in  diebus  festivis,  excepto 
porlali  sancti  Johannis  et  de  Madama,  et  dictis  diebus  apparietur 
solum  guichetum;  et  deputetur  certus  numerus  armatorum  ad  cus- 
todiam  diclorum  portalium,  arbitrio  dominorum  viguerii  et  capita- 
nei,  et,  si  eis  videatur  totaliter  claudere  portalia,  quod  claudentur. 
Item  quod  custodes  intendant  et  prohibeant  ne  mossores  intrent  vil- 
lam  presentem  cum  armis  nec  baculis  ferratis,  sed  illa  faciant  dep- 
ponere  in  proxima  dorao  dictorum  portalium'. 

Pro  Universitate  et  Judeis. 

Item  fuit  ordinatum  quod  domini  sindici  et  dominus  assessor  pre- 
sentis ville  Tharasconis  debeant  intimari  baylonis  Juatarie  presentis 
ville,  quod  debeant  edifficari  facere  de  bono  pariete  cancellos,  cons- 
tructos  de  fustalhia  in  locis  jam  edifficatis,  bene  et  débite;  et  quod 
debeant  facere  fieri  portas  in  iutroytu  Juaterie  et  in  cancello  versus 
castrum,  lita]  quod  quadrige  onerate  vel  non  ouerate  possint  ire  et 
redire  ;  et  hoc  pro  conservatione  ipsorum  Judeorum  et  dicte  Juaterie, 
tam  personarum  quam  bonorum  suorum  '. 

'  BB,  VI,  [^  151  vo,  IG  dé-embre  U8o. 

«  BB,  12,  i^'  211,  11  juin  1488. 

8  BB,  12,  l»  219,  8  janvier  1488-89. 


292  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 


XIII. 


Pro  Duranta  del  Barri,  filla  Abraham  del  Barri,  judei  de  Arelatey 

recogiiicio  dotis  ^ 

Anno  a  nativitate  Domini  millesimo  quadringentesimo  quadrage- 
simo  sexto  et  die  vicesima  quarta  mensis  oetobris.  Cum  in  contracta 
matrimonii  inter  Josse  del  Gaylar,  judeum,  filium  Gresquetl  del 
Gaylar,  judei  hujus  ville  Tharasconis,  ex  una,et  Durantam  del  Barri, 
judeam,  filiam  Abraham  del  Barri,  judei  civitatis  Arelatis,  ex  altéra 
partibus,  et  juxta  ritum  Judeorum  celebrato,  diclus  Abraham  del 
Barri  promiserit  et  constituerit  dicte  Durante,  filiesue,in  dotem,  pro 
dote,  nomine  et  ex  causa  dotis  ipsius  Durante,  videlicet  centum 
florenos  solvendos  in  raupis,  jocalibus  et  bendaribus  ad  extimam 
communium  per  partes  predictas  eligeadorum  die  celebracionis  dicti 
matrimonii,  ut  laciùs  de  premissis  partes  ipse  constare  dixerunt 
quadam  quarta  judayca,  nuncupata  inter  Judeos  ebrayceQuessuba  ', 
sumpta  et  scripta  in  illa  dicitur  contineri  juxta  compotum  Judeorum, 
scilicet  a  creacione  mundi  sub  anno  quinque  millia  ducentesimo  sep- 
timo  et  die  quarta  mensis  nuncupati  inter  Judeos  ebrayce  Marche- 
suan^,  et  incipit  dicta  quarta  judayca  juxta  lecturammichipariparus 
factam  in  sua  secunda  linea  Iloulan  *  et  finit  in  eadem  Borbi  %  et  in 
penultima  sui  linea  incipit  Quesmalta^  et  finit  in  eadem  Entefe^ 

Hinc  siquidem  fuit  et  est  quod  anno  et  die  supra  in  principio 
hujus  note  descriptis,  personaliter  constituti  dictus  Gresquetus  del 
Gaylar,  judeus,  et  Bonafilia,  dicti  Gresqueti  uxor,  dicta  bonafilia  cum 
auctoritate  et  licencia  dicti  Gresqueti,  mariti  sui,  ibidem  presentis, 
suamque  auctoritatem  et  licenciam  maritalem  dicte  Bonefilie,  uxori 
sue  ibidem  presenti,  ad  omnia  et  singula  infrascripta  dantis,  pre- 
bentis  et  concedentis,  ambo  ipse  Gresquetus  del  Gaylar  et  Bonafilia 
conjuges,bona  fide  etc.^  per  se  et  suos  heredes  etc.,  coufessi  fuerunt 
et  in  veritate  recognoverunt  dicto  Abraham  del  Barri  et  Durante, 
palri  et  filie  ibidem  presentibus,  stipulantibus  etc.,  pro  se  et  suis 
etc.,  se  dictos  Gresquetum  del  Gaylar  et  Bonamfiliam,  conjuges, 
habuisse  et  realiter  récépissé  a  dicto  Abraham  del  Barri,  videlicet 
centum  florenos  per  dictum  Abraham  dicte  Durante,  filie  sue,  ut  pre- 
missum  est,  in  dotem  constitutos,  et  hoc  in  raupis,  bendaribus  et 
jocalibus,  ad  quos  centum  fiorenos  parles  predicte  dicta  jocalia, 
raupas  et  bendaria  dixerunt  fuisse  extimata  ;  de  quibus  etc.  quicta- 

*  Notes  brèves  de  Jean  Muratoris,  vol.  17.  24  octobre  1440. 

*  Pour  Ketouba. 

*  Pour  Mar'heswan. 

*  Pour  Olam. 

5  Pour  Barbi  =  i^'l  "|2. 

^  Probablement  pour  NnDTODNlD- 

^  Ou  Intet'c.  Mot  mal  comprib  par  lo  notaire  et  correspondant  aux  mots  hébreux 


LES  JUIFS  DE  TARASCON  AU  MOYEN  AGE  293 

verunt  etc.  excepcioni  etc.  Et  si  dicte  dotis  restitucio  locum  sibi 
vendicaret  per  mortem  dicte  Durante,  eo  tune  dicti  Gresquetus  del 
Caylar  et  Bonafilia  promiserunt  diclam  dolem  restituere  illi  seu  illis, 
cui  seu  quibus  de  jure  venerit  restituenda.scilicetoctuaginla  quinque 
florenos  in  raupis  et  jocalibus  extimandis  et  quindecim  florenos  infra 
duosannosa  die  vendicacionis  dicte  dotis  computandos,  scilicet  anno 
quolibet  dictorum  duorum  annoruin  septem  florenos  cum  dimidio.Et 
si  conlingeret  dictam  restitucionem  dicte  dotis  habere  locum  per  mor- 
tem dicti  Josse  del  Caylar,  eo  tune  dicti  Gresquetus  et  Bonafilia  pro- 
miserunt dictam  dotem  restituere  incontinenti  morluo  dicto  filio, 
scilicet  in  bendaribus,  jocalibus  et  raupis,  si  starent,  ad  extimam 
duorum  communiter  eligendorum  et  residuum  in  peccunia. 

Fuit  de  pacto  inter  ipsas  partes  habito  et  convento,  quod  dictus 
Gresquetus  teneatur  et  debeat,  et  quod  facere  promisit,  diclos  Josse, 
filium  suura,  et  dictam  Durantam,  ejusdem  Josse  uxorem.  nulrire  et 
alimenlare  sanos  et  infirmes  in  domo  sua  et  facere  jassinas  et  libères 
ex  eisdem  proveniendos  per  spacium  decem  annorum,  a  die  presenti 
in  antea  computandorum  et  numcrandorum. 

Pro  quibus  omnibus  et  singulis  supradictis.  dicti  Gresquetus  del 
Gaylar  et  Bonafilia,  conjuges,  obligaverunt  et  ypothecaverunt  dictis 
Abraham  et  Durante,  presentibus  ut  supra  etc.,  omnia  et  singula 
bona  sua  mobilia  et  immobilia,  prescencia  et  futura,  curiis  presentis 
ville  Tharascouis,Gamere  Racionum  civitatis  Aquensis  et  spiritualis 
Avinionis  et  cujuslibet  alterius  curie,  etc. 

Juraverunt,  etc. 

Renunciaverunt,  etc. 

De  quibus  omnibus, 

Actum  Tharascone  in  domo  heredum  Dieuîosal  Abraham  Soffer 
condam,  judei,  presentibus  Moneto  Dapiera,  aliàs  Borgarel,  Stephano 
Margot,  laboratoribus  ejusdem  ville  Tharasconis. 

Et  me  Johanne  Muratoris. 


XIV. 

Lettres  patentes  de  Charles  VIII,  roi  de  France,  ordonnant  l'expulsion 

des  Juifs, 

—  22  mai  1496»  — 

Gharles  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France,  Sicille  et  Jherusalem, 
conte  de  Prouvence,  Forcalquier  et  terres  adjacentes.  A  noz  amez  et 
feaulx  les  gouverneur,  grant  seneschal  de  Prouvence  ou  son  lieu- 
tenent  et  gens  de  nostre  conseil,  maistres  racionnaulx  de  nostre 
.Chambre  d'Aix,  aux  juge  mage  de  Prouvence,  des  appeaulx,  viguier 
et  juge  deTbarascon  et  a  tous  noz  autres  justiciers  et  officiers  pro- 
vensaulx  ou  a  leurs  lieuxlenens,  salut  et   dillection.   Gomme  puis 

*  Archives  municipales  de  Tarascon,  GG,  iO. 


294  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

aucun  temps  a  Toccasion  des  grans  abbuz,  usures,  rapines  et  autres 
tromperies  que  faisoient  et  commectoj^ent  les  Juifz  en  nostre  ville 
d'Arle,  nous  eussions  fait  vuider  et  dechasser  lesdits  Juifz  de  ladite 
ville  ;  lesquelz  ou  aucun  d'eulz  se  soient  retirez  en  nostre  ville  de 
Tharascon  avec  les  autres  qui  y  estoyent  et  sont  encores  a  présent, 
et  combien  qu'ilz  deussent  estre  tenuz  en  servitude  sans  privilleige, 
comme  esclaves,  sans  souffrir  faire  dommaige  ni  injure  aux  Crestiens  ; 
toutesvoyes  par  la  grant  liberté  en  laquelle  ilz  sont  tenuz  en  ladite 
ville  de  Tharascon  et  soubz  couleur  des  lettres,  provisions  et  respitz 
que  leur  avons  par  cy  devant  baillez  de  non  vuider,  ilz  ayent  prins  et 
prenent  faculté  de  faire  marchandise  et  toutes  manières  de  contratz, 
commectans  usures,  rapines  et  autres  maulx  innumérables,  et  que 
pis  est,  provocquent  a  ce  faire  les  Chrestiens  riches  a  leur  dampna- 
cion  ;  au  moyen  de  quoy  par  lesdites  usures,  les  pouvres  Chrestiens 
sont  grandement  endommaigez  et  est  leur  destruction  ;  et  oultre, 
pour  ce  que  grant  multitude  de  peuple  vient  et  habonde  souvant  en 
ladite  ville  du  temps  des  moyssons,  plusieurs  questions  et  debbaz  se 
sont  meuz  entre  ledit  peuple  eslrangier  et  lesdilz  Juifz,  iceux  Juifz 
afin  d'estre  a  seureté  ont  trouvé  moyen  qu'il  a  esté  enjoingl  ausditz 
habitans  de  les  garder  et  préserver  de  toutes  oppressions  et  dom- 
maiges  dont  inconvénient  pourroit  avenir  a  ladite  ville,  parceque 
ceux  de  ladite  ville  se  mectent  souvant  en  dangier  de  leurs  personnes 
pour  les  garder,  qui  est  grant  subjection  ausditz  habitans;  aussi  se 
sont  meuz  et  subsistez  plusieurs  procès  a  cause  des  abbuz  et  maulx 
faiz  et  commis  en  ladite  ville  par  lesditz  Juifz  entre  iceulx  Juifz  et 
lesditz  habitans,  lesquelz  Juifz  par  lesditz  procès  et  appellations 
qu'ils  font  par  chascun  jour,  a  quoy  ilz  ne  doyent  estre  receuz  ne  a 
plaider  avec  les  Chrestiens,  et  les  autres  choses  dessusdites,  donnent 
ausditz  habitans  et  autres  noz  —  subjectz  qui  soubz  nostre  liltre  de 
très  chrestien  Roy  veuUent  vivre  et  mourir,  plusieurs  grans  vexa- 
cions  et  travaulx  ;  en  quoy  la  chose  publicque  est  grandement  inté- 
ressée et  plus  pourroit  estre,  se  prompte  et  convenable  provision  ny 
estoil  donnée,  savoir  vous  faisons  que  nous,  ces  choses  considérées, 
et  que  en  toutes  les  villes  et  lieux  de  nostre  Royaume  et  autres  noz 
pais,  fors  oudit  conté  de  Prouvence,  ny  a  aucuns  infidèles  ne  mes- 
creans,  mais  en  ont  esté  par  noz  prédécesseurs  roys  très  chrestiens 
dechassez  et  expulsez,  voulans  en  ce  les  ensuir  *  et  tousjours  garder 
et  augmenter  la  foy  catholicque  et  nostre  dit  liltre  de  Roy  très  chres- 
tien, et  apresquc  avons  fait  mectre  ceste  matière  en  conseil  par 
Tadvis  et  deliberacion  de  plusieurs  princes  et  seigneurs  de  nostre 
sang  et  gens  de  nostre  grant  conseil,  vous  mandons,  commandons  et 
expressément  enjoignons  par  ces  présentes  et  a  chascun  de  vous  sur 
ce  requis,  que  dedeus  le  quinziesme  jour  de  juillet  prochainement^ 
veneut,  et  sans  plus  de  terme  ou  respit,  vous  faicies  vuider  et  de- 
chasser lesdilz  Juifz  et  Juisves  de  ladite  ville  de  Tharascon,  ressort  et 

^  Pour  ensuivre  ou  ensivre. 


LKS  JUIFS  DK  TARASCON  AU  MOYEN  AGK  2% 

viguerat  d'icelle,  saDS  plus  les  souffrir  y  demourer,  habituer,  aller, 
venir,  passer,  séjourner,  ne  résider  en  aucune  manière  ;  lesquelles 
ville  et  viguerat,  demourance,  résidence,  aller  et  venir,  nous  leur 
avons  ledit  temps  et  terme  escheu  et  passe,  interdict  et  dedendu,  in- 
terdisons et  deffendoDs  par  ces  présentes  en  contraignant  a  ce  faire 
et  obéir  lesditz  Juifz  et  Juisves  par  prinse  de  corps  et  de  biens  et  pro- 
céder a  la  confiscation  de  ceulx  que  trouverez  faire  ou  avoir  fait  le 
contraire,  nonobstant  oppositions  ou  appellations  et  autres  faicles  ou 
a  faire,  relevées  ou  à  relever,  et  tous  lesditz  procès  et  procedeures 
meuz  ou  autres  qui  se  pourroyent  mouvoir,  pour  retarder  le  parlement 
desdilz  Juifz  de  ladite  ville,  ausquelz  ne  voulons  doresennavant  les- 
ditz Juifs  estre  admis,  oyz  ne  receuz,  nonobstant  aussi  quelzconques 
usances,  statuz,  ordonnances,  provisions,  mandemens,  respitz,  de- 
laiz  et  libertez  qui  pourroyent  avoir  esté  octroyez  ausdilz  Juifz  de 
non  vuider  ne  estre  dechassez  ;  lesquelz  procès  et  procedeures,  pro- 
visions, libertez,  mandemens,  respiz  et  delaiz  de  vuider  et  quelz- 
conques autres  provisions  données  ou  à  donner  en  faveur  desdilz 
Juifz,  a  cause  que  dessus,  nous  de  nostre  plaine  puissance  et  auclo- 
rité  royal,  avons  revocquez,  cassez  et  adnullez,  revocquons,  cassons 
et  adnuUons  et  mectons  du  tout  au  néant  par  cesdites  présentes,  et 
a  iceulx  ne  voulons  qu'efn]  vous  arrestez  ayez  aucun  regard  ne  que 
différez  à  l'execucion  de  ces  présentes  en  quelque  manière  que  ce  soit, 
car  ainsi  nous  plaist-il  estre  fait.  Mandons  et  commandons  a  tous  noz 
justiciers,  officiers  et  subgeclz  que  a  vous  et  a  chascun  de  vous,  voz 
commis  et  depputez  en  ce  faisant  soit  obey  et  nous  prestent  et  donnent 
conseil,  confort,  ayde  et  prisons,  se  mestier  est  et  requis  en  sont. 
Donné  à  Lyon  le  xxii®  jour  de  raay,  Tau  de  grâce  mil  CCCC  quatre 
viugs  et  seize  et  de  noz  règnes  de  France  le  treziesme  et  de  Sicille  le 
second. 

Par  le  Roy,  monseigneur  le  Cardinal  de  Saint-Malo,  les  S"  de 
Prennes,  du  Moulin  et  autres  presens. 

J.    BOHIER. 

XV. 
Pro  magùtro  Mosse  Meyr^  jtideode  T/iarascone,  quiciancia.  1456, 

Anno  incarnationis  Domini  millesimo  ini^\  L.  sexto  et  die  se- 
cunda  mensis  augusti.  Notum  etc.  quod  Mossonus  Salamonis  Soffer, 
judeus  Tharasconis,  gratis,  per  se  et  suos,  coufessus  fuit  se  habuisse 
a  magislro  Mosse  Meyr,  judeo  de  Tharascone,  présente,  stipulante 
pro  se  et  suis  etc.,  videlicet  tlorenos  quinque  valoris  etc.  et  hoc  pro 
labore  suo  impenso  in  traclando  matrimonium  factum  interComprat 
Mosse  de  Volabrica,  filium  dicti  Mosse  Meyr,  et  Reginam,  judearu, 
filiam  coudam  magistri  Toros  Nathan  de  Tharascone.  De  quibus  tlo- 
renis  quinque  et  labore  suo  dicti  malrimonii  et  pro  parte  dicti  Mosse 
Gomprat  de  Volabrica,  dictus  Mossonus  tenens  seconlentumeumdem 


296  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

magistrum  Mosse  Meyr  et  suos  bonaque  sua  quictavit,  cum  pacto  etc. 

Siib  etc.  RenuDcians  etc.  Jurans  etc.  De  quibus.  Actum  Tharascone 
in  apotheca  mei  uotarii  infrascripti  domus  habitationis  Guimonis 
Giboyni,  presenlibus  ibidem  Guilhelmo  Lieuthaudi  et  Guilbelmo 
Gastellani,  de  Tharascone,  testibus. 

Et  me  Petro  Margoli  notario  K 


XVI. 

Pro  discreto  viro  magisiro  Michaele  Gtiiàerti  presentis  ville, 
empcio  gaiellarum  masselli  et  vini  carrerie  Judée. 

Anno  quo  supra  (1441)  et  die  vicesima  sexta  mensis  aprilis.  Per- 
sonaliter  conslituli  magister  Salves  Avieudo[r],  Rossellus  Ferrarii, 
Cassions  Bonjues,  bailoni  carrerie  Judée  presentis  ville  Tbarasconis, 
Ferrarius  et  Boniaquelus  de  Ponte,  auditores  compotorum,  magister 
Bonjues  Nathan, 

{Blanc  de  deux  lignes.) 

ipsi  inquam  bailoni,  auditores  compotorum  et  alii  Judei  supranomi- 

nati,  omnes  simul  et  quilibet  ipsorum  in  solidum  lam  nominibus 

ipsorum  propriorum  quam  nomiue  et  vice  omnium  aliorum  Judeo- 

rum  dicte  carrerie  Judée,  per  se  et  suos  in  dicta  carreria  successores, 

nominibus    quibus    supra,    vendiderunt    et    titulo   pure,  perlecte, 

simplicis  et  irrevocabilis  vendicionis   tradiderunt  et   concesserunt 

discreto  viro  magistro  Michaeli  Guiberti,  habitatori  presentis  ville, 

presenti,  stipulant!   etc.  pro  se  et  suis  heredibus  etc.  videlicet  jus 

gabelle  masselli  carniura   dicte  Judée  pro  duobus  anuis  proxime 

sequentibus,  computandis  et  incipiendis  in  festo  sancti  Michaelis 

o      c 
anni   presentis;   et   finietur  anno  M.  IIII.  XL  tercio,  dictis  duobus 

annis  revolutis;  item,  jus  gabelle  vini  similiter  pro  duobus  gauditis 

incipiendis  in  vindemiis  proxime  venientibus  et  hiis  inclusis. 

Vendiderunt  inquam  dicti  vendilores  nominibus  quibus  supra 
dictas  gabellas  hinc,  ad  et  per  tempus  et  tempora  predicla  dictorum 
duorum  annorum  prout  et  quemadrnodum  infra  particulariter  suut 
descripla,  precio  et  nomine  precii  hujusmodi  vendicionis  diclarum 
imposicionum  pro  dictis  duobus  annis,  videlicet  ducentorum 
ilorenorum,  de  quibus  ducentis  florenis  predicli  venditores  nominibus 
quibus  supra  confessi  fuerunt  habuisse  et  récépissé  centumllorenos. 

De  quibus,  etc. 

Excepcioni,  etc. 

Et  si  plus  valent,  etc. 

Dantes  et  concedentes,  etc. 

Cedentes  et  remictentes,  etc. 

DisvestiveruDt,  etc. 

*  Pierre  Margoli,  notaire,  anno  1456. 


LES  JUIFS  DE  TAHASCON  AU  MOYEN  AGE  297 

Investiverunt,  etc.  per  tactum  manuum. 

Gonstituerunt  procuraLorem,  etc. 

Promiserunt  facere  habere  et  paciffice  possidere  diclo  durante 
tempore. 

Kt  si  tractus  in  causam,  etc. 

Pro  quibus  omnibus  dicti  venditores  et  ipsorum  quilibet  in  solidum 
nominibus  quibus  supra  obligaverunt,  ypothecaverunt  etsubmiserunt 
se  ipsos  et  bona  sua  quecumque  eorura  et  cujuslibet  ipsorum  et 
aliorum  Judeorum  dicte  carrerie  mobilia  et  immobilia,  presencia  et 
futura,  curiis  presentis  ville  Tharasconis,  camere  racionum  civi- 
tatis  Aquensis,  domini  auditoris,  viceauditoris,  locumtenenlis  et 
comissarii  et  spiritualis  Avinionis,  stalulorum  novi  et  veteri 
Massillie  et  cujuslibet  alterius  curie  etc.  Jurantes  etc.  Renun- 
cianles  etc. 

Dictus  vero  magister  Michael  promisit  dictos  centos  florenos 
restantes  solvere  predictis  venditoribus  aut  suis,  hiuc  ad  festum 
sancte  Martlie  proxime  futurum,  unà  cum  reffectione  omnium 
darapnorum  etc. 

Juravit  etc.  Renunciavit  etc. 

De  quibus  etc. 

Actum  Tharascone  in  apotheca  mei  notarii,  presentibus  discretis 
viris  magistro  Artaudo  Fabri,  aliàs  de  Blacba,  notario,  ludovico  de 
Valencia,  de  Tholono,  habitatoribus  Tharasconis ^ 


XVII. 

Segun  si  los  capilolz  de  la  galella  del  vin  per  doas  gausidas  acomensant 
a  vindimias  prodanament  venens  m.  iiij.  xlj. 

Premierament,  que  tôt  Juzieu  ho  Juzieva,  estranis  ho  privatz,  que 
fassa  vin  ho  fassa  fayre  en  la  vila  de  Tharascon  ho  en  son  destrehc 
per  heure,  per  vendre  ho  per  donar,  sie  blanc  ho  roge,  de  grès  ho  de 
plan,  muscadel,  vin  bolit-  et  generalment  qualque  vin  que  sie,  fassa 
lo  de  sas  vinhas  ho  que  compres  la  frucha  ho  li  fos  douada,  en 
qualque  maniera  que  sie  ho  de  calque  part  que  venga  en  aquesta 
vila  los  dihcz  vins,  losdilz  Juzieus  deian  et  sien  tengulz  de  pagar  als 
deputalz  comprados  ho  culhidos^  a  rason  de  j  gros  per  barrai; 
acomensant  lo  terme  d'aquesta  gabella  lo  jourt  de  sant  Gili  pro- 
chanament  venent  et  durant  doas  gausidafs];  exceptada  la  baila*  de 
la  carriera  que  es  franqua  jusques  a  la  soma  de  viij  barrais  de  vin. 

Item,  que  Iota  tempra*  que  si  fassa  ho  si  fassa  fayre  per  los  sobre 

*  Notes  brèves  de  Jeau  Muratoris,  vol.  12,  anno  1441. 

*  Vin  cuit. 

*  Les  agents  chargés  de  recevoir  la  gabelle. 
**  La  sage-femme  de  la  Communauté. 

'  La  piquette. 


298  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

dihcz  Juzieus   en  lo   dihc   destrehc  per  beure,  per  vendre  ho  per 
donar,  aquel  de  qui  sera  deia  pagar  miehc  gros  per  barrai. 

Item,  que  si  deia  pagar  la  gabella  del[s]  Tins  ho  de  las  tempras 
en  la  forma  et  maniera  desus  expiessada,  so  es  asaber  denfra  très 
pagas,  lo  permier  ters  de  so  que  hun  cascun  deurie  de  la  gabella, 
segun  le  vin  ho  la  tempra  que  universalment  si  atrobarie  en  son 
sellier  a  la  festa  de  Tossans  prochanament  venent 

(Inachevé.  *) 

RatifPicacio  Jacob  Bonet  Avieudor, 

Anno  quo  supra  et  die  décima  mensis  maii,  Jacob  Bonet  Avieudor, 
judeus,  certificatus  de  vendicione  gabellarum  maselli  et  vini  Garrerie 
Judée  presentis  ville  per  suprà  nominatos  venditarum,  diclam 
vendicionem  laudavit,  aprobavit,  emologavit  et  confirmavit,  obligando 
et  ypothecando  personam  et  bona  curiis  in  instrumente  vendicionis 
descriptis,  promitendo  omnia  et  singula  in  dicta  vendicione  contenta 
tenere  et  observare;  et  ita  juravit  per  quiniam. 

Renunciavit  etc. 

De  quibus. 

Actum  Tharascone,  in  apotheca  mei  notarii  infrascripti,  presentibus 
venerabili  et  discretis  viris  Johanne  Radulphi,  presbitero,  magistro 
Pelro  de  Tamenayo,  notarié,  jurisperito. 

Et  me  Johanne  Muratoris  ^ 

^  Suite  de  l'acte  précédent, 

*  Notes  brèves  de  Jean  Muratoris,  vol.  12,  anno  1441. 


NOTES  ET  MÉLANGES 


NOTES  EXÉGÉTIQUES 


I.  isttnr  (Genèse,  v,  29). 

Tous  les  exégètes,  anciens  et  modernes,  ont  remarqué  que  le 
nom  de  Noé  ne  cadre  pas  avec  l'explication  de  ce  nom  par  le  verbe 
ûn3,  car  le  d  manque  dans  na.  Mais  je  ne  crois  pas  qu'on  ait,  en 
outre,  relevé  que  le  verbe  ûna  ne  se  construit  jamais  avec  la  prépo- 
sition 1^  et  que  le  mot  «  consoler  »  ne  s'emploie  pas  plus  en  hébreu 
qu'en  français  pour  dire  :  soulager  de  la  fatigue.  Il  me  paraît  ré- 
sulter forcément  de  cette  triple  difficulté  que  li^na*!  est  une  faute 
pour  ^3b  ni5^.  Le  verbe  rr^arr  veut  bien  dire  :  donner  du  repos  après 
une  fatigue,  et  il  se  construit  avec  la  préposition  *|^.  Il  nous  suffit 
de  rappeler  le  verset  d'Isaïe,  xiv,  3  :  ^niry^  ^b  'n  rf^ri  ûva  ïT^m 
^n  I2:f  ^Oi^  îT»25prj  Tii^yn  I^jt  ^ui»r  La  similitude  de  ce  passage 
avec  celui  de  la  Genèse  est  saisissante.  Si  notre  correction  est 
juste,  l'écrivain  biblique  a  donné  une  explication  étymologique, 
qui,  cette  fois  tout  au  moins,  s'accorde  avec  la  grammaire. 

II.  "^b  (Gen.,  XX,  5). 

Abiraélech,  roi  de  Guerar,  s'excuse  d'avoir  enlevé  Sara,  er  allé- 
guant qu'Abraham  lui  avait  dit  que  Sara  était  sa  sœur.  Mais  le 
texte  ne  parle  pas  d'une  conversation  qu'Abraham  aurait  eue  avec 
Abimélech.  Aussi  croyons-nous  que  le  mot  "^b  a  été  substitué  par 
mégarde  à  ïib  :  «  Abraham  a  dit  d'elle  :  elle  est  ma  sœur.  »  La 
faute  se  trouve  également  dans  la  Septante.  Notons,  à  ce  propos, 
que  dans  le  verset  2,  il  vaudrait  mieux  lire  ïinuîb  «  au  sujet  de 
Sara  »  que  ni;2)  b^.  La  préposition  b  est  employée  ainsi  au  ver- 
set 13  :  •'b  •'^^N  «  Dis  à  mon  sujet  ».  C'est  cette  acception  peu  fré- 


300  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

quente  du  b  qui  a  vraisemblablement  amené  au  verset  5  le  chan- 
gement de  ïib  en  -^b. 

III.  Exode,  i,  IC,  et  Osée,  ii,  2. 

La  traduction  ordinaire  de  y^i^n  )12  nhy^  par  «  et  (le  peuple 
d'Israël)  se  retirera  du  pays  »  est  peu  satisfaisante,  car  ces  mots 
sont  précédés  de  «  il  se  joindra  à  nos  ennemis  et  nous  com- 
battra »  ;  or,  ce  n'est  généralement  pas  quand  on  attaque  un  pays 
qu'on  le  quitte,  c'est  quand  on  y  soutfre.  Un  talmudiste  {Sota^ 
11  a)  l'a  si  bien  senti  qu'il  prétend  que  Tihy^  est  pour  iS'^b^^n  :  les 
Egyptiens  se  verraient  obligés  de  quitter  l'Egypte.  M.  Wogue 
propose  de  traduire  :  ce  II  s'élèvera  plus  que  le  pays.  »  Nous  ne 
croyons  pas  que  ))2  signifie  ici  plus  que  :  mais  ce  qui  nous  paraît 
certain,  c'est  que  l'expression  doit  signifier  a  devenir  maître  du 
pays  >3.  Le  sens  littéral  serait  :  «  s'élever  par  rapport  au  pays  ». 
De  la  sorte,  le  passage  devient  très  clair. 

Cette  même  locution  se  retrouve,  Osée,  ii,  2,  dans  un  passage 
auquel  l'interprétation  que  nous  proposons  s'adapte  parfaitement. 
Le  prophète  dit  qu'Israël  et  Juda  se  réuniront  et  qu'ils  deviendront 
les  maîtres  du  pays.  Jusqu'ici  on  a  traduit  ;  «  ils  reviendront  du 
pays  )),  ce  pays  étant  la  Babylonie  ;  mais  le  prophète,  dans  cet  en- 
droit, ne  parle  pas  de  l'exil,  et,  s'il  en  avait  parlé,  il  se  serait  servi 
de  termes  moins  obscurs.  Quelques  commentateurs  ont  bien  vu  que 
y^iN^î  désigne  forcément  la  Palestine,  mais  ils  prennent  Th:f  dans 
le  sens  de  déborder,  sens  que  ce  mot  n'a  pas.  Ce  que  le  prophète 
veut  dire,  d'après  nous,  c'est  que  la  Palestine  appartiendra  aux 
Israélites  et  aux  Judéens  réunis,  et  non  plus  aux  étrangers. 

IV.  M-iM^^  (Exode,  xv,  2). 

Ce  mot  n'a  pas  encore  été  expliqué  ;  on  le  traduit,  d'après  le  con- 
texte, par  «  célébrer  »,  mais  sans  fournir  d'étymologie  satisfai- 
sante. Si  l'on  remarque  que  le  mot  parallèle  ina^TD^wSi  a  un  3  de- 
vant le  suffixe,  on  est  porté  à  croire  que  nm:i^i  est  pour  irr^is^i, 
qui  serait  lui-même  une  altération  de  ir!3i"i5<i  «  et  je  lui  rendrai 
grâces  ».  Les  mots  ti^nn  et  d)3"n  sont  réunis  dans  Is.,  xxv,  1. 

V.  -lis  (LÉv.,  I,  8,  12;  vin,  20). 

Ce  mot  a  été  traduit  dans  les  anciennes  versions  par  «  graisse  »  ; 
mais  cette  interprétation  laisse  à  désirer,  car  on  ne  voit  pas  pour- 
quoi, dans  un  holocauste,  la  graisse  serait  mise  à  part.  Saadia  et 
Ibn  Djanah  voient  dans  n^D  la  réunion  des  organes  respiratoires 


NOTES  ET  MÉLANGES  301 

avec  l'œsophage  et  le  foie  ;  mais  nous  ignorons  sur  quoi  cette 
explication  est  fondée.  Les  traducteurs  et  exégùtes  sont  partis  de 
cette  idée  que  la  tête  et  le  ns  sont  autre  chose  que  les  a^nn:,  et, 
en  effet,  dans  Lév.,  vin,  20,  il  est  dit  :  n^i  ^i<T,  n^  r;c73  '-,::p"«i 
^izn  nt^i  û'^nnir»,  «  Moïse  lit  fumer  la  tôte,  les  morceaux  et  le  "no  ». 
Cependant  on  remarque  que  dans  Lév.,  i,  8,  il  n'y  a  pas  de  con- 
jonction vav  devant  Oi^n-  ni<.  Or,  si  le  vav  manque  parfois  dans 
de  longues  énumérations,  il  est  plus  rare  qu'il  soit  omis  dans  une 
série  de  trois  noms.  On  serait  donc  porté  à  croire  que  ':;i<n  et  ""-i: 
donnent  le  détail  du  terme  général  d'Anna,  et,  en  ce  cas,  mo  dési- 
gnerait les  morceaux  du  corps  en  dehors  de  la  tête.  Dans  le  second 
passage  (v.  12),  on  lit  :  i^i^d  nxT  t::.^-!  nt^-i  vnnDb  "inx  nnn:i.  La 
construction  de  cette  phrase  est  assez  singulière,  car  grammati- 
calement nn^D  nt^i  "lot^'n  ns^i  devrait  être  la  suite,  non  de  vnr:b, 
mais  de  infi^  ;  or,  dans  l'explication  ordinaire,  c'est  impossible. 
Mais  si  l'on  retranche  le  vav  de  n^ai^n  n^n,  qui  peut  être  une  ditto- 
graphie  du  vav  final  de  vnns':),  alors  '*::wNn  et  niD  sont  le  détail  de 
mnsb  iDi^  nnDi,  et  la  phrase  devient  correcte  et  claire  :  «  Il  le  cou- 
pera en  morceaux,  à  savoir  sa  tôte  et  ses  membres.  » 

Reste  le  passage  de  Lévit.,  viii,  20.  Dillmann  {ad  l.)  observe  que 
le  mot  ^ns  manque  dans  le  passage  correspondant  d'Exode,  xxix, 
17,  et  a  été  ajouté  d'après  Lév.,  i,  8.  Mais  ce  n'est  pas  seulement 
le  mot  *n^  qui  manque  dans  l'Exode,  c'est  la  proposition  entière  ; 
car,  dans  l'Exode,  c'est  après  VJf^'Di  nnnp  niinm  qu'il  y  sl  by  nnîi 
i^i^n  b:>i  rnns  ;  il  ne  s'y  trouve  donc  rien  qui  corresponde  à  n::p^T 
Mi25?3.  Or,  cette  proposition  est  superflue,  car,  dans  le  verset  sui- 
vant, on  lit  :  h^i^n  b'^  ns^  n^a?:  Tjp^i.  On  est  obligé  de  dire  que 
b''isr»  b'D  signifie  «  le  reste  du  bélier  »  ;  mais  que  reste-t-il  après 
que  la  tête,  les  membres  et  le  pédcr  sont  brûlés  ?  Donc  la  phrase 
M^^  '^Wp'^1,  etc. S  paraît  avoir  été  intercalée  par  quelqu'un  qui  ne 
comprenait  déjà  plus  le  sens  du  mot  n"iD  dans  Lév.,  i,  8,  et  qui  a 
cru  que  les  d'»nn3  étaient  autre  chose  que  le  uîî^"!  et  le  n^D,  parce 
que  dans  l'Exode,  xxix,  17  b,  le  mot  û-«nn3  est  coordonné  avec  uji^n. 
Dans  ce  passage,  en  effet,  le  mot  d'Anna  est  pris  dans  un  sens  res- 
treint ;  mais  ce  mot  peut  avoir  aussi  un  sens  large,  et  désigner 
tous  les  morceaux  du  corps,  la  tête  comprise,  et  c'est  alors  le  mot 
^^D  qui  désigne  les  membres  sans  la  tête.  C'est  peut-être  cette 
interprétation  qu'Ibn  Ezra  a  en  vue,  quand  il  dit  que  de  nombreux 
savants  contemporains  expliquent  tid  par  t:]i:\  «  corps  ».  Nous 
ignorons  qui  sont  ces  savants,  et  Ibn  Ezra  lui-même  s'en  tient  à 

1  II  est  possible  cependant  qu  il  faille  lire  Hp'^T  au  lieu  de  "liJp'^l,  et  alors  l'iater- 
polatioû  pourrait  se  réduire  au  mot  "mD. 


302  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

la  traduction  du  Targoum.  Chose  curieuse,  le  mot  fino,  en  arabe, 
veut  dire  morceau  (de  viande  ou  de  rocher)  ;  mais  nous  attachons 
plus  d'importance  au  sens  qui  se  dégage  du  texte  lui-m(^me,  qu'aux 
comparaisons  étymologiques  les  plus  séduisantes. 

VI.  ■'it-iD  nn  '^'^ryy  (Soph  ,  m,  10). 

«  D'au  delà  des  fleuves  de  l'Ethiopie,  "^i:!-:  na  ^"ir^y  apporteront 
mon  offrande.  »  Les  mots  que  nous  avons  laissés  en  hébreu  ont 
suscité  une  foule  d'interprétations  plus  étranges  les  unes  que  les 
autres  et  que  nous  croyons  inutile  de  reproduire  *.  Mais,  à  notre 
connaissance,  personne  n'a  pensé  à  une  explication  très  simple  et 
qui  consiste  à  voir  dans  ■^li'iD  na  "^nn:»,  les  noms  des  fleuves  d'Ethio- 
pie. Le  verbe  libnv  aurait  tout  naturellement  pour  sujet  tr^l^y,  qui 
se  trouve  dans  le  verset  précédent.  Sans  doute  Taccentuation  mas- 
sorétique  est  contraire  à  notre  interprétation,  mais  c'est  précisé- 
ment cette  fausse  coupe  du  verset  qui  aura  égaré  les  exégètes.  Les 
noms  propres  des  fleuves,  étant  inconnus  des  copistes,  auront  été 
altérés,  et  les  accentuateurs,  entendant  par  "^iriD  les  dispersés 
d'Israël,  auront  fait  des  mots  "^itiD  na  "^nn:?,  le  sujet  du  verbe  l"ibnv. 

Maintenant  est-il  possible  de  retrouver  les  noms  des  fleuves  qui 
se  cachent  dans  "«iriD  nn  "^nns»?  C'est  justement  en  lisant  les  noms 
des  principaux  fleuves  de  l'Ethiopie,  l'Atbar  et  le  Takazé  que  nous 
avons  pensé  à  les  rapprocher  de  "^iiiD  nn  "^nrij»  et  à  voir  dans  ces 
mots  énigmatiques  des  noms  propres.  En  caractères  hébraïques 
la  transcription  exacte  d'Atbar  et  Takazé  serait  "^nm  nnntî.  Si 
l'identification  de  ces  fleuves  avec  ""^is  ra  ^^'ny  ne  s'impose  pas, 
elle  paraît  néanmoins  possible  quand  on  pense  à  la  manière  dont 
les  noms  propres  sont  défigurés  par  les  copistes.  Mais  que  cette 
identification  soit  juste  ou  non,  il  n'en  est  pas  moins  très  admis- 
sible que  les  mots  '^itiD  nn  ^inj^  soient  l'apposition  de  oïD  •'nn:,  et 
non  le  sujet  de  libar. 

VIL  m25UÎ3>  (Ps.,   VI,  "7). 

On  rattache  ce  mot  à  ^3^  «  teigne,  mite  »,  et  Ton  traduit  îtcîo:? 
'^y^y  d:>S73,  «  mon  œil  est  rongé  par  le  chagrin  ».  Mais  le  chagrin 
ne  ronge  pas  les  yeux,  il  les  gonfle,  au  contraire.  On  arrive  à  un 

*  Eu  dernier  lieu,  M.  Ilommel  {'Expository  Times,  xi,  p.  93)  a  expliqué  "^"in^  par 
in3>  •  encens  >,  d'après  Ez.,  viii,  11,  et  a  vu  dans  "^^1ï^  l'arabe  fauat  ou  faughat 
«  odeur  d'encens  »,  eu  même  leaips  que  le  minéen  "^bîNi  qui  siunilierait  «  encens  ». 
Mais  nni'j  qui  correspond  à  l'araméeu  "J'û^*,  veut  duo  «  fumée  »,  el  non  •  encens  », 
et,  en  admettant  les  élymolo^^ies  douteuses  que  fournit  M.  Hommcl  pour  ^2115»  l* 
construction  de  la  phrase  serait  des  plus  embarrassées. 


NOTES  ET  MELANGES  303 

sens  plus  naturel  en  rapprochant  ^^y  de  l'arabe  r:  lavec  ghaïn), 
qui  veut  dire  «  se  gâter,  devenir  purulent  ».  On  comprend  que  les 
larmes  finissent  par  gâter  les  yeux. 

VIII.    DlTTOGRAPHIES   VERTICALES*. 

La  forme  anormale  "^brîNï-;  (Josué,  vu,  21)  s'explique  si  l'on  con- 
sidère que  ce  mot  est  au-dessus  de  ïibn«rj  (v.  22).  Le  n  de  "«'^nNn 
doit  simplement  être  retranché.  Dans  II  Sam.,  xxiii,  8,  nnujn  vient 
du  verset  suivant,  à  une  ligne  de  distance  (Kennicott,  cité  par 
Thenius).  Enfin,  le  mot  p-^li:  après  d"'nb5^  (Ps.,  vu,  10)  embarrasse 
la  phrase,  d'autant  plus  qu'il  se  trouve  déjà  dans  le  verset.  Il  est 
probable  qu'il  provient  du  v.  12,  où  il  est  à  sa  place. 

Mayer  Lambert. 


TlUITS  APOLOGETIQUES 

DANS  LA  AGADA  DE  SAMUEL  B.  NAHMANI 

Voici  sommairement  quelques  notices  qui,  à  mon  avis,  sont  in- 
téressantes pour  l'époque  du  célèbre  agadiste  Samuel  b.  Nahmani  * 
(rji:^r{  by^  ;  voir  Ber,  Rabba,  ch.  m  et  xii,  Vay.  R.,  c.  xxxi).  Une 
étude  plus  approfondie  permettrait  peut-être  de  multiplier  les 
exemples  et  confirmerait  ceux  que  nous  allons  citer. 

L  Si  Samuel  b.  Nahmani  s'efforce,  au  nom  de  son  maître  Jona- 
than S  de  présenter  les  fautes  de  certains  personnages  bibliques 
comme  n'existant  pas  (cf.  Sabbat,  55&),  et  s'il  déclare  que  celui-là 

»  Voir  Revue,  t.  XXXIII,  p.  305  ;  XXXIV,  p.  204  ;  XXXVI,  p.  101  ;  XXXVII, 

p.  207. 

»  Il  était  aussi  halachisle,  comme  nous  rapprennent  ses  biop^raphes.  Voir  parti- 
culièrement Eoullin,  98  a  :  0"m  "^T^i^  13  "^""1  "llin  "«bn;  ""rj  IIIZ^  133 
I^IJ-lis  5<b"|  1373712  "13,  et  Berachot,  17  a,  d'où  il  semble  résulter  qu'il  était  chef 
d'une  école.  —  I.-H.  Weiss  [Beth-Talmud,  I,  cf.  Bâcher,  Agada  d.  pal.  Amor.,  I, 
p.  480.  note  3)  explique  le  passage  de  Ber.,  ix,  2  :  "»2J<  p.lD  'H  nmn:»  bbTQi  ^J2 
i"^3ni  «  q"i  racontera  les  merveilles  de  Dieu,  comme  moi  et  mes  collègues?  »  en 
disant  qu'il  entendait  que  «  lui  et  ses  collègues  étaient  aussi  bien  des  agadistes  que 
des  haîachisles  ».  Mais  le  passage   parallèle    du  Midr.  Tekil.  (éd.   Buber),  19,  §  2, 

porte  :  ^mi  ic^nmnn  'ji3"'N  '\^12^  ""Ninm  N:i<  "iiriD. 

*  On  ne  sait  pas  au  juste  qui  était  ce  Jonathan  (cf.  les  biographes).  Il  est  aussi 
désigné  comme  rT-l"i3ïl  ID'^N  ';n^"'"''  ^'-  ^''^'■-  Tekil.,  10  :  •J'^î^  '\^\':^'^  PN  Ni:?31 
ïl-T^aiTI-  Dans  Ber.  Ji.,  c.  xcv,  Samuel  rapporte  une  parole  de  'jn^T^  '"1  ^^  dans 
Midr.  Teh.,  I,  §  13,  elle  se  tiouve  rapportée  au  nom  de  rr^^n^J  10  IPSI^  '").  H  y 
a  aussi  un  ni"'an  1^  NJlN  'l  Ketoubol,  22  a,  et  ailleurs. 


304  REVUE  DES  ETUDES  JUIVES 

se  trompe  qui  accuse  de  péché  David,  Salomon,  Joas,  etc.,  l'on  ne 
saurait  douter  que  sous  ces  paroles  ne  se  cache  une  intention  polé- 
mique. Certains  adversaires  ont  dû  à  ce  moment  essayer  d'ex- 
ploiter les  fautes  et  les  défauts  des  personnages  bibliques. 

On  trouve  déjà  quelque  chose  de  semblable  dans  la  généalogie 
de  Jésus,  Mathieu,  ch.  i,  où  toute  naissance  de  légalité  douteuse 
est  mise  en  relief. 

II.  C'est  probablement  dans  le  même  esprit  qu'il  faut  entendre 
les  mots  de  Baba  Batra,  15  h  :  Tj^i^  r^n-«n  nci^  Nnu:  nsb53  iJ^'ï^n  bn 
Nnu5n  i^niDb^  isniD  DdbJ2  \S73  ïi:'rj  «bw^  «  Quiconque  dit  que  isn-vT  nbb^a 
(I  Rois,  X,  1)  était  une  femme,  se  trompe  ;  ces  mots  signifient  [non 
la  reine  de  Saba]  mais  le  royaume  de  Saba.  »  Comme  on  sait,  la 
légende  dans  différentes  versions  (dont  celle  de  Balkis,  Coran, 
Soura,  27,  est  une  des  plus  caractéristiques)  raconte  que  Salomon 
entretint  des  relations  intimes  avec  la  reine  de  Saba  et  que  ces 
relations  ne  furent  pas  sans  avoir  des  suites  (de  même  dans  le 
Midrasch  juif  postérieur  ;  cf.  le  passage  cité  dans  Luzzatto,  Oçar 
ha- Si  front,  II,  p.  204  :  p  mb-^i  SiTob'::):  rï"in:>n3  w^nu:  Tohi2).  C'est 
sans  doute  contre  les  déductions  que  la  polémique  tirait  de  ce 
verset  qu'est  dirigée  l'explication  artificielle  de  Samuel  au  nom 
de  Jonathan. 

III.  La  parole  suivante  me  semble  aussi  digne  d'attention  [Ber. 
R.,  c.  Lxxxviii)  :  ï-T^î-i-^^u  ts-^^iNn  m"-\i<  rn  w\b  "^373^  nn  •:;"n  -i73N 

...tnN  l-^^^miT^û  buj  ï-;72iN  teïib  'jn^ûikXT  «  Les  non-juifs  n'auraient 
pas  dû  compter  parmi  eux  de  lépreux;*  toutefois  ils  sont  atteints 
de  la  lèpre,  afin  qu'ils  ne  tourmentent  pas  les  Juifs  et  les  appellent 
un  peuple  de  lépreux.  »  Ce  singulier  passage  s'explique,  à  mon 
sens,  par  le  reproche  que  les  antisémites  de  l'antiquité  adressaient 
aux  Juifs  de  descendre  de  lépreux  égyptiens  (cf.  Josèphe,  Contre 
Apion,  I,  XXVI,  2*). 

H. -P.  Chajes. 


H.   TANHOUM  A  HATHAR 

Le  Talmud  de  Babylone  {Sanhédrin,  5  b),  en  traitant  de  la 
défense  faite  à  un  élève  de  se  prononcer  sur  des  questions  rituelles 

*  Cf.  Bachor,  l.  r.,  p.  /i!)7  et  suiv.;  Tb.  Rciuacb,  Textes  d'auteurs  grecs  et  romains 
relatifs  au  Judaïsme ^  p.  1\\  57  et  118. 


NOIES  ET  MELANGES  305 

OU  juridiques  en  présence  ou  dans  le  voisinage  de  Sun  maître,  rap- 
porte que  R.  Tanhoum  bar  Ammi,  de  passage  à  Hatliar,  dëclara 
qu'il  était  permis  pendant  la  Pâque  de  tremper  du  froment  dans  de 
l'eau  et  de  le  concasser  ensuite,  car  il  n'y  a  pas  à  craindre  qu'il 
fermente.  Comme  on  lui  objectait  qu'il  n'avait  pas  le  droit  d'en- 
seigner à  Ilathar,  puisque  son  maître  R.  Mani  s'y  trouvait,  il  ré- 
pondit qu'il  ignorait  la  présence  de  son  maître,  'm  n^'nn  ûimn  'i 
•^dt:  'n  nxb  ib  i-i7ûn  .nosn  Y'^n  mnbb  -im?:  inb  ^m  nnnb  rbp^x  ^tîwX 
n^n  D"NN  nnn  Dip73n  nsbr;  mT«  bt<  i^7:bn  N^:m  ■?wSDr;  wN2\s  mr  i?:i 
rNn3>it<  HNb  Tnb  'n72i<  .b5<"iuî'«  ï-i:n7:  "i:;:^  r-iiNOiD  -cba  1:7273  pnm 
S'appuyant  sur  ce  passage,  MM.  Neubauer  {Géographie  du  l'ai- 
mud,  p.  392),  Koliut  {Ariich  completum,  III,  fin)  et  Hirschensuhn 
[Méhlierè  Éreç,  p.  117)  affirment  qu'il  existait  une  localité  du 
nom  de  Hathar,  que  les  deux  premiers  identifient  avec  Hatra, 
en  Mésopotamie,  et  le  dernier  avec  Hatra,  dans  le  voisinage 
de  INehardéa.  A  mon  avis,  ces  trois  savants  se  trompent.  Voici 
pourquoi.  Le  Talmud  de  Jérusalem  [Schehiit,  vi,  1,  36c)  rap- 
porte la  même  discussion  qu'il  illustre  du  même  exemple,  mais 
les  noms  du  docteur  et  de  la  localité  sont  différents,  il  dit  :  R. 
Tanhoum  b.  Hiyya  était  à  Héfér...  Dans  le  Tanhouma  (éd. 
Buber,  Ahrè,  6),  le  docteur  s'appelle  R.  Nahoum  b.  Yirmiya  ; 
dans  j.  Giiiltin,  i,  2,  p.  43c,  dans  la  Pesikta  de  R.  Kaliana  (éd. 
Buber,  172  a)  et  dans  le  LévUique  R.,  ch.  xx,  le  nom  du  docteur 
est  R.  Tanhoum  b,  Yirmiya  et  celui  de  la  localité  Héfer.  A  re- 
marquer que  le  maître  s'appelle  partout  Mani.  Ces  divers  passages 
nomment  donc  deux  endroits  différents,  Hathar  et  Héfer,  dont  le 
premier  est  nommé  une  fois  et  l'autre  cinq  fois,  et  quatre  person- 
nages différents  :  Nahoum  b.  Yirmiya,  une  fois  ;  Tanhoum  b. 
Ammi,  une  fois;  Tanhoum  b.  Hiyya,  une  fois,  et  Tanhoum  b. 
Yirmiya,  trois  fois.  On  peut  admettre  hardiment  que  R.  Mani  n'a 
pas  vu  son  autorité  méconnue  par  quatre  élèves  et  dans  deux  en- 
droits différents,  et  que,  par  conséquent,  ces  différences  de  nom 
sont  dues  à  des  erreurs  de  copiste.  Il  n'est  pas  non  plus  trop  témé- 
raire de  supposer  que,  dans  le  Tanhouma,  une  lettre  (n)  a  été 
omise  accidentellement  et  que  dnmn  est  devenu  ûim,  d'autant  plus 
que  ce  passage  seul  mentionne  un  amora  du  nom  de  Nahoum  b. 
Y.  (cf.  Heilprin,  Seder  Haddorot,  s.  v.  "^"a  dnni).  Or,  comme  le 
nom  de  Tanhoum  b.  Yirmiya  revient  trois  fois  et  ceux  de  Tanhoum 
b.  Ammi  et  de  Tanhoum  b.  Hiyya  seulement  une  fois,  un  peut 
conclure  avec  M.  Buber  [Tanhouma,  l.  c.  note  93j  qu'^  notre 
docteur  s'appelait  en  réalité  Tanhoum  b.  Yirmiya.  Nous  ferons 
remarquer  en  passant  que  Tanhoum  b.  Ammi  et  Nahoum  b. 
Y.  ne  sont  mentionnés,  à  notre  connaissance,  qu'une  seule  fois 

T.    XXXIX.    N»  78.  20 


306  RKVUE  DKS  ETUDES  JUIVES 

dans  ces  passages  ;  il  n'est  donc  pas  certain  qu'ils  aient  existé. 
Nous  pouvons  faire  le  même  raisonnement  à  propos  du  nom  de 
la  localité  et  dire  que  Hathar  n'étant  mentionné  que  dans  le  seul 
passage  de  Sanhédrinj  il  est  vraisemblable  qu'il  y  a  là  une  erreur 
et  que  le  vrai  nom  est  Héfer,  mentionné  dans  cinq  passages. 
D'autres  raisons  viennent  encore  à  l'appui  de  notre  hypothèse  et 
nous  font  croire  que  inn  n'est  pas  le  nom  exact.  Raschi  dit  bien 
(ad  L)  que  c'est  «  un  nom  de  lieu  *  )>,  mais  Rabbinovicz,  dans  son 
DiUduliè  Soferim,  ad  L,  note  80,  et  Kohut  [l.  c.)  citent  d'anciennes 
versions  qui  ont  l'adverbe  ûnnb,  au  lieu  du  nom  propre  'nnnb,  et 
dans  les  Tosafot  d'Eroiibin  {Q2b,  s.  v.  t^iDn  yi),  qui  rapportent 
littéralement  le  passage  de  Sanhédrin,  il  y  a  la  leçon  i^^n^b.  Ces 
variantes  nous  permettent  d'affirmer  que  notre  texte  a  été  altéré 
et  qu'en  tenant  compte  des  passages  parallèles,  il  faut  corriger 
*innb  en  "nDrib. 

Pourtant,  j'hésite  à  adopter  cette  correction,  d'abord  à  cause  de 
la  leçon  des  Tosafot,  qui  ont  Nlnt^b,  mot  qu'il  est  difficile  de  consi- 
dérer comme  une  corruption  de  ^snp  et  ensuite  parce  que  î^nn^b 
comme  la  variante  ûnnb,  si  ce  sont  vraiment  des  corruptions,  se 
rapprochent  plus  de  la  leçon  ^nnb  du  Talmud  de  Babylone  que  du 
mot  isnb.  Je  crois  donc  qu'en  réalité  le  mot  nnnb  est  correct  ;  seu- 
lement, il  ne  faut  pas  y  voir  un  nom  géographique,  mais  un  ad- 
verbe formé  par  contraction  des  mots  nni^  ^rh  «  en  un  certain 
endroit  »,  comme  'iDin  est  formé  de  ^'o^  ^n  {Rosch  Ilaschana, 
21  a  ;  Jastrow,  Dictionnaire,  s.  v.).  D'après  cette  hypothèse,  toutes 
les  variantes  du  Talmud  de  Babylone  auraient  le  même  sens  : 
ûnnb,  i^'nni^b  et  nn&^  inb,  et  ensuite  le  texte  de  ce  passage  serait 
bien  conforme  aux  habitudes  du  Talmud  babylonien  qui  a  pour 
caractéristique  d'omettre  les  noms  géographiques  dans  les  récils 
d'origine  palestinienne  ^.  Or,  cette  anecdote  vient  certainement  do 

*  Dans  j.  Berakhot,  6  a,  nous  trouvons  ces  mots  ;  inSinS  llMl  '"Il  ÏT^"13  pHit"^  '"1- 
Une  noie  marginale  dit  à  propos  du  dernier  mot  que  c'est  «  un  nom  de  lieu  ».  Cetl  • 
explication  a  été  acceptée  par  les  commentateurs,  depuis  Syrleio  \éà.  Lehmaun)  jus- 
qu'à Frankel.  Mais  nous  ne  pensons  pas  qu'il  y  ail  eu  une  localité  de  ce  nom,  pas- 
plus  qu'un  amora  du  nom  de  'ni  ""«"in  pn^i"^  'l-  Toute  la  citation  est  simplement 
le  nom  du  docteur,  !-;3"inD  n">"*n  'm  n"^n3  priil"^  'n,  el  les  mots  nmnn  mn  sont 
une  corruption  de  nmriD  H'^'^n-  C<e  doci.eur  est  mentionné  à  plusieurs  reprises  dans 
le  Yerouschalmi  [Mcguilla,  71  c;  Yebamot,  14a);  l'édition  de  Venise  a  une  leçon 
presque  correcle  n^IPlD  m^l  'ni  rT'-in  "^"l.  Dans  j.  Teroumot,  viii,  9,  p  46*, 
le  nom  de  în^lP^  est  changé  en  ÏTl'^riD. 

*  Voici  quelques  exemples  de  cette  habitude.  On  lit  dans  j.  Schebiit,  vi,  1,  p.  37  ^  : 
'iSI  'J'in^jn  i::^^  !nn  "^21  •  Rabbi  était  à  Acco  ».  Le  même  lait  est  ainsi  raconte 
dans  b.  tSanhédrtn,  Wh  :  -^nN  D"ip73b  "^nn  Y'^  *^^'^  ^^°  '  ^°  •'°"'''  ^"^'^  ^^ 
rendit  dans  un  endroit  ».  Dans  j.  Erouhm^  i.  p.  19f,  et  j.  Soucca^  i,  1,  p.  '>Vla  : 
*13'^3^jV  y'D"^"!  b:^N  p''^"*"!  "Tf^rTvIi  !T>Uy?û  «  H-  Josué  b.  Korlia  se  rendit  auprès 
de  W.  Yohanan  à  Nof^'uinar  ».    Le   Talmud   babli  ne   donne  pas  le  nom   de   la  ioca- 


iNOlKS  ET  MELANGES  307 

la  Palestine,  puisque  les  docteurs  qui  y  sont  mentionnée  sont  Pales- 
tiniens, et  bien  qu'ils  aient  émigré,  nous  sommes  obligés  d'ad- 
mettre que  l'incident  en  question  s'est  passé  sur  le  sol  de  la  Pales- 
tine. Quand  cet  épisode  est  venu  de  ce  pays  en  Babylonie,  le  nom 
de  la  localité  où  il  a  eu  lieu  a  été  oublié  et  renaplacé  par  l'adverbe 
de  lieu  "innb  ==  ^n5<  inb. 

Wilmington,  N.  C,  octobre  1899. 

S.  Mendelsohn. 


RESTAURATION  D'UiNE  PESIKTA 

Dans  la  Pesihta  Rabbati,  ch.  xxxiii  (éd.  Friedmann,  p.  155a), 
à  propos  des  mots  û-i^^ob^  de  I  Rois,  x,  12,  et  de  û^?:"i:ibîî  de 
lî  Chron.,  ii,  7,  on  lit  ces  mots  : 

wNDN  -i"N  t3^:\"i?3bwX  N"i  .riT-  :s'M2'D  "iT!  "i^7û*«:)P  tzmx  tzi\s-',7:  i-i^rr:: 

On  s'est  déjà  donné  beaucoup  de  mal  pour  expliquer  ce  passage, 
mais  tous  les  efforts  ont  été  vains.  Que  signifient  ces  mots  :  n:"«bn5^ 
et  r^-'bnfi^?  L'Aroiich  ne  le  dit  pas;  bien  plus,  il  ne  les  mentionne 
même  pas.  L'auteur  du  Zéra  Ephralm  (cité  par  Friedmann,  ad 
loc,  note  96)  corrige  n:;"«bai5  en  ns^baN,  correction  adoptée  par 
M.  Gûdemann  [ib.,  p.  203  b)  :  ce  serait  alors  le  grec  ebeninos  ou 
ebelinos  (bois  d'ébène).  M.  Friedmann,  après  avoir  cité  quelques 
variantes,  émet  l'hypothèse  que  ce  mot  est  une  altération  de 
N:\''bn^,  qui  est  lui-môme  une  leçon  corrompue  (cf.  Jastro^v,  Dic- 
tionnaire, s.  V.  i^^'^h'21  ;  Kohut,  Ariicli,  s.  v.  mi<).  Mais,  à  supposer 
que  le  problème  étymologique  soit  résolu,  nous  n'apercevons  pour- 
tant pas  encore  le  rapport  entre  le  sens  représenté,  d'après  ces 
diverses  définitions,  par  nos  termes  et  le  sujet  même  de  notre 
Pesikta.   Voici  ce   que   dit   le   Dictionnaire    de  Jastrow  de  nos 

lité.  Dans  j.  Uroubù:,  iv,  4,  p.  23  c  :  "Vl^'^t  Nn?3rib  'J'^pbo.  .-,61  dans  b.  Eroubitt, 
65i  :  pl3lD  Niriïlb  nybp'^N.  Kulin,  dans  j.  Yebamot,  xii,  p.  13  fl,  et  Genèse  M., 
ch.  Lxxxi,  on  raconte  une  visite  faite  à  Lëvi  bar  Sisi  par  «  des  habitants  de  Khémo- 
nia  »,  tandis  que  dans  b.  Ychamot,  lOo  a,  aucun  nom  géographique  n'est  mentionné  : 
on  parle  simplement  d'une  <  certaine  ville  >. 


oUS  REVUE  DES  ÉTUDES  JUIVES 

termes,  dont  tous  les  deux  désignent,  pour  tout  le  monde,  un  seul 
et  même  objet  :  «  ^'^baj^,  rr^-^bni^,  n.  pr.  m.,  dans  Pesihta  R.,  33 
[j.  Ber.,  III,  6a,  îib"«3i73;J.  Naz.y  vu,  56  a,  l-h^'2^]  ».  Essayons 
maintenant,  d'après  cet  article^^de  M.  Jastrow,  de  débrouiller  le 
mystère  qui  enveloppe  notre  Pesikta.  Et  d'abord  quel  but  poursuit- 
elle?  Est-ce  la  définition  de  almouggim  et  de  algoummim?  Il 
suffit  de  jeter  un  regard  sur  le  contexte  pour  nous  convaincre  que 
ce  n'est  pas  le  cas.  Notre  passage  est  précédé  par  ces  mots  que  le 
'i:nn  «  a  été  créé  pour  cette  occasion  [pour  le  décor  du  sanctuaire] 
et  qu'il  a  ensuite  disparu  ».  Puis  suivent  les  textes  de  la  Bible  cités 
par  les  docteurs  pour  confirmer  cette  assertion.  Chacun  de  ces 
textes  est  introduit  par  l'adverbe  pT  «  et  de  même  »,  pour  indiquer 
qu'il  est  en  connexité  avec  ce  qui  précède.  En  recherchant  le  point 
de  ressemblance  entre  le  passage  précédent  et  le  nôtre,  qui  com- 
mence aussi  par  pi,  nous  trouvons  que  les  û'i^l^bi^,  comme  le  ^nn, 
ont  été  créés  pour  un  but  déterminé  et  ont  ensuite  disparu  :  ûn:>ob 
iniii  itî'ias.  Ce  fait  est  indiqué  par  la  diversité  de  la  forme  du  nom, 
qui  tantôt  est  û"':ii7DbN,  tantôt  û'^):n^bN,  diversité  qui,  d'après  les  doc- 
teurs, ne  provient  pas  d'une  transposition  de  lettres  due  au  hasard, 
comme  ;25n5  et  nu5:D,  mais  est  voulue,  préméditée.  Considérant  donc 
comme  particulièrement  importantes  les  syllabes  du  milieu,  ils 
disent  que  û'^:in?obN  contient  la  racine  yù2  (cf.  Jastrow,  Diction- 
naire, s.  V.),  et  que  «  des  blocs  de  pierre  très  durs  de  leur  nature 
["^iQib:*,  cf.  il).,  s.  V.  ûb"i5]  deviennent  mous  et  comme  fondus  dès 
qu'ils  sont  exposés  à  l'action  du  ^'^12'Q^  (cf.  Sota,  48^)  ».  Mais  la 
forme  de  û"'?2i:\bi^  renferme  la  racine  ûis,  couper,  retrancher  (Jas- 
trow, s.  V.)  et  cette  forme  nous  apprend  que  ces  matériaux  furent 
retranchés,  c'est-à-dire  disparurent  dès  qu'il  n'en  fut  plus  besoin 
pour  le  temple.  C'est  ce  que  dit  notre  Pesikta  :  ''12^T^  ...'  tL"^:ii^bi< 
t^"T  .nTn  :ii?3D  rn  "TiTo^b  szmN  tz^^mn  h^-ujj  n^nc  \^'^'2^  v- 
inriSi  iN-iDS  ton3>u:b  ...[Q'^)3^:^bkS]  S=i^^^?3bN. 

La  Pesikta  ne  s'occupe  donc  pas  de  l'espèce  des  matériaux  em- 
ployés, mais  des  particularités  que  présentèrent  ces  matériaux, 
et,  par  conséquent,  nous  pouvons  admettre  avec  M.  Jastrow  que 
n:i'^b3i<  ou  :\ibnî<  n'est  pas  le  nom  d'un  genre  de  bois,  mais  désigne 
un  docteur  qui  est  identique  avec  le  docteur  appelé  ailleurs  nVas» 
(j.  Berahhot,  m,  6  a)  ou  nb-in:;  (j.  Nazv\  vu,  56  a). 

*  Dans  son  édition  de  la  Pesikta,  M.  Kriedmann  a  ajouté  après  ce  mot  la  fin  du 
verset  des  hois  :  riTH  t3T^n  13^  riNna  Nbl  C2^:>73bwN  ""iTr  p  N3  Nb,  comme  si 
lexplicalion  de  la  Pesikta  ^73:iD^  ^N"1^3  QDJ'Ob  avait  pour  (ondement  celte  tin  de 
verset.  La  vérité  est  que  cette  addilion  rend  encore  le  passa<;e  de  la  Pesikta  plus 
obscur  et  que  le  commentaire  de  la  Pesikta  ne  s^applique  qu'à  la  forme  même  du  mot 
C5'^7315b5<.  Dans  le  texte  original,  la  citation  finit  avec  Cl5'^)23bNn,  et  alors  com- 
mencent les  explications.  • 


NOTES  KT  .MKLANGKS  300 

Comme  ce  docteur  est  mentionné  très  rarement  dans  la  littéra- 
ture rabbinique  — je  ne  crois  pas  qu'il  soit  nommé  autre  part  — , 
il  me  semble  nécessaire  de  prouver  qu'il  est  possible  chronologi- 
quempnt  qu'il  ait  formé  un  anneau  de  la  chaîne  de  rabbins  qui  se 
sont  transmis  les  explications  de  notre  Pesikta. 

D'après  le  Yerouschalmi  (Z.  c),  ïib^n:^?^  ou  nb-^ns  est  le  frère  de 
l'Amora  bien  connu  R.  Abba  ou  Ba  b.  Cohen,  élève  de  R.  Yosé  II. 
Lui-même  communique  à  R.  Yosé  une  décision  qu'il  rapporte  au 
nom  de  R.  Aha  et  dont  ce  dernier  refuse  d'accepter  la  paternité. 
Ce  passage  montre  donc  que  notre  docteur  faisait  partie  de  la  cin- 
quième génération  des  Amoraïm  ;  il  en  ressort  également  que  R. 
Houna  qui  rapporte  une  opinion  de  R.  Joseph  (de  la  troisième 
génération)  et  est  représenté  ailleurs  {Nombres  R.,  ch.  xiv)  comme 
le  maître  du  célèbre  agadiste  de  la  cinquième  génération  Tanhouma 
b.  Abba,  était  plus  âgé  que  Magbila.  Les  mots  N5in  Yi<  ri^a^^a  sont 
donc  chronologiquement  exacts. 

Mais  qui  est  le  R.  Abba  de  notre  Pesikta  ?  Ce  ne  peut  être  un 
contemporain  plus  jeune  de  Magbila,  car  dans  la  cinquième  géné- 
ration des  Amoraïm  nous  ne  trouvons  pas  de  docteur  de  ce  nom. 
A  mon  avis,  Na^'n  est  ici  une  faute  de  copiste.  On  lisait  probable- 
ment à  l'origine  dans  la  Pesikta  :  -i"&<  pD  ^n  «at^  'm  ■'in^s  nra^TD 
'131  ';'«3N  "jn  N31Ï1.  Un  copiste,  ayant  pris  Magbila  pour  un  terme 
de  botanique,  a  cherché  à  rendre  le  passage  plus  intelligible  en 
transposant  le  nom  «aî<  'n  et  en  le  plaçant  au  commencement  de  la 
phrase.  Peut-être  aussi  les  mots  '-i"i  ■'inc?  étaient-ils  écrits  par  abré- 
viation n"^N,  que  le  copiste  a  lu  :  'n  h)ON  ;  de  là  notre  leçon  '-i  ^'n^ 
^^iA,  Et  comme  Houna  b.  Abbin  est  aussi  surnommé  in^rt  (cf.  Seder 
Haddoroty  s.  v.;  Buber,  Midrasch  Tehillim,  p.  15),  le  copiste  a 
rapporté  à  ce  docteur  une  partie  des  noms  appartenant  à  Magbila, 
et,  au  lieu  de  insn  «ni^,  il  a  mis  insM  5^3iïi  K 

Donc,  en  tenant  compte  également  de  la  correction  suggérée  par 
M.  Jastrow,  nous  lisons  ainsi  le  passage  de  la  Pesikta  : 

■•ttibii  1i3&<  p  wNiiïi '-1N  1^3  -13  N2wN '-n  -"-inN  rT'D'»2:i?3  .û-iSTT^bNn 

*  Bien  que  ceux  qui  sont  familiarisés  avec  la  littérature  rabbinique  n'i^rnorent  pas 
que  les  textes  sont  parfois  très  altérés,  je  veux  quand  même  citer  un  exemple  carac- 
téristique de  ces  corruptions.  Dans  j.  Pèa,  vi,  1,  19ô,  nous  lisons  :  '^tz^  'l  N2  *Tn 
''0^  Ui-^pb  12  ;D"n  "^TSip  iSm*'  'm  Nnn.  Ce  texte  est  certainement  altéré  et  "î3î<"ir: 
[Edouyot^  IV,  3)  le  corrige  ainsi  :  ■c:ip'5  Uî*^"!  "^TDIp  n725«  "^ma  N^N-  Frankel  a 
adopté  cette  correction  {Mebo  ha- Yerouschalmi,  61  b].  Mais,  en  réalité,  il  n'existe 
pas  d'Amora  du  nom  de  i3n3  Î^TN,  et  il  faut  lire  \:r\T  NH"  ^ITM  "^ain  IH  (cf.  j. 
Moed  Katon,  m,  5,  p.  82c;  j.  Nazv\  vu,  3,  p.  56  c).  Ailleurs  J.  Meguilla,  i,  6, 
p.  10 d)  le  mot  lIlTJi^n  «  tous  les  deux  »,  par  suite  de  Pomission  du  nom  de  "i^'ï 
que  l'imprimeur  a  oublié,  devient  an  nom  propre,  et  on  a  ces   mots   13    yCîir;'^   'n 


310  Hi:VUL  DES  ETUDES  JUIVES 

Sz^TOTiibN   N'i    HT-  :;v:d   vn  -i-'»'ab  Dmx    û^n-i?:   T«n"::  V"'^"'  ^^" 

S.  Mendelsohn. 


L'EXÉGÈSE  BIBLIQUE  DE  NAHSCHON  GAON 

Nahschon,  qui  fut  gaon  à  Sera  de  876  à  881,  était  fils  de 
Sadoc*  et  père  du  futur  gaon  Haï  2.  Lorsqu'il  fut  nommé  gaon,  il 
était  dans  un  âge  avancé^. 

Il  ne  nous  est  pas  parvenu  grand'  chose  de  ses  écrits*.  On  en 
trouve  des  citations  chez  des  auteurs  du  xi^  siècle  et  postérieu- 
rement. On  a  reproduit  aussi  de  ses  Consultations  juridiques  dans 
le  pnit  "^^t:^  %  par  exemple,  surtout  dans  les  û'^jiTonp  û"'3ii^:i  mar^an 
(Berlin,  n'n'n). 

Nahschon  a-t-il  été  cabbaliste  et  l'a-t-il  été  à  la  manière  des 
nouveaux  représentants  de  cette  doctrine?  Rien  ne  le  prouve^. 
Mais  il  semble  avoir  cultivé  avec  prédilection  l'explication  de  la 
Bible  au  moyen  des  nombres.  Voyez,  par  exemple,  l'Arouch,  5.  v., 
bon  III,  et  Va  1^'^D  'lUîn  "  dans  le  recueil  de  ses  Rf^ponses,  où  j'ap- 
pelle particulièrement  l'attention  sur  cette  phrase  :   ^np  nn'^ry 

Enfin,  un  manuscrit  du  Yémen^,  que  j'ai  acquis  récemment, 

*  Cf.  la  Lettre  de  Scherira,  édit.  Goldberg.  p.  43,  et  Isaac  Halévi,  Dorot  Hari- 
L'Chonim,  III,  p.  246  et  suiv. 

*  Ne  pas  le  confondre  avec  son  homonyme  Haï  Gaon,  fils  de  Scherira  Gaon. 

'  Sadoc  Gaon  est  mort  en  823;  même  si  Nahsclion  a  perdu  son  père  enfant,  il  n'a 
otcupé  le  {.^aonai  que  vers  sa  soixantième  année. 

*  Dans  le  mDn^J'  'O  il  est  question  du  b^:»^3'  de  Nahschon.  Cf.  encore  Rapo- 
purt,  Bikkouré Haïttlm^'K.^Zl. 

»  Cf.  Kapoport,  i^/(/.,  XI,  82-83. 

^  Cf.  Rapoport,  l.  c,  et  Steinschneider,  Catal.  BodL,  p.  2020. 

'  Duns  sa  lettre  (p.  9û),  qui  précède  ce  recueil,  Rapoport  ne  tranche  pas  la  ques- 
tion de  savoir  si  cette  Réponse  est  de  Nahschon.  Cependant,  si  l'on  considère  que 
celte  >orle  d'interprétation  est  tout  à  lait  conforme  à  l'esprit  de  Nahschon,  que  l'on 
compure  cette  Réponse  avec  celle  que  nous  donnons  ci-après,  j'estime  qu'on  est  reçu 
a  attribuer  également  la  première  à  notre  Gaon. 

'^  Co  ms.  est  en  écriture  carrée  sur  une  feuille  de  papier  épais.  Aucune  date  ni 
ai.cun  nom  d'auteur  ue  sont  indiqués;  mais  vraisemblablement  le  ms.  n'est  pas 
postérieur  au  xvii»  siècle,  à  en  juger  d'après  les  caractères  et  les  autres  signes.  Cer- 
taines lettres  diffèrent  essentiellement  des  nôtres.  Le  zaïn  et  le  noun  final  se  res- 
semblent tout  à  fait;  seule  la  longueur  les  distingue  l'un  de  l'autre.  Le  tout  se  com- 


NOTKS  KT  MKLANGKS  lill 

nous  présente  une  explication  analogue.  En  réalité,  ce  qui  s'y 
trouve  de  Nahschon  n'est  pas  considérable  :  cela  prend  dix  lignes 
dans  notre  manuscrit  et  s'arrête  aux  mots  V't  iriim  'n  b"D7  ;  ce 
qui  suit  en  est  le  commentaire  et  a  été  rédigé  par  une  autre 
main.  Mais  pour  nous  l'un  et  l'autre  passage  sont  intéressants  ; 
le  premier  parce  que  nous  y  saisissons  la  manière  de  penser  du 
Gaon  ;  le  reste,  parce  que  nous  y  sommes  renseignés  sur  ce  qui  a 
pu  faire  naître  l'idée  que  R.  Nahschon  était  cabbaliste.  Car,  tandis 
que  celui-ci  parle  simplement  de  liT::n  ^I2^n  cv  les  sages  suppu- 
tateurs  »  (qu'il  ne  faut  pas  identifier  avec  les  mathématiciens),  le 
commentateur  y  voit  de  la  cabbale  (voyez  ci-dessous).  Or  il  res- 
sort clairement  de  notre  ms.  que  telle  n'est  pas  la  pensée  de  R. 
Nahschon.  C'est  probablement  à  de  semblables  interprétations  — 
si  môme  il  ne  s'agit  pas  de  véritables  interpolations  —  qu'il  faut 
rattacher  l'assertion  de  R.  Méir  ibn  Gabbaï,  auteur  de  l'ouvrage 
cabbaliste  ^îîlpïi  rtna:^,  que  Nahschon  aurait  professé  la  cabbale. 

Voici  le  texte  du  ms.,  dont  je  corrige  les  fautes  et  dont  j'ex- 
plique en  note  les  points  obscurs. 

"j-^sn  ^3^3N  3pr-»  .inuîbn  ht  px:*  'jiUJn:  'n  don  mnn  ^-inl:?:  (^^:w5<?3) 
Tiob  rsTH  1^:7371   /D  'û"^o^nT  'n  q^t:'  vn.x  r:^'jb  nn:?:    rr-oDn  "]-n3 
n^y  n)3&i  '•pb  w^J^i^  1^or^  n^nonb  cn^^n^x  Szs"':^:?^  nn'2V  m:?!  --ino: 
■•TODn  ^D  y^  ,niom  ,[iiy  V^""  "i"^^  T^  iT^^on]  y'^Vir)  »  m-n  nab  m::' 
'n  tan  ^d  .-itt   »nr;.XD[rî]  t^s-û  c^-ipD  ]^j72  '^r^  ^d  tzj-'iT^iwN   *pT::nn 

pose  de  vingl-sept  li^çnes  et  demie  qui  occupent  un  espace  de  20  centimètres  de  long 
sur  16  de  large.  A  la  huitième  ligne,  la  feuille,  à  force  d'avoir  été  pliée,  est  coupée; 
toutefois  l'écriture  est  restée  lisible.  Les  deux  parties  sont  rattachées  par  des  fils. 

*  Gen.,  xxxii,  15. 

*  Il  ne  faut  pas  se  méprendre  sur  le  sens  de  cette  expression,  vu  qu'il  dit  dans 
la  suite  que  le  «  mystère  »  repose  sur  un  «  calcul   •.  Voir  plus  loin. 

3  Gen.,  ib.y  17. 

*  Je  ne  sais  de  quels  sages  il  est  question.  Si  un  nombre  quelconque  peut  attirer 
une  grâce,  on  peut  parler  de  ïir>l>0,  de  •  chose  singulière  »,  mais  il  n'y  a  oas  là 
de  r!?3Dn-  Peut-être  est-on    fondé  ici   à  se  rappeler  la  parole  de    Scherira  Gaon  : 

b33  nn7:b  û-im-ip  dr;  "^d  .Dnin  [a^D'^UD]  ibwX  ûnm  itt  niid  na-'-j-'m 

!  n:i3nDT3D  n'«m,  citée  par  A.  l^pUein  niip^  ""-im,  p.  8.  Eirange  parait  la 
ratsou,  quoiijue  ce  ne  soit  que  p:)ur  •  calm?r  les  quesliouueurs  »,  cotntue  du  Hdpo- 
port  [l.  c,  p.  83),  au  moyen  de  laquelle  Nahschou  cxpliquo  l'usage  d'après  leijuel 
on  circoncit  l'enfant  mort  deux  ou  trois  jours  après  sa  naissance  :  'J"^"l72r«1  '{'^b'^J»")  "'^rî 

n^b  i-«pD72"i  rrbvin  bs?  'i-'Dnn?:  xbi  rr'-np  b:>  n'-b  -«b-^i  -"«cd:  n:  ^d 
Vnn^ûT  NpiDi^  i<y^^^  "th  û^^73^  n"»nn  -«im  i-'j^m?:  «""Tdo  ]i2  ^di  h^:: 

&<n°l3î<b  ï^^b.  On  pourrait  comparer  à  Saiih.,  WOb,    où   il    est  dit  :  bi<n"J"^   '^llZ'p 

'y<D  ^b^7a"'0  nyou  ,2T:-\"y-  ^^nb  q^nd  -«n^j^sTa  a\i?3  an-j  ;  cf.  aussi  Mi- 

drasch  DDOïl  (D"'C3Tpbrî  'o,  I,  P-  5).   Mais  si  l'on  examine  atleuiivemenl  ces  pis- 
sages,  ou  se  rend   couyiio  (ju  il  ne  s'agit   pas   d'un    entant   de   lieix    ou    trois  j  jurs, 
mais  d'un  enfant  soumis  à  Tobli^alion  de  la   circoncision,    c'est-i-dire  âgé  de  huit 
jours.  Donc  l'usage  dont  parle  Nahschon  ne  se  trouve  pas  dans  W  Tilmud. 
5  Voir  ce  qui  précède. 


312  HKVUK  DES  ETUDES  JUIVES 

t2\nN73  ton  "iDÎ  "^pbm  iD"!  &-  tzi-^nc:?!  ï=:^^N7:  "^pbm  .t]">n^:>i 
mriwS  m-^r','^'  mbi:iD  r^i^rti  .';"i2cnn  ï-tt3  '^^^D  rii'îî  apy^T  .Sz'^T^DrT 
i3^:n?mprî  ^rî^o^  nn^n  .'np^n  nn  ^iiiD-^i  ^D-»Db  irinp"»  ï-Ti:"i^D  "^Tab 
m^nb  ï-i^t-i"'  'TCNb  'jrT'  t::îo  ïitt  .&"«"icm  S'^^bT^r:  î-i3r;N2 
n'yUN  )'^ji2r:  "^pbr;  nsm  ^r^r:  v^'^ïi  ^iz^^yb  tihuX-'t  ,-:^^<r^  V'-'^"  lamN 
aiiy  r<in  Dcn  TvUwN  v^^"  "^pbm  .odp.  nujwX  i-'STwn  ts:^^  r^^irt  in3 
av^-^m  '-1  ^^T3>  '{•cyb  nns  ri3?i<  np:?-"  ï-i"û9  ï-tt  "^mm  .ina  t»:5N  'j"'5?3n 
,^^n:7:3  "i"^:d  î-i*-,d5wN  i";72Nn  ï-ît  TTom  .'iDn  l-'aTa  iwsrrb  Drm  /D 
!-T-iD  nb^?2  r^i'T^n  t::n::i  a^^Tsb  ^n  rnb^s  "^ïd  s^tt^t  rriè  "]n  ?-,b7:b 
'n  b"D3^  .np-'T  ^2  -i:i:D"''!  '"^11:2  '^sb  mon  r*,:Ti^  nniT  non  "in-w"»  inx 

a'"i'»::rî  t^pbnrr  tzniwN  t^iiui  tz^pbnb  nnpbnrsU  l"^:?:  bD  )^zyr>  *^zi 
■^5  T^pbnn  m^n  ^m'Cjn  by  inin-o  "î-^ni  .3r;î<:n  1^:73  a^Nnpsn  tn 
a^nnNn  mD-iy^ja  .  Ti:^iy'r2  bsn  inx  s^bx  i^-^k  T^pbna  mcn  i"iT»an 
yiip  tzî'^DbN  'n  tj-^Db^n  iSn  m:N723  T'D  tors  t-nnuî^'n  rr::^  t*<nn 

b^3  *;di  ,  ï-tj:\:5  tebiDT  r-nncT  '*r^bc"i  ""lin  ib  'w*^'»:;  ï-tou:  i7:d  :  •im73D 

tzno  in  £2^N^72:rT  tn^pbnn  "rén  1^3731  .nn'irî  ts::!:^  csm  arsî^ïn  i-'573 
•^'T  /3  /N  uî*»  ibn  ';"'27û3  .nnî^Dn  v^'o  niï-î  f-ÎT  5"i  to^bi^'  .a-^rj 
tzi-^mnNT  Ï-TN73  inbi3>r7  n-^irnTD  uj"«t  .f-ir^^  &^p:)nrr  ï-ibw^  to^birn 
onuî  a-^pbnn  î-ibN  brj  q-i::itr;n  inNi  tD-^ra^i:  ribnj^  :?-^3-i  o-^i  ,to"^:uji 
ti-'iu:n  tzi^pbnrti  .  [tii'«T:j:yi]  ts-^rn-i^^i)  t=i"«nN73  ■ib:^-'  ^dS  ^zizn  ^^r:: 
' /n  /i  /2  /N  •a'^  5n  *;"^:?22  ^r:  t-<"im  ,'7bn  tzj^bi:'  t2n'«:j:>n  sz-^n^^j  ^2722 
13  uî-»-!  :n"D  :>-^n-i  ,i3  ;a"^"i  tnuîi'i  ï-75<73  .n^irn?:  nn  a-^i  .n"*"  CD-«b"i3> 
nn  '^^^  :  tDn^3>  ,nuj3^  nnN  nn  ïj-it  :n5  ,r-in''Oy  nn  ':j->t  •173  ,rT'C-'7:n 
br)  tz3"«bn:t  ,-iu::>  /  tD-^r^an  tzno3>  -in  ïj-^t  :-iU5r  nn^N  nnw\i)  ,S3^nu:7 
tzi-'pbnm  5n  ton  ^èn  b"»a  to-^n^n  to-'pbnno  -«-in  .idî  to^pbnn  rib» 
Tw^b  tosnsn  nrtN^n  i"^:):  ton  to-^T^im  .nén  ton  dS  bu;  to^"i;an 
,n-i2Dî<  mb733  T7:"iD  itdd  ^dS  t<inn  i^:73n  toir:'  ■i73s:yb  2d?i  5-i  ton 
mm  nb7a   ^"«d   '"iTD^'oiJn     mm    i-inny;:     mii:   pbi   .-idt:d  nno-iDN 

*  C'est-à-dire  un  nombre  qui  en  donne  un  *  second  »,  à  savoir  le  nombre  voulu. 
'  Gen.,  XXXIII,  11. 

*  7A.,  xxxii,  21. 

*  C'est  à  cet  endroit  que  commence  le  commentaire  ;  on  n'en  indique  pas  l'auteur. 
^  11  faut  lire  comme  plus  haut  {ligne  2)  13rmiD,  attendu  que  ce  n'est  pas  Nabscbon 

qui  parle. 

«  '^  signifie  le  tout,  '2  la  moitié,  et  '1  le  quart.  284  ainsi  divisé  donne  la  valeur 
'1  '3  'N  =:  7  y  compris,  220.  7  +  142  +  71  =  220. 

T  Le  nombre  220  est  divisible  par  2,  4,  r,  (284  ne  l'est  pas),  10,  11,  20  et  22. 
de  n'Tn'N  =  12+  110+  55  +44  +  22  +  11  +  10  =284. 

^  S'il  ne  poursuit  pas  :  un  44"**  c'est  5,  c'est  que  Tun  et  l'autre  sont  déjà  men- 
tionnés, le  dernier  en  55, 

*  Ce  qui  suit  est  ajouté  par  le  commentateur. 


NOTES  F/r  MKLANGKS  313 

■ib  imN  bDT  .n-^rTouîT  -:r^3-n  rr'iinTai  '('n  ,'2  /n)  'i,'3/wN  dh  ,:"o  Y'o 
rzDn  'tn-'T  'm*'  nnwS  toip^  bwX  De  b^m  nrwSTo  yin  nnN:n  1^:73  on 
n723m  .r"iibp7jn  m73Dn  m*'  ncxD  -:t  mizzn  yi^  riyti  n•p.y•'^  *  .ir.n 
,ir\yn2  tDia  bD  ny:lJ^  .ly^n  "'nTD   tzN  ^3  miD  np^j  yn-^  r<b  ^T 

A  considérer  les  dernières  lignes  et  sans  tenir  compte  de  ce 
que  ..  .r\hl2  "^s  est  une  addition,  on  remarque  qu'ici  déjà  la  nou- 
velle cabbale  a  pénétré.  C'est  ce  que  décèlent  ces  mots  :  D'û  bsm 
nrii^ûip^  bi<,  ainsi  que  cette  phrase  :  . .  .i"»!-»  «b  ïimo  *yp^yi  it  riTonm. 
Sans  doute,  Nahschon  se  sert  déjà  de  l'expression  nno3  ^^D,  mais 
cela  signifie  simplement  que  l'effet  est  un  t  mystère  »,  que  le 
nombre  cherché  découvert  par  (?)  est  capable  de  produire.  Mais 
la  raison  de  cet  effet  demeure  un  secret  pour  chacun,  d'autant 
qu'(m  ne  saurait  donner  la  raison  d'une  ^ibiao.  Notre  commenta- 
teur, lui,  ajoute  :  «  Il  est  peu  d' hommes  qui  saisissent  le  secret 
de  cette  sagesse  »  ;  c'est  ainsi  que  parlent  les  cabbalistes. 

L.  Grunhut. 


L'ORDRE  DE  CALATRÀVA  ET  LES  JUIFS 


M.  Samuel  Berger  a  fait  connaître  dernièrement  un  manus- 
crit espagnol  de  la  Bible  qui  nous  intéresse  d'une  façon  spé- 
cifie, p^rce  qu'il  renferme  la  copie  de  la  correspondance  échangée 
entre  Don  Luis  de  Guzman,  grand-maître  de  l'ordre  de  Galatrava, 
et  un  savant  juif,  R.  Mose  Arraguel*. 

L'antique  ordre  de  Galatrava  et  son  grand-maître  (on  ne  l'avait 
pas  remarqué  jusqu'ici)  entretenaient  toute  sorte  de  relations  avnc 
les  Juifs,  et  ils  occupent  une  certaine  place  dans  l'histoire  des  Juifs 
d'Espagne.   Gela  ressort  des  documents  qui  se  sont  conservés  à 

*  Eslher,  iv,14. 

*  C'est  une  faute  de  copie,  car  7  +  32  +  16  +  8  =  63. 

'  De  tout  cela,  il  n'y  a  pas  tiace  dans  Nahschon.  Ainsi  la  cabbale  commence  quand 
les  Gaonim  finissent. 

*  Voir  Hevue,  XXXVllI,  309  et  suiv. 


314  lŒVUL  DES  DTUDliS  JUIVLS 

Giudad-Real  et  dans  les  archives  de  l'État  espagnol,  et  qui  viennent, 
en  partie  seulement  il  est  vrai,  d'être  publiés  pour  la  première  fois 
par  les  soins  de  M.  F.-R.  de  Uhâgon  de  Madrid  '. 

Parmi  les  grandes  richesses  et  les  vastes  domaines  que  l'ordre 
reçut  des  rois  de  Gastille  et  d'Aragon,  à  partir  d'Alphonse  VI 
de  Gastille  et  d'Alphonse  II  d'Aragon,  étaient  compris  aussi  les 
perceptions  et  impôts  de  plusieurs  Aljamas,  ou  communautés 
juives,  perceptions  et  impôts  dont  les  rois  firent  cadeau  à  l'ordre. 
En  1179,  Alphonse  II  lui  donna  la  ville  d'Alcaniz  et  son  domaine. 
En  1304,  Jayme  II  conféra  à  l'ordre  le  droit  de  recevoir  dans  cette 
ville  trente  «  Judios  casatos  »,  Juifs  mariés  ou  familles  juives,  pri- 
vilège confirmé  le  23  avril  1336  par  Pedro  IV  ^. 

De  même,  la  ville  de  Maqueda  et  son  Aljama  étaient  propriété 
de  l'ordre  ;  de  là  vient  que  D.  Luis  de  Guzman,  en  tant  que  maître 
de  Galatrava,  appelle  R.  Mose  Arraguel  <<  notre  vassal  de  notre 
ville  de  Maqueda  ».  Gette  communauté  paraît  avoir  été  assez  im- 
portante ;  en  1474,  elle  payait  encore  au  roi  un  tribut  annuel  de 
2,500  maravédis.  Sur  la  représentation  du  grand-maitre  D.  Garcia 
Lopez  et  en  faveur  de  l'ordre,  Alphonse  XI,  «  pour  empêcher  la 
dépopulation  de  la  ville  »,  dispose,  à  la  date  du  20  novembre  1316, 
que  les  Juifs  de  Maqueda,  écrasés  d'un  grand  impôt  de  capitation, 
n'auront  plus  à  acquitter  qu'un  impôt  de  5,000  maravédis  ^  En 
1371,  Henri  II  consentit  au  grand-maître  et  à  l'ordre  de  Galatrava 
500  maravédis  des  contributions  payées  par  les  communautés 
juives  sitiiées  entre  Guadalfeisa  et  Muladar,  y  compris  Villa-Real*. 

Ce  n'est  pas  seulement  par  les  impôts  que  l'ordre  et  le  grand- 
maître  étaient  en  rapport  avec  les  Juifs,  mais  encore  pour  des  af- 
faires commerciales.  En  1310,  l'ordre  vendit  au  prix  de  15,000  ma- 
ravédis d'or  un  moulin  appelé  Batanejo,  moulin  à  cylindre  en 
Guadiana,  qui  jadis  avait  appartenu  à  «  D.  Çulema  aben  Albagal  » 
de  Villa-Real  (Giudad-Real)  et  à  sa  femme  \  G'est  le  même  Salomon 
ib^  Albagal  de  Villa-Real  qui,  pour  une  créance  de  12,000  doublons 
d'or  qu'il  avait  sur  son  peu  honnête  compagnon  Israël  Alhadad  et 
sur  sa  femme  Glara,  s'engagea  dans  un  long  procès.  Après  avoir 
été  ballotté  des  tribunaux  juifs  aux  tribunaux  chrétiens,  le  litige 
fut  soumis  par  la  reine  D.  Maria  de  Molina  à  l'arbitrage  de  R. 

*  Boletin  de  la  r.  Academia  de  la  historia,  XXXV,  cuad.  1-3. 

*  Bolettn,  p.  51,  n»  272;  p.  52,  n°  278  ;  voir  aussi  RevuCy  XXVil,  149. 

*  Boletin^  p,  36,  n**  187  :  •  Que  la  Aljama  de  Judios  de  Maqueda  solo  pa;;iie 
5,000  maravédis  de  pecho  à  fin  de  evilar  su  despoblaciou  «  por  la  grau  cabeva  do 
pechos  que  daban   ». 

*  Boletin,  p.  45,  n»  235. 

'  Venta  de  un  molino  Uamado  Batanejo,  olorgadd  par  D.  Çulema  Abenalbagal  y 
su  mujer  Donna  Joanila,  judios  moradores  en  Villa  Keal,  Boletin,  p.  126,  n»  193. 


NOTKS  KT  M  KL  A  NO  KS  ?,\y, 

Ascher  b.  Yeliiel  '.  Salomon  ibn  Albagal  était  fermier  d'impôts  et 
avait  ainsi  accès  à  la  cour*.  Sa  femme  s'appelait  Joanila,  ainsi 
que  nous  l'apprend  le  document  en  question.  Son  fils  Samuel  habi- 
tait également  à  Villa-Real  ^  Sa  fille  Dina,  épouse  de  U.  Abraham 
aben  Xuxen,  mourut  à  Tolède  dans  la  fatale  année  1349  *. 

Le  Juif  D.  Abraham  aben  Çaren  de  Villa-Real  avait  en  sa  pos- 
session d'autres  moulins  appartenant  à  Tordre,  les  moulins  hydrau- 
liques de  Telada.  Le  grand-maître  D.  Garcia  Lopez,  dont  nous 
avons  parlé  plus  haut,  les  avait  donnés  en  viager  à  D.  Abraham, 
et  en  nantissement  il  lui  avait  garanti  par  écrit  tout  son  avoir. 
En  1315,  l'ordre  rentra  en  possession  des  moulins  ^  Or,  ce  D. 
Abraham  aben  Çaçen  est  le  même  que  le  fameux  fermier  d'impôts 
D.  Abraham  aben  Xuxen  (Susan),  ledit  gendre  de  Salomon  ibn 
Albalag  et  petit-fils  de  D.  Gag  (Isaac),  TAlmoxarife  raayor  d'Al- 
phonse X  le  Sage. 

En  terminant,  disons  encore  que  Alphonse  VII,  D.  Berengaela, 
sa  femme,  et  ses  fils  Sancho  et  Fernando,  donnèrent  la  ville  d'Otos 
aux  frères  Avenzadech  et  Aleazar.  L'acte  de  donation  est  daté  de 
l'année  1170  (1132)  «. 

M.  Kayserling. 


UNE  PERSÉCUTION  DES  JUIFS  A  FEZ 

«  Dans  la  grande  ville  de  Fez  une  terrible  persécution  eut  lieu  ; 
mais  comme  je  n'ai  trouvé  là-dessus  rien  de  précis,  je  ne  l'ai  pas 
décrite  plus  amplement  »,  dit  Salomon  ibn  Verga  dans  sa  Chro- 
nique'. II  s'agit,  semble-t-il,  de  la  persécution  qui  s'exerça  peu 

*  Ascher  b.  Yehiel,  Consultations,  p.  107,  n»  6  :  173^3^71  j'C)  niD"'"!  "^I^T  milN  by 

isbmm  d"'DUJT  û"<73^  ht  iNnnbî<  p  bNT::"«  m  b:;nbwS  p  r.n'rc  'n  ann 

''3"'*ib  nb^yr,  mToiN  V't^ji  ûb-i:5>n  niTonN  \^^b  bx-ia^  l^in  d-i^itû  r:?:D 

...n5b73n  nDnn"'3^  "^nn^a  mbn  indtd  nmn  b^banD  nnjT  bxn^r"' 

Etant  donné  que  le  procès  l'ut  remis  par  la  reine  Maria  de  Moiina  entre  les  mains 
de  R.  Ascher,  il  faut  reporter  la  sentence  de  ce  dernier  après  1310.  Peut-être  sont- 
ce  le  15,000   maravédis  d'or  reçus  pour  les  moulins  qui  faisaient  l'objet  du  procès. 

>  Il  dit  lui-même  :  '^b72rT  "liinb  "^b-'b  "^nDHirim. 

•  Zikhron  Tehouda,  Consultât.,  n»  70. 

♦  Abnè  Zikharon,  n»  43. 

»  Boletin,  p.  127,  n»  200. 

"  Boletin,  p.  8,  n»  4.  David  Avenzadach  (ibn  Zadoc),  dans  Jacobs,  Sources  of  the 
history  ofthe  Jeivs  in  Spain,  p.  37,  n*  C03. 

'  Schébet  Yehouda  (éd.  Wiener),  p.  6i  :  ^sbl  bna  ^73\a  ïn"»n  0"'D  nbnia  "y^yi 


316  REVUE  DKS  EÏUDP.S  JUIVES 

de  temps  après  l'expulsion  des  Juifs  d'Espagne,  et  sur  laquelle 
Andréas  Bernaldez  donne  quelques  détails  dans  sa  chronique  pu- 
bliée il  y  a  une  dizaine  d'années  *. 

Fez,  une  des  plus  grandes  et  plus  belles  villes  d'Afrique,  a  eu  de 
tout  temps  nombre  d'habitants  juifs.  Beaucoup  d'exilés  espagnols 
y  cherchèrent  asile,  en  sorte  qu'au  commencement  du  xvi«  siècle 
la  population  juive  était  très  considérable.  Suivant  Bernaldes,  il  y 
avait  10,000  Juifs  ;  ce  chiffre  est  exagéré;  Hieronymo  de  Mendoça 
ne  parle  que  de  1,000  habitants  juifs*.  La  Juderia  de  Fez,  ainsi  qu'on 
appelait  le  quartier  qui  leur  était  réservé,  avec  ses  hautes  maisons 
n'avait  qu'une  porte,  à  l'entrée  de  laquelle  les  fonctionnaires  du 
roi  montaient  perpétuellement  la  garde  et  se  faisaient  payer  les 
tributs  '. 

Quelques  années  après  l'expulsion  d'Espagne,  il  y  eut  à  Fez  une 
grande  persécution.  Le  peuple  surexcité  tomba  sur  les  Juifs,  pilla 
à  cœur  joie  et  fit  de  nombreux  massacres.  A  Fez  vivait  alors  un 
Juif  nommé  Aron  qui  était  très  savant  et  très  sage,  et  qui  jouissait 
auprès  du  roi  d'une  telle  faveur,  qu'il  parvint  à  exercer  une  grande 
influence  sur  les  aff'aires  de  l'Etat.  D'où  haine  des  Maures  nobles, 
aussi  bien  contre  le  roi  que  contre  le  Juif.  En  un  seul  et  même 
jour,  la  foule  soulevée  égorgea  le  roi  et  son  favori,  pénétra  dans  le 
quartier  juif,  démolit  les  maisons,  pilla  et  tua  les  Juifs;  ceux-là 
seuls  furent  épargnés  qui  embrassèrent  l'islamisme. 

Cette  émeute  se  répandit  avec  la  rapidité  de  l'éclair  dans  les 
autres  villes  du  pays;  partout  on  mit  les  Juifs  au  pillage  et  on  les 
massacra.  Cependant  ceux  qui  avaient  été  violemment  convertis  ne 
devinrent  pas  plus  des  mahométans  sincères  que  les  Juifs  d'E— 
pagne  n'étaient  devenus  bons  chrétiens.  Cela  n'échappa  point  au 
successeur  du  roi  assassiné.  Il  ordonna  donc  à  tous  les  Juifs  de  Fez, 
qui  avaient  été  convertis  de  force  de  se  réunir  en  plein  champ;  là 
il  leur  laissa  le  choix  entre  le  retour  à  la  religion  de  leurs  pères 
ou  l'adhésion  de  plein  gré  à  l'islamisme.  Dans  ce  dernier  cas,  ils 
seraient  traités  sur  le  même  pied  que  les  Maures;  ceux  qui  reste- 
raient juifs  seraient  soumis  à  certaines  lois  d'exception.  Ils  n'a- 
vaient pas  le  droit  de  porter  comme  les  Maures  des  chaussures  en 
cuir,  mais  des  chaussures  tissées  d'un  chanvre  grossier;  il  leur 
était  interdit  d'avoir  un  cheval  sellé,  de  monter  à  cheval  par  la 
ville,  de  porter  des  armes;  ils  devaient  revêtir  des  manteaux 
noirs,  etc.  Quant  aux  Juives,  défense  leur  était  faite  de  porter  un 
voile  et  des  manteaux  couleur  olive. 

*  Bernaldez,  Historia  de  los  Reyes  Catolicos  (Séville,  1870},  I. 

'  iHeronymo  Ae  Mendoça,  Jornada  de  Afnca  (Lisbonne,  1H07,\  p.  69. 

'  Mendoça,  /.  c,  p.  69  f. 


NOTES  ET  MELANGKS  317 

Malgré  ces  lois  oppressives,  la  plupart  revinrent  avec  joie  au 
judaïsme  et  rendirent  ainsi  un  éclatant  témoignage  de  la  fer- 
meté de  leur  foi.  Dans  une  autre  circonstance  encore,  en  1532,  ils 
fournirent  la  preuve  de  leur  constance.  Le  franciscain  André  de 
Spolète  vint  en  janvier  1532  à  Fez  et  obtint  du  roi  Muley  Ibrahim 
l'autorisation  de  disputer  publiquement  avec  les  Juifs.  Il  organisa 
donc  des  controverses  publiques,  mais  il  ne  réussit  pas  dans  son 
entreprise  de  conversion.  Désespéré  de  son  échec,  le  zélé  francis- 
cain se  donna  la  mort^ 

M.  KA.YSERL1N0. 


SUR  LES  POESIES  DE  MOÏSE  HAYYIAI  LUZZATTO 


Kii  Italie,  terre  classique  de  la  poésie,  chaque  événement  de  la 
communauté  juive  ou  de  la  famille,  joie  ou  peine,  était  chanté. 
On  faisait  imprimer  des  pièces  de  vers  sur  des  feuilles  détachées 
lors  de  l'inauguration  d'une  synagogue,  d'une  donation  de  rou- 
leaux de  la  Loi,  à  l'occasion  d'un  mariage,  d'un  deuil,  à  la  suite 
d'une  promotion  au  grade  de  docteur  en  médecine  ou  en  philoso- 
phie, etc. 

Peu  de  ces  feuilles  volantes  sont  parvenues  jusqu'à  nous.  Notre 
inoubliable  ami  David  Kaufmann  possédait  une  collection  de  ces 
feuilles,  dont  il  a  publié  quelques  spécimens,  entre  autres  deux 
poésies  de  M.  H.  Luzzatto  sur  la  promotion  de  deux  de  ses  amis 
(ci-dessus,  p.  133-136). 

La  pièce  sur  la  promotion  d'Emmanuel,  fils  de  Raphaël  Galvo, 
citée  par  Kaufmann  (p.  134),  d'après  Almanzi,  se  trouve  dans  un 
recueil  de  poésies  de  circonstances  que  j'ai  entre  les  mains.  J'f^n 
reproduis  ci  après  le  texte.  A  mon  sens,  l'exemplaire  que  j'ai 
sous  les  yeux  est  le  même  que  celui  dont  s'est  servi  Almanzi. 

Selon  Kaufmann  la  promotion  eut  lieu  le  23  octobre  n24.  Cette 
date  est  empruntée  au  registre  d'immatriculation  de  l'Universilé 
de  Padoue.  Il  en  résulte  que  M.  H.  Luzzatto  n'était  âgé  que  de  dix- 
sept  ans  au  moment  où  il  composa  cette  pièce. 

Gomme  l'a  fait  observer  notre  regretté  collègue,  Emmanuel 
était  lui  au^si  poète  ;  il  y  a  de  lui  deux,  poésies  dans  le  ny^y  bip  de 

^  Acenheiro,  C kronicon  dos  Reis  de  Portugal^  p.  35P. 


318  HKVUE  r)KS  ÉTUDES  JUIVES 

A.  B.  Pipenio,  I  unp,  au  1°  25,  sur  le  mariage  d'Abraham  rîSi':?:, 
l'autre,  au  f^  49,  sur  le  mariage  de  Moïse  Atias.  Cf.  encore  sur 
Emmanuel,  ibidem,  (°  85. 

S.  J.  Halberstam. 

y^is^  Tby^  /5"i:T  -inb^  b^e-i  n""ir!i):s  V"'"'^'-*  V"^  abcn  crrn  p 
:  "^bc?:  î^uîNi  ,inbi^:i  m-iNDn  "ip""  b^  r^N  im.xnna 

,"^?2-^cn  r-ncnb  ^cd:^  r^ii:r 

V2^':^r\  û'viîT  ,ïi:"«-ir;  tid-ii  bx 
mamn  -i"«'w3  •^■^rtn  t^bi  ,*|r;53 
/?2''nn  bnpT  .î^t   ■>-i"'n^  mnsb 

.tzb:'  Q-^^pT  ^:-:b  c-^nnn^i 
■«72'n  ,rni:^b73  Y-  "i^^^'-  ^'^  "T^"^ 

■«Tiinbn   t**:bT  .tzT'r:  -puîb  'nt^  «b 

i:i::3  TwN  ,j^*bD  t-,-i:n?:  ::y 

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à 

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'   l'eut  êlre  plus  exacleiiiciit  ri3'. 


TABLE  DES  MATIERES 


ARTICLES  DE  FOND. 

Adler  (Elkan).  Note  additionnelle  sur  Moïse  Halawa 89 

Araujo  (Oscar  d').  La  grande  synagogue  de  Ségovie 209 

Bâcher  (W.).  Une  vieille  liste  de  livres 199 

Bank  (L.).  «  Les  gens  subtils  de  Poumbedita  » 191 

Ghajes  (H. -P.).  Les  juges  juifs  en  Palestine,  de  l'an  70  à  l'an  500.      39 

Dëjob  (Charles).  Le  Juif  dans  la  comédie  au  xvjii°  siècle 119 

IIOLLEAUX  (Maurice).  Sur  un  passage  de  Flavius  Josèphe  {An- 

tiq.  jnd.,  XII,  4,  §  155) 161 

Kahn  (Saiomon).  Les  Juifs  de  Tarascon  au  moyen  âge 95  et  261 

Kaufmann  (David).  L  Lettres  de  Scheschet  b.  Isaac  b.  Joseph 
Benveniste  de  Saragosse  aux  princes  Kalonymos  et  Lévi 

de  Narboune 62  et  217 

IL  Menahem  Azaria  di  Fano 413 

Krauss   (S.).    Sur  la   sémantique  des  mots  talmudiques  em- 
pruntés au  grec 53 

LÉVI  (Israël).  I.  Les  nouveaux  fragments  hébreux  de  l'Ecclé- 
siastique, de  Jésus,  fils  de  Sira 1  et  117 

IL  Un  recueil  de  Consultations  inédites  de  rabbins  de  la 
France  méridionale  {suite) 76et226 

III.  La  lutte  entre  Isaïe,  fils  d'Abba  Mari,  et  Yohanan, 
fils  de  Matatia,  pour  le  rabbinat  de  France  à  la  fin  du 
xiv'  siècle 85 

IV.  L'inventaire  du  mobilier  et  de  la  bibliothèque  d'un 
médecin  juif  de  Majorque  au  xiv*'  siècle 242 

Reinach  (Théodore).  Le  décret  athénien  en  l'honneur  d'Hyrcan.      16 
Sack  (Israël).  Israël  et  Juda  {fin) 28 

NOTES  ET  MÉLANGES. 

CfîAJES  (H.  P.).  Traits  apologétiques  dans  la  agada   de  R.  Sa- 
muel b.  Nahmani 303 

FuRST  (J.).  Un  passage  difficile  du  Yalkoul 132 


S2()  RnVUR  DES  KTUDES  JUIVES 

(jRUiSHur  (L.).  L'ejiégèse  biblique  de  Nahschon  Gaon r'.IO 

Halberstam  (S.  J.).  Sur  les  poésies  de  Moïse  Hayyim  Liizznto.  :^17 
KA.UFMANN  (David).  Poésies  de  Moïse  Hayyim  Luzzalo  pour  féli- 
citer ses  amis  promus  docteurs  en  médecine  ei  eu  phi- 
losophie    1 33 

Kayserling  (M.)-  I-  L'ordre  de  Galalrava  et  les  Juifs 313 

If.  Une  persécutiou  des  Juifs  à  Fez 315 

Lambert  (Mayer).  Noies  exégétiques 2^<9 

Mendelsohn  (S.).  Le  ressenluneut  de  Gaïu ^29 

IL  R.  Tauhoum  à  lialhar 3(i4 

III.  Restauration  d'une  Pesikta 307 

BIBLIOGRAPHIE. 

LÉvi  (Israël).  Revue  bibliogra])hiqup,  3*"  trimestre  1899 137 

Wetll  (Julien).  Der  Fûlirer  Maimùni's  in  der  Weltlitleralur,  par 

David  Kaufmann 155 

Additions  et  rectifications 160 

Table  des  matières 319 


VKISAMLKS.     IMPRIMEHIKS  CKHF.,    RUK   DUPLKSSIS,  59. 


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